Passer au contenu
Début du contenu

FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 033 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 24 mars 2022

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

     Bienvenue à la 33e séance du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion que le Comité a adoptée le 12 janvier 2022, le Comité se réunit pour discuter de l'inflation dans l'économie canadienne actuelle.
    La séance se déroule en mode hybride, conformément à l'ordre que la Chambre a adopté le 25 novembre 2021. Les membres sont présents en personne dans la salle ou à distance à l'aide de l'application Zoom. Les délibérations sont diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. La webdiffusion montre toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.
    La séance prend également la forme d'un webinaire. Les webinaires sont conçus pour les séances publiques des comités et ne sont accessibles qu'aux députés, à leurs collaborateurs et aux témoins. Les membres sont immédiatement admis comme participants actifs. Toutes les fonctionnalités à la disposition des participants actifs demeurent les mêmes. Les membres du personnel sont des participants non actifs et peuvent donc suivre la séance uniquement en mode mosaïque. Je rappelle à tous les participants que les captures et photos d'écran sont interdites.
    Compte tenu de la pandémie, des recommandations des autorités sanitaires et de la directive que le Bureau de régie interne a prise le 19 octobre 2021, et afin de préserver la bonne santé et la sécurité de tous, ceux qui assistent à la séance en personne doivent maintenir une distance physique de deux mètres et porter un masque non médical lorsqu'ils circulent dans la salle. Il leur est instamment recommandé de le porter en tout temps, y compris lorsqu'ils sont assis. Chacun doit assurer une bonne hygiène des mains en utilisant le désinfectant fourni à l'entrée de la salle. La présidence fera respecter ces mesures pendant toute la séance. Je remercie d'avance les députés de leur collaboration.
    Pour assurer le bon déroulement de la séance, voici quelques règles à suivre. Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont disponibles. On peut choisir, au bas de l'écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Si le service d'interprétation est interrompu, il faut m'en informer immédiatement. Nous allons le rétablir avant de reprendre les travaux. La fonction « Lever la main », au bas de l'écran, permet de demander la parole ou d'attirer l'attention de la présidence.
    Les députés présents dans la salle font comme d'habitude, lorsque l'ensemble du Comité est présent sur place. Ne pas oublier les lignes directrices du Bureau de régie interne sur l'utilisation du masque et les protocoles sanitaires.
    Avant d'intervenir, chacun doit attendre que je lui donne la parole en le désignant nommément. Les participants qui sont en vidéoconférence cliquent sur l'icône prévue pour activer le micro. Le micro de ceux qui sont dans la salle est contrôlé comme d'habitude par l'agent des délibérations et de la vérification. Il faut parler lentement et distinctement. Lorsqu'on ne parle pas, son micro est en sourdine. Les députés et les témoins s'adressent toujours à la présidence.
    Quant à la liste des intervenants, le greffier du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir un ordre d'intervention unique pour tous les membres, qu'ils participent en mode virtuel ou en personne. Le Comité a convenu qu'au cours de ces audiences, le président appliquerait la règle voulant que la réponse du témoin ne prenne pas plus de temps que la question. Cela dit, j'invite députés et témoins au respect et à la politesse dans leurs échanges. Si le député estime que le témoin a dépassé son temps de parole, il a le droit de l'interrompre ou de lui poser la question suivante. Je demande également aux députés de ne pas trop dépasser leur temps de parole pour que leurs collègues puissent aussi intervenir pendant la séance. Nous n'interviendrons pas pendant le temps de parole d'un député, mais qu'on sache que le greffier a deux pendules pour chronométrer les députés et les témoins.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins: Stephen Punwasi, analyste principal des données, Better Dwelling; Jessy Desjardins, vice-président, Développement et conception, Brigil; David Macdonald, économiste principal, Centre canadien de politiques alternatives; Ben Rabidoux, analyste en immobilier, Edge Realty Analytics Ltd.; Sylvie De Bellefeuille, avocate, conseillère budgétaire et juridique, et Alexandre Plourde, avocat et analyste, Option consommateurs.
     Mesdames et messieurs les témoins, vous avez cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire.
    Nous allons commencer par Stephen Punwasi, de Better Dwelling.
    Vous avez donc cinq minutes. Je vous en prie.

  (1535)  

     Bonjour et merci de m'avoir invité.
    Je m'appelle Stephen Punwasi. Je suis analyste en chef des données chez Better Dwelling, la plus importante source indépendante d'informations sur le logement au Canada. Certains d'entre vous connaissent peut-être mon travail, qui consiste à aider à mesurer l'ampleur des problèmes de blanchiment d'argent au Canada ou de la crise mondiale des logements vacants. Les autres me connaissent comme spécialiste de la finance comportementale et des facteurs qui influent sur le prix des actifs.
    Aujourd'hui, je voudrais parler de chats, mais j'ai été invité à parler de l'inflation, ce que je ferai.
    Oui, l'inflation est effectivement un problème mondial. Cependant, ce n'est pas à cause de quelque force de la nature. C'est dû à des erreurs de politique monétaire similaires qui ont été commises dans de nombreux pays. Les émetteurs de devises souveraines convertibles, comme le Canada, peuvent contrôler la valeur de leur monnaie et donc l'inflation. Le principal problème, c'est que les taux d'intérêt sont trop bas depuis trop longtemps.
    Au début de la pandémie, les banques centrales craignaient une déflation. Le principal moyen dont la Banque du Canada disposait pour lutter contre la déflation consistait à abaisser les taux d'intérêt pour accroître la demande de biens, en particulier les prêts hypothécaires. L'objectif était de stimuler la demande pour qu'elle dépasse l'offre, créant ainsi une augmentation non productive des prix, ce qu'on appelle aussi l'inflation.
    Lorsque la baisse des taux d'intérêt ne stimule pas assez l'inflation, les banques centrales recourent à des mesures d'assouplissement quantitatif. Il s'agit d'un outil de politique monétaire non classique qui sert à accroître encore plus d'inflation. Cela ne sert ni à faire briller les chaussures ni à préparer le café. Il n'a littéralement qu'un seul but, accroître l'inflation.
    L'assouplissement quantitatif le fait en inondant d'argent le marché, en fournissant des liquidités aux marchés du crédit et en faisant baisser le coût des emprunts. Après tout, la loi de l'offre et de la demande s'applique à tous les maillons de la chaîne des biens et des services, pas seulement au produit final.
    Pendant très longtemps, nous avons présumé qu'il était bien que les taux d'intérêt soient faibles. L'argent bon marché fait baisser le coût de la dette, n'est‑ce pas? L'exemple parfait est celui du logement. Il y a quelques mois, la Banque du Canada a voulu prouver que les faibles taux d'intérêt avaient fait baisser le coût du logement. Or, ce n'est pas ce qui s'est produit. Elle a constaté que les consommateurs avaient ajusté leur budget pour tenir compte du crédit excédentaire disponible, ce qui a fait gonfler le prix des logements pour tout le monde. Les acheteurs n'ont pas vu leurs frais de possession diminuer, mais ils ont eu un plus gros capital à rembourser.
    Au cours des 30 dernières années, les banques centrales ont cru rendre le logement plus abordable grâce à des taux plus bas. Il s'avère que personne n'a fait les calculs jusqu'à tout récemment.
    Pourquoi ces points sont-ils importants? En octobre, l'inflation au Canada a atteint 4,7 %, soit plus du double du taux cible. Souvenez-vous du programme d'assouplissement quantitatif dont j'ai parlé tout à l'heure, celui qui vise uniquement à stimuler l'inflation. Cette mesure s'appliquait toujours à ce moment‑là, et les banques du Canada écrivaient littéralement à leurs clients pour leur dire que la banque centrale faisait preuve de témérité, au mépris de ses propres recherches. C'est comme si la Banque du Canada appuyait à fond sur l'accélérateur en disant que des facteurs externes n'allaient pas ralentir la voiture. Son explication? L'offre ne suffisait pas à répondre à la demande.
    Quelques mots, rapidement, à propos de cette demande. Il ne s'agit pas d'une demande ordinaire, mais d'une demande stimulée par la faiblesse des taux d'intérêt. La BMO estime que le volume des ventes de maisons est plus élevé du tiers par rapport à la normale à cause des faibles taux d'intérêt. Les ventes atteignent presque un niveau record. Elles ne sont pas déprimées, ce qui nécessiterait des mesures accrues de stimulation. Mais la faiblesse des taux ne stimule pas la vente. Elle ne fait qu'accroître la surenchère parce qu'elle est censée faire augmenter les prix.
    Je le répète, l'objectif d'une politique monétaire expansionniste est de créer de l'inflation. La demande est censée dépasser l'offre, ce qui pousse les prix à la hausse.
    Environ le tiers des acheteurs actuels sont des investisseurs. À Toronto, autour du quart des acheteurs sont des investisseurs, ce qui est ahurissant pour un marché de cette taille. Ils ne cherchent pas à assouvir leur envie d'être propriétaires; ils cherchent à tirer parti de l'inefficacité du capital. La demande excessive ne fait pas qu'évincer les utilisateurs finaux; elle les transforme aussi en une source rentable de paiements réguliers pour les investisseurs.
    Le crédit bon marché n'est pas réservé aux acheteurs qui veulent se loger. Tout le monde y a accès. Plus on a des moyens importants, plus on est en mesure d'emprunter et d'exploiter un système qui prête de l'argent à des taux d'intérêt qui sont, dans les faits, négatifs.
    J'ai mis l'accent sur l'inflation dans le secteur du logement, mais les mêmes facteurs déterminent l'inflation dans l'ensemble de l'économie. Les prix de l'immobilier sont un coût d'intrant essentiel pour tous les biens. Une demande excessive, et non une pénurie de l'offre, est la conséquence recherchée lorsqu'on inonde le marché de capitaux.
    Récapitulons: la Banque du Canada a abaissé les taux d'intérêt pour susciter de l'inflation. La baisse des taux n'ayant pas assez stimulé l'inflation, la Banque a inondé le marché de milliards de dollars de crédit par des mesures d'assouplissement quantitatif pour générer plus d'inflation, et elle pense maintenant que des facteurs externes sont à l'origine de cette inflation. Pas besoin de détectives de roman policier pour savoir d'où vient cette inflation.
    Merci.
    Merci, monsieur Punwasi.
    Nous passons maintenant à Brigil et à Jessy Desjardins, qui aura cinq minutes.

  (1540)  

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.
    Je m'appelle Jessy Desjardins et je suis vice-président, Développement et conception, chez Brigil.
    Tout d'abord, je tiens à vous remercier de votre aimable invitation à comparaître devant vous aujourd'hui.
    J'avoue ressentir une certaine nervosité, car c'est la première fois que je témoigne devant un comité parlementaire. Je suis nerveux, mais ô combien fébrile de vous parler des sujets qui me passionnent et qui passionnent notre entreprise, soit l'accès au logement, l'environnement et l'économie, trois éléments indissociables.
    Permettez-moi d'abord de vous parler un peu de Brigil. Nous sommes une entreprise familiale privée, à propriétaire unique, qui agit sur le territoire de la capitale nationale. Nous construisons non seulement des logements, mais surtout des milieux de vie. Depuis 1985, nous avons construit plus de 12 000 logements et en possédons toujours plus de 4 500, que nous offrons sur le marché de la location. Au fil des ans, nous avons acquis des terrains qui nous permettront de construire plus de 40 000 nouveaux logements au cours des 20 prochaines années dans la région de la capitale nationale.
    La flambée des prix au Canada est le résultat d'une multitude de facteurs, dont, bien entendu, l'effet de l'inflation mondiale, mais également et, surtout, de la pénurie de logements disponibles. Cette pénurie est le malheureux résultat de la mauvaise planification urbaine qu'il y a eu cours ces 50 dernières années au Canada. À ce chapitre, tous les ordres de gouvernement doivent assumer une part de responsabilité. Je suis du même avis que la Société canadienne d'hypothèques et de logement, ou SCHL, qui comparaissait devant vous le 21 janvier dernier et qui affirmait que l'offre de logements ne suivait pas le rythme de la demande, étant donné que le Canada enregistre la plus importante croissance démographique de tous les pays du G7.
    Il faut absolument construire davantage si nous voulons équilibrer l'offre et la demande de logements. Par contre, les embûches pour y parvenir sont nombreuses. À l'échelle municipale, la planification à long terme est déficiente; elle devrait intégrer davantage de cohésion entre l'aménagement du territoire et les transports en commun. Les nombreuses exigences municipales, la lourdeur bureaucratique qui s'y rattache et les délais administratifs augmentent également les coûts de construction, puis, accessoirement, ceux des loyers. Au Québec, en particulier, différents aspects de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme légitiment le syndrome du « pas dans ma cour » évoqué par la SCHL. Cette réalité témoigne malheureusement d'une volonté de favoriser un intérêt particulier au détriment de l'intérêt collectif. Je pourrai vous donner un exemple concret si vous le souhaitez.
    Les coûts importants du logement doivent, à mon sens, être relativisés en fonction des coûts de subsistance totaux. Je fais ici précisément référence aux coûts liés à l'usage de l'automobile. En plus de représenter 22 % de tous les gaz à effet de serre au Québec, l'usage et l'entretien d'une voiture personnelle entraînent des coûts importants pour les ménages canadiens. Selon CAA Québec, c'est l'équivalent de 833 $ par mois. Si les milieux urbains densifiaient davantage les territoires limitrophes aux axes de transport en commun, l'automobile pourrait à terme devenir un luxe plutôt qu'une nécessité. L'arrivée du train léger à Ottawa est exemplaire à cet égard.
    La pression pour construire plus de logements se fait sentir partout dans les pays industrialisés. Cette situation entraîne une rareté des matériaux de construction et conséquemment une pression inflationniste sur leur prix, puis un allongement des délais de livraison. Non seulement on s'arrache les matériaux, mais on s'arrache également la main-d'œuvre qualifiée. En lien avec cette pénurie, la multiplication des travaux d'infrastructures publiques occasionne non seulement une flambée des coûts de construction, mais aussi un ralentissement considérable de la capacité de l'industrie de la construction à livrer des unités habitables à court terme. Or, certains de ces travaux sont essentiels, par exemple, les travaux liés à des réseaux structurants de transport en commun, alors que d'autres, comme certains travaux autoroutiers, sont contestables à l'heure de la 26e Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, ou COP26.
    Soyons clairs, la construction de logements est tributaire d'un écosystème de contraintes municipales, de développement des systèmes de transport et de la dure réalité économique. Brigil, comme bien d'autres promoteurs immobiliers, souhaite faire partie de la solution.
    C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci.
    Merci, monsieur Desjardins.

[Traduction]

    Excellente déclaration liminaire. Merci pour toutes les maisons que vous construisez.
    Nous passons maintenant à David Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives. Vous avez cinq minutes.
    Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité à m'exprimer sur cette question urgente qu'est l'inflation. Bien qu'il y ait eu des pressions inflationnistes évidentes dès la fin de 2021, la situation s'est beaucoup aggravée à cause l'invasion russe en Ukraine. Mais il reste que l'inflation correspond à une moyenne des prix individuels, et il est possible d'en faire un examen plus détaillé, examen qui pourrait déboucher sur des solutions.
     En examinant les données, nous constatons que quatre principaux facteurs poussent à la hausse l'indice des prix à la consommation. Je vais parler de chacun d'eux avant de passer aux mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour atténuer ces pressions.
    Les quatre principaux facteurs qui ont beaucoup progressé au cours de l'année et qui représentent également une proportion relativement importante du panier de l'indice des prix à la consommation sont le coût de remplacement par les propriétaires — soit le coût d'achat d'une nouvelle maison ou d'une maison sur le marché de la revente —, l'achat de voitures et de camions, l'essence et le mazout domestique, et les aliments, en particulier les viandes achetées à l'épicerie.
    Prenons le premier élément. La hausse du prix des maisons a été phénoménale depuis le début de la pandémie à cause de plusieurs facteurs, notamment des taux d'intérêt qui n'ont jamais été plus bas. Récemment, ces taux ont suscité une surabondance de demande en provenance des investisseurs, qui mobilisent désormais le quart de tous les nouveaux prêts hypothécaires sur les grands marchés.
    Il vaut la peine de souligner que le prix vertigineux des maisons n'est pas attribuable à un manque de nouvelles maisons. En fait, nous avons construit plus de maisons ces quatre dernières années qu'il ne s'est constitué de nouvelles familles. Et comme aucune règle ne limite la propriété à une maison par famille et que les investisseurs achètent le quart de toutes les maisons, l'offre ne sera jamais suffisante, car les investisseurs achètent une deuxième, une troisième ou une quatrième maison. Le gouvernement fédéral n'est pas à l'origine du problème, mais, parmi les quatre facteurs que j'ai énumérés, le secteur du logement est sans doute celui sur lequel il peut avoir le plus d'impact.
     Les récentes mesures fédérales visant à rendre le logement plus abordable ont souvent mis l'accent sur de nouveaux moyens d'emprunter davantage. Le programme de prêts hypothécaires avec participation de la SCHL ou encore les allégements fiscaux pour les acheteurs d'une première maison ne font que pousser les prix à la hausse. À ce stade, il faudrait s'intéresser aux investisseurs, qu'ils soient étrangers ou canadiens, dans le but de changer les attentes à l'égard du marché. Le problème ne concerne pas les fondamentaux. C'est un problème de psychologie du marché.
    Le BSIF et la SCHL disposent de nombreux outils pour calmer la demande des investisseurs et, par conséquent, freiner la hausse des prix. Exiger des mises de fonds toujours plus élevées pour les logements achetés comme placement serait une bonne première étape. Ce serait un signal fort que de faire passer la mise de fonds de 20 à 30 % pour la première maison acquise comme placement et de majorer ce pourcentage de 10 points pour chaque maison supplémentaire achetée pour la même raison. La SCHL devrait également limiter les emprunts qui servent à assurer la mise de fonds, par exemple en utilisant des marges de crédit garanties par la valeur propre des propriétés existantes. Une plus grande transparence dans les offres et les inspections peut certainement être utile, mais l'incidence sur les prix sera probablement limitée.
    Le deuxième grand facteur d'inflation est le prix de l'essence et du mazout domestique. La guerre en Ukraine a des répercussions immédiates sur ces produits. Le gouvernement fédéral ne contrôle évidemment pas les cours internationaux du pétrole et il n'a rien fait pour provoquer cette hausse. La cause, c'est l'invasion de l'Ukraine par les Russes. Il y a des mesures à court, à moyen et à long terme qui pourraient être utiles.
     À court terme, la flambée des prix du pétrole entraînera des profits records dans le secteur pétrolier et gazier au Canada; toutefois, un impôt sur les profits extraordinaires des producteurs de pétrole et de gaz dont les recettes financeraient un transfert destiné aux ménages à faible revenu pourrait compenser l'effet de la hausse des prix de l'essence à court terme. À moyen terme, nous devrions accélérer l'abandon des véhicules personnels à essence. Malheureusement, ce n'est là qu'une mesure à moyen terme, car il y a de longues listes d'attente pour les véhicules électriques, et les principaux métaux de batterie comme le nickel et le palladium viennent de Russie. À long terme, nous devons décarboner notre économie si nous voulons que la fluctuation des prix cesse d'avoir une incidence sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement dans les transports. Bien sûr, la lutte contre les changements climatiques exige la décarbonisation, mais celle‑ci nous rendra aussi moins dépendants de régimes despotiques aux quatre coins du monde.
    Il y a eu de fortes augmentations de prix dans une troisième catégorie, celle des voitures et des camions. La hausse est liée à des problèmes de chaîne d'approvisionnement et à de mauvaises décisions d'achat des fabricants en début de pandémie, notamment l'annulation des commandes de microprocesseurs. C'est là un problème international qui n'est pas propre au Canada. À l'automne, la production a repris, mais les perturbations aux frontières et le fait que certains intrants clés viennent de Russie menacent de prolonger la hausse des prix de ces produits.
    La dernière catégorie est celle des aliments, et notamment de la viande, dont les prix élevés contribuent à l'inflation. Cela est en partie attribuable à la sécheresse de l'été dernier dans les Prairies. Toutefois, il y a aussi une forte concentration du marché, particulièrement dans le secteur du bœuf, puisque seulement trois usines au Canada transforment 90 % du bœuf canadien. En fait, l'une des entreprises qui exploitent ces usines attribue expressément au prix élevé du bœuf ses profits records de 2021. Non seulement les entreprises refilent le prix aux consommateurs, mais elles ajoutent au passage une marge supplémentaire pour gonfler leurs propres profits.
     Malheureusement, la guerre en Ukraine aura probablement d'autres répercussions à cause de la hausse des coûts du blé et des engrais; toutefois, ces répercussions prendront probablement plus de temps à se concrétiser.

  (1545)  

     Je dirai pour conclure que plusieurs des principaux facteurs qui poussent les prix à la hausse sont internationaux et n'ont rien à voir avec la politique gouvernementale. L'augmentation constante du prix des maisons est un problème propre au Canada, et le gouvernement fédéral pourrait la freiner en écartant les investisseurs du marché.
    Bien que les cours du pétrole soient internationaux, notre dépendance à l'égard de l'essence pour alimenter nos véhicules ne l'est pas. C'est une raison de plus pour passer à un avenir carboneutre au Canada.
    Merci beaucoup. J'ai hâte de répondre à vos questions.

  (1550)  

    Merci, monsieur Macdonald.
    Nous allons maintenant passer à Edge Reality Analytics Inc. et à Ben Rabidoux.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Merci de l'invitation à m'exprimer dans le cadre de votre étude particulièrement opportune sur l'inflation au Canada.
    J'ai fondé North Cove Advisors en 2013, et j'observe depuis les tendances en matière de logement et de crédit à la consommation au Canada pour des investisseurs institutionnels de partout dans le monde. Plus récemment, j'ai fondé Edge Realty Analytics, qui travaille avec des professionnels de l'immobilier. Mon principal domaine de compétence est celui du logement, et c'est le sujet que je veux aborder aujourd'hui.
     En termes simples, le secteur du logement au Canada traverse une crise. Nous savons tous que l'abordabilité se détériore, mais les dernières données aident à mettre l'ampleur du problème en perspective.
    Le prix moyen d'une maison au Canada en février, selon l'indice des prix des propriétés MLS, était 29 % plus élevé qu'il y a seulement un an, ce qui correspond à une hausse annuelle de près de 200 000 $ du prix moyen d'une maison au pays.
    Le problème s'aggrave. Depuis 2000, il n'y a eu que neuf mois pendant lesquels les prix ont augmenté de plus de 2,5 % en un seul mois à l'échelle nationale. Sept de ces neuf mois étaient l'année dernière, dont trois mois de hausse record parmi les quatre derniers mois seulement. Février a établi un record avec une augmentation des prix de 3,5 %, ou l'équivalent de 29 000 $ en un seul mois.
    Comment en sommes-nous arrivés là? De telles hausses des prix indiquent clairement que nous avons un important déséquilibre entre l'offre et la demande. Ce qui nous a conduits à une telle situation et les solutions possibles à l'avenir font l'objet de nombreux débats. J'aimerais aborder quelques-unes des dynamiques sous-jacentes qui nous ont menés là selon moi.
    Tout d'abord, l'offre insuffisante de maisons unifamiliales a causé une crise aiguë pendant la pandémie. Le Canada a construit un nombre insuffisant de maisons unifamiliales d'un bout à l'autre du pays, mais plus particulièrement dans les grandes régions métropolitaines. Des années 1970 aux années 2000, le Canada a connu une croissance démographique moyenne de 3,1 millions par décennie, et on a construit environ 1,4 million de nouvelles maisons unifamiliales chaque décennie. Bref, une croissance démographique de 3,1 millions et la construction de 1,4 million de maisons unifamiliales. Or, de 2011 à 2020, la croissance démographique a atteint presque 4 millions, mais c'est tout juste si on a construit 1,1 million de nouveaux logements. En somme, une accélération massive de la croissance de la population et un ralentissement marqué du nombre de nouvelles maisons unifamiliales construites.
    Lorsque la pandémie de COVID a frappé, il y a eu un changement notable et compréhensible dans les préférences des consommateurs, qui se sont tournés vers des endroits moins densément peuplés, c'est‑à‑dire précisément vers le genre de logements que nous n'avons pas construits en nombre suffisant. Par conséquent, le nombre de maisons unifamiliales actuellement mises en vente dans les grandes régions métropolitaines se situe environ à 40 % sous les moyennes observées de 2010 à 2020. Voilà le premier problème.
    Ajoutons qu'une croissance démographique robuste nécessite l'adhésion des municipalités. L'un de nos « superpouvoirs » en tant que pays est notre capacité et notre volonté d'attirer les esprits les plus brillants de la planète. Le Canada a constamment profité d'une croissance démographique qui figure parmi les plus importantes au sein du G20. Nous devrions tous reconnaître que c'est nécessaire pour maintenir la croissance économique à long terme, mais aussi reconnaître que des compromis s'imposent, a fortiori lorsque le marché du logement est sous tension.
    Le problème ici, c'est que la politique d'immigration est établie au fédéral, mais la capacité, ou parfois la volonté, de fournir les logements nécessaires pour soutenir cette croissance se trouve chez les municipalités. Ce que nous avons vu au cours des dernières années, c'est un mouvement concerté et malavisé attribuable au syndrome « pas dans ma cour », qui s'est révélé être un obstacle majeur à une nouvelle augmentation de l'offre. Ces voix ont une influence disproportionnée à l'échelle municipale. Il faut s'attaquer à ce problème, et j'ai trouvé encourageant de voir, pendant la dernière campagne électorale, plusieurs solutions proposées par les partis pour encourager fortement les municipalités à éliminer des formalités administratives inutiles et à accélérer l'approbation des projets mûrement réfléchis qui viendraient accroître l'offre sur le marché, qui en a grandement besoin.
    La crise du logement qui sévit remonte en partie à 2019. À l'époque, la croissance démographique au Canada a presque atteint le chiffre de 600 000 personnes en une seule année, ce qui était partiellement attribuable à une augmentation record de 200 000 résidents non permanents supplémentaires, par exemple des étudiants étrangers.
     Je ne pense pas que nous ayons la capacité nécessaire au pays, même avec l'adhésion des municipalités, pour offrir assez de logements face au rythme de la croissance démographique. Permettre une telle croissance démographique sans tenir compte des contraintes du monde réel est un échec sur le plan politique qu'il ne faut pas répéter. Nous avons besoin d'une meilleure coordination à Ottawa pour veiller à ce que la croissance démographique combinée en recourant à la migration internationale et aux programmes de résidence non permanente ne dépasse pas la capacité de l'industrie de la construction à suivre le rythme de cette croissance.
    Lorsque l'offre pour un bien est perçue comme étant insuffisante, les spéculateurs sont naturellement attirés. Il y a donc deux aspects: la pénurie et la spéculation sont les deux faces d'une même pièce. Et c'est particulièrement vrai lorsque les taux d'intérêt sont faibles et que les gens sont obligés de faire des investissements plus risqués pour obtenir un rendement.

  (1555)  

    Même en tenant compte d'une très forte croissance démographique, les ventes de maison en fonction de la population demeurent supérieures d'environ 25 % aux normes à long terme. Le montant des ventes de maisons au Canada a atteint 460 milliards de dollars au cours de la dernière année, soit plus du double des niveaux enregistrés avant la COVID.
    De toute évidence, nous sommes aux prises avec une demande excessive qui ne peut pas s'expliquer uniquement par les données démographiques. Avec l'aide des données du registre foncier, j'estime qu'environ la moitié de la hausse des ventes de maison depuis 2015 est attribuable à une part grandissante de personnes qui possèdent plusieurs propriétés. Les investisseurs et les spéculateurs stimulent maintenant disproportionnellement la demande. Et comme ces investisseurs...
    Pouvez-vous songer à conclure, s'il vous plaît?
    Certainement. Il n'y a pas de solution miracle, mais un ensemble réfléchi de politiques peut commencer à faire bouger les choses.
     Je vais m'arrêter là.
    Merci.
    Merci, monsieur Rabidoux. Il y aura beaucoup de temps pour répondre aux questions des députés lorsque nous en arriverons là.
    Nous allons maintenant entendre Mme Sylvie De Bellefeuille et M. Alexandre Plourde d'Option consommateurs. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je m'appelle Alexandre Plourde. Je suis avocat et analyste chez Option consommateurs.
    Je suis accompagné de ma collègue Sylvie De Bellefeuille, avocate et conseillère budgétaire.
    Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos observations. Option consommateurs est une association qui a pour mission d'aider les consommateurs et de défendre leurs droits. Dans nos activités, nous sommes notamment en contact avec des consommateurs qui éprouvent des difficultés financières ou qui ont des problèmes d'endettement.
    En conséquence, il va sans dire que la crise inflationniste que connaît actuellement le Canada nous préoccupe grandement. Qu'on parle d'habitation, d'énergie ou d'alimentation, l'inflation touche des biens et des services de base dont les consommateurs ne peuvent pas se passer. Pour vivre, un consommateur doit payer son loyer, consommer de l'électricité et faire son épicerie. Ces dépenses ne sont pas un luxe, ce sont des besoins essentiels que les consommateurs ne peuvent pas omettre ou reporter.
    Dans ce contexte, l'inflation est particulièrement problématique pour les consommateurs à faible revenu, qui ont bien moins de marge de manœuvre budgétaire pour absorber une diminution de leur pouvoir d'achat.
    En raison de la hausse importante des prix, ces consommateurs risquent de se trouver devant des choix budgétaires difficiles. Par exemple, pour la plupart des ménages à faible revenu, l'alimentation est l'une des seules dépenses compressibles. Cela fait que les consommateurs n'ont pas d'autre choix que de se priver d'une alimentation adéquate pour parvenir à payer d'autres postes de dépense. On voit d'ailleurs de plus en plus de ménages avoir recours à des banques alimentaires pour subvenir à leurs besoins, incluant de plus en plus de travailleurs.
    Bien entendu, nous sommes pleinement conscients que l'inflation est un problème économique complexe qui ne se résorbera pas d'un coup de baguette magique, comme dans un conte de fées. Malgré tous les efforts des gouvernements pour juguler la hausse des prix, nous envisageons que les consommateurs devront composer avec la diminution de leur pouvoir d'achat pendant des années. Toutefois, nous proposons aujourd'hui quatre mesures qui pourraient, selon nous, atténuer les effets de l'inflation sur les consommateurs et les aider à y faire face.
    La première mesure que nous proposons est évidemment que le gouvernement soutienne davantage les consommateurs les plus vulnérables. Puisque les personnes à faible revenu risquent d'être les plus touchées par l'inflation, nous proposons de bonifier substantiellement plusieurs prestations gouvernementales, notamment le crédit pour la TPS-TVH, l'Allocation canadienne pour enfants et le Supplément de revenu garanti. Selon nous, la bonification de ces programmes contribuerait à atténuer le choc inflationniste pour les consommateurs qui peinent le plus à joindre les deux bouts.
    La deuxième mesure que nous proposons est de s'assurer que les marchés sont concurrentiels. Plus que jamais, il est important que la concurrence entre les entreprises fasse son œuvre pour que les Canadiens puissent profiter du meilleur prix.
    Malheureusement, un secteur particulièrement important pour les consommateurs pose problème à cet égard, soit celui des télécommunications. Encore aujourd'hui, le Canada est l'un des pays du monde où le prix des services de télécommunications est le plus élevé. Selon nous, cette situation est attribuable au manque de compétition entre les fournisseurs de services de télécommunication.
    Pour favoriser une plus grande concurrence dans ce marché et pousser les prix à la baisse, nous proposons que le gouvernement contraigne les grandes entreprises de télécommunications à partager leurs infrastructures de réseau Internet et mobile avec de plus petits fournisseurs, et ce, à des tarifs peu élevés.
    La troisième mesure que nous proposons est de légiférer pour offrir une plus grande transparence des prix aux consommateurs. L'inflation a amené certains commerçants à recourir à la « réduflation », une pratique qui consiste à réduire subtilement la quantité d'un produit tout en conservant le même prix, de manière à camoufler une augmentation du prix.
    Dans un contexte inflationniste, nous considérons que ces pratiques doivent être mieux encadrées, afin de permettre aux consommateurs d'avoir l'information nécessaire pour adapter leurs comportements d'achat aux augmentations de prix. Bien que la réglementation canadienne impose aux fabricants d'inscrire les quantités sur leurs produits, nous croyons que la loi devrait aller plus loin et faire en sorte que les consommateurs soient clairement avisés lorsqu'un fabricant a réduit la quantité de son produit.
    La quatrième et dernière mesure que nous proposons est de s'assurer que les biens de consommation qu'achètent les Canadiens ont une durée de vie adéquate. Compte tenu de la hausse importante du prix des électroménagers et d'autres appareils, la loi canadienne devrait avoir pour effet de faciliter la réparabilité de ces biens de consommation à un coût abordable. Pour ce faire, nous proposons notamment d'interdire la pratique de l'obsolescence programmée, d'incorporer dans la loi une exigence de disponibilité des pièces de rechange et des services de réparation et de modifier la loi canadienne sur le droit d'auteur pour lever les entraves de propriété intellectuelle à la réparation des appareils.
    Outre l'intérêt environnemental évident à diminuer le cycle de remplacement des biens de consommation, l'allongement de la durée de vie des biens et des appareils permettrait aux consommateurs d'éviter d'avoir à en acheter de nouveaux et les aiderait ainsi à faire face à la hausse des prix.

