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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 049 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 9 février 2011

[Enregistrement électronique]

  (0900)  

[Traduction]

    Je déteste avoir à pousser les gens, mais c'est toujours le président qui est blâmé si la séance commence en retard; nous allons donc commencer à l'heure.
    C'est très agréable d'être ici, à Guelph; je tiens à remercier notre hôte, le député Frank Valeriote, qui nous a accueillis, et à remercier tous ceux qui sont ici.
    Notre première séance, ce matin, durera une heure et demie. Les groupes, organisations ou particuliers auront droit à un maximum de 10 minutes pour présenter leur exposé, après quoi nous allons passer à la période de questions.
    Pour commencer, nous accueillons M. Michael Emes, doyen du Collège de la science biologique de l'Université de Guelph.
    J'aimerais commencer par vous expliquer un peu mes antécédents. Vous aurez compris que je ne suis pas né au Canada, à mon accent, mais j'y travaille. Je suis un scientifique, et mon domaine de recherche est l'amélioration de la productivité des cultures. Je suis arrivé au Canada en 2002, en provenance du Royaume-Uni, car je venais d'accepter le poste de doyen du Collège de la science biologique de l'Université de Guelph.
    Le rôle des scientifiques comme moi consiste non seulement à mettre en place des mécanismes d'amélioration de la sécurité alimentaire et de notre qualité de vie, la nôtre et celle des autres, mais aussi de le faire en visant la durabilité. C'est pourquoi j'espère que vous allez me considérer comme une personne qui essaie d'évaluer les faits de manière objective, sans défendre de point de vue politique ou financier. J'ajouterais que je ne reçois pas de financement de l'industrie biotechnologique.
    Comme vous le savez, et je l'ai constaté, l'Europe a réagi beaucoup plus négativement que l'Amérique du Nord aux technologies des OGM, dont les utilisations commerciales et agricoles, je parle des cultures, ont été extrêmement limitées. Au contraire, les cultures génétiquement modifiées sont répandues, aux États-Unis et au Canada.
    J'ai cru qu'il serait utile d'intégrer à mon exposé un résumé de mes opinions sur les raisons pour lesquelles la réaction aux OGM a été si différente, en particulier celle du Royaume-Uni, qui a été probablement le premier à réagir si négativement. Quand j'étais là-bas, dans les années 1990 et au début de 2000, j'ai participé à un grand nombre de discussions et de débats publics et j'en connais donc personnellement la nature.
    À mon avis, le débat animé touchant l'acceptation des OGM en Europe n'a pas donné grand-chose. On en a beaucoup parlé, mais on n'a fourni aucun éclaircissement, et c'est en grande partie en raison de la façon dont les médias et les divers intervenants ont présenté les choses. On a joué sur les émotions en utilisant des expressions comme « aliments-Frankenstein », et ces expressions elles-mêmes sont tirées d'un monde imaginaire. On a essayé de résumer des questions complexes à un commentaire de 30 secondes ou à une citation qui tient en une seule ligne, dans les journaux, mais cela ne sert la cause d'aucune des parties puisque, à l'échelle mondiale, le phénomène est déjà répandu.
    La presque totalité des cultures issues de la recherche en biotechnologie, à l'échelle du monde, sont des cultures de soya, de maïs, de coton et de canola, et, en 2008, elles occupaient quelque 115 millions d'hectares. À l'échelle du globe, environ 37 p. 100 de ces cultures comportent un caractère biotechnologique. Les OGM ont été acceptés aux États-Unis, au Canada, en Chine, en Afrique du Sud et dans la plus grande partie de l'Amérique du Sud, y compris le Brésil, et la position de l'Europe semble donc décalée; en outre, elle soulève la question des obstacles au commerce, et il est permis de soutenir que cela aura une incidence sur les agriculteurs canadiens et sur ceux des pays en développement, qui dépendent des exportations vers l'Europe.
    Pourquoi l'Europe s'est-elle soudainement opposée à cette technologie? L'une des raisons, je crois, c'est que le problème s'est vivement posé après la crise de l'ESB, au Royaume-Uni, qui a attiré l'attention du grand public sur ce qu'il a perçu comme un échec de l'agriculture. En fait, lorsque le mouvement de protestation a commencé, à la fin des années 1990, les OGM se trouvaient déjà sur les tablettes des supermarchés du Royaume-Uni, et depuis quelques années, mais il a par la suite fallu les retirer. Il y a ensuite eu un article scientifique, dont la teneur n'a jamais été validée, et qui a créé une alerte sanitaire. Le prince Charles s'en est mêlé, et vous connaissez la suite.
    Qu'entend-on par modification génétique? On parle ici de modifier la composition génétique de certains organismes, en particulier des plantes, mais aussi du bétail. Mais en réalité, c'est ce que font les éleveurs depuis des décennies, au moins, y compris, j'aimerais le préciser, en favorisant l'échange de l'information génétique entre des espèces qui, dans leur milieu naturel, ne sont pas sujettes au croisement ou à la pollinisation croisée. Il ne s'agit pas encore de la technologie des modifications génétiques.
    Par définition, l'agriculture n'est pas un phénomène naturel. La population du monde entier trouve dans seulement 15 végétaux et 7 espèces animales sa source d'alimentation quotidienne. Que vous soyez d'accord ou non, c'est un fait. Au cours des 50 ou 60 dernières années, on a intégré aux cultures des milliers de gènes provenant d'espèces avec lesquelles il n'existe aucune compatibilité, dans l'état sauvage, et la plupart de ces gènes nous sont inconnus. Laissez-moi le répéter: je ne parle pas encore des technologies servant aux modifications génétiques. Le triticale, un type de fourrage qui pousse en Europe, est un bon exemple. C'est le résultat d'un croisement entre le blé et le seigle.
    Donc, si vous considérez qu'il est fondamentalement inacceptable de permettre le transfert de gènes en faisant fi de la sélection naturelle, sachez qu'une bonne partie des aliments qui se trouvent dans notre assiette sont produits exactement de la même façon; ces méthodes, utilisées encore aujourd'hui, fonctionnent. Le transfert d'une petite poignée des gènes recherchés, par exemple pour permettre à un végétal de mieux résister à une maladie, s'accompagne souvent du transfert incontrôlable d'un millier de gènes, au sujet desquels ont ne sait rien.

  (0905)  

    Pourtant, ce processus qui échappe en partie à notre contrôle a permis de produire des aliments nutritifs, que la plupart d'entre nous tenons maintenant pour acquis. Soyez tranquilles. Il s'agit d'une méthode relativement aléatoire et incontrôlée de modification génétique, qui suppose également l'utilisation d'agents mutagènes et tératogènes actifs, causes d'anomalies congénitales, dans le but d'augmenter le nombre de chromosomes et d'obtenir les mutations recherchées.
    Vous imaginez bien que les médias se jetteraient comme des ogres sur les mots que je viens de dire. Je vois déjà les gros titres: « Les gènes traversent les frontières entre les espèces »; « Agents tératogènes en agriculture: "ce n'est pas naturel", affirme un chercheur ».
    Hors contexte, je dois reconnaître que tout cela est vrai. Il existe un cultivar d'orge largement utilisé, Golden Promise, que l'on trouve également dans des exploitations agricoles biologiques. Il s'agit en fait d'un cultivar issu d'une mutation: l'orge a été soumis à des rayons X, ce qui a entraîné la réorganisation des chromosomes — il s'agissait en fait d'en mettre en valeur les propriétés utiles aux producteurs de whisky.
    Ce que j'essaie de faire comprendre, c'est que la sélection des plantes en vue de la production alimentaire s'est toujours appuyée sur des modifications génétiques et l'échange d'informations génétiques, souvent par des méthodes éloignées de la nature, avant même les OGM. Mais des gros titres comme ceux que je viens d'inventer auraient pu empêcher tous les progrès réalisés depuis 60 ans. Je crois que le débat est en bonne partie biaisé par des titres sensationnalistes, qui ne font avancer ni l'une ni l'autre cause.
    Les OGM ne sont pas non plus une panacée qui résoudra le problème de la sécurité alimentaire et de la faim dans le monde, mais c'est, selon moi, un autre engin puissant à mettre dans l'arsenal. Récemment, Sir John Beddington, conseiller scientifique en chef du gouvernement du Royaume-Uni, a fait la déclaration suivante:
    
[Traduction] Il n'y a pas de solution magique, mais il serait extrêmement difficile de trouver un argument qui justifierait, même minimalement, que l'on n'utilise pas les technologies comme celles permettant les modifications génétiques... Aucune approche unique ne peut garantir la sécurité alimentaire.
    Vous voulez savoir ce qu'on entend exactement par modification génétique dans le contexte actuel? Il s'agit de transférer un gène ou un petit groupe de gènes sélectionnés d'une espèce à une autre, ou de modifier un gène existant déjà dans une espèce végétale donnée. En ce qui concerne la technologie — c'est-à-dire la méthode utilisée pour réaliser cette modification génétique particulière —, la principale différence entre les OGM et les produits dont je viens de parler, c'est que la technologie permet une précision beaucoup plus grande. Elle permet par exemple d'incorporer un gène unique connu parmi, disons, 30 000 autres gènes, de façon qu'on puisse le retracer. Comparez cela avec ce que je vous ai décrit tantôt, quand je parlais de milliers de gènes supplémentaires inconnus qui étaient intégrés en même temps que le gène désiré.
    Donc, comment peut-on utiliser la technologie de la modification génétique, et quelles seraient ses répercussions sur la chaîne alimentaire et sur l'environnement? Eh bien, je peux vous parler par exemple des cas les plus connus, je crois, c'est-à-dire l'insertion d'un gène qui assure la résistance à des herbicides ou à des parasites. Ces gènes sont en général prélevés sur des micro-organismes.
    Les éléments qui menacent le plus le rendement des cultures, ce sont les mauvaises herbes, les agents pathogènes et les parasites. Comment les contrôlons-nous? Eh bien, ce que nous faisons le plus souvent, c'est d'asperger et d'espérer; on utilise des tonnes d'herbicides, de fongicides et de pesticides, et il est compréhensible que les gens aient des réserves à leur sujet. Le lobby en faveur des OGM soutient que cela est meilleur pour l'environnement, car c'est une façon de réduire l'empreinte chimique; le lobby contre les OGM affirme que c'est pire. Où sont donc les données probantes? Eh bien, malheureusement, il faut répondre que les deux camps ont tendance à utiliser ces données autant en bien qu'en mal. Ce qui est indiscutable, cependant, par exemple, c'est que le recours à du coton génétiquement modifié en Australie a sauvé cette industrie, qui était sur le point de disparaître totalement parce qu'elle utilisait de trop grands volumes de pesticides. De la même façon, au Canada, le maïs génétiquement modifié a permis de réduire des deux tiers environ le volume de pesticides utilisés. M. Van Acker pourra vous donner des renseignements plus éclairés au sujet de la tolérance aux herbicides.
    Les choses ont commencé à changer en Europe. On y trouve maintenant des pommes de terre génétiquement modifiées, cultivées en Allemagne, en Suède et dans la République tchèque, et du maïs génétiquement modifié, cultivé en Espagne et au Portugal avec l'approbation de l'Union européenne. L'Irlande vient d'approuver l'utilisation du maïs génétiquement modifié dans les aliments et les aliments pour animaux, mais, et c'est peut-être le fait le plus important de tous, le Comité permanent de l'Union européenne sur la chaîne alimentaire et la santé animale, avec l'appui de plusieurs gouvernements, y compris celui du Royaume-Uni, a voté cette semaine en faveur de l'importation d'aliments pour animaux contenant des traces non autorisées de substances végétales génétiquement modifiées. Le paysage de la réglementation est donc en train d'évoluer, en Europe. Je n'ai aucun doute sur le fait que la tendance va se maintenir.
    Jonathan Swift — j'ai hésité avant d'utiliser cette citation, mais c'est ainsi que je vais conclure — a écrit dans Les voyages de Gulliver que « si quelqu’un pouvait faire croître deux épis ou deux brins d’herbe [là] où auparavant il n’y en avait qu’un », il aurait fait davantage pour l'humanité, j'hésite quand même, « que toute la race de nos sublimes politiques ».

  (0910)  

    C'est un défi intéressant, pour toutes les personnes présentes ici.
    Merci beaucoup. C'est une belle citation à utiliser en conclusion.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Rene Van Acker, du Département d'agriculture végétale, de l'Université de Guelph également.
    Veuillez respecter le délai de 10 minutes, s'il vous plaît.
    Je m'appelle Rene Van Acker. Je suis professeur au Département d'agriculture végétale et doyen associé au Collège d'agriculture de l'Ontario, de l'Université de Guelph, au Canada. Je remercie le comité de son invitation. Auparavant, j'ai enseigné la malherbologie et la gestion des cultures à l'Université du Manitoba, à Winnipeg, de 1996 à 2006. Mes domaines de recherche sont la biologie et l'écologie des semis de mauvaises herbes, les systèmes de culture solides, la coexistence des cultures génétiquement modifiées et non modifiées et les transferts de caractère d'une culture à l'autre.
    Mon travail dans le domaine du transfert de caractère m'a amené à participer à des activités de collaboration, à des conférences et à des consultations à l'échelle internationale, au Danemark, en Allemagne, en Autriche, en Australie, en Suisse et aux États-Unis, et à faire partie du comité consultatif scientifique pour une série de conférences internationales sur la coexistence des cultures génétiquement modifiées et non modifiées dans la chaîne d'approvisionnement agricole, qui ont eu lieu au Danemark, en France, en Espagne et en Australie.
    J'ai grandi sur une ferme dans le Sud-Ouest de l'Ontario. J'ai reçu de l'Université de Guelph mes diplômes de baccalauréat et de maîtrise en phytotechnie et en gestion des mauvaises herbes, et l'Université de Reading, au Royaume-Uni, m'a remis mon diplôme de doctorat dans le domaine de l'écologie des cultures et des mauvaises herbes.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de présenter un exposé. J'en profiterai pour attirer votre attention sur les défis qui se présentent lorsqu'on veut s'assurer qu'un type de culture n'en contamine pas d'autres et sur le problème particulier que cela représente quand on veut éviter que de nouveaux caractères n'apparaissent de manière accidentelle ou imprévisible dans une autre culture, en particulier lorsque le seuil de quantité nuisible est très peu élevé. Si l'on envisage de réglementer les préjudices potentiels liés à la présence non voulue d'un caractère donné, il faudra donc être réaliste.
    En ce qui concerne les cultures comportant de nouveaux caractères, la plupart des risques ont trait au transfert de ces nouveaux caractères, qui peuvent passer d'une espèce cultivée à une espèce sauvage, comme dans le cas des mauvaises herbes, ou d'une espèce cultivée à une autre espèce cultivée. Cela est particulièrement vrai dans le cas du transfert de caractères à l'intérieur d'un système agricole ou à l'intérieur des processus d'approvisionnement agricole.
    Le problème de la gestion des nouveaux caractères ou des transgènes, qui exigent de s'assurer qu'ils ne se présenteront pas là où on ne les a pas voulus, est un des principaux sujets du débat sur le caractère souhaitable de certains nouveaux caractères. Quand on parle de la coexistence, c'est en général dans le contexte des seuils acceptés pour la présence des plantes adventices, mais il est important de souligner qu'il faut gérer strictement les caractères réglementés afin d'empêcher leur propagation et que le seuil relatif à la présence des caractères réglementés est fixé à zéro. C'est la politique adoptée au Canada, de même qu'aux États-Unis, en Australie, au Japon, en Corée et dans tous les pays de l'Union européenne, à l'heure actuelle.
    En Amérique du Nord, nous possédons une expérience de plus 10 ans dans le domaine de la production commerciale de cultures génétiquement modifiées, comportant des caractères nouveaux distincts et facilement retraçables, et nous pouvons tirer de cette expérience une mine d'exemples et de données probantes dont on pourra se servir au moment de définir les règles relatives au confinement des caractères.
    Dans le cadre d'une enquête que j'ai réalisée en collaboration en 2005, j'ai fourni des renseignements qui confirmaient et mettaient en relief deux aspects importants de cette question. En premier lieu, lorsqu'un végétal comportant des caractères nouveaux fait l'objet d'une culture commerciale extérieure pendant un certain temps, il est inévitable que ces caractères nouveaux s'étendent au-delà de leur destination prévue. Le risque de fuites augmente en même temps que l'importance de la production et des équipements connexes ainsi qu'avec l'augmentation du nombre des intervenants des processus de production et de manutention. En second lieu, une fois qu'un caractère donné s'est échappé et se dissémine dans l'environnement, y compris la chaîne d'approvisionnement agricole, il est difficile, voire impossible, de le récupérer et c'est pourquoi, lorsque la fuite représente un problème, c'est un problème persistant qui deviendra probablement permanent.
    Ces deux aspects expliquent pourquoi il est nécessaire d'être prudent et de prendre de grandes précautions au moment de produire et de mettre à l'essai des caractères nouveaux, qu'il faudra confiner ou qui pourraient se révéler nuisibles s'ils apparaissaient là où ils ne sont ni voulus, ni attendus. La gestion du confinement des caractères présente de nombreux défis, entre autres en raison du fait que ces caractères sont souvent invisibles et que le contrôle exige des méthodes de dépistage efficaces.
    Les caractères se propagent par le truchement du pollen ou des semences. La propagation vise une multitude de sous-populations, c'est-à-dire les cultures proprement dites, les cultures créées volontairement et les sous-populations sauvages. Le transfert se fait par le truchement de l'équipement ou pendant la manipulation humaine, pendant les semailles et les moissons et pendant le nettoyage, la manipulation et le stockage des semences. Chaque pièce d'équipement et chaque intervenant humain peut être considéré comme un piège ou comme une source de ces caractères en les transportant, souvent sous forme de semence. C'est pourquoi l'on peut voir chacune des pièces de l'équipement et chaque intervenant humain comme une sous-population supplémentaire d'un caractère donné ou d'un groupe de semences.
    Les caractères peuvent se propager entre ces sous-populations, qui, ensemble, forment une métapopulation, soit une population où ce caractère est présent. En conséquence, des mécanismes de confinement responsables devront tenir compte de toutes les sous-populations possibles de même que de toutes les possibilités de transfert réciproques entre le pollen et les semences. Il faut en particulier attacher une grande importance au dépistage et à l'éradication au point de chute, c'est-à-dire la culture cible. C'est là une considération centrale, étant donné que les points de chute des caractères peuvent être des champs, des exploitations agricoles, des pièces d'équipement ou des commerces, et que des personnes concernées ne sont pas toujours au courant des efforts de confinement. Voilà une difficulté.

  (0915)  

    Dans tout système de confinement d'un caractère donné, la rigueur nécessaire sera fonction du seuil de tolérance et des probabilités de fuite ou de transfert du caractère. Ce dernier aspect dépend de la nature du végétal cultivé et de la complexité du système de production et de manipulation. Pour être efficaces, les mesures doivent dépasser des limites d'un champ ou d'une exploitation agricole et respecter comme il se doit les défis du confinement.
    Depuis le début de sa production commerciale, en 1996, nous avons accumulé une bonne expérience touchant le canola tolérant le glyphosate, par exemple dans l'Ouest du Canada, et on peut donc dire que cette culture créée volontairement peut être considérée comme une métapopulation pour ce qui est du gène Roundup Ready. Et je parle de la période de culture en milieu ouvert. Nous avons récemment publié un article montrant que les pousses de canola, sur le bord des routes, ont reçu ces nouveaux caractères. En ce qui concerne le gène Roundup Ready du canola, le confinement du caractère aurait requis — mais personne ne l'a exigé — des mesures visant l'ensemble de la région. Gérer le confinement dans un champ donné ou dans une culture donnée seulement, cela n'aurait pas été une mesure suffisante ni réaliste.
    Étant donné le nombre de mécanismes qui permettent à un caractère de s'échapper et comme il peut répéter l'exercice, se propager par lui-même et s'installer, tous ceux qui cherchent à le confiner doivent utiliser toutes les méthodes possibles. Il est essentiel d'utiliser plusieurs méthodes en même temps, puisque même une contamination très faible d'un stock de semence peut facilement se traduire par une présence importante du caractère en question dans la récolte, et cela, même pour les espèces qui se reproduisent principalement par autopollinisation et dont la durée de vie des semences est très limitée, par exemple le blé de printemps du Canada.
    L'isolement physique est l'un des mécanismes que l'on utilise traditionnellement pour limiter l'échange de gène par le truchement du pollen; cependant, cette méthode n'assure pas la protection contre l'invasion d'un caractère, et les personnes qui s'efforcent de confiner les caractères doivent tenir compte du fait que les distances d'isolement traditionnel ont été établies dans le but de garantir la pureté des semences, non pas, nécessairement, l'absence totale d'un caractère donné ou la pureté génétique. Les distances d'isolement doivent être adaptées à la nature de l'espèce visée et à son seuil de tolérance.
    L'autre méthode de confinement est l'isolement temporel; elle est souvent utilisée par les phytogénéticiens et par les producteurs de graines. Toutefois, les systèmes traditionnels d'assurance de la pureté des semences n'ont pas été conçus pour assurer les niveaux requis de pureté qui seraient nécessaires pour empêcher le transfert d'un caractère donné. Dans une étude ayant fait l'objet d'un examen par les pairs, qui a été publiée en 2004, et qui portait sur des stocks de graines certifiées de canola de l'Ouest du Canada, nous avons révélé avoir découvert des caractères génétiquement modifiés non voulus dans 97 p. 100 des stocks, à un niveau allant parfois jusqu'à 4,9 p. 100.
    Un exemple connu d'échec des mesures de confinement des caractères est celui du maïs StarLink, cultivé aux États-Unis. Ce maïs avait été modifié afin qu'il exprime une protéine insecticide et avait été approuvé pour la consommation animale, mais pas pour la consommation humaine. Les mesures de supervision de la ségrégation entre les aliments pour humains et les aliments pour animaux du système de manutention des produits en vrac des États-Unis n'ont pas été suffisantes, et la protéine insecticide a été retrouvée dans un certain nombre d'aliments préparés, en 2000. Trois ans après cette découverte, et après une impressionnante campagne de rappel, le département de l'Agriculture des États-Unis retrouvait toujours des traces du maïs StarLink dans les systèmes de traitement des aliments pour humains et les systèmes de traitement des aliments pour animaux des États-Unis.
    L'affaire StarLink a démontré non seulement que les lacunes des protocoles de confinement permettaient à des caractères problématiques de s'échapper, mais aussi que le retrait complet de certains caractères et des produits sur lesquels ils sont fixés, dans des systèmes complexes et imposants de production d'aliments pour humains et d'aliments pour animaux commerciaux est un problème extraordinairement difficile qu'il peut être impossible de régler.
    Un exemple plus récent est celui du riz LibertyLink, produit aux États-Unis. Ce riz génétiquement modifié, un produit réglementé, s'est répandu à la suite d'essais au champ dans un cadre confiné, et on a fini par en retrouver de nombreux éléments dans la chaîne d'approvisionnement en riz commercial des États-Unis, y compris des graines certifiées, des usines ou des produits de consommation vendus par les États-Unis dans les principaux marchés d'exportation du riz, y compris dans plusieurs pays d'Europe. Les répercussions économiques sur les producteurs de riz américains ont été évaluées à plus de un milliard de dollars. Le coût final, pour les agriculteurs, ne sera pas connu tant que les poursuites entamées contre le concepteur du riz génétiquement modifié par près de 3 000 agriculteurs n'auront pas été réglées.
    Ces cas, parmi d'autres, mettent en lumière tout ce qui peut arriver quand un caractère s'échappe et devient un envahisseur de la grande chaîne de l'approvisionnement.
    En résumé, la mise au point de caractères génétiquement modifiés pour la culture entre dans une nouvelle ère et devra englober tous les caractères possibles, y compris ceux qui pourraient réellement représenter des risques pour la santé humaine ou pour l'environnement, les caractères qui peuvent avoir une incidence sur les coûts des processus agricoles, les caractères que l'on étudie et que l'on exempte de la réglementation, dans diverses mesures selon le pays, ce qui nuit à la synchronisation de la déréglementation et favorise le morcellement des marchés d'exportation des produits agricoles. Dans cette nouvelle ère, l'économie pourrait souffrir de l'apparition de certains caractères là où on ne les attend pas et là où on ne les veut pas. En outre, le transfert de caractères d'une culture à une autre, dans le paysage agricole diversifié et le long d'une grande chaîne d'approvisionnement agricole intégrée est un phénomène très complexe et difficile à suivre; si un caractère réussit à s'échapper, il sera difficile, voire impossible, de l'éradiquer par la suite.

  (0920)  

    C'est pourquoi il est important, si l'on pense à adopter un règlement sur les possibles préjudices économiques, qu'il soit réaliste et tienne compte des faits concrets touchant le transfert et le confinement des caractères.
    Merci beaucoup, monsieur Van Acker.
    Monsieur Raizada, veuillez ne pas dépasser vos 10 minutes, s'il vous plaît.
    Je m'appelle Manish Raizada et je suis professeur agrégé au Département d'agriculture végétale; je suis aussi agent des relations internationales.
    On m'a dit, dans la seconde moitié des années 1990, que j'ai peut-être été le premier diplômé du monde à produire du maïs génétiquement modifié; je suis généticien moléculaire. Avant cela, cependant, je travaillais en fait pour Greenpeace, et je me considère également comme un environnementaliste. Je vais donc essayer de faire voir ces deux points de vue, ici, et de donner aussi le point de vue des pays en voie de développement.
    On me demande souvent si les OGM sont bons ou mauvais? Je réponds aussi: est-ce que les médicaments sont bons ou mauvais?
    Certains médicaments sont extraordinaires. Quand j'ai un rhume, je prends de l'aspirine ou du Tylenol, et c'est parfait. D'autres « médicaments », comme la cocaïne, sont moins bons. C'est peut-être que certains médicaments sont bons, à faible dose, et mauvais à plus forte dose. Cela dépend.
    Il y a aussi dans le monde beaucoup de gènes. Cela dépend du gène, cela dépend du fait qu'il s'exprime ou non, mais à mon avis, tout dépend du risque et des avantages relatifs que présente un gène quelconque, et c'est cela qu'il faut évaluer. Je crois que les deux côtés de la question, les risques et les avantages...
    Monsieur Raizada, les interprètes ont de la difficulté à vous suivre. Pourriez-vous...
    M. Manish N. Raizada: Ralentir?
    Le président: Pourriez-vous ralentir un peu, si vous le pouvez?
    Bien sûr.
    Je crois que l'on a exagéré autant les risques que les avantages relatifs. Il est question ici des risques et des avantages relatifs. J'ai divisé mon exposé selon quelques thèmes. Encore une fois, je veux exprimer différents points de vue.
    Le premier thème, c'est l'éthique. Je pense que la population croit que les généticiens moléculaires jouent avec la nature, qu'ils se prennent pour Dieu. Les biologistes moléculaires pensent ainsi. N'oubliez pas qu'un transgène traverse la frontière entre les espèces; le gène d'une espèce est greffé sur une autre espèce.
    Mais selon le point de vue d'un généticien moléculaire, les espèces ne sont pas si importantes que cela, honnêtement. Je vais vous donner un exemple. Les gènes sont un produit d'autres gènes; ils portent l'héritage des gènes remontant au début de la vie. Lorsqu'un généticien moléculaire découvre un nouveau gène, dans un végétal, l'une des premières choses qu'il fera sera de vérifier si ce gène présente des similitudes avec les gènes d'une bactérie ou d'un homme, un gène semblable qui aurait peut-être été davantage étudié. C'est ainsi que l'on apprend que les gènes sont liés, même après des milliards d'années d'évolution, parce qu'ils viennent tous les uns les autres.
    C'est un concept très important. Lorsqu'un généticien moléculaire constate que l'on a pris le gène d'une espèce pour le greffer à une autre espèce, il n'est pas trop ému, car tous les gènes viennent d'une espèce ancestrale, dont toutes les espèces descendent. En fait, 30 p. 100 des gènes de l'homme se retrouvent dans la levure, et c'est peut-être réciproque. La levure — qui sert à faire du pain — est distincte de l'homme depuis 1,5 milliard d'années. Cela vous montre à quel point tous les organismes sont liés entre eux. En fait, c'est pour moi la plus grande découverte du XXe siècle: toutes les formes de vie sur Terre et tout l'ADN de ces formes de vie présentent des liens très étroits.
    Voilà pourquoi nous ne faisons pas un drame de la violation des frontières entre les espèces. En fait, quand il est question des plantes cultivées, nous pouvons même aller plus loin. Nous savons par exemple que le maïs est le fruit d'un ancien croisement entre deux espèces, dont l'une est liée au sorgho. En fait, toutes les plantes que nous cultivons sont le fruit de croisement entre espèces. C'est l'évolution naturelle, et c'est pourquoi, encore une fois, on ne doit pas en faire un drame.
    Prenons le maïs — encore une fois, on pense que nous jouons avec la nature. Le maïs descend d'une ancienne graminée du Mexique, qui ne ressemble aucunement au maïs moderne. Cette graminée s'appelait téosinte, et ce sont les peuples indigènes du Mexique d'autrefois qui ont transformé le téosinte pour produire le maïs moderne. Si l'on veut, cet ancien peuple a transformé une Chevy Nova en Ferrari. Tout ce que les OGM changent, c'est la couleur du volant. Encore une fois, c'est un peu, selon moi, la façon dont les généticiens moléculaires envisagent les choses.
    Prenons maintenant les variétés de maïs moderne — et je ne parle pas des OGM. On observe dans certaines variétés qu'il manque toute une série de gènes et dans d'autres, qu'il y a toute une série de gènes supplémentaires. Tout cela, c'est naturel. Quand il est question de bactéries, les microbiologistes discutent toujours pour savoir s'il convient même de parler d'espèces, dans le cas des microbes, en raison de la circulation très libre et naturelle des gènes d'une espèce à une autre.
    C'était à peu près là le point de vue des généticiens moléculaires.
    À titre de comparaison, je vais vous donner le point de vue tout aussi valide des écologistes. Les écologistes ont assurément à coeur les espèces, et la façon dont ces espèces interagissent au sein d'un écosystème. Si vous modifiez le comportement de l'une des espèces de cet écosystème, vous perturbez l'écosystème entier. Le croisement des espèces ou la modification du comportement d'une espèce peuvent donc avoir de graves répercussions.
    Je crois que ce sont là les deux principaux points de vue qui touchent à la biologie. Les deux points de vue sont valides. Seul le raisonnement qui y a mené est différent. Je voulais tout simplement parler de l'aspect éthique de la manipulation de la nature.
    En ce qui concerne l'environnement, M. Van Acker a parlé du flux génétique, et la question est là. Nous ne pouvons remettre cela en question. Mais j'aimerais vous expliquer que les généticiens moléculaires de même que les entreprises ont les moyens de limiter ce flux génétique.
    Je vais vous donner un exemple tout simple. Nous savons tous que nous héritons de gènes de notre mère et de gènes de notre père. C'est la même chose pour les végétaux. Nous pouvons mettre au point des transgènes qui ne s'exprimeront que s'ils trouvent un partenaire — autrement dit, lorsque deux gènes seront présents. C'est la seule façon pour eux de s'exprimer. Vous pouvez greffer un de ces gènes sur le chromosome maternel et greffer son partenaire exactement au même endroit sur le chromosome paternel. Je vais m'en tenir à cela; ce qui se passera, s'il y a pollinisation, c'est que l'un des gènes va se déplacer, mais il ne se produira rien de plus.

  (0925)  

    J'affirme donc que les généticiens moléculaires peuvent faire certaines opérations, et j'aimerais que les organismes de réglementation les encouragent à le faire, de façon à réduire les répercussions du flux génétique. Si on parle de réduction de la biodiversité, lorsqu'une entreprise invente un nouvel OGM, elle le greffe sur des organismes dont le patrimoine génétique est diversifié et en fonction de l'environnement local; l'enjeu est donc moins important.
    Le problème le plus important, honnêtement — et cela n'a rien à voir avec les OGM — c'est que le monde ne s'occupe que d'un petit nombre d'espèces végétales. Je suppose que les OGM sont capables d'empirer le problème en raison de cet accent mis sur un petit nombre d'espèces. Il existe peut-être 20 000 espèces comestibles, et si nous désirons réellement régler le problème mondial de l'accès à la nourriture et celui des changements climatiques, je crois que la solution serait d'augmenter la biodiversité. L'enjeu ne tient pas vraiment aux OGM, car les OGM ne remplacent pas de bonnes pratiques écologiques.
    Laissez-moi maintenant parler de la question de la santé humaine. Nous avons adopté le concept selon lequel ce qui est naturel est meilleur. J'entends souvent cela: c'est naturel, donc c'est meilleur. Eh bien non, la nature n'est pas une merveille. La nature ne veut pas être mangée. Les plantes ne veulent pas qu'on les mange. Qu'est-ce qu'elles font? Elles produisent une soupe de substances chimiques toxiques. Voilà pourquoi on ne mange pas des feuilles quand on traverse une forêt. En fait, si l'on veut parler des plantes qui poussent dans le sol, on compte sur Terre jusqu'à 100 000 substances chimiques qui sont des substances chimiques naturelles. Nous pensons que les substances chimiques sont artificielles. Non, elles sont tout à fait naturelles, et le monde est un endroit dangereux.
    À mon avis, on exagère et on construit même un mythe en laissant entendre que les OGM sont nécessairement plus sûrs pour les humains que les pesticides épandus. Si l'« OGM produit une toxine et que cette toxine ou ses produits dérivés pénètrent dans une graine ou dans un produit comestible quelconque, évidemment que cela n'en fait pas un produit sécuritaire. Bien sûr que non; c'est une toxine.
    Il faut donc se demander de quel gène il s'agit. Voilà la clé et la réponse. De quel gène s'agit-il? Comment agit-il? Produit-il une toxine? Est-ce qu'un de ses produits de dégradation est toxique? Il faut une réglementation appropriée à ce sujet.
    On en arrive à la question de l'étiquetage et du risque relatif. Nous sommes vraiment obsédés par les OGM et la question de savoir s'ils sont sûrs ou non. Trois études réalisées il y a plusieurs années ont soutenu que la moitié des agents cancérogènes qu'une personne absorbe quotidiennement sont absorbés par les trois à cinq tasses de café qu'elle boit — et je vérifie qui boit du café ici, aujourd'hui —, car les fèves de café contiennent plus de 100 substances chimiques, dont plusieurs sont cancérogènes.
    On peut donc bien parler du risque relatif que représentent les OGM, mais à mon avis, le principal problème, c'est qu'il n'existe nulle part dans le monde une bonne base de données sur les effets toxiques des substances chimiques naturelles présentes dans les aliments que nous consommons. Je crois que c'est là l'enjeu le plus important quand il est question de la santé humaine. Les taux de cancer augmentent. Nous ne connaissons pas les interactions naturelles entre les substances chimiques des aliments que nous consommons selon toutes sortes de nouvelles combinaisons.
    Pour certaines personnes, la consommation d'ADN est préoccupante. Les animaux mangent de l'ADN depuis 1,5 milliard d'années, et nous n'avons pas encore été transformés en végétaux. Les gens s'inquiètent des conséquences imprévues de l'ajout de nouveaux gènes ou d'ADN dans les végétaux. Il est vrai, en effet, que l'ajout d'un nouveau gène dans un végétal entraîne la production d'une protéine. Cette protéine interagira avec les autres — peut-être — et cela pourrait avoir des conséquences imprévues. Dans le cadre de la réglementation, nous devrons donc certainement étudier les interactions moléculaires. Il existe des technologies qui pourront le faire. L'une d'entre elles s'appelle la biopuce.
    Nous consommons des OGM depuis très longtemps. Si vous êtes diabétique et que vous devez vous faire des injections d'insuline, vous utilisez un produit génétiquement modifié. Chez les personnes qui s'injectent le gène de l'insuline humaine, la protéine de l'insuline s'exprime dans un autre organisme. Si vous avez un problème d'intolérance au lactose, comme moi, et que vous prenez des comprimés de Lactase, comme je le fais, vous ingérez donc un OGM. Plusieurs des médicaments que nous prenons sont en fait des produits génétiquement modifiés. Il faut donc, je le répète, considérer la question dans ce contexte.
    En ce qui a trait aux enjeux socioéconomiques... je fais avec mes étudiants une tournée dans le Midwest américain, et je parle à de nombreux agriculteurs. Ils sont nombreux à apprécier les OGM, ils aiment vraiment ces nouveaux caractères; ils sont fantastiques et ils fonctionnent très bien. Cependant, ce que les agriculteurs n'aiment pas, c'est de se faire forcer la main par des entreprises qui possèdent les meilleurs stocks de géniteurs... Ils n'ont pas le choix. S'ils veulent puiser dans ce stock de géniteurs sélectionnés, ils doivent accepter les OGM qui y sont associés, ou une combinaison d'OGM, même s'ils aiment certains OGM, mais pas les autres.

  (0930)  

    C'est pourquoi je crois que c'est important.
    Je crois que, si vous voulez adopter un nouveau règlement, il faudra faire des concessions, car cela coûte des centaines de milliers de dollars pour mettre un OGM sur le marché, aujourd’hui. Cela réduit la concurrence en augmentant les monopoles, dans le domaine, et je crois que cela doit préoccuper tout le monde.
    Pour terminer, je serai très bref, dans le contexte mondial, ce n’est pas un OGM qui va nourrir le monde entier, comme quelqu’un l’a dit plus tôt. Ce n’est pas une panacée. La pauvreté mondiale, en Afrique, en Amérique latine et en Asie, est due à un certain nombre de facteurs. L’accès à de bonnes semences est difficile. Il manque d’engrais. L’irrigation n’est pas suffisante. Il manque de conseillers agricoles. Un OGM ne peut régler aucun de ces problèmes.
    Toutefois, les OGM ont leur raison d'être, surtout quand il est question des caractères permettant des interactions écologiques, et je veux dire par cela, la résistance aux insectes et aux maladies. Ils semblent être très efficaces. Ce qui pourrait changer la donne, à ce chapitre, c'est que, pendant que nous parlons d'introduire un gène ou une poignée de gènes, il existe maintenant une technologie capable d'introduire des chromosomes complets. C'est une entreprise appelée Chromatin qui fait cela. Elle aura prochainement la capacité d'introduire des chromosomes artificiels complets dans un végétal, ce qui veut dire qu'elle pourrait y introduire des milliers de gènes à la fois.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup, monsieur Raizada.
    Nous allons maintenant écouter M. Derek Penner et M. Mike McGuire, de Monsanto Canada, qui devront, s'il vous plaît, respecter la limite des dix minutes.

  (0935)  

    Merci, monsieur le président et merci aux membres du comité permanent, d'avoir donné à Monsanto Canada l'occasion de comparaître devant vous.
    Je m’appelle Derek Penner et je suis le président-directeur général de Monsanto Canada. Je suis en compagnie d’un collègue, notre vice-président, Ventes et marketing pour le secteur du maïs et du soya au Canada.
    Je suis canadien et j’ai grandi à Winnipeg. Depuis 2002, j’ai occupé différents postes au sein de Monsanto Canada. J’ai été nommé à mon poste actuel l’automne dernier et je dirige maintenant le segment canadien des activités de notre entreprise. Avant cet emploi, j’avais passé deux années à titre de directeur de la stratégie, des licences et de la gestion des produits de Monsanto pour notre région de l’Europe, du Moyen-Orient et de l’Afrique, basée en Europe.
    Comme notre entreprise est entièrement axée sur l’agriculture et fait figure de chef de file dans le domaine de l’application de la biotechnologie à l’agriculture, je suis très heureux de la possibilité qui m’est donnée aujourd’hui de vous parler de notre travail ici, au Canada, et partout dans le monde.
    Pendant la courte période qui m’a été réservée aujourd’hui, j’ai pensé faire avec vous un survol de nos activités au Canada. Nous avons un bureau d’affaires pour l’Est, situé ici, à Guelph, mais nous sommes présents partout au pays. Je veux également vous parler un peu de nos produits utiles, lesquels ont été adoptés par les agriculteurs canadiens; je veux vous donner un aperçu de notre industrie dans son ensemble et de la valeur et des avantages de la biotechnologie agricole pour les agriculteurs canadiens. Je souhaite finalement réaffirmer notre soutien à l’égard du système de réglementation actuel du Canada, qui est fondé sur la science, et qui est essentiel à notre capacité d’investir dans le pays et de continuer à offrir les solutions exigées par les producteurs pour assurer la prospérité de leurs activités agricoles.
    À ce sujet, je veux remercier le comité de prendre le temps de jeter un coup d’œil sur notre industrie et de poser les questions qui contribueront à préserver son dynamisme dans les années à venir. La R-D et les investissements futurs dans la technologie des productions végétales du Canada sont évidemment importants pour notre entreprise et pour les agriculteurs, et nous voulons travailler en collaboration avec nos collègues de l’industrie et avec les agriculteurs en continuant à créer des produits innovateurs dont bénéficiera le secteur agricole canadien.
    Monsanto Canada emploie environ 280 employés à temps plein et à temps partiel dans 15 installations ou endroits différents. En plus de notre siège social de Winnipeg et de notre bureau d’affaires pour l’Est, situé à Guelph, nous disposons également d’un bureau des affaires gouvernementales et réglementaires à Ottawa, d’une unité de production de semences à Lethbridge, de fermes expérimentales à Saskatoon, à Yorkton et à Edmonton, de centres d’amélioration génétique des cultures à Carman et Oakville (Manitoba), à Guelph et London (Ontario), ainsi que d’une unité de production de semences à Cranbrook, en Colombie-Britannique.
    Nous avons tout récemment terminé la construction d’un centre ultramoderne d’amélioration génétique des cultures de 12 millions de dollars à Winnipeg, au Manitoba, lequel est situé à côté de notre siège social à l’Université du Manitoba. J’invite les membres du comité à visiter ces installations, s’ils ont le temps. Ce sera un immense plaisir pour nous de vous en faire faire le tour. Nous sommes également en train d’investir une autre somme de 12 millions de dollars dans l’amélioration et l’agrandissement de notre centre de production de semences et d’amélioration génétique des cultures de canola à Lethbridge, en Alberta.
    C’est dans ces installations que nous menons des recherches, en visant à ajouter des caractères favorables aux cultures, y compris le maïs, le soya et le canola, et c’est là aussi que nous effectuons des essais sur le terrain des produits commerciaux qui sont nés de nos recherches approfondies. Ces caractères, comme la résistance aux mauvaises herbes et aux ravageurs, l’amélioration du rendement et la résistance au stress, comme le froid et la sécheresse, offrent un potentiel considérable pour l’avenir de la production agricole.
    Nous croyons qu’il est important que des organismes de réglementation canadiens examinent la sécurité de l’ensemble des produits biotechnologiques au regard des aliments pour humains, des aliments pour animaux et de l’environnement. Le système actuel garantit la sécurité des produits agricoles biotechnologiques actuellement sur le marché et donne à la population canadienne la certitude que ces produits sont sécuritaires; et ils le sont effectivement. Depuis leur apparition en 1996, plus d’un billion de repas contenant des produits biotechnologiques ont été consommés, sans qu’aucun cas de préjudice à un humain ou à un animal n’ait été documenté de manière fiable. L’examen continu de ces technologies pour garantir la sécurité des aliments pour humains, des aliments pour animaux et de l’environnement — à l’aide d’un système scientifique — envoie un message important à nos clients du monde entier: ces produits ont été soumis à un examen exhaustif et ils sont considérés comme sécuritaires.
    Nous reconnaissons pleinement que l’approbation des organismes de réglementation ne nous autorise pas à elle seule à lancer de nouveaux produits sur le marché, mais il s’agit d’une première étape essentielle à la résolution de tout problème associé à l’acceptation par les consommateurs des produits agricoles biotechnologiques. À cet égard, nous continuons de collaborer avec d’autres associations agricoles et intervenants de l’industrie au Canada pour veiller à ce que tous les produits soient mis sur le marché de manière responsable, conformément à des plans de gestion exhaustifs, afin non seulement de protéger la technologie et ceux qui l’ont adoptée, mais également pour faire en sorte que ceux qui souhaitent faire un choix différent ne soient pas touchés de manière défavorable.
    Il existe des précédents qui montrent que les problèmes qui touchent le marché lorsque des produits agricoles biologiques sont lancés peuvent être, et ont été, réglés efficacement par l’industrie. Le lancement du canola transgénique au Canada en est un bon exemple. Ensemble, les agriculteurs et les intervenant de l’industrie ont su tirer parti des avantages de la biotechnologie et entretenir des relations commerciales avec des acheteurs clés du monde entier.

  (0940)  

    Une évaluation économique du lancement du canola résistant aux herbicides, dans l’Ouest canadien, qui a été publiée par le Conseil canadien du canola en 2000, a révélé qu'une valeur cumulative différentielle de près de 500 millions de dollars avait été créée pour l’industrie de 1997 à 2000.
    Notre travail consiste à faciliter l’accès à de nouvelles technologies novatrices qui permettront aux agriculteurs canadiens de demeurer compétitifs sur les marchés mondiaux. Pour offrir des innovations aux exploitations agricoles, il faut commencer par la recherche et le développement. Cette année, Monsanto a investi plus de un milliard de dollars afin de mettre en place le système de production le plus robuste de l’industrie.
    Aujourd’hui, nos chercheurs du monde entier travaillent activement en vue de découvrir, de mettre au point et de lancer la prochaine génération de produits agricoles grâce auxquels les agriculteurs obtiendront un meilleur rendement de chaque acre de terre. Tout ce que fait Monsanto a pour but de rendre l’agriculture toujours plus productive et plus profitable pour les agriculteurs, en plus de la rendre plus efficiente et plus durable pour la planète.
    Les agriculteurs canadiens sont des adeptes de la technologie, et c’est pourquoi ils demandent qu’on leur fournisse des moyens d’accroître leur production en vue de nourrir la planète, qui se développe constamment, tout en réduisant les incidences de l’agriculture sur l’environnement. La biotechnologie constitue l’un des outils qui peuvent contribuer à satisfaire à ces exigences. En outre, notre capacité à réaliser et à compléter des recherches au Canada est essentielle pour répondre de façon adéquate et précise aux nombreuses questions sur lesquelles les agriculteurs et autres intervenants nous ont demandé de nous pencher.
    Voilà quelques-unes des raisons qui expliquent pourquoi Monsanto continue d’investir dans le secteur de la biotechnologie agricole et de travailler en collaboration avec l’industrie en vue de trouver des solutions de façon que l’on puisse mettre de l’avant les nouvelles technologies de façon positive et responsable.
    En conclusion, la recherche que nous avons entreprise à l’interne en collaboration avec le milieu universitaire et d’autres chercheurs en vue de conférer de nouveaux caractères biotechnologiques à certains produits agricoles, notamment le maïs, le canola, le soya, la luzerne, la betterave à sucre, le blé et les légumes, révèle que les agriculteurs canadiens sont à l’affût de nouvelles possibilités plus économiques et durables pour accroître leur production et leur rentabilité.
    Les produits agricoles issus de la biotechnologie offrent aux agriculteurs une valeur incontestable, notamment l’efficacité des produits, l’amélioration de la production, la simplicité, l’amélioration du travail de conservation du sol, des grains plus propres, l’absence de restrictions relatives aux produits agricoles, ainsi qu’un dossier de suivi solide du profil de sécurité environnementale.
    Le Canada doit continuer d’exercer son leadership dans le secteur de la biotechnologie en défendant son système de réglementation axé sur la science et en contestant les obstacles commerciaux non justifiés, qui ne cadrent pas avec les règles commerciales de l’OMC. Les commentaires positifs reçus des agriculteurs canadiens (et de ceux du monde entier) nous motivent. Nous demeurons prêts à travailler en collaboration avec l’industrie et le gouvernement afin de trouver des solutions pratiques et efficaces qui permettront aux agriculteurs, à l’industrie et aux consommateurs de profiter des avantages de la biotechnologie.
    Pour terminer, j’aimerais faire part aux membres du comité de l’annonce faite la semaine dernière dans le cadre du Forum économique mondial qui avait lieu à Davos, en Suisse. Un regroupement de 17 entreprises et gouvernements de toutes les régions du monde, dont fait partie Monsanto, a lancé une stratégie visant l’amélioration en matière de sécurité alimentaire, de croissance économique et de durabilité de l’environnement, qui passe par l’augmentation de la productivité et du rythme de croissance de l’agriculture.
    Une brochure est accessible en ligne: elle a pour titre « Realizing a New Vision for Agriculture: A roadmap for stakeholders ». J’encouragerais les membres du comité à la télécharger. Cette brochure énumère des cibles ambitieuses, mais incontournables: augmenter la production de 20 p. 100, réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 p. 100 par tonne de production, réduire la pauvreté dans les milieux ruraux de 20 p. 100 par décennie, pour les trois prochaines décennies. Vous avez beaucoup entendu parler de ces sujets au cours des dernières années, et aussi de la croissance de la population. Je crois que cela doit prendre une place de choix dans les notes du comité permanent.
    Merci de m'avoir consacré de votre temps.
    Merci, monsieur Penner.
    Si cela vous est possible, j'aimerais que vous envoyiez le document dont vous venez de parler dans votre compte rendu, soit à chacun des membres du comité, soit, à tout le moins, au greffier. Ce serait apprécié.
    D'accord.
    Merci.
    Le dernier témoin de la séance, mais pas le moindre, est M. Frank Ingratta, président de Ingratta Innovations Inc., qui se présente à titre personnel.
    Bienvenue. Vous ne devez pas dépasser les 10 minutes.
    Merci également au comité qui me donne l'occasion de participer aux débats sur cet important enjeu.
    Puisque je suis inscrit à l'ordre du jour comme témoin à titre personnel, et que je ne représente aucune organisation, je crois qu'il serait utile de vous donner quelques renseignements de base pour expliquer pourquoi on m'a invité à témoigner.
    Je viens de prendre ma retraite après avoir été pendant huit ans sous-ministre de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales de l'Ontario. J'ai participé activement à l'élaboration d'une politique et d'une réglementation en matière d'agriculture, à l'échelle tant provinciale que nationale. Avant de passer 17 ans au service de ce ministère, j'ai fait partie de nombreux comités scientifiques et techniques. J'ai présidé, par exemple, le Comité canadien des productions végétales et le Comité d'experts de l'horticulture du Canada. Je ne veux pas me vanter, mais j'ai également siégé au premier comité fédéral-provincial chargé de l'élaboration de normes visant à favoriser la croissance de l'industrie des aliments biologiques. Fait intéressant, ce comité s'est réuni au lac Meech au début des années 1990.
    Je suis en outre vice-président du conseil d'administration du centre George Morris, reconnu comme le principal centre de recherche sur l'agroalimentaire du Canada. Après avoir mené pendant plus de 20 ans des analyses de qualité, le centre s'est taillé une bonne réputation dans le domaine des stratégies, de l'élaboration de politiques et de conseils en matière réglementaire pour tout ce qui concerne l'agroalimentaire, ainsi que pour le soutien constant qu'il a fourni afin d'assurer la viabilité économique et la compétitivité des systèmes agroalimentaires canadiens.
    En ce qui concerne le sujet d'aujourd'hui, la réglementation des modifications génétiques, il est évident que le centre est favorable à la sécurité des technologies, qui peuvent améliorer la compétitivité et la rentabilité des exploitations agricoles et de l'industrie alimentaire du Canada. Dans leur dernier bulletin, Schmidt et Stiefelmeyer ont mis en relief les effets négatifs d'une réglementation qui date et qui est inutilement restrictive. Le centre a recueilli des données importantes et accumulé de l'expertise dans ce domaine, et je suis convaincu que, si le comité avait besoin d'une analyse approfondie des options en matière de réglementation, le centre pourrait lui fournir d'excellents conseils techniques et stratégiques.
    J'ai donc une expérience à la fois stratégique et technique, mais je dois reconnaître que mes connaissances techniques ne sont sûrement pas aussi à jour que celles des autres personnes qui participent à la séance de ce matin.
    Aujourd’hui, j’aimerais vous expliquer en mes propres termes cette question, discuter de certaines des options et, avec votre accord, fournir des commentaires généraux sur la solution que je recommande. Si je ne me trompe pas, l’enjeu dont nous devons débattre aujourd’hui consiste à déterminer si le Canada doit soutenir le recours aux technologies de modification génétique ou restreindre de façon draconienne leur utilisation. Il est clair que les avantages des modifications génétiques ont toujours été démontrés. Au début du siècle, le périodique Harvard Business Review a déclaré que les biotechnologies pouvaient avoir sur l’économie et l’innovation des répercussions plus importantes que la révolution numérique des années 1980. Le périodique donnait plusieurs exemples allant de l’insertion de gènes permettant de tolérer le froid à l’utilisation de cellules souches pour accélérer de façon spectaculaire la guérison des brûlures de la peau. J’estime donc que nous ne devons pas, aujourd’hui, chercher à savoir si les modifications génétiques sont une bonne ou une mauvaise chose; je vais donc commenter plutôt la façon appropriée de réglementer cette industrie.
    À mon avis, la réglementation est le fondement de la croissance d’une industrie forte. Si nous voulons que les technologies continuent leur progrès, il faut établir toute une série de règles bien claires et uniformes. La réglementation doit se fonder sur les faits, la science, la sécurité de l’environnement et la population du Canada. Elle ne peut pas, par pur caprice, être fondée sur le point de vue moraliste d’un opposant ou sur le désir de revenir à une ère révolue. Les règlements doivent être transparents. Ceux qui créeent les technologies doivent connaître les règlements, mais ils doivent agir avec une transparence suffisamment grande pour que ceux qui ont besoin de confirmer que les règles sont respectées aient la possibilité de participer de manière efficace au processus. Cela fait trop longtemps que les opposants soutiennent que le milieu de l’innovation et de la recherche entretient peut-être un certain parti pris. La transparence de la réglementation mettra en sourdine cette plainte.
    Dans bon nombre de cas, les produits des nouvelles technologies ont une portée internationale et peuvent être éutilisés partout dans le monde. Je ne serais pas en faveur de l’adoption en vrac des règlements d’une autre administration, mais il est certain que l’expertise technique sur laquelle s’appuient les essais en matière de sécurité, d’efficience et de reproductibilité peut être mise à contribution par les organismes de réglementation du monde entier.
    En ce qui concerne les autres administrations, je suis certain que les membres du comité savent que le Comité de l'agriculture de la Chambre des États-Unis étudie exactement la même question que nous, aujourd'hui même. Le secrétaire Vilsack a témoigné devant ce comité il y a seulement 20 jours. Il a fait l'éloge des possibilités des biotechnologies, mais il a conclu de la façon suivante:
[Traduction] « ... ces conflits ont constamment entraîné des litiges et ont plongé les producteurs et les innovateurs en matière technologique dans l'incertitude. L'agriculture américaine se trouve à un point tournant; il faut que les problèmes à la source des litiges et de l'incertitude soient réglés de façon que l'on puisse tirer pleinement profit du potentiel de tous les secteurs de l'agriculture.

  (0945)  

    Aux États-Unis, à l’heure actuelle, il existe deux possibilités : avoir ou non le statut de produits réglementés. Plus de 750 produits ont été jugés non justiciables de réglementation. Les États-Unis envisagent actuellement d’accorder le statut de produits non réglementés à certains produits, en imposant des restrictions géographiques et des distances d’isolement pour satisfaire certaines personnes qui exigent des certitudes touchant la dérive des gènes.
    Il convient de souligner, sur ce sujet — même si ce n’est pas aussi récent que les articles des quotidiens d’aujourd’hui — que l’Académie pontificale des sciences, qui compte parmi ses membres plus de 20 lauréats de prix Nobel, a demandé que l’on assouplisse la réglementation trop sévère et non justifiée par la science que certains pays ont adoptée dans le but d’améliorer les cultures génétiquement modifiées. L’Union européenne elle-même envisage de lever certaines restrictions à l’importation visant les cultures génétiquement modifiées puisqu’elle est en train de réécrire les politiques agricoles communes.
    À mon avis, de nouveaux défis en matière de réglementation vont bientôt se présenter. Aujourd’hui, on connaît de nombreux exemples de cultures génétiquement modifiées, dont on a changé les caractères liés aux intrants, par exemple la résistance aux insectes, et qui comporte un nombre croissant de caractères liés à l’environnement. Il y a quelques années, j'ai eu l’occasion de prendre connaissance d’un programme de recherche horticole réalisé au Chili et qui avait permis de produire 9 000 plants de semis génétiquement modifiés de pêcher, capables de pousser dans un sol très salin, et qui avaient été produits à partir de ressources naturelles du pays — voilà un exemple de caractères environnementaux.
    Toutefois, à l’avenir, les répercussions viendront des caractères liés aux extrants — des caractères qui, si vous le voulez, ciblent les consommateurs —, qui permettront aux cultures ainsi modifiées d’être bénéfiques pour la santé humaine, par exemple en diminuant les volumes de gras trans ou en améliorant l’apport en vitamines. La seule façon logique d’élaborer un système de réglementation régissant ces nouveaux caractères devra être fondée sur des éléments de preuve scientifique concernant leur innocuité pour les consommateurs et pour l’environnement.
    Le vrai problème de la réglementation, c'est toujours qu’elle ne peut pas être universelle. Compte tenu de la pléthore de nouvelles innovations déjà sur le marché et de celles qui s’annoncent, il est important que les changements relativement mineurs ne soient pas soumis à l’examen minutieux qui serait logiquement exigé dans le cas d’une modification qui pourrait avoir des effets concrets dramatiques.
    Il faudra aussi préciser la cible du règlement: un processus ou un produit? Il ne s’agit pas d’adopter un règlement dans le but d’augmenter les bénéfices nets de l’innovateur, mais il faut cependant pouvoir tenir compte des répercussions potentiellement positives de l’innovation. Si le produit de l’innovation a réellement la capacité de réduire la famine ou d’augmenter la productivité dans un environnement hostile, il faudrait que cela se reflète dans les critères scientifiques et stratégiques s’appliquant à l’utilisation de cette technologie.
    En résumé, un règlement touchant les modifications génétiques devrait avoir les mêmes caractéristiques que tous les bons règlements, comme le Code de la route ou les règlements sur le contrôle des institutions financières ou de l’industrie pharmaceutique. Le règlement doit être actuel, il doit être fondé sur les meilleures données scientifiques disponibles et il ne doit pas être influencé par des groupes d’intérêt. Le règlement doit assurer la sécurité des citoyens et de l’environnement, avoir la souplesse nécessaire pour s’appliquer aux diverses technologies, être transparent aux yeux de tous et pouvoir être appliqué de manière efficiente. Le système de réglementation du Canada répond en grande partie à ces critères. Le règlement touchant l’utilisation des technologies de modifications génétiques doit respecter les mêmes normes.
    Merci.

  (0950)  

    Merci beaucoup, monsieur Ingratta.
    Nous allons maintenant passer aux questions. Nous avons tout juste le temps nécessaire pour que tout le monde ait de nouveau son tour.
    Monsieur Valeriote, c'est votre circonscription, et vous pouvez donc commencer. Vous avez sept minutes.
    Tout d’abord, messieurs, j’aimerais vous remercier d’avoir accepté notre invitation, malgré votre horaire chargé, et de vous être présentés devant nous. Nous savons tous que les OGM sont des outils, parmi tant d’autres, dont nous nous servirons pour combattre la faim dans le monde, qui ne cesse d’augmenter, et pour nourrir trois milliards de personnes de plus, pendant les 40 prochaines années — et pour accroître la production alimentaire d’environ 70 p. 100, ce qui, on m’a dit, sera au bout du compte nécessaire.
    Nous en avons déjà entendu beaucoup, et pourtant, comme je l'ai décrit, il existe deux solitudes. Je ne sais pas si ces deux solitudes vont jamais pouvoir se réconcilier, sans parler de tous les incidents qui se sont produits aujourd'hui, car cela est impossible — Manish, vous avez parlé d'un certain nombre de règlements qui, à votre avis, seraient d'importants mécanismes à utiliser pour réduire le flux génétique et étudier les interactions moléculaires dans le but d'éviter toute toxicité. Rene, vous avez parlé de mettre en place des zones tampons plutôt que des barrières. J'imagine que cela concerne quelque chose que j'ai lu, dans les documents de l'Association canadienne des producteurs de semence — les distances d'isolement visant à préserver l'identité.
    Frank, vous avez fait de la politique. Il me semble que vous aviez — pas de la politique, à proprement parler; vous étiez sous-ministre, plutôt. Merci — je suis sûr que vous êtes content que j'aie corrigé cette erreur. Il me semble — Derek et Mike, également — que vous connaissez bien la question. Michael, vous l'abordez sous l'angle de l'histoire. Je trouve déconcertant qu'il ait fallu le projet de loi C-474 pour attirer l'attention sur ce débat, puisque, selon la plupart de nos commentaires, ce projet de loi n'apporte aucune réponse. Il a bien sûr soulevé des questions dont il faut parler. Je pense par exemple au droit des producteurs d'aliments biologiques de faire pousser leurs produits sans craindre qu'ils soient contaminés. Ce n'est pas une solution facile à trouver, mais c'est une simple proposition. Je me demande pourquoi, si quelqu'un parmi vous, ou si plusieurs personnes sont prêtes — car nous n'allons pas pouvoir le faire — à se réunir, à redonner vie au Comité consultatif canadien de la biotechnologie, à rameuter les troupes et à commencer la discussion de façon que nous puissions trouver des solutions.
    Ne comptez pas sur nous. Il serait préférable que la solution vienne de l'industrie. Pouvez-vous réagir à cela, messieurs? Rene, vous avez parlé de zones tampons. Est-ce que c'est réaliste? Est-ce que le règlement peut gérer cela? Frank, vous avez soumis quelques idées. Voulez-vous en discuter?

  (0955)  

    J’aimerais dire deux mots, si vous me le permettez. Premièrement, je ne crois pas à l’existence de deux solitudes, tout d’abord. Cet enjeu est très terre à terre. Je crois que nous avons bien vu les préoccupations des agriculteurs de l’Ouest du Canada lorsqu’il a été question d’introduire du blé transgénique. Il y avait d’un côté des agriculteurs qui adoraient leur canola Roundup Ready et qui disaient que malgré cela, ils ne voulaient pas de blé transgénique si cela devait nuire aux marchés. C’était une préoccupation tout à fait concrète et terre à terre. Ce n'était aucunement une question de principe. Un bon nombre de ces agriculteurs seraient en faveur du blé transgénique, si les marchés leur échappaient. Je crois que c’est une situation très concrète pour bien des gens et pour bon nombre des agriculteurs concernés, et je ne crois pas que l’on puisse dire que ce sont deux solitudes. C'est une partie du dilemme.
    Il y a ensuite la question de la tolérance zéro et je pense à l’article publié dans la presse européenne sur les changements potentiels. Est-ce que les Européens acceptent les caractères que nous n’autorisons pas? Il faudrait en discuter. Quelle est la politique du Canada à ce chapitre? À l’heure actuelle, notre politique consiste à ne tolérer aucun des événements visés par la réglementation. Allons-nous changer cette politique? Nous prétendons que les Européens doivent changer leur politique, mais, si la Chine, par exemple, voulait exporter au Canada un produit qui n’y est pas encore réglementé, quelle serait notre politique? À l’heure actuelle, notre politique consiste à ne rien accepter.
    Ce n'est pas simple. Ce n'est pas tout noir ou tout blanc, et il ne s'agit pas de deux solitudes. Je crois que les gens veulent des choix et des garanties.
    Pensez-vous qu'une présence en faible quantité...? Nous avons parlé à Mary Buhr, il y a deux jours, en Saskatchewan, et elle a affirmé qu'il faudrait peut-être accepter ici également la présence d'une faible concentration, car le seuil de zéro n'est tout simplement pas réaliste.
    Je crois que nous devons bien réfléchir avant de dire cela. Je crois que nous devrions nous réserver le droit de n'autoriser une présence en faible concentration que lorsque nous pensons que c'est acceptable, car nous voulons aussi conserver l'efficacité de notre système de réglementation et nous voulons conserver ce droit d'avoir notre propre système de réglementation.
    Les zones tampons sont-elles des solutions réalistes?
    Encore un fois, cela dépend. Je dirais que, si nous voulons produire une denrée à l'échelle commerciale, il n'est probablement pas réaliste de fixer le seuil à zéro. Je crois que les intervenants de la chaîne d'approvisionnement seront d'accord avec moi. C'est difficile, dans un vaste territoire.
    Est-ce que quelqu'un veut ajouter quelque chose?
    Oui, Frank.
    J’aimerais commenter la question qui concernait la source des solutions. Il est certain que le comité accomplit un travail important en écoutant tous ces témoignages sur les solutions possibles. Si j'ai voulu parler de l’Académie pontificale des sciences, c’est un peu parce que c’est un regroupement de personnes très savantes qui se réunissent pour discuter d’un large éventail d’enjeux.
    En tant que dirigeants politiques, vous devez vous occuper d’un nombre monstrueux d’enjeux. C'est vraiment une occasion... et je crois sincèrement que les participants de l’industrie sont capables de se réunir pour échanger leurs points de vue, en discuter et en débattre. Les solutions viendront de ce côté, dans la mesure où le gouvernement participe aux échanges et est prêt à y porter attention, et s’ils essaient de modeler ces politiques et règlements selon les divers points de vue exprimés.
    Que le travail soit confié au comité dont vous avez parlé ou à un autre organisme, peu importe, mais il est absolument essentiel que les intervenants de tous les secteurs, qu’ils appartiennent ou non à une des deux solitudes, puissent se réunir et tenir un débat de fond afin d’élaborer certaines des dispositions réglementaires dont nous parlons. Je suis bien sûr en faveur de la reprise de ces travaux; on pourrait aussi mettre en œuvre l’une des recommandations du comité, celle qui vise à créer un tel organisme. C’est essentiel, si l’on veut trouver une solution.

  (1000)  

    Derek voulait ajouter autre chose.
    J'ai un ou deux commentaires à faire.
    Premièrement, nous devons adopter une politique pour déterminer les seuils acceptables. M. Van Acker a dit qu'un seuil de zéro n'était pas réaliste, et il est clair comme de l'eau de roche que ce seuil n'est réaliste nulle part le long de la chaîne de valeur des approvisionnements.
    J'aimerais d'ailleurs parler, et M. Van Acker a abordé la question, de la Chine. Il y a en Chine un milliard de personnes. La Chine investit 1 p. 100 de son PIB dans la R-D en visant en particulier les biotechnologies, dans le monde entier. Le Canada, voire toute l'Amérique du Nord, est plutôt un chef de file du processus de réglementation et d'approbation scientifique et en ce qui concerne la mise en valeur des métiers liés aux biotechnologies. Nous sommes des acteurs de cette industrie depuis 20 ans, et nous sommes présents sur les marchés depuis 15 ans. Nous devons faire oeuvre de pionnier au moment d'élaborer ces politiques.
    À mon avis, du moins, beaucoup de pays considèrent que le Canada est un chef de file au chapitre de l’élaboration des politiques et des procédures. Avec l’arrivée de la Chine, nous devons vraiment jeter les bases d’un dialogue fructueux. Comme M. Van Acker l’a dit, il faudrait savoir ce que l’on dira lorsque les normes relatives à la présence adventice et à la présence de faible concentration seront imposées et que des produits exportés de la Chine arriveront au Canada. Nous devons avoir une solution et nous devons agir, non pas réagir.
    Voilà ce que je voulais dire.
    Merci.
    Nous passons à M. Bellavance.

[Français]

    Je m'adresserai d'abord au professeur Raizada.
    Connaissant la perspicacité de notre analyste de la Bibliothèque du Parlement, Frédéric, je suis convaincu que vous serez cité dans le rapport que le comité va faire. Votre position est tout à fait équilibrée. En effet, personnellement, je n'ai jamais vu de groupes d'opposition à la biotechnologie. Par contre, on voit des groupes d'opposition aux organismes génétiquement modifiés. Il faut donc faire la part des choses.
    Quand vous nous dites, par exemple, que l'insuline est un organisme génétiquement modifié, qu'il y a une foule de médicaments tel que le lactosérum et ainsi de suite, je ne pense pas que quiconque connaissant un peu le dossier suggérera qu'il faut tout arrêter parce que ce sont des OGM. Il y a donc cette espèce d'opposition équilibrée qui me touche. Je suis convaincu que je peux parler en ce sens au nom de mon parti, le Bloc québécois.
    Par ailleurs, vous nous dites également qu'il y a une base de données insuffisante à ce jour. Ça fait en sorte qu'on ne connaît pas tous les effets sur la santé et l'environnement créés par les organismes génétiquement modifiés. Donc, que le débat se fasse est tout à fait sain. Cependant il faut qu'il se fasse de façon transparente. Toute la question de l'acceptabilité sociale s'y trouve.
     À ce sujet, je voudrais m'adresser à M. Penner.
    Au cours des témoignages précédents devant le comité, on a entendu parler de l'importance de la communication et de l'information. Bien souvent, pour de grosses compagnies, cet aspect veut dire de la propagande en raison des relationnistes chèrement payés, de tous les moyens et des ressources dont elles disposent. Elles veulent faire entrer dans la tête des gens que ce qu'ils ont est bon.
    Ce qui importe pour moi dans la communication de l'information — et je pense que c'est ce que la population veut également —, c'est la transparence. Les consommateurs veulent savoir exactement ce qu'il y a dans leur assiette. Les producteurs agricoles veulent savoir quels genres de semences ils utilisent et quels sont leurs effets et leurs impacts économiques. C'est donc une différence dans l'approche, mais elle est évidemment capitale.
    Quant à Monsanto, je ne ferai pas tout le tour de votre dossier parce que je ne le connais pas assez. Je voudrais plutôt avoir vos réactions sur ce qui est public, ce qu'on sait, sans nécessairement répondre à chacun des sujets dont je vais parler brièvement. Êtes-vous conscient de ce qui se passe en matière d'acceptabilité sociale?
     Devant le comité, des scientifiques ont parlé de la contamination. C'est un fait avéré et la dissémination l'est également. Votre état de monopole crée évidemment certains problèmes dans plusieurs pays. Des audiences se déroulent actuellement aux États-Unis, du côté du ministère de la Justice, à cet égard. En Virginie de l'Ouest, il y a des poursuites contre vous sur le soya. Vous êtes également en conflit avec l'Inde sur une question de problèmes de résistance aux parasites, notamment.
    Quand on parle de contamination, on n'a pas besoin d'aller très loin. On vient d'arriver de la Saskatchewan où il y a ce fermier, M. Schmeiser, âgé de 72 ans. Je ne suis pas un juge de la Cour suprême du Canada. Je sais qu'il a perdu en Cour suprême. Toutes les ressources, tous les moyens financiers que vous avez mis contre cet agriculteur de 72 ans, auraient peut-être été mieux investis dans la promotion des zones tampons, des zones de protection contre les semences OGM, par exemple.
    Un homme de 72 ans qui avait développé sa propre variété de canola s'est retrouvé en cour contre un géant comme vous. C'est sûr qu'en terme d'acceptabilité sociale, il y a eu tout un battage médiatique autour de ça. C'est la grosse compagnie multimillionnaire qui s'attaque à un fermier de 72 ans qui a développé sa propre variété de canola, qui se fait poursuivre et qui l'écrase en cour.
    Le débat tourne beaucoup autour de cela. L'historique des grandes compagnies qui font des OGM fait en sorte que la population s'inquiète de plus en plus. Toute communication, toute information, si valable soit elle, peut être entachée par ces exemples, par ce qu'on voit à travers le monde, et même par ce que les gens voient dans leur propre cour ici.
    Êtes-vous conscients de cela?

  (1005)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Bellavance, d'avoir posé cette question. Vous en avez dit beaucoup; vous avez abordé plusieurs enjeux.
    Pour commencer, j’aimerais vous dire que la politique de Monsanto, globalement, consiste à faire preuve de transparence quant aux produits que l’entreprise met sur le marché. Nous avons toujours prétendu travailler en étroite collaboration avec les intervenants, ceux de l’industrie comme les consommateurs. Au Canada, par exemple, nous avons un conseil consultatif réunissant des agriculteurs de toutes les régions du Canada — de l’Est comme de l’Ouest. Ce conseil regroupe des représentants de l’Association des producteurs de blé, de l’Association des producteurs de canola du Canada, du Conseil canadien du canola, de l’Association des producteurs de céréales de l’Ontario. Nous collaborons avec eux et nous prêtons l’oreille à leurs problèmes et préoccupations, car les agriculteurs sont les intervenants clés.
    En ce qui concerne les monopoles, je crois que c’était l’un de nos sujets de réflexion, lorsque la biotechnologie a vu le jour, en 1996. Oui, je suis d’accord pour dire que Monsanto a été un agent d’innovation et qu’il a mis diverses technologies sur le marché, mais, 15 ans plus tard, nous sommes toujours là et nous comptons plusieurs compétiteurs qui proposent des caractères compétitifs. Les agriculteurs ont le choix, non seulement pour ce qui concerne les technologies et les biotechnologies, mais aussi en ce qui a trait aux gènes ou modifications génétiques qu’ils peuvent acheter.
    En ce qui concerne l'affaire Percy Schmeiser, je dois vous dire, honnêtement, que je ne m'attendais pas à devoir répondre à cette question. Je dirais que la position de Monsanto... Je ne sais pas si Mike peut en dire plus à ce sujet, mais il n'a pas mis au point lui-même les caractères dont il est question. Cela est ressorti clairement de la décision et des éléments de preuve qui ont été soumis.
    Prenons le Canada et prenons le reste du monde. Il y a au Canada seulement 60 000 agriculteurs. Nous n’allons pas nous adresser à chacun d’entre eux personnellement. En ce qui concerne Percy Schmeiser, il s’agissait d’une personne, un agriculteur, qui appréciait beaucoup la technologie brevetée que nous lui proposions et les avantages qu’il pouvait en retirer, mais il a laissé entendre qu’il cherchait activement à nous voler notre technologie.
    Nous avons donc pris cette affaire au sérieux. Nous devons protéger nos investissements. Nous dépensons un milliard de dollars par année, et 59 999 agriculteurs du Canada respectent cela.

  (1010)  

[Français]

    Comme je vous disais, monsieur Penner, je n'ai pas l'intention de refaire le...

[Traduction]

    Vous n'avez plus le temps, en fait, à moins que ce ne soit que pour...

[Français]

    Je ne voulais évidemment pas refaire le jugement de la Cour suprême du Canada. Ce que je voulais souligner, c'est la perception au sein de la population en donnant l'exemple de la grosse compagnie qui s'en prend à un seul fermier. C'est dans ce sens que je le mentionnais
    C'est la perception de la population. Comme de fait, je ne suis pas juge de la Cour suprême.

[Traduction]

    D'accord. Je ne voudrais pas faire dire à M. Penner ce qu'il n'a pas dit, mais je crois qu'il comprend ce que vous avez dit. Il faisait simplement un commentaire.
    Avez-vous quelque chose à ajouter?
    Monsieur le président, je crois avoir dit que nous comptions un certain nombre d'agriculteurs et que, si l'on observe la situation sous l'angle des statistiques... Nous comprenons quelle perception les gens peuvent avoir de Monsanto. Pourtant, prenez un échantillon de cultivateurs du Canada et des États-Unis, où la biotechnologie est acceptée, et je crois que vous pouvez même aller en Amérique latine — en Argentine et au Brésil —, et vous constaterez que la demande est là et que les gens sont prêts à payer pour la technologie.
    Malheureusement... nous vivons dans une société de marché libre, et nous sommes une grande entreprise, en croissance depuis plusieurs années. Mais c'est la réalité dans laquelle nous vivons. Nous comprenons cet enjeu, et nous travaillons pour faire changer les perceptions.
    Merci.
    Nous devons poursuivre. Nous risquons de manquer de temps.
    Monsieur Shipley, sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais éclairer mon distingué collègue. Je crois que nous devons vraiment comprendre que le projet de loi C-474 n'a pas fait de cette question une priorité. Ce projet de loi, comme vous le savez, est toujours à l'étude. Ce n'est pas un bon projet de loi. Il est incomplet. Je sais que nous sommes les seuls à ne pas l'avoir appuyé, mais il n'a pas fait en sorte que...
    J'apprécie vraiment que tous le gens aient pris le temps de se présenter. J'ai passé toute ma vie dans le milieu agricole, et je m'occupe de biotechnologie depuis 1996, et, 15 ans plus tard, je suis en mesure de poser la question suivante. La biotechnologie que nous connaissons aujourd'hui — il en a été question dans une étude — est en émergence. Je voudrais seulement avoir un peu plus d'explications. Est-ce que l'on considère qu'il s'agit d'une technologie émergente, ou est-ce que ce ne serait pas une technologie — je me trompe peut-être — qui est sur le point d'exploser?
    J'aimerais avoir vos commentaires. Quelle est sa position par rapport à l'agriculture et au consommateur? Quelles sont ses répercussions sur les deux? Je sais que c'est un outil, mais je trouve qu'il se passe beaucoup de choses, dans le milieu agricole. Comme je l'ai déjà dit, je crois que les gens qui sont aujourd'hui des acteurs dans le domaine de l'agriculture, dans cette industrie, vivent l'une des époques les plus fantastiques et les plus fructueuses que l'industrie ait jamais connues.
    J'aimerais avoir vos commentaires, monsieur Raizada, monsieur Penner et aussi, ensuite, monsieur Ingratta.
    Comparativement à il y a 10 ans, nous connaissons maintenant le code génétique complet d'un grand nombre d'organismes — bactéries, plantes, animaux — qui nous permettent de mieux appliquer d'un organisme à un autre des gènes sur lesquels nous avons beaucoup de renseignements. Grâce à cela, la technologie va connaître un essor. Autrement dit, l'ensemble de gènes existants qui nous sert d'outil est sur le point de prendre de l'essor.
    La vision objective à ce chapitre serait que, jusqu'à maintenant, si vous vous penchez sur l'amélioration des cultures aux quatre coins du monde, les OGM ont joué un rôle mineur, et je dis cela en tant que généticien moléculaire. Ce sont les phytogénéticiens classiques qui ont eu beaucoup plus d'influence sur le rendement.
    Cela tient au fait que le rendement de base est lié à un très grand nombre de gènes. Il faut apporter des modifications mineures à de nombreux gènes — en règle générale — pour accroître le rendement. On appelle cela le métabolisme primaire. Les OGM, pour leur part, auront une incidence considérable sur ce qu'on appelle le « métabolisme secondaire », c'est-à-dire la façon dont un organisme interagit avec son environnement, comme la résistance entomopathogène.
    Les OGM peuvent avoir une incidence importante, mais elles ne seront limitées qu'à un certain aspect. L'autre aspect du métabolisme secondaire porte sur des caractères intéressants, comme des propriétés nutraceutiques. Il y aura des répercussions importantes.
    Il existe des caractères où un seul gène — ou un, deux ou trois gènes — peut avoir une grande incidence. Et il y a d'autres caractères où cela est exagéré.

  (1015)  

    Je ne suis pas un scientifique, mais j'avancerais — à la lumière des données que j'ai vues — que les OGM ont joué un rôle important au chapitre du rendement de cultures au cours des 15 dernières années. Je vais donner quelques exemples, et je laisserai la parole à Mike.
    Nous avons un exemple ici, en Ontario. Si nous remontons dans le temps — avant la présentation du maïs génétiquement modifié aux agriculteurs canadiens —, les agriculteurs récoltaient en moyenne 112 boisseaux par acre. Dans les années 1930, on comptait 30 ou 35 boisseaux par acre. Alors, oui, il y a eu beaucoup d'amélioration. Mais si vous vous concentrez sur les dernières 15 années, en ce qui concerne les proportions, les agriculteurs récoltent maintenant près de 160 boisseaux par acre grâce à des variétés génétiquement modifiées.
    De plus, il y a un exemple européen lié au maïs Bt. Ce sont des études de Monsanto, alors, nous avions un point de vue de tierces parties américaines. Nous avons examiné des données qui s'étendent sur la dernière décennie qui portent sur la comparaison de diverses variétés de maïs Bt et de diverses variétés classiques. Et il était clair qu'en moyenne — au cours de cette décennie —, les variétés de maïs Bt donnaient lieu à un gain d'une demi-tonne par hectare comparativement aux variétés d'OGM classiques.
    Je ne suis pas scientifique de formation, mais ce sont des points de données qui, à mes yeux, indiquent de bons résultats.
    J'aimerais apporter le point de vue d'une population en baisse — c'est-à-dire celle qui a connu l'ère prébiotechnologique. Il y a de moins en moins de gens qui peuvent comparer l'ère prébiotechnologique et l'ère postbiotechnologique. Je peux commenter sur les deux.
    L'un des plus gros avantages que la biotechnologie a procurés aux agriculteurs — vu qu'ils travaillent dans un environnement d'incertitude où il y a une formule de risques, dont les conditions météorologiques, le prix des cultures et d'autres risques —, c'est une plus grande certitude.
    Si nous examinons les rendements moyens, les caractères intégrés grâce à la biotechnologie éliminent les effets d'un temps sec, des infestations d'insectes et des mauvaises herbes. Alors, l'un des grands avantages de la biotechnologie, c'est que les agriculteurs n'ont plus à composer avec autant d'années difficiles — une année sèche, une année où les mauvaises herbes posent problème ou une année où des parasites sont présents. Tous ces malheurs sont contrebalancés par la police d'assurance intégrée dans la récolte.
    Lorsque les agriculteurs connaissent une mauvaise année, il leur faut cinq ou six ans pour s'en remettre. Lorsque vous vous entretenez avec des agriculteurs, l'une des choses qu'ils ne cessent de répéter, c'est que la biotechnologie a permis d'éliminer certains des risques liés à l'agriculture, ce qui est une grande amélioration comparativement à l'ère prébiotechnologique.
    Votre question, essentiellement, est de savoir s'il y a eu ou s'il y aura un essor. Je crois que la technologie a pris de l'essor dans le domaine agricole. Si nous examinons les superficies et la croissance de la productivité liée aux superficies où des organismes génétiquement modifiés sont plantés, cet essor a déjà eu lieu. L'essor a lieu.
    Mais je crois que le vrai essor — à l'ère de la technologie numérique — aura lieu lorsque les applications destinées aux consommateurs seront mises de l'avant. Tout le monde a maintenant un ordinateur à la maison parce que les gens sont en mesure d'accéder à Internet. Quand la seule chose que vous pouviez faire était de contrôler la température dans la maison, ou de petites choses comme ça, ce n'était pas grand-chose. Lorsque les applications destinées aux consommateurs sont arrivées, la technologie a connu un essor. Et je crois que c'est ce qui va arriver dans l'avenir. Ce ne sera pas tant l'incidence sur les agriculteurs que l'incidence possible des produits alimentaires sur les consommateurs, surtout dans le domaine de la santé.
    C'est très prometteur. À l'heure actuelle, il y a peu d'exemples concrets, mais c'est très prometteur, et c'est là qu'il y aura un essor. C'est pourquoi on parle de la nécessité de mettre les règlements à jour pour que nous puissions composer avec cet essor. Mis à part la question qui nous occupe aujourd'hui, un enjeu futur sera encore plus important.
    Merci.
    Monsieur Van Acker, très brièvement.
    Oui, j'ai seulement deux choses à ajouter. D'une part, j'espère qu'il est clair pour tout le monde que nous parlons de produits GM liés à l'agriculture et non à la biotechnologie industrielle. C'est très important.
    D'autre part, Thijs Tollenaar et Liz Lee ont publié en 2007 un très bon article sur la convergence des sciences qui présente une analyse détaillée du rendement accru de la récolte de maïs au cours du dernier siècle. Thijs travaille actuellement pour Monsanto, au RTP, et il a déjà professeur à Guelph en tant que spécialiste de la physiologie du maïs. Je peux vous procurer une copie de l'article, si vous voulez. Les auteurs soulignent et appuient l'affirmation de Manish selon laquelle il s'agit d'une question qui porte sur la polygénie.

  (1020)  

    Merci beaucoup.
    Il va falloir réduire les dernières interventions à cinq minutes, Wayne et Randy.
    Vous avez cinq minutes, monsieur Easter.
    Je n'y vois aucun inconvénient.
    Merci aux témoins d'être ici.
    J'aimerais reprendre où M. McGuire s'est arrêté, c'est-à-dire sur les améliorations apportées par la biotechnologie. À nos yeux, il est évident qu'il y a eu d'énormes... Et cela découle peut-être des aliments-Frankenstein dont Michael a parlé plus tôt. Mais on croit à tort que la biotechnologie ne touche que les OGM, et ce n'est pas le cas. Je crois que c'est une composante de la boîte à outils.
    Dans le même ordre d'idée — et c'est ce à quoi je veux vraiment en venir —, comment pouvons-nous favoriser une meilleure compréhension du grand public à l'égard non seulement des produits GM, mais aussi de la biotechnologie? Nous ne parlons plus du projet de loi C-474. Vous avez tort, Bev. Nous n'avons pas appuyé le projet de loi C-474; nous avons appuyé la discussion, et nous allons voter contre le projet de loi aujourd'hui.
    Frank, vous avez indiqué que les préjugés possibles à l'égard de la biotechnologie — je crois que vous vouliez parler des entreprises — doivent être dissipés ou qu'on a l'impression qu'il existe peut-être des préjugés à ce chapitre. Comment nous y prenons-nous? J'ai entendu des histoires d'horreur sur des cultivars de maïs après l'intégration du maïs GM au Mexique. C'est la réalité. Monsanto, Syngenta et d'autres sociétés détiennent beaucoup de pouvoir... et les agriculteurs doivent toujours se rabattre sur leurs semences. Je dois admettre qu'il y a certainement une rentabilité économique à faire cela.
    Mais comment pouvons-nous en arriver à un système transparent qui ne gêne pas trop les entreprises qui veulent faire des investissements et que le public reconnaît comme un système fondé sur la science, sur la salubrité des aliments et sur la protection de l'environnement?
    Lorsque je parlais de la question des préjugés — il arrive si souvent que les gens se plaignent... Même récemment, on a reproché l'Université de Guelph de s'attacher un peu trop aux aspects positifs de la biotechnologie, et certains diraient que cela tient au fait que l'industrie subventionne certains de ses programmes de recherche. On considère automatiquement que l'université a un parti pris. Le fait que cela ait même été mentionné publiquement m'a toujours énervé. Je respecte énormément l'intégrité du milieu de la recherche, mais, dès qu'il est financé par une multinationale, on met en doute sa bonne foi.
    Voilà pourquoi j'insiste sur la transparence, sur l'importance d'affirmer très clairement qu'un soutien financier est effectivement offert, mais aussi que les intentions et les extrants de ces programmes sont à la disposition des gens peuvent les consulter et qu'il ne peut donc pas y avoir de grand complot entre les chercheurs et les multinationales. C'est pourquoi j'ai parlé de transparence. À mon avis, la réglementation doit être élaborée de façon transparente. J'entends par là que toutes les parties doivent y participer. Vous devrez finalement prendre une décision, mais vous aurez pris connaissance de l'avis de toutes les parties et des renseignements essentiels à l'élaboration... Je crois que c'est crucial.
    Je sais que c'est un peu vague comme réponse, mais je continue de croire que le fait de s'assurer que ces renseignements sont disponibles aidera le grand public à comprendre et — je me répète — à voir les nombreux exemples de situations où il y a des répercussions positives, et, lorsque nous commençons à avoir des exemples de répercussions positives sur les gens, et non seulement sur la capacité des producteurs à améliorer leurs profits...

  (1025)  

    Par contre, un des problèmes qui se présentent ici, c'est que nous dépendons des données des entreprises. Aucune institution publique — dont l'avis peut être considéré comme impartial, je suppose — n'a de données sur la question. Nous dépendons de données des entreprises pour certaines analyses, et cela ne mène certainement pas à la transparence. Y a-t-il un domaine où nous pouvons intervenir?
    Soyez très bref parce que nous...
    Je crois que, du point de vue de Monsanto, nous créons les données, mais nous n'établissons pas les critères. Nous devons réaliser certaines choses pour obtenir une approbation réglementaire. Nous ne sommes pas en droit de décider ce que nous présentons, mais nous sommes tenus de fournir un ensemble de données solide à l'égard de toutes les technologies que nous proposons. Elles sont scrutées à la loupe. Les gens reviennent avec des questions. Ils nous posent des questions sur nos données et sur la façon dont nous les avons obtenues. J'aime considérer cela comme le coût à assumer pour la création de données. Nous ne choisissons pas ce que nous présentons. Nous fournissons ce qui est exigé, et nous sommes obligés de nous soumettre à une approbation réglementaire complète. Je crois donc qu'il y a une distinction à faire.
    Monsieur Raizada, vous avez acquiescé d'un signe de tête.
    Permettez-moi simplement d'ajouter, concernant la transparence, que, lorsque Monsanto obtient un brevet, c'est un document public. C'est un merveilleux document, très détaillé, et très rigoureux. Pour améliorer la transparence, je suggérerais que le dossier public — le brevet — soit versé dans une base de données. Le dossier serait disponible, et il est très détaillé.
    Monsieur Hoback, vous avez les cinq dernières minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'être ici ce matin. Toutes mes excuses pour mon retard. Le vol à partir d'Ottawa a pris un peu plus de temps que prévu ce matin; alors, je tiens à m'excuser auprès de Dean Emes d'avoir manqué son exposé. Je compte bien le lire plus tard.
    Tout d'abord, nous avons déjà débattu la question liée à la présence de faible concentration. Au cours de chaque réunion, tout le monde dit que la question de la présence de faible concentration doit être abordée. Je crois que le ministre comprend cela et que les Européens commencent à comprendre cela. À mon avis, des gens plus futés que moi vont quantifier la présence de faible concentration, mais je crois savoir que tout le monde considère que c'est un élément sur lequel il faut se pencher, partout dans le monde.
    J'ai des questions concernant quelques éléments. Tout d'abord, il semble qu'une étude sur la biotechnologie finit toujours par devenir une étude sur les OGM. C'est dommage, car les OGM — comme Wayne l'a dit — comptent parmi les outils de la boîte à outils, mais de nouvelles technologies, comme la génomique et d'autres idées, verront le jour et permettront de produire exactement les mêmes caractères obtenus grâce à la GM. À titre d'exemple, je me demande quelle serait la réaction si nous utilisions la génomique plutôt que la GM pour conférer à la luzerne certains caractères propres au gène Roundup. Cela serait-il possible?
    En fait, des gens du ministère me disent qu'une fois que des brevets sont décernés à Monsanto pour des OGM, les gens qui s'opposaient aux OGM n'y verront soudainement aucun inconvénient, et ils ont plutôt l'air d'en avoir contre Monsanto.
    C'est dommage — comme vous l'avez dit, monsieur Penner — que c'est la réalité dans laquelle vous vivez et avec laquelle vous devez composer.
    Wayne a soulevé un point que je trouve important, à savoir les communications dans le cadre du processus réglementaire. À Saskatoon, nous avons vu comment les chercheurs faisaient leurs cultures dans les boîtes de Pétri et comment ils s'y prenaient pour obtenir les caractères voulus, ce qui était intéressant. Il me semble que le système de réglementation est très fermé et contrôlé. Est-ce un commentaire raisonnable? Alors, avant même qu'un nouveau produit ne soit commercialisé, il faut passer par le système de réglementation — qui est dans un environnement très fermé — pour empêcher tout risque de contamination de l'extérieur. Est-ce un commentaire raisonnable?
    Oui.
    D’accord. Si nous faisons cela dans le cadre de la réglementation, quel est l’objectif de l’enregistrement, alors? Dans l’Ouest du Canada, nous passons par la réglementation et, encore une fois, nous obtenons cet ensemble de données. Nous faisons tout ce travail et, essentiellement, nous concluons en disant: « Tenez, tout est en règle. C’est sécuritaire. Il n’y a aucun problème. » Par contre, lorsque nous passons à un deuxième groupe pour l’enregistrement, processus de deux ans grâce auquel on sélectionne la variété en fonction de la rentabilité ou d’autres renseignements non scientifiques. Ce processus est-il toujours efficace? Est-il toujours nécessaire?
    Monsieur Ingratta, vu votre expérience en la matière, quel serait votre avis?
    Le processus d’enregistrement est en quelque sorte un processus distinct — comme la série d’essais sur le terrain que vous avez mentionnée — pour démontrer qu’une variété est en fait meilleure. Habituellement, nous adoptons un modèle qui vise à assurer non seulement la protection du consommateur, mais aussi une qualité supérieure à ce qui existe actuellement. On peut donc dire que le processus d’enregistrement contribue à démontrer non seulement qu’une variété résiste à un herbicide X, mais aussi qu’elle est en réalité meilleure et qu’elle procure une meilleure productivité comparativement à ce qui existe actuellement.
    Je ne voudrais pas carrément écarter le processus d'enregistrement, mais, s'il y avait une possibilité de le simplifier ou de l'intégrer à d'autres processus, ce serait peut-être la solution que vous cherchez.

  (1030)  

    C'est un commentaire intéressant, car c'est ce que j'ai entendu des chercheurs. Ils avançaient la même chose. Ils ne voulaient pas que le processus d'enregistrement disparaisse, mais ils estimaient qu'ils avaient recueilli durant le processus de réglementation des données qu'ils pourraient utiliser pour simplifier le processus d'enregistrement.
    Monsieur McGuire.
    Je crois que le maïs est un bon exemple. L'enregistrement des variétés de maïs a pris fin il y a plusieurs années — probablement il y a environ dix ans. Nous n'enregistrons pas de nouvelles variétés. On partait du principe que les entreprises allaient être motivées à produire de meilleures variétés; si elles proposaient une variété inférieure, les entreprises ne dureraient pas très longtemps.
    Alors, les engagements que nous avons pris en tant qu’industrie... Nous n’aurions pas à soumettre des variétés de maïs à des essais aux fins d’enregistrement, mais l’industrie s’est engagée à prendre part à des essais de rendement pour que les agriculteurs puissent obtenir des données provenant de tierces parties et pour que tout le monde puisse constater le rendement des produits. C’est une bonne hypothèse : les entreprises présenteront de meilleurs produits parce que c’est ce qu’elles veulent faire. Mais nous avons convenu, en tant qu’industrie, d’effectuer conjointement des essais pour fournir aux agriculteurs des données provenant de tierces parties.
    Selon moi, c’est un bon système. Je crois que le système mérite d’être envisagé, car il n’a pas retardé l’introduction de nouveaux produits. Les agriculteurs canadiens voulaient avoir accès à ces variétés hybrides de maïs en même temps que l’agriculteur du Michigan, où aucun processus d’enregistrement n’est en place. Cela nous a donc permis d’obtenir des produits améliorés plus rapidement et d'évoluer aux côtés des États-Unis, mais le système nous a procuré la capacité d’obtenir des données sur le rendement pour nous assurer de faire ce que nous avons convenu de faire.
    Votre temps est écoulé, monsieur Hoback, croyez-le ou non. Avez-vous un dernier commentaire? Il vous reste environ 10 secondes.
    Le dernier point que j’allais aborder concernait le un pour cent de recherche en Chine, mais je crois qu’en guise de conclusion, je vais dire que nous venons tout juste de voir la Commission canadienne du blé décider de débourser de l’argent pour des laquiers au lieu de le remettre dans la recherche. Je m’apprêtais à demander si vous trouviez que c’était une utilisation judicieuse de l’argent, compte tenu du déficit auquel nous faisons face au chapitre des produits céréaliers — à la lumière des recherches — et du déficit lié aux progrès réalisés au chapitre de la culture du blé et de l'orge comparativement à celle du canola ou du maïs ou d'autres récoltes, mais...
    Peut-être que vous pouvez leur demander durant vos remerciements.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Je remercie tous nos témoins. Nous apprécions vraiment votre présence. Il n'y a jamais suffisamment de temps, mais je suis certain que nous savons où vous trouver. Si nous avons des questions particulières, nous le ferons. Encore une fois, merci.
    Nous allons suspendre la séance pour cinq minutes.
    Nous allons demander aux témoins de quitter la table. Nous avons de nouveaux témoins qui prendront place.

  (1030)  


  (1045)  

    Merci, messieurs, d'être ici aujourd'hui.
    Sans plus tarder, passons aux exposés. Nous allons entendre M. Rowe, président et directeur général de Nutrasource Diagnostics Inc., pour tout au plus 10 minutes. Allez-y, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Et je remercie le comité de me donner l'occasion de témoigner. C'est apprécié.
    La plupart d’entre vous n’ont probablement jamais entendu parler de nous ni de notre entreprise. Pour vous donner un petit aperçu — au risque de vous donner l'impression d'écouter une infopublicité, ce qui n'est pas mon intention —, nous sommes une entreprise de recherche à contrat fondée en 2002. L'entreprise est constituée en vertu d’une loi fédérale depuis. Elle compte quatre divisions: une division des essais cliniques sur les humains, une division de l’analyse des produits, une division des diagnostics humains et une division de la consultation réglementaire. Il importe de noter que nous ne travaillons avec aucun produit pharmaceutique. Nous n’effectuons que des travaux concernant l’humain à l’égard de produits non pharmaceutiques, d’ingrédients actifs utilisés dans les aliments, les boissons et les cosmétiques et dans des produits de santé naturels.
    Nous avons pris part — à divers degrés — à l'étude de près de 250 allégations relatives aux effets sur la santé approuvées par Santé Canada dans ces catégories. Nous effectuons parfois le processus complet pour le promoteur; nous nous occupons parfois d'une partie du processus. Nous avons participé à environ 250 approbations.
    Un des sujets clés qu'on m'a demandé d'aborder était la question de savoir si le gouvernement fédéral devrait financer la recherche au Canada dans le secteur de la technologie agricole et agroalimentaire et, le cas échéant, de quelle la façon le secteur devrait être financé. Je vais parler de cela aujourd'hui.
    Chose intéressante — en parallèle à cela —, en mars 2009, Santé Canada a publié une monographie portant sur la relation entre les aliments et les allégations relatives aux effets sur la santé. La monographie ciblait les entreprises du secteur des aliments et des boissons ainsi que les entreprises agricoles et agroalimentaires pour qu’elles puissent savoir comment elles pourraient justifier une allégation relative aux effets sur la santé concernant leurs produits. Nous sommes en train de parler de la relation directe entre un produit et un consommateur.
    En réaction à cette monographie, le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire a lancé une DP par le truchement du système MERX. Il y a eu six de ces DP, et, dans le cadre de celles-ci, nous avons été invités, en tant que soumissionnaires, à établir notre arbre décisionnel pour la sélection des six secteurs sur lesquels nous allions nous concentrer et à indiquer en quoi les six secteurs en question sont liés à l’ensemble de la preuve figurant dans la littérature.
    Notre soumission a été retenue pour cinq des six DP. Nous avons depuis achevé tout ce travail. Deux des six propositions ont été soumises à un groupe d'experts aux fins d'examen, et, jusqu'à maintenant, une des deux pourrait mener à de nouvelles allégations très intéressantes à l'égard des effets de ce secteur de produits sur la santé.
    Lorsque nous menons un examen systématique, nous examinons l’ensemble de la preuve existante. Nous fixons les paramètres à l’égard des critères d’inclusion et d’exclusion afin de choisir les publications qui serviront à corroborer l’allégation. Nous déterminons ensuite lesquelles seront utilisées et pourquoi. Dans un cas particulier, nous nous sommes appuyés sur les critères établis pour choisir les publications qui allaient être utilisées dans le cadre de l’examen des cinq groupes, et voici ce qui est arrivé. Après avoir effectué une recherche filtrée — selon le titre, le résumé et le texte complet — de 14 658 références uniques à l’égard d’une catégorie particulière du secteur agricole — et c’est une catégorie importante dans le secteur agricole au Canada —, nous avons été en mesure d’utiliser 59 publications. C’était après avoir commencé avec 14 000 publications. Il y avait 45 essais sur le terrain, une étude par observation et 13 métaanalyses, c'est-à-dire des examens systématiques ou des ouvrages faisant autorité. Ce sont des documents qui relèvent du domaine public.
    Si vous examinez cela, il y a environ 14 600 études qui, aux fins de la corroboration d’une allégation relative aux effets sur la santé devant Santé Canada, sont inutilisables, et qui, du point de vue du ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire — selon la monographie —, sont inutilisables. Alors, cela revient vraiment aux extrants auxquels s’attendent le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, Santé Canada et le gouvernement du Canada.
    À mes yeux, concernant la façon dont la recherche est financée, le rejet d'un si grand nombre d’études tient au fait qu’elles n’avaient pas les ressources adéquates. À titre d’exemple, si vous voulez mener adéquatement une étude sur la réduction du taux de cholestérol, il vous faut deux groupes — au minimum — pour effectuer un essai contrôlé en double aveugle, et il vous faut 45 sujets. Si vous n’avez pas 45 sujets, les statistiques ne seront pas significatives. Vous ne serez pas publié, et vous n'aurez pas de bonnes statistiques pour prouver une relation liée à l’allégation relative à l'effet d'un aliment donné sur la réduction du taux de cholestérol.
    Il n'y avait pas suffisamment de sujets. Il n'y avait pas suffisamment de groupes. Le résultat final qu'on comptait obtenir n'était pas compatible avec la durée de l'essai. Pour toutes ces raisons, nous voyons sans cesse beaucoup d'argent gaspillé pour mener des essais mal conçus.

  (1050)  

    De notre point de vue, en ce qui concerne le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Santé Canada et les secteurs agroalimentaires qui sont en pleine croissance aux quatre coins du pays, il existe deux possibilités clés qui fonctionnent en synergie.
    La première est la possibilité liée à l’allégation relative aux effets sur la santé. Je peux vous assurer de prime abord que, lorsque Santé Canada appose un sceau sur une allégation relative aux effets sur la santé justifiée pour un produit canadien lié à l’agriculture canadienne, cela permet d’accroître la part de marché tant au pays qu’à l’étranger. J'ai reçu des tonnes de commentaires à cet égard, de multinationales comme de toutes petites entreprises. À mes yeux, c’est un extrant clé.
    Bien souvent, l’argent des contribuables sert à financer — par l’intermédiaire de divers mécanismes — des essais qui sont mal conçus qui ne donneront même pas les résultats escomptés. Même si ce sont des résultats favorables qui dénotent une tendance positive, ils ne permettront pas de corroborer une allégation en vue d’obtenir une approbation de Santé Canada. C’est un domaine qui laisse beaucoup à désirer au chapitre de l'analyse des écarts.
    La deuxième possibilité est la propriété intellectuelle qui est produite. Il est souvent très difficile pour les entreprises du secteur des aliments et des boissons d’obtenir la propriété intellectuelle liée à une formule dans cette industrie. Elles peuvent obtenir une certaine protection de la PI à l'égard de la source, ce qui nous ramène au bétail et aux récoltes. Liées à leur source — et ce sont des sources uniques —, les données propres à un produit sont absolument essentielles à la protection de la PI si on veut permettre la croissance du secteur et de la part de marché tant au pays et à l’étranger. Les entreprises peuvent faire cela grâce à une allégation relative aux effets sur la santé.
    Quant aux demandes de brevet et au dépôt de marques de commerce, c’est là où on pense à la culture de l’asperge Millenium comme exemple de situation où on pourrait relier des résultats particuliers aux allégations santé d'un secteur agroalimentaire canadien et favoriser l'expansion de ce secteur au pays et à l’étranger.
    Concernant tout cela, je crois que, si le gouvernement du Canada est intéressé par ces deux possibilités et considère que ces extrants sont des résultats concrets du financement de recherches par Santé Canada et le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, il faut établir une norme minimale liée à la conception des essais, sinon vous vous retrouvez toujours avec le scénario que j'ai décrit plus tôt. Ce n’est pas un scénario que j'ai choisi parmi tant d’autres, cette situation a été constatée dans tous les cinq secteurs que nous avons étudiés au nom du ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire.
    Toutefois, si le gouvernement du Canada s'intéresse à des recherches expérimentales de base qui ne sont pas dotées de paramètres liés à la conception d'essais en vue du processus de commercialisation, c'est-à-dire à des travaux expérimentaux préliminaires, exclusivement — étant donné que c'est la façon dont le modèle de financement est établi actuellement — qu’ils soient financés par des agences de commercialisation, par des groupes d’agriculteurs ou des organismes et des associations liés ou non à des programmes universitaires, alors le statu quo est suffisant.
    Si vous vous attendez à ce que ces extrants permettent d’améliorer l'agriculture canadienne, il faut établir des paramètres liés à la façon dont les essais sont conçus. Ce sont les essais dont les résultats sont publiés. Pensez à tout l’argent qui a été investi dans des essais que les revues ont rejetés parce qu’ils n’étaient pas conçus adéquatement. Si vous pensez à l’ensemble des investissements et aux résultats réels qui sont produits, je crois que le rendement des investissements est bien trop faible et qu’il pourrait être beaucoup plus élevé.

  (1055)  

    Merci beaucoup, monsieur Rowe.
    Nous allons maintenant passer au vice-président de l'Association des fruiticulteurs et des maraîchers de l'Ontario, M. John Kelly.
    Je vais d’abord vous parler un peu de mon parcours, compte tenu du contexte de la discussion de ce matin. Avant de me joindre à l’Association des fruiticulteurs et des maraîchers de l’Ontario, j’étais à la tête du service des affaires réglementaires et du développement technique pour une grande société se consacrant à la protection des cultures. J'ai également occupé un autre poste où j’étais chargé de la commercialisation et des affaires réglementaires liées à la biotechnologie animale; alors, si vous avez des questions à cet égard, n’hésitez pas à les poser.
    Mes commentaires d’aujourd’hui mettront l’accent sur les politiques et sur la commercialisation, car je crois que c'est là que nous devons centrer nos efforts. L’initiative d’innovation et de commercialisation d’Erie est un effort régional — jouissant d'un soutien assez large — qui vise à transformer certaines possibilités agricoles dans le Sud de l’Ontario — plus particulièrement dans les plaines sableuses où se trouve la ceinture du tabac — et à tenter de diversifier nos possibilités agroalimentaires à cet endroit. Nous jouissons du soutien d’un bon nombre d'organismes différents, d’organismes de recherche et de développement — comme l’Université de Guelph et le Vineland Research and Innovation Centre —, de divers organes gouvernementaux — comme le conseil d’adaptation d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales — ainsi que des administrations régionales — comme le comté de Norfolk et le comté d’Oxford. Nous bénéficions également d'un soutien important de l’industrie, par l’entremise de l’Alliance of Ontario Food Processors, d'associations de pomiculteurs et de fruiticulteurs et maraîchers, et de cultivateurs de tabac et d’asperges.
    Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui pour fournir des commentaires sur la biotechnologie et son importance pour le secteur.
    Mes commentaires porteront sur les biotechnologies —on entend par cela la technologie dans le bioespace —, et cela permettra d'encadrer mes commentaires. Je vais également parler de la façon dont je vois la croissance de l'agriculture et les nouvelles possibilités qui se présentent — celles dont nous devons tirer profit pour demeurer compétitifs.
    Nous sortons d’une ère de fabrication. Dans les années 1950 à 1980, l’économie reposait sur les grandes entreprises de fabrication, dont les voitures — le secteur automobile — et d'autre encore. De 1990 à 2010, c’était l’ère de la TI. Selon moi, nous nous dirigeons vers l'ère bio. Nous entrons maintenant dans une ère bio; alors, beaucoup d’autres secteurs seront appuyés par l’agriculture, et ces choses auront des répercussions importantes et distinctes sur l’économie canadienne.
    Nous serons toujours le pourvoyer d'aliments salubres et de qualité. La difficulté qui se présente dans le secteur, c'est d'être en mesure d'être compétitifs et de faire concurrence sur la scène internationale, c'est-à-dire contre des produits provenant de différentes sources dans le monde. On a mentionné la Chine plus tôt. Nous devons également faire concurrence à la Californie. Il faut également se mesurer au Chili à l'égard de certaines choses.
    Nous savons également que l'agriculture — au-delà de l'alimentation — permettra d'appuyer l'industrie des produits chimiques. Elle sera en mesure d'appuyer le secteur énergétique ainsi que d'autres secteurs.
    Aux yeux des agriculteurs, la biotechnologie signifie plus de choix et plus d’avantages. Elle permet de composer avec des choses comme les maladies, les parasites, les stress — comme la sécheresse qui a été mentionnée plus tôt — et d'obtenir un rendement accru. Nous prévoyons des avantages liés à la santé. L’une des difficultés qui s’était présentée, c’est que de nombreux caractères auxquels nous nous sommes intéressés sont des caractères d'intrants et que nous commeçons tout juste à entrer dans le secteur des caractères d'extrants. Je vais revenir sur cela dans quelques minutes.
    Nous innovons dans le domaine agricole. La biotechnologie est simplement un autre type d’innovation. Lorsque nous nous penchons sur l’avenir de l’agriculture, il y a essentiellement trois principaux volets. Le premier, c’est l’alimentation et la santé, et nous avons beaucoup d’exemples liés à la biotechnologie où l’alimentation et la santé jouent un rôle. Nous voulons être en mesure de satisfaire aux exigences nutritionnelles. Nous voulons réussir à documenter la salubrité des aliments, mais nous voulons aussi passer aux aliments fonctionnels et aux produits nutraceutiques, et nous pouvons faire ces choses grâce aux caractères d'extrants. Le riz doré que Syngenta a mis au point en est un exemple, mais il y en a d’autres — le retard de la maturation, par exemple, et le transport des produits. Nous pouvons faire ces choses beaucoup mieux.
    Au chapitre de la bioéconomie, nous pouvons parler de biocombustibles, que ce soit du bioéthanol provenant d’une base d’amidon ou d’une base cellulosique; de biodiesel provenant de plantes, d’une base algale, des matières grasses utilisées dans les restaurants ou d’une base animale; et du biogaz, qui découle de processus de fermentation, soit de coproduits agricoles... Vous remarquerez que le fumier est un coproduit. Ce n’est plus un déchet; alors, il vous faut éliminer ce langage et voir les choses différemment. C’est la même chose pour les déchets municipaux; nous pouvons les utiliser pour produire de l’électricité. La biomasse est un autre exemple, et elle sera très importante si nous comptons produire de l’électricité à des endroits comme Nanticoke et Lafarge. Il y a des technologies de torréfaction. Elles doivent être mises en valeur. Syngas est une autre entreprise où on a recours à la gazéification immédiate de la biomasse pour la production gazière.

  (1100)  

    Nous allons aussi pouvoir mettre au point des produits biochimiques, et nous avons actuellement beaucoup de produits biochimiques. Prenez les chaises rembourrées sur lesquelles vous êtes assis, je parie qu'elles contiennent du soya. L'extraction d'acide gras hydroxylé à partir de l'huile de ricin est un autre exemple d'avenue à explorer, mais l'huile de ricin pose problème, car elle contient un composé qu'on appelle la ricine. Eh bien, j'en parlais à Frank plus tôt. Nous pouvons procéder à l'extinction du gène à l'origine de la ricine, de façon à ce qu'il ne soit pas exprimé. C'est également un produit génétiquement modifié. L'acide polylactique et les polyhydroxyalcanoates — les PHA — comportent aussi d'énormes avantages pour nous. Et je ne parle que de l'aspect chimique.
    Nous étudions des fibres pour le secteur de l'automobile, les meubles et le platelage; ce sont aussi des choses qui peuvent être améliorées à l'aide de produits agricoles. Alors, nous avons l'alimentation et la santé, nous avons la bioéconomie, et la dernière chose, qui présente une excellente possibilité pour nous, c'est l'environnement, l'exploitation de l'économie du carbone. Le Canada jouera un rôle énorme dans l'économie du carbone, et nous devons être en mesure d'en tirer profit. Les cultures énergétiques spéciales en place ont plus de racines sous la terre que de plantes au-dessus, et c'est un puits de carbone et un moyen de le capter.
    La gestion de l'eau est un autre secteur où nous assurerons un certain leadership, que ce soit par la conservation, la gestion des ressources ou la mise au point de plantes tolérantes à la sécheresse grâce à la biotechnologie. Alors, ce sont des occasions que nous pouvons saisir.
    Nous devons pouvoir soutenir l'entrepreneur, et nous devons pouvoir soutenir l'application de la science. Ainsi, lorsque nous voudrons commercialiser ce genre de choses, nous devrons avoir des programmes à l'appui des nouveaux entrepreneurs. Voici quelques exemples: une entreprise du nom de Naturally Norfolk a mis au point de nouvelles technologies de séchage pour ces aliments. Elle touche un financement provincial. Nous devons trouver d'autres façons de soutenir des entreprises comme celle-là. Pour illustrer la situation inverse, on peut parler de Bick's Pickles, qui a été acquise par une société américaine, et l'usine Bick's ferme maintenant ses portes au Canada. Comment pouvons-nous éviter ce type de fermeture?
    Nous devons promouvoir la commercialisation de l'innovation au Canada. Un autre produit, le stevia, a été mis au point par Jim Brandle, d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, à London. Eh bien, devinez où on l'a commercialisé? Aux États-Unis. Nous devons être capables de faire ces choses ici.
    Nous devons aussi aborder certaines répercussions de la réglementation. On peut parler d'Enviropig, si vous voulez. L'Enviropig est un animal génétiquement modifié afin de réduire le phosphate dans le lisier. Nous n'avions pas de réglementation pour régir ce genre de chose. Ce produit va d'abord être commercialisé aux États-Unis.
    La réglementation intelligente. Je suis certain que vous avez tous entendu parler de Gaétan Lussier et de ce qu'il a fait il y a quelques années. Nous devons mettre en valeur ce qu'il a fait. Le coût de la production et le salaire minimum — ces facteurs ont tous une incidence sur nous, même s'ils ne se rattachent pas directement à la biotechnologie. Et nous avons entendu des discussions au sujet de la réglementation environnementale et des reculs à ce chapitre ce matin.
    La prochaine chose, c'est que nous devons aussi amener le consommateur à accepter la biotechnologie. Ce sont les consommateurs qui font rouler l'économie. Notre population se transforme. La population vieillit. La population du secteur ethnique prend de l'expansion. Nous ne fournissons pas ce secteur ethnique. Nous devrions faire cela. Alors, lorsque nous songeons à produire de nouvelles denrées, comme des légumes asiatiques, par exemple, comme le kaddu indien ou le calalou ou les piments forts rouges de Chine, nous devrions faire ces choses.
    Nous mettons aussi au point des cultures génétiquement modifiées pour offrir des produits à forte teneur en oméga-3. Aux États-Unis, on dit des choses au sujet des oméga-3 qu'on ne peut pas dire au Canada, et je vais vous donner l'exemple de l'American Heart Association, qui dit ouvertement que nous devrions consommer plus d'oméga-3 à la suite d'un accident cardiaque ou d'un accident cardiaque grave. Alors, une recommandation pour nous, pour Agriculture Canada et pour d'autres ministères fédéraux, dont Santé Canada, Environnement Canada, Industrie Canada et Ressources naturelles Canada, serait d'appuyer ouvertement l'adoption de ces produits une fois qu'ils seront réglementés. Il s'agit non pas de simplement dire « oui, nous croyons qu'ils sont acceptables », mais de les soutenir ouvertement et de les adopter.
    La biotechnologie est une bonne chose pour les agriculteurs, c'est une bonne chose pour les consommateurs et c'est bon pour l'environnement, à mon avis. Nous voyons le milieu agricole accepter progressivement ces produits, mais nous avons toujours de la difficulté avec le consommateur. Et j'étais heureux de prendre connaissance des les données que Mike Emes nous a communiquées ce matin.
    J'ai encore quelques points. Il faut que l'industrie participe à l'élaboration de cette réglementation de la biotechnologie, et pas seulement la réglementation elle-même, mais la façon dont nous la présentons. Nous devons encourager l'industrie à installer son infrastructure de transformation au Canada. Nous savons que nous pouvons procéder aux extractions. Nous savons que nous pouvons mettre au point des produits neutraceutiques. Nous devons trouver des façons de véritablement soutenir les gens qui font ces choses.

  (1105)  

    Nous pouvons cultiver les produits. Nous avons un excellent climat, surtout dans le Sud de l'Ontario, où l'on cultive toute une foule de produits. Je crois qu'il y a plus de 200 cultures dans le sud de l'Ontario.
    Comment pouvons-nous encourager les personnes et les entreprises à se lancer dans la transformation et la distribution de ces produits sur les marchés existants? Nous avons déjà les marchés.
    Les politiques sont importantes. Nous avons effectivement besoin de soutenir l'entrepreneur et l'innovation. Les organisations comme la mienne — Erie Innovation and Commercialization — et BioEnterprise, le Vineland Research and Innovation Centre, Soy 20/20 et Ontario Agri-Food Technologies doivent être soutenues, car il s'agit d'entreprises de pointe qui soutiennent l'entrepreneur et font progresser ces choses
    Nous devons élargir le cadre stratégique Cultivons l'avenir. Il importe de poursuivre le partenariat avec le gouvernement de l'Ontario. Nous devons renforcer le volet de la commercialisation. Cela favorisera la réglementation de la biotechnologie. Nous devons élaborer des programmes de gestion du risque pour les espèces qui ne sont pas actuellement cultivées ici — par exemple, un régime d'assurance pour ces cultures énergétiques spéciales que nous ne possédons pas à l'heure actuelle.
    Nous devons également soutenir les cultivateurs. On pourrait le faire par l'intermédiaire du programme des travailleurs étrangers. Actuellement, en Ontario, le salaire minimum a eu une véritable incidence sur la rentabilité et la capacité des gens de subvenir à leurs besoins.
    La dernière chose dont je voulais parler, c'est de l'importance de la convergence intersectorielle. Je siège au conseil d'administration de Life Sciences Ontario. Ce conseil regroupe des représentants de l'industrie agricole, de la bioéconomie et des milieux de la santé animale, de l'agriculture et de l'environnement ainsi que des avocats et des banquiers et ce genre d'intervenants. Nous ne nous intéressons pas seulement à l'alimentation des gens. Les applications en alimentation et en la santé, la bioéconomie, les aspects environnementaux... Les enjeux qui se rattachent à l'agriculture sont les mêmes que dans la plupart des secteurs d'innovation. Nous aimons investir dans la recherche et nous aimons voir nos travaux de recherche, commercialisés ailleurs. Il en est tout simplement ainsi.
    Il est difficile de construire un secteur fondé sur l'innovation s'il n'y a pas de financement pour faire progresser la technologie. Si le travail de recherche est bon, il fera son chemin jusqu'aux États-Unis, mais nous devons le garder ici. Nous ne voulons pas constamment devoir le racheter.
    On a parlé de l'harmonisation de la réglementation. Je conclus...
    Le président: Oui.
    M. John Kelly: Alors, le message de LSO est simple: nous devons travailler ensemble.
    Merci.

  (1110)  

    Merci beaucoup. Transmettez mes salutations à mon bon ami Brian Gilroy.
    Je le ferai.
    M. Rothstein, de l'Unité de Guelph.
    Merci, monsieur le président, et je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à témoigner devant lui.
    J'aimerais seulement décrire brièvement mon cheminement, car cela a une forte incidence sur le genre de travail de recherche que nous faisons. J'ai tout d'abord travaillé à Ciba-Geigy en Caroline du Nord. Il s'agit maintenant d'une filière de Syngenta. Ensuite, je me suis joint au corps enseignant de l'Université de Guelph. J'ai été titulaire d'une chaire de recherche industrielle financée en partie par Pioneer Hi-Bred. Ensuite, j'ai quitté l'université et je suis allé travailler à Pioneer, en Iowa, où j'étais directeur de la recherche pour les métiers de l'agronomie. Ensuite, je suis revenu après l'acquisition de la société par Dupont. Je suis retourné au sein du corps enseignant de l'université.
    Depuis 2003, nous entretenons avec Syngenta un partenariat important, qui se poursuivra pendant au moins quelques années encore, probablement plus. J'aimerais vous signaler que ce genre de collaboration à long terme avec un partenaire de l'industrie est très rare. Une combinaison de facteurs que j'aimerais aborder plus tard est à l'origine de cette longévité.
    Évidemment, nous nous plaisons à penser que c'est en partie grâce à notre compétence, mais c'est aussi en raison de l'accessibilité de l'infrastructure ainsi que d'autres aspects du financement qui nous procurent une certaine souplesse sur le plan de la recherche, ce dont je vais parler dans un instant.
    Les deux questions qu'on m'a posées étaient de savoir si l'industrie a besoin de l'aide du gouvernement pour financer la recherche, le développement et la commercialisation en biotechnologie et comment le gouvernement peut aider. Évidemment, comme je ne dispose que de sept ou huit minutes encore, je vais seulement aborder ces questions du point de vue de mon domaine, à savoir la génétique des plantes de grande culture et la biotechnologie.
    J'aimerais pour les deux prochaines minutes vous résumer l'histoire de la recherche et du développement dans ce secteur. L'essentiel de la capacité des organisations de recherche industrielles était en fait axée sur une seule culture, à savoir le maïs, pour différentes raisons historiques et commerciales. Même ici, elles ne peuvent mener qu'une fraction des travaux de recherche possibles, ce qui ouvre effectivement la porte aux chercheurs du secteur public, qui pourraient participer à certains de ces travaux.
    Au Canada, la recherche du secteur public a apporté une contribution très importante pour tous les aspects de l'amélioration génétique des cultures. Ces dernières années, le développement de produits est devenu de plus en plus difficile. Les technologies destinées à l'amélioration génétique des cultures se sont complexifiées et sont de plus en plus coûteuses. Parallèlement, j'avancerais qu'on a vu dans le secteur public une lente diminution des efforts ainsi qu'une déviation de la R et D vers une diversité de secteurs n'ayant pas de lien avec la production alimentaire. Je pourrai revenir sur ce sujet si vous avez des questions par la suite.
    Ce dont j'aimerais vous parler quelques instants, c'est de l'avenir. Je crois qu'il y a effectivement des occasions fantastiques d'être compétitifs sur la scène internationale dans ce secteur. J'aimerais mettre en lumière certaines de nos forces et certaines des faiblesses sur lesquelles il faudrait travailler pour arriver à nos fins.
    Quelles sont les forces? De façon générale, notre infrastructure est bonne, pour la plupart. Une grande partie a été financée par la FCI, et d'autres programmes ont été financés par le gouvernement fédéral. Nous disposons d'une bonne capacité intellectuelle. Je tenais à le dire.
    L'une des choses très importantes pour moi est le bon financement des subventions de contrepartie visant à stimuler l'interaction entre les entreprises et les universités. C'est un phénomène plutôt propre au Canada, si l'on regarde les autres joueurs sur la scène internationale. Ce que je veux dire, c'est que, si on obtient de l'argent d'une entreprise, on peut obtenir un financement de contrepartie, soit du CRSNG, notre organisme subventionnaire national, soit de l'un des programmes ontariens visant notre secteur.
    Pourquoi est-ce important? Évidemment, il y a deux choses. Premièrement, l'entreprise obtient un meilleur rendement sur son investissement, alors elle est d'autant plus intéressée à investir. Pour le chercheur, cela vous donne en vie de vous consacrer à ce projet particulier, car, lorsque vous obtenez de l'argent d'une société... Je touche beaucoup d'argent de Syngenta, mais je l'utilise pour rémunérer des techniciens afin qu'ils fassent du travail dans le cadre du contrat que nous avons conclu. Ainsi, grâce aux fonds de contrepartie, vous pouvez embaucher des étudiants postdoctoraux et des étudiants de deuxième cycle pour faire le stimulant travail intellectuel que cela suppose. Alors, c'est vraiment un gros point fort.
    Quelles sont les faiblesses? Je ne veux pas trop critique m'attarder sur ces choses, mais il est absolument clair que le financement de la recherche fondamentale dans ce secteur est très faible, et, lorsqu'on fait des comparaisons internationales, c'est tout à fait clair. Cela a des conséquences, mais je ne veux pas trop m'attarder sur ce sujet.
    Ce dont j'aimerais parler un peu plus en profondeur, c'est du fait qu'il n'y a pas de financement systématique, continu et à grande échelle pour les capacités nécessaires dans ce secteur. Je crois que cet aspect est très, très important. Je vais vous donner quelques exemples dans d'autres pays, juste pour illustrer mon propos.

  (1115)  

    Le premier exemple, c'est l'Australie. Au cours des trois dernières années, le pays a financé trois établissements différents — injectant de 20 à 30 millions de dollars pour chacun — en vue d'une activité qui me tient beaucoup à cœur, à savoir l'examen de l'incidence de la génétique des cultures sur différents caractères importants, comme la tolérance à la sécheresse ou le rendement. L'une des personnes que j'ai formées vient de partir pour diriger un de ces établissements, alors j'en connais assez long sur le sujet.
    Il n'y a rien de comparable au pays. Je devrais ajouter que, en plus de financer l'établissement, le pays finance l'exploitation de l'établissement de façon soutenue, ce que nous négligeons parfois de faire.
    L'autre pays... Je sais qu'on a mentionné la Chine à quelques reprises. Nous avons commencé à établir des partenariats importants avec des Chinois. Le pays a beaucoup investi dans l'étude de la génétique des quatre grandes cultures les plus importantes: le maïs, le blé, le riz et le soya. Je dirais que, à certains égards, la capacité de recherche en Chine est parfois inférieure à nos normes, de en proportion, mais la Chine s'améliore constamment et deviendra un concurrent de taille — toutefois, ce à quoi je veux en venir, c'est que nous pouvons aussi collaborer avec elle.
    Et voilà le dernier sujet que je voulais aborder. Ce genre de travail ne se fait pas à un seul endroit, et le financement destiné à la collaboration internationale tend à être médiocre. Encore une fois, je vais citer la Chine comme exemple. Un de mes collègues de travail, M. Yong-Mei Bi, et moi-même sommes allés en Chine à quelques reprises, et nous avons établi ce qui pourrait devenir un vaste partenariat entre l'Académie chinoise des sciences agricoles et l'Université de Guelph. Étrangement, c'est la Chine qui est le pays émergent, et elle a beaucoup d'argent pour envoyer des gens ici. Elle va envoyer une foule d'étudiants de deuxième cycle travailler ici. En revanche, nous avons beaucoup de difficultés à obtenir du financement pour envoyer des étudiants là-bas, ainsi que du personnel et des membres du corps enseignant. Dans un certain sens, c'est un peu embarrassant.
    La dernière chose que je voudrais dire, c'est que, au cours de mes interactions avec Syngenta et des gens d'autres sociétés, j'ai pu constater très clairement que l'industrie est à la recherche de gens pour mettre les mains à la pâte durant les premières étapes de la recherche et du développement. Je suis absolument convaincu que les sociétés qui assumeront ce rôle en retireront une part disproportionnée des retombées, aux chapitre tant de leurs activités agricoles que des débouchés commerciaux qui s'offriront à eux.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Rothstein.
    Passons maintenant à M. Allan Paulson, du Réseau des aliments et des matériaux d'avant-garde.
    Je suis directeur scientifique associé d'AFM Net, réseau national de centres d'excellence. L'administration centrale est ici, à Guelph. Je suis aussi professeur et chercheur à l'Université Dalhousie, à Halifax. Je suis également directeur de l'Institut canadien de la technologie des pêches, établissement de R et D sans but lucratif à l'appui de l'industrie locale dans les Maritimes. J'ai aussi déjà été chercheur scientifique à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Voilà un peu de mes antécédents.
    J'aimerais parler essentiellement de la dichotomie — ou des deux solitudes — entre les difficultés que doit surmonter l'industrie sur le plan de la recherche et celles auxquelles doivent faire face les universités et le gouvernement. Ensuite, je vais expliquer comment nous pouvons unir ces deux secteurs afin d'optimiser les ressources.
    Du côté de l'industrie, les besoins en matière de recherche sont habituellement des besoins très appliqués. Ils sont à court terme et pragmatiques — les gens ont besoin d'une réponse immédiate.
    Prenez l'industrie alimentaire. Habituellement, la marge est basse, et le volume, élevé. Cela signifie que, si vous êtes une petite ou moyenne entreprise, vous avez peu de fonds pour la recherche. Mais même les grandes entreprises ont réduit ou imparti leurs activités de R et D. Alors, il n'y a pas beaucoup d'argent consacré à la recherche dans l'industrie.
    En outre, la propriété intellectuelle doit être claire. Ils ne doivent pas nécessairement détenir la PI, mais ils doivent savoir qui la détient.
    Enfin, la confidentialité est essentielle. C'est habituellement le premier parti qui gagne.
    Je vais parler au nom des chercheurs universitaires, mais cela s'applique presque autant aux chercheurs gouvernementaux. Les chercheurs universitaires doivent gérer des exigences conflictuelles. Ils sont responsables de la recherche et de l'enseignement, il y a la découverte pure comparativement à la recherche appliquée. Lorsque vous êtes chercheur industriel, vous n'avez qu'une priorité. Votre priorité est la recherche pour la compagnie. Lorsque vous êtes chercheur universitaire, vous portez différents chapeaux.
    Quant à l'avancement professionnel, on met habituellement l'accent sur la recherche fondamentale plutôt que sur la recherche appliquée. La recherche coopérative n'est pas autant valorisée lorsqu'il est question de permanence ou de promotion. La recherche universitaire tend à s'étendre sur un horizon temporel plus long. Vous devez avoir un programme de recherche plutôt qu'un projet en tant que tel — des projets dans le cadre d'un programme, mais toujours d'un programme à long terme. L'essentiel de la recherche est menée par des étudiants de deuxième cycle et des étudiants postdoctoraux, alors il y a une composante de formation. On peut difficilement dire à un étudiant de deuxième cycle de travailler sur un projet et de présenter une solution en un mois.
    L'autre chose, c'est que l'accent est mis sur la publication, et non pas le brevet. Pour la permanence et la promotion, on comptabilise les publications, mais les brevets n'ont pas la même valeur, ce qui, à mes yeux, est complètement absurde. Les thèses d'étudiants de deuxième cycle prennent aussi du temps à publier, alors c'est ce modèle « publier ou périr » que l'on impose aux professeurs.
    Enfin, la PI peut poser des problèmes — elle est extrêmement importante dans l'industrie. Beaucoup de chercheurs, voire la plupart d'entre eux, ne s'intéressent pas tant à la PI. Beaucoup d'entre eux ne reconnaîtraient même pas la PI si elle leur tombait dessus. La valeur de la PI n'est pas reconnue. La protection de la PI est extrêmement inégale. La plupart des laboratoires n'ont pas de protocole rigoureux visant à s'assurer que tout est bien documenté dans des cahiers de laboratoire. Du reste, les politiques varient d'une université à l'autre. Si une société fait affaire avec plusieurs université, les règles du jeu ne sont pas toujours les mêmes.
    D'autres difficultés s'ajoutent à tout cela. Le Canada est un pays très vaste. Notre population est très petite. Notre expertise et nos ressources sont dispersées. Notre culture en matière de recherche n'est pas orientée vers la recherche transformationnelle, coopérative. L'industrie alimentaire est fragmentée à l'échelle nationale, et il en va de même pour le milieu de la recherche. Beaucoup d'excellents travaux de recherche sont en cours, mais ils sont dispersés et n'ont aucun lien entre eux.

  (1120)  

    Par conséquent, les deux côtés éprouvent des frustrations. Cela signifie qu'il y a une perte de possibilités. Le Canada est excellent en recherche fondamentale, mais réussit très mal à appliquer et à commercialiser les travaux de recherche.
    Quant aux possibilités, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas très bien réussi à lier l'industrie et les différentes capacités de recherche. Au Réseau des aliments et des matériaux d'avant-garde, organisation de recherche nationale constituée pour relier le milieu universitaire et l'industrie, le gouvernement, les organisations non gouvernementales et les organismes internationaux, on a mis l'infrastructure en place. Nous avons une grande expérience de la constitution d'équipes de recherche destinées à la recherche transformationnelle et à la commercialisation de la recherche ainsi que de la formation d'employés spécialisés qui seront les leaders de demain.
    Le financement du réseau prendra fin le 31 mars de cette année. L'infrastructure en place, l'expertise et l'expérience en place constituent pour nous une occasion de prendre ce cadre et d'en faire un gestionnaire des travaux de recherche qui coordonnerait les sections éparpillées à l'échelle du Canada, dans l'industrie comme dans les universités. Il s'agit d'un portail central pour rassembler l'industrie et les chercheurs, les ONG, etc.
    Je vais m'arrêter ici et répondre à vos questions.

  (1125)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux questions.

[Français]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Le président:A point of order?
    Très brièvement, monsieur le président.
    Le greffier a distribué le document de M. Rowe. Vous connaissez la règle du comité concernant le français et l'anglais, les deux langues officielles. Le document en français est complètement incompréhensible. Je demande donc au greffier de ne pas distribuer un document quand il est comme cela. Il ne s'agit pas seulement de deux ou trois fautes de français. Le document a probablement été traduit à l'aide d'un logiciel et c'est du chinois pour moi. Mes collègues anglophones peuvent donc comprendre la teneur de ce qui leur a été remis, mais pas moi. Je veux rappeler aux témoins qu'ils peuvent faire parvenir leurs documents au greffier dans la langue de leur choix, en anglais ou en français, et qu'ils pourront être traduits. Le document dont je parle, monsieur le président, n'est pas en français.

[Traduction]

    Il va sans dire que mon français n'est pas très bon. J'ai jeté un coup d'œil au document. Il est en français. S'il y a un problème à l'égard de la qualité du français, je vous invite à en parler à...

[Français]

    Ce n'est pas de qualité dont il est question. Le document est fait d'une série de mots en français mis les uns à la suite des autres, mais il est complètement incompréhensible. C'est ce que je veux vous dire. Il faut que ce soit clair.

[Traduction]

    Peut-être que le terme « qualité » n'était pas juste. Encore une fois, je crois que vous avez transmis votre message aux témoins.
    Monsieur Rowe.
    Pour que M. Bellavance le sache, la traduction n'a pas été faite à la machine. C'est l'un de mes employés certifiés en bilinguisme qui s'en est chargé. Mes excuses.
    Cela procédait de bonnes intentions.
    On l'a certainement fait avec de bonnes intentions. Je m'excuse de tout inconvénient...

[Français]

    Je ne veux pas avoir un long débat à ce sujet, mais votre employé...

[Traduction]

    Moi non plus.

[Français]

    Oui, mais la règle est claire. Ce document n'aurait pas dû être distribué, c'est ce que je veux dire, tout simplement. Je ne veux pas entendre parler de bonne foi.

[Traduction]

    Selon le Règlement, le texte doit être dans les deux langues et, à mon avis, à la lumière de ce que j'entends, le français est médiocre. Monsieur Rowe a présenté ses excuses. Je ne sais pas ce que nous pouvons faire d'autre, si ce n'est de tirer une leçon de cet incident.
    Monsieur Valeriote, pour sept minutes.
    Messieurs, tout d'abord, j'aimerais vous remercier d'avoir pris le temps de venir ici aujourd'hui partager vos idées sur les questions en matière de biotechnologie que doit étudier le comité. Bien sûr, intuitivement, nous présumions que les OGM étaient au cœur de la question, mais, de toute évidence, ce n'est pas le cas; ce n'est qu'une partie d'une industrie biotechnologique beaucoup plus vaste.
    John, vous avez vraiment bien fait passer cette idée lorsque vous avez parlé des biocombustibles, de l'environnement, des plastiques et de toutes ces autres choses. Le comité a eu l'occasion de voir la preuve de tout cela cette semaine, pendant son voyage en Alberta et en Saskatchewan.
    Nous avons parlé des OGM plus tôt ce matin, et, maintenant, nous en sommes à parler de la commercialisation. Je suis d'accord — et je crois que c'est quelque chose que nous constatons tous — pour dire que nous réalisons ici de grandes innovations. Nous exportons toutes nos grandes innovations comme nous exportons nos ressources naturelles.
    Nous avons déjà une infrastructure importante destinée à aider la commercialisation, comme AFMNet. Il y a MaRS à Toronto. Nous essayons d'établir un mini-MaRS ici à Guelph. Il y en a un à Ottawa.
    Je me demande si, à votre avis, le gouvernement devrait consacrer plus d'énergie et de ressources, pas seulement des ressources financières, à la création d'un ministère de la commercialisation pour aider les gens à s'adapter, déterminer où se trouve l'infrastructure, la soutenir là où elle existe et peut-être la reproduire là où elle n'existe pas. C'est seulement grâce à un tel effort que, à mon avis, les cerveaux, l'argent et les personnes qui possèdent des compétences entrepreneuriales pourraient réellement se regrouper et empêcher l'exportation de toutes nos merveilleuses innovations.
    Steven, vous avez parlé d'un rapport, que vous n'aviez pas l'intention de citer constamment, au sujet de la médiocrité de notre financement de la recherche fondamentale comparativement à d'autres pays. Vous sembliez avoir des statistiques pour appuyer votre propos. Pourriez-vous les transmettre à notre greffier à un moment ultérieur?
    Je n'ai pas de rapport, mais je pourrais certainement obtenir les statistiques pour vous.

  (1130)  

    Vous pourriez obtenir les statistiques.
    Lorsque nous sommes allés au Collège Olds hier, on nous a dit que nous perdions beaucoup de nos chercheurs. Ils ne restent pas au Canada. Nous pensions le contraire plus tôt, nous pensions que nos chercheurs restaient.
    J'aimerais que vous traitiez de la question de la commercialisation et de ce dont nous avons besoin pour garder nos chercheurs. S'il reste du temps, j'aimerais vous parler plus particulièrement de la perte de financement d'AFMNet.
    Je serais heureux d'en parler.
    Avons-nous besoin d'un ministère de la commercialisation? Je crois que nous obtenons de bien meilleurs résultats lorsque nous confions la commercialisation aux gens qui s'y connaissent vraiment. C'est pourquoi je suis en faveur d'organismes comme BioEnterprise, par exemple. Son mandat est d'aider des organisations sur le plan de la commercialisation. Il a aussi la capacité de travailler avec beaucoup de gens dans le secteur.
    Nous devons trouver des façons de soutenir les personnes expérimentées en commercialisation. Il ne s'agit peut-être pas de créer un autre ministère, mais il ne fait aucun doute que la collaboration avec l'infrastructure actuelle d'Industrie Canada et d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, en particulier — car il s'agit là du mandat de BioEnterprise —, sera très importante.
    Je crains que la création d'un autre ministère ne fasse que donner naissance à une nouvelle organisation qui fait ce qu'on fait déjà, mais pas de façon efficace. Nous savons que, au Canada, la commercialisation est vraiment médiocre. Les études de l'école de commerce de l'Université de Toronto l'ont démontré. J'avance que nous devons financer des organisations qui sont déjà sur le terrain et s'occupent de la commercialisation.
    Quant à la perte de chercheurs, la situation est exactement la même dans le secteur des fruits et légumes, pour une différente raison. Les chercheurs atteignent l'âge de la retraite. Il s'agit là d'un facteur clé pour nous, car nous n'avons pas de plan pour déterminer ce qui se produira. Lorsque Adam Dale et Alan McKeown prendront leur retraite et quitteront la Station de recherche de Simcoe, qui va se charger de la recherche sur les petits fruits et de certains travaux de génomique des petites plantes dont nous avons besoin?
    Steven.
    J'aimerais aborder quelques aspects. Au chapitre de la commercialisation, il y a deux choses que je tiens à dire. En ce qui concerne mon propre secteur de recherche, ce qui importe vraiment, c'est que nous devenions vraiment, vraiment habile à l'égard de choses que nous ne faisons pas assez bien encore afin d'attirer des entreprises et de progresser sur le plan de la commercialisation. Je ne saurais trop insister là-dessus. Vous n'avez qu'à regarder les industries de pointe; Waterloo réussit très bien dans certains domaines, et vous pouvez observer toute la commercialisation qui s'ensuit. Je ne veux pas entrer dans les détails ici, mais je serais heureux de le faire si quelqu'un posait la question.
    L'autre chose, c'est que j'ai travaillé avec de petites entreprises, et, comparativement à nos voisins du sud, nous ne faisons pas un très bon travail pour ce qui est de soutenir les petites entreprises en ce qui concerne la recherche. Je ne saurais trop insister sur l'importance des subventions SBIR — destinées à la recherche pour les petites entreprises — aux États-Unis, comparativement à comment nous faisons les choses ici, ce qui suppose presque toujours des subventions de contrepartie et beaucoup de paperasserie administratives. Là-bas, les gens déposent des demandes de subventions, obtiennent le financement, puis ils commencent. Ici, vous devez obtenir un financement de contrepartie, et un fonctionnaire vient vous voir chaque mois pour vous demander comment vous avez dépensé l'argent. Je crois que c'est très différent.
    Quant au maintien en poste de nos chercheurs ici, de toute évidence, nous éprouvons actuellement des problèmes. Le financement des universités n'est pas en croissance. Cela signifie que nous n'embauchons pas de nouveaux membres du corps enseignant. Nous ne l'avons pas fait depuis quelques années. Nous ne le ferons pas avant trois ou quatre ans. Cette situation n'est pas propre à notre université. Du reste, le genre de débouchés que nous pourrions créer — si nous devenions très bons dans certains domaines et attirions des initiatives commerciales ici — auraient des retombées énormes, à mon avis.
    C'est tout ce que je voulais dire, je crois.
    Si vous permettez, Allan, AFMNet a perdu son financement, puis, peu de temps après, nous avons appris que le CRSNG avait retiré la recherche alimentaire de ses priorités, ce qui a été une grande source de préoccupation pour beaucoup de gens. Certaines personnes m'ont écrit — Maple Leaf, par exemple. Il y a deux jours seulement, Mme Jill Hobbs et M. Mark Wartman de la Saskatchewan m'ont fait part de leurs graves inquiétudes à propos d'AFMNet.
    Pouvez-vous me dire ce qu'il faut faire? Si le CRSNG ne veut pas vous financer, alors que vous en avez besoin, dites-nous pourquoi vous en avez besoin, quel est l'intérêt et ce que nous pourrions faire pour vous aider.

  (1135)  

    Actuellement, AFMNet est une entité qui fait office à la fois de facilitateur, de formateur de personnes hautement qualifiées et d'organisme subventionnaire. À mes yeux, le rôle le plus important d'AFMNet est non pas nécessairement celui d'organisme subventionnaire — même si c'est quelque chose d'extrêmement important, vu le retrait du financement du CRSNG —, mais il doit pouvoir faciliter le regroupement de chercheurs, combler l'écart — cette vallée de la mort — qui sépare le travail en laboratoire et le fait de prendre un produit et de le commercialiser...
    Pour moi, la plus grande perte est la formation du PHQ, la formation des étudiants, des techniciens et des étudiants postdoctoraux pour qu'ils deviennent des entrepreneurs. Nous avons un solide programme de formation multidisciplinaire et multisectoriel. Quatre-vingts pour cent du financement de la recherche d'AFMNet sont destinés aux étudiants de deuxième cycle, aux étudiants de premier cycle et aux étudiants postdoctoraux, etc. Nous leur offrons une formation beaucoup plus diversifiée, variée, que ce que n'importe quel autre étudiant de deuxième cycle pourrait obtenir. Cette possibilité sera perdue.
    Il y a deux semaines, nous avons tenu un séminaire sur le perfectionnement professionnel, ce que nous faisons annuellement, et, comme d'habitude, nous avons reçu des commentaires élogieux. Nous avons invité des entrepreneurs. Nous avions des gens qui nous demandaient essentiellement comment préparer un curriculum vitae. Ce sont des choses comme ça que ces étudiants n'obtiendraient pas s'ils restaient cloués à un banc de laboratoire, et on va s'en débarrasser. Alors, il doit y avoir une façon de continuer.
    Merci.
    Monsieur Hoback, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, messieurs, d'être venus ici ce matin. Il est fantastique d'entendre des gens dans qui sont sur le terrain, et c'est toujours un plaisir de sortir d'Ottawa, même pour aller à Guelph. C'est fantastique.
    Je crois que je vais poursuivre sur la même voie que Frank, sur ce que l'Université de Saskatchewan a appelé « la vallée de la mort ». Son interprétation de la vallée de la mort était la suivante: lorsque vous avez une idée et que vous pouvez effectivement la mettre au point jusqu'à un certain degré, alors vous arrivez dans la vallée de la mort lorsque vous voulez la commercialiser.
    John, avez-vous des idées sur la façon de jeter un pont au-dessus de la vallée de la mort?
    Ce phénomène survient lorsqu'une personne a une validation de principe. Elle sait que ça fonctionne, mais elle n'arrive pas à passe à l'étape de la fabrication. Habituellement, une personne profite d'un financement de l'université et du gouvernement pour atteindre l'étape de la validation de principe, puis il faut essayer de trouver du financement sur le marché des capitaux privés, le marché des investisseurs providentiels ou le marché du capital-risque.
    En agriculture, les bailleurs de fonds sont rares. Il y a des gens qui sont prêts à prendre une entreprise, à condition qu'elle enregistre des recettes de deux millions de dollars, et l'aideront à grandir. Mais, habituellement, nous n'avons pas d'investisseurs pour cette vallée de la mort.
    L'une des choses que pourrait faire le gouvernement, c'est d'établir un fonds de subventions de contrepartie pour appuyer ce genre de choses, réduire le risque de certaines technologies en développement.
    Beaucoup de technologies ne possèdent pas les caractéristiques qui attirent les investisseurs en capital-risque, parce que ceux-ci cherchent à faire un coup de circuit. Beaucoup de technologies dans le secteur agricole seront profitables, mais il ne s'agit pas de coups de circuit. C'est une autre partie de notre travail.
    L'entreprise de Will a prospéré grâce au soutien de l'université et du programme SBIR, formule que nous devrions songer à adopter.
    Lorsqu'on regarde l'infrastructure du secteur de la biotechnologie, l'un des commentaires que nous avons entendus à Saskatoon, c'est que nous pouvons développer les données, mettre au point le produit, mais, pour une raison donnée, nous exportons toujours la fabrication.
    Savez-vous comment nous pourrions renverser cette tendance pour que la fabrication se fasse ici aussi, afin d'établir un système intégral ici au Canada plutôt que d'exporter la fabrication aux États-Unis ou ailleurs?

  (1140)  

    C'est en partie une question d'argent et de la capacité de financer les activités à partir de l'étape de la vallée de la mort. Je sais qu'Agriculture et Agroalimentaire Canada a tenté de convaincre des Canadiens de risquer un investissement dans ce domaine. Cela n'a pas fonctionné. J'ignore pourquoi on ne réussit pas à trouver des investisseurs, mais je sais qu'on a pu en trouver facilement aux États-Unis.
    Ce que nous devons faire, entre autres, c'est de faciliter les choses, et il faut mettre en place des incitatifs pour que les investisseurs soient portés à envisager ces technologies dès les premières étapes.
    L'autre chose, c'est que nous devons sensibiliser le secteur de l'investissement à la nature des possibilités. Ils connaissent le modèle de l'agriculteur, et ils connaissent le modèle de la TI. La plupart du temps, lorsque je parle à des Ontariens et que je leur demande quel est le secteur le plus important en Ontario, ils répondent que c'est le secteur automobile, le secteur des TI ou le secteur pharmaceutique. Je dois leur dire qu'ils se trompent — c'est l'agriculture au premier rang, puis les trois autres. La plupart des gens l'ignorent.
    En ce qui concerne l'infrastructure du secteur de la biotechnologie, c'est bien de voir que la conversation n'a pas pris la direction des OGM. Lorsque nous faisons cette étude, on se dirige automatiquement vers les OGM. La bioscience, c'est beaucoup plus que les OGM.
    Que devons-nous faire pour construire l'infrastructure nécessaire qui fera du Canada un joueur important dans le secteur de la bioscience et de la biotechnologie?
    Nous avons parlé de ce qui se produit en Chine et en Australie, les investissements consentis là-bas. Devrions-nous songer à recourir davantage à la contribution des agriculteurs? Devrions-nous envisager d'autres idées comme ça?
    Je vais seulement parler de mon secteur, car c'est une question très vaste. Dans mon domaine, ce qui est essentiel que les gens comprennent, c'est l'incidence des différentes approches génétiques — qu'il s'agisse d'OGM ou non — sur l'aspect de la plante, sur caractères. C'est ce qui est vraiment difficile à faire, et il ne fait aucun doute que les sociétés cherchent le plus possible à se défaire de la tâche consistant à faire comprendre cela.
    Par exemple, si nous devenons vraiment bons et que nous établissons une organisation importante pour le faire, alors, tout à coup, toutes les activités de ce secteur finiront par se retrouver entre vos mains. Par exemple, j'étudie les caractères agronomiques — essentiellement le rendement et l'incidence de différents stress sur le rendement. Mais, ce n'est pas seulement ça. Je pourrais étudier la façon d'utiliser des plantes pour obtenir d'autres types de caractères ou comment les utiliser pour produire un combustible. Il faut établir un système et devenir vraiment habile à l'égard d'une activité de base, en arriver à un système qui permet aux gens d'arriver avec une idée quelconque, qu'ils viennent du secteur public ou du secteur privé.
    Je crois qu'il y a un débouché ici. Personne au monde ne le fait dans la mesure nécessaire pour inciter les organisations de recherche de sociétés à impartir ce travail. C'est seulement un exemple.
    Je suis né à Kitchener-Waterloo et j'y ai grandi. Je suis un diplômé de l'Université de Waterloo. Je me souviens du temps où la rue Phillip n'était qu'un champ agricole. En une période de cinq à dix ans, l'Université de Waterloo s'est autoproclamée le MIT du Canada. Dès lors, RIM, Sybase, Open Text, MKS et Virtek — je pourrais en nommer encore bien d'autres — ont pris leur envol. Beaucoup d'argent a été injecté, et maintenant, on voit le capital investi porter fruit.
    De ce point de vue, je crois que, si vous voulez bien faire les choses, et je reviens essentiellement au propos de ces messieurs, nous — c'est-à-dire l'industrie, le milieu universitaire et tous les ordres de gouvernement — devons nous affirmer et structurer tout ça. Nous devons dire que nous allons investir beaucoup d'argent dans ce secteur et qu'il s'agit de la voie vers la commercialisation, du début à la fin, qui permet de passer de l'idée au produit. Il faut mobiliser tous les intervenants et établir un processus qui respecte certaines normes. Ensuite, on assistera à la naissance d'un réseau qui multipliera les occasions commerciales.
    Dans une autre vie, j'ai travaillé à l'Université de Guelph dans le secteur de la vente — disons — de contrats de R et D pour la science et le génie au secteur privé. Il m'est souvent arrivé de constater que les enseignants en sciences et en génie ignoraient qu'ils avaient un produit entre les mains alors que cela ne faisait absolument aucun doute. Bien souvent — pas toujours, bien sûr —, ils sont programmés pour toujours poursuivre la même chose, encore et encore, toujours les mêmes concepts, et publier, publier, publier.
    Mais, ce faisant, pendant qu'ils tournent en rond, en quelque sorte, dans leur quête du savoir, ils donnent naissance à toutes sortes de concepts, d'idées et de produits et, bien souvent, ils ignorent qu'ils pourraient tout simplement présenter leur produit, qu'il vaut la peine de le commercialiser. Il y a toujours une possibilité d'introduire un produit de prochaine génération ou une version B ou un produit amélioré trois ou quatre ans plus tard, lorsque vous aurez répondu à la prochaine question qui ressort de votre démarche intellectuelle.
    Bien souvent, d'excellentes technologies ou les fondements d'un excellent produit reposent sur des étagères d'universités partout au pays. Ce travail ne sera jamais mis au grand jour. Il n'entrera pas dans la filière de la commercialisation qui permet à quelqu'un de franchir les étapes. Force est de reconnaître, en effet, que de nombreux enseignants dans les domaines de la science et du génie ne sont pas programmés comme ça ni motivés ou encouragés à aller dans cette direction. Ils ne s'arrêtent pas à l'aspect de la commercialisation et ne le comprennent pas. Ils ont effectivement besoin d'aide. Beaucoup d'entre eux l'admettront volontiers; ce n'est pas quelque chose qui leur fait honte. Ils savent qu'ils ont besoin d'aide et, bien souvent, ils ne savent tout simplement pas vers qui se tourner.
    Si cela était plus évident et s'il existait des centres de commercialisation mieux structurés et mieux financés... Je préfère que l'on regroupe nos forces en deux ou trois centres plutôt que de financer toutes sortes de choses à moitié, car, à mon avis, c'est une meilleure approche pour obtenir des résultats tangibles.

  (1145)  

    Merci.
    Il restera peut-être du temps à la fin, Randy, si vous voulez ajouter quelque chose.
    Monsieur Easter, pour cinq minutes.
    Merci, messieurs.
    Je vais partir d'un point de vue général, puis m'attacher à certains des secteurs qui devront peut-être faire l'objet de recommandations.
    John, vous avez parlé de l'élaboration de programmes de gestion du risque pour les cultures énergétiques. Nous éprouvons des problèmes à l'égard des programmes actuels de gestion du risque, particulièrement dans le domaine de l'agriculture. Avancez-vous qu'il faut prévoir pour les cultures énergétiques quelque chose de différent de ce qu'on applique à l'agriculture en général?
    Non. Vous parlez des cultures qui n'ont jamais été utilisées en pratique, n'est-ce pas?
    L'hon. Wayne Easter: D'accord.
    M. John Kelly: Vous pouvez choisir la culture énergétique. Le miscanthus n'est pas une plante indigène. Comment pouvons-nous gérer le risque lié au délai nécessaire pour que les cultivateurs puissent intégrer le miscanthus?
    D'accord. Je comprends. Je suis tout à fait d'accord avec vous. C'est quelque chose que nous devons... Nous avons vu cette situation à Saskatoon.
    L'autre question qu'ont soulevée quelques personnes se rattache à la perte de chercheurs. Nous avons le même problème. Vous avez mentionné les chercheurs dans le domaine des petits fruits. Il y a le même problème en Colombie-Britannique. Nous éprouvons le même problème dans le Canada atlantique. Les chercheurs d'Agriculture Canada partent à la retraite, et personne ne les remplace. C'est un grave problème.
    Une des choses qu'on recommande, peut-être davantage dans la région de Saskatoon, c'est de renforcer notre initiative de recherche publique dans le domaine de la recherche fondamentale, car je crois que les temps ont changé. Je crains que les sociétés privées n'attirent la crème des chercheurs du fait qu'elles paient mieux. Les incitatifs sont là.
    Il sera difficile de revenir à un système où nous attirons la crème dans le secteur de la recherche publique, dans le domaine de la recherche fondamentale. Avancez-vous que nous devons redoubler d'effort, j'imagine, au chapitre de la participation du gouvernement du Canada à la recherche publique?
    Si je comprends bien, vous faites allusion à deux choses. Premièrement, il y a le fait qu'on ne remplace pas les chercheurs clés, et cela arrive à la fois au gouvernement et dans les universités. Je vais parler du contexte universitaire, car c'est ce que je connais.
    Au cours de mes 10 premières années à Guelph, de 1988 à 1998, nous n'avons pas fait de recrutement. Ensuite, pendant une brève période, nous avons recruté quelques personnes, et maintenant, encore une fois,nous ne le faisons plus. Cela a donné lieu à un problème énorme sur le plan de l'innovation à l'échelle du pays. Nous ne sommes pas les seuls. Je n'ai pas de solution à ce problème, parce que le coeur de la question est d'ordre financier, de toute évidence.
    Quant à savoir si c'est une bonne chose, je ferais valoir que ce n'est pas une bonne chose du tout.

  (1150)  

    Je ne veux pas vous interrompre, Steven, mais, pour ce qui est des finances, les données que nous avons — Statistique Canada, de la Fondation canadienne pour l'innovation, de tout le monde — révèlent sans équivoque que chaque dollar investi dans la recherche offre un meilleur rendement qu'un dollar investi dans n'importe quel autre domaine.
    Larry va me couper la parole dans une minute, mais je veux seulement ajouter deux autres questions auxquelles, à mon avis, nous avons besoin d'une réponse. Peut-être que vous pourriez répondre tous les deux.
    Steven, vous avez parlé de la difficulté liées aux demandes de subvention, tous ces fonctionnaires qui vous suivent partout. Je crois que nous sommes à une époque où nous permettons essentiellement aux exigences de la perfection de faire obstacle à la bonne façon de procéder. Les gouvernements ont si peur de faire la une parce qu'ils ont dépensé 10 $ au mauvais endroit qu'ils sont prêts à en dépenser 1 000 $ sur des freins administratifs. Pour moi, c'est tout à fait absurde. J'aimerais que vous en parliez plus.
    Ce que j'entends des chercheurs dans ma région, c'est qu'ils consacrent 40 p. 100 de leur temps à courir après l'argent, alors qu'ils devraient consacrer leur précieux temps à faire ce pourquoi ils ont été formés et instruits, bref, à leur domaine d'expertise. C'est ça, le problème.
    Ma deuxième question est pour M. Rowe.
    Vous avez parlé de la conception des essais. Je me disais que, si l'essai n'est pas bien mené ou que l'on ne réussit pas à avoir les gens qu'il faut — ou pour toute autre raison —, nous perdons en fait l'investissement initial qui avait été injecté dans le secteur de la recherche.
    Pourriez-vous répondre à ces questions?
    Quel était le dernier volet de votre question?
    Vous avez parlé du fait que vous n'avez pas la quantité de gens nécessaires pour faire les essais appropriés. Je constate que nous perdons les étapes initiales de la mise au point du produit, ou l'avantage de la diffusion de ces connaissances grâce à l'analyse de bases de données. De fait, nous perdons une bonne partie de l'investissement initial consenti pour cette recherche.
    Cela revient vraiment au type d'extrants que vous recherchez. Si vous voulez financer des travaux de recherche expérimentale très loin de la commercialisation, qui ne visent pas à valider une allégation relative aux effets sur la santé, alors peut-être que l'investissement offrait un meilleur rendement.
    Toutefois, si vos extrants concernent une allégation relative aux effets sur la santé, ce que beaucoup d'entreprises du secteur des aliments et des boissons et même de groupes de cultivateurs recherchent, au bout du compte, pour leur secteur, car cela leur donne un avantage commercial au pays et à étranger, alors ces essais n'ont pas été conçus correctement.
    Je ne dis pas que ces essais sont de « mauvais essais », mais, si le but est de justifier une allégation relative aux effets sur la santé, telle que définie par Santé Canada, la FDA, l'USDA ou l'UE, alors ils ne sont pas conformes à la norme minimale — voilà où je veux en venir. Cela dépend vraiment des extrants.
    J'ai un autre bref commentaire sur le financement, qu'on n'a pas abordé aujourd'hui. Le crédit d'impôt pour la RS et le DE, la recherche scientifique et le développement expérimental, existe depuis des dizaines d'années, peu importe le parti au pouvoir à Ottawa. Il existe depuis assez longtemps et augmente chaque année. Pour ma société, il a été un outil phénoménal. Le fardeau de la preuve est beaucoup moins lourd comparativement à une demande de subvention du CRSNG ou du PARI. Je profite d'un immense avantage concurrentiel par rapport à, disons, l'Université de Guelph lorsque j'embauche des chercheurs, grâce au crédit d'impôt pour la RS et le DE. C'est de notoriété publique. Il n'y a pas de secret là.
    Quant au programme de RS et de DE, le gouvernement fédéral a fait un travail fantastique pour le secteur privé, que vous soyez un fournisseur de services comme nous, une société de recherche ou une société qui possède un service de recherche, comme Syngenta, lorsque vient le temps d'établir un programme qui vous permet de subventionner des salaires grâce à ce crédit d'impôt.

  (1155)  

    Monsieur Rothstein, brièvement.
    Je me ferai très bref.
    Je suis d'accord avec John quant au crédit d'impôt, soit dit en passant.
    Pour ce qui est de la lourdeur de l'administration, j'ai effectivement un certain nombre de subventions et de contrats. Chaque année, habituellement, je dois rédiger de neuf à 14 rapports pour respecter différentes obligations, et j'ai dû embaucher une personne à cette fin. Je ne peux pas le faire moi-même. C'est notre lot, maintenant, avec les vérifications et tout cela.
    Vous avez posé une question au sujet des demandes de subventions. Je considère que c'est mon travail, afin d'obtenir de l'argent pour mon groupe. Je consacre beaucoup de temps à cette activité. C'est inévitable à mes yeux.
    Monsieur Shipley.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.
    Bill, vous avez soulevé un aspect notoire. Par exemple, l'Université de Waterloo et son histoire de MIT du Canada. Elle allait se faire la championne. C'est à se moment-là qu'ils ont pris cette décision. Ensuite, il semble que le secteur privé vous ait signifié son appui, et proposé des choses.
    Je suis certain que c'était beaucoup plus compliqué que cela. Qui a pris cette décision, et comment un établissement d'enseignement a-t-il pu prendre cette décision? L'initiative venait-elle seulement d'elle? L'université a pris cette décision et a déclaré qu'elle allait procéder ainsi pour attirer des partenaires, qu'elle allait procéder ainsi pour faire de la recherche et qu'elle allait procéder ainsi pour allier les deux...
    Je vais parler un peu de vos commentaires, Allan, sur l'industrie et les universités.
    Waterloo s'est toujours distinguée dans le domaine du génie et de l'informatique. Elle a contribué à la croissance de ces secteurs, tant sur le plan de la recherche que sur le plan technique.
    Il faut vraiment remonter à M. Hagey, l'un des premiers intervenants. Lorsque ces gens se sont regroupés, ils ont déployé un effort concerté et ont déclaré qu'ils appartenaient à cette catégorie, ils avaient l'intention de mener le peloton. À ce moment-là, ils étaient aussi les pionniers du modèle co-op, qu'adoptent maintenant bien des universités — à peu près toutes — ainsi que les collèges communautaires.
    Je crois que l'opportunité de la décision et un peu de chance sont entrés en jeu, mais, à un moment donné, l'administration de l'Université de Waterloo a déclaré qu'elle allait se lancée dans la mêlée. Elle allait s'affirmer et s'assumer. Elle allait suivre cette voie.
    Et elle est encore sur cette voie. Cette décision a probablement été prise vers la fin des années 1960, au début des années 1970. Je crois que le président de l'époque à Waterloo, Burt Matthews, a été un moteur important dans cette affaire, tout comme l'ont été ses successeurs. Le dernier président, David Johnson, a aussi joué un rôle.
    Steven, pour ce qui est de l'Université de Guelph, peut-être que l'agriculture et la biotechnologie ne sont pas des domaines aussi attrayants que le MIT de Waterloo... Je l'ignore.
    Pour ce qui est de pouvoir aller de l'avant, est-ce une décision délibérée? L'Université de Guelph est-elle reconnue à l'échelle du Canada comme étant spécialisée en agriculture? Est-ce quelque chose d'atteignable, êtes-vous à un tournant décisif? Cela va...
    Nous avons discuté plus tôt avec les témoins du fait que cette industrie représente la plus grande valeur pour notre économie, à vrai dire, pas seulement en Ontario, mais partout au Canada.
    Vous allez saisir cette chose et vous affirmer en tant qu'université à suivre, pas juste en Ontario, mais aussi à Saskatoon ou je ne sais où. C'est ce que vous allez faire. Vous serez les champions.
    Pensez-vous qu'une telle chose puisse être viable un jour? J'entends Allan parler de l'industrie et des universités: la première veut la commercialisation et l'autre s'intéresse aux programmes. C'est incohérent.
    J'aimerais connaître vos commentaires — à vous deux — sur cette question. Je crois que quelqu'un doit se faire le champion du secteur et, alors, quel sera le rôle du gouvernement?
     Vous me mettez sur la sellette avec cette question. Vous me demandez si l'université devrait ou pourrait se déclarer comme le futur champion?
    Je crois que cela revient à ce que disait Bill tout à l'heure; c'est une décision que l'on peut prendre. Vous pouvez affecter vos ressources à cette fin. Vous pouvez affecter vos efforts intellectuels à cette fin.
    Malheureusement — et les choses sont tout simplement ainsi —, tout cela s'est dilué un peu au cours des dernières années, en partie parce que les étudiants sont moins nombreux en agriculture, ce qui explique en partie la situation. Les modèles de financement ne fonctionnent pas exactement de la même façon qu'avant.
    Si vous me demandez si on devrait le faire, je crois que oui, certainement. Je crois qu'on devrait le faire ici. Je crois qu'on pourrait aussi le faire à Saskatoon. Il existe peut-être d'autres universités où on devrait le faire.
    Je crois que cela prend du leadership et du financement. Je ne sais quoi dire d'autre à ce sujet.

  (1200)  

    Je suis d'accord avec vous pour dire, sans aucun doute, qu'on devrait le faire. Les taux d'inscription aux programmes d'agriculture sont à la baisse partout au pays, mais, selon moi, c'est parce que les étudiants potentiels ne considèrent pas ce domaine attrayant. Ils croient qu'il n'y est question que d'agriculture, alors que l'industrie de l'agroalimentaire aujourd'hui va beaucoup plus loin que l'activité agricole.
    Si, d'une façon ou d'une autre, l'alimentation, l'agriculture et l'agroalimentaire se retrouvaient sur la liste nationale des priorités en matière de recherche, je crois que cela attirerait de nouveaux chercheurs, du financement et de nouvelles entreprises dans le secteur.
    Est-ce que l'histoire de « MIT du Canada » était déjà, en quelque sorte, dans la liste des priorités du gouvernement? Croyez-vous que cela a contribué à ce qu'on fasse cela à Waterloo? Ou s'agissait-il simplement de dire: « Voilà l'initiative que nous avons prise, et nous devons trouver une source d'investissement autre que les deniers publics ou l'argent des contribuables »?
    J'essaie de comprendre comment procéder. Je ne veux pas blâmer personne, car cela doit tout simplement arriver. Il y a moins de gens dans le domaine de l'agriculture. Notre industrie est vaste, ce qui signifie qu'elle se spécialise. Les intervenants du milieu sont des gens d'affaires fantastiques. Ils sont des innovateurs fantastiques. Ils adaptent la recherche à leurs besoins, pas à ceux de quelqu'un d'autre. Cela va aussi pour l'innovation.
    J'essaie de comprendre comment aller dans cette direction et ce que nous pouvons faire pour aider. Je suis ouvert.
    John, vous avez l'air de vouloir dire quelque chose.
    Oui. Je trouve intéressant que tout le monde parle de Saskatoon et de Guelph. À vrai dire, vous parlez du développement de grappes d'entreprises.
    La grappe d'entreprises de Saskatoon a vu le jour il y a environ 30 ans, dans un cadre bien défini par le gouvernement de la Saskatchewan. On a dit: « Nous allons devenir le chef de file mondial de biotechnologie agricole. » C'est le titre qu'ils convoitaient.
    Cette grappe d'entreprises a été financée. Alors, si vous regardez toutes les sociétés autour de l'Université de la Saskatchewan à Saskatoon, vous verrez qu'il y en a une multitude.
    Si vous regardez ce qui s'est produit à Guelph, il s'agit également d'une grappe d'entreprises agricoles. Sa gestation a été un peu différente, plus naturelle — mais le plus grand facteur qui a contribué au regroupement, c'est la présence dans la localité du ministère provincial de l'Agriculture. Si vous regardez de l'autre côté de la rue, dans le parc scientifique, vous verrez Syngenta, Monsanto, Elanco, Bayer, l'Institut canadien de la santé animale et les Grain Farmers of Ontario. Ils sont tous là. Je me souviens, il y a 12 ans, d'avoir traversé un champ de soya où ils se trouvent aujourd'hui. C'est une grappe qui est apparue naturellement.
    Que peut faire le gouvernement? Il peut aider à établir des installations à un endroit particulier et de fournir l'infrastructure, puis les choses se formeront autour. Selon la théorie des grappes, les concurrents s'établiront les uns à côté des autres, car ils comprennent que c'est important. La même chose est arrivée à Waterloo.
    Merci. Il semble que nous n'arrivons jamais à...
    Me permettez-vous de répondre à quelque chose que m'a demandé Bev? Je crois que je peux donner des renseignements en réponse à sa question au sujet de la façon dont de Guelph va se décrire.
    D'accord, allez-y, brièvement.
    En fait, le maire a constitué un groupe de travail il y a plus d'un an, ce qui a permis de réunir un certain nombre de personnes, dont le député provincial, le député fédéral — moi — et M. Kevin Hall, vice-recteur à la recherche à l'Université de Guelph. On essaie actuellement de déterminer si nous allons nous déclarer le centre canadien d'agrotechnologie, de biotechnique, de la technologie de l'environnement et de la technologie de l'alimentation.

  (1205)  

    C'est bien.
    Messieurs, merci beaucoup. Il n'y a jamais assez de temps, et le nôtre est écoulé.
    Nous apprécions beaucoup votre participation ici aujourd'hui. Si vous jugez qu'il serait indiqué de nous signaler une précision, veuillez transmettre l'information au comité. Elle sera traduite dans les deux langues officielles, et nous en prendrons connaissance.
    Puis-je apporter un commentaire? Je n'ai jamais eu la possibilité de le mentionner. J'en ai seulement pour quelques secondes.
    Oui, certainement.
    Au sujet du commentaire de Bill touchant les essais cliniques, à vrai dire, AFMNet finance un poste de coordonnateur pour un établissement d'essais cliniques multiservices conçu pour faire exactement ce dont vous parliez. À l'heure actuelle, il est composé — si je ne m'abuse — de quatre établissements. Les protocoles sont exactement les mêmes. La coordination se fait à partir de l'Université Laval, et c'est une autre chose que nous allons perdre.
    Merci beaucoup.
    Encore une fois, merci, messieurs.
    La séance est levée.
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