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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 013 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 23 juillet 2020

[Enregistrement électronique]

  (1205)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
     Bienvenue à la 13e réunion du Comité permanent des pêches et des océans.
     Conformément à la motion adoptée par la Chambre le 26 mai 2020, à l’article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 1er juin 2020, le Comité reprend son étude sur le saumon du Pacifique, en se concentrant plus particulièrement aujourd’hui sur l’éboulement the Big Bar.
     La réunion d’aujourd’hui se déroule en vidéoconférence. Les audiences sont publiques et on peut y accéder sur le site Web de la Chambre des communes. Sachez que le webcast montre la personne qui parle, et pas l’ensemble du Comité.
     Les membres du Comité les connaissent maintenant par cœur, mais pour la gouverne des témoins qui comparaissent pour la première fois en ligne devant un comité de la Chambre des communes, je vais quand même vous lire les consignes qui s’appliquent:
     Pour cette vidéoconférence, l’interprétation fonctionne presque comme pour une réunion ordinaire. Au bas de l’écran, vous avez le choix entre le parquet, l’anglais ou le français. Si vous changez de langue pendant votre intervention, vous devez vous brancher sur le canal d’interprétation qui correspond à la langue que vous parlez. Il est préférable de faire une courte pause quand vous changez de langue.
     Avant de parler, attendez que je vous donne la parole. Quand vous êtes prêt à parler, cliquez sur l’icône du micro pour activer le micro.
     Si un député veut invoquer le Règlement, il doit activer son micro et indiquer qu’il veut invoquer le Règlement.
     Si un député veut intervenir à propos d’un rappel au Règlement soulevé par un autre député, je l’invite à cliquer sur la fonction « lever la main ». Pour cela, vous devez cliquer sur « participants » au bas de l’écran et, quand la liste s’affiche, cliquer sur « lever la main » en face de votre nom. De cette façon, le président saura que vous voulez prendre la parole. J’inscris les noms par ordre chronologique, mais il faut pour cela que je puisse voir le signal « lever la main » sur mon écran.
     Si vous n’avez pas la parole, votre micro doit être fermé. Je suis très ferme là-dessus, et je vous invite à respecter cette consigne en permanence.
     Je vous encourage fortement à utiliser des écouteurs.
     Enfin, lorsque vous avez la parole, parlez lentement et distinctement.
     Si un problème technique survient — en ce qui concerne l’interprétation ou l’audio, par exemple —, informez-en le président immédiatement pour que nous puissions interrompre la réunion et résoudre le problème le plus rapidement possible.
     Avant de commencer, je vous invite tous à cliquer sur le coin supérieur droit de votre écran afin de vous assurer que vous êtes bien en mode « galerie ». De cette façon, tous les participants à l’écran peuvent se voir.
     Comme l’a dit Nancy, Mme Elizabeth May, qui représente la circonscription deSaanich—Gulf Islands, se joint à nous aujourd’hui. Je ne sais pas, par contre, si elle est à Ottawa ou chez elle.
     Bienvenue à nouveau parmi nous, madame May. Votre contribution nous est toujours précieuse.
     Nous accueillons aujourd’hui plusieurs témoins: M. Carl Walters, professeur émérite, Institute for the Oceans and Fisheries, University of British Columbia, qui comparaît à titre personnel; Jesse Zeman, directeur de la restauration des poissons et de la faune, à la BC Wildlife Federation; Jason Wang, vice-président de la Fondation du saumon du Pacifique; et Aaron Hill, directeur exécutif de la Watershed Watch Salmon Society.
     Je vais donner la parole à M. Walters pour six minutes ou moins.
     Vous avez la parole, monsieur.
    Merci. Comme je n’ai pas reçu de consignes précises sur les sujets que vous vouliez que j’aborde, je vais vous exposer, de façon générale, ce qui arrive au saumon du Pacifique.
     Je fais de la recherche sur les populations de saumon du Pacifique depuis plus de 50 ans, notamment sur les causes du grave déclin de nombreuses populations de saumon et de hareng. Le ministère des Pêches et des Océans a répondu à ce déclin en fermant plusieurs pêcheries, mais ces fermetures n’ont pas enrayé le déclin. Un grand nombre de scientifiques du ministère attribuent ce déclin à des facteurs environnementaux qui sont hors de notre contrôle, comme le changement climatique, mais depuis quelques années, j’en suis venu à la conclusion que ce déclin était dû principalement à l’augmentation massive des populations de mammifères marins, comme les phoques et les otaries, et à leurs pratiques prédatrices. Le nombre de phoques et d’otaries a augmenté considérablement sur la côte Pacifique, il a probablement doublé par rapport à ce qu’il était depuis plusieurs millénaires, lorsque les peuples des Premières Nations les chassaient de façon intensive. Pour les saumons, le risque de prédation n’a jamais été aussi grand.
     Je pratique assidûment la pêche sportive depuis 1969, et, au fil des ans, j’ai observé avec consternation l’effondrement de la pêche sportive dans le détroit de Georgie, l’une des zones les plus poissonneuses de la côte Pacifique. Lorsque j’ai commencé à pêcher dans le détroit de Georgie, on pouvait y faire près d’un million de journées de pêche à la ligne par an, et les pêcheurs qui venaient de l’extérieur de la province représentaient un avantage économique de plus de 60 millions de dollars par an pour l’économie locale de la Colombie-Britannique, soit plus que la pêche commerciale de saumon de la Colombie-Britannique. Cette pêche sportive a décliné de plus de 80 %, surtout entre 1980 et 1995, et il n’y a pas eu de rétention de saumon coho depuis plus de 20 ans.
     Quand le déclin a commencé dans les années 1980, les scientifiques comme moi en ont attribué la cause à la surpêche. Nous avons conseillé au ministre des Pêches d’alors, John Fraser, d’adopter des règlements plus restrictifs, c’est ce qui s’est passé, et la pêche commerciale à la traîne a été complètement fermée. Mais les stocks ont continué de décliner. Alors nous en avons attribué la cause à la production des écloseries et à d’autres facteurs, comme l’augmentation de la température de l’eau, mais les stocks ont continué de décliner.
     Aucun d’entre nous n’imaginait que les mammifères marins pouvaient être la cause de ce déclin jusqu’à ce qu’une étude importante réalisée en 2010 par des scientifiques du MPO indique que les populations de phoques, dans le détroit de Georgie, avaient décuplé entre 1972 et 2000, un ordre de grandeur qui correspondait assez bien au déclin de la pêche commerciale dans le détroit de Georgie.
     Aujourd’hui nous assistons à une grande controverse. Nous sommes en présence de deux grandes thèses pour expliquer l’origine de ce déclin et sa persistance. La première est le changement climatique, notamment l’augmentation de la température de l’eau. La deuxième est l’augmentation des pratiques prédatrices des phoques. Nos données indiquent que le nombre de saumons juvéniles consommés chaque année par les phoques dans le détroit de Georgie suffit à lui seul à expliquer ce déclin. Il y a presque autant de jeunes saumons chinook et coho qui arrivent chaque année dans le détroit de Georgie qu’il y en avait dans les années 1970, mais ils ne survivent pas plus d’une année dans l’océan.
     Nous ne pouvons pas prouver que la consommation de jeunes saumons par des mammifères marins est ce que nous appelons un phénomène additif. Nous ne pouvons pas prouver que si on supprimait la prédation, les poissons survivraient. Il se peut que d’autres agents mortifères en tuent autant, parce qu’il y a quelque chose qui ne va pas dans l’océan. On pourrait faire une expérience à grande échelle en demandant aux Premières Nations de se livrer à la chasse au phoque, sur une base commerciale, afin de voir si cela permet de restaurer au moins une partie de la valeur économique de la pêche sportive et, éventuellement, d’avoir un effet bénéfique sur d’autres espèces en voie de disparition, comme le saumon coho du Fraser intérieur.

  (1210)  

    De façon générale, nous avons constaté, dans des études récentes, que l’augmentation considérable des populations d’otaries dans les eaux canadiennes du détroit de Georgie est certainement au moins partiellement responsable du déclin du saumon sockeye du Fraser, qui a donné lieu à la commission Cohen, et est très certainement responsable de l’effondrement de deux de nos grandes populations de hareng sur la côte Ouest, au large de l’île de Vancouver et dans la zone Haida Gwaii.
     J’ai récemment eu l’occasion d’aider la Pacific Balance Pinniped Society à élaborer des propositions pour que les Premières Nations puissent pratiquer la chasse au phoque et à l’otarie sur une base commerciale, dans le but de réduire ces populations de pinnipèdes de 50 % par rapport à leur niveau actuel et de faire en sorte qu’il n’y en ait pas plus qu’à l’époque où les Premières Nations les chassaient sur une base durable. Ces propositions ont été soumises au ministère il y a deux ans, mais elles sont restées lettre morte; le ministère a invoqué toutes sortes d’excuses pour ne rien faire. On peut comprendre, étant donné la controverse qui entoure la chasse aux mammifères marins sur la côte Pacifique.

  (1215)  

    Monsieur Walters, je dois vous interrompre. Votre temps est écoulé. J’espère que vous aurez l’occasion de dire ce qu’il vous reste à dire en répondant aux questions.
    Je suis désolé.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Zeman, de la B.C. Wildlife Federation, pour six minutes ou moins.
     J’aimerais parler de l’avenir du saumon du Pacifique à partir de mon expérience du saumon arc-en-ciel du Fraser, en particulier celui des rivières Thompson et Chilcotin. Selon l’histoire de cette espèce, on est passé de la pêche normale à la pêche avec remise à l’eau, pour finir par l’interdiction totale de la pêche.
    Le problème de ces espèces, c’est qu’elles migrent ensemble...

[Français]

     Excusez-moi, monsieur le président, mais l'interprétation ne fonctionne pas.

[Traduction]

    Moi non plus je n’ai pas entendu.
     Pouvez-vous recommencer, monsieur Zeman?
    Merci de m’avoir invité.
     J’aimerais parler de l’avenir du saumon du Pacifique à partir de mon expérience du saumon arc-en-ciel du Fraser, en particulier celui des rivières Thompson et Chilcotin.
     Selon l’histoire de cette espèce, on est passé de la pêche normale à la pêche avec remise à l’eau, pour finir par l’interdiction totale de la pêche. Le problème de ces espèces, c’est qu’elles migrent avec le saumon rose et le saumon keta, et dans les pires années, les spécialistes du saumon arc-en-ciel estiment que la moitié de ces poissons sont pris dans des filets, en captures accessoires, et que près de la moitié d’entre eux périssent. Leurs populations étaient en grave déclin au milieu des années 1990, quand seuls 3 000 à 4 000 géniteurs réussissaient à survivre. Cette année, on a dénombré 62 saumons arc-en-ciel dans la rivière Thomson et 134 dans la rivière Chilcotin. Ils sont en voie de disparition.
     En 2017, tous les clignotants étaient au rouge et nous étions en mode de crise. Malgré cela, le ministère a autorisé la pêche au filet sur le Fraser. Les organisations non gouvernementales de l’environnement ont réclamé une évaluation d’urgence de la situation, dans le cadre du COSEPAC, ce qui a été fait. En 2018, le COSEPAC a annoncé que deux de ces populations couraient un risque d’extinction imminente, à cause principalement des prises accessoires de poissons adultes par des pêcheurs utilisant des filets pour attraper du saumon du Pacifique, et à cause aussi du mauvais état de l’océan.
     Cela a déclenché la procédure prévue par la Loi sur les espèces en péril, laquelle prévoit la préparation d’un Avis scientifique. Cet avis a été préparé par trois scientifiques: un de la province, un indépendant et un du ministère. Il a ensuite fait l’objet d’un examen par les pairs, au Secrétariat canadien de consultation scientifique. Plus tard, une réponse à une demande d’accès à l’information nous a indiqué que l’avis avait été validé par 42 experts et gestionnaires. Cet avis n’a jamais été publié.
     Après l’évaluation du potentiel de rétablissement, ou EPR, une lettre adressée par la province au ministère indiquait que l’abrégé du ministère n’était plus défendable sur le plan scientifique. Nous avons découvert, après plusieurs demandes d’accès à l’information, que l’avis scientifique qui avait été examiné par les pairs avait fait l’objet d’un abrégé dans un rapport scientifique consultatif, manifestement dans le but de sous-estimer les effets des filets sur le saumon arc-en-ciel.
     En 2019, les gouvernements fédéral et provincial ont mis en place un plan de reconstitution des stocks. La Colombie-Britannique estimait que, pour protéger 95 % de ces poissons, il fallait interdire l’utilisation de filets sur le Fraser pendant 84 jours. Le ministère ne s’est engagé à le faire que pendant 27 jours. En septembre, le ministère a tué ses deux premiers saumons arc-en-ciel dans ses pêches à l’essai. Le 16 septembre, la Colombie-Britannique a fermé le peu de pêche à la truite qui se pratiquait dans le Fraser, probablement en représailles aux décisions du ministère, pour apprendre le lendemain que le ministère avait autorisé la pêche économique sélective au saumon rose, avec des sennes de plage, et avait autorisé la rétention du saumon keta. Il ne faut pas oublier qu’à cette époque, le ministère avait calculé qu’il avait une probabilité de 1 % d’atteindre sa cible d’échappées de 800 000 saumons keta dans le Fraser, mais qu’il a quand même autorisé la rétention du poisson.
     Le ministère a encore une fois utilisé son propre modèle, qui a été par la suite jugé invalide, pour justifier l’ouverture de cette pêche. Nous avons dû faire une demande d’accès à l’information pour savoir ce qui s’était passé en coulisses, dans les officines du ministère, pendant ces deux années, mais on nous a dit que ça prendrait 822 ans pour recevoir la réponse du gouvernement fédéral. Ensuite, ce chiffre a été ramené à deux mois et demi, mais il faudra deux ans pour savoir ce qui s’est passé dans les coulisses.
     Pour cette année, soit 2020, le plan est le même: les experts du saumon arc-en-ciel disent qu’il faut interdire les filets pendant 77 jours, mais le plan du ministère est de ne les interdire que pendant 27 jours. Autrement dit, nous sommes en train de provoquer l’extinction de cette espèce.
     À l’heure actuelle, le rapport scientifique consultatif est le seul document disponible. L’avis scientifique examiné par les pairs n’est toujours pas publié, et nous n’avons toujours pas la réponse à notre demande d'accès à l’information. Voilà le ministère auquel nous avons affaire, en Colombie-Britannique. C’est un ministère qui est enlisé dans des problèmes d’ordres structurel et culturel, et qui est d’une impéritie totale.
     Le saumon arc-en-ciel n’est pas la seule victime. Le saumon coho du Fraser intérieur était moribond dans les années 1990, et plusieurs populations de saumons chinook et sockeye sont en passe de le devenir. La réponse du ministère a été de modifier les règlements sur les pêches et d’anéantir ces populations de poissons. C’est un grave manquement, à la fois pour les poissons et pour les gens qui veulent les protéger.
     Voici un certain nombre de mesures à prendre pour mettre fin à cette hécatombe.
     Il faut financer la restauration de l’habitat. Il n’y a que six biologistes spécialisés dans la restauration dans toute la province de la Colombie-Britannique. Ils n’ont pas de budget de base.
     Il faut adopter des méthodes de pêche sélective. Le saumon arc-en-ciel n’est pas la seule victime des filets dans le Fraser. Le saumon l’est aussi, tout comme nous constaterons, l’année prochaine, que l’esturgeon est lui aussi en déclin, principalement à cause des filets. Il faut interdire les filets.
     S’agissant de la contrebande, nous avons des images qui montrent des saumons chinook, arc-en-ciel et coho, lequel est une espèce en péril, qui sont pris dans des filets illégaux utilisés pratiquement quotidiennement. On les signale au ministère, mais personne ne nous rappelle jamais. Il y a rarement des poursuites. Les agents des pêches sont devenus des spécialistes de la destruction de filets maillants sur le Fraser, au lieu de protéger les saumons contre les contrebandiers.
     Il faut améliorer la surveillance de la pêche dans tous les secteurs. Les modèles de reconstitution des espèces ne tiennent pas compte de la pêche illégale, et nous savons que les saumons chinook du Fraser qui périssent à cause des activités de pêche ne sont même pas comptabilisés dans les ressources halieutiques du fleuve. Autrement dit, il y a des milliers de poissons, voire des dizaines de milliers, qui sont tués chaque année dans le Fraser et qui, selon le ministère, n’ont même jamais existé.
     Nous devons prendre des mesures en ce qui concerne les fermes piscicoles, l’activité prédatrice des pinnipèdes et les passes migratoires. Sur le plan international, nous devons prendre des mesures en ce qui concerne le pacage en mer afin de réduire le nombre de saumons roses et keta issus d’écloseries qui sont déversés dans le Pacifique chaque année. Tout cela doit être fait.

  (1220)  

    Le ministère des Pêches et des Océans est un vrai désastre, sur les plans culturel et structurel. C’est une agence qui gère le poisson. Il ne rend aucun compte à la population. Il est pratiquement impossible d’obtenir des données auprès de ses fonctionnaires. Ces derniers nous répondent chaque fois de faire une demande d’accès à l’information, parce qu’ils ont peur de perdre leur emploi s’ils donnent au public des données qui sont pourtant financées par le même public. Les scientifiques, le personnel responsable de l’habitat et le personnel responsable de l’application de la loi sont rarement écoutés. Le mot d’ordre, c’est pêcher, pêcher, pêcher.
     Pour ce qui est maintenant de la question plus générale de la gestion des ressources naturelles, qu’il s’agisse de l’eau, de l’air ou du poisson, il faut trois choses: du financement, des études scientifiques et le soutien de la population.
     Premièrement, il faut que le financement soit dédié. Cela facilite les flux d’argent, donne un horizon aux contribuables et permet de planifier sur 1, 5 et 10 ans.
     Le rôle de la science est de fixer des objectifs pour les populations de poissons et leur habitat, d’identifier les menaces et les barrières, et d’établir le niveau des captures autorisées. Ce n’est pas le rôle des gestionnaires, c’est le rôle des scientifiques.
     Enfin, il y a la question du soutien de la population. L’agence doit être redevable devant la population, elle doit être transparente et prendre des décisions à partir de données probantes. Ceux qui luttent pour la protection de la ressource doivent avoir l’impression de faire partie intégrante de ce processus. Voilà à quoi le ministère devrait ressembler, mais pour l’instant, il est aux antipodes.
     Je vous remercie de m’avoir écouté.
    Merci, monsieur Zeman.
     Je vais maintenant donner la parole à M. Hwang, de la Pacific Salmon Foundation, pour six minutes ou moins.
     Je rappelle aux témoins qu’ils doivent s’efforcer de parler lentement, car il y a des interprètes qui essaient de les suivre. Moi qui suis de la côte Est, je sais que je parle très vite, et j’ai parfois beaucoup de difficultés à ralentir. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a un interprète qui vous écoute et qui essaie de traduire ce que vous dites pour ceux qui veulent l’entendre dans leur langue maternelle.
     Merci.
    Bonjour à tous. Je m’adresse à vous depuis Kamloops, en Colombie-Britannique. Je vous remercie de m’avoir invité et je suis ravi d’être ici aujourd’hui.
     J’ai plusieurs choses à dire, en guise de déclaration liminaire.
     Nous sommes confrontés à une grave situation. Comme l’a dit M. Zeman, ce que nous faisons en ce moment n’est pas bon pour notre saumon du Pacifique. Un grand nombre de populations connaissent un grave déclin. On ne s’en est pas rendu compte l’an dernier, parce que l’éboulement de Big Bar accaparait toute l’attention, mais le retour des saumons du Pacifique sur la côte a enregistré le pire taux de toute son histoire. Il n’a jamais été aussi bas dans le fleuve Fraser. Le taux qui a déclenché la création de la commission Cohen était plus élevé. Si l’on ne prend pas des mesures adéquates maintenant, bon nombre de nos populations de saumon du Pacifique risqueront de subir le même sort que ce qui est arrivé à la morue de la côte Est, et nous savons ce qui est arrivé.
     Pour savoir ce qu’il faut faire, il faut avoir une vision à long terme. La reconstitution des stocks va prendre du temps. Il n’y a pas de solutions magiques, mais il est possible de prendre des mesures pour que les choses s’améliorent.
     Tout n’est pas négatif dans la situation actuelle. Des programmes positifs ont été mis en place, comme le PPCPR, sous le gouvernement conservateur, et le Plan de protection des océans, sous le gouvernement libéral actuel. J’ajouterai, en particulier, le Fonds de restauration et d’innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique qui a été créé plus récemment et qui est aussi une mesure positive parce que la collaboration entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial est tout à fait indispensable.
     En revanche, il faut bien comprendre que les problèmes auxquels nous faisons face sont énormes et que leur solution prendra beaucoup de temps. Un financement quinquennal est utile, certes, mais ce n’est pas sur cette durée qu’on va résoudre le problème. Pour ce qui est de la restauration des protections éliminées, c’est bien sûr un objectif positif, mais il doit être suivi de mesures concrètes.
     Il faut bien comprendre que l’écologie du saumon est très complexe. Il n’y a pas de solution simple. Il y a des problèmes de prédation, des problèmes d’habitat, et des problèmes liés à la pêche. Ces problèmes se subdivisent en différents éléments, et on ne peut pas faire une chose en pensant que cela va tout améliorer.
     Quant à savoir ce qu’on peut faire pour le saumon, il faut à mon avis considérer l’océan comme un moteur qui permet aux populations de saumon de remonter et de descendre. Cela fait partie du cycle naturel. C’est peut-être en train de changer à cause du changement climatique, mais il y a des choses que nous pouvons faire pour gérer ce que de nombreux biologistes résument en trois mots: la pêche, l’habitat et les écloseries. Je vais y revenir dans le détail.
     Outre cela, nous avons aussi besoin de nous fonder sur des données et des informations, il faut que les scientifiques puissent continuer d’essayer de comprendre ce qui se passe.
     Je vais revenir sur tout cela très rapidement.
     S’agissant de la pêche, nous savons qu’elle a été réduite. M. Walters nous l’a dit tout à l’heure. Nous savons que l’accès et la capacité de la pratiquer sont très importants pour le public. Toutefois, nous devons nous demander comment nous débloquons l’accès à cette pêche. À l’heure actuelle, il est bloqué principalement parce que des populations affaiblies migrent avec d’autres populations plus résistantes. Nous avons besoin de disposer de meilleures informations, de meilleures données scientifiques, de meilleurs systèmes de surveillance et de meilleures évaluations pour pêcher les espèces qui sont saines et protéger celles qui sont faibles. Ceux qui pratiquent la pêche — les Premières Nations, le public et les pêcheurs commerciaux — ont leur rôle à jouer à la table de discussion.
     S’agissant des écloseries, il n’y en a pas une pareille. Je pense que nous devons porter notre attention sur les écloseries axées sur la conservation. Ce n’est pas la même chose que les écloseries qui produisent du poisson exploitable. Ce n’est pas la même chose que les écloseries qui déversent de grandes quantités de poissons dans l’océan en espérant que ça donnera de bons résultats. Une écloserie axée sur la conservation a ceci de particulier qu’elle a vocation à renforcer des populations affaiblies en attendant que nous trouvions la cause du problème et que nous puissions y trouver une solution. Si nous nous précipitons à encourager les écloseries à augmenter leur production, il est peu probable que nous obtenions les résultats escomptés.
     Nous avons un urgent besoin d’écloseries axées sur la conservation. Nous devons les aider, ne serait-ce qu’à cause de ce qui est arrivé à Big Bar. Il va nous falloir des dizaines de millions de dollars pendant deux décennies.
     S’agissant maintenant de l’habitat, nous avons besoin de protéger ce que nous avons, de restaurer ce qui a été endommagé, d’agir de façon stratégique et pas réactive, et de coordonner nos efforts plutôt que de travailler chacun de son côté. Il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire pour protéger l’habitat, mais nous ne faisons pas ce qu’il faut faire.
     Je vous ferai parvenir un certain nombre de recommandations plus tard, par écrit, mais nous devons absolument commencer à élaborer des plans de préservation de l’habitat en fonction des bassins hydrographiques et à les mettre en œuvre.

  (1225)  

    Pour ce qui est de la surveillance, de l'évaluation et des données, je dirai, pour résumer, que nous ne pouvons pas gérer ce que nous ne mesurons pas. Or, nous ne faisons pas suffisamment de contrôle et nous ne mesurons pas assez. Il faut tenir compte de l'écologie et de la science océaniques pour bien comprendre ce qui se passe.
     En résumé, le système de gestion est dysfonctionnel. La somme de tous les éléments ne nous permet pas de comprendre ce qui se passe et de résoudre les problèmes. On nous déroule de beaux discours. Nous avons eu la Commission d'enquête Cohen et nous avons la politique sur le saumon sauvage, mais nous n'obtenons pas les résultats escomptés. Le gouvernement du Canada doit fixer des objectifs pour la reconstitution des stocks de saumon et leur durabilité, et il doit s'engager à les atteindre en prenant les mesures appropriées.
     En résumé, il faudra faire de nouveaux investissements importants dans la pêche, les écloseries et l'habitat. Il faudra débloquer des fonds pour le ministère aussi bien que pour les collaborateurs et les partenaires. Le système de gestion doit être restructuré. Il serait souhaitable de créer un organisme de contrôle indépendant, qui compléterait le travail effectué par le ministère et les autres organismes de réglementation.
     J'en resterai là. Je pense avoir respecté mes six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    En effet, six minutes très précisément. Je vous en suis reconnaissant. Merci.
     Je vais maintenant donner la parole au représentant de la Watershed Watch Salmon Society.
     Monsieur Hill, vous avez six minutes ou moins.
    Merci beaucoup de m'avoir invité.
     Je suis le directeur général de la Watershed Watch Salmon Society, un petit organisme de bienfaisance voué à la conservation du saumon. Depuis 22 ans, nous essayons de cerner les problèmes et de trouver des solutions en ce qui concerne la gestion du saumon sauvage.
    Je travaille dans cet organisme depuis une dizaine d'années. J'ai un diplôme supérieur en biologie, avec une spécialisation en saumon. Pendant plusieurs saisons, j'ai été observateur et technicien dans des pêcheries commerciales sportives. Je suis né et j'ai grandi dans le Nord de la Colombie-Britannique. Mon père était à la fois pêcheur commercial et guide de pêche sportive. Je suis un pêcheur amateur et j'adore rapporter des saumons à ma famille. Mon organisme et moi appuyons vivement les droits de pêche des Autochtones.
     Notre rôle consiste à défendre l'intérêt public dans le domaine de la conservation du saumon sauvage en Colombie-Britannique, qui est l'espèce qui intéresse le plus la population. Je l'ignorais quand j'ai commencé à militer en faveur de la conservation. Je croyais que seule une minorité de gens partageaient nos valeurs en ce qui concerne la conservation du saumon sauvage et son habitat. C'est seulement lorsque nous avons fait un sondage, peu avant les élections fédérales de 2011, que les résultats m'ont appris que, par exemple, seulement 8 % des habitants de la Colombie-Britannique étaient d'accord pour dire que « le gouvernement devrait être autorisé à laisser périr des petites populations de saumon en voie de disparition ». Les réponses à d'autres questions de ce sondage, et à d'autres sondages depuis, témoignaient d'un appui public substantiel pour la conservation du saumon et la reconstitution des stocks.
     Nous en avons grandement besoin aujourd'hui. La situation est très inquiétante, comme l'ont dit les autres témoins. Dans le passé, lorsqu'une remontée de saumons était peu nombreuse, la suivante compensait en nombre, mais depuis 10 ans, il y a de moins en moins de bonnes surprises. Dans la plupart des rivières de la province, les remontées de saumon sain sont la minorité. Les rivières sont dépeuplées.
     Nous savons quels sont les problèmes. Les autres témoins nous en ont parlé ce matin: les virus et les parasites des fermes piscicoles; la surpêche; les effets nuisibles des écloseries de saumon; la destruction de l'habitat et la pollution; et bien sûr, le changement climatique, qui bouleverse le débit des eaux et le cycle des températures et qui endommage les sources alimentaires des saumons. Tous ces problèmes ont été exacerbés par une gestion dysfonctionnelle chronique dont M. Zeman a parlé et par une longue série d'enquêtes publiques et de politiques officielles depuis plusieurs décennies.
     Les solutions existent. Je vais simplement vous donner quelques exemples par où commencer.
     Premièrement, le gouvernement devrait mettre en œuvre les grandes recommandations de la Commission Cohen. Elle a coûté aux contribuables environ 35 millions de dollars. Contrairement à ce qu'on nous raconte, la plupart des 75 recommandations du juge Cohen n'ont pas été mises en œuvre. Il faudrait commencer par la recommandation qui consiste à fermer les fermes de saumon dans les îles Discovery d'ici à 2020, c'est-à-dire cette année. Il faudrait aussi prendre des mesures immédiates, dans le cadre des engagements pris dans la lettre de mandat, pour amorcer le virage vers l'aquaculture du saumon en parc clos, afin que les virus et les parasites ne contaminent pas le saumon sauvage. Il faut s'inspirer du modèle qui a récemment été mis en place avec succès par les Premières Nations et le gouvernement provincial dans l'archipel Broughton.

  (1230)  

    Monsieur Hill, pouvez-vous vous rapprocher du micro?
    Oui. Ça va mieux?
    Merci.
    Parfait.
    Il faut aussi mettre en œuvre la politique sur le saumon sauvage. C'est une excellente politique, et le juge Cohen l'approuve. Les mesures qu'elle prévoit consistent à évaluer l'état de nos populations de saumon et de leur habitat et à mettre en œuvre des plans de reconstitution des espèces en voie de disparition, mais 15 ans plus tard, il n'y a toujours rien. L'actuel plan de mise en œuvre ne nous mènera nulle part. Il faut étudier et atténuer les risques posés par les écloseries de saumon. Et il faut le faire dans le cadre d'une évaluation du risque biologique, comme le promettait la politique de 2005 sur le saumon sauvage.
     Encore une fois, tout a été fait à moitié, et nos écloseries continuent d'avoir des effets nuisibles sur le saumon sauvage, au grand dam du contribuable.
     On peut réduire la surpêche en s'orientant vers ce que nous appelons les pêcheries de « stocks connus », qui ne capturent que les excédents de populations identifiables, et en adoptant de bonnes pratiques comme les captures effectives et la surveillance des stocks, le signalement vérifiable des captures...

[Français]

     Monsieur le président, il y a encore des problèmes d'interprétation. En français, elle est sans cesse interrompue à cause de problèmes de son. Si c'était possible, il faudrait laisser aux interprètes le temps de replacer leur équipement pour que nous puissions les entendre.

[Traduction]

    Je suis désolé.
    Je n'ai pas entendu l'interprétation, madame Gill. Je ne sais pas si les interprètes sont là? Je n'ai pas entendu l'interprétation, madame Gill.

[Français]

    Exactement. Je n'ai pas d'interprétation non plus.

  (1235)  

[Traduction]

    Il vous reste une minute et 42 secondes.
    Je parlais de surpêche. Un grand nombre de programmes de surveillance du saumon ont été réduits à leur plus simple expression, et si nous ne savons pas combien il y a de poissons, nous ne devrions pas autoriser la pêche.
     Pour ce qui est de la restauration de l'habitat, il y a des possibilités extraordinaires. Un endroit idéal est la bande de 1 500 kilomètres qui constituait jadis un habitat exceptionnel pour le saumon, mais qui est aujourd'hui entravée par des structures décrépies de contrôle des inondations, dans la vallée du bas Fraser. Les projets de restauration permettent de créer de bons emplois, de reconstituer l'habitat du saumon et, dans ce cas-là, de mieux protéger nos collectivités contre les inondations. Mais il faut faire plus. Il faut commencer par cesser de détruire l'habitat.
     Il faut aussi protéger les populations de saumon en voie de disparition, conformément à la Loi sur les espèces en péril. C'est à cela qu'elle sert, mais jusqu'à présent, chaque espèce proposée a été refusée simplement pour préserver des activités de pêche non durables.
     Enfin, le gouvernement a fait quelque chose de bien en renforçant la Loi sur les pêches. Mais il lui faut maintenant mettre en œuvre sa propre loi et notre cadre national pour la pêche durable en fixant des cibles de reproduction et en adoptant des plans de reconstitution des populations de saumon et de saumon arc-en-ciel, qui sont en voie de disparition.
     Au final, il faut que le gouvernement serve l'intérêt public général, car un grand nombre d'habitants de notre province, quelles que soient leurs affiliations politiques ou leurs origines sociales, veulent que leurs enfants et leurs petits enfants puissent aller voir et attraper des saumons dans les cours d'eau locaux pendant encore de nombreuses années.

[Français]

    Monsieur le président, je n'ai pas voulu interrompre le témoin une troisième fois. J'ai entendu l'interprète dire que c'était très difficile pour elle, compte tenu du débit rapide du témoin. Il faudrait demander aux gens qui n’ont pas de notes d'allocution de ralentir leur débit. Cela vaut aussi pour la suite de la réunion. Je vous remercie.
    Monsieur Hill, je suis désolée de vous avoir interrompu plusieurs fois, mais c'est important pour moi d'entendre l'ensemble du message. Merci.

[Traduction]

    Monsieur le président, je suis disposé à vous faire parvenir mes notes tout de suite après la réunion, si cela peut vous être utile.
    Oui, je vous en remercie d'avance.
     Merci, madame Gill, de signaler ce problème. À chaque début de réunion, nous demandons aux gens de parler lentement pour que les interprètes puissent les suivre. Je sais que c'est difficile de parler plus lentement qu'on en a l'habitude. Nous essayons de faire preuve de patience et nous encourageons les témoins à nous donner les notes qu'ils ont préparées pour que nous puissions les suivre, tout en écoutant l'interprétation. À l'avenir, nous leur demanderons de nous donner leurs notes dès le début de la réunion. J'espère que cela évitera d'autres problèmes.
     Nous allons maintenant passer aux questions. Avant de donner la parole à M. Arnold pour six minutes ou moins, je vous demande de préciser, quand vous posez une question, à quel témoin vous vous adressez. Cela facilitera beaucoup les choses et vous permettra de faire le meilleur usage de vos six minutes, car sinon, tout le monde se regarde sans savoir qui doit répondre. Je vous invite donc à le faire, cela nous facilitera la tâche à tous et nous permettra d'obtenir davantage d'informations. Merci.
     Monsieur Arnold, vous avez six minutes ou moins.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins qui comparaissent devant le Comité aujourd'hui. Nous avons entendu des déclarations vraiment très intéressantes.
     Je vais commencer par le professeur Walters. À votre avis, quelles espèces de pinnipèdes nuisent à la reconstitution des stocks de saumon du Pacifique dans les eaux de la Colombie-Britannique?
    Dans l'intérieur méridional de la Colombie-Britannique, dans la région du détroit de Georgie, ce sont les phoques communs. En dehors des eaux territoriales, c'est surtout l'otarie de Steller. Ces dernières années, il y a eu une hausse assez spectaculaire, mais pas suffisamment contrôlée, du nombre d'otaries de Californie qui remontent dans nos eaux pendant l'hiver.
     Nous pensons que le phoque commun et l'otarie de Steller sont les plus gros problèmes.
    Merci.
     Le ministère a récemment fourni au Comité des réponses écrites à des questions posées à des réunions antérieures. Parmi ces réponses, le ministère affirme, et je cite:
L'actuelle population de phoques communs correspond aux niveaux normaux, depuis le déclin causé par la surpêche et la décision de les protéger par une loi en 1970.
Les populations d'otaries de Steller dans les eaux de la Colombie-Britannique ont à peu près quadruplé depuis qu'on les recense, c'est-à-dire depuis le début des années 1970.
    Êtes-vous en accord avec ces chiffres?
    Absolument pas. La principale étude qui est sortie en 2010, et nous en avons repris les conclusions, se basait sur des données historiques concernant la chasse commerciale et l'abattage sélectif des phoques communs. Il y a beaucoup de rétro-calcul dans la façon de déterminer le nombre de phoques qui existaient dans les années 1880, à l'époque où la chasse pratiquée par les Premières Nations s'est complètement effondrée à cause de la variole. À cette époque, nous avons calculé qu'il y avait à peu près deux fois moins de phoques qu'il y en a aujourd'hui en Colombie-Britannique.
     Comme je l'ai dit aussi, les peuples des Premières Nations pratiquaient une chasse intensive au phoque et à l'otarie depuis des milliers d'années. Par conséquent, quand les gens disent que c'est une situation normale, ce n'est pas du tout normal comparé à ce qui se passait depuis des milliers d'années.

  (1240)  

    Merci.
     Vous avez dit que les Premières Nations chassent le phoque et les mammifères marins depuis des millénaires. Y a-t-il actuellement un marché pour le phoque et l'otarie? Je ne parle pas d'abattage sélectif, je parle d'une chasse contrôlée qui contribuerait à l'économie des Premières Nations, de la Colombie-Britannique et du Canada.
    On espère pouvoir développer des marchés commerciaux. L'une des principales propositions qui a été faite est de réaliser une étude de marché. À l'heure actuelle, on ne s'en sert guère que comme appât pour les crabes et comme aliments pour les fermes de visons.
     Ils ont eu le même problème, dans l'Est, à trouver des débouchés commerciaux pour les chasseurs de phoques, car il n'y a pas de marché pour cette viande ou pour les produits connexes.
     On espère qu'à long terme, on pourra développer des marchés étrangers, notamment en Chine. Les Chinois, apparemment, aiment manger...
    Très bien, donc il y a des marchés potentiels, et nous ne parlons pas d'abattage sélectif, mais plutôt d'une chasse potentiellement contrôlée. Merci.
     Je vais maintenant m'adresser à M. Zeman, si vous permettez, qui représente la BC Wildlife Federation.
     Monsieur Zeman, vous avez parlé d'un rapport qui a été bidouillé. Pouvez-vous nous en dire davantage? Pourquoi le ministère voudrait-il modifier un rapport ou censurer les données scientifiques qu'il contient?
    Il y a deux processus. Il y a d'abord l'évaluation du potentiel de rétablissement, l'EPR, qui est un document scientifique examiné par les pairs et qui identifie les causes et les solutions potentielles. Ensuite, il y a l'avis scientifique, qui est l'interprétation qui en est faite par un profane. Ce qui s'est passé, c'est que l'EPR a été soumise au processus d'examen par les pairs et que, d'après ce que nous avons pu en juger par des demandes d'accès à l'information auprès de la province, les formulations ou les conclusions de l'EPR ont été modifiées dans l'avis scientifique. D'après les demandes d'accès à l'information, il semblerait que cela ait été fait dans le but de sous-estimer le rôle des filets sur le saumon arc-en-ciel du Fraser intérieur.
     Le fait qu'il soit impossible d'obtenir des données ou des informations auprès du ministère des Pêches et des Océans et que celui-ci n'ait aucun compte à rendre à la population est un problème qui préoccupe notre province depuis longtemps. À la demande d'accès à l'information que nous avons adressée au gouvernement fédéral, dans le cadre de ce processus, on nous a répondu qu'il faudrait 822 ans pour nous faire parvenir une réponse.
     Il y a manifestement des choses qu'on nous cache dans ce dossier.
    Merci.
     J'aimerais revenir à M. Walters.
     Dans une autre réponse, le MPO indique, et je cite:
Il y a encore beaucoup d'incertitude et les scientifiques sont loin d'être d'accord entre eux en ce qui concerne l'impact des pinnipèdes sur le saumon, par rapport à d'autres prédateurs, et en ce qui concerne d'autres facteurs qui pourraient contribuer au déclin des stocks.
    Le MPO ajoute:
Le Ministère a entrepris une étude sur le régime alimentaire des pinnipèdes pour remédier à cette incertitude.
    Savez-vous si d'autres études sur le régime alimentaire des pinnipèdes ont permis de remédier à cette incertitude?
    Non, et cela ne va pas nous apporter beaucoup d'informations précises.
     Le problème qui se pose avec les saumons juvéniles du détroit de Georgie qui sont mangés par des phoques est qu'ils représentent un infime pourcentage de l'alimentation des phoques. Ces derniers consomment des tonnes de poissons de toutes sortes, et il suffit qu'une petite fraction de ces tonnes soit du saumon juvénile pour que cela représente un très grand nombre de saumons juvéniles. Par conséquent, toutes les autres études qui vont être faites sur le régime alimentaire des phoques ne vont pas nous apprendre grand-chose.
     Même si nous pouvions prouver, avec les données que nous avons recueillies à l'UBC, que les phoques en consomment suffisamment pour que cela modifie le taux de mortalité des saumons, même si nous pouvions le prouver, nous ne saurions pas davantage si les jeunes saumons qui ont été mangés par les phoques étaient atteints d'une maladie ou souffraient du réchauffement de la température de l'eau et auraient péri de toute façon, même si on avait diminué la population des phoques. Cette incertitude peut seulement...

  (1245)  

    Merci, monsieur Walters. Merci, monsieur Arnold.
     Je vais maintenant donner la parole à M. Hardie pour six minutes ou moins.
    Puisque je n'ai que six minutes, commençons sans tarder.
     Monsieur Walters, nous étudions aussi la situation des pêcheries de la côte Est, et notamment les efforts déployés pour assurer la reconstitution des stocks de morue au large de Terre-Neuve. Nous y travaillons depuis 1992, sans beaucoup de résultats. Mes collègues de Terre-Neuve noteront avec intérêt qu'on n'a pas non plus trouvé de solution en ce qui concerne les pinnipèdes de la côte Est.
     Vous voyez à quoi je fais allusion?
    Oui. J'ai récemment publié une étude, avec George Rose, sur les stocks de morue du Nord. Nous avons examiné les résultats du relevé et nous en avons conclu que les stocks de morue du Nord sont en train de se reconstituer à un rythme géométrique élevé, mais ils étaient tellement bas qu'il va falloir attendre longtemps avant qu'ils ne représentent à nouveau une biomasse importante.
     Des études réalisées par le ministère dans le golfe du Saint-Laurent indiquent que l'activité prédatrice des phoques sur les stocks de morue du sud-ouest du golfe du Saint-Laurent a probablement un impact très élevé, et qu'elle est à l'origine d'un taux de mortalité naturelle quatre fois plus élevé que normalement.
    Je dois vous interrompre, car j'ai d'autres questions.
     Monsieur Zeman, une étude réalisée par le Sénat au milieu des années 2000 demandait au ministère d'étudier l'impact des filets dérivants sur le fleuve Fraser. Savez-vous si ces équipements sont toujours utilisés?
    Oui, ils le sont, à la fois légalement et illégalement. Le problème avec les filets, c'est que si un poisson est de la bonne taille, il va se faire prendre dans le filet, et il y a de fortes chances que, même s'il ressort du filet ou que quelqu'un le rejette à la rivière, il finisse par périr.
    Est-ce que cela pose des problèmes avec les peuples autochtones, les Premières Nations, etc.? Est-ce que ce sont eux qui utilisent principalement des filets?
    C'est intéressant que vous me posiez la question, parce que pendant la première année qui a suivi la création du Fonds de restauration et d'innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique, plusieurs Premières Nations ont déposé des demandes pour faire la transition vers des méthodes plus sélectives, et leurs demandes ont été rejetées.
     Un certain nombre de Premières Nations du Fraser sont vraiment intéressées à adopter des méthodes plus sélectives, car elles se rendent compte que cela a un impact sur les poissons locaux et sur le niveau des stocks.
     Le problème, c'est que si nous continuons à utiliser des filets maillants et que les stocks continuent de diminuer, nous ne pourrons plus pêcher; il va donc falloir adopter des méthodes sélectives. Il y a des Premières Nations qui veulent s'orienter dans cette direction, mais leurs demandes ont été rejetées. Nous avons beaucoup travaillé avec le gouvernement provincial. Je sais que les méthodes de pêche sélective sont maintenant une priorité pour la crevette, mais cela montre encore une fois que les grandes orientations ne viennent pas d'en haut. Nous n'avons plus les ressources halieutiques que nous avions jadis, il va donc falloir que nous modifiions nos pratiques de pêche, et très franchement, nous avons 100 ans de retard.
    Monsieur Hill, j'ai une petite question à vous poser.
     L'an dernier, un grand nombre de pêcheurs nous ont dit que dans la partie sud du détroit de Georgie, il y avait énormément de poissons issus d'écloseries de l'État de Washington. Je crains donc que les informations que nous avons sur l'état des stocks ne soient encore une fois très incomplètes ou tout simplement erronées.
     Qu'en pensez-vous?
    Vous soulevez une excellente question, monsieur Hardie. Il y avait des stocks importants, et il y en a encore cette année, de certaines espèces provenant de l'État de Washington et de la Colombie-Britannique et transitant par la mer des Salish. Cela compense en quelque sorte les déclins importants que nous observons sur toute la côte et l'état déplorable des populations de quinnat du Fraser qui migrent aux côtés de ces espèces. L'abondance de quelques espèces entretient les pêcheries, mais un grand nombre d'espèces plus petites et en voie de disparition sont encore plus impactées par les activités de pêche.
     Cela montre bien qu'il est nécessaire — comme je l'ai dit ainsi que M. Zeman et M. Hwang — de mieux surveiller l'identification génétique des stocks afin de mieux comprendre quelles espèces sont capturées pendant leur migration. Il existe des méthodes de gestion des pêches qui permettent de mieux exploiter les stocks abondants et de réduire l’incidence sur les populations menacées qui migrent en même temps. Plusieurs propositions ont été soumises au ministère afin qu'il s'oriente dans cette direction, parce que c'est ce qu'il faut faire.

  (1250)  

    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Une minute.
    J'aimerais parler de la santé des poissons — pas seulement de leur nombre — et de la salubrité de leur nourriture. Qu'en est-il? Le hareng, le plancton et les organismes que les poissons consomment sont-ils en aussi mauvais état que les poissons eux-mêmes?
     Monsieur Hwang, avez-vous quelque chose à dire?
    C'est une question très vaste, monsieur Hardie.
     Pour résumer, je dirai que l'océan n'est plus ce qu'il était. M. Walters a déjà dit quelques mots là-dessus, et il serait sans doute prêt à en parler plus longuement. Certaines populations de harengs sont en déclin et d'autres se portent bien, mais c'est une question très vaste et très complexe, au niveau de l'interaction écologique.
    Merci, monsieur Hardie. Votre temps est écoulé.
    Merci, monsieur.
    Je vais maintenant donner la parole à madame Gill, pour six minutes ou moins.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tous les gens qui viennent témoigner aujourd'hui. Leurs témoignages sont très intéressants, et je les apprécie beaucoup.
    Je vais essayer de faire une synthèse relative, si une synthèse est possible dans ce cas-ci.
    La plupart d'entre vous ont mentionné le manque de financement qui leur permettrait d'arriver à vos fins et la nécessité de mettre à jour les données. Vous avez aussi parlé du rapport Cohen. Je crois que M. Hill a dit que, même si on arrivait à mettre en œuvre les recommandations, on n'arriverait pas à atteindre les objectifs. Vous avez également dit que les mesures étaient prises trop lentement ou qu'elles étaient insuffisantes. M. Zeman a même parlé de transparence. Selon moi, cela fait le tour de ce qui a été dit aujourd'hui.
     Je vais donner aux témoins tout le reste de mon temps de parole.
    Je sais que le milieu est très complexe. Il y a différents plans d'eau, différentes espèces. Quelles mesures, y compris d'ordre financier, faudrait-il prendre en priorité pour qu'il y ait des répercussions positives à plus ou moins long terme?
    Messieurs Hill, Zeman, Hwang et Walters, la parole est à vous.

[Traduction]

    C'est une excellente question. À mon avis, il faut commencer par mettre en place des plans de reconstitution des stocks d'espèces en voie de disparition, comme le prévoient la politique sur le saumon sauvage, le Cadre pour la pêche durable et la nouvelle Loi sur les pêches. De cette façon, en se basant sur la science, nous pourrons identifier les mesures qui seront les plus bénéfiques à chacune des espèces. Les conditions varient tellement d'une espèce à l'autre qu'une mesure aura un effet différent sur des populations différentes à des endroits et à des moments différents. C'est la façon de remédier au problème.
    Compte tenu de ce que M. Hill vient de répondre, je dirai que l'essentiel c'est d'agir.
     Il y a beaucoup de plans en attente, dont on utilise certains éléments quand ça convient, généralement à court terme et sans le financement nécessaire à leur réalisation complète, ce qui nous empêche de bien gérer les ressources et de prendre les mesures qu'il faut pour faciliter la reconstitution des stocks. Il y a un manque flagrant de ressources, de coordination et de responsabilité, non pas parce que les gens ne sont pas compétents, mais parce que le système dans son ensemble ne nous permet pas d'obtenir les résultats qu'il faut.
    Je propose deux priorités absolues en ce qui concerne le financement du ministère.
     La première est de restaurer et d'améliorer le système de surveillance des échappées. Pour de vastes tronçons de la côte, nous n'avons aucune idée du nombre de poissons qui viennent y frayer et de l'état du stock de petits saumons de Colombie-Britannique, parce que le programme de surveillance des échappées ne fonctionne pratiquement plus.
     La deuxième grande priorité que je propose est de faire des recherches précises sur les pratiques de pêche sélective. On en a parlé il y a quelques instants à propos de l'utilisation de sennes de plage dans le Fraser, par exemple, pour permettre la pêche sélective. Selon une étude physiologique récente particulièrement intéressante, si vous attrapez des saumons avec une senne de plage peu après leur sortie de l'océan et leur entrée dans l'eau douce, et que vous les remettez à l'eau, c'est fini, ils périssent. Cette pseudo-pratique de pêche sélective fait inévitablement plus de mal que de bien. Nous devons donc mieux comprendre ce qu'est la pêche sélective, car nous n'en connaissons rien.

  (1255)  

    Oui, la question de la pêche sélective dans le Fraser est une question très vaste. Ce que M. Walters a dit est tout à fait exact. L'utilisation de sennes de plage se traduit par un taux de mortalité de 30 à 60 %. Les poissons périssent. La pêcherie fixe semble être la solution de l'avenir.
     Dans ce cas-là encore, le ministère a autorisé une pêcherie à utiliser son propre modèle, qui a été jugé invalide sur le plan scientifique. Ce modèle tue des espèces en voie de disparition avec des méthodes qu'ils disent sélectives mais que les études scientifiques dénoncent.
     S'agissant du ministère, ces dysfonctionnements systémiques... Nous avons parlé de la morue de la côte Est, du saumon arc-en-ciel du Fraser intérieur, et du saumon coho du Fraser intérieur. Le ministère n'est pas conçu pour conserver et restaurer le saumon. Il est conçu pour gérer les pêcheries. Ce sont deux fonctions tout à fait différentes. L'une consiste à trouver du poisson à pêcher, l'autre consiste à préserver le saumon.
     À l'heure actuelle, c'est la fonction gestion des pêches qui l'emporte, et les scientifiques du ministère sont incapables d'obtenir des résultats en matière de durabilité. Il y a un problème inhérent au ministère, que vous ne voyez pas dans les autres agences responsables des ressources naturelles. Il est en train de gérer la disparition de ces poissons par une pêche intensive.
    Monsieur le président, s'il me reste encore un peu de temps, j'aimerais souligner un autre point, c'est-à-dire l'importance de la collaboration entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.
    Bien que le gouvernement fédéral gère le saumon, c'est le gouvernement provincial qui exerce l'autorité constitutionnelle sur les terres et les eaux. Il est impossible d'obtenir ce dont vous avez besoin pour gérer le saumon sans bien gérer les terres et les eaux pour parvenir à des résultats durables. La coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces est une absolue nécessité pour y arriver.
    Merci de vos commentaires. Vous êtes arrivé presque pile à six minutes.
    Nous allons maintenant passer à M. Johns pendant un maximum de six minutes. Je vous en prie.
    Merci à vous tous de vos témoignages.
    J'aimerais commencer avec vous, monsieur Hwang.
    Vous avez mentionné la pêche, l'habitat et les écloseries. Pourriez-vous nous parler de l'importance du financement qui a été versé par le gouvernement... ? Vous avez cité le Fonds de restauration et d'innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique et souligné l'importance de sa contribution. Nous avons vu qu'au cours de la première année seulement, le fonds avait reçu des demandes de financement se chiffrant à 340 millions de dollars. Le gouvernement a octroyé moins de la moitié des fonds pour cette série de demandes.
    Pourriez-vous nous décrire l'ampleur des besoins et nous dire si les gouvernements sont loin du compte par rapport au financement nécessaire?
    Le chef Patrick Harry et Greg Witzky nous ont parlé hier des demandes qu'ils ont présentées. Bon nombre de ces demandes ont été rejetées. Ils affirment que nous faisons face à l'extinction si nous n'investissons pas dès maintenant dans le rétablissement et la protection de l'habitat.
    Je vous remercie de votre question, monsieur Johns.
    Je dirais, à titre de préambule à ma réponse, que dans certaines situations, nous faisons face à une urgence critique compte tenu de l'état des populations. Le problème de Big Bar a mis en lumière certaines de ces situations. Les problèmes de cette nature existaient même avant l'incident de Big Bar. M. Zeman a parlé des problèmes du saumon arc-en-ciel; il y a eu aussi des problèmes avec le saumon quinnat, ainsi qu'avec le sockeye et le coho.
    Je pense qu'il est urgent de prendre certaines mesures qui nécessiteraient d'importants investissements dès maintenant. D'autres mesures qui devraient être prises à long terme nécessiteraient en revanche des investissements substantiels et permanents.
    Pour ce qui est de l'importance du financement au titre du FRISCB, les sommes qui y ont été investies — environ 140 millions de dollars sur cinq ans — sont, à mon avis, d'un ordre de grandeur inférieur à ce qui est nécessaire pour entreprendre toutes les mesures de rétablissement dont les témoins ont parlé aujourd'hui. Il faut mener des recherches scientifiques, des évaluations et de la surveillance. Il faut prendre soin de l'habitat; il faut gérer les écloseries; et il faut également gérer correctement la pêche.
    Il serait impossible de faire toutes ces choses même si vous injectiez un montant additionnel de 50 millions de dollars par année dans le système pendant 10 ans. Ce serait un bon départ, mais lorsqu'il est question d'un objectif de 500 millions, ce montant ne permettrait pas de réaliser tout ce dont les témoins vous ont parlé aujourd'hui.
    J'espère que cela répond en partie à votre question.

  (1300)  

