Les questions orales

Plus que toute autre rubrique de la journée parlementaire, la période des questions, d’une durée de 45 minutes, fournit un instantané quotidien de la scène politique nationale et est suivie de près par les députés, les journalistes et le public. Elle a lieu à 14 h 15 du lundi au jeudi et à 11 h 15 le vendredi. C’est au cours de cette partie de la journée parlementaire ayant la plus grande visibilité que le gouvernement doit rendre des comptes sur « sa politique administrative et sur la conduite de ses ministres, tant individuellement que collectivement2 ». Comme on l’a dit, « [l]a période des questions est l’occasion pour les parlementaires de donner libre cours à leur spontanéité et à leur dynamisme3 ». Tout député peut poser une question, même si la période est presque exclusivement réservée aux partis de l’opposition, pour confronter le gouvernement et le tenir responsable de ses actions, et pour souligner ses manquements apparents. « La période des questions, dans sa forme actuelle, sert bien l’opposition et dans une moindre mesure le gouvernement […]. Elle n’est pas faite d’interventions subtiles ou intelligentes, mais elle permet aux deux parties de faire valoir leurs points de vue.4 »

Historique

Pendant la majeure partie de l’histoire du gouvernement parlementaire au Canada, il n’existait pas de règles écrites autorisant les questions orales, bien que cette pratique existait. Avant la Confédération, les questions orales étaient essentiellement posées avec le consentement de la Chambre et « elles sont devenues plus fréquentes au fur et à mesure qu’évoluait le gouvernement responsable5 ». Les premières règles adoptées par la Chambre des communes en décembre 1867 ne traitaient que des questions écrites6. Néanmoins, la pratique des questions orales avait déjà débuté le 29 novembre 1867, soit trois semaines après l’ouverture de la première session du Parlement, lorsqu’une question orale avait été posée, avant l’appel de l’Ordre du jour, non pas à un ministre mais au président du Comité des impressions7.

En 1878, les questions orales étaient devenues fréquentes, au point où le Président Anglin a dû se prononcer :

Les honorables députés ont coutume de demander au gouvernement toutes informations spéciales entre les différents appels des divers ordres du jour que fait [le Président] avant les avis de motion ou les ordres du jour. Je ne sache pas qu’aucun honorable membre ait un droit positif même d’agir ainsi ; mais je crois qu’il doit se restreindre simplement à demander l’information au gouvernement, et il ne doit pas commencer à faire des commentaires sur la conduite du gouvernement8.

Dans les années qui ont suivi, la pratique de poser des questions orales concernant des questions jugées urgentes s’est transformée en un droit par convention9.

Avec le temps, des normes et des règles informelles se sont établies et, dans les années 1940, les questions orales (c’est-à-dire les « questions posées à l’appel de l’Ordre du jour », comme on les appelait à l’époque) faisaient partie intégrante de la journée parlementaire. Mais elles n’étaient toujours pas régies par des règles écrites. Les déclarations faites à la Chambre par les Présidents afin de donner des orientations, des interprétations ou des avis sur les questions et réponses acceptables ont confirmé la légitimité de cette convention10. Toujours dans les années 1940, des comités de la procédure ont commencé à examiner la pratique des questions orales en vue de la codifier.

La première tentative de la Chambre remonte à 1944, lorsqu’un comité spécial a noté que « [l]a coutume de poser des questions avant d’aborder l’ordre du jour s’est développée à un point tel qu’elle fait maintenant partie de notre pratique parlementaire. Il n’est ni possible ni opportun de la supprimer11 ». Ce comité proposait qu’une règle officielle soit adoptée afin de permettre que des questions orales soient posées avec un préavis d’au moins une heure et qu’elles soient suivies d’au plus trois questions supplémentaires12. Toutefois, le rapport recommandant cette nouvelle règle n’a jamais été adopté. Par la suite, d’autres comités proposeront des règles similaires, mais aucun de leurs rapports ne sera adopté par la Chambre13. Entre-temps, en 1947, la rubrique « Demandes de renseignements au gouvernement » apparaissait dans les Débats lorsque des questions orales étaient posées à la Chambre.

L’absence de règles régissant les questions orales a obligé la présidence à se prononcer de nouveau et a entraîné, en 1955, la modification de la procédure suivie pour les questions marquées d’un astérisque (questions écrites exigeant des réponses orales). Cela visait à réduire le nombre de questions orales inscrites à l’Ordre du jour14, mais en fait, la « période des questions à l’appel de l’Ordre du jour » n’a cessé de prendre de l’ampleur. Au début des années 1960, elle devait brièvement se transformer lorsque la présidence a commencé à appliquer diverses règles anciennes et non écrites, dont bon nombre étaient désuètes, sur le contenu des questions15. Le tollé que cela a provoqué devait mener à l’adoption, en 1964, de la première série de règles sur la période des questions16.

Le critère selon lequel les questions doivent être de nature urgente est ajouté dans les articles du Règlement adoptés par la Chambre en 196417. Il est également établi que la Chambre entendra les Questions orales à la fin des Affaires courantes, immédiatement avant l’appel de l’Ordre du jour. Étant donné qu’à l’époque, toutes les séances commençaient à 14 h 30 par les Affaires courantes, la période des questions s’amorçait toujours à la même heure environ, selon le temps consacré aux Affaires courantes. Le vendredi faisait toutefois exception puisque la séance débutait à 11 heures par les Affaires courantes. Aucune limite n’avait été imposée pour les autres jours, mais une limite de 30 minutes a été introduite pour les Questions orales du mercredi, probablement parce que la séance du mercredi était plus courte, la Chambre ne siégeant pas en soirée. D’autre part, une nouvelle procédure était établie : les députés mécontents de la réponse reçue lors de la période des questions ou qui n’avaient pu obtenir de réponse parce que le Président avait jugé leur question non urgente étaient dorénavant autorisés à soulever ces questions au moment de l’ajournement de la Chambre.

