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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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39e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 058

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 3 octobre 2006





CANADA

Débats de la Chambre des communes

VOLUME 141
NUMÉRO 058
1re SESSION
39e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mardi 3 octobre 2006

Présidence de l'honorable Peter Milliken

    La séance est ouverte à 10 heures.

Prière



AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

  (1005)  

[Traduction]

Les comités de la Chambre

Comptes publics 

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le huitième rapport du Comité permanent des comptes publics sur le chapitre sept, « L'acquisition de bureaux loués » du rapport de mai 2006 du vérificateur général du Canada.
    De plus, conformément à l'article 109 du Règlement, le comité demande que le gouvernement dépose une réponse globale à ce rapport.

Opérations gouvernementales et prévisions budgétaires  

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires sur le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2007.
    Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour que, en ce qui a trait à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-24, et nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le projet de loi C-24 ne puisse faire l'objet d'aucun autre amendement ni sous-amendement; que les jours où le projet de loi C-24 sera débattu à la deuxième lecture, la Chambre siège au-delà de l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien et ne s'ajourne que lorsque les délibérations seront terminées, à moins qu'une motion d'ajournement soit proposée par un ministre de la Couronne.
    Le leader du gouvernement à la Chambre des communes a-t-il le consentement unanime pour proposer cette motion?
    Des voix: Non.

Loi de 2006 sur les droits d’exportation de produits de bois d’oeuvre

    Monsieur le Président, conformément à l'article 56.1 du Règlement, je propose:
    Que, en ce qui a trait à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-24, et nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le projet de loi C-24 ne puisse faire l'objet d'aucun autre amendement ni sous-amendement;
que les jours où le projet de loi C-24 sera débattu à la deuxième lecture, la Chambre siège au-delà de l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien et ne s'ajourne que lorsque les délibérations seront terminées, à moins qu'une motion d'ajournement soit proposée par un ministre de la Couronne.
    Que les députés qui sont contre la motion veuillent bien se lever.
    Et moins de 25 députés s'étant levés:
    Le Président: Comme moins de 25 députés se sont levés, je déclare la motion adoptée.

    (La motion est adoptée.)

[Français]

    Le Président: L'honorable député de Saint-Jean désire invoquer le Règlement.
    Monsieur le Président, lorsque vous avez fait le compte, je vous ai vu nous compter un par un et je vous ai entendu dire qu'il y avait 25 députés présents en cette Chambre. J'aimerais connaître le décompte, s'il vous plaît.
    Il y avait seulement 21 députés. J'ai dit 25, car c'est le chiffre requis. C'est pour cette raison que j'ai mentionné ce chiffre. Toutefois, je n'ai compté que 21 députés.

[Traduction]

Pétitions

La voie navigable Trent-Severn  

    Monsieur le Président, au nom du député de Simcoe-Nord, j'aimerais déposer aujourd'hui une pétition contenant plus de 900 signatures, à l'appui d'une évaluation par le gouvernement de la voie navigable Trent-Severn, comme le propose la motion d'initiative parlementaire no 161, dont la Chambre a été saisie.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement d'envisager le bien-fondé d'évaluer l'avenir de la voie navigable historique Trent-Severn et la possibilité qu'elle devienne un bien récréatif principal, une destination de renommée internationale pour les plaisanciers, une plus grande source d'énergie hydroélectrique propre et renouvelable, un catalyseur permettant de développer et de relancer l'économie des municipalités situées le long de ces 386 kilomètres et un modèle de développement durable.

  (1010)  

L'âge du consentement  

    Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre pour présenter les pétitions de citoyens de Vancouver qui souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur leur inquiétude concernant la nécessité de protéger les enfants des prédateurs sexuels.
    Les pétitionnaires demandent que le gouvernement fédéral en fasse un objectif prioritaire. Ils sont très inquiets de la vulnérabilité des jeunes à l'égard de l'exploitation sexuelle et ils ont signé une pétition qui demande à la Chambre de protéger ces membres vulnérables de notre société de tout danger. Il me fait plaisir de présenter cette pétition aujourd'hui.

La justice  

    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour déposer quatre pétitions. Les deux premières ont trait au crime et à la punition qui en découle dans notre société, et elles sont signées par des résidants de Windsor -Ouest, Windsor--Tecumseh de et du comté d'Essex. Les pétitionnaires demandent que les peines soient purgées intégralement dans le cas de crimes graves.

Le commerce  

    Monsieur le Président, les deux prochaines pétitions ont une grande importance. Elles sont signées par des membres du CAW, qui s'oppose aux négociations que poursuit le Canada avec la Corée du Sud concernant le libre-échange.
    Le moment est historique étant donné que les signatures des deux premiers groupes de pétitions font partie de 47 000 signatures qui seront déposées à la Chambre des communes. J'ai invité les députés de tous les partis à déposer ces pétitions pour rejeter les initiatives actuelles du ministre du Commerce international qui se prépare à conclure une entente commerciale tout à fait contraire aux intérêts des fabricants canadiens de partout au pays.
    Il me fait plaisir de déposer cette pétition historique pour mettre un terme à cette folie et pour faire en sorte que nos emplois dans le domaine de l'automobile, de la construction navale et dans d'autres domaines de la fabrication soient protégés contre les pratiques dommageables envisagées dans l'entente de libre-échange avec la Corée du Sud.

L'âge du consentement  

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui, au nom d'électeurs de Calgary et des environs, une pétition concernant la protection de nos enfants contre les prédateurs sexuels. Ces pétitionnaires demandent que le gouvernement en fasse une priorité absolue.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement, en Parlement assemblé, de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire passer immédiatement l'âge du consentement de 14 à 16 ans.

Questions au Feuilleton

    Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
    Le Président: Est-ce d'accord?
    Des voix: D'accord.
     La présidence a reçu avis d'une question de privilège du député de Windsor--Tecumseh. Je suis prêt à entendre les observations du député et j'invite le député de Windsor--Tecumseh à prendre la parole.

Privilège

La Commission du droit du Canada  

[Privilège]
    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour soulever la question de privilège au sujet d'une situation très grave, à mon avis, qui porte atteinte à la démocratie au Canada. Celle-ci est très grave du point de vue du respect du gouvernement de l'heure envers la Chambre des communes et ses élus.
    Je prends donc la parole au sujet de l'annonce que le gouvernement a faite la semaine dernière à propos de l'élimination de tout financement destiné à la Commission du droit.
    La Commission du droit fut créée en 1996 en vertu d'une loi. Elle s'emploie depuis, avec l'aide de ses employés, à élaborer des rapports, entre autres activités. La loi autorisant la création de cette commission a été adoptée au Parlement à toutes les étapes. Aucune modification n'a été apportée à cette loi au cours des dix années d'existence de la commission.
    Le gouvernement essaie une fois de plus d'agir contre la volonté du Parlement, de contrecarrer les désirs qu'il a exprimés dans cette loi. Si je peux m'exprimer de façon un peu plus familière, le gouvernement essaie d'emprunter la porte arrière au lieu de la porte avant, qu'il emprunterait s'il prenait la question au sérieux et était disposé à respecter la procédure habituelle.
    Le gouvernement dit simplement —  et je ne sais pas exactement comment il pense en avoir l'autorité, soit par le président du Conseil du Trésor, soit par un agent du cabinet du premier ministre — qu'il a unilatéralement décidé d'éliminer tout le financement de la Commission du droit du Canada.
    Quand la commission a été créée par voie législative, il était très clair qu'elle avait certaines responsabilités. Par exemple, l'article 6 l'oblige à rendre des comptes à la Chambre. Elle est aussi tenue de nommer un président et des commissaires. Ces derniers, en vertu de la loi, sont rémunérés par le gouvernement du jour. De surcroît, la commission dispose d'un personnel à temps plein et d'un siège où elle effectue ses recherches et rédige des rapports sur des questions d'actualité dans la communauté juridique. Soit dit en passant, la Commission du droit a fait un excellent travail.
    Ce n'est pas la première fois que ce gouvernement fait une telle chose. Ce n'est pas comme s'il pouvait prétendre avoir fait erreur. Nous sommes déjà passés par là il n'y a pas si longtemps, dans le cadre de la Loi sur les armes à feu. Certains députés ministériels pensaient que ce dernier allait simplement éliminer unilatéralement toutes les dispositions de la Loi sur les armes à feu portant sur le registre des armes à feu au moyen d'un décret réglementaire. C'est sûrement le Bureau du Conseil privé ou le Cabinet qui s'en serait chargé.
    Le gouvernement sait qu'il ne peut pas faire cela. Des juristes lui ont même confirmé qu'il ne le pouvait pas. Il n'y a aucune différence entre cette situation-là et celle dont je parle aujourd'hui. La Commission du droit devait être créée aux termes de la loi adoptée il y a une dizaine d'années. Elle a depuis été créée. Elle était conforme aux dispositions législatives jusqu'à il y a environ une semaine.
    On a ordonné à la Commission du droit de mettre fin à toutes ses activités d'ici la fin de l'année. Le gouvernement élimine tout son budget, ce qui revient à l'obliger à cesser son travail d'ici la fin de l'année.
    Le gouvernement sait qu'il ne peut le faire dans le cas de la Loi sur les armes à feu. Il ne peut pas le faire non plus dans le cas de cette loi exactement pour les mêmes raisons. De plus, et je pense que cela montre le mépris du gouvernement à l'égard de la Chambre des communes, le gouvernement conservateur précédent a fait la même chose à la Commission de réforme du droit du Canada, en 1992-1993. Au moins, le gouvernement de l'époque s'était conformé à la loi, mais il était majoritaire, c'est peut-être la différence par rapport à la situation actuelle.
    Le gouvernement sait qu'en situation minoritaire, en ce qui concerne cette question, il ne pourrait forcer la Chambre à adopter une mesure législative abolissant la Commission du droit. Le gouvernement sait que les trois partis d'opposition s'y opposeraient. Comme nous croyons dans l'institution qu'est la Commission du droit, nous rejetterions une telle mesure législative.

  (1015)  

    Je me permets de revenir encore une fois aux années 1992-1993, pour signaler que le précédent gouvernement conservateur a effectivement supprimé la Commission de réforme du droit, qui a précédé la Commission du droit, mais qu'il l'a fait au moyen d'une mesure législative. Les conservateurs formaient un gouvernement majoritaire et ils ont imposé une mesure législative à la Chambre.
    Deux autorités reconnues soutiennent que le gouvernement ne peut pas faire ce qu'il a proposé la semaine dernière. Les conservateurs ne peuvent sabrer ce financement et de ce fait supprimer la Commission du droit. Ils savent qu'ils ne peuvent pas le faire à cause de l'opinion juridique qu'ils ont eu concernant la Loi sur les armes à feu. Ils savent qu'ils ne peuvent pas le faire parce qu'il y a déjà un précédent visant précisément la Commission du droit, qui s'appelait à l'époque, la Commission de réforme du droit, lorsqu'un gouvernement précédent a fait la même chose mais ouvertement, au moyen d'une mesure législative, non de façon détournée.
    Pour ce qui est des répercussions, il ne s'agit pas uniquement d'une atteinte à mes privilèges de député, mais, franchement, il s'agit d'une atteinte aux privilèges de tous les députés, y compris ceux du côté ministériel. Qu'est-ce qui pourrait miner davantage l'autorité de la Chambre des communes que le fait que nous ne respections pas les lois que nous adoptons nous-mêmes ici? Je ne vois rien de pire.
    Il s'agit d'une attaque directe contre nos privilèges de députés. Les lois que nous adoptons doivent être respectées et exécutées. Sans cela, c'est-à-dire si un gouvernement veut y changer quelque chose, il doit les modifier. Les conservateurs ne peuvent pas agir par décret. Ils ne peuvent pas procéder par des moyens détournés. Ils doivent agir publiquement et faire tenir un vote à la Chambre.
    Monsieur le Président, je vous demande de déclarer qu'il y a eu atteinte à nos privilèges à tous. Si c'est la décision que vous rendez, je demanderai que la question soit renvoyée au Comité de la justice. Dès que vous rendrez votre décision, je serai prêt à présenter la motion nécessaire.

  (1020)  

     Monsieur le Président, je veux apporter mon appui à la question de privilège soulevée aujourd'hui.
    Le gouvernement conservateur minoritaire a fait des coupes sombres et a donné avis à la Commission du droit du Canada, qui est l'agence fédérale indépendante de réforme du droit, qu'elle serait à toutes fins utiles éliminée.
    La Commission du droit du Canada a été créée le 1er juillet 1997 par la loi intitulée Loi sur la Commission du droit du Canada, qui a reçu la sanction royale le 29 mai 1996. Cette loi prévoit que la commission est un organisme indépendant qui doit rendre des comptes au Parlement du Canada par l'intermédiaire du ministre de la Justice. Cela est clairement établi aux articles 2 à 6 de la loi.
    L'article 7 exige la nomination d'un président et de quatre commissaires. Les paragraphes 11(1) et 11(2) prévoient que le président est rémunéré et que les commissaires reçoivent des honoraires, ce qui nécessite des fonds.
    Au paragraphe 15(1), nous voyons que « [l]e personnel nécessaire à l’exécution des travaux de la Commission — dont un directeur général — est nommé conformément à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique ».
    Le paragraphe 18(1) crée le conseil consultatif de la Commission du droit du Canada qui est composé d'un minimum de 12 membres et d'un maximum de 24.
    L'article 19 va plus loin et stipule que le conseil « doit donner à la Commission des conseils sur ses orientations [et] le programme à long terme de ses travaux ».
    Les fonctions sont précisées au paragraphe 5(1):
    La Commission doit
(a) consulter le ministre de la Justice relativement au programme annuel des travaux qu’elle se propose d’entreprendre;
(c) présenter au ministre les rapports préparés de sa propre initiative ou à la demande de ce dernier.
    Ainsi, ce groupe dispose des deux options.
    Selon l'article 23, « le président présente au ministre de la Justice le rapport annuel d’activité de la Commission pour l’exercice précédent ».
    Aux termes de l'article 24, le « ministre de la Justice fait déposer les rapports de la Commission devant chaque chambre du Parlement ».
    Enfin, suivant l'article 25, le « ministre fait déposer sa réponse aux rapports de la Commission devant chaque chambre du Parlement ».
    Monsieur le Président, ces articles de loi sont rédigés de manière à revêtir un caractère obligatoire. Remarquons l'absence du mot « peut ».
    Lorsque le précédent gouvernement progressiste-conservateur, celui du premier ministre Mulroney, a mis fin aux travaux de la Commission de réforme du droit — laquelle avait été créée en vertu d'une loi semblable, la Loi sur la Commission de réforme du droit — il a dû abroger cette loi, ce qu'il a fait en 1993. La Commission de réforme du droit était mandatée par le Parlement. Par conséquent, il y a un précédent. Nous devons mettre fin aux travaux de l'actuelle Commission du droit de la même manière.
    Le gouvernement minoritaire actuel ne peut pas décider unilatéralement de faire fi des lois adoptées par le Parlement. Ces décisions servent les parlementaires. Il est particulièrement consternant que le ministre de la Justice choisisse d'ignorer les directives d'une loi qui concerne les parlementaires des deux Chambres.
    L'article 3 stipule ceci:
    La Commission a pour mission d’étudier et de revoir le droit du Canada et ses effets, d’une façon systématique qui reflète les concepts et les institutions des deux systèmes juridiques du Canada — le droit civil et la common law — , afin de fournir des conseils indépendants sur les mesures d’amélioration, de modernisation et de réforme qui assureront un système juridique équitable répondant à l’évolution des besoins de la société canadienne [...]
    S'agit-il d'un autre cas où le gouvernement, comme pour le registre des armes à feu, essaie de sabrer le financement essentiel au lieu de revenir devant le Parlement et les parlementaires pour débattre et décider de l'avenir de la Commission du droit du Canada, qui a été créée par une loi?
    La Loi sur la Commission du droit du Canada a établi la Commission du droit du Canada, qui jouit d'une réputation internationale. Les coupes dans le financement de cette commission qui ont été annoncées la semaine dernière vont pratiquement l'éliminer. La commission a été informée qu'elle devait mettre fin à ses activités d'ici deux mois. En vertu de quelle autorité le gouvernement se permet-il de faire cela?
    Je crois qu'il s'agit d'un outrage au Parlement, aux députés et à tous les Canadiens. Selon la loi, pour que cette commission puisse servir le Parlement, son financement doit être adéquat. Elle ne peut pas être une coquille vide.

  (1025)  

    Le ministre de la Justice du Canada ne peut permettre cela. Il fait partie du Cabinet qui a pris la décision de sabrer dans ces budgets. Il sait qu'il y a une loi. Les Canadiens devraient-ils prendre exemple et choisir quelles lois ils respectent?
    Monsieur le Président, j'espère sincèrement que la question de privilège vous paraîtra fondée à première vue. Je crois même qu'il s'agit d'un outrage au Parlement.
    Monsieur le Président, je suis convaincu que vous jugerez qu'aucun privilège n'a été lésé dans le cas qui nous occupe, au contraire.
    Le député néo-démocrate a dit qu'il s'agissait d'une menace pour la démocratie.
    À mon avis, la démocratie est menacée quand un gouvernement ne tient pas les promesses qu'il a faites à ses électeurs.
    Monsieur le Président, comme vous le savez, lors des dernières élections, mon parti a dit très clairement aux Canadiens qu'ils payaient trop d'impôt et que nous allions faire quelque chose pour rectifier cela. Nous avons donc inclus des baisses d'impôt dans le budget déposé le printemps dernier.
    Nous avons aussi dit aux Canadiens que nous ne dépenserions pas d'argent lorsque cela ne sera pas absolument nécessaire. Nous voulons dépenser l'argent des Canadiens ordinaires de manière judicieuse. C'est exactement ce qu'a fait le président du Conseil du Trésor.
    Monsieur le Président, nous avons déjà entendu cela de la part de personnes occupant des fonctions semblables à celle du président du Conseil du Trésor. Aucune loi ne nous oblige à dépenser jusqu'au moindre sou de ce que nous avons. Nous avons entendu l'argument selon lequel nous devrions en quelque sorte trouver des façons de dépenser cet excédent de plus de 13 milliards de dollars. Cela est ridicule.
     Quand vous vous pencherez sur cet argument, monsieur le Président, vous en viendrez selon moi à la conclusion que le président du Conseil du Trésor et le gouvernement du Canada ne sont pas obligés de continuer à dépenser de l'argent dans des domaines où le gouvernement a décidé de ne pas investir afin de tenter de protéger les intérêts des contribuables.
    Monsieur le Président, je crois que vous serez en mesure de prendre une décision rapide à ce sujet, décision qui sera bien entendu respectée. Ce sera, j'en suis sûr, une décision éclairée, mais je crois que vous concluerez que le gouvernement a agi dans les règles et qu'il est très prudent avec l'argent des contribuables de ce pays.
    Je remercie le député de Windsor—Tecumseh, la députée de London-Ouest et le leader du gouvernement à la Chambre des communes de m'avoir présenté leur point de vue respectif sur la question. Je vais y réfléchir.
    La députée de Vancouver-Est désire soulever la même question de privilège. J'espère qu'elle présentera un nouveau point, car j'ai le sentiment d'avoir entendu les deux côtés de la question à cette étape. Je suis disposé à l'entendre si elle pense apporter de nouvelles idées, mais en toute honnêteté je crois que nous en avons déjà entendu assez sur le sujet.
    Monsieur le Président, j'interviens pour appuyer le député de Windsor—Tecumseh, car j'estime qu'il s'agit d'une question très importante pour tous les députés. Nous sommes les gardiens du Parlement. Si nous ne faisons et ne disons rien pour les protéger, les mesures et les processus de la Chambre ne mèneront à rien.
    J'attire l'attention de la présidence au passage qui figure à la page 51 de l'ouvrage de Marleau et Montpetit et qui explique clairement le cas. Le voici:
    La Chambre a le pouvoir d’invoquer le privilège lorsqu’on fait obstacle à l’exécution de ses fonctions ou de celles des députés. C’est uniquement dans ce contexte que le privilège peut être considéré comme une exemption par rapport à la loi générale.
    C'est le point sur lequel je veux insister. L'ouvrage précise que:
    Les députés ne sont pas au-dessus des lois qui régissent tous les citoyens du Canada. De fait, les privilèges des Communes visent à préserver les droits de chaque électeur.
    Voilà exactement ce que nous voulons faire valoir aujourd'hui. Les députés qui nous ont précédés ont débattu de cette mesure législative dans les années 1990, en respectant les processus qui s'appliquaient alors, au nom des électeurs du Canada. Cette mesure a été dûment adoptée. Rejeter cette mesure maintenant d'un trait de plume va, selon moi, à l'encontre de la démocratie et de la décence et a une incidence réelle sur nos privilèges.
    J'espère que vous tiendrez compte des arguments qui vous ont été présentés aujourd'hui, monsieur le Président, et que vous verrez que le gouvernement a mal agi. La présidence doit intervenir. Il faut respecter les bons procédés et les traditions de la Chambre.

  (1030)  

    Je remercie la députée de Vancouver-Est de ses remarques. Je vais prendre la question en délibéré et je ferai part de ma décision à la Chambre en temps opportun.

Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Loi de 2006 sur les droits d’exportation de produits de bois d’oeuvre

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 29 septembre, de la motion portant que le projet de loi C-24, Loi imposant des droits sur l'exportation aux États-Unis de certains produits de bois d'oeuvre et des droits sur les remboursements de certains dépôts douaniers faits aux États-Unis, autorisant certains paiements et modifiant la Loi sur les licences d'exportation et d'importation et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.
    Lorsque nous avons interrompu le débat, le député de Mississauga-Sud avait la parole. Il restait cinq minutes à la période allouée pour les questions et les observations faisant suite au discours du député.
     Je demande donc s'il y a des questions ou des observations. Le député de Windsor-Ouest a la parole.
    Monsieur le Président, c'est un privilège pour moi que d'amorcer le débat ce matin en posant une question à mon collègue.
    L'une des choses qu'il ne faut pas oublier au sujet du projet de loi C-24 et du sous-amendement présenté par mon collègue, le député de Burnaby—New Westminster, c'est qu'ils auront des répercussions sur toute une série d'accords commerciaux que nous avons conclus avec les États-Unis.
    Le député croit-il que nous créerons ainsi un précédent? Essentiellement, le projet de loi propose d'interférer avec un accord commercial que nous avons conclu avec les États-Unis et qui établit un ensemble de règles. Or, ces règles pourront maintenant être modifiées unilatéralement et ce, avec la complicité du gouvernement.
    Le député croit-il que cela aura une incidence sur nos relations commerciales futures dans le cadre de l'accord qui est actuellement en place?
    Monsieur le Président, je suis plutôt d'accord avec le député pour dire que c'est ce qui s'est produit avec l'accord sur le bois d'oeuvre. Le gouvernement compte dans ses rangs un ministre qui, lorsqu'il était ministre au sein du gouvernement précédent, luttait farouchement pour résoudre le conflit en invoquant des décisions liées à l'ALENA et l'OMC et en recourant au mécanisme de règlement des différends.
    Or, ce ministre a maintenant laissé tomber complètement l'industrie. Pis encore, il a non seulement menacé tous ceux qui ne souscrivent pas à l'accord, mais il a aussi déclaré qu'il leur ferait la vie dure. En outre, nous avons appris que si d'autres choisissent de faire valoir leurs droits, cela pourrait mettre en péril l'accord.
    Par conséquent, j'estime que cette capitulation sur toute la ligne dans le dossier du bois d'oeuvre est un fiasco depuis le début. Le gouvernement devrait avoir honte de menacer le secteur du bois d'oeuvre au lieu de le défendre.
    Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir eu l'occasion d'écouter le débat sur le projet de loi C-24, l'accord sur le bois d'oeuvre, ces derniers jours. Un certain nombre de députés ont parlé des pertes d'emplois et des autres répercussions de l'accord dans leurs collectivités et dans leur économie locale. C'est un problème qui doit être mis en évidence.
    L'une de nos préoccupations relativement au projet de loi, c'est qu'il n'est fondé sur aucune stratégie industrielle cohérente. Voici un accord qui viole pratiquement toutes les procédures et tous les processus qui sont prévus dans nos accords commerciaux et que nous n'avons d'autre choix que de signer. Cependant, cet accord ne s'inscrit dans aucune stratégie cohérente axée sur la durabilité, la création d'emplois à valeur ajoutée et le renforcement des économies locales.
    Je voudrais que le député nous dise ce qu'il pense du fait qu'il s'agit d'un accord isolé qui n'est lié à aucune stratégie industrielle globale dont nous avons besoin dans notre pays.
    Monsieur le Président, je m'inquiète en outre sérieusement des conséquences sur les autres accords commerciaux. Manifestement, ça n'a pas fonctionné parce que le gouvernement avait d'autres intentions.
    Cependant, je crois que c'est encore pire. Nous savons tous que l'industrie était contre l'accord il y a un certain temps. Puis, tout d'un coup, une mystérieuse volte-face se produit, et on accepte de concéder un milliard de dollars à l'industrie et au gouvernement des États-Unis.
    Se pourrait-il que ce changement de position soit lié à la nouvelle orientation du gouvernement, dont la majorité des décisions semblent désormais plus conformes aux politiques des États-Unis qu'aux politiques du Canada? On dirait une républicanisation des politiques canadiennes. Qu'il s'agisse de politique étrangère ou de politique économique, la liste des exemples est longue. Je pense qu'il est temps de dénoncer l'inféodation du gouvernement conservateur à George Bush.

  (1035)  

    Monsieur le Président, j'ai le privilège de prendre la parole au sujet du projet de loi C-24, l'accord de braderie du bois d'oeuvre, comme on le dit partout au pays. Nous avons entendu beaucoup de discussions dans cette enceinte à propos du projet de loi. J'aimerais commencer par remercier mon collègue, le député de Burnaby—New Westminster, qui a accompli un travail formidable et a mis beaucoup d'efforts dans ce dossier de même que dans d'autres dossiers commerciaux importants pour les emplois au Canada, qui sont au coeur du présent débat.
    Il s'agit d'emplois, de cultures et de collectivités qui vont beaucoup pâtir en raison de pratiques commerciales injustes. Il s'agit d'un crime commercial dont notre pays fait les frais et dont le gouvernement actuel est complice.
    Je vais commencer par lire un extrait des Débats de la Chambre des communes qui porte sur ce dossier et qui remonte à un certain nombre d'années:
     Tout récemment, le groupe extraordinaire de règlement des différends de l'ALENA a déclaré que ces droits n'avaient aucun fondement, mais, jusqu'à maintenant, les États-Unis ont refusé d'accepter cette décision et ont demandé au Canada de négocier une nouvelle entente. Je répète ce que j'ai déjà dit et je serai le plus clair possible: il n'est pas temps de négocier, il est temps de respecter les décisions.
    Le premier ministre a fait ces observations, puis il a fait volte-face. Il s'est défilé de ses responsabilités. C'est inacceptable. Le premier ministre avait promis aux Canadiens que le Canada et ses accords commerciaux sortiraient gagnants grâce au règlement négocié en vertu de l'ALENA et au libre-échange. Il n'a pas tenu parole.
    Il vaut également la peine de noter, non seulement à l'intention des députés, mais aussi à celle des experts et des membres des groupes d'intervenants à l'étranger, que ceux qui ont subi des répercussions dans ce dossier se sont présentés et ont dit ce qu'ils pensaient. Je vais maintenant donner lecture d'un commentaire fait par Frank Dottori, coprésident du Conseil du libre-échange pour le bois d'oeuvre, un groupe de revendication qui représente les sociétés forestières canadiennes:
    Nous nous attendons à ce que notre gouvernement nous aide à lutter contre les forces protectionnistes américaines et à qu'il trouve une solution à long terme aux problèmes de notre industrie.
    Je mentionnerai également le commentaire suivant, fait par Stephen Atkinson, analyste de la société BMO Nesbitt Burns:
    Pourquoi abandonner 22 p. 100 à la concurrence? Cet argent appartient aux entreprises canadiennes et à leurs actionnaires. Pourtant, le gouvernement se permet d'en faire cadeau.
    Un grand nombre de Canadiens, notamment les travailleurs touchés, les analyses de l'industrie et les groupes d'intérêts, rejettent unanimement cette entente.
    Ce dossier est important, dans le cadre global de nos relations commerciales avec les États-Unis.
    Quand j'ai été élu pour la première fois en 2002, j'ai eu l'occasion de participer à un lobby du bois d'oeuvre. Nous nous sommes rendus à Washington pour rencontrer plusieurs analystes et divers groupes d'intérêts et organismes, ainsi qu'un certain nombre de représentants du Congrès et de sénateurs, pour les mettre au courant des effets pervers de cette pratique sur l'industrie canadienne et leur dire combien elle était injuste.
    La population doit comprendre que, depuis cette époque jusqu'à maintenant, on ne compte plus les groupes et organisations qui ont appuyé la position canadienne, celle que la Chambre des communes devrait préconiser, à savoir que le Canada devrait entretenir des relations commerciales équitables avec les États-Unis, non pas les rapports préjudiciables actuels. Cependant, ce sont les lobbyistes les plus influents, de concert avec un petit groupe de membres du Congrès et de sénateurs, qui ont influencé la Maison-Blanche dans cette direction. Nous avons en fait beaucoup d'amis aux États-Unis qui comprennent que ce conflit a des répercussions négatives pour nos deux pays.
    Que le ministre du Commerce international soit libéral ou conservateur et qu'il change d'idée comme il change de parti n'a aucune importance à mes yeux. Ce qui importe, c'est que l'on abandonne cette mesure législative, que l'on instaure des appuis et que l'on maintienne une entente juste. Il ne s'agit pas uniquement de ce que nous avons déjà abandonné, et j'en parlerai plus tard, mais également de ce que nous comptons faire dans l'avenir en ce qui a trait à nos relations commerciales et aux conséquences que tout cela entraînera sur les emplois au pays.
    Je viens d'une région qui a bien réussi a plusieurs égards, mais qui a eu beaucoup de problèmes dans le secteur de l'automobile. En 1965, le Canada a négocié avec les États-Unis un pacte de l'auto qui était basé sur un système commercial juste entre nos deux pays. Ce système a été profitable à nos deux pays et il a permis le développement du secteur de l'automobile, non seulement au Canada, en Ontario et dans d'autres parties du pays, mais aussi dans certains États des États-Unis, comme au Michigan et ailleurs. Ce pacte a également favorisé d'autres secteurs, dont ceux de l'outillage et de la fabrication de moules et tous ces secteurs basés sur l'innovation technique qui assurent le développement économique du Canada. C'était une entente de commerce équitable basée sur des règles et ces règles ont été respectées.

  (1040)  

    Qu'a-t-il fini par arriver? Nous avons adhéré à l'ALENA et conclu une entente de libre-échange et un jugement défavorable à notre endroit a mis fin au pacte de l'automobile. Depuis ce temps, nous avons eu des problèmes. Notre part du marché a diminué. Toute une série d'obstacles ont été créés, rendant la concurrence encore plus difficile. Nous avons perdu une très bonne entente commerciale qui s'était avérée très profitable pour le Canada. Cette entente nous a permis de percevoir des millions de dollars par année en impôts, a assuré de bons emplois aux Canadiens et permis à nos écoles et universités d'innover. Nous avons abandonné tout cela parce que nous avons respecté les règles.
    Que nous reste-t-il maintenant? Nous avons une entente pour laquelle les Américains ont unilatéralement décidé de ne pas tenir compte de toute décision favorable au Canada. Nous avons continué d'enregistrer des réussites tout au cours de ce difficile processus, un processus qui a exigé que les politiciens et les organes du gouvernement appuient ce secteur dans ces moments difficiles, mais aussi un processus dont l'objectif ultime était d'en arriver à une entente commerciale équitable et à un règlement conforme à l'entente commerciale que nous avons signée.
    Ce que le gouvernement dit actuellement, c'est que les Américains ne sont pas tenus de respecter les règles, car, s'ils jouent assez dur et que leurs lobbyistes sont assez puissants, le Canada va capituler, non seulement en acceptant un règlement qui renferme un ensemble de dispositions préjudiciables pour les collectivités et les industries de tout notre pays, mais aussi en renonçant à beaucoup d'argent. Le Canada cède plus de 1 milliard de dollars aux États-Unis.
    Une partie de cet argent sera remise directement aux associations américaines du bois d'oeuvre afin qu'elles puissent concurrencer les entreprises canadiennes. D'autres montants seront versés dans un fonds discrétionnaire, à la Maison-Blanche, qui ne sera même pas tenue de s'adresser au Congrès pour qu'il décide de la façon dont ils seront dépensés. C'est inadmissible. L'argent devrait être retourné à ceux qui l'ont versé, à savoir à nos entreprises de l'industrie qui ont subi des torts considérables au cours de cette pratique.
    La réaction du gouvernement à l'égard de ceux qui ont critiqué cette pratique a été inacceptable. En substance, il a recouru à des tactiques musclées et il s'est assuré que ceux qui élèvent la voix subiront des préjudices. Il n'offrira pas de garanties de prêts et il n'aidera pas les entreprises à faire valoir leurs droits devant les tribunaux, comme cet accord les y autorise. C'est inacceptable.
    Je m'inquiète vivement de la position qu'adoptera le ministre à l'égard d'autres accords internationaux et politiques commerciales.
    Je sais que le Comité du commerce s'est réuni cet été parce que nous étions préoccupés par la position du ministre à l'égard du commerce équitable dans le dossier de la Corée. Il n'y a rien d'équitable dans ce dossier. Nous nous y opposons depuis le début. Nous espérons que d'autres députés se joindront à nous dans cette bataille.
    Quoi qu'il en soit, en juin dernier, le député de Burnaby—New Westminster a déposé au comité un rapport montrant que, si nous approuvions cet accord avec la Corée, nous perdrions d'autres emplois dans le secteur de l'automobile. Il ne s'agit pas uniquement du fait que le ministre a prévu une mauvaise entente pour le projet de loi C-24; il est également question de sa compétence et des motifs qui le poussent à agir. Nous avons une vue d'ensemble de la situation.
    Pourquoi agissons-nous ainsi? L'étude, qu'on a demandé au comité de déposer, n'a été rendue publique que trois mois plus tard. Ce n'est que lorsque le syndicat des TCA a publié ses propres études au sujet du libre-échange avec la Corée et des conséquences qu'il pourrait avoir sur l'industrie canadienne que le gouvernement a enfin publié le rapport montrant que les deux dossiers auront de graves effets préjudiciables. Le dossier qui nous occupe actuellement montre qu'il ne s'agit pas d'un accord commercial raisonnable et avantageux pour le gouvernement canadien.
    Quelle est la motivation? Je crois qu'elle est tout simplement de nature politique. C'est pour des considérations politiques qu'on apaise le camp américain de sorte que le gouvernement puisse faire valoir qu'il est près des États-Unis et obtenir des résultats, en dépit de ce qu'il leur vend, et c'est également pour des considérations politiques que, dans le dossier du commerce avec la Corée, on fait savoir que le gouvernement va conclure un accord avec la Corée au détriment des Canadiens.
    Je sais que mon temps de parole est écoulé, mais je veux souligner aux Canadiens qu'il s'agit d'un précédent. Il ne s'agit pas seulement du bois d'oeuvre. Même si certaines collectivités ne comptent pas un secteur du bois d'oeuvre, elles seront touchées à l'avenir, parce que cet accord autorise le ministre à brader d'autres secteurs d'activité. Qu'on parle de l'automobile, de l'acier ou de l'agriculture, l'accord permet non seulement à ceux qui sévissent contre nous, mais aussi à notre gouvernement, qui est censé nous protéger, de faire abstraction des règles.

  (1045)  

    Monsieur le Président, j'ai lu hier dans un journal qu'EDC demande que les titulaires des droits qui ont été perçus autorisent leur transfert à EDC dans le cadre de cette entente. Comment interprète-t-il cela? Ne croit-il pas, comme d'autres Canadiens, qu'il y a quelque chose de suspect là-dedans? EDC veut que les entreprises du secteur du bois d'oeuvre transfèrent leurs créances, de manière à pouvoir poursuivre ce processus. Y a-t-il dans cela un message caché?
    Monsieur le Président, le gouvernement a d'abord demandé aux entreprises de se braquer elles-mêmes le pistolet sur la tempe. Il leur demande maintenant de charger le pistolet. C'est inacceptable.
    EDC ne manifeste pas l'appui qu'elle manifesterait si elle souhaitait faciliter nos échanges commerciaux. L'industrie manque d'appui, en voilà un autre exemple navrant. Le gouvernement a eu recours à des tactiques brutales alors qu'il est censé bien traiter les entreprises. Il agit de façon déplorable et inacceptable, sans parler du mauvais signal qu'il envoie aux autres entreprises.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Windsor-Ouest du survol historique qu'il a fait. Il est important de ne pas oublier l'époque du Pacte de l'automobile. C'est parce qu'il a respecté les règles du jeu que le Canada a perdu le Pacte de l'automobile. Nous en avons vu les conséquences.
    L'accord sur le bois d'oeuvre a fait l'objet de plus d'un paradoxe. Au départ, le NPD n'appuyait pas l'ALENA, c'est vrai, mais puisque l'ALENA existe, nous croyons qu'il faut respecter les règles du jeu établies. Nous aimerions que les règles changent, mais il est prévu que la résolution des différends passe par ces mécanismes. Pourtant, l'accord sur le bois d'oeuvre ignore complètement les règles.
    Le député de Windsor-Ouest pourrait-il parler davantage des conséquences pour ce qui est de la perte d'emplois? Je sais que le secteur de l'automobile est en proie au même problème dans sa collectivité. Sur le même front, nous sommes sur le point de commencer un nouveau chapitre, celui de l'industrie du bois d'oeuvre. Des milliers de travailleurs vont joindre les rangs des chômeurs parce que le Canada a capitulé et signé un accord déplorable.
    Monsieur le Président, la députée de Vancouver-Est soulève un point fort important. Au bout du compte, ce qui importe le plus dans tout cela, ce sont les emplois et les collectivités, qui, souvent, dépendent beaucoup les uns des autres pour assurer leur prospérité. Partout dans le pays, nous voyons des collectivités en crise.
    Il est important de souligner que le gouvernement n'a pas encore proposé de stratégie sectorielle dans quelque domaine que ce soit. L'ancien gouvernement avait parlé de ce genre de stratégie pour les secteurs de l'automobile, de l'aérospatiale et du textile, mais n'a jamais rien fait. Maintenant, avec cet accord, le gouvernement actuel dit que si les États-Unis ne veulent pas respecter les règles du jeu, le Canada cédera. Les États-Unis ne respecteront pas les règles du jeu, ce qui aura des conséquences néfastes sur l'industrie et les collectivités. Il n'existe aucune stratégie sectorielle. Pourquoi n'y a-t-il pas de stratégie pour les collectivités qui seront touchées? Pourquoi n'y a-t-il pas de plan d'aide?
    Le moins que le gouvernement puisse faire, c'est établir une stratégie sectorielle pour cette industrie afin d'aider ceux qui subiront les conséquences de la mauvaise décision du gouvernement. Au lieu de cela, le gouvernement dit qu'il faut accepter cet accord et passer à autre chose. L'accord est peut-être bon pour le gouvernement, mais il est mauvais pour d'autres. C'est inacceptable.
    Monsieur le Président, il y a certains détails relatifs à l'accord, particulièrement en ce qui concerne les producteurs de bois d'oeuvre qui souhaitent exercer leur droit de poursuivre leurs recours judiciaires. Il semblerait qu'ils pourraient en fait faire échouer l'accord. C'est une question à laquelle le gouvernement n'a pas encore répondu directement.
    Pourquoi débattons-nous la motion de voies et moyens, qui pourrait perdre toute sa pertinence si ce qu'on entend est vrai? Le gouvernement devrait peut-être être appelé à expliquer pourquoi on tarde à verser les paiements et à dire s'il y a quelque fondement que ce soit aux allégations selon lesquelles les producteurs qui veulent poursuivre leurs recours judiciaires pourraient faire échouer l'accord.

  (1050)  

    Monsieur le Président, le député a tout à fait raison. C'est un problème important et je me demande bien pourquoi le gouvernement voudrait s'y attaquer d'une façon aussi hostile.
    Je pense que cette façon de faire s'inscrit dans un programme plus vaste visant à se faire du capital politique, qu'il s'agisse du dossier dont nous discutons, de démanteler la Commission canadienne du blé, ou de s'en prendre à l'industrie de l'automobile et à celle de la construction navale au moyen d'un accord de libre-échange innovateur. Toutes ces possibilités sont évoquées par le gouvernement afin de semer la confusion chez le public et de mousser son propre programme politique. Mais pendant ce temps le gouvernement ne s'occupe pas des faits. Il ne répond même pas à une simple question. En est-il ainsi parce que ce sont les tribunaux qui vont trancher?
     Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui pour m'opposer, au nom du Nouveau Parti démocratique, au projet de loi C-24.
    Les députés néo-démocrates participent très activement à ce débat. Un peu plus tôt, le gouvernement a déposé une motion visant à mettre fin au débat sur un amendement et sur le projet de loi comme tel. C'est là une autre illustration du mépris total du gouvernement à l'endroit de la Chambre. Il s'agit ici d'un projet de loi et d'un accord importants qui auront une incidence dans toutes les régions du pays et qui touchera les travailleurs, les intérêts commerciaux et l'économie des collectivités locales. On aurait cru qu'une mesure législative aussi importante ferait l'objet d'un débat exhaustif et démocratique à la Chambre. Pourtant, aujourd'hui, le leader du gouvernement à la Chambre a eu recours à une tactique visant essentiellement à censurer le débat sur le projet de loi et à y mettre fin.
    Je vais parler des audiences publiques un peu plus loin, mais je veux d'abord dire que j'ai honte du fait que le gouvernement ait eu recours à cette tactique aujourd'hui afin d'empêcher les députés d'exprimer leurs points de vue et de faire part des préoccupations de leurs électeurs relativement à cette mesure législative. Nous allons utiliser chaque minute du temps alloué au débat sur le projet de loi C-24. Nous sommes fermement convaincus que cette mesure, qui constitue l'accord sur le bois d'oeuvre, est mauvaise pour les Canadiens et l'industrie.
    Je remercie le député de Burnaby—New Westminster, notre porte-parole en matière de commerce, qui a dirigé notre débat sur cette question. Il a travaillé inlassablement au comité, à la Chambre et, au cours de l'été, au sein de la collectivité. Notre porte-parole en matière de commerce a réussi à obtenir que le comité se réunisse l'été pour discuter de cette question importante, alors que la Chambre était en congé. Nous le remercions de l'attention qu'il a portée aux détails de cet accord imposant. Il a fait connaître le contenu de l'entente au grand public, a signalé ce qui clochait et a fait savoir pourquoi cette entente devrait être rejetée. Je vais rapidement passer en revue les raisons qui font qu'elle devrait être rejetée.
    Dénonçons d'abord une fausseté, soit que l'Accord sur le bois d'oeuvre est fondé sur l'idée que les industries canadiennes exploitant le bois d'oeuvre sont subventionnées. Les Américains ont colporté cette idée à chaque recours judiciaire qu'ils ont exercé et par tous les moyens politiques qu'ils ont trouvés. C'en est rendu au point que les Canadiens commencent à croire que les Américains ont peut-être raison.
    Cette fausseté, soit que les industries exploitant le bois d'oeuvre sont subventionnées, a été exposée devant tous les tribunaux commerciaux de l'ALENA et des États-Unis, et l'argument a été rejeté chaque fois. Les tribunaux se rangent clairement du côté de l'industrie canadienne. Le mythe des subventions a été utilisé par les États-Unis pour donner un coup de pouce à leurs propres industries au détriment du Canada. Ce mythe est fondé sur des prémisses complètement fausses. C'est évident que les États-Unis ne veulent pas respecter la règle du jeu malgré les décisions sans équivoque rendues au moyen du mécanisme de règlement des différends et par les tribunaux. Mais ce qui est vraiment consternant pour nous, c'est de voir que le gouvernement conservateur permet aux États-Unis d'enfreindre les règles, alors que nous étions sur le point de gagner la partie.
    Le Canada a remporté ces importantes batailles juridiques en vertu de l'Accord de libre-échange nord-américain devant les tribunaux commerciaux américains. En fait, en utilisant les mécanismes légalement accessibles, le Canada était à quelques mois de gagner les deux dernières causes encore devant les tribunaux, ce qui aurait annulé le différend et aurait entraîné le remboursement complet des 5,3 milliards de dollars prélevés en droits illégaux. Mais qu'est-ce que notre gouvernement a choisi de faire? Apparemment, il voulait conclure une entente à tout prix, et nous voilà maintenant en train de l'adopter à toute vapeur à la Chambre, avec ce projet de loi.

  (1055)  

    En deuxième lieu, l'entente cède 500 millions de dollars appartenant à l'industrie canadienne du bois d'oeuvre pour subventionner la U.S. Coalition for Fair Trade Lumber Imports. Il est incroyable que, dans le cadre de l'accord, nous remettions de l'argent qui appartient en toute légitimité aux entreprises canadiennes à une coalition américaine, coalition qui va continuer à s'opposer à l'industrie canadienne en renforçant l'argumentation et la campagne visant à favoriser ses intérêts.
    Troisièmement, l'entente accordera également un financement de 450 millions de dollars au gouvernement Bush, qui s'en servira à sa discrétion, apparemment sans obtenir l'approbation du Congrès et sans rendre de comptes à qui que ce soit.
    Quatrièmement, nous nous inquiétons de nous faire dire que cette entente est merveilleuse, qu'il ne peut y en avoir de meilleure et qu'elle assurera la paix dans le domaine forestier, etc. En réalité, cette entente peut être annulée unilatéralement à tout moment. Elle n'assure ni la stabilité, ni la prévisibilité que cherchait, me semble-t-il, l'industrie canadienne du bois d'oeuvre. Il s'agit évidemment d'éléments critiques. Face à un différend qui a perduré, il est important de bénéficier de stabilité et de prévisibilité. On nous dit que cela est prévu dans l'entente mais, lorsque nous prenons connaissance des détails, nous constatons que tel n'est pas le cas.
    De plus, l'accord impose des limites déraisonnables au commerce par l'application de droits tarifaires et de contingents punitifs qui vont dans le sens contraire de la souplesse nécessaire. Il est ainsi difficile pour l'industrie de planifier ses activités et de prédire ses flux de trésorerie, par exemple.
    Bon nombre de chefs de file de l'industrie partout au Canada ont dit craindre, lors des audiences du Comité du commerce tenues cet été, que l'accord sur le bois d'oeuvre ne détruise leur industrie et leurs collectivités. Les milieux de l'industrie eux-mêmes sont inquiets. Nous devrions en être très préoccupés.
    Comme nous l'a dit le député de Windsor-Ouest, l'accord établit un précédent très néfaste, non seulement pour le bois d'oeuvre, mais pour d'autres secteurs industriels au Canada. Il ouvre la porte à d'autres attaques de le part des États-Unis, qui voudront cibler d'autres intérêts et industries du Canada en leur imposant des droits tarifaires illégaux. Pourquoi? Parce que les États-Unis savent qu'ils peuvent le faire impunément. Ils savent non seulement qu'ils peuvent le faire impunément, mais qu'ils en seront récompensés.
    Le NPD voit là une pente dangereuse, un précédent très néfaste. On aura tant misé sur cet accord qu'il deviendra de plus en plus difficile désormais de combattre d'autres campagnes qui émaneront des milieux politiques et qui cibleront les intérêts canadiens.
    À la Chambre, nous avons passablement entendu parler de la façon dont cet accord peut entraîner un nombre considérable de pertes d'emplois. J'ai interrogé d'autres députés à ce sujet. Je suis entre autres préoccupée par le fait que l'accord ne repose sur aucune stratégie industrielle, stratégie que nous pourrions examiner pour constater qu'elle vise effectivement à renforcer la productivité et l'économie canadienne, et qu'elle est axée sur la création d'emplois, sur des normes de travail décentes et sur la durabilité. Cependant, cet accord ne repose sur rien de tout cela. En fait, secteur après secteur, nous semblons nous éloigner de toute stratégie.
    Je me rappelle que, la semaine dernière, le député deWestern Arctica parlé de cette question. Il a utilisé l'exemple du secteur pétrolier et gazier à l'égard duquel, encore une fois, nous n'avons pas de stratégie industrielle. Nous n'avons pas non plus de stratégie dans le secteur manufacturier.
    Le député de Windsor-Ouesta parlé un peu plus tôt de l'industrie automobile. Il a dit qu'il n'y a pas de stratégie industrielle pancanadienne.
    Compte tenu du contexte de départ dans lequel il s'inscrit, cet accord donne vraiment une très mauvaise impression. Il donne l'impression que le gouvernement n'est pas intéressé à créer une stratégie d'ensemble. À cet égard, je signale qu'il en était de même du gouvernement précédent puisqu'il n'y a pas de stratégie industrielle.
     Il est consternant de voir que pendant l'été, le Comité du commerce, a convenu, à la majorité, de tenir des audiences sur cet accord, dans trois collectivités, soit Thunder Bay, Vancouver et Saguenay.

  (1100)  

    Récemment, le comité a complètement fait volte-face à ce sujet. Malheureusement, les députés libéraux ont permis l'examen d'une motion concernant ces audiences et ils ont voté contre. Nous étions prêts à tenir des audiences dans ces collectivités très gravement affectées par la situation, mais, soudainement, le projet est tombé à l'eau. Je me demande vraiment où les députés libéraux se situent à ce sujet, parce qu'il me semble que la tenue de consultations à l'extérieur d'Ottawa auprès des collectivités affectées constitue un aspect très important du présent débat.
    Je suis contre cet accord, à l'instar des autres députés du caucus néo-démocrate. Nous en débattrons aussi longtemps que possible pour en empêcher l'adoption.
    Monsieur le Président, j'ai pris grand plaisir à écouter les remarques de la députée de Vancouver-Est. Elle a présenté les faits de façon très éloquente.
    Tout au long des échanges, de la négociation des ententes et au moment de la signature potentielle, tout le monde s'en est tenu au même montant, soit 5 milliards de dollars. Nous discutons de ce montant depuis huit ou neuf mois maintenant. Si quelqu'un avait 5 milliards de dollars à la banque, n'y aurait-il pas des intérêts qui s'accumulent? Le montant semble être bloqué à 5 milliards de dollars. Si je comprends bien, 5 milliards de dollars canadiens seraient retenus en fiducie quelque part, et je ne pense pas qu'il s'agisse d'une armoire ou d'un tiroir. Ce montant est dans un endroit où il accumule des intérêts. La députée sait-elle quelque chose à ce sujet?
    J'ai aussi cru comprendre que les entreprises canadiennes qui décident de ne pas signer cette entente seront pénalisées par le gouvernement au moyen d'un droit de 19 p. 100. J'aimerais connaître son opinion à ce sujet.
    Finalement, je pense que sa remarque au sujet des libéraux est quelque peu injuste. Je crois que les Canadiens qui suivent ce débat savent que nous combattons vigoureusement cette entente parce que nous la trouvons injuste envers l'industrie canadienne, les produits canadiens et le Canada en tant que pays.
    Monsieur le Président, il est décevant que les libéraux aient changé d'idée au comité, surtout après ce qui vient de se produire aujourd'hui en ce qui concerne l'interruption du débat. J'espère que les libéraux reverront leur position quant à l'importance de tenir des audiences dans ces trois centres. Bien des gens ont besoin de se faire entendre et veulent se faire entendre.
    Pour ce qui est des questions du député, la question des 5 milliards de dollars a été soulevée à maintes reprises. Normalement, dans le cadre des pratiques comptables, les intérêts font partie du processus de rapprochement financier, mais d'une façon ou d'une autre, il n'en a pas été tenu compte. Il n'est pas simplement question des 5 milliards de dollars et du milliard de dollars qui reste aux États-Unis. Il faut aussi penser aux intérêts qui n'ont pas été calculés.
    Le droit de 19 p. 100, qui est en fait une double imposition, une taxe punitive imposée aux compagnies qui refusent d'adhérer, m'a l'air d'un précédent inquiétant. Le gouvernement conclut une entente et il menace ensuite les compagnies à la pointe du fusil en leur disant que si elles n'adhèrent pas elles devront payer un droit supplémentaire. Cela est fondamentalement antidémocratique et c'est une raison de plus de ne pas aller de l'avant avec cette entente.

  (1105)  

    Monsieur le Président, la situation a bien changé ces derniers jours en ce qui a trait à cette entente, en ce sens que le gouvernement l'a, encore une fois, repoussée de 30 jours.
    Selon moi, ce délai donne au gouvernement, qui prétend avoir beaucoup d'appui pour cette entente, une excellente occasion de tenir des audiences à trois endroits pour vraiment écouter ce que pensent les Canadiens. Nous pourrions reporter le vote tant que le gouvernement n'aura pas prouvé à la population qu'il a de l'appui pour cette entente, que ceux qui sont en faveur sont prêts à exprimer leur position dans des audiences publiques et à orienter les parlementaires.
    Ma collègue croit-elle qu'une excellente occasion s'offre au gouvernement pour prouver qu'il a raison?
    Monsieur le Président, le député a parfaitement raison. On se demande vraiment pourquoi le gouvernement est si déterminé à mettre en oeuvre cet accord en toute hâte en faisant ce qu'il a fait aujourd'hui et en ne tenant pas d'audiences. Je crois que les conservateurs sont en déroute. Ils s'inquiètent certainement du fait que l'élan qu'ils croyaient s'être donnés s'essouffle rapidement. Ils ont donc repoussé la mise en oeuvre de l'accord au 1er novembre, je crois, et la date pourrait être encore repoussée.
    Le gouvernement ferait bien de faire face à la musique et d'écouter ce que les Canadiens ont à dire. De quoi a-t-il peur? Pourquoi ne veut-il pas écouter les gens des collectivités les plus touchées? Si le gouvernement pense que son accord est si bon, il doit écouter ce que les gens ont à dire. Rien ne dit qu'il serait impossible de le faire avec un peu de temps.
    Nous demandons au gouvernement et aux autres parties de revenir sur leur décision et de permettre la tenue d'audiences dans les collectivités touchées.
    Monsieur le Président, le gouvernement conservateur a sacrifié l’industrie canadienne du bois d’œuvre en acceptant cet accord. Nous allons nous y opposer parce qu’il n’est pas bon.
     Dès le début, nous avons dit que les accords de libre-échange étaient voués à l’échec. Je me souviens des longs débats du milieu des années 1980. Nous avons dit que l’ALENA poserait des problèmes. À l’époque, on nous a dit de faire confiance, que cet accord commercial marcherait bien et que les entreprises en profiteraient assurément.
     Qu’est-il arrivé ensuite? Dans ma circonscription, Trinity—Spadina, beaucoup de fabriques de vêtements ont fermé leurs portes. Un grand nombre d’immigrantes ont perdu leur emploi et leurs moyens de subsistance à cause de l’Accord de libre-échange. Au milieu des années 1980, il y a eu beaucoup de discussions. Nous sommes beaucoup intervenus pour dire quel sort attendait certaines industries. On nous a répondu qu’il y aurait des perdants et des gagnants et que nous allions bien voir les résultats.
     Dans ma circonscription, Trinity—Spadina, des milliers et des milliers d’emplois ont disparus, des tas d’usines et des zones entières ont été balayées. Heureusement, nous avons pu attirer d’autres industries, en informatique et dans bien d’autres secteurs, pour aider à rebâtir tout ce quartier. Chose certaine, l’industrie du vêtement, au centre de Toronto, a été presque totalement éliminée. Sauf erreur, on peut dire la même chose de certains secteurs de Montréal. De surcroît, il se trouve que maintenant, dans l’industrie du vêtement, il y a des gens qui travaillent chez eux et sont très mal payés. Tout cela à cause du libre-échange.
     À l’époque, nous avons dit aussi que l’Accord de libre-échange ne marcherait pas forcément, à cause du chapitre 11 qui permet aux grandes sociétés de poursuivre divers ordres de gouvernement.
     Il y a quelques années, la petite localité de Hudson, au Québec, a décidé d’interdire les pesticides. Certaines entreprises ont crié à l’injustice. Aux termes de l’Accord de libre-échange et du chapitre 11, la localité de Hudson a été poursuivie, mais heureusement, grâce à l’aide de la Fédération canadienne des municipalités et de bien d’autres intervenants, la localité a fini par l’emporter. Grâce à cette victoire, différentes municipalités peuvent maintenant interdire les pesticides si elles le souhaitent.
     On nous a dit que l’industrie profiterait du libre-échange, mais voyez ce qui se passe. L’accord sur le bois d’œuvre écarte complètement le mécanisme de règlement des différends. On nous a dit de nous fier aux tribunaux, qu’ils nous protégeraient. Ils ne le feront plus. L’accord sur le bois d’œuvre détruit le mécanisme de règlement des différends de l’ALENA, car on accepte de donner des centaines de millions de dollars à l’administration Bush et à la U.S. Coalition for Fair Lumber Imports. Le message est clair: nous allons payer les Américains pour nous faire intimider. La coalition est le principal adversaire de l’industrie canadienne du bois d’œuvre, et nous lui versons de l’argent que nous avons durement gagné pour la remercier d’avoir harcelé le Canada, les entreprises canadiennes, les travailleurs canadiens.
     Voici ce qu’on en dit. Un des chroniqueurs du Toronto Star a dit que, grâce à cet accord, nous pouvons arrêter de prétendre que nous avons un accord de libre-échange avec les États-Unis et passer à autre chose. Voilà où nous en sommes.

  (1110)  

     Dans le Thunder Bay Chronicle Journal, publié dans une région où de nombreux emplois vont disparaître, à moins qu’ils n’aient déjà disparu, on lit ceci:
    Pendant combien de temps encore le Canada va-t-il se laisser intimider par une poignée de puissants sénateurs américains qui sont aux ordres de leurs barons de l’industrie du bois d’oeuvre qui leur demandent de faire la sourde oreille aux nombreuses décisions rendues contre eux en vertu de l’ALENA? Pendant combien de temps encore George W. Bush va-t-il accepter cette trahison infligée au meilleur ami des États-Unis? Combien de temps encore Stephen Harper va-t-il le tolérer?
     Il n’y a pas très longtemps, en 2005, le premier ministre a dit... Je sais que je n’aurais pas dû lire son nom. Je suis désolée.
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. On vient de désigner un député de la Chambre, le premier ministre, en l'occurrence, par son nom. Je crois que le Règlement dit que les députés doivent être désignés par leur titre de ministre ou le nom de leur circonscription.
    Je demande à la députée de Trinity—Spadina d'éviter de désigner le premier ministre par son nom à l'avenir.
    Monsieur le Président, vous avez raison. Je lisais une citation et j'ai en effet désigné le premier ministre par son nom. Je m'en excuse. Cela ne se produira plus.
    Permettez-moi de lire une autre citation du premier ministre, qui date de 2005. À l'époque, il a dit ceci:
    Si l'industrie américaine est capable de convaincre le gouvernement de ne pas rembourser les droits perçus, après avoir perdu son dernier appel devant le tribunal de l'ALENA, l'absence de différend dans la plupart des autres échanges commerciaux n'est d'aucune utilité pour nous rassurer. Si les règles sont tout simplement ignorées, c'est le fondement même d'un système axé sur le respect des règles qui est menacé. L'avenir des relations commerciales entre le Canada et les États-Unis pourrait être dangereusement compromis.
    Nous savons que si la Chambre adopte cette entente, nos relations commerciales avec les États-Unis se dégraderont. Les industries de l'acier et du blé seront touchées. Cette entente aura des répercussions négatives sur nos accords et nos relations commerciales dans de nombreux secteurs.
    C'est également un exemple qui montre clairement comment le gouvernement fait fi des intérêts des Canadiens pour apaiser nos puissants voisins du Sud. Tous les Canadiens et toutes les entreprises canadiennes veulent que le gouvernement canadien défende leurs intérêts, comme il a été élu pour le faire.
    Malheureusement, le gouvernement a laissé tomber l'industrie canadienne du bois d'oeuvre. Cette dernière n'est pas subventionnée par le gouvernement canadien et n'est pas protégée non plus contre les vives attaques des entreprises américaines qui se liguent contre elle.
    Nous savons que cet accord va nuire à l'emploi. De bien des façons, il va conduire à une situation terrible. À l'époque, nous avons dit à des milliers de travailleurs qui avaient perdu leur gagne-pain au cours des cinq dernières années qu'il y avait de la lumière au bout du tunnel, car nous remportions ces divers litiges. En fin de compte, lorsque nous aurons eu gain de cause devant les divers tribunaux, et il ne reste plus qu'une affaire à entendre, les 5 milliards de dollars seront remboursés aux entreprises canadiennes. Elles seront alors en mesure d'investir dans leur secteur. Les travailleurs canadiens pourront en profiter. Nous avons dit aux intéressés qu'il fallait poursuivre nos efforts.
    Malheureusement, cet accord est tout à fait inéquitable à l'égard des gens qui travaillent encore dans l'industrie du bois d'oeuvre et leurs familles, car la situation demeurera instable et imprévisible dans ce secteur. Il y aura moins d'argent à réinvestir dans ces entreprises pour qu'elles se modernisent et il n'y a pas d'argent pour une rationalisation ni aucun encouragement à cet égard.
    De plus, il y a aura probablement un accroissement des exportations massives de bois brut, ce qui nuira à l'industrie. Nous allons remarquer une restructuration de l'industrie du bois d'oeuvre du fait d'un manque de compétitivité par rapport à nos concurrents américains, ce qui entraînera des suppressions d'emplois. Comme l'industrie n'aura pas une grande marge de manoeuvre à cause des contingents et des taxes, il lui sera difficile de planifier ses activités et d'être compétitive.
    Cela va également constituer un problème pour les grandes villes. En effet, les gens, surtout les Américains, devront en fin de compte payer plus pour faire construire une maison.
    C'est la raison pour laquelle nous allons nous prononcer contre cette très mauvaise entente pour les travailleurs et pour l'industrie.

  (1115)  

    Monsieur le Président, ma question s'adresse à la députée de Trinity—Spadina. Pourquoi son parti et elle n'appuient-ils pas cet accord?
    Voici un accord auquel souscrivent toutes les principales provinces productrices de bois d'oeuvre. La Colombie-Britannique appuie l'accord. L'Ontario appuie l'accord. Le Québec appuie l'accord. En outre, cet accord jouit du soutien de la vaste majorité des entreprises de l'industrie. Une majorité écrasante d'entreprises de l'industrie appuient cet accord.
    Pourquoi n'appuie-t-elle pas l'accord quand les trois principales provinces productrices de bois d'oeuvre et la vaste majorité des entreprises du secteur du bois d'oeuvre l'appuient? Comment peut-elle prendre la parole à la Chambre et ne pas appuyer un accord auquel souscrivent les provinces et les producteurs de bois d'oeuvre?
    Monsieur le Président, la réponse est fort simple. C'est un milliard de dollars. C'est de l'argent canadien. C'est la souveraineté canadienne. Si nous appuyons cet accord, nous devrons verser un milliard de dollars aux États-Unis. Les seuls qui se réjouissent de l'accord sont les Américains qui savent que c'est de l'argent qu'ils nous ont volé après nous avoir intimidés pendant des années. Ils se serviront de cet argent pour continuer de harceler notre industrie.
    Depuis que cet accord a été annoncé, 112 entreprises canadiennes ont intenté des poursuites contre les gouvernements canadien et américain en invoquant le respect de l'intégrité du chapitre 19 et en exigeant le remboursement de la totalité des droits de douane illégalement prélevés par le Trésor américain. Le fait que de nombreuses entreprises canadiennes intentent des poursuites me dit que ces dernières ne sont pas heureuses de l'accord.
    Le milliard de dollars que nous laissons derrière est, à mon avis, le fruit d'un crime commercial et devrait être remboursé en totalité aux contribuables canadiens, qui gagnent leur vie à la sueur de leur front.

  (1120)  

    Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement ce que la députée de Trinity—Spadina avait à dire. Elle a parlé d'une foule de choses, outre l'entente sur le bois d'oeuvre, et elle a dit que les ententes commerciales ne donneront rien. Elle a fait une généralisation qui n'est pas très juste, selon moi, car, sans de telles ententes, nous n'aurions pas connu la prospérité que nous avons connue au cours des 10 ou 12 dernières années, la plus longue période de croissance économique ininterrompue de l'histoire de notre pays.
    Propose-t-elle que nous ne fassions rien? Nos excédents commerciaux ont augmenté, ce qui a permis de créer plus de trois millions d'emplois. Elle a parlé des pertes d'emplois survenues au cours des cinq dernières années. Le Canada a connu une croissance dans le domaine de l'emploi.
    Elle a parlé des secteurs du textile et du vêtement. Je me souviens que, du temps où je présidais le Comité du commerce international, nous avons entendu les témoignages de personnes qui étaient bien conscientes du fait que l'industrie subissait des transformations, notamment à l'appui des PMA, ce que la députée ne savait sûrement pas. Le milieu a appris à s'adapter; nous avons appris à être plus concurrentiels et à adapter nos méthodes.
    Je terminerai par une question. La députée est-elle en train de nous dire que nous ne devrions signer aucune entente commerciale internationale, que le Canada devrait devenir un pays hermétique qui ne fait affaire avec aucun autre? Que dit-elle au juste?
    Ce que je dis très précisément, monsieur le Président, c'est que le mécanisme de règlement des différends est foutu. L'accord prévoit ce mécanisme, et nous obtenons constamment gain de cause. Nous obtenons gain de cause devant les tribunaux, mais cette entente va créer un précédent.
    Il est vrai que nous avons besoin du commerce, mais de commerce loyal, pas seulement du libre-échange. Est-ce que c'est libre quand nous perdons 1 milliard de dollars, quand des entreprises canadiennes sont harcelées par des coalitions américaines, quand on nous enlève tous nos droits?
    Le commerce avec les États-Unis n'est pas la seule option qui s'offre à nous. Nous devrions concentrer davantage nos efforts du côté de la Chine et de l'Inde. Nous faisons bien quelques efforts, mais nettement pas assez quand il s'agit, par exemple, d'encourager les petites entreprises à prendre contact avec d'autres pays et à trouver des moyens d'y faire du commerce.
    J'ai mentionné le mécanisme de règlement des différends et le fait que nous obtenons constamment gain de cause devant les tribunaux. Pourtant, on a signé une entente qui, en définitive, ne nous permet pas de récupérer le milliard de dollars qui manque.
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement et j'attire l'attention de la présidence sur le fait que le gouvernement a invoqué plus tôt aujourd'hui l'article 56.1 du Règlement afin de couper court au débat sur les amendements et sous-amendements proposés au projet de loi C-24 dont nous débattons actuellement.
    Le gouvernement a eu recours de façon inappropriée à cet article du Règlement. J'aimerais porter à votre attention un débat tenu à la Chambre ainsi qu'une décision rendue par le Président en septembre 2001. Le député de Winnipeg--Transcona a d'ailleurs participé à ce débat qui portait sur le recours inapproprié à l'article 56.1 du Règlement.
    En rendant cette décision en 2001, le Président a demandé aux députés de faire preuve de beaucoup de circonspection à la lecture de décisions antérieures. Puis il a fait le parallèle entre l’article 56.1 du Règlement, qui exige une tentative préalable en vue d’obtenir le consentement unanime, et l’article 78, la règle d’attribution de temps, qui exige un avis selon lequel il y a eu consultation préalable. Le Président a dit ceci:
    Or il me semble douteux, après la lecture du texte complet de la décision, que le Président Fraser ait vraiment eu l'intention de laisser entendre que l'article 56.1 devait s'interpréter comme un autre mécanisme, acceptable au plan de la procédure, pour limiter le débat.
    Il a ajouté ceci:
    Le recours accru à l’article 56.1 depuis 1997 est une source de sérieuses préoccupations pour le Président. Le gouvernement dispose déjà, en vertu des articles 57 et 78, de plusieurs options pour limiter le débat. L’article 56.1 est censé être réservé aux motions pour affaires courantes, telles les motions visant l’agencement des travaux de la Chambre. Il n’a jamais été destiné à servir pour l’adoption d’un projet de loi à ses diverses étapes et surtout pas un projet de loi qui n’entre pas dans la catégorie des projets de loi envisagés par le Règlement dans les « cas d’urgence ou de circonstances extraordinaires ».
    Par conséquent, monsieur le Président, je vous demande de vous pencher sur la question et de statuer si le gouvernement a eu recours de façon inappropriée à l'article 56.1 du Règlement. On invoque habituellement cet article au cours de l'étude des affaires courantes quant à savoir si les travaux de la Chambre seront suspendus plus tard ou plus tôt que prévu pour le congé estival. Les conservateurs ont invoqué cet article de façon inappropriée afin de limiter le débat sur ce projet de loi alors qu'ils pouvaient recourir à d'autres articles du Règlement prévoyant la tenue de consultations entre les partis.
    Les conservateurs utilisent une fois de plus des moyens détournés pour en arriver à leurs fins. C'est inacceptable. Je saisis la présidence de cette question et lui demande de rendre une décision.

  (1125)  

    D'autres députés souhaitent-ils intervenir au sujet du même recours au Règlement? Le député d'Abbotsford a la parole.
    Monsieur le Président, je rappelle à la Chambre et à la députée que la motion a déjà été adoptée. La députée essaie donc d'intervenir après coup sur une question réglée. Elle ne peut pas le faire. Je l'invite donc à consulter l'alinéa 56.1b) du Règlement, qui dit essentiellement qu'il ne devrait être invoqué que pour l'administration des affaires de la Chambre et l'agencement de ses travaux.
    Ce n'est pas la première fois que ces arguments sont évoqués à la Chambre et il est regrettable que la députée soulève la question aujourd'hui. Je lui rappelle que nous n'avons écourté le débat d'aucune façon. En effet, la députée et tous les députés de son parti ont toujours le droit de poursuivre le débat pendant le temps de parole dont ils disposent. Par conséquent, il est inexact d'affirmer que nous avons abrégé le débat sur cette importante question.
    Y a-t-il d'autres interventions sur ce même recours au Règlement?
    Comme il n'y en a aucune, j'informe la Chambre et, en particulier, la députée de Vancouver-Est, que la présidence va prendre ce recours au Règlement en délibéré. La présidence est déjà consciente des controverses antérieures qui ont été soulevées au sujet de cette même procédure et, en temps voulu, le Président communiquera sa décision à la Chambre sur ce recours au Règlement.
    Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre quelques minutes pour vous faire part de mes réflexions sur cette importante question dont la Chambre est saisie.
     Je représente une circonscription du Nord de l’Ontario dont l’économie est fortement tributaire de la forêt. Il est essentiel que tous ceux d’entre nous qui représentent ici des circonscriptions de cette importante région de notre merveilleux pays se prononcent clairement et d’une manière concise et passionnée sur des sujets qui ont des conséquences pour nous. L’économie du Nord de l’Ontario est très vulnérable et très fragile. Des décisions gouvernementales comme celle-ci ajoutent un élément de précarité dans un marché qui est déjà forcément instable en raison des aléas qui le caractérisent.
     Nous, du Nord de l’Ontario -- et j’utilise le mot « nous » parce mes propos reflètent ce que j’ai entendus à maintes occasions de la part des représentants de la coalition des entreprises forestières du nord ontarien et des membres d’administrations municipales de tout le Nord de l’Ontario -- allons subir les répercussions de cet accord. Ces personnes me parlent et parlent très explicitement aux membres de notre caucus et des caucus libéral et conservateur des conséquences qu’aura cet accord pour eux. Ils parlent de la réalité telle qu’elle existe actuellement dans le Nord de l’Ontario, où le milieu de l’industrie forestière est inquiet. C’est « la débâcle pure et simple », comme ils disent, et cet accord y est pour beaucoup.
     Dans le Nord de l’Ontario, nous avons besoin que le gouvernement travaille en partenariat avec nous. Nous avons besoin que le gouvernement, comme il l’a fait par le passé, conjugue ses efforts avec ceux des collectivités du Nord pour assurer à l’économie de notre région une certaine stabilité. Sans cette stabilité, sans ces collectivités et sans ces partenariats, un pan très important de l’économie canadienne, à savoir le secteur des ressources, l’industrie forestière, risque de subir de lourds dommages. Et le tort qui lui sera causé sera, à mon avis, irrémédiable. Voilà ce que m’ont dit très éloquemment les représentants des autorités locales et de l’industrie elle-même dans le Nord de l’Ontario.
     Ils m’ont rappelé que nous avions fini par accepter l’Accord de libre-échange. Celui-ci ne nous a pas emballés quand il a été présenté et adopté à la Chambre, mais, après l’avoir examiné de plus près -- et, vu que nous sommes ce que nous sommes, nous les gens de cette région du pays, à savoir des gens capables de surmonter quotidiennement et avec ténacité des difficultés tenant à la géographie du territoire que nous occupons ainsi qu’aux conditions atmosphériques et, parfois, à l’isolement que nous connaissons --, nous en sommes venus à accepter cet accord de libre-échange. Nous avons fait appel aux meilleurs cerveaux que nous avons pu trouver et nous sommes parvenus à nous servir dudit accord pour développer encore davantage un secteur de notre économie qui, pour l’essentiel, était déjà dynamique et stimulant. L’Accord de libre-échange nous a procuré des emplois et a profité à nos collectivités. Il a d’ailleurs contribué à la prospérité qu’a généralement connue l’économie de notre pays ces 10 à 15 dernières années.
     Nous nous sommes toutefois retrouvés à maintes et maintes reprises devant les tribunaux avec nos vis-à-vis étasuniens, qui n’ont cessé de s’en prendre à nous en essayant d’exploiter les lacunes de l’Accord. Ils ont formulé contre nous des griefs qui n’étaient nullement fondés suivant les termes de l’Accord de libre-échange. L’industrie et nos collectivités, entre autres, ont dépensé des dollars durement gagnés pour faire face comme il se devait à ces poursuites. Chaque fois, le Canada a eu gain de cause.
     Mais voici que nous nous retrouvons maintenant à la merci d’un gouvernement conservateur qui est prêt à faire volte-face, à jeter l’éponge et à déclarer forfait devant les États-Unis. Cette position aura de très lourdes conséquences pour l’industrie forestière du Nord de l’Ontario. Elle envoie le mauvais message.

  (1130)  

    Comme les députés le savent, les Canadiens ont des liens économiques quotidiens très directs et très immédiats avec les Américains. Dans presque tous les secteurs de notre économie, les États-Unis sont notre principal partenaire commercial. Qu'arrivera-t-il si nous nous retrouvons dans un avenir plus ou moins rapproché à devoir nous plier aux conditions des acteurs d'un secteur économique ou d'un autre aux États-Unis qui décident de protester parce qu'ils souffrent d'une certaine manière de notre bon travail, de notre ingéniosité et de notre capacité à créer des produits, à les expédier de l'autre côté de la frontière et à les vendre à des prix concurrentiels à la population américaine? Qu'arrivera-t-il si l'industrie américaine à laquelle nous faisons concurrence peut simplement décider comme ça de nous intenter des poursuites pour nous vaincre à l'usure en nous forçant à dépenser tout notre argent à nous défendre?
    Et ensuite, lorsque le gouvernement canadien, élu par la population du Canada, agit conjointement avec le gouvernement américain et l'industrie en question et décide tout bonnement qu'il a tort et qu'il doit rectifier la situation avec un nouvel accord, mais que cet accord ne respecte ni la lettre, ni l'esprit de l'accord de libre-échange qui était en vigueur et lorsque le gouvernement fait fi des mécanismes de règlement des différends qui étaient prévus, comment pouvons-nous lui faire confiance pour signer d'autres accords à l'avenir avec les États-Unis?
    Je peux imaginer toutes sortes de scénarios de ce genre susceptibles de devenir réalité. L'économie du Nord de l'Ontario a besoin de stabilité avant toute chose. Nous avons besoin de connaître les règles à l'avance. Lorsque nous investissons notre argent, que nous travaillons fort et que nous faisons tout ce qui est nécessaire pour être concurrentiels dans le monde qui nous attend et dans l'économie mondiale qui est désormais la nôtre, nous avons besoin de savoir que nous allons réussir, que nous allons créer des emplois, que nous allons vendre nos produits et que nos collectivités vont demeurer non seulement viables, mais bien vigoureuses dans le monde de demain.
    L'accord dont nous débattons depuis deux semaines, qui est le résultat de la capitulation du gouvernement et contre lequel les libéraux disent vouloir voter, même s'ils n'ont rien accompli dans ce dossier pendant les 13 années où ils ont été au pouvoir, aura un effet dévastateur pour ce secteur économique dans le Nord de l'Ontario.
    Au fil des ans, le gouvernement a compris qu'il devait être présent à la table, qu'il devait être un partenaire et qu'il devait offrir de réels outils dans des régions comme le Nord de l'Ontario si nous voulons stabiliser notre économie à base de ressources naturelles.
    Monsieur le Président, vous qui venez du Manitoba, et moi, qui viens du Nord de l'Ontario et qui ai été député à Queen's Park pendant 13 ans, nous savons que le secteur des ressources naturelles est complètement ignoré depuis environ 10 ou 15 ans. Les barons du capital du monde, particulièrement les capitalistes américains, avec tout leur argent, se sont tournés vers le secteur des technologies de pointe, qui est tout nouveau et attrayant. Ils ont oublié l'épine dorsale, le pain et le beurre, la base même de l'économie canadienne, base qui est là depuis le tout début et continuera d'être là et de constituer notre denrée de base. Ils ont oublié cela et ont laissé les forces du marché nous secouer dans tous les sens au point que nous sommes maintenant en difficulté et, dans certains cas, dans une situation désespérée.
    Au fil des ans, les gouvernements ont compris cela, quelle que soit leur allégeance. Nous avons eu des conservateurs, des libéraux et des néo-démocrates en Ontario. Le Manitoba a eu des néo-démocrates. Ici, en cette enceinte, nous avons eu des libéraux et des conservateurs. Ils savaient qu'il leur fallait avoir une présence plus forte, et non seulement capituler chaque fois que les Américains se mettaient en colère contre nous. Ils savaient qu'il leur fallait des instruments comme FedNor et le ministère provincial du Développement du Nord et des Mines. Ils savaient qu'ils devaient être présents dans ces collectivités et agir de concert avec nous.
    Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui équivaut à un camouflet. Il abandonne et délaisse cette très importante économie fondée sur les ressources naturelles, le secteur forestier, qui bat de l'aile de nos jours dans le Nord de l'Ontario. J'ose affirmer que si nous persistons dans cette voie, nous allons tous, sous une forme ou une autre, en récolter les conséquences négatives.

  (1135)  

    Monsieur le Président, j'ai écouté les deux derniers députés néo-démocrates qui viennent d'intervenir. Leur manque d'information sur le sujet est assez ahurissant.
    Le député qui vient de parler insinue que l'accord n'a pas l'appui de l'industrie. C'est faux. En fait, l'industrie l'appuie sans réserve. C'est un bon accord pour le Canada et pour l'industrie forestière. Le pays avait besoin d'un tel accord depuis longtemps. Au lieu de démolir l'accord, le NPD devrait féliciter le gouvernement d'être parvenu à une entente.
    Les députés du NPD ont parlé d'un milliard de dollars qui irait aux Américains et dont se servirait l'industrie américaine pour se battre contre la nôtre. J'aimerais corriger cette information. L'initiative méritoire représente 450 millions de dollars, soit presque la moitié du montant d'un milliard de dollars. Le fonds est géré par une organisation sans but lucratif chargée de prendre des mesures qui vont aider. En examinant qui fait partie de l'organisation, on se rend compte que cette dernière va créer des débouchés pour l'industrie canadienne du bois de sciage. Les Canadiens pourront prendre part à ces initiatives de multiples façons. Ce n'est pas du tout de l'argent qui ira au gouvernement américain. Les députés ont donné des renseignements trompeurs.
    Quant au mécanisme de règlement des différends, mentionné par un des députés précédents...

  (1140)  

    À l'ordre, s'il vous plaît. La période des questions et observations ne dure que cinq minutes. De nombreuses personnes veulent parler. Le député a pris près de deux minutes; je vais donc donner la parole au député de Sault Ste. Marie.
    Monsieur le Président, j'espérais qu'il y aurait une question dans la diatribe que nous venons d'entendre.
    Ce secteur est important dans le Nord de l'Ontario. Cette importante mesure du gouvernement va toucher directement toutes les collectivités du Nord de l'Ontario. Que le député m'attaque personnellement au sujet de ma capacité de m'exprimer au nom de ces collectivités, cela me déçoit quelque peu et m'incite à me demander si le gouvernement prend vraiment au sérieux ce dossier très important.
    Il y a cependant une question que le député a soulevée et à laquelle je voudrais répondre brièvement. On a intimidé le secteur du bois d'oeuvre pour l'obliger à appuyer l'accord. Les représentants de l'industrie canadienne qui sont venus témoigner aux audiences parlementaires ont confirmé que le gouvernement conservateur avait forcé l'industrie du bois d'oeuvre à accepter un accord boiteux. Cette tactique d'intimidation a obligé l'industrie à court d'argent à capituler quelques mois à peine avant de remporter la dernière bataille juridique contre les droits de douane imposés par les États-Unis.
    Monsieur le Président, je serai bref. Pendant les dernières élections, le chef du NPD a déclaré aux Canadiens: « Regardez ce que nous avons obtenu pour vous. Votez pour nous. »
    Quant au député qui a parlé avec beaucoup de passion de sa circonscription, Sault Ste. Marie, et du Nord de l'Ontario, où le secteur compte pour beaucoup, je voudrais lui poser une question, car la députée de Vancouver-Est a dit: « Nous étions si près du but. » Si nous étions si près du but, je demande au député et à tous ses collègues du Nouveau Parti démocratique: pourquoi ont-ils battu prématurément le gouvernement de l'heure alors que nous étions si près de conclure un accord?
    Aujourd'hui, je pense que ce parti a trahi notre pays autant que le gouvernement l'a fait.
    Monsieur le Président, oui, nous étions très près du but dans le déroulement d'un processus juridique auquel la politique et le gouvernement n'auraient pas dû être mêlés. Si le gouvernement avait laissé l'industrie régler seule ses préoccupations en recourant au processus juridique mis à sa disposition dans le cadre de l'ALENA, oui, nous aurions eu un accord différent.
    De toute évidence, les libéraux n'ont toujours pas tiré une leçon de ces élections. Les électeurs s'étaient prononcés sur la corruption et une culture du « tout m'est dû », une pratique que le gouvernement libéral semblait trouver normale et que, manifestement, il n'a pas encore abandonnée.
    Monsieur le Président, je suis fier de participer aujourd’hui au débat sur ce projet de loi qui a des répercussions économiques sur le Nord de l’Ontario que je représente. Je suis heureux d’exprimer mon opinion sur le sous-amendement proposé à un projet de loi qui constitue probablement -- nous devons vraiment mettre cela en contexte -- l’une des mesures législatives les plus vénales et les plus pusillanimes dont la Chambre des communes ait jamais été saisie, compte tenu de ce qui est en jeu. On nous demande ici, au Parlement, de menacer notre propre industrie d’une épée de Damoclès pour permettre au gouvernement de s’en prendre non seulement au secteur forestier, qui compte parmi les principales industries du pays, mais aussi aux collectivités de notre région.
     J’ai passé beaucoup de temps ces dernières années en réunion avec des travailleurs forestiers mis à pied à Kapuskasing, Smooth Rock Falls, Opasatika, Béarn et Timiskaming. Ces gens ont perdu leur gagne-pain à cause de ce long et pénible différend qui nous oppose à notre premier partenaire commercial.
     Pendant toute la période où l’ancien gouvernement libéral était au pouvoir, nous demandions au gouvernement fédéral de s’engager à appuyer notre industrie. Nous avions demandé des garanties de prêt pour l’aider à tenir le coup jusqu’aux étapes finales des contestations en cours. Nous n’avions pas réussi à obtenir cet appui de l’ancien gouvernement libéral.
     En fait, le gouvernement a transmis un message très clair aux habitants de collectivités telles que Smooth Rock Falls, Red Rock et Ignace: « Vos collectivités ont été coupées de l’économie sociale du pays. Vous devez vous débrouiller tout seuls. Quand il s’agit de défendre les intérêts des collectivités du Nord qui dépendent des ressources naturelles, nous allons vous laisser prendre soin de vos propres affaires. »
     Ce message a été amplifié à l’infini lorsque notre ami, le transfuge, nous a rapporté en toute hâte cet odieux accord sur le bois d’œuvre résineux. Il est important que nous comprenions clairement pourquoi le gouvernement cherche à brûler les étapes pour que cet accord soit signé.
     Nous sommes en présence d’un gouvernement soucieux d’obtenir des résultats rapides pour être en mesure de se présenter à nouveau devant l’électorat avec quelques séances de photos et quelques cases cochées sur sa liste de promesses. L’une de ces cases consistait à brader notre industrie forestière.
     Au cours d’un débat radiodiffusé que j’ai eu avec le ministre de la Santé, il a dit: « Nous avons réussi à signer cet accord en sept mois. C’est un résultat sans précédent. » Bien sûr, si le gouvernement est prêt à s’écraser, il peut signer n’importe quoi en très peu de temps. C’est ce qui s’est passé.
     Parlons un peu de l’ensemble de l’accord avant de passer au détail de quelques-uns de ses aspects les plus troublants.
     Il y a d’abord un milliard de dollars appartenant à nos producteurs que nous laissons aux États-Unis. Près de la moitié de ce montant ira directement à nos concurrents pour qu’ils s’en servent contre nous en rééquipant leurs collectivités. Pendant ce temps, nos collectivités ne reçoivent rien. Le gouvernement versera chaque année des subventions de 1,5 milliard de dollars aux exploitants des sables bitumineux de l’Alberta. Il n’a rien offert à nos collectivités forestières. Pourtant, nous devons céder 500 millions de dollars à nos concurrents.
     Demandez donc aux sociétés canadiennes où elles réinvestissent des fonds. Elles les réinvestissent au sud de la frontière. C’est le cas d’un certain nombre d’entreprises de ma circonscription qui avaient été fondées dans le Nord de l’Ontario, qui avaient reçu l’essentiel de leur soutien, année après année, du Nord de l’Ontario et qui vont maintenant réinvestir leur argent chez nos voisins du Sud parce que c’est là que l'argent va être réinvesti.
     On demande au Parlement de t donner de l’argent à nos concurrents. Et nous, qu’est-ce qu’on a? Est-ce qu’on a une entente pour sept ans? Non. Pour cinq ans? Non. Pour trois ans? Non. L’entente est seulement pour 18 mois. Sans compter que nos concurrents aux États Unis peuvent prendre l’argent et se retourner contre nous n’importe quand. Ils ont déjà dit qu’ils vont le faire. La semaine dernière, le lobby américain du bois d’œuvre a déclaré qu’il fallait se préparer à une guerre totale. Ils l’ont dit clairement
     Une voix: S’il n’y avait pas d’entente.
    M. Charlie Angus: Peu importe qu’il y ait une entente ou non.
     À la place, est ce qu’on a un accord de libre échange équitable? Non. On a un marché très limité dans lequel il faudrait maintenant livrer concurrence. Si le marché américain ralentit le moindrement, comme semble l’annoncer le nombre des mises en chantier actuellement, on devra faire face à des droits de douane encore plus élevés.
     À quoi avons-nous renoncé pour cela? On nous demande de renoncer aux victoires juridiques que nous avons accumulées au fil des ans. Le premier ministre actuel manque d’honnêteté envers la population canadienne s’il pense nous faire croire que nous aurions eu encore sept ans de batailles juridiques, qu’il fallait conclure une entente pour avoir un peu de paix. La réalité est que nous en arrivions à nos deux appels définitifs. Rendus là, nous ne pouvions plus revenir en arrière.

  (1145)  

     Pourquoi les gens de l’industrie forestière n’ont-ils pas encore capitulé? Le gouvernement leur met le couteau sur la gorge et pourtant certains résistent encore parce qu’ils savent que s’ils renoncent aux garanties juridiques qu’ils ont obtenues devant les tribunaux, ils n’ont plus rien.
     En gros, voilà les faits, mais il est important maintenant de dire franchement jusqu’où va le gouvernement, pour montrer son attitude déconcertante à l’endroit de notre industrie forestière. Non seulement les conservateurs ont signé et abandonné tous nos avantages afin d’obtenir rapidement une entente. Avec les conservateurs, je suppose qu’il faut s’attendre à cela. Ce n’est pas d’hier que les conservateurs bradent les intérêts du pays; il ne faut donc pas s’étonner. La surprise ici, c’est qu’ils agissent comme des prédateurs contre nos propres entreprises. Il n’y a pas de précédent à cela. Regardons certaines des dispositions.
     Pour remplacer les droits de 10 p. 100 sur le bois d’œuvre, on nous demande maintenant, comme parlementaires, d’imposer à nos propres entreprises un droit d’exportation de 15 p. 100. C'est censé être une bonne affaire. De surcroît, voilà que notre gouvernement veut imposer un droit punitif supplémentaire aux entreprises qui persistent à vouloir défendre leurs intérêts. On nous demande, comme parlementaires, d’accepter qu’on punisse financièrement les entreprises qui refusent de souscrire au marché conclu par le gouvernement.
     C’est du jamais vu. Je ne pense pas que nous puissions trouver dans l’histoire d’autres cas où un gouvernement se soit présenté devant le Parlement en déclarant avoir l’intention de sévir financièrement contre notre industrie, et ce, après que celle-ci eut traversé une importante crise économique. Qu’on nous demande, comme parlementaires, de nous en prendre à notre propre industrie constitue un étrange acte de trahison.
     L’article 10 impose un droit d’exportation de 15 p. 100 à compter de la signature de l’entente. C’est de la double imposition qui va bien au-delà des droits antidumping et compensatoires existants.
     L’article 18 prévoit en outre l’imposition d’un droit spécial punitif aux entreprises récalcitrantes. Si ce droit spécial est effectivement perçu, ces entreprises. paieront 37 p. 100. Ce n’est pas le lobby américain du bois d'oeuvre qui demande cela, c’est notre propre gouvernement conservateur qui l’exige pour forcer les entreprises à plier l’échine.
     Là encore, il nous faut replacer la question dans son contexte. Nous sommes au courant de l’hémorragie financière qu’ont connue nos entreprises touchées par la crise du bois d’œuvre. Ce que nous dit le gouvernement, c’est que si ces entreprises lui résistent, elles seront acculées à la ruine financière. À cause des marges limitées dont nos banques canadiennes disposent pour l’industrie forestière, nous verrons notre propre gouvernement les poursuivre.
     L’article 48 imposerait en outre à ces entreprises l’obligation de tenir des registres pendant six ans.
     L’article 77 mentionne que le gouvernement n’a même pas besoin de mandat pour s’introduire dans les locaux des entreprises pour vérifier si elles sont en règle. Voici donc que notre gouvernement agit à l’encontre des intérêts de notre industrie.
     L’article 89 autorise le gouvernement à exiger de chacune de ces entreprises un chèque en blanc pour les forcer à payer immédiatement. Quel succès aura, quand elle ira renégocier ses emprunts à la banque, une entreprise forestière canadienne qui, voulant défendre ses intérêts supérieurs, n’a pas cédé devant le marché conclu par le gouvernement, alors que les banques savent pertinemment que le gouvernement peut aller vérifier sur place les registres de l’entreprise et la poursuivre?
    Les conservateurs ont vivement recommandé cette entente. Je peux comprendre pourquoi. Certains députés libéraux du Nord de l'Ontario appuient aussi cette entente. Je ne comprends vraiment pas un tel appui, tout particulièrement dans le cas des régions où notre industrie traverse une crise aussi grave. Ce qui m'étonne au plus haut point, toutefois, c'est que le Bloc québécois appuie cette entente. C'est le parti qui a pris position à la Chambre contre toute motion visant à interdire l'utilisation de pesticides partout au pays parce que cela pourrait empiéter sur les compétences du Québec. C'est également ce parti qui a contrecarré les plans relatifs à la garde d'enfants pour le reste du Canada parce qu'il craignait une ingérence dans les affaires du Québec. Toutefois, ce parti ne s'oppose pas à un projet de loi qui permettrait au gouvernement des États-unis d'imposer une politique forestière au Québec. Il ne trouve rien à redire à un projet de loi qui permet au gouvernement fédéral de cibler les sociétés québécoises, de s'ingérer dans leurs affaires pour voir si elles respectent les dispositions établies, et de porter des accusations contre celles qui ne s'y conforment pas.

  (1150)  

    C'est le monde à l'envers. On demande aux députés de travailler au détriment de nos propres industries et de nos collectivités. C'est une situation inacceptable. Nous devons déclarer très clairement que cette entente est l'une des plus lâches et vénales jamais présentées au Parlement. En tant que représentant du secteur du bois d'oeuvre et des travailleurs de l'industrie de la pâte de bois du Nord de l'Ontario, je n'appuierai jamais une mesure aussi méprisable que celle-ci.

[Français]

    Monsieur le Président, j'entendais le député néo-démocrate dire que le Bloc québécois était réellement en faveur de ce projet de loi. Je ferais remarquer au député d'en face que, bien souvent, il rouspète et chiale à propos de n'importe quel sujet, mais que lorsque vient le temps de voter, il vote favorablement. Cela dit, qu'est-ce que cela lui apporte d'affirmer des choses d'un côté pour ensuite faire le contraire de l'autre côté? À mon avis, ce qu'on peut dire est une chose et ce que je comprends en est une autre.
    En ce qui concerne le bois d'oeuvre, les gens du Québec sont favorables à l'entente. Évidemment, ils sont mis au pied du mur, avec un couteau sur la gorge les forçant à accepter cette entente. Et on nous demande si nous y sommes favorables! Ils nous demandent de voter pour les sortir du marasme, pour leur donner de l'oxygène afin qu'ils continuent de survivre.
    C'est ce qu'on fait au Bloc québécois. Si les députés d'en face n'ont rien compris, c'est leur problème. Cependant, qu'ils ne nous embarquent pas dans leur bateau et dans leur chariot pour nous emmener dans des endroits où nous ne voulons pas aller.
    J'ai une question à poser au député de l'autre côté. Le président de la FTQ, M. Massé, craint qu'à la suite de cette entente, les Américains ne prennent le contrôle de toutes les entreprises forestières, tant du Québec que d'ailleurs.
    Le député pense-t-il que le fait d'accepter cette entente pourrait amener l'industrie forestière américaine à nous acheter?

  (1155)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'habite du côté ontarien de la région du Témiscamingue et je suis à même de constater les conséquences des compressions exercées dans le secteur forestier comme ce fut le cas en Abitibi-Témiscamingue. Nos producteurs nous disent que cette entente n'est pas bonne. C'est une entente que le gouvernement nous a imposée, et si nous acceptons ce précédent, notre industrie forestière sera encore plus pauvre dans deux, trois ou cinq ans.
    Ce principe permettant au gouvernement des États-Unis de remettre en question les politiques forestières provinciales constitue une intrusion inacceptable dans la souveraineté de nos provinces. En tant que néo-démocrates, nous ne l'accepterons jamais.
    Monsieur le Président, j'ai écouté les remarques du député et j'ai trouvé de nombreux éléments de désinformation dans ce qu'il avait à dire.
    J'aimerais lui demander pourquoi il a choisi de reconnaître que ce différend dure en fait depuis 24 ans. Il a également choisi de ne pas tenir compte des témoignages présentés au comité tout au long de l'été. Le comité a siégé tout l'été et a entendu des témoins sur la question du bois d'oeuvre. On nous a dit clairement depuis le tout début, en ce qui a trait à l'ALENA, que les États-Unis ne voulaient pas que le bois d'oeuvre soit inclus dans l'ALENA. En fait, cette question a fait l'objet d'un protocole d'entente. Voilà pourquoi les États-Unis ne veulent pas accepter les résultats et pourquoi nous sommes incapables d'en arriver à un règlement.
    Je suis d'accord avec lui pour dire que l'industrie est dans un bien piètre état. Et c'est à cause de la négligence de l'ancien gouvernement libéral. Pendant 13 ans, non seulement il n'a pas été capable de conclure un accord, mais il n'a absolument rien fait pour l'industrie.
    Voici la question que je veux poser au député néo-démocrate. S'il se préoccupe tellement de la question du bois d'oeuvre, pourquoi son parti n'a-t-il pas dit un mot au sujet du bois d'oeuvre lorsqu'il s'affairait à négocier le budget libéral-néo-démocrate? Le NPD aurait pu demander tout ce qu'il voulait à ce moment-là et il n'a jamais demandé quoi que ce soit pour l'industrie du bois d'oeuvre.
    Monsieur le Président, je m'attendais à une belle conclusion, mais la réponse fournie me laisse quelque peu sur ma faim.
    À mon avis, la question est absurde. Il faut se concentrer sur le fait que le gouvernement s'est amené en voulant de toute évidence conclure rapidement un accord quelconque. Lorsque les gens de l'industrie — et j'en ai rencontré partout au pays — ont pris connaissance de cet accord, ils ont dit que celui-ci était mauvais. Le gouvernement leur a répondu: « Tant pis. Nous n'allons rien négocier de mieux ». Une telle attitude est sans précédent.
    Si j'étais l'adjoint de la secrétaire parlementaire, moi aussi je sortirais de la Chambre dans la honte. L'entente que les conservateurs ont conclue est une honte. Il importe de préciser clairement à la Chambre que les conservateurs sont ensuite allés voir les membres de notre industrie et leur ont dit: « Nous n'allons pas vous défendre. Nous ne nous battrons pas pour vous. Cet accord est à prendre ou à laisser ». Lorsque les membres de l'industrie ont encore dit non, ils ont répliqué en imposant la taxe de 19 p. 100 à nos propres compagnies. C'est abusif.
    La Chambre est-elle prête à se prononcer?
    Des voix: Le vote.
    Le vice-président: Le vote porte sur le sous-amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter le sous-amendement?
    Des voix: D'accord.
    Des voix: Non.
    Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur du sous-amendement veuillent bien dire oui.
    Des voix: Oui.
    Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
    Des voix: Non.
    Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.
    Et plus de cinq députés s'étant levés:
     Le vice-président: Convoquez les députés.

  (1200)  

    Monsieur le Président, je demande que le vote soit reporté à demain, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles.
    Le whip de l'opposition a demandé que le vote soit reporté à demain, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles. Par conséquent, il en sera ainsi.

Le Code criminel

     La Chambre reprend l'étude, interrompue le 2 octobre, de la motion portant que le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel (courses de rue) et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, hier il y a eu un excellent débat sur ce projet de loi. Cette mesure a pour objet d’inscrire dans la loi cinq nouvelles infractions ayant trait aux courses de rue.
     S’il y a des députés qui n’ont pu suivre une grande partie du débat à cause d’autres responsabilités, je les renvoie au discours prononcé par la députée de London-Ouest qui a accompli un travail extraordinaire pour faire ressortir, à l’intention de tous les députés, certains aspects préoccupants sur lesquels il faudrait s’arrêter. J’ai vraiment trouvé ses observations très utiles.
     C’est sûr, les courses de rue représentent un problème extrêmement grave. C’est un problème important pour les Canadiens, que la Chambre doit étudier attentivement.
     À l’heure actuelle, le Code criminel prévoit quatre infractions ayant trait à la conduite dangereuse d’un véhicule à moteur. Il y a notamment la conduite dangereuse causant des lésions corporelles, la conduite dangereuse causant la mort, la négligence criminelle causant des lésions corporelles et la négligence criminelle causant la mort.
     Ce projet de loi ajouterait une autre dimension à prendre en compte au moment de porter une accusation, et qui consiste à se demander si l’infraction prévue au Code criminel a également été exacerbée par l’incidence d’une course de rue.
     Les députés qui ont suivi le débat sauront que, même en ce qui concerne la définition du terme course de rue, tout n’est pas toujours clair. Au fond, il faut pour cela deux automobiles. Comme l’ont fait remarquer les députés de Scarborough—Rouge River et de London-Ouest, la définition pourrait, par inadvertance, inclure même les rallyes. On peut trouver une couple d’autres exemples. Prenons ainsi deux personnes qui ne se connaissent pas et qui sont arrêtées à un feu de circulation, mais qui, sans avoir rien préparé à l’avance, se regardent et commencent soudainement à jouer de l’accélérateur; si elles démarrent en trombe en même temps au feu vert, on peut se demander s’il s’agit d’une course de rue ou d’une simple accélération. C’est une affaire de jugement, je suppose.
     C’est qu’un certain nombre de députés ont dit craindre que la définition ne soit pas assez claire et exhaustive pour que les événements sportifs légitimes, par exemple, soient exclus ou exemptés aux termes des dispositions du projet de loi.
     Le député de Scarborough—Rouge River a également soulevé la question de savoir s’il ne pouvait pas y avoir des cas où il s’agit d’une course contre la montre où deux voitures se font la course, non pas simultanément, mais consécutivement pour se rendre du point A au point B. En fait, elles sont chronométrées. C’est une course contre la montre et je suppose qu’il y a là des possibilités intéressantes. Par conséquent, il faut que la définition soit claire.
     Probablement l’un des points les plus intéressants que la députée de London-Ouest a soulevé au cours du débat est le fait que les tribunaux ont maintenant un certain nombre de choses à examiner pour déterminer la peine dans une situation donnée. Si nous ajoutons maintenant les circonstances dans lesquelles ont lieu les courses de rue, au lieu d’être bidimensionnel, le problème pourrait être tridimensionnel. Nous devons examiner l’expérience des tribunaux pour voir si la législation actuelle leur pose déjà un problème et quelle est la latitude laissée aux juges pour l’imposition des peines.

  (1205)  

     Le projet de loi augmente les peines prévues et, dans certains cas, accroît la peine maximale et progressive en ce qui concerne l’incarcération et l’interdiction de conduire. Néanmoins, on ajoutant ces cinq nouvelles infractions, il semble que le projet de loi ajoute peut-être un autre élément qui risque d’avoir des répercussions sur la latitude dont les juges disposent pour déterminer la peine appropriée.
     Quand j’ai examiné certains débats qui ont eu lieu antérieurement sur la question, j’ai remarqué un passage intéressant dans le discours du ministre de la Justice. Il a dit:
    Le droit pénal peut être, et devrait être dans ce cas, un outil permettant de faire changer la perception du public.
     Je ne sais pas si l’on peut simplement dissocier cela de tout ce que l’on attend du droit pénal. Si nous disons qu’il y a des courses de rue et que nous avons fait notre travail en imposant des peines plus sévères, il faut également se demander si des peines plus sévères et plus longues ne devraient pas être imposées pour d’autres choses, et la Chambre s’est penchée souvent sur la question de la dissuasion.
     Lorsqu’on s’attaque aux activités criminelles, est-ce seulement une question de dissuasion? Dans au moins une demi-douzaine de discours qui ont été prononcés hier, les gens ont plaidé de façon extrêmement convaincante en faveur d’une approche plus globale du problème des courses de rue. Je crois qu’au cours du premier semestre de 2006, il y a eu dix décès attribuables à ce phénomène. Il ne fait aucun doute qu’une mort c’est déjà trop, surtout quand ont lieu des actes aussi irresponsables que les courses de rue, mais les études démographiques ont montré qui y participait.
     C’est intéressant et cela vient du résumé législatif de la Bibliothèque du Parlement. En ce qui concerne les données démographiques, il est dit que les participants peuvent être généralement classés dans une des trois catégories suivantes: il y a d’abord les jeunes âgés de 18 à 24 ans qui vivent généralement chez leurs parents et qui, pour la plupart, ont un faible revenu. Je ne sais pas si ce sont les parents ou les jeunes de 18 à 24 ans qui ont un faible revenu, mais je suppose qu’on parle sans doute des personnes qui ont commis l’infraction.
     La deuxième catégorie est celle des 25 à 40 ans qui, en général, modifient leur véhicule et utilise de puissantes automobiles comme des Camaro, des Corvette et des Mustang. La troisième catégorie est constituée de gens d’âge divers qui conduisent des voitures importées comme le dernier modèle d’Acura, de Honda, de Mitsubishi ou de Nissan.
     J’ai un autre élément à ajouter. L’étude révèle aussi que certains participants se servent de véhicules volés, ce qui représente un aspect complètement différent pour ce qui est des activités criminelles dans notre société. Il y a cependant des caractéristiques démographiques qui ressortent dans certaines circonstances. Pour ce qui est de modifier le Code criminel et de nous acquitter, comme parlementaires, de notre devoir -- comme nous le disons chaque matin dans notre prière -- de faire de bonnes lois et de prendre de bonnes décisions, devons-nous dire que c’est une bonne loi et qu’elle réglera tous les problèmes quand nous ne se faisons qu’alourdir les peines et jeter plus de gens en prison?
     Cela nous amène à la question de la dissuasion. Nous en avons discuté à la Chambre à plusieurs reprises pour déterminer si des peines plus sévères dissuadent les délinquants. Je n’ai pas l’impression que nous arriverons à dissuader des jeunes de 18 à 24 ans, qui agissent sous l’influence de leurs hormones, des amis qui les entourent et, dans certains cas, de l’alcool. Ces jeunes font des courses tout simplement parce que c’est cool de le faire.

  (1210)  

     Il y a ensuite le groupe des 25 à 40 ans dont les membres ont probablement un peu d’argent à dilapider et qui peuvent se permettre d’acheter des voitures et d’en gonfler le moteur, en installant par exemple des brûleurs spéciaux à oxyde d’azote. Dans ce cas, il s’agit souvent de fantaisies de jeunes cadres aisés qui veulent s’offrir un peu d’aventure.
     Par ailleurs, on ne peut pas modifier une voiture sans se procurer du matériel très spécialisé. Nous devons nous demander s’il y a un moyen de communiquer avec ceux qui produisent et vendent ces pièces aux amateurs de courses de rue. Cela ferait partie d’une approche globale équilibrée de ce problème. J’ai souvent pensé que, dans tout problème social que nous essayons de régler ici, la sensibilisation du public et la prévention constituent d’importantes parties de la solution.
     Lorsque j’ai été élu à la Chambre en 1993, la toute première réunion à laquelle j’ai assisté était une séance du Comité de la santé. Des fonctionnaires nous avaient alors dit que 75 p. 100 des crédits vont aux soins thérapeutiques pour remédier après coup aux problèmes de santé et que 25 p. 100 seulement servaient à la prévention. La conclusion était qu’un système de santé qui utilise 75 p. 100 de son budget pour guérir et seulement 25 p. 100 pour prévenir n’est pas viable.
     Au cours de la dernière décennie, nous avons constaté d’une façon très claire qu’on ne peut pas faire abstraction de la valeur de la prévention. Dans le cas du modèle de la santé, il s’est avéré que pour chaque dollar consacré à la prévention, nous pouvons économiser des centaines de dollars à long terme. C’est une conclusion très sensée. Toutefois, nous n’appliquons pas des principes de ce genre dans le domaine judiciaire.
     Si nous établissons des conditions très rigoureuses, qu’il s’agisse de minimums obligatoires ou de maximums accrus, et les intégrons dans le Code criminel, nous finirons par avoir un système complètement dépourvu de flexibilité.
     Je sais qu’on a étudié un peu la question des circonstances atténuantes. La question est liée au syndrome d’alcoolisation fœtale ou à ce qu’on appelle maintenant les troubles causés par l'alcoolisation fœtale. Le Manitoba, la Saskatchewan et l’Alberta ont réalisé des études. Il y a un ou deux ans, ces provinces ont annoncé que la moitié des personnes incarcérées dans les établissements provinciaux souffraient d’anomalies congénitales attribuables à l’alcool. Si ces personnes enfreignent la loi, quelle latitude laisse-t-on aux tribunaux pour envisager des peines adaptées à ces circonstances particulières? Connaissons-nous suffisamment les facteurs qu’il faudrait prendre en considération pour déterminer la peine? Faut-il incarcérer des personnes qui ont des problèmes mentaux dans des prisons où on s’efforcera de les réadapter alors que c’est impossible pour elles? Voilà des questions intéressantes.
     Je me demande si les personnes qui ont ce syndrome et qui, pour une raison ou une autre, participent à des courses de rue risquent d’avoir la même peine que quelqu’un qui a agi en pleine connaissance de cause ou avec une intention criminelle. Je suis persuadé que le ministre de la Justice conviendra que, dans certains cas, ces gens n’ont aucune intention criminelle. Quelle latitude laisse-t-on aux tribunaux? Cela m’inquiète. Je suis sûr qu’il y a d’autres cas semblables.
     Je crains que les juges et le système de justice n’aient encore moins de latitude. Je me demande également si ce n’est pas s’engager dans une voie dangereuse que de laisser entendre que, peut-être, les juges ne font pas leur travail correctement. Il est terrible que non seulement certaines gens n’aient aucun respect pour les lois, mais aussi que les législateurs perdent le respect du système judiciaire également. Je me demande dans quelle mesure le problème que nous avons avec les tribunaux parce qu’ils n’imposent pas des peines assez sévères et n’envoient pas assez de gens derrière les barreaux ne tient pas au fait suivant: le gouvernement du Canada apporte des modifications au Code criminel en imposant certaines choses alors que ce sont d’autres administrations, c’est-à-dire les provinces et les territoires, qui doivent se charger de l’application. Elles ont besoin de prisons. Où peuvent-elles trouver les ressources nécessaires? Si elles n’ont pas assez de tribunaux, si les tribunaux sont engorgés...

  (1215)  

    L'hon. Vic Toews: De quoi parlez-vous? Il s’agit du projet de loi C-19.
     M. Paul Szabo: Je comprends bien. C’est un dialogue intéressant avec le ministre de la Justice. Je le remercie d’être ici et de suivre le débat. C’est un débat important, et je sais que le ministre y attache aussi de l’importance.
     Lorsque nous modifions le Code criminel, que nous ajoutons de nouveaux éléments, que nous éliminons une certaine latitude ou imposons aux juges des contraintes peut-être encore plus grandes, au point qu’ils ne peuvent faire autre chose que d’envoyer de plus en plus de monde en prison, cela veut dire qu’il faut bâtir de nouvelles prisons. J’ignore qui va payer, lorsque ce n’est pas de ressort fédéral.
     Comment régler le problème d’engorgement des tribunaux? Même au niveau fédéral, de très nombreuses nominations de juges n’ont pas été faites. Le système judiciaire a du mal parce qu’il manque de juges. J’ignore pourquoi le gouvernement traîne les pieds. Ce sont là autant d’éléments dont il faut tenir compte.
    Où voulons-nous en venir en fin de compte? Disons-nous que la magistrature importe peu, que nous allons faire adopter cela envers et contre tout? Disons-nous simplement que c'est l'accusation à porter, qu'il faut régler l'affaire rapidement et que les juges n'ont aucun choix? Dans ce cas, tout à coup, nous n'abordons pas de façon globale le problème des courses de rue.
    Où est l'argent pour la sensibilisation? Comment se fait-il qu'il n'en soit pas question dans le projet de loi? Où est l'argent pour d'autres mesures préventives, comme des ressources affectées aux autorités policières à tous les niveaux pour qu'elles puissent mieux s'intégrer dans les collectivités afin d'aider les législateurs à transmettre le message à ceux qui sont visés? Ce phénomène ne se retrouve pas dans tout le pays. Des études intéressantes montrent où certains problèmes se posent.
    J'ai posé des questions semblables au sujet d'autres projets de loi. Il semble que la solution du gouvernement à tous les problèmes consiste à construire davantage de prisons et à emprisonner plus de gens. Je suppose que le programme de logement du Canada se résume à construire plus de prisons.
    Il faut imposer aux gens qui commettent des crimes graves des peines appropriées et proportionnées. Cependant, lorsqu'on crée cinq infractions différentes avec des peines graduelles ou progressives, il devient tout à coup très difficile de respecter le critère de proportionnalité. J'ignore comment les juges seront en mesure de le faire.
    Un de nos collègues conservateurs a dit que le système du Centre d'information de la police canadienne ne renferme pas de données permettant de déterminer si un incident était relié à une course de rue. On ne fait qu'enregistrer l'infraction au Code criminel. J'ai dû réfléchir à cela.
    Je ne suis pas certain, mais il me semble que si le nom d'une personne apparaissait parce qu'elle a violé une loi et si on avait la preuve que cette infraction était reliée à une course de rue, cette information devrait être connue relativement à l'accusation portée maintenant. Si cette personne a été reconnue coupable d'excès de vitesse ou de négligence causant des lésions corporelles ou la mort, ou autre chose du genre, on pourrait également s'interroger sur les circonstances et le dossier du tribunal devrait le préciser. Ainsi, même le problème relié au Centre d'information de la police canadienne n'est pas assez important pour affirmer que c'est une lacune qui justifie de prendre cette mesure. Je ne pense pas que ce soit une raison suffisante.
    J'ai d'autres questions. La députée de London-Ouest a soulevé des points très importants. Si le projet de loi est adopté à l'étape de la deuxième lecture et renvoyé au comité, comme je le crois nécessaire, bon nombre de ces questions devraient être examinées sérieusement par le comité avant qu'on aille plus loin.

  (1220)  

    Monsieur le Président, je remercie le député pour une autre contribution intelligente à nos débats. Pourrait-il nous parler de l'influence que l'attrait pour la vitesse a sur les courses de rue? Depuis deux jours, des députés ont parlé des films, des poursuites en voiture dans les films, des jeux vidéo et des sports extrêmes qui glorifient la prise de risques.
    Monsieur le Président, le député a parfaitement raison. J'ai entendu des déclarations et des exemples en ce sens. Je dois admettre que cela m'a fait penser à la publicité sur l'Acura, je crois. On y dit, entre autres, que la voiture se contrôle bien dans les virages prononcés. On montre une auto dont le bas de caisse s'ouvre et un grappin à crampons retenu par un câble est projeté sur un pilier de béton pour aider l'auto à prendre un virage. On a tendance à rendre la vitesse séduisante. Beaucoup de fabricants d'automobiles font cela, mais ça ne nous aide pas à promouvoir une utilisation responsable de l'automobile. C'est à cela que la question se ramène.
    Le député a raison. Cette situation tend à prouver, comme je l'affirme, que la sévérité des peines ne suffira pas à lutter contre les courses de rue. Que fait-on des autres éléments? Comment contrer l'influence de la culture populaire? Comment agir sur les autres facteurs qui influencent tout particulièrement les jeunes et les font se retrouver dans des situations qui sont préjudiciables à nous tous?
    Monsieur le Président, je comprends que le député appuie le renvoi du projet de loi à un comité pour une étude plus approfondie.
    J'ai été intrigué lorsqu'il a dit que nous lions les mains des juges. Comme le député le sait, le projet de loi ne prévoit pas de peine minimale obligatoire, mais plutôt une suspension obligatoire du permis de conduire et des peines maximales plus rigoureuses. À mon avis, des peines maximales plus sévères donnent plus de pouvoir discrétionnaire aux juges.
    J'invite le député à ne pas penser que nous lions les mains des juges, mais plutôt à voir que nous leur donnons plus d'indications. Je comprends que certains juges aimeraient que la Chambre des communes, qui reflète les sentiments de la population, donne davantage d'instructions pour qu'ils puissent imposer des peines mieux adaptées aux délits. Ceux qui méritent d'être emprisonnés seraient mis en prison, mais ceux qui méritent de purger leur peine au sein de la collectivité le feraient.
    J'aimerais que le député dise s'il croit que le projet de loi est destiné à donner plus d'instructions aux juges.

  (1225)  

    Monsieur le Président, sur ce point, je recommanderais au député de lire l'intervention de ma collègue de London-Ouest.
    Les tribunaux ont déjà la liberté de tenir compte de circonstances aggravantes comme le fait d'avoir participé à une course de rue. Ce n'est pas nécessaire d'en faire une disposition du Code criminel. Si nous le faisons, nous allons compliquer les choses et ce sera plus difficile de condamner les coupables. Le problème, d'après moi, c'est que les tribunaux pourraient avoir plus de difficulté à prouver l'intention criminelle sur tous les éléments nécessaires. Je ne suis pas sûr que le député ait compris ce point.
    Je demande au député d'y penser. Ce n'est pas simplement l'établissement de peines minimales obligatoires ou de peines absolues qui lierait les mains des juges. Le projet de loi modifie la proportionnalité des peines, et cela peut poser un problème. Les gens trouveront des arguments en faveur de peines avec sursis. Il se pourrait que moins de gens aillent en prison, parce que les peines prévues sont disproportionnées.
    Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole sur le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel (courses de rue) et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en conséquence.
    Nous discutons d'une mesure législative très importante. C'est une question d'importance dans beaucoup de localités, aux quatre coins du pays. C'est important pour beaucoup de gens de ma circonscription, Burnaby—Douglas, qui ont connu personnellement les conséquences des courses de rue. Certains ont perdu des parents ou des proches à cause de telles courses.
    Des décès survenus dans ma circonscription, sur le chemin Barnett et sur la rue Hastings, étaient directement attribuables aux courses de rue. En parcourant ma circonscription, il m'arrive trop souvent de voir, en bordure de la route, de ces petits monuments qui sont érigés après ce genre d'incident. Des hommages de ce genre se trouvent encore en bordure de ces deux routes pour nous rappeler les tragédies survenues et le décès de personnes aimées au sein de la collectivité. Ces décès ont affligé des familles, des amis et des collègues de travail.
    Ces incidents ont aussi été la cause de beaucoup de blessures graves. Il arrive que les victimes innocentes de telles courses soient des passants, ou encore les chauffeurs ou les passagers d'autres véhicules. L'activité irresponsable qu'est la course de rue engendre tragédie sur tragédie.
    Les courses de rue n'ont pas leur place dans nos collectivités. Elles constituent un danger pour ceux qui y participent et pour le public. Il faut examiner tous les aspects de ce problème. C'est une question importante à traiter pour accroître la sécurité dans les collectivités et pour améliorer la compréhension de la responsabilité publique, des engagements et des relations que nous avons les uns avec les autres et qui font de nos collectivités des endroits prospères et où il est possible de vivre en sécurité. Les courses de rue transgressent les ententes qui lient mutuellement les citoyens quant à leur mode de vie dans une collectivité.
    Il faut se pencher sur tous les aspects des courses de rue. Au cours du débat des deux derniers jours à la Chambre, c'est un point à l'égard duquel le projet de loi a été critiqué. Certains se demandent si le projet de loi porte sur tous les aspects connus des courses de rue. Je vais lire la définition qu'en donne le projet de loi C-19. La voici, telle qu'elle figure dans le projet de loi:
« course de rue » Épreuve de vitesse entre des véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grande route ou tout autre lieu public.
    Les députés s'interrogent sur les activités que comprend cette définition. Doit-il nécessairement s'agir d'une course où deux voitures ou plus sont côte à côte? Qu'en est-il des autres genres de courses de rue qui ont lieu dans les collectivités? J'aimerais connaître les expressions populaires appropriées pour décrire ces activités parce que je suis certain qu'il y a d'autres façons plus usuelles de le faire.
    Dans certains cas, les gens font des courses chronométrées pour savoir combien de temps il faut pour se rendre à un endroit précis. Dans d'autres cas, les gens s'envoient un message par téléphone cellulaire ou un courriel pour se donner rendez-vous quelque part et le premier arrivé est déclaré gagnant. Il y a également d'autres variantes. La course de rue ne se limite pas uniquement, comme nous pourrions le croire, à une course entre deux ou plusieurs véhicules côte à côte.
    La définition qui figure dans le projet de loi s'applique-t-elle à toutes les situations, qui sont tout aussi dangereuses et qui causent tout autant de problèmes dans les collectivités que la course plus traditionnelle? Quelle est la portée de ce projet de loi? Compliquera-t-il, par exemple, la vie des organisateurs de rallyes automobiles? Pénalise-t-il les départs en trombe à un arrêt obligatoire quand une autre voiture se trouve juste à côté?
    Quelle est exactement la portée de la définition et de quelle manière va-t-elle influer sur notre compréhension de cette activité criminelle? Il convient de régler certains problèmes associés à la définition et de préciser celle-ci pour que je puisse appuyer totalement le projet de loi.
    Il n'y a pas que les jeunes qui s'adonnent à des courses de rue. Au cours de la dernière journée et demie, nous avons débattu de ce sujet et avons peut-être été prompts à accuser les jeunes d'être la source principale du problème.

  (1230)  

    Comme l'a mentionné l'intervenant précédent, les données démographiques englobent une vaste gamme de personnes qui s'adonnent à diverses formes de courses de rue et qui peuvent prendre part à cette activité dangereuse. Il s'agit de gens qui peuvent modifier leur voiture pour en augmenter la puissance au-delà de ce qui convient au poids du véhicule. Il existe des personnes qui gonflent le moteur de leur véhicule et se bricolent une voiture haute performance.
    Certains conduisent des véhicules à très grande puissance pour affirmer leur statut social. Les voitures à grande puissance très coûteuses sont souvent perçues comme une indication du haut statut d'une personne dans la collectivité. La vitesse est parfois associée à ce statut aussi.
    Je ne crois pas les jeunes soient les seuls à blâmer. Manifestement, ce ne sont pas eux qui achètent les voitures les plus chères et les plus rapides offertes sur le marché. Ils sont souvent ceux qui ne peuvent pas se le permettre. Ce n'est donc pas un problème de jeunes. C'est un problème qui touche tous les segments de la société.
    Malheureusement, ce n'est pas non plus seulement une affaire d'hommes, comme l'ont prouvé certains des plus récents incidents. Il faut éviter d'imputer le problème à une montée d'hormones chez les jeunes hommes. C'est un argument qui a été utilisé à maintes reprises durant le débat. Le problème touche tous les groupes démographiques de la société.
    J'aimerais aussi parler de l'argument selon lequel les courses de rue ne sont pas prévues dans le Code criminel. Je pense qu'elles le sont, très clairement. D'ailleurs, dans le discours qu'il a prononcé hier à l'ouverture du débat sur le projet de loi, le ministre a très clairement dit que le Code criminel offre des options et prévoit déjà des peines très graves pour les activités comme les courses de rue.
    Je vais répéter les chefs d'accusation que le ministre a mentionnés dans son discours. Les infractions contenues dans le Code criminel sont la négligence criminelle causant la mort qui, comme l'a indiqué le ministre, est passible d'une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité. Ce n'est pas une infraction mineure, c'est une infraction grave passible d'une peine très lourde.
    Il y a aussi la conduite dangereuse causant la mort, qui est actuellement passible d'une peine maximale de 14 ans d'emprisonnement. C'est aussi une grave infraction passible d'une lourde peine. Ensuite, il y a la négligence criminelle causant des lésions corporelles, qui est passible d'une très lourde peine d'un maximum de 10 ans en prison. Il y a aussi la conduite dangereuse causant des lésions corporelles, qui est aussi passible d'une peine maximale de 10 ans d'emprisonnement. Et enfin, il y a l'infraction de conduite dangereuse, qui est passible d'une peine maximale de 5 ans d'emprisonnement et qui peut s'appliquer quand personne n'a été tué ou blessé.
    Ce sont tous des chefs d'accusation très graves en réponse à des crimes très graves. Ils sont dans le Code criminel pour qu'on s'en serve. Si l'application de la loi est problématique, nous devons nous pencher sur les raisons pour lesquelles ces options ne sont pas utilisées. Pourquoi la police ne se sert-elle jamais de ces chefs d'accusation?
    Parallèlement, si elle porte ces accusations contre des suspects et ces derniers ne sont pas condamnés, pourquoi ne le sont-ils pas? Cependant, je ne pense pas qu'il y ait des preuves en ce sens. En tout cas, je n'ai connaissance d'aucune preuve selon laquelle ces chefs d'accusation n'ont pas mené à des condamnations dans les cas très graves.
     Il y a aussi toute la série d’interdictions de conduire que prescrit actuellement le Code criminel et qui font partie des options offertes aux tribunaux. Aux termes du Code criminel actuel, dans le cas d’une personne reconnue coupable d’une des cinq infractions que j’ai mentionnées tout à l’heure, le tribunal peut ordonner une période d’interdiction de conduire pouvant aller jusqu’à trois ans pour conduite dangereuse d’un véhicule à moteur, jusqu’à dix ans pour conduite dangereuse causant des lésions corporelles ou la mort et pour négligence criminelle causant des lésions corporelles. Dans le cas de négligence criminelle causant la mort, le tribunal peut ordonner une interdiction permanente de conduire. Voilà ce qu’a dit le ministre de la Justice dans son discours hier sur les dispositions actuelles du Code criminel.
     En ce qui concerne les interdictions de conduire, le tribunal dispose d’options très sévères. Une interdiction d’une durée de trois ans ou de dix ans ou une interdiction à vie, ce n’est pas une peine légère pour celui qui est reconnu coupable d’une des cinq infractions.
     Je ne pense pas qu’il y a un problème actuellement avec le Code criminel. De toute évidence, le Code criminel traite la conduite dangereuse d’un véhicule et la conduite dangereuse causant la mort ou des blessures comme une affaire grave qui mérite un châtiment très sévère. Je pense qu’à l’heure actuelle, il y a de bonnes possibilités dans la loi.

  (1235)  

     Je me demande donc pourquoi nous envisageons d’apporter ces modifications à la loi. Je pense que c'est relié à l’intérêt du Parti conservateur pour les peines minimales obligatoires et à sa volonté de lier les mains des tribunaux dans le cas de crimes particuliers. Je sais que les peines minimales obligatoires ne fonctionnent pas. Elles n’empêchent pas les crimes. Elles ne les préviennent pas. On pense rarement aux conséquences d’un acte criminel avant de le commettre. Cela ne fait pas partie du plan.
     Tout cela ne sert qu’à mettre plus de gens en prison au Canada. Je m’inquiète des intentions du gouvernement à cet égard. On a déjà vu que le gouvernement entend augmenter le nombre des places derrière les barreaux. J’ignore l’effet que cela aura sur notre société, à long terme.
     Nous savons bien qu’au bout du compte, emprisonner des gens ne règle pas les problèmes de criminalité auxquels fait face notre société. Cela ne les aide pas à se réinsérer dans la société et à apprendre à se comporter de façon positive dans nos collectivités. Je ne suis pas certain que ce soit une solution et que ce projet de loi règle le problème en proposant des peines plus sévères pour le crime en cause.
    J'aimerais mentionner que les membres de la communauté religieuse d'Ottawa, entre autres, se réunissent ce soir, à l'Université St. Paul, pour discuter des condamnations avec sursis et des peines obligatoires. L'assemblée se tiendra à 19 heures. J'aimerais pouvoir y assister, mais je serai ici pour participer au débat sur le Darfour. Je crois que ces personnes soulèvent des questions très importantes que nous devrions également aborder dans le cadre de notre étude du projet de loi.
    J'ajouterai que je ne crois pas que les juges prennent les infractions de conduite dangereuse à la légère. Au contraire, ils les prennent très au sérieux. Je ne crois pas qu'il y ait un seul juge dans tout le pays qui soit clément à l'égard de ce type de crimes, surtout lorsqu'il y a des morts ou des blessés. J'en suis même convaincu.
    Bien entendu, les juges font des erreurs et, bien entendu, le système n'est pas parfait. Cependant, ceux qui affirment que le système est défaillant et qu'on fait preuve de clémence envers les criminels ont complètement tort. Les juges du Canada font de l'excellent travail, compte tenu de l'ampleur de la tâche et des moyens dont ils disposent.
    Nous devons tenir compte des faits et des circonstances de chaque affaire et imposer des peines qui soient justes et proportionnelles. Les juges doivent être en mesure de prendre ce type de décisions et d'apprécier avec discernement les circonscontances de l'espèce. C'est justement ce qu'ils font.
    Je ne veux rien faire qui puisse saper le pouvoir des juges dans notre système. Ils font un travail difficile, et ils le font bien. J'estime que, à l'heure actuelle, ils ont les ressources dont ils ont besoin pour faire le travail qu'on leur demande.
    Par ailleurs, il existe d'autres moyens d'empêcher les courses de rue. Nous devrions prendre des mesures préventives. Je crois que le sujet a été abordé hier et plus tôt aujourd'hui.
    On nous a dit que les corps policiers ont besoin de plus de ressources et de plus d'effectifs, qu'ils ont besoin de plus d'équipement afin de pouvoir se consacrer autant qu'ils le souhaitent à la lutte contre ce crime en particulier. Nous avons, bien sûr, entendu parler du service de la GRC à Richmond, qui a trouvé le moyen de couper des ressources ailleurs pour les réaffecter à la lutte contre les crimes de rue, lesquels constituent un gros problème dans cette collectivité. La police a donc trouvé le moyen de lutter contre la criminalité. Cela a exigé des compromis. La police a dû prendre des décisions difficiles lorsqu'il fallait choisir où couper des ressources, mais elle a néanmoins trouvé le moyen de le faire.
    Nous devons faire en sorte que ce genre de décision soit plus facile à prendre et que nos corps policiers disposent des ressources nécessaires. Malheureusement, le projet de loi C-19 est muet à ce sujet.
    Des exemples, on en trouve également à l'étranger. L'État de Victoria, en Australie, a adopté des mesures pour combattre le taux de mortalité élevé sur les autoroutes, mesures qui ont permis de le réduire de près du tiers sur une période de 15 à 20 ans. Cela représente une réduction importante du taux de mortalité sur les autoroutes australiennes dans l'État de Victoria.
    L'une de ces mesures est une marge de tolérance de trois kilomètres-heure au-dessus de la limite de vitesse relativement à la délivrance de contraventions. Au Canada, nous présumons tous pouvoir dépasser de dix kilomètres-heure environ la limite de vitesse avant de risquer de se faire coller une contravention. Dans l'État de Victoria, en Australie, il est bien connu que la marge de tolérance n'est que de trois kilomètres-heure. J'ai pu constater que cette mesure a un effet sur la vitesse à laquelle les gens roulent sur les autoroutes là-bas. C'est un autre type de mesures qu'on devrait peut-être envisager, du moins à l'échelon provincial.

  (1240)  

    Selon mon expérience en Colombie-Britannique, les gens avaient ralenti sur les routes quand nous utilisions le radar photo. J'emprunte souvent la route Sea to Sky en Colombie-Britannique, qui est reconnue comme l'une des routes les plus dangereuses au Canada. Les gens ne conduisaient pas aussi vite sur cette route quand il y avait un radar photo, un point c'est tout. Quand on a cessé d'utiliser les radars photo, les gens ont recommencé à faire de la vitesse. Le radar photo joue un rôle important et je crois que c'est une mesure qu'il nous faudrait envisager.
    L'éducation des conducteurs est une autre mesure. Il faudrait peut-être envisager des cours de conduite obligatoires dans toutes les administrations de manière à ce que les conducteurs soient sensibilisés aux courses de rue, entre autres, dans le cadre de leur formation de base.
    Je crois aussi qu'il nous faut prévoir des limites applicables aux véhicules modifiés pour les courses. Nous devons nous assurer que les véhicules modifiés pour tout genre de course ne sont pas conduits sur les routes de nos collectivités.
    Selon moi, nous devons aborder de façon générale toute la question de la culture de la vitesse dans notre société. Je crois que certaines de ces idées nous permettraient de nous attaquer sérieusement à la vitesse sur nos routes. Nous pouvons tous jouer un rôle.
    J'estime toutefois qu'il faut s'arrêter sur d'autres questions en ce qui concerne la culture de la vitesse. Nous avons entendu parler à plusieurs reprises des annonceurs et des constructeurs automobiles qui vendent des voitures en mettant en valeur leur vitesse.
    Nous connaissons tous le message publicitaire dans lequel un jeune garçon dit « vroum, vroum, vroum » pendant qu'une voiture file sur une route. Voilà comment on s'y prend, entre autres, pour donner l'impression que les véhicules sont conçus pour être conduits rapidement et qu'ils doivent être conduits ainsi et pour attirer les jeunes. Je crois que c'est dangereux. Des pressions devraient être exercées sur les annonceurs en ce qui concerne ce genre d'attrait dans les publicités.
    Nous avons aussi vu les préoccupations des annonceurs en matière de responsabilité juridique. Quand des voitures sont conduites à grande vitesse dans les messages publicitaires à la télévision, on voit apparaître à l'écran un message indiquant qu'il s'agit d'un circuit fermé et qu'il peut y avoir des conséquences. À mon avis, on a identifié des questions de responsabilité dans ce cas. Les annonceurs tentent de dire que c'est quelque chose à faire dans un circuit fermé, alors que l'impression générale est tout autre.
    J'estime également que nous devons exercer des pressions sur les fabricants de véhicules et d'automobiles. Comment se fait-il que les voitures peuvent se déplacer à des vitesses de 180 à 200 kilomètres à l'heure ou plus? Avons-nous l'occasion de conduire à une telle vitesse? C'est peut-être le cas pour les véhicules d'urgence mais, en général, ceux d'entre nous qui utilisent leur véhicule pour faire des courses, pour conduire les enfants à l'école ou pour aller à un rendez-vous n'ont pas du tout besoin d'un véhicule capable de se déplacer si vite. En modifiant les véhicules que nous conduisons, ce que les fabricants devraient être tout à fait capables de faire, nous pourrions peut-être améliorer la situation dans son ensemble.
    Il faut également tenir compte de la culture populaire. Au cinéma, les poursuites en voiture sont omniprésentes. Également, certains jeux vidéo nous montrent des poursuites et des courses de rue très inquiétantes où, par exemple, le but consiste à obliger quelqu'un à céder la route et à prendre le fossé, ou pire encore. Il y a aussi, à mon avis, toute une culture du sport extrême, qui valorise le fait de prendre de grands risques.
    Il nous faut nous pencher sur divers aspects de cette culture.
    On peut avoir l'impression que ce projet de loi aidera à sensibiliser le public, mais je pense qu'il a également certains effets moins constructifs. Je n'ai pas à faire semblant que la mesure va régler le problème si j'estime que tel n'est pas le cas à certains égards. Le projet de loi me semble avoir une portée fort limitée et j'ai de la difficulté à voir comment il va vraiment avoir une incidence et un effet préventif sur les courses de rue au Canada.
    Selon moi, notre objectif devrait être d'empêcher les courses de rue avant qu'elles n'aient lieu. Je crois qu'il existe déjà des peines graves pour les personnes condamnées pour conduite dangereuse et la course de rue fait partie de ce genre d'infraction. Les dispositions du Code criminel existent. Je doute cependant que la mesure législative ait des vertus éducatives. Également, il me semble que nous passons tout à fait à côté pour ce qui est de la prévention.
    Ce débat m'intéresse. Je suis heureux de pouvoir y participer. J'ai écouté attentivement les interventions des autres députés et je compte bien participer aux prochaines étapes de l'étude de cette mesure législative.

  (1245)  

    Monsieur le Président, j'ai deux courtes observations et une question à formuler.
    Tout d'abord, il me semble que le député dont j'ai pris plaisir à écouter le discours fait preuve de la même confusion entre la possession d'un objet par une personne et le comportement de celle-ci, comme plusieurs semblent le faire au sujet des armes à feu. Ce n'est pas le fait de posséder une arme à feu ou une automobile, peu importe la marque, qui rend une personne coupable. C'est le comportement qui fait la différence. C'est ça que nous tentons de réglementer.
    Je crois également que nous ne limitons pas la capacité des tribunaux à agir au bas de l'échelle des sanctions, mais que nous élargissons plutôt leurs options au sommet de cette même échelle, ce qui, selon moi, n'est pas mauvais.
    Ma question concerne la prévention, plus particulièrement ce que mon collègue a dit dans ses remarques et dans une question qu'il a eue à l'intention d'un orateur précédent. Elle porte sur l'influence de la culture, de la publicité, etc. Je suis d'accord avec lui quand il affirme que tout cela a un effet négatif.
    J'aimerais connaître ses suggestions en matière de réglementation de la culture, du cinéma, de la publicité et de la capacité des constructeurs automobiles à fabriquer des véhicules qu'ils peuvent vendre, et savoir si ses suggestions s'arrêtent à la réglementation, ou si elles vont au-delà, jusqu'à une certaine forme de censure?
    Monsieur le Président, je ne suis pas en faveur de la censure, mais je crois que le public dispose de plusieurs moyens de faire pression sur les publicitaires, par exemple, et sur les producteurs de films, d'émissions de télévision et ainsi de suite.
    Je ne crois pas que nous devrions interdire par la loi de montrer une voiture qui roule vite, par exemple. Or, il y a eu des cas où des campagnes ont attiré l'attention des publicitaires sur le fait qu'ils montrent un certain produit ou une certaine activité sous un jour qui n'est pas conforme à ce que souhaite la société. Je crois que de telles campagnes peuvent avoir un réel effet et que ce type de pression est très important.
    Nous devrions faire pression sur les fabricants de voitures afin qu'ils cessent de mettre l'accent sur la vitesse dans leurs publicités. Il y a d'autres raisons d'acheter une voiture. Nous devrions peut-être poser des questions sur la sécurité et ainsi de suite lorsque nous allons acheter un véhicule. Ces questions devraient avoir une plus grande importance.
    L'idée d'exiger des fabricants de faire en sorte que les véhicules ne soient pas en mesure d'atteindre des vitesses extrêmes m'intéresse. Je crois que nous devrions nous pencher là-dessus. Il ne fait aucun doute que le secteur de l'automobile consacre une grande partie de la recherche et du développement à l'aspect vitesse. On le voit bien dans le domaine de la course de haut niveau.
    Il n'y a sans doute pas suffisamment de recherches consacrées aux autres aspects, ceux qui touchent les véhicules que la majorité utilise au quotidien. Je crois qu'il serait intéressant d'explorer les possibilités de recherche sur la mise au point, la fabrication et la mise en marché de véhicules qui n'ont pas besoin d'atteindre ces vitesses, afin de les rendre attrayants et moins dommageables pour l'environnement. Je crois que ces possibilités valent la peine qu'on s'y attarde.

  (1250)  

    La Chambre est-elle prête à se prononcer?
    Des voix: Le vote.
    Le président suppléant (M. Andrew Scheer): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
    Des voix: D'accord.
    Une voix: Avec dissidence.
    Le président suppléant (M. Andrew Scheer): Par conséquent, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

    (Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)

La Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques

    -- Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans ce débat sur le projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques, et de recommander à la Chambre que ce projet de loi soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Ce projet de loi est très technique. Il est toutefois essentiel que ces changements techniques soient apportés afin que nous puissions promulguer l'ancien projet de loi C-13, adopté au cours de la dernière législature, avec l'appui de tous les partis.
    Bon nombre de députés qui étaient ici lorsque le projet de loi C-13 a été adopté savent bien de quoi il s'agit, mais je vais en faire un bref historique pour ceux qui n'y étaient pas.
    La Banque nationale de données génétiques, qui est administrée par la Gendarmerie royale du Canada, est en opération depuis le 30 juin 2000. Cette banque permet essentiellement d'effectuer une comparaison entre les profils génétiques des délinquants reconnus coupables et les échantillons prélevés sur les scènes de crimes. On y retrouve actuellement près de 100 000 profils génétiques de délinquants reconnus coupables et environ 30 000 échantillons prélevés sur des scènes de crimes. Les données contenues dans cette banque ont été utiles dans près de 6 500 enquêtes policières.
    En 2001, des procureurs et des fonctionnaires fédéraux et provinciaux ont constaté un certain nombre d'insuffisances dans la loi. La Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada, qui comprend des représentants des avocats de la défense, a adopté des résolutions visant à traiter en priorité sept problèmes.
    Le gouvernement a lancé des consultations publiques à l'automne de 2002. Ce n'est qu'en mai 2004 que l'on a présenté l'ancien projet de loi C-35, en vue d'apporter des correctifs aux problèmes constatés. Ce projet de loi est mort au Feuilleton au moment où les élections ont été déclenchées et il a été présenté à nouveau sous la forme de l'ancien projet de loi C-13 en octobre 2004.
    On peut dire, je pense, que, même si tous les partis appuyaient l'idée d'une banque de données génétiques et les changements proposés dans l'ancien projet de loi C-13, bon nombre de députés souhaitaient des changements plus considérables.
    Des négociations ont eu lieu entre les partis pour qu'on propose un ensemble de changements pouvant assurer un appui unanime au projet de loi. En mai 2005, trois amendements importants au projet de loi ont été adoptés.
    Le premier visait à élargir le régime de rétroactivité pour qu'il englobe les personnes déjà condamnées pour meurtre, homicide involontaire coupable ou agression sexuelle. Je me souviens que notre parti, qui était dans l'opposition, portait un intérêt tout particulier à cette question.
    Le deuxième visait la création d'une catégorie de délinquants très violents pour laquelle le tribunal n'aurait aucune discrétion pour refuser de prononcer l'ordonnance de prélèvement. Encore ici, il s'agissait d'une autre initiative de mon parti, qui a formulé la recommandation en ce sens au cours de la dernière législature.
    Le troisième amendement visait à élargir la définition des infractions secondaires pour qu'elle englobe toutes les infractions du Code criminel ou de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances qui sont punissables, par mise en condamnation, de cinq ans d'incarcération ou plus.
    Le projet de loi a ensuite avancé avec une extrême rapidité à la Chambre et au Sénat en bénéficiant de l'appui de tous les partis, en raison de l'imminence d'un vote de confiance sur le budget.
    Les dispositions de l'ancien projet de loi C-13 qui sont entrées en vigueur avec la sanction royale étaient celles qui portaient sur l'élargissement du régime de rétroactivité, par lequel environ 4 400 délinquants de plus étaient visés par la possibilité d'un prélèvement, sur la procédure de traitement des ordonnances de prélèvement dans les cas où celles-ci sembleraient avoir été mal exécutées et sur les procédures dans les cas de tests d'empreintes génétiques partiellement concluants.
    Les principales modifications qui ne sont pas encore entrées en vigueur sont les suivantes.
    La première vise à permettre aux tribunaux de prononcer des ordonnances de prélèvement à l'endroit de personnes faisant l’objet « d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux  ».
    La deuxième consiste à ajouter à la liste des infractions désignées l'usage d'Internet en vue de leurrer un enfant, le fait de proférer des menaces, le harcèlement criminel et la participation aux activités d’une organisation criminelle.
    La troisième consiste à faire passer le « vol qualifié » et « l'entrée par effraction dans une maison d'habitation » de la liste des infractions secondaires à la liste des infractions primaires.
    La quatrième vise à créer une nouvelle sous-catégorie dans la liste des infractions primaires consistant en 16 infractions d'une extrême violence pour lesquelles les tribunaux n'ont absolument aucune discrétion et doivent prononcer l'ordonnance de prélèvement.
    Cinquièmement, il s'agit d'élargir la définition des infractions de type secondaire, de façon à inclure toutes les infractions passibles d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus.
    La plupart des députés conviendront qu'il s'agit là de modifications qui rehausseront la capacité de la police à utiliser la base de données et à protéger les Canadiens des criminels.

  (1255)  

    Pourquoi alors ces modifications ne sont-elles pas encore en vigueur? Les responsables fédéraux, provinciaux et territoriaux, en se préparant à la proclamation des autres dispositions du projet de loi C-13, ont identifié un certain nombre de problèmes techniques importants qui devraient être corrigés avant la proclamation, de même que certaines procédures qui devraient être modifiées pour en augmenter l'efficacité et en réduire les coûts. En conséquence, le gouvernement précédent a présenté le projet de loi C-72 en novembre 2005, afin d'apporter les modifications nécessaires. Cependant, ce projet de loi est mort au Feuilleton au moment du déclenchement des élections.
    Les responsables ont poursuivi leurs travaux et ils ont identifié encore d'autres changements susceptibles de clarifier l'intention du Parlement lorsqu'il a adopté l'ancien projet de loi C-13 et les procédures qui devraient être modifiées pour rendre la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques plus efficace.
    J'ai déjà été procureur de la Couronne à l'échelon provincial. Je sais donc combien il est important que des procédures claires soient définies dans le Code criminel pour qu'une loi puisse être efficace. Je suis heureux que mon ministère ait pris l'initiative d'organiser une réunion de deux jours avec les procureurs, la police, les experts des questions médico-légales et le personnel correctionnel pour étudier en profondeur le projet de loi C-13.
    Le projet de loi actuel, le C-18, propose une douzaine de modifications qui ne figuraient pas dans l'ancien projet de loi C-72, et ces changements découlent directement de la réunion en question. Le projet de loi C-18 ne propose aucune modification des politiques et procédures sous-jacentes déjà adoptées par le Parlement. Il contient surtout des modifications du libellé, notamment la création de dix nouveaux formulaires. Ces modifications ne sont pas radicales et ne risquent donc pas de faire les manchettes, mais elles seront bien reçues par les intervenants du domaine, qui sont responsables de la mise en oeuvre des mesures adoptées par le Parlement.
    Le projet de loi C-18 contient également des modifications de fond qui devraient recevoir l'appui de tous les députés. En particulier, il ajouterait la tentative de meurtre et le complot en vue de commettre un meurtre aux infractions visées par les disposition rétroactives. Il s'agit là d'infractions très graves qui dénotent un risque élevé de récidive et qui sont passibles d'une peine d'incarcération à vie, une peine plus sévère que pour les infractions sexuelles qui sont déjà incluses dans la disposition de rétroactivité.
    Il permettrait également à la Couronne de se prévaloir des dispositions rétroactives concernant les ordonnances de prélèvement de substances corporelles dans les cas où un contrevenant aurait été condamné avant le 30 juin 2000 pour une des infractions énumérées et où il purgerait toujours une peine pour l'infraction en question, plutôt que d'exiger qu'il purge une peine de deux ans ou plus.
    Il y a quelques cas de personnes qui, avant le 30 juin 2000, ont été condamnées à de multiples peines consécutives pour diverses infractions, y compris pour des infractions qui rendent un délinquant, qui purge toujours sa peine, admissible rétroactivement à un prélèvement. Bien que le tribunal ait clairement considéré ces personnes comme ayant commis des infractions graves, il ne leur a imposé une peine de deux ans ou plus pour aucune des infractions commises. Le projet de loi permet également d'émettre une ordonnance de prélèvement d'ADN sous 90 jours après le prononcé de la peine.
    On estime que la principale raison pour laquelle des ordonnances ne sont pas émises dans de nombreux cas où elles sont déjà autorisées est que les procureurs sont extrêmement occupés et oublient de rappeler au tribunal d'étudier la question. Cela donnerait à la fois au procureur et au juge le temps d'étudier les dossiers et, si la question a tout simplement été oubliée, de tenir une audience où la poursuite et le délinquant puissent présenter leurs arguments au juge, qui décidera d'émettre ou non l'ordonnance.
    Il prévoit aussi que ce serait une infraction que de ne pas se présenter pour un prélèvement d'ADN. On s'attend à ce que l'existence d'une infraction précise fera mieux comprendre au délinquant la nécessité de se présenter pour un prélèvement et, ainsi, accroîtra l'observation des ordonnances de prélèvement de substances corporelles à enregistrer dans la banque de données génétiques. Le projet de loi autoriserait toute force policière qui arrête une personne pour ne s'être pas présentée pour un prélèvement de substances corporelles à effectuer le prélèvement.
    Ce serait très onéreux si les délinquants arrêtés dans une province devaient être renvoyés dans la province où l'ordonnance a été émise pour que l'échantillon soit prélevé. Le texte permettrait qu'un service de police qui a été autorisé à effectuer un prélèvement génétique en autorise un autre à le faire si c'est moins coûteux. La police a été empêchée d'exécuter des ordonnances dans les cas où des délinquants ont été incarcérés hors de sa zone de compétence ou qui ont été mis en liberté sous condition et résident hors de sa zone de compétence.
    Le transfert de l'ordonnance à un tribunal compétent et l'obtention d'une autre ordonnance constitue une procédure longue et coûteuse, qui pourrait être évitée.
    Des changements sont également apportés pour permettre à la Banque nationale de données génétiques de communiquer plus efficacement avec les laboratoires médico-légaux et avec ses partenaires étrangers.

  (1300)  

    Le Parlement voulait assurément encourager ces échanges, mais l'amendement intégré au projet de loi C-13 n'est pas aussi clair qu'il le devrait. Par ailleurs, la Loi sur la défense nationale est modifiée de manière à ce que la disposition visant les militaires relativement au prélèvement de substances corporelles continue de refléter la disposition visant les non-militaires.
    Le projet de loi renferme d'autres modifications de détail comme celle-ci et je suis convaincu que des responsables seront invités à fournir des explications au comité à l'étape de l'étude article par article de la mesure. Selon moi, les députés doivent savoir avant tout que les modifications que propose ce projet de loi seront très utiles aux organismes d'application de la loi, aux procureurs et aux juges, qui utilisent quotidiennement les lois.
    L'adoption de ce projet de loi permettra la proclamation et la mise en vigueur sans heurts du reste de l'ancien projet de loi C-13.
    Bien sûr, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques ne sera pas immuable. Les députés ne sont pas sans savoir qu'un examen parlementaire de cette loi est prévu tous les cinq ans et qu'il aurait dû débuter le 30 juin 2005. Des fonctionnaires de mon ministère, le ministère de la Sécurité publique, de la GRC et de la Banque nationale de données génétiques aideront volontiers le comité dès que celui-ci aura obtenu son mandat d'examen.
    Force est de reconnaître que le retard dont je viens de parler n'a pas que de mauvais côtés. Le comité pourra examiner des questions telles que le prélèvement d'office de substances corporelles après une déclaration de culpabilité ou d'autres questions qui ne manqueront pas d'être soulevées compte tenu de l'appui ferme qu'a donné la Cour suprême à la loi actuelle dans l'arrêt qu'elle a rendu en avril 2006 dans l'affaire R. c. Rodgers.
    Cet arrêt porte principalement sur la rétroactivité de l'examen d'une demande ex parte, mais aussi sur l'argument de l'inconstitutionnalité du prélèvement.
    Il est utile d'examiner en détail les motifs invoqués par la Cour suprême pour confirmer la constitutionnalité de la loi. Je tiens à citer un passage du jugement, car c'est important pour nos discussions. La Cour suprême a donné la précision suivante:
     Nul doute que la preuve génétique a révolutionné le déroulement de l’enquête et de la poursuite dans le cas de nombreux crimes. Elle a non seulement permis d’identifier et de poursuivre de nombreux criminels dangereux, mais aussi de disculper bon nombre de personnes soupçonnées ou déclarées coupables à tort. On ne saurait trop insister sur l’importance de cette percée médico-légale pour l’administration de la justice. On ne peut non plus faire abstraction des graves répercussions de la saisie et de l’utilisation d’échantillons d’ADN par l’État sur la protection de la vie privée et sur la sécurité de la personne. Un juste équilibre doit être établi entre ces intérêts opposés, compte tenu des paramètres constitutionnels.
    La Cour ajoute:
    Pour les motifs qui suivent, j’arrive à la conclusion que le prélèvement sur les catégories de condamnés désignées d’échantillons d’ADN destinés à la banque de données génétiques n’est pas abusif au sens de l’article 8 de la Charte.
    Il s'agit de l'article de la Charte portant sur la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.
    La Cour ajoute:
    La société a indéniablement intérêt à ce que les organismes chargés du contrôle d’application de la loi recourent à cette technique performante pour identifier les contrevenants. L’atteinte à l’intégrité physique est minime. L’effet attentatoire possible sur le droit à la vie privée est soigneusement circonscrit par des garanties légales qui ne permettent l’utilisation de la banque de données génétiques qu’à des fins d’identification.
    La Cour suprême dit également:
    Contrairement aux dispositions sur les mandats de perquisition, celles relatives au prélèvement d’échantillons destinés à la banque de données génétiques ne visent pas les personnes soupçonnées d’une infraction, mais bien celles déclarées coupables de différentes catégories d’infractions. Elles ne permettent pas l’obtention d’éléments de preuve pour les besoins d’une poursuite. Elles prévoient plutôt le prélèvement d’échantillons à la seule fin d’établir des profils d’identification génétique destinés à la banque de données. Lors d’une enquête ultérieure, la comparaison des éléments de preuve génétique recueillis sur le lieu du crime avec les profils d’identification génétique contenus dans la banque de données permettra de disculper ou d’identifier un suspect. Toutefois, lorsqu’il y a correspondance, l’échantillon ne sera pas remis aux enquêteurs. Il leur faudra recourir aux méthodes habituelles, dont l’obtention d’un mandat ADN, pour recueillir des éléments de preuve et faire progresser l’enquête.

  (1305)  

    La Cour affirme ensuite:
     Vu l’objet des dispositions relatives à la banque de données génétiques, j’estime que l’analogie doit se faire avec la prise des empreintes digitales et les autres mesures d’identification liées à l’application de la loi. L’objet du régime législatif est expressément énoncé à l’art. 3 de la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques — « aider les organismes chargés du contrôle d’application de la loi à identifier les auteurs présumés d’infractions désignées, y compris de celles commises avant l’entrée en vigueur de la présente loi ».
    Et elle poursuit ainsi:
    Les dispositions relatives à la banque de données génétiques de la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques et du Code criminel visent à mettre les nouvelles techniques d’analyse génétique au service de l’identification des contrevenants connus ou éventuels. La Loi sur l’identification par les empreintes génétiques se veut le complément moderne de la Loi sur l’identification des criminels [...]
    Je suis sûr que le comité entreprendra un examen détaillé de la loi sur les empreintes génétiques et qu'il voudra étudier soigneusement les conséquences de ce jugement. J'espère que tous les partis pourront s'entendre, à la table du comité, sur la meilleure manière de procéder pour que nous puissions protéger les Canadiens sans contrevenir à la Charte des droits et libertés.
    Toutefois, nous ne savons pas quand ce comité sera mis sur pied, ni quand il tiendra ses audiences ou formulera ses recommandations. Je parle du comité qui sera mandaté par le Parlement pour faire un examen complet de la question. Nous ne devrions pas attendre que ce processus de longue haleine soit terminé pour adopter des modifications qui sont généralement reconnues comme étant nécessaires immédiatement.
    Par conséquent, je suis heureux de recommander que le projet de loi C-18 soit lu pour la deuxième fois et renvoyé au comité permanent pour examen.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie le ministre de son discours. Je peux l'assurer que nous allons travailler très sérieusement à l'étude de ce projet de loi. Nous comprenons bien que c'est un outil important pour les policiers. Par ailleurs, au Bloc québécois — tout comme, j'en suis convaincu, l'ensemble des parlementaires —, nous avons toujours été soucieux de l'équilibre entre la protection que l'on doit accorder également à la vie privée dans certaines circonstances et la résolution diligente des enquêtes.
    J'aimerais que le ministre donne un peu plus d'informations sur un aspect du projet de loi, soit celui de la prérogative que la GRC aura de divulguer l'information sur l'ensemble des enquêtes criminelles. Je croyais qu'il était possible pour la GRC de diffuser l'information sur les infractions pouvant faire l'objet d'un prélèvement, donc la liste des 16 infractions les plus graves que l'on connaisse, les infractions que l'on dit primaires.
    À qui sera destinée cette information? Qui en seront les destinataires? Le projet de loi ne devrait-il pas comporter une balise additionnelle en pareille matière? Ne faut-il pas s'inquiéter d'une trop grande diffusion de l'information qui concerne l'ADN, information extrêmement intrusive et à caractère confidentiel et privé? Quel est l'élargissement de la portée de cet article?

  (1310)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, je crois que nous entrons dans des détails plus techniques, mais je n'ai pas les qualifications nécessaires pour donner des réponses catégoriques. Je peux dire que les empreintes digitales sont prises lorsqu'un individu est mis en accusation, tandis que, dans le cas des empreintes génétiques, les prélèvements sont faits une fois qu'un individu a été condamné seulement, ce qui est beaucoup plus restrictif.
    Le système canadien est très différent du système britannique, où les individus sont tenus de donner des prélèvements de substances corporelles dès qu'ils sont mis en accusation. Cela a permis de trouver les auteurs de graves crimes dans des affaires déjà classées. En Grande-Bretagne, les individus soupçonnés de crimes contre la propriété, comme les entrées par effraction, sont tenus de donner des prélèvements de substances corporelles dès leur mise en accusation. Beaucoup d'autres types de crimes violents ont aussi été résolus.
    Le potentiel des empreintes génétiques est immense. Je constate que le projet de loi canadien est très restrictif, pas uniquement en ce qui concerne les infractions, mais également pour ce qui est des condamnations. Dans certains cas, les juges peuvent même refuser d'ordonner le prélèvement de substances corporelles. Je constate également que certaines restrictions s'appliquent à la manière dont les corps policiers peuvent fournir les renseignements sur les empreintes génétiques, mais je crois qu'il faudra étudier la question plus à fond en comité. Je conseille au député de poser ses questions aux fonctionnaires au moment de l'étude en comité.
    Monsieur le Président, le ministre devrait savoir que beaucoup de gens se préoccupent vivement de l'identification des membres de leur famille qui sont disparus. Je sais que le processus d'identification par les empreintes génétiques présente des difficultés. En fait, il y a actuellement des projets de loi d'initiative parlementaire qui soulèvent la question. Je ne doute pas que la plupart d'entre nous compatissent à la souffrance des gens dont des proches sont disparus.
    Le ministre de la Justicesaisira-t-il l'occasion pour nous expliquer certaines des difficultés liées à l'identification de personnes disparues par leurs empreintes génétiques?
    Monsieur le Président, la députée a raison de dire que c'est une question qui présente des difficultés.
    Je sais que le gouvernement précédent a souligné certaines préoccupations relatives aux banques de données de personnes disparues. On s'interroge encore de la question de savoir si cela relève vraiment de la compétence du gouvernement et du Parlement fédéraux. J'estime que cette question relève de la compétence du Parlement fédéral. J'ai hâte de discuter de cette question dans le cadre de l'étude d'un autre projet de loi.
    Je sais qu'il y a des difficultés. Je puis dire à la députée que je comprends ce problème. Même s'il s'agissait d'un projet de loi d'initiative parlementaire provenant de l'opposition, mon ministère serait certes prêt à l'étudier très sérieusement et à le faciliter.
    En ce qui concerne cette mesure, toutefois, elle ne ferait que compliquer les choses et retarder l'adoption des modifications proposées au projet de loi qui a été adopté par le Parlement avant les dernières élections. Le gouvernement ne voulait pas soulever cette question dont a parlé la députée de London-Ouest dans le débat sur cette mesure. Que la question soit soulevée dans le cadre de l'étude d'une initiative parlementaire distincte ou de l'examen global, le Parlement devrait l'examiner très sérieusement.
    Monsieur le Président, je m'excuse à l'avance si le ministre a traité de ce point dans ses observations préliminaires, parce que je suis arrivé quelques minutes en retard.
    Le projet de loi C-18 prévoit le prélèvement, de façon rétroactive, de substances corporelles dans le cas d'individus qui ont été accusés d'avoir commis une infraction, qui ont été déclarés coupables et qui sont en train de purger leur peine. Celle-ci serait passablement longue, puisque ces individus seraient encore en détention. Dans le cas des personnes trouvées coupables d'avoir commis ces infractions, le projet de loi autoriserait maintenant le prélèvement d'un échantillon de leurs substances corporelles, ce qui n'est pas le cas en vertu de la loi actuelle.
    Le ministre sait-il combien de personnes qui ont été déclarées coupables et qui sont toujours incarcérées seraient visées par les changements qu'il propose? Le gouvernement voudrait-il que des échantillons soient prélevés sur tous ces individus?

  (1315)  

    Monsieur le Président, le député soulève un point très bon et très important.
    Nous savons que le projet de loi présenté en mai 2005 élargissait la portée de la loi de façon à pouvoir prélever de façon rétroactive des échantillons sur les personnes déclarées coupables de meurtre, d'homicide involontaire ou d'agression sexuelle, ce qui n'était pas le cas auparavant.
    Qu'on me corrige si je me trompe, mais je crois savoir que le seul amendement de fond relativement aux changements visant à permettre aux autorités de prélever rétroactivement des échantillons de substances corporelles vise les tentatives de meurtre et les complots en vue de commettre un meurtre. Il s'agit d'infractions très graves.
    Je ne connais pas avec certitude le nombre d'individus qui sont présentement incarcérés relativement à de tels crimes. J'imagine qu'il n'est pas très élevé, compte tenu du nombre relativement peu élevé de meurtres au Canada.
    Monsieur le Président, je profite de l'occasion pour remercier le ministre d'avoir participé à une table ronde à Oshawa, au cours de l'été. Les dirigeants communautaires m'ont dit que le ministre avait fait preuve d'une grande écoute et ils ont aussi souligné l'engagement qu'il a pris d'améliorer les droits des victimes.
    Le ministre pourrait-il élaborer sur le projet de loi et nous expliquer le lien entre celui-ci et les droits des victimes?
    Monsieur le Président, il ne porte pas sur les droits des victimes en tant que tels, mais indirectement, chaque fois qu'un malfaiteur, un délinquant, est traduit en justice et condamné grâce aux preuves génétiques, c'est dans l'intérêt des droits des victimes et je pense que c'est important dans cette optique.
    Cependant, comme l'a mentionné plus tôt une députée de l'opposition, la question des personnes disparues, par exemple, est un élément important auquel il faut s'intéresser. Un autre aspect important de la question est que l'ADN peut permettre de disculper des innocents. L'ADN peut faciliter ce processus. Parlons un instant des gens qui sont victimes d'une erreur judiciaire, qui ont été condamnés ou accusés injustement; l'identification génétique est une des façons les plus efficaces de prouver leur innocence.
    Cela m'a fait plaisir de participer à la discussion très intéressante qui a eu lieu à Oshawa avec les électeurs de mon collègue.
    En termes généraux, j'estime que l'élargissement des autorisations relatives aux prélèvements de substances corporelles est important tout simplement parce qu'il aidera la police à appréhender les suspects et à les faire condamner. En même temps, j'estime que le projet de loi est soigneusement équilibré pour faire en sorte qu'aucun droit garanti par la Charte ne puisse être violé. Quant à la question de savoir si le projet de loi va assez loin à cet égard, je rappellerai une fois de plus au député l'affaire Rodgers dans laquelle certains principes directeurs ont été fixés. Je ferai aussi référence à l'expérience d'autres pays, principalement la Grande-Bretagne, où le droit de prélever des substances corporelles est beaucoup plus large et où, parallèlement, certaines mesures de protection sont en place. Il faut évidemment trouver un équilibre dans tout cela.
    Je pense que ce sont de très bons premiers pas, mais je pense aussi qu'il faut aller plus loin.
    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques. Le projet de loi C-18 a une incidence sur le Code criminel, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et la Loi sur la défense nationale.
    Comme bien d'autres de mes collègues à la Chambre, j'étais députée lorsque la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques a été présentée en 1998. Elle est entrée en vigueur le 30 juin 2000.
    Il est précisé à l'article 13 de cette loi que, dans les cinq ans suivant l’entrée en vigueur de la loi, un comité du Sénat, de la Chambre des communes, ou mixte, doit procéder à un examen des dispositions et de l’application de la loi. Cet examen n'a pas encore eu lieu et l'actuel ministre de la Justice a dit dans une lettre écrite plus tôt cette année que cet examen devrait commencer le plus tôt possible après que ce projet de loi aura reçu la sanction royale.
    Je crois que l'examen devrait avoir lieu le plus tôt possible pour bien des raisons. J'aimerais savoir, de la part du ministre, si sa garantie que l'examen prescrit par la loi aura bel et bien lieu veut dire en fait que cela se fera seulement après que le ministre aura présenté à la Chambre d'autres de ses projets de loi concernant la loi et l'ordre ou bien si l'examen peut avoir lieu d'ici un an, dans un délai raisonnable. Où exactement se situe cet examen dans la liste de priorités du gouvernement minoritaire?
    Dans une lettre qui, je crois, a été envoyée à tous les membres du Comité de la justice, le ministre a mentionné diverses questions qu'il voulait voir faire l'objet de discussions, et ce sont des questions importantes. En voici quelques-unes: le fait d'avoir une seule liste d'infractions désignées; la portée de la discrétion des juges relativement aux ordonnances; le prélèvement d'empreintes génétiques en vertu de la Loi sur l'identification des criminels; les échanges internationaux; la question que j'ai mentionnée il y un instant; l'analyse des liens de parenté; les échantillons fournis volontairement; les échantillons prélevés sur les victimes; l'exonération.
    L'actuel ministre de la Justice, que nous venons d'entendre, a insisté sur le fait que les modifications contenues dans le projet de loi C-18 sont nécessaires pour qu'on puisse profiter des changements apportés dans le projet de loi C-13 de l'ancien gouvernement, adopté il n'y a pas si longtemps. L'ancien projet de loi C-13 a été adopté le 19 mai 2005 et seulement certaines parties de cette mesure sont actuellement en vigueur.
    Pour ceux qui n'ont peut-être pas participé à ce processus législatif, il serait peut-être utile d'énoncer l'objet de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. L'article 3 de cette loi dit ceci:
    La présente loi a pour objet l’établissement d’une banque nationale de données génétiques destinée à aider les organismes chargés du contrôle d’application de la loi à identifier les auteurs présumés d’infractions désignées, y compris de celles commises avant l’entrée en vigueur de la présente loi.
    Les principes de la loi sont énoncés à l'article 4:
a) la protection de la société et l’administration de la justice sont bien servies par la découverte, l’arrestation et la condamnation rapides des contrevenants, lesquelles peuvent être facilitées par l’utilisation de profils d’identification génétique;
b) ces profils, de même que les substances corporelles prélevées en vue de les établir, ne doivent servir qu’à l’application de la présente loi, à l’exclusion de toute autre utilisation qui n’y est pas autorisée;
c) afin de protéger les renseignements personnels, doivent faire l’objet de protections:
(i) l’utilisation et la communication de l’information contenue dans la banque de données — notamment des profils — , de même que son accessibilité,
(ii) l’utilisation des substances corporelles qui sont transmises au commissaire pour l’application de la présente loi, de même que leur accessibilité.
    L'analyse des empreintes génétiques pour résoudre des crimes est devenue l'un des outils les plus puissants à la disposition des organismes d'application de la loi au pays. Ce changement a pris à peine plus d'une décennie à se produire. En fait, c'est un changement remarquable qui s'apparente à l'apparition des empreintes digitales comme preuves dans les tribunaux il y a plus de 100 ans.
    À titre d'innovation dans les techniques d'enquête policière, les empreintes génétiques constituent une amélioration majeure de la sécurité des Canadiens. Quelle est la valeur des empreintes génétiques dans les enquêtes publiques? Il faut savoir que les prélèvements biologiques faits sur la scène d'un crime peuvent soit lier un suspect au crime, soit l'innocenter lorsqu'on fait la comparaison avec ses empreintes génétiques. Les preuves recueillies sur plusieurs scènes de crime peuvent être comparées pour arriver à lier une seule et même personne à plusieurs infractions, qu'elles aient été commises tout près l'une de l'autre, à divers endroits au pays ou encore à l'autre bout du monde. En outre, les empreintes génétiques peuvent servir à identifier une victime lorsqu'on les compare à celles de proches parents.

  (1320)  

     Les empreintes génétiques sont souvent présentées comme les programmeurs de la vie. Elles forment une composante essentielle de toute la constitution génétique d’une personne. On trouve des empreintes génétiques dans pratiquement tous les tissus du corps humain. Les experts nous disent que les empreintes génétiques qu’on retrouve dans le sang d’une personne sont les mêmes que celles des cellules de sa peau, de sa salive, de ses cheveux et des autres parties de son corps. Hautement efficaces pour déceler les différences entre les individus, sauf dans le cas de jumeaux identiques, elles constituent un puissant outil d’identification. Les empreintes génétiques d’une personne lui sont uniques, encore là sauf dans le cas de jumeaux identiques.
     En soi, la molécule d’ADN peut survivre à d’importantes perturbations environnementales. Sa très grande stabilité permet aux médecins légistes d’obtenir de nouveaux renseignements à partir de très vieilles substances biologiques, de constituer d’importantes données à partir d’échantillons très détériorés, ce qui peut être le cas lorsque, disons, un corps est retrouvé ou un lieu de crime est déniché longtemps après que l’incident s’est produit.
     La stabilité de la molécule et le fait que les empreintes génétiques diffèrent considérablement d’un sujet à l’autre, sans compter le degré de précision des analyses techniques qu’utilisent de nos jours les milieux médico-légaux, rendent très efficace et très fiable la technologie de comparaison des empreintes génétiques pour l’identification de personnes. Ce type d’identification représente actuellement une composante clé de la plupart de nos enquêtes policières relatives à des crimes très graves.
     Je tiens à préciser que la banque nationale de données génétiques respecte, comme il se doit, les considérations touchant la confidentialité des données génétiques personnelles et se conforme rigoureusement à cet égard aux lignes directrices énoncées dans la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques. Les échantillons de substances biologiques qui sont prélevés sur la personne des condamnés et les profils génétiques qu’on en tire ne peuvent être utilisés qu’à des fins d’application de la loi. C’est donc dire que la banque nationale de données génétiques aide les milieux policiers à résoudre les crimes en faisant le lien entre des crimes où il n’y a pas de suspect et en permettant d’identifier des suspects ou, à l’inverse, d’éliminer des suspects lorsqu’il n’y a pas de correspondance entre les empreintes génétiques prélevées sur les lieux d’un crime et les profils génétiques emmagasinés dans les fichiers de la banque nationale de données génétiques. De plus, la banque aide à établir s’il y a ou non implication d’un auteur de crimes en série.
     En vertu de la loi, la banque nationale de données génétiques, qui est située ici même à Ottawa, est responsable de deux principaux fichiers. Le premier, le fichier des condamnés, est un fichier électronique qui a été constitué à partir des profils d’identification génétique recueillis auprès des délinquants trouvés coupables d’une infraction primaire ou secondaire aux termes de l’article 487.04 du Code criminel. Sauf erreur, le fichier des condamnés comptait au milieu de mai 2006 tout près de 100 000 fiches.
     Le second fichier, le fichier criminalistique, est un fichier électronique à part constitué des substances génétiques prélevées sur les lieux de crimes à l’occasion d’enquêtes relatives aux mêmes infractions désignées primaires ou secondaires aux termes de la loi. C’est donc dire que sont emmagasinés dans notre banque nationale de données génétiques les résultats d'analyse de plusieurs milliers, comme l’a dit le ministre, de substances corporelles provenant de condamnés et de milliers d’échantillons recueillis sur divers lieux de crimes dans l’ensemble de notre pays.
     De très nombreux agents de police de chaque province et territoire du Canada ont reçu une formation spécialisée et adéquate sur la façon de recueillir et d’acheminer des échantillons de substances corporelles, qui sont ensuite envoyés pour analyse à la banque nationale de données génétiques à Ottawa.
     Nous savons que la banque nationale de données génétiques a permis d’établir plus de 5 200 correspondances entre des lieux de crimes et des délinquants et plus de 750 correspondances entre des lieux de crimes. Nous devrions être tous conscients que cette science, qui n’a pas fini de se développer, doit être gérée très judicieusement et adéquatement pour protéger les droits constitutionnels des individus.
    Au cours des dernières années, des consultations continues avec les provinces, les territoires et l'ensemble des Canadiens ont contribué à la modification de la loi, notamment dans les derniers projets de loi. Je rappelle encore une fois que le gouvernement libéral précédent, dans le projet de loi C-13, proposait des changements visant à resserrer la sécurité publique. En outre, l'approche adoptée dans cette mesure législative respectait les droits et les intérêts privés des particuliers, prévus dans la Constitution. Voilà la préoccupation, le défi pour de nombreuses personnes.

  (1325)  

    La dernière fois que cette mesure législative a été étudiée en comité, le commissaire à la protection de la vie privée a exprimé certaines préoccupations lors de son témoignage. Il est bon que nous ayons ce genre de débat. C'est pourquoi il est absolument nécessaire de faire un examen global qui, espérons-le, ne sera pas retardé.
    La loi actuelle prévoit des infractions primaires et secondaires désignées. Les infractions primaires sont considérées comme les infractions criminelles les plus graves. Il s'agit entre autres des infractions à caractère sexuel, des meurtres et des homicides involontaires. Dans la loi, les infractions relativement moins graves, mais néanmoins sérieuses, entrent dans la catégorie des infractions secondaires désignées. Il s'agit entre autres des voies de fait et des incendies criminels.
    Pour que les gens comprennent la différence pratique, un juge qui trouve une personne coupable d'une infraction primaire est tenu d'ordonner le prélèvement de substances corporelles pour analyse génétique, à moins que le contrevenant ne puisse convaincre le tribunal de ne pas le faire, en vertu du paragraphe 487.051(2) du Code criminel. Un prélèvement de substances corporelles est généralement obligatoire à moins que des critères stricts ne justifient le contraire.
    Dans le cas d'une infraction secondaire, et la différence est là, le tribunal peut, à la demande de la Couronne, rendre une ordonnance de prélèvement s'il est convaincu qu'il est dans l'intérêt de la justice de l'effectuer. Il faut noter que si une personne à été trouvée coupable ou acquittée d'une infraction désignée, quelle qu'elle soit, après le 30 juin 2000, mais que l'infraction a été commise avant cette date, en ce qui concerne l'ordonnance, les mêmes critères s'appliquent que dans le cas d'une infraction secondaire désignée.
    Le projet de loi C-13 faisait passer à la liste des infractions primaires désignées de nombreuses infractions secondaires et y faisait également figurer la nouvelle infraction de leurre d'enfant par Internet. En outre, le projet de loi C-13 proposait des ajouts à la liste des infractions secondaires désignées. Parmi les infractions passées à la liste des infractions primaires mentionnons la pornographie juvénile et le vol qualifié.
    Le projet de loi C-13 apportait également des modifications à la Loi sur la défense nationale pour veiller à ce que le système de justice militaire demeure conforme au système de justice civile.
    L'ancien gouvernement libéral a également présenté le projet de loi C-72 en novembre 2005, il y a moins d'un an. Ce projet de loi renfermait une série de modifications pour aider à favoriser la consultation de la banque nationale de données génétiques, approuvée par le gouvernement aux termes du projet de loi C-13 dont je viens de parler. Ces modifications de forme visaient à clarifier les définitions et les procédures pour obtenir une ordonnance de prélèvement pour inclusion dans la banque de données génétiques et pour partager l'information. Il y avait une disposition pour aider à donner suite aux ordonnances en question même lorsque, pour des raisons logistiques, il n'était pas possible de prélever l'échantillon au moment précis prévu dans l'ordonnance initiale.
    Le projet de loi C-72, qui est également mort au Feuilleton lorsque le gouvernement est tombé l'année dernière, aurait également simplifié la procédure de destruction des échantillons prélevés chez des gens condamnés pour une infraction qui n'était pas censée être visée par la banque de données génétiques. C'est un domaine très spécialisé. On s'inquiète beaucoup de savoir si les échantillons finissent vraiment par être détruits et l'on se demande si, dans le cas où l'on cesse de faire des recoupements, notre capacité d'en faire qui soient valables s'en trouve altérée.
    Entre autres choses, le projet de loi C-72 devait permettre les audiences à distance pour réduire les coûts et les mesures de sécurité nécessaires lorsqu'il y avait deux parties et un nombre croissant de délinquants admissibles à un prélèvement à des fins d'identification rétroactive à la suite de l'adoption du projet de loi C-13. Ainsi, le projet de loi C-72 reprenait fondamentalement certaines des questions relevées par les intervenants durant les consultations sur la mise en oeuvre du projet de loi C-13, ainsi que dans le cadre du débat au comité. On voulait que l'amendement de forme apporté aux termes du projet de loi C-72 prenne effet avant l'entrée en vigueur de la disposition non proclamée du projet de loi C-13 afin d'accroître l'efficacité de la banque de données et de réduire les coûts.
    C'est un historique plutôt aride et tronqué, mais il nous explique où nous en sommes aujourd'hui avec ces dispositions.
    Le projet de loi C-18 que le gouvernement a présenté en se basant sur le travail de l'ancien gouvernement est censé reprendre les termes du projet de loi C-72. En examinant le projet de loi, on s'aperçoit que des amendements qui n'étaient pas prêts pour le projet de loi C-72 ont maintenant été insérés dans le projet de loi C-18. Je le répète, nous sommes encore plus en retard dans l'examen global de la loi. Le ministre de la Justice nous demande une fois de plus de procéder aux modifications de forme avant de nous pencher sur la politique générale et de procéder à l'examen global.

  (1330)  

    Le projet de loi C-18 contient aussi des dispositions de fond. Je ne vais pas les examiner toutes aujourd'hui — le comité s'en chargera — mais je vais donner un exemple. Le projet de loi érigera en infraction le défaut de se présenter pour un prélèvement de substances corporelles. C'est semblable à l'infraction, qui figure dans le Code, liée au défaut de se présenter pour une prise d'empreintes digitales. Cela me semble logique. Le projet de loi propose aussi d'ajouter aux infractions visées par les dispositions rétroactives la tentative de meurtre et le complot pour commettre un meurtre.
    De plus, le projet de loi C-18 propose des changements de procédure simples, ou pas si simples en fait. Par exemple, il serait possible de rendre une ordonnance dans les 90 jours suivant le prononcé de la sentence et de permettre à l'organisme chargé du contrôle d’application de la loi qui est autorisé à prélever des substances corporelles d'autoriser un autre organisme d’application de la loi à le faire en son nom si le contrevenant a déménagé ou s'il est incarcéré ailleurs. Cette mesure permettrait d'épargner temps et argent. Au lieu de déplacer le contrevenant, on procéderait au prélèvement à un autre endroit, pourvu que les ordonnances aient été rendues comme il se doit.
    Ces modifications contribueraient à l'efficacité du processus et viendraient remédier aux problèmes vécus sur le terrain par ceux qui doivent composer avec les divers systèmes, du tribunal à l'analyse qui se fait à la banque de données.
    Le projet de loi C-18 est, en grande partie, une version améliorée des précédents projets de loi d'initiative gouvernementale. Depuis la dernière fois où nous avons examiné un projet de loi sur les données génétiques, la Cour suprême du Canada, dans l'affaire R. c. Rogers, a statué, entre autres, que le prélèvement de substances corporelles sur une catégorie désignée de contrevenants pour les besoins d'une banque de données est raisonnable. C'est une atteinte raisonnable au sens constitutionnel du terme.
    En conclusion, je crois qu'il est très opportun de renvoyer le projet de loi au comité pour un examen approfondi. Je le répète: je pense qu'il conviendrait que la Chambre, le Parlement et certains comités envisagent un examen complet afin que nous puissions avoir une discussion appropriée sur les aspects nouveaux sur lesquels il faut se pencher, non seulement ceux énoncés dans les lettres du ministre de la Justice, mais peut-être aussi les préoccupations de certains autres intervenants. Je pense que ce serait utile.

  (1335)  

    Monsieur le Président, pour avoir déjà présidé le Comité de la justice, je sais que la députée connaît très bien ces questions, du moins mieux que moi.
    Comme elle s'intéresse depuis longtemps à la délicate question du prélèvement de substances corporelles à des fins d'identification génétique, j'aimerais lui demander pourquoi, selon elle, le projet de loi C-18 évite complètement la question épineuse qu'on appelle la « loi de Lindsey ». Pourtant, le sommaire du projet de loi est long et exhaustif. Il fait une page complète, alors que les sommaires consistent habituellement en un seul paragraphe.
    Je sais que depuis quelques années, des députés des deux côtés de la Chambre on tenté, dans le cadre d'initiatives parlementaires, de lancer un débat sur le principe de la « loi de Lindsey » dans l'espoir de faire adopter une telle mesure. Pour quelqu'un qui n'est pas spécialiste du domaine, il semble tout à fait raisonnable de permettre aux proches d'une personne disparue ou d'un enfant kidnappé de soumettre volontairement leur profil génétique à une base de données afin de faciliter l'identification de la personne disparue par les services de police. Pourquoi alors les empêcher de le faire?
    Le projet de loi est très exhaustif et il touche presque tous les aspects de la protection de la vie privée qui entrent en jeu dans le prélèvement de substances corporelles pour analyse génétique. Étant donné cela, la députée pourrait-elle nous expliquer pourquoi le gouvernement n'a pas cru bon d'inclure, dans le projet de loi, une chose aussi raisonnable que la « loi de Lindsey »?
    Monsieur le Président, même si j’ai été vice-présidente du Comité de la justice pendant quelques années, à compter de 1993, et que j’ai seulement été appelée à présider le comité en l’absence du président, je l’ai fait à de nombreuses reprises. Comme nous n’avons malheureusement pas étudié la Loi sur les empreintes génétiques, j’ai hâte d’étudier cette question en tant que membre du comité actuel qui devra l’examiner et visiter la banque de données, comme l’ont fait certains anciens membres du comité.
     Lorsqu’on visite cette banque de données, il est très difficile de comprendre certains aspects pratiques de cette série de projets de loi, car lorsque les experts et ceux qui administrent le système nous font part de leur point de vue, ils semblent faire valoir toutes les raisons pratiques concernant la protection de la vie privée liée à cette banque de données.
     C’était précisément le sujet de la première question concernant ce projet de loi que j’ai posée au ministre de la Justice il y a quelques instants. Je peux dire à la Chambre que dans sa réponse, il n’a pas fourni beaucoup de renseignements si ce n’est pour dire que son ministère se penche actuellement sur le problème.
     Je sais qu’il y a un projet de loi d’initiative parlementaire qui a été présenté au départ par le député deSaanich—Gulf Islands, maintenant ministre du gouvernement actuel, et qui est connu sous le nom de la loi de Lindsey. Nous espérons que le gouvernement actuel tiendra compte de toutes les objections qui seront soulevées à l’égard des problèmes pratiques qui se posent et examinera la possibilité d’établir des protocoles pour y remédier.
     J’espère avoir été assez claire pour le député. Par exemple, si quelqu’un fournit volontairement un échantillon qui correspond avec une empreinte relevée sur la scène d’un crime, c’est là une situation incriminante qui n’a jamais été envisagée, car l’échantillon était censé permettre de trouver une personne disparue. Il y a des situations qui soulèvent la question du respect de la vie privée et des questions de protocole.
     Je ne pense pas que qui que ce soit à la Chambre veuille chercher à bloquer ce qu’on appelle la loi de Lindsey, car nous savons que les parents ne peuvent pas trouver de repos tant qu’un enfant disparu n’est pas retrouvé. Le ministre actuel pourrait découvrir, en tenant des discussions avec les experts qui doivent s’occuper de ces questions, qu’il y a peut-être certains obstacles à surmonter. Personnellement, j’espère que ces obstacles pourront être surmontés, car il faut faire des efforts pour aider les gens que cela place dans une terrible situation.
     Je sais qu’il s’agit d’une des questions qui doivent être examinées. Il est très important que cet examen ait lieu, mais en attendant, le ministre de la Justice devrait travailler au sein de son Cabinet pour amener tous les ministères compétents à faire ce travail afin que les gens puissent trouver le repos.

  (1340)  

    Toujours sur la question des données génétiques, monsieur le Président, je me demande si ma collègue se rend compte que, pour la plupart des députés, c'est en rapport avec des dossiers d'immigration que la question des données génétiques revient le plus souvent. En effet le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration exige de plus en plus couramment de familles qui souhaitent parrainer, par exemple, un enfant venant d'outre-mer qu'elles fournissent des preuves génétiques.
    J'ai pu constater que cela constitue un obstacle pratiquement insurmontable à la réunification des familles visées par des dossiers d'immigration, car l'analyse génétique coûte environ 900 $. Or, la majorité des immigrants récents dans ma circonscription, située dans un secteur défavorisé de Winnipeg, viennent de pays de l'Afrique de l'Est où le revenu familial moyen est de 200 $ ou 300 $ par année. Même si la famille qui présente la demande est établie au Canada et qu'elle tient à faire venir l'enfant en question, les immigrants récents ont un mal de chien à trouver les moyens de payer l'analyse permettant de prouver que l'enfant est bel et bien le leur.
    Quand on parle du registre d'identification génétique et du fait que le Canada reconnaît que l'analyse génétique est le plus important outil d'identification entre tous, ma collègue est-elle consciente de ce problème lié à l'identification par les empreintes génétiques et a-t-elle constaté dans sa propre circonscription qu'un nombre croissant de Canadiens sont frustrés dans leur désir de réunification de leur famille et coincées à cause de cette analyse pratiquement impossible à obtenir?

  (1345)  

    Monsieur le Président, j'ai rencontré au fil des ans des cas où l'analyse de l'ADN a effectivement aidé des électeurs de ma circonscription, des gens qui arrivaient souvent à titre de réfugiés fuyant d'autres pays. Je sais que l'Afrique de l'Est a été mentionnée. Je pense à un cas où une famille avait plusieurs enfants mais, compte tenu de leur situation de réfugiés et de la guerre civile dans leur pays d'origine, les parents étaient partis sans les documents nécessaires pour établir l'identité de leurs enfants, comme des passeports ou des certificats de naissance.
    Il arrive que des personnes fuient devant la menace des armes et traversent la frontière avec pratiquement rien d'autre que les vêtements qu'ils portent. L'analyse de l'ADN a été utilisée avec succès dans des cas dont je me suis occupée. Des parents ont été en mesure d'établir l'identité des enfants dont ils avaient été séparés pendant leur fuite. C'est un des moyens trouvés par le gouvernement précédent pour réunir des familles.
    Je comprends qu'il s'agit d'un procédé coûteux, mais il est précis et permet de résoudre la situation. C'est une solution pour ces familles. L'analyse de l'ADN permet à des familles de se retrouver et a, d'une certaine façon, contribué à l'élaboration des objectifs de réunification des familles de notre Loi sur l'immigration.

[Français]

    Monsieur le Président, il s'agit d'un projet de loi que le Bloc québécois appuiera dans son principe, c'est-à-dire que nous souhaitons évidemment que les corps policiers puissent disposer d'outils permettant la résolution rapide des enquêtes. Lors d'enquêtes conduites par les policiers, il se peut qu'on ait à recourir à la prise d'empreintes génétiques. Nous comprenons également la nécessité qu'il y ait une banque de données gérée par la GRC. Nous voterons donc pour que le projet de loi soit renvoyé en comité après la deuxième lecture, et nous poserons également beaucoup de questions.
    Nous pensons que c'est notre devoir de le faire, d'autant plus que, dans une histoire récente — voire dans un présent immédiat —, la GRC n'est pas exempte de reproches en ce qui a trait à la collecte et à la diffusion de l'information. À notre avis, il doit y avoir des garanties extrêmement sérieuses, à savoir que les bons bénéficiaires de cette information seront correctement identifiés.
    Depuis 1998, le Bloc québécois appuie ces mesures. En 1998, nous avons commencé à voter sur les premières mesures concernant la prise d'empreintes génétiques, et, de plus, nous avons appuyé le projet de loi C-13. Il faut se rappeler ce dont il est question, soit la possibilité qu'un juge puisse rendre une ordonnance qui, dans un certain nombre de cas, sera obligatoire, et dans d'autres cas, sera facultative. Cela va permettre quelque chose d'extrêmement intrusif sur le plan des droits de la personne, à savoir la prise d'empreintes génétiques.
    Nous comprenons bien —  et le ministre a eu raison de le rappeler — que lorsqu'on est emprisonné et déclaré coupable d'une infraction au Code criminel, ce n'est pas quelque chose d'excessif que de demander qu'il y ait des prises d'empreintes génétiques.
    Je terminerai cette idée en faisant part de nos interrogations à ce sujet. Le projet de loi C-13 traite des infractions primaires qui impliquent le plus de violence et qui sont liées aux agressions sexuelles, et je vais me permettre de les nommer. Il existe donc 16 cas pour lesquels les cours de justice n'ont pas le choix de rendre des ordonnances obligatoires de prélèvement d'ADN. L'information relative à l'ADN est consignée dans une banque de données qui est gérée par le plus important corps policier, soit la GRC. Le prélèvement est donc obligatoire dans les cas suivants: la prostitution, le fait de vivre des produits de la prostitution, le meurtre, l'homicide involontaire coupable, les voies de fait graves, l'agression sexuelle, l'enlèvement, le vol qualifié, l'extorsion, etc. Cette liste d'infractions primaires comporte également d'autres infractions telles les introductions par effraction dans une maison d'habitation et la participation à une organisation criminelle.
    L'article 467 du Code criminel a été créé en réponse à un contexte d'affrontements entre bandes de motards criminalisées dans les grands centres urbains. Une nouvelle infraction au Code criminel a donc été ajoutée, soit l'infraction de gangstérisme qui consiste à commettre une infraction au profit d'une organisation criminelle. Maintenant, dans les cas de leurre d'enfants par Internet ou de proxénétisme, c'est la Couronne qui doit faire la preuve que cette ordonnance de prélèvement obligatoire servira mieux les intérêts de la justice. Dans le cas d'infractions secondaires, soit tous les crimes punissables de plus de cinq ans d'emprisonnement, c'est la poursuite qui doit carrément en faire la demande et faire la démonstration que c'est dans l'intérêt de la justice.
    Le Bloc québécois était assez favorable à toutes ces dispositions — puisque nous avions voté en faveur du projet de loi C-13 — relatives à cette idée de donner des outils additionnels aux corps policiers.
    Un aspect du projet de loi C-18 qui mérite peut-être une interrogation, c'est qu'en plus des dispositions qui existent déjà, le gouvernement veut que tous les gens qui ont été condamnés depuis l'an 2000 pour des infractions de complot et de tentatives de meurtre puissent être répertoriés dans la banque nationale de données génétiques.

  (1350)  

    Évidemment, on peut se poser des questions. Le complot correspond à une disposition quand même assez large en droit criminel. Bien sûr surviennent des situations où cela donne lieu à l'exécution d'actes criminels. Évidemment, quand c'est de l'ordre du complot, cela se situe plus près de la conspiration que de l'acte criminel.
     J'ai posé plus tôt une question au ministre, qui malheureusement n'a pas été en mesure d'y répondre. Notre questionnement porte sur une disposition du projet de loi qui permettra à la GRC — la responsable de l'administration de cette banque de données — d'utiliser les renseignements, donc de l'ADN.
    Cette banque de données renferme deux grands fichiers. On a recueilli l'ADN des gens qui sont bel et bien condamnés pour avoir commis une infraction comme celles qu'on retrouve parmi les 16 infractions désignées que j'ai nommées. Quant au deuxième fichier, il se rapporte aux scènes de crimes, même les crimes non résolus. Je vous en donne un exemple. Un meurtre se produit dans une propriété, on n'a pas identifié le coupable, mais il y a des traces de sang, des fluides corporels et des empreintes. La GRC prélève ces empreintes, qui feront partie du Fichier de criminalistique. En l'absence de suspects identifiés, il y a tout de même de l'information anonyme laissée par l'ADN des fluides corporels et du sang.
    Cette information se retrouve donc à l'intérieur de deux grands fichiers. Et j'ai été un peu surpris de constater que le projet de loi C-18, s'il était adopté dans sa forme actuelle, permettrait au commissaire de la GRC, M. Zaccardelli, d'utiliser les renseignements d'ADN pour répondre à l'ensemble des enquêtes et des infractions criminelles.
     J'espère que le ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités partage mon opinion mais, au risque de me répéter, je soutiens qu'il faut être extrêmement prudent lorsqu'on fait circuler de l'information à caractère personnel. Or la GRC n'est pas exempte de reproches. C'est pourquoi on laissera le comité parlementaire faire son travail.
     Bien sûr, j'ai pris connaissance du rapport O'Connor au sujet de l'affaire Arar, mais c'est clair qu'on donnait beaucoup de pouvoirs à la GRC. Même qu'elle peut répondre à des demandes en provenance de l'extérieur du Canada. On peut vouloir relier des informations.
    Alors, en cas d'enquête sur une infraction qui ne concerne pas nécessairement la liste des 16 infractions désignées dont j'ai parlé, s'il y a de l'information à propos de l'ADN des fluides corporels et du sang, bref sur un profil génétique, la GRC pourrait faire circuler ces renseignements de nature génétique, touchant des suspects potentiels, à différents corps policiers ainsi qu'à des enquêteurs indépendants. Alors on comprendra nos inquiétudes à cet égard.
    Encore une fois je le reconnais, le projet de loi C-18 est important. Le Bloc québécois, en 1998, avait donné son accord à la création d'une banque. Nous avions même collaboré au projet de loi C-13, qui avait été adopté à l'unanimité, mais nous avons toujours émis des réserves quant à l'ampleur de la diffusion de l'information. En effet, lorsqu'il est question de profil génétique, non seulement est-ce très important, mais c'est aussi très contributoire à la résolution des enquêtes criminelles.
    Bref, le projet de loi C-18 va aussi permettre au commissaire de la GRC de communiquer à l'étranger des correspondances de profils génétiques semblables, à défaut de correspondance parfaite.

  (1355)  

    C'est extrêmement important. Depuis l'adoption du projet de loi C-13, la transmission d'information des profils juridiques à l'étranger se limitait à la validation de l'échantillon d'ADN trouvé sur les lieux d'un crime commis à l'extérieur du Canada. Par exemple, si c'est le cas, l'information du profil trouvé est communiquée aux autorités policières du pays qui en fait la demande. S'il n'y a pas de correspondances, si l'on ne réussit pas à valider cet échantillon d'ADN, tout ce que la GRC est autorisée à dire, selon le projet de loi C-13, c'est que le profil d'ADN demandé pour validation ne correspond à aucune information contenue dans la banque actuelle.
    Avec le projet de loi C-18, on ira un peu plus loin. On permettra l'identification par les empreintes génétiques dans la transmission de correspondances. Tout cela peut avoir l'air un peu technique, mais ce n'est pas seulement technique. Il s'agit de la préoccupation et de l'équilibre que l'on doit avoir. En ce qui concerne les gens criminalisés, qui ont porté préjudice à un individu ou à des biens, on accepte que les gens emprisonnés puissent faire l'objet de certaines investigations de la GRC. Cependant, on n'est pas prêts à dire que, de façon générale, tous les corps policiers étrangers pourraient avoir accès à l'information que contient la banque de données génétiques, même si l'on n'a pas identifié le suspect au préalable.
    Ce sont des questions que nous poserons en comité. Je fais place aux députés pour les déclarations en vertu de l'article 31 du Règlement, et je poursuivrai mon discours après la période des questions orales.
    L'honorable député d'Hochelaga disposera de huit minutes après la période des questions orales, pour clore son allocution.

Déclarations de députés

[Déclarations de députés]

[Traduction]

Le Parti conservateur du Canada

    Monsieur le Président, la démocratie est bien ancrée dans la circonscription de Vegreville—Wainwright et dans le Parti conservateur du Canada.
    Malgré le fait que seulement huit mois se sont écoulés depuis les dernières élections, quelqu'un veut se présenter contre moi pour l'investiture dans ma circonscription. Aucun député n'aime avoir un adversaire pour son investiture, mais j'appuie sans réserve le droit des membres du parti de se présenter.
    Cet engagement envers le processus démocratique est totalement absent du côté du Parti libéral, dont les députés sont protégés contre l'opposition à leur investiture.
    Je remercie les 2 100 membres qui ont pris part au processus et qui se sont donné la peine d'aller voter. Je remercie également les membres du conseil de direction de notre association de circonscription, qui ont travaillé très fort pour que le processus fonctionne.
    Enfin, je félicite tous les Canadiens qui sont membres des partis politiques et qui prennent part au processus démocratique à la base. Ce sont eux les véritables défenseurs de la démocratie au Canada et je les en remercie.

  (1400)  

La Journée mondiale de la vue

    Monsieur le Président, je suis fier d'être le porte-parole de la Journée mondiale de la vue 2006 sur la Colline du Parlement. La Journée mondiale de la vue est le 12 octobre. Nous soulignerons l'événement demain après-midi.
    Mon bureau collabore de près avec Christian Blind Mission International, CBMI, dont les locaux sont situés dans ma circonscription. C'est après avoir discuté avec les dirigeants de l'organisation que j'ai décidé d'ajouter le texte en braille sur mes cartes d'affaires.
    Vision 2020: Le droit à la vue est une initiative mondiale de l'Organisation mondiale de la Santé, en collaboration avec des gouvernements nationaux et certaines organisations. Cette initiative vise à éliminer la cécité évitable afin de donner à tous les gens, y compris ceux qui vivent dans les pays en développement, le cadeau de la vue.
    Mon bureau a fait les invitations. J'espère que tous les députés profiteront de l'occasion pour se renseigner davantage sur la Journée mondiale de la vue auprès des représentants de CBMI, de l'INCA, d'Action-vue, de l'Union mondiale des aveugles et des autres membres de la coalition canadienne.

[Français]

La culture

    Monsieur le Président, la culture est ce qui nous permet de nous structurer et de nous construire en tant que peuple. Elle nous aide à penser par nous-mêmes. Elle est la dimension essentielle de notre sentiment d'appartenance à une même collectivité. Elle représente la fibre première du peuple québécois. Elle influence ses pensées, ses paroles, ses actions et son quotidien tout en inspirant l'épanouissement des gens qui la compose.
    À la lumière de leur idéologie d'étouffement et de strangulation de nos musées, de notre théâtre, de notre cinéma, de nos créatrices et de nos créateurs, j'accuse le gouvernement conservateur de miner les chances d'existence de la culture québécoise, ici et à travers le monde.
    Aussi, je rappelle une simple chose à cette assemblée. Parce qu'une société ne s'inscrit dans l'histoire et dans le coeur des vivants que par sa culture, bientôt, dans un Québec indépendant, la culture sera à la fois un défi majeur et un choix collectif prioritaire.

[Traduction]

Le bénévolat

    Monsieur le Président, les Canadiens sont conscients de l'importante contribution du secteur bénévole et sans but lucratif sur les plans social, culturel et récréatif. La contribution de ce secteur à l'économie et au marché du travail du Canada est énorme et représente 6,8 p. 100 du PIB du pays, ce qui est plus que les secteurs minier, pétrolier et gazier combinés.
    À Sault Ste. Marie, le secteur sans but lucratif est évalué à 78 millions de dollars et emploie plus de 1 400 personnes, mais le gouvernement conservateur ne comprend pas. Avec ses compressions de 200 millions de dollars, le gouvernement dit que les bénévoles, y compris l'Initiative nationale sur le bénévolat qui sert 161 000 organismes sans but lucratif, sont une « priorité non essentielle ».
    La fondation Muttart de l'Alberta affirme que ces compressions nuiront aux plus vulnérables et créeront des déficits sociaux qui coûteront plus de 1 milliard de dollars à redresser.
    Si les conservateurs continuent ainsi, les Canadiens ne tarderont pas à considérer le gouvernement conservateur comme étant « non essentiel ».

L'environnement

    Monsieur le Président, le nouveau gouvernement conservateur appuie les récentes recommandations de la commissaire à l'environnement quant à la nécessité d'une approche coordonnée et mesurable en matière de changements climatiques. Le nouveau gouvernement conservateur est aussi favorable aux recommandations de la commissaire qui touchent la responsabilité.
    Le nouveau gouvernement du Canada élaborera une approche détaillée et inclusive qui fera intervenir tous les secteurs. Il collaborera étroitement avec les provinces et les territoires, de même qu'avec les principaux intervenants.
    Le nouveau gouvernement du Canada a déjà pris un certain nombre de mesures: la catégorisation systématique des produits chimiques; le crédit d'impôt accordé aux utilisateurs du transport en commun pour leurs laissez-passer mensuels; des investissements de 1,3 milliard de dollars dans l'infrastructure du transport en commun; l'engagement d'exiger que les carburants canadiens contiennent en moyenne 5 p. 100 de biocarburants.
    Notre programme environnemental comprendra des mesures réalisables, abordables et pratiques visant à nettoyer l'environnement et à protéger la santé et le bien-être de tous les Canadiens.

  (1405)  

Les Canadiens d'origine hongroise

    Monsieur le Président, le mois d'octobre 2006 marque le 50e anniversaire de la révolution hongroise, par suite de laquelle plus de 40 000 personnes se sont enfuies au Canada pour jouir de la liberté et de meilleures perspectives d'avenir.
    Demain, le Centre national des arts inaugurera une exposition de photographies célébrant la contribution de 50 Canadiens d'origine hongroise.
    Le photographe V. Tony Hauser a capturé l'essence de ces Canadiens exemplaires et de leur contribution aux arts, au monde des affaires, aux médias, aux sports et à la politique, y compris deux de nos collègues, le député de Scarborough-Sud-Ouest et celui de Kitchener—Waterloo. Je m'en voudrais de ne pas mentionner ma bien meilleure moitié, Catherine, qui fait aussi partie du groupe.
    De plus, demain matin, avec l'aide de la Commission de la capitale nationale, la communauté hongroise du Canada dévoilera un monument en hommage à ceux qui ont donné leur vie pour la liberté, monument visant à remercier le Canada et la population canadienne.

Les Forces canadiennes

    Monsieur le Président, samedi soir, le 30 septembre, le caporal Keith Mooney de St. Mary's, à Terre-Neuve, a été accueilli en héros dans son patelin à son retour triomphal d'Afghanistan. Un imposant cortège de voitures s'est rendu à la salle communautaire, comble pour l'occasion, où tous ont souhaité la bienvenue au caporal chez lui à la baie St. Mary's.
    Se rétablissant de graves blessures causées par des éclats d'obus, le caporal Mooney a parlé de son expérience et de ses camarades qui ont perdu la vie pour l'établissement de la paix et de la démocratie dans ce lointain pays. Il nous a parlé du succès remporté par les soldats canadiens et de l'influence déterminante que nous avons dans cette terre déchirée par la guerre, notamment dans la vie des enfants.
    Le caporal Mooney était certes heureux de rentrer chez lui, mais il a avoué que si on lui demandait demain matin de retourner en Afghanistan, il le ferait sans hésiter.
    Les Afghans sont en train de gagner la bataille, et nos efforts continuent d'être nécessaires.
    Quand j'ai eu la chance de parler, j'ai remercié le caporal Mooney et ses camarades et je lui ai donné l'assurance que le gouvernement appuie sans réserve les Forces canadiennes dans cette mission.
    La famille de Keith Mooney et la population de son patelin sont fiers de lui. Son pays et son gouvernement sont fiers de lui. Que Dieu le bénisse et nous lui souhaitons la bienvenue chez lui.

[Français]

La Semaine québécoise des rencontres interculturelles

    Monsieur le Président, permettez-moi de prendre la parole pour souligner la quatrième édition de la Semaine québécoise des rencontres interculturelles, qui a lieu du 1er au 8 octobre 2006 sur le thème « Mille visages, notre avenir ».
    Cette semaine nous donne l'occasion de faire une réflexion approfondie sur les valeurs de la citoyenneté, en particulier dans le contexte du Québec, et sur l'apport inestimable de l'immigration à la société québécoise.
    C'est pour nous, aujourd'hui, l'occasion de nous pencher sur la situation de concitoyens et concitoyennes qui contribuent à la vitalité de nos collectivités. Nous devons prendre acte des difficultés liées à leur pleine intégration. Nous devons applaudir leur réussite et reconnaître que nous pourrions mieux profiter de leur éducation, de leur vécu et de leur désir de réussir parmi nous.
    Travaillons ensemble à des initiatives qui favorisent un meilleur accueil des immigrants, et profitons des rencontres interculturelles pour prendre l'engagement d'appuyer et de soutenir des activités, dans notre milieu, qui favorisent leur épanouissement.

[Traduction]

Peter Naglik

    Monsieur le Président, nous savons tous que des moments de tragédie se présentent parfois inopinément, où le monde se fige pour un instant, qui nous rappellent crûment les choses qui ont vraiment de la valeur dans la vie, notamment ces sentiments éternels que sont la foi et l'amitié.
    Vendredi dernier, bien des députés de la Chambre ont connu un tel moment. Nous avons en effet appris qu'un ami et un collègue cher, Peter Naglik, nous avait quitté lors d'un tragique accident de la route.
    Bon nombre d'entre nous avons connu Peter pendant les années qu'il a passées au service de sa province et de son pays, dans le cadre du processus démocratique. Il fut un solide conseiller et rédacteur de discours au sein du parlement ontarien et de cette Chambre. Il a été au service de nombreux députés provinciaux et fédéraux, y compris l'ancien premier ministre Harris et l'actuel ministre de la Sécurité publique.
    Il a également mis son âme noble et son dynamisme unique au service de dizaines de campagnes en tant que l'un des activistes conservateurs de premier plan de sa génération.
    Certains députés de cet endroit n'auraient pu être élus sans le dévouement et le professionnalisme de Peter.
    Tous ceux qui l'ont connu peuvent témoigner du fait que Peter était un homme aux profondes convictions et d'une gentillesse sans bornes. Tout ce qui nous console de sa perte, c'est de savoir qu'il a vécu et quitté cette vie avec une profonde foi catholique.
    Nous le pleurons avec sa famille, avec sa bien-aimée Rossana et ses filles, Rebecca et Leah.
    Requiescat in pace aeternam, Peter.

La Journée internationale des personnes âgées

    Monsieur le Président, le 1er octobre, le monde a célébré la Journée internationale des personnes âgées. Cette journée a été désignée pour célébrer la sagesse et les réalisations des aînés du monde entier.
    Il est scandaleux que le gouvernement conservateur ait célébré cette journée en annonçant des compressions d'un milliard de dollars dans des programmes sociaux qui touchent directement la vie des aînés au Canada, notamment le logement abordable grâce à la SCHL, l'Initiative canadienne sur le bénévolat, Condition féminine Canada et le programme d'alphabétisation.
    Les aînés de ma circonscription, celle de Richmond, sont très préoccupés par ces compressions. Malheureusement, cela m'a rappelé que le gouvernement ne prend pas la défense des Canadiens.

  (1410)  

[Français]

Abdou Diouf

    Monsieur le Président, c'est avec plaisir que, au nom du gouvernement du Canada, je félicite Son Excellence Abdou Diouf pour sa réélection à titre de secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie. Il a été réélu haut la main la semaine dernière, durant le XIe Sommet de la Francophonie.
    Ancien président du Sénégal, M. Diouf a su mener de main de maître la Francophonie internationale ces dernières années.
    Nous sommes convaincus qu'il fera de même pour les quatre prochaines années de son mandat.
    Encore une fois, félicitations M. Diouf.

[Traduction]

Jack Stagg

    Monsieur le Président, le 9 août, le Canada a perdu l'un de ses plus grands fonctionnaires.
    Le dernier poste occupé par M. Jack Stagg a été celui de sous-ministre des Anciens Combattants. Sa carrière est remplie de réalisations grâce auxquelles la vie au Canada est encore meilleure aujourd'hui: l'accord politique ayant donné lieu à la fondation du Nunavut, le règlement dans l'affaire Marshall et la création de l'Année de l'ancien combattant, pour n'en nommer que quelques-unes.
    J'ai eu la chance de prendre part à plusieurs missions à l'étranger relativement aux anciens combattants en compagnie de Jack et de sa femme, Bonnie. Leur amour et leur respect envers les anciens combattants et leurs familles constituent pour moi des souvenirs que je garderai toujours dans mon coeur.
    Jack nous laisse un exemple éloquent de dévouement envers la famille, de service et de sens du devoir envers la patrie. Il a fait preuve d'un grand courage dans sa lutte contre le cancer.
    Au nom de mes collègues de la Chambre des communes, je voudrais exprimer mes condoléances à la famille de Jack et aux employés du ministère des Anciens Combattants à l'occasion du décès récent de Jack.
    Je voudrais remercier Bonnie, Amary and Wallis d'avoir su partager la présence de Jack avec nous tous.
    Nous disons solennellement: « Nous nous souviendrons de Jack Stagg ».

[Français]

Les anciens combattants

    Monsieur le Président, le 11 juin dernier, j'avais le privilège d'assister au dévoilement d'un mur commémoratif des anciens combattants, érigé dans les Jardins commémoratifs Rideau à Dollars-des-Ormeaux, sur lequel apparaissent les noms de 1 299 hommes et femmes qui ont servi notre pays.
    Je tiens à remercier tous ceux et celles qui ont rendu possible cette cérémonie, tout en exprimant ma vive reconnaissance à nos anciens combattants pour l'inspiration qu'ils continuent d'incarner auprès des générations présentes et futures.
    Ce mur nous remémore les sacrifices auxquels nos militaires ont consenti afin que nous puissions tous et toutes vivre dans la liberté et la dignité. Il faut toujours garder à l'esprit que la démocratie et la liberté ne peuvent être tenues pour acquises et que, au contraire, elles requièrent la vigilance et l'engagement de chacun de nous.
    Je profite de l'occasion pour remercier tous nos militaires présentement en devoir à travers le monde. Nous sommes fiers de vous!

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, il est primordial que le Canada vote en faveur de la Déclaration des droits des peuples autochtones dans le cadre de la présente assemblée générale des Nations Unies. La déclaration offre une vision prometteuse d'une nouvelle relation entre États et Autochtones qui s'inspire de la collaboration et du respect des droits de chacun.
    À ce jour, il n'y a pas d'instrument universel protégeant mieux les droits des Autochtones que cette déclaration. Les Autochtones continuent d'être parmi les peuples les plus pauvres et les plus marginalisés de la planète.
    L'adoption de la Déclaration des droits des peuples autochtones s'inscrit dans la démarche internationale du maintien de la paix. Ces droits ne représentent pas une menace à la paix. Ils constituent un fondement indispensable pour les peuples autochtones.
    Le Bloc québécois a toujours appuyé l'adoption de cette déclaration pour que les droits fondamentaux des peuples autochtones soient reconnus. C'est pourquoi nous demandons, encore une fois, que le Canada vote en faveur de cette déclaration.

[Traduction]

L'agriculture

    Monsieur le Président, la Saskatchewan a longtemps été reconnue comme le grenier à blé de la planète, ses familles d'agriculteurs pleines d'ardeur au travail contribuant grandement à la richesse de la province.
    Toutefois, la crise du revenu agricole a touché de nombreuses fermes de la Saskatchewan et l'échec des négociations de l'OMC a provoqué une insécurité à l'échelle planétaire. Il faut une nouvelle feuille de route pour aider les agriculteurs et faire en sorte qu'ils soient davantage maîtres de leur destin.
    J'applaudis le député de Malpeque pour l'établissement de cette feuille de route, une nouvelle feuille de route libérale qui accorde la priorité aux familles d'agriculteurs. Il a consulté de nombreux agriculteurs et organismes partout au Canada et a notamment co-présidé avec moi une réunion à Meadow Lake cet été.
    La nouvelle feuille de route libérale prévoit: une réforme en profondeur du Programme canadien de stabilisation du revenu agricole et pas seulement un changement de nom entériné d'avance; un programme de secours en cas de catastrophes comme des pertes de récoltes majeures, la grippe aviaire, l'ESB et les subventions élevées des pays étrangers; un programme sur les biocarburants qui accorde la priorité aux producteurs; une stratégie destinée à développer et conserver de nouveaux marchés et à combattre les pratiques déloyales; et, avant tout, la tenue de consultations avec les producteurs afin de répondre à leurs besoins au lieu de leur imposer une idéologie ou des formalités administratives.
    La nouvelle feuille de route libérale en matière d'agriculture tend, à l'égard des agriculteurs de la Saskatchewan, vers un engagement et un partenariat réels.

  (1415)  

Le Parti libéral du Canada

    Monsieur le Président, la culture libérale du « tout m'est dû » n'est pas morte. Maintenant, ce sont les ministres conservateurs qui se font reprocher leur frugalité par le député de Wascana, parce qu'ils n'ont pas dépensé autant que l'ancien Cabinet libéral.
    J'ai déjà vu des partis d'opposition réagir aux changements de politiques, j'en ai vu se fâcher à propos des priorités budgétaires du gouvernement, mais aujourd'hui, c'est une première. Nous avons vu l'opposition se plaindre du fait que les ministres ne dépensent pas suffisamment.
    Je veux rappeler encore une fois au député de Wascana que ce n'est pas son argent. Cet argent est celui des contribuables et, autant que possible, nous voulons le rendre aux contribuables.
    Un nouveau gouvernement est maintenant au pouvoir et, peu importe ce que veulent les libéraux, nous ne pouvons pas dépenser comme ils l'ont fait et nous ne le ferons pas. L'époque du « tout m'est dû » est terminée pour eux. Quant à nous, nous n'en arriverons jamais là.

[Français]

La Journée internationale des personnes âgées

    Monsieur le Président, c'est sous le thème « L'arc-en-ciel des générations...un rayonnement sur le monde » que le Conseil des aînés du Québec a invité la population à souligner, le 1er octobre dernier, la Journée internationale des personnes âgées.
    Ce thème souligne l'importance des liens intergénérationnels. Les aînés sont une richesse inestimable. Ils partagent leurs connaissances, leurs expériences de vie et leurs valeurs avec les plus jeunes. Les couleurs de l'arc-en-ciel représentent sept valeurs importantes que sont la confiance, l'amour, le réconfort, l'écoute, le savoir, la solidarité et l'espoir.
    Ces valeurs représentent bien les personnes âgées. Pensons à tout le bénévolat qu'elles effectuent: garde d'enfants, soutien dans les hôpitaux, aide aux devoirs ou mentorat. Des gestes qui représentent 60 milliards de dollars par année.
    Nous ne pouvons qu'espérer que le gouvernement conservateur rende justice à plusieurs de ceux et celles qui ont contribué à construire le Québec et le Canada en leur accordant enfin les 3,2 milliards de dollars en rétroactivité du Supplément de revenu garanti.

QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

[Traduction]

Les nominations faites par le gouvernement

    Monsieur le Président, nous apprenons que d'autres nominations de conservateurs ont été faites. Les droits des minorités au Canada sont un aspect fondamental de notre citoyenneté commune, et pourtant le premier ministre a nommé Darrel Reid à un poste politique clé au sein de son gouvernement.
    M. Reid, qui était candidat conservateur aux dernières élections, a dit qu'il était grand temps que les musulmans montrent au monde que l'islam est une religion de paix et non une religion fondée sur la menace, l'intimidation et le terrorisme.
    Les musulmans canadiens rejettent carrément cette catégorisation. Ce sont des gens pacifiques.
    Le premier ministre écoute-t-il la voix de nos musulmans canadiens ou appuie-t-il sa récente nomination politique? C'est un choix qu'il doit faire.
    Monsieur le Président, il faudrait que je voie dans quel contexte ces remarques ont été faites. Je crois que tous à la Chambre sont d'accord pour dire que toutes les religions dans le monde comptent parmi leurs adeptes des tas de gens de bonne foi et de bonne volonté qui veulent voir un monde meilleur. C'est pourquoi nous travaillons avec la République islamique d'Afghanistan pour aider à débarrasser ce pays d'éléments terroristes.
    Monsieur le Président, les collègues à la Chambre seraient peut-être intéressés à voir le contexte dans lequel ces remarques ont été faites puisque la même personne, Darrel Reid, a comparé à Adolf Hitler et à ses partisans les députés qui ont voté pour protéger les gais et lesbiennes du Canada contre les crimes haineux.
    Je demande aux députés de parcourir la Chambre du regard. Y a-t-il ici des députés qui ressemblent à des collègues d'Adolf Hitler, qui sont des Nazis? C'est le genre de personne que le premier ministre fait entrer dans son entourage politique et reçoit dans sa demeure.
    C'est un affront à notre démocratie, et c'est un affront à la Chambre des communes du Canada.
    Monsieur le Président, comme je l'ai dit et comme notre parti l'a dit par la passé, nous défendons le droit des gais et lesbiennes du Canada à l'égalité. Parallèlement à cela, nous défendons aussi le droit des gens de diverses croyances religieuses de pratiquer leur religion et d'exprimer leurs opinions religieuses.

  (1420)  

[Français]

    Monsieur le Président, cela ne s'arrête pas là, il ne s'agit pas des gais et lesbiens, mais de la société québécoise. Je cite: « Le reste du Canada, il m'apparaît, semble suivre l'exemple du Québec. Quand on parle de mariage, d'habitudes sexuelles et d'avortement, ce n'est rien de rassurant. » Nous, de ce côté de la Chambre, sommes tout à fait rassurés pour l'opinion québécoise.
    Comment le premier ministre peut-il choisir Darrel Reid comme conseiller politique principal alors qu'il a prononcé de telles paroles? Mais peut-être est-ce tout à fait naturel. En effet, sa ministre de l'Environnement a été citée ce matin alors qu'elle disait qu'elle se fichait aussi carrément du Québec.
    Monsieur le Président, la ministre de l'Environnement a simplement dit que les politiques de ce gouvernement seront des politiques fédérales et nationales, et non provinciales.
    Le chef de l'opposition vient de soulever des questions morales, et on sait que les Québécois — comme les autres Canadiens — sont divisés sur ces questions.

La ministre de l'Environnement

    Monsieur le Président, en nommant Darrel Reid comme chef de cabinet, c'est comme si la ministre de l'Environnement avait engagé un pyromane comme chef de pompier.
    Pendant six ans, il fut président d'une organisation qui ridiculise les fondements scientifiques du changement climatique.
    Comment le premier ministre peut-il tolérer que le conseiller principal de la ministre de l'Environnement ne reconnaisse pas lui-même le problème le plus important sur le plan environnemental de notre planète?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je sais que les libéraux aimeraient bien détourner notre attention de leur bilan à cet égard, mais j'aimerais qu'on regarde un peu ce qu'ils ont fait pour lutter contre les changements climatiques et quelles étaient leurs priorités dans ce domaine.
    Les libéraux ont acheté des crédits étrangers à la société d'électricité d'État de Chine, au coût de 2 millions de dollars. J'ai parlé la semaine dernière, ici à la Chambre, des 4,5 millions de dollars que les libéraux ont versés au Kazakhstan et, hier, des 5 millions de dollars qui ont été versés à la Banque asiatique de développement. Aujourd'hui, j'aimerais parler des 2 millions de dollars versés à la société d'électricité d'État de Chine, toujours pour acheter des crédits.
    Toutes ces sommes auraient pu financer la mise au point d'une technologie antipollution et de traitement des eaux usées pour protéger la santé des Canadiens. Cet argent devrait rester ici au pays.

[Français]

    Monsieur le Président, nous savons que la majorité des Canadiens désirent que leur gouvernement respecte le Protocole de Kyoto. C'est vrai au Québec comme ailleurs au pays.
    Pourtant, la ministre qui travaille à remplacer le Protocole de Kyoto par un plan supposément national a déclaré, à la suite de sa rencontre avec des dirigeants du secteur de l'énergie:

[Traduction]

     « le Québec ne fait pas partie de mes préoccupations ».

[Français]

    Comment la ministre ose-t-elle dire que le Québec ne fait pas partie de ses préoccupations?
    Comment se fait-il que le premier ministre ne dénonce pas ces propos?
    Monsieur le Président, je suis désolée que mes commentaires aient été mal interprétés.
    Je sais que les Québécois tiennent à leur environnement, et c'est pour cette raison qu'ils doivent faire partie de notre plan. Il nous faut un plan national qui ne favorise pas une province plus qu'une autre. Encore une fois, il faut attendre que le plan soit dévoilé.

Le bois d'oeuvre

    Monsieur le Président, alors que l'industrie du bois d'oeuvre est à bout de souffle, le gouvernement retarde la mise en application de l'entente conclue avec les États-Unis. L'industrie du bois d'oeuvre du Québec attend avec impatience le remboursement des sommes prévues par l'entente. Celle-ci précise que c'est le gouvernement qui doit acheminer l'argent à l'industrie du bois d'oeuvre et qu'il doit, par la suite, se faire rembourser par les États-Unis.
    Puisque l'entente le permet, pourquoi le gouvernement ne rembourse-t-il pas immédiatement l'industrie du bois d'oeuvre pour ensuite exiger des États-Unis le versement des sommes dues?
    Monsieur le Président, ce gouvernement travaille à faire adopter l'entente du bois d'oeuvre aussi rapidement que possible.
    Dans l'entente, un processus existe. La Société de développement des exportations est là pour encourager le versement des fonds aux compagnies, et ce, dès que possible.
    Je demande au Bloc québécois de travailler avec le gouvernement pour faire adopter cette entente dès que possible, afin que les compagnies puissent recevoir leurs fonds.

  (1425)  

    Monsieur le Président, il n'y a strictement rien qui empêche le gouvernement de verser l'argent aux compagnies. Les compagnies en ont besoin. Il peut le faire dès maintenant et se faire rembourser par la suite.
    Je ne comprends pas le gouvernement et ce premier ministre qui, alors qu'il était dans l'opposition, demandait des garanties de prêts. Il est en mesure, maintenant qu'une entente de principe est conclue, de verser l'argent. Les compagnies en ont besoin maintenant. C'était urgent en juillet, c'est urgent maintenant. Qu'attend-il?
    Monsieur le Président, c'est urgent, mais il fallu six mois au chef du Bloc québécois pour prendre une position sur cette entente.
    Il est essentiel de faire adopter cette entente aussi vite que possible. Je demande au Bloc québécois de travailler avec nous pour faire adopter le projet de loi C-24, afin que ces compagnies puissent recevoir les fonds donnés par ce gouvernement.
    Monsieur le Président, il a l'imagination débordante.
    Au mois d'avril, une entente a supposément été conclue. Au mois de juin, cela ne fonctionnait plus. Au mois de juillet, elle était rejetée. Elle a été conclue vers le 28 août. Nous avons réagi dans les jours qui ont suivi, cela n'a pas pris des mois. C'était urgent depuis longtemps. Plutôt que de réinventer l'histoire et de tenter de faire croire n'importe quoi, il devrait se tenir debout. Des emplois sont actuellement en jeu. Plutôt que de faire du chantage, qu'il donne l'argent aux compagnies et qu'il se fasse rembourser plus tard.
    Monsieur le Président, l'histoire est claire. Ce gouvernement et ce premier ministre ont pris position en avril. C'est en septembre que le chef du Bloc québécois a finalement pris une décision. Cette entente doit être mise en application au plus vite. Je demande au Bloc québécois de travailler avec nous pour que cela se fasse enfin.
    Monsieur le Président, l'entente d'avril a été rejetée par les compagnies. Le premier ministre devrait savoir cela. Le 21 août, l'entente a été acceptée. Lorsqu'il était dans l'opposition, le premier ministre demandait des garanties de prêts. Son entente a été conclue le 21 août. Elle a été retardée, surtout en raison de la Colombie-Britannique. Maintenant, au Québec, l'argent est nécessaire. Ce premier ministre a bien le pouvoir, mais il n'a pas le vouloir.
    Monsieur le Président, l'industrie québécoise a voté en faveur de cette entente en avril, dès qu'elle a été signée par ce gouvernement.
     Nous travaillons aussi vite que possible pour donner des fonds aux compagnies, mais nous avons besoin de cette Chambre et de l'appui du Bloc québécois pour ce faire.

L'Afghanistan

    Monsieur le Président, en ce qui concerne le cas du bois d'oeuvre, c'était un mauvais engagement en avril, un mauvais engagement en septembre quand le Bloc québécois l'avait appuyé, et il s'agit toujours d'un mauvais engagement.

[Traduction]

    De plus en plus de gens se disent préoccupés de la guerre en Afghanistan parce que la stratégie adoptée ne fonctionne pas. Nous avons entendu très récemment le sénateur républicain Bill Frist dire que la guerre contre l'Afghanistan ne pourra jamais être gagnée par les voies militaires et réclamer que l'on se tourne plutôt vers des solutions diplomatiques.
    Pourquoi le premier ministre n'est-il pas prêt à admettre, comme le font les républicains et comme l'a fait son propre ministre de la Défense il y a quelques semaines à peine, qu'il ne peut y avoir de vainqueur militaire dans cette guerre.

[Français]

    Monsieur le Président, tout d'abord, j'ai dit au chef du Bloc québécois que voilà, nous avions son appui pour faire adopter l'entente sur le bois d'oeuvre.

  (1430)  

[Traduction]

    En ce qui a trait à l'Afghanistan, le chef néo-démocrate sait très bien que le gouvernement a dit que nos seuls efforts militaires n'arriveraient pas à régler cette guerre. La sécurité et la stabilité en Afghanistan font évidemment partie d'une stratégie à plusieurs volets à laquelle les Nations Unies participent.
    Nous sommes fiers du travail de tous nos fonctionnaires, mais particulièrement de celui de nos militaires en Afghanistan. Nous les appuyons entièrement.
    Monsieur le Président, c'est la première fois que le premier ministre reconnaît à la Chambre que nous devons pouvoir compter, en Afghanistan, sur une stratégie à plusieurs volets plus équilibrée. Ce n'est pas trop tôt.

[Français]

    La réalité, c'est que la stratégie de guerre qu'on utilise maintenant ne fonctionne pas. Ce n'est pas seulement la position du NPD. Un autre républicain, le sénateur Martinez, a lui aussi dit, « [...] qu'une solution politique est la manière de régler tout ça. » C'est ce que nous avons dit.
    Pourquoi le premier ministre s'entête-t-il à enfoncer le Canada dans une mission qui ne fonctionne pas?
    Monsieur le Président, c'est la mission de toutes les Nations Unies. Je ne comprends pas pourquoi le chef du NPD commence maintenant à citer des républicains.

[Traduction]

    Toutefois, je peux dire une chose importante. Le gouvernement a toujours tenu le même langage. Nous appuyons nos troupes en Afghanistan. Elles font un travail magnifique. Nos soldats sont des héros et tous les députés devraient les appuyer.

[Français]

Le Québec

    Monsieur le Président, on croyait avoir tout vu de la part du gouvernement d'extrême droite, eh bien non! On sait maintenant ce que le chef de cabinet de la ministre de l'Environnement pense du Québec et des Québécois. Il critique la Révolution tranquille et dit avoir peur que le Canada ne suive le mauvais exemple du Québec en ce qui a trait au mariage, aux moeurs sexuelles et à l'avortement. Le Québec n'a pas à avoir honte de ce qu'il est devenu comme société.
    Le premier ministre endosse-t-il ces propos diffamatoires et intolérants?

[Traduction]

    Encore une fois, monsieur le Président, ce n'est là qu'une distraction pour ne pas que les Québécois voient le bilan des libéraux dans le domaine de l'environnement. J'attends avec impatience de répondre à d'autres questions comme celle-là parce que j'ai assez de matière pour rouler pendant des mois.
    La semaine dernière, j'ai déclaré à la Chambre qu'environ 4,5 millions de dollars iraient au Kazakhstan, hier, j'ai dit que 5 millions de dollars seraient accordés à la Banque asiatique de développement et, aujourd'hui, je dirai qu'environ 2 millions de dollars seront accordés à la société d'électricité d'État de Chine, tout cela pour acheter des crédits à l'étranger. C'était une priorité des libéraux.

[Français]

    Monsieur le Président, la ministre de l'Environnement a dit tout récemment, et je cite: « Le Québec n'est pas vraiment une préoccupation pour moi. » Autrement dit, elle s'en fout. C'est franc, c'est direct. Sauf que la franchise ne compense pas l'incompétence et l'intolérance à l'égard du Québec. Ces propos s'ajoutent à ceux de son chef de cabinet qui dit avoir peur que les méchants Québécois n'aient une mauvaise influence sur le reste du pays. Toute une équipe! C'est encore du Québec bashing.
    Le premier ministre n'a qu'une seule option: se lever et s'excuser auprès de l'ensemble des Québécois.
    Monsieur le Président, ce n'est pas vrai. Encore une fois, je suis désolée si mes commentaires ont été mal interprétés.
     Je sais que les Québécois aiment leur environnement. C'est pour cela qu'ils doivent faire partie de notre plan, mais on doit avoir un plan national pour tous les Québécois et les Canadiens.

[Traduction]

Les nominations gouvernementales

    Monsieur le Président, après avoir promis aux Canadiens qu'il serait impeccable, on commence à voir la vraie nature du gouvernement. Des travailleurs conservateurs provinciaux semblent libres de se vautrer dans l'assiette au beurre. Le bureau régional du ministre est rempli d'initiés du parti. Cependant, l'esprit de parti du premier ministre suinte de partout dans le processus de nomination de la lieutenante-gouverneure, qui est la femme d'un membre influent du parti. La lieutenante-gouverneure représente la reine, ce n'est pas une fonction qui doit récompenser des services politiques rendus.
    Comment le premier ministre peut-il expliquer que la liste des nominations de copains du parti s'allonge autant?
    Monsieur le Président, Son Excellence Barbara Hagerman est un membre respecté du monde des arts et de la culture de l'Île-du-Prince-Édouard et je suis convaincu qu'elle sera une excellente lieutenante-gouverneure pour sa province.
    Monsieur le Président, voyons toute l'histoire. Le mari de la nouvelle lieutenante-gouverneure admet avoir des liens étroits avec les conservateurs et tout particulièrement avec le premier ministre. Il a travaillé à la campagne de ce dernier lors de la course à la direction du Parti conservateur et il a siégé au sein du premier exécutif du nouveau parti. En fait, ils sont si près l'un de l'autre que, l'an dernier, le premier ministre a passé la fête du Canada sur le bateau de M. Hagerman.
    Est-ce que cette nomination est un cadeau politique? Est-ce que le premier ministre peut réduire son attirance pour l'assiette au beurre? Et qu'en est-il des principes d'éthique? Qu'en est-il de la responsabilité?

  (1435)  

    Monsieur le Président, la lieutenante-gouverneure de l'Île-du-Prince-Édouard est une personne de premier plan et tout à fait qualifiée pour occuper le poste. Cette attaque honteuse du député de Malpeque contre cette personne n'est rien d'autre que de la politicaillerie.

[Français]

Le contrôle des armes à feu

    Monsieur le Président, un rapport publié hier par une coalition de 600 ONG met en lumière des lacunes importantes dans la législation sur le contrôle du ravitaillement en armes pour les pays soumis à des embargos, responsables de massacres ou qui portent atteinte aux droits humains. On y révèle, entre autres, que des compagnies canadiennes contournent les lois en vendant du matériel militaire en pièces détachées.
     Le gouvernement canadien va-t-il continuer à fermer les yeux et tolérer que des pièces détachées vendues à la Chine servent à la construction d'armes qui sont ensuite revendues au Soudan, ou va-t-il s'engager à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ce trafic?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le Canada a un régime efficace de contrôle des exportations et il collabore particulièrement avec d'autres États pour veiller à ce que des pays signataires de traités de non-prolifération ne fassent pas entrer des armes dans des zones sous embargo comme le Soudan. Nous soutenons en principe un traité global et juridiquement contraignant sur les armes conventionnelles qui va empêcher l'entrée illégale d'armes dans des régions comme le Soudan.

[Français]

    Monsieur le Président, le ministre le sait très bien, les trafiquants d'armes contournent les traités existants en vendant des pièces détachées qui servent en bout de course à la fabrication d'armes et de matériel militaire.
    Le gouvernement entend-il collaborer à la mise en place d'un traité qui encadre une telle utilisation des pièces détachées?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je viens de dire que nous allons appuyer les efforts pour contrôler la vente d'armes illégales dans les zones sous embargo. Bien entendu, nous voulons voir comment ce traité sera rédigé. Nous nous préoccupons certes du fait que des armes illégales aboutissent au Soudan en particulier. Nous savons que, dans le passé, certaines de ces armes ont été utilisées contre les Soudanais. Dans cette mesure, je suis heureux de travailler avec notre collègue et tous les députés pour veiller à ce que cela ne se reproduise plus à l'avenir.

[Français]

Maher Arar

    Monsieur le Président, en dépit des affirmations du ministre de la Sécurité publique, la lettre qu'il a fait parvenir aux États-Unis leur demandant de retirer le nom de Maher Arar de leur liste de suspects ne constitue en rien une lettre de plainte. La recommandation du rapport O'Connor en exige davantage.
    Le ministre des Affaires étrangères pense-t-il vraiment nous convaincre que la lettre de son collègue constitue une plainte formelle?

[Traduction]

    Monsieur le Président, comme mon collègue, le ministre de la Sécurité publique, l'a déclaré également, nous allons certes examiner toutes les recommandations du juge O'Connor. Ces recommandations comprennent, bien entendu, des discussions avec les deux autres pays en cause, les États-Unis et la Syrie. Nous comptons bien avoir ces discussions. En fait, nous croyons également que ces rapports devraient se retrouver entre les mains des deux pays qui ont joué un rôle dans ces événements vraiment déplorables.

[Français]

    Monsieur le Président, il me semble qu'il est clair que quand on parle d'une lettre qui a été envoyée, on ne parle pas de conversation et encore moins de plainte formelle.
    Le ministre de Sécurité publique prétend-il qu'en envoyant la lettre, il a porté plainte formellement aux États-Unis, alors qu'il ne l'a pas fait pour la Syrie?
    Comme les prétentions du ministre de la Sécurité publique ne tiennent pas, je demande au ministre des Affaires étrangères ce qu'il attend pour loger une plainte formelle auprès des États-Unis et de la Syrie, comme le recommande le rapport O'Connor, et ce, dès maintenant?

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous n'attendons rien. Nous prenons des mesures globales. Nous n'allons pas aborder ces recommandations à la pièce. Nous allons agir de façon responsable. Nous allons bien nous imprégner de tout le rapport et nous assurer de réaliser de véritables progrès quant à la protection à l'avenir de gens comme M. Arar qui sont si mal traités.
    J'invite notre collègue à être patiente. Tout cela va se produire à l'avenir. Le Canada va prendre les mesures voulues pour veiller à ce que ces événements ne se reproduisent plus. Le ministre de la Sécurité publique et le premier ministre ont déjà pris des mesures énergiques dans ce dossier.

  (1440)  

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, hier lorsque j'ai demandé au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien pourquoi l'ancien ministre conservateur Harvie Andre s'était vu attribuer un contrat à fournisseur unique valant jusqu'à un demi million de dollars, il a insulté le négociateur précédent, un ancien premier ministre de l'Ontario, qui a effectivement de l'expérience en matière de revendications territoriales.
    Le ministre va-t-il expliquer pourquoi le gouvernement a écarté une personne ayant de l'expérience en matière de revendications territoriales, le plus récemment à Caledonia, pour favoriser un petit copain qui n'a aucune expérience en la matière?
    Monsieur le Président, le navire libéral fait fausse route dans le cas qui nous occupe.
    J'ai confirmé hier que, lorsque je suis devenu ministre, j'ai congédié M. Peterson comme négociateur concernant les questions de transfert de responsabilités dans le Nord. À la suite d'une recherche annoncée publiquement, j'ai embauché une personne qualifiée, un parlementaire respecté, un chef de file du monde des affaires et dans son milieu et un universitaire. Non seulement M. Andre est-il plus qualifié et plus compétent, son contrat ne coûte que 50 000 $ par année. Le contrat auquel j'ai mis fin accordait 3,1 millions de dollars sur trois ans, ce qui en fait un contrat très libéral.
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, à l'ordre. La députée de Churchill a maintenant la parole pour poser sa question complémentaire.
    Monsieur le Président, le ministre a abandonné l'accord de Kelowna. Il a renié l'engagement pris envers Kashechewan et abandonné la stratégie d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones. Son gouvernement affiche un excédent de 13 milliards de dollars et le ministre n'a même pas pu défendre les Premières nations et la Stratégie de lutte contre le tabagisme chez les Inuits. Pourtant, il a pu trouver jusqu'à un demi-million de dollars pour son copain conservateur.
    Comment se fait-il que le ministre récompense ses amis et ne tienne pas compte des besoins des Autochtones du Canada?
    Comment la députée arrive-t-elle à prendre la parole à la Chambre? Elle devrait être gênée de le faire en contestant un contrat que les libéraux ont attribué à un ancien premier ministre libéral pour un montant de 3,1 millions de dollars sur trois ans, comparativement à un contrat prudent avec M. Andre, un Canadien respecté, d'une valeur de 50 000 $. Le gouvernement et le premier ministre agissent de façon responsable, contrairement à ce qu'on a vu de la part des libéraux.
    Monsieur le Président, il y a d'autres détails au sujet de ce contrat, qui se situait en fait entre 250 000 $ et 500 000 $, des détails que le ministre n'a pas donnés à la Chambre.
    Soyons clairs. Ce contrat à fournisseur unique n'est pas qu'un autre cas de favoritisme à la Mulroney. Le problème va plus loin que l'hypocrisie habituelle du gouvernement et la violation de ses propres principes moralisateurs.
    Par votre entremise, monsieur le Président, je demande au ministre: n'est-il pas vrai que la fille et le gendre de M. Andre, le bénéficiaire de cette assiette au beurre, ne sont nuls autres que la directrice et le président de l'association de circonscription du ministre?
    Monsieur le Président, si nous devons répondre aux calomnies malveillantes des députés d'en face, parlons du contrat en question, un contrat de 50 000 $, et non de 500 000 $ comme l'affirme l'opposition. Qu'on compare cela au contrat de 3,1 millions de dollars, de 1 million de dollars par année, destiné à un libéral, un contrat dont il n'est pas nécessaire de rendre compte aux contribuables du Canada. En outre, le contrat était tel que nous avons dû le reprendre de zéro.

  (1445)  

    Monsieur le Président, le parti d'en face avait promis de mettre fin au favoritisme. Non seulement il a renié cette promesse, mais il est devenu le roi du favoritisme.
    Le gendre de M. Andre était non seulement président de l'association de circonscription, mais également coprésident de la campagne électorale du ministre, et sa fille était directrice de l'association de circonscription. Le ministre et des agents de circonscription se sont placés directement en situation de conflit d'intérêts et ont abusé de l'argent et de la confiance des contribuables.
    Quand le premier ministre va-t-il mettre un terme à cette situation gênante, enfin assumer un peu de responsabilité et congédier son apprenti favorisé?
    Monsieur le Président, malgré les calomnies que les libéraux veulent proférer, M. Andre est qualifié. Il est un Canadien respecté. Il est un parlementaire respecté. Il est un ancien membre du Conseil privé. Il est respecté comme chef d'entreprise et comme dirigeant dans sa collectivité.
    Le contrat est défendable et ne représente qu'une fraction du coût du contrat qui a été accordé à l'ancien premier ministre libéral de l'Ontario.

La responsabilité gouvernementale

    Monsieur le Président, dans le cadre d'un autre scandale libéral, la Commission de la fonction publique a révélé aujourd'hui qu'au cours des derniers jours du régime libéral corrompu, deux hauts fonctionnaires ont sciemment transgressé toutes les règles en tentant d'obtenir des nominations grassement rémunérées au sein de la fonction publique. Ces postes fantômes ont été créés dans le seul but de frauder les contribuables canadiens.
    Que fait le nouveau gouvernement conservateur pour remplacer la culture libérale de corruption par une culture de reddition de comptes?
    Des voix: Oh, oh!
    À l’ordre, s’il vous plaît. Le président du Conseil du Trésor a la parole. Il intervient pour répondre à la question du député. Tous les députés voudront entendre sa réponse.
    Le président du Conseil du Trésor a la parole.
    Monsieur le Président, nous savons que la culture libérale de corruption n'a pas pris fin avec le départ d'Alfonso Gagliano, de David Dingwall ou d'André Ouellet. Elle n'a pas non plus pris fin avec le dépôt du rapport Gomery ou de la vérificatrice générale. Nous apprenons aujourd'hui dans ce rapport que, au cours des derniers jours de leur règne, au lieu de faire leurs valises, les libéraux ont une fois de plus enfreint toutes les règles en tentant d'obtenir des emplois pour leurs amis en guise de faveur politique. C'est une véritable honte.
    La Loi fédérale sur la responsabilité mettrait fin à ce resquillage de la part de membres du personnel politique libéral et viendrait mettre de l'ordre dans...
    La députée de Trinity—Spadina a la parole.

La Commission de l'immigration et du statut de réfugié

    Monsieur le Président, parlant de népotisme, j'ai été scandalisée, en tant que femme et immigrante, d'apprendre dans la presse qu'un membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié aurait commis un harcèlement sexuel. Cette personne est un petit copain du réseau libéral, mais pis encore cette affaire témoigne de l'écroulement d'un système malade.
    Il y a cinq ans la Chambre des communes a approuvé la création de la Section d'appel des réfugiés, mais ni les libéraux, ni les conservateurs n'ont donné suite à ce vote. Le ministre va-t-il enfin agir et protéger les personnes les plus vulnérables?
    Monsieur le Président, ces allégations troublent tous les députés. La GRC mène une enquête. Il y a aussi une enquête interne. Nous travaillerons en collaboration avec la CISR à la mise en oeuvre de tout changement qui pourrait s'imposer. Notre priorité est de protéger les personnes vulnérables.
    Monsieur le Président, on n'annonce aucune mesure ferme. S'il y a un jour parfait pour annoncer la réforme du système d'immigration, c'est aujourd'hui. Au-delà du scandale qui éclabousse une personne, cette affaire est une honte nationale. Ce n'est pas en remplaçant un ami du Parti libéral par un ami du Parti conservateur qu'on réglera le problème. Cela ne fonctionnera pas.
    Le ministre va-t-il apporter immédiatement les correctifs qui s'imposent et retirer à ces juges le pouvoir absolu qui leur est conféré?
    Monsieur le Président, j'assure à ma collègue que nous prenons cette affaire au sérieux. C'est une tragédie pour les personnes touchées. Heureusement, la GRC fait enquête.
    Toutefois, je tiens à signaler que le fait d'ajouter un autre palier d'appel ne règle en rien la situation. Il y a des gens qui n'hésitent pas à commetre de tels actes et qui ne se préoccupent guère du nombre de paliers d'appels. Les membres de ces commissions ont des pouvoirs incroyables, si bien que nous devons faire preuve d'une extrême prudence lorsque nous les choisissons. Nous ferons tout en notre pouvoir pour que les personnes nommées à ces postes soient compétentes et aient un comportement éthique.

  (1450)  

La reddition de comptes au sein du gouvernement

    Monsieur le Président, le gouvernement conservateur minoritaire mine sa propre crédibilité. Il a omis de déclarer des fonds destinés au congrès conservateur. Il a enfreint les règles concernant l'accès à l'information. Le secrétaire parlementaire du premier ministre a dû reconnaître l'existence d'une campagne de désinformation délibérée. Les initiés du Parti conservateur utilisent leurs contacts privilégiés comme tremplin pour faire du lobbying dans le secteur privé. On trouve du favoritisme politique dans presque tous les ministères.
    Les Canadiens sont préoccupés par toutes ces contradictions et par cette politique de deux poids, deux mesures. Quand le gouvernement mettra-t-il en pratique ce qu'il prêche?
    Monsieur le Président, cette question est posée par un homme qui siégeait au Cabinet avec des gens comme André Ouellet, David Dingwall et Alfonso Gagliano et qui n'a rien dit pendant toutes ces années où son parti baignait dans les scandales.
    Quand il se lèvera pour poser sa question complémentaire, il pourrait peut-être dire aux Canadiens comment progresse l'enquête sur le scandale libéral des fiducies de revenu.
    Monsieur le Président, les Canadiens ne sont pas dupes de l'esbroufe du ministre. Ils reconnaissent le style de Mike Harris, ce style de la droite mesquine qui a laissé l'Ontario aux prises avec d'énormes problèmes juridiques comme celui d'Ipperwash, avec d'énormes problèmes environnementaux comme Walkerton, avec d'énormes problèmes économiques comme une dette publique cachée de 5 milliards de dollars, sans parler de ce ministre qui soulève de sérieux problèmes d'éthique parce qu'il a dépensé des millions de dollars pour de la publicité partisane et pour les services de doreurs d'image.
    Le ministre promettra-t-il au moins qu'il ne fera pas au Canada ce qu'il a fait à l'Ontario?
    Monsieur le Président, ce que nous espérons de ce côté-ci de la Chambre et ce que les Ontariens espèrent sincèrement, c'est que Bob Rae ne fasse pas au Canada ce qu'il a fait à l'Ontario.
    Quand le député de Wascana parle de milliers de dollars pour refaire l'image d'un député, je lui signale que cela n'est jamais arrivé. Si c'était le cas, je serais le premier à demander une vérification d'optimisation des ressources.

[Français]

Les langues officielles

    Monsieur le Président, le Programme de contestation judiciaire a permis aux communautés francophones ainsi qu'aux communautés anglophones de prendre leur propre place et celle qui leur revient au sein du Canada.
    Comment le premier ministre entend-il mettre en oeuvre le projet de loi S-3, qui oblige le gouvernement fédéral et ses agences à respecter la Loi sur les langues officielles et permet aux communautés minoritaires de les poursuivre devant les tribunaux quand ils y contreviennent en plus de faire respecter leurs droits.
    Monsieur le Président, je voudrais dire à mon collègue de la Nouvelle-Écosse que si les libéraux croient que les lois du gouvernement d'une province ou du gouvernement du Canada ne semblent pas respecter la Constitution, ils doivent le dire très clairement.

[Traduction]

    Les droits de la personne sont très importants. Le député de la Nouvelle-Écosse devrait peut-être se lever et expliquer les allégations excessives qu'a faites le député d'Eglinton—Lawrence en déclarant qu'il a été l'objet de sectarisme et de discrimination parce qu'il n'est pas assez Canadien. Le député d'en face peut peut-être expliquer ces commentaires.
    Monsieur le Président, la commissaire sortante aux langues officielles, Dyane Adam, a dénoncé la compression du financement de ce programme. Le président du programme a indiqué que, dans la majorité des cas, les contestations visaient les lois provinciales plutôt que les lois fédérales. C'est grâce à un tel cas si l'éducation en français est possible en Nouvelle-Écosse et si les services de santé sont offerts en français en Ontario.
    Peut-être que le premier ministre veut se venger de l'affaire Harper c. Canada qui l'a mis dans l'embarras. Peut-être veut-il se venger de l'affaire Montcalm, qui l'a mis dans l'embarras, de même que des ministres provinciaux. Le ministre parle encore de lois fédérales. S'excusera-t-il auprès des Canadiens pour les avoir induits en erreur?

  (1455)  

    Monsieur le Président, tous les députés veulent s'assurer que les droits de la personne sont respectés. Nous voulons tous que la Constitution et la Charte soient respectées. Le gouvernement du Canada se doit de défendre ces droits.
    L'ancien gouvernement voulait mettre en oeuvre un programme visant à financer des avocats libéraux pour qu'ils défient leur propre gouvernement. De ce côté-ci de la Chambre, nous acceptons nos responsabilités constitutionnelles.

[Français]

L'assurance-emploi

    Monsieur le Président, le 21 septembre dernier, ma collègue de Compton—Stanstead interpellait la ministre des Ressources humaines et du Développement social afin de connaître ses intentions quant à la reconduction des mesures transitoires visant à atténuer les effets néfastes du découpage des régions économiques de l'assurance-emploi dans l'Est du Québec. La ministre a alors esquivé la question en répondant son « mantra » habituel, à savoir que le moment venu elle prendrait des décisions éclairées concernant les délimitations. Le 7 octobre approche, le moment est venu.
    La ministre peut-elle nous faire part de ses décisions concernant le découpage et la reconduction des mesures transitoires? Le 7 octobre, c'est dans quatre jours.

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous sommes au courant des dates d'échéance des mesures transitoires. C'est pourquoi nous travaillons très fort pour faire en sorte qu'un programme soit mis en oeuvre avant la date butoir. Nous poursuivons nos efforts à cette fin.

[Français]

    Monsieur le Président, le temps presse. L'échéance arrive le 7 octobre et ça, c'est dans quatre jours. La ministre doit agir maintenant.
    Le gouvernement se rend-il compte que les travailleuses et les travailleurs des régions, dont le développement a été freiné par la crise du bois d'oeuvre, sont les mêmes qui sont lourdement pénalisés par les délais entourant le redécoupage des régions économiques et le retard à reconduire les mesures transitoires?

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous sommes parfaitement conscients de l'importance des mesures transitoires, qui ont été prolongées à plusieurs reprises au cours des dernières années. Nous savons également que les limites des régions pour l'assurance-emploi devront faire l'objet d'un examen complet à long terme. C'est la première étape du processus.

L'enquête sur l'affaire Maher Arar

    Monsieur le Président, la semaine dernière, le commissaire de la GRC a déclaré au Comité de la sécurité publique que la GRC n'avait eu que 24 heures pour produire son rapport sur Maher Arar présenté au gouvernement. Il a ainsi laissé entendre que les inexactitudes et les omissions étaient attribuables à ce court délai.
    Nous savons que le juge O'Connor a pour sa part déclaré que la GRC avait disposé de neuf jours complets. Le ministre de la Sécurité publique se préoccupe-t-il du fait que le commissaire de la GRC peut avoir induit le comité en erreur ou peut n'avoir aucune idée de ce qu'il avance au sujet du rapport dommageable et inexact présenté au gouvernement du Canada concernant M. Arar?
    Monsieur le Président, toute cette affaire, qui s'est déroulée sous l'ancienne administration du gouvernement libéral, nous préoccupe tous. Voilà pourquoi, d'entrée de jeu, nous avons adopté les 23 recommandations du juge O'Connor. Nous avons aussi dit, et nous sommes d'accord avec le juge O'Connor, qu'il fallait redresser les inexactitudes, et nous continuerons en ce sens.

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, dans un discours prononcé le 4 mai 2006, Gordon Campbell, le premier ministre de la Colombie-Britannique, a déclaré: « Je crois que le premier ministre et son gouvernement se sont engagés à combler les lacunes cernées en ce qui concerne la santé, l'éducation, le logement et les possibilités économiques ».
    Ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes. Que fait le nouveau gouvernement du Canada pour combler les besoins des Premières nations en éducation?
    Monsieur le Président, je suis ravi d'avoir l'occasion de répondre à une question de substance. Le gouvernement travaille étroitement avec le gouvernement de la Colombie-Britannique, la First Nations' Emergency Services Society et une administration scolaire dirigée par une Première nation. Nous améliorons les résultats scolaires et ils seront comparables à ceux des autres Canadiens.
    L'éducation est la clé pour éliminer le cycle de pauvreté qui afflige tant d'Autochtones. Le premier ministre Campbell assume un rôle de chef de file à cet égard.
    Dans le budget de 2006, le gouvernement a prévu un total de 450 millions de dollars, dont une partie sera affectée aux résultats scolaires. J'encourage les députés d'en face à collaborer au comité pour que ce projet soit mené à terme.

L'environnement

    Monsieur le Président, à force de regarder, ces derniers mois, la ministre de l'Environnement faire un gâchis comme son prédécesseur, on se rend compte que « plus ça change, plus c'est pareil ».
    Nous n'avons pas de stratégie en faveur d'automobiles écologiques et des milliers de travailleurs canadiens du secteur automobile ont perdu leur emploi. Combien d'emplois supplémentaires devront être perdus avant que la ministre daigne aller réveiller le ministre de l'Industrie pour qu'il s'active? Nous avons perdu tellement d'emplois et la ministre refuse de se prononcer sur une stratégie canadienne en matière d'automobiles écologiques.

  (1500)  

    En fait, monsieur le Président, le ministre de l'Industrie, le ministre des Finances, le ministre des Transports et moi-même rencontrons les fabricants d'automobiles ce soir pour discuter de notre politique environnementale.
    Monsieur le Président, les Canadiens auront une impression de déjà vu, car non seulement il y a tout juste 18 mois, la ministre de l'Environnement ainsi que son prédécesseur ont voté contre une motion du NPD tendant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais la ministre n'arrive toujours pas à faire preuve de fermeté. Elle se défile et ne fait pas son boulot.
    Quand va-t-elle présenter un plan de lutte contre les changements climatiques? Quand va-t-elle cesser de répéter les phrases qu'on a rédigées pour elle pour se mettre à prendre des mesures utiles aux yeux des parlementaires?
    Monsieur le Président, parlons de mesures en environnement au lieu de faire de beaux discours, parce que c'est ce que les Canadiens veulent voir.
    Tandis que le NPD publiait des communiqués, le gouvernement n'a mis que quelques mois à faire du Canada le premier pays au monde à interdire l'utilisation des APFC, un produit chimique toxique qui cause le cancer. Quelle a été la réaction? La Société canadienne du cancer a accueilli favorablement notre mesure.
    C'est ce genre de mesures que les Canadiens veulent dans le domaine de l'environnement. C'est ce que nous allons leur donner.

L'enquête sur l'affaire Maher Arar

    Monsieur le Président, revenons à la question qui a été posée et à la réponse du ministre qui n'en était pas une. Ou bien le commissaire de la GRC a induit le comité en erreur, ou bien il ne s'est pas, à ce jour, donné la peine de faire toute la lumière sur ce que la GRC a fait pour camoufler cette piteuse enquête.
    Le député de Leeds—Grenville, collègue du ministre, a déclaré au comité que le rapport de la GRC est émaillé « d'inexactitudes et d'omissions » qu'il devait « attribuer à l'incompétence, à la négligence ou à une tromperie délibérée ».
    En termes très simples, le ministre partage-t-il l'avis de ce député conservateur?
    Monsieur le Président, c'est le juge O'Connor qui a très clairement signalé l'existence d'un grand nombre d'inexactitudes relativement à toute cette affaire pendant que l'ancien gouvernement fédéral libéral était aux commandes. Ces inexactitudes, entre autres, ont mené à la tenue de l'enquête.
    Nous allons donner suite. Nous suivons la recommandation selon laquelle il conviendrait d'examiner les méthodes d'enquête, particulièrement en ce qui concerne les trois autres personnes nommées dans ce rapport. Nous poursuivons dans ce sens.

La frontière canado-américaine

    Monsieur le Président, l'ancien gouvernement libéral n'a pas donné suite aux préoccupations de Canadiens relativement à l'initiative des États-Unis visant les voyages dans l'hémisphère occidental.
    Le ministre de la Sécurité publique pourrait-il nous donner son point de vue sur la décision du Congrès américain de reporter jusqu'en 2009 la mise en oeuvre des nouvelles mesures d'identification à la frontière canado-américaine?
    Monsieur le Président, mon collègue a tout à fait raison. La volonté des États-Unis d'exiger que toute personne voulant entrer dans ce pays soit munie d'un passeport est connue depuis près de deux ans. Pourtant, lorsque les libéraux étaient au pouvoir, ils n'ont rien fait.
    Notre premier ministre a fait de ce dossier une priorité, tout comme le ministre des Affaires étrangères, des élus des deux côtés de la frontière et des groupes d'entreprises. Nous avons accompli quelque chose que l'opposition disait impossible à réaliser. La date de mise en oeuvre de ces mesures a été reportée de presque une année et demie.
    Le dossier n'est pas réglé. Il nous reste encore du travail à faire, mais nous avons fait beaucoup de chemin grâce aux efforts du premier ministre, de notre gouvernement et d'un grand nombre d'autres intervenants.

Présence à la tribune

     Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de Son Excellence Victor Alcides Bogado Gonzalez, président de la Chambre des députés du Paraguay.
    Des voix: Bravo!

Initiatives ministérielles

[Subsides]

[Traduction]

Travaux des subsides

Motion de l'opposition -- La condition féminine  

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 28 septembre, de la motion.
    Comme il est 15 h 4, conformément à l'ordre adopté le jeudi 28 septembre, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion de la députée de Beaches—East York concernant les travaux des subsides.
    Convoquez les députés.

  (1515)  

[Français]

    (La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
 

(Vote no 36)

POUR

Députés

Alghabra
André
Angus
Asselin
Atamanenko
Bachand
Bagnell
Bains
Barbot
Barnes
Beaumier
Bélanger
Bell (Vancouver Island North)
Bell (North Vancouver)
Bellavance
Bennett
Bevington
Bigras
Black
Blais
Bonin
Bonsant
Boshcoff
Bourgeois
Brison
Brown (Oakville)
Brunelle
Byrne
Cannis
Cardin
Carrier
Chan
Charlton
Chow
Christopherson
Coderre
Comartin
Cotler
Crête
Crowder
Cullen (Skeena—Bulkley Valley)
Cullen (Etobicoke North)
Cuzner
Davies
DeBellefeuille
Demers
Deschamps
Dewar
Dhaliwal
Dhalla
Dosanjh
Duceppe
Easter
Eyking
Faille
Gagnon
Gaudet
Gauthier
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Guay
Guimond
Holland
Jennings
Julian
Kadis
Karetak-Lindell
Keeper
Kotto
Laforest
Laframboise
Lapierre
Lavallée
Layton
Lee
Lemay
Lessard
Lévesque
Loubier
Lussier
MacAulay
Malhi
Malo
Maloney
Marleau
Marston
Martin (Winnipeg Centre)
Martin (Sault Ste. Marie)
Masse
Mathyssen
Matthews
McDonough
McGuinty
McTeague
Ménard (Hochelaga)
Ménard (Marc-Aurèle-Fortin)
Merasty
Minna
Mourani
Murphy (Moncton—Riverview—Dieppe)
Murphy (Charlottetown)
Nadeau
Nash
Ouellet
Owen
Paquette
Patry
Perron
Peterson
Picard
Plamondon
Priddy
Proulx
Ratansi
Redman
Regan
Robillard
Rodriguez
Rota
Roy
Russell
Savoie
Scarpaleggia
Sgro
Siksay
Silva
Simard
St-Hilaire
St. Amand
St. Denis
Steckle
Stoffer
Stronach
Szabo
Telegdi
Temelkovski
Thibault (Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques)
Thibault (West Nova)
Tonks
Valley
Vincent
Wilson
Wrzesnewskyj

Total: -- 145


CONTRE

Députés

Abbott
Albrecht
Allen
Allison
Ambrose
Anders
Anderson
Arthur
Baird
Batters
Benoit
Bernier
Bezan
Blackburn
Blaney
Boucher
Breitkreuz
Brown (Leeds—Grenville)
Brown (Barrie)
Bruinooge
Calkins
Cannan (Kelowna—Lake Country)
Cannon (Pontiac)
Carrie
Casey
Casson
Chong
Clement
Cummins
Davidson
Day
Devolin
Doyle
Emerson
Epp
Fast
Finley
Fitzpatrick
Flaherty
Fletcher
Galipeau
Gallant
Goldring
Goodyear
Gourde
Grewal
Guergis
Hanger
Harper
Harris
Harvey
Hawn
Hearn
Hiebert
Hill
Hinton
Jaffer
Jean
Kamp (Pitt Meadows—Maple Ridge—Mission)
Keddy (South Shore—St. Margaret's)
Kenney (Calgary Southeast)
Komarnicki
Kramp (Prince Edward—Hastings)
Lake
Lauzon
Lemieux
Lukiwski
Lunn
Lunney
MacKay (Central Nova)
MacKenzie
Manning
Mark
Mayes
Menzies
Merrifield
Miller
Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam)
Moore (Fundy Royal)
Nicholson
Norlock
Obhrai
Oda
Paradis
Petit
Poilievre
Prentice
Preston
Rajotte
Reid
Richardson
Ritz
Scheer
Schellenberger
Shipley
Skelton
Smith
Solberg
Sorenson
Stanton
Storseth
Strahl
Sweet
Thompson (New Brunswick Southwest)
Thompson (Wild Rose)
Toews
Trost
Turner
Tweed
Van Kesteren
Van Loan
Vellacott
Verner
Warawa
Warkentin
Watson
Williams
Yelich

Total: -- 118


PAIRÉS

Députés

Bouchard
Freeman
Lalonde
O'Connor
St-Cyr
Tilson
Van Loan
Wallace

Total: -- 8


    Je déclare la motion adoptée.

[Traduction]

    À l'ordre, s'il vous plaît. Je signale à la Chambre que, en raison du vote par appel nominal différés, l'étude des initiatives ministérielles sera prolongée de douze minutes.

Recours au Règlement

Questions orales  

[Recours au Règlement]
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement relativement à la période des questions.
    Au cours de la période des questions, le leader parlementaire de l'opposition officielle, le député de Wascana, a dit que j'avais présenté des excuses pour avoir induit délibérément la Chambre en erreur, si je le cite bien.
    Je tiens à préciser officiellement qu'il n'en est rien. Un député qui en accuse un autre d'avoir induit délibérément la Chambre en erreur tient des propos antiparlementaires. Je n'ai pas induit la Chambre en erreur, si bien que je n'ai pas présenté d'excuses pour l'avoir fait.

Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Loi modifiant certaines lois en matière d’identification par les empreintes génétiques

     La Chambre reprend l’étude la motion portant que le projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d’identification par les empreintes génétiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, je voudrais parler du projet de loi C-18, qui est une sorte de projet de loi omnibus, mais un petit projet de loi omnibus, concernant l’utilisation de la technologie génétique dans notre système de justice pénale.
     Comme le ministre nous l’a dit tout à l’heure, le projet de loi vise à remédier à un certain nombre de problèmes dont on ne s’était pas rendu compte lorsque le système a été mis en place en l’an 2000, et de nouveau en 2004-2005, lorsque des modifications assez importantes à la loi ont été adoptées et sont entrées en vigueur. Il est devenu évident depuis que des modifications supplémentaires s’imposent.
     Je dois reconnaître que j’aborde ce projet de loi en hésitant à l’appuyer. Je crois qu’une fois de plus, lorsqu’il s’agit des lois reliées à la criminalité, au Code criminel et au système de justice pénale, le gouvernement prend des mesures ponctuelles qui ne sont pas justifiées par la réalité à laquelle nous sommes confrontés ici, à la Chambre, et plus particulièrement à la réalité à laquelle nous sommes confrontés au Comité de la justice qui se trouve surchargé de travail en raison du grand nombre de projets de loi d'initiative ministérielle qui lui sont soumis. Malheureusement, ce projet de loi en est un nouvel exemple.
     Ce qui aggrave les choses, c’est que la loi qui a été adoptée pour établir la banque de données génétiques oblige le Parlement à réexaminer la loi au bout de cinq ans. Ce délai de cinq ans a expiré en 2005. Le gouvernement libéral précédent n’a pas procédé à cet examen et le gouvernement actuel n’a toujours pas annoncé quand il le ferait.
     Le projet de loi C-18 devrait s’inscrire dans l’examen global que nous allons faire. À cause de cette mesure, nous allons répéter, dans une large mesure, le travail que nous avons accompli au sujet de la banque de données génétiques.
     C’est également un exemple flagrant de l’hypocrisie du gouvernement qui, lorsqu’il siégeait dans l’opposition, avait présenté un certain nombre de projets de loi d’initiative parlementaire dont l’un, qui était parrainé par un membre du Cabinet actuel, visait à faire des ajouts au fichier. Ce projet de loi, baptisé la loi de Lindsey, devait créer un fichier distinct pour les empreintes génétiques trouvées sur les lieux d’un crime qui pouvaient provenir de personnes décédées.
     Lorsque des membres de la famille, des êtres chers et des amis proches disparaissent, nous n’avons aucune possibilité de nous servir de la technologie génétique que nous possédons et qui pourrait être très utile pour retrouver ces personnes.
    L'établissement de ce registre distinct bénéficie du soutien de tous les partis et, pourtant, le gouvernement n'a pas trouvé le moyen d'inclure cette disposition dans ce projet de loi afin que nous puissions l'étudier. Le gouvernement n'a pas effectué l'examen global. On y procède à la pièce et, je le répète, on étudie seulement un nombre limité de dispositions. Le gouvernement fait fi de ce qu'il préconise depuis longtemps, soit la création de ce registre. Il en fait fi complètement.
    Lorsque nous avons posé une question au ministre à ce sujet plus tôt aujourd'hui, il a répondu: « On s'en occupera une autre fois ». Cela n'est tout simplement pas acceptable. Cela nous amène à nous demander ce que le gouvernement veut faire du système de justice criminelle. Comment s'attaque-t-il efficacement aux problèmes de criminalité dans notre pays? Comme je le dis, nous nous posons la question, mais la réponse est passablement évidente. Le gouvernement ne sait pas où il va et il n'agit pas avec efficacité ou efficience.

  (1520)  

    Je vais maintenant commenter expressément les dispositions du projet de loi. Comme je l'ai dit, nous n'avons pas de problème à adopter le principe du projet de loi et à le renvoyer ensuite au Comité de la justice. Le projet de loi remédierait à certains problèmes au niveau de l'infrastructure actuelle de la banque de données génétiques, mais il nous inspire certaines préoccupations que nous exposerons en comité.
    Les modifications que nous avons adoptées, et qui ont acquis force de loi en 2005, comportaient quelques dispositions rétroactives. La préoccupation dont le comité a débattu à l'époque tenait au fait que les dispositions rétroactives contrevenaient peut-être à la Charte. Nous ne savons pas, et je ne suis pas sûr que le gouvernement sache, si ces dispositions ont été contestées. Toutefois, si elles l'ont été, cela nous amène à nous interroger sur les dispositions rétroactives figurant dans l'actuel projet de loi, lesquelles visent un petit nombre d'accusations et permettent de prélever des échantillons auprès de gens qui ont déjà été reconnus coupables et qui sont actuellement incarcérés. C'est là une des questions qu'il nous faudra soulever.
    Plusieurs autres dispositions posent problème au chapitre de la vie privée et de nos droits garantis par la Charte. Un exemple parmi tant d'autres est la disposition du projet de loi qui permettrait à la banque de données de communiquer des renseignements quand un échantillon sous examen ne correspond pas entièrement au profil d'identification génétique connu, selon les normes les plus strictes. Nous avons différentes normes. Il y a bien évidemment des dispositions qui portent sur les profils génétiques écartés. Nous avons aussi des dispositions sur les cas où la correspondance est presque totale, et nous avons ensuite différentes gradations intermédiaires.
    Le projet de loi propose de permettre à la banque de données de communiquer des renseignements quand l'échantillon à l'étude ne correspond que moyennement. Puisque cela soulève des questions liées à la Charte, il faudra étudier la disposition en comité pour déterminer s'il faudra en préciser le libellé ou peut-être l'éliminer entièrement.
    L'autre disposition dont j'ai déjà parlé à la Chambre est celle qui faciliterait l'exécution d'ordonnances portant sur la destruction d'échantillons qui n'ont pas été prélevés convenablement, ce qui veut d'habitude dire qu'un échantillon a été prélevé dans le cadre d'un crime qui n'était pas prévu dans la loi en vigueur. Le problème, c'est que, quand nous avons tenu des audiences en 2004-2005, les techniciens de la banque de données savaient que c'était un problème important parce que la destruction d'un échantillon donné peut entraîner la destruction d'autres échantillons. Il va falloir se pencher sur cette question.
    Cependant, il y a encore un autre problème. En effet, le projet de loi permettrait au procureur, à la Couronne, de demander qu'un échantillon qui n'a pas été prélevé convenablement soit détruit sans que le gouvernement ait besoin d'en aviser la personne concernée. En toute justice, si la substance corporelle n'a pas été prélevée convenablement, il faudrait dire à la personne concernée que cet échantillon sera détruit. Je pense que, par respect pour la vie privée et, honnêtement, par souci de justice, les personnes concernées devraient être avisées.
    L'une des questions majeures que nous aborderons quand nous procéderons à l'examen de la loi adoptée en 2000 sera celle de savoir si nous devons élargir l'éventail de crimes pour lesquels il est possible de prélever un échantillon de substances corporelles. Actuellement, les crimes sont classés en deux catégories, et tous ceux qui sont actuellement assujettis aux dispositions de cette loi sont des crimes très graves: meurtre, tentative de meurtre, agression sexuelle grave, agression physique grave et autres crimes de cet ordre.

  (1525)  

    Dans d'autres régimes, notamment au Royaume-Uni mais aussi dans un certain nombre d'États américains, le prélèvement de tels échantillons s'applique maintenant à un très grand nombre de crimes. Le comité a été un peu estomaqué d'entendre que, en Angleterre, les autorités peuvent demander et obtenir des échantillons de substances corporelles auprès d'une personne accusée non pas d'un crime, mais d'une infraction, par exemple une infraction routière.
    Nous discuterons de la possibilité d'allonger la liste des crimes pouvant donner lieu à un prélèvement de substances corporelles.
    C'est toutefois ce que nous faisons avec ce projet de loi. Pour moi, c'est signe que nous devrions nous attaquer à l'examen tout de suite plutôt que de le remettre indéfiniment, parce que nous allongeons la liste des crimes. Nous ajoutons au moins deux autres crimes et peut-être une ou deux autres infractions connexes, mais moins graves.
    Le processus que nous suivons est très peu efficace. Je crois que cela empêche la Chambre et le comité et, au bout du compte, la population de bénéficier de cet examen de la loi adoptée en 2000, c'est-à-dire du régime actuellement en place. Je reconnais que certaines des réserves que nous avions en 2000 doivent être examinées en regard de la Constitution et de la Charte.
    Dans l'affaire R. c. Rogers, la Cour suprême a rendu au printemps dernier une décision qui, selon moi, constitue un signal clair. Compte tenu de cette décision, certaines réserves que nous pouvions avoir ne s'appliquent plus, mais ce n'est tout de même pas un chèque en blanc. Contrairement à ce que j'ai entendu le ministre dire ce matin, je crois que la Cour suprême a encore des réserves quant à l'utilisation des empreintes génétiques relativement à certains chefs d'accusation, par exemple dans le cas d'infractions mineures. Ces réserves concernent le droit à la vie privée et les libertés civiles.
    Nous ne devrions pas étudier ce projet de loi sans avoir fait au préalable un examen complet parce que nous devons atteindre un juste équilibre. Je crains que nous soyons en train d'adopter ces modifications législatives sans avoir pris le temps de déterminer où se trouve cet équilibre. La Cour suprême s'est prononcée très clairement à cet égard, dans l'affaire Rogers et dans d'autres causes: le problème fondamental est l'atteinte au droit à la vie privée de la personne, en particulier lorsqu'on fait des prises de sang à des fins d'analyse génétique, mais également lorsqu'on prélève de la salive ou une autre substance corporelle.
    En examinant l'expérience acquise ailleurs dans le monde, notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis, nous avons pu constater avec intérêt l'efficacité de cet outil pour permettre à la police d'obtenir des condamnations ou pour innocenter des gens dès le départ.
    Dans quelques cas d'erreurs judiciaires commises au Canada, c'est principalement le recours à la banque de données génétiques et à cette technologie qui a permis d'innocenter les personnes ayant été injustement condamnées. Au Canada, nous savons particulièrement bien que cet outil peut servir non seulement pour obtenir des condamnations, mais aussi pour innocenter des gens, parfois très tôt dans le cours des procédures.
    Il ne fait aucun doute que nous voulons adopter ce genre de mesure. La vraie question est le message que nous devons envoyer au gouvernement pour qu'il cesse de légiférer de cette manière. Lorsque nous sommes en présence d'un problème relatif à la criminalité ou au système de justice pénale, nous avons grand besoin d'une perspective globale. Nous devons avoir recours beaucoup plus souvent aux projets de loi omnibus dans ce domaine.
    Chaque fois que je prends la parole au sujet d'un nouveau projet de loi, je signale qu'il est absolument nécessaire de réformer complètement le Code criminel ainsi que d'autres lois, notamment celles sur les drogues. Nous aurions dû faire cela il y a 20 ans. Il y a dans le Code criminel des articles qui se contredisent carrément et qui, dans beaucoup de cas, prêtent à confusion. Cette loi est beaucoup trop longue et elle contient de nombreux chevauchements.

  (1530)  

    Je ne peux m'empêcher de faire remarquer que l'un des organismes qui auraient pu nous appuyer dans cette démarche est la Commission du droit. C'est là une des tâches que nous aurions pu lui confier dans le cadre de l'ébauche d'une politique qui aurait servi à établir la façon de procéder pour réformer le Code criminel.
    Je profite de l'occasion pour signaler à quel point il est important que le gouvernement revienne sur sa décision et qu'il rétablisse la Commission du droit, afin qu'on puisse lui confier cette responsabilité. Il est évident que le gouvernement n'a ni la capacité, ni même la volonté de le faire. Il faudra donc confier cette tâche à quelqu'un d'autre et espérer qu'elle sera achevée dans un délai raisonnable.
    En somme, nous appuyons, en tant que parti, le principe du projet de loi et croyons qu'il devrait être renvoyé à un comité. J'ai quelques réserves à l'égard de la rétroactivité et de la protection de la vie privée, ainsi que des questions liées à la Charte. Toutefois, je crois qu'elles pourront être résolues assez facilement à l'étape de l'étude en comité. Espérons que le gouvernement reconnaîtra bientôt la nécessité de réformer le système de justice pénale dans son ensemble.

Recours au Règlement

Loi de 2006 sur les droits d'exportation de produits de bois d'oeuvre — Décision de la présidence 

[Décision de la présidence]
    Avant que je ne demande s'il y a des questions et observations concernant le discours du député, j'aimerais régler un recours au Règlement soulevé ce matin par la députée de Vancouver-Est au sujet de la motion adoptée par la Chambre aux termes de l'article 56.1 du Règlement. La députée a soutenu que la motion était irrecevable et qu'elle n'avait rien à voir avec une motion pour affaire courante concernant les heures de séance ou d'ajournement de la Chambre ou l'agencement de ses travaux, mais qu'elle équivalait plutôt à une motion d'attribution de temps ou de clôture. Je crois que les mots qu'elle a employés étaient que la motion visait à « couper court  » au débat. Dans son argument, elle a cité un extrait d'une décision que j'ai rendue en 2001, dans laquelle j'exprimais certaines préoccupations à l'égard du fait que l'article 56.1 était utilisé à des fins qui n'avaient pas été envisagées au moment de son adoption.
    L'ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes, à la page 571, décrit l'article 56.1 du Règlement de la façon suivante:

[Français]

    Si, à un moment quelconque au cours d’une séance de la Chambre, le consentement unanime est refusé pour la présentation d’une « motion pour affaire courante », un ministre peut demander à la présidence, pendant les Affaires courantes, de mettre la motion aux voix. À ces fins, l’expression « motion pour affaire courante » désigne les motions qui peuvent s’imposer pour l’observation du décorum de la Chambre, le maintien de son autorité, l’administration de ses affaires, l’agencement de ses travaux, la détermination des pouvoirs de ses comités, l’exactitude de ses archives ou la fixation des jours où elle tient ses séances ainsi que des heures où elle les ouvre ou les ajourne. La motion, qui ne peut être ni débattue ni modifiée, est immédiatement mise aux voix par le Président. Si 25 députés ou plus s’opposent à la motion, elle est réputée retirée; sinon, elle est adoptée.

[Traduction]

    Dans le cas qui nous occupe, on a adopté une motion voulant que la Chambre « ne s'ajourne que lorsque les délibérations seront terminées ». Cela s'applique à une motion de deuxième lecture d'un projet de loi, une motion qui, j'ajouterais, a fait l'objet d'un amendement et d'un sous-amendement. Comme nous l'avons vu plus tôt aujourd'hui, le débat sur le sous-amendement s'est terminé et un vote est prévu pour demain, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles. La Chambre reste donc saisie de l'amendement et de la motion principale. En fait, l'effet de cette motion n'est pas très différent de celui d'une motion aux termes de l'article 26 du Règlement, qui prévoit la poursuite du débat sur une question dont la Chambre est saisie, ce qui veut dire qu'elle prévoit une prolongation de la séance d'une durée non précisée pour la poursuite du débat sur une question particulière. On pourrait donc faire valoir que cela peut être perçu comme une motion concernant l'administration des affaires de la Chambre ou l'agencement de ses travaux.
    En lisant la motion proposée par le leader du gouvernement à la Chambre et adoptée par la Chambre, je constate que tout député qui désire participer au débat sur l'amendement et sur la motion principale et qui ne l'a pas encore fait aura l'occasion de le faire. La motion ne précise pas de limite pour la fin de ces délibérations, comme ce serait le cas s'il s'agissait d'une motion d'attribution de temps ou de clôture. Au lieu de cela, la motion ne fait que prolonger la séance pour l'étude de la motion dont la Chambre sera alors saisie. C'est très différent. Les précédents dont je dispose, y compris mes propres décisions antérieures, sont donc insuffisants, à mon avis, pour que je déclare la motion irrecevable cette fois-ci.
    Toutefois, cela n'enlève rien aux préoccupations soulevées par la députée de Vancouver-Est au sujet de la nature des motions présentées aux termes de l'article 56.1 du Règlement. Mon prédécesseur et moi-même avons tous deux encouragé le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre à examiner l'emploi correct de cet article du Règlement. Jusqu'à maintenant, je ne suis au courant d'aucun rapport que le comité aurait présenté sur cette question.
    Je remercie la députée de Vancouver-Est d'avoir porté cette affaire à l'attention de la Chambre, mais je crois que la motion qui a été adoptée est recevable.

  (1535)  

Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques

[Initiatives ministérielles]
    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, comme le député l'a mentionné dans ses commentaires, nous avons déjà été saisis d'un grand nombre de projets de loi relatifs à la justice, et je tiens à le remercier de sa participation à cet égard.
    Le projet de loi dont nous sommes saisis est un projet de loi de la législature précédente qui a été présenté de nouveau. Il s'agissait du projet de loi C-72, modifications techniques à la base de données génétiques. Le député voudrait peut-être rafraîchir notre mémoire au sujet du sentiment général de la Chambre en ce qui concerne l'importance de la base de données génétiques en tant qu'outil permettant aux autorités de résoudre des questions de nature criminelle ou judiciaire.
    Je concluerai en disant que s'il s'agit de modifications techniques, le député a soulevé quelques points intéressants qui justifieraient le renvoi du projet de loi au comité pour compléter les travaux entrepris pendant la dernière législature.
    Le député a soulevé une question et j'aimerais qu'il précise sa pensée. Il s'est dit préoccupé par le nombre de projets de loi relatifs à la justice qui ont été présentés, en se demandant si cela ne camouflait pas des intentions cachées. Il s'est aussi demandé si une telle quantité de projets de loi ne pas pourrait entraver le fonctionnement du Parlement.
    Monsieur le Président, dans mon discours d'hier, j'ai soulevé la question des arrière-pensées du gouvernement.
    Le député a mentionné que cette mesure législative était au stade d'ébauche pendant la dernière législature. Par conséquent, il ne doit pas cadrer avec les intentions du gouvernement, qui consistent à s'attaquer aux grands dossiers relatifs au crime en présentant, un à un, une série de projets de loi à la Chambre, sans pour autant s'attendre à ce que nous les examinions tous avant les prochaines élections générales fédérales qui, comme nous le savons tous, seront déclenchées avant longtemps. Les questions dont le Comité de la justice a déjà été saisi sont traitées en priorité. Ces dossiers sont d'une telle ampleur que rien de ce que nous pourrions renvoyer au comité en ce moment, notamment ce projet de loi, ne pourrait revenir à la Chambre avant les prochaines élections fédérales.

  (1540)  

    Monsieur le Président, le député de Windsor—Tecumseh a soulevé un certain nombre de points dans son discours au sujet des dispositions rétroactives, du besoin réel d'un examen du Code criminel et de quelques questions liées à la protection des renseignements personnels et à la Constitution. Vers la fin de son discours, il a parlé de l'utilité de la Commission du droit et de la façon dont elle aurait pu être utilisée dans ces circonstances. La Commission du droit fait partie des organismes dont la suppression a été annoncée par le gouvernement conservateur la semaine dernière dans le cadre de son programme de compressions.
    Le député peut-il nous parler du rôle particulier qu'aurait pu jouer la Commission du droit dans ce programme, voire dans tout l'examen du Code criminel?
    Monsieur le Président, un jour ou deux après l'annonce de ces compressions par le Conseil du Trésor, celle concernant la Commission du droit en particulier, le Comité de la justice a entendu des témoins dont un porte-parole de l'Association canadienne des chefs de police. Ce porte-parole a fait valoir le même point de vue que moi, à savoir qu'il faut réexaminer le Code criminel dans son ensemble. L'approche à la pièce adoptée par le gouvernement déplaît aux chefs de police parce qu'elle est source de confusion pour l'association, ses dirigeants et l'administration de la justice en général.
    Je lui ai demandé s'il connaissait un organisme autre que la Commission du droit qui soit apte à rédiger un code criminel modèle, c'est-à-dire un document d'orientation traitant de la façon de restructurer le Code criminel. Il n'a pu nommer aucun organisme qui pourrait le faire, et il a tout à fait raison.
    Je ne connais aucun autre organisme, à part la Commission du droit, qui pourrait mobiliser les ressources du pays pour faire un examen global, dont nous avons désespérément besoin, de notre système de justice pénale et, notamment, du Code criminel.

[Français]

    Monsieur le Président, nous appuyons ce projet de loi. Toutefois, je trouve un peu inquiétant d'élargir les pouvoirs de la GRC relativement à la gestion de la transmission des informations génétiques, au lendemain du rapport O'Connor déposé en cette Chambre.
    Ce rapport a fait la lumière sur des fautes graves commises par la GRC. Le juge O'Connor a découvert, en cours d'enquête, que de fausses informations au sujet de Maher Arar avaient été transmises par la GRC aux autorités américaines, et que ces dernières avaient entraîné la déportation de M. Arar en Syrie. À la suite de ces fausses informations transmises par le gouvernement canadien au gouvernement américain, M. Arar a été torturé.
    Il devient extrêmement urgent que la GRC prenne ses responsabilités dans ce dossier. Or elle ne les prend pas, personne n'ayant été accusé. J'éprouve donc des inquiétudes, bien que nous appuyions ce projet de loi qui permet également la transmission de l'information génétique, du Canada à d'autres pays.
    Comment peut-on contrôler ces informations génétiques? Ma question s'adresse au député du NPD: comment peut-on éviter que puissent se produire d'autres dérapages, comme se sont produits le dérapage concernant Maher Arar et les autres qui ont certainement eu lieu dans le passé? Quel type d'amendement pourrait-on apporter à ce projet de loi afin d'éviter ces pièges?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue du Bloc de sa question.
    Il n'existe pas de régime qui permettra à la GRC ou à d'autres forces policières d'être parfait. Par contre, on peut établir des règles pour les contrôler.
    Mon collègue a soulevé un bon point, car un des amendements suggérés dans ce projet de loi permettrait à nos agents policiers et à la banque d'ADN de donner des informations d'ordre génétique à des policiers étrangers. Ce serait la première fois que nous ferions cela. Cela entraînerait un problème potentiel que nous étudierons en comité.
    Encore une fois, il n'existe pas de système absolument parfait. Par contre, nous continuerons à essayer.

  (1545)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis très heureux d'apporter mon soutien au projet de loi C-18 et de dire que je souhaite qu'il soit renvoyé à un comité pour une étude plus approfondie.
    La Banque nationale de données génétiques est une grande réussite. Elle aide les policiers à mener leurs enquêtes sur des milliers de crimes graves. Elle apporte une contribution d'une valeur incalculable à la sécurité des Canadiens. Le projet de loi ne peut qu'ajouter à ce succès.
    Une bonne partie de mon discours sera familier à ceux qui ont participé au débat sur l'ancien projet de loi C-13 lors de la dernière législature et tout particulièrement aux députés qui faisaient partie du comité permanent au moment des audiences sur le projet de loi parce que, comme l'a déclaré le ministre, le projet de loi C-18 ouvre la voie à la proclamation de l'ancien projet de loi C-13. Quoi qu'il en soit, il est important d'expliquer aux députés le fonctionnement de la loi et du système de données génétiques.
    La Banque nationale de données génétiques joue quatre grands rôles. Elle aide les agences d'exécution de la loi à résoudre les crimes, premièrement, en permettant de relier des crimes entre eux lorsqu'il n'y a pas de suspect. La banque de données génétiques informerait les corps policiers visés afin qu'ils comparent leurs notes sur leurs enquêtes respectives.
    Deuxièmement, elle aide à identifier les suspects. Lorsque la banque de données génétiques permet de relier le lieu d'un crime au profil génétique d'un délinquant qui a été condamné, les policiers en sont informés afin qu'ils puissent mieux orienter leur enquête.
    Troisièmement, elle aide à éliminer les suspects lorsqu'aucun lien ne peut être établi entre le lieu d'un crime et le profil d'un individu fiché dans la banque de donnée. On néglige souvent cet aspect dans le débat sur la banque de données ou sur les modifications à apporter à la loi, mais la banque de données a servi à écarter des suspects et à les innocenter. Si aucun lien ne peut être établi, les policiers savent qu'aucun des 100 000 délinquants dont le profil génétique se trouve dans la banque de données n'était sur les lieux du crime.
    Enfin, la banque de données génétiques sert à déterminer si un récidiviste endurci est en cause. La banque de données fait savoir aux policiers que plusieurs crimes semblent avoir été commis par le même individu. Cela est important, car il est utile pour une enquête de savoir qu'un individu commet des crimes à répétition.
    Comme David Griffin, un cadre de l'Association canadienne des policiers, l'a déclaré devant le comité permanent lors des audiences sur l'ancien projet de loi C-13:
     L'analyse d'empreintes génétiques est une technique innovatrice dans l'application et l'administration de la justice. C'est une science qui permet de découvrir et de condamner les délinquants et d'acquitter les innocents. Dans les enquêtes policières importantes, l'épargne des coûts par la réduction du temps consacré à l'enquête et l'identification, la confirmation ou l'élimination des suspects peut être considérable. C'est particulièrement important dans des crimes tels que les enlèvements d'enfants par des étrangers et pour lesquels le temps est précieux pour retrouver la victime vivante.
    Une ordonnance de prélèvement de substances corporelles peut uniquement être rendue relativement à un nombre limité d'infractions. Les juges conservent le pouvoir discrétionnaire de refuser de rendre une ordonnance, sauf dans les cas les plus graves. L'information obtenue peut seulement servir à l'enquête sur les infractions criminelles. Le fait que les données obtenues servent uniquement aux enquêtes visant ces crimes est un autre aspect important qui est souvent oublié par ceux qui critiquent la Banque nationale de données génétiques.
    Le projet de loi C-18 ne modifie pas les dispositions fondamentales du Code criminel sur l'analyse génétique, ni celles de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Le suivi parlementaire qui doit être effectué au bout de cinq ans et qui n'a pas encore été entrepris est la façon appropriée d'envisager d'autres changements ayant une portée étendue. Le projet de loi dont nous sommes saisis se borne à proposer des améliorations techniques au système en place.
    Le ministre a déjà fait allusion à l'appui enthousiaste donné par la Cour suprême aux dispositions législatives actuelles dans l'arrêt Rodgers. Je tiens à assurer aux députés que la mesure proposée respecte la Charte. Qui plus est, les solides mesures de protection de la vie privée qui sont déjà en place demeurent inchangées.

  (1550)  

     C’est probablement au Canada que les protections contre la mauvaise utilisation des profils d’identification génétique sont les plus solides. Elles sont plus fortes que dans tout autre pays. La loi prévoit que les substances corporelles prélevées en vertu d’une autorisation de la banque de données génétiques pour que le profil soit versé dans la banque ne peuvent servir qu’à l’analyse génétique. Les parties inutilisées des substances prélevées doivent être conservées en sécurité à la banque nationale de données génétiques.
     De plus, c’est une infraction criminelle d’utiliser les substances corporelles ou les résultats d’une analyse génétique obtenus en vertu d’une autorisation de la banque, sinon pour les transmettre à la banque. Tout manquement à cette disposition constitue une infraction mixte passible d’une peine maximum d’emprisonnement de deux ans lorsqu’il y a mise en accusation.
     L’utilisation des profils d’identification génétique et des substances corporelles à la banque nationale est strictement limitée à la seule comparaison entre le profil du délinquant et les profils établis à partir de substances trouvées sur les lieux du crime. Toute utilisation de l’information ou des substances qui sont conservées à la banque ou la communication de l’information qu’elles peuvent recéler sont strictement limitées à la seule identification prévue par la loi. Voilà un autre détail que négligent ceux qui critiquent la banque de données génétiques. En réalité, toute dérogation à ces dispositions est une infraction criminelle passible d’une peine maximum de deux ans d’emprisonnement.
     On ne peut faire savoir qu’aux organismes compétents d’application de la loi, aux laboratoires d’enquête ou aux utilisateurs autorisés du fichier automatisé des relevés de condamnations criminelles géré par la GRC si le profil d’identification génétique d’une personne se trouve dans le fichier des condamnés.
     Bien que les substances prélevées soient conservées dans la banque après analyse, elles ne peuvent être utilisées que pour d’autres analyses génétiques lorsque des progrès technologiques appréciables ont été accomplis après le moment où le profil initial a été établi. Les résultats de toute analyse génétique ultérieure et les résidus de substances corporelles sont soumis aux mêmes contrôles rigoureux que le profil initial et les substances prélevées au départ.
     La communication de profils d’identification génétique à des gouvernements étrangers et à des organisations internationales n’est autorisée que pour des fins légitimes d’application de la loi, et seulement aux termes d’accords précis qui doivent prévoir des garanties pour protéger le caractère privé des renseignements personnels qui sont communiqués.
     Je répète que ces protections accordées par la loi ne sont pas modifiées par le projet de loi C-18. Le projet de loi laisse inchangées, intactes ces protections des droits des Canadiens contre toute mauvaise utilisation possible de la banque de données génétiques ou contre toute utilisation autre que celle que notre police peut en faire pour protéger les Canadiens et la société. Concrètement, ces protections sont assurées par les garanties de procédure élaborées par la banque nationale de données génétiques.
     Conformément à un accord international, l’analyse génétique qui est faite par notre banque, et par les autres banques de données génétiques dans le monde, ne porte que sur un petit segment de l’ensemble du génome humain. Au niveau international, les scientifiques ont choisi 13 locus à analyser, car il s’y trouve d’importantes variations dans la population mondiale. Les données génétiques analysées sont souvent qualifiées d’anonymes, car, mis à part la possibilité d’identifier le sexe, il n’y a aucun lien avec les attributs physiques ou médicaux. Par conséquent, le profil d’identification produit par la banque ne peut révéler la couleur des cheveux, de la peau ou des yeux d’une personne.
     En raison des variations, tous, à l’exception des jumeaux identiques, ont un profil génétique unique. C’est cette possibilité d’identifier une personne sans l’ombre d’un doute qui fait de la banque de données génétiques et de sa collection de données des outils aussi précieux pour l’application de la loi. Il est possible d’identifier une personne au-delà de tout doute.
     La GRC a élaboré des procédures internes pour éviter toute manipulation des données. Sur réception d’une trousse, la banque sépare le matériel génétique des données personnelles. Les substances biologiques et l’information signalétique reçoivent le même code à barres unique. La banque de données conserve les substances et les analyse. Les données personnelles et la série complète des empreintes digitales sont envoyées aux Services d’information sur les casiers judiciaires canadiens, qui les conservent dans des conditions de sécurité strictes. Par conséquent, le personnel de la banque de données ne sait absolument pas à qui appartiennent les substances analysées ni, lorsqu’il y a correspondance, quel délinquant condamné est lié à la scène du crime.

  (1555)  

     Il est important de souligner que nous avons fait le maximum pour séparer les renseignements contenus dans le prélèvement de substances corporelles pour analyse génétique et les renseignements associés à la personne à qui appartient ce prélèvement. Le code-barres est simplement communiqué aux Services d’information sur les casiers judiciaires canadiens qui récupèrent les renseignements d’identification et les envoient au laboratoire qui a téléchargé le profil vers le fichier de criminalistique. Bien entendu, les personnes non autorisées ne peuvent pas entrer dans la banque de données ou avoir accès aux Services d’information sur les casiers judiciaires pour examiner ou récupérer des données.
     Le site web de la Banque nationale de données génétiques contient une foule de renseignements sur la façon dont la banque de données fonctionne, son histoire et la science sur laquelle elle se fonde. J’espère que les membres du comité permanent qui n’ont pas eu l’occasion de visiter la Banque nationale de données génétiques s’organiseront pour le faire. Je sais que le personnel se fera un grand plaisir de leur montrer comment fonctionne le système et de répondre à toutes leurs questions. Une visite de la banque de données a certainement permis aux députés qui ont étudié l’ancien projet de loi C-13 de comprendre le point de vue des témoins et de recommander des amendements.
     Enfin, je rappelle à la Chambre qu’un comité consultatif de la Banque nationale de données génétiques a été mis sur pied par voie de règlement. Ses membres comprennent d’éminents chercheurs, des spécialistes de la protection de la vie privée et des droits de la personne, ainsi qu’un ancien juge de la Cour suprême. Les fonctions du comité portent sur toutes les questions reliées à l’établissement et au fonctionnement de la banque de données génétiques.
     Les députés trouveront très intéressants les rapports que le comité consultatif a publiés au cours des années. Les membres du comité consultatif seront sans doute appelés à témoigner lorsque le Parlement examinera la loi.
     Je voudrais maintenant aborder certaines dispositions particulières du projet de loi C-18. En fait, l’efficacité de la Banque nationale de données génétiques dépend de trois facteurs: premièrement, le nombre de profils contenus dans le fichier de criminalistique, deuxièmement, le nombre de profils qui se trouvent dans le fichier des condamnés et, troisièmement, les ressources dont dispose la police pour poursuivre les pistes générées par la banque de données.
     Une fois que le projet de loi C-18 sera adopté et que l’ancien projet de loi C-13 sera proclamé, il y aura beaucoup plus de contrevenants qui pourront être répertoriés dans la banque de données génétiques en vertu d’une ordonnance et la police pourra verser un plus grand nombre d’empreintes prélevées sur les lieux d’un crime dans la Banque nationale de données génétiques. Cela permettra certainement d’établir un plus grand nombre de correspondances entre les empreintes génétiques prélevées sur les lieux d’un crime et le fichier des condamnés ou encore entre différents lieux de crime. C’est là l’objectif ultime de la banque de données génétiques.
    En ce qui concerne les ressources de la police, nous avons réservé 15 millions de dollars sur deux ans pour accroître la capacité de la Banque nationale de données génétiques de traiter les échantillons prélevés chez des délinquants reconnus coupables, et pour augmenter la capacité des laboratoires régionaux de traiter les échantillons recueillis sur les lieux de crimes. Sans ces ressources supplémentaires et sans les modifications proposées dans le projet de loi C-18, la proclamation de l'ancien projet de loi C-13 n'aiderait guère à atteindre l'objectif visé par le Parlement.
    Toutefois, l'ancien projet de loi C-13 contenait des lacunes qu'il fallait corriger. Le gouvernement précédent a présenté l'ancien projet de loi C-72 pour corriger les problèmes qui se posaient dans le projet de loi C-13. Ce projet de loi aurait, premièrement, remanié la définition de manière à ce que les divers amendements soient cohérents les uns avec les autres dans un ordre logique; deuxièmement, il aurait modifié les formulaires pour tenir compte des changements apportés à la procédure d'obtention d'une ordonnance de prélèvement rétroactif; troisièmement, il aurait garanti que le commissaire ne fournisse de plus amples renseignements concernant une éventuelle correspondance de données génétiques qu'à la demande du laboratoire ou de la police; enfin, il aurait corrigé une différence dans les versions française et anglaise de l'article autorisant la mise en commun internationale de profils génétiques.
    L'ancien projet de loi C-72 contenait de nombreuses autres modifications du libellé du projet de loi C-13 et deux modifications procédurales demandées par les provinces pour réduire les coûts; une disposition permettant de tenir des audiences par vidéoconférence sur le prélèvement rétroactif; enfin, une procédure plus simple relativement aux ordonnances comportant une erreur, procédure qui aurait éliminé une requête auprès des tribunaux d'appel afin que l'ordonnance soit annulée et l'aurait remplacée par une attestation délivrée par le procureur général. Ces modifications reviennent dans le projet de loi C-18, dont nous sommes saisis aujourd'hui. Ce texte comporte, comme le ministre l'a dit, de nombreuses autres clarifications et améliorations qui ont été proposées par des responsables depuis le dépôt de l'ancien projet de loi C-72.
    Les députés doivent savoir que les provinces ne seront pas prêtes avant plusieurs mois. Elles doivent apprendre à leurs procureurs, policiers, administrateurs judiciaires et employés de bureau les nouvelles procédures. Vous comprenez bien qu'elles ne vont pas commencer cela avant que le projet de loi n'ait reçu la sanction royale.

  (1600)  

    Nous sommes d'avis que la Chambre devrait agir rapidement pour renvoyer le projet de loi C-18 au comité et c'est donc avec plaisir que j'exhorte la Chambre à adopter le projet de loi C-18 à l'étape de la deuxième lecture.
    Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le député des commentaires qu'il a formulés à l'appui du projet de loi.
    Il existe déjà, comme il le sait sûrement à titre de secrétaire parlementaire et de député, un projet de loi d'initiative parlementaire qui a été déposé par le député de Burlington et qui propose le recours à la banque de données génétiques ou à un autre registre de données génétiques pour tenter d'aider les familles de personnes disparues à tourner la page.
    Le secrétaire parlementaire doit également savoir que le gouvernement dont il fait partie a laissé entendre à la Chambre que ce projet de loi devrait obtenir la recommandation royale. Il semble donc peu probable que le gouvernement soit disposé à aider les familles éprouvées à tourner la page ou peut-être même à trouver les personnes disparues.
    Est-il d'avis que ce projet de loi, ou un projet de loi semblable, pourrait aller de l'avant en comité ou autrement. Je suis persuadé qu'une bonne partie des opérations de ce ministère relèvent de son habile direction, à titre de secrétaire parlementaire.
    Y aurait-il à son avis moyen de réaliser les deux principaux objectifs qui sont, d'un côté, d'assurer le respect de la vie privée et donc la protection contre une possible auto-incrimination et, de l'autre côté, d'aider les familles à tourner la page, ce que le gouvernement ne semble pas prêt à appuyer.
    J'aimerais entendre les commentaires du député à ce sujet.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Moncton—Riverview—Dieppe pour sa question et pour son travail au sein du Comité de la justice, qui sera chargé d'examiner le projet de loi C-18 lorsque la Chambre le lui aura renvoyé.
    De ce côté de la Chambre, nous sommes certainement favorables à l'idée d'aider les familles à retrouver les enfants qu'elles croyaient peut-être perdus. C'est un objectif louable qui, selon moi, mérite qu'on examine la question.
    Toutefois, le projet de loi C-18 vise la rationalisation de la banque de données génétiques actuelle. Nous cherchons, par ce projet de loi, à corriger les lacunes qui se sont manifestées au fil du temps, depuis que nous avons commencé à nous servir de cette nouvelle technologie et que de plus en plus d'information a été mise à la disposition des gens qui l'utilisent. Voilà ce que vise le projet de loi. Il allège la mécanique permettant de délivrer des ordonnances de prélèvement de substances corporelles. Il allège la charge de travail de la police et l'aide à obtenir des ordonnances et à les faire appliquer.
    Il y aura un vaste examen de la banque de données génétiques, et je suis d'avis que, à ce moment-là, il conviendra plus qu'actuellement de discuter des changements pouvant être apportés à la banque de données génétiques au-delà de ce que contient le projet de loi C-18.

  (1605)  

    Il reste six minutes à la période des questions et des observations, et trois personnes désirent poser des questions. Pour être juste, j'aimerais que les questions ne durent pas plus qu'une minute chacune et que les réponses soient limitées également à une minute. Le député de Berthier—Maskinongé a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, ma question s'adresse au député conservateur. On sait que la question de la communication des profils semblables à l'étranger préoccupe le Bloc québécois.
    Comme on le sait aussi très bien, le projet de loi prévoit que le commissaire de la GRC est autorisé à communiquer à l'étranger les correspondances de profils génétiques semblables à défaut de correspondance parfaite. Notons que la loi antérieure sur l'identification par les empreintes génétiques autorisait déjà la transmission de correspondances imparfaites, mais exclusivement entre corps policiers canadiens.
    Selon nous, le danger d'élargir les pouvoirs de transmission d'information génétique à l'étranger réside dans l'augmentation des risques de dérapage et dans le fait de mettre les corps de police étrangers sur la piste d'individus dont le profil génétique ne concorde pas avec les échantillons d'ADN trouvés sur le lieu d'un crime.
    J'aimerais savoir du député qui vient de faire son allocution quels moyens, quels amendements, quelles stratégies on peut mettre en place, en ce qui concerne autant la GRC qu'un amendement au projet d'un loi, pour éviter que de telles situations se produisent lorsqu'on communique des informations du Canada vers l'étranger. La marge d'erreur, selon moi, est...

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai assez succinctement parlé des mesures de protection dans mon discours. D'ailleurs, contrairement à ce que certaines personnes pensent à propos de la banque de données génétiques, les renseignements personnels liés à la substance corporelle ne sont pas conservés dans les mêmes locaux que cette dernière. Les données, l'échantillon et les renseignements personnels sont maintenus dans des endroits différents.
    J'encouragerais le député, s'il en a l'occasion, à visiter la banque de données génétiques pour constater lui-même les énormes efforts consentis pour protéger les renseignements personnels. Nous avons à coeur la protection de ces droits légitimes dont jouissent les Canadiens.
    À noter que quand il s'agit de communication avec un État étranger, seul le profil et non la substance corporelle stockée est communiqué au gouvernement étranger en question, et des accords particuliers en la matière sont en vigueur; ils comprennent des mesures de protection pour faire en sorte que les renseignements personnels...
    La députée de Nanaimo—Cowichan a la parole.
    Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire a fait référence à l'examen imminent de la base de données génétiques, et je me demande pourquoi le gouvernement a choisi de ne pas procéder à cet examen.
    Le député de Windsor—Tecumseh a aussi parlé de la nécessité d'une réforme générale du Code criminel, et je me demandais si le secrétaire parlementaire pouvait nous en dire deux mots.
    Monsieur le Président, la base de données génétiques fait l'objet d'un examen. Le système actuel est évidemment d'une grande valeur pour les Canadiens. Il a servi non seulement à résoudre des crimes mais aussi à disculper des innocents, et le processus fera l'objet d'un examen exhaustif. Cela devrait répondre à la question de la députée.
    C'est très simple, le projet de loi comble les lacunes du système. C'est là l'objectif du projet de loi C-18. Ce dernier est une mesure corrective ciblant le registre de données génétiques et il a été conçu pour combler les lacunes, pour rationaliser le système et pour le rendre plus efficace, et non pour y apporter des changements fondamentaux.
    Monsieur le Président, lorsque les Canadiens, d'un océan à l'autre, regardent le débat sur la chaîne CPAC, nombre d'entre eux ne s'y retrouvent plus lorsqu'on parle du projet de loi C-18. On mentionne ce qui est arrivé au projet de loi C-13 et comment il est lié au projet de loi C-72. Tout cela devient un peu compliqué et j'aimerais des explications précises à cet égard.
    Comme le député le sait, depuis les nombreuses années que je siège dans cette Chambre, je prône ardemment l'idée d'adopter des mesures plus musclées à l'égard des crimes contre les enfants, particulièrement les agressions sexuelles et la pornographie juvénile.
    Je me demande si le député pourrait donner des détails sur le traitement prévu dans le projet de loi C-18 à l'égard de ces crimes.

  (1610)  

    Monsieur le Président, la banque de données génétiques repose sur une science complexe. C'est un outil extrêmement complexe, mais son objectif ultime est de protéger les Canadiens et de nous permettre d'identifier des échantillons de substances corporelles et, espérons-le, de mettre derrière les barreaux des contrevenants qui n'auraient pas été incarcérés autrement, notamment ceux qui s'en prennent aux enfants.
    Je félicite le député de Wild Rosede ses efforts à cet égard, notamment pour la protection des enfants. La banque de données génétiques vise précisément ce but. Les échantillons qui sont versés dans la banque de données génétiques peuvent prévenir des crimes.
    Le projet de loi C-18 prévoit également des ordonnances de prélèvement de substances corporelles sans aucune exception pour la sous-catégorie des 16 infractions que nous considérons comme les plus graves. Par conséquent, ces infractions les plus graves entraînent un prélèvement obligatoire de substances corporelles.

[Français]

    Monsieur le Président, je vous remercie de me donner cette occasion de prendre la parole relativement au projet de loi C-18.

[Traduction]

    J'ai deux pensées à partager en guise d'introduction. Le député de Wild Rose a raison. Le public pourrait penser que les numéros C-18, C-72 et C-13 font partie d'un jeu de bingo, mais c'est du sérieux.
    Pris ensemble, ces trois projets de loi permettront aux agents de police et aux services policiers de mieux faire leur travail, qui consiste à inculper et à retracer les gens qui ont commis des crimes, et aussi, comme mon exposé le montrera, à disculper les gens innocents.
    Je tiens aussi à féliciter mon bon ami, le député de Fundy Royal, pour son excellent discours. La frontière entre nos circonscriptions, entre les comtés de Westmorland et d'Albert, n'est pas défendue et je crois que les gens de nos collectivités partagent le même système de valeurs et les mêmes valeurs communautaires.
    Les gens des comtés d'Albert et de Westmorland pourraient croire que le député de Fundy Royal et moi dominons le débat. Je crois que cela s'explique par le fait que nous faisons tous deux partie du comité. Nous ne travaillons pas toujours ensemble, mais nous avons le même objectif, celui de rendre les lois du Canada plus solides et efficaces.
    Ceci dit, je suis heureux de parler du projet de loi C-18, qui vise à faciliter la mise en oeuvre des réformes législatives de la banque de données génétiques. Il faut cependant préciser que ce projet de loi s'appuie sur le très bon projet de loi C-72 présenté par l'ancien gouvernement libéral. Il s'agissait d'une excellente tentative de correction des anomalies désuètes et maladroites contenues dans le système actuel.
    La banque de données génétiques a donné des résultats impressionnants. Elle a fourni des renseignements essentiels aux déclarations de culpabilité dans près de 2 300 cas de crimes graves. Elle a joué un rôle clé pour aider les services de police à résoudre plus de 300 cas de vol à main armée, 1 200 cas d'introduction par effraction, 200 cas de meurtre ainsi que — et ce chiffre pourrait intéresser le député de Wild Rose — 400 cas d'agression sexuelle dans les collectivités canadiennes, d'un océan à l'autre. Ce sont des chiffres impressionnants.

[Français]

    Il s'agit là d'une réussite extraordinaire. De plus, la Banque nationale de données génétiques est un des outils les plus puissants dont disposent les forces policières et les tribunaux du pays. Encore plus important est le fait la Banque nationale de données génétiques permet d'exonérer des citoyens innocents et de punir les vrais coupables des crimes.

[Traduction]

     Trop souvent, la théorie de l’ordre et de la loi des gens d’en face ne tient pas compte du fait que certaines personnes ont été accusées et condamnées à tort. Toute condamnation injuste est inacceptable. Non seulement la banque de données génétiques est un grand succès, mais c’est un exemple étonnant de l’utilisation qui est faite de la technologie pour améliorer la justice en fournissant des preuves irréfutables.
     Voilà pourquoi je me réjouis que le gouvernement conservateur minoritaire ait présenté le projet de loi C-18 qui se fonde en grande partie, comme je l’ai dit, sur l’ancien projet de loi C-72 que le gouvernement libéral avait présenté.
     Les nouvelles modifications que propose le projet de loi C-18, et qui figuraient dans le projet de loi C-72, permettront d’apporter un certain nombre de changements et d’améliorations à la banque de données génétiques, conformément au projet de réforme libéral de la banque de données génétiques que prévoyait le projet de loi C-13 qui a reçu la sanction royale en mai 2005. Les services de police, les provinces et les territoires attendent impatiemment ces améliorations qui ne sauraient arriver trop tôt.
     Je dois me faire l’écho de deux observations du député de Windsor—Tecumseh. L’une d’elles est que le Code criminel du Canada, un épais document à peu près incohérent, bien qu’il ait été créé par un ministre de la Justice conservateur à la fin du XVIIIe siècle, a tellement grossi avec le temps qu’il a besoin d’un sérieux élagage et même d’être complètement refait. Cette opinion n’est pas seulement celle du député de Windsor—Tecumseh. Les députés de Fundy Royal et de Wild Rose savent que l’éminent professeur de l’Université d’Ottawa, David Paciocco, nous en a récemment parlé au comité permanent.

[Français]

    Dans la belle province de Québec, le professeur estimé Daniel Grégoire a aussi demandé ces réformes.

  (1615)  

[Traduction]

     La deuxième raison pour laquelle il faut adopter ce projet de loi, et c’est pour cela que nous l’appuyons, est que le Comité de la justice est tellement inondé de projets de loi que nous devons être certains que le gouvernement est sincère. J’ai entendu des propos sincères de la bouche des membres du comité que je connais bien. Je crois que l’on veut sincèrement que ce projet de loi soit adopté, qu’il soit examiné par le comité et renvoyé à la Chambre et qu’il entre en vigueur. Comme nous sommes tous d’accord quant à son utilité, examinons-le rapidement au comité et adoptons-le.
     Une fois de plus, le gouvernement minoritaire actuel essaie toutefois de montrer que son grand programme législatif est bien le sien. En fait, tous les projets de loi qui nous sont présentés et qui ont plus de trois pages reprennent sans doute des mesures qui ont été présentées par le gouvernement libéral et qui sont mortes au Feuilleton. Ce ne sont pas de nouveaux projets de loi que les conservateurs ont fait préparer par leur service de rédaction express. Le gouvernement doit avoir quelque part un service express pour rédiger les projets de loi.
     Pour ceux que les statistiques intéressent, c’est un des bons projets de loi. C’est un projet de loi libéral auquel on a donné un nouveau numéro. Nous nous ferons un plaisir de le considérer pour le moment comme un projet de loi conservateur s’il est possible de le faire adopter par le comité. Cela dit, la banque de données génétiques, tout comme tout autre programme ou mesure législative du gouvernement, soulève certaines inquiétudes au sujet de la protection de la vie privée.
     Comme de nombreux exemples l’ont montré dans le passé, les renseignements personnels peuvent franchir rapidement les frontières juridiques existantes de même que tous les obstacles imaginables. C’est pourquoi j’insiste sur la nécessité de concilier le droit de tous les citoyens, y compris celui des suspects, à la confidentialité des renseignements personnels et la nécessité de protéger l’ensemble de notre société contre le crime et la criminalité.
     Jusqu’à maintenant, le droit à la vie privée a été protégé dans la banque de données génétiques en veillant à ce que l’identité de tous les suspects demeure confidentielle pour assurer à chacun un traitement équitable. Nous devons faire en sorte que les modifications proposées respectent les limites établies dans les dispositions du droit canadien en matière de protection des renseignements personnels.

[Français]

    Depuis des années, la technologie utilisée dans l'identification par les empreintes génétiques a fait ses preuves à un bon nombre de reprises. L'identification génétique peut jouer un rôle essentiel dans la condamnation ou l'exonération de suspects de crimes majeurs incluant des meurtres, ainsi que d'autres crimes ayant causé la mort de victimes innocentes.
    Ainsi, les changements actuellement proposés par le projet de loi C-18 permettront à un nombre encore plus grand de citoyens respectueux des lois d'être exonérés d'accusations, tout en donnant plus de muscle à la législation actuelle en matière de prélèvement d'ADN.
    En fait, le simple fait de tenter d'échapper et de se soustraire à un prélèvement d'ADN m'apparaît une raison suffisante de douter des motivations et des motifs d'un suspect.
    Il y a certainement lieu de s'interroger sur les raisons qui pourraient inciter un suspect potentiel à tout faire pour ne pas se soumettre à un prélèvement d'ADN quand, dans les faits, ce même prélèvement pourrait l'exonérer de tout soupçon, s'il est innocent bien sûr.

  (1620)  

[Traduction]

     La banque de données génétiques étant un outil passablement nouveau, il est compréhensible qu’elle ait besoin d’être améliorée pour faire en sorte qu’elle atteigne son plein potentiel.
     C’est pourquoi il est souhaitable d’ajouter aux infractions déjà prévues dans les dispositions rétroactives les cas de tentative de meurtre et de complot en vue de commettre un meurtre. La loi étant en quelque sorte organique, elle doit être modifiée au rythme de l’évolution de nos collectivités.
     Les infractions qu’on ajoute sont des infractions graves. Elles sont importantes. Leurs auteurs, étant donné qu’ils peuvent être dangereux, devraient être tenus de fournir un échantillon de substances corporelles pour insertion dans la banque de données génétiques afin qu’on puisse établir un lien entre ces substances et d’autres crimes qu’ils auraient pu commettre dans le passé ou qu’ils pourraient commettre dans l’avenir.
     Il est important pour nous, de ce côté-ci de la Chambre, de souligner que nous appartenons à un parti — et je pense que tous les parlementaires en conviendront — qui respecte la loi et qui tient à la primauté du droit au Canada. Notre parti — et je crois que, comme parlementaires, c’est là un objectif que nous partageons tous — a à coeur que nos collectivités soient davantage en sécurité. Si l’adoption de ce projet de loi doit permettre d’améliorer notre banque de données génétiques et, partant, d’attraper plus d’individus qui ont ou auront commis des crimes, elle est souhaitable.
     Par ailleurs, je crois vraiment que le droit qu’ont les citoyens respectueux de la loi de vivre en paix devrait toujours être l’objectif premier de tout projet de loi de ce genre. Il serait insensé de protéger des criminels contre la découverte d’autres crimes qu’ils ont pu ou pourraient commettre, et c’est pourquoi il est tout simplement logique et il s’impose que nous fassions en sorte que les renseignements contenus dans la banque de données génétiques puissent être utilisés, et le soient obligatoirement, pour enquêter sur tout délit criminel. Les Canadiens ne peuvent en définitive qu’y gagner à ce que nous améliorions nos techniques d’enquête criminelle, et peut-être que ce serait également une bonne chose qu’on puisse faire le lien entre des individus reconnus criminels et d’autres infractions criminelles dont ils pourraient être accusés et reconnus coupables.
     Évidemment, ces mesures doivent aller dans les deux sens. Bien que les organismes chargés de l’exécution de la loi devraient être en mesure d’utiliser l’information contenue dans la banque de données génétiques pour enquêter sur tous les délits criminels de certains individus, celle-ci ne devrait pas devenir fermée au point qu’on ne puisse en supprimer aucun renseignement. Il y a, de fait, une limite de temps à l’efficacité d’une banque de données génétiques.
     Il est essentiel qu’on puisse, au besoin, accéder à des renseignements précis contenus dans la banque de données génétiques pour les supprimer afin de permettre la rectification d’erreurs et de faire en sorte que justice soit vraiment rendue. C’est pourquoi il est également souhaitable qu’on simplifie la procédure de destruction des échantillons de substances corporelles et qu’on considère qu’il s’agit même là d’une condition très importante pour assurer l’efficacité optimale d’une banque de données génétiques.

[Français]

    Alors que la banque de données d'ADN continue de croître avec chaque échantillon amassé, l'utilité de cet outil extraordinaire continue aussi d'augmenter. Elle fera du Canada un endroit où la justice canadienne —  ainsi que nos agences policières et ses enquêteurs — est aussi juste et équitable qu'elle ne peut l'être.

[Traduction]

    La Banque nationale de données génétiques est une ressource à la fois impressionnante et merveilleuse. C'est un des outils de recherche les plus puissants que le système de justice pénale ait jamais eus. Le projet de loi C-18 rendra cet outil encore plus efficace.
    Il est très important pour nous, de ce côté-ci de la Chambre, de souligner qu'aucun des projets de loi que propose le gouvernement ne fonctionnera en l'absence des ressources nécessaires. Les seules déclarations qui ont été faites ces dernières semaines au sujet de la justice concernaient des compressions.
    Qu'il s'agisse de compressions apportées au Programme de contestation judiciaire ou au budget de la GRC en ce qui concerne l'essai d'une méthode pour arrêter sur la route les gens qui enfreignent le Code criminel alors que leurs facultés sont affaiblies par la drogue, ce sont là les mesures qui viennent appuyer le discours du gouvernement en ce qui concerne la loi et l'ordre.
    Je ne peux qu'espérer que des discussions comme celle-ci et les discussions qu'il pourrait y avoir au comité permettront au gouvernement de voir qu'il est ridicule de déclarer avec pompe que les conservateurs sont les gardiens de la loi et de l'ordre quand ils n'affectent pas les ressources nécessaires pour appliquer les lois qu'ils récitent fièrement sur les perrons d'église, dans les hôtels de ville et dans les centres commerciaux.
    Bref, le Parti libéral et moi-même, en ma qualité de membre du Comité de la justice, nous engageons, en toute bonne foi, à appuyer ce projet de loi en principe, à travailler sans relâche au comité pour l'améliorer et, plus important encore, à faire adopter ce projet de loi puisque, après tout, il s'agit simplement du projet de loi C-72 sous une nouvelle forme. C'était notre idée. Nous l'avons préparé. Pour une fois, peut-être, je peux déclarer, de façon non partisane, que le gouvernement peut bien s'approprier le mérite de ce projet de loi, car nous savons, dans nos coeurs, que nous l'avons mis au point.

  (1625)  

    Monsieur le Président, le député a raison d'affirmer que, de ce côté-ci de la Chambre, nous prenons les questions de justice au sérieux. Nous écoutons ce que les Canadiens ont à dire.
    Nous sommes actuellement très occupés au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, auquel siège également le député. Par exemple, nous sommes en train d'étudier le projet de loi C-9, qui propose d'éliminer les peines d'emprisonnement avec sursis dans le cas des crimes graves; le projet de loi C-10, qui prévoit des peines minimales obligatoires dans le cas des crimes commis avec une arme à feu; et le projet de loi C-19, qui porte sur les courses de rue et au sujet duquel le député a pris la parole hier. Nous nous pencherons aussi sur d'autres mesures visant à protéger les Canadiens.
    Je suis fier de dire que nous avons prévu les ressources nécessaires pour l'application de nos mesures législatives. Ainsi, notre budget prévoit l'embauche de 1 000 nouveaux agents de la GRC. Nous investirons les fonds suffisants pour former et employer de nouveaux agents de police municipaux. Ces ressources sont essentielles pour donner du muscle à notre programme législatif.
    Puisque le député appuie le projet de loi C-18 et les améliorations qui ont été proposées relativement à la banque de données génétiques, et puisqu'il reconnaît l'importance de cette dernière, compte-t-il faire pression au sein de son parti pour que le projet de loi C-18 soit adopté le plus rapidement possible? Puisque nous sommes très occupés au Comité de la justice, fera-t-il pression au sein de son parti pour que le projet de loi C-18 soit même envoyé directement au Sénat, étant donné que beaucoup des questions qui y sont abordées ont déjà fait l'objet de débats?
    Monsieur le Président, malgré tout le respect que j'ai pour le député, ses commentaires sur la fourniture de ressources pour soutenir l'intention présumée du gouvernement d'être le gouvernement de la loi et de l'ordre sont ridicules.
    En effet, dans notre collectivité commune, la GRC joue le rôle de corps de police municipal et son financement est insuffisant. Elle n'a aucun espoir d'obtenir un supplément de ressources qui lui permettrait de patrouiller nos rues pour faire appliquer certaines des lois qui sont adoptées ici.
    J'ai d'abord à l'esprit les commentaires qui ont été faits ici même au sujet de l'élimination de la Commission du droit et sur le fait que ces mêmes lois auraient été encore meilleures si nous avions pu compter sur les services de la Commission du droit.
    Enfin, la décision d'amputer de 4,6 millions de dollars le budget de la GRC au titre du projet pilote de détection routière des conducteurs aux facultés affaiblies suffit pour aliéner tout citoyen favorable au programme axé sur la loi et l'ordre et pour rendre encore plus furieux les membres de l'organisme Les mères contre l'alcool au volant, connu sous l'acronyme MADD.
    Au sujet de la question principale, le député reconnaîtra que les commentaires faits par tous les députés de ce côté-ci de la Chambre indiquent que nous sommes intéressés à faire progresser les bons projets de loi et à faire obstacle aux mauvais. C'est notre rôle et nous continuerons de le jouer.

  (1630)  

    Monsieur le Président, je suis heureux de parler aujourd'hui en faveur du renvoi au comité du projet de loi C-18.
    Comme cela a déjà été mentionné, la Banque nationale de données génétiques est une réussite. Elle a été créée à point nommé et respecte son budget. Elle collabore étroitement avec les laboratoires judiciaires, non seulement ceux de la Gendarmerie royale du Canada, mais aussi avec le Centre de criminalistique de Toronto et le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale à Montréal. En contrepartie, les laboratoires collaborent étroitement avec les services de police locaux.
    Ce sont des policiers spécialement formés qui s'occupent de prélever les échantillons des contrevenants condamnés. Ces prélèvements biologiques comprennent des échantillons sanguins, qui sont les plus faciles à analyser et qui comptent pour plus de 98 p. 100 des échantillons soumis pour analyse, ainsi que des prélèvements de gorge et des échantillons de cheveux.
    Les échantillons biologiques des contrevenants condamnés sont transmis à la Banque nationale de données génétiques pour inscription au fichier des profils génétiques. Ces renseignements sont ensuite inscrits dans le Système de gestion de comparaison de profils génétiques, le CODIS, un progiciel qui permet de mémoriser et de comparer ces profils. Le CODIS a été mis sur pied par le Federal Bureau of Investigation et le département américain de la Justice et la BNDG y a accès gratuitement. Ce progiciel représente la norme universelle pour les laboratoires judiciaires et il permet à la BNDG de participer à l'échange de renseignements, conformément aux ententes qui ont été signées au niveau international.
    Les policiers et les spécialistes des laboratoires judiciaires se rendent également sur les lieux de crimes. Lorsqu'ils trouvent des empreintes génétiques et qu'ils ont un suspect en vue, ils peuvent demander un mandat ADN à un juge afin de déterminer si l'empreinte génétique trouvée sur les lieux du crime et celle du suspect sont bien les mêmes.
    Tous les jours des suspects sont innocentés grâce aux empreintes génétiques. Nous ne devons pas sous-estimer les avantages qu'une telle mesure entraîne pour le système canadien de justice. Il est devenu inimaginable de ne pas avoir recours aux empreintes génétiques dans un cas comme celui de Steven Truscott, par exemple. Il est essentiel d'éviter, tant que faire se peut, les erreurs judiciaires pour maintenir la confiance des Canadiens envers le système judiciaire.
    Lorsque les policiers trouvent des empreintes génétiques mais n'ont pas de suspects, les laboratoires judiciaires font une analyse de ces données et versent le profil génétique ainsi établi dans un fichier criminalistique, qui constitue une banque de données distincte. La BNDG conserve ces renseignements électroniques ainsi que certaines données de base comme la date, le laboratoire qui a fourni les renseignements ainsi qu'un numéro d'identification unique qui permet de demander au laboratoire en cause d'effectuer la comparaison en cas de correspondance.
    La BNDG peut établir des correspondances avec une scène de crime après plusieurs années. La correspondance établie n'est évidemment pas une preuve irréfutable. Ce n'est qu'un début et les policiers doivent reprendre l'enquête en se basant sur cette correspondance. Selon l'endroit où l'échantillon a été prélevé, il peut y avoir une explication plausible justifiant la présence de la personne en cause. Toutefois, il peut arriver que cette correspondance mène à une condamnation après plusieurs années.
    La collaboration des laboratoires a été très avantageuse pour le Canada. Plus la banque de données emmagasinera d'échantillons de scènes de crime transmis par les laboratoires judiciaires et d'échantillons correspondant à des délinquants reconnus coupables, plus le système dans son ensemble sera une réussite. Selon le dernier rapport annuel de la Banque nationale de données génétiques, seulement 25 suspects ont été identifiés au cours de la première année financière de fonctionnement de la banque. En 2005-2006, on a noté 2 323 identifications de suspects, soit à peu près 100 fois plus.
    La Banque nationale de données génétiques continue d'effectuer de plus en plus de comparaisons concluantes. Au cours des six derniers mois, elle a fourni à la police des pistes d'enquêtes pour quelque 50 meurtres, 18 tentatives de meurtre, 110 agressions sexuelles et 80 vols qualifiés.
    Permettez-moi de vous donner un exemple concret de la valeur du recoupement d'empreintes génétiques. Il s'agit d'un cas décrit dans le rapport de 2005-2006 de la Banque nationale de données génétiques.
    Le 23 avril 2002, la famille d'un homme de 29 ans a signalé sa disparition à Dawson Creek. La police a pu déterminer qu'il avait été vu la dernière fois neuf jours plus tôt à un pub local en compagnie de deux hommes non identifiés. On a provisoirement identifié les deux hommes et on les a associés à une résidence située à proximité. Cependant, lorsque les policiers sont arrivés à cette résidence, elle était déserte.
    Ayant découvert des taches de sang à divers endroits de la maison, les policiers ont soupçonné quelque chose de louche et ils ont transmis les éléments de preuve pour analyse des empreintes génétiques. Ils ont aussi obtenu des prélèvements biologiques des parents du disparu pour faciliter l'identification. Ayant effectué l'analyse, les services de laboratoire judiciaire de la GRC ont confirmé que certains échantillons de sang prélevés à la résidence correspondaient à celui de l'homme disparu, mais ont signalé aussi la présence du sang d'une autre personne inconnue.
    Les profils génétiques inconnus obtenus sur les lieux du crime ont été téléchargés dans le fichier criminalistique de la Banque nationale de données génétiques. Sans savoir ce qui était arrivé à l'homme, les policiers ont continué de s'appuyer sur tous les indices possibles pour le retrouver, lui, ainsi que ses assaillants présumés. Dans leur recherche des deux hommes vus pour la dernière fois avec le disparu, les policiers ont abouti à un véhicule abandonné à Mayerthorpe, en Alberta. Ils y ont trouvé divers articles courants imbibés de sang, de même que le sac à dos de l'homme disparu. Ces articles ont été envoyés à un laboratoire judiciaire régional pour analyse. La comparaison des profils génétiques du lieu du crime à celui de l'homme disparu a été concluante. Ces éléments de preuve s'ajoutaient à d'autres qui tendaient à établir que la police avait affaire à un homicide et non pas à un cas de personne disparue.

  (1635)  

    Peu de temps après, un homme qui marchait dans la rue, à Saskatoon, a été agressé violemment par deux individus qui ont été appréhendés et accusés de tentative de meurtre. Des mandats de prélèvement d'échantillons de substances corporelles chez les suspects ont été exécutés dans ce cas-là. La BNDG a lié le profil génétique de l'un des suspects de Saskatoon au profil génétique inconnu provenant de la résidence abandonnée, à Dawson Creek.
    Il a été confirmé que l'homme porté disparu avait quitté le pub avec les deux suspects et se rendait à la résidence. Une dispute avait éclaté et la victime avait été poignardée à mort et démembrée. Pendant l'attaque, un des suspects s'était fait une entaille, qui est devenue l'indice clé qui a permis à la BNDG de lier les suspects à la scène du crime. Les suspects de Saskatoon ont été accusés et condamnés pour meurtre au deuxième degré.
    Il ne fait aucun doute que l'arrestation rapide de délinquants comme ceux-là, rendue possible par la comparaison entre des données génétiques, a permis d'éviter des milliers de crimes. L'identification génétique apporte vraiment une contribution presque inégalée à la sécurité des Canadiens.
    Pour ouvrir une parenthèse, je suis en train de relire un classique de Truman Capote intitulé De sang-froid. Il aurait été intéressant de voir dans ce roman quel résultat les données génétiques auraient eu sur ce cas.
    Au cours de la dernière législature, des améliorations relativement modestes à la banque de données génétiques ont été présentées au gouvernement dans le projet de loi C-13. Le comité permanent de la Chambre a tenu un grand nombre d'audiences et a examiné une vaste gamme de questions. Le comité permanent a adopté d'importants amendements les 5 et 10 mai 2005. Ces amendements reflétaient un compromis garantissant que tous les partis appuieraient l'adoption du projet de loi. La Chambre l'a adopté le 12 mai et, en raison du vote imminent sur le budget, il a été immédiatement mis en oeuvre.
    Les dispositions du projet de loi portant sur l'expansion du régime rétroactif, qui rend admissibles au prélèvement d'échantillons de substances corporelles environ 4 400 délinquants de plus, la méthode de traitement des ordonnances de prélèvement qui semblent à première vue avoir été mal rendues, par exemple, des ordonnances irrégulières, et les méthodes de traitement des correspondances mitigées entre des données génétiques, sont entrées en vigueur au moment de la sanction royale. En raison de l'empressement à adopter le projet de loi, il a été impossible, contrairement à la pratique habituelle, d'examiner de près les modifications, d'étudier les amendements qui s'imposaient, d'évaluer toutes les conséquences des changements et d'apporter des corrections à l'étape du rapport, à la troisième lecture, ou au Sénat. Le projet de loi qui a été adopté présente donc de sérieux problèmes qu'il faudrait régler avant sa proclamation.
    Dans son discours, le ministre a exposé les nombreuses dispositions importantes du projet de loi C-13 qui ne sont pas encore en vigueur. Les plus importantes sont, sans aucun doute, les modifications dans les définitions des infractions primaires et secondaires. Lorsqu'elles entreront en vigueur, il va y avoir une augmentation importante du nombre de délinquants auxquels on ordonnera de fournir un échantillon de substances corporelles et du nombre de crimes pour lesquels des profils d'identification génétique pourront être déposés au fichier de criminalistique. Comme nous le savons, plus nous aurons de profils dans la banque de données, plus nous pourrons établir de correspondances.
    Il est donc important d'étudier ce projet de loi en profondeur, mais rapidement. Je ne crois pas qu'il y ait vraiment de divisions sur ce projet de loi à la Chambre, tout comme il n'y avait pas de réels désaccords au sujet du projet de loi C-13. Nous voulons tous nous assurer d'utiliser le plus possible les empreintes génétiques pour élucider des crimes tout en respectant la Charte et le droit à la protection de la vie privée des Canadiens.
    Je crois également qu'on souhaite procéder rapidement à l'examen complet du système d'empreintes génétiques, examen dont on a souvent parlé dans les débats et les audiences sur le projet de loi C-13 et que l'on a considéré comme la tribune tout indiquée pour examiner les grandes modifications.
    Ainsi, au Royaume-Uni, en 2004-2005, le Forensic Science Service a signalé qu'il avait fait 40 000 recoupements entre ses données et différents crimes, y compris 165 homicides, 100 tentatives de meurtre, 570 viols, 5 600 cambriolages et 8 500 vols de voiture. Les lois qui le régissent sont bien différentes des nôtres. Les Britanniques prélèvent des substances corporelles en même temps que les empreintes digitales et ils gardent les profils d'identification génétique, quel que soit le résultat des poursuites pénales, alors que nous conservons les empreintes digitales, mais pas le profil d'identification génétique. 
    Au Canada, par opposition, les ordonnances de prélèvement de substances corporelles ne peuvent être prises contre les gens reconnus coupables que dans le cas d'un nombre limité d'infractions, et les juges conservent le pouvoir discrétionnaire de refuser de prendre cette ordonnance.
    Le projet de loi C-18 ne modifie pas ces éléments essentiels des dispositions du Code criminel portant sur les substances corporelles et de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Comme je l'ai dit, l'examen parlementaire après cinq ans, qui n'a pas encore commencé, est la tribune appropriée pour examiner des modifications très importantes. Le projet de loi C-18 se limite à des améliorations de forme au système actuel.
    Je voudrais conclure en parlant brièvement de l'attitude des tribunaux à l'égard des empreintes génétiques. Je crois qu'elle évolue rapidement, à mesure que les cours deviennent de plus en plus sensibles aux avantages de ces empreintes qui permettent d'identifier avec certitude les auteurs de crimes. Le ministre nous a déjà dit que la Cour suprême avait accordé un appui très ferme à la loi actuelle dans l'affaire Rodgers.

  (1640)  

    Alors que l'affaire Rogers concernait les dispositions d'application rétroactive de la banque de données génétiques, il y a fort à parier que les dispositions d'application actuelles sont tout-à-fait constitutionnelles. J'ai été informé qu'au cours des cinq dernières années, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques a fait l'objet de dizaines de contestations dont certaines sont allées jusqu'en appel, et ce, dans presque toutes les provinces.
    Dans la décision qu'elle a rendue dans l'affaire Briggs, la Cour d'appel de l'Ontario a déclaré que l’obtention du profil d’identification génétique d’un délinquant sert l’intérêt de l’État non pas simplement pour une question d’application de la loi en rendant possible le dépistage d’autres crimes commis par un délinquant. Ces dispositions poursuivent des fins beaucoup plus larges, dont les suivantes : dissuader les récidivistes potentiels; favoriser la sécurité de la collectivité; détecter l’œuvre d’un contrevenant en série; aider à résoudre de vieux crimes; simplifier les enquêtes; et, par-dessus tout, aider les personnes innocentes en leur permettant d’être écartées comme suspects très tôt dans le processus d’enquête ou en exonérant celles qui ont été injustement condamnées.
    Je crois que la Chambre reconnaît les bienfaits de la preuve génétique et que nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour en encourager l'utilisation. À court terme, je suis d'avis que nous devons adopter le projet de loi C-18. À long terme, nous devons travailler ensemble, par le biais de l'examen parlementaire, afin de déterminer le meilleur système possible pour le Canada puis procéder aux modifications que le comité jugera nécessaires.
    J'invite donc la Chambre à adopter le projet de loi C-18 en deuxième lecture.
    Le projet de loi C-18 en est surtout un de forme, mais il prend fond sur une mesure semblable adoptée lors de la précédente législature avant la dissolution du Parlement, le projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et la Loi sur la défense nationale. Ce fut la loi originale sur la banque nationale des données génétiques, loi présentée par le gouvernement libéral de l'époque. Plusieurs raisons motivaient l'adoption rapide et efficace de cette mesure.
    Des personnes hautement visibles détenues dans des pénitenciers allaient être libérées. Or, sans cette loi, il aurait été impossible de prélever des échantillons de substances corporelles sur ces personnes avant leur remise en liberté.
    Ces échantillons sont très utiles, car ils aident les organismes d'application de la loi à élucider et à prévenir des crimes. Ce fut l'une des raisons qui accéléra l'adoption de ce projet de loi avec l'appui de tous les partis à la Chambre et, si je ne m'abuse, avec l'appui des partis dans l'autre endroit. Le projet de loi a obtenu la sanction royale lors de la précédente législature. Tout est allé très vite.
    Des amendements complexes ont été proposés à l'étape de l'étude en comité. L'urgence d'adopter la mesure était telle que des erreurs de langage se sont glissées dans le texte. Le projet de loi dont nous sommes saisis corrige certaines des erreurs de forme qui se sont glissées dans la mesure originale, le projet de loi C-13.
    Le projet de loi C-13 offre un bel exemple de la collaboration des parlementaires de tous les partis au sein d'un comité. Le gouvernement libéral était minoritaire à l'époque, mais les parlementaires se sont serré les coudes au sein du comité de manière à améliorer le projet de loi et à accélérer son adoption par la Chambre des communes et l'autre endroit.
    Pour revenir en arrière, je dirai qu'avant la présentation du projet de loi au Parlement et son renvoi au comité, la GRC avait signalé que seulement 50 p. 100 des prélèvements de substances corporelles effectués étaient versés à la banque de données génétiques de la GRC. Je n'étais pas le seul à me préoccuper de la situation. À l'époque, j'avais l'honneur d'être le secrétaire parlementaire de la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, si bien que j'ai soulevé la question auprès du ministère de la Justice, entre autres. Je ne comprenais pas pourquoi seulement la moitié des prélèvements de substances corporelles étaient versés dans la banque de données génétiques.
    Il s'adonne que, compte tenu du libellé de la loi, les juges avaient le pouvoir de décider quelles empreintes génétiques seraient versées dans la banque de données génétiques et quelles ne le seraient pas. J'ai trouvé cela assez curieux parce que je n'ai pu déterminer dans quelles circonstances le juge, dans toute sa sagesse, déciderait qu'il n'était pas dans l'intérêt public que les empreintes génétiques d'un condamné soient versées dans la banques de données génétiques.
    En toute justice pour tous les intéressés, il faut dire que par suite de l'établissement de la banque de données génétiques, une certaine confusion a régné parmi les procureurs et les juges. L'ordonnance de prélèvement de substances corporelles doit être présentée au juge qui préside, lui demandant d'ordonner que des substances corporelles soient prélevées et versées dans la banque de données génétiques. Or, il y a eu un manque de communication ou d'information au sujet des empreintes génétiques à verser dans la banque de données génétiques de la GRC.
    Si je me souviens bien, le ministère de la Sécurité publique et le ministère de la Justice ont créé un programme pour informer la magistrature et les procureurs que cette ordonnance devait être dressée par les procureurs et présentée au juge avant que les empreintes génétiques soient prélevées et versées dans la banque de données génétiques.

  (1645)  

    Quand le projet de loi a été renvoyé au comité, ces questions ont été posées. Avec une grande collaboration de tous les partis, le Bloc québécois, le Parti conservateur, le Parti libéral et le NPD, nous avons apporté d'importants amendements au projet de loi.
    Nous avons commencé à établir une très longue liste de crimes où le juge n'aurait aucune latitude, où les empreintes génétiques seraient prélevées d'office et versées dans la banque de données génétiques. Cela a fait l'objet de beaucoup de discussions avec le ministère de la Justice. D'aucuns estimaient que l'inclusion de tous les crimes pourrait entraîner une contestation en vertu de la Charte et partant, le rejet des bonnes dispositions du projet de loi en même temps que celles qui seraient rejetées par suite d'une contestation en vertu de la Charte.
    Au comité, nous avons mis un peu d'eau dans notre vin, et nous avons décidé que, pour les crimes les plus odieux, ce ne serait pas laissé à la discrétion du juge. Pour des actes comme un meurtre ou un viol, le projet de loi modifié enlevait tout pouvoir discrétionnaire au juge. Ainsi, les résultats des analyses de substances corporelles étaient automatiquement versés à la banque de données génétiques.
    J'ai été très fier de notre travail à ce moment-là. Même si l'on disait que le gouvernement minoritaire ne fonctionnait pas à un certain niveau, j'avais pu constater que, du moins au niveau des comités, et sans aucun doute au niveau du sous-comité du Comité de la justice, une coopération fructueuse s'était établie. Je pense que nous avions amélioré le projet de loi. Nous avons aussi travaillé sur la question de la pornographie juvénile. Ensuite, le Parlement a été dissous et des élections ont été déclenchées, mais ce comité fonctionnait très bien, pour le bénéfice des Canadiens.
    J'ai été très fier que nous ayons pu adopter le projet de loi C-13, qui avait reçu la sanction royale. Le ministère de la Justice a constaté plus tard que celui-ci posait des problèmes de forme, et c'est pourquoi nous sommes maintenant saisis d'une nouvelle mesure sur cette question. Le projet de loi C-13 donnait suite à l'engagement de notre gouvernement libéral de donner à la police les outils dont elle avait besoin pour lutter contre la criminalité.
    C'est pourquoi je suis amèrement déçu que le gouvernement conservateur veuille abolir le registre des armes à feu. Nous savons que ce registre est très efficace. C'est vrai qu'il a coûté trop cher au moment de sa création, mais ces coûts sont irrécupérables. Quiconque est le moindrement versé en économie ou en finances sait qu'une fois que des coûts irrécupérables ont été payés, il ne sert pas à grand-chose de faire marche arrière et de voir comment on peut remettre la main sur cet argent. C'est du passé. La question qui se pose est de savoir si le registre des armes à feu est utile aujourd'hui, et la réponse est oui, sans hésitation.
    Par exemple, les agents de la paix consultent le registre environ 6 000 fois par jour. Ces agents de la paix ont-ils le temps de s'asseoir devant leur ordinateur à naviguer sur des sites qui ne leur donneraient aucun renseignement utile? Ce sont des gens occupés. Ils doivent jongler entre des priorités concurrentes. Ils doivent décider à quels appels ils doivent répondre. Ils doivent rationaliser leur emploi du temps. Ont-ils le temps de s'asseoir à l'ordinateur et de consulter des sites rien que pour le plaisir? Bien sûr que non. Nous savons que les policiers considèrent le registre comme un outil très utile, surtout dans les cas de violence familiale.
    Cela veut-il dire que, si la police consulte le registre des armes à feu et qu'aucune arme n'a été enregistrée pour une résidence, la police va répondre à l'appel avec nonchalance? Bien sûr que non. Les policiers du Canada ne sont pas si naïfs. D'un autre côté, si la police consulte le registre et découvre qu'il y a des armes à la résidence en question, cela l'aidera à établir sa façon de procéder dans la situation.
    Je vais donner un autre exemple de l'importance de la banque de données génétiques et du registre des armes à feu sur le plan de l'application de la loi. Le registre des armes à feu a permis la signature de quelque 7 000 à 8 000 affidavits qui ont aidé les procureurs de la Couronne à obtenir des condamnations. Le volet d'enregistrement des armes du Centre des armes à feu permet de dépister de nombreuses personnes instables ou ayant un casier judiciaire qui désireraient une arme à feu. On empêche ces gens de posséder une arme. Je sais que le gouvernement conservateur ne se propose pas d'interdire l'enregistrement des armes ou de se débarrasser de ce volet, mais il commet une erreur grave relativement au registre des armes d'épaule.

  (1650)  

    Je voudrais m'attarder encore aujourd'hui sur l'autre mythe selon lequel les armes d'épaule ne sont pas utilisés pour perpétrer des crimes, parce que ce sont des résidants des régions rurales du pays qui en possèdent. Les faits montrent le contraire. Plus d'homicides et de suicides au Canada sont commis à l'aide d'armes d'épaule qu'à l'aide d'armes de poing, ou autant. Les armes de poing représentent un problème dans les centres urbains et les armes d'épaule, dans les régions rurales du Canada.
    Je vais assurément appuyer le projet de loi sur les empreintes génétiques, car le projet de loi C-13 était très important du point de vue de l'application de la loi et du maintien de l'ordre au Canada. Ce projet de loi-ci raffine le libellé, un libellé très important, afin d'accroître l'efficacité de la mesure.
    Je vais m'attarder un moment au projet de loi C-13 et à la liste des infractions que le comité et, en fin de compte, le Parlement et l'autre endroit ont approuvée. Sur la liste des infractions à l'égard desquelles le juge ne peut exercer aucune discrétion en ce qui concerne les empreintes à verser dans la banque de données génétiques figurent des crimes tels que le meurtre, l'homicide involontaire et les voies de fait graves. Le leurre d'enfants sur Internet, la pornographie juvénile et les infractions liées au crime organisé sont ensuite venus s'ajouter à la liste des infractions désignées pouvant faire l'objet d'une ordonnance visant la banque de données génétiques. Cela est absolument essentiel pour que les organismes d'application de la loi puissent se servir des données génétiques pour élucider des crimes ou les prévenir.
    Je suis très fier du travail que le comité a accompli et je suis très heureux d'appuyer ce projet de loi qui apporte les modifications de nature technique qui s'imposent pour rendre encore plus efficace et efficiente la mesure législative originale.
    Pour vous donner un exemple, le projet de loi C-18 érige en infraction l'omission de se présenter pour se soumettre à un prélèvement de substances corporelles. Le tribunal peut ordonner un prélèvement, mais si la personne ne se présente pas, comment faire ledit prélèvement? L'omission de se présenter sera donc passible de sanction.
    Le gouvernement conservateur — et, pour tout vous dire, j'appuie sa démarche dans ce cas-ci — a également allongé la liste des crimes odieux à l'égard desquels le juge n'a pas d'autre choix que faire verser les empreintes génétiques dans la banque de données génétiques. Les infractions visées sont notamment la tentative de meurtre et le complot en vue de commettre un meurtre. Ces infractions sont également visées par les dispositions à effet rétroactif qui s'appliquent aux délinquants reconnus coupables d'une seule inculpation pour meurtre, infraction d'ordre sexuel ou tentative de meurtre avant le 30 juin 2000, moment où la loi habilitante en vertu de laquelle la banque de données génétiques a été créée est entrée en vigueur.
    On dirait de la langue de bois, mais il s'agit en réalité de très importantes modifications de nature technique, et j'espère que la Chambre les appuiera. Le gouvernement s'efforce, par ce projet de loi, de recueillir le plus d'empreintes génétiques possibles à verser dans la banque de données génétiques afin que les organismes d'application de la loi puissent s'en servir pour lutter contre la criminalité et pour la prévenir.
    Voici un autre exemple des corrections de nature technique apportées au nouveau projet de loi: il garantit que l'information communiquée par la Banque nationale de données génétiques pourra servir aux enquêtes sur toutes les infractions criminelles. Cela peut paraître plutôt évident, mais si ce n'est pas consigné dans le texte de loi, il se trouvera quelqu'un pour faire valoir qu'il est permis de se servir de l'ADN pour enquêter sur certaines infractions, mais pas sur toutes. Le projet de loi est clair et limpide à ce sujet.

  (1655)  

    Je reviens un instant sur la liste des crimes à propos desquels le juge n'a aucun pouvoir discrétionnaire. À l'époque, la question a été vigoureusement débattue au comité. Franchement, je suis en faveur d'un certain pouvoir discrétionnaire pour l'appareil judiciaire, mais si, pour quelque raison que ce soit, le Parlement du Canada estime que le pouvoir discrétionnaire des juges n'est pas exercé de manière appropriée, selon les parlementaires, il est tout à fait approprié que le Parlement abolisse ce pouvoir discrétionnaire.
    Ce n'est pas pour de petits délits qu'il faut envoyer les empreintes à la Banque nationale de données génétiques. Ce n'est pas pour le vol à l'étalage, ni pour un excès de vitesse. C'est pour meurtre, viol, tentative de meurtre, complot pour commettre un meurtre et toute une liste d'autres crimes odieux. Je crois qu'il est tout à fait approprié que les juges soient tenus, sans pouvoir discrétionnaire, de veiller à ce que l'ADN soit envoyé à la Banque nationale des données génétiques.
    Voici encore un exemple de modifications de nature technique apportées au projet de loi dont nous discutons aujourd'hui: il simplifie la procédure de destruction des échantillons prélevées chez des personnes reconnues coupables d'un délit, mais qu'on ne prévoit pas inclure dans la banque nationale. Je le répète, c'est une amélioration de nature procédurale, mais il est important de pouvoir détruire des échantillons si l'on ne prévoit pas les inclure dans la banque de données.
    Lorsque nous débattons de l'ADN, cela entraîne souvent un débat, débat que nous avons tenu au comité également, à propos de la protection des renseignements personnels des Canadiens. Le respect de la vie privée est un aspect important que nous, parlementaires, devons prendre en compte.
    Je ne prétends pas parler pour tous les Canadiens, mais si quelqu'un veut prélever un de mes follicules pileux et le stocker dans une banque de données génétiques, honnêtement, je n'y vois aucun inconvénient. Cependant, je comprends que certaines personnes considèrent que c'est une atteinte à leur vie privée, et je respecte cela, c'est pourquoi nous devons en tenir compte quand nous présentons des projets de loi à la Chambre. Nous devons veiller à ce que seules les substances corporelles qui sont exigées par la loi et qui répondent à certains critères établis par le Parlement soient prélevées.
    Un autre des changements d'ordre technique prévus dans le projet de loi consiste à faire en sorte que les ordonnances de prélèvement pour inclusion du profil d'identification génétique dans la banque de données puissent être exécutées même si, pour des raisons de logistique, il est impossible de le faire au moment précisé dans l'ordonnance. Une fois de plus, c'est une question de procédure. Malheureusement, nous avons une vaste jurisprudence sur la question et les avocats trouveront toujours des raisons à invoquer pour essayer d'éviter que leurs clients n'aient pas à soumettre de substance corporelle pour analyse génétique. Ils pourraient invoquer le fait qu'ils ne pouvaient respecter les délais précisés dans l'ordonnance.
    La disposition énonce très clairement que la substance corporelle doit être présentée, même si ce n'est pas au moment précis fixé dans l'ordonnance.
    Le projet de loi tire précise aussi certaines définitions concernant la procédure relative à l'obtention d'une ordonnance de prélèvement et à la communication de renseignements à des organismes d'application de la loi étrangers. Toutes sortes de renseignements sont communiqués à des organismes d'application de la loi et à Interpol et il faut veiller aux préoccupations des Canadiens relativement à la protection des renseignements personnels. Cette modification précise les règles régissant la communication de ce genre de renseignements.
    J'espère que la Chambre adoptera ce projet de loi. Celui-ci aiderait nos organismes d'application de la loi à prévenir des crimes et à traduire les délinquants en justice. Je n'ai aucun doute que notre parti collaborera avec les autres partis de la Chambre pour faire en sorte que ce projet de loi soit adopté rapidement. J'appuierai le projet de loi et j'espère que d'autres l'appuieront aussi.

  (1700)  

Les travaux de la Chambre

    Monsieur le Président, il y a eu des consultations et je crois que vous constaterez qu'il consentement unanime à l'égard de la motion suivante. Je propose:
    Que, nonobstant tout article du Règlement ou usage de la Chambre, pendant le débat exploratoire de ce soir, la présidence ne reçoive ni demande de quorum ni motion dilatoire ni demande de consentement unanime.
    La Chambre accepte-t-elle à l'unanimité que le député présente la motion?
    Des voix: D'accord.
    Le président suppléant (M. Royal Galipeau): La Chambre a entendu la motion. Lui plaît-il de l'adopter?
    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

Loi modifiant certaines lois en matière d’identification par les empreintes génétiques

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d'identification par les empreintes génétiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, nous savons qu'une loi peut être améliorée lors d'un examen. Lorsque le gouvernement libéral avait introduit la banque de données, en 2000, il avait été promis qu'un examen serait fait de la nouvelle loi dans les cinq années subséquentes. Nous attendons la possibilité de consulter les policiers, les commissions de services policiers et les enquêteurs. Nous attendons aussi avec impatience l'occasion d'examiner ce que font d'autres gouvernements, dans d'autres pays, afin de voir comment améliorer notre banque de données.
    Je crois que tous les députés aimeraient ajouter le profil génétique des personnes disparues ou des restes humains non identifiés à la banque de données, crée par la loi Lindsey. La mère de Lindsey, Judy Peterson, affirme depuis longtemps qu'il serait utile d'ajouter ces profils à la banque, soit en modifiant la loi existante, soit en adoptant un nouveau projet de loi.
    Pourquoi ne fait-on pas cet examen? Pourquoi ne réclamons-nous pas un examen? Nous étions censés procéder à cet examen en 2005, mais le gouvernement libéral ne l'a jamais fait. Je ne vois pas non plus le gouvernement conservateur procéder à cet examen.
    Le député croit-il qu'il serait important de faire un examen de la loi pour éviter que nous procédions de façon fragmentaire? Croit-il que nous devrions avoir un registre distinct pour les empreintes génétiques des personnes disparues ou des restes humains non identifiés ou que nous devrions utiliser la banque de données existante?
    Monsieur le Président, je sais que la loi est entrée en vigueur en 2000 et qu'elle devait faire l'objet d'un examen cinq ans plus tard, examen qui n'a toutefois pas eu lieu.
    Une voix: L'examen est en retard.
    L'hon. Roy Cullen: Oui, il est en retard. Nous devrions effectuer cet examen, car il s'agit d'une loi du Parlement. Je serais d'accord pour que nous procédions à l'examen.
    Comme j'étais secrétaire parlementaire à l'époque, je sais qu'il y avait eu de vastes consultations dans le cadre de l'étude du projet de loi C-13. Cependant, ces dernières ne peuvent pas remplacer un examen parlementaire. Je crois que la question est tout à fait pertinente.
    Je m'étais beaucoup investi dans le dossier du fichier des personnes disparues, qui était alors piloté par le député de Saanich—Gulf Islands. Bien entendu, ce dernier a depuis passé le flambeau. À l'époque, le gouvernement fédéral était en faveur de la création d'un fichier des personnes disparues. Toutefois, cette question nécessitait l'intervention des provinces. En d'autres mots, l'initiative devait provenir des provinces et des territoires, car la création d'un tel fichier relevait de leur compétence constitutionnelle.
    Néanmoins, nous avions tenu de vastes consultations auprès des provinces et des territoires d'un bout à l'autre du Canada afin de démêler la question et de définir quelle serait leur contribution. Je crois que le ministre de la Justice avait abordé la question avec ses homologues des provinces et des territoires. L'idée avait suscité quelques réserves en ce qui a trait à la protection de la vie privée, mais nous étions pour la plupart de l'avis qu'elles ne constituaient pas un obstacle insurmontable.
    Je suis certes en faveur de la création d'un fichier des personnes disparues. Cependant, il est essentiel de récolter l'appui des provinces et d'établir très clairement comment fonctionnera le fichier, comment l'information sera transmise à la banque de données génétiques et comment le fichier sera utilisé.

  (1705)  

    Monsieur le Président, j'ai remarqué que mon collègue, dans son discours, a fait une comparaison avec le désastreux programme fédéral d'enregistrement des armes d'épaule. Ce qu'il n'a pas dit, c'est qu'il y a une différence entre le coût de la banque de données génétiques et celui du registre des armes d'épaule, qui est d'environ 1 milliard de dollars. Les coûts de la banque de données génétiques seront beaucoup plus raisonnables.
    Le député pourrait-il nous dire ce qu'il pense des coûts, puisque le registre des armes d'épaule devait, au départ, coûter 2 millions de dollars? Maintenant qu'un nouveau gouvernement a été élu, peut-être que les coûts de la banque de données ne seront pas aussi exorbitants que ceux du registre.
    Monsieur le Président, la mise sur pied du registre des armes à feu a coûté plus de 2 millions de dollars. Je crois que le député voulait parler d'un chiffre supérieur à 2 millions de dollars, mais le chiffre de 2 milliards de dollars qu'on a lancé en l'air est tout à erroné. Cependant, il est vrai qu'il a fallu près de 1 milliard de dollars, étalé sur cinq ou six ans, pour créer la banque de données du registre.
    J'ai travaillé dans le secteur privé et j'ai vu des mégaprojets de technologie de l'information dans un contexte où les besoins fonctionnels et les politiques étaient en pleine évolution. J'ai vu énormément de ces projets qui ont lamentablement échoué également dans le secteur privé. Ce n'est pas uniquement le gouvernement qui peut rater ce genre de projets. Dans ce cas, le projet était un échec. De nombreuses raisons expliquent cet échec, mais nous n'aborderons pas cet aspect de la question aujourd'hui. Je ne sais pas si le député, qui possède une formation en économie, écoutait ou n'a tout simplement pas entendu, mais la notion de prix existe.
    Lorsque nous, libéraux, étions au pouvoir, nous avons pris des mesures pour revoir la gouvernance du centre de contrôle des armes à feu. Nous avons apporté certains changements en matière de gestion. Nous sommes aujourd'hui saisis de la question du registre des armes à feu, dont le fonctionnement coûte maintenant environ 20 millions de dollars par année. Les services de police font plus de 6 000 interrogations par jour. Cela représente un coût annuel de 22 millions de dollars. Or, si ce registre permet de sauver une ou deux vies, il en vaut largement la peine. Le député n'a pas fait mention d'un autre paradoxe: le registre a reçu l'appui de l'Association canadienne des chefs de police et des agents de police qui, lors de leur dernier congrès, ont adopté une résolution en faveur du registre.
    Le gouvernement conservateur part du mauvais pied en supprimant le registre des armes d'épaule. Je maintiens que nous devrions conserver cet outil important.

  (1710)  

    Monsieur le Président, la génétique a fait d'immenses progrès au cours des 10 ou 12 dernières années. Je me souviens de l'acquittement d'O.J. Simpson en 1995 par un jury, malgré les preuves génétiques qui semblaient accablantes.
    Un commentateur a indiqué qu'en ignorant les preuves génétiques dans ce procès, le jury avait pris une décision qui s'apparentait à celle d'un jury qui, il y a un siècle, aurait écarté comme preuve une photographie montrant l'assassin en train de tirer sur quelqu'un, sous prétexte qu'elle aurait été produite au moyen d'un nouveau gadget à la mode du nom d'appareil-photo. Nous avons parcouru beaucoup de chemin depuis ce temps.
    J'ai une question pour mon collègue, qui nous a offert, selon moi, un discours solide sur la question. Grâce aux empreintes génétiques, on a pu innocenter les malheureuses victimes d'erreur judiciaire qu'ont été David Milgaard, qui a passé 25 ans en prison, et Guy-Paul Morin, qui a été incarcéré pendant 18 mois. Je me demande si mon collègue considère que nous avons beaucoup à gagner en ayant de plus en plus recours aux empreintes génétiques.
    Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion formidable de me rendre cet été dans la circonscription de mon collègue de Brant, où j'ai rencontré de nombreux électeurs qui n'ont que des éloges à faire à mon collègue parce qu'il se consacre à bien les servir et qu'il s'intéresse à l'adoption de bonnes politiques.
    Il a tout à fait raison en ce qui concerne les empreintes génétiques. Des progrès technologiques considérables ont été réalisés. Le Canada est actuellement un chef de file dans ce domaine, et s'il reste encore du pain sur la planche, je pense que le gouvernement devrait mettre l'épaule à la roue.
    Les avancées scientifiques qui sous-tendent la technologie des empreintes génétiques constituent l'autre facette des progrès réalisés. Je pense en outre que les gens qui sont chargés de l'application de la loi sont beaucoup plus méticuleux qu'auparavant sur les scènes de crime et dans l'utilisation étape par étape des empreintes génétiques. Il s'agit de précautions très importantes parce que les empreintes génétiques risquent d'être peu utiles si elles se retrouvent au mauvais endroit ou sont contaminées par une autre substance. Je n'ai pas l'intention de vanter les mérites des acteurs du procès d'O.J. Simpson, mais je pense qu'il y a une leçon à en tirer parce que les avocats de la défense ont certainement su tirer profit des faiblesses qui pouvaient exister. Je pense que nous devons faire des progrès sur les deux fronts à la fois: sur les scènes de crime et dans les technologies relatives aux empreintes génétiques.
    Monsieur le Président, je suis heureux d’intervenir ce soir au sujet du projet de loi C-18, qui propose toute une série de modifications de forme pour renforcer nos lois régissant notre Banque nationale de données génétiques. Le Canada est l’un des rares pays du monde à posséder une telle banque.
     La mesure législative proposée est similaire au projet de loi C-72 qui avait été déposé au cours de la 38e législature. Le Parlement a été abruptement dissous lorsque l’actuel gouvernement conservateur a collaboré avec les autres partis de l’opposition pour faire tomber prématurément le gouvernement minoritaire libéral.
     Ces nouvelles modifications législatives permettront de donner effet au projet de loi C-13, le projet de loi original sur la banque de données génétiques qu’avait présenté l’ancien gouvernement libéral. À la demande expresse de l’Association canadienne des chefs de police et des organisations policières de tout le pays, l’ancien gouvernement libéral avait mené une vaste série de consultations auprès d’organismes gouvernementaux, de groupes de défense de la protection de la vie privée, d’organismes médico-légaux et d’experts en génétique, consultations qui ont abouti au dépôt et à l’adoption du projet loi C-13. Ce projet de loi est reconnu comme un instrument indispensable d’exécution de la loi.
     L’analyse médico-légale de substances corporelles s’est révélée un outil essentiel non seulement pour établir la culpabilité de prévenus mais également pour disculper des personnes condamnées à tort, comme on a pu le constater récemment dans certaines affaires abondamment médiatisées. Les cas de MM. Milgaard et Guy Paul Morin dont on vient tout juste de faire mention en sont des exemples.
     Le prélèvement d’acide désoxyribonucléique, communément appelée ADN, que l’on trouve dans les chromosomes de tout être vivant, est reconnu comme étant l’une des méthodes les plus efficaces pour recueillir de solides éléments de preuve dans une enquête criminelle. Selon les experts, il n’y aurait pas, sauf dans le cas de jumeaux identiques, deux personnes qui ont le même profil génétique. En nous fondant sur cette prémisse, on peut en conclure qu’il est possible de comparer les données génétiques recueillies sur les lieux d’un crime à celles d’un suspect afin de déterminer si les deux échantillons appartiennent à la même personne.
     Les avantages de l’utilisation d’un tel système sont nombreux. Les policiers peuvent identifier et arrêter un récidiviste en comparant les données génétiques recueillies sur les lieux d’un crime à celles contenues dans le fichier du délinquant mis en accusation. Ils peuvent également établir si une série d’infractions ont été commises par le même délinquant ou si plusieurs personnes y ont participé. Les policiers peuvent faire des recoupements et relier des profils génétiques à d’autres affaires sur lesquelles eux-mêmes ou d’autres corps policiers enquêtent.
     L’utilisation des profils génétiques facilite le déroulement des enquêtes policières en permettant d’éliminer plus rapidement des suspects dont les données génétiques consignées dans les fichiers de la banque ne correspondent pas à celles recueillies sur les lieux d’un crime.
     Enfin, le fait de savoir que des méthodes d’analyse génétique sont utilisées pour résoudre des crimes peut également dissuader des délinquants de commettre d’autres crimes.
     La Banque nationale de données génétiques est gérée par la Gendarmerie royale du Canada et elle sert à aider les organismes d’application de la loi à enquêter sur les crimes graves. La banque de données a deux indices ou indicateurs. Le fichier de criminalistique contient le profil d’identification génétique établi à partir des substances corporelles trouvées sur les lieux d’une infraction désignée ou prélevées sur le corps d’une victime ou sur toute autre personne ou chose associée à la perpétration d’une infraction désignée.
     Le fichier des condamnés contient les profils d’identification génétique établis avec le consentement des condamnés ou conformément à une ordonnance des tribunaux. Cela s’applique aux contrevenants reconnus coupables de certaines infractions au Code criminel ainsi qu’à des personnes assujetties au code de discipline militaire qui ont été reconnues coupables d’une infraction désignée à la Loi sur la défense nationale.
     Nous sommes parfaitement au courant des préoccupations importantes concernant l’atteinte à la vie privée, surtout en ce qui concerne la conservation d’échantillons biologiques. La communauté scientifique a fait valoir des arguments convaincants pour dire qu’elle jugeait essentiel de conserver des échantillons biologiques afin que la banque de données génétiques puisse s’adapter aux changements technologiques futurs.
     Nous savons que le domaine de l’analyse génétique en criminalistique se développe rapidement et les experts judiciaires nous ont dit qu’avec l’évolution de la technologie, les profils génétiques d’aujourd’hui deviendront sans doute périmés dans quelques années. Les échantillons conservés pourront être analysés une nouvelle fois à l’aide de la nouvelle technologie, ce qui garantit que la banque de données du Canada pourra suivre les progrès technologiques.
     Le projet de loi C-13, la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques, autorisera la police à prélever des empreintes génétiques sur les contrevenants reconnus coupables de certains actes criminels. Les 38 principaux actes criminels désignés ont été choisis en raison de leur nature, de leur gravité et de la probabilité que le coupable ait laissé des preuves biologiques sur les lieux du crime. Cela comprend les crimes contre la personne les plus graves comme les homicides et les infractions sexuelles. La loi prévoit également le prélèvement de substances corporelles sur les contrevenants qui ont commis les infractions désignées avant l’entrée en vigueur de la Loi sur l’identification par les empreintes génétiques.
     La banque de données génétiques est de peu ou d’aucune utilité pour identifier les auteurs d’actes criminels graves si elle ne contient pas déjà leurs profils génétiques. Selon certaines études criminologiques, les contrevenants qui commettent des actes criminels graves ont déjà commis des infractions moins graves. Certaines personnes ont donc préconisé d’élargir la liste des principales infractions désignées pour y inclure des infractions moins graves.

  (1715)  

     Au Canada, tout élargissement de la liste des infractions désignées pour le prélèvement obligatoire d'empreintes génétiques ferait l’objet d’un examen en regard de la Charte. Le prélèvement de substances corporelles est considéré comme une méthode intrusive qui constitue une perquisition. La difficulté est de parvenir à un équilibre raisonnable entre les droits d’une personne et la protection que l’on veut accorder à la société.
     Le projet de loi C-18 ajouterait la tentative de meurtre et le complot en vue de commettre un meurtre ou de faire assassiner une personne à la liste des infractions couvertes par les dispositions rétroactives qui s’appliqueraient aux contrevenants reconnus coupables d’un seul meurtre, d'une infraction sexuelle ou d'homicide involontaire avant le 30 juin 2002, date de l’entrée en vigueur de la loi établissant une banque de données génétiques.
     Quand les audiences initiales sur la banque de données génétiques ont eu lieu, les personnes consultées se sont clairement exprimées en faveur de la création d’une Banque nationale de données génétiques, mais elles ont également émis des inquiétudes au sujet des valeurs canadiennes que sont la protection de la vie privée, la protection du public et les droits individuels garantis par la Charte.
     Divers groupes d’intérêt, dont le commissaire à la protection de la vie privée et le Barreau du Québec, ont laissé entendre que le projet de loi ne contenait pas suffisamment de garanties à l’égard de l’utilisation qui serait faite des profils génétiques des victimes, des suspects innocentés et des personnes qui fournissent volontairement des échantillons pour aider la police dans son enquête.
    Par conséquent, l'ancien gouvernement a présenté une motion visant à préciser que les données contenues dans le ficher de criminalistique devaient être éliminées si elles se rapportaient à une victime ou à une personne ayant été écartée de la liste des suspects dans une enquête criminelle.
    Le projet de loi à l'étude contient aussi une disposition permettant la destruction de substances corporelles lorsque le procureur général d'une province confirme que l'ordonnance concerne une infraction qui ne devait pas être visée par la banque de données. Ce système plus simple éliminera les frais qu'il faut engager lorsqu'un procureur général doit s'adresser à un tribunal pour faire annuler une ordonnance.
    Dans certaines circonstances, la mesure législative habiliterait les tribunaux à ordonner à toute personne qui souhaite comparaître à l’audience relative à une ordonnance ou à une autorisation de prélèvement de substances corporelles pour analyse génétique, de comparaître par vidéoconférence, par exemple, grâce à un système de télévision en circuit fermé ou à tout moyen de communication semblable, pour les besoins des audiences tenues en vertu des dispositions de rétroactivité du projet de loi. Cela réduirait beaucoup le coût et les mesures de sécurité nécessaires pour transporter les délinquants susceptibles de faire rétroactivement l'objet de prélèvements.
    Nous savons tous que l'activité criminelle ne connaît pas de frontières. Les délinquants doivent être arrêtés et traduits devant les tribunaux dès qu'ils sont trouvés et les agences d'exécution de la loi doivent donc avoir les outils pour cela. Le projet de loi permettrait à une agence d'exécution de la loi étrangère, aux fins d'enquête ou de poursuites concernant une infraction criminelle, de fournir des substances corporelles pour analyse et autoriserait le commissaire à communiquer les résultats de cette analyse au gouvernement étranger concerné.
    Les modifications de pure forme proposées dans le projet de loi C-18 renforceraient notre législation sur la banque de données génétiques et amélioreraient l'exécution de la loi, pas uniquement au Canada, mais à l'étranger également.

  (1720)  

    Monsieur le Président, quand le député de Windsor—Tecumseh est intervenu un peu plus tôt, il a soulevé différentes questions. Ces questions n'ont pas été abordées dans ce discours et jusqu'à présent, je ne crois pas que nous ayons les réponses dont la Chambre a besoin. Entre autres, le système actuel aurait dû faire l'objet d'un examen en 2005, je crois, et ce projet de loi ne dit rien sur cet examen.
    Le député pourrait-il nous parler de ce point qui ne se trouve pas actuellement dans le projet de loi dont la Chambre est saisie?
    Monsieur le Président, l'examen obligatoire est en retard d'environ neuf mois. Malheureusement, le Comité de la justice qui a entrepris cet examen est très occupé; il est saisi de nombreux projets de loi. J'éprouve bien franchement de la sympathie pour les membres du comité. Ils sont débordés. J'imagine qu'il suffirait d'avoir les ressources pour faire progresser ce dossier.
    L'examen aura lieu et ce projet de loi n'y changera rien, mais ces modifications de forme sont requises maintenant pour renforcer le projet de loi C-18 et en faire un texte législatif viable qui augmentera les instruments de mise en application de la loi de notre pays.
    Il ne conviendrait pas non plus d'attendre l'examen avant de présenter ces modifications. Je vois que le ministre de la Justice est d'accord. Je suis sûr qu'il fera en sorte que cet examen soit effectué le plus efficacement et le plus rapidement possible.
    Monsieur le Président, je comprends qu'un examen prend du temps, mais il me semble y avoir duplication des efforts lorsqu'on se penche d'une manière fragmentée sur les nombreux projets de loi portant sur la justice dont la Chambre et le Comité de la justice sont saisis.
    Le député de Windsor—Tecumseh a mentionné la Commission du droit, dont les jours sont comptés, comme on le sait, à la suite des réductions budgétaires annoncées la semaine dernière par le gouvernement conservateur.
    La Commission du droit a joué un rôle très utile au Canada en matière d'élaboration des politiques; elle a peut-être aussi fait bénéficier la Chambre d'une perspective indépendante dans ses avis. Le député avait laissé entendre précédemment que la commission pourrait avoir un rôle utile à jouer dans la refonte qui s'impose du Code criminel.
    Je me demande si le député pourrait nous toucher un mot de ce rôle que la Commission du droit pourrait peut-être jouer auprès de la Chambre.
    Monsieur le Président, je n'étais pas ici lorsque le député de Windsor—Tecumseh a fait cette intervention, mais je le sais très méthodique et préoccupé par la protection de la vie privée.
    Je partage l'inquiétude de la députée devant les réductions annoncées récemment et la disparition éventuelle de la Commission du droit. Je ne suis cependant pas certain de vouloir renoncer à mon rôle et à mes fonctions et voir le Comité de la justice faire de même, au profit d'une autre instance. L'examen devrait être effectué par le Parlement, et je suis certain — le message est passé — que le tout se déroulera aussi rondement que possible.
    C'est important, et nous en sommes conscients. Selon toute vraisemblance, le projet de loi va être adopté presque à l'unanimité, et l'on pourra compter sur une grande coopération aux fins de la révision de la loi. Celle-ci sera examinée de très près, car on parle d'un très grave empiètement sur les droits des particuliers. Il s'agit d'un outil d'application de la loi tellement formidable que l'on tient à l'améliorer pour le bien de la société, non seulement au Canada, mais, comme je le disais, aux quatre coins de la planète.

  (1725)  

    Monsieur le Président, je voudrais faire un commentaire sur le dernier point qui a été soulevé. J'aimerais avoir plus de précisions sur l'équilibre entre les droits et les avantages du projet de loi, mais plus particulièrement sur le droit à la vie privée.
    Monsieur le Président, voilà justement l'élément clé de ce projet de loi. C'est un processus très intrusif et l'enregistrement de ces données peut sans doute révéler beaucoup de détails sur une personne. Les connaissances scientifiques continuent de se raffiner et nous ne pouvons pas encore savoir ce que l'analyse des empreintes génétiques va finir par révéler. Nous sommes déjà fascinés par les informations qu'elle fournit à l'heure actuelle.
    Pour ceux qui le savent, lorsque nous avons visité les installations dans les locaux de la GRC, ici même à Ottawa, nous avons pu observer comment les analyses étaient faites et ce à quoi les échantillons étaient soumis. Cette visite a été très instructive. On recherche toujours l'équilibre entre la protection de la société et le respect des droits de la personne. Nous avons établi un équilibre très équitable et nous avons l'intention de le maintenir.
    Il est certain que nous tenons compte des exigences de la Charte. Si nous dépassons les limites, je suis convaincu que les tribunaux sauront nous ramener à l'ordre. S'il faut modifier la loi pour qu'elle soit conforme aux précédents et aux décisions judiciaires, nous le ferons.
    Monsieur le Président, je veux formuler une brève observation. On a dit que le prélèvement de substances corporelles était intrusif. En fait, dans l'affaire Rodgers, la Cour suprême a récemment statué que le prélèvement de substances corporelles comportait un niveau minime d'intrusion. La décision se concentrait entièrement sur l'identification.
    En l'espèce, le tribunal a examiné le mécanisme de manière très approfondie, il a confirmé sa constitutionnalité, indiqué qu'il y avait un équilibre approprié et salué cet outil d’identification par les empreintes génétiques. Rien dans le présent projet de loi ne compromet cet équilibre. Comme nous le savons, ce projet de loi est en grande partie celui qu'avait présenté l'ancien gouvernement, sauf qu'il contient de nouvelles modifications.
    Monsieur le Président, l'intrusion n'est pas liée à la méthode de prélèvement. On procède par piquage, comme de nombreux diabétiques chaque jour, ou par prélèvement de cheveux ou poils.
    Ce qui pourrait être une source de préoccupation au cours des prochaines années, ce sont les renseignements révélés par l'analyse d'échantillon. Toutefois, je suis d'accord avec le député: le projet de loi est la réplique du projet de loi C-72. Je serai heureux de l'appuyer. C'est un bon projet de loi. Il est nécessaire. Il améliorera l'application de la loi et aidera les organismes qui en sont chargés.
    Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir dans le débat sur le projet de loi dont la Chambre est saisie.
    Comme le député de Windsor—Tecumseh l'a souligné plus tôt, ce projet de loi soulève plusieurs interrogations. J'ai déjà posé plusieurs questions sur un point en particulier, mais je n'ai toujours pas obtenu de réponse satisfaisante.
    Il a entre autres été souligné plus tôt qu'on avait semblé adopter une approche fragmentée à l'égard de la préparation de plusieurs projets de loi touchant la justice. Tout semble se décider sur un coup de dés, c'est-à-dire que si les conservateurs ont un intérêt pour un sujet, ils réunissent certains renseignements et présentent un projet de loi. Puis ils passent à autre chose, et à autre chose encore. Cela me semble témoigner d'une approche très fragmentée à l'égard du système judiciaire et à la révision nécessaire du Code criminel.
    Lorsque la Banque nationale de données génétiques a été mise sur pied, il avait été prévu qu'elle ferait l'objet d'un examen parlementaire après cinq ans, soit en 2005. Nous sommes maintenant en 2006 et cela n'a toujours pas été fait. Le gouvernement libéral précédent n'a pas lancé d'examen et le gouvernement actuel n'a toujours pas fait savoir s'il avait l'intention de le faire. Plutôt que de déposer le projet de loi C-18, il aurait peut-être été préférable de mener en tel examen complet.
    Nous entendons souvent les députés parler de responsabilité, de rationalisation et d'efficacité. Plutôt que de faire les choses en double, il serait beaucoup plus logique de saisir cette occasion pour mener l'examen parlementaire prévu sur le registre des empreintes génétiques, de tenter d'en déceler les lacunes et de prévoir ensuite une mesure législative qui permettrait de les combler.
    Dans le cas présent, nous avons affaire à un cas où on met la charrue devant les boeufs. La Chambre est saisie d'un projet de loi que les députés débattront pendant un certain temps et qui sera ensuite renvoyé à un comité. Nous entendrons des témoins de tous les coins du pays, puis le projet de loi reviendra à la Chambre. À un certain moment, nous devrons faire un examen, qui nécessitera à son tour la convocation de témoins et la tenue d'audiences devant le comité, etc.
    Le gouvernement conservateur parle constamment de rationalisation et d'efficacité. Si c'est le cas, il a raté une occasion en or, dans ce projet de loi, de prêcher ce qu'il dit.
    Une autre chose dont un certain nombre de députés ont parlé, et cela vaut vraiment la peine que je le répète, c'est le fait qu'un projet de loi d'initiative parlementaire semblable a déjà été présenté, mesure que l'on a appelé « loi de Lindsey ». Ce projet de loi prévoyait l'établissement d'un registre distinct d'empreintes génétiques prélevées sur des scènes de crime et qui seraient susceptibles de provenir de personnes décédées.
    Je citerai maintenant le député de Windsor—Tecumseh, qui a dit: «  Lorsque des membres de la famille, des êtres chers et des amis proches disparaissent, nous n’avons aucune possibilité de nous servir de la technologie génétique que nous possédons et qui pourrait être très utile pour retrouver ces personnes. » Encore une fois, c'est une chose dont on parle depuis des années. Nous avons maintenant l'occasion de répondre à ce besoin criant. Nombre de gens ont souffert de la perte d'un proche. C'était le moment de remédier à ce problème.
    Le projet de loi présentait d'autres défauts. L'un d'eux est la rétroactivité. Un autre est la possibilité de contestations constitutionnelles. Certes, des préoccupations ont été soulevées en 2000 au sujet de la constitutionnalité du registre de données génétiques. Jusqu'à maintenant, il n'y a pas eu de contestations, mais la possibilité existe toujours. Si le projet de loi est renvoyé à un comité, j'invite les députés à en examiner de plus près l'aspect constitutionnel.

  (1730)  

    Certains députés ont soulevé des questions sur l'utilisation que l'on pourra faire de cette information. Par exemple, est-ce que des sauvegardes suffisantes seront en place ou se peut-il qu'à nouveau, dans de tristes circonstances, l'information soit communiquée à des puissances étrangères et utilisée à des fins ne correspondant pas aux valeurs canadiennes ou aux façons dont les Canadiens veulent que cette information soit utilisée.
    De l'avis général, le projet de loi sur les empreintes génétiques comporte de très bons éléments. Il constitue un outil important que nous pouvons utiliser, mais nous voulons que les sauvegardes soient en place pour garantir que la vie privée des Canadiens soit protégée et que l'information soit utilisée de manière appropriée.
    Je saisis cette occasion pour parler de la Commission du droit. Un député a mentionné le fait qu'elle ne voulait pas se soustraire à ses responsabilités et qu'elle relève de la compétence de la Chambre. La Commission du droit ne prendrait pas de décisions au nom de la Chambre. Elle fournirait des conseils à la Chambre et l'aiderait à élaborer des politiques. Elle pourrait être un organisme indépendant, capable d'étudier un éventail de questions que la Chambre n'a pas toujours l'occasion d'étudier. Il est très triste de penser que la Commission du droit ne sera pas là pour fournir ces conseils et avis à la Chambre.
    Lorsque ces compressions ont été présentées, quelques-uns parmi nous ont fait remarquer qu'il n'y avait eu ni consultation, ni débat. Le fait que la Commission du droit ait été supprimée donne un autre exemple d'absence de consultation, de débat ou d'examen de l'utilité de l'information fournie dans le passé. Je sais que certains parmi nous ont déjà utilisé des rapports préparés par la Commission du droit pour préparer notre propre débat et pour nous aider à définir nos opinions. Elle a effectué de très bons travaux sur des questions comme le mariage entre personnes de même sexe et la représentation proportionnelle. La Commission du droit aurait pu être un outil très précieux pour la Chambre et dispenser des conseils concernant les réformes qui s'imposent dans le Code criminel et dans d'autres projets de loi touchant le domaine de la justice.
    La Chambre doit examiner un certain nombre de questions.
    Je veux revenir à la protection des renseignements personnels et aux droits garantis par la Charte. Ces questions soulèvent des préoccupations. Je veux parler de l'une des dispositions; le député de Windsor—Tecumseh l'a déjà fait, mais je me dois de le faire de nouveau. Il ne s'agit là que d'un exemple, car plusieurs autres dispositions du projet de loi permettront à la banque de données génétiques de communiquer des renseignements même lorsque l'échantillon examiné ne correspond pas parfaitement à un profil de données génétiques. Nous appliquons diverses normes à cet égard, et bien sûr, nous avons des dispositions pour les cas où il n'y a aucune correspondance. Nous avons des dispositions pour les cas où il y a une correspondance parfaite, ou divers degrés de correspondance.
    Bien que la banque de données génétiques constitue un outil précieux, la façon dont les correspondances sont déterminées et seront utilisées soulève des préoccupations. Il est très important d'examiner quelques-unes de ces questions liées à la protection des renseignements personnels et autres questions très techniques. Le comité convoquera sûrement un grand nombre de témoins pour veiller à ce qu'on réponde à toutes ces questions très techniques.
    Il y a eu par le passé des exemples où des échantillons de substances corporelles ont été prélevés incorrectement. Leur suivi et leur destruction ultérieure sont d'importantes questions liées à la protection des renseignements personnels.
    Le cas de Maher Arar, bien qu'il n'ait rien à voir avec le profil de données génétiques, est un exemple de renseignements utilisés incorrectement, ce qui n'inspire pas confiance au sein de la population canadienne. Dans le cas de M. Arar, des renseignements ont été recueillis incorrectement, puis utilisés incorrectement. Cet épisode honteux dans l'histoire du Canada a ébranlé la confiance de la population à l'égard de la façon dont les renseignements sont recueillis, dont les droits des Canadiens sont protégés, dont ces renseignements sont communiqués à des gouvernements étrangers et de ce qu'il advient de citoyens canadiens lorsque ces renseignements sont divulgués. Nous savons que M. Arar a été victime de torture. Nous savons aussi que le gouvernement canadien n'a pas agi aussi rapidement qu'il l'aurait pu pour protéger ses droits.

  (1735)  

    Même s'il n'était pas question d'empreintes génétiques, l'affaire Arar est l'exemple d'un cas où le gouvernement canadien n'a pas été en mesure de protéger les droits de nos citoyens. Les Canadiens auraient raison de s'en inquiéter. Ils veulent s'assurer que toute information d'ordre génétique soit recueillie, mémorisée et utilisée à bon escient. Il nous importe de faire en sorte que les systèmes que nous établissons pour protéger les droits des Canadiens soient bien établis, tout à fait transparents et clairs. Les Canadiens exigent certainement de leur gouvernement la transparence et la clarté. Nous nous attendons à ce que la présente mesure législative soit conforme à ce souci de transparence et de clarté.
    Nous avons pu constater la valeur de tels renseignements pour la réforme de jugements de condamnation injustifiés, et un certain nombre de cas ont été cités à cet égard. C'est un autre exemple de l'utilité de la banque de données génétiques pour protéger les droits des citoyens. Dans certaines affaires très médiatisées, un meilleur usage d'une banque de données génétiques aurait pu empêcher certaines personnes d'être incarcérées injustement et de passer des années en prison pour des crimes qu'elles n'ont pas commis. L'outil que propose le projet de loi est clairement valable. Il est à la disposition non seulement du système de justice pénale mais des personnes accusées de crimes.
    Dans l'ensemble, le fait que le projet de loi sera renvoyé au comité donnera l'occasion de se pencher sur des questions relatives à la protection de la vie privée et à l'application de la Charte, à des questions concernant la mémorisation de l'information et les contestations d'ordre constitutionnel auxquelles pourrait donner lieu la mesure. J'invite le comité à se pencher sur le processus d'examen, qui est censé être en cours et qui pourrait être instructif pour le comité et d'autres députés. Il pourrait également éviter certains chevauchements qui suscitent des inquiétudes considérables. L'examen débouchera peut-être également sur une révision d'ensemble du code de justice pénale, qui contient souvent des dispositions contradictoires. Je crois que le code de justice pénale n'a pas été revu en profondeur depuis plusieurs années. Il semble opportun, compte tenu du nombre de projets de loi dont sera saisie la Chambre, que ce processus crucial soit lancé.
    Même si les projets de loi concernant la justice ont proliféré devant la Chambre, il se peut que nous n'employions pas notre temps aussi efficacement que possible. Nous pourrions peut-être considérer l'examen dont il est question comme une façon justement de contrer cette prolifération.
    Des députés ont soulevé bon nombre d'aspects importants. Je suis convaincu que les membres du Comité de la justice en ont pris bonne note.

  (1740)  

    Il restera six minutes au député lors du prochain débat sur ce projet de loi.
    Comme il est 17 h 42, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

Initiatives parlementaires

[Initiatives parlementaires]

[Traduction]

La Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement

    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement au sujet du projet de loi C-285. Sans se prononcer sur la valeur de ce projet de loi d'initiative parlementaire, le gouvernement estime que ce projet de loi exige une recommandation royale.
    Monsieur le Président, au cours de la 38e législature, vous avez jugé qu'un projet de loi semblable, le projet de loi C-363, n'exigeait pas une recommandation royale. Je voudrais soumettre des renseignements supplémentaires sur les questions soulevées à l'occasion de cette décision et je voudrais vous demander de réexaminer cette décision en fonction de ces nouveaux renseignements.
    Le projet de loi C-285, comme son prédécesseur, exigerait que la Société canadienne d'hypothèques et de logement distribue ses bénéfices aux provinces. Le 3 octobre 2005, monsieur le Président, vous avez noté qu'une recommandation royale n'est nécessaire que lorsque le projet de loi vise à retirer des sommes du Trésor et non d'autres sources. Vous avez dit être en désaccord avec l'affirmation selon laquelle:
[...] puisque les sommes du fonds de réserve sont intégrées au Trésor chaque année, elles peuvent être considérées comme faisant partie des recettes générales sous le contrôle de la Couronne.
    Monsieur le Président, je vous demande de réfléchir à deux points. Tout d'abord, les biens détenus par des sociétés d'État sont-ils visés par la définition du « revenu public » qui est garanti par l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 et l'article 79 du Règlement. Je prétends que les biens de la SCHL sont visés par cette définition.
    L'article 2 de la Loi sur la gestion des finances publiques définit les fonds publics comme suit:
« fonds publics » Fonds appartenant au Canada, perçus ou reçus par le receveur général ou un autre fonctionnaire public agissant en sa qualité officielle ou toute autre personne autorisée à en percevoir ou recevoir. La présente définition vise notamment [...]
c) les fonds perçus ou reçus pour le compte du Canada ou en son nom;
d) les fonds perçus ou reçus par un fonctionnaire public sous le régime d'un traité, d'une loi, d'une fiducie, d'un contrat ou d'un engagement et affectés à une fin particulière précisée dans l'acte en question ou conformément à celui-ci.
    La SCHL est une société d'État et une société mandataire aux termes de la Loi sur la gestion des finances publiques, de la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement et de la Loi nationale sur l'habitation. Elle doit rendre des comptes au Parlement par l'entremise d'un ministre. Les activités de la SCHL sont dirigées par le gouvernement. Ses finances sont assujetties à une vérification par le Bureau du vérificateur général du Canada et à un contrôle du Parlement.
    Même si l'article 128 de la Loi sur la gestion des finances publiques permet à une société d'État d'avoir un compte bancaire distinct plutôt que de déposer directement ses fonds dans le Trésor, les recettes de cette société n'en demeurent pas moins des « fonds publics ».
    Les résultats financiers nets de la SCHL sont calculés pour chaque exercice financier et combinés à ceux du gouvernement. Par conséquent, le bénéfice net de la SCHL est reflété dans les recettes du gouvernement, dollar pour dollar. Ce revenu reste dans les coffres du gouvernement fédéral et est donc disponible pour l'octroi éventuel de crédits par le Parlement.
    Monsieur le Président, l'autre nouveau point que je veux porter à votre attention est lié à la décision que vous avez rendue le 13 juin 2005, lorsque vous avez mentionné que la question déterminante pour établir si une recommandation royale est nécessaire est celle de savoir si un projet de loi:
 [... ] ferait plus que modifier la méthode de comptabilité des fonds publics. Si ce n'était pas le cas, la recommandation royale ne serait pas nécessaire, puisque la façon dont les fonds publics sont inscrits aux registres du gouvernement n'est pas une dépense nécessitant une recommandation royale.
     Monsieur le Président, lorsque vous avez rendu cette décision, vous avez jugé que, pour ce qui est du transfert de fonds du Trésor à un compte distinct pour une fin précise et circonscrite, une recommandation royale était nécessaire parce que:
[ ... ] ces sommes ne pourront plus être consacrées à d'autres dépenses engagées par le Parlement. Ces sommes ne seront plus disponibles parce qu'elles auront, en fait, été dépensées [ ... ]
    Je fais valoir que les principes invoqués dans cette décision devraient s'appliquer dans le cas du projet de loi C-285. Dans ce cas-ci, les comptes de la SCHL sont combinés aux recettes du gouvernement et disponibles pour d'autres dépenses engagées par le Parlement. Du fait qu'il transfère cet argent aux provinces, le projet de loi C-285 constitue en fait une affectation. En d'autres mots, l'adoption du projet de loi C-285 aurait pour résultat que de l'argent qui, auparavant, faisait partie des fonds publics serait directement transféré aux provinces sur une base annuelle.
    C'est de toute évidence plus qu'une modification de la méthode de comptabilité des fonds publics, étant donné que l'argent échapperait au contrôle du gouvernement et du Parlement. En bref, le projet de loi C-285 entraînerait une nouvelle dépense pour une nouvelle fin non prévue dans la loi existante. Par conséquent, je crois que le projet de loi intégral nécessite une recommandation royale.
    Monsieur le Président, j'ose espérer que ces renseignements supplémentaires vous seront utiles au moment de vous pencher sur cette importante question financière.

  (1745)  

[Français]

    Monsieur le Président, nous avions déjà déposé ce projet de loi: le projet de loi C-363. Nous avions alors demandé l'avis de la présidence sur ce projet de loi, et il avait été dit que rien n'empêchait que des sommes de la SCHL soient versées au Trésor en les affectant à un autre usage. Il y a donc déjà eu une décision voulant qu'on ne puisse pas empêcher le dépôt du projet de loi C-363, parce qu'il n'avait pas trait à l'affectation des fonds de la Couronne et que, par conséquent, il ne portait pas atteinte à sa prérogative financière. Nous avons donc déjà eu l'avis de la présidence lors de la dernière législature concernant le dépôt du projet de loi C-363.
    C'est dans le même contexte que le collègue du Parti conservateur veut revenir à une décision qui a déjà été prise, et pour laquelle on nous donnait raison: nous pouvions déposer le projet de loi C-363.

[Traduction]

    Monsieur le Président, le 31 mai, le Président a expliqué en grand détail les cas dans lesquels une recommandation royale est nécessaire. En effet, je pense que 10 des 30 projets de loi inscrits au Feuilleton nécessitent une recommandation royale.
    Le 31 mai, le Président n'a pas considéré que le projet de loi à l'étude nécessitait une recommandation royale. J'ai posé quelques questions aux membres du personnel qui se penchent sur la question et qui conseillent le Président. Je leur ai demandé si on avait attiré leur attention sur d'autres questions qui n'avaient pas été soulevées quand ils avaient fait leur premier examen des projets de loi afin de conseiller le Président. On m'a répondu que non. J'estime qu'il faudrait poser une fois de plus la question à la Direction des journaux et leur faire valoir les arguments que vient de soulever le leader du gouvernement à la Chambre.
    Je le répète, l'examen a été réalisé en fonction des règles précisées par le Président le 31 mai. Au terme de l'examen, il a été décidé que le projet de loi ne nécessitait pas de recommandation royale. Je recommanderais simplement à la députée de poser la même question, c'est-à-dire si des points soulevés par le leader du gouvernement à la Chambre aujourd'hui n'avaient pas été pris en compte par le Président quand le personnel a fait la première étude. Je pense que la députée verra que la réponse est non.

  (1750)  

[Français]

    Monsieur le Président, je comprends mal que le collègue conservateur se pose cette question étant donné que cela a déjà été décidé.
    Je souligne que lorsqu'il a lu tout ce qui avait trait aux provenances de l'argent, il n'a omis qu'une chose, c'est que l'argent ne provient pas de recettes, de revenus ou de choses comme cela. C'est de l'argent que la Société canadienne d'hypothèques et de logement a déjà et qui lui revient. Il ne s'agit pas d'un nouveau revenu ni d'argent qu'elle perçoit, ce n'est rien de cela. C'est de l'argent qu'elle a déjà et qui retourne dans ses caisses. C'est bien différent. Tout ce qu'il a lu ne s'applique pas à ce projet de loi.

[Traduction]

    Je remercie tous les députés de leurs interventions à ce sujet. Nous sommes à l'étape de la deuxième lecture, et nous poursuivrons le débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi. Le Président décidera à un autre moment si nous passerons à l'étape de la troisième lecture. Pour l'instant, reprenons le débat. La députée de Québec a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, vous n'acceptez donc pas que nous discutions du projet de loi, ni aujourd'hui ni tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas obtenu de réponse? Est-ce ce que vous dites?
    Pourtant, une décision a déjà été rendue dans le cas projet de loi C-363. Cette décision disait que cela n'affectait pas les fonds de la Couronne. Par conséquent, le projet de loi C-363 ne portait pas atteinte à la prérogative financière de la Couronne. Cette décision a été rendue pour un projet de loi similaire, le 5 mai 2005. On avait soulevé les mêmes interrogations. On disait qu'on ne pouvait pas déposer un tel projet de loi parce que cela affecterait les conditions et les réserves de la recommandation royale. Je pense que si nous ne discutons pas de ce projet de loi aujourd'hui, c'est démontrer...
    Des voix: Oui, nous en discutons.
    Mme Christiane Gagnon: Nous en discutons? Ce n'est pas ce que j'avais compris.

[Traduction]

    Je m'excuse du malentendu. Nous passons au débat à l'étape de la deuxième lecture. Si le Président estime qu'il est nécessaire de se prononcer sur cette question, il le fera subséquemment.
    Continuons le débat à l'étape de la deuxième lecture.

[Français]

    Monsieur le Président, j'essayais de gagner quelque chose qui était déjà gagné. Je vous remercie.
    Nous voyons déjà à quel point le Parti conservateur est contre ce projet de loi. Le chat est sorti du sac. On connaît la direction et la sensibilité du Parti conservateur envers les plus démunis de la société. Ce projet de loi vise à aider les plus démunis de la société à être mieux logés et à trouver des logements à prix abordables.
    Je voulais commencer mon discours en parlant de ce nouveau projet de loi, le projet de loi C-285, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement (bénéfices versés aux provinces).
    En commençant mon discours, je souhaitais parler de l'historique du logement social au Québec.
    Je qualifiais l'attitude du gouvernement en place, soit le gouvernement conservateur, et celle des libéraux qui était là auparavant, d'insensible et d'irresponsable en ce qui a trait à la situation vécue par plus de 400 000 familles au Québec et par 1,7 million de familles au Canada. Ces familles consacrent plus de 30 p. 100 de leurs revenus au logement.
    L'ancien gouvernement libéral disait toujours qu'un milliard de dollars était destiné annuellement au logement social et que, chaque année, d'autres montants y étaient investis. Nous ne nous attaquons pas à cela. Nous nous attaquons au milliard de dollars supplémentaire. Il faudrait investir deux milliards de dollars annuellement dans le logement social afin de développer de nouvelles unités de logement social.
     Le milliard de dollars alloué au logement social est un milliard de dollars attribué pour payer les hypothèques et des restaurations très mineures — comme le rapiéçage des trous. L'argent ne sert pas à effectuer des restaurations importantes. Plusieurs parcs immobiliers, qui datent de plusieurs années, auraient besoin de sérieuses réparations. Ainsi, les gens pourraient vivre dans un logement salubre et de bonne qualité.
    Le projet de loi C-285, un projet de loi que j'ai moi-même déposé en tant que députée de Québec, est un projet de loi qui relève de la responsabilité du porte-parole de notre parti en matière de logement social, soit du député de Brome—Missisquoi. Ce projet de loi est remis à l'ordre du jour, car nous sommes convaincus et nous souhaitons que ce projet de loi puisse être adopté ici, à la Chambre des communes.
    Mon collègue de Brome—Missisquoi, porte-parole en matière de logement social, aurait très bien pu présenter ce projet de loi. Les projets de loi privés sont tirés au sort. Mon nom est sorti avant celui de mon collègue.
    Compte tenu de l'urgence d'adopter un tel projet de loi, un projet de loi qui fera l'objet d'un vote, nous pourrons voir et analyser la sensibilité de tous les parlementaires en cette Chambre envers une meilleur contribution de la part du gouvernement et de la part de la SCHL.
    La SCHL — la Société canadienne d'hypothèques et de logement — prête de l'argent à des particuliers qui ne possèdent pas la somme nécessaire. De plus, elle offre, à un taux supplémentaire, une assurance hypothécaire qui leur permet de faire l'achat d'une maison. Lorsque des acheteurs potentiels possèdent seulement 5 p. 100 du capital nécessaire à l'achat d'une maison, la Société canadienne d'hypothèques et de logement leur fait un prêt hypothécaire, ajouté au prêt hypothécaire d'une institution bancaire. Ainsi, la Société canadienne d'hypothèques et de logement amasse des surplus.
    Le projet de loi demande qu'un certain pourcentage des surplus de la Société canadienne d'hypothèques et de logement soit remis aux provinces et aux territoires afin de répondre au besoin de la population.
     Certains secteurs et certains quartiers situés dans l'ensemble du Canada ont un urgent besoin de logement abordable — on parle de 450 000 familles au Québec et de 1,7 million de familles au Canada —, alors que la SCHL engrange des surplus de plus de 5,2 milliards de dollars.

  (1755)  

    On dit que si cela continue, cela atteindra 7 milliards de dollars d'ici les trois prochaines années.
    Il faut demander un effort de la SCHL puisque sa mission est d'accompagner les Canadiens et les Canadiennes, de même que les Québécois et les Québécoises, dans leur recherche d'un logement sécuritaire et sanitaire. La SCHL n'est pas une institution d'affaires commerciales qui doit engranger des surplus, les placer et faire du profit. Sa mission n'est pas commerciale.
    On constate qu'au fil des années, la SCHL s'est complètement écartée de sa mission et a fait de l'argent plutôt que de remettre cet argent à la collectivité. C'est pourquoi nous espérons que ce projet de loi sera adopté afin que la SCHL retrouve ses premières bases sociales et sa mission première, soit de permettre à ceux et celles vivant sous le seuil de la pauvreté et travaillant au salaire minimum d'être mieux logés.
    Dans certains quartiers, l'augmentation des coûts du logement est effarante, surtout dans les quartiers de centre-ville où un embourgeoisement se fait au fil des ans. Il y a de la spéculation dans le domaine immobilier, et pour avoir droit à un logement décent, certaines parties de la population doivent pouvoir obtenir l'aide de ce gouvernement par le biais d'une société d'État que l'on appelle la SCHL.
    J'ai écorché plus tôt le Parti libéral parce que ce sous-financement de l'habitation et du logement abordable, social et communautaire perdure depuis 1993. En effet, pas un seul sous neuf n'a été investi dans le développement de nouvelles unités à caractère social. Toutefois, 1 milliard de dollars ont été versés chaque année pour payer le parc existant de logements sociaux et les hypothèques qui s'y rattachent. Pour l'instant, nous espérons faire changer d'idée le Parti conservateur afin qu'il ait un peu plus le coeur sur la main et qu'il regarde la situation en face. Les conservateurs disent vouloir aider la population, or cela constituerait une bonne façon de le faire tout en respectant les compétences des provinces. Il s'agit d'un vote important qui nous permettra de découvrir le vrai visage du Parti conservateur.
    Comme je le disais, nous demandons qu'il n'y ait pas tant de surplus. Nous ne sommes pas contre le fait que la Société canadienne d'hypothèques et de logement engrange des surplus, mais 5,3 milliards de dollars en 2006 et 7 milliards de dollars en 2008, c'est beaucoup d'argent et nous pourrions être beaucoup plus proactifs afin que plus d'unités sociales voient le jour. Il est urgent que nous commencions à investir dans les programmes de logements sociaux, communautaires et abordables.
    Il y a trois priorités ou besoins essentiels dans la vie: se loger, se nourrir et se vêtir. Mais comment respecter ces besoins essentiels lorsqu'on donne de 50 p. 100 à 80 p. 100 de son maigre salaire minimum ou de son revenu se situant sous le seuil de la pauvreté? Si l'économie va bien, surtout dans la région de Québec, certains emplois ne sont toujours pas suffisamment rémunérés.
    Nous souhaitons donc une reprise des négociations en ce qui a trait au transfert complet des responsabilités et des montants relatifs au secteur de l'habitation.

  (1800)  

    Il faudrait aussi inclure les coûts associés à la rénovation, car c'est un peu là que le bât blesse. En effet, on sait très bien que le milliard de dollars que le gouvernement donne chaque année pour le logement social ne couvre pas souvent l'ampleur de la désuétude de certains bâtiments.
    Avec cela, on peut se péter les bretelles. C'est beau de dire à la population qu'on donne un milliard de dollars pour le logement social par année, mais c'est un montant insuffisant pour répondre à l'ensemble des défis à relever, soit de donner une meilleure habitation aux personnes aux prises avec des problèmes financiers.
    Donc, comme je le disais, la SCHL devrait reprendre sa mission d'aider la population à mieux se loger. Elle devrait cesser d'être une compagnie d'assurance privée, qui accumule des excédents. Je vais vous démontrer comment on pourrait arriver à remettre ces surplus directement au Québec et aux provinces.
    Nous souhaiterions que 5 p. 100 des 264 milliards de dollars d'investissements puissent être gardés par la SCHL au titre de ses avoirs, qui seraient ainsi limités. Ce sont donc des avoirs limités à 1,32 milliard de dollars que la SCHL pourrait garder. De plus, 10 p. 100 de ce 1,32 milliard de dollars serait la limite que la SCHL pourrait détenir dans son fonds de réserve. Il y a donc des avoirs et un fonds de réserve.
     Si les excédents étaient de 5,3 milliards de dollars, on pourrait soustraire de cette somme 1,3 milliard de dollars, ce qui ferait une somme de 4 milliards de dollars. Et les excédents du fonds de réserve qui sont inexistants pour l'instant iraient directement au Québec ou aux provinces.
    On voit donc que la SCHL se réserve un montant excédentaire. En fait, c'est comme s'il s'agissait d'une compagnie privée ayant des avoirs. Elle peut ainsi faire ses placements et engranger de plus en plus de profits, au lieu de se limiter à sa mission première qui était d'aider vraiment la population et de répondre à ses besoins.
    Quinze minutes, c'est très peu pour parler d'un sujet qui me tient à coeur. On sait que depuis 1993, le logement social était l'une de mes premières responsabilités ici, en ce Parlement. Je suis heureuse de m'associer avec le député de Brome—Missisquoi qui a hérité de ce dossier et qu'il a à coeur. Il connaît bien les défis qu'il faut relever.
    Nous espérons que tous les parlementaires de cette Chambre aideront les plus mal pris de la société qui paient 30, 50 ou 80 p. 100 de leur maigre revenu. Je vois qu'un député conservateur opine du bonnet, mais contrairement à ce que je voudrais par rapport à la suggestion ou à la sensibilité que j'ai relativement aux personnes les plus démunies de la société. Je dirai à ce député qu'il y a en effet des personnes démunies dans notre société et qu'il faut en avoir soin.

  (1805)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai une observation à formuler au sujet de la préoccupation de la députée d'en face concernant les besoins en logement des Canadiens.
    J'ai des réserves concernant les hypothèses sous-entendues de la députée quant à l'excédent de la SCHL. Je signale que lorsqu'on lui a posé une question à ce sujet, l'ancien ministre libéral du Logement et ancien député de London-Centre-Nord, Joe Fontana, a dit ceci: «  Les surplus de la SCHL ne sont pas scandaleux. » Pourquoi? Parce que la SCHL garde en réserve les bénéfices nets de l'assurance, conformément aux exigences que le Bureau du surintendant des institutions financières a établies en matière de suffisance du capital pour les compagnies d'assurance d'hypothèques. Grâce à ses pratiques commerciales prudentes, la Société canadienne d'hypothèques et de logement avait en réserve, en décembre 2005, 3,4 milliards de dollars, alors que les polices d'assurance prêt hypothécaire en vigueur totalisaient 274 milliards de dollars. Ce fonds de réserve, qui représente 1,2 p. 100 de son portefeuille, est conforme aux exigences du BSIF.
    La députée d'en face va-t-elle dire à la Chambre pourquoi elle est d'avis que la SCHL ne devrait pas appliquer des pratiques commerciales prudentes?

