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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 002 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 31 janvier 2022

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Je pense que nous avons le quorum. Je suis prêt. Je pense que les représentants de tous les partis sont prêts. Je déclare donc la séance ouverte.
    Bienvenue à tous à la deuxième séance du Comité permanent des ressources naturelles de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité commence son étude sur le Fonds de réduction des émissions de gaz à effet de serre — programme côtier. La séance d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les membres participent en personne dans la salle ou à distance via l'application Zoom. Notez que la diffusion sur le Web montrera toujours la personne qui parle et non l'ensemble du Comité.
    Je profite de cette occasion pour rappeler à tous les participants que les captures d'écran ou la prise de photos de votre écran ne sont pas autorisées. Les délibérations d'aujourd'hui seront télévisées et également disponibles sur le site Web de la Chambre des communes.
    Compte tenu de la pandémie actuelle et au regard des recommandations des autorités de santé publique, ainsi que de la directive du Bureau de régie interne du 19 octobre 2021, pour préserver leur santé et leur sécurité, nous recommandons à toutes les personnes qui assistent à la séance en personne de se conformer aux règles suivantes.
    Toute personne présentant des symptômes doit participer par Zoom et ne pas assister à la séance en personne. Les participants doivent respecter une distance physique de deux mètres, qu'ils soient assis ou debout, et porter un masque non médical lorsqu'ils circulent dans la salle. Nous recommandons vivement aux membres de porter leur masque en tout temps, y compris lorsqu'ils sont assis. Toutefois, comme vous pourrez le constater en me regardant, lorsque je vous donne la parole, vous pouvez enlever votre masque pour parler. Nous vous demandons de remettre votre masque lorsque vous avez terminé votre intervention. Des masques non médicaux, qui nous permettent de vous entendre plus clairement que les masques en tissu, sont disponibles dans la salle.
    Toutes les personnes présentes doivent maintenir une bonne hygiène des mains en utilisant le désinfectant pour les mains situé à l'entrée de la salle. Les salles de comité sont nettoyées avant et après chaque séance. À cette fin, nous vous encourageons à nettoyer les surfaces telles que les bureaux, les chaises et les microphones avec les lingettes désinfectantes qui vous sont fournies lorsque vous quittez la salle ou que vous vous asseyez à votre place.
    En tant que président, j'appliquerai ces mesures pendant toute la durée de la séance, et je remercie d'avance les membres de leur coopération.
    Pour assurer le bon déroulement de la séance, j'aimerais vous présenter rapidement quelques règles à suivre. Des services d'interprétation sont disponibles pour cette séance. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre l'audio du parquet, l'anglais ou le français. Les membres et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix.
    Les membres présents dans la salle sont priés de lever la main pour prendre la parole. La greffière et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre des intervenants. Pour les membres qui participent sur Zoom, veuillez utiliser la fonction « lever la main » et vous serez inscrits sur la liste. Vous comprendrez que cette tâche peut parfois être difficile, comme nous l'avons vu lors de notre première séance, lorsque les membres lèvent la main à la fois dans la salle et sur Zoom. La greffière et moi-même gérerons l'ordre des interventions du mieux que nous le pourrons, et nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
    Avant de parler, veuillez attendre que je prononce votre nom. Si vous êtes sur Zoom, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer. Pour les membres présents dans la salle, votre micro sera contrôlé comme d'habitude par l'agent des délibérations et de la vérification. Lorsque vous n'avez pas la parole, votre micro doit être désactivé.
    À titre de rappel, tous les commentaires des membres et des témoins doivent être adressés au président.
    Nous avions convenu de commencer par examiner certains travaux du Comité avant d'entendre notre premier témoin.
    Le premier point est l'adoption du rapport de la réunion du sous-comité du 24 janvier. Le rapport a été distribué à tous les membres la semaine dernière. Si les membres préfèrent que je lise le rapport dans son intégralité, je peux le faire maintenant. Dans la négative, pour gagner du temps, si tous les membres l'ont déjà lu et s'ils sont tous d'accord pour l'adopter sans débat, nous pouvons procéder de cette manière. Quel est le souhait du Comité?
    Je vois que M. Angus acquiesce en faveur de l'adoption. L'un d'entre vous s'y oppose‑t‑il?
    D'accord. Nous sommes prêts à commencer. L'un d'entre vous pourrait‑il proposer une motion visant à adopter le rapport?
    M. Maloney propose d'adopter la motion. Avons-nous besoin que quelqu'un l'appuie?
    Monsieur Angus.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci.
    Nous devons également adopter les budgets de nos deux premières études. Ils ont également été distribués aux membres la semaine dernière. Ils couvrent essentiellement le coût des lignes téléphoniques et des casques d'écoute nécessaires à nos séances. Il s'agit du budget de l'étude du Fonds de réduction des émissions — programme côtier, d'un montant de 1 725 $, et du budget de l'étude d'un plafond des émissions de gaz à effet de serre pour le secteur pétrolier et gazier, d'un montant de 7 125 $.
    Le Comité souhaite‑t‑il adopter le budget de ces deux études?
    Des députés: Oui.

  (1540)  

    Le président: Merci. Voilà pour les travaux du Comité.
    Nous allons maintenant passer à notre premier groupe de témoins sur l'étude du Fonds de réduction des émissions — programme côtier.
    Dans notre premier groupe de témoins, Jerry DeMarco, commissaire à l'environnement et au développement durable, représente le Bureau du vérificateur général et se joint à nous à distance. Bienvenue, commissaire.
    Nous accueillons également James McKenzie, directeur principal, et Sylvie Marchand, directrice.
    Pour les deux groupes de témoins, je vais essayer une astuce de comptabilisation du temps que j'ai vu sur la Colline. J'ai un chronomètre, et lorsque nous atteindrons les 30 dernières secondes, je vous montrerai un carton jaune. Lorsque le temps sera écoulé, je montrerai un carton rouge et vous demanderai de conclure votre intervention. Vous n'êtes pas obligé de vous arrêter au milieu de votre phrase, mais nous passerons ensuite aux questions. Je ferai de même pour les intervenants.
    Les membres du premier et du deuxième groupe de témoins disposeront chacun de cinq minutes pour faire leur déclaration préliminaire. Je vous indiquerai lorsqu'il vous restera 30 secondes et quand votre temps sera écoulé. Lorsque nous passerons à la série de questions, je ferai de même.
    Sur ce, je vais donner la parole au commissaire à l'environnement et à ses collègues, qui présenteront leur déclaration préliminaire de cinq minutes, avant de passer à la première série de questions et réponses.
    Merci.
    Merci, monsieur le président. Nous sommes heureux de comparaître devant votre comité cet après-midi pour présenter les résultats de notre rapport sur le Fonds de réduction des émissions. Je tiens à souligner que cette audience se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anichinabé.
    Je suis accompagné aujourd’hui de James McKenzie, le directeur principal chargé de l’audit, et de Sylvie Marchand, la directrice qui a mené l’audit et l’équipe.
    Les gaz à effet de serre produits par les activités humaines altèrent le climat partout dans le monde. Aux termes de l’Accord de Paris, le Canada s’est engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre annuelles de 40 % à 45 % par rapport aux niveaux de 2005, d’ici 2030. Le Canada s’est aussi engagé à atteindre la carboneutralité au plus tard en 2050.
    Pour atteindre ces objectifs, le Canada devra réduire de manière concrète et considérable les émissions de gaz à effet de serre de façon à ce qu'ils soient inférieurs aux niveaux enregistrés au cours des années passées. En novembre 2020, le gouvernement a lancé le Programme côtier et infracôtier du Fonds de réduction des émissions, dans le cadre du Plan d’intervention économique du Canada pour répondre à la COVID‑19. Le gouvernement estimait que ce programme de 675 millions de dollars était un moyen d’aider les entreprises du secteur énergétique en difficulté à faire face à la baisse du prix du pétrole pendant la pandémie.
    L’audit visait à déterminer si Ressources naturelles Canada avait conçu et mis en œuvre le Programme côtier et infracôtier de manière à optimiser les ressources engagées et à garantir que les réductions d’émissions de gaz à effet de serre attendues après 2023 sont crédibles et durables. Dans l’ensemble, nous avons constaté que le ministère n’avait pas conçu le Programme de manière à optimiser les ressources engagées ou à permettre des réductions crédibles et durables des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur pétrolier et gazier.
    Lors de la conception du programme, le ministère n’a pas appliqué les principes de comptabilisation des gaz à effet de serre ni le concept d’additionnalité, selon lequel les réductions d’émissions n’auraient pas dû être attribuées au Programme si elles se seraient produites même sans ce dernier, grâce au règlement. Plus de la moitié des réductions totales ciblées par le Programme avaient déjà été comptabilisées dans le cadre du règlement fédéral sur le méthane. Le ministère a donc présenté de façon erronée ce que le Programme pouvait accomplir.

  (1545)  

[Français]

     Le ministère a indiqué que l'une des raisons d'être du programme était d'aider à préserver des emplois dans le secteur pétrolier et gazier. Nous avons toutefois constaté que le ministère n'avait pas défini le maintien des emplois comme critère d'admissibilité ou d'évaluation pour accorder un financement.
    Nous avons constaté que le ministère avait évalué la viabilité financière des sociétés et avait ajouté des procédures de contrôle et de surveillance des risques pour toutes les sociétés. Par exemple, les ententes de contribution définitives prévoyaient des procédures pour atténuer le risque de défaut de paiement et pour aider à garantir l'achèvement de projets.
    Nous avons aussi constaté que les attentes du ministère pour les 40 projets financés dans la première période d'inscription au programme avaient été surestimées. Pour 27 projets financés, les sociétés avaient indiqué dans leurs demandes que leur projet augmenterait la production de pétrole ou de gaz. Toutefois, le ministère n'avait pas tenu compte des émissions découlant de hausses de production dans ses estimations. Si ces émissions avaient été prises en compte, elles auraient amoindri, voire surpassé, la réduction d'émissions attendues des projets.
    Enfin, le ministère n'avait pas pleinement évalué l'optimisation des ressources en fonction du coût par tonne de réduction des émissions de gaz à effet de serre ou du nombre d'emplois préservés.
    Pour aider le Canada à atteindre sa cible nationale de réduction des émissions de gaz à effet de serre, Ressources naturelles Canada devra s'assurer de fonder ses politiques, ses programmes et ses mesures sur des estimations fiables des réductions des émissions attendues.
    Nous avons formulé six recommandations dans le cadre de cet audit. Le ministère a accepté quatre recommandations et les deux autres ont été acceptées en partie.
    Monsieur le président, je termine ainsi ma déclaration d'ouverture. Nous nous ferons un plaisir de répondre à toute question du Comité.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Parfait. Merci pour votre déclaration préliminaire et pour sa brièveté. Vous avez pris un peu moins de cinq minutes.
    Nous allons maintenant passer à la première membre du groupe de témoins, Mme Goodridge, du Parti conservateur.
    Allez‑y, madame Goodridge, vous avez six minutes. Vous pouvez commencer.
    Merci pour l'exposé que vous venez de présenter. C'était très instructif.
    Dans le rapport que vous avez publié récemment, vous indiquez ce qui suit:
Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada avait surestimé les réductions d’émissions de gaz à effet de serre attendues du Programme côtier et infracôtier.
    Pouvez-vous préciser comment ces réductions ont été surestimées? Plus précisément, pensez-vous que ces surestimations semblaient irréalisables lors de votre examen initial?
    J'aimerais répondre à cette question en donnant deux exemples. L'un est le concept de l'additionnalité, et l'autre est le concept de l'examen de l'ensemble des émissions ou des émissions nettes, par opposition à un aspect des émissions.
    Pour ce qui est de l'additionnalité, la réponse est mise en évidence dans notre rapport, dans la pièce contenant le graphique qui vise à illustrer la notion d'additionnalité. La question est de savoir si ce fonds a permis de réaliser les réductions qui lui sont attribuées ou si d'autres facteurs sont entrés en jeu. Dans ce cas, il s'agissait du règlement sur le méthane.
    Si l'on finance les activités qui étaient déjà prévues par le règlement sur le méthane, on ne peut pas affirmer que ces réductions d'émissions sont attribuables au programme. En ne distinguant pas les causes et les effets du programme de ceux du règlement sur le méthane, on a surestimé les résultats, car le concept d'additionnalité n'a pas été utilisé correctement.
    Le deuxième aspect est la question des émissions nettes. Les chiffres fournis par le ministère ne donnent pas une vue d'ensemble de l'effet total du financement sur les installations et l'équipement en question. Nous voulions savoir quel avait été l'effet net du programme, et non seulement quelles émissions étaient attribuables à la pièce d'équipement qui était mise à niveau sur le site. Cela pose problème, car bon nombre des demandes que nous avons examinées et qui concernaient les installations indiquaient que leur production allait augmenter. Cependant, ces augmentations de production, qui pourraient compenser les réductions d'émissions de l'équipement installé, n'ont pas été prises en compte dans les estimations du ministère.

  (1550)  

    Je vous remercie. Vous l'avez mentionné dans votre déclaration préliminaire.
    Avez-vous parlé à des entreprises qui ont reçu ces fonds lors de la production de votre rapport? Si oui, certaines d'entre elles ont-elles indiqué que les surestimations étaient évidentes?
    Je vais demander à une membre de notre équipe, Sylvie Marchand, de parler des procédures qui ont été appliquées dans le cadre de cet audit.
    Nous n'avons pas interrogé d'entreprises, mais nous avons parlé aux fonctionnaires du ministère. Telle était la portée de notre audit.
    Lorsque vous effectuez un audit, si vous ne parlez pas aux entreprises, comment pouvez-vous affirmer aussi clairement ce que vous avez dit dans votre rapport?
    Nous avons examiné les mémoires et l'analyse du ministère. Les mémoires sont en fait les déclarations officielles des entreprises, c'est‑à‑dire les déclarations concernant ce qu'elles espèrent obtenir grâce à leur projet.
     Vous n'avez parlé à aucune entreprise, et il n'y a eu aucun suivi auprès des entreprises après leur rapport initial.
    Je sais que cela semble illogique. Nous avons examiné ce qui a été fait dans le passé, et dans le passé, le ministère n'a fait qu'arrêter la mise en œuvre du fonds et évaluer les mémoires.
    Nous avons analysé la conception du programme. Nous n'avons ni évalué ni suivi les résultats des projets une fois que les installations ont mis en œuvre la technologie. Cela ne faisait pas partie de la portée de notre audit.
    Votre rapport indique également ce qui suit:
Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada n’avait pas suivi les principes fondamentaux de comptabilisation des gaz à effet de serre ni aucune norme pour préparer ses estimations des réductions d’émissions attendues.
    Vous a‑t‑on expliqué pourquoi ces principes n'étaient pas pris en compte?
    Si vous lisez le rapport, le ministère était apparemment convaincu que son approche permettait de comptabiliser correctement les réductions d'émissions, mais lorsque nous lui avons demandé s'il appliquait les normes ISO qui garantissent la crédibilité et la reproductibilité des estimations des réductions d'émissions attendues, il a confirmé qu'il n'utilisait pas ces normes.
    Très bien. Je suis désolé de devoir vous interrompre. Les six premières minutes sont écoulées.
    Nous allons maintenant passer à Mme Dabrusin, du Parti libéral, pour un premier tour de six minutes.
     Je suis très heureuse de pouvoir m'entretenir avec vous et de recueillir vos commentaires, que nous avons obtenus grâce à votre audit. Ils nous sont très utiles.
    J'aimerais commencer par quelques notions de base sur le méthane, car je pense que les réductions de méthane sont importantes pour les émissions de GES dans leur ensemble. Lorsque je me suis penchée sur la question, j'ai cru comprendre que la principale source d'émissions de méthane au Canada était l'industrie pétrolière et gazière.
    Est‑ce exact?

  (1555)  

    Oui.
    La majorité de ces émissions proviennent de la ventilation et des fuites. Je voudrais que vous donniez une vraie réponse, non pas parce que j'essaie de vous mettre dans l'embarras, mais parce que nous aurons alors une réponse.
    Oui. Merci.
    C'est parfait. Merci.
    D'après ce que je comprends, les émissions de méthane sont en fait une source de réchauffement climatique plus — faute d'un meilleur terme, bien que vous puissiez en trouver un meilleur — toxique que le CO2.
    Est‑ce exact?
    Je n'utiliserais pas le terme « toxique », mais leur potentiel de réchauffement est beaucoup plus important que celui du dioxyde de carbone. Elles restent moins longtemps dans l'atmosphère, mais pendant le temps où le méthane y est présent, le potentiel de réchauffement est beaucoup plus important. On pourrait aussi dire qu'il s'agit d'un gaz à effet de serre plus puissant, plutôt que plus toxique.
    Je m'excuse. Voilà pourquoi je vous demandais de me suggérer un meilleur terme. C'est ce que je voulais dire.
    Si je comprends bien, les réglementations en place portent sur les émissions de méthane.
    Oui.
    Je parle de FRE, mais je vais dire Fonds de réduction des émissions. Il s'agit en quelque sorte d'une pièce qui vient compléter la réglementation, d'un incitatif qui vient s'y ajouter.
    Si le programme était mené en respectant le principe de l'additionnalité, je dirais qu'il est complémentaire, mais dans les faits, il ne l'est qu'en partie, car il y a parfois double emploi.
    C'est une réponse précise. C'est ce que je voulais entendre. C'est en quelque sorte une avenue différente de celle de la réglementation. Nous avons la réglementation, puis nous avons cette autre mesure, qui, si je comprends bien vos recommandations, est un élément complémentaire.
    Est‑ce exact?
    Oui.
    J'examinais quelques pièces à ce sujet.
    Si toutes vos recommandations étaient prises en compte à partir de maintenant, considéreriez-vous alors qu'il serait important d'avoir cet incitatif en plus de la réglementation qui est en place?
    Le choix des mesures revient au gouvernement de l'heure, bien entendu. Si le programme était bien mené — et c'est ce que visent nos six recommandations... Le programme n'est pas terminé, et si des programmes similaires sont mis en place dans l'avenir, nous souhaiterions qu'ils soient menés de la façon la plus efficace possible.
    Si c'est la mesure pour laquelle on opte — et au cours de la prochaine heure, vous entendrez sans doute des témoins vous parler d'autres enjeux stratégiques —, nos recommandations visent donc à améliorer le rendement de ce type de mesure, oui.
    C'est excellent.
    Cet audit portait sur la première période d'inscription, et des changements ont été apportés à la troisième période d'inscription.
    Prévoyez-vous procéder à un autre audit pour comparer les résultats de la troisième période d'inscription?
    Il est fort possible que nous procédions à un audit de suivi sur la troisième période d'inscription. Nous avons examiné la première, et la deuxième a eu lieu après la fin de la période de notre audit, mais avant aujourd'hui, et la troisième est celle qui est en cours.
    La majeure partie du montant original de 675 millions de dollars est encore disponible, alors il est possible que nous procédions à un audit de suivi. Tout dépendra de certains facteurs, notamment si l'on détermine qu'il existe un risque que les problèmes persistent lors de la troisième période d'inscription. Nous examinerons alors dans ce cas les récents changements annoncés par Ressources naturelles Canada pour vérifier si le ministère applique de manière tangible les recommandations contenues dans notre rapport.
    Il ne me reste pas beaucoup de temps, mais j'ai vu que certains disaient à propos du programme que 97 % des réductions d'émissions découlant du fonds provenaient de projets qui éliminaient les évacuations de routine intentionnelles et les fuites, plutôt que de les réduire. Est‑ce que cela correspond aux conclusions de votre audit?
    Je crois qu'on disait que 97 % des projets dépassaient ce qui est prévu dans le règlement sur le méthane. Je ne pense pas qu'il s'agissait de 97 % des émissions, toutefois. Un projet pouvait respecter ce qui est prévu, puis aller au‑delà. Si un projet faisait les deux, il était comptabilisé dans le 97 %, mais je ne crois pas que le 97 % fait référence à la quantité des émissions.

  (1600)  

    Je vais revérifier cela, mais je comprends.
    Je vois qu'il ne me reste littéralement que 10 secondes, alors je vais les céder à la présidence.
    Je vous remercie, madame Dabrusin.
    Je veux simplement mentionner que M. Morrice de Kitchener-Centre vient de se joindre à nous.
    Je vous souhaite la bienvenue à notre comité.
    Nous passons maintenant à M. Simard du Bloc québécois pour sa période de six minutes.
    Monsieur Simard, allez‑y.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur DeMarco. J'ai apprécié votre rapport, que j'ai lu dans mon bain. En effet, j'ai cette fâcheuse habitude, et j'ai dû réchauffer mon bain deux fois pour lire votre rapport en entier.
    Un élément de votre rapport m'a frappé. Vous avez dit que les deux tiers des projets, soit 27 projets sur 40, entraîneraient un accroissement de la production de pétrole et de gaz.
    Je ne suis pas un spécialiste des secteurs gazier et pétrolier, mais j'ai une idée bête en tête pour réduire les émissions, soit la nécessité de plafonner la production. Il me semble que la logique veut qu'une augmentation de la production suppose une augmentation des émissions.
    Vous avez dit tout à l'heure que le déploiement de pareilles mesures n'était pas efficient. Croyez-vous qu'il est impossible de déployer un programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre sans plafonner, de prime abord, la production?
    Je vous remercie de votre question, qui touche à la fois le sujet de notre rencontre d'aujourd'hui et celui de notre réunion de la semaine prochaine. J'y répondrai donc brièvement.
    Dans notre rapport de novembre intitulé « Leçons tirées de la performance du Canada dans le dossier des changements climatiques », la Leçon no 2 porte sur les émissions du secteur pétrolier. Il est effectivement important de fixer un plafond pour atteindre nos objectifs. Nos émissions ont augmenté au cours des 30 dernières années, et nous devons les réduire. Il est donc nécessaire de fixer un maximum et nous en parlerons davantage la semaine prochaine. Ce maximum est important pour atteindre l'objectif de 2030 et celui de 2050.
    Vous avez également démontré dans votre rapport, en vous appuyant sur des faits très clairs, que le programme ne permettait pas d'atteindre les objectifs. Je pense en particulier au fait de préserver les emplois.
    Seriez-vous prêt à dire aujourd'hui que le gouvernement n'avait pas établi de cible claire relativement aux objectifs du programme?
     Il y avait une cible pour les émissions, mais pour les autres éléments, il n'y avait qu'un objectif qualitatif. Pour confirmer l'optimisation des ressources, en ce qui concerne les emplois, par exemple, on a besoin de mesures et de cibles. Or il n'y en avait pas pour ce programme.
    Vous avez parlé du concept d'ajout et d'additionnalité. Je suis curieux de savoir s'il existe, à Ressources naturelles Canada et peut-être au ministère de l'Environnement, des outils pour faire ce type de travail, c'est-à-dire pour mesurer l'additionnalité des réductions d'émissions.
    Je ne le sais pas. Vous pourrez probablement le demander aux représentants de Ressources naturelles Canada mercredi, quand ils seront ici.
    Je vais demander à Sylvie Marchand si elle en sait plus que moi à ce sujet.
    Bonjour. Je vous remercie de votre question.
    Comme nous le disons dans notre rapport, l'utilisation des normes, particulièrement des normes ISO 14064, est très utile à cette fin. Leur objectif est d'assurer la cohérence, la reproductibilité et l'additionnalité des réductions d'émissions estimées. C'est ce que nous proposons dans nos recommandations, soit l'utilisation de ces normes, de protocoles ou d'autres normes qui sont basées sur cette norme ISO. C'est donc très possible, oui.

  (1605)  

    Je vois le Fonds de réduction des émissions et d'autres initiatives du gouvernement comme une volonté de décarboner le secteur gazier et pétrolier. Pour moi, c'est comme dire qu'on peut créer de la poutine de régime. Je ne conseille à personne de manger de la poutine pour faire un régime. Alors, si on veut décarboner l'économie du Canada, il me semble que la solution n'est pas d'investir massivement dans le secteur gazier et pétrolier, mais plutôt dans des énergies renouvelables.
    À votre connaissance, personnellement, ne croyez-vous pas qu'il serait préférable d'investir davantage dans des énergies renouvelables que dans le secteur gazier et pétrolier?
    C'est un choix qui revient au gouvernement, et non à moi. C'est une question de politique.
    On sait que la courbe des émissions va dans la mauvaise direction, alors il faut poser de telles questions. Je vous recommande de poser cette question aux représentants du ministère mercredi.
    Je vous remercie, monsieur DeMarco.

[Traduction]

    Je vous remercie. C'est malheureusement la fin de cette série de questions.
    Nous passons au dernier député, M. Angus, du NPD, qui a la parole pendant six minutes.
    Le méthane est en train de détruire la planète. Il est 80 fois plus dangereux que le CO2. J'ai parlé avec des gens de l'industrie qui disent que c'est possible d'éliminer les fuites. Ce qui semble manqué à l'heure actuelle, c'est la volonté de l'industrie de le faire. Compte tenu des déclarations très fermes du premier ministre à Paris et de l'engagement du Canada à la COP26, ce programme me semble être une évidence. Les choses devraient être très simples, et pourtant, quand je regarde comment ce programme a été conçu, il l'a été pour attirer des investissements et accroître la compétitivité, et en tout dernier lieu, surprise, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, principalement le méthane.
    Comment un programme qui vise à attirer des investissements et à accroître la compétitivité peut‑il, en fait, lutter contre la crise climatique?
    C'est une excellente question, et c'est pourquoi nous voulions que le ministère se penche sur l'ensemble de la situation, plutôt que seulement sur une pièce d'équipement installée sur un site donné. Nous voulions connaître l'effet global du fonds, entre autres, sur le maintien de la production, ou encore sur l'augmentation de la production qui, sans le fonds, ne se serait pas produite.
    C'est le principe fondamental de l'exhaustivité qui fait partie des principes de comptabilisation des gaz à effet de serre. Si on ne regarde pas l'ensemble de la situation, et qu'on s'en tient à des programmes à courte vue comme celui‑ci, il n'est alors pas surprenant de constater que les émissions du Canada, au cours des 30 dernières années, ont augmenté, même si nous avons des programmes qui visent à les réduire.
    Nous recommandons d'avoir une vue d'ensemble au moment de créer et de mettre en œuvre un programme comme celui‑ci, plutôt que d'adopter une perspective trop étroite. De plus, les données publiées par le ministère ne portent pas sur les émissions nettes, et nous avons besoin de connaître les émissions nettes pour savoir si nous atteignons nos cibles de l'Accord de Paris.
    Je m'excuse de vous interrompre, mais vous avez parlé de subventions. Si nous augmentons la production et attirons des investissements dans le secteur pétrolier, il s'agit de subventions. N'est‑ce pas le but de ce programme?
    Oui, ce fonds est un type de subventions, je suis d'accord.
    Ce sont des subventions.
    Vous avez ensuite dit que vous étiez surpris et déçu de voir que Ressources naturelles Canada n'effectuait pas de suivi des réductions d'émissions. J'ai déjà travaillé pour des Premières Nations et des groupes d'artistes et nous recevions des sommes d'argent insignifiantes. Si nous n'obtenions pas de résultats, nous ne recevions pas l'argent, et les fonctionnaires fédéraux ne nous lâchaient pas d'une semelle. Par contre, les pétrolières reçoivent 134 millions de dollars dans le but de nous aider à sauver la planète, et Ressources naturelles Canada n'effectue pas de suivi pour s'assurer que le travail est fait. Comment est‑ce possible?

  (1610)  

    Lorsque nous avons effectué l'audit, nous nous attendions à voir des mesures et des cibles en lien avec ce qu'on appelle l'optimisation des ressources. Selon le guide du Conseil du Trésor, l'optimisation des ressources passe notamment par la pertinence et le rendement. On s'interroge maintenant sur la pertinence du programme, car la situation liée à sa raison d'être, soit la baisse des prix des produits de base, a changé considérablement depuis sa création. Le rendement — ce qui équivaut à mesurer le coût par tonne, le coût par emploi maintenu, etc. — était aussi un élément manquant. C'est un programme qui, à n'en pas douter, a été très mal conçu.
    D'accord. Il s'agit donc de subventions. Le ministère ne vérifie même pas si les réductions portent sur le méthane, qui est en train de tuer la planète. Vous avez soumis votre rapport à Ressources naturelles, qui l'a balayé du revers de la main. Vous avez dit être très déçu de ses réponses, et que cela n'augure rien de bon.
    Devant ce bilan accablant, vous dites que le Canada doit cesser d'aller d'échec en échec et que la réponse du ministère, pour reprendre vos mots, n'augure rien de bon. Qu'est‑ce que cela signifie?
    Eh bien, le ministère a accepté seulement quatre des six recommandations et a accepté les deux autres en partie. Dans une des réponses à la recommandation 4.40, il ne semblait pas vraiment comprendre l'idée d'une réduction des émissions par rapport à un scénario de référence, alors il y a là un problème.
    Il est également intéressant de noter qu'en réponse à la recommandation 4.93, il parle de la nécessité pour le programme d'être basé sur les besoins financiers. C'est une question que vous pourriez poser au ministère au sujet...
    Désolé, mais puis‑je avoir une précision? Des besoins financiers de qui parle‑t‑on ici? Ceux des pétrolières au Canada? Le ministère s'inquiète de leurs besoins financiers quand il est question du méthane? Est‑ce ce sur quoi se concentrait le ministère?
    Eh bien, je vous parle de leur réponse.
    Wow.
    Je ne peux pas parler en leur nom.
    Non, je sais que vous ne pouvez pas parler en leur nom, mais nous avons un gouvernement qui s'est engagé sur la scène internationale à réduire les émissions de gaz à effet de serre... Et les représentants du ministre et du ministère disent qu'ils axent leurs efforts sur le fait de répondre aux besoins financiers des grosses pétrolières et non pas de réduire les émissions de méthane. C'est ce que le ministère a répondu. Je trouve cela scandaleux.
    Eh bien, ce que j'essayais de dire, c'est qu'ils ont convenu avec nous que leurs décisions devaient reposer sur les besoins financiers. Cela nous ramène à la pertinence et à l'optimisation des ressources. La question que vous pourriez vouloir poser au ministère est de savoir si les besoins financiers — et je sais que vous n'êtes pas d'accord avec cela au départ — sont toujours un élément pris en compte lors de la troisième période d'inscription, étant donné que les prix des produits de base ont beaucoup augmenté depuis le début du programme.
    Elles ont reçu 18 milliards de dollars en subventions l'année dernière, et le gouvernement axe ses efforts sur les besoins financiers des grosses pétrolières. Je suis simplement scandalisé par cela.
    Le temps est maintenant écoulé.
    Nous allons passer à la deuxième série de questions, qui sera d'une durée de 15 minutes. Cela nous mènera essentiellement à la fin de la première séance. Je pense que nos prochains témoins sont presque prêts. Lorsque nous aurons terminé les quatre périodes de questions, nous allons clore la présente séance.
    Je dis donc aux témoins de la deuxième séance qui attendent de bien vouloir se préparer, car la séance débutera dans 15 minutes.
    Monsieur Maguire, vous êtes le premier et vous avez cinq minutes.
    Monsieur le commissaire, je vous remercie de votre exposé et je remercie les gens qui vous accompagnent aujourd'hui pour la préparation du rapport.
    Dans la foulée de la question que vient de poser M. Angus et du fait que le ministère ne comprenait pas l'idée des scénarios de référence pour ce programme... Monsieur le commissaire, pourriez-vous simplement nous dire ce qui explique en apparence l'absence de ces scénarios? Le programme visait, bien entendu, à soutenir l'industrie et la création d'emplois, l'idée globale étant de réduire les émissions de méthane.
    Pouvez-vous nous dire comment cela a pu être mesuré en l'absence de scénarios de référence?
    C'est une excellente question. Je vais résumer ce qui se trouve à la page 15 et aux suivantes dans le rapport. Je vous encourage à les lire après la séance.
    Les scénarios de référence sont très importants. Nous avons une pièce qui explique le principe. À partir du scénario de référence, on peut déterminer l'effet qu'a eu le fonds, ou dans le cas présent, le fonds et la réglementation sur les émissions de méthane. Sans un bon scénario de référence, l'équation pour déterminer les émissions repose essentiellement sur une mauvaise base. Il est nécessaire d'avoir un scénario de référence pour prévoir ce que seront les émissions, pas seulement pour l'année en cours, mais pour les années à venir, lorsque la réglementation sur le méthane entrera en vigueur. Ce n'est qu'ainsi que l'on peut déterminer, par exemple, l'incidence du fonds, en plus de la réglementation, sur les émissions de méthane.
    Sans un bon scénario de référence, les calculs seront erronés.

  (1615)  

    Je vous remercie. Le plan prévoyait même un taux de défaut de 25 % pour les entreprises qui présentaient une demande de financement. Nous savions combien d'entreprises et d'emplois étaient menacés dès le départ, apparemment, lorsque le programme a été mis en place. Je sais en quoi consiste un scénario de référence, bien entendu, mais s'il n'y en avait pas dans ce cas particulier, je me demande comment on peut mesurer le tout. Je vous remercie du rapport, mais je ne sais pas comment on règle le problème.
    Avez-vous trouvé quelque preuve que ce soit que le gouvernement a demandé...? Je répète sans doute la question de mon collègue. Vous avez déjà dit qu'il n'y a pas eu de consultations avec les entreprises. Si tel est le cas, quelles recommandations feriez-vous maintenant au ministère pour déterminer si, oui ou non, le fonds permet de maintenir des emplois?
    Au sujet de l'optimisation des ressources et du maintien des emplois, il n'y a essentiellement aucun critère pour approuver un projet qui est basé sur cet objectif. Il y a un objectif visant à maintenir des emplois, mais il n'y a pas de critères d'admissibilité pour les demandeurs précisant qu'ils vont maintenir tel nombre d'emplois par dollar dépensé, etc.
    On revient à la notion de base de gestion du rendement. Si on s'est donné comme objectif de maintenir des emplois, il faut établir une cible et une façon de mesurer le tout, et de mesurer aussi l'efficacité avec laquelle la cible est atteinte. Tous ces éléments sont absents, alors il faudrait tout reprendre à zéro.
    Comment travaille‑t‑on avec un plan qui prévoit également un taux de défaut des entreprises de 25 %? Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    J'ai une autre question. Il s'agissait d'un programme de sept ans dont le remboursement était prévu avant la fin de cette période. Tout l'argent devait être distribué en 2021-2022, au cours de ces deux années, pour réduire les émissions de méthane et être ensuite remboursé. Quels critères le gouvernement a‑t‑il utilisés pour ce faire et comment mesure‑t‑il si nous sommes en bonne voie de réduire les émissions de méthane?
    Ils ont effectué quelques tests sur la viabilité financière des entreprises, et c'est ce qui a mené à l'hypothèse du taux de défaut de 25 % que vous avez mentionné il y a quelques minutes.
    Il faut aussi dire qu'il est question du défaut de remboursement pour les prêts. Le ministère est disposé à annuler potentiellement jusqu'à 25 %. C'est l'hypothèse avancée. Toutefois, il y a aussi une portion non remboursable, ce qui équivaut à une subvention directe. Il y a donc le prêt et il y a ce que le ministère appelle une portion non remboursable du prêt, ce qui équivaut, pour le commun des mortels, à une subvention. Ce sont des sommes que les contribuables canadiens ne récupéreront pas.
    Le temps est écoulé.
    Monsieur Maloney, vous avez cinq minutes pour poser vos questions.
     Monsieur DeMarco, je tiens à vous remercier vous et vos collègues d'être avec nous aujourd'hui et de nous présenter un aperçu de votre rapport et des recommandations qu'il contient.
    J'aimerais simplement mentionner que je suis heureux d'être ici. J'en suis à ma première séance de comité en personne depuis près de deux ans. Pardonnez-moi si je cherche mon micro pendant la séance.
    Monsieur DeMarco, mes questions portent sur le processus. Votre collègue a dit que vous n'examinez pas les résultats du programme et que vous n'avez parlé à aucune entreprise qui a demandé ou reçu du financement. Est‑ce la pratique habituelle dans le cadre d'un audit?
    Il faut se rappeler que l'objet de notre audit est le programme du gouvernement. Nous ne procédons pas à un audit du secteur privé directement. Nous avons effectué un audit du processus de demande de fonds et d'attribution des fonds. Nous avons examiné si les résultats ont été mesurés, parce que l'audit portait sur Ressources naturelles Canada. L'audit ne portait pas sur les entreprises, puisque nous n'avons pas, comme leurs vérificateurs, accès à leurs livres.
    L'audit a porté sur Ressources naturelles Canada, leurs dossiers et les mesures que le ministère a utilisées pour évaluer l'optimisation des ressources et déterminer si les réductions étaient crédibles et durables. Je me suis concentré sur le travail de Ressources naturelles Canada.

  (1620)  

     Fort bien, mais comment évaluer la pertinence des critères pour un programme comme celui‑ci sans examiner les résultats? Vous avez fait des déclarations plutôt arrêtées aujourd'hui en ce qui concerne les résultats, à savoir s'ils sont mesurables ou non, s'ils sont positifs ou non.
    Je suis perplexe, car je ne comprends pas comment vous pouvez faire ces déclarations sans examiner vous-même les résultats.
    Nous faisons ces déclarations en nous basant sur de bons principes de la conception d'un programme comme celui‑ci.
    N'oubliez pas que nous nous sommes lancés dans ce travail juste après la première période d'inscription au programme, de sorte que les fonds venaient d'être versés et l'équipement, en majeure partie, était encore en cours d'installation ou sur le point d'être installé. Nous n'attendions pas que les 675 millions de dollars soient versés et que tout l'équipement soit installé, pour ensuite examiner les erreurs commises des années plus tard. Nous avons examiné les choses après la première période d'inscription, parce que nous voulions voir s'il y avait des failles dans la conception du programme, et pas seulement les résultats que nous pourrions mesurer avec un suivi.
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, je remettrais en question la capacité d'avancer qu'il y a des failles dans le programme sans avoir examiné tous les faits. D'après mon expérience, tirer des conclusions définitives sans disposer de tous les faits est une entreprise risquée.
    Je tiens à vous remercier d'avoir effectué l'audit, car votre rôle est d'essayer d'aider le gouvernement à améliorer des programmes comme celui‑ci et bien d'autres. Il me semble que votre audit a été fructueux de ce point de vue, car le gouvernement a adopté quatre des six recommandations et en a accepté en partie deux autres. J'imagine que cela vous amène à conclure qu'il est sur la bonne voie. Mon observation est-elle juste?
    Nous n'avons pas réalisé d'audit sur les changements apportés au programme qui s'appliqueront à la troisième période d'inscription.
    Je suis désolé de vous interrompre, mais mon temps est limité. Cela m'amène à vous poser ma prochaine question.
     Vous avez dit à ma collègue, Mme Dabrusin, que vous ne savez pas si vous allez procéder à un audit sur la troisième période d'inscription. Vous avez dit que c'est possible, mais que vous le ferez si vous déterminez qu'il existe un risque qu'il y ait des problèmes concernant la troisième période d'inscription.
    Comment savez-vous qu'il y a un problème si vous ne faites pas d'audit?
    Pour ce qui est du choix des audits, nous effectuons ce que nous appelons la planification stratégique des audits. Nous examinons les questions, puis nous les sélectionnons. Nous devons les examiner de prime abord pour voir s'il y a un élément sur lequel il serait bon de mener un audit. Si c'est le cas, nous procédons à l'audit. Si nous examinons la question et qu'il semble que des corrections ont été apportées et qu'il n'y a pas de problèmes, alors il y a moins de raisons de procéder à un audit.
    Vous le faites sans examiner les choses de plus près. Mon interprétation est-elle juste?
    On doit faire le choix de mener un audit ou non en fonction de certains renseignements. Il va sans dire que nous ne prenons pas cette décision sans réfléchir.
    Un peu plus tôt, en réponse à une question de M. Angus, vous avez dit qu'il fallait regarder l'ensemble de la situation. Je vais en rester là.
    Vous avez conclu, monsieur, par exemple, que des réductions se seraient produites de toute façon, mais vous ne le savez pas parce que vous n'avez pas examiné les résultats, n'est‑ce pas?
    Nous le savons parce qu'une partie de l'argent devait servir à financer des initiatives...
    C'est un commentaire sur la conception, monsieur. Je parle d'une conclusion fondée sur les résultats. C'est ce que je veux dire. À moins d'examiner les résultats et de parler aux personnes qui font partie du processus, comment pouvez-vous tirer ces conclusions?
    J'ai déjà abordé la question, à savoir que si nous intervenons maintenant, nous allons nous concentrer davantage sur la conception. Si nous attendons pour mener un audit dans six ans et que nous vous disons ce qui n'a pas fonctionné, vous nous demanderez probablement pourquoi nous ne vous l'avons pas dit plus tôt pour que vous puissiez améliorer le programme. Nous sommes intervenus au moment où nous l'avons fait, et nous avons utilisé tous les renseignements auxquels nous avons eu accès pour examiner la conception et la mise en œuvre. C'est...
    C'est ce que je veux dire. Vous avez fait ce que vous avez fait. Vous pourriez vouloir revoir cela.
    Le temps est maintenant écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Simard, qui dispose de deux minutes et demie.
    La parole est à vous, monsieur Simard.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je juge votre conclusion sévère. Ce que vous dites, c'est que le Fonds de réduction des émissions pourrait stimuler la production pétrolière et gazière et entraîner une augmentation des GES. Si c'était le cas, cela deviendrait une subvention inefficace aux combustibles fossiles. C'est ce que j'en ai retenu.
    D'ailleurs, pour ce qui est de la troisième période d’inscription, vous faites quatre recommandations. Premièrement, je me demande si vous pourriez indiquer dans vos recommandations qu'il serait peut-être préférable qu'il n'y ait pas de troisième période d’inscription.
    Deuxièmement, croyez-vous vraiment que, en appliquant les quatre critères que vous présentez comme des modifications à apporter, nous pourrons véritablement en arriver à une réduction des GES?

