Passer au contenu
Début du contenu

SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 039 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 novembre 2023

[Enregistrement électronique]

  (1005)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 39e réunion du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.

[Français]

     La réunion d’aujourd’hui se déroule sous forme hybride. Les députés peuvent y participer en personne ou au moyen de l’application Zoom.

[Traduction]

     J'invite les membres présents dans cette salle qui voudront avoir la parole à lever la main. Ceux qui sont sur Zoom devront utiliser la fonction « Lever la main ». Le greffier et moi allons gérer l'ordre des interventions de notre mieux, et nous vous remercions d'avance de bien vouloir faire preuve de patience et de compréhension.

[Français]

    Avant de commencer, je tiens à noter que le sujet de la première partie de la réunion d'aujourd'hui est le transfert illégal d’enfants ukrainiens vers la Russie. Certaines discussions pourraient être difficiles pour les téléspectateurs, les membres et le personnel du Sous‑comité. Si vous vous sentez en détresse ou si vous avez besoin d'aide, veuillez consulter le greffier pour obtenir de l'information sur les services de soutien offerts par l'Administration de la Chambre des communes.

[Traduction]

     Je vous invite maintenant à vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue à notre premier témoin de ce matin, M. Andriy Kostin, procureur général de l'Ukraine.
    Monsieur Kostin, bienvenue au Canada et au sous-comité des droits de la personne. Merci d'avoir accepté de nous rencontrer aujourd'hui. Vous disposerez d'un maximum de cinq minutes pour vos observations, après quoi nous passerons aux questions des membres du Sous-comité. Je vous ferai signe quand il vous restera une minute.
    Monsieur Kostin, à vous la parole pour cinq minutes.
     Bonjour, monsieur El‑Khoury, et distingués membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui pour parler des crimes de guerre de la Russie et des autres atrocités qu'elle commet contre les enfants ukrainiens. Nous nous réjouissons par ailleurs d'avoir pu vous soumettre un bref mémoire sur cette question.
    D'entrée de jeu, je tiens à exprimer ma sincère gratitude au Canada, à son gouvernement et à son peuple pour leur soutien indéfectible et continu à l'Ukraine. La question de notre coopération et de notre partenariat bilatéraux a fait l'objet de nombreuses discussions hier, à Toronto, dans le cadre de la conférence intitulée « United for Justice Conference: War Crimes against Ukrainian Children ». L'événement a accueilli d'éminents experts canadiens et internationaux, ainsi que les ministres Joly et Virani.
    Malheureusement, à l'heure où nous nous parlons, la Russie continue de commettre des actes haineux qui sont des éléments distincts de sa doctrine politico-militaire ainsi que du modus operandi des forces armées russes et de leurs mandataires. La déportation et le transfert forcés d'enfants ukrainiens sont l'une des conséquences atroces de l'agression russe — une pratique condamnable mise en œuvre dès les premiers jours de l'occupation de certaines parties du territoire ukrainien en 2014.
    Que fait la Russie? Elle déplace et éloigne de force les enfants de leurs parents, de leur famille immédiate et du milieu dans lequel ils ont été élevés.
    Le dirigeant de la Fédération de Russie est le cerveau de cette politique appliquée à grande échelle au nom, soi-disant, de la sécurité et de la santé ou encore pour créer des lieux de villégiature. En Russie, les enfants ukrainiens sont dépouillés de leur citoyenneté ukrainienne et proposés à l'adoption par des familles russes sur des sites spécialisés en ligne. Ce n'est pas là une simple allégation, mais une pratique ouverte et connue qui est appuyée et même perpétrée conjointement par les responsables russes qui sont censés protéger les droits et libertés des enfants.
    Les deux premiers mandats d'arrêt émis par la Cour pénale internationale contre le président Poutine et la soi-disant commissaire à l'enfance, Maria Lvova‑Belova, pour la déportation forcée d'enfants confirment que ces pratiques existent bel et bien.
    Imaginez ces enfants, des tout-petits, qui sont une carte maîtresse dans le jeu de la Russie et qui ne se souviennent pas de leur véritable identité, de leur famille ou de leurs proches et qui n'ont aucune idée de là où ils se trouvent. Nous parlons de milliers d'enfants qui sont délibérément emmenés en Russie.
    Les enfants des territoires occupés sont rassemblés et transférés dans des centres désignés sous le prétexte non fondé d'une évacuation pour des raisons de sécurité. En l'espace de quelques jours, les enfants sont transportés en voiture ou en train vers les régions frontalières de la Fédération de Russie, où ils sont remis aux mains des services de garde de diverses régions de la Fédération. Les autorités russes compétentes désignent alors un tuteur parmi les employés de l'administration des services de garde qui sera chargé d'entamer les procédures d'adoption et de changement de citoyenneté ainsi que le transfert des enfants déportés à des familles russes.
    Les enfants ukrainiens confiés aux différents centres des territoires occupés, dans les régions frontalières de la Russie ou dans les établissements de garde d'enfants en Russie, ont une liberté de mouvement limitée, ce qui signifie qu'ils ne peuvent pas quitter l'endroit et qu'ils n'ont pas de contact avec des membres de leur famille. Une autre pratique est le transfert d'enfants ukrainiens vers la Crimée occupée ou diverses régions de la Fédération de Russie, dans des camps dits récréatifs, mais parfois jusqu'en Sibérie et sur la côte Est du Pacifique. De nombreuses installations refusent de divulguer leur identité au motif de prétendues préoccupations d'ordre sécuritaire.
    Nous disposons actuellement de renseignements sur plus de 19 000 enfants ukrainiens ayant été transférés de force dans des territoires temporairement occupés, puis déportés en Russie, et nous continuons de recueillir des informations sur chaque enfant que nous cherchons à retrouver. Jusqu'à présent, seulement 387 enfants nous ont été rendus.
    Cette pratique a été qualifiée de crime de guerre par la CPI, mais aussi par la Commission d'enquête des Nations unies pour l'Ukraine, par la mission d'enquête de l'OSCE et par des organisations régionales comme le Conseil de l'Europe.
    Malheureusement, les crimes commis contre les enfants ukrainiens n'ont rien d'aléatoire ni de ponctuel. Ils s'inscrivent dans le cadre d'une politique généralisée et systématique du Kremlin contre la population civile ukrainienne. Nous estimons par conséquent que cette pratique constitue un crime contre l'humanité et qu'elle pourrait même être apparentée à un crime de génocide, car il s'agit d'un transfert forcé d'enfants. La Russie ne se limite pas à la déportation et à l'adoption d'enfants. Des Ukrainiens, enfants comme adultes, sont forcés de se soumettre à un programme de rééducation aux réalités russes. Pour les adolescents, cela s'entend souvent d'une formation militaire.

  (1010)  

     L'an dernier, le rapport de l'Observatoire des conflits, un organisme financé par le département d'État américain, a dénoncé l'existence d'un réseau de 43 camps de rééducation. Les enfants sont endoctrinés pour adhérer à la vision que le Kremlin a de la nation, de la culture, de l'histoire et de la société. Cela fait partie de la politique planifiée de la Russie visant à dénigrer l'identité ukrainienne en nous dépouillant de nos enfants. Un nouveau rapport déposé il y a quatre jours fait état de la participation de plus de 2 400 enfants ukrainiens aux mains du gouvernement du Bélarus à des formations politiques et militaires à Dubrava ainsi que dans 12 autres installations au Bélarus.
    Cela n'a rien de nouveau. Mise en œuvre en 2014, la politique de russification est maintenant largement appliquée dans les territoires occupés sous le couvert de programmes dits de rééducation. Songez donc à ces scènes grotesques montrant des enfants vêtus d'uniformes de type militaire qui glorifient la guerre selon une version du Kremlin qui consiste à déformer les faits historiques.
    En ma qualité de procureur général de l'Ukraine, ma tâche consiste à tenir pleinement responsables les auteurs de ces crimes odieux à l'échelle nationale, tout en favorisant l'application à grande échelle des mécanismes de justice internationale. En tant que principal responsable, je diligente des enquêtes approfondies sur les crimes internationaux commis contre des enfants, notamment dans les cas de déportation et de transferts forcés. Nous sommes reconnaissants envers nos partenaires pour leur soutien indéfectible à notre travail de partie civile. Nous félicitons également le bureau du procureur de la Cour pénale internationale pour ses efforts rigoureux, sa détermination et les progrès constants qu'il a réalisés dans ses enquêtes.
    Nous devons tous en faire davantage. Premièrement, nous devons mettre en œuvre des modalités efficaces pour contrer cette pratique inacceptable. On pourrait notamment placer sous le coup du régime de sanctions toutes les personnes et entités associées de près ou de loin au transfert forcé et à la déportation d'enfants ukrainiens.

  (1015)  

    Excusez-moi. Nous avons un problème du côté de l'interprétation.
    Parfait, vous pouvez poursuivre.
    Deuxièmement, nous devons assurer le retour en toute sécurité et sans entrave des enfants ukrainiens dans leur famille, auprès de leurs tuteurs et dans leur foyer grâce à une aide ciblée et significative. Nous espérons que le Canada sera à l'avant-garde de cette initiative en tant que coresponsable du point quatre de la formule de paix de l'Ukraine.
    Troisièmement, nous devons poursuivre nos enquêtes avec le maximum d'efficacité pour traîner chaque agresseur en justice, étant entendu que personne ne pourra bénéficier d'un asile quelconque.
    Nous sommes heureux de voir que le Canada se joint à nous pour explorer de telles possibilités au nom des enfants ukrainiens.
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci, monsieur Kostin. Je vous remercie de vos bons et excellents commentaires.
    Nous allons maintenant passer aux questions des membres du Comité. Chaque député dispose de sept minutes.
    J'inviterai d'abord M. Genuis à prendre la parole.
    Monsieur Genuis, c'est à vous pour sept minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Procureur général Kostin, merci pour votre présence. Comme nous tous, vous aurez sûrement vu l'annonce, qui a été faite à ce sujet hier, je crois, par la ministre Joly sur un réseau média. Cela en dit long sur l'important travail de nature multipartite effectué par le comité et, en général, sur les horribles violations des droits de la personne qui se produisent en Ukraine.
    Aujourd'hui, nous sommes bien sûr là pour parler surtout de la question de l'enlèvement des enfants, mais j'aimerais vous inviter à commenter les autres formes d'atrocités commises par les envahisseurs russes. Nous avons en effet entendu parler de violence sexuelle systématique, de torture systématique, de cas où même des mineurs ont été victimes de violence sexuelle et de torture, et de situations horribles, où des membres des familles des victimes ont été contraints d'assister à ces exactions.
    Qu'en est‑il de la torture et de la violence sexuelle pratiquées par l'occupant?
     Je vous remercie de votre question.
    Comme vous l'avez dit à juste titre, la Russie commet toutes sortes de crimes de guerre contre l'Ukraine et les Ukrainiens. La violence sexuelle liée aux conflits est l'un des crimes de guerre les plus brutaux dont la Russie est coupable. Il ne s'agit pas de cas isolés. Les crimes dénoncés ne sont pas le fait de certaines unités militaires qui auraient perdu le sens de la mesure. C'est un comportement que nous avons constaté dans tous les territoires occupés.
    Les premiers constats ont été faits dès les premiers mois de la guerre, puis le monde entier a été témoin des atrocités commises à Bucha et dans d'autres villes voisines de Kiev, ainsi que des atrocités de masse qui y ont été commises par les Russes en février et en mars de l'an dernier. Après la libération de la région de Kharkiv et dans les mois qui ont suivi le début de la guerre et de l'occupation, nous avons constaté les mêmes crimes perpétrés par d'autres unités militaires. Dans la foulée de la libération de Kherson en novembre, nous avons, de nouveau, constaté le même genre de crimes commis là‑bas, ce qui signifie que la perpétration de crimes contre des civils, y compris contre des enfants, est une politique de persécution des Ukrainiens qui est appuyée par les plus hauts échelons du leadership militaire et politique en Russie.
    Nous enquêtons sur ces chaînes de commandement. Pour revenir à la violence sexuelle liée aux conflits, nous avons entamé des enquêtes sur 252 actes de violence sexuelle en temps de guerre concernant 151 femmes, 95 hommes et 13 enfants tous victimes de violence sexuelle. Nous avons déjà identifié 37 suspects. Mon bureau en a fait inculper 22 par les tribunaux ukrainiens qui en ont déjà reconnu deux coupables d'actes de violence sexuelle contre des victimes ukrainiennes.

  (1020)  

    Merci de nous avoir fait part de ces chiffres très inquiétants.
    Je souhaite revenir sur la question de la chaîne de commandement en ce qui concerne les atrocités commises par les Russes. Quel genre de preuves avez-vous trouvées relativement à la coordination de ces actions et aux ordres concernant leur exécution? Pensez-vous que les échelons supérieurs tolèrent ces dérapages ou créent un environnement où ces abus sont tolérés, ou plutôt que nous sommes en présence d'un phénomène de dérogation à des consignes claires visant à interdire aux soldats russes de commettre ce genre de crimes?
    Nous avons des preuves pour les deux, mais la typologie des crimes commis contre des civils dans les territoires occupés est indicative d'une politique systématique de persécution, parce que ce genre de crimes pendant l'occupation visaient principalement à briser la volonté du peuple ukrainien. Ces crimes ont été commis pour faire une démonstration, pour menacer les gens, pour les empêcher de parler et pour les soumettre.
    C'est pourquoi la commission de tels crimes revêt un caractère, selon moi, systématique et pourquoi nous sommes en présence de toute une diversité de crimes commis contre la population civile.
    Je peux vous en donner plusieurs exemples. Nous travaillons avec des survivants dans la région de Bucha, par exemple. Pendant l'occupation, un père et son fils adolescent étaient en train de descendre la rue à pied pour se rendre à la mairie où obtenir l'aide humanitaire dispensée par des bénévoles quand ils ont été arrêtés par deux militaires russes et plaqués au sol. Le père a été abattu sous les yeux de son fils. Les militaires ont également tiré autour du fils qui était encore au sol, simplement pour le terroriser.
    Dans un autre cas survenu dans la même localité, des Russes ont pénétré dans une maison où vivait une famille composée du mari, de son épouse et du père de celle‑ci. Ils ont essayé de les convaincre qu'ils étaient venus pour les « libérer », et quand ces Ukrainiens, nos compatriotes, leur ont dit qu'ils n'avaient pas besoin d'être libérés et qu'ils devaient les laisser partir et les laisser tranquilles, les Russes ont abattu le mari devant sa femme. Puis, à deux reprises, ils ont feint de vouloir la tuer en pointant leurs armes dans sa direction. Ce n'est qu'après que son père leur eut demandé de les laisser tranquilles qu'ils ont pu s'échapper. Ils ont attendu que l'armée ukrainienne libère Bucha pour enterrer le mari.
    Nous avons compilé toute une variété de cas de ce genre. Je pourrais vous en citer beaucoup, mais il est important de souligner que, dans une petite localité, les Russes ont commis différents types de crimes, simplement pour terroriser la population locale.
     Merci, monsieur Genuis. Votre temps est écoulé.
    Je cède la parole à M. Ehsassi.
    Monsieur Ehsassi, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Monsieur le procureur général, c'est un grand honneur de vous recevoir. Merci pour votre présence.
    J'ai eu l'occasion de me rendre deux fois en Ukraine dans les 18 derniers mois. À chaque fois, j'ai cherché à rencontrer vos officiels sur place qui, à mon avis, accomplissent un travail magnifique de collecte et de catalogage des preuves pour monter des dossiers contre les soldats russes présents en Ukraine.
    Mais d'abord, pourriez-vous nous décrire en termes très généraux le travail important que fait votre bureau pour cataloguer les activités criminelles des Russes en Ukraine?
    Merci pour cette question.
    Nous enquêtons sur 110 000 crimes de guerre. C'est notre objectif pour le moment. Nous sommes tous conscients que le nombre réel est beaucoup plus élevé, parce que nous n'avons pas accès aux territoires temporairement occupés. Enquêter a posteriori sur un si grand nombre de crimes de guerre signifie que nous devons bien organiser notre travail.
    À cette fin, nous avons créé une unité spéciale: le service central des crimes de guerre. Nous avons formé à cette fin tous nos procureurs et enquêteurs de deux organismes d'enquête, soit la police nationale et le service de sécurité de l'État. Nous avons également créé des spécialisations dans certains crimes de guerre. Nous avons donc une unité de lutte contre la violence sexuelle liée aux conflits, une unité spéciale qui enquête sur les crimes de guerre contre les enfants, une unité qui enquête sur les crimes de guerre contre l'environnement et une autre qui enquête sur la cybersécurité relativement aux attaques menées par la Russie et qui sont considérées comme des crimes de guerre. C'est tout à fait unique dans l'univers des enquêtes et de la poursuite de tels crimes. J'ai également créé des unités spéciales de procureurs rattachées à neuf régions. Il s'agit de régions proches de la ligne de front ou ayant été touchées par l'occupation temporaire. Nous avons organisé une formation poussée de tous les procureurs et enquêteurs chargés de ces régions.
    Nous avons aussi créé des documents stratégiques, le plus important de tous étant celui qui traite des enquêtes et des poursuites relatives aux crimes internationaux pour la période 2023 à 2025, qui nous permet de catégoriser légalement et structurellement les crimes de guerre sur lesquels nous enquêtons et que nous poursuivons, pour les classer par ordre de priorité parce qu'il est impossible de tout faire en même temps. Nous avons maintenant un document précis qui indique à tous les procureurs et à tous les enquêteurs comment classifier les cas par ordre de priorité. Bien sûr, les cas où des civils ont été tués, blessés, violés, maltraités, humiliés ou détenus illégalement et tous les cas où des enfants ont été touchés en tant que victimes et survivants sont notre priorité.
     Afin d'atténuer les problèmes liés à la charge de travail, nous transférons également certains cas d'une région à l'autre en Ukraine parce que cela offre plus de possibilités.
    Outre que nous travaillons sur tous ces crimes de guerre, et en plus de ces unités spéciales, nous avons deux groupes de procureurs qui enquêtent sur les crimes d'agression — soit les crimes commis par les dirigeants, ceux qui se produisent en amont de tous les autres crimes de guerre — et les crimes de génocide. Cela découle de la typologie des crimes à l'échelle nationale.
    Une autre strate de notre réseau, dont la vocation est d'exiger des comptes, est celle de nos relations avec les mécanismes judiciaires internationaux. D'abord et avant tout, nous coopérons avec la CPI et l'équipe de Karim Khan. Vous savez, la CPI a mis en œuvre son bureau de Kiev — elle l'a non seulement ouvert, mais vraiment rendu opérationnel. C'est le plus gros bureau actif en dehors de La Haye depuis la création de la CPI. Voilà qui en dit long de la solidité de notre coopération avec la CPI.
    Nos procureurs travaillent quotidiennement avec la CPI. Nous avons créé des groupes de travail. Nous avons également établi des priorités pour nos enquêtes. Je ne peux pas vous donner de détails sur l'indépendance des enquêtes, mais je dirais que notre travail avec la CPI est très structuré.
    Nous travaillons également avec tous les mécanismes internationaux existants, comme la Commission d'enquête des Nations unies, les missions d'information de l'OSCE et tous les autres mécanismes des Nations unies sur la prévention de la torture et la lutte contre la violence sexuelle. Nous avons beaucoup d'appuis. Le plus gros problème, c'est notre transparence totale. Nous sommes prêts à collaborer ouvertement. Nous sommes prêts à partager toutes les preuves et tous les renseignements que nous recueillons. C'est une position très ferme de notre gouvernement: être ouvert au partage de toute l'information existante.
    Le troisième niveau est notre coopération avec nos partenaires internationaux. Plus de 20 pays, dont le Canada, ont ouvert des enquêtes nationales sur des crimes de guerre commis en Ukraine. Nous avons créé une équipe d'enquête conjointe avec des pays proches de l'Ukraine où se trouvent beaucoup de réfugiés. Ces réfugiés peuvent soumettre des témoignages, des séquences vidéo et d'autres preuves des crimes de guerre dont ils ont été les victimes ou les témoins. Notre équipe d'enquête conjointe est en liaison avec l'Ukraine, la Lettonie, la Lituanie, l'Estonie, la Pologne, la Slovaquie et la Roumanie. Cela simplifie l'échange de preuves.