  (1600)  

     Je vous remercie de nous avoir écoutés. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Plourde.

[Traduction]

     Mesdames et messieurs les témoins et les membres du Comité, compte tenu de l'heure, nous aurons environ 55 minutes pour les questions avant de passer à la réunion à huis clos du sous-comité.
    Nous entamons la première série de questions. Pendant ce tour, chaque parti aura un maximum de six minutes pour poser ses questions.
    Nous commençons par les conservateurs. M. Fast sera le premier.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de nous avoir fait part de leurs réflexions sur l'inflation au Canada.
    Mes questions s'adressent à M. Punwasi.
    Votre témoignage m'a intrigué.
    Vous savez sans doute que le gouverneur de la Banque du Canada a comparu il n'y a pas si longtemps. J'ai essayé de lui faire admettre que sa politique d'assouplissement quantitatif a pu avoir une influence sur l'inflation que nous observons aujourd'hui dans le secteur du logement. Il a tout fait pour ne pas l'avouer. Je crois qu'il a nié toute corrélation directe entre assouplissement et inflation. Il m'a semblé jouer sur les mots, mais il a fini par admettre qu'il pourrait y avoir un lien entre l'assouplissement quantitatif et l'inflation dans le secteur du logement.
    Vous semblez penser que l'inflation dans le secteur du logement est directement liée à l'assouplissement quantitatif et aux faibles taux d'intérêt actuels. Est‑ce exact?
    Oui. Je suis tout à fait d'accord.
     L'une des principales caractéristiques de l'assouplissement quantitatif, c'est que la Banque achète des obligations de l'État, ce qui finit par avoir une incidence sur les titres de dette de durée semblable... Le programme d'assouplissement quantitatif a amené la Banque à acheter un grand nombre de ces obligations à cinq ans intentionnellement pour réduire le coût des prêts hypothécaires à taux fixe de cinq ans. Cela n'a pas d'autre but que d'augmenter la demande de prêts hypothécaires, ce que la Banque du Canada a elle-même dit au départ.
    À un autre moment, la Banque du Canada a également publié une étude qui concluait que l'assouplissement quantitatif se traduisait par une richesse plus grande et une meilleure égalité et gonflait le prix des actifs. Voilà qui contredit plus ou moins ce que le gouverneur a dit.
    Pouvez-vous nous parler un peu de la relation entre les exigences de la politique budgétaire du gouvernement et celles de la banque centrale en matière d'assouplissement quantitatif?
    Sujet délicat, n'est‑ce pas?
    Reprenons ce que la Banque du Canada a écrit dans une de ses études: « Toutefois, à cause des niveaux croissants de dette publique, certaines banques centrales subissent de plus en plus de pressions politiques et de velléités d’ingérence de la part des gouvernements. »
    Essentiellement, il y a deux formes de dominance monétaire que la Banque du Canada explique dans son étude. Et les pressions exercées par les gouvernements à l'échelle mondiale ont poussé les banques à s'écarter de leur propre mandat. Lorsque la Banque a le contrôle, on parle de « dominance monétaire », et elle contrôle le taux d'inflation. C'est un peu son rôle, son but. Lorsque les gouvernements influencent une banque centrale, ils créent ce qu'on appelle une « dominance budgétaire ». Ce qui pousse la banque centrale à abandonner son propre mandat relatif à l'inflation comme principal enjeu et à soutenir les dépenses de l'État.

  (1605)  

    Permettez-moi de vous interrompre rapidement, car c'est le cœur de ma question.
    Êtes-vous d'avis que la politique budgétaire ou la dominance budgétaire du gouvernement a nui aux décisions que la Banque aurait dû prendre?
    Certainement.
    La banque centrale elle-même fait cette déclaration dans sa dernière étude, qui s'intitule littéralement The Central Bank Strikes Back! Elle propose qu'à l'avenir, si une crise comme celle‑ci survient, un cadre soit mis en place pour que le gouvernement ne puisse plus menacer la crédibilité d'une banque centrale en la poussant à soutenir ses marchés du crédit. Il faut plutôt qu'il y ait une sorte de compromis entre les deux. Le gouvernement devra mettre en œuvre une sorte de cadre qui l'astreindra à la prudence budgétaire et précisera que les emprunts doivent correspondre de façon stricte à ses besoins. Dans ces conditions, la banque centrale l'appuiera.
     À titre de précision, lorsque vous parlez de « dominance budgétaire », vous faites référence aux besoins du gouvernement en matière d'emprunts et de dépenses auxquels la banque centrale répond. Est‑ce exact?
    Oui. Le crédit est aussi assujetti à la loi de l'offre et de la demande. Si la demande de crédit, qui comprend les emprunts du gouvernement, dépasse l'offre de liquidités, les taux d'intérêt augmentent. Pour maintenir la stabilité des marchés du crédit, la banque centrale injecte des liquidités sur le marché afin d'empêcher la hausse des taux. Plus longtemps le gouvernement agit de la sorte, plus les distorsions sont marquées, et cela devient [...] sur le marché, où il n'est plus tenu compte du mandat initial.
    Comme vous le savez, la banque centrale est censée être indépendante du gouvernement. Pourtant, vous laissez entendre que la politique budgétaire que le gouvernement a adoptée avec ses plans de dépenses nécessitant des emprunts a en fait créé une dominance budgétaire qui a entraîné...
    Monsieur le président.
    Oui, monsieur Chambers.
    Je suis désolé, monsieur le président et monsieur le greffier, mais ceux qui sont en ligne ont perdu le son pendant une trentaine de secondes. Vous voudrez peut-être redonner la parole à M. Fast ou ajouter 30 secondes à son temps de parole.
    Nous ne pouvions rien entendre, selon moi. On aurait dit que tous ceux qui sont en ligne étaient touchés. Je tenais à soulever le problème. Merci.
    Je suis d'accord.
    D'accord.
    Monsieur Punswasi, ce qui me préoccupe, c'est l'indépendance de la banque centrale. Elle doit prendre ses décisions dans l'intérêt des Canadiens, y compris ceux qui achètent des maisons et qui contractent des prêts hypothécaires.
    Vous avez laissé entendre, il me semble, que les décisions du gouvernement fédéral en matière d'emprunts et de dépenses se sont traduites par une dominance budgétaire, ce qui, d'une certaine façon, a nui aux décisions de la banque centrale. Ai‑je raison?
    Oui, certainement.
    Excusez-moi, a‑t‑on raté cette explication de l'offre et de la demande en matière de crédit?
     L'hon. Ed Fast : S'il vous plaît...
    M. Stephen Punwasi: Essentiellement, plus la demande de crédit est forte, plus les taux d'intérêt augmentent. La banque centrale doit injecter des liquidités sur le marché pour stabiliser les taux afin que le crédit reste à un taux qui lui paraît convenir. Elle doit arrêter de se soucier de l'inflation et simplement stabiliser le marché. Plus le gouvernement doit emprunter et plus il le fait à des taux d'intérêt qui ne sont pas ceux du marché, plus il y a des distorsions, et ces conditions s'étendent à l'ensemble du marché.
    Merci, monsieur Punwasi.
    Merci, monsieur Fast.
    Nous passons maintenant aux libéraux. Madame Dzerowicz, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leurs exposés.
    Je m'adresse d'abord à M. Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives. S'il me reste du temps, je poserai une question à la fin à M. Desjardins, de Brigil.
    Monsieur Macdonald, vous avez beaucoup parlé d'inflation. Vous avez aussi parlé de logement.
    Tous les rapports que je lis disent que l'inflation a augmenté dans le monde entier. Les principaux facteurs de l'inflation à l'échelle mondiale, y compris au Canada, sont les cours mondiaux du pétrole, les problèmes de la chaîne d'approvisionnement liés à la pandémie et la façon dont le virus a modifié les habitudes de dépenses, entre autres choses. Êtes-vous d'accord?

  (1610)  

    Oui, ce sont trois des quatre facteurs que j'ai soulignés.
    Je comprends.
    Vous avez également dit que le conflit en Ukraine accentuera l'inflation. Sauf erreur, l'OCDE a estimé que le taux d'inflation pourrait augmenter de 2,5 % au cours de la prochaine année. Selon vous, est‑ce possible?
    L'impact a certainement été assez immédiat sur les prix du pétrole et de l'essence. Il pourrait aussi y avoir une incidence sur les prix des aliments, bien que ce soit peut-être à plus long terme, sur les marchés du blé et des engrais en particulier. Les répercussions ne sont pas tout à fait claires.
    À propos de l'Ukraine et de l'impact de l'inflation là‑bas, pensez-vous que le Canada peut faire quelque chose à ce sujet?
    Le gouvernement fédéral ne contrôle pas le prix du pétrole ni celui de l'essence. Ils sont régis par les marchés internationaux.
    Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas contrôler, dans une certaine mesure, notre propre chaîne d'approvisionnement et notre dépendance à l'essence dans le transport des personnes. Cela ne peut pas changer du jour au lendemain. Cette évolution relève d'une stratégie à long terme visant la carboneutralité. Nous ne pouvons pas agir sur les prix, mais nous pouvons changer la quantité que nous utilisons.
     D'accord. Je comprends.
    J'ai été heureuse de constater qu'un certain nombre de prestations gouvernementales sont indexées à l'inflation. Ce qui me vient à l'esprit, ce sont le RPC, la SV, le SRG, le crédit pour TPS et l'ACE. Diriez-vous qu'il s'agit d'une mesure positive qui aidera certaines des personnes les plus vulnérables à surmonter au moins en partie les perturbations qui sont déjà là et celles qui viendront?
    Oui. Tous les grands programmes fédéraux de transfert de revenus sont indexés. Ce n'est pas nécessairement vrai à l'échelle provinciale.
    Dans un seul cas, celui des réserves, les prestations fédérales ne sont pas nécessairement indexées. En effet, dans les réserves, l'aide sociale correspond à ce que les provinces versent, et il arrive que ces prestations ne soient pas indexées. Si elles ne le sont pas, le gouvernement fédéral n'indexe pas sa propre aide sociale dans les réserves.
    Mais pour ce qui est des principaux transferts, il est rassurant de savoir qu'ils sont tous déjà indexés à l'inflation.
    Merci de le dire. Nous nous inquiétons tous des plus vulnérables. Nous sommes tous préoccupés par les effets qu'ils subissent. C'était déjà difficile pendant la pandémie. L'indexation est un avantage, un élément positif, et il est important de le souligner.
    Il y a toujours des lacunes dans nos mesures de soutien. Ce sont généralement des hommes célibataires sans emploi qui sont laissés pour compte. Avez-vous des mesures à recommander pour aider ce groupe particulier qui n'a peut-être pas accès aux autres prestations dont j'ai parlé, pour l'aider à traverser la période d'inflation qui est attendue?
    Au niveau fédéral, nous avons un système de revenu de base pour les aînés, soit la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti. Nous avons un système pour les familles avec enfants, l'Allocation canadienne pour enfants. Mais nous n'avons vraiment aucun soutien en bonne et due forme pour les adultes qui ne se trouvent dans aucune de ces deux catégories. C'est l'une des grandes lacunes de la sécurité du revenu au Canada. Comme certaines de ces personnes sont handicapées, un programme canadien d'invalidité serait un élément important pour subvenir aux besoins de ce groupe.
    Il y a un autre élément important: il faudrait vraiment modifier les modalités de l'Allocation canadienne pour les travailleurs. Il s'agit d'un soutien pour les ménages à revenu relativement faible, mais il est assez mineur, et on n'y a droit que si on a un revenu d'emploi. Celui qui n'en a pas n'a pas droit à l'Allocation canadienne pour les travailleurs. Si certains ont un faible revenu, c'est parce qu'ils n'ont pas de revenu d'emploi. Si on modifiait les modalités de l'Allocation canadienne pour les travailleurs de façon qu'elle s'applique aux personnes qui n'ont pas de revenu ou qui ont un revenu particulièrement faible, on comblerait vraiment cette lacune dans le système de sécurité du revenu du Canada.
    Merci, monsieur Macdonald. Je vous dirai que c'est l'une des recommandations que nous avons formulées dans notre mémoire prébudgétaire.
    Enfin, il a été question de logement. Vous avez dit que les investisseurs achètent la moitié de toutes les nouvelles maisons. Ce phénomène est‑il observé dans l'ensemble du Canada? J'ai beaucoup aimé votre recommandation voulant que la mise de fonds soit majorée de 10 %.
    Confirmez-vous que la moitié des maisons neuves est achetée par des investisseurs dans l'ensemble du Canada? Avez-vous d'autres solutions à recommander pour régler ce problème?

  (1615)  

    Il s'agit en fait d'une estimation de M. Rabidoux. Je me suis reporté à l'étude de la Banque du Canada qui a été publiée il y a trois ou quatre mois et qui portait sur le pourcentage des hypothèques de la SCHL consenties pour des logements acquis comme placement. C'est de l'ordre de 20 à 25 % sur les grands marchés au Canada.
    C'est l'un des points sur lesquels le gouvernement peut agir de façon très dynamique pour calmer la hausse des prix dans le secteur du logement. Il peut notamment faire passer la mise de fonds initiale de 20 à 30 % pour un premier logement acquis comme placement. Et le pourcentage est ensuite majoré de 10 points pour chaque logement supplémentaire acheté aux mêmes fins. Ce serait un message très clair pour les investisseurs: les marges bénéficiaires devront être beaucoup plus élevées et il vous faudra beaucoup plus d'argent pour pénétrer ce marché. Ce serait, je pense, une façon plus productive, plus prévisible, de limiter la hausse des prix plutôt que d'offrir aux gens d'autres possibilités d'endettement, comme...
    Merci, monsieur Macdonald.
    Merci, madame Dzerowicz. Votre temps de parole est écoulé.
    Les députés et les témoins auront peut-être remarqué que nous éprouvons des difficultés techniques et des problèmes de connexion. Le Comité n'est pas le seul touché. La même chose arrive à d'autres comités sur la Colline du Parlement. Je suis certain que le personnel technique fait tout son possible pour veiller à ce que nous puissions poursuivre, mais si un incident survient, sachez que nous n'y pouvons rien pour l'instant.
    Nous passons maintenant au Bloc. Six minutes.
    Monsieur Ste‑Marie, vous avez la parole. Je vous en prie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur participation et de leurs présentations.
    Mes questions s'adressent aux représentants d'Option consommateurs, Mme De Bellefeuille et M. Plourde.
    Je vous remercie de tout le travail qu'Option consommateurs fait pour les gens au Québec. Vous faites une vraie différence.
    Je vais revenir brièvement sur les éléments que vous avez soulevés.
    En période d'inflation, on essaie de rendre l'économie plus résiliente, mais c'est un long processus. Pour soutenir à court terme les plus vulnérables, vous suggérez, plutôt que d'envoyer un chèque ou un crédit d'impôt à plus de 90 % de la population, que les mesures ciblent les plus démunis, notamment avec le crédit de TPS-TVH de façon permanente.
    Pouvez-vous nous parler un peu de ce programme? En quoi ce que vous proposez diffère-il de la situation actuelle? Concrètement, combien de personnes seraient touchées par ce que vous proposez?
    Merci.
    Bonjour.
    Je vous remercie d'avoir posé cette question.
    Option consommateurs propose des mesures qui permettront de soutenir véritablement les personnes plus vulnérables. Nous ne préconisons pas nécessairement des mesures qui vont aider tout le monde. C'est sûr que l'inflation affecte tous les consommateurs actuellement. Tout le monde est affecté par l'inflation, mais les personnes à faible revenu sont celles qui ont le moins de marge de manœuvre. Le choix qui se présente à une personne à faible revenu est de couper dans le nécessaire, tandis qu'une personne ayant des revenus un peu plus élevés, même si elle subit aussi les conséquences déplaisantes de l'inflation, pourra couper dans le luxe et des choses qui ne sont pas essentielles.
    Comme vous le mentionnez, nous proposons qu'on soutienne les personnes les plus vulnérables, notamment en bonifiant le crédit de TPS-TVH. Je n'ai pas de chiffres exacts sur la quantité de personnes que cela pourrait aider, mais nous favorisons les mesures les plus progressives possible, soit celles qui aideront les plus vulnérables en leur donnant plus d'argent.

  (1620)  

    Merci, c'est très intéressant.
    Un de mes collègues, M. Jean‑Denis Garon, le député de Mirabel, a discuté des mesures d'aide pour les plus vulnérables et a évoqué une certaine possibilité en ce qui concerne les crédits de taxes. Comme chacun le sait, ces crédits sont envoyés de façon trimestrielle. Souvent, les ménages avec de faibles revenus ont des problèmes de liquidités. M. Garon a suggéré qu'on envoie ce crédit chaque mois, si ce n'est pas trop compliqué. Au lieu d'attendre trois mois avant d'avoir le crédit, il y aurait un paiement chaque mois. Évidemment, ce serait le même montant au total, mais il arriverait sur une base plus fréquente.
    Une telle mesure ferait-elle une différence pour les gens que vous soutenez et conseillez?
    Effectivement, cela pourrait faciliter la gestion de leurs finances. Quand il y a des rentrées d'argent d'un coup, les gens doivent les gérer de façon ponctuelle. Or, on doit répondre à plusieurs besoins de base sur une plus courte période. On fait son épicerie toutes les semaines et on doit payer son loyer. Si ces personnes recevaient ce crédit chaque mois, cela leur faciliterait les choses.
    D'accord, merci beaucoup.
    J'ai bien aimé votre intervention concernant l'importance de rendre les marchés concurrentiels. Notre comité constate aujourd'hui que l'accès à une connexion Internet à tarif abordable et de qualité reste un défi. Ce n'est pas seulement vrai pour les villages du nord comme dans la Matawinie dans ma circonscription, mais également pour le Parlement d'un pays du G7, où cela semble être toujours problématique. Quoi qu'il en soit, nous retenons vos suggestions.
    J'aimerais que vous nous parliez de « réduflation », qui est un terme vraiment intéressant. Sans nommer de compagnie directement, avez-vous des exemples concrets, juste pour nous donner une idée de ce que représente la « réduflation »?
     Je vous remercie de la question.
    La « réduflation », que l'on appelle aussi le sous-dimensionnement, n'est pas un nouveau phénomène. Toutefois, il prend beaucoup d'ampleur dans le contexte inflationniste actuel. Cette technique peut être utilisée pour à peu près n'importe quel produit alimentaire, et même pour des produits non alimentaires. On a vu beaucoup d'exemples de ce phénomène dans les médias dernièrement concernant les boîtes de céréales, les briques de fromage et les contenants de jus, entre autres. Toutes sortes de tactiques peuvent être employées par les commerçants pour réduire la quantité d'un produit sans que le consommateur s'en rende compte lorsqu'il fait son épicerie.
    [Difficultés techniques]. Par exemple, on peut mettre un renflement en dessous d'une bouteille de jus pour donner l'impression qu'elle contient autant de jus qu'avant.
    L'inconfort que nous avons relativement à cette pratique, c'est qu'elle mise sur la sensibilité des consommateurs aux prix. Les commerçants peuvent réussir à augmenter leurs prix d'une manière un peu détournée qui manque d'éthique. Le problème, c'est qu'il n'est pas illégal en soi pour un commerçant de réduire la quantité de ses produits. La Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation et la Loi sur les poids et mesures obligent les commerçants à inscrire la quantité des produits sur les articles en vente, mais ne les obligent pas à mentionner aux consommateurs que la quantité du produit a été réduite.
    Ce que nous voudrions, particulièrement dans le contexte inflationniste actuel, c'est que des normes d'étiquetage forcent les commerçants à indiquer clairement aux consommateurs que la quantité du produit a diminué. Nous voudrions aussi que soit mise en œuvre, partout au Canada, une mesure concernant l'affichage des prix par unité de mesure. C'est une mesure qui permet aux consommateurs de comparer les produits et d'être mieux informés quant au prix qu'ils paient pour chaque produit.
    À notre avis, ce genre de mesure…
    Merci, monsieur Plourde.

[Traduction]

     Merci.
    Nous passons maintenant au NPD. M. Blaikie a la parole pour six minutes.
    Je vais commencer par remercier les témoins de leur présence.
    Mes questions s'adressent à M. Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives.
    Je reviens brièvement sur l'indexation des prestations en fonction de l'inflation. J'entends souvent des aînés d'Elmwood—Transcona exprimer leur indignation lorsqu'ils voient la hausse relativement modeste des prestations du Régime de pensions du Canada. S'ils la comparent à la progression du coût de la vie, ils constatent, à juste titre, un certain décalage.
    Pourriez-vous éclairer un peu le Comité? Pourquoi les Canadiens ont-ils souvent l'impression que leurs prestations, même si elles sont indexées à l'inflation, ne suivent pas le rythme de l'augmentation des coûts qu'ils doivent assumer dans leur budget mensuel?

  (1625)  

    Bien sûr. Le premier point, qui tient de l'évidence, c'est qu'il y a un délai entre le moment où l'inflation est observée et celui où les prestations augmentent.
    La Banque a fait une étude sur la perception de l'inflation par rapport aux chiffres publiés. Les consommateurs n'achètent pas tous les mêmes choses. Les achats des aînés diffèrent de ceux des familles avec enfants, et celles‑ci ne font par les mêmes achats que les consommateurs qui étudient.
    L'IPC s'applique à tous les Canadiens. Il ne tient pas compte d'un seul groupe en particulier. Il est donc certainement possible que pour les aînés, qui achètent peut-être davantage des produits d'épicerie, les prix semblent augmenter plus rapidement que le niveau général des dépenses.
    L'IPC est une moyenne de divers prix. Il ne correspond pas forcément à l'expérience de tout le monde. En fait, il ne correspond à l'expérience de personne parce que personne ne loue ou n'achète une maison et une voiture chaque année. C'est une moyenne. Chacun peut observer tout à fait autre chose, selon l'endroit où il habite.
    D'accord, merci.
    Vous avez dit tout à l'heure que certains transformateurs de bœuf, par exemple, avaient attribué leurs profits records à l'augmentation des prix du bœuf. Nous savons que l'argent supplémentaire n'est pas toujours réparti équitablement dans la chaîne d'approvisionnement.
    Pourriez-vous aider le Comité à comprendre un peu mieux les pressions inflationnistes qui jouent sur les prix des aliments. Qui gagne? Qui perd? Quelles mesures le gouvernement pourrait‑il prendre pour éviter que les consommateurs ne paient beaucoup trop cher pour accroître les profits d'un maillon de la chaîne d'approvisionnement alors que d'autres maillons et les consommateurs eux-mêmes écopent?
     Lorsque nous cherchons les causes de l'inflation, en dehors des chocs venus de l'extérieur, comme le prix du pétrole, nous pointons souvent du doigt les travailleurs et disons qu'ils demandent des salaires trop élevés. Mais il y a une autre possibilité, soit que les sociétés augmentent leurs profits tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Il se peut fort bien que le coût des biens ait augmenté et qu'elles refilent ce montant aux consommateurs en ajoutant une majoration de 2 ou de 5 % pour gonfler leurs propres profits. C'est une autre cause d'inflation.
    Il vaut la peine de s'intéresser à la concentration du marché dans des secteurs particuliers. J'ai parlé du bœuf simplement parce que ce secteur est très concentré et qu'on trouve au Canada fort peu d'installations qui transforment le bœuf. On dénombre trois grandes usines, dont deux appartiennent à Cargill, et Cargill, une grande société internationale, a déclaré des profits records en 2021. Elle a notamment évoqué les prix élevés du bœuf. Le phénomène n'est donc pas exclusivement canadien, mais cela montre simplement que la fluctuation des prix et le fait que les consommateurs acceptent généralement que les prix à l'épicerie soient plus élevés ne signifient pas que les entreprises ne majorent pas leur marge bénéficiaire au passage, dans la chaîne d'approvisionnement.
    Cela n'étonne pas les producteurs de bœuf. Ils sont bien au courant de la concentration du marché. Ce n'est pas une surprise pour les agriculteurs en général, qui n'ont pas vu augmenter le prix qui leur est versé pour leur production, même si le prix du pain augmente pour les consommateurs. Quelque part dans la chaîne, quelqu'un s'empare de cette valeur, et ce ne sont pas les agriculteurs. C'est souvent sur ce plan que les chaînes d'approvisionnement sont pressurées par deux ou trois chaînons différents — et le secteur de l'épicerie ne compte pas non plus un nombre très élevé de joueurs au Canada —, car on y observe une concentration des profits.
    Il vaut la peine d'en tenir compte lorsque nous constatons cette forte poussée inflationniste. Certains en profitent pour accroître leurs profits.
    Nous comptons souvent sur la concurrence pour nous protéger contre les prises de bénéfices injustes. Lorsqu'il n'y a pas assez de concurrence sur le marché, quelles autres solutions les Canadiens pourraient-ils envisager pour s'assurer qu'aucune entreprise ou qu'aucun chaînon particulier dans les chaînes d'approvisionnement ne réalise des profits excessifs?
    À court terme, il serait possible, entre autres choses, d'instaurer un impôt sur les profits excessifs. Cette possibilité est déjà à l'étude dans le secteur bancaire. Cela pourrait également être envisagé pour l'industrie pétrolière et gazière qui, j'en suis sûr, réalisera des profits records en raison des prix élevés du pétrole cette année. D'autres secteurs pourraient aussi être visés, comme celui des chaînes de magasins d'alimentation, parmi d'autres, de sorte que toute somme excédentaire qu'ils gagnent serve à financer un transfert aux ménages à faible revenu, comme certains l'ont déjà proposé ici même. Ce transfert pourrait prendre la forme d'une augmentation d'un paiement forfaitaire au titre du crédit pour TPS, par exemple.
    C'est peut-être une solution à court terme. Si nous examinons les problèmes de la transformation du bœuf en particulier, la construction d'un plus grand nombre d'abattoirs locaux, qui pourraient être financés par le gouvernement fédéral, est une autre façon d'accroître le nombre de protagonistes sur ce marché. Parfois, la concentration du marché ne disparaît pas spontanément. Souvent, les gouvernements doivent intervenir pour rendre les marchés équitables, ce qu'ils ne sont pas nécessairement. Ce peut-être parfois le cas, mais pas toujours. Il vaut donc la peine de continuer d'examiner la concentration sur le marché et la prise de bénéfices excessifs et de voir ce que les gouvernements peuvent faire à ce sujet, à part instaurer un impôt sur les profits excessifs.

  (1630)  

    Merci, monsieur Macdonald, et merci, monsieur Blaikie.
    Chers collègues, nous allons passer au deuxième tour. Compte tenu de l'heure, ce sera le dernier. Nous allons commencer par les conservateurs et M. Chambers aura cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bienvenue aux témoins. Merci à vous.
    Je souhaite la bienvenue à ceux d'entre vous qui sont ici pour la première fois. Il est bien d'entendre des voix diverses au Comité.
    Mes questions s'adressent à MM. Punwasi et Rabidoux.
    Monsieur Punwasi, je vais reprendre là où mon collègue a laissé, mais je tiens au préalable à vous féliciter, vous et votre équipe, du travail que fait Better Dwelling. Elle fournit d'excellents renseignements sous une forme très conviviale et facile à lire. C'est formidable et rafraîchissant de voir de l'information facilement assimilable pour les Canadiens.
    Si la Banque du Canada n'avait pas acheté d'obligations de l'État, que serait‑il advenu des taux d'intérêt?
    Ils auraient augmenté au même rythme que les emprunts consentis. Une grande partie du crédit disponible sur le marché aurait été absorbée, et tous les taux hypothécaires auraient augmenté, tout comme l'ensemble des taux débiteurs.
    Par ailleurs, la Banque du Canada aurait pu se concentrer sur son mandat, soit stabiliser le taux d'inflation, ce qui aurait complètement changé la donne. La Banque Scotia n'a pas dit autre chose l'automne dernier, au moment où il aurait fallu commencer à relever les taux. On a pourtant continué de soutenir les dépenses de l'État.
     D'accord, merci. C'est une précision utile. Cela simplifie les choses pour moi.
    Vous avez parlé d'inégalité. Qui est le plus touché par l'inflation?
    Ce sont habituellement des gens qui sont payés en argent liquide.
    Plus on est riche, moins on risque de voir sa richesse rognée par une inflation passagère, car on a de meilleurs moyens de placer son argent là où il sera protégé contre l'inflation. On possède une maison ou des placements qui réagissent à l'inflation.
    Ceux qui sont payés en liquide n'ont pas forcément droit à des hausses pour compenser l'augmentation du coût de la vie. Le coût de leurs emplettes a peut-être progressé de 10 %, mais le taux d'inflation officiel de Statistique Canada ne dépasse guère les 5 %. S'ils obtiennent une hausse de 5 % à cause de l'inflation, ils risquent de voir leur qualité de vie se dégrader. Ils sont aussi les plus susceptibles d'avoir dans leurs comptes bancaires de l'argent qui n'est pas placé.
    Exact. Les personnes vulnérables sur le plan économique sont les plus à risque, comme celles qui ont un revenu fixe et les aînés, etc.
    Vous avez parlé de ceux qui détiennent des actifs. Y a‑t‑il quelqu'un d'autre, d'autres entités qui profitent de l'inflation?
    Les emprunteurs. La question est de savoir si l'avantage tiré du montant emprunté l'emporte sur l'effet négatif de l'inflation.
    Si 70 % des coûts d'une personne augmentent, mais que 30 % de ses coûts sont liés au logement et que son hypothèque est déflatée parce qu'elle est à faible taux, elle en bénéficie plus ou moins, mais pas vraiment. Au bout du compte, elle en sort perdante.
    Qu'en est‑il du gouvernement fédéral? Bénéficie‑t‑il de l'inflation?
    Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il a une lourde dette, mais l'inflation elle-même est un impôt, parce que ceux qui détiennent les titres de dette finissent par payer la dette à l'émetteur, c'est‑à‑dire l'État. Si bien qu'une inflation plus élevée signifie que l'émetteur dilue la valeur de sa propre monnaie.

  (1635)  

    Merci.
    Monsieur Rabidoux, merci beaucoup de votre déclaration liminaire. J'ai trouvé très utile le document que vous avez remis à l'avance au Comité.
    Je sais que vous n'avez pas pu aller jusqu'au bout de votre exposé. Vous avez présenté un tableau qui illustre la relation entre l'investissement des entreprises et l'investissement résidentiel. En quoi cela vous préoccupe‑t‑il?
    La part de l'investissement résidentiel augmente considérablement tandis que l'investissement des entreprises est presque au plus bas. Qu'en pensez-vous?
    Pour utiliser une analogie, l'investissement résidentiel total comme part de tous les investissements dans l'ensemble de l'économie — les investissements des entreprises et de l'État — atteint environ 40 %.
    Pourquoi ce chiffre est‑il important? Que s'est‑il passé ces 20 dernières années dans les pays de l'OCDE? Seulement trois d'entre eux ont atteint ce niveau: l'Irlande, la Grèce et l'Espagne, au milieu des années 2000. Ces pays ont ensuite été frappés par une très grave crise du logement.
    Ce qui est préoccupant? Si on injecte plus d'argent dans les propriétés résidentielles et moins dans les éléments productifs de l'économie, la capacité de rembourser cette dette à long terme diminue, peut‑on soutenir. C'est une grave préoccupation, du point de vue qui est le mien. Les investissements résidentiels atteignent un niveau record tandis que les investissements des entreprises sont anémiques.
    Très rapidement, donnez-nous une réponse en deux secondes. Vous dites qu'il y a une crise. S'agit‑il d'une bulle immobilière?
    Oui.
    Merci, monsieur Rabidoux.
    Merci, monsieur Chambers.
    Nous passons maintenant aux libéraux. Monsieur Chatel, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie aussi tous les témoins.
    Monsieur Desjardins, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation au Comité. C'est inspirant de vous entendre parler de promotion immobilière intégrée à l'environnement. Nous allons y revenir, parce que j'ai trouvé très intéressant le lien que vous faites entre l'infrastructure verte et la promotion immobilière.
    Tout d'abord, au Comité, nous avons entendu plusieurs témoignages selon lesquels une question d'offre et de demande est au cœur du problème de l'inflation immobilière, tant au Canada qu'ailleurs. Nous l'avons entendu aujourd'hui également. Pour gérer l'offre, dans votre introduction, vous avez parlé de contraintes particulières, tant à l'échelle municipale que provinciale.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur ces contraintes?
     Je vous remercie beaucoup de votre question.
    Évidemment, il y a beaucoup de contraintes qui existent à l'heure actuelle, dans le domaine de l'immobilier, pour ce qui est de construire des logements très rapidement. Lorsqu'on soumet un projet à une municipalité, cela peut prendre plus de 12 mois pour recevoir un permis de construction. Or, dans un marché inflationniste comme celui dans lequel on vit en ce moment, un projet pourrait ne plus être viable 12 ou 18 mois après son dépôt. Il y a beaucoup de projets qui sont déposés, mais qui doivent ensuite être modifiés pour en réduire les coûts et repensés de fond en comble.
    Alors, l'accélération de l'émission des permis pourrait permettre de mieux gérer le risque lié à l'inflation dans la construction de logements. Aussi, une émission plus rapide des permis lorsqu'on est près des axes de transport structurant pourrait faciliter l'arrimage de tous les investissements que les différents ordres de gouvernement font dans le transport collectif. C'est donc vraiment une question de délai.
    Par ailleurs, la réglementation, qui est de plus en plus sévère en ce qui concerne les types de bâtiments que l'on doit construire, ajoute d'autres coûts à ceux qui sont associés à la simple inflation et à la qualité des bâtiments. Au Québec, le bâtiment résidentiel représente 4,2 % des émissions de gaz à effet de serre, tandis que l'automobile représente 22 % de celles-ci. Il faudrait aborder le problème d'une façon plus holistique, en tenant compte de la complexité de nos villes, et trouver des solutions collectives pour accélérer la construction.
    Merci beaucoup, c'est très intéressant.
    Monsieur Desjardins, quand vous avez mentionné le transport structurant, vous avez aussi parlé de l'importance de l'infrastructure verte et des transports en commun dans la planification de nouveaux logements.
    Avez-vous des exemples concrets à nous donner?

  (1640)  

    Oui, certainement.
    La planification d'infrastructures vertes ou de projets de transport structurants majeurs est un incitatif énorme pour les promoteurs et constructeurs immobiliers au Canada. Non seulement cela nous donne une assurance quant à la mobilité future de nos investissements, mais cela nous permet aussi de réduire énormément les coûts de construction, puisque nous ne sommes pas obligés de fournir autant de stationnements souterrains, qui peuvent atteindre des coûts énormes allant de 30 000 $ à 50 000 $, et parfois même plus que cela, dans les milieux où il y a des contraintes. Nous le voyons de façon très concrète dans nos projets, où nous sommes capables de réduire le loyer d'un logement d'une chambre de 400 $, et parfois plus encore. Alors, ce que nous sommes capables de réaliser est majeur, lorsque nous arrimons nos projets à des projets de transport structurants.
    Nous avons parlé des municipalités, mais quel est le rôle du gouvernement fédéral à cet égard?
    Si on est capable de réduire les investissements dans les infrastructures liées à l'automobile et de permettre aux constructeurs canadiens de rediriger ces énergies et cette main-d'œuvre vers le milieu de l'habitation, cela va réduire la pression liée à la main-d'œuvre. Le rôle du gouvernement fédéral est de permettre au Canada d'être le Canada de demain, un Canada mobile et durable.
     Merci, madame Chatel.

[Traduction]

     C'est maintenant le tour du Bloc. Monsieur Ste-Marie, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

    Je vais m'adresser de nouveau à Mme De Bellefeuille et M. Plourde, d'Option consommateurs.
    Nous avons compris que vous proposez que l'on soutienne mieux les plus vulnérables, que l'on s'assure que les marchés sont concurrentiels, que l'on assure une meilleure transparence en ce qui concerne les prix, puis que l'on s'assure que les biens de consommation ont une durée de vie adéquate et qu'il n'y a pas d'obsolescence programmée, notamment.
    Je tiens à rappeler aussi que, dans vos recommandations prébudgétaires, vous suggériez de mieux soutenir le logement social et de favoriser des initiatives d'accès à la propriété, notamment par le truchement de propriétés collectives comme les coopératives.
    Ici, j'aimerais bifurquer un peu, mais il y aura quand même un lien avec votre intervention. Dans celle-ci, vous avez démontré, au fond, l'importance de bien défendre le droit des consommateurs, surtout les plus vulnérables. Cela prend un équilibre entre l'industrie et les consommateurs. Quand on regarde ce qui se fait en Europe, il y a un bon soutien qui est garanti. Toutefois, je veux parler d'un cas où il n'y a pas eu d'inflation du tout depuis les 20 dernières années, c'est-à-dire le soutien que le gouvernement canadien apporte aux associations de consommateurs. Dans le Programme de contributions pour les organisations sans but lucratif de consommateurs et de bénévoles d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, il n'y a pas eu 1 ¢ d'augmentation depuis 20 ans.
    J'aimerais donc vous entendre sur l'importance de mieux financer des organismes tels que le vôtre pour assurer un équilibre entre l'industrie et le droit des consommateurs, notamment les plus démunis.
     Je vous remercie de nous donner l'occasion de parler de cette question, qui est quand même hautement préoccupante.
    Actuellement, il existe un très grand déficit en matière de représentation des consommateurs au Canada. Les industries ont largement les moyens de payer des représentants pour faire valoir leurs intérêts. C'est particulièrement vrai pour les industries qui sont dans le giron fédéral, comme l'industrie des télécommunications et les banques. Pendant la pandémie, on a vu aussi que c'était le cas de l'industrie du transport aérien. Ce sont des industries fédérales qui génèrent beaucoup de profits et qui sont en mesure de faire du lobbyisme pour défendre leurs intérêts.
    En revanche, les groupes de consommateurs canadiens sont souvent sous‑financés. Ils reçoivent peu d'argent du gouvernement fédéral. Depuis des années, nous demandons effectivement une augmentation du fonds d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada qui est destiné à la recherche en matière de consommation et qui a, pendant des années, soutenu les associations de consommateurs. Nous demandons une bonification de ce fonds pour aider un tant soit peu les associations de consommateurs à faire leur travail.
    Il faut comprendre qu'il est de plus en plus compliqué de défendre les consommateurs aujourd'hui, en 2022. La consommation change, les problèmes...

  (1645)  

[Traduction]

     Nous manquons de temps, mais je vous remercie beaucoup de votre réponse.
    Ce sera maintenant le NPD. M. Blaikie a deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Macdonald, je reviens à vous pour discuter un peu du logement. Vous avez dit tout à l'heure que le relèvement de la mise de fonds exigée pourrait calmer cette tendance à acheter des biens immobiliers à titre de placements.
    Avez-vous réfléchi à la possibilité de primes d'assurance hypothécaire différentes, à la SCHL, selon que l'acquéreur achète un logement comme lieu de résidence ou comme placement? Et avez-vous des idées à proposer au Comité au sujet d'une politique d'intérêt public qui soit utile dans la lutte contre l'inflation des loyers?
    Je commence par votre dernière question. L'inflation et la hausse des loyers sont dans bien des cas directement régies par les gouvernements provinciaux. Ceux-ci dictent ce qui est permis comme hausse sur ces marchés. En ce sens, il existe déjà des plafonds si la politique provinciale le prévoit et comporte des dispositions au sujet des nouveaux logements — et il existe diverses exceptions. Ce que je vous dis là ne vous est pas très utile, puisque ce type de politique relève des provinces et non des autorités fédérales. Il s'agit néanmoins d'un domaine où les gouvernements ont une influence directe sur l'indice des prix à la consommation.
    Il est aussi possible d'influencer l'achat de logements, les frais de scolarité et les frais de garderie. Là‑dessus, les gouvernements peuvent assez directement fixer les prix pour les consommateurs, et ces éléments sont pris en compte dans l'indice des prix à la consommation.
    Pour ce qui est des autres moyens qui pourraient servir à décourager les investisseurs tout en laissant le marché ouvert pour ceux qui veulent acheter pour se loger, il est vrai qu'on pourrait aussi moduler les primes de l'assurance de la SCHL.
    J'encourage les membres du Comité à envisager de s'en prendre aux investisseurs en particulier, car vous essayez en fait d'écarter la spéculation, ou une partie de la spéculation, du marché dans l'espoir que cela modère la hausse des prix ou les fasse même diminuer. Il n'y aura pas de répercussions directes sur les propriétaires de maison comme en aurait un taux de financement à un jour de 3 %, si la Banque du Canada haussait ses taux. Si le gouvernement fédéral ne prend pas de mesures pour maîtriser l'inflation, la Banque du Canada va agir et faire grimper les taux d'intérêt pour tout le monde, propriétaires et investisseurs.
    Merci.
     Merci, monsieur Blaikie. Votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant aux conservateurs. Monsieur Albas, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à tous les témoins.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. Stewart, je serai donc très bref.
    Monsieur Punwasi, tout d'abord, on dit que lorsque la Banque du Canada modifie son taux de financement à un jour, il peut s'écouler environ 18 mois avant que cette modification soit pleinement prise en compte dans l'économie. Je suis certain que, pour les moyens non classiques de la politique monétaire comme l'assouplissement quantitatif, les choses se passent à peu près de la même manière.
    Même si la Banque du Canada a donné des indications prospectives et dit qu'elle allait passer à un resserrement quantitatif, à votre avis, à quoi devrions-nous nous attendre dans ce domaine?
    Pour ce qui est de l'impact de l'assouplissement quantitatif, je suppose que les marchés financiers doivent se stabiliser et tout absorber. Au fur et à mesure que cet argent supplémentaire est injecté sur le marché, il y a toujours un impact qui met de 18 à 24 mois à se répercuter sur le marché.
    En appliquant un resserrement quantitatif, la Banque provoque une hausse tout en essayant d'opérer un repli. C'est un jeu assez dangereux. Il vaut mieux agir sur une longue période, lorsque la situation et les circonstances s'y prêtent. Maintenant, la Banque se demande si elle doit agir ou non, et elle risque de provoquer un resserrement excessif ou d'apporter trop de modifications en même temps.
    Au lieu de se demander où elle va, elle se regarde les pieds et essaie de contrôler la suite des choses.
     S'il y avait une récession au cours, disons, des 6 à 24 prochains mois, est‑ce que ce serait encore plus difficile? Des taux d'intérêt plus bas seraient une solution toute naturelle, et ils n'ont jamais été plus bas qu'à l'heure actuelle.
    Oui, ce serait une catastrophe s'il y avait une récession à un moment où l'inflation fait rage. Ce serait un peu comme dans les années 1970 ou au début des années 1980. Ce ne serait bon pour personne.

  (1650)  

    Dernière question. Le gouvernement a dit qu'il voulait faire beaucoup de choses: mettre fin aux enchères à l'aveugle, consacrer le droit à l'inspection des maisons, interdire la propriété étrangère et instaurer un impôt pour combattre la revente rapide. Ces mesures seront-elles efficaces, selon votre perception du marché?
    Les bulles ont tendance à avoir un impact d'ordre émotif, et des interventions réglementaires comme celles‑là n'ont peut-être pas d'impact direct, mais elles modèrent les attentes sur le marché.
    Je cède le reste de mon temps de parole à M. Stewart.
    Ma première question s'adresse à M. Rabidoux.
    Monsieur Rabidoux, l'état actuel du marché du logement au Canada est‑il sain? Pourquoi oui ou pourquoi non?
    Le marché n'est pas sain du tout. J'en reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure. Il y a une demande énorme qui dépasse largement les besoins de la croissance démographique et ce que dicteraient des fondamentaux raisonnables. Cela tient en partie à l'augmentation de la spéculation des investisseurs canadiens et étrangers. On prétend qu'il ne s'est pas assez construit de logements et notamment de maisons unifamiliales. Il y a du vrai là‑dedans. Divers facteurs sont à l'œuvre.
    Merci de votre réponse.
    Comme le Comité le sait, nous sommes un parti favorable à l'immigration. Elle est la clé d'une économie prospère et diversifiée au Canada. Cela dit, craignez-vous que les divers services gouvernementaux ne travaillent de façon compartimentée? Le gouvernement sait‑il tenir compte de la situation dans son ensemble en ce qui concerne le logement et la croissance de la population?
    C'est pour moi un grand sujet d'inquiétude. Je crains que, lorsqu'il fixe des objectifs en matière d'immigration permanente, le gouvernement fédéral ne tienne pas compte de l'incidence des résidents non permanents, comme les étudiants étrangers, qui ont toujours besoin d'un logement locatif dans bien des cas. Cela resserre le marché locatif et pousse des locataires vers le marché de la propriété; il y a donc un effet net de resserrement dans l'équilibre global du marché.
    Nous ne pouvons pas accueillir 600 000 personnes en un an. Notre politique d'immigration doit reposer sur une réflexion plus poussée.
    Merci, monsieur Rabidoux.
    Dernière question. Avez-vous quelque chose à ajouter pour finir, des idées de politiques ou de solutions? Je vous laisse les dernières secondes au cas où vous auriez quelque chose à ajouter.
    Je suis d'accord avec M. Macdonald au sujet d'un resserrement des exigences pour les investisseurs. C'est une politique tout à fait sensée. Je pense également que nous avons vraiment dormi au gaz en ce qui concerne le blanchiment d'argent à l'échelle internationale et que nous avons la frontière la plus poreuse qui soit pour toutes sortes de capitaux illicites. Il faut que cela cesse. Nous devons faire preuve de fermeté à cet égard et il faut absolument resserrer la demande excédentaire.
    Dans un marché qui fonctionne normalement, ce n'est pas aussi important, mais lorsque l'offre est limitée, cette demande supplémentaire a un effet important sur les prix et nous devons donc tout simplement la faire diminuer. Il y a là une réflexion sensée. Je vais m'arrêter là.
    Merci, monsieur Rabidoux.
    Merci, messieurs Albas et Stewart.
    Nous passons maintenant aux libéraux. Monsieur MacDonald, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, je reviens à M. Punwasi.
    Monsieur Punwasi, vous venez de publier un message sur Twiter:
Le Comité des finances [du Canada]: Les dépenses du gouvernement peuvent-elles avoir une incidence sur la capacité de la banque centrale de s'acquitter de son mandat, monsieur Punwasi?

Moi: La Banque du Canada l'admet dans un document...
*Silence total.*
    Monsieur Punwasi, tout d'abord, comme d'autres membres du Comité l'ont fait remarquer, le rapport que vous avez cité est un travail en cours, une recherche indépendante du conseil d'administration de la Banque. Êtes-vous au courant de ce détail? Voulez-vous préciser certains de vos propos?
    Bien sûr.
    Le rapport interne de la Banque du Canada dit qu'il y a un lien avec les dépenses du gouvernement. Les notions élémentaires d'économie vont dans le même sens.
    Merci, monsieur Punwasi.
    Monsieur Macdonald, je m'adresse à vous. J'ai lu votre rapport final. Les prévisions budgétaires provinciales initiales m'intéressent beaucoup. Vous avez dit qu'elles étaient complètement erronées. Vous n'avez peut-être pas dit « complètement », mais vous avez dit qu'elles étaient erronées.
    Une simple question: pourquoi sont-elles erronées à ce point? Quel pourrait être l'effet sur l'inflation dans chacune des provinces?
     Vous vous reportez sans doute à un rapport que j'ai rédigé au sujet de l'évolution des déficits provinciaux au cours des deux premières années de la pandémie.
    Chose certaine, pour l'année dernière — l'exercice 2021‑2022 qui se termine dans quelques jours —, les déficits provinciaux projetés, au départ, étaient de 70 milliards de dollars. Selon l'estimation finale présentée dans ce rapport, ils ont été d'environ 20 milliards de dollars, ce qui représente un changement énorme dans l'ampleur des déficits provinciaux. Six provinces sur dix seront probablement en situation excédentaire cette année ou l'an prochain, en grande partie grâce à une reprise économique inattendue à l'automne et à des transferts fédéraux supplémentaires non prévus — bien que ce soit en grande partie la croissance économique qui est la principale explication.
     Ces revenus supplémentaires des provinces, qui sont de l'ordre de 60 milliards de dollars, par rapport aux estimations initiales portant sur l'exercice 2021‑2022, sont attribuables à la croissance économique, mais aussi à la hausse de l'inflation. Une inflation plus forte pousse à la hausse les recettes provinciales et fédérales dans la mesure où ces recettes demeurent relativement constantes comme pourcentage du PIB. Si le PIB nominal augmente, que ce soit en raison de l'inflation ou de la croissance réelle, les recettes augmentent aussi. C'est donc en partie attribuable à la hausse de l'inflation au cours de l'automne.

  (1655)  

    Compte tenu de ces excédents et de l'allégement de la dette, monsieur Macdonald, comment les gouvernements provinciaux devraient-ils maintenant dépenser leur argent, à votre avis?
    Il arrive souvent que les gouvernements provinciaux prétendent que leurs coffres sont vides, qu'ils n'ont donc rien pour les soins de longue durée et tout le reste. Ils ne peuvent plus le prétendre. Leurs coffres débordent. Soit dit en passant, une grande partie de cet argent vient du gouvernement fédéral.
     Les provinces sont en bonne position pour dépenser en fonction de leurs priorités. Espérons que ce seront les priorités que la pandémie a fait ressortir: des soins de longue durée terriblement inadéquats, des systèmes de soins de santé qui ne sont tout simplement pas assez résilients, les grands enjeux que nous avons mis en veilleuse pendant deux ans, comme les changements climatiques. Nous avons certainement observé une tendance à réduire les impôts au lieu de s'intéresser à ces priorités. J'espère qu'ils changeront d'attitude dans l'utilisation des excédents.
    Ce n'est pas faute d'argent, à ce stade‑ci, qu'on opte pour certaines orientations. La plupart des provinces ont de l'argent. Il faut maintenant voir quelles sont leurs priorités.
    Merci.
    Au nom des membres du Comité, du greffier et des analystes — ceux qui prépareront le rapport sur l'inflation pour le Parlement —, je remercie les témoins. Merci également au personnel et aux interprètes de leur travail.
    Je dirai à ceux pour qui le travail des comités sur la Colline est une nouvelle expérience qu'ils se sont fort bien tirés d'affaire. Merci beaucoup de toutes vos réponses. Je vous souhaite une excellente journée.
    Chers collègues, la séance est levée. J'invite les membres à quitter la séance publique sur Zoom. Quant aux membres du sous-comité, je leur demande de se reconnecter au moyen des liens Zoom que le greffier a communiqués dans un courriel distinct.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU