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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 25 avril 2022

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Bienvenue à la 17e réunion du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. Au cours des deux heures qui suivent, nous discuterons avec différents témoins dans le cadre de notre étude sur les effectifs du secteur de la santé au Canada.
    Avant de vous les présenter, je vais donner les consignes habituelles pour les réunions hybrides comme celle d'aujourd'hui, qui se déroulera conformément à l'ordre pris par la Chambre le 25 novembre 2021. Conformément à la directive du Bureau de régie interne du 10 mars 2022, les personnes qui se trouvent dans la salle doivent porter le masque, sauf si elles se trouvent à leur siège durant les délibérations.
    Voici maintenant quelques instructions pour les témoins. Tout d'abord, je vous demanderais d'attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, et je crois que c'est le cas de tous les témoins, vous pouvez activer votre microphone en cliquant sur l'icône qui figure à votre écran, et le désactiver de la même façon quand vous n'avez pas la parole. Pour entendre les interprètes, cliquez sur les icônes du parquet, de l'anglais ou du français au bas de votre écran.
    Je vous rappelle par ailleurs que vous devez toujours vous adresser à la présidence, et que les captures et les photos de votre écran sont interdites. Les délibérations seront accessibles au site Web de la Chambre des communes.
    Conformément à notre motion d'affaire courante, j'informe le Comité que les témoins ont effectué les essais de connexion requis avant la réunion.
    Nous recevons aujourd'hui le Dr David Gratzer, médecin et psychiatre traitant, ainsi que le Dr Arjun Sahgal, professeur de radio-oncologie. Tous les deux témoigneront à titre personnel.
    Nous accueillons également des porte-parole de la Fédération des étudiants et des étudiantes en médecine du Canada, soit Mme Santanna Hernandez, la présidente, et M. Montana Hackett, le directeur des affaires gouvernementales.

[Français]

    Nous recevons également la Dre Anne‑Louise Boucher, directrice, Planification et régionalisation, et M. Pierre Belzile, directeur, affaires juridiques, tous deux de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

[Traduction]

    Enfin, souhaitons la bienvenue au Dr David Peachey, le directeur de l'organisme Health Intelligence Inc., et à Mme Janet Morrison, la présidente et vice-chancelière du Sheridan College.
    Je tiens à remercier nos distingués témoins de participer à nos travaux et de prendre le temps de nous faire profiter de leur sagesse et de leurs conseils afin d'éclairer les recommandations que nous soumettrons au gouvernement du Canada relativement aux effectifs dans le secteur de la santé. Nous allons d'abord entendre vos remarques liminaires, suivant l'ordre de l'avis de convocation.
    Je vous demanderais de ne pas dépasser les cinq minutes qui vous sont allouées.
    Docteur Gratzer, vous serez le premier. Vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes. Bienvenue au Comité.
    Merci, mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'avoir invité à m'adresser à vous aujourd'hui.
    « J'ai commencé à regarder l'horloge durant la journée et à penser de plus en plus souvent au nombre de patients à voir et au temps qu'il me restait. Je savais que j'arriverais à les voir tous, mais je ne savais pas de quoi j'aurais l'air à la fin de mon quart de travail. Au fil du temps, j'ai commencé à regarder l'horloge de plus en plus tôt et, un jour, j'ai réalisé que je travaillais depuis à peine cinq minutes quand je me suis dit que la journée allait être très longue. »
    C'est ce que m'a dit un collègue médecin récemment. Quand il est question de recrutement et de maintien en poste dans le secteur de la santé, plusieurs facteurs doivent être pris en compte, y compris les besoins psychologiques des travailleurs.
    Je m'appelle David Gratzer. Je suis médecin et psychiatre traitant. Je vais prendre quelques minutes pour vous parler d'épuisement professionnel et des troubles mentaux. Les observations dont je vais vous faire part m'ont été inspirées de mon expérience au sein du Centre for Addiction and Mental Health, ici à Toronto, au sein duquel je cumule des fonctions cliniques, administratives et éducatives. Je tiens à préciser que les points de vue que j'exprimerai aujourd'hui peuvent différer de ceux du Centre.
    Je vais parler brièvement de l'épuisement professionnel, en commençant par avouer que j'ai un certain parti pris à ce sujet. Comme je travaille avec des médecins, je vais parler de ce que je vois relativement à leur épuisement professionnel et à leurs besoins, mais je crois néanmoins que mes observations valent pour tous les domaines de la santé.
    Comme vous le savez peut-être, le syndrome d'épuisement professionnel chez les médecins est caractérisé par trois symptômes: la fatigue émotive, la dépersonnalisation et l'altération du sentiment de réalisation personnelle. Plus précisément, la fatigue émotive se manifeste par le sentiment d'être vidé, de n'avoir plus rien à offrir aux patients à la fin d'une journée. La dépersonnalisation survient quand un médecin ne voit plus les patients comme des personnes, mais plutôt comme des objets, et l'altération du sentiment de réalisation personnelle se passe d'explications, bien que je doive ajouter qu'elle est souvent associée à une impression d'inefficacité malgré des années de formation et la bonne volonté.
    Les problèmes liés à l'épuisement professionnel ne datent pas d'hier, mais la pandémie a aggravé tout ce qui était difficile dans la réalité des médecins. Selon les milliers de réponses reçues au Sondage national de l'Association médicale canadienne sur la santé des médecins, ils étaient un sur trois environ à avoir souffert d'épuisement professionnel. C'était avant le début de la pandémie. Depuis, les chiffres ont explosé. Le dernier sondage indique qu'un médecin sur deux environ est concerné. C'est donc la moitié des effectifs médicaux qui a été touchée d'une façon ou d'une autre par l'épuisement professionnel au Canada. Les sondages auprès du personnel infirmier, des ergothérapeutes et d'autres travailleurs de la santé ont donné des résultats semblables. Autrement dit, la situation très problématique avant la pandémie n'a fait qu'empirer, ce qui n'a sans doute rien de surprenant.
    Je vais maintenant aborder la question de la pandémie et des troubles de santé mentale. On a beaucoup entendu parler des enquêtes récentes selon lesquelles les gens se sentent plus anxieux et plus moroses. En tant que psychiatre, je trouve ces résultats intéressants, mais pas forcément inquiétants pour la plupart des personnes. Là encore, je fais bien attention de peser mes mots. Les gens sont pour la plupart résilients et, malgré le stress provoqué par la pandémie et l'incertitude de certains concernant leur capacité de payer le loyer ou leur avenir professionnel, ils s'en sortiront sans trop de dommages émotionnels et psychologiques.
    Il y a toutefois des groupes plus à risque. Je pense à trois groupes en particulier, soit les personnes qui ont déjà souffert de troubles mentaux, celles qui ont été directement exposées au virus et à la maladie et, enfin, celles qui y ont survécu. Un très, pour ne pas dire un trop grand nombre de travailleurs de la santé pourraient être classés dans les trois catégories et risquent de souffrir ou souffrent déjà de troubles de stress post-traumatique, de troubles anxieux ou de troubles dépressifs graves.
    On peut lire dans la documentation que des symptômes psychologiques sont apparus bien longtemps après la disparition des symptômes physiques du syndrome respiratoire aigu sévère. Je pense que la COVID‑19 aura le même effet. Autrement dit, il faut s'attendre à ce que les difficultés liées à cette maladie perdurent après le départ du dernier patient des unités de soins intensifs.
    Je tiens à conclure sur quelques mots d'espoir. Nous avons à notre portée des solutions judicieuses et pratiques, dont certaines sont déjà en application. Les très nombreux écrits publiés depuis une vingtaine d'années sur l'épuisement professionnel proposent une panoplie de mesures possibles.

  (1540)  

    Il se fait de l'excellent travail chez nous. Notamment, les docteures Treena Wilkie et Tania Tajirian ont créé un groupe de soutien par les pairs qui s'est révélé très efficace pour les médecins. Bien entendu, le traitement des troubles de santé mentale... C'est ce à quoi je consacre ma carrière. Nous n'avons jamais eu autant de moyens d'aider les personnes qui en souffrent. L'essentiel, comme de raison, est de reconnaître l'existence de ces problèmes et de prendre des mesures adéquates.
    Merci.
    Merci, docteur Gratzer.
    Nous entendrons maintenant le Dr Sahgal, qui témoignera à titre personnel.
    Bienvenue au Comité. Les cinq prochaines minutes sont à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis très honoré de m'adresser au Comité.
    Je suis le Dr Arjun Sahgal. Je travaille au Sunnybrook Odette Cancer Centre de l'Université de Toronto. Je témoigne aujourd'hui à titre personnel, à titre de médecin canadien et de professeur de radio-oncologie sous-spécialisé dans le traitement des tumeurs du cerveau et de la moelle épinière.
    Je trouve important de préciser que dans notre domaine, les cancers sont le plus souvent incurables. Je pense, entre autres, aux glioblastomes. Les tumeurs cérébrales cancéreuses sont particulièrement résistantes, et je me considère privilégié d'avoir traité des patients atteints et d'avoir tenté de prolonger leur vie. J'ai accompagné autant des patients indigents que des figures emblématiques de notre pays, tel Gord Downie. Réaliser que la maladie a le dernier mot, peu importe l'endroit où les patients se trouvent dans le monde ou leur parcours, éveille toujours en moi un sentiment d'humilité.
    De par sa nature, notre travail est éminemment stressant et lourd émotivement. Avec des ressources étirées au maximum, l'exercice de notre profession était déjà difficile dans le système public, mais le contexte pandémique depuis deux ans a exacerbé les risques d'épuisement à l'échelle du système. Au début, il a fallu composer avec les pénuries d'équipement de protection personnelle essentiel pour nos rencontres avec les patients, le risque accru de contagion pour nous-mêmes, nos familles et les patients qui n'avaient pas la COVID, le triage des patients en fonction du risque lié à la COVID, auxquels se sont ajoutés depuis des réalités comme le travail dans un système de santé débordé et les efforts de rattrapage parallèlement à des hausses du nombre de patients atteints de la COVID et ayant besoin de soins. Tous ces facteurs ont constitué un terreau idéal pour l'épuisement professionnel dans toutes les sphères de la profession médicale.
    L'épuisement guette aussi les patients et les soignants, qui comme les médecins subissent les effets délétères de la pénurie de ressources. Toutes les facettes des soins sont mises à rude épreuve par le manque de ressources humaines en santé.
    Nous sommes à court de personnel infirmier, de professionnels paramédicaux, de préposés aux bénéficiaires, de médecins. Bon nombre d'entre eux ont pris leur retraite, ont quitté la profession ou se sont recyclés parce que l'environnement de travail est devenu trop exigeant et les ressources cruellement insuffisantes.
    Par surcroît, le système a échoué à fournir l'aide supplémentaire dont les travailleurs de première ligne ont vitalement besoin. Les nouvelles stratégies se succèdent à vitesse grand V, sans que personne ne cherche à savoir de quoi auraient véritablement besoin les travailleurs de la santé maintenant. La reconnaissance ne suffit pas.
    Il m'arrive souvent de réfléchir à un système dans lequel on pourrait optimiser l'efficacité de notre pratique en modernisant les systèmes de dossiers électroniques de santé, en uniformisant les méthodes d'accès aux tests d'imagerie par résonance magnétique et de tomodensitogramme, notamment, en améliorant les processus d'approbation des nouveaux médicaments et des nouveaux tests d'importance vitale de même que les soins spécialisés, et en augmentant le personnel d'administration des soins de santé. De plus en plus, ces tâches sont déléguées aux médecins et la situation du système ne fait qu'empirer, ce qui aggrave le risque d'épuisement professionnel. Il faut laisser les médecins exercer la médecine et faire en sorte que le système leur fournisse le personnel administratif requis pour qu'ils puissent soigner leurs patients. Il n'est pas raisonnable de demander à des médecins de réduire le temps consacré aux soins pour passer des commandes et transcrire des notes. Ce serait un atout énorme pour maintenir le personnel en poste, surtout dans les régions nordiques et rurales, et pour lutter contre l'épuisement professionnel chez les jeunes médecins, qui semble prendre des proportions alarmantes.
    Je ne suis pas un expert et je ne travaille pas non plus dans une collectivité rurale ou mal desservie mais, à titre de spécialiste, je me préoccupe de tous les patients atteints d'une tumeur rare en Ontario. Selon les échos que je reçois de mes collègues du Nord, le problème est beaucoup plus grave dans les régions éloignées en raison du bassin de travailleurs réduit et des compressions dans certains services essentiels.
    L'accès accéléré aux soins virtuels a facilité la gestion de la crise que nous traversons. Nous pouvons maintenant accomplir beaucoup plus de tâches de manière virtuelle, mais il faut assurer l'équité du système et de l'accès aux ressources non seulement dans les hôpitaux, mais dans tous les milieux de soins, y compris les bureaux de santé situés en région éloignée.
    Il faut dès aujourd'hui réfléchir à de nouveaux modèles de santé pour optimiser l'utilisation des ressources de plus en plus restreintes en raison de l'épuisement professionnel des effectifs dans un contexte où les pénuries de personnel et la lourdeur de l'administration exercent une pression constante.
    Je suis convaincu que l'accroissement des effectifs sera déterminant, mais c'est quelque chose qui prendra du temps. Les programmes accélérés de recrutement à l'étranger de personnel infirmier et de travailleurs du secteur des soins de longue durée pourraient représenter une partie de la solution, mais il faut former plus de jeunes Canadiens et rendre de nouveau attrayantes les professions de soins aux personnes malades et dans le besoin.
    La modernisation des ressources serait très bénéfique pour les établissements situés dans les régions rurales. Le personnel serait fier de travailler dans un tel contexte et il serait plus facile de les retenir et de faire du recrutement si le matériel médical est aussi moderne qu'au centre-ville de Toronto. Les nouveaux pourront faire leur travail comme ils l'ont appris. Ce serait sûrement efficace aussi pour réduire le taux d'épuisement professionnel dans le secteur des soins.
    Bref, tous les travailleurs de la santé, autant le personnel chargé de maintenir les lieux propres ou d'assurer notre sécurité que les techniciens, le personnel infirmier et les médecins, tous se donnent corps et âme pour prodiguer les meilleurs soins aux patients.

  (1545)  

    J'en suis convaincu, tout comme je suis convaincu que des mesures s'imposent dès aujourd'hui pour nous protéger contre l'épuisement professionnel. Je remercie le Comité de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer sur cet enjeu.
    Merci, docteur Sahgal.
    Vous nous avez offert une parfaite introduction aux représentants de la Fédération des étudiants et des étudiantes en médecine du Canada.
    Soyez les bienvenus.
    Merci au Comité permanent de la santé de prendre le temps d'entendre le point de vue de la Fédération des étudiants et des étudiantes en médecine du Canada, la FEMC. Notre organisme représente plus de 8 000 étudiants de 15 facultés de médecine du Canada, qui sont l'avenir de notre système de santé.
    Je m'appelle Santanna Hernandez, et je suis la présidente de la FEMC. Je m'adresse à vous depuis le territoire traditionnel des peuples signataires du Traité no 7 au sud de l'Alberta, qui est aussi la patrie de la nation des Métis de l'Alberta , région 3. Je suis accompagnée par M. Montana Hackett, notre directeur des affaires gouvernementales et président désigné, qui se trouve sur les territoires du Traité no 2 et du Traité no 6 dans le canton de London, en Ontario.
    À titre d'étudiants en médecine, nous apportons un point de vue unique dans ce débat et nous avons à cœur les intérêts des apprenants et de la communauté éducative élargie dans le domaine médical. Nous savons que vous avez déjà accueilli nos partenaires de l'Association médicale canadienne, et nous avons bon espoir que nos propos et nos demandes s'inscriront dans la foulée de leur témoignage. Comme eux, nous sommes ici pour parler des problèmes très graves liés à la crise sanitaire et aux ressources humaines, des investissements nécessaires dans une stratégie nationale dans ces domaines, de même que de l'instauration d'un programme national de délivrance des permis d'exercice.
    Il peut être difficile de comprendre les incidences de ces enjeux pour les étudiants et les lacunes qui nous touchent plus particulièrement. Je prendrai donc un petit moment pour vous donner quelques précisions à ce sujet.
     Pour les étudiants en médecine, le processus de jumelage revêt une importance capitale. Tous les ans, des médecins qualifiés ne sont pas sélectionnés pour un poste de formation postdoctorale. Le rôle du gouvernement est décisif puisque l'offre de places de résidence dans les diverses provinces est souvent fonction du financement de l'éducation et des ressources disponibles pour l'établissement de programmes à l'échelle nationale. Le premier tour du processus de jumelage de 2022 a pris fin il y a quelques semaines à peine. L'année a été marquante pour toutes sortes de mauvaises raisons, et il est clair qu'il y a urgence pour le fédéral et les provinces d'agir pour lutter contre les problèmes d'épuisement professionnel chez les étudiants en médecine, faire de la prévention et assurer le maintien des effectifs, mais aussi d'affecter les ressources requises à un système de santé déserté par ses travailleurs.
    Il faut absolument que le système de résidence tienne compte des besoins de la population des patients et des aspirations professionnelles des futurs médecins si nous voulons prévenir l'épuisement professionnel. Notamment, le gouvernement devra investir dans les projections en matière de ressources humaines et s'assurer que le programme est suffisamment financé.

  (1550)  

    Par ailleurs, il est urgent d'établir un programme national de délivrance des permis d'exercice. Actuellement, les médecins doivent soumettre une demande distincte à chacun des ordres des médecins des 13 provinces et territoires du Canada pour obtenir un permis d'exercice. Ce modèle les empêche d'exercer dans plusieurs provinces et territoires. C'est un problème pour les résidents et les médecins membres du personnel, qui souhaitent avant tout que les modes de prestation de soins aux patients soient faciles et souples. Ce fardeau administratif détourne les médecins de leur objectif premier, qui est de fournir des soins centrés sur le patient, et entraîne un risque important pour leur sécurité ainsi que de nombreux retards.
    S'ils peuvent plus facilement exercer la médecine hors de leur province ou de leur territoire, les résidents pourront travailler auprès des communautés rurales et éloignées qui sont mal desservies. Pour les futurs médecins, le fait d'avoir à soumettre de multiples demandes s'ajoute à un emploi du temps déjà surchargé. Un programme national de délivrance des permis d'exercice éliminerait cet obstacle et offrirait la souplesse nécessaire pour offrir des soins centrés sur les patients qui en ont le plus besoin.
    Nous nous sommes associés avec Médecins résidents du Canada, le Collège des médecins de famille du Canada, le Collège royal, l'Association médicale canadienne et la Société de la médecine rurale du Canada pour publier une déclaration dans laquelle nous préconisions cette approche. C'était il y a plusieurs années, et l'urgence de ce changement est aujourd'hui plus forte que jamais.
    Enfin, il faut de toute urgence débloquer des fonds pour la prévention et le traitement en santé mentale. Selon le sondage que la FEMC a réalisé auprès de ses membres en 2017, 37 % environ des étudiants en médecine du Canada remplissaient les critères de l'épuisement professionnel. Il s'agit d'une proportion alarmante, d'autant plus que ce sondage a été réalisé avant la pandémie.
    Wesley Verbeek, qui étudiait en médecine en 2017, résume très bien la situation quand il dit qu'il y a un problème quand des étudiants, dont la formation porte sur les soins en santé mentale et en santé physique, n'ont pas le temps de s'occuper d'eux-mêmes. Il ajoute que les étudiants doivent apprendre et faire énormément de choses en peu de temps. Ils doivent s'accrocher, sans jamais lâcher. C'est une pression énorme parce que plus ils réussissent à tenir le rythme, plus ils ont de chances d'obtenir la place de résidence convoitée.
    Notre ancien président, le Dr Franco Rizzuti, explique que les étudiants en médecine ont tendance à être hyperperformants et très résilients, mais que l'effet cumulé de plusieurs facteurs de stress peut mener à l'anxiété, à la dépression et à l'épuisement professionnel.
    Les contraintes de temps, le manque de sommeil, les semaines de 70 heures durant les stages cliniques, le fait de voir mourir un patient pour la première fois et les problèmes personnels peuvent avoir raison des meilleurs mécanismes d'adaptation, selon le Dr Rizzuti. Il se demande comment nous pourrons améliorer la santé et le bien-être globaux au sein de la profession médicale générale si les stagiaires, qui n'ont pas encore à composer avec le stress lié à l'exploitation d'une entreprise et aux exigences du travail sur appel, présentent déjà des taux élevés d'épuisement professionnel et de dépression.
    La conjugaison de facteurs comme les longues périodes d'attente et l'accès difficile à de l'aide en santé mentale pour les stagiaires, en raison des exigences de leur formation, crée une situation de crise.
    Nous avons trois recommandations à formuler.
    Il est urgent que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership en vue de la mise en place d'un plan national intégré dans les secteurs de la santé et des ressources humaines, qui sera fondé sur une approche intergouvernementale.
    Il faut éliminer les obstacles pour les professionnels de la médecine en appuyant l'adoption d'un système national de délivrance des permis d'exercice qui leur permettra d'offrir des soins dans les provinces et les territoires où les patients en ont le plus besoin.
    Enfin, pour remédier à la crise dans ce domaine, il faut améliorer l'accès à l'aide en santé mentale pour les stagiaires en médecine.
    Nous sommes au début de notre vie de service à nos communautés, et l'adoption des mesures recommandées se traduira par une plus grande qualité des soins pour l'ensemble de la population. Dans mon travail auprès des aînés de la nation des Pieds-Noirs de Mohkinstsis, le nom donné à Calgary dans la langue pied-noir, j'ai eu le privilège de recevoir beaucoup d'enseignements sur l'importance de cheminer en parallèle. C'est ce que nous devons faire maintenant. Nous devons travailler main dans la main pour créer un système de santé qui favorise le bien-être et la durabilité, ainsi qu'une approche proactive de la sécurité des patients.
    Nous vous demandons d'agir avant qu'il soit trop tard. Nos professeurs ont besoin de vous, et nous aussi. Cet enjeu transcende les partis. Les Canadiens vous veulent dans leur équipe.
    Mahsi cho. Merci, monsieur le président, et merci au Comité d'avoir entendu notre témoignage.
    Merci à vous deux. Je suis certain que les membres auront des questions pour vous tout à l'heure.

[Français]

    Je cède maintenant la parole à la Dre Boucher, de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.
    Je suis médecin de famille, et je représente la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, ou FMOQ.
    En premier lieu, je tiens à remercier le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes, et tout particulièrement M. Luc Thériault, député de Montcalm, de nous permettre d'offrir quelques commentaires sur l'état des effectifs médicaux en médecine de famille au Québec.
    La FMOQ est un syndicat professionnel représentant les quelque 10 000 médecins de famille qui exercent la profession dans le réseau de la santé au Québec. Il est un organisme représentatif reconnu par l'État québécois pour négocier, avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, les conditions de pratique de ses membres. Par contre, ce n'est pas seulement un syndicat, mais aussi un acteur important en matière de planification et d'organisation des soins médicaux généraux au Québec, ainsi que la plus importante entreprise de formation médicale continue en médecine de famille au Québec.
    La FMOQ et ses membres jouent un rôle central dans la bonne marche du système de santé québécois. On l'a vu dans le cadre de la crise sanitaire liée à la pandémie de la maladie à coronavirus. Nous avons fait la démonstration que notre organisation est un partenaire indispensable et incontournable pour les décideurs politiques et les gestionnaires du réseau.
     La pandémie a révélé que la FMOQ et ses membres ont répondu présent à tous les niveaux d'intervention. Ils ont su, de façon proactive et avec beaucoup d'initiative, réorganiser rapidement l'offre de services en première ligne, tout en appuyant activement les soins aux malades en deuxième ligne et les différents services offerts en établissement. Que ce soit dans les cliniques médicales de première ligne, dans les salles d'urgence, dans les unités d'hospitalisation, aux soins intensifs, dans les centres de soins de longue durée, dans les centres locaux de services communautaires, dans les soins à domicile, dans les soins palliatifs, qu'ils soient donnés à domicile ou en établissement, ou dans le cadre du travail lié à l'aide médicale à mourir, quel que soit le milieu de pratique, les médecins de famille québécois ont été à la hauteur. Ils continuent de l'être aujourd'hui et ils le seront demain. Ils sont solidaires à l'égard des besoins de la population.
    Au Québec, les médecins de famille couvrent à la fois la première et la deuxième ligne médicale. À l'échelle du Canada, ils sont plus nombreux à pratiquer en deuxième ligne. L'effort additionnel qu'a commandé l'état d'urgence sanitaire pour les médecins de famille les a assurément marqués. Cet effort s'est traduit par une augmentation des jours travaillés et, conséquemment, par un épuisement palpable sur le terrain. Cela a été un stress important sur les plans physique, psychologique et professionnel que de devoir faire face à un rythme soutenu de travail et d'être continuellement en adaptation, autant pour la couverture des soins, où la demande variait constamment en fonction de la pandémie, qu'au sein des équipes médicales, où l'absence impromptue des effectifs pour raison d'isolement à cause de la COVID‑19 mettait tous les professionnels en mode adaptation rapide, et ce, de façon constante.
    L'exercice de la médecine pendant la pandémie, à certains égards, s'en est vu ainsi bouleversé. Pour ne donner qu'un seul exemple, l'avènement en force de la télémédecine dans la pratique de tous les jours a durablement et rapidement modifié les habitudes. Malheureusement, pour soutenir tous ces efforts auprès de la population et pour bien coordonner tous ces changements sur le plan professionnel, l'état de nos effectifs ne se situe pas à un niveau optimal. Bien au contraire, nombreux sont ceux qui manquent à l'appel. Comme nous l'avons déjà répété à de multiples reprises au cours des derniers mois, il manque actuellement plus de 1 000 médecins de famille au Québec pour combler la totalité des besoins.
    Les raisons de cette pénurie sont multiples. Outre les bouleversements et la fatigue qu'a générés la pandémie au sein des effectifs ces dernières années, il y a un accroissement important de la lourdeur des tâches médico-administratives. Cela donne lieu à une baisse d'attractivité de la profession pour ce qui est des nouveaux aspirants à l'exercice de la médecine.
    À titre informatif, le Service canadien de jumelage des résidents met en avant un système de candidature, de sélection et de jumelage à des postes de formation postdoctorale en médecine partout au Canada. Cette année encore, les finissants boudent la médecine familiale au profit d'autres spécialités médicales, et ce, de façon très importante au Québec. Un peu plus de 90 postes en médecine familiale au Québec sont restés vacants après le premier tour de jumelage. Il ne faut jamais oublier qu'un poste non pourvu en médecine de famille peut avoir une incidence négative sur l'accès aux soins de première ligne pendant plus de 30 ans. Pour nous, cette situation est aussi triste qu'alarmante. La médecine de famille au Québec a un urgent besoin d'être valorisée auprès des étudiants en médecine. Trop de personnes, dont certaines aux plus hauts niveaux, ont malheureusement dénigré cette profession au cours des années, ce qui a produit les résultats que l'on connaît.

  (1555)  

    Sur le plan des effectifs, il manque donc au moins 1 000 médecins de famille au Québec. C'est une pénurie importante. Au cours des sept dernières années, dont les deux dernières années en particulier, plusieurs postes sont restés vacants.
    De plus, il y a moins d'activités de première ligne au Québec que dans le reste du Canada. Les médecins de famille du Québec font preuve d'une plus grande polyvalence que les médecins de famille ailleurs au Canada. En effet, environ 50 % d'entre eux exercent dans au moins deux milieux de pratique. Le nombre de médecins de famille par 100 000 habitants est plus bas au Québec que dans le reste du pays.
    Selon les dernières données existantes pour 2020‑2021, il y a approximativement 9 800 médecins de famille dans le régime public québécois, et plus de 7 500 d'entre eux offrent des services de première ligne. De plus, 3 737 soignants s'occupent des patients en milieu hospitalier, 2 453 travaillent dans les salles d'urgence, 2 303 travaillent dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, ou CHSLD, et plus de 117 travaillent dans un service d'obstétrique, où il y a eu au moins 34 000 accouchements en 2020‑2021. D'autres travaillent dans divers secteurs, comme les soins palliatifs, la réadaptation, et ainsi de suite.
    Il importe de tenir compte de la polyvalence des médecins de famille québécois, dont la contribution à la charge de travail des médecins de famille en établissement se situe entre 35 et 40 % comparativement à environ 20 % en Ontario, si l'on veut se faire une idée juste des effectifs en médecine familiale au Québec qui sont disponibles en première ligne. Nous voulons également insister sur le fait que les difficultés d'accès aux investigations spécialisées ainsi que les délais d'attente visant les consultations et les interventions chirurgicales donnent lieu à une surconsultation. Par exemple, les patients peuvent consulter plusieurs fois leur médecin de famille pour l'ajustement de la posologie liée à un analgésique ou lorsqu'ils sont en attente d'une intervention chirurgicale ou d'une évaluation. Cet autre problème vient à son tour accroître la surcharge de travail des médecins de famille.
    De plus, notamment dans les régions éloignées du Québec, l'état des effectifs médicaux en médecine familiale, bien que loin d'être optimal, s'est révélé relativement stable ces dernières années. Toutefois, certaines régions, comme l'Abitibi‑Témiscamingue, Chibougamau et les Îles‑de‑la‑Madeleine, se détachent du lot. En effet, ces territoires géographiques peinent davantage que les autres à recruter des médecins.
    Mentionnons aussi les zones rurales qui, actuellement, sont les secteurs géographiques les plus mal en point à cet égard. Les médecins de famille qui exercent en zones rurales sont souvent des médecins en fin de carrière, qui ont consacré l'essentiel de leur pratique à leur communauté. Il y a très peu de relève médicale dans ces communautés rurales qui, pourtant, ne sont pas toujours si éloignées d'un centre urbain. En effet, de nombreux jeunes médecins hésitent à commencer leur carrière dans des milieux aussi isolés. De nombreux sous-territoires vivent d'importants problèmes de recrutement. En ce qui concerne les communautés autochtones, depuis quelques années...

  (1600)  

    Docteure Boucher, je vous demanderais de bien vouloir conclure votre présentation. Vous pourrez ajouter des précisions lors de la période de questions.
    Je vais conclure en disant qu'à notre avis, le gouvernement fédéral doit augmenter de façon considérable les transferts en santé au gouvernement du Québec afin de mieux soutenir les médecins de famille et leur donner accès à de meilleurs plateaux techniques pour mener des activités d'investigation.
    La valorisation de la profession de médecin de famille au Québec est également un aspect majeur à considérer au sein de notre réseau de soins. La médecine familiale pourrait être valorisée et soutenue par le truchement de fonds fédéraux accordés aux universités québécoises, en particulier pour exposer davantage les étudiants du niveau prédoctoral à la médecine familiale.
    Nous voulons aussi mettre en avant un élément important. Nous croyons que le gouvernement fédéral et ses sociétés pourraient être invités à revoir ce qui vient compliquer inutilement l'exercice de la médecine familiale. Je pense, par exemple, aux tracasseries administratives liées aux demandes de crédits d'impôt et autres formulaires ainsi qu'aux règlements de toutes sortes.
    Dans le contexte de la pénurie actuelle de médecins de famille, nous ne pouvons plus pratiquer la médecine de la même façon. Nous devons pouvoir déléguer plus de tâches et travailler en collaboration avec d'autres professionnels. Nous devons aussi diminuer la charge médico-administrative. Cette réorganisation du travail nécessite un soutien et une gestion du changement qui permettront aux médecins de famille d'exercer ce pour quoi ils ont été formés, c'est-à-dire la médecine.
    Je vous remercie, docteure Boucher.

[Traduction]

    Nous entendrons maintenant le directeur de Health Intelligence Inc., le Dr David Peachey.
    Vous avez la parole, docteur Peachey.
    Bonjour et merci de me donner l'occasion de rencontrer le Comité.
    J'ai préparé de brèves remarques liminaires qui vous aideront à comprendre la nature de notre travail et quelques-unes des leçons que nous avons apprises.
    Health Intelligence a réalisé des travaux dans des domaines connexes. Notre équipe de quatre personnes est composée de spécialistes de la direction de projet, des statistiques de la santé, du génie informatique et de la gestion de projet. Nous avons tous été consultants dans le secteur de la santé pendant au moins 20 ans, et plus particulièrement dans le domaine de la planification des ressources et des services cliniques depuis les 10 dernières années. Nous avons notamment réalisé des travaux de planification des ressources et des services de portée et d'intensité variées pour neuf provinces ou territoires.
    J'estime que le type de planification que nous faisons représente un aspect fondamental du mandat du Comité, surtout pour ce qui concerne les efforts de recrutement et de maintien en poste, qui sont voués à l'échec s'il n'y a pas de plan de recrutement.
    Sans planification, les systèmes de santé atteignent rarement, sinon jamais, leur plein potentiel. Les ressources humaines représentent l'essence des systèmes de santé. La technologie, les lits et les produits pharmaceutiques sont certes essentiels à son fonctionnement mais, au bout du compte, la qualité des soins que reçoivent les patients est intrinsèquement liée à la qualité des ressources humaines.
    Dans le secteur de la santé, la planification des ressources humaines vise l'équilibre entre l'offre, la demande et les besoins dans un système de prestation de services à forte intensité de main-d'œuvre. Il faut bien comprendre les effets conjugués de la complexité des effectifs, des rôles de l'offre et de la demande dans les pénuries, des tendances démographiques et des conditions de travail pour bien évaluer les pressions actuelles et à long terme sur les effectifs.
    La planification des ressources et les initiatives stratégiques associées ne peuvent pas donner les résultats attendus si elles ne sont pas coordonnées pour l'ensemble des effectifs. Si la planification et les politiques du système de santé, ainsi que leur mise en application ne sont pas fondées sur la planification des effectifs, rien ne changera. Au Canada, cela signifie que la croissance restera foncièrement axée sur la demande et un changement des besoins liés aux effectifs dans le secteur de la santé.
    Cela dit, les projections liées aux services cliniques reposent sur des hypothèses concernant les principaux déterminants liés aux besoins de la population et le bassin de main-d'œuvre. La planification des ressources et des services consiste à façonner les projections en fonction des stratégies, des politiques et des objectifs organisationnels. Comme vous le savez sûrement, il n'existe pas de formule rigide en matière de planification, mais elle ne peut pas non plus être strictement intuitive. En fait, c'est un travail d'exploration, qui exige à la fois de trouver l'information et d'y réagir.
    Notre méthode de prédilection depuis plus d'une décennie fait intervenir un modèle corrigé axé sur les besoins de la population. Le modèle primaire axé sur les besoins de la population est corrigé et modifié pour tenir compte des faiblesses intrinsèques connues. Les éléments et les variables utilisés dans notre modèle représentent les fondements de la complexité d'une planification décennale continue et intégrant le rechargement constant des données et des composantes qualitatives. Cette planification assure la prestation de soins équitables, durables et fondés sur les besoins de la population en matière de santé.
    Pour que les soins soient centrés sur les patients, comme il a été mentionné précédemment, la collaboration et le travail d'équipe sont essentiels. Et pour cela, il faut notamment que le rôle de tous les fournisseurs du système soit optimisé et que les résultats soient mesurables, qu'il y ait un climat de respect mutuel et que la qualité soit une responsabilité partagée.
    La méthode, en constante évolution depuis 12 ans, est séquentielle. La première étape est celle de la collecte, de la collation et de l'analyse d'un corpus exhaustif de données, suivie de la saisie d'éléments qualitatifs complets grâce à la participation d'un nombre important de parties prenantes, ainsi que de la mise à jour de notre base de données documentaires. Nous évaluons les facteurs déterminants des besoins et de l'offre. Les résultats conjugués de ces étapes forment la base d'un catalogue de données préliminaire et, ultérieurement, d'un compendium de données qui est la source de l'analyse de l'environnement que nous utilisons pour établir des modèles novateurs de soins.
    Les éléments qualitatifs et quantitatifs liés aux besoins et à l'offre sont intégrés au moyen de notre logiciel et du modèle corrigé axé sur les besoins de la population afin de générer un modèle de prévision qui comprend entre autres des mises en situation et des simulations qui sont traduites en hypothèses de base, de référence et fortes en vue de l'établissement d'un plan décennal continu.
    Voici pour le contexte et le sommaire de notre approche. Je vais maintenant vous donner une liste des leçons et des points importants qui ont été des constantes dans tous nos travaux. Je précise qu'ils ne sont pas classés par ordre de priorité.
    Premièrement, si le patient n'est pas la priorité, alors à quoi bon? Nous avons réussi à nous en sortir avec un système de soins centré sur les fournisseurs. Avec un peu de chance, nous allons réussir à instaurer un système centré sur les patients.

  (1605)  

     Le recrutement et le maintien en poste des professionnels de la santé sont incontestablement favorisés par la mise en place d'un plan de ressources et de services. Cependant, il est préférable de traiter le recrutement et le maintien en poste comme des entités distinctes, car ils se distinguent par des éléments moteurs différents.
     Les soins en milieu rural et éloigné bénéficient de programmes des différents ordres de gouvernement, mais nécessitent un soutien avec les outils modernes de la santé numérique.
     Les thèmes récurrents dans toutes les administrations sont les soins collaboratifs, la santé mentale et les toxicomanies, les soins palliatifs, les populations vulnérables, la santé publique, la santé maternelle et infantile et les soins aux personnes âgées. Ces thèmes reviennent en tête de liste dans toutes les administrations où nous travaillons.
     Comme nous l'avons mentionné — et il est important de le souligner —, pour être efficace, un plan de ressources et de services doit être axé sur la navigation et non pas prescrire. La planification doit être adaptée aux priorités de l'administration et à une évaluation des besoins. Tous les fournisseurs doivent s'appuyer dans leur travail sur des ETP cliniques, y compris un mandat universitaire.
    Il faut que l'élaboration des modèles de soins optimise les rôles de toutes les disciplines de prestation et repose sur un partage de la responsabilité en matière de qualité. L'incapacité à réaliser des avancées dans les modèles de soins perpétue le statu quo et marginalise les prestataires qui ne sont pas médecins.
     Il faut également mettre davantage l'accent sur la généralité. C'est l'une des clés de la transformation des soins de santé.
     Enfin, monsieur le président, la planification que je viens de décrire n'est certainement pas une fin, mais un début.
     Je vous remercie.

  (1610)  

    Merci beaucoup, docteur Peachey.
     Enfin, nous accueillons la présidente et vice-chancelière du Sheridan College, Mme Janet Morrison.
     Vous avez la parole, madame.
     Je m'appelle Janet Morrison, et je suis présidente et vice-chancelière du Sheridan College.
     Nos campus sont situés sur le territoire traditionnel de plusieurs nations autochtones, notamment les Anishinabe, les Haudenosaunee, les Wendat, les Métis et la Première Nation des Mississaugas de New Credit.
     Merci beaucoup de m'avoir invitée à parler du rôle essentiel des établissements postsecondaires comme Sheridan dans le façonnage de l'avenir du personnel paramédical du Canada.
     Avant de commencer, je tiens à saluer et à remercier la députée Sonia Sidhu pour le rôle qu'elle joue dans la défense des soins de santé à l'échelle locale et nationale.
     Sheridan est l'un des 24 collèges publics de l'Ontario. Nous comptons plus de 55 000 étudiants à temps plein et à temps partiel inscrits à une variété de programmes menant à un diplôme ou à un certificat dans les domaines des arts et du design, de la technologie, des affaires, de l'informatique, des métiers spécialisés et de la santé. Nous avons trois campus dans certaines des villes qui connaissent la croissance la plus rapide du pays: Oakville, Mississauga et Brampton. Notre campus de Brampton héberge notre faculté de santé appliquée et d'études communautaires, où plus de 3 000 apprenants sont actuellement inscrits à des programmes comme la pratique des sciences infirmières, la thérapie sportive, la kinésiologie et les services de soutien à la personne, entre autres.
     Nos diplômés jouent un rôle essentiel dans les soins de première ligne partout en Ontario en veillant à la santé et au bien-être des Canadiens, qu'il s'agisse de personnes âgées, de jeunes confrontés à des obstacles ou de personnes atteintes de maladies chroniques. L'aspect pratique de l'apprentissage au Sheridan College commence tôt. Chaque année, nous envoyons 1 500 étudiants en stage dans des établissements de première ligne, ce qui représente des milliers d'heures de service dans la communauté, que ce soit dans des hôpitaux, des pharmacies, des foyers de soins de longue durée, des refuges, des maisons de transition, des cliniques sportives ou, dans le secteur privé, dans l'industrie pharmaceutique et les technologies de la santé.
     J'aimerais vous faire part de ce que nous disent nos étudiants, nos anciens élèves, nos professeurs et nos partenaires sur le terrain, dans les communautés, à propos des réalités de leur lieu de travail. Avant même le début de la pandémie, la municipalité locale de Brampton avait déclaré une urgence sanitaire. Le manque de personnel de première ligne qualifié et agréé pour prendre soin de la population florissante et de plus en plus diversifiée de la ville était un facteur essentiel. La ville, comme une grande partie de la région du Grand Toronto, connaissait un afflux de nouvelles familles qui s'installaient et une population vieillissante, deux catégories qui avaient toutes deux besoin de soins culturellement compétents alors qu'il y avait de nombreux départs à la retraite chez le personnel de santé.
     Puis la pandémie a frappé. Pendant quelques très longues semaines, les infections à la COVID ont ravagé le cœur de nos quartiers à Brampton. Les infections ont atteint un niveau record et le taux de vaccination était parmi les plus bas de notre province.
     Le Sheridan College a pris l'initiative de respecter son engagement en tant qu'établissement d'ancrage en organisant des cliniques de vaccination à grande échelle sur son campus Bill Davis à Brampton. Bien que nous ayons été heureux de fournir l'espace, surmonter l'hésitation de la population locale à se faire vacciner a nécessité un effort uni des organisations de services sociaux des communautés sud-asiatiques, noires, latines et philippines.
    L'effort interprofessionnel combiné de tant de citoyens concernés, d'employés du Sheridan qui ont donné de leur temps et d'organisations a permis de livrer 35 000 doses de vaccin et a permis à Brampton et à la région de Peel de surmonter ce qui semblait être un défi insurmontable. Cette clinique a été un énorme succès, mais elle nous a aussi appris des leçons vraiment essentielles.
    Premièrement, la pandémie a durement frappé les merveilleux professionnels de la santé en première ligne et le système dans son ensemble — ce que vous savez certainement. Les besoins en matière de soins de santé dans la collectivité augmentent, tout comme la main-d'œuvre a du mal à attirer de nouveaux talents et à maintenir les professionnels en poste, car beaucoup d'entre eux prennent leur retraite ou changent de profession. On prévoit qu'il manquera 20 000 infirmières et infirmiers et préposés aux services de soutien à la personne en Ontario d'ici 2024. C'était avant la pandémie. Un médecin local m'a dit qu'il avait perdu un quart de son personnel infirmier dans la salle d'urgence.
    Deuxièmement, nous avons vu de nos propres yeux et entendu de la part de tant de personnes que veiller au bien-être d'une population croissante et diversifiée est une tâche de plus en plus complexe pour laquelle il faut avoir davantage de contacts individuels, susciter la confiance dans un contexte culturel ou religieux, et disposer de réseaux de soins interprofessionnels intentionnels et coordonnés. Ce point a été davantage souligné lors d'une table ronde organisée par le Sheridan College en janvier, qui a rassemblé des voix éminentes de toute la région de Peel, notamment des hôpitaux, des unités de santé publique, des centres de soins de longue durée, des laboratoires commerciaux et des associations de soins de santé.

  (1615)  

    Troisièmement, de nombreux professionnels formés à l'étranger continuent d'avoir du mal à percer sur le marché du travail. Compte tenu des leçons que j'ai déjà mentionnées, cela n'a aucun sens. Plutôt que de faire des petits travaux pour joindre les deux bouts et subvenir aux besoins de leur famille, de nombreux professionnels de la santé qualifiés pourraient travailler en première ligne et contribuer à résoudre la crise.
     Bien que je parle du vécu de notre coin du monde dans la région de Peel, je soupçonne que la situation est semblable dans d'autres parties du Canada. Je ne pense pas que ces défis soient insurmontables, cependant, alors permettez-moi de vous énumérer quelques idées sur ce que le gouvernement fédéral pourrait faire.
     Premièrement, nous savons que l'une des raisons pour lesquelles la pandémie a frappé certaines collectivités plus durement que d'autres est la prévalence des maladies chroniques dans ces collectivités. Dans la seule région de Peel, les taux de diabète, d'arthrose, de cancer et de maladies cardiaques sont en hausse depuis des années. Nous devons nous concentrer sur la protection de nos collectivités contre la prochaine pandémie en nous attaquant aux maladies chroniques. Les établissements publics d'enseignement postsecondaire peuvent avoir un rôle important dans ce domaine grâce à leurs recherches et à leurs méthodes d'enseignement appliquées, qui comprennent des stages dans divers milieux, des partenariats avec la collectivité et l'industrie et l'utilisation de la technologie. Je sais que l'enseignement postsecondaire est de compétence provinciale, mais il existe de nombreux exemples de la façon dont le gouvernement fédéral a soutenu les établissements universitaires dans des domaines comme le développement des compétences, la recherche et l'innovation technologique.
     Deuxièmement, nous attirons déjà beaucoup de talents internationaux au Canada par le truchement du système d'éducation postsecondaire et du système de points d'appréciation d'immigration pour les travailleurs qualifiés. Dans les deux cas, les collèges subventionnés par l'État, comme le Sheridan, constituent souvent la voie vers une nouvelle carrière et une nouvelle vie au Canada. Bon nombre de nos diplômés obtiennent un permis de travail et, en fin de compte, la résidence canadienne.
     Les immigrants formés à l'étranger viennent également nous voir pour se perfectionner grâce à des microcrédits afin de pouvoir répondre aux exigences des employeurs canadiens, mais beaucoup trop d'entre eux sont laissés pour compte. Le principal écueil est le manque de renseignements cohérents et précis fournis aux personnes dans leur pays d'origine par des agents non réglementés et souvent sans scrupules, avant leur arrivée au Canada.
     Je demande instamment à ce comité d'inciter les collèges publics à faire partie de la solution en renforçant les voies de communication pour les demandeurs de visa éventuels, qu'il s'agisse d'étudiants ou d'immigrants qualifiés.
     Un autre domaine de grand stress pour les diplômés qui se préparent à entrer dans le monde du travail de la santé est le logement. Nos campus sont situés dans des villes où l'accessibilité au logement est une préoccupation majeure pour la plupart des gens. Les solutions débattues ignorent souvent la population étudiante. Qu'il s'agisse d'étudiants étrangers ou canadiens, l'offre restreinte de logements sûrs sur le campus ou à proximité et la flambée des loyers dans les quartiers de banlieue font que bon nombre d'entre eux vit dans des logements locatifs surpeuplés et peu sûrs.
    Au Sheridan College, nous voulons régler le problème de l'abordabilité du logement pour les étudiants, qu'ils choisissent de vivre sur le campus ou à l'extérieur. Bien que nous aimerions pouvoir offrir plus d'options, il n'est pas financièrement viable pour nous d'entreprendre la construction et l'exploitation de nouveaux logements dans la région du Grand Toronto sans l'aide du gouvernement. Par conséquent, nous demandons que les établissements postsecondaires soient admissibles à des subventions d'investissement dans le cadre du fonds d'accélération de la construction de logements.
     Enfin, nous devons nous pencher sur le soutien essentiel dont les étudiants ont besoin pour faire la transition vers le marché du travail après l'obtention de leur diplôme. Qu'un étudiant soit canadien ou étranger, nous devons lui offrir la même éducation enrichie en théorie et en pratique appliquée. Les étudiants canadiens et étrangers qui obtiennent un diplôme de nos programmes sont prêts à répondre à la demande de compétences sur le lieu de travail, et ces lieux de travail, comme le secteur des soins de santé, en ont un besoin urgent. Le gouvernement fédéral peut les soutenir en accélérant leur carrière, en rendant tous les étudiants étrangers inscrits dans des établissements postsecondaires accrédités admissibles au programme Emplois d'été Canada, par exemple. Cela permettrait de combler les lacunes et les besoins des marchés du travail locaux, de fournir aux étudiants étrangers l'expérience de travail canadienne essentielle dont ils ont besoin, de les aider à construire leur parcours vers la résidence au Canada et de les rémunérer équitablement dans leurs placements professionnels.
     Permettez-moi de vous assurer que, d'après ce que j'ai vu de nos étudiants étrangers, ils sont précisément le genre de citoyens dont le Canada a besoin pour aider à renforcer notre tissu social et notre main-d'œuvre en santé. Le Sheridan organise un sommet sur l'expérience des étudiants étrangers plus tard cet été, ouvert aux résidants, aux étudiants, aux établissements postsecondaires, aux décideurs de tous les ordres de gouvernement et plus encore. C'est avec plaisir que nous communiquerions les recommandations de ce sommet au Comité.
     Je remercie infiniment le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes de m'avoir invitée à présenter cette députation aujourd'hui. Je vous félicite pour l'énorme travail que vous accomplissez afin d'améliorer la vie de tous les Canadiens. C'est avec grand plaisir que je répondrai à vos questions.

  (1620)  

    Merci, madame Morrison.
     Nous passons maintenant directement aux questions, en commençant par les conservateurs.
     Monsieur Lake, vous avez six minutes.
     Je vous remercie tous d'avoir pris le temps de partager votre expérience avec nous.
     Je vais commencer par Mme Hernandez et M. Hackett. Tout d'abord, il y a probablement une blague là‑dedans sur le fait que ma fille était une grande fan il y a environ 12 ans. Quand je pense à ma fille, qui a maintenant 22 ans et qui est en première année de droit, je vois la pression qu'elle subit. C'est difficile lorsque j'essaie de trouver des conseils à lui donner pour savoir si la pression est bonne ou trop forte. Par moments, elle peut être écrasante, et c'est clairement excessif.
     Dans quelle mesure la pression subie au début de l'internat et de la faculté de médecine est-elle considérée comme faisant partie de la préparation de l'avenir? Où se situe la limite de cette pression?
    Vous soulevez un point incroyablement important auquel nous faisons face en tant qu'apprenants en médecine.
     Une chose que le monde universitaire fait très bien, c'est ajouter des choses sans jamais évaluer s'il y a vraiment lieu de continuer à garder certaines des choses qui sont encore des pièces du puzzle.
    Au cours des dernières décennies, nous avons acquis dans l'enseignement médical une compréhension de la science. Nous continuons à faire de nouvelles percées dans le domaine des soins de santé et dans la façon dont nous pouvons fournir ces soins, mais nous ne regardons jamais la portée pratique de ce que nous essayons d'accomplir.
     Comme l'a mentionné le Dr Peachey, nous devons vraiment réévaluer le temps que nous consacrons aux choses et les priorités que nous établissons. Une chose importante que nous constatons dans la façon dont nous avons fait nos évaluations est que certains des aspects que nous essayons d'étudier ne font pas forcément ce que nous devons faire. Par exemple, ils intègrent les antibiotiques ou la pharmacologie dans notre programme, mais comme nous le savons, la pharmacologie change constamment. La recherche donne toujours lieu à des changements. Or, il existe une multitude d'applications qui nous donnent ces renseignements en un clin d'œil.
     Est‑ce à ça que nous devons passer notre temps, ou nous faut‑il acquérir des compétences en une bonne prestation de soins centrés sur le patient?
     Lorsqu'il s'agit des pressions qui nous sont imposées, celles‑ci se résument aux évaluations et au degré de contenu que nous essayons de fournir, mais aussi aux pressions et au vécu de nos enseignants. Ils sont soumis à leur propre fardeau en tant que prestataires de soins de santé dans ce système. Lorsque quelque chose comme la pandémie se produit, cela ne fait qu'ajouter une couche supplémentaire à leur responsabilité de former les futurs fournisseurs de soins de santé et de continuer à soutenir le système de soins de santé qui est nécessaire pour assurer la santé des Canadiens.
     Je vais intervenir. Vous avez mentionné le Dr Peachey et les soins axés sur le patient.
     Docteur Peachey, vous avez mentionné une chose qui m'a poussé à écrire une brève note ici et que j'aimerais que vous expliquiez davantage.
    Vous semblez dire que notre système a été jusqu'à présent un système axé sur les fournisseurs et qu'il doit changer. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
    Merci.
     Au fil des ans, le système de soins a clairement été axé sur le fournisseur. Cela s'explique par la nature même des systèmes de santé dont l'évolution passe par la recherche de preuves.
     Je reviens aux sages paroles de Steven Lewis, de la Saskatchewan, il y a de nombreuses années. Il a posé deux questions. Il a demandé comment peut‑on savoir si les soins qu'on donne sont axés sur le patient et comment peut‑on savoir si les soins qu'on reçoit sont axés sur le patient.
     L'un des thèmes qui en ressort — et qui a certainement été perpétué par le travail que nous avons fait — est qu'en fin de compte, il faut se poser la question: si on ne le fait pas pour le patient, pourquoi le fait‑on?
     Je pense que c'est la transition qui doit se faire.
     C'est intéressant parce que dans le genre de travail que nous faisons, nous nous heurtons souvent à une résistance au début, mais au fur et à mesure, les gens accueillent et adoptent le changement et, en fait, le font avancer.

  (1625)  

    Docteur Gratzer, je m'adresse à vous maintenant pour vous demander si vous voulez bien nous en dire plus sur ce sujet ou tout autre point que vous avez entendu, car vous avez été le premier à témoigner, avant tous les autres témoins.
     Je ne sais pas s'il y a un sujet sur lequel vous voulez vous concentrer, ou si vous voulez parler des pressions et de la mesure dans laquelle cela fait partie de la préparation.
     Je vais peut-être faire tout ça, brièvement.
    Je relève un certain thème commun dans les différents témoignages pour ce qui est de la façon dont la nature de la pression a changé en ce qui concerne les soins de santé. Il y a plus de données à connaître que jamais auparavant. C'est une bonne chose. Nous sommes en mesure d'aider les patients comme nous ne pouvions pas le faire il y a 5 ou 10 ans.
     Les attentes sont plus élevées, car la révolution des consommateurs qui a transformé d'autres aspects de l'économie transforme maintenant le secteur des soins de santé.
     Il s'agit donc de trouver un équilibre entre ce que nous attendons de nos travailleurs de la santé et ce que nous pouvons raisonnablement attendre d'eux. Je pense que lorsque nous parlons des médecins — et bien sûr, les médecins ne sont pas les seuls travailleurs de la santé — les choses deviennent encore plus difficiles parce qu'on nous a enseigné pendant si longtemps que nous ne devrions pas tomber malades, que nous devrions simplement continuer tant bien que mal, et ainsi de suite, comme si les médecins n'étaient pas humains et étaient en quelque sorte au‑dessus de ça.
    En ce qui concerne ce que nous voulons que l'effectif de santé soit, je crois qu'il nous faudra équilibrer ces éléments et reconnaître également que, même si la COVID va aller et venir, les soins de santé ont fondamentalement changé. Pensez un instant à la façon dont les gens exerçaient le métier dans les années 1970, lorsque Marcus Welby, M.D. était l'émission de télévision la plus populaire en Amérique du Nord. Près d'un foyer sur quatre regardait cette émission américaine. Si quelqu'un avait une crise cardiaque, Marcus Welby lui conseillait de garder le lit, car il n'y avait pas grand-chose d'autre à faire. Il est certain qu'on n'avait pas besoin de lire des quantités de revues médicales pour prescrire quatre ou six semaines de repos au lit.
     Aujourd'hui, bien sûr, nous disposons de produits qui détruisent les caillots. Il est prouvé que les antidépresseurs pour les personnes à risque sont indiqués après un infarctus du myocarde. Toutes ces choses se rejoignent.
     Où est‑ce que je veux en venir? Il y a eu un thème commun de reconnaissance de l'épuisement professionnel et des troubles de santé mentale, mais aussi un point commun pour nous de devoir aussi trouver des solutions innovantes.
    Merci beaucoup.
     Monsieur van Koeverden, vous avez six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
     La semaine dernière, les ministres Duclos et Khera ont annoncé conjointement l'attribution de 379 millions de dollars au Fonds pour la sécurité des soins de longue durée. On a publié des normes et bien avancé dans ce travail. Le défi qui persiste est lié à la main-d'œuvre, et c'est un aspect que nous devons régler. Les observations qui nous ont été présentées jusqu'à présent nous guideront dans nos délibérations. Je remercie tous ceux qui sont venus aujourd'hui pour nous faire part de leur point de vue.
     Ma question sera brève, mais j'aimerais pouvoir m'adresser à plus d'un témoin. Il ne me reste que cinq minutes et demie.
     Je vous demanderais, madame Morrison, en levant mon chapeau à Halton — j'ai grandi tout près du Sheridan College— , de répondre d'abord à cette question, puis de laisser suffisamment de temps aux autres pour qu'ils puissent le faire eux aussi. Ma question porte sur les titres de compétences des professionnels de la santé formés à l'étranger, dans ce pays. En cherchant des solutions pour attirer davantage de talents en amont chez les étudiants qui sont actuellement au secondaire ou qui font peut-être des études de premier cycle, c'est beau de s'attaquer à ce problème dans des années et des décennies, mais nous avons un défi à relever maintenant. Je sais que dans ma collectivité diversifiée de Milton, nous avons beaucoup d'assistants médicaux, de médecins, d'infirmières ou d'infirmiers et de préposés aux services de soutien à la personne qui occupent d'autres emplois. Ils sont bien plus qualifiés que cela.
     Comment le réseau postsecondaire de l'Ontario, mais aussi de tout le Canada peut‑il nous aider à mettre à niveau les professionnels de la santé formés à l'étranger pour que nous puissions relever ce défi dès maintenant?
    Merci pour votre leadership et votre présence dans la collectivité. Vous êtes certainement bien connu sur nos campus.
     Vous savez, l'accès est un casse-tête compliqué. Je vous dirais que nous devons le rendre financièrement viable pour les apprenants. Il faut penser à la paperasserie. Il faut penser aux processus réglementaires en particulier. En particulier pour les apprenants dont l'anglais n'est pas la langue maternelle, les obstacles sur le plan des services qu'ils peuvent fournir et de la capacité multilingue qu'ils peuvent offrir dans les collectivités, notamment dans la région du Grand Toronto, sont énormes, mais il nous faut trouver comment réduire les obstacles à la formation de ces apprenants à l'échelle locale. Il faut offrir des cours du soir. Il faut offrir des cours de fin de semaine. Il faut offrir un soutien linguistique en anglais, surtout dans le domaine de la pharmacologie, par exemple. Si vous aviez encore besoin d'étudier cette matière, pensez à la difficulté de le faire dans une deuxième ou une troisième langue.
    Je pense qu'il y a beaucoup de possibilités. Nous devons être déterminés et penser à l'accès en des termes très larges. Ce sont des fruits mûrs que nous pouvons mieux exploiter.

  (1630)  

    Merci, madame Morrison.
     Madame Hernandez, j'ai vu que vous avez beaucoup acquiescé. Puis‑je vous demander si vous avez des idées à partager?
    Oui. Absolument.
     Avant mes études de médecine, j'ai fait beaucoup de travail durant mes études de premier cycle en Colombie-Britannique par l'entremise de la BC Federation of Students. L'une des grandes enquêtes et études que nous avons réalisées portait sur l'équité pour les étudiants étrangers. Je rencontrais constamment des étudiants qui avaient exactement la formation dont vous avez parlé, mais qui n'étaient pas en mesure de franchir l'étape suivante pour faire valoir ces titres.
     À mon avis, certains éléments clés doivent être réglés dans le cadre de la politique d'immigration. Souvent, nous les faisons venir ici et nous les formons dans certains domaines, mais lorsqu'il s'agit d'obtenir les points d'immigration dont ils ont besoin pour pouvoir faire la transition, ils ont plus de points d'immigration en étant gérants chez McDonald's qu'en étant caissiers dans une banque ou aides-soignants ou certains de ces autres métiers. La façon dont l'échelle d'immigration fonctionne pour l'attribution de ces points en vue de devenir des citoyens canadiens est plus fructueuse dans d'autres domaines.
     L'autre chose que nous pourrions faire, c'est de travailler avec nos partenaires de l'enseignement postsecondaire pour créer des programmes de transition qui leur permettent d'acquérir certaines compétences linguistiques en anglais, mais aussi de satisfaire aux normes d'agrément que nous avons dans nos programmes et qui peuvent faire défaut dans les leurs. Il y a quelques différences dans les soins que nous apprenons, mais il existe des solutions vraiment pratiques. Nous avons des dirigeants dans tout le pays, tant dans l'enseignement de premier cycle que dans l'enseignement médical, qui veulent voir ce travail avancer. Malheureusement, si nous faisons ce travail, nous n'avons pas nécessairement la capacité de le mettre en oeuvre sans certains changements que le gouvernement fédéral doit apporter pour que ce soit bien fait.
    Merci, madame Hernandez; et merci pour vos années de travail dans ce domaine.
     Comme il reste environ une minute et 20 secondes, y a‑t‑il d'autres témoins qui ont des points de vue forts à partager au sujet des titres de compétences étrangers? Les points de vue moyennement forts sont tout aussi bienvenus.
     Je dirais simplement qu'il est très important de faire venir les professionnels appropriés, mais il ne s'agit pas simplement de les faire venir et de les intégrer à la main-d'oeuvre. Nous devons avoir un système qui peut les former pour que, où qu'ils soient, les patients et les collectivités reçoivent le même niveau de soins que s'il s'agissait d'un médecin formé au Canada, dans le système médical canadien. Il y a des différences. Nous voyons des systèmes où les patients sont moins bien soignés en raison du manque de formation des professionnels.
     Si vous voulez un système dans lequel nous accueillons plus de professionnels de la santé, ce dont nous avons absolument besoin, il faut que cela s'équilibre avec la formation supplémentaire qui leur est dispensée afin que nous ayons tous relativement les mêmes normes de soins.
    Merci beaucoup.
     Je vais céder le temps qui reste à la présidente.
    Merci, monsieur van Koeverden.

[Français]

    Monsieur Garon, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais remercier l'ensemble des témoins de leurs témoignages très éclairants.
    Docteure Boucher, ce qui est intéressant, c'est que nous sommes à Ottawa, le siège du gouvernement fédéral, qui ne gère pas d'hôpitaux ni de système de santé. Le gouvernement fédéral n'a pas de compétence fonctionnelle dans la gestion des services de santé. Vous avez parlé de l'augmentation du Transfert canadien en matière de santé, ou TCS. C'est un transfert inconditionnel supplémentaire qui serait versé au Québec et aux provinces.
    Nous avons grandement besoin de médecins, notamment dans les régions éloignées du Québec. De quelle façon une augmentation importante du TCS vous aiderait-elle à mettre en valeur la profession de médecin omnipraticien?
    Je vous remercie de la question.
    Permettez-moi de mentionner un élément important, à savoir les transferts au sein des facultés de médecine. Le cursus prédoctoral expose, d'une façon qui varie d'une faculté à l'autre, les étudiants à la médecine familiale dans différents secteurs de pratique et dans différentes régions au Québec, qu’il s’agisse de régions éloignées ou de régions intermédiaires. Si les universités avaient les fonds nécessaires pour inclure systématiquement des stages d'introduction à la médecine familiale dans leur cursus, tous les étudiants pourraient y être exposés au niveau prédoctoral.
    Les grandes lignes des cursus sont communes aux quatre facultés de médecine au Québec, mais il y a quand même des éléments qui varient quant à certains stages, notamment pour ce qui est de l'exposition à la médecine familiale. Cela peut contribuer au fait que l'exposition à différents modèles de médecine familiale ne soit pas optimale.

  (1635)  

    Ce que vous nous dites, c'est que la décentralisation et des facteurs régionaux importants interfèrent avec le type de formation des médecins de famille, et qu'essentiellement, ce sont les gens sur le terrain et les provinces qui sont les mieux placés pour mettre en place des formations qui correspondent aux besoins.
    Est-ce bien cela?
    Oui, c'est exactement cela.
    Ce sont les facultés de médecine qui ont le pouvoir de développer des éléments de leur cursus. Il faut bien comprendre qu'avant la sélection et le jumelage de résidents en médecine familiale ou en médecine spécialisée, les médecins ne font pas leur choix dans les deux ou trois derniers mois de leur formation prédoctorale. Ils le font plusieurs mois avant cela.
    Ces programmes nécessitent parfois plus de fonds, car il faut qu'il y ait des médecins de famille et des milieux disponibles pour les recevoir. Ensuite, il faut sortir des hôpitaux si l'on veut que les médecins de famille acquièrent de l'expérience en soins de première ligne et que leur formation ne se limite pas au milieu hospitalier. Il faut sortir des sentiers battus. Bien sûr, il y a un certain coût à cela, parce que cela prend des infrastructures, du personnel et des médecins de famille. Ceux-ci doivent se libérer ou, du moins, adapter leurs tâches liées aux soins des patients pour encadrer des apprenants.
    Je vous remercie, docteure Boucher.
    Pendant la pandémie, le gouvernement fédéral a dû injecter d'urgence plus de 30 milliards de dollars dans les systèmes de santé des provinces. Le ministre de la Santé s'en est beaucoup vanté, d'ailleurs. Maintenant, il y a du délestage, des interventions chirurgicales ont dû être repoussées et on offre un montant ponctuel de 2 milliards de dollars aux provinces et au Québec. Selon ce que je comprends, la situation des hôpitaux est critique. Vous dites que le déficit de formation en médecine familiale pourrait avoir des conséquences négatives pendant 30 ans.
    En quoi cette approche consistant à faire des transferts conditionnels, ponctuels et mal planifiés sans avoir de vision à long terme, nous empêche-t-elle de former des médecins de famille pour aider les gens sur le terrain?
    La crise sévit toujours. Même si la pandémie s'essouffle de nouveau, il y a quand même du rattrapage à faire non seulement pour donner des soins, mais aussi pour rendre le milieu attractif pour les soignants et les apprenants.
    Les transferts ponctuels nous permettent de faire un certain rattrapage, mais il faut avoir une vision à moyen et à long terme. Lorsqu'un poste en médecine familiale est laissé vacant, cela représente de 30 à 35 ans de diminution de l'accès aux soins de première ligne au Québec. Si vous multipliez ce chiffre par 1 000, je vous laisse faire le calcul quant au nombre de personnes qui n'auront pas accès aux soins. Si elles y ont accès, les délais ne seront pas toujours acceptables.
    Docteure Boucher, il avait été proposé, notamment par le Bloc québécois, de tenir un sommet national sur les soins de santé, où les acteurs du milieu auraient pu discuter de ces questions de terrain avec le premier ministre, directement avec Ottawa. Je sais que le Dr Amyot, votre président, s'est montré favorable à cette approche.
    En quoi est-ce important de sensibiliser Ottawa au fait que ce sont les gens qui travaillent sur le terrain qui sont les mieux placés pour comprendre la réalité du milieu?
    Le Canada est un très grand pays. Chaque province, chaque région, a sa propre réalité. Quand on établit de grands principes pancanadiens en matière de qualité ou d'orientation des soins de santé, l'applicabilité sur le terrain devient une question primordiale, que ce soit dans les provinces ou dans les régions. Ce sont elles les mieux placées pour connaître la réalité sur le terrain et les caractéristiques locales ou régionales en fonction du type de population, des ethnies, des réalités urbaines par rapport à la réalité des régions intermédiaires et des régions éloignées.
    Le Canada a certainement un rôle à jouer dans l'établissement de principes en matière d'équité, de soins de base et d'accès à des soins de santé gratuits, mais il faut que leur applicabilité soit évaluée par des gens sur le terrain. Il y a trop de réalités différentes d'un océan à l'autre. Il n'est pas possible d'adopter une règle unique qui s'appliquera partout de la même façon.

  (1640)  

    Je vous remercie, docteure Boucher et monsieur Garon.

[Traduction]

     Le suivant est M. Davies. Vous avez six minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
     Madame Hernandez et monsieur Hackett, j'aimerais vous poser quelques questions en premier.
     Il est établi que le Canada est en pénurie de médecins de famille. Aux dernières nouvelles, quelque cinq millions de Canadiens n'ont pas accès à un médecin de soins primaires, ce qui est assez choquant pour un pays qui prétend avoir un accès public et universel à l'assurance-maladie.
     Vous qui représentez les étudiants en médecine et la prochaine génération de médecins, pouvez-vous nous donner un aperçu de la situation? Dans quelle mesure vos collègues dans les facultés de médecine sont-ils attirés par une orientation vers la médecine familiale? Dans la négative, quelles sont les raisons pour lesquelles ils ne se dirigent pas vers la médecine familiale?
    Je peux répondre à cette question. C'est une question fantastique.
     Je suis quelqu'un qui veut être médecin de famille, alors j'ai peut-être un parti pris pour cette question. Mme Hernandez le veut aussi.
     C'est une très bonne question et quelque chose qui, comme nous l'avons dit, est très propre à la région et aux personnes qui entrent à la faculté de médecine. Les conversations sur les perspectives de carrière dans les facultés de médecine montrent qu'il faut trouver ce qui vous apporte le plus de joie et ce dans quoi vous excellerez. En fin de compte, être médecin, n'importe lequel des différents types de médecins, est une chose très personnelle.
     En fin de compte, les facultés de médecine nous apprennent à être des généralistes. Nous obtenons notre diplôme en possédant toutes les compétences de base pour être un médecin d'un point de vue général, mais les soins ont tellement changé au cours des 20 ou 30 dernières années, que de plus en plus d'hyperspécialisations sont nécessaires en raison de la qualité des soins et de la nature expansive des spécialités de soins de santé.
     Parallèlement, vous avez mentionné qu'il y a un immense besoin de médecins de famille dans ce pays. En tant qu'étudiant actuellement en stage clinique, c'est quelque chose que je constate assez couramment. Le nombre de personnes qui n'ont pas de médecin de famille et qui se présentent au service des urgences ou à l'hôpital est incommensurable. L'impact — non seulement des facteurs systémiques, mais aussi de la médecine préventive pour ce qui est de l'accès aux soins — est dévastateur pour ces patients.
     Du point de vue des étudiants en médecine, c'est une chose dont nous devons tous tenir compte, dont nous avons besoin en tant qu'individus et dont les populations que nous essayons de servir ont également besoin.
    Malheureusement, il y a un programme caché dans l'enseignement qui nous est donné par des sous-spécialistes. Une grande partie de cela vient de la façon dont la rémunération de nos précepteurs est donnée.
    Nos gens au Québec — la FMEQ, l'organisation étudiante qui représente les étudiants québécois — nous disent que les médecins de famille enseignants ne sont pas rémunérés de la même façon que les spécialistes, ce qui les incite moins à participer à notre enseignement. Si nous ne sommes pas formés par des médecins de famille, comment sommes-nous censés nous enthousiasmer? Comment inciter les étudiants à vouloir devenir médecins de famille?
     J'adore la médecine familiale, c'est ce que j'ai toujours voulu faire, et en tant qu'étudiant en médecine militaire, j'ai la chance de pouvoir poursuivre sur cette voie. Cependant, nous devons soutenir nos médecins pour qu'ils puissent nous enseigner, nous enthousiasmer pour cette profession. C'est ce que nous ne voyons pas, le soutien de nos médecins qui sont sur le terrain et qui sont nos éducateurs.
    Merci.
     Pour en revenir à la résidence, monsieur Hackett, je crois que vous en avez parlé.
     Je suis curieux de savoir combien de diplômés, approximativement, des facultés de médecine canadiennes ne correspondent pas à un poste de résidence au Canada et sont donc incapables d'exercer la médecine dans cette région.
    Si vous voulez approfondir cette question, vous pouvez le demander à Mme Hernandez.

  (1645)  

    Oui. Comme je siège à ces comités, j'ai probablement plus de chiffres en tête.
     Je vous en prie, madame Hernandez. Je pensais que c'était M. Hackett qui avait soulevé la question.
    Oui, il a certainement soulevé le point.
     En moyenne, récemment, nous avons vu environ 70 étudiants en médecine par année ne pas être jumelés après le deuxième tour. Souvent, nous avons de nombreuses places en médecine familiale qui sont disponibles, surtout au Québec. Cette province réussit mieux à rendre plus de places disponibles.
     Souvent, ça devient une question politique. Comme vous pouvez le constater, en Alberta, nos médecins n'ont pas vraiment de contrat, de sorte que leur rémunération peut varier considérablement. Cela a certainement un impact sur les personnes qui souhaitent s'orienter vers la médecine familiale ici, en Alberta. Cette année, 26 % de nos places en médecine familiale n'ont pas été jumelées à l'Université de Calgary, ce qui est le taux le plus élevé que nous ayons vu.
    En tant que personne qui veut être jumelée ici, en Alberta, parce que ma famille est ici et que mes ancêtres viennent de la Première Nation de Cold Lake, dans le nord de l'Alberta, j'aimerais pouvoir rester ici et pratiquer ici, dans ma province. Malheureusement, il y a un aspect politique à la médecine, comme vous le voyez ici, comme nous vous le représentons aujourd'hui, car il y a des pièces politiques qui soutiennent notre succès continu et les gouvernements décident des places en résidence. Par conséquent, nous devons travailler avec eux pour élaborer des programmes qui ont des places pour les étudiants, afin de pouvoir continuer à les former.
    Monsieur le président, me reste‑t‑il du temps?
    Il vous reste environ une demi-minute.
    Rapidement, alors, madame Hernandez, vous avez mentionné que vous veniez d'une région rurale. Nous savons que le Canada accuse déjà un retard par rapport aux autres pays membres de l'OCDE en ce qui concerne le nombre de médecins pour mille, mais cette situation est particulièrement grave dans les grandes régions rurales du Canada. Bien que 19 % des Canadiens vivent dans des zones rurales, elles ne sont desservies que par 8 % des médecins.
     Avez-vous des suggestions à nous faire sur la façon d'attirer les jeunes étudiants en médecine pour qu'ils exercent dans des régions rurales ou mal desservies?
    Ayant dû voyager 27 heures pour accoucher de mon troisième enfant parce que je vivais à Fort Nelson, en Colombie-Britannique, à l'époque, je pense qu'un élément clé est de donner aux collectivités rurales l'accès aux ressources dont elles ont besoin pour fournir des soins. J'ai dû me rendre à Burnaby pour accoucher parce que c'était le seul endroit où je pouvais me permettre de rester avec ma famille.
     Si nous avions accès à des ressources là‑bas, comme l'anesthésie, l'échographie et des choses comme ça...
    J'ai dû voyager quatre heures pour mon échographie.
     Les médecins ne veulent pas forcément exercer là où ils n'ont pas les ressources nécessaires pour soigner leurs patients. Ils ont constamment l'impression de laisser tomber ces personnes parce qu'ils ne peuvent pas faire les choses dans un délai adéquat et qu'ils dépendent désespérément de partenaires urbains qui acceptent de prendre certains de leurs patients de façon réactive plutôt que proactive.
    Monsieur le président, le compte rendu pourrait refléter le hochement de tête enthousiaste de M. Hackett.
    Oui, un hochement de tête très enthousiaste. Je vous remercie.
    En fait, je suis heureux que vous ayez posé cette dernière question. C'était un très bon échange, très utile pour nous. Je vous remercie tous les deux.
     Le prochain intervenant est M. Ellis. Vous avez cinq minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président; et merci à tous les témoins.
    J'ai été médecin de famille pendant 26 ans et j'ai été intimement lié à ce système sous tous les aspects de la médecine familiale, c'est donc un sujet qui me tient à cœur.
     La véritable prémisse pour moi est que je ne suis pas tout à fait certain que la population canadienne comprenne le précipice au bord duquel nous nous trouvons tous en tant que citoyens canadiens, avec le désastre imminent, et cela m'effraie.
    Cela dit, docteur Gratzer, vous avez beaucoup parlé de l'épuisement des médecins, la moitié peut-être des médecins étant épuisés à l'heure actuelle.
     C'est une généralisation grossière, mais si les médecins doivent se remettre de l'épuisement professionnel, pourriez-vous, en quelques mots, nous dire comment cela pourrait se produire, et combien de temps cela prendrait‑il, le cas échéant?
    Chaque personne est différente et le vécu de chacune est différent, mais nous constatons qu'au cours des 10 dernières années, la documentation est devenue beaucoup plus réfléchie et mature, ce qui est une façon élégante de dire que d'autres personnes cherchent des réponses et je pense qu'il y en a quelques-unes.
     Elles comprennent, tout d'abord, une culture du bien-être permettant aux médecins d'obtenir des soins, et des soins en temps opportun, et rendant acceptable le fait que les médecins le souhaitent. Nous constatons également que l'autonomisation peut être utile. Bien que je sois très reconnaissant d'être médecin, il y a des frustrations incroyables, comme d'autres l'ont dit aujourd'hui, y compris des frustrations très modernes en ce qui concerne les dossiers médicaux électroniques et autres. Ce sont des problèmes qu'il serait utile de régler, parfois par des mesures très simples.
     Bien sûr, on peut aussi penser à des façons dont les médecins pourraient se soutenir mutuellement, tout comme les autres travailleurs de la santé. On pense au soutien entre les pairs, et ainsi de suite.
     Ce que je veux dire, c'est que si l'épuisement professionnel est un phénomène très courant, il existe des mesures très raisonnables que l'on peut prendre pour y remédier. La clé est de le faire et de s'éloigner de la pensée qui prévalait il n'y a pas si longtemps en Amérique du Nord et en Occident, à savoir que les médecins ne tombent pas malades et que nous n'avons pas besoin de nous soucier de leur santé.
     Nous avons passé énormément de temps aujourd'hui à parler de la façon d'attirer plus de gens dans le secteur des soins de santé, des conversations très raisonnables, et elles nous font comprendre l'importance de retenir ces personnes et de s'assurer qu'elles travaillent de façon efficace et efficiente également.

  (1650)  

    Très bien. Je vous remercie de tout ça.
    Docteur Sahgal, vous travaillez certainement dans un domaine très sous-spécialisé: la radiothérapie du cerveau et de la colonne vertébrale. Comment allons-nous rattraper le nombre de médecins qui nous manque?
    Vous avez parlé des dossiers médicaux électroniques et de la réduction du travail administratif, mais nous avons également besoin de plus de personnes pour faire le travail. Comment allons-nous les faire entrer rapidement dans le système canadien?
    Je dirai que nous avons constaté qu'en raison des retards causés par la pandémie, les cancers sont beaucoup plus avancés qu'ils ne l'étaient auparavant. Les choses que nous voyons sont horribles et nous ne les avons jamais vues.
     Nous essayons tous de travailler pour rattraper le retard. Les horaires sont vraiment très longs et nous avons besoin de plus de personnel. Il ne s'agit pas seulement d'engager plus de personnel, mais aussi de faire en sorte que les hôpitaux permettent à ce personnel de travailler.
     Voici ce qui se passe. Un certain nombre de médecins peuvent faire une certaine quantité de travail, mais nous n'avons pas les infirmières ou le personnel de bureau nécessaires. Les hôpitaux essaient de réduire leur budget en diminuant l'aide apportée aux médecins et au personnel paramédical, ce qui augmente notre charge. Cette charge pèse toujours sur nous, car nous ne sommes pas des employés de l'hôpital, mais des personnes travaillant dans le cadre des soins hospitaliers.
     En fin de compte, nous devons augmenter le nombre de médecins pour combattre le fardeau, mais le système doit s'assurer qu'il nous donne le degré de soutien nécessaire pour travailler parce que, comme on l'a déjà mentionné, nous faisons tout ce que nous faisons, mais nous n'avons pas le soutien nécessaire pour remplir notre mandat de prendre soin des patients.
    Je vous remercie.
     Il nous reste environ 30 secondes.
     Monsieur Hackett, vous avez fait un commentaire que j'ai trouvé intéressant. Vous avez dit que c'était une année marquante pour toutes les mauvaises raisons. Sans parler de la COVID, je suppose que vous parliez d'autre chose. Peut-être pourriez-vous nous éclairer à ce sujet.
    Oui, absolument.
    Il s'agissait du point concernant les diplômés qui n'obtiennent pas une place dans notre pays. C'est un élément important de l'épuisement des étudiants.
     Imaginez l'étudiant qui passe par toutes les étapes nécessaires pour entrer à la faculté de médecine, qui fait partie des quelques personnes admises, qui apprend tout ce qu'il doit apprendre, qui termine ses stages cliniques, qui prépare une demande d'emploi pour le poste qu'il souhaite occuper dans sa collectivité, et qui ne l'obtient pas, qui n'est jumelé à rien du tout.
     Je ne peux vous décrire à quel point c'est traumatisant pour les gens. Mme Hernandez et moi avons parlé à de nombreux étudiants cette année en particulier qui ont vécu cela et c'est une source énorme d'épuisement pour les étudiants dans la profession médicale. De toute évidence, c'est un gaspillage de ressources, car ce sont des personnes qui sont déjà des médecins diplômés et qui n'entrent pas dans le système.
    Merci, monsieur Hackett, et monsieur Ellis.
     Ensuite, c'est le tour de Mme Sidhu, pour cinq minutes. Allez‑y, madame, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à tous les témoins d'être avec nous.
     Ma première question s'adresse au Dr Sahgal. Je vous remercie pour le travail acharné que vous faites à Sunnybrook. Je veux simplement me faire l'écho de mes collègues.
     De nombreuses familles ont dû faire face à des retards dans les opérations chirurgicales et le dépistage du cancer. Après la pandémie, nous nous attendons à voir une augmentation du taux de cancer. Avec l'investissement fédéral récent de 2 milliards de dollars pour s'attaquer à ce problème... De prime abord, que recommandez-vous?
     Vous avez également dit que pour combattre ce fardeau... Qu'en pensez-vous? À quel rythme pouvons-nous augmenter les ressources? Quels types de ressources pouvons-nous fournir?
    Merci beaucoup, madame Sidhu.
     Je pense que l'un des problèmes est celui des lits de soins intensifs. Nous devons absolument augmenter la capacité de l'unité de soins intensifs; ensuite, les opérations chirurgicales pourront avoir lieu. Parallèlement à l'augmentation de la capacité des soins intensifs, nous avons besoin de personnel. C'est là que nous commençons à échouer. Nous n'avons pas les infirmières et le personnel nécessaires pour le soin postopératoire des patients. C'est un équilibre très délicat à l'heure actuelle.
     J'aimerais simplement faire comprendre au Comité que la disparité entre les divers systèmes de santé, qui prévoient des budgets pour le personnel de bureau et le personnel infirmier afin d'essayer de gérer les pressions qui s'exercent sur le système hospitalier, n'aide pas forcément l'arriéré des cas de COVID. C'est là que les patients atteints de cancer souffrent. Il est plus difficile pour nous d'obtenir des tests lorsque nous savons que nous en avons besoin. Il est plus difficile pour nous d'obtenir des opérations chirurgicales. Nous n'avons plus de soutien infirmier comme avant. Encore une fois, nous sommes surchargés par les tâches administratives.
     Quel que soit le paiement de transfert, si vous pouvez vous assurer que certains montants sont dirigés vers ces services afin que nous puissions faire notre travail, ce serait très positif en ce qui concerne le taux d'épuisement professionnel.

  (1655)  

    Merci.
     La prochaine question s'adresse à Mme Morrison.
     Madame Morrison, merci pour votre leadership.
     Nous avons beaucoup entendu parler au cours de ces réunions du fait que la formation et les titres de compétence des travailleurs de la santé formés à l'étranger ne sont pas reconnus. Quel rôle aimeriez-vous que les collèges aient pour résoudre ce problème et faire en sorte que des professionnels qualifiés occupent les bons emplois?
    Lorsque nous avons organisé le sommet sur les soins de santé à Sheridan à la fin janvier — une table ronde, comme je l'ai dit —, j'ai été très impressionnée par la discussion et les solutions proposées. Elles ne sont pas particulièrement incroyables. Le problème touche les talents. Nous avons entendu dire qu'il s'agit du champ d'exercice, et qu'il faut veiller à ce que tout le champ d'exercice professionnel soit dûment exploité. Tout cela revient au modèle de soins — les bons soins au bon moment et au bon endroit.
     Un grand nombre des solutions proposées par les partenaires étaient axées sur plusieurs des thèmes dont nous avons parlé aujourd'hui, comme la collaboration, l'utilisation de la technologie, la sensibilisation des collectivités mal desservies et l'utilisation des données pour savoir où nous allons et ce qui doit se passer.
     Je me dois de souligner que j'ai œuvré dans le domaine de la formation médicale pendant près de la moitié de ma carrière postsecondaire. Il est essentiel de faire en sorte que nous disposons de bons talents dans les services auxiliaires pour que les médecins et les talents plus spécialisés puissent faire leur travail. Le manque d'attention visant les préposés aux services de soutien, les infirmières auxiliaires et le personnel de soutien médical administratif... Je pense que cela mérite toute notre attention dès maintenant.
    Merci.
     Vous avez mentionné l'idée de se prémunir contre la prochaine pandémie en se concentrant sur les maladies chroniques. Comme vous le savez, de nombreuses maladies chroniques sont une préoccupation majeure dans de nombreuses collectivités au Canada, y compris dans la région de Peel.
     Comment le gouvernement peut‑il promouvoir le rôle du secteur de l'enseignement postsecondaire pour aider à atteindre nos objectifs communs?
    C'est une excellente question.
     Je suis toujours étonnée lorsque j'entends certaines données dans ce domaine. Vous et moi savons très bien que la moitié des adultes de Peel déclarent vivre avec un problème de santé chronique, que les Sud-Asiatiques, en particulier, sont de 15 à 20 % plus susceptibles de développer un diabète et que le risque de diabète chez les femmes noires a grimpé en flèche au cours des dernières années.
     Il existe des programmes dans le secteur postsecondaire, tant au niveau des collèges que des universités, qui sont vraiment axés sur des campagnes d'éducation et de sensibilisation, ainsi que sur le changement de perspective et, aussi, de mode de vie. Tout au long du continuum de soins, nous devons faire bouger les gens. Nous devons aider les gens à faire de l'exercice. Nos programmes de kinésiologie, de thérapie sportive et d'ostéopathie, par exemple, ont tous pour but de soutenir les gens avant qu'ils ne reçoivent un diagnostic de maladie chronique, et certainement après.
     Je pense que les collèges, les instituts, les polytechniques et les universités peuvent travailler en collaboration pour s'assurer que nous avons les bons talents pour être proactifs et en amont dans le ressourcement du système — et, avec un peu de chance, avant qu'il ne soit surchargé.

  (1700)  

    Merci, madame Morrison et madame Sidhu.

[Français]

    Monsieur Garon, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Docteure Boucher, le Transfert canadien en matière de santé représentait jadis 35 % des coûts du système. Ce pourcentage a diminué à 22 %, et il sera appelé à diminuer encore pour atteindre 18 %.
    J'ai grandi dans une petite ville près de Senneterre, en Abitibi. Aujourd'hui, les citoyens n'ont plus accès à un médecin de famille et l'hôpital est fermé. Ils n'ont plus accès à des salles d'accouchement. En fait, pour les familles, l'accès aux services de santé est très difficile.
    Selon vous, si le Transfert canadien en matière de santé était rétabli à un niveau qui permettrait de couvrir 35 % des coûts du système, quelles seraient les retombées relativement aux services réels pour les familles québécoises qui vivent en région?
    C'est une excellente question.
    Je crois qu'il faudra être imaginatif, parce que le fait d'investir de l'argent ne permettra pas nécessairement d'obtenir la main-d'œuvre nécessaire. Par contre, cela pourrait faciliter la formation continue, un peu comme le mentionnait Mme Morrison.
    Il y a aussi d'autres éléments dont il faut tenir compte. Nous sommes au XXIe siècle, et il faut adopter des façons de faire modernes.
    Je pense notamment à la télémédecine et au réseautage. Des médecins peuvent se rendre en région, mais la structure du système de soins doit permettre aux citoyens d'avoir accès à des soins et à des spécialistes. On ne peut pas demander à plusieurs spécialistes de s'installer en Abitibi ou dans des endroits peu densément peuplés, parce qu'ils ne pourront pas maintenir leurs compétences à jour s'ils ne sont pas exposés à certains cas.
    Par contre, les consultations médicales en ligne ainsi que le réseautage en télémédecine et l'accès à des spécialistes par téléphone, tant pour les consultations entre médecins et patients que pour les consultations entre médecins, sont des facteurs qui permettraient d'améliorer l'offre de services dans les régions rurales et dans les régions éloignées.
    Cependant, tout cela entraîne des coûts. Une augmentation des transferts en santé vers les provinces permettrait un meilleur accès dans toutes les régions, tout en tenant compte des besoins en matière de main-d'œuvre. On ne crée pas la main-d'œuvre, et il est impossible de multiplier les effectifs existants. On peut toutefois favoriser la formation de nouveaux médecins au moyen de programmes. Le problème lié au manque de main-d’œuvre n'existe pas seulement dans le domaine de la santé, il existe aussi dans plusieurs autres domaines.
    Il faut nous doter de systèmes qui permettent l'accès aux soins de santé. Du moins, il faut que les professionnels de la santé, les spécialistes et les autres intervenants, aient du soutien.
    Grâce aux moyens informatiques, technologiques ou robotiques contemporains, les médecins peuvent faire à distance l'auscultation, l'écographie, des manipulations médicales et des interventions chirurgicales. Cependant, il importe de ne pas oublier les coûts engendrés par ces nouvelles façons de faire. Cela nécessiterait, entre autres choses, une augmentation des transferts de fonds en santé.
    Je vous remercie, docteure Boucher et monsieur Garon.

[Traduction]

    La personne suivante est M. Davies, s'il vous plaît, pour deux minutes et demie.
    Merci.
     Docteur Peachey, divers témoins nous ont dit qu'au Canada, nous sommes noyés de données, mais que nous ne semblons pas être en mesure de les réunir à l'échelle nationale lorsqu'il s'agit de gérer la crise des ressources humaines dans le secteur de la santé.
     Avez-vous des idées ou des conseils à donner à ce comité sur la façon dont nous pouvons mieux utiliser les données pour traiter plus efficacement ce problème?
    Je pense que le problème est le suivant: il existe de très bonnes données, mais, comme vous l'avez indiqué, souvent, elles ne sont pas utilisées. Parfois, les détenteurs de données ne sont pas conscients de la qualité de leurs données. Lorsque les données commencent à être utilisées, les gens commencent à s'y intéresser.
    Quant à la question de savoir où nous allons à partir de là et comment les données sont utilisées, on peut l'envisager de différentes manières, à mon avis. Revenons à la question des soins centrés sur le patient qui a été soulevée plus tôt. Les données suggèrent, selon toutes sortes de paramètres, que ce n'est tout simplement pas le cas. En réalité, au début, il y a plusieurs années, nous ne planifions que les ressources médicales, jusqu'à ce que nous ayons pris conscience du fait que cela ne faisait que perpétuer le modèle médical. Aujourd'hui, nous refusons les plans de ressources médicales et nous ne faisons que des plans de services cliniques et préventifs, et 50 % de ce travail — qui prend six à neuf mois au début d'un projet — repose sur la collecte et l'examen de données. Il ne s'agit pas d'un exercice purement quantitatif, car il faut aussi avoir une composante qualitative.
     Les données sont généralement meilleures que ce que la plupart des gens pensent. Elles ne sont simplement pas utilisées. On peut en dire autant de la planification des services ou de la façon dont nous analysons la rémunération des médecins. Cela s'étend à tout. Vous avez tout à fait raison. Les données sont là et ne demandent qu'à être utilisées.

  (1705)  

    Vous avez probablement vu un peu le problème auquel nous sommes confrontés. Certaines personnes sont d'avis catégoriquement que la prestation des soins de santé est de compétence provinciale, mais, bien sûr, le gouvernement fédéral joue un rôle dans ce domaine. C'est un peu comme presser un ballon rempli d'eau. Si nous réglons un problème de ressources humaines dans une région du pays, nous pourrions finir par nuire à une autre.
     Quel est le rôle du gouvernement fédéral dans la coordination d'une approche nationale pour régler ce problème?
    Veuillez répondre aussi succinctement que possible.
    À mon avis, il s'agit d'entreprendre les analyses nécessaires produire une seule méthode utilisée dans l'ensemble des provinces et territoires. Une méthode unique nous permettrait de recueillir les données et de commencer à les examiner à l'échelle nationale. Tant que nous aurons 13 systèmes de soins de santé autonomes, cela ne se produira pas.
    Merci, monsieur Davies.
     Nous avons maintenant Mme Goodridge pour cinq minutes.
     Je remercie les témoins de leur témoignage d'aujourd'hui. C'est toujours spectaculaire d'avoir une perspective aussi différente sur certaines de ces questions.
     Je ne vois pas Mme Hernandez à l'écran. Elle s'est peut-être déconnectée, ce qui est regrettable. J'allais lui parler du tout nouvel hôpital de la base de la 4e escadre Cold Lake — et peut-être, monsieur Hackett, vous pourriez lui en faire part, si c'est quelque chose qui l'intéresse. Nous avons un tout nouveau centre de santé à la 4e escadre. J'aimerais beaucoup qu'elle revienne un peu plus près de chez elle.
     Vous parliez des places de résidence, et du fait que tant de résidences ne sont pas pourvues. Ma circonscription est Fort McMurray—Cold Lake, et nous avons un grand nombre de collectivités rurales, nordiques et isolées. Nous aimerions beaucoup avoir des résidents qui se forment directement dans nos collectivités. Je sais qu'il y a certains défis à relever à cet égard.
     Avez-vous des idées sur la façon dont nous pourrions améliorer et augmenter le nombre de résidents dans certaines de ces collectivités rurales?
    Absolument, et, oui, Mme Hernandez a dû se retirer. Elle devait se rendre dans un autre endroit pour parler de cette question précise.
     Lorsqu'il s'agit d'engager des résidents et des étudiants en médecine dans des régions plus rurales, en fin de compte, si l'on considère la question du point de vue « le plus tôt possible dans le pipeline », bien sûr, la meilleure façon de recruter des gens dans une région est de recruter les gens de cette région, alors il faut examiner les possibilités pour les gens des régions rurales de s'inscrire à la faculté de médecine.
     Du point de vue du gouvernement fédéral, il s'agit de réduire l'obstacle des coûts et d'augmenter les possibilités pour les personnes de cette région d'acquérir l'éducation requise pour pouvoir postuler et ensuite être admises. Nous avons vu que les admissions dans les facultés de médecine commencent à se pencher sur cette question, mais en amont, il faut également travailler beaucoup plus sur ce point.
     Pour ce qui est d'attirer les résidents actuels dans ces espaces, il s'agit en fin de compte d'investir dans la formation offerte dans ces endroits.
    Mme Hernandez a mentionné que l'un des principaux problèmes de la médecine rurale est qu'elle est souvent en manque de personnel, car elle ne dispose pas des mêmes ressources. Par exemple, j'ai fait l'une de mes rotations cliniques à Wiarton, une collectivité qui n'est pas trop rurale par rapport à d'autres dans le nord de l'Ontario, mais il y avait quand même des décisions à prendre en matière de gestion, car nous ne disposions pas, par exemple, d'un tomodensitomètre que nous pouvions utiliser immédiatement, ou de tous les bilans sanguins que nous pouvons normalement faire faire.
     Rendre ces endroits plus attrayants pour les médecins de différents horizons en s'assurant que ces ressources sont disponibles est un élément, et aussi un partenariat avec les facultés de médecine et un investissement dans plus de places peut-être dans ces endroits serait aussi une chose fantastique. En fin de compte, les gestionnaires essaient de répartir les places dans les résidences du mieux possible en fonction des régions. En définitive, nous n'avons qu'un nombre limité de facultés de médecine et moins de places.
     Ce sont là deux ou trois choses que nous pouvons faire.

  (1710)  

    Fantastique.
     Selon certains de mes amis qui ont fait leurs études de médecine, comme les facultés de médecine se trouvent dans les grands centres, une fois que les étudiants s'habituent au fait qu'ils peuvent aller dans n'importe quel restaurant à n'importe quelle heure de la journée, il devient un peu moins intéressant pour eux de retourner dans certaines de ces collectivités rurales, mais je vais faire un peu de publicité pour ma collectivité en précisant qu'il y a des vols directs Fort McMurray-Toronto, et que l'on peut donc rentrer chez soi très souvent.
     Docteur Sahgal, je vous ai vu acquiescer. Avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je dirais simplement que le point qui a été soulevé est qu'équiper ces communautés rurales avec des services pour que les médecins puissent faire leur travail réduira le stress sur les médecins et améliorera les taux d'épuisement professionnel. Nous devons nous rappeler que si le système ne fournit pas ce tomodensitomètre, c'est toujours le médecin qui a la responsabilité médicale du patient. Si quelque chose ne va pas, ce n'est pas l'hôpital ou le système qui peut être blâmé, mais c'est nous que l'on blâme. Il ne s'agit pas seulement d'action en justice. C'est notre propre blâme moral que nous nous imposons. Ce stress est quelque chose que la plupart des professionnels ne comprennent pas vraiment, lorsque nous n'avons pas pu obtenir un test et qu'une personne meurt sous nos yeux.
    Merci beaucoup, docteur Sahgal.
     Madame Goodridge, vous faites un travail incroyablement efficace de recrutement et de vente de votre circonscription. Bravo.
     Monsieur Jowhari, à vous la parole s'il vous plaît, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à tous les témoins.
     Je vais commencer par M. Hackett. Au cours de la dernière heure, nous avons été nombreux à parler du jumelage des résidents. Pouvez-vous nous expliquer brièvement comment fonctionne le processus de jumelage? Comment est‑il réparti entre les diplômés de nos propres universités, les personnes accréditées à l'échelle internationale qui viennent ici et beaucoup de mes amis qui vont aux États-Unis pour obtenir leur diplôme de médecine et qui reviennent ici et doivent faire leur résidence? Qui fixe les objectifs? Comment ces objectifs sont-ils fixés? Qui joue un rôle, du point de vue du gouvernement, dans l'établissement de ces objectifs? Comment le gouvernement fédéral peut‑il aider?
    Je peux absolument répondre aux six questions, oui. Je vous en remercie.
     En ce qui concerne le fonctionnement du processus de jumelage des résidents, essentiellement au cours de notre dernière année d'études en médecine, nous suivons un processus de stages facultatifs au cours duquel nous choisissons des endroits et des programmes précis que nous voulons visiter et dans lesquels faire une rotation. Nous accumulons les différentes pièces de notre dossier de candidature, puis nous soumettons un classement final de nos programmes préférés dans ces endroits précis et nous postulons ensuite aux endroits où nous voulons faire une résidence.
     Nous espérons ensuite obtenir des entretiens à ces endroits, avoir une entrevue, puis soumettre notre ordre final de préférence. De leur côté, les programmes soumettent également leur ordre définitif de préférence pour les candidats.
     Ces ordres, ainsi que nos candidatures, sont transmis à une organisation appelée CaRMS, le service canadien de jumelage des résidents. Cet organisme fait un excellent travail au moyen d'un algorithme qui fait correspondre l'étudiant et le programme, en fonction des facteurs que j'ai décrits.
     En ce qui concerne le rôle du gouvernement — je crois que c'était la partie suivante de votre question, à savoir comment le gouvernement...
    Votre témoignage indique que c'est le gouvernement qui détermine le nombre de places. Quel ordre de gouvernement prend cette décision?
    C'est de compétence provinciale. Essentiellement, le système fonctionne de la façon suivante: il est censé y avoir une allocation de ressources humaines et de santé pour ces places, où l'on examine les besoins des collectivités, le besoin de types particuliers de médecins dans ces endroits, ainsi que les places prédéfinies qui déterminent les spécialistes, et ces places sont ensuite ouvertes à recevoir une demande.
     Malheureusement, je crois comprendre que cela ne se produit pas aussi souvent qu'il le faudrait, de sorte que souvent nous postulons à des processus qui sont dépassés, et les postes pour lesquels nous postulons ne sont pas forcément ceux qui correspondent au besoin à ce moment précis. Le gouvernement œuvre dans ce processus en gérant ce modèle, mais aussi en finançant les postes en fonction des besoins de la collectivité.
     C'est le contexte provincial, mais, comme on l'a déjà mentionné, le gouvernement fédéral doit tenir compte des besoins de notre système pancanadien d'une manière que les gouvernements provinciaux ne peuvent pas toujours faire dans leur propre contexte, de sorte qu'il dirige ce dont nous avons besoin en tant que pays et qu'il donne aux provinces les outils qu'elles peuvent utiliser pour répondre à leurs besoins particuliers en fonction du contexte dans lequel le gouvernement fédéral travaille.

  (1715)  

    Merci.
     Recommanderiez-vous que le gouvernement fédéral lie une partie de ses transferts à l'établissement de certains de ces objectifs pour aider les provinces à ouvrir certains de ces créneaux?
    C'est une question délicate. En fin de compte, c'est quelque chose qui devrait être examiné, mais cela dépend aussi de la façon dont c'est fait. Ce sont les provinces qui connaissent le mieux leur contexte, ou qui devraient le connaître, et elles devraient collaborer avec les régions, les collectivités et les facultés de médecine de ces régions. En définitive, comme je l'ai dit, s'il est possible d'établir certaines priorités nationales et si ces priorités doivent être respectées en les rattachant à un transfert, je crois que c'est quelque chose qui devrait être examiné, mais bien sûr, tout se joue dans les détails dans ce genre de choses.
    Comme il reste 30 secondes, je vais passer rapidement au Dr Sahgal.
     Merci beaucoup pour l'excellent travail que vous et votre équipe faites à Sunnybrook. J'ai un très bon ami, le Dr Pirouzmand, qui travaille également à Sunnybrook.
     Vous avez parlé de technologie, et je sais que vous travaillez sur une technologie plus récente, le MR‑Linac, qui est censé accélérer le processus d'imagerie. Pouvez-vous nous en parler et nous dire comment cette technologie va nous aider à éliminer certains de ces arriérés?
    La technologie MR‑Linac est l'une de celles que nous avons introduites ici en tant que première au Canada pour essayer d'obtenir une plateforme technologique permettant de réduire le nombre de traitements. Au lieu de six semaines de radiothérapie, nous pouvons maintenant le faire en une semaine.
     Ce qui est important ici, c'est de savoir comment nous avons obtenu cette technologie. Nous avons dû lever des fonds par le truchement de la philanthropie. Nous avons eu des subventions gouvernementales. Nous sommes allés voir notre système hospitalier et les avons suppliés de nous donner de l'argent, et ils ont été très heureux de nous fournir un financement pour l'innovation. C'est la combinaison de la philanthropie, des subventions gouvernementales et du budget de l'hôpital qui a permis d'y aboutir. Il n'y a pas beaucoup d'endroits qui peuvent le faire comme Sunnybrook, alors même si nous avons fait quelque chose d'extraordinaire ici à Sunnybrook, ce n'est pas quelque chose qui peut nécessairement être imité dans tout le pays, et c'est là qu'entre en jeu l'équité dans l'allocation des ressources.
    Merci, docteur Sahgal et monsieur Jowhari.
    Le prochain intervenant est M. Lake, pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
     C'est une excellente réunion, et j'aimerais avoir un tour de 10 heures pour poser des questions en ce moment.
     Nous avons beaucoup parlé des problèmes et des défis au cours de plusieurs réunions sur ce sujet, et j'ai l'impression que, parfois, nous ne passons pas assez de temps à parler des solutions possibles, et je pense un peu au caractère mesurable et à l'image de la réussite.
     Je vais peut-être poser cette question de manière assez large et ouverte, en commençant par le Dr Gratzer. De quoi aurait l'air la réussite? Pouvez-vous donner des exemples de réussite?
    Vous avez deux questions ici, et l'une est de savoir comment nous la mesurerions. Je pense que c'est une excellente question car, sans paramètres, comment pouvons-nous savoir si ce que nous faisons est bénéfique? Je dirais qu'avec le temps, il y aurait lieu d'établir des paramètres nationaux sur l'épuisement professionnel, ce qui permettrait également de responsabiliser le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.
     Vous demandez également où nous pourrions trouver des idées et des expériences, et voici quelque chose d'important à considérer lorsque nous pensons à l'épuisement professionnel. Nous ne voulons pas nécessairement être trop créatifs ou trop novateurs; copions les idées de notre administration et d'autres administrations qui ont trouvé des moyens novateurs d'aider les gens, en particulier les médecins.
     Encore une fois, j'ai abordé quelques-unes de ces choses, et je ne veux pas utiliser tout votre temps, mais les communautés de pratique et la recherche de moyens pour que les médecins se sentent plus efficaces sont de bons exemples. Il faut aussi faciliter l'accès aux soins, compte tenu de la stigmatisation, particulièrement au sein du corps médical, de l'accès aux soins.
    Docteur Sahgal, vous avez parlé d'efficacité et j'ai noté des outils pour « laisser les médecins être des médecins », ce qui semble avoir été repris tout au long de la conversation aujourd'hui.
     Quels exemples pourriez-vous donner à cet égard? Où sont les exemples les plus flagrants de médecins qui perdent du temps à faire des choses auxquelles ils ne devraient pas consacrer de temps?

  (1720)  

    Je peux vous dire que même en ce qui concerne ma propre vie familiale, ma femme travaille au Women's College où ils ont un système de dossiers médicaux électroniques. Elle passe des heures à saisir les médicaments des patients, à s'assurer qu'elle envoie les notes par télécopieur aux médecins concernés et à taper les numéros de télécopieur. Notre système ici à Sunnybrook est un peu différent. Nous n'avons pas cela. Nous utilisons différentes stratégies efficaces pour que je n'aie pas à consacrer quatre heures à des tâches administratives après avoir vu des patients.
     Si vous pouviez affecter une partie des fonds alloués au soutien de l'initiative clé des dossiers médicaux électroniques — parce que c'est une initiative clé pour améliorer le flux de communication dans les soins dispensés aux patients dans tout le pays —, mais en veillant à ce qu'il y ait un budget pour nous aider à gérer les dossiers médicaux électroniques, ce serait un progrès énorme dans les soins de santé pour les patients dans tout le pays.
    J'aime le fait que lorsque j'ai parlé d'efficacité, vous avez mentionné votre femme et l'envoi de télécopies. C'est génial.
     J'allais passer à une autre question, mais je me demande, madame Morrison, puisque vous acquiesciez, si vous avez quelque chose à ajouter ou si le Dr Peachey a quelque chose à ajouter.
     Je pense qu'il y a des moyens de mesurer les progrès à faire et je reviens aux professionnels formés à l'étranger. Nous avons de l'expérience dans l'avancement, la surveillance réglementaire et la réduction de la paperasserie dans le cadre du Programme d'échanges internationaux. Nous avons cette expérience dans d'autres milieux que celui des soins de santé — je pense tout de suite à la comptabilité. Il y a des moyens de mesurer cela. Combien y a‑t‑il de projets en cours? Combien de temps cela prend‑il? Encore une fois, ce n'est pas sorcier. Je pense qu'il s'agit d'un effort concerté et d'un sentiment d'urgence partagé à l'échelle nationale.
    Si je peux ajouter quelque chose, il y a beaucoup de mesures qui sont très utiles et elles peuvent être à un niveau individuel dans une spécialité ou elles peuvent être géographiques. L'une de mes préférées est le taux de trouble pour lequel le suivi ambulatoire serait à privilégier, qui mesure les personnes admises à l'hôpital qui n'auraient probablement pas été admises à l'hôpital si elles avaient consulté un médecin de soins primaires en temps opportun. C'est un assez bon outil pour dire ce qui se passe.
     Merci, docteur Peachey.
     Ensuite, nous allons passer au Dr Hanley, s'il vous plaît, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup. Je me sens tout à fait comme M. Lake. Nous avons eu droit à d'excellents témoignages de tous les participants. Il est difficile de savoir où concentrer ses cinq minutes.
     Je pense que je vais commencer par le Dr Sahgal.
     Je trouve que même si vous êtes dans une pratique hyperspécialisée, vous avez parlé avec beaucoup d'éloquence des besoins des régions rurales. Nous avons presque une dichotomie entre le besoin de super-spécialisation, en particulier dans notre ère moderne, et le besoin de pratiques très générales.
     En particulier dans les régions rurales et éloignées, comment pouvons-nous optimiser ce mélange entre les généralistes et les spécialistes?
    À mon avis, ce sont les nouveaux modèles de soins qui sont importants. Nous devons commencer à chercher des moyens d'équilibrer la présence du spécialiste dans la grande ville où nous avons tous les outils pour faire notre travail, tout en soutenant les collectivités rurales afin que les soins puissent y être dispensés.
     Le défi est qu'il y a une limite à ce que nous pouvons faire et qu'une grande partie de ce travail fait partie intégrante du rôle du médecin, mais n'est pas nécessairement rémunéré, pas forcément en tant que rémunération du médecin, mais aussi en tant que rémunération du système hospitalier. Il y a beaucoup de changements qui doivent être mis en place afin de faire ce travail de proximité et de le maintenir.
     Je vais vous donner un exemple rapide de l'un de mes domaines particuliers, qui est la radiochirurgie cérébrale, ou radiation focalisée. Nous nous sommes rendus sur place par nos propres moyens et avons enseigné à toutes nos collectivités — que ce soit Kitchener, Kingston ou Sudbury, dans le Nord — et j'y ai donné des conférences et essayé de leur apporter la technologie pour qu'ils puissent faire les traitements sur place. Quand ils ont besoin d'aide, nous sommes là quand c'est le plus important. Ils peuvent appeler. Ils peuvent me joindre 24 heures sur 24 et sept jours sur sept et nous le ferons, mais ce ne sont pas tous les endroits qui ont des champions de médecins. Pour favoriser ce modèle de sorte que les Canadiens des régions rurales aient le même niveau d'accès qu'ici, il faut beaucoup de travail et d'efforts et un nouveau modèle de soins.

  (1725)  

    Je vous remercie.
     Docteur Peachey, vous vous souvenez peut-être que j'exerçais au Yukon lorsque vous y avez effectué un travail approfondi sur les données qui, à mon avis, a jeté beaucoup de lumière sur les besoins. Je me demande si vous pouvez nous donner quelques exemples où cette recherche approfondie de données a vraiment éclairci les besoins en matière de combinaison de fournisseurs et comment nous pouvons vraiment élever cette conversation dans tout le pays.
    Je vais vous donner un exemple, il y en a plusieurs, et j'aimerais beaucoup que le Dr Gratzer fasse une remarque à ce sujet.
     Une chose que nous constatons constamment, où que nous allions, c'est que la santé mentale et les dépendances sont un véritable problème, non seulement en incidence et prévalence, mais aussi parce que les personnes qui ont vraiment besoin de voir un psychiatre doivent attendre souvent des périodes déraisonnables, avec de graves conséquences. D'autre part, en ce qui concerne le nombre de personnes qu'un psychiatre doit peut-être voir, il n'a pas besoin de voir toutes les personnes qui passent la porte simplement parce qu'elles lui ont été adressées.
     Dans le modèle que nous avons pris, nous avons examiné les données à ce sujet et nous avons commencé à préconiser cela, je crois au Manitoba, pour améliorer l'emploi du temps des psychologues cliniques non seulement dans le positionnement dans les bureaux de soins primaires, où un patient qui arrive et qui a besoin de ce genre d'évaluation peut l'obtenir le jour même, être aiguillé sur le bureau suivant. De même, les psychologues cliniciens peuvent servir de filtre pour les patients qui sont aiguillés vers des psychiatres, et si le patient doit être vu le lendemain, il est vu le lendemain. S'il peut être retardé, on peut le retarder ou il peut retourner voir son médecin de famille.
     Quelle que soit la discipline médicale que l'on veut examiner, les données qui sous-tendent ce genre de décisions peuvent être extraites et utilisées.
    Merci.
     Monsieur le président, puis‑je laisser le Dr Gratzer faire un bref commentaire à ce sujet?
    Allez‑y, très brièvement, s'il vous plaît.
    Je suis d'accord. Nous devons être plus intelligents pour ce qui est de savoir qui fait quoi et quand.
     Soit dit en passant, je crois aussi que cela contribuerait à un meilleur bien-être général si l'on voyait des cas qui correspondent davantage à nos compétences plutôt que n'importe quelle personne qui a été aiguillée vers nous. D'une certaine manière, notre système de soins de santé n'a pas beaucoup évolué depuis les années 1950, où une secrétaire appelait une autre secrétaire pour un rendez-vous, jusqu'à ce qu'elle soit peut-être remplacée par le télécopieur, qui n'est pas encore forcément remplacé par quoi que ce soit, mais je pense que ces éléments méritent d'être pris en considération.
     Des études montrent par exemple que les infirmières praticiennes pourraient être en mesure de faire de meilleurs bilans que certains spécialistes, en étant plus disponibles et plus attentives aux détails. Ces choses sont bonnes du point de vue du système, mais aussi du point de vue de la santé mentale, car elles contribuent au bien-être général.
     Je me souviens avoir travaillé une fois dans une clinique où l'on me demandait souvent de recevoir des personnes voulant une thérapie de couple. Je n'avais aucun problème à m'asseoir avec ces patients, mais nous n'offrions pas la thérapie de couple. C'était, en quelque sorte, une perte d'heure pour eux de s'asseoir avec moi et de parler de ces choses, et cela ne me satisfaisait pas non plus.
    Merci, docteur Hanley et docteur Gratzer.

[Français]

    Monsieur Garon, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Docteure Boucher, j'aimerais d'abord vous remercier d'avoir été avec nous aujourd'hui afin de nous faire profiter de votre expertise et de nous présenter votre point de vue.
    Vous témoignez aujourd'hui devant le Comité permanent de la santé du Parlement canadien. Vos auditeurs, ce sont des parlementaires qui ont le pouvoir de changer les choses et le devoir d'améliorer la qualité de vie des Canadiens et des Québécois.
    J'aimerais savoir, en terminant, quel message vous voudriez que les parlementaires retiennent de votre passage au Comité.
    Je vous remercie de la question.
    Parmi les éléments à retenir, il y a d'abord l'importance du soutien à la pratique médicale, ce que le Dr Sahgal a souvent mentionné. Il ne fait aucun doute que les tâches non médicales, les tâches administratives et les tâches manuelles qui pourraient être faites de façon automatisée doivent être assurées par d'autres professionnels que les médecins.
    Ensuite, il faut mettre à profit la technologie pour offrir des soins aux gens dans les régions rurales ou éloignées. Si cette technologie était accessible pour les médecins spécialisés désireux de faire de la télémédecine, cela pourrait aussi inciter les étudiants à se tourner vers la médecine familiale. Les médecins de famille vont envisager la possibilité d'aller travailler en région s'ils savent qu'ils obtiendront du soutien. Ils ne se sentiront pas seuls et démunis. Un intervenant a aussi mentionné la crainte de voir des personnes porter plainte auprès de l'ordre professionnel.
    Je suis convaincue que les gens des régions et des provinces sont plus au fait des besoins locaux et régionaux que ceux qui rédigent des directives centralisées pancanadiennes. Bien sûr, il faut avoir des directives et des orientations canadiennes, mais il faut vraiment laisser aux gens qui se trouvent dans les régions, sur le terrain, le soin d'établir les besoins.

  (1730)  

     Je vous remercie.
    Pour terminer, je retiens de la lecture de votre mémoire que votre organisation demande aussi une augmentation du Transfert canadien en matière de santé de façon à ce que le financement soit inconditionnel, stable, prévisible et pérenne.
    Je vous remercie beaucoup d'avoir comparu devant le Comité.
    Je vous remercie, monsieur Garon.

[Traduction]

    La dernière série de questions viendra de M. Davies. Allez‑y, s'il vous plaît, pour deux minutes et demie.
    Merci.
     Docteur Peachey, Wayne Gretzky a dit que le truc était d'aller là où la rondelle se dirigeait. Je pense que le corollaire de cela est qu'il est important de savoir d'où nous venons afin d'éviter les problèmes du passé.
     Je note qu'en juin 2010, ce comité a déposé un rapport intitulé Promouvoir des solutions novatrices pour relever les défis des ressources humaines en santé. En 2011, le gouvernement fédéral a lancé la stratégie en matière de ressources humaines en santé pour « attirer, préparer, déployer et maintenir en poste des fournisseurs de soins de santé hautement qualifiés pour offrir aux Canadiens l'accès à des soins efficaces et adaptés en temps voulu, dès maintenant et à l'avenir. » C'était il y a 11 ans.
     En plus de son rôle dans le financement des soins de santé, le gouvernement fédéral apporte son soutien au comité fédéral-provincial-territorial sur les effectifs en santé. En 2005, il a lancé la Stratégie pancanadienne relative aux ressources humaines en santé qui...

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Il n'y a pas d'interprétation.
    Je vous remercie, monsieur Garon.

[Traduction]

    Monsieur le greffier, pouvez-vous vérifier si c'est quelque chose que nous allons pouvoir résoudre assez rapidement? Nous avons presque atteint l'heure.

[Français]

    L'interprétation a été rétablie, monsieur le président.
    C'est très bien.

[Traduction]

     Allez‑y, monsieur Davies.
    Merci.
     Docteur Peachey, pour mon collègue francophone, en juin 2010, ce comité a déposé un rapport intitulé Promouvoir des solutions novatrices pour relever les défis des ressources humaines en santé. En 2011, il y a 11 ans, le gouvernement fédéral a lancé la stratégie en matière de ressources humaines en santé pour « attirer, préparer, déployer et maintenir en poste des fournisseurs de soins de santé hautement qualifiés pour offrir aux Canadiens l'accès à des soins efficaces et adaptés en temps voulu, dès maintenant et à l'avenir. » Il y a 17 ans, en 2005, le gouvernement fédéral a lancé la Stratégie pancanadienne relative aux ressources humaines en santé.
     Pouvez-vous nous expliquer pourquoi, au cours des 15 dernières années, nous n'avons pas réussi à régler la question des ressources humaines dans le secteur des soins de santé? Quels conseils auriez-vous à donner pour éviter les problèmes à l'avenir?
    Je pense que la principale raison est la complexité, comme il y en a toujours lorsqu'il s'agit de traiter avec des personnes et des énergies, et de déterminer l'offre et les besoins. Cela peut être coûteux. Les rapports que vous avez énumérés n'ont fondamentalement mené à rien, et c'est pourquoi nous sommes toujours confrontés à ces questions aujourd'hui. Mais il y a, parallèlement, un enthousiasme à faire des changements et les gens n'ont plus peur du changement.
    L'un des meilleurs comités auxquels j'ai participé est le comité sur le personnel de santé de Santé Canada, qui est très bien représenté. Il a été frappé de plein fouet par la pandémie, mais il relève de la Conférence des sous-ministres de la Santé. Lorsqu'ils ont l'occasion de se faire entendre, ils ont beaucoup de choses à dire. Si la Conférence des sous-ministres peut saisir cette occasion, je pense que nous verrons des changements.
    Merci, docteur Peachey et monsieur Davies.
     Voilà qui met fin au temps dont nous disposons pour les questions, mais je demande à mes collègues de ne pas partir en courant. Nous allons remercier nos témoins, puis il y a quelques questions administratives que je veux aborder très rapidement.
     À tous nos témoins, comme cela a été dit à plusieurs reprises au cours de cette séance, cette discussion a été extrêmement réfléchie et informative. Nous vous remercions beaucoup de la façon dont vous avez répondu aux questions, de la profondeur de votre expérience et de votre volonté de la partager avec nous. Nous approchons rapidement de la fin de la partie de cette étude consacrée aux témoignages. Comme certains de mes collègues l'ont indiqué, nous pourrions continuer 10 heures de temps encore, car chaque fois que vous enlevez une couche de l'oignon, il y a quelque chose d'autre. Merci encore pour votre présence parmi nous et pour cette réunion très productive et intéressante.
     Chers collègues, il y a deux questions que je voudrais aborder avec vous. Premièrement, le Comité a adopté une motion concernant la ligne 988 de prévention du suicide. L'adoption de cette motion est inscrite au procès-verbal. Par conséquent, nous sommes maintenant en mesure de recevoir des mémoires du public, mais nous n'avons pas fait ce que nous faisons habituellement, c'est‑à‑dire fixer une limite à ces mémoires. En général, nous imposons une limite de 2 000 mots. Est‑ce que tout le monde est d'accord pour que nous déclarions que la limite pour tous les mémoires qui seront soumis en ce qui concerne ce point est de 2 000 mots?
     Monsieur Barrett, vous avez la parole.

  (1735)  

     Je m'en remettrais aux analystes, compte tenu du temps limité dont nous disposons. Si votre recommandation est éclairée par ces derniers, nous l'appuyons. Il n'y a pas une tonne de temps avant la fin de juin et beaucoup de rapports sont préparés en même temps.
    C'est exactement de là que vient la suggestion, monsieur Barrett. C'est pourquoi je l'ai présentée.
     Y a‑t‑il un consensus dans la salle?
    Oui.
     Je vous remercie.
     J'ai mentionné le dernier point, mais je tiens à le régler définitivement. Nous recevons la visite d'une délégation de parlementaires finlandais le 11 mai. Ils ont demandé à parler avec le comité des ressources humaines et le comité de la santé pendant une heure le 11 mai. Même si c'est par un vote à main levée, je veux que vous indiquiez si vous seriez prêts à donner une heure le 11 mai, à midi ou à 13 heures, pour parler avec la délégation de parlementaires de la Finlande.
     Le déjeuner sera fourni. Il ne s'agira pas d'une réunion officielle. Ce sera une rencontre en personne seulement et on vous fournira les biographies à l'avance. Il n'est pas prévu que la rencontre sera publique ou qu'elle sera enregistrée. Il s'agit simplement d'un échange d'idées et d'une séance de questions-réponses, si vous voulez.
    Cela vous intéresse‑t‑il? C'est ma première question. La deuxième question est de savoir si quelqu'un a une préférence marquée entre midi et 13 heures pour notre rencontre d'une heure avec la délégation finlandaise le 11 mai.
     Monsieur Davies, allez‑y.
    Je pense que c'est une excellente idée.
     Je me demande ce que vous en pensez, monsieur le président. Notre réunion normale commencerait à 12 h 30 et, bien sûr, nous avons une période de questions — excusez-moi. Je suis à Vancouver, alors je suis à l'heure de Vancouver.
     Oubliez ça. Je suis tout à fait d'accord.
    Je vous remercie.
     Il y a...

[Français]

    Monsieur le président, y aura-t-il des services d'interprétation lors de cet événement? Est-il possible de s'en assurer?
    Je vois que le greffier me fait signe que oui.
    Je pense qu'il n'est pas du tout acceptable qu'il y ait des réunions sur la Colline du Parlement sans services d'interprétation.
    Je suis d'accord avec vous.
    Je vous remercie.
    Je confirme donc qu'il y aura des services d'interprétation.

[Traduction]

    Je vois que nous avons un consensus.
     À moins qu'il n'y ait des opinions fermes, je propose midi, et le comité HUMA pourra venir après nous. Ainsi, nous aurons le meilleur déjeuner.
     Le Comité souhaite‑t‑il lever la séance?
     Des députés: D'accord.
    Le président: Merci à tous. Passez une bonne soirée.
     La séance est levée.
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