  (1625)  

     Nous proposons six recommandations, et pas seulement quatre, pour améliorer le programme.
    Pour ce qui est de savoir s'il est raisonnable qu'il y ait une troisième période d’inscription, je pense que le Comité devrait la poser au ministère, mercredi.
     J'ai parlé de la pertinence de l'optimisation des ressources. A-t-elle changé en raison du changement du prix du pétrole depuis le début de la pandémie? C'est une autre question que le Comité pourra poser au ministère, mercredi.
    Je comprends que ce n'est pas votre rôle et je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche. J'aimerais savoir s'il vous est possible de faire autre chose que de proposer des modifications et de carrément dire que le programme devrait être mis sur pause ou que la troisième période d’inscription ne devrait pas avoir lieu.
    Ce que je veux surtout savoir, c'est si vous avez le droit de faire ce genre de recommandations.
    Il y a beaucoup d'options. Par exemple, on peut utiliser le principe du pollueur-payeur et dire qu'il n'y aura pas de subvention. Dans ce cas, on utilise un règlement plutôt qu'une subvention.
     Il y a plusieurs options, et ce sera à lax autres témoins de dire laquelle ils préfèrent, pas seulement en ce qui a trait au troisième période d’inscription de ce programme, mais aussi en ce qui a trait aux programmes futurs.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Angus.
    Merci, monsieur DeMarco. J'ai siégé à de nombreux comités et j'ai énormément de respect pour le travail que vous accomplissez. Je suis un peu déçu de l'attaque que vous avez subie de la part de mon collègue libéral, comme si vous ne saviez pas ce que vous faisiez.
    Lorsque vous avez dit que les réponses du ministère vous avaient beaucoup déçu, j'ai été frappé par le fait que cela n'augure rien de bon. Nous parlons d'un engagement qu'a pris un gouvernement de respecter ses engagements internationaux, mais nous constatons que, depuis le début, il axe ses efforts sur les besoins financiers des grosses pétrolières, comme l'a dit le ministère.
    J'ai une question au sujet de vos observations. Je vous cite ici. « Le Canada a déjà été un chef de file dans la lutte contre les changements climatiques. Toutefois, après une série d'occasions ratées, il est désormais le pays avec la pire performance de toutes les nations du G7 depuis l'adoption de l'historique Accord de Paris sur les changements climatiques en 2015 ». Il s'agissait de la rencontre à laquelle le premier ministre a déclaré que le Canada était de retour. Comment se fait‑il qu'après le retour du Canada en 2015, le pays a maintenant la pire performance de toutes les nations du G7? Pouvez-vous l'expliquer?
    Je ne peux l'expliquer, mais je peux mettre les choses en contexte. J'ai décrit le Canada comme un chef de file. J'ai participé à la conférence de Rio en 1992, et le Canada était bel et bien un chef de file. Il encourageait d'autres pays industrialisés à adopter les conventions à Rio. De plus, le Canada a été l'hôte de la conférence de 1988, qui a fait connaître les changements climatiques. C'étaient des intentions. C'étaient de bonnes actions, mais elles n'ont pas été suivies de résultats.
    À quel point la situation est-elle mauvaise? Eh bien, depuis la conférence de Paris, nos émissions ont augmenté, et les six autres pays du G7 font mieux que le nôtre. Ce n'est toutefois pas seulement depuis la conférence de Paris. Depuis celle de Rio, en 1992, le Canada a la pire performance des pays du G7, de sorte qu'on ne parle pas seulement des dernières années, mais de l'ensemble des trois décennies. Les émissions du Canada ont augmenté de plus de 20 %, tandis que la plupart des émissions des pays du G7 ont diminué, et quelques pays sont à peu près dans la même situation qu'ils étaient en 1990.
    Nos émissions ont augmenté de 20 %. Le Canada est un cas particulier par rapport aux autres pays du G7.
    Un cas particulier. Merci. Mon temps est écoulé. Serait‑il possible de nous fournir une liste des sociétés qui reçoivent de l'argent? Il nous serait certainement utile de savoir s'il s'agit de sociétés très rentables. Il serait utile d'avoir une idée de la façon dont le programme s'est déroulé.

  (1630)  

    Je devrai le vérifier. Nous vous reviendrons là‑dessus, monsieur Angus.
    Merci.
     Merci à tous. C'est ce qui met fin à la première partie de notre réunion avec le commissaire.
    Monsieur DeMarco, monsieur McKenzie, madame Marchand, je vous remercie de vous être joints à nous cet après-midi et de nous avoir parlé de l'audit que vous avez réalisé. Sur ce, je crois que vous pouvez quitter l'appel.
    Je vérifie auprès de la greffière pour m'assurer que nous sommes prêts à accueillir le prochain groupe de témoins.
    Nous recevons M. Pierre-Olivier Pineau, professeur à HEC Montréal, qui comparaît à titre personnel; M. Tom Green, conseiller principal en politiques climatiques à la Fondation David Suzuki; et M. Brent Lakeman, directeur de l'Initiative hydrogène à Edmonton Global. Nous accueillons également deux représentants de Protection environnementale Canada: Mme Julia Levin, responsable du programme climat et énergie; et M. Dale Marshall, gestionnaire du programme national du climat.
     Vous disposerez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Je vous avertirai lorsqu'il vous restera 30 secondes afin que vous puissiez conclure. Ne vous arrêtez pas au milieu d'une phrase, mais terminez votre déclaration par une conclusion. Nous passerons ensuite aux questions. Nous verrons comment le tout se déroulera au fur et à mesure.
    Nous allons d'abord entendre M. Pineau, qui fera une déclaration préliminaire de cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.

[Français]

     Bonjour, je remercie le Comité de m'avoir invité.
    Je vais commencer simplement par dire que, au début de la pandémie, en mai 2020, les prix du pétrole ont chuté assez rapidement à des niveaux record. Celui du Western Canadian Select avait atteint 3,50 $ le baril. Cela a fait énormément de mal aux entreprises albertaines.
    Dans un contexte de pandémie, le gouvernement a voulu venir en aide à tous les Canadiens et à toutes les entreprises canadiennes qui subissaient des torts causés par la pandémie. Aujourd'hui, non seulement le prix du pétrole a rebondi à des niveaux jamais vus depuis 2015, mais la production de pétrole en Alberta n'a jamais été aussi élevée. On a atteint un record de production en Alberta en octobre 2021, et les prix ont remonté à des niveaux qu'on avait connus avant 2015. C'est donc dire que l'industrie pétrolière en Alberta est redevenue extrêmement rentable aujourd'hui.
    Quand on conçoit des programmes d'aide, ceux-ci s'adressent à des entreprises ou à des individus qui sont en difficulté. Or il est très évident que l'industrie pétrolière ne l'est plus aujourd'hui. Il me semble donc que la raison d'être de ce programme — c'est bien d'un programme d'aide qu'il s'agit — vient de s'effondrer, puisqu'il était là pour aider des entreprises qui n'en ont maintenant plus besoin. En toute logique, on devrait cesser d'aider des gens qui n'en ont pas besoin.
    De plus, nous sommes dans un contexte de lutte contre les changements climatiques, et le fait que les subventions aux entreprises pétrolières existent encore a été maintes fois dénoncé. Le gouvernement de M. Trudeau, lors de sa première campagne électorale, avait même promis de mettre fin aux subventions à l'industrie des énergies fossiles. C'est d'ailleurs une des seules promesses liées au secteur des ressources naturelles qu'il n'a pas tenues. Il en a tenu beaucoup d'autres, mais celle concernant les subventions au secteur des énergies fossiles n'a pas été tenue. Je m'étonne que l’on continue de subventionner, par l'entremise d'un tel programme, un secteur dont on veut très clairement réduire les émissions.
    Aujourd'hui, avec le premier groupe de témoins, on a déjà fait état de la situation des émissions de gaz à effet de serre au Canada. On sait qu'elles vont dans la mauvaise direction. On sait aussi que les consommateurs canadiens sont parmi ceux qui paient le moins cher leurs produits pétroliers sur la planète, puisque nous avons un niveau de taxation très bas comparé à celui des autres pays de l'OCDE. Malgré cela, le gouvernement subventionne les entreprises pétrolières pour faire des choses que celles-ci devraient faire en vertu de la réglementation. Comme M. DeMarco l'a indiqué, la réglementation les oblige à limiter leurs émissions de méthane.
    Il s'agit donc d'un programme qui vient aider des entreprises qui n'ont pas besoin d'être aidées. C'est contraire à la logique économique, c'est contraire à la logique environnementale et c'est contraire au bien-être des citoyens canadiens, qui voient leurs fonds publics être mal dépensés dans des programmes qui, comme on l'a vu, ne sont pas efficaces, puisqu'il existe déjà des règlements qui font la même chose.
    Devant tant d'aberrations, je me désole. J'espère que le gouvernement va simplement abolir ce programme « d'aide », un programme de subvention qui ne mérite certainement pas d'exister encore et auquel il faudrait mettre fin très rapidement.

  (1635)  

[Traduction]

     Merci. Je vous remercie de vos observations.
    Nous sommes prêts à passer à notre prochain témoin, qui représente la Fondation David Suzuki.
    Monsieur Green, c'est à votre tour de faire votre déclaration préliminaire de cinq minutes.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant le Comité aujourd'hui.
    La Fondation David Suzuki plaide depuis longtemps en faveur d'une réglementation efficace visant à réduire rapidement les émissions de méthane dans le secteur pétrolier et gazier. Étant donné qu'il s'agit d'un gaz à effet de serre de courte durée de vie, dont l'effet de forçage climatique sur 20 ans est 86 fois supérieur à celui du CO2, la réduction du méthane dans l'atmosphère peut produire rapidement des résultats positifs pour le climat. L'urgence de s'attaquer aux émissions du secteur pétrolier et gazier est accentuée par les résultats des mesures sur le terrain, qui montrent régulièrement que les émissions de méthane sont deux fois plus importantes, voire plus, que celles enregistrées dans le rapport d'inventaire national du Canada.
     Malheureusement, la réglementation existante sur le méthane peut, en fait, entraîner une augmentation du brûlage à la torche de gaz riche en méthane et en composés organiques volatils. Le torchage du méthane et de composés organiques volatils entraîne la formation de particules de carbone noir, qui sont toxiques et constituent un polluant climatique de courte durée de vie dont le potentiel de réchauffement planétaire est plusieurs centaines de fois supérieur à celui du dioxyde de carbone. Le brûlage à la torche est également une voie de conformité qui ne cadre pas avec les objectifs climatiques du Canada et l'engagement d'éliminer le brûlage à la torche de routine d'ici 2030.
     Le gouvernement fédéral a annoncé la création du Fonds de réduction des émissions, le FRE, au début de la pandémie, à un moment d'incertitude économique où les gouvernements déployaient rapidement des mesures pour stabiliser l'économie. Comme mon collègue, M. Pineau, l'a mentionné, les prix du gaz et du pétrole étaient très bas. Nous croyons au principe du pollueur-payeur, et donc, offrir du financement à l'industrie pétrolière et gazière par le FRE n'est pas l'approche que nous aurions recommandée. Cependant, une fois que la décision de créer le FRE a été prise, nous avons cherché à nous assurer que pour les produits concernés, les réductions d'émissions obtenues étaient supérieures aux exigences réglementaires, et que l'accent était mis sur l'élimination plutôt que sur la réduction des émissions.
    Dans une lettre commune d'avril 2020, nous avons fait des recommandations au ministre. Nous croyions que si le FRE était guidé par de tels principes, le programme entraînerait des réductions d'émissions supérieures à celles qui pourraient résulter des réglementations fédérales et provinciales. De plus, le FRE stimulerait la croissance de l'industrie naissante de la réduction du méthane.
    Lorsque Ressources naturelles Canada a annoncé les résultats nets des première et deuxième périodes d'inscription, nous avons été heureux de constater que 97 % des réductions d'émissions étaient attribuables à des projets qui éliminaient l'évacuation et le torchage de routine intentionnels. Cela a été réalisé pour moins de 20 $ par tonne d'équivalent CO2. Il s'agit d'une réalisation remarquable, qui montre que le Canada doit immédiatement renforcer la réglementation existante pour mettre fin à l'évacuation et au torchage intentionnels de gaz riches en méthane.
     Nous étions naturellement inquiets lorsque nous avons été mis au courant de certains des problèmes relevés dans le rapport du commissaire à l'environnement. Comme nous nous attendions à ce que Ressources naturelles Canada prenne des mesures correctives, nous avons écrit au ministre Wilkinson, en décembre de l'année dernière, pour l'exhorter à s'assurer que, quelle que soit la ligne de conduite adoptée, qu'il s'agisse de réviser ou d'annuler le FRE en faveur d'autres mesures, le ministère a comme objectif d'atteindre ou de dépasser les résultats obtenus dans les deux premières périodes d'inscription du programme sur une période équivalente.
    La semaine dernière, des représentants du ministère nous ont informés des changements apportés au programme pour la troisième période d'inscription. Nous sommes ravis que les projets proposés doivent dépasser les exigences réglementaires, et que seuls les projets d'infrastructure qui éliminent les sources d'évacuation de routine intentionnelle soient admissibles au programme.
     Le FRE a montré que la lutte contre le méthane offre certaines des mesures d'atténuation les moins coûteuses, sur la base d'un dollar par tonne, dans l'ensemble de l'économie canadienne. Nous sommes déterminés à participer à l'examen de la réglementation existante et à l'élaboration de meilleurs règlements pour l'atteinte de l'objectif de 2030, soit d'exiger du secteur pétrolier et gazier canadien qu'il réduise ses émissions de méthane d'au moins 75 %. Nous sommes également conscients que l'élaboration de ces règlements prend du temps. Nous préférons l'approche réglementaire et nous croyons que les efforts qui seront déployés pour atténuer les émissions devraient être guidés par le principe du pollueur-payeur, l'engagement du Canada à éliminer les subventions aux combustibles fossiles d'ici 2023 et l'engagement à éliminer progressivement le financement public du secteur des combustibles fossiles.
    Cela dit, nous reconnaissons qu'en étant axé sur l'élimination et l'idée de dépasser les exigences réglementaires, le FRE a le potentiel de produire rapidement des réductions d'émissions substantielles mettant le Canada en meilleure position pour atteindre ses objectifs climatiques concernant l'amélioration de la qualité de l'air et de la santé publique.

  (1640)  

[Français]

     Je vous remercie de votre attention. Je répondrai volontiers à vos questions.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup de votre déclaration préliminaire.
    Tout le monde a très bien respecté le temps alloué. Je vous en remercie.
    C'est maintenant au tour du représentant d'Edmonton Global.
    La parole est à vous, monsieur Lakeman. Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

[Traduction]

    Bonjour à tous les membres du Comité permanent des ressources naturelles.
     J'aimerais tout d'abord souligner que je participe à la réunion d'aujourd'hui depuis le territoire du Traité no 6, lieu de rassemblement traditionnel et centre de commerce de nombreuses Premières Nations et de peuples métis et inuits.
    Edmonton Global remercie le Comité de l'occasion qui lui est donnée de comparaître devant vous aujourd'hui pour discuter des possibilités que présente l'hydrogène. L'objectif d'Edmonton Global est de transformer radicalement et de faire croître l'économie de la région métropolitaine d'Edmonton.
    La transition énergétique, en particulier celle attribuable à l'hydrogène, est un excellent exemple de la transformation radicale que notre région cherche à réaliser. Nous ne pourrons pas y arriver seuls. Nous reconnaissons que le gouvernement fédéral est un partenaire essentiel dans cette transition. Les engagements mondiaux en faveur de la carboneutralité pris par les gouvernements et l'industrie sont le moteur de cette transformation. On estime que ce changement entraînera des investissements mondiaux de l'ordre de 2,5 à 11 billions de dollars d'ici 2050.
     L'hydrogène jouera un rôle clé dans la transition énergétique mondiale et pourrait éventuellement représenter 20 % des sources d'énergie, et plus encore même, au Canada, soit environ 30 %. Il s'agit d'une occasion économique en or pour le Canada. L'Accélérateur de transition, un groupe de réflexion canadien qui travaille à accélérer notre transition énergétique, estime que la transition vers l'hydrogène a un potentiel de retombées de 100 milliards de dollars par an. Elle va créer des emplois. La stratégie sur l'hydrogène du gouvernement fédéral prévoit la création de 350 000 nouveaux emplois au Canada. Une étude récente sur la transition énergétique présente des conclusions similaires, c'est‑à‑dire que l'adoption de technologies pour la production d'énergie propre fera augmenter le PIB de l'Alberta de 61 milliards de dollars en créant 170 000 emplois.
    En 2020, le premier centre de l'hydrogène au Canada a été créé dans la région d'Edmonton, compte tenu du rôle essentiel que la région jouera en tant qu'épicentre de l'économie de l'hydrogène au Canada. Ce centre est dirigé par les maires et les dirigeants de cinq municipalités de la région, ainsi que par les chefs de deux Premières Nations de la région.
    Le monde commence à porter attention à ce qui se passe ici. Quelques projets de plusieurs milliards de dollars ont été annoncés dans la région, y compris l'ouverture de la première centrale de production d'hydrogène carboneutre à l'échelle industrielle au monde. Nous prévoyons environ 30 milliards de dollars de nouveaux investissements dans la région d'ici 2030.
    La réalisation de ce potentiel économique ne se fera pas toute seule. Il faudra que tous les ordres de gouvernement s'engagent à travailler ensemble de manière opportune et coordonnée. Il faudra investir dans les infrastructures, notamment pour assurer le transport et l'utilisation de l'hydrogène dans les centres d'hydrogène, ainsi que pour l'acheminer vers les principaux marchés d'exportation.
    Il faudra également investir dans la main-d'œuvre qui soutiendra l'économie de l'hydrogène. Il s'agit d'une excellente occasion de transition pour la main-d'œuvre hautement qualifiée formée pour notre secteur énergétique conventionnel.
    Les programmes du gouvernement fédéral joueront un rôle clé dans la croissance de cette industrie. Des programmes comme le Fonds pour les combustibles propres et l'Accélérateur net-zéro constituent un excellent point de départ. Les incitatifs fédéraux, comme un crédit d'impôt pour le déploiement du captage, de l'utilisation et du stockage du carbone, pourraient également revêtir une importance capitale.
    Nous avons besoin d'une approche stratégique des investissements du gouvernement fédéral, axée sur la construction et le développement rapides de l'infrastructure nécessaire. Cela contribuera à réduire nos émissions suffisamment pour atteindre la carboneutralité. Il faudra, pour ce faire, nous concentrer sur les régions du pays qui peuvent non seulement faire de la production à grande échelle — et rapidement — mais aussi démocratiser l'utilisation de l'hydrogène dans les principaux secteurs.
    Nous observons une tendance internationale à l'utilisation de centres d'hydrogène pour catalyser la croissance de l'économie de l'hydrogène. Des pays comme le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l'Allemagne et la Corée sont tous en train d'établir des centres d'hydrogène. De même, le Canada devrait les considérer comme un mécanisme stratégique pour faire avancer la transition énergétique. Ces centres permettent d'adopter une approche adaptée au potentiel régional dans différentes régions du pays.
    Le centre de l'hydrogène de la région d'Edmonton fournit une feuille de route pour le développement rapide de l'économie de l'hydrogène dans l'Ouest canadien, qui nécessitera une approche intégrée comprenant un soutien pour des éléments comme l'infrastructure de ravitaillement en hydrogène, des incitatifs à l'acquisition de véhicules à pile à hydrogène ou à moteurs bicarburants, et la mise en place progressive d'une infrastructure de pipelines pour relier les principaux groupes ayant besoin de s'approvisionner en hydrogène.
    La concurrence est forte dans le monde pour prendre le leadership dans l'économie de l'hydrogène, et le Canada risque d'être exclu des principaux marchés d'exportation si nous n'agissons pas rapidement et vigoureusement. Il faut que les gouvernements fédéral et provinciaux travaillent ensemble pour établir l'infrastructure de transport de l'hydrogène essentielle pour acheminer nos produits à faible teneur en carbone et à faible coût vers des marchés mondiaux comme ceux du Japon et de la Corée.
    J'aimerais souligner, pour terminer, l'importance de nous éloigner des messages axés sur le code de couleur des diverses méthodes de production d'hydrogène. Les investisseurs ont besoin de certitude quant aux attentes en matière d'intensité de carbone, et nous devons communiquer des mesures scientifiquement crédibles pour établir l'intensité de carbone. Il y a un risque que certains des projets les plus avancés et les plus rigoureux au monde soient jugés incompatibles avec les objectifs de carboneutralité de certaines organisations si nous continuons à affirmer que l'hydrogène à faible teneur en carbone ne peut provenir que de sources d'énergie renouvelables. Edmonton Global applaudit les efforts du gouvernement fédéral et du gouvernement de l'Alberta en vue d'établir une norme d'intensité de carbone rigoureuse et scientifiquement crédible pour les projets futurs.
    Voilà qui conclut mes observations préliminaires. Je serai heureux de répondre aux questions du Comité.

  (1645)  

    C'est parfait. Merci beaucoup. Vous avez pris cinq minutes pile.
    Je demanderais toutefois à tous les intervenants de ne pas parler trop vite, afin que nos interprètes puissent vous suivre.
    Sur ce, nous entendrons une dernière déclaration préliminaire de Protection environnementale Canada. Je crois que c'est Mme Levin, responsable du programme climat et énergie, qui va présenter l'exposé.
    Si c'est bien cela, madame Levin, je vous cède la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant le Comité aujourd'hui. J'aimerais mettre en contexte le bilan du gouvernement fédéral pour ce qui est d'accorder des subventions aux sociétés pétrolières et gazières et le genre de stratégie qu'illustre bien le Fonds de réduction des émissions.
    Le gouvernement du Canada continue d'offrir d'énormes subventions et mécanismes d'aide publique aux producteurs de combustibles fossiles, malgré son engagement à éliminer ces subventions. Le Fonds de réduction des émissions n'est qu'un des nombreux programmes de soutien créés en 2020 pour subventionner l'industrie pétrolière et gazière, par lesquels le gouvernement a promis 18 milliards de dollars en subventions et financement public cette année‑là seulement. Au cours des cinq dernières années, les gouvernements du Canada ont versé 100 milliards de dollars aux entreprises pétrolières et gazières.
    Nous savons que nous avons besoin d'une approche pangouvernementale pour affronter la crise climatique. Les subventions aux combustibles fossiles sapent notre capacité à respecter nos engagements en matière de climat. C'est pourquoi des dirigeants internationaux tels que le directeur de l'AIE et le secrétaire général des Nations unies exhortent les pays à éliminer toute subvention aux combustibles fossiles, une étape essentielle dans la lutte contre la crise climatique.
    Le FRE n'est qu'un des nombreux programmes de financement mis en place pour subventionner les combustibles fossiles sous couvert de réduction des émissions et de création d'emplois. Le ministre Wilkinson prétend que ces programmes qui visent ostensiblement à obtenir des résultats environnementaux ne sont pas des subventions aux combustibles fossiles, mais ce n'est tout simplement pas vrai, et cela ne correspond pas aux définitions internationales telles que celles de l'Organisation mondiale du commerce.
    Les programmes tels que le FRE réduisent le coût de production et d'exploitation des entreprises pétrolières et gazières, ce qui se traduit par une rentabilité accrue. Ils faussent le marché, favorisant encore plus les combustibles fossiles au détriment de solutions comme les énergies renouvelables et l'électrification des transports ou les VE. Ces programmes socialisent les coûts de l'assainissement de l'environnement en permettant aux sociétés pétrolières et gazières de tirer d'énormes avantages des ressources publiques. En fait, les profits des sociétés pétrolières et gazières atteignent des sommets, selon l'ARC Energy Research Institute, soit presque 100 milliards de dollars cette année.
    Non seulement ces programmes se trouvent à refiler les coûts environnementaux aux contribuables, violant ainsi les principes du pollueur-payeur inscrits dans les lois canadiennes, mais aucun de ces programmes n'a à ce jour permis de réduire les émissions, d'assainir l'environnement ni de créer ou préserver des emplois, comme les législateurs prétendaient vouloir le faire. Au contraire, dans son audit, le commissaire décrit le FRE comme une subvention aux combustibles fossiles et une utilisation inefficace de l'argent des contribuables. Il révèle à quel point ce programme est mal conçu.
    Bien qu'il ne soit pas réaliste d'analyser ainsi chaque programme de dépenses, les tendances mises en lumière par le commissaire s'observent dans d'autres programmes gouvernementaux, comme le programme de 1,7 milliard de dollars consacré au nettoyage des puits de pétrole et de gaz. Plutôt que de favoriser le lancement de nouveaux travaux d'assainissement, ce programme a eu pour principal résultat que des entreprises rentables n'avaient plus elles-mêmes à dépenser pour cela puisqu'elles bénéficiaient de fonds publics. Ce modèle suscite des inquiétudes, et il y a lieu dese demander comment sont conçus des programmes de financement encore plus importants, tels que celui de l'Acélérateur net zéro de 8 milliards de dollars.
    Comme nous le savons, le gouvernement s'est engagé à éliminer les subventions aux combustibles fossiles d'ici l'année prochaine. Cet engagement a été pris en réponse aux nombreuses pressions exercées par le public. Cependant, pour que l'approche du gouvernement soit crédible, elle doit se fonder sur des définitions reconnues au niveau international, faute de quoi ce serait de rompre une promesse faite aux Canadiens.
    Le FRE illustre bien une deuxième tendance inquiétante qui témoigne de l'effet du lobbying de l'industrie. La réglementation est le meilleur moyen et le moyen plus rentable de s'attaquer aux émissions de méthane. Elle garantit que le public ne fasse pas le ménage à la place de l'industrie et que chaque installation prenne des mesures concrètes pour réduire ses émissions.
    Nous savons que l'industrie pétrolière et gazière a fait pression pour que la réglementation existante sur le méthane soit retardée, affaiblie et rendue facultative. Le lobby du pétrole et du gaz affaiblit constamment l'approche réglementaire afin de réduire le coût de ses activités, puis convainc les gouvernements d'assumer une partie de ces coûts, ce qui revient à subventionner la conformité réglementaire.
    Le Canada doit s'attaquer à son problème de méthane. Il est d'une importance capitale de réduire les émissions de méthane. C'est en fait peu coûteux, et de nombreuses mesures sont faciles à mettre en œuvre. Il faut renforcer la réglementation actuelle visant à réduire les émissions de méthane d'ici 2025 et veiller à ce que les nouveaux règlements adoptés d'ici 2030 pour réduire les émissions de méthane soient bien robustes. Toutefois, il n'y a aucune raison pour que le public absorbe ces coûts à la place de l'industrie.
    En outre, la meilleure façon de réduire les émissions de méthane est de commencer à parler de l'urgence de s'affranchir du pétrole et du gaz. Nous devons commencer à planifier réellement la transition pour cesser de produire des combustibles fossiles.
     Pour conclure, nous savons que l'ampleur des dépenses nécessaires pour faire face à la crise climatique est considérable. Étant donné que les gouvernements n'ont pas une capacité de dépense infinie, nous devons être stratégiques. Les sociétés pétrolières et gazières ont énormément profité des ressources publiques pendant des décennies. Au lieu de continuer de subventionner le secteur, le gouvernement doit mettre en place un cadre réglementaire solide qui garantisse que les sociétés pétrolières et gazières font leur juste part tout en investissant dans des activités qui protègent le climat et favorisent l'efficacité énergétique, les énergies renouvelables et l'électrification. En continuant d'offrir des subventions telles que le FRE, on gaspille l'argent qui permettrait de financer des solutions climatiques.
    Je m'arrêterai là.

  (1650)  

    C'est très bien. Merci.
    Je remercie chacun de nos témoins pour ces déclarations préliminaires.
    Il y aura maintenant une série de questions de la part de chaque parti, de six minutes chacune. Nous commencerons avec M. Melillo.
    J'aimerais remercier tous nos témoins d'être parmi nous aujourd'hui; je les remercie de toutes leurs observations jusqu'à présent. J'ai hâte d'entendre ce qu'ils auront à dire quand nous passerons aux questions.
    L'une des critiques que nous avons entendues à l'encontre du fonds extraterritorial, c'est que dans certaines régions, les émissions ont même augmenté après que des entreprises aient reçu des fonds, ce qui n'est évidemment pas idéal lorsque l'on cherche à réduire les émissions. Il y a une chose que je tiens à souligner, parce que de toute évidence, quand des entreprises augmentent leur production au Canada, elles le font d'une manière beaucoup plus respectueuse de l'environnement que dans de nombreux autres pays et se trouvent en fait à déplacer leur production de pétrole et de gaz ou de GNL vers des pays où la réglementation est moins stricte.
    J'aimerais adresser ma question à M. Pineau.
    Je serais simplement curieux de connaître votre point de vue à ce sujet, si l'on pense aux exemples du GNL au Québec ou du pétrole et du gaz en Alberta. Au cours de la dernière législature, j'ai eu l'occasion de me rendre à Fort McMurray pour visiter l'un des sites et de voir l'excellent travail accompli là‑bas pour réduire les émissions. Je me demande si vous pouvez vous prononcer sur les effets positifs d'une augmentation de la production au Canada pour remplacer les émissions produites à l'échelle mondiale.
    C'est intéressant d'analyser la question sous cet angle.
     Je suis allé à Fort McMurray. J'ai examiné de nombreuses installations d’exploitation des sables bitumineux et leurs émissions. L'intensité des émissions diminue, ce qui est une bonne chose. Vous avez également raison de dire que la production pétrolière et gazière est meilleure au Canada que dans la plupart des endroits du monde. Vous avez fait allusion au projet de GNL au Québec. D'un point de vue énergétique, j'étais en faveur de ce projet. Nous voyons le genre de problèmes géopolitiques qui se posent en Europe, en Ukraine et en Russie. Si le Canada pouvait être un fournisseur de gaz naturel pour l'Allemagne, par exemple, ce serait certainement très utile pour l'ensemble du monde.
    Cela dit, la lutte contre le changement climatique ne doit pas se concentrer sur la production, mais sur la consommation. Nous avons tendance à oublier que les Canadiens sont parmi les leaders mondiaux de la consommation d'énergie par habitant. L'attention que nous portons à l'industrie est, à mon avis, mal placée. Aujourd'hui, nous sommes ici pour discuter d'un programme qui subventionne la production au Canada. Il est clair que ce programme est mauvais et qu'il devrait être annulé le plus rapidement possible.
    Le vrai combat devrait porter sur les consommateurs. Nous devrions faire en sorte que les consommateurs canadiens puissent utiliser moins de pétrole et de gaz grâce à de meilleurs systèmes de mobilité et à des normes plus strictes dans les codes régissant le bâtiment et le chauffage de nos maisons. Nous devons proposer d'autres options. Le principal problème n'est pas, je dirais, l'industrie pétrolière et gazière. Le principal problème réside dans nos habitudes de consommation et dans la façon dont nous avons appris à utiliser trop de pétrole et de gaz, trop d'énergie en général, même l'électricité. Je viens du Québec. Nous consommons bien trop d'électricité au Québec.

  (1655)  

     Je vous remercie de ces commentaires, cela m'amène à une autre question.
    Dans votre rapport intitulé L'état de l'énergie au Québec en 2020, vous indiquez que le nombre de véhicules par 1 000 personnes au Québec continue d'augmenter, alors que les véhicules électriques et hybrides rechargeables représentent, je crois, environ 3 % des nouvelles ventes d'automobiles au Québec. Je viens du Nord de l'Ontario, de Kenora, une région où les options sont très limitées pour les véhicules électriques. Il y a très peu de bornes de recharge le long des autoroutes et, bien sûr, des températures glaciales, ce qui rend le changement de consommation, d'habitude, assez difficile pour les gens de ma région.
    Je me demande si, à votre avis, le Canada dispose actuellement de l'infrastructure nécessaire pour faciliter une plus grande croissance des véhicules électriques et des véhicules rechargeables.
    La réponse rapide est non; nous n'avons pas l'infrastructure nécessaire, mais le problème, ce n'est pas les véhicules électriques. Le problème n'est pas le manque de véhicules électriques. Le problème, c'est que nous avons trop de voitures et trop de grosses voitures au Canada. La géographie n'a pas changé au cours des 20 dernières années, tandis que le nombre de voitures par 1 000 habitants a augmenté, de même que la taille des voitures. Nous avons vraiment un problème d'excès: il y a trop de voitures, et les véhicules sont trop gros.
    Avant d'électrifier notre flotte de véhicules, nous devrions en fait revenir à des voitures plus petites et promouvoir le covoiturage et l'autopartage, des options qui ne nécessitent pas de transport public. Je suis un grand féru du transport en commun, et nous devrions le favoriser partout où nous le pouvons, mais il faut vraiment mettre l'accent sur les petites voitures. Il sera beaucoup plus facile d'électrifier des voitures plus petites que d'électrifier la flotte actuelle de VUS. C'est là que nous sommes vraiment mal alignés dans nos objectifs.
    Monsieur Marshall, je crois que vous avez levé la main. Je veux savoir si vous avez des choses à dire sur l'une ou l'autre de ces questions. Notre temps est limité, alors gardez‑le à l'esprit.
    Nous sommes pratiquement à la fin des six minutes prévues, mais je n'avais pas vu votre main levée, donc je vous donne une seconde pour ajouter une phrase ou deux. Nous passerons ensuite à M. Chahal.
    Il y a des études évaluées par les pairs sur l'intensité des GES, le contenu en carbone, les différentes formes de pétrole dans le monde. Celui du Canada est l'un des pires. Masnadi et al. ont constaté qu'il était le quatrième plus sale pour son contenu en carbone par rapport au pétrole produit dans 50 autres régions du monde.
    Il est donc absurde de dire que le pétrole canadien est propre et qu'il serait bénéfique pour le climat qu'il remplace les autres formes de pétrole. Toute intensification de la production pétrolière au Canada aggravera le changement climatique.
    Nous allons devoir passer à M. Chahal.
    Monsieur Chahal, vous avez six minutes.
    Merci pour les exposés que vous nous avez présentés aujourd'hui. C'est merveilleux de pouvoir tous vous accueillir.
    Je suis heureux que M. Pineau ait parlé du pétrole à trois dollars le baril. En fait, le prix du Western Canadian Select est même devenu négatif, si je ne m'abuse. Il est important que les gens le sachent. Je vis à Calgary et je peux vous citer quelques chiffres. Notre centre-ville connaît un taux d'inoccupation de 30 %, ce qui met sérieusement à mal les budgets provinciaux et municipaux. Autre conséquence plus néfaste encore, des milliers de Calgariens et d'Albertains ont perdu leur emploi.
    À mon sens, l'objectif du programme est clairement défini. L'enveloppe de 750 millions de dollars s'inscrivait dans le cadre du Plan d'intervention économique du Canada pour répondre à la COVID‑19 afin d'aider les entreprises pétrolières et gazières à préserver les emplois. En situation de crise, il était primordial de sauvegarder les emplois tout en réduisant les émissions de méthane. Selon moi, c'est l'élément essentiel à considérer dans l'analyse des premières périodes d'inscription au programme. Avons-nous atteint ces objectifs? C'est ce qu'il faut déterminer d'abord et avant tout.
    Monsieur Lakeman, vous avez parlé de l'hydrogène et des initiatives fort intéressantes d'Edmonton Global en la matière. Existe‑t‑il d'autres façons pour le gouvernement du Canada d'aider les entreprises pétrolières et gazières à réduire leurs émissions tout en préservant les emplois?
    Par ailleurs, estimez-vous que les premières périodes d'inscription à ce programme ont permis de mettre au jour des perspectives de recherche et développement pouvant faire espérer de nouvelles réductions des émissions de méthane?

  (1700)  

    Je ne sais pas dans quelle mesure je peux vous fournir une réponse détaillée au sujet de ce programme étant donné que nos cibles n'étaient pas nécessairement les mêmes avec l'hydrogène… Je peux toutefois vous dire que, dans le cas de l'hydrogène, nous devons notamment gérer les émissions de méthane associées à la production du pétrole et du gaz en amont, et plus particulièrement à la production du gaz naturel.
    Si l'on considère encore une fois l'intensité carbonique de la production d'hydrogène, il est bien certain que tout programme visant la réalisation de gains d'efficience ou l'élimination des émissions fugitives et d'évacuation de méthane peut être bénéfique. Il convient d'adopter une approche multidimensionnelle pour déterminer dans quelle mesure le secteur pétrolier et gazier peut contribuer à la réduction des émissions, ce qui nous ramène aux avantages de l'hydrogène dont nous traitions précédemment.
    C'est exactement là où je veux en venir. Il faut continuer en priorité à réduire nos émissions en mettant à contribution certaines initiatives provinciales et en améliorant le positionnement relatif de notre secteur de la production de gaz naturel. Je pourrais vous citer l'exemple d'un rapport récent qui traitait de l'hydrogène suivant les couleurs qu'on lui attribue, soit l'hydrogène bleu et l'hydrogène vert. On y utilisait des facteurs d'émissions de méthane qui n'étaient pas vraiment représentatifs de la situation au Canada et en Alberta plus particulièrement. On semblait indiquer que nous en étions sans doute à 25 % du total, ou on pourrait parler d'une amélioration de 75 % par rapport aux niveaux utilisés pour une analyse comparative à l'échelle internationale.
    Nous continuons d'observer certains progrès, si bien que notre secteur de production d'hydrogène se positionne de plus en plus favorablement.
    Diriez-vous que les premières périodes d'inscription au programme ont permis de faire un usage optimal des ressources investies?
    Je ne peux pas me permettre de commentaires sur la participation au programme. Je n'ai pas effectué d'examen approfondi à ce sujet. Je ne suis pas un expert en la matière.
    Monsieur Green, merci d'être des nôtres. Ressources naturelles Canada a apporté certaines modifications au programme pour la troisième période d'inscription. Croyez-vous que ces changements ont amélioré le programme? Diriez-vous que le nouveau seuil établi pour le coût par tonne devrait permettre une optimisation des ressources?
    Le ministère cherche à améliorer le programme en réponse à l'analyse de ses résultats par le commissaire.
    Il importe notamment de souligner que le Règlement n'exige pas l'élimination de toutes les sources continues de ventilation de routine intentionnelle. C'est ce que je souhaiterais, mais ce n'est pas le cas. De nombreux puits de pétrole produisent des gaz associés sans qu'il y ait nécessairement un réseau à proximité pour le captage de ces gaz. Les projets financés ont permis le raccordement à une infrastructure semblable de telle sorte que les gaz en question, plutôt que d'être évacués ou éliminés à la torche, ont pu contribuer à l'approvisionnement énergétique ou servir de combustible sur place. Selon moi, c'est mieux encore que ce que prévoit le Règlement.
    Nous préconisons certes un renforcement des dispositions réglementaires, mais cela ne peut pas se faire du jour au lendemain. Je crois que la troisième période d'inscription à ce fonds contribuera à la réduction des émissions d'ici à ce que le Règlement soit changé.

  (1705)  

    Auriez-vous d'autres suggestions à nous faire pour l'amélioration du programme?
    Je pense que les changements apportés sont très constructifs, mais je ne saurais vous fournir une analyse plus détaillée de la question.
    Nous allons devoir vous dire merci, car le temps prévu est épuisé.
    Nous passons maintenant à M. Simard.
    Vous avez six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Pineau, j'ai trouvé votre intervention fort éclairante, d'autant plus que mon collègue M. Chahal vient de nous dire que l'objectif du programme était d'aider les entreprises pétrolières. Je trouve cela intéressant et je trouve que nous progressons.
    Dans votre présentation, vous avez dit que l'existence du programme s'expliquait peut-être par les prix du pétrole qui ont chuté pendant la pandémie et que, maintenant, comme il y a une augmentation des prix du pétrole, et comme les compagnies sont redevenues rentables, ce programme n'avait peut-être plus lieu d'être.
    Je m'interroge sur les motivations du gouvernement. Qu'est-ce qui a motivé le gouvernement à mettre en place le Fonds de réduction des émissions? Selon moi, l'objectif n'était certainement pas de réduire les émissions des secteurs gazier et pétrolier, mais plutôt de leur offrir un soutien financier. À la lumière de votre explication et de celle de M. Chahal, je crois comprendre que l'objectif était d'offrir un soutien financier au secteur gazier et pétrolier pendant la crise, et non pas de réduire les émissions de GES.
    Par conséquent, j'aimerais aborder un sujet qui me préoccupe beaucoup. N'y a-t-il pas, actuellement, une nouvelle façon de faire où on utilise la réduction des émissions comme prétexte pour soutenir financièrement l'industrie pétrolière? D'ailleurs, on l'a fait un peu dans le cas de l'hydrogène.
    J'aimerais vous entendre là-dessus, monsieur Pineau.
    J'aimerais aussi entendre Mme Levin par la suite.
    Je vous remercie de votre question, monsieur Simard.
    De manière générale, je suis tout à fait d'accord sur votre analyse. Le gouvernement fédéral et plusieurs gouvernements provinciaux sont très prompts à accorder des subventions pour développer et soutenir différentes industries.
    Ce que vous dites au sujet de l'industrie pétrolière est vrai, à mon avis, mais c'est entièrement vrai aussi dans le cas de l'industrie des véhicules électriques. Les gouvernements aiment donner de l'argent pour que les Canadiens achètent davantage de biens, alors que la lutte contre les changements climatiques nous dicte que ce n'est pas davantage, mais moins, de véhicules que nous devrions mettre sur les routes, et que nous devrions consommer moins de biens matériels pour réduire notre empreinte carbone et notre empreinte environnementale.
    De manière générale, je suis entièrement d'accord pour dire que les gouvernements n'utilisent pas les bonnes mesures pour nous mener à ces réductions. S'ils ne le font pas, c'est parce que le message voulant qu'il faille consommer moins de biens matériels et moins d'énergie est difficile à faire passer. Le fait qu'un changement de comportement est nécessaire est un message difficile à porter sur le plan politique.
    On a trop souvent tendance à vouloir pointer du doigt les industries quand on veut lutter contre les changements climatiques. Certes, ces industries ont des lobbys et ne posent pas toujours les meilleurs gestes pour la lutte contre les changements climatiques, mais, ultimement, ce sont les consommateurs qui surconsomment. Il faut envoyer le message que notre consommation doit être réduite afin d'être compatible avec un climat moins dégradé que ce qu'on peut craindre.
    Merci.

[Traduction]

    Je suis également d'avis que le gouvernement s'est rendu compte qu'il ne lui était plus possible d'octroyer des subventions à ce secteur en procédant comme il le fait depuis des décennies. Il utilise maintenant le prétexte de la création d'emplois et de la protection de l'environnement pour verser les mêmes subventions en les cachant derrière un nouveau déguisement. Si la création d'emplois était vraiment l'objectif, elle aurait fait partie des critères essentiels pour recevoir du financement. Ce n'était pas le cas, et les entreprises pétrolières et gazières… Le prix du pétrole a baissé pendant un mois avant de remonter rapidement, bien avant que des fonds soient versés dans le cadre de ce programme.
    Ce fonds est particulièrement problématique dans un contexte où le secteur pétrolier et gazier exerce des pressions incessantes pour que la réglementation demeure peu contraignante, et pour que le gouvernement comble le manque à gagner. Cette tendance se traduit en fin de compte par des bénéfices plus élevés et des coûts plus faibles pour les entreprises de ce secteur.
    J'aurais un dernier bref commentaire en terminant. Il est primordial que nous prenions les mesures nécessaires concernant le secteur pétrolier et gazier. C'est la source d'émissions qui est la plus importante et qui croît le plus rapidement au Canada, autant pour le méthane que pour les autres gaz à effet de serre. Il ne suffit pas de réduire la consommation, car nous savons que le Canada est l'un des pays qui exportent le plus de combustibles fossiles. Les émissions générées par ces exportations, qui ne sont pas prises en considération dans nos systèmes de comptabilisation nationaux, dépassent même les émissions intérieures canadiennes. En 2019, les combustibles fossiles que nous avons exportés ont généré 954 mégatonnes de gaz à effet de serre, ce qui est nettement plus que nos émissions intérieures. C'est pourquoi il est aussi important de s'attaquer à ce problème.

  (1710)  

[Français]

    Merci beaucoup, madame Levin.
    Malheureusement pour vous, monsieur Pineau, votre langage non verbal est assez évocateur. Lorsqu'il a été question d'hydrogène, je vous ai vu opiner du bonnet.
    Il n'y a pas si longtemps, nous avons étudié en comité la question de l'hydrogène, et ce que l'on nous disait, c'est qu'il est loin d'être clair que les stratégies de captation de carbone pour l'hydrogène, que l'on qualifie d'hydrogène bleu, soient efficaces. De plus, les coûts qui y sont associés pourraient être très élevés. J'ai toujours pensé que c'était peut‑être plus coûteux maintenant de produire de l'hydrogène à partir de la biomasse que de l'hydroélectricité. Cependant, il faut aussi calculer le coût de ces stratégies de captation de carbone.
    J'aimerais vous entendre à ce sujet, monsieur Pineau, et peut-être vous aussi, monsieur Lakeman, s'il reste un peu de temps par la suite.
    J'avoue que je ne comprends pas pourquoi on parle d'hydrogène ici quand on parle de ce programme.
    Je pense que vous avez entièrement raison: la prémisse de l'hydrogène bleu repose sur une captation du CO2, qui est encore très chère et commercialement non démontrée. Il y a eu de grands échecs en Saskatchewan ou des dépassements de coûts, alors c'est très difficile de voir beaucoup d'avenir pour l'hydrogène à grande échelle.

[Traduction]

    Merci à tout le monde.
    Nous allons maintenant passer à M. Angus pour sa première période de six minutes.
    Merci à nos témoins. Nous avons droit à des échanges vraiment fascinants.
    À mon sens, nous sommes réunis aujourd'hui pour déterminer si un programme gouvernemental d'investissement produit les résultats escomptés. Est‑ce que les objectifs sont atteints? Une catastrophe climatique est à nos portes. Il est par ailleurs absolument nécessaire que nous modernisions notre économie et, dans ce contexte, que le gouvernement investisse et dépense de façon responsable.
    Je vais d'abord m'adresser à vous, monsieur Lakeman, car je viens d'une région qui vit de l'exploitation des ressources et j'ai été témoin de transitions marquées par l'injustice qui ont eu des répercussions catastrophiques du point de vue socio-économique. Le moment serait propice à une diversification de nos investissements pour nous orienter dans une perspective plus favorable, mais nous avons peu de temps pour agir.
    Selon vous, quel rôle pourrait jouer Edmonton sachant que vous êtes au cœur du secteur énergétique et que vous possédez l'expertise voulue? Devrions-nous chercher à diversifier les investissements que nous consentons actuellement en misant sur cette expertise pour nous donner une économie fondée sur une énergie verte et renouvelable de telle sorte que notre pays puisse aller de l'avant en évitant d'être laissé pour compte?
    Il y a la possibilité pour une ville comme Edmonton de devenir l'un des premiers carrefours de l'hydrogène. Nous sommes un peu l'épicentre de ce secteur. Pour prendre bien conscience de toutes les options qui s'offrent à nous, il n'y a qu'à penser à la main-d'œuvre de notre région capable de faire la transition vers certains de ces emplois de l'avenir dans le secteur de l'hydrogène. Cela exigera toutefois un effort concerté.
    Comment aborder à la fois la production d'hydrogène et, surtout, son utilisation et certains des emplois qui y sont associés? Comment faire en sorte que les professionnels actuellement à notre disposition en génie, en construction et dans d'autres secteurs du marché du travail, puissent opérer cette transition à l'appui de l'économie de l'hydrogène et des nouvelles possibilités qui s'offrent en la matière? Nous pensons uniquement à l'hydrogène, mais le processus pourrait aussi mener à la création de nouvelles industries différentes de celles du passé dans nos régions.
    Le potentiel de transition est incroyable. Nous pouvons compter sur des travailleurs spécialisés, mais nous devons chercher en priorité à combler les lacunes au sein de la main-d'œuvre disponible et à bien analyser les perspectives susceptibles de s'ouvrir d'ici 5 ou 10 ans. Il faudra pour ce faire adopter une approche plus stratégique que par le passé.
    Merci. J'ai vraiment hâte de pouvoir retourner à Edmonton. J'ai de la parenté là‑bas. J'y ai présenté de nombreux spectacles mémorables au fil des ans. Je ne vais pas vous parler de mes performances musicales, mais je compte bien m'y rendre à nouveau dès que le variant Omicron sera derrière nous.
    Nous essayons de voir comment il est possible d'investir dans la région. Nous cherchons aussi à déterminer les formes d'investissement à éviter.
    Madame Levin, M. Guilbeault y est allé récemment d'une grande déclaration en indiquant en quelque sorte qu'il allait passer à l'action d'ici 18 mois. Il était difficile de savoir s'il envisageait une fermeture définitive du secteur pétrolier et gazier. Je pense qu'il voulait dire qu'il allait mettre fin aux subventions pour les combustibles fossiles.
    Les Canadiens espèrent que des mesures énergiques seront prises, mais nous devons constater que ce plan concernant le méthane, comme l'a même confirmé mon collègue libéral de Calgary, visait à venir en aide à l'industrie pétrolière. C'était un incitatif financier pour cette industrie. Tant mieux si l'on pouvait réduire du même coup les émissions de méthane, mais on n'a même pas vérifié si les cibles avaient été atteintes.
    Que faut‑il conclure selon vous du fait que l'on prend simplement cet argent, qui aurait dû servir à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le contexte de la catastrophe climatique qui nous guette, pour le donner aux grandes pétrolières sans même qu'elles aient des comptes à rendre?

  (1715)  

    Lorsqu'on est dans un trou, il faut cesser de creuser. En versant des subventions pour les combustibles fossiles, on va tout à fait à l'encontre des objectifs établis. C'est littéralement jeter de l'huile sur le feu.
    C'est la tendance que l'on peut observer depuis un moment déjà. C'est le secteur le plus subventionné de l'économie canadienne. Il a bénéficié d'énormes quantités de fonds publics au fil des ans. Il faut que cela cesse, et il ne fait aucun doute que les Canadiens s'attendent de leur gouvernement qu'il donne suite à son engagement de mettre fin aux subventions pour les combustibles fossiles.
    C'est un engagement qui a été pris pour la première fois en 2009. Ce n'est rien de nouveau. Les années de retard s'accumulent. Il est censé y avoir cette année un examen par les pairs avec l'Argentine. C'est trois ans plus tard que ce qui était prévu.
    Il n'en demeure pas moins que le gouvernement s'en remet à une technique de diversion en essayant de maquiller ses subventions aux combustibles fossiles pour en faire quelque chose de nouveau, une mesure de réduction des émissions, que ce soit au moyen du fonds consacré à cette fin ou via le financement du captage et du stockage du carbone, alors qu'il devrait en fait être question de la cible à viser pour lutter contre les changements climatiques, à savoir la production pétrolière et gazière. Il en ressort également que nous devons éviter de nous embourber dans des stratégies misant sur l'hydrogène, car elles sont aussi basées sur les combustibles fossiles, ce qui ne fera qu'envenimer le problème des émissions de méthane.
    Encore là, comme disait mon collègue libéral de Calgary, on en a eu pour notre argent parce qu'il s'agissait d'un incitatif financier pour l'industrie.
    Au cas où vous l'ignoreriez, nous sommes en pleine pandémie. Depuis le début de cette pandémie, les gens de Shell ont pu rencontrer ceux du Cabinet du premier ministre à six reprises. Ils ont aussi rencontré directement le premier ministre. Les têtes dirigeantes des grandes pétrolières ont eu près d'une centaine de rencontres avec le ministre Guilbeault ou le ministre Wilkinson et leur personnel. Le premier ministre a même mis sur pied un comité spécial pour le secteur du pétrole et du gaz. Je suppose que leur nom est inscrit sur le dossier des fauteuils. Ils ont reçu 18 milliards de dollars en subventions pendant la première année de la pandémie.
    Ces gens‑là ne fabriquent pas de l'équipement de protection individuelle. Ils ne sont pas à la tête d'unités de soins intensifs. D'après ce qu'on nous dit, c'est une industrie qui croule actuellement sous l'argent.
    Pourriez-vous nous indiquer de façon plus précise combien d'argent a ainsi été versé sans condition aux grandes pétrolières?
    Comme vous l'avez souligné, le gouvernement a versé en 2020 18 milliards de dollars au secteur des combustibles fossiles, dont 13 milliards de dollars en financement public par l'entremise d'Exportation et développement Canada. Il est question ici de financement vraiment crucial dont les entreprises pétrolières et gazières ont besoin pour réaliser leurs grands projets.
    Selon les estimations de Bloomberg New Energy Finance, les gouvernements du Canada ont versé 100 milliards de dollars sur une période de cinq ans aux entreprises pétrolières et gazières.
    Rien de moins! Merci beaucoup.
    C'est excellent. Merci.
    Nous allons maintenant entreprendre le prochain tour de questions avec M. Maguire qui dispose de cinq minutes.
    J'ai seulement quelques questions pour M. Lakeman.
    Je me suis consacré pendant toute ma carrière à l'amélioration des produits exportés par notre pays. Vous y avez fait allusion. Je suis depuis longtemps persuadé que les entreprises canadiennes du secteur des ressources naturelles ont la capacité de concevoir, de fabriquer et de vendre à d'autres pays leurs équipements permettant de réduire les émissions.
    Vous avez mentionné quelques projets, mais pourriez-vous nous parler de certaines initiatives, tout particulièrement s'il est question d'innovation, en cours de réalisation ici même au Canada? Vous avez dit vouloir favoriser la croissance d'Edmonton, mais nous devons en faire autant pour l'ensemble du Canada. Nous disposons des capacités nécessaires dans nos universités et de la technologie requise dans nos entreprises pour fabriquer les produits en question.
    Vous avez notamment cité les possibilités d'exportation vers le Japon et la Corée du Sud. Pourriez-vous m'en dire plus long à ce sujet?
    Certainement. Je vais peut-être parler d'abord des exportations.
    Nous savons que certains pays ne disposant pas dans une mesure semblable des ressources pouvant leur permettre de tabler sur l'énergie renouvelable se tournent vers l'hydrogène et l'ammoniac pour la production d'électricité. Le Japon a été très clair à ce propos. Les Japonais ont ciblé certains pays, dont le Canada, susceptibles de leur fournir ces ressources énergétiques, que ce soit sous la forme d'hydrogène ou d'ammoniac. Ils nous ont toutefois aussi indiqué très clairement qu'ils souhaitent travailler avec le Canada pour permettre la mise en marché de nos produits.
    C'est l'un des défis que nous devons relever. Nous pouvons produire à très faible coût en minimisant nos émissions de carbone, mais nous devons aussi parvenir, comme je l'indiquais, à offrir nos produits sur le marché de façon coordonnée.
    Par ailleurs, une grande variété d'innovations sont en cours de développement dans l'Ouest canadien, notamment aux fins du captage du carbone… Je viens tout juste de participer à des conférences commerciales au Moyen-Orient, et je peux vous assurer d'une chose. Il ne fait aucun doute que nous avons une bonne longueur d'avance dans des domaines comme le captage et le stockage du carbone, avec des projets qui sont en cours depuis maintenant plus de six ans, chacun d'eux permettant le stockage de plus d'un million de tonnes par année. Les yeux de la planète sont tournés vers nous.
    Il y a de nombreux autres secteurs dans lesquels nous nous employons localement à concevoir des technologies de prochaine génération avec le soutien de certains mécanismes de financement provinciaux et fédéraux en prévision d'un éventuel déploiement à plus grande échelle. Nous disposons des attributs, des talents et des conditions économiques nécessaires à cette fin. Il y a aussi des projets dans le cadre desquels nous pouvons utiliser l'hydrogène de différentes manières. Nous avons ainsi un projet de mélange qui sera lancé sous peu par ATCO — plus tard cette année ou au début de l'an prochain — pour l'injection d'une certaine quantité d'hydrogène. Le monde va aussi garder un œil sur ces projets ainsi que sur nos experts capables de comprendre le fonctionnement de ces technologies en étant notamment conscients des enjeux métallurgiques associés à la combinaison de l'hydrogène et du gaz naturel.
    Nous avons l'expertise; nous avons lancé des projets pilotes et, je le répète, la planète entière semble nous surveiller de très près actuellement.

  (1720)  

    Que recommanderiez-vous d'autre pour n'importe lequel de ces programmes, tant pour réduire les émissions que pour en donner pour leur argent aux contribuables?
    Ça se résume à ceci: une démarche stratégique, davantage holiste, axée sur la production, mais également sur l'utilisation et par laquelle nous pouvons réaliser le plus rapidement les plus grands changements.
    L'hydrogène est important pour la carboneutralité, et nous devons agir rapidement. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe d'attendre pendant 20 ans la mise en place de conditions parfaites.
    Nous pouvons nous adapter rapidement. Encore une fois, nous pouvons appliquer des leçons apprises ailleurs au Canada et dans le monde. Comment alors s'y prendre de façon stratégique?
    Les entreprises pétrolières et gazières à qui j'ai parlé ont visiblement envie de réduire leurs émissions. Vous avez évoqué le Moyen-Orient, où nous sommes des chefs de file.
    Nous pourrions également l'être dans d'autres secteurs. La cimenterie, par exemple. Mais devrions-nous avoir un plan concret pour subventionner la réduction de ses émissions?
    Bien sûr. À Edmonton, d'autres projets nous passent sous les yeux: Inland Cement collabore avec d'autres entreprises à la capture du carbone dégagé par leurs procédés. Lafarge également. Un certain nombre de projets intéressants, de projets pilotes sont en cours. Ils participent à ce mouvement.
    L'hydrogène est important pour les secteurs dont l'électrification est très difficile ou qui ne peuvent pas utiliser uniquement des énergies renouvelables, par exemple la sidérurgie, la cimenterie et d'autres secteurs grands consommateurs d'énergie thermique.
    Nous avons besoin dans ces secteurs d'une sorte de programme pédagogique pour amplifier certains de ces projets.
    Compte tenu de vos antécédents dans la surveillance de l'environnement, que proposeriez-vous d'autre pour mesurer ces émissions fugitives?
    Beaucoup de techniques en permettent la surveillance par satellite ou au sol. À dire vrai, énormément de travail a porté, dans la dernière décennie, sur la surveillance des émissions de méthane.
    Il s'agit d'examiner toutes ces techniques et certaines des méthodes peu coûteuses de les appliquer, y compris à de vastes superficies.
    J'interviens pour vous prévenir que le temps commence à manquer pour ne pas dépasser 17 h 30.
    Madame Lapointe, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins qui sont ici ce soir.

[Traduction]

    Je suis ravie des connaissances que vous nous prodiguez.
    Je questionne d'abord M. Lakeman.
    Vous avez parlé d'innovation. Pour atteindre les objectifs de carboneutralité, nous aurons besoin de l'innovation de tous les chefs et partenaires de nos industries. C'est vrai également des gouvernements. Nous savons que le gouvernement du Canada s'est donné un plan climatique ambitieux. En conséquence, le cadre politique actuel aura également besoin d'une réflexion et d'une méthodologie innovantes.
    À cette fin, dans sa recherche de nouvelles façons d'élaborer une politique efficace, quels changements le gouvernement pourrait‑il provoquer?
    Il faut encore examiner des occasions peut-être exceptionnelles et différentes à saisir partout au Canada. Comment, peut-être, s'inspirer des grappes industrielles? Comment saisir cette occasion, par exemple dans la région d'Edmonton? Comment s'y prendre de même dans la région de Toronto, de Hamilton et des régions semblables, en nous focalisant sur l'unicité de ces régions et comment amplifier rapidement l'effort? J'y reviendrai constamment. Il se peut qu'il faille s'y prendre autrement que par le saupoudrage de programmes d'incitation sur toute l'étendue de notre pays et plutôt viser les endroits où nous pouvons produire rapidement le plus grand effet. Je reviens constamment au changement d'échelle nécessaire, à l'amplification rapide, parce que c'est ce dont nous avons besoin, en l'occurrence.
    Depuis 20 ou 30 ans, je me focalise sur les politiques d'adaptation aux changements climatiques, et il m'arrive parfois de penser que nous avons trop tardé à agir et manqué le coche. Il faut peut-être aussi un effort très concentré, sur le plan régional et géographique, mais auquel participent en collaboration étroite tous les ordres de gouvernement. Notre région, dont le poids économique est le tiers de celui de l'Alberta, dispose d'un pôle hydrogène dont ses maires sont parties prenantes. Voilà l'occasion de vraiment coaliser les autorités pour appliquer cette stratégie.

  (1725)  

    D'après vous, comment l'industrie, les ordres de gouvernement et les syndicats devraient‑ils collaborer ensemble pour créer de l'efficacité et des résultats mesurables?
    Il faut examiner des mécanismes rassembleurs, y compris pour les communautés autochtones. Encore une fois, le pôle hydrogène de notre région d'Edmonton résulte de la coalition de deux de nos premières nations autochtones — la direction, les chefs de ces nations — et des maires qui ont trouvé une façon de mobiliser les industries, dans certains cas, celles qui le voulaient bien, celles qui voulaient vraiment contribuer à la solution du problème.
    Nous cherchons cette coordination, qui pourrait différer de celle du passé, alors que nous nous serions retrouvés dans des situations très « transactionnelles ». Nous envisageons la démarche globale à plus long terme, qu'on peut adopter par la collaboration avec l'industrie, dans différentes parties de l'économie — non seulement, encore une fois, en ce qui concerne la production, mais également en ce qui concerne le volet utilisation. Nos associations industrielles du secteur du transport, par exemple, réalisent des études pilotes sur des camions mûs à l'hydrogène.
    Il faut une démarche différente de la traditionnelle, qui n'était axée que sur la production, une démarche qui, à la place, tient compte de la production, de l'utilisation et des infrastructures.
    Monsieur Green, pouvons-nous prendre à court terme des mesures qui bonifieront les résultats que nous cherchons à obtenir pour réduire les émissions de méthane dans le secteur pétrolier et gazier?
    L'objectif canadien de réglementation du méthane en 2025 ne sera vraisemblablement pas atteint, parce qu'il semble que la réglementation aboutira à une réduction de 29 % plutôt que des 40 à 45 % visés. On a donc entamé une révision réglementaire. Il est indispensable de s'assurer de sa bonne exécution et de la modification du règlement.
    La troisième période d'inscription de ce programme vise les projets qui suppriment la ventilation de routine. À court terme, ce pourrait donc être une occasion en or.
    Je voudrais également vous poser la question sur les différentes approches au moyen desquelles le gouvernement peut élaborer des politiques efficaces et innovantes.
    Il est très difficile de répondre en 30 secondes à une si grande question. Il faut d'abord, d'un point de vue holiste, déterminer à quoi le gouvernement devrait consacrer son argent, et je serais d'accord avec mes homologues de Protection environnementale Canada: principalement dans les énergies renouvelables, pour ne plus brûler de combustibles fossiles, et dans l'augmentation de l'efficacité énergétique pour rehausser la qualité de vie des Canadiens grâce à des immeubles traversés de moins de courants d'air et dépourvus de cuisinières au gaz, par exemple, qu'on sait causer des problèmes de santé.
    Malheureusement pour nous, c'est la fin de notre réunion. Il est 17 h 29…

[Français]

     Monsieur le président, pardonnez-moi de vous interrompre, mais pourrait-on poursuivre la réunion?
    J'aimerais poser une brève question. Aussi, j'aimerais laisser deux minutes de parole à M. Angus.

[Traduction]

    Vous êtes le suivant et si vous pouvez terminer en une minute, vous pouvez, bien sûr, poser une question et…

[Français]

    Je serai bref, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à l'ensemble des témoins.
    Si vous aviez une recommandation à faire au ministre, seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'il faudrait tout simplement surseoir à la troisième période d'inscription au Programme côtier et infracôtier du Fonds de réduction des émissions?
    Messieurs Pineau, Marshall, Lakeman, Green et madame Levin, vous pouvez simplement répondre par oui ou par non.

  (1730)  

    Oui, et il faudrait des réglementations plus musclées.
    C'est un peu plus compliqué que cela. Je crois que cela dépend. Personnellement, je crois qu'il faut qu'il y ait des réglementations. Sinon, cela vaudrait peut-être la peine.

[Traduction]

    C'est une subvention aux combustibles fossiles, et le gouvernement est déterminé à les supprimer.
    Notre temps est écoulé.
    En guise de conclusion, je tiens à remercier chacun des témoins.
    J'invoque le Règlement.
    Laissez‑moi terminer, monsieur Angus. Je serai à vous sous peu.
    Merci, madame Levin, messieurs Pineau, Green, Lakeman et Marshall.
    Je tiens à dire que, mercredi, nous rencontrerons le ministre Wilkinson et ses adjoints dans la première heure, puis, dans la deuxième, des témoins supplémentaires. Nous conclurons ainsi cette étude et, le plus tôt possible, ensuite, nous aurons des instructions pour la rédaction.
    Le lundi 7 février, nous nous attaquerons au prochain ordre, une étude du plafonnement des émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier. On confirme actuellement la participation des témoins.
    Monsieur Angus, vous avez la parole pour votre rappel au Règlement.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins. Ils ont été excellents. L'étude est fascinante.
    J'ai demandé si nous pouvions obtenir du commissaire à l'environnement la liste des compagnies subventionnées. Vu qu'on nous dit qu'il s'agissait d'une aide financière pour aider des compagnies en difficulté, il importe vraiment que nous sachions exactement qui a reçu l'argent.
    D'accord. J'y donnerai suite avec notre greffière.
    Merci.
    Sur les entrefaites, il est maintenant 17 h 30.
    Je vous remercie tous pour votre temps.
    La séance est levée.
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