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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 039 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 novembre 2009

[Enregistrement électronique]

  (1115)  

[Traduction]

    J'aimerais déclarer la séance ouverte.
    Il s'agit de la 39e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous poursuivons l'étude des établissements correctionnels fédéraux, et nous nous concentrerons sur les questions relatives à la santé mentale et à la toxicomanie.
    Avant de passer à notre premier point, je voudrais lire un passage aux membres du comité et j'invite ces derniers à écouter très attentivement, car vous devrez l'approuver: « Que le Comité acquitte les frais de représentation liés aux repas de travail qui auront lieu pendant son voyage à Oslo et à Londres durant la semaine du 22 novembre, et que le greffier soit autorisé à acheter des souvenirs. »
    Comprenez-vous tous l'essentiel de ce texte?
    Ce sont des souvenirs à donner à...
    Aux personnes qui sont...
    Des représentants officiels.
    Le président: Oui.
    M. Mark Holland: Pas des souvenirs pour le greffier.
    Non.
    D'accord, le texte est-il approuvé?
    M. Roger Préfontaine (Le greffier du comité): Monsieur, je viens tout juste de remarquer que j'aurais dû ajouter quelque chose ici, au cas où nous en aurions besoin, un déjeuner de travail à Montréal.
    Le président: Oh, nous avons oublié Montréal. Il est possible que nous ayons un déjeuner de travail à Montréal, alors nous l'ajouterons également, le jeudi soir lorsque nous serons à Montréal. Ce sera plutôt un souper.
    Je vais de nouveau lire le texte rapidement: « Que le Comité acquitte les frais de représentation liés aux repas de travail qui auront lieu pendant son voyage à Montréal le 18 novembre, ainsi qu'à Oslo et à Londres durant la semaine du 22 novembre, et que le greffier soit autorisé à acheter des souvenirs. » Il s'agit de petits cadeaux en signe de courtoisie que nous remettrons aux personnes que nous rencontrerons, nos homologues en Norvège et en Angleterre.
    Oui, monsieur MacKenzie?
    Pourriez-vous donner des éclaircissements? J'ai des questions à poser. Les cadeaux seront remis aux hôtes.
    Oui, ils seront remis à nos collègues en Norvège. Ils ne sont pas pour les membres du comité.
    C'est exact. Alors les membres du comité recevront leurs indemnités quotidiennes et ils paieront pour leurs propres...
    Oh, oui.
    Êtes-vous tous en faveur de ce texte? Des objections?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci. Nous aborderons maintenant les points énoncés à l'ordre du jour.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue au directeur général, au sous-commissaire principal et à la sous-commissaire pour les femmes du Service correctionnel du Canada. Nous vous demanderons de vous présenter, et d'énoncer brièvement vos antécédents...
    Est-ce que quelqu'un invoque le Règlement?

[Français]

    Monsieur le président, puisque vous avez abordé la question du voyage, je voulais vous faire part à nouveau de ma grande inquiétude par rapport aux voyages qui seront organisés et relativement au fait que nous devrions être vaccinés. En fait, je suis très inquiète que l'on prenne l'avion, qu'on aille dans plusieurs provinces et dans deux pays différents. On va être en contact avec plusieurs personnes. Je pense qu'il est fondamental qu'on trouve une solution au problème de la vaccination.

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr de la façon que nous pouvons aborder ce point. Je me demande si nous pourrions nous adresser à nos leaders parlementaires et à nos whips pour déterminer si quelque chose doit être fait à cet égard.
    Monsieur Norlock.
    Monsieur le président, je ne demande aucun traitement de faveur parce que je suis député. Je veux être traité de la même façon que tout autre citoyen du pays.
    Des voix: Bravo!
    Une voix: Je suis d'accord.
    Très bien. Je ne veux vraiment pas prendre plus de temps pour discuter de cela, car nous devons écouter nos témoins, mais je crois que vous avez fait connaître votre point de vue. Si nous devons discuter de ce sujet davantage, faisons-le à la fin de l'audience. D'accord?
    D'accord. Qui voudrait prendre la parole en premier et peut-être nous parler un peu de ses antécédents? Est-ce que chacun d'entre vous ferez un exposé?
    Deux personnes. Allez-y.
    Bonjour, tout le monde.
    Je m'appelle Marc-Arthur Hyppolite. Je suis sous-commissaire principal au Service correctionnel du Canada. J'ai étudié la criminologie, la sociologie et la psychologie à l'Université d'Ottawa. J'ai fréquenté le Collège de Maisonneuve à Montréal. Je suis ici pour représenter le Service correctionnel du Canada. J'ai 25 ans d'expérience dans des établissements correctionnels et j'ai travaillé à quelques reprises pendant de courtes périodes dans d'autres ministères.
    Je suis heureux d'être ici et j'aimerais vous remercier de l'occasion que vous me donnez de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Comme vous le savez, monsieur le président, les Autochtones du Canada ont une culture très riche et diversifiée. Malheureusement, cette histoire a fait en sorte qu'un nombre disproportionné d'Autochtones sont incarcérés dans les pénitenciers au Canada. Comme il est décrit dans le plan stratégique pour les services correctionnels offerts aux Autochtones et comme on peut le voir dans le récent cadre de responsabilisation, les mesures prises par le Service correctionnel du Canada illustrent la compréhension de cette histoire, la réalité sociale actuelle et l'importance des traditions culturelles dans la formulation d'une politique correctionnelle concrète pour les Autochtones qui relèvent de notre responsabilité.

  (1120)  

[Français]

    Comme le commissaire vous l'a mentionné en juin de cette année, nous avons constaté, au cours des 10 dernières années, d'importants changements dans le profil de la population carcérale. L'augmentation du nombre de délinquants qui ont des problèmes de santé mentale et de toxicomanie est un facteur important qui explique ces changements.
    Les délinquants autochtones sont généralement plus jeunes que les délinquants non autochtones. Ils présentent un risque plus élevé et ont davantage de problèmes de santé. Ils sont, par exemple, plus nombreux à souffrir de troubles causés par le syndrome d'alcoolisation foetale et de troubles mentaux.

[Traduction]

En outre, nous avons constaté que les délinquants autochtones avaient un taux beaucoup plus élevé de problèmes liés aux drogues et à l'alcool que les délinquants non-autochtones.
    Notre approche en ce qui concerne les services correctionnels offerts aux Autochtones est fondée sur le continuum de soins comprenant chaque étape de la peine imposée à un délinquant, de son admission à sa mise en liberté dans la collectivité. Le continuum de soins, qui a été créé en consultation avec les intervenants et les partenaires autochtones, a permis de créer de nouvelles occasions de répondre aux besoins des délinquants autochtones, comme il était décrit dans le plan stratégique de 2006 à 2011 portant sur les services correctionnels offerts aux Autochtones. Ce plan a été élaboré pour renforcer la capacité du Service correctionnel du Canada à intervenir de façon efficace auprès des délinquants faisant partie des premières nations et des communautés des Métis et des Inuits, et pour intégrer ce continuum au sein du Service correctionnel du Canada.
    Le Service correctionnel du Canada reconnaît que la culture autochtone est de nature holistique et que les aînés intègrent les plans d'intervention destinés aux délinquants autochtones et aident à leur élaboration afin de s'assurer que ces plans sont intégrés dans leurs programmes de guérison. En nous fondant sur notre expérience du travail auprès des délinquants autochtones, il est évident que les programmes qui comprennent des éléments culturels appropriés d'interventions correctionnelles sont plus efficaces auprès des Autochtones qui représentent des risques plus élevés et qui ont des besoins plus grands que les autres groupes faisant partie de la population.
    Comme vous le savez, les programmes correctionnels efficaces constituent un élément essentiel de la réduction de la récidive et de la préparation des délinquants en vue de leur retour sécuritaire au sein de la collectivité. Ainsi, les programmes comprennent l'intégration de principes correctionnels efficaces se rapportant aux approches autochtones traditionnels en matière de guérison et de spiritualité.
    Des recherches ont démontré que les programmes qui comprennent des éléments appropriés sur le plan culturel dans les interventions en milieu carcéral sont plus efficaces auprès des Autochtones qui représentent des risques plus élevés et qui ont de plus grands besoins que les autres groupes faisant partie de la population.

[Français]

    Par conséquent, nous offrons des programmes conçus expressément pour répondre aux besoins particuliers des délinquants autochtones. Nous travaillons en partenariat avec les collectivités autochtones et nous écoutons les conseils et les recommandations que nous donnent les comités consultatifs autochtones auxquels nous avons recours régulièrement pour nous aider à mettre en oeuvre nos plans d'action.

[Traduction]

    Le Programme pour délinquants autochtones toxicomanes, qui est offert aux niveaux d'intensité élevée et modérée, en constitue un bon exemple. Ce programme est destiné aux délinquants qui sont des hommes autochtones, et il vise à réduire le risque de rechute en ce qui concerne la toxicomanie et de récidive en matière d'actes criminels. Le programme est fondé sur une approche holistique afin de permettre l'examen des conséquences de la toxicomanie sur les plans physique, mental, émotionnel et spirituel dans un milieu sécuritaire et favorable. Du point de vue culturel, il répond également aux besoins des délinquants faisant partie des premières nations, des communautés inuites et des communautés métisses.
    Pour faire face aux besoins futurs, le Service correctionnel du Canada a investi près de 33 millions de dollars dans les services correctionnels offerts aux Autochtones en 2009-2010 dans le but de soutenir ce qui suit: l'expansion des programmes autochtones d'intervention et de guérison dans nos établissements et les pavillons de ressourcement dans les communautés; la conclusion de contrats avec un plus grand nombre d'aînés dans nos établissements et dans la collectivité; un nombre accru d'appartements et de maisons pour offrir un soutien plus intensif en matière de guérison; et la création d'un plus grand nombre d'emplois et d'occasions de placements pour les Autochtones.
    Je suis persuadé que nos recherches poussées et l'élaboration de programmes efficaces nous mettent sur la bonne voie afin de répondre au profil des délinquants et de répondre aux besoins précis des délinquants autochtones. Dans le cadre de ce travail, les mesures visant à aborder les problèmes de santé mentale et de toxicomanie constituent des priorités importantes.

  (1125)  

[Français]

    Je vous remercie de m'avoir permis de m'adresser à vous. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
     Par la suite, si vous voulez que la sous-commissaire pour les femmes fasse une présentation, cela sera possible.

[Traduction]

    Vous pouvez y aller, Madame.
    J'aimerais simplement vous donner un aperçu de mon parcours. Je travaille à Service correctionnel Canada depuis 25 ans. J'ai d'abord été agente correctionnelle à l'établissement de Kingston; j'ai donc gravi les échelons en occupant divers postes au sein de l'établissement, du côté de la sécurité. Pour ce qui est de la gestion de cas, je travaille à l'administration nationale depuis les 11 dernières années, et j'ai été nommée à mon poste actuel au cours de la dernière année. Voilà un aperçu de mon parcours.
    Je suis très ravie d’être ici aujourd’hui et j’aimerais vous remercier de me donner l’occasion de vous parler de certaines questions concernant les délinquantes. Il s’agit d’un domaine d’une importance clé pour le Service correctionnel du Canada et auquel j’accorde aussi une très grande importance personnelle à titre de sous-commissaire pour les femmes.
    J’aimerais d’abord, pour vous situer, formuler quelques commentaires généraux au sujet de la population de délinquantes au Canada. À tout moment, il y a un peu moins de 1 200 femmes qui purgent une peine de ressort fédéral au Canada: environ 44 p. 100 d’entre elles purgent leur peine dans l’un de nos établissements, tandis que les autres purgent leur peine dans la collectivité. Si on examine le profil démographique général des délinquantes, on constate qu’elles ont tendance à être pauvres, jeunes et peu instruites et à manquer de compétences relatives à l’emploi. Comparativement à la canadienne moyenne, les délinquantes affichent une incidence plus élevée de problèmes de toxicomanie et de santé mentale, et elles sont plus susceptibles d’avoir des antécédents de violence physique et/ou sexuelle. Bref, les délinquantes présentent des facteurs uniques qui influent sur leur comportement criminel, de sorte qu’elles ont besoin d’une approche unique adaptée à leurs besoins particuliers. Cette approche est couramment appelée approche « axée sur les femmes », car elle tient compte des réalités sociales des délinquantes et répond aux besoins individuels de toutes les délinquantes que nous prenons en charge.
    Comme le sous-commissaire principal vient de le souligner, le SCC a observé des changements importants dans le profil global des délinquants au cours de la dernière décennie. Cela s’applique également à la population de délinquantes. Ainsi, depuis une dizaine d’années, nous avons constaté que les délinquantes que nous prenons en charge étaient plus nombreuses à avoir des besoins en santé mentale ou à présenter des troubles de comportement complexes. Nous avons aussi constaté que les délinquantes purgeaient des peines beaucoup plus courtes. Ces exemples et de nombreux autres facteurs montrent indubitablement que notre organisation fait face à de plus grands défis quant à la façon dont elle doit gérer efficacement les délinquantes et les aider à renoncer à leurs activités criminelles et à faire des choix de vie plus positifs.
    L’un des moyens que nous prenons pour renforcer notre capacité à répondre aux besoins des délinquantes aux prises avec des troubles mentaux est de déterminer ces besoins dès le premier jour de leur admission. À cette fin, le SCC est en train d’améliorer son processus de dépistage et d’évaluation à l’admission avec la mise en place du Système informatisé de dépistage des troubles mentaux à l’évaluation initiale. En cernant mieux les troubles de santé mentale au tout début, nous sommes en meilleure position pour les traiter de façon proactive.
    Trois options s’offrent actuellement à nous pour traiter les délinquantes qui présentent des besoins plus élevés ou de graves troubles de santé mentale. Les deux unités de traitement psychiatrique intensif constituent la première option. Il y a une unité à l’Institut Philippe-Pinel et une autre au Centre psychiatrique régional des Prairies pour les délinquantes qui ont besoin d’être traitées dans un établissement psychiatrique.
    Les unités d’habitation en milieu de vie structuré mises en place par le SCC constituent la deuxième option. Ces unités, où les délinquantes vivent dans une aire distincte et suivent les programmes dans une autre aire de l’établissement, sont destinées aux délinquantes ayant une cote de sécurité minimale ou moyenne. Il s’agit d’un environnement thérapeutique où les membres d’une équipe interdisciplinaire peuvent offrir 24 heures par jour des traitements spécialisés dans le domaine des interventions correctionnelles, de la réadaptation et de la santé mentale.
    Enfin, pour les délinquantes qui exigent une intervention intensive similaire mais qui ont une cote de sécurité maximale, le SCC a construit des unités de garde en milieu fermé dans chacun des cinq établissements régionaux pour femmes. Ces unités ont adopté des mesures de sécurité améliorées et une approche interdisciplinaire semblable à celle qui est utilisée dans les unités d’habitation en milieu de vie structuré, qui permet d’offrir des interventions, des programmes et des traitements intensifs à ces délinquantes à risque élevé.
    Par ailleurs, la thérapie comportementale dialectique – ou TCD – et la réadaptation psychosociale sont des interventions importantes destinées aux délinquantes qui ont des besoins en santé mentale. La TCD est un traitement de santé mentale exhaustif destiné aux délinquantes ayant de graves problèmes émotifs et comportementaux. La TCD s’attaque à ces problèmes en mettant l’accent sur l’acquisition de compétences dans le domaine des émotions, des relations, des processus cognitifs et du stress. La réadaptation psychosociale répond aux besoins des délinquantes dont le fonctionnement cognitif est lent. Elle les aide à reprendre leur vie en main en les aidant à acquérir des compétences psychosociales et à établir des objectifs et des plans pour les préparer à mener une vie autonome.
    En outre, comme la majorité des délinquantes sont des survivantes de violence et de traumatismes, des interventions visant à traiter ces questions leur sont aussi offertes. Des séances de counseling collectives ou individuelles sont offertes à toutes les délinquantes pour les aider à faire face aux conséquences importantes que ces actes et d’autres expériences ont eues sur leur vie.
    Comme je l’ai déjà mentionné, outre les troubles de santé mentale, les statistiques montrent que jusqu’à 80 p. 100 des délinquantes incarcérées ont des problèmes de toxicomanie. Nous devons absolument travailler en collaboration avec les délinquantes pour cerner ces problèmes et traiter leurs dépendances de façon proactive. Le SCC a élaboré une série de programmes destinés expressément aux délinquantes et j’aimerais décrire brièvement deux programmes qui visent à les aider à traiter leurs dépendances et leurs comportements violents.

  (1130)  

    Le Programme d'intervention pour délinquantes toxicomanes est conçu pour répondre aux besoins de toutes les délinquantes dans le domaine de la toxicomanie. Il comporte plusieurs niveaux d'intervention destinés aux délinquantes depuis leur entrée à l'établissement jusqu'à l'expiration de leur mandat. Des programmes de suivi sont aussi offerts dans la collectivité.
    Le deuxième exemple est le programme Esprit de la guerrière, qui a été élaboré par les Native Counselling Services of Alberta pour répondre aux besoins des délinquantes autochtones; il est plus particulièrement axé sur la violence, la toxicomanie et l'association à un gang, et l'objectif global est de réduire la récidive.
    En terminant, j'aimerais mentionner que je crois que les programmes et les interventions que nous offrons pour permettre aux délinquantes de faire de meilleurs choix sont appropriés et efficaces. Le SCC s'efforce depuis longtemps de répondre aux besoins des délinquantes, mais il lui reste encore du travail à faire. La nature de notre travail est telle que nous devons continuellement évoluer et nous adapter pour relever de nouveaux défis. Je crois que nous sommes sur la bonne voie et je suis impatiente de discuter de certaines de ces questions avec vous aujourd'hui.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Madame Allgaier, je vais vous donner l'occasion de me parler un peu de vous avant de passer aux questions et commentaires, parce que l'on ne vous a pas présentée officiellement.
    Je suis Lisa Allgaier, la directrice générale des initiatives pour les Autochtones. Je suis en poste depuis novembre 2002. Il s'agit de mon premier poste au sein du gouvernement fédéral. Auparavant, j'ai travaillé pour la Colombie-Britannique à titre de directrice pour la santé des Autochtones.
    Je travaille dans, avec et pour la communauté autochtone depuis vingt ans maintenant, soit toute ma carrière professionnelle.
    Je fais partie des premières nations. Ma famille vient du Nord du Manitoba, des communautés des premières nations de Norway House et Cross Lake, et j'ai surtout grandi en Colombie-Britannique.
    Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui. Merci de m'avoir invitée.
    Merci beaucoup.
    Comme c'est l'usage habituel, nous commencerons par le Parti libéral, l'opposition officielle, pendant sept minutes, s'il vous plaît.
    Monsieur Holland.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Merci de nous consacrer du temps.
    M. Sapers, l'enquêteur correctionnel, critique depuis longtemps le Service correctionnel du Canada parce qu'il refuse de confier à la sous-commissaire pour les femmes le plein pouvoir d'agir directement en ce qui concerne toutes les questions touchant les femmes incarcérées, étant donné que beaucoup de gens croient qu'en confiant ces pouvoirs à la sous-commissaire pour les femmes, elle serait davantage en mesure de servir les intérêts des détenues. En fait, l'enquêteur correctionnel est allé jusqu'à dire que si on avait donné suite aux recommandations de la Commission Arbour, il est fort possible que la tragédie d'Ashley Smith ne serait pas survenue.
    Pourquoi ces recommandations n'ont-elles pas été prises en compte, et pourquoi les préoccupations de M. Sapers n'ont-elles pas été reconnues et mises en oeuvre?
    Je commence par M. Hyppolite.
    Monsieur le président, nous connaissons la recommandation de l'enquêteur correctionnel en ce qui concerne le fait de donner une autorité hiérarchique à la sous-commissaire pour les femmes autochtones. Cette question a été examinée à plusieurs reprises, et nous sommes d'avis que le rôle fonctionnel joué par la sous-commissaire pour les femmes au niveau national est la façon correcte et efficace de procéder.
    Les sous-commissaires de nos cinq régions sont directement responsables de la prestation de programmes et de services correctionnels aux délinquantes. Le rôle fonctionnel qui nous incombe est un rôle très important; nous sommes responsables de l'établissement de politiques. Récemment — et je donnerais la parole à Mme Elizabeth Van Allen à ce sujet —, nous avons établi une définition claire des rôles et des responsabilités entre le sous-commissaire et la sous-commissaire pour les femmes. Nous demeurons convaincus que la bonne façon de faire ne consiste pas à confier des responsabilités hiérarchiques directes à la titulaire du poste, mais à travailler en collaboration avec tous les partenaires des régions pour assurer la prestation de services correctionnels efficaces.
    D'accord. Vous êtes ne souscrivez donc pas aux préoccupations soulevées par M. Sapers.

