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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 007 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 14 avril 2016

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour. Je déclare la séance ouverte.
    Conformément à l'ordre de renvoi qu'a reçu le Comité le 21 mars 2016, le Comité étudie le projet de loi C-6, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et une autre loi en conséquence.
    Je souhaite la bienvenue à nos premiers témoins, qui s'exprimeront au sujet du projet de loi C-6: Andrew Brouwer, avocat-conseil principal, droit des réfugiés, Aide juridique Ontario; Audrey Macklin, professeure à la faculté de droit de l'Université de Toronto; Tamra Thomson, directrice, Législation et réforme du droit, et Christopher Veeman, membre de l'exécutif, Section nationale du droit de l'immigration, qui représentent tous les deux l'Association du Barreau canadien.
    Soyez les bienvenus. Chacun d'entre vous disposera d'au plus sept minutes pour faire un exposé. Nous allons procéder selon l'ordre alphabétique.
    Monsieur Brouwer, vous êtes le premier.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les membres du Comité. Je suis ravi de m'adresser à nouveau au Comité.
    Je travaille pour Aide juridique Ontario, qui est le plus important programme d'aide juridique au pays. Notre mandat consiste à assurer l'accès à la justice aux Ontariens les plus vulnérables et les plus marginalisés. Nous accomplissons ce mandat en fournissant des services juridiques, en offrant des cliniques juridiques communautaires et spécialisés, et bien sûr en rémunérant des avocats du secteur privé qui acceptent des certificats afin qu'ils représentent nos clients. Aide juridique Ontario aide quotidiennement près de 4 000 Ontariens à faible revenu en facilitant leur accès à la justice. Nous nous occupons de cas qui relèvent du droit criminel, du droit de la famille, du droit de l'immigration et des réfugiés ainsi que du droit des pauvres.
    Aide juridique Ontario a également un mandat de réforme du droit dont l'objectif principal est de faciliter l'accès à la justice aux personnes les plus vulnérables. Nous avons quelques grandes priorités dans le domaine du droit des réfugiés et de l'immigration. Il s'agit de l'égalité d'accès aux droits garantis par la Charte et la protection efficace de ces droits; la protection des non-citoyens atteints de maladie mentale; la protection et la promotion des droits des enfants; l'application au Canada du droit international en matière de droits de la personne; et l'accès à la citoyenneté et la protection de celle-ci, particulièrement pour les Canadiens naturalisés.
    Nous félicitons le gouvernement d'avoir présenté le projet de loi C-6 aussi tôt durant son mandat et nous appuyons la plupart des dispositions de cette mesure législative. Nous sommes particulièrement en faveur des dispositions qui visent à supprimer l'obligation de déclarer son intention de résider au Canada et à éliminer le pouvoir de retirer la citoyenneté pour des motifs de sécurité nationale. Nous appuyons également les changements liés aux exigences linguistiques et aux exigences en matière de résidence aux fins de la naturalisation.
    Cela étant dit, selon nous, le projet de loi n'est pas parfait. Il présente des lacunes et des problèmes importants, mais nous espérons que le Comité pourra y remédier. Il y a en particulier cinq points qui nous préoccupent. J'ai distribué un résumé, en anglais et en français, des modifications que nous recommandons, et j'espère que vous avez ce document sous les yeux. Je vais rapidement passer en revue ce que nous proposons.
    Je sais que le premier point a suscité un grand débat. Je vais laisser la professeure Macklin parler de la question du processus de révocation. Aide juridique Ontario partage le point de vue de la professeure Macklin en ce qui concerne la meilleure solution à apporter, et je sais que le ministre McCallum a fait savoir qu'il souhaite se pencher sur la modification de cette disposition.
    Le deuxième point concerne les recours en cas de refus d'une demande de citoyenneté. Le projet de loi C-24 enlevait aux demandeurs dont la demande de citoyenneté était refusée leur droit d'interjeter appel auprès de la Cour fédérale et proposait plutôt une révision judiciaire assujettie à une autorisation. Ce changement crée un obstacle injuste et coûteux à l'accès à la justice, particulièrement dans un domaine qui est au coeur de ce que cela signifie d'être un membre de la société. L'obligation d'obtenir une autorisation de la Cour fédérale peut avoir pour effet de doubler le temps nécessaire pour obtenir un recours et de doubler le coût qui y est associé. En outre, les refus d'accorder une autorisation, comme vous le savez j'en suis sûr, ne sont pas justifiés par le juge de la Cour fédérale, ce qui constitue une injustice pour les demandeurs qui, naturellement, percevront l'obligation d'obtenir une autorisation comme étant arbitraire. Ils ne savent pas pourquoi ils ont obtenu un refus. Nous exhortons par conséquent le Comité à modifier le projet de loi C-6 de façon à annuler les modifications apportées par l'article 20 du projet de loi C-24 et à revenir aux dispositions d'appel auprès de la Cour fédérale qui existaient auparavant dans la loi.
    Le troisième point concerne la restriction à la première génération née à l'étranger. Nous avons été ravis d'entendre le ministre McCallum affirmer devant votre comité qu'il ne devrait y avoir qu'une seule classe de citoyens. À notre avis, la loi canadienne ne devrait contenir aucune disposition qui fait une distinction entre les citoyens nés au Canada et les citoyens naturalisés. Ma petite-fille sera une citoyenne canadienne peu importe où elle est née. La petite-fille de M. Virani — mon député — ne sera pas une citoyenne canadienne, à moins qu'elle soit née au Canada. Il s'agit là d'une distinction injuste. C'est pourquoi nous demandons au comité de modifier le projet de loi C-6 de façon à inclure une disposition qui annule la disposition visant la première génération née à l'étranger au paragraphe 3(3) de la Loi sur la citoyenneté.
    Le quatrième point concerne le calcul de la durée de présence. Nous appuyons le changement aux exigences en matière de résidence proposé dans le projet de loi C-6. Nous demandons qu'un crédit soit aussi accordé aux fins de l'obtention de la résidence permanente aux personnes dont la demande de statut de réfugié a été jugée admissible, mais qui attendent la tenue de leur audience. Comme vous le savez, il y a un très important arriéré actuellement. Les gens attendent trois ou quatre ans avant d'obtenir leur audience. Cette période d'attente devrait leur être créditée.

  (1105)  

    En outre, les demandeurs dont la demande a été acceptée pour des motifs humanitaires devraient aussi obtenir un crédit pour ce temps. Il s'agit d'un processus qui comporte deux étapes, alors les gens attendent parfois pendant des années avant d'obtenir l'approbation finale. Cette période d'attente n'est pas la faute du demandeur; il s'agit d'un problème qui existe au ministère de l'Immigration, qui prend trop de temps pour traiter les demandes. Nous demandons qu'on leur crédite également la moitié de cette période.
    Enfin, je demande au Comité d'examiner sérieusement la question de l'apatridie et la façon dont la loi peut être modifiée pour traiter les cas des personnes apatrides au Canada.
    Étant donné que le nouveau gouvernement reconnaît l'importance du droit international et de l'engagement à l'échelle mondiale, nous sommes confiants que le Canada signera la Convention relative au statut des apatrides de 1954, mais nous pouvons modifier dès maintenant la loi pour faire en sorte de mieux protéger les personnes apatrides et de mieux nous conformer aux normes et au droit international.
    Nous avons trois recommandations à formuler.
    La première, qui est essentielle, est d'inclure une définition du terme « apatride » à l'alinéa a) du paragraphe 2(2) de la loi. Nous voulons que cette définition comprenne les apatrides de jure ainsi que les apatrides de facto. Dans la pratique, il faut régler le cas des personnes apatrides et les aider à obtenir une protection essentiellement pour s'assurer que chaque membre de la société ait un lien avec un État.
    De nombreuses personnes ont exprimé des préoccupations, notamment dans le cadre d'une affaire au Royaume-Uni appelée Pham, qui montre bien les problèmes qui surviennent lorsqu'on a une définition trop restreinte et légaliste du terme apatride. Nous proposons une définition qui figure dans les documents que nous vous avons remis. Il s'agit de la définition suivante: apatride désigne une personne qu'aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation et comprend les apatrides de jure ainsi que les apatrides de facto.
    Je vous ai remis un document qui provient du site Web du ministère, qui contient l'interprétation et la définition du gouvernement de ces deux termes, c'est-à-dire de jure et de facto.
    Deuxièmement, toujours en ce qui concerne l'apatridie, nous demandons une modification au paragraphe 5(4) de la loi, la disposition qui concerne le pouvoir discrétionnaire d'attribuer la citoyenneté dans des situations particulières. Nous proposons qu'il soit mentionné précisément dans la loi que l'apatridie est un facteur qui justifie d'attribuer la citoyenneté en vertu du paragraphe 5(4).
    Enfin, nous proposons une modification à l'article 10 de la Loi sur la citoyenneté, qui concerne le processus de révocation. Nous proposons d'inclure une exemption à l'égard de la révocation lorsque cette révocation pourrait conférer à une personne l'état d'apatride, qu'il s'agisse d'apatride de jure ou de facto. Nous croyons que cela permettrait efficacement d'éviter qu'une décision de révocation ait des conséquences inattendues, et nous vous demandons d'envisager sérieusement d'apporter cette modification.
    Voilà qui termine mon exposé.

  (1110)  

    J'aimerais rappeler aux témoins — j'ai été un peu indulgent à cet égard — de ne pas dépasser les sept minutes accordées à chaque témoin.
    Professeure Macklin.

[Français]

     Je vous remercie de m'offrir cette occasion de faire une présentation.
    Je vais faire ma présentation en anglais, mais je ferai de mon mieux pour répondre aux questions qui me seront posées en français.

[Traduction]

    À l'instar de M. Brouwer, j'aimerais féliciter le gouvernement pour les nombreuses dispositions bénéfiques qu'il a incluses dans le projet de loi C-6. Comme mon temps est limité, je vais me concentrer sur les éléments qui, à mon avis, méritent davantage d'attention.
    Mon exposé portera exclusivement sur la procédure de révocation de la citoyenneté pour des raisons de fraude ou de fausse déclaration.
    Actuellement, en raison des modifications qu'a apportées le gouvernement précédent à la Loi sur la citoyenneté, lorsque le gouvernement envisage de retirer la citoyenneté à une personne, le ministre ou son représentant envoie un avis à cette personne. Ce citoyen a ensuite la possibilité de répondre par écrit aux allégations qui donnent lieu à l'intention de révoquer sa citoyenneté. Cela se fait exclusivement par écrit, mais le ministre peut décider de demander la tenue d'une audience.
    En fonction des documents qui lui sont présentés en réponse à cette intention et d'autres éléments de preuve, le ministre prend la décision de révoquer la citoyenneté. À ce moment-là, la personne peut demander une révision judiciaire devant la Cour fédérale, mais seulement si elle obtient l'autorisation de la Cour fédérale.
    Plutôt que de procéder à une analyse de la jurisprudence pour expliquer pourquoi ce processus ne survivrait probablement pas à une contestation constitutionnelle, permettez-moi simplement de vous l'expliquer à l'aide de quelques exemples.
    Généralement, plus le statut d'une personne est sûr, quel qu'il soit, plus nombreuses sont les mesures de protection dont elle bénéficie avant qu'on décide de lui retirer son statut. De même, plus les conséquences de la décision sont importantes, plus on met l'accent sur l'équité procédurale durant le processus qui mène à la décision qui aura ces conséquences.
    Gardez ces deux choses en tête pendant que je vous explique que, dans le cadre du processus de révocation de la citoyenneté en vertu de la loi actuelle, une personne bénéficie d'un moins grand nombre de mesures de protection qu'un résident permanent qui plaide sa cause devant la section d'appel de l'immigration, ou même qu'une personne qui conteste en cour une contravention pour excès de vitesse. J'espère que cela vous démontre qu'il est problématique de révoquer la citoyenneté d'une personne dans le cadre d'un processus qui prévoit moins de mesures de protection que dans les cas de révocation du statut de résident permanent ou même dans les cas de contestation en cour d'une contravention pour excès de vitesse.
    Je dois ajouter qu'aux États-Unis, par exemple, la révocation de la citoyenneté pour des motifs de fraude ou de fausse déclaration s'effectue dans le cadre d'un processus faisant appel aux tribunaux civils. Cela se fait devant un tribunal ordinaire en appliquant les procédures civiles ordinaires.
    Je vais faire une proposition pour modifier le processus actuel de révocation de la citoyenneté de façon à ce qu'il soit conforme à l'article 7 de la Charte des droits et libertés. L'article 7 de la Charte garantit à chacun le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne et précise qu'il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.
    Ce que je propose, c'est un mécanisme pour traiter les cas de révocation de la citoyenneté pour des motifs de fraude ou de fausse déclaration qui respecte, à mon avis, les principes de justice fondamentale. Permettez-moi en premier lieu de dire que je prévois que la majorité des cas où la révocation sera envisagée concerneront des allégations de fraude ou de fausse déclaration liée aux exigences de présence effective aux fins de l'obtention de la citoyenneté, quoiqu'il existe certes bien d'autres motifs qui justifient de révoquer la citoyenneté.
    Je propose que la décision de premier niveau relève encore d'un représentant du ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Ensuite, si une décision négative est rendue, la personne devrait avoir le droit d'interjeter appel auprès d'un tribunal quasi judiciaire indépendant. Il pourrait s'agir par exemple de la section d'appel de l'immigration de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. On pourrait aussi mettre sur pied un autre tribunal à cette fin.
    Il faudrait réfléchir à la composition de ce tribunal. Est-ce que les membres devraient détenir une formation juridique? Devrait-il y a avoir un membre ou peut-être deux ou trois membres? Ce sont toutes des questions auxquelles il faut réfléchir.

  (1115)  

    En ce qui concerne les questions importantes de procédure et de preuve, je crois qu'il serait important que le fardeau de la preuve — c'est-à-dire prouver que les faits et les manquements à la loi qui justifient la révocation sont véridiques — incombe au ministre; que la preuve soit faite selon la prépondérance des probabilités; qu'il y ait divulgation complète du dossier, afin que le citoyen ait accès à tous les éléments de preuve disponibles; et en outre que les parties puissent présenter d'autres éléments de preuve lors de l'appel.
    Quelle compétence ou quel mandat serait attribué à un tel tribunal? Il pourrait être en mesure d'étudier un appel en fonction du droit, des faits, du pouvoir discrétionnaire et de ce qu'on appelle des considérations « équitables » ou des considérations humanitaires. De façon générale, cela respecte le mandat actuel de la Section d'appel de l'immigration relativement à la perte du statut de résident permanent. Divers recours seraient à la disposition du tribunal, lesquels pourraient être encore une fois étudiés plus en profondeur.
    Que se passerait-il ensuite? Il y a d'abord la décision initiale, qui est portée en appel devant un organisme d'appel indépendant qui a le pouvoir de maintenir ou d'annuler cette décision initiale. Advenant une décision négative, l'une ou l'autre des parties pourrait s'adresser à la Cour fédérale. On pourrait demander s'il devrait s'agir d'un appel ou d'une révision judiciaire. Je serais davantage en faveur d'un appel. Je crois toutefois qu'il s'agit d'une question qui mérite certainement d'être discutée davantage.
    Il est important, et je suis d'accord ici sur ce qu'a dit Andrew au sujet du refus d'accorder la citoyenneté, que ce soit de plein droit; c'est-à-dire, qu'une autorisation ne soit pas obligatoire.
    Voilà qui termine mon exposé. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Je vous remercie, professeure Macklin.
    Je vais maintenant donner la parole à Mme Thomson.
    Vous disposez de sept minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les membres du Comité.
    M. Veeman et moi-même allons partager le temps de parole de sept minutes.
    J'aimerais d'abord vous remercier de nous donner l'occasion de comparaître devant vous au sujet des modifications à la Loi sur la citoyenneté.
    L'Association du Barreau canadien est une association nationale qui représente plus de 36 000 avocats au Canada, dont plus de 1 000 sont membres de la section du droit de l'immigration, dont le principal objectif est l'amélioration du droit et de l'administration de la justice. C'est dans cette optique que nous avons examiné le projet de loi et que nous formulons nos commentaires aujourd'hui.
    Le mémoire que vous avez en main aujourd'hui a été préparé et approuvé en tant que déclaration publique émanant des membres de la section du droit de l'immigration et il a été passé en revue par le comité de la législation et de la réforme du droit. Je vais céder la parole à M. Veeman, qui continuera l'exposé.
    Je présume que tout le monde a reçu le mémoire. Je vais m'attarder à certains des points que nous faisons valoir dans le mémoire, mais vous pourrez le passer en revue à votre convenance.
    Depuis le temps où j'ai commencé à pratiquer dans ce domaine, la Loi sur la citoyenneté a connu deux stades. La loi est restée largement inchangée après qu'elle eut été remaniée en profondeur en 1977 — si on exclut les modifications liées aux Canadiens dépossédés apportées en 2009 — jusqu'à ce que le projet de loi C-24 entre en vigueur. Jusqu'au projet de loi C-24, les praticiens du domaine étaient d'avis que le système était dans son stade « byzantin », si on peut utiliser ce terme. Je dis cela parce que personne ne savait quel était le critère juridique relatif à la résidence ni quelles étaient les exigences à remplir pour devenir un citoyen. La jurisprudence posait un problème. Les tribunaux ne pouvaient pas régler ce problème, il y avait des arriérés sur le plan du traitement des demandes et l'ancien système ne permettait pas de servir les intérêts du Canada.
    L'ABC a appuyé les efforts du gouvernement en vue d'améliorer la situation par l'entremise du projet de loi C-24. Il faut avouer que le projet de loi C-24 a permis de régler de nombreux problèmes. La définition du terme résidence a été clarifiée, de sorte que nous avons maintenant la définition de la présence effective. Le processus de prise de décisions a été simplifié et le gouvernement a consacré des ressources au traitement des demandes. Toutes ces mesures ont permis de faire diminuer les délais de traitement.
    En 2014, l'ABC s'est opposée à un grand nombre des autres dispositions du projet de loi C-24. Bien que cette mesure législative ait contribué à sortir la Loi sur la citoyenneté de son stade byzantin, aux yeux de certains praticiens du domaine, elle l'a rendue un peu kafkaïenne, car, comme nous l'avons entendu, elle permet à un fonctionnaire de révoquer la citoyenneté d'une personne sans qu'il y ait d'audience. Le gouvernement a aussi ajouté une disposition inédite dans la loi, à savoir l'article 13.1, qui autorise le ministère à suspendre le traitement d'une demande indéfiniment. Ce sont là des dispositions qui selon nous sont contraires à la primauté du droit. Parmi les modifications proposées dans le projet de loi C-24, il y avait celle visant à faire en sorte que le système d'appel devienne un système de révision judiciaire. Du point de vue des praticiens du domaine, il s'agit d'un système inférieur. Comme nous l'avons entendu dire, il faut obtenir une autorisation, et, dans tous les cas où on n'accorde pas l'autorisation, on n'obtient pas non plus les motifs. Les personnes qui obtiennent un refus ne peuvent pas interjeter appel ni obtenir les motifs de la décision.
    Notre section appuie un bon nombre des dispositions du projet de loi C-6 qui visent à annuler certains de ces changements, en particulier les motifs de révocation de la citoyenneté liés à l'intérêt national. Nous nous étions vivement opposés à cela. Plutôt que d'énumérer tous les points sur lesquels nous sommes d'accord, que vous trouverez dans notre mémoire, j'aimerais signaler certains des aspects du projet de loi qui pourraient être améliorés selon nous.
    La professeure Macklin a abordé le premier aspect, tout comme le ministre lorsqu'il a comparu mardi dernier. Je veux parler de l'existence d'un processus équitable et indépendant pour les personnes passibles d'une révocation de leur citoyenneté pour des raisons de fraude ou de fausse déclaration. La professeure Macklin a décrit ce qu'elle propose, alors je ne vais pas tout expliquer. La solution que nous proposons est un peu différente de celle qu'a suggérée la professeure Macklin. L'objectif global est le même, c'est-à-dire veiller à ce que chaque cas puisse être examiné en vertu de motifs humanitaires avant la révocation de la citoyenneté. Selon nous, il conviendrait d'envisager de conférer ce pouvoir discrétionnaire au fonctionnaire qui étudie le cas d'une personne et de faire en sorte que sa décision soit directement examinée par la Cour fédérale en appliquant la norme de la décision raisonnable.
    Dans certaines situations, en vertu de la loi actuelle, des personnes peuvent se voir retirer leur citoyenneté pour des raisons de fausse déclaration et deviennent directement des ressortissants étrangers interdits de territoire. C'est ce qui se produit lorsqu'elles ont fait une fausse déclaration dans leur demande de résidence permanente et qu'elles ont par la suite obtenu la citoyenneté.

  (1120)  

    Nous pensons que toutes les personnes dont la citoyenneté est révoquée devraient obtenir le statut de résident permanent et interjeter appel devant la Section d'appel de l'immigration pour conserver ce statut et essayer de rester au Canada.
    Dans notre mémoire, nous préconisons, en ce qui a trait au processus d'attribution de la citoyenneté, de laisser un pouvoir discrétionnaire d'accorder la citoyenneté aux personnes méritoires qui ne peuvent pas satisfaire aux critères de la présence effective, même si elles ont de liens solides avec le pays et qu'elles sont désireuses de devenir des citoyens canadiens. En 2014, nous avons proposé certaines définitions qui pourraient être utilisées.
    Je vais vous donner quelques exemples de cas qui pourraient être problématiques. Un pilote qui habite au Canada, mais qui se trouve souvent à l'étranger en raison de son travail, pourrait avoir de la difficulté à satisfaire à l'exigence de trois ans sur cinq. Soit dit en passant, l'exigence de trois ans sur cinq constitue une amélioration par rapport à celle de quatre ans sur six. C'est un assouplissement, mais il reste qu'il y aura des cas difficiles à trancher.
    Je vous remercie, monsieur Veeman. Peut-être que nous pourrons examiner certaines des autres recommandations durant la période des questions. Votre temps est écoulé.
    Madame Zahid, vous disposez de sept minutes pour interroger les témoins.

  (1125)  

    Premièrement, j'aimerais profiter de l'occasion pour remercier tous les témoins de s'être déplacés et de nous avoir fait part de leurs points de vue sur cette mesure législative importante que nous sommes en train d'étudier.
    Ma première question s'adresse à Christopher ou à Tamra de l'Association du Barreau canadien. J'ai lu votre mémoire, dans lequel vous demandez une plus grande latitude lorsqu'il s'agit de déterminer les liens du demandeur avec le Canada plutôt que de strictement s'appuyer sur la présence effective. Je suis certes en faveur d'une plus grande latitude et je ne crois pas qu'il faille exiger une présence inutilement coûteuse et longue, mais en permettant une plus grande subjectivité de la part des juges de la citoyenneté, ne risque-t-il pas d'y avoir une application inégale du principe de la canadianisation, car les critères varient d'un juge à l'autre?
    Oui, il est certes possible qu'il y ait des différences, si c'est un décideur qui évalue les différents éléments. Ce type d'analyse est effectué dans le contexte de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, précisément l'article 25, qui permet de présenter une demande pour demeurer au Canada en tant que résident permanent pour des motifs humanitaires.
    Ce type de décision est déjà prévu dans la loi de façon générale. Selon notre point de vue, nous nous occupons des personnes qui sont aux prises avec ces cas difficiles et nous cherchons une façon de défendre les intérêts de ces personnes dont le cas est difficile. Nous pensons que certaines d'entre elles ont un dossier convaincant qui justifie de leur accorder la citoyenneté.
    Ma question s'adresse à Andrew Brouwer. Vous avez beaucoup écrit sur la question de l'apatridie et de la nécessité pour le Canada de respecter ses obligations internationales en se dotant de politiques d'immigration qui permettent d'éviter que quiconque devienne apatride. Vous avez aussi largement parlé de cette question. Plusieurs projets de loi ont cherché à remédier aux lacunes de la Loi sur la citoyenneté à cet égard. Pouvez-vous nous dire quels changements s'imposent selon vous pour améliorer la situation? Est-ce que ces changements devraient être apportés grâce à des amendements au projet de loi C-6 ou devraient-ils faire l'objet d'une mesure législative distincte qui permettrait la tenue d'un débat axé précisément sur cette question?
    Le Canada pourrait et devrait certainement beaucoup faire en ce qui concerne l'apatridie. Nous sommes saisis du projet de loi C-6 et je crois, si vous jetez un coup d'oeil à mon document, que vous y verrez des changements qui pourraient être apportés dans ce contexte et qui feraient une différence énorme actuellement en ce qui concerne l'accès à la citoyenneté; le fait notamment de prévoir une définition juridique, c'est-à-dire dans la Loi sur la citoyenneté, aiderait énormément.
    Outre ces considérations, je suis d'accord avec vous. Il faudrait aborder de plus grandes questions en ce qui concerne la protection des apatrides. Je sais que l'UNHCR, Amnistie internationale et d'autres organisations demandent au nouveau gouvernement de devenir signataire de la convention de 1954. Je crois que ce serait un pas important; ensuite, il faudrait établir un processus pour déterminer le statut des apatrides.
    Si nous étions en mesure de déterminer, grâce à une procédure semblable à celle que prévoient le Royaume-Uni et d'autres pays, si quelqu'un est véritablement de fait ou de droit apatride, et de lui accorder la possibilité de demander un statut canadien, ce serait déjà un changement d'importance majeure. Ce serait une mesure indépendante qui ferait bien sûr l'objet d'un débat et d'un encadrement législatif.
    Il paraît que le ministère envisage une autre mesure visant à modifier les lignes directrices sur les motifs d'ordre humanitaire pour la résidence permanente, afin de s'assurer que l'apatridie est un facteur pertinent dans l'exercice de la discrétion prévue à l'article 25 portant sur la résidence permanente. Cette disposition serait semblable à ce que je recommande actuellement quant à la Loi sur la citoyenneté, c'est-à-dire que le paragraphe 5(4) reconnaisse que l'apatridie est un facteur important qui devrait justifier l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire dans l'attribution de la citoyenneté.
    Ma question est destinée à Mme Macklin.
    J'aimerais parler de la révocation de la citoyenneté dans le cas d'actes qui montrent [Note de la rédaction: inaudible] les « valeurs canadiennes » introduites dans la Loi sur la citoyenneté par les modifications contenues par le projet de loi C-24, modifications qui seraient abrogées par le projet de loi C-6. Dans un éditorial paru dans le Toronto Star le 25 avril 2013, vous avez comparé cette disposition à la « pratique médiévale de bannissement ».
    Pouvez-vous nous dire comment le fait de permettre à un politicien de révoquer la citoyenneté en raison d'une vague définition [Note de la rédaction: inaudible] des valeurs nous mène vers une pente savonneuse de motifs justifiant la révocation et ouvre la voie à une contestation en vertu de la Charte des droits et libertés si la disposition n'est pas supprimée?

  (1130)  

    La révocation de la citoyenneté porte atteinte à plusieurs droits garantis par la Charte, notamment l'article 7, dont j'ai parlé plus tôt. Cela peut constituer un traitement ou une peine cruel et inusité, comme l'a indiqué la Cour fédérale récemment dans l'affaire portant sur les soins de santé offerts aux réfugiés.
    Le gouvernement antérieur a encadré la révocation de la citoyenneté en l'associant à certains actes criminels. Dans l'ensemble, il s'agissait d'actes criminels portant atteinte à la sécurité nationale. Si vous avez été trouvé coupable de l'un de ces crimes, le ministre pourrait alors révoquer votre citoyenneté.
    Nous en déduisons deux choses. Primo, c'est que la révocation de la citoyenneté sert en fait de punition. C'est une punition imposée par un ministre qui outrepasse ses pouvoirs légaux habituels. Le pouvoir de trouver quelqu'un coupable d'un crime et de les punir est un pouvoir qui incombe uniquement aux tribunaux. Un ministre n'a pas cette autorité. C'est le premier problème. Secundo, bien sûr, vient le principe de la double peine, c'est-à-dire que quiconque commet un acte criminel ne peut être puni deux fois pour cette même infraction. Ces deux critères viennent s'ajouter au fait qu'il s'agit d'un traitement ou d'une peine cruel et inusité.
    Enfin, dans un jugement de la Cour suprême du Canada portant sur le refus du droit de vote aux détenus, la Cour a indiqué que le fait de révoquer quelque chose d'aussi fondamental que le droit à la citoyenneté pour faire valoir une valeur symbolique constituait alors une atteinte au droit de vote. Si on prend ce principe et on l'extrapole, il s'applique sans aucun doute à la citoyenneté.
    Merci, madame Macklin.
    Monsieur Tilson, vous disposez de sept minutes.
    Certains d'entre vous ont comparu dans le cadre de notre étude sur le projet de loi C-24. Quel plaisir de vous revoir. Tous vos exposés sont de nature juridique, mais c'est normal, car vous êtes tous juristes.
    J'aimerais poser une question sur la révocation dans le contexte du terrorisme. Ce cas de figure se produit de plus en plus, notamment en Europe, mais également ici.
    Les Canadiens veulent se sentir en sécurité. Vous le savez déjà peut-être, mais j'aimerais parler du contexte de trois autres pays qui ont des dispositions semblables à celles prévues dans le projet de loi C-24. Si le temps le permet, je vous demanderai votre avis.
    Au Royaume-Uni, aux termes de la Loi sur la nationalité britannique de 1981, un citoyen britannique né au pays peut se voir révoquer sa citoyenneté si le secrétaire d'État est satisfait que c'est dans l'intérêt public et que la personne ne deviendrait pas apatride. Les citoyens naturalisés du Royaume-Uni pourraient se voir révoquer leur citoyenneté si le secrétaire d'État est satisfait qu'il est dans l'intérêt public de procéder ainsi, puisque la personne participe à des actes qui portent gravement atteinte aux intérêts fondamentaux du Royaume-Uni et le secrétaire d'État a des motifs raisonnables de croire que la personne pourrait acquérir une autre nationalité.
    Cette dernière disposition, qui rendrait une personne apatride, est entrée en vigueur il y a deux ans. L'expression « dans l'intérêt public » vise notamment la participation au terrorisme, à l'espionnage, au crime organisé, aux crimes de guerre ou à des comportements inacceptables.
    En France, il s'agit d'un projet de loi qui a été adopté à l'Assemblée nationale et qui doit maintenant être débattu au Sénat, et dont les dispositions permettent la déchéance de la nationalité des citoyens naturalisés si cette mesure ne les rend pas apatrides.
    Tous les États semblent être saisis des questions que vous avez soulevées sur l'apatridie.
    L'article 25 du Code civil prévoit qu'un individu peut être déchu de la nationalité française s'il est condamné pour un acte préjudiciable aux intérêts de la France; toutefois, la déchéance n'est encourue que si les faits reprochés se sont produits dans un délai de 10 ans à compter de la date de l'acquisition de la nationalité française. Ce délai peut être de 15 ans selon les faits reprochés. En d'autres termes, il y a la question de la fraude, dont aucun de vous n'a parlé.
    Le débat qui a lieu actuellement en France porte sur un texte législatif qui permettrait la déchéance de la citoyenneté des Français nés au pays et ayant une autre nationalité qui sont condamnés pour un acte qualifié de crime préjudiciable aux intérêts de la France. Le projet de loi a été adopté à l'Assemblée nationale en février et le Sénat français en est maintenant saisi. Le texte fait l'objet d'une grande controverse et n'a pas encore été adopté, à ma connaissance.
    Une fois que le projet de loi aura été adopté dans les deux chambres, il faudra modifier la constitution, ce qui exige un vote majoritaire aux deux cinquièmes dans les deux chambres. Il se peut que l'amendement n'aboutisse pas.
    On a apporté des modifications à la loi en Australie en décembre dernier. Les Australiens ayant la nationalité pourraient être déchus de leur citoyenneté australienne pour des motifs liés à la sécurité nationale. Les motifs précis justifiant la déchéance de la citoyenneté sont le fait de participer à des actes terroristes, d'être combattant pour une organisation terroriste et d'être trouvé coupable d'une infraction liée au terrorisme.
    Ces dispositions sont semblables à celles qui sont contenues dans le projet de loi C-24. Il se peut toutefois que le projet de loi français ne soit pas adopté. Je demanderais notamment aux représentants de l'Association du Barreau canadien, en commençant peut-être par M. Veeman, ce qu'ils en pensent. J'imagine que vous allez me répondre que c'est bien beau tout cela, mais nous avons la Charte des droits et libertés, quoiqu'à ma connaissance, nous n'avons aucune jurisprudence en la matière à ce jour.

  (1135)  

    Ma réaction sera plutôt d'ordre pratique, dans la mesure où je ne sais pas comment la révocation de la citoyenneté d'un individu contribue à notre sécurité. Je crois que le problème du terrorisme...
    Eh bien, l'individu sera déporté. Voilà ce qui contribue à notre sécurité.
    Certes, mais les gens trouveront un moyen de rentrer au pays. Il vaut mieux les garder en prison, car c'est probablement là où ils aboutiront s'ils sont trouvés coupables d'un acte terroriste.
    Monsieur le président, d'après ce que j'ai compris des dispositions prévues par ces trois pays et du projet de loi C-24, ce cas de figure se produirait après la condamnation, et non avant.
    Je n'ai pas étudié ce projet de loi.
    M. David Tilson: Madame Thomson?
    Je n'ai rien à dire.
    J'aimerais intervenir, si vous me le permettez bien.
    Le président français, François Hollande, a annoncé récemment que son gouvernement avait renoncé à ce projet de loi, donc j'en conclus que la France n'aura pas ces mesures.
    Il est vrai que l'Australie n'a pas de charte des droits. En Grande-Bretagne, d'après ce que je comprends, les dispositions font continuellement l'objet de contestations, comme l'affaire Pham récente. Plutôt que de parler des quelques rares pays qui ont adopté de telles dispositions, je crois qu'il serait plus intéressant de prendre note des pays qui ne l'ont pas fait, dont les États-Unis, qui ont précisé il y a longtemps, dans une décision de la Cour suprême américaine, que la « citoyenneté n'est pas un permis dont la validité échoue lorsqu'on se comporte mal ».
    Quant à l'idée qui veut que nous soyons davantage en sécurité en révoquant la citoyenneté des gens et en les déportant, je dirais que les gouvernements ont caractérisé le terrorisme comme étant un problème mondial. Il ne s'agit pas d'un problème local que nous pouvons résoudre en l'exportant vers un autre pays. En fait, la population est toujours menacée, et la déportation des individus qui sont présumés être des terroristes vers un autre pays n'est pas une solution comme le laissent entendre certains pays.
    En dernier lieu, permettez-moi de souligner l'absurdité du modèle britannique. Admettons que quelqu'un ait la double nationalité canadienne et britannique, et que les deux pays décident que la déchéance de la citoyenneté est justifiée. À ce moment-là, ce serait une course pour voir qui peut révoquer la citoyenneté le premier. L'autre pays doit accepter cet individu, car il n'aura qu'une seule nationalité. Si on pense que l'approche adoptée par le Royaume-Uni est un modèle qui doit être repris par tous les autres pays, il faut songer aux conséquences. Si tout le monde se comportait ainsi, les conséquences seraient absurdes.
    Merci, madame Macklin.
    Madame Kwan, vous avez sept minutes.

  (1140)  

    J'aimerais remercier tous les témoins pour leurs excellentes déclarations et leurs mémoires.
    Je ne vais pas ressasser certains des problèmes qui ont été soulevés par rapport au projet de loi C-24, car nous sommes maintenant saisis du projet de loi C-6, et j'en suis ravie. Il serait plus pertinent de se pencher sur les problèmes à régler dans le projet de loi C-6.
    En ce qui concerne la révocation, nous en avons assez parlé. Quant aux audiences indépendantes et impartiales, nous avons fait le tour de la question. Il en vaut de même pour l'apatridie.
    Il reste encore quelques autres problèmes dont on n'a pas parlé en raison d'un manque de temps, il me semble. Tout d'abord, la connaissance des langues officielles. Je sais que le mémoire de l'Association du Barreau canadien aborde la question. Je me demandais si vous vouliez intervenir sur l'exigence visant les connaissances dans l'une des langues officielles. Est-ce une double épreuve, et que recommandez-vous comme solution?
    Avant le dépôt du projet de loi C-24, les candidats pouvaient subir l'épreuve des connaissances avec l'aide d'un interprète. On évaluait alors leurs connaissances et pas forcément leurs compétences linguistiques. Dans notre mémoire, nous indiquons que le fait d'obliger les gens à subir l'épreuve des connaissances dans une langue officielle constitue une épreuve de connaissances linguistiques. Nous proposons de retourner à l'ancien système, selon lequel les gens pouvaient subir l'épreuve avec l'aide d'un interprète.
    Passons à autre chose. Le projet de loi C-24 prévoyait des dispositions concernant les infractions commises à l'étranger, dispositions qui ont été conservées dans le projet de loi C-6, lequel interdit la citoyenneté aux individus accusés d'une infraction à l'étranger, ou encore qui purgent une peine d'emprisonnement pour une telle infraction.
    Il y a la question connexe des obstacles à la citoyenneté, dont certains d'entre vous ont parlé dans leur mémoire. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et si vous êtes d'avis que le Comité devrait recommander des amendements sur ces deux questions.
    Ma question s'adresse à vous tous.
    L'Aide juridique est préoccupée par cette disposition. Elle permet une situation selon laquelle un régime répressif n'a qu'à porter des chefs d'accusation contre un dissident qui est arrivé au Canada pour l'empêcher de devenir citoyen. Une telle mesure serait suffisante pour interdire de façon indéfinie la citoyenneté à la personne. Je serais certainement pour la suppression de cette disposition.
    Je présume que tous les témoins sont pour une telle modification.
    Comme vous le savez peut-être, les droits exigés pour les demandes de citoyenneté ont grimpé considérablement au cours des dernières années, soit une hausse de presque 500 %. Vous qui travaillez avec les gens qui font de telles demandes, pensez-vous que les personnes éprouvent de grandes difficultés et que le gouvernement devrait chercher des mesures pour réduire ce fardeau? Ce ne serait peut-être pas au moyen de ce projet de loi, car sa portée est autre.
    En examinant notre clientèle, je peux vous affirmer que les droits de demande de citoyenneté et de résidence permanente constituent un obstacle considérable pour de nombreuses familles. Nous n'en avons pas parlé dans notre mémoire, puisqu'il n'y a aucun lien avec le projet de loi. Si nous pouvions réduire ces droits ou les indexer sur les revenus, ou encore faire des exceptions dans le cas de candidats pauvres, ce serait une mesure importante pour éliminer l'un des obstacles à la citoyenneté de nos clients.
    D'après les recherches limitées qui ont été faites à la suite des modifications les plus récentes, on a conclu que les dispositions frappent les personnes venues au Canada à titre de réfugiés le plus durement en ce qui concerne l'accès à la citoyenneté. L'aspect financier fait partie des considérations. Les réfugiés sont parmi les gens qui éprouvent un désir et un besoin désespérés d'obtenir la citoyenneté dans les délais les plus brefs, et nous devrions éviter de créer des obstacles arbitraires à la citoyenneté.
    J'ajouterais seulement que les frais exigés pour le traitement des demandes font partie d'un modèle de recouvrement des coûts. À notre avis, le traitement des demandes de citoyenneté devrait se faire rapidement. Pour ce qui est des problèmes d'accès, on pourrait peut-être songer à une exonération pour des motifs humanitaires, mais nous n'appuierons pas forcément la réduction des frais si les délais de traitement en souffrent.

  (1145)  

    J'aimerais rappeler à tous que nous devons nous en tenir au projet de loi C-6. Merci.
    Que pensez-vous du fait que l'on tiendra compte des motifs d'ordre humanitaire à toutes les étapes de la révocation de la citoyenneté? Des modifications ont été apportées par rapport au projet de loi C-24 à ce sujet. Selon votre expérience, pourquoi faut-il tenir compte des motifs d'ordre humanitaire et à quelles étapes?
    Il vous reste 40 secondes pour répondre.
    Les motifs d'ordre humanitaire sont d'une importance cruciale dans un système d'immigration, car on ne peut jamais prévoir l'incidence de l'application de la loi dans toutes les circonstances et pour toutes les personnes concernées.
    En ce qui nous concerne, les motifs d'ordre humanitaire qui entrent en ligne de compte lors de la révocation de la citoyenneté devraient être examinés par la Section d'appel de l'immigration ou le tribunal compétent qui entendra l'appel, le cas échéant. Il faudrait préciser les facteurs qui entreront en ligne de compte, ou encore qui seraient particuliers dans le contexte de la citoyenneté.
    Monsieur Tabbara, vous disposez de sept minutes.
    Dans ma circonscription, j'ai un électeur qui est résident permanent. Sa femme et ses enfants résident à 100 % ici au Canada. Sa famille a immigré ici, et il a monté une entreprise florissante dans le Golfe et y va souvent en avion. Il continue à gérer cette entreprise afin de subvenir aux besoins de sa famille. Il a donc passé du temps dans le Golfe pour s'occuper de ses affaires. Le projet de loi C-24 a changé les dispositions de longue date visant la citoyenneté canadienne en réduisant la question de la résidence à un nombre de jours de présence physique.
    Notre ministre de l'Immigration actuel, lorsqu'il était membre du troisième parti d'un comité, a critiqué le projet de loi C-24 en indiquant qu'il resserrait la définition de la résidence de façon à ne plus permettre les séjours à l'étranger.
    L'électeur dont je vous parle travaille pour une entreprise canadienne, mais le projet de loi C-6 n'en tient pas compte. Par conséquent, la femme et les enfants de mon électeur pourraient facilement être admissibles à la citoyenneté, qu'ils ont déjà obtenue d'ailleurs, mais l'électeur n'a jamais pu devenir citoyen canadien en raison de ses séjours à l'étranger pour son entreprise.
    Dans votre mémoire, vous parlez longuement de ce problème de la page 10 à 12. Pouvez-vous nous parler des preuves indiquant que c'est une restriction injustifiée dans la définition de la résidence?
    Nous avons déposé un mémoire lorsque le projet de loi C-24 est entré en vigueur. Dans ce que nous appelons les « cas épineux », nous proposons toujours qu'il y ait une disposition permettant au ministère d'attribuer la citoyenneté.
    À l'époque, j'ai décrit les critères qui existaient avant le projet de loi C-24 comme étant un vide quelconque. Personne ne le savait vraiment, mais il y avait toute une gamme de critères différents à appliquer. À titre de compromis, nous avons proposé ce que prévoyait IRCC dans son Guide des politiques de citoyenneté no 5, soit quelques exceptions à la règle pour ce qui était de la présence physique au Canada. Ces exceptions sont décrites aux pages 10 et 11.
    Il s'agit d'une évaluation plus nuancée des liens entre la personne et le Canada, ce qui pourrait éventuellement permettre à quelqu'un comme votre électeur d'être admissible à la citoyenneté. Or, l'exigence en matière de présence physique rend les choses très simples pour les agents qui traitent les dossiers. Je crois que c'est d'ailleurs un facteur quant à la rapidité du traitement des dossiers. Il y a donc un compromis pour ce qui est de la latitude dans le traitement des dossiers et la rapidité que tout le monde recherche. L'ABC a comme position qu'il y a des dossiers de citoyens potentiels méritants qui devraient être étudiés.

  (1150)  

    J'ajouterais qu'il existe une différence entre la règle qui n'est pas claire, c'est-à-dire « que veut dire résidence », et la règle qui est raisonnablement claire et peut être mise en application de façon efficace et rapide, à savoir « la résidence correspond à une présence physique », en plus d'une exception qui permettrait aux personnes de demander une exemption à la discrétion des autorités.
    Je crois qu'il y aurait alors une différence sur le plan administratif dans l'efficacité du système. La dernière solution est probablement beaucoup plus efficace que la première.
    Vous en avez parlé rapidement, mais si vous deviez proposer un amendement afin d'étendre la définition de résidence au-delà d'une simple présence physique, afin de tenir compte de certaines situations qui sont courantes, avez-vous des recommandations quant aux critères que vous aimeriez voir?
    Ces critères sont énumérés aux pages 6 et 7 du guide. Ils s'appliqueraient, par exemple, à une personne qui doit se déplacer pour affaires, mais dont la famille vit au Canada, dont les enfants fréquentent l'école ici, et qui a une maison ou une résidence ici au pays. Il faut déterminer si cette personne a centralisé son mode d'existence, c'est le langage qui est utilisé dans la jurisprudence, au Canada. Cela dépend également de la longueur des absences du Canada. S'il s'agit d'un long séjour, on pourrait plus difficilement le justifier.
    Le denier facteur qui est énuméré, et encore je parle du Guide des politiques de citoyenneté qui existait avant le projet de loi C-24, c'est la qualité des attaches avec le Canada. Ces attaches sont-elles plus importantes que celles entretenues avec un autre pays? Par exemple, si votre électeur est davantage établi dans le Golfe, il lui serait plus difficile d'être admissible à la citoyenneté canadienne.
    Bref, vous avez proposé que le ministre soit autorisé à exercer un pouvoir discrétionnaire ou encore que les juges de la citoyenneté prennent la décision. Si le ministre disposait d'un tel pouvoir discrétionnaire, serait-il en mesure de le déléguer aux agents d'immigration?
    Oui, c'est ce que nous proposons. En vertu de l'article 25 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, on peut conférer aux agents les pouvoirs nécessaires pour accorder des exemptions, et c'est l'approche que nous préconisons.
    Monsieur Saroya, vous disposez de cinq minutes.
    J'ai une question concernant la révocation de la citoyenneté. Y aurait-il des conditions qui justifieraient la révocation de la citoyenneté, admettons la fraude ou le fait de mettre des renseignements trompeurs dans sa demande? Seriez-vous en faveur de telles mesures?
    Qui est le destinataire de votre question?
    M. Bob Saroya: Tout le monde.
    L'Association du Barreau canadien aurait comme position que la citoyenneté devrait être révoquée lorsqu'il y a une fausse représentation et de la fraude, mais qu'il devrait néanmoins y avoir une certaine latitude lorsqu'il s'agit de quelqu'un qui est au pays depuis longtemps, qui y est établi, et pour lequel la révocation aurait une conséquence grave, par exemple, sur son emploi. On pourrait peut-être accorder une exemption dans ces cas-là.
    En général, cependant, nous ne sommes pas en faveur de la conservation de la citoyenneté des gens qui font de fausses représentations.
    Permettez-moi d'ajouter mon grain de sel. Quelles que soient la fraude ou les fausses représentations commises, il faut en tenir compte, car si on l'avait su, la personne n'aurait pas obtenu la citoyenneté.
    On pourrait également tenir compte d'une autre dimension, en examinant des données comparatives d'autres pays comme la France. On pourrait songer à établir un délai de prescription, comme nous le faisons dans bien des cas. Après une certaine période, nous considérons qu'il ne vaut plus la peine d'assujettir quelqu'un à un risque de poursuites. C'est ce qui se passe dans le droit pénal et le droit civil. On pourrait songer à le faire dans le cas de la révocation de la citoyenneté. C'est un autre facteur.
    Dans le cas de personnes qui ont commis des crimes de guerre pendant la Deuxième Guerre mondiale ou en Bosnie-Herzégovine, certains des renseignements pertinents ont été découverts 10 ou 20 ans après que les personnes concernées étaient devenues citoyens. Ce sont des situations réelles. Devrait-on révoquer leur citoyenneté ou non?

  (1155)  

    Vous pourriez décider qu'il n'y a aucun délai de prescription dans le cas des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité. Vous pourriez décider qu'il devrait y avoir un délai de prescription dans le cas de fausses représentations concernant des faits d'une gravité moindre qui pourraient justifier la révocation. Bien sûr, c'est une question qui doit être examinée soigneusement; je ne vous fournis maintenant qu'une réponse sommaire.
    Mes collègues et moi avons à coeur la sécurité des Canadiens. Compte tenu de vos propos, quels changements recommandez-vous au projet de loi  C-6 afin d'assurer la santé et la sécurité des Canadiens? Ma question s'adresse à vous tous.
    Je ne suis pas sûre que la citoyenneté soit l'outil optimal pour réaliser votre objectif qui consiste à assurer la sécurité des Canadiens. Je crois qu'il faudrait plutôt regarder du côté des lois pénales et de nos autres mesures sécuritaires. Le rôle de la citoyenneté dans ce domaine est limité. Je ne dis pas qu'il soit absent, mais il est néanmoins limité, et on ne devrait pas l'exagérer ni l'utiliser à des fins pour lesquelles il ne convient pas ou qui soient contraires à ce qui était voulu au départ.
    Je suis entièrement d'accord. Je ne crois pas qu'il faille modifier la Loi sur la citoyenneté pour y ajouter des mesures qui protégeront les Canadiens. Nous avons des lois pénales. Nous avons des mesures en matière de sécurité.
    J'ai une autre question pour vous qui porte sur les compétences linguistiques. Le ministre a comparu mardi dernier. Aucune consultation n'a été faite à ce sujet. Or, les compétences linguistiques sont d'une importance vitale pour réussir dans ce pays et s'intégrer dans la société. Les compétences linguistiques protègent les personnes.
    Je peux vous donner un exemple on ne peut plus clair. Lorsque je suis arrivé ici il y a 42 ans, je devais payer le dîner de mon collègue chaque jour parce qu'il traduisait mes propos pour l'employeur.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Bob Saroya: C'est drôle maintenant, mais ce ne l'était pas à l'époque.
    Que peut-on faire afin que les gens soient véritablement protégés? Devrait-on y consacrer davantage de fonds? Que pouvons-nous faire afin que les gens apprennent l'une des langues et aient les compétences nécessaires pour ne pas être isolés sur le plan social ou culturel et pour trouver un emploi ou faire des études? Que peut faire le gouvernement afin de protéger correctement les gens?
    Malheureusement, monsieur Saroya, vous n'avez plus de temps, et nous allons passer à quelqu'un d'autre.
    Monsieur Sarai, vous avez cinq minutes.
    J'avais quelques questions en tête, mais je vais en poser une autre afin d'aider mes collègues d'en face ainsi que d'autres qui ne comprennent pas pourquoi nous voulons modifier le projet de loi C-24.
    Vous êtes tous juristes, et je vous demanderais de faire l'avocat du diable ou de jouer un rôle semblable. Admettons que d'autres pays ont adopté le projet de loi C-24, non le projet de loi C-6, mais bel et bien le projet de loi antérieur, comme l'ont fait dans une certaine mesure la Grande-Bretagne et l'Australie, et comme la France en avait l'intention. Un Canadien né ici de parents canadiens est adopté et déménage ensuite en Australie, y prend la nationalité, disons que c'est pour un emploi. Il se fait radicaliser par une idéologie folle, devient terroriste et commet des actes violents. Pensons-nous que la population canadienne serait ravie si, après avoir été condamnée là-bas, la personne était déchue de sa citoyenneté australienne et l'Australie se disait que puisque cette personne est née au Canada, il faudrait la déporter? Pensez-vous que les Canadiens seraient ravis?
    J'aimerais d'abord entendre le représentant de l'Association du Barreau et ensuite peut-être Mme Macklin.
    Le Barreau propose l'abrogation des dispositions prévoyant la révocation en cas d'atteinte aux intérêts nationaux. Je crois que notre réponse est non. Les Canadiens ne seraient pas ravis si on nous renvoyait des gens dans un tel contexte.
    Je cède la parole à ma voisine.
    Il me semble que vous faites de la rhétorique. Il s'agit de la réciprocité. J'ai donné l'exemple de quelqu'un qui a la double nationalité canadienne et britannique, et le pays qui doit accueillir cette personne est le dernier pays à avoir révoqué sa citoyenneté. Il y a de toute évidence un facteur arbitraire.
    Votre question nous mène à nous demander à qui nous appartenons et de quoi dépend l'appartenance. Nous parlons souvent « d'appartenance » dans un sens élargi, lorsqu'on parle des attentes à l'égard des citoyens canadiens, mais lorsqu'il s'agit de déportation, on se fie à la stricte définition légale de la citoyenneté comme motif valide justifiant la déportation, car ces gens ont vraiment leur place « là-bas ». Je crois que votre question montre bien l'écart entre la façon dont nous utilisons la citoyenneté et la façon dont nous la comprenons.

  (1200)  

    Mes autres questions sont de nature plus technique. Depuis trois ans, l'ABC recommande que les déclarations d'impôt ne fassent pas partie des exigences. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi les gens seraient dispensés de payer des impôts au Canada ou d'en fournir la preuve au titre des critères de citoyenneté?
    La raison en est que la Loi de l’impôt sur le revenu comporte ses propres mécanismes d’application, et de les imposer aux candidats à la citoyenneté équivaut à faire appliquer la Loi de l’impôt sur le revenu par le biais de la Loi sur la citoyenneté, ce qui n’est pas une bonne approche.
    Nous avons par ailleurs imaginé que quelqu’un pourrait penser qu’il n’a pas à faire de déclaration d’impôt en soumettant sa demande de citoyenneté, pour se rendre compte par la suite qu’il aurait dû la faire. Peut-on dire alors qu’il a fait une fausse déclaration dans sa demande de citoyenneté? Est-ce que sa citoyenneté pourrait être révoquée pour son ignorance de la Loi de l’impôt sur le revenu? Voilà le raisonnement que nous avons suivi.
    Prenons maintenant le scénario suivant. Dans le cas de quelqu’un dont la citoyenneté peut être révoquée aux termes du projet de loi C-6, pour fraude ou pour fausse déclaration dans une demande, vous dites qu’il devrait reprendre son statut de résident permanent plutôt que d’être un ressortissant étranger interdit de territoire. Comment en arrivez-vous à cette conclusion?
    Je pense à quelqu’un qui omettrait de déclarer qu’il a été criminel de guerre. Cette personne serait à juste titre déclarée interdite de territoire. Mais je pense aussi à quelqu’un comme l’un de mes oncles qui, pour entrer dans l’armée pendant la Seconde Guerre mondiale, a déclaré qu’il avait 17 ans au lieu de 15. Cette fausse déclaration a été maintenue lorsqu’il a fait sa demande d’immigration au Canada. Selon la réglementation actuelle, on pourrait penser que sa demande d’immigration était frauduleuse. Pour des gens comme lui, il pourrait être plus utile de conserver sa citoyenneté ou du moins son statut de résident permanent.
    Devrait-il y avoir un mécanisme en deux étapes? Ou bien proposez-vous un processus d’audience? Quel mécanisme permettrait de déterminer si quelqu’un reprend son statut de résident permanent ou si c’est un ressortissant étranger interdit de territoire?
    Vous avez 20 secondes.
    Cela arrive dans de rares cas, par exemple lorsque quelqu’un fait une fausse représentation dans sa demande de statut de résident permanent et qu’il obtient ensuite sa citoyenneté. En vertu de la loi actuelle, il redevient un ressortissant étranger. Notre argument est qu’il devrait prendre le statut de résident permanent pour pouvoir interjeter appel. Ces cas pourraient être réglés par la Section d’appel de l’immigration ou au moment de la révocation de la citoyenneté.
    J’aimerais remercier notre groupe de témoins de leurs exposés et de leurs réponses instructives.
    Nous allons maintenant suspendre la séance pendant deux ou trois minutes pour permettre au nouveau groupe de témoins de s’installer.

  (1200)  


  (1210)  

    La séance reprend.
    Parmi les témoins de ce second groupe, nous entendrons M. James Bissett, à titre personnel, Mme Debbie Douglas, directrice générale de l’Ontario Council of Agencies Serving Immigrants, et M. Ihsaan Gardee, directeur exécutif du Conseil national des musulmans canadiens.
    Nous allons commencer par M. Bissett. Vous avez sept minutes, monsieur.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je dois dire d’emblée que l’intérêt que je porte au sujet que nous étudions découle de mon expérience en tant que chef du service d’immigration canadien, poste que j’ai occupé pendant cinq ans, et de ma carrière de fonctionnaire consacrée essentiellement aux questions d’immigration et de réfugiés.
    J’ai déjà comparu devant votre comité où j’avoue avoir défendu le projet de loi C-26. Je l’ai fait en raison de deux dispositions que j’estime importantes. La première porte sur la période de temps qui doit s’écouler avant d’acquérir la citoyenneté canadienne. La seconde porte sur la question de savoir s’il convient de retirer la citoyenneté de gens qui ont une double nationalité et qui ont commis des actes de terrorisme ou de trahison.
    Je ne vois pas de raison valable de prolonger la période qui doit s’écouler avant d’obtenir la citoyenneté. La raison la plus convaincante de ne pas le faire semble être — et les membres du Comité seront probablement d’accord avec moi — que l’on peut participer plus rapidement aux élections. À part cette raison, je n’en vois pas d’autre. Je pense d’ailleurs que beaucoup de Canadiens en conviendront. En tout cas, trois années sont bien peu de temps pour accorder le don précieux de la citoyenneté.
    Si des membres du Comité se retrouvaient par hasard immigrants dans un pays comme, disons, l’Inde ou l’Égypte, auraient-ils le sentiment qu’en 10 ans, ils connaîtraient suffisamment la langue et les coutumes du pays, les droits et responsabilités des citoyens, ainsi que les institutions sociales et politiques pour pouvoir participer aux élections? J’en doute. C’est pourtant ce que nous attendons des gens qui immigrent au Canada. Nous nous attendons à ce qu’ils puissent connaître toutes ces choses en trois ans, de même que les obligations et responsabilités associées à la citoyenneté.
    Nous allons accueillir cette année quelque 300 000 immigrants provenant d’environ 190 pays. Des milliers d’entre eux viennent de pays qui n’ont pas de tradition de gouvernement démocratique. Ils n’ont pas eu cette chance et je pense qu’il est naïf de croire qu’en seulement trois années, ils seront prêts à accepter toutes les responsabilités associées à la citoyenneté.
    La réduction de la période de résidence encourage un phénomène de plus en plus courant, les citoyens de complaisance. Ce sont des gens qui restent dans le pays juste le temps d’acquérir la citoyenneté et qui repartent ensuite dans leur pays d’origine.
    Selon la Fondation Asie Pacifique, il y aurait quelque 2,8 millions de citoyens canadiens qui vivent en dehors du pays. Beaucoup se souviendront qu’en 2006, lors des troubles survenus au Liban, nous avons rapatrié quelque 15 000 citoyens canadiens, au coût de 94 millions de dollars pour les contribuables. Peu après que la situation se soit calmée au Liban, au moins 7 000 d’entre eux y sont retournés.
    Sur la question de savoir s’il convient ou non de dépouiller de leur citoyenneté des gens qui ont une double nationalité, je rappellerai au Comité que les résidents permanents n’obtiennent pas tous la citoyenneté canadienne après l’avoir demandée. Nous n’accordons pas la citoyenneté à des gens qui ont un lourd casier judiciaire. Nous ne permettons pas à des gens qui ont été accusés de crimes contre l’humanité d’accepter la citoyenneté. Ces même critères devraient également s’appliquer aux gens qui obtiennent la citoyenneté beaucoup plus tard et qui commettent ensuite d’horribles actes de terreur contre leurs concitoyens.
    Le principal argument, et le plus courant, que l’on fait valoir contre la révocation de la citoyenneté est que celle-ci crée deux classes de citoyens. Je ne trouve pas l’argument valable, car il est dans la nature même de la citoyenneté de créer plus d’une classe de citoyens. Il y a les citoyens canadiens du fait de la naissance. Il y a les citoyens qui ont fait une demande de naturalisation et qui l’obtiennent en répondant aux critères correspondants et il y a une troisième catégorie de gens qui ont la double nationalité. On a donc déjà trois catégories de citoyens.

  (1215)  

    En fait, des citoyens canadiens de naissance peuvent voir leur citoyenneté révoquée en vertu des dispositions du projet de loi C-24, parce que des milliers d’entre eux ont une autre nationalité par leur père ou leur mère. Si votre père était allemand, par exemple, vous avez automatiquement la citoyenneté allemande. Ainsi, des citoyens canadiens de naissance, de même que ceux qui ont obtenu la citoyenneté par naturalisation auraient pu être touchés par l’ancien projet de loi C-24.
    Qu’on le veuille ou non, je pense qu’il y a une différence fondamentale entre les Canadiens de naissance et les citoyens naturalisés. On est citoyen de naissance par hasard et non pas par choix. Par contre, on est naturalisé parce qu’on a fait une demande de citoyenneté. Il s’agit d’un choix volontaire, qui suppose un engagement officiel et un serment d’allégeance au nouveau pays. Les citoyens de naissance n’ont pas ce choix et ne peuvent pas perdre leur citoyenneté. Ils n’encourent aucune sanction tandis que les citoyens naturalisés ont fait un serment d’allégeance à leur pays, ont fait le choix de devenir Canadiens et s’ils violent leur serment ou renoncent à leur allégeance, il me semble logique qu’ils soient passibles de sanctions.
    Nous ne sommes certainement pas le seul pays à révoquer la nationalité de gens qui, ayant la double nationalité, ont commis des actes de terreur ou en sont suspects. En Angleterre par exemple, le secrétaire de l’intérieur peut retirer la nationalité à des gens qui ont la double nationalité et ce, sans leur donner de raison ou, s’il le fait, il leur donne une raison très vague…
    Il vous reste 10 secondes, monsieur Bissett.
    … en invoquant l’intérêt public.
    Enfin, selon un rapport du gouvernement de 2014…
    Malheureusement, votre temps de parole est écoulé, monsieur Bissett.
    … le SCRS, ou les forces de sécurité de ce dernier, sait que parmi les 130 Canadiens qui sont associés au groupe État islamique ou à d’autres groupes terroristes à l’étranger, 80 sont revenus.
    Merci, monsieur Bissett.
    Vous avez sept minutes, madame Douglas.
    Comme notre temps est compté, j’aimerais demander aux témoins de ne pas dépasser leur temps de parole.
    L’Ontario Council of Agencies Serving Immigrants, ou OCASI, accueille favorablement les amendements apportés au projet de loi C-6. J’étais ici pour le projet de loi C-24 et je suis heureuse d’être de retour.
    Nous espérons que le projet de loi lèvera certains des obstacles à l’obtention de la citoyenneté auxquels font face notamment les groupes désavantagés, tels que les immigrants et réfugiés racialisés, ainsi que les femmes, enfants et aînés réfugiés et immigrants.
    Nous nous réjouissons à la perspective que le projet de loi aboutisse à un processus de citoyenneté plus inclusif et plus accessible, et abroge la citoyenneté à deux niveaux qu’avaient entraînée les changements apportés au précédent projet de loi C-24. Nous sommes heureux que le gouvernement actuel ait fait de cette abrogation une priorité et qu’il ait présenté aussi rapidement ce projet de loi.
    Le projet de loi C-24 faisait passer la période de résidence de trois des quatre années précédentes à quatre des six années précédentes. Il exigeait six mois de présence effective au Canada pour chaque période de quatre des six années précédentes. Il retirait le crédit de pré-résidence permanente qui pouvait compter pour la résidence d’un maximum d’un an pour ceux qui se trouvaient légalement au Canada avant de devenir des résidents permanents, tels que les réfugiés, les étudiants étrangers, les aides familiaux résidants et, au Canada, les conjoints parrainés.
    Le projet de loi C-6 portera la période de résidence exigée à trois des cinq années précédentes, tout en maintenant les six mois de présence effective exigés pour chaque période de trois des cinq années précédentes. Il rétablit jusqu’à un an le crédit de pré-résidence permanente.
    Le projet de loi réduit le délai d’attente exigé avant d’être admissible à la citoyenneté et permet aux immigrants et aux réfugiés d’être naturalisés plus rapidement. Il leur permettra d’être des membres à part entière de la société canadienne et d’y contribuer à leur plein potentiel. Cela est particulièrement important pour les réfugiés qui pourraient ne pas avoir d’autre pays vers lequel se tourner pour être protégés et répondra à des besoins pratiques tels que le passeport.
    La réduction du délai d’attente est particulièrement importante pour les futurs citoyens, tels que les aides familiaux résidants, les travailleurs migrants et les étudiants étrangers. Ces gens auront probablement vécu et travaillé au Canada pendant un certain temps avant de devenir résident permanent. Ils auront appris à connaître le pays et les gens, et contribué aux collectivités dans lesquelles ils vivent, notamment en payant des impôts locaux.
    Le maintien d’exigences strictes en matière de présence effective exclut toute marge de manoeuvre, même si des circonstances extraordinaires obligent d’éventuels candidats à voyager pendant de longues périodes.
    L’OCASI est en faveur de la période de résidence exigée de trois des cinq années précédentes et appuie le fait qu’on permette aux candidats de comptabiliser jusqu’à un an de présence avant de devenir résidents permanents.
    Nous n’appuyons pas l’application stricte de l’exigence de présence effective. Nous recommandons que le juge de la citoyenneté puisse avoir une marge de manœuvre pour approuver la demande lorsque le candidat, particulièrement s’il est apatride, s’est conformé à toutes les autres exigences et qu’il a une raison convaincante d’avoir manqué certains jours de présence effective.
    Par ailleurs, le projet de loi C-24 élargit les exigences liées aux tests de connaissances générales et linguistiques, puisque celles-ci s’appliquent désormais aux personnes âgées de 14 à 64 ans, et non plus aux personnes âgées de 18 à 54 ans. Les candidats âgés peuvent très bien apprendre suffisamment l’anglais ou le français pour fonctionner, mais ont de la difficulté à passer le test. Ceux qui ont une formation scolaire limitée ou sont analphabètes auront le plus de difficultés. Apprendre une nouvelle langue et passer un test est souvent plus difficile en vieillissant.
    L’OCASI estime important d’encourager les résidents, y compris âgés, à apprendre l’une des langues officielles et à acquérir des connaissances sur le Canada, mais en faire une condition de la citoyenneté empêcherait beaucoup d’entre eux de participer pleinement à la société. Étant donné la vulnérabilité des personnes âgées, nous serions en faveur de faciliter l’accès à la citoyenneté afin que davantage de résidents puissent jouir du statut, des droits et de la protection associée à la citoyenneté.
    Les jeunes candidats âgés de 14 à 18 ans vont à l’école secondaire où ils apprennent l’une des deux langues officielles et acquièrent des connaissances sur le Canada. Nous ne comprenons donc pas pourquoi le projet de loi C-24 abaisse l’âge requis à 14 ans. Il serait opportun de supprimer cette exigence.
    L’OCASI appuie l’amendement proposé qui vise à exiger des tests linguistiques et de connaissances pour les personnes âgées de 18 à 54 ans. Nous demandons également au Comité de recommander que les candidats âgés, et tout particulièrement les réfugiés, puissent faire appel à un interprète lors de l’entrevue avec le juge de la citoyenneté, aux fins des exigences à satisfaire en matière de connaissances. Cette disposition était prévue avant les changements apportés au projet de loi C-24.

