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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 033 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 10 juin 2014

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-17. Nous avons quelques témoins à entendre aujourd'hui, donc commençons sans plus tarder.
    Nous allons d'abord entendre notre témoin comparaissant par téléconférence ce matin.
    Madame Graham, nous entendez-vous bien?
    Nous vous entendons très clairement.
    Nous allons vous donner la parole la première. Il y aura quatre ou cinq exposés — vous présenterez le premier —, après quoi nous laisserons les membres vous poser des questions. Pouvez-vous rester en ligne, si cela vous convient?
    Vous avez environ 10 minutes pour votre exposé. Allez-y, si vous le voulez bien.
    Je vous remercie infiniment de me permettre de contribuer à votre étude du projet de loi C-17.
    Je vais mettre l'accent aujourd'hui sur les raisons pour lesquelles je crois qu'il faut modifier le projet de loi afin d'accroître la transparence et l'ouverture des données sur les essais cliniques et les décisions entourant l'approbation de médicaments par Santé Canada.
    J'ai commencé à m'intéresser à la transparence des données sur l'innocuité et l'efficacité il y a presque 20 ans, pendant que je travaillais comme chercheure universitaire à un essai clinique de phase IV. Le fabricant qui parrainait notre étude avait sélectionné les résultats positifs de notre base de données, ignorant les cas moins positifs afin d'appuyer son argumentaire pour l'inclusion du médicament à la liste provinciale des médicaments assurés. J'étais consternée par cette manipulation de données, et c'est là où j'ai commencé à me demander comment des médicaments médiocres pouvaient être approuvés au départ, compte tenu du coût qu'ils représentent pour notre système de santé.
    Entre 2001 et 2006, j'ai mené des recherches anthropologiques en profondeur à l'unité de réglementation de Santé Canada. J'observais les évaluations de médicaments, les activités réglementaires et le processus décisionnel. J'ai également participé à des consultations sur l'homologation progressive avec Santé Canada, en plus de présider un comité consultatif expert sur le programme d'accès spécial.
    Les préoccupations et les recommandations formulées par notre comité en 2008 sur le rôle et la nécessité d'une modernisation de la réglementation n'ont jamais été rendues publiques, mais plusieurs s'appliquent aux recommandations relatives au projet de loi C-17.
    En 2004, Santé Canada a reçu le prix de la Loi du silence de l'Association canadienne des journalistes, décerné au ministère considéré le plus secret, pour refuser l'accès à ses bases de données sur les médicaments susceptibles de causer préjudice à des Canadiens ou de les tuer. L'ACJ a accusé le ministère de faire passer des intérêts commerciaux devant la santé des Canadiens. La capture réglementaire, un terme utilisé de part et d'autre pour accuser une autorité réglementaire de favoriser les intérêts d'une partie au détriment des autres, peut exister dans n'importe quel secteur. Ce n'est pas l'apanage d'un seul parti.
    L'aptitude des évaluateurs réglementaires de Santé Canada et des examinateurs indépendants à faire leur travail est compromise lorsqu'ils n'ont accès qu'à des données partielles et incomplètes. Je ne veux pas critiquer le travail remarquable des responsables de la réglementation à Santé Canada. Ils travaillent dans un contexte de contraintes structurelles et financières considérables. L'embauche de quelques évaluateurs supplémentaires à peine en 2004 et en 2005 — pendant que j'y effectuais des recherches — a permis aux directions de rattraper des années de retard.
    Les améliorations apportées au cours des dernières années ont rendu les activités et les rapports de Santé Canada plus facilement accessibles, mais ces instruments restent faibles, puisqu'il nous manque des renseignements importants sur les projets et les méthodologies de recherche, les données, l'examen critique et l'évaluation, qui nous assureraient des résultats et des analyses non biaisés. Bien que les examinateurs de Santé Canada aient recours à beaucoup de mécanismes pour prendre leurs décisions, dont des communications bilatérales continues avec le promoteur pour poser des questions et obtenir des clarifications pendant leurs examens, je crois que l'évaluation indépendante conserve un rôle essentiel nécessitant un accès ouvert aux données d'essais cliniques et aux motifs de décision de Santé Canada.
    Par exemple, l'évaluation par Santé Canada de la thérapie Prochymal à base de cellules souches nous a laissé plus de questions que de réponses. En 2012, le Canada est devenu le premier pays à approuver sous conditions le Prochymal pour le traitement de la maladie aiguë du greffon contre l'hôte chez les enfants. Son homologation se fondait sur des données très encourageantes attestant de réponses cliniques significatives fournies par le fabricant. Cependant, la FDA, aux États-Unis, n'a pas été convaincue et a refusé d'homologuer le médicament. Le fabricant, Osiris, prévoyait utiliser le Prochymal pour traiter beaucoup d'autres maladies, ouvrant ainsi la porte à de nombreuses indications non autorisées.
    Le fait que le groupe d'experts ait recommandé d'inclure à la monographie du produit un avertissement afin d'indiquer que les effets à long terme du Prochymal® chez les enfants en croissance sont inconnus aurait dû, j'espère, alerter la Direction des produits de santé commercialisés du fait qu'elle se trouvait devant une véritable bombe à retardement.
    La décision du Canada d'approuver le Prochymal, sur la base de données d'essais cliniques limitées et non publiées, a été accueillie comme une immense réalisation par le milieu financier et celui de la recherche pharmaceutique. Elle a été perçue comme un changement de cap au Canada, montrant une ouverture à un accès plus rapide au marché plutôt qu'au renforcement du système d'innocuité des médicaments dont les Canadiens ont besoin et que leur a promis le gouvernement dans le discours du Trône de 2003.
    Le sommaire des motifs de décision de Santé Canada pour le Prochymal dressait un portrait confus des critères et de la démarche qui ont mené à son autorisation. Santé Canada a utilisé les données de deux études non publiées pour en arriver à cette décision, dont l'une ne respectait même pas les critères de signification statistique pour le résultat final critique. Je vous cite un extrait du sommaire des motifs de décision:
À ce jour, seules des preuves préliminaires indiquent une valeur thérapeutique potentielle pour le Prochymal; cependant, ce médicament n'a pas montré jusqu'à présent de toxicité et a affiché un profil d'innocuité relativement bénin.
    Je souligne que c'est la même chose pour un placebo et que selon les preuves en question, cet essai ne se fondait que sur 28 jours de recherches cliniques.

  (0850)  

    Il se dégage des consultations de la DGPSA elle-même que les documents du sommaire des motifs de décision « ne contenaient pas [...] d'information suffisamment détaillée sur les essais cliniques, y compris les participants à l'étude, les conclusions et les dangers, pour vraiment permettre aux consommateurs et aux fournisseurs de soin de santé de faire des choix éclairés ».
     Dans un article du domaine des affaires intitulé « How to Tell When a Drug Company Fibs About Clinical Trial Results », Adam Feuerstein a écrit ce qui suit:
Osiris Therapeutics a fait « disparaître » des données importantes quand elle a annoncé les résultats... d'une étude intermédiaire sur la thérapie aux cellules souches Prochymal chez des patients ayant subi une attaque cardiaque.
    La réglementation est efficace quand rien n'est tenu pour acquis et qu'il y a de nombreux mécanismes successifs de contrôle des lacunes potentielles. Un bon organisme de réglementation doit redoubler de prudence. Je pense que personne ici ne voudrait que les organismes de réglementation canadiens se fassent prendre au dépourvu. Je ne peux pas me permettre de tolérer une bombe à retardement, personne d'autre ne peut se le permettre d'ailleurs. Le projet de loi C-17 ne va pas assez loin pour assurer un examen indépendant et systématique de toutes les données d'essais cliniques. Le projet de loi C-17, dans sa forme actuelle, ne prévoit pas de mécanisme de clarifications et de consultations entre les promoteurs et les organismes de réglementation, ni la publication des motifs détaillés de l'autorisation, de l'autorisation sous conditions, du refus, de la suspension ou du rappel de médicaments. Il ne prévoit pas d'obligation budgétaire non plus afin de prévoir des ressources pour les activités réglementaires accrues qui viendront avec la modernisation pour respecter les obligations du Canada d'assurer l'innocuité et l'efficacité des produits de santé thérapeutiques. Si ces activités supplémentaires ne s'accompagnent pas d'engagements budgétaires, les dispositions de la loi resteront futiles.
    La modernisation de la réglementation touche tous les pays. Elle vise à rester au diapason avec nos voisins politiques en matière de politique, d'économie, de sciences et de technologie, mais il s'agit également de l'occasion, pour les meneurs d'essais cliniques et les organismes de réglementation, d'adopter de nouvelles méthodologies plus robustes. Le projet de loi C-17 renforce certes les pouvoirs de rappel du ministre de la Santé, mais il ne met aucunement l'accent sur la nécessité d'augmenter les ressources de Santé Canada pour favoriser les examens indépendants que la prudence exige et nous donner accès aux motifs de décision.
    Cet effort de modernisation favorise plutôt la surveillance postcommercialisation et le suivi des médicaments approuvés sous conditions, dont beaucoup devraient être interdits d'emblée. En accélérant l'accès à ces drogues, nous risquons de faire des Canadiens des cobayes d'essais cliniques de phase quatre qui ne jouissent pas des protections ni des contrôles minutieux propres aux essais cliniques de phases un, deux et trois.
    Faute d'accès indépendant, ouvert et transparent aux résultats des essais cliniques, l'autorisation et l'approbation de l'utilisation de médicaments restent un plongeon à l'aveugle éthiquement injustifiable. Le projet de loi C-17 sera beaucoup plus bénéfique pour tous les Canadiens si l'on comble cette lacune. Comme on peut le lire dans la revue Nature:
La transparence accrue des données d'essais cliniques devrait aider à accélérer le développement de nouveaux médicaments, à assurer des examens indépendants de l'innocuité et de l'efficacité des médicaments et à accroître la confiance qu'inspirent les recherches scientifiques dans l'industrie.
    Nous en sortirons tous gagnants.
    Merci.
    Merci infiniment.
    Le prochain témoin comparaît par vidéoconférence. Nous allons entendre... Est-ce bien Joel Lexchin?
    Comme election.... Très bien, alors je vous souhaite la bienvenue, monsieur Lexchin.
    Vous avez 10 minutes, monsieur.
    Je tiens à remercier le comité permanent de me permettre de comparaître aujourd'hui.
    J'enseigne l'administration de la santé à l'Université York et travaille comme médecin d'urgence au University Health Network de Toronto. J'analyse la politique pharmaceutique, j'en parle et j'écris sur le sujet depuis plus de 30 ans; je suis l'auteur ou co-auteur d'environ 140 articles examinés par les pairs en la matière.
    Mon témoignage portera essentiellement sur trois enjeux: premièrement, les études postcommercialisation doivent être réalisées en temps opportun; deuxièmement, il faut s'attaquer aux problèmes des essais cliniques menés par les fabricants eux-mêmes; troisièmement, il faut améliorer la quantité d'information divulguée par Santé Canada après avoir approuvé un nouveau médicament.
    Pour le premier enjeu, j'examinerai la politique régissant l'avis de conformité avec conditions. Pour le deuxième enjeu, j'utiliserai les résultats d'un examen systématique récent qui décortique les résultats et les conclusions des essais financés par les sociétés pharmaceutiques, par comparaison avec les résultats d'essais financés d'autres sources. Pour le troisième enjeu, je me fonderai sur une étude dont j'ai publié récemment les résultats avec un étudiant de cycle supérieur sur la quantité et la qualité de l'information divulguée dans le sommaire des motifs de décision que Santé Canada publie lorsqu'il approuve un nouveau médicament.
    La politique sur l'avis de conformité avec conditions a été adoptée en 1998, dans le but — et je cite Santé Canada — de « permettre l'accès à de nouveaux médicaments prometteurs pour les patients atteints d'une maladie ou d'une affection grave, mettant la vie en danger ou sévèrement débilitante ». Elle s'applique lorsque les marqueurs de substitution indiquent que ces produits offrent « un traitement, une prévention ou un diagnostic efficace d'une maladie ou affection pour lesquelles aucun médicament n'est actuellement mis sur le marché au Canada » ou « une augmentation significative de l'efficacité ou une diminution significative du risque » comparativement aux thérapies actuelles.
    Un marqueur de substitution pourrait par exemple indiquer qu'un médicament fait diminuer la taille d'une tumeur cancéreuse. Lorsqu'elles reçoivent un avis de conformité avec conditions, les entreprises doivent s'engager, par écrit, à mener des études de confirmation, c'est-à-dire des études qui en établissent rigoureusement l'efficacité, puis à en soumettre les résultats à la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada. Si les essais postcommercialisation ne fournissent pas suffisamment de preuves d'avantages cliniques, l'avis de conformité avec conditions peut être révoqué et les produits, retirés du marché. Santé Canada donnera également un avis de conformité avec conditions pour une nouvelle indication d'un produit existant.
    Depuis l'adoption de cette politique, en 1998, Santé Canada a donné en tout 60 avis de conformité avec conditions pour des nouvelles substances actives (c'est-à-dire des molécules qui n'avaient jamais auparavant été commercialisées au Canada) ou de nouvelles indications de médicaments existants. Sur les 60, 7 ont été soit révoqués, suspendus, non respectés ou retirés, ce qui en laisse 53. Sur les 53 restants, les conditions ont été respectées dans 28 cas et restent à l'être dans 25 autres.
    J'ai inséré dans mon mémoire un tableau qui montre qu'il a fallu six ans pour que les conditions d'au moins 4 de ces 28 avis soient respectées et qu'il en reste 25 dont les conditions ne sont toujours pas respectées. Il y a 15 produits qui sont sur le marché depuis plus de 6 ans. Certains le sont depuis pas moins de 12 ans, ce qui signifie que les médecins les prescrivent, que les patients les prennent, mais que personne ne sait vraiment à quel point ils sont efficaces, si même ils le sont.
    Santé Canada ne divulgue aucune information publique sur le statut des essais cliniques qui sont censés être réalisés pour respecter les conditions auxquelles les produits ont été homologués.
    Mon deuxième sujet concerne les essais financés par les sociétés pharmaceutiques. Environ 80 % de l'ensemble des essais cliniques sont financés par les sociétés pharmaceutiques.

  (0855)  

    J'ai participé récemment à un examen de la Collaboration Cochrane qui portait sur les résultats et conclusions des essais financés par les sociétés pharmaceutiques par rapport à ceux des essais financés d'autres sources. Pour vous mettre un peu en contexte, la Collaboration Cochrane est une organisation indépendante, non gouvernementale et à but non lucratif, qui rassemble environ 31 000 volontaires de plus de 20 pays. Elle a été formée pour organiser systématiquement l'information sur les recherches médicales afin de faciliter les choix des professionnels de la santé, des patients, des décideurs politiques et des autres relativement aux interventions en matière de santé, selon les principes de la médecine fondée sur des données probantes.
    Selon nos conclusions, qui ont été publiées il y a deux ans, les études financées par les sociétés pharmaceutiques et les fabricants d'instruments médicaux présentent plus souvent des résultats et des conclusions favorables que les études financées par d'autres sources. Les conclusions étaient les mêmes pour une multitude de maladies et de traitements. Plus précisément, nous avons constaté qu'une étude financée par une entreprise était 2,15 fois plus susceptible de produire des résultats positifs et 2,67 fois plus susceptible de mener à des conclusions positives que si une autre source (des organismes de bienfaisance, des hôpitaux, des universités, les IRSC) avait financé les essais. Ces constats indiquent que le simple fait que les sociétés pharmaceutiques financent des essais crée un biais probablement positif. Si les membres du comité le souhaitent, je peux vous fournir un exemplaire électronique de cette étude.
    Enfin, au sujet des sommaires des motifs de décision, ils découlent d'une initiative lancée par Santé Canada le 1er janvier 2005. Il s'agit en fait d'un document publié après l'autorisation d'un nouveau médicament ou d'un nouvel appareil médical, qui explique l'information scientifique et l'analyse des risques et des avantages qui ont été prises en compte avant que le produit ne soit approuvé. Ce document contient une partie susceptible d'intéresser particulièrement les gens comme moi, les professionnels de la santé, c'est-à-dire la description des essais cliniques préalables à la commercialisation qui ont été analysés par Santé Canada, ainsi qu'un résumé de l'évaluation finale des avantages et des risques que présente le produit. Santé Canada a pour position que le sommaire des motifs de décision permettra aux professionnels de la santé et aux patients du Canada d'avoir plus d'information pour appuyer des choix de traitement éclairés.
    J'ai récemment examiné, avec l'un de mes étudiants de cycle supérieur, les 161 sommaires des motifs de décision publiés sur 456 essais cliniques examinés par Santé Canada entre le 1er janvier 2005 et la fin avril 2012. Nous nous sommes penchés tout particulièrement sur l'information divulguée sur l'innocuité et l'efficacité des médicaments. Nous avons ciblé l'information sur les caractéristiques des patients ayant participé à ces essais ainsi que sur les risques et les avantages des médicaments en question.
    Pour ce qui est des caractéristiques des patients, nous cherchions des renseignements sur l'âge et le sexe des patients, le fait qu'ils soient hospitalisés ou non et la façon dont ils ont été retenus pour participer à cet essai.
    Pour ce qui est des risques et des avantages du médicament, nous nous sommes penchés sur la durée de l'étude, la signification statistique des résultats, le fait que le médicament ait ou non été comparé à un placebo ou à un autre médicament, le pourcentage des patients qui se sont retirés de l'essai et la différence s'il y a lieu entre les taux de retrait des participants qui prenaient le nouveau médicament et des participants qui prenaient le placebo ou le médicament de comparaison.
    Voici quelques-uns de nos constats. Au total, 32 sommaires des motifs de décision sur 161 contenaient des renseignements sur le genre de tous les patients. Le nombre de documents déclarant l'âge de tous les patients était de 53 sur 161.

  (0900)  

Le nombre de documents qui précisaient la durée des essais était de 90 sur 161. Le nombre de documents mentionnant le nombre de personnes à s'être retirées des essais était de 4 sur 157. Quatre documents ne pouvaient être analysés sous cet angle. Le nombre de documents à exposer en détail les différences entre les taux de retrait chez les participants qui prenaient le nouveau médicament et chez les participants qui prenaient un placebo ou médicament de comparaison était d'un sur 154.
    Voici nos conclusions:
Dans l'ensemble, les renseignements sur les essais cliniques qu'on trouve dans les SMD sont variables, et il ne semble pas y avoir de méthode de présentation standard... Au moins un sommaire sur trois ne présente pas de renseignements sur les caractéristiques des patients ayant participé à l'essai ni sur les avantages et les risques des traitements testés.
    Je pourrai vous faire parvenir une version électronique de cette étude si vous le désirez.
    Sur la base de ces renseignements, j'ai deux recommandations de modifications à apporter au projet de loi C-17.
    Premièrement, si Santé Canada exige des essais postcommercialisation sur les médicaments, il doit périodiquement faire rapport de leur évolution, probablement une fois par année. Par exemple, il devrait préciser s'ils sont en retard et le cas échéant, pourquoi. Quand devraient-ils débuter? Sont-ils commencés et quand devraient-ils se terminer? S'ils le sont, quels en sont les résultats?
    Deuxièmement, Santé Canada doit veiller à ce que tous les résultats des essais cliniques sur l'innocuité et l'efficacité d'un nouveau médicament soient rendus publics dans un délai d'un an suivant la fin de l'essai et que tous les renseignements permettant d'identifier les patients en aient été caviardés.
    Enfin, je crois que Santé Canada doit instaurer un mécanisme afin de séparer le financement des études postcommercialisation de la tenue des essais eux-mêmes. Je proposerais que la société qui s'est engagée à mener l'essai verse l'argent nécessaire aux IRSC. Les IRSC pourraient ensuite sélectionner des chercheurs pour planifier et mener l'essai; ceux-ci analyseraient les résultats de l'essai de manière indépendante de la société, et les résultats des essais seraient rendus publics.
    Je vous remercie infiniment de m'avoir écouté.

  (0905)  

    Je vous remercie infiniment, docteur.
    Nous allons maintenant entendre Elaine Gibson, qui comparaît à titre personnel.
    Allez-y, vous avez 10 minutes.
    Merci. Comme nous étions censés être ici jusqu'à 9 h 45, sachez que je ne pourrai pas rester jusqu'à la fin de la séance car je dois partir un peu avant 10 heures. Je m'excuse d'avance auprès des membres du comité.
    C'est une honte pour notre pays que Santé Canada n'ait pas, à l'heure actuelle, le pouvoir de rappeler un produit pharmaceutique. J'exhorte donc les membres du comité à corriger cette omission en adoptant le projet de loi C-17. Vous joueriez ainsi un rôle important en contribuant à assurer la sécurité des Canadiens.
    Cela dit, il y a plusieurs façons d'améliorer le projet de loi C-17. D'autres témoins abordent la question cruciale de la transparence. Je ne vais pas en parler. Je vais exposer trois autres mesures que je vous prie d'adopter. Ce sont des mesures simples, directes et, je l'espère, faciles à comprendre. Je serai ravie de répondre à vos questions par la suite.
    Je vais même vous proposer un libellé pour les amendements que je recommande. Malgré leur simplicité, ces mesures pourraient améliorer de façon significative la sécurité des patients qui, comme vous le savez, est l'objet de ce projet de loi.
    Tout d'abord, il faudrait élargir la portée du projet de loi C-17 pour qu'il s'applique à tous les titulaires d'une autorisation relative à un produit thérapeutique. Ensuite, il faudrait inclure davantage d'événements indésirables. Enfin, il faudrait exonérer Santé Canada de toute responsabilité pour des mesures prises de bonne foi.
    Je vais maintenant expliquer ces mesures une par une.
    Ma première recommandation vise à élargir l'application du projet de loi C-17. Le libellé actuel vise de façon générale les titulaires d'une autorisation relative à un produit thérapeutique. Toutefois, la disposition précise concernant la capacité d'ordonner un rappel mentionne strictement les vendeurs de produits. La production et la distribution des produits pharmaceutiques sont une industrie complexe qui exige la participation de plusieurs entreprises. Les titulaires ne sont pas tous des vendeurs.
    Par exemple, une entreprise qui est titulaire d'une autorisation pourrait autoriser une autre entreprise à vendre les produits, ce qui fait en sorte qu'elle ne correspond pas à la définition d'un vendeur. On devrait donc modifier les dispositions sur le rappel afin d'englober toutes les entités liées à la chaîne de production et viser précisément les titulaires d'une autorisation relative à un produit thérapeutique.
    Deuxièmement, il faudrait inclure une plus grande variété d'événements indésirables. Le libellé du projet de loi fait référence aux préjudices subis. Vous vous souviendrez peut-être du rappel de certains emballages de la marque de contraceptifs oraux Alysena. Santé Canada était d'avis que le problème d'emballage, qui a possiblement entraîné de nombreuses grossesses imprévues au pays et qui a donné lieu à de multiples revendications et poursuites pour des grossesses non désirées, ne constituait pas une conséquence indésirable grave pour la santé.
    Il a finalement convenu que si une femme ne devait pas être enceinte pour des raisons de santé, cela constituerait une conséquence nuisible, mais pas si elle avait seulement choisi de ne pas être enceinte, en prenant notamment des contraceptifs oraux pour des raisons non médicales.
    Autrement dit, selon Santé Canada, une grossesse serait un choix de vie et non pas un effet indésirable grave.
    Le libellé du projet de loi C-17 devrait être modifié pour inclure des situations telles que des erreurs d'étiquetage ou d'emballage de produits. Le libellé pourrait se lire comme suit: « Pour plus de clarté, un effet indésirable à un médicament comprend notamment les circonstances dans lesquelles le produit thérapeutique n'a pas l'effet voulu en raison d'une erreur d'étiquetage ou d'emballage ».
    Un effet indésirable à un médicament comprend les circonstances dans lesquelles le médicament n'a pas l'effet souhaité en raison d'une erreur d'étiquetage ou d'emballage.
    Troisièmement, il faudrait exonérer Santé Canada de toute responsabilité pour des mesures prises de bonne foi. En dernier lieu, et ce qui est peut-être la mesure la plus importante, la ministre de la Santé ou son mandataire doivent pouvoir exercer les pouvoirs prévus dans le projet de loi C-17 en toute impunité, pourvu qu'ils agissent de bonne foi. La responsabilité délictuelle est, à mon avis, un mécanisme extraordinaire de reddition de comptes et, en temps normal, je ne demanderais pas qu'on accorde l'immunité au gouvernement pour ses actions; toutefois, songez à ça.

  (0910)  

    Les compagnies pharmaceutiques sont parmi les sociétés les plus puissantes au monde. Les recettes totales du gouvernement du Canada pour 2012-2013 s'élevaient à 257 milliards de dollars. Le total des revenus des 10 compagnies pharmaceutiques les plus importantes combinées était de plus de 400 milliards de dollars en 2013, et celui des 50 plus importantes, de 610 milliards de dollars en 2012. Les compagnies pharmaceutiques n'hésitent donc pas à engager des poursuites. Ces dernières années, elles ont mené des activités illégales et se sont vues imposer des amendes se chiffrant dans les milliards de dollars qu'elles ont payées sans même sourciller. Ce n'est pas exactement David contre Goliath, le gouvernement du Canada contre les compagnies pharmaceutiques, mais vous comprenez l'idée. Pour rappeler les faits que je viens d'exposer, les recettes totales du gouvernement du Canada s'élevaient à 257 millions de dollars alors que celles des 10 compagnies pharmaceutiques les plus importantes étaient de plus de 400 milliards de dollars.
    J'ai peur que la crainte de poursuites judiciaires, qui pourraient porter un dur coup à notre économie, nuise à la capacité de Santé Canada d'exercer ses fonctions énoncées dans le projet de loi C-17. Prenons l'exemple d'un rappel d'un produit à titre préventif qui, finalement, n'était pas nécessaire, selon les preuves accumulées par la société. On imagine très bien le vendeur intenter une poursuite contre Santé Canada pour la perte de ventes durant la période du rappel. Pour veiller à ce que Santé Canada puisse s'acquitter de son mandat qui est de protéger les Canadiens, il faut avant tout modifier le projet de loi C-17 et y inclure une exonération de responsabilité.
    À quoi ressemblerait une telle exemption? Voici un exemple de libellé. Les greffiers en ont des copies qu'ils vous remettront plus tard.
Le gouvernement n'est pas responsable des pertes ou des dommages résultant, directement ou indirectement, de,
a) l'adoption de (articles précis) cette loi, d'une norme ou d'un règlement établi en vertu des dispositions de cette loi, ou
b) tout acte — action ou omission — dans l'exercice d'un pouvoir ou d'un devoir conféré par cette loi ou un règlement, à moins que la personne qui intente les poursuites prouve que les actes n'ont pas été commis de bonne foi.
    Que signifie agir de bonne foi? C'est agir d'une façon qui n'est pas malveillante, autrement dit, d'une façon positive sur le plan moral. Si cette mesure est adoptée, le gouvernement sera à l'abri des poursuites à cet égard.
    En terminant, je vous demanderais d'appuyer l'adoption du projet de loi C-17 avec les améliorations précises que je propose. Le projet de loi vise à protéger les Canadiens contre les médicaments dangereux. Ces mesures s'assureront que le projet de loi, une fois en vigueur, atteindra son objectif. Les membres du comité sont bien placés pour jouer un rôle important dans la protection des Canadiens et je vous encourage à le faire.

  (0915)  

    Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à M. Herder.
    Monsieur, vous disposez de 10 minutes.
    Je vous remercie de me donner cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis spécialiste du droit de la propriété intellectuelle. Puisque mon temps est limité, je vais surtout me concentrer sur la question de la transparence, dont le projet de loi C-17 ne traite pas. J'aborderai des questions précises qui touchent deux thèmes. Je vais conclure en lisant cinq dispositions clés qui, selon moi, devraient être ajoutées au projet de loi.
    Mon premier thème concerne la communication de preuves et la transparence du travail de réglementation.
    Premièrement, il faudrait modifier le projet de loi C-17 afin de rendre obligatoires l'enregistrement de tous les essais cliniques, de la phase un à la phase quatre, ainsi que de toutes les autres études expérimentales, et la déclaration de tous les résultats d'études, pour tous les nouveaux médicaments et les nouvelles indications de médicaments homologués qui sont soumis à l'approbation réglementaire, qu'ils soient approuvés ou non.
    Deuxièmement, il faudrait autoriser la ministre de la Santé à divulguer les rapports d'études cliniques. Il peut être essentiel d'avoir accès à ces rapports et aux données qu'ils renferment pour comprendre la qualité des preuves à l'appui d'un médicament donné.
    Selon une étude publiée la semaine dernière dans le British Medical Journal, qui compare des rapports d'études cliniques et des publications au sujet de la duloxétine, un médicament souvent utilisé dans le traitement d'un trouble dépressif majeur au Canada, « les rapports d'études cliniques renfermaient des données exhaustives sur les préjudices majeurs qui n'apparaissaient nulle part » ailleurs.
    Un débat fait rage actuellement concernant les meilleurs moyens de communiquer les rapports d'études cliniques. Pour cette raison, il serait approprié de définir ces méthodes par règlement. Quoi qu'il en soit, il est crucial d'investir la ministre du pouvoir de les publier.
    Troisièmement, il faudrait obliger la ministre à rendre publiques toutes les décisions, y compris les homologations de produits, les refus, les suspensions, les rappels et les raisons qui expliquent ces décisions. Les patients, les médecins, les chercheurs, les fabricants de médicaments et les autres organismes de réglementation auraient avantage à connaître la façon dont l'organisme de réglementation interprète les données probantes. En outre, cette façon de procéder améliorera la qualité du processus décisionnel de l'organisme de réglementation ainsi que la confiance des Canadiens.
    Quatrièmement, il faudrait imposer de véritables sanctions dans les cas de non-respect des exigences en matière de transparence. Malgré les pénalités clairement indiquées dans la loi aux États-Unis, le bilan au chapitre de la conformité est loin d'être reluisant. Selon une étude, 78 % des essais cliniques enregistrés sur ClinicalTrials.gov n'ont pas donné de résultats dans le délai imparti d'un an.
    Par conséquent, je propose une stratégie d'application de la loi modifiée. À l'instar des États-Unis, le projet de loi C-17 devrait imposer des sanctions pécuniaires à ceux qui ne se conforment pas aux exigences sur l'enregistrement et la déclaration des résultats. Cependant, le projet de loi C-17 devrait également lier la déclaration des résultats à l'approbation préalable à la mise en marché.
    Le projet de loi C-17 comprend déjà un amendement à la Loi sur les aliments et drogues qui exigerait que les fabricants respectent toute condition associée à l'homologation de leur produit. Ce pouvoir ne devrait pas être utilisé qu'à l'occasion. On devrait plutôt l'exercer chaque fois que les rapports sur les résultats sont incomplets au moment de l'approbation préalable à la mise en marché. Lorsque l'organisme de réglementation refuse un médicament ou une nouvelle indication d'un médicament existant, et que cette exigence n'a pas été respectée — les résultats doivent être publiés dans les six mois —, les fabricants devraient encourir une amende additionnelle.
    Mon deuxième thème est la nécessité d'indiquer clairement que la transparence l'emporte sur les aspects commerciaux.
    Voici mon premier point. Le paragraphe 6(6) du projet de loi C-17 propose de modifier le paragraphe 30(3) de la Loi sur les aliments et drogues. Cette modification ouvre une porte vers une diminution des pouvoirs prévus dans cette loi visant à mettre en oeuvre les articles d'accords commerciaux concernant la propriété intellectuelle. On devrait la supprimer du projet de loi. Les objectifs commerciaux ne devraient pas diminuer la responsabilité du gouvernement fédéral de protéger le bien-être des Canadiens.
    En deuxième lieu, et il s'agit de mon dernier point, sachez que les prétentions des fabricants selon lesquelles certains renseignements sont exclusifs — c'est-à-dire des renseignements confidentiels ou des secrets commerciaux — ont toujours été un obstacle majeur à la transparence. Toutefois, conformément à ses obligations internationales, la réglementation canadienne sur les aliments et drogues protège déjà les données contre toute exploitation déloyale dans le commerce, en accordant au fabricant d'un médicament innovateur une période d'exclusivité commerciale de huit ans, en plus de la protection conférée par les brevets. Malgré tout, Santé Canada a jugé que les renseignements au sujet de l'innocuité et l'efficacité des médicaments ne peuvent être divulgués. Par conséquent, le projet de loi C-17 doit préciser que l'organisme de réglementation a le pouvoir de divulguer cette information.

  (0920)  

    Des gens ont sacrifié leur corps et ont pris de sérieux risques, susceptibles de mettre leur vie en danger, afin qu'on puisse recueillir ces renseignements. Ce n'est pas un secret qui appartient aux entreprises, et l'organisme de réglementation doit être libre de les divulguer.
    Pour conclure, je vous propose cinq dispositions qui devraient être ajoutées au projet de loi C-17, à la lumière de mes explications.
    Tout d'abord, tous les essais cliniques et autres études expérimentales sur un produit thérapeutique doivent être enregistrés sur une base de données interrogeable et accessible au public avant le recrutement des participants, conformément à la réglementation. De plus, la ministre ne doit pas délivrer une autorisation de mise en marché à l'égard d'un produit thérapeutique à moins que des essais cliniques et d'autres études expérimentales sur ledit produit aient été enregistrés aux termes de cette disposition, qu'ils aient été réalisés ou non au Canada.
    Deuxièmement, tous les résultats des essais cliniques et d'autres études expérimentales sur un produit thérapeutique doivent être consignés sur une base de données interrogeable et accessible au public dans l'année suivant la fin de l'essai ou de l'étude, conformément à la réglementation. De plus, lorsque les résultats d'un ou de plusieurs essais cliniques ou études expérimentales associés au produit thérapeutique n'ont pas été déclarés dans le respect de cette disposition avant l'autorisation de mise en marché, la ministre doit exiger, à titre de condition, que les résultats soient déclarés selon cette disposition dans les six mois suivant l'autorisation de mise en marché. Enfin, dans le cas où un produit thérapeutique ne reçoit pas une autorisation par la ministre, le fabricant doit déclarer les résultats de tous les essais cliniques et études expérimentales en vertu de cette disposition dans les six mois suivant la décision de la ministre de ne pas délivrer une autorisation de mise en marché.
    Troisièmement, la ministre doit divulguer publiquement les rapports d'études cliniques conformément à la réglementation.
    Quatrièmement, la ministre doit divulguer, sur une base de données interrogeable et accessible au public, l'information au sujet des autorisations relatives aux produits thérapeutiques, y compris les conditions connexes, les changements aux indications, les refus, les suspensions, les rappels et les raisons qui expliquent ces décisions.
    Cinquièmement, la ministre, conformément aux dispositions susmentionnées, doit divulguer publiquement l'information au sujet de l'innocuité et l'efficacité du produit thérapeutique, y compris les réactions indésirables aux médicaments, que lui transmettent les fabricants, les établissements de soins de santé et d'autres personnes. De plus, l'information mentionnée dans cette disposition ne doit pas être utilisée par un fabricant à des fins commerciales déloyales, comme le prévoit la réglementation.
    Je considère qu'il est essentiel d'ajouter ces dispositions intégralement au projet de loi afin qu'il puisse réaliser son plein potentiel.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    C'est Mme Hyland qui fera le dernier exposé de ce matin. Allez-y. Vous disposez de 10 minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, les membres du comité et du personnel, je vous remercie de me donner cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui au nom d'ISMP Canada.
    Je tiens à dire que nous appuyons fortement le projet de loi C-17, Loi visant à protéger les Canadiens contre les drogues dangereuses, aussi appelée Loi de Vanessa.
    L'Institut pour l'utilisation sécuritaire des médicaments du Canada est un organisme indépendant et sans but lucratif créé en 2000 dans le but d'analyser les méfaits évitables causés par des médicaments, de définir les améliorations à apporter au système et de faire progresser la sécurité des médicaments.
    Le projet de loi obligera notamment les établissements de soins de santé à déclarer les réactions indésirables graves aux médicaments et les incidents liés à des instruments médicaux. Nous sommes d'avis que cela nous permettra de mieux cerner les risques associés à l'utilisation des médicaments.
    De nombreuses recherches ont démontré que les méfaits causés par les médicaments sont plus fréquents que pourraient l'imaginer les médecins et le public. Une étude de 2008 a révélé qu'une consultation à l'urgence sur neuf survient à la suite d'un effet indésirable à un médicament et que 68 % de ces consultations peuvent être évitées. Les études et l'expérience ont démontré que dans bien des cas, les torts peuvent être prévenus et les patients peuvent être protégés, mais encore faut-il que les fournisseurs et les administrateurs de soins de santé soient au courant des problèmes.
    L'une des façons d'y remédier est de mettre en place un rigoureux système de déclaration. Grâce à un tel système, on disposera de plus de renseignements pour être mieux en mesure d'évaluer le rapport avantages-risques. Tout le monde peut rédiger un rapport à partir des événements ou des réactions indésirables déclarés, et sachez qu'un seul rapport peut faire une différence et, au bout du compte, influer sur la prestation des soins de santé.
    Notre organisation travaille en étroite collaboration avec les hôpitaux, et nous savons que la déclaration est volontaire. On est de plus en plus soucieux de la sécurité et conscients de l'importance de la déclaration. Nous savons également que la déclaration des méfaits causés par les médicaments est variable. Le projet de loi encouragera le milieu de la santé à miser sur les infrastructures existantes, à uniformiser les pratiques et à adopter des approches normalisées, de sorte que la qualité des données recueillies soit améliorée.
    Nous sommes prêts pour ce projet de loi. Selon notre expérience, étant donné que le milieu de la santé reconnaît son importance, le travail supplémentaire de la part des médecins ou des organisations ne constituera pas un obstacle à sa mise en oeuvre. Les gens sont conscients que cette mesure législative, une fois adoptée, favorisera non seulement la déclaration, mais entraînera aussi une meilleure collaboration à l'échelle provinciale et nationale.
    Grâce à ce projet de loi, nous avons la possibilité de cerner les pratiques exemplaires en matière de déclaration et de coordination des systèmes actuels afin de fournir à Santé Canada les données sur les réactions indésirables graves. On pourra lier ce travail au moyen de technologies modernes, comme les dossiers de santé électroniques, et ainsi continuer d'améliorer la saisie des données sur l'utilisation et l'innocuité des médicaments.
    En outre, l'analyse et l'interprétation des données s'amélioreront. L'une des limites du système actuel est que la déclaration volontaire des médecins dans les hôpitaux ne nous permet pas de déduire ou de prévoir la probabilité de méfaits précis. Nous pouvons y remédier grâce à la déclaration obligatoire. Autrement dit, les rapports volontaires de méfaits graves et inattendus causés par des médicaments nous aident à détecter les nouveaux risques de façon précoce. Cependant, si on augmente le nombre de rapports dans le cadre d'un processus obligatoire dans les hôpitaux, nous serons en mesure de dégager des tendances et ainsi de mieux étayer l'évaluation continue du rapport avantages-risques d'un médicament.
    Notre organisation travaille en étroite collaboration avec les consommateurs et les patients et nous sommes à même de constater que la plupart d'entre eux ont l'impression que la déclaration est déjà obligatoire. Ce projet de loi nous aidera à répondre à leurs attentes. En dernière analyse, il nous permettra de nous assurer que les médecins, de concert avec les patients, auront suffisamment d'information pour prendre une décision éclairée au sujet du traitement à privilégier.
    Par ailleurs, le projet de loi permettra de renforcer la surveillance de la sécurité en conférant des pouvoirs accrus à Santé Canada.
    L'approche de Santé Canada où la surveillance couvre tout le cycle de vie des médicaments démontre que le ministère reconnaît la nécessité d'évaluer de façon continue l'utilisation d'un médicament et son rapport avantages-risques dans le monde réel. Le projet de loi autorise Santé Canada à exiger que les titulaires de licences réalisent des évaluations, compilent des renseignements sur l'utilisation des produits, mènent des essais ou surveillent les expériences, prennent des mesures de prévention et vérifient l'efficacité de ces mesures.
    De plus en plus, on considère que les activités de pharmacovigilance se rapportent non seulement aux réactions indésirables qui indiquent le rapport avantages-risques inhérents de la molécule de médicament, mais aussi aux événements indésirables évitables à l'origine des améliorations du système de santé, des pratiques et des étiquettes.

  (0925)  

    Par exemple, après avoir analysé les erreurs de médication, qui sont des torts évitables, nous avons collaboré avec les fabricants et Santé Canada afin d'améliorer la conception des étiquettes. Nous avons essayé de mettre l'accent sur l'information essentielle plutôt que sur la marque ou les aspects de commercialisation. De cette façon, ce sont les renseignements importants qui retiennent l'attention, et nous réduisons le risque d'erreur.
    Les pouvoirs conférés par le projet de loi permettront d'exercer une plus grande influence sur les facteurs particuliers à prendre en considération relativement à l'emballage et à l'étiquette, à la monographie du produit, à la notice d'accompagnement du produit ainsi qu'à l'information à l'intention des patients. Compte tenu de l'évolution de l'innocuité des médicaments, nous savons maintenant beaucoup mieux comment concevoir des étiquettes dans une optique de sécurité, en fonction des besoins de l’utilisateur et en utilisant une expertise relative aux facteurs humains pour nous aider à assurer une représentation optimale de l'information et à réduire les risques d'erreur.
    Il existe une tension entre la science de l'innocuité des médicaments et les nombreux efforts pour commercialiser et vendre un produit. Les deux peuvent être diamétralement opposés. C'est pourquoi il est important que Santé Canada soit bien placé pour faire passer la sécurité avant la commercialisation, la marque et les ventes. Santé Canada doit pouvoir exiger une intervention rapide lorsque la sécurité des Canadiens est menacée.
    Je reconnais que des progrès en matière de pharmacovigilance ainsi que des initiatives de sécurité fructueuses ont été accomplis dans les limites et les contraintes de la Loi sur les aliments et drogues.
    De nombreux fabricants se sont empressés de corriger les problèmes en fonction des renseignements obtenus, mais ce n'est pas toujours le cas. Si nous sommes en mesure d'intervenir rapidement en réponse aux risques recensés, par exemple en exigeant un changement à une étiquette, en publiant de nouveaux renseignements en matière de sécurité ou en ordonnant le rappel d'un produit, nous estimons que la sécurité des patients sera accrue.
    Encore une fois, étant donné que nous travaillons auprès des consommateurs et des patients, nous savons qu'ils croient que Santé Canada est déjà investi des pouvoirs énoncés dans le projet de loi. Ce projet de loi nous aidera à être à la hauteur de leurs attentes.
    En résumé, les éléments de la Loi de Vanessa encouragent la collaboration et l'amélioration du système grâce à la déclaration des réactions indésirables graves aux médicaments. Le projet de loi harmonise les pouvoirs de Santé Canada avec le niveau de reddition de comptes et responsabilité auquel on s'attend.
    Les études et les consultations exhaustives qui ont mené à l'élaboration de ce projet de loi démontrent qu'il satisfait aux critères du caractère raisonnable. Nous sommes très reconnaissants d'avoir la possibilité d'encourager le comité à adopter le projet de loi C-17.
    Merci encore, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis impatiente de prendre part à votre discussion et de voir les prochaines étapes.

  (0930)  

    Madame Gibson, vous avez indiqué que vous deviez partir à 9 h 40 ou 9 h 45. Est-ce exact?
    Je vais probablement partir à 9 h 55.
    Je le précise, de sorte que les députés qui ont des questions à vous adresser le fassent avant que vous partiez. Je n'essaie toutefois pas de dire aux députés à qui ils doivent poser leurs questions.
    Madame Davis, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Vous êtes clairement des experts dans le domaine et nous vous sommes très reconnaissants de nous avoir présenté des exposés aussi précis aujourd'hui.
    Je pense que le projet de loi a trouvé des appuis dans tous les partis. Toutefois, je trouve déplorable que nous devions l'adopter à toute vapeur. Quelque 45 témoins nous ont demandé de comparaître. Jeudi dernier, nous avons recueilli les témoignages des représentants du gouvernement. Aujourd'hui, nous entendons vous cinq. Jeudi, nous allons entendre d'autres témoins, puis le lundi suivant, nous procéderons à l'étude article par article du projet de loi. Je crois qu'il est très important que nous aboutissions à une mesure législative qui se tient. Nous sommes partis d'une bonne proposition et nous devons l'améliorer le plus possible. Vous nous avez donné des suggestions très précises. Je trouve toutefois dommage que nous ne puissions pas donner la parole à tous ceux qui souhaitaient s'exprimer sur le projet de loi.
    Nous avons attendu ce projet de loi pendant six mois. Nous sommes maintenant à la dernière minute et nous devons l'examiner à toute vitesse. Je tiens à le préciser parce que je trouve cette situation désolante.
    J'aimerais maintenant revenir à vos témoignages afin de mettre certaines choses au clair.
    Janice, vous avez soulevé plusieurs questions et vous avez mentionné qu'il était important que l'évaluation de toutes les données des essais cliniques soit indépendante.
    Joel, vous avez également proposé que les compagnies pharmaceutiques paient pour des essais indépendants afin de séparer l'argent de ceux qui procèdent aux essais. Par conséquent, j'aimerais simplement savoir si vous parlez de la même chose ou si vous parlez de deux choses distinctes.
    Matthew, vous avez formulé des recommandations précises et très utiles. L'une d'elles n'a pas beaucoup retenu l'attention et il s'agit de la suppression — j'ai oublié le numéro de l'article — de la disposition qui traite des accords commerciaux pouvant annuler l'effet de ce projet de loi. J'aimerais que vous nous en parliez davantage. D'après ce que j'ai compris, si nous avons un projet de loi qui exige la transparence et un accord commercial qui protège les droits de propriété intellectuelle de certains médicaments, ce dernier aura préséance sur le projet de loi et il n'y aura pas de transparence. J'aimerais que vous nous donniez plus de précision là-dessus.
    Est-ce que l'un d'entre vous pourrait nous dire si nous devrions élargir la portée du projet de loi afin qu'il s'applique aux produits de santé naturels? Nous avons reçu de nombreux courriels de la part de gens qui considéraient que cela devrait être le cas. Nous en avons discuté avec la ministre et elle nous a indiqué que les produits de santé naturels présentaient beaucoup moins de risques. Étant donné la teneur du projet de loi, je pense que cela semble être une affirmation raisonnable. J'aimerais toutefois avoir votre avis, étant donné que vous êtes des experts dans le domaine de l'innocuité des médicaments. Selon vous, le projet de loi devrait-il aussi s'appliquer aux produits de santé naturels?
    Je sais que j'ai posé beaucoup de questions et j'aimerais que Joel, Matthew et Elaine y répondent.

  (0935)  

    Je pourrais commencer par discuter de l'évaluation indépendante.
    Tout d'abord, ce sont mes suggestions à propos de qui fait les essais, qui les analyse et qui détermine si on a mené les essais requis. Ensuite, pour ce qui est de l'analyse indépendante, sachez que malgré les meilleures intentions du monde, les gens font des erreurs lorsqu'ils analysent les essais. Santé Canada en fait. Les chercheurs indépendants en font. Comme on l'a dit, il faut une divulgation complète de tous les rapports des essais cliniques. Lorsqu'un médicament se trouve sur le marché, les gens peuvent aller consulter cette information et déterminer si on a pris les bonnes décisions. Ils peuvent peut-être analyser l'information différemment et souligner des choses qui n'ont pas été relevées lors de la première analyse.
    Je pense que ces deux choses sont complémentaires.
    Si vous me le permettez, je vais répondre. Je suis d'accord avec Joel; ils sont complémentaires. Dans mon exposé, je me suis concentrée principalement sur une évaluation indépendante effectuée par des gens qui ne participent pas à l'essai clinique ou par un organisme de réglementation gouvernementale. Mais, je suis tout à fait d'accord avec Joel.
    J'en parle depuis environ 10 ans. Le mieux serait que l'industrie, au Canada et partout ailleurs, prenne l'argent qu'elle investit dans les essais — argent qu'elle donne, en partie, aux chercheurs universitaires — et qu'elle le donne plutôt à une source indépendante, comme l'IRSC, qui pourrait ensuite décider à qui confier ces essais de façon à ce que les chercheurs cliniques ne mènent pas eux-mêmes les essais dans l'industrie.
    Si vous me le permettez, je vais répondre à votre question au sujet de la disposition sur les accords commerciaux.
    Selon le libellé actuel de la loi, il est question du pouvoir de prendre les règlements par rapport aux accords commerciaux. L'article commence par « sans que soient limités les pouvoirs conférés ailleurs dans le projet de loi », ou quelque chose du genre. Ainsi, il est possible de créer des règlements concernant ces ententes commerciales, sans que ceux-ci amoindrissent ou modifient les pouvoirs conférés ailleurs dans la loi.
    En vertu du projet de loi C-17, le libellé serait « Sans que soit limité le pouvoir conféré par les autres paragraphes du présent article ». Cela signifie que la mise en oeuvre de ces accords commerciaux ou des engagements relatifs à ces accords commerciaux sur la propriété intellectuelle pourrait modifier les pouvoirs conférés ailleurs dans la loi. C'est mon interprétation. C'est très subtil. Cela ne signifie pas nécessairement que ces pouvoirs seront modifiés, mais ils pourraient l'être au nom du commerce tout en respectant les articles connexes de l'ALENA et de l'Accord sur les ADPIC sur la propriété intellectuelle.
    J'espère que c'est plus clair. La première fois que j'ai lu le projet de loi, je ne l'ai pas remarqué. Le libellé est très subtil, mais je crois qu'il est important de le souligner, car il ouvre la porte à toutes sortes d'entraves aux responsabilités ou aux pouvoirs conférés par la loi concernant les rappels, notamment, et ce, au nom de la sécurité des patients ou de la transparence. En théorie, ce nouveau libellé pourrait permettre de telles entraves.

  (0940)  

    Je vais répondre à votre dernière question sur les produits de santé naturels.
    Pouvez-vous le faire en une vingtaine de secondes? Nous avons largement dépassé le temps prévu.
    Non, il ne faut pas y ajouter les produits de santé naturels.
    D'accord.
    C'est trop compliqué; on ne ferait que l'alourdir. Il n'y a aucune raison de les jumeler.
    C'est assez concis.
    Madame Adams, vous avez la parole.
    Je vous remercie tous de votre présence aujourd'hui.
    Dans le récent article de l'ACSM que vous avez tous corédigé, le sujet des essais cliniques est celui qui m'a le plus marquée; vous dites que nous devons améliorer la loi à cet égard.
    Pouvez-vous nous donner un aperçu des éléments les plus importants à modifier pour bien faire les choses?
    Je ne suis pas certain de bien comprendre la question. Est-ce que vous parlez des essais cliniques en général ou des renseignements relatifs aux essais cliniques qui devraient être communiqués à des fins de transparence?
    C'est exact. Quelles sont vos recommandations quant à l'élaboration d'un amendement à cette fin?
    Je vais peut-être m'en remettre à Joel et Janice pour certaines parties de la réponse, mais ce qui est très utile à mon avis, c'est qu'on a fait beaucoup de travail pour définir les éléments particuliers à communiquer. L'Organisation mondiale de la Santé a réalisé des travaux qui ont donné lieu à l'établissement d'un ensemble de renseignements de base à inclure: le nombre de patients, le nombre de personnes qui ont abandonné les essais, les divers résultats visés par les essais, la conception des essais. Il y a des listes prêtes à utiliser qui énoncent les principaux éléments d'information à intégrer à tous les systèmes d'enregistrement des essais cliniques.
    Joel et Janice peuvent décrire les renseignements plus en détail.
    Tout d'abord, je dirais que les rapports d'études cliniques devraient être rendus publics. Il s'agit de documents exhaustifs. Ils comptent parfois des milliers de pages. Ils ne seront pas lus par tout le monde, mais les personnes qui élaborent les lignes directrices à l'intention des praticiens, celles qui procèdent à des examens systématiques, les liront et les analyseront.
    Ce qu'il faut faire aussi, et ce n'est pas une mesure particulièrement radicale — GlaxoSmithKline s'y est déjà engagée —, c'est de rendre disponibles les rapports complets sur les essais réalisés, pour les chercheurs qualifiés. Ces chercheurs présenteront une demande à GlaxoSmithKline. L'entreprise mettra sur pied un comité indépendant chargé d'évaluer la légitimité des demandes et publiera tous les renseignements. Il s'agit des données brutes qui sont recueillies pour réaliser les essais sur les médicaments.
    Je crois que nous avons besoin de deux choses: d'abord, la publication sans équivoque des rapports d'études cliniques sans une demande officielle; ensuite, la publication des données brutes des essais cliniques par les entreprises, à la suite d'une demande valide des chercheurs.

  (0945)  

    Cela fait référence à un autre élément. Je crois que Santé Canada veut atteindre un équilibre entre l'information commerciale confidentielle et la sécurité des patients, qui est primordiale. À mon avis — et je crois qu'il s'agit de l'avis de tout le monde ici —, la sécurité des consommateurs et la sécurité des patients représentent une priorité si importante que devons y accorder plus d'importance qu'à la protection de l'information commerciale confidentielle.
    Comment peut-on atteindre cet équilibre? Est-ce que c'est votre suggestion pour y arriver?
    Oui. Je crois que pour les cliniciens et les prescripteurs, la sécurité des patients est d'une importance primordiale.
    Les fabricants ont des préoccupations légitimes quant aux renseignements sur la fabrication des médicaments, qui doivent être protégés; ce sont des secrets de fabrication. Bien sûr, nous ne devons pas communiquer de renseignements permettant d'identifier les patients, mais à part cela, la sécurité est plus importante que le secret commercial.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    Avez-vous d'autres suggestions quant à la façon d'atteindre cet équilibre ou à d'autres renseignements qui devraient être rendus publics?
    Je réitérerais simplement — et je croyais que vous parliez seulement de l'enregistrement — que la communication d'autres types de renseignements est également essentielle. On accorde maintenant beaucoup d'importance à la transparence, et si l'on se limite à l'enregistrement des essais cliniques, ce qui est le cas depuis des années dans d'autres pays, alors on risque une victoire à la Pyrrhus. La publication des résultats doit être appuyée par d'importantes mesures d'application. Il faut des rapports sur les essais cliniques. Il faut veiller à protéger les renseignements personnels des patients de même qu'à exclure les renseignements sur les processus de fabrication, comme l'a fait valoir Joel.
    Mais il faut rendre disponibles les renseignements tirés des participants aux études au sujet de l'innocuité et de l'efficacité des médicaments, et ces renseignements seront publiés en grande partie dans les rapports d'études cliniques.
    Enfin, nous avons besoin des renseignements sur l'interprétation des données probantes par Santé Canada. On parle de probabilités et d'une grande part d'incertitude. Les organismes de réglementation tirent des conclusions différentes au sujet d'un même médicament, pour les mêmes indications. C'est très complexe, et les organismes de réglementation peuvent apprendre les uns des autres, de même que par le dialogue avec des organismes indépendants comme la Collaboration Cochrane, ce qui peut grandement améliorer la qualité de leur travail.
    Ces trois éléments — la communication des résultats, les rapports d'études cliniques et les décisions des organismes de réglementation et les motifs connexes — doivent s'ajouter à l'enregistrement des essais cliniques.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Scarpaleggia, vous avez la parole.
    Je remplace la porte-parole libérale en matière de santé aujourd'hui; vous m'excuserez si mes questions vous semblent quelque peu rudimentaires.
    À l'heure actuelle, l'enregistrement des essais cliniques n'est pas requis. Est-ce que cela signifie qu'une société qui procède à des essais cliniques doit en informer le gouvernement d'une quelconque façon? Je ne suis pas certain de bien comprendre.
    Les sites d'essais cliniques doivent être approuvés par le gouvernement, mais les sociétés ne sont pas tenues de respecter les exigences en matière d'enregistrement. Cela dépend du site, du lieu des essais au Canada.
    Les chercheurs financés par le secteur public doivent respecter les exigences en matière d'enregistrement en vertu de l'Énoncé de politique des trois Conseils, mais celui-ci ne vise pas les essais financés par le secteur privé, les organismes de recherche privés, qui sont assez communs au Canada.
    Je vois.
    Où se situe le Canada par rapport aux autres pays? Si nous resserrons le projet de loi, est-ce que nous serons un chef de file? J'essaie seulement de voir où nous nous situons.
    Je ne sais pas qui veut répondre à cette question.

  (0950)  

    Si l'on fait la comparaison avec les États-Unis et l'Union européenne, nous arrivons loin derrière, au troisième rang, en matière de transparence. L'adoption du projet de loi C-17, avec les amendements proposés, permettra à mon avis au Canada de surclasser les États-Unis et l'Union européenne. Toutefois, à l'heure actuelle, nous ne sommes pas très bien positionnés en ce qui a trait à la transparence, à la communication des renseignements.
    Si le projet de loi C-17 est adopté sans les importants amendements qui ont été proposés, est-ce que le Canada accusera toujours un retard? En fait, je me demande si le projet de loi n'est pas seulement un placebo, s'il va nous permettre de réaliser des progrès. Est-ce que nous serions toujours derrière les États-Unis et l'Europe en ce qui a trait à la transparence?
    Le projet de loi représente un pas dans la bonne direction, mais à l'heure actuelle, l'Union européenne communique les rapports sur les essais cliniques. Le projet de loi ne l'exige pas, alors je ne crois pas...
    Je vous remercie de votre réponse.
    Je me demande pourquoi le projet de loi n'est pas plus solide; ce sont les mêmes sociétés au Canada. Elles tirent profit du même cadre en matière de droit commercial et ont les mêmes préoccupations relatives à la propriété intellectuelle. Je ne comprends pas pourquoi nous n'avons pas uniformisé les règles du jeu, puisque nous avons affaire aux mêmes joueurs. Mais bon, ce sera au gouvernement de répondre à cette question.
    Monsieur Herder, d'après vos commentaires, dois-je comprendre que les accords commerciaux ne nuisent pas à l'adoption des amendements que vous et d'autres avez proposés, qu'il faut seulement utiliser la bonne formulation pour que les amendements ne fassent pas l'objet d'une contestation commerciale? Ou est-ce que les accords commerciaux et la sécurité des patients représentent un problème endémique?
    C'est mon point de vue.
    En vertu des accords commerciaux, le Canada est tenu de prendre des mesures pour protéger les données, en gros, ce qui comprend les données relatives à l'innocuité et à l'efficacité des médicaments. Or, il y a deux exceptions à cet engagement, notamment lorsque ces données sont nécessaires pour protéger le public; il s'agit donc d'une exception destinée à protéger l'intérêt du public, et je dirais qu'il est essentiel d'avoir accès à cette information. Certains contesteraient cela. J'ai donc tenté de miser sur l'autre exception, voulant que le gouvernement ait mis en place des mesures pour protéger les données contre les utilisations commerciales injustes.
    Ce qui préoccupe le plus les entreprises lorsqu'on parle de transparence, c'est la possibilité de laisser le champ libre aux concurrents, surtout les fabricants de médicaments génériques. Par l'entremise d'un règlement en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, le Canada a établi des périodes d'exclusivité des données, qui diffèrent des brevets et d'autres types de protection du marché offerts aux premières entreprises. Pour les drogues innovantes, on a établi une période de huit ans au cours de laquelle le ministre de la Santé ne peut délivrer un avis de conformité à un concurrent pour un même médicament en vertu de la Loi sur les aliments et drogues. Comme nous avons protégé les données contre une utilisation commerciale injuste, je crois que le gouvernement a la possibilité d'accroître la transparence de ces renseignements tout en respectant nos obligations commerciales.
    J'aimerais simplement commenter l'une de vos questions.
    La Loi sur les aliments et drogues n'a pas été modifiée depuis 50 ans, je crois. Vous nous demandez si nous accusons un retard? Santé Canada accuse un léger retard par rapport aux autres pays en ce qui a trait aux autorités.
    D'après ce que je comprends, on a proposé certains projets de loi plus complexes: le projet de loi  C-51, le projet de loi C-52. Ils étaient exhaustifs et complexes, et ils n'ont pas été adoptés. Ce projet de loi est plus simple et va droit au but, dans l'objectif d'accroître la sécurité au Canada.
    Le Canada est déjà en avance sur d'autres pays à certains égards. Il y a seulement une poignée de pays à l'échelle mondiale qui publient les rapports sur les effets indésirables des médicaments en ligne, à l'intention du public et des praticiens. À ma connaissance, il y a deux autres pays qui le font: les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Nous avons pris des mesures pour démontrer notre leadership à l'échelle internationale. Les États-Unis publient les renseignements sur les incidents liés aux instruments médicaux en ligne, mais pas les rapports sur les effets indésirables des médicaments.
    Je tenais seulement à vous parler de la position du Canada à l'échelle mondiale.

  (0955)  

    Combien de temps me reste-t-il? Il ne m'en reste plus?
    Malheureusement, votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Young.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse au Dr Joel Lexchin. Permettez-moi d'abord de faire une brève observation. Nous avons appris que vous êtes l'auteur ou le coauteur d'environ 140 articles évalués par des pairs et que vous travaillez sur ce dossier depuis 30 ans. Je sais que vous êtes allé à contre-courant durant une bonne partie de votre carrière, surtout au début lorsque vous étiez la voix qui prêchait dans le désert pour ce qui est de l'innocuité des médicaments. Je tenais donc à vous remercier et à vous féliciter publiquement du travail avant-gardiste que vous menez dans ce domaine depuis tant d'années.
    Docteur Lexchin, pourriez-vous expliquer en quoi la transparence des essais cliniques est importante pour les patients? Autrement dit, quels en seront les avantages nets pour les patients et comment cela permettra-t-il d'améliorer leur santé et de réduire les réactions indésirables aux médicaments?
    Tout d'abord, monsieur Young, je vous remercie énormément du compliment. J'aimerais vous rendre la pareille, sachant que vous avez dû livrer une longue et dure bataille avant de pouvoir présenter ce projet de loi devant la Chambre des communes et, malheureusement, c'était à la suite de la tragédie concernant votre fille.
    Permettez-moi de décrire brièvement, en guise d'exemple, comment une transparence accrue permettrait d'améliorer la sécurité des patients. Nous savons tous que les antidépresseurs — plus précisément, les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine, comme le Paxil — ont été largement utilisés en pédiatrie pour un usage hors indication. C'est souvent parce que les gens... Les médecins sont désespérés, et il n'y a pas assez de pédopsychiatres. Il faut attendre un an avant qu'un enfant gravement perturbé puisse suivre une thérapie. Les médecins ont recouru à ces médicaments parce qu'ils ont présumé que si ces produits aident les adultes, ils pourraient aussi aider les enfants.
    Quand des chercheurs se sont mis à examiner les données publiées sur les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine en général, ils ont tiré la conclusion que ces médicaments procurent certains bienfaits aux enfants et qu'ils ne posent pas de problèmes graves sur le plan de l'innocuité.
    Cependant, quand ces mêmes chercheurs ont réussi à obtenir les résultats non publiés des essais menés partout aux États-Unis, ils en sont arrivés à une tout autre conclusion. Ils ont conclu qu'il n'y avait aucune preuve de bienfait pour les enfants et qu'il y avait un risque de préjudice majeur.
    Cet exemple montre pourquoi l'idée de se fier uniquement aux données publiées pose problème. C'est l'information non publiée... Selon certaines estimations, la moitié des essais cliniques ne sont jamais publiés. Les médecins ont besoin de ce type de données pour être en mesure de prendre des décisions éclairées, pour offrir aux patients le meilleur traitement et pour protéger les patients lorsqu'ils utilisent les médicaments.
     C'est un excellent exemple.
    Pouvez-vous parler des catastrophes liées à l'usage de médicaments? Selon vous, si le projet de loi C-17 avait eu force de loi pendant les années 1990 et que les données cliniques étaient publiées durant cette période, combien ou quels types de catastrophes aurait-on pu éviter?
    Il y a un certain nombre de catastrophes éventuelles que nous aurions pu éviter. Mentionnons d'abord deux médicaments utilisés pour traiter l'arythmie cardiaque. Ces médicaments étaient couramment prescrits par les médecins pour traiter, non pas des cas d'arythmie grave, mais plutôt des cas d'arythmie très mineure. Lorsqu'on a finalement réalisé des essais pour examiner cette question, on s'est rendu compte que ces médicaments tuaient plus de gens qu'ils n'en guérissaient.
    Prenons ensuite l'exemple de Vioxx, même si cela ne s'est pas passé durant les années 1990. Ce médicament a été approuvé au Canada en 1999. En 2003, c'était le 10e médicament le plus prescrit au pays sur le plan du nombre d'ordonnances. Toutefois, en septembre 2004, il a été retiré du marché à cause des risques cardiaques qui y étaient associés.
    Enfin, il y a la question des traitements hormonaux substitutifs. Là encore, ces médicaments étaient largement utilisés par les femmes ménopausées. On a mené un essai aux États-Unis, financé à même les fonds publics, parce que les sociétés n'étaient pas disposées à le financer elles-mêmes... Quand les résultats de l'essai ont été publiés, on a découvert que l'hormonothérapie substitutive permettait effectivement de réduire les risques de fractures, mais qu'elle augmentait aussi le nombre de problèmes cardiaques, le nombre d'accidents vasculaires cérébraux et le nombre de cas de cancer du sein.
    Tous ces problèmes auraient pu être évités si on avait mieux divulgué l'information.

  (1000)  

    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Herder.
    Monsieur, un des gros problèmes liés aux recherches cliniques, c'est la tactique des sociétés pharmaceutiques qui consiste à demander au chercheur, dès le début d'un essai clinique, de signer un contrat pour essentiellement imposer le bâillon. Aux termes de ce contrat, si les sociétés décident de mettre fin à l'essai, le chercheur n'aura pas le droit d'en reparler ni de l'exposer au grand jour. Pourquoi? Parce que bon nombre de leurs essais montreront que leur médicament ne vaut pas plus qu'un placebo ou que leur nouveau médicament cause du tort aux patients; les sociétés pharmaceutiques veulent dissimuler ce fait.
    Vos recommandations visant à améliorer la transparence aborderaient-elles ce problème, c'est-à-dire les cas où l'essai est enregistré, puis interrompu? Réclamez-vous ou demandez-vous que même les preuves partielles découlant de l'essai ou les données cliniques partielles soient publiées, elles aussi?
    C'est une excellente question, qui est très concrète. Selon moi, les amendements que je propose permettraient certainement de tenir compte des résultats négatifs, mais encore faut-il définir en quoi consiste un résultat négatif, ce qui mérite une réflexion approfondie. J'essaie d'englober tous les résultats, mais si on n'a pas de résultat proprement dit parce que la société pharmaceutique a mis un terme à l'essai, alors à partir de quel moment la déclaration devient-elle obligatoire?
    Je pense qu'il faudrait probablement un certain délai avant de déclarer les résultats ou toutes les mesures prises avant l'arrêt de l'essai. Selon moi, les exemples vraiment inquiétants seraient les cas de réactions indésirables, même dans le cadre d'une étude. Si la société pharmaceutique met un terme à une étude, non seulement pour des raisons commerciales ou stratégiques, mais parce qu'il y a de très graves problèmes d'innocuité, on devrait alors déclarer ce fait.
    Je pense que c'est possible. J'ignore si le libellé exact que j'ai utilisé tient compte de cet aspect, mais j'espère que ce sera défini par la réglementation.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Si vous avez besoin de traduction, je vous recommande de mettre vos écouteurs.
    Si vous êtes prêt, monsieur Morin, vous pouvez y aller.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Est-ce que vous pouvez tous m'entendre en français?

[Traduction]

    Je crains que non.
    D'accord. Alors pouvons-nous...?
    Essayez de nouveau.

[Français]

    M'entendez-vous en anglais quand vous utilisez les écouteurs?
    Monsieur Lexchin, m'entendez-vous en anglais?

[Traduction]

    Je regrette, mais je n'ai pas encore entendu l'interprète.
    D'accord. Nous allons prendre quelques instants pour voir de quoi il s'agit.
    Je pense que M. Morin était en train de dire que, selon lui, les Leafs vont remporter la coupe Stanley l'année prochaine, mais je n'en suis pas tout à fait sûr. Je n'ai pas encore parfaitement assimilé mes leçons de français.

  (1005)  

    Je conteste la présidence.
    Je suis pas mal certain que c'est ce qu'il a dit.
    Madame Graham, êtes-vous toujours là?
    Oui.
    Avez-vous pu entendre la traduction?
    Non. Je n'ai pas entendu le français non plus.
    D'accord, nous allons demander à nos techniciens de régler le problème.
    Monsieur Wilks, si vous êtes prêt, vous pouvez y aller, puis nous reviendrons à M. Morin, si cela vous convient.
    Merci, monsieur Morin.
    Je voulais parler de quelques points et, malheureusement, un des témoins est déjà parti. On a soulevé, entre autres, la question des produits de santé naturels, lesquels ne sont pas inclus dans le projet de loi  C-17 parce qu'ils présentent un faible risque et parce qu'ils sont déjà bien réglementés.
    Madame Hyland, souscrivez-vous à cette approche, étant donné le faible risque inhérent aux produits de santé naturels? Je pourrais peut-être demander l'avis de M. Herder et du Dr Lexchin, puis celui de Janice Graham, qui est en ligne également.
    Commençons par Mme Hyland.
    Je doute que les risques soient moins importants. Nous estimons que l'inclusion des produits de santé naturels dans les projets de loi complexes les empêche d'aller de l'avant et d'être adoptés. Leur ajout au projet de loi pourrait, en fait, ralentir l'excellent travail qui a déjà commencé. Alors, peut-être que la question des produits de santé naturels doit effectivement être traitée, mais dans l'avenir... pour qu'on puisse adopter le projet de loi C-17 et faire ce premier pas. Bref, je pense qu'il faudra examiner cet aspect, mais je ne suis pas certaine que nous ayons besoin de l'inclure dans le projet de loi C-17 à ce stade-ci.
    Est-ce que cela vous aide?
    Oui, merci.
    Monsieur Herder.
    Je suis du même avis, car je ne suis pas convaincu que les produits de santé naturels comportent foncièrement moins de risques. C'est pourquoi, selon moi, ils devraient être réglementés de façon très rigoureuse. À certains égards, il s'agit surtout d'une question stratégique, comme ma collègue l'a insinué, même si je ne suis pas sûr qu'il soit bien compliqué de corriger cette partie du projet de loi. Si j'examine rapidement le projet de loi, je constate que les produits de santé naturels sont exclus de la définition de « produit thérapeutique ». Alors, si on supprimait tout simplement ce libellé, advenant que le comité soit motivé à soumettre les produits de santé naturels à une norme plus rigoureuse, les nouvelles mesures prévues dans le projet de loi pourraient peut-être s'appliquer aux produits de santé naturels.
    Docteur Lexchin.
    Je pense que nous avons certainement besoin de plus d'informations sur les produits de santé naturels. Je travaille dans un centre d'urgence. Quand les gens viennent et qu'ils disent prendre divers produits de santé naturels, je n'ai vraiment aucune idée, d'abord, des risques inhérents à ces produits et, ensuite, de l'interaction entre ces produits et n'importe quel médicament d'ordonnance que ces gens pourraient prendre.
    Je ne suis pas le seul à penser ainsi. Je crois que la plupart de mes collègues sont dans la même situation. Nous avons assurément besoin de plus d'informations sur l'innocuité de ces produits. Mais, à mon avis, une des raisons pour lesquelles le projet de loi C-51 est mort au Feuilleton, c'est l'opposition de la collectivité des produits de santé naturels. Je n'aimerais pas que le projet de loi C-17 subisse le même sort à cause de ce genre d'opposition. Je pense que nous devons aller de l'avant et instaurer une meilleure réglementation sur les produits de santé naturels. Cependant, je suis d'accord pour dire que cela peut se faire plus tard.

  (1010)  

    Merci.
    Madame Graham.
    Merci. C'est une très bonne question, monsieur Wilks. Merci de la poser.
    Je faisais de la recherche à Santé Canada lorsque la Direction des produits de santé naturels a été mise sur pied. À cette époque, le Canada faisait figure de chef de file mondial — position qu'il occupe d'ailleurs encore aujourd'hui — pour avoir créé une telle direction. Malheureusement, et je vais le dire ici, la direction a fini par céder à la pression de l'industrie — et je parle de l'industrie des produits de santé naturels —, parce qu'elle a éliminé les questions d'efficacité dans les activités d'approbation. Alors, contrairement aux produits biologiques et pharmaceutiques, les PSN, ou produits de santé naturels, n'ont pas besoin d'un sceau d'approbation attestant leur efficacité.
    Les gens s'inquiètent surtout de l'innocuité, et je partage la préoccupation de mes collègues, à savoir que de nombreux produits de santé naturels ne sont pas sans danger. C'est quelque chose qui est reconnu partout dans le monde.
    J'étais en Afrique de l'Ouest le mois passé, et j'ai vu un petit garçon se tordre sur le sol après s'être fait enlever un terrible abcès sans analgésiques, parce que l'infirmière dans cette petite clinique sans électricité s'était rendu compte que ces enfants venaient et... Au Canada, les gens commencent par ouvrir leur armoire à pharmacie ou aller voir l'herboriste du coin pour acheter le nécessaire. Quand ils finissent par se rendre à l'urgence en dernier recours, le personnel d'urgence ne peut pas les traiter, parce qu'ils ignorent les produits qu'ils utilisent.
    À mon avis, la question des produits de santé naturels pourrait très facilement détourner notre attention de l'objectif commun, c'est-à-dire celui de faire adopter la version amendée du projet de loi C-17. J'aimerais donc laisser de côté cette question pour l'instant, parce que nous tenons à ce que le projet de loi C-17 soit amendé et approuvé.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Wilks.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Mme Gibson a brièvement évoqué les produits de santé naturels, et je pouvais voir qu'elle voulait en dire plus. Pourrions-nous demander au greffier d'écrire à Mme Gibson pour voir si elle voudrait bien soumettre d'autres observations, en plus de celles qu'elle a formulées officiellement, sur les produits de santé naturels et le projet de loi  C-17?
    Nous pouvons certainement le lui demander, et nous veillerons à ce que l'information soit acheminée à l'analyste aussi.
    D'accord, monsieur Morin.
    Nous allons retenter le coup, mesdames et messieurs.
    Docteur Lexchin et madame Graham, pourriez-vous nous dire si vous entendez l'anglais lorsque M. Morin commencera son intervention?

[Français]

    Pouvez-vous maintenant m'entendre en anglais quand vous utilisez vos écouteurs?

[Traduction]

    Oui.
    M. Morin n'a dit que quelques mots. Je n'ai pas entendu l'interprétation en anglais. Je pourrai savoir s'il y a des problèmes avec l'interprétation s'il intervient un peu plus longuement.

[Français]

    Il n'y a pas de problème. Si vous le désirez, je peux parler en français plus longtemps.
    Entendez-vous maintenant l'interprétation simultanée?

[Traduction]

    C'est beau. Je peux maintenant entendre l'interprétation anglaise. Merci.

[Français]

    J'en suis très heureux.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer dans ma langue maternelle.
    Ma première question s'adresse à M. Lexchin et à M. Herder. D'autres témoins peuvent aussi formuler des commentaires à ce sujet.
    Plus tôt, on a parlé d'une pilule contraceptive qui, selon l'ancienne définition qui n'est pas dans le projet de loi C-17, faisait en sorte qu'une grossesse était considérée comme la conséquence d'un choix de vie. Donc, selon la nouvelle définition qu'on retrouve dans le projet de loi que nous étudions, y a-t-il d'autres exemples concrets de médicaments qui, justement, ont été mal classifiés?
    Autrement dit, la nouvelle définition va-t-elle pouvoir régler d'autres situations qu'on aurait vues au Canada, outre la pilule contraceptive qui a été donnée en exemple précédemment?

  (1015)  

[Traduction]

    Je peux peut-être prendre la parole en premier.
    J'estime que l'argument que Mme Gibson faisait valoir s'articulait autour de l'interprétation restrictive des dommages ou des préjudices. Elle avançait que sans indications claires, les dommages ou les préjudices comprenaient des produits qui avaient été mal étiquetés ou mal emballés, ce qui ne fonctionnerait pas, comme on en a été témoin avec un contraceptif oral, que l'on n'inclurait peut-être pas dans la définition de « dommage ».
    Compte tenu des définitions qui se trouvent dans le projet de loi C-17 et le libellé qu'elle a proposé d'ajouter pour tenir compte des cas où des produits sont mal étiquetés ou mal emballés, le projet de loi engloberait d'autres éléments de même que les réactions indésirables aux médicaments — les types de dommages plus traditionnels.
    Je ne suis pas certain si j'ai répondu directement à votre question, mais je pense que nous en sommes là, et c'est ce qui a été proposé.

[Français]

    Dans l'histoire du Canada, connaissez-vous d'autres cas concrets où il y a eu ce genre de problème, ou est-ce seulement pour un médicament qu'une décision de ce genre a été prise?

[Traduction]

    Je pense qu'il y a eu d'autres exemples où l'organisme de réglementation n'est pas intervenu rapidement en raison d'un conflit ou d'une discussion quant à savoir si les dommages sont clairement démontrés. Diane-35 était un autre médicament couramment utilisé pour le traitement de l'acné qui a retenu une certaine attention au cours de la dernière année. Le retard qui inquiétait vraiment les gens découlait du fait qu'on n'avait pas le pouvoir d'émettre un avis de rappel sans la permission du fabricant. C'est ce que prévoit le projet de loi.
    C'est un exemple. Je ne sais pas si le Dr Lexchin peut en fournir d'autres.
    Je ne connais pas d'exemples concrets, mais l'un de nos problèmes, c'est qu'il est très difficile d'obtenir des renseignements à partir des publications de Santé Canada portant sur les médicaments qu'il a retirés du marché pour des raisons de sécurité. Si vous voulez savoir quels médicaments ou le nombre de médicaments que Santé Canada a retirés du marché en raison de problèmes d'innocuité au cours des 20 dernières années, vous devez fouiller dans 20 années de rapports de Santé Canada pour dresser une liste de ces médicaments. Santé Canada ne tient pas un registre de ce genre.

[Français]

    Merci.
    Docteur Herder, vous avez parlé plus tôt des études de post-commercialisation.
    Pour le Canada, quelle est l'importance de serrer la vis aux compagnies pharmaceutiques en les obligeant à rendre publiques d'autres études une fois que le médicament est arrivé sur le marché?

[Traduction]

    Je pense qu'il est essentiel de prendre certaines mesures. L'une d'elles consiste à faire en sorte que toute condition à respecter pour obtenir une licence de commercialisation et toute condition visant à continuer de réaliser des études post-commercialisation soient rendues publiques pour que d'autres demandent des comptes à l'entreprise et à l'organisme de réglementation pour assurer un suivi au sujet de ces conditions particulières.
    Ensuite, si ces études sont effectuées, mais ne sont pas nécessairement publiées, ces renseignements devraient être communiqués à Santé Canada. Si Santé Canada a la capacité de divulguer ces renseignements parce qu'il prend la décision de remplacer une licence conditionnelle par une licence sans conditions supplémentaires parce que l'étude post-commercialisation a été réalisée, il faudrait que cette information soit communiquée à ce moment-là. En recommandant plus précisément de s'assurer que les décisions de Santé Canada sont transparentes, j'espère que cela permettra à l'organisme de réglementation d'annoncer publiquement toute étude post-commercialisation qui est effectuée. Même si la compagnie ne prend pas elle-même l'initiative d'en faire l'annonce, l'organisme de réglementation pourrait le faire en son nom.
    Merci.
    Monsieur Gravelle, vous êtes le prochain intervenant.
    Merci, monsieur le président.
    Pourriez-vous me prévenir lorsqu'il ne me restera qu'une minute, s'il vous plaît?
    Docteur Lexchin, je ne suis pas certain si je vous ai bien compris, alors je vous demanderais de répéter vos remarques. Je pense que vous avez dit que Santé Canada permet aux Canadiens de prendre des médicaments au sujet desquels les professionnels de la santé ne savent rien. Est-ce bien ce que vous avez dit?

  (1020)  

    Non. Pour tout nouveau médicament d'ordonnance ou médicament en vente libre qui arrive sur le marché, Santé Canada doit évaluer les renseignements que les entreprises soumettent à son sujet.
    Le problème, c'est que les essais cliniques qui sont effectués avant qu'un médicament atteigne le marché sont assez restreints. Ils sont généralement réalisés sur de courtes périodes. Ils sont ordinairement réalisés auprès de groupes très limités, généralement des hommes et des femmes d'âge moyen qui ne prennent pas d'autres médicaments ou qui n'ont aucun problème de santé qui pourrait empêcher de déterminer si le médicament fonctionne ou pas.
    Donc, lorsque ces médicaments arrivent sur le marché, nous en savons très peu à leur sujet, surtout en ce qui concerne leur innocuité et leur efficacité pour un vaste éventail de personnes. Par exemple, si le médicament a été uniquement étudié auprès de personnes d'âge moyen, que fera-t-il pour la grand-mère de 85 ans qui prend déjà cinq ou six autres médicaments, ou pour votre fille de huit ans? Nous l'ignorons.
    C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons absolument besoin de réaliser ces études post-commercialisation afin de recueillir ces renseignements additionnels qui nous permettront de nous assurer que les médicaments sont utilisés de la façon la plus efficace et sûre possible.
    Merci.
    Vous avez également parlé des essais financés par des compagnies pharmaceutiques par opposition à ceux qui sont financés par des entreprises indépendantes. Donc, qu'est-ce qui est préférable pour les Canadiens, les essais qui sont financés par les compagnies pharmaceutiques ou ceux qui sont financés par des entreprises indépendantes?
    Eh bien, les fonds pour réaliser les essais proviennent principalement des compagnies pharmaceutiques à l'heure actuelle. Il en coûte environ 150 millions de dollars pour effectuer un essai. La dernière fois que j'ai vérifié, je pense que le budget des IRSC s'élevait à environ 900 millions de dollars, et c'était pour tous les travaux de recherche que les compagnies financent, et non pas seulement pour les essais de médicaments.
    Donc, les compagnies pharmaceutiques disposent des fonds nécessaires pour réaliser les essais, mais elles sont également aux prises avec un dilemme. D'un côté, elles ont le devoir envers leurs actionnaires de s'assurer que l'entreprise prend de la valeur et, d'un autre côté, elles ont le devoir envers les médecins et la population de veiller à ce que toute l'information soit communiquée avec exactitude.
    Parfois, à la lumière de ce qu'on a constaté aux États-Unis et des poursuites intentées par le département de la Justice contre des entreprises, ces conflits sont résolus pour garder l'information secrète. Les compagnies pharmaceutiques peuvent continuer de financer les essais. Mais comme je l'ai dit tout à l'heure, ce qu'il faut, c'est que le financement des essais et la sélection de celui qui élabore, mène et analyse les essais soient deux choses distinctes. C'est donc pourquoi je propose que les compagnies pharmaceutiques remettent l'argent à un organisme indépendant, comme les IRSC, qui utiliseraient un processus évalué par des pairs pour déterminer qui devrait réaliser les essais.
    Merci beaucoup.
    Puisqu'il ne me reste qu'une minute, j'aimerais demander à tous les témoins ici présents aujourd'hui, en commençant avec Mme Hyland, s'ils croient que les amendements proposés amélioreraient ce projet de loi.
    Je crois que...
    N'oubliez pas qu'il ne me reste qu'une minute.
    D'accord, m'accordez-vous quelques instants pour que je puisse réfléchir à ce que je vais dire? Je veux vous donner une réponse éclairée.
    Absolument. Le projet de loi C-17 est solide dans sa forme actuelle. Il pourrait l'être encore plus si les amendements sont apportés.
    Docteur Lexchin.
    Je suis d'accord avec Matthew Herder.
    Madame Graham.
    Absolument.
    Pour revenir à vous...
    Je conviens que nous pouvons faire plus, et je pense que nous devons peut-être le faire par étapes. Ce qui me préoccupe, c'est que les amendements pourraient retarder la mise en vigueur de ces pouvoirs essentiels. C'est ma seule inquiétude. Je pense qu'il y a toujours place à amélioration. Il y aura constamment des améliorations et des modifications à apporter à la Loi sur les aliments et drogues. Je ne suis toutefois pas certaine que ce serait une bonne chose de retarder la mise en oeuvre d'éléments clés du projet de loi C-17.
    Je suis ravi que les témoins s'entendent pour dire que c'est un projet de loi très solide.

  (1025)  

    Très bien.
    Monsieur Lunney.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    J'aimerais simplement faire une observation, puisque nous en sommes... J'ai quelques questions pour nos témoins.
    La raison pour laquelle les produits de santé naturels ont été retirés du projet de loi, c'est qu'ils sont fondamentalement différents des médicaments d'ordonnance car ce sont des vitamines. Ce sont des minéraux, des molécules naturelles. Par conséquent, les professionnels de la santé les qualifieront de produits orthomoléculaires parce qu'ils sont dans leur état naturel. Tout produit dans le régime de médicament qui est breveté ne peut être utilisé dans son état naturel. Donc, les fabricants doivent trouver un moyen de changer la molécule en ajoutant du méthylate, de l'hydrogène, du carboxylate, ou de la transformer de manière à ce qu'elle soit comme l'originale mais différente, afin de breveter le processus. Cette différence fondamentale change beaucoup la donne pour ce qui est des profits associés à un produit breveté, mais augmente également le risque. Quoi qu'il en soit, je ne fais que signaler que c'est l'une des raisons pour lesquelles ces produits sont dans un régime de réglementation distinct, qui est l'un des régimes de réglementation les plus rigoureux au monde à l'heure actuelle.
    Docteur Lexchin, vous avez évoqué quelques exemples qui sont utilisés. Les inhibiteurs spécifiques du recaptage de la sérotonine, les antidépresseurs, sont souvent utilisés pour un usage non conforme à l'étiquetage pour les adolescents et les enfants. Les données publiées et non publiées, lorsqu'on les compare, fournissent une perspective différente. Vous avez mentionné le THS à titre d'exemple et dit qu'on a appris, je pense, qu'il augmente de 40 % les risques de myocardiopathie et de cancer de l'ovaire et du sein. Vous pouvez me corriger si j'ai tort. Il me semble que c'était une augmentation des risques d'environ 40 %. Mais êtes-vous au courant, docteur Lexchin, des études qui établissent un lien entre les médicaments contre l'acidité, et plus particulièrement les inhibiteurs de la pompe à protons, et la bactérie C. difficile?
    J'ai lu un peu à ce sujet, mais je ne serais pas en mesure de commenter...
    Permettez-moi d'être plus précis lorsque je dis que des articles publiés — et c'est sur le site Web de la FDA — font état d'une augmentation des risques de 40 à 275 %, selon la dose, la durée de la prise du médicament et la dose-effet, car plus on prend un médicament pendant longtemps, plus les risques sont élevés, et plus la dose est élevée, plus les risques sont accrus de contracter une infection pouvant mener à une hospitalisation de trois semaines, à des traitements antibiotiques, à une chirurgie intestinale, voire au décès.
    Selon vous, une hausse de 40 à 275 % est-elle considérable sur le plan clinique?
    Oui, absolument.
    Bien. Merci de votre intervention.
    Eh bien, nous avons un Programme canadien de surveillance des infections nosocomiales et 58 hôpitaux universitaires au Canada. Ils surveillent cette situation depuis plus de 10 ans, mais ils ne colligeaient apparemment pas de données sur les médicaments que les gens prenaient au moment de leur hospitalisation ou lorsqu'ils ont commencé à souffrir de diarrhée associée aux antibiotiques ou de MACD. Estimez-vous que c'est une occasion ratée?
    Oui. Je pense qu'il nous faut de meilleures sources de données que celles que nous avons actuellement.
    Par exemple, dans la majorité des provinces, il n'y a pas de guichet unique où l'on peut savoir si des ordonnances ont été délivrées. La Colombie-Britannique est une exception. Son programme PharmaNet consigne toutes les ordonnances qui sont rédigées, peu importe qui paie pour le médicament. Ce type de renseignements, combinés aux bases de données des hôpitaux et des cliniques externes, pourraient certainement contribuer à fournir plus d'information sur les médicaments qui sont utilisés et leurs effets néfastes éventuels.
    Merci de cette observation.
    Je vous remercie des remarques que vous avez faites au sujet de la Collaboration Cochrane et de nous avoir fait part de ce que l'initiative a déterminé concernant le risque accru. Elle a du moins établi que lorsque les études étaient uniquement financées par les compagnies pharmaceutiques, il était plus probable que les conclusions soient plus positives.
    Je voulais vous poser une question, monsieur, et aux autres témoins, au sujet d'un point qu'Elaine Gibson a soulevé. Je suis désolé qu'elle ne soit pas ici pour l'expliquer. C'était la question d'étendre l'application à tous les détenteurs de produits thérapeutiques, plutôt que seulement aux vendeurs. S'agit-il d'un problème?
    Je vais adresser ma question à M. Herder. Est-ce quelque chose que vous surveillez? D'après vous, devrions-nous assurer un suivi à cet égard?

  (1030)  

    Oui.
    C'était dans l'article que Joel, Janice, Elaine, Barbara Mintzes et moi-même avons publié. C'était l'un des points qui, à notre avis, devaient être traités dans le projet de loi, simplement pour faire clairement savoir que d'autres intervenants du monde des affaires dans la chaîne de production et la chaîne de distribution qui ont des produits pharmaceutiques, s'ils les ont en mains et qu'un avis de rappel est émis, alors le rappel s'appliquera à eux également.
    Monsieur Lunney, votre temps est écoulé. Merci.
    Madame Davies.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais revenir à un des points que vous avez soulevés, Matthew. Vous avez abordé quatre points au sujet de la transparence, de l'enregistrement de tous les essais cliniques, de la nécessité de rendre obligatoire la divulgation de toutes les études et de tous les rapports, et de la mise en application de sanctions en cas de non-respect. Le troisième concernait la présentation de rapports par Santé Canada sur toutes les décisions et les motifs qui les sous-tendent.
    Je crois que nous nous sommes penchés sur la question et que nous avons dit que le fardeau des sociétés pharmaceutiques est considérable et ainsi de suite, ce qui est évidemment essentiel. À vrai dire, plus nous en apprenons sur cet enjeu, plus il est inquiétant de constater à quel point nous en savons peu dans la sphère publique sur ce qui passe. Espérons que ce projet de loi sera en mesure de remédier au problème.
    Pour ce qui est du rôle joué par Santé Canada, nous n'avons pas mis beaucoup l'accent là-dessus. Que se passe-t-il maintenant? Si votre amendement ou votre suggestion est intégré au projet de loi, de quelle façon pensez-vous que cela accélérera la communication de l'information? Vous savez peut-être que le vérificateur général a publié, en 2011, un rapport disant qu'il faudrait attendre jusqu'à deux ans, même sous le régime actuel, avant que les gens soient mis au courant de certains effets indésirables.
    Si nous adoptions en principe cette façon de procéder et que nous essayions d'obtenir un amendement, de quelle façon cela pourrait-il garantir selon vous une circulation simplifiée de l'information de manière à ce que le système ne devienne pas paralysé parce que tout le monde attend que quelqu'un d'autre diffuse des renseignements?
    Merci de poser la question.
    À mon avis, lorsqu'on réfléchit à la transparence, il est essentiel de tenir compte de l'image institutionnelle de Santé Canada, par rapport à d'autres organismes de réglementation. De toute évidence, le ministère à lui seul n'a pas forcément les ressources nécessaires pour s'attaquer à certains de ces problèmes.
    Cela dit, en ce qui concerne plus particulièrement la mise sur papier des décisions, les meilleures données que nous avons jusqu'à maintenant, comme l'a dit M. Lexchin dans ses observations, proviennent des sommaires des motifs de décisions. Ces documents ont tendance à comporter des lacunes, et ils sont également longs et difficiles à produire.
    Quand je parle des « motifs de décisions », je parle peut-être davantage d'une grande partie des données que de la logique et de la description, même s'il serait également bien d'en tenir compte. L'idée, c'est de décrire et de présenter les données que le fabricant leur a communiquées, ce qui, en théorie, pourrait se révéler plus efficace que notre façon de faire actuelle, qui consiste en une sorte de processus très technique. On rédige, et probablement révise, une grande partie des motifs. Je crois qu'il pourrait y avoir un formulaire plus simple qui porte sur les raisons pour lesquelles on a considéré que les risques l'emportent sur les avantages, et sur les données qui expliquent également les décisions, ce qui permettrait de produire des rapports plus rigoureux. Comme l'a démontré M. Lexchin, les renseignements les plus élémentaires sur les essais, comme le sexe des participants, la durée de leur participation et ainsi de suite, font souvent défaut. Le simple fait de demander de tels renseignements, qui devraient être plutôt faciles à recueillir, serait très utile.
    Comme vos explications.
    Pour donner suite à vos observations, êtes-vous préoccupé par la quantité de ressources dont aurait besoin Santé Canada pour prendre le dossier en main?
    Nous avons posé la question à des fonctionnaires jeudi dernier, et ils ont répondu qu'ils ont réalisé des gains d'efficience et changé la façon dont ils font les choses depuis 2011, et que la situation est meilleure maintenant. Cela dit, je pense que la réussite du projet de loi dépend de la façon dont il est mis en oeuvre, et il faut des ressources pour assurer le suivi, notamment en ce qui a trait à la transparence à Santé Canada.
    Avez-vous des préoccupations concernant les ressources nécessaires à la mise en oeuvre de ce projet de loi, à savoir qui diable se tiendra au courant de la situation et assurera un suivi de toutes les tâches qui devront être accomplies?
    Tout à fait, mais je ne suis pas convaincu que le fait d'avoir moins de ressources signifie qu'il y a aura moins de transparence. À mon avis, cela peut vouloir dire le contraire.
    Plus précisément, la divulgation de rapports d'études cliniques — des documents fournis par la société — est préoccupante lorsque les responsables de Santé Canada considèrent cela comme une pratique qu'ils doivent façonner, mais pour laquelle ils n'auront peut-être jamais les ressources nécessaires. Cela dit, s'ils ont le pouvoir de diffuser de l'information que, par définition, on obtient déjà des fabricants en vertu de la loi, il serait possible, en théorie, d'accroître la transparence avec moins de ressources.

  (1035)  

    Bien. Merci de ces explications.
    Monsieur Lizon.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bienvenue à tous les témoins.
    J'aimerais également, monsieur le président, qu'on me fasse signe lorsqu'il ne me restera qu'une minute. Merci.
    Ma première question s'adresse à M. Lexchin et porte sur la disposition disant que les résultats d'un essai clinique doivent être rendus publics dans un délai d'un an.
    Qui aurait accès à cette information? C'est évidemment inutile pour le grand public. À votre avis, qui devrait y avoir accès, et en vertu de quelles règles? D'une part, il faut tenir compte des grands avantages que cela représente pour les patients potentiels et, d'autre part, nous ne voulons pas qu'on s'en serve pour se livrer à des pratiques commerciales déloyales.
    Je crois que M. Herder a décrit certaines des mesures de protection des données déjà prises par Santé Canada ou le Canada pour essayer de s'assurer que l'information n'est pas utilisée à des fins commerciales déloyales. Pour ce qui est de la divulgation de l'ensemble des résultats des essais cliniques effectués, nous pourrions commencer par examiner ce que j'ai dit par rapport au modèle que la société GlaxoSmithKline s'est engagée à respecter, à savoir qu'elle diffusera toute l'information à cet égard dès que les chercheurs auront présenté une demande et qu'un comité indépendant l'aura approuvée pour que ceux qui sont en mesure d'utiliser cette information l'aient à leur disposition.
    Par exemple, l'ISMP pourrait s'intéresser à cette information pour élaborer des stratégies visant à mieux protéger les patients. L'ACMTS, qui évalue les nouveaux médicaments et les nouvelles technologies, pourrait quant à elle s'en servir lorsqu'elle prépare ses rapports, alors que d'autres groupes au Canada qui élaborent des lignes directrices à l'intention des cliniciens pourraient inclure tous les renseignements pertinents dans leurs recommandations aux médecins sur la meilleure façon de prescrire des médicaments.
    Monsieur Herder, vous avez mentionné que les accords commerciaux ne devraient pas porter atteinte à ce projet de loi, mais vous avez dit que cela pourrait être contesté. Je ne sais pas quels sont les renseignements inclus dans un rapport sur un essai clinique, mais dans les accords commerciaux entre les pays, une disposition prévoit la protection des données et des brevets pharmaceutiques — j'ignore si c'est sur une période de huit ou dix ans.
    Les rapports sur les essais cliniques comprennent-ils des données qui seraient protégées en vertu de cette disposition?
    Je pense qu'il est important de garder en tête une ou deux choses. Il faut entre autres savoir que certains accords internationaux prévoient des exigences minimales liées à la propriété intellectuelle. Il est nécessaire d'avoir un système de brevetage. Comme vous le dites, il faut prendre des mesures pour protéger les données, mais elles ne déterminent pas nécessairement à quoi ressemble votre système de brevetage et quelles sont les exigences à cet égard dans un pays donné.
    Lorsque les règles diffèrent d'un pays à l'autre, les sociétés les contestent souvent. Elles font toujours l'objet d'un conflit, mais un pays souverain dispose d'une marge de manoeuvre pour définir ses propres normes. Par conséquent, dans le cas de données qui pourraient se trouver dans des rapports sur des essais cliniques, oui, on pourrait avancer qu'elles doivent être protégées. Il s'agit de renseignements scientifiques. La définition du mot « données » est plutôt littérale. Si les données sont traitées de manière confidentielle, les sociétés invoqueront ce motif.
    Cela dit, lorsqu'on a pris comme nous en tant que pays les mesures nécessaires pour protéger les données, ou, ce qui à mon avis est également vrai dans ce cas-ci, s'il est nécessaire de protéger la santé publique, on peut passer outre à la protection des données ou rendre publique l'information concernée. Donc, même si l'information est considérée comme confidentielle, le Canada peut toujours exiger qu'elle soit divulguée.

  (1040)  

    Merci, monsieur Lizon.
    Monsieur Young.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poser à M. Lexchin une question sur la prescription de médicaments à des fins autres que l'usage approuvé. C'est un sujet sur lequel vous avez écrit à maintes reprises au fil des ans, monsieur Lexchin. Je sais qu'environ 70 % des médecins ont parfois recours à cette pratique. Je ne dis pas que c'est entièrement mauvais, car c'est relativement répandu. Cela dit, c'est peut-être beaucoup plus risqué pour les patients, car, premièrement, il s'agit de cas où il n'a pas été prouvé que les médicaments sont sécuritaires et efficaces. Bien souvent, cette pratique est attribuable à une commercialisation illégale, c'est-à-dire que des représentants de sociétés pharmaceutiques se rendent dans les bureaux des médecins ou les invitent à dîner pour leur dire à voix basse de prescrire un médicament à des fins pour lesquelles il n'a pas été prouvé que c'est sécuritaire. Troisièmement, au moins du côté de la société pharmaceutique, cette pratique repose principalement sur l'intention de créer des médicaments populaires qui rapportent 1, 2, 3 ou 4 milliards de dollars par année.
    En tenant compte du fait qu'il s'agit d'une compétence provinciale, avez-vous l'impression que les pouvoirs prévus dans la Loi de Vanessa, selon lesquels le ministre peut exiger que des essais supplémentaires soient effectués, seront utiles pour lutter contre la prescription de médicaments à des fins autres que l'usage approuvé?
    Absolument.
    Par exemple, si nous avions des preuves qu'un médicament est consommé à grande échelle à des fins autres que l'usage approuvé, le projet de loi C-17 autoriserait le ministre à exiger que les sociétés concernées mènent d'autres études pour que nous puissions mieux déterminer s'il convient ou non de prescrire le médicament à cette fin.
    À l'heure actuelle, on estime que 70 % des prescriptions à des fins non conformes ne reposent pas sur de bonnes données scientifiques. Cela ne signifie pas, comme vous l'avez souligné, que la prescription de médicaments à des fins autres que l'usage approuvé est mauvaise pour les gens; cela veut simplement dire que nous ne le savons pas. Nous devons être en mesure de fixer les exigences nous permettant d'obtenir l'information nécessaire pour déterminer si l'emploi non conforme d'un médicament est bon ou mauvais.
    Cela dit, nous devons également songer à adopter une disposition qui tiendrait compte du fait que même si Santé Canada recueille, par le truchement de ses déclarations d'effets indésirables, des données sur l'emploi conforme et non conforme des médicaments, cette information n'est pas disponible dans sa base de données en ligne. On ne sait pas vraiment à quelle fréquence des effets indésirables sont liés aux prescriptions de médicaments à des fins autres que l'usage approuvé. Il serait possible de remédier très facilement à cela en donnant à Santé Canada les ressources nécessaires pour diffuser cette information dans sa base de données publique, ou en l'obligeant à le faire.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Lexchin, vous avez également beaucoup écrit sur la gravité du problème des réactions indésirables aux médicaments au Canada et, en fait, en Amérique du Nord. Nous savons, et vous avez des preuves écrites dans l'étude de Lazarou, à l'Université de Toronto, que les médicaments d'ordonnance consommés conformément à leur posologie, de la bonne façon, sont la quatrième cause de décès en Amérique du Nord et sont responsables de millions de réactions indésirables.
    Si la Loi de Vanessa était adoptée avec les modifications que vous avez recommandées, ou des modifications similaires, de quelle façon la médecine moderne changerait-elle au Canada?
    Nous n'allons jamais parvenir à une sécurité absolue. Cela n'existe pas. Chose certaine, on estime qu'environ 60 % des réactions indésirables aux médicaments pourraient être évitées, et une des façons de les prévenir est d'être mieux informés sur le moment où elles ont lieu et les personnes qui en souffrent.
    Aux termes de la Loi de Vanessa, et en obtenant une plus grande quantité de renseignements sur la sécurité, nous pourrions probablement prévenir un nombre considérable de réactions indésirables aux médicaments et réduire le nombre d'hospitalisations ainsi que le taux de morbidité. Le nombre exact est difficile à établir, mais il y aurait d'importantes réductions selon moi.

  (1045)  

    Merci beaucoup.
    Auriez-vous l'obligeance de décrire le pire cas que vous avez vu où un médicament a causé du tort après avoir été prescrit de manière non conforme à grande échelle?
    Je suppose que ce que j'ai vu qui est le plus susceptible de causé du tort aux patients est l'usage inapproprié d'antibiotiques pour soigner des maladies virales ou lorsqu'il y a pas d'infection au départ, ou le choix d'un mauvais antibiotique qui a mené à des cas d'infection à C. difficile. L'infection à C. difficile, en particulier chez les aînés, peut être très difficile à traiter et peut nécessiter des hospitalisations prolongées ou, comme l'a dit votre collègue, entraîner la mort.
    Merci.
    Cela met fin à notre séance d'aujourd'hui. Nous allons tous nous revoir jeudi.
    La séance est levée.
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