  (1135)  

    Je vais donc poser la question à Mme Van Allen, si vous permettez.
    Estimez-vous à ce stade-ci que les recommandations de la Commission Arbour qui portent spécifiquement sur votre poste ont été effectivement mises en oeuvre ou, au contraire, qu'il subsiste des manques eu égard aux commentaires de Mme Arbour?
    En ce qui concerne le poste de sous-commissaire pour les femmes, la structure de gouvernance retenue par le SCC est celle qui convient. Nous en avons discuté à de nombreuses reprises en comité exécutif et c'est la conclusion à laquelle nous en sommes arrivés.
    Après mon accession au poste en décembre 2008, nous avons conçu un document énonçant les rôles et les responsabilités. Nous l'avons diffusé largement dans l'organisation. J'ai exercé un vigoureux leadership fonctionnel au niveau du travail avec les régions pour renforcer les relations avec les SCR. Comme vous le savez, les sous-commissaires régionaux sont épaulés par des sous-commissaires adjoints qui ont pour responsabilité d'assurer la gestion au quotidien des établissements.
    J'ai établi des relations solides avec ce groupe qui est responsable des établissements pour femmes, avec les directeurs d'établissement pour femmes, et nous nous réunissons quatre fois par année. Nous abordons alors des sujets d'intérêt mutuel et des préoccupations communes. Nous avons également des conférences téléphoniques mensuelles. Donc, nous avons de solides relations de travail et je crois qu'elles fonctionnent bien.
    Nous savons en ce moment que, d'après Don Head, plus du quart des détenues sont aux prises avec de graves problèmes de santé mentale. D'autres avancent un chiffre plus élevé, mais le quart au moins d'entre elles connaissent de graves problèmes de santé mentale.
    Nous savons que le nombre de détenues autochtones est effarant, surtout si on le compare à la population de détenues non autochtones — il est de plus de 32 p. 100. Nous savons que les problèmes de toxicomanie touchent plus de 75 p. 100 des détenues dans nos prisons. Ces chiffres sont épouvantables.
    Je sais bien que vous avez fait allusion à deux ou trois programmes, mais la réalité, c'est que le nombre des détenues est appelé à augmenter encore. L'impact sur notre système de détention en sera d'autant plus grand et les ressources qui vous ont été accordées n'ont pas tellement augmenté. J'irais jusqu'à dire qu'elles ne sont même pas suffisantes pour maintenir le statu quo avec l'afflux de nouveaux détenus.
    Au vu de ces chiffres, comment pouvez-vous dire que la situation s'améliore? Moi je vois plutôt une détérioration de la situation. Voilà ce qui m'inquiète.
    Nul doute que le service soit aux prises avec un certain nombre de défis, comme vous l'avez mentionné. Nous observons effectivement une augmentation du nombre des femmes présentant des problèmes de santé mentale parmi celles que notre système accueille. Cela ne fait aucun doute. La situation n'est pas différente dans le cas des femmes autochtones et effectivement, la prévalence des problèmes de santé mentale chez les femmes autochtones est supérieure à celle des femmes non autochtones.
    Mais comme je l'ai mentionné, nous avons un certain nombre de programmes et de mécanismes d'intervention. Je viens d'en mentionner deux, mais nous avons une gamme complète de programmes destinés aux Autochtones en général. Nous avons des programmes pour les aînés, nous avons les unités des Sentiers autochtones et nous avons des programmes conçus pour répondre aux besoins des contrevenants autochtones en tenant compte des facteurs culturels.
    En ce qui concerne le problème de santé mentale, nous nous sommes dotés d'une stratégie intégrée en santé mentale que nous sommes actuellement en train de mettre en place.
    Excusez-moi de vous interrompre, mais le problème, c'est qu'un enquêteur correctionnel nous dit que nous utilisons en fait nos prisons comme des hôpitaux et que c'est un échec lamentable, que les programmes, les services et la formation dispensés aujourd'hui ne fonctionnent pas. Et le problème, c'est aussi que nous observons une augmentation de la population, comme vous venez de le dire, et que l'on ne voit guère d'augmentation correspondante des budgets.
    Il y a peut-être une petite augmentation du budget, mais seriez-vous d'accord qu'elle ne pourra permettre au mieux que de maintenir le statu quo? Quand l'augmentation de la population pose un problème qui va en s'aggravant tandis que le budget pour y faire face n'augmente que modestement, alors même qu'on est déjà aux prises avec les problèmes relevés par l'enquêteur correctionnel, selon lequel notre gestion de ces problèmes de santé mentale est un échec, se pourrait-il que les ressources que nous mettons en oeuvre ne nous permettent pas vraiment de garder la tête hors de l'eau et de maintenir le statu quo?
    Le temps est écoulé, mais vous pouvez répondre brièvement.

  (1140)  

    Monsieur le président, le Service correctionnel du Canada s'est vu octroyer dans son budget de 2008 la somme de 29,1 millions de dollars au titre de l'amélioration de la santé mentale. Nous nous sommes dotés d'une stratégie globale en santé mentale pour les établissements, à laquelle s'en ajoute une autre pour la communauté.
    Quand les femmes autochtones arrivent à l'évaluation initiale, on évalue évidemment leurs besoins. Nous disposons de cinq centres régionaux de traitement pour faire face aux problèmes de santé mentale qui se posent chez tous les délinquants, y compris les Autochtones, et, dans une certaine mesure, les femmes autochtones également.
    La stratégie en santé mentale comporte donc six volets. Le premier, à l'arrivée du détenu, consiste à procéder à une évaluation informatisée; c'est un mécanisme que nous venons de mettre en place. Le deuxième consiste à fournir des services en santé mentale répondant aux besoins immédiats. Ensuite, il y a les besoins de niveau intermédiaire, c'est-à-dire que les délinquants qui ont des problèmes de santé mentale qui ne sont pas suffisamment aigus pour être dirigés vers un établissement psychiatrique sont placés dans des centres de soutien.
    De plus, nous disposons en ce moment d'un certain financement assorti d'une clause de révision en 2010, une fois l'examen du budget terminé, et le Service correctionnel a l'intention d'utiliser des fonds d'inexécution jusqu'à ce qu'il puisse s'assurer un financement plus constant. Les déliquants qui présentent des problèmes de santé mentale aigus sont placés dans cinq établissements psychiatriques. Nous avons également un certain nombre de contrats avec des professionnels de la santé mentale dans la communauté qui sont eux aussi appelés à assurer des services. Enfin, nous voulons également avoir un volet formation qui permettra au personnel d'interagir de façon professionnelle et appropriée sur le plan culturel avec les délinquants atteints de maladie mentale aiguë.
    Merci beaucoup. Nous avons largement dépassé notre temps.
    Monsieur Ménard, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    En 1996, la juge Arbour a présenté son rapport à la suite d'une commission d'enquête sur des événements qui avaient eu lieu à la prison des femmes de Kingston. Elle avait fait 14 recommandations. Ont-elles toutes été mises en vigueur?

[Traduction]

    Comme vous le savez, les recommandations étaient assez nombreuses. Le SCC ne les a pas toutes acceptées, mais il en a appuyé l'immense majorité et la plupart d'entre elles ont été mises en oeuvre.
    La nature de certaines des recommandations est telle que le travail devra continuer. Il faudra par exemple que j'examine avec les provinces et les territoires des mécanismes de coopération sur des aspects tels que la réalisation commune des programmes ou la formation conjointe du personnel ainsi que des ententes d'échange de services; nous continuerons d'y travailler.
    Nous avons fait paraître un rapport sur les progrès réalisés depuis dix ans — et je pourrais le fournir à votre groupe — qui reprend clairement chacune des recommandations par son numéro en indiquant dans chaque cas les progrès accomplis à ce jour, si vous souhaitez avoir une réponse plus complète.

[Français]

    Plus tard, en 2003, la Commission canadienne des droits de la personne a produit un rapport qui s'intitulait « Protégeons leurs droits », où elle faisait l'examen systémique des droits de la personne dans les services correctionnels destinés aux femmes purgeant une peine de ressort fédéral. Ce rapport définissait trois principes directeurs. Elle-même avait fait 19 recommandations.
    Pourriez-vous nous dire lesquelles de ces recommandations ont été acceptées et mises en vigueur, et celles qui ont été refusées?

[Traduction]

    Le SCC a accepté la plupart des recommandations de la CCDP, la Commission canadienne des droits de la personne. Chaque année, nous lui faisons rapport des progrès accomplis relativement à chacune des recommandations. J'ai rencontré la CCDP deux fois au cours des six derniers mois environ.
    Certaines recommandations, pas beaucoup, n'ont pas encore été pleinement mises en oeuvre. Nous travaillons actuellement à régler les trois volets qu'il reste.
    Une importante recommandation qui n'a pas été mise en oeuvre pleinement encore est issue de ce rapport et je voudrais m'y arrêter. Il s'agit de la mise au point de l'échelle de classement initial par niveau de sécurité pour les femmes. Le retard s'explique en partie par le fait que la mise au point d'un outil de recherche solidement étayé exige l'examen d'un certain nombre de cas. Le nombre restreint de délinquantes incarcérées allonge forcément le temps de collecte des données et de mise à l'essai du prototype. Nous poursuivons nos travaux à ce sujet.
    Aucune des recommandations non encore prises en compte n'est reliée à la santé mentale ou à la toxicomanie. Certaines constatations nous incitent toutefois à poursuivre nos efforts pour renforcer le recours à des ententes aux termes de l'article 84 pour la supervision des délinquantes autochtones à l'intérieur des communautés autochtones. Par ailleurs, certaines des recommandations qui ont été mises en application, entre autres celle concernant le Pavillon de ressourcement Okimaw Ohci à Maple Creek, en Saskatchewan, ont eu des répercussions positives sur ces sous-groupes. Le rapport sur les progrès réalisés depuis dix ans que j'ai mentionné présente une ventilation recommandation par recommandation que nous pouvons vous fournir si vous souhaitez avoir davantage de détails relativement à chaque recommandation.

  (1145)  

[Français]

    J'aimerais maintenant vous entendre parler de Joliette. La publicité a été considérable quand la prison de Joliette a été construite. Il y avait un certain nombre d'articles à ce sujet, mais je dois dire qu'à l'époque, on accordait plus d'importance à la qualité architecturale de la prison et à ses quartiers de vie. Cela fait quand même un certain temps que la prison de Joliette a été créée, j'imagine qu'on y a mis des programmes sur pied.
    Cela s'avère-t-il une expérience positive pour les femmes qui l'ont fréquentée? Et si c'est une influence positive, peut-on en tirer des leçons également pour le traitement des hommes?

[Traduction]

    Permettez-moi de rappeler un peu l'historique des pénitenciers pour femmes. Évidemment, on a demandé pendant de nombreuses années la fermeture de la Prison des femmes avant que cela ne se produise finalement, après quoi on a créé les cinq établissements régionaux pour femmes. Comme pour toute chose, il y a toujours des ratés et des défis en cours de route lorsqu'on établit quelque chose de nouveau. Par exemple, au départ, l'établissement ne comptait pas de milieu fermé pour gérer les détenues difficiles qui avaient besoin d'être structurées et supervisées davantage; on y a remédié par la suite.
    Mais, en fin de compte, nous avons mis en place des établissements fondés sur les cinq principes généraux du rapport d'un groupe d'étude intitulé La création de choix, lesquels sont le pouvoir de contrôler sa vie, des choix valables et responsables, le respect et la dignité, un environnement de soutien, et la responsabilité partagée. Je crois que c'était l'objectif des établissements, et c'est la façon dont ils sont mis sur pied. C'est un mode de vie commun: elles vivent dans des maisons ensemble; elles doivent apprendre à s'entendre et à se soutenir mutuellement. Je pense qu'il s'agit en grande partie d'un environnement favorable, et cela fonctionne pour les femmes.

[Français]

    Ma question est un peu plus simple que cela. En quelques mots, est-ce que Joliette est une expérience positive? Sinon, n'a-t-elle pas réalisé les espoirs que l'on y avait placés?

[Traduction]

    Selon moi, l'ouverture des cinq établissements régionaux s'est avérée une expérience positive.

[Français]

    Car vous savez qu'il fallait la défendre: dans une certaine partie de l'opinion publique, c'était considéré presque comme une colonie de vacances.
    Monsieur Hyppolite, je crois que vous voulez intervenir.
    Une colonie de vacances: le Service correctionnel est en désaccord quant à ce genre d'évaluation.
    Moi aussi.
    Comme vous le savez, les établissements sont construits d'une façon qui reflète les valeurs canadiennes. Les principes de notre mission sont très clairs à ce sujet. Les concepts de réhabilitation et de traitement des délinquants et délinquantes sont très clairs dans un pays aussi civilisé que le nôtre.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Davies, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord dire que, selon moi, il se fait beaucoup de bonnes choses dans notre système correctionnel, et je vous en félicite. Je tiens également à mentionner qu'à mon avis, il y a beaucoup de très bonnes intentions et des gens extrêmement dévoués dans notre système correctionnel. C'est important de le préciser, parce que nous avons tendance à mettre l'accent sur le négatif, mais il y a du positif.
    Ceci étant dit, je crois qu'il est plus productif pour nous de parler davantage de notre point faible. Je vais citer un extrait du rapport de M. Sapers et vous demander vos commentaires. Voici ce qu'il dit:
[...] je suis toujours déçu de la lenteur à laquelle les changements sont apportés et par l'absence de résultats concrets montrant une amélioration dans la prestation et la qualité des soins et des services offerts aux délinquants atteints de troubles mentaux. Comme je l'ai mentionné auparavant, les intentions sont bonnes, mais le système n'a pas la capacité de réagir et de s'adapter à la situation. De façon générale, la situation des délinquants atteints de problèmes de santé mentale ne s'est pas beaucoup améliorée depuis que mon Bureau a signalé pour la première fois le triste état des choses en 2004.
    Avez-vous des commentaires? M. Sapers a-t-il tort ou raison? Qu'avez-vous à dire?

  (1150)  

    Nous sommes d'accord avec M. Sapers sur le fait que les problèmes de santé mentale représentent de grandes difficultés pour le Service correctionnel du Canada, mais nous ne sommes pas d'accord avec lui lorsqu'il affirme qu'aucun progrès n'a été réalisé.
    Depuis 2002, le Service correctionnel du Canada s'efforce énergiquement de mettre en oeuvre une stratégie globale en matière de santé mentale, et nous sommes en train de terminer la vaste majorité des phases de cette stratégie.
    Quand un délinquant arrive à un établissement, avant il signalait ses problèmes lui-même, mais maintenant nous avons mis en place un processus d'évaluation informatisé grâce auquel nous pouvons rapidement cerner les problèmes de santé mentale. Ensuite, le délinquant est pris en charge. On dresse le plan correctionnel et le plan de ressourcement de cette personne, ce qui permet de déterminer le genre d'intervention nécessaire.
    Bien sûr, nous faisons face à des difficultés, en particulier pour ce qui est de conserver et de recruter des professionnels de la santé mentale. Nous mettons en place un processus de recrutement des ressources humaines très dynamique, mais nous avons des problèmes de maintien de l'effectif. Nous avons augmenté la capacité des centres de traitement régionaux et nous avons presque multiplié le nombre de contrats que nous avons avec des professionnels de la santé mentale.
    Nous avons également pris part à de nombreuses démarches horizontales avec nos partenaires et intervenants. Par exemple, nous avons parlé de la question de la santé mentale avec les responsables des services correctionnels des gouvernements territoriaux. Nous étudions constamment les pratiques exemplaires. La commission de la santé mentale, présidée par —
    Monsieur, je vais vous interrompre, parce que j'ai peu de temps. Vous avez eu la chance de faire votre discours. J'aimerais parler de certaines choses.
    Le problème, monsieur, c'est que ce que vous dites ici ne correspond pas à la réalité des prisons. Lorsque je vais dans les prisons, et j'en ai visité huit ces deux derniers mois, tout le monde me dit — les détenus, les professionnels qui travaillent là — que le diagnostic ou l'évaluation n'est pas approprié lorsque les gens entrent en prison. Les services de counselling ne sont pas adéquats. En fait, pratiquement toutes les personnes à qui j'ai parlé m'ont affirmé qu'il n'y avait à peu près aucun service de counselling dans notre système carcéral. Les gens veulent des séances individuelles de counselling thérapeutique en santé mentale chaque semaine, aux deux semaines ou chaque mois, et ils ne les obtiennent pas.
    J'ai appris qu'en Colombie-Britannique, 40 p. 100 des postes de conseillers, d'ergothérapeutes et de conseillers en toxicomanie sont vacants. J'en conclus, monsieur, que malgré toutes les discussions sur le terrain, dans nos prisons, les prisonniers ne reçoivent pas les services de santé mentale qui leur sont offerts. Quels sont vos commentaires?
    J'admets que nous avons sans doute des difficultés dans certains secteurs, mais je ne connais aucun délinquant qui a été diagnostiqué comme atteint de problèmes de santé mentale dont les besoins n'ont pas été satisfaits. Là où nous n'avons pas de professionnels sur place — par exemple, si quelqu'un part —, nous avons la capacité de recruter des personnes de la collectivité pour offrir les services.
    Il y a place à l'amélioration dans de nombreux secteurs, mais je dois vous dire qu'un service global existe du début de l'admission du délinquant, ensuite dans la collectivité et le continuum des soins offerts à ce délinquant atteint de troubles mentaux.
    En fait, je peux vous dire que lorsque le délinquant a purgé sa peine, nous avons établi dans la collectivité ce que nous appelons la planification des sorties, c'est-à-dire qu'avant que le délinquant atteint de problèmes de santé mentale soit libéré, il y a une stratégie complète, ce qui comprend aussi un cercle de soutien dans la collectivité, et le délinquant est mis en relation avec des ressources dans la collectivité qui peuvent satisfaire ses besoins et lui offrir les services nécessaires en matière de santé mentale.

  (1155)  

    D'accord. J'aimerais maintenant parler un peu de la situation des femmes. À ce que je sache, le Canada est l'un des seuls pays importants dans le monde qui n'a pas de programme mère-enfant dans ses prisons. On m'a également dit que cela peut être très efficace pour les femmes en prison. Souvent, la plus grande motivation des femmes est de renouer des liens avec leurs enfants. Selon mes renseignements, 28 pays comptent des programmes visant à accueillir des enfants dans les prisons, et le Canada n'en fait pas assez à cet égard.
    Je me demande si vous avez des conseils ou des idées sur ce sujet.
    En fait, nos cinq établissements régionaux pour les femmes offrent le programme mère-enfant. Nous y avons apporté quelques changements il y a environ deux ans, mais le programme existe et les femmes peuvent s'en prévaloir.
    Puis-je vous demander combien d'enfants participent à ce programme au pays?
    Je ne parle qu'au nom des délinquants fédéraux. Depuis son entrée en vigueur, il n'y a jamais eu un grand nombre de femmes qui ont tiré avantage du programme.
    Puis-je demander pourquoi?
    Oui, mais...
    Vous ne le savez pas?
    Pour être honnête avec vous, je ne sais pas pourquoi. Cependant, à l'heure actuelle — et je peux vérifier pour vous — je crois qu'une seule personne participe au programme.
    C'est ce qu'on m'a dit. Au Canada, qu'on dise avoir un programme mère-enfant et qu'un seul enfant au pays y participe, j'en conclus... C'est presque comme si nous n'avions pas de programme du tout. Je suggère que nous examinions la question.
    J'aimerais parler rapidement de la ségrégation.
    Je n'ai plus de temps?
    Votre temps est écoulé, je suis désolé.
    Madame Glover, s'il vous plaît.

[Français]

    Bienvenue à tous les témoins. C'est un honneur de vous rencontrer.

[Traduction]

    Je vais continuer sur ce que M. Davis a dit, parce que je suis intéressée à savoir de quelle façon nous améliorons les relations entre les femmes et leurs enfants.
    J'aimerais savoir si vous encouragez activement la relation entre les délinquantes et leurs enfants en dehors des établissements. Est-ce que vous posez des gestes concrets dans ce sens?
    Nous offrons des programmes relatifs au rôle parentale des femmes. En ce qui a trait à savoir si l'enfant doit rester ou non avec sa mère, la décision est prise dans le meilleur intérêt de l'enfant. La communauté est impliquée dans le processus lorsque nous prenons cette décision; ce ne sont pas uniquement les SCC qui prennent cette décision. Les services d'aide à l'enfance provinciaux sont impliqués dans l'évaluation, ainsi que dans les décisions, et l'on tient compte de leur collaboration. Manifestement, nous voulons encourager la relation entre une mère et son enfant.
    Avec les changements qui ont été apportés au programme il y a quelques années... Peut-être que les SCC pourraient mieux communiquer avec les institutions afin de s'assurer que tous comprennent bien que le programme existe toujours et qu'il est disponible pour les délinquantes qui entrent en prison et qui ont des enfants à leur charge.
    Je suis heureuse de l'entendre. Je sais bien qu'elle est encouragée, simplement parce que ma mère a fait toute sa carrière dans un établissement correctionnel.
    Je suis contente que vous ayez dit que les intérêts de l'enfant doivent être pris en considération. Sans cet élément, nous n'avons pas une image complète. En fait, nous pourrions, placer des enfants dans des milieux à risque si ça ne faisait pas partie du programme d'évaluation. Donc, merci d'avoir clarifié ce point.
    J'aimerais également discuter de ce que vous avez dit concernant les programmes de suivi dans la communauté, parce que nous savons tous que tant qu'elles reçoivent des traitements et qu'elles profitent des programmes dans les installations... Qu'est-ce qui arrive lorsqu'elles quittent les installations? Les récidives, les rechutes de toxicomanie et tous ces types de situation surviennent. Quels sont les programmes de suivi que vous avez, puisque vous en avez parlé dans votre discours?
    Ce qu'il y a avec les programmes dans la communauté c'est que... Le défi avec les délinquantes, bien sûr, est qu'elles sont dispersées sur le plan géographique et que leur nombre est moins élevé. Elles représentent donc un plus grand défi pour nous.
    Nous avons un programme de suivi qui traite l'abus de drogues ou d'alcool que nous pouvons offrir aux femmes dans la communauté. Nous essayons d'offrir ces programmes à de petits groupes si c'est ce qu'il faut. Nous tentons également de travailler avec nos partenaires dans la communauté pour que ces services soient offerts aux femmes qui en ont besoin.

  (1200)  

    Quels partenaires?
    Des partenaires comme la Société Elizabeth Fry, la Société John Howard, et nous essayons de les mettre en contact avec les services qui existent déjà dans les communautés.
    Qu'en est-il des partenaires en santé mentale?
    C'est là une grande partie de la planification des sorties de nos délinquants, lorsqu'ils sont en institution, nous tentons de travailler avec...
    Pour ce qui est de nos cas les plus difficiles, l'établissement, en fait, travaille en étroite collaboration avec les gens des libérations conditionnelles qui préparent le retour des délinquantes dans la communauté, déterminent les besoins de chaque délinquante et ce que la communauté doit offrir, ils mettent en place les services appropriés et soutiennent la délinquante. Lorsque nous le pouvons, nous travaillons avec nos partenaires et nous appuyons sur eux.
    En fait, nous avons eu récemment un dossier particulièrement difficile pour lequel nous avons été en mesure d'établir un très bon plan de soutien pour la délinquante et avons travaillé étroitement avec les gens de Elizabeth Fry pour aider cette femme à réintégrer la communauté. Je suis heureuse de dire que son retour a été couronné de succès et qu'elle reste dans la communauté, non sans difficulté bien sûr.
    Allez-y, monsieur Hyppolite.
    J'aimerais être très spécifique en ce qui concerne les services communautaires en santé mentale qui sont fournis. Je peux vous dire précisément que 50 nouveaux postes ont été créés pour soutenir les services communautaires en santé mentale: 30 dans la communauté répartis dans 16 bureaux de libération conditionnelle. De plus, 14 nouveaux postes pour fournir des services de planification des sorties aux délinquantes en établissement ainsi que 5 postes de coordonnateur régional ont été créés pour coordonner la libération de ces délinquantes dans la communauté.
    Ceci est pour répondre directement à la question de M. Don Davies.
    Le 31 mars 2009, 97 p. 100 des postes de première ligne dans notre stratégie en santé mentale étaient comblés, alors quand on entend des histoires sur le manque de postes et le manque de service... Un total de 471 recommandations ont été faites pour les services de planification des sorties en clinique, et 540 recommandations ont été faites pour des services de spécialistes en santé mentale communautaires; sur un total de 923 délinquantes qui ont été référées, 88 ont été référées pour les deux services. Nous parlons donc d'un total de 923 délinquantes depuis que nous avons instauré notre stratégie communautaire en santé mentale. Je pourrais continuer encore et encore.
    Je peux vous dire également que parmi les 52 établissements, 43 contrats ont été signés pour fournir des services là où nous avons identifié des lacunes, ce qui comprend également le traitement des troubles causés par l'alcoolisation foetale. Puis-je ajouter qu'un bon nombre de nos employés, plus spécifiquement les responsables des services correctionnels (nous commençons par former les gestionnaires) qui entrent en contact avec les délinquants qui ont des problèmes de santé mentale sont formés. Je crois que la dernière fois que j'ai vérifié, et je peux encore vérifier, 1 600 de nos employés avaient été formés.
    C'est très bien.
    Est-ce qu'il me reste un peu de temps monsieur le président?
    Vous avez moins d'une demi-minute.
    J'aimerais parler de la culture autochtone et des enseignements traditionnels. Je suis très heureuse d'apprendre que vous en faites plus dans ce domaine. J'ai personnellement rencontré quelques Autochtones qui ont un réel sentiment d'appartenance et d'ouverture lorsqu'on leur permet de pratiquer ces enseignements. Je veux donc vous féliciter pour cela, et j'espère que cela continue dans le suivi en communauté parce que ce sont les anciens qui les initient dans les établissements correctionnels, et j'espère qu'ils sont encouragés à entretenir ces relations à l'extérieur.
    Vous avez fait une observation intéressante lors de votre exposé, madame Van Allen, au sujet des femmes qui obtiennent des peines d'emprisonnement de plus en plus courtes. Pourriez-vous expliquer cette observation?
    Je crois que 61 p. 100 des femmes qui entrent dans nos institutions servent aujourd'hui des peines beaucoup plus courtes, moins de quatre ans, ce qui veut dire que nous avons moins de temps pour travailler avec elles à l'intérieur et les préparer à leur retour dans la communauté. C'est un autre défi auquel nous devons faire face.
    Est-ce que c'est à cause du type d'infraction ou ...? Avez-vous des renseignements à ce sujet?

  (1205)  

    Malheureusement non. Nous pourrions creuser un peu plus loin, mais le fait est que les peines d'emprisonnement sont plus courtes. C'est ce que nous observons en ce moment.
    Merci.
    Nous allons devoir conclure maintenant. Merci.
    M. Oliphant, ensuite M. Norlock.
    Merci à vous tous.
    Monsieur le président, j'ai un appel au Règlement.
    Je veux simplement clarifier un certain point afin que nous gérions notre horaire adéquatement. Selon l'horaire que vous nous avez donnée, ces témoins sont ici de 11 h à midi, et de midi à 13 h, nous devons écouter les deux prochains témoins. Je demande simplement comment nous allons faire cela.
    C'est une excellente question. Je suis à la disposition du comité. Nous avons commencé 15 minutes en retard parce que le groupe qui occupait la pièce n'a pas libéré les lieux à temps. Je pensais séparer le temps en deux et permettre à ces personnes de continuer un peu plus tard que midi et, puisque nous sommes ici pour trois heures, nous pourrions laisser le groupe continuer un peu plus tard que 13 h.
    Est-ce que cela vous va? Aimeriez-vous faire une pause maintenant?
    Je suggère que nous accordions l'heure au complet à ces témoins, et l'heure au complet aux prochains témoins. Nous pourrions retrancher du temps au cours de la dernière heure, qui est facultative, pour examiner la LERDS. Je préférerais entendre les témoins.
    Pourquoi cela? Nous pourrions avoir une heure au complet pour chaque témoin.
    Alors vous voulez que nous nous rendions à environ et quart?
    Oui, à la condition que nous accordions une heure au prochain témoin.
    D'accord.
    Je crois que nous pourrions probablement discuter de la LERDS.
    Est-ce que les membres du comité sont d'accord?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Très bien.
    Monsieur Oliphant.
    Merci à tout le monde pour l'important travail que vous effectuez. J'ai cependant moins de remerciements à faire en ce qui concerne le plaidoyer inspiré en faveur du statu quo. Je crois que c'est bon et loyal. Mais je ne crois pas que le commissaire principal soit aussi engagé envers le statu quo que vous l'avez été aujourd'hui. Je peux le comprendre, compte tenu des articles de journaux que j'ai lus ce matin au sujet des nouveaux fonctionnaires qui doivent adhérer au Plan d'action économique du gouvernement. Vous devez savoir que vous avez la permission de nous aider à mieux faire fonctionner le système. C'est notre raison d'être.
    Madame Van Allen, à la fin de votre témoignage, vous avez dit qu'il vous restait du travail à faire. J'aimerais mettre l'accent sur le travail qu'il nous reste à faire. Ce travail pourrait porter sur la capacité se rapportant aux diagnostics ou aux infrastructures matérielles. Il peut s'agir de problèmes liés à la dotation — rassembler les membres du personnel qui ont reçu une formation professionnelle et une formation appropriée de sensibilisation aux différences culturelles. Sinon, ça pourrait représenter un problème en ce qui concerne la participation aux programmes des personnes incarcérées. Le temps vous appartient. Nous avons besoin de votre expertise pour nous aider à mieux faire notre travail.
    Nous avons un problème en ce qui concerne notre capacité en matière d'infrastructure pour nous occuper des délinquants atteints d'une maladie mentale. Pour les femmes incarcérées dans des établissements à sécurité minimale et moyenne, nous avons un bon programme. Nos milieux de vie structurés fonctionnent bien, et nous avons reçu des félicitations à cet égard. En réalité, récemment, un comité d'examen a fait des commentaires concernant les milieux de vie structurés, comme l'avait fait Constance Glube dans son évaluation du Service correctionnel du Canada. Ça marche très bien.
    C'est plus difficile lorsque nous avons affaire à des femmes qui ont des problèmes de comportement découlant de besoins plus complexes en matière de santé mentale. Malheureusement, pour travailler avec ces femmes, nous avons besoin d'un environnement plus sécuritaire. Nous disposons de cinq installations régionales. Les unités sécuritaires sont relativement petites, et cela posent des problèmes. C'est un problème que nous devrons aborder au cours des prochaines années.
    Je ne voudrais pas vous interrompre, mais je vais le faire. Il me semble que ces aspects ne sont pas incompatibles. Les problèmes de comportement sont très souvent, sinon presque toujours, liés à la santé mentale. C'est le noeud du problème de ce que nous essayons de faire. Nous voulons une installation dans laquelle nous pourrons fournir des traitements, et qui sera sécuritaire pour les agents correctionnels et la collectivité. Avons-nous des éclaircissements à cet égard?
    C'est un aspect que nous examinons depuis que j'occupe ce poste. Nous avons examiné certaines des exigences liées aux infrastructures parallèlement aux types de femmes avec qui nous devons travailler et aux défis qu'elles représentent. Nous devrons examiner les processus habituels du Conseil du Trésor pour faire avancer certaines de nos idées.

  (1210)  

    Nous avons des problèmes à régler afin d'améliorer le système. Nous ne nous présenterons pas ici en disant que nous n'avons pas de problème et que tout va bien. Nous avons beaucoup de préoccupations en ce qui concerne la santé mentale. Nous échangeons les pratiques exemplaires avec des organisations spécialisées et la collectivité. Une partie de notre stratégie sur la santé mentale n'a pas été financée. Nous l'avons financée à l'interne. Nous essayons d'obtenir un financement permanent après mars 2010 pour notre initiative communautaire de santé mentale. Cette initiative est liée aux soins intermédiaires de santé mentale, qui est nécessaire lorsque quelqu'un a des problèmes de santé mentale qui ne sont pas aigus, mais qui nécessitent un soutien. Nous voulons être en mesure de créer des unités de soutien qui fourniront des soins intermédiaires à ces personnes. Cette initiative n'est pas financée, et nous aimerions obtenir des fonds pour elle. Nous devons également renforcer notre capacité en matière de diagnostic, afin de mieux comprendre la prévalence des problèmes de santé mentale.
    De plus, nous sommes limités par l'importante pénurie d'équipements et de personnel dans le domaine de la santé mentale, comme les psychologues et les infirmières. C'est un problème important pour nous dans certaines parties du pays, surtout dans des régions comme Grande Cache, en Alberta, et Port-Cartier, au Québec.
    Est-ce que le fait d'emprisonner plus de gens en raison des peines minimales obligatoires, etc., améliorera ou entravera la situation?
    Allez-y. Une réponse brève.
    Ça amènerait des problèmes supplémentaires. Évidemment, nous devrions renforcer notre capacité à répondre à ces besoins en nous fondant sur les exigences que nous avons relevées grâce à l'évaluation et à la détermination d'indices après l'évaluation initiale. Les outils d'évaluation informatisés nous aideront également à faire une présélection.
    Merci.
    Monsieur Norlock, s'il vous plaît, vous avez cinq minutes. Ensuite, Mme Mourani a aussi demandé la permission de poser des questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président. J'éviterai toute mesquinerie politique.
    J'aimerais poser deux questions.
    La première question s'adressera à M. Hyppolite. Je ne veux pas appeler cela le profil typique, parce que ce n'est pas ce que je veux faire, mais ne serait-ce pas exact de dire qu'en général, les établissements correctionnels fédéraux constituent la destination finale pour un grand nombre de ces personnes? Autrement dit, on a commencé par des programmes de traitement dans la collectivité, qu'il s'agisse des AA ou de toxicomanie. Ensuite, ces personnes peuvent avoir reçu un counseling familial à l'école. Puis, si ces personnes sont généralement impliquées dans une activité criminelle, elles se retrouveraient dans un établissement provincial, car les infractions peuvent constituer une première infraction, ou une deuxième infraction, peut-être de nature plus mineure. Les établissements correctionnels fédéraux constituent en quelque sorte la destination finale. Est-ce que cette évaluation serait juste, ou existe-t-il d'autres types de profils?
    Pour illustrer ce que vous dites, si nous prenons l'exemple des délinquants autochtones, fondamentalement, nous nous trouvons à la fin du cheminement. La plupart des problèmes sont non seulement multidimensionnels, mais ils sont également très complexes. Ce sont des problèmes sociétaux qui nécessitent un effort concerté.
    Habituellement, les délinquants qui arrivent ont de nombreux problèmes. Il y a des problèmes de sous-emploi et de faibles niveaux d'éducation. Il y a parfois des antécédents sociaux comprenant des agressions sexuelles, de la violence familiale et de la consommation abusive d'alcool et d'autres drogues. Il y a des problèmes de santé mentale et d'autres problèmes liés aux syndromes de stress post-traumatique. Et à présent, la situation est encore plus compliquée en raison de la prolifération des gangs. Beaucoup de membres de la communauté tombent sous l'influence des gangs.
    Lorsque nous recevons ces personnes dans notre système, nous devons créer une équipe pluridisciplinaire pour élaborer des interventions et une planification correctionnelle, et ce, dans le but de répondre aux besoins des délinquants. Ça ne se fait pas seulement dans des établissements, ça se fait dans le cadre d'un continuum de soins comprenant également un retour dans la collectivité. Nous avons déterminé que plus nous offrons des programmes dans la collectivité, moins ces personnes ont tendance à récidiver et à revenir dans notre système.
    En plus de nos nombreuses interventions, nous offrons huit programmes correctionnels de base à l'intention des délinquants autochtones. Ces programmes comprennent un programme de guérison de base, un programme d'acquisition des compétences psychosociales, un programme de cercles de changement, un programme à intensité élevée de prévention de la violence familiale pour les Autochtones, ainsi que le programme En quête du guerrier en vous, qui est un programme axé sur la violence et la toxicomanie. Nous avons un programme qui s'adresse aux délinquants sexuels issus de la communauté inuite, un programme de consommation abusive d'alcool et d'autres drogues à l'intention des Autochtones, qui constitue un programme de toxicomanie destiné expressément à répondre aux besoins culturels des Autochtones, et un programme de suivi pour les délinquantes Autochtones, qui est un programme de suivi dans la collectivité après le traitement.

  (1215)  

    Est-ce que les programmes dont vous parlez sont offerts dans le cadre du programme Sentiers autochtones? J'ai visité la prison de ma région et j'ai pu constater qu'on y a bâti une unité séparée destinée précisément aux membres des premières nations. Je parle de l'établissement Warkworth. On m'a informé que cet établissement accueillait le nombre le plus élevé de détenus autochtones au Canada. Je me trouvais sur place lors de l'ouverture de l'établissement, et bien entendu, certains ainés et chefs locaux des divers territoires des premières nations aux alentours de la prison se trouvaient sur place.
    Je me demande si Mme Allgaier pourrait nous dire s'il existe un programme du type Sentiers autochtones, et si ce programme aborde tous ces aspects?
    Il reste environ 30 secondes pour répondre.
    Je serai brève.
    Je tiens simplement à préciser que les Sentiers autochtones n'est pas un programme; c'est une intervention. Les programmes dont M. Hyppolite vient de parler sont des programmes correctionnels concrets qui font partie des programmes ou d'un plan de guérison du Service correctionnel. Les unités des Sentiers autochtones ont été mises sur pied très rapidement, en grande partie, mais pas uniquement, pour les délinquants autochtones qui souhaitent régler leurs problèmes — santé mentale, toxicomanie et autres problèmes liés aux antécédents ou à la famille — de manière plus intensive, à l'aide de la guérison autochtone. Les unités des Sentiers autochtones visent à offrir à des délinquants une guérison et une intervention beaucoup plus intensives. Il y a une unité à Warkworth ainsi que dans plusieurs autres établissements.
    La parole est maintenant à Mme Mourani, pour cinq minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous et merci d'être ici.
    Monsieur Hyppolite, vous avez parlé de programmes. Le Service correctionnel investit 2 p. 100 de son budget dans les programmes. J'aimerais que vous me parliez des délais d'attente par programme et par institution, ainsi que de l'accessibilité des détenus à ces programmes. Si vous n'avez pas les chiffres avec vous, j'aimerais que vous les transmettiez au comité plus tard.
    Je m'engage à vous fournir des détails sur les délais d'attente par institution et par programme.

  (1220)  

    J'aimerais aussi avoir les chiffres pour les femmes et pour les hommes.
    Le Service correctionnel, dans son plan de réintégration de deux ans, reconnaît l'utilité et le caractère essentiel des programmes. Lorsqu'un détenu arrive à la réception, il est pris en charge et une évaluation initiale est faite. On évalue les besoins de ce détenu en termes « criminogéniques » et d'emploi. Un plan correctionnel est alors développé, et c'est à ce moment qu'on fait les références nécessaires.
    Je connais très bien le processus.
    Il est certain qu'il y a plus de demandes que ce que nous pouvons offrir.
    Sachant qu'il y a beaucoup de demandes et que les programmes sont essentiels, pourquoi n'investir que 2 p. 100 de votre budget? Ces programmes font partie de la mission du SCC. Pourquoi pas ne pas investir 5, 10 ou 20 p. 100 dans les programmes, d'autant plus que vous dites qu'il manque de professionnels?
    La plus grande partie du budget du Service correctionnel est consacrée à ce qu'on appelle en anglais les fixed costs.
    Elle est consacrée à la sécurité.
    On a fait des représentations auprès du Conseil du Trésor et dans le contexte du programme de transformation, on a reçu des fonds additionnels qu'on vient justement de réinvestir dans les programmes. Notre plan de trois ans vient d'être approuvé il y a environ deux mois. Nous comptons investir davantage, jusqu'à concurrence de 5 millions de dollars l'an prochain et de 5 millions de dollars l'année suivante. On a jusqu'à trois ans pour investir directement dans les programmes, y compris au chapitre de l'emploi. On vient de développer une stratégie d'emploi pour les détenus et les Autochtones.
    Dans le contexte de la transformation, on vient de restructurer l'architecture de notre programme. On vient de faire ce qu'on appelle un integrated correctional program. C'est un programme qui s'adresse à tout le monde, mais si un détenu, pour une raison ou une autre, n'a pas fini son programme et est transféré dans un autre établissement, les modules qu'il n'a pas terminés peuvent le suivre. Cela réduira le taux d'abandon et augmentera le pourcentage de gens qui complètent leur programme, ainsi que notre capacité à offrir le programme à un nombre beaucoup plus grand de personnes qui le demandent. On mène actuellement un projet-pilote dans le Pacifique pour valider ce nouveau programme, qui est complet et global, et qui s'adresse à tout le monde.
    Prenons, par exemple, le Centre régional de santé mentale, le CRSM. Les détenus peuvent venir d'autres pénitenciers de partout. Ils sont évalués et transférés dans des ailes de traitement. Lorsque le traitement est terminé, le détenu est placé dans une aile de transfert avant de retourner dans son pénitencier initial.
    Combien de temps s'écoule-t-il entre le transfert d'un détenu dans une aile de transfert, où il ne bénéficie d'aucun programme, et le moment où il retourne dans son pénitencier initial, que ce soit dans les CRSM ou dans tous les centres correctionnels de ce genre au Canada? J'aimerais que vous déposiez un document à cet effet.
    Oui, je peux vous fournir ce document. Cela ne pose aucun problème.
    Par contre, vous devez savoir que, dans les centres de traitement en santé mentale, il y a le directeur qui gère l'établissement et, en même temps, le directeur clinique. Lorsque le docteur traitant l'individu réfère ce dernier au centre, les deux directeurs doivent se parler, et l'admission doit être faite par le directeur clinique de ce centre.
    Dès lors, cela exige beaucoup de mobilité et de rapidité. J'imagine qu'il faut qu'un lit soit prêt et qu'il faut aussi avoir développé un plan de traitement. Donc, cliniquement, ce n'est pas compliqué, mais c'est du moins complexe.
    Je vais vous dire pourquoi je vous pose ces questions.
    On a porté à mon attention que, parfois, ces détenus restent très longtemps dans ces ailes de transfert, pas forcément pour des raisons cliniques. C'est plutôt parce que l'on ne veut pas d'eux dans leur pénitencier initial ou parce qu'il faut justifier la présence de certains détenus dans des ailes de transfert, au regard de la capacité.
    Aussi, j'aimerais comprendre pourquoi, parfois, des détenus peuvent rester dans des ailes de transfert pendant un an, sans pouvoir bénéficier d'un programme. J'aimerais qu'on me l'explique. Car si deux directeurs doivent se parler et que ça leur prenne un an pour ce faire, ça va mal à la shop, je peux vous le dire! Ah, ah, ah!
    Que le patient reste longtemps dans les ailes de transfert car on ne veut pas l'avoir, ce n'est pas admissible.
    Par contre, vous devez savoir que, selon la politique, c'est le directeur qui envoie qui a le dernier mot lorsqu'on fait un transfert. Le fait que l'autre soit moins ouvert et réceptif ne veut pas nécessairement dire que la décision finale du directeur qui transfère ne peut pas être prise, évidemment, en toute sécurité pour l'établissement, les employés et les autres détenus. Si un détenu représente un risque en dehors de l'étendue de la capacité des gens de gérer ce risque, évidemment, ils agiront avec beaucoup de précautions. Ce ne sont pas nécessairement des [Note de la rédaction: inaudible].

[Traduction]

    Merci.
    Nous devons conclure ici. J'aimerais remercier nos témoins de leur présence.

  (1225)  

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Hyppolite.
    Monsieur le président, je voudrais que M. Hyppolite dépose deux documents que j'ai mentionnés, tout à l'heure. Je voudrais aussi qu'il dépose un document portant sur la façon dont sont gérés les déficients et les autistes dans le SCC. J'aimerais que ce document soit porté à notre attention, compte tenu du fait que ce genre d'individus peut se retrouver dans le système correctionnel. Ce sont des individus très particuliers, qu'ils ne faut forcément confondre avec ceux éprouvant des problèmes de santé mentale.
    En tous cas, j'aimerais qu'on m'explique un peu comment le SCC gère cela.

[Traduction]

    Faites-lui-en la demande et il pourra essayer de le fournir au comité.

[Français]

    C'est une troisième demande?
    Voulez-vous reformuler la demande?
    Oui, tout à fait.
    Je voudrais savoir comment le service correctionnel gère, dans ses pénitenciers, les déficients intellectuels graves — ou déficients, tout court — identifiés comme tels et les autistes.
    D'accord. Vous voulez avoir le document là-dessus?
    C'est ça.

[Traduction]

    La séance est suspendue un instant.
    Merci.

  (1225)  


  (1225)  

    Nous sommes heureux d'accueillir le Dr Peter Ford, médecin, à titre personnel; ainsi que Mme Kim Pate, qui représente l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry.
    Nous vous souhaitons la bienvenue. J'ai peur que nous manquions de temps. Vous n'aurez probablement pas autant de temps que prévu. Nous comprimerons les procédures, puisque nous devons nous pencher sur un projet de loi.
    Docteur Ford, veuillez commencer.
    Je m'appelle Peter Ford. Je suis médecin. J'ai travaillé au département de médecine à Queen's et j'ai récemment pris ma retraite.
    Depuis le dernier quart de siècle, je soigne des patients atteints du VIH et de maladies connexes. Également, depuis environ un quart de siècle, je me rends régulièrement dans les prisons pour soigner des détenus de pénitenciers fédéraux atteints du VIH.
    À n'importe quel moment, je m'occupe de 35 à 50 patients atteints du VIH dans la région Est de l'Ontario. Quatre-vingt-quinze pour cent d'entre eux ont l'hépatite C, ce qui, dans ce contexte particulier, est une indication claire de l'usage de drogues injectables.
    En raison de cette prévalence élevée d'hépatite C chez les personnes atteintes du VIH, nous avons effectué certaines études dans les années 1990 — la première a été réalisée en 1994 — pour voir quelle était la prévalence du VIH et de l'hépatite C dans les établissements en général. Nous avons examiné un établissement à sécurité moyenne de la région de Kingston et avons procédé à une étude anonyme, qui a révélé que 28 p. 100 des détenus avaient l'hépatite C et que 1 p. 100 avaient le VIH.
    Nous avons répété cette étude en 1998, et à ce moment-là, 33 p. 100 des détenus avaient l'hépatite C et 2 p. 100 avaient le VIH. Pendant la deuxième étude, nous avons rempli un questionnaire détaillé, qui pouvait être relié aux échantillons de sang de façon anonyme. Ce que nous avons découvert, c'est que presque toutes les personnes qui avaient l'hépatite C avaient déjà utilisé des drogues injectables. Les gens qui ont dit avoir partagé du matériel d'injection avaient le taux d'incidence d'hépatite C le plus élevé. Mais l'aspect le plus alarmant de l'étude, c'est qu'il y avait un groupe de personnes qui n'avaient pas fait usage de drogues injectables à l'extérieur de la prison, mais qui avaient partagé du matériel d'injection en prison, et les deux tiers de ces personnes étaient atteintes d'hépatite C.
    Nous nous trouvons donc devant un problème de maladie transmissible par le sang, qui est importée dans les prisons, et qui prolifèrent dans les prisons. Cette situation a des implications très graves en matière de santé publique, parce que ces personnes vont sortir de prison et qu'elles recommencerons à faire ce qu'elles ont fait pour être infectées. De plus, l'hépatite C peut se transmettre par voie sexuelle — moins de 10 p. 100 des cas résultent d'une transmission par voie sexuelle —, alors le risque ira au-delà des utilisateurs de drogues injectables et visera leurs partenaires sexuels.
    Les coûts en santé à long terme sont très importants. Il en coûte environ 20 000 $ pour traiter une personne atteinte d'hépatite C. Le traitement n'est pas toujours concluant. Le traitement n'est pas toujours possible, car les patients ne s'identifient pas ou que le traitement ne leur convient pas — et il y a certaines raisons qui expliquent pourquoi les gens ne sont pas traités.
    Le résultat final de l'hépatite C est l'insuffisance hépatique. La transplantation hépatique à la suite d'une insuffisance hépatique causée par l'hépatite C est maintenant la cause la plus répandue de transplantation hépatique en Amérique du Nord, et nous n'en sommes qu'aux débuts de cette épidémie. L'épidémie d'infection à l'hépatite C a pris de l'ampleur en raison de l'augmentation de l'utilisation de drogues injectables, mais il faut compter 20 ans avant d'arriver à l'étape finale de l'insuffisance hépatique. Alors le gros du problème ne surviendra pas avant un certain temps.
    Les services correctionnels devront s'occuper des personnes atteinte d'insuffisance hépatique en phase terminale, et c'est là une perspective très coûteuse. En tant que médecin, le nombre de cas d'hépatite C, et dans une certaine mesure de VIH, liés à l'utilisation de drogues injectables dans nos établissements me préoccupe beaucoup.
    J'ai apporté quelque chose que je peux faire circuler, mais si vous la faites circuler, je vous demanderais de ne pas ouvrir ce contenant. Il renferme une seringue qui a été apportée à notre clinique de Kingston par un gardien très effrayé qui venait de se piquer avec l'aiguille pendant une fouille de la cellule. Cette seringue était probablement la seule de l'établissement d'où elle venait. Elle a probablement été utilisée par au moins 10 à 15 personnes différentes, et plusieurs d'entre elles auraient été infectées par l'hépatite C et certaines auraient été infectées par le VIH.

  (1230)  

    Vous verrez que cette seringue, qui est fait d'un stylo à bille, de ruban et d'une aiguille qui vient probablement d'une seringue à insuline, est sale. Il n'est pas possible de la nettoyer. Il n'y a aucune façon de la nettoyer, même avec la meilleure volonté du monde. Ces seringues sont non seulement responsables de la transmission de l'hépatite C, du VIH et de l'hépatite B, mais elles sont aussi responsables d'un grand nombre d'abcès plutôt horribles au site d'injection, et que je vois dans le cadre de mon travail à la prison. Je crois qu'il s'agit d'un problème qui doit également être réglé.
    Merci, monsieur.
    Merci beaucoup.
    Je ne sais pas si vous voulez que je la fasse circuler.
    Le comité veut-il la voir circuler? Si vous voulez la voir, vous pourriez peut-être aller dans ce coin.
    Madame Pate, c'est à vous.
    J'aimerais vous remercier de nous avoir invités. J'aimerais également vous présenter les excuses de ma présidente, Lucie Joncas, qui aurait aimé être ici, mais je crois que son absence reflète le volume de travail que nous avons.
    L'une des choses que j'aimerais aborder en premier lieu a aussi trait à l'une des questions posées au Service correctionnel du Canada à la dernière séance. L'une des raisons pour lesquelles les femmes connaissent la croissance la plus rapide en matière de population carcérale est également liée à l'augmentation du nombre de femmes qui purgent des peines plus courtes dans des pénitenciers fédéraux. Selon moi, la situation s'aggravera, particulièrement en raison de l'adoption récente du projet de loi C-25.
    Si nous nous retrouvons devant cette situation, c'est qu'avec les réductions des services sociaux, des soins de santé et des services éducatifs offerts dans la communauté, les personnes qui sont les plus marginalisées et qui dépendent le plus sur ces services sont plus susceptibles de passer entre les mailles du filet et de commettre des crimes et, au bout du compte, d'être incarcérées, étant donné qu'il y a moins d'options, moins d'endroits où aller pour obtenir des services, moins d'endroits où aller pour obtenir l'aide dont elles ont besoin. En fait, nous voyons des personnes demander des peines en fonction de la croyance ou du principe réel et bien intentionné — de la part du procureur de la couronne, de l'avocat de la défense, des personnes elles-mêmes — qu'elles pourront avoir accès à davantage de programmes et de services dans le système fédéral.
    Notre système des prisons fédérales est probablement le meilleur au monde. Nous le disons sans nécessairement ressentir une très grande fierté actuellement, parce qu'il n'est pas très bon en ce moment. En fait, il présente de nombreuses lacunes, et j'aimerais parler de quelques-unes d'entre elles. Certaines lacunes ont déjà été abordées. Je suis certaine que vous avez des exemplaires du récent rapport de l'enquêteur correctionnel qui a été présenté par le ministre de la Sécurité publique la semaine dernière. Je sais également que vous connaissez les rapports sur la mort d'Ashley Smith et d'autres rapports présentés par le Bureau de l'enquêteur correctionnel.
    Hier, j'étais au CPR en Saskatchewan, le Centre psychiatrique régional, dont vous avez entendu parler. Je trouve toujours intéressant d'entendre parler de ces établissements du point de vue de ceux qui ont la responsabilité de défendre le travail qu'ils font au sein du Service correctionnel Canada, et de défendre les politiques. Cependant, j'aimerais vous dire que la réalité dément les représentations que vous avez entendues, non pas parce qu'il n'existe pas de personne bien intentionnée — il y a beaucoup de bonnes personnes qui travaillent au sein du système correctionnel —, mais surtout parce qu'elles sont incapables de parler de ce qui se passe vraiment dans le système.
    Lors de mon passage au Centre psychiatrique régional, j'ai vu des femmes qui recevaient ce qu'on vous a décrit comme des soins psychiatriques intensifs. Les soins psychiatriques intensifs sont essentiellement une ségrégation accompagnée de contraintes chimiques en plus des contraintes mécaniques et de l'utilisation de la force dont vous avez entendu parler et que vous avez lues dans différents rapports. Je me suis penchée sur le traitement qui a été utilisé avec des personnes comme Ashley Smith. Vous m'excuserez si j'utilise cet exemple, mais le traitement qu'elle a reçu a si souvent fait l'objet de discussions publiques qu'il évoquera probablement certaines images avec lesquelles vous pourrez faire des liens.
    La seule différence que j'ai vue dans le traitement des femmes par rapport à la dernière fois que j'étais là, c'est que les femmes sont maintenant moins susceptibles de porter des vêtements de sécurité, à moins qu'elles soient activement suicidaires. Si elles s'automutilent, elles peuvent plutôt porter la tenue en molleton de l'établissement. Lorsque vous visiterez cet établissement, c'est probablement ce que vous verrez, si en fait vous rencontrez les femmes qui y résident — et certaines d'entre elles souhaitent vous rencontrer; vous avez besoin de le savoir.
    De plus, bien qu'on nous dise à répétition que les prisonniers sont traités comme des patients, quand j'étais au palais de justice où le superviseur des services correctionnels qui a été accusé de voies de fait contre Ashley Smith fait face à ces accusations et subit son procès au moment où je vous parle, le personnel qui a succédé a parlé du fait que même pour le personnel des soins infirmiers et le personnel en santé mentale au sein d'un hôpital psychiatrique qui est également dûment désigné comme un pénitencier, la priorité est la sécurité, et non les besoins en traitement des personnes qui y résident.
    Même si ce n'est pas la loi et la politique, c'est la perception des membres du personnel qui ont témoigné, qui étaient sans doute également préparés à faire ce témoignage. Pour eux, en fait, la priorité est la sécurité. Dans votre tournée des établissements, lorsque vous vous pencherez sur les questions de santé mentale, je vous suggère de poser des questions sur tous les programmes dont vous avez entendu parler. Ce sont de très bons programmes, et certains sont d'excellents programmes, mais demandez à quelle fréquence ils sont offerts et combien de personnes les ont suivi récemment. Sont-ils offerts actuellement? Combien de personnes au cours de la dernière année ont suivi ces programmes? Quelle est la durée de ces programmes? Depuis combien de temps les effectifs chargés des programmes sont-ils complets?
    Un avantage de votre comité, c'est en fait qu'il y a eu une augmentation des ressources vers ces domaines au cours des derniers mois. Je tiens à vous féliciter tous du travail que vous faites, parce qu'il y a des personnes qui en bénéficient.

  (1235)  

    Des femmes ont été libérées; je parlerai de quelques-uns de ces cas dans un instant. Le témoin précédent en a aussi fait mention.
    Je ne crois pas qu'il faille améliorer les stratégies de santé mentale dans les prisons pour les raisons que je viens de mentionner. Je pense qu'il sera très difficile d'améliorer les services de santé mentale dans les prisons. Les prisons pour femmes disposent des meilleures ressources en santé mentale au pays, et pourtant, dans les milieux de vie spéciaux — peut-être sont-ils nommés autrement maintenant —, les unités de santé mentale que nous venons de vous décrire sont essentiellement destinées aux personnes qui ont une déficience intellectuelle ou des troubles mineurs de santé mentale.
    Au moment où l'on se parle, les femmes qui souffrent des problèmes de santé mentale les plus graves sont toujours celles qui sont confinées aux unités d'isolement, qui ont des comportements autodestructeurs et qui considèrent les interventions envers ces comportements comme des punitions, que ce soit ou non le but visé par les employés. Je sais qu'en réalité, ce n'est pas l'intention de nombreux employés, mais c'est ce que ressentent ces femmes. Et dans bien des cas, si elles essaient d'en parler ou de se plaindre en utilisant les mécanismes disponibles, on les encourage à retirer leur plainte ou à ne pas poursuivre leur démarche. Il suffit de lire les rapports concernant le décès d'Ashley Smith pour bien comprendre comment ça se passe et comment ces interventions ne sont jamais des moyens efficaces pour régler les problèmes, qu'ils soient individuels ou systémiques.
    Nous travaillons à mettre en lumière toutes ces questions, mais je dois vous dire que nous avons de sérieuses difficultés sur le plan de l'accessibilité. Nous sommes présentement en pourparlers. On nous a interdit l'accès aux unités d'isolement. En ce qui concerne les domaines que nous avons documentés au fil des ans avec l'enquêteur correctionnel et avec d'autres, ou au sujet desquels nous avons demandé un examen à l'enquêteur correctionnel après avoir identifié certains problèmes dans des secteurs donnés, que ce soit le cas de Prison for Women en 1994, ou, plus récemment, celui d'Ashley Smith ou d'autres femmes qui se trouvent dans ces secteurs, on nous a répondu entre autres que l'accès ne nous serait plus autorisé.
    On nous a fermé les portes et la position officielle actuelle n'est pas claire. Dans la dernière lettre que le commissaire du Service correctionnel du Canada m'a envoyée, il disait que nous n'avions pas le droit de nous rendre dans les unités d'isolement. Depuis, lors de nos discussions avec le commissaire, on nous a dit que la décision revenait aux directeurs d'établissement. On m'a laissé entrer dans une unité, mais pas dans une autre.
    Je vous encourage donc à poser ces questions, à savoir qui surveille ce qui se passe, et pendant votre examen, je vous encourage à vous concentrer sur les recommandations de Louise Arbour, de la Commission des droits de la personne, du Bureau de l'enquêteur correctionnel et du groupe de travail du Service correctionnel sur l'examen de l'isolement, qui recommandait des limites à l'isolement et des changements à la classification. Même s'il y a un nouveau modèle de classification, ce sont toujours les besoins des femmes — et des hommes, à mon avis — qui sont traduits en facteurs de risque qui permettent de considérer que ces personnes nécessitent une plus grande sécurité et de les tenir en isolement.
    Je n'insisterai jamais assez sur la nécessité d'une surveillance externe du système correctionnel. Même si le commissaire à la vie privée a jugé que nous pouvions accéder aux dossiers d'Ashley Smith, nous ne les avons toujours pas, ce qui m'empêche de vous parler d'éléments qui ont certainement existé et qui se sont produits en me basant sur le témoignage de Mme Smith, ainsi que sur celui d'autres détenues et d'employés.
    Je voudrais également revenir sur un point que j'ai déjà soulevé devant quelques-uns d'entre vous dans d'autres comités et dans des contextes différents. Le Service correctionnel du Canada lui-même nous demande de plus en plus — pas de manière officielle, mais par l'entremise de ses employés — d'amener ces dossiers devant les tribunaux et de déposer des plaintes en matière de droits de la personne devant diverses autres instances, parce que les gens sentent qu'ils n'ont pas de pouvoir à l'intérieur du système. Les gens croient qu'ils ne peuvent pas s'exprimer sur les problèmes réels causés par les limites qu'on leur impose.
    Il existe des exemples d'événements très positifs. J'allais vous donner une liste de 15 femmes dont le cas... Je ne le ferai pas, je vois le président secouer la tête.
    Je vais vous parler d'un cas soulevé par la sous-commissaire pour les femmes, Mme Van Allen. Elle a parlé des grands progrès faits par une femme qui a été libérée récemment après être passée par l'isolement. Ce cas fait partie des exemples de situations où des gens viennent nous demander de faire tout notre possible pour faire sortir une personne. Je suis très heureuse de constater que le Service correctionnel du Canada et la Commission nationale des libérations conditionnelles ont jugé bon de libérer cette femme. Je suis également très heureuse de vous dire que j'ai rencontré cette femme dans la collectivité à trois reprises. Elle va très bien, elle a un toit, elle travaille, elle s'épanouit. Les gens des services correctionnels à qui je l'ai présentée la semaine dernière lors d'une conférence, quand je l'ai invitée à venir dîner avec nous, ne l'ont pas reconnue, trois mois après sa sortie de sa cellule d'isolation. Ça vous montre à quel point le seul fait d'être libre peut faire une différence sur le plan de la santé mentale. J'utilise le terme « libre » dans son sens large parce qu'elle est suivie, mais elle est dans la collectivité et elle a du soutien, un endroit où vivre, quelque chose à faire et des gens autour d'elle.
    Je dois également vous dire — j'ai demandé l'information, mais elle doit être confirmée — que le fait de garder cette femme dans les conditions qui étaient les siennes en prison a coûté deux millions de dollars juste pour les heures supplémentaires, tandis qu'on dépense environ 10 000 dollars par année pour l'encadrer dans la collectivité.

  (1240)  

    Lorsque vous étudierez ces questions, je vous suggère fortement d'examiner de quelles manières les ressources peuvent être améliorées au sein de la collectivité, et non dans les prisons, afin que les personnes puissent recevoir ces services dans la collectivité. On devrait avoir accès aux services au sein de la communauté aussitôt la sentence rendue.
    Je comprends que nous devons maintenant passer aux questions. J'y répondrai avec plaisir.
    Je vais devoir limiter tous les partis à un seul tour. Le Bloc aura sept minutes, le NPD également, et ainsi de suite, puis nous devrons clore la séance. Je serai très strict au sujet de ces sept minutes.

  (1245)  

    Monsieur le président, j'invoque le règlement, je ne suis pas d'accord.
    Dans la dernière heure, j'avais très clairement soulevé la question. J'ai dit que nous acceptions de passer rapidement les autres témoins tant que nous avions l'heure entière pour les témoins qui sont actuellement devant nous. Je croyais que c'était ce que nous avions convenu.
    Mais ensuite, vous avez accepté que Mme Mourani prenne la parole au dernier tour. Elle l'a dit clairement. Nous devrons donc mettre fin à ce tour sept minutes et demi plus tôt.
    Est-ce qu'il y aurait une autre solution à ce problème?
    Si nous calculons bien, nous devrions trouver une solution sensée.
    Premièrement, quand avons-nous commencé?
    Il était 11 h 15.
    À mon avis, il était plutôt 11 h 20.
    Non. En fait, nous avons commencé à 11 h 14 et quelques secondes. Nous avons ensuite réglé certaines questions. Il était environ 11 h 14 et 30 secondes lorsque nous avons commencé.
    Où voulez-vous en venir?
    Nous avions accepté de nous rendre à 15 minutes après l'heure. Je crois que c'est lorsque nous...
    Nous nous y rendrons. Un tour sera suffisant pour nous y rendre.
    Bien.
    Allez-y.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins.
    J'ai peu de temps et beaucoup de sujets.
    Premièrement, docteur Ford, je partage vos craintes concernant l'incidence des maladies infectieuses dans notre système carcéral. Je me demandais plus particulièrement si vous aviez des renseignements concernant les effets de la politique gouvernementale de tolérance zéro à l'égard des drogues sur les maladies infectieuses. Nous savons que des millions de dollars ont été dépensés et que les tests aléatoires ont prouvé qu'il n'y avait aucun effet sur la consommation de drogues dans les prisons. Dans certains cas, on a vu une baisse de 1 p. 100, dans d'autres, c'était plutôt une hausse de 1 p.100.
    Ce que je retiens des anecdotes qui m'ont été racontées, c'est que cette stratégie a eu des effets importants sur l'incidence des maladies infectieuses. Les gens utilisent des aiguilles sales et ils se procurent des drogues de manière plus dangereuse. Cette situation a engendré de grandes inquiétudes relativement à la santé, et ça ne s'applique pas qu'à la population carcérale. Je crois que parfois, nous ne tenons pas compte du fait que plus de 90 p. 100 des détenus finissent par être libérés. C'est là qu'il peut y avoir un grave problème pour la population dans son ensemble.
    Avez-vous des données précises sur les effets de cette stratégie gouvernementale sur l'incidence des maladies infectieuses?
    Il est difficile d'obtenir ces données. Nous avions prévu faire une autre étude du genre en 2002 dans une prison de sécurité moyenne, mais deux jours avant le début des travaux, le Service correctionnel nous a abandonnés et il ne nous a pas permis d'entreprendre l'étude. Ce que je peux vous dire, c'est que nous avons fait une étude en 1994 et qu'à l'époque, 12 p. 100 des détenus avaient dit qu'ils s'étaient injecté des substances pendant leur séjour en prison. En 1998, nous avions posé la même question, et le taux avait grimpé à 25 p. 100.
    Nous croyons, et je pense que le Service correctionnel partage notre point de vue, qu'une partie du problème vient de la mise en place des tests aléatoires. Il était donc devenu impossible pour les détenus de fumer de la marijuana sans se faire prendre, parce qu'elle demeure dans l'urine pendant deux semaines, tandis que les traces de cocaïne disparaissent en quelques heures, comme la majeure partie de la métabolite de l'héroïne. Il est clair que des manoeuvres ont indirectement fait augmenter les risques dans les prisons.
    L'autre élément responsable de la hausse du risque est la fouille des cellules. On confisque les rares seringues qu'on y trouve. Il arrive que deux ou trois rangées utilisent la même seringue, qui peut être cachée derrière une brique dans le secteur des douches. Ce sont donc des problèmes graves.
    Est-ce que les gens s'injectent plus de drogues? Je ne le sais pas, mais je ne vois certainement pas moins de maladies contagieuses.
    Je crois qu'il est scandaleux que l'on y ait mis fin, parce que nous devons nous pencher là-dessus. Je crois que les maladies infectieuses constituent un énorme problème dans nos prisons. Le fait est que ces problèmes se répandent ensuite dans la population. Je crois que les gens méritent des réponses honnêtes, particulièrement lorsque la consommation réelle de drogues demeure inchangée ou lorsque — comme je l'ai dit — des tests faits au hasard dénotent une augmentation.
    Madame Pate, M. Jones a comparu devant ce comité. Il partageait un grand nombre des préoccupations dont nous ont fait part l'Enquêteur correctionnel, Mme Arbour et de nombreux autres. Il a déclaré que la direction suivie par le gouvernement en ce qui a trait à son programme de lutte contre la criminalité et à ses services correctionnels était contraire aux données recueillies, à la logique, à l'efficacité, à l'histoire, à la justice et aux principes humanitaires. Il a essentiellement dit la même chose que M. Jackson et M. Stewart, à savoir que nous nous dirigeons vers le désastre américain. Seriez-vous d'accord pour dire que c'est la trajectoire que nous suivons en ce moment?

  (1250)  

    Oui, je le serais. Et si le comité n'a pas encore obtenu copie du rapport produit par Human Rights Watch International — et il date maintenant de cinq ans, je pense —, où il était mentionné que le nombre de personnes présentant des problèmes de maladie mentale était plus élevé dans les prisons que dans n'importe quel établissement de santé mentale aux États-Unis, ce serait très utile, parce que je pense que plusieurs de ces problèmes y sont aussi examinés, en plus de l'excellent rapport produit par Michael Jackson et Graham Stewart.
    Maintenant, vous avez aussi mentionné dans vos commentaires les problèmes que nous avons à obtenir des réponses publiques relativement à ce qui s'est passé avec Ashley Smith, l'enquêteur correctionnel ayant manifesté une réelle frustration vis-à-vis le peu de mesures qui ont été prises.
    Seriez-vous d'accord avec sa conclusion à l'effet que les changements qui auraient dû être apportés à la suite de ce qui s'est passé avec Ashley et les leçons qui auraient dû être tirées dans ce cas ne l'ont pas été, et qu'en fait, on peut voir des cas similaires à celui d'Ashley se produire dans notre système carcéral et que l'on peut s'attendre à ce que des tragédies similaires se reproduisent si des mesures ne sont pas prises?
    Je suis d'accord. J'ai vu deux de ces femmes hier. En fait, la femme dont j'ai parlé serait une autre de ces femmes si elle n'avait pas été libérée plus tôt cet été. Et il y a aussi d'autres femmes que j'ai mentionnées. Alors je serais très heureuse, si c'était possible, de vous renseigner davantage sur certaines de ces femmes.
    Nous avons eu quelques cas que nous avons essayé d'emmener jusqu'au tribunal. Et ce qui est très positif pour ces femmes, c'est que leur situation a changé, mais il est toujours possible que quelqu'un d'autre se retrouve dans la même situation, malheureusement.
    Alors oui, nous avons besoin d'une réforme du système, ce qui peut être fait en examinant certains mécanismes de responsabilisation individuelle. L'enquêteur correctionnel a parlé d'abolir le protocole de gestion, une question sur laquelle ce comité devrait aussi se pencher. Cette désignation s'applique aux établissements à sécurité renforcée. Toutes les femmes de ces catégories sont actuellement des Autochtones, et ce sont des femmes qui présentent d'importants problèmes de santé mentale. Alors je crois que nous avons besoin d'examiner les liens entre la transposition des besoins et les facteurs de risque.
    Aussi, lorsque l'on se penche sur le cas d'Ashley, des gens de l'intérieur et de l'extérieur des services correctionnels qui ont examiné sa situation — et pas seulement au fédéral — m'ont dit que chaque incident où elle avait agi de façon apparemment menaçante envers le personnel était prévisible et provoqué, malgré ce que soutient la position officielle. En fait, il y a eu de réelles périodes de temps où il n'y a pas eu d'explosion, mais ce n'est pas ce qui est inscrit dans les dossiers. La plupart des dossiers rendent compte de tout ce qui s'est passé de négatif dans la prison relativement à un prisonnier.
    Vous avez présenté ces exemples et vous avez indiqué que vous pourriez être en mesure de les fournir au comité. Je crois que ce serait très utile.
    La dernière question — parce que je crois qu'il s'agit peut-être de la dernière question que je pourrai poser — concerne les recommandations de Mme Arbour. L'enquêteur correctionnel a sévèrement critiqué le Service correctionnel du Canada pour ne pas avoir mis en oeuvre un certain nombre d'entre elles, mais l'une en particulier octroie au Sous-Commissaire pour les femmes une autorité pleine et entière pour tout ce qui touche les prisonnières.
    Vous avez entendu les commentaires des représentants du Service correctionnel du Canada qui disent qu'ils ne sont pas d'accord avec l'enquêteur correctionnel. Comment réagissez-vous à cela? Reconnaissez-vous l'importance des recommandations de Mme Arbour à cet égard? Comment réagissez-vous à la réponse qu'ont donnée aujourd'hui les gens de l'organisation?
    Oui, nous sommes d'accord avec la recommandation de Mme Arbour. En fait, nous, l'enquêteur correctionnel et un certain nombre d'autres groupes avons recommandé, lors de la commission Arbour, la création d'un système entièrement indépendant en raison de la façon dont les services correctionnels masculins influent négativement sur ce qui se passe avec les femmes. En fait, l'un des problèmes dans le cas d'Ashley et dans tous ces autres cas, c'est qu'il est souvent très difficile de déterminer avec exactitude qui est responsable en fin de compte. Ça peut être le directeur, quelqu'un de la communauté, le sous-commissaire régional, il s'agit peut-être d'une décision stratégique encouragée par l'administration centrale, et c'est parfois tout ça. Alors c'est très difficile à déterminer. Il est alors plus facile d'assumer la responsabilité, mais il est très difficile d'obtenir le type de responsabilisation et de gestion des peines dont nous avons besoin.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Ménard, vous cédez votre temps à Mme Mourani.
    Madame Mourani, s'il vous plaît, allez-y.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Bonjour. Je vous remercie d'être ici et de nous aider dans cette étude. J'aurais une question à poser à Mme Pate.
    Je résume ce que vous disiez: les institutions carcérales, les pénitenciers, ne sont pas vraiment des lieux où l'on peut gérer des personnes ayant des problèmes de santé mentale. Le système correctionnel est vraiment basé sur la gestion du risque, il faut en convenir.
    Selon vous, les hôpitaux psychiatriques des différentes provinces sont-ils capables de gérer le risque que peut représenter une personne qui a un problème de santé mentale et qui est criminelle? Le font-ils très facilement, actuellement, dans le cas d'ex-détenus, peut-être? En fin de compte, ces 20 p. 100 qui sont dans le système correctionnel et que l'on identifie comme étant très malades, pourraient-ils tout simplement être gérés par les hôpitaux psychiatriques?

  (1255)  

[Traduction]

    Je serais d'avis, oui, qu'ils le pourraient. La loi — la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition — comme elle existe actuellement, le permettrait.
    En fait, le système correctionnel envoie régulièrement des personnes dans les établissements psychiatriques des différents ordres de gouvernements. Le plus évident, que nous connaissons et dont il a été question, est l'Institut Philippe-Pinel, qui dispose d'une unité séparée. Cependant, St-Thomas a aussi été utilisé dans cette région. D'autres hôpitaux ont été utilisés. Certaines sections de l'hôpital général de Kingston ont été utilisées. Ça dépend des établissements, mais la plupart des provinces et territoires — pas tous les territoires — ont des services de médecine légale fermés.
    Bien que, parfois, ce ne soit pas le meilleur endroit, en raison des ressources limitées, d'après mon expérience, chaque prisonnier qui est passé d'une cellule d'isolement à un service de médecine légale — même s'il s'agit d'un service fermé, même s'il s'agit du service le plus sécurisé, même si les conditions d'isolement sont essentiellement les mêmes — a présenté une amélioration dans les 24 heures. C'est peut-être dû en partie aux traitements médicaux plus appropriés ou à d'autres facteurs. Aussi, ils sont fondamentalement traités comme des personnes présentant un problème de santé mentale dont le comportement reflète ce problème, et non pas une mauvaise conduite, contrairement à ce qui est normalement perçu dans les prisons, comme on peut s'y attendre. C'est ainsi que sont les prisons.
    Comme je l'ai mentionné, au centre psychiatrique régional, la plupart des employés estiment que la sécurité a préséance sur la santé mentale, bien que ce soit le domaine de compétence de cet établissement.
    Une autre question que vous devriez poser, surtout dans les centres psychiatriques que vous visitez, c'est le nombre de fois où sont entamées des instances d'incarcération. D'après mon expérience, les lois en matière de santé mentale servent souvent à entamer des instances d'incarcération et à faire des injections forcées. C'est ensuite abandonné avant que les mécanismes de surveillance n'entrent en action dans un centre provincial de santé mentale.
    Mon travail post-universitaire actuel touche la santé mentale dans le contexte judiciaire en raison de ces problèmes. Alors si nous pouvons vous aider avec quelque chose, je serais ravie de le faire. Je sais que nous ne disposons que d'un temps limité.

[Français]

    Merci, madame.
     Vous parliez beaucoup d'isolement. Actuellement, le projet de loi C-47 met en avant différentes mesures de changement pour le Service correctionnel, dont des mesures qui visent à sanctionner davantage l'irrespect, les comportements inadéquats dans les pénitenciers.
    Selon vous, ce projet de loi peut-il être encore plus néfaste pour les personnes atteintes de troubles mentaux et qui n'ont pas forcément la même façon d'exprimer leurs émotions, leur vécu que pour quelqu'un qui n'a pas de problèmes de santé mentale?

[Traduction]

    L'accès le plus limité touche les possibilités de libération conditionnelle. Plus les dispositions législatives le permettent — et sont en fait supposées l'assurer — et plus on se rend compte que ces individus ne sont pas capables de sortir. En ce moment, les gens doivent mériter leur sortie. Je peux vous dire que les femmes dont je parle, y compris les femmes qui vont et viennent entre la communauté et Pinel, qui avaient l'habitude d'aller et venir entre les hôpitaux psychiatriques et les unités d'isolement — et il y a eu beaucoup d'interventions pour briser ce cycle —, sont des personnes qui seraient toujours dans le système si nous n'avions pas d'interventions comme les libérations conditionnelles.
    Avec l'élimination de certaines de ces possibilités, nous verrons davantage d'individus se rendre à l'expiration de leur mandat, puis être libérés dans la communauté. Nous les voyons déjà à cette étape. L'an dernier, une femme est passée directement du protocole de gestion décrit dans le rapport de l'enquêteur correctionnel à la rue. Elle avait l'habitude d'avoir les poignets menottés dans le dos, de porter un vêtement de sécurité et d'être escortée par trois à cinq employés chaque fois qu'elle sortait de sa cellule; elle s'est retrouvée dans la rue, sans ressources ou presque. Nous avons finalement pu lui procurer certaines ressources.
    Ces cas seront de plus en plus nombreux. C'est organisé ainsi. Les coûts financiers qui y sont associés sont immenses, à l'instar des coûts humains et sociaux pour ces individus et pour la communauté en entier, parce qu'il n'y a pas de ressources. Il vaudrait beaucoup mieux investir maintenant dans les services communautaires, même dans les services fermés spécialisés en santé mentale dans le contexte judiciaire — si c'est ce dont nous avons besoin —, que de les mettre en prison, selon moi. Notre organisation appuierait cela.

  (1300)  

[Français]

    Pensez-vous vraiment qu'actuellement, en ce qui concerne l'évaluation du mérite à la libération, le Service correctionnel a cette expertise propre au domaine de la santé mentale? Évaluer le mérite d'un détenu criminel qui fait partie d'un gang de rue, d'une organisation criminelle ou de toute autre forme de criminalité mais qui n'a pas de problèmes de santé mentale, c'est une chose et cela fait partie de l'ordre criminologique de l'évaluation du risque et du mérite.
    Cependant, comment peut-on évaluer le mérite de quelqu'un qui souffre de problèmes de santé mentale, de troubles psychotiques, qui voit des choses derrière vous, qui est dans le bureau de son agent et qui lui dit qu'il voit derrière lui le démon avec des tentacules?Je l'ai déjà vécu, c'est pourquoi je vous pose la question. Comment peut-on évaluer le mérite de quelqu'un qui est en pleine crise psychotique?

[Traduction]

    Très brièvement.
    Merci.
    Vous avez dit avec plus d'éloquence ce que j'essayais de dire une minute plus tôt en réponse à votre question précédente.
    Ici encore, l'une des recommandations faites par Louise Arbour, et répétée par l'enquêteur correctionnel dans son dernier rapport, est qu'un expert en santé mentale devrait faire un examen indépendant des personnes qui sont actuellement en isolement.
    Les gens passent de plus en plus de temps dans ces conditions et développent davantage de problèmes de santé mentale. Nous avons maintenant deux cas où les juges ont estimé que la prison constituait un facteur de risque pour quelqu'un présentant des problèmes de santé mentale et ayant commis une infraction avec violence. Ce n'est pas inhérent à ces personnes, mais le fait qu'elles se soient habituées à un milieu institutionnel favorise ce genre de réaction; elles cherchent ainsi à obtenir de l'attention comme elles le peuvent.
    Merci beaucoup. Nous devrons nous arrêter ici.
    Monsieur Davis, s'il vous plaît, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    La première chose que je veux faire au nom de tous les Canadiens est de vous remercier, Madame Pate, ainsi que la Société Elizabeth Fry, d'offrir un service aussi essentiel aux femmes de l'ensemble du pays.
    Je veux aussi remercier le docteur Ford pour tout le travail que vous avez fait dans nos prisons au cours des 25 dernières années. Je peux dire que vous devez avoir commencé très jeune.
    Il y a beaucoup de questions à poser au sujet de la santé mentale, et nous n'avons que sept minutes. Je m'en tiendrai à certains éléments précis.
    Je veux revenir à la question de l'isolement. Je crois que tous les membres de ce comité seront d'accord pour dire que nous réglons les problèmes de santé mentale dans nos prisons en plaçant les gens en isolement. L'autre chose sur laquelle j'espère que tout le monde s'entend jusqu'à maintenant c'est que l'isolement est probablement le pire endroit où placer quelqu'un aux prises avec un grave problème de santé mentale.
    M. Sapers l'a bien exprimé. Il a dit que les périodes prolongées sans contact humain ont un effet défavorable sur la santé mentale et nuisent à la réadaptation.
    Je sais qu'il y a des modèles dans le monde qui utilisent d'autres méthodes que l'isolement. L'une d'entre elles est utilisée dans un établissement britannique appelé Styal Prison, où ils ont — je crois — une unité de dix lits. Lorsqu'une personne s'automutile ou présente un comportement qui dénote un grave problème de santé mentale, elle est envoyée dans cette unité et un employé lui est assigné. Cette personne est essentiellement placée dans un milieu de soins de santé au sein de l'établissement.
    Pensez-vous que c'est quelque chose que nous devrions imiter ici?
    Nul doute que les exemples... L'établissement correctionnel de Bedford Hills à New York s'est doté d'un modèle semblable pour la prestation de services en santé mentale aux prisonniers. Son administration relève de l'hôpital psychiatrique de New York.
    Il y a eu à une certaine époque des établissements vraiment importants au Royaume-Uni, mais ils ont été fermés depuis. Des unités spéciales de type Barlinnie accueillaient ceux qui étaient considérés comme étant les cas les plus difficiles et qui présentaient probablement de surcroît des problèmes de santé mentale. Nous nous disons souvent que les milieux thérapeutiques de ce genre sont essentiellement choses du passé.
    Il y a déjà eu des établissements qui fonctionnaient très bien et où on pratiquait des interventions positives et efficaces. La plupart d'entre eux ont été fermés, comme on ferme les ressources de la communauté. Je vous encouragerais à regarder de ce côté.
    Je vous encouragerais également à prendre connaissance du genre d'information que les femmes nous ont demandé d'obtenir au sujet de leur cas mais que nous avons été incapables d'obtenir. Malheureusement, on accorde tellement d'importance à l'aspect financier. Personnellement, je m'intéresse davantage au coût humain et social de la situation actuelle.
    Regardez simplement certains de ces cas et la différence de coût du maintien de ces femmes dans la communauté. J'ai une liste de femmes qui ont été classées parmi les plus difficiles lorsqu'elles étaient en prison et qui vivent maintenant dans la communauté. Il peut leur arriver à l'occasion de séjourner à l'hôpital, mais elles ne causent pas de désordre quand elles sont à l'extérieur. Elles ne présentent aucun risque pour le public. Si elles présentent un risque pour quelqu'un, c'est pour elles-mêmes, et là encore, ce n'est pas régulier, cela arrive quand elles font une crise reliée à leurs problèmes de santé mentale ou...

  (1305)  

    À ce sujet, y a-t-il des ressources suffisantes dans la communauté, en particulier pour les femmes qui sont libérées d'établissements fédéraux, des maisons de transition ou des centres de soutien, où elles peuvent continuer d'avoir accès aux programmes dont elles ont besoin?
    Non, il n'y en a pas. En fait, je vous invite à consulter un autre Américain, Jerome Miller, qui était directeur du centre correctionnel pour jeunes au Massachusetts dans les années 1970 et qui dirigeait un...
    J'invoque le Règlement. Il y a 11 conversations en même temps dans cette salle, avec les hauts fonctionnaires, avec les adjoints et avec des membres du comité. Je n'arrive pas à entendre le témoin même avec mes écouteurs sur les oreilles.
    Respectez les témoins, s'il vous plaît.
    Merci. Très à propos, monsieur Oliphant.
    Continuez, madame Pate.
    Parlant de la désincarcération des détenus du centre correctionnel pour jeunes, Jerome Miller a dit qu'on n'en faisait pas assz au niveau du transfert des ressources à la communauté, notamment. Il y a donc des personnes qui connaissent ce volet par expérience et qui en ont tiré des enseignements. Je vous encouragerais à examiner cette avenue. Nous pourrions commencer par une stratégie de désincarcération pour un certain nombre de personnes qui présentent des problèmes de santé mentale. Si l'on ne transférait dans la communauté que la moitié des ressources que l'on consacre actuellement à leur maintien en détention, les avantages seraient énormes non seulement pour les personnes concernées mais également pour beaucoup d'autres qui présentent des problématiques semblables. À mon avis, c'est quelque chose que l'on peut faire et qu'on doit faire.
    Les intervenants correctionnels précédents ont, je crois, fort bien défendu leur système à ce stade-ci, et il ne manque pas d'aspects à défendre, mais je pense qu'ils ont péché par excès d'enthousiasme dans leur démarche.
    Je cite un passage du rapport de M. Sapers:
Au cours de la période de six mois allant d'avril à septembre 2008, 184 incidents d'auto-mutilation ont été signalés dans le RAPSIT, soit plus du double par rapport à la même période en 2006.
    Ce que j'en retiens, c'est que si le nombre d'incidents d'auto-mutilation a doublé sur une période de deux ans, ça doit être signe que les programmes et les interventions offerts dans nos prisons ne sont ceux qui conviendraient. Avez-vous rencontré le phénomène de l'auto-mutilation et de la tentative de suicide dans les prisons?
    D'après notre expérience avec les personnes auprès desquelles nous travaillons et d'après les intervenants régionaux qui visitent les établissements en notre nom, plus les gens se sentent désespérés et moins ils ont d'espoir, plus il est probable qu'ils... Habituellement, ils s'en prennent d'abord à eux-mêmes. Puis ils peuvent se mettre à s'en prendre à d'autres — membres du personnel, autres prisonniers — et ils peuvent finalement en venir à se suicider.
    Il existe une bonne documentation sur ce phénomène. La Dr Jan Heney, qui a travaillé à la Prison des femmes, a fait une recherche sur le suicide pour le Service correctionnel. La Dre Kathleen Kendall a évalué les programmes de thérapie et la difficulté de dispenser des programmes de thérapie en prison. Elle a travaillé pour le Service correctionnel du Canada. Le Service correctionnel ne se montre guère disposé à communiquer la plupart de ces rapports, sûrement parce qu'ils sont très sévères. Cela dit, les gens qui nous encouragent, en cour ou ailleurs à y recourir reconnaissent qu'il existe un véritable besoin de changer de direction.
    Si chacun d'entre vous pouvait suggérer au comité une mesure à prendre ou une intervention à faire pour améliorer la prestation des services en santé mentale dans les prisons, qu'est-ce que ce serait?
    Je dirais qu'il faudrait adopter une approche très réaliste à l'endroit du problème de toxicomanie. Le problème de la toxicomanie et celui de la santé mentale se recoupent largement; on ne peut les séparer l'un de l'autre.
    Nous voyons beaucoup de schizophrènes qui vivaient dans la rue et qui sont séropositifs ou porteurs de l'hépatite C parce qu'ils ont consommé de la drogue. Les deux problèmes se recoupent largement. On fait peu d'effort pour traiter la toxicomanie comme une maladie. Pour le Service correctionnel, la toxicomanie est un crime. Il s'agit en fait d'une maladie, comme l'alcoolisme. Je pense qu'il faut changer un peu notre façon d'aborder la toxicomanie pour tenir compte de cette réalité.
    Je suggérerais la responsabilisation à l'extérieur, afin que les gens qui réintègrent la communauté puissent bénéficier de services dispensés dans la communauté et avoir accès à toute une gamme d'options... — de ceux qui ne présentent pas de risque pour le public à ceux qui sont atteints de psychose aigüe et qui peuvent avoir besoin d'un encadrement médico-légal très serré et très sécuritaire... que les services de ce genre soient fournis dans un contexte communautaire, régi par exemple par le système de santé mentale, pas par le système correctionnel.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Rathgeber, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci monsieur le président.
    Je remercie les témoins pour leurs intéressants exposés.
    Dr Ford, j'ai écouté attentivement votre exposé. En réponse à la dernière question de M. Davies, vous avez indiqué, et je suis certainement d'accord avec vous, que notre système carcéral était affecté d'un problème de propagation de maladies infectieuses, le VIH et l'hépatite C. Dans votre conclusion comme dans votre allocution d'ouverture, vous dites qu'il s'agit d'un problème auquel il faut s'attaquer. En réponse à la question de M. Davies, vous avez dit qu'il fallait adopter une approche réaliste en matière de toxicomanie. Excusez-moi, monsieur, mais je ne sais pas ce que ça veut dire. Vous avez cerné le problème. Quelle est la solution, à votre avis?

  (1310)  

    Il y a un certain nombre de solutions. Il n'y a pas de réponse facile en matière de toxicomanie. C'est un grand problème pour la société et nous consacrons beaucoup de temps à éviter de l'aborder, justement en raison de son ampleur. Mais il faut reconnaître que la toxicomanie est une maladie, pour que l'on puisse faire suivre aux toxicomanes des programmes appropriés pour prévenir la consommation. Il faut, je crois, accepter que consommation il y aura, ce qui est manifestement le cas dans les prisons. Les gens se piquent dans des conditions extrêmement malsaines. Il faut s'attaquer à ce problème.
    Les Européens l'ont fait en adoptant des programmes d'échange des seringues dans les prisons et il est intéressant d'observer que la plupart des pays européens sont en train d'emboîter le pas. Il y a un projet pilote en Russie. L'Iran s'est doté d'un programme d'échange de seringues. Même chose au Kazakhstan. Même en Moldova, pays dont à peu près personne n'a entendu parler, il y a un programme d'échange des seringues dans les prisons. Aucun pays anglophone dans le monde n'a de programme de ce genre, même s'il y a de gros problèmes de toxicomanie.
    Dois-je comprendre que vous préconisez la mise en place dans les prisons fédérales d'un programme d'échange de seringues placé sous l'égide de l'État?
    Oui. C'est la position officielle de l'Association médicale canadienne et aussi de l'Ontario Medical Association.
    Vous êtes conscient du dilemme. Il est illégal de consommer ou de posséder des substances figurant à l'annexe A de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Vous comprenez ça.
    Oui.
    Les gens qui sont détenus dans une prison fédérale y sont parce qu'ils ont été reconnus coupables d'avoir commis une infraction grave et leur réhabilitation consiste en partie, du moins je présume, à apprendre à respecter la loi, le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Comment le Service correctionnel du Canada peut-il résoudre le dilemme en sanctionnant, sinon en favorisant une violation de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances?
    Il peut examiner les modèles mis en place en Europe, où chaque prisonnier trouve à son arrivée en prison une seringue munie d'une aiguille qui est fixée au mur de sa cellule. La consommation de drogue est toujours illégale mais si consommation il y a, ce ne sera pas en partageant aiguilles et seringues avec 15 autres personnes. Cette pratique réduit également le risque que les gardes se piquent quand ils procèdent à une fouille des cellules. Ça peut se faire; ça se fait dans de nombreux pays et ça marche.
    L'autre objection qui est toujours soulevée est que les aiguilles et les seringues pourront être utilisées comme armes; cela ne s'est pas produit dans les pays européens qui ont adopté ce système.
    Je comprends bien, mais vous comprenez également le dilemme dans lequel on se trouve, dans lequel l'État se trouve quand il sanctionne sinon favorise une violation de sa propre loi.
    L'État ne sanctionnerait pas la consommation de drogue. La consommation de drogue serait toujours illégale dans la prison. Dans la rue, l'État fournit gratuitement aux toxicomanes des aiguilles et des seringues propres.
    Pas notre gouvernement.
    Oui, votre gouvernement le fait. Le programme est administré par les autorités provinciales. La municipalité de Kingston, par exemple, échange 250 000 aiguilles et seringues par année. Cette pratique est légale, mais la consommation et la possession de drogue ne le sont pas. Il y a certainement là un dilemme, mais c'est une question de santé publique.
    Vous savez parlé d'un modèle européen. Dites-moi, docteur, si la seringue et l'aiguille placées sur la tablette de la cellule d'un prisonnier peuvent servir à d'autres usages, quel qu'il soit, à part une injection intraveineuse de drogue?
    Non, pas plus que l'eau de Javel que le service correctionnel fournit déjà aux prisonniers.
    Madame Pate, vous suivez de très près les questions de détention des femmes et je salue votre travail et votre expertise. Vous connaissez donc certainement le rapport publié en 1996 par la juge Arthur au sujet de certains événements survenus à la Prison des femmes de Kingston, ainsi que le rapport publié ultérieurement, en 2003, par la Commission canadienne des droits de la personne, rapport intitulé Protégeons leurs droits: Examen systémique des droits de la personne dans les services correctionnels destinés aux femmes purgeant une peine de ressort fédéral. Les rapports ayant été publiés dans un cas en 2003 et dans l'autre, en 1996, vous pensez bien que le système pénal était administré par deux gouvernements différents; sur les 19 recommandations qui y figuraient, combien ont été mises en oeuvre?
    Les services correctionnels vous diront que la plupart l'ont été, pour ma part, je peux dire qu'un grand nombre l'ont été en partie. Il y a un poste de sous-commissaire pour les femmes, mais aucune autre recommandation connexe n'a été appliquée. Cela dépend de la recommandation dont vous parlez.
    Ce qui est important de savoir est que le rapport de 1990 du Groupe d'étude sur les femmes purgeant une peine fédérale, mis sur pied par un gouvernement conservateur et avec lequel chacune des recommandations a été comparée, encourageait fortement un modèle de désincarcération. En fait, il favorisait des installations à sécurité minimum pour les femmes dans tout le pays. J'aimerais dire que c'était, selon moi, une recommandation très sage. Elle n'a pas été appliquée à cause du mélange entre les femmes et les hommes, c'est-à-dire que dès qu'une personne s'échappait, que des femmes s'enfuyaient et étaient rattrapées au bout de quelques kilomètres, la décision était prise de renforcer la sécurité tout autour. Pour une raison ou pour une autre, on a pensé que cette recommandation allait poser certains risques, c'est pourquoi elle n'a jamais été appliquée, ni aucune autre. De plus, certains incidents très médiatisés d'hommes en fuite ont justifié ce rejet.
    Je crois que Louise Arbour a dit que les recommandations qui avaient été faites en 1990 concernant les services correctionnels pour les femmes servaient de porte-étendard pour l'ensemble des services correctionnels. C'est en fait l'endroit où on peut réellement instaurer des changements progressifs qui n'augmentent pas les risques pour la sécurité publique. Elles n'ont pas été suivies. Je vous invite fortement à examiner ces recommandations ainsi que la possibilité de les mettre en place, parce qu'avec ce type de population on pourrait le faire. En fait, ce serait rater une belle occasion que de ne pas le faire.
    Les chefs des services correctionnels du pays, tant au niveau fédéral, provincial que territorial du milieu des années 90, ont poussé très fort pour une stratégie de désincarcération qui n'a jamais été appliquée non plus. Celle-ci avait reçu l'aval, je crois, de tous les partis.

  (1315)  

    Merci.
    Vous avez tous les deux été très utiles.
    Merci.
    Merci beaucoup d'être venu devant le comité.
    Malheureusement, nous commençons à être pressés. Nous allons suspendre pour moins d'une minute, fermer les caméras de télévision, et ensuite étudier article par article notre projet de loi.
    Merci encore une fois.

  (1315)  


  (1320)  

    Recommençons.
    Nous allons étudier article par article le projet de loi C-34, une loi pour modifier le Code criminel ainsi que d'autres lois.
    Nous accueillons encore une fois à titre de conseillers et de témoins, Mme Mary Campbell de la Direction générale des Affaires correctionnelles et de la justice pénale, et M. Douglas Hoover de la section de la politique en matière de droit pénal. Merci beaucoup d'être venus.
    Nous allons procéder le plus rapidement possible.
    Le gouvernement distribue certaines modifications concernant ce dont nous allons discuter sous peu.
    Monsieur le président, lorsque nous avons terminé à la dernière session, nous avions un amendement du NPD ainsi qu'un sous-amendement du Parti Libéral. Nous en avions discuté, et je crois que vous pouvez constater que le membre du Parti Libéral souhaite retirer son sous-amendement et le membre du NPD veut introduire un petit changement à l'ébauche de son amendement.
    Est-ce que c'est le cas, monsieur Holland?
    Oui. M. MacKenzie parle en mon nom en cette occasion.
    Nous travaillons si bien ensemble dans ce comité.
    Monsieur Davies, êtes-vous prêt à présenter votre amendement avec ces légères modifications?
    Je le suis, monsieur le président. Merci.
    Pourriez-vous procéder immédiatement?
    J'aimerais m'assurer de bien suivre la procédure, est-ce que nous sommes tous d'accord pour procéder?
    Je vois qu'il n'y a aucune objection. Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je crois que l'amendement a été distribué. Il s'agit du paragraphe 33(2).
    À titre d'information pour tous les membres, j'aimerais dire qu'à la dernière réunion nous avions espéré modifier le projet de loi pour qu'il exige des personnes inscrites qu'elles fournissent, dans les sept jours, les renseignements concernant un changement d'employeur. Malheureusement, à cause d'erreurs dans la rédaction, la portée a été beaucoup plus grande, ce qui n'était pas l'intention de départ. Donc, la rédaction a été refaite pour qu'il soit clair que nous ne faisons qu'ajouter les changements d'employeurs aux exigences en matière de coordonnées devant être fournies dans les sept jours.
    J'aimerais remercier tous mes collègues et ce comité pour leur grande coopération à cet égard.
    M. Davies a proposé la motion. Vous avez la chance d'entendre l'explication.
    Monsieur le président, j'aimerais également dire rapidement qu'il y a une modification consécutive présentée par M. MacKenzie qui accompagne ce projet de loi. Je crois que c'est tout simplement pour se conformer à celle-là.
    M. MacKenzie a bien indiqué cela.
    Y a-t-il d'autres discussions à ce sujet avant que nous passions au vote?
    Le conseiller législatif vient de me dire que nous pouvons également appliquer le vote à l'article 34.1.
    (L'amendement est adopté.) [Voir le Procès-verbal]
    Monsieur le président, est-ce qu'on peut indiquer dans le compte rendu que j'ai gagné?
    Des voix: Oh, oh!
    M. Don Davies: Je blague.
    Je ne sais pas pourquoi vous avez l'impression que nous ne vous apprécions pas dans ce comité. Ce n'est pas le cas, monsieur Davies; votre contribution est précieuse. Vous nous faites mûrement réfléchir tout cela et c'est très apprécié. Merci.
    (L'article 33 modifié est adopté.)
    (Article 34 — Avis en cas d'absence)

  (1325)  

    Je crois que le gouvernement aimerait présenter l'amendement G-3 à l'article 34.
    Monsieur le président, j'aimerais que l'article 34 soit modifié par substitution, à la ligne 13, page 28, de ce qui suit:
« toutes ces résidences secondaires ou s'il n'a pas donné l'avis prévu à l'alinéa a) alors qu'il était tenu de le faire; »
    Aimeriez-vous offrir d'autres explications?
    Je vous ai lu l'amendement. Le fait est que le projet de loi C-34 exigera des délinquants sexuels inscrits qu'ils préviennent à l'avance de leur absence pour une période de sept jours ou plus de leur résidence principale ou secondaire.
    Cet amendement va combler une faille dans la loi afin de veiller à ce que les délinquants sexuels aient toujours une obligation légale d'avertir des responsables du registre de leur absence, même s'ils ne le font pas avant de partir.
    Cet amendement servira également à faire concorder les versions anglaise et française.
    Y a-t-il des commentaires?
    (L'amendement est adopté.)
    (L'article 34 modifié est adopté.)
    Nous avons un autre amendement, G-4, qui créera un nouvel article, 34.1.
    Monsieur MacKenzie, pourriez-vous le présenter et nous donner quelques explications?
    Monsieur le président, je propose que le passage de l'article 8 de cette loi précédant l'alinéa a) soit remplacé par ce qui suit:
« 8. Lorsqu'un service de police ou le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada reçoit la copie d'une ordonnance transmise au titre de l'alinéa 490.018(1)d) du Code criminel, le préposé à l'enregistrement pour le compte de l'un ou l'autre: »
    Je crois qu'il s'agit d'un amendement consécutif nécessaire si le premier amendement proposé est adopté et qu'il crée un nouvel article 10.1. Cela permettrait également aux agents de la GRC responsables du Registre national des délinquants sexuels d'être autorisés à enregistrer des informations d'ordonnances d'enregistrement dans la base de données. Cela fait donc référence à l'article 10.1 original et est une conséquence de cela.
    Monsieur Holland, avez-vous des commentaires?
    Y a-t-il une raison pourquoi ces éléments n'ont pas été inclus dans le projet de loi au départ? Est-ce que c'était un oubli?
    Je crois qu'il y a eu un oubli dans la rédaction initiale de la loi.
    Pouvez-vous confirmer cela, madame Campbell?
    Merci.
    (L'amendement est adopté.)
    Le président: Je crois que l'amendement BQ-1 a également créé un nouvel article. Je vais donner la chance à M. Ménard de proposer l'amendement.
    Allez-y, monsieur.

[Français]

    Je propose que le projet de loi C-34 soit modifié par adjonction, après la ligne 28, page 28, du nouvel article suivant :
34.1 L'alinéa 8a) de la même loi est modifié par adjonction, après le sous-alinéa (vi), de ce qui suit:

(vi.1) le modus operandi de l'intéressé,
    On en avait discuté à l'occasion de plusieurs témoignages: on voulait que des indications soient données sur la façon d'opérer, généralement, d'un délinquant sexuel, de manière à faciliter le travail des policiers qui le recherchent et pour toutes les autres raisons valables. En pratique, c'est vrai que la majorité des délinquants sexuels ont très souvent une façon d'agir particulière.
    Monsieur MacKenzie, je ne sais pas si vous voulez encore soulever ce que vous m'avez communiqué auparavant. J'en ai profité pour faire des vérifications. On a soumis ces amendements il y a plusieurs jours. Les légistes se sont effectivement rencontrés. Ils ont d'abord pensé que l'on pouvait insérer des locutions latines. Dans ce cas-ci, cette locution latine est couramment utilisée dans les deux langues officielles. Le terme « modus operandi » décrit aussi exactement ce que l'on veut exprimer dans le projet de loi. Après discussion entre eux et consultation, ils ont accepté de garder l'expression latine « modus operandi » et de ne pas suggérer d'autres expressions françaises ou anglaises qui voudraient dire la même chose.

  (1330)  

[Traduction]

    Bien, je vais laisser M. Holland faire un commentaire et ensuite M. MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Juste avant de commencer le débat, je me rappelle de la dernière fois où nous avons eu un long débat avant de décider si oui ou non nous pouvions débattre d'une question. Je crois qu'il y a certaines objections — que je ne comprends pas, bien franchement — qui doivent être explorées avant de commencer le débat. J'aimerais savoir si nous pouvions les éliminer avant de passer au débat.
    Je ne veux tout simplement pas débattre de quelque chose pendant longtemps pour ensuite réaliser que nous ne pouvons pas voter sur la question. Je crois que nous devons déterminer l'admissibilité de la motion en premier lieu. Je ne comprends pas les problèmes soulevés face à l'admissibilité, mais il a été porté à mon attention qu'il y en avait. Donc, si nous pouvions traiter avec cela avant de commencer le débat, je crois que ça aurait un peu plus de sens.
    Eh bien, vous me demandez de décider avant de procéder à tout cela.
    Non, je veux seulement que cette question soit soulevée avant d'entamer le débat la concernant.
    Si le comité approuve la question, bien je ne m'y opposerai pas si c'est cela que vous demandez.
    Bien, sur cette base, je vais l'appuyer.
    Les objections dont j'ai entendu parlé jusqu'à maintenant, concernent la difficulté d'incorporer les mots « modus operandi » dans le projet de loi. Cela me semble étrange, bien que le latin ne soit pas une de nos langues officielles, il y a un bon nombre de mots qui sont entrés dans la langue anglaise et française et qui viennent directement du latin. Comme par exemple le terme « caveat » en anglais, c'est un exemple parfait d'un terme latin qui est utilisé dans un contexte légal. En fait, il y a de nombreuses expressions en droit qui viennent directement du latin. Donc, selon moi « modus operandi » est un terme juridique tout à fait valable. En fait, il est utilisé couramment dans l'anglais usuel et

[Français]

la langue française, dans le vocabulaire des personnes qui parlent français. Ces personnes disent « modus operandi », pas autre chose que cela, et le contexte est certes clair. Voilà pourquoi il est logique que j'appuie cette motion de M. Ménard.

[Traduction]

    D'accord, merci.
    Je vais demander à M. MacKenzie de commenter, et ensuite Madame Campbell, vous pourrez commenter.
    Oui, absolument.
    Monsieur le président, le gouvernement n'appuie pas les amendements. D'après les rédacteurs de Justice Canada, l'usage d'une terminologie qui n'est ni anglaise ni française, tel que « modus operandi », n'est pas permise dans la rédaction des lois. De plus, « modus operandi » n'est pas un terme précis et ne réfère pas à un domaine de données normalisées ni à des descripteurs dans le Registre national des délinquants sexuels. Une étude plus approfondie ainsi que des consultations avec nos partenaires provinciaux et territoriaux ainsi qu'avec la police seraient nécessaires afin de déterminer précisément qu'est-ce que l'on entend par le terme « modus operandi » afin que son sens et ses paramètres soient clairs. J'aimerais que l'on réfère le tout aux responsables, qui je crois, peuvent mieux répondre à cette question.
    D'accord, je vais donner la chance à Mme Mourani de faire un bref commentaire et ensuite nous passerons aux responsables.

[Français]

    Merci.
    Je voudrais juste rappeler à mes collègues que, dans la problématique de la délinquance sexuelle, le modus operandi est fondamental pour la police. Le terme « modus operandi » peut être traduit par « mode d'opération », « mode opératoire » ou, en anglais, « M.O. », « method » ou « method of operating ». Voici comment fonctionne un pédophile. Par exemple, il va aller autour d'une école. C'est ainsi qu'il recrute ses victimes. Après il les attire d'une certaine manière pour mieux pouvoir les kidnapper ou il utilise, par exemple, des leurres. Ainsi, il dit qu'il cherche son animal.
    Ces gars peuvent généralement être identifiés par la police non seulement aux fins de prévention, mais aussi aux fins d'enquête. Pourquoi aux fins d'enquête? Parce qu'à partir du moment où l'on connaît le mode opératoire d'un délinquant sexuel, on peut retracer non seulement une victime qui aurait pu disparaître, mais aussi le pédophile en question. C'est aussi fondamental qu'une marque de voiture, qu'une plaque d'immatriculation, que son nom et son adresse.

  (1335)  

[Traduction]

    Je pensais laisser tout le monde exprimer son opinion et ensuite demander une opinion juridique.
    Monsieur Davies, rapidement s'il vous plaît.
    J'ai soumis un amendement qui s'est rendu jusqu'à l'étape de la rédaction, mais il ne figure pas dans le dossier. Je ne sais pas pourquoi, c'est peut-être de la faute de mon bureau.
    En ce qui concerne...
    La raison pour laquelle je soulève ce point c'est qu'il pourrait aider à résoudre ce que M. Ménard tente de dire. J'ai utilisé l'anglais et j'ai dit « une description de la façon dont ils ont commis chaque crime de nature sexuelle pour lesquels ils ont été condamnés ».
    Je ne sais pas très bien pourquoi cela n'a pas été inclus.
    Une voix : Ce n'est pas la même chose.
    Ce n'est pas la même chose? Si ce n'est pas la même chose, je croyais tout simplement que ça pourrait aider. Je ne sais pas pourquoi ça n'a pas été inclus.
    On me dit que ça n'a pas été reçu. Donc, je ne sais pas ce qui est arrivé.
    Êtes-vous certain de l'avoir présenté? Est-ce que ça résout la question?
    Ils font signe que non. D'accord.
    Est-ce que quelqu'un par ici...? Oui, madame Glover.
    Je vais être brève. Je ne sais pas s'il y a eu un problème avec la traduction ou quoi, mais ce que disais Mme Mourani ne concernait pas le problème dont nous parlons. La question est de savoir si le libellé comme tel et l'utilisation d'expressions latines est acceptable. Tout ce qu'elle a dit... Personne n'en a fait mention. Je tiens simplement à lui dire que nous ne remettons pas en question ce qu'elle a dit. C'est seulement la traduction d'expressions latines qui pose problème.
    Monsieur Oliphant.
    Certains appuieront le concept, les principes. Je n'ai aucun problème avec l'expression « modus operandi. » C'est intéressant de constater que nous utilisons aussi « MO ». Je dirais que « MO » n'est pas suffisant, mais c'est le jargon. Je crois que « modus operandi »est le bon terme. Si certains experts ont des problèmes avec ça, ce sont probablement les mêmes experts qui ont négligé certains articles que nous devons maintenant corriger. Personnellement, je suis prudent et je ne m'en remets pas systématiquement à des experts. J'aimerais que le concept soit intégré. Je pense que le concept énoncé par M. Davies décrit très bien ce que l'on entend par « modus operandi ». Il me semble qu'il pourrait y avoir un sous-amendement à l'amendement, « modus operandi », puis sa phrase. Je pense que c'est la même chose, ou du moins, très semblable.
    Je crois que les policiers utilisent toujours le terme « modus operandi ». C'est ce qu'on entend. Donc, je veux que le concept soit intégré, et il va falloir trouver une façon d'y arriver.
    Vous utilisez « MO », n'est-ce pas?
    Essayons de garder l'esprit ouvert. Écoutons maintenant attentivement ce que...
    Il y a du latin dans les armoiries du Canada.
    Oui, et je me demande comment les Canadiens arrivent à comprendre.
    Écoutons attentivement ce que les autres ont à dire et prenons une décision en fonction de ce que nous entendrons dans les prochaines minutes.
    Madame Campbell, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Vous êtes beaucoup plus attentif que mes étudiants en droit, je peux vous le dire.
    Je ne peux évidemment pas commenter sur le bien-fondé de la proposition, mais simplement vous donner un peu d'information générale. Quand nous avons examiné l'amendement, nous avons entre autres consulté les rédacteurs du ministère de la Justice. Tout ce que je peux dire au comité, comme l'a fait M. MacKenzie, c'est que, selon la réponse que nous a donnée le service juridique, les lois doivent être entièrement en anglais et en français. Je reconnais que c'est un peu étrange, surtout que mon collègue M. Hoover a parcouru l'index du Code criminel, et qu'on y voit, bien sûr, l'expression mens rea. Toutefois, il m'a précisé que cette expression ne figurait pas dans l'article du Code comme tel.
    Bien entendu, ceux d'entre nous qui sont allés à la faculté de droit ont passé beaucoup de temps à apprendre les locutions latines et les ont utilisées souvent, mais dans un contexte quelque peu différent de la rédaction d'une loi.
    Je suis ensuite allée voir dans le Black's Law Dictionary, 8e édition, puisque c'est la référence. On y trouve une entrée pour modus operandi tout comme plusieurs autres expressions latines du droit. Le Black's définit le « modus operandi » comme une méthode opératoire ou une manière de procéder, un modèle récurrent de comportement criminel si distinctif que les enquêteurs peuvent attribuer le travail à une seule et même personne.
    J'ai aussi cherché des instructions en français, et j'ai trouvé un livre très intéressant intitulé Les locutions latines et le droit positif québécois, qui contient aussi une entrée pour « modus operandi » et le définit comme une

  (1340)  

[Français]

une « Façon de travailler, de fonctionner, de faire mode d'action ».

[Traduction]

    La dernière chose que j'aimerais dire est que cette locution ne figure pas dans la loi ni dans le règlement sur le registre des délinquants sexuels de l'Ontario, et donc le plus difficile, en ce qui concerne les éléments de l'article 8, est, bien entendu, d'être suffisamment précis pour que tous les agents sur le terrain disposent d'informations précises et pertinentes. Certains agents croient que cette locution, même si elle est bien comprise en général, pourrait ne pas être suffisamment précise pour permettre aux agents de police de savoir précisément ce qui doit être inscrit à cet endroit. Et bien entendu, l'article 8 précise que l'ordre vient du tribunal; ils sont donc en grande partie liés par l'information fournie par le tribunal. Il est facile d'inscrire un nom ou la nature précise du crime, ou de mettre des empreintes digitales dans un champ. Par contre, si on se contente d'inscrire « MO », ou les équivalents anglais ou français, on ne serait pas aussi précis.
    Je ne fais que commenter les aspects techniques, et je ne remets nullement en question le bien-fondé de la proposition.
    Monsieur Hoover, avez-vous quelque chose à dire?
    Je voulais simplement ajouter que même s'il est vrai que le Parlement est son propre maître et qu'il peut faire ce qu'il veut avec le contenu de la législation, il n'en demeure pas moins que pour nous, ce serait un précédent. Si vous utilisez une expression latine dans une loi canadienne, cette loi risque de n'avoir aucune force exécutoire. Vous devez en être conscients. Et je le répète, je pense que l'expression peut très bien se traduire en anglais et en français.
    Elle serait sans contredit exécutoire si elle est en anglais ou en français, mais pas si elle est en latin.
    Madame Campbell.
    Je voudrais ajouter quelque chose que j'aimerais ensuite que nous examinions, monsieur le président. Je pense que c'est important de garder en tête, comme je l'ai déjà dit, que le registre n'est qu'un outil pour aider la police dans ses enquêtes criminelles, et possiblement pour prévenir les crimes. Les autres outils demeurent à leur disposition, et nous pensons bien sûr à l'outil connu sous l'acronyme SALCV, le Système d'analyse des liens entre les crimes de violence. Il s'agit d'un système mis à jour par la police concernant les crimes à caractère très violent. Les anciens agents de police ici présents peuvent me corriger, mais je crois que cette base de données contient des informations sur le MO et sur d'autres questions connexes.
    Les agents qui enquêtent sur la disparition d'un jeune enfant peuvent consulter le SALCV et le registre national des délinquants sexuels, et comparer l'information des deux. Donc, si un certain élément distinctif de la disparition correspondait à l'information du SALCV, ce renseignement — le nom de la personne — pourrait être comparé au registre des délinquants sexuels pour vérifier si la personne en question vivait dans la région où l'enfant a disparu.
    Pourriez-vous nous proposer quelques expressions que nous pourrions utiliser, afin d'éviter les problèmes dont vous parlez?

  (1345)  

    Puis-je poser une question?
    Je vais attendre la réponse à ma question, et ensuite vous pourrez poser la vôtre, monsieur Holland.
    Nous sommes dans une impasse; que pouvons-nous faire pour nous en sortir?
    Je n'ai rien à vous proposer pour le moment. Si vous voulez mettre la question de côté quelques instants, les agents pourront profiter de ce sursis pour amener des suggestions.
    D'accord.
    Quelqu'un a des suggestions?
    Monsieur Holland, puis monsieur Oliphant.
    Je pense que mon problème, c'est que « modus operandi » figure dans l'Oxford English Dictionary et fait partie de la langue anglaise. Il y a beaucoup de mots de la sorte. Mens rea est un autre exemple dont nous avons déjà parlé, et qui fait maintenant partie de la langue anglaise. Notre langue tire ses orgines du latin. Nos mots sont d'origine anglo dans certains cas, saxonne, dans d'autres, mais aussi allemande ou française, et même japonaise. Tous nos mots proviennent d'autres langues. L'anglais n'est pas une langue vierge, et après un certain temps, un mot faisant partie du jargon devient un mot courant du langage.
    Selon moi, un mot du jargon fait partie de la langue à partir du moment où il figure dans l'Oxford English Dictionary, qui est en quelque sorte la bible de l'anglais. J'ai donc un peu de difficulté à comprendre pourquoi nous ne pouvons utiliser certains mots, parce que ça m'amène à me demander quels mots, de quelle origine, peut-on utiliser. Si nous ne pouvons utiliser un mot d'origine latine, même dans un sens contemporain, et que ce mot figure dans un dictionnaire anglais, alors quelles sont les autres expressions que nous ne pouvons pas utiliser? Et existe-t-il un dictionnaire de termes que je peux ou ne peux pas utiliser?
    Je suis confus, parce qu'un terme comme mens rea, par exemple, a un sens très précis. Si je dis qu'une personne n'avait pas suffisamment de mens rea pour être l'auteur du crime commis, on tient compte d'un contexte bien particulier — même si je suppose qu'il y a une autre façon de dire la même chose.
    Je ne comprends pas quel est le problème. Je pense que c'est un handicap, et peut-être que le mieux serait de demander aux agents de prendre le temps de penser à d'autres formulations et de déterminer de quelles sources on peut tirer notre vocabulaire.
    Monsieur Oliphant, puis monsieur Davies. Essayons de faire progresser ce projet de loi.
    Je suis d'accord avec M. Holland, et j'aimerais d'abord qu'il soit mis à l'essai, mais j'aimerais aussi que... Je ne connais pas très bien la façon de procéder article par article, et c'est la première fois que j'examine un projet de loi. Je suis député depuis un an, mais c'est la première fois que j'applique l'examen article par article, donc je ne sais pas trop comment nous pouvons mettre à l'essai le principe de ces deux amendements.
    Je crois qu'ils sont identiques, ou du moins très similaires, et je crois qu'ils concordent avec les témoignages que nous avons entendus durant notre étude de la loi elle-même — pas l'étude du projet de loi, mais l'étude que nous avons faite la semaine précédente. Mais je ne sais pas comment vérifier que tout est conforme.
    Ça va renforcer le registre. Ça va donner un autre outil aux services de police. Je pense que c'est ce que le gouvernement demande. Nous pensons que la législation sera ainsi meilleure et plus efficace, mais je ne veux pas perdre beaucoup de temps sur les mots latins, anglais et français, peu importe, pour autant que tout le monde soit d'accord. Je pense que nous avons le vote de toute façon.
    Monsieur Davies.
    Je viens de vérifier avec notre expert juridique. Je ne sais pas qu'est-ce qui s'est passé, mais ça a été soumis. Ça n'a vraiment pas d'importance. J'ai une formulation ici qui, je crois, pourrait faire l'affaire. Je vais la lire. On ajouterait ceci: « ... une description de la façon dont ils ont commis chaque crime de nature sexuelle pour lesquels ils ont été condamnés ».
    Quand j'ai lu ce passage, un peu plus tôt, mes collègues du Bloc m'ont dit que cette définition était trop précise et pas suffisamment générale pour inclure tout le concept. Si je paraphrase correctement, ils veulent quelque chose qui saura capturer les motivations profondes de l'auteur du crime. Mais quand j'ai entendu la définition de « modus operandi » du Black's Law Dictionary, le modus operandi ne comprend pas cette notion de motivation. Il ne s'agit que du modèle selon lequel un crime est commis. Ceci étant dit, si mes collègues du Bloc ont l'intention de mettre en mots un concept beaucoup plus large que ça, qu'ils le fassent. Mais je crois que la définition que j'ai écrite — je peux bien la faire circuler — et rédigée en anglais, ajoute ce que la plupart d'entre nous croyons nécessaire d'ajouter, peu importe le bien-fondé, pour aider la police.
    Si le registre indique qu'une personne aime s'attaquer aux enfants en utilisant un certain type de jouets pour les appâter... Disons que la personne a l'habitude de tourner autour des écoles avec un chiot dans les bras. Cette information serait probablement utile dans un registre. Je pense que c'est beaucoup plus utile que d'essayer de savoir ce qui se passe dans leur esprit, parce qu'il s'agit de faits objectifs. Quand il existe un modèle récurrent dans la façon dont les crimes sont commis, ça pourrait être utile pour la police de le savoir quand ils consultent le registre.
    J'aimerais tout simplement redire que j'ai mis cette définition sur papier et que je peux la soumettre au comité pour qu'il l'examine et qu'il détermine si ça couvre toute la notion.

  (1350)  

    D'accord.
    Oui?
    Puis-je avoir une réponse à ceci? Vous allez avoir une impression de déjà vu car j'en ai déjà parlé, mais puis-je savoir exactement ce que signifie le mot verboten en anglais. Je ne comprends pas ce concept.
    Verboten, d'abord.
    Ce que je veux dire — et je vais paraître un peu effronté — c'est...
    Je suis allemand, je vous comprends.
    ... que nous utilisons beaucoup de mots provenant d'autres langues, et on nous dit qu'on ne peut l'utiliser parce qu'il s'agit d'une expression latine. Ce que je veux dire, c'est que ce mot figure dans l'Oxford English Dictionary comme mot de la langue anglaise. Comment fait-on la distinction? C'est comme ça que les expressions latines et d'autres termes entrent dans le vocabulaire. J'aimerais comprendre la distinction.
    La parole est à Mme Mourani.

[Français]

    J'aimerais revenir sur ce qu'a dit M. Davies. Dans la version française de sa motion, on utilise les mots « description du crime ». Or le mot « description » peut signifier bien des choses. Par exemple, décrire un crime peut se limiter à la description de la scène du crime, mais ce n'est pas la même chose qu'un mode opératoire. La description du crime et celle de la victime font partie du mode opératoire.
     Souvent, le délinquant sexuel choisit sa victime. Certains ne la choisissent pas, mais ils sont en minorité. Ça fait partie du mode opératoire. Si l'on veut définir le mode opératoire de manière précise, il va falloir ajouter les mots « description de la scène du crime », « description de la victime », « description des diverses étapes ayant mené au crime ». La description du crime ne constitue qu'une partie du mode opératoire.

[Traduction]

    C'est au tour de Mme Glover, puis de M. Rathgeber.
    Je vais essayer d'être brève encore une fois. Je voudrais seulement répéter ce que mon collègue a déjà dit; il y a quelques problèmes ici, et pour une raison quelconque, nous nous sommes concentrés sur ce mot latin. Mais il y a un autre problème: c'est le fait que les gens qui vont appliquer ces articles sont généralement des policiers, qui n'ont pas étudié le latin et qui ne peuvent pas dire sur-le-champ ce que signifie mens rea et « modus operandi », parce qu'ils utilisent des termes différents selon la province ou le territoire où ils sont. Donc, M. MacKenzie a suggéré de faire d'autres études et d'autres consultations pour que les partenaires provinciaux et territoriaux, de même que le milieu policier, déterminent précisément ce qu'on veut dire par ce terme.
    Pour répondre rapidement à la question de M. Holland, j'espère avoir mon mot à dire en tant que secrétaire parlementaire pour les Langues officielles. Les deux langues officielles, monsieur, sont le français et l'anglais. Les conseillers nous ont dit qu'il est essentiel que la loi soit en français ou en anglais. Ça élimine toute autre langue, pour la loi en tant que telle. Le terme peut figurer dans l'index, ou dans n'importe quel genre de document par après. Mais c'est clair d'après ce que j'ai entendu qu'il doit être en français ou en anglais seulement. Si nous constatons qu'il y a deux problèmes, nous ne pourrons peut-être trancher ça ici. Nous allons tourner en rond. Nous devrions peut-être reporter la question pour qu'elle soit approfondie, et puis nous pourrons passer à d'autres articles pour finir le reste.
    Monsieur Rathgeber.
    Merci.
    Je pense que je peux éclairer M. Holland.
    Il y a une distinction entre les mots et les expressions. Si un mot d'origine latine est intégré au dictionnaire Webster's, on peut l'utiliser pour rédiger une loi du Parlement du Canada. Mais ce n'est pas la même chose pour une expression. Mens rea est une expression, comme actus reuset res ipsa loquitur. Mais vous pourriez voir le mot res au Parlement. Il faut donc faire la distinction entre les mots d'origine étrangère qui viennent à être intégrés à l'usage, et les expressions propres au latin, qui ne peuvent pas être utilisées.
    Je peux vous donner d'autres détails; ce sera à mon tarif horaire normal.
    Des voix: Oh, oh!

  (1355)  

    Essayons de conclure ce point, ou nous devrons y revenir plus tard.
    Monsieur Ménard.

[Français]

    Je suis d'accord avec Mme Glover. Nous devrions reporter cela.
    Par contre, je voudrais simplement souligner que mon idée — et je ne dis pas que c'est la meilleure, même si j'ai cru qu'elle l'était quand je l'ai soumise — était de sauver du temps aux policiers. Il s'agissait de les inciter à décrire une façon d'agir de manière succincte, de manière à ce que ce soit utile.
    Or les suggestions de M. Davies feraient en sorte d'allonger la description. Il s'agirait de décrire les divers crimes à partir desquels les policiers devraient déduire le modus operandi. J'étais parfaitement favorable à la définition du Black's Law Dictionary. Elle m'apparaissait très complète. Donc, si nous sommes tous d'accord pour ajouter ce concept, nous pouvons le faire.
     Enfin, je voulais quand même signaler que le terme « modus operandi » figure peut-être dans le dictionnaire Webster, mais qu'il figure assurément dans le Petit Robert, qui est en quelque sorte la bible en matière de français usuel. On définit très succinctement ce terme comme une manière de procéder, un mode opératoire. Quant à moi, les deux expressions correspondent exactement à ce que je voulais inscrire. J'espère que vous comprenez la distinction, par rapport à ce que suggère M. Davies.

[Traduction]

    Il faut être tous d'accord pour retirer l'amendement. Il propose de le retirer maintenant.

[Français]

    Je n'ai pas compris ce que vous avez dit, monsieur le président. Pourriez-vous le répéter?

[Traduction]

    Avez-vous proposé de retirer votre amendement?

[Français]

    Non, j'ai suggéré que nous reportions l'étude de l'amendement et qu'entre-temps, des experts s'entendent sur ces questions. Je voulais ajouter cela. C'est ce que je veux, et je voulais qu'ils le comprennent. Je ne veux pas que les policiers racontent toutes les histoires.

[Traduction]

    Voulez-vous reporter la question à un peu plus tard, monsieur MacKenzie?

[Français]

    Au contraire, je veux qu'ils résument en quelques mots des renseignements utiles pour l'identification d'une personne, parfois inconnue, qui a commis plusieurs crimes en ayant recours au même modus operandi.

[Traduction]

    Monsieur MacKenzie.
    Je propose que nous nous sortions de cette impasse et que nous demandions aux fonctionnaires de revenir une autre fois avec plus de détails.
    Je me demande si on peut poursuivre et accepter le reste; ce serait la seule question à régler après. J'ai regardé notre calendrier, comme les autres devront le faire. Je crois que nous aurions le temps de reprendre cette question le 3 décembre.
    Madame Campbell, vouliez-vous dire quelque chose?
    Nous avions une petite discussion rapide. Dans le Black's Law Dictionary, on parle de « method of operating ». Ça semble certainement correspondre à ce qui se trouve dans le dictionnaire français. Je ne sais pas si ce serait

[Français]

« façon de travailler » ou « façon de fonctionner »...
    On parle d'une manière de procéder, d'un mode opératoire.

[Traduction]

    Est-ce que vous proposez que nous acceptions cette formulation au lieu de « modus operandi »?

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    D'accord.
    Monsieur Holland.
    Ça pose problème à mes yeux. C'est dans les deux dictionnaires, on en a déjà parlé. Si vous me trouvez pointilleux, je suis désolé, mais prenez n'importe quelle loi avec laquelle les policiers doivent travailler; certains termes peuvent être complexes, mais ils font partie de notre vocabulaire.
    J'ai énormément de difficulté à accepter que nous ne pourrions pas utiliser ces termes, et je m'inquiète des précédents que ça créerait. Si je ne peux pas utiliser des termes du Oxford English Dictionary, je crois que ça crée un dangereux précédent. La réalité, c'est que les mots, comme l'a dit M. Ménard, les expressions à deux mots, comme « déjà vu », un autre qui s'utilise en anglais, acquièrent une signification très précise. Ils sont dans nos dictionnaires et on peut facilement les inclure à notre vocabulaire.
    Je ne dis pas que nous devrions utiliser ce terme en particulier ici; je dis que je m'inquiète du précédent qu'on établit. Nous n'avons plus de temps aujourd'hui, mais je crois que nous devrions y réfléchir. Peut-être que les fonctionnaires du ministère pourraient trouver de meilleurs exemples de mots du dictionnaire que nous pouvons utiliser ou non.
    Ce qui m'inquiète, c'est créer un précédent.

  (1400)  

    Monsieur MacKenzie.
    Monsieur le président, je dois convenir que « method of operation » en anglais couvre exactement le sens voulu par M. Ménard, vraiment. Et les fonctionnaires disent que c'est acceptable pour nous. Ils vont retourner voir les partenaires des provinces et des territoires et régler la question.
    Je crois que nous pourrons clore la question si nous pouvons seulement accepter...
    Il faut procéder de la bonne façon. Nous devons noter l'amendement que M. Ménard a suggéré, soit parler de « mode opératoire ». C'est l'amendement que vous faites.
    Il faut que ça provienne de quelqu'un d'autre, c'est vrai, désolé. Vous ne pouvez pas faire cet amendement.
    Je propose l'amendement.
    M. MacKenzie propose l'amendement. En anglais, il s'agira de « method of operation ».
    Est-ce que je vais trop vite, monsieur?

[Français]

    Non, mais je n'ai que deux oreilles, monsieur le président. Si deux personnes parlent en même temps...

[Traduction]

    Lyne va vous dire le terme français. Je ne le prononce pas très bien.

[Français]

    Je vois ici dans le dictionnaire, « manière de procéder ».
    Il s'agit d'une méthode, non? Il s'agit d'une manière de procéder, d'un mode opératoire.
    Il s'agit de « mode opératoire » et de method of operation.

[Traduction]

    Monsieur le président, on se trouve à dépasser 14 heures. Nous avons déjà convenu de revenir à cette question plus tard. Je suis d'accord pour que ce soit au début de décembre. Nous devons aussi examiner le reste des articles.
    Je suggère que nous revenions là-dessus la prochaine fois.
    Est-ce que nous pourrions voter sur ce point pour que nous n'ayons pas à tout reprendre?

[Français]

    Monsieur le président, je veux proposer un sous-amendement.

[Traduction]

    Si vous comptez proposer un sous-amendement, nous allons devoir nous arrêter ici. Nous continuerons le 3 décembre.
    Est-ce que tous les membres sont d'accord pour que nous poursuivions le 3 décembre?
    Des voix Oui.
    Le président D'accord.
    La séance est levée.
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