  (1220)  

    Par l'entremise du projet de loi C-24, en 2012, le gouvernement précédent a modifié les règles concernant les demandes de citoyenneté pour exiger dès le départ une preuve de compétence linguistique. Nous suggérons d'éliminer aussi l'exigence liée à la présentation de cette preuve dès le départ. En effet, de nombreux candidats potentiels ont été exclus du processus de demande de citoyenneté en raison de cette exigence. Par exemple, certains demandeurs exercent plus d'un emploi pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille et n'ont pas le temps de suivre des cours de langue; ils ne tentent donc même pas de faire l'examen. D'autres ne peuvent pas payer les frais liés à l'examen. De plus, certains d'entre eux vivent et travaillent dans des collectivités qui n'ont pas de centre d'examen. Ceux qui n'ont pas les moyens ou le temps de se déplacer ne sont donc pas en mesure de faire l'examen.
    Des travailleurs de l'établissement et de l'intégration des immigrants et des réfugiés nous ont dit qu'en raison de diverses difficultés, leurs clients attendent d'être plus vieux pour pouvoir faire une demande de citoyenneté sans avoir à faire les examens de connaissances ou de compétences linguistiques. Les réfugiés — surtout les femmes réfugiées — sont les plus durement touchés. Souvent, ces personnes ont satisfait à toutes les autres exigences en matière de citoyenneté; ce sont des résidents canadiens qui habitent et travaillent ici. Ils font partie de nos communautés. Ils contribuent à la société canadienne de différentes façons. Pourtant, ils ne peuvent pas obtenir la citoyenneté en raison de cette exigence linguistique.
    L'OCASI demande aux membres du Comité d'envisager une recommandation qui éliminerait l'exigence de présenter dès le départ une preuve de compétence dans une langue officielle. Nous vous demandons plutôt de formuler une recommandation selon laquelle dans un cas où un demandeur satisfait à tous les autres critères, le juge de la citoyenneté devrait avoir la souplesse nécessaire pour déterminer, à l'aide d'une entrevue, si ce demandeur possède la compétence voulue dans une langue officielle et des connaissances suffisantes sur le Canada pour répondre aux exigences liées à la citoyenneté.
    D'autres modifications contenues dans le projet de loi C-6...
    Madame Douglas, vous avez 15 secondes.
    Oh. Dans ce cas, permettez-moi de parler des demandeurs ayant une déficience.
    Actuellement, certains demandeurs ayant une déficience, par exemple une déficience auditive ou visuelle, n'ont pas à satisfaire aux exigences en matière de langue et de connaissances. Toutefois, les règles sont vagues en ce qui concerne les autres demandeurs, car elles ne font que laisser entendre que les personnes qui présentent une certaine condition et qui peuvent fournir certains documents peuvent demander une exemption.

  (1225)  

    Merci, madame Douglas. Vous pourrez peut-être nous en dire plus pendant la série de questions.
    Absolument. J'en parlerai pendant la série de questions.
    Monsieur Gardee, vous avez la parole.
    Veuillez tenter de vous en tenir aux sept minutes qui vous sont imparties.
    Bonjour, monsieur le président et honorables membres du Comité.
    Au nom du Conseil national des musulmans canadiens, je suis heureux d'avoir l'occasion d'offrir au Comité le point de vue de notre organisme sur le projet de loi C-6 et sur la Loi sur la citoyenneté.
    Brièvement, le CNMC est un organisme sans but lucratif indépendant et non partisan qui oriente les efforts en matière d'engagement civique musulman et de promotion des droits de la personne. Notre mandat vise à protéger les droits de la personne et les libertés civiles des musulmans canadiens, à promouvoir leurs intérêts publics, à favoriser une compréhension mutuelle entre les communautés et à lutter contre l'islamophobie. Depuis 15 ans, nous nous efforçons de remplir notre mission par l'entremise d'activités dans quatre domaines principaux, notamment l'éducation et la sensibilisation des membres de la communauté, la mobilisation des médias, les mesures contre la discrimination et la défense des intérêts publics.
    Tout d'abord, aujourd'hui, l'exposé du CNMC sera axé sur les dispositions du projet de loi C-6 qui abrogent les motifs de révocation de la citoyenneté canadienne relatifs à la sécurité nationale. Nous n'avons pas de position officielle sur les autres modifications à la Loi sur la citoyenneté proposées dans le projet de loi.
    À titre d'organisme faisant la promotion des libertés civiles, le CNMC appuie les modifications législatives proposées dans le projet de loi C-6 qui visent à corriger les éléments problématiques et discutables sur le plan législatif qui ont été présentés dans le projet de loi C-24. Plus précisément, à notre avis et selon de nombreux autres organismes canadiens de défense des droits de la personne respectés, notamment Amnistie internationale Canada et l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique, l'élimination des motifs de révocation de la citoyenneté canadienne relatifs à la sécurité nationale respecte les idéaux du Canada en matière de démocratie et veille à la protection de nos libertés civiles durement gagnées qui nous tiennent à coeur.
    La loi en vigueur a essentiellement créé deux classes de citoyens. Le fait que les citoyens à double nationalité soient plus à risque de perdre leur citoyenneté signifie que certaines personnes et certains groupes sont moins canadiens que d'autres, et qu'ils méritent moins d'être protégés par la loi. Cela va complètement à l'encontre des droits à l'égalité garantis par l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui prévoit l'égalité de tous devant la loi et le même bénéfice de la loi. En effet, exposer les citoyens à double nationalité à l'exil, une conséquence à laquelle ne sont pas soumis les Canadiens qui n'ont aucune autre nationalité, rend les citoyens à double nationalité inégaux devant la loi.
    La Loi sur la citoyenneté permet de punir à nouveau un citoyen à double nationalité déclaré coupable et incarcéré pour une infraction criminelle liée à la sécurité nationale par l'exil au moyen de de la révocation de sa citoyenneté et de sa déportation. À notre avis, et selon de nombreux experts juridiques, cela va à l'encontre de la primauté du droit et des protections garanties par la Charte.
    En plus de ces préoccupations liées aux droits de la personne, il faut également tenir compte du contexte élargi lié aux conséquences sociales découlant des dispositions sur la révocation de la citoyenneté, et notre organisme les connaît bien, car nous entendons et recevons régulièrement les préoccupations des musulmans canadiens. En termes simples, ces lois n'existent pas dans un vacuum et elles ont des conséquences néfastes. En effet, la révocation de la citoyenneté des citoyens à double nationalité pour des raisons de sécurité nationale cible injustement les immigrants et les groupes racialisés, surtout ceux appartenant à des communautés musulmanes. Cette méthode ne contribue pas à améliorer notre sécurité nationale, car nous nous contentons d'envoyer nos problèmes aux autres pays, même si un grand nombre d'entre eux pourraient nous servir d'alliés dans la lutte contre l'extrémisme violent.
    Ne vous méprenez pas, les conséquences de la loi en vigueur vont au-delà des citoyens à double nationalité. En effet, les musulmans, leur famille et leurs communautés ont été touchés de façon disproportionnée par des mesures de lutte contre le terrorisme avouées et mises en oeuvre au nom de la sécurité nationale. Dans certains cas, le processus de révocation de la citoyenneté a été enclenché contre des personnes nées au Canada qui détenaient seulement la citoyenneté canadienne, tout simplement parce qu'en théorie, ces personnes auraient été en mesure d'obtenir la citoyenneté d'un pays étranger par l'entremise de leurs parents, même si elles n'ont jamais obtenu cette citoyenneté étrangère ou vécu dans un pays étranger.
    Il s'agit d'une initiative draconienne et archaïque. Une telle interprétation et mise en oeuvre arbitraire et dangereuse des dispositions sur la révocation de la citoyenneté expose la nécessité de les abroger le plus rapidement possible.
    C'est dans ce contexte que nous rappelons au Comité les avertissements formulés en 2006 dans le rapport de la commission Arar:
Étant donné que jusqu'ici, les enquêtes liées à la sécurité nationale ont surtout visé les membres des communautés arabes et musulmanes, il est plus probable que si on porte atteinte aux droits de la personne de Canadiens innocents, ils se retrouveront dans ces groupes.
    Les événements du 11 septembre 2001 ont propulsé la communauté musulmane à l'avant-plan et ses membres sont constamment observés, et cette surveillance est renforcée par les stéréotypes négatifs et la discrimination pratiquée à leur égard dans les pays occidentaux, y compris au Canada. Le fait que l'on puisse potentiellement invoquer des déclarations de culpabilité liées au terrorisme qui ont été rendues à l'extérieur du Canada pour révoquer la citoyenneté aggrave le problème. Si les dispositions liées à la révocation de la citoyenneté avaient été en vigueur, il n'est pas difficile d'imaginer qu'une personne comme le journaliste canadien Mohamed Fahmy aurait, de manière absurde, perdu sa citoyenneté après avoir été déclaré coupable à l'issue d'un processus qui a largement été décrit comme étant déficient sur le plan juridique. Cela devrait tous nous faire réfléchir.
    Au bout du compte, même si les musulmans canadiens profitent autant que les autres citoyens de la sécurité publique et de la sécurité nationale, les musulmans canadiens paient aussi un prix plus élevé pour les avantages qu'ils retirent des mesures liées à la sécurité nationale. Cela vaut aussi pour les répercussions entraînées par d'autres mesures liées à la sécurité nationale, par exemple la Loi antiterroriste de 2015.
    Le CNMC croit fermement que l'abrogation des dispositions permettant la révocation de la citoyenneté à la suite d'infractions criminelles relatives à la sécurité nationale représente une étape nécessaire et essentielle à la protection des droits constitutionnels dont jouissent les Canadiens. Il est impératif que le Canada, en sa qualité de société libre et démocratique, soutienne le traitement égal de tous en vertu de la loi. En même temps, le CNMC appuie les mesures qui améliorent la sécurité publique tout en respectant les libertés civiles et les protections conférées par la Charte.

  (1230)  

    Je tiens à préciser que tous les Canadiens conviennent qu'il faut tenir les gens responsables des infractions qu'ils commettent. Il ne fait aucun doute que les infractions énumérées dans la loi en vigueur représentent des crimes graves; toutefois, ces crimes sont punis de façon appropriée par le système de justice pénale, qui se fonde sur un système accusatoire solide et transparent et sur l'application régulière de la loi. À l'opposé de ce principe de justice fondamentale, le pouvoir d'imposer l'exil, comme le prévoit la loi en vigueur, est profondément injuste et discriminatoire.
    Toujours dans l'esprit du projet de loi C-6, nous aimerions également profiter de cette occasion pour encourager le Parlement à abroger, au mieux, ou à modifier de façon importante, au pire, d'autres mesures législatives qui menacent les principes de la démocratie, de l'égalité et de la primauté du droit. Le projet de loi C-6 aura peu de répercussions si ces mêmes principes sont minés par d'autres mesures législatives telles la Loi antiterroriste de 2015, et si les modifications apportées ne sont que superficielles.
    Comme il a été mentionné, étant donné que les communautés musulmanes ont subi, de manière disproportionnée, les répercussions des mesures de sécurité et des mesures législatives adoptées précédemment, elles ont des motifs raisonnables de craindre de devenir les victimes indirectes dans une situation de pouvoir illimité et de partage d'information sans retenue, et même d'être les cibles directes d'une surveillance injuste.
    La tentation de créer d'autres pouvoirs d'application de la loi, de détention et de punition afin de donner à la population un sentiment de sécurité accru peut être forte, mais elle représente un terrain glissant dans une démocratie libérale. Les dispositions de la Loi sur la citoyenneté concernant la révocation de la citoyenneté...
    Il vous reste 15 secondes.
    ... se trouvent également sur ce terrain glissant.
    En terminant, le CNMC appuie fortement l'élimination des motifs de révocation de la citoyenneté relatifs à la sécurité nationale prévue dans le projet de loi C-6. Par l'abrogation de ces mesures, le gouvernement peut renforcer son engagement à redonner aux Canadiens l'assurance qu'ils seront traités de façon égale, y compris les musulmans canadiens, qui se sont sentis stigmatisés par les politiques en matière de sécurité nationale et les discours publics à cet égard.
    Monsieur Ehsassi, vous avez sept minutes.
    J'aimerais remercier tous les témoins d'avoir comparu devant le Comité. Manifestement, l'un des problèmes que nous avions avec le projet de loi C-24, c'est qu'il avait reçu très peu de contributions d'experts comme vous, et je suis donc très heureux qu'on nous ait donné l'occasion de vérifier si le projet de loi C-6 renferme des lacunes.
    J'aimerais revenir sur votre exposé, monsieur Gardee. Je comprends que vous êtes très préoccupé par les mesures de révocation de la citoyenneté. Je ne suis pas certain si vous étiez présent pendant la première heure, lorsque Mme Macklin a parlé d'un mécanisme qui pourrait s'appliquer à la révocation de la citoyenneté. J'aimerais savoir si vous avez des commentaires à formuler à cet égard et si vous pouvez nous proposer un mécanisme qui veillerait à la mise en oeuvre de mesures de protection.
    J'ai seulement assisté à une partie de l'audience précédente et je ne suis malheureusement donc pas en position de formuler des commentaires appropriés sur un tel mécanisme.
    D'accord. Dans ce cas, j'aimerais poser une question à M. Bissett.
    Monsieur Bissett, vous avez manifestement de nombreuses années d'expérience sur les enjeux liés à l'immigration. Vous savez probablement qu'au moment de la présentation du projet de loi C-24, l'Association du Barreau canadien a présenté des observations détaillées. L'un des enjeux qui préoccupaient vraiment les membres de cette association, c'était la prise de mesures de protection pour veiller à ce que le projet de loi C-24 soit conforme à la Charte ou, plus précisément, à l'article 7 de la Charte. Avez-vous des commentaires à cet égard?
    Non. Je savais que les membres de l'Association du Barreau canadien avaient exprimé des craintes selon lesquelles le projet de loi n'était pas conforme à la Charte, mais à ma connaissance, il est conforme à la Charte. Je ne sais pas s'il a été soumis au test, mais les représentants du ministère de la Justice ont sûrement examiné cette question très attentivement. S'ils avaient été d'avis que le projet de loi présentait un risque de non-conformité, je pense qu'ils auraient hésité à laisser le gouvernement de l'époque l'adopter.
    Manifestement, ce type de questions juridiques divise toujours les avis, et j'aurais cru que le projet de loi C-24 aurait fait l'objet d'une contestation à ce jour, car il est en vigueur depuis un certain temps. En effet, à ma connaissance, il a été appliqué dans un cas où un Canadien a perdu sa citoyenneté.