  (1025)  

    De plus, comme je l'ai indiqué, nous coordonnons les efforts d'enquêtes indépendantes menées dans d'autres pays. À ce sujet, dans le cas d'Eurojust de La Haye, nous avons créé un instrument spécifique et unique qui est pleinement opérationnel depuis novembre. Il s'agit de la base de données sur les crimes internationaux fondamentaux.
    Si nous l'avons fait, avec l'aide de la Commission européenne, c'est parce que des millions d'Ukrainiens se trouvent dans différents pays. Ils peuvent s'adresser à la police et aux procureurs de ces pays, faire des déclarations et présenter des preuves. Afin que ces preuves ne soient pas perdues dans une affaire importante, nous avons créé une base de données dans laquelle les autorités enquêtrices nationales d'autres pays peuvent verser les renseignements constituant des preuves. Nous nous sommes tous entendus pour échanger ces preuves avec célérité.
    Nous attendons que d'autres pays portent les premières inculpations contre des responsables russes des crimes commis. Ce sera un signal très fort adressé à la Russie pour dire qu'il n'y aura aucun refuge, parce que des enquêtes nationales sont en cours et que nous échangeons nos renseignements avec les autres autorités enquêtrices nationales.
    Je suis également prêt à transférer des cas de chez nous où, par exemple, des ressortissants d'autres pays ont été touchés par la guerre agressive de la Russie. Le transfert de cas nous aidera, bien sûr. Cela réduira un peu notre charge de travail, mais, encore une fois, ce sera un signal très fort indiquant que le monde est à nos côtés pour que justice soit rendue à toutes les victimes et à tous les survivants de cette guerre. Bien sûr, le dernier élément de notre réseau de reddition de comptes est la création d'un tribunal spécial pour crime d'agression.
    Nous sommes reconnaissants au Canada d'appuyer le groupe des pays qui préparent actuellement les modalités juridiques d'un tel tribunal, ainsi que la CPI, ce qui est très important. Je dis toujours que si vous aidez la CPI, vous aidez l'Ukraine.

  (1030)  

    Merci, monsieur Ehsassi. Votre temps est écoulé.

[Français]

     J'invite maintenant M. Brunelle‑Duceppe à prendre la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le procureur général, je vous souhaite la bienvenue au Sous-comité.
    Selon votre expérience et votre connaissance du dossier, pouvez-vous nous dire si des organismes indépendants ont accès à ces enfants pour vérifier ce qui se passe après qu'ils ont été transférés vers la Russie? Ces enfants sont-ils complètement hors de portée?

[Traduction]

    Je suis désolé, mais vos propos n'ont pas bien été interprétés. Auriez-vous l'obligeance de répéter votre question?

[Français]

    Des organismes indépendants peuvent-ils vérifier ce qui arrive aux enfants lorsqu'ils sont transférés vers la Russie? A-t-on accès à ces enfants-là lorsqu'ils sont en sol russe?

[Traduction]

    C'est en fait un gros problème, parce que la Russie ne coopère pas avec les organisations et mécanismes internationaux, même si elle en fait partie. Je dis toujours que la Russie veut profiter de tout ce qui peut jouer en sa faveur, soit de tous les mécanismes internationaux existants, comme le droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU. Cependant, la Russie ne coopère pas avec les autres institutions dans le respect du droit international, même si elle en fait partie et qu'elle a des obligations spécifiques.
    Nous utilisons différents moyens pour vérifier cette information, et le Comité international de la Croix-Rouge en est un. C'est un travail difficile et ces gens‑là ont... Je ne dirais pas qu'ils ont « accès » aux autorités russes, mais ils ont un canal de communication partiellement ouvert. La Russie peut vérifier certaines informations, mais nous ne sommes pas certains que ces informations, advenant qu'elles soient vérifiées par la Russie, soient bien réelles. C'est parce que, pour reparler du cas des enfants, placés dans des centres de détention et des soi-disant camps, la Russie déplace occasionnellement les enfants d'un camp à l'autre. Même si les Russes nous donnent ces renseignements, ceux‑ci pourraient ne pas être valides.
    De toute façon, la Russie ne coopère généralement pas avec les institutions et les mécanismes internationaux, ce qui est un vrai problème.
    À cette fin, nous collaborons avec différentes ONG et organisations de la société civile qui sont à la fois nationales — c'est‑à‑dire, ukrainiennes — et internationales, parce qu'elles utilisent les ressources de l'OSCE pour essayer de savoir où se trouvent nos enfants. Quand nous avons cette information, nous pouvons sensibiliser la population mondiale et il arrive que la Russie renvoie nos enfants chez eux.

[Français]

    Merci. C'est exactement la raison pour laquelle je vous posais cette question. C'est assez majeur.
    Dans votre présentation, vous avez parlé du changement de comportement des enfants lorsqu'ils retournent dans leur famille.
    Des enfants sont venus ici avec beaucoup de courage pour témoigner devant nous, au Sous-comité.
     À quel point ce changement de comportement est-il systématique chez les enfants qui ont été transférés vers la Russie et qui finissent par retourner dans leur famille en Ukraine?

[Traduction]

     C'est une question délicate. Je ne peux pas vous dresser un portrait détaillé de la situation des enfants rentrés chez eux. Nous les traitons avec beaucoup d'égard et, au nom de la justice, nous avons aussi amélioré nos communications avec eux. Nous avons changé nos approches et nos techniques. Nous sommes habituellement limités à un seul interrogatoire ou à une seule communication avec les enfants, parce que nous ne voulons pas les retraumatiser. Il est arrivé que nous ayons deux contacts par semaine, mais habituellement nos enquêteurs et nos procureurs se limitent à une seule communication aux fins d'enquête.
    Nous avons créé des salles vertes spéciales, que nous appelons Barnahus, où les enfants, surtout les très jeunes, rencontrent des psychologues. Le procureur se trouve dans une salle voisine pour suivre les entretiens sans avoir à être en présence des enfants. Nous avons amélioré la loi pour rendre cela possible.
    Le bureau du procureur général ne cherche pas à extraire des confessions de chaque enfant ukrainien retourné chez lui. Si l'enfant est prêt à en parler, nous prenons note de ses propos, mais il est impossible de le bombarder de questions pour le faire parler. C'est surtout ce que les enfants sont prêts à nous dire qui compte, parce que nous pouvons alors les aider. Notre changement d'approche à cet égard est notoire, car nous avons repris les normes de la Cour pénale internationale pour les appliquer à notre travail avec les enfants. Ces normes sont très exigeantes.
    Si vous me le permettez, je vais m'arrêter là.
    Il est très important que les enfants participent à notre quête de justice et participent aux discussions. Quand ils sont prêts, leur voix de victimes et de témoins de crimes de guerre nous est précieuse. Nous les amenons à s'exprimer et nous utilisons des techniques précises pour qu'ils puissent le faire en toute liberté. C'est très important. Les enfants seront un des rouages de la justice en tout temps, en liaison avec toutes les autres institutions pour que leur voix soit entendue.

  (1035)  

[Français]

     Merci.
    À quel point avez-vous des preuves indiquant que le groupe Wagner est impliqué, ou l'a été, dans le transfert de ces enfants? Existe-t-il des preuves?

[Traduction]

    Il faut vérifier cette information, parce que le Groupe Wagner s'est rendu coupable de deux types d'activités illégales. Premièrement, il se bat au côté des forces armées russes et, deuxièmement, ses hommes ont été parmi les plus brutaux pour terroriser la population civile.
    Nous pouvons vérifier cette information pour vous donner des réponses exactes et vous fournir une déclaration écrite, si vous le souhaitez.

[Français]

    Vous avez parlé de personnes qui se situent quand même dans le haut de la pyramide et qui sont impliquées dans les transferts. Or il y a aussi des fonctionnaires aux niveaux fédéral, régional, et même local, qui ne sont peut-être pas sanctionnés présentement, que ce soit par les Américains ou par d'autres pays.
    À quel point serait-il important d'uniformiser les sanctions, non seulement chez les hauts fonctionnaires, mais également chez les petits fonctionnaires locaux? Cela pourrait-il nous aider à lutter contre ce fléau qu'est le transfert des enfants ukrainiens vers la Russie?

[Traduction]

    C'est très important. Nous sommes tout à fait favorables à l'utilisation de cet instrument à l'heure où nous recueillons suffisamment de preuves pour inculper les coupables. Et puis, nous faisons circuler l'information pour sanctionner ces coupables, parce que c'est en sanctionnant les échelons intermédiaires que nous parviendrons à dissuader les autres de commettre ces crimes.
    La Russie a adopté une loi spécifique qui a donné à penser à beaucoup de ces gens qu'ils ne font qu'exécuter des ordres. Ils ne comprennent pas qu'ils commettent des crimes de guerre. Il est très important de les sanctionner et de leur compliquer les choses quand ils commettent ces crimes, en attendant que nous ayons suffisamment de preuves pour pouvoir les inculper au criminel, de sorte à décourager la perpétration de tels crimes à l'avenir.
    Merci.

  (1040)  

     J'invite maintenant M. Angus à prendre la parole pour sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup pour votre témoignage, procureur général Kostin.
    Toute cette conversation est très délicate. Nous avons été témoins d'une série de crimes de guerre commis par la Russie, avec ciblage des symboles culturels ukrainiens et violence sexuelle de masse à la clé sur les champs de bataille, comme Kharkiv et Kherson. Nous avons vu la torture. Nous avons été témoins du meurtre de civils. Cependant, cette question de prendre les enfants de force nous amène dans un tout autre domaine, parce que l'occupant cherche ainsi à détruire les familles et l'identité de ces enfants.
    L'enlèvement d'enfants correspond à l'une des définitions juridiques du terme génocide. Pour mémoire, je rappelle que vous avez mentionné le chiffre de 19 000 déportations. Vous avez identifié des enfants ayant été illégalement placés en adoption. Vous avez dit que des adolescents étaient forcés de suivre une formation militaire.
    À quel point tout cela est‑il systématique? Qu'est‑ce que cette tendance nous apprend sur la tentative de la Russie de détruire l'identité ukrainienne et les familles ukrainiennes?
    Ce sont des tactiques couramment utilisées par la Russie pour détruire l'Ukraine en tant que nation, parce que kidnapper nos enfants à une telle échelle vise justement à nous voler notre avenir, l'avenir de notre nation.
     Comme cela a été dit, le premier mandat d'arrêt a été émis contre Poutine, qui est à la tête de ces pratiques systématiques, selon des preuves parlantes établissant que cela s'inscrit dans le cadre des politiques génocidaires russes contre l'Ukraine et les Ukrainiens.
    Vous avez tout à fait raison de dire que le transfert d'enfants appartenant à un groupe constitue en soi un crime génocidaire. Nous avons constaté l'existence de cet élément génocidaire, mais aussi d'un autre élément: l'incitation au génocide. Deux propagandistes russes, dont un a clamé publiquement avoir tué par noyade des enfants ukrainiens, ont été condamnées par les tribunaux ukrainiens.
    L'autre propagandiste, Gasparyan, qui a été inculpé par les tribunaux ukrainiens, est celui qui a imaginé le terme « dénazification », depuis brandi contre l'Ukraine. Il est l'un des meneurs de cette incitation au génocide. Bien sûr, quand l'incitation à la commission d'un acte génocidaire est systématique, la preuve est faite que la Fédération de Russie est animée de l'intention d'effacer, d'éliminer l'Ukraine en tant que nation.
    Merci.
    J'ai une question à deux volets.
    Tout d'abord, en ce qui concerne les crimes de guerre internationaux, il est important de pouvoir nommer et identifier Vladimir Poutine, qui est évidemment un grand criminel de guerre, ainsi que Mme Lvova-Belova, la soi-disant ministre de l'Enfance. Qu'a‑t‑on fait pour identifier les commanditaires de ces crimes, les fonctionnaires, les acteurs des échelons inférieurs qui participent à l'enlèvement d'enfants par la force et qui doivent les protéger? Pouvons-nous commencer à les nommer et à émettre des mandats sur la scène internationale?
    De plus, en ce qui concerne les 19 000 enfants expulsés de force, avons-nous de bons dossiers indiquant où ils se trouvent, qui ils sont et qui sont leurs familles? Dans quelle mesure est‑il important de disposer de cette information?
    Il s'agit d'informations extrêmement importantes qui permettent de poursuivre et de punir tous ceux ayant pris part à la commission de ce type de crime et de disposer d'informations sur l'endroit où se trouvent nos enfants afin de les rapatrier.
    La reddition de comptes ne suffit pas, à elle seule, à ramener nos enfants à la maison. Je dirais qu'elle est un volet important des pressions exercées sur les autorités russes pour qu'elles commencent à nous rendre nos enfants, mais ce n'est pas suffisant. C'est pourquoi nous demandons que soit créé un mécanisme international pour encadrer le renvoi de nos enfants dans leurs foyers — un dossier dans lequel le Canada est l'un des chefs de file au côté de l'Ukraine — et que les autres nations prêtes à nous aider fassent bloc.
    En réponse à votre première question, je répéterai bien sûr que nous menons des enquêtes nous permettant d'établir qui a pris part à la perpétration du crime d'enlèvement d'enfants ukrainiens, des personnes qui appartiennent aux échelons supérieur et intermédiaire, et au niveau régional. Dès que nous avons ces renseignements, nous les répercutons pour que ces gens soient sanctionnés, comme je l'ai dit, alors que nous poursuivons nos enquêtes. Nous communiquons les noms des individus identifiés afin qu'ils soient sanctionnés avant même d'être inculpés. Sur le plan international, nous aidons évidemment la CPI à enquêter sur ces cas, de plus en plus, et j'espère que nous verrons tous les résultats de ces enquêtes à l'avenir.

