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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 018 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 mai 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Voici la séance 18 des travaux du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Aujourd'hui, nous poursuivons l'étude du projet de loi C-391, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu (abrogation du registre des armes d'épaule.
    C'est toute une série de témoins que nous accueillons aujourd'hui et, plutôt que de prendre beaucoup de temps pour les présenter au départ, en commençant par la gauche ici, je vais demander à chacun de présenter son exposé. J'espère que vous le savez, vous disposez d'une dizaine de minutes pour présenter un exposé; ensuite, nous ouvrons la séance aux questions et observations.
    Qui veut commencer? Est-ce la Fédération des femmes du Québec?
    Madame Conradi, je vous prie d'y aller. Bienvenue au comité.

[Français]

    Merci beaucoup. Merci de nous accueillir aujourd'hui pour parler de cet enjeu d'une très grande importance.
    Je suis la présidente de la Fédération des femmes du Québec. Je suis accompagnée par Manon Monastesse, qui est la directrice d'un des groupes membres de la fédération, et on a voulu faire la présentation ensemble.
    La Fédération des femmes du Québec a pour mandat de défendre les droits des femmes dans toutes les sphères de la vie sociale et politique. Nous représentons 175 organisations dans toutes les régions du Québec, y compris les régions rurales. Nous avons également 600 membres individuels.
    Il y a maintenant plusieurs années, nous avons reçu le mandat, par la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence — c'est-à-dire la fondation mise sur pied par les familles des victimes du drame de Polytechnique —, de nous occuper de la commémoration le 6 décembre. Partout au Canada, des événements sont organisés, mais c'est nous qui avons reçu le mandat de la part de cette fondation pour organiser des événements de commémoration. Pour nous, la commémoration n'est pas là uniquement pour qu'on se souvienne des femmes qui sont tombées sous les balles du tueur il y a 20 ans, par exemple, mais pour qu'on se souvienne aussi des débats et des enjeux qui ont suivi et qui nous ont permis d'avoir un registre des armes à feu. Ce registre est en quelque sorte une réponse faisant suite à une campagne importante menée par des amis de victimes du 6 décembre.
    Par conséquent, si nous intervenons ici aujourd'hui, au comité, c'est notamment dans l'esprit de maintenir le Registre canadien des armes à feu et de défendre ce testament et ces legs qui nous ont été apportés par les amis et la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence.
    Vous pouvez imaginer que, dans la perspective des groupes de femmes, nous sommes particulièrement préoccupées par les aspects liés à la violence conjugale et à l'enregistrement des armes.
     Je céderai donc tout de suite la parole à Manon Monastesse, qui travaille dans une fédération qui vient justement en aide aux femmes victimes de violence conjugale.
    La fédération regroupe 41 maisons destinées aux femmes victimes de violence conjugale et en difficulté, au Québec. Il s'agit d'environ la moitié des maisons d'hébergement du Québec. Nous accueillons environ 10 000 femmes et enfants par année. La question de l'homicide conjugal, plus spécifiquement de l’uxoricide et de l’infanticide commis par un conjoint ou un ex-conjoint, est un enjeu majeur, au cœur de l'intervention auprès de la clientèle des maisons d'hébergement, que ce soit sur le plan de la sécurité ou de la prévention.
    La Loi sur les armes à feu a permis d'importants progrès, notamment en diminuant le nombre d'agressions armées dans un contexte de violence conjugale ou familiale. Les carabines et les fusils de chasse sont les armes le plus souvent utilisées lors d'homicides conjugaux, pour la simple raison que les armes d'épaule sont celles qui sont le plus souvent présentes dans les foyers québécois, donc les plus facilement accessibles.
    Vous comprendrez que, selon nous qui sommes signataires de ce mémoire qui a été déposé, le projet de loi C-391 envoie un dangereux message. Si les armes d'épaule n'ont pas besoin d'être enregistrées, est-ce à dire qu'elles ne constituent pas un réel danger? Trop d'exemples nous prouvent le contraire, notamment celui de Marie-Josée Desmeules, qui a été abattue par son mari au moyen de son arme de chasse en décembre 2009 à Saguenay. En plus d'augmenter le nombre de victimes, les carabines et les fusils de chasse augmentent le degré de létalité des attaques. Elles sont à prendre au sérieux, comme toutes les armes à feu.
    Il faut comprendre que, depuis 1995 au Québec, la politique Prévenir, Dépister, Contrer la violence conjugale enjoint les policiers à assurer la sécurité et la protection des victimes ainsi que de leurs proches. On procède si possible à la saisie des armes à feu dès l'arrestation ou, à défaut de cela, on s'assure que les conditions de mise en liberté provisoire en prévoient la remise sans délai à un agent de la paix. Or c'est ce que font les policiers, au Québec. La première chose qu'ils font en arrivant sur les lieux, dans une situation de violence conjugale, est de vérifier si le conjoint ou l'ex-conjoint a des armes.
    Même la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec, Mme Christine St-Pierre, a dit en entrevue que si Ottawa décidait de démanteler le registre national, la vie des policiers québécois et des victimes de violence conjugale serait mise en danger de façon non nécessaire. Selon nous, éliminer le registre ou le rendre inefficace a pour conséquence directe de priver les policiers d'un outil essentiel d'intervention et de prévention, et de mettre en péril la sécurité des femmes et des enfants que nous recevons dans nos maisons d'hébergement.
    En terminant, nous voulons vous rappeler l'importance de l'actuel système de contrôle des armes par rapport à notre capacité d'aider les personnes victimes de violence conjugale. Nous vous demandons de rejeter ce projet de loi, notamment à cause des conséquences dangereuses qu'il y aurait sur la sécurité du public et, tout particulièrement, sur celle des femmes et des enfants que nous hébergeons.

  (1535)  

    Dans cette perspective, l'enregistrement de chaque arme nous donne une indication sur le nombre et la sorte d'arme détenue par un agresseur potentiel, dans les cas de violence conjugale. Malheureusement, la violence conjugale existe aussi chez les citoyens qui n'ont aucun passé criminel. Protéger les femmes de la violence est une responsabilité sociale et politique. Elle relève même des conventions internationales auxquelles souscrit le gouvernement canadien. Cette responsabilité est nettement plus importante que tout inconvénient pouvant être associé au fait de remplir des formulaires.
    Un registre québécois, par exemple, ne serait pas efficace relativement à la circulation des armes au Canada. Par conséquent, nous ne souhaitons pas le démantèlement du registre canadien. Lors d'incidents criminels, près de la moitié des armes à feu sont des armes d'épaule. Elles ne sont donc pas utilisées uniquement pour la chasse. Dans 85 p. 100 des cas, les homicides impliquant une arme à feu sont commis au moyen d'une arme d'épaule. Le registre fonctionne, et il est important de le maintenir. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant écouter le président de l'Association canadienne des policiers, M. Charles Momy.
    Bonjour, monsieur le président. Comment allez-vous aujourd'hui?
    Mesdames et messieurs les membres du comité, merci de nous avoir invités à prendre la parole ici aujourd'hui.
    Je m'appelle Charles Momy. Je suis président de l'Association canadienne des policiers. Je voudrais vous présenter, à ma droite, l'agente-détective Nadine Teeft, membre de la section de lutte contre le crime organisé, escouade contre les armes à feu et les gangs, au Service de police de Toronto, membre elle aussi de l'Association canadienne des policiers. Je vais présenter ma déclaration, ce qui devrait prendre cinq ou six minutes, monsieur le président, puis Nadine prendra les trois minutes qui restent environ pour terminer.
    L'ACP est heureuse de pouvoir témoigner devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale à propos du projet de loi C-391. Pour brosser le contexte, disons que l'Association canadienne des policiers est le porte-parole national de 41 000 membres du personnel policier travaillant en première ligne partout au Canada. Dans plus de 150 associations membres, notre association regroupe du personnel policier des services de police des villages et petites villes du Canada comme dans ceux des grandes villes. Cela comprend les services de police provinciaux, la GRC, la police des chemins de fer et les associations de policiers des premières nations.
    Notre objectif consiste à travailler auprès des élus de tous les partis politiques à l'adoption de réformes utiles pour améliorer la sécurité de tous les Canadiens, et notamment celle de ceux qui ont juré de protéger nos collectivités. Depuis des décennies, les associations de policiers préconisent des réformes touchant notre système de justice au Canada. L'ACP a abattu un travail très positif à cet égard avec le gouvernement actuel, par l'appui et les idées qu'il a pu exprimer à propos de plusieurs projets de loi. De fait, durant la semaine, j'ai assisté à une table ronde organisée par Sécurité publique concernant la loi sur les empreintes génétiques, qui est un autre instrument dont disposent les policiers pour appréhender les criminels. Cependant, là où il s'agit du registre des armes d'épaule, nous faisons respectueusement valoir un avis différent sur la question.
    Je ne suis pas là aujourd'hui pour submerger le comité d'informations statistiques. Les responsables du programme canadien des armes à feu de la GRC en ont déjà fourni une grande part, mais signalons que notre mémoire, que nous avons remis aux membres du comité, comporte des informations de cette nature.
    En 2007, les responsables du programme canadien des armes à feu de la GRC ont sondé nos agents sur le terrain à propos de l'usage qu'ils font du registre canadien des armes à feu en direct. Au total, 56 services de police ont été sondés au Canada. Ce sont 408 agents de police qui ont participé à l'enquête dans l'ensemble; 262 d'entre eux étaient patrouilleurs, 64, enquêteurs criminels, et 82, superviseurs.
    Voici les résultats de l'enquête: 92 p. 100 ont utilisé le registre canadien des armes à feu en direct, le RCAFED, 65 p. 100 ont dit l'utiliser quotidiennement; 73 p. 100 utilisent le RCAFED pour répondre aux signalements; 69 p. 100 ont affirmé que le RCAFED avait une incidence sur leur façon de réagir à un signalement; et, enfin, 74 p. 100 ont affirmé que l'usage du RCAFED est utile aux enquêtes et aux opérations policières.
    Nous avons toujours affirmé que les services policiers utilisent le registre canadien des armes à feu. Est-ce que chaque policier qui se trouve au pays le consulte? Bien sûr que non. Sont-ils des milliers à le consulter? Il est tout à fait possible que ce soit le cas. Quoi qu'il en soit, nous pouvons dire avec certitude que, en 2009, il y a eu quatre millions de consultations du RCAFED, dont 45 p. 100 en lien automatique avec le CIPC. Les 55 p. 100 qui restent sont des interrogations particulières liées le plus souvent à des cas de violence conjugale.
    Le registre canadien des armes à feu permet d'assurer la sécurité dans nos collectivités, point à la ligne. Je suis là pour affirmer que le registre des armes d'épaule représente un des nombreux instruments à la disposition des policiers. La banque de données génétiques et le registre des délinquants sexuels sont deux autres exemples. Tous les policiers utilisent-ils tous les instruments en question, le registre des délinquants sexuels ou la banque de données génétiques? Vraisemblablement, non. Le registre est un outil précieux qui est très utile aux enquêtes et à la prévention de la criminalité, et qui nous permet d'avoir des collectivités plus sûres. Permettra-t-il de résoudre chaque crime commis avec une arme à feu? Empêchera-t-il toute mort due à l'utilisation d'une arme à feu ou servira-t-il à résoudre toute affaire du genre? Bien sûr que non, tout comme le Code criminel n'empêche pas le meurtre ou l'agression sexuelle.
    Comme les carabines et les fusils de chasse sont les armes à feu qu'on retrouve le plus souvent chez les gens, ce sont les armes à feu auxquelles les policiers ont le plus souvent affaire lorsqu'ils sont appelés à intervenir dans le cas d'une querelle de ménage ou d'un cas de violence conjugale. La semaine dernière, des policiers retraités de Winnipeg sont venus déclarer au comité — que la plupart des vrais criminels — les membres de gang et de groupes criminels organisés — n'enregistrent pas leurs armes à feu. Nous sommes d'accord avec eux.

  (1540)  

    Les usages que la police fait du registre sont nombreux; permettez-moi de vous citer quelques cas. Par exemple, ce sont des éléments d'information tirés du registre qui ont permis d'arrêter de condamner deux hommes pour complicité dans le meurtre de quatre agents de la GRC à Mayerthorpe, en Alberta, en 2005, grâce en particulier à une vérification portant sur une carabine dûment enregistrée trouvée sur les lieux du crime, une arme à feu sans restriction. L'élément d'information a été versé dans le dossier de la preuve qui a permis de condamner les deux hommes au bout du compte.
    Le registre a-t-il sauvé la vie des quatre agents de la GRC en question? Non, ce n'est pas le cas, mais il a quand même permis de traduire les responsables en justice.
    Deuxième exemple: un détachement de la GRC a recouru avec profit à l'ENSALA après avoir intercepté un suspect en possession de quatre armes d'épaule dans son véhicule. Comme le suspect répondait de façon évasive aux questions posées, les enquêteurs ont cru que les armes à feu étaient peut-être volées. L'ENSALA a effectué des vérifications dans le RCAFED et a déterminé que les quatre armes à feu étaient enregistrées au nom d'un résident de l'endroit et non pas de l'homme qui les avait en sa possession.
    La police a communiqué avec le propriétaire enregistré, qui travaillait à l'extérieur de la ville. Il a déclaré que, à sa connaissance, toutes ses armes à feu étaient entreposées de manière sécuritaire dans sa maison. La police s'est rendue chez lui et a découvert des éléments de preuve confirmant qu'une personne avait pénétré par effraction dans la maison et que les 16 armes d'épaule qu'il possédait avaient été volées. Une enquête subséquente a permis de récupérer les 12 autres armes d'épaule qui se trouvaient entre les mains du suspect.
    Où les armes à feu en question auraient-elles abouti si nous n'avions pas arrêté cet homme? Peut-être entre les mains de véritables criminels. Qu'est-ce que ces derniers auraient prévu en faire? Je vous laisse le soin de tirer vos propres conclusions sur ce point. Je pourrais continuer longtemps à donner des exemples de la façon dont les policiers consultent le registre des armes à feu, mais je me contenterai de vous exposer quelques faits.
    Le registre des armes à feu est maintenant en place. Il n'en est pas aux étapes de la planification; nous n'en sommes pas au début du projet. Le registre est opérationnel. Il fonctionne, aujourd'hui même. Se prononcer en faveur du projet de loi C-391 n'aura pas pour effet de récupérer les sommes d'argent investies au départ dans la création du programme. On nous affirme sans cesse que l'élimination du registre des armes d'épaule signifierait pour les Canadiens une économie d'à peu près quatre millions de dollars par année.
    En tant que policiers, nous assumons la responsabilité de la sécurité de nos collectivités sur le terrain même. La sécurité des enfants, des femmes et des hommes de tout le Canada représente toujours une question capitale dans notre travail. En outre, j'ai aussi la responsabilité d'assurer la sécurité de mes agents. À l'Association canadienne des policiers, la sécurité des collectivités et des policiers eux-mêmes motive notre opposition au projet de loi C-391. Beaucoup d'idées erronées ont circulé à propos de la question, qui a semé la perplexité chez les Canadiens, dont les politiciens et même nos membres, à l'occasion.
    Permettez-moi de faire valoir un dernier point, tandis que j'arrive au terme de mon exposé. Comme bon nombre d'entre vous, j'ai un permis de conduire. Ce document me permet d'utiliser un véhicule, véhicule qui est immatriculé, donc enregistré. Pour vous donner un exemple rapidement, si je devais arrêter le président pour excès de vitesse après la séance d'aujourd'hui, je vous dirais que M. Breitkreuz serait appelé à produire son permis de conduire et je vous dirais aussi que son véhicule serait aussi immatriculé.
    À moi qui suis policier, cela me permet de confirmer que le véhicule conduit par M. Breitkreuz lui appartient bel et bien ou encore qu'il s'agit d'un véhicule volé ou d'un véhicule qui sert à une autre fin que celle prévue ou qui a été utilisé pour une autre activité criminelle quelconque. Ce sont les exemples que j'emploie pour parler des permis et de l'enregistrement, qu'il s'agisse des véhicules que l'on trouve au pays ou des armes à feu qu'on trouve au pays.
    Permettez-moi de céder la parole à ma collègue Nadine Teeft, qui vous présentera ses observations durant les quelques minutes à venir.

  (1545)  

    Il reste moins d'une minute, mais allez-y.
    Je m'appelle Nadine Teeft et je suis membre du Service de police de Toronto depuis presque 20 ans. En ce moment, je fais partie de l'escouade intégrée contre les armes à feu et les gangs.
    Si je regarde le nombre total d'armes à feu saisies par le Service de police de Toronto, toutes armes confondues, pour 2007, 2008 et 2009, je vois une constante: presque la moitié des armes à feu peuvent être retracées à des Canadiens qui les possédaient de façon légale avant qu'elles ne soient détournées vers le marché des armes à feu illicite et finissent par servir à commettre un acte criminel.
    La proportion de 50 p. 100 ainsi notée d'une année à l'autre représente une statistique choquante. Pour contrer cette tendance, le registre constitue un instrument utile aux projets policiers visant à faire respecter la loi. L'utilisation d'armes à feu ayant d'abord appartenu légitimement à certaines personnes pour commettre des crimes au pays est ce qui a motivé au départ la création du registre des armes à feu au Canada.
    L'idée consistait à croire que le fait d'attribuer des permis aux propriétaires d'armes à feu individuels aurait pour effet d'accroître leur responsabilité. Les propriétaires, croyait-on, se conformeraient à la réglementation sur l'entreposage sécuritaire des armes. Ainsi, ils seraient mieux à même de reconnaître les risques et responsabilités de celui qui possède une arme à feu et, étant connus des autorités, ils seraient dissuadés de refiler leurs armes à feu de propriété légitime à quelqu'un qui n'est pas autorisé à en faire usage ou à en être le propriétaire.
    À titre de policière sur le terrain, je consulte le registre tous les jours. Démarche fructueuse qui m'a permis de saisir près de 1 600 armes à feu depuis un an et demi. Toutes les armes à feu en question étaient entre les mains de personnes qui n'étaient pas autorisées à les posséder; certaines d'entre elles provenaient de personnes qui n'avaient pas entreposé leur arme à feu de manière sécuritaire. Cela comprend des fusils d'assaut et des armes à feu sans restriction ou des armes d'épaule.
    Le registre est un outil de travail utile et nécessaire qui prouve que le régime de permis à lui seul ne suffit pas à la tâche. J'utilise le registre comme source d'information servant à justifier des mandats que je rédige pour assurer la sécurité publique. Cela m'a permis de retirer plusieurs armes à feu de maisons des gens pour empêcher des cas de violence.
    J'ai saisi les armes à feu de personnes faisant l'objet d'une ordonnance d'interdiction ou d'une révocation de permis pour des raisons liées à la santé mentale ou à des accusations au criminel. La consultation du registre était la seule façon de déterminer si la personne en question possédait une arme à feu.
    À Toronto, l'arme d'épaule n'est peut-être pas l'arme de choix des gangs dont la violence fait les manchettes. Tout de même, ne vous méprenez pas: les habitants de la ville de Toronto ne meurent peut-être pas tous aux mains de tueurs maniant une arme d'épaule, mais ils sont certainement les victimes d'actes criminels commis par des personnes dont l'arme d'épaule est l'arme de choix. Depuis un an et demi à Toronto, des centaines de personnes ont été les victimes de vol à main armée dans les magasins du secteur du détail où le criminel utilisait une arme d'épaule.
    Les carabines et les fusils de chasse...

  (1550)  

    Combien de temps vous reste-t-il? Vous avez dépassé très nettement le temps alloué.
    Il nous reste 45 secondes.
    Les carabines et les fusils de chasse représentent une certaine proportion des armes à feu saisies en rapport avec des actes criminels. Chaque fusil tronçonné est à l'origine d'une arme à feu sans restriction. Les armes à feu, dont les carabines et fusils, peuvent servir à des fins légitimes, mais ils peuvent être mal utilisés aussi, et c'est souvent le cas.
    Quelles que soient les raisons qui motivent leur choix, on ne peut passer sous silence le fait que les armes d'épaule servent à commettre des crimes violents et, pour tout à fait les mêmes raisons qui motivent l'existence du registre pour les armes à feu interdites et à autorisation restreinte, il devrait exister pour les armes à feu sans restriction.
    Nous avons actuellement un seul et unique registre national des armes à feu, où figurent toutes les armes à feu. Une arme pourvue d'un canon peut être mortelle. Quelle que soit sa catégorie, une arme à feu demeure une arme à feu, et tant que nous ne pourrons dire que les armes d'épaule ne posent aucune menace pour la collectivité que nous servons, il est impératif que toutes les catégories d'armes à feu soient enregistrées au nom des personnes voulues, sans aucune exception.
    J'ai grandi dans une famille de chasseurs, et la famille de mon mari est adepte du tir sportif. Je comprends la passion des gens, je ne m'oppose pas à la propriété légitime d'armes à feu et je ne cherche pas à faire des personnes qui possèdent légalement une arme à feu des criminels.
    Chaque propriétaire d'arme à feu a légalement la responsabilité de se conformer aux exigences énoncées dans la Loi sur les armes à feu en s'assurant de posséder les permis nécessaires en rapport avec ses armes à feu et en entreposant celles-ci de manière sécuritaire à l'abri du vol et d'une mauvaise utilisation. Or, la seule façon de garantir la conformité avec les exigences est l'application de la loi.
    L'utilisation des armes à feu à des fins criminelles constitue un problème grave. Le phénomène a un impact dévastateur sur la vie des victimes, des familles et des collectivités de tout le pays. Les incidents liés aux armes à feu sont devenus une occurrence presque quotidienne.
    Je suis reconnaissante du fait d'avoir reçu une merveilleuse formation et d'avoir à ma disposition d'excellents outils qui me permettent de faire mon travail efficacement et de protéger la collectivité que je sers. J'en suis reconnaissante à la fin de chaque journée quand je rentre chez moi auprès de ma famille. La sécurité des policiers et la sécurité de tous les Canadiens seront compromises si le registre des armes à feu cesse d'inclure tous les renseignements sur les armes à feu concernant les titulaires de permis.
    Je vous en prie: ne me retirez pas un outil de travail précieux que j'utilise tous les jours en tant que policière active sur le terrain. N'ouvrons pas la voie au marché des armes à feu illicites qui fera que des gens vont vendre ou donner leurs armes à feu à n'importe qui, en sachant que l'arme en question ne pourra jamais être retracée jusqu'à eux.
    Merci.
    Maintenant, pour représenter le gouvernement du Yukon, l'honorable John Edzerza, membre de l'assemblée législative et ministre de l'Environnement.
    Allez-y, monsieur.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, c'est un honneur pour moi de défendre aujourd'hui devant le comité le projet de loi C-391. Je crois comprendre que je suis le premier Autochtone à comparaître devant votre comité, ce qui est très décevant.
    Monsieur le président, c'est depuis longtemps que nous nous opposons au registre des armes d'épaule au Yukon, voire dans le Nord dans son ensemble, depuis la création même du registre en 1993. La création du registre était prévue dans le projet de loi C-68, loi concernant les armes à feu et certaines autres armes. Le texte a reçu la sanction royale en 1995.
    Je veux lire pour le compte rendu une motion présentée à l'assemblée législative du Yukon le 14 décembre 1994 par feu Johnny Abel, ex-député des Vuntut Gwitchin. La motion se lit comme suit:
[Traduction] La présente assemblée est d'avis que les modifications proposées de la loi fédérale sur les armes à feu devant être présentées au Parlement du Canada en février 1995 ne répondent pas aux besoins des Canadiens du Nord et ne correspondent pas à leur style de vie;
L'Assemblée législative du Yukon invite vivement le ministre fédéral de la Justice, l'honorable Allan Rock, à s'abstenir d'adopter les modifications proposées en la matière tant qu'elles ne satisfont pas aux besoins des Canadiens du Nord.
    La motion a été adoptée à l'unanimité. Les paroles de M. Abel demeurent actuelles. Il a dit:
À Toronto, les gens ne vont pas chasser le rat, ni n'ont besoin d'aller chasser le caribou comme les gens d'Old Crow. S'ils ont faim, ils s'en vont simplement à la plus proche épicerie. L'épicerie des gens d'Old Crow, c'est la nature elle-même, notre territoire traditionnel: la plaine Old Crow.
Pour mes commettants, l'arme à feu est un outil. Il nous faut un fusil pour chasser et pour tirer de la nature les fruits qu'elle offre. Pour faire son travail, le menuisier a besoin d'outils comme le marteau et la scie. Pour faire son travail, le mécanicien a besoin d'outils comme la clé à molette et le tournevis.
Mes commettants sont des chasseurs. Nous avons besoin d'armes à feu pour faire notre travail.
    Monsieur le président, depuis que le député Johnny Abel a présenté sa motion en 1994, l'assemblée législative du Yukon a accueilli d'autres motions opposées au registre des armes d'épaule, mais toujours en vain. Le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut — tout le Nord du Canada — sont unis dans leur appel en faveur de l'élimination du registre des armes d'épaule. Tandis que je vous parle aujourd'hui, les trois premiers ministres du Nord se réunissent à Whitehorse, et je suis sûr qu'ils discuteront de l'élimination du registre des armes d'épaule.
    Monsieur le président, je suis là aujourd'hui pour parler au nom des Yukonnais et dire que le registre des armes d'épaule, qui est inutile et inefficace, doit toucher à sa fin. Le registre force des citoyens respectueux des lois à enregistrer leurs outils de travail, qui leur servent souvent à assumer leurs responsabilités quotidiennes dans la vie. Le registre cible les personnes qui vivent de la nature — les citoyens, éleveurs, agriculteurs, chasseurs et pourvoyeurs des premières nations — et non pas les criminels que l'on souhaite viser. L'enregistrement ne vaut que pour ceux qui respectent la loi. Les gens qui entendent commettre un crime à l'aide d'une arme à feu ne vont pas l'enregistrer.
    La loi à l'origine du registre devait permettre, espérait-on, de réduire la criminalité violente. Habituellement, ce sont des armes de poing et d'autres armes passées en contrebande qui servent aux activités des organisations criminelles, notamment au trafic de la drogue, non pas les fusils de chasse. La violence conjugale, la violence envers les femmes est un problème dans notre société. Malheureusement, l'enregistrement des fusils de chasse ne modifiera pas cette dimension dysfonctionnelle de notre société. Dans la plupart des cas, c'est la force physique qui est employée pour violenter les femmes.
    Au Canada, les meurtriers emploient le plus souvent une arme tranchante pour commettre leur crime. En 2008, c'est un couteau qui a servi contre 6 p. 100 des victimes des crimes violents. À titre de comparaison, 3 p. 100 des crimes violents ont été commis au moyen d'un bâton ou d'un instrument contondant, et 2 p. 100, au moyen d'une arme à feu. Les données proviennent d'un article de Statistique Canada intitulé Les couteaux et les crimes violents au Canada, 2008.
    Je suis venu vous parler aujourd'hui de la vie dans le Nord canadien et du fait que les armes d'épaule y sont utilisées tous les jours par bon nombre de Yukonnais. Dans le Yukon rural, un fusil constitue peut-être la seule défense possible contre l'attaque de nombreux prédateurs. Le fusil est un outil dont se servent les citoyens ruraux pour se protéger quand ils sortent pour subvenir aux besoins de leur famille, faire de la prospection, pêcher et faire de la cueillette. Aux yeux de nombreux Yukonnais, le fusil est un moyen à employer pour nourrir ses enfants, les aînés et, dans certains cas, la collectivité.

  (1555)  

    Aux yeux de certains, l'enregistrement et le coût qu'il suppose entraîneront une détresse financière. Il est question de citoyens respectueux des lois qui ont utilisé leur fusil de manière sécuritaire toute leur vie durant.
    J'aimerais maintenant vous faire part de mon expérience d'une vie passée à utiliser les armes d'épaule dans le territoire du Yukon.
    On m'a inculqué la valeur d'un fusil à un très jeune âge, qu'il s'agisse d'un fusil de calibre .22 ou .30-06. On m'a appris à respecter et à honorer les fusils. J'ai chassé des lapins et des tétras à l'âge de neuf ans, et j'ai tué mon premier orignal à l'âge de 13 ans.
    Monsieur le président, les gens des premières nations ont vécu sous l'emprise des gouvernements fédéraux pendant des centaines d'années — seulement les premières nations. Quel autre groupe est assujetti à une loi comme la Loi sur les Indiens?
    Cela est garanti, nous avons le droit de chasser et de nourrir nos familles. Peut-on croire que ce système de registre a diminué ces droits-là? En tant qu'aîné d'une première nation, je crois que c'est bien le cas. Il est difficile pour les gens des premières nations de posséder une arme à feu. Je sais qu'il y a à Teslin, au Yukon, un aîné auquel on a retiré son fusil, et il lui a fallu deux ans de bataille devant les tribunaux pour le ravoir. On le lui a enlevé parce qu'il n'était pas enregistré. C'est incroyable. Qu'est-ce qui pourrait bien arriver maintenant?
    Monsieur le président, le registre des armes d'épaule a même une incidence négative sur nos cérémonies traditionnelles. Par exemple, quand quelqu'un meurt, nous tenons un potlatch commémoratif un an plus tard. À l'occasion de cette cérémonie, nous offrons des cadeaux au clan adverse. Le cadeau le plus honorable qu'on puisse donner à cette cérémonie, c'est un fusil. Nous ne pouvons le faire et nous ne le faisons pas, nous ne le faisons plus, et cela blesse notre esprit. C'est encore une loi qui nous est imposée et qui mine notre fierté.
    Mesdames et messieurs les membres du comité permanent, je dois vous demander pourquoi personne ne consulte les premières nations à propos de questions importantes comme celles-ci. Y a-t-il quelqu'un à Ottawa qui sait vraiment en quoi cela touche les gens des premières nations partout au Canada? C'est une autre façon de nous dénigrer, c'est presque comme si nous n'avions pas d'importance, comme si nous n'avions rien à dire dans cette histoire.
    En parlant d'avoir quelque chose à dire, monsieur le président, j'ai aussi entendu le leader libéral à Ottawa dire à tous les membres de son parti de sauver le registre. Si tel est le cas, c'est non seulement les premières nations qui ne pourront dire ce qu'elles ont à dire, mais aussi la majorité des citoyens du Yukon. Nous n'avons qu'un porte-parole au Parlement, et il est membre du Parti libéral. Il faut se demander: et la démocratie dans tout cela?
    Je pourrais vous en parler pendant des jours, mais le temps qui m'est alloué est limité. Tout de même, je vais résumer la situation comme suit. Premièrement, pour les membres des premières nations et d'autres personnes au Yukon, le fusil présente la valeur la plus élevée qui soit, c'est un objet précieux au point d'être une nécessité pour vivre des fruits de la terre, c'est plus précieux que les diamants ou l'or. Ensuite, on n'a pas consulté les premières nations pour savoir en quoi cette loi aurait une incidence sur nos droits en tant qu'Autochtones et nos cérémonies traditionnelles. Enfin, nous ne connaissons pas le montant d'argent qui a été consacré à cette loi jusqu'à maintenant. Nous avons entendu dire que ce sont des milliards de dollars. La seule réaction que nous puissions avoir, c'est de dire que nous aurions pu utiliser cet argent-là pour rénover nos maisons.
    Selon nous, cette loi a été écrite pour les grandes villes du Sud, sans que personne ne réfléchisse à ceux qui vivent des fruits de la terre. Dans les familles des premières nations, les fusils sont passés à la génération suivante lorsque quelqu'un meurt. J'ai reçu un des fusils de mon père lorsqu'il est mort. Nous ne pouvons plus faire cela.
    Notre seule voix au Yukon est mise en péril par la discipline de parti chez les libéraux. Je dis cela avec tout le respect que je dois à Larry, car, sincèrement, je crois qu'il appuierait ses commettants et voterait en faveur du projet de loi C-391.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie du temps que vous m'avez accordé aujourd'hui. Je vous remercie de l'occasion que vous m'avez donnée de me faire entendre. Il a fallu beaucoup de courage pour venir ici aujourd'hui, car je ne vous connais pas et que vous êtes beaucoup plus puissants que moi, mais il fallait que je le fasse. Il y a un ami qui m'a approché à la cérémonie du potlatch il y a deux jours. Je le citerai: « Quand tu iras à Ottawa, tu diras à ces gens-là que ce ne sont pas les armes à feu qui tuent. Ce sont les maudits crétins qui pointent une arme à feu chargée sur quelqu'un et tirent sur la gâchette. »
    Je demande respectueusement à tous les membres du comité, de tous les partis, d'appuyer le projet de loi C-391, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, j'avais des documents à déposer, mais ils n'étaient pas traduits en français. Les membres du comité vont les recevoir d'ici quelques jours. Merci.

  (1600)  

    Merci beaucoup, monsieur. J'apprécie le fait que vous soyez venu.
    Nous allons maintenant écouter notre représentant du Service de police d'Abbotsford, le chef de police Bob Rich.
    Bienvenue, monsieur Rich.
    Merci. J'apprécie de pouvoir être là. Il est assez génial d'être canadien et de participer à un exercice démocratique. C'est assez génial pour moi de pouvoir faire cela; je vous remercie donc de me permettre d'être là aujourd'hui.
    Je veux parler un peu de la situation que nous voyons, moi et mes collègues policiers, dans la localité où nous travaillons. La ville d'Abbotsford compte 135 000 habitants et 210 policiers. Nous sommes situés à 70 kilomètres à l'est de Vancouver. C'est la première localité qui n'est pas vraiment une banlieue de Vancouver. Elle se trouve au milieu de la vallée du Fraser. Abbotsford, de fait, est la plus grande municipalité de la Colombie-Britannique dans le sens où elle occupe 140 milles carrés, dont les terres agricoles représentent une bonne part.
    À propos de la question en jeu, en 2008, il y a eu 58 meurtres dans la vallée du Fraser et dans le Lower Mainland. En 2009, il y en a eu 56. C'est deux années-là, nous nous sommes retrouvés au beau milieu de guerres des gangs. De fait, Abbotsford s'est trouvé au cœur même de ces guerres de gang. Je suis encore à essayer d'élucider l'affaire, mais ce que je suppose, c'est que Vancouver a réussi à repousser certaines cultures illégales jusque dans la vallée, là où les terres agricoles se prêtent mieux à la dissimulation des bâtiments des grandes cultures illégales, de sorte que nous nous sommes retrouvés avec des centaines d'entre elles. En grandissant à Abbotsford, certains jeunes hommes ont évolué dans cette industrie qui leur a rapporté beaucoup d'argent, et les gangs ont prospéré. Je me suis joint au Service de police d'Abbotsford en tant que chef il y a deux ans de cela et j'essaie encore de comprendre comment cette localité agricole a fini par se retrouver au cœur de cette histoire.
    Quoi qu'il en soit, en 2008 et encore une fois en 2009, dès que Statistique Canada présente la donnée, Abbotsford était et demeure la capitale du meurtre au Canada. Nous avons enregistré 11 meurtres l'an dernier, dans une petite localité qui compte 135 000 habitants. Deux de ces meurtres ne sont pas recensés chez nous à proprement parler, parce qu'ils ont été commis à 50 mètres de chez nous dans une réserve qui relève de la GRC, mais c'était deux garçons de l'une de nos écoles secondaires qui ont été tués; ils avaient 18 et 17 ans. Ce sont nos meurtres, ils font partie des 11 meurtres commis. Huit des meurtres en question sont liés à des histoires de gang et de drogues.
    C'est donc notre grand problème. J'imagine que ce que viens de dire est assez évident, mais c'est quand même à cela que nous devons nous atteler. Nous venons de créer une escouade de lutte contre les gangs. Je passe beaucoup de temps dans les écoles à parler aux jeunes. Nous prenons toutes sortes de mesures de prévention, mais nous sommes en difficulté. Je viens de finir un dénombrement. Il y a 130 membres de gangs qui vivent dans la région d'Abbotsford ou qui y exercent leur métier. Nous en avons dressé la liste pour pouvoir les cibler.
    Un des faits dont il faut tenir compte, c'est que les frères Bacon ont grandi à Abbotsford et y vivent toujours. Vous avez peut-être entendu ce nom-là. Ce sont les chefs du gang des Red Scorpion, qui est devenu le gang que les autres gangs voulaient éliminer, si bien qu'il y a beaucoup d'actes de violence qui ont fini par être commis sur notre territoire, même si ça s'inscrivait dans une lutte plus vaste.
    Environ 90 p. 100 des armes à feu utilisées dans les fusillades sont des armes de poing ou des fusils d'assaut transportées illégalement depuis l'État de Washington, de l'autre côté de la frontière. Abbotsford est un de ces endroits où il y a long bout de frontière qui est laissé sans protection. Beaucoup de gens font de la randonnée dans les montagnes, si vous voulez, en traversant notamment ce que nous appelons l'« avenue zéro ». Ils traînent de la cocaïne, de la marijuana et des armes de poing. Nos difficultés ont surtout trait à l'utilisation du genre d'armes dont j'ai parlé, et je veux souligner cela aux membres du comité: voilà ce à quoi nous faisons vraiment face, du moins dans mon coin du pays.
    C'est un problème dynamique qui gagne en ampleur. Ce n'est pas une situation statique, et je crois que c'est à cause des armes à feu au Canada que la guerre des gangs a été si violente.
    Je suis devenu policier jeune, et ma femme ne s'est jamais inquiétée de moi. Mon jeune fils est policier à Vancouver, et ma femme me demande s'il est sain et sauf presque toutes les deux semaines. Je n'ai plus de réponse brillante à donner à cette question, étant donné qu'il tombe sur des armes de poing beaucoup plus souvent que je n'ai eu à le faire moi-même.
    Que peut-on faire? Avec tout le respect que je vous dois, je vous dirai que je comprends l'attention portée à la question des armes d'épaule, dont je vais parler dans un instant, mais je crois que nous devons prendre du recul et élaborer un programme global de contrôle des armes à feu au Canada. Je crois que le moment est venu d'examiner la situation. À mon avis, nous sommes en difficulté. Cela a beaucoup à voir avec nos voisins américains. Cela à beaucoup à voir avec les problèmes de drogues avec lesquels nous nous débattons.
    Je suis d'avis que nous avons adopté une mauvaise approche face aux armes de poing. Je porte sur moi une arme de poing. Elle est conçue pour une seule fin, soit de tirer sur un être humain. À mon avis, personne ne devrait porter une telle arme à moins que son métier consiste à protéger le public et qu'il soit essentiel qu'il puisse s'en servir. Je crois que ça devrait être interdit dans tous les cas. À propos de cette idée de tir sur cible de la part de propriétaires particuliers d'armes de poing, je crois que le Canada n'a pas adopté la bonne approche.

  (1605)  

    Les fusils d'assaut ne devraient jamais se retrouver entre les mains d'un particulier. Il n'y a tout simplement rien qui justifie cela. On peut bien créer, si on le veut, des régimes spéciaux pour qu'ils puissent être utilisés dans les clubs de tir, mais je pense qu'ils ne devraient jamais, au grand jamais, se retrouver dans la maison d'un particulier.
    Je crois que nous devrions prendre des mesures pour simplifier les pouvoirs des services de police de façon à ce nous puissions être plus efficaces dans nos perquisitions et nos saisies, qu'il s'agisse des pouvoirs qui nous sont conférés par voie de mandat aux termes du Code criminel, qui sont démesurément complexes par rapport à ce qui se fait dans tous les autres pays industrialisés — les pouvoirs qui nous sont conférés par voie de mandat sont incroyablement complexes dans tous les secteurs — ou, aussi, les pouvoirs de perquisition sans mandat dont nous disposons.
    La violence familiale est un enjeu énorme qui me préoccupe. C'est l'une de nos six priorités, dans notre collectivité. C'est un enjeu sur lequel nous mettons l'accent. C'est un véritable problème. L'une des choses que nous devrions faire à ce sujet, ce serait d'exercer un beaucoup plus grand contrôle sur les personnes qui détiennent un permis de possession et d'acquisition. Nous devrions en faire beaucoup plus.
    J'ai un ami qui souhaitait obtenir un permis de possession et d'acquisition. Quelqu'un m'a appelé dans le cadre de la vérification de ses antécédents, et le commis qui était à l'autre bout du fil m'a posé des questions lamentables et fermées pour savoir qui était cette personne et si elle devrait ou non posséder un permis de possession et d'acquisition. Si l'un de mes enquêteurs devait un jour poser ce type de questions, je demanderais qu'il soit congédié. Le commis m'a simplement demandé: « Est-ce que cette personne a tendance à être violente? Si elle possédait une arme, pensez-vous qu'elle tuerait des gens? » Évidemment, je connaissais les bonnes réponses, celles que je devais donner si je voulais que mon ami obtienne un permis.
    Ce n'est pas comme ça qu'on mène une entrevue. Ce n'est pas comme ça qu'on découvre les problèmes associés à une personne.
    Il faudrait investir plus d'argent et avoir davantage recours à des spécialistes pour déterminer qui devrait posséder un permis de possession et d'acquisition. Il faudrait faire beaucoup plus de vérifications auprès de sources ouvertes sur Internet, par l'entremise des réseaux sociaux. S'il vous plaît, investissons davantage dans cette partie du système.
    J'ai trouvé intéressant ce qu'a dit le détective de Toronto à propos de l'excellent travail qui est fait là-bas en ce qui concerne le contrôle des armes à feu et des enquêtes effectuées pour faire la chasse aux armes à feu. Cet important investissement a commencé à être effectué à Toronto à la suite du meurtre d'une jeune fille. J'aimerais beaucoup que de tels montants d'argent soient investis en Colombie-Britannique et dans le reste du Canada sans qu'il y ait un incident horrible comme élément déclencheur.
    Nous sommes inondés par des armes à feu américaines de grande qualité et nous sommes incapables de mettre fin à ce flux. C'est difficile. Je sais que la frontière est ouverte, mais nous devons agir à ce sujet et effectuer des enquêtes pour partir à la recherche de ces armes à feu.
    En Colombie-Britannique, il y a 909 000 armes à feu enregistrées, et 76 000 d'entre elles appartiennent à des personnes dont le permis de possession et d'acquisition est expiré. Nous ne nous occupons pas du système qui a été conçu pour permettre une surveillance de tout cela. Pourquoi donc?
    Je crois que le registre existe pour les bonnes raisons, mais il y a tout de même deux problèmes importants au sujet du registre.
    D'abord, je crois fermement que le registre est abominablement inexact. Je discute avec mes enquêteurs et avec mes spécialistes des armes à feu, et ce qu'ils me disent, l'un après l'autre, c'est que, chaque fois qu'ils ont essayé de l'utiliser, ils ont constaté que l'information qu'il contient n'est pas exacte. Je crois que la raison pour laquelle nous ne sommes pas partis à la recherche des personnes dont les permis sont expirés, dans ma province, c'est parce que, quand nous avons essayé de le faire, nous avons constaté que l'information concernant les permis expirés et les armes à feu se trouvant dans une résidence était erronée. Il y a là un problème. Je ne fais pas du tout confiance au système actuel.
    À la suite d'une discussion que j'ai eue avec mes propres spécialistes, je crois — c'est une estimation complexe, comme celle que je pourrais faire concernant le nombre d'installations de culture qui existent à l'heure actuelle à Abbotsford — qu'il y a bien plus d'un million d'armes d'épaule, facilement, au Canada, qui ne sont pas inscrites de quelque façon que ce soit. Le système est un échec.
    Ce que je constate, c'est donc que mes enquêteurs ne se fient pas vraiment au registre. Ils sont obligés de vérifier dans le système quand il y a un cas de violence familiale, parce que nous devons utiliser tous les outils à notre disposition, mais je crois qu'un système qui présente des failles, c'est encore pire que l'absence de système. Si nous ne pouvons pas corriger le problème associé au registre des armes d'épaule, je pense, en tout respect, qu'il faudrait le mettre au rebut.
    L'autre chose que j'aimerais dire — et je n'aurais peut-être pas été au courant s'il n'y avait pas eu d'incident —, c'est que le recours au droit pénal pour garantir le contrôle des armes à feu s'est révélé un échec cuisant. Il y a maintenant, littéralement, des centaines de milliers de Canadiens qui commettent une infraction criminelle parce que leur arme n'a pas été enregistrée ou parce que leur permis de possession et d'acquisition est expiré. C'est là une façon horrible de miner l'efficacité d'un système très important dans notre pays. Je pense donc que, si nous voulons aller de l'avant, il faut aussi modifier ce système.
    Voici, au fond, ce que je veux dire à propos du problème du registre des armes d'épaule comme élément faisant partie du système général qui vise à régler le problème du contrôle des armes à feu, problème auquel nous faisons vraiment face: nous devons conserver ce registre seulement si nous sommes en mesure de corriger ces lacunes. Il existe depuis longtemps, mais si nous n'allons pas nous assurer de posséder un registre des armes d'épaule exact dans ce pays, je pense que ça ne devrait pas être à nous de régler ce problème.

  (1610)  

    Je serais prêt à me fier au CIPC seulement si je pensais qu'il est efficace, et je serais prêt à me fier à ce registre seulement si je pensais qu'il est efficace.
    Merci.
    Vous avez pris 10 minutes, tout juste. Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Rahilly du Dawson College Committee for Gun Control. Je vous souhaite la bienvenue parmi nous, monsieur. Allez-y, présentez votre exposé.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de venir vous rencontrer, à titre de représentant du Collège Dawson, pour discuter du contrôle des armes à feu. Notre comité a été mis sur pied quelques jours après l'attaque qui a eu lieu au Collège Dawson le 13 septembre 2006.
    Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais dire quelque chose au député assis derrière le chef Bob Rich. J'ai écouté ses commentaires à propos de ses préoccupations à titre de représentant des indigènes du Nord, et j'éprouve beaucoup de sympathie pour ce qu'il nous a expliqué, à tous, aujourd'hui. Je dois dire, cependant, que ses propos illustrent bien le sentiment de victimisation qu'éprouvent les peuples du Nord, de même que les chasseurs et les agriculteurs.
    Je crois que, si on s'attarde à ce sentiment de victimisation, on constate qu'il a beaucoup été encouragé par des porte-parole du gouvernement qui ont parlé, encore et encore, de l'argent qui est gaspillé et de milliards de dollars... pourtant, le registre a fait l'objet d'un examen de la part de la vérificatrice générale et d'autres personnes.
    C'est vrai, la mise sur pied du registre a coûté extrêmement cher. C'est un problème que nous devrions laisser à d'autres; nous pouvons fouiller le passé et peut-être découvrir qui est à blâmer, mais le système existe maintenant. Sa mise sur pied ou son financement présentait peut-être des failles, et il est certain que son financement est insuffisant.
    Le chef Bob Rich affirme qu'il ne peut appuyer le système si on ne peut pas le réparer. Évidemment, on peut réparer le système. Si on devait construire une maison formidable mais dépasser de beaucoup notre budget, quelle personne saine d'esprit irait dire que, comme la maison ne fonctionne pas bien — la plomberie fonctionne mal, l'électronique n'est pas très bonne, le toit fuit — il faudrait se débarrasser de la maison? Qui ferait appel à une telle logique?
    Je trouve ce discours à propos de la victimisation très regrettable. S'il est si difficile d'utiliser le registre, c'est qu'il faut le modifier. J'ai un collègue qui m'a raconté que ça lui avait pris des mois pour faire enregistrer une arme. C'est là une difficulté. J'espère que le gouvernement ne privera pas le registre de financement et de personnel à un point tel que les gens continueront à se sentir victimisés.
    Je vais maintenant parler du Collège Dawson. Vous êtes nombreux à être au courant de ce terrible incident qui est survenu en 2006. J'étais là, ce jour-là, et j'ai vu certains de ces visages que vous voyez sur cette photo. Le Collège Dawson compte environ 7 500 étudiants, enseignants et membres du personnel. Les étudiants ont fui l'immeuble, des coups de feu ont été entendus, et les policiers sont arrivés. Des armes étaient brandies un peu partout. C'était terrible de voir le regard des jeunes. C'est une chose qui ne devrait jamais arriver.
    Ce jour-là, il s'est produit une véritable tragédie. Dix-neuf personnes ont été blessées et, malheureusement, l'une d'entre elles est décédée. Je connais les parents de la fille qui se trouve dans le cercueil. Si vous aviez pu les rencontrer et voir leur visage — et je suis sûr que bon nombre des professionnels ici présents les ont vus — ce sont des visages que vous ne voulez pas voir. Il n'y a pas de mots pour les décrire. Le désespoir et l'angoisse de ces personnes leur font vivre un cauchemar constant; pourtant, elles ont appuyé notre comité, elles en sont devenues membres et ont joué un rôle actif, et sont même venues à Ottawa en novembre 2006 pour participer à une conférence de presse nationale.
    Pourquoi les parents de cette jeune fille sont-ils venus à Ottawa? Le registre n'a pas empêché la mort de leur fille, mais la perte qu'ils ont subie et la violence qui a eu lieu ce jour-là leur a permis de comprendre à quel point il était important que les Canadiens soient moins à risque d'être victimes d'un acte de violence commis à l'aide d'une arme à feu. C'est ce qui est important.

  (1615)  

    Trois jours après l'incident, le premier ministre a dit, à la radio de CBC, que le registre des armes à feu n'avait pas empêché l'attaque au Collège Dawson. Je m'excuse, mais c'est une déclaration tout à fait ridicule. Je ne peux pas croire que le premier ministre a dit une telle chose.
    Après avoir entendu ces propos, nous avons, des étudiants, des enseignants et moi, mis sur pied notre comité. Nous nous sommes penchés sur la question du contrôle des armes à feu au Canada. Nous avons écouté des professionnels qui avaient quelque chose à dire à ce sujet. J'ai communiqué avec l'ancien dirigeant de l'Association canadienne des chefs de police. J'ai communiqué avec les contrôleurs des armes à feu.
    Toutes les personnes ici présentes qui ont une très vaste expérience de ce domaine ne disent pas qu'il faut se débarrasser du registre. Je ne pense pas que ce que dit le chef Bob Rich, c'est qu'il faut se débarrasser du registre; ce qu'il dit, c'est qu'il faut régler les problèmes qui y sont associés ou s'en débarrasser. C'est bouleversant de penser qu'un gouvernement envisagerait une telle chose. Un système sert à réglementer les huit millions d'armes qui y sont enregistrées, et nous voulons nous débarrasser de ce système?
    Nous savons tous ce qui s'est passé avec la déréglementation au cours des dernières années. Vous vous souvenez de la débâcle financière aux États-Unis? C'était à cause d'une déréglementation. Vous vous souvenez de l'important déversement de pétrole dans le golfe? C'était à cause de la déréglementation. Et maintenant, nous parlons de déréglementation des armes à feu.
    Ce ne sont pas des outils de jardinage. Ce ne sont pas des outils mécaniques. Ce sont des armes conçues pour lancer un projectile à grande vitesse vers une cible. Bon nombre d'entre elles, comme celle-ci, sont faites pour tuer des gens. La carabine que vous voyez sur cette image est une Beretta Cx4 Storm. Elle a été utilisée pour semer la destruction au Collège Dawson.
    Quand Stockwell Day, qui était le ministre de la Sécurité publique à l'époque, s'est rendu au Collège Dawson, il a dit à notre comité que cette arme n'avait pas sa place entre les mains d'un civil. Il a fait cette déclaration en 2006. Nous lui avons demandé d'ajouter cette arme à la liste des armes prohibées. Il a répondu qu'il verrait ce qu'il peut faire. C'était il y a quatre ans, et l'arme n'est toujours pas sur la liste. La Ruger Mini-14, qui a été utilisée pour les meurtres commis à l'École Polytechnique n'y est pas non plus.
    Je crois que le gouvernement s'est montré grandement irresponsable en ce qui concerne le contrôle des armes à feu au Canada. Il s'est passé une chose peu après ma rencontre avec Stockwell Day: il m'a envoyé une lettre parce que je lui avais demandé de l'information. Dès le premier paragraphe, il parlait de Gary Mauser. Gary Mauser est l'éminence grise derrière la tentative des Conservateurs d'éliminer le registre.
    Voici une photo de Gary Mauser. Gary Mauser est professeur. Il fait beaucoup de recherches sur les armes à feu. Stockwell Day m'a envoyé de nombreux rapports de recherche rédigés par cet homme. Cet homme ne devrait pas être celui qui décidera de la politique du Parti conservateur en ce qui concerne le registre des armes d'épaule au Canada. Cet homme souhaite que les Canadiens aient le droit de porter des armes dissimulées, comme c'est le cas aux États-Unis. Est-ce que c'est ce que souhaitent les Canadiens? Si nous nous débarrassons du registre, ce sera peut-être la prochaine étape. Ce sera peut-être l'objet d'une autre politique conservatrice. Peut-être que les citoyens qualifiés devraient pouvoir porter une arme dissimulée sur eux.
    J'ai une dernière photo à vous montrer. Pour certaines personnes, c'est à cela que ressemble le paradis. C'est une photo de Honolulu, à Hawaii. Pourquoi est-ce que je vous montre cette photo? Étonnamment, c'est l'un des États des États-Unis qui a un dossier admirable en ce qui concerne le contrôle des armes à feu. Hawaii est l'un des États américains qui compte un taux très faible de violence et d'homicides commis à l'aide d'une arme à feu. À Hawaii, toutes les armes doivent être enregistrées, y compris les carabines et les fusils de chasse. Cela mérite d'être souligné.
    Mais même Hawaii n'a pas un aussi bon dossier que le Canada. Notre système est plutôt bon. Il n'est pas si mauvais. Le registre n'est pas le meilleur élément du système, ni un élément très important, mais il est essentiel. Tout doit être inclus.

  (1620)  

    J'encourage le gouvernement à laisser aller les choses. Cela va tout simplement trop loin.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Les derniers, mais non les moindres. Nous accueillons maintenant, de l'Association canadienne des médecins d'urgence, les Drs Alan Drummond et Carolyn Snider. Lequel d'entre vous va faire l'exposé?
    J'aimerais, au nom de l'Association canadienne des médecins d'urgence, vous remercier et remercier les membres du comité de nous avoir invités et de nous donner l'occasion de vous faire connaître un point de vue qui est, à notre avis, différent, sur toute cette question. Je vais faire les présentations. La Dre Carolyne Snider est médecin d'urgence et chef de l'équipe de traumatologie à l'hôpital St. Michael's à Toronto, en plus de faire de la recherche dans le domaine de la prévention des blessures.
    Nous avons probablement des rôles un peu complémentaires en ce qui concerne les services d'urgence. Je suis un médecin de famille en région rurale qui dirige le service d'urgence dans une petite ville. Je ne pense pas que Carolyn possède d'armes, mais moi, j'en possède; vous obtiendrez donc, je crois, une combinaison intéressante de nos points de vue sur la médecine d'urgence et sur le contrôle des armes à feu au Canada.
    L'ACMU est la société nationale spécialisée qui s'occupe de la médecine d'urgence. Elle représente plus de 1 800 médecins dans l'ensemble du pays qui ont un intérêt pour la médecine d'urgence ou qui la pratiquent. La médecine d'urgence a évolué, depuis sa reconnaissance comme spécialité il y a 30 ans. Au départ, elle se concentrait uniquement sur l'évaluation des patients gravement malades ou blessés, mais, au fil du temps, nous avons commencé à mettre l'accent de plus en plus sur des éléments comme la recherche, la conception de systèmes et la prévention des blessures. Les blessures demeurent une préoccupation importante pour notre association, mais, au sujet de cette préoccupation constante, nous nous sommes rendu compte que notre capacité collective de traiter une blessure à titre de fournisseurs de soins de santé au sein de notre économie actuelle a été grandement exagérée. C'est pourquoi la prévention revêt une importance encore plus grande pour nous.
    Nos membres s'inquiètent toujours des blessures et des décès par balle, et c'était vrai dès 1994-1995, quand nous avons soutenu initialement le projet de loi C-68. Ils ont insisté pour que leurs associations professionnelles, que nous représentons, soutiennent vigoureusement les efforts de réduction du nombre tragique de victimes d'une mauvaise utilisation des armes à feu. Nous avons pris la position de tête dans les appels en faveur de la déclaration obligatoire des blessures par balle au Canada et nous soutenons toujours vigoureusement les clauses de la Loi sur le contrôle des armes à feu en tant qu'ensemble logique de règlements pour minimiser le risque de blessures et de décès reliés aux armes à feu au Canada.
    Les blessures sont un enjeu important de sécurité publique. Elles sont la principale cause de décès chez les personnes âgées de 1 à 44 ans, et la plupart des décès attribuables à des blessures surviennent avant même que nous ayons eu l'occasion d'intervenir. Les blessures surviennent à la maison ou sur la route. Elles représentent un lourd fardeau économique en raison non seulement des coûts médicaux directs, mais aussi des coûts de réadaptation et de la souffrance humaine connexe.
    Les médecins, les infirmiers et les infirmières d'urgence au Canada, tout comme les chirurgiens traumatologues, sont actifs pour sensibiliser les législateurs au rôle qu'ils peuvent jouer dans la prévention des blessures. Nous avons la ferme conviction que ces efforts de sensibilisation, jumelés à des lois comportant une conscience sociale, se traduiront par des changements sociétaux positifs, la prévention de blessures et des vies sauvées.
    Nous vous demandons instamment de voir les clauses de la Loi sur les armes à feu dans leur forme actuelle non pas comme des éléments d'un projet de loi sur le contrôle des armes à feu, mais plutôt comme des éléments clés d'une loi socialement responsable sur la santé et la sécurité publique. On a constaté une réduction de la mortalité attribuable aux armes à feu au Canada depuis l'introduction de règlements sur les armes à feu en 1991 et en 1995, et nous ne voyons aucune raison majeure — aucune raison tout court, de fait, sur le plan de la sécurité publique — pour modifier en profondeur des règlements si efficaces.
    Vous avez devant vous notre mémoire et notre document d'information. Je crois que nous connaissons tous les taux de possession d'armes au Canada. Il faut souligner que le taux de possession d'une arme à feu est plus élevé en régions rurales et, surtout, que les régions rurales, dont les territoires et les collectivités du Nord, sont celles où il y a le plus grand taux de décès dû à une arme à feu, généralement à une arme d'épaule.
    Par exemple, en Ontario, en 2004-2005, on comptait 8,7 visites à l'urgence sur 100 000 qui étaient attribuables à une blessure par balle dans les collectivités du nord de la province, soit un nombre beaucoup plus élevé que la moyenne provinciale, qui était de 5,3 visites à l'urgence sur 100 000 dans le sud de l'Ontario.
    Les armes à feu sont une cause importante de blessures et de décès au Canada. En 2005, 818 Canadiens ont été tués par l'emploi d'armes à feu et, malgré l'accent que les médias ont mis sur le crime de façon générale, 72 p. 100 de ces décès reliés à des armes à feu ont été des suicides; il s'agit donc en grande partie d'une question de prévention du suicide.
    Malgré la réduction impressionnante de la mortalité associée à la Loi sur les armes à feu, comme nous en discuterons plus tard brièvement, il reste beaucoup de travail à abattre pour réduire ce coût social tragique et ce gaspillage financier inacceptable. Selon nous, ce n'est pas le moment de penser à réduire les efforts en vue d'un meilleur contrôle des armes à feu.
    Le suicide est la deuxième cause de décès en importance au Canada pour les personnes âgées de 10 à 34 ans, des jeunes gens dans la fleur de l'âge, et la neuvième cause de mortalité dans l'ensemble. En 2005, les décès par balle représentaient 15 p. 100 des suicides et, comme je l'ai mentionné précédemment, 72 p. 100 des décès par suicide sont associés à des armes à feu.

  (1625)  

    La majorité des suicides ne sont pas, de fait, prémédités; il s'agit plutôt de gestes de nature impulsive. L'accès à une arme à feu facilite le geste de se suicider. Si vous placez un fusil sur votre tempe et que vous appuyez sur la gâchette, vous avez 96 p. 100 de risque de mourir. Si vous prenez une surdose de médicaments, les risques sont beaucoup moins importants puisqu'ils sont de moins de 5 p. 100. Les tentatives de suicide par balle sont particulièrement mortelles.
    Notre examen de la documentation, qui a mené à la position de l'ACMU sur le contrôle des armes à feu, nous a permis de constater que les suicides par balle ont chuté de 46 p. 100 au Canada depuis l'adoption du projet de loi de Kim Campbell en 1991 et de 35 p. 100 depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les armes à feu en 1995; nous estimons donc que les éléments de preuve sont clairs: le contrôle des armes à feu au Canada, qui s'effectue de diverses manières, a eu l'effet cumulatif de réduire les suicides par armes à feu au pays.
    Je vais aller un peu plus vite. En ce qui concerne les homicides entre conjoints, le fait qu'il y ait une arme à feu à la maison est reconnu comme un facteur de risque. Nous savons que le taux d'homicides de conjoints est plus élevé de cinq fois contre les femmes que contre les hommes. On a utilisé une carabine ou un fusil de chasse dans 62 p. 100 des cas. On constate aussi que l'utilisation d'armes à feu dans les homicides entre conjoints a chuté de 36 p. 100 depuis l'adoption de la Loi sur les armes à feu puisqu'on est passé de 25 victimes en 1995 à 9 en 2008.
    Nous ne connaissons rien au contrôle du crime. Nous nous en remettons à nos amis des diverses associations de policiers, mais nous constatons tout de même avec intérêt que, en ce qui concerne les homicides, même si la violence attribuable aux gangs a augmenté à Toronto et à Abbotsford, le taux d'homicides par balle dans la société canadienne a, en fait, beaucoup diminué depuis l'adoption du projet de loi C-68.
    Je vais passer par-dessus la question des blessures accidentelles et celles du paradigme de la prévention des blessures. Je vais me contenter de dire que, à notre avis, les législateurs de notre pays ont un rôle à jouer en ce qui concerne les projets de loi en matière de santé publique.
    Est-ce que j'ai encore du temps?

  (1630)  

    Il vous reste deux minutes et demie.
    Ce sera suffisant.
    La question qu'il faut se poser, c'est: quel est le rôle du registre? C'est, pour nous, une préoccupation non pas philosophique mais bien pratique.
    À titre de médecin d'urgence, que ce soit dans la région rurale de Perth ou dans le centre-ville de Toronto, nous rencontrons fréquemment des personnes qui arrivent à l'urgence avec l'idée de se suicider ou qui menacent de le faire. Ce sont bien souvent les policiers qui les amènent. Il est très difficile de déterminer qui est à risque de se suicider et qui ne l'est pas. C'est vraiment une décision très délicate, et nous avons sur les épaules un grand poids clinique. Nous ne voulons pas nous tromper.
    Pour nous, c'est très pratique de savoir s'il y a une arme au domicile de la personne puisque cela nous aide à évaluer le risque de mortalité de la méthode que pourrait employer la personne. Le fait de pouvoir compter sur les forces policières qui peuvent nous confirmer que l'arme qui se trouvait dans un domicile en a été retirée nous aide beaucoup à prendre une décision quand nous envisageons de libérer un patient.
    C'est la même chose dans les cas de violence conjugale. Des femmes arrivent à l'urgence, souvent accompagnées de policiers, et, encore une fois, nous devons garantir la sécurité de cette personne. Devrions-nous la renvoyer chez elle? Les policiers peuvent accéder au registre pour savoir si le propriétaire de la maison possède des armes à feu, ce qui constitue un aspect important.
    Il s'agit, pour nous, de préoccupations d'ordre pratique. Tout cela n'a rien de philosophique.
    Notre association a transmis un message très clair au cours des 10 ou 15 dernières années. Elle a soutenu de façon constante un contrôle efficace des armes à feu, plus particulièrement le projet de loi C-68. Il est difficile d'extraire les dispositions de ce projet de loi qui ont eu, plus particulièrement, un effet positif, mais l'expression cumulative du projet de loi s'est révélée positive.
    Nous vous demandons avec insistance de ne pas abolir le registre. À notre avis, il s'agit d'un outil important pour garantir la santé et la sécurité de tous les Canadiens.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous passons maintenant aux questions et aux commentaires. Nous commencerons par entendre M. Holland, de l'opposition officielle.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être venus aujourd'hui.
    Monsieur Momy, je pourrais peut-être commencer par vous. Merci beaucoup de votre travail, et je veux remercier, par votre entremise, les 41 000 agents et plus que vous représentez. Je les remercie des services qu'ils rendent à la collectivité et au pays.
    Je crois que l'une des choses sur lesquelles le comité a de la difficulté à mettre le doigt — et trois détectives très convenables de Winnipeg nous en ont parlé —, c'est s'il existe d'importantes divisions au sein des services de police. C'est un aspect que les personnes qui s'opposent au registre tentent de faire ressortir.
    Étant donné que vous représentez les forces de l'ordre, plus particulièrement les policiers, pouvez-vous répondre à cette question? Pour toute question, il y a des gens d'accord et des gens en désaccord, mais il est légitime de se demander s'il s'agissait là d'un point de vue marginal ou si la communauté policière est bel et bien divisée.
    Je vais répondre au nom de nos membres seulement. Il y a, au Canada, environ 75 000 policiers. Ce chiffre inclut les agents de la GRC, et, comme vous le savez, monsieur Holland, nous ne représentons qu'un très petit nombre de ces agents de la GRC.
    J'ai toujours été très clair et direct au sujet de cet enjeu en particulier. Évidemment, il y a de petits groupes de membres de l'Association canadienne des policiers qui ont des points de vue différents sur ce sujet en particulier. Quand je parle de « petits groupes », il faut tenir compte du fait que nous représentons environ 156 associations membres de partout au pays. Personne, ici, ne sera étonné d'apprendre que la fédération des policiers de la Sastakchewan a exprimé ouvertement des réserves au sujet de ce texte législatif.
    J'aimerais dire, cependant, que, quand nous nous sommes rendus à Ottawa récemment, sur la Colline, pour exercer des pressions auprès du gouvernement il y a quelques semaines, nous avons entendu divers spécialistes se prononcer au sujet du registre des armes à feu, de ce qu'il permet et de ce qu'il ne permet pas, et nous avons obtenu plus de renseignements concrets sur le registre des armes à feu. Ce que je peux vous dire, c'est que, à la fin du présent mois, la fédération des policiers de la Saskatchewan tiendra son assemblée générale annuelle à Estevan, en Saskatchewan, et que j'y participerai. Les membres de la fédération examineront de nouveau la question à la lumière des nouveaux renseignements révélés au cours des derniers mois, mais surtout au cours des dernières années, étant donné que le registre des armes à feu a beaucoup changé au cours des dernières années au pays, depuis que la GRC a pris la direction du programme canadien des armes à feu. Cela dit, je peux vous dire, ici et maintenant, que le point de vue de la fédération des policiers de la Saskatchewan et, en date d'aujourd'hui, opposé à celui de l'Association canadienne des policiers dans son ensemble.

  (1635)  

    Je n'ai plus beaucoup de temps, donc je pensais peut-être poser quelques questions, puis les témoins y répondront brièvement.
    Parmi les quelque 150 associations, il y en a actuellement une qui s'oppose au registre, et elle examine de nouveau sa position. Est-ce exact?
    Il s'agit d'une association qui représente six petites associations de la Saskatchewan.
    Donc, il s'agit de six associations.
    Agente-détective Teeft, vous avez dit, dans votre exposé, que les armes à feu qui proviennent du marché canadien constituent un problème. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? À quel point les armes provenant de sources canadiennes et se retrouvant entre les mains des criminels constituent-elles un problème? J'aimerais une réponse brève.
    Les statistiques révèlent que, à Toronto, au cours des trois dernières années, 50 p. 100 des armes qui ont servi à commettre un crime, des armes à feu, étaient de source nationale. Cela signifie habituellement que la majorité de ces armes provenaient de résidences, peut-être pas de Toronto, mais certainement du Canada. Ces armes ont été retracées jusqu'au Canada et représentent un problème. Ce taux est d'environ 50 p. 100 — plus ou moins 3 p. 100 — depuis les trois dernières années, ce qui signifie qu'il demeure constant à 50 p. 100. Le registre nous aide à prendre des mesures d'exécution de la loi pour garantir le respect de celle-ci.
    Monsieur Rich, vous avez entendu l'Association canadienne des policiers, vous avez entendu l'agente-détective, et je suis certain que vous avez entendu la position de l'Association canadienne des chefs de police, qui disent tous qu'il s'agit d'un outil très important en matière de sécurité publique — un outil parmi tant d'autres.
    Compte tenu du fait que la vérificatrice générale et la GRC nous ont dit que le problème coûte 4,1 millions de dollars par année et du fait que la très vaste majorité de vos collègues — en fait, sur 430 chefs de police, vous êtes, je crois, un des trois chefs qui se sont prononcés contre le registre —, ne pensez-vous pas que, puisque tant de personnes jugent le registre essentiel à leur travail et que celui-ci coûte 4,1 millions de dollars par année, nous devrions nous efforcer d'améliorer le système? Pour vous, serait-il préférable d'abolir le système ou de le réparer? Pouvez-vous me donner des précisions à ce sujet?
    J'ai toujours un peu de difficulté avec la façon dont on affirme que tous les policiers appuient le registre. J'ai envoyé un courrier électronique à mes collègues, dans la province, et j'ai reçu rapidement quelques réponses discrètes de certains dirigeants de la GRC qui ne voudraient pas qu'on répète les préoccupations qu'ils ont exprimées à propos du registre; cela signifie que, dans mon monde, on demande aussi aux gens de se conformer. Il y a, à divers degrés, des personnes qui ont du mal à appuyer le registre.
    Je ne veux pas vous interrompre, mais j'ai peu de temps. Pouvez-vous simplement me dire si vous pensez qu'il est préférable d'abolir le système ou de le réparer? C'est une question toute brève parce que je dois poursuivre.
    Si la très grande majorité des personnes qui représentent ces associations, à tout le moins, disent qu'ils en ont besoin et qu'il coûte 4,1 millions de dollars, serait-il logique de l'abolir, ou devrait-on plutôt retenir les commentaires que vous avez faits sur l'importance de l'améliorer?
    Vous ne le réparez pas pour 4,1 millions de dollars. Oui, je suis d'accord pour que les Canadiens essaient de le réparer avant que nous l'abolissions, mais les coûts seront beaucoup plus élevés que ça.
    Monsieur Drummond, je vais vous citer. Vous avez dit récemment:
À titre de coroner et de médecin d'urgence en région rurale, je peux dire avec certitude que je n'ai jamais vu de blessures infligées par une arme de poing. J'ai toutefois vu ma part de blessures et de décès attribuables à des carabines et à des fusils de chasse... le problème des blessures causées par une arme à feu ne touche pas seulement Toronto et ne concerne pas seulement les gangs. Il est aussi présent dans ma petite collectivité rurale idyllique et touche des personnes qui semblent par ailleurs tout à fait normales. L'enregistrement des armes à feu est important si l'on veut garantir la reddition de comptes et le respect des règlements en matière d'entreposage sécuritaire.
    Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Comme vous venez d'une collectivité rurale, possédez-vous, vous-même, monsieur Drummond, un permis de port d'armes?
    Oui, j'en ai un. J'ai une carabine .22 et un fusil de calibre 12. J'ai un terrain d'environ 12 acres au bord de l'eau, et je les utilise surtout pour le contrôle des animaux, même si les animaux n'ont pas grand-chose à craindre de moi. Mon fils chasse à l'arc, donc ce n'est pas vraiment un problème.
    Je peux vous dire que j'ai grandi à Montréal, que j'ai vécu à Vancouver et que j'ai été dans l'armée canadienne. J'ai vu beaucoup plus de blessures par balle dans ma vie dans la région agricole de Perth au fil des ans, et il va de soi que les carabines et les fusils de chasse étaient les armes les plus souvent en cause. C'était ces armes qui avaient été utilisées. En 30 ans de pratique de la médecine, je n'ai jamais vu de blessure causée par une arme de poing.

  (1640)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Mourani. Allez-y, je vous en prie.

[Français]

    Je vous remercie tous d'être présents.
     Monsieur Rahilly, je voulais vous féliciter pour votre discours qui, à mon sens, est tellement concret et nous ramène sur le plancher des vaches.
    Ma question s'adresse plutôt à M. Rich.
     Monsieur Rich, vous voulez une amélioration du registre. Vous dites que cela va coûter plus cher, mais vous voulez une amélioration. Vous ne semblez pas vouloir mettre le registre à la poubelle. On pourrait quand même tenter de l'améliorer.
     Vous parlez également, si j'ai bien compris, d'une décriminalisation des honnêtes citoyens, des chasseurs. Vous dites que de plus en plus de personnes sont condamnées comme des criminels parce qu'elles n'ont pas enregistré leurs armes. Vous parlez d'un million de personnes qui auraient des armes d'épaule non enregistrées.
     De quand date ce nombre d'un million de personnes? Parle-t-on d'avant ou après 2006 —, avant l'amnistie, après l'amnistie?

[Traduction]

    C'est le genre de chiffres que les gens peuvent inventer et que personne ne peut jamais critiquer, j'imagine, mais lorsque je demande à mes experts combien il y a d'armes d'épaule au Canada à l'heure actuelle, ils me répondent — de façon très conservatrice — qu'il y en a un million. C'est le nombre d'armes d'épaule qu'ils croient qu'il y a au Canada en ce moment.

[Français]

    Est-ce avant l'amnistie? Est-ce comme cela depuis longtemps?

[Traduction]

    Aujourd'hui. Maintenant. Elles ne sont toujours pas enregistrées.

[Français]

     Avez-vous les chiffres pour 2004, 2005, 2003?

[Traduction]

    Non.

[Français]

    Pouvez-vous les avoir?

[Traduction]

    Non, parce que, comme je l'ai dit dans mon exposé, c'est comme estimer combien il y a d'installations de cultures sur le territoire d'une collectivité. On ne peut qu'évaluer ce nombre, et je ne prétends pas que le chiffre de un million que j'ai cité ne soit autre chose qu'une estimation.

[Français]

     Je comprends. C'est donc un peu, comme vous dites, un chiffre sorti d'un chapeau. C'est ce que j'ai compris de la traduction.

[Traduction]

    Je dirais que c'est un chiffre qui vient d'une personne qui connaît extrêmement bien le domaine des armes au Canada et que son avis est tout à fait valable.

[Français]

    Parlez-vous de la personne dont M. Rahilly nous a montré la photo, M. Mauser? Est-ce lui qui a sorti ce chiffre ou quelqu'un d'autre? J'ai vu son fusil. Il était très gros.

[Traduction]

    Je demande à mes experts, et non à ce professeur. Merci.

[Français]

    D'accord. Vous parliez de décriminalisation, si je ne me trompe pas, monsieur Rich, et je vous avoue que cela fait un moment aussi que j'entends à ce comité le mot « décriminalisation ». J'ai voulu comprendre ce qu'on veut dire par cela et je vous avoue que je n'ai pas encore compris.
     Le 15 juin 2000, la Cour suprême a rendu une décision dont je vais vous lire un extrait:
On ne peut pas diviser clairement les armes à feu en deux catégories — celles qui sont dangereuses et celles qui ne le sont pas. Toutes les armes à feu sont susceptibles d'utilisation criminelle. Elles sont toutes susceptibles de tuer et de mutiler. [...] Toutes les armes à feu sont donc une menace pour la sécurité publique [...] leur contrôle relève de la compétence en matière criminelle [...]
    C'est donc dire que leur contrôle relève de la compétence du fédéral. J'essaie de comprendre. Si on veut décriminaliser, cela veut dire que les articles 91 et 92 du Code criminel n'existent plus. Donc, le fait de ne pas enregistrer son arme, intentionnellement ou non, n'est plus un crime. Or tout n'est plus un crime, et il revient donc aux provinces de gérer cela. Je me trompe?

[Traduction]

    J'ai suivi une formation en droit, mais c'était il y a 30 ans, alors vous m'en demandez beaucoup.
    Dans la province, par exemple — je sais que c'est quelque chose que vous savez déjà — nous avons des systèmes d'enregistrement des voitures et des permis de conduire. Il ne s'agit pas d'un système pénal. Le gouvernement fédéral peut avoir des systèmes d'enregistrement fondés sur des lois autres que pénal. Il y a le pouvoir de réglementation. Le gouvernement fédéral applique des lois de nature réglementaire qui interdisent de pêcher le homard de certaines façons, alors il pourrait, dans le cas de l'enregistrement, avoir recours à des lois de nature réglementaire non pénales, ou encore — et je ne suis pas spécialiste de la question —, je pense que les provinces pourraient s'occuper de l'enregistrement des armes à feu au lieu que la possession soit criminalisée.

  (1645)  

[Français]

    Pour reprendre l'exemple des voitures — M. Momy pourrait peut-être nous éclairer aussi là-dessus —, l'enregistrement d'une voiture relève du provincial et non du fédéral. Or, quand on dit qu'on veut décriminaliser l'enregistrement, c'est qu'on veut déléguer un pouvoir aux provinces. Car si c'est criminalisé, ça relève du Code criminel, notamment dans le cas des articles 91 et 92, et je ne comprends pas comment on peut décriminaliser cela sans confier la réglementation à la province. Je ne sais pas si vous pouvez me répondre, M. Momy.

[Traduction]

    Il reste une minute.

[Français]

    Je suis d'accord. Il faudrait que ça devienne une responsabilité provinciale, que ce soit géré par les provinces, que ce ne soit plus entre les mains du fédéral. Ce serait la seule manière de faire, et je peux vous dire que nous sommes complètement opposés à cette idée.
    D'accord. D'après ce que je comprends, pour décriminaliser l'infraction qui consiste à ne pas enregistrer son arme à feu, intentionnellement ou non, il faut qu'on déréglemente et qu'on dise aux provinces de gérer cette infraction elles-mêmes. Sinon, ça reste un crime.
    Absolument.
    Merci, je comprends mieux maintenant.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    M. Comartin n'est pas là, mais il a pris une entente avec M. Wrzesnewskyj.
    Vous avez la parole, monsieur.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être ici.
    Monsieur Momy, vous avez dit que vous représentez 156 associations de policiers et leur quelque 75 000 membres. Vous avez parlé aussi de l'utilisation que les agents de police ordinaires que vous représentez font du registre des armes à feu: 92 p. 100 l'utilisent, 65 p. 100 l'utilisent quotidiennement et 73 p. 100 l'utilisent en réponse à des signalements, alors il semble que le registre soit énormément utilisé.
    Nous avons également ici des chiffres qui montrent que non seulement le pourcentage d'utilisation et d'adoption est important, mais également que le nombre d'interrogations est passé de 2 087 en 2004 à 11 085 l'an dernier. C'est une augmentation d'utilisation de plus de 531 p. 100 sur cinq ans.
    Si le registre n'était pas efficace, l'utilisation ne diminuerait-elle pas? J'ai dû mal à suivre le raisonnement. Il y a une augmentation de l'utilisation. Le pourcentage d'utilisation est élevé. Ça semble indiquer que les agents de police utilisent le registre parce qu'il fonctionne.
    En ce qui concerne les documents de référence et les statistiques que j'ai fournis, c'est dans le cadre du Programme canadien des armes à feu de la GRC qu'on a effectué, en 2007, une enquête auprès de nos membres un peu partout au pays. Voilà donc une chose.
    Une part importante de l'information que vous mentionnez vient de la GRC en tant que telle. Toutes les données que nous avons demandées viennent en majeure partie du Programme canadien des armes à feu, c'est-à-dire la GRC elle-même.
    Ce que je peux vous dire, c'est que je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a eu une importante augmentation de l'utilisation du registre des armes à feu en tant que tel, qui, encore une fois, n'est qu'un élément du Programme canadien des armes à feu. Mon point de vue là-dessus, c'est qu'il y a eu un changement important dans la façon dont le Programme canadien des armes est géré. Nous savons tous que c'est la GRC qui s'en occupe depuis 2006-2007, je crois. Il y a eu une augmentation importante de l'utilisation par les agents de première ligne au cours de cette période.
    Comme je l'ai dit, je ne nie pas le fait qu'il y a des liens automatiques avec des ordinateurs des services de police de partout au pays, surtout à Toronto et en Colombie-Britannique, d'après ce que nous savons, mais, même si on ne tient pas compte de ces chiffres, ça demeure 50 p. 100.

  (1650)  

    Excellent. Merci.
    Il semble que les agents de police soient nombreux à adopter le registre comme outil: 92 p. 100 d'entre eux l'utilisent, et ils l'utilisent souvent et sont de plus en plus nombreux à le faire. Ça semble indiquer qu'il s'agit d'un outil utile pour la police. En fait, vous nous avez donné des exemples des pires crimes qui sont commis au Canada. À Meyerthorpe, où nous avons perdu quatre de nos agents, le registre a aidé à résoudre le crime.
    Personnellement, croyez-vous que le registre a permis de sauver la vie d'agents de police de première ligne?
    C'est une question à laquelle il est difficile de répondre. Je vais vous dire pourquoi.
    Je vais en revenir à ce que le Dr Drummond disait au sujet du registre. Il me faudrait pas mal de temps pour expliquer ça par rapport au fait de sauver une vie. Est-ce que je suis en mesure de parler d'un incident en particulier et de dire que le registre a permis de sauver la vie d'une personne précise? Non, je ne peux pas, mais, ce que je peux dire, c'est que lorsque...
    Je voulais plutôt connaître votre sentiment à cet égard, puisqu'il est difficile de présenter des preuves empiriques qui montreraient que c'est le cas. Ce n'est pas la nature de l'outil.
    D'accord. D'après mon expérience dans la police et mon intuition, si nous commencions à éplucher tous les cas, nous en trouverions certainement de nombreux dans lesquels le registre a permis de sauver la vie de gens, et plus précisément dans les domaines dont le Dr Drummond parle, c'est-à-dire à l'égard des suicides.
    Merci. J'aimerais aborder une autre question.
    Nous avons entendu parler de trois agents de police à la retraite du service de police de Winnipeg. L'un d'entre eux, un certain M. Tinsley, a affirmé certaines choses que j'ai trouvées assez troublantes.
    Avant d'aborder ce sujet, je voulais vous demander si vos associations de police sont élues par voie démocratique? Êtes-vous élus de façon démocratique?
    Elles le sont. Le président et le directeur de chacune des 156 associations sont élus.
    Ils sont non pas nommés, mais bien élus, et vous représentez les agents de police ordinaires.
    C'est exact.
    Je vous pose la question parce que nous avons entendu dire que les policiers sont en fait réduits au silence, c'est-à-dire que les membres ordinaires de votre association ne se font pas entendre. Voilà une chose que nous avons entendu dire. En outre, on a allégué que des agents de police ont fait l'objet de mesures d'intimidation et se sont fait dire de ne pas intervenir.
    Je trouve qu'il y a un manque de cohérence bizarre entre ces théories de la conspiration qui se répandent et l'idée que ce n'est pas vraiment le point de vue de la police. Nous entendons dire que les représentants élus par voie démocratique des agents de police ordinaires de 150 des 156 associations de police disent qu'ils sont en faveur du registre. Ensuite, bien sûr, il y a toujours des divergences d'opinions, mais nous entendons...
    Il vous reste moins de une minute.
    ... dire que c'est une conspiration. Il y a une théorie de la conspiration...
    Comme il ne me reste que peu de temps, j'aimerais poser une question à M. Rahilly. Si vous pouviez me montrer encore une fois l'arme qui a été utilisée au Collège Dawson... Vous avez comparé cette arme à celle qui avait été utilisée à l'École polytechnique, le Ruger Mini-14. C'est l'arme qui avait été utilisée pour tuer 14 femmes et en blesser 13 autres en moins de 30 minutes.
    Est-il vrai que, sans le registre des armes à feu, cette arme — le Ruger Mini 14 — ne serait plus enregistrée au Canada?
    Non. Eh bien, si le registre n'existe plus — non, désolé. Je veux que ce soit clair. C'est...
    Le registre des armes d'épaule...
    Oui, l'arme à autorisation restreinte... En fait, les gens à ma droite pourraient répondre à cette question mieux que moi. Les armes semi automatiques...
    Il va falloir nous arrêter maintenant. Nous avons pris beaucoup plus de temps que prévu.
    Oui, toute trace des fusils semi automatiques disparaîtrait.

  (1655)  

    Vous voulez dire des armes du genre de celles dont nous avons parlé. Merci.
    Merci.
    Monsieur Rathgeber, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être venus ici aujourd'hui. Je suis content de vous revoir, monsieur Momy, et j'ai plusieurs questions à vous poser.
    M. Rich a dit dans son témoignage que, selon lui, le registre des armes à feu est d'une inexactitude épouvantable. Compte tenu du fait qu'il y a une amnistie depuis 2006, êtes-vous d'accord avec M. Rich là-dessus?
    Non, et la seule raison pour laquelle je ne le suis pas, monsieur Rathgeber, c'est que, encore une fois, le rapport annuel du Programme canadien des armes à feu de l'an dernier, qui provient de la GRC, contient de l'information selon laquelle le registre continue d'être utilisé. S'il y avait tant de problèmes, on pourrait penser que...
    Je n'ai vraiment pas beaucoup de temps. Il y a une amnistie concernant l'enregistrement, alors vous admettez que de nombreux détenteurs de fusils ne les enregistrent pas?
    Assurément.
    Vous devez donc être d'accord avec M. Rich pour dire que l'information que contient le registre n'est pas exacte. Les gens ne s'enregistrent pas.
    Étant donné les amnisties prolongées qui ont eu lieu, certainement. Beaucoup de gens ne s'enregistrent pas.
    Vous êtes donc d'accord pour dire que le registre n'est pas exact, en ce moment, aujourd'hui.
    Étant donné les amnisties prolongées...
    Merci.
    En 2004, votre association a adopté la résolution suivante:
L’Association canadienne de la police professionnelle … appuie un système d’enregistrement des armes à feu qui comprend des renseignements exacts sur toutes les armes à feu et auquel tout le personnel policier a accès en temps opportun pour améliorer la sécurité de tous les membres des services policiers et de nos communautés au Canada.
    Cette résolution n'est donc plus en vigueur. Vous venez de me dire que vous ne pensez pas que le registre est exact.
    En fait, dans ce document, vous remarquerez aussi que nous parlons également de continuer à améliorer le programme des armes à feu ou le registre des armes à feu. Comme je l'ai dit, les amnisties prolongées ne contribuent certainement pas à l'enregistrement des armes à feu.
    La résolution de 2004 ne portait certainement pas sur un registre contenant de l'information inexacte.
    Elle envisageait certainement les problèmes liés à tout type de registre.
    D'accord. Je vais aborder la question de manière légèrement différente.
    Vous avez parlé d'un sondage. M. Wrzesnewskyj en a parlé assez longuement, et il a dit quelque chose que vous devez corriger selon moi. Il a dit que vous représentez 75 000 membres, alors que selon votre mémoire, vous en représentez 41 000.
    Oui. Lorsque j'ai dit 75 000, je parlais de tous les agents de police de première ligne du pays, y compris ceux de la GRC, mais, dans notre cas, ce n'est que 41 000.
    Votre association compte 41 000 membres.
    C'est exact.
    D'après ce que je comprends, seulement 408 d'entre eux ont répondu au sondage. C'est ce que vous avez dit.
    Oui. Le sondage en question a été effectué, en fait, dans le cadre du Programme canadien des armes à feu par la GRC en 2007.
    Vous êtes conscient du fait que moins de 1 p. 100 de vos membres ont répondu à ce sondage.
    Nous savons tous comment les sondages fonctionnent, mais, oui, c'est un petit...
    Ce n'est pas un sondage auprès d'un échantillon choisi au hasard. C'est un sondage auquel tous les membres ont eu l'occasion de répondre.
    C'est vrai.
    Mais plus de 99 p. 100 d'entre eux ont choisi de ne pas le faire, non? Il y a 408 de vos membres qui ont répondu au sondage, et ils sont 41 000.
    Encore une fois, je ne peux pas vous expliquer comment le sondage en tant que tel a été présenté, parce que nous n'y avons pas participé. L'Association canadienne des policiers n'a pas participé à ce sondage précis. C'est un sondage qui a été effectué par la GRC en 2007, alors ça n'avait rien à voir avec nous.
    Néanmoins, 92 p. 100 de moins de 1 p. 100 de vos membres ont utilisé le registre, d'après votre propre sondage.
    Ce n'est pas notre sondage.
    D'après le sondage que vous avez présenté dans votre déclaration initiale.
    Oui.
    Merci.
    Je veux parler de 11 000 interrogations qui sont faites chaque jour. Je pense que vous avez raison de dire que 45 p. 100 d'entre elles se font automatiquement par l'intermédiaire du CIPC, et je le comprends, mais je veux parler de l'autre tranche de 55 p. 100, dont vous avez dit qu'il s'agit normalement d'interrogations faites dans le cadre d'interventions à un domicile. C'est de ces interrogations que je veux parler.
    Supposons que vos agents se rendent à un domicile pour régler un problème. Vous effectuez une recherche, et, d'après celle-ci, il n'y a pas d'armes dans la résidence en question. Est-ce que vous me dites que vos agents, ou les membres de votre association, se fient à cette recherche et entrent dans la maison en pensant qu'il ne s'y trouve pas d'armes?
    Pas du tout.
    Merci.
    Supposons maintenant que les agents effectuent la même recherche, que ce soit à partir du nom de la personne ou de l'adresse. Ça importe peu. Le registre indique qu'il y a une arme. Vos agents entrent. Ils prennent les mesures nécessaires pour que l'arme ne puisse pas être utilisée. À ce moment-là, présument-ils que la scène du crime est sûre, ou supposent-ils qu'il peut y avoir d'autres armes?
    On présume toujours qu'il y a d'autres armes.
    D'accord. Vous m'avez donné deux réponses avec lesquelles je suis d'accord.
    Vous avez effectué deux recherches. L'une a donné un résultat, l'autre pas. Vos agents ne se sont fiés à aucune des deux recherches dans le registre. Dans les deux situations, ils ne se sont pas fiés à l'information. Est-ce exact?

  (1700)  

    La réalité, c'est que lorsque, comme agent de police, vous vous présentez à une résidence et que vous avez accès au registre, il y a une différence énorme entre une résidence où il y a une arme et une autre où il y en a 15 ou 30.
    Je comprends, mais, dans les deux situations que j'ai évoquées, les agents ne se fieraient pas à l'information qui figure au registre, non?
    Non.
    Merci.
    Trois de vos membres m'ont rendu visite il y a deux ou trois semaines, pendant la journée de l'association des policiers sur la Colline, d'excellents agents d'Edmonton, et ils avaient trois choses en tête. Ils voulaient parler d'une unité de négociation pour la GRC, ils voulaient parler d'augmentation de salaire pour les agents de première ligne et ils voulaient parler d'un fonds pour la famille des policiers qui périssent pendant le service.
    Si c'est une question si importante pour l'ACP, pourquoi ne fait-elle pas partie des choses pour lesquelles on les a envoyés me parler?
    La question du registre des armes à feu fait partie des nombreuses questions qui forment nos priorités...
    Elle ne fait pas partie des trois plus importantes?
    Non.
    D'accord. Vous avez bel et bien fait un sondage en 2010. Vous avez effectué un sondage auprès de vos membres, et vous le faites chaque année, non?
    Non.
    Il est question dans votre site Web du sondage de 2010 auprès des membres. Vous n'êtes pas au courant?
    Oui, d'accord.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il n'y a pas de questions au sujet du registre des armes d'épaule dans ce sondage?
    Ce n'était pas un sondage sur nos priorités.
    Sur quoi portait-il? Vous avez demandé à vos membres ce qu'ils pensaient de la Loi sur les jeunes contrevenants. Vous leur avez posé des questions sur la libération conditionnelle et sur les peines, mais pas sur le contrôle des armes d'épaule, sur le contrôle des armes à feu?
    Non. Ce sondage découlait en gros des séances de planification stratégique de l'an dernier, qui ne portaient pas...
    Il reste 30 secondes.
    Si vous n'avez pas effectué de sondage auprès de vos membres l'an dernier et que cette question ne figurait même pas dans votre sondage en 2004, comment pouvez-vous dire au comité que vous exprimez le point de vue de 41 000 agents de première ligne?
    Notre conseil d'administration compte 29 membres. Ce sont des agents de police actifs qui représentent différents groupes de partout au Canada, de Vancouver à Halifax, en passant par Winnipeg et Toronto.
    Vous exprimez donc le point de vue des présidents d'associations, et non celui des agents de première ligne qui sont membres de votre association?
    Ces présidents, eux — et je crois que c'est la question que M. Holland a posée tout à l'heure —, sont élus par leurs membres en général.
    Est-ce qu'il y en a parmi eux qui ont effectué un sondage auprès de leurs membres, mis à part en Saskatchewan?
    Ça ne relève pas de moi.
    M. Brent Rathgeber: Merci.
    Merci.
    Monsieur Kania, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Docteur Drummond, l'Association canadienne des médecins d'urgence s'oppose au projet de loi C-391 et est en faveur du registre des armes à feu. Votre organisation n'est que l'une des nombreuses organisations de médecins et d'autres professionnels de la santé qui s'y opposent. Pouvez-vous me dire quelles sont les autres organisations qui s'opposent au registre des armes à feu?
    Oui, certainement.
    Comme vous le savez, la semaine dernière, un important groupe de professionnels de la santé a présenté une lettre ouverte aux députés à l'appui du registre des armes à feu. Il y avait parmi ce groupe 28 associations de médecins et d'infirmiers et infirmières, ainsi que certains professionnels de la santé assez importants.
    Nous sommes des travailleurs de première ligne. Nous voyons ce qui se passe. Toute cette idée de lutte contre le crime n'a pas beaucoup de sens pour nous, professionnels de la santé. À nos yeux, il s'agit en fait d'un projet de loi axé sur la prévention en matière de santé, sur la protection de la santé.
    Outre l'Association canadienne des médecins d'urgence, je sais que l'Association canadienne de traumatologie et la National Emergency Nurses Affiliation ont également un certain soutien, et nous faisons la promotion de la prévention des blessures et du projet de loi de contrôle des armes à feu. De nombreuses organisations — des organismes de prévention du suicide, des syndicats d'infirmiers et d'infirmières, des associations de santé publique, des travailleurs de première ligne dans le domaine des urgences — se sont rangées derrière ce point de vue.
    Serait-il juste de dire que les fournisseurs et les organisations de soins de santé sont essentiellement tous en faveur du registre des armes à feu?
    Non, je pense que ce ne serait pas juste. Je ne crois pas, par exemple, que l'Association médicale canadienne s'est prononcée sur la question du registre des armes à feu. Même au sein des différentes associations, vous allez entendre des gens qui ont des points de vue différents.
    Cependant, Carolyn et moi présentons le conseil de l'Association canadienne des médecins d'urgence et nos 1 800 membres. Nous avons toujours été unis dans notre soutien à l'égard d'un contrôle plus strict des armes à feu au Canada dans le but de réduire les pertes de vie dans nos services d'urgence dues aux armes à feu.
    Savez-vous s'il y a des organisations de santé mentale ou de santé qui se sont prononcées officiellement en faveur de l'élimination du registre des armes à feu?

  (1705)  

    Je crois qu'il y a au Québec un organisme de prévention du suicide qui s'est dit tout à fait en faveur de cela.
    Voulez-vous dire en faveur de l'abrogation du registre?
    Non, pas de...
    C'était ça la question.
    Je ne suis pas attentif à ce qu'on me dit. Demandez à ma femme.
    Y a-t-il des organisations de santé mentale ou de santé qui ont affirmé que le registre des armes à feu devrait être abrogé?
    Personnellement, je n'en connais aucune.
    Monsieur Mony, savez-vous quel gouvernement a instauré l'amnistie dont mon ami de l'autre côté a parlé?
    Est-ce que c'était le gouvernement conservateur?
    Oui.
    Eh bien, j'aimerais vous donner des exemples — et j'ai fait ça la dernière fois aussi — de l'utilité du registre. J'aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez.
    Prenons par exemple les ordonnances des tribunaux. Si un juge ordonne que les agents de police saisissent les armes à feu qui se trouvent dans une résidence et que, selon le registre — et je vais donner le même exemple que la dernière fois — il y en a 13, n'est-il pas utile, pour les agents de police, s'ils en ont trouvé dix, de savoir qu'il devrait y en avoir au moins trois autres et qu'ils devraient continuer de chercher?
    C'est la même chose que pour n'importe quel autre élément de preuve. Dans ce cas, nous continuons de chercher, c'est certain. Nous ne nous fions entièrement à aucun des outils que nous avons à notre disposition. Les agents de police doivent toujours être tout à fait certains; dans un cas comme celui que vous venez d'évoquer, ils continuent de chercher, mais le registre est un outil qui les aide à recueillir l'information dont ils ont besoin pour se présenter devant le juge afin d'obtenir un mandat. Dans le cas d'une saisie d'armes, c'est sûr que nous continuerions de fouiller la maison.
    S'il n'y avait pas de registre et que vous ne disposiez d'aucun moyen de savoir combien il est censé y avoir d'armes dans la maison, vous continueriez de chercher, vous feriez de votre mieux et vous trouveriez ce que vous trouveriez, mais s'il y a un registre, comme c'est le cas en ce moment, et que, selon celui-ci, il y a au moins 13 armes et que vous n'en avez trouvé que dix, alors vous serez certain que vous devrez continuer de chercher. Je sais que vous continueriez de chercher et que vous feriez de votre mieux — je suis d'accord —, mais vous continueriez de chercher jusqu'à ce que vous trouviez au moins trois autres armes, parce que vous savez qu'il est censé y en avoir au moins trois de plus, n'est-ce pas?
    Assurément.
    Parlons de la violence familiale. Comme nous le savons, dans les cas de violence familiale, ce sont surtout les armes d'épaule qui sont utilisées. Je vais vous donner le même exemple concret. Si un agent de police intervient et qu'il y a des menaces, il sait qu'il doit faire quelque chose pour protéger les membres de la famille. Si, selon le registre, il y a 13 armes et qu'on en a trouvé que 10, la même chose s'applique: il doit continuer de chercher dans ces circonstances pour protéger la famille, parce qu'il sait qu'il doit en trouver au moins trois autres. Est-ce exact?
    Certainement. En fait, il y a aussi un exemple dans les documents que j'ai remis au comité. Il s'agit d'une situation précise qui ressemble à celle que vous évoquez. Dans ce cas-là, la famille croyait que le père, qui était suicidaire, n'avait que 13 armes, alors qu'il en avait 21. C'est grâce au registre que les agents de police l'ont découvert. Dans ce cas-là aussi, une fois qu'ils ont trouvé les 21 armes en question, ils ont continué de chercher.
    Monsieur MacKenzie, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Juste pour préciser — et, monsieur Rich, peut-être pouvez-vous confirmer ceci —, l'amnistie ne supprime pas l'obligation d'avoir un permis. Elle ne fait que permettre aux gens d'enregistrer leur arme sans avoir à payer de frais. Est-ce exact?
    C'est exact.
    L'amnistie n'est donc pas une mauvaise chose. En fait, elle vise à ramener les gens dans le système.
    Il s'agit de les ramener dans le troupeau, certainement; l'intention est très bonne.
    D'accord. Nous procédons à l'enregistrement des armes de poing depuis les années 1930.
    C'est exact.
    Ce qui pose problème, pour vous, ce sont les armes de poing.
    Oui, ce sont les armes de poing et les fusils d'assaut qui seraient illégaux au Canada.
    C'est ça.
    D'après ce que je sais, le Beretta Cx4 Storm est en fait une arme à autorisation restreinte. Le projet de loi C-391 ne s'appliquerait pas à cette arme, puisque, en tant que telle, elle serait inscrite au registre des armes à autorisation restreinte le cas échéant.
    Pardonnez-moi. Je pense qu'il s'agit simplement d'un fusil semi-automatique qui avait été enregistré légalement et qui était légalement en la possession de l'auteur de la fusillade à Dawson.
    Même si c'est le cas, l'arme serait enregistrée d'une façon ou d'une autre.
    Désolé; je pense que oui, mais je ne veux pas prétendre être l'expert.
    Très bien, mais l'un des problèmes qui se posent, c'est que nous essayons de faire d'un registre d'armes sans autorisation restreinte une forme de contrôle des armes à feu. Je pense que, de façon générale, la plupart des gens seraient d'accord pour dire que seulement la moitié des armes sont inscrites au registre.
    Est-ce que ça correspond plus ou moins à ce que vous...

  (1710)  

    C'est exactement ce que j'essaie de dire. Je n'ai pas le chiffre. Comme je l'ai dit, c'est toujours difficile d'établir le chiffre, mais une énorme proportion des armes d'épaule qui existent ne sont pas inscrites au registre, et ça, ça pose un problème important.
    Si ça doit nous coûter 4,1 millions de dollars par année pour la moitié des armes inscrites, ça coûtera forcément assez cher d'essayer de faire inscrire l'autre moitié, beaucoup plus que 4,1 millions de dollars.
    Oui, et j'imagine que ça coûterait beaucoup plus que 4,1 millions de dollars aussi si nous tenions un registre contenant de l'information parfaitement exacte et accessible en temps opportun.
    Connaissez-vous le projet de loi C-17, qui portait sur la manipulation et l'entreposage sécuritaires des armes à feu et les AAAF?
    Oui.
    Peu de temps avant le projet de loi C-68, il y a eu le projet de loi C-17. Avec les AAAF, les agents de police interrogeaient les gens avant la délivrance des permis.
    C'est exact.
    Ce système n'existe plus.
    C'est vrai. Nous avons adopté un autre système de vérification des antécédents, je suppose.
    Je vous dirais que, lorsque les agents de police effectuaient ces vérifications des antécédents, les gens qui avaient un problème de dépendance, que ce soit à la drogue ou à l'alcool, ou encore des problèmes de santé mentale, n'obtenaient pas de permis.
    C'est vrai. Pour ma part, je crois qu'un enquêteur ayant reçu une formation adéquate, qu'il porte l'insigne ou non, serait beaucoup plus efficace que le système actuel.
    Dans le cadre du système actuel, je crois que vous avez expliqué que le détenteur d'un permis de possession et d'acquisition parle avec quelqu'un au téléphone et...
    J'avais l'impression que je demandais une carte de crédit ou quelque chose du genre.
    D'accord. Je comprends.
    Docteur Drummond, je viens moi aussi d'une collectivité rurale où j'étais agent de police, et je suis tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit au sujet des blessures qui sont causées par des armes d'épaule, et non par des armes de poing. Vous ne pensez pas que cela a quelque chose à voir avec le fait qu'il n'y a pas autant d'armes de poing que d'armes d'épaule dans les régions rurales?
    Eh bien...
    Ce que je veux dire, c'est que les armes de poing semblent parfois être davantage un problème des régions urbaines, ce qui fait que, ce qu'on voit, c'est ce qui est là naturellement.
    Je suis d'accord. Encore une fois, je ne suis pas criminologue; je fais simplement état de ce que je vois.
    J'ai parlé du projet de loi C-17, et je pense que vous l'avez peut-être mentionné aussi. À l'époque, j'ai vu le changement se passer en ce qui concerne les morts accidentelles lorsqu'il est devenu obligatoire d'adopter des pratiques de manipulation et d'entreposage sécuritaires et d'entreposer séparément les armes et les munitions. Ça a fait une différence énorme au chapitre des décès accidentels, surtout dans les régions rurales par rapport aux enfants.
    Puis-je répondre à cette question?
    Je vous en prie.
    Merci, je vais répondre à cette question.
    Nous avons assurément été témoins d'un déclin après l'adoption du projet de loi de 1991, mais un travail approfondi a été effectué au Québec. On a été en mesure de faire une analyse des séries chronologiques dans le cadre de laquelle on a examiné les décès dus aux armes à feu, et on a pu isoler les tendances à la baisse et l'adoption du projet de loi. Ça été fait par Mme Gagné en 2008. L'étude portait sur le projet de loi C-51, adopté en 1977, le projet de loi C-17, adopté en 1991, et le projet de loi C-68, adopté en 1995...
    Ce que je dis, c'est que l'effet est cumulatif à partir du projet de loi C-17, ce qui fait que le projet de loi C-68 reçoit le crédit pour une bonne partie des retombées positives du projet de loi C-17.
    Non. Ce qui est intéressant, c'est qu'elle a été en mesure d'isoler cette réglementation et de constater en fait une diminution beaucoup plus importante des homicides et des suicides à la lumière de cela.
    Je dirais également que nous constatons ce déclin surtout au chapitre des suicides.
    D'accord.
    Docteur Drummond, je pense que vous avez utilisé certains chiffres portant sur les décès chez les femmes. Les données de Statistique Canada pour 2008 sont les suivantes: 51 femmes ont été poignardées, 34 ont été étranglées et 25 ont été tuées par balles. Je crois qu'une arme d'épaule a été utilisée pour tuer 11 des 25 femmes tuées par balles. Est-ce que ça correspond aux chiffres?
    Je pense que le Dr Drummond a cité des chiffres plus tôt qui étaient assurément plus importants que ceux-ci, mais ce sont les chiffres de Statistique Canada. Je me demande simplement...
    Il va falloir arrêter ici.
    Si vous tombez là-dessus, veuillez nous le faire savoir et nous allons examiner cela. Il ne nous reste plus de temps.
    Monsieur Desnoyers, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à vous tous. Votre contribution, aujourd'hui, est importante pour ce qu'on tente de faire concernant le contrôle des armes à feu, qui est, quant à moi, quelque chose d'extrêmement important.
    Je veux davantage me pencher sur le volet de la violence, entre autres la violence conjugale et la façon dont les policiers peuvent utiliser ce registre dans des situations de violence conjugale et de suicide. Comme vous venez de le dire, il y a une tendance à la réduction actuellement. Cela dit, on ne dit pas que ce n'est que grâce au registre, mais plutôt qu'il y a plusieurs outils parmi lesquels le registre est un des plus importants à être utilisé en fait d'outil de prévention. Le volet qu'on oublie souvent, soit l'aspect de la prévention, se construit grâce à ça et profite à tous ceux qui doivent utiliser ce registre.
    Si le registre n'est pas tout à fait à jour, je pourrais me demander si ce n'est pas à cause des conservateurs et de l'amnistie qu'ils ont mise en avant, qui empêche les gens d'enregistrer leurs armes. Cependant, avec le temps, si on réussit à le conserver et à enlever cette amnistie, on pourrait contrôler toutes ces armes, surtout les armes d'épaule.
    En fait, on peut sauver des vies dans les situations de violence conjugale. Lorsqu'il est question de suicide, on peut aller chercher des armes. En cas de violence conjugale, le travail des policiers est de savoir comment s'y prendre quand ils savent qu'il y a des armes dans la maison.
    Donc, je vais commencer avec vous sur la question des suicides, puis celle de la violence conjugale et, enfin sur celle des policiers.

  (1715)  

[Traduction]

    J'aimerais dire que nous, les médecins d'urgence, utilisons le registre quotidiennement de deux manières.
    D'abord, en ce qui concerne la violence conjugale, entre 2 et 12 p. 100 des femmes qui sont admises à notre service d'urgence sont actuellement victimisées par leurs partenaires. En fait, on a constaté dans le cadre d'études réalisées aux États-Unis — malheureusement, nous ne savons pas encore cela au Canada — que le cinquième des femmes tuées par leur partenaire avaient été admises à un service d'urgence au cours de l'année précédente.
    Je veux mettre cela dans le contexte du nombre de femmes que je vois chaque semaine qui subissent de la violence à la maison. Dans chacun des cas, je demande s'il y a une arme à feu, parce que nous savons qu'il y a un risque de décès énorme lorsqu'il y a une arme à feu à la maison dans les cas de violence conjugale. En outre, nous les encourageons fortement à communiquer avec la police si la police n'est pas déjà intervenue. L'une de mes principales préoccupations, c'est de sortir cette arme de la maison. Dans bien des cas, la police intervient, et c'est souvent l'un des résultats de son intervention, comme le fait qu'elle offre beaucoup de soutien aux femmes victimisées.
    Pour ce qui est du suicide, c'est la même chose. Lorsqu'un policier amène un patient à l'urgence, ce qui est assez courant dans le cas des patients qui sont très déprimés — c'est souvent la police qui les amène à nos services d'urgence —, encore une fois, je demande s'il y a une arme inscrite au registre à la maison. Si c'est le cas, je veux savoir que l'arme a été enlevée de la maison, et, si on n'a pas été en mesure de la trouver, ça change beaucoup mon évaluation de la sécurité du patient.

[Français]

    La Fédération des femmes du Québec, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je vais répondre à une partie des questions qui ont été soulevées et je vais ensuite passer la parole à Mme Monastesse.
    Nous constatons qu'au Québec, par exemple, il y a 15 personnes sur 100 000 dans les régions, comme la région de Montréal, qui sont tuées avec des armes à feu, alors que dans le Nord du Québec, dans les régions rurales, les communautés inuites, c'est 78 personnes sur 100 qui sont tuées avec des armes à feu.
    Ce matin même, j'étais en réunion avec des groupes de femmes, notamment Pauktuutit, un groupe de femmes inuites qui disent que leur priorité ultime, c'est de lutter contre la violence faite aux femmes dans le Nord. On sait que la présence d'armes à feu dans la maison, lorsqu'il y a violence conjugale, est un immense facteur de risque.
    Par ailleurs, je suis déjà allée dans le Nord, j'y ai passé un certain temps. J'ai énormément de respect pour la culture de chasse des Inuits. Je pense que c'est extrêmement important que la culture inuite puisse continuer à exister, que les Inuits puissent avoir accès à la chasse, à l'eau et à la terre, pour leur nourriture. Cela dit, tous les instruments internationaux disent qu'il n'y a pas de coutumes ou de traditions qui peuvent justifier la mise à l'écart de moyens de lutte contre la violence faite aux femmes.
    Donc, en tout respect de cette culture, il y a des femmes du YWCA du Yukon qui nous indiquent que l'enjeu de la violence envers les femmes est non seulement un risque de mort, mais est aussi utilisé comme une menace dans les cas de violence conjugale.
    Manon, aurais-tu quelque chose à ajouter?

  (1720)  

[Traduction]

    Merci. Désolé, le temps est écoulé. Il y aura peut-être encore du temps au cours du prochain tour.
    Monsieur McColeman, vous avez la parole.
    Merci, et merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Leur présence est réellement appréciée.
    J'aimerais aborder la question des premières nations avec vous, monsieur le ministre, et recueillir quelques commentaires de votre part. L'une des raisons, c'est que je représente la plus grande première nation du Canada qui se trouve dans ma circonscription, celle de Brant, qui inclut la Ville de Brantford, les Six Nations de la rivière Grand et les Mississaugas de New Credit. Il s'agit d'environ 12 500 personnes.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous lorsque vous dites que vous êtes déçu d'être le seul représentant des premières nations à pouvoir venir témoigner. À cause de l'ordre du jour bien rempli qui a été proposé par différents membres du comité, nous n'avons pas été en mesure d'entendre autant de témoins que nous aurions aimé le faire.
    Quoi qu'il en soit, dans vos observations, vous avez parlé de votre député, celui du Yukon. Je crois que vous l'avez appelé par son prénom, Larry. J'imagine qu'il s'agit de Larry Bagnell. Il est le porte-parole des gens du Yukon, et, en particulier, dans votre cas, des Autochtones du Yukon. Est-ce exact?
    Savez-vous que votre député, Larry Bagnell, a dit qu'il fait tout ce qu'il peut pour lutter contre le registre des armes d'épaule en vigueur depuis 13 ans?
    Non, je ne le savais pas.
    Eh bien, je vais vous lire ce qu'il a dit: « “Les gens du territoire savent bien que je lutte ardemment contre cela depuis des années”, a dit M. Bagnell lundi... » Ça vient d'un article écrit par Jason Unrau le 5 mai. Je fonde ma question sur cet article.
    Avez-vous parlé du fait qu'il lutte contre le registre avec votre député?
    La dernière chose que j'ai entendue de la part de notre député, c'est qu'il a les mains liées.
    D'accord. Ce que vous dites, dans ce cas, c'est que son chef, M. Michael Ignatieff, lui dicte comment il doit voter.
    Oui.
    Ce que vous êtes en train de dire, juste pour être sûr, c'est qu'il ne représente pas les membres des premières nations du Yukon.
    Eh bien, disons que s'il devait y avoir une élection demain matin dans notre collectivité et qu'il devait voter non, il ne serait pas ici à Ottawa.
    Merci.
    Je ne sais pas, monsieur le président, s'il est approprié que ce document soit déposé ou non, mais c'est une lettre de la Federation of Saskatchewan Indian Nations. Quelque 71 chefs autochtones de la Saskatchewan l'ont signée, l'ont envoyée à leur député et aussi au premier ministre du pays, et ils souhaitent voir le système actuel du registre des armes d'épaule aboli et remplacé par quelque chose qui serait éventuellement plus efficace.
    Saviez-vous que cette lettre avait été envoyée par les premières nations de la Saskatchewan?
    En fait, j'ai appris l'existence de la lettre aujourd'hui.
    Je pourrais vous dire, probablement avec beaucoup de certitude, que si nous devions demander à tous les chefs du Yukon, la réponse serait d'abolir le registre.
    Je veux simplement signaler que je vis dans une région du pays, le sud-ouest de l'Ontario, qui est assez populeuse, et pourtant, l'opinion de mon chef, le chef du conseil de bande élu — c'est-à-dire le chef Bill Montour — est la même. Il dit qu'il serait prêt à venir témoigner en ce sens au nom de la plus grande première nation du Canada. Il s'agit d'un groupe de membres de premières nations qui vit dans ce que j'appellerais une partie urbanisée du pays, pas dans le Grand Nord. Ils voient le registre comme quelque chose qui leur est imposé et qui n'est ni très efficient ni très efficace dans leur collectivité.
    L'autre chose que j'aimerais aborder — et peut-être cette question s'adresse-t-elle à vous, monsieur Rich —, c'est que j'ai cru percevoir dans les témoignages le désir d'avoir un mécanisme de contrôle des armes à feu qui soit efficace et efficient. Nous ne sommes pas contre le contrôle des armes à feu, pas du tout. L'ancien chef de police, M. MacKenzie, a parlé du système des entrevues. Les armes sont dangereuses dans les mains de criminels, et ce ne sont pas les armes qui sont dangereuses, ce sont les gens qui les ont dans les mains. Le chef l'a bien dit dans une discussion qu'il a eue avec son ami — je ne vais pas utiliser les mêmes mots que vous, monsieur le ministre — et ça a été dit à plusieurs reprises. Je me demande simplement...

  (1725)  

    Posez votre question.
    La question concerne les permis et le resserrement des critères à respecter pour obtenir un permis de possession d'armes. Pouvez-vous dire quelque chose là-dessus?
    Si j'avais à choisir entre les deux, j'investirais mon argent dans le choix des personnes qui peuvent obtenir un permis. Pour moi, c'est le principal problème, ainsi que le fait d'effectuer une vérification approfondie pour déterminer si les gens deviennent instables ou se livrent à la violence conjugale ou encore ont des troubles mentaux. C'est tous ces problèmes. C'est là où j'investirais mon argent.
    Merci beaucoup.
    Il nous reste environ trois minutes et demie, monsieur Holland, si vous souhaitez utiliser ce temps.
    Merci, monsieur le président.
    Nous enregistrons notre voiture. Nous enregistrons notre bateau. Nous enregistrons notre chien. La réalité, c'est que l'enregistrement de toutes ces choses, ainsi que des armes, est un outil important. Personne ne dirait que le simple fait d'enregistrer une voiture permet de prévenir les accidents, mais nous reconnaissons tous, lorsque nous devons faire la file au bureau des véhicules, comme je l'ai fait hier, que ça fait partie du processus et que ça fait partie du fait d'être membre d'une société démocratique et d'avoir le privilège de pouvoir utiliser une voiture ou un bateau, ou encore de posséder un animal domestique ou une arme.
    Lorsqu'on remet en question le fait que l'Association canadienne des policiers, qui élit ses dirigeants — soit dit en passant, tous les gens qui sont ici sont élus — soit représentative des gens qui élisent ces dirigeants ou lorsque notre régime de démocratie représentative est remis en question, pour moi, ça pose problème.
    Lorsque l'Association canadienne des policiers nous dit qu'elle a besoin du registre pour faire son travail, lorsque l'Association canadienne des chefs de police nous dit que c'est important pour elle et qu'elle en a besoin pour assurer la sécurité de nos collectivités, lorsque les professionnels du domaine médical s'expriment d'une façon pratiquement unanime — en fait, il n'y en a aucun qui exprime une opinion différente — et disent que nous devons conserver le registre parce qu'il permet de sauver des vies, lorsque toutes ces personnes expriment leur opinion et que les chefs des conseils de police de l'ensemble du pays disent que c'est essentiel, lorsque la vérificatrice générale dit que tout ça coûte 4,1 millions de dollars par année, lorsque nous savons que la police utilise le registre 11 805 fois par jour...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    D'accord. Un instant.
    Non, monsieur le président, permettez-moi de terminer, s'il vous plaît. J'en arrive à une question.
    C'est un rappel au Règlement.
    C'est un rappel au Règlement.
    Il ne me reste qu'une minute.
    Je suis curieux de voir si une question va être posée avant la fin de la période.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement. Prenez un instant pour y réfléchir — réfléchir à tout ça.
    Une voix: Vous n'êtes pas le président.
    M. Mark Holland: Pensez-y. C'est incroyable que le registre soit utilisé plus de 11 000 fois par jour.
    Il fait un discours.
    Voici ce qu'il en est.
    Monsieur le président, je peux préparer une question. Monsieur le président, s'il vous plaît, j'essaie de poser une question. S'il vous plaît.
    D'abord, je suis fier d'appuyer un chef qui va agir pour assurer la protection de nos collectivités. Je suis fier d'appuyer un chef qui dit qu'un système qui est appuyé par tant de professionnels doit être conservé. Je poserais la question suivante à quiconque: pourquoi irait-on abolir quelque chose qui coûte 4,1 millions de dollars si tant de gens disent que c'est un outil dont ils ont besoin?
    Au bout du compte, si, individuellement, vous n'avez pas particulièrement besoin de cet outil, alors laissez les autres continuer de l'utiliser, comme c'est le cas du camionneur qui doit conduire pour gagner sa vie. Il sait qu'il doit enregistrer sa voiture. C'est la même chose pour les armes.
    Ma question s'adresse à la Fédération des femmes du Québec.
    Laissez du temps pour la réponse.
    Croyez-vous que le projet de loi, et par extension, le gouvernement Harper qui le propose, vient en aide aux femmes? Croyez-vous que l'abrogation du registre des armes à feu soit une façon efficace de lutter contre la violence faite aux femmes?
    Quelqu'un d'autre veut intervenir?

[Français]

    Bien sûr que ce n'est pas une bonne façon de combattre la violence envers les femmes.
    D'ailleurs, j'ai une question pour les conservateurs. Ont-ils demandé aux groupes de femmes autochtones ce qu'elles pensent de la violence conjugale qu'elles vivent et ce qu'elles pensent de l'enregistrement. De plus, que pensent les femmes dans les régions rurales qui font face à de la violence conjugale avec des armes à feu qui ne seraient plus couvertes par l'enregistrement?
    Pour notre part, on dit que ce projet de loi est irresponsable, et il faut vraiment s'y opposer.

[Traduction]

    Quelqu'un d'autre? Vous avez la parole, monsieur Edzerza.
    Oui, je voudrais...
    C'est mon tour, monsieur le président. J'ai une question pour M. Momy.
    Vous avez adressé votre question à tous les témoins, et maintenant...
    Non. J'ai posé une question très précise à la fédération. J'ai une dernière question pour M. Momy et une pour l'agente-détective Teeft, et il ne me reste que très peu de temps.
    Je veux simplement savoir...
    Désolé. Le temps est écoulé.
    La séance est levée.
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