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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 28 février 1995

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1995-1996

LA CHAMBRE DES COMMUNES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1995-1996

RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS

    Présentation et adoption de la motion 10111

PÉTITIONS

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 10112

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LA FAMILLE

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Mills (Red Deer) 10112

LA FISCALITÉ

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LA FISCALITÉ

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES PRESTATIONS DE CONJOINT

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA FISCALITÉ

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion 10115
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 10124
    Mme Stewart (Brant) 10129
    M. Speaker (Lethbridge) 10137
    M. Speaker (Lethbridge) 10138
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 10141

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS

LA FISCALITÉ

LE BUDGET

L'AGRICULTURE

LE FORUM NATIONAL SUR LA SANTÉ

LE BUDGET

LE DÉBAT RÉFÉRENDAIRE

LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

    Mme Dalphond-Guiral 10143

LES AFFAIRES INDIENNES

LE BUDGET

L'AGRICULTURE

L'EXPOSÉ BUDGÉTAIRE

L'EXPOSÉ BUDGÉTAIRE

L'AGRICULTURE

LA CIRCONSCRIPTION DE BROME-MISSISQUOI

QUESTIONS ORALES

LE BUDGET

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10145
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10145
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10146
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10146
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10146
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10146
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10147
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10147
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10147
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10147
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10148
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10148
    M. Gauthier (Roberval) 10148
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10148
    M. Gauthier (Roberval) 10148
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10148
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10149
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10149
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10149
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10149
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 10150
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10150
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10150
    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 10151
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10151
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10152
    M. Chrétien (Frontenac) 10152
    M. Martin (LaSalle-Émard) 10152

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion relative au budget,de l'amendement et du sous-amendement 10153
    M. Mills (Red Deer) 10166

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

    Projet de loi C-37. Reprise de l'étude entroisième lecture 10174
    Adoption de la motion par 146 voix contre 79 10174
    Troisième lecture et adoption du projet de loi 10175

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion, de l'amendementet du sous-amendement 10175
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 10176

10107


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 28 février 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1995-1996

Le président du Conseil du Trésor présente un message dont le Président donne lecture à la Chambre et par lequel Son Excellence le Gouverneur général transmet le budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 1996.

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais également déposer, à l'appui des prévisions budgétaires, la partie I, le Plan de dépenses du gouvernement.

En outre, je remets au greffier de la Chambre, au nom de mes collègues, la partie III du Budget des dépenses principal, comprenant 78 plans de dépenses ministériels. Nous avons remis ces documents aux membres des comités permanents pour les aider dans leur examen des autorisations de dépenses demandées dans la partie II du budget des dépenses.

* * *

LA CHAMBRE DES COMMUNES

Le Président: J'ai l'honneur de déposer le plan de dépenses de la Chambre des communes dans le cadre des prévisions budgétaires de 1995-1996.

* * *

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à des pétitions.

[Traduction]

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1995-1996

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je présente aujourd'hui le Budget des dépenses principal de 1995-1996 du gouvernement du Canada.

[Français]

Il s'agit du deuxième Budget des dépenses principal de cette 35e législature. Il contient les plans de dépenses du gouvernement pour le prochain exercice financier.

[Traduction]

Comme le ministre des Finances le dit dans son budget, ce document est conforme à l'engagement pris par le gouvernement de réduire les dépenses, de rationaliser ses activités et de modifier fondamentalement les programmes et les services de l'État ainsi que leur mode de prestation.

(1010)

Le Budget des dépenses principal expose en détail les dépenses budgétaires prévues pour le prochain exercice, qui s'élèvent à 164,2 milliards de dollars. Ce montant comprend 116,2 milliards de dollars découlant de mesures législatives actuelles et 48 milliards de dollars de dépenses pour lesquelles nous demandons l'autorisation du Parlement.

Le Budget des dépenses principal constitue la première étape de l'application du plan de dépenses présenté dans le budget.

Hier, nous avons entendu le ministre des Finances annoncer un plan de dépenses s'élevant à 163,5 milliards de dollars pour 1995-1996. Comme je l'ai dit, le Budget des dépenses principal déposé aujourd'hui s'élève au total à 164,2 milliards de dollars pour la même période.

La différence entre les deux chiffres tient au fait que le Budget des dépenses principal ne comprend pas les répercussions des lois proposées pour mettre en oeuvre certaines réductions de dépenses annoncées dans le budget. Il ne tient pas compte non plus d'ajustements techniques présentés dans la partie I du Budget des dépenses.

Les dépenses de programmes prévues dans le budget, qui ne comprennent pas les frais de service de la dette publique, seront ramenées à 114 milliards de dollars en 1995-1996, puis à 107,9 milliards de dollars en 1996-1997. La diminution est donc de 10,8 p. 100. Cela est le résultat de l'examen des programmes et des mesures budgétaires antérieures.


10108

[Français]

Le budget prévoit des réductions des dépenses. Il démontre notre volonté de continuer de diminuer le déficit et d'atteindre nos objectifs financiers.

[Traduction]

Le budget insiste sur la nécessité de réduire les dépenses de l'État et d'améliorer le climat économique pour relancer la création d'emplois. L'examen des programmes est au coeur du budget et constitue un élément clé de notre programme de création d'emplois et de croissance économique. Le gouvernement a effectué cet examen pour relever les programmes et les services qui ne sont plus utiles ou qui pourraient être administrés avec plus d'efficience ou d'efficacité par d'autres instances.

Nous avons constaté les résultats dans le budget, qui limite le rôle du gouvernement fédéral dans certains secteurs et détermine les programmes et les services dont la prestation pourrait être avantageusement confiée à d'autres niveaux de gouvernement ou au secteur privé.

D'ici 1997-1998, il importe de le souligner, les dépenses ministérielles assujetties à l'examen des programmes diminueront de quelque 19 p. 100 par rapport à 1994-1995, ce qui est crucial si nous voulons atteindre notre objectif, ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB en trois ans, et, bien entendu, poursuivre ces efforts de réduction par la suite.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples de la façon dont le gouvernement met en application l'examen des programmes avec des ressources qui se font de plus en plus rares. Premièrement, le gouvernement concentrera ses efforts sur ses responsabilités essentielles. Ainsi, Transports Canada investira ses efforts dans la formulation de politiques et de mesures législatives ainsi que dans l'élaboration et la mise en application de normes de sûreté et de sécurité. En conséquence, un certain nombre d'activités du ministère, dont ses services de navigation aérienne, seront commercialisées. Les subventions au transport seront aussi réduites sinon supprimées, et les opérations restantes seront rendues plus efficientes.

Deuxièmement, le gouvernement réduit les chevauchements entre les niveaux fédéral et provincial. Par exemple, Pêches et Océans Canada négociera avec les provinces le transfert de ses programmes relatifs aux eaux douces pour concentrer ses efforts sur la conservation et l'exploitation durable des pêcheries et autres ressources des océans.

Troisièmement, le gouvernement utilisera les technologies nouvelles pour améliorer son efficacité. Par exemple, Environnement Canada automatisera ses services d'environnement atmosphérique. Le ministère tentera également de trouver des façons de fournir ses services météorologiques avec plus d'efficacité.

Quatrièmement, nous allons promouvoir l'autonomie en mettant un terme aux subventions directes aux entreprises. Les organismes régionaux consentiront désormais des prêts et s'intéresseront davantage aux besoins des PME.

Cinquièmement, le gouvernement recouvrera ses coûts en faisant payer certains de ses services à leurs bénéficiaires directs ou en augmentant les frais de service, mesure équitable pour les contribuables en général. Il en sera ainsi pour les frais d'immigration, les frais d'inspection agricole, les frais de mise à l'essai des médicaments et les frais d'homologation des médicaments.

Sixièmement, les programmes de même nature seront fusionnés pour faire des gains d'efficacité. Par exemple, Pêches et Océans et Transports Canada fusionneront leurs flottes de surveillance de la Garde côtière et des pêches.

Comme vous pouvez le constater, nous n'avons pas eu peur de prendre des décisions difficiles. Nous avons ainsi tenté d'améliorer l'efficacité des fonctions principales du gouvernement et nous y parviendrons.

(1015)

Évidemment, la transition d'un système où on essaie de faire tout pour tous à un système où on offre à la population un nombre plus limité de programmes et de services de grande qualité entraînera une réduction de l'effectif de la fonction publique fédérale. Par suite de sa restructuration et du transfert de certaines fonctions à d'autres secteurs, le gouvernement réduira son effectif d'au plus 45 000 postes au cours des trois prochaines années. Il s'agit de la plus importante réduction d'effectif jamais effectuée depuis la Seconde Guerre mondiale.

[Français]

J'ai annoncé une série de mesures qui aideront les employés à poursuivre leur cheminement à l'extérieur de la fonction publique. Ce programme, qui se compare à ceux du secteur privé, sera juste, tant pour les employés que pour les contribuables.

[Traduction]

Il nous permettra d'apporter les changements nécessaires en matière de programmes et d'atteindre les objectifs financiers fixés dans le budget. Quant aux programmes et aux services qui subsisteront, le gouvernement en améliorera la qualité afin d'atteindre un juste équilibre entre les intérêts des contribuables et ceux des prestataires de services. Il adoptera des modes économiques de prestation de programmes et de services de qualité et en améliorera la qualité et l'efficacité dans toute la mesure du possible.

Dans tout le gouvernement, les ministères et les organismes relèvent le défi en innovant. Les résultats de l'examen des programmes et des initiatives que je viens d'exposer démontrent hors de tout doute que le gouvernement a la ferme intention d'être plus efficace, de concentrer ses énergies et ses ressources là où elles sont le plus nécessaires, et de ne pas vivre au-dessus de ses moyens, c'est-à-dire au-dessus des moyens des Canadiens. Nous avons une fonction publique très dévouée, d'un grand professionnalisme, et je sais qu'elle peut assurer ces services.

Le gouvernement est déterminé à faire preuve de responsabilité financière. Nous continuerons de gérer les nouvelles priorités en réaffectant les ressources nécessaires. La refonte du système de gestion des dépenses que j'ai récemment annoncée aidera les ministères à adapter leurs programmes à la réduction de leurs ressources. Ce système permettra également aux comités parlementaires d'avoir accès aux renseignements dont ils ont besoin pour exercer leur mandat d'examiner les plans et les priorités de dépenses des ministères et des organismes publics.


10109

[Français]

Notre but premier est de fournir des programmes et des services de grande qualité dans les limites de nos moyens financiers. Ce Budget des dépenses nous permet de penser que nous sommes sur la bonne voie.

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, le ministre vient de déposer devant cette Chambre le Budget des dépenses principal pour l'année 1995-1996. Ce Budget s'élève à 164,2 milliards de dollars. Le ministre nous précise que les dépenses de programmes prévues dans le Budget passeront de 120,9 milliards de dollars en 1994-1995 à 114 milliards en 1995-1996, puis à 107,9 milliards en 1996-1997, c'est-à-dire une diminution de 10,8 p. 100.

À quoi servira cette baisse de 13 milliards en deux ans dans les dépenses de programmes? Cette baisse servira surtout à financer l'augmentation des frais de la dette publique qui, durant ces mêmes deux ans, augmentera de près de 9 milliards de dollars, et ce, dans un contexte de reprise économique où l'inflation est quasi nulle et les taux d'intérêt demeurent à un niveau raisonnable. Il s'agit en fait d'une augmentation de 20,7 p. 100 du service de la dette au cours des deux prochaines années, soit près du double de la diminution des dépenses de programmes prévue par le ministre.

Près des trois quarts de tous ces efforts, de toutes ces coupures dans les programmes ne serviront, en fait, qu'à supporter le service de la dette qui dépassera les 50 milliards de dollars en 1996-1997.

En 1994-1995, les frais de la dette représentent 33,6 p. 100 des recettes budgétaires. En 1996-1997, ces frais de la dette représenteront 36,6 p. 100 des revenus budgétaires. Il ne faut pas se leurrer, malgré l'exercice de l'examen des programmes et des mesures budgétaires antérieures, l'endettement se poursuit de plus belle.

L'examen des programmes ne fait que transférer des milliards de dollars des mains des citoyens canadiens aux mains des investisseurs qui financent une dette toujours croissante.

(1020)

Le ministre nous disait encore que, d'ici 1997-1998, les dépenses assujetties à l'examen des programmes diminueront de 19 p. 100 par rapport à 1994-1995. Mais ce que le gouvernement nous passe en catimini, c'est que la majeure partie de cette diminution ne servira qu'à financer les frais de la dette publique, comme je le disais antérieurement.

On nous répète que le gouvernement réduit les chevauchements entre les paliers fédéral et provincial. En réalité, on ne transfère que la dette et les factures sans transférer les pouvoirs et les points d'impôt correspondants.

Par exemple, le ministère des Pêches et des Océans se départira des programmes relatifs aux eaux douces. Ceci se fait déjà, de toute façon, depuis longtemps dans l'Est. Pourquoi n'avoir pas plutôt transféré la gestion complète des pêches, tel que demandé par les provinces concernées?

Le gouvernement ne se retire pas des domaines relevant des provinces avec pleine compensation fiscale. Il y a toujours deux ministères de la Santé, deux ministères du Développement des ressources humaines s'occupant des programmes sociaux dans chacune des provinces.

Si le gouvernement s'était retiré des champs de compétence provinciale, il aurait pu réduire de plusieurs milliards supplémentaires ses dépenses de fonctionnement et, du même coup, éliminer les chevauchements coûteux de l'appareil fédéral.

Le gouvernement veut promouvoir l'autonomie en mettant un terme aux subventions directes aux entreprises. Ces subventions aux entreprises, de 3,8 milliards de dollars actuellement, seront encore de 1,5 milliard dans trois ans. Pourquoi ne pas y mettre fin complètement dès maintenant, alors que les regroupements d'entreprises et de gens d'affaires, dont le Conseil du patronat du Québec, demandent au gouvernement de les abolir complètement?

Le gouvernement entend également tarifer plusieurs services gouvernementaux. Cette mesure est louable en fait, mais est-ce en exigeant des droits de 975 $ à chaque adulte qui fait une demande d'immigration au Canada que l'on réduira réellement le déficit? Exiger cette somme de gens qui viennent ici pour améliorer leur situation économique relève, à notre avis, d'un mercantilisme de mauvais aloi.

Le budget prévoit réduire les subventions laitières de 30 p. 100 au cours des deux prochaines années. Le Québec, qui reçoit 50 p. 100 de ces subventions directes, sera touché de plein fouet par cette mesure. On coupe les subventions agricoles avec compensation dans l'Ouest, mais sans compensation au Québec.

On nous dit également que l'on sabrera 45 000 postes dans la fonction publique au cours des trois prochaines années, et tout ça suffit à peine à ralentir le rythme de l'endettement. Le gouvernement se dit déterminé à faire preuve de responsabilité financière, mais l'endettement se poursuit comme sous Wilson et Mazankowski.

Pourquoi n'a-t-on pas ciblé les coupures de postes dans les ministères et organismes où il y a des chevauchements avec les provinces? Au contraire, une partie importante des coupures de personnel sera réalisée dans des ministères comme la Défense nationale, les Transports où il n'y a pas de chevauchements avec les provinces.

Si le gouvernement avait voulu parler d'un fédéralisme flexible, il aurait dû amorcer, dès le dépôt du budget, son intention de se retirer des champs de compétence provinciale; en maintenant sa présence dans ces champs, il se laisse le droit d'imposer ses normes et sa réglementation.

Il aurait fallu couper beaucoup plus maintenant, mais de façon plus judicieuse, pour pouvoir couper moins dans l'avenir et éliminer complètement le déficit en 1997-1998, et faire en sorte que les frais de la dette publique ne représentent pas près de 50 p. 100 des dépenses de programmes, comme ce sera le cas dès 1996-1997. Les coupures prévues pour l'an prochain dans les transferts aux provinces et les coupures nécessaires dans les programmes dans deux ans feront mal, mais, malheureusement, elles ne serviront qu'à maintenir les frais de la dette publique sous les 50 ou 55 milliards de dollars à ce moment-là. On reporte toujours les décisions difficiles à plus tard.

Le budget des dépenses principal du Bureau du vérificateur général est en baisse de 5,2 millions de dollars, soit un peu plus de 10 p. 100. Le gros de cette diminution, soit 4,4 millions de dollars est attribuable à l'examen des programmes gouverne-


10110

mentaux, alors que l'examen de ces programmes est l'une des pierres angulaires de la démarche gouvernementale. N'est-ce pas paradoxal?

On baisse le budget du vérificateur général, alors que sa mission prend de l'ampleur et que le gouvernement nous dit que le vérificateur général publiera jusqu'à cinq rapports annuellement. Il faudra de toute façon amender la loi actuelle, qui prévoit que le vérificateur général peut publier un rapport annuel et trois rapports supplémentaires. Donnons au vérificateur général les moyens de sa mission au lieu de diminuer son budget, alors que sa mission s'élargit.

(1025)

[Traduction]

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai pris bonne note que le président du Conseil du Trésor a formulé, dans sa déclaration, ces deux observations: «Comme vous pouvez le constater, nous n'avons pas eu peur de prendre des décisions difficiles.» et «Le gouvernement est déterminé à faire preuve de responsabilité financière».

Le gouvernement pense que la solution est d'augmenter les impôts, encore et toujours, et il dit ensuite: «Nous allons effectuer des compressions partout.» Or, à la lecture de ce budget, on constate que les dépenses gouvernementales vont encore augmenter pour une deuxième année consécutive. Bien sûr, le précédent gouvernement en faisait autant tous les ans.

Chaque année, les dépenses augmentent, alors que le gouvernement parle de les réduire. Il réduit les programmes destinés à la population canadienne, parce que le montant de l'intérêt qu'il nous faut payer à cause de la dette échappe à tout contrôle. Voilà pourquoi, compte tenu de l'intérêt de la dette, le total des dépenses ne cesse d'augmenter.

Prenons le taureau par les cornes! Équilibrons le budget et freinons la croissance de l'intérêt au cours des trois premières années du gouvernement libéral. Pendant que le gouvernement fera passer le montant des dépenses liées aux services qui sont offerts aux Canadiens de 120 milliards de dollars à 108 milliards de dollars, l'intérêt de la dette, de 38 milliards de dollars qu'il était, va s'élever à 51 milliards de dollars, ce qui est loin de compenser toutes les compressions effectuées au détriment des Canadiens. Les choses ne vont pas changer. Les dépenses vont augmenter, tandis que les services offerts aux Canadiens vont être réduits.

M. Silye: Au cours de sa dernière année, le gouvernement dépensera davantage qu'au cours de sa première année, soit 158,7 contre 158.

M. Williams: Monsieur le Président, nous voyons également le grand engagement que le gouvernement a pris envers nos programmes sociaux. Il s'apprête à réduire les dépenses sociales de 7,3 p. 100. Au chapitre des programmes culturels, le gouvernement va réduire ses dépenses de 6,9 p. 100.

Établissons clairement nos priorités. Bien sûr, nous devons protéger les programmes sociaux, l'essentiel des programmes sociaux et des programmes culturels devrait rester intact, tant que notre déficit ne sera pas maîtrisé. Bien sûr, c'est ce que ferait un gestionnaire prudent dans un gouvernement qui s'attelle à la difficile tâche d'équilibrer le budget.

J'ai observé que le budget du vérificateur général subira une baisse de 10 p. 100. Pourtant, il gère son ministère avec responsabilité. Il dit qu'il peut joindre les deux bouts avec 10 p. 100 de moins. C'est lui qui révèle le gaspillage et la mauvaise gestion qui règnent au sein du gouvernement. Bien sûr, s'il peut s'accommoder d'une réduction de 10 p. 100, il faudrait retrancher 10 p. 100 du budget de tous les autres ministères.

Voilà pourquoi le Parti réformiste dit depuis fort longtemps qu'il y a des compressions à effectuer, du gaspillage, de la mauvaise gestion dans les ministères, mais qu'il ne faut pas réduire les programmes sociaux.

Or, nous constatons des augmentations. On est loin des compressions tous azimuts. Ainsi, l'Entreprise du Cap-Breton, dans l'est du Canada, bénéficiera d'une augmentation de 69 p. 100, soit de 10 à 17 millions de dollars. Il semble difficile d'expliquer pourquoi un secteur en particulier ou un ministère en particulier peut bénéficier d'une augmentation de 69 p. 100, alors que tous les autres doivent se contenter d'un peu moins.

Le ministre nous dit qu'il va céder la gestion des poissons d'eau douce aux provinces. Nous pensions: «C'est formidable! Nous allons enfin assister au dégraissage de ce ministère.» Eh bien, les dépenses du ministère des Pêches et des Océans vont passer de 775 à 896 millions de dollars, soit une augmentation de 121 millions de dollars, à mesure que le gouvernement se décharge de ses responsabilités.

M. Hermanson: Il n'y a plus de poisson.

M. Williams: Et il n'y a plus de poisson. Il y a toutefois 123 cadres dans ce ministère. La proposition parle de transfert et de réduction des responsabilités, mais aucunement de diminution du nombre de cadres. Il faudrait mettre de l'ordre dans tout cela. Nous devons couper d'abord aux échelons supérieurs de la pyramide avant de passer aux échelons inférieurs.

Nous avons parlé de l'autre endroit qui coûte très cher au pays. Je constate que, selon le Budget des dépenses principal, les sommes accordées au Sénat augmenteront cette année. L'augmentation est minime, mais on propose tout de même de dépenser davantage à l'autre endroit durant l'année qui vient. Nous l'avons dit, il faut commencer par le haut, par les pensions des députés, la Chambre des communes, le Sénat, etc.

(1030)

Les chômeurs sont nombreux au pays. Nous devons aider les gens à créer des emplois. Nous constatons que le gouvernement consacrera 427 millions de dollars à l'identité canadienne, alors qu'il vaudrait mieux consacrer cette somme à la création d'emplois dans le secteur privé et à la réduction des impôts, au lieu de dépenser des montants semblables pour protéger notre identité canadienne qui se perd, dans bien des cas, dans la foulée des programmes de multiculturalisme auxquels nous consacrons des centaines de millions de dollars.


10111

L'automne dernier, le président du Conseil du Trésor a déclaré que nous devions attendre l'annonce du budget avant qu'il nous fasse part des dépenses consacrées aux groupes d'intérêts spéciaux. Toutefois, je n'ai rien vu à ce sujet dans le budget présenté hier. Voilà un autre poste où le gouvernement gaspille un demi-milliard de dollars. Nous aurions pu couper là, au lieu de viser la base même des programmes sociaux.

Notre dossier des mégaprojets n'est pas très reluisant. Le projet de l'usine de valorisation du pétrole lourd de Lloydminster a coûté plus de 500 millions de dollars et c'était un projet très prometteur. Nous avons dû l'abandonner, il y a deux mois environ, en vendant notre participation de 500 millions de dollars pour la somme de 42 millions de dollars. Ça n'a certes pas été une bonne affaire. Nous avons aussi abandonné notre garantie de prêt pour le projet de l'usine de valorisation de Regina, ce qui nous a coûté 125 millions de dollars. Il semble maintenant que le plus grand projet de tous, Hibernia, nous coûtera 5,8 milliards de dollars. Le gouvernement devra assumer 62 p. 100 des coûts, soit 3,6 milliards de dollars, et nous conserverons 8,5 p. 100 de l'avoir.

La gestion des finances du pays, telle que pratiquée par le gouvernement, laisse beaucoup à désirer. En examinant le Budget des dépenses principal, nous trouverons de nombreux autres points et nous révélerons aux Canadiens tous les cas de gaspillage, de mauvaise gestion, de protection des postes de hauts niveaux et d'élimination des emplois à la base. Nous devons tenir les Canadiens informés de ce que fait le gouvernement. Au cours des prochains mois, nous soulèverons ces questions devant les comités.

RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Madame la Présidente, conformément aux paragraphes 81(4) et 81(6) du Règlement, je propose:

Que le Budget des dépenses principal pour l'exercice se terminant le 31 mars 1996, déposé le 28 février 1995, soit renvoyé aux divers comités permanents suivants de la Chambre des communes:
Étant donné que la liste est assez longue, je demande qu'elle soit imprimée dans le hansard sans être lue.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle d'accord?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: La liste suit:]

Au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Nord canadien
Affaires indiennes et du Nord canadien, crédits 1, 5, 10, 15, L20, L25, L30, 35, 40, 45, 50 et 55

Au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
Agriculture et Agroalimentaire, crédits 1, 5, 10, 15 et 20

Au Comité permanent du patrimoine canadien
Patrimoine canadien, crédits 1, 5, 10, 15, L20, 25, 30, 35, 40, 45, 50, 55, 60, 65, 70, 75, 80, 85, 90, 95, 100, 105, 110, 115, 120, 125, 130, 135, 145 et 150

Au Comité permanent des opérations gouvernementales
Conseil du Trésor, crédits 1, 5, 10 et 15
Conseil privé, crédits 1, 5, 10 et 35
Gouverneur général, crédit 1
Parlement, crédit 1
Patrimoine canadien, crédit 140
Travaux publics et Services gouvernementaux, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35 et 40

Au Comité permanent des ressources naturelles
Ressources naturelles, crédits 1, 5, 10, L15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50

Au Comité permanent de l'environnement et du développement durable
Environnement, crédits 1, 5 et 10
Conseil privé, crédit 30

Au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
Affaires étrangères, crédits 1, 5, 10, 15, 20, L25, L30, 35, 40 et 45
Travaux publics et Services gouvernementaux, crédit 45

Au Comité permanent des finances
Finances, crédits 1, 5, L10, L15, L20, 25, L30, 40 et 55
Revenu national, crédits 1, 5 et 10

Au Comité permanent des pêches et des océans
Pêches et Océans, crédits 1, 5 et 10

Au Comité permanent de la santé
Santé, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25 et 30

Au Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées
Justice, crédit 15

Au Comité permanent de l'industrie
Agence de promotion économique du Canada atlantique, crédits 1, 5 et 10
Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, crédits 1 et 5
Finances, crédits 45 et 50
Industrie, crédits 1, 5, 10, L15, L20, 25, 30, 35, 40, 45, 50, 55, 60, 65, 70, 75, 80, 85, 90, 95, 100 et 105

Au Comité permanent de la justice et des questions juridiques
Conseil privé, crédit 40
Justice, crédits 1, 5, 10, 20, 25, 30, 35, 40 et 45
Solliciteur général, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50

Au Comité permanent du développement des ressources humaines
Développement des ressources humaines, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50

Au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
Conseil privé, crédit 20
Parlement, crédit 5

Au Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants
Anciens combattants, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Défense nationale, crédits 1, 5, 10, 15 et 20

Au Comité permanent des comptes publics
Finances, crédit 35

Au Comité permanent des transports
Conseil privé, crédit 15
Transports, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50

Au Comité permanent des langues officielles
Conseil privé, crédit 25

Au Comité mixte permanent de la citoyenneté et de l'immigration
Citoyenneté et Immigration, crédits 1, 5, 10 et 15

Au Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement
Parlement, crédit 10


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(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens à nouveau aujourd'hui pour présenter la pétition no 17 au nom de certains de mes électeurs qui veulent empêcher la libération anticipée de Robert Paul Thompson. L'audience de libération conditionnelle de M. Thompson doit avoir lieu le 11 avril 1995.

Les pétitionnaires que je représente veulent assurer la sécurité de nos citoyens dans nos rues. Ils s'opposent à la pratique courante de libération anticipée des criminels violents avant que ceux-ci n'aient purgé la totalité de leur peine.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement d'assurer une meilleure sécurité aux citoyens respectueux des lois et aux familles des victimes de criminels condamnés pour meurtre.

(1035)

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je souhaite présenter, au nom d'électeurs de Lambton-Middlesex, une pétition dûment certifiée par le greffier des pétitions.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier le Code criminel, comme on le propose dans le projet de loi C-41, ni le Code des droits de la personne ni la Loi canadienne sur les droits de la personne ni, enfin, la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle».

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, au nom d'électeurs de Végréville, j'ai l'honneur de présenter, aujourd'hui, trois pétitions.

Dans la première, les pétitionnaires demandent que le Parlement appuie les lois qui punissent sévèrement tous les criminels violents utilisant des armes pour commettre un crime, ainsi que de nouvelles dispositions du Code criminel concernant le contrôle des armes à feu qui reconnaissent et protègent le droit des citoyens respectueux des lois de posséder et d'utiliser des armes à feu à des fins récréatives. Les pétitionnaires exhortent le Parlement à souscrire à une mesure législative abrogeant ou modifiant la législation actuelle sur le contrôle des armes à feu, législation qui n'améliore pas la sécurité publique et qui ne s'est pas révélée efficace, mais plutôt trop complexe pour être applicable.

Je présente cette pétition au nom de mon électeur, Stan Chevraux, ainsi que des autres signataires.

LA FAMILLE

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, dans la seconde pétition, les pétitionnaires demandent au Parlement de s'opposer à toute mesure législative qui redéfinirait directement ou indirectement la notion de famille et prévoirait notamment le versement de prestations familiales, ainsi que l'octroi d'avantages reliés au mariage, aux gens qui ne peuvent être considérés comme des membres de la famille, la famille étant définie comme des personnes apparentées par les liens du sang, le mariage ou l'adoption et le mariage étant l'union légale d'un homme et d'une femme.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, dans la troisième pétition, les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte canadienne des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et, notamment, de ne pas modifier la Loi canadienne des droits de la personne en insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je présente aujourd'hui une pétition signée par 30 personnes dont 21 de mes électeurs.

Même si les pétitionnaires et moi-même ne partageons pas la même opinion, je soumets aujourd'hui, en leur nom, une pétition qui exhorte le Parlement à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne pour interdire toute discrimination basée sur l'orientation sexuelle.

Je crois à l'égalité de tous les Canadiens et je pense qu'on ne peut accorder aucun statut spécial à un groupe donné.

LA FISCALITÉ

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter, aujourd'hui, à la Chambre, une pétition portant environ 3 900 signatures.

Cette pétition vient presque trop tard, car les pétitionnaires demandent au Parlement de réduire les dépenses gouvernementales au lieu d'accroitre les impôts et de mettre en oeuvre une loi sur la protection du contribuable pour limiter les dépenses fédérales.

Chose intéressante, dans la ville de Golden où on ne retrouve que 2 371 foyers, quatre femmes ont réussi à recueillir 2 500 de ces 3 900 signatures. Il faut reconnaître que le gouvernement était soumis à d'énormes pressions. Je dis que cette pétition vient presque trop tard parce que, malheureusement, même si les augmentations d'impôt sont limitées, elles sont quand même là dans le budget.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règle-


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ment, je suis heureux de présenter deux pétitions aujourd'hui. La première que Mme Barbara Gobbi, de ma circonscription, Prince-George-Bulkley Valley, a fait circuler, est signée par un certain nombre de personnes.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et de s'abstenir d'apporter toute modification législative qui sanctionnerait ou autoriserait l'aide ou l'encouragement au suicide, ou encore l'euthanasie passive ou active.

Je suis heureux de préciser que j'appuie cette pétition.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, la seconde pétition a aussi été recueillie par Mme Barbara Gobbi, de Prince George, en Colombie-Britannique. Elle est signée par un certain nombre de personnes.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'édicter une loi protégeant les enfants à naître. Ils prient humblement le Parlement d'agir en ce sens.

Là encore, j'appuie cette pétition.

(1040)

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter deux pétitions qui portent sur le contrôle des armes à feu.

Dans la première, les pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer des lois qui punissent sévèrement tous les criminels violents faisant usage d'armes à feu pour commettre un crime. Ils lui demandent également d'appuyer de nouvelles lois qui reconnaissent et protègent les droits des honnêtes citoyens. Enfin, ils lui demandent de souscrire à des lois abrogeant ou modifiant les mesures actuelles de contrôle des armes à feu qui n'ont pas amélioré la sécurité publique ou qui se sont révélées inefficaces.

Dans la deuxième pétition, qui porte sur le même sujet général, les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas adopter d'autres lois, règlements ou décrets portant sur le contrôle des armes à feu.

LA FISCALITÉ

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui quatre pétitions au nom des habitants de la circonscription de Calgary-Nord.

La première pétition demande au gouvernement de ne pas augmenter les impôts. Les pétitionnaires, qui estiment être déjà écrasés sous les impôts, demandent que leur fardeau fiscal ne soit pas alourdi.

LE SUICIDE ASSISTÉ

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par des habitants de Calgary-Nord qui demandent au gouvernement de ne pas modifier le Code criminel afin d'autoriser le suicide assisté.

LES PRESTATIONS DE CONJOINT

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition est signée par des citoyens qui s'opposent à ce que les prestations de conjoint soient versées aux couples de même sexe.

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, dans la dernière pétition, 105 habitants de Calgary-Nord protestent contre l'insertion de l'orientation sexuelle parmi les motifs de distinction illicite prévus dans la charte des droits.

Je suis heureuse de déclarer que je défendrai le point de vue de mes électeurs sur ces questions, à la Chambre, au cours des prochains mois.

LA FISCALITÉ

Mme Roseanne Skoke (Central Nova, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter. Conformément à l'article 36 du Règlement, au nom de 72 électeurs de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, je désire déposer une pétition concernant la TPS et l'impôt sur le revenu.

LE SUICIDE ASSISTÉ

Mme Roseanne Skoke (Central Nova, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par 26 électeurs du comté de Digby, en Nouvelle-Écosse.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et de n'apporter à la loi aucune modification qui aurait pour effet d'approuver ou de permettre l'aide ou l'encouragement au suicide ou toute activité visant à mettre fin à la vie humaine.

Je souscris à cette pétition.

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Roseanne Skoke (Central Nova, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition renferme 107 signatures. Vingt-cinq signataires viennent d'Edmonton, en Alberta, et les 82 autres, de la Nouvelle-Écosse, y compris du comté de Digby.

Les pétitionnaires prient le Parlement de ne modifier ni la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et, notamment, de ne pas modifier la Loi sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

Je suis d'accord avec ces pétitionnaires.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis très heureux de présenter aujourd'hui une pétition signée par 1 025 personnes de Minden, Haliburton, Eagle Lake, Wilberforce et Bobcaygeon, dans la circonscription de Victoria-Haliburton.


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Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre des communes sur le contrôle des armes à feu et demandent au Parlement de ne donner force de loi à aucun des plans d'action du gouvernement qui traitent de l'enregistrement et de l'interdiction des armes à feu, mais de trouver de meilleurs moyens de réduire le nombre de crimes avec violence qui sont commis au Canada.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement au sujet de la question no 93 que j'ai soumise à cette Chambre le 19 octobre dernier. Il y avait deux éléments à cette question. Non seulement y a-t-il eu un retard de trois mois dans l'obtention de la réponse, mais quand je l'ai finalement obtenue, vendredi dernier, on ne répondait qu'à la moitié de la question. Il y a une moitié de la question à laquelle je n'ai toujours pas de réponse.

Ce que j'ai reçu, c'est un petit paragraphe de deux lignes qui me conseillait d'aller le chercher moi-même. «Look it up yourself», m'a-t-on dit dans la réponse. J'ai été voir, effectivement, et c'est un genre de bouillie qu'on peut trouver à la Bibliothèque, et ce n'est même pas à jour. Ma question était relative aux propriétés du gouvernement fédéral au Québec, en 1994, et les informations que j'ai dû aller chercher remontent à plusieurs années.

(1045)

Je me demande comment on peut tolérer ce genre de mépris flagrant des règlements de cette Chambre. Comment peut-on permettre des délais aussi longs? Comment peut-on donner des réponses incomplètes et abuser des privilèges des députés? À quoi est-ce dû? Est-ce que c'est le résultat des coupures au Budget ou est-ce qu'on veut encore une fois nous empêcher d'avoir accès à l'information? Est-ce que c'est le culte du silence?

Je veux avoir de l'information et je ne parviens pas à l'obtenir.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député de Québec-Est a soulevé souvent, et même trop souvent je dois dire, cette question.

Il a obtenu une bonne réponse. Vendredi, j'ai déposé en Chambre une réponse de 1 450 pages sur cette question. Évidemment, il n'a pas lu tout cela.

Quant à la deuxième partie de sa question, la réponse se trouvait dans les 1 450 pages. La réponse est la suivante: «Le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux n'a identifié aucune circonscription spécifique. Cependant, nous avions une copie de l'annuaire des biens immobiliers de 1992, dans lequel se trouve une liste des biens immobiliers fédéraux dans la province de Québec et dans le reste du Canada, qui peut être obtenue à la Bibliothèque du Parlement ou encore par l'intermédiaire d'un député.»

Tous ces renseignements sont à la disposition de tout le monde. Ils sont disponibles à la Bibliothèque. Il n'est pas nécessaire de préparer une réponse pour la déposer ici en Chambre quand il y a une copie de la même chose à la Bibliothèque, au bout du corridor.

L'honorable député peut y aller, il n'est pas nécessaire de déposer un tel document ici en Chambre, avec tout le coût que cela représente au niveau de la préparation des copies.

M. Loubier: Oh, oh!

M. Milliken: À titre de critique de l'opposition pour les questions financières, l'honorable député de Saint-Hyacinthe-Bagot devrait prendre en considération les coûts. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai bien entendu la réponse du secrétaire parlementaire. J'aimerais maintenant qu'on poursuive avec les autres questions.

[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je voulais répondre d'abord au rappel au Règlement.

Nous répondrons aujourd'hui à la question no 116.

[Texte]

Question no 116-M. Cummins:

En ce qui concerne MM. Paul LeBlond, Joe Scrimger et David Brander-Smith (membres de la Commission d'examen du saumon sockeye de la rivière Fraser qui enquête sur la gestion gouvernementale de la rivière Fraser et sur l'application des lois à cet endroit), a) quel avantage ou rémunération M. Paul LeBlond a-t-il reçu des ministères des Pêches et des Océans, de l'Environnement et des Transports, relativement aux contrats de plus de un million de dollars accordés à Seaconsult Marine Research Limited depuis 1984, b) quel avantage ou rémunération Paul LeBlond a-t-il reçu à titre de membre du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques de Pêches et Océans Canada, c) quels rapports Paul LeBlond a-t-il produits au nom du gouvernement en plus des rapports sur l'automatisation des phares et la suppression des navires-stations météorologiques, d) quelles soumissions ou propositions Joe Scrimger a-t-il présentées au ministère des Pêches et des Océans et à son Institut des sciences de la mer en 1993 ou 1994 et e) quelle a été la rémunération de David Brander-Smith en tant que directeur du Conseil consultatif de l'Institut des sciences de la mer et quelles recommandations et quels avis le Conseil a-t-il donnés pendant son mandat au sein du Conseil?
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): On m'informe comme suit:

a) Les ministères des Pêches et des Océans, de l'Environnement et des Transports n'ont pas de renseignements sur ce sujet.

Les renseignements financiers demandés sur la compagnie Seaconsult Marine Research Limited et ses sous-traitants sont de nature personnelle. Par conséquent, il faut s'adresser directement à la compagnie ou à M. LeBlond pour plus de précisions à ce sujet.

b), c) et d) Les renseignements demandés se trouvent dans la réponse à la question no 85 déposée le 24 février 1995.

Veuillez noter que M. LeBlond a également fourni son assistance au personnel du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) pour alimenter une étude du ministère des Pêches et des Océans portant sur l'utilisation de plates-formes de recherche, en coordonnant les renseignements

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recueillis auprès de la communauté de recherche universitaire. M. LeBlond n'a pas été rémunéré pour ces activités; il s'est porté volontaire pour ces services.

e) Le Conseil consultatif du directeur pour l'Institut des sciences de la mer a été créé en 1991, et M. David Brander-Smith a alors été nommé président. Le Conseil a réalisé un examen complet des programmes de l'Institut, a défini les programmes de base et a aidé le directeur à déterminer les priorités des programmes et à établir des mécanismes pour échanger de l'information avec les intervenants. Dernièrement, le Conseil a fourni beaucoup d'avis sur les façons de faire face aux stratégies de réduction des programmes et aux compressions budgétaires. Le Conseil se compose de membres provenant de différents milieux: affaires, loisirs, pêche autochtone, universités, autres paliers de gouvernement, secteur du pétrole et du gaz naturel. L'objectif du Conseil est de permettre aux intervenants de contribuer à l'élaboration et à l'orientation du programme ministériel des sciences de la mer. Pendant la présidence de M. Brander-Smith, de novembre 1991 à novembre 1994, le Conseil a donné des avis dans les domaines clés suivants:

-L'établissement des priorités des programmes de l'Institut. Le Conseil a alors souligné l'excellence et le nombre des travaux scientifiques réalisés, a séparé les activités principales des autres activités et a indiqué dans quelle mesure les programmes permettent de respecter les priorités.

-L'élaboration d'une stratégie sur les programmes de l'Institut (examens internes et par les clients) et la mise en oeuvre d'un examen essentiel à cet égard.

-La nécessité d'un examen des programmes par des scientifiques de l'extérieur.

-L'établissement des clients clés et des personnes-ressources de l'Institut et la tenue de consultations intensives avec ces clients afin de connaître leurs perceptions et leurs besoins; la détermination de façons d'améliorer les services et d'élaborer des mécanismes plus formels pour échanger l'information.

-L'élaboration d'un programme de communication visant à échanger l'information sur les activités des programmes avec les clients, le public, les services au sein du ministère et les autres ministères.

-L'utilisation plus marquée des partenariats et des réseaux à des fins de collaboration, de communication et d'échange de l'information.

-L'accentuation des initiatives qui favorisent l'efficacité et l'établissement de sources de financement novatrices.

Quant au volet de la question portant sur la rémunération, se reporter à la réponse donnée à la question no 85 déposée le 24 février 1995.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): On a répondu à la question mentionnée par le secrétaire parlementaire.

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Je tiens à signaler à la Chambre que, conformément à l'article 33 du Règlement, par suite de la déclaration ministérielle, la période réservée aux initiatives ministérielles sera prolongée de 22 minutes.

_____________________________________________


10115

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 février, de la motion: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir, en cette journée suivant le dépôt du Budget, d'intervenir à nouveau et de préciser la pensée de l'opposition officielle face au Budget déposé hier par le ministre des Finances du Canada.

Le Budget que nous avons devant nous constitue un pelletage en règle du déficit fédéral dans la cour des provinces, en plus de faire mal aux plus démunis, aux assistés sociaux, aux chômeurs, aux étudiants, aux personnes du troisième âge. Il fera mal aussi, à partir de l'année prochaine, à l'ensemble des contribuables québécois et canadiens, tout en épargnant, et c'est là l'odieux de la chose, les grandes entreprises, les banques qui bénéficient encore une fois d'un sursis, malgré une petite hausse minime des impôts qu'elles auront à payer cette année.

Les entreprises et les banques bénéficient des largesses fiscales du gouvernement fédéral et des largesses, sous forme de subventions, alors que tout le monde, partout, les provinces, les personnes les plus démunies, les contribuables, à partir de 1996, paient et paieront davantage et toujours davantage pour le laxisme et pour l'incompétence de ce gouvernement.

(1050)

Ce Budget constitue d'abord une décentralisation du déficit fédéral, une décentralisation de la facture fédérale qui commence avec les coupures dans les transferts fédéraux au titre de l'enseignement postsecondaire, de la santé et de l'aide sociale.

Bien sûr, en 1995, ce gouvernement agit de façon sournoise, de façon pernicieuse. En 1995, il n'y aura pas de coupures. On comprend cela, c'est l'année référendaire. Il n'y en aura pas de coupures, pour donner l'illusion aux Québécoises et aux Québécois que ce régime va bien. On ne donne pas le vrai dessin, le vrai design de la faillite de ce régime en 1995 parce qu'on est en année référendaire. Mais attention, à partir de 1996, là, ça fait mal, là, ça commence à faire mal. Et non seulement le ministre des


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Finances nous demande de nous serrer la ceinture, mais il nous demande de nous serrer la ceinture à double tour et de porter des bretelles.

Dès 1995, le couperet fédéral s'abat en coupant 2,5 milliards en transferts fédéraux aux provinces; et seulement au Québec, en 1995, le gouvernement du Québec sera privé de plus de 700 millions de dollars de transferts. En 1997, pire encore, on est encore plus loin de la campagne référendaire. En 1997, c'est 4,5 milliards qu'on vole aux provinces, et seulement pour le Québec, à peu près un milliard de dollars.

Où va-t-on prendre l'argent pour compenser cela? Il n'y a qu'un seul contribuable canadien et un seul contribuable québécois. C'est eux qui paieront. Alors qu'on nous dit qu'il n'y a pas de hausse d'impôt de prévue dans ce Budget, il y a des hausses d'impôt, mais elles sont cachées, elles sont reportées, elles sont détournées. Et on fait supporter l'odieux par les provinces.

Après 1997-1998, le ministre des Finances reste muet. Mais on sait, nous, ce qu'il nous prépare après cela parce que, année après année-et ça il le cache aux Québécois en année référendaire-ce régime sera aussi vorace, sera autant «dollargivore» qu'il l'est à l'heure actuelle dans le gaspillage des fonds publics dans une structure qui est non conforme aux réalités socio-économiques du Québec et du Canada. Année après année, en ce qui concerne les contribuables, ce sont eux qui vont payer d'une façon ou d'une autre pour le laxisme et pour le pelletage en règle effectués par le ministre des Finances.

Ce sont les Québécoises et les Québécois en ce qui concerne le Québec qui vont toujours payer, qui vont continuer de payer parce que ce qu'on ne dit pas, ce qu'on ne crie pas sur les toits, c'est que, malgré le pelletage de sept milliards au chapitre des transferts-ça, c'est le premier pelletage-la machine fédérale demeure la même.

Est-ce qu'il y a abolition de ministères? Non. Le ministère de la Santé demeure, le ministère responsable des ressources humaines demeure et tous les ministères qui sont responsables du dédoublement et des chevauchements dans les secteurs où le ministre des Finances propose de pelleter sa facture aux provinces demeurent en poste. Et lorsqu'on regarde l'évolution des impôts que les Québécois et les Canadiens devront payer au cours des prochaines années, malgré ce pelletage d'une partie du déficit, les Québécois et les Canadiens vont toujours continuer à payer, toujours plus, au gouvernement fédéral. Ils vont payer plus aussi au Québec, en Ontario et partout, puisque le gouvernement fédéral a fait du délestage de ses responsabilités financières.

Alors, cela veut dire, en gros, qu'à partir de l'année prochaine, les contribuables québécois-parce que je m'adresse particulièrement à eux aujourd'hui-paieront cher. L'année prochaine sera l'année postréférendaire. Ils paieront cher s'ils refusent de se donner un vrai pays, un pays normal, un pays qui va prendre le contrôle à 100 p. 100 de ses finances publiques et qui va imprégner le redressement dont on a besoin, mais en ayant un plan vers lequel on se dirigera à 100 p. 100, et non pas un plan qui sera démoli année après année par l'arbitraire de ce gouvernement-là, par l'arbitraire des coupures qu'il fait au chapitre destransferts.

Si les Québécois cette année ne font pas un choix en leur faveur, un choix en faveur de la souveraineté, un choix en faveur de l'efficacité budgétaire et de l'efficacité dans l'allocation des ressources, bien, ils paieront. On leur cache cette situation.

(1055)

On leur cache aussi le fait qu'en 1997-1998, malgré tous les sacrifices qu'il auront faits, malgré les hausses d'impôts auxquelles ils font face, que ce soit par l'entremise de Québec ou du fédéral, on leur cache que malgré tous ces sacrifices la dette fédérale sera encore de 625 milliards de dollars. C'est pourquoi l'agence Moody's tenait sous observation le gouvernement fédéral. C'est l'importance de la dette à moyen terme et l'incapacité du gouvernement à maîtriser cette évolution qui ont amené cette situation.

Les Québécois doivent faire un choix qui est de plus en plus clair, et encore plus depuis hier, ils doivent faire un choix. Demeurer au sein du régime fédéral au cours des prochaines années signifie à peu près ceci: de moins en moins de services et de bénéfices venant du fédéral; de plus en plus de pelletage des problèmes de déficit dans la cour des provinces qui se solde, au bout du compte, par une augmentation des impôts puisque c'est le même contribuable; de plus en plus de mauvaises nouvelles, année après année; de moins en moins de capacité pour le gouvernement du Québec de contrôler la création d'emplois, de pouvoir mettre en place un plan de match pour relancer l'économie, relancer l'emploi et la croissance dans toutes les régions du Québec, parce qu'on ignore ce qui va nous tomber sur la tête avec les décisions fédérales. C'est ce que signifie le statu quo et rester dans le régime fédéral à partir de 1996.

Les Québécoises et les Québécois ont un choix à faire et un choix qui sera décisif en faveur de la croissance économique, en faveur de l'emploi et d'une sortie du marasme occasionné par le régime fédéral.

Non seulement le ministre des Finances pellette ses responsabilités dans la cour des provinces, mais il conserve encore ses cibles favorites pour tenter d'améliorer légèrement la situation des finances publiques au Canada. Et ces cibles sont les étudiants, les assistés sociaux, les personnes malades et les chômeurs. Encore les chômeurs, comme si les chômeurs n'avaient pas assez payé depuis que ce gouvernement est en place, depuis que ce gouvernement a trahi sa promesse de les aider et de créer des emplois.

Déjà cette année, le ministre des Finances prévoyait couper dans le fonds de l'assurance-chômage 2,4 milliards de dollars. L'année prochaine, il prévoyait couper un autre 2,4 milliards, et maintenant il vient d'ajouter, comme si cela n'était pas assez, une autre coupure de 10 p. 100 pour un montant d'environ 1,5 milliards de dollars qui s'ajoute aux millards de coupures déjà prévus. Est-ce cela la prise de position en faveur de l'emploi, est-ce cela la prise de position en faveur des plus démunis, contenue dans le livre rouge? Ce red book qu'on a brandi pendant des mois et des mois et qu'on ne respecte même pas.

Les prises de position en faveur de l'emploi sont dénuées de sens lorsqu'on regarde ce budget. En ce qui concerne l'emploi comme tel, le seul programme mis en place et qui donnait des résultats très parcimonieux en termes de création d'emplois, on parlait de 45 000 emplois temporaires, ce programme dans


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lequel il restait 200 millions, le ministre des Finances a décidé hier de couper ces 200 millions. Est-ce cela jobs, jobs, jobs? C'est cela, jobs, jobs, jobs.

Mon collègue de Rosemont me faisait remarquer avec justesse ce matin que lorsqu'il est question de l'évolution du chômage au cours des prochaines années dans les prévisions du plan budgétaire du gouvernement, on voit que le chômage restera autour de 9,5 p. 100 au Canada. Consciemment, le gouvernement, puisque c'est lui qui établit ces prévisions, ne se sera pas soucié de la création d'emplois. Il ose même prévoir une stabilité du taux de chômage au cours des prochaines années autour de 9,5 p. 100. Savez-vous ce que cela veut dire pour le Québec? Cela signifie un taux de chômage d'environ 11 p. 100 et qui restera à 11 p. 100 si on demeure à l'intérieur de ce régime.

Il y a quelque chose d'encore plus spectaculaire là-dedans. En lisant et relisant ce document, on trouve beaucoup de choses. Ce qui est plus spectaculaire encore, c'est que ce taux de chômage record et son maintien sont obtenus sans augmentation de la productivité. C'est une chance et une malchance. S'il y avait eu une augmentation de la productivité prévue pour les prochaines années, le taux de chômage grimperait probablement à 13 ou 14 p. 100 au Québec et au Canada.

(1100)

En même temps, il faut être productif, de plus en plus productif, puisque dans le nouveau cadre que nous impose l'internationalisation des échanges, le nouvel accord du GATT et l'Organisation mondiale du commerce, il faut être de plus en plus performant et de plus en plus productif, si on veut se maintenir et même performer sur les marchés internationaux. Mais le ministre des Finances ne prévoit pas de gains de productivité.

Alors, ce Budget est déjà, au niveau de l'emploi, d'une morosité terrible, d'autant plus que le ministre des Finances, en établissant ses prévisions, nous dit qu'au cours des trois prochaines années-et peut-être plus tard, parce qu'il arrête, à un moment donné, de faire des prévisions, car il est certain qu'on va s'apercevoir que ça va mal au Canada-il prévoit que le différentiel entre le taux de chômage du Canada et celui des États-Unis va être de 4 p. 100 et que cela va se maintenir.

C'est catastrophique de baser les prévisions du ministre sur des données conscientes, parce qu'il est conscient de ces données, et de ne pas prendre parti en faveur de mesures qui favorisent l'emploi et des emplois durables. Pendant ce temps, pendant que le ministre des Finances s'acharne sur les provinces et qu'il fait supporter l'odieux des grandes réformes fiscales aux provinces, pendant qu'il s'acharne sur les étudiants et les assistés sociaux, les personnes malades et peut-être les personnes du troisième âge, parce qu'il met en place un comité d'examen de l'ensemble de la sécurité de la vieillesse, ce gouvernement maintient des privilèges indus pour les grandes entreprises et pour les très hauts revenus.

Pour ce qui est des entreprises, le ministre des Finances prend la peine, dans un paragraphe, de dénoncer les subventions aux entreprises disant que ces subventions faussent la concurrence, qu'elles sont dépassées, étant donné la nouvelle donne internationale, que ces subventions causent une concurrence déloyale entre des entreprises voisines, entre des entreprises canadiennes. Il dénonce à tour de bras ces subventions, mais par contre, que fait-il? Il réduit ces subventions, sur une période de trois ans, de 60 p. 100, alors qu'il aurait dû, de l'avis même du Conseil du patronat du Québec, de Ghislain Dufour, qui n'est sûrement pas quelqu'un de la gauche, éliminer ces subventions, totalement et rapidement. Le ministre des Finances, malgré le fait qu'il soit d'accord avec l'analyse, maintient 1,5 milliard de dollars en 1997. Il restera encore 1,5 milliard de dollars de subventions directes aux entrepises.

À ce moment-là, on aura coupé plus de 307 millions de dollars dans le logement social. Vous voyez la compassion, vous voyez la conscience sociale de ce gouvernement, qui parle de job, job, job, qui parle des plus démunis, qui a un discours, je vous dirais, digne du NPD dans ses belles années, mais qui, dans les faits, est pire que les conservateurs, sinon tout près du Parti réformiste.

Si au moins le ministre des Finances avait eu l'intelligence, tout comme son gouvernement, de sabrer la moitié des 3,8 milliards de dollars de subventions offertes aux entreprises à l'heure actuelle, de prendre au moins cette moitié et de la distribuer équitablement entre les efforts de recherche et de développement au Canada pour améliorer la compétitivité des entreprises et par ailleurs le logement social, on aurait compris qu'il veuille faire une meilleure allocation et on aurait applaudi cette meilleure allocation. Mais au lieu de ce faire, non seulement il maintient un montant considérable de subsides directs, mais il sabre dans les logements sociaux et il poursuit sa basse oeuvre qu'il a débutée l'année dernière.

C'est la même chose pour la réforme de la fiscalité. Le traitement préférentiel reste là. Les grandes entreprises, on en comptait plusieurs milliers en 1991 qui n'avaient pas payé un cent d'impôt au gouvernement fédéral et qui faisaient perdre des centaines de millions, sinon quelques milliards de dollars au fisc fédéral, ces milliers de grosses entreprises qui font des profits, qui continuent à faire des profits, malgré les ralentissements qu'on a connus depuis 1990, vont pouvoir, encore et toujours, éviter de payer leur dû au fisc. Il n'y a rien là-dedans qui ressemble à un impôt minimum pour éviter que ces grosses entreprises prennent toutes sortes de moyens détournés pour éviter de payer leur dû.

Pour ce qui est des conventions fiscales, le vérificateur général lui-même en parle. Nous en parlons depuis un an et demi. Il y a 16 pays, à l'heure actuelle, qui sont considérés comme des paradis fiscaux, qui aident des entreprises et qui refusent de faire leur devoir corporatif auprès du fisc fédéral. Ces paradis fiscaux aident ces entreprises à dévier des centaines de millions de dollars, à déclarer des pertes fictives d'entreprises fictives, d'entreprises bidon dans des paradis fiscaux, de rapatrier ici et de déduire là leurs revenus, afin de détourner ainsi le fisc fédéral.

(1105)

On n'a rien changé dans ces paradis fiscaux. On demande aux Québécois et aux Canadiens de se serrer la ceinture à double tour, et on laisse passer des choses scandaleuses comme celles-là. Monsieur le Président, trouvez-vous cela normal? Je sais que vous ne pouvez pas me répondre, mais c'est anormal.

Bien sûr, le ministre des Finances, hier,-je ne sais pas s'il avait des bretelles, mais j'ai l'impression qu'il aurait dû en avoir-disait: «Les entreprises font un effort supplémentaire au


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niveau de la taxation, surtout les grosses entreprises, et les banques vont payer enfin un impôt au fisc fédéral.»

S'agissant des banques, des pauvres banques, le ministre prévoit au cours des deux prochaines années, un impôt provisoire-non pas permanent-pour satisfaire les pressions populaires, les pressions populaires qui disaient: Mais nous, on paie. On paie depuis 1984, on ne cesse pas de payer, on se fait couper à tour de bras et les banques font des profits et ne paient pas d'impôt.

Pour répondre justement aux pressions populaires, pour avoir l'impression d'avoir un souci de justice sociale, le ministre des Finances prévoit, au cours des deux prochaines années, aller chercher un gros cent millions dans leurs poches. Un gros cent millions, pour l'ensemble des banques au Canada-juste pour vous illustrer ce que ça représente-la Banque royale, la petite Banque royale a fait un profit record, cette année, de 1,2 milliards de dollars. Que va-t-on aller chercher de ces gens-là? Ça dure deux ans. Pas étonnant que, aujourd'hui, les taux d'intérêt ont diminué un peu. C'est du donnant donnant.

Quand il s'agit des entreprises en général, le ministre des Finances dit: «Les entreprises vont contribuer à améliorer la situation des finances publiques». Regardez de quelle façon ces entreprises le faisaient. Elles le font en augmentant à peu près de 1,5 p. 100 de ce qu'elles paient aujourd'hui en termes d'impôts. Sur 18 milliards de dollars de taxes et d'impôts que les entreprises paient au fisc fédéral, cela correspond à peu près à 17 ou 18 p. 100 de l'assiette fiscale. Ce sont les vrais contribuables qui remplissent les coffres fédéraux.

Ces entreprises vont payer, en 1995-1996, 260 milllions de dollars de plus. En 1996-1997, 270 millions de dollars. En 1997-1998, 280 millions. Il fallait indexer pour avoir l'impression que l'effort qui était demandé était très grand. Savez-vous que cet effort-là, en plus de représenter 1,5 p. cent d'augmentation du fardeau fiscal, parce qu'ils peuvent éviter de le payer, savez-vous que c'est dix fois moins de sacrifices qu'on leur demande, que ce qu'on demande aux chômeurs cette année? Dix fois moins de sacrifices, et on dit que c'est équitable? Il y a quelque chose qui cloche dans ce gouvernement. Ce n'est pas la première fois que je le dis, mais je trouve qu'il y a quelque chose de profondément malheureux. Je suis mal à l'aise devant ça.

Les conventions fiscales, la même supercherie ou à peu près. Le ministre des Finances dit: «J'ai répondu à une demande de l'opposition officielle.» Littéralement, hier, le ministre des Finances nous a ri à la face. Il nous a ri à la face puisqu'il prévoit éliminer les privilèges indus des très riches familles canadiennes dans les fiducies familiales, uniquement en 1999.

Cela me fait penser un peu à l'histoire du policier qui avertit le voleur deux heures à l'avance qu'il va arriver sur les lieux pour l'arrêter. En 1999, les fiducies, pas toutes les fiducies familiales, parce qu'on n'a jamais dit que toutes les fiducies familiales étaient mauvaises, mais les fiducies familiales qui servent d'instrument de planification fiscale puissant pour les très riches familles canadiennes, les avoirs de ces fiducies-là des très riches familles canadiennes auront été transférés dans d'autres véhicules qui, eux, sont maintenus intégralement par le ministre des Finances dans ce budget. On aura perdu toute récupération fiscale qu'on aurait dû faire sur les gains en capital annuels que ces fiducies réalisaient. C'est rire de nous, que de nous présenter de telles choses.

(1110)

Quant aux dédoublements et au gaspillage, cela va se poursuivre parce que le fédéral ne se retire pas, et de l'opinion même du ministre des Affaires intergouvernementales, le fédéral va continuer à avoir son mot à dire dans tous les domaines de juridiction provinciale. Même s'il paie de moins en moins, il va mettre son nez là-dedans.

Les dédoublements et les chevauchements vont continuer puisque, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, les ministères fédéraux dans lesquels on observe ces dédoublements vont demeurer en place. Quand a-t-on entendu parler d'abolition d'un ministère? Jamais. Comment peut-on dire que les dédoublements et les chevauchements de juridiction sont réduits et qu'on fait face à une immense réforme structurelle du régime fédéral, alors que rien n'a changé?

Cela m'amène à parler des mises à pieds sauvages dans la fonction publique. Il y a deux façons de réorganiser une machine qui est trop grosse, et de l'avis de l'opposition officielle, cette machine est trop grosse. Il y a deux façons de la réorganiser: la bonne et la mauvaise.

Ce gouvernement a pris la mauvaise façon. L'image que j'ai en tête-et j'avais envie de pleurer lorsque je l'ai vu-c'est celle du ministre des Affaires intergouvernementales, assis confortablement à son bureau, en train de pitonner sur un écran cathodique et de choisir combien il couperait d'effectifs dans chacun des ministères fédéraux et dans les sociétés d'État. Il n'a pas pensé deux minutes à aller s'asseoir avec les gens. Il n'a pas pensé deux minutes qu'il y avait des êtres humains derrière son écran cathodique. Il n'a pas pensé deux minutes qu'il y avait des représentants dûment élus des syndicats de la fonction publique, de l'Alliance de la fonction publique avec qui il aurait pu aller s'asseoir et discuter de la réorganisation.

Il est évident qu'il faut réorganiser la fonction publique. Il est évident que la machine est trop grosse. Il est évident qu'il faut une réduction d'effectifs quelque part, mais pas de manière sauvage, de manière inhumaine, comme le ministre des Affaires intergouvernementales y a pensé, et sans aucune garantie. Il n'y a aucune garantie.

Qu'est-ce qui nous assure qu'il va y avoir, de cette mise à pied de 45 000 personnes, des gains d'efficacité? Qu'est-ce qui nous garantit que la morosité de la fonction publique ne fera pas en sorte que le service public va diminuer? Qu'est-ce qui nous garantit, et c'est un point important, que les «patroneux» en face de nous, que les amis du régime, les amis du Parti libéral ne seront pas embauchés à côté, en sous-traitance? Cela s'est vu par le passé. Il n'y a aucune garantie à cet effet. La seule garantie, c'est qu'il y a un risque quelque part pour que les mises à pied sauvages que l'on fait à l'heure actuelle soient compensées en sous-traitance et qu'au lieu de réaliser des économies, le gouver-


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nement fédéral nous coûte plus cher encore qu'il ne nous a jamais coûté. Cela aussi s'est vu.

On oublie toujours que dans la fonction publique, il y a des gens compétents, des gens d'expérience, des gens qui savent travailler et qu'en allant en sous-traitance, souvent, cela nous coûte plus cher parce qu'on fait face à des entreprises qui n'ont d'autre objectif que de réaliser rapidement un profit sur le dos des contribuables canadiens. Il faut penser à cela aussi.

Je l'ai dit et je le répète, l'opposition officielle, lorsqu'elle parle de dégraissage de l'appareil, lorsqu'elle dit que le Canada est un pays surgouverné, cela veut dire que l'appareil est trop gros, qu'il y a des fonctionnaires en trop, cela est certain, mais il y a une façon de le faire. La façon sauvage, on ne l'adopte pas. Même l'Alliance de la fonction publique est venue nous dire qu'elle était prête à parler de réorganisation, mais de réorganisation intelligente, pas de coupures latérales, pas de coupures qui vont se solder par des surplus de coûts pour les contribuables, qui seront de moins en moins bien servis et qui seront servis avec morosité. C'est une situation difficile à vivre.

Je souhaite que le gouvernement aille s'asseoir de nouveau avec les gens de l'Alliance de la fonction publique, qu'il discute, chose qu'il n'a pas faite depuis qu'il est là. La première chose qu'il a faite depuis qu'il est là, c'est d'arrêter de discuter, alors qu'il dénonçait l'arrêt des discussions entre le gouvernement conservateur et les travailleurs de la fonction publique. Il devrait le faire. Ces gens ont des idées pour réaliser des économies. Ils ont des idées pour faire en sorte que l'appareil bureaucratique s'amaigrisse, mais de façon intelligente. Il faut se fier à leur expertise.

En agriculture, le ministre hier s'est détourné des vraies questions. Le ministre, hier, n'a pas voulu ressortir les vieux conflits.

(1115)

J'en ai vécu un en 1982, lorsqu'il était question de réformer l'accord du Nid-de-Corbeau, le Crow's Nest Pass Agreement. J'ai remarqué à ce moment qu'il y avait une dualité à souhait, qu'il y avait des intérêts des «cattlemen» de l'Ouest, des producteurs de boeuf, qui divergeaient même des intérêts des céréaliculteurs de l'Ouest. Mais, en gros, il y avait vraiment des divergences entre l'Ouest et l'Est, en particulier le Québec.

On observe dans le Budget que le ministre a décidé d'abolir la subvention de 560 millions accordée pour le transport des céréales aux sociétés ferroviaires dans les provinces des Prairies. Mais pour compenser cette disparition, il va donner aux producteurs de l'Ouest, sur la base des superficies cultivées, 1,6 milliard de dollars pour compenser la supposée perte de la valeur des terres dans l'Ouest. Ce à quoi le ministre des Finances n'a pas pensé, ni son collègue de l'Agriculture, c'est que la subvention du Nid-de-Corbeau a développé un équilibre à souhait dans la production agricole au Canada. L'Ouest était voué à la production de céréales et bénéficiait d'un transport subventionné et, à l'Est, la production animale s'est développée, en particulier dans le secteur laitier et dans le secteur du porc.

Si vous brisez cet équilibre par la disparition du Nid-de-Corbeau, si vous compensez la valeur des terres dans l'Ouest, vous en arrivez à oublier une partie du casse-tête qui est l'impact de ce bris de l'équilibre sur l'est du Canada.

Nulle part dans le discours sur le Budget on ne parle d'une partie de la compensation qui pourrait aller aux producteurs de l'est du Canada et en particulier au Québec qui vont subir aussi un préjudice. Ce préjudice est double, parce que non seulement les producteurs de l'Ouest auront une subvention de 1,6 milliard pour s'adapter, mais ils pourront aussi utiliser ces 1,6 milliard de deniers fédéraux auxquels contribue le Québec à 25 p. 100 pour venir concurrencer les producteurs d'animaux du Québec. Est-ce cela, l'équité du fédéral? Est-ce cela, le bel équilibre Est-Ouest? Ce n'est pas comme cela que ça marche.

En plus, les producteurs de l'Ouest recevront une garantie de prêt de un milliard, plus 300 millions pour leur permettre de s'adapter à leur nouvelle situation. Les producteurs de l'Ouest recevront trois milliards pour la disparition de la subvention du Nid-de-Corbeau de 560 millions. Déjà, en partant, il y a quelque chose de très odieux là-dedans. Il y a quelque chose d'inéquitable d'utiliser des fonds fédéraux, subventionnés à 25 p. 100 par le Québec, pour soutenir nos concurrents de l'Ouest qui vont venir aussi sur nos propres marchés.

En plus de donner 3 milliards dans l'Ouest, on coupe 30 millions au Québec, car le Budget prévoit une diminution de 30 p. 100 du subside laitier versé aux producteurs de l'Est, ce qui touche le lait voué à la transformation, la fabrication du fromage, du yogourt, de la crème glacée et le reste. Cinquante pour cent des produits laitiers qu'on consomme sont produits au Québec. Alors, on donne trois milliards dans l'Ouest et on coupe 30 millions aux producteurs laitiers du Québec. Est-ce cela, l'équité? Est-ce cela, faire preuve de «fair play» dans l'allocation et dans la répartition des efforts Est-Ouest chez des agricultueurs pour qu'ils contribuent à l'amélioration des finances publiques?

Monsieur le Président, ce n'est pas bien équitable comme traitement. Et en même temps, pour les producteurs de lait, cela ajoute à la pression déjà forte qui est sur eux parce que n'oublions pas que, depuis deux ans, avec les nouveaux accords du GATT, ceux de l'Organisation mondiale du commerce, les producteurs de lait, au Canada comme au Québec, ont à faire face à une concurrence accrue. Ils ont perdu un de leurs piliers fondamentaux du système de production laitière qu'on a appelé l'article XI. Et depuis ce temps-là, la concurrence augmente année après année, puisque les tarifs qui remplacent la protection frontière, avec l'article XI diminuent année après année et qu'on permet sur leurs marchés l'entrée de produits étrangers, qui viennent concurrencer les produits laitiers québécois et canadiens.

Alors, en plus de leur demander de faire face à cette nouvelle réalité, on leur demande aussi de se serrer encore la ceinture. Cela faisait dire hier à M. Laurent Pellerin, président de l'UPA, que les producteurs agricoles étaient prêts à faire un effort équitable, mais que c'était rendu trop, que cela n'avait plus de bon sens.

On peut parler aussi, et je vais le faire rapidement, du budget à l'aide internationale.


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(1120)

Combien de fois les députés de ce gouvernement, lorsqu'ils étaient dans l'opposition officielle, ont-ils dénoncé l'attitude des conservateurs face à l'aide internationale? Combien de chemises, le ministre des Finances-qui n'était pas ministre des Finances à ce moment-là-et l'actuel premier ministre aussi ont-ils déchirées parce que les conservateurs coupaient dans l'aide internationale? Ils font pire.

Le Budget présenté hier par le ministre des Finances prévoit des coupures de 532 millions de dollars à l'aide internationale qui exacerbent une situation de désaffection du Canada face à ses devoirs auprès des communautés internationales les plus démunies. Quand on parle des plus démunis parmi les communautés internationales, on parle de millions d'enfants qui meurent à tous les jours. C'est de cela dont on parle.

On exacerbe une situation qu'on avait décriée chez les conservateurs et on poursuit les coupures à l'aide internationale. Non seulement ce gouvernement manque de compassion envers les plus démunis du Canada et du Québec, mais il en manque doublement lorsqu'il est question d'enfants qui meurent quotidiennement à l'échelle internationale.

Parlons maintenant de la défense nationale. Tout le monde doit faire un effort équitable. Alors le ministre dit qu'on fermera la base de Saint-Hubert, au Québec, et qu'on réduira les effectifs et la valeur des infrastructures à Bagotville, au Québec. De l'avis de son propre analyste au ministère de la Défense nationale, bon an mal an, au Québec, il manque environ 650 millions de dollars dans les dépenses effectuées par le ministère de la Défense nationale. Six cent cinquante millions, et c'est un minimum.

Année après année, étant donné l'importance de la population au Québec et l'importance des contributions fiscales-les Québécois payent 30 milliards de taxes et d'impôts dans les coffres fédéraux, ce ne sont pas des cadeaux que nous recevons-malgré tout ça, il manque annuellement, au minimum, 650 millions de dépenses du ministère de la Défense nationale en territoire québécois.

En plus, même si le Québec correspond grosso modo à 24 p. 100 de la population, même si on contribue à 23,5 ou 24 p. 100 de l'assiette fédérale, on ne dispose que de 15 p. 100 des infrastructures de la défense nationale en territoire québécois, donc, bien en deçà du poids démographique ou du poids de la contribution fiscale des Québécoises et des Québécois.

Malgré cela, on nous dit que tout le monde doit faire un effort. Il y a des années que l'on fait de la rationalisation, que l'on paie pour cette rationalisation. On en a assez au Québec de payer pour cette rationalisation. Quand on dit que tout le monde doit payer, il faudrait voir ce que nous avons déjà payé en n'obtenant pas notre part des dépenses et des investissements effectués annuellement par le ministère de la Défense nationale en territoire québécois. Je pense qu'il aurait fallu y penser à deux fois avant de faire cela. Les Québécois vont s'en rappeler, parce qu'on va le leur rappeler constamment.

Ce budget est hypocrite, je l'ai déjà mentionné, parce qu'on cache la vérité aux personnes du troisième âge. On leur dit que ça va bien et que ça continuera à l'intérieur du régime fédéral, alors qu'on met en place-et le chef de l'opposition a soulevé le problème hier-un comité pour examiner l'ensemble de la problématique des pensions et de la sécurité de la vieillesse, dès l'année prochaine. Comme le disait si bien le chef de l'opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean hier, on ne met pas en place des comités pour augmenter les pensions.

Mais 1995 étant une année référendaire, les fédéralistes, le Parti libéral en particulier, perdaient un argument majeur s'ils s'attaquaient aux personnes du troisième âge, celui de pouvoir dire que les pensions vont diminuer s'ils changent de régime. Ils n'ont pas voulu faire cela avant le référendum. Ils cachent la vérité aux Québécoises et Québécois du troisième âge, comme ils cachent la vérité à l'ensemble de la population du Québec, le vrai visage de ce régime en faillite.

Le ministre des Finances a trouvé le moyen de trahir la promesse du premier ministre de ne pas hausser les taxes pendant les deux premières années de son mandat. L'année dernière, c'est en coupant le crédit d'impôt en raison de l'âge pour les personnes du troisième âge, qu'il est allé cherché 500 millions de recettes supplémentaires. Cette année, c'est en taxant l'essence et le tabac pour un montant global d'environ 800 à 900 millions.

(1125)

Ce Budget ne s'attaque pas aux vrais problèmes et ne répond pas aux vrais besoins de la population. Peut-être que le gouvernement fédéral va s'en sortir cette fois-ci. Peut-être que l'apparence de contrôle des finances publiques va faire en sorte que les agences de cotation vont maintenir sa cote de crédit. Par contre, il est à peu près certain que les agences de cotation vont reluquer du côté des provinces, parce que le gouvernement fédéral a transféré tous ses problèmes financiers du côté des gouvernements provinciaux. Alors, décote pour décote, au bout de la décote, il y a des taux d'intérêt plus élevés pour refinancer la dette et que ce soit au fédéral ou auprès des gouvernements provinciaux et du gouvernement du Québec, c'est toujours le même contribuable qui va payer.

C'est du maquillage, cette situation, cette observation. Mes collègues réformistes gagneraient à bien se tenir. Ce Budget n'imprègne en rien non plus une direction très solide, très forte, au niveau de la dette publique cumulative à moyen terme, et cela, l'agence de cotation Moody's l'a bien soulevé. Ce qui inquiète les investisseurs et ce qui a un impact important sur les taux d'intérêt, l'absence d'investissements, l'absence de création d'emplois significative pour nous sortir d'un taux de chômage qui gravite autour du 10 p. 100, c'est justement le poids de la dette publique. À la fin de 1997 et dès 1997, et je le dis à mes concitoyens et concitoyennes du Québec, on va continuer à leur imposer des sacrifices. Le gouvernement fédéral va continuer à couper et à faire du pelletage, laissant au gouvernement du Québec l'odieux des augmentations de taxes ou des coupures de dépenses dans des services essentiels.


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Ce ne sera pas fini, puisqu'on n'a rien réglé avec ce Budget. On va toujours se retrouver avec une dette immense si on ne fait pas un choix en faveur d'un renouveau quelque part, d'un renouveau vraiment structurel, qui consiste à faire un nouveau pays, à se donner un nouveau souffle au Québec. Si on ne le fait pas, on va payer et on n'a pas fini de payer.

On a le choix, au Québec, de repartir sur des bases nouvelles, de se faire un véritable projet de société, de ne pas être à la merci de l'arbitraire de ce gouvernement, année après année, de ne pas être à la merci de l'arbitraire qui se traduit par des hausses d'impôt, aussi, d'un côté comme de l'autre. On a le choix de sortir de cela ou de rester et de continuer à couler avec ce grand véhicule.

Je pense que les Québécoises et les Québécois vont faire le choix de sortir du régime, vont faire le choix du renouveau, vont faire le choix de vivre autre chose que la morosité, année après année, sans projet de société, sans perspective de création d'emplois, sans perspective d'enrichissement, sauf l'enrichissement de la dette fédérale.

J'aimerais proposer un amendement au discours sur le Budget du ministre des Finances. Je propose:

Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:
«la Chambre des communes rejette le Budget du gouvernement qui constitue un pelletage systématique du problème financier du gouvernement fédéral dans la cour des provinces; n'allège en rien le fardeau fiscal de la classe moyenne tout en maintenant des échappatoires fiscales pour les très hauts revenus et les grandes entreprises canadiennes; et fait fi des besoins criants des sans-emploi et des plus démunis, lesquels sont frappés de plein fouet par des coupures additionnelles aux programmes sociaux.»
(1130)

[Traduction]

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais parler de la politique budgétaire du gouvernement qui se dégage du budget déposé hier à la Chambre. Je n'en parlerai pas tant du point de vue d'un parti d'opposition que de celui des personnes dont les intérêts personnels et collectifs sont touchés par le budget.

Au nom des Canadiens, le Parti réformiste analysera le budget à la lumière de quatre critères. Premièrement, l'emploi. Le budget répond-il aux besoins des chômeurs et des personnes frappées par le sous-emploi? Deuxièmement, la sécurité sociale. Le budget comble-t-il les besoins des bénéficiaires des services gouvernementaux, en particulier les services sociaux? Troisièmement, l'aspect financier. Le budget répond-il aux attentes de ceux qui avancent l'argent, les prêteurs à qui le gouvernement demande plus de 30 milliards de dollars pour combler son déficit, et les pauvres contribuables qui doivent débourser 120 milliards par année? Enfin, l'aspect des valeurs. Le budget exprime-t-il l'honnêteté, le courage, l'équité, le leadership et l'intégrité que les Canadiens sont en droit d'attendre du gouvernement?

Mes collègues analyseront le budget en fonction de ces critères de façon plus détaillée que moi, mais je voudrais néanmoins résumer les résultats de cet exercice.

Le ministre des Finances affirme que le budget atteint les objectifs sectaires énoncés dans le livre rouge des libéraux, dont une timide réduction du déficit qui sera ramené à 25 milliards d'ici 1997. Certains observateurs et critiques seront peut-être assez crédules pour croire au livre rouge et considérer que l'objectif de 3 p. 100 est acceptable, mais, en définitive, la grande majorité des Canadiens ne l'accepteront pas.

Si nous analysons le budget en fonction des intérêts des chômeurs, de ceux qui sont frappés par le sous-emploi et qui veulent de vrais emplois, le budget trahit les attentes de ces personnes puisqu'il ne contient aucune véritable mesure à long terme pour faciliter la création d'emplois dans le secteur privé.

Si nous examinons le budget à la lumière des intérêts des bénéficiaires des services gouvernementaux, qui veulent une véritable sécurité sociale à long terme, là encore le budget déçoit parce qu'il ne fait rien pour freiner le détournement de fonds des programmes sociaux au profit du paiement de l'intérêt massif sur la dette fédérale qui s'alourdit.

Évalué en regard des intérêts des Canadiens qui attendent un plan efficace d'élimination du déficit, ce budget trahit leurs attentes puisqu'il prévoit seulement de ramener le déficit à 24 milliards d'ici 1997.

Du point de vue des pauvres contribuables, qui ne veulent pas une hausse des impôts, mais une réduction des dépenses menant à un allégement de leur fardeau fiscal, le budget est une trahison parce qu'il va chercher un milliard de dollars de plus chaque année dans les poches des contribuables et qu'il ouvre la voie à de nouvelles hausses d'impôts.

En somme, si on évalue le budget à l'aune des intérêts du public, des travailleurs, des bénéficiaires des services sociaux, des investisseurs, des prêteurs et des contribuables, on constate que ce budget trahit leurs intérêts à tous les points de vue. Ce budget est un abus de confiance, au même titre que le budget Mulroney-Wilson de 1984-1985. Les libéraux ont raté la rare chance qui leur était donnée d'équilibrer le budget, une chance qui n'est offerte qu'une fois à un nouveau gouvernement.

Je ne veux pas, par ce triste bilan, être injuste envers le ministre des Finances ni déprécier exagérément ses efforts pour présenter un budget meilleur et plus juste. Le ministre et son ministère auraient pu, si le premier ministre leur avait accordé plus de liberté et d'appui, montrer clairement aux Canadiens à quel point le déficit contribue à détruire les programmes sociaux. Ils se seraient fixé comme objectif d'éliminer, pas seulement de réduire, le déficit. Le premier ministre s'est cependant opposé à autant de franchise et le ministre s'est plié à sa volonté.

Je crois que si le projet de réforme des programmes sociaux présenté par le ministre du Développement des ressources hu-


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maines n'avait pas été un échec total, le ministre des Finances aurait pu présenter un projet combinant de vraies réformes sociales et une vraie réduction des dépenses. Le ministre du Développement des ressources humaines a ébranlé le ministre des Finances et l'a laissé tomber.

(1135)

Je crois que si le caucus libéral ne comptait pas autant de députés qui s'accrochent à des valeurs dépassées, par exemple l'idée que les dépenses gouvernementales ont un effet stimulant, ou encore que le Canada a un problème de recettes, et non de dépenses, et si le ministre des Finances ne traînait pas ces boulets vivants, il aurait pu faire mieux.

En toute équité, le ministre des Finances n'est pas le seul responsable de cette trahison des intérêts du public que représente le budget. Nous croyons que le ministre du Développement des ressources humaines, les faibles d'esprit du caucus libéral, mais surtout le premier ministre lui-même, sont encore plus à blâmer.

En tant que contribution constructive au débat, mes collègues vont examiner le budget à la lumière des autres critères dont j'ai déjà parlés. Par exemple, ils vont l'examiner du point de vue de l'emploi, pour montrer à quel point il nuit à un million de chômeurs et à plus de deux millions de travailleurs sous-employés dans notre pays. Comme solution de rechange constructive, ils offriront aussi le plan d'emploi en 5 R du Parti réformiste, qui se base sur l'élimination du déficit et l'allégement du fardeau fiscal pour stimuler la création d'emplois à long terme dans le secteur privé.

Le plan d'emploi en 5 R se fonde sur l'hypothèse qui veut qu'un dollar laissé entre les mains d'un contribuable, d'un consommateur, d'un investisseur ou encore d'un homme ou d'une femme d'affaires crée plus d'emplois qu'un dollar laissé entre les mains d'un bureaucrate, d'un lobbyiste ou d'un politicien.

Mes collègues examineront ce budget sous l'angle de la sécurité sociale pour montrer les dommages qu'il cause, surtout à long terme, aux personnes qui dépendent des grands programmes de sécurité sociale du gouvernement fédéral que sont la sécurité de la vieillesse, l'assurance-chômage, le financement des programmes établis et le régime d'assistance publique du Canada. Comme solution de rechange constructive, nous offrirons la vision réformiste d'une société moins inquiète grâce à l'augmentation des pouvoirs des particuliers et des collectivités et à la décentralisation de la prestation des programmes sociaux aux paliers d'administration les plus près des gens.

Mes collègues montreront comment, en appliquant ces principes, nous pourrons obtenir, sur le plan de la sécurité sociale et pour plus de Canadiens, un meilleur rendement de 140 milliards de dollars en dépenses fédérales et provinciales combinées que de 155 milliards de dollars de dépenses combinées. La solution de rechange à l'État providence que le Parti réformiste propose se base sur l'hypothèse qui veut qu'un dollar laissé entre les mains d'une mère, d'un père, d'une famille, d'un étudiant, d'une personne âgée, d'un travailleur de première ligne, dans le domaine de la santé, rapporte plus, pour la sécurité sociale, qu'un dollar laissé entre les mains d'un gouvernement fédéral loin des gens.

Pour terminer, mes collègues examineront ce budget du point de vue financier, pour montrer combien il mine la confiance des contribuables et des prêteurs. Comme solution de rechange constructive, ils exposeront les solutions et les calculs que nous avons présentés dans notre Budget des contribuables, le 21 février, pour éliminer le déficit en trois ans grâce à des réductions de dépenses seulement, sans augmenter les taxes et les impôts.

Même si nous trouvons énormément à redire des valeurs qui se dégagent de ce budget et de son contenu, au nom des travailleurs, des bénéficiaires de services, des contribuables et des citoyens, contrairement au Bloc et aux autres, nous avons une solution de rechange constructive à proposer. Tous les éléments de cette solution de rechange figurent dans le Budget des contribuables, et nous invitons les médias, le public et les députés à comparer ce budget au budget libéral.

Aujourd'hui, je tiens à rappeler au premier ministre et au ministre des Finances le défi que nous leur lançons. Nous voulons un débat juste, où tous les coups sont permis, un débat opposant le budget du gouvernement au Budget des contribuables. Choisissons un soir, la semaine prochaine ou d'ici dix jours-et pour que cela coûte moins cher, tenons ce débat ici, à la Chambre-mais laissons nos partisans à la maison, pour qu'il n'y ait, à la Chambre, que cinq personnes: le premier ministre, le ministre des Finances, moi, un de nos porte-parole en matière de finances et vous, monsieur le Président. Faisons en sorte qu'il n'y ait que deux documents sur la table: le budget libéral et le Budget des contribuables. Laissons les caméras de télévision filmer nos échanges pour que les députés, les médias et le public puissent en prendre connaissance. Organisons un débat réel et faisons un examen approfondi des hypothèses fondamentales qui soutiennent ces deux budgets et des directions où ils nous mènent. À l'issue du débat, il faudra choisir rien de moins que le plan d'action à adopter pour remettre de l'ordre dans les finances du gouvernement fédéral en vue du XXIe siècle.

(1140)

Comme je l'ai dit au début de mon intervention, il y a un critère suprême à la lumière duquel il faut examiner ce budget: celui des vertus du budget. Le budget exprime-t-il l'honnêteté, le courage, l'équité, le leadership et l'intégrité auxquels les Canadiens sont en droit de s'attendre de la part de leur gouvernement? Encore une fois, et c'est triste à dire, ce budget échoue sur ce plan-là.

Dans le livre rouge, le gouvernement a passé sous silence et minimisé l'importance des dommages que le déficit et la dette font à la création d'emplois dans le secteur privé et pendant des mois, il a continué de dire que les dépenses publiques importantes, par l'intermédiaire du programme d'infrastructure, par exemple, étaient la clé de la création d'emplois. Il n'a pas eu le courage et l'honnêteté de dire aux Canadiens que c'était le déficit, la dette et les niveaux d'imposition élevés qui nuisaient à la capacité du secteur privé de créer des emplois pour des centaines de milliers de chômeurs canadiens.

Dans ce budget, le gouvernement persiste dans la même voie. Il réduit, méconnaît, essaie même de nier ou de dissimuler l'importance du tort irréparable que ses dépenses excessives causent aux programmes de sécurité sociale dont dépendent tant de Canadiens.

Ce plan budgétaire du gouvernement va augmenter la dette fédérale de plus de 100 milliards de dollars. Les paiements d'intérêts sur la dette fédérale vont passer à plus de 50 milliards


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de dollars par an, soit près du tiers du budget fédéral d'ici à la fin de la présente législature.

Le gouvernement va se servir de l'argent des contribuables pour payer 50 milliards de dollars par an en intérêts et réduire d'autant les fonds consacrés à tous les autres programmes, notamment les dépenses sociales qui constituent la majeure partie des dépenses du fédéral.

Autrement dit, la menace la plus importante et la plus réelle posée aux programmes sociaux au Canada, ce ne sont pas des attaques imaginaires au titre de la réforme fiscale, c'est l'incapacité chronique, implacable et systématique du gouvernement libéral de ramener le déficit à zéro dans les meilleurs délais.

À moins d'y annexer un addendum qui décrive clairement l'impact de l'accroissement de la dette et du service de la dette sur les programmes sociaux, les personnes âgées, les assistés sociaux, les personnes qui dépendent du gouvernement fédéral pour les soins de santé, ce budget manque d'honnêteté et de courage. C'est un budget lâche et malhonnête qui échoue au test de caractère à ce stade où il est très important d'en faire preuve.

Ceci m'amène au trait de caractère également important de la justice et de l'esprit de leadership. Le ministre des Finances demande aux Canadiens de faire des sacrifices afin que l'on puisse réduire les dépenses et le déficit. Le budget annonce de futures compressions, par exemple au niveau des prestations d'assurance-chômage, des prestations aux personnes âgées et des transferts aux provinces pour les programmes sociaux. Le ministre prétend être guidé par un esprit de justice quand il annonce des compressions au niveau des dépenses et des augmentations d'impôt.

Comme le ministre l'a dit, le diable se cache dans les détails. Si l'on veut faire preuve de justice et de leadership, c'est en haut qu'il faut commencer et faire le sacrifice le plus visible. Pour les députés et le gouvernement, cela signifie renoncer au régime de pension doré des députés que tant de Canadiens trouvent obscène et qui est à leurs yeux l'exemple même des dépenses excessives en haut de l'échelle.

Que fait le gouvernement au lieu de cela? Quelques jours avant le budget, il présente un régime de pension des députés légèrement modifié-nous appelons cela le régime allégé-qui assure encore aux députés le régime de pension le plus généreux du pays. Il contient une disposition de désengagement à l'intention des députés dont c'est le premier mandat, mais il offre aux ministres de premier plan et aux principaux députés de l'arrière-ban des millions et des millions de dollars de prestations de retraite qui dépassent tout ce à quoi pourraient rêver les Canadiens ordinaires. Il appelle cela une réforme du régime de pension. Il dit que c'est faire preuve d'équité et de justice. Il déclare réduire vraiment les coûts quand en fait il n'en est rien.

Ce manque de respect dans sa façon de procéder en ce qui concerne le régime de retraite des députés, les principes que le gouvernement épouse dans le budget dénotent un défaut de caractère de sa part.

(1145)

Il est impossible qu'un ministériel puisse voter en faveur de ce budget avec les réductions de dépenses et les augmentations d'impôt qu'il comporte et voter en même temps en faveur du régime de retraite doré des députés sans compromettre l'intégrité du gouvernement. Qu'en sera-t-il?

Les députés réformistes ont l'intention de renoncer au régime de retraite des députés. Nous demandons à tous les autres députés de la Chambre d'en faire autant. Leurs électeurs vont leur dire de le faire sinon ils les botteront dehors. Cet appel que nous lançons doit être respecté si l'on veut rendre, par l'exemple, justice, leadership et intégrité au Parlement et à tout budget qu'il appuie.

En conclusion, certains observateurs de ce budget diront qu'il fait faire au Canada un pas de plus vers le mur qu'il frappera bientôt, un pas de plus vers la crise de confiance de la part des créanciers qui va faire s'effondrer le dollar et grimper les taux d'intérêt, qui va freiner soudainement la reprise économique et qui va commencer à faire s'effilocher le filet de sécurité sociale.

Certains diront que le fait que le gouvernement n'élimine pas le déficit maintenant, alors que l'économie est dans une situation relativement bonne, va laisser les Canadiens sans défense s'il survient un ralentissement économique.

Certains diront que les coupes nécessaires pour équilibrer le budget, lorqu'elles seront faites enfin, seront beaucoup plus sévères et beaucoup plus destructrices, car le gouvernement n'a pas eu le courage de les faire maintenant. Seul l'avenir nous dira qui a raison.

Cependant, au nom des Canadiens de tout le pays, au nom des contribuables, des employeurs, des employés, des consommateurs, des prestataires de services et des citoyens en général, je dis au premier ministre, au ministre des Finances, à tous les membres du Cabinet libéral, à tous les membres du caucus libéral et à tous les hauts fonctionnaires qui ont travaillé à la préparation du budget: «Si ce pays frappe un mur, si les programmes sociaux de ce pays frappent un mur en raison de ce que le budget n'a pas fait, vous serez tenus personnellement, professionnellement et politiquement responsables des conséquences, quoi qu'il arrive.»

Je propose:

Qu'on modifie l'amendement en retranchant tous les mots suivant les mots «budget du gouvernement» et en les remplaçant par ce qui suit:
«parce qu'il ne réussit pas à éliminer le déficit de façon rapide et décisive d'ici la fin de la présente législature et demande aux générations à venir de faire les frais d'une irresponsabilité financière.»
Des voix: Bravo!

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup de plaisir le discours de notre chef, le député de Calgary-Sud-Ouest. Jusqu'à présent, c'est le seul discours sur le budget, entendu à la Chambre, qui ait du sens.

(1150)

Le budget présenté hier avait quelques augmentations de taxes et quelques réductions de dépenses. Cependant, le problème, c'est que le rapport de la dette nationale au PIB reste inchangé. Il


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se situe encore aux environs de 73 ou 75 p. 100, ce qui signifie que nous ne faisons pas de progrès.

Oui, en tant que contribuables nous allons en souffrir un peu. Nous allons payer davantage pour l'essence que nous mettons dans notre voiture. Nous allons payer plus de taxes et, naturellement, nous allons constater une certaine réduction des services. Nous allons voir 45 000 fonctionnaires perdre leur emploi, mais au sommet pas beaucoup de mouvement. Cela signifie que les services dont bénéficient les Canadiens vont être réduits.

Nous allons souffrir un peu. Nous allons avoir des frais supplémentaires, mais pas le moindre gain. Il n'y a rien qui améliorera la situation que connaîtront nos enfants dans un avenir à plus long terme.

Est-ce que le député pourrait nous parler de l'aspect positif du budget des contribuables du Parti réformiste à cet égard, surtout à la lumière du budget présenté hier par le ministre?

M. Manning: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention. Il a mis le doigt sur le problème essentiel qui doit être résolu par cette Chambre, et au cours de ce débat, j'espère.

Après les réductions de dépenses proposées par le ministre, la triste vérité est que nous aurons encore un déficit de 25 milliards à la fin de 1997. La dette fédérale est de plus de 600 milliards et les paiements d'intérêts sur cette dette dépassent 50 milliards par année.

Si les députés étudiaient les conséquences du coût de financement de la dette pour les dépenses sociales, les programmes sociaux en particulier, ils constateraient que les dommages causés par la dette sont pires que tout ce qui a été proposé par quiconque en réductions de dépenses.

Ce que tentait de faire le budget des contribuables que nous avons présenté, c'était de réduire le déficit beaucoup plus rapidement, de sorte que la dette cesse d'augmenter et que l'on puisse enrayer l'hémorragie d'argent en paiement d'intérêts qui se fait au détriment des programmes sociaux.

Je dis honnêtement à la Chambre que si les gens comparaient les deux budgets, s'ils comparaient les difficultés créées par des coupes plus profondes, afin de s'attaquer plus rapidement au déficit, aux difficultés qui résulteront de l'inaction, et donc de l'augmentation des paiements d'intérêts avec les conséquences que l'on sait sur les programmes sociaux, ils verraient qu'il serait préférable, plus acceptable pour les électeurs et les Canadiens, d'adopter l'objectif réformiste d'éliminer le déficit en trois ans plutôt que celui du ministre qui est de «réduire le déficit de moitié d'ici 1997».

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, lorsque le député de Calgary-Sud-Ouest a pris la parole, aujourd'hui, il a commencé par dire qu'il n'aborderait pas ce débat de façon partisane. J'ai donc été surpris que le chef du Parti réformiste ne reconnaisse pas qu'il n'y a pas eu d'augmentation des impôts sur le revenu des particuliers.

Une des choses que j'ai lues dans le budget du Parti réformiste-je ne peux pas vous le montrer, cela ne se fait pas ici-c'est que l'on y propose un impôt uniforme, une chose à laquelle je croyais, comme les députés le savent, encore que je l'appelais un impôt unique et qu'il était de conception plus progressiste que ce que propose le député.

En vertu de la proposition d'impôt uniforme du chef du Parti réformiste, inévitablement certains Canadiens paieraient davantage. Comment le chef du Parti réformiste concilie-t-il son impôt uniforme avec sa déclaration que l'on ne devrait pas prendre davantage d'argent dans l'enveloppe des impôts sur le revenu des particuliers?

(1155)

M. Manning: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Ma réponse se divise en deux volets.

D'abord, le député a laissé entendre que nous devrions remercier le ministre de n'avoir pas augmenté l'impôt sur le revenu des particuliers. Je lui rappelle-et il le sait très bien-que l'on puise toujours dans la poche du même contribuable. Ce ne sont pas les automobiles qui paieront la hausse du prix de l'essence d'un cent et demi le litre. Ce sont les gens. C'est l'ensemble des Canadiens qui assumera ces hausses de taxe de plus de un milliard de dollars par année, qui sont prévues dans le budget. Il importe peu, pour les simples contribuables, de savoir comment on trouvera les fonds supplémentaires. En bout de ligne, ce sont eux qui paient.

Le député parle ensuite des conséquences d'un impôt uniforme pour la planification budgétaire et les contribuables. Selon moi, c'est toujours la charge fiscale totale qui pose un problème. Si l'on peut plafonner les dépenses au point d'alléger le fardeau fiscal des contribuables, ce qui était l'objectif de notre Budget des contribuables, la charge totale que devraient assumer les Canadiens dans le cadre d'un régime d'impôt uniforme ou de n'importe quel autre régime serait moins élevée qu'elle l'est actuellement.

Notre objectif est d'alléger vraiment le fardeau fiscal des contribuables, au moyen d'une réforme fiscale, mais d'abord et avant tout par une réduction des dépenses, qui sont la cause première des impôts trop élevés.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, j'ai seulement un petit commentaire et une question pour mon honorable collègue, le chef du Parti réformiste. Dans le Budget, on s'aperçoit qu'au niveau des mesures qui sont prises en agriculture dans l'est du pays, on va couper 32 millions de dollars au Québec. On va couper également bien sûr des mesures, celle du Nid-de-Corbeau, dans l'Ouest, mais par contre, on va compenser les agriculteurs dans ce coin-là avec une somme globale de 2,9 milliards de dollars.

On voit là, dans cette mesure, ce qui justement au Québec pose un problème, dans ce pays. C'est-à-dire qu'on prend de l'argent et qu'on le met ailleurs et que nous, on n'en a pas. Et je prends, à titre d'exemple, avant de poser ma question, tout le domaine de l'énergie au Canada et au Québec. On a trois sortes d'énergie: pétrochimique, nucléaire et électrique. On a investi massivement dans l'énergie pétrochimique, on le voit avec Hibernia, des milliards de dollars. On a investi massivement, et je parle de


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fonds fédéraux, dans l'énergie des CANDU. Ce sont 12 milliards de dollars qu'on a investis dans cela depuis le début, toujours des fonds fédéraux auxquels le Québec participe à 25 p. 100, et on n'a jamais rien investi dans l'électricité du Québec.

C'est ce qu'on dit. Je pense que ce que mon honorable collègue est en train de nous dire quand il nous dit: «We are going to hit the wall quite soon», et je suis tout à fait d'accord avec lui, ce qu'il nous promet, c'est l'apocalypse et nous, ce que nous disons au Québec, c'est que notre apocalypse à nous, c'est de rester dans ce système.

Est-ce que mon honorable collègue pourrait nous expliquer comment il voit les différences de ce qui se passe entre l'ouest du pays et le Québec?

[Traduction]

M. Manning: Monsieur le Président, je peux répondre à un certain nombre de points de l'intervention du député, que je remercie par ailleurs d'avoir soulevé ces questions. Je lui rappelle qu'Hydro-Québec n'a jamais payé d'impôts et que cette société n'a jamais non plus été victime d'une attaque du gouvernement fédéral, comme l'a été le Programme énergétique national par exemple. C'est l'une des différences entre les traitements qu'on a réservés à ce secteur dans l'Ouest et au Québec.

Pour ce qui est des conséquences de ce budget pour l'agriculture, j'ai entendu des députés formuler d'autres commentaires insinuant que le gouvernement avait été injuste en annulant le tarif du Nid-de-Corbeau et en prévoyant des indemnisations de l'ordre de 1,6 milliard de dollars pour les agriculteurs de l'Ouest, alors que les subventions à l'industrie laitière, qui est québécoise pour une bonne part, sont réduites de 30 p. 100.

Je rappelle au député que l'industrie laitière bénéficie de deux sources de subventions. Le gouvernement lui verse une subvention directe, mais la gestion de l'offre lui assure aussi une protection considérable. Cette subvention est versée directement par le contribuable, et non par le gouvernement. Si l'on additionne ces niveaux de subvention, on constate que l'aide aux industries québécoises assujetties à la gestion de l'offre est aussi élevée ou sinon plus que celle dont jouit le commerce du grain et du bétail, dans l'Ouest, qui se pratique davantage selon les principes du marché libre.

Les députés du Québec devraient penser que, si le Québec devient indépendant, son gouvernement ne pourra plus subventionner et protéger ses industries comme il l'a fait par le passé. Les conséquences pour ses agriculteurs seront donc infiniment plus graves qu'elles ne peuvent l'être à la suite de ce budget.

(1200)

M. David Walker (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je veux dire au chef du troisième parti-sur un ton humoristique, rien d'autre-que s'il prétend parler sans accessoires, je l'invite à regarder ce que nous faisons, puis à jeter un coup d'oeil autour de lui; il verra bien qu'il est arrivé bien préparé pour son intervention.

Je suis très heureux d'intervenir dans ce débat aujourd'hui. C'est peut-être le moment le plus important que nous vivrons jamais à la Chambre-le débat sur le budget des dépenses de l'exercice 1995, que le ministre des Finances a présenté hier à la Chambre.

Je n'ai pas besoin de préciser que le débat porte non seulement sur la question des compressions, mais aussi sur des questions de fond et sur l'examen des programmes. Le ministre des Finances a pris des décisions fondamentales quant à la façon dont notre gouvernement et notre population allaient devoir agir pour redéfinir le rôle de l'État.

L'idée générale est claire: pour atteindre les objectifs du gouvernement et, j'espère, de tous les députés, nous devions créer un contexte favorisant la croissance économique, la création d'emplois pour les Canadiens et l'émergence d'une nouvelle période d'abondance qui bénéficiera à tous les Canadiens. Dans ce contexte, la première mesure que nous avons proposée était de corriger le tir et de veiller à ce que le gouvernement fasse bien les choses, ici, à Ottawa.

[Français]

Ce Budget réalise des économies considérables de manière à tenir l'engagement de réduction du déficit pris dans notre livre rouge. De plus, si l'économie évolue de manière plus favorable que prévu dans nos hypothèses extrêmement prudentes, le déficit pourrait diminuer encore plus vite.

[Traduction]

Nous en récolterons les fruits non seulement cette année ou l'année prochaine, mais comme nous avons bien fait les choses cette fois-ci, dans les années à venir.

J'aimerais faire un aparté pour dire que tout le monde dans cette Chambre devrait être encouragé par les nombreuses réactions extrêmement positives. Ce budget a été accepté par les Canadiens d'un océan à l'autre, par les gens que notre déficit inquiète mais qui, par ailleurs, voulaient être rassurés que le gouvernement n'allait pas bouleverser leur vie inutilement. Il est vrai que beaucoup de gens, de tous les milieux, en paient le prix de bien des façons. Par ailleurs, il est gratifiant de voir que les Canadiens ont évolué au point où ils peuvent dire: «Nous sommes sur la bonne voie. Nous prenons les mesures nécessaires pour le bien du Canada.» Les observateurs étrangers, dont dépend en partie notre succès, ont bien vu eux aussi que le ministre des Finances avait pris les mesures qui s'imposaient pour assainir les finances publiques.

Ce budget est très différent des budgets conservateurs précédents. C'est une question qu'on me pose souvent. Tout d'abord, nous ne nous contentons pas de nous gargariser de mots. Nous faisons en fait des choses bien précises. Nous allons réussir. Ce budget ne contient pas de vagues promesses, mais bien des engagements fermes. Nous avons fait la preuve, l'an dernier, que nous étions capables de tenir nos engagements. Nous le prouverons encore l'an prochain et toutes les années à venir.

Chose la plus importante pour les députés de ce côté-ci de la Chambre, en essence, ce n'est pas un budget conservateur. Il s'inscrit dans la tradition des libéraux, bâtisseurs de la nation. Il prend clairement ses racines dans les principes qui leur sont


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chers, à savoir le leadership économique, la compassion et la recherche de l'équité. Nous ne laisserons pas en héritage aux Canadiens une autre décennie de déception à l'égard du budget et du gouvernement.

Le budget d'aujourd'hui est un cri de ralliement. Le moment est venu de saisir les occasions et de relever les défis qui se présentent à nous. Comme notre premier ministre se plaît à le répéter, si nous devons réduire le gouvernement, autant le faire pendant que l'économie est en expansion. L'économie est maintenant en pleine croissance; le moment est venu de passer à l'action.

Au cours de cette dernière année, nous avons été témoins de la création de plus de 443 000 emplois permanents, non pas du fait de notre intervention, mais grâce à la sagesse collective des Canadiens qui ont repris confiance dans l'économie. Nous avons enregistré un taux de croissance bien supérieur à celui de tous nos partenaires du G-7. Nous avons montré aux nations industrielles du monde occidental comment relancer l'économie.

Nous ne prétendons pas être responsables d'une telle réussite. Nous savons que nous n'en sommes pas les auteurs, mais nous espérons contribuer à créer, pour les particuliers et les entreprises, un climat de confiance en l'avenir propice à une expansion économique continue.

(1205)

[Français]

Une occasion s'offre aussi sur le plan politique. Les Canadiens ont clairement indiqué qu'ils voulaient des mesures énergiques pour réduire la dette publique pour que nous puissions nous débarrasser de l'écrasant fardeau des impôts élevés et des taux d'intérêt qui en résultent.

Le défi à relever est tout aussi clair. Des risques bien réels pèsent sur l'avenir économique du Canada en raison d'une dette de 500 milliards de dollars qui nous rend extrêmement vulnérables à l'effet brutal des taux d'intérêt.

Et ces taux d'intérêt ont continué d'augmenter en raison de pressions originant des États-Unis et du Canada. Rien que depuis octobre, les taux à court terme ont augmenté d'environ 2,5 points.

[Traduction]

Il est très important de le souligner. Je tiens à dire à tous les parlementaires assemblés ici aujourd'hui que parfois au comité nous nous demandons si ce dernier a une influence, si les ministres écoutent, si le premier ministre écoute, si les députés de l'opposition ont de l'influence. Je crois que les délibérations du Comité des finances sont un parfait exemple de participation des parlementaires à l'élaboration de la politique.

Nous avons tenu de longues audiences. À l'automne, nous avons entendu plus de 650 témoins. Nous sommes parvenus à la conclusion que le gouvernement se devait d'être prudent, qu'il devait faire attention à l'augmentation des taux d'intérêt, que nous devions prendre des mesures draconiennes et délibérées pour réduire le déficit. Le ministre des Finances a tenu compte de notre avertissement.

Bien que nous semblions un peu extrêmes dans nos recommandations, la réalité nous a donné raison. Les taux d'intérêt ont augmenté, rendant la tâche du gouvernement encore plus ardue.

Il est tout à l'honneur du premier ministre, du ministre des Finances et autres collègues du Cabinet qu'ils aient réagi et produit un budget traduisant notre détermination à atteindre nos objectifs. C'est cette prudence qui poussera le gouvernement à prendre les mesures appropriées dans les années à venir.

Arrêtons-nous un moment. Que se serait-il passé si nous avions décidé de ne rien faire? Il y a dans ce pays et devant le Parlement des voix qui clament: «La situation n'est pas si catastrophique que ça. Toute cette histoire de déficit n'est qu'un complot de la droite qui veut détruire nos programmes sociaux.» Si nous n'avions rien fait, le déficit aurait augmenté de 5 milliards de dollars cette année et de 10,6 milliards l'an prochain. Autrement dit, nous serions moins avancés qu'au moment où nous avons formé le gouvernement en promettant de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB. Ces mesures sont indispensables et nous suivons les démarches nécessaires pour rectifier la situation.

Pour atteindre nos objectifs budgétaires, comme le ministre des Finances l'a expliqué hier, nous allons réaliser des économies cumulatives de 15,6 milliards de dollars au cours des deux prochains exercices. De ce montant, 13,4 milliards de dollars résulteront de réductions des dépenses; il n'y aura aucune hausse de l'impôt sur le revenu des particuliers.

Comme le chef du troisième parti vient de le déclarer, ce sont d'excellentes nouvelles pour le Canada. En fait, nous réglons le problème de la dette publique en reconnaissant le caractère légitime des familles de classe moyenne et le fait que le fardeau fiscal leur échoit de plus en plus depuis quinze ans et pèse donc sur leurs enfants qui peuvent difficilement compter sur la sécurité financière.

Le gouvernement a écouté ce message très attentivement et il y a répondu prudemment, de telle sorte que les Canadiens comprennent que nous mettons de l'ordre dans les affaires gouvernementales et que c'est en dernier ressort que nous demandons leur aide.

[Français]

Nous prenons également des mesures déterminées pour rendre le régime fiscal plus équitable, éliminer les échappatoires et veiller à ce que la grande entreprise contribue davantage à la lutte contre le déficit.

[Traduction]

Pour l'ensemble des trois prochains exercices, les mesures budgétaires prévoient près de sept dollars de réduction des dépenses pour chaque dollar de recettes. Ces mesures modifient la taille et la forme du gouvernement en imposant des choix difficiles parmi les priorités. En 1996-1997, les dépenses des programmes auront diminué, passant de 120 milliards à 108 milliards de dollars. Depuis des décennies, aucun gouvernement n'a pris une mesure aussi énergique.


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(1210)

Le fait le plus important, c'est qu'en 1996-1997, la dette cessera d'augmenter plus vite que l'économie. Quand le ministre des Finances déclare publiquement que nous allons venir à bout du problème, que nous allons sortir de ces ornières, il met le doigt sur le point capital. Le ratio de la dette au PIB commencera à diminuer. Voilà la clé d'une situation financière soutenable et nous sommes déterminés à adopter en permanence la trajectoire descendante.

Il y aura des dividendes. Nous tenons à ce que les Canadiens le sachent. C'est la première étape. Il n'est pas question de dresser ou d'abandonner un budget le soir même de l'annonce; il faut permettre aux Canadiens et aux ministères de s'adapter. Il y aura un dividende. Ce dividende découle de la prudence de nos hypothèses et c'est ce qui nous permettra d'atteindre notre objectif.

Nous constituons de substantielles réserves pour éventualités: 2,5 milliards de dollars en 1995-1996 et 3 milliards de dollars l'année suivante. Même si les taux d'intérêt dépassent d'un point et demi nos hypothèses, nous pourrons atteindre nos objectifs.

C'est cette prudence qui nous a permis d'atteindre notre objectif et de faire encore mieux que nous l'avions prévu, et c'est ce qui contribue à renforcer la confiance des Canadiens dans leur gouvernement national. Nous prenons des engagements que nous pouvons tenir. Nous évitons de fixer des objectifs à atteindre cinq ou dix ans plus tard, de sorte que si jamais une crise survient, comme c'est le cas au Mexique, on dira: «Ne vous inquiétez pas de ce problème à court terme. Oublions cela pour l'instant, nous y reviendrons plus tard.»

À la Chambre des communes, nous disons que, si nous sommes confrontés à une crise, nous devons nous adapter, réduire nos dépenses et atteindre notre objectif une année après l'autre. C'est comme cela qu'on bâtit la confiance; ce n'est pas en fixant un vague objectif pour l'avenir et en disant: «Nous pouvons ramener le déficit à zéro en trois ou quatre ans.» Un tel comportement n'aide pas, il ne fait qu'engendrer de la frustration. Les politiciens qui passent leur temps à semer des promesses récoltent l'amertume.

Il est très important que chaque député saisisse bien la responsabilité qui lui incombe dans ce débat de faire comprendre aux Canadiens que nous allons atteindre nos objectifs en agissant de façon équitable et uniforme, de sorte qu'ils garderont du milieu des années 1990 un meilleur souvenir que de celui des années 1980, car il y aura une véritable réalisation de leur gouvernement national.

[Français]

Pour l'avenir, nos réserves pour éventualités peuvent jouer un double rôle. Non seulement elles assurent la réalisation de nos objectifs, mais, si elles ne sont pas nécessaires, elles ne seront pas dépensées. Cela permettra de réduire encore plus le déficit.

Voilà qui souligne un autre dividende que procure nos hypothèses économiques prudentes.

[Traduction]

Si les taux d'intérêt et la croissance dépassent nos prévisions et évoluent selon la moyenne du secteur privé, en 1996-1997, le déficit pourrait chuter de façon marquée. Il pourrait correspondre à moins de 2,5 p. 100 au lieu de 3 p. 100 du PIB.

Le gouvernement se montre très prudent à cet égard. Nous voulons que les Canadiens comprennent que nos objectifs sont réalistes; si nous obtenons de meilleurs résultats, c'est que nous avons de la chance. Nous établissons des prévisions avec prudence parce que nous voulons réussir. Nous sommes d'avis que la crédibilité, non pas du gouvernement, mais du pays est fondée sur l'atteinte d'objectifs une année après l'autre.

L'essentiel du processus qui permettra d'atteindre ces objectifs n'est pas le fruit d'une rapide rencontre autour d'une table entre le ministre des Finances et quelques fonctionnaires. Au cours de la première année où j'ai collaboré avec le ministre, il m'appelait de temps à autre à son bureau pour tenter de déterminer les mesures à prendre. Nous n'étions au pouvoir que depuis quelques mois et nous traversions une grande période d'apprentissage.

Le ministre a alors décidé, à juste titre, d'effectuer un examen des programmes, décision qu'ont d'ailleurs approuvée ses collègues au Cabinet. Cela peut paraître, à bien des égards, ésotérique, mais un examen des programmes donne à un groupe de ministres l'occasion de discuter de la façon dont ils veulent remanier le gouvernement et d'élaborer une nouvelle stratégie gouvernementale. Le but n'était pas de critiquer les programmes et de dire: «Réduisons ceci et cela.» Le but était de dire: «Dans chacun des ministères, quel programme pouvons-nous abandonner et sur quoi devons-nous mettre l'accent? Comment devons-nous nous y prendre pour élaborer une stratégie industrielle?» Mon collègue de Don Mills participe à cet exercice. Comment nous y prendre pour élaborer une stratégie dans le domaine des sciences? Comment nous y prendre pour réduire les subventions agricoles? Que faire pour rendre le réseau de transport plus efficace? Ce ne sont pas des questions en l'air; ce sont de graves questions auxquelles il est difficile de répondre. D'ailleurs, les réponses que nous donnons cette année ne sont pas des réponses définitives.

(1215)

Nous constaterons une progression constante. Nous reviendrons à la charge avec de nouvelles solutions. Ce budget stimulera les députés de ce côté-ci de la Chambre et les incitera à prendre les mesures qui s'imposent et à modifier les opérations gouvernementales. J'espère que les partis d'opposition feront des suggestions que nous pourrons appliquer afin de créer un gouvernement national de plus en plus fort.

[Français]

Bien entendu, nous n'avons pas attendu le Budget pour prendre des mesures concrètes. Notre examen des agences, offices, conseils et commissions, terminé au début du mois, entraînera la disparition de 73 de ces organismes sur 120. Les 47 organismes restant seront restructurés et rationalisés. Cela permettra d'éliminer 665 postes dont les titulaires sont nommés par le gouverneur en conseil et d'économiser 10 millions de dollars par an.


10128

[Traduction]

Je pourrais donner de nombreux exemples de projets qui ont connu un énorme succès. Au ministère des Pêches et des Océans, nous réduirons les dépenses de 210 millions de dollars en trois ans, car nous avons constaté qu'il y avait plus de fonctionnaires que de pêcheurs actifs. Le ministère des Transports cessera d'agir en exploitant pour se concentrer sur son rôle d'organisme de réglementation et de décideur.

La population se pose de grandes questions sur les subventions aux entreprises.

[Français]

En fait, la réduction des subventions aux entreprises sera mise en oeuvre dans tous les ministères. La réduction touche les subventions à l'agriculture et au transport qui ont été instituées il y a des dizaines d'années.

[Traduction]

En tout, le budget réduira de moitié les subventions, qui passeront de 3,8 milliards de dollars à 1,5 milliard en 1997-1998.

Nous prendrons également d'autres mesures pour recouvrer les frais, notamment dans le domaine de l'immigration.

En ce qui concerne les transferts aux provinces, nous annonçons la réforme du régime des transferts fédéraux aux provinces. Nous croyons que nos solutions innovatrices nous permettront de mettre sur pied un régime plus durable qui répondra aux besoins de la population.

Dans le dernier budget, pour prouver notre appui à chacune des provinces, nous avons renouvelé le programme de péréquation pour cinq ans. Nous tenons cet engagement dans le budget déposé hier.

À compter de 1996-1997, à l'instar d'autres programmes importants, notamment le Financement des programmes établis au titre de la santé et de l'éducation, le Régime d'assistance publique du Canada sera transformé en un mécanisme de financement global appelé le transfert social canadien.

[Français]

Il s'agit au fond de convertir le Régime d'assistance publique du Canada au mode de financement global qui s'applique déjà au FPE, ce qui permettra aux provinces d'innover en fonction de leurs priorités.

Cependant, il est bien clair aussi, dans le Budget, que les principes de la Loi canadienne sur la santé devront être respectés. Et aucun changement n'est apporté au principe selon lequel les provinces doivent fournir des services d'assistance sociale sans exiger de durée minimale de résidence.

[Traduction]

Sous le régime du TSC, les transferts versés aux provinces seront amputés de 2,5 millions l'an prochain et de 4,5 millions l'année suivante. Cela signifie que, l'an prochain, l'ensemble de tous les principaux transferts aux provinces, en espèces et en points d'impôt, sera réduit de 4,4 p. 100 par rapport à leur niveau actuel.

Par opposition, les dépenses fédérales diminueront de 7,3 p. 100. Pour donner un ordre de grandeur, notons que les réductions au cours de la deuxième année ne représenteront que 3 p. 100 de l'ensemble des recettes provinciales. Nous avons donc pris des mesures qui nous frappent, nous, plus durement que les autres.

Il reste deux questions à aborder: l'assurance-chômage et la protection des aînés. Permettez-moi d'en parler brièvement.

[Français]

Dans le courant de l'année, le ministre du Développement des ressources humaines présentera des propositions législatives afin de mettre en place, à partir des meilleurs éléments de l'assurance-chômage, un régime réformé qui mettra l'accent sur l'aide plutôt que sur la dépendance.

(1220)

[Traduction]

Cette réforme aura lieu en 1996 et permettra de réduire d'au moins 10 p. 100 la taille du programme. Cela signifie que la réforme nous permettra d'économiser 700 millions de dollars en 1996-1997. Je reviendrai, à un moment plus propice, à la question de la protection des aînés.

J'ajouterai que ce budget peut paraître dur à bien des égards, mais l'optimisme dont ont fait preuve les Canadiens hier soir et encore aujourd'hui prouve que nous sommes sur la bonne voie et que nous jouissons de l'appui de la population.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt les propos de mon honorable collègue qui vante les mérites de ce nouveau Budget, disant que c'était peut-être l'occasion d'agir avec fermeté pour redresser les finances publiques. Est-ce qu'il est d'accord avec moi pour dire qu'il semble que ce Budget a été plutôt souple pour les banques et les fiducies familiales?

On exige des banques, pour les deux prochaines années, à peu près 100 millions de dollars seulement, pour une seule fois pendant ces deux années, ce qui ne représente vraiment pas beaucoup, quand on pense que les banques sont les entreprises qui ont fait le plus de profits, depuis les cinq à dix dernières années. La Banque royale, seulement l'année dernière, a réalisé 1,2 milliard de profits nets. Et ce n'est qu'une seule banque.

Ensuite, le fait que les changements aux fiducies familiales soient reportés à l'année 1999, dans cinq ans, cela donne toute la latitude à ces fiducies, aux plus riches gens du pays, d'utiliser un autre véhicule pour camoufler ces fonds, pour éviter toute forme de taxation. Alors que le gouvernement aurait eu, seulement avec eux, l'occasion d'aller chercher peut-être un milliard de dollars, est-ce que lui, le député, pense vraiment que ce gouvernement a agi avec fermeté et justice, par rapport aux fiducies familiales et aux banques?

M. Walker: Madame la Présidente, le député a noté deux mesures et je voudrais en discuter. Premièrement, concernant la question des fiducies familiales, nous avons éliminé tous les avantages fiscaux découlant de ces fiducies et nous avons abrégé le report de la règle des 21 ans. Nous commençons immédiatement à nous occuper de l'impôt sur les fiducies familiales.


10129

[Traduction]

Il y avait deux questions à régler dans le cas des fiducies familiales et nous avons pris deux mesures pour ce faire: la première vise à modifier immédiatement les avantages prenant la forme d'un fractionnement du revenu et la deuxième porte sur l'impôt sur le capital, la règle des 21 ans. Cette deuxième mesure ne pourra s'appliquer qu'en 1999. À cause d'une décision prise par le gouvernement précédent, il faut prévoir une période de transition de quelques années. En ce qui concerne le revenu, nous prendrons immédiatement des mesures, en ce qui concerne le capital, nous commençons.

[Français]

Pour ce qui est de l'autre question concernant les banques, nous avons augmenté une taxe spéciale pour les banques, qui rapportera 60 millions de dollars pour l'année courante.

[Traduction]

À notre avis, il s'agit d'un grand pas dans la bonne direction. Cela incitera les banques à se pencher sur plusieurs questions qu'elles doivent régler immédiatement.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Madame la Présidente, le député a fait allusion aux transferts aux provinces et au fait que selon lui, elles seraient peu affectées ou moins affectées que les autres en comparant des pourcentages de coupures et là, il y a tout un débat qui est soulevé autour des normes, les normes nationales. Que va-t-il arriver avec les standards?

On peut voir plusieurs phrases dans les documents, quant à ces références, et ce n'est pas tellement clair. J'aimerais qu'il nous précise sa vision à lui de cela et je vais citer un passage du discours du ministre des Finances, qui disait: «Les provinces seront désormais libres de concevoir des programmes sociaux innovateurs, des programmes qui répondent aux besoins d'aujourd'hui, plutôt qu'à des règles inflexibles.»

Alors, il confirme que par le passé, il y avait des règles inflexibles, ce qui est déjà une bonne étape. Mais c'est la phrase suivante que j'aimerais qu'il m'explique: «Cependant, la souplesse ne veut pas dire que tout est permis.». C'est écrit en italique, en caractères différents. Qu'est-ce que ça veut dire: «la souplesse ne veut pas dire que tout est permis»?

Ça veut dire que le gouvernement fédéral va continuer à exercer un contrôle. Hier, le ministre du Développement des ressources humaines, qui participait à une émission de radio en même temps que moi, disait: «Avant, on n'avait pas de contrôle sur les fonds. Maintenant, on va en avoir, parce qu'on va s'entendre avec les provinces sur des normes qu'on va définir conjointement.»

(1225)

On sait très bien ce que cela veut dire, des normes conjointes. J'aimerais donc que le député m'explique ce que cela veut dire que «la souplesse ne veut pas dire que tout est permis».

[Traduction]

M. Walker: Madame la Présidente, je remercie le député pour sa question. Les transferts aux provinces et la façon de faire ces transferts occupent depuis toujours une place importante dans la politique canadienne.

Essentiellement, la stratégie du gouvernement fédéral depuis le début des années 60 a pris la forme d'un programme qui porte le nom de Régime d'assistance publique du Canada. Ce programme permet aux provinces d'accéder librement à des fonds fédéraux si elles remplissent certaines conditions établies par Ottawa. En 1977, lors de la mise sur pied du financement des programmes établis, nous avons mis des fonds globaux à la disposition des provinces pour l'éducation postsecondaire et la santé à condition qu'elles se conforment à la Loi canadienne sur la santé.

Ce que les provinces réclament dans les discussions depuis le début des années 80, c'est une plus grande flexibilité du Régime d'assistance publique du Canada pour pouvoir concevoir des programmes sociaux plus innovateurs. Par contre, beaucoup de groupes d'intérêts nationaux estiment que l'appui à l'égard de l'éducation postsecondaire varie réellement d'une région à l'autre du pays. De plus, les types de services offerts dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada varient également beaucoup.

Nous avons décidé de retourner aux principes de base, de trouver une façon de donner aux provinces une plus grande flexibilité dans les transferts au titre des programmes sociaux. En même temps, en tant que gouvernement national, nous devons nous assurer que nous respectons les principes qu'appuie le Parti libéral. Dans le cadre des consultations budgétaires qui ont lieu normalement lorsque les mesures législatives découlant du budget seront présentées, nous aurons l'occasion de discuter de cette question. Je suis certain que les ministres responsables des finances et de la politique sociale et les premiers ministres des provinces voudront en parler également.

Mme Jane Stewart (Brant, Lib.): Madame la Présidente, je veux féliciter le secrétaire parlementaire pour son discours et lui dire à quel point j'ai aimé travailler avec lui au Comité permanent des finances.

Il a mentionné que le travail du comité a eu un impact important sur le ministre et sur son budget. Je suis d'accord avec lui sur ce point, car j'ai pu constater que le budget reflétait les recommandations formulées par le comité et les suggestions faites par les Canadiens. Nous avons donné aux Canadiens la chance de participer au débat sur le budget, ce qui est très important pour eux.

Je voudrais demander au secrétaire parlementaire s'il s'attend à ce que le ministre des Finances continue son processus de consultation auprès des Canadiens et demande encore une fois au comité de participer à ce processus en vue de la préparation du prochain budget.

M. Walker: Madame la Présidente, le processus sera beaucoup mieux rodé l'an prochain. Je crois que nous avons tous appris quelque chose l'an dernier. Nous aimerions commencer un peu plus tôt.


10130

Le Comité des finances doit tenir des consultations en vertu d'un ordre de la Chambre et il continuera donc de le faire.

Je tiens à signaler aussi que le gouvernement a changé la façon dont les ministères produisent leurs budgets. Selon la nouvelle façon de procéder, chaque comité participera à la préparation du budget. Nous allons nous servir de l'expérience de l'an dernier pour améliorer le processus afin de le rendre le plus efficace possible. Le Comité des finances sera au centre de ce processus mais, contrairement à l'an dernier, nous ne serons pas les seuls participants. Le travail des autres comités nous aidera désormais à améliorer le budget chaque année.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, je voudrais demander au secrétaire parlementaire si son impression n'est pas la même que la mienne. Pour ce qui est des programmes de création d'emplois, j'ai l'impression qu'il n'y a pas grand-chose là-dedans. Le ministre des Finances fait un peu comme le chômeur découragé qui vendrait son coffre à outils. Cela sous-entendrait qu'il n'a plus d'espoir de retourner sur le marché du travail.

Je ne vois aucune mesure pour la création d'emplois dans ce Budget. J'ai plutôt l'impression que le ministre vend son bois pour payer son poêle. Il y a quelque chose qui ne va pas dans cette affaire.

Le secrétaire parlementaire pourrait-il nous dire ce qu'il a vu de miraculeux dans cela pour la création d'emplois?

M. Walker: Madame la Présidente, nous avons annoncé l'an passé notre programme des infrastructures. Nous avons créé beaucoup de postes et beaucoup de projets avec ce programme.

(1230)

Ce Budget nous permettra de continuer notre travail de création d'emplois à la grandeur du Canada. Je suis assuré que cette stratégie nous réussira.

La présidente suppléante (Mme Maheu): J'ai l'honneur de souhaiter la bienvenue, une fois de plus, à notre chef de l'opposition, à qui je cède la parole.

Des voix: Bravo!

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Madame la Présidente, seize mois après l'élection d'octobre 1993, le gouvernement vient d'effectuer tout un virage. Finie la prétention affichée pendant une bonne partie de l'année 1994 à l'effet qu'il n'y avait pas à Ottawa de véritable crise budgétaire, et que l'on pouvait se contenter de faire du «surf» sur la vague de la reprise économique, vague qui nous est venue de nos voisins du Sud, pour une bonne part.

Quand un pays aussi endetté que le Canada prévoit, comme ce fut le cas dans le Budget de février 1994, une réduction dans ses déficits fondée sur des hypothèses de taux d'intérêt totalement invraisemblables, cela ne rassure personne, et encore moins les créanciers, canadiens ou étrangers. Ces derniers sont devenus, à force d'irresponsabilité fiscale du gouvernement fédéral, les véritables maîtres de la situation et les juges de la rectitude fiscale. Le gouvernement canadien, ne pouvant se passer des prêteurs extérieurs, ceux-ci ont eu tout le loisir, au cours des derniers mois, de siffler la fin de la récréation. Crise du dollar et hausses des taux d'intérêt sont devenues les deux faces d'une même médaille. En ce moment même, les taux d'intérêt réels sont parmi les plus élevés qu'on n'ait jamais connus. On le doit à une réalité aussi simple que brutale: au 31 mars 1995, la dette fédérale atteindra 546 milliards de dollars, soit 73,2 p. 100 du Produit intérieur brut. Lorsqu'on superpose cette dette et celle des provinces, 210 milliards à la même date, on obtient une dette globale équivalant à 102 p. 100 du Produit intérieur brut.

Un pays aussi riche que le Canada a pratiquement ainsi perdu son indépendance monétaire et budgétaire. Le tiers des recettes fédérales, 42 milliards de dollars, aura été consacré cette année au service de sa dette.

J'ouvre ici une petite parenthèse. On n'est peut-être pas à deux milliards près, mais je m'étonne de voir que le ministre des Finances a, dans son exposé du 18 octobre 1994 devant le Comité permanent des finances, évalué le service de la dette pour l'année fiscale 1994-1995 à 44,3 milliards, pour ensuite le ramener à 42 milliards dans son Budget d'hier, alors que les taux d'intérêt ont beaucoup augmenté après octobre 1994, ce que personne ne pouvait soupçonner. C'est tout de même curieux, et je ne puis m'empêcher de penser que le ministre des Finances fait parfois de la politique-avec un petit «p»-avec ses estimations financières. Le Budget d'hier n'est pas, comme on le verra, exempt de cette pratique. Fermons la parenthèse.

Les créanciers ont donc claqué des doigts, et le petit livre rouge, écrit par le même ministre des Finances, s'est envolé en fumée. Les coupures dans les programmes sociaux, la constitution d'une caisse excédentaire de l'assurance-chômage, dont la cagnotte s'élèvera à pas moins de cinq milliards de dollars, la miniaturisation brutale des tranferts en espèces aux provinces, rien de tout cela ne figurait au sommaire du fameux petit livre rouge.

Nous, de notre côté, parlions du gras dans la machine fédérale, de la réduction possible du budget de la Défense, de la rationalisation des abris fiscaux, des nombreux dédoublements entre le fédéral et les provinces. Mais, de l'autre côté de la Chambre, on affichait un sourire un peu narquois, on disait, un tantinet condescendant: «On sait bien, vous du Bloc, vous voulez éviscérer le gouvernement fédéral. Vous voulez couper six milliards dans les budgets de fonctionnement du gouvernement, plus deux milliards à la Défense, alors que le Canada est le pays de l'OTAN qui dépense le moins à ce poste: allons, soyez sérieux, messieurs du Bloc!» Voilà ce que l'on nous disait, il n'y a pas si longtemps.

Hier, le ministre des Finances nous a dit: «Vous aviez raison! Dans trois ans, les dépenses non statutaires des ministères fédéraux seront réduites, en valeur absolue, de 9,8 milliards.» Mieux vaut tard que jamais, même si chacune des nombreuses cibles de «l'Examen des programmes» ne mérite pas forcément le sort qui lui est réservé. C'est ailleurs que le Budget pèche par dureté sociale ou sombre dans la manipulation.


10131

[Traduction]

Le discours du ministre des Finances hier m'a rappelé une chanson que chantait Dinah Washington à la fin des années 50. Certains d'entre vous se souviendront peut-être de cette jolie ballade intitulée What a Difference a Day Makes (Que de changements en un jour). Le budget d'hier aurait pu avoir comme sous-titre «Que de changements en une année».

(1235)

Pensez à l'an dernier. Qui parlait de la crise de la dette, du gras dans la fonction publique fédérale, des dédoublements coûteux entre les gouvernements fédéral et provinciaux, et ainsi de suite? Étaient-ce les libéraux? Évidemment pas. Ils étaient tous, ou presque tous, beaucoup trop occupés à citer des passages de leur bible, le livre rouge. Le premier ministre disait: «Quelle crise de la dette? Le Canada va très bien.» Un an plus tard, obligé à voir la réalité en face par les marchés monétaires qui tiennent maintenant le gros bout du bâton, il ne chante plus la même chanson. Ces mêmes libéraux ne se gênent pas aujourd'hui pour faire des réductions.

L'objectif qui consiste à ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB, la clé de la discipline budgétaire dans le livre rouge, est devenu un simple objectif intermédiaire qui doit nous conduire à un budget équilibré. Aucune date n'a été fixée pour l'atteinte du nouvel objectif. Cependant, on a l'impression que le ministre des Finances aimerait bien l'atteindre le plus tôt possible, et j'ajouterais, pratiquement à tout prix.

Par exemple, il parle avec lyrisme de la possibilité que le déficit se situe sous la barre des 19 milliards de dollars pour l'exercice financier 1996-1997. Là-dessus je mettrais un bémol pour deux raisons.

La première, c'est cette chose insondable que l'on appelle l'avenir. L'avenir peut apporter bien des surprises désagréables. Le ministre des Finances en sait quelque chose. Tout juste l'an dernier, ses prévisions des taux d'intérêt sont apparues complètement dépassées seulement deux mois après la présentation du budget à la Chambre. Qui avait prédit la crise mexicaine qui a commencé le 21 décembre dernier? Personne, en tout cas, pas publiquement. Si l'on se fie aux experts, tout allait bien au Mexique le 20 décembre.

On me dit que les économistes, comme bien d'autres professionnels respectés, ont tendance à suivre le troupeau. Cela explique en partie pourquoi leurs prévisions sont souvent interchangeables de l'un à l'autre et passent à côté des faits déterminants avec une belle constance. Toutes les récessions ont été prédites après coup. Dans le cas particulier qui nous occupe, on peut éprouver un certain malaise devant l'hypothèse budgétaire sur la croissance du PIB. L'an dernier, on prévoyait pour 1994 et pour 1995 des taux de croissance du PIB de 3 et de 3,8 p. 100 respectivement. Le premier chiffre était nettement en-deça de la réalité puisque la croissance a finalement été de 4,3 p. 100, grâce, en partie, à la vigueur de l'économie américaine.

Cette année, la prévision du taux de croissance pour 1995 est la même que celle de l'an dernier, 3,8 p. 100. Cela paraît un peu étrange puisque l'on prévoit que les taux d'intérêt seront beaucoup plus élevés que ce que l'on attendait l'an dernier. Selon certains signes, on sent déjà que les taux d'intérêt élevés font reculer la demande de biens de consommation. Nous ne pouvons certainement pas exclure la possibilité que le taux de croissance réelle soit de 2,5 p. 100 cette année. Dans une telle éventualité, le plan du ministre des Finances en subirait le contrecoup.

Un autre facteur toutefois, invite à la prudence. Les compressions réelles de dépenses sont une chose, et elles devraient faire suite à l'examen des programmes. Toutefois, le budget contient d'autres compressions de dépenses que l'on pourrait inclure dans la catégorie des écrans de fumée.

[Français]

Le Budget accorde beaucoup d'importance à un deuxième bloc de réduction, celui qui touche les transferts aux provinces. Les paiements de transfert comprennent essentiellement trois programmes différents: le Régime d'assistance publique du Canada, le Financement des programmes établis qui regroupe la santé et l'enseignement postsecondaire, et la péréquation. Ils n'évoluent pas forcément tous dans le même sens. Et la comptabilisation de ces paiements par le fédéral inclut non seulement les paiements en espèces, mais aussi le rendement des points d'impôt transférés aux provinces, au moment des ententes sur les programmes à frais partagés. C'est une manière pour le fédéral de mieux paraître. Mais il n'a aucun contrôle sur le rendement des points d'impôt, et surtout il ne peut récupérer ces points: il n'en a jamais été question. Ce que le fédéral contrôle, ce sont les transferts en espèces dont l'évolution constitue le véritable test de l'équité fédérale.

Or, voilà que le fédéral frappe un grand coup. Jugeant que, et je cite le discours du Budget: «À l'heure actuelle, les transferts au titre du Régime d'assistance publique du Canada s'accompagnent d'un grand nombre de conditions inutiles, qui limitent la capacité d'innovation des provinces,», le fédéral a décidé de fusionner avec le Financement des programmes établis et d'avoir ainsi, à compter de 1996-1997, un seul programme de transferts, appelé Transfert social canadien.

(1240)

Ce programme continue d'inclure, dans la comptabilité fédérale, des points d'impôt et des transferts en espèces. Et, du point de vue fédéral, c'est la beauté de la chose. Pour trois raisons différentes.

La première est que cela permet de réduire substantiellement les transferts en espèces, qui constituent la seule véritable dépense pour le fédéral, et donc d'afficher pour les marchés financiers une feuille de route plus impressionnante au chapitre du déficit, tout en présentant à l'opinion publique canadienne, et c'est le deuxième avantage, une image différente à l'aide du calcul intégrant le transfert des points d'impôt.

On peut ainsi lire dans le discours du Budget, et je cite: «L'ensemble des principaux transferts fédéraux aux provinces sera réduit de 4,4 p. 100 en 1996-1997 par rapport à leur niveau actuel de 1994-1995. Cette réduction est plus favorable que celle qui touche nos propres dépenses, puisque ces dernières, à l'exception des transferts aux provinces, diminueront de 7,3 p. 100 au cours de la même période.»


10132

Le troisième avantage de ce démarrage du Transfert social canadien réside dans la date d'allumage: pas cette année, mais au début de 1996-1997, donc après le référendum québécois. Il y a là quelque chose de révélateur, involontairement sans doute, mais indubitablement révélateur. Si ce nouveau programme était si bénéfique pour les provinces, dont le Québec, et s'il démontrait vraiment la «flexibilité» du fédéralisme canadien, ne devrait-il pas être opérationnel dès le début de la prochaine année fiscale, c'est-à-dire le 1er avril prochain? Comme ça, tous les Québécois verraient de leurs propres yeux la qualité de la marchandise avant d'apposer leur croix historique au référendum. En réalité, il n'y a aucune chance au monde pour que cela se produise ainsi. On va comprendre pourquoi. Toutes les provinces sont d'ailleurs concernées.

[Traduction]

Toutes les provinces s'inquiètent des répercussions du nouveau transfert social canadien. Si on regarde à la page 37 du discours du budget, la vérité apparaît toute nue.

De 1994-1995 à 1996-1997, les transferts en espèces passeront de 17,3 milliards de dollars à 12,9 milliards, soit une chute de 4,4 milliards. Il faut tenir compte des versements de péréquation qui augmentent d'une année à l'autre pour se faire une image globale des paiements de transfert aux provinces. Mais même en tenant compte de ces versements, il y aura une baisse de 3,6 milliards de dollars dans les transferts fédéraux aux provinces en deux ans. Nous parlons ici d'une réduction réelle de 14 p. 100, non pas d'une réduction théorique de 4,4 p. 100 comme aimerait nous le faire croire le ministre des Finances. Il s'agit donc de compressions plus radicales que celles qui frappent les dépenses fédérales au titre des programmes.

Donc, qui se laissera tromper par les affirmations voulant que ce programme vise à définir un système fédéral plus décentralisé quand sa seule raison d'être, c'est de réduire les dépenses fédérales? À moins de prouver, au besoin, qu'il ne s'agit pas là d'un programme qui ne sera pas renouvelé, mais bien d'un programme qui disparaît graduellement, la somme globale, transferts fiscaux et en espèces, est donnée pour le programme de transfert en 1997-1998, mais le montant des transferts en espèces n'est pas donné séparément.

Cependant, puisque nous avons les données séparées pour les transferts fiscaux et les transferts en espèces pour chaque année de 1994-1995 à 1996-1997, il est assez facile de donner une bonne estimation des transferts en espèces pour 1997-1998. Ce chiffre serait d'environ 10,3 milliards de dollars, soit 2,5 milliards de moins qu'en 1996-1997. Fédéralisme flexible? Peut-être bien, mais pour qui?

Cette compression dans le transfert social canadien aux provinces représente plus de 40 p. 100 de la réduction des dépenses fédérales au titre des programmes entre 1994-1995 et 1996-1997. Cela permet au gouvernement fédéral de se targuer d'avoir un déficit inférieur à 25 milliards de dollars pour la dernière année. Peu importe l'effet que cela produit sur les marchés monétaires, il reste presque certain que beaucoup de provinces devront accepter d'augmenter leurs propres déficits pour affronter les vents froids venus d'Ottawa.

(1245)

[Français]

Pour le Québec, il y a plus et il y a pire. Les données relatives aux transferts en espèces avant et au moment de l'implantation du Transfert social canadien indiquent pour lui une perte sèche de près de 700 millions de dollars en 1996-1997 seulement. Pour 1997-1998, la perte se chiffrera à près de deux milliards de dollars. Dans ces conditions, le discours sur le Budget recèle des accents presque comiques, sinon un peu grotesques. Je me suis demandé comment le ministre des Finances a pu s'empêcher de rire en lisant, devant cette Chambre, le passage de son discours où il exalte l'innovation dont les provinces pourront dorénavant faire preuve dans la gestion des programmes sociaux.

Son flegme et sa maîtrise de soi ont certainement été soumis à rude épreuve lorsqu'il a lu le passage suivant, et je cite: «Avec le Transfert social canadien, les provinces seront désormais libres de concevoir des programmes sociaux innovateurs, des programmes qui répondent aux besoins d'aujourd'hui, plutôt qu'à des règles inflexibles.» Et, toujours pince-sans-rire, il continue, et je cite encore: «Cependant, la souplesse ne veut pas dire que tout est permis.» Le fédéral crée un programme qui enlèvera au Québec plus de 2,5 milliards de dollars sur trois ans mais attention! il y a encore des normes à respecter. Le grand frère coupe, et coupe encore, mais il édicte toujours. Est-ce de la bêtise, ou de la simple arrogance?

Il faut une bonne dose d'impudence pour s'adresser sur ce ton aux provinces, à la vieille de les ligoter dans une camisole de force financière. Bonne nouvelle, leur annonce le ministre, je vous coupe sept milliards de dollars, mais je vous permets en même temps de faire preuve d'imagination. Le Budget et le ministre ne le disent pas, mais on sait bien à quoi les dirigeants des provinces devront employer leur créativité. Ils devront l'employer à imaginer de nouvelles coupures de services et se creuser la cervelle pour empêcher un irrépressible gonflement de leurs déficits.

Dans ce jeu impitoyable, les dominos tomberont les uns après les autres, d'un palier de gouvernement à l'autre. Mais au bout du compte, c'est le contribuable qui recevra tout sur le dos. Pour le chômeur, pour le démuni, pour la personne malade, la savante construction de chiffres et l'évasion de responsabilité du ministre se traduiront par des réalités terriblement concrètes: une réduction de bénéfices de chômage, des programmes d'aide abolis, une couverture d'assurance-maladie de plus en plus réduite. Sans compter les gens du troisième âge, qui seront informés, l'an prochain après le référendum, des résultats de la réflexion amorcée par le ministre sur le sort de leur pension de vieillesse. Le moins qu'ils puissent se dire maintenant, les gens du troisième âge, c'est que, lorsqu'un ministre des Finances se met à examiner un programme social, ce n'est pas pour l'enrichir.

Puis, il y a aussi la question plus spécifique de l'équité envers le Québec concernant certains programmes. Je pense en particulier au monde de l'agriculture. Les producteurs laitiers du Québec sont frappés durement par une réduction de coupures de 30 p. 100 des subsides laitiers. Aucune compensation.


10133

Dans l'Ouest canadien, les fermiers devront faire face à une suppression des subventions au transport du grain: l'abolition du Nid-de-Corbeau. Par contre, ils sont très généreusement compensés par des versements en capital non taxables. Deux poids, deux mesures. Je regrette de le dire, un autre dossier, et on reparlera plus des autres dossiers au cours des journées qui viendront. Dans la Défense, par exemple, nous apprenons récemment par une étude, que le Québec perd 600 millions de dollars par année par rapport à la part qu'il devrait recevoir de la démographie de son poids dans la Confédération dans l'allocation des contrats militaires et des dépenses militaires.

Six cents millions de dollars par année, et en plus, le Québec n'a pas son quota des bases militaires canadiennes. Déjà, il est en déficit par rapport à l'équité qu'on devrait respecter dans l'établissement des bases militaires. Qu'est-ce qu'on apprend dans le Budget? Que l'on va fermer une autre base québécoise, l'une des seules qui reste: Saint-Hubert, et qu'on va réduire les effectifs à Bagotville. Vous me direz, oui, que l'on va couper aussi dans le reste du Canada. Non. Je comprends que l'on va couper ailleurs, parce que déjà la balance est inéquitable. On ne fait qu'accroître l'inéquité par les décisions qui sont prises actuellement. Et même si on intègre la péréquation dans la comparaison de la situation actuelle, par rapport à celle qui prévaudra après l'application des nouvelles mesures de transferts de paiements, la conclusion demeure semblable.

(1250)

Les transferts fédéraux en espèces vont ressembler, au Québec, à une peau de chagrin: 7,4 milliards de dollars aujourd'hui, 6 milliards dans trois ans. Un autre paragraphe du discours du Budget laisse même présager des jours encore plus sombres: «Nous sommes disposés à financer le Régime d'assistance publique du Canada d'une façon analogue au financement des programmes établis dans les domaines de la santé et de l'enseignement postsecondaire.» Cette formulation véhicule une ambiguïté certaine. Québec reçoit environ 35 p. 100 de l'enveloppe de la RAPC et quelque 25 p. 100 du FPE. Mais, si le simple critère démographique prévaut à l'avenir sur le critère des besoins réels dans le calcul du Transfert social canadien, cela signifiera, bien sûr, un manque à gagner supplémentaire de plusieurs centaines de millions de dollars pour le Québec.

Un paragraphe du Plan budgétaire incite à penser qu'une telle réorientation n'a rien d'impossible. En effet, voici l'une des justifications données au nouveau Transfert social canadien, et je cite: «Les dépenses fédérales ne seront plus déterminées par les décisions prises par les provinces, quant aux bénéficiaires et au mode de prestation de l'assistance sociale et des services sociaux.» Voilà qui ressemble fort à une volonté de désengagement d'une optique plus sociale.

Et comment ne pas souligner ici l'asymétrie bien concrète du fédéralisme canadien? Si le fédéral n'aime pas que les provinces lui forcent la main, il peut, lui, se dégager en tirant un trait. Mais, pendant des décennies, les provinces, et notamment le Québec, ont du se plier aux desiderata du fédéral, sans aucun pouvoir de le faire reculer. C'est probablement dans le domaine de la santé que cette impuissance relative des provinces ressort le plus. Le Budget indique noir sur blanc que le fédéral paiera de moins en moins pour les coûts de santé, tout en intimant aux provinces, qui assument déjà la majeure partie du fardeau financier, l'ordre de respecter les normes prévues dans la Loi canadienne sur la santé.

Moins pour la santé, moins pour l'assistance sociale, moins pour les chômeurs. Quand on sait que les personnes âgées consomment aujourd'hui 40 p. 100 de tous les soins de santé, proportion en croissance continue, force est de conclure que ce budget marque un virage social qui n'est pas exempt, tant s'en faut, de dureté et d'insensibilité. Le Canada est-il tellement pauvre, les solidarités sociales sont-elles si fragiles que les couches sociales les plus pauvres et les plus désemparées doivent faire à ce point les frais de la nécessaire lutte au gaspillage public?

Mais ce virage social ne prendra pas effet demain matin, seulement dans un an. Le gouvernement joue non seulement d'une stratégie pour impressionner les milieux financiers, mais également d'une stratégie référendaire, qui lui commande de reporter au-delà du référendum québécois tous les projets où il s'apprête à user et abuser du sabre. La coupe à blanc dans les transferts monétaires aux provinces? Dans un an. De nouvelles restrictions à l'assurance-chômage? On en discute à l'automne et en juillet 1996, c'est parti. Le débat sur la sécurité du revenu des personnes âgées? À l'automne, avec des changements très importants déjà suggérés pour le début de 1997, particulièrement pour la Pension de la sécurité de la vieillesse.

[Traduction]

Pas besoin d'avoir la tête à Papineau pour comprendre que le gouvernement fédéral attend. Il aimerait sincèrement que le référendum ait lieu demain matin. Comment quelqu'un peut-il choisir entre deux options fondamentales si le gouvernement fédéral ne veut pas clarifier sa position sur tous les dossiers qu'il serre sur son sein. Croit-il que les Québécois ont oublié mai 1980? Le piège était bon la première fois, mais il ne le sera pas autant la deuxième. À mes vis-à-vis, je dis: «Clarifiez votre position, montrez-nous ce que vous cachez dans vos manches. Les gens veulent savoir ce que vous allez leur offrir».

Il y a au moins une chose de clair. Tout le tapage qui a entouré le budget en avait amené certains à penser qu'il pourrait raviver la flamme du fédéralisme renouvelé où on aurait vu le gouvernement fédéral se retirer des champs de compétence des provinces en leur cédant les ressources financières correspondantes. Beaucoup de gens doivent être amèrement déçus. L'idée d'un gouvernement central dominateur et de dix provinces vassales est plus vive que jamais.

(1255)

[Français]

Dans le fédéralisme canadien, il y a le pouvoir de l'argent et il y a le pouvoir réglementaire. Pendant longtemps, le gouvernement fédéral a disposé des deux. Aujourd'hui par son ingérence,


10134

le premier lui fait défaut. Aussi s'accroche-t-il au deuxième au nom d'une certaine idée de la «nation» canadienne qu'a toujours rejetée le peuple québécois. Si le fédéral réussit à refiler une partie importante de son déficit aux provinces, il se remettra en selle financièrement, sur le dos des autres, bien sûr. Il y a déjà pensé d'ailleurs, cela transparaît partout dans le Budget. Plusieurs commentateurs croient qu'il y a une relation mécanique entre la dette fédérale et le partage des pouvoirs. Les choses ne sont pas si simples. La réduction de la taille du gouvernement fédéral est une chose, une authentique décentralisation en est une autre. Manifestement, la stratégie fédérale consiste à réaliser la première sans s'engager sérieusement dans la voie de la décentralisation, et donc sans vision cohérente des rapports futurs entre le Québec et le reste du Canada. Telle est la grande leçon de ce Budget. Historique, il l'est sans doute, mais pour des raisons opposées à celles avancées par son auteur.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Madame la présidente, il me fait plaisir aujourd'hui d'avoir l'occasion de prendre la parole concernant le Budget.

Notre position est très claire. Les marchés mondiaux ont réagi favorablement à ce Budget. Le Parti réformiste évidemment croit que les coupures sont insuffisantes. Ils auraient voulu croire que le gouvernement aurait sabré davantage. Si on se rappelle du budget qu'ils viennent de présenter, il y a quelques jours, je dis budget-entre guillemets-parce que ce fameux document n'a reçu aucun commentaire favorable. Ce document qu'ils ont présenté pour faire croire aux Canadiens et Canadiennes qu'ils avaient la compétence pour présenter un budget, ce budget-entre guillemets-ne faisait que sabrer davantage à travers le pays.

Et puis nous avons ce matin, le Bloc, l'opposition officielle qui croit que nous avons trop coupé, pas assez coupé. J'ai écouté très attentivement leurs discours et je ne suis pas certain de savoir ce qu'ils veulent. Veulent-ils plus de coupures, moins de coupures, des coupures différentes? Je ne sais pas.

Je viens d'entendre le commentaire suivant qui disait que supposément, les libéraux avaient ridiculisé les propos du Bloc quant au gras dans l'appareil gouvernemental, et maintenant on nous dit que finalement nous avons réalisé qu'il y avait du gras et nous l'avons coupé. Est-ce qu'il n'y a pas une contradiction flagrante dans ces positions?

Il me semble qu'il s'agit d'une contradiction flagrante. Si je n'ai pas raison, mes collègues me poseront des questions et clarifieront sans doute leur position. Cela me ferait grandement plaisir. Nous nous trouvons aujourd'hui entre l'extrême droite et la gauche, et, je crois, quelquefois l'extrême gauche. Ce n'est pas du tout une mauvaise position.

Que disent les Manitobains et les Manitobaines au sujet de ce Budget? J'ai pensé que cela pourrait intéresser mes collègues des deux partis de l'opposition. Voilà un journal qui dit: «Grits axe spending». Un autre article qui dit: «Western diversification to get new look», c'est un article positif. Un autre qui dit: «Social safety net rescued», une citation du ministre du Développement des ressources humaines.

(1300)

Et puis je continue: «Tough plan boosts buck, raises hopes». Ce ne sont pas des libéraux qui ont écrit ces articles-là, je vous assure. Finalement, «Federal Budget turning the corner». Je continue: «Budget draws applause». Cela vient du Manitoba. Donc, la réaction du Manitoba, en général, est une réaction positive. Je vois mes collègues du Bloc qui sont tellement heureux que ce soit une réaction positive. Je vais leur parler d'autres réactions tout à l'heure.

Je sais à quel point mes collègues du Bloc apprécient, lorsque je fais un discours, que lorsque je les implique, lorsque je parle de leurs contradictions flagrantes, lorsque je leur démontre que partout au pays, sauf dans le parti de l'opposition officielle on voit du bon dans le Budget qui vient d'être présenté, non seulement du bon, on va au-delà du bon.

Vous n'êtes pas sans savoir que ce Budget est dur, mais il est équitable. Il n'y a aucune région, aucun groupe d'individus qui est touché injustement, pas injustement. Il y a beaucoup de gens qui sont touchés, mais est-ce qu'ils sont touchés injustement? Dans l'affirmative, voulez-vous le souligner, s'il vous plaît.

Le ministre des Finances était forcé de répartir équitablement les compressions budgétaires dans toutes les régions. Je dois ajouter que ce Budget pose des gestes nécessaires, et je souligne «nécessaires», pour maîtriser le déficit. Ce sont les mesures gouvernementales du gouvernement fédéral les plus sévères au point de vue du Budget depuis 50 ans. Cela nous assure de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB d'ici 1996-1997.

De ce fait, le Budget a surpassé, il a dépassé les attentes des marchés internationaux. Je vais ajouter que ce n'est pas un budget d'un gouvernement conservateur. Ce Budget ne coupe pas aveuglément, il redéfinit le rôle du gouvernement, de sorte que tous les ministères concentreront leurs efforts sur les priorités des Canadiennes et des Canadiens. C'est important à noter. Nous allons faire ce que nous devons faire.

J'ose croire que les députés du Bloc seront très heureux de voir que, suite à l'implantation de ce Budget, il y aura moins de chevauchements. Sûrement que cela va leur plaire. Sûrement, puisqu'ils en parlent tellement.

De plus, contrairement aux budgets conservateurs précédents, nous ne nous en sommes pas pris aux plus démunis de la société canadienne, pas du tout. Nous, le Parti libéral du Canada, avons un engagement envers les programmes sociaux.

Plus tard cette année, le ministre du Développement des ressources humaines déposera un projet de loi sur la mise en place d'un programme d'assurance-chômage revu en profondeur qui répondra mieux aux besoins des Canadiens et des Canadiennes partout au pays.

Par-dessus le marché, notre gouvernement est absolument déterminé à offrir un système de protection équitable et financièrement viable aux aînés qui ont tellement contribué au développement de ce pays.

Je vais continuer à citer des faits au sujet de ce Budget. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est un Budget qui est dur mais qui,


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selon la majorité des commentateurs, est équitable. Pour faciliter l'atteinte des objectifs de réduction du déficit, le Budget prévoit que les mesures suivantes prennent effet sur-le-champ. C'est très important.

Par exemple, en premier lieu, le taux d'impôt des grandes sociétés passe de 0,2 p. 100 à 0,225 p. 100. Le taux de la surtaxe des sociétés est porté de 3 à 4 p. 100. Jumelées, ces deux mesures entraîneront des recettes supplémentaires de 260 millions par année. Toutes les grandes sociétés dont le capital est supérieur à 10 millions seront visées par la hausse du taux de l'impôt.

Le Budget prévoit aussi l'augmentation temporaire de l'impôt sur le capital des banques et d'autres grandes institutions de dépôt visées à la partie VI de la Loi de l'impôt sur le revenu. Ce supplément rapportera 100 millions sur une période de 20 mois.

(1305)

À part cela, nous avons parlé souvent ici à la Chambre des communes des fiducies familiales. On les a attaquées, mais on s'occupe de ce problème, car elles seront éliminées à compter du 1er janvier 1999. Le choix permettant de différer l'imposition des gains en capital en vertu de la règle des 21 ans sera aboli.

L'abolition du choix offert aux bénéficiaires privilégiés permet d'éviter qu'une fiducie ne serve à des fins de fractionnement de revenu, ce qui donne un grand avantage.

Mes amis d'en face se réjouiront sûrement de ces mesures fort progressistes et surtout équitables. Je le vois dans leur sourire. Voilà une des mesures qu'ils vont applaudir et louanger.

Dans ce Budget, il n'y a pas eu d'augmentation d'impôt sur le revenu. Je suis surpris que mes collègues ne l'aient pas louangé. Je suis surpris du fait qu'ils ne font qu'identifier des questions qui servent, selon leur point de vue, à essayer d'embarrasser le gouvernement.

Je suis aussi surpris que mes collègues d'en face n'aient pas mentionné que, pour chaque dollar d'impôt, il y aura 7 $ de réduction dans les programmes gouvernementaux. Je suis énormément surpris qu'on n'ait pas mentionné ce fait saillant et important, qui est quand même un principe de base fondamental à ce que le gouvernement est en train de faire, soit de s'assurer qu'on a quand même un financement raisonnable, simple, qui répond aux besoins des Canadiens et des Canadiennes, mais qui, en même temps, coupe dans les programmes qui ne sont pas absolument essentiels.

Je suis aussi surpris qu'on n'ait pas mentionné les REER qui représentent une solution raisonnable. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y avait des gens des deux côtés: ceux qui voulaient qu'on ne coupe rien et ceux qui voulaient qu'on les élimine presque. Qu'a-t-on fait? On a coupé un petit peu; ils seront gelés et augmentés de 1 000 $ par année. L'effet est de toucher surtout aux mieux nantis. J'aurais cru que mes amis du Bloc auraient quand même indiqué qu'il s'agissait d'un pas en avant. Peut-être qu'ils le feront tout à l'heure.

Pas d'imposition des programmes de soins dentaires et médicaux. Vous n'êtes pas sans savoir que nous avons tous reçu des lettres de citoyens et citoyennes de tout le pays qui ne voulaient pas que ces programmes soient imposés, et ils ne l'ont pas été. J'aurais cru que mes collègues d'en face auraient eu quelque chose de bien à dire à cet égard. Ils l'ont peut-être oublié. Il est fort possible qu'ils le mentionneront sous peu.

J'ai lu ce matin diverses coupures de presse de tout le pays. Je veux en citer quelques-unes pour faire part aux Canadiens et aux Canadiennes de l'impression des gens qui ne sont pas en politique, de l'impression des gens qui ne font pas partie d'une formation politique d'opposition, de l'impression des gens qui regardent cela de façon rationnelle dans le but de conseiller les Canadiens et Canadiennes.

Dans le journal The Gazette, on lisait ceci: «Belt-tightening impresses markets». C'est intéressant. Ici, «Ottawa aims to shrink deficit. Big spending cuts, modest tax hikes will be used to save $13.6 billion.»

Il y en a d'autres, et je sais que mes collègues apprécient beaucoup le fait que je partage avec eux un point de vue rationnel. Dans le Globe and Mail: «Family trust to lose deferment»; et ça continue, monsieur le Président. Dans Le Devoir du 28 février, on y lit: «Les dépenses des ministères réduites de 19 p. 100». C'est intéressant.

Le quotidien The Globe and Mail titre: «Ottawa axes business handouts. Subsidies being cut by nearly $2.3 billion over three years».

(1310)

Ici, sur la même page, on peut lire: «Women's programs dodge cuts.» Mes collègues vont sûrement se lever et applaudir cette mesure. Je poursuis les citations. Dans le Ottawa Citizen d'aujourd'hui: «Environment groups offer rare praise to government. Activists find reasons for hope amid bad news». C'est intéressant.

Je continue: «Average consumer escapes brunt of budget». C'est ce que dit The Gazette aujourd'hui. Le Toronto Star va dans le même sens: «Liberals cut what Tories didn't dare». C'est intéressant, monsieur le Président!

Je continue. Dans The Globe and Mail, sous la plume de Jeffrey Simpson, on y lit: «A fine start in attempting to escape the deficit/debt trap».

De l'autre côté de la page, encore dans The Gazette: «Historic budget slays the herd of sacred cows». Et dans La Presse d'aujourd'hui, on peut lire: «L'économie peut de nouveau respirer.» «Martin budget good first step, but Canada still faces tough decisions»; oui, c'est vrai. Mais, c'est un bon premier pas.

Finalement, ma dernière preuve est très intéressante car il s'agit d'un communiqué de presse des comptables agréés qui donnent une note de 4 sur 5 au Budget fédéral; 4 sur 5!


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Les députés des partis de l'opposition, ce matin, ne nous donnaient pas tellement; peut-être 1 ou 2 sur 5. Ce qui me surprend, c'est qu'ils n'ont rien trouvé de bon. Cela me dépasse. Je peux comprendre qu'on veuille identifier certaines questions qui leur tiennent à coeur et ils voudraient peut-être faire des recommandations pour essayer de les améliorer. Je comprends et j'accepte. C'est le rôle de l'opposition. Mais ce que je ne comprends pas, c'est qu'on ne puisse absolument rien trouver de positif à l'intérieur de tout le Budget. Cela me dépasse.

Ce qui me dépasse aussi en ce qui concerne le Bloc, c'est que derrière chaque coupure, chaque manoeuvre, il y a un fédéraliste caché. Il y a sans doute une stratégie préréférendaire. Mais oui, il y a quelque chose là, il faut qu'il y ait quelque chose. Même s'il n'y a rien, il y a quelque chose. On est en train de s'imaginer qu'il y a un fédéraliste caché derrière chaque virgule, chaque point, chaque mot, chaque phrase.

C'est un Budget raisonnable, c'est un Budget équitable, c'est un Budget qui est dur, mais c'est un Budget qui est sensible aux régions et aux différents groupes. On peut prendre la position de l'extrême droite. . .

[Traduction]

C'est-à-dire le Parti réformiste. Je veux parler de l'extrême-droite, que représente le Parti réformiste. Les réformistes ont proposé «un budget». Je n'ai évidemment pas vu un seul commentaire positif à ce propos de la part d'un journaliste responsable dans tout le pays. Les critiques qu'ils vont maintenant adresser à notre budget n'auront probablement pas toute la crédibilité qu'ils auraient souhaitée.

Encore une fois, je les invite à me corriger si je me trompe. Je les invite également à nous dire comment on pourrait améliorer ce document. Voilà le défi que je lance à mes collègues des deux partis d'opposition, à l'opposition officielle aussi bien qu'au tiers parti.

Qu'ils ne se contentent pas de tirer sur le budget. Qu'ils fassent plutôt des recommandations judicieuses afin qu'on puisse l'améliorer pour le bien du pays et celui de tous les Canadiens. Voilà le vrai défi.

J'ai siégé un certain temps dans l'opposition. J'ai trouvé cela plutôt agréable, je dois l'avouer, car on y a évidemment pour tâche de critiquer ce que propose le gouvernement. Cependant, la tâche de l'opposition ne se résume sûrement pas à s'attaquer à des points particuliers sur lesquels on croit le gouvernement vulnérable ou sur lesquels on pense pouvoir exploiter un avantage politique. J'accepte cela, mais la responsabilité de l'opposition ne s'arrête pas là, car elle doit aussi faire des suggestions concrètes.

(1315)

[Français]

À mes chers amis, des deux partis d'en face, j'offre le défi suivant: On a un nombre de jours où on pourra débattre ce débat et aller de l'avant. Critiquez, si vous le voulez, de façon positive, mais amenez-nous, s'il vous plaît, des suggestions qui vont améliorer ce qui a été présenté, des suggestions qui vont répondre aux besoins des Canadiens et des Canadiennes d'un bout à l'autre du pays, des suggestions qui vont nous permettre d'être beaucoup plus sensibles qu'on le serait peut-être sans avoir eu l'occasion de partager vos pensées, votre sagesse politique, si vous décidiez de l'utiliser pour autre chose que d'attaquer ce Budget, qui a été bien reçu d'un bout à l'autre du pays, et peut-être surtout, jusqu'à présent, par les marchés mondiaux.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais dire au député de Saint-Boniface que, si on souriait de ce côté, c'est tout simplement parce qu'on est toujours surpris de voir comment un député du gouvernement peut faire la sourde oreille pour faire de la politique avec un petit «p», comme le disait tantôt le chef de l'opposition officielle.

Lorsque le député dit que l'on n'a rien vu de positif dans ce Budget, c'est faux. J'aurais aimé qu'il comprenne ou qu'il entende complètement le discours qui a été prononcé tout à l'heure par le chef de l'opposition. Il aurait vu que le député de Lac-Saint-Jean a soulevé certaines choses positives dans le dossier. Cependant, il ne va pas assez loin. Il y a des injustices dans ce Budget et je vais n'en soulever que trois au député de Saint-Boniface, parce que le temps est limité.

Le député de Saint-Boniface dit qu'il n'a rien vu d'inéquitable, rien d'injuste dans ce Budget. Premièrement, trouve-t-il ça équitable que l'on coupe environ 32 millions de dollars aux agriculteurs et producteurs laitiers du Québec, et qu'on compense les producteurs de l'Ouest de 2,9 milliards de dollars pour des coupures à peu près identiques, toute proportion gardée? Pense-t-il que c'est juste cette coupure-là? Il parle également de fiducies familiales. Est-ce que c'est juste d'attendre jusqu'en 1999 avant de faire quelque chose dans un dossier semblable?

D'ici 1999, il n'y aura plus d'argent dans les fiducies familiales. Ces personnes vont avoir trouvé d'autres abris fiscaux pour se protéger. C'est immédiatement que le Budget aurait dû fesser dans ce dossier-là.

Quant au dernier, trouve-t-il cela normal, que les banques entre autres, on leur impose de modestes cent millions de dollars, alors qu'une seule des banques, la Banque royale, a empoché plus de 1,2 milliard de profits l'an dernier? Est-ce normal? Est-ce équitable dans le Budget? J'aimerais entendre le député de Saint-Boniface sur ces questions-là.

Soit dit en passant, le député de Saint-Boniface a cité des grands titres de certains journaux de son comté. J'imagine qu'il aurait dû, pour un député francophone, citer certains grands titres au moins en français de sa circonscription. Je ne sais pas, probablement, que les francophones sont un peu moins bien servis dans sa province qu'au Québec.

M. Duhamel: Monsieur le Président, je vais commencer par le dernier commentaire. Il n'y avait pas de journaux en français ayant été publiés hier soir ou ce matin. C'est pour ça que je ne les ai pas cités.

En ce qui concerne les francophones de ma province, oui, il y a des améliorations, il y a beaucoup de choses qui ont été faites et qui sont très positives. J'ose croire que les commettants et commettantes de ma circonscription sont bien servis par leurs députés au fédéral et au provincial, ainsi que leur conseillère, car nous sommes tous de langue française, au municipal. Écoutez, on verra. On aura à se représenter. Je me suis présenté en 1988, en 1993 et peut-être, en 1997 et 1998. On verra. Je vais leur permettre de se prononcer plutôt que de laisser mon ami du Bloc faire un tel jugement.


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Je veux simplement ajouter, par exemple, que j'ai trouvé un peu méchant de sa part de dire que je n'avais cité que des journaux en anglais du Manitoba. Je veux simplement souligner, qu'il n'y en avait pas en français qui ont été publiés ce matin.

Lorsque j'ai lu les coupures de journaux, j'en ai cité quelques-unes qui étaient en français et qui louangeaient le Budget du gouvernement. Voilà, j'ai pris ce que j'ai pu trouver. Franchement, je vais en trouver d'autres et je vais vous les faire passer, afin que vous puissiez les lire et ça va peut-être changer votre opinion.

(1320)

Le président suppléant (M. Kilger): J'hésite à interrompre le député de Saint-Boniface, mais je veux m'assurer que toutes les interventions soient faites par l'entremise de la Présidence, et non pas en disant «vous» comme en anglais on dit «you». Les députés doivent toujours s'adresser à la Présidence.

M. Duhamel: En ce qui concerne les trois questions précises des coupures dans l'Ouest versus les coupures dans l'Est, les gens de l'Ouest, voyez-vous, c'est cela monsieur le Président. . . monsieur le Président, je vous remercie de m'avoir rappelé que je dois vous impliquer, parce que j'ai l'intention de le faire.

C'est cela le problème du Bloc, ils sont comme cela quelquefois et c'est dommage parce qu'il y a des gens, des hommes et des femmes qui ont une grande ouverture d'esprit, s'ils se le permettent. . . Mais voilà ce que les gens de l'Ouest se disent: Nous avons été coupés de 100 p. 100, vous dans l'Est avez été coupés de 30 p. 100.

C'est ce que les gens se disent. Un des députés a dit: Oui, mais ils vont quand même avoir une compensation. Oui, mais s'ils ont subi 100 p. 100 de coupures, peut-être qu'il y a une raison pour avoir une compensation.

Monsieur le Président, vous m'entendez, monsieur le Président, ils ne veulent pas regarder cela: 100 p. 100, écoutez, une compensation, 30 p. 100, non c'est injuste, c'est injuste. Prenez le temps de le regarder, s'il vous plaît.

En ce qui concerne les fiducies familiales, nous sommes le premier gouvernement qui a décidé de faire quelque chose.

M. Bellehumeur: Vous êtes le premier gouvernement à le faire?

M. Duhamel: Attendons, attendons! Voyez-vous, monsieur le Président, ils veulent tout faire aujourd'hui, même s'ils ne sont pas prêts. Nous, ce que nous allons faire, c'est que nous allons nous assurer que ce sera fait. On veut quand même être raisonnable. Lorsqu'on a diminué les transferts, on n'a pas dit: c'est pour tout de suite, aujourd'hui, à minuit. On a dit qu'ils avaient le temps afin de pouvoir s'ajuster. C'est une façon sensible d'agir. On ne prend pas le gros marteau du gouvernement et crac, ça y est, c'est fini. Nous sommes sensibles, et nous leur donnons le temps de s'ajuster.

En ce qui concerne les banques, 100 millions c'est beaucoup plus que ce que j'ai dans mon compte en banque aujourd'hui. Sans doute que c'est un pourcentage assez important de leurs recettes. Est-ce que ce pourrait être plus? Bien sûr que ce pourrait être plus. Quel sera l'impact? Est-ce qu'il y aurait un impact négatif sur la création d'emplois si c'était augmenté beaucoup plus? Voilà, ils ne veulent pas regarder les deux, trois ou quatre côtés de la médaille. Ils ne font que regarder un côté, ils ne font qu'utiliser quelque chose que les gens n'aiment pas, les gros profits des banques, et ils essaient d'exploiter cela. Je trouve que ce n'est pas tout à fait honnête.

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, le député de Saint-Boniface a cité des extraits d'un certain nombre d'articles de journaux et cité une variété de sources qui faisaient un certain éloge du budget, mais pas de façon concluante. D'après un des commentaires, il s'agissait d'un bon premier pas, mais le Canada avait encore des défis à relever.

Un des grands défis auxquels le Canada et les simples citoyens font face tient au fait que le gouvernement actuel, durant son premier mandat et d'ici 1996-1997, aura ajouté 100 milliards de dollars à la dette des Canadiens, sans aucun plan ni aucune indication qu'il prévoit une fin, un moment déterminé où cette dette cessera de s'accumuler et de s'accroître. Il n'est dit nulle part aux Canadiens que cette dette va cesser de croître.

Après toutes les belles déclarations qu'il a faites à la Chambre, le député a-t-il la réponse à la question de savoir quand les déficits cesseront de s'accumuler et de faire grossir la dette? Les Canadiens connaîtront alors le montant réel de la dette canadienne, et nous devrons à ce moment-là nous y attaquer.

M. Duhamel: Monsieur le Président, je suis ravi de voir que mon collègue reconnaît que de nombreux articles de journaux-je dois me rappeler que je ne suis pas censé les brandir à la Chambre-ont porté sur le budget un jugement plutôt favorable. On a dit non seulement que le budget représente un bon premier pas, mais aussi qu'il s'engage dans la bonne direction et que nous parviendrons au but.

Il n'y aurait apparemment pas de plan. C'est inexact. Je sais que mon collègue est un homme estimable et qu'il n'essaie pas de nous prêter des intentions machiavéliques. Il existe cependant un plan. Nous avons affirmé dans notre livre rouge que nous nous étions fixé pour objectif de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB. Il est clair qu'une fois cet objectif atteint, nous allons tâcher d'éliminer le déficit pour ensuite nous attaquer à la dette. Mon collègue le sait bien.

(1325)

Monsieur le Président, vous savez que M. Speaker est bien conscient de ce que je dis. Il existe un plan. Cela me paraît aussi évident que le nez au milieu du visage, et particulièrement évident quand c'est moi qui utilise cette image. Un plan existe bel et bien. Nous allons atteindre notre objectif, après quoi nous allons éliminer le déficit et puis nous attaquer à la dette, et le pays se trouvera alors dans une position solide.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais faire un court commentaire. Je considère ce Budget un peu comme du venin dans lequel on met un peu de sucre pour nous le faire avaler. Comment se fait-il qu'on reporte à 1999 les mesures concernant les fiducies familiales et qu'on ne parle pas de délai au sujet des mesures concernant les personnes âgées?


10138

Si on réduit les transferts aux provinces-et c'est la question que j'adresse à mon collègue de Saint-Boniface-comment voulez-vous que cela n'affecte pas les plus démunis, les plus pauvres? Chez nous, cela fera extrêmement mal aux agriculteurs. Les 15 p. 100 de réduction de cette année et les 15 p. 100 de l'an prochain leur feront très mal. Il y en a qui m'ont dit, ce matin, qu'ils pouvaient à peine arriver et qu'avec ces coupures, c'est presque la fin. Comment peut-on croire qu'il ne s'agit pas de venin?

M. Duhamel: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Évidemment, le Budget fera mal à certaines personnes. Je l'ai dit, c'est un budget dur, mais équitable. Je ne crois pas qu'il défavorise un groupe particulier au niveau des coupures.

Il y a un autre point à prendre en considération. Si je n'ai pas raison, que peut-on faire de façon collective afin d'essayer de contrecarrer cela? Maintenant qu'une décision a été prise, que peut-on faire? En ce qui concerne les questions de savoir pourquoi une chose a été retardée, etc. vous savez fort bien que dans beaucoup de cas, il faut quand même consulter. On ne peut pas simplement dire: «Voilà, c'est fait.» Dans d'autres cas, il faut donner le temps de s'ajuster à de nouvelles mesures. Je crois que c'est tout à fait sensé et raisonnable d'agir ainsi.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Avant que le député ne commence son intervention, je signale que, dans l'intervention précédente, nous avons entendu le secrétaire parlementaire faire allusion au député de Lethbridge en le nommant par son nom. Nous savons évidement que cette pratique n'est pas la coutume ici. Je sais bien, cependant, que lorsque j'occupe le fauteuil et qu'il s'adresse en anglais à «Mr. Speaker», ce n'est pas à lui-même qu'il s'adresse.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, dans ma carrière antérieure à l'Assemblée législative de l'Alberta, j'ai connu le même genre de situation. Je suis heureux d'avoir la parole à la Chambre et d'avoir ainsi l'occasion de participer aujourd'hui au débat sur le budget.

J'ai écouté très attentivement hier et j'ai examiné ce que le ministre des Finances a présenté aux Canadiens comme le plan que le gouvernement avait à leur proposer. Nous en avons entendu parler, lors de la dernière campagne électorale, de ce plan qui devait tout changer pour les Canadiens et résoudre tous les problèmes. Pendant la campagne électorale, les libéraux nous ont présenté le livre rouge qui était censé contenir toutes les réponses aux questions. Le hic, c'est que le livre rouge est maintenant devenu désuet et ne répond pas aux questions. Les principes énoncés dans le livre rouge ont été appliqués au plan budgétaire actuel qui nous a été présenté hier. C'est insatisfaisant pour les Canadiens.

Pourquoi est-ce insatisfaisant? Tout d'abord, si j'avais à qualifier et à décrire ce budget, je dirais qu'il n'offre aucune conclusion, aucune orientation ni aucune solution véritable au principal problème auquel les Canadiens sont confrontés, un grave problème que le gouvernement actuel ne fait qu'aggraver et exacerber.

(1330)

À propos d'absence de conclusion, je songe aux responsabilités que le ministre des Finances assumait dans le secteur privé, lorsqu'il possédait une flotte de navires sur les Grands Lacs. Il ne lui serait jamais venu à l'esprit de mettre un navire sur l'eau en disant: «Sa place est là. J'ignore où il va et je ne peux tirer aucune conclusion quant à la destinée de ce navire.» Il n'agirait pas ainsi. Et personne ne raconterait une histoire sans conclusion, car nous devons comprendre où l'histoire où nous mène pendant qu'on nous la raconte. Or, ce budget est sans conclusion.

Quelle était la conclusion que les Canadiens attendaient? Les médias me l'ont apprise. Quand il a cité un certain nombre d'articles concernant le budget, le député de Saint-Boniface nous a dit quelle était la réaction des gens.

Au cours des dix derniers jours, les Canadiens, les investisseurs, les médias avaient des questions d'une suprême importance à l'esprit. Ces questions étaient les suivantes: Quand le déficit sera-t-il éliminé? Quand le déficit sera-t-il ramené à zéro? Quand cela arrivera-t-il?

Il ne faut pas chercher de réponse à ces questions dans le budget. Selon moi, tout cela a eu un effet dévastateur sur la confiance des Canadiens désireux d'investir chez nous. Nous ne savons pas jusqu'où les taux d'intérêt vont aller ou quelle sera la valeur de notre dollar. À cause de ce manque de confiance, nous ignorons quelle croissance connaîtront nos revenus. Le gouvernement n'a pas eu la volonté ou le courage nécessaire pour se pencher sur son administration et établir un plan qui aurait conduit à sa propre conclusion, celle qui convient à ce pays.

Or, que se dégage-t-il de ce budget? Comme je l'ai dit, au moment de poser une question à la Chambre, notre pays se retrouve avec une dette grossie de 100 milliards de dollars.

Au cours des trois années d'administration du gouvernement actuel qui prendront fin en 1996-1997, la dette augmentera de 100 milliards de dollars. Entre 1994-1995 et 1995-1996, le montant payé au titre de l'intérêt aura passé de 42 à 49,7 milliards de dollars, si bien que les frais d'intérêt se seront accrus de plus de six milliards de dollars.

L'année suivante, soit en 1996-1997, les frais d'intérêt vont-ils baisser? Pas le moindrement du monde! Leur montant s'élèvera à 50,7 milliards de dollars. On peut imaginer les effets de ce budget sur les programmes sociaux, sur les autres priorités, sur les décisions que le gouvernement doit prendre quant à la réduction des dépenses, à la réduction des services que le gouvernement fédéral offre à la population canadienne.

Les frais d'intérêt échappent à tout contrôle et la situation ne va pas s'améliorer parce que ce budget ne comporte ni plan ni conclusion. Que va-t-il se passer après 1996-1997? La question est grave! Le gouvernement ignore ce qui va se produire.


10139

Il dit que, en 1996-1997, le déficit passera peut-être de 25 à 19 milliards de dollars, ce qui correspond à l'objectif de 3 p. 100. Si on y parvient, le Canada sera sauvé. Or, c'est faux. Il suffira d'une récession pour que notre déficit se remette à augmenter rapidement, atteignant 25, 30, 40, 50 milliards de dollars. Quelle en serait la conséquence?

Eh bien, nous pourrions très rapidement nous retrouver avec une dette accumulée de 100 milliards de dollars de plus. Non seulement le montant s'élèvera à 603 milliards de dollars en 1996-1997, comme le ministre des Finances nous l'a dit hier, mais il se peut très bien que, en 1999 ou en 1998-1999, il atteigne les 700 milliards de dollars. Qu'en est-il de nos coûts d'intérêt et de l'économie du Canada? Nous sommes dans une situation désastreuse.

(1335)

Le gouvernement nous dit de ne pas nous inquiéter, que tout va bien aller, qu'il va proposer un plan pour venir à bout du problème et qu'il a deux ans pour faire quelque chose. Il n'a rien fait. À la Chambre, nous avons gaspillé l'exercice financier 1994-1995 à cause d'un budget sans effet. Le budget actuel n'est guère mieux si l'on fait fi des beaux discours qui l'entourent. Savons-nous en quoi consistent les véritables réductions de dépenses? Elles représentent 4,1 milliards de dollars. Le gouvernement nous annonce cela comme un grand exploit.

À la fin de la présente législature ou de l'exercice financier 1996-1997, nous n'aurons guère commencé à nous attaquer au problème du déficit. Nous allons en subir les conséquences. Si nous ne nous montrons pas rigoureux et que nous nous contentons de l'approche libérale facile et assez peu efficace, les Canadiens en paieront le prix.

Je voudrais faire une autre observation durant les deux dernières minutes à ma disposition. Qui paie pour cela? Nous accablons nos enfants et la future génération de Canadiens d'une dette supplémentaire d'au moins 100 milliards de dollars. C'est scandaleux!

Le gouvernement dit qu'il n'a pas augmenté l'impôt sur le revenu des particuliers dans ce budget, mais songez à la hausse de l'impôt sur le revenu des particuliers de la prochaine génération de contribuables. Dans quelques années seulement, ils auront à payer la dette que nous avons accumulée. Pensez aux impôts que le gouvernement leur a réservés. Ces 100 milliards de dollars supplémentaires sont la responsabilité, non pas de l'ancien gouvernement conservateur, mais bien du gouvernement actuel.

Songez aux hausses d'impôt sur le revenu des particuliers qui s'ensuivront. Songez aux sociétés qui devront peut-être quitter ce pays parce qu'elles ne pourront payer les impôts exigés par le prochain gouvernement qui sera peut-être libéral ou autre et qui devra s'attaquer aux problèmes.

C'est là toute l'horreur de ce budget. Plus que jamais auparavant, nous avons tout d'abord besoin d'un budget réformiste, le Budget des contribuables qui dit très clairement aux Canadiens, premièrement, que les impôts n'augmenteront pas cette fois-ci et, deuxièmement, que nous devons réduire les dépenses de manière que le déficit soit supprimé en trois ans.

Voilà ce que la Chambre devrait faire au lieu de se contenter de l'approche doucereuse qui a été utilisée et qui réserve un avenir terrible aux futures générations de Canadiens.

Je crois qu'il faut prendre cela en considération. Si le gouvernement ne le fait pas, il devra en assumer l'odieux. Le gouvernement a fait preuve de lâcheté en ne réglant pas le problème auquel il est confronté, et les générations futures le tiendront responsable de ne pas avoir pris les moyens nécessaires pour nous sortir de cette situation très difficile.

M. Julian Reed (Halton-Peel, Lib.): Monsieur le Président, je suis très curieux de savoir dans quel genre de boule de cristal particulière mon collègue regarde pour prévoir ce qui se produira dans quatre ou cinq ans.

J'imagine qu'il a prédit la chute du peso mexicain. Je suppose qu'il y a quatre ans, il a prévu que l'inflation appréhendée aux États-Unis entraînerait une hausse des taux d'intérêt.

Il doit sûrement savoir quand le budget sera finalement équilibré. À tort ou à raison, notre ministre a décidé de prévoir des mesures sur deux ans, pour la simple et bonne raison qu'il a ainsi plus de chance de prévoir ce qui se produira durant cet intervalle.

Comme nous le savons, les événements n'ont pas tous tourné comme on l'avait prévu à l'origine. Quelle curieuse vision mon collègue a-t-il eue pour pouvoir dire au gouvernement ou le mettre au défi de dire que, dans tant de mois ou d'années, le budget devrait finalement être équilibré? Mon collègue constatera peut-être avec surprise que le budget sera équilibré avant ce que lui et moi avions prévu.

(1340)

J'aimerais savoir comment il fait pour prévoir l'avenir ainsi?

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, lorsque nous présentons nos orientations ou que nous faisons nos déclarations à la Chambre, notre objectif global est toujours de nous tourner vers l'avenir et non pas vers le passé. C'est peut-être ce qui différencie les réformistes des libéraux.

Nous savons tous que l'établissement de prévisions comporte une certaine part de risque. Quand on a la responsabilité de gouverner, il faut faire les meilleures projections possibles.

Il est évident que le gouvernement actuel va atteindre son objectif de 3 p. 100 du PIB et qu'il va nous laisser un déficit de 25 milliards de dollars en 1996-1997. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute. À mon avis, il va atteindre cet objectif, même s'il faut tout d'abord dire qu'il n'est pas très difficile à atteindre.

Deuxièmement, comme je l'ai dit, nous aurons alors ajouté 100 milliards de dollars supplémentaires à la dette que nous aurons accumulée. C'est évident et facile à prévoir.


10140

Troisièmement, il convient de se demander si, après cela, le gouvernement a prévu des mesures pour supprimer le déficit. A-t-il la certitude qu'il pourra ramener le déficit de 25 milliards de dollars en 1996-1997 à zéro d'ici deux ans? Si le gouvernement estime pouvoir y parvenir, pourquoi ne le dit-il pas?

Le président suppléant (M. Kilger): Le député partage son temps de parole avec son collègue, le député de Capilano-Howe Sound. Je m'engage envers le député de l'opposition officielle qui demande la parole pour poser une question ou faire une observation à lui donner la parole, s'il le veut, lors de la prochaine intervention.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, sans malice, j'estime qu'il serait utile, à l'occasion de la présentation du budget, de rappeler ce que les libéraux ont coutume de dire en des moments pareils: «Les compressions budgétaires de 6 milliards de dollars frappant les programmes gouvernementaux en général s'inspirent de la politique de la terre brûlée. Elles vont avoir pour effet une diminution de la qualité des services de l'État à laquelle les Canadiens s'attendent comme leur dépôt sacré. Le licenciement de 42 000 fonctionnaires est une décision sans coeur et sans merci.» Les libéraux auraient dit: «Il détruit à jamais le caractère sacré des conventions collectives. Ce n'est rien d'autre qu'une attaque en règle contre les syndicats.»

Évidemment, s'ils étaient dans l'opposition, les libéraux auraient réservé leur plus grande indignation aux compressions de 4 milliards de dollars touchant les paiements de transfert. Ils auraient dit: «Ces réductions nous empêcheront d'appliquer les normes nationales en matière de santé, d'éducation supérieure et d'aide sociale. Le gouvernement sans coeur et sans merci s'engage sur la pente savonneuse où les protecteurs des normes perdront prise. Le pays s'écroulera. Ce sera comme aux États-Unis. Oh mon Dieu! Il y aura des mendiants dans les rues. Les pauvres devront s'en remettre au crime. Les gens ne se sentiront plus comme des Canadiens parce qu'en passant d'une province à l'autre ils toucheront des prestations d'aide sociale d'un montant différent. Pouvez-vous imaginer cela, des universités de qualité inférieure et des normes en matière de santé qui varient d'une province à l'autre?»

Les libéraux diraient ceci: «Le problème du déficit est réglé sur le dos des pauvres, de ceux qui sont le moins en mesure de se défendre.» Dans l'opposition, ils auraient dit: «La taxe sur l'essence est une ponction fiscale dégressive parce que tous les contribuables à revenus faibles et moyens sont forcés de se servir de leur voiture pour aller travailler. Pis encore, les mesures fiscales n'ont pas touché les bénéfices soi-disant indécents des banques. Le gouvernement n'a pas relevé l'impôt sur la fortune ni créé d'impôt sur les successions.»

Quand il était dans l'opposition, le ministre des Finances demandait tous les jours au gouvernement d'abaisser les taux d'intérêt. Il refuse maintenant de le faire. Il n'a pas ordonné au gouverneur de la Banque du Canada d'abaisser le loyer de l'argent et d'alléger le fardeau de la dette. Qu'est-ce qui ne va pas?

(1345)

Je suis sûr que s'ils avaient été dans l'opposition, les libéraux auraient profité de cette occasion pour rappeler au gouvernement ses promesses d'élection brisées. La TPS, cette taxe dégressive, coûteuse, compliquée au point d'en être agaçante existe toujours et servira même à une autre ponction de 2 milliards de dollars auprès des Canadiens, dont bon nombre sont pauvres. Il n'y a toujours pas de nouvelles garderies. L'ALENA est responsable de l'exode des emplois vers le Mexique.

La meute aurait hurlé la suprême insulte à l'opposition. Elle aurait dit: «Ils sont en train de manger lentement leur livre rouge.» Bref, les libéraux auraient conclu en ces termes: «Ce budget s'inspire de l'idéologie de la droite et ressemble, comble de l'horreur, au programme du Parti réformiste.» Nous sommes fiers de dire que c'est le cas.

Je ne suis pas libéral et je n'utiliserai pas ces slogans pour critiquer le budget. Ses lacunes sont fondamentales et effrayantes pour quiconque connaît le principe des intérêts composés.

Durant les années 80, mes collègues économistes et moi avions coutume de nous asseoir à la table de la salle à manger de l'Université Simon Fraser. Nous discutions des budgets successifs de Michael Wilson, qui ressemblait à Paul Martin, le ministre des Finances actuel. Mes excuses, monsieur le Président.

Le président suppléant (M. Kilger): Je voudrais rappeler aux députés qu'ils ne peuvent s'adresser la parole par leur nom et qu'ils doivent utiliser le nom de la circonscription ou du ministère du député en cause.

M. Grubel: M. Wilson avait coutume de dire: « Nous avons dû faire face à la réalité financière. Nous avons pris des mesures sévères qui transformeront le mode de fonctionnement du gouvernement. Nous avons franchi un tournant. Nous avons stabilisé la dette par rapport au PIB. Dans le prochain budget, nous diminuerons le ratio de la dette par rapport au PIB. Nous sommes bien engagés sur la voie de la viabilité financière à long terme.»

Je n'oublierai jamais que nous étions tous d'accord pour dire que la stabilisation de ce ratio en période de prospérité économique ne suffisait pas. La prise de mesures fiscales et l'engagement de dépenses pendant les périodes de prospérité se traduiront par des déficits lorsque la récession frappera. Nous avions raison à ce moment-là. Ce n'était pas une question idéologique, mais une simple question de principe économique.

Ce budget est du déjà-vu, sauf que, cette fois-ci, les compressions sont réelles, contrairement aux réductions magiques de Wilson par rapport à des prévisions précédemment gonflées. Ces compressions représentent un réel progrès et tout le crédit en revient au ministre des Finances et à certains de ses collègues.

La tragédie, c'est que ces réductions arrivent trop tard et qu'elles ne vont pas assez loin. La dette s'élevant maintenant à 550 milliards de dollars, ces compressions absolues ne sont pas plus efficaces que les coupes fantômes effectuées par le ministre Wilson à une époque où la dette atteignait la moitié de cette somme.

Les compressions de dix milliards de dollars dans les dépenses de programmes équivalent à peu près à l'augmentation de neuf milliards de dollars en frais de service de la dette pour la durée du présent budget, selon la dette prévue. Grâce à la prospérité et aux mesures fiscales, les recettes devraient augmenter de 12,7 milliards de dollars, ce qui est considérable. Toutefois, cela suffira à peine à maintenir le rapport actuel entre la dette et le PIB.

Il suffit de connaître ces données pour comprendre ma réaction négative à l'égard du budget. Permettez-moi de les répéter.


10141

Les compressions de 10 milliards de dollars, quelque déchirantes qu'elles soient, suffiront à peine à compenser l'augmentation du coût de la dette pour la période, soit 9 milliards de dollars selon la dette prévue. Les augmentations de recettes prévues, à cause de la prospérité et des mesures fiscales, devraient atteindre le chiffre effarant de 12,7 milliards de dollars. Toutefois, elles permettront uniquement de maintenir à son niveau actuel le rapport entre la dette et le PIB.

(1350)

Il en est ainsi parce que le poste budgétaire le plus important ne sera pas modifié, soit les transferts aux personnes, qui s'élèvent à 37 milliards de dollars. Le rapport entre la dette et le PIB ne baissera jamais, malgré la prospérité, à moins que cette catégorie de dépenses ne soit aussi mise à contribution et qu'elle ne participe à la résolution de la crise de notre pays.

Les investisseurs ont fixé le destin du dollar et du taux d'intérêt canadien et ils sauront voir les véritables chiffres derrière la façade et les compressions, pourtant audacieuses et bien réelles. Ils demanderont pourquoi nous n'avons pas modifié les transferts aux personnes. Ils se souviendront des slogans libéraux traditionnels, que nous appelons du trompe-l'oeil, et ils feront le lien entre les deux. Ils ne seront certes pas rassurés.

Monsieur le Président, j'espère, pour le Canada, mes enfants et les vôtres, que mon diagnostic est faux et que le Parti réformiste ne pourra jamais déclarer: «Nous vous l'avions bien dit.»

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, lorsque j'écoute mon collègue, je me demande s'il avance ou s'il recule. J'ai l'impression qu'il avance décidément vers l'arrière.

Malheureusement, je dois être d'accord avec lui sur certains points, car il a déploré, avec raison, le manque de fermeté du gouvernement dans la lutte au déficit, qui atteint déjà des sommets faramineux. Il n'est pas nécessaire d'être savant pour comprendre que, plus on tarde à résoudre la question, plus le fardeau des prochaines générations augmente.

Ce sont les jeunes du pays qui devront payer. Il est vrai que nous nous facilitons la tâche en n'étant pas plus fermes, mais là s'arrête mon accord avec le député. Je ne partage pas son manque de compassion envers les gens touchés par les compressions, alors que le gouvernement n'a pas exigé davantage de la part des banques, par exemple.

Mon collègue ne croit-il pas qu'il est injuste de demander aux banques du Canada de contribuer 100 millions de dollars au cours des deux prochaines années, alors que nous savons qu'elles ont réalisé des profits considérables depuis quelques années? La Banque Royale à elle seule a réalisé des profits nets de 1,2 milliard de dollars l'année dernière. Nous demandons à ces banques de contribuer seulement 100 millions de dollars alors que nous sabrons les programmes sociaux. Le député considère-t-il que cela est juste?

M. Grubel: Monsieur le Président, je crois que dans le domaine de la politique économique, il faut voir loin. Il est inacceptable de pénaliser ceux qui réussissent bien, comme les banques le font depuis maintenant un an environ, après avoir subi d'énormes pertes. Si nous agissons ainsi, nous nuirons aux investissements au Canada.

Les investissements sont la source de notre prospérité. Ce sont les seuls qui accroîtront notre niveau de vie en augmentant notre productivité. Sans eux, c'est tout à fait impossible. Même la nouvelle technologie ne peut voir le jour sans les investissements.

Je ne partage pas l'opinion que, pour assurer à long terme un bel avenir à notre pays, il est sage de dire à des particuliers ou à des sociétés, qu'il s'agisse d'une banque, d'une entreprise, d'un professionnel, d'un joueur ou de n'importe qui d'autre qui a du succès, qu'ils ne peuvent garder cet argent, car il y a des gens qui n'ont pas investi, qui n'ont pas eu de chance, qui n'ont pas travaillé aussi dur et qui comptent sur cet argent.

Ce n'est pas ce qui a fait la grandeur de notre pays. Ce n'est pas ainsi que le Canada demeurera prospère. Le Parti réformiste et, chose certaine, votre serviteur, défendront à jamais le système qui nous a permis d'obtenir le niveau de vie dont nous sommes si fiers.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté l'intervention du député et j'ai remarqué qu'il a réclamé des coupes sombres dans les dépenses des programmes de sécurité sociale.

(1355)

J'ai toujours cru que, en tant que députés, il nous incombait non pas de consacrer tout notre temps aux nantis, mais bien de nous assurer surtout que le gouvernement se préoccupe toujours du sort des plus défavorisés dans notre société.

Je voudrais signaler que, dans le sommaire du Budget des contribuables, à la rubrique de l'assurance-chômage, qui coûte actuellement 15,6 milliards de dollars, le député propose des compressions de 3,4 milliards de dollars d'ici la fin de la troisième année.

Lorsque des gens sont placés dans une situation extrêmement difficile faute d'avoir un emploi, le député croit-il honnêtement que c'est une bonne politique gouvernementale que de réduire de près de 22 p. 100, selon ses propres calculs, les sommes qu'on va leur consacrer. Le député pourrait-il me dire s'il considère que c'est une bonne politique?

M. Grubel: Monsieur le Président, je remercie le député de soulever ce point important. L'OCDE a publié un rapport dans lequel elle a dit que le régime d'assurance-chômage du Canada est un exemple remarquable de générosité excessive. Le vérificateur général a un graphique que je recommande au député d'examiner et qui illustre et documente cette générosité.

Un Américain qui gagne 100 $ et se retrouve au chômage touchera des prestations de 20 $. Un Européen qui gagne le même montant touchera un montant de 30 $. Le député sait-il combien reçoit un Canadien, selon le vérificateur général? Il reçoit 60 $, deux fois le montant versé en Europe. Est-ce faire preuve d'insensibilité que de tenir compte des suggestions de l'OCDE et du vérificateur général pour limiter quelque peu cette générosité excessive?

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Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


10142

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui marque le dernier jour du Mois de l'histoire des Noirs.

En tant que député de Dartmouth, je suis fier de représenter les plus vastes collectivités noires autochtones du Canada, celles de Preston, de Preston-Nord, de Cherrybrook et de Lake Loon. Les collectivités de Preston possèdent une histoire riche et fascinante qui a largement contribué à la culture de la Nouvelle-Écosse et de partout ailleurs au Canada. Malheureusement pour les autres régions du pays, une grande partie de ce patrimoine culturel n'a pas été transcrite, ayant plutôt été transmise oralement d'une génération à l'autre.

Les élèves de l'école secondaire Cole Harbour ont voulu changer cela en recourant à des techniques de communication modernes. Dans le cadre d'un projet consacré au Mois de l'histoire des Noirs, des élèves ont créé une adresse sur le réseau mondial d'Internet afin d'offrir un aperçu de ce riche patrimoine à des millions d'usagers d'ordinateur d'un peu partout au Canada et ailleurs dans le monde.

Je demande aux députés de se joindre à moi pour féliciter les participants à ce projet des énormes efforts qu'ils ont déployés afin de faire connaître au monde entier l'histoire des Noirs de la Nouvelle-Écosse.

* * *

[Français]

LA FISCALITÉ

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, il est inacceptable que le ministre des Finances, dans son Budget, se soit encore attaqué aux plus démunis et ait complètement épargné les privilèges fiscaux des mieux nantis de notre société.

Cette approche perpétue les iniquités fiscales en ne proposant aucune réforme de la fiscalité. On ne retrouve rien dans ce Budget pour éliminer les conventions fiscales signées avec des pays considérés comme des paradis fiscaux, permettant ainsi aux grandes sociétés d'éviter de payer de l'impôt. Rien non plus, sur les pavillons de complaisance utilisés par les armateurs canadiens et le gouvernement lui-même, pour employer des marins étrangers qui ne paient pas d'impôt au Canada.

Le comble, c'est que le ministre ne propose de s'attaquer aux fiducies familiales qu'en 1999, alors que les familles riches utilisent cette échappatoire fiscale pour ne pas payer leur juste contribution à l'État. Comme le disait l'animateur de radio, Joël le Bigot, si vous frappez sur les petits, c'est que vous êtes mûr pour le gouvernement fédéral.

[Traduction]

LE BUDGET

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre des Finances a livré son budget mais, en ce faisant, il a raté une occasion en or.

Les Canadiens veulent de l'espoir, ils veulent la vérité et ils veulent du leadership. Mais où se trouve l'espoir lorsque nous découvrons que l'intérêt composé sur les déficits prévus par le ministre des Finances, en plus de notre dette déjà colossale, annulera les économies réalisées à la suite des compressions qu'a annoncées le ministre? Le ministre n'a même pas eu le courage de nous dire quand nous aurons un budget équilibré.

Les Canadiens veulent la vérité. Ils veulent savoir ce qu'il adviendra de nos programmes sociaux à mesure que l'intérêt composé continuera d'engloutir une partie encore plus grande de nos dollars d'impôt, et ce, tout simplement parce que le gouvernement n'a pas pu prendre dans ce budget les décisions difficiles qui s'imposaient. Sur cette question, le ministre demeure silencieux.

Enfin, les Canadiens veulent du leadership. Ils veulent un gouvernement qui fait lui-même des sacrifices. Les Canadiens n'apprécient pas un gouvernement qui fait des compressions dans la fonction publique, qui augmente les impôts et qui permet que des dépenses excessives mettent en péril la sécurité de la vieillesse, mais en même temps, qui n'a pas assez de volonté pour renoncer au régime de retraite le plus généreux et le plus extravagant que l'argent des contribuables puisse acheter.

* * *

L'AGRICULTURE

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieurle Président, le titre principal du numéro du Regina LeaderPost de ce matin résume tout en un mot: la dévastation. Les agriculteurs. . .

Le Président: Je rappelle au député qu'il ne doit pas brandir d'objets à la Chambre.

M. Solomon: Monsieur le Président, les agriculteurs de l'Ouest sont encore sous le coup du budget d'hier, qui a eu l'effet d'un ouragan sur l'agriculture. Il sème la destruction et la désolation à la grandeur du Canada rural.

Les familles d'agriculteurs y perdront le tiers de leur revenu net et de la valeur de leurs terres. Les agriculteurs travaillent dur pour nourrir la population et ils ne demandent qu'à être traités équitablement. Le gouvernement libéral leur a répondu en leur imposant des réductions impitoyables.

Le ministre de l'Agriculture a trahi les Canadiens des régions rurales en supprimant la subvention du Nid-de-Corbeau, en réduisant de 30 p. 100 les subventions aux producteurs laitiers et en abandonnant d'autres voies ferrées.

Les agriculteurs sont maintenant pris entre un revenu qui va en diminuant et de minces chances de pouvoir vendre leur ferme. Le gouvernement a traité les agriculteurs d'une manière impardonnable et a ainsi causé des dommages irréparables à ce que nous considérions jadis avec fierté comme le grenier de notre pays. Ce budget est une catastrophe pour les Canadiens de l'Ouest. C'est


10143

une honte pour le gouvernement libéral qui promet encore d'autres calamités.

* * *

LE FORUM NATIONAL SUR LA SANTÉ

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, étant donné que le système de santé canadien se trouvait à une étape cruciale de son existence, le premier ministre a eu la sagesse de créer le Forum national sur la santé dans le but de définir une vision pour le système de santé à l'aube du XXe siècle. Cette vision fera l'équilibre entre la promotion des soins et de la santé, la prévention et la protection.

Venant de divers milieux et régions, les membres du Forum sur la santé tentent de définir les priorités nationales et d'encourager le dialogue entre les Canadiens sur les questions de santé à moyen et à long terme. Au cours des mois qui viennent, ils dirigeront la discussion et aideront à élaborer des stratégies qui amélioreront la santé de la population canadienne.

Je suis content qu'un membre de la communauté de London ait été nommé pour siéger au Forum sur la santé. Mme Shanti Radcliffe y apporte son expérience dans le domaine des soins de santé communautaires pour les jeunes, les femmes, les personnes âgées et les immigrants. Je félicite Mme Radcliffe et tous les membres du forum, qui contribuent à faire en sorte que le Canada ait le meilleur système de soins de santé au monde.

* * *

LE BUDGET

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, les habitants de Guelph-Wellington voulaient que l'on réduise le déficit et que l'on diminue les dépenses avec responsabilité et le ministère des Finances a exaucé leurs souhaits.

Ils savent qu'il n'est pas facile de faire des compressions, mais qu'il est encore plus difficile d'être juste et équitable dans la façon de procéder pour réduire le déficit. Notre budget fait preuve d'équité. Ils savent qu'il est facile de critiquer, mais qu'il est encore plus difficile de prendre de bonnes décisions, les décisions qui s'imposent, comme l'a fait le gouvernement. Ils savent qu'il est facile de publier des chiffres et de proposer des idées qui se fondent sur des principes, plutôt que sur la réalité. Hier, on a reconnu, dans le budget, que la réduction du déficit allait toucher la vie des gens.

Les habitants de Guelph-Wellington ne s'attendent pas à des solutions faciles, comme celles que l'on trouve aux numéros 1-900 et dans les émissions du canal communautaire. Ils croient en notre pays et en notre capacité de régler nos problèmes. Ils veulent que le Canada réussisse. Ils voulaient un budget sévère. Ils voulaient que l'on réduise les dépenses. Ils voulaient des mesures équitables. Nous leur avons donné tout cela.

* * *

[Français]

LE DÉBAT RÉFÉRENDAIRE

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, le Québec, version souverainiste, est un pays où règne l'intolérance, où la démocratie est bafouée, où la dissidence idéologique est perçue comme un crime de lèse-majesté évalué au pourcentage des votes exprimés.

(1405)

Quand un Bourgault accuse de racisme les anglophones qui voteraient démocratiquement contre leur projet, passe encore. Quand un Landry déclare que le multiculturalisme n'a pas sa place dans la société québécoise, c'est encore discutable, mais quand un membre de cette Chambre démocratiquement élu, soutient que les néo-Québécois ne devraient pas avoir le droit de s'exprimer ni de voter sur une question aussi cruciale que l'avenir de leur pays, c'est inadmissible.

Au nom de tous les Québécois anglophones et les néo-Québécois qui ont fait du Canada et du Québec leur patrie, où ils ont bâti leur vie et élevé leurs enfants, j'exige des excuses publiques du député de Louis-Hébert.

Je tiens à rappeler aux Bourgault et Paré de ce monde, qu'ils sont eux aussi des fils. . .

Le Président: Chers collègues, quand nous avons des déclarations comme ça, si nous parlons des idées ça va, mais il ne faut pas attaquer un député ou un autre. Je vous demanderais tous de ne pas utiliser le nom d'un député, mais le nom de son comté.

* * *

LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement de Jean Chrétien a annoncé hier dans le Budget, son intention de couper dans les pensions. . .

Le Président: Ma chère collègue, ne pas utiliser le nom du député, s'il-vous-plaît.

Mme Dalphond-Guiral: Le gouvernement libéral a annoncé hier dans son Budget l'intention de couper dans les pensions de vieillesse dès 1997. Le Budget d'hier nous démontre bien que la principale menace aux pensions de vieillesse et aux programmes sociaux vient du gouvernement fédéral, pas du gouvernement du Québec.

À voir le gouvernement aller, l'assaut en règle du fédéral sur les aînés, les chômeurs et les bénéficiaires des programmes sociaux ne fait que commencer. C'est le président du camp du non, M. Michel Bélanger, qui doit être bien découragé, lui qui tente de semer l'épouvante en racontant l'histoire des méchants séparatistes qui veulent couper dans les pensions de vieillesse.

Nous attendons avec impatience sa critique pointue du Budget fédéral.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, récemment, le vérificateur général a dit qu'une partie des dépenses de programmes du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ne répondait pas aux objectifs stratégiques, comportait des lacunes sur le plan de la gestion, ne donnait pas suffisamment de renseignements en ma-


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tière d'évaluation et de rendement et qu'on ne pouvait donc pas en rendre compte comme on le devrait.

De plus, ce ministère n'a pas publié de rapport annuel depuis 1992, ce qui nous empêche de voir si les programmes sont exécutés avec efficacité.

Le budget fédéral a dit que l'on réduirait les dépenses dans tous les ministères fédéraux, à l'exception du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Le gouvernement demande aux Canadiens de faire leur part pour la réduction du déficit. Pourtant, il augmente les dépenses du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien de 12 p. 100 au cours des trois prochaines années. Une grande partie des dépenses de programmes du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien va au-delà des engagements constitutionnels, juridiques ou politiques.

Étant donné ces préoccupations, il est inacceptable et injuste d'augmenter les fonds prévus dans le budget pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

* * *

LE BUDGET

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a déposé hier le budget du gouvernement. Par ce budget, et celui déposé en 1994, le gouvernement s'est fixé un défi et un objectif, celui de contrôler le déficit et la dette.

Les Canadiens ont demandé et appuyé une combinaison de coupes au niveau des dépenses publiques et la poursuite de notre programme de création d'emplois et de croissance, la croissance la plus forte des pays du G-7 l'année dernière et une croissance qui va se poursuivre grâce à ce budget vigoureux.

Les mesures prises dans ce budget permettent de veiller à ce que nous atteignions l'objectif que nous nous étions fixé l'an dernier, de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB.

Le ministre a produit un budget juste et équitable qui répond aux attentes des Canadiens en ce qui concerne les programmes sociaux et la réduction des dépenses.

Toutes nos félicitations au ministre des Finances pour le dévouement dont il fait preuve afin de contrôler le déficit et la dette de notre pays et de redonner confiance à tous les Canadiens.

* * *

(1410)

L'AGRICULTURE

Mme Marlene Cowling (Dauphin-Swan River, Lib.): Monsieur le Président, ce budget est dur, mais les mesures qui ont été prises devaient l'être et l'ont été de façon équitable, conformément à notre engagement.

Le meilleur moment de réduire les dépenses est de le faire en période de croissance. Dans le secteur agricole, les prix sont en hausse, nos marchés d'exportation sont en train de s'étendre et les producteurs sont dans une excellente position pour s'adapter aux changements.

L'élimination des subventions prévues par la Loi sur le transport du grain de l'Ouest combinée aux avantages fiscaux va permettre aux agriculteurs des Prairies de recevoir 2,2 milliards de dollars cette année. Nous veillerons à ce que l'argent soit versé de façon juste et équitable.

Je suis sûre que les hommes et les femmes qui travaillent dans le secteur agricole continueront, comme ils l'ont toujours fait, de s'adapter aux changements constants qui s'opèrent dans cette industrie de façon à veiller à ce que le Canada reste un leader mondial dans le domaine de la production agricole.

* * *

[Français]

L'EXPOSÉ BUDGÉTAIRE

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le ministre des Finances pour l'excellent budget qu'il nous a présenté hier. La vigueur avec laquelle le ministre des Finances a décidé de s'attaquer au problème du déficit sans hausser l'impôt des particuliers a semblé plaire aux marchés financiers qui n'ont pas tardé à réagir.

Ainsi, la Banque de Montréal, la Laurentienne et le Mouvement des caisses populaires Desjardins ont déjà annoncé une réduction de leur taux préférentiel. Cette première réaction laisse entrevoir à court terme une baisse probable des taux hypothécaires, ce qui favorisera une indispensable relance dans l'industrie de la construction.

Ces bonnes nouvelles sont de nature à rassurer les consommateurs canadiens et à favoriser la poursuite de notre croissance économique. Bravo à notre ministre des Finances et à notre gouvernement qui respecte ses engagements.

* * *

L'EXPOSÉ BUDGÉTAIRE

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, les Québécois et les Québécoises savent maintenant à quoi il faut s'attendre d'Ottawa en cette année référendaire au Québec.

Loin de proposer une décentralisation des pouvoirs, le Budget fédéral d'hier démontre qu'Ottawa refuse toujours de se retirer des domaines de compétence provinciale. Ottawa s'entête même à étendre ses interventions, notamment dans le domaine de la formation professionnelle.

Tout ce que ce gouvernement libéral réussit à transférer aux provinces, c'est le déficit. Le Budget d'hier cherche à pelleter le déficit fédéral dans la cour des provinces: 2,5 milliards de dollars l'an prochain et 4,5 milliards l'année suivante.

Le gouvernement fédéral veut ainsi reporter après l'échéance référendaire québécoise l'essentiel des coupures dans les transferts aux provinces et dans les services fédéraux aux citoyens. Voilà le véritable coût d'un non au référendum, voilà le coût du statu quo.

10145

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, les réformistes ont déjà reconnu la nécessité de réduire les dépenses publiques et de permettre aux gens de se débrouiller seuls quand ils en sont capables. Les réformistes croient aussi qu'avant de réduire les dépenses, il faudrait réduire les barrières et accroître la flexibilité de façon à permettre aux gens de bien s'en sortir dans un marché plus libre. Les agriculteurs partagent ce point de vue.

Hier, les dépenses du ministère de l'Agriculture ont été substantiellement réduites. Les agriculteurs et les chefs de l'industrie disent que ces compressions seront dures, mais qu'elles sont nécessaires.

Ce qui me préoccupe toutefois c'est qu'en s'orientant vers un système plus axé sur le marché, le gouvernement n'a pas éliminé les barrières réglementaires et n'a pas tenu compte des efficacités accrues. Faute de tels changements, ces réductions au niveau du financement risquent de paralyser les agriculteurs et l'industrie plutôt que d'améliorer leur situation.

Les agriculteurs ont besoin d'un climat de stabilité, de prévisibilité et de certitude pour s'adapter aux nouvelles réalités financières. Ils ont besoin de la liberté voulue pour récupérer ce qu'ils ont perdu dans ce budget. Ce gouvernement ne leur en a pas donné.

* * *

[Français]

LA CIRCONSCRIPTION DE BROME-MISSISQUOI

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, je m'adresse pour la première fois en cette Chambre, pour remercier d'abord la population de Brome-Missisquoi qui m'a témoigné de sa confiance à l'occasion de l'élection partielle du 13 février dernier.

Je réitère mon engagement à ne ménager aucun effort pour être à la hauteur des attentes d'excellence de mes concitoyens.

[Traduction]

Je suis fier de me joindre aux forces du Parti libéral du Canada à la Chambre des communes. J'ai demandé à mes électeurs d'avoir confiance dans le gouvernement. Après moins d'une semaine sur la colline du Parlement, je vois que le gouvernement ne décevra pas les Canadiens.

La délicate situation financière du pays exigeait une intervention ferme, mais humaine. On nous a présenté un budget qui est courageux et juste. Le pays est maintenant sur la bonne voie.

(1415)

[Français]

Les personnes âgées sont protégées, le fardeau fiscal des familles à revenus modeste et moyen n'a pas augmenté et l'État sera moins lourd et mieux géré. Je m'engage maintenant à participer activement à la création d'emplois et à renouveler l'économie dans Brome-Missisquoi. Je remercie d'ailleurs les députés du caucus libéral qui m'ont déjà assuré de leur appui pour atteindre ces objectifs.

_____________________________________________


10145

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE BUDGET

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, dans son opération de marketing prébudgétaire, le gouvernement annonçait le Budget d'un nouveau Canada. Le ministre des Affaires étrangères prophétisait même, avec un zèle réformiste qu'on ne lui connaissait pas, que l'on ne pourrait plus parler du statu quo après le Budget. Or, la décentralisation promise n'est rien d'autre, dans les faits, que la poursuite du désengagement financier d'Ottawa en matière de santé, d'enseignement postsecondaire et d'aide sociale.

Ma question s'adresse au premier ministre. Où est donc ce fameux Canada renouvelé qui a été annoncé à grands coups de trompette, alors que nous n'avons eu droit, hier, qu'à un balayage additionnel de quelque 7 milliards de dollars de factures dans la cour des provinces?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons décidé, dans le Budget d'hier, d'offrir beaucoup plus de flexibilité aux provinces dans l'administration de leurs programmes et nous essayons d'améliorer la situation de tout le monde. Les provinces auront plus de facilité pour établir elles-mêmes leurs programmes, en autant qu'elles respectent les aspirations de tous les Canadiens, c'est-à-dire d'avoir des programmes minimum pour tous les Canadiens, de sorte que la dignité des personnes soit respectée d'un bout à l'autre du Canada. Je pense que ce Budget reflète la volonté et la capacité de ce gouvernement de proposer des changements.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, comment le premier ministre peut-il avoir l'audace de prétendre qu'en privant les provinces de 7 milliards de dollars, il leur offre davantage de souplesse, de flexibilité, de capacité d'innovation pour les programmes sociaux, alors que les provinces ont déjà toutes les difficultés à faire face à la croissance de leurs dépenses dans le domaine de la santé, de l'aide sociale et de l'éducation?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, depuis très longtemps, les provinces nous demandaient d'enlever certaines conditions qui existaient dans l'administration des programmes d'aide sociale et c'est ce que nous proposons à ce moment-ci.

Quant aux services de santé, les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé, tout le monde au Canada s'entend pour dire qu'ils doivent être maintenus, parce qu'ils sont l'essence même de notre société et ce sont eux qui permettent aux gens d'avoir accès à des services de santé égaux pour tout le monde, peu importe les conditions financières des gens.


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De toute façon, il fallait être juste et équitable dans notre Budget. On ne pouvait pas couper systématiquement le budget de fonctionnement du gouvernement fédéral et ne pas couper les transferts aux provinces. C'est juste une question d'équité entre tous les programmes du gouvernement.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, j'ai entendu le premier ministre dire qu'il a cherché à être équitable par son Budget. Je ne sais pas s'il a pensé au Québec quand il a dit cela, quand on sait qu'en 1997, selon les critères qui apparaissent déjà dans les documents du ministère du Développement des ressources humaines, Québec devra supporter 41,7 p. 100 des diminutions de paiements de transfert. Est-ce qu'on appelle cela de l'équité? C'est le Québec qui «passe au cash» là-dedans!

M. Loubier: Oui, 41 p. 100. C'est équitable, ça. Bravo pour l'équité!

M. Bouchard: Comment le gouvernement peut-il afficher une pareille assurance, avec la duplicité qu'on connaît à son attitude présentement, puisqu'il claironne sa détermination de respecter les principes d'universalité et d'accessibilité en même temps qu'il annonce qu'il va réduire brutalement sa contribution à leur financement?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la question de réduction des dépenses dans tous les programmes des gouvernements a lieu à tous les niveaux. Les membres du présent gouvernement du Québec, les amis du chef de l'opposition, ont coupé 600 millions de dollars, si je ne m'abuse, dans les programmes de santé au mois de décembre. Alors, nous aussi, nous faisons la même chose, parce qu'il faut qu'il y ait des compressions, il faut que chaque niveau du gouvernement puisse en profiter.

(1420)

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, le Budget du ministre des Finances annonce la fusion de tous les paiements de transfert aux provinces en un seul programme global de transfert appelé le Transfert social canadien. Il fixe à 7 milliards de dollars le montant des coupures additionnelles dans les paiements de transfert aux provinces au cours des trois prochaines années sans préciser les modalités de répartition des paiements à partir de 1997.

Comment le ministre des Finances peut-il décréter des coupures d'une telle ampleur aux transferts auprès des provinces et reporter candidement à plus tard toute discussion avec celles-ci?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, il n'est pas question de reporter ces discussions. Nous sommes prêts à les amorcer demain si les provinces sont prêtes. C'est très clair. D'ailleurs, on l'a dit lors de notre rencontre avec les ministres des Finances. J'ai invité les ministres des Finances provinciaux à se joindre à moi immédiatement après le discours sur le Budget, et je suis prêt à les rencontrer n'importe quand. Il n'est pas question d'un retard.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, en reportant à plus tard, tel qu'il est précisé dans son Budget, les négociations avec les provinces sur la répartition des transferts, doit-on comprendre que le ministre des Finances veut cacher aux Québécois avant le référendum l'impact négatif du Transfert social canadien, justement parce que c'est le Québec qui sera le plus grand perdant en assumant plus de 41 p. 100 des coupures aux paiements de transfert, aux provinces, en 1997?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, d'abord, les chiffres que le député mentionne ne sont carrément pas vrais.

Deuxièmement, si vous voulez le savoir, les coupures au Québec, en 1994-1995 et 1996-1997, seront de 350 millions de dollars. Ce ne sont pas des montants farfelus comme ceux que le député vient de mentionner.

En ce qui concerne les discussions et le fait qu'il nous dit qu'on va les reporter après le référendum, d'abord, on a dit lors du dernier discours sur le Budget qu'on était pour les aviser et non leur faire une surprise comme celle que le gouvernement précédent leur a faite.

Est-ce que le député est en train de nous dire qu'on devrait le faire immédiatement? Je pense que M. Campeau ne sera pas tellement satisfait.

Troisièmement, dites-nous à quel moment le référendum aura lieu, on va le tenir et après on réglera les problèmes.

[Traduction]

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, dans son budget d'hier, le ministre des Finances s'engageait à ramener le déficit à 24,3 milliards en 1997.

Pendant ce temps, les fonctionnaires du ministère des Finances prédisent aux journalistes et aux marchés financiers que le déficit sera ramené à zéro d'ici l'an 2000.

Pourtant, dans le discours du budget d'hier, on ne disait rien de la façon dont le déficit passerait de 24 milliards à zéro en trois ans.

Le ministre dira-t-il aux Canadiennes et aux Canadiens, et veut-il dire à la Chambre aujourd'hui, comment il compte ramener le déficit de 24 milliards à zéro en trois ans? Est-ce que ce sera au moyen d'augmentations d'impôts, de coupes dans les programmes sociaux, ou d'une combinaison des deux?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, j'ai répété maintes fois à la Chambre que, pour un gouvernement, la meilleure façon d'atteindre ses objectifs est de se donner une série d'objectifs à court terme qui le maintiennent en alerte.

C'est de loin la meilleure méthode de contrôle des dépenses qu'un gouvernement puisse avoir. C'est la raison pour laquelle nous allons atteindre notre objectif de l'an prochain et aussi celui de l'année d'après.


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Je peux dire aux députés que ce que le gouvernement ne veut pas faire, c'est présenter un budget comme celui du Parti réformiste qui est basé sur de fausses hypothèses et de fausses données, et qui n'atteint pas ses objectifs.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le défaut principal de la réponse du ministre est aussi le défaut fondamental du budget d'hier.

On cache la vérité en ce qui concerne la menace qui plane sur les programmes sociaux du fait de l'ampleur des paiements d'intérêts. En vertu du plan budgétaire du ministre, les dépenses de programmes vont être réduites de 12 milliards sur trois ans, alors que d'ici 1997 l'intérêt sur la dette va augmenter de 13 milliards pour atteindre 51 milliards par année. La réalité, c'est que les paiements d'intérêts augmentent plus vite que notre capacité de réduire les dépenses ou d'accroître les recettes.

(1425)

Ma question au ministre des Finances est celle-ci, et tout ce que je demande, c'est un chiffre: Peut-il dire aux Canadiens combien de milliards de dollars ils paieront en intérêts l'année où le budget sera enfin valable?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, le député d'en face sait très bien que sa question est insensée. Nous avons dit que nous parviendrions à un budget équilibré en établissant une série d'objectifs à court terme. Cela va de soi qu'il y a un objectif ultime.

Je ne peux pas croire que des députés de ce parti puissent encore prendre la parole pour réclamer qu'on épargne les programmes sociaux alors qu'ils ont présenté la semaine dernière un budget dont le but ultime était de garantir que tous les Canadiens pauvres restent pauvres et que ceux de la classe moyenne le deviennent.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre prétend que son budget a épargné les programmes sociaux de compressions injustes ou pas nécessaires. En fait, les véritables compressions d'ordre social se cachent dans les énormes paiements d'intérêts qui ne sont pas nécessaires et que le gouvernement laisse croître de façon irresponsable en ne s'attaquant pas plus rapidement au déficit.

Cela signifie que, quand les libéraux imposeront des compressions d'ordre social, car ils le feront, ces compressions seront plus importantes, plus désespérées et plus destructrices que les Canadiens ne peuvent l'imaginer.

Le ministre des Finances peut-il honnêtement avouer aux Canadiens qu'il fait courir le plus grand des dangers aux programmes sociaux en ayant négligé d'équilibrer le budget plus rapidement, alors qu'il avait une chance de le faire?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, la meilleure façon de remettre de l'ordre dans les finances de notre pays, c'est de présenter un budget qui fasse chuter les dépenses fédérales de 120 milliards de dollars en 1993-1994 à 108 milliards en 1996-1997.

La meilleure façon de traiter les finances du Canada, c'est de limiter les dépenses de programmes à 13 p. 100 du total, ce qui est la proportion la plus faible depuis 1951. La meilleure façon d'épargner les programmes sociaux est de faire en sorte qu'un parti qui a dit qu'il récupérerait la pension de vieillesse des gens qui reçoivent le supplément de revenu garanti ne prenne jamais le pouvoir.

Des voix: Bravo!

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le Budget déposé hier implique des coupures additionnelles de 7 milliards de dollars pour les provinces au cours des trois prochaines années. En transférant une facture additionnelle de 7 milliards de dollars aux provinces, Ottawa pellette une fois de plus une partie de son déficit dans la cour des provinces.

Le ministre des Finances admettra-t-il que les coupures additionnelles décrétées par son gouvernement dans les paiements de transfert aux provinces vont se traduire inévitablement dans les faits par une réduction des services aux citoyens, une augmentation des impôts provinciaux ou un mélange des deux?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, pas du tout. Lorsqu'on a rencontré les ministres des Finances, ils nous ont demandé d'abord pour ne pas avoir de surprise de leur donner au moins une année d'avis. Ce qu'on a fait.

Deuxièmement, ils nous ont demandé de couper chez nous d'abord et de couper chez nous beaucoup plus fort qu'on ne coupait chez elles. Si l'on regarde, on a fait des coupures chez nous, par exemple, en 1996, de 7,3 p. 100 et seulement de 4,3 à 4 p. 100 en ce qui concerne les provinces. Lorsqu'on regarde la province de Québec, c'est seulement 350 millions de dollars en comparaison avec cette année. Alors, il faut le dire, c'est inférieur à 3 p. 100 des revenus des provinces. Je crois que c'est abordable.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, les chiffres du ministre des Finances sont faux. Il regarde l'ensemble des transferts et c'est seulement les transferts en espèces qu'il coupe. Il le sait très bien.

Le ministre des Finances confirme-t-il que les coupures dans les paiements de transfert aux provinces qu'il a décrétées hier se traduiront par un manque à gagner pour les Québécois de plus de 2,5 milliards de dollars d'ici trois ans?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, en comparaison avec cette année, c'est 350 millions de dollars.

(1430)

[Traduction]

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, au cours des années 80, Michael Wilson nous présentait des budgets fondés sur les mêmes principes et les mêmes projections de stabilisation du rapport entre la dette et le PIB que le budget d'hier. Comme les analystes le disaient à l'époque et le


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disent maintenant, il ne suffit pas de planifier en fonction d'une stabilisation du rapport entre la dette et le PIB en période de prospérité.

Pourquoi la prochaine récession, qui arrivera inévitablement, ne ferait-elle pas encore augmenter le déficit et ne ramènerait-elle pas le pays dans une situation incontrôlable où la dette grandit par rapport au PIB?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, la prémisse du député est erronée. Premièrement, quand Michael Wilson présentait son budget, il ne faisait pas de vraies compressions. Comme le député le sait bien, il n'a fait que hausser les niveaux de référence.

Deuxièmement, Michael Wilson n'agissait pas suivant une perspective ordonnée des affaires du pays ou un ordre de priorité. Il faisait simplement des coupes dans tous les domaines.

Troisièmement, Michael Wilson n'a jamais atteint ses objectifs, et nous avons atteint les nôtres.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, Michael Wilson était aussi dans la position très avantageuse d'avoir une dette de 250 milliards de dollars au lieu de 550.

Les compressions absolues des dépenses de 10 milliards de dollars prévues dans le budget équivalent presque à l'augmentation du service de la dette qui est évaluée à 9 milliards pour la période couverte par le budget. L'augmentation prévue des recettes due à la prospérité et aux augmentations d'impôts s'élève à la somme astronomique de 12,7 milliards de dollars.

Est-ce que, dans son prochain budget, le ministre pense pouvoir maintenir le rapport entre la dette et le PIB en se contentant de pareilles compressions et d'une augmentation similaire des recettes?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, comme le sait le député, non seulement le rapport entre la dette et le PIB se stabilisera en 1996-1997, mais en outre il commencera à s'améliorer, tendance dont je puis assurer le député qu'elle sera permanente.

Le député a soulevé une question très importante. Réduire le rapport entre la dette et le PIB est un objectif extrêmement important. Nous en sommes très conscients et nous nous y employons.

Le député a mentionné l'ampleur de la dette que je dois éponger par rapport à celle dont Michael Wilson avait hérité. Il existe une autre différence entre Michael Wilson et moi-même. Il a eu la bonne fortune de succéder à un gouvernement libéral alors que j'ai pris la succession des conservateurs.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement n'a pas osé dévoiler dans son Budget ses véritables intentions sur la réforme des pensions de vieillesse, préférant reporter encore une fois une étude qui devait normalement être publiée l'an dernier.

Le ministre des Finances confirme-t-il que les intentions de son gouvernement sont de réduire les bénéfices du régime de pensions de vieillesse pour des milliers de citoyens canadiens, voire restreindre l'accessibilité au régime pour des milliers de personnnes âgées?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, pas du tout. La réponse est carrément non. Ce que nous avons l'intention de faire, c'est d'étudier avec les provinces le Fonds de pensions du Canada, et en même temps, j'en suis sûr, ils étudieront le Fonds de pensions du Québec, parce que c'est cet automne qu'il faudra faire les révisions nécessaires. C'est tout à fait naturel de les étudier tous ensemble, avec les provinces.

(1435)

Je peux vous assurer, et je peux assurer le député, qu'on a l'intention de protéger les plus vulnérables de notre société, les aînés du Canada.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, vous comprendrez qu'il serait étonnant que le ministre des Finances crée un comité de travail pour augmenter les pensions de vieillesse. Cela m'étonnerait beaucoup.

Est-ce que le ministre des Finances admettra que s'il ne divulgue pas immédiatement les modalités de son projet de réforme de la sécurité de la vieillesse, c'est qu'il souhaite que ses intentions ne soient connues des personnes âgées qu'uniquement après la période référendaire au Québec?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, on a un échéancier qui a été établi par la loi depuis bien longtemps pour étudier le Fonds de pension du Canada tous les cinq ans, et le Fonds de pension du Québec. Ce n'est pas nous qui avons établi l'échéancier. Je le répète encore, dites-nous quand vous aurez le courage de tenir le référendum, on va régler le problème, et après cela on pourra continuer de bâtir le pays.

Vous savez, nous avons beaucoup de questions à régler au Canada. On a une économie à gérer, et peut-être que je devrais poser la question encore une fois. Le grand penseur économique du mouvement séparatiste, Richard Le Hir, a dit qu'il n'était pas prêt à rencontrer les obligations du Québec en ce qui concerne la dette. Est-ce que c'est la position du Bloc québécois? Est-ce qu'il y a encore une différence d'opinion?

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, ce gouvernement avait promis aux Canadiens un plan visant à préserver et à protéger notre sécurité sociale tout en tenant compte de la réalité financière. Ils l'attendent toujours. Dans son budget d'hier, le gouvernement nous promet encore un autre document de travail de la part du ministre du Développement des ressources humaines.


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Ma question s'adresse au ministre des Finances: Pourquoi les Canadiens devraient-ils, pour la deuxième fois, confier la réforme des programmes sociaux à un processus et à un ministre qui jusqu'ici n'a jamais tenu parole?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, une fois de plus, et ce dans le seul intérêt de la discussion, la députée pose une question sans savoir de quoi elle parle, ce qui est regrettable étant donné la gravité du sujet.

Comme nous l'avons clairement indiqué dans le budget d'hier, nous avons une idée très précise des initiatives que nous allons prendre pour réformer les programmes sociaux. À l'automne, nous présenterons une mesure législative d'envergure concernant l'assurance-chômage. Dans le budget d'hier, nous avons prévu la création d'un nouveau fonds d'investissement en ressources humaines qui va nous permettre de mettre en oeuvre dès maintenant certaines des réformes proposées.

Nous avons déjà commencé à réorganiser le ministère du Développement des ressources humaines afin de décentraliser la prestation des programmes et de mettre fin au double emploi et aux chevauchements. Nous avons lancé un nouveau programme de transfert, là encore dans le but d'éliminer les chevauchements et le double emploi avec les provinces.

Il me semble que ce n'est pas mal comme début de réforme sociale et de loin supérieur à tout ce que le Parti réformiste a proposé jusqu'à maintenant.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Je ne m'étais pas rendu compte que le ministre s'attendait que le Parti réformiste fasse le travail à sa place.

Plus sérieusement, le ministre sait que, pour chaque dollar emprunté aujourd'hui, il y aura deux dollars de réductions demain. Des Canadiens s'inquiètent et demandent: «Qu'est-ce que cela signifie pour nos programmes sociaux?» Quelle réponse le ministre des Finances peut-il leur fournir?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, la réponse saute aux yeux. La principale différence entre le Parti réformiste et le nôtre, c'est que nous croyons profondément au tissu social du Canada.

(1440)

Pour certains députés, les compressions ne sont que des opérations comptables; il suffit d'équilibrer les livres et non les besoins d'un pays. Ce n'est pas l'avis de notre gouvernement.

Si notre gouvernement s'attaque au déficit, ce n'est pas parce que nous pensons que les Canadiens ne devraient pas avoir de programmes sociaux, mais bien parce que nous voulons les préserver ainsi que l'héritage du Parti libéral.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, après avoir coupé sur trois ans 5,5 milliards de dollars dans l'assurance-chômage dans son premier Budget, coupure dont les chômeurs n'ont pas encore fini de subir pleinement les effets, voilà que le ministre des Finances s'acharne à nouveau sur les chômeurs en annonçant une coupure additionnelle de 10 p. 100 du budget d'assurance-chômage pour l'an prochain.

Le ministre des Finances reconnaît-il que les coupures additionnelles qu'il annonce en matière d'assurance-chômage priveront les chômeurs d'au moins 700 millions de dollars additionnels en 1996-1997?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'invite la députée à examiner attentivement le document budgétaire et les initiatives que nous avons envisagées dans le cadre de la réforme de l'assurance-chômage.

Cette réforme vise à modifier le système pour faciliter le retour sur le marché du travail, éliminer du système de nombreux obstacles et fournir aux Canadiens de vraies ressources leur permettant d'obtenir une solide formation, de bons services d'orientation et des programmes de qualité. Pour cela, nous pouvons utiliser les économies réalisées dans le cadre de la mesure législative.

La députée est donc complètement dans l'erreur. En réalité, nous voulons convertir le régime en un fonds d'assurance-chômage et donner aux Canadiens de nouveaux espoirs, de nouveaux emplois, de nouvelles possibilités. Voilà ce que signifie la réforme.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, pendant la tournée du Comité du développement des ressources humaines, nous nous sommes fait dire à répétition que le problème, beaucoup plus que la formation, c'était des emplois, des vrais emplois. Or, il n'y a rien dans ce Budget pour les emplois.

Comment le ministre des Finances peut-il oser exiger un effort supplémentaire d'au moins 700 millions de dollars aux chômeurs alors qu'il s'est contenté d'un impôt temporaire de 100 millions de dollars sur deux ans aux banques et aux institutions financières quand on sait que la Banque royale, à elle seule, a réalisé des profits de 1,2 milliard de dollars l'an passé?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, la meilleure façon de garantir des emplois au Canada c'est exactement ce que le ministre vient de dire, c'est-à-dire de passer d'une aide passive à une aide active pour apporter ce dont les travailleurs ont besoin.

La meilleure façon de le faire c'est de réduire les cotisations d'assurance-chômage pour que les PME puissent engager du monde. Et troisièmement, la meilleure façon c'est de maintenir la reprise économique. L'année dernière, on a créé 433 000 emplois et l'an prochain, on fera la même chose.


10150

[Traduction]

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie.

Le budget d'hier a tracé la voie menant à une solide croissance économique. Il est conforme aux engagements pris pendant la campagne électorale. Un de ces engagements portait sur la création d'emplois dans le secteur de la petite et moyenne entreprise.

Le secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie peut-il expliquer quelle réponse ce budget donne aux préoccupations des petites et moyennes entreprises?

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le meilleur espoir que nous avons pour remettre les Canadiens au travail réside dans le secteur de la petite et moyenne entreprise, c'est-à-dire le million d'entreprises qui emploient près de 70 p. 100 des Canadiens.

Dans son budget, le ministre des Finances a pris trois mesures précises à l'endroit de la petite entreprise. Premièrement, aucun changement n'est apporté au taux de l'impôt des sociétés dans le cas d'une petite entreprise. Deuxièmement, l'exonération de 500 000 $ en gains de capital est maintenue. Troisièmement, et il s'agit de la mesure la plus importante, le ministre des Finances a annoncé hier soir que les banques à charte du Canada devront répondre de leurs relations avec les petites et moyennes entreprises.

(1445)

Aujourd'hui, le président du Comité permanent de l'industrie a annoncé que, d'ici deux semaines et demie, les présidents de toutes les institutions financières du Canada pourront venir témoigner devant le comité et expliquer l'appui qu'ils offrent aux petites entreprises.

Voilà comment des emplois seront créés.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, enfouis dans les tréfonds du budget libéral se trouvent une augmentation de la taxe sur l'essence, une hausse de 2 points du taux d'intérêt exigé sur les impôts en souffrance, un excédent du compte d'assurance-chômage et l'élimination du transfert de l'impôt sur le revenu des entreprises d'utilité publique, pour ne nommer que quelques-unes des mesures annoncées hier. Le ministre admettra-t-il qu'il s'attaque encore et toujours aux Canadiens à revenu moyen?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, au bout d'un an, nous avons finalement réglé, et de façon très satisfaisante, la question des combustibles de remplacement avec l'utilisation de l'éthanol.

Des voix: Oh, oh!

M. Martin (LaSalle-Émard): Monsieur le Président, je n'aurais jamais dû m'aventurer sur ce terrain. Je flaire des embûches.

Le Président: Décidément, les députés débordent d'imagination.

Des voix: Oh, oh!

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, sur une note plus sérieuse, le ministre se targue d'être transparent et il parle effectivement d'une hausse de la taxe sur l'essence de 1,5c. le litre. Toutefois, il ne faut pas oublier qu'il y a une taxe sur cette taxe, la TPS. Le ministre ne pense-t-il pas que certains Canadiens pourraient voir dans cette mesure une tactique visant à les tromper?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Non, monsieur le Président, jamais de la vie. Les Canadiens connaissent très bien les produits et services auxquels s'applique la TPS. Maintenant que le budget a été déposé, nous avons hâte de nous attaquer, un peu plus tard au cours de l'année, à la question de la TPS.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Dans le cadre des nouvelles compressions budgétaires au sein du ministère de la Défense, le ministre de la Défense a annoncé hier la fermeture du quartier général de l'armée de terre et des installations de Saint-Hubert. Selon le journal La Presse, cette décision entraînera l'abolition de 400 postes, dont la moitié sont occupés par des civils.

Comment le ministre des Finances peut-il justifier, après la fermeture, l'année dernière, du Collège militaire de Saint-Jean, la décision de fermer complètement les installations et la base de Saint-Hubert, alors que la sous-représentation du Québec au chapitre des infrastructures et des dépenses de l'armée canadienne privent déjà le Québec d'un minimum de 650 millions de dollars par année?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le Comité mixte spécial de la défense de la Chambre des communes et du Sénat a recommandé d'économiser de l'argent en éliminant une structure de commandement dans les Forces armées canadiennes. Dans le budget déposé hier, nous avons respecté cette recommandation en abolissant le commandement aérien à Winnipeg, le commandement maritime à Halifax et le commandement de la force terrestre à Saint-Hubert.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Finances prend-il l'engagement que des mesures d'adaptation seront rapidement mises en place pour permettre aux employés civils de se trouver un nouvel emploi?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, dans le budget de l'an dernier, nous avons annoncé l'abolition de 16 500 postes à la défense nationale. Hier, nous avons annoncé l'élimination d'un peu moins de 12 000 postes. En tout, cela fait près de 30 000 postes. Toutes les personnes visées seront admissibles au programme de réduction des troupes à l'intention des militaires ou du programme de réduction des effectifs civils à l'intention des fonctionnaires.


10151

J'aimerais ajouter que 73 p. 100 des personnes visées par les réductions annoncées l'an dernier ont accepté notre offre et ont touché en moyenne une indemnité de 53 000 $. Nous pensons que les personnes visées cette année seront traitées équitablement et humainement et qu'elles accepteront l'offre de départ.

(1450)

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, selon les prévisions budgétaires déposées ce matin, la Société d'expansion du Cap-Breton verra son budget augmenter de 69,3 p. 100. C'est exact, monsieur le Président, une augmentation de 69,3 p. 100 par rapport à l'an dernier. J'avais cru entendre le ministre des Finances déclarer hier qu'il allait réduire les dépenses.

Comment le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux peut-il justifier une telle augmentation des dépenses dans sa propre circonscription? Comment peut-il se justifier aux yeux des Canadiens du reste du pays?

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

Il devrait savoir que la réduction des fonds accordés à l'APECA et à la Société d'expansion du Cap-Breton totalise 173,5 millions de dollars sur une période de trois ans. Dans le cas de la Société d'expansion du Cap-Breton, les compressions sont de plus de 2,5 millions de dollars et le personnel y sera réduit de 24 p. 100.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): J'avais cru dire qu'il y avait eu une augmentation de 69 p. 100, monsieur le Président.

Je constate également que, dans les prévisions budgétaires du ministère du Patrimoine canadien, une enveloppe de 1,8 million de dollars est prévue pour la construction d'un terrain de golf au Cap-Breton.

Hier, le ministre des Finances a dit de réduire les dépenses. Il a également déclaré que le deuxième principe voulait que les priorités nationales reflètent les besoins de la population et que le troisième principe était celui de la frugalité parce que chaque dollar compte.

Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux comprend-il le sens de ce qu'a dit le ministre des Finances ou bien refuse-t-il tout simplement de renoncer à l'assiette au beurre?

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je remercie le député pour sa question.

Il devrait savoir que le ministre des Finances a imposé aux agences de développement régional des compressions de plus de 550 millions de dollars. L'examen des programmes a porté sur tous les ministères et sur toutes les agences du gouvernement du Canada et tous ont subi des compressions.

L'APECA perdra 173,5 millions de dollars en trois ans et elle devra perdre 50 personnes employées.

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé des Sciences, de la Recherche et du Développement.

Le budget d'hier reflète la situation financière très sérieuse à laquelle le gouvernement et la nation sont confrontés. En nous efforçant de juguler notre déficit, il importe de continuer à jeter les bases sur lesquelles s'appuiera notre croissance économique future.

Gardant cela à l'esprit, le secrétaire d'État peut-il dire à la Chambre comment le budget se répercutera sur le financement des sciences et de la technologie?

L'hon. Jon Gerrard (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement), Lib.): Monsieur le Président, le budget donne une priorité aux sciences et à la technologie.

Par exemple, le budget du ministère de l'Industrie a été amputé de 43 p. 100, mais les compressions imposées aux deux conseils subventionnaires qui relèvent du portefeuille d'Industrie Canada, le CRSNG et le CRSH, ne seront que de 14 p. 100 pour les trois prochaines années et les compressions imposées au Conseil national de recherches du Canada ne seront que de 15 p. 100 pour la même période au cours des trois prochaines années.

Donc, le budget est dur, mais juste et on y a donné la priorité aux sciences et à la technologie, ce qui est important pour notre avenir.

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le ministre a dit que la justice entre les régions constituait un des principes fondamentaux de son budget. Or, aujourd'hui, pour l'agriculteur, le pêcheur, le chef de petite entreprise dans une localité rurale ou le mineur, le budget n'est pas seulement austère, il est dévastateur.

Le ministre n'est-il pas d'accord pour dire que ce sont les Canadiens des petites localités et des régions rurales que les financiers de Wall Street ont tenus en otage dans ce budget?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Non, pas du tout, monsieur le Président.

La députée le sait, nous avons un problème de dette et de déficit. Les Canadiens voulaient que nous y fassions face, car cela faisait près d'une décennie que cette mesure était sans cesse reportée à plus tard. D'ailleurs, ce sont les secteurs de l'économie, les petites localités et le Canada rural dont elle parle qui souffraient du fait que le niveau de vie canadien diminuait, non pas à cause du budget actuel, mais parce que les gouvernements antérieurs avaient refusé de s'attaquer au problème.

En nous confrontant au problème, nous avons donné aux Canadiens des petites localités et des régions rurales un énorme espoir, l'espoir que nos programmes sociaux seront maintenant préservés, que les secteurs industriels de base seront préservés et que les Canadiens continueront de créer des emplois. Voilà vraiment ce que nous avons fait dans ce budget, un budget pour les Canadiens.


10152

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. C'est à propos de la proposition. . .

Des voix: Oh, oh!

(1455)

Le Président: La parole est au député de Sherbrooke.

M. Charest: Monsieur le Président, c'est la plus longue question que j'aie eue à poser depuis longtemps. Ma question au premier ministre a trait à une disposition du Plan budgétaire, à la page 65, qui prévoit une mesure fiscale pour les grands-mères.

À propos des changements qu'il compte apporter dans le cadre de la réforme des pensions, le gouvernement annonce qu'il songe à offrir les prestations de sécurité de la vieillesse en fonction du revenu familial. Cela voudrait dire que les femmes âgées de plus de 65 ans qui bénéficient des prestations de SV pourraient les perdre en raison du revenu de leur conjoint. Le premier ministre confirmera-t-il cette éventualité à la Chambre des communes?

[Français]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Ma réponse, monsieur le Président, c'est que la prétention du député ne se réalisera pas. Ce que nous voulons faire à ce moment-ci c'est de nous assurer que le Régime des pensions soit réétudié et on est obligé, en vertu des lois de ce Parlement, de rencontrer les provinces tous les cinq ans. Nous devons les rencontrer cette année à ce sujet. Il faut s'assurer que le système de pensions au Canada puisse continuer dans les générations à venir, et c'est ce que le ministre des Finances a indiqué dans son budget hier.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Le ministre des Finances annonçait hier la fin des subventions aux transporteurs de grain tout en annonçant une généreuse compensation de près de 3 milliards de dollars versée notamment sous forme de subventions directes aux producteurs de l'Ouest. Le ministre a aussi réduit de 30 p. 100 les subventions aux producteurs laitiers. Moins chanceux, ceux-ci n'ont pas droit à des compensations.

Comment le ministre des Finances peut-il justifier une telle politique de deux poids, deux mesures tout à fait inéquitable pour les producteurs laitiers, situés pricipalement au Québec et qui sont privés de toute forme de compensation financière, contrairement aux producteurs céréaliers de l'Ouest?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, il y a une différence fondamentale entre les deux. En ce qui concerne le Pas du Nid-de-Corbeau, c'était très clair que l'on vient de terminer la subvention. Tandis qu'en ce qui concerne les subventions à l'industrie laitière, le ministre de l'Agriculture, aujourd'hui, est à Québec en train de rencontrer l'association. D'ailleurs, on ne l'a pas abolie, tout ce qu'on a fait c'est qu'on l'a coupée de 30 p. 100. Cela étant dit, j'ai un peu de difficulté à comprendre, mais je comprends. Il faut être consistant. Nous, il faut le dire, on l'a coupée de 30 p. 100. Est-ce que je peux citer le chef de l'opposition dans un débat avec Joe Clark? M. Clark a dit, et je le cite en anglais:

[Traduction]

«Nous versons des subventions importantes aux producteurs de lait industriel. En tâchant de rendre un Québec indépendant plus compétitif, allez-vous supprimer ces subventions, Lucien?»

[Français]

Et le chef de l'opposition a dit, et je le cite en anglais:

[Traduction]

«Si vous me le demandez, oui, nous devrions effectivement abandonner cette pratique.»

Des voix: Oh, oh!

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Alors que les Canadiens ordinaires se voient frappés par les dispositions du budget, les prévisions budgétaires de cette année révèlent que les budgets de fonctionnement du Sénat et des cabinets ministériels ont augmenté.

Comment se fait-il que les sénateurs et les politiciens continuent de profiter de l'assiette au beurre à Ottawa, alors que les Canadiens surchargés d'impôts doivent se serrer la ceinture?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'on peut voir une augmentation de 1 000 $ pour le Sénat dans le Budget des dépenses principal.

Je crois comprendre que les membres de l'autre endroit cherchent encore à faire des réductions, tout comme la Chambre des communes. Le whip en chef du gouvernement vient d'annoncer, la semaine dernière, que le budget de la Chambre des communes sera réduit, sans parler des réductions de 19 p. 100 sur trois ans annoncées hier par le ministre des Finances. Jamais les dépenses publiques n'ont été réduites de façon aussi massive dans les temps modernes. En plus de ces réductions de 19 p. 100, le régime de pensions des députés a été réduit de 33 p. 100 en un an.

* * *

(1500)

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Chers collègues, je voudrais vous signaler la présence à notre tribune d'une personne qui connaît bien cette Chambre. Il s'agit de l'honorable Alan A. Macnaughton, ancien Président de la Chambre des communes.

Des voix: Bravo!

10153


10153

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement, ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

M. John Harvard (Winnipeg St. James, Lib.): Madame la Présidente, je veux tout d'abord féliciter le ministre des Finances pour le budget qu'il a présenté hier, budget qui, à mon avis, est juste et équitable. Je crois que cela répond au premier critère établi par la population: le budget devait être juste et équitable pour tous les Canadiens et toutes les régions. Le ministre des Finances a réussi cet exploit, tout en faisant un effort magistral pour réduire le déficit et la dette et mettre de l'ordre dans les affaires du gouvernement pour la première fois depuis de nombreuses années.

Je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour parler non seulement du budget déposé hier, mais aussi d'une maladie qui est en train d'envahir le Canada, une maladie qui devient plus visible et plus répandue à l'occasion d'événements comme ce débat sur le budget. C'est une maladie causée par un manque de compréhension, de compassion et d'acceptation. Cette maladie, axée sur l'égocentrisme, est propagée par les individus, les entreprises, les médias et les députés. Je veux parler ici de ce que j'appelle la culture de la victimisation.

Cette culture est dépeinte et exacerbée presque exclusivement par la droite. Je crois que, au cours des dix dernières années, l'idée que chacun de nous est une victime s'est répandue de façon alarmante. Les Canadiens sont des victimes. Nous vivons dans la crainte d'être victimisés davantage. En réalité, je crois que cette paranoïa a créé une société dans laquelle nous sommes tous victimes de quelque chose par nécessité.

Nous sommes victimes de la criminalité. Nous sommes victimes des impôts. Nous sommes victimes du gouvernement. Nous sommes victimes des grandes sociétés. Nous sommes victimes des groupes d'intérêts. Les habitants de l'Ouest sont des victimes. Les Québécois sont des victimes. Les habitants de la région atlantique sont des victimes. Nous sommes victimes si nous parlons anglais. Nous sommes victimes si nous parlons français. Nous sommes rarement des gens unis par un lien commun. Pourtant, ce lien commun existe. Nous sommes tous des Canadiens. On ne peut pas nier le fait que nous sommes tous des Canadiens et que nous formons la population sur laquelle le ministre des Finances s'est basé pour établir son budget.

(1505)

La réduction de dépenses de 7$ pour chaque dollar de nouvelles recettes fiscales n'est pas un fardeau attribuable à un type de Canadien, mais à tous les Canadiens. Si nous sommes tous touchés, comment pouvons-nous tous être des victimes? J'entendais des députés d'en face renforcer la notion selon laquelle nous sommes tous des victimes.

Certains groupes d'intérêts et même certaines provinces qui n'ont pas obtenu ce qu'ils voulaient dans ce budget ont dit que le gouvernement n'a pas été honnête. Comme des enfants gâtés, nos critiques exigent plus pour eux-mêmes sans trop se soucier des autres. Du même souffle, ils exigent des mesures d'austérité plus rigoureuses, mais ils comptent le plus souvent qu'elles seront au détriment de quelqu'un d'autre.

Ils demandent aux Canadiens de croire, ou plutôt de compter que le gouvernement est là pour les dorloter. Que c'est le rôle du gouvernement de leur rendre la vie plus facile. «Si les choses ne se passent pas comme elles le devraient, c'est parce que ce gros méchant gouvernement ne me laisse pas réussir. Je suis une victime.» Nous avons tous jusqu'à un certain point contribué à créer cette mentalité d'impuissantes victimes.

Ainsi, les indicateurs économiques montrent que les Canadiens se remettent de la récession du début des années 90. Mais un traumatisme subsiste. Le ministre des Finances a surpassé ses objectifs de 1994 de compression des coûts, mais l'opposition continue de hurler. Les dépenses au titre des programmes seront réduites d'environ 10 milliards de dollars, et c'est à l'avantage de tous les Canadiens. Mais l'opposition hurle encore et demande: «Et moi?»

À bien des égards, et grâce aux critiques, les Canadiens sont devenus plus dépendants du gouvernement. Celui-ci doit veiller à ce que nous ayons tous des emplois et satisfaire notre moindre caprice. Il doit panser nos moindres blessures. Nous comptons moins sur nous-mêmes, sur nos propres compétences. Nous sommes devenus des victimes. Mais nous ne pouvons pas penser qu'à nous. Nous ne pouvons pas accepter non plus de vivre dans une culture de victimisation.

Kennedy avait raison de dire: «Nos privilèges ne sauraient dépasser nos obligations. Nos droits ne seront protégés qu'aussi longtemps que nous remplirons nos responsabilités.»

Les réformistes voudraient que nous fassions disparaître tous les programmes et services offerts à tous les Canadiens. Selon eux, il faut tailler aveuglément dans le vif. Notre droite politique n'aurait jamais pu concevoir la compassion et la compréhension humaine que traduit la mise en place du nouveau transfert social canadien pour les provinces.

Il est vrai qu'il y aura réduction des versements aux provinces; c'est nécessaire pour rétablir notre situation financière. Cette mesure ne peut pas et ne doit pas être vue comme un moyen indirect de s'attaquer aux simples citoyens. Elle témoigne plutôt de notre attachement à bien gouverner en réduisant les chevauchements et le double emploi.

Il est donné aux Canadiens l'occasion d'aider à créer et à développer un fédéralisme plus mûr sur le plan financier. Par des initiatives comme le transfert social canadien, le gouvernement a mis en place les conditions nécessaires pour répondre aux


10154

préoccupations des citoyens, qui souhaitent des programmes durables, et des provinces, qui réclament plus de souplesse.

Il ne faut pas oublier que le ministre des Finances a tenu compte du fait que le changement nécessite une période d'adaptation. Le gouvernement n'a pas oublié les personnes en chair et en os qui subiront les effets de ce budget. Le gouvernement n'entend pas perpétuer l'idée que nous vivons dans une culture qui fait de nous des victimes.

Dans leur budget, les réformistes ont misé sur les craintes de ceux qui se considèrent comme des victimes. Certains députés d'en face voudraient en effet nous faire croire qu'il suffit de procéder à des compressions pour que tout aille mieux. En même temps, les réformistes refusent toutefois de dire clairement comment ils procéderaient. En fait, si nos compressions ne leur plaisent pas, la solution est toute simple: ils n'ont qu'à proposer les leurs, mais elles ont intérêt à produire les résultats escomptés en bout de ligne. Une approche aussi indolente et simpliste laisse supposer qu'il suffit de réduire ce qui constitue le plus lourd fardeau d'après les critères qu'on s'est fixés. Les réformistes devraient s'assurer des résultats en bout de ligne.

C'est ce genre d'analyse naïve qui perpétue la victimisation culturelle. Ce serait merveilleux si l'on pouvait examiner son budget personnel et en supprimer les éléments qui semblent les plus coûteux. Pourquoi se préoccuper de la nourriture, des vêtements et du logement? À en croire certains députés, il n'y a que le résultat final qui compte. Pourquoi se montrer humain? Il suffit d'équilibrer le budget, quels qu'en soient les coûts sociaux.

(1510)

Pareilles compressions visant la nourriture, les vêtements et le logement sont irréalistes sur le plan personnel et sont inacceptables au niveau fédéral. Nous devons évaluer nos priorités et, à partir de là, déterminer où nous pouvons réduire les dépenses. C'est là l'approche que le gouvernement actuel et son ministre des Finances ont adoptée.

Nous serions encore plus victimes si nous pratiquions simplement des compressions pour arriver à un résultat final. Nous avons eu recours à une méthodologie et à un raisonnement sûrs pour déterminer les secteurs où il y avait du gaspillage et des chevauchements et ceux qui n'étaient pas suffisamment rentables. Grâce à cette évaluation réaliste de la situation économique du Canada, le ministre des Finances a proposé, au regard de la responsabilité budgétaire, une approche qui reconnaît la notion de réussite culturelle. Le gouvernement ne contribue pas au malaise de la victimisation culturelle.

Fondamentalement, le troisième parti propose une vision égoïste: comme je vis dans l'Ouest, je vais réduire les services dans l'Est. Soyons honnêtes. Notre société ne pourra survivre si nous sommes ethnocentriques. En adoptant ce genre d'attitude régionaliste égocentrique dangereuse et préjudiciable aux composantes culturelles du tissu canadien, on fait un effort futile pour tenir le coup.

Le tissu finit pas s'user et se déchirer. Il faut cesser de penser que nous sommes victimes de l'environnement culturel dans lequel nous vivons. Nous ne devons pas accepter l'idée que, pour survivre, nous devons être les plus forts ou avoir les ressources les plus abondantes.

Les réformistes voudraient que nous adhérions tous à cette logique, une logique qui détruirait irrémédiablement le tissu social. Si le recours à ce genre de logique vise simplement la suppression de la dette, cette approche ne tient alors pas compte du fait que nous tous, quel que soit notre province ou pays d'origine, qu'il s'agisse du Manitoba, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Yukon ou du Nunavut et que nous soyons néo-canadiens ou canadiens de souche, nous faisons encore tous partie d'une collectivité.

Nous ne pouvons survivre en nous préoccupant uniquement de nos besoins ou désirs particuliers. Parce que les êtres humains ont un esprit grégaire et que nous sommes des créatures sociales, nous devons voir plus loin que le bout de notre nez.

Les Canadiens voulaient et méritaient un budget respectant les principes de la justice et de l'équité. Le ministre a atteint cet objectif. Les sociétés autant que les contribuables sont des partenaires égaux dans la lutte pour la survie du Canada.

Nous savons que le ministre des Finances est sérieux. C'est pourquoi les sociétés et les particuliers ont été mis sur le même pied. Par des améliorations du régime fiscal, par exemple, les entreprises indépendantes et non constituées en société devront dorénavant payer l'impôt sur leur revenu l'année où elles le touchent, tout comme les salariés doivent le faire. Dans ce budget, nous avons donc supprimé des obstacles contribuant à la culture de la victimisation.

Nous avons la chance de vivre dans une société qui nous permet d'exister en tant qu'entité synergique où le tout est plus grand que l'ensemble de ses parties. Je ne nierai pas que nous avons tous nos problèmes, dont certains sont propres à certaines personnes ou à une région donnée et certains nous concernent tous.

Nous devons être en mesure de nous étirer davantage et de courir plus vite afin de ne être constamment ramenés dans le passé. Nous devons accepter nos responsabilités d'abord en tant que Canadiens. Nous devons nous rendre compte que le changement n'est pas en soi une mauvaise chose. Nous devons nous rendre compte que nous ne sommes pas des victimes, mais des vainqueurs.

Avant d'aller plus loin, je voudrais féliciter le ministre du Développement des ressources humaines et nos collègues manitobains au sein de notre caucus de leur dur travail et de leur détermination à l'égard de ce budget.

Il y a deux mois, la perspective de perdre le commandement aérien est devenue une horrible possibilité. Cependant, après le budget d'hier, la réalité pour les Manitobains est moins grave. Seulement de 350 à 375 emplois seront supprimés par suite de la fermeture du quartier général du commandement aérien. C'est une différence marquée par rapport au nombre d'emplois qui auraient été perdus selon les prévisions. Bien que la perte du commandement aérien sera difficile pour les Manitobains, j'ai la certitude qu'une fois que les raisons du gouvernement seront comprises, les Manitobains accepteront ce changement.


10155

(1515)

Ils l'accepteront d'autant plus facilement que ce n'est pas seulement le commandement aérien qui sera touché; en effet, le quartier général du commandement maritime de la région de l'Atlantique et le quartier général du commandement de la force terrestre au Québec seront également fermés.

Je puis dire aux députés qu'il y a des gens à Winnipeg qui pensaient que le commandement aérien pourrait être fermé, mais que le commandement de la force terrestre serait épargné. Nous avons agi ainsi parce que le ministre et notre gouvernement croient en l'équité.

Les Manitobains pourront se rendre compte qu'ils ne sont pas les seuls à subir des réductions. En fait, toutes les régions seront touchées. Certes, ces fermetures seront durement ressenties dans les régions en cause, mais il ne faut pas perdre de vue le fait que l'ensemble du niveau de gestion sera supprimé et que cela fera économiser beaucoup d'argent aux contribuables canadiens.

Le budget présenté hier redéfinit le Canada et ses relations avec les provinces. Les Canadiens entrent dans une nouvelle ère. Une étape importante a été franchie pour en finir avec la culture de la victimisation. Enfin, le gouvernement a décidé de préserver les valeurs fondamentales tout en reconnaissant les différences intrinsèques entre les provinces. Pensons par exemple à la décentralisation de la gestion des aéroports au Canada. Le gouvernement conserve son rôle de gardien, mais accepte que des gens de Winnipeg, de Toronto et de Barrie, en Ontario, puissent se charger, avec succès, de l'exploitation de leurs aéroports locaux.

Non seulement ces efforts permettent de supprimer des niveaux bureaucratiques, mais ils constitueront une motivation positive pour tous les Canadiens qui se sentent à l'aise au sein d'une fédération et ne sont pas victimes de nos identités régionales.

C'est ce qui s'appelle gouverner, et pas simplement faire des compressions. Ça prend un gouvernement intelligent pour reconnaître qu'il a des obligations sociales, culturelles et morales. Nous pouvons peut-être maintenant dépasser l'attitude qui nous amène à nous demander ce que l'on peut espérer dans un pays de régions? On va évidemment se plaindre. Le leader de l'opposition va peut-être finir par saisir ce que c'est que le franc-jeu et comprendre que, si le Québec touche deux milliards de dollars de moins au titre des paiements de transfert, cette réduction s'appliquera à l'ensemble des provinces.

Les députés d'en face finiront peut-être par comprendre ce qu'est le franc-jeu et par cesser de manipuler la vérité pour l'accommoder à un projet restreint. Je fais allusion à l'idée que défendent certains et qui veut que les immigrants vivant au Québec ne devraient pas pouvoir voter à l'occasion d'un référendum, ce qui nous amène à nous demander qui est un vrai Québécois et qui ne l'est pas. Nous devons tabler sur notre dénominateur commun: nous sommes tous des Canadiens, et cela, pour le meilleur et pour le pire.

L'ironie, c'est que, le plus souvent, leadership et performance économique vont de pair. Le président Clinton fait chez lui ce que nous faisons ici. Il fait des dégraissages et réduit la dette. Malgré les efforts déployés par le président Clinton, les perspectives économiques là-bas sont loin d'être aussi positives qu'elles ne le sont chez nous. Pourtant, les Américains semblent avoir confiance en eux-mêmes et dans leur capacité de surmonter tous les obstacles qui se dressent devant eux.

Or, au Canada, on veut nous convaincre que tout va mal. C'est le cas, par exemple, du chef du troisième parti qui, quand il s'adresse aux médias, n'a que les mots «malhonnête», «lâche» et «hypocrite» à la bouche. Je me demande comment nous pouvons oublier cette très inquiétante menace qu'il faudra bien payer la note. Je suppose que c'est la population qui sera le dindon de la farce. La droite politique voudrait que les sondages décident des questions. Ce serait une sorte de démocratie par téléphone. Il n'y aurait pas de consultation, pas de recherche, ni de compromis ou de leadership. L'opinion publique serait le juge suprême.

Je suis persuadé que le chef réformiste s'apercevrait rapidement que le fait d'imposer à tous les Canadiens le fardeau de prendre toutes les décisions aurait un certain nombre de répercussions catastrophiques. Ce serait une aventure extrêmement dangereuse.

Cela surprendra peut-être mes vis-à-vis, mais ce sont les notions d'efficience et de leadership qui sont à la base de la démocratie et de l'élection de représentants. Gouverner, c'est choisir.

(1520)

Si nous voulons survivre, nous devons apprendre à croire en nous-mêmes et dans notre merveilleux pays. Il faut accepter nos réalités socio-économiques et lutter pour nous assurer un meilleur avenir. D'aucuns prétendent que la situation ne peut que s'améliorer, mais je tiens à dire à la Chambre que c'est un objectif subjectif.

Aux yeux des Nations Unies, les Canadiens vivent dans le meilleur pays du monde. Selon une récente étude suisse, quatre villes canadiennes étaient considérées parmi les douze endroits où il faisait le mieux vivre dans le monde. D'autres pays et cultures croient au Canada et nous envient notre situation. On peut alors se demander pourquoi les Canadiens sont si insatisfaits. Pour quelle raison la majorité d'entre eux se croient-ils des victimes d'une façon comme de l'autre?

Notre défi est donc celui-ci: Nous devons créer une mentalité de vainqueurs, pas de victimes. Il faut favoriser l'émergence d'une culture qui nous incite à agir par compassion envers les autres et pas nécessairement pour des motifs pécuniaires. On doit mesurer le succès en fonction des résultats, et non de l'argent dépensé. Je tiens à le souligner. Il s'agit d'évaluer ces résultats à partir de critères socio-économiques. C'est ce que nos vis-à-vis n'ont pas compris au sujet du budget que le ministre a présenté hier.

Quand un réformiste nous a-t-il demandé de penser aux autres avant de nous préoccuper de nos propres intérêts? Quand le chef de l'opposition a-t-il tenu compte des souhaits des Québécois lorsqu'il laisse planer la possibilité de reporter la date du référendum pour pouvoir mieux manipuler les résultats? Ce n'est pas de la démocratie. Quand les Canadiens pourront-ils avoir davan-


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tage d'estime d'eux-mêmes et de satisfaction en sachant qu'il y a plus de plaisir à donner qu'à recevoir?

Il s'agit du débat sur le budget, mais un budget ne se limite pas à des chiffres. Des gens sont touchés par le changement.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Madame la Présidente, mon honorable collègue vient de nous parler à quelques occasions de manipulations: manipulation de la réalité, manipulation des chiffres dans notre analyse du Budget qui vient d'être déposé, manipulation politique concernant le référendum. J'aimerais faire un petit rappel à mon honorable collègue et lui dire que s'il y a eu manipulation politique au Canada, c'est en 1982 qu'elle a eu lieu avec le rapatriement de la Constitution canadienne contre l'Assemblée nationale du Québec unanimement. Et on a changé les termes du contrat qui nous unit. C'est ça de la manipulation politique.

J'aimerais demander à mon honorable collègue, puisqu'on est perdant dans cette Confédération et qu'on va tenir éventuellement un référendum, s'il croit que le Budget qui a été déposé hier est de nature à aider les choses?

[Traduction]

M. Harvard: Madame la Présidente, il y a au Québec un courant d'opinion selon lequel nous voudrions le statu quo, selon lequel le choix lors du prochain référendum se fera entre le statu quo et la souveraineté.

Je crois qu'il y a un autre choix. C'est celui d'un fédéralisme progressiste et vivant, qui se développe et évolue. En étudiant le budget, nous pouvons voir à quel point le fédéralisme canadien est souple et peut se développer. Si nous examinons les changements recommandés en vertu du programme de transferts canadien, nous constatons que les provinces ont plus de latitude, ce qu'elles souhaitaient depuis longtemps.

Nous, au gouvernement fédéral, nous voulons des normes et des principes nationaux et nous les aurons. Ce budget montre que le fédéralisme, tel que nous le connaissons, est bien vivant. C'est un organe bien en vie. Il évolue avec le temps. Il s'adapte aux nouvelles circonstances et aux nouvelles conditions.

(1525)

Je sais que cela décevra terriblement les souverainistes qui se plaisent à dire à leurs amis que notre fédéralisme est coulé dans le béton ou pris dans la glace. Rien ne saurait être plus loin de la vérité.

[Français]

M. Pomerleau: Madame la Présidente, on nous parle beaucoup de fédéralisme évolutif. En 1980, les Québécois ont dit non à la souveraineté du Québec, et l'une des raisons fondamentales invoquée était que si nous faisions la souveraineté du Québec à ce moment-là, nous connaîtrions énormément de problèmes de dette, de chômage, de déficit et de taxes. On a dit non, bien sûr.

En 1980, la dette canadienne était de 80 milliards de dollars et 15 ans plus tard, elle est rendue à 550 milliards. Est-ce cela, le fédéralisme évolutif, le fédéralisme flexible? Est-ce que mon honorable collègue n'admet pas que le fédéralisme flexible dont on nous vante les mérites est en réalité un fédéralisme «cassé»?

[Traduction]

M. Harvard: Madame la Présidente, lorsque nous avons été portés au pouvoir à l'automne 1993, après neuf années de régime conservateur, notre situation budgétaire était sens dessus dessous. Elle n'était pas en ordre. Il nous a fallu un certain nombre de mois pour arriver là où nous en sommes aujourd'hui. Cependant, le budget dont nous sommes saisis redressera notre situation financière.

S'il y un désenchantement au Québec ou ailleurs au Canada, c'est parce que, avant notre élection à l'automne 1993, il y a eu dans notre pays un gouvernement fédéral qui, pendant neuf ans, ne s'est pas préoccupé de nos finances et de nos problèmes nationaux.

Notre gouvernement va maintenant s'en occuper. À mon avis, nous avons de bonnes raisons de croire que le déficit et la dette seront réduits systématiquement et méthodiquement. Dans un avenir pas trop éloigné, nous aurons éliminé le déficit.

[Français]

M. André Caron (Jonquière, BQ): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que j'interviens concernant l'exposé budgétaire qui a été présenté hier par le ministre des Finances. C'est avec d'autant plus de plaisir que je peux faire remarquer à la population que les promesses qui avaient été faites par le ministre des Finances concernant certains aspects reliés au Budget, c'est-à-dire la dette et une réforme de la fiscalité, n'ont pas été tenues.

D'entrée de jeu, hier, le ministre des Finances a débuté son discours sur le Budget en identifiant les deux grands problèmes du Canada. Le premier, le problème du référendum québécois, et le deuxième, le problème de la dette. Je remarque, à la lecture du Budget et aux conséquences que j'en tire, que le ministre des Finances en est simplement à contempler les problèmes du Canada. Le Québec, il faut bien le dire, semble un problème pour le Canada. Et que fait le ministre des Finances, qu'a fait le gouvernement fédéral depuis les derniers 20, 25 ans? Le gouvernement fédéral a contemplé le problème, l'a regardé, l'a étudié, a réfléchi au problème, mais n'a rien fait pour le régler.

Sur la question de la dette, c'est un peu la même chose. Tous les ministres des Finances du Canada depuis 25 ans ont regardé la dette, que ce soit les ministres libéraux ou les ministres conservateurs, comme M. Lalonde, M. Wilson, M. McEachen, tout le monde a dit: «C'est un peu dommage, on dépense trop au Canada par rapport à ce que l'on gagne. C'est dommage, il faudrait réduire le déficit et il faudrait réduire la dette.» Et si on regarde les tableaux, on s'aperçoit que la dette du Canada, depuis 20-25 ans, augmente toujours. On regardait les tableaux qui ont été produits par le ministre des Finances à la suite de son Budget, et la dette augmente encore.


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(1530)

Le Canada regarde son problème de dette, comme il regarde le problème québécois, ce qui pour lui est le problème québécois. Je pense qu'un des grands maux du Canada c'est qu'il regarde ses problèmes mais qu'il ne les règle jamais.

Il y a un autre problème au Canada aussi qui n'a pas été identifié par le ministre des Finances, il y a un problème qu'il a soulevé dans plusieurs discours pendant la campagne électorale, c'est le problème de l'emploi, le problème du chômage. Pendant la campagne électorale on voyait de la publicité du Parti libéral qui parlait de jobs, jobs, jobs. Aujourd'hui on ne parle plus de jobs, on parle de dette, dette, dette, on parle de couper, couper, couper. Le problème des chômeurs est très loin de la pensée du ministre des Finances.

Si je regarde dans ma région, dans ma ville, dans mon comté, je vois un milieu industriel qui a subi de plein fouet, depuis une dizaine d'années, la reconversion, la modernisation des entreprises, l'arrivée des nouvelles technologies. On constate que des personnes qui travaillaient pour de grandes entreprises depuis des années, qui gagnaient des salaires moyens, même moyens supérieurs, se sont retrouvées au chômage. Ces gens ont été au chômage un an parce qu'il n'y avait pas de politiques particulières pour les aider à se reclasser. Maintenant ils frappent à la porte de l'aide sociale.

Dans ce Budget il n'y a rien pour ces chômeurs. Il n'y a absolument rien qui leur permettrait de regarder l'avenir avec espoir. On parle bien sûr d'une réforme possible de l'assurance-chômage qu'on accompagne d'une coupure de 10 p. 100 des montants alloués. On parle d'une réforme où les chômeurs se verraient donner une formation en vue d'emplois nouveaux.

Je pense qu'on nous présente par la bande la fameuse réforme de l'assurance-chômage du ministre Axworthy, l'assurance-chômage à deux niveaux, ce que quelqu'un dans ma région appelait le gros chômage et le petit chômage. Il y aura des gens au Canada qui vont devoir se contenter du petit chômage. En regardant le Budget du ministre des Finances, c'est à ces gens-là que je pense. Qu'y a-t-il de neuf dans ce Budget pour les chômeurs, pour les assistés sociaux, pour les jeunes qui arrivent sur le marché du travail, qui sont pleinement formés?

Pour les jeunes ce n'est pas une question de formation. Pour les jeunes c'est une question de fait, ils sont formés dans les techniques de pointe. Je regarde les jeunes qui sont formés dans le domaine de la technologie au cégep de Jonquière, ils sont formés à toutes les techniques nouvelles. Ces gens ne devraient pas avoir de difficulté à se placer sur le marché du travail parce qu'ils sont compétents et ils ont toute la formation nécessaire. Mais ils ne se placent pas. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas d'emploi.

Il n'y a pas d'emploi pour les gens qui en cherchent un. Simplement pour aller au niveau où on se trouvait au début de la crise économique, il faudrait créer 400 000 emplois au Canada. C'est 400 000 pour se retrouver là où on était il y a trois ans, et en plus on ne parle pas des gens qui sont arrivés et qui sont nouveaux sur le marché du travail.

J'ai été étonné d'entendre le ministre des Finances dire que les deux grands problèmes du Canada étaient le Québec et la dette, et qu'il laisse de côté toute la question du chômage.

Maintenant, la question du Budget: quel jugement peut-on porter sur ce Budget? Si on lit les journaux de ce matin on remarque qu'il y a des gens qui sont contents. Il y a des gens qui sont heureux. Des gens disent que l'économie va enfin respirer. C'était un des titres d'un éditorial de La Presse. On nous disait qu'avant le Budget c'était difficile, que le Canada s'en allait à la faillite, que la décote était en vue. Maintenant, après le Budget, cela va beaucoup mieux, les associations de comptables attribuent une cote de 80 p. 100, 4 sur 5 au ministre des Finances. Alors tout va très bien. Mais qui nous dit que cela va très bien à partir de ce Budget?

(1535)

Les grandes entreprises, les banques, les maisons de courtage qui vendent des obligations du Canada, en fait, tous les gens qui actuellement profitent du système. Les gens qui sont bien rémunérés, qui travaillent dans des secteurs où l'économie s'est bien développée, des secteurs financiers. Souvent des secteurs qui ne produisent pas beaucoup de richesses, mais qui jouent avec la richesse, en prenant un pourcentage au passage. Ces gens-là sont heureux.

Deux choses à partir de cette constatation. Premièrement, on remarque que ces gens sont heureux parce qu'ils voient dans le Budget qui nous est présenté une certaine solution au problème de la dette. C'est curieux, il suffit d'un budget qui a l'air de colmater certaines brèches au sujet de la dette pour que l'autre problème, celui qui consiste à dire que le Québec serait l'un des grands problèmes du Canada, celui du Québec, semble disparaître. On ne dit pas que le Canada a réglé le problème du Québec, le Québec n'est simplement plus un problème. C'est une chose que je peux constater.

Le contribuable ordinaire, que dit-il au sujet du budget? J'ai l'impression qu'il dit simplement «ouf! on a évité le couperet cette fois-ci». Bien sûr, il paiera son essence un peu plus cher. S'il est agriculteur au Québec et qu'il produit du lait, il aura moins de subventions, on parle de 2 000 ou 3 000 $ dans certains cas, c'est quand même appréciable. Certains contribuables vont payer peut-être un peu plus d'impôts, mais de façon générale, le contribuable a l'impression de l'avoir échappé belle.

Mais tous les autres, les oubliés, ceux dont je parlais tout à l'heure qui sont en quête d'emploi, en quête d'un meilleur statut socio-économique au Canada, ces gens-là on ne les voit pas se féliciter du Budget dans les grands titres des journaux. On ne les entend pas. Ils sont silencieux.

Assurément, depuis quelques années, on voit que la grande presse du Canada, que ce soit celle du Québec ou du Canada anglais, est passablement moins attentive à ces gens qu'elle ne l'était dans les années 1970. Probablement que ceux à qui appartient la presse ont réussi à vendre un peu plus leur idéologie, c'est-à-dire l'idéologie qui prétend que l'État doit intervenir de moins en moins et laisser les démunis et les moins privilégiés de la société se débrouiller par eux-mêmes.


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Cette idéologie est omniprésente dans les journaux et tout le monde regarde ça, regarde le Budget et dit «c'est tant mieux». Où sont-ils les budgets où sans exagérer les dépenses on se préoccupait des plus démunis? On ne fait cela nulle part dans ce Budget.

De plus, il y a un certain nombre de choses qu'il ne faut pas oublier. Il ne faut pas oublier que ce Budget voulait d'une certaine façon, selon l'annonce du ministre des Finances, restructurer le Canada en décentralisant. On disait que le Canada était trop centralisé, que cela coûtait trop cher, qu'il y avait des responsabilités dont on ne voulait plus et qu'on remettrait aux provinces.

On envoie des choses aux provinces, on envoie des engagements pour sept milliards de dollars vers les provinces d'ici deux ans; un transfert au titre de la santé, de l'éducation, de l'aide sociale. Mais on constate que ce n'est pas une vraie décentralisation, c'est un transfert des problèmes. Ce n'est pas un transfert comme celui qui se ferait suite à d'honnêtes négociations où on voudrait restructurer le fédéralisme canadien.

Bien plus, ce Budget ne nous amène pas une réforme de la fiscalité. Il y a quelques dispositions au sujet des REER, on resserre un peu. Au niveau des grandes sociétés, on majore un peu le taux d'imposition. On passe de 0,2 à 0,225, c'est très peu, cela représente 145 millions. On parle d'une surtaxe sur les bénéfices. Cette surtaxe passe de 3 à 4 p. 100. En trois ans, cela représente 350 millions. On parle d'un impôt temporaire pour les banques.

(1540)

Un impôt qui, pour l'ensemble des banques, sera à peu près de l'ordre de 100 millions. On voit que la Banque royale du Canada, à elle seule cette année, a fait des profits de 1,2 milliard. Si on additionne l'ensemble des profits des banques, que représentent 100 millions? Ce n'est rien.

Pour quelle raison le ministre des Finances nous arrive-t-il avec une proposition comme celle-là qui, à la limite, est insultante pour ceux qui paient des taxes? Réflexion faite, je pense que la réponse serait du côté du scandale que certaines personnes ont vu dans cette faiblesse de l'imposition. L'an prochain, les banques vont encore faire d'énormes profits parce que les taux d'intérêt étant ce qu'ils sont, les rationalisations que les banques ont faites pendant les trois ou quatre dernières années étant ce qu'elles sont, les banques vont faire d'énormes profits. Ce sera encore le scandale dans les journaux. Qu'est-ce que le ministre des Finances pourra dire? «Oui, mais nous leur avons imposé une taxe provisoire, temporaire, une taxe spéciale de 100 millions.» On parlera peut-être de profits d'une dizaine de milliards et ils auront une taxe de 100 millions.

C'est 1 p. 100. C'est un peu insultant pour ceux qui doivent payer souvent jusqu'à 40 ou 50 p. 100 de leur revenu en impôt. Il est sûr que ce sont peut-être les gens les plus fortunés

Le ménage de la fiscalité n'a pas été fait dans le Budget qui est devant nous. Les problèmes des abris fiscaux restent là, de même que ceux de l'ordre de ce dont on parlait au Téléjournal, la semaine dernière, où on comparait deux personnes qui gagnent 100 000 $. Ce n'est pas rien, 100 000 $. Ce sont des gens fortunés. La personne qui était à salaire payait 40 000 $ à 43 000 $ d'impôt par année, alors que celle qui gagnait le même montant mais qui était à son compte, grâce à toutes sortes de stratagèmes fiscaux, à un salaire un petit peu plus faible qu'elle avait, aux enfants qu'on considérait, en fin de parcours, payait 22 000 $ d'impôt.

Quand les Canadiens regardent ça, même s'ils ne sont souvent pas très très sympathiques aux gens qui gagnent 100 000 $, ils comparent les deux, ils se disent que quelque chose ne fonctionne pas dans le régime fiscal.

Ce Budget, pour nous, n'est pas acceptable parce qu'il ne fait pas le ménage dans la fiscalité.

Maintenant, en ce qui concerne la dette. Si, encore là, il y avait des résultats, mais les résultats ne sont pas évidents. Actuellement, le ministre des Finances évalue cette année la dette autour de 500 milliards de dollars, et il ne fait pas de prévisions fantaisistes, il prévoit qu'elle aura augmenté autour de 603 milliards dans trois ans. La dette, peu importe ce que le ministre a fait, augmentera encore de 100 milliards. Le coût en intérêt passera de 42 milliards à 50 milliards. Et le déficit budgétaire restera à la hauteur de 24 milliards de dollars en 1996-1997.

On parle de dette, mais le citoyen qui regarde ça dans son salon et qui est peut-être prêt à faire des sacrifices se dit: «Oui, mais la dette est encore là. La croissance de la dette est encore là. Les intérêts mirobolants qu'on va payer sont encore là.» Qu'a-t-il gagné?

Le contribuable sera d'autant plus interrogateur s'il voit quelles sont les hypothèses sur lesquelles reposent ces prévisions. Ces hypothèses reposent sur une prévision de croissance économique qui se poursuivra au-delà de 1997. Alors, la dette va continuer de monter même si l'économie va bien ou qu'elle continuera à bien aller pendant les trois prochaines années.

Considérons les prévisions de taux d'intérêt. Je suis un peu surpris de voir le ministre des Finances qui prévoit les taux d'intérêt deux ans d'avance quand souvent il ne peut pas les prévoir deux mois d'avance. Il faut quand même avoir des chiffres dans le Budget pour que ça fasse scientifique et que ça fasse sérieux.

Mais il y a une chose qui est probablement scandaleuse et que la personne qui regarde ça de son salon va trouver stupéfiante, à mon sens, c'est qu'on prévoit que le taux de création d'emplois va reculer. Cette année, il serait de l'ordre de 3 p. 100; il reculerait l'an prochain autour de 2 p. 100.

On prévoit encore un taux de chômage de l'ordre de 9,4 p. 100. Ce n'est pas un taux de chômage faible. En fait, 9,4 p. 100 ne représente que les chômeurs recensés, mais plusieurs ne sont pas recensés. Cela veut dire qu'on va encore se retrouver, dans des régions comme la mienne, avec un taux de chômage réel de 15, 16 ou 17 p. 100.


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(1545)

Ces gens-là, les gens qui ont à coeur de travailler pour gagner leur vie et celle de leurs enfants, ne voient pas de support dans le Budget du ministre des Finances.

Je vais conclure sur deux points. Le Budget qui nous est présenté ne nous apporte pas de solutions sur la question de la dette. Pour quelles raisons? C'est peut-être justement que le Budget repose sur un certain nombre de présuppositions qui ne tiennent pas compte de l'influence que peut avoir la Banque du Canada sur la politique monétaire.

Il y a plusieurs intervenants en économie qui disent qu'un assouplissement de la politique monétaire aurait l'avantage de stimuler l'économie, en ce sens qu'il y aurait une réduction des taux d'intérêt et les gens pourraient investir et relancer les entreprises. Mais par une approche, que je qualifierais de doctrinaire, le ministre des Finances ne veut pas toucher à la politique monétaire même si, actuellement, à toutes fins pratiques au Canada, il n'y a pas d'inflation. Alors, il serait temps de relâcher ou d'assouplir de ce côté-là pour donner une chance à l'économie.

Je conclus sur cette note. À mon avis, il y aurait une autre solution qu'on pourrait nous, souverainistes québécois, amener. Nous croyons qu'il devrait y avoir une restructuration du Canada. Je pense que la souveraineté du Québec qui va se faire, à mon avis, dans les années qui viennent, va nous donner la chance de restructurer l'économie et de partir avec de nouveaux présupposés, de regarder nos politiques et nous donner aussi l'opportunité de partir sur une base nouvelle.

Alors, je m'opposerai à l'adoption du Budget du ministre, lors du vote, pour toutes les considérations que je viens de vous exposer.

[Traduction]

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt le discours du député et j'aimerais faire une observation au sujet d'un dossier particulier que le député a invoqué.

Il s'est interrogé sur ce que le budget réservait aux jeunes et sur l'absence d'emplois. Certes, il va de soi qu'il y a encore beaucoup trop de Canadiens sans emploi, notamment des jeunes.

Ce ne sont pas les gouvernements qui créent des emplois. Ce sont les entreprises, surtout la petite et la moyenne. Au Canada, plus d'un million de petites entreprises procurent du travail à plus 70 p. 100 des Canadiens. Ce sont elles le vrai moteur de notre économie. Ce sont elles qui créent véritablement des emplois. Le député n'est pas sans savoir que, au cours de l'année écoulée, le gouvernement a contribué à la création de plus de 433 000 emplois.

J'ai consulté les données économiques de l'année dernière. En fait, au cours de la dernière année, notre taux de croissance a atteint 4,25 p. 100, soit le taux le plus élevé de tous les pays du G-7. Selon l'OCDE, pour ce qui est de la croissance, le Canada se maintiendra à la tête des pays industrialisés pendant deux ans encore. Le taux de chômage a baissé sous la barre des 10 p. 100 et l'inflation est presque nulle au pays.

Le député a terminé sa présentation en parlant de la raison profonde de sa présence ici. Il s'agit de la souveraineté, de l'indépendance, de la séparation du Québec.

Le député est-il prêt à admettre que la capacité du Canada de progresser, de parvenir à une meilleure croissance économique et de créer plus d'emplois est liée en grande partie à la confiance des investisseurs et à la certitude des gens par rapport aux affaires du pays? N'est-il pas d'avis que, une fois le référendum passé, une fois enfin réglée la question qui coûte si cher au Canada depuis tant d'années, le Canada retrouvera une position économique beaucoup plus solide?

[Français]

M. Caron: Madame la Présidente, je remercie le député de son commentaire et de sa question.

Au sujet du commentaire, je voudrais simplement dire que lorsque le ministre des Finances nous parle de création d'emplois ou lorsque le Parti libéral nous parlait de création d'emplois pendant la campagne électorale, on ne disait pas: «Nous allons aider à créer 400 000 emplois.» Le Parti libéral disait: «Nous allons créer des emplois». Le ministre des Finances nous dit: «Nous avons créé, au Canada, 450 000 emplois.» Je pense qu'il devrait ajouter «nous avons aidé à créer», si on suit l'argumentation de mon aimable collègue.

(1550)

Pour ce qui est de la question de la confiance et du Québec, je ne crois pas que c'est en mettant les problèmes sous le tapis qu'on va les régler. La question du Québec, c'est une question de peuple qui veut arriver à sa souveraineté. Je pourrais faire une longue histoire, ce serait l'histoire du Québec, pour dire que pour nous, il y a comme un aboutissement. Et je pense que ce n'est pas en niant cette réalité que le Canada va faire que le problème du Québec disparaîtra. Ce serait plutôt en l'acceptant et en regardant les conséquences possibles pour le Canada et le Québec d'une souveraineté du Québec.

J'ai bien l'impression que le Canada est capable de survivre à la sécession du Québec. Pourquoi pas? Je pense qu'on agite actuellement des épouvantails en disant que parce que le Québec veut sa souveraineté, les gens hésitent à investir. Mais, c'est curieux, après la défaite de 1980 et le rapatriement de la Constitution qui devait consacrer un nouvel ordre au Canada, on n'a pas eu de boom économique. En 1982, il y a eu une crise économique grave et c'était deux ans après la défaite du référendum au Québec. Je ne pense pas qu'il y ait de lien.

Mais, par exemple, il y a une chose que je voudrais dire au député en terminant, c'est que tant que la question du Québec ne sera pas réglée, le Canada va toujours identifier cette question comme un problème. Je pense que la seule façon de la régler, ce n'est pas en retenant les gens malgré eux, en leur faisant peur ou en les retenant sous le coup de la menace, qu'on va régler le problème. Le problème va rester. Que ce soit un oui, que ce soit un non au référendum, il va y avoir encore avant et après le référendum, peu importe le résultat, des souverainistes au Québec et des souverainistes qui vont continuer à défendre leur point


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de vue, parce que c'est une question de coeur et c'est aussi une question d'intérêt pour le Québec.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Madame la Présidente, depuis de nombreux mois, pour ne pas dire depuis quelques années, nous entendons les fédéralistes prétendre que tous les maux économiques qui surviennent au Canada sont la conséquence de l'instabilité politique. Lorsqu'on a assisté dans les derniers mois à la hausse des taux d'intérêt, lorsqu'on a assisté à la chute assez dramatique du dollar canadien, on a dit: Voilà, c'est la faute des méchants séparatistes.

Je demande à mon collègue comment expliquer simplement qu'au lendemain d'un Budget plutôt bien accueilli par les milieux financiers, comment expliquer que les taux d'intérêt dès le lendemain ont tendance à être à la baisse et que le dollar a tendance à remonter. Pourtant, le problème québécois n'existe-t-il pas toujours? Comment expliquer cela?

M. Caron: Je remercie mon collègue. Madame la Présidente, je l'explique en disant que la relation est très faible et, à mon sens, inexistante. On nous a fait le même coup après le résultat du référendum de Charlottetown en 1992. Si on se souvient bien, on avait vu des études, même une de la Banque royale qui disait qu'advenant que le Canada réponde non ou que le Québec réponde non, cela allait être l'apocalypse au Canada, qu'il allait y avoir, peut-être même-je me souviens dans l'étude, ou c'est peut-être une caricature que les journaux en faisaient-des trains remplis de Canadiens pour aller vers la frontière américaine pour se mettre à l'abri dans le paradis économique du pays voisin. Dans le fond, il n'y a pas de lien. Si vous regardez la courbe de l'économie et toute la question de l'aspiration du Québec à la souveraineté, il n'y a pas de lien entre les deux. Souvent, le niveau d'aspiration à la souveraineté au Québec est fort, l'économie est faible, et souvent c'est le contraire.

(1555)

Je pense qu'il y a malheureusement des hommes politiques qui font de la politique avec un petit «p» sur cette question. Je trouve ça dommage, parce que l'art de la politique, la science de la politique, la profession de politicien est une profession noble. C'est l'art ou la science du gouvernement. C'est l'art ou la science de voir à l'orientation et à la direction des sociétés. Quand on prend toutes sortes de moyens ou de subterfuges pour essayer de miner l'adversaire en faisant du chantage sur ces questions, je pense qu'en plus de réduire la vigueur de l'argumentation, on réduit aussi la qualité de la prestation de l'homme politique.

Je remercie le député de Louis-Hébert de m'avoir donné la chance de dire qu'à mon sens la question de l'économie est reliée à celle du Québec. Je suis d'accord, mais je ne suis pas d'accord pour dire que cela affaiblit l'économie canadienne. Je dirais plutôt qu'actuellement, on est en attente. Il y a des gens qui sont en attente et si on réussit à prendre une décision, je suis sûr que l'économie va se relancer, au Canada ou au Québec, et on va avoir, à ce moment-là, les moyens nécessaires pour restructurer nos économies et faire en sorte que sur le territoire du Canada actuel, on ait deux pays qui soient à l'aise financièrement et dont les populations vont pouvoir collaborer avec bonheur.

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Madame la Présidente, je m'adresse aujourd'hui à cette Chambre dans le but d'appuyer un Budget innovateur qui lance l'économie canadienne et le fédéralisme canadien dans une nouvelle direction. Je désire également appuyer ce Budget car, en même temps, il demeure fidèle aux principes libéraux les plus fondamentaux. Je félicite le ministre des Finances d'avoir présenté un Budget qui équilibre la nécessité d'un retour rapide à la responsabilité fiscale au niveau fédéral et la nécessité de maintenir ce qui nous définit comme peuple, la compassion de nos programmes sociaux.

Depuis le début des consultations prébudgétaires, le message de mes commettants et commettantes est clair: il faut s'occuper du problème du déficit, mais en agissant ainsi, il faut être juste et équitable.

[Traduction]

Mes électeurs m'ont fait savoir très clairement que, comme chaque foyer, le gouvernement devait apprendre à vivre selon ses moyens. Il devait s'efforcer de réduire le déficit en coupant dans les dépenses publiques et non en augmentant le fardeau de la classe moyenne.

Ils m'ont dit aussi qu'ils souhaitaient un régime fiscal plus juste et la protection des plus faibles de notre société, grâce à des programmes sociaux modernes et efficaces. Les mêmes électeurs m'ont dit être convaincus que nos programmes sociaux devaient être revus et modernisés afin qu'ils soient plus efficaces et conformes aux réalités des années 90.

Je suis heureux d'affirmer que, selon moi, ce budget pourrait représenter le premier pas vers cet équilibre délicat que souhaitent mes électeurs. Cependant, je dois dire qu'on ne pourrait parvenir à cet équilibre si les Canadiens n'étaient pas prêts à appuyer un changement réel, de nouvelles orientations et une nouvelle façon de gouverner. C'est ce qu'ils souhaitent.

Notre premier défi consiste à faire en sorte que le gouvernement vive selon ses moyens. Un peu comme un foyer, le gouvernement qui vit au-dessus de ces moyens finit par éprouver des difficultés.

Les réalisations des Canadiens et du Canada, un pays qui a une petite population, sont sans aucun doute sans précédent. Les Canadiens ont uni leurs efforts pour bâtir le meilleur pays du monde. Nos ressources sont abondantes. Notre population est bien instruite et laborieuse, notre secteur privé est dynamique et les Canadiens ont l'esprit d'entreprise.

L'année dernière, parmi les pays membres du G-7, nous avons été celui qui a eu la plus forte croissance. Notre taux d'inflation est peu élevé, nos exportations sont en pleine expansion et des emplois se créent. Notre économie est sur la bonne voie. Nous pouvons compter sur les éléments essentiels à la réussite économique.

Cependant, les taux d'intérêt et notre devise sont à la merci des marchés financiers internationaux qui spéculent sur notre capacité de contrôler la dette publique et le déficit. Ces marchés nous surveillent de très près et n'importe quelle rumeur peut entraîner une hausse des taux d'intérêt et la chute du dollar canadien. Dans ces conditions, nous vivons sous un nuage perpétuel d'incertitude économique qui a des répercussions sur les décisions financières des particuliers et des entreprises.


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(1600)

Année après année, les dépenses des gouvernements ont été supérieures à leurs recettes. Nous avons emprunté au point où notre capacité de rembourser est mise en doute. Nous sommes maintenant à la merci de nos prêteurs qui contrôlent tous nos mouvements. On peut affirmer qu'on juge maintenant la gestion des affaires publiques sur ses répercussions sur les Canadiens et nos créanciers, ces derniers s'inquiétant davantage de notre capacité de rembourser que de nos aspirations, en tant que peuple. En réalité, à cause de notre dette croissante et de notre déficit persistant, nous perdons le contrôle de notre politique gouvernementale.

On n'a jamais vu un budget d'une aussi grande portée. Il poursuit les initiatives entreprises l'année dernière et prépare le terrain pour que nous puissions contrôler à nouveau nos finances publiques et notre politique gouvernementale, ce qui nous donnera, en fin de compte, la possibilité de mettre à nouveau l'accent sur la construction d'une société juste et équitable.

Ce budget réduit notre déficit de façon marquée. En trois ans, le gouvernement aura épargné 29 milliards de dollars. En 1996-1997, nous aurons atteint notre objectif de réduction du déficit, soit 3 p. 10 du PIB. Si les prévisions du secteur privé se révèlent exactes, nous le dépasserons même. Comme le ministre des Finances l'a déclaré à de nombreuses reprises, nous devons atteindre notre objectif de réduction du déficit ou risquer de demeurer vulnérables à la spéculation sur les marchés financiers internationaux.

Le budget ne se contente pas d'établir un plan de réduction du déficit. Il définit également une nouvelle façon de gouverner, une nouvelle approche correspondant davantage aux besoins et aux défis des années 90.

Lorsque le gouvernement a accepté de relever le défi que constituait la réduction du déficit, il a rejeté la solution draconienne qui consistait à tout sabrer. Des réductions générales de 20 à 30 p. 100 ne contribuent pas à réduire le déficit pour la simple raison que, même si on réduit un mauvais programme de 30 p. 100, il reste encore 70 p. 100 de gaspillage. Par ailleurs, il est insensé de réduire un bon programme de 30 p. 100.

Des mesures radicales de réduction du déficit peuvent donner des résultats, mais ce sont le plus souvent les plus faibles qui en font les frais. Ce n'est pas notre façon de faire. Nous avons le sens de la responsabilité financière et nous croyons en l'équité. Le gouvernement est conscient qu'il faut réduire le déficit, mais il doit aussi renouveler l'appareil gouvernemental pour mieux servir les Canadiens dans une économie nouvelle.

Tout en réduisant l'appareil gouvernemental fédéral, le budget jette les fondements d'un gouvernement plus avisé, plus efficient, plus responsable et plus sensible aux nouvelles priorités. Voilà en quoi consiste essentiellement la révision des programmes. Les ministères ont entrepris l'exercice en posant une simple question: Dans les années 90, que doit faire le gouvernement pour la population? Nous avons analysé les choses que doit faire le gouvernement fédéral afin de trouver la meilleure façon de leur donner corps.

Les choses qu'il n'appartient pas au gouvernement fédéral de faire ont été écartées, parce qu'on a jugé qu'aucun niveau de gouvernement ne devait s'en charger, ou considérées comme relevant davantage de la compétence d'un niveau de gouvernement plus près de la population. Il en est résulté des ministères plus modestes, une réduction de 16,9 milliards de dollars des dépenses consécutive à la révision des programmes, des ministères plus efficaces et dotés de nouveaux mandats, des objectifs plus précis et de nouvelles priorités qui serviront mieux les contribuables et favoriseront une économie innovatrice.

La refonte du rôle et du fonctionnement du gouvernement montre clairement que le fédéralisme canadien est flexible et qu'il continue d'évoluer pour répondre aux besoins de la population et de la nouvelle économie. Nous savons tous que des conférences constitutionnelles dont on parle beaucoup mais qui ne donnent que peu de résultats, sauf des désaccords et des divisions, ne sont pas porteuses de changements.

Dans notre fédération, le changement se produit surtout à force de discussion, de dialogue et de négociation de questions pratiques qui intéressent les Canadiens ordinaires. C'est à ce niveau que le fédéralisme canadien est flexible et qu'il répond aux besoins de tous les citoyens.

[Français]

À titre de francophone originaire du nord de l'Ontario, je suis témoin de cette évolution. C'est en raison du fédéralisme canadien, un fédéralisme flexible, que je peux me lever en cette Chambre aujourd'hui et m'adresser à vous dans ma langue maternelle, parler de mon patrimoine que j'ai pu maintenir et enrichir et de ma fierté d'être canadien-français.

(1605)

L'acheminement n'a pas toujours été facile et on a dû se débattre à plusieurs reprises. Mais en l'absence du Canada, de son fédéralisme, la bataille aurait été perdue dès le début.

[Traduction]

Un aspect de l'examen des programmes qui a toujours été crucial, c'est que le palier de gouvernement qui est le mieux placé pour assurer un service devrait se charger de le faire. Une déclaration aussi audacieuse démontre clairement que le gouvernement fédéral désire promouvoir activement l'évolution du fédéralisme, car il y va de l'intérêt des Canadiens. Le fédéralisme au Canada ne signifie pas le statu quo.

Ce désir du gouvernement fédéral s'inscrit dans le nouveau régime de transfert aux provinces. Le régime de financement global écarte les fonctions de partage des coûts pour accorder aux provinces une plus grande souplesse dans la prestation des programmes financés en partie par le gouvernement fédéral. Cette mesure reconnaît la nécessité d'adapter les programmes sociaux pour qu'ils répondent aux besoins précis des Canadiens des différentes régions. La réduction de 4,4 p. 100 dans les transferts aux provinces est une mesure nécessaire pour aider le gouvernement fédéral à atteindre son objectif de réduction du déficit.

Cependant, il faut dire qu'en 1996-1997, le gouvernement fédéral transférera 35,3 milliards de dollars aux provinces. La plupart des Canadiens reconnaîtront que des transferts de 35,3 milliards de dollars par an confirment l'engagement du gouvernement face aux paiements de péréquation et son appui des


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programmes sociaux dirigés par les provinces. De plus, le gouvernement est toujours prêt à rencontrer les provinces pour établir les principes qui doivent régir la répartition et l'utilisation de ces transferts.

Je sais qu'au niveau local, l'administration mange une grande partie des fonds destinés aux programmes sociaux. Les pauvres ne reçoivent pas les fonds qui leur sont destinés, à cause des frais administratifs élevés. Grâce à la flexibilité qui leur est offerte, les provinces pourront réduire les frais administratifs et faire en sorte que les gens qui ont besoin d'argent en reçoivent plus. Si les fonds sont bien gérés, les économies pourraient même atteindre l'objectif de 4,4 p. 100 des réductions dans les transferts.

Certaines provinces ou certains gouvernements provinciaux pourraient essayer de voir, dans les réductions et les transferts, une attaque personnelle ou un moyen, pour le gouvernement fédéral, de se décharger de ses responsabilités. Je tiens à rappeler à ces personnes qu'il y a, au Canada, trois paliers de gouvernement, y compris les municipalités, mais que les contribuables sont toujours les mêmes. En fin de compte, un budget provincial qui est équilibré au moyen de transferts d'un gouvernement fédéral accablé par la dette ne présente aucun avantage pour les contribuables.

Les déficits et les dettes accumulées sont des problèmes courants dans notre pays, à tous les paliers de gouvernement. Nous devons apprendre à chercher, ensemble, à les régler dans l'intérêt des contribuables.

Comme nombre de mes collègues l'ont déjà mentionné, ce budget est sans précédent. C'est le premier budget qui soit aussi complet et d'une telle portée. Grâce à lui, nous sommes en bonne voie de réduire le déficit. Pour chaque dollar de recettes nouvelles que permettra de générer ce budget, les dépenses seront réduites de sept dollars.

Aucun gouvernement n'aime réduire les dépenses, mais nous n'avons guère le choix. Nous avons procédé d'une manière qui nous a semblé rationnelle et juste. Nous n'avons pas réduit les dépenses aveuglément. Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons commencé par les secteurs non prioritaires et avons aussi cherché à renouveler le rôle de l'appareil gouvernemental afin d'épargner la somme importante de 16,9 milliards de dollars. Nous avons appliqué le principe de la responsabilité partagée au concept de la réduction du déficit. Pour protéger les plus vulnérables, nous avons demandé à ceux qui en avaient les moyens d'assumer une plus grande part du fardeau.

Par exemple, le budget prévoit des réductions massives au niveau des programmes industriels, des subventions aux entreprises, des organismes d'expansion régionale et des subventions au transport. Il prévoit aussi d'importantes compressions dans les secteurs de la défense, des ressources naturelles et du patrimoine canadien. Somme toute, d'importantes compressions ont été effectuées à divers degrés dans la vaste majorité des ministères.

Pour ce qui est des recettes, nous n'avons pas hésité à prendre des mesures pour que le système fiscal soit plus juste. Nous avons clairement fait savoir à ceux qui ont les moyens de payer qu'ils devront assumer une part de responsabilité accrue en ce qui concerne la réduction du déficit. Par exemple, nous avons ramené temporairement à 13 500 $ le plafond des cotisations aux REER, mesure qui touche seulement les personnes qui gagnent plus de 75 000 $. Il va y avoir un nouvel impôt sur les revenus de placement de sociétés privées. Nous allons éliminer les avantages de report pour les revenus tirés d'une entreprise ou d'une profession. Nous allons restreindre certains encouragements fiscaux. Nous allons imposer les fiducies familiales. Nous avons augmenté le taux d'imposition des grandes sociétés. Une nouvelle surtaxe des sociétés a été instituée, de même qu'un nouvel impôt sur le capital des banques. Enfin, il y a la taxe sur l'essence.

(1610)

S'ils regardent l'ensemble des recettes générées, je suis sûr que la majorité des Canadiens conviendront que nous avons satisfait aux critères d'équité. Je suis sûr qu'à l'avenir, nous allons prendre de nouvelles mesures pour éliminer encore certaines échappatoires fiscales.

Si vous me permettez quelques secondes, je voudrais dire à la Chambre ce dont il n'est pas question dans le budget. Le gouvernement a fait preuve de courage en ouvrant le processus budgétaire et en accueillant les suggestions des Canadiens. Pendant tout le processus nous avons répété que notre attitude serait juste et équilibrée.

L'opposition a utilisé le processus de consultation pour faire croire, à tort, que le gouvernement imposerait de nouvelles taxes ou de nouveaux impôts à la classe moyenne. Elle a prétendu que nous allions surcharger la classe moyenne, il n'en est rien. Elle a prétendu qu'il y aurait une taxe sur la santé, il n'y en a pas. Elle a dit que l'on imposerait les prestations dentaires, nous ne l'avons pas fait. Elle a dit que l'on imposerait les REER, ce n'est pas le cas. Que nous imposerions les gains aux loteries, ils sont toujours nets. Enfin, elle a dit qu'il y aurait des augmentations d'impôt et il n'y en a pas. J'ajouterais qu'il n'y a pas non plus d'augmentation des cotisations à l'assurance-chômage.

En fin de compte, je pense que nous sommes parvenus à une bonne répartition des sacrifices sur tous les Canadiens de toutes les régions du pays.

[Français]

Madame la Présidente, certains individus et groupes nous disent que nous sommes allés trop loin, tandis que d'autres nous disent que nous ne sommes pas allés assez loin. Je leur réponds que nous avons fait ce que nous avons promis de faire: développer un Budget qui rencontrera nos objectifs et nos cibles pour la réduction du déficit.

La voie que nous avons choisie est la meilleure. Notre Budget est un budget équilibré qui balance la nécessité de contrôler nos dépenses gouvernementales et le besoin de continuer à offrir à nos plus vulnérables la protection de nos programmes sociaux. Couper trop vite pour satisfaire les financiers entraînerait un coût trop élevé pour nos démunis et nuirait à la confiance des Canadiens et des Canadiennes dans notre économie; tandis que ne pas couper assez mettrait notre capacité de payer nos dépenses en péril et nous rendrait susceptibles davantage au contrôle des marchés étrangers.

Pendant les temps difficiles, les provinces se tournent vers le gouvernement fédéral pour du leadership. Malheureusement, pendant les neufs années écoulées, les provinces se sont tournées vers le gouvernement fédéral pour ce leadership et le gouvernement Mulroney ne l'a pas donné.

J'aimerais répéter la citation faite par le ministre des Finances pendant son discours: «Le gouvernement ne doit pas vivre dans


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le passé, chaque jour apporte son lot de besoins nouveaux. S'il faut combattre l'inflation, contrer le chômage et faire quelque chose dès maintenant pour ramener la prospérité au Canada, le gouvernement doit commencer à planifier en fonction de l'avenir sans timidité ni hésitation, mais avec audace, imagination et courage.»

Ce n'est pas par coïncidence, que l'individu en compagnie du ministre soit le fils de la personne qui a fait cette déclaration. C'est cette personne, le fils, de M. Paul Martin senior, qui ramènera la stabilité, la confiance et la prospérité au pays.

En plus, les Canadiens et les Canadiennes peuvent être confiants que leur gouvernement fédéral fournira le leadership voulu par les provinces. Si en cette Chambre on fait face à une opposition nouvelle de deux partis, les réformistes et les bloquistes, c'est parce que le gouvernement Mulroney n'a pas répondu à l'appel au leadership des provinces.

Par ce fait même, l'équipe libérale répondra à cet appel des provinces et la disparition de ces nouveaux partis sera inévitable.

(1615)

[Traduction]

En conclusion, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur un autre aspect du budget. Je voudrais offrir au ministre des Finances les services de ma circonscription et de ma région pour l'aider à remplir ses engagements. Dans la région de Nickel Belt et Sudbury, nous avons de riches mines, des travailleurs spécialisés, ainsi que les compétences et les institutions pour fournir au gouvernement du Canada la nouvelle pièce de 2 dollars que prévoit le budget. Nous serions heureux de fournir ce service au reste du Canada.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Madame la Présidente, le député et d'autres avant lui ont déclaré qu'avec ce budget les dépenses étaient maintenant mieux ciblées.

Les mesures les plus importantes en matière de dépenses sont le résultat de ce qui n'a pas été fait plutôt que de ce qui a été fait, car c'est cela qui a augmenté le service de la dette.

Est-ce que cela signifie que l'intention délibérée du gouvernement est de cibler les dépenses plus sur les paiements d'intérêts que par le passé?

M. Bonin: Madame la Présidente, c'est une question qu'on a posée tellement souvent à la Chambre. Je vais tenter de donner une réponse différente de celle qu'on donne généralement, parce qu'il semble que les députés du Parti réformiste ne comprennent pas.

Quand on est aux prises avec un problème de l'importance de celui qui se pose au Canada, il faut adopter une attitude équilibrée. Nous avons hérité du problème.

J'aime le comparer à ce que j'ai appris à la télévision au sujet de la ville de New York où l'infrastructure souterraine du réseau d'égout est tellement vieille et rouillée qu'il est impossible d'aller vérifier si la soupape fonctionne car, à cause de la rouille, il suffirait de l'actionner pour qu'elle se casse. J'aime cette comparaison.

Les gens à qui je raconte cela, mes électeurs et d'autres Canadiens, des membres de mon parti et d'autres partis, mais pas du Parti réformiste, semblent en conclure qu'il est dangereux de trop vouloir économiser.

Les Canadiens et le gouvernement libéral aimeraient certainement mettre le couperet dans tout cela et en finir une fois pour toutes avec la dette. La seule grande difficulté, c'est que des êtres humains en souffriraient. J'ai bien peur que ce soit là où les réformistes décrochent. Nous le leur disons et nous essayons de leur expliquer qu'il faut faire preuve d'un peu de compassion. C'est un mot que bon nombre d'entre nous avons utilisé à maintes reprises, mais qu'on n'entend jamais dans la bouche d'un réformiste.

On évalue souvent le sens de la compassion d'une société à la façon dont elle traite ses personnes âgées. L'idée d'enlever 3 milliards de dollars de revenus aux personnes âgées ne correspond pas à ma définition de la compassion. J'ai répondu pour ceux qui comprennent déjà. Je me sens comme le pasteur ou le prêtre qui prêche à l'intention de ceux qui ne pratiquent pas. Ils ont très souvent entendu cette réponse et ils ne comprennent toujours pas.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Madame la Présidente, je voudrais principalement réagir aux propos du député de Nickel Belt au début de son intervention. Il semble décrire comme un fait d'armes que grâce au fédéralisme canadien, il puisse encore se lever et prendre la parole en français dans cette Chambre.

J'avoue avoir beaucoup de difficulté à comprendre qu'on puisse aussi facilement l'accepter, car l'inverse de cela aurait été l'assimilation. Donc, il reconnaît comme exceptionnel le fait qu'il ne soit pas assimilé.

Comme représentant d'une communauté francophone, j'ai un peu de mal à le comprendre, lui qui est témoin des taux d'assimilation absolument exorbitants que l'on retrouve au Canada. Alors que le taux d'assimilation pour l'ensemble des provinces anglophones était de 27 p. 100 en 1971, il est passé à 37 p. 100 en 1991.

(1620)

Lui aussi est membre d'un gouvernement pour lequel le commissaire aux langues, dernièrement, déposait un rapport tout à fait scandaleux par rapport à l'incapacité de ce gouvernement de permettre aux francophones des autres provinces, dans des taux beaucoup trop élevés, de recevoir des services en français. Il est membre aussi de ce gouvernement qui va encore couper dans les budgets de Radio-Canada d'une façon sans doute équilibrée dans le réseau français et dans le réseau anglais, sans se rendre compte que le réseau français est victime de discrimination depuis 20 ans, alors que les cotes d'écoute sont identiques et que les budgets sont un tiers plus élevés dans le réseau anglais pour des cotes d'écoute identiques et pour des grilles horaires identiques, à moins qu'on me convainque que Radio-Canada anglais a un horaire quotidien de 36 heures par jour, ce que j'aurais beaucoup de difficulté à comprendre.


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J'ai de la difficulté à comprendre ces propos-là, et j'aimerais qu'il m'explique comment il peut se lever à la Chambre et faire l'éloge du fédéralisme qui a produit ces choses quand même pas très intéressantes et pas très élogieuses non plus.

M. Bonin: Madame la Présidente, je suis surpris de la connaissance qu'a développée mon collègue de l'autre côté sur la situation des francophones hors Québec, au Canada. Lorsque je suis arrivé ici, à Ottawa, en même temps qu'eux, lorsqu'ils m'ont entendu parler français, ils ont pris pour acquis que j'étais un membre du Bloc.

La plupart de ces individus n'étaient jamais sortis du Québec. La plupart de ces séparatistes n'étaient même pas conscients qu'il y avait des francophones en dehors du Québec. Je viens d'un comté francophone à 40 p. 100. Je représente un comté francophone à 40 p. 100 et nos collègues séparatistes du Québec ne savent même pas que nous existons. C'est à la fin de l'année 1978 que René Lévesque est venu à Sudbury, dans mon comté, à l'Université Laurentienne et qu'il nous a dit: Les francophones hors Québec, on a assez de problèmes, on n'a pas de temps pour vous. C'est ce qu'il a dit.

Mes collègues du Bloc québécois sont surpris, sont émus qu'il y ait des francophones hors Québec. Je vais leur parler un peu de l'histoire du nord de l'Ontario. Je viens d'une famille de neuf enfants, tous francophones. J'organise des pique-niques de famille dans mon comté, la famille Lefebvre, et on part des descendants de ma grand-mère et mon grand-père. Je me souviens qu'une année nous étions 750 inscrits, des francophones. Alors, sortez de votre coquille! Pardon, madame la Présidente, par votre intermédiaire, je veux leur dire qu'ils sortent de leur coquille.

On ne propose jamais de se séparer de ce qu'on ne connaît pas. Allez voir le reste du Canada. Allez voir s'il existe, goûtez-y et vous allez voir que le Canada vaut la peine d'être tenu ensemble. Oui, si je me lève en cette Chambre et que je vous adresse la parole dans ma langue maternelle, le français, avec autant de fierté, c'est parce que j'ai pu vivre, j'ai pu grandir et je suis allé à l'université en français. Mon fils est dans un programme de médecine familiale en français dans le nord de l'Ontario, ma femme enseigne dans une école française.

Avant d'être élu, j'étais professeur dans un collège en français dans la division française et le nouveau collège est en train de se faire construire. J'ai été président d'un conseil scolaire français-anglais où la majorité des conseillers scolaires étaient francophones. Alors, ne venez pas prétendre que les francophones hors Québec n'ont pas de droits et qu'on nous enlève tous nos droits tous les jours. On a eu de la difficulté dans le passé. On a appris à se connaître parce qu'on n'a pas dit: On se sépare. Ce que nous avons dit: Nous nous assoyons ensemble et nous apprenons à travailler ensemble.

J'ai joué au hockey avec les anglophones et j'ai aimé jouer au hockey avec les anglophones. C'est du bon monde. J'ai aussi joué dans une autre ligue où tout le monde était français et on parlait français sur la glace et dans les vestiaires. On a appris à travailler à surmonter des problèmes, à se respecter. Le respect d'une personne envers une autre, c'est très important pour une fédération.

Le message n'est pas compliqué. Pour les séparatistes, si vous voulez vous séparer, au moins sachez de quoi vous vous séparez parce que vous prenez des risques extraordinaires de faire souffrir les personnes que vous représentez. Ce n'est pas juste de faire cela parce que les députés du Bloc québécois dans cette Chambre ne représentent pas la majorité des Québécois et des Québécoises. C'est dangereux, le jeu qu'ils jouent et nous, du nord de l'Ontario, on le sait.

(1625)

Lorsqu'on parle de Radio-Canada, un des problèmes que nous avons dans le nord de l'Ontario, et je vais le dire, car je pense qu'il faut que ce soit dit, c'est que la programmation nous vient en majorité de la province de Québec. On veut plus de programmation locale. La propagande qui nous vient de la télévision et de la radio nous incite à changer à nos autres postes francophones du nord de l'Ontario.

[Traduction]

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue, le député de Red Deer.

Le sujet de mon intervention devant cette Chambre est le budget qui nous a été présenté hier et, plus précisément, la partie de ce budget qui porte sur la science et la technologie. Le ministre des Finances a dit que l'objectif général des dépenses du fédéral dans ce domaine était de renforcer les capacités scientifiques et techniques du Canada.

Une grande partie des fonds est distribuée par deux conseils subventionnaires, à savoir le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et le Conseil de recherches en sciences humaines. Tous les deux ont pour rôle primordial de promouvoir la recherche universitaire et les études avancées. Leur budget a été réduit proportionnellement moins que celui des autres organismes, comme l'a dit le ministre, en raison de l'importance qu'attache ce gouvernement à la R-D.

Il en va de même du Conseil national de recherches du Canada qui voit son budget réduit, mais pas autant que d'autres organismes. Le CNRC va devoir éliminer les activités les moins prioritaires.

Ce qui précède prouve que pour le gouvernement la science et la technologie constituent un atout stratégique.

Permettez-moi de citer directement le ministre des Finances tel qu'il s'est exprimé dans le plan budgétaire: «Une dette et des déficits importants entraînent une hausse des taux d'intérêt, un relèvement des impôts et taxes et une baisse de la confiance, ce qui freine l'investissement et la croissance. Les besoins financiers découlant de déficits chroniques, lorsqu'ils ne sont pas compensés par une augmentation de l'épargne dans le secteur privé, rendent le Canada plus dépendant des emprunts à l'étranger, dont le service constitue une ponction permanente sur le revenu national et le niveau de vie futur. L'obligation de financer le déficit réduit également les ressources dont dispose le gouvernement pour assurer d'importants services publics et investir suffisamment dans les domaines d'intérêt stratégique pour la nation, comme les sciences et la technologie. . .»


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Il devrait être évident pour tout le monde que ce budget, du fait qu'il ne s'attaque pas adéquatement aux problèmes fiscaux du gouvernement, ralentira l'évolution justement dans les domaines dont dépend le développement futur de l'économie canadienne, alors que cette évolution doit avoir lieu pour que le Canada livre une concurrence à l'échelle mondiale.

On s'est interrogé aussi sur le traitement des dépenses de R-D en général et, en particulier, de celles qui sont engagées par des institutions financières. Encore une fois, je cite le ministre qui a déclaré ce qui suit: «En attendant d'avoir tranché la question, tous les travaux de R-D applicables aux technologies de l'information que mèneront les institutions financières après la date du budget seront exclus de la définition de `recherches scientifiques et de développement expérimental' jusqu'à ce que soit terminé l'examen concernant les travaux de R-D applicables aux technologies de l'information.»

On se demande s'il s'agit d'une mesure discriminatoire à l'endroit des principaux intéressés au développement scientifique et technologique ou si, comme l'a déclaré Peter Cook dans son article paru hier dans le Globe and Mail: «Pour un politicien, l'équité ne signifie pas qu'il faut partager le fardeau, mais bien en charger de rares colosses.» Comme les institutions financières ne sont pas légion et que les banques à charte sont de loin les moins nombreuses et les plus robustes, il y aura effectivement bien peu de colosses qui seront visés par les règlements.

(1630)

La question est toutefois importante. Cette mesure peut-elle décourager des innovateurs dans le domaine des technologies de l'information? La question est problématique si l'on pense que, selon le vérificateur général, il faut reconnaître que l'économie mondiale est de plus en plus dirigée par les industries basées sur la connaissance et que l'innovation est indispensable.

Il a continué en décrivant les caractéristiques d'un pays innovateur. Il a dit notamment que, premièrement, l'innovation est devenue une question essentielle à notre survie. On ne peut pas la considérer comme une option. Deuxièmement, les tendances à l'innovation n'apparaissent pas d'elles-mêmes. Elles surviennent grâce aux efforts des gens. L'innovation découle de l'esprit d'innovation et ne peut être ni légiférée ni ordonnée par décret. L'innovation provient du travail des particuliers et des collectivités créatrices et interactives et se développe bien dans un climat qui la favorise.

Troisièmement, il dit que le gouvernement doit créer un climat propice à l'innovation. Sinon, les innovateurs n'innoveront pas ou iront travailler là où l'innovation est encouragée. Quatrièmement, une société innovatrice aura comme partenaires tous les segments de nos collectivités, l'ensemble des gouvernements, des localités, des particuliers, des entreprises et des familles. Cinquièmement, il dit que la société canadienne a le potentiel nécessaire pour être particulièrement innovatrice, étant donné sa diversité culturelle. Le Canada pourrait être reconnu comme un pays innovateur.

Le vérificateur général a également signalé l'absence d'un ferme leadership au ministère des Sciences et de la Technologie: «Le gouvernement n'a pas une idée précise de ce qu'il cherche à accomplir dans le domaine des sciences et de la technologie.»

En réponse à cette observation du vérificateur général, voici ce que le ministre des Finances affirme dans son plan budgétaire:

Industrie Canada met au point une stratégie fédérale en matière de sciences et de technologie. Le ministère tente d'établir une vision nationale des sciences et de la technologie grâce à des consultations avec des organismes de l'extérieur, à un examen interne et à une évaluation indépendante effectuée par le Conseil consultatif national des sciences et de la technologie.
De concert avec d'autres ministères concernés, Industrie Canada prend également des mesures afin d'accroître la pertinence et l'incidence économique des dépenses de l'État en matière de sciences et de technologie. On tente d'adopter une approche qui s'apparente davantage aux pratiques en vigueur dans le secteur privé.
Voilà une déclaration fort éloquente. Elle reste vague, mais précise bien que la connaissance est la clé de l'avenir. Combien d'argent un investisseur privé serait-il disposé à placer dans une vision aussi vague et insipide?

Dans ce cas, comme dans tout autre projet du reste, il est essentiel d'établir clairement l'objectif poursuivi, de sorte que l'on puisse déterminer les coûts et savoir quand l'objectif est atteint. Actuellement, je crains qu'on oriente bien des fonds et des activités vers l'atteinte d'un objectif donné, mais qu'on rende peu de comptes à ce sujet. Or, quand les ressources se font rares, on ne peut se permettre qu'il y ait pareils manquements à l'obligation de rendre compte et que les fonds publics soient dépensés d'une manière aussi irresponsable.

J'aurais quelques suggestions qui pourraient peut-être aider à respecter les recommandations du vérificateur général. Premièrement, dans notre pays, il n'y a pas suffisamment de liens entre la politique en matière de science et technologie, d'une part, et les indicateurs économiques, d'autre part. Ceux qui élaborent les politiques gouvernementales se demandent-ils quels sont les indicateurs économiques visant la science et la technologie?

Deuxièmement, la science et la technologie restent intériorisées. Alors qu'elles veulent être novatrices, qu'elles veulent être un instrument important de la reprise économique, elles semblent ne pas avoir la moindre idée des mesures à prendre pour devenir cet instrument. À mon avis, cela s'explique par le fait qu'on n'a jamais relié au ministère des Finances les études issues du ministère des Sciences et de la Technologie.

À bien des égards, le ministère canadien de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie vit une crise d'identité. Il sait ce qu'il veut être, soit un instrument de relance économique, mais il ne sait pas le moins du monde comment y parvenir.


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On entend beaucoup parler de la création de partenariats plus solides entre le gouvernement et les universités, le gouvernement et l'industrie, ainsi que l'industrie et les universités, mais on n'a pas entendu un mot des relations qu'il faut absolument établir entre les scientifiques universitaires et les économistes.

(1635)

Bon nombre de ceux qui composent la structure des sciences et de la technologie sont passés de la tour d'ivoire de l'université à la tour d'ivoire du gouvernement. Ni à un endroit ni à l'autre, la valeur marchande n'a beaucoup d'importance dans le fonctionnement quotidien des institutions.

À l'abri de la dure réalité et n'ayant pas à recueillir des recettes pour poursuivre leur travail, ils ont des objectifs qui découlent de leur volonté de maintenir le statu quo. Ils préfèrent croire que le régime de subventions est sacré et indispensable, que la production de recettes n'est pas du ressort de la science.

Pourtant, la production de recettes est un élément central, lorsqu'il s'agit de stimuler la reprise économique. Nous comptons sur les sciences et la technologie pour créer des produits et des emplois et pour ménager un créneau au Canada sur le marché mondial. Lorsqu'on nous dit que les sciences et la technologie peuvent le faire, nous le croyons parce que c'est ce que nous souhaitons. Mais nous voulons que cela se fasse tout de suite.

Faudra-t-il attendre encore 30 ans, depuis que le dernier examen de la question des sciences et de la technologie a eu lieu, sans que rien ne se produise? Il est temps de quitter les tours d'ivoire et de se mettre à l'oeuvre.

Il nous faut une structure différente, une nouvelle configuration, qui placerait l'accent davantage sur chaque travailleur du savoir et moins sur la concentration et la centralisation des services, une structure qui réunisse Terre-Neuve à la Colombie-Britannique grâce à une inforoute permettant la transmission des idées, la création en coopération, la constitution d'équipes de production armées de compétences et non limitées à des institutions, à des secteurs, à des régions ou à des gouvernements. C'est ça l'innovation. C'est ce qui garantira l'avenir du Canada. C'est dans cette voie que nous devons nous engager, et tout de suite.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui pour faire un discours que j'espérais sincèrement ne pas avoir à faire. L'automne dernier, le ministre des Finances a promis qu'il allait prendre des mesures sérieuses au sujet de la dette et du déficit dans son budget et il a affirmé qu'il savait que les Canadiens n'accepteraient pas de hausses d'impôts.

Le ministre a ensuite tenu des consultations prébudgétaires dont on a beaucoup entendu parler. Le ministre a dit maintes et maintes fois qu'il écouterait les Canadiens. Les espoirs et les désirs des Canadiens ont été trahis, et c'est absolument inacceptable.

Je veux parler de la razzia fiscale du gouvernement. Depuis que j'ai été élu, un des plus grands désirs exprimés par mes électeurs et par l'ensemble des Canadiens, c'est que le gouvernement cesse de hausser les impôts. Les Canadiens sont déjà imposés à mort. Ils sont saignés à blanc par le gouvernement.

Même si le gouvernement était au courant de la situation terrible dans laquelle nous sommes, il a décidé encore une fois d'aller vider les poches des Canadiens. Mais cette fois, comme la poche où sont les billets est déjà vide-à cause du gouvernement-le fisc a décidé de fouiller dans la poche où se trouve la monnaie pour aller y chercher les dernières pièces qui restent.

Nous avons une taxe sur l'essence, une taxe sur les services publics en Alberta et une augmentation de l'impôt des sociétés qui aura évidemment des répercussions sur le public. On n'a pas éliminé les échappatoires. On n'a pas taxé les riches. Ce sont là des taxes qui touchent tous les Canadiens qui utilisent des ampoules électriques, qui chauffent leurs maisons, qui conduisent une voiture, les agriculteurs et les consommateurs en général.

C'est tout à fait inacceptable. On a dit et répété au gouvernement qu'il n'a pas de problème sur le plan des recettes, mais bien sur le plan des dépenses. L'an dernier, les dépenses du gouvernement ont fait grimper le déficit à un niveau record. Nous avons accumulé une dette de plus de 550 milliards de dollars qui coûte aux contribuables près de 80 000 $ la minute en frais d'intérêts.

C'est incroyable, mais c'est ce que nous laissons aux générations à venir. C'est le genre de compassion dont nous avons entendu certains députés parler. Il faudrait faire preuve d'un peu de compassion pour ceux qui viendront dans l'avenir. Le gouvernement semble croire qu'en arrivant à des dépenses excessives totalisant environ 24 milliards de dollars en 1997-1998, il aura accompli la plus grande réalisation de tous les temps. Il m'est tout à fait impossible de voir où sont les priorités du gouvernement.

Comment se fait-il qu'il n'ait pas compris que les Canadiens demandaient qu'il n'augmente pas les impôts et qu'il s'occupe du déficit?

(1640)

Même les inconditionnels du Parti libéral comme le Toronto Star et bien d'autres rapportaient dans leurs gros titres à la une que les contribuables exhortaient le gouvernement à lutter contre le déficit en réduisant les dépenses et non pas en augmentant les impôts.

Le gouvernement s'est fait dire la même chose à d'innombrables reprises, mais il n'a pas écouté. Je sais que le gouvernement peut probablement donner un million d'excuses pour augmenter les impôts et je suis convaincu que les doreurs d'image pensent réussir à faire croire à la population canadienne que les impôts sont dans le meilleur intérêt de tout le monde, mais ils se trompent.

Nous croyons que l'élimination du déficit et l'adoption d'un régime fiscal réformé assorti d'un plan à long terme de réduction de la dette constituent les seuls moyens de sauver les programmes que les Canadiens chérissent.

En 1984, notre dette était de 190 milliards de dollars. Un type s'est présenté en prétendant arranger cela. En 1988, il a à nouveau déclaré qu'il allait arranger cela et, à ce moment-là, la dette était passée à 370 milliards de dollars. En 1993, on nous a dit que


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nous avions eu un très mauvais gouvernement et qu'il avait fait augmenter la dette jusqu'à 489 milliards de dollars au moment des élections. Quelqu'un nous a à nouveau dit que cela allait être corrigé.

En 1997, au moment des prochaines élections, la dette sera de plus de 600 milliards de dollars. Pourtant, le gouvernement croit qu'un déficit de 32 milliards de dollars l'an prochain est une grande réalisation. Je regrette, mais je ne suis pas de cet avis.

Dans le passé, le gouvernement a toujours cru qu'il pouvait élaborer des politiques dans les hautes sphères du pouvoir, puis les imposer à la base. Le gouvernement croyait savoir ce qui était meilleur pour les Canadiens, et il le leur imposait.

Le gouvernement précédent avait cette habitude, mais nous savons ce qu'il en est advenu. Le gouvernement a beau ne pas vouloir entendre cela, mais l'époque où Ottawa disait aux Canadiens quoi faire et comment vivre est révolue. Il est temps que les Canadiens de la base disent quoi faire aux politiciens ici à Ottawa, et ils font mieux d'écouter.

Depuis maintenant plusieurs mois, le gouvernement a empiré le problème, car il a dit aux Canadiens qu'il était à l'écoute. Ils croyaient avec optimisme qu'un jour nouveau s'était levé, mais ils se rendent compte maintenant que le gouvernement n'en fera qu'à sa tête, sans se soucier de ce qu'il a entendu au cours des consultations pré-budgétaires.

L'art de la politique n'a pas changé à Ottawa. Le gouvernement prétend écouter pour se donner bonne apparence et il assure aux Canadiens qu'il a changé de conduite, mais l'illusion ne dure jamais. Ce budget fera aux Canadiens l'effet de la douche froide dont ils avaient besoin pour comprendre ce que pense vraiment le gouvernement.

Taxer et accaparer, tel est le mot d'ordre, et les souhaits du public importent peu. Honte à vous, monsieur le ministre des Finances. Vous vous assoyez sur votre pension dorée tandis que les générations à venir de Canadiens sont sacrifiées. Non seulement il est immensément honteux que le gouvernement ait décidé d'imposer des taxes, mais quand je me demande si le budget s'attaque au moins comme il le faut au problème de la dette et du déficit, ma réponse est non.

La dette fédérale s'élève à environ 550 milliards de dollars et augmente de 10 milliards tous les deux ou trois mois. Les intérêts sur cette dette sont énormes, et s'accumulent au rythme de 80 000 $ la minute. Chaque fois que les taux d'intérêt augmentent d'un pour cent, le déficit augmente de près de 2 milliards de dollars. D'ici aux prochaines élections, nos paiements d'intérêts annuels s'élèveront à plus de 50 milliards de dollars. C'est cela, et rien d'autre, qui menace vraiment notre filet de sécurité sociale.

Les cambistes internationaux sont heureux aujourd'hui parce qu'on leur a garanti une source toujours plus abondante d'argent. Autrement dit, même s'il n'y avait plus un cent d'intérêt à payer sur la dette, si un seul contribuable canadien remboursait la dette à raison de 10 000 $ par année, celle-ci ne serait pas complètement épongée avant l'an 5 500 0000 après J.-C.

Face à ce problème d'endettement, quelle est la réponse du gouvernement? Quelles mesures sérieuses prendra-t-il pour sauver le pays de ce péril économique? Il a promis de ramener ses dépenses excessives à 25 milliards de dollars environ par année au-delà de ce que nous pouvons nous permettre d'ici aux prochaines élections.

Pour les Canadiens, cela se traduira par l'ajout de 100 milliards de dollars à la dette nationale, qui atteindra la marque de 600 milliards de dollars. Quel engagement et quelle mesure responsable. Avec ce genre de connaissances budgétaires, les ministres pourraient peut-être se faire engager comme consultants financiers quand ils seront à la recherche d'un emploi après les prochaines élections. Nul doute que des génies financiers comme eux n'auront aucun problème à se faire engager. Peut-être que les caisses de crédit et d'épargne américaines sont à la recherche de cadres supérieurs.

(1645)

Sur une note plus sérieuse, je n'en reviens pas que le gouvernement estime en avoir fait assez. Depuis des mois, les Canadiens disent au gouvernement qu'ils sont prêts à faire des sacrifices pour éponger le déficit, mais le gouvernement continue de croire qu'il peut faire comme d'habitude. Le gouvernement veut avoir le beurre et l'argent du beurre. D'une part, il dépense sans compter au point d'acculer le pays à la faillite, de l'autre, il prétend lutter contre le déficit.

Je regrette, mais cela ne peut pas continuer comme ça. Les Canadiens veulent que cela change. Ils veulent des changements véritables, des vraies réformes, des vraies réductions des dépenses et ils ne veulent plus de nouveaux impôts. Le message est simple, mais le gouvernement n'écoute pas. Il est facile de voir quelles mesures sont nécessaires, mais le gouvernement a peur d'agir.

Au cours de l'année qui vient, le Canada s'endettera de plus en plus, le dollar aura de la misère et les taux d'intérêt seront généralement à la hausse. À mesure que les taux d'intérêt monteront, notre croissance ralentira et les chômeurs du Canada continueront à chercher du travail sans succès. Par le passé, le gouvernement aimait à rejeter la responsabilité de ces problèmes sur le dos du gouvernement précédent, mais ce temps est révolu. Le gouvernement a maintenant pris la situation en main et n'a plus qu'à assumer la responsabilité de ses actes. Les Canadiens sont assez brillants pour le savoir. Ils se souviennent de ce qu'on leur a promis, et ils n'oublieront pas.

Les provinces et la population du Canada ne seront pas dupes de la façon qu'a Ottawa de camoufler la vérité. Assez, c'est assez. Commençons par le haut de la pyramide. Réduisons les pensions des députés. Réduisons le nombre de députés. Réformons et réduisons le Sénat. Réduisons le nombre de cadres supérieurs et intermédiaires et cessons d'exercer les compressions toujours à la base de la pyramide.

Notre gouvernement a poussé les choses à la limite et la situation ne peut plus qu'empirer. Le Parti réformiste ne restera pas à rien faire. Les réformistes ont un message à faire passer: cessons de hausser les impôts et finissons-en avec le déficit. Il est maintenant temps de tenir tête au gouvernement et de le forcer à écouter. Nous lui répéterons notre message sans relâche, aussi souvent qu'il le faudra, pour le faire passer. Nous avons un problème grave et nous devons nous en occuper.


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M. George S. Rideout (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt mon collègue d'en face. Il a dit que le gouvernement n'avait pas écouté, pas discuté et pas fait participer les Canadiens au processus de planification et de réforme budgétaires, en essayant de concevoir un budget qui réglerait la crise financière sans pour autant créer de récession.

Les Canadiens nous ont dit qu'ils ne voulaient pas de hausse d'impôt sur le revenu et que nous ne devions ni toucher aux REER ni imposer les régimes de soins dentaires. Ils nous ont demandé de réduire considérablement la taille du gouvernement afin de le rendre plus efficace. Le gouvernement a écouté et a fait exactement ce qu'on attendait de lui.

Quand les réformistes nous ont présenté leur proposition de budget, je les ai entendus s'en prendre aux petits en disant qu'ils pouvaient se serrer la ceinture. Ce budget prévoyait des hausses d'impôt directes dans la région de l'Atlantique. Il s'en prenait à l'APECA et attaquait toutes ces institutions qui assurent le bon fonctionnement de cette région. Le budget proposé par le Parti réformiste s'en prendrait aux personnes âgées qui verraient leurs impôts sur le revenu augmenter.

Est-ce que le Parti réformiste a écouté les gens avant de mettre son budget de l'avant?

M. Mills (Red Deer): Madame la Présidente, ce que nous avons fait justement, c'est écouter les gens. Ils nous ont dit qu'ils en avaient plus qu'assez du gouvernement, du premier au dernier palier. Ils nous ont dit: «Donnez-nous des programmes qui nous permettent de nous occuper de nos propres affaires au niveau local.»

Si le député avait lu le Budget des contribuables, il aurait vu que c'est exactement ce que nous proposons. Nous recommandons des mesures telles que les REER, qui permettent aux gens de se débrouiller tout seuls, de ne pas dépendre de la bureaucratie ni d'un gouvernement qui au bout de 35 ans les trahit et cesse de garantir les programmes sociaux et les services dont ils ont besoin. C'est ce que les gens nous ont dit.

(1650)

La menace, ce sont ces 600 milliards de dollars et ces 50 milliards en intérêt à payer. C'est la menace qui pèse sur tous les programmes sociaux et tout le monde va en pâtir alors que le budget que nous avons présenté aurait été juste et égalitaire et aurait apporté une solution. Lorsque le gouvernement se réveillera, il sera trop tard.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, moi aussi je dois commenter la brève intervention du député.

Le Parti réformiste a mis à profit la période prébudgétaire pour faire le tour du pays et inciter à ce qu'il appelle la révolte fiscale, semant la panique parmi les Canadiens en leur disant que le gouvernement aller faire ceci ou encore cela. Comme l'a fait remarquer le député tout à l'heure, le gouvernement ne va pas imposer les REER ni les prestations d'assurance dentaire et médicale. Le gouvernement a écouté.

Le gouvernement a réduit ses dépenses. Pour chaque dollar d'augmentation de ses recettes, il a comprimé ses dépenses de sept dollars. Le député essaye de sauver la face devant le ridicule de cette incitation à la révolte fiscale en prenant comme bouc émissaire la nouvelle taxe d'accise de 1,5c. le litre.

J'ai une question très simple à lui poser afin que tous les Canadiens comprennent exactement de quoi il s'agit. Le député pourrait-il dire à la Chambre ce que cette augmentation représente pour le Canadien moyen qui fait le plein à sa station service? Combien cette nouvelle taxe va-t-elle coûter aux Canadiens?

M. Mills (Red Deer): Madame la Présidente, la réponse à cette question est, évidemment, 500 millions de dollars, mais les choses ne sont pas aussi simples. Bien d'autres domaines sont visés.

Il y a naturellement l'augmentation de 12,5 p. 100 de l'impôt des grandes sociétés qui sera refilée aux consommateurs. Il y a tous les changements apportés aux transferts aux provinces, qui font que les provinces auront moins d'argent, même si elles devront fournir plus de services.

On parle des mesures à long terme. Je viens de l'Alberta et un de nos ex-premiers ministres, M. Getty, a déposé un budget similaire, où il cherchait à rendre les gens heureux, à ne pas faire de vagues, à contenter tout le monde.

Pour ce qui est des consultations auprès de la population, du nombre de réunions publiques et de tout le reste, je serais ravi de comparer notre travail à ce que le député a pu faire.

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, contrairement à l'orateur précédent, je suis très heureuse d'intervenir aujourd'hui pour approuver le budget. Je suis très fière du nouveau concept de gestion financière que nous propose le gouvernement, car il est audacieux et futuriste.

Dans ce budget, le ministre des Finances a courageusement redéfini le système de gouvernement du Canada, tout en préservant les principes fondamentaux que sont l'équité et la justice.

Je voudrais aujourd'hui aborder certaines parties du budget qui touchent plus particulièrement les habitants de la Colombie-Britannique et mes électeurs.

Je tiens à préciser que ce budget permet au gouvernement de tenir toutes les promesses qu'il a faites. Le budget était dur mais juste. Le gouvernement a veillé à ce que le fardeau financier imposé à tous les Canadiens soit réparti de façon équitable. Il a commencé en faisant le ménage à la Chambre des communes, en donnant un exemple de modération et de prudence financière venant d'en haut.


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Le budget échappe au syndrome du «n'importe où mais pas dans ma cour». Nous avons commencé en mettant de l'ordre dans nos propres affaires. Nous avons redéfini le gouvernement lui-même en rationalisant, en dégraissant et en accroissant l'efficience, en énonçant un rôle convenant mieux au gouvernement et où celui-ci stimule la croissance plus qu'il ne la gère.

Nous nous sommes retirés des mégaprojets, en sabrant les subventions aux entreprises, à l'agriculture, aux transports et aux mines. Nous croyons que ces secteurs peuvent s'occuper d'eux-mêmes et être concurrentiels si nous ne nous mêlons pas de leurs affaires. C'est ce que leurs représentants nous ont souvent dit et c'est ce que nous faisons maintenant.

Nous privatiserons les agences viables, notamment dans les transports, pour qu'elles s'autosuffisent et que ce soient les usagers qui paient les services et pas l'ensemble des contribuables. Nous continuerons de veiller sur la sécurité de la population et sur le maintien de normes nationales.

(1655)

Le budget annonce un véritable virage dans notre histoire économique. Depuis quelques années, nous avons étiré nos ressources à la limite pour gouverner. Nous avons déployé de grands efforts pour survivre sans être étouffés par le poids de la dette et de dangereux déficits.

La récession que nous venons de traverser, conjuguée aux répercussions négatives du déficit et de la dette, a nui à notre crédibilité sur les marchés mondiaux. Notre survie économique était à la merci des courtiers des banques d'affaires de New York et des éditorialistes de Washington.

Nous avions deux possibilités: nous pouvions continuer de nous laisser entraîner par la spirale de l'endettement, risquant même de devenir un membre du tiers monde, ou nous pouvions prendre des mesures pour amorcer un virage. Il nous fallait une révolution et le budget que nous avons présenté en est une.

Au cours des deux prochaines années, ce budget générera des économies cumulatives de 13,3 milliards de dollars dont 11,9 milliards proviendront de réduction des dépenses gouvernementales. Cela représente 7 $ de réduction des dépenses pour chaque dollar de recettes fiscales. Par conséquent, en 1996-1997, notre croissance économique dépassera enfin le taux de croissance de la dette.

C'est là un élément clé. Ce sera un point tournant pour notre nation: pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, nos recettes dépasseront nos emprunts. Nous aurons finalement renversé la vapeur.

Contrairement aux discours ronflants qui caractérisent la réaction furieuse et déchaînée des partis d'opposition et d'autres groupes, le budget n'amoindrit en rien notre engagement en faveur des programmes sociaux. Je crois plutôt qu'il le confirme une fois pour toutes. En prenant en main nos finances, nous avons regagné notre souveraineté et notre capacité de prendre nos propres décisions au sujet du genre de démocratie sociale dans laquelle nous voulons vivre. Nous nous sommes mis dans une position où nous pouvons prendre des décisions fondées sur nos valeurs en tant que peuple, des valeurs comme la compassion et la justice sociale, des valeurs selon lesquelles le rôle du gouvernement consiste à créer des possibilités pour tous les Canadiens, à aplanir les obstacles et à protéger les plus vulnérables dans notre société.

Ce budget nous permettra de protéger nos programmes sociaux des banques d'affaires et des éditorialistes du monde entier. En atteignant nos objectifs en matière de réduction du déficit, nous prenons des mesures pour empêcher New York ou Tokyo de faire la loi dans notre pays et de détruire nos programmes sociaux. Un gouvernement libéral ne permettrait jamais que cela se produise.

Je suis heureuse de voir que ce budget, aussi austère qu'il puisse être, ne touche pas de façon néfaste les pauvres, les malades et les personnes âgées. À titre de secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé, je suis heureuse de signaler que, en ce qui concerne l'assurance-maladie, ce budget n'a aucune incidence sur les normes et les principes qui nous sont chers et qui sont consacrés dans la Loi canadienne sur la santé. En fait, d'un bout à l'autre du pays, les régimes d'assurance-maladie continueront de respecter les principes établis, soit l'intégralité, l'universalité, la transférabilité, l'accessibilité et la gestion publique. Nous nous sommes engagés, dans le livre rouge, à voir à ce que ces principes soient respectés et nous tenons cette promesse.

Hier, réagissant de façon typique au discours du ministre des Finances, le chef de l'opposition et son porte-parole en matière de finances ont déclaré que le budget ne faisait que confirmer le statu quo. Il est clair que le chef de l'opposition n'a pas lu le document ou, s'il l'a fait, qu'il ne l'a pas compris.

Le budget fait tout le contraire. Il marque clairement le début d'une ère nouvelle en ce qui concerne le fédéralisme et les relations fédérales-provinciales. C'est un pas dans la direction d'un système plus maigre, plus efficace et plus responsable qui reconnaît les compétences provinciales et la capacité de redéfinir et d'offrir des services efficaces au niveau local, soit la démarche ascendante dont les partis d'opposition parlent si souvent, mais qu'ils sont si peu disposés à mettre en oeuvre.

En lisant les journaux ce matin, j'ai constaté qu'une bonne partie des médias se sont concentrés sur le nouveau système de financement global, appelé Transfert social canadien, qui aura pour résultat, selon eux, que les provinces fourniront moins de services. Au contraire, grâce au nouveau système de paiement de transfert forfaitaire, notre gouvernement se trouve à donner aux provinces une plus grande souplesse et une plus grande latitude dans l'administration de leurs programmes sociaux.

Le rôle du gouvernement fédéral se trouve redéfini, mais de façon positive. Je crois fermement que ces changements nous permettront d'établir des normes nationales bien claires pour tous les programmes sociaux. Voilà une mesure que mes électeurs et des groupes de partout au Canada préconisaient depuis des années.

Au lieu de balkaniser le pays, cette mesure nous permettra d'établir des objectifs nationaux en matière d'éducation et de sécurité sociale comme nous l'avons fait avec tant de succès en matière de santé.

(1700)

Depuis son début, le régime d'assurance-maladie a confié aux provinces la gestion et l'administration des soins de santé, régies par un ensemble de principes consacrés dans la Loi canadienne sur la santé. Cela a permis de créer un système de santé qui nous unit tous en tant que Canadiens, un système dont nous sommes


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fiers à juste titre, un système qui a libéré le ministère fédéral de la Santé qui a ainsi pu se concentrer sur des questions plus vastes touchant la santé et la sécurité de tous les Canadiens. Voilà ce que nous entendons faire grâce à cette décentralisation en faveur des provinces.

Je suis convaincue qu'à la suite de ses consultations avec les provinces, le ministre du Développement des ressources humaines agira rapidement en vue de proposer des normes et des principes qui nous permettront d'agir selon les principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé et selon les normes d'administration et de souci national que nous connaissons en tant que nation.

Le transfert social canadien va faire exactement ce que nous souhaitons. Le gouvernement fédéral a montré qu'il était possible de gouverner mieux et plus efficacement avec des ressources moindres. Je crois que les provinces vont relever le défi qui leur est ainsi lancé et nous montreront qu'elles peuvent faire aussi bien que nous.

Je voudrais également dire un mot des modifications apportées à la Loi sur l'assurance-chômage, car elles me semblent très importantes. L'une des questions clés à cet égard est liée au mandat des libéraux, qui est de redonner des emplois durables aux Canadiens. C'est exactement ce qui se produira si nous pouvons faire porter nos efforts sur les services d'emploi et la formation.

Les Canadiens qui se sentent très vulnérables en ce moment parce qu'ils sont au chômage et craignent que cela ne compromette leur avenir devraient se rassurer, car nous efforçons de leur donner les moyens et les compétences afin qu'ils retrouvent du travail, gardent leur emploi et contribuent ainsi à la compétitivité de notre pays. Nous retirons le filet de sécurité, mais nous donnons un tremplin. C'est ce que préfèrent la plupart des Canadiens, selon moi.

Nous réduisons aussi le financement consacré aux programmes d'assurance-chômage. D'ici l'automne de l'an prochain, le financement diminuera de 10 p. 100. Ces compressions seront possibles grâce à l'allégement de l'appareil administratif et à un taux de chômage plus faible. Comme la Chambre le sait, nous avons créé des emplois et fait baisser le taux de chômage de deux points, ce qui ne s'était pas vu depuis 10 ou 15 ans.

Nous prenons des mesures pour réprimer les abus qui, selon ce qu'on entend dans tout le pays, sont endémiques dans le régime. Cela se traduira par des économies de 200 millions de dollars.

En outre, nous voulons prendre des mesures innovatrices et originales. Nous voulons constituer une réserve de 5 milliards dans la caisse de l'assurance-chômage pour que les erreurs commises par le passé ne se renouvellent pas. Si l'économie connaît des périodes de récession et de ralentissement, nous aurons en partant un coussin, de sorte que nous n'aurons pas à augmenter les cotisations d'assurance-chômage et, par conséquent, à paralyser les entreprises qui doivent connaître une expansion pour nous aider à soutenir l'économie dans les moments difficiles. C'est là le simple bon sens.

En maintenant un surplus, nous pourrons réduire les taux et compter sur cette aide dans les périodes de faible croissance économique. Cela nous aidera aussi à favoriser la création d'emplois à un moment crucial, lorsque nous nous remettons du ralentissement de l'économie.

De plus, je suis très heureuse de souligner que, partout dans ce budget, le gouvernement a maintenu totalement et fermement son engagement à l'égard d'un système de protection des aînés qui soit juste et durable. Il reconnaît ainsi l'apport important des personnes âgées à l'infrastructure sociale et gouvernementale du Canada.

Il y a beaucoup de personnes âgées dans ma circonscription. Elles craignaient beaucoup que leurs pensions ne soient sacrifiées dans ce budget. Je suis heureuse de pouvoir leur dire que les deux principaux piliers du système de pensions public, soit le Régime de pensions du Canada et le Régime des rentes du Québec, la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti seront maintenus et améliorés.

Dans ce budget, le ministre des Finances a promis de rencontrer les représentants des provinces à l'automne et d'examiner notre très chancelant Régime de pensions du Canada. Le ministre des Finances s'est engagé à publier, en collaboration avec le ministre du Développement des ressources humaines, un document recommandant les changements à apporter au système pour qu'il soit abordable, juste et durable, alors que beaucoup d'entre nous, baby-boomers, sommes en voie de devenir des personnes âgées.

Enfin, le ministre a annoncé un changement au mode de versement de la Sécurité de la vieillesse aux aînés à revenu supérieur qui ont été soumis aux règles de la récupération fiscale. Il s'agit simplement d'une mesure administrative sensée. Si on déduit les montants à recouvrer de ces versements chaque mois au lieu d'attendre à la fin de l'année pour les récupérer, on évite ainsi beaucoup de paperasserie.

(1705)

Le budget fait également suite à notre promesse du livre rouge quant au maintien de l'équité dans le régime fiscal. Le ministre des Finances a refusé d'équilibrer le budget au détriment des pauvres. Il a plutôt essayé de frapper ceux qui ne font habituellement pas leur juste part.

La réforme des fiducies familiales en est un bon exemple. Je crois fermement que dans les périodes d'austérité tous les Canadiens devraient payer leur juste part d'impôts et ne pas échapper au fisc grâce à des échappatoires.

Le budget élimine le plafond-ce qui est juste-, modifie la gestion des fiducies familiales et supprime le mécanisme de sélection d'un bénéficiaire privilégié pour les années d'imposition d'une fiducie qui commencent après 1995, sauf lorsque ce choix concerne une personne souffrant de déficience mentale ou physique. Le gouvernement a encore une fois fait preuve de compassion en ne s'attaquant pas aux plus démunis.

Je reconnais que les fiducies familiales ont de nombreux objectifs non fiscaux valables, comme faciliter la planification successorale, mais ces modifications garantissent que lesdites fiducies ne serviront pas à reporter le paiement de l'impôt sur les gains en capital à l'aide du fractionnement du revenu. C'est cette


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échappatoire que nous voulions supprimer. Encore une fois, le budget montre que nous sommes déterminés à apporter des réductions à condition qu'elles soient justes.

Le budget renferme d'autres bonnes nouvelles pour mes électeurs, à savoir la réorientation du rôle du gouvernement dans les transports. Le gouvernement fédéral cessera d'exploiter le système et se contentera de légiférer, de prendre des règlements, bref d'en être le simple gardien avec des responsabilités limitées en ce qui touche son exploitation. Les subventions seront réduites et dans bien cas éliminées. Les principaux éléments seront davantage commercialisés; quant au reste des activités, leur efficacité sera améliorée par le recours accru aux usagers plutôt qu'aux contribuables pour absorber les coûts du système de transport.

Ainsi, le budget réduira les dépenses nettes de Transports Canada et des organismes qui lui sont rattachés de plus de 50 p. 100 en 1997-1998, les faisant passer de 2,8 milliards de dollars à 1,4 milliard de dollars. En conséquence, le port de Vancouver, dans ma circonscription, et d'autres ports du pays pourront obtenir l'autonomie qu'ils recherchaient depuis tellement longtemps pour prospérer et puis devenir enfin concurrentiels.

Des modifications apportées au secteur minier influeront favorablement à long terme sur la Colombie-Britannique. Dans ce budget, le gouvernement fédéral a décidé de ne pas renouveler les ententes sur l'exploitation minière, tout en insistant sur le fait qu'il n'abandonne pas le secteur minier. L'affaire est que le secteur ne bénéficie pas d'un régime fiscal équitable, qui lui soit favorable aux diverses étapes de l'exploitation minière, puisque, entre autres, on ne fait pas de distinction entre les mines reprises et les mines nouvelles. Nous allons nous pencher sur ces questions pour accorder à ce secteur ce dont il a besoin et éliminer ce qui l'empêche d'être aussi rentable que possible, en Ontario et en Colombie-Britannique.

Je voudrais maintenant faire quelques observations à propos du Parti réformiste qui attaque notre budget. Les réformistes ont attaqué notre budget en disant que nous n'avions pas fait ce que nous devions faire, tout cela sans tenir compte de nos chiffres. Ils nous ont même traités d'hypocrites.

Le budget que le troisième parti a déposé était un train de mesures punitives et loin d'être créatives. Depuis que notre pays existe, le Parti libéral a toujours été fidèle au poste en période de changement. Chaque fois que notre pays a voulu pénétrer de nouveaux secteurs, se développer davantage, modifier sa façon de faire les choses, il s'est toujours trouvé un gouvernement libéral qui mette le processus en branle.

Nous sommes à l'aube du XXIe siècle. Bien des défis nous attendent. Nous avons vu qu'il nous fallait être compétitifs. Nous avons vu que nous devions nous préoccuper de formation, d'emplois, de création d'emplois, de croissance économique. Nous mettons l'accent sur la croissance économique, sur les moteurs de cette croissance que sont la petite et la moyenne entreprises, les sciences et la technologie. Nous allons faire avancer ce pays.

Il y a toujours eu un gouvernement libéral pour aider le Canada à traverser les temps difficiles. Une fois de plus, nous sommes au rendez-vous pour faire entrer le Canada dans le XXIe siècle. Je sais que le monde entier a les yeux tournés vers le Canada, un modèle à imiter.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'attention ce que vient de dire ma collègue. Il me semble que c'est tissé au fil rouge.

(1710)

C'est rempli de sophismes. Je vais faire un commentaire et je poserai ensuite la question à ma collègue. Comment peut-on donner des soins de santé de qualité quand, dès l'an prochain, le transfert aux provinces sera coupé de 700 millions? Comment arriver à donner de meilleurs soins de santé? Vous en avez parlé longuement tantôt.

Si j'étais un jeune diplômé, ce soir, je serais très inquiet. Si j'étais sur la sécurité du revenu, je le serais encore davantage, chômeur, pas mieux. Je serais extrêmement inquiet. On parle de 45 000 fonctionnaires, on parle de la base de Saint-Hubert et des autres, ce sont quand même des personnes extrêmement compétentes qui perdent leur job et qui vont sûrement se retrouver du travail. Mais si j'ai 24 ans, des diplômes et que je veux me placer, c'est autre chose. Un emploi c'est un emploi, ce n'est pas deux emplois. C'est la ruée.

Ce soir, je serais très heureux si j'étais une fiducie familiale, jusqu'en 1999, ça va bien, j'ai le temps de me faufiler facilement. Ne vous inquiétez pas. Si j'étais la Banque royale, je serais très heureux aussi. Je vous enverrais des douzaines de roses et on chanterait ensemble. Les riches, les bien-nantis se réjouissent, les plus démunis s'attristent.

J'aimerais que ma collègue donne une vraie réponse à ces jeunes universitaires, ces chômeurs et ces sans-emploi. Comment et où votre Budget contribue-t-il à créer des emplois rapidement, quand on sait qu'on enlève 200 millions dans les infrastructures?

[Traduction]

Mme Fry: Madame la Présidente, je voudrais, tout d'abord, répondre à la déclaration de mon collègue au sujet de la santé. De nombreuses études ont maintenant démontré que le régime de soins de santé était suffisamment financé mais qu'il fallait tout simplement l'administrer de façon plus efficiente. C'est ce que nous devrions essayer de faire.

Il est inutile de continuer d'y consacrer toujours plus d'argent. Grâce à une meilleure gestion, notre système pourra offrir aux Canadiens les meilleurs soins de santé du monde. À l'heure actuelle, on n'applique pas de bons principes de gestion. Nous n'étudions pas le résultat des mesures que nous prenons pour voir si elles ont des répercussions sur l'état de santé de la population.


10172

Il y a maintenant suffisamment d'études pour montrer que nous pouvons le faire et épargner des sommes importantes qu'on pourra alors consacrer à des aspects importants, comme la prévention et l'amélioration de l'état de santé de la population, pour que nos enfants puissent sortir de la pauvreté et vivre en bonne santé. Nous savons que la pauvreté est responsable, en grande partie, de la mauvaise santé de certains au Canada. Il faut affecter nos ressources là où elles sont le plus utiles et peuvent améliorer la situation. C'est ce que nous serons en mesure de réaliser, si nous administrons mieux notre système.

Je ne vois pas comment des compressions dans le financement de notre régime de santé pourraient le rendre encore pire. C'est un défi pour les provinces d'apprendre comment administrer notre système comme il se doit en appliquant de bons principes et d'excellentes lignes directrices. Je pense que c'est possible et que les provinces sont tout à fait capables de relever ce défi.

En ce qui concerne les Canadiens, notamment les jeunes, qui cherchent du travail, le régime d'assurance-chômage actuel nous apprend que 25 p. 100 des Canadiens sont des analphabètes fonctionnels. Dans les Maritimes, la proportion est de 40 p. 100. Il n'est plus question de l'étudiant type, mais d'une population adulte qui a besoin d'acquérir des compétences et des outils pour retourner sur le marché du travail.

D'une part, le gouvernement essaie de stimuler les petites et moyennes entreprises qui vont créer 80 p. 100 des emplois et, d'autre part, nous voyons l'assurance-chômage comme une façon d'aider les gens à obtenir les outils et les compétences dont ils ont besoin pour réintégrer la population active, devenir indépendants, ainsi que contribuer à l'essor et à la compétitivité de notre pays. C'est ce que nous voulons faire, créer des possibilités, un tremplin et non un filet de sécurité.

(1715)

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Madame la Présidente, quand j'entends délirer ainsi les libéraux, je ne peux m'empêcher de penser aux paroles d'une chanson qu'interprétait la célèbre chanteuse Dalida et qui disait ceci: «Paroles, paroles, paroles. Encore des mots, toujours des mots, les mêmes mots, rien que des mots.»

La députée a parlé du programme de transfert social que le gouvernement a l'intention de faire et dans le cadre duquel il envisage de combiner les dépenses ou les transferts aux provinces au titre de la santé et du bien-être social et au titre de l'enseignement postsecondaire, et où nous nous trouvons, comme par magie, à faire disparaître 4,5 milliards de dollars.

Les députés devraient savoir que nous avons fait une proposition semblable mais que nous parlions alors de transférer des points d'impôt, de transférer la capacité des provinces de pouvoir financer cela. Le gouvernement ne fait que se décharger de ses responsabilités.

Ce qui est embêtant avec ce plan, c'est que la Loi canadienne sur la santé et le Régime d'assistance publique du Canada sont tous deux gravés dans la pierre en ce qui concerne ce que les provinces doivent faire. Par conséquent, c'est l'enseignement postsecondaire qui écope le plus ici, avec la disparition de ces 4,5 milliards de dollars. C'est l'enseignement postsecondaire qui écope.

Étant donné la très grande importance que l'on accorde, en Colombie-Britannique, à la question des pensions des députés, la députée pourrait-elle me dire-car je sais que les habitants de sa circonscription, et sûrement tous les habitants de la Colombie-Britannique seraient désireux de le savoir-si elle a l'intention d'exercer son droit de se retirer du régime de retraite des députés et de montrer ainsi le leadership que recherchent les Canadiens?

Mme Fry: Madame la Présidente, j'aimerais faire quelques observations à propos du joli petit discours que nous a fait le député avant sa question, mais je voudrais d'abord répondre à cette dernière.

Le député me demande si je vais renoncer au régime de retraite car ce serait à ses yeux faire preuve de responsabilité. Il y a beaucoup de façons de faire preuve de responsabilité. Je voudrais étudier la question. Je voudrais voir si c'est faisable ou si je devrais le faire.

La réforme des pensions est une question essentielle, une question fondamentale. On l'a examinée. Le premier ministre a été très clair lorsqu'il a parlé de réformer la pension de retraite des députés. Un troisième parti à la Chambre nous a présenté un rapport dans lequel il est beaucoup question de la réforme des pensions et du revenu des députés. Le député ne parle pas de tout ce que contient ce rapport.

Il est facile d'être sélectif, de prendre une petite partie d'un rapport et de le commenter. Le député doit tenir compte de l'ensemble du rapport. Un défaut fondamental de toutes les politiques du troisième parti est que ses membres n'examinent les choses que partiellement. Ils n'examinent jamais l'ensemble pour voir quel sera l'impact, s'il va y avoir ou non une réaction en chaîne.

Le député devrait peut-être examiner les choses de façon globale de temps en temps.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, je suis, depuis l'élection, critique officielle du ministre du Développement des ressources humaines et je me retrouve aujourd'hui devant le Budget du ministre Martin. Cela représente un long parcours, un parcours à obstacles.

C'est un parcours qui m'a permis de comprendre, malgré les propos tenus par le ministre, la lecture même de son budget et l'écoute de son discours que, loin d'avoir abandonné l'idée de coupures importantes dans les programmes sociaux et l'idée de centralisation, le Budget qui est devant nous, au contraire, confirme que le gouvernement central n'a rien de plus cher que de se désengager de la santé, de l'éducation, de l'aide sociale, des autres services sociaux, mais de conserver les secteurs, même s'ils ne relèvent pas de son champ de compétence, où il estime qu'il doit oeuvrer.

(1720)

Et là, sans crier gare, sans même se soucier de l'efficacité, il va multiplier les dédoublements, les chevauchements, sans vergogne. Pendant la récente tournée du Comité du développement des ressources humaines, les nombreux groupes et personnes qui sont venus nous rencontrer, plus de 1 000, sont venus nous dire


10173

essentiellement que leur problème principal, ce n'était pas d'avoir plus de formation-oh oui, souvent ils en veulent-mais plutôt d'avoir un emploi et un emploi décent.

Or, à cet égard, le Budget est complètement muet. Il est muet et d'une façon incompréhensible. Il est muet, alors que la voie des seules coupures budgétaires est une voie qui ne mène nulle part, pour ce qui est de s'attaquer sérieusement aux problèmes du déficit et de la dette. Oui, le ministre a franchi une étape, mais il n'y a qu'à regarder comme il faut pour savoir que la dette ne diminuera pas cette année, au contraire, et que le déficit a été ramené au prix de très lourds sacrifices, de très durs sacrifices. Et quand on sait que seulement un point de pourcentage fait augmenter de 1,7 milliard l'intérêt, on se dit qu'on ne peut pas regarder seulement du côté des coupures.

On ne le peut pas pour la dette, mais on ne le peut pas surtout pour les personnes dont la vie, en ce moment, tient au fait d'avoir un emploi ou d'espérer en avoir un. À travers le Canada, les gens nous ont dit qu'ils étaient désireux de discuter des programmes sociaux, de leur réforme, mais pas dans le contexte de coupures accrues. Ils nous ont dit également que le Canada n'était pas un modèle en ce qui concerne les programmes sociaux. Des chiffres récents de l'OCDE montrent bien que pour ce qui est des dépenses sociales, le Canada est en bas de la moyenne de l'OCDE, au même niveau que la Nouvelle-Zélande, pour les admirateurs de la Nouvelle-Zélande.

Dans ce Budget, qu'est-ce que nous voyons? Nous voyons qu'il y aura 7,5 milliards de dollars de plus de coupés dans les programmes sociaux, d'ici 1998. Je dis «de plus», parce qu'il faut bien rappeler que le précédent Budget adopté ici même prévoyait une autre coupure de 7,5 milliards dans les programmes sociaux. Alors, ça fait deux fois 7,5 milliards, oui, ça fait 15 milliards de dollars de coupures dans les programmes sociaux, échelonnées sur une période de quatre ans. C'est ce qu'une fuite avait annoncé, quand le ministre du Développement des ressources humaines avait fait connaître son projet. Et au bout de la course, après cette tournée, après les luttes entre libéraux, on s'aperçoit que finalement, ce qui était le plan au mois d'octobre, c'est ce qui est dans le Budget du ministre des Finances, malgré la consultation.

Les gens ont dit: «On ne peut plus couper dans les programmes sociaux.» La coupure prévue se passe malgré les problèmes engendrés. Qu'est-ce qu'on constate dans ce Budget également? On constate qu'il y a un désengagement du gouvernement fédéral à l'endroit de la santé, de l'éducation et de l'aide sociale.

(1725)

Je dis «désengagement» parce que la diminution du financement est telle que les provinces vont se retrouver avec des problèmes de plus en plus graves. On a appelé Transfert social canadien ce regroupement des anciens programmes de financement, d'éducation et de santé d'un côté et, de l'autre, de l'aide sociale. Mais ce Transfert social canadien cache deux réalités auxquelles on fait allusion dans le Budget et ce sont les suivantes: désormais, avec ce Transfert social canadien, quand il y aura une récession, les provinces seront celles qui assumeront en entier les coûts additionnels liés aux personnes qui viendront gonfler les rangs de l'aide sociale. C'est un désengagement, madame la Présidente.

Alors que le régime d'assistance publique du Canada, qui comportait bien des défauts, avait été bâti sur le financement par le fédéral des programmes des provinces venant en aide à leurs personnes démunies, désormais on fait disparaître cela en disant que ça donne plus de liberté. Mais quelle liberté donne-t-on aux provinces? On leur transfère, non pas des responsabilités, elles les avaient; on leur transfère des coûts et, en réalité, on leur laisse assumer les problèmes, comme si ce n'était pas, au bout du compte, les citoyens et citoyennes qui allaient en payer le prix et de façon dramatique.

Je vais reprendre en français une phrase prononcée par mon honorable collègue de la Colombie-Britannique qui m'a précédée. Elle a dit: «On remet la liberté de dépenser aux provinces parce que ce sont elles qui peuvent le mieux gérer.» Comment se fait-il qu'on remette aux provinces les sommes qui sont en diminution, qui sont sur le point de disparaître? On dit aux provinces: «Ayez de l'imagination», alors qu'on leur emplit les bras de problèmes et de problèmes graves.

Mais il y a de l'argent. Il y en a, même si cela vous surprend. Il y a un lieu caché dans ce Budget qui est responsable d'ailleurs que la face du Budget ait été bien améliorée. Ce lieu, c'est la Caisse d'assurance-chômage, les programmes payés par la Caisse d'assurance-chômage. Le Québec a demandé d'obtenir le contrôle sur l'ensemble du secteur de la main-d'oeuvre ou au moins sur la formation professionnelle. Il y a de l'argent dans ce secteur. Qu'en fait-on? C'est dommage, mais là où il y a de l'argent, on ne pense plus que les provinces sont les mieux placées pour avoir de l'imagination, pour connaître les besoins des citoyens et pour les aider. Non. On reconnaît l'habileté des provinces quand elles seront obligées de faire face aux coupures, de faire des choix dramatiques et d'avoir l'air d'être celles qui sont responsables des problèmes.

Mais là où les provinces pourraient détenir des moyens qui les aideraient à développer l'emploi, à se définir des stratégies avec des moyens, ah, là, cela relève du fédéral; il garde ces moyens-là.

Grâce à la Caisse d'assurance-chômage, le gouvernement fédéral se trouve, dans le présent Budget, à nous faire des propositions qui passent en douce. Une première proposition est celle d'un nouveau fonds d'investissement en ressources humaines.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette d'interrompre l'honorable députée de Mercier, mais vous disposerez encore de 10 minutes après le vote.


10174

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 février, de la motion: Que le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants et le Code criminel, soit lu pour la troisième fois et adopté.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 17 h 30, conformément à l'article 45(5)a) du Règlement, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé de la motion à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-37.

Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 164)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Allmand
Arseneault
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Bernier (Beauce)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélanger
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Cauchon
Chamberlain
Chan
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Cowling
Crawford
Culbert
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Discepola
Dromisky
Duhamel
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Finlay
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gerrard
Godfrey
Graham
Gray (Windsor West)
Guarnieri
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Iftody
Irwin
Jackson
Jordan
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacAulay
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Marchi
Marleau
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
Nunziata
O'Brien
O'Reilly
Ouellet
Pagtakhan
Paradis
Parrish
Patry
Payne
Peric
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Proud

Reed
Regan
Richardson
Rideout
Rock
Rompkey
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Simmons
Skoke
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
Young
Zed-146

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Althouse
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Bachand
Bellehumeur
Benoit
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brien
Brown (Calgary Southeast)
Bélisle
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Duceppe
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Gilmour
Godin
Gouk
Grubel
Guimond
Hanger
Harper (Calgary West)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jacob
Jennings
Johnston
Lalonde
Landry
Laurin
Lebel
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Manning
Marchand
McLaughlin
Mills (Red Deer)
Morrison
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Ramsay
Ringma
Robinson
Sauvageau
Schmidt
Silye
Solberg
Solomon
Speaker
St-Laurent
Stinson
Taylor
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne
Williams-79

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Anderson
Asselin
Bergeron
Bouchard
Brushett
Deshaies
Dubé
Dumas
Flis
Goodale
Guay
Hickey
Irwin
Langlois
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
MacLaren
Mercier
Ménard
Peters
Pillitteri
Robichaud
Vanclief
Wood
de Savoye


10175

(1800)

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

[Français]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion, ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, il est toujours difficile de reprendre l'élan qu'on s'était donné dans une première partie de discours. Je suis certaine que les auditeurs ou les téléspectateurs ont dû abandonner pour cette période de vote.

Je voudrais dire brièvement que dans ce Budget, il y a une chose qui me surprend et c'est le rôle joué par la Caisse d'assurance-chômage. Le gouvernement fédéral, comme on l'a vu, se désengage de ses responsabilités de financement dans la santé, l'éducation et l'aide sociale. Par le biais d'une loi adoptée ce printemps, le projet de loi C-17, on a réduit les conditions d'admissibilité à l'assurance-chômage, ce qui a fait en sorte qu'il y a eu moins de personnes qui ont pu avoir accès à l'assurance-chômage, pour moins longtemps et avec des prestations réduites.

La Caisse d'assurance-chômage a permis au gouvernement fédéral de se rembourser du prêt qu'il avait dû contracter pendant la récession et présenter ainsi un portrait plus favorable. Mais, ce n'est pas tout. Du fait qu'il n'a pas réduit les cotisations, du fait qu'il avait réduit l'accessibilité, il s'est retrouvé à pouvoir faire des prévisions étonnantes. Cette année et l'année prochaine, il y aura une différence de cinq millards de dollars entre les dépenses et les recettes.

À quoi servira cet argent? Le gouvernement fédéral propose d'abord, bien sûr, de finir de rembourser le déficit. Est-ce qu'il propose de réduire les cotisations, d'aider les petites et moyennes entreprises? Non. Ce qu'il propose, c'est de laisser s'accumuler un surplus de cinq milliards de dollars. Ce qu'il propose également, pour financer la création du Fonds d'investissement en ressources humaines, comme on dit dans le Budget, grâce d'ailleurs à une nouvelle réforme de l'assurance-chômage qu'il annonce, c'est de divertir des sommes pour gonfler le Fonds d'investissement en ressources humaines.

(1805)

Alors en fait, la Caisse d'assurance-chômage sert de vache à lait. Elle sert de vache à lait parce qu'elle permettra au gouvernement fédéral d'être à l'abri lors de la prochaine récession. Alors que lui se retire du financement ou de tout autre espèce de choses ressemblant au RAPC et qu'il laisse les provinces avec les conséquences d'une éventuelle récession et du gonflement du rang des pauvres, lui, il se met à l'abri pour la prochaine récession. Et comment? Avec les surplus de la Caisse d'assurance-chômage.

Ces surplus à l'assurance-chômage, qui les fournit? Bien sûr, les entreprises. C'est important de savoir que ce sont surtout les entreprises qu'on dit à haute intensité de main-d'oeuvre, c'est-à-dire les entreprises où il y a le moins de technologie, celles qui font le plus de choses à la main, les entreprises, généralement, où les salaires sont les plus bas. Ce sont ces entreprises et ces travailleurs qui contribuent pour une large part à la Caisse d'assurance-chômage, alors que les entreprises qui ont davantage de technologie, des hauts salaires, à cause des plafonds, sont exemptées. Ce qui fait que cette caisse est financée par des travailleurs et des entreprises qui ne sont pas ceux et celles qui en profitent le plus. Non seulement ils servent à donner une sécurité relativement à la prochaine récession, ils permettront également au gouvernement fédéral de présenter un déficit diminué parce que ces sommes sont comptabilisées dans le Budget fédéral. On a d'ailleurs recommandé que cela ne soit plus le cas.

Finalement, non seulement on constate davantage de coupures dans les programmes sociaux, non seulement on constate qu'il n'y a rien pour l'emploi, non seulement on constate que le gouvernement fédéral ne se retire pas là où il y a de l'argent et en conséquence là où il peut imposer sa volonté, il ne parle plus dans la formation de la main-d'oeuvre du fait que les provinces sont celles qui savent le mieux faire. Ce n'est pas ce que dit le gouvernement. Il conserve le contrôle de la formation professionnelle et de toute la main-d'oeuvre. Comme je disais, il ne se retire pas là où il y a de l'argent.

Mais cet argent fourni par la Caisse d'assurance-chômage est fourni par les entreprises à forte intensité de main-d'oeuvre où il y a beaucoup de monde à relativement bas salaire et par ces travailleurs. Et je termine en disant que ce sont surtout les travailleurs qui paient parce que finalement les entreprises refilent ces coûts aux consommateurs.

C'est particulièrement odieux que le gouvernement fédéral se fasse une beauté grâce à ce fonds, se prémunisse pour l'avenir, alors que les travailleurs se retrouveront dans l'obligation de payer plus d'impôts ou d'avoir plus de problèmes pour ce qui est de la santé, de l'éducation et de l'aide sociale.

Il y a un autre élément important dont je veux parler, c'est celui des nouvelles normes nationales auxquelles nous prépare le Transfert social canadien. Tout le discours du Budget est de dire: «Nous entrons dans une nouvelle ère canadienne. Nous avons enfin compris que ce sont les provinces qui savent le mieux faire,» j'ajoute, dans les moments difficiles. Mais ce n'est pas tout.

Ce nouveau Transfert social canadien qui permet au gouvernement fédéral de se désengager lors d'une prochaine récession, ce Transfert social canadien permet aussi au gouvernement fédéral de se donner les moyens de développer de nouvelles normes.

(1810)

En effet, que dit-on? On dit que ce Transfert social canadien, pendant deux ans, va être financé suivant la moyenne du Régime d'assistance publique du Canada et du FPE et que, pendant deux ans, les normes en santé vont s'appliquer, au point que le gouvernement fédéral pourrait retirer des sommes si une province ne les


10176

acceptait pas. Par contre, on dit que le RAPC, lui, le Régime d'assistance publique du Canada, qui finance à 50 p. 100 les dépenses sociales, n'existe pas. Il ne reste que l'obligation de donner une aide sociale et de ne pas poser de condition pour les résidants.

Dans le fond, par rapport à cet abandon du RAPC, le gouvernement se dit: «Ah! Je suis libéral, je reconnais enfin le rôle des provinces.» Mais en réalité, c'est un repli, parce que le gouvernement fédéral n'était plus capable de maintenir le RAPC et qu'il ne voulait pas faire l'investissement nécessaire pour que l'Ontario, qui a payé cher la dernière crise, puisse avoir sa part. Alors pris en sandwich, devant ajouter de l'argent ou pénaliser le Québec, le gouvernement central a décidé de se donner l'allure d'être ouvert, mais de préparer avec les provinces de nouvelles normes qui, tel que l'a dit le ministre Martin, pourraient régir le nouveau Transfert social canadien.

Plus de coupures, plus de centralisation, les problèmes et les dettes aux provinces et aux citoyens; le gouvernement fédéral, oui, se prépare, en se donnant, à lui, une marge de manoeuvre en se servant de l'argent des travailleurs et des PME.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je trouve curieux qu'un critique de l'opposition s'objecte à ce transfert de certaines compétences auprès des provinces. Même si c'est le rôle de l'opposition de faire le procès du gouvernement, dans ce cas-ci, on refait toujours le procès du fédéralisme.

On parlait des surplus de la Caisse de l'assurance-chômage. Il est certain que, depuis quelques années, on est dans l'obligation de revoir nos programmes, de faire une évaluation sérieuse pour savoir où nous sommes rendus dans ce programme qui est en existence depuis plus d'une cinquantaine d'années. Il est certain qu'on doit faire des ajustements. On doit faire face aux nouvelles obligations de la mondialisation des marchés, et je crois que le gouvernement fédéral est tout à fait conscient de l'importance d'y apporter certains correctifs.

J'aimerais que la critique de l'opposition nous dise ce qu'elle pense du gouvernement qui décide d'en faire plus dans les services d'orientation, de formation, de compétence de base ainsi qu'en formation et en expérience en milieu de travail. Il a aussi l'intention d'en faire plus dans les services de garde pour enfants. Il étudie même des possibilités au niveau du Supplément du revenu. Je voudrais savoir si, à son avis, ce ne sont pas de nouvelles façons de faire ou de voir qui sont fort honorables et qui seront sûrement pour le mieux-être de la population au Québec?

Mme Lalonde: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de m'avoir posé cette question.

Tout d'abord, je voudrais dire que si j'ai parlé des surplus d'assurance-chômage, c'est que ces surplus sont dus aux coupures qu'on a faites. Mais mon honorable collègue me donne l'occasion de dire que ce que le gouvernement fédéral s'apprête à faire avec son Fonds d'investissement en ressources humaines, c'est de se donner un fonds gras, parce qu'il sera alimenté à la fois par les programmes relevant actuellement du Trésor, plus-et c'est très clair dans le Budget-la réallocation des sommes qui seront dégagées par une nouvelle réforme de l'assurance-chômage.

Cela signifie que le gouvernement va se donner une grosse caisse pour agir dans les domaines de compétence provinciale. Il ne se donnera même plus la peine d'essayer de négocier ou d'imposer ses normes, il va agir.

(1815)

La dernière étape est la centralisation au Canada des programmes sociaux depuis le transfert des juridictions, parce qu'à ce moment-là, on demandait la permission au moins au Parlement. La dernière étape est l'étape de l'intervention directe en services de garde, en suppléments de revenus, parce que l'objectif du ministre, c'était de pouvoir assumer, de par les fonds fédéraux, l'aide, les services d'employabilité, le développement de l'emploi, oui, mais pour les aptes au travail, qui désormais ne seraient plus de la compétence des provinces, mais deviendraient, par la magie des chômeurs de longue durée, des ressortissants du gouvernement central.

Alors, oui, il y a une grande réforme qui est en cours, mais cette réforme, au lieu d'aller dans le sens de reconnaître les compétences des provinces, elle va dans le sens de donner le pouvoir direct, par le biais de l'argent, au gouvernement central. Il se fiche des chevauchements, des dédoublements. Il se fiche de se coordonner, d'avoir une stratégie avec les provinces, ce qui va faire que dans les faits, le gouvernement central va se trouver à aspirer complètement le champ de la main-d'oeuvre. On comprend alors, dans ces conditions, pourquoi il ne veut pas céder la formation professionnelle au Québec.

[Traduction]

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais avant tout préciser que je ne crois pas une seconde que le peuple du Québec, si on lui donne la possibilité de voter sur une question référendaire nette et précise, votera en faveur de la séparation. La députée et moi ne sommes donc pas du tout d'accord là-dessus.

Je veux qu'on en prenne note car je voudrais poser à la députée une question en supposant que son rêve de voir le Québec se réalise ou ne se réalise pas. Il est question d'accorder le même traitement à l'éducation, à l'assurance-maladie et au Régime d'assistance publique du Canada, et de s'en décharger, comme les libéraux tentent de le faire, en retirant 4,5 milliards de dollars. Qu'il soit nécessaire ou non de maintenir le même niveau des services, si on le fait, il faudra inévitablement que les provinces haussent les impôts.

Cette hypothèse simplement mise à part, je voudrais poser une question de principe, étant donné que la députée a soulevé la question des normes nationales. J'ai déjà dit que j'étais catégoriquement opposé à l'idée de la séparation du Québec, mais si elle se réalisait, comment peut-on prétendre que les Québécois seraient en meilleure position puisqu'il n'y aurait absolument


10177

aucune norme nationale ou, en d'autres termes, il n'y aurait aucune compétence conjointe entre le Québec et le Canada?

Ensuite, si, comme je le crois, les Québécois décident qu'il est préférable de rester dans le Canada, la province ainsi que les autres ne seraient-elles pas mieux d'être en mesure de hausser les impôts? En d'autres termes, le gouvernement fédéral transfère la capacité d'imposer les points d'impôt aux provinces. Si ces dernières géraient les programmes, est-ce que cela ne solutionnerait pas le problème du Bloc et du PQ qui cherchent à étendre la compétence provinciale en matière de santé, d'assistance sociale et d'enseignement postsecondaire?

[Français]

Mme Lalonde: Madame la Présidente, si je comprends bien la question de mon collègue, c'est qu'il se demande si au fond, ce qu'on ne veut pas, ce sont des transferts de points d'impôt. C'est la position que l'on a prise et le rapport minoritaire du Comité du développement des ressources humaines fait, en effet, état de revendications de transferts de points d'impôt.

Mais sur la question des normes, il est tout d'abord important d'établir un fait. À travers le Canada, que nous, membres du comité, avons visité, il a été clair partout en dehors du Québec qu'on tenait à des normes nationales fortes, «strong national standards». Par contre, au Québec dans l'ensemble, généralement, avec quelques exceptions, on tient à faire ses propres normes.

(1820)

Le peuple québécois est un peuple, même quand il ne se nomme pas, et à ce moment-là il tient à être celui qui fait ses normes. Et il arrive souvent, d'ailleurs, que les normes au Québec soient plus élevées que celles qu'on constate ailleurs, pour des raisons qu'il ne m'appartient pas d'expliquer, mais c'est un fait. C'est vrai pour les services de garde, c'est vrai pour la loi qu'on a sur les handicapés et je pourrais en nommer comme ça.

Mais, du fait que le Québec est un peuple, un peuple avec des différences régionales, et c'est normal, il tient à définir lui-même ses propres normes. Alors, c'est ce que j'ai à dire là-dessus, parce qu'au fond, d'un point de vue philosophique, l'organisation économique, l'organisation sociale des peuples est différente et on n'a qu'à regarder et qu'à étudier l'ensemble des peuples, et même à un niveau de dépenses sociales équivalent, on fait des choix différents dans les différents peuples, à cause de l'histoire, à cause des priorités qu'on a, justement parce qu'on est différents.

Alors, c'est sur cette base, sans l'avoir exprimé de façon rationnelle, que l'on peut comprendre et défendre l'idée que le peuple québécois tient à ses propres normes.

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je dois vous dire qu'hier, j'ai écouté le discours du ministre des Finances avec intérêt. J'attendais, dans ce discours, clairement des réponses aux nombreux messages que m'ont livrés les citoyens du comté de Saint-Léonard au cours des derniers mois, au cours des dernières semaines.

En effet, dans tous mes déplacements, dans toutes mes rencontres, dans tous mes appels téléphoniques, mes concitoyens m'ont donné à peu près les mêmes conseils. Ils me disaient: «Décidez-vous, faites quelque chose, il en est grand temps.» Ils me disaient: «Mettez de l'ordre dans vos finances, on s'en va à notre perte.» Ils me disaient: «Dégraissez le gouvernement, ça coûte trop cher.» Surtout, ils m'imploraient de ne pas hausser les impôts. Ils me disaient aussi: «Ne touchez pas aux personnes âgées.» Ils me disaient: «Laissez-nous investir dans nos REER, on en a besoin.» Ils me disaient: «Coupez les subventions aux entreprises et encouragez les petites et moyennes entreprises.» Et ils me disaient: «Taxez les grandes corporations et taxez les banques.»

La population de Saint-Léonard est réaliste. Elle est raisonnable et pragmatique. Elle sait que notre avenir dépend des choix que nous faisons aujourd'hui, dans ce Budget que le ministre des Finances nous a présenté hier après-midi. Elle sait aussi qu'il faut prendre le taureau par les cornes et apprendre à vivre selon nos moyens. Elle sait surtout que sans un coup de barre radical cette année, notre niveau de vie et nos perspectives de prospérité sont menacés.

D'entrée, le ministre des Finances a déclaré solennellement: «Nous avons fait notre choix. Aujourd'hui, nous agissons.» Oui. Notre gouvernement a choisi de prendre les mesures budgétaires les plus vigoureuses jamais vues depuis 50 ans, pour maîtriser la bête noire, la bête monstrueuse qu'est devenu notre déficit. Le gouvernement fédéral va se serrer la ceinture et comprimer ses dépenses, toutes ses dépenses, à tous les niveaux.

Toutefois, nous le faisons dans le plus grand respect des valeurs chères aux Canadiens et aux Canadiennes. Nous allons promouvoir la relance de l'emploi et de l'économie. Nous allons protéger les plus vulnérables de notre société. Nous allons couper dans le train de vie de l'État. Nous allons faire tout cela sans hausse d'impôts, sans coupure aux allocations pour personnes âgées et sans taxer les régimes d'épargne-retraite.

(1825)

À Saint-Léonard, comme dans tous les coins du pays, les Canadiens et Canadiennes applaudissent le ministre des Finances aujourd'hui. Il a eu le courage de faire ce que d'autres ont promis pendant presque dix ans. Pendant trop longtemps, on nous a servi des mirages. Ce que la population canadienne veut, ce sont des résultats, des résultats tangibles et mesurables. Et des résultats, nous en avons déjà.

L'an dernier, lors de notre premier Budget, nous avons promis de ramener le déficit sous les 40 milliards de dollars. Une fois tous les calculs faits, notre déficit fondamental devait être autour de 4,4 milliards de moins que prévu. Voilà des résultats tangibles, voilà quelque chose de nouveau. Depuis dix ans, on nous promettait de réduire le déficit et on n'a jamais réussi. Et voilà qu'on réussit et qu'on fait même mieux que ce qu'on avait planifié de faire.

Il y avait longtemps qu'on n'avait pas vu un gouvernement dépasser sa prévision du déficit à la baisse plutôt qu'à la hausse. Nous avons aussi obtenu des résultats très encourageants ici même, à la Chambre des communes. Vous vous souviendrez,


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madame la Présidente, il y a tout juste un an, que le Bureau de la régie interne adoptait un plan de rationalisation des dépenses de la Chambre. Ce plan, que plusieurs ont baptisé, avec une pointe d'ironie, le «plan Gagliano», visait à réduire nos dépenses de cinq millions de dollars par année.

Le grand défi était de réaliser ces économies tout en fournissant aux députés et à leur personnel les outils nécessaires pour remplir adéquatement le mandat que leur ont confié les électeurs. Mais les temps changent, la technologie se développe et en conséquence, les outils de travail des députés, comme de la population en général, doivent s'adapter aux besoins nouveaux.

Par exemple, l'arrivée des télécopieurs et des transmissions électroniques a radicalement modifié le besoin en messagers que nous avions sur la colline parlementaire. Nous avons donc analysé nos besoins méthodiquement. Nous avons proposé de nouvelles avenues et nous avons appliqué nos recommandations avec diligence et discipline.

Nous avons tendu la main à nos employés, leur proposant des conditions généreuses de départ volontaire, dont un grand nombre se sont prévalu. Nous avons redéfini les tâches et mis le reste du personnel à contribution, demandant à chacun de nos employés de faire un peu plus avec un peu moins.

Ce matin, le président du Conseil du Trésor a fait rapport sur les résultats de ce plan de rationalisation. À ce jour, la Chambre des communes a épargné pas moins de 5 719 500 $ comparativement à son budget de l'année dernière. Nous avons donc non seulement atteint notre objectif, mais nous l'avons déjà dépassé.

Mais ce n'est pas tout. L'exercice se poursuit, car la veille, notre Président annonçait une réduction de un million de dollars dans l'administration des Services de restauration de la Chambre. Appliquée sur trois ans, cette initiative nous permettra donc de réduire les dépenses d'opération de la Chambre des communes de près de sept millions de dollars par année.

Voilà des résultats! Ce sont des résultats concrets qui démontrent clairement que nous sommes sérieux quand nous disons que nous allons mettre de l'ordre dans nos affaires.

Nous sommes les premiers à nous serrer la ceinture et nous ne demandons rien aux autres que nous ne sommes pas près à subir nous-mêmes.

(1830)

La recette est simple et connue de tous. D'un bout à l'autre du pays, les Canadiens et Canadiennes bouclent leur budget en surveillant chaque jour leurs dépenses. Le temps est venu pour tous les gouvernement, incluant le nôtre, de faire de même.

Le ministre des Finances a clairement énoncé notre plan global. Pour chaque dollar de revenu supplémentaire, le gouvernement canadien va diminuer ses dépenses de 7 $. Il s'agit là du coup de barre le plus audacieux, le plus rentable jamais vu dans ce pays depuis 50 ans.

Pour assainir de façon durable les finances publiques, nous devons absolument repenser le rôle et la structure de l'État. Nous devons centrer les activités du gouvernement autour des priorités des Canadiens et des Canadiennes. Dans ce Budget, nous ramenons la taille et la structure du gouvernement à un niveau conforme à nos moyens.

Comme l'a si bien dit le ministre des Finances, et je cite: «Notre philosophie est simple. S'il n'est pas nécessaire que le gouvernement fasse quelque chose, il ne devrait pas le faire. Et, à l'avenir, il ne le fera pas.»

Le gouvernement va donc privatiser et commercialiser ses activités lorsque cela est possible et souhaitable. Nous allons progressivement nous départir de nos intérêts dans des sociétés comme Cameco, une entreprise d'uranium, le CN, Petro-Canada, le système de navigation aérienne et le Groupe Communication Canada.

Nous allons réduire de 60 p. 100-je dis bien de 60 p. 100-en trois ans nos dépenses consacrées aux subventions aux entreprises. L'aide à l'industrie que nous allons maintenir sera orientée vers les principaux moteurs de la croissance économique, soit l'expansion du commerce, les sciences et la technologie ainsi que la petite et moyenne entreprise.

Presque chaque fois que je me lève en cette Chambre, je rappelle à mes collègues le rôle principal que jouent les petites et moyennes entreprises dans notre économie.

Je dis toujours avec grande fierté que nos petites et moyennes entreprises sont la principale source de création d'emplois dans notre pays. Elles sont dynamiques, pleines d'enthousiasme et d'innovation. Elles nous aident à sortir plus rapidement des cycles économiques difficiles et elles contribuent largement au développement de nos collectivités. Il est donc prioritaire de leur fournir une aide concrète pour qu'elles puissent survivre et prospérer. Mieux encore, nous devons éliminer les obstacles à leur réussite, car leurs succès sont les nôtres.

L'an dernier, nous avions annoncé notre intention d'examiner l'exonération cumulative de 500 000 $ de gains en capital pour les agriculteurs et les propriétaires de petites entreprises. Nous avons procédé à cet examen et nous en sommes venus à la conclusion que cette exemption doit demeurer.

Je voudrais ouvrir une petite parenthèse à ce sujet. Hier soir, le chef de l'opposition a tenté de semer la peur et la confusion au Québec en reprochant au gouvernement de vouloir étudier certains problèmes auxquels nous devrons faire face au cours des prochaines années.

C'est vrai que le gouvernement veut étudier et discuter avec les provinces des moyens à prendre pour préserver notre régime de pensions de vieillesse, pour moderniser notre régime d'assurance-chômage et pour maintenir nos programmes d'aide aux démunis.

«Quand le gouvernement étudie, c'est toujours pour couper», a déclaré le chef de l'opposition. Je dis non à mon honorable collègue. Attention, il ne faut pas tout généraliser. Il ne faut pas semer la peur et la confusion sans aucune raison valable. Étudier veut dire analyser, examiner. Consulter veut dire chercher des solutions.


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(1835)

Vous en avez la preuve avec l'exemption de 500 000 $ de gains en capital pour les petites entreprises et les agriculteurs.

L'année dernière, on avait dit: « On va l'étudier.» On l'a étudié et puis on dit non, on va le garder. C'est important de le garder. Donc, il ne faut pas faire peur au monde. Ce n'est pas parce que le ministre des Finances a annoncé hier qu'il va étudier le Régime de pensions, qu'on va tout changer et qu'on va enlever les pensions à nos gens.

Ces organismes, comme le Bureau fédéral de développement régional du Québec, ont un rôle important à jouer dans l'expansion économique et la création d'emplois durables. Toutefois, ce n'est pas en faisant des cadeaux aux entreprises que nous atteindrons cet objectif. Tout le monde est d'accord sur ce point. Nous allons donc réduire radicalement nos subventions aux entreprises. Désormais, notre aide prendra principalement la forme de prêts aux entreprises, des prêts remboursables.

Les conditions de remboursement de ces prêts seront adaptées à la promotion de véritables possibilités d'expansion. Ils continueront ainsi d'aider nos PME de façon tangible, tout en rentabilisant l'argent des contribuables.

Enfin, nous sommes déterminés à permettre à nos petites et moyennes entreprises d'avoir accès au financement dont elles ont besoin pour demeurer la source première de création d'emplois au Canada. J'ai souvent répété ma profonde conviction que les banques canadiennes ont une responsabilité particulière dans ce domaine.

Nous avons déjà pris l'initiative de travailler avec les banques afin de corriger les lacunes actuelles. D'ici l'automne, nous allons poursuivre cette opération afin d'élaborer des points de référence applicables au financement des petites entreprises. Là commme ailleurs, nous voulons voir des débouchés concrets. Ce processus sera donc évalué l'année suivante, et nous avons toutes les raisons de croire que cette collaboration débouchera sur des résultats valables pour nos petites entreprises.

Le budget déposé devant vous, hier, par le ministre des Finances marque le début d'une nouvelle ère. Il propose une nouvelle façon de gérer la Confédération canadienne. Il met en évidence une approche plus simple, plus efficace et respectueuse des compétences des gouvernements provinciaux. C'est pour ça que nous pouvons dire, sans l'ombre d'un doute, que ce budget est un exemple du fédéralisme évolutif, dynamique, coopératif et pragmatique qui est le nôtre.

Plus personne ne pourra dire que le gouvernement canadien prône ou propose le statu quo. Désormais, les provinces auront une plus grande marge de manoeuvre et moins de contraintes dans la gestion de leurs compétences. Le Transfert social canadien, qui réunit en un seul transfert global les trois enveloppes distinctes que les provinces recevaient du gouvernement fédéral, facilitera grandement le travail. Cette nouvelle approche allégera les obstacles administratifs pour les provinces, tout en les assurant d'une souplesse maximale dans la conception des programmes adaptés aux besoins de leurs usagers. Les gouvernements provinciaux n'auront plus à se demander si telle ou telle dépense est admissible. Ils seront maîtres de leur budget et maîtres de leurs décisions.

Grâce à cette initiative, la bureaucratie fédérale et celle des provinces seront toutes simplifiées. Nous aurons moins de paperasse, moins de réglementation et plus de résultats. C'est ce que les Canadiens de toutes les régions du pays attendent de leur gouvernement, qu'il soit un gouvernement fédéral ou qu'il soit un gouvernement provincial. J'admets que notre budget est dur. Les coupures annoncées sont sans précédent.

(1840)

Mais nous n'avions plus le choix. Le maintien de notre niveau de vie et l'avenir de nos enfants exigent que le gouvernement prenne des mesures fermes et qu'il les applique avec détermination.

Néanmoins, tous reconnaîtront que le Budget est aussi équitable. Nous avons fait en sorte que l'effort de redressement soit partagé par tous. Je dis que la population de Saint-Léonard comprend cela et la population canadienne aussi. Notre Budget est exigeant. Toutefois, il maintient l'essentiel, il respecte les principes fondamentaux qui animent la population canadienne, soit l'équité entre les individus et les régions. Ces principes sont à la base même de notre fédération et ils font du Canada un des meilleurs pays au monde. Si vous me le permettez, madame la Présidente, j'adresserai quelques mots à mes électeurs de langue anglaise.

[Traduction]

Le budget que le ministre des Finances a déposé hier soir est sans contredit une mesure énergique. Aujourd'hui, nous devons nous demander si nous avions le choix. Il est indiscutable que, ces derniers mois, les marchés financiers et nos propres institutions financières ont tenté de nous faire comprendre qu'il fallait mettre de l'ordre dans nos finances.

Le ministre des Finances, qui devait trouver l'équilibre entre rétablir la confiance dans le marché et éviter les compressions trop radicales, a pu faire en sorte que notre croissance économique se poursuive. En même temps, il y avait les marchés financiers qui demandaient un engagement sérieux de notre gouvernement à remettre de l'ordre dans ses finances.

Le ministre des Finances a fait un excellent travail en déposant un budget très équilibré. Ce matin, les marchés financiers, les médias et tous les gens ont réagi. Je suis député fédéral depuis plus de dix ans, et c'est la première fois que, le lendemain du dépôt du budget, je vois autant d'annonces et de commentaires positifs dans les médias et ailleurs. Nous devons féliciter notre ministre des Finances et notre gouvernement de leur excellent travail.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, j'aimerais pouvoir dire qu'après avoir entendu les paroles rassurantes du ministre, je vais bien dormir ce soir. J'aimerais pouvoir le dire, mais c'est impossible.

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Dans son discours, le ministre a parlé d'illusions. Il dit que le gouvernement actuel n'essaie pas de nous bercer d'illusions. Depuis 25 ans, on nous a bercés d'illusions et servi de beaux discours, on nous a dit qu'on s'attaquerait rigoureusement au déficit, qu'on allait vraiment s'employer à résoudre le problème cette année, l'année prochaine ou l'autre après.

Ce que le ministre oublie, c'est qu'il était beaucoup plus facile pour ses prédécesseurs de nous bercer d'illusions que ce ne l'est pour lui. Les anciens ministres des Finances pouvaient faire des compressions illusoires et nous les faire avaler, mais le ministre actuel doit pratiquer de véritables compressions. Le problème, c'est que ces compressions restent illusoires parce qu'elles ne sont pas suffisamment importantes.

Tout ce qui se produit en l'occurrence, c'est que le gouvernement comprime les dépenses qu'il prévoit pour les trois prochaines années juste assez pour qu'elles équivalent à l'intérêt supplémentaire qu'il devra payer sur ce qu'il doit déjà. Le gouvernement ne bouge pas.

Il me fait penser à un marin dont le navire a sombré et qui fait frénétiquement du surplace. Il voit un canot de sauvetage à une centaine de verges de lui et au lieu d'essayer de l'atteindre, il se dit que c'est trop difficile et qu'il va continuer de faire du surplace. C'est ce qu'il fait et il finit par se noyer. Le gouvernement marche sur l'eau, et le Canada s'enfonce dans ses dettes.

(1845)

Le ministre peut-il nous dire quel plan d'urgence son gouvernement a l'intention de mettre en oeuvre si jamais le service de la dette devenait si lourd qu'il ne restait plus d'argent pour les programmes sociaux ou même les services gouvernementaux les plus élémentaires? Car c'est là où nous nous dirigeons.

Nous nous dirigeons vers un point où il n'y aura plus de filet de sécurité sociale, plus de pensions, plus d'aide sociale, plus d'assurance-chômage. Il ne restera plus rien si tout s'écroule comme un château de cartes. Quel plan d'urgence le gouvernement a-t-il conçu?

M. Gagliano: Madame la Présidente, je voudrais d'abord remercier le député de m'avoir donné l'occasion d'exprimer mon point de vue à ce sujet.

Je comprends le député et j'ai les mêmes insatisfactions que lui. Je suis à la Chambre depuis 10 ans. Tous les ans, le ministre des Finances prenait la parole et promettait de réduire le déficit. Mais il ne l'a jamais fait. Pour la première fois depuis 10 ou 11 ans, un ministre des Finances s'est levé à la Chambre l'an dernier et a prédit un déficit.

L'exercice prendra fin le 31 mars, et nous sommes le 28 février, un mois avant la fin de l'exercice et nous prévoyons, après avoir tenu compte de tous les facteurs, que le déficit sera diminué de 4 milliards de dollars de plus que prévu. Tel est l'engagement que nous avons pris envers les Canadiens au cours des dernières élections et que le premier ministre a pris quand il a été élu. Nos prévisions vont se réaliser parce que nous avons pris cet engagement, et nous voulons faire en sorte que les Canadiens le sachent.

C'est pourquoi ce matin les marchés financiers ainsi que tous les analystes financiers et économiques étaient très satisfaits de notre budget. Ils se sont rendu compte que nous sommes sérieux quand nous disons que nous allons ramener le déficit à 24 milliards de dollars l'an prochain, ce à quoi nous nous sommes engagés dans le livre rouge, soit 3 p. 100 du PIB. Par conséquent, il est important pour les marchés financiers, pour notre système financier et économique que, lorsque nous nous fixons des objectifs, que nous établissons des prévisions, que nous faisons des estimations, il importe, dis-je, que nous sachions de quoi il retourne et que nous nous assurions d'atteindre nos objectifs.

C'est la première chose que le ministre des Finances a faite dans son premier budget et qu'il continue de faire dans son deuxième, soit maintenir l'objectif de 3 p. 100 et même aller un peu plus loin.

Un jour viendra où nous n'aurons plus de déficit et où nous pourrons commencer à éponger la dette nationale. Et ce jour viendra, durant le mandat de notre gouvernement et de l'actuel ministre des Finances.

En outre, le député ne devrait pas oublier qu'au déficit financier s'ajoute un déficit humain. Le gouvernement n'est pas une entreprise qui peut fermer ses portes en disant: «Tant pis!» Nous sommes un gouvernement, nous devons gérer un pays. Au-delà du déficit financier, nous devons tenir compte des êtres humains.

Voilà ce que font le ministre des Finances et le gouvernement. Ils veulent respecter l'engagement qu'ils ont pris de réduire le déficit pour parvenir à régler le problème de la dette, pour mener le pays vers la prospérité économique, pour pouvoir aider les plus démunis et créer des emplois pour les jeunes afin qu'ils aient un avenir.

Aux yeux du Parti réformiste, tout est noir et la fin du monde est pour bientôt.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais dire au secrétaire d'État que j'ai remarqué, à la page 14 du document intitulé Budget en bref et qui a été déposé hier par le gouvernement, la citation suivante: «Notre gouvernement est absolument déterminé à offrir un système de protection équitable et soutenable à nos aînés.»

Je me demande s'il pourrait nous aider à comprendre quelque chose. Vu que le gouvernement vient de faire de véritables compressions de 10 milliards de dollars et vu que le paiement des intérêts sur la dette a augmenté de 10 milliards de dollars depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement, nous faisons du surplace. Vu que les frais d'intérêts augmentent à un taux de 17,3 p. 100, vu que les gouvernements ont laissé le Régime de pensions du Canada atteindre un tel état de sous-financement qu'il manque maintenant des fonds à hauteur de quelque 487,5 milliards de dollars et vu que ceci s'ajoute aux 545 milliards de dollars de notre dette nationale, le total atteint plus d'un billion de dollars.

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Je me demande si le secrétaire d'État ne pense pas, comme moi, que les mots relevés dans le Budget en bref, ceux qui promettent, comme l'a affirmé le ministre des Finances, que le gouvernement subviendra aux besoins des aînés, advienne que pourra, ne sont pas justement que des mots, que des belles paroles.

Si nous sommes aussi rapidement entraînés dans le trou par les frais d'intérêts supplémentaires, c'est-à-dire l'intérêt de la dette que nous avons déjà contractée, si nous ne rebroussons pas chemin aussi rapidement, quoi qu'en dise le gouvernement, nous ne pourrons plus nous occuper des personnes âgées.

M. Gagliano: Madame la Présidente, permettez-moi d'assurer au député et à tous les Canadiens qui nous regardent en ce moment qu'il y aura bel et bien de l'argent. Le gouvernement du Canada sera en mesure de respecter ses engagements et de verser une retraite aux personnes âgées.

La différence entre eux et nous, c'est que les réformistes voient tout en noir. C'est la fin du monde! Le député a reconnu que nous avions effectué de vraies compressions. Notre budget est équilibré dans la mesure où nous avons effectué les compressions qui s'imposaient et pris des mesures visant à favoriser la croissance économique. Le déficit sera résorbé. On réduira le déficit en créant des emplois.

Ce que le Parti réformiste n'arrive pas à comprendre, c'est que, grâce à la création d'emplois, les gens travailleront, paieront des impôts et augmenteront les revenus de l'État, ce qui fera que le gouvernement pourra payer la dette.

Le problème que nous avons connu ces dix dernières années, c'est que le précédent gouvernement se fixait des objectifs qui n'étaient jamais atteints et que les dépenses étaient supérieures aux recettes. Pour la première fois de notre histoire, notre budget de fonctionnement est excédentaire. Voilà ce que le Parti réformiste ne veut pas comprendre.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 18 h 52 et qu'il n'y a aucun député pour prendre part aux délibérations sur la motion d'ajournement, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 52.)