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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 018 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 11 mai 2022

[Enregistrement électronique]

  (1610)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à la 18e séance du Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride. Conformément à la directive du Bureau de régie interne du 10 mars 2022, tous ceux qui assistent à la réunion en personne doivent porter un masque, sauf les députés qui sont assis à leur place pendant les délibérations.
    J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité. Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent à la réunion par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Pour ceux qui participent par Zoom, vous avez des options d'interprétation au bas de votre écran, soit le parquet, l'anglais et le français.
     Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 21 mars 2022, le Comité reprend son étude sur les opportunités commerciales pour les entreprises canadiennes dans l'Indo-Pacifique.
    Nous accueillons aujourd'hui Mme Lynette Ong, professeure à l'Université de Toronto, qui comparaît à titre personnel. Nous recevons également M. Jeff Nankivell, président et chef de la direction de la Fondation Asie Pacifique du Canada; et Mme Sandra Marsden, présidente de l'Institut canadien du sucre. Nous avons aussi des représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec: M. Philippe Noël, vice-président des Affaires publiques et économiques; et M. Mathieu Lavigne, directeur des Affaires publiques et économiques. Des représentants de la Coalition internationale pour la défense des droits de la personne aux Philippines figurent également parmi nos témoins: Mme Patricia Lisson, présidente; et M. Guy-Lin Beaudoin, président, Québec. Enfin, nous recevons M. Denis Mazerolle, président de Nature Alu.
    Bienvenue à vous tous.
    Madame Ong, je vous invite à faire votre déclaration préliminaire. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci.
    Bonjour, honorable présidente, honorables membres du Comité permanent du commerce international. C'est un grand honneur pour moi de témoigner devant cet important comité permanent.
    Je suis professeure de sciences politiques à la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l'Université de Toronto. Je suis sûre que d'autres spécialistes vous ont dit beaucoup de choses sur les possibilités commerciales pour les entreprises canadiennes dans l'Indo-Pacifique. Dans mon témoignage, en tant que politologue, j'aimerais offrir une perspective plus large sur la stratégie indo-pacifique du Canada, dont nos politiques commerciales devraient faire partie, selon moi.
     J'aimerais soulever trois points importants. Premièrement, je crois que nos politiques commerciales, y compris les négociations commerciales concernant l'accord de libre-échange entre le Canada et l'ANASE et l'accord de partenariat économique global entre le Canada et l'Indonésie qui sont en cours, devraient faire partie intégrante de la stratégie indo-pacifique. À mon avis, cette stratégie vise autant à établir des partenariats avec les pays de la région qu'à contrer l'influence de la Chine. En fait, les deux objectifs ne sont pas incompatibles. Ils se renforcent mutuellement.
    Pour atteindre ces deux objectifs, je crois que le Canada doit adopter une perspective à long terme dans son approche concernant l'Indo-Pacifique, une approche qui vise à renforcer les capacités locales et à améliorer la prospérité régionale. Dans le cadre de ses politiques commerciales, le Canada devrait accorder la priorité à ces objectifs, en plus de garantir l'accès aux marchés pour les exportations canadiennes dans la région. Si nous percevons la stratégie indo-pacifique comme la pierre angulaire d'une stratégie plus large visant à faire face à la montée de la Chine, je pense que l'établissement de partenariats durables avec les nations indo-pacifiques devrait être une priorité. Ces objectifs sont conformes à la stratégie indo-pacifique de l'administration Biden qui a été publiée en février de cette année.
     Deuxièmement, il existe plusieurs façons de construire des partenariats durables. En plus de garantir l'accès aux marchés, j'invite le gouvernement à donner la priorité aux mesures qui visent à améliorer les normes de travail et les normes environnementales ainsi que l'inclusion numérique. La création d'accords commerciaux favorables aux travailleurs et respectueux de l'environnement est pertinente pour les pays de l'Asie du Sud-Est, qui sont loin derrière ceux de l'Asie du Nord pour ce qui est du niveau du PIB, ce qui peut mener à un compromis sur ces questions dans la recherche de possibilités économiques.
    Une part croissante du commerce s'effectue désormais par des supports numériques. Cependant, dans de nombreux pays en développement de la région indo-pacifique, l'inclusion numérique et les questions de sécurité des données qui y sont liées ne doivent pas être tenues pour acquises. C'est important pour améliorer la capacité des nations de l'Indo-Pacifique à atténuer les effets négatifs de l'ouverture commerciale. Je crois que si le Canada souhaite établir un partenariat à long terme avec les pays de la région, nous devrions songer à les aider à renforcer leurs capacités d'atténuation.
    Troisièmement, je veux inclure la Chine dans l'équation. La ministre Joly a récemment fait une visite diplomatique en Indonésie et au Vietnam. Même si la Chine ne se classe qu'au quatrième rang lorsqu'il s'agit des sources d'investissement direct étranger en Asie du Sud-Est, certains pays sont plus dépendants des capitaux chinois que d'autres. Des enquêtes récentes révèlent, en fait, une grande disparité quant à l'attitude adoptée à l'égard de la Chine en Asie du Sud-Est. Si les élites en général souhaitent poursuivre une stratégie d'équilibre entre les États-Unis et la Chine, certains gouvernements plutôt autocratiques, comme celui du président nouvellement élu, Bongbong Marcos, le fils de l'ancien dictateur Ferdinand Marcos aux Philippines, sont entièrement pro-Chine.
     Cela dit, diverses enquêtes révèlent également qu'il existe de réels sentiments anti-chinois au sein de la société dans toute la région. J'ai fait valoir le rôle du Canada dans le renforcement des capacités de la société civile afin de permettre aux pays de l'Asie du Sud-Est de faire preuve de plus de discernement face à l'influence grandissante de la Chine et de permettre aux citoyens de faire contrepoids, au besoin, aux décisions d'investissement des gouvernements. Dans mon livre sur la Malaisie qui a été récemment publié, The Street and the Ballot Box, je soutiens qu'une société civile forte peut contribuer à mobiliser de larges segments de la société pour obtenir de meilleurs résultats politiques grâce à une opposition plus forte.
    En conclusion, les économies émergentes de l'Asie du Sud-Est ont souvent besoin des investissements chinois pour construire des infrastructures ou alimenter une industrie manufacturière à forte intensité de main-d'œuvre, ce qui leur laisse peu d'options pour refuser toute offre d'investissement chinois, même si les conditions sont défavorables. Je crois que le Canada, de concert avec d'autres démocraties occidentales, est en mesure de renforcer la capacité de la région à collaborer avec la Chine davantage sur un pied d'égalité. Cela mérite, je crois, une place de choix dans la politique commerciale du Canada ainsi que dans sa stratégie indo-pacifique.
    Encore une fois, je vous remercie de m'avoir offert l'occasion de donner mon point de vue.

  (1615)  

    Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à M. Nankivell.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de participer à cette discussion importante.

[Français]

    La Fondation Asie‑Pacifique du Canada a été constituée en 1985 par la Loi sur la Fondation Asie‑Pacifique du Canada et a pour mandat de promouvoir l'engagement du Canada dans cette région.

[Traduction]

    Aujourd'hui, alors que nous cherchons de toute urgence à diversifier nos marchés d'exportation et nos sources d'approvisionnement pour les importations dans une nouvelle ère d'incertitude géopolitique, le mandat de promouvoir l'engagement du Canada en Asie est certainement plus pertinent que jamais.
    Je sais que de nombreux témoins ont déjà dit au Comité que la région indo-pacifique sera la principale source de croissance économique dans le monde au cours des prochaines décennies. Notre fondation peut fournir de nombreuses données quantitatives au sujet de cette croissance. Notre site Web, asiapacific.ca, regorge de renseignements à ce sujet.
    Ma déclaration préliminaire portera sur certains aspects qualitatifs de la croissance. Ce qui fait de cette croissance une opportunité vraiment intéressante n'est pas tant son volume que sa nature. Dans un marché émergent comme le Vietnam, une croissance économique de 2 % est très différente d'une même croissance dans un marché établi comme les États-Unis. Dans les marchés établis, les entreprises canadiennes qui cherchent de nouveaux clients doivent généralement arracher des parts de marché aux acteurs établis qui ont des clients fidèles. En revanche, chaque point de pourcentage de croissance dans ces grandes économies à revenu intermédiaire représente généralement des millions de ménages qui franchissent un seuil de revenu leur permettant de modifier leurs habitudes de consommation.
    En clair, dans ces endroits, chaque année, de nouveaux ménages ont de l'argent à dépenser pour une meilleure éducation, des soins de santé, des aliments et des vêtements de qualité, des produits financiers et des loisirs.
    Voilà ce que promet fondamentalement la croissance en Asie pour les Canadiens. C'est l'occasion pour nos entreprises d'être concurrentielles sur de nouveaux marchés de services et de biens dont les consommateurs sont nombreux chaque année à envisager l'achat pour la première fois de leur vie. L'urbanisation est l'élément clé de cette transformation de la consommation. D'ici 2050, la population urbaine de l'Asie sera passée de 2 à 3,3 milliards de personnes. Il n'en résulte pas seulement un changement de mode de vie; la plupart des bâtiments que ces 1,3 milliard de nouveaux citadins habiteront en 2050 n'ont pas encore été construits, sans parler de toutes les nouvelles routes, des centres commerciaux, des écoles et des systèmes de transport rapide qu'ils utiliseront. Tout cela devra répondre à des normes de plus en plus strictes en matière de réduction de l'empreinte carbone et d'efficacité énergétique, ce qui offre d'excellentes possibilités sur le plan des technologies et des approches propres novatrices, dans lesquelles les Canadiens sont compétitifs à l'échelle mondiale.
     Cette transformation ouvre des possibilités importantes dans toute une série de secteurs, ce qui inclut une croissance continue de nos exportations traditionnelles, mais aussi une croissance dans de nouveaux secteurs, notamment celui des produits agroalimentaires et des produits de la mer de qualité supérieure. Cela comprend aussi les services éducatifs, c'est‑à‑dire le recrutement d'un plus grand nombre d'étudiants au Canada en provenance d'un plus grand nombre de pays en Asie, ainsi que la prestation de services de consultation en éducation et de technologie dans le pays, en Asie. Il y a les technologies propres liées à l'efficacité énergétique, la transition vers des systèmes énergétiques durables, la construction à faibles émissions de carbone, la gestion de l'eau et d'autres priorités environnementales. On parle aussi des technologies numériques et des applications de l'intelligence artificielle dans les domaines de la santé, de la finance, de l'éducation, de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Il y a les produits financiers pour les ménages et l'épargne en vue de la retraite, un domaine dans lequel les Canadiens sont déjà bien établis dans certaines parties de l'Asie grâce à nos compagnies d'assurance et à nos gestionnaires d'actifs et grâce au leadership éclairé de nos fonds de pension en tant que partenaires d'investissement à long terme respectés et recherchés en Asie.
    Bien que tout cela soit très prometteur, nous ne devons pas nous faire d'illusions. Il existe partout des concurrents féroces, tant internationaux que locaux. Il faut être conscient des risques de toutes sortes. Pour réussir, nous devrons nous concentrer sur le long terme, déployer des efforts soutenus et investir des ressources réelles.
    En lançant une stratégie indo-pacifique pour le Canada, le gouvernement fédéral doit s'engager à agir sur au moins trois plans. Premièrement, il faut que les dirigeants politiques collaborent de façon continue avec les partenaires de l'Asie. Il s'agit en particulier d'élargir et d'approfondir les relations avec les économies émergentes et les puissances moyennes de l'Asie du Sud-Est. Le lancement de négociations de libre-échange avec l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est et l'Indonésie est un bon départ.
     Deuxièmement, il y a un besoin d'investissements financiers et de soutien réglementaire pour les infrastructures matérielles et immatérielles dont dépend l'expansion du commerce. Les pipelines ne sont qu'un exemple. Un autre exemple est le port de Vancouver, à quelques kilomètres de l'endroit où je me trouve actuellement, dont il faut renforcer la capacité. Il faut également agir sur le plan du zonage afin qu'il y ait davantage de terrains industriels pour l'entreposage et la logistique. C'est un aspect qui nécessite une volonté politique dans l'intérêt national.
    Troisièmement, il faut investir dans le renforcement des connaissances et des compétences des Canadiens sur l'Asie, depuis les étudiants jusqu'aux cadres supérieurs de nos entreprises, en passant par les institutions publiques et les gouvernements. Nous avons besoin d'un soutien public accru pour que nos entreprises puissent bien connaître les risques et les possibilités par l'intermédiaire du Service des délégués commerciaux, d'Exportation et développement Canada, de la Banque de développement du Canada et des agences de développement régional.

  (1620)  

    À la Fédération Asie Pacifique du Canada, nous avons examiné ces questions de près. Je serais ravi d'en parler plus longuement et de discuter d'autres sujets d'intérêt pour le Comité.

[Français]

    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui. J'attends avec impatience notre discussion.

[Traduction]

     Merci beaucoup, monsieur.
    Nous passons maintenant à Mme Marsden, qui dispose de cinq minutes.
     Merci, honorable présidente, merci, honorables membres du Comité.
    Je suis ravie de vous présenter aujourd'hui le point de vue de l'industrie canadienne du sucre sur les possibilités commerciales dans l'Indo-Pacifique.
    Les membres de l'Institut canadien du sucre représentent les producteurs de sucre raffiné dans quatre provinces du Canada, ce qui inclut le raffinage du sucre de canne dans les principaux ports de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec et la transformation de la betterave à sucre en Alberta. L'industrie a également deux installations de transformation de produits contenant du sucre en Ontario.
    L'Institut canadien du sucre soutient les initiatives du gouvernement du Canada visant à diversifier et à développer les marchés d'exportation du sucre et des produits alimentaires contenant du sucre. Nous préconisons toujours la réduction des barrières tarifaires et non tarifaires sur les marchés à valeur élevée, tout en soutenant fermement l'avancement de la libéralisation multilatérale. C'est particulièrement important dans notre secteur, où le commerce mondial et régional est caractérisé par une intervention gouvernementale importante qui crée des distorsions dans la production et le commerce.
    Toutefois, l'industrie canadienne du sucre fonctionne selon les conditions du marché mondial, sans subventions ni barrières tarifaires prohibitives. Par rapport aux pays de l'ANASE, à l'Inde et à de nombreux autres marchés protégés, notre marché est ouvert et ne comporte qu'un modeste tarif d'environ 6 %. Cela contraste, par exemple, avec des droits de 94 % sur le sucre en Thaïlande, de 95 % en Indonésie et de 100 % en Inde. Compte tenu des barrières tarifaires et non tarifaires importantes sur le sucre dans ces régions et de la domination de la Thaïlande et de l'Inde dans la production mondiale et régionale de sucre, le Canada n'a pas eu la possibilité d'exporter du sucre raffiné vers ces pays.
    Dans ce contexte, les chances d'assister à une croissance importante des exportations de sucre sont très limitées. C'est pourquoi nous ne sommes pas pour l'élimination de notre modeste tarif sur le sucre raffiné. Il est faible par rapport aux normes internationales, mais il offre une certaine protection contre les politiques ayant des effets de distorsion sur le commerce.
     D'un autre côté, il peut y avoir des possibilités à long terme pour l'industrie des aliments transformés, dont notre industrie dépend comme fournisseurs. Nous contribuons de façon importante aux investissements dans la transformation des aliments au Canada, représentant environ 25 % de la fabrication d'aliments, et représentant environ 22 milliards de dollars de revenus et près de 10 milliards de dollars d'exportations. En fait, environ 40 % de la production de sucre du Canada est exportée sous forme de produits alimentaires.
    Bien que les États-Unis soient le marché d'exportation le plus important pour nos clients — les transformateurs alimentaires qui utilisent notre sucre —, la diversification est également importante. Dans ce contexte, le potentiel de croissance supplémentaire et de produits alimentaires à valeur ajoutée est important pour notre industrie.
    À l'heure actuelle, pour la grande majorité des produits alimentaires contenant du sucre, ainsi que pour l'ensemble des aliments transformés, les importations au Canada excèdent largement les exportations. S'il est important d'ouvrir les marchés aux produits agricoles canadiens, il est également essentiel de remédier au déséquilibre commercial des aliments transformés à valeur ajoutée.
    Nos priorités dans le cadre des négociations avec l'Indonésie, l'ANASE et l'Inde comprennent l'avancement de la position de longue date du Canada selon laquelle le raffinage confère l'origine au sucre brut. Cette règle d'origine est essentielle pour reconnaître que 90 % du sucre raffiné du Canada dépend de l'industrie canadienne de raffinage pour les consommateurs et les transformateurs alimentaires canadiens.
     Nous aimerions éliminer les droits imposés à l'étranger sur le sucre et les aliments contenant du sucre, étant donné le déséquilibre substantiel dans la protection tarifaire dans ces économies. Dans la plupart des cas, il n'y a pas de droits d'importation au Canada, ou ils sont très faibles, alors que les tarifs dans ces marchés potentiels sont disproportionnés ou prohibitifs.
     Une autre priorité consiste à redresser le déséquilibre commercial dans les aliments transformés à valeur ajoutée. Il est important que dans le cadre des négociations, on s'attarde à l'ensemble important et complexe de mesures non tarifaires qui empêchent le Canada d'exporter des aliments transformés à valeur ajoutée vers ces pays.
     En bref, et plus particulièrement dans le contexte des négociations avec l'ANASE, comme je l'ai mentionné, les chances d'accéder au marché sont limitées pour le sucre canadien et les produits à forte teneur en sucre, étant donné la production excédentaire de la Thaïlande, sa domination dans la région et ses politiques de distorsion. Cette domination risque de faire détourner davantage de produits de sucre raffiné vers le Canada sans possibilité d'exportation compensatoire. En ce qui concerne les produits alimentaires qui contiennent du sucre, une négociation globale visant à réduire substantiellement les barrières tarifaires et non tarifaires pourrait fournir des possibilités à long terme, à mesure que le marché se développe et que la demande d'aliments et de boissons emballés augmente.
    En ce qui concerne...

  (1625)  

    Désolée de vous interrompre, madame Marsden. Les cinq minutes sont écoulées, et nous devons laisser du temps à nos membres.
    Entendons maintenant, pendant cinq minutes, la révérende Lisson et le major Baudouin.
    Les sections canadienne et québécoise de la Coalition internationale pour la défense des droits de la personne aux Philippines ont accompli de nombreuses missions pour les droits de la personne dans les îles de Luçon et de Mindanao, respectivement dans le nord et le sud de ce pays, parmi les peuples autochtones touchés par l'activité minière.
    La part du Canada dans l'activité minière mondiale est considérable. D'après le ministère des Ressources naturelles, près de la moitié des sociétés minières du monde sont basées au Canada. Les sociétés minières canadiennes possèdent 15 % des mines philippines. Occupant le 50e rang des pays riches en minéraux, grâce à des réserves minérales inexploitées d'une valeur de 1 000 milliards de dollars, les Philippines attirent les intérêts miniers étrangers.
    Le gouvernement philippin a particulièrement facilité la tâche aux investisseurs. Sa loi de 1995 sur les mines, faite pour les investisseurs miniers étrangers, a été adoptée alors que le pays était empêtré dans la dette nationale accumulée pendant la dictature de Marcos et une baisse de l'activité minière, au début des années 1990. La loi coïncidait également avec la promotion des privatisations rapides et des économies du libre marché par la Banque mondiale et la Banque de développement asiatique.
    Le 3 mai, à la Chambre des communes, pendant la période des questions, un député libéral a questionné un ministre de son parti et, sans les paraphraser, il est évident qu'ils convenaient que les Philippines sont un eldorado pour les investisseurs canadiens qui veulent y brasser des affaires. Mais, d'après notre expérience, ce pays est avant tout un eldorado pour les violations des droits humains. Celui qui veut investir dans ce pays doit agir avec prudence s'il ne veut pas contribuer directement ou indirectement à ces violations, particulièrement dans le secteur minier.
     Nous en avons constaté directement les effets chez deux peuples, les Igorots et les Lumads. De puissants acteurs commerciaux et politiques contournent l'obligation du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Ce principe est régulièrement enfreint par corruption et intimidation, comme le montrent plusieurs études indépendantes communiquées à la haute-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme Michelle Bachelet.

  (1630)  

[Français]

    Madame la présidente, distingués membres du Comité, selon nous, il est important que le gouvernement canadien tienne compte de la situation précaire des droits de la personne aux Philippines, d'autant plus que la société civile et l'opposition sont mises à mal lorsqu'elles lancent des accusations et lorsqu'elles font l'objet d'accusations non fondées quant à une affiliation communiste, ce qui, selon la perception de l'État philippin, donne à celui-ci la permission de les marquer au rouge.
    Par ailleurs, les défenseurs du domaine ancestral, tant les Lumads que ceux qui visent à protéger l'environnement, figurent en bonne place parmi les victimes d'exécution extrajudiciaire. Ces défenseurs sont à Mindanao, à Negros, dans la région de la Cordillère, à Palawan et dans la province de Bataan. Plus de 227 d'entre eux ont été victimes d'exécution extrajudiciaire; la moitié s'opposait aux projets miniers et un tiers faisait partie des premiers peuples des Philippines.
    Ces dernières années, la rhétorique virulente des plus hauts dignitaires du gouvernement, qu'elle soit le fait du président, du chef de l'armée ou du chef de la police nationale philippine, a été omniprésente et profondément préjudiciable. Certaines déclarations ont atteint le niveau de l'incitation à la violence. Cette rhétorique va de commentaires dégradants et à caractère sexuel contre les défenseures des droits de la personne et les politiciennes, y compris des blagues sur le viol, en passant par des déclarations incendiaires appelant au bombardement des peuples autochtones qui s'opposent aux activités de développement et d'exploitation minière, jusqu'aux messages qui encouragent la violence extrême en appelant à la décapitation des acteurs de la société civile et en avertissant les journalistes qu'ils ne sont pas à l'abri d'un assassinat.
    Le rapport de la haute-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Mme Michelle Bachelet, en décrit les sources, de même que trois rapports des sections du Canada et du Québec de la Coalition internationale pour la défense des droits de la personne aux Philippines.
    Je vais maintenant vous présenter nos recommandations.
    Nous recommandons d'abord que le gouvernement canadien, dans toutes ses négociations, ainsi qu'Exportation et développement Canada, dans ses investissements, soient conscients des problèmes de non-respect des droits de la personne et des droits des premiers peuples en lien avec les projets miniers canadiens aux Philippines, et qu'ils en tiennent compte avant d'investir dans des entreprises. Il serait prudent qu'ils fassent les vérifications nécessaires avant d'investir l'argent des contribuables dans des entreprises qui pourraient, directement ou indirectement, bafouer les droits de la personne.
    De plus, nous considérons qu'il est important que le gouvernement mette sur pied un comité chargé de faire des vérifications indépendantes du politique avant d'investir dans des entreprises, et qu'EDC prévoie, dans tous les contrats qu'elle conclut avec des entreprises faisant affaire dans les Philippines, des dispositions relatives à la protection des droits de la personne et de l'environnement et au respect du principe du consentement libre, préalable et éclairé en ce qui a trait aux projets miniers.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Toutes mes excuses pour mon interruption.
    La parole est maintenant à M. Noël.

[Français]

    Je m'appelle Philippe Noël et je suis vice-président des Affaires publiques et économiques à la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je suis accompagné de mon collègue Mathieu Lavigne, directeur des Affaires publiques et économiques.
    La Fédération des chambres de commerce du Québec, ou FCCQ, regroupe 130 chambres de commerce et compte 1 100 membres corporatifs dans tous les secteurs de l'économie, dans l'ensemble du territoire du Québec et dans toutes les régions.
    Le soutien gouvernemental au succès de nos entreprises sur les marchés mondiaux est une question fort importante pour nous, parce que l'avenir de notre économie dépend de la capacité de nos entreprises à exporter leurs produits et à affronter une concurrence de plus en plus vive, autant sur notre marché intérieur qu'à l'étranger. Cela inclut les pays de l'Indo‑Pacifique, qui s'étendent de l'Asie centrale à l'Asie de l'Est, en passant par l'océan Indien et l'Océanie, ce qui comprend la Chine, le Japon, l'Inde, l'Australie, ainsi que l'Association des Nations de l'Asie du Sud‑Est, ou l'ANASE, dont nous parlerons un peu plus tard.
    D'ailleurs, le gouvernement fédéral et l'ANASE ont convenu de procéder aux négociations d'un accord de libre-échange en novembre 2021. La signature d'un tel accord constituerait un pas de plus vers la diversification des marchés d'exportation des entreprises québécoises.
    En 2018, la FCCQ avait produit un mémoire détaillé sur cet accord afin de présenter ses attentes. Nous avons eu l'occasion d'intervenir pour faire valoir notre point de vue sur cette question. Pour nous, il s'agit d'une occasion supplémentaire de diversifier nos marchés au Québec, qui s'ajoute aux autres accords commerciaux internationaux auxquels nos entreprises participent. Qui plus est, la taille, la diversité et la croissance des marchés visés par cet accord témoignent de l'importance des occasions d'affaires que représentent ces marchés. L'accès privilégié à ces marchés émergents permet d'entrevoir un tel accord avec optimisme.
    Depuis 2020, l'Indo‑Pacifique est devenu le deuxième marché d'exportation internationale du Québec, et le profil des exportations québécoises est diversifié. Au total, ce grand marché représente 12 % de nos exportations et 10,4 milliards de dollars d'exportations pour le Québec. Il s'agit également d'un marché où le Québec a connu sa plus forte progression au cours des 10 dernières années, soit tout près de 74 % de développement, notamment grâce à l'efficacité de notre plaque tournante logistique et du port de Montréal, entre autres, qui permettent de rejoindre rapidement le marché québécois et canadien, de même que celui du Midwest américain.
    Il y a aussi des accords commerciaux comme l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste et l'Accord de libre-échange Canada‑Corée.
    Plus du quart des exportations vers les marchés de l'ANASE sont faites par l'industrie aérospatiale, tandis que d'autres secteurs d'importance pour l'économie du Québec, par exemple l'agroalimentaire, la machinerie industrielle, le fer et la sidérurgie, le matériel informatique et électronique ainsi que les produits issus de l'industrie forestière, comptent pour une part importante des exportations vers ces pays.
    Nous avons un certain nombre d'attentes concernant les accords internationaux, notamment à l'égard des gouvernements.
    En premier lieu, il faut réduire les barrières tarifaires et non tarifaires aux exportations canadiennes. Pour cela, il faut établir des règles d'origine simples et efficaces, et réduire les obstacles techniques au commerce, notamment en assurant une meilleure coopération réglementaire et douanière.
    Deuxièmement, il faut maintenir la gestion de l'offre pour notre secteur agroalimentaire.
    Troisièmement, il est important d'avoir une meilleure coopération environnementale.
    En quatrième lieu, il faut s'assurer d'établir des règles concernant la protection des investissements et le règlement des différends.
    En cinquième lieu, il faut faciliter l'admission et le séjour temporaire de voyageurs d'affaires et de travailleurs qualifiés.
    Il faut aussi encadrer le commerce électronique et veiller à la protection des données. Il y a encore de nombreux problèmes de cybersécurité, comme on l'a vu dans les derniers mois. D'ailleurs, la FCCQ a récemment publié une étude là-dessus.
    Finalement, il faut soutenir l'internationalisation des PME et mieux promouvoir les occasions d'affaires découlant des nouveaux accords commerciaux.
    Les grandes entreprises connaissent généralement plus les enjeux du commerce mondial et ont davantage la capacité d'agir et de réagir rapidement à un nouvel accord commercial.
    Nos échanges avec les PME et les chambres de commerce nous permettent de constater certaines lacunes en matière d'information et de sensibilisation sur les enjeux liés aux nouveaux accords commerciaux. Mal informées, ces entreprises peuvent rater des occasions découlant de ces accords, ou encore être surprises par l'arrivée de nouveaux concurrents sur leurs marchés traditionnels.
    En terminant, nous encourageons le gouvernement fédéral à travailler en étroite collaboration avec le Québec pour bien intégrer leurs services de soutien à l'exportation et, surtout, pour mieux communiquer aux entreprises les services offerts. Par exemple, en faisant un référencement systématique des services fédéraux et provinciaux pour répondre aux besoins des exportateurs, on permettra à ces derniers de mieux connaître toute la gamme de services offerts.

  (1635)  

    La FCCQ rappelle que le succès des accords commerciaux reposera sur la capacité des entreprises à tirer profit de l'ouverture de nouveaux marchés et à faire face à de nouveaux concurrents.
    Je vous remercie. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Mazerolle, qui dispose de cinq minutes.

[Français]

    Madame la présidente, membres du Comité, bonjour.
    Je suis Denis Mazerolle, président de Nature Alu.
    Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous faire part des défis de Nature Alu, une nouvelle entreprise située au Saguenay, au Québec.
    Premièrement, je vais expliquer ce que nous faisons. Nature Alu achète de l'aluminium primaire d'Aluminerie Alouette, située à Sept‑Îles, par l'entremise de son fournisseur, Albecour, et effectue la purification de cet aluminium à un niveau de 99,99 % et plus à l'aide de son procédé innovateur conçu entièrement au Saguenay—Lac‑Saint‑Jean. L'aluminium ainsi purifié est destiné à l'exportation vers les marchés spécialisés de la haute technologie, tels que les batteries aux ions de lithium, les batteries aluminium‑air, les condensateurs électrolytiques, les alliages de spécialité, les peintures de spécialité, les ordinateurs quantiques, les semi-conducteurs et les impressions 3D.
    Avant de parler des défis que Nature Alu rencontre, il faut expliquer un peu la structure du prix de l'aluminium. Celle-ci est basée sur le prix du LME, soit le London Metal Exchange, qui est annoncé quotidiennement, mais le LME n'est pas le seul élément qui dicte le prix quand nous achetons ou vendons de l'aluminium. Dans notre cas, lorsque nous achetons de l'aluminium de notre fournisseur, une prime de marché s'ajoute au prix du LME. Cette prime de marché est établie pour un marché donné: en Amérique du Nord, on l'appelle la prime du Midwest; en Europe, il y a la prime Metal Bulletin; en Asie, c'est la prime MJP, ou Main Japanese Ports.
    Alors, l'aluminium que nous achetons ici, en Amérique du Nord, nous le payons au prix du LME, additionné à la prime du Midwest. Ensuite, nous faisons la transformation et la purification de l'aluminium, et nous lui donnons une valeur ajoutée qui est basée sur son niveau de pureté et sa mise en forme.
    Le prix du LME fluctue beaucoup, mais ce n'est pas vraiment ce qui constitue le problème. Le problème, c'est que la prime de marché varie d'un marché à l'autre. Dans notre cas, nous payons la prime la plus chère, soit la prime du Midwest. Quand nous voulons vendre notre produit en Asie, la prime est alors beaucoup plus faible. Nous sommes donc très désavantagés sur le plan du prix de l'aluminium.
    Je vais vous expliquer ce qui a causé ce problème de variation des primes. D'abord, il y a eu l'imposition, en vertu de l'article 232 de la Trade Expansion Act, aux États‑Unis, d'un tarif de 10 % sur l'aluminium canadien exporté aux États‑Unis. Dès que cette taxe a été imposée, la prime du Midwest a augmenté de 10 %. Il s'est alors créé un décalage énorme entre la prime du Midwest, en Amérique du Nord, et les autres primes de marché en Europe et en Asie. En septembre 2020, cette taxe a été abolie pour les producteurs d'aluminium canadien, mais la prime du Midwest est demeurée à un niveau très élevé, c'est-à-dire qu'elle est 10 % plus élevée que les autres. Elle n'est pas revenue à sa valeur normale, qui présentait un écart d'environ 100 $ par rapport aux autres primes de marché. Elle est restée gonflée à un niveau où la différence de prix entre l'aluminium acheté ici, au Québec ou au Canada, et le même aluminium acheté en Asie est de près de 800 $. Récemment, nous avons fait le calcul et il s'agissait de 770 $.
    Donc, le désavantage de Nature Alu, c'est qu'elle achète son aluminium à très haut prix et le transforme pour ensuite l'exporter en Asie, dans un marché où l'aluminium vaut beaucoup moins cher. Cette distorsion, qui a été introduite dans la prime du Midwest par l'imposition d'un tarif en vertu de l'article 232 de la Trade Expansion Act, paralyse carrément les exportations de produits transformés en Europe et en Asie. Tous les exportateurs d'aluminium ont le même problème que nous. Nature Alu ne réussit pas à exporter ses produits transformés en Europe et en Asie, en raison de l'écart entre la prime du Midwest et les autres primes de marché.

  (1640)  

    Nature Alu demande au gouvernement du Canada que l'argent qu'il a prélevé grâce à ses contre-mesures aux tarifs douaniers imposés par les Américains en vertu de l'article 232 de la Trade Expansion Act soit utilisé pour aider Nature Alu à exporter ses produits transformés en Europe et en Asie. Cette aide permettrait de réduire l'effet de cet écart et de corriger la distorsion introduite dans la prime du Midwest…

  (1645)  

[Traduction]

    Je suis désolée de vous interrompre, monsieur Mazerolle, mais il est important pour les membres du Comité d'avoir la chance d'apporter des éclaircissements et de poser des questions. Merci beaucoup.
    La parole est à M. Martel.

[Français]

    Juste avant que nous commencions la période de questions, madame la présidente, j'ai quelque chose à vous demander. Nous savons qu'il y aura un vote sous peu à la Chambre. Est-ce que nous pouvons nous entendre sur le fait que nous allons rester ici jusqu'au moment du vote, par respect pour les témoins, étant donné que la réunion sera déjà très courte?

[Traduction]

    Si, au début de la sonnerie d'appel, nous y consentons à l'unanimité, nous pouvons poursuivre nos travaux jusqu'au moment où nous devons voter. Nous pouvons le faire ici, si le Comité le veut.
    Êtes-vous tous d'accord?
    Des députés: Oui.
    La présidente: Très bien. Merci.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Mazerolle, c'est un plaisir de vous voir aujourd'hui.
    Nous avons beaucoup entendu parler de Nature Alu et du potentiel de votre aluminium de haute pureté. Je pense entre autres aux alliages de spécialité.
    Pourriez-vous m'en dire davantage sur la façon dont votre produit se démarque à l'échelle internationale et sur la manière dont le Canada pourrait en bénéficier?
    Quand nous avons créé Nature Alu, notre objectif était de nous intégrer dans la transition énergétique grâce à l'aluminium de haute pureté. L'aluminium de haute pureté est utilisé dans les batteries aux ions de lithium et dans les batteries aluminium-air, de même que dans les condensateurs électrolytiques, qui sont très utilisés dans les voitures électriques. C'est l'un des segments de marché dans lesquels nous voulions percer.
    L'aluminium de haute pureté produit chez Nature Alu est celui qui a la plus basse empreinte carbone au monde. Notre concurrence vient surtout de la Chine, où les alumineries fonctionnement au moyen d'électricité produite à partir de charbon. De plus, les procédés de purification qui sont utilisés en Chine sont énergivores, comparativement aux nôtres. Par conséquent, l'empreinte carbone de l'aluminium de Nature Alu est 20 fois plus petite que l'empreinte carbone d'un même produit fabriqué en Chine à partir de l'énergie qui vient du charbon. C'est un avantage que nous avons.
    La chaîne d'approvisionnement a également son importance. Nous discutons avec des gens qui aimeraient être alimentés par des fournisseurs qui ne viennent pas nécessairement de la Chine ou de la Russie. Aujourd'hui, la majorité de l'aluminium de haute pureté vient de ces pays. Les gens cherchent à diversifier leur chaîne d'approvisionnement et Nature Alu est une option pour eux, pourvu que nous puissions offrir un prix compétitif.
    Selon vous, quelles sont les possibilités d'exportation de votre produit en Asie, spécialement dans les pays de l'ANASE?
    Ces pays fabriquent beaucoup de composants électroniques. Il y a aussi les semi-conducteurs, qui peuvent être fabriqués avec de l'aluminium de haute pureté. Nous pensons que les possibilités dans ces pays vont s'accroître grandement dans l'avenir. Beaucoup de composants électroniques et de condensateurs seront produits dans ces pays, et Nature Alu pourrait être un fournisseur important.
    Je sais que vous avez conclu un petit contrat avec l'Inde par le passé, mais, comme vous le disiez tout à l'heure, votre entreprise n'est pas vraiment compétitive dans ce marché.
    Cela m'amène à parler de la fameuse prime du Midwest, qui, selon vous, vous désavantage énormément sur le marché. Vous aimeriez que le gouvernement fasse quelque chose pour régler le problème de cette augmentation de 10 %. Selon vous, cette prime est beaucoup trop élevée et représente un obstacle pour vous.
    En septembre 2020, quand la taxe sur l'aluminium a été abolie, les gens se sont dit que la situation était réglée pour le Canada, mais elle n'est pas réglée pour les exportateurs, qui doivent toujours acheter leur aluminium en payant ce surplus de 10 %, qui est toujours dans le prix.
    Nous sommes vraiment défavorisés et nous aimerions être indemnisés afin que la situation redevienne comme elle était avant l'imposition de l'article 232 de la Trade Expansion Act, alors que l'écart était d'environ 100 $ entre l'Asie et l'Amérique du Nord. Si nous revenons à ces niveaux, nous pourrons acheter notre matière première à un prix compétitif et faire des propositions compétitives aux clients dans ces marchés.

  (1650)  

    Comme vous l'avez dit, le gouvernement pourrait vous aider s'il compensait cet écart.
    Je vous remercie, monsieur Mazerolle.
    Ma prochaine question s'adresse aux représentants de la FCCQ.
    Dans le cadre d'un éventuel accord de libre-échange avec l'ANASE, quelles seraient les occasions d'affaires pour le Québec et quels secteurs le Canada devrait-il privilégier?
    Je vous remercie de la question.
    Je vais commencer et je laisserai ensuite mon collègue M. Lavigne vous répondre à son tour.
    Plusieurs secteurs sont intéressants pour nos entreprises exportatrices. Si on fait abstraction des pays signataires du PTPGP, il reste dans l'ANASE le Cambodge, l'Indonésie, le Laos, le Myanmar, les Philippines et la Thaïlande. Ces pays veulent acquérir une expertise dans le domaine de l'électronique et des semi-conducteurs, comme vient de l'expliquer le témoin dans ses réponses aux questions précédentes.
    Par ailleurs, les pays de l'ANASE offrent énormément de possibilités au Québec du côté des technologies de l'information et de la communication, en agroalimentaire, en économie verte, plus particulièrement dans l'électrification des transports, en aérospatiale, dans les secteurs minier et forestier, ainsi que dans le secteur des infrastructures, notamment par l'entremise de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures.
    Si nous pouvons accroître notre présence sur les marchés publics, énormément de possibilités de développement s'offriront à nos entreprises, surtout si l'accord actuellement en négociation avec l'ANASE est conclu.
    Je ne sais pas si mon collègue a quelque chose à ajouter.
    En ce qui concerne le secteur agroalimentaire, j'aimerais rappeler que certains produits agroalimentaires du Québec jouissent déjà d'une notoriété et d'une popularité dans cette région. Je pense notamment au porc, qui est beaucoup exporté dans les pays asiatiques, ainsi qu'au soya québécois, qui est en train de se tailler une place sur ces marchés.
    Il y a donc des débouchés pour nos entreprises si les barrières tarifaires sont réduites.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Miao, vous disposez de six minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Je remercie tous les témoins de nous accompagner dans cette étude. C'est toujours un plaisir de rencontrer quelqu'un en Colombie-Britannique.
    Je voudrais interroger M. Nankivell, de la Fondation Asie-Pacifique du Canada.
    D'après vous, comment les relations du Canada avec la région indo-pacifique ont‑elles évolué, et dans quelle mesure cela a‑t‑il augmenté les possibilités d'échanges commerciaux avec cette région?
    J'aime beaucoup cette question. J'ai une réponse en deux ou trois parties.
    D'abord, ces dernières années, on a cherché à diversifier les relations avec les puissances moyennes et les économies émergentes de l'Asie du Sud‑Est, ce qui est très souhaitable.
    La professeure Ong a fait allusion à l'importance géopolitique, pour le Canada, de la multiplication de ses relations avec des partenaires en Asie du Sud‑Est, comme Singapour, le Vietnam, l'Indonésie et la Malaisie, afin de s'affirmer sur la scène géopolitique asiatique. Il en découle également des conséquences pour nos relations avec la République populaire de Chine. Elles nous placent en meilleure posture.
    Pour ce qui est de l'élargissement des possibilités commerciales, il est assez évident — ce que la Chambre de commerce du Québec a également confirmé — que l'Asie du Sud‑Est n'a pas été aussi bien démarchée par les entreprises canadiennes dans la dernière décennie, ce qui devrait inciter les Canadiens à y aller et à explorer ces marchés, surtout que, compte tenu des tendances économiques dont d'autres et moi‑même avons parlé, ces pays sont très populeux: 100 millions d'habitants chacun au Vietnam et aux Philippines, près de 300 millions en Indonésie. Les taux de croissance démographique font naître très rapidement une classe moyenne beaucoup plus nombreuse.
    Les dispositions que le gouvernement canadien a prises, ces dernières années, pour entamer les négociations d'un accord de libre-échange avec l'Association des Nations de l'Asie du Sud‑Est et, en même temps, l'Indonésie, alors que nous avions ratifié notre participation à l'accord complet et progressif pour le Partenariat transpacifique, voilà autant de clés qui ouvriront des portes aux entreprises canadiennes et leur donneront l'élan voulu pour augmenter leurs chances en Asie du Sud‑Est en particulier.
    Simplement pour conclure, le hic est que nos partenaires commerciaux de la région en sont venus à douter de la constance du Canada, ce qui, cette fois, nous oblige vraiment à des investissements à long terme. Il faut que les dirigeants politiques — ministres, premiers ministres de provinces, maires et ainsi de suite — aillent visiter souvent la région, pas seulement une fois par décennie ou quand nous briguons un siège au Conseil de sécurité, et qu'ils prennent le temps voulu pour nouer des rapports. En Asie du Sud‑Est, particulièrement, les décideurs ont besoin de voir que le Canada est déterminé, mois après mois, pas seulement une fois de temps à autre.

  (1655)  

    Merci beaucoup pour cette réponse, qui m'amène à vous interroger sur la mission commerciale récente dirigée par des femmes et qui est allée en Asie-Pacifique, plus particulièrement en Inde.
    Pouvez-vous nous exposer de façon plus détaillée les résultats de cette mission, et les leçons qui pourraient en être utiles?
    La Fondation, dans ce cas, agissait en partenariat avec le Conseil de commerce Canada-Inde, pour la mission dans ce pays, mais nous avions d'autres missions.
    Notre fondation, avec le soutien financier d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, pour soutenir l'entrepreneuriat féminin en Asie, a envoyé ses missions de femmes d'affaires dans différents pays asiatiques, notamment au Japon, ces dernières années, en Corée du Sud et, l'année dernière, une mission en virtuel en Australie et en Nouvelle-Zélande, ainsi que, en mars, en Inde.
    Y ont participé toute une gamme d'entreprises dirigées par des Canadiennes, qui, en virtuel, ont été mises en contact avec d'éventuels partenaires indiens. D'après moi, il est encore un peu trop tôt pour faire le bilan des ententes concrètes entre entreprises qui en ont résulté, mais cette mission a quand même donné lieu à l'organisation de dizaines de rencontres d'entreprises.
    Pendant ces missions virtuelles, nous organisons quelques séances en plénière, avec conférenciers et groupes de discussion sur des sujets d'intérêt mutuel pour les entrepreneuses et les organisations qui les appuient au Canada ainsi que dans le pays partenaire, en l'occurrence l'Inde. Ces séances sont suivies de rencontres entre entreprises organisées par notre équipe, en grande partie de notre bureau de Toronto. Dans ce cas, nous travaillons avec le Conseil de commerce Canada-Inde et avec le Service des délégués commerciaux du gouvernement du Canada en poste en Inde, pour organiser ces dizaines de rencontres pour développer les nouveaux partenariats.
    C'est avec plaisir que je communiquerai à votre comité des renseignements pour faire le point sur cette initiative.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Savard-Tremblay, vous disposez de six minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je salue l'ensemble des témoins, que je remercie de leur temps et de leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Je pense que nous nous entendons tous pour dire que de grandes occasions d'affaires s'offrent à nous dans cette région du monde, mais il faut aussi faire des mises en garde, car il y a certaines zones d'ombre. C'est pour cela que j'aime particulièrement les exposés comme ceux de Me Beaudoin et de Mme Lisson.
    J'aimerais d'ailleurs vous poser une question, monsieur Beaudoin. Vous avez parlé du marquage au rouge. Pouvez-vous nous dire brièvement de quoi il s'agit?
    Cela consiste à porter de fausses accusations contre des gens, en disant qu'ils sont liés à la Nouvelle Armée du peuple, qui est le bras armé du Parti communiste des Philippines et qui est en insurrection depuis une quarantaine d'années. Ces accusations sont portées contre des membres du clergé, des avocats, des activistes, des défenseurs des droits de la personne. D'ailleurs, beaucoup de défenseures des droits de la personne sont ainsi accusées. Je pense par exemple à Mme Maria Ressa, avec qui nous travaillons et qui vient de recevoir le prix Nobel de la paix, et à Cristina Palabay, qui a reçu le Prix franco-allemand 2021 des droits de l'homme et de l'État de droit. Sans la remise de ces deux prix, ces deux femmes auraient été assassinées, comme la majorité des gens que nous avons interviewés.
    C'est pour cette raison que les gens avec lesquels nous travaillons, bien qu'ils soient favorables au commerce, aimeraient bien que le Canada interdise aux sociétés minières canadiennes de s'installer dans des zones où il y a une opposition de la part des communautés autochtones, de l'intimidation, du harcèlement ou du marquage au rouge, ainsi que dans les zones ciblées par les militaires pour lutter contre le terrorisme. Aux Philippines, les violations des droits de la personne sont incroyables. Lorsque des compagnies minières veulent s'établir à un endroit où il y a des communautés autochtones, que ce soit au nord ou au sud, on va souvent procéder à un nettoyage. Vous comprendrez qu'il devient alors plus facile de faire de l'exploration minière. Donc, les gens avec lesquels nous travaillons souhaitent l'établissement de zones très particulières.
    Il ne faut pas oublier que, en raison de l'application d'une loi antiterroriste, environ 347 000 personnes dans le sud du pays ont été déplacées parce que le gouvernement y a bombardé des villages.
    Dans le sud du pays, nous travaillons avec les Lumads. Nous les aidons à établir des écoles où les Autochtones peuvent enseigner leur langue et leur culture et faire la promotion de leur mode de vie. Par exemple, pour les sociétés minières, le territoire représente de l'or, mais, pour les Autochtones, il représente l'accès à l'eau, à la nourriture et à un certain niveau de vie. Or, selon un article du journal The Guardian, le président Duterte lui-même accuse ces écoles d'apprendre aux enfants autochtones à se rebeller contre son gouvernement. Il a même menacé de commander des raids aériens contre ces écoles, et...

  (1700)  

    Je comprends ce que vous dites, mais revenons-en au comportement des entreprises minières.
    Vous avez recommandé, par exemple, des mesures ou une loi de diligence raisonnable. Cela pourra faire l'objet de discussions également, en temps et lieu. De façon plus immédiate, je pense à la responsabilité de ces entreprises. Autrement dit, si l'une d'elles a un comportement répréhensible, il faut qu'elle en paie le prix. En ce moment, il arrive parfois que les entreprises n'en paient pas le prix, comme le dirait un de mes collègues.
    On peut aussi considérer le rôle du Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises, c'est-à-dire l'OCRE. Est-ce que l'OCRE en fait suffisamment, à l'heure actuelle?
    En principe, dans un pays qui respecte la règle de droit, un bureau d'ombudsman est un organisme indépendant. Or, le Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises relève du bureau du premier ministre.
    De plus, c'est un ombudsman sans réels pouvoirs, puisqu'il ne peut pas faire d'enquêtes de son propre chef ni assigner de témoins. D'ailleurs, on peut lire ceci sur le site Internet de l'OCRE: « Le décret 2019‑1323 nous autorise à recueillir vos renseignements personnels. Pour la plupart des plaintes, nous donnerons ces renseignements à l’entreprise canadienne contre laquelle vous avez porté plainte. » C'est une des raisons pour lesquelles les gens avec qui nous travaillons ne déposent absolument aucune plainte. Vous comprendrez que personne n'osera porter plainte si le fait de s'opposer à l'exploration minière aux Philippines expose les gens au risque, si ce n'est déjà fait, d'être marqués au rouge.
    Il faudrait donc que le Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises ait le pouvoir de faire enquête, dans un premier temps. Surtout, il devrait avoir le pouvoir de préciser, après avoir mené une enquête sur des événements survenus dans un cas donné, quelles mesures ont été exigées de la part de l'entreprise concernée.
    C'est pour cela que nous demandons au gouvernement canadien et à Exportation et développement Canada d'exercer une diligence raisonnable et d'imposer des exigences particulières lorsqu'il est question d'investir de l'argent des contribuables dans des entreprises.
    Peut-être que la révérende Lisson aurait quelque chose de particulier à ajouter au sujet de la réglementation, qu'il serait important d'améliorer.
    J'aimerais justement lui demander comment nous pouvons resserrer les règles pour que les entreprises canadiennes qui ont des activités à l'étranger respectent davantage les droits de la personne. Nous avons une occasion d'agir, alors qu'il est actuellement question d'un potentiel accord. Il est peut-être temps d'y inscrire certaines dispositions.
    Madame Lisson, j'aimerais entendre votre point de vue à ce sujet.

[Traduction]

    J'estime, en effet, que nous avons besoin de lois sans faille pour obliger ces compagnies à rendre des comptes. Ce n'est pas assez de leur demander de s'autoréguler, et nous savons que, particulièrement dans le secteur minier et l'armement, notamment, il n'y a pas d'autorégulation. Elles ne s'autorégulent pas comme il faudrait pour protéger l'environnement et les droits humains dans des pays comme les Philippines.
    Ce n'est pas seulement les Philippines. D'autres pays sont également en cause. Il est donc capital de fonder tous les accords commerciaux sur les droits humains. Voilà la base de la formulation de tout accord commercial que nous concluons.
    Il faut également extirper de l'accord commercial toute clause régissant le règlement des différends entre investisseurs et États. Cette réserve, dans un accord, autorise les compagnies à poursuivre ensuite le pays, de sorte que nous nous trouvons dans des situations terribles où une entreprise minière poursuit le gouvernement parce que la communauté a entravé son activité dans le pays.

  (1705)  

    Merci beaucoup, ma révérende.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Madame Gazan, vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup. Qu'il est agréable d'être de passage dans votre comité! J'essaierai d'être à la hauteur.
    Madame Lisson, vous avez parlé de la participation de compagnies canadiennes à la violation des droits de peuples autochtones aux Philippines. Vous avez dit que les Philippines sont un eldorado des violations des droits humains, y compris le fait de ne pas obtenir le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, en contravention directe de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    Voilà qui me met mal à l'aise, parce qu'un comité de l'ONU, cette semaine, a condamné le Canada pour avoir omis de soutenir les droits humains, particulièrement en rapport avec la construction des pipelines Trans Mountain et Coastal GasLink.
    Le comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale s'est dit préoccupé et a dit regretter profondément que le Canada continue à déplacer de force les défenseurs des territoires autochtones non cédés. Il a ajouté que la Colombie Britannique, particulièrement, avait augmenté l'usage de la force et le recours à des poursuites au pénal contre les protestataires pacifiques et les contrevenants qui se trouvaient sur les territoires, leur surveillance, pour intimider, déplacer et expulser par la force les nations des Wet'suwet'en et des Secwepemcs de leurs territoires traditionnels, particulièrement par la GRC, le Groupe d'intervention pour la collectivité et l'industrie et des agences de sécurité privée.
    On semble deviner un comportement systématique par lequel ça se passe au Canada ou avec la participation d'entreprises minières canadiennes qui ont sale réputation, à l'étranger, comme nous le savons.
    Pendant la dernière législature, nous avons adopté le projet de loi C‑15, pour l'adoption et la mise en œuvre intégrales de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    Comment le Canada se trouve‑t‑il à enfreindre la loi canadienne en ne garantissant pas le respect des droits humains fondamentaux par les activités minières?
    Faute de détails, je ne peux vous en donner qu'un aperçu très sommaire, mais je peux vous les communiquer plus tard.
    Les sociétés minières canadiennes violent ce traité avec les Nations unies par le déplacement par la force des peuples autochtones de leurs terres. Les Lumads, de Mindanao, chez qui nous avons séjourné pendant trois semaines avaient été chassés de leurs terres. Cinq cents d'entre eux étaient rassemblés sur le terrain d'une église. Ils y vivaient depuis cinq ans, parce qu'une compagnie minière les avait chassés, une importante compagnie canadienne, dois‑je ajouter, mais que je ne nommerai pas.
    Ensuite, elles font occuper les communautés par la police paramilitaire et des militaires qui y campent, c'est‑à‑dire qu'ils entrent dans une communauté. Dans les régions rurales des Philippines, on a souvent entre le plancher des maisons et le sol un espace où les animaux se nourrissent pendant la saison des pluies. Les militaires campent directement sous les maisons des Autochtones pour les intimider dans l'espoir que certains d'entre eux signeront le consentement préalable donné librement.
    J'ai encore une question.
    Ce n'est certainement pas sans coercition, c'est‑à‑dire à l'encontre de l'une des bases du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
    Monsieur Beaudoin, vous avez parlé de la violence exercée par les compagnies minières, aux Philippines, contre les femmes et les filles autochtones. Actuellement, le comité de la condition féminine fait une étude sur la relation entre la mise en valeur des ressources et les taux accrus de violence contre les femmes et les filles autochtones au Canada.
    Diriez-vous que les compagnies minières canadiennes manquent à la tâche d'assurer la mise en place de mesures convenables de protection pour les femmes et les filles, non par omission mais activement?
    En effet, nous savons que, à proximité des localités où on extrait des ressources, des femmes, souvent, disparaissent ou sont assassinées. Est‑ce également très fréquent, actuellement, est‑ce que c'est associé à la présence de compagnies canadiennes?
    Je pose la question à M. Beaudoin…

  (1710)  

    Voulez-vous que je réponde, monsieur Beaudoin?
    … ou à madame Lisson. N'importe qui de vous deux.
    Si vous me permettez de répondre, il semble que, aux Philippines, actuellement, ce ne soit pas tout à fait la même chose qu'ici, au Canada, avec les femmes et les filles autochtones disparues, mais les femmes sont très durement touchées dans leur santé et par la pauvreté. Les femmes défenseures des droits humains sont arrêtées, emprisonnées et, dans la plupart des cas, c'est en raison d'enjeux miniers.
    Nous sommes au courant d'un cas, l'arrestation et l'emprisonnement d'une femme qui a accouché en prison et dont le bébé est mort, faute de soins. Normalement, comme elle militait pour les droits humains, elle aurait dû pouvoir en prendre soin et le nourrir, mais ce droit lui a été retiré quand elle a été jetée en prison en sa qualité de défenseure des droits humains.
    Voilà les problèmes que nous éprouvons. Ce sont des problèmes parallèles, qui touchent particulièrement la santé des femmes, la pauvreté et le logement ainsi que des violations des droits, de ce point de vue.
    C'est un peu différent du Canada…
    Merci beaucoup, madame Lisson.
    Monsieur Martel, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse aux représentants de la FCCQ.
    Comme on le sait, l'Asie est présentement très compétitive dans plusieurs secteurs. J'aimerais savoir quels secteurs au Québec subiraient le plus de conséquences négatives si un accord de libre-échange avec l'ANASE était conclu.
    Nous n'avons pas tellement réfléchi aux répercussions négatives qu'il pourrait y avoir sur certains secteurs. Nous voyons plutôt les accords internationaux comme des occasions à saisir, et cela a toujours été notre position. Nous voyons les avantages plutôt que les désavantages, autant pour nos entreprises exportatrices que pour les chaînes d'approvisionnement. En effet, les accords commerciaux peuvent faciliter l'accès à des produits, en plus de permettre un échange d'expertise par la main-d'œuvre.
    J'aimerais préciser que plusieurs des biens que nous importons déjà des pays de l'ANASE ne peuvent pas être produits au Québec. Par exemple, l'un des principaux produits que nous importons, ce sont des fruits qui poussent là-bas, mais pas chez nous. Il ne s'agit pas nécessairement de produits qui se substitueraient directement à des produits d'ici. Cet accord aurait donc des incidences moins grandes sur nos industries, contrairement aux accords de libre-échange conclus avec l'Europe ou les États‑Unis, par exemple, où l'on doit vraiment considérer les produits de substitution. Dans le cas de l'ANASE, l'effet est un peu moins direct.
    Selon ce que je comprends, vous n'avez aucune crainte que le Québec perde des emplois dans le domaine manufacturier, par exemple, à la suite d'une entente de libre-échange avec les pays de l'ANASE.
    Nous ne regardons pas du tout cet accord de libre-échange sous cette optique. Nous voudrions même que les barrières soient les moins restrictives possible pour nos entreprises et que les accès aux marchés soient réciproques, y compris pour le secteur manufacturier.
    Nous voyons qu'il existe énormément d'occasions à saisir pour mettre en lumière le savoir-faire du Québec, notamment en économie verte, pour accroître nos partenariats avec les pays d'Asie et pour intensifier nos investissements à l'étranger par le truchement de nos entreprises qui possèdent une expertise. Je pense notamment à l'électrification des transports, dont j'ai parlé plus tôt, ainsi qu'au secteur de l'énergie. Comme vous le savez, les pays asiatiques ont des gros défis lorsqu'il s'agit de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Nous pensons que des entreprises québécoises pourront contribuer passablement à cet effort.
    J'aimerais maintenant parler de l'Agence des services frontaliers du Canada.
    Selon vous, est-ce que l'Agence des services frontaliers du Canada fait un assez bon travail en ce qui a trait à l'application de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, qui vise à protéger l'industrie canadienne...

[Traduction]

    Monsieur Martel, toutes mes excuses, mais je dois vous interrompre.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Est‑ce que tout le monde veut voter ici ou veut prendre le temps de se déplacer pour aller à la Chambre?
    Tout le monde est‑il d'accord pour voter ici?
    Des députés: Oui.
    La présidente: D'accord. Nous pouvons poursuivre pendant encore cinq minutes, à peu près.

  (1715)  

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vais reprendre ma question.
    Selon vous, est-ce que l'Agence des services frontaliers du Canada fait un assez bon travail en ce qui a trait à l'application de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, qui vise à protéger l'industrie canadienne du dommage causé par les importations de marchandises faisant l'objet de dumping ou de subventionnement?
    En toute franchise, nous n'avons pas poussé notre réflexion jusqu'à cette loi.
    Cela dit, nous entendons souvent dire que les processus de l'Agence sont complexes pour nos entreprises quand vient le temps de profiter des accords internationaux. Nous entendons souvent des entreprises dire qu'elles préféreraient payer le tarif douanier, car cela leur semble plus simple que de démontrer aux autorités douanières que leurs produits à destination du marché international sont admissibles dans le cadre des accords commerciaux. C'est surtout ce genre de complexité et d'obstacles techniques au commerce que les entreprises nous rapportent.
    Nous ne nous sommes pas beaucoup penchés sur cette question. Nos membres ne nous en parlent pas énormément, non plus.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Mazerolle.

[Traduction]

    Essayez d'être très bref, s'il vous plaît.

[Français]

    Je voudrais revenir sur la fameuse prime du Midwest, car elle pourrait vraiment être néfaste dans l'avenir si rien ne bouge de ce côté.
    Avez-vous d'autres solutions? Tout à l'heure, vous m'avez parlé d'une certaine solution, mais avez-vous d'autres options relativement à cette prime?

[Traduction]

    S'il vous plaît, soyez bref.

[Français]

    L'une des options serait de faire venir de l'aluminium du Moyen‑Orient, par exemple, pour le transformer ici et le retourner sur les marchés. Cela pourrait être une solution, mais cela n'aurait pas trop de sens. En effet, nous serions obligés de faire ce genre de truc pour pouvoir exporter l'aluminium en Asie, alors que nous sommes dans la vallée de l'aluminium et que nous sommes entourés d'alumineries.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Sheehan, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Le changement climatique a gravement touché la région de l'Asie-Pacifique. Ses effets ont été terribles. Des catastrophes ont coûté cher en vies humaines, particulièrement dans les Philippines, en Thaïlande et au Myanmar. Sur le plan des affaires, des endroits comme Singapour sont très inquiets de la montée des eaux, qui touchent le transport maritime et les défis locaux.
    Voici ma question à M. Nankivell.
    Le Canada est devenu un chef de file des technologies propres et des énergies renouvelables. Quelles occasions percevez-vous dans la région pour les échanges commerciaux de technologies propres et d'énergies renouvelables?
    Nous pourrions consacrer beaucoup plus que six minutes à cette question. Comme vous l'avez dit, il s'agit de l'Asie.
    Tout d'abord, des régions de l'Asie et des pays comme les Philippines, le Bangladesh et les îles du Pacifique Sud sont les endroits les plus peuplés au monde qui sont menacés par les changements climatiques. Dans le golfe du Bengale, les habitants de la région de Dacca, une des villes ayant la croissance la plus rapide en Asie et la capitale du Bangladesh, sont très exposés à l'élévation du niveau de la mer.
    Il y a un vaste éventail de possibilités. Au chapitre des mesures d'atténuation des changements climatiques, les innovations canadiennes dans le domaine de la capture du stockage à grande échelle comptent parmi les meilleures au monde et pourraient s'avérer extrêmement utiles.
    Nous pourrions parler entre autres des matériaux de pointe pour la construction. J'ai mentionné que dans les grandes villes d'Asie, la majorité des logements qui abriteront la population dans 30 ans ne sont pas encore construits. Cette situation offre la possibilité d'exploiter des technologies, des techniques et des matériaux de construction utilisant moins de carbone. Les possibilités abondent dans le domaine des matériaux. Non seulement certains matériaux peuvent réduire l'empreinte carbone de la production du matériel et de la construction des bâtiments, mais d'autres encore peuvent aider à éliminer le carbone une fois qu'ils sont mis en place. La science des matériaux offre de grandes possibilités dans ce secteur. Les centres d'innovation partout au Canada travaillent là‑dessus.
    La gestion de l'eau est un autre problème lié aux changements climatiques, qui causent à la fois des inondations et des sécheresses. Des technologies canadiennes sont utilisées dans ce secteur. Par exemple, une entreprise canadienne a conçu un système très complexe de prévention des inondations qui est utilisé à Kuala Lumpur, en Malaisie. Ce système convertit rapidement les tunnels routiers en évacuateurs de crues au moyen de détecteurs et d'applications d'intelligence artificielle. La gestion de l'eau est un autre secteur où les possibilités abondent. De grandes entreprises canadiennes et des fonds d'investissement bâtissent des portefeuilles d'entreprises qui travaillent dans la gestion de l'eau.
    Sur le plan des technologies agroalimentaires, le Canada a apporté des contributions majeures dans le secteur de l'aridoculture. Par exemple, des techniques canadiennes mises au point à partir de recherches effectuées dans l'Ouest canadien après la grande sécheresse sont utilisées en Chine depuis les années 1990 et 2000. Grâce à ces techniques, les agriculteurs, qui reçoivent beaucoup moins d'eau à cause des changements climatiques, obtiennent le même rendement en utilisant une quantité nettement inférieure d'eau.
    Ce ne sont là que quelques exemples des secteurs dans lesquels des technologies éprouvées sont prêtes à être mises en place à l'échelle de l'Asie. On ne saurait surestimer la demande de telles technologies dans les marchés d'Asie. Les gouvernements, y compris les plus grands, comme ceux de la Chine, de l'Inde et de l'Indonésie, se préoccupent beaucoup des changements climatiques. La porte est ouverte. Les Canadiens sont invités à venir présenter des solutions. C'est un domaine riche de possibilités.

  (1720)  

    Monsieur Sheehan, il vous reste 20 secondes.
    Je vais demander aux représentants des droits de la personne de réagir très brièvement à l'élection récente du président des Philippines, M. Ferdinand Marcos fils, surnommé « Bongbong ».
    Avez-vous des réflexions ou des commentaires, en 10 secondes?
    Vous pouvez aussi nous les envoyer par écrit.
    C'est dur à dire en 10 secondes.
    Nous nous attendons à peu de changements. Je pense que le duo formé par M. Marcos et Mme Duterte adoptera une approche semblable à celle du président sortant. La situation pourrait même être pire.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Il reste trois minutes avant le vote. J'essayais de faire en sorte que M. Savard-Tremblay puisse poser une question.

[Français]

    De toute façon, c'est un tour de deux minutes et demie, donc ce serait possible.

[Traduction]

    Il reste deux minutes et demie avant le vote.

[Français]

    Je ne sais pas si les autres sont d'accord.

[Traduction]

    Je vous donne la parole pour une question.

[Français]

    Je vais donc poursuivre avec vous, madame Lisson.
    Vous avez parlé de l'activité minière. Y a-t-il d'autres secteurs aux Philippines où la situation est délicate et qu'il faudrait surveiller?
    Cela risque d'être votre mot de la fin.

[Traduction]

    Merci.
    D'après moi, l'autre secteur qu'il faut surveiller, c'est l'industrie militaire, particulièrement la vente de produits militaires aux Philippines. Ces dernières années, le Canada a vendu peu de matériel militaire, mais ces ventes sont à la hausse. Comme le gouvernement des Philippines vient de s'engager à apporter des améliorations sur 15 ans, les ventes de matériel militaire augmenteront probablement au cours des prochaines années.
    Les forces armées philippines sont mobilisées principalement pour les opérations de sécurité internationales, c'est‑à‑dire pour s'occuper des exploitations minières et pour lutter contre la Nouvelle Armée populaire et les rebelles Moro. Ce sont des enjeux qui concernent les droits de la personne et la défense des droits de la personne. Le gouvernement se sert de l'armée pour lutter contre les insurgés et le terrorisme; c'est donc un moyen pour le gouvernement de sévir contre ses critiques, y compris les défenseurs des droits de la personne et de l'environnement.
    La guerre contre le terrorisme...
    Je suis désolée, madame Lisson, mais je dois vous interrompre.
    Je vous suggère de nous envoyer d'autres renseignements à ce sujet par écrit. Cela pourrait nous être utile, car nous n'avons tout simplement pas assez de temps à consacrer à nos nombreux excellents témoins. Pardonnez-nous d'avoir commencé en retard et de finir deux ou trois minutes avant le moment prévu, mais il y a un vote, et le temps est très serré.
    En fait, je pense que le temps commence à être trop serré. Si le Comité le veut bien, je vais lever la séance.
    Merci beaucoup. La séance est levée.
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