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CC2 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-2


NUMÉRO 003 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 31 octobre 2007

[Enregistrement électronique]

  (1550)  

[Traduction]

    Je déclare la séance de cet après-midi ouverte. Conformément à l'ordre de renvoi du 26 octobre, notre comité reprend son étude du projet de loi C-2.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux fonctionnaires du ministère de la Justice. Merci d'être des nôtres aujourd'hui pour traiter de certaines des questions avec lesquelles nous n'avons peut-être pas pu en finir hier, après l'exposé du ministre.
    Je voudrais seulement faire quelques observations sur ce que j'appelle des questions administratives sur lesquelles nous devrons ou devrions nous pencher après avoir entendu les fonctionnaires. J'accorderai donc tout au plus peut-être cinq minutes aux membres du comité pour régler ces questions après les témoignages.
    J'aimerais aussi vous faire remarquer que nous avions prévu une heure pour entendre les fonctionnaires du ministère. Si nous avions reçu des témoins après eux, nous leur aurions réservé la deuxième heure. En fait, personne ne pouvait témoigner aujourd'hui. Des témoins viendront demain matin. Les fonctionnaires sont disposés à rester si nous voulons profiter de cette occasion pour prolonger la séance et obtenir réponse aux questions que nous voulons leur poser, comme l'ont proposé M. Comartin et Mme Jennings.
    Nous tenons à vous remercier de votre temps. Je vous cède maintenant la parole.

[Français]

    Allons-nous continuer la réunion jusqu'à 17h 30?

[Traduction]

    Donnez-moi une minute, monsieur Ménard.

[Français]

    Dois-je comprendre, monsieur le président, que nous allons continuer la réunion jusqu'à 17 h 30? J'aimerais suggérer qu'on poursuive avec les fonctionnaires jusqu'à 17 h 15, puis, de 17 h 15 à 17 h 30, qu'on dispose de nos questions techniques. Peut-on s'entendre sur cette façon de procéder? Est-ce que ça convient aux collègues? Est-ce que ça irait à Mme Jennings?
    Madame Jennings, vous n'écoutiez pas. Nous avons une relation de couple, vous et moi.
    Je m'excuse publiquement d'avoir été prise par un autre sujet assez important. Mais le vôtre l'est aussi.
    Madame Jennings, regardez-moi bien dans les yeux, on va se parler.
    Je vous regarde bien dans les yeux.
    Voulez-vous qu'on continue jusqu'à 17 h 15 avec les fonctionnaires?

[Traduction]

    Il y a beaucoup d'amour dans la pièce aujourd'hui, et je m'en réjouis vraiment. Cela me fait chaud au coeur. C'est vraiment incroyable.
    Je crois que M. Ménard a fait une excellente recommandation, c'est-à-dire que nous poursuivions jusqu'à ce que nous ayons épuisé les questions ou jusqu'à 17 h 15, pour ensuite laisser partir les fonctionnaires. Nous aborderons les affaires courantes du comité au cours des cinq ou dix dernières minutes.
    Très bien. Merci.
    Madame Kane.
    Bonjour. Je m'appelle Catherine Kane et je suis avocate générale principale intérimaire à la Section de la politique en matière de droit pénal.
    J'aimerais vous présenter mes collègues et parler brièvement de leurs domaines de compétence relativement au projet de loi C-2 qui, comme vous le savez, est une compilation de projets de loi présentés au cours de la dernière session du Parlement. Mes collègues sont des experts en la matière.
    Nous n'avons pas préparé de déclaration préliminaire ni d'exposé. Le ministre a fourni l'aperçu hier. Nous sommes ici pour répondre à vos questions, si vous en avez. Je dirai aussi qu'au fur et à mesure que le comité avance dans ses travaux, des questions surgissent. Vous voudrez peut-être interroger les fonctionnaires à la fin de vos délibérations. Nous pourrions nous mettre à votre disposition lorsque les travaux du comité toucheront à leur fin.
    Je suis accompagnée de Greg Yost, avocat à la Section de la politique en matière de droit pénal et responsable des dispositions du projet de loi C-2 relatives à la conduite avec capacités affaiblies.
    Julie Besner est également avocate. Elle est responsable des dispositions relatives aux armes à feu et au régime de remise en liberté sous caution pour les personnes accusées d'infractions mettant en jeu des armes à feu, de même que des peines. Ces dispositions faisaient auparavant partie des projets de loi C-10 et C-35.
    Doug Hoover est responsable des réformes concernant les délinquants dangereux, qui figuraient auparavant dans le projet de loi C-27, en plus des nouvelles réformes contenues dans le projet de loi C-2.
    Enfin, ma collègue Carole Morency est avocate générale par intérim à la Section de la politique en matière de droit pénal et responsable des dispositions relatives à la protection de l'âge de consentement, qui figuraient auparavant dans le projet de loi C-22.
    Je peux certes jouer le rôle de maître de cérémonie, ou peu importe, pour diriger les questions. Je pourrais sans doute répondre à quelques-unes d'entre elles, mais vous avez les experts ici.
    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer par Mme Jennings.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup d'être des nôtres aujourd'hui.
    J'ai quelques questions concernant les dispositions du projet de loi C-2 qui portent sur les délinquants dangereux. Premièrement, y a-t-il des femmes qui ont été déclarées délinquants dangereux? Deuxièmement, combien de femmes, le cas échéant, ont fait l'objet d'une audition visant à déterminer si elles devaient être déclarées délinquants dangereux? Troisièmement, au cours des cinq dernières années, combien de femmes auraient pu être visées par une demande de renvoi pour évaluation, compte tenu de leurs condamnations? Enfin, a-t-on effectué une analyse comparative entre les sexes pour ces dispositions particulières du projet de loi présenté par le gouvernement? Par exemple, nous savons déjà qu'il existe un nombre disproportionné d'Autochtones aux prises avec notre système juridique et nos services correctionnels. Cela vaut aussi pour les femmes.
    J'aimerais savoir si vous pouvez nous fournir ces renseignements et, dans la négative, pourquoi?

  (1555)  

    Je peux confirmer qu'à ma connaissance, on a approuvé une demande de déclaration de délinquant dangereux qui concernait une femme. Je ne connais qu'un seul cas. Il y en a peut-être d'autres, mais je ne saurais le dire.
    En ce qui concerne les délinquants dangereux qui se trouvent actuellement dans le système, nous pouvons nous renseigner auprès des représentants du Service correctionnel et vous communiquer l'information, à moins que ces derniers comparaissent eux-mêmes devant le comité.
    Le ministère de la Justice n'a pas fait d'analyse comparative entre les sexes pour ce qui est des demandes d'audition en vertu de la partie XXIV. Je ne suis pas qualifié pour répondre quant au nombre de demandes qui auraient pu être faites au cours des cinq dernières années ni pour répondre aux autres questions. Tout ce que je peux confirmer, c'est que je connais un seul cas où une femme a été déclarée délinquant dangereux.
    Savez-vous combien de femmes au cours des cinq dernières années, compte tenu de leurs condamnations, auraient pu faire l'objet d'une demande de renvoi pour évaluation en vue de les déclarer délinquants dangereux? Pouvez-vous nous renseigner là-dessus?
    Ma réponse est la même: non, nous n'avons pas fait une telle analyse. Je n'écarte pas la possibilité qu'on en fasse une éventuellement car nous devrions à tout le moins effectuer le recoupement avec le nombre de femmes qui ont été reconnues coupables de délits sexuels sur une période donnée. Grâce au suivi des condamnations réalisé par Statistique Canada, on pourrait le faire. Mais nous ne l'avons pas fait. Nous pourrions aussi vérifier auprès de Sécurité publique Canada pour voir si ce genre d'analyse a été effectuée.
    Ce type d'examen nécessiterait un certain temps, car les analystes et les recherchistes devraient passer en revue et réunir une quantité prodigieuse de données.
    Y a-t-il une raison particulière pour laquelle le ministère de la Justice n'a pas effectué une telle étude?
    Tout ce que je peux dire, c'est qu'il ne s'agit pas d'un problème particulier. Le nombre de femmes ayant fait l'objet de demandes de déclaration de délinquants dangereux est très faible. Il n'y en a qu'une poignée. Je suis au courant d'un seul cas où la demande a été approuvée.
    S'il y avait réellement une crainte que les femmes soient traitées quelque peu différemment, alors je crois que nous pourrions examiner cette question, mais personne ne m'a fait part de cette suggestion. En tout cas, dans mon travail au cours des dernières années, rien ne laisse croire qu'il existe une différence en fonction du sexe dans la façon dont les poursuivants appliquent cette disposition.
    Merci.
    Pour ce qui est du nombre de personnes reconnues coupables d'infractions, au cours des cinq dernières années disons, et contre lesquelles la Couronne aurait pu déposer une demande de renvoi pour évaluation en vue d'une audition visant à les déclarer délinquants dangereux, savez-vous combien de délinquants auraient fait l'objet d'une telle demande durant la période en question? Combien de personnes ont en réalité fait l'objet d'une telle demande?
    J'ignore les chiffres. Encore une fois, nous pouvons nous renseigner. Mais, je n'ai pas cette information à portée de la main.
    Savez-vous si l'information existe sous une forme qui pourrait être présentée au comité? Selon moi, il va de soi que si ce genre de système existe, on devrait déterminer si la loi est appliquée dans tous les cas susceptibles de pouvoir faire l'objet d'une demande de renvoi pour évaluation. Si elle n'est pas appliquée dans un nombre important de cas, quelle en est la raison?
    Je peux certainement expliquer pourquoi nous ne le faisons pas et pourquoi cela risque de ne pas être applicable.
    En ce qui a trait au seuil pour faire une demande de renvoi pour évaluation, il ne s'agit pas vraiment d'un critère coulé dans le béton. Les juges doivent tenir compte de facteurs souples pour décider si une infraction répond aux critères de sévices graves à la personne. Le seuil de base — ou le point de départ — serait, au moins, une peine de dix ans. Il faudrait alors examiner tous les cas où une personne a été reconnue coupable de cette infraction préalable, puis étudier chaque décision du tribunal ayant infligé la peine afin de déterminer si, à son avis... Et il faudrait se mettre dans la peau du juge, chose presque impossible. Il faudrait aussi passer en revue les transcriptions des cinq dernières années, ce qui représente probablement plus d'une centaine de milliers de cas. Bref, la quantité de ressources exigées par un tel examen ne justifierait probablement pas cette démarche.
    Dans l'ensemble, comme l'a répété à maintes reprises la Cour suprême du Canada, je dirais que la demande de déclaration de délinquant dangereux ne doit être utilisée que dans la plus rare des occasions, notamment lorsque les délinquants ne présentent aucun espoir de réadaptation, en vue de protéger la société. C'est pourquoi le nombre réel de demandes sera, en soi, très restreint par rapport au nombre total de délinquants dans le système judiciaire. Dans la grande majorité des cas, le régime de détermination de la peine prévu par le Code criminel suffit pour gérer le risque posé par la plupart des délinquants. Les rares fois où ce n'est pas le cas, les auditions de déclaration de délinquant dangereux fournissent un autre moyen — à savoir, la peine d'une durée indéterminée — d'assurer la sécurité du public.
    Une fois de plus, je comprends la raison pour laquelle vous me posez la question, mais le type d'examen dont vous parlez serait probablement peu pratique et n'aiderait pas vraiment à déterminer si une politique appropriée est en place.

  (1600)  

    Merci, monsieur Hoover.
    Monsieur Ménard.

[Français]

    Je vais poursuivre dans la voie de Mme Jennings. J'avoue assez mal comprendre, et je pense, monsieur Hoover, que vous pouvez m'expliquer cela.
    On pouvait ne pas être d'accord avec l'augmentation des peines minimales proposée dans le projet de loi C-10, mais au moins c'était clair. C'était une question de philosophie judiciaire, et on peut être pour ou contre.
    J'ai du mal à comprendre et j'aimerais que vous m'expliquiez quelle est la difficulté pour le poursuivant, dont on comprend que c'est souvent la Couronne. Pourquoi les dispositions actuelles du Code criminel ne sont-elles pas suffisantes? Pourquoi le gouvernement ressent-il le besoin de nous proposer une liste? Vous parlez d'infractions primaires, mais je comprends qu'il y a une liste d'infractions secondaires.
    Qu'est-ce qui pose un problème, si je suis procureur de la Couronne et que je veux utiliser ces dispositions pour un délinquant dangereux? Vous avez répondu à Mme Jennings que les critères étaient trop stricts, mais soyez plus précis. N'ayez pas peur de faire référence à des réalités administratives, car c'est de cela que dépendra notre appui ou non aux dispositions venant de l'ancien projet de loi C-27. Qu'est-ce qui, dans l'administration actuelle, pose problème pour un poursuivant devant une cour de justice?

[Traduction]

    Encore une fois, quelques problèmes ont été recensés dans le cadre des consultations en cours avec les hauts fonctionnaires provinciaux et territoriaux qui représentent les procureurs généraux des provinces et des territoires.
    Tout d'abord, la déclaration de la Couronne règle le problème voulant qu'elle ne soit pas toujours en mesure de réfléchir à la question de savoir si un délinquant particulier mérite une demande de déclaration de délinquant dangereux. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une question de nécessité dans certaines compétences ou d'une question de manque de ressources dans d'autres. Cela a tendance à varier.
    Nous savons que, statistiquement parlant, des écarts semblent exister dans la fréquence à laquelle les provinces et les territoires recourent aux dispositions relatives aux délinquants dangereux. Cela étant, je crois que le principe sous-jacent ne consistait pas à obliger la Couronne à faire une demande de déclaration de délinquant dangereux dans une situation donnée, mais plutôt à s'assurer qu'elle réfléchisse à la question de savoir si cette personne mérite une demande en vertu de la partie XXIV et qu'elle indique clairement cette intention au tribunal.

[Français]

    Je voudrais comprendre correctement la première partie de votre réponse. Vous dites que la Couronne n'est pas en mesure d'avoir recours à cette désignation, mais à quoi est-ce dû? D'après ce que je comprends, on se trouve dans une situation de voir-dire. On parle d'un professionnel, en l'occurrence d'un psychiatre, du moins dans le cas du Québec. Pour quelle raison la Couronne n'est-elle pas en mesure d'avoir recours à cette désignation? Quelle est la difficulté?

[Traduction]

    Je ne crois pas qu'elle ne soit pas en mesure d'y avoir recours. La Couronne peut clairement faire la demande dès le départ, mais pour bien comprendre tout le contexte... je pense que les ressources du tribunal, de la Couronne, suffisent à peine dans de nombreuses administrations. Partout au Canada, il faut souvent faire au plus vite et j'imagine que le système est surchargé...

  (1605)  

[Français]

    De quelles ressources parle-t-on? De ressources en vue d'obtenir de l'expertise? Quel type de ressource fait défaut au poursuivant?

[Traduction]

    Cette étape précède l'évaluation. Avant l'évaluation, la Couronne doit présenter une demande au tribunal, en vertu de la partie XXIV, pour tenir une audition de déclaration de délinquant dangereux. Elle doit en premier lieu soumettre une demande au tribunal et soutenir que la personne a atteint le seuil de condamnation — c'est-à-dire qu'elle a commis des sévices graves à la personne ou l'une des trois infractions sexuelles désignées. Ensuite, la Couronne fait une demande d'évaluation psychiatrique.
    Pour ce faire, d'après moi, la Couronne doit décider qu'elle procédera ainsi au moment même de la détermination de la peine. Je crois que certains procureurs généraux provinciaux et le procureur général du Canada craignaient que la Couronne ne puisse, dans certains cas, se pencher adéquatement sur la question pour diverses raisons, j'imagine, plus particulièrement pour que la déclaration n'oblige pas la Couronne...
    Pourquoi?
    C'est pour veiller à ce que la Couronne ait au moins envisagé de faire une demande de déclaration en vertu de la partie XXIV et le dise publiquement chaque fois qu'il y a des antécédents de crimes violents ou d'infractions sexuelles. Cette mesure ne vise pas à obliger la Couronne ou le tribunal à demander une déclaration de délinquant dangereux, mais simplement à s'assurer que la Couronne a au moins songé à cette option dans les cas où il y a lieu de croire que le délinquant a des antécédents de crimes sexuels violents.

[Français]

    J'ai de la difficulté à comprendre. Supposons que je sois le poursuivant, donc le ministère public, que j'aie devant moi le Code criminel et qu'on me dise qu'il doit y avoir un risque de récidive. Trois critères sont précisés dans le Code criminel. Je sais qu'il y a des nuances à faire entre les provinces et les poursuivants, mais j'aimerais connaître la raison pour laquelle on ne se rend pas jusqu'à l'obtention du diagnostic, par exemple, ou qu'on ne dépose pas devant le juge. Est-ce parce que les procureurs ont trop de documents à remplir? Je saisis mal pourquoi on ne se rend pas à la deuxième étape.

[Traduction]

    À mon avis, la vraie question que la déclaration de la Couronne tente de régler, c'est de veiller à ce que le procureur de la Couronne ait examiné à fond la première étape de l'enquête. Je crois qu'on s'inquiétait du fait que cet examen n'est pas toujours effectué. Là encore, les raisons sont variées. Ce n'est peut-être pas toujours la même.
    Par exemple, le système national de repérage, qui est relativement récent au Canada, tente de régler cette question de manière administrative en faisant en sorte que pour les délinquants qui se déplacent d'un endroit à un autre — autrement dit, ils peuvent avoir été condamnés en Ontario la première fois, peut-être au Manitoba la troisième fois et en Colombie-Britannique la quatrième fois — la Couronne dans chacune de ces provinces est au courant des antécédents de cette personne qui, si elle est condamnée de nouveau, fera l'objet d'une demande de déclaration en vertu de la partie XXIV. Je pense que ce système s'inscrit plus ou moins dans la même veine que cet effort.
    Il est important d'adopter une approche globale en matière de gestion des délinquants à haut risque d'un bout à l'autre du pays car, si une administration est moins vigilante qu'une autre, le système s'écroule. On essaie d'assurer l'uniformité entre les provinces et les territoires.

[Français]

    J'aimerais poser ne dernière question, si vous le permettez.

[Traduction]

    Vous avez quelques secondes.

[Français]

    Y a-t-il des délinquants dangereux qui ont été désignés comme tels en vertu du Code criminel après une première offense grave? Est-il possible d'obtenir une ventilation du nombre d'offenses? Dans nos statistiques, on parle de 384 personnes, dont 333 appartenant à la population carcérale. Avez-vous des cas à l'esprit?

[Traduction]

    Oui. En principe, vous n'avez besoin que d'une condamnation, pour autant que la Couronne puisse établir qu'il y a des habitudes de violence. Vous pouvez en fait présenter des preuves dans le cadre d'un procès intenté contre un délinquant dangereux qui ne se rapportent pas à une condamnation. Autrement dit, vous pouvez convoquer des gens pour qu'ils témoignent que l'individu avait commis un certain nombre d'autres crimes violents, même s'il n'avait pas été accusé ou condamné pour ces derniers. À ma connaissance, vous trouverez... là encore, de tels délinquants dangereux existent déjà. C'est possible, mais plutôt rare.
    Merci beaucoup, monsieur Ménard.
    Monsieur Comartin, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Pour poursuivre dans la même veine, prenons le cas du violeur qui passait par les balcons. Cette histoire a éclaté au grand jour l'été dernier. L'individu avait été condamné à 20 ans de prison; on avait visiblement jugé qu'il avait commis un crime très grave et il avait été condamné pour de multiples infractions à la fois. Vingt ans plus tard, il est libéré sans être soumis à une surveillance raisonnable.
    En pareils cas, a-t-on déjà examiné pourquoi la Couronne n'a pas présenté de demande de déclaration de délinquant dangereux? Des études de cas ont-elles été réalisées à cet égard? J'imagine, monsieur Hoover, que les bureaux provinciaux du procureur général procèdent à de telles études. Le cas échéant, sont-elles publiques?

  (1610)  

    Sans vouloir prendre la chose trop à la légère, je pense que la presse et le milieu politique font beaucoup d'analyses. Nous avons tendance à ne pas vouloir trop nous prononcer sur des causes précises qui sont devant les tribunaux, comme c'est certainement le cas ici.
    Non, pour bien me faire comprendre, je ne vous demande pas de commenter cette affaire. Je la citais en exemple.
    Y a-t-il eu des cas où les procureurs généraux partout au pays se sont penchés sur le processus qui a fait qu'ils n'ont pas demandé à l'époque...
    Votre question est valable. Je pense que c'est tout à fait ce que nous faisons depuis 1995 par l'intermédiaire du groupe de travail sur les délinquants à risque élevé, qui est un comité composé de hauts fonctionnaires du ministère de la Justice de partout au pays. En 1997, grâce à ses travaux, le Code criminel a été modifié et on a ajouté la catégorie des délinquants à contrôler. Je pense que la majorité des experts conviendraient que ce programme a donné d'excellents résultats pour gérer les risques de crimes contre les Canadiens.
    Depuis l'affaire Johnson, le même comité s'emploie activement à trouver des solutions aux problèmes qu'a engendrés cette décision dans les tribunaux de première instance. Ce projet de loi est le fruit d'une grande partie de ce travail.
    Encore une fois, chaque fois que se produit un tel cas, des pressions sont exercées sur le ministère de la Justice pour qu'il examine si l'affaire est susceptible de susciter une analyse plus poussée ou soulever une autre préoccupation.
    Une fois achevée, cette analyse est-elle rendue publique? Existe-t-il des rapports pouvant nous expliquer pourquoi certaines demandes n'ont pas été présentées? Je crois que c'est là où M. Ménard voulait en venir, et je partage son inquiétude: pourquoi la demande n'est-elle pas faite en vertu de la loi existante?
    Évidemment, dans n'importe quelle cause, les transcriptions et les décisions sont rendues publiques et accessibles à quiconque souhaite les examiner.
    Monsieur Hoover, avez-vous un résumé de ces transcriptions? Compte tenu des contraintes de temps que le gouvernement nous impose actuellement, il nous sera absolument impossible de passer en revue ces transcriptions.
    Non. Mais pour être juste cependant, un ensemble de lois antérieur s'appliquait à ce cas particulier. Je pense que la décision initiale remonte à 1978. La catégorie des délinquants à contrôler n'existait pas à l'époque. Si cette cause particulière était entendue aujourd'hui, l'issue serait tout autre. On aurait fort probablement présenté une demande en vertu de la partie XXIV. Même si l'on n'aurait pas réussi à obtenir une déclaration de délinquant dangereux, on aurait probablement déclaré l'individu délinquant à contrôler.
    Je rappelle que nous examinons les cas au fur et à mesure. Avons-nous mené des études? La réponse est oui. Par exemple, le groupe de travail sur les délinquants à risque élevé a produit deux rapports qui ont été publiés, l'un en 1995 et l'autre en 1997. Si je me rappelle bien, il a également produit le rapport sur le registre des délinquants sexuels, qui a été rendu public il y a plusieurs années et a donné naissance au projet de loi C-16, adopté par la Chambre des communes il y a quelques années.
    Là encore, les travaux liés au projet de loi qu'il mène actuellement sont toujours passés au crible dans les provinces, mais seront probablement publiés à un moment donné.
    Pourriez-vous fournir ces deux rapports à la greffière? Quel était le premier déjà?
    Le groupe de travail sur les délinquants à risque élevé a publié le rapport sur les délinquants dangereux en 1995 et le rapport sur le registre des délinquants sexuels, en 2002, je crois.
    D'accord.
    En ce qui concerne l'amendement que vous avez apporté au projet de loi C-2 par rapport au projet de loi C-27 précédent, pourriez-vous me dire, très brièvement, si nous allons pouvoir un jour nous pencher sur la question du manquement aux conditions des délinquants à contrôler? Autrement dit, lorsqu'il y a non-respect des conditions, combien de temps avons-nous pour faire une demande? Des délais sont-ils prévus? Le cas échéant, quels sont-ils?
    En vertu de la réforme proposée, lorsque le tribunal déclarera qu'un délinquant est dangereux, cette désignation le suivra toute sa vie. Il a été établi que le délinquant était bel et bien dangereux. S'il viole une condition et qu'il est reconnu coupable de non-respect d'une ordonnance de surveillance de longue durée, il s'expose alors à cette audition subséquente. Si le délinquant a purgé sa peine et qu'il est soumis à une OSLD, mais qu'elle est venue à échéance, et qu'il a commis une autre infraction constituant des sévices graves à la personne et est condamné, il s'expose également à une audition abrégée, au cours de laquelle la Couronne n'aura pas à prouver encore une fois qu'il est un délinquant dangereux, en vertu de l'article 753.1.

  (1615)  

    Ce que je demande cependant, c'est de combien de temps le poursuivant dispose-t-il pour demander qu'un délinquant soit déclaré dangereux?
    Il dispose exactement du même temps qu'en vertu de la procédure actuelle. La procédure est exactement la même que celle qui est en place actuellement. Essentiellement, c'est au moment de la détermination de la peine, même si une disposition dans la partie XXIV portant sur les délinquants dangereux autorise actuellement la Couronne à donner avis de son intention de faire une demande en vertu de la partie XXIV, mais n'a pas en main les documents. Elle a six mois pour présenter la demande, mais le délai est rarement utilisé.
    C'est tout ce que j'avais à dire, monsieur le président. Merci.
    Merci, monsieur Comartin.
    Monsieur Keddy.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
    J'ai quelques questions à poser, mais tout d'abord, monsieur le président, j'aimerais souligner un point concernant la procédure. Hier, les partis d'opposition ont fait quelques observations au sujet de la loi américaine des « trois prises ». Puisque nous sommes un comité législatif et non pas un comité ordinaire qui siège en cette Chambre, je ne vois pas le lien avec ce projet de loi particulier. J'aimerais que vous vous penchiez sur la question pour déterminer si cette loi est pertinente pour la discussion, car à mon avis, ce n'est pas le cas.
    Bien. Merci.
    Ma première question porte sur les infractions relatives aux armes à feu.
    Comme tous les Canadiens le savent, il y a des dizaines de milliers d'armes à feu non enregistrées dans ce pays, la plupart appartenant à des citoyens des régions rurales et urbaines respectueux des lois, qui n'ont jamais eu de contravention pour avoir fait un excès de vitesse ou brûlé un feu rouge. Ce qui m'inquiète, c'est que lorsque cette mesure législative sera mise en oeuvre — et je m'attends à ce qu'elle le soit et à ce que les Canadiens l'appuient —, tous ces gens, sans que ce ne soit de leur faute, seulement parce qu'ils n'ont pas enregistré leurs armes à feu, seront soudainement considérés comme des criminels. En fait, ils le sont déjà en vertu des lois actuelles.
    Je me demande si on avait envisagé l'idée d'une amnistie. Ça fonctionne. On accorde des amnisties ponctuelles pour les armes à feu tous les six, sept ou dix ans. Les gens rapportent les armes qu'ils n'utilisent pas, ce qui permet de retirer de la circulation beaucoup d'armes de poing. Cela donne également aux gens l'occasion d'enregistrer leurs armes à feu.
    Y a-t-on songé?
     Ma collègue, Julie Besner, pourra répondre à vos questions concernant les dispositions du projet de loi qui portent sur les infractions relatives aux armes à feu, les pénalités et le régime de remise en liberté sous caution. Cependant, nous ne sommes pas en mesure de formuler des observations sur les initiatives envisagées par le gouvernement qui débordent du cadre de ce projet de loi. Nous nous en tiendrons à la portée du projet de loi.
    Je comprends. Je crois en avoir ai déjà parlé.
    Ma prochaine question porte sur le mécanisme — pour utiliser un terme non juridique — permettant de déclarer qu'un délinquant est dangereux. Il existe un processus très rigoureux et complet. Dans l'intérêt du comité et des Canadiens qui nous regardent, pourriez-vous expliquer en quoi consiste ce processus?
    Voulez-vous qu'on traite d'abord de la question des armes à feu?
    Peu importe: les armes à feu ou le processus de déclaration.
    Brièvement, pour répondre à la question concernant les risques que pourraient encourir les citoyens respectueux des lois qui possèdent des armes à feu pour des raisons légitimes et qui pourraient être ciblés par certaines des dispositions relatives aux infractions proposées par le projet de loi C-2, je peux vous dire que les infractions en question sont les crimes commis avec une arme à feu les plus graves que prévoit le Code criminel. Par exemple, la possession simple sans certificat d'enregistrement n'est pas visée par le projet de loi C-2. Celui-ci concerne les infractions commises par des gangs avec des armes à feu et les infractions les plus graves non relatives à l'usage d'une arme à feu, comme le trafic et la contrebande d'armes à feu.
    Est-ce que cela répond à votre question?

  (1620)  

    Quel est le lien entre les infractions relatives aux armes à feu et la déclaration de délinquant dangereux?
    Il n'y a pas de lien étroit entre les dispositions relatives aux armes à feu proposées dans le projet de loi C-2 et la demande de déclaration de délinquant dangereux, sauf dans le cas de deux nouvelles infractions prévues par le projet de loi. L'introduction par infraction pour voler une arme à feu et le vol qualifié visant une arme à feu seront ajoutés à la liste des infractions désignées.
    Mon collègue, M. Hoover, peut vous fournir des détails à ce sujet et répondre à votre question plus générale sur le processus de demande.
    Oui. Toutes les infractions relatives aux armes à feu qui sont assorties d'une peine minimale de 10 ans peuvent donner lieu à une demande de déclaration de délinquant dangereux, pour autant qu'elles respectent le critère de sévices graves à la personne. Il suffit de regarder les nouvelles infractions et de vérifier si elles sont assorties d'une peine minimale de 10 ans pour savoir si on peut présenter une demande de déclaration de délinquant dangereux.
    En ce qui concerne votre autre question, voulez-vous que j'explique rapidement le processus de déclaration de délinquant dangereux?
    Premièrement, il faut qu'une personne soit accusée de ce qui peut être caractérisé d'infraction qui constitue des sévices graves à la personne ou d'une des trois infractions sexuelles désignées. Ensuite, la Couronne doit convaincre le juge qu'il y a des motifs raisonnables de croire que la demande sera approuvée et, si c'est le cas, la Couronne a le pouvoir d'ordonner l'évaluation psychiatrique du délinquant, ce qui prend en général un mois. Un rapport est présenté au tribunal et examiné par la Couronne. Si la Couronne considère qu'une demande de déclaration de délinquant dangereux peut être approuvée, elle la présentera, avec le consentement du procureur général, et en informera l'avocat de la défense. Ensuite, l'audience a lieu.
    À l'audience, on se base surtout sur les critères énumérés au paragraphe 753(1), qui stipule que la Couronne doit prouver au-delà de tout doute raisonnable que, par la répétition continuelle de ses actes, le délinquant démontre une brutalité suffisamment dangereuse et constitue un risque. Une fois que la preuve a été faite, en raison d'une décision de la Cour suprême du Canada rendue en 2003 dans l'affaire R. c. Johnson, la cour a le pouvoir de refuser d'imposer une peine d'une durée indéterminée et de déclarer le délinquant dangereux si elle est convaincue qu'une peine moins sévère peut suffire à neutraliser la menace qu'il représente pour le public.
    Merci.
    Vous avez pris presque exactement sept minutes, c'est merveilleux.
    Monsieur Lee.
    Je voudrais juste vous rappeler que nous en sommes maintenant aux tours de cinq minutes.
    J'aimerais revenir sur une de mes questions qui a été laissée en suspens hier parce qu'on n'a pas eu le temps d'y répondre. Elle porte sur les dispositions de la loi concernant les délinquants dangereux. Je crois que nous sommes tous d'accord sur le fait que le droit de garder le silence est un principe de justice fondamentale protégé par la Charte. Si certains ne sont pas d'accord, j'aimerais le savoir, mais je tiens pour acquis que le droit de garder le silence est protégé.
    J'aimerais donc savoir si ce droit est préservé à l'étape de la déclaration de culpabilité et à celle de la détermination de la peine. C'est ma première question. Si c'est le cas, je pense que ces dispositions pourraient en fait enfreindre ce droit protégé par la Charte parce qu'on imposerait à une personne le fardeau de réfuter une présomption et de prouver qu'elle n'est pas dangereuse. On espère que les procureurs généraux déclareront délinquants dangereux tous ces individus, mais quoi qu'il en soit, comme l'a dit M. Keddy, les juges doivent vérifier s'ils ont atteint d'abord la limite du « retrait après trois prises ».
    Alors, pourriez-vous me dire si ces dispositions enfreignent la Charte et si le droit de garder le silence est protégé?
    Le droit dont vous parlez est évoqué à quelques reprises. À l'article 11, on trouve le droit de ne pas témoigner contre soi-même dans toute poursuite. Ensuite, il y a peut-être l'article 7 — les principes de justice fondamentale — qui s'applique de façon plus générale et qui comprend ce droit.
    Dans la décision R. c. Lyons rendue en 1987, qui a été la première contestation des dispositions de déclaration de délinquant dangereux après la proclamation de la Charte, la Cour suprême du Canada a déclaré que les droits de l'article 11 ne s'appliquaient pas tels quels au processus de déclaration de délinquant dangereux, en raison du contexte. On parle ici de droits qui, traditionnellement, se rattachent au procès et à l'accusation. Dans cette affaire, la cour a déclaré que l'inculpé ne pouvait se réfugier derrière les droits revendiqués pour échapper à la déclaration de délinquant dangereux. Je ne crois donc pas que cela relève de cet article.
    La cour s'est ensuite penchée sur l'article 7, les principes de justice fondamentale dont découlent les droits à la vie, à la liberté et à la sécurité. Selon la cour, dans le procès de délinquants dangereux, il importe de ne pas appliquer ces droits isolément, mais plutôt de faire en sorte que, dans l'ensemble, le procès soit équitable, le délinquant ait l'occasion de présenter sa version des faits et l'audience soit impartiale. Ce qu'il faut retenir, c'est que le droit du délinquant de garder le silence est en fait protégé tout au long des procédures. L'accusé n'a pas à témoigner à la barre.
    Bien avant cette étape, souvenez-vous qu'une évaluation psychiatrique impartiale a été ordonnée par la cour. C'est souvent sur cette évaluation que se basent la plupart des arguments soulevés pour justifier la déclaration de délinquant dangereux. En fait, dans la majorité des cas, grâce à l'aide juridique, la défense appelle des experts à témoigner pour réfuter les points négatifs soulevés par les témoins impartiaux de la Couronne.

  (1625)  

    Je tiens à souligner que, dans l'affaire Lyons, la décision a été rendue conformément aux anciennes règles régissant les délinquants dangereux.
    En fait, pas exactement.
    Mais nous allons changer la loi. Je ne vous demande pas si les anciennes règles, les règles actuelles, respectent la Charte; je vous parle des nouvelles, qui font peser une présomption sur une personne qui a ou non le droit de garder le silence.
    Ne convenez-vous pas que ce sont les nouvelles dispositions concernant les délinquants dangereux qu'il faut évaluer, et non pas les anciennes? Je ne vous demande pas de vérifier si les anciennes dispositions respectent la Charte; ce qui m'intéresse ce sont les nouvelles. On fait peser sur une personne condamnée trois fois la présomption qu'elle est dangereuse, et la seule façon pour elle de s'en sortir, de renverser cette présomption, c'est de témoigner et d'en accepter les conséquences. C'est peut-être ce que commande le bon sens, mais est-ce que cela enfreint le droit de garder le silence, ce droit est-il préservé? Est-ce que votre ministère a déterminé que le droit de garder le silence s'appliquait à l'étape de la détermination de la peine?
    Oui, nous l'avons fait, nous avons analysé et examiné en profondeur cette question.
    Je pourrais également vous mentionner des cas plus récents. En fait, dans l'affaire R. c. Grayer, la Cour d'appel de l'Ontario a affirmé que, dans le cas d'une demande de déclaration de délinquant dangereux, le délinquant peut exercer son droit de garder le silence, mais à ses risques et périls. Si les éléments de preuve démontrent qu'il constitue une menace pour la société et qu'il choisit de se taire, de ne pas participer, de quelque façon que ce soit, au processus d'évaluation ou à l'audience elle-même, la cour rendra sa décision, qu'il témoigne ou non.
    Merci.
    Monsieur Petit.

[Français]

    On vous a vu deux ou trois fois au cours des étapes du projet de loi qu'on a tenté de présenter lors de la dernière session. Il y a un point qui m'intéresse. Maintenant, tous ces projets de loi sont interreliés, mais j'aimerais que vous me parliez un peu plus en profondeur de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue.
     Ma pratique totalise presque 30 années, et pendant cette période, tout ce que j'ai traité, ce sont des cas d'alcool au volant. Il était question de drogue dans le Code criminel, mais on ne la détectait pas facilement. Même si quelqu'un en avait consommé, on avait de la difficulté à le traîner devant les tribunaux.
    J'aimerais savoir ce que nous apporte le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui et en quoi il est différent. Je pense que nous pouvons nous féliciter, de même que l'opposition, de l'avancement qu'il représente. Au Québec, les accidents causés par des facultés affaiblies — et on ne parle pas uniquement de l'alcool — sont un problème très grave. On en voit tous les jours.
    Je ne sais pas qui peut me répondre, mais j'aimerais savoir en quoi ceci diffère de ce que nous connaissons. Le public sait ce qu'il en est dans les cas impliquant l'alcool, mais a un peu plus de difficulté à comprendre dans les cas reliés à la drogue.

  (1630)  

     C'est vrai qu'il y a eu des procès reliés à des cas de facultés affaiblies par la drogue dès que ces articles ont été inclus dans le Code criminel. Le problème a toujours été la preuve. On n'a pas d'instruments comme ceux permettant de faire des tests sur le bord de la route pour détecter la présence d'alcool. Depuis plusieurs années, au moins depuis le rapport de 1999 du comité spécial, on se penche sur cette question. Il y a des milliers de drogues appartenant à plusieurs familles, et elles ont des effets différents selon la personne. Aucune réponse technique ne nous permettrait d'avoir ce dont on dispose pour détecter l'alcool au volant.
    Ce que nous avons découvert, et qui semble le plus efficace, c'est le nouveau programme d'expertise en reconnaissance de drogues. Je dis qu'il est nouveau parce qu'il l'est pour le Canada. Ce programme existe aux États-Unis et dans d'autres pays depuis une vingtaine d'années. On l'utilise au Canada, particulièrement en Colombie-Britannique, depuis une dizaine d'années. Dans le cadre de ce programme, si on a des raisons de soupçonner qu'un individu est affaibli par la drogue, on peut le faire examiner par un expert en reconnaissance de drogues, qui fera une série d'observations physiques: réaction à la lumière, test du pouls et de la pression sanguine ainsi que d'autres tests de ce genre.
    Selon ses observations, le spécialiste peut indiquer le type de drogue probablement consommé par l'individu et ayant causé son affaiblissement. Il peut ensuite demander à l'individu de fournir un échantillon d'une substance corporelle qui sera analysée. S'il a dit qu'il s'agissait de cocaïne et qu'on en trouve en effet dans son système, il y a un procès. On a observé que la manière dont l'individu conduisait avait quelque chose d'étrange, un expert a reconnu une certaine drogue et on a procédé à une analyse.
    Dans le cadre du présent projet de loi, on va rendre obligatoire la participation à ces tests. Premièrement, des tests seront effectués au bord de la route pour détecter les facultés affaiblies, que ce soit par l'alcool ou les drogues. L'individu devra essayer de réussir quelques tests physiques qui seront prescrits en vertu d'un règlement. Ces tests existent depuis des années et sont assez bien connus. S'il échoue à ces tests mais que l'alcool n'est pas en cause, c'est-à-dire que son taux d'alcoolémie n'est pas supérieur à 0,08, on pourra demander qu'il participe au programme de reconnaissance de drogues. L'expert devra y participer. Le fait de ne pas y participer et de ne pas permettre qu'un échantillon de substance corporelle soit fourni à des fins d'analyse constituera une infraction.
    Ce que nous offrons ici, c'est l'outil permettant que ce programme soit efficace. En Colombie-Britannique, les gens ont compris rapidement que ce n'était pas une très bonne idée de faire le test volontairement. Par conséquent, le succès espéré ne s'est pas concrétisé. Nous croyons, en nous fondant sur ce qui s'est passé aux États-Unis, que ce programme sera efficace pour détecter les drogues ainsi que les personnes dont les facultés seront affaiblies par les drogues, et pour établir une preuve suffisante afin que ces personnes soit reconnues coupables. Évidemment, ça dépend du nombre d'experts en reconnaissance de drogues. Ça va prendre du temps avant qu'on puisse encadrer un nombre suffisant de personnes.

[Traduction]

    Merci, monsieur Yost.
    Madame Freeman.

  (1635)  

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Hoover.
    Monsieur Hoover, j'aurais besoin d'une explication concernant le nouvel article 43 du projet de loi. Cet article se lit comme suit :
    43. La même loi est modifiée par adjonction, après l’article 753, de ce qui suit :
    753.01(1) Si le délinquant déclaré délinquant dangereux est reconnu coupable postérieurement d’une infraction qui constitue des sévices graves à la personne ou d’une infraction prévue au paragraphe 753.3(1) [...]
    Le paragraphe 753.3(1) du Code criminel, pour sa part, dit que :
    753.3(1) Le délinquant qui, sans excuse raisonnable, omet ou refuse de se conformer à l’ordonnance de surveillance à laquelle il est soumis aux termes du paragraphe 753.1(3) est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans.
     Plus loin, dans l'article 43 du projet de loi, on décrit la procédure, et le paragraphe 753.01(5) stipule que le délinquant peut purger une peine d'une période indéterminée.
    Pouvez-vous m'expliquer le fonctionnement de ces deux articles, qui ne me semblent pas compatibles actuellement? J'imagine que vous avez une explication très claire à me fournir. Ma question porte sur le fait que l'article 43 fait référence au paragraphe 753.3(1), qui prévoit une peine maximale de 10 ans pour bris d'ordonnance, et qu'il crée un nouveau paragraphe où on prévoit toutes sortes d'autres infractions et même une peine indéterminée. Il ne semble pas y avoir de... À moins que vous n'ayez une explication à me fournir à ce sujet.

[Traduction]

    En fait, cette disposition donne l'autorité nécessaire pour réviser le dossier d'un individu étant déjà considéré comme un délinquant dangereux, mais qui se serait vu infliger une peine moins sévère la première fois. Si cet individu est ensuite reconnu coupable d'un bris d'ordonnance de surveillance de longue durée ou de sévices graves à la personne, les avocats de la Couronne se serviront de cette disposition, figurant dans la partie XXIV, après ou même avant l'évaluation. Donc, une fois que la cour a établi qu'il y a déjà eu condamnation, c'est la procédure prévue qui s'applique. Plus précisément, le paragraphe (5) proposé porte sur la détermination de la peine. Il donne à la cour les lignes directrices qu'elle doit suivre pour décider si la personne doit maintenant purger une peine d'une durée indéterminée ou une peine moins sévère.
    Peut-être pourriez-vous m'indiquer plus précisément ce qui vous préoccupe dans l'article 753.01 proposé? Est-ce le paragraphe (1)?

[Français]

    Il s'agit d'un nouvel article qui ne faisait pas partie du projet de loi C-27. Était-il dans le projet de loi C-27, ou n'est-il apparu que dans le projet de loi C-2?

[Traduction]

    Cela fait partie des nouvelles modifications qui ne figuraient pas dans le projet de loi C-27. Encore une fois, il s'agit d'un ajout. Si vous vous souvenez de nos discussions de l'année dernière, l'une des préoccupations soulevées par les procureurs généraux des provinces, mentionnée en comité, était l'incapacité de réviser un dossier après la première audience.
    On ajoute donc cet élément, de sorte que, si une personne est reconnue coupable du bris de son ordonnance de surveillance de longue durée, elle doit comparaître à nouveau devant la cour, et la Couronne n'a pas à démontrer une nouvelle fois qu'il s'agit d'un délinquant dangereux, parce que la désignation est maintenue. Il suffit de convaincre la cour que la personne devrait ou non recevoir une peine moins sévère que la peine d'une durée indéterminée.

[Français]

    D'accord, je vous suis.
    Je voudrais une autre précision. Ce nouvel article 43 fait référence au paragraphe 753.3(1).  Lorsque le délinquant qui, sans excuse raisonnable, refuse de se conformer à une ordonnance de surveillance, on prévoit au paragraphe 753.1(3) un emprisonnement maximal de 10 ans. Il y a déjà une peine prévue dans le paragraphe auquel on fait référence. Dans l'article que vous avez créé, on parle d'autres peines. C'est ce que je ne comprends pas.

[Traduction]

    Je ne sais pas vraiment où vous voyez cela. Peut-être pourriez-vous me l'indiquer précisément, parce que je ne le trouve pas dans la disposition.

[Français]

    Reprenez le texte même de l'article 43 :
    43. La même loi est modifiée par adjonction, après l’article 753, de ce qui suit :
    753.01(1) Si le délinquant déclaré délinquant dangereux est reconnu coupable postérieurement d’une infraction qui constitue des sévices graves à la personne ou d’une infraction prévue au paragraphe 753.3(1) [...]
     Dans le paragraphe 753.3(1), il est question du bris d'ordonnance...

  (1640)  

[Traduction]

    Madame Freeman...

[Français]

    … et on a déjà prévu une peine maximale de 10 ans.

[Traduction]

    ... Il ne vous reste qu'environ 10 secondes.
    Le paragraphe 753.3(1) proposé porte sur le bris d'ordonnance, sur la condamnation pour non-conformité. Si vous êtes reconnu coupable de cette infraction, vous êtes assujetti à cette disposition. Celle-ci permet d'éviter de prouver que le délinquant est dangereux, parce que cela a déjà été fait. Ce qu'il reste à prouver sur le plan de la peine est prévu au paragraphe 753.01(5) proposé.
    Donc, le paragraphe 753.3(1) porte sur le bris d'ordonnance. Je crois que c'est ce sur quoi vous vous interrogiez.
    Merci.
    Monsieur Moore.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins ici présents de nous avoir fait profiter de leur expertise dans différents domaines. Nous vous en sommes reconnaissants. Vous apportez beaucoup à nos discussions.
    Comme vous n'êtes pas venus ici pour nous écouter pendant deux heures sans rien dire, je vais poser une question à Mme Morency.
    Il y a eu des cas notoires — et je ne vous demande évidemment pas de nous parler des affaires en cours — de gens qui se sont rendus dans certains pays pour, carrément, abuser de jeunes. J'imagine qu'on peut les qualifier de touristes sexuels pédophiles, ou quelque chose du genre. Je me demandais si vous pouviez nous parler un peu des modifications qu'apportait le projet de loi C-22 à l'âge de protection et qui ont été incorporées au projet de loi C-2, et de leurs répercussions. Vous pourriez aussi nous dire si le Canada a déjà été considéré comme une destination pour ce genre de touristes, et ce que cela signifie.
    Je me souviens de témoignages que nous avons entendus au cours de la dernière session au sujet des techniques raffinées utilisées par des groupes d'adultes qui cherchent à avoir ce genre de relations avec des jeunes. On nous avait expliqué comment ces personnes utilisaient Internet pour parvenir à leurs fins. Pourriez-vous nous dire si ces groupes comprendront le message, et si le Canada est considéré comme une destination pour le tourisme sexuel?
    Comme vous l'avez dit, les réformes proposées dans le projet de loi C-2 reprennent le contenu du projet de loi C-22, visant à faire passer l'âge de consentement de 14 à 16 ans et à maintenir l'âge de protection à 18 ans lorsqu'il est question d'actes criminels liés au commerce du sexe ou à la prostitution. Le Code criminel interdit déjà, depuis 1997, le tourisme pédosexuel. Autrement dit, si un résident ou un citoyen canadien se rend à l'étranger et se livre à une activité sexuelle avec un enfant — toute infraction s'appliquant en vertu du nouvel âge de protection — , il pourrait être condamné ici au Canada pour avoir commis cette infraction à l'étranger, comme si celle-ci avait été perpétrée au pays.
    À l'heure actuelle, lorsqu'un individu commet un acte criminel impliquant un enfant de moins de 14 ans, la disposition sur le tourisme pédosexuel permettrait qu'il soit poursuivi au Canada, pourvu qu'il n'ait pas été reconnu coupable de la même infraction dans le pays où il l'a commise. En haussant l'âge de consentement à 16 ans, on protégera nos jeunes de 14 et 15 ans contre l'exploitation sexuelle par des adultes, de même que contre le tourisme pédosexuel. Par conséquent, peu importe que l'infraction soit commise ici au Canada, si l'âge de consentement est établi à 16 ans en ce qui a trait aux actes criminels impliquant des enfants, le tourisme pédosexuel serait également visé.
    De toute évidence, lorsque les policiers ont comparu devant le comité sur la justice, ils ont évoqué la ruse de certains prédateurs sexuels qui utilisent le leurre sur Internet en vue d'exploiter sexuellement des enfants. Encore une fois, le relèvement de l'âge de consentement permettra de mieux protéger les jeunes contre ce genre de manoeuvre sur Internet.
    Certains témoins nous ont dit avoir entendu, au cours de leurs infiltrations, des prédateurs sexuels dire que l'âge de consentement au Canada était plus bas qu'ailleurs dans le monde. Cela attire peut-être des pédophiles de l'étranger. Chose certaine, on a signalé des cas où, par exemple, un individu américain venait au Canada pour rencontrer une personne qu'il avait leurrée sur Internet, et se faisait appréhender à la frontière. Cette preuve a été fournie au comité sur la justice.

  (1645)  

    Merci.
    Il vous reste 30 secondes, monsieur Moore.
    Merci, mais je propose que nous continuions, car je n'aurai pas le temps d'obtenir une réponse complète. Je n'ai plus de questions.
    Merci.
    Monsieur Comartin.
    Je n'ai rien d'autre à ajouter, merci.
    Très bien.
    Madame Jennings.
    Dans le régime actuel applicable aux délinquants dangereux, la Couronne n'est pas tenue de demander au tribunal qu'un délinquant reconnu coupable d'une première, deuxième, troisième, dixième ou cinquante-cinquième infraction subisse une évaluation. Par ses amendements, qu'on retrouve dans le projet de loi C-2, le gouvernement conservateur propose-t-il de remédier à la situation? La Couronne est-elle maintenant obligée de...? Est-il obligatoire de présenter une demande de déclaration de délinquant dangereux à partir d'un certain nombre de condamnations pour des infractions graves et violentes désignées?
    Non.
    D'accord. Par conséquent, lorsqu'on entend qu'on est « retiré après trois prises », en fait, cela n'a rien à voir avec la réalité. Il n'y a rien dans le projet de loi C-2 qui oblige la Couronne à demander une évaluation visant à déterminer si un délinquant doit être déclaré dangereux, par exemple, après sa troisième condamnation, n'est-ce pas?
    Lorsqu'un délinquant a commis une troisième infraction figurant sur la liste des infractions désignées primaires, la Couronne sera tenue de déclarer, en audience publique, si elle a entièrement tenu compte de la procédure spéciale prévue à la partie XXIV du Code criminel. De plus, une troisième condamnation entraînera un renversement du fardeau de la preuve, c'est-à-dire qu'il incombera au criminel violent de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu'il ne représente plus un danger pour la société.
    Si la Couronne demande une évaluation.
    Tout à fait.
    Mais si la Couronne n'en fait pas la demande, par exemple, si elle déclare, en audience publique, qu'elle n'exige pas d'évaluation pour quelque raison que ce soit, il n'y a rien dans ce projet de loi qui l'oblige à le faire.
    Exactement. Vous interprétez bien le projet de loi.
    Merci.
    En réponse aux questions de mes collègues, vous avez, entre autres, mentionné le manque de ressources dans certaines provinces, voire toutes, qui pourrait être pour quelque chose dans le fait que la Couronne présente ou non une demande de déclaration de délinquant dangereux, et qu'on y donne suite ou pas.
    Outre le problème de ressources, s'il est question de crimes graves violents ou de nature sexuelle et que le délinquant a été condamné plus d'une fois — disons trois —, ne serait-il pas plus efficace de le confier automatiquement à un expert aux fins d'une évaluation plutôt que de laisser le soin à la Couronne de décider si elle en fait la demande ou non?
    En tant qu'ancien avocat de la défense, je dois dire que je saisirais toutes les opportunités pour entacher la crédibilité de mes adversaires.
    À mon avis, il serait malavisé d'obliger la Couronne à faire quoi que ce soit dans le processus criminel. Je pense que cela ferait probablement plus de tort que de bien. De façon générale, le risque de porter préjudice...

  (1650)  

    Permettez-moi de vous interrompre un instant, monsieur Hoover.
    En quoi cela peut-il être malavisé puisque cela donnerait automatiquement lieu à une évaluation, par un expert, des risques que pose un délinquant pour la société? Comment peut-il être déraisonnable de vouloir s'assurer qu'un individu qui a été reconnu coupable, disons à trois ou quatre reprises, subisse automatiquement cette évaluation?
    Je le répète, il y a un nombre relativement important d'individus qui atteignent ce seuil particulier et à qui on doit consacrer énormément de ressources. Selon moi, cela ne ferait pas augmenter le nombre de demandes accueillies; mais si oui, l'augmentation ne serait pas notable. Autrement dit, vous pourriez vous retrouver avec plus de cas à traiter, mais le tribunal ne désignera certainement pas n'importe qui délinquant dangereux.
    Nous ne le savons pas.
    Je dirais que c'est le travail de la Couronne au départ.
    Mais vous venez tout juste de dire que...
    Au départ, c'est la Couronne qui a la responsabilité de déterminer si oui ou non elle a eu la possibilité de...
    Monsieur Hoover, vous avez dit que les études n'avaient pas été réalisées.
    Madame Jennings, je vous ai laissée déborder. J'espérais que nous obtiendrions une réponse, mais votre temps est écoulé.
    Monsieur Kramp.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous les témoins.
    Nous avons relevé de nombreux cas où... Évidemment, notre système judiciaire laisse beaucoup de latitude et est fondé sur les compromis et les fluctuations de la capacité de la Couronne et de la défense à négocier le processus juridique à l'avantage de tous. C'est ce qui me préoccupe. Ce projet de loi aura-t-il une incidence sur la possibilité de la Couronne ou de la défense de négocier d'autres variantes dans le système de négociation de plaidoyers non discrétionnaire tel qu'il existe actuellement par rapport aux changements éventuels? Aura-t-il une incidence négative ou positive, ou ne changera-t-il rien du tout?
    Permettez-moi d'approfondir un peu votre question.
    Le projet de loi renferme plusieurs éléments. Dans les dispositions relatives à la conduite avec capacités affaiblies, on a apporté des changements aux sanctions, dans les dispositions concernant les crimes graves impliquant une arme à feu, on a proposé des peines minimales obligatoires, et enfin, en ce qui concerne la poursuite des délinquants dangereux, on s'intéresse aux individus ayant déjà été reconnus coupables de crimes graves violents. Dans ce contexte, on aurait peut-être déjà négocié l'issue lors de la condamnation précédente.
    Parlez-vous d'un contexte en particulier?
    Non, ce que j'essaie de dire, au fond, c'est que même s'il paraît évident que le projet de loi simplifiera certaines des options qui ont existé par le passé, il mettra possiblement un terme aux échappatoires, étant donné qu'il est plus clair et explicite. Est-ce que cela vous semble correct?
    Dans le contexte des dispositions relatives aux sanctions applicables aux crimes commis avec une arme à feu et aux délinquants dangereux, nous parlons ici de graves infractions où la Couronne exerce son pouvoir discrétionnaire et détermine les sanctions qui s'imposent. Elle prendrait cette décision dès le départ au lieu de se pencher sur des infractions moins graves. Comme il est question d'infractions sérieuses, je ne crois pas qu'on ait à craindre les sanctions trop sévères. Les infractions graves entraîneront forcément des sanctions punitives.
    Merci.
    J'ai un dernier commentaire. Il ne s'agit pas d'une préoccupation, mais plutôt d'une pensée concernant les contestations en vertu de la Charte.
    Pour autant que je sache, lorsque nous avons discuté des peines minimales obligatoires, dans le cadre de notre examen des mesures législatives précédentes et des questions connexes, la Cour suprême avait statué qu'une sanction donnée pourrait être déclarée inconstitutionnelle si elle était jugée trop sévère. Par exemple, on voulait une peine minimale obligatoire pour possession de stupéfiants et on réclamait dix ans, mais le tribunal a jugé que la peine était déraisonnable car jugée trop sévère; autrement dit, la peine n'aurait pas été proportionnelle au crime. En revanche, nous savons tous qu'il ne s'agit pas ici de délits mineurs. Nous n'avons pas affaire à des voies de faits simples ou à des infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité, mais plutôt aux actes criminels les plus graves et odieux en vertu du Code criminel, c'est-à-dire le viol, le vol qualifié, le meurtre, l'homicide involontaire coupable, l'extorsion, le kidnapping, etc. Toutefois, le projet de loi, tel qu'il est rédigé, fera encore l'objet d'un examen approfondi au plus haut niveau, et justice différée peut être justice refusée.
    Avez-vous confiance que le projet de loi, dans sa forme actuelle, résistera, dans la mesure du possible, à toute contestation en vertu de la Charte?

  (1655)  

    Nous reconnaissons que toutes les mesures législatives sont assujetties à un examen en vertu de la Charte et peuvent être contestées. C'est ainsi depuis que la Charte a été promulguée. Tous nos projets de loi ont été contestés à un moment donné par une instance quelconque, et nous sommes prêts à défendre le présent projet de loi dans tous les cas.
    J'inviterais ma collègue, Mme Besner, à nous entretenir des peines prévues dans le projet de loi pour ce qui est des infractions mettant en jeu une arme à feu, puisque celles-ci ont été soigneusement fixées en fonction de la Charte.
    Pour être plus précise, les peines minimales plus sévères proposées dans le projet de loi pour les infractions impliquant une arme à feu s'appliquent aux infractions particulières qui semblent être devenues un fléau — à savoir le problème des gangs de rue et des armes à feu dans certains centres urbains —, et seuls les crimes graves sont visés. On a inscrit au projet de loi des facteurs aggravants précis — par exemple la récidive et le crime organisé — afin d'accroître sa viabilité en vertu de la Charte.
    Y a-t-il une présomption de culpabilité dans bon nombre de ces cas? Évidemment, si vous êtes en possession de l'arme au moment du crime, y a-t-il une présomption en vertu du projet de loi?
    Je suis désolée; j'ai manqué une partie de votre question. Avez-vous demandé s'il y a une présomption de culpabilité?
    Oui.
    Madame Besner, répondez très rapidement, je vous prie.
    Non, le fardeau de la preuve incombe toujours à la Couronne, qui doit prouver tous les éléments requis.
    Merci, monsieur Kramp.
    Monsieur Comartin.
    Monsieur Hoover, dans les dispositions relatives à la présomption, quand il est question des infractions antérieures, le projet de loi stipule « que ce dernier a déjà été condamné ». Je vais vous donner un exemple d'une situation qui se produit actuellement à Windsor. Il s'agit d'un individu qui a commis une série de crimes. Il est séropositif et on songe à le déclarer délinquant dangereux... Il a commis toutes les infractions dont il a été reconnu coupable en même temps, et on est à présenter une demande de déclaration. Cet article s'appliquerait-il, ou aurait-il fallu que l'individu soit reconnu coupable d'autres infractions deux ans ou même dix ans plus tôt? Qu'est-ce que « déjà été condamné » signifie?
    C'est une bonne question. Je le répète, le projet de loi est rédigé de façon à accorder au tribunal une certaine latitude. La ligne est souvent mince entre une infraction et une autre. Ce que nous voulions éviter, d'une part, c'est qu'un individu soit assujetti à la présomption lorsqu'il y a un lien entre les infractions, soit une séquence d'événements, mais nous voulions arrêter un individu qui, par exemple, avait fait un certain nombre de victimes au cours d'une brève période. Le projet de loi est donc formulé de manière à permettre à la Couronne d'invoquer comme argument le fait que, dans les circonstances particulières, même si peu de temps s'est écoulé entre les infractions, la présomption s'appliquera s'il n'y a aucun lien entre celles-ci, et cela donnera lieu à trois infractions distinctes.
    Permettez-moi de tirer les choses au clair. Quand on dit « a déjà été condamné », si les condamnations sont enregistrées à quelques secondes d'intervalle, la présomption s'appliquera-t-elle?
    Je ne crois pas. Là n'est certainement pas le but. S'il s'agit d'un crime parmi une série, à ce moment-là, selon la jurisprudence, nous allons considérer cela comme une série d'infractions et non pas comme des infractions distinctes. Autrement dit, si un individu commet une introduction par effraction suivie d'une agression sur deux personnes, ce sera probablement perçu comme une série d'infractions et non pas comme trois infractions distinctes.
    Par conséquent, la présomption ne s'appliquerait pas.

  (1700)  

    En effet, pas dans ce cas.
    Merci, monsieur le président.
    Très bien. Nous avons...
     Je suis désolée, mais il y a aussi l'exigence selon laquelle, pour être assujetti à la présomption, un individu doit avoir été condamné à une peine minimale de deux ans d'emprisonnement. C'est donc l'autre critère fondamental auquel il faut répondre.
    Si vous me le permettez, je ne suis pas certain que ce soit pertinent. Je reprends l'exemple de l'introduction par effraction suivie d'une agression; si les infractions ont été jugées ensemble et que l'individu a été condamné à deux ans d'emprisonnement, encore une fois, la présomption ne s'appliquerait pas.
    Non, à moins qu'il n'y ait pas de liens entre les trois infractions.
    Ce que Mme Kane disait, c'est qu'en ajoutant l'exigence d'une peine minimale de deux ans d'emprisonnement, cela amènerait peut-être le tribunal à ne pas tenir compte de ces condamnations qui font partie d'une série d'événements, parce qu'elle les jugerait probablement ensemble, comme le veut le Parlement, c'est-à-dire qu'il doit y avoir une distinction claire entre les diverses infractions.
    Par exemple, si un agresseur sexuel en série commet une série d'agressions au cours d'une période de deux ans et que les condamnations sont enregistrées en même temps, la présomption ne s'applique pas.
    Non. Dans ce cas particulier, la présomption pourrait bien s'appliquer. Par exemple, si l'agresseur a fait trois différentes victimes à quelques mois d'intervalle, de toute évidence, ces dispositions visent à ce que la présomption s'applique en l'espèce, parce qu'il n'y a aucun lien entre les différentes infractions. Dans ce cas, le tribunal aurait condamné l'individu à deux ans d'emprisonnement pour chacune des infractions. Évidemment, le but de cette disposition, c'est que la présomption s'applique dans ce cas.
    Au cours de la dernière année, ou peut-être des deux ou trois dernières années, nous avons eu une autre législation qui portait sur la question et qui était plus précise quant à l'application de cette disposition. Était-ce en vertu de certaines peines minimales obligatoires? Pourquoi n'avons-nous pas utilisé ce genre de formulation?
    Encore une fois, juste pour...
    En fait, cela figure peut-être dans la présente mesure législative. J'ignore si on le trouve au début, conformément à l'ancien projet de loi C-10.
    Ces dispositions prévues dans le projet de loi C-10 ont été reprises dans la présente mesure législative pour clarifier ce qu'on entend par condamnation antérieure, car il y a un système de peines allant en s'allongeant. Ce qui constitue ou non une condamnation antérieure est très clairement indiqué.
    Je suis navré, monsieur Comartin. Nous avons un peu dépassé le temps prévu.
    J'aimerais souligner que M. Moore disposera des cinq prochaines minutes. M. Ménard aura les cinq minutes suivantes, puis ce sera le tour de M. Bagnell. S'il nous reste du temps, nous pourrons entendre un autre intervenant, mais pour l'instant, nous procéderons ainsi.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Hoover, pour les Canadiens qui nous regardent et qui suivent la question, il y a ici beaucoup de termes concernant les délinquants dangereux et les délinquants à contrôler. Il pourrait y avoir une certaine confusion quant à la signification de chacun d'entre eux. Nous avons beaucoup parlé des délinquants dangereux, mais pourriez-vous nous expliquer ce qu'est un délinquant à contrôler et ce qu'implique une telle désignation? Par ailleurs, quelle incidence les changements au projet de loi C-2 auront-il sur l'interrelation entre un criminel dangereux traité comme un délinquant à contrôler et un autre individu simplement traité comme délinquant dangereux, et de quelle façon ce rapport sera-t-il modifié après l'entrée en vigueur de ce projet de loi?
    D'accord. Je vais tâcher d'être bref.
    Dans un sens, c'est une question compliquée, car il s'agit d'une disposition complexe. Essentiellement, la désignation de délinquant dangereux existe depuis un bon moment. À l'origine, avant 1997, on pouvait obtenir une peine d'une durée déterminée ou indéterminée lorsqu'on avait été désigné délinquant dangereux. Le critère pour une telle désignation était l'incapacité récurrente à contrôler ses impulsions sexuelles en ce qui a trait aux crimes sexuels et violents.
    En 1997, nous avons assisté à l'introduction des dispositions relatives aux délinquants à contrôler, qui figurent également dans la partie XXIV, et qui vont pour ainsi dire de pair avec la désignation de délinquant dangereux, car si un juge refuse d'appliquer une peine d'emprisonnement d'une durée indéterminée en tant que délinquant dangereux, il peut désigner l'individu délinquant à contrôler. Dans le cas d'une telle déclaration, on obtiendrait la peine qu'on aurait autrement obtenue pour l'infraction de prédicat — par exemple, dix ou cinq ans —, et la cour pourrait imposer en plus une ordonnance de surveillance de longue durée sous responsabilité fédérale allant jusqu'à 10 ans. Dans ce cas, au moment de mettre une personne en liberté dans la communauté, la Commission nationale des libérations conditionnelles pourrait établir une liste de conditions auxquelles cette personne devra se conformer tant qu'elle vivra dans la communauté. Les conditions pourraient être très réglementées et strictes et, encore une fois, durer jusqu'à 10 ans, dans le but d'assurer la sécurité du public et la réhabilitation du contrevenant.
    En vertu des nouvelles dispositions, bien sûr, nous assistons à un grand changement dans le sens d'une réforme depuis le projet de loi C-27. C'est-à-dire que la violation d'une ordonnance de surveillance de longue durée permettra à la Couronne de traduire quelqu'un en justice à cause de ce manquement, au lieu d'avoir à attendre une infraction de nature sexuelle ou violente avant de pouvoir procéder à une nouvelle audience concernant l'option de la peine d'une durée indéterminée, comme c'était le cas avant cette mesure.
    Encore une fois, depuis l'affaire Johnson, nous constatons maintenant que de nombreux individus qu'on aurait autrement désignés délinquants dangereux sont mis en liberté dans la communauté, et c'est là le public visé par ces nouvelles dispositions. Encore une fois, si ces individus sont incapables de se maîtriser sous l'oeil vigilant de la Commission nationale des libérations conditionnelles et du Service correctionnel du Canada, cela témoigne d'un problème à long terme qui dépasse ce que l'actuelle ordonnance de surveillance de longue durée peut permettre de gérer. Cela étant, si l'on est reconnu coupable d'avoir enfreint les conditions, on sera rappelé devant les tribunaux, et la cour pourra reconsidérer l'option de la peine d'une durée indéterminée.

  (1705)  

    Vous avez dit quelque chose qui m'a en quelque sorte frappé.
    Est-ce de cela dont nous parlons ici — quelqu'un qui a répondu aux critères de délinquant dangereux, mais dont on a décidé qu'il sera traité comme un délinquant à contrôler? Le temps passe, et ils récidivent. Cela, dans les faits, constitue la différence apportée par ce changement en vertu du projet de loi C-2 . Cela voudra dire qu'on n'aura pas à attendre que cette personne commette une autre agression sexuelle violente pour tenir une nouvelle audience relative à un délinquant dangereux.
    Est-ce de cela dont il est question ici? De la différence au chapitre de la capacité de notre système judiciaire à appliquer cette disposition lorsqu'il est évident que des contrôles plus sévères s'imposent parce que la personne a contrevenu à des contrôles très rigoureux, sans qu'il soit nécessaire d'attendre que cette personne fasse une victime? Est-ce bien cela la différence?
    Oui. Je pense que la préoccupation exprimée par les procureurs généraux des provinces concernait le fait que des individus qui, avant la décision R. c. Johnson de 2003, auraient autrement été désignés délinquants dangereux, ne l'étaient pas à la suite de cet arrêt et avaient en fait droit à des peines moins sévères. La différence, selon moi, c'est qu'avant 1997, on pouvait être déclaré délinquant dangereux mais avoir une peine d'une durée déterminée. Il y avait donc un certain étiquetage, une certaine vigilance. Après 1997, on n'était plus du tout étiqueté en tant que dangereux criminel, mais déclaré délinquant à contrôler.
    Et maintenant que nous avons eu l'occasion d'étudier le cas d'individus qui sont passés de délinquants dangereux à délinquants à contrôler après l'arrêt Johnson, il s'avère que ces gens sont un peu plus difficiles à maîtriser en vertu d'une ordonnance de surveillance de longue durée. Je ne suis pas en train de dire qu'aucun d'entre eux ne peut être contrôlé. Les tribunaux ont, dans certains cas, pris la bonne décision. Et, comme il est stipulé dans Johnson, il s'agit d'une décision constitutionnelle, d'une mesure nécessaire. Dans un tel cas, la cour peut user de son pouvoir discrétionnaire pour déterminer si une peine est suffisante par rapport au risque couru par le public. Donc, en ce sens, c'est un changement très significatif.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Ménard.

[Français]

    Je veux seulement m'assurer d'avoir bien compris. Je pense que ce sera important pour la suite des événements. Je prends donc le relais et poursuis l'interrogation de Mme Jennings.
    Au fond, quand on parle d'automatisme dans le projet de loi, stricto sensu, il n'en existe pas vraiment. Si je prends la liste des 12 infractions primaires, la nouvelle obligation qui sera créée, c'est de faire connaître ou non son intention d'utiliser les dispositions de l'article 753.
    Est-ce que je me trompe en disant que jamais le poursuivant ne sera mis en instance ou contraint d'utiliser ces dispositions? Il n'y aura jamais de situation où on sera obligé de dire qu'on va déclarer une personne délinquant dangereux.
    La nouveauté réside dans le fait que, dans le cas des infractions primaires, si on décide de les utiliser, il y a un renversement du fardeau de la preuve, qui échoit alors au prévenu. Jamais, ni sous le régime des infractions primaires ni sous le régime des infractions secondaires, personne de l'appareil judiciaire ne sera obligé d'utiliser ces dispositions. C'est une incohérence par rapport au discours des conservateurs, mais j'y reviendrai. Je veux simplement m'assurer de bien comprendre.

  (1710)  

[Traduction]

    Je ne peux me prononcer pour ce qui est des conservateurs, mais du point de vue du ministère, c'est exact. Ces dispositions n'ont pas une nature contraignante ou automatique.

[Français]

    J'ai une deuxième question à poser. C'est très important de le préciser parce que c'est un peu différent. Loin de moi l'idée de vouloir faire de la partisanerie; j'en serais totalement incapable. Vous me semblez sceptique, petit coquin.
    La deuxième chose sur laquelle je compte beaucoup, c'est l'obtention, avant la fin des travaux de ce comité, d'un portrait réaliste des délinquants dangereux. Pour moi, cela fait toute la différence au monde de savoir que, des 384 délinquants dont on nous parle, 333 sont dans la population carcérale. Il faut qu'on ait une idée du nombre de délinquants qui ont été déclarés délinquants dangereux après une première infraction, après une deuxième infraction et après une troisième infraction, et savoir quel est le type d'infraction commise.
    Dites-nous quelle est la différence dans le régime des infractions primaires? Dans le régime des infractions secondaires, le fardeau de la preuve ne se renverse pas. Du moins, c'est ce que vous sembliez dire plus tôt. Je dois avoir mal compris. Peu importe qu'on soit sous le régime des infractions primaires ou secondaires, si on en est à une troisième infraction, le fardeau de la preuve se renverse quand même. Ai-je bien compris? Quelle est la différence entre le régime d'infractions primaires et le régime d'infractions secondaires, finalement?
    M. Daniel Petit: [Note de la rédaction: inaudible]
    M. Réal Ménard: Je ne veux pas dire sur le plan académique, monsieur Petit. On pense que vous, vous avez réussi les deux.

[Traduction]

    Je crois avoir saisi la dernière partie de votre question. Si j'ai mal compris la première, vous devrez me pardonner.
    Si je ne m'abuse, vous souhaitez connaître la différence entre la liste des infractions désignées et la liste des infractions primaires, ainsi que leur impact à toutes les deux. Est-ce exact?

[Français]

    C'est cela, sur le plan de la preuve et sur le plan de la conséquence pour le prévenu délinquant dangereux.

[Traduction]

    Je répète qu'en ce qui concerne la liste des infractions désignées, s'il y a eu deux condamnations antérieures pour des infractions figurant à cette liste et qu'en plus, de l'avis de la Couronne, la troisième condamnation concerne un sévice grave à la personne, cela a pour seul effet d'obliger la Couronne à déclarer si elle envisage ou non de présenter une demande de déclaration de délinquant dangereux. Encore une fois, ce n'est pas contraignant pour la Couronne ou la cour. Il n'y a pas d'automatisme, et cela ne tend pas vers la présomption. Cette disposition ne fait que garantir que la Couronne a pleinement considéré l'option de la partie XXIV.
    Ensuite, nous avons la liste des 12 infractions primaires. S'il y a deux condamnations antérieures pour des infractions primaires ayant donné lieu à une peine d'au moins deux ans, en plus de la condamnation actuelle — l'infraction de prédicat est tirée de la liste des infractions primaires —, et que la cour imposerait autrement une peine de deux ans, le fardeau de la preuve — c'est-à-dire prouver hors de tout doute le critère de délinquant dangereux, au sens du paragraphe 753 — passera de la Couronne au prévenu. Il devra établir qu'il ne satisfait pas, tout compte fait, aux critères de délinquant dangereux.

[Français]

    Ce qui a trait aux 12 infractions primaires est clair. On comprend ce qui se rapporte à la troisième infraction, au fardeau de la preuve et à l'obligation de faire connaître ses intentions. Mais je croyais qu'il y avait une deuxième série d'infractions parce que dans nos notes, on parle de 42 infractions au total. Je pensais qu'il y avait une deuxième série d'infractions que l'on appelait des infractions secondaires. C'est le sens de ma question.

[Traduction]

    Ce n'est pas du tout applicable au...
    Monsieur Hoover, je suis désolé.
    Votre temps est écoulé, monsieur Ménard.
    Monsieur Lee.
    Permettez-moi de préciser que mon examen critique de ces dispositions ne signifie pas que je ne veux pas souscrire au projet de loi. Ici, nous souhaitons l'appuyer. Nous voulons seulement nous assurer qu'il soit le meilleur possible.
    Ma question concerne la procédure qui sera en vigueur pour l'individu déclaré coupable dans le cas d'une désignation de délinquant dangereux. En ce moment, la présomption fonctionne de telle façon qu'on supposera que la personne répond à n'importe quelle condition prévue dans les dispositions 753(1)a), 753(1)a)(ii), 753(1)a)(iii) ou 753(1)b). Il y a toutes sortes de caractéristiques différentes là-dedans. Il est question de comportement répétitif, de comportement violent persistant. On traite d'une nature brutale. Il y a la partie concernant les impulsions sexuelles, et toute une liste de caractéristiques.
    Dans le cadre d'une audience normale, où il n'y a pas de présomption, ces caractéristiques seront exposées par le procureur afin de signaler qu'on croit que le prévenu correspond à au moins une de ces catégories. Mais en cas de présomption, le projet de loi ne contient aucun mécanisme qui fournirait à la personne reconnue coupable les caractéristiques auxquelles la Couronne s'est fiée. Autrement dit, on déclarerait seulement: « Vous faites partie des délinquants dangereux.  Maintenant, prouvez que ce n'est pas le cas ». La personne trouvée coupable ne dispose pas de détails pour tenter de démontrer la fausseté de la présomption.
    Je vous dirais donc que d'un point de vue procédural, nous sommes en présence d'un sérieux défaut, où une personne déclarée coupable dira: « Je ne dispose pas de détails précis et je dois réfuter une simple présomption; j'en suis incapable ». Je pense que c'est une sérieuse faiblesse, et je vous demanderais de répondre à cela, de me dire si vous pensez que c'est un problème, et si vous croyez que nous pouvons y remédier, avant que le projet de loi ne passe par le processus à la Chambre.

  (1715)  

    Encore une fois, je peux assurer à l'honorable député que nous avons examiné attentivement la possibilité d'une atteinte à la Charte en ce qui concerne cette disposition. Je vous dirais que oui, il est juste de dire que normalement, c'est à la Couronne qu'il incombe de prouver le critère qui figure au paragraphe proposé 753(1), comme vous l'avez fait valoir. Toutefois nous affirmons, encore une fois, qu'il est viable de permettre à la Couronne de transférer le fardeau de la preuve au prévenu, car dans le premier cas, il y a une liste restreinte d'infractions. Il s'agit là de 12 infractions de nature violente ou sexuelle parmi les plus graves.
    Deuxièmement, ces infractions sont celles qui déclenchent l'application des critères d'une demande de déclaration de délinquant dangereux ayant de bonnes chances d'être accordée. Donc, il existe des liens suffisamment étroits pouvant mener à la déclaration de délinquant dangereux lorsqu'on a eu trois de ces condamnations ayant toutes donné lieu à une peine assez sévère de deux ans ou plus. À ce titre, il est raisonnable de transférer le fardeau de la preuve au prévenu, car nous prétendons que dans cette situation particulière — qui ne concernera pas la majorité des procédures relatives aux délinquants dangereux — , le contrevenant a prouvé par ses actions passées qu'il répondait à ces conditions préalables.
    Enfin, je réitère que, conformément à l'arrêt R. c. Lyons, des protections procédurales considérables figurent toujours dans les dispositions relatives aux délinquants dangereux. Vous pourrez principalement trouver ces mesures de protection dès le départ pour ce qui est du pouvoir discrétionnaire de la cour de ne pas permettre la tenue d'une évaluation psychiatrique en l'absence d'une possibilité raisonnable de réussite. Le consentement du procureur général demeure requis dans ce cas-là. Une fois la présomption en place, il est pleinement possible pour le contrevenant de la réfuter, auquel cas le fardeau revient véritablement aux mains de la Couronne.
    Finalement, nous avons l'affaire Johnson, conformément à laquelle la cour, sans égard à la décision rendue sur la question de délinquant dangereux, doit considérer si le délinquant peut être contrôlé en vertu d'une peine moins sévère. Encore une fois, comme vous l'avez déjà laissé entendre — et je suis d'accord —, le prévenu a le droit de garder le silence. Il n'a pas à témoigner à la barre, et n'est pas tenu de présenter d'autres preuves.
    Qu'est-ce exactement que la personne condamnée devrait prouver pour réfuter la présomption? Si vous représentiez une personne déclarée coupable et que vous arriviez à l'une de ces audiences où il y a les présomptions A, B, C, D... Il n'y aura pas d'A, B, C, D; vous êtes simplement l'un de ces délinquants dangereux.
    Pourriez-vous me dire ce qu'on tenterait d'établir pour réfuter la présomption? Que tente-t-on de réfuter, au juste?
    Habituellement, tout comme la Couronne, j'obtiens les mêmes renseignements dans le dossier d'information comprenant l'évaluation psychiatrique déposée. Normalement, dans le cas de toutes les demandes de déclaration de délinquant dangereux, la routine consiste en ce qu'une fois cette évaluation entre les mains, je saurai ensuite quoi faire avec le dossier. Si l'évaluation révèle fortement, dans un sens ou dans l'autre, que mon cas est bon ou mauvais, je devrai agir en conséquence. Si, d'après cet examen, l'évaluateur spécialiste est d'avis qu'on est un délinquant dangereux, qu'on répond aux critères et qu'on est incontrôlable, on tâchera, avec son billet d'aide juridique, de dénicher un autre expert pour réfuter cette preuve.
    Mais dans ce cas-là, monsieur, personne n'a déterminé que vous aviez répondu à l'un des critères particuliers. La présomption stipule simplement que vous avez répondu à l'ensemble de ces critères ou à l'un d'eux. Qu'est-ce exactement que la personne devra réfuter?
    Merci. Je m'en tiendrai là.
    Vous avez dix secondes pour répondre.
    Je dirais que c'est ce même critère auquel on considère que vous répondez que vous devrez réfuter, selon les circonstances. L'évaluation indiquera la nature des facteurs qui font en sorte que vous soyez considéré dangereux. Il ne s'agit peut-être pas d'un mode de comportement. Cela peut être l'un des critères exposés à l'alinéa a) ou b). Il n'est pas nécessaire de prouver les deux. Peu importe celui auquel vous êtes réputé avoir répondu, c'est celui-là que vous devrez réfuter, si vous arrivez à le faire à partir de la preuve.

  (1720)  

    Merci, madame Kane.
    J'aimerais simplement conclure. Nous avons dépassé d'une ou deux minutes le temps alloué, mais je pense que chacun a pu poser les questions qu'il souhaitait.
    Je tiens à remercier sincèrement les représentants du ministère de leur présence aujourd'hui. Nous avons eu un excellent échange approfondi. Je l'apprécie. Nous allons maintenant vous libérer.
    Nous allons interrompre la séance pour une minute, puis nous reprendrons pour régler quelques questions d'ordre technique.

    


    

    Pourriez-vous tous reprendre place?
    Nous devons faire deux choses. D'abord, j'aimerais vous aviser qu'il nous faut remettre une motion au conseil interne concernant la question de notre budget. Laissez-moi vous la lire.
    C'est un exercice de routine.
    Oui, c'est de la simple routine.
    Puis-je proposer que nous arrêtions la télédiffusion de la séance? C'est inutile.
    Des voix: D'accord.
    Très bien. Nous allons interrompre la télédiffusion, le temps d'en terminer avec ceci.
    Je suis conscient que vous êtes impatient de régler cette question, monsieur Lee, mais laissez-moi d'abord lire la motion avant que vous ne la proposiez: que le budget au montant de 45 850 $ soit adopté et que le président soit autorisé à le présenter au Bureau de régie interne.
    La motion est proposée par M. Lee.
    (La motion est adoptée.)

  (1725)  

    Je peux vous dire que demain, nous n'aurons pas à nous lever tous de bon matin comme nous l'avions d'abord pensé. Deux témoins ont été confirmés, l'un du Canadian Centre for Abuse Awareness, et l'autre, du Bureau du procureur général de l'Ontario. Ils ont donné leur confirmation mais, bien sûr, nous avons vu que le premier ministre de l'Ontario a nommé un nouveau cabinet hier. L'ancien ministre a permis au témoin de venir ici, mais pas le nouveau. On tente d'arranger cela. Nous espérions obtenir confirmation avant la fin de notre séance d'aujourd'hui, mais nous n'avons pas pu.
    Je propose que nous commencions la séance à 10 heures, demain, et que nous entendions le témoin du Canadian Centre for Abuse Awareness, en précisant que si le Bureau du procureur général confirme la présence de son représentant, nous entendrons les deux témoins en même temps. Mais je tiens pour acquis qu'il n'y aura qu'un seul témoin demain, et nous commencerons à 10 heures pour terminer à 11 heures.
    Oui.

[Français]

    Monsieur le président, si le témoin que l'on attend arrive et qu'on a terminé après une demi-heure, j'espère qu'on va terminer plus tôt.

[Traduction]

    Oui, ce sera le cas.
    D'accord.
    Bonne question.
    La séance est levée.