  (1235)  

    Eh bien, comme vous pouvez l'imaginer, l'Association du Barreau canadien est responsable de parler au nom des membres du barreau. Ses membres ont évidemment recueilli les commentaires d'experts dans le domaine, des gens qui connaissent parfaitement la Charte et ses répercussions sur n'importe quelle mesure législative. Je crois qu'on peut présumer que s'ils ont adopté un rapport qui a cerné toutes sortes de lacunes et de défauts dans la mesure législative, ils se sont appuyés sur leur formation juridique. Avez-vous quelque chose à ajouter au sujet de...
    J'aimerais seulement ajouter que l'Association du Barreau canadien parle au nom des avocats qui font partie de l'association, mais de nombreux avocats qui font également partie de cette association peuvent être en désaccord avec ce que présente leur association ou du moins entretenir certains doutes sur la question de savoir si le projet de loi, s'il faisait l'objet d'une contestation devant les tribunaux, serait conforme à la Charte ou non.
    Merci beaucoup.
    C'est ce qui termine mes questions.
    Merci.
    Madame Rempel, vous avez sept minutes.
    J'aimerais d'abord m'adresser à M. Gardee.
    Nous avons entamé notre examen du projet de loi avec le ministre cette semaine, et nous avons beaucoup parlé des modifications aux exigences linguistiques. J'aimerais seulement savoir — il s'agit d'un point sur lequel le ministre est d'accord — si vous convenez qu'il est important que les nouveaux Canadiens soient compétents dans l'une des langues officielles du Canada à leur arrivée au pays, afin de favoriser leur inclusion sociale.
    Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, le CNMC n'a pas adopté de position sur les autres éléments du projet de loi. Les positions que nous avons adoptées concernent les éléments liés à la révocation de la citoyenneté.
    Vous n'avez donc aucun commentaire à formuler sur les exigences linguistiques?
    Non. C'est exact.
    D'accord.
    Dans ce cas, j'aimerais poser la même question à Mme Douglas.
    Oui, nous croyons qu'il est important que les nouveaux arrivants parlent l'une des langues officielles du Canada pour pouvoir fonctionner dans le pays. Comme je l'ai dit dans mon exposé, de nombreuses personnes peuvent parler suffisamment anglais ou français pour être capables de fonctionner. Toutefois, faire d'une exigence linguistique une condition à la citoyenneté, surtout pour les personnes qui ne sont peut-être pas en mesure d'atteindre le seuil...
    Merci, madame Douglas. Étant donné que mon temps est limité, j'aimerais poursuivre avec mes questions.
    Madame Rempel, je crois que Mme Douglas était sur le point de terminer sa réponse à la question.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement, car je crois que j'ai le temps de diriger mes questions selon mes objectifs. Mais je vous remercie.
    Ma question concerne donc une discussion qui a eu lieu à la législature du Québec. Plus tôt ce mois-ci, c'est-à-dire en avril, un article a été publié dans The Montreal Gazette sur une proposition qui vise essentiellement à résoudre les défis qui se posent lorsqu'on tente de convaincre les nouveaux Canadiens — ou les nouveaux arrivants au Canada qui s'établissent au Québec — d'apprendre le français, afin de résoudre les problèmes liés à leur inclusion.
    La proposition, telle que décrite dans The Montreal Gazette, était la suivante:
... un immigrant recevrait un certificat d'accompagnement transitoire valide pour trois ans à son arrivée au Québec. À l'issue de cette période, l'immigrant serait évalué sur son niveau de connaissance du français et des valeurs du Québec... ainsi que sur ses efforts pour trouver du travail. Si un immigrant réussit l'examen, il obtient un certificat de sélection après avoir signé un document par lequel il s'engage à respecter les valeurs du Québec. Les personnes qui échouent à l'examen disposeraient d'une année de sursis pour s'améliorer. S'ils ne réussissent pas l'examen à la deuxième tentative, ils n'obtiendraient pas le certificat, ce qui signifierait qu'ils ne pourraient pas faire de demande de citoyenneté canadienne.
    Cette proposition aurait certainement des répercussions, si elle était adoptée ou discutée, en vertu des dispositions du projet de loi C-6. J'aimerais savoir si, à votre avis, une telle proposition serait acceptable ou non.
    J'hésite à formuler des commentaires sur une proposition que je n'ai pas lue. Mais selon ce que vous venez de lire, j'ai beaucoup de problèmes avec l'idée qu'on demande à des personnes de signer un document qui mentionne les valeurs du Québec, et avec le fait qu'il s'agit d'une condition pour obtenir la citoyenneté canadienne.
    Je crois que c'est tout ce que je peux dire jusqu'à ce que je lise l'article ou que j'aie une idée du contexte lié à cette proposition.

  (1240)  

    D'accord.
    Monsieur Gardee, j'aimerais vous donner une autre chance de répondre à la question. En tenant compte de l'intention du projet de loi de diminuer les exigences linguistiques, votre organisme a-t-il pris position à l'égard de la proposition présentée au Québec relativement aux modifications prévues dans le projet de loi C-6?
    J'aimerais répéter ma réponse, madame, c'est-à-dire que nous ne prenons aucune position sur les autres éléments du projet de loi. Merci.
    Excellent.
    Madame Douglas, le ministre nous a dit que le ministère n'avait mené aucune recherche quantitative pour déterminer si on aiderait davantage les nouveaux arrivants au Canada en investissant dans des cours de langue plus efficaces, plutôt que de simplement réduire l'âge auquel s'appliquent les exigences linguistiques. Étant donné qu'un pourcentage élevé de gens qui arriveront au Canada se trouvent dans cette nouvelle tranche de 10 ans, pourriez-vous nous parler des recherches qui auraient été menées par votre organisme et qui démontrent qu'il s'agit d'une meilleure méthode pour faciliter l'intégration des nouveaux arrivants au Canada dans la société plutôt que de simplement réduire l'âge et, encore une fois, qui étudient la possibilité d'un système peut-être mieux structuré pour fournir des cours de langue?
    Nous avons un très bon système de formation linguistique au Canada. Les ressources, plutôt que le contenu et la qualité, représentent toujours un problème en raison de la portée et de l'échelle. Il est intéressant que vous posiez cette question, car c'était exactement ce qui nous préoccupait lorsque des modifications ont été apportées au projet de loi C-24, c'est-à-dire que cela n'était fondé sur aucune preuve, étant donné les nombreuses années pendant lesquelles nous avons maintenu les exigences linguistiques et obligé les gens âgés de 18 à 54 ans à faire l'examen. Le fait que le projet de loi C-6 revienne à un système éprouvé est la raison pour laquelle nous appuyons les changements qui ont été apportés.
    Étant donné que mon temps est limité, pourriez-vous expliquer ce que vous entendez par « système éprouvé »? Quel type de preuve existe-t-il...
    Pendant des décennies, nous avons...
    ... pour démontrer que la diminution des exigences linguistiques entraîne une meilleure intégration à la société canadienne?
    Monsieur le président.
    Allez-y, madame Douglas.
    Pendant très longtemps, les gens âgés de 18 à 54 ans ont dû faire l'examen de la citoyenneté canadienne. Les modifications visant à réduire cet âge à 14 ans et à l'augmenter à 64 ans à l'autre extrémité représentent une décision arbitraire. À l'époque, nous avons souligné qu'un nombre considérable de gens — surtout des réfugiés, et surtout des femmes réfugiées — ne seront pas en mesure, peu importe le nombre de cours d'anglais ou de français qu'ils ont suivis, d'apprendre une langue officielle au niveau qui leur permettrait de réussir un examen de la citoyenneté. Ce que je tente de faire valoir, c'est que le projet de loi C-6 revient aux méthodes précédentes et éprouvées.
    Vous parlez d'éliminer les obstacles auxquels font face ces femmes, et je suis d'accord avec vous. Nous devrions veiller à ce que les femmes qui arrivent au Canada soient en mesure de participer pleinement à la société canadienne et qu'elles n'aient pas de problèmes liés à l'inclusion sociale. À votre avis, pourquoi déciderait-on de modifier l'âge auquel s'applique l'exigence linguistique plutôt que d'envisager de fournir de meilleurs services de formation linguistique?
    De nombreux réfugiés qui peuvent avoir été victimes de violence et d'actes de guerre, qui ont vécu de nombreuses années de privation ou qui ont passé toute une génération dans un camp de réfugiés ne seront peut-être jamais en mesure d'apprendre une langue à un niveau qui leur permettra de réussir un examen, peu importe le nombre d'heures passées à suivre des cours de langue. Toutefois, il se peut que ces gens puissent mener une conversation avec leurs voisins ou avec les clients d'un dépanneur, et fonctionner dans la société.
    Merci, madame Douglas.
    Le temps est écoulé. Cependant, j'aimerais user de mon pouvoir discrétionnaire et vous accorder quelques instants pour que vous puissiez répondre à la première question de Mme Rempel.
    Je ne me souviens plus de sa première question.
    Dans ce cas, nous allons passer au prochain intervenant.
    Madame Kwan, vous disposez de sept minutes.
    J'aimerais tout d'abord remercier les témoins pour leurs réflexions. Il y a peut-être quelques éléments de leurs exposés avec lesquels je ne suis pas d'accord. Cela dit, je vous remercie pour vos efforts et pour le temps que vous y avez consacré.
    J'aimerais adresser ma question à Mme Douglas. J'ai été fascinée par l'expérience de votre organisation, le nombre de gens que vous côtoyez ainsi que votre connaissance de la réalité sur le terrain. Vous avez exprimé des préoccupations à l'égard de la preuve de compétence linguistique qui, selon vous, devrait être éliminée. Je comprends ça. Je peux vous donner l'exemple de ma mère, qui est citoyenne depuis près de 50 ans maintenant. Si ce critère devait s'appliquer à elle aujourd'hui, elle échouerait probablement. En fait, elle échouerait même dans sa langue maternelle, car elle a étudié en Chine jusqu'en 6e année.
    Cela dit, j'aimerais que vous nous en disiez davantage sur l'importance des questions entourant les obstacles linguistiques et financiers à la citoyenneté. Pourquoi devrait-on apporter ce changement, et qu'est-ce qui devrait être fait dans le cadre du projet de loi C-6?

  (1245)  

    L'une des raisons pour lesquelles nous réclamons ce changement est le coût. Nous avons entendu les deux points de vue. Certaines personnes ont passé toute leur vie au Canada, et pour quelque raison que ce soit, elles ont attendu plusieurs années avant de demander leur citoyenneté. L'anglais est la seule langue qu'elles parlent, et pourtant, elles doivent payer pour passer un examen qui confirmera qu'elles respectent les exigences linguistiques. Nous étions particulièrement inquiets pour les étudiants de 14 à 18 ans. On suppose qu'ils fréquentent une école anglophone ou francophone, mais si leurs parents doivent demander leur citoyenneté à leur place, ils devront payer pour pouvoir prouver leurs aptitudes linguistiques. Selon nous, cela ne démontre aucunement que la personne connaît bien le Canada ni les valeurs que nous prônons.
    Comme je l'ai dit, et votre mère en est un bon exemple, nos membres sur le terrain rencontrent constamment des personnes plus âgées, en particulier des femmes, qui sont venues au Canada et qui sont souvent les dernières à pouvoir accéder à ces services parce qu'elles doivent prendre soin de leurs enfants et occuper deux ou trois emplois pour être en mesure de payer le loyer, et elles savent très bien tout ce qu'implique la citoyenneté canadienne. Au lieu de devoir fournir une preuve de compétence linguistique, nous proposons qu'un juge de la citoyenneté ait une conversation avec eux pour tester leurs connaissances. Dans certains cas — et je reviens encore aux femmes réfugiées, plus particulièrement, aux femmes plus âgées —, elles savent très bien ce qui se passe au Canada et sont parfaitement au courant de notre système, alors elles devraient pouvoir compter sur un interprète, au besoin, lors de leur conversation avec un juge de la citoyenneté.
    À cette fin, le projet de loi C-6 apporte ce changement au niveau de l'âge. Les personnes âgées seraient exemptées de ce processus aux termes du projet de loi C-6. D'après mon expérience, il y a beaucoup de gens qui pourraient ne pas être dans ce groupe d'âge. Recommanderiez-vous que ce changement s'applique également à toutes les catégories?
    Je voulais également aborder les difficultés auxquelles peuvent être confrontées les personnes ayant un handicap. Certaines d'entre elles ne peuvent ni écrire, ni parler, ni même signer un examen. Avec le dépôt du projet de loi C-24, de concert avec certains organismes qui travaillent auprès des personnes handicapées, nous avons réclamé que des processus soient mis en place pour les personnes ayant une déficience auditive, par exemple. Il y a d'autres personnes handicapées qui auraient également besoin d'être exemptées. Chose certaine, le projet de loi C-6 n'en fait pas mention, et nous aimerions que le Comité se penche sur les obstacles auxquels se heurtent les personnes ayant un handicap afin qu'elles puissent satisfaire aux exigences linguistiques ou réussir l'examen de la citoyenneté.
    Pour ce qui est des obstacles, en particulier les obstacles financiers, les conséquences sont énormes. Si les gens n'ont pas les moyens de franchir les diverses étapes du processus, nous ne sommes pas plus avancés. Selon vous, quelles mesures le gouvernement devrait-il envisager pour éliminer ces obstacles financiers?
    L'élimination de la preuve de compétence linguistique serait un bon début, mais nous sommes également préoccupés par le fait que le coût d'une demande de citoyenneté soit passé de 200 $ à 400 $, puis enfin à 630 $. Imaginez les familles nombreuses qui doivent payer cette somme d'argent. Encore une fois, ce n'est pas dans le projet de loi C-6, mais nous considérons que le Comité devrait recommander une réduction des frais associés aux demandes de citoyenneté.
    Pour ce qui est de l'accès à la citoyenneté et des cours de langue, vous avez raison de dire que ce n'est pas évident pour beaucoup de gens qui essaient de survivre et de travailler. Il y en a d'autres qui doivent rester auprès de leurs enfants. Si l'on veut remédier à la situation, il faut d'abord se pencher sur ce dont la communauté a besoin. Selon vous, quelles mesures doit prendre le gouvernement pour faciliter l'accès aux cours de langue et même offrir des services de garde afin que les nouveaux arrivants puissent prendre part au processus?

  (1250)  

    En collaboration avec des organismes membres — nous avons 238 organismes partout dans la province de l'Ontario —, nous veillons à ce que les cours de langue soient offerts les fins de semaine ou les soirs de semaine, après les heures de travail.
    La garde d'enfants continue d'être un enjeu important. Ce ne sont pas tous les programmes financés par le gouvernement fédéral qui peuvent répondre aux divers besoins de tous. Malheureusement, les programmes provinciaux, bien qu'ils soient plus souples, n'offrent pas de services de garde.
    Si on veut réinvestir dans les cours de langue, il faudra également tenir compte des services de garde, et je dirais même, du transport.
    Qu'en est-il des 25 000 réfugiés et de leur accès à la citoyenneté?
    Nous prévoyons que ceux qui sont déjà arrivés et ceux qui arriveront respecteront trois des cinq exigences, mais encore une fois, ceux qui ont passé plusieurs années dans les camps ne seront peut-être pas en mesure de satisfaire aux critères.
    Monsieur Chen, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais céder la dernière minute de mon temps à Mme Zahid.
    Je tiens à remercier tous les témoins d'être ici aujourd'hui et de nous donner leur point de vue.
    Monsieur Bissett, vous avez dit tout à l'heure qu'il y avait plus d'une catégorie de citoyens, et vous avez décrit au moins trois catégories et sous-catégories, dont les citoyens de naissance, ceux qui ont une double citoyenneté et les citoyens naturalisés. Dans cette dernière catégorie, vous avez parlé des citoyens de complaisance. Tant qu'à y être, on pourrait extrapoler et établir une distinction par rapport aux citoyens nés au Canada, mais qui sont de deuxième, de troisième ou de dixième génération. On pourrait même considérer les peuples autochtones différemment. Vous avez également dit que lorsque les gens enfreignent la loi, ils doivent être pénalisés. Voulez-vous dire que le système de justice pénale devrait avoir le pouvoir de révoquer la citoyenneté et qu'il devrait y avoir différentes règles pour chacune de ces sous-catégories? Par exemple, que proposeriez-vous pour un citoyen canadien de la dixième génération?
    Je dis simplement que ce système a essentiellement trois catégories. Il n'en a pas 15 ou 20, et je ne dis pas que cela devrait être le cas. Si vous êtes un citoyen de naissance, vous n'avez pas choisi d'être Canadien. Toutefois, si vous le devenez, à ce moment-là, vous avez fait un choix. Ce ne sont pas tous les immigrants qui demandent la citoyenneté; beaucoup d'entre eux ne souhaitent pas l'avoir. Certains craignent de perdre leur citoyenneté dans leur pays d'origine. Cependant, lorsqu'on parle des citoyens naturalisés, c'est-à-dire les personnes qui ont choisi d'acquérir la citoyenneté canadienne et qui ont suivi toutes les démarches pour l'obtenir, qui ont prêté le serment d'allégeance à notre pays et qui doivent respecter les règles et les règlements, si ces personnes enfreignent les règles par la suite, au point même de tuer leurs compatriotes, je pense qu'il devrait y avoir une pénalité pour cela.
    C'est plus symbolique qu'autre chose, parce que comme on l'a dit tout à l'heure, lorsqu'une personne est condamnée — et il ne faut pas oublier que ces personnes doivent être reconnues coupables — pour des actes de terrorisme ou de trahison, que vous lui révoquiez la citoyenneté ou non, cela lui importe peu, mais c'est davantage pour les Canadiens qui tiennent à leur citoyenneté et qui sont offusqués lorsque leurs compatriotes commettent des actes terroristes contre leurs semblables. Je pense que cela justifie une pénalité, et cette pénalité serait la révocation de leur citoyenneté.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Étant donné que nous sommes l'un des premiers comités à examiner un projet de loi au cours de cette législature, j'aimerais établir un précédent en ce qui a trait à votre droit de parler aux témoins. Vous avez dit que vous avez exercé votre pouvoir discrétionnaire en permettant à un témoin de répondre à une question. Mon rappel au Règlement se rapporte au chapitre 20 d'O'Brien et Bosc, où il est question du rôle des présidents, des vice-présidents et des présidents suppléants. Lorsqu'on parle des responsabilités sur le plan procédural, il est indiqué que le président « veille à faire respecter les règles établies par le Comité, notamment en ce qui concerne la répartition du temps de parole ».
    Il ne faut pas oublier non plus les motions de régie interne que le Comité a adoptées au début concernant l'ordre des interventions. J'aimerais aussi citer un autre passage d'O'Brien et Bosc, que l'on retrouve sous la rubrique « Dépositions ». On peut lire « Les témoins doivent répondre à toutes les questions que leur pose le Comité ».
    Je dirais que c'est plutôt aux députés qui posent les questions qu'il revient de prendre cette décision. Je ne crois pas que le président devrait s'ingérer là-dedans. Je sais que les présidents peuvent poser des questions, mais en quoi votre décision reflète-t-elle le Règlement en ce qui a trait à la répartition du temps de parole si vous avez utilisé le créneau des libéraux pour le faire? Je vous demanderais de préciser au Comité dans quelles circonstances, à l'avenir, vous comptez exercer votre droit d'utiliser le temps de parole des députés de l'opposition pour interroger vous-même un témoin et si cela constitue un changement à la motion de régie interne.

  (1255)  

    Merci, madame Rempel.
    Je vous ferais remarquer que M. Ehsassi n'a utilisé que trois minutes et 50 secondes de ses sept minutes, ce qui veut dire qu'il restait encore plusieurs minutes aux libéraux au cours de cette intervention. J'ai décidé d'accorder un peu de temps au témoin, parce que j'ai jugé qu'il était au beau milieu de sa réponse. J'estime aussi qu'il est de mon devoir de maintenir le décorum au sein du Comité.
    Je vous remercie pour votre observation, mais je ne crois pas que cela s'applique. Ma décision ne peut pas faire l'objet d'un débat. Si vous...
    De plus, monsieur le président, si je vous pose la question, c'est que vous venez tout juste de créer un précédent. Si un député décide de ne pas utiliser tout son temps de parole, selon moi, le tour de questions devrait être considéré comme terminé.
    Monsieur le président, essayez-vous d'apporter un changement aux motions de régie interne? Car si c'est le cas, nous devrons passer au vote.
    Pas du tout. Nous ne voulons rien changer aux procédures habituelles. J'essayais simplement de faire preuve de courtoisie en permettant au témoin de terminer sa phrase. J'ai pris le temps qui n'avait pas été utilisé par les libéraux.
    Je crois que cela établit un précédent, monsieur le président. Êtes-vous en train de dire que lorsqu'un député dit qu'il a terminé et qu'on passe à la prochaine série de questions...? Lorsqu'un tour est terminé, on ne peut pas se garder du temps en réserve pour le prochain tour, à moins que vous vouliez changer la procédure? Le cas échéant, je dirais que c'est inacceptable et que nous devrions soumettre cette question au vote du Comité.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'aimerais discuter des deux règles qu'a invoquées Mme Rempel. Je ne crois pas qu'elles s'appliquent en l'occurrence.
    Je demanderais à mon collègue, monsieur le président, de me prouver le contraire, parce que j'ai cité l'ouvrage O'Brien et Bosc...
    Vous l'avez peut-être cité, mais cela ne signifie pas qu'il se rapporte à la situation actuelle.
    Silence, je vous prie. Vous devez vous adresser au président.
    Je vous remercie pour votre question, monsieur Ehsassi. Je vais demander à la greffière de me renseigner là-dessus.
    Merci, monsieur Ehsassi. On n'a pas établi clairement à quel moment un président peut exercer son droit de poser des questions. Cela peut être à la fin d'une audience, comme à la fin d'une série de questions. Je voulais connaître la fin de sa réponse, alors j'ai usé de mon pouvoir discrétionnaire.
    Merci.

  (1300)  

    Je suis d'accord. Je disais simplement que les deux règles citées par Mme Rempel...
    Le président: Ne sont pas applicables.
    M. Ali Ehsassi: ... ne s'appliquent pas en l'occurrence.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'aimerais que vous me disiez si la motion de régie interne a préséance sur votre droit d'interrompre les députés et de poser des questions aux témoins.
    Madame Rempel, sachez que je n'ai pas empiété sur votre temps de parole, alors les motions de régie interne ne s'appliquent pas. En fait, vous avez eu droit à 16 secondes supplémentaires au cours de cette intervention.
    Monsieur le président, je ne parle pas de moi nécessairement, mais plutôt d'autres membres du Comité, tels que ma collègue du NPD. Son temps de parole a été écourté. L'opposition aurait sans doute pu prendre la parole si vous n'aviez pas... Je dis simplement que vous créez un précédent et j'aimerais savoir si votre pouvoir discrétionnaire a préséance sur les motions de régie interne, parce que si c'est le cas, je crois que la Chambre des communes devra déterminer s'il s'agit d'une question de privilège.
    Le président: C'est...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Parlant de procédure habituelle et de droit de parole, je crois que j'avais la parole. J'ai posé une question à un témoin, et il n'a pas pu terminer sa réponse. Même si je comprends les préoccupations qui sont soulevées par la députée de l'opposition, j'aime bien que les témoins ne soient pas interrompus au milieu d'une phrase. C'est une chose.
    Deuxièmement, j'aimerais savoir si mon temps de parole sera écourté, compte tenu de tous ces rappels au Règlement qui n'en finissent plus.
    Les procédures habituelles ont fait l'objet d'un vote et elles s'appliquent pleinement. Le président peut exercer son pouvoir discrétionnaire, et c'est ce que j'ai fait.
    Nous continuerons de suivre les procédures habituelles. Le président, pourra, à l'occasion, se servir de son pouvoir discrétionnaire pour poser des questions aux témoins.
    Monsieur le président, j'aimerais avoir une précision. Lorsque le président décide d'interroger les témoins, comment cela va-t-il se répercuter sur le temps de parole qui a déjà été alloué conformément aux motions de régie interne?
    Je n'enlève pas de temps à qui que ce soit.
    Eh bien, monsieur le président, je crois que oui. En posant vos questions, vous empiétez sur le temps des autres membres du Comité. Si vous prenez la place d'un député libéral, à ce moment-là, j'estime que ce serait juste.
    J'ai exercé mon pouvoir discrétionnaire sans toutefois écourter le temps de qui que ce soit.
    Monsieur le président, je conteste officiellement votre décision. Je considère que vous allez à l'encontre des motions de régie interne et j'aimerais qu'on tienne un vote par appel nominal là-dessus.
    Monsieur le président, je pense que cela répond à la question. Elle conteste votre décision. Je pense que nous devrions poursuivre avec nos questions, puis y revenir par la suite. Merci.
    Oui, et conformément à la procédure, monsieur le président, j'aimerais que ce soit sous forme de motion.
    Cette question ne peut être débattue, et je vais demander à la greffière de recueillir les votes.
    (La décision du président est confirmée: oui, 5; non, 4.)
    La décision est confirmée. Merci.
    Monsieur Chen, vous pouvez poursuivre.

  (1305)  

    Monsieur le président, il ne nous reste plus de temps.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Le temps prévu pour cette réunion est écoulé.
    Dans ce cas, j'aimerais demander aux membres du Comité s'ils souhaitent poursuivre et terminer au moins cette série de questions.
    Monsieur le président, j'invoque de nouveau le Règlement. Si je ne me trompe pas, pour qu'une réunion soit prolongée, un avis doit d'abord être donné au Comité et, par conséquent, la motion est irrecevable.
    Selon l'ordre du jour, la séance se termine à 13 heures, monsieur le président.
    Pas nécessairement.
    Non, mais l'ordre du jour indique que la réunion devrait prendre fin à 13 heures, et il est maintenant dépassé 13 heures. Vous ne pouvez pas décider seul...
    L'ordre du jour est...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Vous ne pouvez pas, de votre propre chef, décider de prolonger la séance. Cette réunion aurait dû se terminer il y a cinq minutes.
    Monsieur le président, je propose:
que la réunion soit prolongée de 15 minutes.
    L'ordre du jour est seulement un guide. Il n'y a pas eu de motion visant à lever la séance.
    Monsieur le président, je viens tout juste de proposer une motion visant à prolonger la séance de 15 minutes.
    Monsieur le président?
    M. Chen a la parole.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, je dirais que la motion...
    Madame Rempel.
    ...par souci d'équité, et pour montrer votre impartialité, si vous souhaitez prolonger la séance du Comité, tous les partis de l'opposition devraient avoir droit à une série de questions supplémentaire.
    Monsieur le président, je propose une motion visant à prolonger la séance de 15 minutes maximum.
    Je propose de modifier la motion afin de prolonger la séance de manière à ce que chacun des partis représentés à la table ait une intervention supplémentaire.
    Je tiens à préciser qu'il restait trois minutes et demie à M. Chen. Le deuxième tour contient 5 interventions, 4 de 5 minutes et une de 3 minutes, pour un total de 23 minutes.
    Je suis désolée, pourriez-vous répéter, monsieur le président?
    Le deuxième tour, qui suivrait le premier tour, dure au total 23 minutes, conformément aux motions de régie interne qui ont été adoptées. Par conséquent, on se retrouve avec 23 minutes, en plus des trois minutes et demie de M. Chen, ce qui nous amène à 26 minutes et demie.
    Est-ce réellement ce que vous voulez?
    Je précise que je dis seulement que le Parti conservateur et le NPD voudraient avoir leur tour, si la séance est prolongée.
    Madame Kwan.
    Merci beaucoup pour cette brillante discussion.
    Voici ce que je propose: vu que la période de questions a été interrompue par des rappels au Règlement, ce qui nous a fait perdre un certain nombre de minutes, nous pouvons, et je proposerais l'amendement, prolonger d'autant la séance.
    Monsieur le président, je voudrais retirer ma motion. Madame Kwan...
    Le président: Et bien, nous avons été saisis de la motion.
    Je ne sais pas, exactement...
    [Note de la rédaction: inaudible] et, simplement pour clarifier mon sous-amendement, j'ai proposé, au nom de l'équité et dans un souci d'impartialité, vu que le président prolonge unilatéralement la séance du comité, en usant de sa prérogative, de prolonger la séance de manière à inclure une série supplémentaire de questions dans laquelle chaque parti d'opposition ainsi que, bien sûr, le parti ministériel aurait son tour.
    Petite mise au point: la prolongation n'est pas unilatérale. Le Comité est saisi d'une motion de prolongation déposée par le président.
    Faut-il rédiger la motion pour que chacun la comprenne ainsi que les sous-amendements?
    Je tiens à préciser que le sous-amendement vise à autoriser une série supplémentaire complète de questions et qu'il demande un nombre égal de minutes à celui du temps perdu durant le débat sur les rappels au Règlement. Nous autoriserions donc une série complète de questions. Voilà.
    Je suppose que c'est... Non?
    Depuis que Mme Rempel a invoqué le Règlement, nous avons perdu une dizaine de minutes. Le sous-amendement demande donc de modifier l'amendement pour autoriser 10 minutes de plus. C'est ce que je tenais à préciser sur le sous-amendement.

  (1310)  

    Bien. Permettez-moi de découvrir ce qui, en fait, est actuellement proposé.
    La motion initiale visait à prolonger la séance de 15 minutes.
    Exact.
    L'amendement de la motion demande une série supplémentaire complète de questions. Si j'ai bien compris, votre sous-amendement vise à ajouter 10 minutes en compensation du temps perdu à cause des rappels au Règlement de Mme Rempel.
    Exact. Maintenant est-ce que nous allons mettre mon premier amendement aux voix?
    Le sous-amendement.
    D'accord. Merci.
    Monsieur Ehsassi, vous êtes sur la liste des intervenants...
    Monsieur le président...
    [Note de la rédaction: inaudible] tant que je ne comprendrai pas ce qui est mis aux voix, et il semble que ce n'est pas ce sur quoi nous allons nous prononcer.
    Vous figurez sur la liste. M. Ehsassi était le premier.
    Je voudrais simplement des éclaircissements sur l'amendement.
    Si j'ai bien compris, l'amendement nous dit d'utiliser le temps qui reste à utiliser, qui serait de trois minutes et demie. On a depuis compris que tout le temps pris par Mme Rempel doit être repris, soit près de 10 minutes. Je pense que trois minutes et demie suffiraient pour conclure les questions.
    Quelqu'un peut me dire ce qui se passe ici?
    Si j'ai bien compris, il est proposé d'accorder trois minutes à M. Chen, puis de passer à la prochaine série de questions, ce qui signifie que M. Chen est le dernier de la première série et que, en conséquence, nous commencerons ensuite la deuxième série.
    Nous sommes au sous-amendement de Mme Kwan.
    Je comprends — 10 minutes, quelque chose de ce genre. Je tiens seulement à comprendre, parce que je n'ai aucune idée de ce qui se passe.
    Le sous-amendement vise à accorder 10 minutes à la question.
    Est-ce exact, madame Kwan?
    Nous avons passé beaucoup de temps à ne parler de rien alors que, en fait, nous aurions pu entendre les témoins. Pour faire débloquer les choses, je pense à retirer ma motion et à simplement poursuivre.
    Si ce qu'on veut faire est d'entendre les témoins — et ce que je comprends de la motion de ma collègue Mme Rempel, c'est simplement de les entendre — faisons-le. Si nous avons droit à une autre série de questions, parfait. Je pense que les témoins ont beaucoup plus à dire. Faisons-le et faisons-le dans l'heure dont nous disposons, pour pouvoir retourner à la Chambre faire l'autre volet de notre travail.
    Merci, madame Kwan.
    Vous avez retiré votre sous-amendement.
    Allez-y, madame Rempel.
    Actuellement, il ne reste que mon amendement, qui vise à accorder un tour de plus à chaque parti, soit trois minutes. Si nous avons en plus 10 minutes, pourriez-vous préciser qui aura le droit de parole, monsieur le président?
    Il restait environ trois minutes et demie à M. Chen, dans la première série de questions. Vous avez demandé que commence la deuxième série, ce qui ajouterait encore 23 minutes. C'est la situation, maintenant que Mme Kwan a retiré son sous-amendement.
    Monsieur le président, pour que nous comprenions bien... Si nous passons à la deuxième série de questions, nous aurions droit aux 23 minutes.
    C'est ainsi que j'ai compris votre...

  (1315)  

    Est-ce qu'une partie sera accordée au Parti conservateur?
    Vous en avez deux.
    Excellent.
    Vous avez deux tours de cinq minutes.
    Est-ce que ce sera à l'intérieur des 23 minutes?
    Oui.
    Fantastique.
    Dans ce cas, je retire mon amendement.
    Madame Zahid. Allez-y.
    Je suis désolée, nous maintenons l'amendement.
    Je ne le retire pas.
    Mettons-le aux voix.
    Merci. Je mets l'amendement aux voix.
    Nous mettons aux voix l'amendement visant à prolonger la séance du Comité en permettant à M. Chen de terminer son tour et à commencer une deuxième série de questions.
    (L'amendement est rejeté.)
    Une voix: La séance est levée.
    Le président: Il reste une motion. La motion initiale, qui visait à prolonger la séance de 15 minutes.
    Elle a été retirée. Par M. Chen.
    J'ai essayé, mais le président a décidé que c'était irrecevable et il est passé à l'examen du sous-amendement.
    M. Chen a retiré sa motion.
    Comment pourriez-vous mettre aux voix un amendement s'il n'y a pas de motion initiale...?
    Avant de commencer un débat général, avons-nous un compte-rendu exact...? Je crois que M. Chen n'a pas retiré sa motion.
    Je dois entendre des voix, parce que c'est ce qu'il a fait.
    Pouvons-nous régler cette question?
    Sa demande a été jugée irrecevable, parce que, quand il l'a faite, le Comité était saisi du sous-amendement de Mme Kwan.
    Je suis désolé, monsieur le président. Je me souviens très bien que M. Chen a visiblement retiré sa motion à cause du sous-amendement de Mme Kwan.
    Il a retiré sa motion. Sinon, je voudrais l'entendre dire.
    Il a retiré sa motion. C'est sûr.
    Monsieur le président, j'ai demandé le retrait de la motion, et vous avez refusé. J'ai cru comprendre que nous venions de mettre aux voix un amendement de ma motion initiale. Si des membres croient que le Comité n'était pas saisi de ma motion initiale, pourquoi se sont-ils prononcés sur l'amendement d'une motion inexistante?
    Je vous remercie de cette précision, monsieur Chen.
    Madame Rempel.
    Simple demande de précision: la motion de M. Chen ferait-elle qu'aucun membre d'un parti d'opposition ne pourrait parler aux témoins pendant les 15 minutes ajoutées à la séance?
    En fait, elle accorderait à M. Chen ses trois minutes et demie, pour terminer son tour, puis elle donnerait au Parti conservateur et au Parti libéral cinq minutes chacun.
    Excellent.
    Monsieur Sarai.
    Monsieur le président, au nom de tout le Comité, je tiens à présenter mes excuses au témoin pour tout ce cirque. Cela n'aurait jamais dû se produire. Votre temps est très précieux, et cela ne devrait jamais se reproduire. J'espère que notre président et que notre greffière se feront un devoir d'éviter que cela se reproduise.
    Comme personne ne semble vouloir poursuivre le débat, je mets aux voix la motion initiale visant à prolonger la séance de 15 minutes.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Monsieur Chen.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je présente moi aussi mes excuses aux témoins qui ont dû subir les discussions qui viennent de se dérouler sur des rappels absurdes au Règlement.
    Monsieur Bissett, je sais que vous avez été interrompu. Je vais vous poser une autre question.
    Dans votre mémoire au Comité, vous dites que 130 Canadiens se trouvent à l'étranger, qu'ils ont des liens avec l'État islamique et que 80 d'entre eux sont revenus au Canada.
    Pourriez-vous en dire davantage à ce sujet et donner des détails?

  (1320)  

    C'est tiré d'un rapport du Service canadien du renseignement de sécurité, daté de 2014.
    Concernant cette déclaration et, à la lumière de vos autres observations sur le projet de loi C-6, un article daté du 1er mars 2010, par un certain James Bissett, dit que la Charte a effectivement porté atteinte à la souveraineté canadienne. Son auteur préconise aussi l'interrogatoire de tous les candidats à l'immigration qui sont de confession musulmane pour déterminer s'ils souscrivent à des opinions extrémistes.
    Êtes-vous ce James Bissett? Si oui, souscrivez-vous aux opinions exprimées dans cet article?
    Je ne me souviens pas d'avoir dit si c'est ce qui a porté atteinte à la Charte.
    J'ai fait valoir, devant votre comité, qu'il faudrait interroger tous les immigrants avant leur arrivée au Canada. C'était le cas avant, mais, maintenant, dans l'ère du numérique, leurs demandes, présentées par voie électronique, arrivent à Ottawa. Un agent de l'immigration les lit, et si les documents sont en ordre, il délivre le visa. Les immigrants arrivent au Canada sans qu'on les ait vus ni interrogés.
    En ce qui concerne la sécurité, j'ai pensé que cela devrait s'appliquer particulièrement aux pays réputés héberger des terroristes. La plupart de ces pays sont actuellement musulmans. Il était imprudent et dangereux pour la sécurité canadienne de laisser entrer des gens sans qu'un agent des visas les ait d'abord vus, interrogés et que l'agent ait établi que, à son avis, ils pouvaient entrer au Canada, s'adapter rapidement à nos lois et qu'ils possédaient les qualités requises pour demander la citoyenneté.
    Peut-on imaginer un employeur canadien embaucher un candidat sans le voir et ni lui faire passer d'entrevue?
    Ça se passe en ce moment même, et nous accueillons 300 000 nouveaux arrivants au Canada, dont très peu ont été vus ou interrogés au préalable. Un Bangladais désireux de venir au Canada présente sa demande avec toutes ses références, qui peuvent être crédibles ou pas.
    À Dhaka, on peut se procurer un certificat de la police pour un certain nombre de roubles, le joindre à la demande et faire parvenir le tout à Ottawa. Si cela semble en ordre, c'est estampillé, et le visa est envoyé. Le lendemain, on prend l'avion pour Toronto ou Montréal.
    Je pense que c'est dangereux et idiot. Je l'ai dit au Comité et je le redirai.
    Merci, monsieur Bissett.
    Madame Rempel, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Toutes mes excuses aux témoins. Cela arrive de temps à autre quand un comité vérifie des motions de régie interne et ainsi de suite.
    Monsieur Gardee, je tiens à vous remercier de votre temps et de vos observations.
    Madame Douglas, je tiens à vous remercier pour votre travail auprès des nouveaux arrivants au Canada, qui leur permet de connaître la réussite ici et de surmonter les éventuels obstacles qui s'opposent à leur insertion dans la société. Parfois, l'intensité de notre travail de législateurs nous fait négliger certains détails, mais, en fin de compte, indépendamment de la lutte politique, c'est l'objectif que nous voulons tous conserver. Nos questions sur la façon de mieux faire les choses portent parfois sur le plan législatif et parfois encore sur le plan des programmes. J'en suis consciente. Plus tard, je voudrais vous rencontrer pour que nous en discutions.
    Je tiens aussi à remercier M. Bissett d'être ici.
    Sur ce, monsieur le président, je propose:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité étudie le Plan des niveaux d'immigration du Canada pour 2016; que l'étude comprenne un examen des réductions prévues à la catégorie des aides familiaux; que pas moins de deux réunions soient tenues avant le 1er mai 2016 dans le cadre de l'étude; que des fonctionnaires soient présents à au moins une réunion; que le Comité rende compte de ses constatations à la Chambre.
    Je pense que c'est une étude très importante, vu les modifications proposées au projet de loi C-6. Nous avons sans cesse entendu parler des arriérés du traitement des dossiers de certaines catégories de demandeurs qui veulent venir au Canada, particulièrement dans le volet du parrainage par un époux.
    Je pense que cette étude est importante. Le rapport sur les niveaux d'immigration qui a été déposé réduit sensiblement le nombre de places disponibles au Canada pour la catégorie des aides familiaux. Nous avons entendu exprimer beaucoup d'inquiétudes à ce sujet. Je ne crois pas que beaucoup de consultations aient été faites et je pense que cette étude mérite tout à fait le temps qu'y consacrera le Comité. Je pense aussi qu'elle intéresserait beaucoup de personnes, notamment celles qui font partie de la catégorie de parrainage par un époux.

  (1325)  

    Merci.
    Madame Zahid.
    Je pense que nous devrions suspendre le débat et mettre la motion aux voix, parce que nous manquons de temps.
    Je demande la mise aux voix de cette motion.
    Merci.
    Nous passons à...
    Vous ne pouvez pas faire ça.
    Monsieur Tilson.
    Merci, monsieur le président.
    J'appuie la motion. Nous avons discuté de cette question par le passé. Elle intéresse beaucoup les Canadiens et les néo-Canadiens. Nous devrions indéniablement y consacrer du temps et, comme il est proposé dans la motion, en débattre, entendre des témoins, entendre les explications du ministère et peut-être même le ministre sur ses intentions. Je pense que nous devrions continuer de nous intéresser à cette question et il est des plus importants qu'on lui accorde la priorité par rapport à certaines des autres questions que nous avons examinées.
    Merci.
    Merci, monsieur Tilson.
    Comme personne d'autre n'a rien à dire, je mets la motion aux voix.
    Un vote par appel nominal.
    (La motion est rejetée par 5 voix contre 3.)
    Madame Rempel, vous disposez encore de 3 minutes 38 secondes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à Mme Douglas.
    Avec combien de personnes votre organisation travaille-t-elle, qui arrivent par la catégorie des aides qui sont immigrants?
    L'OCASI est l'organisme qui s'occupe de formuler la politique, de faire la recherche et de prendre la défense de ces gens, tout à la fois, mais mes organismes membres, d'un bout à l'autre du pays, particulièrement dans les grands centres urbains, collaborent avec, je dirais, des centaines d'aides familiaux par année.
    Quelles sont certaines des difficultés qu'ils affrontent à leur arrivée au Canada?
    Une longue attente avant de pouvoir accéder à la citoyenneté et des problèmes d'admissibilité aux services avant de devenir résidents permanents.
    Vu que vous avez pu assister à notre mise aux voix d'une étude éventuelle de la catégorie des aides et de la possibilité, par des modifications d'aggraver l'arriéré — j'ai espéré un vote sans partisannerie — croyez-vous que, peut-être, cette étude aurait mérité d'être faite?
    Nous favorisons beaucoup l'élaboration de politiques fondées sur les faits.
    Excellent. Merci.
    Monsieur Gardee aussi, je me demande si votre organisation a des liens avec la catégorie d'aides immigrants ou lui est affiliée et si vous voulez formuler des observations sur ce programme particulier ou une des modifications faites, et qui sera touchée aussi par certaines modifications du projet de loi C-6.
    Encore une fois, nous ne prenons aucunement position sur les autres aspects du projet de loi. Merci.
    Excellent.
    Monsieur Bissett, je sais que, par le passé, vous avez parlé de modifications de la durée de l'obligation de résidence. Je crois fermement que le Canada profite de l'immigration. Je pense que nous sommes une nation d'immigrants qui côtoient les membres de nos Premières Nations sur leur territoire traditionnel et je pense que les candidats à la citoyenneté canadienne, en manifestant leur intention de vivre ici, déclarent qu'ils veulent que le Canada les rende meilleurs et vice versa et qu'ils veulent contribuer au pays.
    Pourriez-vous en dire un peu plus sur l'efficacité de cette modification dans le projet de loi et nous donner votre opinion?

  (1330)  

    J'ai toujours eu l'impression que la durée minimale de résidence avant d'être admissible pour demander la citoyenneté devait être de cinq ans. C'est, je suppose, la moyenne exigée par la plupart des autres pays. La Suisse et l'Allemagne exigent huit ans, et certains pays, bien sûr, n'autorisent aucune demande de citoyenneté. Cinq ans, c'est, je pense, ce qu'exigeait la loi initiale, la Loi sur la citoyenneté de 1947, dans l'idée que les immigrants au Canada auraient à y élire domicile avant d'être admissibles à demander la citoyenneté, et élire domicile signifiait qu'ils devaient être résidents autorisés pendant cinq ans. Après les cinq années de résidence, ils étaient admissibles à demander la citoyenneté.
    D'après vous, quel fait serait nécessaire pour provoquer une modification comme celle que nous constatons ici dans le projet de loi C-6?
    La première modification à la Loi sur la citoyenneté a eu lieu dans les années 1970, quand l'obligation de résidence a essentiellement été ramenée à trois ans. Le projet de loi C-24 l'a prolongée, mais pas assez, je pense. J'aurais encore préféré cinq ans, mais je pense que si on accorde de la valeur à la citoyenneté et qu'on autorise des étrangers à la demander, on la dévalorise en réduisant l'attente...
    Merci, monsieur Bissett.
    ... et nous ne devrions pas le faire, d'après moi. Cinq ans, c'est suffisant pour les personnes qui doivent venir ici.
    Prenons les 25 000 réfugiés syriens...
    Merci, monsieur Bissett.
    Madame Zahid, cinq minutes.
    Très peu d'entre eux parlent notre langue... désolé...
    Monsieur Bissett, vous avez maintenant pris 25 secondes de trop.
    Merci, monsieur le président. Je remercie nos témoins de leur patience.
    Monsieur Gardee, votre organisation, le Conseil national des musulmans canadiens, inscrit parmi ses objectifs la protection des droits de la personne et des libertés civiles des musulmans canadiens (et, par extension, de tous les Canadiens), la promotion de leurs intérêts publics, le développement d'une compréhension mutuelle et la lutte contre l'islamophobie et d'autres formes de xénophobie.
    Dans ce contexte, pourriez-vous discuter de l'impact qu'a eu le projet de loi C-24, avec sa citoyenneté à deux niveaux, sur la communauté musulmane et sa perception par les autres Canadiens et que le projet de loi C-6 cherche à annuler?
    L'impact: beaucoup d'immigrants de la communauté musulmane possèdent une double citoyenneté, ils sont citoyens d'un autre pays, de naissance. Ils peuvent ne même pas vouloir en conserver la citoyenneté. Ils peuvent même ne pas pouvoir y renoncer. Donc, le projet de loi antérieur, le projet de loi C-24 les a fait se sentir comme des citoyens de seconde zone et il a exacerbé leur peur d'être traités comme tels.
    Comme je l'ai dit, les musulmans canadiens tiennent autant à notre sécurité nationale que leurs concitoyens, et ils ont payé trop chèrement pour les mesures antiterroristes édictées au nom de la sécurité nationale. Qu'il suffise de penser à l'affaire Maher Arar, emblématique des bavures qui peuvent survenir quand l'équilibre entre les préoccupations légitimes pour la sécurité et les libertés civiles est considéré comme un jeu à somme nulle. D'après nous, il importe de préconiser une recherche exhaustive et équilibrée de la sauvegarde de la sécurité nationale tout en promotionnant la citoyenneté canadienne de manière à maintenir la primauté du droit et à protéger les droits de la personne de tous.
    Madame Douglas, voyons les modifications apportées à la fourchette des âges pour la démonstration de la connaissance de l'une des langues du pays que propose le projet de loi C-6 à l'étude et parlons du travail de vos organisations membres auprès des immigrants et des résidents permanents, dans leur parcours vers la citoyenneté, travail qui, j'en suis sûre, a comporté un appui et des services linguistiques.
    D'abord, les adolescents de 14 à 18 ans, comment s'est déroulée leur acquisition de l'anglais ou du français?
    Ces jeunes sont inscrits dans notre système scolaire. S'ils sont arrivés à cet âge comme immigrants sans connaissance d'aucune de nos langues officielles, ils sont souvent inscrits en anglais langue seconde. Mais, pour nous, la majorité fréquente l'école depuis un certain nombre d'années et connaît l'anglais.
    Le problème, à notre avis, est de payer pour se soumettre à un test pour prouver une compétence linguistique. De plus, cette exigence du projet de loi C-24 n'est motivée par rien de tangible. Si des parents demandent la citoyenneté, incluent leurs enfants de 14 à 18 ans et répondent aux tests, nous espérons que nos réseaux scolaires enseignent à nos enfants assez de civisme pour qu'ils comprennent le fonctionnement de notre pays. Nous n'avons jamais compris la nécessité d'imposer aux parents des coûts supplémentaires pour prouver des compétences linguistiques. Voilà pourquoi nous appuyons les modifications apportées au projet de loi C-6.
    De plus, et vous m'avez entendue le dire, chez les plus âgés des résidents permanents qui arrivent au Canada, certains, parmi les plus âgés, ont subi des expériences si traumatisantes qu'il leur est absolument impossible d'acquérir un jour des compétences linguistiques suffisantes ou de s'exprimer aisément par écrit dans l'une de nos langues officielles, particulièrement en cas d'illettrisme. Mme Kwan nous a dit que sa mère avait une 6année. Ce n'est pas inhabituel chez certains de nos immigrants et réfugiés âgés.

  (1335)  

    Monsieur Bissett, vous avez dit que vous favorisiez une période plus longue de naturalisation que ce que prévoyait le projet de loi C-24. Cette loi a été en vigueur un certain temps. Quels changements dans la qualité ou d'autres caractéristiques des nouveaux citoyens avez-vous observés depuis, que vous pouvez attribuer à la modification que cette loi a apportée et qui justifient de faire attendre plus longtemps les résidents permanents avant qu'ils puissent demander la citoyenneté?
    Il vous reste 10 secondes.
    Je n'ai observé absolument aucun changement, mais c'était pendant une courte période, et nous ne connaîtrons pas les changements, s'il y en a. Je ne suis pas contre l'idée que beaucoup de nouveaux arrivants puissent être admissibles à demander leur citoyenneté en trois ans, mais, en général, ce n'est pas le cas.
    Merci, monsieur Bissett.
    Je tiens à remercier nos témoins de s'être présentés.
    Mais avant que le Comité ne lève la séance, je signale aux membres du Comité, à la demande du sous-comité, qu'ils peuvent consulter un rapport montrant des prévisions de dépenses pour une étude itinérante au pays comparées à celles d'une étude faite ici, sur la Colline. Le rapport sera communiqué à tous les membres.
    Madame Kwan.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Avant de lever la séance, je demande officiellement l'intégration, dans le compte rendu, des mémoires communiqués par certains témoins qui, faute de temps, n'ont pas été en mesure de terminer leurs exposés, pour qu'aucun renseignement ne soit perdu et qu'on prenne en considération toute l'information à l'étape qui suivra l'audition de tous les témoins.
    Merci, madame Kwan. D'accord.
    Y a-t-il une motion pour l'ajournement? Merci.
    La séance est levée.
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