Passer au contenu
Début du contenu

FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 012 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 3 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Chers collègues, nous accueillons, par voie de vidéoconférence, MM. Pennell et Harvey.
    Avant de céder la parole à nos témoins, j'aimerais rappeler comment les choses se déroulent. Nous accordons habituellement environ 10 minutes à chaque témoin qui désire présenter des remarques liminaires. Les députés ont une période bien limitée pour poser des questions et recevoir des réponses.
    Y a-t-il des questions avant que nous ne commencions, messieurs?
    Oui. Vous disposerez de 10 minutes pour votre déclaration liminaire, et vous pouvez donc en profiter pour nous donner un peu plus de renseignements sur vos antécédents.
    Monsieur Pennell, vous pouvez commencer. Ensuite, nous passerons à M. Harvey.
    Merci.
    Bonjour. Après vous avoir parlé brièvement de ma carrière, j'aimerais faire quelques commentaires qui, à mon avis, sont fort pertinents. Je respecterai les 10 minutes qui m'ont été accordées.
    Je suis titulaire d'un doctorat de l'Université McGill en océanographie biologique. J'ai enseigné dans le secteur des pêches et de l'aquaculture pendant environ 30 ans et j'ai pris ma retraite, comme enseignant, il y a cinq ou six ans. J'ai enseigné à Alert Bay et également à Nanaimo, à l'Université Vancouver Island.
    Je suis spécialiste, entre autres, en salmoniculture, en biologie des salmonidés, en biologie des invertébrés, en conchyliculture et en écologie marine. Pour ce qui est du pou du poisson, j'ai eu de l'expérience sur le terrain dans l'archipel Broughtons et dans les îles Gulf pendant une période de trois ou quatre ans. Je faisais partie du Comité consultatif scientifique du Forum sur le saumon du Pacifique et je suis actuellement directeur de l'Institut pour la recherche côtière de l'Université Vancouver Island et associé de recherche au centre qui étudie les mollusques à la VIU.
    J'aimerais d'abord faire quelques annonces. Je n'ai pas vraiment eu beaucoup de temps pour me préparer — en fait, je n'ai eu qu'hier. Il y a des domaines dans lesquels je ne me sens pas expert, alors si vous posez des questions sur un domaine où je ne juge pas être compétent ou en connaître suffisamment, je vous le dirai.
    Ce que je veux dire surtout — et ce ne sera probablement pas la première fois qu'on vous le dit —, c'est qu'on a dépensé beaucoup d'argent pour étudier le pou, les exploitations salmonicoles et le saumon sauvage. Je pense qu'environ 20 millions de dollars y ont été consacrés au cours des 10 dernières années; certains disent que c'est peut-être même 30 millions de dollars, voire plus.
    Une bonne partie de ces recherches ont été effectuées dans le but de prouver ou de réfuter le fait que l'aquaculture avait un impact, par l'entremise du pou du poisson, sur les populations de saumon rose. Par conséquent, bon nombre de ces travaux de recherche, à mon avis, ne se sont pas attardés sur les connaissances critiques qu'il nous faut pour régler le problème.
    Par exemple, nous ne savons pas comment le pou du poisson, à son stade infectieux, qui est très rare dans le plancton, trouve son hôte, le saumon rose. Nous savons que c'est ce qui se produit, mais nous ne savons pas comment le pou arrive à trouver son hôte, et c'est quelque chose qu'il nous faut absolument savoir si nous voulons vraiment procéder à une étude épidémiologique. Cela a un impact sur tous les modèles que vous pourriez utiliser pour décrire l'infection et évidemment, cela pourrait jouer sur les techniques de gestion utilisées.
    Nous n'avons en fait qu'une idée générale et fort vague de la façon dont l'infection par le pou du poisson en haute mer peut continuer à toucher le poisson. Comment le pou est-il transféré dans des zones où il n'y a pas d'exploitations salmonicoles, par exemple, à de jeunes poissons lors de leur séjour en haute mer et dans les zones côtières? En dépit d'un grand nombre de théories, nous n'avons aucune certitude.
    De plus, le pou du poisson que nous retrouvons en Colombie-Britannique — je sais qu'on vous l'a déjà probablement dit — est probablement une espèce différente. Des études génomiques démontrent qu'il s'agit d'un pou différent, ce qui est parfaitement logique. Par conséquent, nombre des données que nous retrouvons dans les recherches effectuées en Europe pendant une longue période ne peuvent pas être utilisées ici avec quelque confiance que ce soit. Nous n'en connaissons pas suffisamment sur l'impact relatif de la température et de la salinité sur notre espèce de pou du poisson. Nous n'en savons pas suffisamment sur l'interaction entre le parasite et le système immunitaire de l'hôte, et cela est très important.
    Nous savons que le saumon du Pacifique a une bonne résistance naturelle au pou du poisson. Autrement dit, nous parlons ici d'un parasite qui a bien su s'adapter. Mais il y a beaucoup d'autres facteurs que nous ne connaissons pas parce qu'il s'agit ici d'une nouvelle espèce, et nous n'étions pas conscients de cet aspect lorsque nous avons commencé nos travaux.
    De plus, et vous êtes sans aucun doute bien au courant de la situation, c'est qu'il existe en Colombie-Britannique une polarisation marquée à ce sujet. Les scientifiques se penchent sur le débat, et c'est bien, mais l'intensité du débat ici à ce sujet est très forte.

  (1540)  

C'était un débat beaucoup plus animé et plus récurrent, à mon avis, que pour d'autres sujets, à un point tel qu'il y a des scientifiques de renommée des deux côtés qui tiennent des propos complètement contraires et qui ne sont pas du tout d'accord les uns avec les autres. Cela ne facilite pas les choses pour les non-spécialistes qui essaient de se faire une opinion quand vous avez des spécialistes fort compétents qui ne sont pas du tout du même avis. C'est un grave problème.
    Il importe également de signaler — quoique je ne sais pas si nombre de scientifiques seraient d'accord avec moi — qu'en dépit de toutes les recherches que nous effectuons dans le domaine des sciences naturelles, de la biologie et de l'océanographie, pour n'en mentionner que quelques-uns, nous n'avons toujours pas trouvé de solutions au problème. Nous allons d'un problème à l'autre, parce que la vraie question, à mon avis, est la suivante: devrions-nous avoir un secteur de la salmoniculture en Colombie-Britannique? Certains sont d'avis que nous devrions avoir des sites d'élevage, d'autres jugent que non. Le problème, c'est l'acceptation sociale de la salmoniculture.
    Même si toutes ces questions sont abordées comme étant des préoccupations environnementales et qu'on parle aussi de l'impact environnemental, y compris les effets négatifs sur le poisson sauvage, je pense que les vrais problèmes sont bien différents, parce que nous ne semblons jamais être en mesure de les régler. Peu importe les recherches scientifiques que nous effectuons, le conflit demeure toujours, et ne semble pas s'atténuer.
    Je serai heureux de revenir à cette question plus tard, si vous le désirez, mais je crois que les sciences sociales pourraient offrir tout autant de réponses à nos questions que les sciences naturelles, et c'est une chose que nous n'avons pas encore vraiment examiner en Colombie-Britannique.
    Permettez-moi de faire quelques autres commentaires. Je crois que nous avons eu parfaitement raison de nous attaquer au problème du pou du poisson lorsqu'il a fait surface il y a environ 10 ans, parce que le problème avait déjà existé pendant plusieurs années en Europe.
    Mais il s'agissait d'un problème politique, dès les premiers jours, quand des résidants de la province ont vu un grand nombre de poux du poisson sur les alevins du saumon rose après la plus grande échappée de saumons roses de l'histoire des salmonidés. Ils ont noté que le poisson portait des poux du poisson, puis, un an plus tard, en 2002, les remontes des saumons roses avaient chuté de façon dramatique.
    La population de saumons est passée d'environ 300 à 50 millions en une seule génération. C'est une chute extraordinaire. Ce n'est pas inusité pour le saumon rose... mais c'était quand même extrême. Il serait donc normal de se tourner vers le pou du poisson, mais le problème du pou du poisson a été cerné immédiatement par ceux qui vivent dans cette région de la province, par des gens qui voulaient que les sites de salmoniculture disparaissent du secteur depuis déjà plusieurs années.
    Il y a d'autres facteurs bien légitimes qui expliquent la chute dramatique de la population de saumons roses. Par exemple, il est fort possible qu'il y avait trop d'alevins pour la nourriture disponible. Il s'agit donc d'une mortalité attribuable à la densité. C'est la pierre angulaire de l'écologie moderne et de la gestion des pêches. L'abondance de la nourriture et le moment de l'apparition des alevins n'ont peut-être pas coïncidé. Peut-être les alevins sont-ils venus trop tôt ou la nourriture s'est-elle présentée plus tard. C'est un phénomène qui existe. Les conditions océaniques en haute mer ont également peut-être joué un rôle.
    Je ne dis pas que ces facteurs étaient présents lorsque les stocks ont chuté, mais parce que l'on sait que le saumon rose connaît d'importantes variations au niveau de la population et qu'il y a souvent des chutes dramatiques, et que cela se produisait bien avant qu'on invente la salmoniculture, et ce à des endroits où il n'y avait pas de sites de salmoniculture, je juge qu'on aurait dû au moins se pencher sur certaines de ces autres hypothèses à l'époque. Cependant, on a décidé de blâmer le pou du poisson et on n'est jamais revenu sur cette décision, et on n'a jamais étudié de plus près ces autres hypothèses. C'est regrettable.
    L'incidence de poux du poisson a diminué à la fois chez le poisson d'élevage et chez le poisson sauvage. Cela semble être une tendance qui se dessine depuis 2005. Nous ne pouvons pas vraiment déterminer si cette diminution est attribuable à des changements environnementaux, comme une baisse de la salinité de l'eau ou un changement de la température, mais nous savons clairement que les sites d'élevage sont traités, mis en jachère ou vidés, ou encore qu'ils n'ont que des saumoneaux avant que n'arrivent les alevins du saumon rose.
    Il s'agit là d'un programme de gestion locale qui a été lancé par le gouvernement provincial en collaboration avec les principaux salmoniculteurs de la région; je crois qu'il est juste de dire que la gestion des sites d'élevage a permis de limiter les risques associés aux exploitations, aux poux du poisson et aux saumons sauvages. En d'autres termes, il existe un système de gestion aujourd'hui qui devrait permettre de limiter le problème.
    Je désire mentionner le saumon rouge parce que j'ai noté dans les médias qu'on laisse entendre que la chute du nombre de saumons rouges dans le fleuve Fraser pourrait être attribuable au passage de saumoneaux rouges à proximité de sites de salmoniculture des îles Discovery à proximité de la rivière Campbell. Une bonne partie des travaux effectués en laboratoire au cours des deux ou trois dernières années ont démontré — et il faut être prudent quand on pense à transférer les résultats obtenus en laboratoire à ce qui se passe sur le terrain — que le saumon rose, qui ne fait que 0,2 gramme ou un cinquième de gramme lorsqu'il arrive à l'eau salée, est vulnérable au pou du poisson jusqu'à ce qu'il atteigne 0,3 ou 0,5 ou un demi-gramme. Puis, il acquiert une certaine résistance. Lorsque l'alevin atteint un gramme, il est alors très résistant au pou du poisson.
    Le saumon sockeye passe toute une année dans les lacs, et parfois plus longtemps, avant d'arriver à l'océan. Ces saumons sont assez gros. Ils sont des saumoneaux et non plus des alevins. Ils peuvent faire trois ou cinq grammes, et ils sont donc peut-être 25 fois plus gros que l'alevin du saumon rose. Leur peau et leurs écailles sont parfaitement développées et devraient offrir une plus grande résistance aux poux du poisson, même si ces derniers se fixaient sur eux lorsqu'ils passent près d'un site aquacole. Je pense donc que ce problème n'existe pas. C'est mon opinion personnelle.

  (1545)  

    J'aimerais enfin vous dire quelques mots sur la façon de ne pas faire les choses. En Colombie-Britannique... Permettez-moi de faire marche arrière. On dirait que les recherches effectuées sur les sites d'élevage du saumon portent souvent sur des sujets qui semblent préoccuper le public. Cela semble être logique: vous voulez régler les problèmes qui semblent préoccuper la population. Ces problèmes sont survenus par vague, et le problème le plus récent est celui du pou du poisson, et c'est en fait le problème qui a duré le plus longtemps et celui qui a fait couler le plus d'encre au cours des dernières années.
    Mais tout semble indiquer que les préoccupations du public sont tributaires de la couverture médiatique. Ainsi, ceux qui savent mieux convaincre les journalistes de rédiger des articles sur un sujet particulier semblent être ceux qui dictent les priorités en matière de recherche. Tout compte fait, si le Vancouver Sun décide des priorités en matière de recherche, ce n'est peut-être pas l'idéal. Dans ces circonstances, le travail scientifique, comme je l'ai déjà signalé, devient polarisé sur la recherche de la preuve irréfutable. Ainsi, on gaspille beaucoup de temps et d'argent simplement pour trouver quelqu'un à blâmer et pour éviter d'être blâmé, et c'est pourquoi nous ne connaissons pas certains des aspects de la biologie du saumon rose, du pou du saumon ou du pou du poisson.
    Si vous pensez au temps que les gestionnaires et les fonctionnaires ont consacré à cette question, vous ne pourrez jamais vraiment évaluer combien la question du pou du poisson nous a coûté — et nous ne savons toujours pas ce que nous devons savoir. Nombre de questions moins charismatiques ont été négligées et l'on dépense de l'argent sur une question qui a essentiellement fait l'objet d'une promotion par les médias ou par ceux qui ont su comment rejoindre les médias.
    Il nous faut donc une nouvelle approche. Je ne sais pas quoi. Je crois qu'il faut faire preuve d'innovation. Encore une fois, les sciences sociales pourraient peut-être nous aider.
    Voilà qui met fin à mes commentaires.
    Merci, monsieur Pennell.
    Monsieur Harvey.
    Je vais aborder la question sous un angle légèrement différent.
    Bonjour, Bill.
    M. William Pennell: Bonjour!
    M. Brian Harvey: Je pense que je devrais me contenter de vous dire qui je suis, comment j'en suis venu à m'intéresser au pou du poisson, et quelles sont mes connaissances spécialisées. Je suppose que je suis ici pour répondre à vos questions et pour vous fournir des renseignements et peut-être même mon opinion.
    Je suis un biologiste indépendant. Je travaille à titre indépendant depuis que j'ai reçu mon doctorat en 1979 de l'Université de Victoria. J'ai étudié la physiologie du poisson dans le secteur de la pêche et j'ai concentré mes études sur l'utilisation durable de la biodiversité aquatique.
    Je connais assez bien la biologie et les problèmes associés au pou du poisson parce que j'ai eu deux contrats avec le Forum du saumon du Pacifique de la Colombie-Britannique en 2008 et en 2009. On m'avait demandé d'étudier les publications scientifiques revues par un comité de lecture pertinente portant sur l'interaction entre le saumon sauvage et le pou du poisson provenant des élevages de saumon de l'archipel Broughton. C'est la tâche qu'on m'avait confiée. Je ne suis pas un biologiste expert du pou du poisson. Je n'ai pas d'expérience personnelle ou professionnelle en la matière car je n'ai pas effectué des expériences sur le pou du poisson. J'ai eu par la suite un autre contrat du forum sur le saumon, qui m'avait demandé d'étudier tout ce qui présentait un danger pour le saumon sauvage en Colombie-Britannique, ce qui incluait le pou du poisson.
    Dans les 10 premières années de ma carrière, je me suis concentré tout particulièrement sur la conservation de la biodiversité aquatique dans les pays en voie de développement et au sein des collectivités autochtones. Après environ 10 ans, j'ai mis sur pied une ONG canadienne qui, à mon avis, est une bonne réussite — et elle existe toujours d'ailleurs. Il s'agit d'un organisme à but non lucratif appelé World Fisheries Trust qui permet simplement d'appliquer les conclusions de mes recherches au Canada et dans les pays en voie de développement. Nous avons assuré la formation d'intervenants et mené des travaux de développement communautaire. J'ai pendant cette période publié quatre ouvrages techniques sur la conservation de la diversité biologique aquatique.
    Dans la troisième décennie de ma carrière, j'ai quitté le World Fisheries Trust pour me concentrer plutôt sur mon rôle de conseiller indépendant et d'auteur. Je me suis spécialisé dans deux secteurs: j'ai préparé des examens, des évaluations des risques et des analyses de politique sur les secteurs des pêches et de l'aquaculture pour des organismes nationaux et internationaux. Puis, faisant peut-être de preuve d'un peu plus de créativité, j'ai écrit et publié des articles, des chroniques et des ouvrages sur la science et le développement des pêches. Ces publications étaient destinées au grand public.
    J'ai publié mon premier vrai livre en 2008 intitulé The End of the River . Cet ouvrage porte sur la gestion de l'eau et les pêches à l'échelle internationale et plus particulièrement, la gestion de l'eau au Brésil.
    Au fil des ans, divers organismes comme la FAO des Nations Unies, l'ACDI, le CRDI, Pêches et Océans, la Banque mondiale, le Programme de l'environnement des Nations Unies, la Convention sur la diversité biologique de Montréal et de nombreux autres organismes ont financé mes travaux.
    J'ai rédigé plusieurs analyses des risques et des résumés biologiques pour le MPO. Ces documents portaient principalement sur des espèces relevant du COSEPAC ou figurant sur la liste des espèces aquatiques en péril. Certaines de ces espèces avaient fait couler beaucoup d'encre, dont le saumon rouge du lac Cultus et le naseux Nooky, un petit poisson obscur qui a tout un passé politique.
    J'oeuvre dans le secteur des pêches durables et de la conservation de la biodiversité au Canada, en Asie du Sud-Est et en Amérique latine depuis environ 25 ans. J'ai même lancé une longue campagne pour la préservation de la diversité génétique du saumon, et je connais donc assez bien les problèmes relatifs au saumon en Colombie-Britannique.

  (1550)  

    J'ai organisé et présidé un grand nombre de conférences et d'ateliers internationaux sur la biodiversité aquatique et j'ai oeuvré à titre de conseiller auprès des gouvernements provinciaux et fédéral sur certaines de ces questions. J'ai aussi travaillé étroitement avec les premières nations. J'ai en fait beaucoup collaboré avec elles, y compris les Shuswap, en Colombie-Britannique, les Nuu-chah-nulth, qui regroupent plusieurs bandes, les Carrier-Sekani et les Sliammon.
    À l'heure actuelle, je suis expert-conseil et écrivain. Pour ce qui est de la consultation, je me concentre sur les questions de politique et de biodiversité aquatique.

  (1555)  

    Merci beaucoup, monsieur Harvey.
    Monsieur MacAulay.
    Merci beaucoup, messieurs Pennell et Harvey. Bienvenue.
    Vous disposez de beaucoup de renseignements et de données, mais nous avons entendu des commentaires contradictoires au comité. Nous avons entendu Mme Alexandra Morton. Nous avons entendu des représentants du gouvernement provincial, des vétérinaires.
    Je pense que vous savez tous deux ce que Mme Morton nous dirait, et vos vétérinaires provinciaux nous ont dit que le pou du poisson accompagnait le saumon sauvage qui revient de la mer, et qu'il ne provient pas des élevages. Comment réagissez-vous à cette affirmation, à savoir que le pou du poisson ne provient pas des sites d'élevage mais plutôt du poisson sauvage?
    Monsieur Pennell.
    Je ne crois pas que nous connaissons vraiment son origine. Bien avant que cette question ne fasse couler autant d'encre, les concentrations de poux du poisson dans les sites d'élevage étaient probablement beaucoup plus grandes qu'elles ne le sont aujourd'hui, grâce au système de traitement intégré. Je ne pense pas qu'il soit possible de connaître exactement l'origine du pou du poisson. Le pou infecte le saumon rose.
    Un grand nombre de questions n'ont pas encore reçu de réponses. Je ne dis pas qu'il est impossible que le pou du poisson provienne des élevages; il est parfaitement logique de dire que c'est de là que les poux viennent, ou qu'une proportion d'entre eux venait des sites d'élevage. Cependant, nous en savons très peu sur les populations d'élevage. Nous ne savons pas ce qu'il en est de l'infection en hiver, par exemple. Elle semble commencer en décembre, après que la majorité des poissons sauvages sont déjà passés.
    Il y a donc toute une série de questions et de problèmes qui n'ont pas encore reçu réponse. Si j'ai raison de croire que les sites d'élevage sont aujourd'hui assujettis à une bonne gestion, ce qui veut dire que le pou du poisson des élevages salmonicoles se trouve dans une concentration réduite lorsque les jeunes poissons sauvages passent à proximité des sites, je dirais donc que nous avons réglé le problème de façon pratique, même si nous ne connaissons pas encore les dynamiques de la situation, qu'il y ait pisciculture ou pas.
    Monsieur Harvey, est-ce que vous êtes du même avis? Dites-vous, tout compte fait, que nous avons dépensé 30 millions de dollars dans ce dossier et que nous avons appris très peu de choses, voire rien du tout?
    Est-ce que vous m'adressez cette question?
    Oui. Je suppose que je pourrais la poser à M. Pennell, mais vous pouvez y répondre tous les deux, parce que le fait est que nous avons entendu toutes sortes de propos contradictoires.
    Après avoir entendu vos déclarations liminaires, et tout particulièrement celle de M. Pennell, il est évident que nous ne savons pas grand-chose sur le problème. C'est ce qu'on nous dit. Nous avons dépensé beaucoup d'argent, mais nous n'en connaissons toujours pas beaucoup, nous ne savons pas d'où provient le pou du poisson. Ce pou résiste-t-il aux produits SLICE? Oui ou non? Est-ce la méthode qu'il faudrait employer? Le pou du poisson provient-il des sites d'élevage ou provient-il du poisson sauvage? Je pense que c'est certainement un problème très important en ce moment sur la côte Ouest.
    J'aimerais apporter une petite précision à ce que j'ai dit plutôt. Nous avons dépensé beaucoup d'argent, mais nous avons appris beaucoup. Je pense simplement qu'il y a encore certains éléments que nous ne savons pas, que nous aurions peut-être su si nous avions abordé les choses un peu différemment. Je ne veux pas dire que nous n'avons rien fait.
    J'aimerais vous demander alors de nous dire ce que nous pourrions faire. C'est ce que notre comité voudrait savoir, ce que nous devrions faire.
    Nous savons qu'il s'agit là d'un grave problème. Est-ce que la biomasse de saumons est en chute libre? Les saumons sont-ils en danger? Sont-ils menacés? Quelles mesures devrions-nous prendre? Quelles mesures notre comité peut-il proposer au gouvernement? C'est ce que nous voulons savoir. Nous sommes ici, nous écoutons les experts, et je suis convaincu que vous nous faites part du meilleur de vos connaissances, mais le problème, c'est que nous semblons entendre deux sons de cloche.
    Que devrions-nous faire? Que proposeriez-vous si vous deviez dire au gouvernement ce qu'il doit faire pour mettre fin à ce déclin important des stocks? Est-ce que cette situation peut s'expliquer de quelque façon que ce soit par la présence du pou du poisson?
    Je pense que quelqu'un attend que je fasse des commentaires. Alors j'y vais.
    Je dois rappeler que j'aborde les choses sous un angle légèrement différent parce qu'on m'a demandé d'étudier les documents scientifiques publiés pour déterminer s'il y avait un lien entre l'aquaculture et la présence de poux du poisson sur le saumon rose.

  (1600)  

    Un instant, monsieur! Est-ce qu'il s'agit là des études que vous avez effectuées en 2008 et 2009?
    Oui, j'ai effectué deux études. La deuxième était un suivi. En fait, l'étude de 2009 n'était qu'une mise à jour de celle de 2008.
    Très bien. C'est ce que j'aimerais savoir: qu'avez-vous découvert lorsque vous avez passé en revue les documents scientifiques?
    La question qui a été posée est la suivante: le pou du poisson qui provient des élevages de saumon entraîne-t-il la diminution des populations de saumons roses dans l'archipel Broughton? C'était la vraie question.
    Il est très difficile de dire d'où vient le pou du poisson et des choses du genre car il s'agit de questions techniques très compliquées de biologie, et nous ne sommes pas en mesure de répondre avec certitude. Cependant, c'est une très bonne hypothèse qu'on met à l'essai: la présence du pou du poisson est amplifiée dans les élevages de saumon et ce pou infecte les alevins du saumon rose. C'est une très bonne hypothèse et tout semble indiquer que c'est ce qui s'est produit.
    Cependant, j'ai conclu... et n'oubliez pas que cela remonte à 2008; je ne sais pas ce qu'on dit dans les travaux de recherche effectués au cours de la dernière année. Mais j'ai conclu qu'il y avait suffisamment de données scientifiques — assez claires d'ailleurs — pour déterminer si le pou du poisson provenant des élevages expliquait le déclin des stocks de salmonidés. Tout le monde n'est pas d'accord sur la question, ce qui est une très bonne chose dans le monde scientifique. C'est la façon dont la science fonctionne et évolue; les gens ne sont pas d'accord et éventuellement finissent par s'entendre. Cependant, pour ce qui est du pou du poisson, j'ai dû conclure qu'il n'y avait pas consensus.
    J'ai également dit autre chose qui n'a peut-être pas été bien entendu, soit qu'il y a quelque chose qu'on appelle le principe de précaution, qui a été mis de l'avant par la FAO il y a plus de 10 ans. Le principe de précaution vaut également dans le secteur des pêches et de l'aquaculture. C'est un peu, à mon avis, comme si vous mettiez votre ceinture de sécurité à bord d'une voiture lorsque vous savez qu'il y a un risque que vous soyez impliqué dans une collision frontale. Vous n'êtes pas convaincu qu'un accident va se produire, mais vous prenez vos précautions. C'est ce qu'on dit dans ce principe de précaution, mais le gouvernement et les collectivités ont beaucoup de difficulté à comprendre comment appliquer ce principe.
    Dans le cas qui nous occupe, tout semble indiquer qu'il y aurait de très bonnes raisons de faire appel au principe de précaution quand il s'agit du pou de poisson provenant des élevages de salmonidés. Cela semble déjà se produire, comme l'a indiqué Bill Pennell, puisqu'on procède actuellement à une gestion beaucoup plus stricte des sites aquacoles. C'est peut-être pourquoi il y a moins de poux du poisson et pourquoi leur nombre diminue progressivement depuis 2005. C'est peut-être la raison. Je crois que l'on commence à appliquer le principe de précaution et je pense qu'on devrait poursuivre dans cette voie.
    Si je comprends bien le message de votre déclaration liminaire, il serait également juste d'évaluer s'il s'agit peut-être simplement d'un épisode normal du cycle biologique du saumon et pas simplement un problème posé par les sites d'élevage.
    Donc on dit au comité que les élevages de poissons ne sont pas situés au bon endroit. Ces élevages sont situés près d'une pointe à proximité de la route de migration du poisson sauvage alors qu'ils pourraient être situés un peu plus près du rivage et ainsi avoir moins d'impact sur les stocks sauvages. À votre avis, cette critique est-elle justifiée?
    Je n'ai pas vraiment d'opinion là-dessus, mais ce que je sais, c'est ce que j'ai lu des travaux publiés par les experts. Je crois qu'ils ne s'entendent toujours pas sur la question, et c'est tout ce que je peux vous dire. Je ne suis pas un chercheur sur le pou du poisson, et je ne devrais donc pas avoir d'opinion là-dessus. Je peux simplement vous dire que les experts ne s'entendent pas sur la question.
    Monsieur Pennell, avez-vous une opinion?
    Avant que vous ne répondiez, j'aimerais vous rappeler que le MPO a dit qu'il ne disposait d'aucun renseignement qui puisse indiquer que le pou du poisson présente un problème.

  (1605)  

    Je suis d'accord avec ce que Brian vient de dire.
    Vous avez demandé ce que nous devrions faire. Je crois que nous devrions surveiller de très près cette méthode de gestion afin de nous assurer qu'elle est vraiment efficace et que les sites d'élevage arrivent vraiment à réduire le nombre de poux du poisson et de larves du pou du poisson dans leurs parcs. Si nous sommes convaincus que c'est ce que nous faisons, comme Brian l'a dit, alors nous respectons le principe de précaution.
    Nous devrions également suivre ce qui se passe dans les secteurs où l'on a relevé la présence de poux de poisson dans les sites d'élevage, lorsque ces sites se trouvent à proximité de la voie de migration du saumon sauvage. Cela veut dire qu'il faut procéder à des relevés. Cela veut dire qu'il faut lancer une étude permanente. C'est mon opinion. De plus, je crois qu'il serait bon d'avoir plus d'argent pour continuer les études visant à répondre à certaines des questions biologiques fondamentales sur le pou du poisson, des réponses que nous attendons toujours.
    J'aimerais ajouter quelque chose. Je pense qu'il faudrait poursuivre les études océanographiques qui visent à nous permettre d'en connaître davantage sur la circulation océanique et sur d'autres aspects de l'océanographie, parce que ces connaissances nous permettront un jour de répondre à d'autres questions.
    Merci.
    Monsieur Blais.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs Pennell et Harvey.
    Je vais d'abord m'adresser à M. Harvey.
    Vous nous dites que vous n'êtes pas un spécialiste du pou du poisson. Imaginez notre situation, d'autant plus qu'on devra faire des recommandations à ce sujet. Je ne vous demande pas de « mettre votre tête sur le billot », mais de nous aider un peu plus. Vous avez beaucoup lu sur le sujet. Pour ma part, je n'ai pas beaucoup lu sur le sujet, j'en apprends de jour en jour, et je comprends très bien qu'il n'y a pas nécessairement de consensus sur cette question.
    Cependant, selon les lectures que vous avez faites, y a-t-il lieu de déterminer que le pou du poisson est l'un des éléments qui pourraient causer le déclin des populations de saumon? Pourrait-il y en avoir d'autres? Pourriez-vous nous parler des recherches que vous avez faites à ce sujet?
    Évidemment, c'est dans le but de nous aider davantage, parce que, je vous le répète, pour nous, la situation est beaucoup plus nébuleuse que pour vous. N'ayant aucune formation de biologiste, tout ce que j'ai est ce qu'on appelle le GBS, c'est à dire le gros bon sens.
    Donc, pourriez-vous nous aider davantage, plutôt que de répondre de la manière dont vous avez répondu jusqu'à maintenant? Monsieur Harvey?

[Traduction]

    Si j'ai bien saisi, vous voulez que je vous dise si le pou du poisson n'est qu'un facteur parmi tant d'autres qui menace le saumon rose; je parle seulement du saumon rose parce que c'est la seule espèce sur laquelle on s'est vraiment penché.
    Je dirai simplement ceci: mon opinion est celle de la majorité des scientifiques qui rédigent des rapports de recherche sur la question, c'est-à-dire que plusieurs facteurs menacent le saumon. Il existe une interaction entre nombre de ces facteurs. Nous ne comprenons pas tout à fait comment ces interactions fonctionnent, mais évidemment, vous ne seriez pas un bon biologiste si vous ne reconnaissiez pas qu'il y a habituellement plusieurs facteurs qui entrent en ligne de compte pour expliquer ce genre de situation. Un très grand nombre de facteurs ont un impact sur les populations de salmonidés, cela a déjà été démontré.
    Aux États-Unis, par exemple, la situation est un peu différente et ils ont un système qui repose sur quatre piliers qu'on appelle en anglais les « quatre H ». Voyons si je me souviens bien, harvest, la récolte, hatcheries, l'écloserie, l'hydro-électricité. C'est quoi l'autre H? Ah oui, évidemment, l'habitat, soit la perte d'habitat.
    Les choses sont un peu différentes ici en Colombie-Britannique. Nous n'avons pas les importants développements hydroélectriques qu'on retrouve aux États-Unis. Mais les autres facteurs, comme le changement climatique et les contaminants qui proviennent des fonderies d'Asie, ont tous un impact sur la population de salmonidés. Il n'est donc pas probable qu'il n'y ait qu'un seul facteur qui explique la situation. Encore une fois, le principe de précaution est un outil utile qui permet de conclure qu'il pourrait y avoir 10 facteurs qui contribuent à la situation, mais ce constat ne simplifie pas les choses lorsqu'on essaie d'élaborer des politiques ou d'adopter des mesures législatives.
    En passant, je comprends votre situation parce que vous devez vous fier à des experts qui tergiversent et qui essaient de protéger leur position. Je comprends très bien votre situation. J'essaie d'écrire pour le grand public, de vulgariser pour permettre aux lecteurs de bien comprendre une question particulière, mais le principe de précaution dit quand même qu'il pourrait y avoir 10 facteurs qui expliquent une situation. Quels sont les facteurs pour lesquels on peut prendre des mesures?
    Dans le cas qui nous occupe, on peut agir au niveau des récoltes. On peut agir au niveau de l'impact des écloseries sur le saumon sauvage. Il est possible de redonner aux saumons sauvages une partie de son habitat. On ne peut pas vraiment faire grand-chose au niveau du changement climatique dans l'immédiat pour aider les salmonidés, car il est clair que le changement climatique a un impact sur ces populations, mais nous pouvons également faire quelque chose pour régler le problème du pou du poisson.
    Si nous jugeons que les récoltes posent un problème, nous les réduisons. Nous ne serons peut-être pas en mesure de démontrer que c'est un des facteurs, aussi étrange que cela puisse paraître. Ce n'est pas aussi simple que l'on pense, mais nous jugeons que l'exploitation est un des problèmes. Il suffit simplement de diminuer les prises.
    Si nous sommes d'avis qu'il y a de fortes chances que le pou du poisson présente un problème, il s'agit de prendre des mesures. Je crois que c'est justement ce qu'on a fait lorsqu'on a adopté des programmes de gestion intégrée, dont Bill Pennell parlait tout à l'heure.
    Ainsi, mon opinion n'est pas vraiment différente de celle de la plupart des scientifiques. Nous vivons dans un écosystème. Il y a toutes sortes de facteurs d'influence, et il y a beaucoup de choses qui menacent le saumon. Il suffit de mentionner le pou du poisson. Il s'agit peut-être là d'un des facteurs que nous pouvons contrôler plus facilement que les autres.

  (1610)  

[Français]

    J'aimerais poser une question à M. Pennell.
    Plus tôt, lors de votre présentation, vous avez mentionné qu'il faudrait adopter une nouvelle démarche, qu'il faudrait innover. Vous avez même parlé de sciences sociales. J'ai beaucoup de difficulté à vous suivre sur ce terrain. Je vous laisse donc le soin de nous convaincre que les sciences sociales ont quelque chose à voir avec les sciences de la nature, en ce qui a trait au pou du poisson, à l'aquaculture et à la diminution du nombre de saumons. Essayez de nous convaincre qu'il peut y avoir, dans ce labyrinthe, une place pour les sciences sociales.

[Traduction]

    Bon. Je vais essayer de répondre à votre question. Je dois vous rappeler que je ne suis pas un spécialiste en sciences sociales, même si l'Institut pour la recherche côtière, où je travaille à l'heure actuelle, a été mis sur pied dans le but d'aborder les problèmes en matière de ressources côtières sous un angle interdisciplinaire qui inclut les sciences sociales et les sciences humaines et non pas seulement les sciences naturelles.
    Ainsi, nous effectuons beaucoup de recherches et nous faisons des découvertes. Nous apprenons comment mieux faire l'élevage du saumon. Nous apprenons comment assurer la gestion du pou du poisson, par exemple, ce dont nous parlions tout à l'heure.
    Mais la vraie question qu'il faut se poser, c'est s'il devrait y avoir des sites de salmonicultures en Colombie-Britannique. L'opinion est partagée, et on ne semble pas vouloir trancher en s'inspirant de recherches scientifiques. Ainsi, quels sont les vrais problèmes? Pourquoi les gens prennent-ils la chose tant à coeur? Voilà où les experts en sciences sociales peuvent intervenir pour nous permettre de mieux comprendre.
    Ils seront peut-être en mesure de répondre à certaines questions. Pourquoi cette industrie de taille moyenne attire-t-elle une attention si négative? Qu'est-ce qui explique la situation? Comment l'industrie est-elle perçue par les collectivités locales? Quelles sont les dynamiques de ces perceptions? Quelle valeur représente les emplois créés par cette industrie pour les collectivités côtières? Comment peut-on comparer ce secteur aux autres industries? Comment les emplois créés par ce secteur ont-ils un impact sur la viabilité de la collectivité?
    L'industrie de la salmoniculture peut-elle survivre à ces controverses, sans simplement se contenter de lancer une meilleure campagne de relations publiques? Pourquoi les opinions des scientifiques sur le sujet sont-elles si partagées?
    C'est pourquoi cette discussion va bien au-delà d'un simple débat scientifique. Est-ce que les sciences naturelles sont souvent aux prises avec des situations de ce genre ou est-ce que cette controverse est systémique de ce genre de questions? Comment les médias, le gouvernement et le public utilisent-ils les découvertes scientifiques? Est-ce que d'autres secteurs de l'économie ont été confrontés à de tels défis?
    Il s'agit là de questions auxquelles les divers volets des sciences sociales pourraient nous aider à répondre, à mon avis.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Donnelly.

  (1615)  

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier nos deux témoins d'avoir accepté de venir renseigner le comité sur ce sujet.
    Ma première question s'adresse à M. Harvey. Elle porte sur une question que vous avez déjà abordée. Vous avez dit avoir passé en revue 131 articles et avoir d'ailleurs vous-même rédigé un document sur la question. Je voulais savoir quelles conclusions vous aviez tirées après votre examen de 2009.
    Vous avez mentionné le changement climatique. À un certain moment lors du débat sur le changement climatique, il y avait une certaine incertitude et un manque de consensus; je vous demanderai de ne pas oublier ces faits en répondant à ma question quant au rôle du changement climatique dans ce dossier. Je crois personnellement, et vous pouvez être d'accord ou non avec moi, que les scientifiques s'entendent désormais sur le fait que le changement climatique a un impact sur un grand nombre d'écosystèmes.
    Pouvons-nous dire la même chose pour le pou du poisson? Est-il trop tôt encore dans l'examen des données scientifiques pour conclure que le pou du poisson a un impact sur le saumon sauvage?
    C'était trop tôt en 2009 lorsque j'étudiais les documents disponibles sur le pou du poisson. J'aimerais revenir un peu en arrière parce que vous m'avez posé une autre question et vous voulez savoir quelles étaient mes conclusions à l'époque.
    Est-ce que le pou du poisson provenant des élevages de salmonidés est à l'origine du déclin des populations de saumons roses? J'ai conclu qu'il n'y avait pas de consensus sur la question. Comme Bill Pennell l'a signalé, les scientifiques ne s'entendaient pas et en fait chacun défendait sa position avec beaucoup d'énergie. Il y avait des réfutations et des contre-réfutations dans les documents publiés. Je répète qu'on n'en avait pas beaucoup parlé dans les ouvrages scientifiques auparavant. Les scientifiques semblaient avoir la question à coeur.
    Quant au changement climatique, des chercheurs se penchent sur la question depuis déjà très longtemps, depuis beaucoup plus longtemps qu'on le pense. Je viens de terminer le dernier livre de Carl Sagan. Il était un scientifique extraordinaire et également un très bon écrivain scientifique. Cet ouvrage avait été écrit peu de temps avant son décès au milieu des années 1990. Il a écrit un long chapitre sur le changement climatique. Même à l'époque, il existait un certain consensus au sein de la communauté scientifique.
    Alors pour répondre à votre question, il n'y avait pas consensus en 2009 sur le pou du poisson. Mais je pense que nous en étions rendus à accepter le fait que le pou du poisson provenant des salmonicultures infectait le saumon rose — il n'y a aucun doute —, mais de nouvelles méthodes de gestion ont permis de réduire le nombre de poux du poisson qui quittaient les sites aquacoles, où ils se trouvaient en grande concentration.
    Il y a une autre question qui est très importante et que, je crois, personne n'a mentionnée, c'est que nous ne pouvons pas simplement dire que puisque nous semblons avoir trouvé une façon de réduire le nombre de poux du poisson, le problème est réglé. Si la concentration de poux de poisson diminue grâce à l'utilisation d'un pesticide, nous devons nous assurer que cela n'a pas d'effets nocifs, ou tout au moins des effets que la société n'acceptera pas.
    Le changement climatique...
    Puis-je vous interrompre? Je m'excuse. Malheureusement, je n'ai pas beaucoup de temps et j'ai une autre question.
    Au prochain tour, je poserai plusieurs questions à M. Pennell sur le produit SLICE et son utilisation. Pendant qu'il me reste encore du temps, je veux, monsieur Harvey, vous parler des analyses des risques et du principe de précaution.
    Compte tenu des documents que vous avez étudiés et de certaines des questions qu'on vient de vous poser sur la gestion, pouvez-vous faire des commentaires ou formuler une recommandation quant au type de technologie qu'utilise actuellement l'industrie aquacole, soit les parcs en filet et l'élevage en circuit fermé?

  (1620)  

    Non, par contre, j'ai une recommandation pour ladite stratégie intégrée de lutte antiparasitaire. On commence maintenant à concevoir des plans régionaux. Je recommande que ces plans soient précisés et surveillés, en fait fortement surveillés, de sorte que nous assurions un suivi serré non seulement des quantités de poux du poisson, qui semblent être à la baisse, mais aussi de toutes les répercussions secondaires des plans de gestion. Il est clair que nous devrons nous soumettre à ce compromis.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Kamp, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, je vous remercie d'avoir pris le temps de venir témoigner devant le comité. J'en suis très heureux.
    J'aimerais commencer par M. Pennell.
    J'aimerais un peu mieux comprendre l'aspect zoologique. Vous avez parlé de l'étape infectieuse du pou du poisson, à quel moment se produit-elle? Est-ce que cela signifie qu'il y a des poux du poisson adultes dans les centres piscicoles qui se reproduisent, générant ainsi des larves, et que c'est à cet état larvaire que l'étape infectieuse se produit, au moment où ces poux s'attachent à d'autres espèces de poissons?
    Est-ce que vous pourriez éclaircir ce point? J'aurai une question complémentaire par la suite.
    Oui. Cela commence avec les oeufs pondus par la femelle poisson, dite ovigère. Prenons un saumon de l'Atlantique d'une exploitation piscicole. La femelle pond deux longs filaments d'oeufs. Je ne me rappelle pas exactement le nombre d'oeufs; je crois que c'était entre 900 et 1 000 par femelle. Après l'éclosion, nous avons des nauplius, qui passent par les trois étapes d'exuviation en phase de jeûne, soit le moment où ils perdent leur tégument externe et grandissent.
    La quatrième étape est appelée « copépode », c'est le moment où le pou du poisson utilise un petit filament pour s'attacher à son hôte. Ces quatre étapes qui commencent avec l'éclosion se produisent dans les courants. Le plancton, quelques jours après la naissance, arrive à l'étape infectieuse et ne dispose que de cette période pour s'attacher à un poisson. Lorsqu'il rencontre un saumon ou qu'il en trouve un, il s'y attache. Il choisit d'ordinaire comme hôte un salmonidé, mais il peut aussi s'attacher à une épinoche ou à un hareng.
    Le pou passe ensuite par plusieurs exuviations pendant qu'il est attaché au poisson. Il grossit alors de plus en plus et devient enfin un mâle ou une femelle adulte. Les poux du poisson s'accouplent alors et davantage d'oeufs sont produits. L'ensemble du cycle dure environ 45 à 50 jours, selon la température.
    J'ai une question complémentaire. A-t-on déployé beaucoup d'efforts pour savoir si cela se produit effectivement à proximité des exploitations piscicoles?
    Plus précisément, je suis curieux de savoir ce que vous pensez des travaux de Kenneth Brooks, qui avance que, compte tenu de l'emplacement de ces exploitations, de la salinité de l'eau et des courants ainsi que d'autres facteurs, ces poux du poisson n'en sont pas à une étape infectieuse lorsqu'ils rencontrent les saumoneaux de ces piscicultures, ils en seraient plutôt à une étape ultérieure.
    Du moins, c'est ce que j'ai cru comprendre de ses conclusions. Je me demandais ce que vous en pensiez, monsieur Pennell ou monsieur Harvey.
    Je ne crois pas avoir les compétences voulues pour vous donner une bonne réponse. Je crois qu'il a probablement raison, car il y a des courants de marée extrêmes, et non pas des courants associés au débit, ainsi que des courants de marée entraînant un ballottement dans cette zone très complexe appelée Broughtons.
    Je crois qu'il s'écoule probablement environ huit à dix jours entre l'éclosion et l'étape infectieuse. Durant cet intervalle, les poissons auraient eu le temps de s'éloigner à une bonne distance de l'exploitation piscicole d'origine. Mais je ne crois pas que cela soit important. La marée est un facteur qui s'ajoute à l'ensemble global des cycles d'infection dans la zone et, par conséquent, si l'exploitation piscicole est un facteur, l'infection n'a pas à avoir lieu juste à côté de l'exploitation. Cela peut se produire en amont ou en aval.
    J'aimerais répéter ce que j'ai dit plus tôt. On constate que c'est un mystère biologique fascinant, à savoir que ces planctons au cycle infectieux, des éléments minuscules, arrivent à trouver des hôtes si efficacement. Ils arrivent toujours à les trouver. Or, lorsqu'on essaie de séparer un échantillon de plancton de son hôte avec un filet à mailles très fines, et je crois que Brian l'a mentionné dans l'un de ses rapports, on parle ici d'une ou deux larves dans un milieu de la taille d'un salon. Nous ne savons pas vraiment comment ils y arrivent, mais ils y arrivent.

  (1625)  

    Merci de votre réponse.
    Monsieur Harvey, voulez-vous ajouter des observations à ce sujet?
    Oui. D'abord, je dois dire que j'étais totalement émerveillé lorsque j'ai lu la documentation sur le sujet. J'ai dû emmagasiner environ 200 pages d'information. Oui, il est extraordinaire qu'ils arrivent à se trouver un hôte. Il est également très intéressant de constater la rapidité avec laquelle nous sommes en mesure d'étudier les effets des courants et des vents sur ces particules minuscules. Rappelez-vous que cela dépasse tout ce que nous pouvions savoir au sujet du mouvement du courant et de l'eau, puis soudainement, cela devient très important pour arriver à apprendre et à créer des modèles.
    Les théories de Ken Brooks sont fondées sur une modélisation mathématique qui consiste à utiliser les meilleures données, à créer un modèle, à l'alimenter et à tirer des conclusions à partir d'hypothèses. Il existe d'autres modèles mathématiques, en fait il y en a quelques-uns en Europe, dans lesquels les fjords peuvent être différents, alors on ne peut pas vraiment faire d'extrapolations. Je crois que nous comprenons peut-être à 60 p. 100 la façon dont un pou peut se déplacer du point A au point B.
    Néanmoins, comme Bill l'a dit, si les piscifactures de saumon sont aux prises avec beaucoup de poux du poisson et qu'elles contribuent à augmenter le nombre de poux se trouvant normalement dans la nature en les transportant jusque-là, encore une fois, il faudrait que l'approche de précaution consiste à admettre que cela pourrait être la cause du problème. On doit alors envisager de réduire leur présence dans les piscifactures, et je crois d'ailleurs que c'est ce qui commence à se produire.
    Je vous remercie de vos bons arguments.
    J'ai une dernière question, monsieur Pennell, et ensuite je céderai la parole à Mme O'Neill-Gordon, si elle désire poser des questions complémentaires.
    Monsieur Pennell, vous avez abordé la question du saumon rouge, mais très rapidement. L'objectif global de la commission d'enquête qui est en cours et qui se poursuivra pendant un certain temps, c'est de découvrir la cause probable du déclin des stocks de saumon rouge. Dans le mandat de la commission, l'aquaculture est nommée parmi les causes probables.
    Je veux m'assurer d'avoir bien compris ce que vous avez dit. Vous semblez dire que vous ne voyez pas comment les poux du poisson provenant des activités aquacoles pourraient être l'une des causes principales du déclin. Ai-je bien compris?
    Oui, vous avez bien compris. Toutefois, j'aimerais préciser qu'il s'agissait de mon opinion personnelle et que d'autres personnes peuvent penser autrement. Cette opinion se fonde sur les résultats généraux des travaux en laboratoire, qui montrent que les jeunes saumons — dans ce cas-ci, surtout les saumons roses et kéta — sont de plus en plus résistants aux poux du poisson en grossissant.
    Ce sont les plus petites espèces de saumon. Un saumon kéta pèse environ un quart de gramme lorsqu'il arrive à la rivière, et un saumon rose est d'environ un cinquième de gramme. Ils sont extrêmement minuscules. Leurs écailles ne sont pas complètement développées lorsqu'ils arrivent en eau salée pour la première fois, ce qui les rend très vulnérables. Du moins, c'est ce que beaucoup de chercheurs ont conclu.
    En vieillissant, ils se dotent d'un tégument beaucoup plus complexe et commencent à développer des écailles ainsi que d'autres réactions immunitaires, car le système immunitaire des poissons se renforce à mesure qu'ils grossissent. Pour tout un éventail de raisons, dont celles susmentionnées, les poissons semblent acquérir davantage de résistance.
    Les saumons rouges sont des saumoneaux. Ils ont déjà passé tout un an dans un lac, voire deux ans dans certains cas, ce qui explique qu'ils sont beaucoup plus gros. Ils sont de 25 à 30 fois plus grands qu'un alevin et leurs écailles sont totalement développées. Par conséquent, je présume qu'ils ne sont pas particulièrement vulnérables aux poux du poisson.
    Enfin, je ne sais si des chercheurs ont réalisé des travaux sur le saumon rouge pour prouver cette théorie, qui relève en quelque sorte de la spéculation, car je pense que de toutes les causes possibles pouvant expliquer le déclin des populations de saumons rouges dans le fleuve Fraser, le pou du poisson est sans doute la cause la moins probable.
    C'est ce que je pense. Peut-être que les chercheurs du MPO auront un autre point de vue.
    D'accord, merci de votre réponse.
    Monsieur Harvey, voulez-vous formuler un mot de la fin?

  (1630)  

    Il est encore trop tôt pour se prononcer sur les causes du déclin des populations de saumons rouges. C'est un scénario classique, car il y a de très nombreux facteurs. Pour ce qui est du pou du poisson, nous n'avons aucune preuve? C'est ce que tout biologiste vous dira: quelles sont les preuves? Tant qu'une hypothèse n'a pas été prouvée, elle demeure une hypothèse. Deux options s'offrent à nous: le pou du poisson est le principal coupable ou il ne l'est pas.
    En fait, ce ne serait probablement pas si difficile à prouver à l'aide de tests. Si vous fondez vos décisions sur des données scientifiques, alors qui se soucie des différentes opinions? Il est possible de mettre à l'épreuve cette hypothèse.
    Bien. Merci beaucoup.
    Messieurs, au nom du comité, je tiens à vous remercier chaleureusement d'avoir pris le temps, malgré vos horaires chargés, de discuter de vos positions et d'échanger vos points de vue avec nous. Nous vous en sommes très reconnaissants. Comme en témoignent les questions qui vous ont été posées aujourd'hui, le comité cherche activement à s'informer, et nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous renseigner.
    Merci beaucoup, messieurs.
    Nous allons suspendre la séance pendant un court instant, le temps d'accueillir nos prochains témoins.

  (1630)  


  (1635)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Je vous invite à accueillir M. Krkosek.
    Monsieur Krkosek, vous étiez présent durant la première partie de notre séance, alors je n'ai pas à vous expliquer la procédure. Vous avez dix minutes. Vous allez entendre un signal lorsque votre temps sera écoulé. Je sais que vous avez entendu ce signal à quelques reprises déjà.
    Monsieur Krkosek, nous sommes très heureux que vous ayez pris le temps de comparaître devant le comité aujourd'hui. J'espère que nous aurons une discussion très enrichissante qui nous permettra d'approfondir un peu notre étude. Je vous cède maintenant la parole et je vous invite à présenter votre déclaration liminaire.
    Je m'appelle Martin Krkosek. Je suis associé en recherche à l'École des sciences aquatiques et des pêches de l'Université de Washington.
    Je me penche sur le dossier du pou du poisson et du saumon depuis déjà un peu plus de huit ans. J'ai obtenu un doctorat de l'Université de l'Alberta pour l'étude que j'ai réalisée sur ce dossier il y a deux ans et demi. J'ai reçu plusieurs prix pour ces travaux, dont une médaille d'or du gouverneur général. J'ai rédigé une vingtaine d'articles sur le sujet au fil des ans, y compris certains des articles les plus importants qui sont parus dans les plus grands journaux scientifiques et qui ont su grandement attirer l'attention des médias.
    Je tiens à vous remercier de m'avoir invité à vous rencontrer aujourd'hui. C'est tout un honneur pour moi d'être en mesure de venir vous parler de cette question. J'ai préparé un document d'information pour vous; malheureusement, il n'existe pas encore de version française, mais elle ne saurait tarder.
    J'approuve pratiquement tout ce que mes collègues ont dit lors de la dernière heure. À mon avis, nous nous concentrons beaucoup sur ce que nous ne savons pas dans ce dossier mais pas vraiment sur ce que nous savons, et j'aimerais vous en dire un petit peu plus long là-dessus.
    Quatre grandes questions caractérisent ce dossier, des questions sur lesquelles je me penche depuis déjà un bon moment. La première question est la suivante: est-ce que le pou du poisson des élevages salmonicoles contamine le saumon sauvage? Deuxièmement, le cas échéant, quel est l'impact sur le comportement et sur la survie du poisson sauvage? Troisièmement, s'il s'agit d'infestations en série, quels effets ont-elles sur les populations de saumons sauvages touchées? Enfin, si tout cela représente un problème, quelles nouvelles méthodes de gestion pouvons-nous adopter, s'il y en a? Je me penche sur toutes ces questions depuis déjà huit ans.
    Est-ce que le pou du poisson provenant d'élevages salmonicoles infecte le saumon sauvage? Tout semble indiquer que c'est le cas. Les élevages de saumon ne sont pas la seule source de pou du poisson dans l'environnement; en fait, le pou du poisson est un parasite naturel qui existait bien avant que l'on ne procède à l'élevage du saumon. Ce qui a changé, c'est le moment où la transmission se fait dans la vie du saumon et l'ampleur de l'infestation.
    Lorsqu'il n'y a pas d'exploitations salmonicoles, le jeune saumon quitte les rivières et les lacs et se rend dans l'environnement marin littoral au printemps, soit en mars, avril, mai et juin. Pendant cette période, il y a très peu d'hôtes naturels pour le pou du poisson dans l'environnement du littoral. La majorité des hôtes sont au large; il s'agit de saumons adultes, et ils suivent à cette époque leur migration trophique. Ce n'est qu'à l'été, soit en juillet ou en août, que d'importantes populations de saumons sauvages reviennent vers le littoral, portant alors des poux du poisson. Ainsi, il existe une période de trois à quatre mois entre le moment où le jeune saumon se rend dans l'océan et le moment où il est exposé pour la première fois au pou du poisson. C'est pendant cette période qu'il est le plus petit et le plus vulnérable à l'infection.
    Les choses sont bien différentes lorsqu'il y a des exploitations salmonicoles. Elles présentent une population hôte très importante pour le pou du poisson pendant l'hiver, de sorte que lorsque les jeunes saumons arrivent dans l'environnement marin littoral, ils sont en contact avec des élevages de saumons qui renferment des millions d'hôtes domestiqués à un endroit comme l'archipel Broughton, et ces hôtes portent une grande quantité de poux du poisson. Lorsque le jeune saumon entre dans l'océan, il est en contact avec ces parasites et il n'est pas vraiment en mesure de leur résister. C'est justement ce qui nous inquiète: l'impact du pou du poisson au début de la période où le saumon est un alevin, pendant ses premiers mois de vie marine.
    Nous avons constaté que dans les régions où il n'y a pas d'exploitations salmonicoles, la prévalence naturelle d'infection est d'environ 5 p. 100 pour le jeune saumon à cette étape de sa vie. Cependant, dans les régions où il y a des élevages de saumon, la prévalence fluctue énormément, mais elle est habituellement beaucoup plus importante et, dans certains cas, elle peut atteindre 90, 95 ou même 100 p. 100. On relève à l'occasion un taux de mortalité très élevé associé à une charge importante de poux du poisson.
    Nul besoin d'être mathématicien pour voir ce que cela représente. J'étudie cette question environ six mois par année depuis déjà huit ans, et vous voyez vraiment l'impact de cette charge de poux du poisson.

  (1640)  

    Le pou du poisson peut entraîner la mort du jeune saumon. Un pou adulte suffit à causer la mort du plus petit saumon. Les cas les plus communs sont ceux du jeune saumon de taille moyenne qui porte deux ou trois poux, et là l'interaction est beaucoup plus subtile. Il est plus probable qu'il y ait un effet sublétal qui prédispose le poisson à des maladies ou en fait une proie plus facile pour les prédateurs. C'est probablement ce qui entraîne la mort du saumon. Le pou modifie le comportement du jeune saumon de sorte qu'il devient une proie plus facile pour les prédateurs. En fait, dans l'océan, bien avant que le pou ne tue le poisson, un prédateur le tuera simplement en raison de l'infection qui a modifié son comportement.
    Pendant à peu près cinq ans, le jeune saumon de l'archipel Broughton a connu de graves infestations en série du pou du poisson. Ce sont en fait ces infestations qui nous ont poussés à nous pencher sur ce dossier. À l'époque, nous avons enregistré un taux de mortalité très élevé chez les jeunes saumons. En utilisant des outils classiques en matière de pêches et d'épidémiologie, nous avons pu isoler l'impact du pou du poisson des nombreux autres facteurs de confusion et nous avons conclu que le pou du poisson avait une incidence sur la productivité des populations de saumons roses sauvages de l'archipel Broughton. Pendant cette période d'infestation, la productivité a diminué à un point tel que les populations étaient menacées de disparition à l'échelle locale.
    Depuis, d'importants changements ont été apportés à la gestion. Ainsi, on est passé d'une gestion axée sur la protection de la productivité des sites d'élevage à une gestion axée sur la protection du saumon sauvage contre le pou du poisson. Il s'agit d'un plan de gestion locale coordonnée; tout ce travail se fait principalement aujourd'hui encore dans l'archipel Broughton.
    Au printemps, lorsque le jeune saumon se dirige vers la mer, à peu près la moitié des sites sont vides ou sont traités avec des antiparasitaires chimiques afin de réduire au niveau le plus bas possible le nombre de poux du poisson pendant cette période de dévalaison. Des résultats préliminaires semblent indiquer que ce plan de gestion est efficace. La charge de poux dans les sites d'élevage et sur le saumon sauvage a diminué de façon dramatique au cours des dernières années.
    En se servant des modèles que nous employons actuellement, nous, les scientifiques, pourrions conclure que tout cela mènerait au rétablissement de ces populations. Les prévisions que nous avons faites par le passé, alors que nous nous attendions à la disparition locale de certaines populations en raison de l'infestation du pou du poisson, ne sont plus utiles aujourd'hui. Les infestations de pou du poisson ont été dans une large mesure éliminées dans l'archipel Broughton en raison du changement des méthodes de gestion.
    Cette nouvelle gestion dépend en grande partie du recours aux antiparasitaires chimiques et, à mon avis, cette situation est un peu précaire. D'abord, le fait est que ces produits chimiques pourraient avoir un effet négatif sur l'écosystème aquatique. C'est un produit toxique pour les crustacés. Cela inclut les crevettes, le crabe et les copépodes du zooplancton, qui sont un élément essentiel du réseau trophique. À ce jour, aucune étude n'a été faite afin d'évaluer l'impact de ces produits chimiques sur l'environnement.
    De plus, ces produits chimiques peuvent aussi avoir une utilité limitée car il est possible que le pou du poisson développe une résistance à ces produits. C'est une chose qui s'est déjà produite au Nouveau-Brunswick, en Norvège et au Chili. Compte tenu de ce qui s'est produit dans les autres régions, il se pourrait fort bien que la même chose survienne en Colombie-Britannique, même si cela pourrait prendre un peu plus de temps avant de se produire.
    Cependant, l'hiver dernier, pour la première fois, nous avons noté qu'un traitement au Slice — le benzoate d'emamectine — n'a pas porté fruit en Colombie-Britannique, dans la baie Nootka, ce qui nous pousse à croire que le pou du poisson commence déjà à développer une résistance aux produits chimiques utilisés dans la province.
    Cependant, ce n'est pas la seule explication possible. Il se peut également que la dose donnée n'était pas appropriée ou que le saumon se nourrissait moins et n'a donc pas reçu la dose appropriée. Aucune étude n'a encore été effectuée dans le but de déterminer si le pou du poisson a développé une résistance chimique en Colombie-Britannique.
    À ce jour, la majorité des études faites en Colombie-Britannique ont porté sur le saumon rose de l'archipel Broughton, et c'est à cet endroit que nous avons pu en apprendre le plus sur la science et l'interaction du pou du poisson et du saumon. Cela nous a permis de noter l'efficacité des nouvelles mesures de gestion.

  (1645)  

    J'aimerais cependant signaler que dans toutes les grandes régions de salmoniculture de la Colombie-Britannique, tout principalement les îles Discovery, l'archipel Broughton et la baie Clayoquot, nous avons les mêmes modèles d'infestation du pou du poisson et de diminution des populations de saumons sauvages, qu'il s'agisse du saumon rose, du saumon kéta, du saumon coho, du saumon quinnat ou du saumon rouge.
    Il est fort probable que les problèmes que nous avons relevés dans l'archipel Broughton sont généralisés dans la province. Cependant, il est également probable qu'il existe des solutions au niveau de la gestion qui nous permettront de gérer ces problèmes. Ces solutions dépendent de la viabilité à long terme des produits chimiques utilisés pour contrôler le pou du poisson dans les sites d'élevage.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Dhaliwal.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier d'être venu nous rencontrer aujourd'hui pour présenter cet exposé.
    Il y a plus d'un an en Colombie-Britannique, le Forum sur le saumon du Pacifique a formulé plusieurs recommandations. Souscrivez-vous à ces dernières? Dans l'affirmative, pourraient-elles représenter le fondement d'une politique publique?
    J'approuve certaines des recommandations, tout particulièrement celles qui proposent une modification de la gouvernance des ressources en salmonidés pour employer des méthodes globales qui tiennent compte de l'écosystème d'eau douce dans son ensemble ainsi que de l'environnement marin littoral. Actuellement, la gestion est répartie entre plusieurs unités qui n'ont en fait aucun lien les unes avec les autres.
    Le forum a également recommandé de minimiser l'exposition au pou du poisson pendant le début du stade juvénile du cycle de vie du saumon. Je souscris à cette proposition, mais je crois qu'on aurait tort de se concentrer exclusivement sur ces premières étapes de la vie du jeune poisson. Même s'il s'agit de la période pendant laquelle le saumon est le plus vulnérable, il ne faut pas oublier que même lorsqu'il est un peu plus vieux, le saumon est également vulnérable, selon la charge de poux du poisson dans l'environnement et la période d'exposition du saumon.
    Si le jeune saumon est exposé pendant une bonne période à une grande quantité de poux du poisson, la mortalité ne serait pas surprenante; les conditions qui existent actuellement en Colombie-Britannique sont telles que le jeune saumon, peu importe l'espèce, peut être exposé de façon chronique à une grande quantité de poux du poisson. Il faut environ deux ou trois mois à certaines espèces de saumon pour effectuer leur migration à proximité d'exploitations salmonicoles.
    Vous approuvez deux de ces recommandations; est-ce que le gouvernement fédéral a déjà, à votre avis, pris des mesures pour donner suite à ces recommandations? Jugez-vous que le gouvernement devrait agir? Pensez-vous plutôt que notre comité devrait recommander que l'on donne suite à ces recommandations?
    J'aimerais bien qu'on donne suite à certaines de ces recommandations, tout particulièrement celles qui portent sur la gouvernance des salmonidés.
    La commission d'enquête sur le déclin du saumon rouge du Pacifique a... Elle présentera un jour un rapport. D'après vous, que pouvons-nous faire maintenant? Quand vous parlez de gestion... vous ne jugez pas qu'il soit nécessaire de fermer tous les sites d'élevage, n'est-ce pas? Notre comité pourrait-il recommander que certaines mesures soient prises immédiatement?
    À mon avis, le plus grand danger que les exploitations salmonicoles présentent pour le saumon sauvage est la transmission de maladies. Il ne s'agit pas simplement du pou du poisson. Il existe un très grand nombre d'agents de nature virale et bactériologique qui sont transférés entre le saumon sauvage et le saumon d'élevage.
    L'emplacement actuel des sites d'élevage du saumon en Colombie-Britannique se trouve sur la voie de migration de certaines des plus importantes populations de saumons au Canada. Les exploitations salmonicoles sont en contact avec les voies de migration du saumon sauvage deux fois par année. À l'automne et à l'été, lorsque le saumon adulte remonte pour frayer, il passe à proximité des sites d'élevage, et le saumon d'élevage pourrait être exposé à tous ces agents. Au printemps, lorsque le jeune saumon est en dévalaison, il pourrait être infecté par ces agents que pourrait porter le saumon d'élevage.
    La planification de l'emplacement des sites aquacoles en Colombie-Britannique doit être faite très attentivement, tout particulièrement si cette industrie doit prendre de l'expansion à l'avenir. Pour ce qui est des stocks de salmonidés dans le fleuve Fraser, je crois que l'emplacement de plusieurs sites aquacoles à proximité des îles Discovery présente un grave problème. Une modification importante qui pourrait être apportée serait de choisir des sites pour les piscicultures qui sont éloignés des routes migratoires du saumon sauvage.
    Je proposerais également, en m'inspirant de ce qui s'est fait en Norvège, que des zones de protection des écosystèmes des salmonidés soient créées; dans ces zones, la salmoniculture serait interdite. Il s'agirait de zones marines protégées où le saumon sauvage pendant sa montaison et sa dévalaison ne serait pas exposé à des exploitations de salmoniculture.

  (1650)  

    Des représentants du MPO ont dit au comité qu'ils ne savaient pas si les sites d'élevage expliquaient la diminution des populations de saumon sauvage. Qu'en pensez-vous?
    Je dois dire qu'il est vrai que les documents scientifiques publiés par le MPO ne font pas état d'un impact quelconque des sites d'élevage du saumon sur les stocks sauvages.
    Cependant, je ne dirais pas que les données scientifiques en général appuient cette position. Il y a un très grand nombre de documents scientifiques qui font état de l'impact négatif des sites de salmoniculture sur les stocks de saumon sauvage; ces rapports n'ont tout simplement pas été rédigés par des employés du MPO.
    Monsieur Lévesque.

[Français]

    Si vous le permettez, je vais vous appeler par votre prénom, qui a une consonance plus française que Krkosek. Je vais vous appeler Martin.
    Vous avez entendu plus tôt les témoignages des deux personnes qui vous ont précédé. Il y a une question qui m'agace et vous l'avez abordée. On parle d'un produit nommé SLICE. C'est le nom de la compagnie mais pas le nom scientifique du produit.
    J'aimerais savoir si on a testé ce produit strictement sur le pou ou si on l'a testé aussi sur le poisson? On utilise un produit qui s'attaque aux poux du saumon, mais si on utilise un remède de cheval pour traiter une souris, n'est-ce pas le produit, dans les faits, qui tue le poisson?

[Traduction]

    Vous voulez savoir si cela aura un impact sur la santé du saumon...? Est-ce bien cela?

[Français]

    Cela peut-il même le tuer?

[Traduction]

    Je crois que des doses suffisamment élevées pourraient avoir un impact sur la santé et le bien-être du poisson. Mais les doses que le saumon reçoit pour contrôler le pou du poisson ne devraient pas avoir d'impact sur la santé du poisson.

[Français]

    Je vous demandais si on a testé ce produit sur le poisson autant que sur le pou du poisson? Est-ce un produit qui a été testé strictement sur le pou pour l'éliminer, et, est-ce qu'en l'utilisant, on attaque le poisson en même temps? Est-ce possible?

[Traduction]

    Je crois que le produit a fait l'objet de diverses études pour vérifier s'il est efficace pour détruire les parasites, mais pas pour vérifier s'il peut avoir un impact sur la santé et la physiologie du saumon, quoique certains se sont également penchés sur la question.

[Français]

    Donc, on n'a pas fait d'études afin de découvrir s'il est possible que le produit contribue à la diminution du poisson. Si la quantité de poisson diminue en même temps que le nombre de poux, qui sont peut-être plus résistants au produit que le poisson lui-même, on augmente la quantité de poux par rapport au nombre de saumons restants.

[Traduction]

    C'est une question intéressante: est-ce que le produit chimique lui-même présente un danger pour le saumon sauvage? Je ne pense pas que l'exposition du saumon sauvage à ce produit pourrait présenter des dangers.
    Cependant, le produit pourrait avoir un impact sur le réseau trophique du saumon sauvage, car il est toxique pour les crustacés, et j'inclus les copépodes qui vivent dans le zooplancton et qui sont un élément de l'alimentation du jeune saumon sauvage. Si les résidus chimiques dans l'environnement sont suffisamment importants pour avoir un impact sur ces populations de copépodes, tout cela pourrait mener à une diminution de la ressource alimentaire du saumon sauvage.
    Cependant, il ne s'agit que de spéculations. Personne ne s'est encore penché sur la question.

  (1655)  

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur.
    Bien franchement, je vous dirais que votre présentation et les réponses que vous nous donnez apportent beaucoup de clarté. Je comprends beaucoup mieux grâce à vos interventions, et j'ai hâte de lire votre document, lorsqu'il sera traduit en français. Dans votre présentation, tout au début, vous avez mentionné, si je ne me trompe pas, qu'il y avait quatre éléments à considérer. On a parlé d'un élément, soit les sites aquacoles par opposition au saumon sauvage. Il y en a trois autres. Quels sont-ils?

[Traduction]

    Bien, comme je l'ai dit dans mon exposé, il y a quatre grandes questions qu'il faut se poser dans ce dossier. Le pou du poisson porté par le saumon d'élevage infecte-t-il le saumon sauvage? Quel est l'impact du pou du poisson sur le jeune saumon, sur sa survie et sur son comportement?
    Troisièmement, quel est l'impact sur les populations de saumon sauvage des infestations en série, des infestations qui se produisent année après année? Passer de l'impact du pou du poisson sur un poisson à son impact sur la productivité de la population, il y a tout un pas. Enfin, voici la quatrième question: si nous jugeons qu'il y a un problème, que pouvons-nous faire en matière de gestion pour le régler?

[Français]

    Il peut y avoir d'autres éléments qui peuvent causer des difficultés relativement au saumon sauvage, toutes espèces confondues. On nous a parlé des changements climatiques, du comportement animal normal. Il peut y avoir beaucoup d'autres éléments à considérer. Parmi ces autres éléments, mis à part le pou du poisson, quels seraient prioritairement, selon votre échelle, les éléments sur lesquels on devrait davantage se pencher?

[Traduction]

    Il y a plusieurs facteurs qui touchent les populations de ce monde, et ils varient d'une population à une autre. Dans certains cas, la situation est attribuable à la perte d'eau douce. Dans d'autres, il s'agit d'un problème de pollution. Dans d'autres cas encore, c'est un problème de barrages. Ailleurs, cela est attribuable aux maladies qui émanent des exploitations aquacoles ou des écloseries. Il peut aussi y avoir le problème des récoltes et de la surpêche. Un autre facteur non négligeable est celui du changement climatique. Il s'agit d'un problème considérable et imminent.
    Tous ces facteurs contribuent au déclin du saumon sauvage en Colombie-Britannique. Mais ils ne se prêtent pas tous à des solutions de gestion. Si je devais classer les facteurs sur lesquels il faudrait se pencher, je vous dirais que la transmission des maladies à partir des bassins d'aquaculture est un facteur fort important.
    C'est ce que je vous dirais tout d'abord car, tel que l'expérience dans le reste du monde nous l'a dicté, nous pouvons nous attendre à des problèmes dans ce domaine. Ensuite, nous voyons à l'heure actuelle des problèmes en Colombie-Britannique. Et enfin, ces problèmes se prêtent à des modifications de gestion et peuvent aboutir à des solutions. D'autres problèmes, tels que le changement climatique, sont bien plus difficiles à résoudre.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Krkosek, d'être venu et de nous avoir fait vos remarques liminaires.
    J'aimerais vous poser plusieurs questions en même temps. S'il me reste du temps, je vous poserai peut-être une question complémentaire. Vous semblez convaincu que le pou du poisson a une incidence sur le saumon sauvage. En revanche, d'autres témoins et scientifiques ont indiqué que ces preuves ne sont pas concluantes ou qu'il est difficile d'établir ce lien de causalité. Il existe donc deux camps dont les positions sont aux antipodes et un de ces camps ne souscrit pas du tout à vos conclusions.
    Voici ma première question: comment se fait-il que vous soyez aussi certain des conclusions que vous avez formulées?
    Deuxièmement, j'aimerais que vous nous parliez de la tolérance du pou du poisson par rapport au Slice sur la côte Ouest. Quelqu'un a dit à ce comité que cela ne posait pas de problème pour la Colombie-Britannique. Qu'en pensez-vous? Savez-vous comment l'on teste les poux quant à leur tolérance aux médicaments? Qu'en est-il? Qui fait ces tests? Et à quelle fréquence ces rapports ou ces résultats sont-ils rendus publics?
    Enfin, puisque vous avez recommandé des solutions de gestion, pouvez-vous clore en nous parlant des priorités que vous fixeriez pour cette industrie si l'on reconnaissait que le pou du poisson avait une incidence sur la prévalence du saumon sauvage et si l'on était d'accord pour dire qu'il fallait régler le problème du pou du poisson? Quel serait alors le premier problème à résoudre?

  (1700)  

    Pour répondre à votre première question, je vous dirais que le fait que je crois que le pou du poisson pose un problème pour le saumon rouge repose sur mes huit ans de travail sur la question. J'ai passé environ quatre ans sur le terrain à attraper des poissons, à compter le nombre de poux du poisson et à faire des expériences sur les effets du pou du poisson sur le comportement et la survie des jeunes saumons. J'ai passé les quatre années suivantes à analyser ces données et à travailler avec des modèles mathématiques qui permettent de comprendre les incidences de ce que nous avons appris.
    Pendant ce temps, j'ai également lu les documents scientifiques qui avaient été publiés sur le sujet. Les preuves permettent de conclure que le pou du poisson contribue au déclin des populations de saumons sauvages. En ce qui concerne les points de vue divergents de mes collègues, ils estiment que le pou du poisson n'est pas le seul facteur qui contribue à ce déclin. Et je suis d'accord avec eux. Bon nombre de facteurs touchent les populations de saumons. Certains d'entre eux existent depuis bien longtemps.
    Je vous dirais que le pou du poisson est un nouveau facteur et qu'il contribue aux répercussions sur la productivité des populations de saumons sauvages. L'expérience en Europe et en Colombie-Britannique permet de voir que cela peut être un facteur important qui a une incidence sur les populations de saumons. Lorsqu'une collectivité scientifique examine de nouveaux résultats, cela peut prendre du temps et les chercheurs indépendants doivent également prendre leur temps pour faire leur travail et arriver ensuite à un consensus. Nous en sommes au stade où ces résultats sont assez récents, surtout pour la Colombie-Britannique.
    La collectivité scientifique et le travail que j'ai fait permettent de voir que le pou du poisson dans les piscifactures constitue un problème considérable pour les populations de saumons sauvages. Ce n'est pas seulement mon travail qui l'a indiqué. Bon nombre d'autres scientifiques sont arrivés aux mêmes conclusions. Il s'agit également d'un problème qui se prête bien à des modifications et à des solutions en matière de gestion.
    Votre deuxième question portait sur la tolérance qu'a développé le pou du poisson au Slice. Les premières indications de cette éventualité en Colombie-Britannique ont été relevées dans la baie Nootka. Cet hiver, le traitement chimique n'a pas fonctionné dans plusieurs élevages de cette région. La réduction du nombre de poux du poisson dans ces élevages était minime et les populations de poux du poisson se sont multipliées très rapidement par après. Ce sont des exemples probants de résistance à un produit chimique.
    Mais ce n'est qu'un exemple et personne n'a encore examiné ces poux afin de savoir si cette tolérance avait évolué ou non.
    Passons à la prochaine question. Ces travaux sont en train d'être effectués par les responsables au centre de santé des animaux aquatiques qui se trouve dans la région de la rivière Campbell. Je pense qu'ils ne travaillent pas avec les poux du poisson de la baie Nootka, mais avec des poux qui proviennent d'autres régions. Ils exposent les poux à plusieurs niveaux de concentration de produits chimiques et déterminent ensuite quelle concentration tue 50 p. 100 des poux. Il s'agit d'un LD 50. Ils essaient de voir comment la concentration et le LD 50 évoluent. Plus les poux deviennent résistants et plus il faut de Slice pour les tuer.
    Puis-je répondre à la dernière question sur les solutions de gestion?
    Rapidement.
    Rapidement, le premier test indique qu'une zone de gestion coordonnée avec un traitement aux produits chimiques et une mise en jachère semblent réduire la prévalence de poux du poisson. Cela semble donner l'effet escompté. Je pense qu'il s'agit plutôt d'une modification fondamentale. Déplacer les élevages en les installant plus loin des routes de migration du saumon sauvage serait bien plus efficace et permettrait d'alléger cette dépendance fragile que nous avons à l'endroit des traitements aux produits chimiques. Cela pourrait se faire dans le contexte d'une planification spatiale, dans laquelle des zones seraient réservées pour les écosystèmes de saumon sauvage et les poissons ne seraient pas exposés à de tels risques.

  (1705)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Allen.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poser quelques questions à M. Krkosek. S'il me reste du temps... Je pense que c'est ce que Randy avait dit à propos de Tilly.
    On verra comment les choses se présenteront, Tilly.
    Bienvenue. Merci d'être ici.
    Dans votre analyse de ces études — je songe aux données de référence —, vous avez dit que les poux du poisson abondaient dans cette zone, qu'ils s'y trouvaient de toute façon. Combien y en avait-il? Y avait-il des données de référence avec l'aquaculture afin de mieux comprendre ces données?
    Vous avez dit que, dans le cas où il n'y a pas d'élevage, le problème avec les petits poissons est de l'ordre de 5 p. 100, et que cela peut aller jusqu'à hauteur de 90 et 100 p. 100. Qu'en est-il du point de référence en ce qui concerne le nombre de poux du poisson? Est-ce que vous pourrez faire cette étude et la comparer à l'aquaculture?
    Très bien. La règle générale qui émerge est que, lorsqu'il n'y a pas de piscifactures de saumon au cours des deux ou trois premiers mois de la vie des jeunes saumons du Pacifique, l'infection affiche un taux de 5 p. 100 au moins. Ces données proviennent des régions où il n'y a pas d'élevage de saumon. Elles ne proviennent pas des régions où il y avait des piscifactures de saumon.
    Nous n'avons entrepris ces études qu'après que le problème des élevages de saumon se présente et que nous ayons commencé à le constater. Alors, afin de fournir des données de référence, il faut examiner ce qui se passe ailleurs qu'en Colombie-Britannique, dans une région où il n'y a pas d'élevage de saumon, et faire une comparaison spatiale — des régions exposées par rapport à celles qui ne le sont pas —, au lieu de voir ce qu'il en était avant et après la présence d'élevage de saumon.
    Vous avez ces données de référence. Et d'après ce que les derniers témoins ont dit, peu importe où vous allez, le problème sera différent. En ce qui concerne les comparaisons spatiales, est-ce que vous vous heurterez à d'autres défis? Est-ce que vous avez les données de référence pour les régions où l'on ne fait pas d'aquaculture?
    Le taux d'infection est de l'ordre de 5 p. 100 à l'heure actuelle. Cela semble être environ le taux maximal de jeunes saumons au cours des premiers mois de vie marine infectés par le Lepeophtheirus salmonis, soit le pou du saumon.
    Il existe également d'autres espèces de poux du poisson qui sont très présents au cours de cette phase de croissance, mais c'est le pou du saumon qui pose problème, et les niveaux de référence pour cette espèce sont de l'ordre de 5 p. 100 dans les régions où il n'y a pas d'élevage de saumon.
    Je n'ai pas les données sous les yeux, mais il me semble que l'on peut conclure que cela représente 20 fois plus de poux. Est-ce que c'est ce que vous essayez de dire?
    Dans les régions où il y a des élevages de saumon?
    Oui.
    Cela dépend de nombreux facteurs. Cela varie dans les régions d'élevage de saumon et peut passer d'environ 5 p. 100 lorsqu'il y a une bonne gestion à un taux de 95 à 99 p. 100 lorsque la gestion n'est pas efficace.
    Vous avez beaucoup parlé du saumon rose. Comme on l'a indiqué plus tôt, M. Pennell a parlé des nombreux changements survenus au cours des dernières années au chapitre de la remonte du saumon rose et de ce que ces changements supposent.
    Y a-t-il une corrélation qui a été étudiée entre les remontes de saumon — au cours des dernières années — et les facteurs qui les touchent, comme par exemple, le changement climatique? Ma question comporte aussi une deuxième partie: avez-vous fait des analyses sur le saumon rouge?
    Oui, nous avons fait ces analyses. En épidémiologie, nous les appelons des études de comparaison avec les témoins appariés, car il y a deux échantillons de populations qui se trouvent dans les mêmes conditions environnementales. Dans un cas, les témoins sont placés dans un environnement infesté et dans l'autre, ils ne le sont pas. Ensuite, on examine les résultats pour voir s'il y a eu une modification dans leur productivité.
    Nous avons fait une telle analyse pour les populations de saumon rose sur la côte centrale de la Colombie-Britannique. Nous avons examiné les modifications de productivité de ces populations, avant et après les infestations de poux du poisson par rapport à une région non exposée qui se trouvait au nord de cette zone. L'analyse nous a permis d'examiner les facteurs qui sont environnementaux et qui touchent les populations dans leur ensemble — il s'agit donc de fluctuations climatiques de grande envergure. Nous avons utilisé un modèle stochastique non linéaire, qui nous permet de contrôler le bruit ambiant et la mortalité associée à la densité.
    Grâce à cette analyse, nous avons pu isoler les effets des infestations de poux du poisson sur la productivité de ces populations. Nous l'avons fait pour le saumon rose de l'archipel Broughton. Je fais partie d'un groupe qui vient de terminer une étude similaire pour le saumon coho qui se trouve dans cette région. Nous avons commencé à préparer une analyse sur le saumon kéta dans l'archipel Broughton.
    Nous avons également commencer à rassembler les données afin d'examiner la relation entre la productivité du saumon rouge dans le fleuve Fraser et la production aquacole. Mais nous n'en sommes qu'aux premières phases de collecte de ces données.

  (1710)  

    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président? Quatre minutes? Je céderai donc la parole à Mme O'Neill-Gordon.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue.
    Comme vous le savez, nous avons reçu beaucoup d'informations sur cet enjeu et nous avons entendu les points de vue des deux camps sur le sujet.
    Voici ma question. On a dit au comité qu'il y avait des différences considérables entre le pou du poisson dans l'océan Pacifique et l'océan Atlantique. Je viens de la région atlantique. J'aimerais que vous me parliez de ces différences. En quoi est-ce que cela a une incidence sur le taux d'infestation des saumons d'élevage et celui des saumons sauvages?
    Vous posez une question fort intéressante et importante. Les différences entre les poux du poisson du Pacifique et ceux de l'Atlantique sont génétiques.
    Mme Tilly O'Neill-Gordon: Je vois.
    Dr Krkosek: Ils ont examiné les gènes de ces deux groupes et ils ont déterminé qu'ils sont assez différents génétiquement pour être perçus comme des espèces différentes.
    Cela ne veut pas dire que leurs caractéristiques ou leur écologie comportent des différences considérables. Personne n'a encore essayé de voir s'il y avait des différences dans l'évolution biologique de ces espèces, leur pathogénicité, ou encore les caractéristiques de leur hôte. En règle générale, ils ont la même évolution biologique, le même cycle de vie et les mêmes sensibilités à la température et à la salinité.
    Nous avons appris beaucoup de choses sur le pou de l'Atlantique que nous pouvons appliquer à celui du Pacifique. Il faut tout simplement faire attention au moment de le faire.
    Quelle est l'origine de ces différences? D'après vous, y a-t-il deux types d'espèces de poux du poisson, ou s'agit-il de la même espèce avec un bagage génétique différent?
    Cette nuance est subtile. Cela dépend de comment on définit le terme « espèce ». Lorsque les taxonomistes séparent les populations en diverses espèces, ils examinent les distinctions génétiques entre les populations. Leur bagage génétique est assez important pour les établir comme étant des espèces distinctes, car ils ont été isolés pendant un long moment.
    Merci.
    Merci.
    Il vous reste deux minutes et demie, monsieur Calkins.
    Merci, monsieur Krkosek. Je m'appelle Blaine Calkins. Je détiens un diplôme de zoologie de l'Université de l'Alberta. J'aimerais vous poser plusieurs questions.
    J'aimerais que vous me parliez des cycles de vie des cinq espèces de saumons anadromes que l'on retrouve dans l'océan Pacifique. J'aimerais savoir précisément à quel moment ils retournent dans l'océan Pacifique et sont contaminés de divers poux. Un autre témoin nous a dit que le saumon rouge est beaucoup plus grand et que le saumon rose est bien plus petit. Pouvez-vous nous parler des trois autres espèces?
     J'aimerais également savoir ce qu'il en est de la durée de vie de la toxicité biocumulative du Slice. J'aimerais savoir à quel point et pendant combien de temps il est durable dans l'environnement après avoir été utilisé dans les élevages.
    J'aimerais également que vous me parliez du ratio d'infestation et de mortalité des poux. Lorsque les taux d'infestation du pou sur un saumon augmente, que se passe-t-il? Est-ce que cela devient mortel lorsqu'on retrouve quatre ou cinq poux sur un saumon?
    J'aimerais également savoir si vous avez d'autres informations portant sur la mortalité indirecte causée par les poux du poisson? Et j'aimerais que vous m'en parliez davantage.
    Il existe cinq espèces de saumon dans le Pacifique. La plupart des préoccupations relatives aux poux du poisson ont trait au saumon rose et au saumon kéta. C'est parce que lorsqu'ils éclosent du gravier dans les rivières, ils vont directement dans l'océan, alors qu'ils ne sont que des alevins.
    Les trois autres espèces — le saumon rouge, le coho, et le quinnat — passent l'hiver, et parfois une année, voire plus, dans l'eau douce. Quand ils quittent les régions d'eau douce et se déplacent vers l'océan, ils sont bien plus gros. Ils seraient donc moins à risque d'être infestés de poux du poisson que ne le sont le saumon rose et le saumon kéta, qui sont très petits lorsqu'ils entrent en contact pour la première fois avec le pou du poisson.
    Il y a également d'autres formes anadromes de truite fardée et de truite arc-en-ciel qui se déplacent entre l'eau douce et l'eau salée et on a tendance à les oublier. Personne n'est véritablement en train d'étudier...

  (1715)  

    Vous parlez donc de la truite arc-en-ciel et d'autres espèces anadromes.
    Oui, de la truite arc-en-ciel...
    Qu'en est-il du crabe à pois? C'est aussi une espèce anadrome.
    Oui, c'est vrai, et personne ne s'intéresse à ces espèces dans le contexte du pou du poisson.
    Vous avez aussi posé une question sur la persistance de Slice dans l'environnement marin.
    Vous avez dit que c'est un produit toxique pour tous les copépodes et les crustacés, et j'aimerais donc savoir pendant combien de temps il persiste dans l'environnement après son utilisation.
    Je ne sais pas de mémoire pendant combien de temps le produit chimique reste viable dans l'environnement marin; il faudra que je vérifie et que je vous fasse parvenir les données.
    D'accord.
    Si nous en avons le temps, monsieur le président, j'aimerais poser une...
    Il y aura un autre tour.
    M. Blaine Calkins: Pour vrai? D'accord.
    Le président: Monsieur Andrews, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, Martin, d'être venu aujourd'hui.
    J'aimerais renchérir sur ce que disait M. Allen. Il parlait du pourcentage et d'une prévalence naturelle de 5 p. 100. Vous avez dit qu'aux abords des piscicultures de saumon, la prévalence allait jusqu'à 95 p. 100, mais vous n'avez pas insisté. Pouvez-vous nous donner une meilleure idée de ce pourcentage?
    Eh bien, il varie d'une année sur l'autre. Au cours des pires années, quand les infestations étaient les plus intenses, la prévalence de poux du poisson pouvait atteindre les 99 p. 100 dans certains sites, le nombre de poux par jeune saumon pouvant être de 80, 90, voire plus de 100. Ces nombres sont manifestement létaux.
    D'autres années, lorsque moins de piscifactures étaient actives ou encore lorsque les traitements chimiques ou d'autres interventions de gestion réduisaient le nombre de poux dans les piscifactures, nous avons vu des niveaux modérés d'infestation: 30, 40 et aussi 50 p. 100. Cela varie d'une année sur l'autre.
    Nous avons reçu des fonctionnaires du ministère de l'Aquaculture de la Colombie-Britannique. Ils ont visité certaines de ces piscifactures de saumon et ils ont élaboré leurs propres modèles statistiques pour déterminer combien il y a de poux du poisson sur le saumon dans ces piscifactures.
    Nous parlons maintenant de saumon sauvage. Pouvez-vous faire une analyse de leurs statistiques concernant le pou du poisson présent sur le saumon des piscifactures et de leur constatation relative au saumon sauvage qui se trouve à l'extérieur des piscifactures? Existe-il un modèle que vous pouvez utiliser pour déterminer si ce qu'ils disent est exact ou non? Peut-on établir une corrélation?
    Dans le cadre du nouveau plan de gestion coordonnée de la zone, nous nous employons à diffuser ce genre de données qui sont recueillies dans les piscifactures et les données que nous recueillons sur le terrain, à les analyser pour établir le genre de corrélation dont vous parlez.
    Je peux vous dire que pendant les années où l'infestation de poux du poisson était à son plus fort, il y avait sur chaque poisson d'élevage environ cinq, six ou sept poux mobiles. Pour les aquaculteurs, ce ne serait pas un problème pour la santé ou le bien-être des poissons d'élevage.
    Toutefois, ces nombres constituent un problème important pour la santé et le bien-être des jeunes saumons sauvages qui migrent dans les eaux limitrophes. Cela s'explique par le fait que le nombre de poissons dans une piscifacture est très élevé — entre un demi-million et un million — et qu'il y a parfois plusieurs piscifactures le long d'une route migratoire, de sorte que la production réelle de poux du poisson, même s'il y en a que trois ou quatre par poisson... Si vous multipliez cela par deux ou trois millions de poissons, cela fait énormément de poux dans le milieu marin.
    Pour ce qui est du plan de gestion, tel qu'il existe, est-il efficace? Peut-il y avoir coexistence de piscifactures de saumon et de saumon sauvage tout en protégeant le saumon sauvage?
    Je peux dire que le nouveau plan de gestion, qui utilise les périodes de jachère et les traitements chimiques, a permis de réduire le nombre de poux sur les poissons d'élevage. Il est efficace pour ce qui est de réduire le nombre de poux que l'on retrouve sur les poissons sauvages.
    D'après les données que nous avons vues, nous prévoyons que les populations de saumon sauvage se rétabliront dans ces zones, mais il est encore trop tôt pour se prononcer. Tout dépendra de la durabilité à long terme du traitement chimique.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Blais.

[Français]

    J'aimerais aborder deux éléments avec vous, auxquels on n'a peut-être pas touché jusqu'à maintenant. Il s'agit de la pollution et du trafic maritime.
    On comprend très bien qu'un écosystème peut être à large ou à petite échelle. Et je comprends que l'océan Pacifique, le territoire que le saumon occupe, son habitat, c'est suffisamment large pour que plusieurs éléments entrent en ligne de compte.
    Je me demandais si la pollution en général était un autre facteur auquel il fallait prêter attention. Est-ce que le trafic maritime qui augmente, j'imagine, sur ces territoires... Il y a aussi les espèces envahissantes. On peut se poser toutes sortes de questions. Avez-vous des pistes relativement à ces éléments? Ou encore, cela a-t-il déjà été analysé d'une certaine façon?

  (1720)  

[Traduction]

    Vous voulez savoir si ces autres facteurs ont été examinés dans le contexte du déclin général des populations de saumons en Colombie-Britannique. Pour ce qui est du trafic maritime, je ne le crois pas, pas en ce qui a trait au saumon, mais personne n'examine l'incidence du trafic maritime sur les orques et d'autres cétacés qui chassent par écholocation. Cela peut gêner la communication entre les membres du groupe et le repérage de proies.
    La pollution peut avoir un effet considérable sur la dynamique d'un écosystème. Elle peut modifier la productivité et l'écologie du plancton, ce qui a des ramifications pour tout ce qui se trouve plus haut que le plancton dans la chaîne trophique d'un écosystème. Il y a de multiples sources de pollution, normalement associées à l'industrie et aux importantes populations humaines, mais aussi avec les déchets qui proviennent des piscicultures de saumon. Cet ajout de nutriments dans un écosystème peut modifier la dynamique du plancton, ce qui peut avoir de nombreuses conséquences. Mais pour autant que je sache, cette question ne fait pas l'objet d'études approfondies.

[Français]

    Qu'en est-il des espèces envahissantes, maintenant?

[Traduction]

    Les espèces envahissantes ont une incidence considérable sur la modification des écosystèmes. Je ne connais pas, pour l'heure, d'espèces envahissantes en Colombie-Britannique qui pourraient contribuer au déclin des populations de saumon sauvage. Cela ne signifie pas qu'il n'y en a pas, mais tout simplement que je n'en connais pas l'existence.
    Merci.
    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai deux questions.
    Je me demande si vous pouvez nous parler de l'effet qu'a la densité des piscifactures de saumon sur les infestations de poux du poisson.
    Deuxièmement, quelqu'un a dit plus tôt au comité que les scientifiques du MPO s'entendent essentiellement pour dire qu'il n'y a pas suffisamment d'informations pour conclure que la présence de poux du poisson dans les piscifactures a un effet nocif sur le saumon du Pacifique. Qu'en dites-vous?
    Pour ce qui est de la densité des saumons d'élevage, il y a une chose que j'ai apprise de l'écologie des maladies infectieuses, l'épidémiologie, c'est que la dynamique des maladies est très sensible à la densité des hôtes. Quand on entasse des animaux, ou des personnes, il se produit généralement des éclosions de maladies.
    Cela signifie qu'il peut y avoir certains facteurs, dont les seuils critiques de densité des hôtes, qui font que dans une région comme l'archipel Broughton, si la densité régionale est relativement faible, il y a moins d'éclosions de maladies. Quand la densité est très élevée, il peut y avoir beaucoup plus de maladies.
    Il est très difficile de déterminer où se situe ce seuil, mais je dirais que c'est vraisemblablement un facteur. C'est peut-être ce qui explique qu'un endroit comme l'archipel Broughton a maintenant un problème de pou du poisson alors qu'il n'en avait pas auparavant. Une chose semblable s'est produite dans la baie de Fundy au Nouveau-Brunswick où un problème de pou de poisson est apparu quand la densité de poissons d'élevage a augmenté. Le phénomène n'a pas été graduel. Il a été soudain.
    Quant à la position du MPO et des scientifiques du ministère, selon lesquels il n'y a pas suffisamment d'informations qui permettraient de conclure qu'il existe un problème de pou du poisson chez le saumon du Pacifique, je ne partage pas leur avis. J'estime qu'il y a tout lieu de croire que nous avons un problème. J'estime qu'il y a amplement de preuves qui indiquent que le problème est beaucoup plus grave que nous l'imaginons. Il touche d'autres régions de la Colombie-Britannique ainsi que des espèces autres que le saumon. Voilà ce que je pense.

  (1725)  

    Merci.
    Merci.
    Monsieur Calkins.
    Je vais continuer. Je vais continuer de vous lancer mes questions et nous verrons où cela nous mènera.
    En ce qui concerne l'idée selon laquelle la tolérance au Slice soit maintenant un facteur dans un incident particulier, n'est-il pas plus probable que le coupable soit l'un des autres facteurs puisque, si une tolérance se développait, nous ne la verrions pas dans un site seulement, mais plutôt à plus grande échelle? Je ne crois pas qu'il n'y aurait qu'une zone où l'on observerait cette tolérance. Cela semble être un incident isolé. J'aimerais connaître votre avis scientifique là-dessus.
    Deuxièmement, en tant que scientifique, vous avez une liste de desiderata. Dans vos propres recherches, que souhaiteriez-vous savoir que vous ignorez? Quelles sont les choses que vous voudriez voir en ce qui a trait à la recherche complémentaire qui se fait actuellement sur la côte du Pacifique afin de combler les lacunes dans les connaissances scientifiques?
    Je vous ai déjà posé cette question. Je ne sais pas si quelqu'un a déjà fait des recherches ou utilisé un modèle statistique qui se fonderait sur les parcours migratoires connus du saumon. Est-ce possible qu'un saumon rose sortant du fleuve Fraser se soit dirigé vers le Nord au lieu de s'approcher.. Sur la foi des parcours que nous connaissons, dans quelle mesure est-ce possible qu'un jeune saumon nageant vers le Nord évite tout à fait une pisciculture? Je ne sais pas si quelqu'un a fait des études statistiques à cet égard, mais si vous pouviez me répondre, ce serait merveilleux.
    Je vais répondre d'abord à la dernière question.
    Dans l'archipel Broughton, nous avons pu déterminer que l'empreinte spatiale du pou du poisson d'une seule piscifacture est d'environ 30 kilomètres, si bien que dans un rayon de 15 kilomètres de l'emplacement du site, le nombre de poux du poisson est supérieur à ce qu'il serait normalement. S'il y a une empreinte de taille comparable autour des îles Discovery, je dirais qu'il n'est pas possible pour un jeune saumon de migrer vers le Nord de la côte Est de l'île de Vancouver sans être exposé à une piscifacture de saumon.
    Quant à votre première question, j'admets qu'il y a plusieurs facteurs qui pourraient expliquer pourquoi le traitement au Slice dans la baie Nookta a échoué. La résistance du pou du poisson est une hypothèse, mais il y en a d'autres. Il n'est pas possible de les départager pour l'instant. Nous n'avons pas les données voulues. Que ce soit un incident isolé ou que ce soit peu probable, tout dépend de la connectivité qui existe entre les populations de poux du poisson sur le littoral. Nous ne savons pas si la population de poux du poisson de la baie Nootka est très homogène comparativement à d'autres populations en Colombie-Britannique. Si elles sont étroitement apparentées, alors on s'attendrait à ce que le traitement échoue comme cela se produit déjà ailleurs en Colombie-Britannique. Pour le moment, il est trop tôt pour se prononcer.
    Quant à ma liste de desiderata, j'aimerais qu'il y ait des registres accessibles indiquant le nombre de poissons par piscifacture et qu'il y ait des registres de la mortalité et des éclosions de maladies, pour tous les types de maladies et pour toutes les piscifactures de la Colombie-Britannique. J'estime que ce sont là des renseignements d'importance critique que nous devons analyser afin de déterminer s'il y a un lien avec les problèmes de perte de productivité du saumon sauvage en Colombie-Britannique.
    Au nom du comité, je vous remercie, monsieur Krkosek, d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui et de répondre à nos questions.
    J'inviterais les membres du comité à soumettre leurs propositions de témoins au greffier, aux analystes ou à moi-même. S'il vous plaît, n'oubliez pas de le faire.
    Je vous remercie de nouveau, monsieur Krkosek. Nous vous sommes sincèrement reconnaissants du temps que vous nous avez consacré.
    Merci de m'avoir reçu.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU