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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 059 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 2 février 2015

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Merci, mesdames et messieurs, d'être des nôtres.
    Bienvenue au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Il s'agit de la 59e réunion. La séance d'aujourd'hui est télévisée.
    Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 24 novembre 2014, nous allons discuter du projet de loi C-26, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada et la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, édictant la Loi sur la banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé (infractions sexuelles visant les enfants) et modifiant d'autres lois en conséquence.
    Mesdames et messieurs, sachez que nous recevons aujourd'hui deux ministres: le ministre de la Justice, M. MacKay, et le ministre de la Sécurité publique, M. Blaney. Ils vont chacun faire une déclaration préliminaire. Ensuite, nous passerons à la période des questions et réponses. Avant d'entamer la deuxième heure durant laquelle nous entendrons les fonctionnaires, nous aurons besoin de l'approbation du Sous-comité du programme afin de discuter du reste des réunions que nous consacrerons à ce dossier.
    Sans plus tarder, j'invite le ministre de la Justice, M. MacKay, à faire sa déclaration préliminaire.
    Chers collègues, je suis heureux de comparaître devant vous, au Comité de la justice, pour discuter du projet de loi C-26, Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d'enfants. Il s'agit de ma 51e comparution devant le comité.
    Le projet de loi à l'étude et les modifications qui y sont proposées visent à faire en sorte que les délinquants sexuels soient tenus responsables des crimes horribles qu'ils commettent contre les membres les plus vulnérables et les plus précieux de notre société, à savoir les enfants. Pour atteindre cet objectif important, le projet de loi propose une gamme de mesures. Ce que nous essayons de faire ici, bien entendu, c'est de présenter une mesure législative qui appuie davantage les efforts du gouvernement pour protéger les plus vulnérables de notre société.

[Français]

     Ce projet de loi propose d'atteindre cet important objectif par un éventail de mesures différentes, notamment par des modifications au Code criminel et à la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, et la création d'une banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé.

[Traduction]

    Je suis accompagné de divers fonctionnaires ainsi que du ministre de la Sécurité publique, Steven Blaney, qui partage la responsabilité de l'application de cette mesure législative et, en particulier, des modifications qui aboutiront à la création d'une nouvelle base de données. Je laisserai au ministre Blaney le soin de vous expliquer les dispositions du projet de loi qui s'y rapportent. Je tiens à préciser, toutefois, que l'objectif est d'obtenir l'appui de tous les parlementaires. Il s'agit manifestement d'un sujet qui transcende les partis et, pourtant, certains députés ont remis en question la nécessité des modifications proposées dont nous sommes saisis. J'aimerais donc aborder quelques-unes de ces questions.
    Ces modifications sont nécessaires parce que, malheureusement, les cas d'infractions sexuelles contre des enfants continuent d'augmenter. En 2013, la police a signalé que le nombre d'infractions d'ordre sexuel contre des enfants avait encore augmenté, cette fois de 6 % en 2012 et 2011. Pour chaque année civile, il y a eu une hausse de 3 %. Comme l'a indiqué Statistique Canada, les infractions sexuelles contre les enfants ont été l’une des rares catégories d’infractions de violence au Canada à avoir augmenté en 2013. Cette information provient du bulletin Juristat 2013, rendu public en juillet dernier. Nous pouvons tous convenir que ces chiffres sont inquiétants. Nous nous sentons donc obligés de renforcer notre riposte à ces crimes graves, et je suis convaincu que les Canadiens partagent ces préoccupations.
    Le projet de loi C-26 correspond mieux à la gravité des infractions sexuelles contre des enfants, car nous y proposons d'augmenter les peines minimales obligatoires et les peines maximales prévues pour de nombreuses infractions sexuelles commises à l'égard d'enfants. Par exemple, le projet de loi veillerait à ce que la peine maximale pour toutes les infractions mixtes d'ordre sexuel contre des enfants soit de 2 ans moins un jour dans le cas d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire et de 14 ans dans le cas d'une déclaration de culpabilité par mise en accusation.
    En plus d'augmenter les peines relatives à la production et à la distribution de la pornographie juvénile, le projet de loi C-26 propose de faire en sorte que ces infractions donnent obligatoirement lieu à une procédure de mise en accusation afin de mieux tenir compte de leur gravité. Les infractions liées à la pornographie juvénile ont des répercussions dévastatrices et durables sur les victimes, surtout lorsque ces images sont téléchargées sur Internet, où elles peuvent rester durant toute une vie. Nous avons d'ailleurs vu comment cela recoupe la mesure législative contre la cyberintimidation et comment ces images sont souvent utilisées pour intimider des jeunes, à telle enseigne que certains décident de s'enlever la vie.
    Monsieur le président et chers collègues, le projet de loi garantirait aussi qu'un crime perpétré alors que le délinquant faisait l'objet d'une ordonnance de sursis ou qu'il bénéficiait d'une libération conditionnelle ou d'office soit considéré comme une circonstance aggravante. Ces modifications attendues depuis longtemps aideront à empêcher la perpétration de nouvelles infractions par des délinquants sexuels connus ou soupçonnés de s'en prendre à des enfants. Le projet de loi C-26 propose d'imposer des peines plus sévères à ceux qui sont reconnus coupables d'avoir enfreint des ordonnances de surveillance. Il nous incombe — nous en sommes convaincus —  de garantir le respect des ordonnances de surveillance imposées à ces délinquants une fois qu'ils sont remis en liberté et de veiller à ce que le non-respect d'une condition imposée pour protéger les enfants entraîne de graves conséquences. Comme nous le savons, il s'agit de conditions comme l'interdiction d'entrer en contact avec la victime, l'obligation de se tenir loin d'une résidence ou certaines restrictions concernant la possession d'armes à feu, d'alcool ou de drogues.
    Voilà les types de conditions, monsieur le président, dont le non-respect peut, comme cela arrive souvent, mener à la récidive. Dans cette optique, le projet de loi C-26 propose d'augmenter les peines maximales pour le non-respect des ordonnances d'interdiction prévues à l'article 161, des ordonnances de probation prévues à l'article 733.1 et les engagements à ne pas troubler l'ordre public, prévus aux articles 810 à 810.2. Ces types d'ordonnances contiennent souvent des conditions destinées à protéger les enfants, comme je l'ai dit tout à l'heure. Les peines maximales pour le non-respect des conditions liées à l'une ou l'autre de ces ordonnances passeraient de 6 à 18 mois dans le cas d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire et de 2 à 4 ans dans le cas d'une déclaration de culpabilité par mise en accusation.
    Monsieur le président, le gouvernement est également résolu à mettre fin à ce qu'on appelle parfois des peines à rabais pour les délinquants sexuels qui s'en prennent à des enfants. Nous voulons ainsi nous assurer de reconnaître le cas de chaque enfant dont la vie a été bouleversée par ce genre d'infraction. À cette fin, le projet de loi C-26 exige que les tribunaux ordonnent, dans tous les cas, que les peines imposées concernant des infractions liées à la pornographie juvénile soient purgées consécutivement aux peines imposées pour d'autres infractions d'ordre sexuel à l'égard d'enfants. Le projet de loi veillerait également à ce que les délinquants qui agressent sexuellement plusieurs enfants ne reçoivent pas de peines à rabais, du seul fait que les peines sont infligées au même moment pour les infractions mettant en cause plusieurs victimes.
    Par ailleurs, monsieur le président, le projet de loi C-26 permettrait de préciser le libellé du paragraphe 718.3(4) du Code criminel, qui établit les règles générales relatives à l'imposition de peines consécutives et concurrentes. Le libellé actuel est le résultat d'un amalgame de règles qui précèdent la Confédération, d'où la nécessité de les clarifier et de les modifier. Nous profitons donc de cette occasion pour le faire.

  (1535)  

[Français]

     Le projet de loi C-26 propose également de codifier certaines règles applicables à l'imposition de peines consécutives et concurrentes, comme l'imposition de peines concurrentes pour les infractions commises dans le cadre de la même affaire criminelle, aussi appelée « règle de l'infraction basée sur les mêmes faits ».

[Traduction]

    Toutefois, les tribunaux ont également reconnu que les peines visant la même série d'événements ou des événements distincts doivent être purgées de manière consécutive dans certaines circonstances. Le projet de loi reconnaît deux de ces circonstances. Ainsi, une infraction commise alors que le délinquant fuyait devant un agent de police serait passible d'une peine purgée consécutivement à toute autre peine découlant de la même série d'événements, et une peine imposée pour une infraction commise pendant que le délinquant était en liberté sous caution devrait également être purgée de façon consécutive à toute autre peine imposée. Il existe d'ailleurs un précédent à cet égard.
    Monsieur le président, le projet de loi C-26 modifiera également la Loi sur la preuve au Canada de sorte que les conjoints des personnes accusées d'une infraction de pornographie juvénile soient des témoins contraignables pour la Couronne. Leur témoignage pourrait s'imposer pour prouver la culpabilité de l'accusé au-delà de tout doute raisonnable — par exemple, lorsqu'on trouve de la pornographie juvénile dans un ordinateur personnel.
    En conclusion, monsieur le président et chers collègues, et avant de céder la parole au ministre Blaney, le gouvernement reconnaît que les lois pénales, à elles seules, ne constituent pas une réponse complète à l'exploitation sexuelle des enfants et que le système de justice pénale devrait s'attaquer de façon concertée ou globale aux agressions sexuelles perpétrées contre les enfants.
    Le projet de loi C-26 fait partie intégrante de la réponse globale, mais je suis particulièrement heureux de savoir que le gouvernement a attribué plus de 10 millions de dollars à l'amélioration ou à la création de 21 centres d'appui aux enfants afin de répondre aux besoins des enfants et des jeunes qui sont victimes d'actes criminels. J'ai d'ailleurs visité un certain nombre de ces centres — comme beaucoup d'autres députés ici présents, j'en suis sûr — pour voir comment ces centres et ces programmes aident au rétablissement des victimes, en particulier des jeunes victimes qui, dans bien des cas, ont subi un grave traumatisme à la suite d'une infraction d'ordre sexuel.
    Ce n'est là qu'un exemple de plus de l'ensemble des mesures que nous prenons comme gouvernement. Je félicite particulièrement tous ceux qui travaillent auprès des jeunes victimes afin de répondre à leurs besoins spéciaux.
    Sur ce, je cède la parole au ministre Blaney.
    Merci.

  (1540)  

    Merci, monsieur le ministre.
     Ministre Blaney, vous avez la parole.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président, membres du comité, de m'accueillir ici.
    Je suis très heureux d'accompagner mon collègue, le ministre de la Justice et procureur général du Canada, l'honorable Peter MacKay, pour vous parler de la portion de la Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d'enfants qui concerne la sécurité publique.
     C'est une mesure législative qui nous permettra de respecter la promesse de notre gouvernement consistant à protéger des pédophiles les familles, les collectivités et, plus particulièrement, les enfants.

[Traduction]

    Soyons clairs: des mesures plus sévères s'imposent pour protéger les enfants contre l'exploitation et les agressions sexuelles. Comme le ministre MacKay l'a dit, alors que les taux de crimes violents au Canada sont à la baisse, les agressions sexuelles contre les enfants sont à la hausse. En 2013, la police a signalé quelque 4 200 incidents de la sorte.

[Français]

    Les Canadiens sont légitimement préoccupés par la mobilité et le comportement des prédateurs sexuels qui quittent le pays et commettent des infractions sexuelles à l'étranger. C'est pourquoi, afin d'aider à aborder ces questions des plus troublantes, nous avons mis en avant la Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d'enfants.
     Cette loi comprend divers éléments, notamment des mesures qui accroissent les obligations des délinquants sexuels inscrits, particulièrement ceux qui ont fait l'objet de condamnations pour des infractions sexuelles commises sur des enfants ou qui voyagent à l'extérieur du pays pour des raisons de tourisme sexuel impliquant des enfants.

[Traduction]

    En supplément aux observations préliminaires du ministre MacKay, j'aborderai les éléments du projet de loi qui permettront de donner aux forces de l'ordre des outils améliorés pour sévir contre ces personnes ignobles, à savoir la collecte de données sur leurs déplacements, la création de la base de données proprement dite et l'échange d'information entre l'ASFC et la GRC.

[Français]

    Nous avons déjà proposé d'importants changements à la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, cette loi qui a donné lieu à la création d'une base de données nationale sur les délinquants sexuels condamnés au Canada. Nos policiers utilisent le Registre national des délinquants sexuels, qui est géré par la Gendarmerie royale du Canada, afin d'aider à prévenir les crimes de nature sexuelle et de mener des enquêtes à cet égard.

[Traduction]

     Nous disposons déjà d'une base de données, mais elle n'est accessible pour l'instant qu'aux forces de l'ordre. Parmi les 36 000 délinquants sexuels qui y sont inscrits, près de 25 000 ont commis des actes criminels contre des enfants.

[Français]

     Ces crimes sont de nature sexuelle, évidemment.
    À l'heure actuelle, tous les délinquants sexuels inscrits doivent déclarer, une fois par année et chaque fois qu'ils en changent, leur adresse, leur nom, leur lieu d'emploi ou leurs activités bénévoles. Ils sont également tenus de déclarer les absences de sept jours ou plus pour des voyages au Canada ou à l'étranger.
    Cependant, dans le cas de déplacements internationaux, ils sont uniquement tenus de déclarer qu'ils seront à l'extérieur du pays pendant sept jours ou plus et d'indiquer les dates approximatives de leurs voyages. Il n'y a aucune exigence de fournir des renseignements particuliers concernant la destination, et cela doit changer. C'est la raison pour laquelle nous examinons les dispositions législatives qui sont devant nous cet après-midi.
    Nous devons faire plus pour protéger nos enfants de l'exploitation sexuelle, et cela commence ici. Notre responsabilité s'étend aux enfants du monde entier.

[Traduction]

    La Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d'enfants est importante, car si elle était adoptée, elle permettrait de mieux protéger les enfants contre ceux qui veulent voler leur innocence pour leur propre gratification sexuelle perverse. Elle ferait également en sorte que ceux qui se livrent à ces actes odieux soient tenus responsables des dommages qu'ils causent à la société.

[Français]

    Par exemple, si un délinquant sexuel reconnu qui vit en Ontario veut se rendre en Colombie-Britannique pendant deux semaines, il doit fournir l'adresse et les coordonnées de l'endroit où il veut se rendre. Cependant, s'il part pour deux semaines à l'étranger, il n'y a pas de règle quant à l'obligation de fournir des renseignements sur l'endroit où il veut aller.

[Traduction]

    Aux termes de la mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui, cette pratique serait éliminée. Le délinquant sexuel devrait fournir les détails de destination pour des voyages à l'extérieur du Canada de sept jours ou plus, et fournir les dates précises de départ et de retour.

  (1545)  

    En effet, le tourisme sexuel existe malheureusement. Il est important de s'attaquer à cette pratique lorsqu'elle vise des enfants et lorsqu'elle touche le Canada.

[Français]

    Le deuxième changement clé permettra de combler les lacunes qui existent dans les échanges de renseignements entre les policiers et l'Agence des services frontaliers du Canada, ou l'ASFC.
    Étant donné que l'ASFC n'est pas considérée comme un service de police, la loi actuelle ne permet pas de lui divulguer les informations du registre. À l'heure actuelle, il est impossible d'échanger des renseignements avec ceux qui contrôlent l'accès et la sortie à nos frontières.
    Qui plus est, l'agence sera autorisée à collecter des renseignements sur les déplacements de certains délinquants sexuels au moment de leur retour et à les transmettre aux fonctionnaires responsables du registre. La loi permettra d'avoir cet échange et ce partage d'information dans les deux sens.
    Étant donné le rôle important que jouent la Gendarmerie royale du Canada et l'ASFC pour veiller à la sécurité publique, le fait de permettre cet échange de renseignements constitue un élément clé du projet de loi qui renforcera les lois actuelles et responsabilisera les agresseurs sexuels qui voyagent.

[Traduction]

    Enfin, je suis heureux de parler d'une mesure que les Canadiens ont à coeur — y compris moi en tant que père —, à savoir le droit des victimes, des enfants et des familles de savoir s'il y a des délinquants sexuels à haut risque dans leur quartier, et j'insiste là-dessus. Les Canadiens ont le droit de connaître le caractère des personnes qui peuvent se trouver près de leurs enfants. Si un dangereux pédophile vit à proximité de leur enfant, ils ont le droit de prendre des mesures et des précautions appropriées. C'est pourquoi le projet de loi aurait pour effet de créer la Loi sur la banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé, ce qui permettrait à notre gouvernement de créer une base de données publique nationale. Le projet de loi permettrait de créer un registre public des délinquants sexuels à haut risque pour que les parents puissent prendre des mesures responsables afin d'assurer la sécurité de leurs enfants.
    J'ai été heureux de constater que presque tous les députés ont appuyé cette mesure législative importante, à l'exception du Parti vert, qui a voté contre. J'espère que les membres du comité appuieront notre plan en vue de responsabiliser davantage les délinquants sexuels, de mieux protéger les enfants au Canada et à l'étranger contre l'exploitation sexuelle et de donner aux familles canadiennes l'accès à des renseignements qui pourraient les aider à protéger leurs enfants. C'est exactement ce que ferait la Loi sur le renforcement des peines pour les prédateurs d'enfants.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs les ministres, merci de vos déclarations préliminaires.
    Nous passons maintenant aux tours de questions.
    Mme Boivin, du Nouveau Parti démocratique, sera la première à intervenir.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Messieurs les ministres, je vous remercie d'être présents.
    Monsieur MacKay, vous avez dit que c'était votre 51e comparution à notre comité. Quant à vous, monsieur Blaney, c'est votre première comparution. J'espère que vous allez nous donner le temps d'étudier comme il faut le projet de loi C-26, que nous étions bien contents de renvoyer au comité pour étude. J'imagine que vous allez laisser le comité prendre le temps nécessaire pour étudier l'impact de ce projet de loi. C'est un gros dossier qui nécessite la présence de deux ministres au comité. On peut voir qu'il a des répercussions à différents égards.
    Loin de moi l'idée de croire que vous voulez que nous fassions une étude tous azimuts du projet de loi, malgré le fait que le sujet est extrêmement sérieux et que nous devons faire preuve de diligence.

[Traduction]

    J'espère que les ministres n'imposeront pas d'attribution de temps au comité.
    Madame Boivin, comme vous le savez, les ministres ne s'ingèrent pas dans les affaires des comités. Nous n'avons aucune influence sur le calendrier, les témoins ou le temps que vous consacrerez à l'étude du projet de loi.
    Je suis heureuse de l'entendre.

[Français]

    Je suis complètement d'accord sur ce que vous venez de dire. Ce projet de loi est très important et il aura des répercussions énormes sur notre système de justice. Je suis certain que vous aurez le temps nécessaire pour l'étudier.

[Traduction]

    C'est bien. J'ai seulement cinq minutes, alors je vais me lancer. Il s'agit d'un projet de loi très volumineux.

[Français]

    Depuis 2006, votre gouvernement conservateur prend des tonnes de mesures pour mieux protéger les enfants. Vous avez mis en place la Loi sur la sécurité des rues et des communautés, qui prévoit de nouvelles peines obligatoires d'emprisonnement pour sept infractions à caractère sexuel commises contre des enfants déjà prévues au Code criminel, y compris l'agression sexuelle, l'agression sexuelle armée et l'agression sexuelle grave.
    Cette loi interdit également à quiconque de fournir du matériel sexuellement explicite à un enfant en vue de faciliter la perpétration d'une infraction d'ordre sexuel et de conclure avec un tiers au moyen d'un ordinateur ou par d'autres moyens de télécommunications une entente pour commettre une infraction sexuelle contre un enfant.
    Cette loi vise également ceci: renforcer le Registre national des délinquants sexuels, porter de 14 à 16 ans l'âge auquel une jeune personne peut légalement consentir à des activités sexuelles, mettre en place une mesure législative pour obliger les fournisseurs de services Internet à déclarer la pornographie juvénile, renforcer la surveillance des délinquants dangereux et alourdir les peines qui leur sont imposées.
    Pourtant, neuf ans plus tard, vous nous dites que les infractions à caractère sexuel contre les enfants ont augmenté de 6 %.
    Le projet de loi C-26 est-il un constat de l'échec de l'approche que votre gouvernement a adoptée dans les dossiers d'infractions à caractère sexuel contre des enfants? Sinon, sur quelle étude vous êtes-vous appuyés pour en arriver au projet de loi C-26 et pour décider qu'il y avait des besoins particuliers par rapport à ces points?
    Monsieur Blaney, ma dernière question s'adresse à vous. Vous avez parlé du registre des délinquants dangereux. Qui va déterminer quel délinquant est dangereux et comment cela sera-t-il fait? Les gens devraient-ils être satisfaits de savoir qu'un registre contient le nom d'un délinquant dangereux qui circule dans leurs rues? Ne devrait-on pas travailler en vue de sortir le délinquant dangereux de la rue plutôt que mettre beaucoup d'accent sur un registre?

  (1550)  

[Traduction]

    Je vais commencer par le ministre MacKay — question d'ancienneté, je suppose.
    Merci, madame Boivin.
    Tout d'abord, relativement à votre question de savoir pourquoi nous voulons apporter d'autres réformes, d'autres modifications à l'imposition de peines, particulièrement en ce qui concerne les peines minimales obligatoires, la réponse simple est que nous n'en ferons jamais assez pour protéger les enfants vulnérables.
    Les autres mesures ne fonctionnent-elles pas?
    Elles ont fonctionné. Les statistiques révèlent qu'en raison de la persévérance de certains délinquants sexuels, il faut prendre plus de mesures dissuasives et, dans bien des cas, donner plus d'outils à la police et aux fonctionnaires afin qu'ils aient des moyens de dissuader ces gens. Les engagements de ne pas troubler l'ordre public en sont un exemple, et le non-respect de ces engagements ou ordonnances entraîne des mesures précises destinées à dissuader les agresseurs d'enfants... Nous estimons qu'il s'agit d'une mesure importante à prendre pour envoyer ce message de dissuasion.
    Pour ce qui est d'imposer des peines plus longues, je me contenterai de dire que, par rapport au tort que subit un enfant victime d'une agression sexuelle, les fourchettes de peines demeurent peu sévères dans bien des cas, surtout pour les infractions les plus graves qui mettent en cause l'exploitation d'enfants. Mais j'ajouterais...
    Êtes-vous en train de dire que les juges n'ont pas tendance à imposer des peines plus proches des maximums prévus et que les peines infligées sont trop légères au Canada?
    Eh bien, il y a quand même une fourchette de peines, et c'est la partie inférieure de la fourchette qui m'inquiète. Voilà pourquoi le projet de loi propose des peines minimales obligatoires.
    Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, il ne s'agit pas simplement de faire en sorte que le système de justice pénale impose des peines plus lourdes. Il faut aborder le problème de telle sorte qu'on puisse fournir plus de soutien aux enfants, à leur famille et à la collectivité, notamment par l'entremise de centres d'appui aux enfants. La collectivité doit également intervenir.
    Cela fait partie de la réponse que nous jugeons nécessaire. Quand on tient compte des statistiques désolantes qui montrent que les agressions sexuelles contre les enfants persistent et que 55 % de toutes les agressions sexuelles signalées visent des enfants de moins de 18 ans, force est de constater qu'il s'agit d'une situation alarmante dans un pays comme le nôtre et qu'il faut prendre d'autres mesures à cet égard.
    D'ailleurs, ces agressions sont souvent commises par un membre de la famille; ce sera donc intéressant du point de vue du registre.
    Le président: Il vous reste une minute, réponse comprise.
    Mme Françoise Boivin: Peut-être qu'on peut passer au ministre Blaney.
    Comment fonctionne votre registre... qui déterminera

[Français]

le statut de délinquant dangereux?
    Par ailleurs, comme ce sont le plus souvent des gens de la famille qui sont impliqués dans les infractions sexuelles, quel genre de répercussions ce registre va-t-il avoir?
    Je vous remercie.
    Comme vous le savez sans doute, ce sont essentiellement les autorités policières locales qui déterminent quelles personnes doivent faire l'objet d'une notification publique. Cela se fait déjà au Canada. Ce que le gouvernement canadien souhaite faire...
    Je ne vous demande pas qui va faire l'objet d'une notification, mais qui va déterminer le statut de délinquant dangereux au sens de l'article 29 de votre projet de loi.
     Qui va être chargé de cela et quels seront les critères?
    Comme je l'ai indiqué, les autorités policières locales font déjà la notification publique des agresseurs sexuels à haut risque. C'est cette information qui sera colligée et intégrée à la banque de données nationale.

  (1555)  

[Traduction]

    Merci, monsieur le ministre.
    Merci, madame Boivin.
    Le prochain intervenant est M. Dechert, du Parti conservateur.
    Avant de céder la parole aux ministres, monsieur le président, j'aimerais revenir sur une observation faite par Mme Boivin.
    Elle a pris la peine de demander au ministre MacKay de combien de temps le comité disposera pour étudier le projet de loi C-26, celui dont nous sommes saisis aujourd'hui. Bien entendu, elle sait bien que nous avons discuté, au sein du comité, du calendrier relatif au projet de loi et du nombre de jours que nous consacrerons à son étude. En fait, c'est le NPD qui a proposé le délai actuel de quatre jours.
    Les gens qui nous regardent aujourd'hui devraient savoir que c'est le genre d'absurdités que nous entendons souvent de la part des députés de l'opposition. Ce sont eux qui ont établi le temps que nous devrions consacrer à l'étude du projet de loi...
    Le président: Monsieur Dechert...
    M. Bob Dechert: ... et là, ils essaient de faire croire...
    Le président: Monsieur Dechert, on invoque le Règlement.
    M. Bob Dechert: ...que nous cherchons en quelque sorte à raccourcir la durée de l'étude.
    Mme Françoise Boivin: Rappel au...
    Un instant.
    Monsieur Dechert, je vous interromps. On invoque le Règlement.
    Rappel au Règlement, monsieur Dechert. Je veux dire...
    Ce n'est pas M. Dechert qui répond au rappel au Règlement, mais la présidence.
     Notre sous-comité a tenu une séance à huis clos.
    Le président: C'est exact.
    Mme Françoise Boivin: Je voulais tout simplement savoir si le ministre avait... Je n'ai rien dit au sujet du comité ou de tout le reste.
    Si le député souhaite qu'on parle de ce qui s'est passé au sous-comité, je n'ai aucune objection. Je me ferai un grand plaisir de parler du délai de quatre jours pour des projets de loi, une étude et 11 réunions...
    Je comprends.
    Nous n'avons qu'une heure avec les ministres. Je vais expliquer clairement au comité comment nous allons procéder. Nous discuterons du Sous-comité du programme ainsi que du temps que nous allouerons à ce sujet après nos échanges avec les ministres, à moins que vous voulez gaspiller du temps à le faire tout de suite et perdre l'heure que nous avons avec eux. C'est comme vous voulez. Passons à autre chose.
    M. Bob Dechert: D'accord...
    Le président: Merci, monsieur Dechert.
    Quoi qu'il en soit, passons à autre chose. Mon collègue comprend très bien que ce ne sont pas les ministres qui déterminent combien de temps le comité décide de consacrer à un sujet donné, et je pense que les gens devraient savoir que le gouvernement n'a aucunement essayé de faire obstacle à l'étude de ce projet de loi.
    En fait, messieurs les ministres, vous devriez savoir que nous estimons que ce projet de loi est très important, et nous voulons consacrer le temps qu'il faut pour l'étudier. Personne ne devrait croire que le gouvernement essaie de limiter le temps consacré à l'étude de ce projet de loi.
    Monsieur le ministre MacKay, j'aimerais commencer avec vous. Vous avez mentionné qu'il n'y a pas que les sanctions pour lutter contre les infractions sexuelles à l'égard des enfants, qui sont malheureusement en hausse au Canada, et je pense que c'est une grande tragédie. L'opposition se plaît souvent à pointer du doigt ce côté-ci de la Chambre des communes et dire que nous cherchons avant tout à imposer des sanctions et laissons de côté la prévention ou la prestation de services aux victimes d'infractions sexuelles et d'autres crimes.
    Vous avez mentionné les centres d'appui aux enfants et aux adolescents ainsi que l'aide qu'offre notre gouvernement à ces centres. Vous savez sans doute qu'il y a un centre très connu à Toronto, le centre Boost, que vous avez visité et qui fait un travail remarquable pour aider les enfants victimes d'infractions sexuelles. Vous avez visité le centre familial William Davis à Brampton, dans la région de Peel, que je représente. Nous avons bon espoir qu'un centre d'appui aux enfants et aux adolescents sera créé dans la région de Peel pour venir en aide aux victimes d'agression sexuelle.
    Je me demande si vous pourriez nous en dire plus à propos de ces centres, de l'appui que leur offre le gouvernement, et de la façon dont ils peuvent contribuer à lutter contre les agressions sexuelles contre des enfants.
    Merci beaucoup, monsieur Dechert.
    Comme j'ai participé à ce dossier par l'entremise de la pratique du droit ou des travaux parlementaires, et en tant qu'observateur de longue date du système judiciaire, je pense que l'une des grandes réalisations dont nous avons été témoins ces dernières années, ce sont les centres d'appui aux enfants, grâce à leur approche, à leur compassion et au travail incroyable qu'ils font très tôt après que le mal a été fait, lorsque l'incident est encore vif dans l'esprit de la victime, pour ainsi dire. Vous avez mentionné plusieurs de ces centres en Ontario, et j'en ai visités dans presque toutes les provinces et tous les territoires. Nous en avons 21 qui sont en opération actuellement, et nous prévoyons en créer d'autres.
    La magie de ces centres d'appui aux enfants, c'est qu'ils réunissent divers organismes et particuliers qui travaillent tous pour venir en aide aux enfants, dont la police, les tribunaux, les services aux victimes, des pédopsychologues et des psychiatres. Ils réunissent ceux qui ont la responsabilité au quotidien d'aider les jeunes à surmonter les traumatismes qui découlent inévitablement des contacts sexuels et des agressions sexuelles contre des enfants, ainsi que de venir en aide aux parents et de gérer les répercussions sur l'ensemble de la communauté.
    Je le mentionne simplement pour ne pas oublier ce que vous avez dit à propos d'adopter une approche holistique à l'égard des méfaits que causent les agressions sexuelles contre des enfants. Et ces agressions sont en hausse. Il faut se rendre à l'évidence Je sais que c'est un problème dont le comité est saisi. Je n'hésite pas à souligner la nature non partisane du projet de loi, et je pense que vous le verrez clairement lorsque vous l'examinerez plus en détail. Tout comme le ministre Blaney, j'espère que vous l'étudierez rigoureusement.
    Il y a d'autres mesures que nous pouvons prendre également. J'ai eu l'occasion de me rendre dans la province de Mme Boivin la semaine dernière. Je suis allé à Montréal et à Québec pour voir certains des programmes que le ministère de la Justice parraine pour les jeunes contrevenants qui ont peut-être commis, entre autres, des infractions sexuelles et qui sont peut-être devenus des agresseurs après avoir été eux-mêmes des victimes, phénomène que l'on voit souvent. Ces programmes ciblent les jeunes qui sont dans le système, pour ainsi dire, et qui pourraient grandement bénéficier de counselling et d'une intervention précoce qui leur donneraient des options pour essayer de surmonter les difficultés qu'ils ont vécues. C'est un but complémentaire du projet de loi.
    Monsieur le président, j'ai de l'information au sujet des centres d'appui aux enfants que j'aimerais remettre à votre comité à la fin de nos témoignages.

  (1600)  

    Assurez-vous de remettre ces renseignements au greffier. Ce serait formidable. Merci.
    Nous nous ferons un plaisir d'en prendre connaissance, monsieur le ministre.
    Monsieur le ministre, comme vous le savez, le projet de loi propose des changements aux règles de la preuve relativement au témoignage du conjoint. Étant donné que de nombreuses victimes sont jeunes, le témoignage du conjoint est souvent important. Pouvez-vous nous dire de quelle façon ce projet de loi change les règles de la preuve concernant le témoignage du conjoint?
    Monsieur Dechert, ces changements ont une énorme incidence sur les infractions sexuelles plus particulièrement. Dans le passé, un conjoint qui avait des preuves très pertinentes à présenter au tribunal ne pouvait pas le faire, ce qui avait des répercussions sur la capacité de la Couronne de procéder à des condamnations dans les cas mettant en cause des enfants. Dans certains cas, ce n'était pas parce que le témoin ne voulait pas venir à la barre, mais parce qu'il ne pouvait pas le faire en vertu des règles de la preuve.
    D'une certain façon, ce projet de loi a été remplacé par celui que vous avez sous les yeux, la déclaration des droits des victimes, qui comporte également des dispositions qui lèveraient essentiellement l'immunité du conjoint à témoigner. Mais ce projet de loi, qui a été rédigé à peu près en même temps, modifie la Loi sur la preuve au Canada, pour permettre expressément aux conjoints d'être des témoins habiles à témoigner et contraignables dans des cas d'agression sexuelle mettant en cause des enfants.
    Merci.
    Merci, monsieur le ministre, des réponses que vous avez fournies.
    Notre prochain intervenant est du Parti libéral. Monsieur Easter, la parole est à vous.
    Bienvenue, messieurs les ministres, et bienvenue aux fonctionnaires qui vous accompagnent.
    Je connais un peu le registre des délinquants sexuels. J'étais ministre en 2002 lorsque nous avons conclu l'entente fédérale-provinciale pour aller de l'avant avec le registre. Je pense que c'est deux ou trois années plus tard que le gouvernement l'a enfin enchâssé dans une loi.
    Nous croyons fermement que nous devons faire tout en notre pouvoir pour protéger les gens contre les crimes sexuels. Mais en parcourant le projet de loi, et je pense que le secrétaire parlementaire l'a mentionné en partie, on constate qu'il y a deux volets à l'équation. Il y a les sanctions et la prévention, puis il y a la réadaptation. Je sais que la réadaptation n'est pas toujours possible.
    Ce n'est pas le comité auquel je siège habituellement, comme vous le savez. J'ai l'impression que ce projet de loi vise principalement à imposer des sanctions plus sévères, plus de peines consécutives, et ainsi de suite. Vous avez mentionné les centres d'appui aux enfants et l'excellent travail qu'ils font. Y a-t-il autre chose que le gouvernement fait en matière de guérison et de réadaptation pour résoudre ce problème, mis à part imposer des pleines plus sévères et plus de peines consécutives? Y a-t-il des mesures proposées à cet égard dans le projet de loi que je n'ai pas repérées?
    Je commencerais par dire, monsieur le président, qu'à Service correctionnel du Canada, lorsqu'un détenu a été condamné à une peine pour harcèlement sexuel ou, plus important encore, à une peine pour une infraction sexuelle, il est pris en charge par le service et les programmes qui sont offerts.
    Dans toutes les administrations correctionnelles au Canada, nous offrons des services de réadaptation aux individus reconnus coupables d'infractions sexuelles. Les services de traitement comportent habituellement du counselling qui cible les facteurs de risque psychologiques. Il y a aussi des médicaments qui peuvent être administrés. Les services d'aide psychologique et les médicaments sont utilisés de façon sélective pour maîtriser les pulsions et réduire la libido. Les recherches ont démontré que des programmes de traitement exhaustifs peuvent réduire le taux de récidive chez les agresseurs d'enfants de 17 à 10 % après une période de cinq ans.
    Service correctionnel offre des programmes pendant que le détenu purge sa peine. C'est ce qui arrive lorsque l'individu est reconnu coupable d'un crime.

  (1605)  

    Je vais revenir au ministre MacKay. Je sais qu'il réfléchit à la réponse qu'il va donner à la première question.
    Ministre Blaney, l'une des grandes préoccupations, comme nous le savons tous, c'est que ces individus finissent par sortir un jour du système correctionnel. Vous connaissez très bien le programme des cercles de soutien et de responsabilité dont Steve Sullivan, directeur des Services aux victimes d'Ottawa, a parlé à un autre comité. Je vais le citer: « Si le programme des cercles de soutien et de responsabilité perd son financement, les communautés courront de plus grands risques. » Il a également ajouté ceci: « C'est le seul programme communautaire qui s'interpose entre les délinquants les plus dangereux et nos enfants. Il a protégé de nombreux enfants contre la violence et la terreur. »
    Votre gouvernement a coupé le financement de ce programme. Je ne vais pas expliquer en long et en large ce que ces bénévoles font pour travailler avec les délinquants sexuels à risque élevé lorsqu'ils sortent de prison, mais le fait est qu'ils ont protégé de nombreuses familles contre la violence sexuelle. Pourquoi le gouvernement ne continue-t-il pas à le financer? Allez-vous reconsidérer votre décision pour que nous puissions miser sur la réadaptation? Nous devons nous occuper de tous les volets, et non pas seulement des sanctions.
    Merci de votre question.
    Nous travaillons effectivement avec de nombreux organismes bénévoles nationaux lorsque les détenus ont purgé leur peine et sont remis en liberté. Citons notamment la Société John Howard, l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry, l'Armée du Salut, la 7th Step Society of Canada et la Société Saint-Léonard.
    Les subventions de l'ordre de 1,1 million de dollars annuellement étaient accordées à 15 organismes. Nous leur avons versé des fonds jusqu'en 2014, et nous évaluons le financement dans le cadre de cette initiative à l'heure actuelle. Nous le passons en revue. Je m'attends à recevoir de la rétroaction de mes fonctionnaires.
    Il est important d'être là aux différentes étapes, mais il est aussi important d'envoyer le message que la tolérance zéro s'applique lorsqu'on s'en prend à des enfants. C'est également ce qui sous-tend ce projet de loi, pas seulement pour un enfant au Canada, mais aussi pour un enfant à l'étranger. C'est pourquoi j'appuie sans réserve la proposition du ministre MacKay d'imposer des peines minimales obligatoires. Ce crime doit être décrit tel qu'il est: odieux et socialement inacceptable. Comme vous le savez, nous sommes en train de mettre des mesures en place. Si un individu qui a été condamné prévoit se rendre à l'étranger, même pour une courte période, il devra se déclarer aux autorités, et l'information sera transmise...
    Monsieur le ministre MacKay, avez-vous une réponse brève à donner?
    Oui, je serai très bref, monsieur le président.
    En réponse à la question de M. Easter, il y a des programmes, et le ministre Blaney en a mentionné plusieurs. Un que je connais dans le Canada atlantique, c'est le programme New Leaf. À vrai dire, c'était un programme qui était également financé par le gouvernement précédent, dont vous faisiez partie. Il vise plus précisément à aider à réadapter les délinquants. Ces demandes de financement de programme sont examinées chaque année au pays.
    Du côté proactif, l'initiative Pensez cybersécurité et certains sites d'échange d'information en ligne sont des mesures sur lesquelles j'attirerais votre attention également.
    L'échange d'information à l'étranger est quelque chose que nous, en tant que pays, devons faire davantage. Nous devons être responsables de certains des contrevenants, des délinquants sexuels, qui vont dans des pays où ils ne bénéficient pas des mêmes protections, des mêmes programmes, ou encore dans des pays où les lois sont laxistes et permettent à certains de ces prédateurs sexuels de notre société à commettre leurs horribles crimes à l'étranger.
    Il y a des programmes de justice applicables aux Autochtones qui sont également en place pour soutenir les délinquants et les victimes. Je soulignerais notre mesure législative, le projet de loi C-36, qui portait sur la prostitution, qui comptait également du financement pour les programmes.
    Nous continuons d'aller de l'avant avec cette approche holistique dont vous avez parlé.

  (1610)  

    Merci, monsieur le ministre.
    Merci, monsieur Easter.
    Notre prochain intervenant, du Parti conservateur, est M. Wilks.
    Je remercie les ministres de leur présence aujourd'hui. Mes questions s'adressent au ministre Blaney.
    Pour que les policiers puissent retracer les prédateurs sexuels qui s'attaquent aux enfants, il doit y avoir un certain niveau de coordination entre l'ASFC et le registre national des délinquants sexuels. Le projet de loi C-26 renforcerait la reddition de comptes en changeant les procédures liées à la méthode de notification des séjours à l'étranger que doivent suivre les délinquants sexuels inscrits.
    Pourriez-vous nous en dire plus sur cette partie du projet de loi? Quels renseignements les responsables du registre national des délinquants sexuels et les agents de l'ASFC échangeront-ils à la suite des amendements apportés à ce projet de loi?
    Je tiens à remercier le député, qui a été agent de police à la GRC pendant de nombreuses années. Je suis très fier de faire partie de ce gouvernement avec lui.
    C'est en effet ce que nous visons: nous voulons avoir un meilleur échange d'information entre l'Agence des services frontaliers du Canada et les responsables du registre qui renferme les noms des délinquants sexuels. Tous les renseignements suivants sur les délinquants sexuels sont recueillis régulièrement. Les renseignements qui seront échangés porteront sur les agresseurs sexuels d'enfants à risque élevé. Lorsqu'un délinquant sexuel à risque élevé est prêt à voyager à l'étranger, peu importe la durée de son séjour, les renseignements seront transférés à la GRC et à l'ASFC. Il y aurait le prénom et le nom de famille, tous les noms que l'individu utilise, la date de naissance, le sexe et le nombre de permis de conduire et de passeports valides que la personne détient. Ces renseignements servent de sonnettes d'alarme pour l'ASFC afin que le délinquant puisse faire l'objet d'un deuxième contrôle lorsqu'il retourne au pays. Il devra fournir des renseignements aux agents des services frontaliers, dont la date de son départ et la date de son retour ainsi que toutes les adresses où il a logé lorsqu'il était à l'extérieur du Canada. Ces renseignements seront transmis aux responsables du registre national des délinquants sexuels.
    On s'assure que si un individu est considéré comme étant un pédophile à risque élevé, des renseignements au sujet de ces déplacements seront colligés. Si l'ASFC ou la GRC ont des raisons de croire qu'il est nécessaire de transmettre à une administration ces renseignements au sujet d'un délinquant sexuel donné, ils pourront le faire pour prévenir un crime de nature sexuelle ou enquêter.
    Merci de vos observations.
    Pour poursuivre sur le même sujet, le projet de loi C-26 autorise la divulgation à l'ASFC de renseignements tirés de la base de données concernant les délinquants sexuels. L'ASFC pourra notamment fournir aux responsables de la base de données les renseignements suivants concernant le délinquant sexuel visé par la divulgation: la date de son départ du Canada, la date de son retour et toutes les adresses où il a logé pendant son séjour à l'étranger. Cette disposition permettra à l'ASFC de signaler les délinquants à risque élevé dans son système de surveillance et d'aider la police à veiller au respect des exigences relatives à l'identification des voyageurs.
    Pouvez-vous, s'il vous plaît, décrire comment le système fonctionne à l'heure actuelle en ce qui a trait à l'échange d'information entre les responsables du registre national des délinquants sexuels et l'ASFC? Pouvez-vous fournir un exemple pour illustrer comment les changements proposés dans le projet de loi contribueront à assurer la sécurité des Canadiens?
    La façon de procéder à l'heure actuelle est assez simple. Puisque l'ASFC n'est pas l'organisme d'application de la loi, elle ne peut pas échanger d'information avec les responsables du registre. Le Canada n'est donc pas au courant lorsqu'un délinquant sexuel à risque élevé voyage à l'étranger.
    Pour faire un parallèle, nous sommes plus ou moins aux prises avec la même situation lorsque des terroristes voyagent à l'étranger. Le Canada ne peut pas devenir un exportateur net de terroristes ou de prédateurs sexuels. C'est pourquoi nous devons permettre à nos organismes fédéraux d'échanger de l'information pour que ni les terroristes ni les prédateurs sexuels ne puissent tirer parti de cette lacune dans la loi. C'est pourquoi j'appuie sans réserve l'initiative du ministre MacKay et pourquoi nous sollicitons votre approbation cet après-midi pour faire avancer le projet de loi, combler la lacune et veiller à ce que ceux qui profitent de ce manque de communication qui est maintenant interdit en vertu de la loi ne puissent plus le faire. S'ils quittent le pays pour commettre des infractions criminelles telles que des agressions sexuelles, cette information sera transmise au pays.

  (1615)  

    De plus, le projet de loi C-26 renforcera la reddition de comptes en modifiant les procédures concernant la méthode relative aux avis en cas d’absence et de voyage à l’étranger des délinquants sexuels inscrits. Pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet de cette partie du projet de loi? Comment ce système d’avis fonctionne-t-il actuellement? Quel effet aura le projet de loi C-26? Cette modification aura-t-elle des conséquences sur nos responsabilités en matière de coopération dans des enquêtes internationales?
    Le projet de loi renforcera notre capacité de nous acquitter de nos responsabilités et de respecter nos accords en vue de mettre un frein au fléau qu’est le tourisme sexuel. Cela va mettre en place la base. Nous avons créé il y a quelque temps le registre national des délinquants sexuels. Nous devons maintenant mieux nous en servir. Le registre recense les prédateurs sexuels à risque élevé de commettre des infractions contre des enfants.
    Il est important d’intervenir, et voilà pourquoi, grâce au projet de loi, l’échange de renseignements se fera dans les deux sens entre l’ASFC et la GRC. Bref, lorsqu’un délinquant sexuel à risque élevé quitte le pays, la GRC en avise l’ASFC. Lorsque le délinquant revient au pays, l’ASFC recueille les données exactes concernant ses déplacements à l’étranger, et l’information est versée dans le registre national. Cet échange constant d’information de part et d’autre permettra de combler les lacunes et de réduire l’utilisation abusive de notre système que certaines personnes ont peut-être déjà fait en vue de voyager à l’étranger pour y faire du tourisme sexuel.
    Voilà pourquoi je crois qu’il s’agit d’une mesure solide. L’échange d’information est l’un des piliers du projet de loi, et cette mesure comblera les lacunes en la matière.
    Merci de vos questions et de vos réponses.
    La prochaine intervenante est Mme Péclet du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
     Je voulais simplement souhaiter une bonne année aux excellents membres du comité. Je suis très contente d'être de nouveau parmi eux en cette belle année 2015.
    Ma première question fait écho aux questions posées par ma collègue du comté de Gatineau. Je m'adresse au ministre de la Justice.
    J'aimerais savoir pourquoi toutes les infractions relatives aux mineurs n'ont pas été incluses. Par exemple, vous avez augmenté les peines liées à plusieurs infractions, mais vous ne les avez pas toutes incluses. Comment avez-vous procédé à la sélection des différentes infractions? Qu'est-ce qui a motivé vos choix?

[Traduction]

    Merci beaucoup de votre excellente question.
    Les principaux critères étaient des infractions contre des enfants qui sont d’ordre sexuel, qui peuvent mener à l’exploitation et qui peuvent causer une forme de tort à laquelle la meilleure façon de nous attaquer, selon nous, serait d’imposer des peines dissuasives qui mettent davantage l’accent sur la sécurité publique, l’échange de renseignements aux échelles nationale et internationale et l’utilisation de la banque de données et des systèmes en vue de permettre à la population d’avoir accès à cette information et de prendre des mesures pour protéger leurs propres enfants, en plus de certaines mesures proactives du projet de loi.
    Cela se veut une tentative de modernisation en mettant l’accent sur les infractions sexuelles contre des enfants.

  (1620)  

[Français]

    L'article 272 du Code criminel parle d'agression sexuelle armée, de menaces à une tierce personne ou d'infliction de lésions corporelles. Il me semble que cela ressemble à une infraction de nature sexuelle. Pour quelle raison cela a-t-il été exclu?

[Traduction]

    Je suis désolé, mais je ne comprends pas votre question.
    Ma question porte sur l’article 272 du Code criminel. L’infraction est:

[Français]

    ...agression sexuelle armée, menaces à une tierce personne ou infliction de lésions corporelles quand le plaignant a moins de 16 ans.
    Pourquoi avez-vous décidé de faire passer la peine de 14 ans d'emprisonnement à l'emprisonnement à perpétuité? Cela fait écho à ce que disait ma collègue. Pourquoi décider de faire passer la peine de 14 ans d'emprisonnement à l'emprisonnement à perpétuité dans certaines circonstances alors que cela ne serait pas le cas dans d'autres circonstances? Quelle a été la réflexion générale à ce sujet?

[Traduction]

    En gros, cet article du Code criminel vise les agressions sexuelles impliquant des armes et l’infliction de lésions corporelles. Comme vous n’êtes pas sans le savoir, dans le Code criminel, il y a des articles qui sont jugés plus graves et pour lesquels on impose une peine proportionnellement plus lourde.
    Bon nombre des articles dont les peines n’ont pas été augmentées imposent déjà des peines maximales de 14 ans. Dans le cas de l’infraction en question, compte tenu de sa nature et de la présence de violence, de lésions et d’une arme, nous avons jugé que cela nécessitait une peine plus sévère.
    Je comprends. Merci beaucoup.

[Français]

     J'ai une deuxième question à poser.
    Monsieur le ministre de la Sécurité publique, en réponse à une question de mon collègue du Parti libéral, vous avez dit qu'on n'avait pas encore établi le budget du registre et qu'on ne pouvait donc pas savoir ce qu'il coûterait.
    J'aimerais aussi parler de ce que vous avez répondu à ma collègue. Vous avez dit qu'il reviendrait aux forces de police ou aux autorités municipales — peu importe qui en serait responsable — de mettre un tel registre en vigueur. Comment allez-vous déterminer quels sont les coûts associés à ce registre? Les autorités responsables du registre des casiers judiciaires ont déjà beaucoup de difficulté à le tenir un jour. C'est d'ailleurs pour cela que, malheureusement, certaines personnes sont encore en liberté. Leur casier judiciaire n'est pas à jour.
    Ces autorités ont déjà le fardeau de s'occuper d'un premier registre, et elles devront mettre en oeuvre un deuxième registre alors qu'elles n'ont pas les ressources nécessaires pour le faire.
    Je vous remercie de votre question.
    D'abord, il y a déjà une procédure de notification publique à l'échelle des autorités locales et provinciales. À l'heure actuelle, les corps policiers identifient déjà certaines personnes comme étant des prédateurs sexuels à haut risque et jugent que, pour protéger la société, il est important de le faire savoir au public. Ces ressources sont déjà en place.
    Si ce projet de loi est adopté, le gouvernement canadien va colliger ces informations partout à travers le pays. L'entité qui sera responsable de colliger ces informations est la Gendarmerie royale du Canada. Après consultation avec les autorités territoriales, provinciales et municipales, nous allons extraire des notifications publiques qui concernent d'autres gens que des agresseurs sexuels à haut risque l'identité des personnes qui répondent à la définition de prédateur sexuel à haut risque pour les mettre dans une base de données publique.
    Cette base de données pancanadienne sera gérée par la GRC. À cette fin, le projet de loi prévoit un budget d'environ 1,3 million de dollars par année pour les cinq premières années, et 1,17 million de dollars pour les années subséquentes. On prévoit également un montant total de 169 057 $ sur cinq ans, puisqu'il y aura une notification nécessaire à l'ASFC, et un financement de 28 375 $. C'est ce qu'il en coûtera pour que l'agence puisse recueillir des informations sur les prédateurs sexuels à haut risque, par exemple lorsqu'ils reviennent de leur séjour.

  (1625)  

[Traduction]

    Merci, madame.
    Merci de vos réponses, monsieur le ministre.
    Notre dernier intervenant pour notre temps avec les ministres est M. Seeback du Parti conservateur.
    Monsieur MacKay, j’aimerais traiter de deux ou trois éléments. En passant en revue le projet de loi, j’ai remarqué que nous modifions des dispositions en vue d’augmenter certaines peines minimales obligatoires et que nous procédons aussi à une réforme de la preuve. Il est également question de l’imposition de peines consécutives aux délinquants ayant commis des infractions sexuelles contre des enfants.
    Je crois que beaucoup de ces éléments reçoivent une certaine couverture médiatique, ce qui est important, mais d’autres éléments passent sous silence. En ce qui concerne les articles qui portent sur ce qui se passe et les peines proposées pour la violation des conditions d’une ordonnance de probation, d’une ordonnance d’interdiction ou d’un engagement de ne pas troubler l’ordre public, je constate des changements majeurs qui auront une incidence sur la détermination de la peine. Pourriez-vous nous en parler?
    Merci beaucoup, monsieur Seeback.
    À titre de criminaliste, vous savez que c’est un problème depuis des années. Je présume que M. Wilks sait également que l’imposition de peines consécutives, les peines minimales obligatoires, les peines maximales, etc. font partie intégrante du projet de loi. Nous avons été témoins de problèmes en ce qui concerne les conditions des ordonnances de probation et des engagements qui sont imposées à titre de mesures proactives en vue d’essayer de protéger en premier lieu la population, mais cela permet également d’avoir un certain contrôle sur les agissements. Il y a des interdictions en ce qui concerne la consommation d’alcool, la possession d’armes ou la présence à proximité d’enfants.
    L’histoire et les statistiques démontrent malheureusement que la grande majorité des infractions sexuelles contre des enfants sont commises dans une maison par une personne que l’enfant connaît. L’établissement de paramètres concernant l’accès à l’enfant est l’objectif de bon nombre de ces mesures préventives. Malheureusement, la violation de ces conditions est courante. D’après nous, cela doit entraîner une certaine conséquence, et voilà ce que nous cherchons à accomplir ici. Par l’entremise du projet de loi, nous voulons imposer des peines accrues pour la violation des conditions des ordonnances de probation ou des engagements de ne pas troubler l’ordre public qui auront de véritables conséquences; en particulier, la violation des conditions d’une ordonnance de probation serait une infraction.
     Malheureusement, la violation des conditions était souvent traitée comme faisant partie de la nature du système. On ne faisait que l’ajouter en tant que peine concurrente. Il n’y avait pas de mention précise à ce sujet lorsqu’une peine était imposée par un juge.
    Nous tentons d’y remédier. La violation de ces conditions donne une raison de plus d’imposer la peine maximale. La règle générale que ces infractions... tout dépendamment si c’est fait par voie sommaire ou par voie de mise en accusation, se reflète dans la gravité et les conséquences de la violation de ces types de conditions qui visent à empêcher d’autres infractions d’être commises. Cela se trouve dans le projet de loi. C’est une importante partie du message que nous voulons envoyer à la population et aux délinquants, à savoir que les conditions imposées sont sérieuses et qu’il faut les respecter.
    J’aimerais également discuter avec vous des peines concurrentes et des peines consécutives. Je sais que c’est un autre changement qui est proposé dans le projet de loi.
    Pourquoi avons-nous décidé de modifier certains processus pour imposer des peines consécutives au lieu de peines concurrentes?
    Nous avons vu comment le tout fonctionne pour les infractions les plus lourdes du Code criminel, soit les meurtres au premier degré. Récemment, des agents de la GRC ont tragiquement perdu la vie lors d’une fusillade à Moncton. C’était un exemple de l’imposition de peines consécutives. À titre de précision, cela signifie d’imposer des peines cumulatives qui ne seront pas purgées de manière concurrente, mais bien de manière consécutive. Cela indique qu’un crime distinct a été commis contre une personne dans chaque cas.
    C’est le même raisonnement qui s’applique dans le cas des infractions sexuelles contre des enfants. Les paramètres à ce sujet sont restreints — et parfois avec raison — par l’application de longue date du principe de la proportionnalité. Il est très difficile pour une victime ou un membre de sa famille d’entendre que la peine qu’un juge impose ne reconnaît pas individuellement les infractions commises. Les peines consécutives le font. Elles mettent particulièrement l’accent sur chaque infraction, chaque acte de violence, chaque violence sexuelle contre un enfant ce qui, selon nous, nécessite une peine consécutive. Voilà ce que nous cherchons à accomplir par l’entremise du projet de loi. Nous croyons que c’est approprié, compte tenu de la nature odieuse de ce type d’infraction, des torts causés et de la perte de l’innocence, comme mon collègue, le ministre Blaney, l’a dit.
    Nous considérons comme très important de démontrer à la population et aux délinquants que le système de justice imposera de lourdes peines pour ces infractions de nature odieuse.

  (1630)  

    Merci beaucoup.
    C’est tout le temps que nous avions avec nos ministres aujourd’hui.
    Je vous remercie tous les deux de votre présence et de votre participation à nos délibérations sur le projet de loi C-26 en cette première séance à ce sujet.
    Nous suspendrons nos travaux pendant une minute pour donner le temps aux ministres de quitter la pièce.
    Je crois que nous discuterons du sixième rapport que vous avez en main, et je m’attends à ce que nous le fassions à huis clos.
    Monsieur le président, avant de suspendre vos travaux, si vous me le permettez, j’ai offert de remettre ce document d’information sur les centres d’appui aux enfants...
    Remettez-le au greffier qui le distribuera à tous les membres du comité.
    Merci beaucoup.
    Nous suspendons nos travaux pendant une minute.

  (1630)  


  (1630)  

    Nous reprenons nos travaux. Nous commencerons une nouvelle séance, mais j’ai besoin d’une motion pour passer à huis clos et discuter du sixième rapport qui porte sur le calendrier des travaux du comité.
    Une telle motion est-elle proposée? D’accord.
    Nous poursuivrons nos travaux à huis clos pendant quelques minutes. Que tous ceux qui sont en faveur de la motion?

  (1635)  

    Nous pourrions le faire à la fin de la séance.
    Non. Nous le ferons maintenant.
    Pour toutes les personnes qui se trouvent dans la pièce et qui ne sont pas autorisées à assister aux séances à huis clos, nous ferons tout notre possible pour vous permettre de revenir dans la pièce le plus tôt possible. Cela ne devrait pas être trop long, selon moi.
    [La séance se poursuit à huis clos.]

  (1635)  


  (1655)  

    Pendant que nous attendons nos invités, j’ai les rapports 13 et 14. Ils visent à demander à la Chambre, conformément à l’article 97.1 du Règlement, une prolongation de 30 jours en ce qui concerne le projet de loi C-590, dans le cas du rapport 14, et le projet de loi C-587, dans le cas du rapport 13. Quelqu’un pourrait-il proposer une motion en ce sens?
    Une voix: Je la propose.
    (La motion est adoptée.)
    Merci beaucoup à nos témoins du ministère de la Justice et du ministère de la Sécurité publique de leur présence devant le comité. Nous nous excusons du contretemps.
    Il n’y aura pas de déclarations préliminaires; nous n’aurons que des séries de questions.
    Madame Boivin.

[Français]

     Je vous remercie.
    Puisque nous avons un peu de temps, je m'adresserai aux fonctionnaires des deux ministères et de la GRC.
    Nous avons beaucoup parlé avec les ministres, entre autres de la question des augmentations des peines.
    Madame Morency, avant de rédiger le projet de loi C-26, le ministère de la Justice a-t-il fait une étude jurisprudentielle des cas qui sont survenus depuis un certain nombre d'années?
    En fait, pendant la promotion du projet de loi C-26, les deux ministres ont souvent dit que les infractions commises à l'endroit des enfants avaient augmenté de 6 % au cours des deux dernières années. On a souvent entendu cette statistique dans les médias et les deux ministres l'ont aussi souvent évoquée.
    Des analyses ont-elles été faites? Si oui, quelles sont-elles? Comment, et à quels constats les représentants du ministère sont-ils arrivés? Les tribunaux avaient-ils tendance à ne pas donner des sentences suffisantes?
    J'essaie de voir comment on peut décider de pondre un projet de loi tel que C-26. Quel genre d'analyses et d'études ont été faites pour arriver à ces dispositions?
    Comme le ministre vient de le dire, c'était dans le but d'augmenter les peines, non seulement les peines minimales mais aussi les peines maximales.

[Traduction]

    Le projet de loi C-26 propose aussi certaines réformes connexes en ce qui concerne l’imposition de peines concurrentes ou consécutives dans de tels cas. Comme vous l’avez souligné dans le cas du projet de loi C-10, la Loi sur la sécurité des rues et des communautés, ces réformes sont entrées en vigueur le 9 août 2011, et j’avoue qu’il est un peu tôt pour évaluer le progrès de certains de ces cas qui commencent à être entendus par des tribunaux criminels. Avant même l’entrée en vigueur du projet de loi C-10, nous avons vu des juges qui disaient, par exemple, que le Parlement se penchait sur l’importance de s’assurer que les peines dans de tels cas — non seulement les peines minimales, mais aussi les peines maximales — reflètent adéquatement la gravité des infractions et que les tribunaux les jugent plus sévèrement.
    C’est donc un peu une combinaison d’éléments. Premièrement, cela concerne la manière dont les tribunaux traitent de ces questions. Nous commençons un peu à le voir, mais c’est évidemment encore à ses balbutiements. Deuxièmement, le projet de loi C-26 propose une approche combinée pour essayer d’augmenter les peines dans l’ensemble; cela ne concerne pas seulement les peines minimales obligatoires et l’approche qu’avait le projet de loi C-10.

  (1700)  

    Je comprends bien tout ça. Ma question porte davantage sur les types d’études ou de constats qui nous ont poussés à créer le projet de loi C-26. Si nous ne sommes même pas encore capables de voir les effets, bons ou mauvais, du projet de loi C-10, comment pouvons-nous avoir besoin du projet de loi C-26? Par exemple, j’entends le milieu juridique dire qu’en fin de semaine dernière dans ma région, à Gatineau, le tribunal a rejeté 50 cas de conduite avec facultés affaiblies. Pourquoi? Ils l’ont été en raison du temps, de l’incompréhension, selon certains, du dossier par la couronne, des changements qui sont survenus à la suite de la nouvelle infraction, du nouveau fardeau, etc.
    Prenons-nous le temps d’informer tous les tribunaux de tous les changements pour nous assurer qu’ils les mettent en oeuvre avant d’arriver avec de nouveaux articles ou de nouvelles dispositions? Je ne comprends tout simplement pas la logique derrière tout ça, parce que vous ne répondez pas vraiment à ma question. Votre réponse ne m’aide pas à comprendre exactement les éléments qui ont été utilisés pour créer le projet de loi C-26.
    Encore une fois, je peux seulement vous renvoyer aux engagements pris par le gouvernement. Le ministre a clairement dit que la préoccupation et l’intention principales sont de s’assurer que dans tous les cas toutes les formes d’exploitation sexuelle des enfants sont traitées plus sévèrement. Certaines réformes ont été faites par l’entremise de la Loi sur la sécurité des rues et des communautés. Le projet de loi C-26 reprend le flambeau et va encore plus loin pour atteindre cet objectif. Je souligne notamment que le projet de loi C-26 augmente les peines maximales pour un grand nombre d’infractions. Les tribunaux pourront ainsi imposer une plus grande fourchette de peines, ce qui est différent de ce que vous aviez dans le projet de loi C-10.
    Ce sont donc en principe des augmentations, mais nous ne pouvons même pas encore dire ce que les autres dispositions pouvaient accomplir et si le tout avait un effet dissuasif sur la criminalité, par exemple. Je comprends.
    J’aimerais simplement ajouter un élément important à ce sujet que propose le projet de loi C-26. Si vous prenez la jurisprudence et la manière dont les tribunaux imposent des peines dans les cas de pornographie juvénile et d’infractions avec contact sexuel, le projet de loi C-26 s’assure que de telles peines sont imposées de manière consécutive. Nous le voyons maintenant dans certains cas. C’est une question de codification à bien des égards, mais la mesure législative dit qu’il faut le faire dans tous les cas. C’est une modification importante que nous n’avions pas jusqu’à maintenant.
    Dans le même ordre d’idées, le projet de loi C-26 propose une autre réforme. Si la cour est saisie d’une affaire impliquant un délinquant qui a fait plusieurs victimes, la mesure législative explique très clairement aux tribunaux la manière de traiter des peines à l’égard des victimes de manière à ce que, comme le ministre l’a dit, chaque victime ait l’impression que sa douloureuse expérience est reflétée dans la peine imposée à ce délinquant.
    Qu’est-ce qui explique que cela se trouve dans le projet de loi C-26, mais qu’on n’ait pas pensé l’inclure dans le projet de loi C-10?
    Je ne peux pas faire de commentaires sur ce qui s’est passé entre les deux. Le projet de loi C-10, comme vous vous en souvenez, était le regroupement de neuf projets de loi. Certaines parties avaient été présentées au Parlement sur plusieurs années et ont été regroupées après les élections fédérales en vue d’appuyer un engagement du gouvernement. Cela se voulait le rétablissement de réformes qui avaient déjà été présentées.
    Si vous y tenez, je peux demander à ma collègue, Mme Levman, de vous donner des exemples d’affaires dans lesquelles nous avons vu des tribunaux commencer à adopter l’orientation plus sévère que le Parlement demande des tribunaux, à savoir de traiter plus sévèrement les infractions sexuelles contre des enfants.

  (1705)  

    J’aimerais interroger la GRC maintenant, mais je prends note du fait que certains procès, qui précèdent même la présentation du projet de loi C-26, démontrent que les tribunaux prennent ces causes plus au sérieux.
    La GRC...
    Je suis désolé, madame Boivin, mais vos sept minutes sont écoulées. Merci beaucoup.
    Notre prochain intervenant est M. Calkins du Parti conservateur.
    Mes questions sont principalement destinées aux membres de la Gendarmerie royale. Certaines de mes questions sont de nature légèrement technique. J'aimerais simplement qu'on me confirme que j'interprète correctement le résumé législatif et la mesure législative.
    La Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels existe déjà. Les changements proposés maintenant sont majeurs, en ce sens qu'à l'heure actuelle, les personnes qui figurent dans le Registre des délinquants sexuels ne sont pas tenues d'aviser les autorités si elles quittent le pays. Est-ce exact?
    Elles doivent aviser les autorités si elles s'absentent plus de sept jours, mais elles n'ont pas besoin de communiquer l'endroit où elles iront, ni des détails concernant leur...
    Ces gens ne donnent aucun détails?
    Si, en ce moment, ces gens quittaient le pays pendant moins de sept jours, seraient-ils tenus d'aviser les autorités?
     Si l’on adopte les modifications législatives proposées dans le projet de loi, elles changeront cet état de choses, n'est-ce pas?
     Elles changeront cet état de choses pour les agresseurs sexuels d'enfants à risque élevé.
    Seulement pour ceux qui présentent un risque élevé...
    Les agresseurs sexuels d'enfants à risque élevé devront fournir les détails de chacun de leur séjour à l'étranger, quelle que soit leur durée. Ils devront indiquer exactement la date de leur départ, le lieu de leur séjour, ainsi que la date de leur retour. Les autres agresseurs sexuels devront faire la même chose s'ils s'absentent pendant au moins sept jours.
    À l'heure actuelle, si une personne dont le nom figure sur le registre se rend à un endroit différent de son lieu de résidence habituelle pendant moins de sept jours, elle n'a pas besoin d'aviser les autorités. Si la durée de son séjour est supérieure à sept jours, ou inférieure à sept jours, et qu'elle change ses plans, elle doit donner un préavis de sept jours, n'est-ce pas?
    Ces gens doivent-ils donner un préavis s'ils changent leurs plans?
    Oui. Disons que quelqu'un part en voyage pour quatre jours. Il n'a pas besoin d'aviser qui que ce soit. S'il décide de voyager pendant quatre jours supplémentaires et que la mesure législative dont nous sommes saisis est adoptée, il ne pourra pas prendre cette décision au cours de son voyage, n'est-ce pas? Selon mon interprétation du texte de loi, il doit prendre cette décision au moins sept jours avant son départ. Ai-je bien interprété le libellé?
    Si ses plans de voyage changent, il doit en aviser les autorités dans les sept jours qui suivent.
    Dans les sept jours qui suivent la modification de ses plans de voyage?
    C'est exact.
    D'accord. C'est bien.
    J'ai des questions à vous poser à propos de la banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé. Cette base de données diffère du Registre des délinquants sexuels et va plus loin, n'est-ce pas? Je pense qu'il est important que les Canadiens le sachent. Nous parlons de deux entités de données complètement distinctes. La banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé est la seule qui renferme des renseignements sur les délinquants qui seront rendus publics. Ai-je bien compris cet aspect?
    Avant de pouvoir ajouter une personne à la base de données, la personne doit d'abord avoir fait l'objet d'une communication dans l'intérêt public diffusée par les autorités locales provinciales ou territoriales. Si la personne répond au premier critère, c'est-à-dire qu'elle a déjà été identifiée publiquement dans le cadre d'une communication dans l'intérêt public — ces communications sont utilisées non seulement pour les délinquants sexuels, mais aussi pour les meurtriers, etc. —, il ne reste plus qu'à vérifier que le délinquant en question répond aussi à un deuxième critère, à savoir qu'il est considéré comme un agresseur d'enfants à risque élevé.
    Il est écrit ici que les personnes qui répondent à ces critères sont celles « qui sont déclarées coupables d'infractions sexuelles visant les enfants au Canada et présentent un risque élevé de commettre des crimes de nature sexuelle ». Qui détermine si elles présentent un risque élevé? Comment cette décision est-elle prise?
    Si ces gens ont déjà été identifiés par la province ou le territoire où ils résident, un processus sera entrepris, mais le ministère de la Sécurité publique, les provinces, les territoires ainsi que nous serons consultés afin de déterminer exactement le critère à remplir pour atteindre ce seuil.
    Toutefois, contrairement au registre des délinquants sexuels, cette base de données sera à la disposition du public, n'est-ce pas?
    C'est exact.

  (1710)  

    Elle sera tenue à jour par qui?
    Par la GRC.
    Toute personne ayant des enfants, des petits-enfants ou peu importe sera en mesure de consulter publiquement cette base de données, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Fort bien.
    Merci, monsieur le président.
    Il vous reste deux minutes.
    Je peux les céder à M. Dechert.
    Il figure sur ma liste d'intervenants.
    Si vous avez terminé, monsieur Calkins, c'est avec plaisir que j'utiliserai le reste de votre temps de parole.
    J'ai terminé, merci.
    Merci beaucoup, monsieur Calkins.
    J'aimerais donner suite à la question que Mme Boivin a posée à Mme Morency. Mme Morency a en effet mentionné que Mme Levman pourrait peut-être nous en dire un peu plus sur certains cas de jurisprudence.
    Ma question concerne le principe de totalité et la façon dont, selon vous, les tribunaux l'appliquent aux infractions comme celles visées par le projet de loi C-26. Je crois comprendre que certaines des affaires dont nous parlons sont très récentes. Je remarque, par exemple, que des décisions ont été rendues à propos de certaines d'entre elles en 2014. Je pense que quelques-unes d'entre elles pourraient être liées à la mesure législative qui a été adoptée dans le cadre du projet de loi C-10 ou à une autre loi peut-être.
    Madame Morency, j'aimerais que vous formuliez des observations en premier. Ensuite, Mme Levman pourrait peut-être nous exposer certains des cas.
    Pouvez-vous nous dire si les tribunaux ont systématiquement infligé des peines dans tous ces cas, ou le projet de loi C-26 réglera-t-il certains de ces problèmes?
    En fait, je vais demander à ma collègue, Mme Levman, de répondre aux deux parties de votre question.
    Comme Mme Morency l'a indiqué plus tôt, nous observons des cas liés à des accusations de pornographie juvénile et des accusations d'infractions d'ordre sexuel contre des enfants. Nous constatons que les tribunaux infligent assez systématiquement des peines consécutives — pas dans tous les cas, mais ils semblent avoir tendance à le faire.
    Cependant, nous observons un peu moins d'uniformité dans les affaires touchant plusieurs victimes. Les tribunaux adoptent alors différentes approches. Parfois, ils procèdent une victime à la fois; le délinquant se voit infliger des peines concurrentes pour les infractions commises contre la même victime, mais des peines consécutives pour chacune de ses victimes. Dans d'autres affaires, les victimes sont groupées en fonction des infractions qui ont été perpétrées contre elles; les peines infligées pour chaque victime sont purgées simultanément, alors que les peines infligées pour chaque type d'infractions d'ordre sexuel contre des enfants sont consécutives.
    Est-il vrai que les peines ne sont pas appliquées uniformément d’un tribunal à l’autre?
    Oui.
    Vous avez également posé une question à propos du principe de totalité.
    C’est exact.
    Nous constatons que, lorsqu’un délinquant est reconnu coupable de plusieurs infractions, les tribunaux prennent note du fait qu’ils auraient imposé une peine plus longue pour une infraction en particulier, mais ils réduisent la peine d’un an ou deux pour respecter le principe de totalité.
    Je vous remercie infiniment des questions que vous avez posées et des réponses qui leur ont été apportées.
    Notre prochain intervenant est M. Easter du Parti libéral.
    Je m’adresse maintenant soit à Mme Morency, soit à Mme Levman. En ce qui concerne la dernière question, ces peines plus lourdes que l’on voit les tribunaux infliger ont-elles un quelconque effet dissuasif sur les délinquants qui commettent des crimes de ce genre, si ce n’est qu’elles les empêchent de circuler dans nos rues plus longtemps, ou n’y a-t-il rien que vous puissiez dire pour le moment?
    Personnellement, je crois en la réadaptation. Si notre objectif consiste à les empêcher de circuler dans nos rues plus longtemps, eh bien, c’est un objectif parmi tant d’autres. Toutefois, si nous empêchons ces gens de circuler dans nos rues sans leur offrir de programmes, et si nous nous contentons de les remettre en liberté à la fin de leur peine, nous créons simplement d’énormes bombes à retardement. Par conséquent, je me demande si ces peines ont un effet dissuasif. Si ces peines plus lourdes et ces peines consécutives sont censées avoir un effet dissuasif, autre que d’empêcher les délinquants de circuler dans nos rues, les faits corroborent-ils cet effet?
    Je pense qu’il est clairement établi que les principes fondamentaux qui sous-tendent l’approche en matière de peines du Code criminel exigent que les tribunaux prennent en considération la dénonciation, la dissuasion, la réadaptation, etc. Au fil des ans, de nombreuses recherches ont été menées qui traitent des différentes répercussions que les peines peuvent avoir et, notamment, de la question de savoir si les peines minimales obligatoires ont un effet dissuasif particulier comparativement à la neutralisation et toutes les mesures de ce genre. Je suppose qu’à court terme, il serait difficile d’affirmer qu’un lien de causalité directe existe entre ceci et cela en se fondant, par exemple, sur les réformes qui ont été mises en oeuvre au cours des trois dernières années, c’est-à-dire depuis l’adoption du projet de loi C-10.
    Cependant, cela ne veut pas dire que même les réformes de la détermination de la peine, découlant du projet de loi C-10, n’ont pas eu une incidence perceptible. Par exemple, après avoir examiné certaines affaires, j’ai observé le fait que le Parlement était en train d’étudier des propositions d’amendements visant à traiter ces affaires plus sérieusement, et j’ai remarqué que les tribunaux indiquaient que le Parlement soutenait que nous devrions prendre ces infractions plus au sérieux, les condamner plus vigoureusement et dissuader les gens de les commettre de façon plus convaincante. Dans la mesure où, à court terme, nous pouvons signaler cela, je pense que l’on retrouve des preuves à cet effet dans certains cas de jurisprudence.

  (1715)  

    Merci.
    Passons à la GRC et aux différentes bases de données. La banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé sera rendue publique. Comment cela sera-t-il accompli? Comment l’information circulera-t-elle? Si M. Jones est libéré et qu’il s'apprête à débarquer à Delisle, en Saskatchewan, comment se déroulera la transmission de cette information là-bas?
    Posez-vous cette question précisément au sujet de la banque de données publique?
    Oui.
    Cette question n’est pas liée à la libération. Il est important de le comprendre. Pour que le nom d’une personne figure dans la banque de données, il faut premièrement que les autorités locales, provinciales ou territoriales aient pris la décision de faire une communication dans l’intérêt public. Lorsque cela se produit, la première étape est franchie.
    Dans les cas où les autorités locales ont pris la décision de diffuser une communication dans l’intérêt public, la deuxième étape consistera à déterminer si la personne répond aux critères à remplir pour être considérée comme un agresseur sexuel d’enfants à risque élevé. Comme je l’ai mentionné plus tôt, l’établissement de ces critères est toujours en cours dans le cadre de consultations entre le ministère de la Sécurité publique et les provinces et les territoires, étant donné qu’à l’heure actuelle, les provinces et les territoires ont tous leur propre façon de déterminer s’ils feront une communication dans l’intérêt public.
    Ces critères sont en train d’être établis, mais si une personne répond aux critères à remplir pour être considérée comme un agresseur sexuel d’enfants à risque élevé, ses renseignements seront ajoutés à la base de données publique.
    D’accord.
    La mesure législative prévoit une base de données différente qui dépasse l’expansion de notre Registre des délinquants sexuels. D’autres pays ont-ils recours à des registres et des communications publiques de ce genre? Je pense que cela se produit dans certaines régions des États-Unis. Quelle est leur expérience à cet égard? Le savez-vous? Pouvez-vous nous donner un exemple? Si mon collègue souhaite étudier un endroit où ce système est en place, où pourrions-nous trouver cette information?
    Allez-y, Kathy.
    Ce genre de bases de données est certainement utilisé aux États-Unis. La base de données est en place depuis un certain nombre d’années. J’ignore combien d’États participent à sa mise à jour.
    Disposez-vous d’autres renseignements?
    Nous ne savons pas combien d’États participent à sa mise à jour, mais les faits démontrent qu’un grand nombre de membres du public appuient l’idée de disposer d’une base de données semblable. Certaines personnes sont préoccupées par la nécessité de s’assurer que la base de données est tenue à jour, que les renseignements comme les adresses sont exacts, afin que personne ne soit identifié comme un agresseur sexuel d’enfants par erreur.
    D’accord.
    Je ne tiens pas à vous occasionner du travail, mais pourriez-vous nous donner trois exemples d’États qui ont mis en place une telle base de données? Connaîtriez-vous par cœur trois États de ce genre?
    Non, mais, si vous le désirez, nous pourrions certainement communiquer le nom de ces États au comité.
    Si vous pouviez fournir ces renseignements au comité, ce serait bien. Ainsi, nous pourrons effectuer nos propres recherches et obtenir des renseignements auprès de ces régions.
    Certainement.
    L’un de mes sujets d’inquiétude à propos de ces personnes tient au fait que certaines d’entre elles ne suivent pas de programmes pendant leur séjour au sein du système carcéral de Service correctionnel Canada.
    Qu’advient-il si ces délinquants ne suivent pas de programmes? Est-ce qu’ils partent simplement lorsque leur mandat d’emprisonnement expire?
    Dès leur admission dans un établissement de Service correctionnel Canada, les délinquants sont évalués. Si leurs infractions sont de nature sexuelle, les évaluateurs recommandent qu’ils participent à un programme à intensité faible, modérée ou élevée. Cette recommandation est ajoutée à leur plan correctionnel, qui est maintenant obligatoire. C’est, bien entendu, un facteur qui est pris en considération avant d’envisager de leur accorder une liberté conditionnelle ou une semi-liberté.
    De plus, au moment du prononcé de la sentence, certains délinquants seront visés par une ordonnance de surveillance de longue durée si le juge estime que ces délinquants pourraient présenter un risque ou ne pas être aussi bien disposés que d’autres délinquants à l’égard de certains programmes ou de certains choix de traitement.
    En outre, s’ils présentent toujours un risque au moment de leur mise en liberté, ils peuvent être visés par un engagement de ne pas troubler la paix en vertu de l’article 810, comme toute personne peut l’être. Il n’est pas nécessaire que l’individu soit un délinquant.

  (1720)  

    Si personne n'a rien d'autre à ajouter, je vous remercie, monsieur Easter.
    Je pense que notre dernier intervenant est M. Seeback.
    Parlons de l'interaction entre les peines consécutives et le principe de totalité. J'ignore à qui je dois poser la question.
    Si on tient compte du principe de totalité en même temps que de l'augmentation des peines minimales obligatoires et, aussi, de la nature consécutive des peines, comment interagissent tous ces facteurs et la jurisprudence que vous avez étudiée? Si la peine correspondant à une victime était de quatre ans, qu'il y ait trois victimes et que les peines soient purgées l'une après l'autre, est-ce que cela ferait 12 ans? Est-ce que cela s'oppose au principe de totalité ou bien les juges chercheront-ils à compter chacune des trois victimes comme une victime et demie, ce qui revient au même qu'avant, de toute façon?
    Qu'en pensez-vous, d'après la jurisprudence et d'autres facteurs?
    Il est difficile de prévoir avec certitude ce qui arrivera. Je veux dire qu'on laisse à la discrétion des juges l'application, à ce moment-là, du principe de totalité, après qu'ils auront déterminé que, compte tenu de ce principe, la peine combinée ou entière serait excessivement longue ou dure. Mais, comme ma collègue Nathalie Levman l'a dit, nous avons vu des cas où on a écourté la peine pour chaque infraction, pour satisfaire au principe de totalité de la peine, en justifiant cette décision par la proportionnalité de la peine en soi.
    L'augmentation de la peine maximale ne risque-t-elle pas d'écorner le principe de totalité? Si, anciennement, la peine maximale avait été, par exemple, de 10 ans et que, maintenant, elle est de 14 ans, ne croyez-vous pas que cela abolit les repères prévus dans cette circonstance?
    Je sais que vous n'avez pas de réponse certaine, mais qu'en pensez-vous?
    Il est sûr que cela livre un message d'exemplarité de la peine: de quelle peine le pire salaud, auteur du crime dans les circonstances les plus aggravantes mériterait-il d'écoper? Cela incite les juges à changer d'opinion. La peine maximale est augmentée. Elle a été augmentée, ce qui pourrait changer leur opinion sur un coupable qui pourrait passer pour le pire criminel dans les pires circonstances. Cela arrivera certainement, nous le prévoyons, pour certaines peines.
    Je vais céder le reste de mon temps à M. Wilks.
    Merci.
    Ma question s'adresse à la GRC.
    Supposons qu'un délinquant sexuel inscrit dans le Registre national des délinquants sexuels aille en Italie. J'ai choisi ce pays, parce que je crois que nous avons là-bas un agent de liaison. Comment allons-nous confirmer que ce délinquant, qui fournit trois adresses de séjour dans ce pays, y séjournera effectivement?
    Y a-t-il une collaboration effective avec la police italienne ou, d'ailleurs, d'autres pays d'Europe ou devons-nous compter sur notre agent de liaison pour ce travail?

  (1725)  

    Ce n'est pas si simple.
    La loi prévoit la communication de ces renseignements par nous à l'Agence des services frontaliers du Canada, l'ASFC. Tout d'abord, dans le cas particulier des pédophiles à risque élevé, nous posséderons en fait des renseignements détaillés pendant moins de sept jours. Cela nous permet de les communiquer à l'agence, qui, au retour de l'individu, peut vérifier si ce qu'elle a appris correspond aux renseignements qu'il a fournis avant son départ. La communication par nous de renseignements aux agents étrangers ne se fera pas de manière préétablie. Chaque cas sera un cas d'espèce, lorsqu'il y a des motifs pour accélérer l'enquête ou empêcher la commission d'une infraction, tout en tenant compte, notamment, des directives ministérielles sur la communication de renseignements aux polices étrangères, des questions de protection de la vie privée et, selon le pays, des conséquences de la communication des renseignements.
    Voilà, généralement, comment cela se passerait. Il faudrait des motifs précis pour faire plus que communiquer des renseignements à l'ASFC et vérifier des données.
    D'accord. Merci.
    En fait, il reste quelques minutes dont pourrait profiter un néo-démocrate.
    Madame Péclet.
    Deux minutes ou trente secondes, ça ne se refuse pas.

[Français]

     Le ministre a mentionné quelques chiffres en ce qui a trait au registre.
    Des registres existent déjà dans certaines municipalités, alors que d'autres municipalités n'en ont pas. J'aimerais simplement savoir combien d'argent cela représente. Il a parlé de 1,3 million de dollars pour cinq ans. Il a mentionné certains chiffres. Quel est le budget accordé à ce nouveau registre? Comment allez-vous colliger toutes ces informations? Comment cela sera-t-il mis en oeuvre dans les municipalités?
    Cela existe dans certaines municipalités, mais pas dans d'autres. J'aimerais donc simplement clarifier ce que le ministre nous a dit.

[Traduction]

    Vous avez raison de dire que dans les municipalités, il ne s'agit pas de bases de données, ce genre de choses. La nouvelle base de données dont vous parlez sera publique. Actuellement, on peut, à l'échelle locale ou à celle d'une province, divulguer certains faits, dans l'intérêt du public, mais c'est beaucoup plus un communiqué destiné à avertir le public de la présence d'un délinquant dans les environs qu'une base de données. Nous ne consulterons pas ces bases de données.
    Le coût estimé de la mise en oeuvre de la loi par nous, pour les changements que nous devrons apporter au registre des délinquants sexuels ainsi que de la nouvelle banque de données, se chiffre à 6,7 millions de dollars au cours des cinq premières années, puis à 1,17 million par année ensuite. Il comprend la création de cette nouvelle banque de données publique, qui est distincte du Registre national des délinquants sexuels.
    Précisons que le Registre national des délinquants sexuels existe déjà et qu'il renferme 36 000 noms. Cette base nationale unique renferme les noms des personnes reconnues coupables et qui sont tenues de s'y inscrire.
    Dans les provinces, des bureaux d'inscription créés sous le régime de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, permettent de désigner les endroits où ces délinquants iront se présenter, s'inscrire et faire leur déclaration annuelle ainsi que signaler toute modification d'adresse, du permis de conduire, et ainsi de suite. Ils existent aujourd'hui. Ils permettent la mise à jour de la base de données du Registre national des délinquants sexuels. Nous savons ainsi où ces délinquants se trouvent, s'ils ont changé d'adresse, ainsi de suite. Ces renseignements servent aussi à faire des interrogations à l'appui des enquêtes.
    Puis-je...
    Non. C'est terminé.
    C'est une base de données distincte de la banque de données sur les délinquants sexuels à risque élevé qui sera créée après l'adoption du projet de loi.
    Je remercie les intervenants et les témoins.
    Je tiens aussi à remercier nos témoins du ministère de la Justice, de Sécurité publique et Protection civile Canada et de la Gendarmerie royale du Canada.
    Madame Morency.

  (1730)  

    Je suis désolée, mais pourrait-on corriger une erreur que j'ai faite en parlant des réformes et des peines prévues par le projet de loi C-10 pour les agressions sexuelles d'enfants. Je pense avoir dit que leur entrée en vigueur avait été en 2011, alors que, en fait, ç'a été le 9 août 2012. Je suis désolée de cette erreur.
    Je vous remercie de cette mise au point.
    Je vous remercie tous pour le temps que vous avez consacré au comité et au public. Merci beaucoup.
    Cela étant dit, la prochaine séance est mercredi. La séance est levée.
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