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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 108 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 20 février 2019

[Enregistrement électronique]

  (1550)  

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur le cannabis thérapeutique et le bien-être des anciens combattants.
    Je vous présente nos témoins d'aujourd'hui. Par vidéoconférence depuis Halifax (Nouvelle-Écosse), nous allons entendre M. Kyle Atkinson. Nous accueillons ici même M. James MacKillop de l'Université McMaster qui est titulaire de la chaire de recherche Peter Boris sur les toxicomanies au centre de santé Saint-Joseph de Hamilton. Nous recevons aussi M. Andrew Freedman, directeur principal de Freedman and Koski Inc., qui témoigne par vidéoconférence depuis San Francisco en Californie.
    Nous allons d'abord entendre nos témoins...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'ai une motion à présenter.
    Je veux dire à nos témoins que je connais bien leur expertise du domaine et que j'apprécie grandement leur contribution. Il y a toutefois une question très importante que notre comité doit régler avant que nous puissions vous céder la parole. Je vous remercie de votre patience et de votre compréhension à ce sujet.
    Monsieur le président, il s'agit d'une motion urgente et j'ai besoin du consentement unanime du Comité pour pouvoir la présenter. Avant de vous en faire lecture, je vais situer les choses dans leur contexte.
    Le contexte est bien simple. Nous avions une ministre des Anciens Combattants à temps plein qui devait comparaître devant le Comité. C'est toujours de cette manière que les comités fonctionnent lorsqu'ils doivent examiner les budgets de dépense du gouvernement. Chaque comité peut convoquer... Comme c'est presque toujours le cas, ce serait la ministre des Anciens Combattants qui aurait témoigné devant le Comité. C'est une tradition que nous avons toujours respectée jusqu'à maintenant. Cependant, étant donné le chaos qui règne actuellement à Anciens Combattants Canada et le fait que nous avons perdu notre ministre — qui a dû démissionner après avoir été nommée à ce poste — et comme nous disposons de très peu de temps pour examiner le budget supplémentaire (B) du ministère, comme nous étions disposés à le faire conformément à nos obligations, je propose cette motion.
    Je demande donc le consentement unanime de mes collègues pour présenter la motion suivante: « Que le Comité invite le ministre des Anciens Combattants par intérim à comparaître au sujet du Budget supplémentaire des dépenses (B) le 25 ou le 27 février 2019. »
    Ces dates sont précisées dans ma motion du fait que le budget supplémentaire (B) sera renvoyé à la Chambre, le Comité étant réputé en avoir fait rapport sans l'avoir examiné, à la fin de la semaine prochaine si nous ne convoquons pas le ministre pour lui poser des questions au sujet des dépenses prévues à Anciens Combattants Canada.
    Il est primordial que notre comité s'acquitte de son mandat, et ce, malgré le chaos qui règne actuellement au sein du Cabinet et du gouvernement. Nous devons encore faire rapport — si nous choisissons de le faire en tant que comité — du budget des dépenses pour que la Chambre des communes sache ce que nous en pensons.
    Je sais que le Règlement exige qu'un préavis soit donné pour présenter une motion, mais compte tenu de l'urgence et de l'importance de la situation pour notre comité, j'ai cru bon mettre de l'avant cette motion en demandant à mes collègues de consentir unanimement à ce qu'elle soit présentée.
    Gord.
    Oui, monsieur le président.
    Désolé, Gord, mais Mme Wagantall était en attente.
    Madame Wagantall.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux exprimer mon soutien au dépôt de cette motion. Il incombe au Comité d'examiner les budgets des dépenses, et nous nous retrouvons confrontés à un échéancier très serré en raison de tout ce qui arrive au gouvernement avec la ministre des Anciens Combattants récemment nommée qui s'est retrouvée dans une situation où elle n'avait d'autre choix que de démissionner. Nous voilà donc maintenant avec un ministre des Anciens Combattants par intérim.
    Je crois qu'il est vraiment important que nous fassions le nécessaire pour examiner comme il se doit le Budget supplémentaire des dépenses (B) en nous assurant de le faire le 25 ou le 27 février . C'est la seule option qu'il nous reste, car on considérera à la fin de la semaine prochaine que nous avons fait rapport de ce budget, peu importe que le ministre des Anciens Combattants par intérim ait comparu ou non. J'estime qu'il faut que nous nous acquittions efficacement de ce mandat, car les comités — comme chacun sait — doivent fonctionner de façon indépendante sans égard au fait que le gouvernement puisse avoir à composer avec des circonstances comme celle que nous connaissons actuellement. C'est notre responsabilité.
    J'ajouterais que l'on peut très bien expliquer les raisons pour lesquelles on n'a pas donné préavis de cette motion, et que cela n'enlève rien à son importance. Je crois que tout le monde sera d'accord pour que nous allions de l'avant avec cette motion de manière à convoquer le ministre des Anciens Combattants par intérim devant le Comité le 25 ou le 27 février.

  (1555)  

    Monsieur Kitchen.
    Monsieur le président, je veux exprimer mon soutien à cette motion.
    Pour une motion comme celle-ci, il est essentiel que des dates soient précisées, car comme l'a souligné mon collègue, si nous n'avons pas l'occasion d'examiner ce budget des dépenses d'ici la fin de la semaine prochaine, il sera renvoyé à la Chambre et réputé avoir été examiné quoiqu'il arrive.
    Aujourd'hui même, le premier ministre a rappelé que les comités sont des entités indépendantes. Nous devons donc prendre nos propres décisions en nous assurant à chaque fois que nous disposons de toute l'information nécessaire et de tous les pouvoirs requis, et que nous comprenons bien toutes les répercussions qui peuvent en découler. Dans ce cas particulier, ces conditions ne sont pas remplies.
    Je rappelle que lors de sa comparution devant le Comité, le ministre O'Regan avait dit qu'il reviendrait discuter avec nous du Budget supplémentaire des dépenses (B). Cela n'a pas pu se concrétiser. Une nouvelle ministre a été nommée et a démissionné depuis, si bien que nous nous retrouvons encore avec un nouveau ministre.
    Étant donné l'importance de ces enjeux pour nos anciens combattants, je pense qu'il nous incombe de veiller à pouvoir tenir ces discussions en pleine connaissance de cause.
    Monsieur Johns.
    J'abonde dans le même sens que M. Kitchen. Nous avions cru comprendre que la ministre comparaîtrait devant nous avant le budget et la pause. On nous a indiqué il y a quelques semaines à peine qu'elle viendrait nous rencontrer avant que nous fassions rapport du budget des dépenses. Je crois que nous nous attendons toujours à ce que cela soit le cas avec le nouveau ministre. Je pense que les anciens combattants s'attendent également à ce que nous le recevions pour procéder à un examen approfondi de ce budget, comme nous sommes censés le faire.
    Comme le nouveau ministre a indiqué que les anciens combattants sont sa priorité et qu'il va les représenter, je m'attends à ce qu'il comparaisse devant nous. Compte tenu de ces attentes, j'appuie sans réserve cette motion.
    Monsieur Eyolfson.
    Je peux apporter une précision, monsieur le président. Je ne suis pas en train de présenter ma motion. Je demande plutôt le consentement unanime du Comité pour pouvoir le faire.
    Nous sommes passés à un autre point, on ne parle plus de cette motion.
    Je vous demande pardon?
    Alors, vous devez demander la mise aux voix.
    Je demande le consentement unanime pour pouvoir présenter cette motion...
    Vous n'avez pas obtenu le consentement unanime.
    J'admets avoir mis la charrue devant les boeufs. J'aurais dû demander le consentement unanime pour pouvoir présenter ma motion, mais je voulais que tous comprennent bien de quoi il s'agit.
    Oui. D'accord. Je suis désolé. Je vais voir ce que le Comité en pense.
    Y a-t-il consentement unanime pour que cette motion soit présentée?
    Puis-je prendre la parole un moment? Non? Je n'ai pas...
    Non.
    M. Darrell Samson: D'accord.
    Personne ne peut prendre la parole.
    Pas d'intervention s'il n'y a pas consentement? Je ne peux pas prendre la parole?
    Un député: Il n'y a pas eu consentement.
    Vous n'alliez pas voter en faveur de toute manière.
    Vous ne pouvez pas en être sûr.
    Oui; vous venez de dire à votre collègue que vous alliez voter contre.
    Je n'ai pas dit cela.
    M. Phil McColeman: Oui, je vous ai entendu.
    Le président: Monsieur Chen.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Serait-il possible de rappeler mes collègues à l'ordre?
    Oui.
    Nous allons maintenant amorcer nos travaux et entendre nos témoins.
    Désolé, mais est-ce qu'il y a eu mise aux voix?
    Il n'y avait pas consentement unanime pour que la motion soit présentée.

  (1600)  

    Un instant, s'il vous plaît. J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je demande un vote par appel nominal concernant le consentement unanime.
    Ce n'est pas nécessaire.
    Ce n'est pas nécessaire. D'accord.
    Je voudrais alors présenter une autre motion: Que le Comité demande au premier ministre de nommer un ministre des Anciens Combattants à temps plein.
    Avons-nous le consentement unanime pour que cette motion soit présentée?
    Des députés: Non.
    Allons-nous en débattre?
    La motion doit être soumise à l'avance au Comité. Comme cela n'a été fait qu'aujourd'hui, il faut qu'il obtienne le consentement unanime pour que nous puissions en débattre.
    Alors, nous ne pouvons pas en débattre?
    Il aurait fallu qu'il en donne préavis avant aujourd'hui.
    Nous avons des témoins qui attendent. Il n'a pas obtenu le consentement unanime.
    Le président: Monsieur McColeman.
    Je passe donc à un autre sujet. J'aimerais présenter une autre motion: Que le Comité invite le ministre des Anciens Combattants par intérim à comparaître devant le Comité afin qu'il comprenne les sujets dont nous discutons et l'importance de ceux-ci pour les anciens combattants.
    Avons-nous le consentement unanime pour cette motion-ci?
    Non. Le ministre est lui-même un ancien combattant et il comprend très bien de quoi il en retourne. Il a également beaucoup lu à ce sujet.
    Non, il n'y a pas consentement.
    Nous n'avons pas le consentement unanime.
    Voulez-vous que nous considérions que vous avez donné préavis de ces motions en prévision de notre prochaine séance?
    Certainement.
    J'aimerais pouvoir dire que nous perdons ici l'occasion de procéder à un examen minutieux des sommes que l'on prévoit dépenser, soit quelque 323 millions de dollars comme l'indique le Budget supplémentaire des dépenses (B) d'Anciens Combattants Canada. Voilà donc 323 millions de dollars qui vont échapper à la surveillance de notre comité.
    Nous parlons aujourd'hui de cannabis thérapeutique. Nous allons commencer...
    Oui, Cathay.
    J'invoque le Règlement. Je serai très brève. Lorsque nous avons discuté du calendrier de nos séances d'ici la fin juin, nous avons convenu d'une date pour que la ministre des Anciens Combattants vienne discuter avec nous...
    C'est le 20 mars qui était inscrit à notre calendrier.
    ... du Budget supplémentaire des dépenses. Le délai est maintenant fixé à la fin de la semaine prochaine. Je trouve aberrant que l'on n'accepte pas simplement de convoquer le ministre par intérim le 25 ou le 27 février de telle sorte que le Comité puisse faire son travail en posant des questions au sujet de ce budget des dépenses pendant qu'il en est encore temps.
    Je suis désolé, mais vous êtes encore en train de débattre de ces questions. Notre séance d'aujourd'hui est consacrée au cannabis thérapeutique, et j'aimerais que nous puissions commencer à en discuter.
    Oui, monsieur Kitchen.
    J'aurais besoin d'une explication pour m'assurer que je comprends bien... Nous devons nous pencher sur le budget des dépenses d'ici la fin de la semaine prochaine. Il y a un ministre qui est censé comparaître au mois de mars. Il va se présenter ici et nous parler du budget des dépenses alors que ce dossier aura déjà été réglé. Comment est-il possible...
    J'invoque le Règlement. Il y a un ordre du jour qui a été établi pour cette séance. Il y est prévu que nous recevons des invités dont nous allons entendre le témoignage. Nous avons plutôt discuté jusqu'à maintenant des travaux du Comité, et il y a des périodes réservées à cette fin.
    Nous devrions débuter la réunion conformément à l'ordre du jour établi, à moins qu'il y ait consentement unanime pour qu'il en soit autrement, mais je ne crois pas que ce soit le cas.
    Nous allons entreprendre nos travaux.
    Ne puis-je pas obtenir une explication?
    Vous pouvez invoquer le Règlement.
    J'invoque le Règlement pour obtenir une précision. Nous avons des dates qui ne nous permettent pas de respecter les exigences que nous avons à remplir.
    Le rappel au Règlement portait sur le consentement unanime. Comme il n'y a pas eu consentement unanime, nous ne pouvons pas débattre de la question.
    Nous allons maintenant entendre notre premier témoin.
    Monsieur MacKillop, vous avez 10 minutes.
    Bonjour, honorables députés. Je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole devant votre comité pour discuter de cet important sujet.
    À l'Université McMaster et au centre de santé St. Joseph de Hamilton, je suis titulaire de la chaire de recherche Peter Boris sur les toxicomanies, en plus d'être directeur du Peter Boris Centre for Addictions Research et du Michael G. DeGroote Centre for Medicinal Cannabis Research.
    Tout au long de ma carrière, j'ai cherché à parfaire ma compréhension des toxicomanies et, plus récemment, à faire progresser la science du cannabis thérapeutique.
    Je tiens à souligner que les activités principales du DeGroote Centre sont financées par des dons philanthropiques, et non par l'industrie. Notre mission consiste à favoriser une meilleure compréhension du cannabis médicinal en nous fondant sur des faits probants tant pour ce qui est de ses effets thérapeutiques positifs que relativement à ses possibles effets secondaires néfastes.
    Nous cherchons d'abord et avant tout à mener des recherches objectives sur le cannabis, comme nous le faisons pour n'importe quel autre médicament utilisé en médecine.
    Notre raison d'être ne s'appuie pas sur une prise de position en faveur ou à l'encontre du cannabis comme outil thérapeutique efficace, mais plutôt sur la conviction qu'il est nécessaire de pousser davantage les recherches à ce sujet.
    J'ai moi-même publié des travaux de recherche traitant des risques et des méfaits pouvant être associés à la consommation de cannabis ainsi que de ses possibles applications thérapeutiques. Je ne suis ni pour ni contre le cannabis. Je m'intéresse seulement aux données probantes à ce sujet, aussi bien aux fins de la médecine que pour l'élaboration des politiques.
    Je dois dire en guise de préambule que je suis tout à fait conscient des sacrifices consentis par nos anciens combattants. Dans le cadre de ma formation clinique, j'ai travaillé directement auprès d'anciens combattants dans un hôpital spécialisé de Providence aux États-Unis. Je suis bien au fait de la prévalence des problèmes de santé qui sont fréquemment à l'origine de leur recours au cannabis, et je sais que ces problèmes sont souvent la conséquence de leur service militaire.
    Il faut aussi noter que plus de 8 000 anciens combattants canadiens ont été autorisés à consommer du cannabis à des fins thérapeutiques, et que les décisions prises concernant les politiques en la matière pourraient changer beaucoup de choses dans la vie de ces gens-là.
    Mes commentaires d'aujourd'hui vont aller dans le sens des efforts à déployer pour favoriser la santé et le mieux-être des anciens combattants canadiens en s'appuyant sur les meilleures données disponibles.
    Parmi les six thèmes prioritaires retenus par le Comité, je vais me concentrer sur trois aspects au titre desquels je possède une plus grande expertise. Je me ferai un plaisir également de discuter des autres thèmes proposés.
    Le premier enjeu prioritaire est lié à la base scientifique à l'appui des politiques pour le remboursement du cannabis à raison de 3 grammes par jour pour tous les anciens combattants admissibles et jusqu'à 10 grammes pour certains d'entre eux, sous réserve d'une approbation spéciale.
    Est-ce que c'est la bonne quantité? Est-ce trop élevé? Est-ce insuffisant? Malheureusement, les recherches menées jusqu'à maintenant ne permettent pas d'établir un dosage précis. C'est l'un des éléments qui distinguent le cannabis thérapeutique des traitements médicaux traditionnels.
    Le fait est que ce n'est pas un médicament auquel on a attribué un numéro d'identification comme c'est le cas pour tous les autres. C'est une plante, et non une pilule. C'est une plante qui comporte des dizaines de composés différents qui entrent en interaction avec le système endocannabinoïde du corps humain. On croit que cette interaction avec les différents composés du cannabis explique en partie ses effets bénéfiques.
    Il existe en outre de nombreux modes d'administration différents. On ne se limite pas à un cachet, comme la plupart des médicaments; on peut aussi l'inhaler et utiliser divers autres moyens. Les effets peuvent varier en conséquence.
    Pour situer les choses dans leur contexte, on doit dire qu'une quantité quotidienne de 3 grammes serait considérée comme très élevée pour ceux qui en consomment à des fins non médicales, et que l'on parlerait donc d'une consommation extrêmement forte lorsqu'on atteint un niveau de 10 grammes par jour. Pour les fins de la recherche, nous estimons normalement qu'un gramme est l'équivalent d'environ quatre joints de cannabis. Les quantités prescrites correspondent donc à une consommation de 12 et 40 joints par jour respectivement, ce qui fait beaucoup de cannabis.
    Il faut dire que la pharmacologie ne fait aucune distinction entre la consommation à des fins médicales et les autres formes de consommation. Plus une personne consomme de cannabis, plus les risques de conséquences néfastes sont élevés.
    Une personne qui consomme, par exemple, 10 grammes de cannabis par jour risque davantage de développer une dépendance physiologique et de subir d'autres effets secondaires néfastes, comme les difficultés cognitives, les déficiences motrices ou un trouble de l'usage du cannabis, terme technique désignant la dépendance psychologique au cannabis. Il en va de même des symptômes de sevrage qui risquent d'être plus sévères pour les patients auxquels on prescrit de fortes doses.
    Je ne recommande pas de changements ou de restrictions dans l'immédiat à ce chapitre. Toute mesure se traduisant par un accès soudainement beaucoup plus difficile au cannabis, notamment via l'augmentation marquée de son coût pour les patients en consommant à des fins médicales, pourrait avoir des effets néfastes.
    J'estime toutefois important que les anciens combattants qui consomment du cannabis à des fins médicales demeurent étroitement en contact avec leur fournisseur de soins afin qu'il puisse suivre l'évolution de leur état et minimiser les méfaits potentiels.
    Pour ce qui est de votre deuxième thème prioritaire, à savoir les données disponibles sur l'utilisation du cannabis pour le traitement des douleurs chroniques et du trouble de stress post-traumatique, il faut malheureusement avouer que les recherches menées à ce sujet n'arrivent pas à suivre l'évolution de l'utilisation du cannabis dans de tels contextes.

  (1605)  

    En ce qui concerne la douleur chronique, un récent examen de nombreuses études laisse croire qu'il y a un léger effet thérapeutique sur la douleur, mais les taux d'effets secondaires étaient élevés et les effets secondaires étaient plus fréquents que les résultats positifs.
    Dans un autre examen récent, lorsqu'on tenait seulement compte de la douleur neuropathique, on a aussi observé un effet positif, cette fois plus important que la douleur générale, mais les taux d'effets secondaires étaient très élevés et les patients qui prenaient du cannabis thérapeutique contre la douleur étaient plus susceptibles d'abandonner les essais.
    Dans l'ensemble, ces deux examens ont permis de conclure que même si les résultats sont positifs dans le cas de la douleur, les preuves liées aux effets secondaires laissent croire que les inconvénients peuvent dépasser les avantages. Il convient également de noter qu'à ce jour, aucun essai n'a été mené sur des anciens combattants canadiens dans ces examens, et que toutes ces conclusions sont produites par analogie, plutôt qu'en fonction de données probantes sur cette population.
    En ce qui concerne le trouble de stress post-traumatique et d'autres troubles anxieux, il existe des résultats précliniques fascinants qui se fondent sur des modèles animaux. Certains rapports anecdotiques et certaines études de cas sont prometteurs, mais on n'a pas mené d'essais aléatoires contrôlés — selon la norme universellement reconnue — qui démontrent l'efficacité du produit, que ce soit chez les civils ou chez les anciens combattants. À l'heure actuelle, on ne dispose pas des preuves suffisantes pour affirmer que le cannabis est un traitement efficace pour le TSPT ou d'autres troubles anxieux.
    Ce sont mes conclusions personnelles, mais elles ressemblent beaucoup aux conclusions d'un rapport récent du Département des anciens combattants des États-Unis sur les avantages et les méfaits du cannabis pour traiter la douleur et le TSPT chez les anciens combattants américains.
    Par contre, le cannabis s'est révélé utile dans d'autres circonstances, notamment dans la réduction des nausées et des vomissements provoqués par la chimiothérapie, la réduction de la spasticité liée à la sclérose en plaques et la réduction de la fréquence des crises chez les enfants atteints de troubles épileptiques pédiatriques rares. Ce sont tous des domaines dans lesquels les preuves sont plus solides. Ce n'est toutefois pas le cas pour la douleur et le TSPT.
    En ce qui concerne l'effet de la légalisation sur le cannabis thérapeutique pour les anciens combattants, il y a un risque que les personnes qui ont actuellement des autorisations ajoutent du cannabis non thérapeutique légal à la quantité disponible de cannabis thérapeutique. Il est également possible que des anciens combattants qui songent à obtenir une autorisation décident plutôt de s'automédicamenter sans consulter un fournisseur de soins de santé. Cela pourrait être nocif pour les personnes qui se procurent, par inadvertance, des produits qui seraient considérés comme étant à risque élevé. En effet, les produits à teneur élevée en THC qui présentent de faibles taux de CBD peuvent contenir un cannabidiol, un élément que l'on croit responsable des actions thérapeutiques dans une certaine mesure.
    L'autre réalité, c'est qu'étant donné qu'il y a des risques connus, tout usage thérapeutique devrait, à mon avis, se faire en collaboration avec un fournisseur de soins de santé.
    Enfin, puisque le marché du cannabis récréatif sera nécessairement beaucoup plus étendu que le marché du cannabis thérapeutique, il est possible que les produits utilisés principalement à des fins thérapeutiques deviennent de moins en moins faciles à trouver. Il s'agit de produits comme les capsules orales, les huiles orales ou les produits à teneur élevée en CBD. À mon avis, il est important que le système double de Santé Canada qui vise à la fois le cannabis thérapeutique et le cannabis récréatif soit complètement mis en oeuvre et profite d'un soutien approprié.
    Dans ce contexte, je ferais valoir qu'on a grandement besoin de recherches coordonnées à grande échelle sur le cannabis thérapeutique pour les anciens combattants canadiens. En effet, des milliers d'anciens combattants ont accès à ce qu'on pourrait décrire comme étant, pour rester poli, une médecine expérimentale, plutôt qu'une médecine fondée sur des preuves. Puisqu'on a trouvé des preuves que le cannabis est lié à des idées suicidaires et à des comportements d'autodestruction chez les populations d'anciens combattants américains, le risque de préjudice grave est bel et bien présent.
    Nous avons donc besoin de recherches fondées sur les observations pour comprendre les effets du cannabis sur les personnes qui l'utilisent actuellement. Nous devons également mener des essais aléatoires contrôlés, en utilisant la norme universellement reconnue, sur le cannabis comme traitement contre la douleur et le TSPT. Il faut également déployer plus d'efforts en matière d'application des connaissances et d'élaboration de lignes directrices pour sensibiliser les anciens combattants à la réalité des risques auxquels ils s'exposent et pour donner aux cliniciens des recommandations claires sur les pratiques exemplaires.
    Enfin, il est important de se rappeler que le Canada est toujours aux prises avec une importante épidémie d'opioïdes qui reste redoutable. En effet, un accès accru aux opioïdes et une surestimation de leur efficacité combinée à une sous-estimation des risques ont contribué à l'épidémie actuelle. Ce sont là des leçons à retenir dans le contexte du cannabis thérapeutique et dans la période qui suit la légalisation du cannabis en général. À mon avis, ce qu'il faut retenir, c'est qu'un optimisme excessif peut mener à de véritables préjudices dans ce cas-ci.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant votre comité.

  (1610)  

    Merci.
    Monsieur Atkinson, vous avez la parole. Vous avez 10 minutes.
    Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui. Je suis heureux de vous donner un aperçu de mon expérience liée à l'aide aux anciens combattants dans un milieu médical et professionnel en ce qui a trait au cannabis.
    Tout d'abord, il est important que vous sachiez que je ne suis pas un ancien combattant des Forces armées canadiennes ou un membre d'un organisme de premiers intervenants. Je ne suis pas un professionnel de la santé. Je suis un entrepreneur avec des antécédents dans le domaine pharmaceutique et des entreprises technologiques en démarrage qui s'est rendu compte qu'il y avait un grave problème avec la façon dont les Canadiens avaient accès au cannabis thérapeutique, et je voulais faire quelque chose pour remédier à la situation.
    J'ai vu qu'il existait une occasion de modifier le discours sur le cannabis thérapeutique et de combler certaines des lacunes auxquelles font face les soldats qui quittent l'armée. J'ai donc mis sur pied, il y a plus de quatre ans, un organisme appelé Trauma Healing Centers — à ne pas confondre avec un organisme appelé Marijuana for Trauma.
    Pendant trois ans et demi, sous ma direction, nous avons aidé 7 500 patients. Environ 900 d'entre eux étaient des anciens combattants des Forces armées canadiennes. Environ 90 % des 7 500 patients qui ont été aiguillés vers les Trauma Healing Centers avaient déjà essayé le cannabis, et il s'est avéré que ce traitement fonctionnait dans leur cas. Ils ne savaient pas comment ou pourquoi cela fonctionnait, mais cela leur procurait le soulagement des symptômes dont ils avaient désespérément besoin et ce traitement a considérablement amélioré leur qualité de vie.
    L'approche des Trauma Health Centers est fondée sur les soins multidisciplinaires. En effet, j'ai des médecins, du personnel infirmier, des psychologues, des travailleurs sociaux, des diététistes, des massothérapeutes et des conseillers de soutien par les pairs tous sous un même toit pour aider nos patients. Les patients nous sont envoyés par d'autres médecins, c'est-à-dire par un omnipraticien ou un spécialiste.
    Pour ceux qui ne le savent pas, le cannabis thérapeutique est une option de traitement de dernier recours. Lorsque tous les médicaments et les traitements indiqués ont été utilisés, on peut essayer le cannabis thérapeutique. Comme nous diraient les médecins, c'est à ce moment-là que l'art de la médecine entre en jeu.
    Le cannabis thérapeutique n'est pas une solution universelle. Il doit être géré d'une manière médicale et professionnelle pour garantir des résultats positifs. En l'absence de résultats positifs, les médecins doivent interrompre l'autorisation de cannabis du patient comme il le ferait pour tout autre médicament. La grande majorité de nos patients ont été en mesure de réduire ou d'interrompre le protocole pharmaceutique qu'ils suivaient déjà lorsque le cannabis les aidait à améliorer leurs symptômes.
    Je serai le premier à dire qu'il n'y a pas de preuves solides liées à l'usage du cannabis thérapeutique pour le traitement d'un problème médical et que des essais cliniques aléatoires à grande échelle doivent être menés pour veiller à obtenir le maximum d'avantages avec un risque minimal. Toutefois, le manque de preuves ne prouve pas qu'il n'y a aucun avantage. Au bout du compte, il s'agit de gérer le traitement d'une manière médicale et professionnelle, afin de maximiser les avantages potentiels et de minimiser les risques potentiels.
    Malheureusement, au Canada, de nombreux médecins autorisent le cannabis thérapeutique d'une manière risquée. Souvent, ils n'adhèrent pas à une approche qui préconise un départ lent et des progrès graduels. Certains d'entre eux autorisent le cannabis thérapeutique sans bien connaître — ou sans connaître du tout — la façon dont le cannabis fonctionne et ils laissent les patients se traiter eux-mêmes, ce qui n'est pas différent d'une situation dans laquelle les patients achètent le produit dans la rue. L'objectif n'est pas d'aider à « légaliser » — entre guillemets — les patients, car l'objectif devrait être de les aider à soulager leurs symptômes et à améliorer leur qualité de vie.
    J'ai eu de la chance, car un grand nombre de médecins extraordinaires ont travaillé pour moi pendant plus de trois ans et demi au Trauma Healing Centers. La plupart d'entre eux étaient des omnipraticiens qui avaient de l'expérience en gestion de la douleur et en toxicomanie. Certains avaient de l'expérience en santé au travail et travaillaient avec leur commission provinciale des accidents du travail. Deux d'entre eux étaient des spécialistes — en psychiatrie et en gestion de la douleur — et deux autres étaient des anciens combattants des Forces armées canadiennes.
    Nous avons réussi à gagner la confiance d'un grand nombre d'organismes — et à établir des partenariats avec eux — qui sont d'ardents défenseurs du bien-être des anciens combattants, notamment Wounded Warriors Canada, VETS Canada, le CRFM et la Légion royale canadienne, des organismes parmi d'autres qui ont appris à comprendre notre approche et à y croire.
    J'ai également réussi à gagner la confiance du directeur des politiques d'Anciens Combattants Canada, qui était responsable du dossier du cannabis thérapeutique. Mon directeur médical et moi-même avons appuyé le remboursement plafonné à trois grammes par jour, la nécessité d'obtenir une autorisation spéciale au-delà de trois grammes par jour et l'inclusion du remboursement des huiles.
    J'ai parlé à des centaines d'anciens combattants et à leur famille, et ils m'ont expliqué comment le cannabis a grandement amélioré leur état de santé et leur qualité de vie. J'ai rencontré de nombreux militaires de haut rang qui se souciaient du bien-être de leurs militaires et de leurs anciens militaires.
    Lors de la conférence de l'ICRSMV de 2017, j'ai rencontré le médecin-chef Downes et je lui ai expliqué notre approche et les résultats que nous avons observés. Mon équipe et moi-même avons rencontré le général Vance pour l'informer de nos activités, afin de veiller à ce que ses anciens combattants qui souffrent de maladies chroniques, comme le TSPT et des douleurs, reçoivent de l'aide dans le cadre d'une approche de soins multidisciplinaires.
    Nous avons également formulé trois simples recommandations qui, selon nous, pourraient avoir une incidence profonde sur les résultats des anciens combattants qui sont aux prises avec des problèmes de santé et qui quittent l'armée.

  (1615)  

    Nous avons recommandé que les membres des Forces armées canadiennes qui quittent l'armée avec des affections ouvrant droit à pension aient accès à des soins multidisciplinaires à l'extérieur de la base avant leur libération, afin qu'ils puissent poursuivre leur régime de soins sans interruption et qu'ils n'aient pas à attendre que les prestations soient versées par Anciens Combattants Canada pour obtenir des soins.
    Nous avons aussi recommandé que tous les militaires libérés en raison d'affections ouvrant droit à pension soient jumelés à un conseiller en soutien par les pairs plusieurs mois avant la date de leur libération, afin de s'assurer qu'ils aient l'appui d'une personne de leur niveau qui a déjà suivi le processus et qui peut les guider.
    Nous avons recommandé que le programme pilote Opération médecin de famille d'Ottawa soit étendu à d'autres régions du pays, afin d'assurer la continuité des services de soins primaires aux militaires libérés pour des raisons médicales.
    En terminant, j'ai la ferme conviction qu'on peut faire beaucoup plus pour améliorer les résultats des anciens combattants en utilisant une approche de soins multidisciplinaires et des soins coordonnés. Je crois aussi fermement que le cannabis médical peut être utilisé dans le cadre de cette approche.
    Je vous remercie de votre attention.

  (1620)  

    Merci.
    Monsieur Freedman.
    Merci, monsieur le président, de me donner l'occasion de comparaître devant le Comité.
    Pour ceux qui ne le savent pas, j'étais directeur de la coordination de la marijuana sous la gouverne du gouverneur Hickenlooper au Colorado lors de la mise en oeuvre de la légalisation de ce que nous appelons la marijuana thérapeutique et récréative. Depuis, j'ai fondé une entreprise qui travaille principalement pour le gouvernement et pour des entreprises auxiliaires. Cependant, nous n'acceptons pas d'argent de l'industrie de la marijuana ou de l'industrie du cannabis, car cela serait en conflit avec... ce serait en conflit avec notre autre travail.
    Manifestement, je ne suis ni expert en santé publique ni ancien combattant et aujourd'hui — il est peut-être approprié que je sois le dernier témoin —, j'espère vous parler de la tension politique regrettable qui a émergé à la suite de l'interdiction fédérale — et même mondiale — visant la recherche sur le cannabis.
    Vous traitez avec l'une des communautés les plus sympathiques — en plus des enfants atteints d'épilepsie intraitable — qui ont vraiment souffert de l'absence de recherches efficaces menées par les échelons supérieurs du gouvernement sur les effets du cannabis contre le TSPT.
    Ce manque de recherche au cours d'une période donnée, avec des preuves anecdotiques liées à l'utilité du produit, a transformé ce débat politique de ce qui serait habituellement, pour toute autre substance, un modèle « coupable jusqu'à preuve du contraire » en un modèle « innocent jusqu'à preuve du contraire » pour gérer la substance, de manière telle que nous acceptons les avantages suggérés par des anecdotes et des recherches moins poussées plus rapidement que nous le ferions pour une autre substance.
    Je ne dis pas que ce n'est pas la bonne approche à adopter. Je dis simplement que c'est ce qui s'est produit à cause de l'interdiction mondiale visant ce genre de recherche qu'il est nécessaire de mener dans ce cas-ci.
    Cette communauté est clairement fatiguée d'attendre que les institutions traditionnelles rattrapent leur retard et, au fil du temps, on a exercé des pressions de plus en plus grandes pour les droits d'accès et d'utilisation avec, espérons-le, un remboursement financier et une surveillance médicale.
    Toutefois, à mon avis, on a réellement besoin de mener des recherches dans ce domaine, surtout en ce qui concerne les interactions entre les médicaments, en particulier pour les personnes qui pourraient souffrir d'un trouble de stress post-traumatique et qui prennent déjà un autre médicament. Il faut également mener des recherches sur les effets secondaires, comme la toxicité hépatique, et sur des formulations précises pour l'efficacité des médicaments, c'est-à-dire qu'il faut déterminer ce qui fonctionne, pourquoi cela fonctionne et comment nous pouvons mener des recherches à cet égard.
    La tension qui émerge, dans ce cas-ci, c'est que même si certains de ces travaux peuvent être menés avec des fonds publics, en particulier au Canada plus qu'aux États-Unis, on peut faire de grands pas en avant avec la recherche publique et le travail rigoureux par l'entremise de personnes comme M. MacKillop. Il faudra continuer d'ouvrir la voie de la rentabilité pour les entreprises, pour les sociétés pharmaceutiques, afin de continuer de les encourager à mener des recherches dans ce domaine et de continuer d'investir ce qui seront des milliards de dollars — plutôt que des centaines de millions de dollars — pour prouver que le produit est sûr, mais aussi pour mettre au point les formules les plus efficaces.
    Je crois que la mission dont le Comité est saisi aujourd'hui est de trouver un moyen de donner accès à ces communautés qui attendent depuis longtemps tout en continuant d'offrir des incitatifs pour faire progresser la recherche et de réfléchir aux perspectives de recherche à long terme, afin d'offrir des médicaments sûrs et efficaces à ces communautés.
    Je pense que ce sera un objectif particulièrement difficile à atteindre en raison de la légalisation de l'utilisation par les adultes qui sera aussi mise en oeuvre. Comme il a été mentionné plus tôt, cela mènera à l'automédication sur le marché. Néanmoins, je crois que vous devrez réfléchir à la façon dont vous permettrez l'accès et à la façon dont vous continuerez d'encourager la recherche dans ce domaine.
    Je serai maintenant heureux de répondre à vos questions.

  (1625)  

    Merci.
    Nous entamons la première série de questions. La parole est à M. McColeman.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Freedman, vous avez dit que vous aviez participé à la mise en oeuvre au Colorado. Est-ce exact?
    Oui.
    D'après ce que je comprends, le cannabis thérapeutique et le cannabis récréatif appartiennent à deux catégories différentes. Au Colorado, la taxation du cannabis thérapeutique a-t-elle été différente de la taxation du cannabis récréatif?
    Merci, monsieur.
    Je faisais partie du gouvernement du Colorado. En fait, de 2014 à 2017, j'étais la personne-ressource du gouverneur lors de la mise en oeuvre de la légalisation du cannabis thérapeutique et du cannabis destiné aux adultes. Nous avons imposé une taxe de vente de 2,9 % sur le cannabis thérapeutique. Le cannabis destiné aux adultes a fait à la fois l'objet d'une taxe d'accise de 10 % et d'une taxe de vente supplémentaire de 10 % — en plus de la taxe au détail de 2,9 %. Toutes ces taxes sur l'utilisation pour les adultes ont augmenté depuis ce temps-là. Toutefois, la taxe médicale est demeurée à 2,9 %.
    C'est un taux très réduit. Les autres produits médicaux sont-ils taxés à 2,9 % ou ne sont-ils pas soumis à une taxe au Colorado?
    Non, ils ne sont pas visés par la taxe de vente de 2,9 %. Dans ce cas précis, c'est parce que le produit n'est pas distribué dans les pharmacies et qu'il s'agit donc d'une vente dans l'État du Colorado. De plus, oui, la taxe de 2,9 % s'applique aux autres biens au Colorado.
    D'accord. Je pose ces questions pour souligner aux membres du Comité et aux Canadiens que le régime mis en oeuvre par le gouvernement actuel impose une taxe sur le cannabis thérapeutique destiné aux anciens combattants et à d'autres groupes comme ceux dont vous avez parlé, par exemple les enfants qui souffrent du syndrome de la Tourette ou d'épilepsie incontrôlable et qui utilisent le cannabis comme médicament, car il leur a été prescrit.
    La sonnerie se fait entendre. Poursuivons-nous la réunion et les six minutes de M. McColeman ou voulez-vous partir tout de suite? Ai-je le consentement unanime pour rester?
    Des députés: D'accord.
    Merci, monsieur le président.
    Au Canada, le même régime fiscal s'applique au cannabis, qu'il soit destiné à des fins récréatives ou médicales. Ce produit est assujetti à la TVH, à la TPS, ainsi qu'à la taxe d'accise et à une troisième taxe. Nos taxes sont prélevées; je ne suis pas certain du taux, mais je pense qu'il est d'environ 15 ou de 16 % sur le cannabis médicinal. Une initiative est en cours au pays pour adopter le modèle du Colorado ou celui d'autres États. Je sais, pour avoir effectué des recherches, que d'autres États n'imposent pas de taxe. Le fait est que certaines des personnes les plus vulnérables de la société n'ont pas accès au cannabis en raison des lois fiscales du Canada et du régime instauré par le gouvernement au pouvoir.
    Je vous ferais remarquer qu'il y a une distinction à faire entre la consommation à des fins récréatives et à des fins médicales. J'inviterais d'ailleurs les autres témoins à se prononcer sur la question. À titre d'experts du domaine du cannabis, faites-vous cette distinction dans votre esprit?
     Je pense que je connais la réponse du témoin de l'Université McMaster grâce à ses propos, mais j'aimerais demander aux deux témoins qui comparaissent par vidéoconférence s'ils font cette distinction. En outre, pensez-vous que le cannabis médicinal prescrit aux anciens combattants et aux autres groupes vulnérables devrait être assujetti à la taxe d'accise et à d'autres taxes qui en font augmenter le prix, alors que les autres médicaments d'ordonnance ne sont pas taxés au Canada?

  (1630)  

     Je considère qu'il existe deux utilisations distinctes; celle à des fins récréatives et celle à des fins médicales. Selon moi, il faut intervenir pour faciliter l'accès au cannabis consommé à des fins médicales, notamment en réalisant des recherches. À toute évidence, les pharmacies doivent pouvoir fournir du cannabis et les compagnies d'assurances doivent offrir une couverture plus solide pour ce produit.
    En fin de compte, le gouvernement, en taxant le cannabis, a essentiellement assimilé le cannabis médicinal aux produits consommés à des fins récréatives. La situation ne peut continuer ainsi, car c'est injuste pour la population canadienne.
    Monsieur Freedman.
    Je pense évidemment qu'il faudrait offrir l'accès au cannabis, particulièrement pour les groupes les plus vulnérables qui, à mon avis, attendent des recherches depuis longtemps. Il s'agit de personnes qui devraient avoir financièrement accès au cannabis et bénéficier de la supervision d'un médecin.
    Je ferais toutefois la mise en garde suivante au sujet de la différence de prix: dans le cadre du modèle du Colorado, nous n'avons pas constaté qu'un grand nombre de gens restent dans le système médical en raison de la différence de prix. Je pense qu'ils n'y recourent pas pour des motifs médicaux, mais essentiellement pour l'allégement fiscal. Je pense donc que nous avons offert un incitatif au chapitre du prix sous la forme ce qui est essentiellement un rabais. Ce que je regrette, c'est que ceux qui sont les plus susceptibles de devenir dépendants de la substance demandent souvent des cartes médicales pour pouvoir s'en procurer à moindre coût.
    Monsieur MacKillop, souhaitez-vous donner votre avis?
    Oui. J'aimerais apporter un certain nombre de distinctions.
    Celle qui importe de faire d'entrée de jeu, c'est la distinction entre une autorisation et une ordonnance. Sachez que le cannabis médicinal n'est pas prescrit comme un médicament d'ordonnance et n'a pas de numéro d'identification du médicament. Le patient reçoit du médecin une autorisation qui lui donne la permission de consommer du cannabis, mais la substance ne lui est pas prescrite en soi.
    J'ajouterais également que les produits proposés sur le marché médical sont parfois très particuliers. Il y a des comprimés ou des huiles exempts d'ingrédients psychoactifs, alors que dans d'autres cas, il s'agit de fleurs à teneur élevée en THC indifférenciables de celles que l'on trouve sur le marché des produits récréatifs. Il est parfois possible de faire la différence entre les deux, mais pas toujours.
    Je considère qu'il est tout à fait sensé de recourir à la politique fiscale quand vient le temps de faire certaines de ces distinctions, mais il faut aussi prendre au sérieux le point soulevé à propos des conséquences imprévues et du fait qu'on encourage les gens à obtenir des autorisations médicales. Il serait possible d'apporter des précisions quant au fait que certains produits manifestement très médicinaux qui ne sont destinés qu'à la consommation médicale, par exemple, sont sans ambiguïté appropriés, alors que d'autres ne le seraient pas. C'est difficile avec la politique fiscale, mais il faudrait apporter une nuance parce que les mesures pourraient avoir des conséquences imprévues.
    Merci.
    Nous devons nous rendre à la Chambre pour voter; nous allons donc devoir lever la séance.
    Je voudrais remercier les témoins d'avoir comparu aujourd'hui. Le greffier communiquera avec vous pour fixer une autre rencontre afin que nous puissions vous poser des questions.
    La séance est levée.
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