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai énoncé les pratiques de prudence: on pourrait très bien restreindre à la fois l'avoir et les surplus du fonds de réserve en diminuant la réserve comme l'avoir. La SCHL ne serait pas en danger par rapport à sa capacité d'offrir des taux hypothécaires, parce que ces derniers lui rapportent énormément au fil des ans.
    Je sais qu'il y a un certain risque à faire des prêts. Les banques en font, la SCHL aussi, mais cela leur donnerait quand même une marge de manoeuvre assez substantielle. Je n'ai pas dit qu'il fallait prendre tout l'argent du profit de la SCHL. J'ai parlé de 5 p. 100 de diminution de l'avoir et d'une diminution de 10 p. 100 de son fonds de réserve.
    Je pense donc que la députée devrait revoir les chiffres des surplus engrangés par la SCHL et admettre avec nous que la SCHL possède suffisamment d'argent pour survivre.

  (1810)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous savons que la SCHL est censée offrir des logements abordables aux Canadiens, Après tout, cela est un aspect de son mandat.
    Il en coûte au moins 10 000 $ pour garder une personne sans abri à l'hôpital. Il en coûte 4 333 $ pour garder cette personne en prison. Il en coûte 1 932 $ pour un lit dans un refuge pour sans-abri et il n'en coûte que 200 $ par mois pour procurer à cette personne un logement social.
    Le député croit-il que le précédent gouvernement libéral s'est montré irresponsable et que l'actuel gouvernement conservateur se montre irresponsable en n'investissant pas les milliards de dollars de profits de la SCHL dans la construction de logements abordables, alors que l'an dernier, à Toronto seulement, plus de 30 000 locataires, 10 p. 100 de plus qu'en 2004, ont été expulsés de leur logement? C'est du jamais vu et tout porte à croire que la situation continuera de se détériorer. N'est-ce pas irresponsable de la part du gouvernement de ne pas investir ces milliards de dollars dans la construction de logements abordables par l'intermédiaire des provinces?

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie de sa sensibilité à cette question ma collègue.
    Il y a en effet une situation d'urgence. On ne met aucun argent frais depuis 1993. Le gouvernement pourrait le mettre, mais on aurait une autre solution. La SCHL engrange d'énormes surplus qui ne font rien. Ils génèrent des profits, mais la société souffre en ce moment de l'impossibilité d'avoir un meilleur logement, de s'en trouver un. Il y a des taux d'inoccupation dans certaines régions, provinces et villes de 0,5 p. 100, 1,2 ou 1,5 p. 100. Une pression est quand même faite dans le pacte locatif, sur les coûts du logement.
    Je me souviens d'avoir qualifié d'irresponsable le gouvernement libéral. Ce n'est pas la première fois que je fais un discours sur le logement social. Je l'ai fait quand le gouvernement libéral était au pouvoir, mais maintenant c'est le gouvernement conservateur et je les mettrais à peu près dans le même lit, en tout cas pendant quelques instants, le temps de parler de la question du logement social. C'est tout à fait irresponsable. Surtout, il s'agit d' une marque d'insensibilité envers une catégorie de la population qui ne peut s'offrir un logement abordable, sécuritaire et sain.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis ravie de participer au débat sur le projet de loi C-285 qui oblige la SCHL à verser aux provinces les surplus de son fonds de réserve.
    C'est avec une certaine conviction que j'affirme que les parlementaires estiment généralement que les Canadiens devraient avoir une juste chance de posséder ou de louer leur maison. Les parlementaires reconnaissent l'importance d'un logement stable, abordable et de bonne qualité.
    L'objet du projet de loi C-285 est louable, dans la mesure où il vise à encourager l’offre de logements à prix abordable, mais en réalité, il nuirait au système de logement canadien. Les futurs gouvernements auraient plus de difficultés à répondre aux besoins changeants des Canadiens en matière de logement.
    Avant d'examiner le projet de loi C-285 plus en détail, permettez-moi de présenter rapidement les grandes lignes du rôle de la SCHL. Le principal objectif de la SCHL est d'aider les Canadiens à obtenir un logement sûr et de bonne qualité, moyennant un prix abordable. La SCHL s'acquitte de cette tâche en offrant un financement pour le logement abordable de même que pour des rénovations et des réparations, financement dont bénéficient les Canadiens à faible revenu. La SCHL offre également l'assurance prêt hypothécaire.
    L'assurance prêt hypothécaire de la SCHL permet aux consommateurs d'acheter une maison avec seulement 5 p. 100 de mise de fonds à des taux d'intérêts comparables à ceux qui sont réservés aux acheteurs qui font une mise de fonds de 25 p. 100 ou plus.
    Depuis son lancement initial, dans les années 1950, l'assurance prêt hypothécaire a facilité le financement de près de neuf millions de foyers. La SCHL aide de nombreux Canadiens à avoir accès à la propriété domiciliaire.
    Cela m'amène à expliquer pourquoi le projet de loi C-285 est tellement problématique. L'assurance hypothécaire se caractérise par des cycles à long terme. Lorsque le marché de l'habitation est vigoureux, les ventes d'assurance prêt hypothécaire augmentent et les réclamations payées baissent.
    Cependant, l'inverse se produit en période de ralentissement économique, comme ce fut le cas dans les années 1980 et au début des années 1990. Pour gérer les risques inhérents à l'assurance, la SCHL suit les pratiques commerciales prudentes établies par le Bureau du surintendant des institutions financières.
    En décembre 2005, la SCHL enregistrait des bénéfices affectés à la capitalisation de 3,4 milliards de dollars par rapport à 274 milliards de dollars d'hypothèques assurées. Ces réserves pour capitalisation représentent 1,2 p. 100 du portefeuille de la SCHL, ce qui est conforme aux directives du BSIF.
    Les réserves de la SCHL lui servent de coussin de sécurité afin que ses activités d'assurance-prêt hypothécaire n'aient pas à s'appuyer davantage sur l'argent des contribuables pour pouvoir s'acquitter de ses obligations, même lorsque la situation économique est difficile. C'est pourquoi il est essentiel que la SCHL maintienne des réserves suffisantes. Cela lui permettra de conserver des activités d'assurance-prêt hypothécaire viables sur le plan commercial et renouvelables à long terme plutôt que de dépendre de subventions gouvernementales.
    Le projet de loi C-285 ne tient pas compte du besoin d'employer des pratiques commerciales prudentes et transférerait les bénéfices non répartis de la SCHL, qui sont mis de côté dans un fonds spécial, ce qui mettrait en danger l'assurance-prêt hypothécaire pour les générations futures. Le Parlement ne devrait pas éroder ce coussin de sécurité.
    Il faut aussi tenir compte du fait que tous les revenus de la SCHL sont déjà inscrits aux comptes du gouvernement canadien. Il s'agit de fonds publics, c'est-à-dire que le revenu net de la SCHL a été reconnu dollar pour dollar dans les revenus du gouvernement. La SCHL est une société d'État et ses résultats sont donc comptabilisés pour l'exercice financier et regroupés avec les états financiers du gouvernement.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, le gouvernement fédéral fournit, par l'intermédiaire de la SCHL, environ 2 milliards de dollars chaque année au financement et à la gestion de plus d'un demi-million de logements sociaux subventionnés par l'État. Par l'intermédiaire de ses programmes d'assurance-prêt hypothécaire, la SCHL aide à réagir aux fluctuations du marché et aux besoins changeants des Canadiens en matière d'habitation.
    En retirant les réserves de la SCHL du cadre financier fédéral, le projet de loi C-285 lierait les mains de ce Parlement et des parlements futurs. Réduire la marge de manoeuvre dont la SCHL et le Parlement disposent pour réagir aux fluctuations du marché de l'habitation ne semble pas être une façon sage de garantir l'avenir du système d'habitation canadien.

  (1815)  

     Je rappelle à la Chambre que l’ancien gouvernement libéral a adopté la même attitude au cours de la dernière législature en votant contre un projet de loi d’initiative parlementaire quasi identique, le C-363. S’exprimant au nom du gouvernement libéral, l’actuel député de North Vancouver a fait observer que cette mesure emprisonnerait le gouvernement et le Parlement dans une formule rigide. Il a ajouté que la réserve de capital de la SCHL aidait cette société d’État à se financer sans recourir aux subventions de l’État.
     Comme j’y ai fait allusion tout à l’heure, le projet de loi C-285 vise à garantir que les fonds transférés de la SCHL aux provinces soient utilisés pour les logements sociaux et à prix abordable et qu’ils contribuent à la création et au développement de coopératives de logement.
     Toutefois, le nouveau gouvernement du Canada prend déjà des mesures concrètes pour renforcer notre système de logement. En effet, on trouve dans le budget de 2006 plusieurs exemples qui témoignent de cet engagement. Le budget vise à appuyer les familles, à bâtir des collectivités plus sûres et un pays plus fort, ce qui suppose forcément des logements.
     En conséquence, dans le budget de 2006, le nouveau gouvernement a prévu un investissement stratégique ponctuel qui pourrait atteindre 1,4 milliard de dollars. Il s’agit d’établir trois fiducies de logement avec les provinces et les territoires pour le logement à prix abordable, le logement dans le Nord et le logement pour les Autochtones qui habitent hors des réserves.
     De plus, le budget a annoncé une réduction immédiate d’un point de pourcentage de la TPS, mesure qui stimule déjà l’économie et rend de l’argent aux Canadiens qui travaillent fort.
     La réduction de la TPS a aussi un effet favorable sur l’ensemble de l’industrie du logement, puisqu’elle rend le logement plus abordable. Comme l’a fait observer Stephen Dupuis, de la Greater Toronto Home Builders Association, cette réduction aura un impact concret pour les candidats à la propriété: « Sur une maison de 300 000 $, cela pourrait représenter une économie de 2 000 $ pour l’acheteur. »
     De la même façon, Dave Benbow, président de l’Association canadienne des constructeurs d'habitations, a dit que la réduction de la TPS était un avantage majeur pour les acheteurs de maison: « Pour beaucoup de Canadiens, cette mesure rend le logement plus abordable. »
     Ces mesures sont complémentaires des initiatives existantes du gouvernement du Canada visant à maintenir le parc existant de logements à prix abordable. À cet égard, le financement du Programme d'aide à la remise en état des logements et de plusieurs programmes connexes de rénovation et d’adaptation des logements a été renouvelé pour l’exercice 2006-2007, prolongement qui représente un engagement qui peut s’élever à 128,1 millions de dollars.
     De plus, la ministre des Ressources humaines et du Développement social a prolongé l’application de l’Initiative nationale pour les sans-abri, ce qui englobe l’Initiative de partenariats en action communautaire, jusqu’en mars 2007.
     En plus de ces mesures, le gouvernement est en train d’appliquer l’Initiative en matière de logements abordables, évaluée à un milliard de dollars, avec des partenaires provinciaux, territoriaux et locaux. Grâce à ces ressources financières, on bâtit des logements abordables dans des localités de tout le Canada.
     Tous les députés le reconnaîtront, le nouveau gouvernement du Canada poursuit les objectifs énoncés dans le projet de loi C-285 sans recourir aux mesures imparfaites qui y sont proposées. Par conséquent, j’invite la Chambre à faire un choix prudent et à rejeter la formule rigide qui est préconisée dans le projet de loi C-285.

  (1820)  

    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi de la députée de Québec. Le projet de loi C-285, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement, prévoit le versement, par la société, d'une part de ses bénéfices aux provinces à des fins de logement social et abordable.
    La région que je représente, dans l'Île-du-Prince-Édouard, bénéficie grandement des programmes de la SCHL depuis déjà un certain temps. Je pense par exemple au PAREL, qui a aidé beaucoup de mes électeurs à faible revenu. Je sais, entre autres, que des gens ont pu, grâce à ce programme, améliorer leur maison et la rendre plus facile à chauffer l'hiver, ou prolonger notablement la durée de vie de leur maison à la suite des rénovations qu'ils avaient pu faire.
    Il existe d'autres programmes pour la rénovation des logements. Le programme Logements adaptés: aînés autonomes permet aux personnes de plus de 65 de demeurer plus longtemps chez elles. Il y a aussi le Programme de réparations d'urgence, qui aide les personnes à faible revenu aux prises avec des problèmes inattendus, comme un toit qui coule ou un système de chauffage qui tombe en panne. Ce programme donne un coup de main quand une urgence de ce genre se produit.
    Le personnel de la SCHL aide ainsi les propriétaires aux prises avec de tels problèmes courants, et veille à ce qu'ils soient traités équitablement. C'est pourquoi je suis convaincu que la SCHL doit continuer à distribuer directement le financement qu'elle verse, afin que rien ne puisse être détourné et utilisé aux fins d'autres programmes provinciaux.
    La SCHL donne un excellent service aux Canadiens dans les provinces où elle distribue elle-même ses fonds, comme à l'Île-du-Prince-Édouard. Je sais que j'ai déjà dit que ces programmes pourraient jouir d'un meilleur financement, mais j'insiste sur le fait que cette forme de financement annuel n'aide pas seulement les propriétaires de maison, il permet aussi d'injecter de l'argent dans l'économie.
    En tant que politicien d'une région rurale du Canada atlantique, je juge crucial que ces programmes demeurent de compétence fédérale, afin que leur prestation soit uniforme dans les différentes régions du pays — qu'on ne se retrouve pas avec un assemblage hétéroclite de programmes qui laisserait les plus vulnérables de la société passer entre les mailles du filet. Sur ce plan, je peux dire sans hésiter que le gouvernement fédéral joue un rôle crucial.
    Ceci dit, j'aimerais aborder le premier point de ce projet de loi, soit le transfert de sommes d'argent de la Société canadienne d'hypothèques et de logement vers les provinces. L'objection est évidente: ce n'est pas le rôle d'une société d'État d'allouer de l'argent aux gouvernements provinciaux. Cette responsabilité échoit au gouvernement fédéral. Les sociétés d'État sont des entreprises sous la direction du gouvernement et leur but n'est pas de faire des paiements de transfert. C'est clair.
    Supposons un instant que nous pouvons écarter ce principe et permettre à la SCHL d'allouer des sommes d'argent aux provinces. Est-ce qu'on demanderait ensuite à la Monnaie royale canadienne de redistribuer ses profits un peu partout au pays? Et Postes Canada? Jusqu'où pouvons-nous aller? Cette proposition placerait le mode de transfert entre le fédéral et les provinces en contravention à notre système de fédéralisme et n'est donc pas faisable.
    Portons maintenant notre attention sur une autre objection, qui est sans doute de nature plus constructive. Ce projet de loi vise à modifier la Loi sur la Société canadienne d'hypothèques et de logement, bien qu'elle devrait plutôt modifier la Loi nationale sur l'habitation.
    La Loi nationale sur l'habitation a pour but de promouvoir la construction de nouvelles habitations, la réparation et la modernisation des habitations existantes et l'amélioration des conditions de logement et de vie. La partie X de cette loi concerne déjà le logement social. Pour que la SCHL puisse faire ce que ce projet de loi propose, il faudrait aussi modifier la Loi nationale sur l'habitation.

  (1825)  

    Un autre aspect important et problématique de ce projet de loi concerne les bénéfices utilisés pour financer les objectifs de cette mesure législative. Le projet de loi affirme que les surplus de la Société canadienne d'hypothèques et de logement seraient versés aux provinces, mais le calcul de ces surplus n'est pas clair. On ignore au juste de quels surplus il s'agit. Le manque de précision donne lieu à de la confusion et soulève un certain nombre de questions qui demeurent sans réponse. Parlons-nous de l'excédent de capital ou de l'excédent des recettes? Le projet de loi parle-t-il des sommes brutes ou nettes?
    De plus, l'excédent actuel de la SCHL est estimé à 4,4 milliards de dollars, mais de ce chiffre, 3,4 milliards de dollars ont déjà été mis de côté par la SCHL pour couvrir des pertes pouvant survenir à l'avenir. Le projet de loi parle-t-il du milliard de dollars qui reste ou de la somme de 4,4 milliards de dollars? Ou utilise-t-on une autre définition du partage des bénéfices?
    Ce ne sont que quelques-unes des questions sans réponse qui découlent du manque de clarté de cette partie du projet de loi. C'est une grave lacune, car il est alors impossible de déterminer au juste ce que le projet de loi réclame.
    En plus des difficultés déjà mentionnées, je voudrais également ajouter que le type de répartition proposée dans cette mesure législative posera des problèmes sur les plans de la responsabilité et de l'équité.
    Sous sa forme actuelle, le projet de loi va éliminer l'examen parlementaire en permettant de verser directement ces sommes aux provinces au prorata de leur population. De plus, une fois que cet argent est entre les mains des provinces, le Bureau du vérificateur général sera incapable de vérifier l'utilisation qu'on en fait. La chaîne de responsabilité sera brisée et le Parlement ne pourra plus examiner ces dépenses. Nous ne voulons sûrement pas appuyer des projets de loi qui affaiblissent la responsabilité et réduisent la capacité du Bureau du vérificateur général d'assurer une surveillance des deniers publics.
    En ce qui concerne le calcul au prorata de la population, il faut également reconnaître que certaines provinces ont un besoin plus urgent que d'autres de programmes et de projets de logement abordable.
    Alors qu'il est facile d'avoir accès à des logements abordables à Terre-Neuve-et-Labrador, c'est beaucoup moins le cas dans des régions comme l'Alberta, par exemple, où l'industrie pétrolière extrêmement florissante attire un grand nombre de travailleurs de tout le pays, ou en Colombie-Britannique, où une économie forte et l'immigration font monter les coûts du logement à un rythme accéléré. La distribution au prorata de la population ne tiendrait pas compte du fait que les provinces sont dans des situations bien différentes et elle pourrait accroître les tensions régionales liées aux méthodes de répartition au prorata de la population.
    Je le répète, un examen des conséquences du projet de loi sur les plans de la responsabilité et de l'équité de la répartition montre que cette mesure législative est déraisonnable et est loin de parvenir à l'équilibre souhaité.
    Il ne fait aucun doute, comme je l'ai dit plus tôt, que la SCHL et le programme PAREL connaissent beaucoup de succès dans ma région. Cependant, je n'insisterai jamais assez sur le fait que ces programmes doivent demeurer sous la direction du gouvernement fédéral et sous le contrôle de la Chambre des communes. Nous voulons nous assurer qu'ils profitent équitablement à tout le pays.
    Lorsqu'on examine le bilan de la SCHL dans ma région, à l'Île du Prince-Édouard, on constate qu'elle est très sous-financée, mais qu'elle est malgré tout très efficace dans ce qu'elle fait. Il est important non seulement que ces programmes restent où ils sont, mais aussi que le gouvernement fédéral y investisse plus d'argent, car, comme il a déjà été dit à la Chambre, ces programmes permettent à des personnes de demeurer chez elles et ainsi de vivre dans un plus grand confort. En plus de répondre aux besoins des aînés, ces programmes font économiser le gouvernement.
    En somme, je dirai que, dans l'ensemble, ce projet de loi n'est pas viable. Bien que j'appuie sans réserve l'objectif de fournir des logements abordables aux Canadiens, j'en suis venu à la conclusion, après avoir examiné attentivement le projet de loi, qu'il comporte des lacunes fondamentales auxquelles nous ne pourrions pas remédier à l'étape de l'étude en comité.

  (1830)  

    Monsieur le Président, dans ma circonscription, London—Fanshawe, le besoin de logements abordables est critique.
    Les familles font des pieds et des mains pour trouver des logements qui permettront à leurs enfants de vivre en sécurité et d'aller à l'école. De jeunes mères se débattent pour trouver un logement qui leur permettra de fuir la brutalité d'un conjoint. Des personnes âgées dont les revenus de retraite n'ont pas suivi l'inflation doivent maintenant se trouver un logement abordable. Toutes ces situations pourraient être évitées. Le projet de loi à l'étude permettrait d'alléger le fardeau du logement pour des gens de ma circonscription et de l'ensemble du Canada.
    La Société canadienne d'hypothèques et de logement ne prévoit financer que 8 217 nouvelles unités de logement à prix modique cette année. Il s'agit d'une baisse par rapport aux 20 000 unités de l'an dernier. Fait encore plus inquiétant, la SCHL ne prévoit construire que 1 642 unités à prix abordable en 2007. Cette baisse considérable accroîtra le risque de l'itinérance pour un plus grand nombre de Canadiens.
    Selon ce projet de loi parrainé par mon collègue, les bénéfices de la SCHL dépassant les 0,5 p. 100 seraient distribués aux provinces pour leur usage à des fins de logement social et abordable et la SCHL serait tenue d'encourager l'offre de logements de qualité à prix abordable, d'accroître les choix en matière d'habitation pour la population et de contribuer à la création et au développement de coopératives d'habitations. J'aimerais souligner l'importance de chacun de ces aspects.
    Tout d'abord, pour ce qui est du logement coopératif, la dernière coopérative financée par le gouvernement fédéral, Talisman Woods, a été construite dans ma circonscription en 1993. Le projet était d'une extrême importance pour la collectivité. Il permettait aux gens de Talisman Woods d'acheter leurs unités à un propriétaire qui avait négligé l'entretien. La collectivité en question a transformé une bâtisse de trois étages délabrée, où les moisissures et les fuites d'eau abondaient, en logements dont les intéressés pouvaient être très fiers.
    Il serait certainement avantageux pour les gens d'autres localités de bénéficier d'un plus grand nombre de projets financés par le gouvernement fédéral. Le logement coopératif assure non seulement des logements à prix abordable, mais favorise également l'esprit communautaire.
    Le logement social et le logement à prix abordable constituent un besoin critique dans bon nombre de villes du pays. On compte environ 150 000 sans-logis au Canada. Cela représente presque 0,47 p. 100 de la population canadienne et ne tient pas compte des personnes qui vivent dans des logements non conformes, surpeuplés ou temporaires. Selon les statistiques sur l'utilisation des abris partout au Canada, environ une personne sur 200 au Canada est un sans-abri.
    Il nous faut également fournir des logements de qualité à prix abordable. Dans des provinces comme l'Alberta, l'économie fonctionne à plein régime à l'heure actuelle, comme nous le savons tous, et le coût du logement a monté en flèche. Le marché du logement ne suffit plus à la demande, surtout à la demande de logements à prix abordable. Certaines personnes n'ont que peu de choix et n'ont pas d'endroit où habiter, et l'hiver est à nos portes, l'hiver de l'Alberta.
    Le choix en matière de logement est également capital. Souvent, les options de logement social ou abordable sont reléguées dans certains quartiers ou certains immeubles d'habitation. Cela peut aggraver le problème de l'itinérance plutôt que le régler. Par exemple, la plupart des logements abordables sont des appartements qui ne conviennent pas toujours aux familles. Souvent, il faut plus de place. En confinant le logement social dans certains quartiers, on se trouve souvent à forcer des familles à quitter leur propre quartier. Non seulement ces personnes quittent leur foyer et leur quartier, mais encore elles sont coupées de leurs amis, de l'appui et des réseaux de soutien dont elles ont besoin. Les enfants sont forcés de changer d'école.
    Comme les députés le constatent, il est capital qu'il y ait plus de choix en matière de logement.
    Je voudrais faire ressortir deux choses encore. D'abord, je voudrais souligner l'importance de ce projet de loi, compte tenu notamment de l'attaque lancée par le gouvernement conservateur contre le logement abordable. Le budget de la SCHL a été réduit de 45 millions de dollars. Cela pourrait avoir des effets très réels sur la capacité de la SCHL de gérer le logement social dans notre pays.
    Selon des documents obtenus par mes collaborateurs, les compressions, me dit-on, sont à peine inférieures aux taux d'intérêt prévus et inférieures à l'inflation escomptée. Ou bien le gouvernement conservateur apporte des compressions au programme, ou bien il jongle avec les chiffres. Je ne puis croire que le gouvernement tente de nous faire avaler qu'il économise 45 millions de dollars parce que les taux d'intérêt sont plus faibles que prévu. Ce n'est pas quelque chose que le gouvernement conservateur a fait, ni une chose dont il peut s'attribuer le mérite. Cet argent appartient aux Canadiens et il devrait être investi dans le logement abordable dès maintenant. Personne au Canada ne devrait avoir à passer un rude hiver sans toit au-dessus de sa tête.

  (1835)  

    Dans ma circonscription, London—Fanshawe, le ministre responsable de la SCHL a déclaré en août dernier que tous les fonds de l'Initiative de partenariats en action communautaire avait été affectés. Quand cela s'est avéré faux, après d'intenses pressions de la part des collectivités et des médias, l'argent a été promis à nouveau. Nous apprenons aujourd'hui que neuf des dix organisations devant recevoir des fonds n'ont toujours rien reçu. Ces organisations comprennent la London Homeless Coalition, le Comité du SIDA de London, Street Connection, le London Housing Registry, le centre d'action jeunesse et deux organisations des Premières nations. Le temps passe et, une à une, ces organisations devront réduire leurs activités, mettre à pied des employés ou même fermer leurs portes.
    Il est très clair selon moi que le logement, les refuges et la défense des pauvres ne constituent pas une priorité pour le gouvernement.
    Le gouvernement semble vouloir verser les fonds aux organisations le plus tard possible dans l'exercice financier. De cette façon, ces groupes ne peuvent dépenser leur argent avant la fin de l'exercice, le 31 mars. Cela permet aux conservateurs de déclarer que ces fonds peuvent être réduits, car ces groupes n'ont pas dépensé tout l'argent demandé. C'est de la politicaillerie et c'est tout simplement inacceptable.
    Il est très clair que ce projet de loi doit être adopté pour que des fonds soient affectés au logement abordable dans ce pays.
    Enfin, je crains que ces fonds ne représentent pas grand chose en fin de compte. Les changements apportés récemment qui ont ouvert l'assurance hypothécaire à la concurrence auront une incidence négative sur les profits de la SCHL. Le système actuel donne aux gens qui ne peuvent faire la mise de fonds requise sur une maison la possibilité d'acheter tout de même cette maison.
    Il permet aux familles à revenu faible et moyen d'avoir accès à l'assurance hypothécaire. Cela aide à fournir aux familles de travailleurs un logement de qualité. Le système permet aux groupes communautaires d'avoir accès à des taux d'assurance leur permettant de construire et d'entretenir des logements avec services de soutien et des logements qui répondent à d'autres besoins spéciaux.
     Le système actuel qui offre un taux uniforme plus bas est nécessaire pour le marché du logement et essentiel pour les promoteurs de logements abordables. Si les taux d'assurance hypothécaire sont trop élevés, il devient très difficile, voire même impossible, de construire des logements abordables.
    L'assurance hypothécaire est une activité rentable pour le gouvernement. En effet, c'est une bonne vache à lait. En 2005, les recettes nettes provenant de l'assurance hypothécaire de la SCHL s'élevaient à 951 millions de dollars. Bien que le marché ait déjà été partiellement ouvert pour permettre à l'entreprise privée de vendre également de l'assurance, le gouvernement est maintenant en train d'ouvrir la concurrence à d'autres intérêts, ce qui ne laissera aucune protection pour les familles à revenu moyen ou faible et aucune option pour le financement de logements abordables.
    En ouvrant le marché et en laissant davantage d'entreprises se livrer à la concurrence pour offrir une assurance hypothécaire sans aucune garantie, l'accès équitable aux hypothèques pour les acheteurs qui représentent un risque élevé et pour les Canadiens qui vivent en milieu rural pourrait être compromis. Pensez à ces Canadiens des régions rurales, monsieur le Président. Nous devons prévoir un moyen pour garantir l'égalité d'accès à toutes les régions et à tous, quels que soient leurs niveaux de revenu.
    En tant que société d'État, la SCHL doit bien entendu se préoccuper des profits, mais comme son seul actionnaire est le gouvernement du Canada, elle peut se soucier du bien-être des Canadiens au lieu de se préoccuper seulement de son bilan.
    Rien ne prouve qu'ouvrir le système à plusieurs concurrents aidera vraiment les acheteurs qui sont à la recherche d'une assurance hypothécaire. À ma connaissance, aucune étude n'a démontré que le statu quo était source de problèmes. Une partie importante des transactions de la SCHL appartiennent à des marchés qui ne sont pas desservis par le seul assureur hypothécaire privé. L'ouverture de ce marché à d'autres assureurs n'augure rien de bon pour la SCHL et compromettra sa capacité de réinvestir des capitaux dans le logement abordable.
    Ce projet de loi a le potentiel nécessaire pour aider les Canadiens qui ont besoin d'un logement sûr et abordable. J'encourage tous les députés à l'appuyer, car il n'y a pas plus importante façon d'utiliser les deniers publics que de garantir un logement sûr et abordable à la communauté, c'est-à-dire au public.

  (1840)  

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie très chaleureusement ma collègue, la députée de Québec, d'avoir bien voulu déposer ce projet de loi, et également de l'avoir défendu avec autant de sensibilité. Le Bloc québécois propose que la SCHL limite sa capacité de capitalisation en versant au Québec et aux provinces une partie importante des énormes surplus accumulés au cours des dernières années.
    Le projet de loi C-285 permettra au Québec et aux provinces d'investir dans l'habitation, notamment pour la construction de logements sociaux, communautaires et abordables. Au Québec, près de 450 000 ménages ont des besoins impérieux de logement, alors qu'il s'agit de 1,7 million pour l'ensemble du Canada.
     Afin de connaître la véritable situation des mal-logés ou des non-logés, j'ai parcouru le Québec et le Canada l'été dernier. J'ai visité Trois-Rivières, Montréal, Rimouski, Québec, Victoriaville, Sherbrooke, Granby et, dans mon comté, Magog. Puis au Canada, j'ai visité Toronto, Winnipeg, Saskatoon, Edmonton, Red Deer, Regina, Calgary et Vancouver. Dans toutes ces villes, les gens et les bénévoles qui s'occupent des mal-logés crient au secours.
    Ce qui m'a le plus frappé, c'est l'absence de logements permanents pour les itinérants et les sans-abri. Comment leur tendre la main pour les aider s'il n'y a pas de logement pour leur permettre un nouveau départ?
    La situation est de plus en plus dramatique compte tenu des écarts de revenu qui s'agrandissent. J'ai vu tellement de femmes, de vieillards, de familles entières dans la rue et d'Autochtones sans lieu décent de vie au Canada. Même un guide de voyage français le Routard, ayant pour titre Canada de l'Ouest, en parle comme d'un phénomène canadien. Imaginez, le Canada est cité comme ayant un nombre effarant de sans-abri en comparaison de ce que les Européens ont l'habitude de voir! C'est scandaleux dans un pays aussi riche que le nôtre!
    Dans le dernier rapport annuel de la SCHL, la société d'État reconnaît que 15 p. 100 de tous les logements au Canada se situent sous la norme canadienne. Par conséquent, 15 p. 100 de mal-logés se rajoutent aux non-logés.
    À Edmonton, la ville prospère par excellence, le prix des loyers augmente tellement vite — j'ai vu une augmentation de 85 $ à 1 100 $ par mois —, que de plus en plus de personnes et de familles se bricolent des abris de fortune, malgré et à cause du plein emploi à gros salaire. La situation est la même à Regina et à Calgary. Les intervenants du milieu nous imploraient de faire connaître cette situation et le besoin de logements d'accueil, coopératifs et abordables à tous. Les personnes âgées — mais surtout les femmes âgées — les familles monoparentales et les personnes sans métier, les working poors, sont les laissés-pour-compte de la prospérité, et cela, tout autant en Alberta et au Québec que dans toutes les villes du Canada.
    La SCHL a accumulé depuis 1998 des surplus de 5,3 milliards de dollars. Elle n'a jamais eu la mission d'accumuler des fonds de réserve comme un banque. Non, sa mission est d'aider les ménages à se procurer un logement de qualité sûr et à coût abordable pour tous, incluant les personnes les plus démunies.
    La SCHL n'est pas une entreprise privée; c'est une société d'État au service des citoyens et des citoyennes du Québec et du Canada. Il est donc parfaitement illogique, voire immoral que, détournée de sa raison d'être, la SCHL accumule des surplus de cet ordre, alors que la plupart des grandes régions métropolitaines du Québec et du Canada vivent actuellement un pénurie de logements à coût raisonnable.
    Ce projet de loi limitera les réserves de la SCHL à 0,5 p. 100 de son portefeuille de prêts, soit un peu plus de 1 milliard de dollars, ce qui lui permettra de constituer une réserve annuelle d'environ 100 millions de dollars. Ces montants, selon les experts, sont amplement suffisants pour parer à toute éventualité normale.

  (1845)  

    De plus, le fonds consolidé du gouvernement a toujours été la garantie ultime. En fait, rappelons-nous le mandat législatif et les objectifs de la SCHL qui sont de favoriser: la construction résidentielle; la réparation et la mise à niveau des habitations existantes; l'accès à des logements normaux et abordables pour tous, même pour les plus défavorisés de notre société; des logements pour des familles de trois ou quatre enfants — cela n'existe plus, il faut maintenant devenir propriétaire si pour avoir de l'espace pour une famille de trois ou quatre enfants; la disponibilité de financement à moindre coût afin d'y inclure un jour les petits salariés; enfin, la stabilisation des itinérantes et des itinérants.
    Ce mandat doit se refléter dans le plan de la société d'État qui a pour nom: SCHL.
    C'est notre responsabilité, en tant que gouvernement, de s'assurer que la SCHL respecte ce mandat, et de ne pas lui permettre de s'égarer dans des lois du marché qui ne s'appliquent pas à elle. Ce dérapage fait de la pauvreté un obstacle à une société juste et équitable.
    Le gouvernement nage dans les surplus récurrents pendant que les pauvres de notre société se noient dans l'incapacité de payer les loyers du marché. Je pense souvent ici aux femmes âgées.
     Il y a actuellement deux façons de penser. L'Europe délaisse le logement gouvernemental pour le logement du marché. Toutefois, elle paye pour permettre aux pauvres d'y vivre. Jusqu'en 1993 pour leur part, de façon plus traditionnelle, l'Angleterre, l'Australie, les États-Unis et le Canada aidaient à loger les pauvres. En ce moment, le gouvernement semble ne vouloir faire ni l'un ni l'autre. A-t-il perdu la tête? Comment le gouvernement d'un pays développé peut-il se détacher complètement du logement de ses citoyens?
    La semaine dernière, la ministre nous a dit que le gouvernement investissait 2 milliards de dollars par année dans le logement abordable. Soyons clairs, ces 2 milliards de dollars ne visent que les paiements des hypothèques des logements construits avant 1994.
    Il n'y a eu aucun nouveau projet depuis, sauf un petit montant de 800 millions de dollars issu du projet de loi C-48 et venant du budget de l'hiver 2005. C'est beaucoup trop peu pour permettre au gouvernement de prendre ses responsabilités, tant au Québec que dans l'ensemble du Canada. Le fédéral s'est complètement désengagé du développement de nouvelles unités de logements sociaux. C'est, encore une fois, pelleter dans la cour du voisin. On peut comprendre le désabusement des citoyens face à un tel gouvernement.
    Ce désengagement du gouvernement, qui a l'argent, a eu un effet dévastateur sur les ménages à faibles revenus, tant au Québec qu'au Canada. La SCHL n'est ni une compagnie d'assurance ni une banque. Pourquoi dévie-t-elle de son rôle? Est-ce le néolibéralisme du gouvernement qui s'installe jusqu'à l'intérieur de ses institutions gouvernementales comme la SCHL?
    La SCHL, en se créant un fonds de réserve, prétend être fair-play avec les grandes banques canadiennes, mais elle ne l'est pas avec les cinq millions de Québécois et de Canadiens qui vivent sous le seuil de pauvreté et le 1,7 million de ménages mal ou pas logés. Son véritable fonds de réserve est constitué par les paragraphes 29(1), 29(2) et 29(3) de la Loi sur la Société canadienne d’hypothèques et de logement pour venir en aide au logement, pas pour venir en aide au Bureau du surintendant des institutions financières du Canada.
    J'insiste donc, les pertes des activités de la SCHL sont garanties par le fonds consolidé du gouvernement. Le Bloc québécois et les autres partis responsables de la Chambre désirent, par ce projet de loi, ramener la SCHL à son mandat qui consiste à investir ses bénéfices non répartis dans le logement social, le logement abordable, les habitations coopératives et la mise à niveau des 15 p. 100 de logements qui ne répondent pas aux normes.
    Nous sommes convaincus que les provinces sont bien mieux placées pour décider comment utiliser cet argent au mieux. Il n'y a donc pas de raison de ne pas verser ces sommes aux provinces qui vont les gérer parfaitement.

  (1850)  

    Il n'y a donc aucun problème relié au fait qu'il verse ces sommes aux provinces, qui les géreront parfaitement.
    La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de l'ordre des priorités au Feuilleton.

[Traduction]

    Conformément à l'ordre adopté le jeudi 28 septembre, la Chambre se formera maintenant en comité plénier pour étudier l'affaire du gouvernement no  10. Je quitte maintenant le fauteuil afin que la Chambre se forme en comité plénier.
    [ Suite des délibérations au fascicule B. ]
    [Suite des délibérations consignées à la partie A.]

Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

La situation au Soudan

    (La Chambre se forme en comité plénier, sous la présidence de M. Blaikie, pour étudier l'affaire du gouvernement no 10.)

    Que le comité prenne note de la situation au Soudan.
    La Chambre se forme maintenant en comité plénier pour étudier l'affaire du gouvernement no 10.

[Français]

    Je voudrais ouvrir cette séance en comité plénier en faisant une courte déclaration sur les débats exploratoires.
    Pour certains députés, ce sera sans doute la première fois qu'ils participeront à un tel débat. Je vais donc expliquer comment nous procéderons.

  (1855)  

[Traduction]

    Le débat de ce soir est un débat général portant sur la situation au Soudan. Comme c'est le cas dans toutes les délibérations du comité plénier, les députés n'ont pas à être à leur place pour obtenir la parole.
    Chaque député aura 10 minutes à la fois pour participer au débat. Les interventions seront suivies d'une période de questions et d'observations de 10 minutes. En outre, conformément à la motion adoptée hier, tout député qui se lève pour prendre la parole durant le débat peut indiquer au président qu'il partagera son temps de parole avec un autre député.
    Même si les députés peuvent intervenir plus d'une fois, la présidence essaiera généralement de veiller à ce que tous les députés qui souhaitent intervenir puissent se faire entendre avant d'inviter des députés à parler de nouveau, tout en respectant, à l'intention des intervenants, le roulement tenant compte de la taille proportionnelle des partis.
    Pendant la période de questions et d'observations de 10 minutes, il n'y aura pas de limites de temps établies pour chaque intervention, mais je tâcherai de permettre au plus grand nombre possible de députés de participer à cette partie des délibérations et je demande la collaboration de tous les députés pour que leur intervention soit aussi succincte que possible.

[Français]

    En tant que président, je m'inspirerai des règles régissant le comité plénier. Néanmoins, afin de permettre un bon échange, je ferai preuve de discrétion et de souplesse dans l'application de ces règles.

[Traduction]

    J'aimerais également signaler que, en comité plénier, les ministres et les députés doivent être désignés par leur titre ou le nom de leur circonscription et que les commentaires doivent évidemment être faits par l'entremise de la présidence.
    La première série d'interventions suivra l'ordre habituel des partis: le gouvernement, l'opposition officielle, le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique. Ensuite, nous suivrons le roulement habituel tenant compte de la taille proportionnelle des partis.

[Français]

    À la fin du débat de ce soir, la séance du comité sera levée et la Chambre ajournera jusqu'à demain.
    Nous pouvons maintenant commencer la séance de ce soir.

[Traduction]

    Le ministre des Affaires étrangères a la parole.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. J'aimerais vous dire combien j'apprécie votre présence dans le fauteuil du président à l'occasion de l'important débat de ce soir sur le conflit au Soudan.
    J'aimerais commencer par insister sur la profonde inquiétude qu'éprouve le nouveau gouvernement au sujet de la détérioration de la situation au Darfour relativement aux droits de la personne et à la sécurité. Comme nous l'avons fait précédemment, nous allons continuer d'exhorter le gouvernement du Soudan et les diverses factions guerrières du Darfour à mettre fin immédiatement aux hostilités et à cesser les combats.
    La population civile du Darfour souffre depuis assez longtemps. Une force de l'ONU doit être rapidement et pleinement déployée sur le terrain pour rétablir la stabilité. Je vais revenir sur cette question plus tard, mais auparavant, j'aimerais situer la question pour les Canadiens qui assistent chez eux au présent débat.

[Français]

    Le Soudan est situé dans une région qui, de tout temps, a été la plus pauvre du monde et la plus sujette à l'éclatement de conflits. Pour apporter la paix dans cette région, il faut d'abord s'attaquer à trouver des solutions aux différents conflits qui déchirent le Soudan. Les conséquence de ces conflits intérieurs se font sentir bien au-delà de ses frontières.

[Traduction]

    Le Canada a comme politique de considérer le Soudan dans son ensemble, ce qui signifie que toutes les régions du Soudan et les conflits qui s'y déroulent sont interreliés. Le rôle du gouvernement du Soudan est crucial dans les questions de sécurité et de stabilité, et on doit reconnaître que les mesures prises relativement à un problème donné auront inévitablement des répercussions sur les autres problèmes, tout comme ce qui se passe dans les diverses régions du Soudan a des répercussions sur l'ensemble du pays.
    Le Canada fait un grand effort pour que l'on cherche à résoudre les problèmes à la racine plutôt que de se limiter aux symptômes. Le phénomène de la marginalisation est au coeur du conflit du Soudan puisque la richesse y est concentrée à Khartoum et n'est pas redistribuée dans les régions rurales sous-développées du pays.
    Avant la crise actuelle au Darfour, le Sud du Soudan a été éprouvé par une guerre civile dévastatrice. Le bilan de cette guerre a été épouvantable. On l'estime à deux millions de morts et quatre millions de personnes déplacées, soit le plus grand nombre de personnes déplacées que l'on puisse trouver à un endroit donné dans le monde. La région est vaste et les infrastructures sont insuffisantes, notamment en ce qui concerne les écoles, les hôpitaux et les voies publiques élémentaires. Pourtant, de nombreuses personnes y retournent et de nombreuses autres doivent être réinstallées.
    Les négociations parrainées par l'Autorité intergouvernementale pour le développement, qui ont abouti à la signature d'un accord de paix global entre le gouvernement du Soudan et le Mouvement populaire pour la libération du Soudan, ont constitué un effort primordial pour réduire les sentiments de marginalisation. L'accord de paix global comprend des dispositions portant explicitement sur le partage du pouvoir et de la richesse au Soudan.
    Le conflit Nord-Sud, toutefois, continue d'avoir des conséquences dévastatrices. Les autorités soudanaises et la communauté internationale doivent déployer des efforts pour bâtir l'infrastructure nécessaire et créer les institutions qui contribueront au développement à long terme de la région. Il est également nécessaire de rehausser les efforts de consolidation de la paix pour éviter des conflits ultérieurs.
    Nous sommes d'avis que le fait d'appuyer la consolidation de la paix au Soudan et, en particulier, de favoriser la mise en oeuvre complète et rapide de toutes les dispositions de l'accord de paix global constitue la clé de la résolution de la crise au Darfour et d'une paix durable au Soudan.

  (1900)  

[Français]

    Comme le premier ministre l'a fait remarquer la semaine dernière au Sommet de la Francophonie, notre gouvernement veut promouvoir — dans le sud du Soudan et au Darfour en particulier — la réforme du système judiciaire, le rétablissement du système de sécurité, la réduction du trafic d'armes et le renforcement des institutions publiques et de la vie sociale au Darfour et dans l'ensemble du Soudan.

[Traduction]

    Nous sommes déterminés à appliquer, avec d'autres, une approche concertée qui s'attaque aux causes sous-jacentes et aux symptômes du conflit. C'est pour cette raison que le Canada, au titre du Fonds pour la paix et la sécurité dans le monde, offre au Sud du Soudan un soutien supplémentaire pour consolider la paix. Pour l'exercice en cours, nous avons engagé 14,2 millions de dollars, en particulier dans la réforme et le renforcement du système judiciaire, la réduction du trafic d'armes et l'amélioration de la gouvernance.
    Ce montant inclut des sommes pour les projets existants et nouveaux ainsi que pour les initiatives qui se concentrent sur la nature régionale du conflit et qui appuient les efforts de consolidation de la paix dans les pays limitrophes du Soudan. Les projets vont d'une initiative d'envergure destinée à appuyer le système judiciaire et à améliorer le système carcéral dans le Sud du Soudan à une évaluation exhaustive des armes légères dans ce pays.
    La quête pour la paix au Soudan et dans ses régions représente de grandes difficultés pour tous. Comme les députés le savent, le Canada a joué un rôle important dans les pourparlers de paix à Abuja qui ont débouché sur la signature de l'accord de paix sur le Darfour. En fait, le Canada a joué un rôle diplomatique central, collaborant de près avec l'Union africaine, l'Union européenne, la Grande-Bretagne et les États-Unis à la négociation de l'accord durant les derniers jours des pourparlers.
    Durant cette période, je communiquais régulièrement avec les responsables. Je salue les efforts d'Allan Rock, notre ambassadeur aux Nations Unies, et de David Angell, haut-commissaire du Canada au Nigeria, qui ont accompli ce travail important à Abuja.
    À l'époque, nous avons personnellement envoyé une lettre aux chefs rebelles et au gouvernement du Soudan, les exhortant tous à parvenir à une entente que les parties en présence pourraient respecter. Nous estimons que de plus grands progrès doivent être accomplis relativement à l'Accord de paix sur le Darfour, notamment en ce qui concerne sa mise en oeuvre par les parties et la collaboration des non-signataires. Les parties à l'accord et les non-signataires devraient s'engager dans un processus de concertation à cette fin. Le Canada appuiera tous les efforts ayant pour but de ramener à la table de négociation quiconque n'a pas adhéré à l'accord.
    J'ai rencontré Jan Egeland, coordonnateur des secours d'urgence des Nations Unies, qui a décrit avec force détails le besoin urgent de voir intervenir les Nations Unies. Nous avons également parlé de la nécessité de protéger les travailleurs humanitaires au Soudan ainsi que les personnes dont le travail désintéressé sur le terrain met, de plus en plus, la vie en danger.
    Le Canada s'est fait le champion de cette question et de l'inclusion des femmes dans les pourparlers de paix; il a en outre prêté son appui à l'Union africaine afin de tenir compte, dans l'accord proprement dit, des considérations relatives au statut social des hommes et des femmes.
    Il est crucial que, pendant cette transition à une mission des Nations Unies, le Canada continue d'appuyer la relance des efforts diplomatiques déployés sous les auspices de l'Union africaine en vue du règlement du conflit. Le Canada participe activement et de façon significative à cet effort international.
    À l'ONU, il promet d'être très rentable de muter la force déployée au Darfour en une présence de l'ONU au Soudan. Grâce au bassin plus vaste de ressources humaines et matérielles auquel elle a accès, l'ONU apporte une contribution axée sur un financement stable et des décennies d'expérience. Étant donné que, déjà, l'ONU est sur place au Sud Soudan et coordonne les efforts humanitaires au Darfour, la transition au Darfour présentera comme avantages des économies d'échelle combinées à une structure unifiée de commandement et de contrôle. La force centrale revêtira inévitablement un caractère africain marqué au coin de l'Union africaine.

[Français]

    Je reviens des Nations Unies, où nous avons discuté en profondeur de la situation tragique et urgente au Darfour. Mes collègues des autres pays comprennent parfaitement que nous devons unir nos efforts pour mettre fin à ce conflit tout de suite. Nous en avons également discuté cet été à la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays du G-8.

[Traduction]

     Pendant que j’étais au Nations Unies, je me suis entretenu avec le ministre des Affaires étrangères du Soudan, Lam Akol, pour obtenir que le gouvernement de Khartoum autorise une force de l’ONU à entrer au Darfour. J’ai demandé au ministre d’encourager son gouvernement à avoir plus de contacts avec la communauté internationale et à devenir un partenaire à part entière dans le dialogue que le Soudan a demandé. Je lui ai dit qu’il n'avait à craindre aucune forme de colonisation.
     J’avais déjà eu des discussions avec lui en août. Je lui ai parlé de l’inquiétude que suscite au Canada la violence qui continue et lui ai réitéré notre engagement à contribuer à la réalisation d’une paix durable dans la région. Je lui ai dit que le Canada souhaite collaborer plus étroitement avec le Soudan et tous les partenaires internationaux pour renforcer la confiance dans la mission de l’ONU et favoriser son acceptation.
     J’ai parlé à d’autres ministres des Affaires étrangères, y compris ceux des pays africains. Le ministre sénégalais, en particulier, semblait disposé à appuyer pleinement la transition vers une mission de maintien de la paix de l’ONU. J’ai assisté à une réunion spéciale organisée par la secrétaire d’État américaine et le ministre danois des Affaires étrangères Moller à l’intention des pays intéressés à discuter des moyens d’aller plus loin. Les efforts tendant à inclure en tout temps le gouvernement soudanais devraient dans tous les cas figurer en tête de liste. La communauté internationale continue à exhorter Khartoum à accepter la transition.
     Les efforts canadiens et internationaux visaient en outre à persuader les principaux dirigeants africains et arabes qui pourraient avoir une influence auprès du gouvernement du Soudan de parler en faveur de la transition. Pendant que j’étais au Nations Unies, j’ai tenu des réunions avec mes homologues de l’Algérie, de l’Égypte et du Sénégal ainsi qu’avec le secrétaire général de la Ligue arabe, qui se sont tous montrés disposés à user de leur influence auprès du gouvernement soudanais.
     Nous avons été fortement encouragés par la récente décision du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine de renforcer la mission de l’UA et de prolonger son mandat jusqu’à la fin de l’année. En attendant l’arrivée de la mission de l’ONU, la MUAS assurera une certaine protection des civils au Darfour, prévenant ainsi une absence dévastatrice de sécurité sur le terrain. Cela nous donnera également plus de temps pour persuader le gouvernement soudanais d’accepter la mission de l’ONU.
     Nous maintenons notre soutien inconditionnel de la MUAS. Le Canada a joué un rôle international de premier plan, en accordant un important appui à cette mission. Nous lui avons fourni des véhicules blindés, un centre d’entraînement des Forces canadiennes, de l’équipement personnel comprenant des casques et des gilets d’une valeur de 1,4 million de dollars, 25 hélicoptères loués, deux avions, du carburant ainsi que des conseillers militaires et civils. Mon collègue, le secrétaire parlementaire, présentera plus de détails au sujet de notre contribution.
     En tout, nous avons mis à la disposition de l’Union africaine un programme de soutien complet d’une valeur de plus de 190 millions de dollars. Nous avons eu l’occasion de parler à la Croix-Rouge internationale et à des ONG canadiennes qui assuraient un important soutien sur le terrain. Il importe de rappeler que c’est l’Union africaine elle-même qui, tout en acceptant de plus en plus de responsabilités, a demandé que la transition se fasse.
     En conclusion, nous continuerons à travailler avec nos partenaires internationaux pour mettre fin aux souffrances de la population du Darfour. Nous nous félicitons de l’appui demandé par le secrétaire général des Nations Unies et le président de l’Union africaine. Je sais que d’autres députés parleront en détail de propositions précises qui pourraient être faites.
     Je voudrais féliciter de leurs efforts beaucoup de ceux qui sont ici ce soir, y compris le sénateur Dallaire, qui s’est intéressé personnellement à la situation. Nous espérons pouvoir travailler conjointement, d’une façon productive et non partisane, pour faire cesser les incroyables souffrances imposées au peuple du Soudan.

  (1905)  

    Monsieur le président, j'apprécie le fait que nous soyons ici pour discuter de la situation au Soudan, mais nous devrions aussi tenir compte de ce qui se passe partout en Afrique, notamment dans la Corne de l'Afrique, que ce soit en Somalie, en Éthiopie, en Érythrée ou au Soudan. Cette partie du monde pourrait devenir une véritable poudrière. Dans cinq ou six ans, nous pourrions bien nous demander pourquoi nous n'en avons pas parlé avant. À l'heure actuelle, il y a un mouvement de sédition organisé par un groupe islamique en Somalie. Le président du pays vient justement de faire l'objet d'un attentat qui aurait pu lui coûter la vie.
    Une des choses dont nous ne parlons pas est notre manque de communication avec les collectivités soudanaise, éthiopienne, érythréenne ou somalienne du Canada. Par l'entremise de l'ACDI, nous pourrions fournir à ces collectivités un moyen de retourner dans leur pays et de participer au processus de paix. Nous n'offrons pas à nos collectivités les outils de développement durable nécessaires au renforcement de leurs capacités et à leur participation au processus de paix.
    Les collectivités qui vivent au Canada parlent la langue, sont présentes sur le terrain et sont prêtes à participer. Nous avons demandé au gouvernement à de nombreuses reprises d'agir en ce sens. Je me demande si le ministre et son ministère vont étudier les façons de faire du développement durable pour l'édification des pays de cette région par l'entremise de nos collectivités.

  (1910)  

    Monsieur le président, je crois que nous pouvons toujours faire plus. L'importance du défi en cause requiert bien sûr la participation de tous, et tout particulièrement de ceux qui ont les connaissances linguistiques appropriées et qui connaissent bien la région. Je reconnais la pertinence des commentaires du député à l'égard de toute l'approche adoptée à l'égard de l'Afrique. C'est indéniable. Toutefois, je suis d'avis que nous devons concentrer nos efforts sur les endroits où les besoins sont actuellement les plus criants, c'est-à-dire le Darfour.
    Pour faire suite aux commentaires du député, il serait peut-être utile de prévoir une formation pour les médecins ayant personnellement des racines dans la région. J'ajouterais d'ailleurs à ce sujet que l'ACDI est certainement prête à accepter les propositions de participation et d'accueillir ceux qui sont prêts à donner un coup de main. De plus, on pourrait également penser à demander à de simples citoyens d'aider à amasser des fonds, à collaborer plus particulièrement à la construction d'hôpitaux et d'écoles et à contribuer ainsi de façon tangible aux efforts communs.
    Les Canadiens sont généreux de nature. Je crois que le sort des Soudanais les touche profondément. Ils ont été sensibilisés à la situation désastreuse dans laquelle ces gens vivent. Des campagnes d'appui ont été organisées dans les universités et les collèges communautaires d'un bout à l'autre du pays. Des affiches ont été préparées et des groupes d'étudiants participent à ces campagnes de sensibilisation.
    Je crois que le Canada peut faire beaucoup pour ces gens. Le défi de notre génération pourrait bien être de trouver une solution à tous ces maux qui affligent les peuples africains depuis des générations. Le Soudan et plus particulièrement le Darfour en sont un bon exemple. C'est là l'objet de notre débat de ce soir.

[Français]

    Monsieur le Président, le ministre a souligné les efforts de la communauté internationale afin d'amener le gouvernement à accepter la présence de l'ONU au Darfour.
    Il y a cependant deux pays, nommément la Russie et la Chine, qui sont réputés être de très bons amis des autorités darfouriennes. J'aimerais connaître les efforts que le Canada a faits, s'il en a fait ou s'il entend en faire pour amener ces deux pays à avoir une certaine influence auprès du président du Darfour pour accepter que les Nations Unies puissent intervenir dans le dossier.
    Monsieur le Président, j'apprécie la question de la députée du Bloc québécois. C'est un bon point.
    J'ai parlé directement avec les ministres chinois et russe des Affaires étrangères, et j'ai encouragé leur participation pour les efforts en vue d'augmenter l'appui dans la région et pour donner de l'argent et le soutien à cette cause.

[Traduction]

    L'aide doit être organisée à l'échelle internationale. Les pays du G-8 doivent jouer un rôle de leadership à cet égard. Il m'est arrivé à plusieurs reprises de m'entretenir personnellement avec le ministre Lavrov de Russie. Il est bien conscient de tout cela, lui qui vient de présider la rencontre des ministres des Affaires étrangères des pays du G-8.
    Je prends bonne note des commentaires de la députée sur le fait que le Canada doit continuer de voir à ce que cette question soit mise à l'ordre du jour de toutes les rencontres internationales et que les autres pays participent également aux efforts en vue d'alléger les souffrances de ces gens.
    Monsieur le président, avec le déplacement de plus de deux millions de personnes et la mort de centaines de milliers de Soudanais, il est essentiel d'avoir une force capable d'intervenir pour mettre fin au conflit au Darfour.
    Il est vrai que l'Union africaine a déjà prolongé le mandat de ses troupes jusqu'en décembre, mais on a déjà malheureusement reproché à cette force de 7 000 militaires de n'avoir pas réussi à empêcher l'intensification du conflit. Cette force est sous-financée et n'a pas l'entraînement voulu pour intervenir dans un conflit.
    Les Nations Unies ont adopté une résolution prévoyant la constitution d'une force pouvant atteindre 20 000 militaires qui serait prête à être déployée dans le cadre d'une mission convenable. Grâce à la Loi sur l'accès à l'information, ma collègue de New Westminster—Coquitlam, porte-parole de notre parti, a découvert dans des notes d'information qu'il y a en fait 1 600 militaires de disponibles qui pourraient être déployés. Une partie de ces militaires pourrait être rendue disponible et déployée dans le cadre d'une mission de l'ONU.
    Voici ma question au ministre. Êtes-vous prêt à vous engager à dépêcher un contingent au Darfour si les Nations Unies déclarent que le temps est venu d'entreprendre une mission et d'envoyer des troupes sur le terrain?

  (1915)  

    À l'ordre, s'il vous plaît. Avant que nous entendions le ministre des Affaires étrangères, je rappelle à la députée de Trinity—Spadina, en fait à tous les députés, que les règles générales qui régissent nos débats s'appliquent également en comité plénier. Nous ne devons pas nous adresser directement aux autres députés, mais utiliser la troisième personne du singulier. Je demande à tous les députés de respecter cette règle.
    Le ministre des Affaires étrangères a la parole.
    M. le président, la question de la députée de Trinity—Spadina est très pertinente.
    Le Canada a appuyé la résolution 1706 de l'ONU, qui demande instamment que les forces de l'Union africaine soient remplacées par des forces des Nations Unies. Il n'y a pas eu de demande précise. Nous avons la conviction que la transition ne peut se faire que si le gouvernement du Soudan donne son consentement à ce stade. À ce jour, cela ne s'est pas produit. Nous devons continuer de mettre en oeuvre tous les moyens diplomatiques pour obtenir ce consentement. La prolongation de la mission au Soudan nous ouvre un créneau, soit jusqu'au 31 décembre, et l'effort lui-même va continuer sérieusement.
    Je reconnais, comme le font tous les députés, je crois, que le passage du temps peut permettre que d'autres atrocités soient commises dans ce pays. Nous sommes au courant des viols et du ciblage systématique des villages. Nous savons qu'il y a des déplacements massifs de populations, on l'a mentionné, des morts imputables à la faim, des mutilations génitales et des cas de ciblage des femmes. Ces atrocités écorchent la sensibilité de toutes les personnes ici présentes.
    J'ai eu l'occasion d'assister à une conférence portant expressément sur la question des enfants-soldats. Le sénateur Dallaire y a assisté également. Ce sont des choses qui nous secouent au plus profond de nous-mêmes. Elles détruisent vraiment l'âme, quand on pense aux répercussions sur la vie des habitants du Soudan.
    Pourtant, je réaffirme que si le Canada ou n'importe quel autre pays envoyait des troupes là-bas, cela provoquerait immédiatement un conflit avec le gouvernement du Soudan. Tant que nous n'aurons pas pu réaliser la transition aux forces de l'ONU, qui seraient composées principalement des forces de l'Union africaine déjà sur place, renforcées et soutenues par l'équipement, la formation et de l'équipement fournis par les Nations Unies, nous devons continuer de mettre l'accent sur cette transition d'abord et avant tout. Je crois que cela, en soi, est la solution qui mettra fin le plus rapidement aux souffrances et que c'est ce qui donnera le plus rapidement les résultats meilleurs pour la région.
     Monsieur le président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Lac-Saint-Louis.
    À cet instant même, un cauchemar se poursuit à l'autre bout du monde, dans le désert du Sahara. Au moment où nous prenons la parole, des femmes enceintes et des fillettes ayant parfois à peine huit ans se font dépecer devant les membres de leurs familles. À ce jour, 400 000 personnes ont été assassinées et trois millions ont été déplacées. C'est cela le génocide qui sévit au Darfour.
    Le temps des discussions est terminé. Le ministre des Affaires étrangères devrait comprendre cela. L'époque des demi-mesures est révolue.
    Le choix qui s'offre à nous est simple. Voulons-nous une intervention des forces de l'ONU au Darfour, ce qui permettrait de sauver des vies et d'arrêter un génocide, ou voulons-nous continuer à participer à des discussions qui déboucheront sur d'autres pourparlers, mais qui n'entraîneront aucune action et qui résulteront en un plus grand nombre de décès? Telle est la dure réalité. Jan Egeland, auquel le ministre a fait allusion, a prévenu ce dernier qu'au cours de la période qui s'en vient 100 000 civils allaient mourir à chaque mois. Autrement dit, 100 000 décès qui pourraient être évités vont survenir mois après mois.
    Le ministre ne comprend pas que le gouvernement de Khartoum est le régime génocidaire qui est au pouvoir depuis le plus longtemps. Ce régime continue de prendre la communauté internationale pour une bande d'idiots. Il continue d'adopter une approche soi-disant diplomatique. Les pourparlers de paix sont un exercice bidon. Pourquoi? Parce que le régime en place veut que le génocide continue. Il en a fait la preuve dans les montagnes Nuba. Il en a fait la preuve lors du conflit dans le sud du Soudan, qui a entraîné le génocide des tribus Dinka et Nuer, et que j'ai été à même de constater. J'ai vu leurs hélicoptères de combat Hind. J'ai vu les atrocités commises, les gens mutilés, les familles qui ont perdu des êtres chers.
    Cela n'a rien de drôle. On parle d'un génocide. Si nous n'agissons pas, nous allons nous retrouver avec un Rwanda, prise 2.
    Le choix est très simple. Nous avons la responsabilité de protéger ces gens. Avons-nous l'obligation d'agir? Je sais que cette responsabilité est très lourde pour le ministre. Je sais qu'il lui est difficile de prendre cette mesure, parce que cela n'a jamais été fait auparavant.
    Oui, nous sommes intervenus rapidement au Kosovo. Oui, nous avons agi relativement vite au Liban. Toutefois, nous continuons de tergiverser face aux génocides qui surviennent en Afrique.
     La situation sur le terrain est désolante. Les troupes de l’Union africaine ont été incapables de protéger les civils innocents parce qu’elles sont trop peu nombreuses, mal équipées et n’ont pas le mandat voulu pour agir.
     La Résolution 1706 du Conseil de sécurité des Nations Unies porte clairement que les Nations Unies peuvent, en vertu du chapitre VII, autoriser une force à se rendre au Soudan dès demain. Nous voulons que notre pays assume la responsabilité d’intervenir et considère l’envoi immédiat de troupes sur le terrain comme une obligation. Nous pouvons jouer ce rôle de chef de file. C’est ce que nous demandons. Le ministre a dit qu’il avait des liens avec ses compatriotes dans le monde entier. Réunissez-les, engagez-les à fournir des effectifs, de l’équipement, des troupes et à s’acquitter du mandat que les Nations Unies ont confié à la communauté internationale. Si nous ne le faisons pas, des gens continueront de mourir.
     Voici ce que nous demandons.
     Premièrement, nous demandons d’inciter les pays partageant nos vues à contribuer à une force des Nations Unies.
     Deuxièmement, nous demandons que nous renforcions la force de l’Union africaine sur le plan des effectifs, de l’équipement et de leur mandat. Lorsque nous formions le gouvernement, notre contribution à cette force se classait au troisième rang. Nous savons toutefois que cette force ne peut pas protéger les civils innocents.
     Troisièmement, nous demandons que l’on soutienne les organismes humanitaires comme le Programme alimentaire mondial, Médecins Sans Frontières et le Comité international de la Croix-Rouge qui ont rendu des services inestimables lorsque les autres organismes d’aide sont partis et que nous protégions les travailleurs de l’humanitaire. Il y a eu davantage de travailleurs de l’humanitaire tués au cours des trois derniers mois qu’au cours des trois dernières années.
     Quatrièmement, nous demandons que l’on poursuive devant la Cour pénale internationale les personnes que les Nations Unies ont identifiées comme des personnes d’intérêt pour la CPI. Notre pays était le champion de la CPI. Nous pouvons le faire avec d’autres pays.
     Nous devons aussi prendre des sanctions contre le gouvernement de Khartoum s’il n’agit pas.
     J’invite le ministre des Affaires étrangères à ne pas se laisser arrêter par les fausses promesses continuelles du gouvernement de Khartoum, à agir résolument et à tenir les promesses faites ainsi que les accords conclus aux termes de la Résolution 1706 des Nations Unies.

  (1920)  

     Je remercie le général Roméo Dallaire pour son travail ainsi que le député de Mont-Royal qui a accompli une tâche énorme sur ce dossier. Il n’a pas pu être des nôtres ce soir.
     Nous avons agi relativement vite pour protéger la vie de ceux qui étaient en danger au Kosovo. Nous en avons fait autant pour le Liban. Sommes-nous prêts à faire la même chose au Darfour? La vie d’un Africain vaut-elle autant que la vie d’un Européen? Sommes-nous prêts à renforcer la responsabilité de protéger avec l’obligation d’agir?
     Le ministre des Affaires étrangères constatera sans doute que les Canadiens de tout le pays l’implorent de se servir de ses pouvoirs pour agir, pour joindre le geste aux paroles du premier ministre qui a dit que nous voulions faire quelque chose.
     Cette responsabilité repose sur ses épaules. Nous voulons qu’il agisse et qu’il agisse maintenant.
    Monsieur le Président, je sais gré au député d'en face de son discours. Le député connaît très bien la question et je sais à quel point lui-même et d'autres, dont il a mentionné les noms, y compris l'honorable David Kilgour qui est parmi nous ce soir, militent avec ardeur en vue d'une solution.
    Le député défend cette cause avec fougue et conviction, mais les mots demeurent des mots. Il ne s'agit pas d'un enjeu partisan. On peut répandre des calomnies quant à savoir qui a agi et qui a agi rapidement. Je n'ai pas besoin de rappeler au député qu'il a été député d'un gouvernement qui a été au pouvoir pendant 13 ans.
    Le gouvernement actuel a en peu de temps assumé de lourdes responsabilités, s'est engagé activement dans la communauté des nations et il continuera d'agir dans ce sens.
    Le gouvernement a aussi continué d'apporter d'importantes contributions, que ce soit des contributions financières, en matériel ou d'autres. Il a collaboré activement avec les principaux intervenants tels que Jan Egeland et M. Kellenberger, le président de la Croix-Rouge internationale. La responsabilité est collective. La solution ne viendra pas d'un seul pays, d'une seule organisation ou d'une seule personne. Mettre fin à la souffrance nécessitera des efforts humains titanesques.
    Nous pouvons tirer des leçons du passé. Que l'on qualifie l'horreur de génocide ou de massacre, il ne s'agit que de mots lorsque vient le temps d'entrer dans l'action et de mettre fin à ces atrocités.
    Je le répète, l'approche proactive et productive consiste à susciter la responsabilité collective et à exercer collectivement des pressions pour mettre fin aux atrocités commises au Soudan.

  (1925)  

    Monsieur le président, je veux aussi, comme le ministre des Affaires étrangères, louanger le travail difficile que l'honorable David Kilgour a accompli pendant des années, non seulement au Darfour, mais aussi au Sud-Soudan.
    Ce que je voudrais faire comprendre au ministre des Affaires étrangères, c'est que ce ne sont pas les mots qui comptent ici, mais le leadership et l'action. Si le ministre continue à faire le jeu du gouvernement de Khartoum, comme tellement d'autres l'ont fait, le génocide se poursuivra tout simplement.
    Un choix s'offre à nous: nous pouvons agir maintenant et faire entrer des forces onusiennes au Darfour en vertu de la résolution 1706 de l'ONU, ou accepter le fait que nous assistons à un second Rwanda. Ce sont nos deux options. C'est simple.
    Le ministre autorisera-t-il nos troupes à se rendre là-bas, avec d'autres? Nous n'avons pas le choix. Nous avons l'obligation d'agir et d'envoyer des forces militaires dans la région maintenant.
    Monsieur le président, j'ai une question très simple pour mon collègue d'en face. Préconise-t-il à cette fin une invasion unilatérale du Soudan, même si c'était sous l'égide de l'ONU?
    Monsieur le président, la résolution 1706 du Conseil de sécurité de l'ONU exige la formation d'une force multinationale qui serait déployée au Darfour, avec ou sans l'accord de Khartoum.
    Oui, il faut envoyer des troupes au Darfour. Si le député veut qualifier cela d'invasion, alors très bien, ce serait une invasion.
    Monsieur le président, je suis reconnaissante au député de ses commentaires. Il est bien connu que la question le passionne et qu'il y travaille très fort.
    D'après ce que nous disent les gens sur le terrain, il semblerait qu'aucune vie n'ait été sauvée depuis la signature de l'accord de paix. Les violentes attaques contre les civils, surtout perpétrées par la milice du gouvernement, continuent. Ce dernier refuse de créer un environnement qui favoriserait la sécurité.
    J'ai écouté attentivement le ministre des Affaires étrangères quand il a dit qu'on ne nous avait rien demandé, et pourtant, la situation s'aggrave et, d'après ce que j'ai pu comprendre, ce n'est pas le cas. Je pense que la meilleure chose à faire est de faire preuve de leadership et d'agir.
    Je me demande, mis à part le genre de force dont il a parlé, s'il pense qu'il est possible d'enclencher un processus de paix parallèle qui déboucherait sur des discussions au Darfour.
    Monsieur le président, l'accord de paix est dans le coma. Dans le Nord du Darfour, 350 000 personnes sont privées de nourriture. Un processus de paix parallèle ne fonctionnerait pas.
    Le gouvernement de Khartoum, qui a une influence jusque dans les monts Nuba et qui a participé au conflit dans le Sud contre les tribus Nuer et Dinka, et maintenant au Darfour, a démontré qu'il est le régime génocidaire le plus ancien au monde. Il ne tient nullement à participer à des pourparlers de paix qui porteront fruit. Il préfère plutôt profiter des pourparlers de paix pour permettre aux Janjawids, qu'il appuie, d'abattre des innocents et de continuer de se servir de ses bombardiers pour mitrailler, assassiner et anéantir les civils.
    Il n'y aura pas d'autres pourparlers de paix. Le temps des discours est révolu. Le temps des négociations est révolu. Il est temps de passer à l'action.

  (1930)  

    Monsieur le président, je suis content d'avoir l'occasion de participer au débat de ce soir et de traiter de cette question cruciale et urgente de nos enjeux internationaux. En réalité, c'est pour moi non seulement un honneur mais un devoir que de participer au débat.
    La politique étrangère de tout pays doit être conforme aux valeurs de sa population, tant pour sa légitimité que pour sa réussite. Parallèlement, cette politique étrangère doit nécessairement être le reflet de l'histoire du pays, à savoir ses initiatives antérieures en matière de politique étrangère.
    J'estime que les Canadiens sont particulièrement sensibilisés à la vulnérabilité des minorités, qu'elles soient culturelles, linguistiques, religieuses ou autres. Il est presque banal de dire que le Canada est un pays composé de minorités, mais la chose est vraie et cette réalité a eu une incidence sur notre vision du monde. Le Canada n'est pas tout simplement un pays d'immigrants. Il est un pays de minorités et la nuance a son importance pour ce qui est de notre compréhension de nous-mêmes ainsi que de nos objectifs et de nos initiatives en matière de politique étrangère.
    À titre de représentants élus, nous sommes particulièrement bien placés pour comprendre les valeurs et les volontés de nos concitoyens du Canada. Nous les abordons tous les jours et nous leur parlons dans notre milieu, au stade, au centre commercial et au café du coin. Nous, les députés du Parlement, recevons de la correspondance, y compris de plus en plus de courriels, de nos électeurs et de nos concitoyens. Nous recevons des appels téléphoniques, parfois très sentis, de nos électeurs.
    Au cours des quelques derniers mois, j'ai reçu une abondante correspondance de mes concitoyens et de mes électeurs, qui s'inquiètent beaucoup de la situation au Darfour. J'ai même reçu à mon bureau la visite d'un jeune de ma circonscription qui était de passage à Ottawa dans le cadre du Programme Rencontre du Canada. C'était un jeune homme de 17 ans environ, dont la connaissance du monde était impressionnante et qui souhaitait passionnément oeuvrer pour un monde meilleur. Il m'a imploré de demander au gouvernement du Canada de faire quelque chose. Selon lui, nous devions envoyer des troupes canadiennes au Darfour.
    Il m'arrive, comme à tous les députés, de recevoir des lettres de mes électeurs. Certains sont favorables, d'autres défavorables à telle ou telle initiative du gouvernement. Pourtant, pour ce qui est du Darfour, la correspondance est unanime. Je n'ai reçu aucune lettre, ni aucun téléphone, d'un électeur qui m'aurait dit que le Canada devait se tenir à l'écart et adopter une position de neutralité concernant le Darfour.
    Mes électeurs souhaitent nous voir agir dès maintenant. Je suis loin d'être le seul à le dire. Dans l'ensemble du Canada, de nombreuses personnes appuient l'idée que notre pays doit être à l'avant-garde d'un effort international pour empêcher l'aggravation de la catastrophe au Darfour. Cinquante organisations qui représentent des Canadiens de toutes les religions, de tous les âges, de toutes les opinions politiques et de tous les niveaux d'éducation ont appuyé le 17 septembre dernier la Journée mondiale pour le Darfour.
    De plus, des ONG canadiennes ont fondé Save Darfur Canada afin que les voix de milliers de Canadiens inquiets se fassent entendre. Les Canadiens veulent que leur pays prenne des mesures vigoureuses et fasse preuve de leadership, conformément à nos valeurs canadiennes et à nos actions précédentes sur la scène internationale.
    L'ancien gouvernement libéral a établi et défendu le principe de la responsabilité de protéger, une notion avant-gardiste adoptée il y a plus d'un an par l'Assemblée générale des Nations Unies. Le Canada est le père de ce principe, fondé sur l'idée que, si un État souverain n'a pas la capacité ou la volonté de protéger sa population ou est lui-même la source de la menace, la responsabilité de protéger la population revient à la communauté internationale, c'est-à-dire aux Nations Unies.
    Le gouvernement soudanais a clairement prouvé son incapacité à mettre fin à la violence au Darfour. En fait, il commet lui-même des actes de violence. Le Canada doit prendre les devants et jouer un rôle de puissance moyenne crédible pour mobiliser la communauté internationale à agir au Darfour.

  (1935)  

    Nous avons la chance d'avoir à nos côtés un collègue qui en sait beaucoup sur la question, un savoir chèrement acquis. Le sénateur Roméo Dallaire, avec qui je travaille au sein du caucus libéral du Québec, est résolument convaincu que le Canada doit être un leader et défendre la cause d'une intervention internationale pour protéger les gens du Darfour. Nous devrions écouter ses conseils. Nous ne devons pas laisser son savoir se perdre.
    Monsieur le président, je suis né et j'ai grandi en Afrique. J'ai été extrêmement étonné, aujourd'hui, quand j'ai entendu un député dire qu'il veut envahir un pays africain. J'ai trouvé cela incroyable.
    Je veux tout simplement lire ce que le sénateur Dallaire a dit:
    Toute personne qui affirme que l’homme blanc qui s’en va en Afrique pour régler les problèmes des peuples africains est toujours une approche valable est complètement coupée de la réalité de ce continent.
    Le député pense-t-il aller en Afrique tout seul ou demande-t-il aux Canadiens d'aller là-bas? Comment pense-t-il que le monde réagira? Comment pense-t-il que les Africains réagiront? La région entière s'enflammera. Cela n'arrêtera pas le génocide et tout ce qui se passe là-bas. Ce sera un autre Irak. Est-ce ce que vous voulez?
    Croyez-vous que les Africains vont rester sans broncher et accepter d'être envahis? Croyez-vous que l'Union africaine acceptera une telle invasion? Elle a envoyé des troupes sur place pour pacifier la région.
    Comment les membres de ce parti pensent-ils qu'il est possible d'envahir l'Afrique?
    Je ne voulais pas arrêter le député dans son envol, mais, à plusieurs reprises, il est entré dans le débat sans s'adresser à la présidence. J'invite les députés à respecter la procédure.
    Le député de Lac Saint-Louis a la parole.
    Monsieur le président, je remercie le député de mettre ainsi son expertise et ses connaissances sur l'Afrique à contribution dans ce débat. Je ne suis pas, pour ma part, un expert des questions militaires, mais je sais une chose: pour qu'une intervention à l'étranger soit efficace, en particulier si elle suppose l'utilisation de soldats et d'une certaine force, elle doit être sanctionnée par les Nations Unies.
    Une voix: La résolution 1706.
    M. Francis Scarpaleggia: La résolution 1706 est un premier pas vers l'acceptation et la prise en charge de la responsabilité de protéger. Si nous n'intervenons pas avec une certaine force pour protéger les populations vulnérables, alors qu'est-ce que la responsabilité de protéger, sinon un amas de mots sans signification?
    Le député a employé le terme « envahir ». C'est un terme incendiaire qui évoque chez moi l'image d'un pays belligérant qui prend d'assaut un autre pays dans le but de le conquérir, de le piller et de s'approprier ce qui ne lui appartient pas. Ce n'est pas l'esprit de la résolution 1706 . L'esprit de la résolution 1706, c'est de protéger la vie humaine, et nous ne pouvons pas le rejeter du revers de la main.

  (1940)  

    Monsieur le président, j'aimerais réagir à ce qu'a dit le député il y a quelques minutes. La responsabilité de protéger est un principe noble, et nous sommes tous d'accord là-dessus. Il est dans notre intérêt à tous de combattre le mal et d'arrêter ceux qui le propagent.
    Cela dit, si nous décidons d'assumer cette responsabilité, qu'est-ce qui garantit que nous n'obtiendrons pas la même réaction que celle à laquelle nous avons assistée le 17 mai, lorsque les députés de l'opposition se sont prononcés contre la présence de nos troupes en Afghanistan? Comment pouvons être sûrs, lorsque nos jeunes soldats commenceront à revenir dans des cercueils, que nous n'obtiendrons pas la même réaction?
    Monsieur le président, nous ne pouvons être sûrs de rien. Il ne s'agit pas d'une science précise. Ce que je sais, c'est que mes électeurs me disent, lorsque je leur demande, que nous devrions rester tant qu'il le faudra en Afghanistan. En ce qui concerne le Darfour, unanimement, ils me répondent que nous devrions protéger les populations vulnérables de cette partie du monde.
    Je peux comprendre qu'en tant que député je ne puisse avoir accès à toute l'information dont disposent le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense nationale. À l'occasion du débat sur l'Afghanistan, le Comité de la défense avait demandé une séance d'information complète sur la situation avant de voter et, si je me souviens bien, le gouvernement a refusé. Je crois que le gouvernement devrait informer le Comité de la défense et les parlementaires, à huis clos si nécessaire, mais nous devrions disposer de plus d'information. Ainsi, nous pourrions prendre des décisions plus éclairées, plus judicieuses, car nos décisions ont un impact sur des vies humaines.
    Il n'y a rien de mal à exprimer un mobile, à exprimer une noble intention, comme nous le faisons dans ce cas en demandant au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mobiliser la communauté internationale.

[Français]

    Monsieur le président, lorsque la Chambre des communes a débattu de la question du Darfour, le 1er  mai dernier, la situation de cette province de l'ouest du Soudan était déjà extrêmement grave. Nous étions dans l'attente de la signature d'un accord de paix entre les deux mouvements rebelles et le gouvernement de Khartoum.
    Aujourd'hui, nous faisons face à une situation encore plus grave, une situation toujours aussi violente que complexe, où des atrocités continuent d'être perpétrées contre des civils, et ce, en toute violation de l'accord de paix signé le 5 mai dernier. Depuis mai dernier, la crise humanitaire au Darfour n'a cessé de se détériorer et les populations souffrent plus que jamais. L'accès aux populations dans le besoin par les organismes humanitaires est toujours de plus en plus difficile. Encore tout récemment, les responsables du Programme alimentaire mondial déploraient le fait que plus de 355 000 personnes au Darfour soient toujours, après trois mois, privés d'aide alimentaire en raison des combats et du banditisme.
    Le coordonnateur des affaires humanitaires de l'ONU au Soudan estime quant à lui que la situation n'a jamais été aussi préoccupante depuis le début du conflit en 2003. La situation s'est aussi dégradée dans l'est du Tchad. Human Rights Watch a accusé le Tchad et le Soudan de « soutenir des groupes armés responsables de graves crimes » dans l'est tchadien où les violences ont fait des centaines de morts et 50 000 déplacés au cours des derniers six mois.
    En plus de l'aggravation de la situation humanitaire, l'accord de paix partiel sur le Darfour, signé le 5 mai dernier par une partie seulement des groupes rebelles, « est presque mort, sinon dans le coma » comme le relevait Jan Pronk, le représentant du Secrétaire général de l'ONU pour le Soudan. Cet accord de paix « a besoin d'un traitement intensif mais il ne reçoit aucun soin ».
    Lors du dernier débat sur le Darfour, la communauté internationale se trouvait face au même défi: c'est la première fois que la communauté internationale doit chercher à appliquer la responsabilité de protéger. La responsabilité de protéger, rappelons-le, reconnaît la nécessité d'entreprendre des actions résolues afin de protéger les populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l'humanité.
    Depuis le dernier débat sur le Darfour, un pas historique a été franchi lorsque le 28 mai 2006, le Conseil de sécurité a adopté à l'unanimité une résolution sur la responsabilité de protéger qui appuyait la résolution adoptée par l'assemblée générale en octobre 2005.
    Une des clefs essentielles de l'application de cette responsabilité de protéger, c'est de s'appuyer sur les forces en présence et de s'assurer que les parties impliquées fassent la paix elles-mêmes. Une solution pacifique et négociée est toujours préférable. « Quand la paix vient d'une violence extérieure, même si parfois indispensable », comme le mentionnait ma collègue, la députée de La Pointe-de-l'Île, lors du dernier débat, « elle comporte son lot de conséquences graves et extrêmement difficiles à vivre pour l'avenir. »
    Or, le manque de volonté de la communauté internationale a été pointé du doigt par plusieurs experts et organismes à but non lucratif, dont le International Crisis Group, pour ne nommer que cet organisme, comme étant une des principales causes de l'échec, non seulement de la mise en oeuvre de l'accord de paix du 5 mai dernier, mais aussi de l'acceptation par le gouvernement soudanais d'une force des Nations Unies qui prendrait la relève de la force de l'Union Africaine afin de pouvoir protéger les populations du Darfour.
    Étant donné l'urgence de la situation, la communauté internationale doit faire preuve d'une plus grande volonté et doit continuer de tout mettre en oeuvre afin de convaincre tous les acteurs impliqués, de près ou de loin dans ce conflit, du bien fondé de l'envoi d'une force de l'ONU.
    Tout dernièrement, tous les groupes rebelles du Darfour — y compris l'ancienne faction rebelle de Minni Minawi, actuellement au gouvernement — ont exprimé leur soutien à l'envoi de soldats de la paix des Nations Unies. Le Mouvement populaire de libération du Soudan, partenaire du gouvernement soudanais qui représente le sud du Soudan, s'est également prononcé en faveur de la présence d'une force des Nations Unies au Darfour, comme la plupart des partis politiques soudanais.

  (1945)  

    Cela est encourageant. Il s'agit, pour la communauté internationale, de maintenir la pression et de continuer à s'activer sans relâche et de toute urgence, afin de rallier tous les autres acteurs — dont, bien évidemment, le président Omar al-Bechir en premier lieu — autour d'une solution effective de la crise au Darfour. La communauté internationale doit lui fournir l'assurance et le convaincre qu'une force de l'ONU ne sera pas l'occasion d'une nouvelle colonisation du Soudan. Cela n'a pas été et n'est pas le cas de la mission de l'ONU — la MINUS — déjà présente dans le sud du Soudan. Il n'y a aucune raison pour qu'une mission de l'ONU au Darfour soit différente. Le seul objectif visé ici est la protection de populations gravement en danger. Cet objectif sera atteint dans le plein respect de la souveraineté de la nation soudanaise.
    Beaucoup s'entendent pour dire que la Chine et la Russie sont aussi deux joueurs importants de ce conflit. Le président al-Bechir s'est d'ailleurs félicité d'entretenir d'excellentes relations avec ces deux pays. Or ces deux pays se sont abstenus de voter en faveur de la résolution 1706 qui autorise le déploiement de la MINUS dans la région du Darfour en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
    La communauté internationale, y compris le Canada, devrait faire davantage pression sur la Chine et la Russie afin que ces deux pays appuient à leur tour le transfert de la mission de l'Union africaine vers une mission des Nations Unies au Darfour. Ils doivent inciter la Chine et la Russie à faire pression à leur tour sur le gouvernement soudanais afin qu'il accepte ce transfert.
    La communauté internationale et le Canada doivent, par ailleurs, intervenir auprès de la Ligue arabe et des autres pays de la région touchés par le conflit, pour qu'à leur tour, ils interviennent auprès du gouvernement soudanais en vue de le convaincre du bien fondé d'une mission onusienne au Darfour.
    Il est aussi important que la communauté internationale continue à s'activer à convaincre les partis rebelles non signataires de l'accord de paix du 5 mai à se rallier, comme le suggère Jan Pronk. Il s'agit de convaincre les partis rebelles réfractaires à l'accord du bien fondé d'un tel accord, et de l'améliorer le cas échéant, tel que le proposait toujours Pronk, afin de rallier ceux qui se sentent exclus de l'accord. Il y va du bien-être de toute un population.
    À la fin de mai, déjà, une trentaine de commandants et de représentants politiques des branches dissidentes de la faction minoritaire du Mouvement de libération du Soudan et du Mouvement Justice et Égalité ont signé une déclaration d'engagement en faveur de l'accord du 5 mai.
    Comme on le voit, toutes les conditions sont conjuguées pour que la situation au Darfour continue de se détériorer. Par contre, les mesures propices à la résolution du conflit sont aussi à portée de main.
    Le sort de milliers de gens et de toute une population qui a eu son lot de malheurs, l'avenir de milliers d'enfants et l'avenir du Darfour lui-même exigent que le Canada et la communauté internationale continuent d'agir avec doigté afin d'amener les partis impliqués dans le conflit à s'entendre.
    L'extrême gravité de la situation exige cet effort accru de la part du Canada et de la communauté internationale. Nous nous devons d'aider les Darfouriens. Ne les laissons pas mourir devant nos yeux. C'est un peu de notre humanité à toutes et à tous qui s'en irait avec eux.

  (1950)  

[Traduction]

    Monsieur le président, la tragédie au Darfour, éclipsée par les tsunamis, les tremblements de terre et les guerres en Irak et en Afghanistan, disparaît souvent de la vue de l'opinion publique, mais les souffrances n'arrêtent pas pour autant. Au contraire, elles s'aggravent à chaque jour qui passe.
    L'Union africaine a dit que les Nations Unies devraient et doivent entrer au Darfour. Elle exprime la volonté de l'Afrique.

[Français]

    La question à laquelle doit faire face le Canada est donc la suivante: que faisons-nous pour nous assurer que les Nations Unies réagissent rapidement?

[Traduction]

    Nous avons joué un rôle de chef de file en fournissant à l'Union africaine argent, soutien logistique et expertise, ainsi que de l'équipement militaire, des hélicoptères, des véhicules blindés et un entraînement. Nous avons fait la même chose pour paver la voie à un accord de paix dans le Sud.
    Les Nations Unies demanderont au Canada de fournir une contribution plus importante, beaucoup plus importante. La Chambre doit décider de la nature de la contribution du Canada. Que dirons-nous aux Nations Unies et à tous ces Africains dont l'Union africaine est le porte-parole?
    La responsabilité d'offrir une protection était une initiative canadienne, motivée par les terribles événements du Rwanda, lorsqu'un général canadien a dit « Plus jamais ». Elle a également été motivée par le Darfour. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour qu'elle se concrétise.

[Français]

    Monsieur le président, évidemment, je suis tout à fait d'accord. Il faut bien qu'on intervienne sous la gouverne des Nations Unies et que le Canada ait une très grande responsabilité dans cette question. En effet, c'était une initiative du Canada d'amener la question de la responsabilité de protéger. Il ne faudrait pas que cette responsabilité de protéger se cache derrière une absence d'action. Il faut donc absolument trouver les moyens pour que les parties impliquées dans le dossier puissent accepter la présence des Nations Unies.
    Monsieur le président, c'est vraiment très frustrant de prendre la parole pour poser des questions et faire des commentaires ce soir, parce que tout le monde s'accorde sur le fait qu'on fait face à une situation extrêmement grave et qu'il est temps d'agir. Néanmoins, ce qu'on fait ce soir, c'est un débat, et on parle. Cependant, ce n'est pas un débat qui nous permet de prendre des décisions.
    J'ai donc une question pour la députée. Un peu plus tôt, on a entendu le ministre dire en cette Chambre que personne ne nous avait demandé d'intervenir. Et il semblait se féliciter des actions que le Canada avait prises. Certes, nous avons pris certaines actions, mais je me demande s'il n'y avait pas une certaine part de félicitations quant à ce que nous avions fait, et si vraiment cela suffisait et qu'on ait pu cesser.
    Je me demande si la députée a des commentaires sur son approche, sur son attitude?

  (1955)  

    Monsieur le président, je remercie ma collègue de sa question. Il est évident qu'on parle actuellement d'une situation extrêmement grave. Comme je l'ai dit la dernière fois que nous sommes intervenus dans le dossier, j'avais vraiment l'impression qu'on parlait de cela en attendant d'aller souper tant les réponses étaient évasives.
    Quand il y a des questions de cet ordre, la partie gouvernementale nous dit souvent qu'elle y a mis tant d'argent. Ce n'est pas de l'argent qu'il faut. Bien sûr l'argent est nécessaire, mais actuellement, c'est la volonté politique qui est nécessaire, pour qu'on puisse comprendre qu'on ne peut pas laisser des êtres humains vivre une telle situation année après année, sans intervenir. La responsabilité d'intervenir nous demande justement d'y aller, même quand il n'y a pas de demande de la part des gouvernements.

[Traduction]

    Monsieur le président, je me sens obligé d'intervenir pour répondre à la question du NPD.
    Il est clair que le Canada contribue énormément et qu'il continuera de le faire. Le gouvernement précédent a entrepris ce processus en affectant 320 millions de dollars. Nous poursuivrons en ce sens de toutes les façons possibles, notamment en appuyant les efforts de la Cour pénale internationale visant à intenter un procès et à poursuivre les coupables. Nous continuerons d'appuyer les ONG. Nous continuerons d'appuyer les efforts visant à stopper les atrocités au Darfour.
    Cependant, je répondrai à la députée d'en face que diriger unilatéralement une mission pour entrer au Darfour, comme de nombreux députés l'ont suggéré ou insinué ce soir, serait de la pure folie de la part du Canada. Aux termes de la résolution 1706, que le Canada appuie fermement, le consentement du gouvernement du Soudan est un élément essentiel pour le déploiement et, en bout de ligne, le succès de la mission élargie des Nations Unies au Soudan.
    Il doit y avoir un effort concerté de la part des pays du G8, d'autres représentants des Nations Unies —  la députée a elle-même mentionné la Chine et la Russie. Par ailleurs, le Canada et les diplomates canadiens aux Nations Unies ne ménagent pas leurs efforts. John McNee, notre représentant spécial au Nigeria, David Angel, les anciens ambassadeurs, les anciens ministres, les députés de la Chambre et moi-même devons continuer d'exercer des pressions. La mission de l'Union africaine doit faire place à une mission des Nations Unies avec le consentement de la population et du gouvernement du Soudan. Qu'elle soit irrationnelle ou non, il existe clairement une crainte, exprimée par le président Bashir, que ces efforts entraîneront une colonisation.
    Il faut intensifier les efforts et la pression pour faire comprendre que cette mission n'a absolument aucune visée en matière de colonisation et ne constitue aucunement une tentative pour prendre la tête du gouvernement. Cette mission a pour seul but de mettre fin au carnage et au meurtre d'innocents au Soudan.

[Français]

    Monsieur le président, la responsabilité de protéger parle bien sûr de l'acceptation du gouvernement. Cependant, dans les cas où ce dernier n'acceptera jamais — et c'est ce qui semble arriver, parce que de temps en temps il dit oui; il souffle le chaud et le froid —, je pense que toujours dans la responsabilité de protéger, il y a aussi une partie qui dit que si le gouvernement du pays ne peut pas faire ce qu'il faut pour pacifier le pays, les pays étrangers ont encore une responsabilité de protéger.
     À cet égard, je voudrais dire que, de toute façon, les interventions que j'ai préconisées sont dans le cadre des Nations Unies. Et le travail du Canada devrait demeurer à l'intérieur de cette fenêtre pour faire en sorte que la situation change.

[Traduction]

    Monsieur le président, j'ai entendu ce soir le très honorable député de LaSalle—Émard et d'autres députés nous dire ce que nous devrions faire au Darfour, en Afrique. Je sais qu'un sénateur a également exhorté de façon très éloquente le gouvernement à faire davantage.
    Toutefois, je vous le demande, ne sommes-nous pas déjà présents dans une autre région du monde où on nous a demandé d'intervenir? Ne sommes-nous pas présents là-bas par suite d'un terrible génocide et d'atrocités commises à l'égard de femmes et d'enfants? Ne sommes-nous pas présents là-bas parce que les Nations Unies et la communauté internationale nous ont demandé d'y être?
    Je parle environ deux fois par mois à des membres des Forces armées qui se portent volontaires pour une deuxième ou même une troisième période d'affectation en Afghanistan. Ils croient en ce qu'ils font. Devons-nous réellement nous engager sur un autre front, puis un autre encore et disséminer nos ressources restreintes partout au monde?
    Je demande aux députés qui viennent de prendre la parole, et particulièrement à celui de LaSalle—Émard, ne sommes-nous pas en train de demander à notre pays de faire plus que ce que ses ressources lui permettent actuellement de faire?

  (2000)  

    Je tiens à préciser au député qu'il ne peut poser une question au très honorable député de LaSalle—Émard puisque ce dernier avait pris la parole en réponse à une intervention de la députée de Papineau. La députée de Papineau a la parole.

[Français]

    Monsieur le président, la question se situe justement là. Quand on a parlé de la prolongation de la mission en Afghanistan, nos questions au gouvernement étaient dans le sens de connaître l'état des troupes, de savoir ce que nous pouvions faire. Nous n'en savons toujours rien, nous n'avons jamais eu la réponse, sauf que plus ça va, plus on trouve de plus en plus de gens à envoyer en Afghanistan.
     La question du Darfour était préexistante à cette situation. Alors, c'est absolument inconcevable qu'on semble laisser entendre que le Canada n'aurait pas actuellement les moyens d'envoyer des troupes.
    Quoi qu'il en soit, à l'intérieur de la force des Nations Unies, le Canada peut exercer une certaine pression et il doit faire sa part. Continuer de faire sa part ce n'est pas de dire oui un jour et non un autre jour.
     Il y a des situations dans le monde qui requièrent notre assistance. Si, en qualité de parlementaires, nous connaissions exactement les moyens actuels du gouvernement, peut-être serions-nous capables de suggérer des éléments plus précis. Actuellement, selon mon entendement, la situation est absolument catastrophique au Darfour et les réponses qu'on nous donne pour essayer de mitiger les choses ne sont pas crédibles.

[Traduction]

    Monsieur le président, c’est avec plaisir que je prends part au débat sur la crise du Darfour, qu’on a fort bien décrite comme un génocide au ralenti. Il est difficile d’imaginer que la crise ait pu s’aggraver tandis que les projecteurs sont braqués sur le Darfour, mais c’est pourtant ce qui s’est passé.
     Au cours des deux derniers mois seulement, plus de 50 000 personnes ont été déplacées. Des milliers de femmes et de filles ont été brutalisées et violées. Et ces horreurs viennent s’ajouter au bilan des 450 000 personnes déjà tuées au cours de cet horrible conflit. Plus de 2 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur de leur pays, et 250 000 ont été contraintes de fuir dans un pays voisin, le Tchad.
     Baba Gana Kingibe, commandant de la mission de maintien de la paix de l’Union africaine, a dit que la sécurité au Darfour se dégradait.
     Il faut se garder de simplifier à outrance, mais on n’a pas besoin d’être un génie pour trouver une solution et mettre fin à la crise. Nous savons que l’Union africaine a accepté de prolonger sa mission au Soudan et d’y accroître ses effectifs, mais elle manque désespérément des ressources financières que les pays donateurs peuvent lui procurer pour qu’elle puisse honorer cet engagement.
     Nous savons que l’Union africaine a 1 300 soldats prêts à se déployer et qui iraient s’ajouter aux 7 000 qui sont déjà présents au Darfour, mais elle ne peut agir, faute de fonds suffisants.
     Comment nous, pays riches, pouvons-nous discuter tant et plus de cette crise, des viols, des tueries, des déplacements de population, comment pouvons-nous prétendre que nous compatissons de tout notre cœur, mais sans pouvoir nous résoudre à fournir les fonds qui permettraient de dépêcher immédiatement de nouvelles troupes de l’Union africaine dans la région? Comment pouvons-nous exprimer de l’indignation et de l’inquiétude sans pourtant trouver la volonté politique nécessaire pour agir?
     Oui, il est vrai que le Canada a fourni de l’aide, et des députés ministériels l’ont rappelé, mais c’est un moment si difficile. Nous ne pouvons pas nous contenter de rappeler nos contributions et de prétendre avoir fait notre part. Nous devons sûrement faire plus.
     Nous devons prêcher d’exemple. Nous devons être une source d’inspiration et, au besoin, obliger d’autres pays, en leur faisant honte, à faire davantage, car les résolutions ne font rien pour protéger les personnes vulnérables, mais des soldats de la paix peuvent le faire.
     Le Canada est maintenant au nombre des principaux pays donateurs de l’Union africaine, mais, dans une situation aussi grave, une réponse encore plus urgente et importante s’impose. Le Canada, fort de son excédent de 13 milliards de dollars, peut certainement faire plus.
     Je regrette de ne pas avoir entendu le ministre des Affaires étrangères, au moins aujourd’hui, pendant le débat, déclarer que notre pays est prêt à agir, avec la capacité militaire et financière nécessaire, si la situation l’exige.
     S’engager maintenant à participer à une force de l’ONU, ce serait lancer un message éloquent au président al-Bechir du Soudan, lui faisant comprendre que le monde, que le Canada prennent la chose au sérieux et entendent mettre un terme au massacre et protéger les personnes vulnérables au Darfour.
     Le Canada doit encourager l’Union africaine à utiliser à fond l’aide qui est à sa disposition, une aide pour les communications, le commandement et le contrôle, le renforcement des capacités et la création d’une force plus professionnelle. Sur ces plans-là, le Canada peut proposer son expertise et offrir plus encore.
     Le Canada doit intervenir directement auprès du Soudan et essayer de convaincre Khartoum d’accepter le déploiement de forces de l’ONU à la fin de la mission de l’Union africaine, en décembre, et de négocier de bonne foi avec les groupes qui n’ont pas encore signé l’accord de paix.
     Ce soir, je n’ai pas entendu cela de la bouche du ministre des Affaires étrangères ni d’autres députés. Ils se sont contentés de monter une argumentation pour expliquer pourquoi nous ne sommes pas prêts à agir.
     Nous avons constaté en Irak et en Afghanistan qu’on n’obtient rarement la paix avec des armes ou au moyen d’une intervention militaire. Nous devons essayer, par tous les moyens possibles, par le dialogue et un engagement authentique, de promouvoir un processus de paix complet, mais il est rare qu’un processus de paix complet soit fructueux à moins qu’il ne puisse s’appuyer sur un soutien militaire.

  (2005)  

    Les députés conservateurs ne veulent pas écouter les néo-démocrates parler de la valeur d'un processus de paix global. Nous ne les avons jamais entendus parler encore d'un tel processus. Peut-être qu'ils écouteront le leader de la majorité au Sénat des États-Unis, Bill Frist, qui a dit hier à propos de l'Afghanistan que la guerre ne sera jamais gagnée militairement et qu'il fallait amener les milices islamistes à négocier.
    Je ne doute pas que c'est dans cet esprit qu'un Canadien d'origine soudanaise d'Ottawa, un électeur de notre capitale, a donné, après avoir pris conscience de cela, le conseil suivant aux parlementaires aujourd'hui lorsqu'on le lui a demandé. Il a dit que le Canada doit recourir à tous les moyens possibles pour convaincre les parties belligérantes à respecter les accords de paix qu'elles sont signés. Le respect de ces accords permettrait d'éviter d'autres combats ainsi que les tragédies et les souffrances humaines que cela entraîne. Le Canada devrait aussi exercer des pressions de toutes les manières possibles sur les parties belligérantes pour que la confrontation militaire cesse. Cela permettrait à l'aide humanitaire de se rendre aux civils au Darfour. Dans la mesure du possible, le Canada devrait également accorder aux organismes humanitaires une aide financière plus généreuse encore que celle qu'il leur a accordée jusqu'à maintenant pour qu'ils puissent fournir les services requis en abondance aux gens qui en ont désespérément besoin.
    Nous devons faire savoir fermement au gouvernement soudanais que nous sommes très sérieux quand nous disons que nous déploierons des forces de maintien de la paix. Si nous n'arrivons pas à le convaincre à agir de manière à faire cesser ces horreurs, nous pourrons alors prendre des mesures plus agressives, plus délibérées et plus efficaces pour amener les parties belligérantes à conclure un accord de paix.
    Ce que nous avons entendu jusqu'à maintenant de la part des députés ministériels n'est que du verbiage permettant à nos vis-à-vis d'éviter de faire une vraie contribution aux efforts visant à mettre fin à ce génocide au ralenti.

  (2010)  

    Monsieur le président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt la députée de Halifax. Cette fois-ci et à de nombreuses occasions, elle a utilisé des formules ronflantes comme « on n’obtient pas la paix avec des armes ». Elle et son chef courageux croient que nous devrions parler aux talibans et que nous devrions participer à plus d'activités de paix.
    Il faut rétablir la paix, car les affrontements, le génocide comme dit la députée, qui se produisent en Afrique ne vont certainement pas cesser simplement à la suite de négociations.
    Si la députée affirme que nous avons besoin d'une force militaire robuste, c'est-à-dire active, qui est prête à participer à des activités militaires — comme c'est le cas en Afghanistan — pour favoriser le développement, pour construire des écoles pour les enfants, pour empêcher le viol et le mauvais traitement des femmes et pour permettre à celles-ci de participer aux activités démocratiques et d'avoir une vie normale, il faut que des gens soient prêts à aller là-bas pour défendre ces valeurs. C'est exactement ce qui se passe en Afghanistan.
    J'ai une question très directe à poser. Je m'adresse à la députée de Halifax, qui a publié un communiqué il y a quelques jours sur la mission en Afghanistan. Dans ce communiqué, elle dit ceci:
    Les membres des Forces canadiennes méritent d'être envoyés seulement dans des missions qui correspondent aux valeurs canadiennes, où les objectifs sont clairs et où la victoire est possible.
    Les Canadiens sont présents en Afghanistan, car ils ont été invités par le gouvernement afghan. Il s'agit d'une mission avalisée par les Nations Unies qui comprend 37 autres pays de l'OTAN. Or, le président al-Bechir du Soudan a refusé catégoriquement que l'Union africaine transfère l'opération aux Nations Unies. On ne veut pas de nous là-bas. Comment explique-t-elle cela, du haut de sa tour d'ivoire, étant donné ses déclarations à la Chambre aujourd'hui?
    Monsieur le président, il est vraiment regrettable que nous nous retrouvions aussi rapidement pris dans un chassé-croisé de railleries, d'insultes et d'accusations de ce genre lancées à tort et à travers.
    Il est assez ironique de constater que, même si les conservateurs ont le plus grand nombre de députés à la Chambre, ils étaient absents, d'après ce que j'ai vu, lors de l'excellent débat de cet après-midi sur la question du maintien et du rétablissement de la paix. C'est un débat qui était parrainé par un organisme de jeunes, Canada 2020.
    Les invités ont tenu un débat superbe, au cours duquel divers points de vue ont été exprimés sur la question du maintien et du rétablissement de la paix, et en particulier à propos de l'Afghanistan. On y a notamment déploré le glissement vers une vision antagonique du monde calquée sur celle de Bush, vision qui gomme la complexité des situations de ce genre.
    Je n'ai pas l'intention de tomber moi aussi dans cette vision des choses au cours du débat de ce soir. Je crois que le gouvernement a choisi de donner comme excuse le caractère problématique de la situation. Bien entendu, il est extrêmement problématique que le président al-Béchir ne voie pas du tout d'un bon oeil à ce stade-ci l'intervention de troupes de l'ONU. Cependant, le gouvernement conservateur a décidé de se cacher derrière cette excuse plutôt que d'avoir recours à de robustes efforts diplomatiques et de faire appel à l'ensemble de la communauté internationale pour exercer des pressions susceptibles de faire changer d'idée le président et pour qu'entre-temps, on commence à négocier la paix de bonne foi, en présence d'un plus grand nombre d'acteurs autour de la table, ce qui pourrait nous éviter une intervention militaire. La partie n'est pas finie tant qu'elle n'est pas finie. La diplomatie est toujours...
    À l'ordre. L'intervention de la députée est terminée. Le très honorable député de LaSalle—Émard a la parole.
    Monsieur le président, j'aimerais faire une brève observation en réponse à la question du député de Northumberland—Quinte West quant à savoir si notre présence au Darfour est opportune, compte tenu de nos autres engagements.
    Permettez-moi de répondre tout simplement par un oui sans équivoque. Qui plus est, nous sommes en mesure de le faire et de le faire d'une multitude de façons. Comme la députée néo-démocrate le signalait à l'instant, nous entretenons des liens historiques de longue date tant avec l'Afrique qu'avec l'Union africaine. La population africaine nous a demandé de nous acquitter de nos responsabilités en tant que membres de la communauté internationale. Elle a demandé à la communauté internationale d'intervenir. Il nous incombe de nous montrer à la hauteur de la tâche et de répondre à son appel.

  (2015)  

    Monsieur le président, je sais gré au député de LaSalle—Émard de ses propos. Comme le disait tout à l'heure la députée de Trinity—Spadina, la réponse à une demande d'accès à l'information a permis de confirmer, il y a quelque temps déjà, que le Canada dispose de la capacité militaire nécessaire pour contribuer, au besoin, à une force de maintien de la paix de l'ONU au Darfour.
    Pour reprendre ce que j'ai dit plus tôt, rien n'empêche le Canada de faire clairement savoir au président al-Bechir que nous n'hésiterons pas à déployer les militaires canadiens disponibles, notre capacité militaire, pour appuyer une mission de l'ONU, tout en faisant tous les efforts diplomatiques possibles pour ne pas avoir à en arriver là, car il faut inciter le président al-Bashir à réagir aux pressions internationales et aux horreurs qui se multiplient dans le contexte du génocide qui est en train de se perpétrer petit à petit au Darfour.
    Monsieur le président, j'ai une question à poser à ma collègue, mais j'aimerais d'abord souligner une déclaration faite par le député de LaSalle—Émard le 14 novembre 2004. Il a dit qu'il était censé que la population locale procède à ses propres activités de maintien de la paix, plutôt que de parachuter des troupes canadiennes qui ne comprennent pas la culture locale. Il a aussi déclaré que le Canada jouait déjà un rôle très important en Afghanistan, mais que notre pays envisagerait la possibilité d'envoyer du matériel et des instructeurs militaires au Soudan.
    Je crois que c'est ce que nous avons fait. Je crois en fait que le ministre des Affaires étrangères a parlé des discussions énergiques qu'il entreprend avec des personnes comme le président al-Bechir. C'est une réalité.
    J'ai une question à l'intention de la députée. Bien entendu, compte tenu de son soutien enthousiaste, ces dernières années, à l'égard des dépenses militaires destinées à augmenter la capacité des Forces canadiennes à accomplir de telles missions, ce que nous apprécions beaucoup, croit-elle honnêtement que les bérets bleus à la frontière du Soudan vont stopper le génocide qui se déroule dans ce pays? Croit-elle honnêtement que le génocide prendra fin sans la présence d'une force militaire prête à recourir à des mesures vigoureuses et décisives qui incluent probablement, ce qui est malheureux, le fait de devoir tuer des gens?
    Monsieur le président, j'aurais aimé que le député assiste au débat cet après-midi, parce qu'il portait précisément sur ce point.
    La question est de savoir si le maintien de la paix tel que nous le connaissons, dans sa forme classique, convient à la situation dont nous parlons, et si c'est une option réaliste. C'est regrettable, mais je pense que nous en venons tous à la conclusion que les bérets bleus équipés d'armes légères ne parviendraient probablement à rien dans une telle situation.
    Selon moi, le problème, c'est que le gouvernement, d'une part, ne semble pas du tout prêt à comprendre la valeur et la nécessité des initiatives diplomatiques agressives et robustes et que, d'autre part, il semble prêt à envoyer nos troupes dans des missions comme en Afghanistan, où tout laisse croire qu'on ne fait qu'empirer une situation désespérée. Plus la situation est chaotique, plus il y a de morts, plus on alimente le fanatisme, plus les talibans réagissent. C'est un cercle vicieux. Les choses se dégradent, et il se pourrait bien que ce pays devienne l'Irak ou le Vietnam du Canada.

[Français]

    Monsieur le président, on considère que la crise au Darfour a commencé dans les années 1980, qu'en 2003, on a subi un contre-choc sur le plan international et qu'on a commencé à prendre conscience, dans nos chaumières, de ce qui se passait au Darfour. Il n'en demeure pas moins que depuis 2003, les pays étrangers semblent hésitants face à cette situation — une situation tout de même catastrophique.
    Ma question à la députée est la suivante: que faudrait-il faire pour s'assurer que la communauté internationale pourra agir le plus rapidement possible dans une situation où il est reconnu à plusieurs niveaux qu'il y a même apparence de génocide?

  (2020)  

[Traduction]

    Monsieur le président, je vais revenir sur deux grands points. Je crois qu'il faudra augmenter grandement les ressources, d'ici la fin de décembre, pour soutenir l'Union africaine et ses efforts.
    D'abord, la tragédie est notamment due au fait que non seulement les militaires de l'Union africaine sont mal équipés et trop peu nombreux, mais que, selon toute vraisemblance, ils seraient aussi affamés et même sous-alimentés ou en état de malnutrition, avec tous les problèmes de santé que cela entraîne. D'ici à la fin de décembre, nous devrons réagir beaucoup plus fermement. Le Canada doit être au nombre des pays qui vont aller aider, mais d'autres ont fait des efforts bien plus grands pour offrir du soutien à l'Union africaine.
    Ensuite, comme je l'ai déjà dit, nous devons être prêts. Le Canada doit donner l'exemple. Nous devons montrer clairement que nous n'hésiterons pas à nous joindre à une mission de maintien de la paix au Darfour, et en même temps exercer toutes les pressions possibles sur al-Bechir pour tenter d'éviter l'intervention militaire et l'inciter à faire un effort véritable pour rétablir la paix, faire cesser les tueries et amener...
    Reprise du débat. La ministre de la Coopération internationale et ministre de la Francophonie et des Langues officielles a la parole.

[Français]

    Monsieur le président, je suis heureuse de participer à ce nouveau débat sur le rôle du Canada au Soudan. Il est essentiel de nous pencher une deuxième fois sur cette question.
    La situation humanitaire au Soudan demeure alarmante, c'est pourquoi le Canada travaille de concert avec ses partenaires canadiens et internationaux pour porter secours à la population du Soudan et soulager la souffrance humaine.
    Depuis avril 2005, le Canada a promis de consacrer 110 millions de dollars d'aide publique au développement au Soudan. Ces sommes servent à l'aide humanitaire, à la reconstruction et au déminage, ainsi qu'à promouvoir la gouvernance et l'égalité entre les femmes et les hommes. L'ACDI a déjà versé plus de 90 p. 100 de cette somme qui devait être répartie sur deux ans.
    Les attaques contre les Soudanais dans les camps de personnes déplacées et celles contre les travailleurs humanitaires au Darfour inquiètent beaucoup la population canadienne et le gouvernement du Canada. L'insécurité au Darfour compromet l'accès aux populations qui ont vivement besoin d'aide alimentaire. Malgré les difficultés, l'ACDI a engagé 20 millions de dollars d'aide humanitaire au Soudan depuis le débat tenu en mai dernier. Cette aide sert, entre autres, à fournir de la nourriture, de l'eau, des soins médicaux et des abris.
    De ce montant, 10 millions de dollars ont déjà été distribués: 6,8 millions de dollars ont été donnés en appui aux activités d'organismes de l'ONU, dont l'UNICEF, le Programme alimentaire mondial et le Haut Commissariat pour les réfugiés; 1,2 million de dollars ont été remis au Comité international de la Croix-Rouge; et 2 millions de dollars ont été versés à des organisations non gouvernementales canadiennes, notamment Médecins Sans Frontières, Vision Mondiale, Save the Children Canada et la Croix-Rouge canadienne, pour n'en nommer que quelques-unes.
    Dans le discours qu'il a livré à Bucarest, lors du Sommet de la Francophonie, le premier ministre du Canada a rappelé l'importance d'agir pour réduire les tensions et les conflits dans le monde. Il réitère ainsi les recommandations formulées à Saint-Boniface par les ministres de la Francophonie. J'ai eu le privilège de présider cette conférence ministérielle en mai dernier. Nous y avons discuté de la prévention des conflits et de la sécurité alimentaire, tout particulièrement du sort réservé aux populations civiles et de leur accès à l'aide humanitaire. La récente déclaration de Bucarest montre plus précisément que la communauté francophone internationale intensifie les concertations et les actions en faveur des populations du Darfour. Cela se reflète tant au sein des organisations régionales que multilatérales.
    Comme vous le savez, il y a deux missions de paix au Soudan. L'une se déroule au Sud-Soudan sous la gouverne des Nations Unies, l'autre est conduite par l'Union africaine dans la région du Darfour. Le Canada contribue à ces deux initiatives. J'aimerais d'ailleurs souligner que nous sommes l'un des plus importants bailleurs de fonds de la mission de l'Union africaine au Darfour. Grâce à cette mission, l'Union africaine veille à protéger les civils et à prévenir la détérioration de la crise humanitaire.
    Il est clair que nous devons inciter toutes les parties à respecter l'accord de paix et à faciliter le travail de l'Union africaine. De concert avec le gouvernement d'unité nationale et la communauté internationale, nous contribuons également à mettre en oeuvre l'Accord de paix globale entre le Nord et le Sud du Soudan, signé en janvier 2005. Cet accord met fin à plus d'une vingtaine d'années de guerre civile. Après tant d'années d'hostilité, l'instauration d'un climat de paix exige une action énergique et soutenue. Le Canada continuera de se concentrer sur l'ensemble du Soudan. Le Canada continuera ainsi à veiller à ce que les efforts déployés au Darfour ne nuisent pas à l'Accord de paix globale entre le Nord et le Sud.
    Le Canada a pris des engagements importants pour soutenir cet accord de paix. S'il est couronné de succès, cet accord pourra servir d'exemple aux régions avoisinantes. Il deviendrait un puissant outil de persuasion en faveur du règlement non violent des différends. Par contre, si l'Accord de paix globale entre le Nord et le Sud venait à échouer, cela aurait de graves répercussions sur la sécurité et la stabilité du Soudan, mais aussi de toute la région.
    Bien que la situation demeure critique, il y a aussi des résultats tangibles. Le Programme alimentaire mondial parvient à nourrir 6,1 millions de personnes. Je suis fière que le Canada fasse sa part pour aider ces gens. En 2006, le Canada a versé 14,5 millions de dollars en appui aux activités du Programme alimentaire mondial au Soudan.

  (2025)  

    Ce montant a servi à l'achat de près de 12 000 tonnes métriques de blé et de légumineuses. Le Canada a nourri l'équivalent de 105 000 personnes pendant toute une année. Cependant, l'aide du Canada ne se limite pas qu'à l'aide alimentaire; nous avons également contribué à améliorer l'approvisionnement en eau et l'accès aux services d'assainissement pour les populations soudanaises dans le besoin. L'aide canadienne a permis d'entreprendre des activités de déminage et de rouvrir d'importants réseaux routiers.
    Le Canada a également contribué à la réhabilitation de cliniques et d'écoles détruites par la guerre civile. Nous avons fourni des abris, des semences, des outils, des soins de santé et de l'eau à plusieurs dizaines de milliers de personnes.
    Bon nombre des activités que je viens d'énumérer ont une incidence directe sur la vie, la santé et la sécurité des femmes et des enfants, ce qui me touche particulièrement.
    Lorsqu'on parle du travail de l'ACDI, on parle nécessairement de collaboration. L'agence dispose d'un solide réseau de partenaires. Je tiens à souligner l'excellent travail accompli par les organismes partenaires de l'ACDI. Leur savoir-faire et leur compréhension des enjeux mondiaux ne cesse de m'étonner.

[Traduction]

    Le gouvernement du Canada continue d'accorder une très grande importance à la situation au Soudan. Le gouvernement surveille de près la mise en oeuvre de ses programmes. L'ACDI effectue régulièrement des missions sur le terrain pour faire en sorte que nos travaux avec nos partenaires soient coordonnés et portent fruit.
    Nous continuerons de prendre part aux efforts de paix et de bonne gouvernance. Nous poursuivrons notre travail avec les autres donateurs afin de trouver la meilleure façon d'aider les Soudanais. Nous encouragerons également la transition vers une opération menée par les Nations Unies.
    Le Canada ne restera certainement pas inactif devant la crise humanitaire au Darfour. Le gouvernement continuera de collaborer avec ses partenaires canadiens et étrangers pour redonner espoir aux hommes, aux femmes et aux enfants du Soudan, du nord au sud et de l'est à l'ouest de leur pays.
    Monsieur le président, je remercie la ministre de sa présence et de son intervention.
    Il y a des éléments que la ministre et son gouvernement doivent comprendre.
    Le gouvernement de Khartoum est formé d'un groupe de menteurs et d'assassins pathologiques. Ils ont démontré, des monts Nouba jusqu'au conflit dans le Sud, qu'ils ne sont disposés à rien de plus qu'à tenir avec la communauté internationale une série de négociations interminables, de manière à pouvoir continuer les actions meurtrières qu'ils parrainent dans le pays depuis des décennies. Voilà l'histoire de ce pays.
    Il faut bien préciser deux aspects. Les troupes des Nations Unies sont nécessaires et autorisées à un double titre: d'abord, la résolution 1706 du Conseil de sécurité, votée cette année, a autorisé l'envoi de troupes cette année, et non il y a deux ans; deuxièmement, les troupes de l'Union africaine veulent que les forces de l'ONU arrivent au Darfour maintenant, car elles savent qu'elles ne peuvent protéger les civils innocents.
    Le problème qui relève de la responsabilité de la ministre, c'est que l'aide ne peut parvenir aux populations. Dans le Nord, 350 000 Darfouriens n'ont pas de nourriture depuis deux mois. Le Programme alimentaire mondial, organisme onusien, éprouve énormément de difficultés. Jan Egeland a lancé un avertissement à propos de cette catastrophe. Les travailleurs humanitaires s'en vont. Ils le font parce qu'ils ne peuvent travailler dans ce pays.
    Le tableau rosâtre que brosse la ministre décrit une réalité révolue. Ce n'est pas ce qui se passe maintenant. De plus en plus de civils innocents se font tuer maintenant. L'infrastructure du Darfour a été rasée.
    Ma question à la ministre est très simple. Elle déclaré que le gouvernement ferait le nécessaire afin de pouvoir mettre fin aux meurtres au Darfour. Son premier ministre l'a dit à la Francophonie et avant cela. Dira-t-elle à la Chambre que son gouvernement va organiser, avec d'autres pays, l'envoi d'une force multinationale au Darfour, même si Khartoum ne souscrit pas à cette initiative?

  (2030)  

[Français]

    Monsieur le président, comme on le sait, mon collègue et ministre des Affaires étrangères participe activement aux discussions et aux négociations en vue de trouver une solution au conflit qui a présentement cours au Soudan. Il n'en demeure pas moins que, pour le moment, l'Union africaine est là jusqu'à la fin de décembre, et nous appuyons son effort. Nous le ferons jusqu'à ce que les Nations Unies puissent prendre le relais.
    Monsieur le président, à mon avis, il est clair que l'Union africaine n'arrive pas à maintenir l'ordre au Darfour, et encore moins à pacifier les choses.
    La ministre nous parle de la situation comme s'il s'agissait d'un conte de fées. Or, le Darfour est en guerre, les gens meurent à la tonne et on ne voit pas la fin de cette histoire.
    La ministre parle de l'aide alimentaire et de l'argent que ce gouvernement a versé. C'est d'ailleurs notre argent qui va là. C'est très bien, personne ne conteste l'aide du Canada. Cependant, la ministre ne croit-elle pas que dans la situation actuelle, il ne faudrait pas seulement continuer une action qui est pratiquement comme mettre des cataplasmes sur une jambe de bois? 
    D'une part, l'aide n'arrive pas vers les gens qui sont les plus nécessiteux, et d'autre part, même les ONG sont obligées de partir puisqu'on n'est pas dans une situation où la sécurité est assurée et où on peut atteindre les gens. Ne faudrait-il pas envisager autre chose?
    Par conséquent, ne pense-t-elle pas que l'accent devrait être mis sur les pressions auprès des autres pays de la communauté internationale pour qu'il y ait une intervention sous l'égide des Nations Unies?
    Monsieur le président, je ne suis pas certaine d'avoir bien compris les propos de la députée de Papineau, mais en ce qui nous concerne, l'aide humanitaire sera toujours acheminée dans l'espoir de trouver une façon de l'acheminer aux populations qui en ont besoin. Il n'en demeure pas moins que si la situation est critique au Darfour, dans le reste du Soudan, le Canada s'est engagé et maintiendra son engagement envers la population.
    Maintenant, en ce qui a trait aux interventions internationales, je répète encore que notre premier ministre, lors de son discours devant les Nations Unies, a rappelé l'urgence de se concerter et de venir en aide au Darfour. Il l'a également fait lors du Sommet de la Francophonie à Bucarest.

[Traduction]

    Monsieur le président, un rapport publié récemment par Amnistie Internationale, le Réseau d'action internationale sur les armes légères et Oxfam International porte sur le cas de nombreux pays industrialisés, dont le Canada, qui bénéficient du commerce des armes avec des pays qui sont soumis à un embargo sur les armes. Il est de plus en plus facile et rentable d'en sous-traiter la fabrication et d'envoyer des pièces partout dans le monde. Les sociétés productrices d'armes profitent de la situation et ouvrent des usines en Chine, en Inde et ailleurs.
    Cependant, ces pays ne sont pas assujettis aux embargos que les pays industrialisés doivent respecter, ou ils y passent outre. Il est donc inévitable, étant donné les circonstances, que des armes fabriquées avec des pièces canadiennes arriveront au Soudan et dans d'autres pays dont le bilan au chapitre des droits de la personne est plus que douteux. Il a été recommandé d'imposer un contrôle plus strict des exportation de pièces provenant du Canada et que les mesures de contrôle s'appliquent aux sociétés canadiennes qui ont des usines à l'étranger.
    Le gouvernement assumera-t-il cette responsabilité et veillera-t-il à ce que personne ne tire profit de la vente d'armes au Soudan?

  (2035)  

[Français]

    Monsieur le président, je remercie la députée de sa question. Elle doit savoir cependant que les Britanniques sont à faire une étude sur la question et le Canada les appuie dans cette étude. En ce qui concerne le Canada, il n'y a pas de vente d'armes qui se fait directement aux pays.

[Traduction]

    Monsieur le président, il y a eu une augmentation, au cours de la dernière décennie, des conflits et des situations d'urgence, autant d'ordre naturel qu'humain, augmentation qui a entraîné la perturbation des structures sociales, politiques et économiques. Le bilan du gouvernement canadien en matière d'aide à l'étranger est mitigé. Au cours des dernières années, on a demandé aux Canadiens d'intervenir dans des situations de crise comme la guerre en Afghanistan, l'évacuation des ressortissants canadiens au Liban et le génocide au Darfour.
    Le gouvernement canadien a offert une aide fragmentaire dans certains cas et, dans d'autres, il a investi des ressources importantes. Le gouvernement ne dispose d'aucun protocole pour répondre à de telles urgences. Quand le gouvernement conservateur mettra-t-il un tel protocole en place? Il faut que nous puissions prévoir la réaction de notre gouvernement en temps de crise.
    Enfin, le gouvernement est-il disposé à envoyer les troupes au Soudan, oui ou non? Si non, le gouvernement demandera-t-il aux Nations Unies d'imposer des sanctions au Soudan?

[Français]

    Monsieur le président, il y a un principe bien simple à respecter avant d'envoyer des troupes dans un pays: encore faut-il en avoir reçu la demande. C'est notamment la raison de notre présence en Afghanistan: le gouvernement afghan a demandé notre présence là-bas pour l'assister dans la reconstruction de son pays. Dans le cas du Soudan, il n'y a pas eu de demande de troupes canadiennes.
     Il n'en demeure pas moins que le gouvernement du Canada fait preuve de compassion envers les pays qui traversent des crises humanitaires graves. Et c'est la mission de l'ACDI de venir en aide à ces populations.
    L'honorable député de Gatineau a la parole pour une très courte question.
    Monsieur le président, nous sommes ce soir dans un débat exploratoire qui touche le Darfour. Nous savons que la situation se détériore depuis plus de 20 ans, que Khartoum ne coopère pas et que nous faisons face au problème de faire parvenir l'aide humanitaire aux populations touchées.
    Ma question à la ministre est la suivante: jusqu'à quel point allons-nous attendre après le gouvernement de Khartoum, à savoir Omar el-Béchir, avant d'agir? Faut-il attendre que le génocide se perpétue? Ou le Canada est-il dans une position qui lui permette de parvenir à une solution face à cette situation qui va au-delà de l'aide humanitaire actuellement?
    Monsieur le président, en réponse à la question de mon collègue député, je précise que le Canada est très engagé sur tous les plans au Soudan, non seulement en matière d'appui logistique, de diplomatie et de consolidation de la paix. Il fournit du matériel militaire et a fourni de l'aide humanitaire aux populations. C'est sa façon de travailler dans la perspective d'obtenir un règlement au Soudan.

  (2040)  

[Traduction]

    Monsieur le président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Davenport.
    J'interviens à la Chambre ce soir pour parler de la crise humanitaire très grave qui a lieu au Darfour. Depuis 2003, il y a eu une escalade de la violence dans l'Ouest du Soudan. Des milliers de personnes ont été tuées. Des milliers d'autres meurent de malnutrition et de maladie. Plus de deux millions de personnes ont été déplacées et vivent dans des conditions horribles dans des camps de réfugiés. Les atrocités sont tellement graves que, à mon avis, les actes commis contre la population noire africaine au Darfour constituent un génocide.
    Le gouvernement de Khartoum, par l'entremise de sa milice, soit les Janjawids, prend pour cible et tue la population noire africaine. Par conséquent, il n'y a pas d'autre moyen de décrire la situation que de parler d'un génocide.
    La première chose qui me vient à l'esprit lorsque j'entends parler de ces atrocités, c'est le concept que les Canadiens ont préconisé, à savoir la responsabilité de protéger. Si la situation au Darfour ne justifie pas l'intervention de la communauté internationale pour faire respecter ce principe, je ne peux même pas imaginer une situation qui le fera.
    La responsabilité de protéger est un cadre en évolution qui stipule le moment où la communauté internationale devrait prendre des mesures multilatérales pour mettre fin à une grave crise humanitaire. Selon ce principe, la communauté internationale a une responsabilité collective de protéger les populations contre un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, lorsque le gouvernement au pouvoir refuse ou est incapable d'y mettre fin lui-même.
    Au Darfour, on commet un génocide et le gouvernement de Khartoum, dirigé par le président Omar al-Bechir, refuse d'y mettre un terme. Le président al-Bechir a le pouvoir d'y mettre fin, mais il refuse de le faire. Il a autorisé une force de 7 000 soldats de l'Union africaine à se stationner au Darfour, mais elle s'est révélée inefficace. Il empêche maintenant une force progressive de 20 000 soldats des Nations Unies d'être déployée dans la région. Sans ces soldats, la sécurité ne pourra pas être rétablie dans cette région.
    La responsabilité de protéger a évolué, car, il y a environ 11 ans, la communauté internationale n'a pas agi lorsqu'un génocide sanglant a été commis au Rwanda. Un demi-million de Tutsis ont été tués par les extrémistes hutus. Quand tout est fini, la communauté internationale a dit « jamais plus ». Pourtant, nous voyons l'histoire se répéter.
    Sous l'égide des Nations Unies la communauté internationale est passée à l'action, certes, mais c'est insuffisant. Elle a d'abord cru que l'Union africaine avait le leadership nécessaire pour résoudre la crise. Le gouvernement l'a d'ailleurs répété ce soir. Or, l'Union africaine s'est montrées incapable de décourager d'autres exactions.
    Il est évidemment plus facile de porter des jugements après coup. Je ne critiquerai donc pas ce qui a été fait dans le passé, mais il est crucial d'avoir une stratégie pour l'avenir.
    La résolution 1706 du Conseil de sécurité des Nations Unies prévoyait le déploiement dans la région d'une force des Nations Unies composée de 20 000 militaires. La résistance du gouvernement soudanais a empêché le déploiement de cette force. Les Nations Unies agissent comme il se doit, mais une résolution du Conseil de sécurité est inutile si elle n'est pas assortie de la volonté politique d'en assurer l'application.
    Par conséquent, la communauté internationale a besoin d'exercer des pressions plus vives sur le gouvernement soudanais. Les Nations Unies pourraient lancer le bal en pressant ses États membres de respecter strictement l'embargo pétrolier décrété par le Conseil de sécurité. Par ailleurs, les Nations Unis pourraient s'empresser d'arrêter les présumés auteurs du génocide et de commencer les procès. Selon moi, il est crucial de traduire en justice les autorités gouvernementales. Cela s'est révélé efficace au Rwanda dans le passé.
    La communauté internationale doit faire savoir aux chefs d'État aux quatre coins du monde que les crimes contre les populations sont inacceptables. Le gouvernement du Canada a appuyé les efforts de la communauté internationale jusqu'à maintenant. Nous avons injecté des millions de dollars afin de procurer à l'Union africaine l'appui logistique et tactique nécessaire pour mettre fin aux combats. Nous avons aussi apporté une contribution humanitaire de millions de dollars, que ce soit pour des abris, de la nourriture ou des médicaments, autant de besoins à satisfaire pour que la situation s'améliore.
    Pourtant, nous devons nous demander si nous pouvons faire davantage pour que cesse ce conflit. Je crois que le Canada devra jouer un rôle de leader au Darfour.
    Il y a deux évidences. Premièrement, il y a un génocide au Darfour. Deuxièmement, seule la force de maintien de la paix des Nations Unies peut réussir à y mettre fin. Si le Canada et la communauté internationale n'unissent pas leurs efforts dès maintenant pour appliquer le principe qu'est la responsabilité de protéger, quand le feront-ils?

  (2045)  

     Monsieur le président, en formulant certaines suggestions très utiles comme il l'a fait, le député illustre parfaitement quelle devrait être la nature d'un débat comme celui-ci. Ce genre de débat devrait être un exercice constructif auquel participent les parlementaires afin de proposer de solutions.
    Nous avons entendu un récit des atrocités commises au Soudan et plus particulièrement au Darfour. On nous a parlé de massacre, de la violence dirigée contre les femmes et, dans bien des cas, contre les fillettes. On nous dit que des agriculteurs ont peur de sortir et d'ensemencer leurs champs, et que certaines personnes étaient ciblées. Le député a fourni de nombreux exemples de ce qui se passe là-bas.
    Néanmoins, une vérité incontournable demeure, à savoir que, sans la coopération du gouvernement du Soudan ou, à tout le moins, sans une reconnaissance de sa part quant à la nécessité d'une intervention de l'ONU pour assumer cette responsabilité, pour accomplir un important travail humanitaire et pour protéger la population, on ne peut rien faire, on ne peut prendre de mesures concrètes.
    Le député n'est-il pas d'accord que les efforts les mieux ciblés que le Canada peut faire passent par la voie diplomatique et consistent à encourager le gouvernement soudanais et, comme il l'a dit, à maintenir la pression sur celui-ci?
    Certains députés ne seront peut-être pas d'accord, mais une intervention unilatérale ou l'envoi d'une force de l'ONU entraînerait immédiatement une résistance de la part de l'armée soudanaise elle-même, la milice janjawid, et cela n'aboutirait pas à un résultat positif qui permettrait d'atténuer la souffrance qui prévaut actuellement.
    J'appuie la suggestion du député selon laquelle il faut faire d'autres efforts afin de traduire les responsables devant la Cour pénale internationale. C'est ce que le Canada fait. Nous appuyons cette démarche. Notre pays apporte sa contribution à cette cause, comme à beaucoup d'autres auxquelles nous avons fait allusion ici ce soir. Le député n'est-il pas d'avis que ce sont les pressions diplomatiques qui vont entraîner l'arrivée d'une force de l'ONU qui pourra alors s'attaquer à l'importante tâche qu'est la responsabilité de protéger?
    Monsieur le président, je n'ai pas oublié l'embargo des Nations Unies ni la Cour pénale internationale. Cependant, le principe sous-jacent sur lequel j'ai voulu insister est la responsabilité de protéger. La raison en est fort simple. Ce scénario s'est produit au Rwanda et nous en avons été témoins ici. Je me souviens d'avoir vu la situation se dégrader sous mes yeux lorsque j'étais étudiant. Je me souviens que le Canada et la communauté internationale ne faisaient rien. Encore un fois, l'histoire se répète.
    Nous pouvons débattre de cette question jusqu'à ce que mort s'ensuive, sans vouloir faire de jeu de mots, mais pendant ce temps, des milliers de personnes sont assassinées. Encore ce soir, si nous prenions les nouvelles en provenance du Soudan sur Internet, il serait question de ces meurtres. Nous devons nous entendre sur une solution.
    Récemment, j'ai parlé de la situation au Darfour à des élèves. Je parlais de la responsabilité de protéger, lorsqu'un élève de troisième année a dit: « Cela s'est passé au Rwanda, et maintenant c'est au Darfour. Est-ce à cause de la couleur de leur peau? Est-ce parce qu'ils sont noirs? » Cette question m'a stupéfié. C'était une question toute directe et innocente, posée par un jeune enfant. C'est un facteur dont nous devons aussi tenir compte. Sans pour autant minimiser l'importance de notre rôle et de la responsabilité de protéger les populations et de mettre un terme au génocide, nous devons aussi nous pencher sur ce facteur. J'espère que le gouvernement en tiendra compte lorsqu'il examinera la situation.
    Monsieur le président, l'écrivain Edmund Burke a déclaré un jour:
    Il suffit que les hommes de bien ne fassent rien pour que le mal triomphe.
    La situation au Darfour démontre l'absolue vérité de cette affirmation.
    Ce soir, nous sommes appelés à agir. C'est un appel qui doit être entendu d'un bout à l'autre du pays et partout dans le monde, et c'est un appel auquel il faut répondre.
    Il est généralement admis qu'au cours des dernières années, environ 400 000 personnes ont perdu la vie au Darfour. Entre 2,5 millions et 3 millions de personnes ont été chassées de leur domicile. Plus de 3,5 millions de personnes ne survivent aujourd'hui que grâce à l'aide internationale.
    Le conseil de sécurité des Nations Unies a adopté les résolutions les unes après les autres sans véritable résultat ou sans résultat mesurable. Les résolutions 1651, 1591, 1556 et, tout récemment, les résolutions 1665 et 1706 ont été adoptées. La nécessité d'agir est invariablement mentionnée dans ces résolutions, mais le fait est qu'aucune initiative d'envergure n'a été prise par la communauté internationale.
    La force de l'Union africaine qui se trouve actuellement au Darfour est dépassée, sous-financée et, en dépit de ses bonnes intentions, tout simplement inefficace lorsqu'il s'agit d'empêcher que les persécutions se poursuivent au Soudan.
    On a avancé qu'une force de 17 000 à 20 000 soldats était nécessaire pour remplacer les troupes de l'Union africaine actuellement au Darfour. Le gouvernement du Soudan rejette l'intervention de toute force des Nations Unies, mais le nombre hallucinant de morts continue d'augmenter et les souffrances humaines inimaginables se poursuivent. La communauté internationale a l'obligation d'agir, tout comme nous, au Canada.
    Avant que le Sénat n'ajourne pour l'été, le sénateur Roméo Dallaire a déclaré que le Canada devait prêcher par l'exemple. Il a tout à fait raison.
    Dans le rapport du Comité des affaires étrangères on mentionne la nécessité de lancer une mission immédiate au Soudan et on exhorte le gouvernement à soutenir une telle mission par tous les moyens diplomatiques, économiques et militaires à sa disposition.
    Il est maintenant temps d'agir. Nous n'avons plus besoin d'examens et de négociations supplémentaires. Adopter de nouvelles résolutions ne servira à rien.
    N'avons-nous rien appris des événements du Rwanda où des centaines de milliers de personnes ont été massacrées avec une brutalité indicible et où le monde n'a rien fait avant que les pertes ne soient si grandes?
    Le Darfour se trouve dans une crise perpétuelle depuis au moins trois ans. Pourtant, la communauté internationale semble incapable, ou plutôt non désireuse, de faire le nécessaire pour mettre un terme à cette terrible situation. Lorsque le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, qualifie la situation au Darfour de « désastreuse », ce ne sont pas des paroles en l'air.
    Si le monde continue de se perdre en discussions sans prendre de mesure importante, les conséquences pour le peuple du Darfour seront désastreuses. Les mesures à prendre dans cette région sont très simples même si la nature et l'origine du conflit sont compliquées. Ces mesures ne seraient pas sans risque. En effet, le risque est considérable.
    Toutefois, l'inaction n'est plus acceptable ni excusable. Nous devons constituer une force d'au moins 20 000 soldats bien approvisionnés et appuyés par les Nations Unies à déployer dans la région immédiatement. C'est la première étape. Ensuite, nous pourrons nous attaquer aux causes profondes du conflit. Cependant, la première chose à faire est de stopper la souffrance et les tueries.
    La communauté internationale ne peut pas se laisser intimider par les paroles du gouvernement du Soudan, qui rejette sans cesse l'idée d'une force internationale. De nombreux pays exhortent toutes les parties à accepter les modalités des traités de paix qui ont été négociés, mais manifestement cela n'a aucun effet réel.
    Que les parties veuillent ou acceptent une force internationale ou non, en vérité, la communauté internationale a l'obligation d'agir une fois pour toutes. C'est particulièrement le cas lorsque les parties à des conflits comme ceux du Darfour continuent de ne faire preuve d'aucune volonté réelle ni désir d'arrêter leurs activités brutales.
    Les générations futures auront peine à croire que nous avons pu fermer les yeux devant pareille tragédie humaine. Le monde doit agir maintenant, le Canada y compris. Le Canada doit donner l'exemple.

  (2050)  

    Monsieur le président, mon collègue d'en face et moi-même partageons sûrement certaines des mêmes opinions sur cette très importante question, tout comme les autres députés de la Chambre, tous partis confondus.
    Je pense que nous nous entendons tous pour dire qu'il faut être diplomate mais aussi énergique et décisif. Il est important de déployer des forces onusiennes dans la région du Darfour parce qu'un tel déploiement aurait aussi une incidence dans le Sud du Soudan et augmenterait les chances d'un accord de paix global dans ce pays. Nous sommes nombreux à croire que si les choses se gâtent davantage au Darfour, une telle force pourrait aussi être utile.
    Puisque je connais le refrain à la Chambre, je dois demander à mon collègue, si des troupes canadiennes étaient envoyées dans le cadre d'une force onusienne et que les premiers cercueils commençaient à arriver, les troupes resteraient-elles jusqu'à la fin? La détermination à mener la mission à bonne fin serait-elle là? Je sais bien que mon collègue ne peut parler qu'en son nom mais peut-être pourrait-il faire preuve d'un peu de leadership au sein de son parti. Aurait-on la détermination de mener la mission à bonne même quand les premiers cercueils commenceraient à arriver?

  (2055)  

    Monsieur le président, la diplomatie ne peut qu'échouer lorsqu'un gouvernement comme celui de Khartoum décide de se servir de cette même diplomatie comme d'un outil pour débattre sans fin et gagner du temps. Pendant ce temps, il participe au génocide qui se déroule dans le pays. Voilà ce qui arrive vraiment.
    La plupart des experts internationaux en matière de droits de l'homme et la plupart des dirigeants ont reconnu le fait que ce génocide a lieu directement devant nos yeux. Nous pouvons débattre de cette question ad nauseam. L'ONU a déjà adopté plusieurs résolutions. Cependant, ce qu'il nous faut maintenant, c'est de l'action. Il n'est plus question de jouer l'ignorance. Nous savons qu'une tragédie se déroule et qu'il y a eu des massacres. Comme le ministre des Affaires étrangères l'a mentionné, ce pays est le théâtre de beaucoup de violence sexospécifique. Nous devons prendre des mesures concrètes pour intervenir.
    Je pense que les Canadiens comprennent que cette situation justifie notre attention et notre engagement. Nous devons prendre des mesures immédiates, car il est question de mettre un terme au génocide. Nous avons signé des conventions et des traités internationaux témoignant de notre engagement à prendre des mesures pour mettre fin aux génocides.
    Nous avons également signé un protocole sur la responsabilité de protéger et nous devons nous conformer à ce document que nous avons présenté à l'ONU.
    Monsieur le président, le Canada ne doit pas rester les bras croisés pendant que de telles atrocités se produisent au Darfour. Le député est-il d'avis qu'il serait utile que le Canada demande à l'Union africaine de faire une déclaration reconnaissant précisément que la situation au Darfour répond aux critères d'intervention définis à l'article 4 d. de la loi constitutionnelle de l'Union africaine et qu'elle réitère que, dans les circonstances, i'ONU est l'organe approprié pour intervenir au Darfour?
    Monsieur le président, je fais entièrement mienne la déclaration de la députée. Il est très important que nous agissions dans les plus brefs délais.
    Le gouvernement doit emprunter la voie diplomatique, qui est essentielle sur le plan international, mais nous devons également prendre l'initiative d'une résolution demandant l'envoi d'une force de l'ONU. Nous devrions être sur le terrain en ce moment même, car la tragédie continue de se dérouler sous nos yeux. Ne rien faire, c'est comme approuver ce qui se passe dans ce pays.
    Monsieur le président, je me félicite de cette occasion de prendre la parole à la Chambre pour aborder l’une des grandes priorités de notre politique étrangère, soit la triste situation humanitaire qui règne au Darfour et les efforts déployés pour renforcer la protection des civils.
     Comme la Chambre le sait, le nouveau gouvernement du Canada est très inquiet de la situation au Darfour et s’est engagé à prendre des mesures dans le cadre de sa stratégie globale concernant le Soudan.
     Le conflit au Darfour est aussi grave que tragique. Malgré la conclusion d’un accord de paix, les attaques contre les civils se multiplient, menées par un nombre toujours croissant de factions belligérantes. Le viol et les agressions sexuelles, la torture et les enlèvements servent de tactiques pour chasser les gens de leurs maisons et de leurs pâturages, susciter la peur et imposer l’obéissance. Ces crimes de guerre et ces crimes contre l’humanité se poursuivent. Ils sont délibérés et, malheureusement, ils ont été commis jusqu’ici avec une impunité quasi totale.
     Il est triste de constater que les gains réalisés par les organismes d’aide en faveur des droits et du bien-être des civils darfouriens dans les 18 derniers mois risquent d’être compromis par la détérioration de la sécurité. Selon l’UNICEF, les taux de malnutrition mesurés en juillet et en août dans le nord du Darfour se situaient entre le seuil d’urgence de 15 p. 100 et le taux vraiment inquiétant de 27 p. 100, relevé dans une région particulière, parce que les agriculteurs sont incapables de faire leurs semailles et que les organismes d’aide ne peuvent pas distribuer des produits alimentaires par suite du manque de sécurité.
     Les civils, les travailleurs humanitaires et les gardiens de la paix de l’Union africaine sont maintenant la cible d’attaques menées aussi bien par des groupes qui ont signé l’accord de paix que par des groupes qui ne l’ont pas signé. À part les problèmes de sécurité, les organismes humanitaires doivent aussi affronter des obstacles bureaucratiques élevés par certains éléments du gouvernement soudanais, qui entravent leurs opérations.
     Le Canada a fermement pris position sur la situation au Darfour tant par ses déclarations que par les mesures concrètes qu’il a adoptées. Nous avons lancé un appel à toutes les parties pour les exhorter à respecter leurs obligations en vertu du droit humanitaire international. Nous avons fermement demandé aux autorités de permettre aux travailleurs humanitaires d’atteindre les gens qui ont besoin d’aide. Nous avons mis d’importantes ressources à la disposition de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ainsi que des Nations Unies et des organisations non gouvernementales qui répondent aux besoins humanitaires.
     Nous avons assuré un soutien diplomatique à la force de l’Union africaine, à laquelle nous avons fourni de l’équipement et un appui logistique, et avons déployé des efforts en faveur du processus de paix au Darfour. Le Canada a pressé le Conseil de sécurité des Nations Unies d’agir pour protéger les civils du Darfour, conformément à ses propres engagements à cet égard.
     Le gouvernement du Canada a ainsi agi parce qu’il croit que la situation au Darfour justifie la prise de mesures pour protéger les civils. Il estime en outre que le principe de la responsabilité de protéger, dont le Canada s’est fait le champion et auquel ont souscrit les Nations Unies, s’applique certainement dans ce cas.
    Si la Chambre y consent, je voudrais profiter de cette occasion ce soir pour expliquer davantage aux Canadiens ce que le Canada a fait pour protéger les civils au Darfour et ce qui doit être fait dans les semaines et les mois à venir.
    Le Canada est en première ligne des efforts internationaux pour améliorer la protection des populations affectées par la guerre. Nous avons surtout cherché à renforcer la mise en oeuvre des lois et des principes internationaux et à appuyer des activités précises sur le terrain pour protéger les populations. Cela comprend des efforts destinés à donner aux États, aux organes des Nations Unis, aux réseaux régionaux et aux organisations non gouvernementales sur place la volonté politique voulue. Cela comprend également l'élaboration de stratégies pour utiliser des moyens coercitifs afin de protéger les civils, notamment grâce à des sanctions ciblées et des opérations de soutien de la paix au besoin.
    Grâce au travail du Canada dans cette région, les missions sous l'égide du Conseil de sécurité des Nations Unies ont prévu des dispositions précises pour protéger les civils contre toute menace imminente.
    À la suite du déclenchement des hostilités au Darfour, le gouvernement du Canada a immédiatement répondu à l'appel d'organisations humanitaires internationales qui cherchaient à obtenir un appui financier, notamment. La contribution du Canada aux Nations Unies, à la Croix-Rouge et au Croissant-Rouge et à des organisations non gouvernementales actives au Soudan qui offrent de l'aide humanitaire et sauvent des vies s'établit maintenant à plus de 60 millions de dollars pour le Soudan, 60 p. 100 environ de cette somme étant destinée à l'aide humanitaire pour les populations affectées au Darfour.

  (2100)  

    L'appui du Canada à ces organismes a aidé à répondre aux besoins essentiels des civils affectés par la guerre en leur fournissant de la nourriture, un abri et des médicaments.
    Le Canada a également appuyé les initiatives d'aide aux victimes de violence sexuelle, il a collaboré avec le gouvernement du Soudan pour supprimer les obstacles et il a assuré la formation en droit humanitaire international et en matière de droits de la personne aux policiers et aux militaires soudanais.
    Nous avons financé le déploiement des agents de protection des Nations Unies au Darfour pour aider au développement de stratégies par des organismes. Nous fournissons un soutien important aux réfugiés en provenance du Darfour qui sont maintenant dans la partie est du Tchad.
    Le Canada a été un chef de file dans les efforts internationaux pour mettre un terme à l'immunité pour les auteurs de violence contre les civils au Darfour. Il a pressé instamment le Conseil de sécurité des Nations Unies de saisir la Cour pénale internationale de la situation au Darfour et il a été le premier et le seul pays à faire une contribution volontaire de 500 000 $ pour faciliter l'enquête de la cour.
    Le Canada a bien accueilli la décision du Conseil de sécurité comme une étape importante pour punir les auteurs de crimes graves qui auraient été commis au Darfour par toutes les parties. Nous sommes persuadés que l'enquête de la Cour pénale internationale contribuera à établir une paix durable pour les gens du Darfour.
     Guidé par le principe de la responsabilité de protéger et, de façon plus générale, sa politique à l’égard de la protection des civils, le Canada a également pris des mesures concrètes pour prévenir et éliminer la violence contre les populations civiles au Darfour, notamment en souscrivant aux sanctions ciblées décrétées par les Nations Unies et en soutenant l’Union africaine.
     Le Canada a joué un rôle international de premier plan en apportant un important soutien politique et diplomatique au déploiement d’une force de maintien de la paix de l’Union africaine au Darfour. Cette force a pour mission de protéger, y compris en recourant à la force, les civils exposés à une menace imminente de violence, conformément au chapitre VII de la charte des Nations Unies.
     Pour aider l’Union africaine, le Canada lui a fourni, sur sa demande, une centaine de transports de troupes blindés, 25 hélicoptères et deux aéronefs à voilure fixe, plus du carburant pour les faire fonctionner ainsi que des conseillers de la police civile et des conseillers militaires dans le cadre d’un programme de soutien d’une valeur de plus de 190 millions de dollars.
     Cette force de l’Union africaine a travaillé vaillamment. Elle a gardé les camps pour les personnes déplacées et patrouillé les vastes régions isolées du Darfour afin de réduire le risque d’attaques contre les civils, souvent au prix de la vie de ses soldats. Le Secrétaire général des Nations Unies a récemment fait observer que dans les régions où elles avaient été déployées, les forces de l’Union africaine avaient nettement amélioré la sécurité des populations à risque.
     Le Canada croit que l’Union africaine doit être largement félicitée pour ses efforts au Darfour, mais étant donné la poursuite des violences contre les civils et les attaques récentes contre des travailleurs humanitaires qui atteignent un nombre record depuis 2004 et que l’on doit notamment au fait que l’accord de paix au Darfour n’a pas été signé par toutes les parties et que les signataires n’ont pas respecté les conditions prescrites, la communauté internationale, y compris l’Union africaine, reconnaît maintenant que nous devons passer à une nouvelle phase d’engagement international et faire la transition à une mission des Nations Unies.
     La transition à une mission de maintien de la paix des Nations Unies a été demandée par l’Union africaine. Elle a l’appui d’un grand nombre de membres des Nations Unies et le Conseil de sécurité l’a négociée de façon ouverte et transparente. Elle répond à tous les critères de légitimité.
     La mission des Nations Unies conservera un caractère africain comme l’a demandé le gouvernement soudanais. Elle sera conduite en vertu du mandat de protection des civils prévu au chapitre VII qui a été autorisé par le Conseil de sécurité. Elle intégrera une force de maintien de la paix avec la poursuite des efforts déployés sur le plan humanitaire, de la politique et du développement et elle sera mieux en mesure d’assurer la protection des civils et de garantir aux populations touchées l’accès à l’aide humanitaire.
     Pour conclure, nous croyons que la gravité de la crise au Darfour exige une réponse décisive de la part du Conseil de sécurité des Nations Unies et de tous les États membres en ce qui concerne la transition à une mission des Nations Unies. Le Soudan, sa population et ses voisins ont beaucoup à gagner en acceptant cette mission des Nations Unies qui contribuera à la paix et à la sécurité à long terme au Soudan.

  (2105)  

    Monsieur le président, les députés ont tous reçu de nombreuses communications des électeurs au sujet du terrible génocide qui a lieu au Darfour. J'ai apporté trois lettres portant sur ce sujet.
    La première vient de soeur Shelley Marie Jeffrey qui, comme nous, appuie l'idée d'une intervention diplomatique forte de même que la résolution 1706 des Nations Unies. Elle demande pourquoi le Canada ne délègue pas un envoyé permanent au Soudan.
    Shamir Tanna affirme qu'il ne peut rester impassible devant ce qui se passe. Le Canada se doit d'agir. Il demande d'augmenter l'aide humanitaire parce qu'il voit encore des gens mourir là-bas. Ils meurent de faim. Ils n'ont pas encore reçu de quoi répondre à leurs besoins élémentaires, contrairement à ce que prétend le député.
    La dernière lettre que j'ai apportée vient de Stephen Hawrylshyn, qui estime que le Canada ne peut plus se tenir loin du jeu, qu'il doit intervenir pour sauver une population désespérée. M. Hawrylshyn nous rappelle les parole de Lester B. Pearson qui a dit:
     De tous nos rêves aujourd’hui, aucun n'est plus important — et difficile à réaliser — que celui de la paix dans le monde. Ne perdons jamais la foi en la paix ou notre résolution de faire tout ce qui est possible pour qu’elle devienne un jour réalité.
    Le ministre des Affaires étrangèresa déclaré ici même à la Chambre que nous avons engagé toutes nos ressources militaires en Afghanistan. Il a également ajouté qu'aucun effort spécial que le Canada pourrait entreprendre unilatéralement ne pourrait alléger les souffrances.
    Le ministre n'a tout simplement pas compris. Deux millions et demi de personnes ont été déplacées de leurs foyers. Combien de millions de personnes doivent mourir avant que le gouvernement ne décide de prendre des mesures décisives et fasse figure de chef de file dans le cadre d'une initiative de paix durable?
    Nous parlons de vies humaines. Combien de millions de personnes doivent encore mourir avant que le gouvernement ne cesse de tergiverser au sujet de petites choses qu'il peut faire et commence à prendre la vie humaine un peu plus au sérieux?

  (2110)  

    Monsieur le président, je suis étonné d'entendre le député déclarer que nous n'avons pas fait grand-chose. Comme plusieurs l'ont dit, nous avons beaucoup fait sur le plan humanitaire en plus d'appuyer les forces des Nations Unies.
    Est-il vrai que la situation actuelle au Darfour exige une intervention immédiate? Cela ne fait aucun doute. Voilà pourquoi le Canada n'a pas ménagé ses efforts sur le plan diplomatique pour appuyer la résolution 1706 des Nations Unies aux termes de laquelle l'Union africaine peut demander de céder la place à une mission des Nations Unies si elle estime que les Nations Unies peuvent agir plus rapidement. Nous sommes d'accord. Nous appuyons cela.
    Nous savons qu'il nous faut faire preuve de cohésion avec nos partenaires internationaux et obtenir la permission du gouvernement du Soudan. J'expliquerai aux députés pourquoi nous avons besoin de la permission du gouvernement du Soudan. C'est parce que, sans cette permission, la situation pourrait empirer.
    Oui, il faut des mesures immédiates. Cela ne fait aucun doute. Voilà pourquoi le gouvernement exerce des pressions. Le premier ministre, au Sommet de la francophonie et aux Nations Unies, et le ministre des Affaires étrangères, aux Nations Unies, se sont entretenus avec tout le monde.
    Je suis allé au Congo. Je suis allé au Rwanda. J'ai profité de toutes les occasions qui m'ont été données pour demander aux dirigeants africains que j'ai rencontrés de dire au gouvernement du Soudan d'accepter les forces des Nations Unies.
    Oui, le gouvernement est conscient du besoin et il fait tout ce qu'il peut. Il exerce autant de pression que possible de tous les côtés pour assurer cette transition vers une mission des Nations Unies, comme l'ont demandé les Africains.

[Français]

    Monsieur le président, lors d'un échange précédent au cours du débat de ce soir, l'honorable député a fait valoir le fait qu'il n'était pas question que des Blancs interviennent en Afrique noire.
    À ce que je sache, jusqu'à maintenant, le Canada est toujours intervenu selon les valeurs qui étaient les siennes, soit la solidarité, l'entraide et surtout les besoins de la population. J'étais fort surprise d'entendre ce commentaire quant à l'intervention au Darfour. Je ne peux pas m'empêcher de penser que c'était la même chose pour le Rwanda. Nous étions là et nous ne sommes pas intervenus. Par contre, nous sommes intervenus au Kosovo.
    J'aimerais reprendre la question que la fille d'un de nos confrères a posée à son père, qui en a parlé plus tôt. Est-ce parce qu'ils sont Noirs que le gouvernement est si timide dans son désir de solutionner la situation?

[Traduction]

    Monsieur le président, j'irai droit au but. Je suis originaire d'Afrique. Tous ces discours sur les Blancs et les Noirs sont inutiles. Ce n'est pas moi qui le dis, je cite le sénateur qui l'a dit avant moi.
    Parlons un peu de la situation au Rwanda. Je rentre de ce pays. J'ai discuté avec des Rwandais là-bas. La communauté internationale n'a pas exercé suffisamment de pressions pour empêcher le génocide de se produire au Rwanda, et la ligne de faille est toujours là. Le déploiement d'une force internationale continue de s'imposer, mais il ne suffit pas. Nous ne pouvons pas réussir si nous n'attaquons pas le problème à la racine.
    C'est pour cela que nous devons exercer des pressions sur le gouvernement soudanais pour qu'il protège ses citoyens et c'est pour cela que nous devons travailler avec ce gouvernement. La meilleure solution consisterait à faire intervenir la Chine et la Russie. À la conférence de Bruxelles, j'ai aussi suggéré que l'on fasse intervenir l'Inde, que l'on presse tous les pays d'intervenir, au-delà de la communauté des nations. Tout le monde le dit, il y a de toute évidence un génocide au Darfour. Nous devons agir, soit, mais nous devons adopter une approche faisant intervenir sans tarder la communauté internationale.
    Monsieur le président, j'ai consulté des experts après le dernier débat exploratoire sur le Darfour et je l'ai fait de nouveau avant celui-ci. J'ai notamment consulté M. Mayom Bul. Celui-ci est un expert parce qu'il a vécu plus 20 ans au Soudan. M. Bul est un réfugié soudanais. Il veut que le gouvernement lui dise directement pourquoi nous n'assurons pas une présence là-bas. J'ai entendu la liste interminable des mesures que le gouvernement a prises. Je ne sais pas si M. Bul nous regarde et s'il a entendu tout ça.
    Sans vouloir offenser personne, cela n'est pas suffisant; à preuve, l'Union africaine réclame à cor et à cri des ressources. Elle n'en a pas assez. Quelle est la solution, le savons-nous? La solution dépendra du gouvernement soudanais, qui lui donnera ensuite le feu vert. Cela n'est pas suffisant aux yeux de quiconque ici, y compris mon collègue.
    Il nous faut intensifier nos efforts. Nous ne proposons pas d'agir. Aussi difficile que ce soit, il faut le faire. Voilà ce que nous demandons. Pourrait-on ne pas proposer, mais plutôt exiger? Pourrait-on faire ce que doit et fournir à l'Union africaine l'aide dont elle a désespérément besoin?

  (2115)  

    Je suis tout à fait d'accord, monsieur le président. C'est également notre position. Il faut s'engager, mais pas par le moyen proposé, soit une invasion unilatérale du pays. Nous ne sommes pas prêts à procéder de cette façon.
    Je suis néanmoins d'accord avec le député quand il dit qu'il faut unir nos efforts; il a parfaitement raison. Le plus tôt nous nous attellerons à la tâche avec nos partenaires internationaux et avec l'ONU, le mieux ce sera. Nous nous efforçons d'exercer des pressions sur le gouvernement du Soudan pour l'inciter à accepter une mission de l'ONU, conformément à la résolution adoptée à l'ONU.
    Monsieur le président, je voudrais poser une question au secrétaire parlementaire. Je m'inquiète un peu des affirmations faites plus tôt par le ministre des Affaires étrangères et , maintenant, par le secrétaire parlementaire, affirmations selon lesquelles ce qui est proposé, c'est que l'on envahisse un pays étranger, comme si toute cette question n'avait pas déjà été sérieusement étudiée par le Conseil de sécurité des Nations Unies et intégrée à la résolution 1706 de ce dernier. Celle-ci se lit brièvement comme suit:
    Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’unité, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale du Soudan, qui ne seraient pas remises en cause par le passage à une opération des Nations Unies, ainsi qu’à la cause de la paix, et se déclarant résolu à prêter son concours au gouvernement d’unité nationale, dans le plein respect de sa souveraineté, pour faire face aux divers problèmes que rencontre le Soudan, et à faire en sorte que, dans toute la mesure possible, toute opération des Nations Unies au Darfour aurait un caractère africain marqué et compterait une forte participation africaine...
    Comment le secrétaire parlementaire et, avant lui, le ministre des Affaires étrangères peuvent-ils affirmer à la Chambre que la proposition de l'envoi de troupes des Nations Unies au Darfour constitue une sorte d'invasion d'un pays étranger quand ils savent très bien, ou devraient savoir, que la résolution 1706 des Nations Unies traite précisément de cette question et réfute pareille affirmation exagérée et hystérique?
    Monsieur le président, je suis absolument surpris et estomaqué que la députée affirme que cette résolution ne dit nulle part que le consentement du gouvernement du Soudan est nécessaire pour ce déploiement. Je l'invite à relire la résolution, qui stipule précisément: « ... invite en conséquence le Gouvernement d’unité nationale à consentir à ce déploiement. »

[Français]

    Monsieur le président, c'est la deuxième fois en moins d'un an que je me lève en cette Chambre pour décrier le drame humanitaire qui afflige des millions de personnes au Darfour et au Tchad à l'heure actuelle. En effet, le printemps dernier, j'insistais pour que le gouvernement canadien s'impose comme leader dans ce dossier auprès de la communauté internationale, dans le but évident de trouver une solution, une fois pour toutes, à la misère que vivent les êtres humains qui sont au coeur de ce conflit.
    La situation humanitaire s'est dégradée au cours des derniers mois, et plus particulièrement durant les mois d'été qui viennent de s'écouler. Le niveau de violence auquel sont confrontés les travailleurs humanitaires est sans précédent. Le 7 août 2006, le bureau de coordination humanitaire de l'ONU annonçait que la violence a tué plus de travailleurs humanitaires au Darfour ces dernières semaines qu'au cours des dernières années.
    Une fois de plus, le gouvernement conservateur a démontré sa faiblesse et son manque de leadership puisque, à ce jour, sa seule réponse est l'octroi de 40 millions de dollars de plus en aide humanitaire. Bien que le geste soit louable, il est clairement insuffisant.
    Les organismes d'aide réclament une mission onusienne pour pouvoir continuer leur travail humanitaire.
    Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et le PAM ont lancé à nouveau un cri d'alarme au sujet des 350 000 personnes privées d'aide alimentaire depuis trois mois.
    Le Bloc québécois exige que le gouvernement fédéral augmente son aide humanitaire pour le Darfour, en haussant ses dons au Programme alimentaire mondial, et s'assure que les fonds destinés à l'ACDI vont bel et bien à l'aide humanitaire et ne sont pas détournés à d'autres fins.
    Je me permettrai ici une parenthèse, car malheureusement, je ne peux m'empêcher de souligner l'inefficacité qui caractérise la gestion des fonds d'aide accordés par l'ACDI sur le plan international. En effet, selon l'agence de développement international, Action Aid, plus du tiers des fonds investis par l'ACDI sont mal coordonnés, sont versés à des conseillers surpayés ou liés à des dépenses effectuées au Canada plutôt que dans les pays où les besoins sont criants. C'est plus d'un milliard de dollars investis par l'ACDI l'année dernière dans le monde qui ont été gaspillés.
    C'est exactement le même montant que le gouvernement conservateur a coupé la semaine dernière — dans le gras —, dans des programmes qui s'adressent entre autres aux femmes, aux jeunes, aux minorités et aux analphabètes.
    Malgré tous les accords de cessez-le-feu intervenus entre le gouvernement soudanais de Khartoum et les rebelles de la province du Darfour, les affres continuent de s'accumuler au même rythme que les morts et les réfugiés. La situation est intolérable, car plusieurs sources estiment à 300 000 le nombre de victimes depuis le début du conflit.
    Ces mêmes sources évaluent à plus de 3 millions le nombre de personnes déplacées, soit sur le territoire du Darfour, dans d'autres régions du pays ou dans les pays limitrophes tels que l'Ouganda, la République centrafricaine et principalement le Tchad.
    Il y a autant de personnes vivant de façon précaire dans les camps à la limite du Tchad et du Darfour que des personnes ayant perdu la vie depuis le début de ce conflit. La situation pourrait encore dégénérer si le gouvernement nouvellement réélu du Tchad décidait de mettre sa menace à exécution en fermant sa frontière avec le Soudan et en forçant le retour des 300 000 réfugiés dans leur pays.
    La situation dans la région est à la fois complexe, puisqu'elle oppose deux nations qui partagent la même langue, la même religion, mais de points de vue totalement différents quant à l'avenir de leur région. La situation est également explosive: on n'a qu'à regarder attentivement la réalité politique et humanitaire, tant au Soudan que dans les pays voisins.
    Le Bloc québécois croit que la communauté internationale doit être plus proactive afin de remédier à cette crise le plus rapidement possible. L'Union africaine fait déjà un excellent travail dans cette région depuis quelques années, mais les ressources humaines et financières commencent à manquer.
    La communauté internationale et le Canada ont l'obligation d'obtempérer aux demandes de l'ONU qui souhaite mettre en place une mission d'aide sous le commandement de l'Union africaine, puisque ce conflit se déroule en Afrique et que seuls les Africains pourront y trouver une solution.

  (2120)  

    L'Occident a les moyens de venir en aide aux victimes du conflit au Darfour, et nous avons le devoir d'agir.
    Lors du génocide au Rwanda au début des années 1990, le général Dallaire, aujourd'hui sénateur, criait à l'aide pour que la communauté internationale lui donne les ressources nécessaires pour arrêter les massacres et solutionner les tensions qui existaient entre les Hutus et les Tutsis. À l'époque, le Canada, comme plusieurs autres pays, s'est fermé les yeux et s'est rendu complice de plus d'un million d'assassinats.
    Allons-nous, une fois de plus, fermer les yeux sur ce qui se passe là-bas et assister à ces actes de violence sans lever le petit doigt?
    Non, il est temps d'agir et de le faire dans le sens que le souhaitent l'ONU, l'Union africaine, la communauté des États européens et les ONG. Évitons le discours des États-Unis qui tergiversent encore en se demandant si ce qui se passe là-bas est un génocide ou un crime de guerre, car au-delà de l'aspect sémantique, il n'y a pas de différence.
    Il est clair que des crimes contre l'humanité ont lieu au Darfour et que cela devrait suffire pour alerter la communauté internationale. Nous avons les moyens d'agir, car malgré l'opposition actuelle du gouvernement de Khartoum, l'ONU peut intervenir en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, la résolution sur la responsabilité adoptée par le Conseil de sécurité. C'est Kofi Annan lui-même qui exige le déploiement d'une force d'interposition entre les rebelles et les troupes gouvernementales, et ce, malgré l'opposition du gouvernement soudanais.
    Même si la résolution 1706 affirme qu'un tel déploiement doit recevoir l'aval de Khartoum, il est évident selon plusieurs sources diplomatiques et humanitaires qu'une force de l'ONU sous un commandement de l'Union africaine serait bien reçue par toutes les parties.
    D'autres solutions peuvent être mises en place pour limiter la poursuite de ce conflit. Par exemple, à quand la mise en place d'un embargo sur la vente d'armes au Soudan, tel que demandé par les résolutions 1556 et 1591 du Conseil de sécurité de l'ONU?
    Nous apprenions d'ailleurs cette semaine que des pièces canadiennes se trouvent dans les armes et les véhicules que la Chine achète aux États-Unis pour les vendre ensuite au gouvernement du Soudan.
    Comme le demandait plus tôt en cette Chambre ma collègue, la députée de Longueuil—Pierre-Boucher, le gouvernement canadien va-t-il continuer à fermer les yeux et tolérer que des pièces détachées vendues à la Chine servent à la construction d'armes qui sont ensuite revendues au Soudan, ou va-t-il s'engager à prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ce trafic?
    Il est impératif que le Canada maintienne son appui à la Cour pénale internationale dans ses efforts pour mener à la justice les criminels dans le dossier du Darfour.
    Une chose est claire, le Bloc québécois appuie sans réserve la mission de l'Union africaine au Darfour et exige du gouvernement du Canada qu'il augmente son aide financière et la logistique à l'Union africaine pour que cette dernière ait à sa disposition les ressources nécessaires à la continuation de sa mission de paix dans ce coin du monde.
     En avril 2006, ma collègue, la députée de La Pointe-de-l'Île et porte-parole du Bloc québécois en matière d'affaires internationales, déposait une motion devant cette Chambre demandant:
    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement du Canada devrait exiger de ses représentants aux Nations Unies de mettre de l'avant une motion au Conseil de sécurité demandant le déploiement d'une force multinationale de maintien de la paix au Darfour le plus rapidement possible, conformément au paragraphe sur la responsabilité de protéger les populations contre les génocides, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l'humanité de la résolution adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 16 septembre 2005.
    Ce débat a eu lieu il y a près de six mois maintenant, et le gouvernement conservateur se terre pourtant dans un mutisme des plus complets.
    Est-ce à cause de son manque de leadership sur la scène internationale, de son incompréhension des enjeux ou de son aveuglement idéologique calqué sur celui du gouvernement Bush?
    Depuis le début, le Bloc québécois a exigé et appuyé la mise en place d'une force internationale d'interposition au Darfour en attendant la mise en place d'un retour à la vie normale pour les gens touchés par la crise. Le Bloc québécois exige également que cette force soit mise sous l'égide de l'Union africaine pour que ce problème africain se règle avec et par les Africains.

  (2125)  

    Monsieur le président, les discours des députés de l'opposition présentent un plan pour la participation du Canada dans cette mission, et c'est exactement l'approche que ce gouvernement préconise.

[Traduction]

     Nous sommes intervenus souvent et avec rigueur lors de rencontres internationales, y compris aux Nations Unies. Dernièrement encore, au Sommet de la Francophonie, le premier ministre a fait valoir une approche parfaitement logique et vigoureuse, grâce aux propositions de la députée d’en face, notamment celle qui visait à nous entretenir directement avec le Soudan, son ministre des Affaires étrangères et son président, ce que nous avons fait.
     Nous avons certainement appuyé l’idée de poursuivre les efforts pour amener le gouvernement soudanais à accepter le changement de direction ou le redéploiement des forces des Nations Unies qui prendront le relais de l’Union africaine, laquelle assumera essentiellement cette responsabilité ainsi que celle des remarquables et importants travaux qui sont en voie de réalisation.
     Mais je le dis encore une fois. Je tiens à ce que ce soit clair parce que la députée de Halifax a fait une déclaration inexacte en disant que nous sommes opposés à une invasion unilatérale. Personne ne propose quoi que ce soit du genre. D’ailleurs, nous disons, et cela est conforme au libellé de la résolution même, que le Soudan doit inviter le gouvernement d’unité nationale, de par sa nature même, à consentir au déploiement afin que cette transition s’effectue.
     Voilà la question dont la communauté internationale a été saisie. Elle continue de faire pression, comme nous le ferons, à chaque occasion, chaque fois que la question est soulevée et que la pression peut porter fruit, mais ce serait pure folie que d’obéir à la députée de Halifax et au NPD, qui semblent vouloir à tout prix rappeler les troupes d’Afghanistan pour les déployer unilatéralement d’une façon ou d’une autre au Darfour. Cela reviendrait à appliquer la théorie irréconciliable de deux poids, deux mesures.
     Encore une fois, la députée d’en face ne convient-elle pas que le Canada observe la même approche que celle adoptée par l’Union européenne et les pays membres du G8, dont nous faisons partie, ainsi que par les Nations Unies? Le grand homme lui-même, et je lui rends sincèrement hommage en le disant, Kofi Annan, n’a pas proposé une intervention unilatérale des Nations Unies dans cette affaire. Comment la députée peut-elle laisser entendre que le Canada se décharge de sa responsabilité, qu’il ferme les yeux ou qu’il fait moins que les autres pays?
     En fait, je dirais que nous faisons davantage pour ce qui est de contribuer à l’aide, à l’aide humanitaire et à l’appui à l’Union africaine, qui fait un noble travail. Comment la députée peut-elle se lever à la Chambre pour laisser entendre que le Canada se dérobe à sa responsabilité et qu’il ferme les yeux? C'est tout simplement faux et cela dénigre le pays dont sa province est une partie très importante.

  (2130)  

[Français]

    Monsieur le président, j'apprécie la remarque du ministre des Affaires étrangères. Toutefois, j'aimerais ajouter que, dans cette Chambre, nous en sommes à notre deuxième débat exploratoire sur le Darfour, en quelques mois à peine.
    Pour ma part, je n'ai pas vraiment senti la volonté du gouvernement de mettre en place des mesures qui nous inciteraient à comprendre qu'il y a vraiment un effort de la part du gouvernement. Il ne faut pas évaluer ce qu'on a fait de plus ou ce qu'on a fait de mieux que les autres pays au niveau de la crise du Darfour. Depuis les événements de l'été et peu importe le qualificatif employé pour décrire la situation au Darfour, il reste que la situation est grave. Il y a une population en danger, il y a une crise humanitaire. À ce jour, la crise ou le conflit au Darfour a fait plus de 300 000 victimes.
    Le Bloc québécois pense que la communauté internationale doit être plus proactive afin de remédier à cette crise. La question n'est pas de savoir s'il y a un génocide, mais bien d'agir le plus rapidement possible par une force de maintien de la paix, toujours en respectant le fait que ce conflit est un conflit africain.

[Traduction]

    Il reste moins de cinq minutes. J'aimerais permettre à un député de l'opposition officielle et à un député du quatrième parti de poser des questions.
    Monsieur le président, la députée pense-t-elle que le gouvernement vit dans une sorte d'univers parallèle ou qu'il divague complètement? Je n'arrive pas à croire que les députés ministériels acceptent les discours qui leur ont été donnés par le cabinet du premier ministre. Ce n'est certainement pas le ministère des Affaires étrangères qui leur a servi ces bêtises à faire circuler dans cette enceinte.
    La députée comprend bien que Khartoum a rejeté l'idée d'une intervention d'une force de l'ONU au Darfour. Je suis certain qu'elle sait très bien que Khartoum a rejeté cette idée et je me demande si elle croit que le gouvernement est en conscient.
    À son avis, le gouvernement sait-il que 50 députés ministériels à Khartoum sont recherchés par la Cour pénale internationale, qui souhaite les inculper de crimes contre l'humanité?
    Croit-elle en outre que le gouvernement comprend qu'aucune aide ne peut parvenir sur le terrain, que des travailleurs humanitaires se font tuer en plus grand nombre que jamais auparavant, c'est-à-dire un plus grand nombre au cours des trois derniers mois qu'au cours des trois années précédentes combinées? Sait-elle que les groupes d'aide internationale sont partis et ne peuvent rien faire?
    La députée sait tout cela et elle a été très énergique dans ses observations. J'aimerais qu'elle nous dise si elle croit que le gouvernement devrait se servir de ses relations au sein de l'Union européenne, de l'OTAN, des Nations Unies et d'autres groupes pour constituer dès maintenant une force de rétablissement de la paix de l'ONU. Ce serait tout à fait conforme au désir exprimé par l'Union africaine et à la résolution 1706 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

  (2135)  

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais remercier mon collègue libéral de sa judicieuse intervention. Je pense qu'elle va dans le sens de mon allocution.
    On doit aussi, dans ce conflit, écouter les pays limitrophes du Soudan qui interpellent le Canada, entre autres, d'agir avec doigté, en reconnaissant l'urgence de la situation, mais aussi l'importance de l'opposition des voisins du Soudan, notamment l'Égypte, l'Éthiopie et la Libye, à l'envoi des troupes de l'ONU au Darfour sans le consentement de Khartoum.
    Alors je pense que vous comme moi sommes au fait, actuellement, des besoins inhérents à la crise humanitaire qui sévit là-bas. C'est une situation d'urgence et il faut intervenir dans les plus brefs délais pour apporter une aide aux gens qui sont présentement le plus touchés par cette crise: les enfants, les femmes, les personnes déracinées, qui doivent quitter leur pays pour aller vivre ailleurs, le temps que revienne une paix que tous souhaitent dans ce pays.

[Traduction]

    Le député d'Ottawa-Centre a la parole. Il a droit à moins d'une minute et demie pour la question et la réponse.
    Monsieur le président, j'ai souligné un peu plus tôt que l'accord de paix viendra bientôt à échéance. L'Union africaine crie à l'aide. Elle s'est tournée vers le gouvernement soudanais. Ne devrions-nous pas être présents? Ne devrions-nous pas nous rendre sur place, ne plus nous contenter d'écouter la liste des problèmes à régler et intervenir dès maintenant?
    Nous savons que les groupes d'aide quittent les lieux et qu'ils sont remplacés par des militaires.
    La députée ne reconnaît-elle pas l'importance, et je suis persuadée qu'elle en conviendra, de faire quelque chose, de cesser de faire des suggestions, d'intervenir concrètement sans attendre, et de fournir à tout le moins de l'aide supplémentaire à l'Union africaine? Bon sang, ne devrions-nous pas exiger que la Chine et la Russie fassent quelque chose. Il ne suffit pas de faire des suggestions. J'aimerais que la députée nous dise ce qu'elle en pense.

[Français]

    Il reste 20 secondes à la députée de Laurentides—Labelle.
    Monsieur le président, je veux ajouter à ce stade-ci que le Bloc québécois veut une intervention multilatérale au Darfour. Le Bloc québécois se réjouit donc qu'il y ait une transition de la mission de l'Union africaine à une mission de l'ONU.

[Traduction]

    Monsieur le président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer à ce deuxième débat exploratoire sur la situation qui sévit au Soudan.
    Je sais que bon nombre de mes collègues députés sont très touchés par le triste sort qui est réservé aux Soudanais et je crois que le fait que nous tenions un deuxième débat sur ce sujet en moins de six mois démontre bien notre niveau de préoccupation. Comme nous le savons tous trop bien, depuis son accession à l'indépendance, le Soudan a presque toujours été aux prises avec une guerre civile et les Soudanais en paient chèrement le prix.
    Notre gouvernement est conscient que les Canadiens se préoccupent au plus haut point des souffrances qui affligent les Soudanais et nous tenons résolument à travailler de concert avec les Nations Unies et l'Union africaine pour trouver une solution à ce problème. En fait, nous travaillons actuellement avec le reste de la communauté internationale pour aider le Soudan à trouver une façon d'assurer un plus grande stabilité sur son territoire, parce qu'on ne peut pas accepter que le niveau de sécurité continue de se détériorer et que l'on fasse sans cesse obstacle aux opérations d'aide humanitaire les plus fondamentales.
    Pour mettre fin à ces souffrances, le Canada participe à une intense action internationale visant à persuader le Soudan d'accepter une opération de soutien de la paix de l'ONU au Darfour. Parallèlement, le Canada et la communauté internationale continuent de soutenir les efforts de l'Union africaine, car nous savons tous qu'il faut une force sur le terrain pour protéger les civils et pour faciliter l'action des organisations humanitaires.
    Le Darfour n'est qu'une région de tout un pays qui souffre. Dans le sud du Soudan, les infrastructures limitées qui existaient avant le début des combats ont été détruites. Des personnes déplacées dans des régions du pays touchées par la guerre sont confrontées à des pénuries alimentaires en plus de vivre constamment dans l'inquiétude, du fait de la présence de mines terrestres. Ces armes insidieuses ne font pas que menacer leurs vies: elles limitent leur capacité d'exploiter les terres de manière productive. Khartoum, la capitale du Soudan, abrite la plus grande concentration de personnes déplacées du monde, dont un grand nombre vit dans des camps n'offrant aucun service de base.
    Pour cette raison, la stratégie du Canada, dans sa quête de solutions, vise tout le pays. Comme ma collègue, la ministre de la Coopération internationale et ministre de la Francophonie et des Langues officielles, l'a mentionné plus tôt ce soir, le Canada a engagé plus de 100 millions de dollars pour appuyer l'assistance humanitaire, le rétablissement de la paix et la reconstruction.
    En avril 2005, lors de la Conférence à Oslo des pays donateurs pour le Soudan, nous nous sommes engagés à verser 90 millions de dollars sur deux ans. En mai dernier, mon collègue a annoncé une aide humanitaire de 20 millions de dollars pour le Soudan et la région.
    Nous continuons de collaborer avec nos partenaires de la communauté internationale en soutenant des organismes comme l'UNICEF, le Programme alimentaire mondial, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et le Comité international de la Croix-Rouge. Ces organismes apportent une aide humanitaire dans des situations extrêmement difficiles. Ils le font partout au Soudan où il y a des besoins, et nous avons été témoins de résultats. Environ 105 000 personnes auront de la nourriture pendant un an; 500 000 personnes déplacées et réfugiés ont reçu des fournitures médicales; et 60 000 personnes déplacées dans le pays ont accès à de l'eau potable et à des services sanitaires. Est-ce suffisant? Absolument pas, mais nous devons poursuivre nos efforts de concert avec le gouvernement soudanais.
    Nous avons également vu des résultats dans la reconstruction: d'importantes routes ont été déminées, les écoles de 20 comtés ont été rouvertes et 20 000 trousses d'apprentissage ont été remises à des élèves et des enseignants du niveau élémentaire, pour ne mentionner que quelques-uns de ces résultats.
    Le gouvernement du Canada, par l'entremise de l'ACDI, a appuyé l'accord de paix global visant à mettre fin à la guerre civile Nord-Sud en 2005. Cet accord vise à stabiliser toute la région et à apporter la paix au Soudan, mais nous comprenons que la situation sécuritaire déjà préoccupante au Darfour continue de se détériorer et qu'un règlement dans l'Est du Soudan est toujours hors de notre portée.

  (2140)  

    Il ne fait aucun doute que les Soudanais ont encore des défis importants à relever, mais ces défis renforcent notre conviction selon laquelle l'accord de paix nord-sud est la clé d'une paix durable au Soudan et, par voie de conséquence, chez ses voisins.
    Nous sommes très encouragés de voir qu'un gouvernement plus stable est maintenant en place dans le sud du Soudan et que celui-ci aide à mettre fin au conflit qui perdure depuis des décennies dans le nord de l'Ouganda.
    En conclusion, le défi qui consiste à reconstruire le Soudan, y compris le Darfour, est colossal, mais il ne fait aucun doute que l'on peut le relever et qu'en fait il faut le relever. Lorsque la crise qui sévit au Darfour va s'estomper, les réfugiés et les personnes déplacées pourront rentrer chez eux, mais ils auront besoin de l'aide internationale pour reconstruire leurs fragiles communautés. Dans le reste du Soudan, il y aura un travail important à faire dans divers secteurs, notamment la promotion de la réforme du système de justice, la reconstruction du système de sécurité, la réduction du trafic des armes, et le renforcement des institutions gouvernementales et de la vie communautaire. Il ne fait aucun doute que les Soudanais, meurtris par des années de guerre, auront besoin de notre aide pour réaliser une paix durable et rebâtir leur pays.
    Notre gouvernement est déterminé à travailler de concert avec ses partenaires canadiens et internationaux afin d'aider les Soudanais. Nous le faisons en appuyant les valeurs fondamentales du Canada, à savoir la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit.
    Comme le premier ministre l'a dit très clairement lorsqu'il a pris la parole à la conférence sur la francophonie, à Bucarest, le Canada est prêt à assumer son rôle.

  (2145)  

    Monsieur le président, le député est-il conscient que ces gens souvent très puissants, dont bon nombre n'ont rien fait pour le Rwanda, se rendent maintenant compte qu'ils ont eu tort et regrettent beaucoup leur manque de courage? Je veux aussi lui demander s'il considère qu'on parle d'un génocide. Cela peut déjà être qualifié de génocide. D'où tire-t-il ses informations? Pourquoi minimise-t-on ce fait, ce soir?
    Monsieur le président, la députée est certainement la seule à présumer que j'essaie de banaliser la situation humanitaire catastrophique dans laquelle se trouve l'ensemble du Soudan. Je proteste.
    J'ai parlé très sincèrement et très sérieusement de la gravité de la situation, et j'ai rapporté ce que le gouvernement a fait et ce qu'il va faire. Je veux aussi revenir sur certaines observations qui ont été formulées ici, ce soir, à propos des travaux de développement et de reconstruction au Darfour.
    Si nous sommes si hésitants, c'est que les conditions là-bas sont extrêmement dangereuses. Le gouvernement du Soudan n'est pas chaud à l'idée de nous accueillir, parce qu'il considère que notre intervention serait de l'ingérence. En fait, nous voulons aider. Mais de nous faire dire que notre gouvernement essaie de banaliser une telle situation, c'est inacceptable.
    Monsieur le président, je veux revenir à certaines des idées qui ont été exprimées et aux commentaires que j'ai faits plutôt. Si l'Union africaine est vraiment dans une situation telle qu'elle devra se résoudre à dépendre du gouvernement soudanais, cela ne veut-il pas dire qu'il est temps d'accroître l'aide que nous offrons? Nous en avons déjà offert, je le reconnais. Le moment n'est-il pas venu, cependant, de nous pencher sur la façon dont nous répartissons nos propres ressources?
    Rappelons-nous, car c'est important, qu'on a offert au Canada de revenir au Congo et d'intervenir là, mais nous avons refusé. Ce n'est pas le gouvernement actuel qui a refusé l'offre, mais peu importe. Pourquoi? Pour nous engager en Afghanistan.
    Il est difficile de tenir un tel débat sans se demander comment nous répartissons nos ressources, en tant que pays et à l'échelle de la planète. Nous avons appris cet été que nous avons 1 500 soldats. Il a fallu fouiller dans les dossiers du ministre pour l'apprendre, mais nous l'avons appris. Nous le savons et d'autres l'ont mentionné. Il faut vraiment que nous regardions ce que nous faisons. C'est bien beau d'avoir une liste de choses à faire, mais encore faut-il que nous ayons les moyens de les faire. Nous pourrions envoyer des troupes dans d'autres régions d'Afrique où se trouvent des forces de maintien de la paix pour permettre à l'Union africaine de libérer certaines de ses ressources. Personne n'a soulevé cette possibilité. Nous devons envisager ce genre de choses.
    Le ministre dit qu'ils travaillent dur et sans relâche. Je suis sûr qu'il travaille sur cette question tous les matins. Cependant, je ne vois pas les fruits de son travail. Nous devons en voir plus.
    Je me demande si le député pourrait nous dire deux mots à propos de ces idées.

  (2150)  

    Monsieur le président, je conviens avec le député que nous devons aider, mais nous n’avons pas à nous précipiter aveuglément, juste pour pouvoir dire que nous aidons.
     Je trouve qu’il y a de sérieuses contradictions dans certains des propos de nos collègues du NPD. D’après eux, nous devrions retirer nos troupes de l’Afghanistan, dont le gouvernement nous a demandé de l’aide pour appuyer ses citoyens et rétablir la paix. Le NPD tend ensuite l’autre joue en disant que nous devrions envoyer des troupes au Darfour. Je ne comprends pas ce raisonnement. Comme notre premier ministre l’a dit, ce n’est pas le moment d’abandonner l’Afghanistan.
     Nous devons reconnaître l’étendue du désastre humanitaire au Darfour, mais nous ne pouvons pas y envoyer des troupes parce que ce serait considéré comme une ingérence flagrante. Nous ferions plus de tort que de bien.
     Nous serions enchantés de voir les ONG fournir de l’aide, mais je ne voudrais pas être dans la peau de celui qui demanderait aux travailleurs humanitaires de mettre leur vie en danger pour distribuer de l’aide.
    Monsieur le président, je voudrais poser quelques questions sur ce point précis, c’est-à-dire sur le fait d’aller là sans y être invités. J’appuie les Nations Unies. Le monde s’est prononcé dans le cadre d’une résolution de l’ONU. Nous protégeons notre société en cas de conflits domestiques. Il est temps que le monde prenne position en application du principe de la responsabilité de protéger. Même si le président du Soudan estime que l’ONU n’est pas la bienvenue, il est temps d’aller là.
     Comment le secrétaire parlementaire peut-il concilier l’impératif de protéger les gens comme nous le ferions dans notre propre pays avec son affirmation selon laquelle nous devrions attendre d’être invités? C’est une position bien difficile à défendre étant donné les impératifs de la situation.
    Monsieur le président, je serais bien d’accord si les Nations Unies considéraient qu’il est temps d’aller là. Nous pourrions bien appuyer une décision de ce genre. Le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense ont très clairement indiqué que nous n’avons pas assez de troupes parce que nos soldats sont engagés ailleurs pour le moment. Nous essayons d’aider nos soldats à remplir la mission dont ils sont actuellement chargés. Leur enlever des effectifs dans l’immédiat serait injuste pour le peuple afghan.
     Nous appuyons la résolution des Nations Unies qui devrait certainement être mise en œuvre. Ce n’est cependant pas un endroit où le Canada peut, comme le proposent certains députés de l’opposition, intervenir unilatéralement pour imposer sa forme de démocratie.
    Monsieur le président, je trouve qu'il est absolument ahurissant d'entendre les députés du parti ministériel répéter sans cesse que tous les députés, sans exception, appuient une intervention canadienne au Soudan, peu importe les conséquences.
    Comment le secrétaire parlementaire peut-il affirmer à la Chambre, où la vérité est censée être de mise, que des députés néo-démocrates ont dit que le Canada devrait envisager d'envahir le Soudan en tant que puissance étrangère, quand il sait que c'est faux?

  (2155)  

    Monsieur le président, je demande à la députée de Halifax de ne pas me faire dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai jamais laissé entendre que des députés du NPD ont dit cela. J'ai remis en question les motivations des néo-démocrates, qui nous demandent, d'une part, d'abandonner notre mission en Afghanistan et, d'autre part, de plonger nos troupes dans un autre conflit.
    Si je ne m'abuse, j'ai entendu le même commentaire de la part des libéraux. Je crois que bon nombre de mes collègues ont entendu la même chose et cela nous a tous choqués. Ce commentaire a suscité des réactions passionnées, notamment de la part du secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, qui s'est insurgé contre une telle suggestion.
    Monsieur le président, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Ajax—Pickering.
    Je suis ravie d'avoir l'occasion d'intervenir à la Chambre ce soir, mais je regrette que ce débat soit nécessaire. Nous savons tous que pendant l'été il y a eu une recrudescence du pillage et des atrocités au Darfour. On estime que 400 000 personnes sont mortes et que trois millions et demi d'autres sont dans une situation désespérée.
    Je veux aborder la question sous un angle légèrement différent. Hier, j'ai assisté à un événement où on a prié à la mémoire des six millions de personnes mortes pendant l'holocauste orchestré par l'Allemagne nazie. On a également raconté l'histoire de 93 femmes qui, au cours de cette période, devaient servir les militaires allemands mais qui se sont empoisonnées et sont mortes.
    J'ai été frappée par la conspiration du silence et par la complicité qui a existé à l'époque. Or, le fait que nous sommes aujourd'hui témoins d'atrocités qui constituent une violation tellement évidente des droits de la personne montre qu'il y a encore une conspiration du silence et une complicité face à la situation.
    Nous avons beaucoup entendu parler du sort des femmes au Darfour: les viols, l'esclavage sexuel, la torture, les enlèvements, la destruction des villages et le nombre disproportionné de femmes dans les camps de réfugiés. Nous avons entendu parler de leurs difficultés, de la stigmatisation sociale, de la destruction de l'infrastructure sociale, de l'incapacité d'obtenir de l'aide et de la peur de la dénonciation. Nous savons qu'il y a un génocide en cours, que la population est affamée et que ses besoins élémentaires ne sont pas comblés.
    Nos vis-à-vis nous disent ce qui se fait. Je ne nie pas que certaines choses soient faites, mais cela ne suffit pas. Notre collègue néo-démocrate l'a dit, le génocide au Darfour doit être arrêté avant qu'il ne déstabilise le reste de l'Afrique. Le mal qui sévit au Darfour s'est maintenant répandu au Tchad et se dirige vers la République centrafricaine. Travaillons-nous de concert avec la France? Envisageons-nous d'envoyer au Darfour des soldats dans le cadre d'une mission de maintien de la paix des Nations Unies ou est-ce que l'on nous dit que nous n'avons pas les ressources?
    Nous sommes sur le point de nommer un nouveau secrétaire général des Nations Unies. Je veux un secrétaire général dont le premier objectif sera de mettre fin au génocide au Darfour, ce génocide qui se produit en Afrique.
    Nous avons beaucoup entendu parler de la responsabilité qui nous incombe d'empêcher les génocides, le nettoyage ethnique et les crimes contre l'humanité. Les principes font pratiquement l'unanimité, mais la détérioration de la situation, au moment même où je vous parle, démontre le fossé qui existe entre les déclarations de principes et la volonté politique d'agir.
    Nous avons beaucoup entendu parler de la situation en Afghanistan, mais dans la circonscription de Winnipeg-Centre-Sud, j'entends beaucoup plus parler de l'importance d'une intervention canadienne au Darfour. J'entends beaucoup plus parler du Darfour que de l'Afghanistan. Il est important que nous prenions des mesures concertées et structurées. Le langage diplomatique ne suffit pas. Nous devons adopter une position beaucoup plus ferme de concert avec les Nations Unies et d'autres pays.

  (2200)  

    Monsieur le président, bien des choses ont été dites ce soir dans ce débat, mais les propos du député d'Esquimalt—Juan de Fuca défient toute logique. Le député a demandé ce soir qu'on procède à l'invasion d'un pays membres des Nations Unies. C'est écrit dans les bleus. Le député a déclaré: « Si le député veut qualifier cela d'invasion, alors très bien, ce serait une invasion. »
    C'est ce qu'il a dit.
    Je demanderais à la députée pourquoi son collègue d'Esquimalt—Juan de Fuca n'a jamais dit un mot quand il était secrétaire parlementaire dans l'ancien gouvernement? Il était de marbre. Qu'en était-il de ses émotions à cette époque? Pourquoi dénature-t-il le débat en disant que personne ne s'intéresse au Darfour alors que nous avons exposé logiquement les plans du gouvernement que nous ont décrits le ministre des Affaires étrangères et le secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale?
    Je me souviens d'avoir vu le député d'Esquimalt—Juan de Fuca complètement éberlué à la Chambre. Il ne savait que dire. Le Darfour n'existait pas pour lui à ce moment. Aujourd'hui, il demande une invasion. Quelle hypocrisie. La députée pourrait-elle nous dire ce qu'elle en pense?
    Monsieur le président, le député d'en face ne doit pas être très attentif.
    Mon collègue d'Esquimalt—Juan de Fuca milite ardemment en faveur de la résolution du conflit au Darfour. Son éloquence a largement prédominé. Il a influé sur les politiques gouvernementales avant même que des résolutions de l'ONU ne nous mandatent de remédier à la situation. Le gouvernement du Canada a répondu à l'Union africaine avant même que l'ONU ne nous demande de le faire.
    Mon collègue a toujours été à l'avant-garde lorsqu'il s'agit de défendre les intérêts du peuple du Darfour. Cela m'offusque qu'on dise le contraire.

[Français]

    L'honorable député de Gatineau a la parole pour une courte question.
    Monsieur le président, la situation au Darfour est très critique, pour ne pas dire « génocidaire ».
    Selon ma collègue, de quelle façon devrait agir le Canada et les pays qui veulent vraiment résoudre la situation au Darfour? Que doit-on faire pour en arriver à ce que le gouvernement de Khartoum voie la réalité et devienne un acteur positif pour résoudre le problème au Soudan?

  (2205)  

[Traduction]

    Monsieur le président, beaucoup ont parlé ce soir de ce que nous pouvons faire. J'ai affirmé très clairement dans mes brèves remarques que nous devrions défendre activement le déploiement d'une force de l'ONU dans des pays voisins comme le Tchad et la République centrafricaine. Nous devrions au moins faire ce premier pas si nous ne pouvons pas intervenir directement au Soudan.
    Par ailleurs, si nous voulons assumer notre responsabilité de protéger, nous devrons agir de façon dynamique en prenant des mesures diplomatiques et en déployant nos propres ressources et nos propres soldats.
    Monsieur le président, je tiens à mentionner un excellent document d'information qu'un certain nombre d'ONG respectées ont probablement partagé avec tous les parlementaires. Ce document recommande précisément au Canada de s'engager à appuyer le déploiement d'une mission de maintien de la paix des Nations Unies au Darfour, en la dotant de ressources suffisantes et d'un mandat de grande portée pour la protection des civils.
    La députée pourrait-elle parler de cette recommandation très précise? Ne pense-t-elle pas que ce qu'on y demande, c'est que le Canada s'engage immédiatement à participer à cette force de maintien de la paix de l'ONU, pas qu'il envahisse un pays étranger, ni qu'il fasse abstraction d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, mais plutôt qu'il s'engage en montrant clairement qu'il est déterminé à participer à une mission de l'ONU, ce qui pourrait être une façon d'exercer sur le gouvernement soudanais une pression qui se fait désespérément attendre?
    Monsieur le président, je suis parfaitement d'accord avec la députée. Ce qui compte, c'est la volonté de nous engager à intervenir.
    Monsieur le président, après ce qui s'est passé en 1994 au Rwanda, l'Occident a tenté de justifier son échec par son ignorance de ce qui se passait, par la surprise que lui avait causé le génocide du Rwanda, ce qui l'excusait de son inaction.
    Nous pouvons encore débattre de ce que l'Occident aurait dû savoir ou savait effectivement, mais il n'en reste pas moins que la situation du Soudan est très différente aujourd'hui. Nous savons qu'une tragédie humaine se déroule au Soudan.
    Même si les faits ont été exposés à de nombreuses reprises, il vaut la peine de les énumérer à nouveau dans le cadre du présent débat. Nous savons que plus de 200 000 personnes sont mortes. Nous savons que, selon certaines estimations, le chiffre est plutôt proche des 400 000. Nous savons également que 2,5 millions de personnes sont déplacées à l'intérieur du pays et vivent dans des camps officiels ou dans des zones de squatteurs. Des milliers de femmes ont été enlevées et violées systématiquement. Des milliers d'enfants ont été obligés de participer au conflit. Onze travailleurs humanitaires, tous Soudanais, ont été tués au cours des trois derniers mois seulement, et aucun de ceux qui ont perpétré des crimes contre l'humanité n'a été traduit devant la justice.
    Le monde, semble-t-il, a oublié l'Afrique. Puisqu'il n'y a là aucun intérêt à défendre, peut-on soutenir, sinon l'intérêt de l'humanité, la région subsaharienne dans son ensemble a été largement ignorée et n'a pas bénéficié du soutien des pays occidentaux comme elle le mérite et comme elle en a tant besoin.
    Le Canada ne peut rester à l'écart, les bras croisés, devant l'atrocité, tout particulièrement alors que nous sommes bien au fait de l'importance des événements au Soudan et de l'ampleur de la tragédie humaine qui s'y déroule. Le Canada a un rôle à jouer.
    Le Canada doit être fier du rôle qu'il a joué jusqu'à maintenant. De fait, le gouvernement libéral précédent a réservé 366 millions de dollars pour le Soudan. Nous sommes à l'heure actuelle au troisième rang des pays du monde pour l'aide au développement. Le gouvernement actuel a ajouté plus de 40 millions de dollars à cette aide.
    Ce qu'il faut dire, c'est que le monde manque de volonté politique et a besoin de leadership. Le monde a besoin que le Canada sorte du rang, prenne des mesures décisives et dise que ce qui se passe au Soudan est inacceptable. Nous devons dire que nous n'accepterons tout simplement pas les belles paroles, que nous refusons de nous cantonner dans les beaux discours alors que des milliers de personnes vivent des situations incroyables, meurent et sont violées. Nous devons agir.
    À cet égard, je dirais qu'il y a quatre choses à faire, dont trois à court terme et une à plus long terme. Premièrement, le Canada doit être au premier rang des efforts diplomatiques visant une intervention sur le terrain, au Darfour, des forces de maintien de la paix de l'ONU. Il est clair que, compte tenu de la situation actuelle là-bas, l'Union africaine n'est tout simplement pas à la hauteur de la tâche de protéger la population au Soudan et qu'on a cruellement besoin des forces de l'ONU.
    Deuxièmement, nous savons également que l'Union africaine manque de ressources. Elle manque d'argent et de temps et n'a pas la capacité de demeurer sur place. Nous devons, particulièrement à court terme, aider les forces de l'Union africaine en leur envoyant des équipes tactiques spéciales et en leur fournissant les ressources dont elles ont besoin pour réussir leur mission au Soudan.
    Troisièmement, je suis d'avis que nous devons commencer à préparer nos forces aujourd'hui pour une mission au Soudan, puisque cette mission devra avoir lieu. Par conséquent, nous devons prévoir les ressources et les troupes nécessaires pour que la mission soit possible et nous devons commencer l'entraînement de ces troupes dès aujourd'hui, et non le reporter à plus tard.
    Le quatrième point s'inscrit dans le prolongement du troisième, à plus long terme, mais pas trop long, je l'espère. Il faut entrer au Soudan. Il faut qu'il y ait des forces de maintien de la paix de l'ONU sur le terrain, et le Canada devrait jouer un rôle de premier plan à cette fin.
    Même si le gouvernement du Soudan refuse qu'une force de maintien de la paix intervienne, nous avons l'obligation morale d'entrer dans ce pays et de protéger les personnes qui s'y trouvent. La Charte des Nations Unies comporte deux articles qui sont souvent contradictoires; le premier fait état de la nécessité impérieuse de protéger le droit individuel à l'autodétermination, tandis que l'autre dit qu'il ne faut pas se mêler des affaires des autres États. À mon avis, le premier l'emporte sur le second. Nous avons l'autorité morale, et même l'autorité juridique.
    Je signale que, en vertu de la résolution 1706 du Conseil de sécurité et de la doctrine Axworthy de la « responsabilité de protéger », qui a été adoptée à l'ONU l'an dernier, nous pouvons intervenir là-bas.
    Il nous faut cependant recentrer nos efforts. Il faut que notre politique étrangère soit axée sur le maintien de la paix, sur la protection des populations et sur le rôle traditionnel que le Canada a si fièrement joué. Le moment est venu d'agir, et nous avons l'obligation morale de le faire.

  (2210)  

    Monsieur le président, j'ai écouté avec intérêt les observations de mon collègue. Nous entendons constamment parler de maintien de la paix dans un environnement où il n'y a aucune paix à maintenir.
    Que pense le député des actions exigées des quelques membres des Forces canadiennes qui pourraient être envoyés là-bas? Selon lui, comment pourraient-ils intervenir et à quel niveau de force devraient-ils recourir?
    Monsieur le président, j'estime que nous devons apporter la paix au Soudan. Nous devons protéger ses citoyens. Nous avons l'obligation morale d'intervenir lorsqu'un génocide est commis. Le fait est qu'une horrible tragédie est en train de se produire là-bas, et j'estime que le Canada a la responsabilité d'intervenir et de prévenir ce génocide.
    Nous sommes intervenus dans bien des endroits. Nous l'avons fait avec beaucoup d'audace et de fierté et, souvent, nous avions directement intérêt à le faire. Bien qu'il puisse être vrai que nous n'avons pas d'intérêt direct au Soudan, le drame humain qui s'y déroule devrait inciter chacun de nous à insister pour que nous intervenions. Nous devons protéger ces citoyens, ces femmes, qui sont victimes d'une immense tragédie.

[Français]

    Monsieur le président, dans la situation au Darfour, puisque c'est le sujet du débat de ce soir, on se retrouve devant un marasme épouvantable sur le plan humanitaire. Malheureusement, il n'y a pas qu'au Darfour où cela se passe, mais étant donné que c'est le sujet débattu présentement, revenons à la charge une fois de plus.
    Je demanderais ceci à mon collègue. Cette crise existe depuis les années 1980. Cela fait déjà 20 ans que la situation est catastrophique. Depuis 2003, elle nous est apparue de façon très sévère ce qui a fait en sorte qu'on a forcé la main à un traité de paix en mai 2006. Toutefois, encore là, les intervenants internationaux reconnaissent que c'est une chose ratée dans la mesure où il y a encore trop de gens qui meurent sous le feu d'individus qui gèrent un gouvernement qui ne respecte pas les droits humains.
    Selon lui, quelle est la solution à envisager pour amener le gouvernement de Khartoum à participer de façon authentique à une solution pour résoudre la question?

[Traduction]

    Monsieur le président, nous savons que l'accord de paix actuel ne fonctionne pas et qu'il a échoué à tous points de vue. En vérité, l'Union africaine, qui est là pour appliquer l'accord, manque de ressources et ne semble pas avoir la volonté ni la capacité de stopper le génocide qui est en train de se produire.
    Je pense que la seule solution est l'envoi d'une force de maintien de la paix des Nations Unies sur le terrain, au Darfour, pour rétablir la paix et veiller à la protection des droits de la personne, de la vie humaine et de la dignité humaine dans la région. C'est la seule option.
    Si on examine les autres options, on se rend bien compte que le gouvernement du Soudan n'est pas disposé à agir lui-même. En fait, il laisse le génocide se produire. C'est de plus en plus évident. Je crois qu'il est à peu près impossible de penser que l'Union africaine va faire quoi que ce soit d'efficace pour arrêter cela.
    Ce débat mène à une conclusion. Si cette conclusion est qu'une force onusienne de maintien de la paix est nécessaire, alors le Canada doit montrer qu'il est prêt à agir, qu'il est prêt à se rendre dans la région et faire comprendre aux autres qu'il n'endosse ni ne tolère la terrible tragédie qui s'y déroule.

  (2215)  

    Je suis désolé, mais je dois dire au député d'Ottawa-Centre qu'il reste moins d'une minute pour la question et la réponse.
    Monsieur le président, il faut six mois pour réunir une force d'intervention respectable. Le député croit-il que, si nous faisons quelque chose, nous devons le faire maintenant? Il faudrait six mois pour réunir les troupes, et il faut se mettre à pied d'oeuvre maintenant.
    Monsieur le président, je suis de toute évidence d'accord avec le député. J'ai notamment fait valoir qu'il fallait préparer nos troupes dès maintenant. Il nous faut constituer notre contingent et le préparer à se rendre là-bas. Pendant que nous explorons les voies diplomatiques, nous devons aussi nous assurer que nos militaires se préparent en vue de la mission.
    Monsieur le président, je vais partager le temps qui m'est alloué avec le député de Kitchener—Conestoga.
    J'aimerais d'abord souligner que les événements des dernières semaines sont très troublants. Personne ne les banalise. La violence et l'insécurité continuent de tourmenter les habitants du Darfour, même ceux qui ont cherché refuge dans des camps de personnes déplacées et dans l'est du Tchad. Cette violence incessante est inacceptable.
    De plus grands progrès doivent être accomplis concernant l'accord de paix sur le Darfour, y compris son application par les parties et la participation des non signataires. Les parties ayant signé l'accord et les non signataires devraient s'engager dans un processus coordonné à cette fin. Le Canada est prêt à faire sa part. En fait, le Canada a déjà beaucoup fait.
    Le Canada a joué un rôle diplomatique clé, travaillant en étroite collaboration avec l'Union africaine et des partenaires afin de conclure un accord durant les derniers jours des négociations. Cela a mené à la signature de l'accord de paix sur le Darfour. Nous avons fourni un soutien diplomatique et financier ainsi que des experts à l'Union africaine tout au long du processus de paix.
    L'accord de paix sur le Darfour qui a découlé de ces négociations ainsi qu'un passage rapide à une mission de l'ONU demeurent le meilleur espoir pour la paix au Darfour. C'est une tragédie pour les habitants du Darfour que certains des mouvements qui prétendent les représenter persistent à laisser cet espoir s'échapper.
    Durant cette période de transition, l'appui du Canada à la mission de l'Union africaine au Soudan a été indéfectible. Nous nous réjouissons à l'idée de continuer de travailler de concert avec l'Union africaine afin de garantir l'utilisation efficace des ressources disponibles et nous accueillons avec plaisir les plans à court et à long terme de l'ONU en vue de renforcer cette mission en prévision de la transition à une force de l'ONU et de faciliter la mise en oeuvre de l'Accord de paix sur le Darfour.
    Le Canada trouve encourageant que les Nations Unies aient annoncé récemment, suivant l'adoption de la résolution 1706 du Conseil de sécurité, qu'elles s'emploieraient à soutenir la mise en valeur de la MUAS à titre de premier pas vers une transition complète. L'Union africaine est favorable à cette initiative.
    Nous continuons d'exhorter aussi vigoureusement que possible le gouvernement du Soudan à coopérer avec la communauté internationale afin de se rendre de toute urgence à la demande de l'Union africaine et de l'ONU pour que la population du Darfour cesse de souffrir.
    Le Canada continue d'encourager la communauté internationale à continuer d'appuyer la MUAS durant la période de transition. En attendant une mission de l'ONU, la mission de l'Union africaine offre à la population civile au Darfour une certaine protection, pas assez, mais c'est mieux que rien.
    La mission de l'Union africaine s'est révélée un exercice révolutionnaire pour cette organisation et elle a permis de réaliser certains progrès dans des circonstances difficiles. Près de 7 700 policiers militaires et civils sont actuellement déployés au Darfour.
    Le Canada a joué un rôle international de premier plan, fournissant un important soutien à la force de maintien de la paix de l'Union africaine au Darfour. Pour aider l'Union africaine, le Canada a fourni à la mission plus de 100 transports de troupes blindés et la formation des conducteurs de TTB. Il a établi une base d'étape intermédiaire et un centre de formation à Dakar, au Sénégal, pour assurer la formation des soldats de l'Union africaine au moyen d'un programme de formation des formateurs, et plus de 150 soldats de l'Union africaine du Sénégal, du Nigéria et du Rwanda ont été formés pour conduire ces véhicules.
    Nous avons consacré 1,4 million de dollars à l'achat de matériel personnel comme des casques, des vestes anti-balles et des cartes, 25 hélicoptères, deux aéronefs à voilure fixe et du combustible servant à leur fonctionnement, et au paiement des services de conseillers de la police civile et de la police militaire ainsi que de planificateurs experts pour aider l'Union africaine dans la planification et la logistique.
    Cela fait partie du programme de soutien global offert à l'Union africaine. Depuis 2004, le Canada a affecté 190 millions de dollars à la mission de l'Union africaine au Soudan, y compris les 20 millions de dollars récemment annoncés pour le renforcement de la capacité de la MUAS de mettre en oeuvre l'accord de paix au Darfour et d'établir les conditions nécessaires à la transition vers une mission des Nations Unies. Le Canada a réservé ces nouveaux fonds à l'amélioration de son aide dans les domaines du soutien des hélicoptères et des aéronefs à voilure fixe et du combustible pour aéronefs, y compris la fourniture d'un aéronef à voilure fixe supplémentaire.
    Nous examinons aussi d'autres options, dont le renouvellement de notre contribution à la construction de bases de la police civile dans toute la région.
    Pouvons-nous faire plus? Devrions-nous faire plus? Nous devrions déployer un maximum d'efforts pour cela et augmenter notre soutien, dans la mesure du possible.
    Le Canada a été à l'avant-garde de l'action au Darfour, qu'il s'agisse d'aide au développement ou d'aide militaire. Je suis fier de l'appel lancé par notre premier ministre en faveur d'une intervention au Sommet de la Francophonie, et je demande au gouvernement du Soudan d'agir de manière responsable et de travailler avec la communauté internationale pour ramener la paix dans cette région troublée.

  (2220)  

    Monsieur le président, je tiens à apporter des précisions sur les commentaires du député ministériel à l'égard des diverses contributions. C'est notre gouvernement qui a autorisé et envoyé les 100 transports de troupes blindés l'an dernier. J'occupais le poste de secrétaire parlementaire. Avec l'aide de notre chef actuel, qui était alors aux commandes du ministère de la Défense, nous avons exercé des pressions et obtenu l'envoi de ces 100 TTB au Darfour.
    De plus, c'est également nous qui avons autorisé la formation connexe. C'est nous qui avons obtenu les hélicoptères. Nous avons obtenu les aéronefs à voilure fixe. C'est notre gouvernement qui a fait tout cela.
    Le gouvernement en place n'a rien fait jusqu'à maintenant. Le premier ministren'a rien fait de plus que de prononcer de belles paroles qui ne sont pas d'une grande utilité pour sauver des vies.
    Le député a fait de bons commentaires sur l'Union africaine, mais il a oublié de souligner que l'Union africaine demande l'intervention immédiate des Nations Unies. Ces troupes espèrent et réclament la participation des forces onusiennes parce que malgré tous leurs efforts, ils n'arrivent pas à contrôler ce territoire grand comme la France puisqu'ils n'ont pas le personnel, l'équipement et le mandat dont ils auraient besoin pour le faire. Ils sont témoins de toutes ces atrocités dont les députés d'en face ont parlé toute la soirée.
    Le député est un militaire. J'aimerais lui poser une question directe. Est-il prêt à accepter cette notion? Si l'Union africaine demande la participation de la force onusienne de maintien de la paix, qui détient un mandat autorisé par le Conseil de sécurité vertu du chapitre 7, sera-t-il prêt à intervenir à la Chambre et à appuyer la demande de l'Union africaine, c'est-à-dire l'envoi d'une force de maintien de la paix malgré la volonté de Khartoum? Même le gouvernement des États-Unis, et en fait le droit international, reconnaissent qu'une résolution du Conseil de sécurité, comme la résolution 1706, autorise les troupes onusiennes à intervenir même lorsque les dirigeants du pays en cause s'y opposent.
    Le gouvernement de Khartoum a très clairement affirmé qu'il ne permettra pas l'intervention des troupes onusiennes. Pourquoi? Parce qu'il veut que le génocide se poursuive.
    Monsieur le président, je crois que mon collègue se trompe quant au libellé de la résolution 1706, mais permettez-moi de parler de la question militaire qu'il m'a posée, car elle était très directe.
    Est-ce que j'appuie l'intervention militaire de façon générale dans les régions où c'est nécessaire? Oui. Le Canada peut-il, de façon réaliste, jouer un rôle maintenant? Non. Il va falloir au moins six mois même si nous avions suffisamment de militaires à envoyer là-bas.
    On a parlé de 1 200 militaires et même de 1 500 militaires canadiens qui pourraient participer à une mission dans cette région. Je tiens à signaler que si ce chiffre est exact, et j'ignore s'il l'est, ces militaires ne pourraient servir que pour un déploiement à court terme.
    Si nous voulons faire avancer les choses dans des endroits comme le Soudan, comme nous le faisons en Afghanistan notamment, il faut alors un déploiement qui dure beaucoup plus longtemps que six mois. Si nous voulons que nos militaires participent à des opérations comme celle-là, il faut en prévoir trois pour chaque soldat sur place, quelle que soit la région. C'est ce que nous faisons en Afghanistan à l'heure actuelle. Notre personnel est mis trop largement à contribution, car les militaires sont censés rester six mois dans un théâtre d'opérations comme celui-là et ensuite deux ans et demi à l'extérieur de ce genre de théâtre d'opérations. Or, à l'heure actuelle, ils sont dans ces théâtres d'opération six mois sur dix-huit.
    Si nous tentions de faire cela avec une autre mission au Soudan avec un peu plus que quelques centaines de militaires, nous violerions tout à fait le pacte que nous avons conclu avec nos militaires. Nous nous sommes engagés à nous préoccuper de leur sort, à faire en sorte qu'ils puissent poursuivre le bon travail qu'ils réalisent en Afghanistan. Je crois que les femmes et les enfants en Afghanistan ont tout autant le droit de vivre que les femmes et les enfants du Soudan.
    Je ne banalise absolument pas la situation au Soudan. Il faut cependant être réalistes. Le Canada fait déjà beaucoup au Soudan. Pouvons-nous faire plus dans certains secteurs? La réponse est probablement oui, mais pas dans ceux dont parle mon collègue.

  (2225)  

    Monsieur le président, je veux vérifier une chose. J'ai entendu plus d'une fois des députés du gouvernement le dire. Apparemment, l'Union africaine est au bout du rouleau. Elle a besoin d'aide. Allons-nous lui apporter cette aide, oui ou non, et quand?
    Monsieur le président, nous faisons plus que cela. Nous maintenons notre engagement à faire tout ce que nous pouvons. Nous augmentons notre aide étrangère. Nous augmentons l'aide que nous apportons à l'Union africaine afin qu'elle puisse se rétablir.
    Je ne sais pas ce qui se produira demain, mais je peux dire que le gouvernement tient à faire tout ce qu'il peut pour participer à une solution durable au Soudan, que ce soit par des pressions diplomatiques, de l'aide étrangère ou une forme de collaboration avec nos partenaires des Nations Unies. Nous allons faire tout ce que nous pouvons avec les ressources disponibles, en n'oubliant pas que nous avons d'autres engagements ailleurs dans le monde, pour améliorer la situation...
    Nous reprenons le débat. Le député de Kitchener—Conestoga a la parole.
    Monsieur le président, mes collègues ont soulevé d'excellents points quant aux efforts que fait le Canada et aux mesures que nous prenons pour assurer la sécurité de la population du Darfour.
    Moi aussi je suis fier des efforts que fait le Canada. J'ai déjà eu l'occasion de participer à des missions humanitaires à court terme dans des pays en développement. Tous les jours je constate à quel point les Canadiens sont généreux. Si on le leur demandait, la plupart des Canadiens reconnaîtraient qu'ils ont fait leur le proverbe selon lequel on peut s'enrichir en se montrant généreux ou s'appauvrir en se montrant âpre au gain. La générosité est récompensée. Le Seigneur récompense tous ceux qui viennent en aide à ceux qui sont dans le besoin.
    La mission de l'Union africaine au Soudan a donné de bons résultats, compte tenu de circonstances exceptionnellement difficiles. Le partenariat international s'est montré et continue de se montrer généreux en appuyant la mission de paix de l'Union africaine au Darfour. Le Canada appuie la mission de l'Union africaine, mais de toute évidence la communauté internationale doit veiller à faire davantage. Il est urgent de déployer une force des Nations Unies au Darfour.
    Le Canada déploie tous les efforts diplomatiques possibles pour exhorter le gouvernement du Soudan à accepter de passer le relais à une mission onusienne au Darfour. Comme l'a mentionné le ministre des Affaires étrangères, le Canada était présent aux Nations Unies la semaine dernière et mon estimé collègue a profité de l'occasion pour faire part de nos vues aux ministres des Affaires étrangères du Soudan et de certaines nations africaines clés, quant à la nécessité de faire appel à une force onusienne dans la région perturbée du Soudan qu'est le Darfour.
    Le Canada est fier de son partenariat avec l'Union africaine. Nous l'aidons à développer sa capacité de mettre au point des mécanismes efficaces face aux menaces à la paix et à la sécurité en Afrique. Nous sommes heureux de reconnaître les efforts importants faits par l'Union africaine, mais nous nous réjouissons aussi de sa décision de demander l'intervention d'une mission onusienne.
     L'ONU est déjà présente dans le Sud du Soudan où elle assure le maintien de la paix, dans le cadre de la mise en oeuvre de l'accord de paix général qui a mis un terme à la guerre civile. Le Canada collabore étroitement avec ses partenaires internationaux afin de promouvoir la mise sur pied d'une mission onusienne en remplacement de celle de l'Union africaine. Il faudra cependant veiller à ce que l'Union africaine ressorte renforcée de son expérience au Darfour et qu'elle puisse mettre à profit les enseignements qu'elle aura tirés de cette opération dans ses futurs engagements au chapitre de l'instauration de la paix et de la sécurité en Afrique.
    Comme les gens vivent constamment dans la peur ou, pire encore, perdent la vie, il est difficile d'établir qui représente les intérêts des habitants du Darfour. Ces gens souffrent depuis beaucoup trop longtemps et perdent l'espoir. En envoyant une mission onusienne en remplacement de celle de l'Union africaine au Soudan, la communauté internationale va regrouper nos actions dans le pays en une seule opération.
    Il est possible de réaliser des économies importantes en déployant des forces au Darfour, ce qui assure à l'ONU une présence dans tout le Soudan. Ayant à leur disposition plus de ressources matérielles et humaines, les Nations Unies bénéficient d'un financement stable et de décennies d'expérience. Puisque l'ONU est déjà sur le terrain dans le Sud du Soudan et coordonne les interventions humanitaires au Darfour, la transition dans cette région permettra des économies d'échelle, un commandement unifié et une structure de contrôle.
    Nous gardons l'espoir qu'un accord sur la voie à suivre sera conclu dans un très proche avenir. L'engagement du nouveau gouvernement de promouvoir la liberté, la démocratie, la primauté du droit et le respect des droits de la personne demeure solide, tout comme notre engagement d'atteindre ces objectifs par l'entremise d'institutions multilatérales.
    En conclusion, le Canada envisage avec enthousiasme de continuer d'oeuvrer de concert avec l'Union africaine, les Nations Unies, le gouvernement du Soudan et la communauté internationale pour que prennent fin les souffrances de la population du Darfour. Le Canada s'emploiera à obtenir des bénédictions pour les autres, car nous avons été bénis à profusion. Cette responsabilité de pays béni de contribuer à l'établissement d'une paix durable dans l'ensemble du Soudan va demeurer une importante priorité de la politique étrangère du Canada.

  (2230)  

    Monsieur le président, bien que nous accueillons toujours les bénédictions, elles ne sauveront pas de vies dans le monde réel.
    Je me demande si le député envisagerait d'encourager son gouvernement à convoquer une réunion de pays de même esprit qui sont prêts à se retrousser les manches et à discuter des ressources qu'ils sont prêts à allouer à une force de maintien de la paix onusienne au Darfour. Est-il disposé à prendre la parole et à dire qu'il demandera à son gouvernement d'autoriser une telle réunion?
    Monsieur le président, ce serait prématuré de ma part de prendre un engagement à l'égard de quelque chose qui n'existe pas. Évidemment, on prévoit remplacer la mission de l'Union africaine par une mission onusienne. Quand cela sera fait, le député peut être sûr que tout le monde de ce côté-ci de la Chambre travaillera de concert pour trouver une solution crédible.
    Monsieur le président, j'aimerais établir quelque chose à l'intention du gouvernement. Il y a quelques jours, M. Harper a dit:
    Nous voulons réformer le système de justice, reconstruire le système de sécurité, réduire le trafic d'armes et renforcer les institutions gouvernementales et communautaires. Le gouvernement du Soudan devra céder la responsabilité de la mission de l'Union africaine aux Nations Unies, sous commandement africain, au début de l'année prochaine.
    Voilà qui est établi. Je tente de...
    À l'ordre, s'il vous plaît. Si le député d'Ottawa-Centre veut bien prêter attention, je le réprimanderai légèrement pour avoir prononcé le nom d'un autre député plutôt que son titre. Le député de Kitchener—Conestoga a la parole.
    Monsieur le président, je n'ai pas pu entendre la dernière partie de la question du député.
    Monsieur le président, je voudrais que la position du gouvernement soit bien claire. Selon le premier ministre, au début de l'année prochaine, la mission de l'Union africaine devrait être cédée aux Nations Unies, sous commandement africain. Le député est-il d'accord là-dessus, oui ou non?
    Monsieur le président, tous les discours prononcés par les députés de ce côté-ci de la Chambre, ce soir, allaient en ce sens. Ma réponse est oui.
    Monsieur le président, je veux féliciter tous mes collègues qui ont participé au débat, ce soir. C'est exactement le genre de discussion constructive et informée qui devait se tenir sur une question aussi importante. À certains moments, la discussion était émaillée de propos moralisateurs à savoir qu'il devrait y avoir des solutions simples, mais je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que notre pays tient vraiment à contribuer à régler cette situation.
    Notre gouvernement, comme les gouvernements précédents, est très bien intentionné. Les Canadiens eux-mêmes ont fait preuve d'une générosité extraordinaire, comme mon collègue l'a mentionné, et continueront à le faire. Les mesures d'aide humanitaire prises par beaucoup de pays, que l'on pense aux enfants de nos écoles qui recueillent de l'argent ou aux organisations internationales au sein desquelles les Canadiens jouent un rôle visible, sont la preuve d'une immense générosité.
    Nous allons continuer à nous battre, au propre et au figuré, pour mettre un terme à ces souffrances. Je sais que tous les députés, et certainement ceux qui siègent de ce côté-ci de la Chambre, poursuivront sur cette lancée.
    Je félicite mes collègues, les secrétaires parlementaires qui sont ici, et tous ceux qui ont participé pleinement au débat de ce soir.
    Mon grand espoir, un espoir qui a été exprimé par d'autres également, c'est que nos intentions ne se limitent pas à de belles paroles, mais que nous ayons lancé ce soir un cri de ralliement, et que d'autres mesures soient prises pour amorcer une transition et constituer une force qui pourra vraiment faire le nécessaire pour régler cette très grave crise humanitaire.

  (2235)  

    Monsieur le président, je partagerai mon temps de parole avec la députée de Parkdale—High Park.
    Au Darfour, 450 000 personnes ont été tuées, 3,4 millions d'autres ont été affectées par le conflit, 2 millions sont déplacées à l'intérieur du pays et 250 000 ont fui au Tchad. Au cours des deux derniers mois uniquement, 50 000 personnes ont été déplacées et plus de 200 femmes et jeunes filles ont été violées. Voilà les sombres statistiques qui donnent une idée des terribles souffrances des gens du Darfour.
    La situation au Soudan et au Darfour préoccupe sérieusement beaucoup de Canadiens. J'ai d'abord entendu parlé de la situation par l'entremise de la section du Pacifique du Congrès juif canadien qui a porté la situation à mon attention en 2004, lorsque je venais d'être élu député. Cette organisation fait un travail très important auprès des membres de la collectivité darfourienne de la région du Grand Vancouver parce qu'elle s'est engagée à ce qu'aucun génocide ne se reproduise plus jamais dans l'histoire de l'humanité.
    Peu de temps après, j'ai pris connaissance du travail du Canadian Students for Darfur, mis sur pied par des étudiants de l'Université Simon Fraser qui se trouve dans la circonscription que je représente. Ce groupe collabore avec des écoles secondaires, des collèges et des universités. Clement Apaak, ancien président de l'association étudiante de l'Université Simon Fraser, est une des figures clés du groupe Canadian Students for Darfour.
    J'ai eu l'honneur de participer à différentes activités organisées par ce groupe, notamment à une marche tenue à Vancouver l'été dernier. Je veux rendre hommage à Apaak et à ses collègues pour leur dévouement envers la cause de la population du Darfour et pour leurs efforts incessants pour sensibiliser les Canadiens à la situation au Darfour.
    Canadian Students for Darfur et Students Taking Action Now: Darfur (STAND) ont exhorté leurs membres à écrire à leur député. Je vous cite la lettre:
    Lorsque le gouvernement a prêté serment, le premier ministre a déclaré que le Canada ne pouvait plus être un gérant d'estrade. Le nombre de morts au Darfour augmente, des femmes y sont violées et le gouvernement du Soudan bombarde sa propre population civile, alors il est grand temps de quitter les estrades. En tant que puissance moyenne respectée et architecte de la Responsabilité de protéger, le Canada doit prendre la tête de la communauté internationale pour faire cesser le carnage au Darfour. Jeudi dernier, à Bucarest, le premier ministre a parlé directement de la situation au Darfour: « Nous devons tous agir pour sauver une population désespérée. Telle est la responsabilité de protéger. » Le débat qui vient permettra d'évaluer notre volonté de donner suite à cette phrase. Nous vous exhortons à soutenir le leadership canadien en faveur d'une mission des Nations Unies au Darfour selon les conditions de la résolution 1706. La participation du Canada à une telle mission ne peut pas être sous-évaluée. Nous ne pouvons pas échouer le premier test auquel est soumise notre fibre morale en ce début de XXIe siècle. Agissez sans délai.
     Je dis, moi aussi, que nous devons agir.
    J'ai reçu dernièrement, comme bien d'autres députés, une lettre de John Siebert, le directeur exécutif de Project Ploughshares. Nous savons que Project Ploughshares est un centre de paix oecuménique du Conseil canadien des Églises, basé à l'Université de Waterloo. M. Siebert cite également le premier ministre, dans son discours à Bucarest. Le premier ministre a déclaré que la communauté mondiale doit assumer la responsabilité d'apporter la paix dans la région, en dépit de l'opposition du gouvernement soudanais.
    Cependant, M. Siebert se demande également comment le rôle du Canada pourra être renforcé. Il signale que le premier ministre a laissé entendre que le rôle du Canada engloberait la réforme du système juridique, la reconstruction d'un système de sécurité, la réduction du trafic des armes et le renforcement des institutions du gouvernement et de la vie communautaire.
    M. Siebert fait valoir que ces objectifs sont très méritoires mais relèvent tous d'interventions postérieures au conflit et qu'aucun d'entre eux n'appuie une intervention efficace de l'ONU pour faire cesser les atrocités au Darfour. M. Siebert en arrive à la conclusion que le Canada doit appuyer la résolution 1706 du Conseil de sécurité et appuyer l'accord de paix sur le Darfour pour empêcher que les civils ne soient attaqués et menacés.
    Le Canada dispose de la capacité militaire nécessaire pour contribuer à faire cesser les attaques et les menaces contre les civils. Une demande d'accès à l'information en a fait la preuve et même le gouvernement le reconnaît. Nous disposons d'un excédent de 13 milliards de dollars et nous avons donc certainement la capacité financière de contribuer encore davantage.
    Nous devons accroître notre appui aux troupes de l'Union africaine, qui n'ont pas été payées et souffrent peut-être elles-mêmes de la faim, de manière à assurer le déploiement de 1 300 soldats additionnels de l'Union africaine dans la région du Darfour. Nous devons nous engager à fournir davantage d'aide humanitaire, d'autant plus que nous entendons dire que 355 000 personnes du Nord du Darfour sont privées d'aide alimentaire depuis deux mois.
    Le gouvernement du Soudan doit savoir que le Canada est disposé à participer à une force de l'ONU au Darfour et nous devons également continuer à profiter de toutes les occasions diplomatiques pour résoudre cette crise.

  (2240)  

    Monsieur le président, nous avons beaucoup parlé ce soir de la responsabilité de protéger, qui doit évidemment s'accompagner de la capacité de protéger. Nous avons un partenaire éventuel dont personne n'a encore parlé. J'aimerais savoir ce que pense le député du rôle que pourraient jouer les États-Unis dans le cadre d'une mission des Nations Unies au Soudan, que ce soit sur le plan militaire, diplomatique ou autre.
    M. le président, ce qui m'intéresse, c'est le rôle du Canada. C'est, je crois, ce dont nous discutons ici ce soir.
    Je crois que le Canada a les capacités financières et militaires voulues pour participer à cette mission. Nous avons vu, à la suite de demandes d'accès à l'information, que le Canada a effectivement, et la ministre va dans le même sens, la capacité militaire d'envoyer 1 500 soldats au Soudan. Je crois que nous devons exprimer cet engagement très, très clairement.
    En outre, un excédent de 13 milliards de dollars a été annoncé par le gouvernement la semaine dernière. Cela signifie que même si nous avons déjà fait une contribution financière importante à l'action menée au Darfour, nous avons la capacité financière de faire plus que cela. Nous savons que c'est absolument nécessaire. Nous avons vu les difficultés auxquelles se heurtent actuellement les troupes de l'Union africaine au Darfour. Nous savons qu'elles ont besoin de notre aide. Elles n'ont pas été payées. Cela ne peut que nuire à leur capacité de s'acquitter de la difficile mission qu'on leur a confiée. Nous entendons dire qu'elles ne reçoivent pas les vivres dont elles ont besoin. Cela porte également atteinte à leur capacité d'exécuter ce travail important.
    Le Canada doit accroître son aide sous ces deux rapports, même si d'autres pays peuvent aussi agir. Peut-être qu'en prenant des engagements de cette nature, nous pourrons convaincre d'autres pays de se joindre à cette action importante et, aussi, d'appuyer l'Union africaine et les Nations Unies dans ce dossier.
    Monsieur le président, j'entends le député et mes électeurs dire que les Canadiens doivent en faire davantage pour le Darfour. J'entends ensuite le gouvernement affirmer que nous en faisons assez et que nous n'avons pas la capacité d'en faire plus.
    Le gouvernement actuel est-il déconnecté au point de ne pas voir la nécessité d'aider le Darfour?
    Monsieur le président, je ne pense pas que le gouvernement actuel soit déconnecté. Je ne dirais pas cela. Je n'approuve peut-être pas les positions des conservateurs, mais ils ont leurs raisons. Ils défendent leur point de vue ce soir et je me réjouis qu'ils l'aient fait.
    Nous pouvons faire plus comme pays. Les Canadiens veulent que nous fassions plus; c'est ce que j'ai remarqué. Lorsque j'ai marché sur le pont Burrard avec le groupe Canadian Students for Darfur en direction du Sunset Beach Park à Vancouver, nous n'étions pas beaucoup. Mais ce qui nous a tous impressionnés, c'est la réaction des conducteurs traversant le pont. Nous avons entendu de nombreux klaxons et expressions d'appui envers la cause que nous défendions ce jour-là. Nous militions pour une intervention solide du Canada pour remédier à la situation au Darfour. Les réactions sur le pont nous ont fait chaud au coeur et nous ont laissé deviner un vaste soutien de la part du public. Et cet appui augmente. Des événements semblables ont lieu régulièrement dans des villes des quatre coins du pays. À Vancouver, les Canadian Students for Darfur et d'autres groupes organisent souvent des activités. Ils organisent des rassemblements, des manifestations, des marches et des levées de fonds, mois après mois, semaine après semaine, pour favoriser de plus grands efforts canadiens pour aider le Darfour.
    C'est la volonté des Canadiens. Le gouvernement devrait écouter ce que les Canadiens disent sur le Darfour et sur le rôle du Canada. Les Canadiens veulent que nous jouions un rôle accru, un rôle diplomatique accru. Ils veulent que nous incitions davantage d'autres pays à intervenir pour remédier à la situation au Darfour et au Soudan.

  (2245)  

    Monsieur le président, c'est avec plaisir que je prends part à cet important débat sur la terrible tragédie du Darfour.
    Comme d'autres députés l'ont déjà dit, des milliers de gens de partout dans le monde, y compris un fort contingent de ma ville, Toronto, se sont assemblés, le 17 septembre dernier, pour affirmer la nécessité de protéger les victimes innocentes des conflits internationaux. Cela signifie que le Canada doit en faire beaucoup plus pour le Darfour.
    Il est difficile d'imaginer qu'une crise, dont nous avons tellement entendu parler, puisse s'aggraver encore. Comme il a été dit ce soir, depuis deux mois seulement, 50 000 personnes ont été déplacées. Cela s'ajoute aux nombreux milliers de filles et de femmes qui ont été violées, aux 450 000 personnes au moins qui ont été tuées et aux deux millions de personnes et plus qui ont été déplacées. Ces données donnent froid dans le dos. Nous nous sentons comme des somnambules parce que nous avons déjà entendu parler d'horreurs semblables survenues dans d'autres pays. Tous nos cris d'indignation à la Chambre et partout dans le monde sont insuffisants pour exprimer ce que nous ressentons.
    L'Union africaine a accepté de prolonger sa mission avec ses 7 000 soldats et elle a besoin d'argent. Étant donné que le Canada et d'autres pays ont encore sur la conscience le génocide du Rwanda, il est certain que les pays les plus riches du monde doivent se demander s'ils peuvent en faire davantage. Et la réponse à cette question est un oui retentissant. Non seulement nous pouvons faire davantage pour mettre fin à cette terrible tragédie, mais nous avons l'obligation de le faire.
    Le Canada doit convaincre le gouvernement du Soudan qu'à la fin de la mission de l'Union africaine, des forces de l'ONU devront prendre le relais. Le Canada doit s'engager à participer à la mission de l'ONU au Darfour. Le Canada a la capacité militaire et financière nécessaire. Nous le savons. Le Canada doit donner l'exemple. En s'engageant maintenant à participer à une force des Nations Unies, on encouragera d'autres pays à s'engager eux aussi sans tarder et on enverra au Soudan un signal clair que le monde est sérieux cette fois-ci dans sa volonté de mettre fin au massacre et de protéger la population vulnérable du Darfour.
    Seulement un groupe rebelle sur trois a signé l'accord de paix sur le Darfour. Nous devons aussi négocier pour que les groupes qui n'ont pas signé l'accord de paix le fassent.
    Le Canada ne peut pas se chercher des excuses. Nous devons faire absolument tout ce qui est possible pour mettre fin rapidement à un conflit qui a déjà duré beaucoup trop longtemps.
    Monsieur le président, je reprendrai les paroles de mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, qui a dit que le débat de ce soir est très sérieux.
    Un député libéral a dit que le gouvernement n'avait rien fait et qu'il ne ferait rien de plus. C'est absolument faux. Le ministre des Affaires étrangères a dit très clairement que le gouvernement et lui étaient déterminés à poursuivre leurs efforts pour mettre un terme à la terrible tragédie humaine qui se déroule au Darfour. Nous collaborons avec des organismes internationaux, y compris les Nations Unies.
    Tout le monde ne cesse d'évoquer la résolution 1706, mais on oublie commodément que cette résolution demande de collaborer avec le gouvernement du Soudan. À long terme, nous aurons une meilleure chance d'établir la paix si nous collaborons avec ce gouvernement.
    Je profite de l'occasion pour remercier ma collègue du NPD et tous les députés de leurs excellentes suggestions au sujet des mesures à prendre. Je peux assurer à la Chambre, comme le ministre des Affaires étrangères l'a dit, que nous continuerons d'être engagés dans ce dossier.

  (2250)  

    Monsieur le président, je ne sais pas s'il y avait vraiment une question. J'ai cru comprendre que le secrétaire parlementaire avait l'intention de prendre ce débat au sérieux. Il faut donc espérer que ce débat ouvrira la voie à des mesures concrètes et que le Canada se montrera à la hauteur de son obligation morale internationale. C'est pourquoi il ne doit pas seulement exprimer son indignation. Il doit aussi agir. L'action du Canada doit se concrétiser sur le plan diplomatique et sur le plan de la sécurité. Ainsi, il faut absolument que le Canada apporte son aide aux populations qui ont été dévastées par ce génocide qui se déroule au ralenti, comme d'autres l'ont si éloquemment faire observer ce soir.
    Monsieur le président, la députée est-elle d'avis que le génocide au Darfour satisfait aux critères exposés dans un document dont nous comptons parmi les coauteurs, intitulé La responsabilité de protéger? Est-elle d'accord avec moi pour dire que nous n'avons pas attendu d'invitation pour intervenir lorsqu'il s'agissait de l'Holocauste ou du Kosovo?
    Monsieur le président, oui les principes généraux peuvent s'appliquer dans cette situation. Nous avons cependant besoin de les étoffer, compte tenu des particularités de la situation.
    L'important se situe au-delà des mots et des définitions. L'important est la réalité de la tragédie dans laquelle vivent ces gens au Darfour.
    Il ne s'agit pas de souscrire à une définition ou à une autre, mais de savoir si des gouvernements comme le gouvernement du Canada ont le courage et la détermination d'agir. Cela montrera si nous avons assumé notre obligation à l'échelle internationale.
    Monsieur le président, j'aimerais que la députée néo-démocrate clarifie sa position.
    Samedi, j'ai parlé à une amie qui venait tout juste de rentrer au pays après avoir passé quatre ans au Soudan, où elle a travaillé avec un groupe appelé Samaritan's Purse. Cette dame a fait plusieurs allers et retours au fil des années et elle m'a raconté des épisodes incroyables dont elle a été témoin. Lorsque je lui ai dit que nous allions tenir ce débat ce soir, elle m'a dit que personne ne voudrait aller au Darfour dans le contexte actuel.
    Je tiens à remercier personnellement les femmes et les hommes qui ont sacrifié leurs vies personnelles pour aider leur prochain. Nous fournissons l'aide, les ressources financières et un soutien qui prend diverses formes, mais ce sont ces personnes qui sont sur place et nous les en remercions.
    Que pense la députée du fait que notre gouvernement appuie la résolution 1706 de l'ONU et fait l'impossible pour qu'elle soit appliquée? Est-elle d'avis que nous devrions continuer à appuyer cette résolution, ou accepterait-elle que l'on aille tout simplement de l'avant sans invitation...
    La députée de Parkdale—High Park a la parole.
    Monsieur le président, la sécurité est sans nul doute une des clés de la situation au Soudan. Nous disposons des ressources et de la capacité nécessaires pour envoyer des troupes de maintien de la paix au Darfour.
    Pour qu'il y ait un quelconque niveau de paix et une possibilité de venir en aide aux personnes qui en ont si désespérément besoin, il faut d'abord qu'il y ait une certaine sécurité.
    Il s'agit là d'une occasion pour le Canada. Nous avons les ressources. Nous voulons que les gens ne meurent pas inutilement au Darfour et nous voulons nous assurer que nous pouvons leur fournir une certaine sécurité grâce à des troupes de maintien de la paix.

[Français]

    Comme il est 22 h 55, conformément à l'ordre adopté le jeudi 28 septembre 2006, en application de l'article 53.1 du Règlement, le comité s'ajourne et je quitte le fauteuil.

    (Rapport est fait de l'initiative ministérielle no 10.)

  (2255)  

[Traduction]

    Conformément à l'ordre adopté le jeudi 28 septembre 2006, la Chambre s'ajourne à demain, à 14 heures, aux termes du paragraphe 24(1) du Règlement.
    (La séance est levée à 22 h 55.)