En plus de ces modifications au Règlement, la Chambre approuvait des lignes directrices sur le contenu des questions orales et des réponses18. Ces lignes directrices s’inspiraient de précédents jugés encore valables, mais qui n’avaient pas été codifiés. Ainsi, les questions devaient porter sur des sujets suffisamment importants pour exiger une réponse immédiate, brève et non détaillée ; elles ne devaient pas concerner des déclarations faites dans un journal, un avis juridique ou une affaire en instance devant un tribunal. Enfin, on ne devait pas soulever de points trop importants pour être traités dans le cadre d’une réponse à une question. Les réponses devaient être aussi concises que possible, s’en tenir à la question et ne pas entraîner de débat. Les autres aspects, tels que le nombre de questions supplémentaires, étaient laissés à l’entière discrétion du Président, qui pouvait décider de refuser une question ou de l’inscrire au Feuilleton après l’avis requis.

La durée des Questions orales a été modifiée l’année suivante avec l’adoption de dispositions pour limiter la période des questions orales à 30 minutes au plus chaque jour à l’exception du lundi, où elle ne devait pas durer plus d’une heure19. En 1966, la période des questions a été prolongée à 40 minutes les mardi, jeudi et vendredi20. En 1968, le Règlement a de nouveau été modifié afin de réserver une période de 40 minutes par jour de séance aux Questions orales21.

En 1975, une période de temps précise est fixée pour les Questions orales : elle est prévue avant les Affaires courantes et doit alors débuter à 14 h 15 du lundi au jeudi et à 11 h 15 le vendredi22.

Lorsque ces changements ont été apportés, le Président Jerome a fait une déclaration à la Chambre qui, dans une certaine mesure, a encore aujourd’hui une incidence sur le déroulement de la période des questions. Comme il l’explique dans son autobiographie, lorsqu’il a accepté le fauteuil en 1974, il ne pouvait s’inspirer pour diriger la période des questions que de précédents où les questions avaient été jugées irrecevables23. Il établira que les questions orales constituent un droit des députés et non un privilège et il précisera plusieurs principes devant régir le déroulement de la période des questions24. Il réaffirmera que les lignes directrices relatives aux questions et aux réponses continueront de s’appliquer et y ajoutera les exigences qui s’étaient imposées depuis 1964.

Après 1975, la période des questions devient de plus en plus une tribune ouverte où toutes sortes de questions peuvent être posées, souvent sans tenir compte des lignes directrices existantes ni du critère d’urgence figurant dans le Règlement. De plus, les divers Présidents qui se sont succédé ont, pour leur part, apparemment hésité à utiliser leurs pouvoirs discrétionnaires afin d’ordonner que les questions non urgentes soient inscrites au Feuilleton. Enfin, l’arrivée de la télévision à la Chambre en 1977 modifiera en outre le comportement des députés durant la période des questions :

On a par ailleurs avancé que la télévision a également ses côtés négatifs, la plainte la plus fréquente étant peut-être que la période des questions a pris trop d’importance par rapport à l’ensemble des travaux. Certains estiment aussi que les députés ont tendance à poser pour la caméra dans l’espoir de paraître 15 secondes sur l’écran aux nouvelles du soir25.

En 1986, à la suite d’une série de périodes des questions particulièrement houleuses et virulentes durant lesquelles plusieurs députés sont désignés par leur nom et suspendus pour le reste de la séance, le Président Bosley fera une déclaration similaire à celle du Président Jerome en 197526. Comme on l’explique plus loin dans ce chapitre, le Président Bosley énoncera quatre principes et des lignes directrices correspondantes qui sont encore aujourd’hui largement suivis27.

En 1997, les députés soulèvent de nombreuses questions et même des rappels au Règlement au sujet des questions anticipant sur l’Ordre du jour. Auparavant, les questions anticipant sur l’Ordre du jour étaient rejetées afin que la Chambre ne perde pas de temps à discuter des sujets qui seraient débattus plus tard au cours de la séance28. À la suite d’un tel rappel au Règlement, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre recommande, dans un rapport, que les questions qui anticipent sur l’Ordre du jour ne soient pas jugées irrecevables à partir de ce seul critère29. Peu après, même si la Chambre n’avait pas encore adopté le rapport, le Président Parent déclare qu’il suivra l’avis du Comité30. Au cours des législatures suivantes, on a maintenu la pratique autorisant les questions qui anticipent sur l’Ordre du jour31.

Le rôle du Président durant la période des questions

Diriger la période des questions quotidienne est considéré comme une des tâches les plus exigeantes du Président32. Le Président s’efforce de faire en sorte que la période des questions se déroule d’une manière civilisée, que les questions et réponses ne se transforment pas en débat et que les deux côtés de la Chambre puissent participer. Comme le Président Fraser le signale dans La Chambre des communes en action :

La période des questions exige beaucoup du Président de la Chambre des communes. Il doit demeurer très attentif et vigilant, promener un regard perspicace sur toute l’assemblée, être très sensible à l’humeur de la Chambre, connaître les événements nationaux ou internationaux qui risquent d’alimenter la période des questions. Il doit, autant que possible, être au courant des tensions qui existent entre les partis au sujet d’un incident donné33.