    Pensez-vous que le gouvernement réalise l'urgence de la situation? Les yeux sont fixés sur Big Bar, et on mesure bien l'ampleur de la crise. Mais, en réalité, avant cela, il y a eu une autre crise, celle de la moitié des plus faibles montaisons enregistrées jusqu'à ce jour. Avez-vous l'impression que le gouvernement réagit assez rapidement?
    Concernant Big Bar — peut-être que vous pourriez nous en parler —, nous avons vu les délais dans le déploiement du processus d'appel d'offres et des travaux qui devaient être réalisés là-bas. Mardi, nous avons entendu des représentants de Kiewit nous expliquer que le processus d'appel d'offres devrait reprendre à la hausse compte tenu des travaux d'ingénierie requis pour installer des échelles à poissons et que sais-je encore d'ici la prochaine saison — pratiquement dès maintenant.
    Pensez-vous que le gouvernement réagit suffisamment rapidement pour protéger ces stocks pour la prochaine saison?
    Je suis très heureux de voir les travaux qui sont en cours cet été. Ils sont prêts en prévision de l'arrivée des poissons. Les poissons éprouvent de la difficulté en raison de la hauteur naturelle de l'eau, mais ils sont en bonne place actuellement.
    Ce dont je ne suis pas certain, et j'entretiendrai des inquiétudes à ce sujet tant que je ne pourrai pas me rendre sur place, c'est ce qui a été fait en vue de l'automne et de l'hiver pour tirer avantage de la période des basses eaux. C'est à ce moment-là que d'autres travaux pourront être effectués. Le problème n'a pas encore été résolu. Afin de tirer le meilleur parti de la saison de travail, il faut que les approbations financières soient en place et que le système d'approvisionnement ait été activé. J'ignore si cela a été fait ou non. Il faudrait s'occuper de ces questions en priorité afin que cela soit réglé longtemps à l'avance. Il ne faudrait pas que ce genre de fonctions administratives viennent retarder les activités sur le terrain.
    Monsieur Hill, vous avez mentionné les droits de pêche des Autochtones et l'importance de régler les points encore en litige entre le Canada et les communautés autochtones. Lors de notre dernière réunion, le chef Harry et M. Witzky ont parlé du manque de ressources des communautés autochtones pour contribuer à la gestion des pêches, au rétablissement et à la protection de l'habitat, à la mise en œuvre des connaissances traditionnelles et autochtones et pour travailler avec le MPO et la province.
    Pourriez-vous nous parler de l'importance de régler ces questions, de reconnaître ces droits et de fournir des ressources aux tables qui sont actuellement en action?
    Je pense que vous avez très bien cerné la question. Il y a un besoin énorme de ressources supplémentaires.
    Je vais vous parler de l'habitat. Pour ce qui est de protéger l'habitat, certaines des choses les plus positives et intéressantes qui se passent actuellement sont le résultat de la planification de l'utilisation des terres sous la direction des Premières Nations. Elles accordent la priorité aux décisions concernant l'utilisation des terres et la protection et le rétablissement de l'habitat critique pour le saumon et d'autres espèces. On constate un besoin critique de nouvelles ressources et de capacités accrues au sein des Premières Nations et de la part de tous les ordres de gouvernement afin de permettre la participation et de faire progresser ces processus.
    En ce qui concerne les pêches, comme le faisaient remarquer M. Zeman et d'autres personnes, il faudrait déployer énormément plus d'efforts pour faire avancer la pêche sélective des stocks afin de pouvoir pêcher davantage de poissons des populations en abondance et d'avoir moins d'impact sur les populations menacées. Les Premières Nations vont agir en tant que chefs de file à cet égard.
    Je sais que les Nuu-chah-nulth accomplissent un travail important, mais encore une fois, leurs demandes sont refusées. Bien entendu, il reste des points en litige entre cette nation et le gouvernement.
    Vous avez mentionné l'aquaculture. Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet du fossé entre la promesse faite par le gouvernement pendant la campagne électorale de passer à l'élevage en parc clos d'ici 2025 et sa promesse actuelle de simplement adopter des plans d'action? Et quelles seraient les répercussions de cette inaction sur les stocks de poissons sauvages?
    Nous étions très excités d'entendre la promesse, et je pense que c'est une bonne chose que cela apparaisse dans la lettre de mandat. Nous avons entendu parler d'un recul eu égard à la rapidité avec laquelle cela arriverait, mais nous pensons que l'engagement tient toujours.
    Nous encourageons le gouvernement à aller de l'avant avec cette promesse dès que possible. Il devrait également procéder à la mise en œuvre de la recommandation numéro 19 de la Commission Cohen consistant à interdire la salmoniculture dans les îles Discovery dès cette année si les responsables sont incapables de prouver qu'ils ne causent pas de préjudice au saumon sauvage. La surveillance de la vie marine dans les îles Discovery et dans d'autres régions de la côte où des fermes salmonicoles ont été mises en place montre cette année des répercussions énormes, avec des niveaux élevés de poux de mer. Il y a une épidémie de poux, et ils doivent s'en occuper en appliquant cette recommandation immédiatement.
    Merci, monsieur Hill et monsieur Johns.
    Nous allons maintenant entreprendre notre deuxième série de questions. Nous allons commencer avec M. Fast pour cinq minutes au maximum, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Walters, j'ai pris note de vos observations sur la prédation. L'un des travaux que notre comité a l'intention d'entreprendre dans le futur est l'étude de la prédation tant sur la côte Ouest que sur la côte Est. Nous espérons vous revoir devant le Comité pour en parler plus particulièrement.
    En attendant, je remarque que trois de nos témoins — M. Zeman, M. Hwang et M. Hill — ont fait référence expressément au dysfonctionnement au sein du MPO. Quant à M. Walters, il l'a laissé entendre. M. Hwang a fait référence à un organisme de surveillance indépendant.
    J'aimerais lancer cette question à tous nos témoins. Quels changements structurels apporteriez-vous au MPO pour que le ministère soit davantage à l'écoute des parties prenantes et plus efficace dans ses interventions face aux défis très réels qu'affrontent les stocks de saumon de la côte Ouest?
    N'importe lequel d'entre vous peut répondre.

  (1305)  

    Je vais commencer. Ayant eu à composer souvent avec le MPO au fil des années, et puisque bon nombre de mes anciens étudiants y travaillent aujourd'hui, je pense que le problème structurel tient à l'absence de responsabilisation. On a toléré que cette proposition de capture de pinnipèdes stagne sur le bureau d'un gestionnaire du MPO suffisamment longtemps pour entraîner des pertes d'environ 40 millions de dollars à l'industrie de la pêche sportive en Colombie-Britannique, et pourtant, ce gestionnaire n'est d'aucune façon tenu responsable de son inaction. Ce sont des choses qui arrivent, qu'il s'agisse d'initiatives comme celle que je viens de mentionner, des industries, de l'habitat ou des pêches...

[Français]

     Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    L'interprète me mentionne à l'instant que ce serait bien si M. Walters pouvait remonter son microphone pour qu'elle soit en mesure de faire la traduction, car la qualité du son est mauvaise.

[Traduction]

    Monsieur le président, je n'ai pas entendu ce que disait l'interprète. Il n'y a pas eu de traduction.
    Je n'ai pas entendu l'interprétation de votre intervention, madame Gill. Alors, si vous...

[Français]

    L'interprète m'a mentionné qu'elle avait de la difficulté à entendre et qu'elle n'était pas en mesure de faire l'interprétation. Elle souhaiterait que M. Walters monte son micro.

[Traduction]

    Je voulais entendre les commentaires des trois autres témoins également. Quels changements structurels apporteriez-vous si vous aviez la possibilité de restructurer ou de réformer le MPO? Essayez de répondre brièvement, parce que j'ai deux ou trois autres questions.
    Monsieur Fast, je suggérerais, à l'instar de l'une des recommandations de la Commission Cohen, que l'on crée un poste de DGR associé qui serait chargé de la mise en œuvre des conclusions de l'évaluation du potentiel de rétablissement.
    L'intégration d'une grande partie de l'excellent travail qui est accompli au ministère compte parmi les problèmes du MPO. Je dirais qu'en favorisant cette intégration, en se dotant d'un mécanisme de surveillance indépendant, on améliorerait vraiment la responsabilisation. J'ai été fonctionnaire pendant de longues années. Travailler dans l'espace entre les pressions politiques et celles du public et la réalité de ce que vous pouvez accomplir concrètement avec le budget dont vous disposez est très difficile. Il est aussi difficile de se faire entendre au chapitre de ce qu'il est possible de changer et d'améliorer. Disposer d'une ressource capable de mettre ces recommandations à l'essai pourrait nous aider à tirer le meilleur parti possible du ministère.
    Merci.
    Et les deux autres témoins?
    Je suis d'accord avec ce que les deux autres témoins viennent de dire.
    Je mentionnerais l'autre recommandation de la Commission Cohen consistant à séparer le mandat de la promotion de l'élevage du saumon des autres responsabilités du MPO, parce que le ministère est responsable des deux. C'est-à-dire qu'il a à la fois le mandat de conserver le saumon sauvage et de promouvoir l'élevage du saumon, ce qui est à mon avis, une position intenable.
    En ce qui concerne la responsabilisation, il existe aussi une discontinuité entre le mandat de conserver le saumon sauvage et celui de promouvoir la pêche. Selon la politique concernant le saumon sauvage, la conservation est la première priorité du processus décisionnel relatif à la gestion des ressources, mais ce n'est pas ce qui se passe sur le plan opérationnel au MPO. La priorité, c'est la pêche. Il faudrait effectuer un changement du haut en bas sur le plan des priorités au ministère.
    Brièvement, comme je l'ai déjà mentionné au sujet de la gestion des ressources naturelles, les trois éléments sont le financement, la science et le soutien social. Je vais me concentrer sur la science parce qu'il existe un conflit interne au MPO, à savoir qui est le décisionnaire et qui prend les décisions.
    Le rôle de la science est de nous dire ce qui existe, ce qui est possible, et comment y arriver. Après avoir calculé tous ces facteurs, le rôle de la science consiste à nous dire ce qui peut être récolté.
    À l'heure actuelle, l'approche consiste plutôt à essayer de trouver le moyen de récolter quelque chose. Il n'y a pas d'objectif, ou si peu, en ce qui concerne le rétablissement des populations de poissons ou leur conservation. On se retrouve constamment devant ce problème structurel, c'est-à-dire que l'on parle beaucoup de la pêche, et on ne parle pas assez du poisson. Je suis convaincu que vous pouvez remonter à une situation semblable eu égard à la morue de la côte Est. On peut remonter jusqu'au coho du Fraser intérieur et au saumon arc-en-ciel de la rivière Thompson.

  (1310)  

    Merci.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste environ 20 secondes.
    Monsieur Zeman, vous avez parlé des prises accessoires, de la pêche au filet maillant ou à la senne, et vous avez indiqué que ces techniques entraînent des mortalités massives. Pourriez-vous nous expliquer brièvement comment les engins de pêche sélectifs pourraient être utilisés en remplacement des filets?
    Oui, absolument. Les plus intéressants, ceux dont tout le monde parle, et dont nous essayons de faire la promotion, sont appelés bourdigues. Essentiellement, le poisson s'y engouffre en nageant; on peut ensuite soulever le filet et y prélever le poisson que l'on est autorisé à conserver, et les autres poissons finissent dans le fond de l'eau.
    Ce dont parlait M. Walters tout à l'heure, c'est la pêche à la senne dans laquelle les poissons s'entrechoquent ... et finissent par mourir. Les bourdigues sont utilisées en Colombie. Ces sortes de filets-pièges semblent la voie de l'avenir, et constituent notre meilleur espoir pour permettre aux Premières Nations, plus particulièrement, de continuer à pêcher des stocks mélangés.
    Merci. C'est très utile.
    Merci, monsieur Fast.
    Nous allons passer à M. Hardie, pour un maximum de cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins. Vos témoignages sont fascinants.
    Nous avons lu à propos du blob, qui est une énorme masse d'eau chaude dans l'océan Pacifique. Selon l'interlocuteur auquel vous avez affaire, c'est ce qui pousse le bon plancton apprécié par les saumons vers le nord, ne leur laissant qu'un plancton de moins bonne qualité.
    Cela risque d'être difficile à gérer. Parmi les autres choses, toutefois, sur lesquelles nous exerçons un meilleur contrôle... Nous allons commencer avec vous, monsieur Walters. Si nous ne pouvons pas refroidir l'océan Pacifique, que pourrions-nous faire d'autre pour améliorer la santé de nos stocks?
    Les deux choses principales seraient de bien gérer la pêche et de bien gérer la prédation. Ce sont deux aspects que nous pouvons gérer, et il existe de très bonnes preuves directes qu'elles ont d'importantes répercussions sur les stocks.
    Contrairement à ce qu'ont déclaré d'autres personnes, nous avons de manière générale radicalement réduit les taux d'exploitation du saumon le long des côtes. La gestion des stocks ne dépend pas entièrement de la pêche. Il existe clairement des preuves directes de réductions imposées à la pêche destinées à protéger des stocks particulièrement fragiles, et ainsi de suite.
    Très bien, monsieur, je vais devoir...
    Actuellement, en ce qui me concerne, l'investissement le plus important serait dans la réduction des répercussions de la prédation.
    Permettez-moi d'ajouter juste un point, rapidement.
    Très rapidement, s'il vous plaît, monsieur.
    Actuellement, les otaries de Steller consomment près de 300 000 tonnes de poisson chaque année sur les côtes de la Colombie-Britannique. La quantité totale de poissons et la production de l'aquaculture, toutes espèces confondues, en Colombie-Britannique sont inférieures à ce nombre, et se situent aux alentours de 290 000 tonnes.
    Très bien, merci de ce renseignement.
    Monsieur Hwang, le développement, surtout le long du fleuve Fraser, est l'une des choses que nous avons regardées dans le passé. Des projets individuels sont approuvés ou évalués, mais on n'a pas l'impression que quiconque est chargé d'encadrer l'effet cumulatif de toutes les décisions individuelles qui sont prises.
    Monsieur Hill, je vois que vous acquiescez. Peut-être pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet.
    Oui, c'est un très point, monsieur Hardie.
    On ne prend absolument pas en compte l'effet cumulatif sur l'habitat du saumon. La stratégie, aussi, de la politique concernant le saumon sauvage, porte justement là-dessus, mais l'actuel plan de mise en œuvre de cette politique ne fera pas avancer les choses. Il ne nous amène pas jusqu'au point où il faut évaluer l'état des habitats et ensuite fixer des cibles en vue de gérer l'effet cumulatif.
    D'accord.
    Je me demande qui pourrait répondre à cette question-ci. Monsieur Hwang, vouliez-vous ajouter quelque chose?
    Monsieur Hardie, il y a deux ou trois choses que j'aimerais ajouter en effet.
    La première est celle-ci. À la Fondation du saumon du Pacifique, nous disposons d'une plateforme qui sera bientôt en mesure de faire justement cela. On peut en effet se servir d'un outil appelé le Pacific Salmon Explorer pour voir les pressions qui s'exercent sur l'habitat de manière générale. L'outil ne permet pas d'obtenir des renseignements aussi précis que ce dont vous venez de parler, c'est-à-dire de résumer complètement l'effet cumulatif, mais au moins nous commençons à avoir la technologie qui nous permet de comprendre l'état de la situation.
    Mais vous soulevez un point très important, c'est-à-dire que nous n'avons pas de cible. Quel objectif visons-nous du point de vue de l'habitat? En l'absence d'une cible, comment savoir si nous avons atteint notre objectif?

  (1315)  

    Oui.
    Donc, les cibles sont vraiment importantes.
    Je dois souligner que la Colombie-Britannique est un facteur important de l'équation. Le MPO possède l'autorité en matière de gestion pour le saumon et son habitat. Quant à la Colombie-Britannique, elle s'occupe de la gestion des terres et des eaux. Cela revient au même. Parce que les deux doivent coopérer pour obtenir les résultats souhaités.
    Nous entendons très souvent que le MPO consacre énormément de temps à la gestion du nombre de poissons capturés, à l'effort de pêche, mais peut-être pas assez de temps à l'effort visant à rétablir les stocks afin d'obtenir du poisson en meilleure santé et en plus grande quantité.
    Encore une fois, je ne sais pas qui voudrait répondre à cette question. De quoi avons-nous besoin pour obtenir un changement de cap au MPO afin qu'il se consacre réellement au rétablissement des stocks, et non seulement à la gestion de ce qui nous reste?
    Je dirais, laissez les coudées franches aux scientifiques. Donnez-leur un rôle à jouer, et demandez-leur de fixer des objectifs concernant les populations de poissons. Le grand échec dans toute cette histoire, c'est que nous n'avons aucun objectif concernant les populations de poissons.
    Dans le cas du saumon kéta, nous avons vu que même lorsque des objectifs ont été établis, le MPO ouvre quand même les pêches s'ils n'ont pas été atteints. Il incombe aux scientifiques de déterminer quelle est la capacité ou l'aptitude d'une rivière de produire du poisson, combien de poissons devraient s'y trouver, et comment s'y prendre pour obtenir ces résultats. Toute cette question relève entièrement des scientifiques. Et actuellement, au ministère, les aspects scientifiques sont enchevêtrés avec les propos des gestionnaires qui souhaitent déclarer l'ouverture des pêches.
    Il faut s'appuyer sur des études scientifiques. En ce qui concerne la question de l'habitat que vous venez de mentionner, le rôle du Canada à ce sujet, nous devons faire en sorte que le processus d'évaluation environnementale se déroule correctement. C'est le chemin le plus sûr pour assurer la gestion des terres pour le poisson.
    Merci, monsieur Hardie, votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Calkins pour cinq minutes au maximum. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Walters. Je pense que le ministère des Pêches et des Océans utilise toujours une approche écosystémique des pêches. Est-ce bien cela?
    En effet.
    Je sais, je le dis avec un brin d'ironie.
    Mais est-ce que cela vous paraît logique que... ? À mon avis, c'est de là que vient une partie du problème. Compte tenu des dispositions visant les mammifères marins, un large segment de cet écosystème se retrouve essentiellement placé dans une boîte, et déposé sur une étagère avec une étiquette « Ne pas toucher ».
    Je sais que vous en avez un peu parlé, mais comment est-il possible d'effectuer de la gestion écosystémique lorsque vous retirez une énorme partie de l'écosystème de l'équation à des fins de gestion?
    Eh bien, ce n'est pas possible. Le problème est particulier avec les otaries de Steller qui sont considérées comme une espèce menacée, ou quelque chose d'approchant, en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Il n'est donc pas permis de les capturer pour le moment. Toutefois, il existe des éléments probants que — pour le poisson en général — elles représentent l'un des plus gros problèmes, et l'une des plus importantes causes du déclin.
    Le B.C. Sport Fishing Institute, le Conseil consultatif sur la pêche sportive et d'autres organismes ont réclamé le retrait sélectif — non pas un abattage généralisé, mais un retrait sélectif — dans ce qu'ils considèrent comme des endroits où les problèmes sont connus et où la prédation porte préjudice à la population. Vos rapports scientifiques, que je suis en train de consulter, semblent le justifier.
    Avons-nous besoin d'une réduction généralisée de toute la population pour revenir aux niveaux historiques dont vous avez parlé, ou devrait-on recourir à la gestion écosystémique selon laquelle on adopte une approche sélective dans les zones les plus problématiques?
    L'idée de capturer ou d'éliminer les phoques problématiques à l'embouchure du fleuve ne fonctionnera pas du tout. Les phoques tuent les saumons adultes pendant la montaison, et c'est très visible. Les gens sont au courant. Ce phénomène est déjà pris en compte essentiellement dans les analyses dynamiques de population.
    Mais la mortalité des jeunes saumons qui est la cause des problèmes les plus graves avec le saumon quinnat et le coho ne se produit pas à l'embouchure du fleuve. Il n'est pas question de phoques problématiques. C'est toute la population de phoques que traversent les jeunes poissons. La migration des jeunes poissons représente une sorte de défi lorsqu'ils se fraient un chemin le long de la côte.
    C'est un problème diffus; aussi l'idée du retrait sélectif est ce que j'appelle une politique où personne ne gagne. Elle suscitera une énorme controverse dans le public, et n'aura aucune incidence positive.
    Ni aucun avantage.
    À votre avis, quel devrait être leur nombre, en vous fondant sur les données historiques que vous avez recueillies et les prévisions que vous avez établies, ainsi qu'en fonction de l'état actuel des stocks de saumon?
    Quel est le chiffre? Combien devrait-il y en avoir?
    Le nombre que nous avons recommandé se situe à environ 50 % de la taille de la population actuelle de phoques communs et d'otaries de Steller. C'est bien au-delà de ce que... Pendant la majeure partie du XXe siècle, ces populations ont été réduites à environ 10 % de leurs niveaux d'origine. Cette campagne ramènerait leur population aux niveaux qui prévalaient au cours des derniers milliers d'années.

  (1320)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Zeman, si vous le permettez, je pense que c'est vous qui disiez que bon nombre de Premières Nations sont prêtes à adopter les méthodes de pêche sélective. Le Conseil consultatif sur la pêche sportive, le CCPS, a recommandé l'adoption de la pêche sélective de saumons marqués comme l'un des outils qui serait efficace pour le rétablissement des populations de saumon. Ce type de pêche permettrait tout de même aux collectivités côtières qui dépendent du saumon de prospérer.
    Combien de ces Premières Nations sont disposées à abandonner leurs filets? Est-ce que nous nous situons à 50 %? Pourriez-vous nous fournir des précisions à ce sujet? Est-ce vous ou M. Hwang qui avez parlé de cette question?
    Des demandes ont été présentées au Fonds de restauration et d'innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique la première année, et c'était en vue d'une transition. Je n'ai pas de chiffre, mais je pense que cette option offre aux Premières Nations en particulier une solution de rechange. Les discussions que nous avons tenues avec les Premières Nations révèlent que, cumulativement, nous sommes tous terriblement inquiets au sujet de l'état du saumon. Nous reconnaissons tous que nous devons changer notre façon de pêcher les stocks mélangés. Il incombe au gouvernement fédéral et à la province de suggérer des mesures incitatives et de fournir des données scientifiques pour aider à améliorer les méthodes de pêche.
    De fait, je n'ai entendu personne déclarer qu'il s'opposait aux bourdigues. Tout le monde reconnaît qu'il faut en arriver là. Le problème se situe entre ici et là; et il faut commencer à aller dans cette direction. Jusqu'à cette dernière année de financement du FRIS, on n'a constaté aucune velléité de la province ou du gouvernement fédéral d'aller vers les pêches sélectives.
    Comparativement à Washington... Pendant le temps que j'ai passé sur la côte, dans la pêche sélective de saumons marqués, j'ai pêché bon nombre de saumons quinnats qui avaient la nageoire adipeuse coupée. Ce sont des poissons d'élevage qui arrivent de Colombie. Ils sont mélangés avec des poissons locaux du Fraser. Bien entendu, nous avons mis en place des fermetures, et des fermetures très punitives, parce que le ministère a déclaré essentiellement devant notre comité que le seul outil à sa disposition pour rétablir les stocks de saumon consistait à réduire la pression occasionnée par la pêche sportive, une affirmation que je désapprouve.
    Il est question de modifier fondamentalement la manière dont le ministère aborde cette question. Est-ce que la mise en valeur des écloseries, les écloseries à des fins scientifiques, l'amélioration de l'habitat et l'utilisation de ce que l'on appelle la pêche sélective aux saumons marqués, qui aurait entraîné un rebond des stocks de cohos, pourraient constituer des outils efficaces, à votre avis, pour permettre la pêche sportive et une pêche moins destructive que la pêche au filet pour les Premières Nations? Selon vous, est-ce que certaines des recommandations formulées par le Conseil consultatif sur la pêche sportive pourraient faire partie de la solution?
    Monsieur Calkins, vous avez dépassé le temps qui vous était imparti.
    Je vais demander aux témoins, s'ils souhaitent répondre à cette question, de le faire par écrit en transmettant leur réponse au Comité et en demandant de l'inclure dans leur témoignage.
    Nous allons maintenant passer à M. Hardie, pour cinq minutes au maximum. Je vous en prie.
    À vrai dire, avec votre permission, monsieur le président, si Mme May a une question à poser, je me ferai un plaisir de lui accorder une partie de mon temps, parce qu'elle se trouve sur l'océan, comme beaucoup d'entre nous.
    Madame May, aimeriez-vous poser une question?
    Oui. Merci beaucoup, monsieur Hardie. C'est très aimable à vous.
    Monsieur le président, de combien de temps puis-je disposer en acceptant l'offre généreuse de M. Hardie?
    Vous disposez d'un peu plus de quatre minutes.
    Parfait. Je règle ma montre.
    J'aimerais commencer par évoquer un souvenir. En vous écoutant parler, je ne peux m'empêcher d'avoir des réminiscences de l'époque où je travaillais avec un homme dont M. Walters se rappelle sûrement: M. Ransom Myers.
    Donc, je travaillais avec M. Ransom Myers pendant qu'il était au MPO, et qu'il essayait de freiner la destruction des stocks de morue de l'Atlantique. M. Scott Simms s'en rappelle sûrement, lui aussi. Il s'agissait d'un projet du MPO qui imaginait que nous avions cette énorme biomasse féconde et que nous pouvions accroître l'effort de pêche. Après l'effondrement des stocks de morue, et les nombreuses tentatives de la part du MPO qui suivirent, je me rappelle m'être entretenue avec un pêcheur de Terre-Neuve qui m'avait dit qu'avec le ministère, on passe d'une espèce sous-utilisée à une espèce disparue sans avoir vu le moindre plan de gestion entre les deux. J'ai peur d'éprouver encore une fois un sentiment de déjà vu.
    J'aimerais m'adresser à vous, Aaron Hill. Vous avez fait allusion à l'élimination de certaines mesures de prévention des inondations dans le bas Fraser. Cela semble aller dans le sens de ce que disait notre collègue de la Fondation du saumon du Pacifique, M. Hwang. Est-ce que la décision d'enlever ces obstructions dans le bas Fraser appartient au gouvernement de la Colombie-Britannique?

  (1325)  

    C'est une responsabilité partagée, et c'est là que le bât blesse. Les compétences du gouvernement fédéral, provincial et municipal entrent en jeu, et la décision concernant les poissons tombe dans une zone grise où chacun tente d'esquiver la responsabilité.
    Le gouvernement fédéral doit faire preuve de leadership dans la mise en œuvre de la Loi sur les pêches en ce qui a trait aux décisions concernant les ouvrages de défense contre les inondations que nous avons mises en place dans le bas Fraser. Des améliorations à ces ouvrages de défense se chiffrant à plus de 1 milliard de dollars doivent être effectuées dans le bas Fraser afin de protéger les collectivités face au changement climatique. Une énorme occasion favorable se présente. En effet, pendant que nous améliorerons ces ouvrages de défense contre les inondations, nous pourrions utiliser des technologies nouvelles, modernes et respectueuses du saumon. Ces technologies permettraient d'ouvrir cette vaste zone d'habitat qui est bloquée. Ce faisant, nous pourrions rétablir cet habitat en éliminant les espèces envahissantes et d'autres obstacles. Le gouvernement fédéral a investi des sommes à cet égard par l'intermédiaire du Fonds de restauration et d'innovation pour le saumon, mais ce montant ne représente qu'une goutte d'eau dans l'océan comparativement aux sommes qui seraient nécessaires.
    Je pense que tous les témoins seront d'accord avec moi pour trouver que toute cette situation semble écrasante, parce que nous savons que le changement climatique nous attend. Nous n'avons même pas mentionné l'acidification de l'océan. Il faut également tenir compte du problème lié aux divers degrés de l'effort de pêche, et de la prédation.
    Au cours de cette série de réunions, nous nous penchons sur l'éboulement de Big Bar. Bien entendu, tous ceux qui sont ici le savent, cet incident a eu lieu pendant une année où les montaisons ont été les plus faibles que l'on ait jamais enregistrées. Pour établir l'ordre de priorité des interventions, je pense qu'il nous serait utile de savoir quelles mesures sont susceptibles d'entraîner les plus fortes répercussions en vue d'aborder tous ces problèmes.
    J'adresse ma question à M. Aaron Hill, et également à M. Zeman. S'agit-il d'apporter des correctifs au ministère des Pêches et des Océans lui-même, sur le plan de la responsabilisation? S'agit-il vraiment de notre tâche prioritaire? Je pose la question parce qu'il me semble que c'est un changement qui devrait en entraîner beaucoup d'autres.
    Monsieur Hill.
    Absolument. Je pense que M. Zeman et d'autres en ont déjà parlé. On constate un immense manque de responsabilisation et de transparence au sein du ministère. Comme je l'ai déjà mentionné, il existe une discontinuité entre la priorité de la politique concernant le saumon sauvage qui consiste à faire passer la conservation des stocks avant toute chose et ce que nous sommes à même de constater dans les décisions entourant la gestion des pêches, l'habitat, les fermes salmonicoles et d'autres sujets.
    Puis-je m'adresser à M. Zeman? Je pense qu'il me reste encore un peu de temps.
    Il est difficile de savoir où se concentrer compte tenu de la complexité de l'écosystème et lorsque les problèmes semblent écrasants. Monsieur Zeman, pensez-vous que nous concentrer sur le mode de fonctionnement du ministère serait une bonne solution?
    C'est certainement une partie du problème. Il faut que cela soit fait, mais vous avez adopté une approche sélective et vous choisissez... Je ne ferais pas qu'une seule chose à la fois. J'agirais sur plusieurs fronts et j'attaquerais les problèmes de front. Cela fait partie de la solution, mais il n'existe pas de solution miracle à ce problème.
    Merci, madame May.
    Donc, plus de financement, se concentrer sur l'habitat et essayer d'obtenir plus de responsabilisation de la part du ministère...
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame May.
    Nous allons maintenant passer à Mme Gill pour deux minutes et demie, au maximum.

[Français]

    Monsieur le mprésident, comme je l'avais proposé, je souhaite céder mon temps de parole à Mme May.

[Traduction]

    Madame  May, vous pouvez y aller quand vous serez prête.
    Je bénéficie d'une telle générosité aujourd'hui.
    Rapidement, je vais aller à la question de la politique concernant le saumon sauvage. J'aimerais revenir à M. Aaron Hill, parce que c'est lui qui a soulevé la question.
    La politique concernant le saumon sauvage a été introduite en 2005, si ma mémoire est bonne. Pourriez-vous nous expliquer pour quelle raison nous sommes encore en train de parler de sa mise en œuvre?
    C'est une très bonne question. Je pense que le problème s'explique en partie par des difficultés au chapitre des ressources. Comme l'ont fait remarquer M. Walters et d'autres intervenants, il faut réellement compter les poissons pour savoir sur quelle base nous partons avant de mettre en œuvre la première stratégie qui consiste à évaluer l'état de la population.
    Ensuite, comme d'autres l'ont mentionné — M. Hwang, je pense — il y a un manque de responsabilisation au sein du ministère, c'est-à-dire pour ce qui est de déterminer qui est chargé de sa mise en œuvre. C'était d'ailleurs l'une des recommandations du juge Cohen de désigner une personne qui serait responsable de la mise en œuvre de la politique concernant le saumon sauvage, et cette recommandation n'a pas été appliquée.
    Par ailleurs, je pense que simplement avec la mise en œuvre de la politique concernant le saumon sauvage, le ministère devrait réellement entreprendre de très importants changements en matière de gestion. On y sent une très forte résistance au changement. C'est un problème, ça aussi.
    S'il me reste encore du temps, j'aimerais m'adresser à vous, monsieur Hwang, parce que je ne vous ai pas encore posé de questions. Votre perspective concernant les trois leviers, soit la pêche, l'habitat et les écloseries, m'a frappée et me semble un excellent avis. Parmi ces trois leviers, y en a-t-il un plus important que les autres?

  (1330)  

    Non. C'est un peu comme si on disait, « Qu'est-ce qui est le plus important pour la santé humaine? Est-ce l'eau, l'air ou la nourriture? » Vous ne pouvez pas être en bonne santé si vous n'avez pas accès aux trois.
    Je pense que mon temps est écoulé. Je vous suis très reconnaissante. Merci.
    Merci, madame May.
    Nous allons maintenant passer à M. Johns, pour deux minutes et demie, au maximum. Je vous en prie.
    J'aimerais poser une question à M. Hill.
    Monsieur Hill, votre organisation a accompli un travail vraiment important en mettant en lumière l'importance des infrastructures vertes en raison des répercussions du développement des infrastructures sur nos stocks de saumon. Pourriez-vous nous expliquer comment cet élément a été négligé, l'importance d'y investir et le sentiment d'urgence qui l'entoure?
    Oui, je pense que l'on s'entend en général lorsque l'on discute avec des députés et des représentants du gouvernement pour dire qu'il faut se diriger vers des infrastructures vertes et le rétablissement de l'habitat. Comme dans l'exemple de la protection contre les inondations, où il est possible d'être gagnant sur les deux tableaux. C'est-à-dire qu'il est possible de mettre en place des ouvrages pour protéger nos collectivités contre les inondations tout en ouvrant l'habitat du saumon.
    Le problème tient à la complexité des rapports entre les niveaux de compétence. Certains sont engoncés dans de vieux réflexes. C'est pourquoi il faut que les dirigeants fédéraux se donnent comme priorité de régler ces problèmes. Il existe un problème de cloisonnement entre différents ministères qui doit être résolu par ces hauts dirigeants fédéraux.
    Merci.
    Monsieur Zeman, vous avez mentionné certaines lacunes au MPO en ce qui concerne la communication avec les parties prenantes. Pourriez-vous lui attribuer une note à ce chapitre? Comment trouvez-vous que le MPO s'en sort sur le plan de la consultation, de la communication et de l'écoute auprès des parties prenantes et de l'écoute des parties prenantes dans le cadre de ses travaux concernant le saumon sauvage?
    Si je devais lui attribuer une note, ce serait un F.
    Très bien, merci. Pourriez-vous nous suggérer quelques possibilités pour le MPO de changer cela?
    Oui, absolument.
    Dans le domaine de la faune, à l'échelle provinciale, si je souhaite me renseigner au sujet des menaces qui pèsent sur le caribou des montagnes, sur les grizzlis ou sur quoi que ce soit d'autre, il me suffit de prendre le téléphone, d'envoyer un courriel ou d'aborder quelqu'un, et l'on me transmettra tous les renseignements disponibles. Mais lorsque j'appelle au ministère, on me répond, « Désolé, vous devez présenter une demande d'accès à l'information pour obtenir ce renseignement — je ne peux pas vous le fournir parce que je vais me faire taper sur les doigts. »
    Concernant la question des données cachées, je peux citer l'exemple de ce document sur l'évaluation du potentiel de rétablissement qui a fait l'objet d'un examen par les pairs et dont le public ne peut même pas prendre connaissance. Cette étude a été réalisée à l'aide de fonds publics. Elle a subi un processus scientifique rigoureux, et le ministère refuse de le publier. Il est question d'une population de poissons qui est passée de milliers d'individus à moins de 62 et 134. Et pourtant, le ministère ne veut même pas montrer ce que les scientifiques ont dit. Franchement, c'est incroyable qu'une chose pareille se produise au Canada.
    Monsieur Hwang, pourriez-vous...
    Merci, monsieur.
    Merci, monsieur Johns. Votre temps est écoulé.
    Voilà qui met fin à notre série de questions. Nous devons maintenant suspendre la réunion, fermer la session et revenir pour une séance à huis clos pendant laquelle nous établirons des instructions à l'intention de nos analystes en vue de la rédaction du rapport. Je vais vous demander à tous de fermer la session et de revenir ensuite avec les nouveaux renseignements et le nouveau mot de passe afin que nous puissions poursuivre.
    Je tiens à remercier chaleureusement nos témoins d'aujourd'hui. J'espère que la réunion a été utile à tout le monde. Nous vous reverrons peut-être prochainement. Si vous n'avez pas pu nous fournir tous les renseignements que vous souhaitiez, n'hésitez pas à nous les fournir par écrit. Encore merci.
    [ La séance se poursuit à huis clos.]
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