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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 052 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er mars 2011

[Enregistrement électronique]

  (1135)  

[Traduction]

    Je tiens à m'excuser auprès de nos témoins pour le retard, mais ce sont des choses qui arrivent.
    Accueillons sans plus tarder M. Fabijanski. Monsieur, vous disposez de dix minutes pour faire votre exposé.
    Allez-y, monsieur Easter.
    Monsieur le président, je ne veux pas prendre trop de temps, mais je sais que nous avons déjà organisé les séances de jeudi et mardi prochains. Nous en avons discuté entre nous, et plusieurs de nos motions attendent d'être débattues. Certaines d'entre elles sont cruciales dans le contexte actuel. Je propose donc que le comité de direction se réunisse afin de trouver un moment où nous pourrions siéger en dehors de notre horaire normal ou de réserver la séance du jeudi de la semaine suivante à l'étude de ces motions.
    Je pense que la séance de mardi prochain sera consacrée à l'examen d'un de nos rapports d'études. Je propose le jeudi de la semaine suivante, mais si le comité de direction préfère se réunir pour convenir d'une autre date, je n'ai pas d'objection. Tout ce qui importe, c'est que nous puissions considérer quelques-unes de ces motions.
    D'accord, je vais en discuter avec les vice-présidents tout à l'heure, et nous vous reviendrons là-dessus.
    Monsieur Fabijanski, la parole est à vous pour un maximum de dix minutes.
    Je vous remercie pour cette occasion de témoigner devant votre comité.
    Je suis ici aujourd'hui pour faire valoir le point de vue de l'industrie sur le rôle actuel et futur de la biotechnologie dans l'agriculture. Je pense que nous savons tous que la bioéconomie, une économie qui repose sur l'utilisation d'organismes biologiques, est une importante composante de l'économie canadienne qui soutient actuellement plus d'un million d'emplois au Canada.
    L'agriculture est un élément clé de cette bioéconomie, en ce sens qu'elle nous approvisionne en nourriture. Nous pouvons aussi compter sur l'agriculture pour fournir à notre pays de l'énergie, des nouveaux matériaux de fabrication et des solutions environnementales. D'ailleurs, on sait que notre société, qui est une économie fondée sur le pétrole, réclame la mise au point de technologies propres pour contrecarrer la dépendance au pétrole.
    Nous estimons que l'agriculture, et en particulier le rôle que joue la biotechnologie dans le renforcement du secteur agricole, peut non seulement offrir des solutions durables à des problèmes environnementaux, mais aussi fournir de la nourriture et de l'énergie aux marchés nationaux et internationaux.
    J'imagine que la plupart d'entre vous savez que l'agriculture est la première technologie propre. Nous arrivons à capter l'énergie solaire et à la convertir en matériaux vendus sur le marché. Nous avons là une occasion en or d'exploiter nos richesses naturelles en vue de développer une série de produits qui profiteront énormément au Canada.
    Vous savez sans aucun doute que le Canada a un système agricole enviable reconnu à l'échelle mondiale. Il est doté d'un cadre de réglementation rigide ainsi que de bonnes capacités de production et de ségrégation. En effet, les producteurs canadiens ont pu utiliser ce système pour créer des marchés et des produits innovateurs. Cependant, comme tous les gens du secteur en conviendront, les pressions seront de plus en plus fortes pour développer des produits qui se démarqueront de la production des concurrents internationaux.
    Les producteurs agricoles peuvent diversifier leurs sources de revenus, notamment en utilisant différentes techniques de production et en offrant différents produits. Le Canada a une grande capacité d'innovation et met à profit son processus d'innovation pour développer ces produits et réaliser des économies durables. C'est donc dans cette perspective que notre entreprise fait preuve d'innovation pour développer de nouveaux produits destinés au marché agricole.
    Agrisoma est une entreprise canadienne qui bénéficie de la chaîne d'innovation. Jusqu'à maintenant, nous avons reçu beaucoup de subventions de la part du gouvernement. Nous avons établi des partenariats avec le Conseil national de recherches du Canada, le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et des groupes de producteurs comme la Saskatchewan Mustard Development Commission. Au cours des dix dernières années, nous nous sommes employés à rassembler divers éléments de cette chaîne d'innovation dans le but de développer des produits uniques.
    Que faisons-nous? Notre entreprise crée une culture non alimentaire améliorée qui permettra d'accroître la production d'oléagineux à des fins industrielles. Notre produit vise avant tout à préserver la production des aliments et à cibler les terres peu productives afin d'y faire pousser cette variété dont bon nombre de ses applications pourraient remplacer les huiles industrielles dérivées du pétrole.
    Nous sommes un exemple des nombreuses petites et moyennes entreprises qui se sont établies au Canada. Nous sommes parmi les entreprises canadiennes les moins connues, même si nous sommes établis depuis 2001. Nous avons 15 employés. Jusqu'à présent, nous avons investi 10 millions de dollars, sur une plateforme technologique de 65 millions de dollars, dans le développement de nos produits. Nous envisageons de mettre nos produits sur le marché d'ici les deux prochaines années. Je crois que nous sommes la plus grande entreprise de biotechnologie agricole possédée en propriété exclusive au Canada.
    Nous avons reçu l'appui d'organisations comme le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, le CNRC et Technologies du développement durable du Canada, qui ont tous reconnu l'importance de nos travaux et trouvé des façons créatives de nous soutenir à l'avenir.
    Même si nous misons principalement sur la biotechnologie, ce qui compte le plus pour nous, c'est le développement de produits favorables pour l'économie agricole.

  (1140)  

    Par conséquent, notre travail procure des avantages aux agriculteurs. Nous leur fournirons des produits qui leur permettront de diversifier leurs sources de revenus et d'optimiser l'utilisation de leurs ressources. Nous offrirons aux cultivateurs et aux usines de transformation des produits à valeur ajoutée, ce qui aura pour effet de stimuler l'économie rurale. Sur le plan environnemental, nous souhaitons créer des produits susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de favoriser une agriculture durable, et nous comptons faire du Canada non seulement l'un des plus importants fournisseurs d'énergie pétrolière au monde, mais aussi l'un des plus grands producteurs de bioénergie.
    Notre entreprise mise sur les nouveaux marchés et sur la technologie pour offrir des produits innovateurs aux agriculteurs canadiens; en revanche, certaines initiatives sont essentielles au chapitre des politiques pour nous permettre de réussir.
    Toutes les petites entreprises canadiennes se heurtent au même problème: le manque d'accès aux capitaux. Nous sommes désavantagés par rapport aux industries pétrolière, minière et gazière en raison du peu d'actions accréditives qui financent l'industrie. Contrairement à ces secteurs énergétiques, nous avons beaucoup de mal à attirer des investissements privés.
    Par exemple, Technologies du développement durable du Canada est une organisation qui nous a été d'une grande aide. Elle a établi un processus exhaustif de diligence raisonnable et des critères d'investissement qui nous obligent à analyser les produits et les marchés d'un oeil très critique. Par conséquent, nous avons pu compter sur son financement renouvelable pour effectuer nos propres investissements en vue de mettre nos produits plus rapidement sur le marché. Grâce à des organisations comme TDDC, nous avons pu mobiliser des capitaux additionnels.
    Cependant, nous avons beau avoir les capitaux et les ressources nécessaires pour commercialiser un produit, encore faut-il que nous ayons en place des politiques efficaces en matière de réglementation. Au Canada, les produits agricoles doivent respecter des normes très strictes. Au cours des 15 dernières années, on a dû investir des centaines de millions, voire des milliards de dollars dans un système de réglementation de réputation mondiale. N'empêche qu'avec toutes les nouvelles possibilités — les nouvelles cultures énergétiques et vivrières, entre autres —, le système doit être souple, clair et relativement rapide en ce qui concerne sa capacité d'évaluer et d'approuver des produits. Nous estimons qu'il faut miser sur ce que nous avons élaboré jusqu'à présent et l'intégrer à cette nouvelle réglementation qui nous permettra de développer et de commercialiser de nouveaux produits.
    De plus, en ce qui a trait à la bioéconomie et à nos activités, à notre avis, on pourrait élaborer des politiques environnementales pour régler les problèmes liés au transport commercial. Si nous prenons la norme sur le biodiesel qui a récemment été établie, nous constatons qu'elle s'applique davantage aux régions urbaines, de façon à ce qu'on utilise un carburant plus propre qui libère moins de particules et de pollution dans les régions plus populeuses.
    Il y a certaines questions dont nous aimerions vous parler. Sachez qu'il se fait beaucoup de bonnes choses. Il y a de nombreux secteurs de développement qui profiteront autant aux cultivateurs qu'à la société canadienne en général, et ce que nous attendons du gouvernement, ce n'est pas nécessairement de l'argent, mais plutôt une politique et un cadre clairs qui nous permettront d'aller de l'avant et de commercialiser nos produits.
    Nos technologies sont efficaces et affichent un taux de réussite sans précédent. À l'heure actuelle, la biotechnologie agricole et surtout les cultures dans lesquelles on a introduit des nouvelles caractéristiques, grâce au génie génétique, représentent 1 milliard d'hectares partout dans le monde. C'est un secteur qui a pris de l'expansion rapidement. Je suis conscient qu'il fait l'objet d'une certaine controverse, mais une grande partie des travaux réalisés au Canada ont démontré l'innocuité, l'efficacité et la qualité de ces produits. Nous voulons continuer d'offrir de nouvelles possibilités aux agriculteurs.
    Nous aimerions participer à l'élaboration de politiques efficaces sur les plans de la réglementation et de l'investissement afin de faire de l'agriculture un secteur plus dynamique et de stimuler davantage l'économie canadienne.
    En résumé, nous sommes convaincus que le secteur agricole peut grandement bénéficier de la biotechnologie grâce à la diversification de ses produits.

  (1145)  

    Nous pouvons offrir des solutions écologiques, et nous pouvons aussi trouver de meilleures façons de réduire l'incidence de l'augmentation du prix de la nourriture et des coûts de production en vue de produire des aliments salubres et durables.
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci beaucoup, monsieur Fabijanski.
    Nous allons maintenant entendre M. Ted Zettel et Mme Nicole Boudreau, de la Fédération biologique du Canada. Vous avez dix minutes.
    Mesdames et messieurs, je vous remercie de m'avoir invité à m'exprimer devant vous aujourd'hui sur l'industrie de la biotechnologie, du point de vue du secteur biologique.
    Je m'appelle Ted Zettel et je suis agriculteur biologique depuis 1983.
    Il y a 20 ans, j'ai participé à la fondation d'Organic Meadow, une coopérative agricole qui est devenue la principale marque de produits laitiers biologiques au Canada. Je suis président de la Fédération biologique du Canada, l’organisation qui représente le secteur auprès du gouvernement canadien pour les questions de réglementation. Je siège également à la Table ronde sur la chaîne de valeur des produits biologiques et j’ai préparé mes observations aujourd’hui en consultation avec le groupe de travail sur le génie génétique.
    Cela fait 28 ans que je gagne ma vie en mettant au point des produits pour les marchés biologiques et que j’enseigne à d’autres agriculteurs les méthodes de culture et d’élevage à suivre pour satisfaire cette demande croissante des consommateurs. On compte dans le pays quelque 3 900 agriculteurs certifiés biologiques eux aussi attachés à la production biologique.
    En juin 2009, le secteur biologique a assisté à la mise en oeuvre du Règlement sur les produits biologiques, qui régit l’emploi du terme « biologique » et exige que toute production et transformation de produits biologiques soit conforme à une norme et à un processus de vérification nationaux. Depuis, le Canada a négocié un accord d’équivalence avec les États-Unis et est en train de négocier des accords de reconnaissance de norme similaires avec l’Europe et le Japon, les principaux marchés mondiaux.
    En 2008, le secteur biologique canadien représentait pour environ 2 milliards de dollars de ventes au détail. Au Canada, ce sont près de 3 millions d’acres de terres agricoles qui sont gérés de façon biologique. Les ventes mondiales de produits biologiques sont passées d’environ 15 milliards en 1999 à 51 milliards de dollars en 2008. L’Amérique du Nord est le moteur de cette croissance depuis quelques années et, à présent, les produits biologiques représentent 3,5 p. 100 des ventes de produits alimentaires et de boissons.
    Les produits biologiques constituent un segment important de l’économie nationale et mondiale qui va continuer de croître et de séduire des millions de personnes qui souhaitent acheter des aliments produits sans produits chimiques synthétiques, en harmonie avec la nature et sans OGM. Oui, sans OGM. L’utilisation du génie génétique est interdite dans l’agriculture biologique, et ce, dans toutes les normes biologiques, dans le monde entier. L’industrie est claire et unanime à l'égard de l’interdiction de l'utilisation intentionnelle. Nombre de consommateurs qui souhaitent éviter de consommer des produits contenant des OGM se tournent vers les produits biologiques pour cette raison — et parce que la loi n’oblige pas à signaler par des étiquettes la présence d’OGM dans des aliments, c’est vraiment la meilleure façon pour les gens d’être certains de ne rien manger qui contienne des organismes génétiquement modifiés.
    Je suis donc devant vous aujourd’hui pour parler au nom de milliers d’agriculteurs et de millions de consommateurs partout au pays qui souhaitent choisir des produits alimentaires biologiques et sans OGM. Pensez à nos droits, à nos choix, à nos souhaits et à nos moyens de subsistance quand vous délibérez sur les politiques qui façonneront l'avenir de l'agriculture et du système canadien d'approvisionnement alimentaire.
    Tout d’abord, permettez-moi de souligner que les partisans de l’agriculture biologique sont convaincus que la meilleure technologie biologique est celle qui donne des résultats sans manipulation génétique. D’un point de vue historique, les manipulations génétiques telles qu’on les pratique actuellement représentent, au fond, une nouvelle frontière avec, à long terme, des conséquences pour l’environnement et pour la santé encore inconnues et sans doute dangereuses.
    Les innovations biologiques les plus efficaces qui protégeront contre les mauvaises herbes, les organismes nuisibles et les maladies, qui renforceront la santé et la diversité biologiques des sols, et qui produiront des aliments nutritifs se trouvent dans les techniques de production biologique. Nous applaudissons la participation d’Agriculture et Agroalimentaire Canada à la grappe scientifique biologique, car cette participation permettra de faire avancer des études essentielles dans ces domaines de connaissance.
    Toutes ces pistes possibles pour développer la pratique agricole consolident l’autonomie du monde agricole et contribuent à la résilience à long terme du système alimentaire, étant donné qu'elles tirent profit des ressources agricoles et visent le développement d'un écosystème agricole autosuffisant.
    Est-ce le cas des OGM? Non. Jusqu’ici, toutes les cultures génétiquement modifiées le sont soit pour résister à des applications chimiques, soit pour intégrer un pesticide dans la plante elle-même. Nous devons évaluer honnêtement l’effet des technologies issues du génie génétique sur l’agriculture.

  (1150)  

    Avec la tendance à la simplification des systèmes de culture, la dépendance envers l’extérieur et l’utilisation d’intrants à forte teneur en ressources qui s’accentue avec l’utilisation de ces outils, le Canada ne se trouve pas mieux placé pour relever les défis de l’avenir. Indépendamment des intentions actuelles ou futures en matière de modifications génétiques, les marchés biologiques et non OGM du Canada, en Amérique du Nord, en Europe et au Japon restent opposés à cette technologie qui continuera de poser un problème aux producteurs de produits biologiques et sans OGM. Donc, les producteurs et les consommateurs de produits biologiques sont en désaccord avec les promesses de la biotechnologie. Même s'il est clair que les cultures issues de la biotechnologie rapportent beaucoup aux sociétés de biotechnologie, les avantages pour les agriculteurs ou les consommateurs sont extrêmement discutables, même à court terme. Il est clair aussi que les OGM menacent la viabilité du secteur biologique lorsque des plantes génétiquement modifiées essaiment dans des champs biologiques ou que des semences OGM se retrouvent mélangées à des semences biologiques.
    Bien que le secteur biologique ne représente qu'une minime partie de l'industrie agricole, nous restons fermement opposés à la production génétiquement modifiée et à l’expansion des technologies connexes, et nous sommes convaincus qu’une majorité de Canadiens partagent notre position.
     J’aimerais, par conséquent, présenter brièvement ce que nous considérons comme étant les principes de l’adoption d’une politique agricole à laquelle puissent adhérer les Canadiens. Ce sera une politique par laquelle notre gouvernement choisira de protéger un secteur du système alimentaire qui sera vital pour faire face à ce qui s'annonce comme une période de rareté des ressources et d’incertitude écologique. Voici les principes sur lesquels nous proposons d'établir cette politique.
    Principe 1: L’agriculture biologique est un système de production qui apporte des réponses à bien des défis écologiques et sanitaires. Son empreinte carbone est moindre, elle utilise moins d’énergie, renforce les sols, préserve la biodiversité, protège notre eau et donne des produits qui laissent moins de résidus chimiques et, dans certains cas, qui présentent une valeur nutritive supérieure. Les consommateurs veulent des produits biologiques au Canada et sur les marchés d’exportation. L’agriculture biologique est une facette importante de l’économie canadienne et elle doit être protégée.
    Principe 2: Les consommateurs de produits biologiques et les marchés s’attendent à ce que ces produits soient sans OGM. La contamination par les OGM représente un préjudice inacceptable qui doit être atténué ou évité.
    Principe 3: L’agriculture biologique offre un exemple idéal en matière de traçabilité, de ségrégation et de préservation d’identité. Ces efforts ont un coût monétaire qui ne devrait pas être assumé uniquement par le secteur biologique qui n’a pas causé le problème. Les créateurs et les utilisateurs de produits biotechnologiques devraient eux aussi assumer les coûts et les mesures qui visent à garantir l’existence florissante et respectueuse des deux systèmes agricoles.
    Principe 4: Les créateurs et les utilisateurs de cultures génétiquement modifiées devraient être tenus pour responsables en cas de dissémination. Les sociétés biotechnologiques et les agriculteurs qui produisent des cultures OGM devraient dédommager les agriculteurs biologiques pour les pertes financières dues à la présence adventice de végétaux et de semences OGM.
    Principe 5: La commercialisation des cultures génétiquement modifiées ne devrait pas être autorisée sans une évaluation minutieuse des effets potentiels sur l’environnement, la santé et le bien-être socio-économique des agriculteurs, ce qui comprend l’acceptation par les marchés et la capacité de produire des semences non contaminées.
     À cet égard, nous nous devons de commenter le risque imminent que représente le spectre de la luzerne génétiquement modifiée pour tout le système de production biologique. Non seulement la luzerne biologique est exportée comme fourrage biologique, mais elle fait aussi partie intégrante du cheptel et du secteur laitier biologiques, autrement dit de la chaîne de valeur dont dépend énormément notre commerce, et elle est également essentielle dans la rotation des cultures de la plupart des exploitations biologiques.
    Compromettre la luzerne, ce n’est pas compromettre seulement un type de fourrage. On cultive la luzerne dans presque toutes les régions agricoles du pays, d’un océan à l’autre. Du point de vue du secteur biologique, l’introduction éventuelle d’une variété génétiquement modifiée sape tout notre système de production. Nous vous demandons instamment de retarder cette commercialisation jusqu’à ce qu’un examen détaillé des conséquences économiques soit terminé.
    Enfin, le principe 6: Les consommateurs ont le droit de savoir si un aliment contient des produits génétiquement modifiés. L’étiquetage des aliments dérivés de cultures OGM devrait donc être obligatoire.

  (1155)  

    Merci de nous avoir permis de vous faire part de notre point de vue. Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Zettel.
    La parole est maintenant à M. Phillips, de l'Université de la Saskatchewan.
    Permettez-moi d'abord de vous dire que vous venez d'entreprendre une étude importante. J'estime qu'il est primordial pour le Canada de renouveler et de revitaliser sa politique agroalimentaire nationale. Dans cette optique, je crois que l'essentiel du message que nous voulons tous transmettre, c'est que l'innovation doit être au coeur de ce renouveau, pas seulement un moyen de soutenir l'infrastructure actuelle.
    Je crois fermement que nous avons devant nous des arguments solides en faveur du renouvellement et de l'accélération de l'innovation agroalimentaire, et que nous avons l'occasion d'améliorer notre position en développant, en adaptant, en adoptant et en utilisant de façon intelligente et audacieuse les technologies de pointe de tous genres, notamment la biotechnologie. Deux réalités nous poussent inextricablement dans cette direction.
     Premièrement, le secteur agricole canadien doit se mesurer à deux grands concurrents: d'abord le reste du monde, qui évolue de nombreuses façons, puis la demande en ressources de l'agriculture au bout de la rue. Il s'agit de la demande de travailleurs spécialisés dans les villes et les villages avoisinants, de la demande de terres auprès des villes et des industries, et de la demande de capitaux auprès d'autres secteurs. Si l'industrie agricole n'arrive pas à obtenir à tout le moins un rendement moyen de ses investissements, ces ressources vont disparaître, comme cela a été cas de façon assez dramatique un peu partout dans le monde. À l'heure actuelle, l'agriculture ne génère que la moitié environ de la valeur ajoutée par ressource employée, accusant ainsi un important retard par rapport au reste de l'économie. Il est possible de rattraper ce retard; certains producteurs affichent un rendement supérieur à la moyenne, mais la moyenne n'est pas très élevée.
    Deuxièmement, de piètres politiques en matière de commerce et de marché internationaux, combinées à des investissements inadéquats dans la recherche et développement en agroalimentaire à l'échelle mondiale, ont eu pour effet de restreindre l'offre à un moment où la demande est en hausse, ce qui a fait grimper en flèche le prix de nombreux produits de base. Ces augmentations ont sérieusement secoué bien des pays souffrant d'insécurité alimentaire. Nous mettons en péril 850 millions de consommateurs en déficit alimentaire un peu partout dans le monde. Le Canada a l'obligation économique et morale d'intervenir.
    L'innovation ne se limite pas à trouver une nouvelle variété de semences, ni à inventer un nouveau silo-élévateur ou un semoir pneumatique. L'innovation, c'est un processus de changement continu. Cela représente un véritable défi au point de vue des politiques publiques, car cela signifie qu'elles doivent elles-mêmes être adaptables et évolutives. La bonne nouvelle, c'est que le Canada est en bonne position pour relever le défi. Nous pouvons en effet miser sur un siècle ponctué de belles innovations, certaines mises en branle par l'industrie, d'autres par le gouvernement et d'autres encore par des organismes non gouvernementaux et des groupes de producteurs et de producteurs spécialisés. Certaines de ces innovations ont d'ailleurs produit des résultats plutôt spectaculaires.
     Vous avez entendu parler des répercussions des technologies transgéniques sur le secteur agroalimentaire international. Au Canada seulement, l'introduction de produits de haute technologie, comme pour le canola et le blé, s'est avérée très avantageuse pour les producteurs, l'industrie et les consommateurs du monde entier. Je pense que bien d'autres occasions de ce genre s'offriront à nous à mesure que nous adapterons et adopterons ces technologies.
    Un monde de possibilités est à notre portée; il suffit d'évoluer pendant quelque temps dans le milieu scientifique pour voir tout le potentiel non exploité. Il est possible de remédier au stress biotique et abiotique grâce à des techniques de reproduction traditionnelles et non traditionnelles. De plus, nous avons l'occasion de développer des lignées de germoplasme d'élite qui sont concurrentielles et accessibles. En cette période de privatisation accrue des variétés en aval, ces lignées de germoplasme d'élite sont la pierre d'assise d'une politique nationale sur le secteur des céréales et des oléagineux.
    Il y a par ailleurs d'énormes possibilités en matière de différenciation par la qualité. Cette industrie tire la majeure partie de ses profits des produits alimentaires différenciés. Elle ne produit plus de marchandises de base; elle produit des cultures et des oléagineux à haute valeur ajoutée. Nous pourrions en faire beaucoup plus que nous en faisons en ce moment. C'est pourquoi nous devons trouver le moyen de faire cohabiter les produits agroalimentaires biologiques, les produits transgéniques et les produits industriels de pointe dans le cadre des mêmes régimes juridiques, commerciaux et réglementaires.
    Le secteur des biocarburants fait beaucoup parler de lui. Ces biocarburants ont différentes utilisations industrielles, notamment les services environnementaux qui découlent de la biorestauration. J'ai l'impression que bon nombre des plantes, des animaux et des microbes qui se trouvent sur votre territoire sont susceptibles de devenir les centres de bioproduction écologiques de demain.
    C'est tout un défi qui se dresse devant nous. Il faudra changer radicalement la structure de l'agriculture, mais au bout du compte, il s'agit de faciliter la différenciation des produits, des technologies et des services, et ces efforts nécessitent de nouveaux systèmes de réglementation et de gestion. Heureusement, nous sommes très bien préparés pour y faire face, notamment grâce à l'infrastructure d'Agriculture Canada et du CNRC, et à quelques-unes des plus importantes technologies au monde dont on dispose entre autres à Saskatoon, comme le VIDO-InterVac (le centre de recherche sur les vaccins et les maladies infectieuses), de même que le Centre canadien de rayonnement synchrotron, que vous avez eu la chance d'étudier, si je ne m'abuse.

  (1200)  

    Ils représentent probablement le nec plus ultra des nouveaux systèmes de gestion et de réglementation du XXIe siècle. Pour réussir, nous devons faire en sorte que l'agriculture s'éloigne des technologies du XIXe siècle pour adopter celles du XXIe.
    De la même façon, à Saskatoon et à Guelph, notamment, on trouve des partenariats publics-privés très solides laissant entrevoir d'intéressants débouchés et qui, même en l'absence de décisions gouvernementales, donnent lieu à d'importantes avancées industrielles.
    À Saskatoon, par exemple, le regroupement des Saskatchewan Pulse Growers, en collaboration avec le Crop Development Centre, est devenu le centre mondial de la production de légumineuses. Cela a permis de générer une industrie de plusieurs milliards de dollars en Saskatchewan et dans l'Ouest canadien, et parallèlement de produire des aliments qui sont essentiels à la nutrition de bon nombre de ces 850 millions de personnes qui vivent dans des pays en déficit alimentaire.
    Les besoins sont là, et nous avons l'occasion d'y répondre. Quels sont les choix qui s'offrent au gouvernement et à notre société?
    Je crois que pour accélérer l'innovation au sein du système agroalimentaire canadien, il faudra mettre en place de nouvelles politiques, de nouveaux programmes et de nouveaux partenariats qui vont mobiliser les ressources dont nous disposons et établir des liens avec le reste du monde. L'idée est de se donner une motivation et de favoriser un sentiment de certitude. Autrement, les conflits et l’absence d’objectif vont créer de l’incertitude, ce qui va non seulement réduire la valeur des investissements publics, mais aussi éloigner les investissements privés de ce secteur. Personne n’en sortirait gagnant.
    J’aimerais parler de trois secteurs de politique précis. Premièrement, je pense qu’il faut accentuer les efforts de recherche. Le Canada a déjà été le plus grand centre de recherche agroalimentaire du monde, mais si j’en crois les messages envoyés par Ottawa de nos jours, j’en conclus que le gouvernement voit l’agriculture comme une industrie sur le déclin. La politique de sciences et technologie annoncée en 2007, qui a commencé à déteindre sur différentes politiques et différents programmes à Ottawa, vise clairement à exclure ou à écarter les possibilités de recherche et développement liées à l’agroalimentaire. Les centres d’excellence, le CRSNG et le Programme de chaires d’excellence en recherche nous ont en effet tous fermé leurs portes.
    Deuxièmement, le gouvernement fédéral travaille souvent à contre-courant des efforts de recherche et développement. Nous avons tendance à fractionner les agglomérations que les scientifiques de l’industrie réclament et dont ils ont besoin pour mettre en marché de nouvelles technologies. Les laboratoires fédéraux sont souvent déconnectés les uns des autres, et leurs bons coups sont souvent dus au regroupement de talents sous un même toit en partenariat avec l’industrie, comme ce fut le cas pour l’Institut de biotechnologie des plantes à Saskatoon.
    Le financement fédéral est accordé à plus en plus court terme, soit de un à trois ans. Les chercheurs et les chefs de file mondiaux de la recherche font des investissements de sept à 15 ans, alors que nous sommes restreints à des fonds s'échelonnant sur un à trois ans. Qui plus est, ce financement à court terme implique des coûts généraux de 40 à 60 p. 100, et ce, uniquement pour obtenir et gérer les fonds et mettre un terme aux projets. Le fait d'interrompre et de reprendre le travail constamment ne permet pas vraiment d'apporter la valeur à long terme que vous souhaitez avoir.
    De plus les règles administratives entourant la présentation de demandes au gouvernement (et c'est la réalité du XXIe siècle) coûtent très chers à ces programmes. Les chercheurs principaux passent la majeure partie de leur temps à présenter des propositions et à gérer des projets, pas à travailler dans leur laboratoire ni à commercialiser de nouvelles technologies.
    Il faut également penser à la propriété intellectuelle. Il y a quelques semaines, un de mes collègues, Richard Gold de l'Université McGill, vous en a parlé. Je ne m'étendrai donc pas sur le sujet aujourd'hui. Je me contenterai de dire que le système de propriété intellectuelle doit faire partie intégrante de la technologie agroalimentaire du XXIe siècle. Cela ne fonctionnera pas si on s'appuie uniquement sur des innovations de source ouverte. Certains produits et certaines technologies doivent aussi porter des désignations hautement exclusives.
    Troisièmement, le Canada doit parfaire son système de réglementation. Il est permis de croire que nous avons l'un des régimes réglementaires les plus efficaces et respectés au monde pour la biotechnologie et l'agroalimentaire en général. Et je suis tout à fait d'accord avec Steve là-dessus. Nous avions un système d'avant-garde. Vous aurez remarqué que je parle au passé. En effet, rien n'a bougé au cours des 10 dernières années.
    J'ai siégé au Comité consultatif canadien de la biotechnologie, qui a produit différents rapports et formulé des recommandations en conformité avec le rapport de la Société royale. RIen n'a été fait. On attend encore que des décisions soient prises à l'égard de secteurs complets du régime réglementaire. Ce n'est pas parce que nous ne pouvons pas dire oui à Steve; nous ne pouvons même pas dire non ou peut-être. Nous devons toujours faire patienter les gens, en attendant d'avoir une réponse. Cette situation fait fuir les investisseurs publics et privés de ces secteurs.

  (1205)  

    Permettez-moi de conclure là-dessus. Je pense que vous avez une occasion en or de façonner une politique publique digne du XXIe siècle, qui ne servira pas seulement nos intérêts économiques nationaux, mais aussi des intérêts moraux à l'échelle internationale. Le vrai défi consistera pour le gouvernement fédéral de décider s'il veut être un chef de file ou se contenter de suivre les autres. Peut-être même qu'il devra laisser la place à d'autres intervenants canadiens ou étrangers, qui eux prendront la tête de ces secteurs.
    Merci.
    Il arrive que nous nous limitions à des tours de cinq minutes lorsque le temps nous presse, comme en ce moment. Sommes-nous d'accord pour procéder de cette façon?
    Des voix: Oui.
    Le président: Merci.
    Monsieur Valeriote, vous avez cinq minutes.
    Merci à vous tous d'avoir pris le temps de venir nous parler aujourd'hui.
    Peter, je veux vous remercier pour vos commentaires sur le Comité consultatif canadien de la biotechnologie. C'est là-dessus que portera ma question.
    Une des raisons pour lesquelles M. Hoback et moi-même avons présenté cette motion pour avoir cette discussion, c'est que l'étude du projet de loi C-474 nous a permis de constater que des questions avaient été laissées en plan et qu'il fallait y remédier.
    Ma question est la suivante, et j'aimerais que M. Zettel y réponde lui aussi: Est-ce que le fait de reconstituer ce comité permettra de réunir de façon juste et équitable les différentes parties en cause? Beaucoup d'intervenants devraient en effet être assis à cette table. Pourra-t-on respecter les principes énoncés par M. Zettel au nom de l'industrie de la production biologique, pour que les normes biologiques et non biologiques puissent réellement coexister?
    Pensez-vous que des politiques de faible concentration pourraient être une possibilité de compromis. Est-il possible de distancer davantage les cultures transgéniques et non transgéniques? S'agirait-il d'une solution réaliste?
    Pourriez-vous me donner tous les deux votre point de vue à ce sujet?
    Permettez-moi de faire quelques brèves observations. J'ai coprésidé l'examen du système réglementaire et alimentaire relatif aux OGM pour le CCCB de 2001 à 2004, et j'ai siégé à ce comité du début à la fin; je sais donc comment cela fonctionne.
    Vous avez parlé de deux questions qu'un seul mécanisme, selon moi, ne peut résoudre. Il y a une vaste question de politique publique entourant l'acceptation ou la non-acceptation de multiples technologies au sein du même système. C'est une vaste question de politique publique que le CCCB, honnêtement, n'a pas été en mesure de régler. Je ne suis pas sûr qu'une tierce partie puisse le faire. Je pense que les comités comme le vôtre le peuvent. Ils sont en mesure de recueillir les points de vue et d'essayer de les rapprocher, parce qu'au bout du compte, l'important, ce n'est pas ce que M. Zettel et moi-même croyons. Il faut que ce soit un amalgame de ces deux points de vue. Voilà le premier point.
    Vous avez ensuite posé des questions très précises au sujet de la présence en faible quantité, la présence adventice, et la façon dont le système fonctionne. Oui, je crois qu'on peut faire beaucoup plus. En fait, au cours des cinq ou dix dernières années, divers bureaucrates de l'administration fédérale ont travaillé d'arrache-pied à élaborer des règles et des mécanismes afin qu'il y ait une coexistence pratique. Même si un grand débat d'intérêt public n'a pas encore été mené, sur le plan opérationnel, les producteurs pourraient être certains, lorsqu'ils choisissent une culture, que les bons mécanismes sont en place pour répondre aux attentes des consommateurs en matière de qualité.
    Ce genre de débat aura lieu au Canada au cours de l'année. Il y a un événement qui est organisé partout dans le monde et qu'on appelle la conférence sur la coexistence. Elle a été lancée en Europe, où on mettait surtout l'accent sur une discussion de haut niveau: Voulons-nous des OGM? Comment les éloigner d'un système actuellement libre de produits transgéniques? Il y a deux ans, l'événement s'est tenu en Australie, et la discussion a mené à des demi-résultats — nous avons présenté quelques cultures GM, mais pas toutes, et nous ne savons pas trop ce qu'il faut faire ensuite.
    L'événement aura lieu à Vancouver à la fin de l'année. Nous n'aurons pas de discussion de haut niveau, mais plutôt une discussion très pratique pour tenter d'expliquer comment il se fait que dans diverses régions de l'Amérique du Nord et d'autres parties du monde, on peut avoir des cultures biologiques, conventionnelles et industrielles au sein du même système agro-économique. Je pense que c'est au niveau opérationnel qu'on peut déléguer les pouvoirs. En fait, ils viennent en grande partie des organismes de normalisation, de toute façon, ou de groupements de producteurs spécialisés, qui les répartissent. Je doute qu'on puisse laisser ce débat de haut niveau se tenir au-delà de la sphère politique. En fin de compte, 270 ONG ont dit au CCCB qu'il ne lui appartenait pas de tenir cette discussion.

  (1210)  

    Je pense que si les bonnes personnes y participent, nous pourrions avoir une discussion constructive sur la question alimentaire. Ce serait très utile et cela s'impose depuis longtemps. Nous avons mis ces technologies en place dans le système alimentaire sans consulter ni informer la population, et sans lui donner la possibilité de choisir. C'est inadmissible dans une économie moderne fortement développée, avec une population instruite. Si ces technologies servent le bien commun, alors nous pouvons sûrement en convaincre notre population; or, il semble que nous soyons très réticents à le faire.
    En réponse à votre question, si les bonnes personnes sont présentes et si la population est bien représentée — il ne faut pas qu'il n'y ait que ceux qui veulent développer les technologies —, alors je pense que c'est une excellente idée. C'est un forum auquel nous serons heureux de participer.
    En ce qui a trait à la présence adventice, une question très importante, il nous faut garder à l'esprit ce que j'ai proposé: nous sommes sur le point de lancer une nouvelle variété de culture génétiquement modifiée, qui ne se compare à aucune autre sur le plan de la contamination du secteur agricole. Je parle de la luzerne. Voyons s'il y aurait moyen d'empêcher cela. Ensuite, nous parlerons de la façon de nous occuper de celles que nous avons déjà.
    Monsieur Bellavance, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour et merci pour vos témoignages.
    Monsieur Zettel, vous avez parlé dans votre témoignage d'études qui démontrent que l'utilisation des pesticides sur le maïs et le soya continue d'augmenter, alors que ce qu'on entend beaucoup comme argument de la part des entreprises qui font des organismes génétiquement modifiés, c'est qu'on va utiliser moins de produits chimiques dans la culture. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, transmettre ces études au greffier? Cela pourrait être intéressant pour les membres du comité d'en prendre connaissance avant qu'on fasse notre rapport sur le dossier.
    Vous parlez aussi des zones tampons. On a entendu un témoignage, lors de notre réunion précédente, de la part d'un producteur de lait et de céréales biologiques du Manitoba. Je me fie sur son témoignage. Il dit que dans le cas de la luzerne, il a communiqué avec la firme Monsanto pour lui demander quelle était sa politique quant à l'utilisation des zones tampons. Toujours selon le témoignage de M. Larry Black, il nous dit que Monsanto avait l'intention de recommander une distance de 0,8 kilomètre entre les cultures de luzerne génétiquement modifiées et les autres cultures de luzerne, afin de prévenir la pollinisation croisée. Ce qu'on lui a dit chez Monsanto, c'est que les consommateurs de produits biologiques doivent accepter une faible contamination par les OGM.
    Ma question est la suivante. Dans le cas du canola, je sais qu'il y a eu de la contamination. Je sais que dans d'autres cultures aux États-Unis — le colza, si je ne me trompe pas —, il y a eu de la contamination. On nous dit que pour ce qui est de la luzerne, cela risque d'être le cas également. Le Bloc québécois demande aussi qu'il y ait des zones tampons. Parfois, on se dit que cela pourrait être suffisant pour s'assurer que les cultures ne contenant pas d'OGM et les cultures biologiques ne soient pas contaminées, mais est-ce le cas? Est-on en mesure d'avoir la certitude qu'il n'y aura pas de contamination croisée?

  (1215)  

[Traduction]

    Selon les renseignements que je tiens de la communauté scientifique, si la luzerne génétiquement modifiée est cultivée, il n'y aura aucun moyen d'éliminer complètement la contamination des semences, parce que les distances à respecter seraient trop grandes. De nombreuses données démontrent qu'il peut y avoir une pollinisation jusqu'à une distance de 2,5 kilomètres. Cela représente une grande distance pour éloigner sa terre d'une autre terre dans une région agricole. Il faudrait presque consacrer une région entière à la production des cultures transgéniques et les garder dans cette région.
    Il faut aussi se demander qui va le faire. Jusqu'à maintenant, ce sont les agriculteurs biologiques qui ont dû trouver une petite zone isolée quelque part pour produire leurs cultures sans OGM. Est-ce juste? Est-ce vraiment une solution raisonnable? Nous estimons que c'est aux agriculteurs qui veulent produire ces cultures transgéniques que devrait revenir la responsabilité d'empêcher la contamination. Ce sont eux qui devraient payer et qui devraient s'occuper des zones tampons, acheter suffisamment de terres afin d'avoir un endroit isolé pour produire leur culture transgénique.

[Français]

    J'aimerais connaître l'opinion de M. Phillips ou de M. Fabijanski là-dessus. Est-ce que la luzerne est un cas différent des autres cultures?

[Traduction]

    Je ne suis pas un spécialiste de la luzerne, mais permettez-moi de faire deux observations sur cette question.
    La première porte sur les données relatives à l'impact des diverses technologies sur les producteurs. J'ai transmis à votre greffier d'autres observations dont je n'ai pas parlé aujourd'hui, et je les rendrai disponibles pour les membres du comité au besoin. Elles portent sur des études menées au Canada par mon équipe de recherche relativement aux effets de l'utilisation des produits chimiques sur l'économie, l'agronomie et l'environnement. Bon nombre de producteurs traditionnels se servent de produits chimiques, peu importe les semences utilisées. La question est simplement de savoir de quels produits chimiques se servir. Certains produits ont une empreinte écologique moins prononcée — pas nulle, mais moins prononcée que les autres.
    La deuxième question porte sur les zones tampons. C'est une excellente question: quelle est la zone tampon appropriée? Ce n'est pas très clair. À l'heure actuelle, nous utilisons des zones tampons pour des raisons de santé et de sécurité. Elles sont intégrées à nos systèmes. Elles font partie du système d'enregistrement des contrats. Si on cultive du colza ayant un taux élevé d'acide urique, ce qui donne un produit chimique réputé dangereux dans le système alimentaire international, il y a un système de contrats qui impose des zones tampons et des contrôles. Nous l'utilisons à des fins bien précises. Nous utilisons également les zones tampons pour le maïs Bt; nous tentons d'en éviter l'introgression et de créer au moins une population de base non résistante au gène Bt dans les plantes.
    Ces éléments ont été utilisés à des fins bien précises. Nous n'avons jamais utilisé les zones tampons à des fins commerciales. Nous avons toujours estimé qu'il revenait à l'industrie de décider de leur utilisation. Les zones tampons ne concernent pas seulement les cultures biologiques et génétiquement modifiées; nous avons plus de 90 variétés de blé, et chacune peut être touchée par la contamination croisée. De même, il existe 300 ou 400 variétés de canola, et beaucoup peuvent être différenciées. Pour chacune, on vise à maintenir une excellente qualité.
    Si on envisage d'utiliser les zones tampons pour des raisons économiques définies par la réglementation, on risque de créer un système dans lequel aucune variété ayant un caractère distinct ne pourra entrer sur le marché. C'est là ma plus grande crainte — qu'avec les meilleures intentions, on atteigne les pires résultats.
    Allez-y, monsieur Atamanenko. Vous avez cinq minutes.
    Cette étude démontre notamment que l'industrie de la biotechnologie est très diversifiée et que le génie génétique n'en est qu'une petite partie. Ce n'est pas la même chose. Nous savons que toutes les percées majeures en ce qui concerne les variétés et la production ont été faites grâce à la sélection traditionnelle ou à la biotechnologie, mais pas les OGM, qui ont deux caractères: la résistance aux herbicides et le Bt.
    Peter, vous avez parlé de la recherche publique. Les producteurs de cerises de ma région m'ont dit récemment s'inquiéter au sujet de Summerland, où les scientifiques ne sont pas remplacés. Nous savons qu'il nous faut du financement à long terme, et il en faut aussi pour vos gens, M. Fabijanski, afin qu'ils apportent leur aide en biotechnologie. J'y reviendrai dans quelques minutes.
    Monsieur Zettel, vous avez indiqué que la luzerne génétiquement modifiée détruirait pratiquement l'industrie de la production biologique. Il y a des producteurs de fruits et des producteurs biologiques dans ma région qui sont extrêmement inquiets à propos de la nouvelle pomme génétiquement modifiée qui résiste au brunissement. Nous avons entendu des témoignages au sujet du blé. Bien sûr, mon projet de loi a été rejeté, mais ne serait-il pas logique de demander un moratoire? Surtout dans le cas qui vous concerne, parce que cela semble être plus crucial, il devrait y avoir un moratoire sur le développement transgénique de la luzerne jusqu'à ce que les intervenants collaborent avec le gouvernement pour en déterminer la faisabilité. Il devrait y avoir un moratoire sur les pommes génétiquement modifiées afin que les producteurs agricoles, le gouvernement et l'industrie puissent se pencher sur cette question. Il devrait y en avoir un pour le blé également. Autrement dit, avant d'aller de l'avant, nous devrions au moins effectuer une étude approfondie. Tout indique que cela détruirait complètement votre industrie. Il me semble que l'industrie de la biotechnologie, l'association des produits biologiques et les agriculteurs devraient s'entendre pour dire qu'il ne faut pas perdre ce moyen de subsistance. Est-il réaliste de demander un moratoire, en particulier en ce qui a trait à la luzerne?
    Qu'en pensez-vous, monsieur Zettel?

  (1220)  

    Je pense que c'est une idée tout à fait raisonnable, étant donné que la luzerne génétiquement modifiée présente très peu d'avantages. J'ai discuté avec des agriculteurs de partout au pays. Je cultive et récolte la luzerne depuis que je suis haut comme trois pommes. Nous n'avons pas besoin de la luzerne génétiquement modifiée. Elle est d'une utilité très limitée dans l'industrie; si on en fait une analyse risques-avantages, on peut constater qu'il y a beaucoup de risques, mais que les avantages sont très discutables.
    Mon collègue a des idées dignes d'intérêt sur le développement de biotechnologies qui pourraient servir au bien commun et être utiles à la population, au pays, à l'industrie et aux agriculteurs. Je ne veux pas que son travail soit retardé en raison d'un moratoire sur la luzerne. Je crois que c'est probablement l'un des principaux motifs qui justifient de ne pas cesser de produire la luzerne; si nous le faisons, Monsanto se retirera, le financement se tarira, et nous causerons un tort irréparable à l'industrie de la biotechnologie.
    Ce n'est pas notre intention. La luzerne est un cas bien précis, qui doit être traité de façon individuelle. Je pense qu'un moratoire sur la luzerne est tout à fait raisonnable et justifié, mais je ne crois pas qu'il devrait s'agir d'un moratoire global ni d'un obstacle aux excellentes techniques biotechnologiques qui permettent de mettre au point de nouveaux médicaments ou de nouveaux usages pour les plantes à l'extérieur du système alimentaire.
    Qu'en pensez-vous, monsieur Fabijanski?
    Eh bien, le problème avec les moratoires, c'est que nous devons déterminer s'il y a de la valeur avant qu'on démontre qu'il y a une valeur de marché. Cela éloigne l'investissement et l'attention à l'égard de l'industrie. En général, les produits biotechnologiques entrent dans un régime de réglementation qui est, comme l'a dit Peter, reconnu à l'échelle mondiale et qui évalue la qualité des aspects de sécurité et d'environnement. Il les examine de près et permet aux gens de produire en fonction des besoins du marché.
    Nous en avons entendu parler en ce qui concerne le canola tolérant les herbicides. Les gens ont dit que nous devrions imposer un moratoire, mais 90 p. 100 des producteurs utilisent le canola résistant aux herbicides, pour une raison évidente. Je pense que de dire a priori qu'il nous faut imposer un moratoire sur les choses que nous n'aimons pas et cesser de les développer pour effectuer d'autres études soulève une question très simple: Qui va payer ces études, comment cela prendra-t-il de temps et qui se penchera sur leurs résultats?

  (1225)  

    Nous allons maintenant donner la parole à M. Lemieux.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Zettel, je me réjouis beaucoup de vous entendre ce matin. Nous avons tenu un certain nombre de réunions pour étudier le secteur de la biotechnologie et habituellement, le débat gravite autour de la culture transgénique par rapport à la culture biologique. Dans presque toutes nos réunions, il y avait un bel équilibre entre les deux. Nous avons entendu des témoins du secteur biologique et des témoins en faveur des OGM. La discussion nous a été utile.
    Au cours des conversations que nous avons eu auparavant avec les témoins les plus tournés vers la production biologique, j'ai senti qu'ils se sentaient très menacés par l'existence même des cultures transgéniques, mais d'après ce que je lis ici et d'après votre témoignage, il y a une coexistence respectueuse entre les deux systèmes agricoles ainsi que des mesures pouvant être mises en place pour la garantir. Je m'en réjouis, car je crois que cela correspond davantage à la réalité, soit qu'il est très difficile d'imposer un moratoire sur tous les OGM. Par contre, il est aussi très difficile de dire que nous devrions nous lancer à toute vapeur dans tout ce qui est génétiquement modifié. Nous allons plutôt devoir trouver des compromis et nous voulons nous assurer que les politiques mises en place favorisent cette coexistence respectueuse.
    Nous avons entendu des producteurs de soja. Certains produisent du soja transgénique, d'autres, du soja non transgénique, et ils semblent coexister. J'ai demandé si ces agriculteurs s'entendent bien ou s'ils sont en conflit, à couteaux tirés à propos de ces questions. Il y a de la contamination et bien autre chose. On m'a répondu qu'ils coexistent, qu'ils se respectent mutuellement et qu'ils veulent prendre les mesures appropriées.
    Je me demande si vous pourriez nous en parler un peu plus en détail, car j'ai trouvé cela encourageant et rafraîchissant. Je me demande si vous pourriez nous dire quelles mesures vous envisageriez d'adopter pour favoriser cette coexistence respectueuse.
    Certainement. Je le répète, la coexistence respectueuse est notre but, parce que nous sommes un groupe minoritaire au sein de la communauté agricole. La plupart de nos voisins sont des agriculteurs traditionnels. Bon nombre d'entre eux produisent des cultures génétiquement modifiées; il nous faut donc trouver un moyen de travailler ensemble.
    Chaque culture est différente. Le soja ne constitue pas un gros problème. Il n'y a pas tellement de dérive dans le cas du soja génétiquement modifié, et nous pouvons cultiver le soja biologique dans la même région. C'est la même chose pour le maïs. S'il y a quelques champs ou un terrain boisé entre les deux, ça va. Pour la luzerne, c'est tout à fait différent. C'est là où nous devons faire la distinction.
    Que pouvons-nous faire sur le plan des politiques? Je crois que nous devons absolument envisager un transfert de la responsabilité d'empêcher la contamination; cette responsabilité a toujours incombé aux agriculteurs biologiques, et nous devons la laisser à ceux qui produisent la culture contaminante. À l'heure actuelle, ce n'est pas ce que nous faisons. Dès que le produit, une nouvelle variété génétiquement modifiée, est autorisé, vous pouvez le cultiver n'importe où. Si un agriculteur voit ses produits biologiques, qu'il cultive et vend depuis 20 ans, être contaminés par ce produit et qu'il ne peut plus les vendre, vous êtes exonéré de toute responsabilité.
    Permettez-moi de vous interrompre une seconde. Considérez-vous que cette responsabilité se situe à un niveau personnel, c'est-à-dire que les problèmes se règlent entre les exploitations agricoles, ou bien est-ce davantage au niveau organisationnel, où un secteur ou un organisme offre le genre de soutien, de protection ou de dédommagement dont vous parliez?
    Je ne suis pas avocat plaidant, mais je sais que la responsabilité tend à remonter vers le point de départ. La responsabilité part de la personne et remonte jusqu'au fournisseur du produit, et ainsi de suite. La responsabilité pourrait même incomber à l'entreprise qui vend le produit, ainsi qu'à l'agriculteur qui l'utilise.
    Le dialogue entourant la séparation de ces choses pourrait nous permettre de trouver des façons viables de partager la responsabilité, mais il faut avant tout adopter un principe selon lequel les deux parties sont responsables.

  (1230)  

    Permettez-moi d'utiliser les secondes qui restent pour poser une dernière question.
    Steve, étant donné que nous parlons beaucoup d'OGM, pourriez-vous nous donner, du point de vue de la biotechnologie, des exemples concrets — pas nécessairement des exemples d'OGM — de progrès biotechnologiques profitables aux agriculteurs et aux consommateurs?
    Je vous suis reconnaissant de me donner l'occasion d'en parler.
    En ce qui a trait à la culture de tissus en biotechnologie, je crois que toutes les variétés de canola cultivées — qu'il soit biologique, génétiquement modifié ou traditionnel — proviennent de cultures d'anthères, un processus de biotechnologie qui permet aux plantes d'être intactes sur le plan génétique. Toutes les variétés de canola passent par cette étape. Il en va de même du blé, qui a été développé dans des laboratoires régionaux des Prairies; le blé McKenzie et d'autres variétés de blé ont été créées à partir de cultures de tissus. Ces processus permettent essentiellement de modifier le code génétique d'un organisme à l'aide de techniques conventionnelles, ce qui permet de cloner des cultures ou de développer des variétés uniques et intactes sur le plan génétique. L'industrie recherche ces caractéristiques afin d'offrir aux agriculteurs le rendement régulier dont ils ont besoin pour planifier leur production, mais aussi un produit très uniforme et de qualité égale.
    Il pourrait s'agir de cultures non génétiquement modifiées, n'est-ce pas?
    Tout à fait. Il peut s'agir de cultures non génétiquement modifiées ou de cultures traditionnelles. Toutes les cultures sont produites à partir du même processus biotechnologique en laboratoire.
    Merci, monsieur Lemieux.
    M. Easter a maintenant la parole pour cinq minutes.
    Merci à nos témoins. Vous nous avez présenté de bons exposés, qui comportaient une grande variété d'opinions.
    J'aimerais commencer par vous poser une question simple. Au Canada, d'où provient la forte demande pour la luzerne génétiquement modifiée? Peter, pouvez-vous répondre?
    Non, je ne suis pas spécialiste de la luzerne. Par contre, je peux vous donner quelques précisions.
    La question revient à se demander comment une innovation peut pénétrer un marché. Il est impossible de connaître la demande pour une innovation tant que celle-ci n'a pas atteint le marché. J'ai travaillé sur le blé génétiquement modifié, et les estimations de la demande provenant du domaine public variaient entre 0 et 100 p. 100 des agriculteurs. Un sondage réalisé au Canada et aux États-Unis a révélé qu'entre 30 et 40 p. 100 des agriculteurs s'en procureraient la première année, mais en très petite quantité pour en faire l'essai, comme ils l'avaient fait avec le canola dans les années 1990.
    Ted, connaissez-vous des agriculteurs qui en demandent au Canada?
    Non, je n'en connais aucun.
    Je ne peux pas répondre, puisque je connais mal le marché de la luzerne.
    J'ai pris part à la bataille entourant l'hormone de croissance recombinante bovine — je l'ai même menée — vers la fin des années 1990. On nous disait la même chose que vous, Steve, c'est-à-dire que les investissements se tariraient si nous osions l'interdire. Je me souviens que les représentants de Monsanto étaient venus comparaître, que des lobbyistes nous appelaient sans cesse et qu'on invitait les ministres à dîner. Mon Dieu, on prévoyait un désastre épouvantable. Est-ce que le fait de ne pas utiliser d'hormone de croissance recombinante bovine a fait mal au Canada? Je ne pense pas.
    En fait, je crois que Walmart refuse actuellement de vendre le lait qui contient cette hormone. Je soutiens qu'il existe de bons et de mauvais OGM. En tant que public, je crois que nous devons pécher par excès de prudence, surtout avec tout ce que j'entends sur la luzerne. J'imagine qu'il faut trouver un équilibre et mettre en place un système de réglementation pour distinguer ce qui est bon de ce qui ne l'est pas.
    Peter, accepteriez-vous de répondre à une autre question là-dessus? La bataille sur l'hormone de croissance recombinante bovine m'a appris qu'il est extrêmement ardu d'obtenir des renseignements de Santé Canada. En fait, le ministère prenait la défense de Monsanto. Il était impossible d'avoir accès à l'information. Comment le comité peut-il instaurer un système pour que soient menées des recherches indépendantes publiques sans favoritisme et qui ne sont pas liées à une entreprise qui défendrait ses intérêts personnels?

  (1235)  

    Il y a deux volets dont j'aimerais parler brièvement. D'une part, le Comité consultatif canadien de la biotechnologie vous avait déjà donné la réponse à propos des études commandées: nous avons besoin qu'il y ait plus de transparence. Le Canada ne publie pratiquement pas les résultats de nos études contrairement aux États-Unis, où presque tout est inscrit au registre fédéral. D'une certaine façon, nous sommes maintenant tenus par la loi de considérer comme confidentiels tous les renseignements produits par une entreprise commerciale. Par contre, de nombreuses entreprises préféreraient qu'un organisme de réglementation les publie. Ainsi, les renseignements paraîtraient différents. C'est une question de prudence.
    Permettez-moi de revenir à la première question, c'est-à-dire comment le gouvernement devrait réagir aux innovations. Tout à l'heure, j'ai dit que nous avions le choix de mener, de suivre la tendance ou bien de ne rien faire. Le moratoire est une manière de mener qui entraîne toutefois des répercussions considérables. Il faut être certain d'avoir raison, car en cas d'erreur, le gouvernement se fera reprocher d'avoir paralysé une technologie qui aurait pu être très utile.
    Le gouvernement peut aussi décider de suivre la tendance. L'introduction du canola en est un bon exemple. Cette industrie a travaillé de concert avec des adeptes de la nouvelle technologie, la Commission canadienne des grains, ainsi que les scientifiques d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et du Conseil national de recherches du Canada. Le grain a été placé dans un système de ségrégation jusqu'à ce qu'il reçoive l'approbation réglementaire au Japon, le marché étranger prioritaire à l'époque. Suivre la tendance est donc le deuxième modèle d'action possible.
    Enfin, le gouvernement peut décider de ne rien faire. Je dirais que c'est ce qui est arrivé dans le cas du blé. Le gouvernement fédéral n'est pas vraiment intervenu et n'a pas dit un mot. Ce sont les producteurs, les 206 ONG, la Commission canadienne du blé et bien d'autres qui ont dit: « Écoutez, nous ne voulons pas de cette technologie sur le marché, pour l'instant. » Ils pourraient faire de même avec la luzerne.
    Il existe diverses options; le moratoire n'est pas la seule solution. Si l'on veut, il est possible de laisser au marché le soin d'introduire la technologie de façon sécuritaire ou bien de la rejeter.
    Wayne, votre temps est écoulé.
    Allez-y rapidement, Ted. Il ne reste plus de temps.
    J'ai simplement un commentaire sur la bataille entourant l'hormone de croissance recombinante bovine, à laquelle j'ai pris part vers la fin des années 1970. Il y a deux semaines, j'ai rencontré à Ottawa les dirigeants de Santé Canada, des Producteurs laitiers du Canada et du secteur des produits biologiques. Je peux affirmer avec certitude que toute l'industrie laitière canadienne est ravie que nous ayons évité cette catastrophe. Avec le recul, nous sommes heureux que l'hormone n'ait pas été introduite ici, elle qui a eu des conséquences désastreuses pour l'industrie laitière aux États-Unis.
    Très bien, merci.
    Monsieur Hoback, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Voici quelque chose de très intéressant. Ce matin, on a déposé sur mon bureau un document qui disait que l'Union européenne tolérerait désormais la présence de 0,1 p. 100 de matières génétiquement modifiées dans les céréales fourragères. Nous commençons donc déjà à voir les fruits de notre travail sur la présence d'une faible concentration de matières génétiquement modifiées. Je tiens vraiment à faire l'éloge du ministre et de son personnel, qui sont parvenus à faire accepter à l'Union européenne une faible concentration de matières génétiquement modifiées, ce qui aidera notre industrie.
    J'aimerais revenir à l'étude de la biotechnologie. Je trouve très contrariant que nous débattions sans cesse des OGM, puisqu'il ne s'agit que d'un volet de la question. Je comprends que certaines cultures posent problème, comme la luzerne. Je crois que tout le monde doit comprendre ceci: dans le secteur de la biotechnologie, les cultures sont d'abord soumises à un processus d'approbation réglementaire, puis chaque variété doit être homologuée avant d'être cultivée.
    Je trouve cela intéressant, car même si la luzerne passe le processus réglementaire, chaque variété devra ensuite être homologuée. C'est à cette étape que l'on connaîtra les variétés acceptées par le marché et tout ce qui en découle. Il y aura alors des débats semblables à ceux qui ont entouré la décision de ne pas adopter le blé génétiquement modifié.
    Je ne voudrais pas qu'on perde toute retenue et qu'on croie que la luzerne sera cultivée la semaine prochaine au Canada simplement parce qu'elle a reçu l'approbation réglementaire. Si les États-Unis décident de la cultiver, nous n'y pouvons rien; ils agissent comme ils l'entendent. C'est la réalité dont il faut tenir compte.
    L'un des éléments que j'aimerais explorer, c'est que le secteur de la biotechnologie apporte beaucoup de réponses, je crois, à l'amélioration des cultures à l'aide de modifications génétiques. D'autres types de sélections font appel à la génétique ou à la génomique, et nous pouvons aller dans cette voie. Que faisons-nous pour encourager ces types de cultures et ces secteurs?
    Steve, vous avez parlé de capitaux et d'actions accréditives. Avez-vous une idée de ce que nous pourrions faire d'autre pour favoriser la croissance de votre secteur? Nous avons besoin qu'il prenne de l'importance. À l'heure actuelle, qu'est-ce qui freine sa croissance?
    Deux éléments freinent la croissance de notre secteur. L'un d'entre eux est le temps requis pour mettre en marché un produit et savoir si le marché l'acceptera. Avec tout le respect que je vous dois, il ne serait d'aucun secours de vouloir imposer un moratoire sur certains produits par manque de certitude, car cela ne ferait qu'alimenter un climat d'incertitude qui lui décourage les investissements du secteur privé.
    Le deuxième élément qui permettrait d'assurer la croissance de notre secteur, c'est de faire savoir que l'agriculture ne se limite pas à l'alimentation. C'est aussi une question d'environnement, de mise à profit de nouvelles occasions, d'aménagement du territoire agricole, et ainsi de suite. Le grand public et probablement même de nombreux députés ne sont pas conscients de tout ce que l'agriculture peut apporter aux discussions et du genre de politiques qu'il faut promouvoir pour que l'apport de l'agriculture soit reconnu et mis à profit. C'est bien plus que des travaux agricoles. Il s'agit d'un moteur économique qu'il faut alimenter et faire tourner plus vite pour qu'il prenne de la valeur.

  (1240)  

    Vous avez mentionné que la réglementation pose problème. Aujourd'hui, il y a davantage de nouvelles technologies qu'il y a cinq ans, ou même deux ans. Le système de réglementation est-il suffisamment souple et rapide pour suivre le rythme des nouvelles technologies et nous permettre d'accélérer le processus de façon sécuritaire?
    Peter, pourriez-vous répondre?
    À certains égards, oui; à bien d'autres égards, non.
    Ce n'est pas parce que les organismes de réglementation ne sont pas en mesure d'effectuer les évaluations techniques. Dans de nombreux cas, c'est l'obtention des autorisations légales qui pose problème. Le système de réglementation comporte des lacunes. On ne peut pas se contenter de corriger un aspect seulement de celui-ci et penser qu'il va bien fonctionner. Les entreprises savent, quoique vaguement, que le système s'améliore. Toutefois, il continue d'afficher des lacunes, d'où la difficulté d'obtenir des capitaux privés pour financer le processus de commercialisation, où bon nombre des coûts surviennent.
    Vous voulez savoir comment accélérer l'innovation. Prenons l'exemple du gouvernement fédéral. Il dépense beaucoup d'argent, mais pas toujours à bon escient. Il dépense de façon ponctuelle, souvent dans des secteurs d'activité intéressants, mais qui n'ont pas nécessairement un impact important. Génome Canada, qui collabore avec le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire au chapitre de l'environnement, ne finance pratiquement aucune recherche depuis cinq ans sur les récoltes dominantes suivantes: les légumineuses, le canola, qui est considéré comme un dossier fermé, le blé ou encore les céréales fourragères. Il y a beaucoup d'études scientifiques intéressantes qui sont menées, mais elles n'ont rien à voir avec les besoins de l'industrie d'aujourd'hui.
    Autre point: la propriété intellectuelle. Le gouvernement fédéral détient d'importants droits de propriété intellectuelle. Ne vous faites pas d'illusions: vous travaillez peut-être pour le bien collectif, mais vous détenez beaucoup de droits de propriété intellectuelle, et il est difficile dans certains cas d'en tirer partie. Les politiques fédérales sont parfois plus rigoureuses que celles du secteur privé, de sorte que le fait de breveter ou de commercialiser une technologie coûte très cher. Je sais que cette question préoccupe Industrie Canada, Agriculture Canada, et tous les organismes voués à la recherche. Nous en discutons, mais nous revenons toujours au principe voulant que chaque entité demeure propriétaire de ses droits de propriété intellectuelle.
    Il y a des entreprises privées qui affirment que, dans certains cas, il est plus facile pour elles d'agir à titre d'agent auprès de deux organismes publics pour faire breveter une technologie. C'est donc dire que le CNRC et Agriculture Canada ne peuvent parfois faire breveter leur technologie, même si elle appartient à la Couronne, alors qu'une importante multinationale peut y arriver. Ce genre de situation crée des tensions et ralentit la commercialisation, ce qui a un impact sur les revenus.
    Merci, monsieur Phillips.
    Madame Bonsant.

[Français]

    Je vais revenir à vous, monsieur Zettel.
    Vous avez dit qu'il y avait beaucoup de gens qui essayaient de se déplacer pour avoir un meilleur environnement pour l'agriculture biologique. La distance de 0,8 kilomètre entre les OGM et les cultures biologiques n'est pas suffisante à cause du vent, de l'air et de la pollinisation.
    Selon vous, qui devrait avoir la responsabilité de compenser les pertes commerciales des agriculteurs qui possèdent des fermes biologiques? De plus en plus de fermes biologiques ne sont plus en mesure de vendre leurs produits. À un moment donné, elles finissent par faire faillite. Qui devrait être responsable de la perte de revenus de ces agriculteurs?

  (1245)  

[Traduction]

    En tant que contribuable, je serais probablement déçu si le gouvernement était tenu responsable de la perte de revenus. Soyons honnêtes: il y a des semences qui sont utilisées depuis 15 ans, en toute innocence, par des agriculteurs. Nous n'allons pas retourner en arrière et le rendre responsable de ces pertes.
    Cela dit, il faut penser à l'avenir. Si nous savons qu'un nouveau produit risque d'amplifier le problème, nous pouvons arrêter sa production. C'est là la chose la plus sensée à faire.
    Par ailleurs, je pense que le fournisseur de semences doit être tenu en partie responsable de la situation, tout comme la personne qui achète et utilise celles-ci. Ils vont prendre des mesures pour éviter que leur geste ait des conséquences économiques sur leurs voisins s'ils savent qu'ils peuvent en être tenus responsables. Il faut toutefois, pour cela, modifier la réglementation.

[Français]

    Monsieur Phillips, vous avez parlé précédemment des investisseurs privés. J'ai de la difficulté à m'imaginer qui pourrait investir dans les semences, outre Monsanto ou Cargill, parce que je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de gens qui ont les reins assez solides pour développer certaines semences et les faire homologuer.
    Dans mon comté, il y a quelques compagnies biologiques qui ont des produits qui aident la terre sur le plan de l'environnement, mais elles ne disposent pas d'une somme de 100 000 $, de 150 000 $ ou de 200 000 $ pour faire homologuer leurs produits. Ne craignez-vous pas qu'à long terme, lorsqu'on demande trop d'argent au secteur privé, il y ait des monopoles ou qu'une compagnie prenne le monopole sur toutes les semences au détriment des personnes qui ne veulent pas être obligées d'acheter ces mêmes semences?

[Traduction]

    J'ai deux commentaires à faire à ce sujet.
    D'abord, pour ce qui est de savoir s'il y a des investisseurs privés autres que les grandes multinationales qui investissent dans ce secteur, la réponse est oui. La plupart des cultures produites au Canada sont assujetties à des prélèvements qui sont en train de devenir une activité fort lucrative. Par exemple, les producteurs de légumineuses en Saskatchewan ont conclu une entente de cinq à sept ans, évaluée à 10 ou 15 millions de dollars, avec le Crop Development Centre. Celui-ci dispose de capitaux importants, et ce, depuis longtemps, qui lui permet de mener des recherches sur diverses cultures. Dans de nombreux cas, il ne représente pas le bailleur de fond majoritaire d'un projet, mais il est très influent, car ses investissements permettent aux multinationales de voir où se trouvent les débouchés plus intéressants.
    Ensuite, concernant la création d'un monopole, il est vrai que les coûts très élevés liés à la réglementation soulèvent de grandes inquiétudes. Les multinationales sont les seules à pouvoir les assumer. C'est ce qui se passe dans l'industrie pharmaceutique, dans l'industrie agroalimentaire et dans l'industrie financière.
    Pour toutes sortes de bonnes raisons, nous érigeons des barrières, et les seules personnes qui peuvent les franchir, ce sont les mieux nantis. Pour venir à bout de ce problème, de nombreux pays créent des lignées de germoplasmes d'élite très efficaces. Les entreprises ne produisent pas de germoplasmes d'élite dans la plupart des cas, sauf pour ce qui est du blé. Les autres membres de l'industrie utilisent des technologies qui s'ajoutent à celles déjà disponibles publiquement. Donc, si vous possédez une lignée de germoplasmes d'élite efficace, n'importe quel joueur peut faire son apparition et disputer ce marché.
    La bonne nouvelle, c'est que nous avons, au Canada, le canola, un produit qui a été crée au moyen de technologies génétiques.
    Nous avons de la concurrence: trois grandes multinationales se livrent bataille. Elles n'obtiennent pas les rentes, les profits qu'elles pensaient avoir, parce qu'elles doivent se livrer concurrence. Il est vrai qu'elles génèrent des profits intéressants, mais elles en laissent une bonne partie entre les mains des producteurs et des consommateurs à l'échelle internationale.
    Le monopole demeure un enjeu critique. Certaines entreprises exercent un monopole virtuel sur certaines catégories de produits. Le défi consiste à créer un système qui attire plus d'une grande entreprise, ou qui permet aux groupes de producteurs de diriger les efforts de recherche et, partant, d'empocher une bonne partie des rentes.
    Votre temps est écoulé, madame Bonsant. Je suis désolé.
    Monsieur Shipley, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une brève question à poser. Elle s'adresse à M. Zettel.
    Vous avez dit, quand vous avez exposé le premier principe, que l'agriculture biologique laisse une empreinte carbone plus faible, qu'elle utilise moins d'énergie. Je ne sais pas ce que vous utilisez comme élément de comparaison. Pouvez-vous nous envoyer les recherches, les études sur lesquelles vous vous appuyez pour tirer cette conclusion?

  (1250)  

    Oui.
    Très bien. Merci.
    Steve, l'industrie que vous nous décrivez est intrigante. C'est un sujet qui a été peu abordé, sauf dans votre exposé. J'aimerais avoir des précisions là-dessus. Vous parlez de cultiver de nouveaux produits. Vous dites que les agriculteurs pourraient cultiver des produits à des fins énergétiques, mais sans toucher à ceux qui sont déjà cultivés à des fins alimentaires. Je songe, par exemple, au canola, au soya.
    Ai-je raison de dire cela?
    Tout à fait.
    N'utiliseraient-ils pas les mêmes terres qui sont réservées à la culture du canola et du soya?
    Non. Au Canada, il y a de vastes superficies de terres qui sont classées dans la catégorie 3 ou 4. Il ne serait pas possible, dans des conditions climatiques typiques, de produire à cet endroit des cultures vivrières pour un profit. Les intrants seraient trop élevés, tout comme les besoins en eau et en engrais.
    C'est ce qui a amené l'industrie du carbone renouvelable, si je peux m'exprimer ainsi, à répertorier les plantes qui peuvent être cultivées sur des terres marginales, à des coûts d'intrant plus bas: moins d'eau, moins d'engrais, moins d'herbicides pour lutter contre les mauvaises herbes et les ravageurs. Ces plantes seraient plus résistantes aux insectes et aux maladies, et feraient un meilleur usage des sels nutritifs qui se retrouvent dans le sol, ce qui éviterait le recours aux engrais conventionnels.
    C'est l'approche qu'il faut adopter dans le domaine de l'énergie renouvelable. Nous avons tort d'utiliser les terres destinées à la production alimentaire à des fins énergétiques pour alimenter nos véhicules. La biotechnologie constitue une piste de solution à la fois pratique et intéressante, car elle permet de créer, de concevoir un produit qui exige, dans l'ensemble, moins d'énergie lorsque le vient le temps de le traiter et de le convertir en combustible liquide pour le transport.
    Il me semblerait, compte tenu de tous les avantages qui découlent de... Vous dites que les exigences relatives au sol, aux engrais, sont moins élevées dans le cas d'une terre moins productive. S'agit-il d'un produit génétiquement modifié?
    Il ne le serait pas dans un premier temps, mais pour atteindre la parité avec le pétrole, il va falloir modifier génétiquement la plante pour en tirer le maximum et produire du pétrole.

  (1255)  

    Dites-moi où en est la recherche dans ce domaine, où nous en sommes — où vous en êtes — à ce chapitre. Où en êtes-vous sur le plan du développement, de la démonstration? Est-ce qu'il va falloir beaucoup de temps pour convaincre les agriculteurs de...?
    Un témoins a laissé entendre que ce volet de l'industrie de la biotechnologie est bien connu. Je pense plutôt que les Canadiens, les consommateurs en général ne savent pas vraiment ce qu'est la biotechnologie. Nous continuons de mettre l'accent aujourd'hui sur les points que nous abordons lors de chaque réunion, alors que vous nous présentez un produit qui peut être cultivé sur des terres qui n'ont vraisemblablement pas été utilisées à des fins agricoles productives.
    Je vais essayer de revenir au début de votre question.
    Oui. Je suis désolé.
    Côté développement, nous allons lancer notre premier produit en 2012. Il ne sera pas génétiquement modifié. Notre produit génétiquement modifié va être lancé en 2014.
    Concernant les demandes des producteurs, et les agriculteurs en sont conscients, la Saskatchewan Mustard Development Commission a laissé entendre qu'elle aimerait acheter des semences qui seraient plantées sur un minimum de 150 000 acres de terre, dans un premier temps. Il s'agit, pour elle, d'un projet énorme, et elle le sait fort bien, car elle doit composer avec une région plus aride et des sols plus pauvres qui servent à la culture de graines de semences et non de canola. Elle doit trouver d'autres sources de revenu.
    D'après plusieurs sondages menés récemment en Amérique du Nord, jusqu'à 75 p. 100 des producteurs cherchent des cultures de remplacement pour diversifier leurs sources de revenu, pour bénéficier d'une sécurité de revenu, pour créer de nouveaux marchés.
    Je ne pense pas que le pourcentage soit aussi élevé dans la région d'où je viens, en Ontario. Il n'y a pas tellement de terres marginales dans le Sud-Ouest de l'Ontario. Toutefois, dans le Nord, il semble y avoir beaucoup de débouchés pour l'agriculture.
    Pouvez-vous également nous dire... Vous avez parlé d'un bilan carbone neutre. Est-ce que cela s'applique à d'autres produits, à d'autres options?
    Eh bien, les plantes absorbent le carbone qui se trouve dans l'atmosphère, les gaz à effet de serre, et le convertissent en hydrocarbure que nous pouvons utiliser. D'où l'expression bilan carbone neutre. Nous ne convertissons pas les combustibles fossiles extraits du sol en hydrocarbure.
    Nous voulons produire le plus d'hydrocarbures utilisables par acre de terre, mais à un coût minime et en laissant la plus petite empreinte écologique possible. En réduisant les besoins en engrais, en eau, en équipement — l'utilisation moins grande du tracteur entraîne des économies de carburant —, nous pourrons grandement réduire les émissions de gaz à effet de serre.
    Grâce au financement que nous recevons de TDDC, nous sommes en mesure de quantifier l'indice de soutenabilité. Tous les gouvernements exigent maintenant que les carburants renouvelables fassent l'objet d'une analyse de cycle de vie qui démontre qu'ils entraînent effectivement une baisse des émissions de gaz à effet de serre. Je peux vous dire que l' éthanol de maïs ne procure aucun avantage de ce côté-là, alors que les produits à base d'huile, comme le biodiesel, réduisent les émissions de gaz à effet de serre.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Eyking, vous avez droit aux cinq dernières minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins d'être venus nous rencontrer.
    Le Globe and Mail d'aujourd'hui consacre tout un dossier à la faim. J'ai l'impression, quand on lit les différents articles, que l'économie passe après la production alimentaire — comment nous allons produire les aliments, combien nous devrions en produire. Cet enjeu comporte un volet scientifique: en tant que députés et membres du comité de l'agriculture, nous devons penser aux agriculteurs, à la production alimentaire, sauf que nous représentons également des électeurs qui, eux aussi, s'intéressent à la question.
    Autre point: les consommateurs reçoivent des messages contradictoires. Les pays sous-développés se préoccupent uniquement de famine, tandis que nos électeurs, eux, se soucient davantage de la sécurité alimentaire. Le problème, peu importe les recherches que nous effectuons et que vous qualifiez de scientifiques, ce sont les constatations qui se dégagent des études menées en Europe. Je ne sais pas dans quelle mesure elles sont fondées, et vous pouvez nous dire ce que vous en pensez. Ils donnent des aliments génétiquement modifiés aux souris et autre chose du genre. C'est ce qu'ils font. Nous pouvons en rire, dire que ce n'est pas important, mais les décisions ne reposent pas toujours sur le pragmatique, la raison. Elles reposent parfois sur les émotions. Les décisions prises en Europe sont surtout fondées sur les émotions, point à la ligne.
    J'aimerais en savoir un peu plus sur les recherches scientifiques qui sont effectuées. Nous essayons d'éviter la question des OGM, mais c'est impossible. Si nous ne l'examinons pas de manière adéquate, nous allons en subir les conséquences. J'aimerais avoir des précisions au sujet des études qui sont réalisées en Europe, de ce monstre que l'on appelle OGM. Que pouvons-nous dire à nos électeurs?
    Ce qu'il faut se rappeler, comme le ferait n'importe quelle personne sensée, c'est que les experts scientifiques ne sont pas tous du même avis. Si vous aviez suffisamment d'argent, les scientifiques arriveraient à la conclusion que vous recherchez, surtout dans le domaine des sciences de la vie, de la biologie, où nous ne comprenons pas pleinement les mécanismes en jeu. La biologie, l'écologie, la santé des gens, des animaux, des plantes, des systèmes agricoles sont des sujets très complexes. Nous commençons à peine à nous familiariser avec ceux-ci. Je pense que tous les bons scientifiques de par le monde s'entendraient pour dire la même chose.
    Si nous partons de cette hypothèse, quelle est la réponse la plus sensée? Je reviens au principe de précaution auquel votre collègue a fait allusion. Si nous pouvons nous passer d'une chose, laissons-la de côté. Si nous en avons vraiment besoin, comme c'est la cas pour la production de biocarburant sur des terres marginales, alors fonçons. C'est ce que je dirais à vos électeurs s'ils me posaient la question.

  (1300)  

    Allez-y, monsieur Phillips.
    Vous avez posé une question au sujet du 21siècle. Comment normaliser les recherches scientifiques? Comment réunir toutes ces idées différentes et arriver à une conclusion?
    Il y a beaucoup de processus. Il n'y a pas autant de diversité qu'on le croit dans le monde scientifique. D'après un courant de pensée central très fort, la technologie, jusqu'ici, n'a pas généré de risque distinctif dans notre système alimentaire. Il ne faut pas oublier pas que notre système alimentaire n'est pas à l'abri des risques. La plupart des facteurs qui nous tuent n'ont rien à voir avec la biotechnologie.
    Cela semble être la norme, mais la question fondamentale que vous posez, à mon avis, est la suivante: quel rôle, en tant que députés, en tant que membres du gouvernement fédéral, pouvez-vous jouer au chapitre de la normalisation, de la compréhension de cette profusion de données.
    J'ai deux commentaires à faire à ce sujet: d'abord, il ne faut pas porter attention à tous les articles qui sont publiés, parce que la science avance à bâtons rompus. Il est rare qu'un seul article arrive à changer l'opinion générale que l'on se fait de la science.
    Ensuite, la bureaucratie elle-même dispose d'une capacité énorme, sauf que pendant presque 15 ans, elle n'a rien fait du côté de la normalisation scientifique. Lorsque la biotechnologie a vu le jour, le Canada s'est attaché, au sein de l'OCDE, à normaliser bon nombre des pratiques scientifiques dans les documents adoptés par consensus. Nous avons placé toute cette information sur une plate-forme commune pour que les gens puissent la maîtriser. Nous avons transféré cette responsabilité à d'autres. Si nous voulons continuer de jouer un rôle dans ce domaine au 21siècle, nous devons reprendre une partie de cette responsabilité.
    Merci beaucoup.
    Notre temps est écoulé. Je tiens à remercier tous les témoins d'avoir participé à cette discussion. Nous comptons, à un moment donné, publier un rapport sur l'industrie de la biotechnologie. Encore une fois, merci.
    La prochaine réunion va avoir lieu jeudi.
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