Le Président a le pouvoir de juger irrecevable toute question posée pendant la période des questions ou d’interrompre un député (qui tient des propos non parlementaires, par exemple) s’il croit que la question contrevient au respect de l’ordre, du décorum et de la procédure de la Chambre34. Lorsqu’il juge une question irrecevable, le Président peut suggérer au député de la reformuler afin qu’elle soit acceptable à la Chambre35 ou encore demander à un autre député de poser la question suivante36. Lorsqu’une question est jugée irrecevable, le Président peut néanmoins autoriser un ministre à y répondre37.

Le Président peut aussi ordonner que certaines questions posées pendant la période des questions soient plutôt inscrites au Feuilleton38. Il s’agit habituellement de questions qui, de l’avis du Président, ne sont pas urgentes ou qui sont si techniques ou détaillées qu’elles requièrent une réponse écrite. Au cours des dernières années, le Président n’a pas eu recours à cette procédure, choisissant plutôt de suggérer au député qu’il serait peut-être plus approprié de poser sa question sous forme écrite, tout en donnant au ministre l’occasion de répondre s’il le souhaitait39.

Comme seulement 45 minutes sont réservées chaque jour à la période des questions40, le Président a à quelques reprises rappelé que des questions et réponses plus brèves permettraient à un plus grand nombre de députés de participer41. Le Président est le seul à déterminer le temps que prendront les diverses questions et réponses et peut interrompre quiconque prend trop de temps à poser une question ou à y répondre.

Déroulement de la période des questions

Chaque jour de séance du lundi au jeudi, la période de 45 minutes réservée aux Questions orales commence au plus tard à 14 h 15 (ou à 11 h 15 le vendredi)42. La pratique, les précédents et les déclarations des divers Présidents de la Chambre ont contribué à fixer le déroulement de la période des questions. Du début de la 31e législature en 1979 jusqu’à la fin de la 35e législature en 1997, l’usage était d’autoriser le chef de tout parti officiellement reconnu à la Chambre, ou son représentant, à poser une question initiale suivie de deux questions supplémentaires.

Au début de la 36e législature en 1997, le Président Parent a institué des modalités pour le déroulement de la période des questions après consultation des leaders parlementaires de tous les partis officiellement reconnus à la Chambre. Ces modalités ont légèrement évolué depuis lors. Aujourd’hui, le Président donne la parole au chef de l’Opposition, ou au premier député de son parti qui posera des questions, pour une série de trois questions. Il donne ensuite la parole au chef de l’Opposition ou à un deuxième député de l’Opposition officielle pour deux autres questions43. Les premiers députés des autres partis de l’opposition officiellement reconnus obtiennent ensuite la parole pour poser des questions44. Après cette première série de questions, la démarche suivant ces questions initiales dépend du nombre de partis représentés à la Chambre et du nombre de députés de chaque parti. Les députés sont habituellement autorisés à poser une question initiale suivie d’une question supplémentaire ; à l’origine, la question supplémentaire devait découler de la question initiale, mais le lien entre les questions initiale et supplémentaire n’est plus requis aujourd’hui.

Les députés représentant le parti ministériel peuvent également poser des questions, mais moins souvent que les députés des partis de l’opposition.

La participation à la période des questions est l’affaire en grande partie des divers caucus et de leurs whips et peut donner lieu à des négociations entre les partis45. Chaque parti choisit les députés qui participeront à la période des questions et remet quotidiennement au Président la liste des noms de ces députés dans l’ordre dans lequel il serait souhaitable de les entendre. La liste de chaque parti est habituellement préparée par le whip ou par le ou les députés chargés de définir la stratégie du parti pour la période des questions. Le Président n’est pas tenu de suivre ces listes, mais cette pratique est devenue courante46. Avec cette liste comme guide, le Président décide lui-même à quels députés il accordera la parole pour poser des questions.

Les députés des partis politiques non officiellement reconnus à la Chambre et les députés indépendants peuvent poser des questions, mais moins fréquemment que les députés des partis reconnus. Durant la 35e législature (1994-1997), alors que jusqu’à 17 de ces députés ont siégé à la Chambre, le Président a tenté d’accorder la parole à l’un d’entre eux une journée sur deux, sinon tous les jours, habituellement vers la fin de la période des questions47. Depuis 1997, il est arrivé que des députés indépendants obtiennent régulièrement la parole pour poser des questions, et, au cours des dernières années, qu’ils l’obtiennent quotidiennement48.

Les règles n’imposent aucune restriction quant à qui peut poser des questions durant la période des questions, mais les conventions veulent que seuls les simples députés le fassent. Il se peut que des députés obtiennent la parole plus d’une fois pour poser des questions durant la même période des questions49. Les ministres ne posent pas de questions orales ni à d’autres ministres ni aux simples députés. Comme les secrétaires parlementaires doivent parfois répondre aux questions au nom du gouvernement, ils ne posent pas de questions durant la période des questions50. Enfin, le Président ne pose pas de questions et n’y répond pas51.

Officiellement, les questions orales ne nécessitent pas d’avis, mais les députés peuvent, par courtoisie, informer le ministre concerné de la question qu’ils souhaitent lui poser52.

Rappels au Règlement et questions de privilège pendant la période des questions

Habituellement, le Règlement ne peut être invoqué et une question de privilège ne peut être soulevée pendant la période des questions53. Dans sa déclaration de 1975 sur le déroulement de la période des questions, le Président Jerome a indiqué que les rappels au Règlement et les questions de privilège liés à la période des questions devraient être soulevés à la fin de cette période54. Malgré cette directive, il est arrivé que le Règlement soit invoqué ou qu’une question de privilège soit soulevée pendant la période des questions, mais le Président a alors demandé que ces affaires soient reportées après la période des questions55. Toutefois, si le Président juge qu’une situation survenue pendant la période des questions est suffisamment grave pour justifier qu’on s’en occupe immédiatement, par exemple lorsque des propos non parlementaires sont tenus, l’affaire est alors examinée sur-le-champ56.

Les principes et lignes directrices régissant les questions orales

Si les dispositions du Règlement portant sur les questions orales et la période des questions n’ont guère changé depuis 1975, ce n’est pas le cas des lignes directrices portant sur la forme et le contenu de ces questions. Les règles écrites précisent uniquement que les questions orales doivent porter sur des « sujets urgents » et qu’une période doit leur être réservée chaque jour de séance57.

Bon nombre des lignes directrices traditionnelles ne sont plus valables ou sont tombées en désuétude58. Parce qu’il était difficile de distinguer les précédents valables des autres, le Président Bosley s’est penché sur cette question en 198659 et a déclaré que les règles relatives à la période des questions devraient être basées sur les principes suivants :

  • Le temps est précieux et il devrait donc être utilisé de façon aussi profitable que possible et par le plus grand nombre de députés possible ;
  • Beaucoup de citoyens suivent la période des questions à la télévision et comme cette période donne souvent lieu à des échanges animés, la Chambre devrait se montrer sous son meilleur jour ;
  • Si les députés participant à la période des questions peuvent avoir d’autres visées, l’objectif principal doit être de demander des renseignements au gouvernement et de l’amener à rendre compte de ses actes ;
  • Les députés devraient pouvoir poser des questions de la façon la plus libre possible, tout en respectant les autres principes.

Reprenant en partie la déclaration du Président Jerome de 1975, le Président Bosley apportera des précisions :

Dans la déclaration qu’il a faite il y a 11 ans, le Président Jerome a très bien exposé le principe de la brièveté ; je me contenterai par conséquent de citer ses propos que voici :

Il ne fait absolument aucun doute que le pire ennemi de la période des questions est le député qui ne respecte pas ce principe capital. Le député qui pose une question sur un sujet quelconque a peut-être besoin d’une explication, mais il n’a aucune raison de faire un préambule dépassant les limites d’une phrase.

Je me propose de demander à tous les députés d’y faire très attention et de les rappeler à l’ordre s’ils ne le font pas. Je répète qu’un long préambule ou une longue question absorbe une trop grande partie du temps ; le fait que cela provoque invariablement le même genre de réaction ne fait qu’augmenter la difficulté.

Je suis d’accord sur ce point et j’ajouterai que cela s’applique également aux réponses des ministres. À l’instar du Président Jerome, je trouve que les questions supplémentaires ne nécessitent pas de préambule, elles devraient découler de la réponse du ministre et elles ne devraient pas être précédées d’une déclaration ou d’un argument ; elles devraient être précises et directes. La présidence trouve que, compte tenu du premier principe, le temps est précieux, les députés devraient essayer d’éviter de répéter purement et simplement des questions qui ont déjà été posées. Je ne veux pas dire — comme certains semblent l’avoir compris — que l’on ne doit pas poser d’autres questions sur le même sujet, mais que les questions suivantes doivent être différentes de celles qui ont déjà été posées.

Pour les mêmes raisons, depuis toujours, les questions posées aux ministres doivent respecter une règle fondamentale, à savoir que leur objet doit tomber sous la compétence globale du gouvernement ou la compétence particulière de l’un de ses ministres. C’est le seul critère en vertu duquel les ministres doivent répondre aux questions60.

Ces deux déclarations, avec certaines lignes directrices adoptées par la Chambre en 196461, restent utilisées comme points de référence par le Président pour diriger la période des questions. En résumé, lorsqu’un député obtient la parole durant la période des questions, il devrait :

  • poser une question ;
  • être bref ;
  • chercher à obtenir des renseignements62 ;
  • poser une question qui relève de la responsabilité administrative du gouvernement ou du ministre concerné63.

De plus, selon les précédents, une question ne devrait pas :

  • consister à présenter une déclaration, des démarches, un argument ou une opinion64 ;
  • être hypothétique65 ;
  • chercher à obtenir une opinion juridique ou autre66 ;
  • demander des renseignements de nature secrète, comme les délibérations du Cabinet ou les avis fournis à la Couronne par des conseillers juridiques67 ;
  • porter atteinte à la réputation des Occupants du fauteuil, des députés, des sénateurs ou des membres de la magistrature ou commenter leur conduite68 ;
  • discréditer le gouverneur général69 ;
  • porter sur les délibérations du Sénat70 ;
  • porter sur des déclarations publiques de ministres concernant des questions qui ne sont pas directement liées à leurs fonctions ministérielles71 ;
  • porter sur un ancien portefeuille ou d’autres fonctions présumées du ministre, comme des responsabilités politiques au sein de son parti ou d’une région72 ;
  • traiter d’une affaire devant les tribunaux73 ;
  • porter sur le sujet d’une question de privilège déjà soulevée et que le Président a prise en délibéré74 ;
  • créer du désordre75 ;
  • lancer une accusation au moyen d’un préambule76 ;
  • avoir été formulée par un électeur77 ;
  • chercher à obtenir auprès d’un ministre des renseignements de nature purement personnelle78 ;
  • exiger une réponse détaillée qu’il serait plus approprié de traiter sous forme de question écrite inscrite au Feuilleton79 ;
  • porter sur les affaires internes, les dépenses d’un parti ou le financement de campagnes électorales80.

Enfin, toutes les questions et réponses doivent être adressées à la présidence81.

La convention relative aux affaires en instance

Au fil des ans, l’usage s’est établi d’éviter de discuter à la Chambre de questions soumises aux tribunaux, ou faisant l’objet d’un examen judiciaire, afin de protéger les gens concernés contre toute influence indue que pourrait avoir la discussion publique de cette affaire. Cet usage, qu’on désigne comme la convention relative aux affaires en instance (ou règle du sub judice), s’applique aux débats, aux déclarations et à la période des questions82. Il est donc considéré inopportun pour un député, dans sa question, ou pour un ministre, dans sa réponse à une question, de commenter une affaire en instance.

En décembre 1976, un comité spécial est établi afin d’examiner les droits et immunités des députés83. Le Comité spécial sur les droits et immunités des députés décide d’étudier comment la convention relative aux affaires en instance restreint la liberté de parole des députés. Son premier rapport, présenté à la Chambre le 29 avril 1977, demeure la meilleure étude de cette convention84. Le Comité écrit ce qui suit :

Le Comité est d’avis qu’au cours de la période des questions, la présidence devrait s’abstenir d’intervenir en ce qui a trait à l’application de la convention, et qu’il incomberait plutôt au député qui pose la question ainsi qu’au ministre à qui elle est adressée de faire preuve de discernement85.

Comme le Comité l’a signalé, si une question adressée à un ministre porte sur une affaire en instance, il est probable que le ministre disposera de plus de renseignements sur cette affaire que le Président et pourra déterminer si le fait de répondre à la question pourrait causer un préjudice. Le ministre pourrait alors refuser de répondre à la question, comme il en a le droit86. Le Comité indique en outre que tous les députés doivent faire preuve de retenue, mais que c’est au Président de déterminer si une affaire soulevée durant les Questions orales est en instance devant un tribunal. S’il existe une présomption en faveur du débat et contre l’application de la convention, la plupart des Présidents ont plutôt eu tendance à décourager les députés de commenter les affaires devant les tribunaux87. Même si les députés observent habituellement d’eux-mêmes la convention durant la période des questions, le Président a jugé irrecevables des questions concernant des affaires criminelles, en signalant que la présidence avait le devoir de s’assurer que ce droit légitime de la Chambre n’aille pas à l’encontre des droits et intérêts d’un citoyen qui est traduit en justice88.

Les questions concernant l’administration de la Chambre

Le Président occupe le poste de président du Bureau de régie interne, l’organisme qui supervise l’administration de la Chambre. Jusqu’en 1985, l’usage voulait qu’aucune question traitant de l’administration de la Chambre ne puisse être posée au Président durant la période des questions même s’il est également président du Bureau. Les questions à ce sujet pouvaient être adressées directement au Président89. En juin 1985, la Chambre a adopté une nouvelle règle permettant que des questions sur la politique financière ou administrative de la Chambre soient posées aux membres du Bureau de régie interne désignés par celui-ci pour répondre à ces questions plutôt qu’au Président90. Expliquant la procédure à suivre aux députés nouvellement élus de la 35e législature (1994-1997), le Président a donné ces précisions :

Toutes les questions portant sur la gestion interne et financière de la Chambre des communes relèvent, selon la loi, du Bureau de régie interne […]. Il ne s’agit pas d’une responsabilité administrative du gouvernement. C’est pour cette raison que les députés ne peuvent pas poser ces questions à des ministres91.

Les questions concernant les travaux d’un comité

Les questions visant à obtenir de l’information sur l’horaire ou le programme de travail des comités peuvent être posées aux présidents des comités92. On ne peut toutefois pas demander de renseignements à un ministre ou au président d’un comité concernant les délibérations ou les travaux d’un comité, y compris un ordre de renvoi93. Ainsi, une question sera jugée irrecevable si elle porte sur un vote tenu dans un comité94, sur la participation des membres à une réunion d’un comité ou à leurs témoignages95, ou sur le contenu du rapport d’un comité96. Lorsque des députés posent des questions sur les délibérations d’un comité, le Président les encourage habituellement à reformuler leurs questions ou juge les questions irrecevables97.

Les questions supplémentaires

Par définition, une question supplémentaire découle de l’information fournie à la Chambre par le ministre ou le secrétaire parlementaire dans la réponse qu’il a donnée à la question initiale. Aussi la question supplémentaire est-elle posée immédiatement après la réponse à une question initiale. Les questions supplémentaires sont également assujetties aux mêmes lignes directrices que les questions initiales98.

Dans le passé, les Présidents ont utilisé leur pouvoir discrétionnaire pour exiger qu’une question supplémentaire porte sur le même sujet et soit habituellement posée au même ministre99. Toutefois, au début de la 36e législature, en 1997, le Président Parent a permis de rompre avec cet usage en n’exigeant pas qu’une question additionnelle soit toujours une question supplémentaire par rapport à la question principale. Il a indiqué qu’il accepterait qu’un parti permette à deux députés de se partager une série de questions, chacun posant une question différente à un ministre différent100. Cet usage demeure en vigueur aujourd’hui101. On ne fait plus de distinction quant au type de questions permises par la présidence.

Historique

Les lignes directrices sur les questions supplémentaires ont connu à peu près la même évolution que celles relatives aux questions orales. C’est au début des années 1940 que sont apparues les questions supplémentaires, malgré la désapprobation du Président102. En 1943, le Président Glen a déclaré que les questions supplémentaires ne seraient autorisées que « lorsqu’il y avait lieu de demander des déclarations ou des explications aux ministres et dans les cas où le ministre désirait sans doute que la réponse donnée soit la plus claire possible103 ». En 1944, un comité de la procédure a recommandé que le nombre de questions supplémentaires soit limité à trois pour chaque question initiale ; cette proposition fut étudiée en comité plénier, mais aucune décision n’a été prise104. En 1948, un autre comité de la procédure a recommandé qu’une question orale soit suivie d’autant de questions supplémentaires que nécessaire pour clarifier la réponse donnée par le ministre, mais le rapport du comité n’a pas été étudié par la Chambre105.

Durant les années 1950 et au début des années 1960, l’absence de règle régissant les questions orales a amené divers Occupants du fauteuil à faire un certain nombre de déclarations, dans lesquelles ils ont notamment fait des remarques sur les questions supplémentaires. Certains Occupants du fauteuil autorisaient jusqu’à deux questions supplémentaires pour chaque question initiale, d’autres pouvaient autoriser ou refuser une question supplémentaire selon leur jugement106. En 1964, quand on a finalement codifié les règles régissant la période des questions, certains aspects, notamment le nombre de questions supplémentaires, sont demeurés à la discrétion du Président.

En 1975, le Président Jerome a déclaré qu’une question supplémentaire doit découler de la réponse du ministre, et qu’elle devrait être posée d’une manière précise et directe, sans autre préambule, déclaration ou argumentation107. Dans une décision rendue en 1984, le Président Francis rappelle ces remarques108, et, en 1986, le Président Bosley précise en outre que les députés devraient éviter de répéter purement et simplement des questions qui ont déjà été posées, étant donné que le temps dont on dispose pour la période des questions est précieux109.

Les réponses aux questions orales

Aucune règle précise ne régit la forme ou le contenu des réponses aux questions orales. Habituellement, ces réponses doivent être les plus brèves possible, traiter de la question soulevée et être formulées de manière à ne pas provoquer de désordre à la Chambre. Comme le Président Jerome l’a résumé dans la déclaration qu’il a faite en 1975 sur la période des questions, plusieurs types de réponses sont possibles. Les ministres peuvent :

  • répondre à la question ;
  • prendre la question en délibéré ;
  • considérer la question comme un préavis ;
  • expliquer brièvement pourquoi ils ne peuvent répondre immédiatement à la question ;
  • ne rien dire110.

En réalité, les questions sont destinées à l’ensemble du gouvernement même si elles sont habituellement adressées à un ministre. Le gouvernement peut donc désigner le ministre qui répondra à une question donnée, et le Président ne peut obliger un ministre en particulier à répondre à une question111. Le premier ministre (ou le vice-premier ministre ou un ministre agissant au nom du premier ministre) peut répondre à l’une ou à la totalité des questions posées durant la période des questions112. Un seul ministre peut répondre à une question donnée113, bien que, dans certaines circonstances, un autre ministre puisse répondre à une question supplémentaire114.

Comme tous les députés sont tenus, par les règles, d’assister aux séances de la Chambre sauf s’ils sont occupés à d’autres activités et fonctions parlementaires ou à un engagement public ou officiel115, aucune liste n’est établie pour déterminer les ministres qui seront présents un jour donné116. En général, la plupart des ministres sont présents durant la période des questions. Si une question est posée concernant le portefeuille d’un ministre absent de la Chambre, le premier ministre, un autre ministre ou un secrétaire parlementaire peut y répondre117.

Les députés ne peuvent insister pour obtenir une réponse118 ni pour qu’un ministre en particulier réponde à leur question119. Le refus d’un ministre de répondre à une question ne peut être contesté ou faire l’objet d’un rappel au Règlement ou d’une question de privilège120.

Le Président veille à ce que les réponses respectent les règles relatives à l’ordre, au décorum et au langage parlementaire, mais il n’est toutefois pas responsable de la qualité ou du contenu des réponses121. Dans la plupart des cas où on a invoqué le Règlement ou soulevé une question de privilège concernant une réponse à une question orale, le Président a établi qu’il y avait désaccord entre les députés sur les faits relatifs à la question122 et que, par conséquent, il y avait matière à débat et non violation des règles ou des privilèges des parlementaires123.

Débat d’ajournement

Tout député mécontent d’une réponse obtenue durant la période des questions ou dont la question a été refusée par le Président parce qu’elle n’était pas urgente peut donner avis qu’il souhaite parler sur le fond de sa question durant le Débat d’ajournement, qui est la période réservée pour ce faire à la fin de chaque jour de séance, sauf les vendredis. On appelle communément cette période des travaux le « late show124 ». De même, le député dont la question écrite qui était inscrite au Feuilleton n’a pas obtenu de réponse après 45 jours peut donner avis, à la rubrique « Questions inscrites au Feuilleton », qu’il a l’intention de soulever cette question lors du Débat d’ajournement125. Le nom du député est alors inscrit sur une liste avec les noms des autres députés qui ont transmis un avis semblable.

Le Débat d’ajournement se déroule de la façon suivante : au début de cette période de 30 minutes, soit de 18 h 30 à 19 heures du lundi au jeudi, une motion d’ajournement de la Chambre est réputée avoir été présentée et appuyée, sans motionnaire ni appuyeur126. Après le débat, la motion d’ajournement est considérée comme adoptée et la Chambre s’ajourne.

Le Débat d’ajournement permet de brefs échanges (questions de députés suivies de réponses de ministres ou de secrétaires parlementaires)127. Une question jugée irrecevable pendant la période des questions pour toute autre raison que son caractère non urgent ne peut être débattue au moment du Débat d’ajournement128. De même, les questions adressées à des présidents de comité au cours de la période des questions ne peuvent pas être abordées durant le Débat d’ajournement129.

Historique

À la suite de la refonte du Règlement en 1964, la Chambre a adopté la proposition d’un comité de la procédure d’inclure dans le Règlement un article sur la période des questions, le tout premier article à régir cette partie de la séance. La Chambre retenait également la suggestion du comité d’adopter une disposition complémentaire relative au Débat d’ajournement130.

Le comité avait justifié sa recommandation d’un article régissant le Débat d’ajournement de la manière suivante :

[…] imposer simplement des restrictions à la période des questions à l’appel de l’Ordre du jour, en soi, […] ne sauvegarderait pas les droits que reflète cette période. Nous proposons donc […] que trois fois par semaine, le lundi, mardi et jeudi, il y ait une période d’une demi-heure pendant laquelle on pourrait soulever brièvement trois sujets différents. Si pendant la période des questions un député n’est pas satisfait de la réponse du gouvernement […] nous recommandons que ce député puisse donner avis qu’il désire soulever sa question lors de l’ajournement131.

Dans les années 1970, le Débat d’ajournement était devenu un outil précieux pour les députés qui souhaitaient discuter davantage de sujets abordés durant la période des questions. Comme le nombre de députés souhaitant participer à ce débat était beaucoup trop élevé par rapport au temps disponible, un certain nombre de solutions furent suggérées à différents moments : couper de moitié le temps de parole de chaque député participant au Débat d’ajournement132 ; prolonger la période de temps consacré au Débat d’ajournement pour faire passer de trois à cinq le nombre de sujets discutés ; déclarer périmées les questions non appelées après 20 jours de séance133 ; tenir le Débat d’ajournement à 18 heures, même si l’heure d’ajournement était fixée à 22 heures134. Par la suite, en 1982, lorsqu’on a décidé d’éliminer les séances en soirée, le Débat d’ajournement a été déplacé à 18 heures135, puis à 18 h 30 en 1994136. En 1991, le Règlement a été modifié afin de permettre de débattre un maximum de cinq sujets137 ; toutefois, en 2001, la Chambre a décidé de ramener à trois le nombre maximum de sujets discutés, afin que les ministres et les secrétaires parlementaires puissent donner des réponses plus détaillées138.

Avis

Les députés qui souhaitent discuter, au moment du Débat d’ajournement, du fond d’une question déjà posée pendant la période des questions doivent fournir au Bureau un avis écrit au plus tard une heure après la fin de la période des questions, le jour où la question a été soulevée139.

Un député qui souhaite invoquer le Règlement parce qu’une question écrite inscrite à son nom au Feuilleton n’a pas obtenu de réponse dans le délai prévu de 45 jours peut également faire inclure son nom dans la liste des intervenants pour le Débat d’ajournement en donnant un avis oral à la Chambre140. Cet avis est habituellement donné lors de l’appel de la rubrique « Questions inscrites au Feuilleton », durant les Affaires courantes.

Si, pour une raison quelconque, le sujet d’une question n’a pas été débattu durant le Débat d’ajournement dans les 45 jours de séance qui suivent l’avis fourni par un député, l’avis est réputé avoir été retiré141. De plus, si un député est absent du Débat d’ajournement au moment où l’on s’apprête à aborder sa question, l’avis est réputé retiré142. Dans les deux cas, le député se voit privé de façon permanente de la possibilité de soulever cette question durant le Débat d’ajournement.

Sélection des questions à débattre

Habituellement, le Président reçoit plus d’avis de questions à débattre au cours du Débat d’ajournement que ne le permet le temps réservé à ce débat. Ainsi, les questions à débattre un jour donné sont choisies suivant l’ordre dans lequel elles sont soumises. Dans la pratique, une question pour laquelle on a donné avis ne peut normalement pas être débattue durant le Débat d’ajournement de la même journée. Lorsqu’aucun avis n’a été transmis au Bureau, ou qu’un jour donné aucun député n’est prêt à intervenir, le Débat d’ajournement n’a pas lieu.

Le Président a le pouvoir de déterminer les questions qui seront débattues et l’ordre dans lequel elles le seront. Dans sa décision, il tient compte de l’ordre suivant lequel les avis ont été donnés, de l’urgence des questions soulevées et de la répartition des occasions d’en discuter parmi les députés des partis respectifs à la Chambre143. Le Président peut également consulter les représentants des partis pour déterminer l’ordre dans lequel les avis reçus seront étudiés144. Dans la pratique, c’est le personnel des services de la procédure qui, au nom du Président, prépare le Débat d’ajournement.

Au plus tard à 17 heures, les lundis, mardis, mercredis et jeudis, le Président se lève pour faire part à la Chambre des questions à débattre ce jour-là, au moment de l’ajournement145. Le Président demeure libre de modifier au besoin l’ordre des intervenants lors du Débat d’ajournement146.

Durée du débat

Le débat sur un sujet dure tout au plus 10 minutes147. Pendant ces 10 minutes, le député qui soulève la question peut d’abord parler pendant quatre minutes au plus, et le ministre ou le secrétaire parlementaire qui lui répond dispose d’au plus quatre minutes ; suit une série de contre-arguments d’une minute pour chaque intervenant148. Toutefois, le ministre ou le secrétaire parlementaire n’est pas obligé de répondre aux questions soulevées lors de ce débat. Tout ministre ou secrétaire parlementaire peut répondre au nom du gouvernement, et sa réponse ou son refus de répondre ne peut pas donner lieu à un rappel au Règlement ou à une question de privilège149. Pendant le Débat d’ajournement, les députés ne sont pas tenus de parler à partir de leur place150.

Les limites de temps de ce débat sont appliquées de manière stricte par la présidence et aucune prolongation n’est accordée. Il n’est pas non plus nécessaire d’utiliser toute la période de 30 minutes151. Après 30 minutes ou à la fin du débat, selon le cas, la motion d’ajournement est réputée adoptée et la Chambre s’ajourne jusqu’à la prochaine séance152. Si un député ne soulève pas sa question durant le Débat d’ajournement de la séance prévue, le temps alloué est réduit en conséquence.

Suspension ou report du Débat d’ajournement

À l’occasion, on suspend le Débat d’ajournement en raison d’autres ordres de la Chambre nécessitant que l’on poursuive ou que l’on termine d’autres affaires un jour de séance donné. En particulier, on suspend le Débat d’ajournement lorsque la séance est prolongée pour un débat d’urgence153 ou un débat exploratoire154, lorsqu’on propose la motion de clôture sur une affaire155, le jour désigné pour la présentation du budget156, le jour où les délibérations sous la rubrique « Dépôt de projets de loi émanant du gouvernement » n’ont pas été achevées avant l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien157 et le jour où, au cours d’une session, la Chambre continue de siéger au-delà de l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien pour l’élection d’un Président158. En outre, si l’on présente et adopte au cours d’une séance une motion portant que la Chambre s’ajourne, le Débat d’ajournement n’a pas lieu.

Le Débat d’ajournement peut être reporté à plus tard le même jour lorsque la séance est prolongée en raison d’une cérémonie de sanction royale159, d’une déclaration ministérielle160 ou lorsque la période réservée aux Affaires émanant des députés est prolongée lors du deuxième jour réservé aux étapes du rapport et de la troisième lecture d’un projet de loi161. De plus, le Débat d’ajournement peut être reporté lorsqu’une séance est prolongée soit conséquemment à la période de questions et réponses de 30 minutes suivant la présentation d’une motion d’attribution de temps162, soit pour la reprise d’un débat ajourné ou interrompu sur une motion portant adoption d’un rapport de comité163, soit lorsqu’un vote par appel nominal est différé jusqu’à la conclusion de la période des questions164 ou des Ordres émanant du gouvernement. De la même façon, le Débat d’ajournement peut être retardé lors du dernier jour désigné des périodes de subsides se terminant le 26 mars, le 23 juin et le 10 décembre165. Si une motion prolongeant les heures de séance durant les 10 derniers jours de séance de juin166 a été adoptée, le Débat d’ajournement est retardé jusqu’à l’heure d’ajournement établie167. Si une motion a été adoptée afin de poursuivre une séance conformément à l’article 26 du Règlement, le Débat d’ajournement est tenu à la fin de cette période168. Les jours où l’on a dû repousser les Affaires émanant des députés en raison d’un retard ou d’une interruption, on repousse le Débat d’ajournement selon une période équivalente au retard ou à l’interruption169.

À l’occasion, lorsque la Chambre a prolongé une séance pour étudier une mesure législative, tenir un débat spécial ou examiner le Budget principal des dépenses d’un ministère ou d’un organisme donné en comité plénier, elle a décidé que le Débat d’ajournement se tiendrait à l’heure habituelle et que la motion d’ajournement serait réputée avoir été retirée après le débat170. Le Débat d’ajournement a déjà été interrompu pour la sanction royale d’un projet de loi et a repris au retour des députés à la Chambre après la cérémonie au Sénat171. Le Président a aussi interrompu le Débat d’ajournement pour aviser la Chambre de la réception d’un message du Sénat172.

Les rappels au Règlement et les questions de privilège

Le Règlement ne peut être invoqué et une question de privilège ne peut être soulevée pendant le Débat d’ajournement173. Les seules affaires qui peuvent être étudiées durant cette période sont les questions déjà soulevées à la période des questions ou celles inscrites au Feuilleton qui ont été reportées pour débat. Par conséquent, la Chambre peut continuer à siéger sans qu’il y ait quorum. Le Président hésite à examiner des rappels au Règlement ou des questions de privilège lors de cette période, puisque ces questions peuvent concerner l’ensemble de la Chambre. Pour la même raison, le Président refuserait de proposer à la Chambre une motion exigeant le consentement unanime. Mis à part les cas concernant le maintien de l’ordre et le décorum, qui ont parfois donné lieu à des interventions immédiates du Président sans que le Règlement soit invoqué174, la présidence a établi que l’étude d’affaires découlant du Débat d’ajournement doit être reportée au prochain jour de séance175.