  (1045)  

     Merci.
    Je me propose d'aborder une question plus délicate, celle du soutien aux familles. Le Canada a sa propre histoire sombre d'enlèvement forcé d'enfants autochtones. Ceux‑ci ont été enlevés en vertu d'une politique gouvernementale. Je représente de nombreuses familles qui ont vécu ce genre de traumatisme qui est multigénérationnel. Nous sommes encore en train de ramasser les morceaux laissés par des politiques adoptées il y a 20, 30 ou 40 ans.
    Je sais que nous parlons d'enfants qui sont actuellement à risque. Quelles mesures de soutien sont en place pour les familles? Avez-vous les ressources nécessaires, compte tenu de la guerre et de tout le reste, pour soutenir les familles? Cela aura des répercussions à long terme sur la protection des familles et de ces enfants.
    Merci beaucoup de cette question. Vous touchez à un sujet vraiment délicat. La politique du gouvernement consiste à assurer un soutien à toutes les victimes et à tous les survivants de cette guerre. Un grand nombre de victimes et de survivants de cette guerre sont parents d'enfants ayant été enlevés. Ils sont déjà victimes de cette guerre.
    Cette guerre n'a pas été provoquée et elle n'était pas justifiée. Nous avons vécu dans notre pays en paix. Nous avons été attaqués par la Russie. Une partie importante de notre économie et de notre industrie a été détruite par la Russie. Afin de diriger le pays et de veiller à ce que toutes les victimes de cette guerre bénéficient d'une sécurité sociale et d'un soutien adéquats de la part du gouvernement, nous avons besoin du soutien que nous apportent depuis longtemps nos amis et alliés.
    Pour aider les Ukrainiens désormais touchés par une guerre, il n'est pas seulement question d'aider notre gouvernement à diriger le pays durant cette période trouble. Il n'est pas simplement question de nous aider à combler notre déficit budgétaire. L'aide nécessaire est de nature hautement humanitaire. Les Ukrainiens touchés ne pourront bénéficier de prestations de sécurité sociale ni d'autres formes de protection sans l'aide de la communauté internationale.
    Le Canada peut aider...
    Merci, monsieur Angus. Je suis désolé, mais votre temps est écoulé.
    Comme notre temps est limité, chaque député n'aura désormais que deux minutes et demie.
    Madame Vandenbeld, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci. J'allais partager mon temps avec un autre député, mais comme nous n'avons que deux minutes chacun, je ne suis pas sûre que nous aurons le loisir de le faire.
    Je tiens tout d'abord à vous dire, à vous et à tous ceux qui vous accompagnent, que le Canada vous appuie sans réserve. Le travail que vous faites contribuera grandement à faire en sorte qu'il n'y ait pas d'impunité, ce qui est d'une importance vitale pour que la paix et la justice soient vraiment rétablies une fois que tout cela sera terminé. Merci pour ce que vous faites.
    Une chose me préoccupe. Vous avez dit que les Russes prétextent que les enfants sont évacués afin de les protéger. Ce sont des arguments qu'ils continuent d'avancer, surtout devant les tribunaux. Pouvez-vous recueillir suffisamment de preuves pour démontrer que ces enlèvements sont systématiques et que ce ne sont pas des crimes isolés? Serez-vous en mesure de démontrer qu'ils sont délibérés et systématiques?
    Je vais vous donner un exemple. Quand nous avons libéré la région de Kharkiv, nous avons communiqué avec des familles dont les enfants avaient été transférés en Russie. Les autorités d'occupation avaient insisté auprès de ces familles pour qu'elles signent une sorte de procuration, un blanc-seing destiné aux personnes qui accompagneraient leurs enfants sous une forme ou une autre. Ces gens ne savaient même pas où leurs enfants avaient été emmenés. Nous avons de nombreux cas de ce genre que nous avons tous documentés. Ce n'est qu'un exemple de la façon dont la population a été traitée.
    Du point de vue du droit humanitaire international, les Russes devraient renvoyer sans condition tous les citoyens ukrainiens, y compris les enfants. Il existe de nombreux instruments pour cela. Il y a des organisations internationales. Il y a des pays tiers. Par l'entremise de différentes institutions de l'ONU, nous avons envoyé ce signal à de nombreuses reprises. Si les Russes déplacent des enfants ukrainiens sous le couvert d'une évacuation, il leur suffit de les libérer et de les renvoyer chez eux. S'ils ne sont pas prêts à les remettre directement à l'Ukraine, ils peuvent le faire par l'entremise d'autres pays ou avec l'aide d'organisations internationales.
    Mais ils ne le veulent pas. Ce n'est qu'à la suite de pressions internationales qu'ils le font occasionnellement. Ce n'est pas suffisant.

  (1050)  

     Merci, madame Vandenbeld.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole pour deux minutes trente.
    Merci, monsieur le président.
    Je commencerai par deux remarques complémentaires. Je suis tout à fait d'accord pour dire que votre témoignage et d'autres montrent que le régime russe commet un génocide à la faveur de son invasion de l'Ukraine. C'est ce qu'a conclu très tôt la Chambre des communes, et je pense qu'il vaut maintenant la peine de renforcer cette prise de position du Canada au vu des preuves que vous avez fournies. La définition juridique internationale du génocide est très claire.
    Deuxièmement, j'estime que nous devons conclure de votre témoignage qu'il n'est pas seulement nécessaire pour nous d'appuyer les organisations en quête de justice dans ces cas particuliers, mais que nous devons également redoubler notre engagement à appuyer l'Ukraine dans sa marche vers la victoire. Il n'y aura pas de justice sans la victoire de l'Ukraine.
    Votre témoignage souligne les grands enjeux de cette guerre. Nous ne parlons pas simplement de questions abstraites touchant au territoire ou au tracé d'une frontière, car en situation d'occupation, des gens subissent un véritable vol. À cause des atrocités subies par les résidants des régions occupées par la Russie, on peut comprendre pourquoi les principes fondamentaux de l'intégrité territoriale ne peuvent pas faire l'objet de compromis.
    J'ai posé une question sur la violence sexuelle et la torture dans ma première question. Je me demande si vous ne pourriez pas revenir sur la question de la torture, en particulier sur le traitement des détenus.
    Dans le contexte de l'enlèvement d'enfants, nous avons entendu des témoignages qui, à mon avis, sont des descriptions de cas de torture d'enfants enlevés. Pourriez nous parler de façon générale du recours à la torture par les forces d'occupation.
    Répondez en une minute, s'il vous plaît.
    La torture est systématique. Nous enquêtons sur des milliers de cas, même dans la région de Kherson, que nous avons libérée.
    Les preuves et témoignages nous ont permis de découvrir au moins 11 chambres de torture, des lieux de détention illégale où tous les moyens possibles et imaginables ont été utilisés pour torturer des civils ukrainiens.
    La torture est une pratique qui est massivement utilisée contre nos prisonniers de guerre sous contrôle russe. Une fois libérés, ils nous donnent des preuves de la torture et des mauvais traitements qu'ils ont subis pendant leur séjour en Russie.
    La torture est une arme de guerre utilisée par la Russie. Elle fait indéniablement partie de sa politique de persécution et de ses intentions génocidaires, car tous les éléments sont là pour nous donner la certitude que la Russie commet le crime de génocide.
    Merci, monsieur Genuis.

[Français]

     Monsieur Brunelle‑Duceppe, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Deux minutes, ce n'est pas beaucoup, surtout quand nous avons un témoin aussi exceptionnel que vous, monsieur le procureur général.
    En fait, monsieur Kostin, c'est vous qui possédez le plus haut niveau de connaissances dans ce dossier. Je vous cède mes deux minutes de temps de parole pour ajouter quoi que ce soit que vous n'avez pas eu l'occasion de nous dire.
    Vous avez la parole, monsieur le procureur général.

[Traduction]

    Je pense que cette guerre d'agression a démontré que le système du droit humanitaire international, du droit et de l'ordre internationaux, doit être amélioré afin de prévenir de tels crimes en Ukraine, en Europe et dans d'autres parties du monde au XXIe siècle. Or, pour que cela soit possible, nous devons rallier nos efforts en vue de combler les lacunes du système de droit humanitaire international.
    L'une de ces lacunes est le mécanisme de retour des enfants et des civils enlevés et transférés illégalement. Nous avons également la preuve qu'au moins 16 000 civils adultes sont détenus illégalement en Russie. Il n'y a pas assez de mécanismes pour les rapatrier. Le droit humanitaire international ne prévoit pas la procédure à suivre pour l'échange de civils.
    Je suis désolé d'utiliser ce langage cynique, mais c'est pourquoi, à mon avis, rallier nos efforts pour créer de tels mécanismes et rendre ceux des Nations unies plus efficaces et plus pratiques... Nous devons être unis pour cela, faire en sorte que les politiciens et les avocats travaillent ensemble dans le domaine du droit humanitaire international pour créer de tels mécanismes.
     Quant à mon équipe, l'équipe de Karim Khan et nos collègues d'autres pays, nous entendons bien faire notre travail de procureurs, mais cela ne saurait suffire pour nous assurer que tous les enfants seront retournés chez eux.
    C'est notre obligation. Je pense que c'est notre obligation commune de le faire, de réussir à créer de tels mécanismes et de les mettre en œuvre pour ramener nos enfants à la maison.
    Cela empêchera que de tels crimes se reproduisent ailleurs dans le monde.

  (1055)  

     Merci, monsieur Kostin.
    J'invite maintenant M. Angus à prendre la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Nous avons été témoins de niveaux sans précédent de violence et de traumatismes infligés au peuple ukrainien, ainsi que de l'incroyable résistance et résilience de l'Ukraine. Le Canada n'est qu'une puissance intermédiaire, mais nous avons un lien affectif solide avec le peuple ukrainien.
    Selon vous, quelles mesures le Canada doit‑il prendre pour s'assurer d'être présent à long terme, que ce soit sur le plan humanitaire, sur le plan de la reconstruction ou pour veiller à ce que le droit international soit invoqué à fond afin que les auteurs de ces crimes sachent que, peu importe le temps que cela prendra, ils ne s'en tireront pas impunément et la communauté internationale leur demandera des comptes? Quel rôle le Canada peut-il jouer à cet égard?
    Pour faire en sorte que l'Ukraine et le peuple ukrainien vivent en paix, nous devons gagner cette guerre, et gagner cette guerre signifie vaincre la Russie. Cela ne concerne pas seulement l'Ukraine et les Ukrainiens. Encore une fois, il s'agit de rétablir le droit et l'ordre à l'échelle internationale. Vous voyez comment en pleine guerre d'agression, nous faisons face à de nouveaux points chauds sur la carte mondiale, et nous craignons d'en voir encore davantage si l'Ukraine ne défait pas la Russie au plus vite.
    Tous les éléments de soutien, du soutien militaire au soutien financier en passant par le soutien humanitaire, le soutien politique et le soutien dans notre quête de justice et de reddition de comptes, devraient être durables, parce que ce n'est pas seulement pour l'Ukraine. C'est pour vous tous.
    Remporter la victoire est une affaire très onéreuse. Les Ukrainiens, nos excellents soldats et officiers, paient de leur sang. Les civils ukrainiens paient de leur sang. De nombreux pays qui nous aident paient leur part des coûts, mais c'est habituellement pour les aspects militaires et financiers. Nous croyons que dès que nous aurons tout ce qu'il nous faut pour remporter la victoire, cela vous coûtera moins cher à tous — si nous recevons ce dont nous avons besoin le plus tôt possible. Si nous le recevons plus tard, cela vous coûtera plus cher. Chaque nouveau conflit sur la carte mondiale nous coûtera plus cher à tous.
    En nous aidant à gagner le plus vite possible, n'oubliez pas que nous sauvons aussi la vie de nos soldats et de nos civils, et que nous sauvons la vie des Ukrainiens qui demeurent sous l'occupation et sont toujours victimes du régime russe. Ne vous contentez pas d'être avec nous, gagnez cette guerre avec nous. Nous sommes résolus à nous battre. Aidez-nous s'il vous plaît à gagner cette guerre le plus tôt possible.

  (1100)  

    Merci, monsieur Kostin. Bien sûr, le plus tôt sera le mieux, surtout dans un cas comme celui‑ci.

[Français]

     Je vous remercie de votre témoignage et de votre participation à l'étude sur le transfert illégal d'enfants ukrainiens vers la Russie. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous rencontrer et de nous faire part de votre expertise sur ce sujet si important.
    Si vous avez des informations supplémentaires à transmettre au Sous-comité, veuillez, s'il vous plaît, contacter le greffier.

[Traduction]

    Je vais maintenant suspendre brièvement la séance pour que nous puissions accueillir le prochain groupe de témoins dans le cadre de l'étude de l'éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées.
    Merci.

  (1100)  


  (1115)  

     La séance est ouverte.
    J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité.
    Pour faciliter la participation des personnes ayant une déficience visuelle à la séance d'aujourd'hui, je demanderais à tous les députés et aux témoins de s'identifier chaque fois qu'ils prendront la parole.

[Français]

     Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Si vous participez à la réunion par vidéoconférence, cliquez sur l’icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez mettre votre appareil en sourdine lorsque vous ne parlez pas.

[Traduction]

    En ce qui a trait à l'interprétation pour ceux qui utilisent l'application Zoom, vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Les personnes présentes dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et sélectionner le canal désiré.
    Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion pour les témoins, j'informe le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
    J'ai le plaisir d'accueillir le deuxième groupe de témoins qui se joignent à nous ce matin dans le cadre de notre étude de l'éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées.
     Nous accueillons Yasmine Sherif, directrice générale, et Maha Khochen, spécialiste du programme Inclusion scolaire et inclusion des personnes handicapées, toutes deux, de De Education Cannot Wait. Nous avons ensuite Jennifer Rigg, directrice exécutive, de Global Campaign for Education-United States, suivie de Diane Richler et Mónica Cortés, coprésidentes du programme Catalyseur de l'éducation inclusive, de Inclusion International. Nous accueillons aussi Timothy Shriver, président du conseil d'administration, et Gail Hamamoto, directrice générale, tous deux de Olympiques spéciaux Canada. Et enfin, Robert Jenkins, directeur mondial, Éducation et développement des adolescents, du Fonds des Nations unies pour l'enfance.
    Nous allons commencer par Mme Yasmine Sherif.

[Français]

    Vous aurez un maximum de cinq minutes pour présenter vos remarques, après quoi nous passerons aux questions des membres du Sous‑comité.
     Je vous ferai signe lorsqu'il vous restera une minute.

[Traduction]

    Merci d'avoir accepté de comparaître aujourd'hui.
    Madame Sherif, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes de nous accueillir aujourd'hui avec nos collègues et amis du secteur de l'éducation.
    Il s'agit d'une consultation très importante, et je suis heureuse de me retrouver ici avec ma collègue, Maha Khochen, qui est l'experte qui pourra vous offrir davantage de précisions au besoin une fois que nous répondrons à vos questions.
    Tout d'abord, j'aimerais remercier le Canada d'être un membre fondateur de Education Cannot Wait, ou l'éducation ne peut pas attendre.
     La question ultime est la suivante: qu'est-ce que Education Cannot Wait? Eh bien, nous sommes un fonds mondial pour l'éducation dans les situations d'urgence et les crises prolongées. Nous avons nos bureaux au sein d'UNICEF, mais nous travaillons avec tous les organismes des Nations unies. Nous travaillons en étroite collaboration avec les organisations de la société civile — Jennifer Rigg, bien sûr, représente la coalition mondiale — et avec les ministres de l'Éducation, le secteur privé et les gouvernements donateurs stratégiques.
    Le Canada a été l'un des fondateurs de Education Cannot Wait au Sommet mondial sur l'action humanitaire et il y a aussi contribué généreusement. Lors de notre conférence de haut niveau sur le financement qui a eu lieu plus tôt cette année à Genève, en Suisse, le Canada s'est engagé à verser 87 millions de dollars de plus sur quatre ans à Education Cannot Wait dans son plan stratégique pour 2023‑2026.
    Le financement que nous avons reçu pour les quatre prochaines années cible 20 millions d'enfants touchés par la crise, en particulier les filles et les adolescentes qui vivent dans des pays très difficiles à atteindre, fragiles et touchés par des catastrophes causées par la crise et le climat, ou qui sont des réfugiés. Le Canada a joué un rôle déterminant dans la plupart de nos interventions, mais j'aimerais également souligner que des contributions supplémentaires ont été apportées à notre investissement au Bangladesh pour les réfugiés rohingyas — aux réfugiés et aux localités d'accueil, où nous rejoignons plus de 350 000 enfants et adolescents.
    En ce qui concerne l'éducation inclusive des personnes handicapées dans les situations d'urgence, notre approche est tout à fait conforme à l'engagement d'Affaires mondiales Canada à l'égard de l'inclusion des personnes handicapées, conformément à la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. Nous nous réjouissons également du leadership mondial dont le Canada a fait preuve lors du sommet du G7 à Charlevoix, où on a déclaré que les filles handicapées sont particulièrement marginalisées et nécessitent une attention particulière.
    Que faisons-nous?
     Tout d'abord, avant de parler du travail de Education Cannot Wait dans les pays du Sud, permettez-moi de mentionner que l'Organisation mondiale de la Santé estime que 16 % de la population mondiale souffre d'un handicap important. C'est très intéressant. N'oubliez pas que 80 % d'entre eux se trouvent dans le Sud, et que la plupart vivent justement dans des situations d'urgence et de crise prolongées.
    Education Cannot Wait est un fonds mondial qui cherche à obtenir des résultats d'apprentissage et l'égalité et à faire en sorte que tout le monde travaille ensemble, de façon coordonnée et conjointe, plutôt qu'en vase clos, ce qui nous a permis d'atteindre avec succès neuf millions d'enfants et d'adolescents et de leur donner une éducation de qualité dans les régions du monde le plus durement touchées. Nous nous occupons d'abord des interventions d'urgence tout en misant sur le développement à long terme.
     Nous sommes résolus à atteindre 10 % des enfants handicapés. Nous avons augmenté notre allocation budgétaire pour les aider en leur réservant au moins 5 % de chaque programme. Vous pouvez voir le genre de travail que nous faisons avec des organisations locales en Irak et en Colombie, pour n'en nommer que quelques-unes. Jusqu'à maintenant, nous avons rejoint plus de 100 000 enfants, qui reçoivent des machines à écrire en braille, des services d'interprétation gestuelle, des cannes et des infrastructures qui leur permettront d'aller à l'école. Il y a de l'action et il y a des résultats.
    Il me reste quatre secondes. Je vous remercie encore une fois.
     Merci beaucoup.

  (1120)  

    Merci, madame Sherif.
    J'invite maintenant Mme Jennifer Rigg à prendre la parole pour cinq minutes.
     Merci à tous les membres du Sous-comité, aux témoins et à tous ceux qui se joignent à nous aujourd'hui en personne et en ligne.
    Je m'appelle Jennifer Rigg, et je suis la directrice exécutive de la section américaine de la Campagne mondiale pour l'éducation, ou GCE‑US. Il s'agit d'une coalition de plus de 80 organisations nationales et communautaires, de groupes internationaux, de syndicats d'enseignants, de groupes d'étudiants et de jeunes, d'associations de parents, d'organisations de personnes handicapées, d'établissements d'enseignement, de groupes confessionnels et de défenseurs des droits voués à la qualité et à l'éducation universelle, inclusive pour tous.
     Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous et d'appuyer l'importante étude du Sous-comité sur l'éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées, y compris pour celles qui ont des déficiences intellectuelles et développementales.
    Nous faisons partie de la Campagne mondiale pour l'éducation, un réseau actif dans une centaine de pays, surtout au Canada, où nous nous félicitons de notre étroite collaboration avec le Groupe de travail sur la politique canadienne en matière d'éducation internationale, le CIEPWG.
    Je me joins à la conversation d'aujourd'hui de par mon propre vécu et mon expérience professionnelle dans le domaine de l'éducation inclusive et des droits de la personne pour toutes les personnes handicapées, de toutes sortes, à l'échelle mondiale. Je vis avec un handicap visuel et des problèmes aux poignets et aux mains, par exemple. Je suis également la mère d'enfants atteints de dyslexie, de dysgraphie et de troubles d'hyperactivité avec déficit de l'attention, ainsi que la tante d'élèves autistes.
     Quand j'étais toute jeune, ma mère travaillait dans un centre pour la vie autonome et se portait à la défense de la Loi relative aux Américains handicapés. J'ai grandi dans un environnement de défense des droits de la personne, où ma famille m'a aidée à me battre pour surmonter les difficultés et la stigmatisation, et nous continuons de le faire pour les autres.
    Je vous demande de réfléchir à la façon dont vous, votre famille, vos amis, vos réseaux et la communauté mondiale êtes touchés par toute une diversité de handicaps. Imaginez que vous êtes nés avec un handicap dans un pays comme le Soudan, sans certificat de naissance, ce qui rend d'autant plus difficile l'accès à l'école et aux réseaux de soutien. Vous êtes sans soutien à l'apprentissage précoce et sans accès à l'éducation inclusive.
    Nous croyons fermement que chaque apprenant peut s'épanouir dans n'importe quel système d'éducation moyennant une approche pédagogique jumelée qui favorise la transformation à l'échelle du système afin d'améliorer la qualité de l'éducation offerte à tous, à la fois qu'elle donne un soutien ciblé aux apprenants handicapés.
    Mme Sherif vous a fourni quelques statistiques. Nous savons que les enfants et les jeunes handicapés sont souvent marginalisés et qu'on ne leur donne pas la chance de contribuer du leur dans un cadre scolaire inclusif ou à tous les aspects économiques et communautaires importants qui peuvent être débloqués après l'obtention du diplôme. Par exemple, au niveau primaire, le taux de réussite des élèves handicapés est de 15 à 18 points inférieur à celui de leurs camarades, selon le rapport intitulé The Price of Exclusion: Disability and Education, et ce chiffre ne tient compte que des élèves qui ont la chance d'être scolarisés.
    En plus de viser les taux de réussite, il est très important de changer la perception que l'on a des enfants handicapés à l'intérieur et à l'extérieur des écoles. Les adultes et leur entourage peuvent parfois les considérer incapables d'apprendre, même avec des mesures d'adaptation et du soutien, et il arrive qu'on les empêche de fréquenter l'école.
    Il est essentiel de garantir et de promouvoir les droits des enfants et des jeunes — et surtout des personnes ayant des déficiences intellectuelles et développementales — pour créer un avenir meilleur pour les élèves de toutes identités. Par exemple, les systèmes scolaires qui soutiennent les enseignants et les élèves en favorisant l'inclusion créent un environnement plus convivial pour l'apprentissage de tous.
     De concert avec l'International Disability Alliance, IDA, l'International Disability and Development Consortium, IDDC, et la Campagne mondiale pour l'éducation, CME, nous exhortons tout le monde à se joindre à l'Appel à l'action pour une éducation inclusive et équitable, qui a déjà été approuvé par plus de 220 organisations et dirigeants mondiaux, dont Education Cannot Wait, ou ECW, Inclusion International, le mouvement des Jeux olympiques spéciaux, UNICEF et les organisations qui participent à cette merveilleuse session aujourd'hui. Pour que vous en teniez compte dans vos recommandations, nous recommandons fortement cet appel à l'action, et nous vous en avons présenté la version intégrale.
    Il est possible de parvenir à une éducation internationale inclusive de toutes les personnes handicapées au cours de nos vies, mais il reste encore beaucoup à faire pour garantir le droit à une éducation inclusive de qualité.
     J'espère que ce Sous-comité et les dirigeants mondiaux préconiseront une éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées, y compris pour les personnes ayant une déficience intellectuelle ou développementale. Nous tenons particulièrement à exprimer notre gratitude au député Mike Lake et à vous tous pour votre leadership mondial, votre collaboration continue et votre engagement à garantir une éducation inclusive pour tous les élèves.
     Merci beaucoup.

  (1125)  

    Merci, madame Rigg.
    J'invite maintenant Mme Diane Richler, d'Inclusion International, à prendre la parole pour cinq minutes. Je vous en prie, madame.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie d'avoir entrepris une étude sur l'éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées, y compris pour celles qui ont des déficiences intellectuelles et développementales. Je tiens particulièrement à remercier M. Mike Lake d'avoir inscrit cette question cruciale au programme parlementaire. J'aimerais également remercier Mme Vandenbeld, qui a été l'une des rares personnes à soulever la question de l'inclusion dans l'éducation parmi celles qui ont assisté à la conférence des Nations unies préalable au Sommet sur la transformation de l'éducation qui a eu lieu à Paris l'an dernier. Je tiens également à remercier ma députée, Mme Carolyn Bennett, qui a été au nombre des premiers députés de la Chambre à défendre les droits des personnes handicapées.
    Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui comme représentante d'Inclusion International, la fédération mondiale des associations de personnes ayant une déficience intellectuelle et leurs familles, qui compte plus de 200 membres dans plus de 115 pays. Je suis accompagnée virtuellement de Mónica Cortés, de Bogota, en Colombie, qui copréside avec moi le programme Catalyseur pour l'éducation inclusive de notre organisation, qui aide nos membres à promouvoir l'éducation inclusive.
    Madame Cortés, voulez-vous dire quelques mots?

  (1130)  

    Je suis ravie d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui et de vous faire part de notre expérience en Colombie. Comme membres d'Inclusion International, nous faisons la promotion de l'éducation inclusive depuis plus de 15 ans, en fournissant des outils aux familles, aux enseignants et aux décideurs afin qu'ils puissent avoir une vision commune de ce que signifie l'éducation inclusive pour les personnes ayant une déficience intellectuelle.
    Nous connaissons le pouvoir transformateur de l'éducation inclusive lorsque nos enfants peuvent être reconnus et valorisés par leurs camarades sans handicap et par la communauté dans laquelle ils vivent et se développent. Ce n'est qu'à ce moment‑là qu'ils auront de vrais réseaux à l'avenir pour vivre dans la communauté avec un capital social suffisant pour voir à ce qu'ils en fassent partie tout en leur fournissant le soutien nécessaire.
    L'objectif de l'éducation inclusive, tel qu'énoncé dans l'Objectif de développement durable 4, nous a amenés à participer à une initiative financée par Education Cannot Wait, l'Éducation ne peut pas attendre, afin d'assurer l'éducation des élèves qui risquent de vivre des situations d'urgence prolongées, comme les enfants migrants, les victimes de conflits armés, les filles et les femmes victimes de la discrimination et de la violence fondées sur le sexe, parmi lesquels se trouvent des personnes handicapées. Nous apprenons que l'intégration scolaire est un enjeu important. Lorsque les enfants handicapés ne vont pas à l'école, leur mère ne peut pas participer au marché du travail. Dans les conflits et les crises, l'éducation est souvent le seul domaine où les femmes peuvent être incluses.
    La Colombie s'est engagée à avoir un système d'éducation unique et inclusif qui reconnaît l'importance de donner une place à chaque élève, de valoriser ses différences individuelles et de fournir les soutiens et les mesures d'adaptation nécessaires.
    Les pays qui ont ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées, ou CDPH, et qui se sont engagés à combler les lacunes en matière d'accès à l'éducation inclusive pour les élèves handicapés doivent investir des ressources dans la transformation culturelle afin d'éliminer les obstacles qui subsistent pour les groupes sous-représentés, comme les élèves ayant des déficiences intellectuelles et ceux qui ont besoin de beaucoup de soutien, dont une forte proportion ne vont pas à l'école.
    Enfin, d'après mon expérience comme mère d'un fils qui a une déficience intellectuelle et connaissant d'autres personnes qui ont grandi avec ce genre de handicap, je peux dire que nous constatons les bienfaits de l'éducation inclusive pour la vie de ces personnes et de leurs familles. Elles peuvent faire la transition vers des programmes de formation et un emploi et jouir d'une vie bien remplie dans la collectivité.
    Merci beaucoup.
    Je vous redonne la parole, madame Richler.
    Merci, madame Cortés.
    Inclusion International s'est réjouie de l'appui accru à l'éducation inclusive à l'échelle mondiale, comme dans la Convention relative aux droits des personnes handicapées, que le Canada a ratifiée en 2012, l'engagement en faveur de l'éducation inclusive dans les objectifs de développement durable et la conclusion du Sommet des Nations Unies sur la transformation de l'éducation.
    Or, malgré ces engagements internationaux, Inclusion International a constaté que les projets de développement de la société dominante n'incluaient pas les personnes ayant une déficience intellectuelle et, dans bien des cas, favorisaient la ségrégation et d'autres violations des droits de la personne. Les données de l'OCDE montrent que les personnes ayant une déficience intellectuelle sont exclues de presque tous les projets financés par l'aide publique au développement. Je crois que le greffier vous a fourni un lien vers une étude que nous avons effectuée et qui montre que les membres de l'OCDE investissent très peu dans l'éducation qui inclut les apprenants handicapés. Dans les pays membres, 42 % des programmes d'éducation ne sont pas compatibles avec la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
    Par ailleurs, un examen des investissements par le Partenariat mondial pour l'éducation a révélé que la plupart des investissements dans l'éducation des apprenants handicapés étaient destinés à des apprenants ayant des déficiences physiques ou sensorielles et à des programmes séparés. De nombreuses tentatives visant à accroître la participation à l'éducation des apprenants handicapés — ou des filles, des réfugiés, des minorités, des enfants et des jeunes LGBTQ+ — mettent l'accent sur les obstacles que doit surmonter tel ou tel groupe donné. Inclusion International soutient que ce qu'il faut, c'est...
     Madame Richler, pourriez-vous conclure, s'il vous plaît?

  (1135)  

    Ce qu'il faut, c'est une transformation des systèmes éducatifs pour offrir à tous une éducation de meilleure qualité.
    L'une de nos recommandations précises est qu'Affaires mondiales Canada procède à un examen systémique, comme nous l'avons vu dans d'autres pays, de toutes les activités liées à l'éducation inclusive à l'échelle internationale, des investissements bilatéraux, des activités du personnel du ministère et de nos diverses missions, ainsi que de la participation à des institutions multilatérales comme Education Cannot Wait, UNICEF et la Banque mondiale.
    Je serais heureuse de répondre à vos questions. Merci.
    Merci, madame Richler.
    J'invite maintenant M. Timothy Shriver à prendre la parole pour cinq minutes.
    C'est un honneur pour moi de m'adresser au Comité avec mes collègues témoins. Je représente le mouvement international des Jeux olympiques spéciaux. Je suis ravi d'être accompagné de Gail Hamamoto, qui représente le travail que nous faisons dans l'excellent pays qu'est le Canada. Comme bon nombre d'entre vous, je représente ce que je considère — et qui me semble effectivement — être la population la plus négligée, la plus exclue, voire la plus humiliée du monde.
    On retrouve des personnes ayant des déficiences intellectuelles et développementales dans tous les pays, toutes les ethnies, toutes les régions et toutes les collectivités. Cependant, aujourd'hui, malgré leur présence dans nos familles et nos collectivités partout dans le monde, elles demeurent plus susceptibles d'être placées en établissement, de ne jamais fréquenter une école, de mourir jeunes à force de négligence et d'injustice dans les systèmes de santé, et moins susceptibles que presque tout autre groupe d'avoir un emploi, des amis, un foyer ou une vie bien remplie.
    Permettez-moi d'être très clair. Le problème n'est pas le handicap. Le problème n'est pas une déficience intellectuelle ou développementale. Le problème, c'est la peur, la négligence, l'indifférence et le manque d'attention. Le problème, c'est nous. Le problème est urgent et il ne va pas disparaître de sitôt.
    Malgré les observations très importantes qui ont été faites, malgré l'adoption de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, malgré l'adoption des objectifs du millénaire pour le développement et maintenant des objectifs de développement durable, malgré les proclamations et les mécanismes de financement qui existent et qui sont représentés, en partie, par bon nombre d'entre nous dans cette salle et par d'autres, nous avons une crise sur les bras, une crise de longue haleine qui est négligée.
    Aucune institution au monde, même pas la mienne, ne s'est penchée sur cette question. Je ne montre personne du doigt dans cette salle. Je nous montre tous du doigt pour l'état actuel de la situation, où l'on estime que de 50 à 80 % des enfants ayant une déficience intellectuelle ne sont pas du tout scolarisés.
    Comment pouvons-nous prétendre que nous faisons des progrès? Nous n'en faisons pas. Nous ne répondons pas aux exigences de ces objectifs. Nous ne respectons pas la loi adoptée par des pays comme le Canada et une bonne centaine d'autres. Nous avons échoué sur tous ces fronts. La peur continue à contrôler les mécanismes d'élaboration des politiques et de financement qui pourraient répondre aux besoins des personnes ayant une déficience intellectuelle.
    Je ne veux pas paraître pessimiste, mais je tiens à souligner l'urgence de la question. Le statu quo ne permet pas de faire le travail. Il en résulte une injustice et une négligence persistantes, des vies écourtées et l'appauvrissement des femmes, des familles et des enfants ayant une déficience intellectuelle. Notre mouvement, le mouvement des Jeux olympiques spéciaux, travaille dans ce domaine, d'une façon ou d'une autre, depuis plus de 50 ans. Nous avons une formule assez simple pour relever ces défis. Nous invitons les gens à se rencontrer dans un contexte de validité, et non d'invalidité. Nous invitons les gens à se réjouir des dons et des valeurs de chacun, à adopter un esprit de dignité universelle. Nous appelons cette formule un état d'esprit inclusif et elle a été très bien accueillie partout au Canada.
    Je peux vous nommer Red Foster, d'il y a plus de 50 ans. Plus récemment, il y a eu Kim Samuel, une éminente Canadienne, et voici maintenant Gail Hamamoto au téléphone. Il y a 41 000 athlètes au Canada qui participent à ces activités communautaires et on compte 17 000 bénévoles chaque année.
    Voici ce que je pense: Il est temps de prendre des mesures audacieuses. Les jeunes nous demandent de prendre des mesures audacieuses partout dans le monde. C'est un domaine où nous pouvons intervenir. Les plus conservateurs nous demandent d'actualiser nos valeurs, de raviver notre engagement envers la décence humaine et la responsabilité personnelle. C'est l'occasion pour nous de le faire. Les objectifs de développement durable veulent que nous le fassions. La Convention relative aux droits des personnes handicapées veut que nous le fassions. Aujourd'hui, le mouvement des Jeux olympiques spéciaux fait la promotion de l'inclusion sociale dans plus de 28 000 écoles, dans 150 pays.
    Nous devons en faire plus. Nous voulons atteindre 150 000 écoles, mais nous ne pouvons pas y arriver seuls. Nous ne pouvons pas le faire avec de la petite monnaie. Il nous faut des investissements importants de la part d'organismes de développement étrangers, d'organisations multilatérales et de fondations. Nous sommes prêts à travailler avec vous, avec tous les membres du Comité et, bien sûr, avec le député Mike Lake et d'autres qui dirigent ces discussions, pour intensifier ces efforts afin que nous n'ayons pas la même conversation dans un an, deux ans ou cinq ans, ni à devoir faire état de chiffres aussi décevants que ceux que j'ai présentés aujourd'hui.

  (1140)  

    Le Unified Champion Schools peut contribuer à combler le fossé et à enseigner aux enfants comment jouer ensemble. Ils apprendront ensemble et ils grandiront et vivront ensemble. Tout le monde y gagnera. Ce n'est pas seulement un programme destiné aux personnes ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du développement. C'est un appel à l'action pour tous les enfants. Aucun enfant qui apprend et grandit dans l'exclusion d'autres enfants ne reçoit une bonne éducation.
     C'est dans l'intérêt de tous nos enfants.
     J'ai terminé, monsieur le président. Merci.
    Merci.
    J'invite maintenant M. Robert Jenkins, du Fonds des Nations unies pour l'enfance, à prendre la parole pour cinq minutes.
    Je vais poursuivre sur la lancée des autres témoins.
     Je tiens à vous remercier, monsieur le président, ainsi que les membres du Comité et les autres témoins, mais je tiens également à remercier les Canadiens. Étant moi-même Canadien et ayant servi aux Nations unies pendant 30 ans... J'ai vécu à l'étranger pendant longtemps. J'ai été affecté à diverses missions partout dans le monde. J'ai rencontré des Canadiens qui travaillent à l'intégration scolaire et la défendent ardemment. Je pense que c'est au cœur de l'identité canadienne. Comme en témoigne également le travail accompli à l'échelle globale dans le cadre de l'initiative de Charlevoix, il y a de nombreux exemples d'activités engagées par des gouvernements et des décideurs haut placés aussi bien que par des travailleurs communautaires pour faire avancer cet important programme.
    Comme les autres témoins, je pense qu'il reste encore beaucoup à faire. Mais je pourrais ajouter, étant donné que je viens de l'UNICEF — qui est le plus important volet éducation des Nations unies et qui se consacre aujourd'hui à cet enjeu dans 140 pays —, que nous avons appris ce qui est efficace. Permettez-moi de poursuivre sur la lancée des observations précédentes en proposant quelques idées au Comité.
    Premièrement, nous sommes conscients de l'importance de l'intégration scolaire dans la transformation des systèmes d'éducation. Ces systèmes doivent être transformés dans le monde entier. Nous sommes tous conscients de la crise mondiale de l'apprentissage. Les enfants n'apprennent pas ce dont ils ont besoin, et les enfants handicapés sont particulièrement marginalisés. Quand on cherche à atteindre proactivement les enfants handicapés, il faut le faire dans le cadre de ce processus de transformation.
    Comment cela se passe‑t‑il? Quand, dans un pays, on planifie à l'échelle nationale des mesures d'amélioration du système d'éducation avec le gouvernement, tous les acteurs — dont le gouvernement canadien, les ONG canadiennes et le système des Nations unies, avec beaucoup d'appui de la part du Canada — entament un exercice de priorisation en incorporant au cœur de cette transformation l'enjeu très important de la promotion de l'intégration scolaire et de la transition des enfants handicapés vers le système scolaire.
    Comme l'a dit Tim Shriver, les indicateurs sont clairs, et tous les membres du Comité savent que, partout dans le monde, les enfants handicapés sont marginalisés dans les systèmes d'éducation. En les y ramenant et en apportant des changements pour le faciliter, on peut transformer les systèmes dans leur ensemble. Tous les enfants en bénéficient. Certains exemples étonnants attestent, de par le monde, cette transformation, qui a été rendue possible grâce à l'aide du Canada, des Nations unies et d'autres.
    Il y a d'abord les données. Il faut savoir où se trouvent ces enfants dans tel ou tel pays, connaître les obstacles auxquels ils se heurtent et trouver les moyens de les surmonter. Il faut faire participer les enfants et les jeunes de tous les milieux au processus de transformation, mais surtout placer les enfants handicapés au cœur même de ce processus de consultation pour comprendre ce qu'il faut faire et pour agir collectivement.
    Il est également indispensable de renforcer les capacités dans l'ensemble du système d'éducation, du ministère aux autorités locales, en passant par les directeurs, les enseignants, etc., pour accueillir tous les enfants dans les écoles, pour permettre aux enfants de rencontrer d'autres enfants là où ils en sont dans leur apprentissage et leurs besoins et pour leur permettre de réussir dans un cadre inclusif.
    Il est essentiel par ailleurs de tenir compte des normes sociales dont M. Shriver et d'autres ont parlé. Il faut comprendre que les enfants handicapés se heurtent à des obstacles à l'école, mais aussi à la maison et dans les collectivités. Il faut comprendre l'importance de créer des relais proactifs et de nous tenir tous responsables d'intégrer ces enfants pour leur permettre de réaliser leur plein potentiel.
    Le fait est que le Canada est un chef de file mondial dans le domaine de l'éducation, et ce depuis des décennies. J'en ai moi-même été témoin sur le terrain. Je le constate en ce moment dans le cadre du rôle que j'assume à l'échelle mondiale.
    Je vous invite à continuer de jouer un rôle de premier plan dans ce domaine. Vous pouvez compter sur tout le soutien de l'UNICEF pour traduire la bonne volonté des Canadiens en action sur le terrain afin de concrétiser le droit de chaque enfant à l'éducation, y compris les enfants handicapés.
    Je vous remercie. J'ai terminé, monsieur le président.

  (1145)  

     Merci.
    Je remercie tous les témoins de leurs commentaires instructifs. Nous allons maintenant passer aux questions des membres du Comité.
    J'aimerais attirer l'attention des membres du Comité. N'oubliez pas de vous identifier chaque fois que vous commencez à parler et veuillez indiquer clairement à qui votre question s'adresse.
    Pour ce premier tour de table, j'invite M. Mike Lake à prendre la parole pour cinq minutes.
    Allez‑y, monsieur Lake.
    Merci, monsieur le président.
    C'est Mike Lake qui vous parle, comme vient de le dire le président. Ma question s'adresse d'abord à M. Shriver. J'ai un fils qui est un athlète des Jeux olympiques spéciaux. Nous sommes très reconnaissants de l'existence de ce programme.
    J'ai retrouvé le discours de votre oncle en 1962, lorsqu'il a parlé d'aller sur la Lune. Il a dit ceci:
Nous avons choisi d'aller sur la Lune au cours de cette décennie et d'accomplir d'autres choses encore, non pas parce que c'est facile, mais justement parce que c'est difficile, parce que cet objectif servira à organiser et à offrir le meilleur de notre énergie et de notre savoir-faire, parce que c'est le défi que nous sommes prêts à relever, celui que nous refusons de remettre à plus tard, celui que nous avons la ferme intention de remporter...
    Il suffit de remplacer « aller sur la lune » par « inclure tous les enfants », et cela se lit très bien. Nous avons choisi d'inclure tous les enfants et d'accomplir d'autres choses encore, non pas parce que c'est facile, mais justement parce que c'est difficile, parce que cet objectif servira à organiser et à offrir le meilleur de notre énergie et de notre savoir-faire, parce que c'est le défi que nous sommes prêts à relever, celui que nous refusons de remettre à plus tard, celui que nous avons la ferme intention de remporter.
    Vous avez dit que tout le monde est gagnant quand les enfants ayant une déficience intellectuelle sont inclus. Personnellement, je pense qu'on peut en arriver au point où tous les enfants seront inclus dans l'éducation avant la fin de la décennie — tous les enfants. Si nous faisons nôtre ce concept, si nous faisons nôtre l'idée d'atteindre les gens les plus difficiles à atteindre par l'éducation, dans quelle mesure pourrons-nous atteindre chaque enfant en cours de route et réaliser bon nombre des autres objectifs globaux que nous essayons désespérément de faire converger en ce moment?
    C'est Tim Shriver qui répond à M. Lake.
    Merci de cette belle analogie. Il me semble que c'est la bonne façon de l'exprimer.
     Ce n'est pas facile. Si c'était facile, on l'aurait déjà fait. Nous ne serions pas ici pour en discuter. Nous ne parlerions pas d'enfants négligés, maltraités, isolés, placés en établissement et oubliés, mais le fait est que c'est ce que nous sommes en train de faire, et il faudra 20, 30, 40... Je ne sais pas combien de scientifiques, d'ingénieurs et d'universitaires il a fallu pour envoyer un être humain sur la lune dans les années 1960, mais je soupçonne qu'il devait y avoir 50 000 ou 60 000 personnes ne serait‑ce qu'à la NASA — ne me citez pas, s'il vous plaît — et il en ira de même ici.
     Il faut se réveiller. Je sais que vous le savez. Il faut mesurer l'ampleur du défi et se rendre compte de la responsabilité qu'engage le fait de proclamer que nous allons essayer de relever ce défi. C'est embarrassant. Franchement, comme professionnel dans ce domaine, je me sens gêné dans des réunions comme celle‑ci. Comme je l'ai déjà dit, je suis gêné de ma propre organisation.
    Oui, il va falloir le faire, et ce sera difficile. Cela suppose une transformation importante. J'espère que le Canada en prendra la direction. J'ai sollicité beaucoup de gens. Vous pouvez peut-être entendre dans ma voix une certaine frustration accumulée au fil des ans. Je suis effectivement frustré. J'en ai assez d'entendre des parents me dire que leurs enfants n'ont nulle part où aller. J'en ai assez de les entendre me dire que leurs enfants n'ont pas d'amis. J'en ai assez. Quand j'étais dans la vingtaine et la trentaine, je pensais qu'on allait régler ces problèmes. Nous sommes loin d'avoir déployé les efforts nécessaires.
    Le Canada ne pourrait‑il pas, dans la foulée de cette importante audience, s'engager à consacrer une partie importante de ses budgets de développement mondial et d'aide étrangère à ces enfants?
     Vous aidez tous les enfants du monde quand vous aidez nos enfants. Nous aidons tous les systèmes scolaires du monde quand nous mettons en œuvre une conception universelle. Nous aidons tous les enseignants du monde quand nous leur enseignons à être des « intégrateurs » dans leurs classes. La pédagogie s'en trouve améliorée. L'accès aux bâtiments scolaires s'en trouve amélioré. Les résultats scolaires s'en trouvent améliorés. L'ambiance s'en trouve améliorée. Les problèmes de comportement diminuent. Les problèmes de santé mentale diminuent.
    Nous ne nous battons pas seulement pour nos enfants, mais pour tous les enfants. C'est parce que nous sommes des éducateurs que nous le savons. Je viens du milieu de l'éducation. Nous savons que, quand on intègre un enfant, tous les enfants y gagnent. Ce n'est pas seulement l'enfant exclu, l'enfant placé dans une école à part, voire dans un établissement à part. Il n'y a pas que lui qui en bénéficie. Tous les enfants en bénéficient. Nous ne privons pas seulement les enfants ayant une déficience intellectuelle. Nous privons tous les enfants de la possibilité d'avoir confiance en eux-mêmes et d'être convaincus qu'ils vont grandir dans un monde où tout le monde a une chance, et c'est ce qu'ils veulent.
    Ce sera difficile, monsieur Lake, mais j'ai très confiance en votre jugement, en votre zèle et en votre leadership pour susciter le genre de coalition et d'engagement budgétaire dont nous avons besoin maintenant, non pas pour continuer à parler, mais pour réaliser un plan d'action beaucoup plus dynamique.
    Merci.

  (1150)  

     Madame Richler, avez-vous quelque chose à ajouter? Je suis tenté de vous mettre sur la sellette et de vous demander si vous voulez...
    C'est ce que je vais faire. Je vais vous mettre sur la sellette. Allez.
    Merci.
    Je m'appelle Diane Richler. J'appuie entièrement tout ce qu'a dit Tim Shriver. Personnellement, j'ai fait l'expérience de l'intégration scolaire pour la première fois quand mes enfants fréquentaient l'école primaire. Les premières classes inclusives ont été créées à Toronto. Quand je suis allée voir, je me suis dit que c'était le genre de classe que je voulais pour mes enfants. Les enfants étaient actifs. Ils travaillaient ensemble. L'enseignant n'était pas à l'avant de la classe en train de faire taire tout le monde. Il prêtait attention aux besoins de chaque enfant.
    Dix ans plus tard, mon filleul a reçu un diagnostic d'autisme. Il a reçu une éducation inclusive en Colombie-Britannique, de la maternelle à l'école secondaire. Il ne fait aucun doute que le fait qu'il soit dans la même école que les autres et que les enseignants aient appris le genre de choses dont Tim Shriver a parlé a amélioré non seulement son éducation, mais celle de tous les élèves de l'école.
    Ce qui me préoccupe, c'est que nous avons fait des progrès — et je vais maintenant parler du Canada et de progrès comme l'inclusion du mot « handicap » dans la déclaration de Charlevoix et son inclusion ailleurs —, mais que cela ne diminue pas. Il y a des banalités. Excusez-moi, mais le mot « inclusion » est facile à dire.
    Il faut donc examiner les investissements de près et s'arrêter aux obstacles auxquels se heurte tel type ou tel type d'enfant, etc. À quoi l'école devrait-elle ressembler? Quels sont les éléments d'un système d'éducation qui peuvent garantir que personne n'est laissé pour compte? Trop souvent, quand on s'intéresse à tel groupe d'enfants exclus, des obstacles se dressent pour les autres. Nous l'avons vu dans le cas des enfants ayant une déficience intellectuelle. La façon dont une partie de la politique d'aide internationale féministe du Canada a été mise en œuvre est très préoccupante.
    On oublie trop souvent que les enfants ont plusieurs identités. Les filles ne sont pas seulement des filles. Il y a les filles autochtones. Il y a les filles handicapées. Il y a les filles LGBTQ. Nous devons construire des systèmes pour tout le monde. Je crains malheureusement que ce ne soit pas suffisamment intégré aux programmes internationaux auxquels le Canada participe pour garantir que ces enjeux soient abordés partout où le Canada a un rôle à jouer en matière d'éducation.

  (1155)  

    Merci, madame Richler.
    J'invite maintenant Mme Vandenbeld à prendre la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier tous nos témoins de leur participation à ce qui sera, à mon avis, une étude d'une importance vitale sur un sujet qui n'est pas toujours à l'avant-plan des préoccupations.
    Cela me rappelle ce qui s'est passé il y a 10 ou 12 ans quand j'ai assisté au lancement du rapport d'environ 650 pages d'ONU Femmes sur la situation des femmes dans le monde. Quelqu'un dans l'auditoire a demandé: « Pourquoi, dans ces 650 pages, ne parle‑t‑on jamais de handicaps? » La directrice d'ONU Femmes, présente sur place, a réfléchi un instant et a dit que c'était parce que personne dans l'équipe de recherche et de rédaction du rapport n'était handicapé.
    D'où l'importance de participer, d'être représenté. Nous savons tous très bien que ce n'est pas parce que les gens s'y opposeraient. Il y a toutes sortes de conventions, mais ce n'est pas une priorité s'il n'y a pas de représentation sur place.
    J'aimerais revenir à la dernière question, madame Richler. Vous avez parlé d'inclusion par opposition à la ségrégation. On parle souvent du droit à l'éducation, mais pas nécessairement dans le même espace, dans la même classe.
    Madame Sherif, vous avez parlé de l'éducation des réfugiés. On sait que, dans de nombreux pays, il est très difficile d'intégrer les réfugiés dans les systèmes scolaires nationaux. C'est un système séparé. Et, évidemment, il y a une séparation supplémentaire pour les personnes handicapées.
    Je voudrais revenir sur le mot employé par M. Shriver quand il a dit que c'était une population « humiliée ». C'est un mot très fort. Je pense que c'est lié à cette idée de séparation et de ségrégation.
    Et puis, bien sûr, il y a eu M. Jenkins, qui nous a parlé de la transformation de tout le système. À mon avis, c'est le véritable enjeu: vraiment transformer l'ensemble des systèmes d'éducation et la façon dont nous envisageons l'éducation.
    Ma question est la suivante: pourquoi est‑il important d'intégrer les enfants en un seul système d'éducation et non les séparer dans des systèmes distincts? Pourquoi est‑ce important, non seulement pour l'éducation, mais aussi pour le développement de l'enfant?
    Je vais suivre l'ordre dans lequel vous avez pris la parole. Je vais vous laisser le reste de mon temps pour que vous puissiez tous répondre. Veuillez vous laisser les uns aux autres suffisamment de temps pour que chacun ait la chance de répondre dans l'ordre dans lequel vous avez fait votre exposé préliminaire.
    Merci.
     Je crois que Mme Sherif aimerait dire quelque chose.
    Madame Sherif, vous avez la parole.
    Très rapidement, je pense que ces témoins sont formidables et j'aimerais féliciter Mike Lake de nous avoir réunis, parce que je sais tout ce qu'il fait pour faire de cet enjeu une priorité de premier plan.
    Je vais vous expliquer pourquoi c'est tellement important.
    Tout d'abord, 80 % des enfants et des adolescents aux prises avec des difficultés parce qu'ils n'obtiennent pas le soutien dont ils ont besoin par le biais de l'éducation vivent dans des pays du Sud. Comme le Canada est notre principal partenaire — du moins l'un de nos principaux partenaires — pour l'aide aux enfants dans les pays du Sud en crise ou en conflit, j'exhorte le Comité à prêter attention à la majorité de ces 80 % qui, en plus d'être marginalisés, sont stigmatisés en raison de leurs autres difficultés ou handicaps ou qui subissent par ailleurs les effets de catastrophes climatiques ou de conflits armés. Si nous ne pouvons pas répondre aux besoins de ces 80 %, qui vivent dans les contextes les plus difficiles de la planète, cela finira par avoir des répercussions sur nous tous — sans parler de notre conscience.
    J'aimerais également remercier le Canada d'avoir commandé une étude pour déterminer comment renforcer le système, mais je vous demande encore une fois de garder à l'esprit que beaucoup de mes collègues qui investissent tout leur temps dans ces enfants, tous stigmatisés, n'ont absolument rien pour répondre à leurs besoins en matière d'invalidité. Il faudrait plus de financement pour que nous puissions travailler avec le Canada.
    Je voulais simplement le rappeler, mais je dois dire que c'est formidable d'être avec vous tous, parce que nous partageons la même passion et la même détermination à les faire valoir et à ne pas les laisser pour compte, à les faire briller comme les étoiles qu'ils sont.
     Permettez-moi de conclure en disant que je préfère dire que ce sont des enfants ayant d'« autres capacités ». J'étais en Amérique du Sud récemment. En Colombie, j'ai rencontré une petite fille qui est née sans membres. Elle a appris à peindre avec la bouche. Je n'avais jamais vu de si belles peintures et une telle habileté à le faire en tenant le crayon dans la bouche. Je crois que nous devons les hisser au rang d'étoiles à mettre au premier plan, mais il faut investir financièrement dans leur avenir.
    Merci.

  (1200)  

    Je n'ai que quelques minutes, et je vais donc demander à chaque témoin de prendre seulement 30 secondes.
     Merci.
    Merci beaucoup. Je m'appelle Jennifer Rigg et je travaille pour GCE‑US. Je vais essayer d'en dire le plus possible dans ces courtes 30 secondes.
    C'est une excellente question. L'appel à l'action dont j'ai parlé rapidement comporte trois éléments principaux pour nous aider à formuler ces recommandations.
     Premièrement, il faut fixer des objectifs à moyen et à long terme pour veiller à ce que tous les apprenants ayant un handicap soient intégrés à tous les programmes d'éducation, et non pas séparés et regroupés dans une seule école spéciale, et ce d'une manière qui honore et englobe toute la diversité des types de handicaps et qui, comme le disait Mme Richler, réponde vraiment aux besoins particuliers de chaque apprenant.
     Il est par ailleurs essentiel d'intégrer la question du handicap, ainsi que les critères et les cibles qui y sont associés, à l'ensemble des programmes d'éducation, des subventions et des budgets — des budgets plus importants, comme Tim Shriver et d'autres l'ont rappelé.
    Pourriez-vous conclure, s'il vous plaît?
    Merci. Ce qui importe est d'aller au‑delà des projets pilotes et d'en arriver à des projets à grande échelle pour soutenir pleinement tous les enfants et tous les jeunes d'une manière qui aidera également l'ensemble de la société.
    Merci.
    Allez‑y, je vous en prie.
    C'est Diane Richler qui parle. Je ferai deux brèves remarques avant de céder la parole à Mme Cortez.
    La première est que l'inclusion est prévue dans la réglementation. L'observation générale no 4 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées l'énonce clairement: l'inclusion, l'inclusion et encore l'inclusion, et non pas des écoles séparées.
    Deuxièmement, Tim Shriver a rappelé le nombre d'enfants handicapés qui ne vont pas à l'école. Il n'y a pas assez d'argent pour construire des écoles séparées et former du personnel distinct. Donc, si nous pensons que c'est ce que nous allons faire, il va falloir le faire ensemble.
    Madame Cortez, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Veuillez faire vite. Le temps est écoulé.
     Oui, ici, en Colombie, nous avons un système unique pour tous les enfants, sans besoin d'écoles séparées. Bien sûr, comme l'a dit Mme Rigg, nous nous efforçons d'intégrer ce groupe minoritaire d'étudiants et d'immigrants qui vivent différentes situations d'urgence et de catastrophe et de travailler pour eux.
     Il faut démontrer que les principes de l'inclusion scolaire sont meilleurs pour tous, comme l'a dit M. Shriver. Si nous avons une école unique, nous pouvons montrer que tout le monde en bénéficie, que toute la collectivité en bénéficie et que c'est nécessaire. Nous avons besoin d'un meilleur système d'éducation pour tous et nous devons essayer de nous améliorer et de travailler ensemble pour parvenir à une éducation vraiment inclusive pour tous. C'est nécessaire.
    Merci.
    Je demanderai aux autres députés de faire vite parce que nous n'avons vraiment plus de temps.
    Monsieur Shriver, voulez-vous ajouter quelque chose rapidement?
    On l'a dit. Il est temps d'agir. Je sais que des études sont prévues. J'aimerais simplement souligner la dimension politique de cet enjeu. Rappelons-nous. Nous nous réunissons dans un environnement politique. Des gens, ici, sont identifiés comme conservateurs, libéraux, centristes ou progressistes. Ce n'est pas une question partisane. Nous devons être conscients du fait que, comme il ne s'agit pas d'une question partisane, elle échappe parfois au programme politique. J'aimerais simplement rappeler — et je renvoie aux commentaires de M. Lake — qu'il y faudra un effort herculéen parce que personne n'en tirera un profit partisan.
     C'est ce que veulent nos électeurs. Ils veulent que les députés des deux côtés travaillent ensemble. Ils veulent que nous collaborions en fonction de valeurs communes. Faisons de cette question un enjeu politique dans le meilleur sens du terme en montrant ce que la politique peut faire quand les gens travaillent ensemble.
    Merci, monsieur le président.

  (1205)  

    Merci.
    Je suis désolé, mais nous avons dépassé notre temps de quelques minutes.

[Français]

     Maintenant, j'invite M. Denis Trudel à prendre la parole pour sept minutes.
    Monsieur Trudel, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. Je pense que cette étude est vraiment importante et intéressante.
    J'aimerais me concentrer sur l'aspect des services offerts aux enfants francophones.
    On sait déjà qu'au Canada, l'accès à l'éducation des enfants francophones pose problème. J'ai discuté avec les représentantes de l'Alliance des femmes de la francophonie canadienne qui étaient ici, sur la Colline il y a un mois de cela. Elles me disaient que, en Saskatchewan, des enfants avaient à parcourir 300 kilomètres pour aller à l'école, et on ne parle pas des enfants handicapés ou ayant des problèmes particuliers. Pour les enfants francophones ayant des problèmes particuliers, l'accès aux services pose tout un défi, je pense.
    J'aimerais que vous nous parliez de cela.
    Monsieur Jenkins, je commencerais par vous. J'aimerais savoir si cette situation existe déjà dans le monde.
    Cela nécessite-t-il une approche particulière dans les pays en développement, par exemple, en Afrique?
    Est-ce plus difficile pour des enfants francophones d'avoir accès à l'éducation inclusive ou à des services spécialisés que ce l'est pour des enfants d'autres langues?
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Jenkins.

[Traduction]

    Merci de la question.
    Je peux vous parler de l'importance des systèmes d'éducation nationaux qui offrent aux jeunes enfants, notamment, un enseignement dans leur langue maternelle. Les preuves sont très claires. Les enfants apprennent mieux et plus efficacement dans leur langue maternelle. Ils peuvent faire la transition au fil du temps, plus tard. L'UNICEF collabore avec des gouvernements du monde entier à cet égard. Notre organisme appuie des programmes qui permettent aux enfants d'apprendre dans la langue parlée à la maison.
    D'autre part, pour revenir à l'éducation inclusive pour les enfants handicapés — et j'essaie dene pas en faire une question partisane —, quand, comme responsable politique, j'explique l'importance de cette éducation, il y a deux arguments très simples qui, à mon avis, ont trouvé écho dans de nombreux pays.
    Premièrement, les systèmes d'éducation inclusifs sont tout simplement plus efficaces. Ils sont plus efficaces pour intégrer les enfants handicapés et permettre de concrétiser leurs droits. Ils sont également plus efficaces du point de vue des résultats scolaires des enfants déjà scolarisés.
    Soyons clairs: les systèmes d'éducation inclusifs sont plus efficaces et offrent une meilleure éducation à tous les enfants.
    Deuxièmement, sur les plans de l'efficience et du rendement économique, il y a un énorme rendement du capital investi, parce que cet investissement permet aux enfants marginalisés, dont les enfants handicapés, d'avoir droit à l'éducation. Le rendement de cet investissement est très important. Cela se confirme également du point de vue de l'efficience et de l'efficacité.
    Pour revenir à la question initiale, cela permet aussi aux enfants d'apprendre dans leur langue maternelle. C'est une évidence.

[Français]

    C'est intéressant. Je voulais justement vous interroger là-dessus, monsieur Jenkins.
     Il est évident que les enfants apprennent mieux dans leur langue maternelle, mais, quand on n'a pas accès à ces services, que fait-on? Un financement accru pour permettre à ces enfants de recevoir ces services dans leur langue maternelle est-il nécessaire?

[Traduction]

     Là où l'UNICEF travaille parmi les 135 pays visés par des programmes, c'est‑à‑dire des pays à revenu faible ou intermédiaire, nous investissons dans le renforcement de la capacité des enseignants et dans l'embauche d'enseignants locaux pour fournir du matériel didactique dans diverses langues, selon l'endroit, et permettre aux enfants d'apprendre dans leur langue maternelle, puis de faire la transition au fil du temps.
    C'est très difficile dans certains pays où il y a 45 à 50 langues, mais, en fait, il est absolument essentiel de continuer à aider les jeunes enfants, notamment, à apprendre dans leur langue maternelle partout dans le monde.

[Français]

    Je voudrais poser à peu près sur les mêmes questions à Mme Richler.
    Avez-vous constaté, au Canada, une différence quant à l'accès aux soins et aux services pour les enfants qui vivent avec ces problèmes dans les communautés francophones au pays?

  (1210)  

    Si vous le permettez, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    Je crois que la situation a vraiment changé au Canada quand on a offert des services en français aux apprenants handicapés, notamment à ceux qui ont une déficience intellectuelle. Prenons l'exemple du Nouveau-Brunswick. Ce cas est connu dans le monde entier. L'UNESCO, l'OCDE et d'autres l'ont cité comme exemple de l'un des systèmes d'éducation inclusifs les plus progressistes au monde, et c'est vrai. Il y a deux systèmes distincts: le système anglais et le système français. Les deux offrent du soutien aux apprenants handicapés.
    Pour faire suite à ce que vous avez dit, le Canada compte dans ses rangs parmi les meilleurs experts francophones en matière d'intégration scolaire. Nous n'en profitons pas. On ne les laisse pas partager leur expertise, pas plus ceux du Québec que ceux du Nouveau-Brunswick, avec les autres pays francophones du monde. Malheureusement, il y a d'autres pays francophones qui sont plus actifs dans ce domaine, mais qui ne sont pas aussi progressistes en matière d'éducation inclusive.
    Je vois cela comme une véritable occasion pour le Canada de jouer un rôle spécial dans la promotion de l'éducation des enfants francophones handicapés, en s'appuyant sur l'expertise canadienne.

[Français]

    Je suis content d'apprendre qu'au Nouveau‑Brunswick, des experts de calibre international se penchent sur ces questions, mais cela s'étend-il au reste du Canada?
    Constatez-vous encore une différence en ce qui concerne les services et l'accès aux soins pour les enfants qui ont ce genre de problèmes ailleurs au Canada, particulièrement pour les enfants francophones?

[Traduction]

    C'est Diane Richler à nouveau.
    Je suis désolée de ne pas pouvoir donner d'exemples précis, mais je me ferais un plaisir de faire un suivi et de fournir au Comité des renseignements sur ce qui se passe dans d'autres collectivités de la Saskatchewan et de l'Alberta où il y a des systèmes inclusifs.

[Français]

    Ce serait très gentil, et je vous en serais très reconnaissant.
    Merci beaucoup, madame Richler.
     Je vous en prie.
    Merci, monsieur Trudel.

[Traduction]

    J'invite maintenant Mme McPherson à prendre la parole pour sept minutes. Allez‑y, madame.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous nos invités de leurs témoignages aujourd'hui. Je suis particulièrement sensible à l'idée que le travail du Comité et le travail que vous faites tous pour promouvoir l'éducation inclusive sont importants non seulement pour les enfants qui ont besoin d'être inclus, mais aussi pour les systèmes d'éducation et pour tous les enfants en général. C'est vraiment important.
     Je crois aussi qu'il faut souligner le fait que cela améliore la qualité de l'éducation. Mon fils est atteint du TDAH. J'ai à ce sujet un projet de loi d'initiative parlementaire qui vise à faire en sorte que les enseignants et les médecins aient la formation nécessaire pour identifier et traiter le TDAH, parce qu'on sait que, quand c'est traité et pris en charge, il y a de vraies retombées positives, alors qu'il y a un coût extraordinaire dans le cas contraire. C'est ce que l'on constate partout dans le monde quand on parle d'éducation inclusive.
    Là où je ne suis pas tout à fait d'accord avec nos témoins, c'est qu'il ne s'agirait pas d'un enjeu politique. Je suis désolée, mais c'est un enjeu politique, car ce que nous voulons ici, c'est un supplément de financement. Nous cherchons à obtenir un supplément de financement pour pouvoir faire le travail que le Canada devrait faire.
     Actuellement, l'aide publique au développement est fixée à 0,3 % duRNB. C'est insuffisant. Nous avons au Canada un parti politique qui, aux dernières élections, a fait campagne sur une réduction de 25 % de l'APD. Ces choses coûtent de l'argent. Nous devons y contribuer. C'est de l'argent à verser d'avance. C'est de l'argent qu'il faut dépenser maintenant pour ne pas payer mille fois plus ultérieurement. Je suis désolée, mais j'estime que c'est politique.
    Je comprends qu'un examen systémique s'impose. J'aimerais demander à M. Jenkins comment s'assurer que le budget de l'APD soit mieux dépensé. Sachant que nous n'avons pas beaucoup d'argent, sachant que nous devons procéder à un examen systémique de l'utilisation de cet argent, avons-nous besoin d'imposer des conditions... Faut‑il examiner des choses comme nos organisations multilatérales et exiger qu'elles fournissent des données? On nous a dit aujourd'hui qu'il manque de données. Est‑ce une mesure qui permettrait de garantir que le budget de l'APD est dépensé de façon judicieuse?
    Je vais commencer par vous, monsieur Jenkins, si vous voulez bien.
    Merci beaucoup de la question. Excellent.
    On peut utiliser certains paramètres très clairs en parallèle avec les pratiques exemplaires des acteurs du développement et de l'aide au développement pour veiller au respect de normes minimales. Idéalement, le Canada aspirerait bien sûr à être plus que cela, mais, pour ce qui est des normes minimales applicables, l'aide gouvernementale du Canada à l'étranger est mise à profit dans la mesure du possible pour promouvoir l'éducation inclusive.
    Quant au point que vous venez de soulever, madame McPherson — et d'autres —, nous nous ferons un plaisir de vous fournir ces renseignements, et je rappelle que cela peut être lié à l'aide canadienne, mais aussi que, en tenant compte de ces jalons et en en faisant la promotion auprès d'autres acteurs du développement, on peut faire considérablement avancer les choses. C'est ce à quoi je vous inviterais, et nous pouvons... C'est relié aux données. Tout au long de cette transformation des systèmes d'éducation, il s'agit essentiellement de voir comment maximiser ces mesures pour s'assurer que les enfants handicapés soient inclus.
    Je voudrais simplement rappeler une chose. Si on n'agit pas, on court aussi le risque de causer du tort. En offrant de l'aide et en permettant à certains enfants d'apprendre et pas à d'autres, on court le risque d'exacerber les disparités. Quand on intervient, par exemple, dans le domaine de l'aide humanitaire, où beaucoup d'enfants ont besoin d'aide pour apprendre, il est absolument essentiel d'atteindre les plus marginalisés et de travailler à rebours. Ce faisant, on permet à tous les enfants d'en bénéficier.

  (1215)  

    Madame Richler, puis‑je vous poser la même question, s'il vous plaît?
    Je suis désolé, madame McPherson. Je crois que Mme Sherif aimerait également ajouter quelque chose.
    Oui, certainement, madame Sherif. Voulez-vous commencer?
    Merci beaucoup.
    Je pense que les donateurs stratégiques comme le Canada sont d'une importance cruciale, parce que ce qui nous manque pour faire ce travail ensemble, c'est du financement et un modèle dans lequel l'UNICEF soit fortement investi, avec l'UNESCO, le Programme alimentaire mondial et de nombreuses organisations de la société civile qui travaillent avec les réfugiés ou avec Plan international Canada et Save the Children. Quand on rassemble tout le monde pour collaborer, on est plus rentable, et si le conseil rencontre régulièrement ce groupe ou les responsables de ce mécanisme de financement commun, on a une idée directe de ce qui se passe en tout temps.
    C'est une nouvelle façon de travailler, d'agir par l'entremise de fonds mondiaux pour permettre à chacun d'obtenir sa part des fonds de développement et d'APD, en même temps que les donateurs, les pays qui contribuent, peuvent aussi exercer une surveillance directe.
    Je parle au nom de l'organisme Education Cannot Wait, et nous tenons à ce que l'UNICEF obtienne la part du lion, mais nous avons tout autant besoin de la société civile. Jennifer Rigg peut également en témoigner. Nous devons tous collaborer pour être rentables et plus rapides et pour atteindre la durabilité et la transparence.
     Merci. C'est Diane Richler à nouveau.
    Il ne fait aucun doute que la réduction de l'APD a eu des répercussions très négatives. Le gouvernement du Canada a vraiment resserré le champ des domaines et des endroits où il accorde son soutien. Mme Cortez et moi sommes ici pour représenter une organisation qui compte des membres dans plus de 100 pays où le Canada est absent. C'est un domaine où, comme je l'ai déjà dit, nous avons des experts. Nous avons une expertise fantastique à partager, mais nous n'en profitons pas.
    Quant à l'aspect positif de la question, je dirais que, effectivement, c'est un enjeu politique, parce que le premier ministre est maintenant membre de ce qu'on appelle le groupe des amis concernant le financement des objectifs de développement durable. Pourtant, les interventions du Canada dans les forums internationaux sur les ODD n'abordent pas les enjeux de l'éducation ou de l'invalidité. En ce moment, on planifie les mesures qui seront prises pour donner suite aux objectifs de développement durable, mais l'éducation n'est pas à l'ordre du jour, et l'invalidité encore moins. Le Canada pourrait, entre autres, au moment où se déroulent ces négociations à New York, veiller à ce que l'éducation soit considérée comme une priorité mondiale de l'APD, ce qui n'est pas le cas, et que les personnes handicapées et leur inclusion ne soient pas perçues comme une dépense supplémentaire, mais comme un enrichissement et un moyen d'améliorer l'éducation.
    Merci.
    Merci.
    Merci, madame McPherson.
    Nous allons maintenant passer au deuxième tour de table. J'invite Mme Damoff à prendre la parole. Vous avez cinq minutes, madame.
    Allez‑y, je vous en prie.
    Ma question porte surtout sur l'éducation internationale, notamment dans les pays où il est difficile pour les jeunes d'être scolarisés. Dans les pays actuellement en conflit, où se trouvent des camps de réfugiés, ou dans un pays comme l'Afghanistan, où les filles n'ont pas accès à l'éducation, sans parler des jeunes qui ont une déficience physique ou intellectuelle... Comment atteindre ces enfants qui ont d'emblée du mal à avoir accès à l'éducation, sans parler du fait de vivre avec un handicap et même d'être au bas de la liste?
    Les représentants de l'UNICEF et de la Global Campaign for Education pourraient peut-être répondre à cette question.

  (1220)  

     Je serai bref. Je suis très sensible à la situation des enfants qui vivent dans des contextes humanitaires et dans des pays en conflit.
    Tout d'abord, l'éducation doit être considérée comme une mesure qui sauve des vies. Elle doit être au cœur de l'aide humanitaire. C'est un débat que nous continuons de perdre. Actuellement, 3 % des ressources humanitaires mondiales sont consacrées à l'éducation des enfants, et c'est un problème. Ce budget doit augmenter. Yasmine Sherif, de l'organisme Education Cannot Wait, nous à l'UNICEF, et beaucoup d'autres, défendons l'importance de donner accès à l'éducation aux enfants.
    Ayant servi en Jordanie pendant cinq ans comme chef de l'UNICEF juste avant cette affectation, je dirais que, quand on voit un enfant de sept ou huit ans fuir un conflit, traverser la frontière... Ils ont 8, 9 ou 10 ans, et leur premier besoin est de continuer d'apprendre. Ils veulent continuer d'apprendre.
    L'accès à l'éducation permet également d'offrir un soutien psychosocial, des services en santé mentale et une vaste gamme de mesures d'aide tout aussi essentielles.
    Quand leur droit à l'éducation se heurte à de multiples obstacles, et c'est particulièrement le cas dans le contexte humanitaire — comme je l'ai dit tout à l'heure —, il est absolument essentiel que l'éducation qui leur est offerte soit inclusive et engage tous les enfants. En englobant tous les enfants, y compris les enfants handicapés, on ouvre également tout le processus d'apprentissage, en aidant les enfants là où ils en sont dans leur parcours d'apprentissage, là où ils en sont dans leur développement physique, là où ils sont dans leurs besoins psychosociaux, etc.
    Le principe premier est que chaque enfant vivant dans un contexte humanitaire doit pouvoir apprendre. C'est au centre même de l'aide humanitaire, et la communauté internationale, avec le leadership du Canada, va... Les approches novatrices actuelles — technologiques et autres — sont à portée de main pour concrétiser cette vision. Il faut maintenant traduire cette bonne volonté en action, et cela suppose des ressources.
     Il ne me reste que quelques minutes.
     Monsieur Shriver, je suis la très fière députée de Frank Hayden. L'école secondaire Dr. Frank J. Hayden se trouve aussi dans ma circonscription. La plupart des Canadiens ne savent pas qu'il a fait des recherches sur les personnes ayant une déficience intellectuelle et sur les raisons pour lesquelles elles étaient exclues des activités sportives. En 1967, il a eu l'idée des Jeux du Canada et n'a pas réussi à convaincre les organismes qui s'occupaient des personnes handicapées de participer. C'est Eunice Kennedy Shriver qui a découvert les recherches de M. Frank et qui a déclenché les Jeux olympiques spéciaux.
     Je suis très fière de M. Hayden. Les Canadiens ne lui rendent pas suffisamment hommage.
    Il ne me reste qu'une minute, mais pourriez-vous nous parler de l'importance du sport pour les personnes ayant une déficience intellectuelle, parce que les Jeux olympiques spéciaux se déroulent partout dans le monde. Il suffit de lancer un ballon de soccer. Il n'est pas nécessaire que cela coûte cher.
    Quel est le lien entre le sport et la possibilité d'amener ces personnes à faire des études?
    Merci de la question et merci d'honorer M. Hayden. Je crois l'avoir rencontré quand j'avais quatre ans; je le connais donc depuis toujours. Son bilan est extraordinaire.
    Pour faire vite, sur le plan du développement, le jeu, le sport et les jeux sont des outils pédagogiques essentiels. On enseigne des aptitudes sociales par le sport et le jeu. On enseigne des compétences cognitives, l'expression verbale et le langage, des aptitudes relationnelles et l'autorégulation des émotions. Beaucoup de ces choses ne sont pas vraiment enseignées scientifiquement par le sport et le jeu, mais on sait que les enseignants savent comment faire, et nous l'avons constaté dans nos recherches, même avec des enfants que nous avons [difficultés techniques].

  (1225)  

    Nous allons faire une pause. Vous ne perdrez pas de temps de parole. Nous allons attendre que le problème se règle.
    Votre connexion est-elle bonne?
    Je crois que oui. Pouvez-vous m'entendre?
    Oui.
    Permettez-moi de terminer. Je suis désolé de cette interruption.
     La grande conclusion de nos recherches, c'est que les enfants peuvent apprendre énormément. Un formidable développement cognitif et même neurologique est rendu possible par les sports, les activités de loisir, la formation et les jeux qui font appel à la motricité globale et à la motricité fine. En fait, c'est ce qu'on observe tout au long du cycle de vie. Comme un médecin me l'a dit, « le plus grand médicament jamais découvert, c'est l'exercice ».
    Comme outil d'apprentissage, outil d'enseignement et, en particulier, si je peux me permettre de le souligner, outil d'intégration sociale... Quand il est question d'intégration, on insiste souvent sur la proximité physique, le regroupement d'enfants dans la même pièce. C'est très important — loin de moi l'idée de sous-estimer cet aspect —, mais cela ne permet pas d'obtenir l'intégration sociale, d'établir des relations. Pour cela, il faut que les enfants, avec ou sans difficultés intellectuelles et développementales, apprennent à interagir. C'est le sport qui les aide.
     Nous avons constaté... Ce n'est pas parce que nous sommes débordés de fierté. Nous avons constaté qu'il s'agissait du moyen le plus efficace de renforcer la cohésion sociale dont les enfants font l'expérience à l'école et, par conséquent, de contribuer au développement global de relations plus solides, d'un sens plus fort de l'autorégulation, d'une meilleure capacité de résoudre les problèmes, de prendre des décisions, etc.
     J'espère que ces renseignements sont utiles.
    Merci, monsieur Shriver.
     Merci, madame Damoff.
     J'invite maintenant M. Lake à prendre la parole. Cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par répondre aux propos politiques que mon collègue du NPD a tenus tout à l'heure. Nous dépensons beaucoup plus que le gouvernement fédéral ne l'a jamais fait et, malgré toutes ces dépenses, nous obtenons des résultats dignes d'une crise. Par le passé, lorsque nous avons été plongés dans une crise économique de pareille ampleur, le résultat, au milieu des années 1990 et au début des années 2000, a été une réduction de 32 % des programmes et du financement des soins de santé, des services sociaux et de l'éducation, et les niveaux les plus bas de notre histoire en matière de dépenses en développement international. Je crois que nous en étions à une aide publique au développement d'environ 0,21 % à cause de la crise économique de la génération précédente.
     Nous nous soucions de la viabilité des programmes que nous avons mis en place.
    Aujourd'hui, nous parlons de crise. Nous sonnons l'alarme ensemble et le Parlement, malgré les divergences politiques, a reconnu, votant à l'unanimité, que c'est un domaine dans lequel nous devons agir. Le Comité s'est réuni pour cette raison.
    J'adresse mes questions à Jennifer Rigg et elles portent sur les résultats et les mesures à prendre. Je m'intéresse à un appel à l'action du Sommet sur la transformation de l'éducation qui a porté sur l'éducation inclusive pour les personnes handicapées.
     Pourriez-vous nous donner quelques chiffres pour illustrer l'actuelle situation de crise? Je crois qu'il y a 240 millions d'enfants handicapés dans le monde. Quels sont les résultats pour ces enfants à l'heure actuelle?
    Merci, monsieur Lake. C'est tout à fait exact. L'estimation est de 240 millions. Cependant, votre collègue vous a déjà demandé des données. Nous sommes reconnaissants envers l'UNICEF, Education Cannot Wait et d'autres entités qui s'efforcent inlassablement d'améliorer la situation, mais il reste encore beaucoup à faire, non seulement sur le plan multilatéral, mais aussi dans chacun des programmes et dans chacune des collectivités. Par exemple, combien de fois savons-nous vraiment combien d'enfants handicapés sont rejoints dans le cadre d'un programme donné et combien ne le sont pas? Quels sont les obstacles qui font en sorte qu'ils sont toujours laissés pour compte?
    Quant au financement, combien de fonds garantissons-nous pour tel programme ou pour l'éducation inclusive pour les enfants handicapés? Ce sont les initiatives qui reçoivent des fonds qui sont priorisées et se concrétisent. Notre groupe a fait de la recherche dans le cadre de l'appel à l'action pour établir qu'il faut consacrer au moins 5 % des fonds à cet important domaine, mais la double approche dont nous avons parlé plus tôt montre en fait qu'il faudrait plus, au moins au départ. La reddition de comptes? Le Canada et d'autres pays ont participé activement au Sommet mondial sur le handicap ainsi que, comme vous avez eu la merveilleuse idée de le dire, au Sommet des Nations unies sur la transformation de l'éducation. Ce sont des occasions de faire état de ses propres résultats, et nous encourageons tout le monde à faire plus et à rendre pleinement compte de tout ce que nous faisons.
    Nous avons un marqueur de handicap relativement nouveau au Comité d'aide au développement de l'OCDE. Assurons-nous qu'il est effectivement appliqué dans le domaine de l'éducation et que les enfants sont accompagnés dès la naissance et au long de leur parcours. Merci beaucoup.

  (1230)  

    Monsieur Lake, vous avez la parole.
    Le rapport ne compte que deux pages, et il y a aussi toute une série d'images de logos de partisans. Il est donc formidable de voir autant d'appuis à l'égard du rapport.
    Je suis bouleversé. Il est dit que les enfants en situation de handicap ont 49 % plus de chances que les autres de n'avoir jamais fréquenté l'école et 42 % moins de chances d'avoir des compétences de base en lecture et en calcul.
    Monsieur Jenkins, dans la minute qu'il me reste à ce tour, je vous demanderai quel engagement l'UNICEF peut prendre aujourd'hui, à court terme, pour aider à résoudre ce problème.
    Monsieur Lake, merci du leadership que vous continuez d'exercer dans ce dossier et merci de continuer à vous engager si directement auprès de l'UNICEF et à mener la lutte à nos côtés. En fin de compte, nous devons tirer parti de nos 144 bureaux existants. Nous dépensons environ 1,6 milliard de dollars par année en éducation. Nous devons en tirer parti pour maximiser l'impact sur l'éducation inclusive, et cela nous ramène à nos discussions de tout à l'heure sur la nécessité de veiller à ce que tous les programmes de l'UNICEF respectent cette norme. Nous pouvons jouer dans la cour des grands en nous rassemblant pour travailler de la même façon. Nous avons hâte de continuer à travailler avec vous sur ce parcours.
    Merci, monsieur Lake.

[Français]

     J'invite maintenant M. Trudel à prendre la parole pour cinq minutes.
    Madame Sherif, je sais que vous menez des programmes dans beaucoup de pays, notamment à Madagascar, en Éthiopie, au Nigeria, en République centrafricaine et en République démocratique du Congo.
    Avez-vous constaté une différence entre les services offerts aux enfants en situation de handicap, francophones et anglophones, par exemple, et ceux fournis à d'autres ethnies dans ces pays?

[Traduction]

    Allez‑y, s'il vous plaît.
    Une voix: Je pense qu'elle n'est pas là.
    Le président: Oui, mais Mme Khochen devrait répondre à la place de Mme Sherif.
    Madame Khochen, vous avez la parole. Si vous voulez que le député répète sa question, cela n'enlèvera rien à votre temps de parole.
     Le député s'enquiert des expériences que nous avons vécues dans différents pays francophones et veut savoir comment la langue est enseignée dans différents pays, si j'ai bien compris.
    Nous savons que dans chaque pays où nous allons et travaillons, nous trouvons des exemples de pratiques d'intégration fructueuses. Nous voyons ces pratiques fécondes. Nous voyons des enfants qui ne sont jamais allés à l'école auparavant. Jusqu'à maintenant, les exemples que nous avons sont éparpillés. Il y a des exemples de réussite. Premièrement, nous devons vraiment comprendre ce qui ferait de ces expériences un succès, et aussi ce qui nous aiderait à tirer parti de ces réussites.
    Nous croyons fermement que l'intégration ne consiste pas seulement à amener les enfants dans l'environnement et à leur offrir un soutien en matière linguistique. Nous devons vraiment tenir compte des besoins holistiques de l'enfant. Nous devons examiner ce dont l'enfant aura besoin et adapter le soutien en conséquence.
    On a dit que la majorité du soutien allait aux personnes en situation de handicap visible, mais nous savons que seulement 5 % des enfants handicapés en situation d'urgence et de crise prolongée reçoivent une éducation. Nous pouvons supposer que même ceux qui ont un handicap visible ne sont pas rejoints par les services d'éducation.
    La voie à suivre pour nous consiste à réfléchir aux obstacles systémiques, car il existe toujours de la discrimination. La stigmatisation est généralisée. Nous devons réfléchir aux changements systématiques à apporter au milieu éducatif, afin qu'il puisse devenir un milieu accueillant pour tous, indépendamment des différences, des types de difficultés, de leur gravité ou des différences qui peuvent exister entre les enfants.

  (1235)  

[Français]

     Merci.
    J'aimerais aborder la question de façon globale. La question s'adresse à tout le monde.
    J'inviterais M. Jenkins à répondre le premier sur la situation des enfants handicapés, notamment dans les pays en guerre. Parlons de l'Ukraine, de l'Afghanistan, où cela a été difficile. On pourrait même parler de Gaza, où la situation est extrêmement difficile pour les enfants. On le voit et c'est intolérable.
    Sait-on quelque chose sur l'accès à l'éducation pour les enfants vivant avec un handicap, intellectuel ou autre? On sait déjà que l'accès à Gaza est compliqué.
    Si vous avez des données sur ces situations particulières, monsieur Jenkins ou un autre témoin, j'aimerais les connaître.

[Traduction]

    L'UNICEF consacre environ 60 % de ses ressources en éducation aux enfants vivant dans un contexte de crise humanitaire. Cette question a été constamment soulevée au cours des quatre années où j'ai occupé ce poste. C'est surtout parce qu'il y a de plus en plus de crises humanitaires, malheureusement. Nous en sommes maintenant à environ 60 % de nos ressources mondiales en éducation.
    Pour répondre à votre question, cela dépend de chaque contexte, mais la réalité est que les difficultés que les enfants doivent surmonter sont aggravées ou deviennent exponentielles. Si je vis dans une région pauvre, si je suis touché par une inondation, si je suis handicapé, si je suis une adolescente et si je vis dans une famille pauvre, ces défis se conjuguent de façon exponentielle. C'est non seulement difficile... On n'en est pas à 50 % des enfants. Il y a 1 % de chances que ces enfants puissent aller à l'école ou poursuivre leur apprentissage.
    En somme, les enfants handicapés plongés dans des crises humanitaires sont de façon exponentielle désavantagés, parce que non seulement il est difficile de vivre dans une crise, mais ils sont aussi handicapés. Malheureusement, malgré tous les efforts des milieux humanitaires, nous continuons collectivement à laisser tomber ces enfants dans la grande majorité des contextes. Cela nous ramène à ma pressante recommandation. Lorsqu'il s'agit d'intervenir dans une crise, il faut s'occuper d'abord des enfants les plus touchés, les plus marginalisés, pour ensuite prendre les autres en charge. Ce sera à l'avantage de tous les enfants.
    Merci, monsieur Jenkins et monsieur Trudel.
     J'invite maintenant Mme McPherson à prendre la parole. Cinq minutes, s'il vous plaît.
     Merci beaucoup de votre témoignage.
    Monsieur Jenkins, c'est à vous que j'adresse ma question parce que vous venez de répondre à ma collègue au sujet de l'intersectionnalité des impacts et de la façon dont ils s'additionnent.
     Je travaille avec les plus touchés, et je suis d'accord avec M. Trudel. À l'heure actuelle, les conflits à Gaza touchent les enfants de façon disproportionnée. Nous savons que les enfants constituent plus de la moitié de la population palestinienne. L'Afghanistan a cette complexité particulière que sont les répercussions sur les femmes et les filles. Je ne peux qu'imaginer les répercussions sur les femmes et les filles qui essaient d'avoir accès à l'éducation inclusive en Ukraine, également en proie à un conflit.
    Je voulais vous donner un peu plus de temps pour dire un mot de la conjugaison des impacts et peut-être du fait que nous ne nous sommes pas remis de certaines des répercussions de la COVID au cours des dernières années. Pourriez-vous m'en parler un peu, monsieur Jenkins?
    Je pensais y échapper un instant, mais je comprends votre question. Merci beaucoup.
     Je suis vraiment reconnaissant au Comité de l'intérêt qu'il manifeste pour les plus marginalisés, de son engagement à atteindre les enfants handicapés et à reconnaître que, dans les situations de crise humanitaire, ils sont particulièrement marginalisés. Je l'apprécie beaucoup. C'est rafraîchissant.
     Souvent, dans le cas des enfants qui vivent dans des situations de crise humanitaire, des conflits, etc., les besoins en matière d'apprentissage sont moins haut dans l'ordre de priorité, comme je l'ai dit. Sur ce plan, le Canada peut jouer un rôle important, et je vous suis vraiment reconnaissant de l'intérêt que vous manifestez.
    Voici une statistique plutôt effrayante: 70 % des jeunes de 10 ans qui vivent dans des pays à revenu faible ou moyen ne savent pas lire, et bon nombre fréquentent l'école depuis des années. Nous avons une crise mondiale de l'apprentissage sur les bras, point à la ligne. Les enfants handicapés sont particulièrement marginalisés, comme nous l'avons reconnu. Nous revenons à tous les points qui ont été soulevés par tous les membres du Comité dans le cadre de la discussion sur l'importance de systèmes inclusifs qui sont meilleurs pour tous les enfants, plus efficients et plus efficaces.
    Voyons maintenant les situations précaires ou de crise humanitaire. Vous en avez évoqué quelques-unes, dont celle de l'Ukraine, celle de Gaza, plus récente, celle de l'Afghanistan, etc. En fait, vous verrez que les services d'éducation sont mis en veilleuse ou que des enfants abandonnent le réseau scolaire et n'y reviennent jamais. C'est ce qui se passe actuellement en Afghanistan.
    Il est extrêmement coûteux d'aider les enfants à se rattraper et à reprendre leur parcours scolaire... C'est la même chose au Canada — le programme pour les décrocheurs, etc. Il est absolument essentiel que nous fassions tous de notre mieux pour permettre à l'enfant d'apprendre malgré les situations difficiles où il se trouve.
    Nous l'avons vu avec la COVID, comme vous l'avez dit. Les écoles ont fermé. Évidemment, plus l'école a été fermée longtemps, plus l'impact a été marqué sur tous les enfants, mais surtout sur les enfants marginalisés partout dans le monde. Les disparités ont augmenté de façon tragique pendant cette période très difficile dans le monde, et c'est maintenant que les crises frappent. Bon nombre des pays où j'ai travaillé se trouvaient souvent dans des situations de crise humanitaire. Ce sont les enfants marginalisés qui sont touchés de façon disproportionnée par les crises. Les disparités s'aggravent considérablement, de sorte qu'il est très difficile d'amener les enfants déjà aux prises avec des difficultés à retourner à l'école pour reprendre leur parcours d'apprentissage.
    C'est un message clé au sujet des enfants en situation de handicap.

  (1240)  

    Merci.
    J'ai une autre question à ce sujet. Comment pouvons-nous concilier ce travail avec une intervention rapide en cas de crise humanitaire? Certaines choses arrivent très rapidement. Nous voulons apporter le soutien là où on en a besoin. Comment concilier cela avec les contributions au développement à long terme qui réduit la probabilité de conflits et de problèmes humanitaires? Comment trouver le juste équilibre entre le développement et l'aide humanitaire lorsqu'il faut aider des enfants? Comme vous l'avez dit, le problème, c'est le temps nécessaire à la matérialisation des résultats.
     Cette fois encore, je m'adresse à M. Jenkins.
    En fait, il n'y a pas d'équilibre à ménager, car il est possible que tous y gagnent. Tout dépend de la façon d'intervenir.
    Lorsque des enfants de Syrie sont arrivés en Jordanie — j'y dirigeais l'action de l'UNICEF... La façon dont nous intervenons et permettons aux enfants de poursuivre leur apprentissage peut être inclusive, et tous les enfants en ressortent gagnants. Il est possible d'agir de façon à améliorer la qualité de l'éducation pour tous les enfants. Nous le faisons dans beaucoup de situations de crise humanitaire. Lorsque des enfants réfugiés et des enfants visés par des efforts d'inclusion viennent dans une école, si nous soutenons l'école dans son ensemble, nous améliorons toutes les infrastructures et les pratiques pédagogiques de tous les enseignants, mettant ainsi en place un environnement global inclusif, et tout le monde y gagne.
     Il s'agit de tirer parti de l'aide humanitaire pour transformer l'éducation. Cela touche même ce qui se passe en classe. Si un enseignant est capable de rejoindre les enfants handicapés, il peut aussi bien rejoindre tous les enfants, quelles que soient leurs capacités et tout l'apprentissage s'en trouve bonifié. C'est un exemple facile qui montre comment on peut tirer parti des systèmes humanitaires à court terme de manière à transformer le système éducatif pour tous.
     Monsieur le président, combien de temps me reste‑t‑il?
    Votre temps de parole est écoulé.
    Nous allons passer au troisième tour. Chacun aura trois minutes. Ce sera d'abord Mme Damoff.
    Monsieur Jenkins, il m'est arrivé de voir des enfants sans handicap dont un parent était handicapé. À un très jeune âge, l'enfant doit prendre soin d'un parent handicapé. Par exemple, à cause de l'explosion d'une mine terrestre, une mère peut se retrouver seule à s'occuper de sa famille, et du jour au lendemain, l'enfant ne peut plus aller à l'école. Nous voulons que tous les enfants fréquentent l'école. Ceux dont je parle n'ont aucun handicap, mais ils subissent les conséquences du handicap d'un membre de la famille. Ce qui arrive plus fréquemment dans certains pays. Comment rejoindre ces enfants? Avez-vous des idées?

  (1245)  

    Nous parlons de rejoindre l'enfant globalement, et ce n'est pas facile. J'ai travaillé dans le système d'éducation. Le secteur de l'éducation me passionne. Je suis acquis à la cause de l'apprentissage, mais je m'aperçois de plus en plus qu'il y a des limites à ce que nous pouvons faire si nous nous en tenons uniquement à l'école. Il faut que l'enfant puisse venir en classe. Nous devons tenir compte de l'ensemble de sa situation, de l'endroit où il vit, de ses besoins en soutien et de ceux de sa famille, et apporter un soutien complet si nous voulons que la démarche soit efficace. Il faut faire appel aux systèmes de protection sociale en général.
    Puisque j'en suis à parler de ce genre d'approche des besoins globaux, disons qu'il y a également un lien avec l'engagement. Il est absolument essentiel que les collectivités aient des liens avec le système scolaire et qu'il y ait un partenariat auquel participent les familles, les parents et les enseignants. Cela se voit dans le monde entier et peut aider à répondre à la question très importante que vous soulevez au sujet des familles particulièrement défavorisées et marginalisées. Si l'école est placée au centre de la collectivité dans son ensemble, en partenariat avec tous les parents, si elle est elle-même inclusive, les enfants seront également encouragés et l'éducation sera inclusive.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole à Anita Vanderbeld. Il vous reste une minute.
    Merci beaucoup.
    J'en reviens à la collecte de données, mais je ne me souviens pas quel témoin — c'était peut-être vous, monsieur Shriver — a dit que de 50 à 80 % de ces enfants ne vont pas à l'école. C'est très élevé et très général, cette fourchette de 50 à 80 %. Ce n'est pas très précis. Est‑ce révélateur du fait que, de façon générale, nous ne recueillons pas systématiquement ce genre de données et de renseignements? Que pouvons-nous faire de mieux?
    J'adresse la question à M. Shriver.
     La collecte de données est très médiocre. C'est mieux qu'il y a 10 ans. Nous savons que de plus en plus de programmes nationaux recueillent davantage de données. Nous commençons à voir des données sur les handicaps, par exemple, mais ce sont des estimations générales. A priori, je préfère l'action. Nous pourrions consacrer encore cinq ou dix ans d'efforts à l'amélioration des systèmes de données, et nous devons le faire, faute de quoi nous ne pourrons pas savoir si notre travail porte fruit ou non. Nous sommes tous d'accord ici pour dire que, mesure ou pas, nous avons beaucoup de pain sur la planche. J'accepte l'amendement favorable de Mme McPherson, qui dit que c'est politique. J'accepte l'idée et j'accueille favorablement aussi l'idée que cela puisse devenir une source de débat et de litige politique, non pas parce que cela crée des tensions ou des divisions, des gagnants ou des perdants, mais parce que cela crée un sentiment d'urgence, une prise de conscience de l'importance de ce travail. Voilà mon dada.
    M. Lake a demandé ce que nous pouvions faire. Ce dont nous avons besoin dans la plupart de ces pays à l'heure actuelle, ce sont des enseignants formés. Nous devons consentir un investissement massif dès aujourd'hui. Lorsque je frappe aux portes des ministres de l'Éducation, ce que j'ai fait par l'entremise de la coalition que nous sommes en train de former, une coalition spéciale pour l'inclusion scolaire, je demande aux gouvernements d'investir dans l'inclusion, de former les enseignants, de donner aux jeunes, de donner aux familles le moyen d'agir, de permettre que le travail scolaire et l'activité sportive se fassent dans les écoles et de s'engager à atteindre des objectifs. Nous pouvons y arriver. Je serais heureux d'appuyer l'élaboration d'un plan à moyen terme pour la collecte et l'amélioration des données, mais ne nous laissons pas détourner de l'action concrète.
    Merci, monsieur Shriver. Votre temps de parole est écoulé.
    J'invite maintenant M. Lake à prendre la parole. Trois minutes.
    Difficile de m'en tenir à trois minutes. Je tiens d'abord à remercier tous les témoins d'avoir accepté de comparaître. Vous êtes tous des amis et j'ai hâte de poursuivre désormais les échanges avec vous.
    Je vais adresser ma question expressément à Yasmine Sherif, qui est sans doute en train de prendre une profonde respiration, se demandant où je veux en venir. Puisqu'il est question d'action concrète, quel genre d'engagement à agir l'organisation ECW est-elle disposée à prendre tout de suite, le 21 novembre 2023, précisément pour favoriser l'intégration scolaire des enfants handicapés? Quel engagement est-elle prête à prendre dès maintenant?
    Madame Khochen, pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît?
    Oui, bien sûr.
    Merci de votre question, monsieur Lake.
    Education Cannot Wait a déjà pris un engagement ferme en ciblant 10 % des enfants handicapés pour ses différents guichets de financement. Nous nous sommes déjà engagés, en signant l'appel à l'action sur l'inclusion des personnes handicapées du Sommet sur la transformation de l'éducation, à veiller à ce que nos investissements prennent en compte l'intégration des personnes handicapées dans la société en général et à ce que chaque fonds ou investissement comprenne des interventions ciblées à leur intention.
    Il est important de respecter notre engagement et d'encourager les autres à s'engager à tendre la main aux personnes handicapées, principalement les gouvernements des pays où nous travaillons. Si nous ne nous adressons pas aux gouvernements et si nous ne les invitons pas et ne les encourageons pas à signer l'appel à l'action du Sommet sur la transformation de l'éducation, nous ne ferons rien pour favoriser l'intégration des personnes handicapées.
    Il est très important pour nous de travailler aussi main dans la main avec les gouvernements, les organisations locales et d'autres organisations des Nations unies, et de veiller à ce qu'il y ait des efforts durables pour que l'intégration des personnes handicapées devienne et demeure une préoccupation centrale.
    J'espère avoir répondu à votre question.

  (1250)  

    J'ai une brève question complémentaire à poser à Robert Jenkins.
    Je crois à la progression graduelle rapide. Je crois en l'idée que nous pouvons faire de petits pas rapidement et susciter des mesures importantes.
    Selon vous, monsieur Jenkins, quelles petites mesures les gouvernements pourraient-ils prendre au cours de la prochaine semaine ou du prochain mois pour donner un certain élan à des mesures concrètes dans ce dossier?
    Je vous accorde une minute pour répondre.
    Trois choses, selon moi.
    Au moment où nous préparons 2024 dans le monde entier, dans tous les bureaux de l'UNICEF, nous discutons de ce qui peut se faire immédiatement dans tel ou tel pays. Il faut voir la contribution qui peut être la nôtre. Que pouvons-nous apporter? Je songe à la formation des enseignants, à la fourniture de matériel précis comme des manuels numériques, de format accessible, etc.
    Il faut se préoccuper de la façon de s'y prendre, monsieur Lake. Les enfants handicapés ont-ils part aux échanges? Participent-ils? Les organisations engagées dans ce dossier sont-elles présentes? Elles doivent l'être. Il y a une partie du processus dont il est possible de s'occuper immédiatement.
    Ensuite, il y a les résultats ultimes. Mesure‑t‑on les résultats pour les enfants handicapés? Comment se comparent-ils à ceux des autres enfants? Faisons-nous tout notre possible pour nous assurer que les enfants handicapés ont les mêmes chances que les autres d'exercer leur droit à l'éducation?
    Nous pouvons travailler sur les trois fronts immédiatement: facteurs nécessaires, processus et, au bout du compte, résultats.
    Merci, monsieur Jenkins.

[Français]

     J'invite maintenant M. Trudel à prendre la parole pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Le sujet est extrêmement vaste et intéressant.
     J'ai une question connexe à poser à Mme Richler.
    Dans ma circonscription, il y a une ressource qui s'appelle « L'appart à moi ». C'est une ressource pour adultes autistes ou vivant avec une déficience intellectuelle qui comporte neuf appartements pour adultes autonomes et un endroit pour cuisiner des repas collectifs et faire des activités.
    Les locataires de cette ressource travaillent dans un lieu qui s'appelle « Les cuisiniers différents ». La plupart d'entre eux préparent des repas pour les écoles défavorisées.
    Les adultes qui vivent dans cette ressource sont extraordinaires. Ils sont un peu plus choyés que l'ensemble des personnes autistes ou qui vivent en situation de handicap.
    Je les ai même invités au Parlement, et ils sont venus écouter la période des questions, entre autres.
    Ce n'est pas dans le domaine de l'éducation, mais cela reste quand même dans le domaine de l'inclusion.
    Évidemment, la liste d'attente pour accéder à ce genre de ressource pour adultes est longue comme le bras. Il en manque et c'est un défi important.
    Ma question porte plus globalement sur le financement de ce genre ressource. Comment peut-on, dans notre société, promouvoir l'inclusion? Que peut-on faire, comme pays, pour qu'il y ait le moins d'exclus possible, qu'on intègre ces gens et qu'ils se sentent partie prenante de la société?

[Traduction]

     Je suis Diane Richler.

[Français]

     Merci beaucoup.

[Traduction]

     Je suppose qu'il y a deux ou trois choses. Tout d'abord, au Canada, la nouvelle prestation d'invalidité va changer la donne pour les familles. C'est quelque chose de très important, et Rob Jenkins a parlé plus tôt du travail que fait l'UNICEF en matière de protection sociale. Tout comme les droits fondamentaux, les droits des personnes handicapées sont indivisibles. Il est vraiment essentiel de s'interroger sur les fonds injectés dans la protection sociale. À l'heure actuelle, la plupart des pays ne tiennent pas compte des coûts supplémentaires des handicaps. Qu'il s'agisse de questions soulevées par Mme Damoff concernant les enfants qui doivent prendre soin de leurs parents, qu'il s'agisse des prothèses qui ne sont pas couvertes ou du matériel spécial rendu nécessaire par les handicaps, il y a des coûts supplémentaires. Une partie du travail de l'UNICEF sera forcément utile à cet égard.
    Puisque j'ai la parole, j'en profite pour ajouter un élément de réponse à une question que vous avez posée tout à l'heure. Dans les pays francophones — c'est peut-être délicat à dire parce que je sais que ce sera su de tout le monde —, beaucoup de personnes-ressources francophones proviennent de pays qui ont une approche beaucoup plus rigide en matière d'éducation. Le Canada ne loge pas à la même enseigne. L'approche de l'inclusion au Québec, au Nouveau-Brunswick et ailleurs au Canada a beaucoup à offrir à l'échelle internationale.
    L'un des problèmes qu'Inclusion International a constatés, c'est que, lorsque les personnes-ressources francophones viennent de pays qui ont un programme très rigide, où les enfants sont encadrés très tôt et où les enfants handicapés sont séparés des autres, cela installe un certain modèle. C'est ainsi que les intervenants sont formés dans ces pays.
    Le Canada peut jouer un rôle pour faire évoluer les attitudes. Pour le moment, il n'en est pas là, si bien que d'autres prennent le haut du pavé, et le Canada n'influence pas les pays francophones.

  (1255)  

[Français]

    Merci, mesdames Richler et McPherson.
    Je vous remercie de vos témoignages et de votre participation à l'étude sur l'éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées.

[Traduction]

    Monsieur le président, c'était M. Trudel.
    Je suis désolé. Je suis honoré de vous inviter à prendre la parole. Trois minutes, s'il vous plaît, madame McPherson.
     J'ai une très brève question à vous poser au sujet d'une partie de votre témoignage, madame Richler. Vous avez parlé des objectifs de développement durable, les ODD. Nous savons qu'ils sont universels et que le Canada y a adhéré. Comme vous l'avez dit, le premier ministre s'intéresse de près à ces questions.
    Savez-vous si, dans l'un ou l'autre des deux examens nationaux volontaires que le Canada a entrepris, l'inclusion en matière d'éducation, ou même les personnes handicapées, ont été prises en compte?
    Dans le même ordre d'idées, il y a eu le Sommet sur la transformation de l'éducation l'an dernier. Le Canada n'a pas mis l'accent là‑dessus. On n'y a pas porté attention. On a accordé beaucoup d'attention au genre, mais malheureusement, même si la déclaration de Charlevoix utilise le mot « inclusif », ces situations particulières n'ont pas été prises en considération. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire.
    Malheureusement, même dans l'examen des ODD, ou le suivi des ODD effectué par l'UNESCO, il n'y a pas d'indicateurs communs utilisés pour évaluer l'ODD 4 qui met l'accent sur l'éducation. Même s'il y a des indicateurs globaux de cet ODD qui portent sur les personnes handicapées, lorsqu'il s'agit des indicateurs auxquels les pays prêtent attention — il y en a 15 —, ils ne concernent pas les personnes handicapées.
    Comme ils sont universels, nous n'atteignons pas non plus ces objectifs au Canada. C'est pourtant essentiel, à mon sens. Ce n'est pas seulement un problème mondial. C'est aussi censé...
    C'est une question intérieure.
    On pourrait aussi penser que l'universalité signifie que, même si ce n'était pas l'indicateur de l'objectif 4, il faudrait prévoir d'autres indicateurs pour les 16 autres objectifs également.
    On ne le fait pas.
     Merci.
    Ce pourrait être une bonne recommandation à formuler au terme de notre étude.
    Ce serait une excellente recommandation.
    Je voudrais connaître un peu mieux votre point de vue sur une question. Je vais peut-être commencer par Mme Rigg.
    Madame Rigg, nous avons dit qu'il fallait veiller à ce que notre aide publique au développement soit dépensée de façon efficace et soit suffisante, si je peux m'exprimer de la sorte. Pourriez-vous dire un mot de la nécessité de recueillir des données et d'assortir cette aide de conditions pour s'assurer qu'elle comporte un volet d'inclusion?
    J'aimerais beaucoup discuter davantage des conditions. Il serait formidable que le sous-comité examine ses recommandations. Par exemple, je regarde ce qui a fonctionné pour d'autres types d'inclusion qui sont vraiment essentiels. Nous avons encore du chemin à faire sur le plan de l'égalité entre les sexes, par exemple, mais nous avons constaté que les institutions bilatérales et multilatérales ont jugé essentiel de veiller à ce que l'éducation transformatrice à l'égard des genres et l'éducation qui englobe les personnes handicapées soient intégrées à ces structures.
    Maha Khochen est un excellent exemple d'une experte de ECW en matière d'éducation inclusive, mais nous devons aussi nous assurer qu'il y a des personnes munies de ces ressources dans chaque grappe d'éducation qui interviennent sur le front humanitaire et dans tout ce continuum dont vous et M. Jenkins avez parlé, depuis l'intervention humanitaire jusqu'au développement holistique, comme moyen de rejoindre vraiment les enfants.
    Oui, comme M. Shriver et d'autres l'ont dit, il faut améliorer les données tout en agissant et en pressant le pas. Il ne faut pas attendre. Il ne faut pas que le meilleur soit l'ennemi du bien. Comme Mme Richler vient de le dire, il est absolument essentiel que le processus actuel des ODD et toute initiative qui pourrait suivre — ce qui du reste fait l'objet de négociations entre les gouvernements des États membres — aient une très forte influence dans les États membres. Le gouvernement du Canada et ensuite celui de la Namibie dirigent l'élaboration d'un nouveau pacte. Il faut veiller à ce que l'éducation inclusive pour les personnes handicapées soit au premier plan et que les enfants et les adolescents handicapés ne fassent pas que participer à une consultation, mais soient aussi aux côtés des décideurs tout au long du processus.
    Merci.

  (1300)  

    Merci beaucoup.
    Merci, madame McPherson. Je suis désolé de ne pas vous avoir donné la parole.

[Français]

     Chers témoins, je vous remercie de vos témoignages et de votre participation à notre étude sur l'éducation internationale inclusive pour les personnes handicapées. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous rencontrer et de nous avoir fait part de votre expertise sur cet important sujet.
    Si vous avez des informations supplémentaires à transmettre au Sous-comité, je vous demande de les transmettre au greffier.

[Traduction]

    Au nom du Comité, je tiens à remercier tous les témoins d'avoir comparu, d'avoir pris le temps de venir nous donner des explications et de nous avoir fait part de leur point de vue sur cette importante question que nous sommes en train d'étudier.
    Plaît‑il au Comité de lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    Le président: La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU