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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 24 février 1994

LA CHAMBRE DES COMMUNES

AFFAIRES COURANTES

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1994-1995

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1994-1995

    M. Speaker (Lethbridge) 1759

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET QUESTIONS JURIDIQUES

FINANCES

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1994-1995

RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS

    Proposition et adoption des motions 1761

PÉTITIONS

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

LA CHILLIWACK

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion sur le budget, del'amendement et du sous-amendement 1762
    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 1766
    M. Bernier (Gaspé) 1771
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1782
    M. Bernier (Gaspé) 1783
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 1785
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 1792

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

LE SCOUTISME

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

LA VIOLENCE ET LES MAUVAIS TRAITEMENTS

LE CRÉDIT D'IMPÔT POUR PERSONNES ÂGÉES

L'ESTONIE

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

LES AFFAIRES INDIENNES

LES PRIX AUX MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ NOIRE

LA POLITIQUE DE DÉFENSE

LE BUREAU MÉTÉOROLOGIQUE DE SAINT-HUBERT

LES AFFAIRES INDIENNES

LES ANCIENS COMBATTANTS

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

L'EMPLOI

QUESTIONS ORALES

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1796
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1796
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1796
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1797
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1797

L'EMPLOI

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1797
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1797
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1798

LE BUDGET

    M. Martin (LaSalle-Émard) 1798
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1798
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1799
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1799
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1799
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1799
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1799
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1799

LE GOUVERNEUR GÉNÉRAL

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1800
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1800

LE BUDGET

    Mme Gagnon (Québec) 1800
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1800
    Mme Gagnon (Québec) 1800
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1800

LA DÉFENSE NATIONALE

LES AFFAIRES INDIENNES

LE LOGEMENT SOCIAL

LA JUSTICE

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1803
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1803
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1803
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1803

LES PÊCHES

LA FONCTION PUBLIQUE

RECOURS AU RÈGLEMENT

RETRAIT DE CERTAINS PROPOS

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1804

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

    M. Speaker (Lethbridge) 1804
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1804

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Adoption des motions 1805

LE DÉCÈS DE L'HON. DOUGLAS CHARLES NEIL

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1805

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion sur le budget, del'amendement et du sous-amendement. 1806
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1806
    M. Tremblay (Rosemont) 1809
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1811
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1827
    Report du vote sur le sous-amendement 1837

MOTION D'AJOURNEMENT

LES AFFAIRES INDIENNES

L'ÉDITION


1757


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 24 février 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

LA CHAMBRE DES COMMUNES

Le Président: Chers collègues, j'ai l'honneur de déposer le plan de dépenses de la Chambre des communes relatif au budget des dépenses de 1994-1995.

_____________________________________________

AFFAIRES COURANTES

(1005)

[Traduction]

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1994-1995

Le président du Conseil du Trésor présente un message dont le Président donne lecture à la Chambre et par lequel Son Excellence le gouverneur général transmet le budget des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 1995.

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, je soumets la partie II du budget des dépenses.

Je voudrais également déposer, à l'appui des prévisions budgétaires, la partie I du budget des dépenses, le plan de dépenses du gouvernement. En outre, je vais remettre au greffier de la Chambre, au nom de mes collègues, la partie III du budget des dépenses, qui comprend les plans de dépenses de 76 ministères.

Ces documents seront distribués aux membres des comités permanents afin de les aider à étudier les autorisations de dépenser demandées à la partie II du budget des dépenses.

* * *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à plusieurs pétitions.

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1994-1995

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, je présente aujourd'hui le Budget des dépenses principal de 1994-1995 du gouvernement du Canada.

[Français]

J'ai l'honneur de déposer le premier budget des dépenses de cette 35e Législature contenant les projets de dépenses du gouvernement, ministère par ministère, programme par programme, pour le prochain exercice financier.

[Traduction]

Je suis fier de ces prévisions budgétaires, car elles reflètent les engagements que nous avons pris à l'égard des Canadiens au cours de la dernière campagne électorale, à l'automne. Elles montrent que le gouvernement entend aborder les problèmes de façon équilibrée en soutenant la croissance et la création d'emplois tout en prenant des mesures pour réduire le déficit.

Le Budget des dépenses principal explique en détail les dépenses prévues de 160,7 milliards de dollars au cours du prochain exercice. Ce chiffre comprend 112,1 milliard de dollars en dépenses législatives découlant de lois que le Parlement a déjà adoptées et 48,6 milliards de dollars pour lesquels nous cherchons à obtenir l'autorisation du Parlement.

(1010)

Le Budget des dépenses principal constitue la première étape pour mener à bien le plan de dépenses qui s'élève à 163,6 milliards de dollars et qui figure dans le budget présenté il y a deux jours par mon collègue, le ministre des Finances.

Cependant, contrairement au budget du ministre, le Budget des dépenses principal ne renferme pas des réserves et ne prévoit pas les répercussions des mesures législatives proposées. Autrement dit, si une mesure législative n'a pas encore été adoptée, les sommes qui y sont rattachées ne sont pas précisées dans le Budget des dépenses principal.

L'accroissement des dépenses résulte surtout de la hausse des sommes consacrées au service de la dette. Les dépenses de programmes, qui correspondent à nos dépenses totales moins les frais de la dette publique, n'ont presque pas bougé, n'augmentant que de 0,7 p. 100. Dans le cas de la plupart des programmes, les dépenses sont à la baisse.

La Sécurité de la vieillesse et les programmes destinés aux autochtones représentent une large part de l'augmentation des dépenses de programmes. Cela découle d'un accroissement de la population dans ces deux catégories.

Comme le ministre des Finances l'a précisé clairement il y a deux jours, il s'agit là d'un budget qui met en marche la réforme


1758

la plus globale de la politique de dépenses fédérales depuis dix ans. Le Budget présenté mardi et le budget des dépenses principal que je dépose aujourd'hui fournissent un cadre pour l'avenir établi par un gouvernement tourné vers l'avenir.

Notre politique repose notamment sur le principe selon lequel notre gouvernement prend toutes les mesures qui s'imposent et ce, en ayant le sens de ses responsabilités financières.

Dans le Budget des dépenses principal, nous établissons un plan d'action pour chaque élément du programme exposé dans Pour la création d'emplois-Pour la relance économique, mieux connu sous le nom de livre rouge. Les Canadiens nous ont dit que la création d'emplois revêtait beaucoup d'importance pour eux et, dans le livre rouge, nous avons précisé qu'un programme national d'infrastructure serait un élément clé de nos initiatives en la matière.

Je suis fier de dire que depuis notre entrée en fonctions nous avons donné suite à cet engagement en signant des ententes avec chaque province. D'autre part, nous demandons au Parlement, dans le Budget des dépenses principal, d'approuver des crédits de 700 millions de dollars pour la mise en oeuvre du programme au cours du prochain exercice financier.

Le livre rouge annonçait également de nouvelles réductions de 400 millions de dollars des budgets de fonctionnement en 1994-1995, ces compressions passant à 620 millions au cours des deux années suivantes. Le Budget des dépenses principal donne suite à cet engagement. Nous espérons réaliser une bonne partie de ces économies par une amélioration de l'efficience, mais nous sommes conscients qu'il nous faudra peut-être aussi redéfinir les priorités.

La plus grande partie des réductions de 400 millions de dollars touchera les services professionnels contractuels; nous avons d'ailleurs l'intention de demander prochainement au Parlement de revoir toute la question des marchés de services.

Ces mesures se sont cependant révélées insuffisantes. Il nous fallait, pour régler le problème budgétaire, imposer d'autres réductions aux budgets de fonctionnement. Nous avons examiné les diverses solutions possibles; nous avons tenu compte de ce que font les autres gouvernements et le secteur privé; nous avons consulté les syndicats de la fonction publique et, en fin de compte, nous avons pris les mesures qui nous semblaient les plus avantageuses pour les Canadiens, pour les employés de la fonction publique et pour l'économie.

Comme l'indiquait le ministre des Finances dans le discours du budget, les salaires des employés de la fonction publique fédérale et les hausses salariales à l'intérieur d'un même niveau sont gelés pour deux années à compter de 1994-1995. Nous avons cependant prévu étudier avec les employés et leurs agents négociateurs des moyens d'accroître l'efficience des dépenses publiques, ce qui permettrait d'écourter la période de gel.

Dans les circonstances, cette ligne de conduite nous apparaît la meilleure car elle permet de mieux protéger les emplois tout en nous laissant le plus de marge possible pour fournir aux Canadiens des services de qualité au moindre coût possible.

La réduction du budget de la défense reflète la réalité actuelle. L'ancienne structure correspondait à des priorités du passé. L'évolution de l'ordre mondial nous a obligés à adapter nos forces armées à nos besoins futurs.

Les réductions du financement de l'aide internationale sont à la mesure de notre capacité financière plutôt que des besoins réels dans ce domaine. Le Budget des dépenses principal prévoit néanmoins un montant de 2,6 milliards de dollars au chapitre de l'aide internationale.

(1015)

Les Canadiens nous ont fait savoir que les subventions aux entreprises n'étaient pas la mesure la plus rentable du point de vue des contribuables. C'est pourquoi nous avons réduit, comme l'annonçait le livre rouge, les subventions aux petites et moyennes entreprises qui ne se sont pas révélées productives.

Les Canadiens ont clairement exprimé leur désir d'une réforme du programme d'assurance-chômage parce qu'il excédait les moyens des contribuables. Les charges sociales nécessaires pour assurer les prestations affectaient notre position concurrentielle vis-à-vis de nos partenaires commerciaux. Nous devions donc réagir, et c'est ce que nous avons fait.

Le Budget des dépenses principal réserve 16 p. 100 des dépenses totales aux paiements aux autres niveaux de gouvernement et 25 p. 100 aux paiements aux particuliers, notamment au chapitre de la sécurité de la vieillesse et de l'assurance-chômage. Le gouvernement affectera environ 62 milliards de dollars aux programmes sociaux et 4,8 milliards aux programmes de ressources naturelles; 3,9 milliards aux programmes de développement industriel, régional et scientifique; 2,8 milliards au chapitre du transport. Environ 3 milliards seront affectés à la culture et au patrimoine; 3,3 milliards aux programmes judiciaires et juridiques; 6,4 milliards aux opérations gouvernementales générales.

Mon collègue, le ministre des Finances, a indiqué clairement dans son discours que ces mesures ne sont que le début de la réforme. Il a annoncé que nous verrions au cours de la prochaine année à améliorer l'efficience et l'efficacité dans l'administration des services.

Les orientations exposées dans le discours du budget entraîneront une réduction réelle des dépenses d'ici à 1995-1996. Même à l'heure actuelle, comme je le disais plus tôt, les dépenses demeurent à toutes fins utiles au même niveau que l'an dernier.

Le déficit annuel a amorcé une diminution importante, et notre politique budgétaire vise un déficit qui n'excède pas 3 p. 100 de la production totale de biens et services au Canada au cours d'une année.

Voilà la marque d'un gouvernement qui écoute l'électorat, fait preuve de leadership, prend des mesures décisives, consulte ses partenaires et définit clairement la voie de l'avenir pour tous les Canadiens.

[Français]

M. Richard Bélisle (La Prairie): Madame la Présidente, ce qui me frappe, à la lecture du Budget des dépenses 1994-1995 présenté par le président du Conseil du Trésor, c'est que le Budget 1994-1995 du gouvernement par rapport au Budget 1993-1994 est que les paiements de transfert diminuent de 0,5 p. 100 et les autres dépenses de programme de 3,2 p. 100, tandis qu'en même temps les frais de la dette publique augmentent, pour leur part, de 3 p. 100. Cela signifie qu'on applique un début de compression budgétaire pour soutenir l'accroissement du service de la dette dans les faits.


1759

La gestion budgétaire du gouvernement au cours des prochaines années devra donc s'attaquer à comprimer les paiements aux particuliers et les paiements de transfert aux provinces. Mais évidemment, plus on retarde à comprimer ces dépenses, plus la dette s'accroît, comme le démontre le Budget, et plus on devra encore réduire les dépenses dans l'avenir, toujours pour soutenir un service de la dette qui sera devenu incontrôlable. Ce point de rupture approche à grands pas.

Plus la dette augmente et plus on comprime les paiements aux particuliers, plus le fossé entre les riches et les démunis s'accroît. L'écart entre les différentes couches de la société n'a jamais été si grand; il va en s'accroissant. Et l'ironie de la situation est que toute l'accumulation de cette dette au cours des 20 dernières années visait à mieux répartir la richesse à travers le pays.

Pour soutenir le service de la dette en transférant des dizaines de milliards de dollars des contribuables aux investisseurs, on creusera plus que jamais le fossé entre les riches, la classe moyenne et les plus démunis. Est-ce, finalement, l'échec du modèle canadien de la société juste, pensée à une autre époque?

Les dépenses budgétaires prévues sont de 163,6 milliards, soit une augmentation de 2,1 p. 100. On nous dit que plus de 75 p. 100 de cette hausse est imputable aux frais de la dette publique, soit environ 1,6 p. 100. On nous dit que plus de 75 p. 100 de cette hausse est imputable aux frais de la dette publique, soit environ 1,6 p. 100, et cet effet de levier de la dette sur le budget des dépenses prévues ira en s'accentuant avec les années, car le gouvernement n'a pas encore assez réduit ses dépenses, tel que nous le démontre l'exposé du ministre ce matin.

(1020)

Les frais de la dette publique sont de 41 milliards par rapport à 38,5 milliards l'année dernière. Les dépenses de programmes prévues sont de 122,6 milliards par rapport à 121,8 milliards l'année passée, soit une variation de seulement 0,7 p. 100, alors que les frais de la dette varient de 6,5 p. 100 en hausse par rapport à l'année dernière.

Les mesures de compression des dépenses de fonctionnement, soit les budgets des ministères, sont de 413 millions pour cette année, sur des compressions totales de 2,1 milliards. Les compressions de budgets des ministères ne représentent donc en fait que 19 p. 100 des compressions totales. La diminution de l'assurance-chômage, pour sa part, qui est de 725 millions représente 33 p. 100 de ces mêmes compressions. Les économies en subventions aux entreprises sont pour leur part de 117 millions, soit 5,3 p. 100 de l'ensemble de ces mêmes compressions. On voit donc, madame la Présidente, les priorités de ce gouvernement. Il va chercher chez les chômeurs les coupures qu'il est incapable d'effectuer dans l'appareil gouvernemental.

Les compressions dans les ministères représentent moins de 2 p. 100 des dépenses de fonctionnement du gouvernement, dont une partie importante, 19 p. 100, provient de la défense. Donc, l'exercice rigoureux d'examen, poste budgétaire par poste budgétaire, qui avait été demandé par le Bloc québécois, n'a pas été effectué par le gouvernement.

Pourtant, il y a du gras et du gaspillage dans l'appareil gouvernemental. Le vérificateur général estime à plusieurs milliards annuellement les économies potentielles que l'on pourrait faire si l'on mettait fin à ce gaspillage. Quatre cents millions de compression, qui représentent moins de 2 p. 100 des dépenses de fonctionnement, c'est nettement insuffisant, alors que les frais de la dette augmentent au même moment, durant la même période, de 2,5 milliards.

Le gouvernement passe à côté de la nécessaire réduction des dépenses. Seule une réduction des dépenses, notamment par l'élimination du gaspillage et des mauvaises méthodes de gestion, peut à long terme réduire le fardeau fiscal de la classe moyenne qui a provoqué la montée de l'économie souterraine, comme on a eu l'occasion de le voir amplement au cours des derniers mois.

Malgré les prétendues coupures des dépenses annoncées à grand renfort de publicité, les dépenses de programmes du gouvernement continueront d'augmenter cette année de 800 millions. Cette somme de 800 millions correspond aux programmes statutaires comme la péréquation.

Au lieu de s'acharner sur les chômeurs et les personnes âgées, à qui on a réduit le crédit d'impôt en raison de l'âge, le gouvernement aurait dû d'abord agir dès maintenant pour dégraisser l'appareil gouvernemental, notamment en s'attaquant aux multiples dédoublements qui coûtent annuellement de 2 à 3 milliards. Ceci représenterait près de huit fois les compressions décrétées dans le plan de dépenses de l'actuel gouvernement.

Deuxièmement, réduire davantage les dépenses de la défense. Douze p. 100 de coupures sont prévues sur cinq ans, alors que le Bloc québécois demande des réductions de 25 p. 100. Le Collège militaire royal de Saint-Jean ne devrait pas être fermé, selon nous, tant que le Québec n'aura pas sa juste part des dépenses du ministère de la Défense sur son territoire, ce qui devrait correspondre au pro rata de sa population au Canada. Cette fermeture est aberrante, quand le collège vient de faire l'objet de rénovations de plusieurs millions.

En guise de conclusion, j'aimerais ajouter que le gouvernement aurait dû réduire davantage ses dépenses et investir la moitié de cette marge de manoeuvre dans la création d'emplois et l'autre moitié dans la réduction de la dette. La majorité des analystes s'entendent pour dire que le programme des infrastructures est nettement insuffisant, car il ne fait que créer 45 000 emplois temporaires et constitue finalement le programme de relance d'emplois dont le gouvernement nous a parlé à grand renfort de publicité.

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, je suis très heureux de pouvoir parler de la résolution dont nous sommes saisis en réponse au dépôt du budget. Quand on examine l'exposé d'aujourd'hui, ainsi que le budget qui nous a été présenté le 22 février, de très vives préoccupations surgissent. Je pense que ces préoccupations rejoignent les attitudes des Canadiens.

La première de toutes est une constatation: notre endettement nous accule à la ruine. En effet, nous courrons à la ruine, c'est l'évidence même. Notre deuxième préoccupation est le fait que, à cette dette énorme, s'ajoute la dette annuelle, ou le déficit, qui ne cesse de s'accumuler au-dessus de nos têtes, que nous soyons contribuables ou députés. Il nous faut nous attaquer à ce problè-


1760

me. C'est absolument fondamental! Je ne crois pas que les Canadiens puissent encore se permettre d'accumuler une dette supplémentaire de 100 milliards de dollars au cours des trois années qui viennent.

(1025)

Or, les prévisions budgétaires pour l'exercice 1994-1995 s'orientent précisément dans cette direction. Elles nous placent devant un déficit de 39,7 milliards de dollars. Selon le gouvernement, c'est le mieux qu'il pouvait faire dans son processus budgétaire. Il ne pouvait pas faire mieux? Chose sûre, c'est insuffisant. Les parlementaires doivent se pencher sur le problème et lui trouver des solutions.

Le gouvernement a voulu nous convaincre qu'il possédait déjà un plan de réduction des dépenses. Il va faire faire des études sur les compressions à effectuer. D'après mon expérience, chaque fois qu'un groupe de législateurs et de simples citoyens se réunit, il finit par se présenter devant cette assemblée avec des recommandations qui se traduisent plus souvent qu'autrement par une demande de crédits supplémentaires.

Je ne crois pas qu'on ait confié un mandat de ce genre aux comités, dont celui chargé d'étudier les programmes sociaux. Le ministre du Développement des ressources humaines a dit qu'il voulait réduire les coûts de nos programmes sociaux et mieux cibler les services. À ce que je sache, le mandat ne précise pas cela, alors que cela aurait dû y figurer.

Le gouvernement ne fait que maintenir la tendance à la dépense. La seule mesure visant à réduire le déficit que comporte ce budget consiste à tirer parti de la croissance des recettes. On n'y perçoit pas une volonté délibérée de mettre l'accent sur la réduction des dépenses publiques.

Il n'y a rien dans ce budget des dépenses dont nous débattons aujourd'hui qui montre vraiment que le gouvernement a coupé dans le gras, réduit les recoupements, résolu l'inefficience et comprimé l'enflure dont il s'est affligé entre 1975 et 1982. Il n'y a rien dans ce budget des dépenses qui représente vraiment un changement important par rapport aux tendances qu'il a acquises à cette époque. Le gouvernement continue sur sa lancée.

Sur la question des compressions, premièrement, le gouvernement prétend qu'il a fortement comprimé certaines dépenses et qu'il exercera d'autres coupes importantes au cours des trois prochaines années. Selon les projections, on réduirait les dépenses de 11 milliards de dollars.

Le budget des dépenses dont nous sommes saisis prévoit des compressions de 3,7 milliards de dollars. D'ailleurs, en examinant bien le plan budgétaire qui nous a été présenté le 22 février, on constate que 25 p. 100 de ces compressions découlent des politiques conservatrices et non d'initiatives libérales. C'est ma première observation. Par conséquent, comment le gouvernement peut-il se targuer d'avoir sabré dans les prévisions de dépenses?

Deuxièmement, parlons-en du budget des dépenses de 1994-1995. Les compressions représentent 3,7 milliards de dollars, ce qui n'est pas beaucoup pour un budget majeur de 163 milliards de dollars. Les nouvelles initiatives annoncées représentant 2,2 milliards, ce qui nous laisse 1,5 milliard à appliquer au déficit, que l'on ramène ainsi à 39,7 milliards de dollars. On n'a pas fait grand-chose. Pourquoi le gouvernement n'applique-t-il pas entièrement le résultat de ces compressions, soit 3,7 milliards, à la réduction du déficit, afin de réaliser quelque chose d'un peu plus concret?

Bien des fonds ont été réaffectés de façon interne, sans qu'on ait consulté le Parlement à cet égard. En tant que parlementaires, nous devrions avoir l'occasion de poser des questions. Par exemple, quand un programme est assujetti à des compressions, nous devrions pouvoir nous informer sur ce qui sera retranché au juste. Quand un programme fait l'objet d'une réallocation des ressources, nous devrions avoir l'occasion de demander combien coûte la nouvelle priorité, si c'est nécessaire, d'où proviennent les fonds et s'il n'est pas possible de réduire les coûts. Nous n'avons pas vraiment eu l'occasion de faire tout cela dans ce cas-ci. Nous l'aurons peut-être dans le cas du budget des dépenses.

(1030)

Dans le peu de temps qu'il me reste, je voudrais porter un dernier point à l'attention des ministériels. J'espère que le gouvernement s'engagera réellement à donner suite aux paroles du ministre des Finances, qui a dit hier que des comités pourront se pencher sur ces questions et faire des recommandations; j'espère aussi que le gouvernement tiendra compte de ces recommandations et les appliquera. Je voudrais que ce soit un changement marquant de cette 35e législature. Si le gouvernement montre une telle ouverture d'esprit, nous aurons une législature formidable et vraiment démocratique.

Je recommande au gouvernement d'éviter de se faire du capital politique et de mettre un terme à cette façon de procéder où un comité recommande des décisions peu pratiques. Les rapports et les recommandations des comités viennent au premier rang quand le processus d'étude du budget des dépenses est efficace.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET QUESTIONS JURIDIQUES

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité permanent de la justice et des questions juridiques. Conformément à l'ordre de renvoi adopté le vendredi 4 février 1994, votre comité a étudié le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, et votre comité a convenu d'en faire rapport, sans propositions d'amendement.

FINANCES

M. Jim Peterson (Willowdale): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui le deuxième rapport du Comité permanent des finances, conformément à l'ordre de renvoi adopté le mercredi 9 février 1994. Votre comité a examiné le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et sur les contributions fédérales en matière d'enseignement postsecondaire et de santé, et a convenu d'en faire rapport sans propositions d'amendement.

J'ajoute qu'il s'agit ici du deuxième rapport du Comité permanent des finances. Je tiens à remercier tous les membres du comité pour les efforts qu'ils ont déployés dans un esprit de saine collaboration afin de présenter ce deuxième rapport en dépit de tous les autres travaux que le comité a à faire. J'en remercie tous les membres.


1761

LE BUDGET DES DÉPENSES PRINCIPAL DE 1994-1995

RENVOI AUX COMITÉS PERMANENTS

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Madame la Présidente, aux termes des paragraphes 81(4) et 81(6) du Règlement, je propose:

Que les prévisions du budget principal des dépenses pour 1994-1995, qui a été déposé aujourd'hui, soient renvoyées aux divers comités permanents comme il suit:
Comme la liste en est plutôt longue, je demande qu'elle soit imprimée dans le hansard sans être lue.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y consent-on?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: La liste suit.]

Le Comité permanent des affaires indiennes et du Nord canadien
Affaires indiennes et Nord canadien, crédits 1, 5, 10, 15, L20, L25, 30, 35, 40, 45 et 50
Le Comité permanent de l'agriculture et de l'agro-alimentaire
Agriculture et Agro-alimentaire, crédits 1,5,10,15 et 20
Le Comité permanent du patrimoine canadien
Patrimoine canadien, crédits 1, 5, 10, 15, L20, L25, 30, 35, 40, 45, 50, 55, 60, 65, 70, 75, 80, 85, 90, 95, 100, 105, 110, 115, 120, 125, 130, 135, 140 et 150
Le Comité permanent des services gouvernementaux
Patrimoine canadien, crédit 145
Finances, crédit 55
Gouverneur général, crédit 1
Parlement, crédit 1
Conseil privé, crédits 1, 5, 10 et 30
Travaux publics et Services gouvernementaux, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35 et 40
Conseil du Trésor, crédits 1, 5 et 10
Le Comité permanent des ressources naturelles
Ressources naturelles, crédits 1, 5, 10, L15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50
Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable
Environnement, crédits 1, 5 et 10
Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
Affaires étrangères, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, L30, L35, 40, 45 et 50
Travaux publics et Services gouvernementaux, crédit 45
Le Comité permanent des finances
Finances, crédits 1, L5, L10, L15, 20, L25, 35 et 50
Revenu national, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Le Comité permanent des pêches et des océans
Pêches et Océans, crédits 1, 5 et 10
Le Comité permanent de la santé
Santé, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25 et 30
Le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées
Justice, crédit 15
Le Comité permanent de l'industrie
Agence de promotion économique du Canada atlantique, crédits 1, 5 et 10
Finances, crédits 40 et 45
Industrie, crédits 1, 5, 10, L15, L20, 25, 30, 35, 40, 45, 50, 55, 60, 65, 70, 75, 80, 85, 90, 95, 100, 105 et 110
Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, crédits 1 et 5
Le Comité permanent de la justice et des questions juridiques
Justice, crédits 1, 5, 10, 20, 25, 30, 35, 40 et 45
Conseil privé, crédit 35
Solliciteur général, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45 et 50
Le Comité permanent du développement des ressources humaines
Développement des ressources humaines, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40 et 45
Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
Parlement, crédit 5
Conseil privé, crédit 20
Le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants
Défense nationale, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Anciens combattants, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Le Comité permanent des comptes publics
Finances, crédit 30
Le Comité permanent des transports
Conseil privé, crédit 15
Transports, crédits 1, 5, 10, 15, 20, 25, 30, 35, 40, 45, 50, 55 et 60
Le Comité mixte des langues officielles
Conseil privé, crédit 25
Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
Citoyenneté et Immigration, crédits 1, 5, 10, 15 et 20
Le Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement
Parlement, crédit 10
(La motion est adoptée.)

1762

(1035)

PÉTITIONS

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Grant Hill (Macleod): Madame la Présidente, je suis heureux de présenter à la Chambre une pétition signée par des citoyens de Glenwood, en Alberta, dans ma circonscription. Cette pétition a trait aux bureaux de poste, et c'est un honneur pour moi de la présenter au nom de mes électeurs.

LA CHILLIWACK

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Madame la Présidente, j'ai le devoir et l'honneur de présenter une pétition certifiée correcte par le greffier des pétitions. Elle est signée par plus de 400 citoyens qui s'intéressent au sort de la magnifique vallée de la Chilliwack, dans ma circonscription, Fraser Valley-Est.

Les pétitionnaires soutiennent que les inondations et les dommages qu'elles causent aux routes, aux lignes de haute tension, aux résidences et aux entreprises deviennent de plus en plus fréquents depuis les inondations désastreuses de 1989 et de 1990. Chaque nouvelle inondation menace la sécurité du public, fait perdre de la valeur aux propriétés et complique les choses au moment de contracter des emprunts hypothécaires et de souscrire des assurances habitation.

Les pétitionnaires prient donc humblement le Parlement d'inclure la mise en oeuvre du plan de gestion des risques dans la vallée de la Chilliwack dans le programme d'infrastructure du gouvernement du Canada.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Nelson Riis (Kamloops): Madame la Présidente, j'ai le privilège de présenter une pétition signée par des habitants de Kamloops, Chase, Savona, Pinatan, Knutsford, Little Fort, Barrière, Birch Island, Monte Creek, Pritchard, Monte Lake, Westwold, Blue River et Clearwater.

Les pétitionnaires expriment leurs préoccupations au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants. Ils soutiennent que la loi actuelle n'est pas adaptée aux besoins d'une société moderne et demandent au Parlement de la modifier pour améliorer les sentences et la surveillance après la libération, et d'adopter de meilleurs programmes de réinsertion sociale.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Madame la Présidente, je demande que toutes les questions soient réservées.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Les questions sont-elles réservées?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je signale à la Chambre que, en raison de la déclaration ministérielle, la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles sera prolongée de 24 minutes, conformément à l'alinéa 33(2)b) du Règlement.

_____________________________________________


1762

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 23 février, de la motion: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement; ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Madame la Présidente, à partir de maintenant, les députés du Parti réformiste diviseront leur temps de parole en deux discours de 10 minutes, suivis chacun d'une période de cinq minutes réservée aux questions et aux observations.

Ce matin, je voudrais parler du budget du point de vue du ministère de la Défense. Tout d'abord, je veux féliciter le gouvernement d'avoir pris certaines mesures que je trouve bonnes. J'ai remarqué qu'il envisage de simplifier la structure hiérarchique au sein des Forces canadiennes et de réduire le nombre de cadres intermédiaires, deux mesures qui se font attendre depuis longtemps. Il y aura ainsi un augmentation du secteur opérationnel et une réduction du secteur du soutien administratif.

Le fait de modifier les pratiques de gestion, de déléguer plus de responsabilités aux commandants de base et aux commandants d'autres unités et d'éliminer la bureaucratie rendra le processus beaucoup plus efficient et rentable.

Le gouvernement envisage aussi la possibilité d'acheter des produits déjà disponibles sur le marché. Pendant trop longtemps, les Forces canadiennes ont cherché à se procurer des produits spéciaux qui nécessitaient du travail technique additionnel et qui finissaient par coûter plus cher et par prendre beaucoup plus de temps avant de pouvoir être utilisés. Je crois que les achats de produits déjà disponibles sur le marché est une très bonne idée.

Le gouvernement envisage aussi de confier à des entrepreneurs indépendants certaines des tâches que le personnel des Forces canadiennes exécute actuellement. C'est encore un pas dans la bonne direction.

(1040)

Je crois comprendre d'après le document concernant la défense qu'on envisagera de faire appel aux marchés de services assurer les cours de pilotage à Moose Jaw. Je sais que cela a très bien fonctionné à Portage La Prairie pour l'entraînement de base, mais je dois avouer que l'idée de confier la formation de nos pilotes à un organisme non militaire m'inspire une certaine appréhension. Cela a cependant donné d'excellents résultats à Portage La Prairie, et nous devrions certainement explorer cette possibilité pour Moose Jaw.

Je constate également qu'on a fusionné des quartiers généraux de groupe pour des raisons d'efficacité. On a en effet déménagé


1763

de North Bay à Trenton le quartier général du Groupe aéromobile et de combat aérien, autrefois Groupe de chasse. On a également déménagé de Saint-Hubert le quartier général du 10e Groupement aérien tactique qui sera fusionné avec celui du Groupe Transport aérien à Trenton. Il s'agit là encore d'une mesure de réforme et d'efficacité qui devrait donner des dividendes.

Le gouvernement annonce aussi certaines réductions d'infrastructures qui permettront une économie d'environ 850 millions de dollars en cinq ans d'ici 1997-1998. À partir de ce moment-là, cette mesure permettra des économies annuelles de 350 millions de dollars. J'y reviendrai dans quelques instants pour en parler d'un autre point de vue. Tous ceux qui ont examiné le ministère de la Défense se sont rendu compte qu'il y a surabondance d'infrastructures dans les forces armées et qu'il était temps de les réduire.

Je crois cependant que la défense est devenue une cible facile. Lors de la campagne électorale, tous les partis, à l'exception du Parti réformiste, préconisaient très vivement de fortes compressions budgétaires à la défense. C'est peut-être prématuré, car les gens ne se rendent pas bien compte de l'état actuel des forces armées.

Au fond, elles sont sous-financées depuis 1972 lorsque M. Trudeau y a imposé des compressions spectaculaires. Il a cependant dû se rappeler la corrélation entre la défense et le commerce extérieur quand il a tenté de réduire notre contribution à l'OTAN, car il a très vite constaté que cette mesure aurait des répercussions dramatiques pour le commerce canadien. Il a fait volte-face à l'égard des réductions qu'il proposait d'effectuer.

La situation à l'échelle mondiale a incontestablement changé. Les relations entre les deux superpuissances sont choses du passé. Au lieu d'être plus stable, le monde dans lequel nous vivons est toutefois beaucoup plus fragile, nettement moins prévisible et, à mon avis, plus dangereux.

Il y a présentement plus de militaires canadiens qui participent à diverses missions qu'à n'importe quel moment depuis la guerre de Corée. À l'heure actuelle, l'effectif des Forces armées canadiennes compte environ 75 000 personnes. Le gouvernement propose de le ramener à quelque 67 000 d'ici 1998. Je trouve ces compressions discutables, à plus forte raison avant que ne soit terminé l'examen de la politique de défense devant nous permettre de décider du rôle que nous voulons confier aux Forces canadiennes.

Je ne suis pas certain que les Forces armées auront assez de l'effectif actuel de 75 000 personnes pour faire ce que les Canadiens attendront d'elles. À mon avis, il est vraiment prématuré de proposer de nouvelles compressions.

Je me réjouis que l'effectif de la Réserve soit maintenu à 30 000, même si, à mon avis, il faudra peut-être accroître son rôle si nous adoptons le concept de la force totale et que celui-ci s'avère efficace.

Au chapitre des compressions budgétaires, pour la période de 1989 à 1997, le gouvernement précédent avait prévu de réduire de 14 milliards de dollars le budget de la défense. Pour la période de 1994 à 1999, le parti ministériel veut maintenant l'amputer encore de 7 milliards de dollars. Sur dix ans, ce budget de seulement 12 milliards de dollars aura été la cible de compressions qui en totalisent 21 milliards. Et je le répète, ces compressions sont proposées avant même que nous ayons défini le rôle que nous voulons confier à nos Forces armées. J'estime que c'est prématuré.

Comme les compressions dans le secteur de la défense ont entraîné une réduction du budget d'exploitation et d'entretien, il a aussi fallu réduire les activités d'exploitation et de formation de 25 p. 100. En d'autres termes, cela signifie que la force navale a navigué moins, que la force aérienne a volé moins, que l'armée de terre a bénéficié de moins de formation et qu'il continuera d'en être ainsi. Cela signifie aussi que les membres de la force navale, de l'armée de terre et de l'armée de l'air ont reçu une moins bonne formation, qu'ils sont moins compétents et que la capacité opérationnelle est réduite. Il ne fait aucun doute que la formation dont les membres des Forces armées ont besoin leur permet de s'acquitter plus efficacement du travail que nous leur confions. Réduire la formation, c'est réduire la capacité opérationnelle.

Le gouvernement a dit que la moitié des réductions de sept milliards de dollars prévues dans le budget de la défense des cinq prochaines années proviendra de l'annulation du contrat des hélicoptères EH-101. Je tiens à rappeler aux députés que le programme des EH-101 s'étalait sur 13 ans, jusqu'en 2002, et que les dépenses les plus importantes étaient prévues en 1998 et 1999. Les 5,8 milliards de dollars dont le gouvernement parle en l'occurrence sont fondés sur des dollars de 2002 et non pas sur le coût original des EH-101 qui, en dollars de 1991-1992, représentait 4,3 milliards de dollars. Je crois que ses chiffres relatifs à une économie de 3,5 milliards de dollars ne sont pas exacts.

(1045)

Les chiffres font aussi complètement abstraction du coût de l'annulation du programme des EH-101, c'est-à-dire des sommes qu'il faudra verser aux parties ayant déjà investi des montants considérables dans le programme. On estime que ce coût représentera entre 500 millions et un milliard de dollars, mais qu'il sera probablement plus près du milliard. Il n'en est nulle part fait mention dans le budget.

Le ministre de la Défense nationale a dit hier que ces sommes ne proviendraient pas du budget de la défense, mais comme il faudra bien les verser et qu'il n'en est pas fait mention dans le budget, cela signifie qu'elles viendront grossir le déficit de 39,7 milliards de dollars que prévoit le gouvernement.

En outre, à la page 3 du document sur les répercussions du budget, le ministre dit et je cite:

Toutefois, le Ministère devra trouver tout de même des fonds pour des hélicoptères de remplacement si l'examen de la politique de défense en confirme le besoin.
Il a ajouté, et en cela je lui donne raison, que l'examen de la politique de défense confirmera probablement la nécessité d'acquérir des hélicoptères.

Selon le type d'hélicoptère qui sera choisi, nous pourrions dépenser autant et même plus que le coût initial du programme des EH-101. À cause des conditions atmosphériques qui existent dans notre pays, le Canada est l'un des endroits du monde où il est le plus périlleux de voler.

Le Canada est un pays magnifique! J'ai visité un grand nombre de pays, mais c'est sur lui que j'ai arrêté mon choix. Certes, il offre de très nombreux avantages, mais les hivers y sont longs et


1764

rigoureux. En hiver, il y a la glace. Et la glace pose des problèmes pour le pilotage des aéronefs, entre autres, les hélicoptères.

Tout aéronef doit être conçu pour voler malgré la glace. Vous vous rappelez de la tragédie de l'Ocean Ranger. Lorsque la plate-forme s'est renversée, 36 personnes ont perdu la vie. À cette époque, des hélicoptères Sea King et Labrador étaient cloués au sol à Halifax. La glace et le brouillard les empêchaient de décoller.

L'EH-101 aurait pu triompher de ces conditions et, qui sait, sauver les vies des travailleurs sur l'Ocean Ranger. Tout hélicoptère que nous achetons pour être utilisé au Canada, que ce soit à partir d'un navire ou dans le cadre d'opérations de recherche et sauvetage, doit avoir l'autonomie, la vitesse, la puissance et la capacité de voler, quelles que soient les conditions de glace.

Passons à une autre mesure d'économie, la réduction de l'infrastructure, plus précisément l'annonce faite par le gouvernement de la fermeture de quatre bases, soit celles de Cornwallis, de Chatham, d'Ottawa et de Toronto. Selon le document traitant des incidences du budget sur la défense, cette décision va coûter au bas mot 185 millions de dollars. Je ne crois pas que ce chiffre tienne compte des cours de formation et de recyclage, des indemnités versées aux civils, ni des coûts liés à la réaffectation du personnel militaire.

Le don à perpétuité de la station Downsview à la ville de Toronto pour qu'elle le convertisse en parc, c'est super. Mon temps est-il écoulé, madame la Présidente?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le temps du député est écoulé. Celui-ci est prié de conclure.

M. Frazer: En gros, il y a quelques bonnes choses dans le budget, mais on y trouve un grand nombre de mesures incomplètes ou trop hâtives. Bref, le dépôt du budget 1994 a été un jour riche en déceptions pour les Canadiens, en général, et pour les Forces canadiennes, en particulier.

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo): Madame la Présidente, j'ai écouté avec un vif intérêt les propos du député de Saanich-Les Îles-du-Golfe. Il a fait ressortir d'excellents points dans son discours.

Je sais d'expérience que l'infrastructure était comparable à un albatros qui aurait, ces 10 ou 12 dernières années, tenu à la gorge les budgets des forces. Tous les officiers de carrière ont vu dans cette décision une excellente mesure, un moyen de libérer des fonds pour répondre à différents besoins dont il a parlé dans son discours. Il faudrait féliciter le gouvernement d'avoir pris la décision de dépolitiser la nature des bases. Je l'approuve entièrement.

(1050)

Comme lui, je reconnais que nous ne devrions pas modeler l'avenir des forces à partir du budget. Cela exige beaucoup de réflexion. J'espère que le comité constitué à cette fin proposera un programme tourné vers l'avenir et confiera aux forces armées un rôle pertinent. J'ai bien hâte de travailler avec lui à ce projet.

Je voudrais également parler de certains autres points. Les Britanniques ont annoncé aujourd'hui des réductions très importantes de leurs dépenses dans le secteur de la défense. Comme le député l'a souligné, on parle maintenant de concept de la force totale qui regroupe les éléments terre, mer et air. C'est ce qu'on appelle la force totale. Nous consacrons plus de ressources à l'amélioration de la qualité des réserves, comme moyen d'expansion rapide en cas de besoin.

Comme le député l'a si bien dit, nous aurons peut-être à examiner cela dans l'avenir afin d'inciter les Canadiens à devenir membres des forces armées, d'élargir les réserves et de leur donner les compétences nécessaires pour leur permettre d'assumer les rôles joués dans les forces aériennes allemandes, dans les forces aériennes américaines, dans les forces de réserve ainsi que dans les armées de terre et de mer.

Dans l'ensemble, il a présenté de très bons points. Je tiens à préciser que l'ensemble des forces a bien accueilli la réduction de l'infrastructure, car celle-ci exigeait beaucoup trop de ressources humaines et financières. Espérons que cela favorisera la croissance des forces dans l'avenir.

M. Frazer: Madame la Présidente, si vous le permettez, je voudrais aborder le problème de l'infrastructure. Je conviens avec le député que les compressions ont manifestement été faites pour des raisons militaires, et non pour des raisons politiques. Je comprends cela et j'estime qu'il s'agit là d'un pas dans la bonne direction.

Je crois cependant qu'il n'est pas sage de fermer l'un ou l'autre des deux collèges de la défense, le Collège militaire royal de Saint-Jean ou le Royal Roads Military College de Victoria. La capacité totale de formation de ces collèges ne permet pas de fournir suffisamment de diplômés au corps des officiers des Forces canadiennes.

Je sais que, dans le cas de Victoria, l'Université de Victoria n'a pas la capacité voulue pour absorber des étudiants supplémentaires. Par conséquent, en privant le Royal Roads de cette capacité de formation, on réduit le nombre de diplômés qualifiés qui seront formés. Si l'université accueille de futurs officiers des Forces canadiennes, d'autres étudiants se verront exclus du programme. Sauf erreur, la formation universitaire donnée au Royal Roads n'est que légèrement plus coûteuse que celle offerte dans toute université ordinaire. J'estime que le gouvernement a agi prématurément en fermant ces deux établissements.

[Français]

M. Robichaud: Madame la Présidente, je tiens à vous aviser que les députés de ce côté-ci de la Chambre, soit les libéraux, partageront leur période de 20 minutes, soit 2 périodes de 10 minutes, à l'exception des ministres qui utiliseront la période de 20 minutes.

[Traduction]

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound): Madame la Présidente, le gouvernement du Canada est un peu comme une personne qui aurait un problème de poids. Les dépenses en trop, c'est un peu comme la boulimie. Le déficit, c'est un peu comme les graisses qui emmagasinent les calories en trop. Le Canada court les mêmes risques qu'une personne obèse. Ultimement, les


1765

graisses vont bloquer les artères et gêner les fonctions essentielles.

Comme les personnes qui ont un problème de poids, notre gouvernement prend toujours des résolutions pour y remédier, se permettant juste ce qu'il faut de calories aujourd'hui pour maintenir les graisses et décidant de se mettre à un régime plus strict la semaine suivante.

Les excuses invoquées pour remettre, chaque fois, les choses au lendemain sont toujours les mêmes. Nous avons besoin de calories pour maintenir les tissus vivants, sinon cela va faire mal, ce qui veut dire qu'il y aura du chômage. L'autre excuse est que l'on est toujours sur le point de découvrir une nouvelle méthode pour perdre du poids sans mal: un programme d'infrastructures, une refonte majeure des programmes sociaux, des opérations gouvernementales plus efficaces ou encore l'élimination d'échappatoires fiscales.

(1055)

Ce budget a ordonné au patient un régime qui ralentit le taux de croissance de la dette, mais qui ne fait rien pour l'arrêter. Rien n'indique que nous pouvons nous attendre un jour à une réduction de la dette. Les promesses d'un régime plus sévère, lorsque les programmes sociaux auront été restructurés, ne sont plus croyables. Il n'existe aucun moyen de perdre du poids sans mal. On aura beau chercher, on n'en trouvera pas.

Dire que tous les régimes sont dangereux pour la santé n'a aucun sens. Quand les budgets étaient équilibrés, l'économie canadienne était une économie de plein emploi et de croissance rapide. Rééquilibrer les budgets, c'est rétablir des conditions propices, tout comme une personne se sent mieux et plus énergique après avoir réussi à perdre du poids et à avoir retrouvé son poids normal après un régime.

Il existe un remède à la maladie dont souffre le Canada. Par contre, il faut agir vite, si l'on ne veut pas que notre pays souffre davantage. Tout ce qu'il faut, c'est résister et ne pas prendre de deuxième portion. Durant la campagne électorale, la plus grande partie des gens avec lesquels il m'a été donné d'avoir des contacts étaient inquiets face à la taille du déficit et de la dette. Ils voulaient que des mesures spectaculaires soient prises pour les réduire. Ils estimaient que la personne obèse-en l'occurrence le gouvernement du Canada-devait être mise à un régime strict qui lui permetrait d'éliminer totalement les graisses. Ils estimaient qu'un régime choc valait la peine, si cela devait aider le pays à retrouver la santé.

Les habitants de ma circonscription se sont dits prêts à faire des sacrifices dans l'intérêt de la santé financière du pays, mais à une condition: que tous les Canadiens en fassent autant et que nos systèmes de soins de santé et de pensions de retraite soient épargnés. Les programmes sociaux doivent être restructurés pour ne profiter qu'aux personnes dans le besoin. Ce budget ne répartit pas également le fardeau.

Le budget vise en particulier les industries de défense, les fonctionnaires, les contribuables âgés, les entreprises, les entrepreneurs qui font des gains en capital, les prestataires d'assurance-chômage. Pire, on demande à ces Canadiens de faire des sacrifices alors que l'on maintient des dépenses excessives. Il y a maintenant 18 nouveaux programmes de dépenses qui, au total, annulent tout le bénéfice des réductions. Ces nouveaux programmes sont motivés par la poursuite d'objectifs idéologiques résultant de l'opinion du monde libéral sur la capacité des gouvernements de résoudre tous les problèmes de la société.

Il y a la promesse d'augmenter le nombre de places de garderies lorsque la croissance économique aura atteint 3 p. 100. On prévoit ce taux de croissance pour les deux prochaines années. Que coûtera cette promesse? Le budget ne dit rien de ce programme qui pourrait se révéler très coûteux.

On sait que beaucoup de programmes de dépenses fédérales pourraient être réduits. On n'a pas besoin d'études pour savoir lesquels. On aurait pu faire des coupes qui auraient réduit le déficit tout en conduisant à un partage beaucoup plus équitable du fardeau.

Tout d'abord, il y a le régime d'assurance-chômage. Les changements proposés en ce qui concerne l'admissibilité sont un pas dans la bonne direction, mais ils sont insuffisants. Selon la plupart des normes internationales et nos normes passées, un taux de prestations de 55 p. 100 pour les personnes seules est trop élevé. Abaisser le taux des prestations de 2 points est une mesure plus symbolique qu'économique, surtout lorsque, simultanément, on remonte à 60 p. 100 les prestations d'autres personnes.

Deuxièmement, les prestations de Sécurité de la vieillesse qui sont actuellement de 20 milliards, doivent augmenter de 7,5 p. 100 en deux ans, principalement en raison de l'augmentation du nombre de Canadiens admissibles, mais aussi de l'indexation des prestations. Pourtant, on sait très bien qu'une partie non négligeable des ces prestations va à des familles à revenus élevés. Ce programme n'avait pas été créé pour que les familles du décile supérieur, gagnant 100 000 $ par année, reçoivent 2,5 milliards, alors qu'elles n'ont plus de personnes à charge et que toutes leurs dépenses de santé sont payées.

Troisièmement, la catégorie de dépenses qui augmente le plus vite est celle des subventions aux Indiens et aux Inuit. L'augmentation de ce poste budgétaire atteindra 17 p. 100 en deux ans. Les nombreuses personnes auxquelles on a demandé de faire des sacrifices se demandent pourquoi ce programme devrait augmenter de 300 millions chaque année pendant deux ans.

D'une façon plus générale, on prétend dans ce budget que l'on réalisera 8 milliards d'économies en deux ans. Il faut remarquer que ces économies sont par rapport aux prévisions de dépenses des budgets des années passées. La moitié viennent de ce que l'on appelle des «économies imputables à des budgets antérieurs» qui ne nécessitent donc aucun courage politique. En réalité, toutes les prétendues économies ne sont rien d'autres que des réductions d'augmentations annoncées précédemment.

En définitive, pour les Canadiens, cela signifie que les dépenses de programmes resteront à 122 milliards pendant les deux prochaines années. Ce n'est pas le genre de régime qui convient à un patient obèse.

(1100)

Il y a tout lieu de douter de la justesse des prévisions concernant les frais de la dette publique, qui devraient augmenter de 3 milliards au cours des trois prochaines années. Le déficit prévu pour la même période est d'environ 100 milliards. L'intérêt sur la dette supplémentaire atteint à lui seul 6 milliards. Aussi, le gouvernement doit pouvoir compter sur d'importantes économies de 3 milliards de dollars sur les frais du service de la dette, qui atteint déjà 504 milliards.


1766

Voilà des prévisions téméraires. On prévoit que la croissance économique sera de 3 et de 3,8 p. 100 respectivement au cours des deux prochaines années. Il en résultera des pressions inflationnistes, qui seront aggravées par les effets à retardement de la dépréciation de la monnaie canadienne survenue l'année dernière.

Le taux d'inflation de 1,3 p. 100 prévu pour 1995 m'apparaît très faible, tout comme les taux de rendement de 6,1 p. 100 prévus pour les obligations à long terme en 1995. Les prévisions concernant les taux d'intérêt me laissent d'autant plus sceptique que l'économie américaine connaît actuellement un boom et que les taux d'intérêt aux États-Unis ont amorcé une hausse. Le Canada ne peut permettre un écart trop important des taux d'intérêt canadiens par rapport aux taux américains.

J'ai également des doutes au sujet des prévisions de croissance économique des prochaines années, quoique la majorité des économistes ne partagent pas mon point de vue. À mon avis, le fait que les consommateurs hésitent à dépenser et prolongent, de ce fait, la récession, est principalement dû à leur inquiétude face à la dette et au déficit nationaux. Ils craignent d'assister à l'effondrement des services et prestations gouvernementaux, comme cela s'est produit en Nouvelle-Zélande.

Tant que les Canadiens n'auront pas la certitude que le gouvernement a pris des mesures courageuses pour réduire le déficit, ils hésiteront à dépenser. Aussi, la croissance économique pourrait être plus faible que ce qui est prévu dans le budget.

J'ajoute en terminant que les marchés financiers internationaux n'ont fait qu'accorder un répit au gouvernement suite au budget qu'il a présenté, même si les réductions de dépenses annoncées demeurent insuffisantes. Des personnes proches des milieux financiers m'ont dit que nous pouvons nous attendre à une importante fuite de capitaux et à une crise financière si la réforme des programmes sociaux, dont l'annonce doit être faite à l'automne, ne permet pas de réaliser des économies importantes.

C'est pourquoi j'exhorte le gouvernement à s'engager sérieusement dans la réforme des services sociaux. À défaut de décisions difficiles et d'économies véritables, le Canada pourrait se retrouver dans la même situation que le plus important empire immobilier de ce pays.

On n'a pas tenu compte des rumeurs et prédictions concernant une crise financière possible, et les banques ont continué d'accorder du crédit jusqu'à ce que subitement, à cause d'une légère secousse supplémentaire, la crise a éclaté et l'empire au complet a commencé à s'écrouler. Le régime était insuffisant et arrivait trop tard.

Espérons que le Canada ne se retrouvera pas dans la même situation. La décision appartient au gouvernement.

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury): Madame la Présidente, je suis très heureux d'être le premier, parmi mes collègues, à prendre la parole. J'étais sûr que ce discours provoquerait une réaction immédiate. Cela me rappelle certainement la raison de ma présence ici.

Je signale au député de Capilano-Howe Sound que les programmes sociaux n'ont pas pour but de faire épargner de l'argent. Les programmes sociaux visent à aider des gens. Partir du principe qu'il faut épargner de l'argent est inadmissible, considérant l'objet de ces programmes.

Les 18 nouveaux programmes financés en vertu du budget ont été présentés l'automne dernier à la population, et ils ont obtenu l'appui d'un bon nombre de Canadiens. Je pense que, si l'on n'appuie pas ces programmes, on fait fi des voeux que les Canadiens ont exprimés démocratiquement.

Je suis perplexe quand j'entends dire que les coupes dans le programme d'assurance-chômage ne sont pas assez radicales et que nous devrions tenter d'économiser en prenant de l'argent à ceux qui arrivent tout juste financièrement, afin que les gens qui sont plus à l'aise puissent continuer à financer ces programmes.

Finalement, pour reprendre l'analogie du député, qui parlait de régime, je dirais qu'il y a une grande différence entre mettre les gens au régime et les laisser mourir de faim.

M. Grubel: Je remercie le député de nous avoir fait part de ces observations, qui sont nettement sectaires. C'est cette façon de penser qui divise les gens. J'ai hâte de voir combien le député recevra de lettres de ses électeurs auxquels on aura demandé de faire des sacrifices, afin que d'autres puissent en tirer avantage. Je constate pour ma part que les programmes créés par son gouvernement ne sont pas populaires auprès de mes électeurs.

(1105)

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Je voudrais revenir sur l'intervention du député de Capilano-Howe Sound, qui n'y va pas avec le dos de la cuillère et prétend être un expert en régimes-chocs. Il trouve que le Canada ne s'impose pas un régime assez dur et que nous devrions nous serrer encore davantage la ceinture. Comme mon collègue vient de le signaler, il y a une différence entre mettre les gens au régime et les laisser mourir de faim, et je ne suis pas certain que mon vis-à-vis le connaisse.

Il trouve que le Parti libéral se lance dans de nouvelles dépenses excessives. Ensuite, il s'en prend, bien entendu, à l'initiative que nous voulons lancer dans le domaine des garderies et il parle des Canadiens obèses, ce qui me fait quelque peu sourire.

Il prétend que les modifications apportées au régime d'assurance-chômage ne vont pas assez loin, que nous devrions faire preuve de plus de courage et que nous devrions sabrer encore bien davantage dans tout le régime. Je me demande si le député de Capilano-Howe Sound l'aurait fait.

Il parle de lettres écrites par des citoyens canadiens. Serait-il prêt à envoyer une lettre ouverte aux journaux des provinces de l'Atlantique pour faire part aux gens de ses propositions relativement au régime d'assurance-chômage? J'attends avec beaucoup d'impatience de connaître ses recommandations à cet égard.


1767

En ce qui concerne la Sécurité de la vieillesse, il dit là encore que nous versons trop d'argent. Je me demande s'il a lu le budget et s'il n'a pas eu de réactions de personnes âgées qui paieront dorénavant beaucoup plus d'impôts et perdront des milliers de dollars.

Il s'offusque de l'augmentation de 17 p. 100 accordée aux programmes destinés aux autochtones, ce qui représente 300 millions de dollars par année. Pourrait-il nous préciser sa position relativement au traitement à réserver aux autochtones?

Je vais m'en tenir là, car je crois que le député de Capilano-Howe Sound, ce spécialiste des régimes-chocs qui ne mâche pas ses mots, a déjà bien du pain sur la planche.

M. Grubel: Madame la Présidente, je vais devoir dire très brièvement ce que je pense de l'intervention de mon collègue qui nous parlé de toutes les merveilleuses façons dont son gouvernement préserve notre beau pays qui est en train de s'effondrer à cause de la crise financière à laquelle nous faisons face. On ajoute 100 milliards de dollars à la dette en trois ans. Notre déficit actuel s'accroîtra ainsi de 6 milliards de dollars. Je ne peux comprendre qu'on puisse poursuivre sur cette voie.

M. Barry Campbell (St. Paul's): Comme c'est mon premier discours à la Chambre des communes, je tiens d'abord à féliciter le Président pour son élection et vous-même, madame la Présidente, pour votre nomination.

Je voudrais aussi remercier sincèrement les électeurs de la circonscription de St. Paul's, à Toronto, qui m'ont fait l'honneur de me charger de les représenter au cours de cette législature. J'accepte cette responsabilité en toute humilité.

La circonscription de St. Paul's est, à bien des égards, un microcosme du Canada. En effet, elle échappe à tout étiquetage. Elle présente des contrastes. Elle comprend des locataires et des propriétaires, des dirigeants d'entreprises et des entrepreneurs en construction, des néo-Canadiens et des Canadiens de souche. Le sud-ouest de ma circonscription accueille depuis longtemps des vagues successives d'immigrants qui se relaient à mesure que chaque groupe prospère et déménage, à la canadienne.

Les habitants de St. Paul's comptent un grand nombre de personnalités du monde des affaires, de la culture, de la politique, des relations de travail et de l'enseignement, des leaders de la collectivité, et des milliers de travailleurs qui ensemble s'efforcent pour que Toronto et le Canada ne cessent de croître.

(1110)

En faisant du porte-à-porte pendant la dernière campagne électorale, j'ai continuellement été impressionné par la diversité canadienne et la façon dont elle se reflète dans ma circonscription. Comme représentant de St. Paul's, j'ai de formidables modèles à imiter; en effet, John Roberts, Mitchell Sharp et Walter Gordon m'ont précédé à ce titre. Dotés d'une grande vision, ces gens étaient profondément engagés envers le Canada et fondamentalement convaincus du mérite qu'il y a servir ses concitoyens.

En m'acquittant de mes responsabilités, je garderai à l'esprit l'exemple de ces gens qui ont servi et, en ce qui concerne Mitchell Sharp, qui continuent de servir, avec intégrité et dévouement pour leur pays.

Je prends un moment pour remercier les membres de ma famille, ces héros discrets de la vie de toute personne politique. Je suis reconnaissant envers ma femme Debra, qui, pendant que je suis ici, assure la bonne marche de notre foyer à Toronto et envers mes deux fils, Matthew et Jeremy.

Mes parents m'ont appris que, dans une collectivité, chacun reçoit et doit donner en retour. Peu importe les circonstances de notre vie personnelle, nous devons tous relever nos manches, collaborer et essayer de changer les choses. Je serai toujours reconnaissant à mes parents de m'avoir donné cette leçon ainsi que leur appui.

Depuis un an, j'ai eu le privilège de rencontrer des milliers de gens dans ma circonscription. Ils m'ont fait part de leurs préoccupations face au marché du travail et à l'économie. Nombreux sont ceux qui s'inquiètent de l'avenir et qui s'interrogent sur le rôle du gouvernement à notre époque.

La circonscription de St. Paul's n'a pas échappé aux ravages de la récession. Dans bien des cas, l'optimisme a cédé à la frustration et au désespoir. La stagnation économique a fait des victimes. Cependant, notre moral est bon. Les gens de ma circonscription ne sont pas apathiques. Ils ont canalisé leur déception et leur colère. Ils ont décidé de participer à la vie de leur communauté, de leur ville et de leur pays.

Dans ma circonscription, on prend la politique très au sérieux. D'ailleurs, c'est dans la circonscription de St. Paul's qu'on trouve la taverne Montgomery où William Lyon Mackenzie a planifié la rébellion de 1837. On ne peut faire autrement qu'établir un parallèle entre la situation de l'époque et celle d'aujourd'hui. La rébellion a été provoquée par la colère générale que ressentait la population envers le gouvernement qui se montrait indifférent, égocentrique et déphasé. L'audace dont a fait preuve la population en 1837 a ouvert la voie au gouvernement responsable.

Cent cinquante-sept ans plus tard, la population canadienne, en colère contre un gouvernement indifférent et déphasé, a de nouveau décidé de se rebeller, cette fois comme on le fait dans une société moderne, c'est-à-dire aux urnes. Les Canadiens ont envoyé un message clair et net. Ils veulent un gouvernement responsable qui les écoute.

Les habitants de ma circonscription ne sont pas tendres à l'endroit des hommes et des femmes politiques. Ils ne nous oublient pas si nous ne tenons pas nos promesses. Voilà pourquoi je suis fier d'appartenir à un gouvernement qui profite de ce budget pour faire exactement ce qu'il avait promis de faire. Nous finançons tous les grands engagements que nous avons pris dans le livre rouge. En tenant nos promesses, nous contribuons grandement à redonner aux Canadiens la confiance qu'ils doivent avoir dans leur gouvernement.

Parmi les nombreuses initiatives dignes d'intérêt annoncées dans le budget, mentionnons le Programme des travaux d'infrastructure, le Service jeunesse, les programmes de nutrition prénatale, le rétablissement du Programme de contestation judiciaire, le réseau technologique et le Programme d'aide à la remise en état des logements.

Il y a deux visions différentes du Canada. Comme nous l'avons entendu aujourd'hui, certains croient que le Canada est un pays fait de gagnants et de perdants-nous d'un côté, eux de l'autre-et que le gouvernement est au coeur du problème. Le gouvernement n'a aucun rôle à jouer si ce n'est de se tenir à l'écart et


1768

d'observer la situation. Ces gens estiment que l'économie s'adaptera et que nous nous en sortirons tous mieux à long terme si le gouvernement n'intervient pas.

Entre-temps, les temps sont durs et les politiques économiques de la terre brûlée minent grandement le tissu social de notre pays.

[Français]

Madame la Présidente, en travaillant au Fonds monétaire, à Washington, j'ai appris des choses.

[Traduction]

J'ai appris notamment que la réduction des dépenses, accompagnée d'un traitement choc, entraîne inévitablement des dépenses considérables pour la société et ne réussit jamais à redresser la situation économique. Nous devons contrôler les dépenses et favoriser la croissance. C'est d'ailleurs l'objectif que nous nous sommes fixés. Méfions-nous de ceux qui nous proposent des solutions miracles.

[Français]

Notre vision est différente. Le Canada ne se définit pas en termes de gagnants et de perdants. Ce qui importe chez nous, c'est d'améliorer la qualité de vie de tous les Canadiens et Canadiennes, et, ainsi, de faire de tous des gagnants.

Le gouvernement a un rôle à jouer pour revitaliser l'économie et préserver le tissu social. Le Canada a toujours été une terre de prospérité et les Canadiens ont toujours prospéré sous un gouvernement qui mène. Or, même à une époque de restrictions financières, il est possible d'avoir un tel gouvernement. Comme le Budget l'indique, notre gouvernement doit activement participer à la vie économique, sociale et culturelle du pays.

[Traduction]

Dans ce budget, le gouvernement prouve qu'il comprend les responsabilités qu'il a envers la population canadienne. Pour que le Canada et les Canadiens puissent prospérer, le gouvernement ne doit ni se tenir à l'écart, ni faire obstruction, mais il lui faut épauler les Canadiens.

(1115)

Je sais que le gouvernement ne peut pas tout faire. Il y a des choses valables que nous ne pouvons tout simplement pas appuyer. Nous avons fait des choix difficiles dans ce budget, mais je crois que ce sont les bons choix. Nous avons entendu les Canadiens dans le cadre de consultations prébudgétaires.

[Français]

Comme membre du Comité permanent des finances, j'ai hâte d'écouter les Canadiens et les Canadiennes concernant l'orientation de la politique économique.

[Traduction]

Le gouvernement comprend la réalité avec laquelle nous sommes aujourd'hui aux prises et il est prêt à faire ce qu'il faut pour être financièrement responsable. Il a pour priorité de contenir les dépenses. Il entreprend avec ce budget la longue et difficile tâche qui consiste à renverser l'escalade de la dette et du déficit. De tous les budgets de la dernière décennie, celui-ci offre le plan de réduction du déficit le plus ambitieux en ce qui a trait aux dépenses.

Nous n'allons pas blâmer le gouvernement précédent pour le triste état des affaires financières du Canada. Nous sommes disposés à ce qu'on nous juge à la manière dont nous allons nous débrouiller avec ce que nous avons maintenant. Ce budget constitue la première étape du long processus entamé le 25 octobre en vue de rétablir la prospérité financière de notre pays et de protéger la justice sociale qui en est la marque.

Le gouvernement ne va pas résoudre les problèmes du Canada en créant une catégorie inférieure de citoyens. Les plus démunis pourront toujours compter sur l'aide dont ils ont besoin. Avec le gouvernement, je vais travailler à cerner et à appuyer le rôle que le gouvernement peut et doit jouer.

Le gouvernement peut et doit rassembler les gens, fixer des objectifs, faire preuve d'autorité et s'assurer que le travail est bel et bien accompli. Et notre gouvernement le prouve dans ce budget. Le gouvernement comprend qu'il a un rôle à jouer pour aider les Canadiens à trouver un bon emploi, rétablissant ainsi leur confiance dans le Canada. Même en ces temps difficiles, le gouvernement doit satisfaire aux besoins des Canadiens et ce dont les Canadiens ont besoin en ce moment, ce sont des emplois.

Et le gouvernement y parvient de deux façons dans ce budget. Le Programme de modernisation des infrastructures crée des emplois maintenant. Pour ce qui est de l'avenir, le budget prévoit un Programme national d'alphabétisation, un Service jeunesse, des programmes d'apprentissage et des programmes novateurs à l'intention de la petite entreprise.

Je suis persuadé que, avec la collaboration des Canadiens, nous pouvons résoudre le dilemme des années 90. Nous pouvons nous assurer une société bienveillante, une vie culturelle vibrante et une économie viable. Nous pouvons relever le défi.

[Français]

Nous, les députés, devons travailler, mais les Canadiens doivent aussi faire leur part et continuer à croire en ce que nous pouvons accomplir ensemble. Tous les citoyens de notre grand pays doivent reconnaître et accepter leurs responsabilités face à la société et faire leur part. Nous devons reprendre confiance en notre avenir commun.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Madame la Présidente, je suis assez étonné des propos de mon honorable collègue, parce que la vision que j'ai du Budget est complètement différente de celle qu'il nous présente.

De quelle façon peut-il dire qu'on va améliorer la qualité de vie au Canada, lorsque la période d'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage a été portée de 10 à 12 semaines, quand on sait à quel point les gens actuellement vivent une situation économique très difficile dans les régions du Québec et du Canada? Comment peut-on dire que la diminution du nombre de semaines assurables est une façon d'améliorer la qualité de vie des Canadiens? Je pense que les libéraux devront admettre, à tout le moins, qu'ils sont en train de faire le budget des conservateurs.


1769

Que penser de ce Budget qui va chercher de l'argent dans les poches des personnes âgées, qui ont financé, qui ont fait vivre le Canada pendant toute leur vie, et voilà qu'en retour, ils sont payés par une diminution de leur revenu à la fin de leur vie. Je pense qu'on a eu des avis très nets dans les médias à ce sujet, et j'aimerais que le député me dise de quelle façon ces choses-là peuvent améliorer la qualité de vie des Canadiens.

En même temps, comment peut-il dire que le déficit est sous contrôle, alors que c'est le déficit prévu le plus élevé qu'un gouvernement ait osé mettre sur la table? L'année prochaine, je suis prêt à parier avec le député que, lorsqu'on va voir le résultat de l'année financière, le déficit prévu de 39 milliards sera plutôt de 45 milliards, parce que les libéraux ont été incapables de prendre leurs responsabilités et d'effectuer des coupures en matière de chevauchements.

(1120)

[Traduction]

M. Campbell: Madame la Présidente, je veux remercier le député pour sa question.

Le budget contient de nombreux programmes-et j'ai déjà parlé de beaucoup d'entre eux-qui visent à améliorer la qualité de vie des Canadiens: ils visent à donner des emplois à nos jeunes, à permettre aux travailleurs de se recycler ainsi qu'à préserver les programmes sociaux auxquels le député a fait allusion tout en aidant les Canadiens à retourner au travail.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Madame la Présidente, j'appuie certaines des remarques que le député a faites au sujet de la réaction des Canadiens à l'égard d'un gouvernement qui ne les écoute pas. Je constate que les choses ont tellement changé dans notre pays que nous en sommes réellement rendus au point où le gouvernement n'écoute plus les Canadiens.

Il y a une préoccupation que beaucoup de gens ont exprimée, et c'est évidemment la question de la dette énorme qui continue de s'accroître au Canada. Et nous voici devant un budget qui vient d'être présenté et qui nous met dans la situation où, dans trois ans d'ici, notre dette aura encore augmenté de 100 milliards de dollars. Cela ne correspond certainement pas à ce veulent les Canadiens. Il y a une épée de Damoclès qui pend au-dessus de la tête de chaque contribuable canadien. Le service de la dette augmentera de nouveau, et c'est encore les contribuables qui devront payer la note.

Qu'arrivera-t-il? Le fardeau fiscal des Canadiens s'alourdira-t-il encore, diminuant du coup leur qualité de vie? De quelle genre de générosité le gouvernement pourra-t-il faire preuve lorsque les prêteurs le forceront à réduire ses dépenses? Si nous ne faisons rien maintenant pour atténuer le problème, qu'arrivera-t-il d'ici trois ans lorsque les prêteurs diront que nous avons dépassé la limite?

J'aimerais que le député me dise exactement de quel genre de générosité le gouvernement pourra faire preuve s'il ne prend pas des mesures dès maintenant? La situation ne fera que s'aggraver.

M. Campbell: Madame la Présidente, je veux remercier le député pour sa question.

Ce budget ne prévoit aucune hausse d'impôts. Pourtant, contrairement au député et à certains des ses collègues, je suis convaincu que nous saurons relever tous les défis. Je ne suis pas là à attendre que le pays s'effondre. Avec l'aide de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre et des députés ministériels qui siègent de l'autre côté, je porte ma part du fardeau en prenant des mesures qui contribueront à corriger la situation.

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner la possibilité de parler d'un important sujet, à savoir le premier budget du gouvernement dont je fais partie.

Depuis quelques semaines, j'écoute les déclarations, les questions et les discours des députés des deux côtés de la Chambre. Une chose m'a frappé. Peu importe les différences qu'il y a entre nos méthodes et peu importe de quelle région du Canada nous sommes, nous avons tous une chose en commun, c'est un profond sens du devoir envers nos électeurs.

Personnellement, ma circonscription passera toujours avant tout le reste. Je remercie la population de Timiskaming-French River de m'avoir fait confiance. Je tiens à dire à chaque électeur de cette circonscription à quel point je suis fier et honoré d'être leur voix à Ottawa.

Beaucoup de députés, des deux côtés de la Chambre, ont abordé des points précis de l'exposé budgétaire. Je me limiterai aux deux domaines qui, à mon sens, touchent le plus directement ma circonscription, soit l'exploitation minière et l'agriculture.

La circonscription de Timiskaming-French River est en grande partie rurale. Elle est très vaste et s'étend de Matheson et Kirkland Lake, au nord, jusqu'à la rivière des Français, à Alban et à Noëlville, au sud. Cette circonscription doit son développement à l'exploitation forestière, à l'exploitation minière et à l'agriculture. Le tourisme offre de grandes possibilités, mais elles restent relativement inexploitées.

Malheureusement, en raison de la mauvaise politique minière du précédent gouvernement et de l'élimination des mesures qui stimulaient l'exploitation minière par ce même gouvernement, en 1987, Cobalt n'a aucune mine en activité pour la première fois de son histoire. La mine Adams, à Kirkland Lake, et la mine Sherman, à Temagami, deux mines productrices de boulettes de minerai de fer, ont été fermées en 1990. Dofasco, pour des raisons très douteuses, achète maintenant ses boulettes de fer dans la circonscription de l'ancien premier ministre.

(1125)

Je veux énoncer quelques faits et citer quelques statistiques se rapportant à l'industrie minière au Canada. Tout d'abord, on croit généralement que l'activité minière n'est importante que pour quelques régions isolées du Canada. Rien n'est plus loin de la vérité. Les mines constituent la pierre angulaire de notre économie puisqu'elles représentent environ 16 p. 100 du total de nos exportations et 4,6 p. 100 de notre produit intérieur brut. Elles fournissent aussi 100 000 emplois qualifiés et bien rémunérés. Les services et l'équipement dont a besoin l'industrie minière créent plus d'emplois dans les centres urbains que dans les collectivités minières.


1770

L'industrie minière est la principale source d'emplois et l'activité industrielle première dans plus de 150 collectivités canadiennes où vivent environ un million de personnes. Les centres urbains profitent aussi de l'activité minière, car c'est là qu'on retrouve les sièges sociaux de sociétés minières internationales, les entreprises de soutien des mines, y compris les banques, les bourses, les compagnies d'assurance, les fournisseurs, les services juridiques et les consultants.

C'est pourquoi je suis si heureux des mesures gouvernementales se rapportant aux fonds en fiducie de régénération minière. J'ai l'intention de poursuivre mes consultations avec le ministre des Finances et le Cabinet pour que d'autres mesures énoncées dans notre politique des mines, par exemple, le processus d'examen environnemental unique et un programme de stimulants à l'exploration, soient mises en oeuvre le plus rapidement possible.

La deuxième grande idée préconçue, c'est que l'exploitation minière pollue et est irresponsable. Des environnementalistes bien intentionnés ont pratiquement déclaré la guerre à nos industries d'exploitation des ressources comme l'industrie minière, l'industrie forestière et le piégeage. Pourtant, la superficie totale des zones d'exploitation minière au Canada est inférieure à la superficie de la conurbation de Toronto.

Je reconnais qu'on ne peut répéter les pratiques du passé dans les secteurs forestier et minier, mais nous devons nous garder de pousser les choses à l'extrême, ce qui pourrait entraîner la disparition de nos localités dont l'industrie est axée sur les ressources et, partant, causer beaucoup de tort à l'ensemble de l'économie canadienne. Nous devons faire davantage pour bien faire comprendre au public en général, surtout dans les zones urbaines, l'importance du secteur minier dans l'économie canadienne.

Au cours des cinq ou six dernières années, les gisements de minerai inventoriés dans notre pays ont été réduits à des niveaux dangereusement bas. L'incohérence et le dédoublement des processus environnementaux, le manque d'incitatifs, le manque de mécanisme de reconstitution des ressources financières et le manque d'accès aux ressources naturelles à cause des revendications territoriales autochtones ou à cause des parcs constituent quelques-uns des problèmes auxquels fait face l'industrie minière.

Lors de la dernière campagne électorale, le Parti libéral a été le seul a élaborer une politique minière globale. Cette politique a reçu un appui enthousiaste de la part des maires et des préfets de localités minières partout au Canada, dont la plupart sont des localités à industrie unique. Cette politique a également reçu l'aval de toutes les grandes associations minières au Canada. Je félicite le ministre des Finances d'avoir agi avec célérité pour mettre en oeuvre certains éléments de cette politique.

[Français]

L'agriculture demeure un des secteurs économiques primordiaux pour la sécurité, l'économie et la souveraineté de notre pays. Le 15 décembre dernier, le Canada signait l'entente du GATT à Genève. Je tiens à féliciter le ministre de l'Agriculture, le ministre du Commerce international, de même que les quelque 60 députés du caucus libéral qui ont travaillé avec acharnement pour défendre les intérêts des cultivateurs canadiens à Genève.

Ensemble nous avons réussi, dans des circonstances très difficiles, pressés par le temps, à sauvegarder le système de mise en marché et un contrôle effectif des quotas d'importation par une tarification adéquate. Ces mesures assureront la survie de nos fermes familiales, à court et à long terme.

Il reste cependant un problème très épineux à régler avec les Américains, celui de la crème et du yaourt. Je suis confiant que le ministre de l'Agriculture saura négocier avec ceux-ci une entente bilatérale qui saura plaire à nos producteurs laitiers canadiens.

(1130)

Nous devrons cependant demeurer très vigilants car nous subirons des pressions continuelles des Américains pour réduire ces tarifs d'importation. Nous devrons continuer de maintenir la viabilité de nos fermes familiales à n'importe quel prix.

Une nation qui ne peut nourrir son peuple n'est pas une nation souveraine. C'est pourquoi je suis très fier que le ministre des Finances ait maintenu les principaux filets de sécurité aux agriculteurs, y compris le Programme d'assurance du revenu brut et le Compte de stabilisation du revenu net.

Permettez-moi maintenant de faire quelques commentaires aux honorables députés de l'opposition officielle, et plus spécifiquement à leur chef. Premièrement, je voudrais leur parler de mes antécédents. Mes ancêtres sont arrivés dans la belle ville de Québec vers 1658. Je suis très fier d'être de la même lignée qu'un des plus grands Canadiens, Sir Wilfrid Laurier. Ils ont ensuite déménagé en Ontario aux environs de 1889 pour faire l'exploitation forestière et défricher des terres de roches. Je suis très fier que malgré des combats et des défis énormes nous soyons parvenus à maintenir, non seulement notre langue, mais aussi notre culture franco-ontarienne.

Ma famille a été choisie l'an dernier comme la famille francophone de l'année par l'ACFO Nipissing pour son apport au développement de la culture franco-ontarienne.

Mon comté est composé d'une population d'environ 30 p. 100 de francophones, mais aussi de citoyens de descendance ukrainienne, polonaise, italienne et autres, dont 45 p. 100 d'anglophones qui sont venus nous aider à défricher et développer une terre parfois hostile. J'ai l'intention de défendre les droits de toutes ces minorités à part égale.

Je suis doublement fier que, bien que mon comté contienne six municipalités à se déclarer unilingues anglophones bien avant Sault-Sainte-Marie, je sois le premier francophone à se faire élire dans la circonscription de Timiskaming-Rivière-des-Français et ce, par la plus grande pluralité dans l'histoire du comté.

C'est pourquoi j'ai écouté le discours du chef de l'opposition avec beaucoup d'anxiété et d'appréhension. J'ai cru comprendre pendant la campagne électorale qu'il promettait aux Québécois et aux Québécoises de s'occuper d'abord et avant tout de relance économique et de création d'emploi. C'est pour cette raison, je crois, que beaucoup de Québécois ont voté pour son parti. Pourtant, presque tous ses discours ont porté sur le négativisme et sur son agenda séparatiste. Les commettants de leurs comtés du


1771

Québec ne sont pas différents de ceux de Timiskaming-Rivière-des-Français. Ils désirent avoir du pain sur la table et la dignité de gagner honorablement leur vie.

Aussi, je voudrais mettre en garde les honorables députés de l'opposition que s'ils ne mettent pas sur la sellette leur option séparatiste et collaborent avec le gouvernement pour remettre le Canada au travail, ils devront payer, en tant que parti, un prix politique énorme.

De plus, le fait que le chef de l'opposition fasse toujours référence au Canada hors Québec comme au English Canada est un affront aux millions de francophones hors Québec, de même qu'aux millions de Canadiens d'autres origines.

J'ai eu l'opportunité et la joie de visiter à maintes reprises la belle ville de Québec, ainsi que d'autres régions du Québec, et je me suis senti chez moi. Ces régions font partie de mon héritage et de mon patrimoine autant que n'importe quel résidant du Québec. J'invite donc mes collègues du Bloc québécois, plus spécialement ceux du nord-ouest québécois, à collaborer avec nous pour mettre en vigueur nos politiques minières, forestières, agricoles, pour continuer la voie maritime de la rivière Outaouais, pour développer conjointement notre industrie touristique, pour la relance économique et la création d'emplois.

Cherchons ce qui nous unit, plutôt que ce qui nous divise et ensemble, rebâtissons notre pays.

(1135)

M. Yvan Bernier (Gaspé): Madame la Présidente, je voudrais féliciter mon confrère de Timiskaming-French River. Permettez-moi, cependant, de ne pas être tout à fait d'accord avec les propos qu'il vient de tenir. On parle des souverainistes. Oui, je suis fier d'être souverainiste, mais je suis d'autant plus fier que notre chef en ait parlé aussi durant la campagne électorale. Il y a une deuxième qualité qui caractérise les membres du Bloc québécois, celle d'être réaliste.

Le budget qu'on nous a présenté cette semaine s'attaque aux acquis sociaux que l'on a. On en a la preuve. En écoutant parler les citoyens dans nos criconscriptions, on a vu l'impact que les coupures, la baisse de l'assurance-chômage, le nombre de semaines qu'on augmente pour être admissible aux prestations et les autres mesures de réforme qui s'en viennent et que le ministre du Développement des ressources humaines est en train de préparer, représentaient pour eux. Ça nous laisse perplexes, ça nous fait peur et ça nous donne raison d'être fiers d'être souverainistes et, en plus, d'être réalistes.

Ce n'est pas une question de rechercher des divisions, de faire des chicanes ou de faire de la politicaillerie sur le fait d'être Québécois ou d'être Canadien. Ce qu'on nous a présenté, c'est un budget. Mon confrère en a parlé plus abondamment. Je ne peux pas comprendre que l'on cherche à faire des formes de division là-dedans. Mais puisqu'on en parle, je tiens à répéter que la deuxième qualité d'un bloquiste souverainiste est d'être réaliste en disant aux Canadiens: Faites attention, vous avez voté-pour ceux qui l'ont fait-pour les libéraux. Nous, on a toujours dit qu'il n'y avait pas beaucoup de différence entre les libéraux et les conservateurs; on parlait de blanc bonnet et de bonnet blanc durant la campagne.

Si on avait une autre campagne à faire demain matin, j'utiliserais, en parlant de la différence entre les conservateurs et les libéraux, la nouvelle expression suivante: bonnet blanc et cache-oreilles rouge. Il nous manque un morceau et on est en train de nous déshabiller. C'est ce que je voulais lui transmettre.

M. Serré: Madame la Présidente, d'un côté, on a le Parti réformiste qui nous dit qu'on n'a pas fait assez de coupures; de l'autre, on a le Bloc québécois qui nous dit qu'on en a trop fait. Par contre, ils veulent qu'on réduise le déficit, mais il faut arrêter de couper, puis il ne faut pas augmenter les taxes non plus, comme on l'a fait pour les corporations et pour les mieux nantis du pays.

Il y a un comique philosophe bien connu au Québec du nom d'Yvon Deschamps qui a très bien résumé ce que ces gens-là désirent: «Un Québec indépendant dans un Canada uni.»

[Traduction]

Je dois dire qu'il faut choisir. On ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre.

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Madame la Présidente, les gouvernements se suivent et se ressemblent. Telle est, en tout cas, l'impression très nette qui se dégage à la lecture du Budget du 22 février dernier, une fois percé le voile des apparences et coutournées les nombreuses jongleries statistiques qui l'émaillent.

On prétendait pourtant, de l'autre côté de la Chambre, avoir compris deux ou trois choses. La première: l'impérieuse nécessité de réduire significativement le déficit fédéral, pour renverser la spirale déréglée de l'endettement; la deuxième: la perte de crédibilité qui résulte de l'utilisation d'hypothèses «gonflées» à propos de l'évolution économique future; la troisième, l'obligation de franchise et de transparence, dans la mesure où on veut embarquer le public dans le coup, le public qui paie et qui n'apprécie pas qu'on le prenne pour ce qu'il n'est pas.

Il y avait aussi un quatrième élément, dont le nouveau gouvernement donnait l'impression de s'éloigner de plus en plus, au fur et à mesure qu'approchait la date fatidique du Budget. Le fédéral est incontestablement l'initiateur de la spirale de l'endettement, donc de la crise budgétaire dans laquelle le Canada est plongé. Il devrait donc, en toute logique, payer de sa personne, c'est-à-dire balayer devant sa porte.

Comme le fédéral avait reconnu en décembre, notamment à la conférence des premiers ministres, le problème des chevauchements de juridictions et de politiques, certains se permettaient d'espérer quand même.

(1140)

Hélas, sur chacun de ces quatre plans, le Budget constitue une déception d'autant plus surprenante que le gouvernement dispose, au tout début de son mandat, d'une «fenêtre d'opportunité» large à souhait, non seulement politique mais aussi économique. Une reprise, si faible soit-elle, autorise tout de même plus de latitude qu'une récession. L'occasion était belle, elle fut ratée.


1772

Mais venons-en à la substance. Toute personne non avertie du vocabulaire propre aux ministres des finances successifs aurait conclu à partir de la juxtaposition des milliards de coupures annoncées à droite et à gauche et du spectaculaire rebondissement des recettes fédérales que le déficit fédéral allait enfin connaître dès la prochaine année, à une véritable inversion de tendance. Or, il n'en est rien.

On passe d'un déficit délibérément gonflé, en 1993-1994, à 45,7 milliards, à un déficit de presque 40 milliards pour l'année qui vient. Le plan budgétaire du gouvernement nous apprend même que le déficit «fondamental» de 1993-1994, c'est-à-dire à l'exclusion des facteurs ponctuels, s'élèvera à 42,1 milliards, et qu'en l'absence de tout changement politique, le déficit de la prochaine année aurait diminué à 41,2 milliards.

Comparons cette dernière donnée, 41,2 milliards, au déficit annoncé par le ministre des Finances qui est de 39,7 milliards: il faut en déduire que tout ce brassage gouvernemental, tous ces déplacements de chiffres ont, comme résultat net, une très modeste diminution du déficit de 1,5 milliard de dollars. Le ministre des Finances veut nous convaincre qu'il mérite la médaille d'or de la réduction du déficit. En réalité, il mérite une médaille de papier.

Pourquoi une médaille de papier? Parce que sur une médaille de papier, il y a deux faces sur lesquelles on peut inscrire d'un côté «recettes», et de l'autre, «dépenses». Lorsqu'on les détaille, on s'aperçoit que le supposé «exploit» du ministre des Finances repose entièrement sur une progression si élevée des recettes qu'on en reste interloqué, d'autant plus que ses perspectives économiques pour 1994 s'avèrent à la fois réalistes et modestes. Mais cela ne donne pas grand-chose si on n'en tire pas les conclusions appropriées. Qu'on en juge: même en écartant les facteurs ponctuels, les recettes budgétaires n'auront progressé que de 1,2 p. 100, entre 1992-1993 et 1993-1994, alors que le PIB nominal connaissait, lui, une croissance de 3,3 p. 100.

Soudain, grâce à la baguette magique du ministre des Finances, les recettes budgétaires, exclusion faite de l'élargissement de l'assiette fiscale, vont s'envoler de 4,6 p. 100 pour une progression nominale du PIB de 3,9 p. 100. Tout d'un coup, comme ça!

Il faut donc poser la question qu'a évitée le ministre des Finances: quel serait l'impact d'une progression plus réaliste des rentrées fiscales, disons plus 3 p. 100? Le déficit ne serait plus de 39,7 milliards, mais de 42,9 milliards. Le déficit «fondamental» de 1994-1995 ne bougerait donc pas relativement à celui de l'année fiscale qui se termine dans un mois. À première vue, cela semble bien le parcours le plus probable.

Le gouvernement a reculé devant la levée de boucliers provoquée par ses ballons d'essai concernant les REER et les régimes d'assurance-santé offerts par l'employeur. Mais il va tout de même chercher un milliard de dollars de plus dans les poches de la classe moyenne au cours des trois prochaines années, alors que certains abris fiscaux, réservés aux plus riches, demeurent indemnes. Pourtant, on nous avait parlé de plus grande équité fiscale, mais c'est reporté à plus tard.

Pour que les prévisions gouvernementales de recettes budgétaires aient eu une chance de se concrétiser, il faudrait consacrer plus de ressources à la relance de l'emploi, en coupant davantage dans les dépenses fédérales moins névralgiques. De la sorte, il y aurait une véritable réduction du déficit, avec, en prime, un effet favorable sur les taux d'intérêt à plus long terme et donc sur la consommation et l'investissement.

Le gouvernement se comporte comme si le Canada ne traversait pas une crise économique structurelle. L'année 1994 a mal commencé sur le front de l'emploi, puisque 38 000 emplois ont été perdus le mois dernier. De sorte que, près de deux ans après la fin de la récession, 47 p. 100 des emplois qu'elle a fait perdre au Canada n'ont pas encore été récupérés. La création nette d'emplois en 1993, 143 000, n'a même pas suffi à absorber les nouveaux arrivants sur le marché du travail. Au Québec, il reste encore 60 p. 100 des emplois perdus à récupérer. Et l'économie canadienne fonctionne encore bien en decà de son potentiel. Le ministre des Finances prévoit lui-même une création de 173 000 emplois en 1994, ce qui suffit à peine pour les nouveaux arrivants et ne permet donc pas de continuer le rattrapage.

(1145)

Un des obstacles à une véritable reprise de l'économie canadienne réside dans le niveau encore élevé des taux d'intérêt à plus long terme, à cause notamment de cette énorme dette suspendue comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête des Canadiens. Historiquement, les taux d'intérêt à long terme ne dépassaient pas, en termes réels, 4 p. 100. Aujourd'hui, ils sont encore à 6 p. 100 et, plus grave encore, ont recommencé à augmenter depuis quelques semaines sous la pression de l'économie américaine.

[Traduction]

La seule façon de bénéficier à nouveau de l'élan que confèrent les faibles taux d'intérêt à long terme, c'est de réduire considérablement le déficit fédéral. Quand on a une dette de 511 milliards de dollars, une baisse de un point des taux d'intérêt représente au-delà de 5 milliards de dollars de moins à payer en intérêt. La moitié de la dette fédérale est à court terme, tandis que l'autre moitié est à long terme, c'est-à-dire sur plus d'un an. Cet élan peut se maintenir, mais il doit être encouragé par un gouvernement qui sait où il va. Il ne semble pas que ce soit le cas en l'occurrence.

À l'heure actuelle, le ministre des Finances est trop optimiste dans ses prévisions concernant les taux d'intérêt à long terme. Dans quelques mois, il semblera que le gouvernement n'a toujours pas réussi à maîtriser le déficit fédéral, et la croissance économique s'en trouvera encore une fois considérablement retardée. La création d'emplois devait être le cri de ralliement des libéraux. Le ministre des Finances prévoit une véritable relance de l'emploi, mais malheureusement pas cette année. Ce sera pour l'an prochain seulement.

Cela me rappelle un plaque métallique qu'on peut voir dans quelques brasseries et cafés français, une plaque portant l'inscription suivante: «Demain, bière gratuite.» Mais demain seulement, car quand on lit la plaque, c'est toutefois aujourd'hui.

Entre temps, que sommes-nous censés faire d'un budget qui reconnaît que l'une des premières mesures prises en décembre dernier par le nouveau gouvernement a entraîné et occasionne encore des pertes d'emplois? C'est écrit noir sur blanc à la page 2 du document d'information sur les modifications proposées au Régime d'assurance-chômage. Selon ce document, la réduction


1773

du taux de cotisation, qui passera de 3,07 $ à 3 $ en janvier prochain:

. . . allégera sensiblement le fardeau financier des entreprises. D'ici la fin de 1996, cette mesure permettra la création de 40 000 emplois de plus que si l'on avait permis une hausse du taux de cotisation.
Quarante mille emplois, ce n'est certainement pas à dédaigner en ces temps incertains. Cela peut représenter un milliard de dollars en salaires.

Le gouvernement réduira donc la hausse des cotisations qu'il a lui-même décrétée cette année, mais dans dix mois seulement. Entre temps, cette hausse cause la perte de milliers d'emplois. C'est curieux.

[Français]

Mais comment expliquer que les coupures annoncées de quelques milliards n'aient aucun impact réel sur le déficit? C'est qu'il y a deux types de coupures: les vraies et les fausses. Depuis plusieurs années, les ministres des Finances sont devenus de véritables spécialistes en matière de fausses coupures.

Et qu'est-ce qu'une fausse coupure? Une fausse coupure, c'est lorsqu'on annonce une réduction future de dépenses par rapport à ce qui avait été prévu auparavant. Et ce qui était généralement prévu auparavant, bien sûr, c'étaient les augmentations. Réduire ou supprimer cette augmentation devient, dans le jargon des technocrates du ministère des Finances, une coupure. Un salarié qui voit sa hausse de salaire passer de 5 à 3 p. 100 subit dans cette approche une coupure de 2 p. 100, même si la réalité consiste en une hausse de 3 p. 100, qui sera comptabilisée comme telle dans le budget de l'entreprise ou du ministère.

Une telle approche présente évidemment plusieurs avantages pour le gouvernement. Cela permet, d'une part, des effets de menton pour les médias puisque les milliards s'accumulent vite à ce jeu, d'autant plus qu'il n'y a aucune limite de temps. On parlera donc des coupures pour les trois ou, pourquoi pas, les cinq prochaines années. Et comme on a pris l'habitude d'additionner les coupures sur plusieurs années, même si cela ne fait qu'ajouter de la confusion au débat, on arrive rapidement à des sommes impressionnantes, qui permettent de se «péter les bretelles.»

(1150)

Mais ce que cela permet, en réalité, c'est d'entretenir la confusion dans l'opinion publique quant à la détermination du gouvernement à prendre le taureau par les cornes. D'autant plus que les documents budgétaires courants, et les tout derniers ne font pas exception à la règle, ne comprennent jamais les dépenses prévues au budget précédent. Cela facilite les tours de passe-passe et des accrocs plus ou moins importants à la vérité.

Avant d'en citer quelques exemples, vous me permettrez, madame la Présidente, de dire que, non seulement nous ne sommes pas impressionnés par tous ces effets spéciaux, mais nous sommes carrément opposés à cette absence de transparence. Les belles paroles du ministre des Finances en novembre dernier, à l'Université de Montréal, sont tombées dans la corbeille des intentions vite oubliées. Mais on ne réglera pas la grave crise de l'endettement en jouant à cache-cache avec les partis d'opposition et les contribuables.

Je voudrais souligner ici une petite distorsion qui peut ressembler à une peccadille, par rapport aux sommes en jeu, mais qui est peut-être symptomatique d'un dangereux état d'esprit. On semble en effet se dire que, puisque personne ne se donnera la peine de vérifier, on peut se permettre de maquiller la vérité. Alors, voici donc un exemple de ce genre d'attitude à laquelle la rigueur traditionnelle du ministère des Finances ne nous avait pas habitués jusqu'ici. Le plan budgétaire indique à la page 37, et je cite: «Les budgets de l'aide internationale sont donc réduits de 2 p. 100 en 1994-1995 par rapport à 1993-1994.» Or, à la page 39, cette réduction est chiffrée à 91 millions de dollars pour l'année 1994-1995. Cela représente 3,4 p. 100 par rapport aux dépenses de cette année prévues à 2,7 milliards de dollars et non 2 p. 100. Est-ce qu'il faudra vérifier tous les pourcentages dans le plan budgétaire? Ou alors, si nous n'avons pas raison, où est l'astuce? Qu'a-t-on à maquiller? Qu'on nous réponde!

Le budget annonce de nouvelles réductions dans les subventions aux entreprises, aux pages 37 et 38, et je cite: «Ces réductions s'ajoutent aux compressions des subventions et contributions annoncées dans le Budget d'avril 1993. En 1996-1997, les subventions aux entreprises seront de l'ordre de 3,1 milliards de dollars, en baisse d'un peu moins de 10 p. 100 par rapport à leur niveau de 3,4 milliards de dollars en 1993-1994.» Cette dernière phrase est exacte, mais elle contredit totalement la première. Car les dépenses prévues à ce poste dépassent aujourd'hui les dépenses prévues au budget d'avril 1993, qui diminuaient régulièrement de 3,3 milliards en 1993-1994, à 2,5 milliards de dollars en 1997-1998.

Tout cela est bien compliqué, bien difficile à comprendre pour qui que ce soit, mais qui permet, d'une façon générale, au ministère des Finances ou au ministre des Finances, de s'échapper dans les distorsions qu'il veut apporter à la compréhension du débat. L'absence de transparence, dans ce cas-ci en particulier, se double d'une absence de cohérence.

C'est doublement gênant, d'une part parce qu'il y a là une entorse à la vérité, mais aussi parce que cela remet en question toute la cohérence du tableau 8, très important, de la page 39, qui porte sur les réductions de dépenses consécutives à la restructuration des programmes fédéraux, et donc, remet en cause la cohérence du calcul du déficit. En effet, certains items de ce tableau, l'aide internationale et la défense, par exemple, sont relatifs au Budget d'avril 1993. Mais d'autres items ne le sont pas, et ne représentent même pas de nouvelles «fausses coupures.» Les références sont donc complexes et confuses: il y a des oranges et des pommmes, et le commun des mortels n'arrive pas à démêler l'écheveau.

Ce qui est vrai pour les subventions aux entreprises l'est également, au moins en ce qui concerne 1994-1995, pour les dépenses de fonctionnement du gouvernement fédéral. Notons ici, et ce n'est pas pour nous rassurer, que celui-ci éprouve beaucoup de difficultés à contrôler ses dépenses de fonctionnement: au cours des deux dernières années fiscales, ces dépenses ont nettement dépassé l'enveloppe prévue dans les budgets pertinents. Pour 1994-1995, le plan budgétaire annonce que de nouvelles compressions s'ajouteront à celles figurant dans le Budget d'avril 1993, compressions évaluées à 468 millions de dollars pour 1994-1995. Or le Budget de mardi indique, pour la nouvelle année fiscale, des dépenses de fonctionnement identiques à ce qu'avait prévu le Budget d'avril 1993. C'est dans le secteur de la défense, monsieur le Président-je viens de passer du féminin au


1774

masculin, et les gens qui liront le hansard éventuellement comprendront que le Président vient de prendre la place de la Présidente-donc, c'est dans le secteur de la défense qu'on trouve le gros lot des fausses coupures: sept milliards sur cinq ans, par rapport au budget d'avril 1993. Dans ce cas-ci, cela semble revêtir une certaine consistance. Mais la vraie coupure s'avère beaucoup plus modeste, puisque l'enveloppe de la défense passera de 11,3 milliards en 1993-1994 à 10,5 milliards en 1995-1996.

(1155)

Comme il n'y aura pas, en 1994-1995, de véritables réductions dans les dépenses de fonctionnement du fédéral ou dans les subventions aux entreprises, et comme le problème des chevauchements restera entier, il fallait que le ministre des Finances bouge quelque part pour au moins donner l'impression d'un mouvement. Qu'est-ce qui restait? Il restait les dépenses sociales. Alors, allons-y avec les gros sabots.

Qu'on nous comprenne bien, nous aimerions, nous souhaiterions de tout coeur voir l'enveloppe de l'assurance-chômage réduite à néant faute de chômeurs, sinon qu'en transit entre deux emplois. Mais le ministre réduit l'enveloppe, faute de pouvoir réduire le chômage. Il procédera plus tard à une réforme globale qui intégrera, paraît-il, la formation et le recyclage, mais en attendant, il frappe de plein fouet. Il estime lui-même que 85 p. 100 des chômeurs verront leurs prestations réduites, et seulement 15 p. 100 connaîtront une bonification.

Les régions défavorisées seront donc particulièrement touchées. Rappelons que les propres perspectives du ministre pour 1994 ne brillent pas par leur éclat. L'aide sociale, financée au premier chef par les provinces, verra donc la liste des demandes s'allonger.

Or, au même moment, le ministre des Finances réduit ses transferts monétaires aux provinces de 800 millions-je me réfère au tableau 17 de la page 64-800 millions de dollars de réduction au titre des transferts monétaires. La valeur des transferts de points d'impôt augmente plus que cela, mais ce sont les transferts monétaires, les seuls que le fédéral peut réguler, qui importent du point de vue de la politique du fédéral à cet égard. Donc, la lourde responsabilité du fédéral dans la crise budgétaire, la pratique du pelletage du déficit dans la cour des provinces demeurent populaires. Il faudra reparler de cette note salée.

Mais encore une fois, l'évaluation précise du manque à gagner en matière d'assurance-chômage devra attendre. Le ministre des Finances parle d'économies de 725 millions en 1994-1995, mais par rapport à quoi? Ce n'est pas explicite. Ce qui étonne, c'est le coût total des prestations d'assurance-chômage qui ne bouge pratiquement pas de 1993-1994 à 1994-1995, malgré les nouvelles règles et la stabilité du nombre des chômeurs. Les autres estimations des dépenses budgétaires étant ce qu'elles sont, nous sommes en droit d'exiger la simulation détaillée du ministère des Finances.

Y a-t-il, monsieur le Président, indice plus significatif de l'absence de fibre morale de ce gouvernement que cette intention affichée de réaliser les compressions les plus sévères, 5,5 milliards sur trois ans, dans ce secteur spécifique? Les libéraux ont déchiré leur chemise pendant la campagne électorale à propos de la protection des programmes sociaux. Ils sont en train de la recoudre avec du gros fil blanc.

Sur la copie déposée par le ministre des Finances, il convient d'inscrire une seule annotation: «Ce budget n'est qu'un immense trompe-l'oeil». Ce n'est pas ce que le Canada et le Québec attendaient.

[Traduction]

Le Président: Tous les députés le comprendront certainement, il n'y aura pas de période de questions et d'observations, puisque le chef de l'opposition a un temps de parole illimité et que les questions et observations ne sont permises qu'après les interventions de 20 minutes.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, peut-être y aurait-il consentement unanime pour avoir tout de même une période de questions de dix minutes.

Nous avons tous les jours l'occasion, à la Chambre, d'interroger les ministres ainsi que les députés qui font des discours, y compris le chef du Parti réformiste, et le gouvernement, plus particulièrement, répète sans cesse que le chef de l'opposition est en quelque sorte responsable de toutes les politiques adoptées ici.

Il y aurait peut-être consentement pour permettre une période de questions de dix minutes.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

(1200)

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, ce processus, ce fonctionnement constitue un privilège de l'opposition officielle, et l'on ne veut pas remettre en question le rôle de l'opposition officielle, tout comme l'actuel premier ministre le faisait alors qu'il était chef de l'opposition. Donc, nous respectons tout à fait le fonctionnement normal de cette Chambre, tout en nous inspirant de l'actuel premier ministre alors qu'il siégeait de ce côté-ci de la Chambre.

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je rappellerai au Bloc québécois que l'actuel premier ministre acceptait de répondre à des questions après ses discours lorsqu'il était chef de l'opposition. Il ne le faisait pas nécessairement toujours, mais il l'a fait. Malheureusement, l'actuel chef de l'opposition ne prise peut-être pas qu'on lui rappelle son passé comme membre du gouvernement précédent.


1775

J'ai pris part à beaucoup de débats sur des budgets et des autorisations d'emprunt depuis cinq ans, mais je l'ai toujours fait comme membre de l'opposition. La critique du budget était d'autant plus facile que le gouvernement précédant n'atteignait jamais les objectifs qu'il se fixait. Chaque année, il se livrait à de grands discours sur la lutte contre le déficit. Chaque année, il proposait de nouvelles coupes dans les dépenses et de nouvelles hausses d'impôts. Pourtant, le gouffre s'est creusé toujours davantage, au point que nous avons cette année un déficit de 45 milliards de dollars.

Le problème fondamental, négligé par le gouvernement précédent, était la nécessité de prendre au sérieux sa responsabilité à l'égard de la transformation de l'économie canadienne, qui doit reposer sur le savoir, les compétences, l'innovation et l'utilisation de la technologie.

[Français]

Nous vivons dans un nouveau marché mondial. Des changements structurels rapides ont lieu dans nos industries traditionnelles et ces changements auxquels s'ajoute la mondialisation ont suscité la confusion et l'incertitude chez les Canadiens.

[Traduction]

Nous avons raison d'espérer. La nouvelle économie offre des possibilités illimitées aux innovateurs, aux créateurs et aux courageux. Ce budget est une invitation à profiter des possibilités qu'offre la nouvelle économie. C'est un programme axé sur la croissance économique. C'est un programme qui vise à remettre le Canada au travail. Il table sur nos forces, comble nos lacunes et ouvre de nouveaux horizons.

Une certaine vision de l'économie canadienne se trouvait au coeur de notre livre rouge paru durant la campagne électorale. Cette vision se retrouve intacte dans le budget. Pour que cette vision se concrétise, le Canada doit s'adapter à la nouvelle économie, se servir des technologies nouvelles pour accroître nos capacités de production traditionnelles, souscrire aux principes du développement durable ainsi que favoriser la croissance de la petite entreprise à l'aide de la coopération et d'une politique pertinente.

Notre problème fondamental, c'est que la société n'a plus les moyens de maintenir sa consommation au niveau actuel. Les mesures prévues dans le budget réduisent considérablement les dépenses du secteur public fédéral. Cependant, nous devons quand même faire face à la réalité, soit que la seule façon de maintenir notre niveau de vie et de répondre aux attentes des citoyens en matière de services publics, c'est de revitaliser la capacité de création de richesses de notre économie.

La notion que le gouvernement n'a pas de rôle à jouer dans le succès de l'économie est un point de vue que défendaient nos prédécesseurs et que défend maintenant le chef de l'opposition officielle. Ce point de vue a été largement discrédité dans les nouvelles économies en plein essor qui sont en train de devenir rapidement nos principaux concurrents sur le marché international.

Le monde est en train de passer à une économie fondée sur les ressources naturelles et la production en série, à une économie où les innovations sont le résultat de la R-D scientifique.

(1205)

[Français]

Les connaissances et les aptitudes, non plus la situation géographique et les ressources naturelles, sont maintenant à la base des avantages concurrentiels dans le domaine de l'agriculture et des mines, tout aussi bien qu'en informatique.

Les politiques publiques peuvent influencer les connaissances et les aptitudes. Le gouvernement peut favoriser la création et l'amélioration de tels avantages.

[Traduction]

Par ailleurs, avec l'élimination graduelle des barrières commerciales, de nouveaux rôles sont dévolus aux gouvernements dans la création des conditions favorables à la réussite économique à l'échelle nationale. Ainsi, les gouvernements doivent se montrer innovateurs et faire preuve de leur savoir-faire stratégique dans l'utilisation de leurs ressources, qui sont nécessairement limitées, et dans l'orientation à donner à l'économie nationale.

Notre stratégie tient compte des rapides changements qui interviennent dans la monde d'aujourd'hui. Notre stratégie tient compte du fait que les principaux concurrents des entreprises canadiennes ne sont pas à portée de main, qu'ils sont à l'autre bout du monde. Notre stratégie tient compte du fait que notre ressource la plus précieuse, ce sont les personnes, leurs compétences, leurs connaissances et leur désir d'entreprendre avec succès.

Dans cette stratégie, chacun doit se préparer à l'avenir, c'est-à-dire être ouvert à l'idée de devoir vraisemblablement changer de carrière et acquérir de nouvelles connaissances théoriques et pratiques tout au long de sa vie professionnelle. Dans cette stratégie, les sociétés doivent reconnaître qu'il est important de perfectionner sans cesse leurs produits et de trouver de nouveaux marchés, tant au Canada qu'à l'étranger. Pour cela, il leur faut investir constamment dans leurs ressources humaines et, sans délai, acquérir ainsi qu'utiliser de nouvelles techniques, de nouveaux procédés et de nouvelles façons de résoudre de vieux problèmes. Dans cette stratégie, les gouvernements doivent créer un cadre qui soit de nature à encourager les particuliers et les sociétés à innover, à se perfectionner, à développer leurs champs d'activité et à créer des emplois.


1776

Qu'est-ce que cela exige du gouvernement? D'abord, il faut assainir la situation économique. Le ministre des Finances a donc proposé un train de mesures douloureuses, mais réalistes, dont l'objectif est de réduire le déficit à 3 p. 100 du PIB sur une période de trois ans.

[Français]

Nous avons mis en oeuvre une politique monétaire claire et stable jusqu'à la fin de la décennie. Nous avons signé deux accords commerciaux de première importance, l'ALENA et le GATT, qui augmentent et assurent l'accès du Canada aux marchés mondiaux. Et nous sommes en train de négocier un accord global en vue d'éliminer les obstacles internes au commerce national dans un secteur clé d'ici le 30 juin prochain.

[Traduction]

Deuxièmement, il faut assainir la situation commerciale du Canada. J'entends, par là, qu'il faut nous doter d'un cadre fiscal et réglementaire qui permette aux entreprises canadiennes de réussir, plutôt que de leur mettre des bâtons dans les roues. Sur le chapitre de la réglementation de la concurrence et de la protection des consommateurs, il nous faut des lois susceptibles de contrôler le marché et de donner aux entrepreneurs canadiens la possibilité d'atteindre la masse critique nécessaire à la conquête du monde.

[Français]

Nous devons nous efforcer d'atteindre l'excellence en matière d'éducation et de formation et faire disparaître les barrières et les entraves à l'initiative personnelle.

[Traduction]

Troisièmement, nous devons changer la mentalité des employeurs et des employés pour les amener à adopter les nouvelles technologies.

Les progrès dans le domaine des sciences et de la technologie entraînent une croissance de la productivité partout dans le monde. En ces années 90, aucun pays ne peut s'isoler du progrès. Nous devons nous organiser pour rester à la fine pointe de la technologie et, si c'est possible, la dépasser. C'est essentiel, si nous voulons créer des emplois bien rémunérés et assurer notre croissance au cours de cette décennie.

L'ouverture des marchés dans le monde crée de nouveaux débouchés pour les entreprises canadiennes. En Amérique latine et en Asie du Sud-Est, les économies nationales croissent à un rythme de 10 p. 100 et plus. Pourtant, 80 p. 100 du commerce du Canada se fait encore avec une seule nation, les États-Unis. Cent firmes seulement ont profité des innombrables débouchés qui ont été créés dans le monde depuis 1990, ce qui représente 60 p. 100 de nos exportations. Seules 7,6 p. 100 des firmes canadiennes font le commerce d'exportation. Ce n'est pas suffisant pour un pays qui dépend autant que le nôtre du commerce pour maintenir son niveau de vie.

(1210)

Dans une économie mondiale axée sur la connaissance, la technologie et les gens sont ce qui fait la différence entre une firme à Singapour et une firme à Montréal. Pourtant, moins de la moitié de 1 p. 100 des compagnies canadiennes font leurs propres travaux de recherche et de développement. Non seulement cela, les travaux de recherche et de développement qui aboutissent à la fabrication de produits et à l'établissement de services susceptibles de créer des emplois chez nous sont insuffisants. Les compagnies canadiennes, en particulier les petites entreprises, n'ont pas su intégrer la technologie de pointe aussi vite que leur concurrents à l'étranger.

[Français]

Le message est clair. Le nombre d'entreprises qui se livrent à la recherche et au développement et qui investissent dans les technologies de pointe doit augmenter radicalement.

[Traduction]

Comment allons-nous faire pour que plus d'une compagnie canadienne sur dix se lance dans le commerce des exportations? Comment accroître de façon spectaculaire le nombre de compagnies canadiennes qui effectuent des travaux de recherche et de développement? Comment allons-nous arriver à égaler nos concurrents mondiaux sur le plan de l'utilisation de nouvelles technologies de fabrication et de transformation? Ce sont là autant de questions auxquelles nous devons trouver une réponse.

[Français]

Pour réussir, nous devons adopter une économie axée sur l'innovation. Pour réussir, nous devons compter sur les forces des petites entreprises qui offrent les plus grandes possibilités de croissance et de création d'emploi. Pour réussir, nous devons aider les petites entreprises là où elles ont fait preuve de faiblesse, c'est-à-dire au chapitre de la formation, des exportations, de la technologie de pointe et du financement.

[Traduction]

Le ministre des Finances et moi avons déposé, dans le cadre du budget, un plan d'action destiné à aider les petites entreprises à prendre de l'expansion et à continuer de créer des emplois pour les Canadiens. C'est un très bon plan par lequel le gouvernement se dit prêt à aider les entreprises à prendre des risques et à innover. C'est en effet la petite entreprise qui, au Canada, présente les plus grandes possibilités de croissance dynamique et de création d'emplois.

En tête de notre programme de croissance se trouve le processus de consultation qui a été lancé avec le document de travail sur les petites entreprises et qui montre que nous sommes prêts à écouter et à agir. Également en tête de ce programme figure la nécessité de revoir notre approche à l'égard de la science et de la technologie afin de mieux appuyer une économie axée sur la connaissance.

Dans le cadre du budget, nous avons annoncé une réévaluation complète de la politique des sciences et de technologie qui commencera par la publication d'un document de travail au printemps. Ce processus s'inspirera des initiatives prévues dans le budget et débouchera sur une nouvelle politique à long terme en matière de sciences et de technologie qui sera axée sur l'utilisation de nos technologies et de nos ressources de recherche et de développement dans les services et les produits à forte valeur ajoutée.

L'économie axée sur la connaissance se caractérise principalement par la rapidité du transfert de l'information. La réussite économique tient à une circulation de l'information plus libre et plus souple. Dans ce milieu en rapide évolution, la mise en place, pour les Canadiens, d'une autoroute électronique leur permettant d'être rapidement informés et d'être en contact avec les différents médias devient critique pour l'édification de notre nouvelle économie.


1777

[Français]

Le Canada est un chef de file dans le domaine des télécommunications et nous pouvons compter sur ses forces. L'investissement, provenant surtout du secteur privé, est énorme. Je travaillerai de concert avec l'industrie et les utilisateurs de l'autoroute de l'information pour m'assurer que le rôle des gouvernements est à la fois vigoureux et créateur.

[Traduction]

Un seul budget ne suffit pas pour définir une stratégie de croissance économique. Une telle stratégie est au coeur même de la mission du gouvernement. J'ai parlé aujourd'hui de ce que nous allons faire, au cours des prochains mois, pour favoriser la croissance en ce qui concerne, notamment, les petites entreprises, les sciences et la technologie, puis l'autoroute électronique. Le débat d'aujourd'hui porte aussi sur ce que le gouvernement fait actuellement pour respecter les engagements qu'il a pris dans le livre rouge.

(1215)

La réponse est simple. Nous allons tenir ces engagements. C'est avec des capitaux que l'on peut concrétiser des idées et les utiliser pour fabriquer de nouveaux produits et offrir de nouveaux services. Un fonds d'investissement canadien sera créé pour fournir ces précieux capitaux. En quatre ans, nous verserons 100 millions de dollars à ce fonds et nous demanderons au secteur privé d'y contribuer également. Ce fonds sera en place d'ici le début du prochain exercice.

En collaboration avec l'Association des banquiers canadiens, nous travaillons à différents projets visant à améliorer le financement des petites entreprises. Nous prévoyons, entre autres, élaborer un code de conduite qui exposera clairement les liens entre les prêteurs et les emprunteurs. Nous chercherons de nouveaux et de meilleurs moyens de financer les opérations commerciales des entreprises qui reposent sur le savoir.

[Français]

Nous allons travailler avec le secteur industriel afin d'établir des réseaux capables d'aider les regroupements de petites entreprises à accomplir ce que chacune d'entre elles ne pourra réaliser isolément.

[Traduction]

Nos concurrents, surtout en Europe, reconnaissent que la mise en place de réseaux est essentielle pour permettre aux petites entreprises d'être compétitives sur la scène internationale et d'obtenir des avantages concurrentiels sur les plans de l'envergure, de la portée et de la rapidité.

Des réseaux sont particulièrement efficaces pour l'innovation. Grâce à eux, les petites entreprises peuvent mettre au point de nouveaux produits et offrir de nouveaux services, en adoptant et en adaptant des nouvelles technmologies et en se concentrant sur la commercialisation et l'exportation.

Nous améliorerons la diffusion des innovations et l'édification d'une culture des innovations dans les entreprises en engageant 15 millions de dollars, cette année, pour la création du Réseau canadien de technologie. Ce réseau permettra aux petites entreprises d'avoir accès aux renseignements les plus récents sur la technologie, les nouvelles techniques de gestion et les nouvelles occasions d'affaires sur le marché.

[Français]

Nous projetons l'établissement d'un programme de génie et de sciences qui permettra aux petites entreprises d'engager des ingénieurs et des scientifiques, des technologues ou des concepteurs industriels. Nous allons travailler en collaboration avec les provinces et l'industrie pour élaborer et coordonner la création de ce programme pour 1995.

[Traduction]

Pour aider à faire évoluer l'excellence en matière de recherche vers de nouveaux produits, une expansion de l'industrie et des emplois, nous allons affecter, cette année, 10 millions de dollars pour une programme de partenariats technologiques. Ce programme aidera les petites et moyennes entreprises à avoir accès aux résultats des recherches afin qu'elles puissent créer de nouveaux produits, de nouveaux services et de nouveaux emplois.

Il y a un potentiel de croissance considérable, au pays et à l'étranger, pour le secteur de la technologie environnementale, particulièrement pour la petite entreprise. Ce secteur devrait démarrer, et les Canadiens pourraient profiter considérablement de l'exportation et des emplois créés par les technologies environnementales.

La ministre de l'Environnement et moi examinons ce que fait le Canada pour les secteurs touchant la technologie environnementale. Lorsque cet examen sera terminé, nous déposerons un plan détaillé concernant ce secteur stratégique.

Les crédits de 800 millions sur 10 ans pour un nouveau programme spatial à long terme sont la preuve que le gouvernement est résolu à ce que le Canada poursuive son rôle de nation spatiale. Ce nouveau programme correspondra à nos moyens et s'appuiera sur les domaines où nous sommes à la fine pointe technologique, à savoir l'observation terrestre, la télédétection et les communications par satellite.

Pour améliorer notre capacité d'innovation, nous devons absolument disposer d'une base stable pour nos infrastructures de recherche. Le Conseil national de recherches du Canada jouera un rôle clé dans la mise en oeuvre des politiques du gouvernement fédéral en sciences et en technologie. Cette année, nous fournirons de nouvelles ressources au Conseil national de recherches pour qu'il s'acquitte de son mandat.

[Français]

Il est important que nous puissions encourager et préserver nos compétences dans le secteur de la recherche universitaire. Nous accordons une haute priorité à la recherche et au développement universitaires. C'est pourquoi nous continuons, cette année, à assurer le financement des divers conseils qui distribuent des subventions. À partir de l'année financière 1995-1996, nous leur consentirons une augmentation annuelle de l'ordre de 1,5 p. 100.

(1220)

[Traduction]

Le programme des Réseaux de centres d'excellence représente une partie importante de la capacité de recherche universitaire du Canada.

Nous nous assurons qu'il y a suffisamment de fonds pour appuyer la deuxième étape de ce programme. Au cours de cette deuxième étape, nous accorderons une plus grande importance à la capacité économique et commercial des réseaux de soutenir notre programme de croissance fondé sur l'innovation.


1778

Les Canadiens ont connu beaucoup de difficultés au cours de la dernière décennie. Beaucoup de nos concitoyens envisagent l'avenir avec plus d'anxiété que d'espoir. Le gouvernement a pour mission de leur offrir de l'espoir. Cependant, si cet espoir doit être significatif, il doit également être réaliste. Nous avons donc présenté dans ce budget un programme de relance de l'économie canadienne qui, à mon avis, répond aux défis et reconnaît les possibilités qui sont offertes au Canada.

Un jour, quelqu'un a dit à la Chambre: «À l'époque où nous vivons, l'industrie doit faire preuve d'initiative et d'ingéniosité. Nous devons être constamment à l'affût des changements qui s'opèrent actuellement dans le monde et saisir rapidement toutes les occasions de raffermir notre économie. Cela ne peut pas se faire du jour au lendemain, mais je suis convaincu qu'avec la collaboration de l'industrie et du gouvernement, nous pourrons bâtir un Canada et un monde meilleurs.»

Les Canadiens ont suivi les conseils de mon prédécesseur, C.D. Howe, qui a tenu ses propos dans cette Chambre en 1948. Les Canadiens ont fait preuve d'initiative et d'ingéniosité. Ils ont travaillé ensemble, ont saisi les occasions qui leur étaient offertes, ont mis le Canada sur la voie d'une croissance vigoureuse et sans précédent et ont contribué à bâtir un monde meilleur.

Nous possédons toujours cette initiative, cette ingéniosité et cette volonté de saisir toutes les occasions. J'ai la conviction que nous pouvons encore une fois les employer à bien, de sorte qu'au cours du siècle prochain nous puissions connaître une expansion égale à celle que nous avons vécue après la guerre.

J'ai hâte de collaborer avec tous les Canadiens et tous les députés à la réalisation de cet objectif.

M. John Williams (St-Albert): Avant tout, je dois dire à quel point j'ai apprécié les propos de mon collègue et son enthousiasme face à l'avenir brillant qui attend peut-être le Canada. Il a parlé d'autoroute électronique, ce qui est évidemment essentiel pour que notre pays conserve sa compétitivité dans les années à venir.

Il a parlé des possibilités d'exploitation des nouvelles technologies et d'un programme de 50 millions de dollars pour venir en aide aux entreprises de pointe. Il a parlé d'un programme visant à embaucher des scientifiques et des ingénieurs pour que nous puissions faire des progrès et mettre au point de nouveaux produits. Il a parlé d'un programme de 10 millions visant à permettre l'établissement de partenariats pour la mise en marché de nouveaux produits. Tout cela est absolument magnifique.

Voici la question que je pose au ministre: Si tous ces éléments sont tellement importants pour que le Canada puisse progresser et rester compétitif à l'échelle mondiale, pourquoi dépensons-nous six milliards de dollars pour réparer nos routes et nos égouts?

M. Manley: Je remercie le député de sa question, car je crois qu'il est important pour nous de comprendre la source de la croissance économique au Canada. Je pense que ce qui est essentiel dans les observations favorables qu'il a formulées au sujet de certains des investissements que nous souhaitons faire dans la superautoroute de l'information, dans la diffusion de la technologie et dans l'établissement de partenariats technologiques qui permettent de mettre sur le marché de nouvelles inventions, c'est qu'on perçoit cela comme un investissement dans la croissance pour l'avenir.

Statistique Canada a publié, cette semaine ou la semaine dernière, une analyse des raisons qui expliquaient le succès des petites et moyennes entreprises au Canada. On y précisait notamment qu'elles étaient disposées à investir dans la recherche et qu'elles étaient en outre très bonnes lorsqu'il s'agissait d'appliquer de nouvelles techniques.

Nous devons comprendre, lorsque nous dépensons, si nous consommons ou si nous investissons.

En ce qui concerne le programme d'infrastructure, il y a vraiment deux choses que je voudrais dire en réponse à la question du député. Tout d'abord, dans l'élaboration des critères relatifs au programme, on s'est fait un point d'honneur de veiller à ce que la définition soit assez large pour inclure les dépenses liées, par exemple, aux autoroutes électroniques, ainsi que tout ce qui pouvait favoriser les innovations, afin qu'on puisse investir dans la technologie.

(1225)

Je suis très heureux que la municipalité régionale d'Ottawa-Carleton, dont je représente une partie, ait choisi d'utiliser une partie des fonds reçus au chapitre du programme national d'infrastructure pour étendre son réseau de communications en investissant dans l'autoroute électronique pour sa région. Je pense que le gouvernement local a fait preuve d'une prévoyance exceptionnelle et je l'en félicite.

Cependant, on doit également comprendre que les programmes d'infrastructure traditionnels sont également des investissements dans la croissance économique pour l'avenir. Il est vrai qu'ils offrent des emplois à court terme, mais tout comme à certaines époques de notre histoire, ce sont les canaux ou les chemins de fer qui ont joué ce rôle. À l'heure actuelle, dans de nombreuses régions, ce sont les routes, les aéroports ainsi que les moyens de transport et de communication qui sont la source de la croissance économique; ils sont essentiels à cet égard.

Malgré les problèmes qui se posent à cause des limites financières auxquelles ils font face tous les gouvernements à tous les niveaux doivent examiner très attentivement leurs dépenses pour s'assurer qu'elles représentent des investissements dans des gains de productivité pour l'avenir et qu'il ne s'agit pas simplement de dépenser pour la consommation courante. Il faut mettre l'accent sur l'avenir si nous voulons maintenir notre niveau actuel de consommation.

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix): Madame la Présidente, en réponse au discours du ministre, je voudrais lui dire, parce qu'il faisait allusion que le message était clair, que depuis le dépôt du dernier Budget dans cette Chambre, qui prendra fin le 31 mars 1995, le message est effectivement clair, pour ce qui est des Canadiens et des Québécois.

Le message est clair en ce sens que ce soit les conservateurs ou que ce soit les libéraux, les gens n'ont plus confiance au système fédéraliste actuel. Je m'explique: Le Canada est de plus en plus dans le rouge. Le Budget est dans le rouge et le déficit est encore plus dans le rouge. Les libéraux, pour la deuxième fois, viennent d'enregistrer un deuxième record. Le premier record étant d'avoir créé le premier déficit, du temps de l'ex-premier minis-


1779

tre Pierre Elliott Trudeau. Cette semaine, on enregistrait un deuxième record, celui de présenter un budget avec le plus gros déficit, qui se situe à 39,7 milliards, le plus gros déficit qui ait été présenté ici en cette Chambre.

Je voudrais que le ministre m'explique de combien il compte réduire le déficit en présentant un budget avec un déficit de 39,7 milliards? J'attends sa réponse.

M. Manley: Madame la Présidente, ce que j'ai essayé d'expliquer dans mon discours n'est pas trop difficile à comprendre. Je crois que la clé pour réduire le déficit, c'est la croissance économique. Ce que nous avons découvert durant les années où les conservateurs étaient au pouvoir, c'est qu'ils pensaient pouvoir réduire le déficit, seulement en faisant des coupures dans les dépenses et en augmentant les taxes. Cela n'a aucunement fonctionné.

Pour l'année fiscale en cours, le déficit prévu est de 45 milliards de dollars. C'est épouvantable. Si nous voulons solutionner ce problème, il faut d'une part réduire les dépenses du gouvernement. Cela, nous l'avons accepté. Il faut aussi limiter les augmentations de taxes. C'est pour cette raison que le ministre des Finances a mentionné que la réduction du déficit dans ce Budget, c'est que pour chaque dollar d'augmentation de taxes, il y a cinq dollars de coupures. Ce qui est tout à fait différent des anciennes pratiques des conservateurs. Mais nous avons également adopté une politique de croissance économique. Nous sommes prêts à investir dans la nouvelle économie; nous sommes prêts à aider les petites et moyennes entreprises à accéder aux marchés mondiaux pour les biens et services du Canada. Voilà la clé.

(1230)

[Traduction]

Je voudrais ajouter que, pour résoudre notre problème de déficit à long terme, la seule solution réaliste consiste à parvenir à une forte croissance économique durable, et c'est là l'objet de ce budget.

C'est ce qui distingue ce budget des budgets du gouvernement précédent, qui étaient basés entièrement sur le faux espoir qu'il suffisait d'appliquer certains principes fondamentaux de macroéconomie pour qu'il y ait croissance économique, un peu comme l'herbe qui pousse d'elle-même au printemps. Cela n'a pas marché. Nous préférons labourer les champs et les fertiliser afin d'encourager la croissance. Cela va être la clé de la réduction du déficit à l'avenir.

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Madame la Présidente, permettez-moi de féliciter le ministre pour son excellent discours. Je regrette que nous n'ayons pas eu l'occasion de parler au chef de l'opposition. Je crois que c'est là une erreur, car il est assez difficle de savoir ce que pense l'opposition au sujet du budget sans échange ni dialogue.

Si j'ai bien compris, l'opposition est d'avis que les compressions ne sont pas assez rigoureuses. Je ne le saurai jamais vraiment. Mais je sais toutefois que, selon le Parti réformiste, les mesures de réduction ne sont absolument pas assez vigoureuses. Les réformistes auraient coupé bien davantage et auraient été prêts, je suppose, à défendre leur point de vue et à assumer les conséquences.

J'aimerais demander au ministre s'il a vu d'autres domaines où le gouvernement aurait pu imposer des compressions importantes aux Canadiens par le truchement de ce budget, sans tenir compte des conséquences possibles ou du fait que les Canadiens-les travailleurs, les innocents et peut-être même les chômeurs-seraient les premières victimes des effets négatifs de toute compression supplémentaire à venir.

Je me demande où en seront le Parti réformiste et le Bloc québécois dans un an, alors que nous présenterons le prochain budget; ils diront :«Coupez davantage.»

Je me demande simplement si le ministre aimerait donner son avis à ce sujet. Si l'on considère que les gens doivent passer avant tout, vont-ils, dans un an, toujours être d'avis qu'il faut couper davantage?

M. Manley: Madame la Présidente, je prends également note de cette question. J'avoue que je trouve ambigu le point de vue de l'opposition officielle, le Bloc québécois, qui se dit très déçue de l'ampleur du déficit; j'ai d'ailleurs entendu une partie du discours de leur chef à ce sujet.

Hier à la Chambre des communes, les bloquistes ont posé question sur question au sujet des changements apportés au Régime d'assurance-chômage; or, ces changements contribueront à réduire le déficit et les charges sociales. Les bloquistes envoient des messages très contradictoires, et il est impossible de comprendre comment leur objectif politique fondamental, soit le séparatisme qu'ils proclament constamment, pourrait faire autre chose qu'alourdir les coûts qu'ont à supporter la population du Canada et celle du Québec.

En ce qui concerne le Parti réformiste, l'observation est juste; les réformistes ont clairement exposé leur point de vue. Je ne souscris pas à certaines idées exprimées par le Parti réformiste, en particulier lorsqu'il affirme qu'il faudrait supprimer toute aide à l'entreprise.

Dans le domaine des sciences et de la technologie, par exemple, qui m'intéresse particulièrement, le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement, grâce auquel les entreprises de technologie de pointe au Canada obtiennent environ un milliard de dollars d'aide chaque année, a permis au Canada de se doter d'installations enviables en matière de recherche et de développement.

Je disais dans mon discours que nous n'avons pas suffisamment d'installations de ce genre. Si j'en avais le temps, je pourrais dresser la liste des entreprises qui ont choisi de s'installer au Canada et d'y créer des emplois bien rémunérés et à forte valeur ajoutée à cause de l'aide accordée. D'autres pays accordent de l'aide. La recherche-développement est une activité libre de toute attache qui peut se dérouler aussi bien aux États-Unis qu'en Europe ou en Asie.


1780

(1235)

Si nous voulons avoir ces emplois chez nous, nous devrons, malheureusement ou heureusement, selon le point de vue de chacun, être disposés à offrir un environnement fiscal et économique propice à ce type d'activité, comme celui qu'offrent nos concurrents.

J'ajouterai qu'il existe des moyens plus efficaces de réduire le déficit. Par exemple, l'élimination des barrières commerciales intérieures au Canada pourrait entraîner un accroissement de 1 p. 100 du PIB, soit l'équivalent de 6 à 7 milliards de dollars par année. Pourquoi y a-t-il encore autant de provinces qui refusent de s'asseoir à la table de négociations et de dire qu'elles aboliront les barrières d'ici le 30 juin?

Il y a des signes de bonne volonté. Nous avons signé un accord le mois dernier, mais il y a encore beaucoup à faire. J'espère que toutes les provinces signeront une entente avec le gouvernement fédéral.

Nous devons mettre fin au chevauchement des compétences entre les divers niveaux de gouvernement. Le premier ministre et le ministre des Affaires intergouvernementales en ont pris l'initiative. L'élimination des chevauchements permettra d'administrer les services gouvernementaux plus efficacement et de réduire le déficit plus rapidement au cours des années à venir.

M. John Williams (St-Albert): Madame la Présidente, le 22 février 1994 restera dans l'histoire du Canada comme étant le jour où le ministre des Finances n'a pas su relever le défi qui consistait à s'attaquer aux problèmes fiscaux du pays.

Le gouvernement est aux prises avec une dette qui dépasse les 500 milliards de dollars et un déficit annuel de 45 milliards de dollars. Le ministre des Finances présente un budget morne et insipide qui prévoit uniquement une faible hausse d'impôts et une timide réduction des dépenses, ce qui fait bien peu pour réduire et éliminer le déficit. Le ministre a dit lui-même que les mesures qu'il a annoncées à la Chambre mardi ne réduiront le déficit de l'an prochain que de 1,5 milliard de dollars, pour le faire passer de 41,2 à 39,7 milliards de dollars.

Le ministre des Finances nous a fait croire qu'il allait s'attaquer énergiquement à la dette et au déficit du Canada. Il a dit que son budget allait être dur et qu'il allait mettre le holà au déficit. Nous avons donc tous pensé que le ministre des Finances allait se montrer rigoureux. Son budget réduit de moins de 0,3 p. 100 la taille de la dette prévue pour l'an prochain au Canada. C'est cela qu'il appelle une attaque contre la dette et le déficit? C'est cela être rigoureux?

J'ai défié le ministre des Finances à plusieurs reprises déjà et je le fais encore aujourd'hui. Osera-t-il faire preuve de grandeur et équilibrer le budget d'ici la fin de la présente législature? Je répète qu'il peut choisir la médiocrité ou s'élever, se dépasser et débarrasser le pays des déficits et des dettes pour le conduire vers une nouvelle prospérité. L'histoire a toujours reconnu les leaders qui relevaient les défis et elle a toujours marqué ceux qui les refusaient de l'ignominie de leur échec et de leur médiocrité.

Nous risquons apparemment de retrouver simplement une mention du ministre des Finances et de son livre rouge, ou livre à l'encre rouge, dans les notes historiques sur ses politiques incertaines et intempestives.

Le ministre des Finances a innové le 31 janvier dernier en tenant le premier débat prébudgétaire de l'histoire à la Chambre. Il a alors montré un esprit de leadership. Or, les idées novatrices n'ont pas manqué. S'il avait écouté les Canadiens, il aurait su qu'ils ne voulaient plus de ces budgets qui sont censés s'attaquer à nos problèmes fiscaux, mais qui ne comportent que de faibles hausses d'impôts et de timides réductions des dépenses, en attendant que la solution tombe du ciel.

D'après moi, ce budget est un échec au niveau du leadership financier, puisque la période des déficits et des dettes s'en trouve prolongée. Rien ne laisse entrevoir une nouvelle prospérité. En fait, selon mes calculs, il se peut que la solution soit hors d'atteinte, étant donné le manque de leadership et de vision.

Dans son rapport, le vérificateur général a déclaré qu'il y aurait des choix difficiles à faire. Pourtant, le gouvernement continue de verser des millions de dollars en pensions de vieillesse à des biens nantis.

(1240)

Ces taxes et ces impôts sont payés par les travailleurs, dont un grand nombre arrivent tout juste à joindre les deux bouts, et servent à subventionner les prestations de la Sécurité de la vieillesse versées aux familles à revenu élevé. Cela signifie que le ministre des Finances a esquivé les choix difficiles qu'il reste encore à faire.

Que dire de l'assurance-chômage? Le ministre des Finances propose de réduire l'écart entre le revenu d'emploi et les prestations d'assurance-chômage versées aux bénéficiaires à revenu modeste ayant des personnes à charge, dissuadant ainsi ces derniers à trouver du travail.

S'il y a une chose dont le pays a besoin, ce sont de nouveaux emplois. Le budget propose des choix difficiles, mais pas d'emplois. La mauvaise nouvelle dans tout cela, c'est que les choix difficiles restent encore à faire.

Le gouvernement libéral qui régnait au cours des années 70 nous avait promis une société juste, mais a bâti une société endettée. Si nous examinons les années 70, nous voyons que le gouvernement libéral de l'époque a dépensé au-delà de nos moyens, ce qui nous a valu une multitude de programmes sociaux et une montagne de dettes.


1781

Dans les années 80, les gouvernements conservateurs ont promis de renverser cette tendance alarmante. Pourtant, tous les budgets déposés au cours des dix dernières années devaient tenter de résorber les déficits annuels, mais ont continué de ronger notre économie comme une tumeur maligne. La société juste que les gouvernements libéraux avaient promise aux Canadiens au cours des années 70 s'est transformée en une société endettée au cours des années 80. Le budget que vient de déposer le ministre des Finances prouve que le nouveau gouvernement libéral fera de la société canadienne une société en faillite au cours des années 90.

J'ai déjà décrit à la Chambre les choix difficiles que nous avions à faire et la façon dont nous avons relevé le défi par le passé. J'ai établi un parallèle entre la situation actuelle et la fin de la Deuxième Guerre mondiale, lorsque la dette fédérale correspondait à 108 p. 100 de notre produit intérieur brut. À l'époque, nous profitions de ce que nous appelons aujourd'hui un dividende de la paix pendant que nous réduisions notre effort de guerre.

Cependant, la situation n'était pas sans problème. Les soldats qui revenaient de la guerre n'avaient pas de travail, et le secteur industriel traversait une période de transition. Pourtant, à l'époque, les dirigeants de notre pays ont réussi à préparer le terrain pour une période de croissance et de prospérité sans précédent, grâce à leur leadership et à leur vision.

Les députés auront remarqué que j'ai bien dit que le leadership et la vision avaient permis d'utiliser le dividende de la paix pour assurer la prospérité. Nous ne l'avons pas utilisé pour créer de nouveaux programmes sociaux.

Nous pourrions faire la même chose aujourd'hui en créant notre propre dividende de l'élimination du déficit. Il faut que le Canada commence au plus tôt à mettre en valeur ses ressources en fonction des possibilités qu'offre notre monde technologique en mutation constante. Nous avons des talents et des ressources pour lesquels la demande est forte partout dans le monde.

Si nous commençons à exploiter ces possibilités à enseigner aux Canadiens à tirer profit de ces avantages plutôt que de s'appuyer les uns les autres au moyen de programmes sociaux, notre pays aura alors un brillant avenir. Le soleil de la prospérité brillera à nouveau pour nous et pour nos enfants.

Malheureusement, le ministre des Finances a reporté la chose d'une autre année, sinon indéfiniment. À mon avis, la seule chance que nous ayons de rétablir la prospérité économique de notre pays, c'est de supprimer le déficit en réorganisant de fond en comble nos priorités en vue d'équilibrer le budget d'ici à la fin de la présente législature.

Le ministre des Finances n'a pas su assurer l'avenir économique de notre pays. Il n'a pas su relever le défi. Il n'a pas su se montrer extraordinaire et il a manqué une belle occasion d'équilibrer le budget au cours de la présente législature.

Le Jour du jugement financier ne peut être reporté. Nous devons y passer et nous allons y passer mais, si l'on en juge par le budget qui a été déposé hier, les Canadiens devront y passer tout seuls, sans que le gouvernement ne guide leurs pas.

M. Bill Graham (Rosedale): Madame la Présidente, je félicite le député pour son discours.

Je voudrais lui poser deux questions au sujet des remarques qu'il a faites. La première est une question précise, et la seconde est plutôt générale.

(1245)

Le député a mentionné que, à la suite de ce budget, les familles à revenu élevé recevront encore des prestations de sécurité de la vieillesse. Qu'est-ce que le député et son parti considèrent comme un revenu élevé? Où le député tire-t-il la ligne? Quel serait, selon lui, le seuil à partir duquel les gens ne seraient plus admissibles à des paiements supplémentaires?

Comme le député le sait, il est question dans le budget d'établir la limite à 49 000 $. Le député abaisserait-il cette limite à 30 000 $, à 35 000 $? Quelle est, selon le député, la définition d'une famille à revenu élevé? Le député a entendu le ministre dire qu'il a essayé, dans ce budget, de se pencher sur le problème des personnes qui doivent survivre dans une société urbaine complexe et qui ont besoin d'argent pour vivre. Il a établi la limite à 49 000 $. Où le député tirerait-il la ligne?

Deuxièmement, c'est facile de critiquer. Nous étions ici lorsque le ministre de l'Industrie a expliqué les mesures qui, contenues dans ce budget, sont, il me semble, précisément liées à ce dont le député a parlé, soit la nécessité de relancer l'économie et la nécessité pour les petites entreprises d'avoir accès à des services gouvernementaux qui leur permettront de participer pleinement à l'économie.

Le député voudrait-il que toutes ces mesures soient supprimées également? Comment le député s'y prendrait-il pour éliminer totalement notre dette nationale en trois ans? Quelles réductions ferait-il pour atteindre ce but?

M. Williams: Madame la Présidente, en réponse à la question du député, je dirai qu'au cours de la campagne électorale, nous avons déclaré très clairement que nous retirerions les pensions de vieillesse des ménages gagnant plus de 54 000 $.

Lorsque je disais cela à des personnes âgées, elles me répondaient habituellement qu'elles auraient bien aimé que leur ménage ait réussi un jour à gagner 54 000 $ par année. Pourquoi des Canadiens qui travaillent dur et dont beaucoup doivent gratter les fonds de tiroirs, devraient-ils payer des taxes pour offrir des retraites dorées à des gens qui s'en vont vivre en Floride, à Hawaii et en Californie?

Quant à la deuxième question, je répéterai ce que j'ai dit après avoir écouté l'excellent discours du ministre de l'Industrie. Je demande encore une fois pourquoi nous consacrons six milliards de dollars à un programme d'infrastructure, c'est-à-dire de construction ou de réfection d'égouts et de routes, qui n'offrira que des emplois non qualifiés quand le Canada a un si grand besoin d'emplois hautement spécialisés et bien rémunérés pour devenir concurrentiel? J'ai toujours dit que la différence entre un emploi à 20 $ l'heure au Canada et un emploi à 1 $ l'heure au Mexique tient à notre motivation et à notre niveau d'instruction. C'est pourquoi nous devrions prendre ces six milliards de dollars et les investir dans des emplois de haute technologie.


1782

Nous avons annulé un programme d'acquisition d'hélicoptères qui aurait fortement stimulé la recherche et le développement au Canada pour pouvoir paver des routes. C'est là qu'apparaît la confusion dans les priorités du gouvernement. Il n'a pas de véritable projet d'ensemble et pas de vision d'avenir. Il veut tout régler au moyen de solutions à court terme.

Si nous réussissions à nous reprendre en mains, nous pourrions atteindre les objectifs mentionnés par le ministre et, en même temps, équilibrer le budget tout en assurant l'avenir de nos enfants.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Madame la Présidente, c'est un moment de vérité pour le nouveau gouvernement, car son premier budget le définit et donne le ton pour les quatre prochaines années de régime libéral. Je voudrais proposer aujourd'hui une définition qui illustre bien ce que je pense de la teneur du budget. Ce dernier contient quelques bonnes mesures auxquelles je pourrais consacrer plusieurs minutes de mon intervention. Je dois cependant parler des aspects qui sont les plus décevants.

Voici qu'à une période très critique de notre histoire économique, le gouvernement s'est amolli. Au lieu de serrer les poings et de s'attaquer résolument au problème du déficit et de la dette à un moment où les marchés mondiaux observent nos moindres gestes, le gouvernement a choisi d'adopter une approche toute en douceur. Au moment où le nouveau gouvernement se définit ainsi, le mot qui me vient à l'esprit pour définir ce budget décevant est «flasque». Le dictionnaire définit ce terme par mou, avachi, mollasse, sans énergie et faible. Le terme convient parfaitement.

(1250)

Le budget est plus important pour les problèmes auxquels il néglige de s'attaquer que pour les problèmes auxquels il s'attaque. Je veux demander pourquoi ce budget n'a pas fait davantage. Pour imiter un homme d'État américain, au lieu d'examiner les choses telles qu'elles sont et demander pourquoi elles sont comme ça, je me propose aujourd'hui de les examiner telles qu'elles pourraient être et demander pourquoi elles ne sont pas comme ça.

Je m'attacherai donc aujourd'hui aux dépenses qu'on n'a pas réduites et je chercherai à savoir pourquoi. Le budget ne parle aucunement de réduire les dépenses dans des domaines comme l'aide étrangère, les aspects des programmes de bilinguisme qui sont source de gaspillage, les programmes inefficaces de multiculturalisme ainsi que les subventions versées aux sociétés d'État et celles qui le sont aux groupes d'intérêts. Le gouvernement a évité de toucher à ces domaines tout simplement parce qu'ils sont politiquement dangereux.

Or, le temps des décisions sans risque et non litigieuses est passé. Je m'étonne de voir que les députés d'en face refusent encore de reconnaître la gravité de la situation financière de notre pays. Si nous voulons gagner la confiance du monde des affaires et du public en général, nous devons prendre les décisions difficiles dès maintenant, pas dans deux ans, après d'autres études. Il faut les prendre tout de suite.

Je vais vous citer des domaines où des compressions budgétaires s'imposent, et je commencerai par le bilinguisme, oui, le bilinguisme. Les médias sont prompts à rabrouer quiconque aborde le sujet en lui collant l'étiquette anti-Québec. Cela fait couler beaucoup d'encre, et suscite une réaction bien prévisible de la part des députés québécois. Il y a une différence entre le principe du bilinguisme et le gaspillage scandaleux d'argent qui en accompagne parfois l'application.

Je parle de gaspillage inutile. Lorsqu'il est question de la loi sur les langues, on n'a vraiment pas idée de la gravité du problème des fonds publics gaspillés inutilement. J'aimerais lire un passage d'une lettre d'un fonctionnaire:

Au ministère de la Défense nationale, le coût réel des activités liées aux langues officielles est beaucoup plus élevé que celui qui est indiqué. Malheureusement, les lignes directrices du Conseil du Trésor ne nous autorisent pas à divulguer, entre autres choses, le salaire des militaires qui reçoivent une formation linguistique continue et les primes au bilinguisme versées aux civils.
Des millions de dollars ont été dépensés pour la traduction de manuels sur les frégates, mais ce coût est dissimulé dans le budget des frégates, sous une mer de chiffres, de sorte qu'il sera impossible à quiconque d'établir un jour à quoi il correspond vraiment. Lorsque, comme il l'a fait en 1992, le commissaire dit que le coût des langues officielles est d'environ 654 millions de dollars, ce montant ne veut rien dire. Selon un rapport rendu public l'an dernier, ce coût se situerait entre 2 et 4 milliards de dollars. Qui dit la vérité? Personne ne le sait.

D'après un rapport rendu public l'an dernier, depuis 1969, la politique des langues officielles a ajouté 49 milliards de dollars à la dette fédérale. Je vous laisse le soin d'imaginer les répercussions sur la dette provinciale et les coûts que doit engager le secteur privé pour s'y conformer. Où cela s'arrête-t-il?

Le gouvernement a aussi fléchi pour ce qui est de l'aide extérieure. Il serait plus juste de dire qu'il a fait preuve de mollesse. Dans son rapport, le vérificateur général donne de nombreux exemples témoignant d'une mauvaise gestion, notamment en ce qui concerne l'aide extérieure. L'Agence canadienne de développement international, l'ACDI, est devenue une vache à lait. Selon le vérificateur général, l'ACDI essaie de plaire à de trop nombreux groupes d'intérêts et se heurte à de trop nombreux objectifs incompatibles. Le résultat, c'est qu'une agence qui dispose d'un budget annuel supérieur à un milliard de dollars fonctionne inefficacement, dans la confusion la plus totale.

Ce qui est vraiment troublant, c'est que le gouvernement refuse d'imposer de grandes compressions dans ce secteur. Il n'a même pas l'excuse qu'il s'agit d'une question politiquement litigieuse, car les critiques concernant l'efficacité des dépenses au chapitre de l'aide extérieure fusent de toutes parts. Qu'attend le gouvernement? En 1993, le fédéral a dépensé un peu moins de 2,7 milliards de dollars en aide internationale ayant produit peu de résultats concrets, pour ne pas dire aucun.

L'histoire d'horreur continue dans un autre ministère. Je veux parler du ministère du Multiculturalisme.


1783

(1255)

Certaines observations entendues à la Chambre cette semaine sont troublantes. Je crois fermement que nous sommes tous égaux, sans égard à la race, à la couleur ou à la religion. Chaque Canadien devrait être fier de son patrimoine, le défendre et le faire valoir. Mais il ne devrait pas compter sur ses concitoyens pour financer les activités culturelles de son groupe. Chaque groupe devrait subvenir à ses propres besoins.

En 1992-1993, les dépenses fédérales au chapitre du multiculturalisme ont atteint presque 120 millions de dollars. Ce qui est effrayant, c'est la réponse que j'ai eue du documentaliste lorsque j'ai tenté d'obtenir ces chiffres: il avait du mal à trouver cette réponse, à avoir des renseignements des ministères qui font des dépenses dans le domaine du multiculturalisme. Autrement dit, nous n'avons pas la moindre idée du coût véritable du multiculturalisme au Canada.

Il n'y a pas longtemps, au début de la campagne électorale, le déficit était censé être de 33 milliards de dollars. Pendant la campagne, le gouvernement refusait de nous donner l'heure juste. Le nouveau gouvernement a pris les rênes et voici que, chose curieuse, le chiffre a commencé à augmenter. Il est passé à 42 milliards puis, tout à coup, à 46 milliards. Voici maintenant qu'on nous demande de nous satisfaire de 39,7 milliards. Il faut que ça cesse.

Je voudrais laisser une dernière réflexion à la Chambre en terminant. Le précédent gouvernement progressiste-conservateur nous a promis des mesures vigoureuses, mais, lorsqu'est venu le moment de prendre des décisions difficiles sur le plan politique, il a flanché. Le gouvernement actuel s'est fait élire en promettant de s'attaquer à ce problème critique lui aussi, mais sa timidité face à nos problèmes financiers laisse à penser qu'il n'est guère différent du gouvernement précédent. En fait, les libéraux fédéraux ne sont rien d'autres que d'astucieux conservateurs qui ont su se déguiser.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon confrère de son allocution, ce qui ne veut pas dire que je partage tout ce qu'il a dit, et il y a des choses que j'aimerais qu'il précise. Il a parlé du multiculturalisme et je n'ai pas bien saisi ce qu'il en disait. Ses propos déboulaient un peu trop vite par rapport à ma compréhension de la langue anglaise. Je pratique, mais cela ne va pas assez vite.

J'aimerais lui offrir l'opportunité de répéter la pensée du précédent intervenant concernant la coupure du Budget sur le multiculturalisme. Je veux m'assurer que tant et aussi longtemps que le Canada sera le Canada, on pourra parler anglais et français et que la coupure qui touche le multiculturalisme ne va pas en ce sens. J'aimerais entendre sa réponse.

[Traduction]

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, les dépenses du budget du multiculturalisme dont j'ai demandé la suppression sont les subventions aux groupes culturels s'élevant à 21,5 millions de dollars environ. Ce n'est pas la seule compression qu'il faut faire ici. Je n'en ai mentionné que quelques-unes.

Je suis surpris que ce gouvernement croie vraiment que les Canadiens vont le réélire, compte tenu du virage qu'il vient d'amorcer. Son déficit est plus élevé encore que toutes les prévisions. Examinons ce qui est arrivé cette semaine à la Chambre.

Nous avons demandé au premier ministre pourquoi il avait fait un cadeau à sa propre circonscription pour la construction d'un musée de 4,5 millions de dollars. Le gouvernement a dépensé 172 000 $ pour qu'un ministre puisse prendre l'avion afin d'aller prononcer un discours. Il a accordé 27 millions de dollars à la ville de Québec pour un centre de conférences. Il a gaspillé 120 millions de dollars dans le financement de la SRC. Le déficit précédent s'élevait à 33 milliards de dollars. Or, le gouvernement dit que le déficit de cette année s'élèvera à 45 milliards de dollars et qu'il s'estimerait heureux s'il se chiffrait à 40 milliards de dollars.

(1300)

Il y a un dicton qui dit que si on oublie le passé, on est condamné à répéter les mêmes erreurs. Le passé, c'est le gouvernement conservateur. Le gouvernement actuel ne fera pas mieux que son prédécesseur s'il continue dans la même voie.

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt les propos du député. Il a attiré mon attention quand il a dit que le gouvernement libéral lui semblait être fort semblable aux précédents gouvernements conservateurs.

Qu'est-ce qui fait dire cela au député? Est-ce le fait qu'après s'être opposés à l'ALENA du temps où ils étaient dans l'opposition, les libéraux ont, dès leur arrivée au pouvoir, entériné cette entente négociée par les conservateurs? Quand ils étaient dans l'opposition, les libéraux étaient contre les essais des missiles de croisière autorisés par le gouvernement conservateur; une fois au pouvoir, toutefois, ils les ont approuvés eux aussi. Quand son parti était dans l'opposition, mon vis-à-vis parlait souvent contre l'augmentation des charges sociales. Or, l'une des premières choses que le gouvernement a faites, c'est précisément augmenter les charges sociales.

Une voix: Il les a réduites.

M. Riis: C'est ça, augmentez-les, puis réduisez-les quelques jours plus tard.

Est-ce pour ces raisons-là que le député pensait que le gouvernement actuel ressemblait à s'y méprendre au précédent?

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, j'aime bien le procédé utilisé par le député qui consiste à changer une intervention en question. Il a frappé en plein dans le mille. Oui, nous apprenons vite, tous nouveaux députés que nous soyons. Je suppose que je pourrais recourir à ce procédé moi aussi.

J'estime que ce qui me rappelle le plus le gouvernement conservateur, c'est la pratique du financement par le déficit budgétaire et le fait d'accepter, en vertu même du budget, que la dette va augmenter de 100 milliards de dollars en trois ans. Ce n'était pas un problème pour les conservateurs et ça ne l'est pas non plus pour les libéraux.


1784

[Français]

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Madame la Présidente, le 1er février de cette année, le ministre des Finances a affirmé devant cette Chambre que, et je cite:

On sent profondément que le statu quo est inacceptable et que la voie que nous suivons actuellement ne nous mènera nulle part.
Ayant pris conscience du dernier Budget, je constate malheureusement qu'il ne nous mènera effectivement nulle part. Pourquoi? Parce que ce Budget n'offre aucun changement de cap important par rapport à l'orientation des conservateurs au cours des neuf dernières années.

Le gouvernement a été élu parce qu'il promettait des emplois. Pourtant on compte aujourd'hui, au Canada, 29 000 emplois de moins que le jour où le gouvernement a été porté au pouvoir. Les électeurs ont fait clairement savoir au gouvernement précédent ce qu'ils pensaient du niveau inacceptable de chômage. Or, avec ce Budget, le gouvernement a encore manqué à sa parole envers les Canadiens.

Tout est dit à la page 9 du Budget: «Le taux de chômage continuera de dépasser les 10 p. 100 dans un avenir prévisible.» Il n'y a aucun espoir pour les chômeurs. Un travailleur sur cinq au Canada est sans emploi ou travaille à temps partiel parce qu'il est impossible de trouver des emplois à temps plein.

Le Budget présenté se contente d'écarter ces personnes pour laisser la voie libre à une relance sans création d'emploi.

[Traduction]

Les Canadiens en ont assez de ce que l'ancien gouvernement avait coutume d'appeler «une reprise sans création d'emplois». Je demande au gouvernement pourquoi ce budget ne renferme aucun objectif concernant la réduction du chômage. Il prévoit des objectifs portant sur la réduction du déficit, ce qui est très bien, mais ceux-ci devraient s'accompagner d'un plan de réduction du chômage.

Comme nous le voyons dans le budget, le gouvernement s'attend à ce que le taux de chômage continue de dépasser les 10 p. 100 au cours des prochaines années. Au lieu de décider de s'attaquer au chômage, il a choisi de s'attaquer encore une fois aux chômeurs, comme l'a fait son prédécesseur.

Le ministre des Finances nous a répété, pendant toutes les consultations prébudgétaires que nous avons eues, que les sacrifices qu'allait exiger ce budget seraient également partagés. Je demande aux gens d'examiner les faits et de nous dire s'ils estiment que les sacrifices sont également partagés.

(1305)

Fait no 1, 50 p. 100 au moins des réductions de dépenses sont effectuées au détriment des chômeurs.

Fait no 2, les pauvres qui dépendent du filet de sécurité sociale ont perdu deux milliards. L'examen de la politique sociale est terminé avant même d'avoir commencé.

Fait no 3, les provinces vont voir leurs paiements de transfert être réduits, les prestations d'aide sociale augmenter, alors que la caisse de l'assurance-chômage s'épuise et qu'il n'y a pas d'emplois. Ce budget est une façon très élaborée de refiler certaines responsabilités aux provinces, aux territoires et aux chômeurs.

Fait no 4, les provinces atlantiques ont fait plus que leur quote-part de sacrifices. Avec des taux de chômage allant jusqu'à 20 p. 100, les provinces atlantiques vont devoir faire face à la fermeture de bases militaires, à des réductions de revenu, à des indemnisations réduites dans le secteur de la pêche et à l'absence d'emplois. Personne ne peut examiner ce budget et dire que les sacrifices sont également partagés.

Durant les quelques mois qui ont suivi l'élection de ce gouvernement, nous avons assisté à toute une série d'initiatives de consultation. Voyons un peu ce qui ressort dans le budget de ces consultations. Des consultations prébudgétaires ont été tenues et, pourtant, il est clair que ce budget n'est qu'une prolongation des budgets établis par les gouvernements qui ont précédé. Il est clair qu'en se regardant dans la glace, le ministre des Finances a vu le reflet de son prédécesseur, Don Mazankowski.

Un examen de la politique de défense est en cours, alors que ce gouvernement s'est déjà prononcé sur cette question dans son budget. On nous promet un examen de la politique sociale, quand, en fait, le budget établit déjà les paramètres de ce débat. On nous dit qu'il faut également revoir ou renégocier les transferts aux provinces. Cependant, le ministre des Finances a déjà décidé, avec ce budget, de ce qu'il en retournera. Ce budget est fleuri de belles paroles au sujet de la négociation collective, mais empêche, en fait, toute négociation.

Le 2 février 1994, il y avait, au Canada, 29 000 emplois de moins que le 25 octobre 1993. Les gens ont élu ce gouvernement parce qu'ils pensaient qu'il allait donner suite aux promesses qu'il avait faites, c'est-à-dire créer des emplois et remettre les Canadiens au travail. Mais qu'annonce-t-il dans ce budget? Il annonce la disparition de 25 000 postes dans la fonction publique et de 16 500 postes dans le secteur de la défense. Nous ne savions pas que le gouvernement allait changer ses plans, une fois élu. Or, d'après ce budget, c'est exactement ce qu'il compte faire.

Le ministre a dit que les sacrifices allaient également être partagés. Les Canadiens trouvent-ils juste que l'on réduise de six milliards de dollars les fonds destinés aux chômeurs, tandis que les riches peuvent encore déduire 50 p. 100 du coût de leurs croisières et de leurs expéditions de chasse? Les chômeurs vont, eux aussi, pouvoir se déplacer davantage, mais ce sera pour aller aux banques d'alimentation.

Les riches n'avaient rien à craindre de ce budget. Ils pourront encore dissimuler leur argent dans des fiducies privées sans qu'on y touche. Les 63 000 sociétés rentables ne paieront toujours pas d'impôt, et ce gouvernement ne touchera pas aux profits qu'elles réalisent à l'étranger.

[Français]

C'est pourquoi je demande, au nom des travailleurs et des travailleuses de ce pays et également au nom des 1,6 million de personnes qui voudraient un emploi, de rendre ces bottes de travail. La dernière chose dont nous avons besoin, c'est que quelqu'un vienne nous frapper quand nous sommes déjà par terre.


1785

[Traduction]

Ce budget montre clairement que le ministre des Finances devrait rendre ses bottes de travail. Nous n'avons pas besoin d'un coup de pied quand nous sommes déjà à terre.

Ce budget n'a pas donné aux Canadiens l'espoir qu'il aurait dû leur donner. Il n'a pas rétabli la confiance des consommateurs dont nous avons besoin pour relancer l'économie.

(1310)

Ce gouvernement a échoué sur tous les plans, mais ce qui est plus grave, c'est qu'il a trahi la confiance des Canadiens qui l'avaient élu pour qu'il crée des emplois et leur redonne du travail, quand, en réalité, le nombre de chômeurs ne fait qu'augmenter.

Au cours de la session, je présenterai un projet de loi d'initiative parlementaire sur le plein emploi qui demandera au gouvernement ou plutôt qui exigera de lui qu'il établisse des objectifs en matière d'emploi, qu'il présente régulièrement à la Chambre, par l'entremise du ministre du Travail, un rapport sur les progrès enregistrés dans la réalisation de ces objectifs et qu'il remette à chaque député à la Chambre un rapport complet sur les objectifs de création d'emplois du gouvernement. Les Canadiens ne veulent plus de belles paroles et de promesses vides. Ils veulent un chèque de paie.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Madame la Présidente, je voudrais dire à la députée du Yukon que, chaque fois que l'on présente un budget, il y a des personnes touchées par les changements et les transitions.

J'ajouterais que nous partageons la douleur de ces personnes. Nous n'en souffrirons peut-être pas autant, mais cela nous fait mal aussi de voir la vie de ces gens bouleversée, surtout ceux des bases de la région atlantique.

La députée sait que nous avons hérité d'une situation financière qui était très différente de toutes les prévisions acessibles. Nous sommes vraiment très mal pris. Il nous incombe à tous de redonner une certaine confiance à ce pays.

Il y a un domaine du budget dont la députée n'a pas parlé, volontairement ou par oubli. C'est le domaine de la petite entreprise. La députée du Yukon a déjà fait de brûlants discours à la Chambre sur l'importance de la petite entreprise. C'est notre plus grand espoir pour redonner du travail aux Canadiens. C'est notre plus grand espoir pour éliminer le problème de chômage que nous avons. Il faut être juste et reconnaître qu'il y a de nombreuses initiatives intéressantes dans le budget au sujet des petites entreprises.

J'ai parlé à de petits entrepreneurs et déjà, du simple fait que le ministre des Finances ait annoncé que nous mènerions une étude en profondeur sur l'accès de la petite entreprise aux capitaux, on constate une réaction très favorable. Les banques font de la surenchère pour prêter plus activement aux petites entreprises. C'est un des bons aspects du budget, et il ne faut pas l'oublier.

L'autre chose qui est reliée à la petite entreprise est la transformation du programme provisoire d'accession à la propriété au moyen des REER, une excellente idée, en programme permanent. Dans ma circonscription, de nombreux travailleurs du bâtiment-menuisiers, plombiers et entrepreneurs généraux-sont très contents de cela, et on en voit déjà les effets dans la construction domiciliaire. C'est un autre point intéressant du budget.

Je dois reconnaître que c'est un budget qui est dur, mais c'est parce que nous sommes dans une situation d'une gravité jusqu'alors inconnue dans ce pays. Lorsqu'on parle de ce budget, on doit au moins admettre que certaines mesures sont exceptionnelles. Je dirais que les dispositions relatives à la petite entreprise s'inscrivent dans ces mesures.

(1315)

Mme McLaughlin: Madame la Présidente, je suis d'accord avec mon collègue. Certes, il faut mettre l'accent sur la petite entreprise, mais je ferai observer à mon collègue que la petite entreprise compte sur les consommateurs. Si les agriculteurs font faillite et si les usines de même que les mines ferment un peu partout dans notre pays, il ne restera plus beaucoup de consommateurs.

Nous devons établir le lien entre les deux. Les gens touchant des prestations d'assurance-chômage réduites, sans espoir de trouver un emploi, ne constitueront pas un bon bassin de clients pour les petites entreprises dont parle mon collègue.

Je souscris au Fonds d'investissement canadien, une mesure que nous avions nous-mêmes proposée, d'ailleurs, pendant la période électorale, car il est important de mettre du capital de risque à la disposition des petites entreprises. Je souscris donc à cette mesure. J'espère que les députés d'en face examineront la proposition du Nouveau Parti démocratique. Elle était sensée. Il y a des similitudes avec celle du Parti libéral, mais nous avons quelques bonnes idées en commun à ce sujet. Le député d'en face et moi sommes tous deux d'avis que nous devons stimuler cette composante de notre économie.

Je voudrais faire deux autres observations à propos de la petite entreprise. J'ai lu dans le budget que des centres de services aux entreprises allaient être créés dans toutes les provinces. J'espère qu'il ne s'agit que d'un oubli. Nous, habitants des Territoires, devons réparer cet oubli, mais il y en aura un au Yukon et un autre dans les Territoires du Nord-Ouest. Je suppose qu'il y a eu amnésie temporaire dans ce cas. Nous avons, en effet, deux territoires qui couvrent le tiers du bloc continental canadien.

Mon deuxième point concerne les négociations-je tiens à féliciter le gouvernement là-dessus-à mener avec les banques et les institutions financières à propos du capital de risque dont a besoin la petite entreprise. Comme ce n'est pas la période des questions, je vais me contenter de faire une observation. J'espère qu'au cours des consultations, le gouvernement demandera aux institutions financières de songer à une formule pour réinvestir dans leurs communautés respectives une partie ou la totalité des économies qu'elles y auront réalisées.


1786

Un de nos graves problèmes, c'est qu'une très grande partie de l'épargne des Canadiens n'est pas réinvestie au Canada. Ces sommes sont investies à l'étranger, alors que nous devons encourager les Canadiens à en faire profiter leur pays. Nous devrions peut-être suivre en cela l'exemple des Québécois qui investissent chez eux depuis fort longtemps.

M. Nelson Riis (Kamloops): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir participer au débat d'aujourd'hui.

Je dois avouer qu'après avoir écouté le Parti conservateur présenter huit ou neuf budgets et avoir assisté à la présentation de celui-ci, je pourrais presque entendre les bouchons de bouteilles de champagne sauter rue Saint-Jacques, à Montréal, rue Bay, à Toronto et rue Howe, à Vancouver. En effet, les habitués de ces endroits ont presque toujours été très heureux des budgets des conservateurs.

Bien sûr, les travailleurs, eux, ont simplement frémi, sachant qu'ils seraient inondés d'impôts supplémentaires et qu'ils su-biraient des compressions à gauche et à droite. En fait, ils n'ont jamais été déçus, car c'est exactement ce qui s'est toujours produit.

Aux élections, en octobre dernier, les Canadiens ont dit qu'ils enverraient un message clair à Ottawa, et ils se sont débarrassés de tous les conservateurs, sauf deux. Ils ont dit qu'ils enverraient le plus fort message possible et qu'ils éloigneraient tellement les conservateurs qu'ils ne reviendraient jamais, du moins dans un avenir prévisible. Ils sont disparus pratiquement comme les dinosaures.

Les Canadiens ont dit qu'ils voulaient un gouvernement muni d'un fort mandat qui indiquerait qu'il procéderait d'une façon totalement différente. Il prendrait une nouvelle orientation et adopterait une nouvelle approche. Il s'écarterait de la politique budgétaire et financière des années antérieures et créerait des emplois. La liste était interminable.

Dans le livre rouge, on parlait d'emplois, d'emplois et d'emplois ici et là. Bien sûr, c'est ce que les Canadiens voulaient entendre. Ils ont donc élu les libéraux. Puis, presque le lendemain, les choses ont commencé à changer. Il y a une conversion magique qui se fait dès que les libéraux traversent cette allée centrale pour occuper les sièges qui se trouvent à votre droite, madame la Présidente.

Je peux voir tous mes amis l'autre côté. Je me rappelle leurs discours passionnés contre l'ALENA, qui allait coûter des emplois. Pendant des jours et des jours, j'ai entendu l'écho de ces discours partout dans cette enceinte. La première chose qu'ils ont faite a été de signer l'ALENA, ce qui a un peu ébranlé les gens. Ils se demandaient ce qui se passait.

Bien sûr, ils se souvenaient des cotisations sociales que les méchants et mesquins conservateurs avaient l'habitude d'imposer aux petites entreprises. La première chose que le gouvernement a faite fut d'imposer une autre charge sociale. Les Canadiens ont commencé à être passablement ébranlés.

(1320)

Ils se sont souvenus de ces fameux essais des missiles de croisière américains. Cette entente arrivait à échéance, et ils se sont souvenus que les libéraux avaient dit pendant des années que notre attitude était lâche, que le Canada s'en laissait imposer par les États-Unis et qu'eux ne feraient jamais cela. Le moment venu, les libéraux l'ont fait, eux aussi. Ils ont autorisé les essais.

Je pourrais continuer longtemps, mais je crois que je me suis fait comprendre. Avant même que la Chambre ait repris ses travaux, les gens étaient déjà éberlués de voir que les libéraux avaient manqué à leurs promesses et qu'ils avaient fait exactement ce qu'ils devaient ne jamais faire. Ils ont autorisé justement ce qu'ils avaient dit ne jamais vouloir autoriser.

Voici maintenant le moment du budget. Je suppose que les gens ont pensé que le gouvernement avait maintenant une chance de se rattraper. Il avait encore une chance, parce que les Canadiens avaient assigné une tâche bien particulière aux libéraux en les portant au pouvoir-ils devaient créer de l'emploi. Voyez l'emploi qu'ils ont fait du budget. Ce n'est que du baratin.

Examinez bien ce budget. Je suis sûr que d'autres ont contribué à sa rédaction. Je reconnais du Michael Wilson et peut-être du Don Mazankowski là-dedans. On leur a peut-être confié la tâche de préparer ce budget. Kim Campbell a peut-être même fait un saut de Harvard pour y mettre son grain de sel.

Ce budget représente-t-il un changement important dans la politique intérieure de notre pays? Non. La politique monétaire en est-elle modifiée? Non. Je sais que nous avons un nouveau gouverneur de la Banque du Canada-une sorte de sosie de John Crow. Il dit qu'il maintiendra la même politique monétaire.

Y a-t-il un changement dans la politique du gouvernement? Non. Nous attendions un budget différent, qui permettrait vraiment de redonner du travail aux Canadiens. Qu'avons-nous trouvé? En examinant attentivement le plan budgétaire, on constate en arrivant à la page 10, quand on vérifie les prévisions du gouvernement quant à l'effet de cette mesure, que les taux de chômage resteront supérieurs à 10 p. 100, à court terme. Voilà ce qu'on constate quand on se donne la peine de lire le budget.

Voilà où nous en sommes. Le gouvernement lui-même, après toutes les promesses du livre rouge, nous présente un plan budgétaire selon lequel le chômage restera relativement inchangé cette année, l'an prochain et au-delà.

Mme McLaughlin: Et cette fois, c'est un livre bleu.

M. Riis: Oui, cette fois, c'est un livre bleu. Bon sang! ils ne se sont même pas donné la peine d'en changer la couleur.

Quand est venu le temps de fixer des objectifs, on a fixé des objectifs en matière de réduction du déficit et de la dette. Malheureusement, alors qu'il aurait fallu fixer des objectifs pour la réduction du chômage, le budget n'en renferme aucun. À mon avis, il s'agit d'une grave omission, et c'est fort regrettable.

C'est encore la même école de pensée à la Peter Pan qui règne en matière d'économie. Nous avions espéré que les libéraux proposeraient de nouvelles idées, au lieu de continuer à penser que, si l'on croit vraiment que le chômage va diminuer, c'est ce


1787

qui se passera. Mais pour cela, il faut prendre des mesures en conséquence. Il faut fixer des objectifs et mettre en oeuvre des stratégies afin de faire baisser le taux de chômage. Et ce budget ne renferme rien de tel; il n'y a rien à cet effet.

Voici ce qui m'est arrivé, à moi personnellement. De nombreux propriétaires de petites entreprises de Kamloops m'ont téléphoné pour me dire qu'ils n'avaient pas lu le budget et pour me demander ce qu'ils y trouveraient de favorable. J'ai fait ressortir quelques points, comme le réseau qui sera établi et la possibilité de soumissionner pour des contrats internationaux. Ils m'ont répondu «j'ai un salon de coiffure» ou «j'exploite une entreprise de soudure» et «je n'exporterai jamais mes services, alors que puis-je attendre du budget?» J'ai dû avouer, à regret, que la petite entreprise ordinaire ne trouverait rien d'avantageux dans ce budget.

Les chômeurs, comme l'a indiqué mon chef, ont été visés encore une fois par ce budget. Les propres victimes des politiques gouvernementales ont été elles-mêmes visées à nouveau. Voilà une étrange manière de gouverner. Nous l'acceptons toutefois; c'est simplement la répétition de ce que nous avons connu au cours des neuf dernières années, sous le régime Mulroney.

Je voudrais reconnaître le mérite d'une des mesures budgétaires; en fait, je pourrais en mentionner plusieurs, mais je me contenterai d'une seule. Lorsqu'ils ont modifié le système d'assurance-chômage, ils ont admis que certaines personnes seraient durement touchées. Je pense plus précisément aux familles monoparentales ou aux familles à faible revenu avec enfants ou adultes à charge, deux groupes qui verront leurs prestations augmenter quelque peu. En d'autres mots, on a reconnu par cette mesure que certains groupes sont durement touchés.

Le budget renferme-t-il des dispositions pour les 1,5 million d'enfants qui vivent dans la pauvreté?

Mme McLaughlin: Non, rien.

M. Riis: Pas un seul mot.

(1325)

Et les fonctionnaires? Le budget leur porte un coup. Quelque 25 000 d'entre eux risquent de perdre leur emploi d'ici trois ans, et le gouvernement gèle encore une fois les salaires des employés de la fonction publique.

Comment peut-on geler les salaires de tous les employés alors que certains d'entre eux, notamment les messagers ou ceux qui déneigent les trottoirs, gagnent moins de 20 000 $ par année, tandis que des sous-ministres touchent 120 000 $ et plus? Le gouvernement ne sait pas que certains fonctionnaires fédéraux ont tout simplement de la difficulté à joindre les deux bouts.

Le gouvernement a fait preuve d'une certaine sensibilité quand il a modifié les programmes d'assurance-chômage. Pourquoi n'a-t-il pas fait preuve de la même sensibilité à l'égard de ses propres employés de la fonction publique? Quelqu'un disait l'autre jour, à juste titre d'ailleurs, qu'agir de la sorte équivalait un peu à tirer sur ses propres troupes.

Le gouvernement devrait montrer un peu de compassion et tenir compte du fait que certains employés de la fonction publique fédérale ont à l'heure actuelle de la difficulté à joindre les deux bouts. Ces gens souffrent, et le gouvernement aurait dû tenir compte de leur situation avant d'imposer un gel généralisé des salaires.

Je suis très déçu de voir qu'il reste encore des gens qui sont peut-être en train de sabler le champagne. Ce sont les plus riches familles canadiennes qui ont bénéficié d'une échappatoire fiscale créée spécialement pour elles par le gouvernement précédent; en fait, cette mesure a été adoptée par les libéraux, puis mise à jour par les conservateurs. Vous ne trouverez pas un seul avocat ou comptable spécialisé en fiscalité qui approuve les fiducies familiales.

Je me souviens qu'on avait demandé aux spécialistes et conseillers financiers qui avaient comparu devant le Comité des finances ce qu'ils pensaient de cette exemption d'impôt. Tous avaient répondu que c'était une mesure insensée et que le gouvernement avait agi de façon idiote en l'adoptant.

Le ministre des Finances avait l'occasion d'obliger les plus riches Canadiens à payer eux aussi leur juste part. A-t-il supprimé l'échappatoire? Certainement pas. Le gouvernement dit qu'il va étudier la question. Qu'y a-t-il à étudier au sujet d'une échappatoire que tout le monde juge tout à fait immorale?

Je termine en disant que le gouvernement a raté une belle occasion. Je pourrais continuer à en parler et j'espère pouvoir le faire plus tard. Je crains que les Canadiens qui espéraient un changement après les neuf années du gouvernement de Brian Mulroney ne soient très déçus par ce budget.

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Madame la Présidente, je pense que tous ceux qui ont participé à la dernière campagne électorale ont pu constater que les Canadiens attachaient énormément d'importance à la réduction de notre dette et de notre déficit. Je remarque que mon bon ami de Kamloops n'en a pas parlé.

Je pense que nous connaissons la position du Parti réformiste là-dessus. Il prônerait des compressions encore plus importantes pour remédier à la situation. Je crois que nous savons également ce que le Bloc québécois en pense, si j'ai bien compris son chef ce matin. Nous n'avons pas eu la chance de discuter avec lui à cause du nouveau Règlement, mais je crois comprendre que les bloquistes seraient en faveur d'un programme d'austérité encore plus important pour s'attaquer à la dette nationale.

Le député de Kamloops pourrait-il nous préciser la position du NPD relativement à la dette nationale? A-t-on sabré assez ou trop dans les dépenses, ou le gouvernement a-t-il fait juste ce qu'il fallait?

M. Riis: Il est juste de dire que certaines modifications auraient pu permettre dans une très large mesure de réduire notre déficit. Je veux parler notamment de la suppression de certaines échappatoires fiscales tout à fait évidentes, comme les fiducies familiales, et de l'application d'un impôt sur la fortune. Je le répète, nous sommes l'un des rares pays du monde où il n'y a pas d'impôt de ce genre. On ne résoudrait pas ainsi notre problème de déficit, mais cela montrerait que le gouvernement est de bonne foi et que nous allons dans la bonne voie.


1788

J'estime qu'une personne qui gagnerait 5 millions de dollars à la loterie n'aurait aucune objection à payer de l'impôt sur cette somme. Qui oserait prétendre que c'est injuste?

On a souvent discuté à la Chambre de la possibilité de faire payer un impôt minimum aux sociétés, et nous avons considéré que c'était là une initiative qui méritait d'être examinée. Autrement dit, il y a toute une série de modifications au régime fiscal qui permettraient de percevoir bien des recettes.

Ce budget tient pour acquis qu'il permettra de réduire le déficit, ce que nous voulons tous. Personne dans cette enceinte ne niera que nous faisons face à une grave crise au Canada en ce qui concerne notre endettement et notre déficit et que nous devons prendre des mesures pour remédier à la situation.

Dans ce budget, on part du principe que les initiatives lancées permettront de stimuler l'activité économique, et que le gouvernement central percevra ainsi des recettes. Je pense que c'est un résumé assez juste de la position des ministériels.

Cependant, comme mon chef l'a signalé, les chômeurs, les travailleurs sous-employés ou ceux qui ont peur de perdre leur emploi et les gens qui dépendent des services sociaux n'ont pas un revenu disponible suffisant pour contribuer d'une manière significative. C'est cela qu'il faut corriger. Il faut remettre les gens au travail. Lorsqu'ils étaient dans l'opposition, mes vis-à-vis disaient la même chose. Si nous voulons éponger notre déficit, il est essentiel de redonner du travail aux gens afin qu'ils contribuent à notre économie plutôt que de constituer un fardeau pour notre société.

(1330)

Je ne crois pas que ce budget y parviendra. Je ne me fie pas simplement à mes propres observations, je me reporte également aux commentaires d'experts à ce sujet. Je n'ai encore entendu personne affirmer que beaucoup de Canadiens sans travail pourraient enfin d'obtenir un emploi.

Nous avons encore une grande capacité de production non utilisée. Je me rappelle des chiffres publiés plus tôt cette semaine sur les pertes dans le secteur manufacturier en Ontario seulement, à cause de la capacité non utilisée et des nouvelles technologies. On ne donne tout simplement pas de travail aux gens.

C'est pourquoi les Canadiens sont si déçus. Il n'y a rien dans ce budget pour redonner espoir non seulement aux chômeurs, mais également à ceux qui souhaitaient qu'on prenne une nouvelle voie permettant d'offrir de véritables emplois aux gens.

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Madame la Présidente, je suis le débat depuis ce matin avec le plus grand intérêt. Si j'étais perdu ce matin, je le suis encore plus maintenant.

Un peu plus tôt, nous avons entendu deux interventions du Parti réformiste. Dans la première, on disait que nous ne faisions rien et que les compressions n'étaient pas suffisantes. Le porte-parole en matière de défense a dit qu'elles étaient trop importantes. Et maintenant, nous entendons un autre son de cloche.

Qu'ils se décident! Est-ce trop ou pas assez? Nous voulons encourager les entreprises à embaucher. La réduction de 300 millions de dollars du taux de cotisation à l'assurance-chômage va encourager les entreprises à embaucher.

M. Riis: Madame la Présidente, je pense que nous sommes tous ici d'accord pour dire que le secteur que le gouvernement a toujours financé en partie et pour lequel il doit accroître son appui, est celui de la technologie de pointe.

Que contient le budget là-dessus? L'annulation du projet KAON en Colombie-Britannique. Je vois en face certains de mes collègues britanno-colombiens. Ce projet aurait donné au Canada une longueur d'avance dans le domaine de la technologie de pointe. Il aurait été un vote de confiance pour nos ingénieurs et scientifiques les plus éminents, et pour ceux du monde entier.

Les conservateurs avaient giflé la Colombie-Britannique en annulant le brise-glace Polar 8 qui devait être la marque de l'appui fédéral à cette province. L'histoire se répète avec le projet KAON que ce gouvernement vient d'annuler. Et maintenant, les centaines de millions de dollars qui auraient créé des emplois, non seulement dans la construction, mais surtout, et cela était primordial, dans le domaine du génie scientifique de pointe, ne seront jamais versés. Je suis désolé que nous ayons raté une si belle occasion.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Madame le Présidente, le discours sur le Budget du ministre des Finances, que je qualifierais de «Campbell à la sauce Martin», reflète le cercle vicieux de l'irresponsabilité dans laquelle le gouvernement fédéral s'est enlisé.

Le ministre des Finances s'est interdit de faire la job pour laquelle il a été élu. Il a crié tout au long de la campagne «jobs, jobs, jobs», mais quand vient le temps de les créer, il n'est plus là. Il nous annonce plutôt un déficit record prévu de 39,7 milliards et une nouvelle série de comités. Il y a une maladie de la «comitite» à Ottawa que j'ai rarement vue ailleurs.

Au slogan de la campagne électorale succède la timidité d'un ministre des Finances soumis à la bureaucratie fédérale. Comment peut-il être possible, après cela, de demander aux électeurs d'accorder leur confiance aux politiciens quand, de campagne électorale en campagne électorale, les gouvernements nous promettent des choses et font le contraire?

Ce Budget contribuera à accroître les différences, les écarts entre les différentes régions du Canada car, cachées sous le programme des infrastructures, les agences de développement voient leur budget amputé sans que le fédéral laisse la marge aux provinces d'assurer leur développement.

Le fédéral attaque avec courage les plus faibles du système en augmentant le nombre minimal de semaines de travail requis pour avoir droit à l'assurance-chômage. Il diminue à 55 p. 100 le montant versé aux chômeurs. Ça, c'est du Valcourt plus! Le plus grave, c'est qu'on présume que les citoyens ne veulent pas travailler.


1789

(1335)

On remet sur le dos des chômeurs, sur le dos des gens qui cherchent à s'en sortir, le fait qu'il n'y a pas d'emplois pour eux, le fait qu'on a un changement structurel important qui se passe en Amérique du Nord. Au lieu d'essayer de les aider, on se donne une année pour faire une réforme dont on ne connaît pas le contenu alors qu'on devrait être en situation d'économie rapide et bouger tout de suite. Les gens ne nous ont pas élus pour faire des comités, ils nous ont élus pour agir.

J'aimerais souligner aussi de façon particulière que la situation dans des régions comme l'est du Québec est certainement aussi difficile que dans les communautés amérindiennes, et je ne retrouve pas la même mesure pour les gens de nos régions que pour les communautés amérindiennes. Je pense que les besoins des Amérindiens sont là, mais je pense qu'ils le sont chez nous aussi et cela me paraît très malheureux qu'on soit traités de cette façon.

Tantôt, on disait qu'il n'y a pas de hausse d'impôt, mais pensez-vous que pour la personne qui va passer du chômage à l'aide sociale l'année prochaine parce qu'elle n'aura pas les deux semaines supplémentaires, ce n'est pas toute une hausse qu'on va chercher dans son portefeuille? Elle va être obligée de découvrir de nouveaux trucs pour réussir à arriver, et encore après ça on va dire que les gens trompent l'assurance-chômage ou le bien-être social.

Par ailleurs, le gouvernement ferme les yeux sur la lutte aux dédoublements parce qu'il devra admettre que le système fédéral canadien est à la source même des déficits incontrôlés. Lors de la campagne électorale, les électeurs nous reposaient systématiquement la même question: allez-vous créer de l'emploi comme les libéraux le promettent? La réponse qu'on donnait est la suivante: oui, mais pour cela il faut une marge de manoeuvre.

Par manque de courage politique, les libéraux ne peuvent pas remplir leur objectif parce qu'ils ne répondent pas à la nécessité de dégager cette marge de manoeuvre. Nulle part on a pu, depuis qu'on a commencé à siéger, obtenir du gouvernement qu'il étudie sérieusement les dépenses et qu'on puisse corriger ce qui est inéquitable, les programmes qui fonctionnent depuis des années et ne répondent plus aux besoins. Dans la capitale fédérale on oublie souvent les situations réelles des gens qui sont sans emploi. On évite de se pencher sur ces choses-là, de les regarder, parce que ça obligerait le gouvernement à voir comme le système fédéral est coûteux pour l'ensemble du Canada.

S'ils avaient libéré les trois milliards de dollars perdus dans les dédoublements, ils auraient pu redonner espoir à la génération des 25-35 ans dont on gaspille le potentiel. Il y a là des techniciens, des ingénieurs, des gens avec de la formation qui devraient travailler. On va se rendre compte dans dix ou quinze ans qu'on a gaspillé leur génération et qu'on ne s'est pas servi des moyens qu'autrement on aurait pu mettre au service du Québec et du Canada. Ces gens vont vivoter de projet en projet.

Le gouvernement, depuis qu'il a décidé d'imposer les personnes âgées, on comprend un peu plus sa dynamique, maintenant qu'il est devenu un gouvernement conservateur. Le gouvernement oublie aussi que les travailleurs non spécialisés de plus de 40 ans ont été les plus durement touchés par la récession. Nulle part on ne retrouve cette recherche d'équité fiscale qui devait être la marque de ce Budget.

Oubliées, les fiducies familiales. Oubliés, les 250 millions de gaspillage qui s'envolent dans des dédoublements en matière de main-d'oeuvre pour le Québec seulement. Par expérience personnelle, j'ai travaillé au sein de comités de reclassement, comités d'aide à la main-d'oeuvre où systématiquement on retrouve un représentant du provincial, un du fédéral, pour remplir une fonction qu'une seule personne pourrait occuper adéquatement. Il y a là-dessus un consensus au Québec depuis longtemps pour qu'il assume pleinement la juridiction en cette matière et on fait toujours la sourde oreille.

Le gouvernement préfère diminuer les transferts aux provinces de deux milliards de dollars, ce qui priverait le Québec de 700 millions de dollars. Toutes les provinces se verront alors contraintes d'accepter le projet machiavélique du ministre du Développement des ressources humaines de réformer les programmes sociaux.

Cette situation est très pénible à voir parce que le ministre, à ce moment-là, profitera du fait que les provinces seront à genoux, à cause des restrictions budgétaires, pour imposer une réforme dont les Canadiens ne voudront pas. Dans son avant-propos le ministre des Finances déclare:

Notre objectif, c'est un Canada où chaque Canadien et Canadienne apte à tra-vailler pourra trouver un emploi qui lui convient.
Malheureusement, nous ne retrouvons nulle part dans ce Budget, d'incitatif à la création massive d'emplois, tel que promis par les libéraux en campagne électorale, pour tous les travailleurs non spécialisés, à l'exception du Programme des infrastructures qu'on pourra juger au fonctionnement.

En refusant de dégager une marge de manoeuvre à même les dépenses inutiles, le gouvernement retourne dans les ornières du gouvernement conservateur qui l'a précédé, de qui on aurait pu comprendre une telle approche.

(1340)

Le gouvernement n'a pas eu le courage d'abolir les abris fiscaux des riches. Il s'est plutôt tourné vers ceux qui assurent la consommation courante en accroissant leur fardeau fiscal: les personnes âgées, les travailleurs autonomes.

Il pousse l'odieux jusqu'à créer deux classes de revenu pour les bénéficiaires de l'assurance-chômage. Les célibataires vont devoir prouver qu'ils n'ont pas d'amant ou d'amante caché dans un placard. Belle décision en cette Année de la famille, très bonne décision! D'autant plus que les personnes vivant seules doivent souvent assumer des frais fixes qui grugent leur budget de façon accrue. Les seuls emplois créés par cette décision seront ceux des «Axworthy-macoutes» que la logique bureaucratique l'obligera à créer. Les libéraux fédéraux auraient pu profiter de l'expérience de ceux du Québec où une telle mesure est en train de pousser le gouvernement Johnson à la porte.

La démarche du système fédéral passe par une décision aussi invraisemblable que d'accroître le budget du Conseil national de recherches alors que la productivité de cet organisme ne vient pas à la cheville des centres de recherches régionaux. Partout dans le Budget, on sent la marque des mandarins d'Ottawa, inconscients de la réalité vécue par les citoyens dans les régions du Canada et du Québec. Les élus du gouvernement n'ont pas fait leur travail.


1790

Dans un autre ordre d'idées, je voudrais préciser au ministre de la Défense que nous avons, en campagne électorale, prôné des coupures en matière de défense. Cependant, la décision de fermer le seul collège militaire francophone en Amérique du Nord relève de tout autre chose que de la simple mathématique financière. J'en appelle à toute la députation libérale du Québec qui devra porter cette décision comme une stigmate, particulièrement le premier ministre.

Le premier ministre est originaire de la même région que moi, une région, en Mauricie, où on a vécu longtemps la dépendance par rapport aux compagnies américaines ou canadiennes-anglaises dans le domaine de l'industrie du papier. Et lentement, on a dû assurer notre plein épanouissement et prendre notre place. Si lui-même n'est pas conscient de l'impact qu'a une décision comme celle de fermer le Collège de Saint-Jean, je pense qu'il a oublié ce que c'est que d'être Québécois.

Si le système fédéral ne peut plus assurer la formation des officiers francophones au Québec, le Québec ne le prendra pas. Cette bataille se fera dans la lignée des combats menés de haute lutte pour la survie du fait français dans les autres provinces du Canada. Les communautés francophones et acadiennes savent très bien qu'un système d'enseignement bilingue mène tout droit à l'anglicisation, autant pour les militaires que pour les autres citoyens.

Les libéraux ont décidé d'axer la création d'emploi sur la formation de comités. Je vous en nommerai quelques-uns: le Groupe de travail pour élaborer un code de conduite en matière de prêts à la petite entreprise, le Groupe de travail sur les fiducies fiscales, le Groupe de travail sur les régimes complémentaires améliorés pour accroître la compétitivité des entreprises, le Réexamen de la manière dont l'aide fédérale peut être rendue plus efficace. Un document consacré aux sciences et à la technologie sera publié afin d'alimenter un dialogue national qui débouchera sur une nouvelle politique en matière de sciences et de technologie.

Cette manie de la «comitite», pour être issu de la Fonction publique, je la connais bien. Je connais la recettte, c'est la meilleure façon d'aller nulle part. Dans un an, un an et demi, on nous donnera des rapports sur les rapports. On les déposera ici, tranquillement, en catimini, une journée où il n'y a pas trop de monde, et on en reparlera l'année suivante.

Aujourd'hui, les gouvernements doivent réagir rapidement pour que le pays prenne place dans la compétition à outrance créée par la mondialisation des marchés. Pendant que se rédigeront ces beaux rapports et que les années de tergiversations et de comités s'accumuleront, le Canada continuera sa chute vertigineuse sur la liste des pays en déclin de productivité. Personne ne nous a élus pour former des comités.

Des mesures s'imposaient à court terme pour les diplômés des collèges et universités. Les travailleurs de la forêt devront maintenant courir après les contrats de 12 semaines plutôt que de 10. Bien sûr, les fonctionnaires chargés de l'application de l'assurance-chômage seront débordés de travail pour retrouver les méchants chômeurs qui cherchent à sauver leur peau.

Le gouvernement ne prend pas ses responsabilités et se comporte en consultant, alors qu'il doit gouverner. Les délais supplémentaires qu'il se donne lui évitent de faire les choix réels. Les libéraux osent, cependant, ce que les conservateurs n'avaient jamais fait, soit augmenter le nombre de semaines minimal pour être admissible à l'assurance-chômage.

(1345)

Ce budget m'apparaît être celui des bureaucrates qui ne réalisent pas l'effet dévastateur, sur nos milieux locaux, de la hausse du plancher minimal de 10 à 12 semaines d'emploi pour avoir droit à l'assurance-chômage. J'invite les députés libéraux à rappeler au ministre des Finances leur engagement électoral de remettre le Canada au travail.

Ce budget, c'est le budget de la désillusion pour ceux qui croyaient encore qu'un engagement électoral voulait dire quelque chose. Lors de la campagne électorale, j'ai rencontré des gens qui travaillaient dans une tourbière, et pendant une demi-heure ou une heure, je leur ai expliqué comment la politique pouvait servir à quelque chose et comment les élections qui s'en venaient pouvaient aider à effectuer un changement. Mais, lorsque je retournerai dans ma région et que les mêmes personnes vont me dire: «Vous voyez bien que c'est tout du pareil au même, on change de gouvernement, et une fois qu'ils sont élus, ils font pareil comme les autres», je vais pouvoir au moins dire que nous autres on n'a pas changé d'idée.

Monsieur le ministre des Finances, mon cri c'est celui des régions, celles qui vivotent depuis que la pêche a été interdite, celles qui s'arrachent péniblement la vie en essayant de composer avec les problèmes de chômage qu'ils connaissent. C'est aussi ces régions qui ont vu fuir leur jeunesse inexorablement, et aussi toutes celles qui cherchent à s'en sortir. Les régions n'applaudissent pas à ce projet, elles se renfrognent en pensant au jour où elles prendront en main leur développement. Quand on sait que les deux tiers des dépenses d'aide sociale se retrouvent dans les poches des différents intervenants du système plutôt que sur la table de ceux qui en ont besoin, il y aurait eu là quelque chose à attaquer immédiatement et non pas d'y travailler en comité pendant plus d'une année.

Ceux qui s'étonnent que les Québécois élisent régulièrement, à répétition, des souverainistes devraient comprendre, devant les budgets bleus ou rouges qui se succèdent sans qu'on puisse y trouver d'autre saveur que celle de l'appareil bureaucratique fédéral. Ne serait-ce que pour sortir de ce cercle infernal, le Québec n'a plus les moyens de demeurer dans le système fédéral.

En effet l'an prochain, à la même époque, le ministre des Finances va nous expliquer pourquoi il n'a pu restreindre le déficit à 39,7 milliards, mais que 1995-1996 sera la bonne année cette fois-ci, où le gouvernement va vraiment reprendre la commande de son budget. Je serais bien prêt à prendre des gageures avec n'importe quel député du Parlement là-dessus. C'est un vieux refrain connu mais qui chante faux.

Pour éviter cette triste situation, je réitère encore au gouvernement la proposition de tenir un comité spécial d'analyse de toutes les dépenses, composé de parlementaires de tous les partis. Cette démarche obligerait les gestionnaires de l'État à répondre à nos questions sur la nécessité des travaux effectués et


1791

montrerait aussi à l'ensemble du Québec et du Canada que nous sommes les gens qui dirigent ce pays et non pas ceux qui sont dirigés par le haut fonctionnariat.

Demain, je retourne dans ma circonscription dire aux gens de Kamouraska-Rivière-du-Loup qu'il n'y a plus d'espoir de reprendre le contrôle de l'équipage emballé qu'est le gouvernement fédéral. Je voudrais qu'ils se lèvent de partout pour marquer leur réprobation de la même façon qu'ils l'ont fait dans les médias depuis quelques jours. En fin de semaine, lorsque vous rencontrerez vos commettants et qu'ils demanderont à tous les députés du gouvernement: Quelle est la marque libérale différente de ce budget? Que répondrez-vous? Y a-t-il une lueur d'espoir de remettre les Canadiens et les Québécois au travail par ce budget? C'est à la députation libérale de ramener son gouvernement à la raison.

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis): Madame la Présidente, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté notre collègue de l'autre côté de la Chambre. Et c'est un peu drôle parce que le discours ne change pas; peu importe le sujet discuté dans cette Chambre, le discours de nos collègues ne change jamais. C'est toujours le même discours, à l'effet que tout ce qu'on fait, comme gouvernement, se fait sur le dos des chômeurs et des plus démunis de la société. C'est clair pour moi qu'ils n'ont pas lu, premièrement, le Budget, comme tel, et je donnerai un exemple. Quand on parle de l'assurance-chômage, c'est clair qu'on a dit que les femmes avec des enfants ont quand même un avantage dans le nouveau système qu'on va introduire. Et n'oubliez pas qu'il y a d'autres changements qui s'en viennent, des changements qu'on propose de faire. C'est évidemment à leur avantage de parler des chômeurs et des plus démunis, et de quand même utiliser des faussetés auprès des médias et des journalistes dans le but de passer leur message.

(1350)

Dans les journaux de Montréal, il a été dit que les personnes âgées perdraient leur pension. Je peux vous dire que j'ai reçu des appels à mon bureau, justement parce que les gens ont lu les journaux qui contenaient ces faussetés véhiculées par l'opposition, en disant que des personnes âgées, à n'importe quel niveau de revenu, perdraient leur pension. Cela n'est pas vrai.

De plus, en ce qui a trait au scénario toujours présenté par l'opposition, celui-ci n'est pas réaliste. Comme je l'ai mentionné, ils n'ont pas regardé les vrais chiffres dans le Budget et ce que l'on veut vraiment faire. On parle de la création d'emploi. Oui, on en parle, parce qu'il y a des emplois. Dans quelle mesure va-t-on les créer? Dans la mesure où ces emplois pourront venir en aide aux petites et moyennes entreprises, au Québec, sans oublier Montréal, qui est une région que je connais bien, où est situé mon comté.

Il existe plusieurs petites et moyennes entreprises créatrices d'emplois, à Montréal. Dans une étude menée par la Ville de Montréal, il y a quelques années, on disait que c'étaient les petites et moyennes entreprises qui étaient créatrices d'emplois. On va aider ces gens-là. On va quand même leur donner les moyens de créer des emplois pour les plus démunis, comme vous le dites, de l'autre côté de la Chambre.

Compte tenu de la vision limitée de l'opposition, et compte tenu que les discours ne changent pas, j'aimerais demander pourquoi les séparatistes-et c'est le vrai nom, ne l'oubliez pas, de l'autre côté de la Chambre-insistent à jeter continuellement de la poussière aux yeux aux Québécois et Québécoises et ne pas leur dire la vérité?

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Madame la Présidente, je suis très étonné d'entendre ce discours venant d'une députée qui vit dans la région la plus pauvre du Canada. J'ai l'impression qu'elle est sortie de la planète!

Comment pouvez-vous dire que dans votre comté de Saint-Denis, dans la région de Montréal. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): À l'ordre! Je regrette d'interrompre le député, mais il faudrait qu'il adresse ses remarques à la Présidence.

M. Crête: Madame la Présidente, est-ce que la députée pourrait nous dire que dans son comté, le fait de ramener le nombre de semaines minimales pour avoir droit aux prestations d'assurance-chômage, cela ne fera pas gagner la pauvreté? Il ne faut pas inventer des histoires, on aura droit à un moins grand nombre de semaines de bénéfices.

Quant à la question qui concerne les femmes, c'est un effet pervers. Pour une députée du Québec, elle pourrait le comprendre, pour l'avoir vécu. On la vit depuis quelques années, au Québec, la réforme Bourbeau, où les femmes sont obligées de se trouver des témoins, de se sauver de leur maison, le soir, à la noirceur, pour pouvoir prouver qu'elles demeurent seules. Ce genre de situation est inacceptable. Je pense qu'on ne peut pas maintenir cela.

En ce qui concerne maintenant sa question et son commentaire, quant à moi, j'ai bien confiance aux médias canadiens et québécois. Je n'ai pas l'impression qu'ils comptent des mensonges. J'ai l'impression qu'ils reflètent ce qu'ils entendent à la Chambre des communes. C'est un peu ce qu'a constaté le ministre des Finances, au lendemain du dépôt du Budget. Tout le monde a compris qu'il n'avait rien changé, et cela l'a profondément surpris.

J'aimerais répondre maintenant à la dernière remarque, sur ce que vous appelez les séparatistes, du moins ceux qui veulent que le Québec devienne un pays souverain. Un tel pays en est un qui fait toutes ses lois, qui perçoit tous ses impôts et qui signe tous ses traités. À cet effet, dans le régime fédéral il y a, de façon systématique, 3 milliards de dollars en dédoublements qui sont des dépenses inutiles, et à cause de votre idéologie, les gens du gouvernement se refusent à les regarder. S'ils avaient le courage de le faire, ils ne seraient pas pris pour avoir le courage de taper sur les plus démunis.

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River): Madame la Présidente, l'honorable député de Kamouraska-Rivière-du-Loup n'a sûrement pas écouté mon discours de ce matin. Il prétend que dans ce pays, c'est seulement au Québec que l'on peut recevoir une éducation en français. Il pose une question justement aux Acadiens et francophones hors Québec. Tantôt, il nous demandait : «Demandez-leur si on peut avoir une éducation en français hors Québec?».

Madame la Présidente, j'en pense que j'en suis une preuve vivante. J'ai fait toute mon éducation en Ontario et je l'ai faite en français. Non seulement les Franco-Ontariens avaient une bonne éducation, mais on desservait aussi une bonne partie du Québec, du Nord-Ouest québécois, qui venait étudier à Sudbury parce qu'il n'y avait pas d'institution pour l'éducation dans le Nord-Ouest québécois.

1792

(1355)

M. Crête: Madame la Présidente, puisque le député parle français, il a sûrement mal écouté ma réponse parce que je parlais des collèges bilingues. J'ai dit qu'on savait très bien que le bilinguisme dans un collègue bilingue, pour n'importe quel francophone, dans n'importe quelle province du Canada, menait directement à l'anglicisation. Quand on sait qu'au Canada, il a fallu 100 ans pour obtenir des décisions de la Cour suprême pour pouvoir offrir l'enseignement en français dans certaines provinces de l'Ouest et encore, qu'il faut des recours aux tribunaux pour être capables de le conserver, je pense qu'il est très clair que l'enseignement bilingue au Canada n'a aucun avenir. Vous allez nous marcher sur le corps avant de nous imposer la fermeture du Collègue militaire de Saint-Jean! Vous pouvez être certain que l'ensemble du Québec va se lever derrière nous.

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement le discours du député et j'ai apprécié qu'il reconnaisse que notre marge de manoeuvre était très serrée du fait que nous avions hérité d'un cadre financier beaucoup plus piteux que nous n'aurions pu l'imaginer.

Nous nous rendons tous compte qu'il y a une crise de confiance au Canada. Peu importe si la circonscription du député se trouve au Québec et la mienne, au coeur de Toronto, un des facteurs qui mine la confiance des investisseurs au Canada, c'est qu'il y ait tant de députés au Parlement canadien qui parlent constamment de séparation.

Le député ne convient-il pas que l'accent que nous mettons constamment sur la séparation influe autant sur l'économie du Canada que le budget?

[Français]

M. Crête: Madame la Présidente, si le fait d'insister sur la question de la souveraineté du Québec nous conduit à une solution comme celle qui a amené la séparation entre la Norvège et la Suède, je pense qu'on pourra être fiers de notre coup. On peut considérer, aujourd'hui, que des petits pays comme ceux-là ont des situations de quasi plein emploi, alors que nous avons un gouvernement fédéral qui fonctionne comme un éléphant. Il est tellement lent à réagir aux crises, que lorsqu'on en est rendu à imposer des solutions, déjà une autre crise s'est pointée.

M. Martin Cauchon (Outremont): Madame la Présidente, j'écoute mon collègue et à l'entendre, j'ai l'impression que, dans un Québec séparé, ce serait le nirvana. J'aimerais lui demander comment un Québec séparé pourrait être le nirvana et pourrait avoir une meilleure situation économique que celle que nous avons présentement au Canada, un Canada qui a sa place parmi le Groupe des Sept, un Canada qui évolue dans un cadre de libre-échange nord-américain et qui a une ouverture sur l'Europe et sur l'Asie? Comment le Québec séparé pourrait-il offrir plus aux Québécois et Québécoises?

M. Crête: Madame la Présidente, ce que le Québec va pouvoir faire lorsqu'il sera un État souverain, c'est avoir le contrôle de l'ensemble de ses décisions. Il ne décidera jamais de gaspiller 250 millions de dollars dans la main-d'oeuvre juste pour faire plaisir à un autre palier de gouvernement ou pour accorder plus de visibilité à un autre palier de gouvernement.

De plus, on peut dire que le beau Canada, présentement, n'est pas loin d'être examiné par la Banque mondiale. Donc, si on continue à présenter des budgets comme celui-ci, ce sera non seulement les méchants séparatistes du Québec qui réclameront un changement, ce sera l'ordre mondial international.

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Madame la Présidente, j'aimerais féliciter le député du Bloc québécois d'avoir mis tant d'émotion à exprimer ses idées au sujet de l'administration publique.

(1400)

Lorsque sa province deviendra un État séparé, nous dit-il-que Dieu l'en préserve-il aura les réponses à tout et qu'au Québec, ce sera la gloire économique, leurs activités économiques feraient l'envie de tous.

Sur la simple question de l'assurance-chômage, étant donné le contexte économique d'aujourd'hui à travers le Canada, qui inclut les dix provinces et les deux territoires, j'aimerais demander l'avis du député sur ce qu'il proposerait d'améliorer au niveau économique?

M. Crête: Monsieur le Président, si le Québec devenait un État souverain, je n'ai jamais prétendu que ce serait le nirvana, ce sont les propres mots des députés du côté gouvernemental. Par contre, j'ai prétendu, et je prétends toujours, qu'on aurait la chance de se débrouiller aussi bien que beaucoup de petits pays dans le monde qui font pas mal mieux que ce que le Canada fait présentement. Si, en 1980, on se demandait au Québec. . .

Le Président: À l'ordre. Comme il est 14 heures, la Chambre abordera maintenant les déclarations de députés, conformément à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


1792

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

M. Réginald Bélair (Cochrane-Supérieur): Monsieur le Président, la Commission de délimitation des circonscriptions électorales a proposé d'éliminer les circonscriptions de Cochrane-Supérieur et de Timiskaming-French River dans le nord de l'Ontario.

Je suis renversé de constater à quel point la commission ne connaît pas la structure géopolitique de cette région. La réduction du nombre des circonscriptions ne fera que compliquer la prestation des services à nos électeurs en raison des distances à parcourir et de la hausse du critère de population pour le porter à 80 000.


1793

Le nord de l'Ontario devra sacrifier deux circonscriptions au profit du sud de l'Ontario, qui gagnera quatre nouvelles circonscriptions. Or, notre population a besoin d'une solide représentation à Ottawa.

[Français]

En éliminant les comtés de Cochrane-Supérieur et de Timiskaming-French River, la Commission électorale propose ni plus ni moins qu'un défigurement du nord de l'Ontario. Jamais nous n'accepterons que notre représentativité soit réduite en nombre. Comment la Commission a-t-elle pu s'arrêter sur l'unique critère de 80 000 de population pour découper l'immense territoire du nord ontarien?

Elle n'a nullement tenu compte de l'excellence du service que nous avons à offrir à nos commettants malgré les grandes distances à parcourir.

* * *

LE SCOUTISME

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies): Monsieur le Président, le 22 février est une date très importante. En effet, c'est le 22 février 1857 que naissait à Londres, Lord Baden-Powell, fondateur du scoutisme. Donc, le 22 février, c'est la fête internationale du scoutisme, scoutisme auquel adhérait le Canada en 1910.

Le mouvement scout compte aujourd'hui plus de 25 millions de scouts à travers le monde, dans l50 pays. À titre d'ancien scout, je voudrais reprendre, à l'intention de cette Chambre, la fameuse phrase de Baden-Powell: «Essayez de laisser ce monde un peu meilleur qu'il ne l'était quand vous y êtes venus».

* * *

[Traduction]

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, je veux vous faire part de mes réflexions sur la contrebande de cigarettes et l'attitude des Canadiens.

Un grand nombre disent que le gouvernement a provoqué ce problème en imposant des taxes trop élevées, mais que dire de la complicité de l'industrie du tabac qui fait la promotion d'un produit mortel et qui s'emploie à nous faire croire que fumer est une activité socialement acceptable? Les commerçants qui ont protesté récemment ne sont pas coupables de désobéissance civile. Ils ont commis un crime afin d'en retirer un bénéfice. Certains autochtones vivant près de la frontière ont détourné les yeux puis ont accusé quelqu'un d'autre.

Toutefois, ce sont les Canadiens qui consomment ces produits illégaux qui manquent véritablement de principes moraux. Quand sommes-nous devenus une nation de tricheurs? Peut-on tout se permettre, à condition de ne pas se faire prendre? Les Canadiens évitent de payer la TPS; ils fraudent le bien-être social; ils mentent aux douaniers. Le moment est venu pour chacun d'entre nous de faire un examen de conscience et de se pencher sur ce malaise social.

S'il n'y a pas d'acheteurs, il n'y aura plus de vendeurs.

* * *

(1405)

LA VIOLENCE ET LES MAUVAIS TRAITEMENTS

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, il est arrivé à maintes occasions que les députés de tous les partis à la Chambre expriment de façon unanime leur inquiétude face à la violence absurde et croissante au sein de notre société.

La violence conjugale, les mauvais traitements aux enfants et le racisme sont des problèmes souvent soulevés parce que nous savons que l'ordre public et la sécurité des collectivités sont très importants aux yeux de tous les Canadiens.

Pour cette raison, les députés de la Chambre ont le devoir, chaque fois que c'est possible, de montrer qu'ils attachent de l'importance à ces préoccupations sociales. L'appui donné verbalement est utile, mais celui-ci doit être suivi de mesures concrètes qui témoignent d'un engagement sincère et véritable.

Par conséquent, j'invite tous les députés de la Chambre, ainsi que tous les représentants élus au Canada, à se servir de leurs compétences et de leurs ressources pour élaborer et promouvoir des initiatives qui défendent les valeurs que nous partageons tous. Je répète que la violence n'a pas sa place.

* * *

[Français]

LE CRÉDIT D'IMPÔT POUR PERSONNES ÂGÉES

M. Martin Cauchon (Outremont): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour apporter des éclaircissements sur une question qui m'a été posée par de nombreuses personnes sur le crédit d'impôt pour personnes âgées.

Contrairement à ce que le Bloc québécois laisse entendre, les mesures concernant ce crédit d'impôt seront sans conséquence pour la grande majorité des personnes âgées.

En effet, les trois quarts des retraités ne sont pas visés puisqu'ils ont des revenus inférieurs à 25 921 $. Seuls les retraités dont les revenus dépassent 50 000 $ n'auront plus droit au crédit pour personnes âgées. Or cette catégorie ne représente que 5 p. 100 de tous les retraités. Ce faisant, les trois quarts d'entre eux ne seront pas touchés du tout.

Les nouvelles dispositions du Budget auront le même effet bénéfique pour les personnes âgées démunies. Les retraités ayant des revenus inférieurs à 26 000 $ ne paieront pas davantage d'impôt.

L'une des idées maîtresses du Budget 1994, c'est de mieux cibler nos ressources afin que nous puissions subvenir aux besoins les plus élémentaires des personnes qui sont tributaires de l'aide de l'État. En réduisant les crédits d'impôt des nantis, nous dégageons des crédits additionnels pour aider les personnes âgées démunies et faire en sorte qu'ils vivent dans la dignité, sans peur du lendemain.


1794

[Traduction]

L'ESTONIE

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention des Canadiens sur le 76e anniversaire de l'indépendance de la République d'Estonie.

Le 24 février 1918, les nationalistes estoniens proclament l'indépendance par rapport à la Russie et, après plusieurs périodes de domination étrangère, proclament de nouveau leur indépendance le 20 août 1991. Depuis lors, l'Estonie fait figure de leader parmi les pays baltes. Première république de l'ex-Union soviétique à frapper sa propre monnaie, l'Estonie a doublé ses exportations et devance les autres économies en développement de l'ex-Union soviétique de même que la plupart des pays européens.

Sous la direction dynamique du premier ministre, M. Mart Laar, de nouvelles institutions font rapidement leur apparition, confirmant de façon claire et nette que l'Estonie est devenue une république démocratique libre et indépendante, où le pouvoir suprême repose entre les mains du peuple.

Aux Estoniens, les Canadiens désirent transmettre leurs voeux de prospérité et de paix permanentes.

* * *

[Français]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Gaston Péloquin (Brome-Missisquoi): Monsieur le Président, le Québec est encore une fois à l'honneur aujourd'hui à Lillehammer. En effet, c'est avec beaucoup de joie et de fierté que nous avons appris ce matin que Philippe LaRoche, de Lac-Beauport dans le comté de Charlesbourg, et Lloyd Langlois, de Magog dans mon comté, ont respectivement remporté la médaille d'argent et de bronze dans la discipline des sauts acrobatiques.

Nous leur offrons nos plus sincères félicitations et leur souhaitons la meilleure des chances pour les prochains défis qu'ils relèveront avec autant d'ardeur, nous en sommes convaincus.

Monsieur le Président, le grand succès remporté par nos athlètes aux Jeux olympiques est d'autant plus méritoire que ceux-ci doivent faire eux-mêmes les premiers pas dans des conditions souvent difficiles pour trouver un soutien financier.

Nous veillerons à ce que le ministre responsable du sport amateur respecte ses engagements et qu'il mette rapidement en place de nouvelles politiques de soutien pour nos athlètes.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, on a rapporté dans les médias que les députés et les partisans du Parti réformiste s'étaient fait traiter de racistes et d'ennemis des Indiens par certains députés fédéraux.

Je trouve ces calomnies répugnantes, et c'est aussi l'avis de plus de deux millions et demi de Canadiens de tout le pays qui ont voté pour le Parti réformiste.

(1410)

Beaucoup de nos partisans sont des autochtones. Ma circonscription compte deux réserves, et les gens qui y vivent trouvent aussi que ces propos sont injurieux.

Des propos de ce genre ne font que créer des dissensions au sein de notre pays et que susciter la haine entre les divers groupes de Canadiens, alors que devraient régner l'amitié et la bonne entente.

J'espère vivement que les députés qui ont tenu ces propos injurieux prendront ici la parole pour s'excuser et promettront de ne plus jamais tenir des propos aussi haineux, que ce soit en privé ou ici, sous l'oeil des caméras de télévision.

* * *

LES PRIX AUX MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ
NOIRE

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Monsieur le Président, février est le Mois de l'histoire des noirs. La communauté noire a une longue histoire au Canada. Comme beaucoup d'autres immigrants, les noirs ont contribué de façon importante, avec fierté et détermination, à la vie du pays.

Chaque année, en février, le magazine Pride présente des prix aux membres de la communauté noire qui se sont illustrés dans leur domaine de spécialisation et dans leur participation à la vie communautaire. Ces prix visent à reconnaître et à honorer les réalisations et l'excellence des noirs canadiens dans 16 catégories différentes.

Cette année, le magazine Pride a reconnu et honoré trois députés qui, pour la première fois, représentent les électeurs de leurs circonscriptions à la Chambre des communes.

La députée d'Etobicoke-Lakeshore, la députée de Vancouver Quadra et le député de Bruce-Grey ont été choisis pour le travail qu'ils ont fait dans leur milieu à titre, respectivement, d'enseignant, de médecin et de maire, ainsi que pour leur participation, à titre de bénévoles, à beaucoup d'autres initiatives.

Je suis certaine que tous les députés se joignent à moi pour féliciter ces trois députés de leur réussite.

* * *

LA POLITIQUE DE DÉFENSE

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park): Monsieur le Président, cette semaine, le ministre des Affaires étrangères a annoncé que le Canada enverrait 12 membres des Forces armées canadiennes au Cambodge pour participer à la dangereuse mission consistant à enlever les quelque cinq millions de mines qui couvrent littéralement la moitié du pays.


1795

Après deux décennies de guerre civile, le Cambodge a hérité d'une variété mortelle de mines terrestres qui tuent ou mutilent 300 Cambodgiens chaque mois et qui rendent pratiquement impossible toute forme d'agriculture.

Je félicite de leur bravoure les 12 militaires canadiens qui iront participer à cette mission de déminage.

Étant donné les conventions internationales contre l'utilisation d'armes biologiques et chimiques et d'autres armes diaboliques, je recommanderai que l'utilisation de mines terrestres soit inscrite à l'ordre du jour de l'examen de la politique des affaires étrangères et de la politique de défense du Canada que le gouvernement s'apprête à amorcer.

* * *

[Français]

LE BUREAU MÉTÉOROLOGIQUE DE SAINT-HUBERT

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, le 25 octobre dernier, les Québécois et les Canadiens croyaient avoir changé de gouvernement. Malheureusement, jusqu'à preuve du contraire, il n'en est rien. Je vous donne comme exemple un dossier important pour ma région: il s'agit de la fermeture du bureau météorologique de Saint-Hubert.

En effet, les spécialistes en services météorologiques seront remplacés par un service d'automatisation de l'observation qui n'est pas encore au point et qui a de la difficulté à déterminer les types de précipitations.

Suite à cette décision hautement discutable, les représentants de la Montérégie ont demandé une rencontre avec les deux ministres concernés afin de réviser la décision prise par les conservateurs. Le ministre des Transports et la ministre de l'Environnement oseront-ils changer cette décision des conservateurs? C'est à suivre!

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Leon E. Benoit (Végréville): Monsieur le Président, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a récemment exprimé son inquiétude à l'égard de ce qu'il croit être le point de vue du Parti réformiste sur les Canadiens autochtones, à savoir que les réformistes détestent les Indiens. Cette allégation est bien sûr complètement fausse.

On s'est trop souvent servi de telles accusations de racisme pour essayer d'ébranler le Parti réformiste. Ces allégations n'apportent rien de positif aux travaux quotidiens de la Chambre.

Les déclarations que le ministre a faites à la Chambre en laissant entendre que les réformistes affichaient des tendances racistes viennent du fait que nous nous exprimons franchement et sincèrement sur des questions comme les Indiens. . .

Le Président: Quand on fait des déclarations en vertu de l'article 31 du Règlement, la coutume veut qu'on n'attaque pas ainsi directement un autre député.

Le député pourrait peut-être reformuler sa déclaration pour qu'elle ne prenne pas l'allure d'une attaque directe.

* * *

(1415)

LES ANCIENS COMBATTANTS

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole afin d'appuyer la création d'une médaille spéciale pour les anciens combattants de Dieppe.

Le gouvernement fédéral est saisi de la question depuis une trentaine d'années. Presque tout le monde semble voir d'un bon oeil la reconnaissance spéciale de la bravoure de ces anciens combattants très méritants. Les personnalités politiques font de belles déclarations à ce sujet, les fonctionnaires se réunissent, des promesses sont faites, mais rien ne se produit. Si le Canada attend encore, tous ces anciens combattants nous auront quittés.

Je crois savoir que le gouvernement fédéral étudie actuellement des propositions sur la meilleure façon d'exprimer de façon spéciale sa reconnaissance envers ces personnes; lorsqu'il aura terminé son étude, il aura plusieurs solutions concrètes à soumettre aux groupes d'anciens combattants. En outre, le secrétaire d'État dit qu'il estime valable l'idée de créer une décoration de guerre pour ces hommes courageux.

Espérons que cette saga tire à sa fin. Les valeureux combattants de Dieppe attendent depuis assez longtemps. J'exhorte le gouvernement à faire immédiatement quelque chose pour ce groupe d'hommes admirables.

* * *

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

Mme Paddy Torsney (Burlington): Monsieur le Président, il ne reste que deux jours avant le gala annuel organisé pour aider les enfants pauvres de la région d'Ottawa-Carleton, et les billets s'envolent rapidement.

Ce gala, qui connaît un grand succès, est parrainé par le Fund for a New Generation, groupe de jeunes gens actifs qui représentent tous les partis à la Chambre, les secteurs public et privé ainsi que le milieu universitaire. Ces jeunes gens sont profondément convaincus de la valeur des secours qui viennent de la base.

Je saisis cette occasion pour remercier les 100 marchands et détaillants de la région ainsi que les commanditaires nationaux, Sun Life du Canada, Merck Frosst et le Rider Travel Group, qui ont rendu ce gala possible. Mais ils ne peuvent tout faire seuls. Les générations de demain ont besoin de nous dès maintenant.

1796

J'invite les députés, les visiteurs et les pages à enregistrer les Jeux olympiques samedi soir prochain et à venir au Musée de la nature. Un grand nombre d'enfants dans la région d'Ottawa-Carleton ont besoin de notre aide. On peut se procurer des billets aux bureaux de tous les whips. Les députés devraient appeler dès maintenant. Des téléphonistes attendent leur appel.

* * *

L'EMPLOI

M. John Solomon (Regina-Lumsden): Monsieur le Président, les libéraux enlèvent presque tout espoir aux jeunes. Dans ma circonscription, Regina-Lumsden, de plus de plus de jeunes qui demandent de l'assurance-chômage voient leur demande rejetée à cause des modifications injustes qui ont été apportées à l'assurance-chômage.

Ces jeunes n'arrivent pas à trouver des emplois à plein temps et doivent donc se contenter d'emplois saisonniers ou à temps partiel. Quand leur emploi prend fin, ils n'ont pas travaillé le nombre de semaines requis pour être admissibles à l'assurance-chômage. Ils doivent s'en remettre à l'aide sociale de la province. Ils ne sont pas paresseux. Ils sont sous-employés simplement parce qu'il n'y a pas assez d'emplois à plein temps.

Le gouvernement de la Saskatchewan s'est attaqué au problème du chômage, dans son dernier budget, à l'aide d'un programme de création d'emplois. Malheureusement, le budget fédéral se traduira par une autre hausse du nombre de chômeurs et de bénéficiaires de l'aide sociale en Saskatchewan.

Les modifications apportées à l'assurance-chômage ne font que transférer les coûts du fédéral aux provinces et maintiennent la pratique des conservateurs qui consiste à masquer le nombre réel de chômeurs en les transférant à l'aide sociale.

Le gouvernement libéral ne comprend pas. Les chômeurs ne sont pas chômeurs par choix. Ils n'aspirent qu'à une chose: de vrais emplois. Ils n'ont que faire du baratin.

_____________________________________________


1796

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Dans un geste inattendu qui sème la consternation chez les francophones du Québec et du Canada, le gouvernement veut fermer le Collège de Saint-Jean. Seul collège militaire francophone au Canada, il permet aux francophones de progresser dans leur langue au sein de l'armée. Depuis sa fondation, ce collège a formé plusieurs générations de brillants officiers francophones.

Je demande au premier ministre s'il n'admet pas qu'en fermant de façon arbitraire et sournoise le Collège de Saint-Jean, il envoie le message qu'il n'y a plus de place pour les francophones qui veulent devenir officiers de l'Armée canadienne dans leur langue et dans leur milieu?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le gouvernement ne fait pas un geste comme celui-là seulement par caprice. Nous avions une recommandation de fermer les collèges militaires, le Royal Roads à Victoria et celui de Saint-Jean au Québec.

Le Royal Roads a été fondé en 1942, celui de Saint-Jean en 1952. Nous avons fermé les deux et avons décidé d'en faire un seul, où les deux langues officielles du pays seront enseignées, à Kingston, en Ontario. Il y a beaucoup d'institutions de langue française qui fonctionnent très bien en Ontario.

Je voudrais dire au chef de l'opposition qu'il a recommandé à plusieurs reprises de couper de 25 p. 100 dans les dépenses militaires. Si nous avions accepté ces recommandations, non seulement nous aurions dû fermer le Collège militaire de Saint-Jean, mais nous aurions dû fermer aussi Bagotville, dans sa région.

(1420)

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Je comprends mal qu'on puisse tenir de pareils propos quand l'Armée canadienne dépense seulement 13 p. 100 de son budget pour les infrastructures au Québec déjà.

Mais je voudrais, monsieur le Président, si vous me le permettez, rappeler au premier ministre que le Collège de Saint-Jean a justement été fondé pour mettre fin au scandale d'une armée réfractaire au fait français et que justement le Collège de Kingston était l'un des bastions de cette attitude hostile.

Je veux demander au premier ministre s'il ne reconnaît pas que la décision de son gouvernement nous ramène 40 ans en arrière et efface un symbole de réussite du fait français au Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je regrette, peut-être qu'en 1952 c'était le problème, mais depuis ce temps-là, nous avons adopté la Loi sur les langues officielles au Canada. Le meilleur exemple que je puisse donner à la Chambre, à ce moment-ci, c'est que le chef des armées au Canada, John de Chastelain, est anglophone et il est parfaitement bilingue. Ce qui prouve que l'Armée canadienne a bien changé depuis 1952.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, nous aurons tous noté avec intérêt, que le premier ministre a reconnu que, jusqu'en 1952, c'était le problème. Le problème étant en effet, que le fait français n'était pas reconnu, était brimé dans l'Armée canadienne et que Kingston était un pilier d'un pareil rejet.

Je veux demander au premier ministre s'il veut nous confirmer la vérité, c'est-à-dire que la fermeture du Collège de Saint-Jean est le résultat de pressions de dernière minute du caucus libéral, pour faire mieux passer la fermeture de bases militaires dans le reste du Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, c'est une affirmation tout à fait fausse. Le problème n'a même pas été soulevé au caucus libéral.

Je voudrais dire à l'honorable député que, avant de faire ces propositions, que lui-même a faites, il aurait dû y penser à deux fois. Si nous avions coupé 25 p. 100, comme il le demandait, comme il en a parlé des dizaines de fois durant la campagne électorale, non seulement nous aurions fermé Saint-Jean, nous aurions fermé en même temps la base militaire de Bagotville. Et de plus, je pense que le nouveau Canada peut avoir une institution complètement bilingue en Ontario, à Kingston, où ils ont une des meilleures universités du Canada.


1797

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, dans un article paru ce matin et titré: «Kingston, un choix d'économie et d'unité nationale», le ministre de la Défense nationale nous disait, et je le cite: «Je suis fatigué des Québécois qui se disent les seuls gardiens du fait français au Canada.» Et il continuait: «Au Canada, les francophones doivent se sentir confortables partout, et c'est là le rêve de M. Trudeau et des anciens libéraux.»

Monsieur le Président, compte tenu de ces propos, devrions-nous comprendre que c'est pour se débarrasser des Québécois qui le fatiguent que le ministre entend dorénavant confier au milieu de Kingston la formation des officiers francophones?

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je fais miens les propos du ministre de la Défense. C'est possible.

[Français]

J'ai été député de Beauséjour. J'ai fréquenté, pendant que j'étais là, l'Université de Moncton, où il y a des cours de droit donnés strictement en français. J'ai visité l'Université de Sudbury. Je suis allé à l'Université d'Ottawa. J'ai été reçu au Collège de Glendon à Toronto, en Ontario. Il est possible d'avoir, au Canada, des institutions qui peuvent donner une éducation française de première classe en dehors du Québec. Et c'est cela le vrai Canada, c'est-à-dire la protection du français dans tout le Canada.

Des voix: Bravo!

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, comment le premier ministre, qui appuie les propos de son ministre et qui se dit fatigué des Québécois francophones qui tentent de défendre le fait français au Canada, peut-il croire que ceux-ci vont lui faire confiance dans la défense des intérêts du français, alors que celui-ci et son gouvernement s'apprêtent à fermer la seule institution de formation des officiers francophones pour l'Armée canadienne?

(1425)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je suis très heureux d'entendre le député défendre des institutions fédérales au Québec. J'en suis très content. Depuis qu'il connaît plus que sa petite région, j'espère qu'il va commencer à dire. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Bouchard: La petite région du Lac-Saint-Jean, c'est cela?

M. Chrétien (Saint-Maurice): Je dois dire une chose au chef de l'opposition. Si le chef de l'opposition fait l'indépendance du Québec un jour, les enfants de son voisin n'auront pas l'option d'être citoyens américains tout en vivant dans un Québec indépendant. . .

M. Gauthier (Roberval): Parle-t-il de mes enfants?

Des voix: Oh, oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice); C'est vrai! Nous croyons qu'il y a des institutions au Québec qui sont fédérales, et qu'il est possible d'être un fier Québécois, un fier Canadien et un fier francophone dans tout le pays.

Des voix: Bravo!

[Traduction]

Des voix: Encore, encore!

Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je commence à me sentir comme le réparateur Maytag. Si mes collègues le veulent bien, nous allons écouter le député de Calgary-Sud-Ouest.

* * *

L'EMPLOI

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je me demande ce qu'il est advenu de notre intention de nous comporter un peu mieux que dans le passé.

Ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Le premier ministre du Québec a annoncé que son gouvernement avait comme objectif de faire baisser le taux de chômage de 1 p. 100 cette année.

Le gouvernement fédéral a-t-il un objectif semblable pour l'ensemble du pays et, dans l'affirmative, quel est-il?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je vais répondre au député de Calgary-Sud-Ouest en soulignant que, si le premier ministre du Québec peut fixer un objectif de réduction de 1 p. 100 du taux de chômage cette année, c'est notamment parce que le gouvernement fédéral fournit une aide importante pour favoriser la création d'emplois d'un bout à l'autre du pays. En effet, nous aidons le Québec, l'Alberta, la Colombie-Britannique et toutes les autres provinces à réduire le nombre de leurs chômeurs.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, la réponse du ministre est tout simplement trop vague, surtout que cette question intéresse personnellement des millions de Canadiens.

La question que je pose au nom de ces Canadiens est celle-ci: Le ministre a-t-il des objectifs précis de réduction du chômage en 1994-1995, des objectifs pour le secteur public, pour le secteur privé, ou des objectifs nationaux? Si c'est le cas, peut-il nous préciser ces objectifs?

(1430)

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, j'ai deux réponses pour le député. Premièrement, le véritable objectif des ministériels est de mettre en place des programmes de création d'emplois, comme la réduction des cotisations d'assurance-chômage qui permettra de créer 60 000 emplois au pays, un programme d'infrastructure qui donnera 65 000 emplois, un


1798

Service jeunesse qui fournira plus de 15 000 emplois, de même qu'un programme d'apprentissage qui donnera 15 000 ou 20 000 emplois. Notre gouvernement s'occupe de créer des emplois.

Si le député veut des objectifs, je l'invite à lire les documents budgétaires. Il y trouvera la réponse à sa question. Il devrait peut-être apprendre à lire avant de poser des questions.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, le livre rouge et le discours du Trône promettaient des emplois. Pourtant, le budget prévoit que le taux de chômage, qui était de 11,2 p. 100 l'an dernier, passera à 11,1 p. 100 cette année, soit une baisse de seulement 0,1 p. 100.

Le ministre reconnaît-il que ce n'est pas suffisant? Reconnaît-il que l'incidence du budget de mardi sur l'emploi en 1994-1995 est négligeable et, par conséquent, inacceptable pour les chômeurs canadiens?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, sauf tout le respect que j'ai pour le député, je pense que celui-ci souffre d'une légère attaque de schizophrénie.

Hier, il clamait bien haut à la Chambre qu'il fallait réduire les dépenses publiques, ce qui aurait pour effet d'envoyer au chômage des milliers d'autres Canadiens. Or, il nous demande maintenant comment nous allons redonner du travail aux gens. On ne peut pas gagner sur les deux plans.

* * *

[Français]

LE BUDGET

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

En décembre dernier, le gouvernement libéral a haussé les cotisations d'assurance-chômage à 3,07 $, c'est-à-dire une hausse de taxe de quelques centaines de millions de dollars pour l'année 1994. Le nouveau Budget revient sur cette décision, tout en maintenant cette taxe jusqu'en décembre prochain. Or, le gouvernement soutient que la réduction du taux va créer 40 000 emplois à compter de janvier prochain.

Le ministre reconnaît-il que la diminution des cotisations d'assurance-chômage s'impose tout de suite, car de l'aveu même du ministre, l'augmentation décrétée, cette véritable taxe à l'emploi, coûtera quelque 40 000 emplois d'ici décembre prochain?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, c'est un plaisir de voir que le député reconnaît le nombre d'emplois qu'on va créer avec la baisse des cotisations à l'assurance-chômage, une hausse qu'on a été obligé d'imposer aussitôt qu'on a pris le pouvoir à cause du déficit qu'on a hérité du gouvernement précédent. Mais lorsque vous regardez le nombre d'emplois qu'on va créer, notre baisse rejoint vraiment notre programme d'infrastructures et notre programme de création d'emploi qui est vraiment reconnu par tout le monde. Il est vraiment épatant.

Laissez-moi vous citer ces passages: «La réduction des cotisations d'asssurance-chômage est un encouragement important pour la petite entreprise. . . Vous réduisez les charges sociales, vous obtenez la création d'un plus grand nombre d'emplois». C'est John Bulloch, président de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui a dit cela. «Il doit plutôt assurer les conditions susceptibles de permettre à l'entreprise privée de créer des emplois. Et je crois que c'est le ton que donne le Budget»; je vous cite Mme Anne-Marie Hubert, comptable, participante à la conférence de Montréal. «J'estime que le ministre a présenté un budget qui va aussi loin que le gouvernement le peut pour. . .»

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je cède la parole à l'honorable député de Laurier-Sainte-Marie.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, je vous remercie d'avoir interrompu le ministre dans son clipping de presse favorable.

C'est tout de même fantastique! Le ministre nous dit: «Vous reconnaissez que ça crée 40 000 emplois, et on va les créer, on le sait, d'autant plus que, cette année, on va en couper 40 000». Il faut quand même le faire! Monsieur le Président, c'est un pas de cha-cha-cha: un pas en avant, deux pas en arrière. Dans les faits, le ministre reconnaît son erreur, reconnaît que, cette année, il en coupe 40 000. Il nous dit que, l'an prochain, il en sauvera 40 000.

Pourquoi n'agit-il pas de tout de suite et ne sauve-t-il pas ainsi quelques centaines de millions de dollars? En plus, cette mesure créera du chômage parce que-le ministre l'avoue lui-même-on créera des jobs l'an prochain, parce que cette année, on crée du chômage.

Le ministre est-il responsable dans sa politique, oui ou non?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, la réponse est clairement oui.

(1435)

Selon les déclarations d'une grande majorité de syndicalistes et de chefs d'entreprises, le fait qu'on ait indiqué très clairement qu'on va geler les dépenses, c'est là qu'on va faire le roll back et qu'on va créer cet optimisme qui permettra de créer des emplois. Et encore, je peux vous faire part d'une autre citation, si vous ne m'interrompez pas, monsieur le Président: «L'orientation est bonne, parce qu'il s'agit essentiellement d'une charge sociale et si nous pouvons réduire l'impôt sur l'emploi, cela aura un effet positif sur la croissance de l'emploi.» Ce n'est qu'une citation, mais il y en a des milliers, monsieur le Président!


1799

Des voix: Bravo!

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances et touche tous les Canadiens et non seulement les habitants d'une province.

À la page 1 du Plan budgétaire, on peut lire que le gouvernement tentera:

. . . d'atteindre son objectif intermédiaire d'un déficit égal à 3 p. 100 du PIB d'ici 1996-1997.
Si l'objectif intermédiaire est de 3 p. 100, l'objectif ultime est-il de ramener le déficit à zéro?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Oui, monsieur le Président.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, c'est drôle, mais je m'attendais à cette réponse.

Cela m'amène évidemment à demander au ministre quand il s'attend à atteindre cet objectif de zéro?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, le budget nous ouvre la voie. C'est un premier pas important dans la bonne direction.

Je pourrais, encore une fois, vous servir de très nombreuses citations.

Une voix: Oh, oh!

M. Martin (LaSalle-Émard): J'en ai de très bonnes, monsieur le Président.

Il reste qu'il s'agit clairement de notre but ultime. Il est d'ailleurs très clairement énoncé dans le budget. À mesure que nous nous approchons de ce but, nous avons également l'intention de réduire les taxes de même que les impôts et de prendre ainsi une mesure très importante aux yeux d'une nation déjà surtaxée.

[Français]

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes): Monsieur le Président, ma question s'adresse aussi au ministre des Finances.

Dans son discours du Budget, le ministre a choisi de s'attaquer à la classe moyenne et en particulier aux personnes âgées à revenu moyen. C'est une somme de 490 millions sur trois ans qu'il a décidé de prendre dans la poche de ces dernières.

Le ministre des Finances est-il conscient qu'il alourdit, de façon inadmissible, le fardeau fiscal de 800 000 personnes âgées en allant chercher dans la poche d'une personne âgée gagnant 35 000 $ des impôts additionnels totalisant 560 $ sur deux ans?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, 95 p. 100 des personnes âgées auront droit à la totalité ou à une partie du crédit en raison de l'âge. Seulement 5 p. 100 des personnes âgées vont perdre la totalité du crédit.

Tout ce que nous faisons vraiment, c'est d'harmoniser le crédit en raison de l'âge avec les autres crédits accordés en fonction du revenu.

Si je peux poursuivre, notre Budget ne touche en aucune façon au Programme de sécurité de la vieillesse. Il ne touche en aucune façon au Supplément de revenu garanti et ne touche d'aucune façon au crédit pour revenu de pension.

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes): Monsieur le Président, les 800 000 personnes dont je parle sont extérieures à ces 5 p. 100.

Pourquoi le ministre a-t-il choisi de s'attaquer aux personnes âgées à revenu moyen plutôt que de s'assurer que toutes les entreprises paient un minimum d'impôt ou encore de mettre fin au scandale des fiducies familiales?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il y a là deux questions et je vais y répondre. En ce qui concerne les personnes âgées et les mesures que nous venons de prendre, j'aimerais citer la fameuse Mme Solange Denis, dans Le Droit de ce matin: «Il ne faut pas penser que tout nous est permis parce que nous sommes des personnes du troisième âge. Les aînés doivent faire leur part, le déficit est énorme et tout le monde sait qu'il faut se donner la main.» Certainement, nous allons accepter la parole de Mme Denis. Maintenant, monsieur le Président, on vient de me poser la question. . .

(1440)

M. Loubier: Une question!

M. Martin (LaSalle-Émard): Non, c'étaient deux questions. Quand même, il est beaucoup plus habile que vous l'êtes!

Monsieur le Président, sur la question concernant les fiducies familiales, sur ce que nous voulons faire, est-ce que je peux citer un discours fait par le critique financier du Bloc québécois? La même chose pour les fiducies familiales. Nous en avons parlé, mais les études vraiment exhaustives à cet égard manquent. Alors, nous réitérons une autre demande du Bloc québécois de constituer un comité parlementaire.

* * *

[Traduction]

LE GOUVERNEUR GÉNÉRAL

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances, qui n'aura pas besoin de tonnes de papier pour y répondre.

Hier soir, le réseau CTV a rapporté que le gouverneur général voyageait entre Ottawa et l'Arizona en Challenger et cela, au coût de 160 000 $. Je sais que nous souhaiterions tous aller. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Marchi: Quelles extravagances! Ces gens de l'Ouest nous coûtent donc cher.


1800

Le Président: À l'ordre. La coutume veut qu'on ne pose pas à la Chambre de questions au sujet du gouverneur général. Le député voudra peut-être reformuler sa question de façon à obtenir l'information qu'il désire sans faire allusion au gouverneur général. La parole est au député de Wild Rose.

M. Thompson: Merci, monsieur le Président. Je suis étonné de même parler de Challenger. J'ai entendu dire que ces appareils étaient à vendre.

Le ministre des Finances conviendra-t-il que, en ces temps difficiles, le gouvernement devrait commencer à faire preuve d'une certaine retenue dans ce genre de dépenses?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je crois qu'il en est du gouverneur général comme du premier ministre. Pour des raisons de sécurité, les voyages du gouverneur général et du premier ministre sont organisés en fonction de lignes directrices établies par le service de sécurité de la GRC.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, je peux comprendre que la sécurité, c'est important. Je n'en suis pas sûr. Il faudrait que j'examine cela de plus près.

Des voix: Oh, oh!

M. Gauthier (Ottawa-Vanier): On fait preuve d'un manque de respect à l'égard du gouverneur général.

M. Thompson: La sécurité peut probablement jouer. Toutefois, je crois qu'il y a de meilleurs moyens de l'assurer.

M. Manley: Vous n'avez qu'à le demander au général Renfrew.

M. Thompson: Voici ma question suivante. Le ministre des Finances serait-il disposé à entreprendre immédiatement un examen approfondi des salaires et des avantages de tous les employés des contribuables canadiens en vue de mettre un terme aux dépenses somptuaires?

M. Marchi: On vient de les bloquer, pour l'amour du ciel!

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le ministre des Finances fait savoir dans son budget que tous les conseils et toutes les nominations sont l'objet d'un examen à l'heure actuelle sous la direction du ministre compétent, à savoir le président du Conseil privé. Nous sommes en train de tout examiner afin de nous assurer qu'il n'y a pas de gaspillage.

En ce qui concerne le gouverneur général, j'ajouterai que le même principe vaut pour lui que pour Sa Majesté la reine.

* * *

[Français]

LE BUDGET

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Le discours du Budget nous ramène 20 ans en arrière dans l'application du Régime d'assurance-chômage, en prenant en compte le revenu du conjoint et la prise en charge des enfants pour établir le niveau des prestations.

Le ministre ne convient-il pas que les principales intéressées par les modifications apportées par le Budget sont les femmes qui auront à justifier si oui ou non elles ont un conjoint, ou si oui ou non elles ont des enfants à charge?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il est très clair dans la réforme de l'assurance-chômage que nous avons soumise, que le rôle des femmes est quelque chose de très important. C'est pour cela que nous avons vraiment augmenté les bénéfices, par exemple, pour les mères de famille seules. On a renversé les mesures draconiennes du parti conservateur. Alors il est très clair, lorsqu'on regarde la réforme, que le rôle des femmes est très important pour nous.

(1445)

Mme Christiane Gagnon (Québec): Le ministre reconnaît-il que l'application des modifications apportées se traduira par la mise en place d'un appareil monstre de contrôle et de harcèlement auprès des femmes s'apparentant à un escadron de boubous macoutes?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, il n'y a de monstre que dans la tête de la députée.

L'admissibilité au nouveau programme destiné à aider les plus défavorisés sera déterminée au moyen du formulaire de base utilisé pour demander le crédit d'impôt pour enfant.

Je peux donc calmer les craintes de la députée et lui conseiller de s'adresser au chef de l'opposition si d'autres monstres viennent la hanter.

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Ron MacDonald (Dartmouth): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Hier, la Chambre a voté sur l'établissement d'un comité parlementaire mixte chargé d'examiner et de réviser la politique de défense. Mardi soir, le ministre des Finances a annoncé des compressions dans le budget de la défense ainsi que la fermeture ou la réduction des effectifs de plus de 20 installations militaires.

La question que je veux poser au ministre de la Défense nationale est la suivante: Peut-il dire à la Chambre quels critères ont été utilisés dans le choix des bases qui seront fermées ou dont les effectifs seront réduits? Peut-il assurer à la Chambre que les mesures annoncées dans le budget avant-hier soir n'entraveront pas le travail du comité d'examen de la politique de défense?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, j'ai répondu à une question semblable à la Chambre, il y a quelques semaines.


1801

Nos réductions touchent uniquement l'infrastructure excédentaire, et nous avons procédé de cette façon justement pour ne pas nuire au résultat de l'examen de la politique de défense.

Je regrette que de nombreuses installations aient été déclarées excédentaires après un examen exhaustif et une analyse complète des coûts par nos fonctionnaires. Je sais que la circonscription du député a été durement touchée, et je le regrette. Nous essayons de travailler avec lui et avec les autres députés concernés afin de voir si des mesures palliatives pourraient être mises en place pour aider ces localités à remplacer une partie de l'activité économique qu'elles ont perdue.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

M. David Chatters (Athabasca): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Je crois comprendre que le gouvernement précédent et les leaders autochtones s'étaient entendus pour ne pas parler de la loi C-31, qui définissait l'appartenance aux effectifs d'une bande, dans le cadre des discussions concernant les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale des autochtones. Ils ont en effet accepté de laisser aux tribunaux le soin de trancher cette question afin que les discussions sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale puissent se poursuivre plus rapidement.

Voici ma question. Si les leaders autochtones en sont arrivés à cette entente avec le gouvernement précédent et en étaient satisfaits, pourquoi le ministre actuel mêle-t-il maintenant la loi C-31 aux discussions avec les leaders et les bandes autochtones?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, le gouvernement est différent.

Nous sommes partis de la prémisse que le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale existe. Dans le cadre de ces négociations, nous examinons les collectivités, les lignes de partage des eaux et les aspects culturels. Nous ne disons pas qu'un autochtone habitant dans une réserve est différent d'un autochtone habitant hors réserve.

C'est un sujet très délicat. Je sais que cette question tient à coeur aux bandes partout au Canada. Une partie du problème tient au retour à la réserve. Personne ne s'attendait à pareil phénomène. Tout le monde évaluait à environ 10 p. 100 la proportion des autochtones réintégrés sur les effectifs d'une bande et voulant retourner vivre dans la réserve. Or, cette proportion atteint plutôt 40 ou 50 p. 100, et cela crée des pressions énormes pour les chefs.

Malgré tout cela, parler des gens qui font légitimement partie des bandes entre dans le cadre des discussions en cours. C'est la politique de notre gouvernement.

M. David Chatters (Athabasca): Monsieur le Président, je ne suis pas certain que cela réponde à ma question. Les autochtones du Canada arrivent à s'entendre avec les gouvernements et font confiance à ceux-ci, quel que soit le parti qui est au pouvoir et qui doit honorer les ententes.

Voici ma question supplémentaire. Le ministre n'a pas encore clairement nié ou confirmé avoir dit à des membres de certaines bandes de ma circonscription que les réformistes détestent les Indiens. Va-t-il prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour dissiper toute équivoque? A-t-il, oui ou non, dit que les réformistes détestent les Indiens?

Le Président: La parole est ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, s'il veut répondre à la question.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, je crois que c'est très important que je le fasse. Les députés du Parti réformiste du Canada m'ont demandé à plusieurs reprises si j'ai déclaré, au cours d'une rencontre privée, que leur parti déteste les Indiens. Comme je l'ai expliqué hier à la Chambre, je ne me souviens pas d'avoir dit cela, et personne d'autre ne s'en souvient.

(1450)

Cependant, si je l'ai fait ou si le Parti réformiste croit que je l'ai fait, permettez-moi de dire clairement à tous les députés et à tous les Canadiens que, non, je ne crois pas que le Parti réformiste du Canada déteste les Indiens.

Monsieur le Président, la Chambre des communes doit continuer de fonctionner d'une manière impartiale, et tous les députés doivent conjuguer leurs efforts pour améliorer la qualité de vie de tous les membres des premières nations du Canada.

* * *

[Français]

LE LOGEMENT SOCIAL

Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le gouvernement libéral, alors qu'il siégeait dans l'opposition, non seulement dénonçait les coupures faites par le gouvernement conservateur en matière de logement social, mais s'engageait à rétablir les budgets.

Le ministre peut-il nous dire comment il se fait qu'on ne retrouve dans le budget aucune mesure rétablissant l'aide au logement social, rien pour les coopératives, rien pour les habitations sans but lucratif. Pourquoi renie-t-il ces engagements pris au cours de la dernière campagne?

[Traduction]

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion du Canada atlantique): Monsieur le Président, je voudrais remercier et féliciter la députée de ramener cette question sur le tapis. Elle devrait examiner le budget pour voir ce que le ministre des Finances a fait, lui qui ne mérite rien d'autre que des félicitations.

Le ministre prévoit que deux milliards de dollars seront consacrés directement au logement social, qu'un montant de 100 millions de dollars sera réaffecté au PAREL, qui concerne le logement social, et que des économies totalisant environ 120 millions de dollars sur quatre ans seront attribuées au logement social, notion qu'il restera à définir au cours des consultations avec les divers intéressés.


1802

Je dis à la députée et à son parti qu'ils devraient féliciter le ministre des Finances de l'engagement qu'il a pris envers le logement social.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, le ministre des Finances écrivait aux groupes durant la campagne électorale, et je le cite: «qu'il ne fait aucun doute qu'un gouvernement libéral veillera à assumer le financement dans ces secteurs.» Qu'a fait le ministre de cette belle promesse?

[Traduction]

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion du Canada atlantique): Monsieur le Président, je renvoie la députée au tableau 7 du plan budgétaire, qui expose clairement l'engagement du gouvernement du Canada envers le logement social.

La députée et son parti ne s'entendent peut-être pas pour dire que le PAREL concerne le logement social. Mais nous, de ce côté-ci, estimons que oui, car ce programme offre aux Canadiens à faible revenu l'aide dont ils ont besoin pour rénover leur maison.

C'est du logement social. C'est un engagement direct de la part du ministre des Finances.

* * *

LA JUSTICE

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Voilà bien trois semaines que les conclusions de l'affaire des enfants victimes de mauvais traitements à Martensville ont été rendues publiques. Cela a déclenché une tempête de protestations en Saskatchewan. Les habitants de ma province exigent la tenue d'une enquête officielle.

Le ministre va-t-il faire pression sur les autorités de la Saskatchewan pour qu'elles procèdent à une enquête en bonne et due forme?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je tiens d'abord à remercier le député qui a pris la peine de me communiquer d'avance sa question.

Étant donné que les tribunaux se penchent encore sur certains aspects de l'affaire, je ne peux donc pas la commenter. Néanmoins, c'est volontiers que j'en parlerai en termes généraux.

Comme le député l'a reconnu implicitement dans sa question, la décision d'ordonner ou pas à une enquête appartient à la province. Je ne doute pas de la détermination du procureur général de la Saskatchewan, Robert Mitchell, à l'égard de l'intégrité de l'administration de la justice dans sa province.

Je suis persuadé qu'il saura se fonder sur des critères pertinents pour décider si, oui ou non, il doit ordonner la tenue d'une enquête sur des critères pertinents, mais c'est à lui, en tant que procureur général de cette province, de trancher.

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse au ministre de la Justice. En tant que dirigeants, nous devons réagir à l'épouvantable réalité que sont les mauvais traitements infligés aux enfants.

Que compte faire le gouvernement pour aider les Canadiens à prévenir ces horribles crimes commis contre des enfants innocents?

(1455)

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Encore une fois, monsieur le Président, sans vouloir parler de l'affaire Martensville, je voudrais dire au député que je fais confiance à l'efficacité et à la capacité d'intervention du système de justice pénale pour juguler ces crimes épouvantables que sont les pratiques d'exploitation sexuelle des enfants.

Ces cas sont extrêmement délicats, tant du point de vue des enquêtes menées par la police et des poursuites que du point de vue des juges et des jurés qui sont appelés à rendre une décision.

Les lois pénales ont été modifiées ces dernières années, et on a adopté des projets de loi permettant aux victimes de crimes présumés de témoigner plus facilement, d'avoir des parents ou des proches présents dans la salle d'audience et d'utiliser des écrans pour éviter d'être mises en présence de leur agresseur présumé. J'en profite pour rappeler au député que nous avons prévu, dans notre programme, différentes mesures pour nous attaquer à cette question, dont la création d'un registre national des agresseurs d'enfants.

J'ai donc confiance dans le système en place. Le gouvernement a l'intention de continuer de l'améliorer afin de traiter de façon efficace ce genre de crime absolument odieux.

* * *

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor.

De nombreux Canadiens ont l'impression que les ministères essaient d'éviter de futures réductions de budget en épuisant leurs crédits avec insouciance à la fin de l'exercice financier. Le ministre pourrait-il nous dire comment il entend mettre en oeuvre l'engagement du livre rouge qui consiste à exercer une discipline inflexible sur le contrôle des dépenses de l'État?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, c'est en effet une idée que se font les Canadiens. Il est vrai qu'en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, les fonds non dépensés retournent au Trésor à la fin de l'exercice. Il est donc possible que, de temps à autre, des gestionnaires dépensent prématurément, c'est-à-dire qu'ils paient avant que ce ne soit nécessaire.

Pour corriger cela, nous avons prévu, pour cet exercice, une possibilité de report d'un certain pourcentage du budget, de sorte que les dépenses puissent être faites au moment approprié après la fin de l'exercice. Je suis heureux de pouvoir dire à la députée et à tous nos autres collègues que nous avons pris la décision de porter le montant reportable à 5 p. 100 du budget net de fonction-


1803

nement, ce qui devrait certainement contribuer à éliminer cette pratique passée, ou du moins à dissiper l'impression qu'en ont les gens, tout en garantissant une utilisation efficace et efficiente de l'argent des contribuables.

* * *

[Français]

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances, mais d'abord, au nom de tout le Bloc québécois, je veux témoigner de notre solidarité à l'endroit des gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean et leur dire notre regret concernant les propos tenus plus tôt par le premier ministre, lors de cette période des questions.

Le ministre des Finances annonce dans son Budget une faible réduction des dépenses gouvernementales de 400 millions de dollars seulement, et reporte à 1995 les véritables décisions quant à la réduction de l'appareil administratif de l'État. Et pour le citer, des milliers de citations le réprouvent là-dessus.

Pourquoi le ministre des Finances n'a-t-il pas agi cette année pour donner suite immédiatement aux recommandations répétées, année après année, par le vérificateur général, de dégraisser l'appareil gouvernemental, un gaspillage estimé à plusieurs milliards de dollars?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, d'abord, au point de vue non seulement des compressions, mais au point de vue de notre programme de dégraisser l'appareil, pour utiliser le terme, et pour vraiment rendre l'appareil gouvernemental beaucoup plus efficace, conjointement avec le président du Conseil du Trésor et le ministre responsable pour le Renouveau de la fonction publique, nous avons publié, dans notre Budget, un processus de réforme le plus substantiel jamais vu depuis le Deuxième Guerre mondiale au point de vue de l'appareil gouvernemental.

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, le ministre ne convient-il pas qu'en agissant immédiatement sur les coupures dans l'appareil gouvernemental, puisque le vérificateur général, année après année l'indique, il aurait ainsi démontré une véritable volonté politique de mettre fin au gaspillage des fonds publics plutôt que de s'acharner sur les chômeurs, les démunis et les personnes âgées?

(1500)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, nous l'avons déjà dit en cette Chambre, nous acceptons la grande majorité des suggestions du vérificateur général et on a l'intention-on l'a dit dans le Budget-de les mettre en application cette année. C'est notre intention.

[Traduction]

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

La mesure habilitante concernant la stratégie de pêche autochtone expire au printemps. Que je sache, le Cabinet doit revoir cette question afin de décider s'il y a lieu de maintenir ce programme ou de l'éliminer.

Le ministre peut-il nous dire à quoi nous devons nous attendre et si cette décision va être prise de façon complètement isolée ou en consultation avec les personnes directement touchées?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je remercie le député de Delta de sa question.

Le député sait sans doute que j'ai eu le privilège, au cours des deux dernières semaines, de me rendre en Colombie-Britannique où j'ai rencontré plusieurs groupes. J'ai parlé de cette question avec chacun des groupes que j'ai rencontrés et dans un discours que j'ai prononcé devant la Pacific Trollers Association.

Il n'est certes pas question de prendre une décision «de façon complètement isolée», pour reprendre les termes du député. J'ajouterais même que nous serions ravis que le député nous fasse part de son opinion à ce sujet à la Chambre, au comité ou en privé.

Le gouvernement sera saisi de cette question au cours des prochaines semaines. Nous l'examinerons alors comme il se doit et nous nous ferons un plaisir de rendre compte de nos conclusions à tous les Canadiens, de la façon appropriée et en temps opportun.

* * *

LA FONCTION PUBLIQUE

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics a déclaré que le gouvernement avait montré qu'il était sensible aux besoins des personnes âgées en maintenant le PAREL. Je suis d'accord. Le ministre des Finances a prouvé qu'il était conscient des besoins des Canadiens à faible revenu qui avaient des responsabilités spéciales car il a amélioré leurs prestations dans le cadre des modifications apportées au régime d'assurance-chômage.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Lorsqu'on a décidé de geler les salaires de tous les fonctionnaires, étant donné l'écart énorme qui existe entre les plus petits salariés et les plus hauts salariés, pourquoi n'a-t-il pas adopté la même attitude face aux gens qui travaillent pour le gouvernement, étant donné les énormes écarts salariaux dans la fonction publique? Pourquoi n'a-t-il pas tenu compte du fait que les répercussions d'un gel des salaires sont beaucoup plus importantes pour une personne qui gagne 20 000 $ par année que pour une autre qui en touche 120 000?


1804

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, avant la présentation du budget, j'ai consulté les représentants des employés, les divers dirigeants syndicaux, au sujet de la nécessité de réduire la facture salariale pour abaisser le déficit. Nous avons examiné diverses solutions. Je leur ai précisé que nous voulions économiser jusqu'à un milliard de dollars. Ils m'ont fait part de leurs propositions.

Je tiens à dire que, d'abord et avant tout, les représentants syndicaux m'ont dit vouloir préserver des emplois. Ainsi, c'est la voie que nous avons décidé de suivre. Nous avons constaté que la meilleure façon d'effectuer ces compressions serait de prolonger le gel des salaires afin d'essayer de protéger les emplois.

Nous avons examiné beaucoup d'autres solutions, depuis les réductions de salaires jusqu'aux mesures prises par le chef du NPD en Ontario, mais bien entendu, les jours de congé forcé n'étaient pas très populaires auprès des syndicats. Nous avons fait de notre mieux pour sauver les emplois de nos fonctionnaires.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

RETRAIT DE CERTAINS PROPOS

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je veux simplement invoquer le Règlement pour dire que j'aimerais retirer le mot schizophrénie que j'ai employé dans ma réponse au député de Calgary-Sud-Ouest. Je crois qu'il était déplacé dans ce contexte.

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, mon recours au Règlement concerne le commentaire 495 du Beauchesne, à la rubrique «Documents cités».

(1505)

Aujourd'hui, le ministre des Finances a cité un certain nombre de documents en répondant aux questions. Je me demandais s'il ne serait pas possible de demander au ministre de déposer ces documents, conformément au commentaire 495.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je serai fort heureux d'accéder à cette demande. Non seulement je déposerai les documents en question, mais j'en ai toute une autre pile que j'aimerais déposer aussi.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, comme c'est notre habitude, j'aimerais obtenir, de la part du leader du gouvernement à la Chambre, un aperçu des travaux pour les prochains jours, c'est-à-dire pour demain et la semaine suivante, s'il peut le faire.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de faire la déclaration hebdomadaire concernant nos travaux.

Aujourd'hui, la Chambre poursuivra le débat sur le budget. Demain, nous entreprendrons la deuxième lecture du projet de loi C-14 portant pouvoir d'emprunt. Nous poursuivrons ce débat à notre retour, le lundi 7 mars, et si nous terminons avant la fin de la journée, nous reprendrons l'étude des projets de loi C-7 et C-5.

Le mardi 8 mars sera un jour désigné, et nous mettrons aux voix le sous-amendement relatif au budget en fin de journée.

Le mercredi 9 mars, nous poursuivrons le débat sur le budget. Le jeudi 10 mars, nous conclurons ce débat; le cas échéant, les mises aux voix auront lieu à la fin de la journée.

Le vendredi 11 mars, nous entamerons l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-3 concernant les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces. Il est bien entendu que nous ferons les consultations appropriées avant d'établir le reste de l'ordre du jour pour cette journée.

Enfin, dès que j'aurai terminé ma déclaration, mon secrétaire parlementaire aimerait proposer certaines motions s'il a le consentement de la Chambre, comme c'est le cas je crois.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, il y a consentement unanime au sujet de la motion suivante. Je propose:

Que conformément à son ordre de renvoi du 8 février 1994 concernant la modernisation et la restructuration du système de sécurité sociale du Canada, la Chambre autorise le personnel du Comité permanent du développement des ressources humaines à effectuer des voyages au Canada en vue de préparer et de tenir des séances par vidéoconférence durant la semaine du 6 au 12 mars 1994 dans les villes suivantes: Vancouver, Edmonton, Windsor, Québec et Sydney (Nouvelle-Écosse).
On m'informe que le coût total des déplacements prévus et autorisés par la motion est d'environ 11 000 $.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

M. Milliken: Monsieur le Président, j'ai une autre motion, pour laquelle il y a également consentement unanime. Je propose:

Que, si un vote par appel nominal est requis le lundi 7 mars 1994, à la conclusion du débat sur la deuxième lecture du projet de loi C-14, Loi portant pouvoir d'emprunt pour l'exercice 1994-1995, ce vote soit différé jusqu'au mardi 8 mars 1994, à 18 h 30.
Le Président: Les députés ont entendu la motion. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.


1805

(La motion est adoptée.)

Le Président: Durant la période réservée aux déclarations des députés, j'ai donné la parole au député de Red Deer, mais c'est le député de Végréville qui a pris la parole. Le compte rendu sera rectifié en conséquence.

* * *

(1510)

LE DÉCÈS DE L'HON. DOUGLAS CHARLES NEIL

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi que de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour rendre hommage à un ancien député et ami des parlementaires.

L'honorable Douglas Charles Neil nous a quittés pour un monde meilleur le lundi 21 février. M. Neil a toujours bien servi sa collectivité et son pays. Connu pour son travail communautaire, il a aussi, comme tant d'autres, combattu à l'étranger au cours de la Seconde Guerre mondiale. En tant que député, Doug Neil a toujours montré le plus grand respect envers ses collègues et ses électeurs. Il méritait vraiment le titre d'honorable.

Il a été député de la circonscription de Moose Jaw de 1972 à 1984. Cette circonscription correspondait à ce qui est aujourd'hui la partie urbaine au sud de l'actuelle circonscription de Moose Jaw-Lake Centre, que j'ai maintenant le privilège de représenter.

Je n'ai pas connu Doug Neil personnellement, mais mes électeurs m'ont beaucoup parlé de lui. C'est ainsi que j'ai su la qualité du service qu'il assurait à la population, à son pays et à la Chambre. Tous ceux qui m'ont parlé de lui n'avaient toujours que des éloges et des compliments à faire à son égard.

Je lisais justement aujourd'hui les articles annonçant le décès de Doug. Je suis frappé par l'intensité des sentiments que nombre de ses amis proches ont exprimés à l'idée de l'avoir perdu. Mais ce qui est encore plus remarquable, c'est la gratitude et le respect qu'ils lui manifestent. De toute évidence, le dévouement dont il a fait preuve tout au long de sa vie a profondément marqué ses concitoyens.

Je me joins à tous ceux qui pleurent la perte de M. Neil. Au nom de tous les députés de l'opposition, je tiens à transmettre mes sincères condoléances à sa femme, Charlotte, et à sa famille. Je veux également lui rendre hommage en affirmant que, par son passage parmi nous, Doug Neil aura eu et continuera d'avoir une influence bénéfique dans notre monde. Que ceux qui se souviennent de lui honorent sa mémoire.

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, j'ai eu le privilège de connaître Doug Neil de son vivant et de servir à ses côtés à la Chambre, la durée d'un mandat, dans les années 70.

Élu pour la première fois député de Moose Jaw en 1972, il a occupé ce poste jusqu'en 1984. De 1974 à 1979, j'ai eu l'honneur de représenter la circonscription d'Assiniboia, en Saskatchewan, qui à l'époque était voisine de celle de Moose Jaw.

Doug et moi avions certains intérêts communs tels que l'agriculture, les transports et les affaires rurales. Nous avons souvent croisé le fer sur ces sujets et bien d'autres encore en cette enceinte, au Comité permanent de l'agriculture, au Comité permanent des transports et lors de nombreuses apparitions publiques, dans l'ouest du Canada surtout. Bien entendu, nous étions souvent en désaccord sur l'orientation à prendre, mais je crois que nous avions en commun un respect mutuel et un profond engagement vis-à-vis de ceux que nous avions été élus pour servir.

Avant d'être député, Doug Neil s'était distingué comme navigateur dans l'ARC, puis comme avocat, conseiller municipal de Moose Jaw, et membre actif de sa communauté au sein d'organismes tels que le Moose Jaw Wild Aninal Regional Park, la Légion royale canadienne, l'institut interarmées, les Kinsmen de Moose Jaw et les regroupements K-40.

Doug Neil était bien connu et respecté de tous à Moose Jaw. Fier citoyen de la Saskatchewan et du Canada, il fut un député efficace qui a réussi et, un infatigable serviteur de sa communauté. Il sera très regretté de tous.

Je voudrais me joindre au député de Moose Jaw-Lake Centre pour offrir, au nom du gouvernement canadien et de chacun d'entre nous, nos sincères condoléances à la famille de M. Neil.

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, bien que je n'aie pas connu M. Douglas Charles Neil, je désire, en mon nom et au nom de tous mes collègues du Bloc québécois, offrir mes sincères condoléances à la famille et aux amis du député de Moose Jaw, Saskatchewan, qui a siégé en cette Chambre de 1972 à 1984.

(1515)

[Traduction]

M. John Solomon (Regina-Lumsden): Monsieur le Président, j'ai l'honneur cet après-midi d'unir ma voix à celle de mes collègues pour offrir, au nom du caucus du Nouveau Parti démocratique, nos sincères condoléances à la famille du regretté Doug Neil, ancien député de la circonscription de Moose Jaw, en Saskatchewan.

Nous avons été peinés d'apprendre le décès de M. Neil. Nous reconnaissons que, tout comme les membres de sa famille, il a consacré beaucoup de temps et d'énergie au service de la Saskatchewan, du Canada et de la communauté agricole de l'Ouest canadien.

Ma voisine de banquette, la députée conservatrice de Saint John, et moi, au nom des députés néo-démocrates, nous offrons nos sincères sympathies à la famille de M. Neil.

1806


1806

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement; ainsi que de l'amendement et du sous-amendement.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, après avoir écouté les réponses au budget proposé mardi et étudié soigneusement les observations faites par les députés de l'opposition, les commentateurs externes et autres, je me résous à une constatation très triste et décevante.

Les gens ne comprennent pas encore qu'il y a une crise de l'emploi au Canada et aussi à l'échelle mondiale. Ils n'ont pas encore vraiment regardé la réalité en face; or, nous devons nous arrêter pour réfléchir au changement fondamental à apporter à la stratégie des emplois au Canada et commencer à la modifier pour qu'elle fonctionne.

[Français]

Le Bloc québécois, par simple partisanerie, dit que le budget est une attaque contre les chômeurs, mais il ne dit pas que c'est une attaque contre le chômage. Il préfère garder les gens sur l'assurance-chômage et ne pas leur donner une chance d'obtenir un emploi.

[Traduction]

La différence, c'est que nous voulons remettre les Canadiens au travail. Ils veulent protéger les acquis et préserver les anciennes façons de faire; ils ne veulent pas se donner la peine de créer de nouvelles possibilités.

Par ailleurs, il y a le Parti réformiste qui fait de la réduction du déficit une fin en soi, sans tenir compte des conséquences; ils en font tellement un but ultime que le député de Medicine Hat est intervenu à la Chambre pour recommander l'élimination de tous les programmes de formation gouvernementaux, alors que tous les whips devraient savoir que le meilleur investissement à faire, c'est justement dans les ressources humaines.

Les commentateurs externes ont dit que le gouvernement réduisait les prestations d'assurance-chômage, tout comme les conservateurs auraient fait. Ils ne parlent pourtant pas des nombreuses modifications que nous avons apportées pour remettre les Canadiens au travail.

Il est à peu près temps que les députés, les fonctionnaires et tous les Canadiens commencent à examiner de près les façons de créer des emplois, de donner du travail aux Canadiens, de répartir le travail et de préparer les gens au marché du travail. Il s'agit de la responsabilité primordiale du gouvernement, qui devrait également être la responsabilité de tous les députés.

La pénurie d'emplois est un phénomène international. Nous le savons. Elle ne touche pas uniquement le Canada. Dans deux semaines, les États membres du Groupe des Sept participeront à un important sommet sur l'emploi, où ils examineront la perte et la disparition des emplois.

Selon l'OCDE, l'absence de création d'emplois constitue le principal problème lié à l'emploi dans les pays européens. De plus en plus, nous constatons que les vieilles normes et les vieilles formules ne fonctionnent plus. On a beau tirer sur les leviers de la productivité et de la compétitivité, cela ne donne pas d'emplois. Il n'y a rien à y faire.

Par conséquent, nous devons unir nos efforts pour trouver une solution au grave problème de la création d'emplois. Cela signifie que nous devons examiner ce qui se passe sur le marché du travail au Canada. Il y a dix ans, les emplois à temps partiel représentaient environ 10 p. 100 de tous les emplois créés, comparativement à 20 p. 100 de nos jours.

(1520)

Dans les années 90, les candidats à tous les nouveaux emplois devront avoir fait des études postsecondaires. Entre 1990 et 1993, on a observé une hausse de 17 p. 100 des emplois détenus par les diplômés d'université, une hausse de 0,5 p. 100 des postes occupés par des diplômés du secondaire et une baisse de 17 p. 100 des emplois occupés par des travailleurs n'ayant pas terminé leurs études secondaires.

C'est donc dire que le monde du travail est en pleine révolution. Pourtant, certains députés à la Chambre, peu disposés et peu prêts à faire face à la nouvelle réalité, continuent de défendre les vieilles façons de faire. Le monde du travail évolue, et il est à peu près temps que les députés d'en face évoluent, eux aussi.

Je viens d'assister à une réunion d'un groupe spécial composé de dirigeants syndicaux, de chefs d'entreprises et d'universitaires que j'ai réunis pour examiner la question de la distribution du travail. La conclusion de cette première réunion est claire: les stratégies traditionnelles d'augmentation de la productivité et de stimulation de la croissance économique ne fonctionnent plus. Le temps n'est plus à la recherche d'avantages politiques.

À tous les députés réformistes, bloquistes ou autres qui affirment qu'il est temps de refaire la crédibilité du Parlement, je dirai que la première étape consiste à commencer à discuter des questions importantes, c'est-à-dire, des moyens de redonner du travail aux Canadiens.

C'est exactement ce que fait le budget de mardi. Il jette les bases et définit le cadre à partir desquels nous pourrons élaborer une nouvelle stratégie de l'emploi pour les Canadiens. Et c'est ce que les Canadiens veulent. C'est pourquoi ils nous ont élus en octobre dernier.

Toutes les déclarations fumeuses, les charades et autres jeux de mots que nous avons entendus ne réussiront pas à cacher une donnée fondamentale: l'engagement premier et profond de tous les députés ministériels, c'est de redonner du travail aux Canadiens. Nous invitons nos vis-à-vis à nous aider dans notre tâche. Renonçons à toute tentative d'obstruction et à toute duperie.


1807

Je veux maintenant vous donner une bonne idée de notre engagement en faveur de la création d'emplois. Le chef du Parti réformiste voulait savoir ce que nous ferons.

Eh bien, le programme d'infrastructure prévu dans le budget devrait permettre de créer 65 000 emplois directs et peut-être 130 000 emplois indirects. Selon une première estimation, le Service jeunesse devrait permettre la création de 17 000 emplois. Un programme provisoire pour aider les jeunes à faire la transition entre l'école et le milieu du travail devrait toucher environ 60 000 personnes. Une disposition législative prévoyait que les cotisations d'assurance-chômage passeraient à 3,30 $ en 1995, mais nous les ramènerons à 3 $, ce qui devrait permettre la création de 40 000 emplois.

En gros, mes calculs sont assez simples, mais, selon les prévisions, les mesures directes du gouvernement conduiront à la création de plus de 180 000 ou 200 000 emplois.

Nous croyons que cela instaurera un climat qui incitera le secteur privé à nous emboîter le pas. Cela remettra l'économie sur la bonne voie. Nous donnerons un coup de fouet au système et nous mettrons fin à l'insécurité qui assaillait les Canadiens à la recherche d'un emploi. Ils sauront qu'ils ont un gouvernement qui pense à eux et qui fait quelque chose pour la création d'emplois.

Donc, en dépit de toutes ces critiques négatives, il ne faut pas perdre de vue la principale tâche à accomplir, à savoir commencer à aligner nos programmes, nos initiatives et notre politique sur l'absolue nécessité de redonner du travail aux Canadiens.

Je me permets de dire quelques mots au sujet des modifications apportées au programme de l'assurance-chômage. Les députés d'en face se sont empressés de déformer le sens profond de ces modifications. Mais ils ne peuvent pas ne pas reconnaître que, dans chacune des consultations que le ministre des Finances a menées dans tout le pays, les petits entrepreneurs ont promis de créer des emplois pour les Canadiens si nous réduisions les cotisations, si nous allégions un peu le fardeau des charges sociales et si nous étions prêts pour une fois à leur donner une chance.

C'est exactement ce que nous avons fait. Nous avons passé un contrat avec le secteur canadien de la petite entreprise. Nous avons commencé à respecter notre part du contrat. À lui maintenant de respecter la sienne! Tel est le message véhiculé par le budget.

(1525)

Un seul exemple peut suffire. Pour une entreprise qui emploie une centaine de personnes, les modifications annoncées par le ministre des Finances représenteront des épargnes nettes de 30 000 $. C'est le salaire d'un employé de plus. Qu'y a-t-il de mal là-dedans? Pourquoi les députés d'en face ne veulent-ils pas qu'une petite entreprise canadienne crée un emploi de plus?

Je veux qu'ils me donnent leurs raisons, car ils ne l'ont pas encore fait. Tout ce qu'ils demandent, c'est comment nous allons continuer à verser des prestations d'assurance-chômage. Ils ne nous demandent pas comment nous allons redonner du travail aux gens. C'est pourtant ce qu'ils devraient eux-mêmes se demander.

Nous avons certes établi un lien très clair entre les antécédents de travail et le montant des prestations versées. Pourquoi? Je voudrais vous citer quelques exemples. Il est grand temps que nous prenions des mesures pour empêcher les gens de penser que l'assurance-chômage fait partie intégrante du salaire de beaucoup de Canadiens.

J'ai ici une copie d'une lettre envoyée au ministre des Finances par un habitant d'une petite localité de la Colombie-Britannique. Il dit ceci: «Les habitants de cette ville travaillent le nombre de semaines nécessaires et refusent ensuite de travailler jusqu'à l'année suivante. Ils estiment qu'ils ont besoin de travailler seulement le temps qu'il faut pour être admissibles à l'assurance-chômage et ne sentent pas le besoin de travailler après cela.» Ce qui est le plus triste dans tout cela, c'est que leurs enfants commencent à faire la même chose.

Nous sommes en train de créer une culture où nous disons aux gens qu'ils n'ont qu'à travailler un minimum de 10 semaines pour pouvoir retirer de l'assurance-chômage pendant les 42 semaines suivantes. Il n'y a aucune relation entre le travail et les prestations. Nous croyons que l'assurance-chômage est un programme crucial. C'est un programme essentiel, mais il ne doit pas remplacer le travail. Il devrait simplement. . .

Des voix: Bravo!

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Pourtant, c'est ce que les députés d'en face veulent. Ils veulent perpétuer un système qui, en réalité, nuit à l'emploi et n'incite pas les Canadiens à travailler.

Je trouve scandaleux de voir que, à un moment où il y a tant de chômeurs dans notre pays, l'opposition nous dit de ne rien faire pour les aider à retourner au travail.

[Français]

Monsieur le Président, c'est la position du Bloc québécois. Il est en faveur du chômage, pas du travail.

[Traduction]

Nous avons également dit que nous allions commencer à changer notre système pour qu'il réponde mieux aux besoins et que nous reconnaissions que beaucoup de gens ont besoin d'une aide spéciale.

Encore une fois, nous avons modifié le programme d'assurance-chômage de façon à ce que les personnes les plus nécessiteuses reçoivent le plus d'aide, et nous avons augmenté le niveau des prestations pour ces personnes.

Certains journalistes m'ont demandé hier en quoi nous étions différents des conservateurs. Lorsque nous avons changé les conditions d'admissibilité, nous avons réduit les prestations, mais nous nous sommes assurés que les personnes les plus nécessiteuses auront le plus haut niveau de prestations.


1808

Nous avons également apporté des modifications fondamentales aux mesures concernant le départ volontaire de manière à faire passer le fardeau de la preuve de l'employé à l'employeur, pour donner plus d'équité au système. Voilà en quoi nous sommes différents. Nous nous soucions des travailleurs.

La députée s'esclaffe. C'est la même qui se lève à la Chambre pour réclamer qu'on fasse quelque chose en matière de logement social pour créer des emplois, et qui soutient en même temps le parti qui n'a aucun intérêt à créer des emplois grâce à l'abaissement de la cotisation d'assurance-chômage et à d'autres modifications apportées au régime de l'assurance-chômage afin de donner une chance aux gens.

Voilà le problème. Je ne pense pas que ce parti s'intéresse vraiment aux moyens de redonner du travail aux Canadiens. Son véritable programme consiste plutôt à créer des retards, des distorsions, pour prouver que le fédéralisme ne fonctionne pas; c'est ainsi que la réalisation de sa propre prophétie séparatiste devient son programme, plutôt que les mesures permettant de redonner du travail aux gens. Voilà plutôt en effet le véritable programme du Bloc québécois.

Nous reconnaissons parfaitement que ces modifications ne sont pas suffisantes en elles-mêmes. Elles ne sont qu'un début, et c'est pourquoi nous avons prévu dans le budget une restructuration fondamentale des programmes offerts au palier fédéral qui peuvent fournir une nouvelle base pour l'emploi dans notre pays, c'est-à-dire nos programmes de formation, nos programmes d'emploi, nos programmes d'éducation, nos programmes d'aide sociale et nos programmes d'assurance-chômage, afin d'en amorcer l'intégration pour qu'ils se renforcent les uns les autres et donnent une synergie d'aide au lieu de servir simplement à étayer d'anciennes manières de faire les choses.

Nous reconnaissons qu'il faut agir. Nous reconnaissons que les Canadiens n'ont pas voté pour nous afin d'avoir plus d'études et plus de longues et interminables consultations, mais afin d'avoir des mesures concrètes. Ils veulent que notre gouvernement et que la législature actuelle montrent qu'ils sont prêts à travailler pour redonner du travail aux Canadiens. Voilà le message que nous avons reçu, et c'est le message que nous donnons dans le budget. C'est pourquoi nous croyons qu'il sera absolument crucial dans les jours et les semaines à venir que nous commencions à bâtir à partir de cette base.

(1530)

Il y a une semaine environ, nous avons rencontré les représentants des gouvernements provinciaux qui ont offert leur entière collaboration pour réaliser un important programme de réforme. Ils ne restent pas en arrière, à embrouiller les questions et à dérouter les gens, comme les députés d'en face le font pendant ce débat sur le budget. Ils sont prêts à entrer dans la partie et à faire des efforts.

Ce qui importe surtout, c'est que, de concert avec les provinces, nous avons convenu de lancer, au cours de l'année qui vient ou des deux prochaines années, un certain nombre de nouveaux programmes destinés aux chômeurs canadiens chroniques, ceux qui reçoivent de l'aide sociale depuis longtemps, qui ont épuisé leurs prestations et qui ont différents handicaps au chapitre de l'emploi.

Pour les deux prochaines années, le ministre des Finances a prévu 800 millions de dollars pour permettre à notre pays de redevenir innovateur. Nous demandons aux provinces, aux employeurs, aux entreprises et aux syndicats de nous emboîter le pas et d'aborder la question de l'emploi différemment. Nous sommes prêts à utiliser nos maigres ressources pour garantir que les plus durement touchés, les plus nécessiteux et ceux qui sont chômeurs depuis plus longtemps recevront de l'aide.

Je puis d'ailleurs annoncer à la Chambre aujourd'hui que nous avons déjà reçu des demandes et des propositions de toutes les provinces canadiennes. Voilà le genre de coopération dont nous avons besoin. Voilà le genre de travail en partenariat auquel les Canadiens s'attendent. Voilà le climat dans lequel les Canadiens souhaitent nous voir travailler. Ils veulent que nous trouvions des moyens de les rassembler et de les amener à réfléchir et à trouver des solutions ensemble. C'est là le genre d'invitation que nous lançons sans cesse aux députés de l'opposition.

Évidemment, ils ne veulent pas coopérer. Nous savons d'ailleurs pourquoi. Nous connaissons leurs projets. Nous en entendons parler tous les jours à la Chambre. La coopération ne fait pas partie de leur plan, pas plus que l'idée de travailler tout le monde ensemble, à titre de Canadiens. Essayer de rendre notre pays économiquement fort et de nouveau stable n'en fait pas partie non plus. Ils ont un programme destructeur et négatif très différent, mais nous ne les laisserons pas triompher. Nous ne les laisserons pas atteindre leurs objectifs, car nous allons redonner du travail aux Canadiens.

Nous croyons que le budget est une première étape. C'est une première étape pour proposer aux Canadiens une nouvelle orientation et leur faire comprendre que nous avons un plan d'action, que nous allons nous doter d'une nouvelle stratégie de l'emploi, que nous allons commencer à travailler dans le cadre de nos propres programmes et que nous collaborerons avec les provinces et le secteur privé. Nous allons montrer que nous pouvons commencer à réorganiser, à restructurer et à réformer notre système en matière d'emploi.

Je ne prétends pas que ce sera facile, ni que les choses se feront du jour au lendemain. Je suis conscient des difficultés. Je suis également conscient que, si nous ne faisons rien, si nous nous accrochons aux vieilles recettes, si nous reprenons les mêmes arguments éculés, et si nous tolérons le statu quo, rien ne se fera. Nous ne pourrons pas avoir des ressources humaines mieux formées. Nous ne pourrons pas dire à nos jeunes gens que nous allons leur donner une chance d'obtenir un premier emploi réel, au lieu d'un moyen de toucher l'assurance-chômage, qui deviendrait leur première source de revenus. Nous ne pourrons pas dire aux travailleurs plus âgés que nous sommes disposés à les aider à retrouver du travail.

Mon collègue, le ministre des Pêches et des Océans, et moi travaillons en ce moment de concert avec d'autres ministres pour élaborer un programme à l'intention de la région de l'Atlantique. Nous voulons dire aux 35 000 ou 40 000 personnes du secteur de la pêche qui ont été privées de leur gagne-pain, que nous sommes prêts à leur garantir une période de stabilité de cinq ans pour qu'ils acquièrent une nouvelle formation, réorientent leur carrière et recommencent à travailler dans l'écotourisme, l'aquiculture, la remise en état des ressources et la conservation des richesses naturelles des provinces de l'Atlantique. Ils n'auront


1809

plus à se dire, en se levant le matin: «Je n'ai rien à faire. J'attends que le poisson revienne.»

Nous allons les aider à retrouver du travail et à reconstituer les stocks de poisson. Ils ont récolté pendant 20 ans. Nous pouvons les aider à semer pendant les 10 prochaines années. C'est ce que nous voulons faire. C'est une nouvelle approche. Là encore, nous collaborons avec les provinces, les syndicats et l'industrie pour réaliser des choses concrètes.

Je crois que c'est la grande croisade de cette législature. C'est une grande mission qu'il ne faut pas perdre de vue. Comment allons-nous faire pour redonner leur dignité aux Canadiens, pour leur redonner l'occasion de gagner leur vie en exploitant leurs talents et leurs compétences? C'est une chose à laquelle tous les Canadiens ont droit.

(1535)

Ce ne sera pas parfait, et il sera impossible de tout faire, mais tout le monde pourra voir qu'à l'aide des programmes destinés aux jeunes actuellement en vigueur et de ceux que nous venons de créer-le Service jeunesse en milieu communautaire, un programme de formation sur le tas-et grâce aux modifications majeures de l'aide aux étudiants et de l'éducation, nous tentons sérieusement d'inciter les jeunes à retourner à l'école et à trouver du travail. Il s'agit, essentiellement, de garantir aux jeunes de 18 à 21 ans que, s'ils veulent s'améliorer, s'ils veulent travailler et s'ils veulent acquérir des connaissances, le gouvernement sera là pour les aider. C'est ce genre de chose que nous voulons faire.

Monsieur le Président, je vous remercie de m'avoir permis de parler si longtemps. J'espère avoir réussi à convaincre tous les députés et les Canadiens à l'écoute qu'il est de la plus haute importance d'élaborer une nouvelle stratégie en matière d'emploi. Les fondements de cette stratégie se trouvent dans le budget conçu par notre ministre des Finances, mais il reste beaucoup à faire.

Nous avons encore beaucoup de travail à faire au cours de la présente législature afin de favoriser l'échange d'idées, de fournir une tribune aux Canadiens pour exprimer leurs points de vue et proposer leurs solutions. Nous avons beaucoup de travail à faire dans nos collectivités pour amener les entreprises, les travailleurs et les organismes communautaires à faire de l'emploi la principale priorité. Nous avons beaucoup de travail à faire en nous-mêmes pour commencer à comprendre que nous ne pouvons plus garder nos vieux schèmes de pensée et nos vieilles habitudes.

Si nous réussissons à mobiliser nos énergies dans ce nouveau monde de travail, et à faire face aux nouvelles réalités, j'estime qu'à la fin de la présente législature nous pourrons dire aux Canadiens que nous avons atteint notre but en les aidant à retourner au travail.

Tel est notre objectif, telle est notre mission.

[Français]

M. Benoît Tremblay (Rosemont): Monsieur le Président, quand on a un peu d'expérience au Parlement et qu'on entend un ministre, en réponse au discours du Budget ou en suivi au discours du Budget, être aussi partisan que le ministre du Développement des ressources humaines, c'est certainement parce qu'il a quelque chose à cacher.

Il a passé la moitié de son discours à accuser l'opposition et pourtant c'est lui qui a fait toute sa campagne électorale en parlant aux gens de création d'emploi. La vérité est simple, et si la vérité était facile à dire le ministre pourrait la dire calmement. Les Canadiens comprendraient.

Pourquoi le ministre est-il obligé, comme on dit chez nous, de faire des sparages, de crier fort et d'accuser l'opposition? La raison est bien simple; je ne peux dire qu'il ment évidemment, mais on peut dire qu'il ne dit pas toute la vérité. La vérité est fort simple. On va chercher 5,5 milliards sur le dos des chômeurs. On annonce des coupures de 2,5 milliards dans le domaine de l'assistance sociale et on ne sait pas ce qui va arriver dans deux ans avec l'éducation postsecondaire, c'est-à-dire les transferts aux provinces pour l'éducation postsecondaire, mais on sait qu'il va y avoir une diminution, c'est clair. On n'a pas la répartition entre l'assistance sociale et l'éducation postsecondaire, mais on a le total dans le Budget.

Le ministre nous parle de création d'emploi. Il en a parlé pendant toute la campagne électorale. Pourtant, en janvier, le gouvernement a décidé d'augmenter de 800 millions les cotisations à l'assurance-chômage. Maintenant, il nous annonce qu'en 1995, il va les diminuer, les rétablir à ce qu'elles étaient. Ceci se fera dans un an.

On vient d'annoncer la perte de 40 000 emplois et on aura ces emplois en 1995. Mais évidemment, cela fera augmenter le chômage, alors il faut diminuer les prestations. Tout le monde a compris que vous diminuez les prestations d'assurance-chômage. Tout le monde a compris que vous vous préparez à diminuer l'assistance sociale. C'est clair dans votre Budget.

Pourtant, il y a des mesures qui se rapportent à l'entreprise. On en a parlé et le vérificateur général a démontré très clairement que les entreprises canadiennes utilisaient des abris fiscaux internationaux pour cacher des millions de dollars. Or, il y a une petite mesure de prise à l'égard des banques et des compagnies d'assurance, mais elle n'entrera en vigueur qu'en novembre 1995.

Ce matin, dans le Globe and Mail, les représentants des banques disaient: «On n'a pas encore de réponse, on attend; de toute façon, cela se fera en 1995.» Autrement dit, cela a le temps de changer. Mais les mesures pour couper, elles, sont prises tout de suite.

Alors, je demanderais au ministre de nous dire calmement la vérité à cet égard. Il n'a pas besoin de crier, s'il a vraiment un message à donner aux Canadiens. Il n'a pas besoin d'accuser


1810

l'opposition. S'il veut présenter des mesures positives, on est prêts à l'écouter.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je donne donc la parole à l'honorable ministre du Développement des ressources humaines.

(1540)

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, en réponse à ce qu'a dit le député au sujet, entre autres, des réductions annoncées dans le budget, je voudrais lui rappeler qu'il est nécessaire dans tout budget d'équilibrer les objectifs. L'un des objectifs les plus importants est de veiller à maintenir notre pays dans une position financière que les milieux de la finance internationale jugent respectable.

Je voudrais citer une autorité très importante en la matière. Je reprends une page du hansard du 4 mai 1989:

Nous ne voyons jamais la reconnaissance que nous avons, d'un bout à l'autre du pays, une responsabilité vis-à-vis des finances publiques, et que la stabilité des finances publiques est essentielle pour nous permettre de maintenir les programmes sociaux.
Autrement dit, poursuit l'orateur, nous avons des responsabilités non seulement vis-à-vis de nos concitoyens qui, aujourd'hui, ont des problèmes d'existence et de subsistance, mais nous avons aussi des responsabilités vis-à-vis de l'avenir. Et il parle ensuite de la nécessité de régler les problèmes de la dette et du déficit.

[Français]

L'autorité que j'ai citée est l'honorable chef du Bloc québécois, lorsqu'il faisait partie du gouvernement conservateur. Il a changé sa position depuis qu'il n'est plus dans le gouvernement Mulroney mais chef du Bloc québécois.

[Traduction]

Le vice-président: Un grand nombre de députés aimeraient avoir la parole. Le ministre a-t-il terminé?

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre: Monsieur le Président, je comprends. J'aimerais seulement disposer d'autant de temps que celui qu'a pris le député pour poser sa question. Je pense qu'il n'a pas entendu la réponse. Je crois qu'il n'était pas présent à la Chambre. Je veux seulement lui faire remarquer que les mesures directes proposées dans le budget en vue de la création d'emplois-pas seulement des mesures concernant la situation économique en général-devraient permettre de créer 180 000 emplois. Il me semble que c'est un bon début.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt les commentaires du ministre sur l'attention sélective. Je pense qu'il voulait fondamentalement parler de vision étroite des choses. Il a parlé de son objectif de remettre les Canadiens au travail. Il a parlé de l'objectif des réformistes et de l'importance que nous attachons au déficit comme but ultime.

Cependant, en réponse aux questions qui ont été posées au ministre des Finances, il y a moins d'une heure, après avoir finalement reconnu qu'il devrait ultérieurement chercher à obtenir un budget équilibré, il a admis que cela permettrait de réduire les impôts. En réduisant les impôts, on donnera aux entreprises la chance de prendre de l'expansion et de créer des emplois, des emplois à long terme.

Le ministre a dit, si je puis le citer, qu'il avait investi six milliards de dollars-deux milliards de dollars du gouvernement fédéral, deux milliards de dollars des gouvernements provinciaux et deux milliards de dollars des administrations municipales, tout cela venant de la poche du même contribuable-pour créer 60 000 emplois, entre autres choses. Mais il s'agit d'emplois à court terme, acquis avec de l'argent emprunté.

Je pense que, pour régler le problème du Canada, nous devons redresser notre situation financière et créer des emplois à long terme afin que notre avenir nous appartienne, à nous et à personne d'autre.

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Monsieur le Président, il n'est pas question de faire autrement que de redresser la situation financière et de réduire le déficit. Mais ce qu'il faut se demander, c'est comment le faire. Le Parti réformiste estime que la seule façon de faire est d'éliminer toutes les dépenses qui auraient mis les Canadiens au chômage. C'est ce qu'il dit. Il estime que nous ne sommes pas allés assez loin. Pourtant, il y a ici des députés qui pensent que nous sommes allés trop loin.

Ils disent que les mesures draconiennes que propose le Parti réformiste feraient grimper le taux de chômage dans notre pays à 13, 14 ou 15 p. 100. Quant à nous, nous disons que le seul moyen, en définitive, de réduire le déficit est de redonner du travail aux Canadiens, de faire en sorte qu'ils gagnent de l'argent. Il ne faut plus les laisser au chômage, il faut leur faire payer des impôts. Ce gouvernement a la responsabilité de mettre en place les mesures nécessaires pour y parvenir, c'est-à-dire créer un climat propice à l'envoi d'un signal ou d'un message au secteur privé pour lui dire que les temps difficiles sont terminés et qu'il devrait recommencer à créer des emplois.

Dans mon discours, j'ai demandé quel était l'un de ces signaux importants. La réponse était la réduction des cotisations d'assurance-chômage par rapport au taux de 3,30 $ prévu par la loi. Cela le ramène à 3 $, ce qui, pour chaque compagnie qui compte 100 employés, met 30 000 $ dans la poche de l'employeur et de 80 $ à 100 $ dans la poche de l'employé. Cet employé peut alors aller s'acheter une table de cuisine ou acheter des chaussures à son enfant. C'est ainsi que nous allons réduire le déficit, pas en faisant des réductions à outrance. . .

(1545)

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours très agressif du ministre du Développement des ressources humaines. Il a lancé de nombreuses attaques au Bloc québécois. Parfois, il utilise un langage progressiste pour défendre des politiques conservatrices, parfois de droite.

Le Budget s'attaque aux chômeurs et non pas, malheureusement, au chômage. Le Bloc québécois se préoccupe des plus démunis de notre société: les chômeurs, les assistés sociaux. Je viens du mouvement syndical et, monsieur le Président, nous ne sommes pas les seuls à combattre votre Budget et vos coupures à l'assurance-chômage. J'ai reçu les réactions des trois centrales syndicales du Québec: la FTQ, la CEQ et la CSN. J'ai reçu également la réaction du Congrès du travail du Canada, plus de deux millions de Canadiens qui sont consternés par le Budget du gouvernement. Le président de la FTQ, M. Clément Godbout,


1811

dit: «Pour s'attaquer efficacement au problème du déficit et de la dette, il faut remettre les gens au travail en créant de l'emploi, mais cette préoccupation n'apparaît pas dans le Budget.» Pour la FTQ, c'est incompréhensible. Non seulement le gouvernement ne fait-il rien pour l'emploi, mais il trouve le moyen de s'attaquer très durement aux chômeurs et aux chômeuses en allant chercher 6 milliards de dollars au cours des trois prochaines années dans la Caisse d'assurance-chômage.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît! Le député doit terminer ses remarques et poser sa question le plus rapidement possible.

M. Nunez: Que pense le ministre du Développement des ressources humaines de la réaction unanime du mouvement syndical contre le Budget de son gouvernement, contre vos coupures dans le domaine de l'assurance-chômage et des programmes sociaux?

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Monsieur le Président, les propos des syndicats que le député rapporte sont faux, ce n'est pas vrai. En effet, le Budget que nous avons présenté va créer de l'emploi pour 180 000 personnes. J'espère que l'honorable député, dans sa circonscription, enverra des messages d'espoir aux membres des syndicats, et non ce genre de messages du Bloc québécois qui dit qu'il n'y a pas d'espoir pour les chômeurs. Nous envoyons un grand message d'espoir et j'espère qu'il leur transmettra cela.

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je ne peux pas m'empêcher d'être étonné quand j'entends un ministre s'entêter à affirmer que plus on dépensera l'argent du trésor public, plus on créera des emplois. Une telle orgie de dépenses va finir par accroître encore le déficit, l'endettement. Quand verrons-nous les fruits?

Ma question a trait plus particulièrement au programme d'infrastructures. Dernièrement, un maire m'a raconté que ce programme d'infrastructures allait, en gros, lui permettre d'investir dans les égouts et les routes. En définitive, ces gens vont devoir assumer le tiers des coûts, alors que la facture totale. . .

Le vice-président adjoint: Je donne la parole au ministre du Développement des ressources humaines.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Ce qui se passe. . .

Le vice-président adjoint: À l'ordre, s'il vous plaît. La question du député est suffisamment claire.

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Je suis non moins étonné de voir que les députés du Parti réformiste n'ont pas suffisamment le sens de l'économie pour comprendre qu'en investissant dans de nouveaux projets de transport et dans de nouvelles infrastructures, ainsi qu'en améliorant la productivité au niveau nationale, on génère de nouvelles richesses.

Ne comprennent-ils pas combien il est important d'accroître la productivité nationale et d'aider les gens à se remettre au travail?

Des voix: Oh, oh!

M. White (Fraser Valley-Ouest): Vous n'avez aucune idée de ce qu'est le bons sens, en économique.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Heureusement que la période des questions et réponses est terminée.

(1550)

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler de la politique budgétaire qui a été présentée hier par le ministre des Finances.

En tant que nouveau député et membre du Comité permanent des finances, j'ai écouté attentivement le discours du ministre dans l'espoir qu'il serait différent. Lorsqu'on enlève les magnifiques effets oratoires, ce budget n'est rien d'autre qu'une continuation de la philosophie Trudeau, selon laquelle c'est la croissance qui nous sortira de nos difficultés économiques.

Ce principe était la solution d'un autre problème à une autre époque. En fait, les seules choses qui croîtront du fait de ce budget, ce sont les dépenses générales, en augmentation de 3,3 milliards, et le nombre de groupes de travail, de comités et d'audiences publiques pour établir et vendre le budget de l'an prochain. Il y aura quelque 15 nouveaux comités et trois ou quatre groupes de travail.

J'ai déjà dit cela à la Chambre, mais je vais le répéter. Les recettes publiques totales ont été estimées à 123,9 milliards. Les dépenses totales sont légèrement inférieures à cela. C'est l'intérêt sur la dette qui est responsable du déficit de 41 milliards. Le service de la dette fédérale atteint maintenant 33 cents pour chaque dollar de recettes. Je prétends que c'est la dette et ses frais de service qui menacent la viabilité et la souplesse de nos programmes.

Le ministre des Finances est très fier du «processus sans précédent de consultation» qu'a suivi le gouvernement pour préparer le budget. À quoi sert la consultation lorsque le gouvernement se refuse à appliquer les politiques que les gens lui demandent?

Je ne vois pas le plan d'action que le ministre des Finances prétend avoir présenté dans un budget plein de promesses pour l'année prochaine. Cette année, nous avons des augmentations de dépenses importantes, et c'est dans les années à venir que nous aurons les réductions.

En tant qu'ancien joueur de football, je connais la valeur et le but d'un plan d'action. Un bon plan d'action vise à attaquer un obstacle ou un problème connu et, dans ce cas, c'est l'augmentation croissante du coût du service de la dette.


1812

En me fondant sur le plan d'action du gouvernement, je peux dire aux députés d'en face qu'ils attaquent le mauvais problème, car ils négligent la dette. En science économique, c'est indéfendable. Cependant, grâce à sa grande adresse politique et à son merveilleux sens de l'humour, le ministre des Finances saura parler aux journalistes après que la partie aura été jouée. Est-ce qu'il blâmera les joueurs, le plan d'action ou lui-même, lorsque son plan échouera?

Le ministre des Finances a promis d'éviter que le pays ne parte à la dérive en garantissant des emplois intéressants, de la formation et du recyclage. Comment compte-t-il y parvenir alors qu'il dit aux Canadiens, aux gens qui paient nos salaires et le sien, d'attendre une autre année afin que le gouvernement puisse remplir ses promesses? Il semble que ses huit années dans l'opposition ne lui aient rien appris, et je regrette de devoir dire qu'il s'est très peu servi de son sens aigu des affaires.

J'espère que le ministre des Finances et le premier ministre ont beaucoup de plaisir lorsqu'ils se promènent un peu partout dans le pays pour vendre de l'espoir et de faibles promesses pendant une autre année, en s'appuyant sur les fondements très solides des emprunts et des dépenses excessives, tandis que ceux auxquels ils s'adressent doivent vivre selon leurs moyens.

Je soutiens que ce budget, tout comme ses prédécesseurs, a raté la cible. Le ministre des Finances a réellement gaspillé des occasions en or de réduire les dépenses. En voici quelques-unes.

Ce budget aurait pu prévoir la suppression des subventions aux entreprises et des programmes de développement régional, ce qui aurait fait économiser au gouvernement de 3 à 4 milliards de dollars. Il aurait pu au moins prévoir une réduction de 25 p. 100 des subventions aux sociétés d'État, de sorte que le gouvernement aurait économisé 1,25 milliard de dollars. Dans ce domaine, notre parti aurait été plus loin et aurait parlé de l'importance de priver des sociétés d'État. Les bénéfices provenant de ces ventes auraient pu servir à rembourser la dette nationale, ce qui aurait fait économiser de 3 à 4 milliards de dollars supplémentaires au gouvernement.

Ce budget aurait pu traiter également des paiements de sécurité de la vieillesse versés aux personnes âgées dont le revenu du ménage dépasse la moyenne nationale de 54 000 $ par année. Cette moyenne est de 54 000 $, et non de 35 000 $, comme le ministre des Finances semble le dire à la télévision. Ces personnes ne sont pas réellement dans le besoin. Sur ce chapitre, le gouvernement aurait pu économiser de 2 à 3 milliards de dollars.

(1555)

Si le gouvernement ou le ministre des Finances n'avait rien fait et n'avait présenté aucun nouveau budget, selon ses propres chiffres et prévisions, le déficit fédéral aurait tout de même baissé au cours du prochain exercice financier, en passant de ce niveau artificiellement gonflé de 45 milliards de dollars à 41,2 milliards de dollars; en outre, le chômage serait demeuré à peu près à 11 p. 100. Voilà le résultat qu'on aurait obtenu en ne faisant strictement rien. Si l'on compare cela à ce qui a été fait, on peut dire que le ministre des Finances a simplement brassé les cartes de son jeu financier afin de créer une confusion générale et de donner à tous une nouvelle donne à analyser.

Le ministre des Finances a reporté à plus tard les décisions les plus ardues et s'est retrouvé, à la fin, virtuellement dans la même situation qu'au début. Pourquoi alors entreprendre une telle opération? Il a causé de grandes souffrances sans procurer de véritables gains à ceux qui doivent consentir aux sacrifices. À mon avis, tout compte fait, lorsqu'on vous demande de contribuer et d'accepter certains sacrifices, vous devriez aussi recevoir une certaine compensation, et ce budget n'en renferme aucune pour ces gens.

J'estime que les Canadiens n'ont reçu que de mauvaises cartes tandis que le ministre des Finances, de l'autre côté de la table, cachait quatre as dans son jeu. Quand utilisera-t-il son as de la rigueur et se décidera-t-il à couper les dépenses du gouvernement, les dépenses globales j'entends? Quand jouera-t-il l'as de la réalité et cessera-t-il de se cacher derrière les comités et les groupes de travail payés sur les fonds publics pour éviter de parler de l'évidence? Quand fera-t-il les véritables choix? Il doit faire ce qui s'impose, c'est-à-dire réduire les dépenses globales du gouvernement.

Quand sortira-t-il son as du changement et nous montrera-t-il que son parti a appris quelques leçons durant les huit années passées dans l'opposition, à critiquer les budgets conservateurs? Quand s'efforcera-t-il d'expliquer aux Canadiens qu'il vaudrait mieux faire baisser la dette que d'y ajouter sans cesse, et même davantage que ne l'a fait le gouvernement conservateur durant sa dernière année au pouvoir?

Enfin, quand le ministre des Finances jouera-t-il l'as de tous les as, la réforme fiscale qui ferait baisser le taux d'imposition et éliminerait le système d'imposition actuel, si complexe et si bureaucratique, que tous les Canadiens voudraient voir simplifier? Le Canada a besoin d'un impôt uniforme, transparent et simple, d'un taux équivalent pour les personnes et les entreprises, d'un impôt sans exemptions ni échappatoires de l'ordre de 15 à 20 p. 100, d'un système fiscal qui soit égal, juste, neutre et efficient, qui augmente le revenu disponible de tous les Canadiens et de toutes les entreprises et qui réduise le cauchemar bureaucratique qui nous étouffe à l'heure actuelle.

Voilà les principaux facteurs d'un système fiscal efficace. Le budget libéral n'en mentionne même pas un. Lorsque le ministre des Finances aura le courage de jouer cet as, celui de la réforme fiscale, c'est que son gouvernement aura déjà commencé à s'attaquer aux véritables problèmes du pays.

Ce budget n'amorce pas le changement, il ne fait qu'en effleurer les pourtours en laissant derrière lui de hauts taux de dette, d'impôts et de chômage, soit exactement le contraire du but visé.

Le Parti libéral nous demande toujours des suggestions. Eh bien, dans ce discours, j'ai proposé des compressions pour plus de 9 milliards de dollars, des mesures qui ne sont pas dans le budget et que le ministre des Finances pourrait mettre en application cette année. Je le défie d'utiliser toutes ces idées, de s'en attribuer le mérite et de commencer à faire baisser la dette ainsi qu'à faire ce qui serait profitable pour le pays.

Je voudrais dire au ministre des Finances qu'il doit cesser de nous étourdir de paroles. Il doit plutôt prendre de véritables décisions, entrer vraiment dans le jeu, se mettre au travail, réaliser le grand chelem et réduire la dette.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, je ne crois pas que le ministre des Finances soit un escroc


1813

qui parie sur la vie des Canadiens. Selon moi, le ministre des Finances s'intéresse au bien-être des Canadiens. Il se préoccupe de création d'emplois et il a adopté une attitude équilibrée.

Quand un million de Canadiens sont sans emploi, cela crée des frais de 25 milliards de dollars pour notre économie. Je donne à penser au député d'en face que le déficit n'est peut-être qu'un symptôme, et non pas la source du mal.

M. Silye: Monsieur le Président, il y a longtemps que je ne parle plus du déficit, parce que vous n'avez qu'à mentionner le mot pour que cela monopolise les discours de l'opposition. Tâchons de présenter le problème tel qu'il est. Nous avons une dette, et le gouvernement va y ajouter 41 milliards de dollars. À la fin du prochain exercice, elle s'élèvera à 550 milliards. Le problème, c'est la dette, et les intérêts qui courent sur cette dette. Le gouvernement veut se montrer bon en disant qu'il crée des emplois. Le taux de chômage est actuellement de 11,2 p. 100. À la fin de l'année, selon les projections du ministre des Finances et du ministre du Développement des ressources humaines, grâce aux 168 000 emplois que ce dernier a à offrir, ce taux aura passé de 11,2 à 11,1 p. 100. Il aura diminué de 0,1 p. 100. Est-ce cela que le gouvernement appelle redonner du travail aux Canadiens?

(1600)

Vous vous contentez de faire des beaux discours et des promesses, et encore des promesses, mais vous ne ne livrez pas la marchandise. Ce budget vous offrait une chance de réduire le déficit de façon à ce qu'il reste de l'argent pour l'entreprise privée, afin qu'elle crée des emplois valables et à long terme avec ses capitaux propres.

On a pu entendre le ministre du Développement des ressources humaines dire, au cours de son intervention, que les capitaux créaient des emplois. Il n'y a aucun doute là-dessus, pourvu que ces capitaux ne soient pas empruntés et qu'ils ne viennent pas du gouvernement-qu'il s'agisse de capitaux propres et non de capitaux empruntés, des capitaux de l'entreprise privée et non du secteur public.

Le vice-président: J'invite le député de Calgary-Centre à s'adresser à la présidence, pour une raison bien simple. Cette règle vise à préserver l'harmonie entre les députés. C'est ce qui se passe en théorie.

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, permettez-moi, par votre entremise, de faire quelques observations au député de Calgary-Centre en toute harmonie.

En fait, je le trouve plutôt raisonnable sur certains dossiers. Mais ce qui me préoccupe, ce sont les prises de bec constantes entre le Parti réformiste et le gouvernement. C'est le même genre de débat que pendant la campagne électorale alors que nous étions tous à la recherche de voix. Tout était prétexte à débat.

Une question fondamentale se pose. Nous avons proposé un programme et nous l'avons énoncé dans le livre rouge. Le Parti réformiste, lui, a présenté un programme, celui de la terre brûlée. Ma question au député de Calgary-Centre est la suivante: Ne concédera-t-il pas que nous nous en sommes tenus à ce que nous avions promis dans le livre rouge?

M. Silye: Monsieur le Président, en réponse à l'honorable député et avec tout le respect que je lui dois, je n'ai fait que citer les chiffres qui ont été avancés par le ministre des Finances et qui prouvent que les libéraux ont été élus sur la promesse de créer des emplois. Après 12 mois, ils vont créer un nombre d'emplois équivalant à une augmentation d'un dixième pour cent. Si le député veut s'amuser à le calculer lui-même, il s'apercevra que ça ne fait pas une bien grosse augmentation.

Et s'ils continuent comme ça pendant quatre ans, les libéraux vont bientôt se retrouver de ce côté-ci de la Chambre et nous, nous serons en face en grand nombre. Quant l'est du Canada aura compris ce que nous disons, qu'il vaut mieux vivre selon ses moyens, il réalisera que nous avons découvert le problème et que nous savons comment y remédier. Contrairement aux libéraux, nous ne promettons pas la lune.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin): Monsieur le Président, le premier ministre a acheté une paire de bottes de travailleur au ministre des Finances en vue de la présentation du budget l'autre jour, et je crois qu'il a bien fait car le ministre a du boulot qui l'attend.

Comme c'est le cas de toutes les bottes de travailleurs, ou du moins celles que j'ai portées, ce n'est qu'une question de temps avant qu'elles soient crottées.

Le ministre vient de déposer son premier budget, et nous ne pouvons qu'espérer qu'au fil des trois autres budgets qui suivront il apprendra à mieux réduire le déficit. Le budget actuel vient ajouter 39,7 milliards de dollars à la dette des Canadiens, qui passera à 550 milliards d'ici deux ans. Si l'on ajoute à ces 39,7 milliards les 32,7 milliards de déficit prévus pour l'année prochaine, ce sont 72,4 milliards qui viennent s'ajouter à une dette de plus en plus lourde.

Or, comme l'a déjà fait remarquer le député de Calgary, nous vivons à crédit, et le crédit s'accompagne toujours d'un taux d'intérêt d'au moins 7 p. 100, à condition d'être chanceux, si bien que nous ajoutons ainsi 5 milliards de dollars en intérêts à la dette nationale.

Je me permets d'oublier un instant les aspects négatifs et de féliciter le ministre pour avoir fait preuve d'une certaine retenue et avoir apporté aux opérations gouvernementales des modifications qui permettront de réaliser des économies.

(1605)

Malheureusement, je crains que toutes ces économies ne soient annulées par le coût des 18 nouveaux programmes et 15 nouvelles études annoncés dans le budget.

Quand le gouvernement va-t-il enfin reconnaître que nous avons un problème de dépenses? Le problème tient aux dépenses et non pas aux recettes. Les recettes fédérales ont totalisé 127 milliards de dollars en 1993-1994. Le premier ministre déclarait récemment à la Chambre qu'on ne peut pas administrer un gouvernement comme une entreprise.

Même si nous lui donnons raison, peut-être le gouvernement gagnerait-il à gérer ses affaires comme celles d'un ménage. Quand un ménage ne parvient plus à payer ses comptes, il doit prendre des mesures radicales, par exemple se priver de choses qui ne sont pas essentielles afin de réduire ses dépenses et vivre selon ses moyens. Cette solution me semble aller de soi.


1814

Nous devons cesser de verser 70 milliards de dollars par année dans le filet de protection sociale et 40 autres milliards pour le service de la dette. Les gouvernements précédents avaient pris l'habitude d'utiliser la défense militaire comme bouc émissaire au moment du budget, et il semble bien que le nouveau gouvernement ait pris la relève.

Les députés de ce côté-ci étaient satisfaits. En fait, nous avons applaudi et appuyé le gouvernement lorsqu'il a promis d'effectuer un examen de la défense militaire. Or, le gouvernement a accéléré le processus d'examen sans que les députés aient la possibilité d'y contribuer. Le gouvernement a carrément compromis le résultat de l'examen en fermant des bases et en réduisant l'activité d'autres bases.

Si nos forces armées étaient mieux équipées, nous aurions peut-être pu faire respecter la souveraineté du Canada dans les pêcheries de l'Atlantique et nous n'aurions pas aujourd'hui à venir en aide à tous les travailleurs de l'industrie de la pêche de la côte est. Les stocks de morue ne seraient peut-être pas aussi réduits qu'ils le sont à l'heure actuelle; car ils sont certainement très bas. Les députés d'en face disent même que ces stocks sont épuisés. Ainsi, tous ces gens d'affaires qui seraient capables de subvenir à leurs propres besoins vont venir grossir les rangs des chômeurs à temps plein.

En janvier, le taux de chômage était de 11,4 p. 100 au Canada. Selon Statistique Canada, il y avait 1 592 000 chômeurs au Canada le mois dernier et, bien entendu, ce chiffre ne tient pas compte de tous ceux qui ont cessé de se chercher un emploi.

Selon moi, ce budget ne fait qu'effleurer les problèmes. Le régime d'assurance-chômage en est un bon exemple.

La décision de réduire la générosité de ce programme est cependant un pas dans la bonne direction. Après tout, nous savons tous que des prestations généreuses d'assurance-chômage ont pour effet d'accroître le nombre de chômeurs.

Le déficit cumulatif de la caisse d'assurance-chômage s'élève à 6 milliards de dollars. Il est faux de croire qu'il s'agit d'un programme financé exclusivement par les employeurs et les employés. C'est le gouvernement, le contribuable donc, qui comble les trous.

Les modifications au régime d'assurance-chômage annoncées dans le budget visent, comme le ministre l'a déclaré, à offrir des avantages sociaux aux Canadiens les plus démunis. C'est là aussi un geste constructif.

L'assurance-chômage est devenu un régime inefficace de supplément du revenu, plutôt qu'un régime d'assurance sociale. On devrait parler d'assurance-emploi plutôt que d'assurance-chômage et mettre l'accent sur le fait qu'il s'agit d'une assurance. Nous achetons de l'assurance-vie et non de l'assurance-mort.

Le Parti réformiste veut faire de cette assurance-emploi un programme sensé et durable d'assurance sociale qui indemnise les gens qui sont temporairement sans travail. Nous croyons que ce programme pourrait être financé par les employeurs et les employés qui détermineraient le niveau des cotisations et des prestations. Je suis persuadé que cela permettrait dans une large mesure de réduire la taille de l'économie souterraine et, en définitive, d'alléger le fardeau fiscal des Canadiens.

Comme le ministre des Finances l'a dit lui-même, l'économie souterraine n'est pas simplement une question de contrebande; elle reflète le fait que des centaines de milliers de gens, honnêtes par ailleurs, refusent dorénavant d'être gouvernés.

Il semble qu'ils refusent également d'être trop lourdement imposés.

Une voix: Très juste.

M. Johnston: La force de l'économie souterraine est directement proportionnelle aux niveaux d'imposition. Les contribuables ont besoin d'un répit; il faut alléger le fardeau fiscal sous lequel ils croulent.

(1610)

Les Canadiens ne sont pas des tricheurs. Ils sont prêts à acquitter leur part équitable des impôts. Est-ce que ce budget prévoit un niveau d'imposition équitable?

Depuis dix ans, l'un après l'autre, les gouvernements alourdissent sans cesse le fardeau fiscal des Canadiens de la classe moyenne. Selon les rapports de l'Institut Fraser, même si les revenus avant impôt de la famille moyenne ont augmenté, ses revenus après impôt ont diminué. Cela ne peut être dû qu'à une hausse des impôts.

Pendant ce temps, ces mêmes gouvernements ont laissé la dette grimper pour atteindre 500 milliards de dollars, ou un demi-billion de dollars. Doit-on s'étonner que l'économie souterraine prospère? Est-ce que ce budget allège le fardeau des contribuables? J'en doute.

Au Parti réformiste, nous ferons notre possible pour que le ministre puisse porter ses nouvelles bottes de travailleur. Nous continuerons de déployer des efforts à la Chambre et aux comités pour convaincre le ministre et ses collègues ministériels qu'ils doivent revoir la philosophie de leur livre écrit à l'encre rouge avant de présenter un autre budget.

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, j'ai une seule question à poser à mon collègue albertain, le député de Wetaskiwin.

Le député s'est penché longuement sur le programme de l'assurance-chômage. Comme tout bon député de l'opposition, il s'est évidemment attardé à ce qu'il considère comme les aspects les plus négatifs des modifications que nous avons apportées à ce programme.

Une chose qu'il n'a pas signalée, c'est que les cotisations vont passer de 3,07 $ à 3 $. D'après le gouvernement-et je n'ai aucune raison de douter des calculs du ministre du Développement des ressources humaines-,cette réduction des cotisations pourrait entraîner à elle seule la création de 40 000 emplois. Cette réduction met effectivement 300 millions de dollars de plus à la disposition des entreprises, pour la plupart des petites et moyennes entreprises, bien entendu.


1815

Que pense le député de Wetaskiwin de cette réduction et ne croit-il pas qu'elle va permettre aux entreprises de créer des emplois?

M. Johnston: Monsieur le Président, le député pose une excellente question, que nous pourrions sûrement débattre toute la journée.

La première chose qui me vient à l'esprit, c'est qu'avant de donner quelque chose, le gouvernement commence toujours par s'en emparer.

Je vais m'efforcer de répondre de mon mieux à cette question. Je ne vais pas tourner autour du pot. Si le gouvernement ne s'était jamais mêlé d'assurance-chômage, si ce programme était resté entre employeurs et employés, les cotisations tourneraient probablement autour de 1,50 $. On n'aurait jamais eu besoin de les hausser pour ensuite les réduire dans le budget.

Je crois que cela devrait répondre à la question du député.

M. Jerry Pickard (Essex-Kent): Monsieur le Président, je voudrais, moi aussi, féliciter le député et lui poser une question.

Je ne souscris pas entièrement à sa position sur la défense. À mon avis, il est clair que le ministre des Finances et le ministre de la Défense avaient pour mandat de réduire les dépenses. Bien sûr, il y aura un examen de la politique de défense, et cet examen aussi est très important.

Cependant, s'ils ne mettaient pas en oeuvre les mesures prévues dans le budget, il faudrait rajouter 1,9 milliard de dollars au déficit.

Le député veut-il dire qu'il préférerait qu'il n'y ait pas de compressions et que le déficit soit plus élevé?

(1615)

M. Johnston: Monsieur le Président, j'estime que le Canada a besoin d'une armée. Cependant, il faut définir ce besoin. Il est évident que nous avons besoin d'une armée pour affirmer notre souveraineté sur notre territoire. Nous avons aussi besoin d'une armée pour affirmer notre souveraineté sur notre zone commerciale maritime de 200 milles. Nous avons aussi besoin d'une armée pour mener des missions de recherche et de sauvetage.

Cependant, il nous faut définir quelle est au juste l'ampleur de notre besoin avant de sabrer et de couper dans le budget de la défense, avant de décimer notre armée, pour reprendre des termes utilisés par mes vis-à-vis.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, j'ai une très brève question à poser au député.

Il a dit en passant qu'il estimait qu'il était inacceptable de consacrer 70 milliards de dollars à notre régime de sécurité sociale. Pourrait-il dire ce qui, pour lui, constituerait une somme acceptable? En d'autres mots, combien retrancherait-il de ces 70 milliards de dollars et quels programmes éliminerait-il?

M. Johnston: Monsieur le Président, j'ignore si la solution consiste vraiment à éliminer certains programmes. On ne peut pas se tromper en disant qu'on pourrait consacrer moins de 70 milliards de dollars à ces programmes.

Si nous pouvions réduire notre dette, nous pourrions réduire nos paiements d'intérêt et nous pourrions consacrer au moins une partie de ces 40 milliards de dollars aux programmes sociaux. C'est ce que je recommanderais.

M. Tony Ianno (Trinity-Spadina): Monsieur le Président, c'est avec un sentiment d'honneur et de fierté, et avec un sens aigu des responsabilités, que je prends aujourd'hui la parole pour faire ma première intervention à la Chambre. Je voudrais tout d'abord vous féliciter de votre élection au poste de Président. Je crois que votre sens de la justice et votre calme nous aideront en ces temps difficiles à affronter les grands défis que notre pays a à relever.

Je suis honoré par la confiance que les électeurs de Trinity-Spadina ont mise en moi en me permettant de les servir ici à la Chambre. J'espère qu'en qualité de député je saurai me faire l'écho à la fois de leurs plus vives préoccupations et de leurs plus grands espoirs.

La circonscription de Trinity-Spadina est située au coeur du centre-ville de Toronto, sur la rive du lac Ontario. C'est une des circonscriptions les plus diversifiées du Canada sur les plans économique et culturel. La vie y est excitante, et c'est un endroit merveilleux où élever une famille. On y trouve l'Université de Toronto, les Blue Jays de Toronto, champions mondiaux de baseball, et de grandes salles de spectacle. On y trouve également certains des meilleurs restaurants du Canada dans des coins comme le village portugais, la petite Italie, le quartier chinois, The Annex dans la rue Queen et le secteur riverain.

J'ai eu le bonheur de grandir dans Trinity-Spadina, et j'ai connu beaucoup des caractéristiques importantes qu'elle offrait. Comme beaucoup d'autres Canadiens, mes parents ont immigré au Canada à cause des perspectives d'avenir qu'il offrait. Ils m'ont inculqué la croyance qu'on peut réaliser n'importe quel rêve à force de travail. Ils m'ont également fait comprendre que le partage avec autrui et la compassion devaient faire partie intégrante de ce rêve.

Je crois que notre gouvernement a été élu pour donner aux Canadiens un sentiment de fierté, de dignité et d'espoir. Nous y arriverons en traçant une nouvelle voie économique. Mon expérience d'entrepreneur m'autorise à parler avec une certaine pénétration des problèmes auxquels notre économie fait face. Trop souvent, je vois dans Trinity-Spadina des propriétaires de petite entreprise qui luttent pour garder leur entreprise en vie. Je vois


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des mères célibataires qui ont beaucoup de mal à élever leurs enfants. Je vois des diplômés d'université qui essaient de trouver des emplois inexistants et des travailleurs qui ne réussissent pas à joindre les deux bouts. Je vois un nombre stupéfiant de gens qui dépendent de la banque alimentaire Daily Bread, dont énormément d'enfants.

Pour que nous puissions aller de l'avant comme pays, nous devons veiller à ne pas laisser derrière ceux qui sont sans voix, ceux qui sont passés à travers les mailles du filet de sécurité. Nous devons donner aux Canadiens les outils nécessaires pour réaliser leur potentiel et leurs rêves et, partant, ceux du Canada. Voilà l'objectif de notre gouvernement.

Le budget à l'étude représente le premier pas vers la réalisation de cet objectif, en jetant les fondations de la prospérité de demain. Pour y parvenir, nous devons mettre à profit l'esprit d'initiative et la créativité de tous les Canadiens.

(1620)

Nos petites et moyennes entreprises sont la clé du succès de l'économie canadienne. Il y en a plus de 900 000 réparties dans toutes les régions de notre pays. Si, comme il a commencé à le faire dans ce budget, le gouvernement met en place les structures dont ont besoin nos petites et moyennes entreprises, de manière que chacune d'elles puisse embaucher ne serait-ce qu'une personne, bon nombre de nos problèmes économiques seront réglés, et l'économie profitera d'un gain net de 18 milliards de dollars résultant uniquement de l'emploi direct.

Pour pouvoir réussir cela, les petites entreprises doivent avoir accès au capital. Les critères rigides que les banques appliquent lorsqu'elles consentent des prêts et l'annulation arbitraire de marges de crédit portent un dur coup au pivot de notre économie. Chaque fois que nous laissons une petite entreprise fermer ses portes, il s'ensuit non seulement des pertes d'emplois, mais aussi la fin d'un rêve. Il est temps que les banques canadiennes reconnaissent leurs responsabilités à titre de partenaires dans le développement et la croissance de l'économie canadienne. Par l'entremise de la Loi sur les banques, les Canadiens ont conféré des privilèges spéciaux aux institutions bancaires. Ils attendent davantage d'elles. Nous nous emploierons à réaliser cet objectif.

Tel qu'indiqué dans le budget, il fallait avant toute chose établir un groupe de travail qui élaborera un code de conduite en matière de prêts à la petite entreprise. Pour survivre et connaître une expansion, les petites entreprises doivent aussi avoir accès aux marchés de la nouvelle économie mondiale. L'ouverture des marchés étrangers aux entreprises canadiennes offrira à celles-ci des possibilités de croissance sans précédent. La diversité culturelle du Canada et son esprit d'entreprise confèrent à notre pays un avantage unique dans ce monde hautement compétitif.

Le gouvernement jouera son rôle. Notre réseau d'ambassades et nos agents commerciaux dans le monde entier seront notre lien dynamique et constant avec ces nouveaux marchés d'exportation enthousiasmants. Les technologies naissantes d'aujourd'hui seront les moteurs économiques de demain. Nous devons participer pleinement à la révolution technologique et être à la fine pointe du progrès.

En accroissant le financement du Conseil national de recherches du Canada et en mettant en place un programme de partenariats technologiques, le gouvernement mettra en rapport nos établissements de recherche et le secteur privé. Il leur permettra de bénéficier des innovations canadiennes dans des domaines comme l'environnement, la santé, la biotechnologie et les télécommunications. Dans certains d'entre eux, nous sommes déjà des chefs de file mondiaux.

D'ici l'an 2000, nos ventes liées à la technologie environnementale vaudront à elles seules 580 milliards de dollars par année. Maintes possibilités s'offrent à nous. Le gouvernement doit s'assurer que les Canadiens ont la capacité de relever ces nouveaux défis.

Permettez-moi de donner un exemple que je trouve dans ma propre circonscription. Le Central Technical High School a déjà noué des liens de partenariat avec la Canadian Tire Corporation. Par le passé, cette société n'arrivait pas à trouver des diplômés ayant la formation pour la réparation assistée par ordinateur des automobiles. Pour aider à résoudre le problème, elle a fourni a l'école un équipement de 200 000 $ pour moderniser les installations de formation en mécanique automobile. C'est ainsi que les étudiants qui obtiendront leur diplôme pourront entrer sur le marché du travail avec les compétences les plus à jour, et que Canadian Tire n'aura plus à recruter des travailleurs à l'étranger.

Nous devons suivre l'évolution technologique non seulement dans nos établissements d'enseignement, mais aussi dans la population active et sur le marché du travail. Nous devons exploiter les nouvelles technologies pour relancer nos industries existantes. Par exemple, Spadina Avenue a toujours été synonyme d'industrie de la mode au Canada. Aujourd'hui, pour rester compétitive, cette industrie doit adopter de nouvelles approches de la conception et de la fabrication. En faisant appel à la créativité de nos concepteurs et en utilisant les systèmes les plus modernes, assistés par ordinateur, nous pouvons redonner à Toronto la place qu'elle avait à l'avant-garde de l'industrie mondiale de la mode.

Seul ce leadership innovateur permettra d'accomplir ces changements. Ce budget nous aidera à apporter les transformations nécessaires.

Toutefois, la question de la croissance économique ne se résume pas aux exportations. Il faut aussi exploiter les atouts que nous avons déjà. Dans Trinity-Spadina, nous avons une connaissance de première main des avantages que l'expansion du tourisme peut rapporter. C'est dans cette circonscription qu'on trouve un grande nombre des plus belles attractions touristiques au Canada: des musées, des théâtres, des bistros, le Sky Dome, Ontario Place, la tour du CN et Harbourfront Centre. Des millions de visiteurs viennent dans ma circonscription pour écouter de la musique, admirer des oeuvres artistiques, aller au théâtre, voir des lieux historiques et assister à des rencontres sportives. Nous devons profiter de cette ressource. Les gouvernements et les entreprises doivent travailler de concert pour développer cette industrie en faisant connaître nos trésors au monde. Ces ressources doivent être commercialisées d'une manière dynamique. Le tourisme est une forme d'exportation. La différence, c'est que le client étranger vient dépenser son argent chez nous.

(1625)

Je voudrais attirer l'attention des députés sur la possibilité d'un projet d'infrastructure dans ma circonscription, qui fournira quantité d'emplois dans la construction. On a grand besoin de ces emplois qui nous permettront d'atteindre les objectifs à long terme dont j'ai parlé. Je fais allusion à l'établissement du World Trade Centre dans Exhibition Place ou à l'agrandissement du


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Toronto Convention Centre. L'un ou l'autre de ces projets fournirait au Canada des installations qui pourraient concurrencer les centres de congrès du monde entier. En attirant ces activités au Canada, nous pourrions aider les petites et moyennes entreprises à mettre leurs produits et leurs technologies sur le marché mondial.

Outre qu'elles stimuleraient nos marchés d'exportations, ces installations attireraient des centaines de milliers de visiteurs qui dépenseraient des millions de dollars chez nous. La population de Trinity-Spadina veut faire partie d'une fière équipe canadienne se lançant à l'assaut du marché mondial. Le Canada a les outils. Il possède une main-d'oeuvre instruite et intelligente qui peut s'adapter aux nouvelles industries et technologies. Notre diversité est notre force. Nous voulons réussir et en sommes capables. Nous ne craignons pas la concurrence.

Le présent budget jette les bases sur lesquelles se fondera la future croissance économique du Canada. Le gouvernement restera le catalyseur qui permettra à la population, aux entreprises et aux institutions de s'unir pour canaliser leurs efforts et atteindre leurs objectifs communs.

Tous les Canadiens doivent profiter de la croissance. Le rêve de chacun d'entre nous est important. Personne ne sera laissé derrière.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement mon collègue d'en face. En plus de l'idéologie qui nous sépare, j'ai constaté autre chose. J'ai constaté qu'il y a des différences énormes entre les circonscriptions urbaines et les circonscriptions rurales. Chez nous, il n'y a pas de Tour du CN. Je demeure dans un comté rural où la population dépend de l'agriculture et de la forêt et où les chômeurs sont nombreux.

Le député n'est-il pas un peu surpris que, dans le budget, on diminue dans le domaine de la foresterie et qu'en agriculture ce soit le statu quo? Est-ce que cela ne vous surprend pas un peu?

[Traduction]

M. Ianno: Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de sa question. Elle ne me surprend pas. Ce que nous faisons essentiellement dans ce budget, c'est établir un cadre qui nous permette d'investir dans l'agriculture et dans les forêts, mais peut-être pas de la façon dont cela s'est fait par le passé.

Nous devons faire preuve de créativité. Beaucoup de possibilités s'offrent à nous grâce aux nouvelles technologies forestières et agricoles qui non seulement serviront bien nos propres fins, mais aussi celles de mon beau-père, dans sa propre ferme, et celles de mes parents. Un avenir va s'offrir à leurs enfants, qui auront la possibilité d'utiliser de nouveaux procédés qui pourront servir non seulement ici, au Canada, mais aussi à l'étranger, qui profiteront en plus aux marchés d'exportation, ainsi qu'aux différents aspects de l'exploitation agricole, dont l'élevage, et à nos industries forestières, compte tenu de l'appauvrissement dans le monde et de la préoccupation à l'égard de l'environnement.

La question du député ne me surprend pas, mais j'espère que, au cours des quatre prochaines années, lorsque l'économie aura pris du mieux, nous serons à la fine pointe dans beaucoup de ces nouvelles industries et que votre collectivité pourra participer pleinement et vigoureusement, surtout les jeunes.

(1630)

Le Président: Je sais que le député s'adressait à moi quand il a employé le mot «votre».

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député non seulement de son discours, mais aussi de la réserve dont il a fait preuve. J'ai beaucoup apprécié. Je serais heureux de l'accueillir dans mon bureau n'importe quand à cause de cela.

Je voudrais lui poser une question relative à la dette. Des économistes nous ont dit que nous avions peut-être dépassé le point où l'on puisse espérer réduire la dette. À son avis, quelle sera la conséquence, pour la création d'emplois et l'emploi au Canada, d'une augmentation de 100 milliards de la dette nationale au cours des trois prochaines années?

M. Ianno: Monsieur le Président, je suis heureux de la question du député.

Nous souhaitons évidemment ne pas avoir de dette à considérer et être capables de gérer strictement l'investissement. Malheureusement, en tant que petit entrepreneur, je peux dire au député que, lorsqu'on recherche la croissance, il faut payer un certain prix, et ce prix, c'est l'investissement.

Je suis convaincu que nous devons améliorer la formation de notre main-d'oeuvre. Ce que j'ai dit dans mon discours, c'est que nous devions prendre les personnes des échelons les plus bas, celles qui ne participent pas actuellement à l'économie, et les former. Nous devons leur donner l'occasion d'acquérir les outils nécessaires pour que nous, entrepreneurs ou gens d'affaires, puissions trouver nos créneaux sur les marchés internationaux et ramener ainsi de l'argent au Canada. Nous devons aider les Canadiens, ceux qui ne sont pas aussi fortunés que nous, à participer au processus.

C'est pour cela que je crois à la nécessité de faire un investissement. Je n'ai pas peur de la dette si elle permet d'investir dans l'avenir.

[Français]

Le vice-président: Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Crowfoot-Les affaires indiennes; et l'honorable député de Regina-Qu'Appelle-L'édition.

[Traduction]

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole pour souscrire au budget qu'a déposé le ministre des Finances plus tôt cette semaine. Je me sens tout à fait à l'aise d'appuyer ce budget, car il est le fondement des programmes clés du livre rouge, qui constituaient la plate-forme du Parti libéral lors des dernières élections. Ce budget investit dans les gens et dans la création d'emplois et, au lieu de prévoir des hausses d'impôt, il vise la réduction des dépenses.

Plus tôt aujourd'hui, à la Chambre, j'ai entendu les députés indépendants d'arrière-ban tenir des paroles creuses et dire que ce budget avait sûrement été rédigé par le fantôme d'un ancien ministre du Parti conservateur.


1818

Je voudrais profiter de l'occasion pour exposer quelques-unes des mesures que renferme ce budget et quelques-uns des programmes qui, énoncés dans le livre rouge, sont actuellement mis en oeuvre. Par exemple, la création d'un programme national d'infrastructure, qui est déjà en place, le rétablissement complet des fonds affectés au programme national d'alphabétisation, la création du Service jeunesse, la mise sur pied de programmes de stage et d'apprentissage destinés aux jeunes, la garantie d'accès des petites entreprises à des capitaux, en remplacement de la TPS, le rétablissement du Programme d'aide à la remise en état des logements, la création d'un programme de nutrition prénatale, la mise sur pied d'un programme d'aide préscolaire aux autochtones, la création d'un centre d'excellence en santé des femmes, le rétablissement du Programme de contestation judiciaire et de la Commission de réforme du droit, la création de la Fondation canadienne des relations raciales et la constitution du Forum national sur la santé.

On tient effectivement des paroles creuses lorsqu'on laisse entendre que ce budget a été rédigé par un ancien ministre conservateur. En plus de la mise en oeuvre de ces programmes énoncés dans le livre rouge, ce budget offre de l'espoir.

(1635)

[Français]

Si on veut redonner espoir à l'électorat dans nos institutions politiques, il faut que les gouvernements honorent leurs promesses. Les Canadiens et les Canadiennes en ont assez des gouvernements qui disent une chose et qui font le contraire. Avec l'ancien gouvernement, ce pays a pris l'habitude de ne pas respecter les politiciens à cause des promesses brisées. On n'a qu'à penser à l'universalité des programmes sociaux qui était une vache sacrée pour l'ancien gouvernement. Nous tenons parole avec ce Budget. Nous faisons exactement ce que nous avons promis de faire.

[Traduction]

Les efforts déployés autrefois par les gouvernements conservateurs pour réduire le déficit ne tenaient pas compte de la partie des dépenses des états financiers. Les conservateurs, ministre après ministre, avaient l'habitude de dire que les déficits prévus n'étaient jamais atteints parce qu'il n'y avait pas suffisamment de recettes. Ils réussissaient à contrôler les dépenses, mais les recettes étaient insuffisantes. Je pense que c'est pour cette raison que notre pays connaît à présent une crise-une crise de recettes et non de dépenses.

Le gouvernement doit, comme les entreprises, être prêt à encourager l'activité économique et à intervenir pour produire des recettes. C'est ce qui a fait défaut ces dernières années. À présent, c'est dans le budget que nous avons devant nous.

Avant d'être établi, ce budget a fait l'objet de consultations sans précédent.

[Français]

Le processus de consultations prébudgétaires entamé par le ministre des Finances a permis à plusieurs personnes d'exprimer leur point de vue sur des politiques qui les touchent profondément. Le gouvernement a créé un précédent important avec ces consultations. J'espère que nous allons pouvoir aller au-delà des quatre villes qui furent visitées par le comité consultatif pour le Budget de l'an prochain. Grâce aux débats qui ont eu lieu dans cette Chambre, j'ai pu partager les préoccupations de mes commettants et commettantes de Simcoe-Nord.

[Traduction]

Les mesures que j'ai proposées dans le discours que j'ai prononcé au cours du débat qui a précédé le budget ont fait l'objet d'un examen favorable dans le budget. Ces mesures sont, notamment la nécessité d'empêcher que les compagnies canadiennes ne se servent d'une société étrangère affiliée pour éviter de payer des impôts, l'examen des règles applicables aux fiducies familiales par un comité parlementaire, le maintien partiel des déductions que les entreprises peuvent faire au chapitre des frais de repas et de représentation, le maintien du plafond des cotisations aux REER et la mise en place d'un plan permanent permettant aux particuliers de retirer des fonds de leur REER pour l'achat d'une première maison.

En outre, le gouvernement va entreprendre prochainement un examen complet du régime fiscal. En fait, cette question a déjà été renvoyée à un comité. Le remplacement de la TPS fait partie des points qui seront examinés.

[Français]

J'ai déjà mentionné dans cette Chambre qu'il y a un manque de confiance sans précédent parmi les Canadiens et les Canadiennes dans nos politiques de taxation. Si on veut que les Canadiens et les Canadiennes respectent les lois, ces derniers doivent avoir le sentiment que les lois sont justes et équitables.

Si on veut réussir dans notre relance économique, les gens doivent se sentir bien et contribuer à l'économie. Je peux dire en toute confiance que les mesures dans ce Budget redonneront confiance à la population canadienne. Les Canadiens et les Canadiennes peuvent dorénavant compter sur ce gouvernement pour une plus grande justice fiscale.

[Traduction]

Ce budget a été bien accueilli sur les marchés monétaires mondiaux. En fait, hier-le lendemain de l'annonce du budget-,le dollar canadien a enregistré une hausse. Le budget a également reçu un accueil favorable de la part de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui s'est rendue compte que la réduction des cotisations d'assurance-chômage était, en fait, une taxe sur les entreprises et sur les emplois et que cette mesure contribuerait en réalité à créer des emplois.

(1640)

[Français]

Ce Budget démontre que ce gouvernement emprunte une voie radicalement différente de celle de l'ancien gouvernement. Il y a des gens qui veulent que l'on abandonne notre poursuite vers une société juste. Dans les mots du ministre des Finances, ce n'est pas le moment de nous écarter de nos valeurs, au contraire, c'est le moment d'y revenir.

Le simple fait que les partis d'opposition réclament d'une part que nous n'avons pas assez coupé, et d'autre part, que nous avons trop coupé, est l'indice parfait que ce Budget est équilibré.


1819

[Traduction]

Essentiellement, nous tenons les promesses que nous avons faites durant la campagne électorale. Ce budget nous met sur la voie qui devrait ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB en trois ans. C'était dans le livre rouge.

Certains députés de l'opposition se sont plaints de ce que nous n'avions pas suffisamment réduit les dépenses. C'est la position de la plupart des députés réformistes dont j'ai pu écouter l'intervention à la Chambre.

Leur programme électoral était fondé, que je sache, sur la promesse de ramener le déficit à zéro en trois ans. Selon mes estimations, cela ferait subir des épreuves indescriptibles aux Canadiens. Nous voyons déjà les épreuves qui attendent des familles canadiennes par suite des réductions apportées dans le secteur de la défense. Essayer de réduire d'autant le déficit en trois ans serait, à mon avis, insupportable.

L'approche libérale est beaucoup plus équilibrée et réaliste. La majorité des Canadiens ont appuyé le programme libéral. Les Canadiens savent qu'il est impossible de se priver de manger pour acquitter l'hypothèque d'une maison en trois ans.

Je ne m'attends pas à ce que les députés de l'opposition approuvent ce budget, étant donné qu'ils ont fait campagne contre le plan libéral. Par contre, je ne crois pas que ces députés ou les Canadiens puissent vraiment dire que le gouvernement libéral ne s'en tient pas à son livre rouge.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, je m'excuse auprès de M. Collenette si on le fatigue, mais on a à intervenir occasionnellement à la Chambre.

Tout d'abord, je voudrais citer mon collègue de Simcoe-Nord, qui tout au long de son discours, a répété qu'il respectait ses promesses, qu'il respectait le livre rouge, qu'il respectait tout cela; c'est bien beau. Je fais donc une citation du livre rouge-vous pourrez constater que je l'ai lu le livre rouge pour voir les mensonges qu'il y avait dedans. On y promet de transformer les bases militaires en centres d'entraînement et en plaque tournante pour les Casques bleus. Un programme c'est comme un contrat, quand on ne le respecte pas, on est pénalisé.

On n'a pas promis de fermer les bases, on a promis de transformer les bases militaires en centres d'entraînement et en plaque tournante pour les Casques bleus. Qu'est-ce qu'on a fait? On a fermé des bases, on a fusionné des bases, on a fait perdre des emplois.

Je voudrais demander au député, par votre entremise, monsieur le Président, si le gouvernement a pensé un petit peu aux coûts de réaménagement des milliers de militaires qu'il aurait à déménager, qu'il aurait à réaffecter? Je voudrais aussi leur demander s'ils ont pris en considération le nombre de pertes d'emplois directs et indirects, causées par ces fermetures? Il parle de création d'emplois, je parle de pertes d'emplois.

Je cite encore ici un éditorial de Lise Bissonnette qui dit: «Au total, en cinq ans, et après tout ce branle-bas, la défense canadienne n'aura pas économisé un milliard, même pas un milliard après cinq ans. Ce sera 850 millions. Mais dans ces communautés qui abritent les bases, c'est la vie qui s'arrête, du dépanneur au cinéma, en passant par l'école et le restaurant. C'est la vie qui s'arrête, ce sont des emplois qui se perdent, directs et indirects». Voilà pour la première partie de ma question.

La deuxième partie de ma question concerne vos promesses. Est-ce que vous avez promis, pendant la campagne électorale, de taxer les aînés? Est-ce que vous avez promis, pendant la campagne électorale, de pénaliser les chômeurs? Est-ce que vous avez promis, pendant la campagne électorale, de prolonger le gel des salaires des fonctionnaires? Est-ce que vous avez promis, pendant la campagne électorale, de fermer des bases militaires? Ce sont là mes questions, monsieur le Président.

M. DeVillers: Monsieur le Président, je ne pense pas avoir assez de temps à ma disposition pour répondre à toutes ces questions.

[Traduction]

Le député n'est pas sans savoir que le livre rouge était rempli de promesses. Proposée dans le budget, la mesure qui nous occupe, à savoir la fermeture de bases, est loin d'avoir été prise à la légère. Ce sera évidemment le chômage pour les personnes visées. Le ministre de la Défense nous a donné l'assurance que des mesures d'incitation à la retraite anticipée, des cours de formation et de recyclage, entre autres choses, avaient été prévus pour tenter de remédier à la situation. Mais, ce qu'il faut retenir surtout, c'est que les économies qui seront réalisées grâce à ces compressions-on nous dit que ces mesures auraient dû être prises il y a longtemps et qu'elles auraient alors été plus faciles à appliquer-seront réinvesties dans divers programmes, dont certains que j'ai mentionnés au commencement de mon allocation. Ces sommes seront beaucoup plus utiles, puisqu'elles serviront à créer des emplois plutôt qu'à entretenir des installations militaires qui ont perdu leur raison d'être.

(1645)

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, j'aimerais soulever quelques points en réponse au plaidoyer du député en faveur du budget.

Il était fier de parler des nouveaux programmes présentés dans ce budget que le ministre des Finances avait pourtant décrit comme un budget austère. Malgré cela, il comporte 18 nouveaux programmes dont nous avons fort bien su nous passer pendant 125 ans, depuis les débuts de la Confédération. Ce budget devait être très strict, mais le gouvernement y engage des dépenses pour de nouveaux programmes dans de nouveaux domaines.

J'aimerais vraiment que le député réponde à un autre point. Selon lui, nous traversons une crise de recettes et non une crise de dépenses. La dette de ce pays s'élève à 500 milliards de dollars. Les Canadiens ploient sous un fardeau fiscal qu'ils peuvent à peine payer. J'aimerais que le député nous dise pourquoi, à son


1820

avis, nous sommes en crise à cause des recettes et non à cause des dépenses.

M. DeVillers: Monsieur le Président, un déficit, c'est la différence entre les recettes et les dépenses. À mon avis, et mon parti partage cette opinion je crois, il faudrait augmenter les recettes, et les recettes d'un gouvernement proviennent des impôts. La difficulté vient du fait que trop peu de gens payent des impôts dans ce pays à cause du chômage.

Les mesures mises en oeuvre par le programme du livre rouge et le présent budget visent à créer des emplois pour un plus grand nombre de personnes afin qu'on puisse élargir notre assiette fiscale; de cette façon, les gens ne paieraient pas plus d'impôt, mais plus en paieraient. Voilà l'objectif du budget.

[Français]

M. Michel Daviault (Ahuntsic): Monsieur le Président, Montréalais depuis toujours et représentant une circonscription montréalaise, celle d'Ahuntsic, j'aimerais vous parler de ma ville, la ville de Montréal.

Il y a plusieurs années, alors que j'étais à la petite école, les enseignants nous apprenaient, avec un soupçon de fierté à peine dissimulée, que Montréal était la métropole du Canada. On nous apprenait que nous étions les citoyens de la ville la plus importante du Canada au niveau financier, au niveau bancaire, que le port de Montréal était le plus important puisqu'il servait d'entrée et de sortie à toutes les marchandises en provenance de l'Ontario et des Prairies et recevait des biens de l'Europe et de l'Afrique. C'était le bon temps, mais ce temps est révolu.

Oui, Montréal est maintenant devenu la capitale de la pauvreté. En effet, 18,5 p. 100 des familles vivent sous le seuil de la pauvreté dans la région métropolitaine. Et avec le premier Budget Martin, Montréal est devenu la capitale du désespoir. Depuis 10 ans, la pauvreté gagne constamment du terrain et mine non seulement le moral de ses citoyens, mais également sa capacité de faire face aux défis importants qu'elle se doit de surmonter pour être concurrentielle sur les marchés. Les artères commerciales qui, autrefois, pullulaient de commerces, de boutiques et de marchés, affichent maintenant des enseignes «À louer», «Écoulement de marchandises» ou, tout simplement, «Faillite». Je ne dramatise en rien la situation, c'est un constat de la réalité montréalaise.

Mais ce que ces devantures d'établissements affichent ne révèle pas le quart de ce que les citoyens de Montréal vivent. Selon une étude faite par Centraide dans le but de mieux cibler ses interventions auprès des personnes les plus démunies de son territoire, la moitié des personnes à faible revenu recensées sur le territoire de Centraide vivent dans la ville de Montréal. L'île de Montréal, elle, affiche un taux de pauvreté plus élevé que la moyenne du grand territoire de Centraide qui comprend également les banlieues. À Montréal, Montréal-Nord, Verdun et Ville-Saint-Pierre, une personne sur trois vit sous le seuil de la pauvreté.

(1650)

Pour le bénéfice du ministre des Finances, sa propre ville dans son propre comté n'est pas épargnée par la pauvreté, puisqu'une personne sur quatre vit sous le seuil du faible revenu à Ville LaSalle.

C'est ce même ministre qui nous a offert un budget où il est allé puiser l'argent, soi-disant pour relancer l'économie, à même les poches des personnes qui en ont le plus besoin, non pas pour placer leurs économies dans des fiducies familiales et économiser de l'impôt, non pas pour aller dîner avec des gens d'affaires et voir leurs frais de représentation diminuer, mais pour manger, se loger, se soigner et se vêtir décemment.

Celui-là même qui, il n'y a pas si longtemps, alors qu'il réfléchissait sur les banquettes de l'opposition, avant de devenir ministre des Finances, et ne l'oublions pas même s'il semble l'avoir oublié, comme on peut le voir dans son premier budget, celui-là même qui est responsable du développement économique du grand Montréal, écrivait dans La Presse du 8 juin 1992, en parlant de Montréal: «Coeur économique et moteur de développement important, la région de Montréal doit rapidement être relancée, sinon son déclin économique sera également celui du Québec.»

Pourquoi donc le ministre n'a-t-il pas mis de l'avant des mesures telles qu'il les préconisait en juin dernier, à savoir la modernisation ou la reconstruction d'infrastructures industrielles, un programme d'aide à la rénovation domiciliaire qui, comme il le disait si bien, était créateur d'emplois et profitait grandement à une région comme Montréal, là où le taux de locataires est un des plus élevés au pays? Maintenant qu'on sait que le seul programme d'aide à la rénovation, le programme PAREL, s'adresse non pas à des locataires mais à des propriétaires occupants, on se demande bien quel lobby a eu le plus d'influence.

Pourquoi ce même député, devenu ministre, n'a-t-il pas parlé de créer des super-incubateurs économiques, d'inciter à la mise en place d'une politique de renouvellement de l'industrie manufacturière dans des secteurs de croissance, en partenariat avec le Québec et la ville de Montréal?

Ce sont toutes des propositions antérieures du ministre. Était-ce là de la pure fumisterie? Que s'est-il passé avec la promesse faite par lui et les candidats libéraux au mois d'octobre dernier, promesse qui laissait planer un investissement de 250 millions dans la recherche et le développement au Québec, dont la majeure partie à Montréal? Que s'est-il passé, alors qu'il est reconnu par tous que le Québec ne reçoit pas sa juste part de dépenses en recherche et développement?

Comment peut-on avoir promis de telles mesures, et combien d'autres qu'il serait trop long d'énumérer, sans avoir établi des mesures concrètes dans le Budget alors qu'on assiste à l'appauvrissement rapide de Montréal? Et quelles sont les conséquences, à court et moyen terme, d'une dégradation de la situation financière d'une ville de 1,2 million d'habitants, avec un taux de chômage qui est passé de 9,1 p. 100 en décembre 1989, à 13,8 p. 100 en décembre 1993, dépassant pour cette période le taux de chômage de Saint-Jean, Terre-Neuve, alors qu'à Toronto il passait de 4,1, en décembre 1989, à 11,5 pour la même période?

Une des manifestations évidentes de la pauvreté s'illustre par la situation de l'habitation, besoin primaire s'il en est un, et de grande importance dans un pays comme le nôtre aux prises avec des hivers d'une rigueur éprouvante-que l'on peut constater facilement ces jours-ci-tel que celui que nous subissons présentement, et qui devrait se terminer peut-être au printemps.


1821

Plus sérieusement, la situation du logement a été discutée à maintes reprises dans cette Chambre, et pour cause. Elle est un des moyens concrets d'évaluation de l'état de pauvreté d'une ville ou de toute autre communauté. Dans le dernier recensement, on nous trace très bien la situation du logement locatif privé au Québec et au Canada. À Toronto, 62 p. 100 de tous les logements nécessitant des réparations majeures étaient occupés par des locataires. À Montréal, ce chiffre est à peu près équivalent, soit 59 p. 100; il est de 58 p. 100 pour Ottawa-Hull et de 54 p. 100 à Vancouver.

À Montréal, les conditions de vie des ménages locataires sont désastreuses. Un ménage sur trois consacre plus de 30 p. 100 de son revenu pour se loger, et un ménage sur six consacre plus de 50 p. 100 pour se loger. Près de 20 000 personnes peuvent être considérées comme des sans-abri. Selon l'Office municipal d'habitation de Montréal, il y a présentement 10 000 ménages, soit environ 20 000 personnes, sur les listes d'attente. Les principaux demandeurs d'habitations à loyer modique sont des personnes âgées, des familles monoparentales et des personnes handicapées. Bref, des catégories de personnes les plus vulnérables de notre société.

(1655)

Mardi dernier, le ministre des Travaux publics et, à ce titre, ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, me demandait, en guise de réponse à une question que je lui posais sur le logement social, soit à peine deux heures avant le discours sur le Budget, de faire preuve de patience et d'attendre les décisions du ministre des Finances. Eh bien, il n'y a rien dans ce budget pour le logement social.

Montréal compte 63 280 ménages locataires consacrant plus de 50 p. 100 de leur revenu au loyer, soit environ un ménage locataire sur cinq, 19,1 p. 100. C'est la ville canadienne qui compte le plus grand nombre de ménages locataires consacrant plus de 50 p. 100 de leur revenu au loyer, comparativement à 14,5 p. 100 pour Ottawa et 16 p. 100 pour Toronto.

Le Québec compte le tiers des ménages locataires canadiens condamnés à payer plus de 50 p. 100 de leur revenu pour se loger, soit 194 225 ménages contre 583 705 au Canada. Avec une population beaucoup plus importante, l'Ontario compte à peu près le même nombre de ménages devant investir leur revenu en loyer, soit 194 920, mais pour une population totale beaucoup plus grande. La Colombie-Britannique en compte 77 120.

Pour terminer cette triste liste de statistiques qui révèlent le niveau de pauvreté de Montréal, nous tenons à dire un mot sur la ville de Montréal-Nord représentée par notre collègue, M. Nunez, dans le comté de Bourassa, comté voisin du mien, un comté aux prises avec un tel niveau de pauvreté que certains spécialistes considèrent qu'il pourrait devenir une poudrière sociale. À Montréal-Nord, ville fort cosmopolite, 10 500 ménages locataires, soit près de 42 p. 100 de tous les ménages locataires, consacrent plus de 30 p. 100 de leur revenu pour se loger; 22 p. 100 des ménages locataires y consacrent plus de 50 p. 100. Ces chiffres nous indiquent une situation tout à fait aberrante.

Encore une fois, il faut rappeler que le ministre des Finances et les autres candidats libéraux s'étaient engagés, en octobre dernier, à soutenir les organismes coopératifs et sans but lucratif qui oeuvrent dans le secteur du logement social.

Ici, je tiens à rappeler les statistiques de la Fédération de l'habitation coopérative du Canada. En 1992, on comptait 17 400 unités de logement au Québec par rapport à 35 000 en Ontario; 17,4 versus 35. Ces chiffres démontrent encore une fois que le Québec ne reçoit pas sa juste part: un pour deux, c'est sans doute un autre bel exemple de l'équité du système fédéral.

Comment peut-on expliquer que le ministre des Finances écrivait à une coalition d'organismes oeuvrant en matière de logement: «qu'il incombe à l'administration fédérale de s'assurer que plus de un million de foyers canadiens soient logés convenablement, à prix abordable.» Et j'espère que tantôt nos amis poseront des questions sur le programme PAREL, qu'on pourra aborder ensemble.

Comment une société se disant civilisée, se disant digne, le meilleur pays au monde, comme le clament sans cesse nos amis, peut-elle regarder la situation que vivent ces gens comme vous et moi, mais qui n'ont pu trouver un travail ou qui ont perdu le leur, et nous faire croire qu'en coupant 5,5 milliards de dollars aux chômeurs au cours des trois prochaines années, cela aidera à la relance de l'emploi? C'est du surréalisme. En ne s'attaquant pas véritablement au déficit par une réduction des dédoublements et des chevauchements, dont on ne soupçonne toujours pas l'ampleur réelle, en n'imposant pas ne serait-ce qu'un impôt minimum aux grandes sociétés, en devenant tout à fait frileux quand il s'agit de s'attaquer aux dépenses de fonctionnement de l'appareil fédéral, le gouvernement a décidé volontairement de chercher de l'argent dans les goussets des personnes les plus vulnérables de nos sociétés.

En portant la période d'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage de 10 à 12 semaines, il y a fort à parier que tous ceux et celles qui exercent un travail saisonnier, agriculteurs, pêcheurs, jardiniers, serveurs, travailleurs sur une base de plein air ou un travail sur une base contractuelle, seul moyen pour un grand nombre de jeunes professionnels de gagner leur vie, seront pénalisés lourdement par cette mesure. Encore une fois, ce sont les personnes qui ont déjà des problèmes d'emploi qui écoperont des mesures du ministre des Finances.

(1700)

De plus, le début de la réforme de l'assurance-chômage, avant même que ne débute la vaste consultation pour connaître les besoins de la population, aura un effet carrément catastrophique sur l'état des finances des provinces. Ces mesures vont favoriser une augmentation de l'assistance sociale à la charge des provinces qui se verront forcées elles-mêmes de couper dans leurs programmes à cause du gel des transferts aux provinces. On pellette dans la cour des voisins une partie de son déficit, tout en leur coupant les fonds pour répondre aux nouveaux besoins que cela va engendrer. La situation est des plus alarmantes. C'est tout un programme.


1822

Quand on pense que durant la campagne électorale, le Parti libéral ne parlait que d'emploi et d'équité et que ce Budget n'offre aucun remède au chômage et à la pauvreté, il n'offre que des jobs de courte durée et, espérons-le, de plus de 12 semaines pour que ces travailleurs soient admissibles au chômage. C'est nettement insuffisant pour redonner la dignité aux gens sans travail.

Les chômeurs, particulièrement les chômeuses, les aînés, les démunis font les frais des coupures sociales du gouvernement libéral. Le ministre du Développement des ressources humaines, que je qualifierais de «Mr. Axe», nous annonce qu'avec la révision des programmes sociaux, il pourrait y avoir d'autres coupures. Quel virage indécent pour les positions sociales des libéraux depuis le temps de leur période dans l'opposition jusqu'à maintenant où ils sont au pouvoir! «Les coupures à l'assurance-chômage conduisent à une augmentation de l'aide sociale», disait l'actuelle vice-première ministre en 1992. Les coupures à l'assurance-chômage conduisent à une augmentation de l'aide sociale! À ce moment-là, elle siégeait dans l'opposition. D'ailleurs, si vous froncez les sourcils, vous pouvez toujours regarder les nouvelles de Radio-Canada d'hier, on a repassé cet extrait.

Ces nouvelles coupures sont encore du pelletage de déficit dans la cour des provinces. En gelant les paiements de transfert, c'est une facture de 2 milliards qu'on refile aux provinces. Montréal est gravement malade, mais le gouvernement libéral coupe encore un peu plus d'oxygène à sa population défavorisée. Merci aux libéraux pour leur généreux programme d'appauvrissement collectif.

M. Bill Graham (Rosedale): Monsieur le Président, je remercie le député de son allocution très éloquente et de sa description d'une ville en désarroi que beaucoup d'entre nous qui habitent ailleurs au Canada trouvent très troublante. Je suis né à Montréal, j'ai passé ma vie à Toronto, mais j'ai enseigné à l'Université McGill et à l'Université de Montréal. Je demande à mon collègue, en toute humilité, et pas dans un sens hostile, s'il ne serait pas opportun qu'il admette que les problèmes de la grande ville de Montréal, qui devrait être une ville prospère, étant située au bon endroit pour être une ville prospère, ne trouveront pas solution du fait de la propre politique de son parti, de leurs propres menaces d'indépendance? Ce qu'il faut pour la prospérité, c'est l'investissement. C'est l'investissement qui manque à Montréal. Les Montréalais eux-mêmes refusent d'investir, parce qu'ils ont peur de la politique actuelle. C'est vous-mêmes qui créez la situation, une sorte de «self-serving wish», et c'est nous qui devons payer. Le Budget actuel essaie de rétablir un certain équilibre que votre politique même a créé.

J'ai pu constater, lorsque j'étais à Montréal, la première fois que Montréal a commencé à perdre sa position en regard de Toronto, par exemple, c'était lors de l'élection de M. Lévesque. C'était à ce moment-là. On peut le retracer historiquement, c'est très clair. À ce moment-là, Montréal a commencé à se détériorer par rapport à Toronto. Les gens dans ce monde sont libres. Ils sont libres de quitter, ils sont libres de voyager, ils sont libres d'investir leur capital là où ils veulent.

Je vous demande de regarder les choses en face et de vous demander à vous-mêmes si votre politique d'indépendance pour le Québec encourage les investissements au Québec ou est-ce que c'est votre politique qui a créé, à un certain moment et jusqu'à un certain point, les mêmes problèmes que vous venez de décrire avec tant de tristesse? Je vous le soumets en toute humilité et avec toute l'amitié pour la ville de Montréal que nous avons tous, dans tout le Canada.

(1705)

Le vice-président: Je vous prierais d'adresser vos remarques à la Présidence.

M. Daviault: Monsieur le Président, par votre entremise, je remercie le député de ses aimables propos. J'ai cité des chiffres tantôt sur le chômage de 1989 à 1993. À ce que je sache, il n'y avait pas de gouvernement souverainiste à Québec à ce moment-là.

J'aimerais parler de l'étude du professeur William J. Coffey et de Mario Polèse, et si quelqu'un la demande on pourrait la déposer-d'ailleurs, ce document est disponible à la Bibliothèque-sur la ville de Montréal qui s'appelle Le déclin de l'empire montréalais: regard sur l'économie d'une métropole en mutation. Les auteurs ne sont pas des souverainistes et leur analyse montre que le déclin de Montréal est dû principalement à ce qu'ils appellent la perte de l'«hinterland». Le marché s'est déplacé, au fil de cette fédération, vers Toronto. Nos industries ont vieilli, la région du canal Lachine, qui était un des berceaux du développement industriel au Canada, est en totale désuétude et des fonds très importants seraient nécessaires pour le réactiver.

J'ai été moi-même associé à la création d'une corporation de développement économique sur des outils locaux à Montréal. Et finalement, on se prend en main, sauf que c'est un peu à partir de cette prise en main locale qu'on en arrive à se prendre en main sur le plan national. On ne peut pas proposer, et je suis Montréalais, je suis «Montréaliste», et dans ce sens, on ne peut pas nous proposer de nous prendre en main selon nos moyens, tout en laissant des outils importants entre les mains du gouvernement fédéral qui les gère très mal.

À la période des questions cet après-midi, le ministre, dans une grande envolée partisane, a parlé de PAREL. PAREL étant supposément un programme de logement social, il ne s'adresse qu'aux propriétaires-occupants, dans sa principale partie, et deuxièmement, aux personnes handicapées. La partie pour les personnes handicapées, on peut l'assimiler à du logement social, c'est évident.

On sait qu'à Montréal, on a un problème surtout au niveau des familles monoparentales et des nouveaux arrivants, car on a une grande population nouvelle, et que ces populations habitent souvent en appartement. C'est probablement le même problème à Toronto aussi. Mais ces gens ne sont pas admissibles à un tel programme.

Un gouvernement qui, dans l'opposition, déchirait littéralement sa chemise sur le logement social, rendu au pouvoir, garroche quelques peanuts-je m'excuse de l'expression-et vient nous dire qu'il fait du logement social. Je tente de trouver un terme parlementaire, mais je dirais que c'est proprement odieux. Quand le ministre vient nous dire qu'en plus, il faudrait applau-


1823

dir le ministre des Finances qui est responsable du développement économique de Montréal, c'est le «boutte du boutte»!

Donc, il y a cette étude-là et vous pourrez la consulter; j'en rappelle encore le titre, Déclin de l'empire montréalais. On y identifie comme un facteur mineur l'option politique québécoise, mais un facteur politique mineur à ce stade-ci. M. William J. Coffey, j'imagine que ce n'est pas un souverainiste.

L'importance pour la métropole du Québec, parce que c'est maintenant la métropole du Québec, de se donner des moyens passera par une reconnaissance que ces moyens doivent appartenir au gouvernement du Québec. Le gouvernement fédéral n'a pas rempli son mandat et, personnellement, j'ai perdu espoir.

(1710)

En 1988, j'étais de ceux qui ont appuyé les conservateurs pour le beau risque. . .

Une voix: Chrétien l'a coulé.

M. Daviault: Pour le beau risque, ça n'a pas marché. Même avec les cinq conditions minimales de M. Bourassa, ça n'a pas marché. Au départ, ces cinq conditions minimales avec un rapatriement de pouvoir, avec un respect de nos pouvoirs, même ça, ça n'a pas marché; c'était un minimum. Ce que le gouvernement nous dit pour ce qui est de la position constitutionnelle, c'est business as usual, le problème va disparaître de lui-même. Ce n'est pas vrai. Le gouvernement fédéral est impliqué dans tous les secteurs d'activité. Il n'y a pas un seul ministère, mis à part la défense, où il ne soit pas impliqué.

Les projets de développement économique qu'il nous présente, le programme Service jeunesse, qui ressemble à celui de Katimavik, est un programme provincial. Ça n'a pas d'affaire là-dedans. C'est un programme culturel, c'est un programme d'éducation, le fédéral n'a pas d'affaire là-dedans.

Dans la formation professionnelle, il n'y a pas un sujet au Québec qui ne fasse autant l'unanimité que la formation professionnelle. Le très souverainiste Conseil du patronat, et son président M. Ghislain Dufour, qui n'est pas un souverainiste, sont tous d'accord. C'est la SQDM qui doit le faire, la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Quand on arrivera à cela dans d'autres sujets, on pourra en sortir des éléments de dossier, des dossiers spécifiques où le gouvernement fédéral ne reconnaît même pas des programmes qui sont admissibles pour la SQDM; tout le temps du dédoublement. On perd nos énergies, et pendant ce temps-là, on coupe l'aide aux chômeurs. Vous avez vous-même dit qu'en coupant l'assurance-chômage, vous alliez créer une pression sur l'aide sociale. Maintenant que vous êtes au pouvoir, vous dites le contraire.

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Affaires parlementaires)): Monsieur le Président, je trouve extrêmement déprimant d'écouter les discours des députés du Bloc québécois qui nous peignent le Québec, un portrait du Québec comme étant tellement sombre, comme si c'était l'endroit le plus misérable au monde. Vraiment, si je devais demeurer au Québec, je serais très mécontent.

Ne serait-il pas plus avantageux pour les députés du Bloc de vanter plutôt le génie québécois, les progrès qui ont été faits par l'entreprise québécoise, ce qui est d'ailleurs reconnu à travers le monde? Le député ne croit-il pas que si son discours était beaucoup plus positif, qu'il vantait en fait les mérites, le génie québécois, que les entrepreneurs seraient prêts à venir s'y installer et justement à créer des emplois, afin d'améliorer le sort des Québécois, ce qu'il souhaite d'ailleurs tout comme nous?

M. Daviault: Je remercie le député de Beauséjour. Effectivement, l'entrepreneurship québécois n'est à dédaigner d'aucune manière. Dans la circonscription que je représente, on a, pendant plusieurs années, tenté d'obtenir une corporation de développement économique. Les députés fédéraux et provinciaux ainsi que les conseillers municipaux nous ont toujours dit que c'était impossible. On s'est pris en main, on l'a fait, parce qu'on voulait le faire.

Au niveau provincial, il y a amplement d'exemples de réussite, mais il y a des freins à ces éléments-là, et lorsque je vous ai parlé plus précisément de l'assurance-chômage, je parlais d'oxygène. Parce que, en attendant que tous ces problèmes se résolvent, que le ministre du Développement des ressources humaines s'assoit avec son collègue provincial et règle le dossier, on l'espère, le mieux possible, de la formation professionnelle, ça nous prend de l'oxygène à Montréal pour nos défavorisés.

Cet après-midi, quand le ministre présentait du clipping de presse, il a sans doute oublié celui sur l'assurance-chômage, en page B-1 de La Presse d'aujourd'hui, où M. Claude Forget avait proposé une importante réponse. M. Forget était ministre libéral provincial autrefois.

(1715)

M. Forget note en outre que l'introduction d'un taux de prestations différent pour les contribuables ayant des personnes à charge va compliquer et accroître les coûts administratifs d'une loi déjà fort complexe.

Il ne s'agit pas de passer de 55 à 60 p. 100. Vous allez créer une administration qui ne sera absolument pas administrable; vous allez créer des problèmes très importants; vous allez compliquer le système. Des mesures fiscales nébuleuses comme en page C3, même les experts ne s'y retrouvent pas. On dit d'ailleurs, en page titre: «M. Paul Martin cache mal sa déception devant l'accueil très froid qu'a suscité le plan financier du gouvernement et s'en attribue en partie la responsabilité.»

Peut-être l'article le plus intéressant du quotidien La Presse, et ce sont tous des articles de La Presse. . .

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le temps passe. Votre temps de parole est écoulé nous devons maintenant passer au débat.


1824

[Traduction]

M. Culbert: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Au sujet des propos du dernier député à avoir pris la parole, j'ai cru comprendre-à moins que l'interprétation ne m'ait pas permis de tout comprendre-que le député a désigné un très honorable et distingué ministre du nom de «Mr. Axe», si je ne m'abuse. C'est ce que l'interprète a dit. Je ne crois pas que le député l'ait fait intentionnellement, mais si c'est le cas, je trouve qu'il y aurait lieu d'intervenir.

Le vice-président: Je suppose que c'était un rappel au Règlement. Le critère qui justifie un rappel au Règlement, c'est le fait qu'un député ait tenu des propos perturbateurs pour la Chambre. Malgré ce qu'en dit le député qui vient d'invoquer le Règlement, je ne crois pas qu'il y ait eu de propos perturbateurs.

Si je constate le contraire, je reparlerai à la Chambre des termes qui ont été reconnus comme antiparlementaires. Ayant lu Beauchesne plusieurs fois, je suis passablement sûr que l'expression «Mr. X» n'est pas antiparlementaire, mais je me ferai un devoir de vérifier et d'en reparler au député.

M. John Finlay (Oxford): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour faire mon premier discours, en tant que député d'Oxford, en cette élégante et vénérable enceinte. Lorsque je l'ai visitée, il y a une cinquantaine d'années, n'étant encore qu'au secondaire, je ne croyais pas qu'un jour j'aurais l'occasion de m'adresser à mes honorables collègues en tant que membre du gouvernement de Sa Majesté. Ce jour est venu, et c'est pour moi une expérience profondément émouvante.

Je suis fier de représenter les citoyens de la circonscription d'Oxford et du comté de Burford. Je les remercie de m'avoir permis de les servir et de servir le Canada.

Les comtés d'Oxford et de Burford, qui forment la circonscription d'Oxford, sont situés en plein coeur de la région agricole du sud-est de l'Ontario. Elle n'est pas aussi escarpée que l'Alberta et la Colombie-Britannique, ni aussi vaste que le Manitoba et la Saskatchewan, et ne possède ni les océans ni le littoral rocheux des Maritimes, mais elle a la beauté bucolique, le passé et le caractère de plus d'une circonscription à majorité rurale du centre du Canada.

L'agriculture est l'épine dorsale de nos communautés. On cultive le tabac dans le sud d'Oxford, autour de Tillsonburg, ville en expansion dont les usines fournissent des pièces à l'industrie automobile. Tillsonburg est également le siège de la Commission de commercialisation du tabac jaune.

À environ 25 kilomètres au nord de Tillsonburg se trouve la ville d'Ingersoll où est située la très moderne et immense usine automobile de General Motors Suzuki, connue sous le nom de CAMI.

Woodstock, ville de 30 000 habitants, est le centre administratif du comté d'Oxford. On y trouve de nombreuses usines desservant l'industrie automobile et du camionnage, plusieurs usines de fabrication de produits en béton, des fonderies et des usines de transformation des métaux. En fait, le panneautage du nouveau tunnel sous la rivière Détroit est fabriqué à Woodstock.

(1720)

Woodstock s'enorgueillit du titre de capitale laitière du Canada et elle a d'ailleurs pour emblême depuis 50 ans une vache Holstein, Springbank Snow Countess, qui était la propriété de Tom Dent; ce dernier a été Président de l'Assemblée législative de l'Ontario de 1943 à 1955. La statue grandeur nature de Snow Countess pose fièrement le long de la route à l'entrée est de Woodstock.

Je pourrais déployer toute mon éloquence à parler des centaines de fermes laitières bien tenues du comté d'Oxford et du canton de Burford. Il ne faut pas oublier non plus les producteurs de cultures industrielles et les éleveurs de porcs et de poulets. En fait, la ferme Cold Springs de Thamesford est l'un des principaux producteurs et transformateurs de dindes en Ontario.

Le canton de Burford s'enorgueillit de la présence d'usines de haute technologie et d'une ferme de recherche sans pareil. On trouve, juste au nord de Woodstock, la société Western Ontario Breeders Incorporated, qui recueille, analyse, conserve et vend dans le monde entier du sperme servant à l'insémination artificielle du bétail.

Oxford est le lieu de naissance de personnages historiques intéressants, notamment Aimie Semple MacPherson, l'évangéliste californienne, qui est née et a grandi près d'Ingersoll. Était également native de la région, Cassie Chadwick, une femme moins admirable mais ayant connu une existence tout aussi colorée. Mme Chadwick était cette fameuse arnaqueuse qui vivait fastueusement à Cleveland, en Ohio, et qui prétendait être la fille illégitime du millionnaire new-yorkais, Andrew Carnegie, d'illustre réputation.

Chez les hommes, le «colonel» Joe Boyle, sauveur de la Roumanie et originaire de Woodstock, a fait fortune dans l'industrie du lavage hydraulique de gisements alluvionnaires au Klondike après la ruée vers l'or. Pendant la Première Guerre mondiale, il créa sa propre batterie de fusils mitrailleurs et la dota d'anciens membres de la police montée et de mineurs qu'il transporta en France. M. Boyle fut envoyé en Roumanie et en Russie pour y réorganiser les chemins de fer. Durant la révolution bolchevique, il récupéra du Kremlin des joyaux de la couronne et quelque 20 millions en espèces pour la reine Marie de Roumanie.

Ses ossements ont été ramenés à Woodstock il y a plusieurs années afin d'y être inhumés. Le révérend John Davies, de la vieille église anglicane de St. Paul's à Woodstock, qui a vécu jusqu'à l'âge de 101 ans et qui avait connu Joe Boyle au Klondike, a présidé la cérémonie d'inhumation.

On me permettra de rappeler d'autres héros. L'équipe de souque à la corde, les Mighty Men of Zorra, remporta le titre mondial à l'Exposition internationale de Chicago en 1893; on lui a rendu hommage le 1er juillet dernier à l'occasion du concours international de souque à la corde, dans le cadre des jeux annuels


1825

des Highlands à Embro. Le pilier de l'équipe de 1893, Robert MacIntosh, avait 52 pouces de tour de poitrine.

L'an dernier, l'hydroglisseur de classe illimitée, Miss Canada IV, a été remis par son propriétaire et pilote, M. Harold Wilson, au musée Centennial Park à Ingersoll. L'embarcation avait brisé le record de vitesse établi par sir Malcolm Campbell dans les années 30.

Je voudrais faire partager à mes collègues certaines de mes convictions au sujet de notre pays. J'ai une foi immense dans le Canada. Je souscris au point de vue exprimé il y a deux semaines par l'un de nos vis-à-vis qui a déclaré qu'il y avait trois réalités à la base de notre histoire: les peuples autochtones, les Anglais et les Français.

Mon collègue du Bloc a ajouté à juste titre que, maintenant, plus d'un tiers des Canadiens, 12 millions en fait, n'étaient ni des autochtones ni des anglophones ou des francophones, mais étaient plutôt de diverses origines culturelles et raciales.

Je voudrais rappeler à tous les députés que 52 p. 100 des Canadiens sont des femmes.

Je suis fier de souscrire à l'idéologie libérale et de faire partie de ce gouvernement libéral. Nos députés représentent les gens de tous les coins du pays.

Voyez la diversité qu'on retrouve sur les banquettes ministérielles et en face, dans le déversoir. Pratiquement tous les groupes ethniques qui composent notre pays sont représentés au gouvernement. Nous ne sommes pas encore parvenus à l'égalité en ce qui concerne la représentation des femmes. Cependant, sur les 52 femmes qui siègent dans cette enceinte, 37 sont des libérales, ce qui constitue une nette amélioration par rapport au dernier gouvernement.

(1725)

Je crois que les Canadiens veulent que notre gouvernement réussisse. Ils souhaitent aider les gens à retrouver un emploi. Selon eux, on doit avoir au Canada un régime fiscal équitable qui fait payer à chacun sa juste part.

Ils réclament un nouveau filet de sécurité sociale abordable, sensé et réservé aux gens dans le besoin. Ils nous invitent à gouverner avec fermeté, à établir la paix ainsi qu'à faire respecter la loi et l'ordre. Ils souscrivent aux diverses mesures très fermes prises par le premier ministre pour lutter contre le problème de contrebande du tabac. Ils nous demandent de réexaminer en profondeur la Loi sur les jeunes contrevenants et notre régime de libération conditionnelle, pour ce qui est des tueurs en série et des agresseurs sexuels violents.

Dans le discours du Trône, notre gouvernement s'est engagé à ouvrir davantage le processus politique et à accorder plus de pouvoirs aux députés d'arrière-ban des deux côtés de la Chambre. Je voudrais rappeler à nos vis-à-vis que les gouvernements provinciaux sont tout aussi responsables que le gouvernement fédéral des chevauchements inutiles de programmes.

Dans le premier budget présenté par le ministre des Finances, nous avons respecté une autre promesse contenue dans notre célèbre livre rouge.

Notre budget aidera les petites et moyennes entreprises à se lancer dans de nouveaux projets et sur de nouveaux marchés. Il réduira de façon marquée les dépenses consacrées à des programmes inefficaces et non productifs. Il nous forcera à procéder à un réexamen en profondeur de tous nos programmes de sécurité sociale et du rôle de notre ministère de la Défense pour nous assurer que nous pouvons offrir les programmes nécessaires de façon efficiente et efficace.

On élargit l'assiette fiscale et on supprime certaines échappatoires du régime fiscal. On fait payer plus d'impôts aux grosses sociétés et aux riches. On réduit les cotisations d'assurance-chômage afin d'aider les petites entreprises à prendre de l'expansion.

Il prolonge la durée minimale d'admissibilité et diminue le taux des prestations pour tous, sauf ceux qui ont des personnes à charge et qui sont dans le besoin.

Il comprend bien d'autres dispositions qui réduisent les dépenses fédérales.

En terminant, permettez-moi de rappeler des paroles de sir Wilfrid Laurier, qui peuvent être un excellent sujet de réflexion pour tous les députés, en particulier ceux de la loyale opposition de Sa Majesté qui sont du Québec.

En 1911, sir Wilfrid Laurier a dit:

Au Québec, je suis un traître pour les francophones et, en Ontario, un traître pour les anglophones. Au Québec, on me traite de chauvin et, en Ontario, de séparatiste. Au Québec, on m'appelle un impérialiste et, en Ontario, un anti-impérialiste. Je ne suis rien de tout cela. Je suis Canadien. Le Canada a inspiré toute ma vie. Je me suis appuyé sur un véritable canadianisme, fait de modération et de conciliation, qui m'est apparu, la nuit, comme une colonne de feu et, le jour, comme une colonne de nuage.
Je rends hommage à sir Wilfrid et je recommande à tous les députés d'adopter sa vision équilibrée et ardente de notre grand pays.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je félicite le député de Oxford qui vient de prononcer son premier discours à la Chambre. Nous sommes ravis de connaître maintenant divers aspects de sa circonscription et je devine qu'il a beaucoup à dire à cet égard.

Par contre, il s'est montré peu bavard sur certaines parties du budget. Il a paru insister davantage sur la fierté qu'il resssent du fait que son gouvernement tente d'élargir l'assiette fiscale et d'éliminer les échappatoires afin d'augmenter les revenus provenant des impôts.

Je me demande s'il est d'accord avec l'orateur précédent qui a soutenu, malgré mes protestations, qu'au Canada, il n'y avait pas de crise au chapitre des dépenses, mais plutôt à celui des recettes.

Le député semble croire que nous devrions prélever encore plus d'impôts. Je lui pose donc la même question que j'ai posée tout à l'heure à l'autre orateur. Ne croit-il pas que, au moment où les Canadiens gémissent sous le lourd fardeau de leurs impôts et où notre dette s'élève à 500 milliards de dollars, nous devrions regarder du côté des dépenses pour les réduire de façon radicale, plutôt que d'essayer d'aller puiser encore quelques dollars dans les poches des contribuables?


1826

(1730)

M. Finlay: Monsieur le Président, j'apprécie les observations du député. Je suis heureux que certains commentaires sur Oxford l'aient intéressé.

En ce qui concerne le budget et la question très pertinente qu'il pose, je dirai que nous devons penser que ce budget diminue les dépenses de 5 $ pour chaque 1 $ de taxes perçues ou autrement.

Je conviens avec lui que les Canadiens s'opposent à une hausse des impôts, mais je crois avoir aussi affirmé qu'ils voulaient un régime fiscal équitable qui leur permettrait de donner leur juste part. À mon avis, ce budget ne va pas assez loin à cet égard. Je rappelle toutefois au député qu'un comité doit se pencher sur la question des fiducies familiales et que le ministre des Finances a indiqué que d'autres modifications seraient apportées plus tard.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly): Monsieur le Président, je m'élève contre les affirmations du député d'en face qui dit que les provinces sont responsables des dédoublements. Il faudrait que monsieur, qui a fréquenté le lycée il y a plus de 50 ans, aille se recycler.

Je me demande si, pour lui, le partage des compétences législatives constitutionnelles a une quelconque signification. Les provinces se sont mis d'accord, quatre à l'origine, pour mettre en commun certains pouvoirs, mais elles n'ont jamais, jamais, au grand jamais pensé se dépouiller des pouvoirs qui leur étaient propres, qui étaient les leurs et nécessaires à leur développement à l'intérieur de la Confédération canadienne. Donc, là-dessus, c'est une aberration.

S'il y a dédoublement, c'est par l'envahissement des pouvoirs fédéraux depuis toujours. Les provinces ne se sont pas immiscées dans la Défense nationale du canada; les provinces ne se sont pas immiscées dans le commerce extérieur. Donc, c'est une aberration pure et simple. On entend ça depuis ce matin. Donc, il faudrait rétablir les faits.

Pour ce qui est de la création d'emploi, on a 99 p. 100 de nos entreprises canadiennes qui comptent moins de quatre employés. Il y en a 1 114 000 qui sont des travailleurs autonomes, qui exercent une entreprise autonome; ce n'est pas tellement fort. On vient nous dire, par le truchement d'une manigance et d'une manipulation des chiffres, qu'on va réduire leurs impôts de 28 à 12 p. 100 alors qu'en réalité ils sont imposés à 12 p. 100. Ces gens-là ont toutes les misères du monde à arriver.

Le ministre sait-il que, pendant qu'il nous lance des sornettes comme celles de tantôt, la dette nationale nous coûte 75 000 dollars la minute, et que, pour les quatre ou cinq minutes qu'il a prises pour nous dire des aberrations semblables, on s'est ramassé quelque chose comme 275 000 $ plus pauvre qu'au début, au moment où il a pris la parole. Il devrait être conscient de cela!

[Traduction]

M. Finlay: Monsieur le Président, je pense que trois ou quatre questions ont été soulevées. Il y en a eu deux au début de l'intervention. Je rappelle au député que, s'il est vrai que les impôts et la mort sont deux certitudes, il en existe aussi une autre: le changement.

Lorsque notre Constitution a été écrite, nous ne franchissions pas l'Atlantique en six heures. Nous ne traversions pas le pays en quatre heures et demie. Nous n'avions pas de téléphone pour communiquer avec nos bureaux de circonscription. L'électronique, la fibre optique et bien d'autres inventions encore n'existaient pas. La Constitution était un bon document, compte tenu de l'époque et des connaissances des gens.

Je me permets de dire au député qu'il doit être de son époque. Nous avons des problèmes en matière de lignes aériennes et de télécommunications, et ceux-ci exigent de nouvelles approches.

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain): Monsieur le Président, je félicite le député d'Oxford de son premier discours à la Chambre. Son intervention était très bonne et certainement très opportune.

Dans le cadre de ces observations sur le budget du ministre des Finances, je tiens à dire qu'il est à l'honneur des Canadiens d'avoir élu un parti qui tient ses promesses.

(1735)

En moins de quatre mois, nous avons amorcé toutes les mesures proposées dans le livre rouge. Je souligne aux électeurs de Souris-Moose Mountain qu'il n'y a pas de nouveaux impôts. C'est une bonne nouvelle pour les agriculteurs et les petites entreprises de ma circonscription, qui craignaient que l'exemption de 500 000 $ pour les gains en capital ne soit touchée.

Pour bien des agriculteurs, leur régime de pension, c'est leur ferme. Cette exemption leur assure une sécurité financière tout à fait légitime. Le budget déposé est un placement visant à assurer l'avenir du Canada. Ce budget est juste, pragmatique et axé sur le progrès.

Je suis très heureux qu'il accorde aussi une attention particulière à l'agriculture. Encore une fois, la population de Souris-Moose Mountain compte beaucoup sur l'industrie agricole. En fait, chaque ménage en dépend plus ou moins directement dans notre circonscription.

Par conséquent, je suis très ravi de voir que de nombreux programmes touchant le secteur agricole ont été préservés. Les habitants de la circonscription de Souris-Moose Moutain sont des gens responsables et généreux. Ils veulent faire leur part pour aider le pays, réduire le déficit et développer notre économie. Ils sont prêts à porter leur part du fardeau. Cependant, ils veulent être sûrs que le gouvernement gère de façon responsable leurs contributions.

Ce que j'apprécie beaucoup dans le budget, ce sont les solutions équilibrées et responsables proposées pour régler les problèmes futurs. Nous réduisons le déficit tout en stimulant la création d'emplois. Nous venons en aide aux gens qui en ont besoin tout en abolissant les échappatoires et en éliminant le gaspillage. Nous mettons de l'ordre dans nos affaires, exactement comme mes électeurs m'ont demandé de le faire.

Toujours dans cet esprit de collaboration et de générosité, mes électeurs me disent qu'ils sont prêts à faire leur part dans le domaine agricole, à condition que nous agissions de façon responsable et que nous préservions le secteur agricole de la catastrophe et de l'effondrement.


1827

Le budget répond à leurs attentes. Même si une réduction générale de 5 p. 100 s'appliquera aux subventions et aux contributions, les programmes essentiels d'assurance-agricole ne seront pas touchés. En particulier le régime universel, le Compte de stabilisation du revenu net et l'assurance-récolte échappent aux compressions. Voilà de très bonnes nouvelles pour les habitants de ma circonscription. Les agriculteurs ont été durement touchés par des circonstances tout à fait indépendantes de leur volonté. Ils apprécient grandement le fait que ces programmes ne soient pas visés par les compressions budgétaires, car ils en ont énormément besoin.

Comme l'a annoncé le ministre des Finances, l'imposition des gains en capital des petites entreprises et des agriculteurs fera l'objet d'une étude. Le ministre nous a assuré qu'aucun changement ne sera apporté à l'exonération actuelle sans l'accord de la collectivité agricole.

Il y a une question qui inquiète les céréaliculteurs de ma circonscription, ce sont les réductions aux subventions versées aux termes de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest. Le groupe d'étude du paiement des producteurs n'a pas encore déposé son rapport. La collectivité agricole aimerait avoir l'occasion d'approuver tout nouveau processus avant que des réductions ne soient appliquées au programme actuel.

Le budget aura d'importantes répercussions sur la croissance économique et les emplois, puisqu'on y prévoit le financement d'un certain nombre de programmes qui, mentionnés dans le document intitulé Pour la création d'emplois, pour la relance économique, permettront de créer des emplois immédiatement et de jeter les bases en vue de la création d'emplois futurs.

On est en train de mettre en oeuvre le programme des travaux d'infrastructure, et les accords nécessaires ont été conclus avec chacune des provinces. Au cours des trois prochaines années, les programmes créeront entre 50 000 et 65 000 nouveaux emplois. Le budget contient d'autres initiatives visant à redonner espoir aux jeunes Canadiens. Par exemple, le Service Jeunesse permettra aux jeunes d'acquérir une expérience professionnelle enrichissante et de développer leurs aptitudes personnelles.

Le gouvernement créera aussi un nouveau programme d'apprentissage, en collaboration avec les provinces, dans le but d'offrir à nos jeunes une formation non traditionnelle.

Il importe de noter qu'aucun changement n'est apporté au Régime d'accession à la propriété permettant aux détenteurs de REER d'utiliser ce dernier pour financer l'achat d'une première maison. Cette question inquiétait beaucoup mes électeurs et, encore une fois, le budget a su apaiser leurs craintes.

(1740)

En ce qui concerne les programmes sociaux, je me réjouis que le gouvernement se propose de remanier d'ici deux ans le système canadien de la sécurité sociale, qui est désuet. Il va construire des ponts afin de redonner du travail aux Canadiens, car ceux-ci préfèrent l'autonomie à la dépendance. Le budget prévoit que l'on consacre 800 millions de dollars à essayer de nouvelles façons de sortir les Canadiens de la dépendance et de leur redonner du travail.

Comme promis dans le programme électoral du parti ministériel, le budget prévoit des fonds pour la mise sur pied du Programme d'aide préscolaire pour les autochtones, la création d'un centre d'excellence sur la santé des femmes, l'établissement de la Fondation canadienne des relations raciales, le rétablissement de la Commission de réforme du droit et du Programme de contestation judiciaire, ainsi que la mise sur pied d'un programme de nutrition prénatale à l'intention des femmes enceintes ayant un faible revenu.

Échevin et ancien maire de la ville d'Estevan, j'ai toujours cru dans la responsabilité financière et la restriction des dépenses, et ce budget prévoit les deux. Pour chaque nouveau dollar perçu, le gouvernement va réduire ses dépenses de 5 $, ce qui donnera une réduction de 23 milliards de dollars sur trois ans. De plus, l'annulation du contrat des hélicoptères EH-101 vient ajouter 1,7 milliard de dollars sur trois ans.

Non seulement nous réduisons les dépenses, mais nous nous attaquons aux échappatoires budgétaires. Nous allons, au moyen de stimulants, rendre la fiscalité canadienne plus juste.

En ramenant de 80 à 50 p. 100 la déduction accordée aux entreprises pour les frais de repas, nous sommes sur la bonne voie. La suppression immédiate de l'exonération des gains en capital de 100 000 $, qui profite surtout à des Canadiens à revenu élevé, est un autre pas dans la bonne direction.

Le gouvernement libéral a promis de créer des emplois et, à cette fin, le budget vise à stimuler le renouveau économique. Nous encourageons les innovations ainsi que les progrès technologiques, et le gouvernement soutient la précieuse petite entreprise. Le programme d'investissement canadien, l'accès amélioré au capital de risque, et le programme canadien de partenariats technologiques sont autant d'excellentes initiatives.

Pendant des années, les gouvernements ont promis plus qu'ils ne pouvaient donner et ont donné plus qu'ils ne pouvaient se le permettre. Nous nous attaquons directement au déficit. Nous allons le faire passer de 45,7 à 32,7 milliards de dollars en trois ans. Parce que notre gouvernement est déterminé à réduire ses dépenses, nous nous proposons de donner l'exemple en réduisant de trois milliards de dollars nos dépenses de fonctionnement et en bloquant les salaires.

Enfin, en ce qui concerne la Commission d'assurance-chômage, le fait de réduire les cotisations de 3,07 $ à 3 $ va mettre 300 millions de dollars de plus à la disposition des petites entreprises.

Je tiens à assurer aux députés et à tous les Canadiens que nous allons remporter la médaille d'or. Jamais ministre des Finances n'a autant fait que le nôtre. C'est avec plaisir que j'appuie ici, ce soir, son budget.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je félicite le député pour son discours. Je voudrais tenter une fois de plus de comprendre la logique de ce programme d'infrastructure.

Ce programme est censé être financé à l'aide de deux milliards de dollars du gouvernement fédéral, de deux milliards de dollars des gouvernements provinciaux et de deux autres milliards des gouvernements municipaux. Les municipalités majoreront probablement leur impôt foncier, les gouvernements provinciaux imposeront probablement une surtaxe, et ainsi de suite.

Je me demande si le député peut éclairer ma lanterne et dire combien de temps les emplois créés par le programme dureront, comment on peut justifier la dépense de six milliards de dollars


1828

pour créer des emplois pendant cette période et comment cet argent sera récupéré.

M. Collins: Monsieur le Président, je me contenterai d'expliquer comment fonctionnera le programme d'infrastructure en Saskatchewan. Je souligne, en passant, que j'attends avec impatience qu'il démarre parce que, à mon avis, il offre de nombreuses possibilités, en tout cas, pour la ville d'où je viens.

Nous envisageons un projet d'égouts et d'aqueduc qui coûtera environ quatre millions de dollars. Il appartiendra à la province de décider si ce projet sera retenu. Quelles seraient les retombées du projet dans notre région?

(1745)

Je sais parfaitement bien que beaucoup de gens dans le sud-est de la Saskatchewan, surtout dans ma circonscription, cherchent du travail. Ils attendent des possibilités d'emploi et de perfectionnement.

Quelles seront les retombées du programme? Le projet d'amélioration de notre ville permettra d'embaucher ces gens. Nous pourrons embaucher des gens de la ville d'Estevan pour travailler à un projet qui apporte quelque chose de permanent à la ville. J'attends le début du programme avec impatience. Et cela, c'est uniquement dans la partie sud de la province.

Voyons maintenant le nord de la province. Le programme d'infrastructure offre d'immenses possibilités aux peuples autochtones. Il offre la possibilité d'un nouveau départ en éducation. Il offre aussi la possibilité aux autochtones de déterminer eux-mêmes où mettre l'accent dans le domaine de l'éducation. Quant aux possibilités d'emploi, je crois qu'elles sont immenses.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, comment mon collègue peut-il dire que le Budget est très bon pour les agriculteurs et les agricultrices quand, dans l'Est, à peu près dans toutes les paroisses, il y a un encan par semaine? Il s'est permis de dire qu'il y a une réduction du budget de 5 p. 100. Je lui demande de me citer un seul avantage, pour les agriculteurs de l'Est, qu'on peut voir dans ce Budget?

[Traduction]

M. Collins: Monsieur le Président, je crois qu'il y a beaucoup de possibilités pour tout le monde. Nous pouvons rester ici et faire l'autruche. C'est ce que certaines personnes voudraient faire. Il y a des gens qui diront que nous sommes allés trop loin et d'autres qui diront que nous ne sommes pas allés assez loin.

Nous en sommes arrivés à un point où la réalité nous force à essayer de tirer le meilleur parti de ce que nous avons. Les agriculteurs du Québec et de l'Ontario réussiront tout aussi bien que ceux de la Saskatchewan. Oui, ils devront peut-être faire preuve d'un peu plus d'ingéniosité, car personne ne peut échapper à la réalité: il y aura des réductions.

Ce sera peut-être dans l'industrie laitière que les producteurs deviendront plus ingénieux. Ils vont faire concurrence aux producteurs américains, et je suis certain qu'ils vont bien réussir. Oui, ils vont, eux aussi, subir leur part de réductions. Toutefois, je pense particulièrement aux députés des circonscriptions de l'est qui ont perdu certaines de leurs bases et qui risquent de perdre 2 000 emplois. Ces circonscriptions sont très durement touchées, mais personne n'a été épargné d'un bout à l'autre du pays. L'impact du budget est le même pour le Québec que pour la Saskatchewan ou n'importe quelle autre province.

M. Leon E. Benoit (Végréville): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au nom des Canadiens qui sont déçus du budget que le gouvernement a déposé à la Chambre mardi.

Leur déception est très justifiée. Commençons par examiner les paroles des participants aux consultations prébudgétaires, les paroles du gouvernement lui-même et les mesures prises par ce gouvernement dans le budget 1994-1995.

Un habitant de Calgary, qui a participé aux consultations prébudgétaires, a dit ceci: «L'État ne peut lui-même créer ces emplois. . . Il devrait se retirer pour laisser le secteur privé investir et créer des emplois.» Beaucoup d'autres Canadiens sont du même avis.

À la page 8 de la brochure du gouvernement intitulée Aborder les choix ensemble, le ministre des Finances reconnaît que le rôle de l'État devrait consister à:

. . .instaurer un climat économique favorable au secteur privé et plus particulièrement à la petite entreprise, réduire le fardeau imposé par la réglementation et le régime fiscal, et renforcer l'éducation.
Je remercie le ministre d'avoir reconnu ce que les réformistes disent depuis des années.

Il est toutefois malheureux que, dans ce budget, le gouvernement n'ait pas mis en pratique ce qu'il prêche. Et ce n'est pas tout. À la page 9 de la même brochure, le ministre des Finances laisse entendre qu'on ne doit pas faire confiance aux gens qui ont participé à ces consultations. Voici ce qu'a dit le ministre:

. . .le gouvernement ne peut se résoudre à admettre que des initiatives de dépenses immédiates n'ont aucun rôle à jouer.
Le ministre continue de ne pas tenir compte du point de vue des Canadiens en justifiant la nécessité d'accroître les dépenses pour les programmes, comme le programme d'infrastructure. Pour que les gens aient confiance en l'intégrité d'un gouvernement, il faut de la cohérence entre ses paroles et ses actes. En l'occurrence, il n'y a même pas de cohérence entre les paroles du gouvernement sur une page de son document et celles qui figurent sur la page suivante.

(1750)

Les Canadiens ont fait preuve de bon sens et ils ont réclamé une réduction des dépenses. Or, le gouvernement les augmente. Il est temps que le gouvernement commence à écouter la population.

Je vais montrer de quelle façon les chiffres contenus dans ce budget touchent les habitants de la circonscription de Végréville, tout comme ceux du Canada tout entier. À la fin de l'année prochaine, la dette du gouvernement fédéral s'élèvera à environ 550 milliards de dollars. Environ 40 milliards de dollars viendront s'ajouter à cette dette au cours de la prochaine année financière. En me servant de ma propre famille comme exemple, je vais démontrer le fardeau que nous imposons aux jeunes Canadiens.


1829

La part de la dette nationale que ma femme, mes cinq enfants et moi devons se chiffre à environ 140 000 $. Le déficit de cette année y ajoutera encore 1 700 $ par personne. Quand mes cadets arriveront au début de la vingtaine, ils devront chacun un total d'environ 40 000 $, qui représente leur part de la dette nationale du Canada si elle continue d'augmenter au même rythme.

Je crois qu'il est moralement mauvais de la part du gouvernement de continuer à dépenser aussi exagérément. Si ces dépenses excessives continuent, le Canada en arrivera d'ici deux ans à une situation de crise peut-être comparable à celle qu'a connue la Nouvelle-Zélande. Dans une telle éventualité, il faudra mettre en oeuvre des mesures budgétaires radicales qui feront très mal. On pourrait éviter un peu de cette douleur si le gouvernement effectuait dès maintenant les compressions nécessaires.

J'implore le ministre des Finances de faire ce genre de compressions dans un mini-budget présenté au début de l'automne. Les Canadiens ne peuvent se permettre d'attendre ce retour au bon sens encore un an.

Les députés réformistes ont toujours présenté des solutions de rechange positives et constructives aux propositions gouvernementales. Fidèle à la tradition, je ferai au gouvernement des recommandations très précises.

Voici certaines des propositions du Parti réformiste. Il faudrait transformer le régime d'assurance-chômage en un régime d'assurance autofinancé dont les prestations, les cotisations et le financement seraient déterminés par les employeurs et les employés. Les contribuables épargneraient ainsi 3,5 milliards de dollars par année. Il faudrait supprimer les subventions aux entreprises, de l'ordre de 3,4 milliards de dollars par année. Il faudrait supprimer le financement aux groupes d'intérêts spéciaux au lieu d'une simple étude de la question, d'où des économies de 500 millions de dollars par année. Il faudrait réduire l'aide extérieure de 700 millions de dollars, et non pas de 400 millions de dollars comme le prévoit le budget. Il faudrait réduire de l'ordre de 25 p. 100 les subventions aux sociétés d'État, pour des économies annuelles d'environ 1,25 milliard de dollars. Il faudrait réduire de 15 p. 100 les frais généraux non salariaux du gouvernement fédéral, pour une économie annuelle d'environ 1,8 milliard de dollars. Il faudrait cibler le Régime d'assistance publique du Canada, de manière à aider les Canadiens nécessiteux, pour une économie d'environ 1,5 milliard de dollars par année. Il faudrait réduire la sécurité de la vieillesse pour les ménages ayant des revenus annuels supérieurs à 54 000 $, d'où une économie annuelle de 3,5 milliards de dollars.

Si l'on ne tient pas compte de la réforme de l'assurance-chômage, les économies que je viens d'expliquer dépasseraient 12 milliards de dollars par année. Le gouvernement aurait dû proposer ces mesures ou d'autres semblables dans son budget. Ce sont des mesures que les Canadiens ont proposées lors des consultations prébudgétaires.

Le ministre et le gouvernement écouteront-ils les Canadiens cette fois? Présenteront-ils un nouveau budget au début de l'automne afin de tenir leurs promesses?

Je vais utiliser le temps qu'il me reste pour discuter des dispositions budgétaires liées à l'agriculture. Ce que je déplore le plus, c'est que le gouvernement a réduit les dépenses dans le domaine agricole et qu'il continuera de le faire sans avoir libéré les agriculteurs du fardeau de la réglementation à outrance. Ainsi, le gouvernement maintient la réduction de 10 p. 100 de la subvention du Nid-de-Corbeau mise en application par le gouvernement précédent dans son budget de 1993-1994. Le financement aux agriculteurs a ainsi été amputé de plus de 60 millions de dollars. Ce qui me préoccupe, c'est que, parallèlement à la réduction du financement, on ne s'attaque pas aux problèmes du système de transport du grain et du manque de transformation des produits agricoles canadiens.

(1755)

En outre, la subvention du Nid-de-Corbeau est encore accordée aux chemins de fer. Les wagons de grain sont encore régis par au moins trois organismes. Et la Commission canadienne du blé interdit aux agriculteurs de chercher par eux-mêmes de nouveaux débouchés et d'y livrer leur grain.

On réduit le financement des agriculteurs alors que ceux-ci ne peuvent pas améliorer leur propre situation. Il faut supprimer les excès de la réglementation avant de faire des compressions.

Lors d'une conférence à laquelle j'ai assisté la semaine dernière, des agriculteurs ont dit très clairement qu'ils ne veulent pas que le versement de subventions agricoles se poursuive indéfiniment. Ils veulent que la réglementation soit profondément allégée et que des compressions soient ensuite effectuées. J'espère que le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture, qui était lui aussi à la conférence, a bien écouté.

Pendant la campagne électorale, le Parti réformiste a présenté un budget pour l'agriculture au cours des trois années à venir. Dans ce budget figurait notre plan visant à accorder plus de 2 milliards de dollars aux producteurs, tout en faisant économiser entre 400 millions et 500 millions de dollars par année aux contribuables. Les réformistes ont promis de proposer des solutions de rechange constructives, comme le montre bien notre proposition dans le domaine de l'agriculture.

Je le répète, avant de faire des réductions, il faut supprimer les dispositions qui empêchent les agriculteurs d'accéder au marché libre. Les chevauchements entre les gouvernements fédéral et provincial doivent être réduits, et les frais d'administration élevés de la réalisation des divers programmes, fortement comprimés.

Voici quelques-unes des recommandations du Parti réformiste: premièrement, regrouper la douzaine et plus de programmes non coordonnés de filet de sécurité et en faire trois, soit un programme d'élimination des distorsions commerciales, un programme de stabilisation du revenu et un programme d'assurance-récolte amélioré.

Deuxièmement, réformer le système de transport de manière que les produits puissent être transportés au moyen de n'importe quel mode de transport, à n'importe quelle étape de la transformation.

Troisièmement, accroître la participation du secteur privé à la recherche, à l'éducation et à la formation professionnelle.


1830

Quatrièmement, mieux cibler les fonds de recherche pour atteindre les objectifs fixés par les agriculteurs et les entreprises agroalimentaires.

Cinquièmement, améliorer la réglementation relativement à la sécurité, à la concurrence loyale et au règlement des différends pour que le marché fonctionne mieux.

En outre, nous proposons les modifications suivantes en ce qui concerne la Commission canadienne du blé: premièrement, rendre la Commission canadienne du blé comptable à ceux qui paient, soit les céréaliculteurs de l'Ouest. Deuxièmement, autoriser la commission à s'occuper de n'importe quelle culture, mais permettre aux agriculteurs et aux compagnies de grain de concurrencer la commission. Troisièmement, maintenir les garanties de prêt du Canada tant que les autres pays feront de même. Quatrièmement, donner aux agriculteurs le droit de choisir entre le prix du syndicat et le prix sur le marché libre.

J'estime que ces modifications se traduiront par une augmentation du prix que les agriculteurs obtiennent sur le marché. Cette augmentation entraînera une baisse des paiements du programme de filet de sécurité, une baisse qui ne figure pas dans le budget de l'agriculture du Parti réformiste.

En guise de conclusion, je dirai que le budget du gouvernement comprend peu de modifications dans le secteur de l'agriculture. Le gouvernement ne devrait d'ailleurs pas apporter de modifications importantes avant d'avoir fait un examen approfondi de sa politique agricole. Cependant, les études comme celle qui est en cours dans les secteurs de la volaille et de l'industrie laitière sont sans valeur parce que leur portée est trop limitée dès le départ. Dans cette étude, on conserve la gestion de l'offre comme principe fondamental au lieu de permettre aux agriculteurs et aux autres intéressés d'en discuter et de décider si ce système devrait être maintenu.

Alors qu'une étude de l'agriculture. . .

Le vice-président: À l'ordre. Je regrette beaucoup d'interrompre le député. Est-ce que c'est son premier discours à la Chambre? Je ne pense pas. Le député me dirait-il si c'est son premier discours? Non? Alors je regrette, mais son temps de parole est écoulé. Je suis sûr qu'il aura l'occasion de finir d'expliquer son point de vue avant d'avoir répondu à toutes les questions que les députés veulent lui poser.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, le député a parlé du transport ferroviaire. En Alberta, il y a eu quelques essais de privatisation de lignes de chemin de fer qui avaient été abandonnées. Elles ont été reprises par des entreprises privées qui ont réussi à les rentabiliser.

(1800)

Le parti du député est-il en faveur de la privatisation des lignes ferroviaires au Canada?

M. Benoit: Monsieur le Président, il y a la privatisation des chemins de fer eux-mêmes et celle du matériel roulant. Dans les deux cas, nous sommes prêts à envisager la privatisation.

Il faut étudier la question un peu plus, mais je suis persuadé qu'il doit y avoir plus de concurrence que maintenant dans les transports ferroviaires. La privatisation ou la nationalisation des lignes ferroviaires et la concurrence sont une question importante. Comment faut-il s'y prendre? Il reste encore à en débattre.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue de son exposé. Il a fait plusieurs suggestions qui pourraient être très utiles sur le chapitre de la réduction des coûts.

Il serait très utile également que mon collègue nous dise quel impact cette liste de suggestions, une fois ces dernières appliquées, aurait sur la situation du chômage. En d'autres termes, combien y aurait-il de chômeurs de plus au Canada?

Ma deuxième question a trait à ce programme d'assurance-chômage autofinancé. Le député sait-il si son programme entraînerait une hausse ou une baisse des cotisations, une hausse ou une baisse des montants versés aux Canadiens sans emploi?

M. Benoit: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses deux excellentes questions.

En ce qui concerne la deuxième, à savoir s'il y aura une hausse ou une baisse des cotisations, il faut comprendre que, s'agissant d'un régime autogéré, il appartiendra à l'employeur et à l'employé de décider s'il faut, oui ou non, hausser les cotisations, réduire les prestations et fixer les conditions d'admissibilité au régime. Nous disons qu'il appartient aux deux parties de modifier le régime comme elles l'entendent, parce que ce sont les intéressés qui le financent. Nous disons que le régime doit être entièrement financé par ses cotisants.

La première question portait sur les compressions et leur incidence sur le chômage. Je crois que les compressions que nous avons proposées se feraient peut-être sentir sur le chômage pour une courte période. Je crois très fermement que, si ces compressions étaient effectuées et que les Canadiens constataient que le gouvernement s'engage enfin à mettre un frein à ses dépenses exorbitantes, le taux de chômage serait à la baisse en l'espace d'un an et demi ou deux. Certes, l'économique n'est pas une science exacte, mais telle est ma conviction.

M. John English (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires intergouvernementales et président du Conseil privé): Monsieur le Président, moi aussi j'accueille favorablement les propositions qu'a faites le député, mais je me rappelle que, pendant le débat sur le GATT, nous avions parlé des subventions aux exportations céréalières qui étaient accordées dans bien des pays, dont le Canada, les États-Unis et la Communauté européenne.

Les subventions du Canada aux exportations céréalières sont inférieures d'environ 30 à 35 p. 100 à celles de la Communauté européenne et probablement légèrement inférieures à celles des États-Unis, mais considérablement supérieures à celles de l'Australie et de l'Argentine. Dans le cas de l'Australie, les subventions sont pratiquement nulles et, pour ce qui est de l'Argentine, celle-ci doit payer pour ses exportations, car elle subventionne ses fabricants.


1831

Cela étant dit, selon le député, quel devrait être le montant convenable pour notre accord de subvention?

M. Benoit: Monsieur le Président, le député demande précisément quel devait être le montant des subventions aux exportations céréalières. S'il parle des exportations céréalières en particulier, il faut réduire le montant des subventions avec le temps. Mon objectif et celui que les agriculteurs m'ont dit vouloir qu'on atteigne à un moment donné-je ne peux pas dire au juste si c'est dans six ans ou dans dix ans-serait le plus près possible de zéro.

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Monsieur le Président, lors de la présentation du budget, le ministre des Finances a dit qu'il comptait réduire de 400 millions de dollars les budgets de fonctionnement des ministères, au cours de la prochaine année, et de 1,5 milliard de dollars de plus, au cours des trois années suivantes. J'ai une suggestion sur la façon dont le ministre pourrait s'y prendre pour réunir de tels fonds.

(1805)

Le discours qu'il a prononcé à l'occasion de la présentation du budget m'a vivement impressionné. Il m'a vraiment fasciné. Le ministre a dit, et je cite: «Le budget déposé aujourd'hui fait suite à un processus sans précédent de consultation auprès des Canadiens et Canadiennes. Leurs avis nous ont été extrêmement utiles. Cependant, une constatation domine toutes les autres. Les Canadiens en ont assez de l'inertie des gouvernements. Ils aspirent à des changements fermes et en profondeur. Les Canadiens savent quel genre de pays ils veulent.»

Ces paroles m'ont franchement impressionné. C'est pourquoi j'ai été un peu surpris de constater que le ministre ou le gouvernement n'avaient pas fait les consultations qu'ils disaient avoir faites. Ils n'ont proposé, par exemple, et c'est ce que je tiens à dire, aucune réduction dans le domaine des langues officielles. Pourtant, de l'avis des habitants de ma circonscription, Nanaïmo-Cowichan, c'est un secteur où des réductions s'imposent.

Je me demande également si le ministre des Finances a consulté ses propres collègues. Le 27 janvier, le député d'Ottawa-Vanier a fait le commentaire suivant: «Il faudrait entreprendre une étude sérieuse pour déterminer si la Loi sur les langues officielles atteint le but visé.» Je suis d'accord avec lui. Il faudrait vraiment entreprendre une étude sérieuse à ce sujet. À mon avis, et de l'avis également des habitants de ma circonscription, cette politique ne fonctionne pas et coûte beaucoup trop cher.

Avant d'aller plus loin, j'aimerais corriger une impression que pourrait peut-être avoir le Bloc québécois en ce qui concerne la position du Parti réformiste sur les langues officielles.

[Français]

L'honorable député de Richmond-Wolfe a dit: «S'ils croient que l'anglais doit devenir la seule langue officielle du gouvernement fédéral, qu'ils le disent clairement.» J'aimerais dire clairement que nous ne croyons pas que l'anglais doive être la seule langue officielle. Il faut avoir deux langues officielles, le français et l'anglais, partout, sauf que ça doit être ici au Parlement, dans les cours du gouvernement et dans les bureaux officiels du gouvernement.

[Traduction]

Officiellement, le Parti réformiste appuie le bilinguisme, mais le bilinguisme individuel. Le gouvernement applique un bilinguisme territorial. Autrement dit, et prenons Québec pour exemple, les services doivent être assurés en français dans toute la province de Québec, car le nombre d'habitants le justifie manifestement. À Montréal, il est évident que des services en anglais devraient être assurés dans Notre-Dame-de-Grâce, Saint-Luc, Beaconfield, etc.

[Français]

Il faut donner les services dans la langue là où le besoin existe.

[Traduction]

Passons maintenant à un autre aspect de la raison pour laquelle je m'attaque à cette question du bilinguisme officiel. Je répète encore une fois que nous sommes en faveur du bilinguisme, en faveur d'un bilinguisme personnel. Nous voulons que cette forme de bilinguisme soit plus répandue. Le bilinguisme officiel est un facteur de discorde et de gaspillage. C'est un terrible gaspillage d'argent.

(1810)

Dans quelle mesure est-ce un gaspillage? Selon Diane Francis, du Financial Post, la traduction complète des manuels techniques sur les deux nouvelles frégates actuellement en cours de construction-500 000 pages au total-coûterait 100 millions de dollars.

La Défense nationale et le ministère des Approvisionnements et Services ont répondu en disant que le coût réel pourrait atteindre 43,5 millions. Malheureusement on ne connaîtra probablement jamais le coût réel de la traduction de ces manuels puisqu'il demeurera caché dans les coûts généraux des frégates. Le fait que les coûts soient cachés et qu'il soit très difficile de les distinguer les uns des autres pose un énorme problème, non seulement en ce qui concerne le gouvernement, mais aussi dans le cas des prévisions budgétaires et autres dépenses.

Je tiens également à dénoncer le fait que la politique des langues officielles au Canada est le produit de l'élite d'Ottawa. Cette élite affirme depuis longtemps qu'il faut promouvoir cette politique, qu'elle servira merveilleusement le pays et qu'elle contribuera certainement à y garder le Québec. Je ne crois pas que ce soit vrai et je ne pense pas non plus que la population du Québec le croit, en tout cas, pas de la façon dont le bilinguisme officiel est appliqué au Canada.

Tout à fait fidèle à l'élite d'Ottawa, le commissaire aux langues officielles aurait récemment déclaré: «Nous ne devons pas nous laisser décourager par l'opposition qui se manifeste au sein de l'opinion publique. Ce sont de vaillants adversaires avec lesquels il faut compter.» Et cela en dépit ou peut-être à cause d'un sondage Gallup publié en mars 1992 qui montre que 64 p. 100 des Canadiens estiment que le bilinguisme officiel est un échec.


1832

Combien coûte le bilinguisme? Je l'ignore. Il est à peu près impossible d'en connaître le coût véritable. Prenons toutefois un exemple. La Défense nationale reconnaît que les programmes de langues officielles ont coûté à peu près 48 millions de dollars au cours de l'exercice financier 1992-1993. Or, ce montant n'apparaît nulle part dans les comptes publics du ministère de 1992-1993. Ces chiffres demeurent cachés quelque part.

En fait, la personne qui a rédigé le rapport sur le coût du programme des langues officielles à la Défense nationale indiquait dans la lettre d'accompagnement envoyée avec le rapport à mon bureau: «Les coûts réels des activités de la Défense nationale en matière de langues officielles sont plus élevés que ceux indiqués dans le document ci-annexé envoyé par télécopieur. Malheureusement, les lignes directrices du Conseil du Trésor concernant les états comptables ne permettent pas de connaître, entre autres, les salaires du personnel militaire qui participe à des programmes de formation linguistique permanents, ou le coût de la prime au bilinguisme versée aux fonctionnaires.» La difficulté d'établir les coûts tient en partie à ce problème.

J'ajouterai pour terminer que le budget devrait s'attaquer au problème du déficit et qu'une façon de le faire est de réduire les dépenses, en particulier dans des domaines qui créent la division au pays. C'est notamment le cas de la Loi sur les langues officielles et c'est pourquoi je demande au gouvernement d'examiner la loi et de réduire les dépenses qu'elle entraîne.

(1815)

[Français]

M. Dan McTeague (Ontario): Monsieur le Président, je dois souligner, en ma capacité de Franco-Ontarien, que durant les années 1960 et 1970 j'ai eu la chance d'apprendre une deuxième langue. J'ai appris une autre langue, je dois le signaler au cher député de Nanaimo-Cowichan, à cause de l'institution du bilinguisme. Durant mes années scolaires et durant mes années en tant qu'employé du secteur privé. . .

[Traduction]

. . .j'ai eu la chance de travailler dans plusieurs grandes entreprises canadiennes qui reconnaissent d'emblée que le bilinguisme officiel est beaucoup plus facile si, par exemple, on peut lire de l'anglais sur un côté de la boîte de céréales, et du français du même côté. C'est beaucoup plus facile de communiquer ainsi avec les sept, huit ou neuf millions de francophones de notre pays, qui ne sont pas tous réunis dans une seule et même région.

[Français]

Je suis témoin d'un système qui bouge, d'un système qui m'a permis de parler une deuxième langue. Je souhaite que le député de Nanaimo-Cowichan reconnaisse avec moi que le système des deux langues a été un des plus grands événements au pays et nous a permis, comme Canadiens, d'être différents dans le monde en ce qui a trait à l'efficacité économique.

M. Ringma: Monsieur le Président, je suis bien content que l'honorable député ait appris l'anglais et le français. C'est une bonne chose pour notre pays et je suis d'accord avec lui. Tout de même, je maintiens ce que j'ai dit dans mon discours, qu'il y a un gaspillage énorme d'argent dans ce pays. Vous, vous êtes l'exemple de quelqu'un qui a appris les deux langues, tant mieux. Je peux vous assurer que, même s'ils sont d'accord avec l'idée d'apprendre les deux langues officielles, voire d'autres langues, la plupart des gens de l'Ouest trouvent qu'il y a du gaspillage, et je répète ce que j'ai dit dans mon discours sur ce point.

Le vice-président: Je demanderais aux députés, que ce soit en anglais ou en français, de faire leurs remarques à l'intention de la Présidence.

[Traduction]

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, le député aimerait savoir combien coûte la politique des langues officielles, mais je signale qu'il n'y a pas de politique du bilinguisme officiel. Je serais heureux de lui faire voir un article que j'ai publié justement sur cette question des coûts, que jamais personne n'a contestés.

Des commentaires comme ceux que le député vient de tenir sur le coût des langues officielles ne peuvent qu'exacerber les réticences manifestées par certains Canadiens, aux quatre coins du pays. Nous ne connaissons pas les coûts exacts engendrés par cette politique. Nous savons qu'ils sont élevés.

Que dire maintenant de son commentaire au sujet de l'élite d'Ottawa?

[Français]

Qu'en est-il des collectivités francophones telles que Saint-Boniface, St-Albert en Alberta, les autres communautés francophones à travers le Canada. Ce sont les élites, ce sont ces gens-là qui demandent des services en français.

A-t-il reconnu qu'il y a des sénateurs et des députés unilingues ici, des unilingues de langue française et unilingues de langue anglaise, des soldats canadiens unilingues de langue française et unilingues de langue anglaise? Est-ce que ces gens-là ne doivent pas se parler? Que propose-t-il vraiment? Faire peur aux Canadiens? S'il y a du gaspillage, qu'on l'identifie! Le gaspillage, on peut l'enlever, mais enlever cette politique qui permet aux Canadiens de se parler, c'est de la foutaise!

M. Ringma: Monsieur le Président, comme je l'ai dit, moi-même et le Parti réformiste n'avons rien contre le bilinguisme, et je ne considère pas que les gens de Gravelbourg, Saskatchewan, de Grande-Prairie ou de Saint-Boniface soient l'élite. L'élite est ici quelque part à Ottawa, où ils forcent le dénouement, en disant: nous allons avoir cette loi, forcée, avec des inspecteurs qui contrôleront, et on pourra dépenser n'importe quel montant d'argent à ce sujet. C'est contre ça que je m'élève.

(1820)

[Traduction]

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex): Monsieur le Président, je suis heureuse de prononcer aujourd'hui mon premier discours à la Chambre.

J'en profite pour vous féliciter pour votre nomination, monsieur le Président.


1833

En l'honneur de l'Année internationale de la famille, je commencerai par remercier ma propre famille pour le soutien et les encouragements qu'elle m'a toujours prodigués.

Je veux aussi remercier l'équipe de collaborateurs la plus dévouée que je pouvais souhaiter avoir durant ma campagne électorale, pour tout le bon travail qu'elle a accompli. Je remercie aussi les habitants de la circonscription de Lambton-Middlesex, pour la confiance qu'ils m'ont manifestée en me choisissant pour les représenter dans cette 35e législature et, je me permets de le préciser, pour avoir élu la première femme au poste de députée de cette circonscription depuis le début de la Confédération.

Avant d'être élue députée, j'ai eu le privilège de travailler avec l'ancien député de Lambton-Middlesex, M. Ralph Ferguson, qui était ministre de l'Agriculture dans le gouvernement Turner.

Les députés seront peut-être intéressés de savoir que cette circonscription a joué un rôle essentiel dans l'histoire du Canada. La bataille historique de Longwoods a eu lieu dans le comté de Middlesex, durant la guerre de 1812. En fait, le grand chef indien Tecumseh a été tué durant cette bataille. D'ailleurs, n'eut été du rôle que Tecumseh a joué en refoulant les Américains hors de nos frontières, il ne fait aucun doute que nous ferions maintenant partie des États-Unis.

Du côté de Lambton, on a découvert du pétrole dans le canton d'Enniskillen, vers le milieu du XIXe siècle. C'était la toute première découverte de pétrole en Amérique du Nord. Certains des puits forés à cette époque sont exploités depuis plus de 100 ans et sont encore productifs.

Lambton-Middlesex est l'une des plus grandes circonscriptions du sud-ouest de l'Ontario. C'est une circonscription principalement rurale, qui renferme 18 municipalités, plusieurs villes et villages, un centre urbain, Strathroy, et quatre réserves autochtones.

La plus grande industrie de Lambton-Middlesex est l'agriculture; on y produit notamment des fruits, des légumes, du maïs, du soja, de la volaille, des produits laitiers, du porc et du boeuf.

Je suis fière de dire que plusieurs chefs de file éminents dans le domaine de l'agriculture au Canada habitent ma circonscription.

Je manquerais à mon devoir si j'oubliais de mentionner que la ferme Cuddy's, la plus grande entreprise d'élevage de dindons en Amérique du Nord, se trouve aussi dans Lambton-Middlesex. Elle exporte des morceaux de dindons vers toutes les régions du globe.

En ma qualité de co-présidente du groupe de travail sur l'éthanol et du comité spécial qui étudiera la viabilité de l'industrie canadienne de l'éthanol, je suis heureuse de voir que le ministre des Finances est prêt à réexaminer la nécessité de mieux nous assurer que l'éthanol sera exempté de la taxe d'accise fédérale. Je demanderais au ministre d'inscrire cet élément au haut de sa liste de priorités.

Nous avons une occasion exceptionnelle que nous ne devons pas manquer. Nous devons favoriser une plus grande utilisation des mélanges carburants contenant de l'éthanol. Ils sont excellents pour l'environnement. Faits à partir d'une ressource renouvelable, ils créeront d'immenses nouveaux marchés pour le maïs et le grain.

Ce budget amorce l'une des réformes les plus exhaustives et les plus fondamentales de la politique gouvernementale depuis des décennies, dans des domaines de première importance comme la sécurité sociale et la défense.

Les Canadiens nous ont fait savoir qu'ils en avaient assez de l'inertie gouvernementale. Ils veulent que leur gouvernement se dote d'un plan d'action et qu'il le respecte. Nous avons un plan; il s'agit de notre plate-forme électorale, le livre rouge-Pour la création d'emplois, Pour la relance économique.

Par ce budget, nous finançons chaque mesure importante mentionnée dans le livre rouge; nous réalisons nos engagements.

Ce qui me plaît le plus est le fait que ce budget présente une approche équilibrée grâce à ses trois principaux objectifs: renouveau économique, réduction du déficit et réforme sociale. Ce sont les assises mêmes de nos priorités-la création d'emplois et la croissance.

En se concentrant sur ces trois objectifs, ce budget répond directement aux préoccupations et aux priorités formulées par les Canadiens durant la série de consultations sans précédent menée par le gouvernement. Le budget agit sur trois fronts: financement des programmes d'infrastructures, engagement à ramener les cotisations d'assurance-chômage au niveau de 1993 et nouvelles stratégies favorables aux petites entreprises, véritable moteur de notre nouvelle économie.

Dans ma circonscription, comme partout ailleurs au Canada, la récession a fait beaucoup de victimes parmi les petites entreprises. Cependant, un certain nombre d'usines entreprenantes-chaussures, pièces d'automobiles, aliments congelés, maisons mobiles et autres, ont réussi à traverser la tempête économique grâce à leur créativité et à leur travail acharné.

(1825)

Je suis particulièrement heureuse et soulagée de voir qu'on maintient l'exemption de 500 000 $ pour les petites entreprises et les exploitations agricoles.

Je suis également très contente de constater qu'on a décidé de faire du Régime d'accession à la propriété un programme permanent qui permettra aux acheteurs d'une première maison d'utiliser les fonds qu'ils ont dans un REER pour leur mise de fonds. La croissance des REER est phénoménale au Canada alors que de plus en plus de Canadiens s'en servent pour compléter leur pension de retraite.

Dans les régions agricoles comme ma circonscription de Lambton-Middlesex, c'est souvent le seul moyen de s'assurer une certaine sécurité au moment de la retraite. Les petites et moyennes entreprises ne veulent pas qu'on leur fasse la charité. Il faut plutôt qu'on leur permette d'avoir accès plus facilement à des capitaux, qu'on encourage l'innovation et la technologie de pointe, qu'on offre une meilleure formation en gestion, qu'on réduise la réglementation et la paperasserie inutile et qu'on essaie de façon beaucoup plus dynamique de profiter des nouveaux marchés d'exportation.

Je suis très heureuse de voir que ce budget porte sur toutes ces questions. En fait, il est favorable aux petites entreprises. On prend les mesures suivantes: on crée un fonds d'investissement canadien pour fournir du capital de risque aux entreprises; on améliore de l'accès aux capitaux pour les petites entreprises grâce à l'établissement d'un groupe de travail chargé d'élaborer, de concert avec les banques du pays, un code de conduite dans le


1834

domaine des prêts à la petite entreprise; on établit un centre unique de services aux entreprises dans chaque province afin de rassembler tous les services gouvernementaux dans un même lieu; on ramène le taux de cotisation à l'assurance-chômage au niveau de 1993 pour 1995 et 1996. On va permettre ainsi aux entreprises d'économiser 300 millions de dollars par année, et ce sera de l'argent qu'elles pourront réinvestir dans de nouveaux emplois. Nos petites entreprises ont besoin d'un répit, et c'est exactement ce que leur donne ce budget.

Si j'avais à utiliser un mot pour décrire le message que renferme le budget de 1994, ce serait «espoir».

Les Canadiens ont également déclaré qu'ils souhaitaient qu'on modifie notre régime de sécurité sociale pour s'assurer qu'il est équitable, sensible aux besoins des gens et abordable; ils veulent une réforme qui encourage les gens à travailler et crée des emplois et des débouchés.

Cette réforme a déjà été lancée par le ministre du Développement des ressources humaines. Le budget présente des mesures importantes pour faire face à ce défi. Le lien qui existe entre les antécédents de travail et l'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage est en train d'être réévalué.

Les individus ayant des personnes à charge verront leurs prestations passer à 60 p. 100 de leur salaire alors que les autres ne recevront que 55 p. 100 de leur salaire original.

Ce gouvernement tient à réduire le déficit. Notre plan de réduction des dépenses nettes, qui s'étalera sur trois ans, est le plus ambitieux de tous les budgets présentés au cours de la dernière décennie. L'un des principaux objectifs de ce budget est de prendre des mesures concertées pour assainir les finances publiques, mesures essentielles à la revitalisation économique du Canada.

Pour préparer son budget, le ministre des Finances s'est appuyé sur des prévisions de croissance économique très prudentes et très modérées, pour cette année et l'année prochaine. Ces prévisions, issues d'un consensus de prévisionnistes du secteur privé, diffèrent très nettement des projections beaucoup trop optimistes présentées dans les budgets précédents, ce qui a donné lieu à des prévisions de déficit en deça de la réalité par plusieurs millions de dollars.

Les Canadiens ne sont plus prêts à accepter ce genre de mauvaises surprises. Les mesures annoncées dans le budget de 1994 et la croissance modérée que nous prévoyons feront tomber le déficit de 45,7 milliards de dollars en 1993-1994 à 39,7 milliards pour l'exercice financier suivant. On s'attend à ce qu'il passe à 32,7 milliards en 1995-1996. Pour chaque dollar d'augmentation des recettes, il y aura 5 dollars de réduction des dépenses.

Enfin, je crois qu'il est juste de dire que le budget de 1994 est le fruit de consultations publiques d'une ampleur encore jamais vue, qui ont rassemblé des Canadiens de tous les horizons pour parler des défis économiques et financiers que notre pays doit relever. Je félicite le ministre des Finances d'avoir pris l'engagement de continuer à consulter les Canadiens ouvertement et largement.

Pour terminer, je dirai que je suis fière de faire partie de ce gouvernement, un gouvernement qui s'est engagé à restaurer l'honnêteté, l'intégrité et la responsabilité dans l'appareil gouvernemental.

(1830)

Si nous continuons à tenir cette promesse, alors nous regagnerons la confiance du public et nous serons en mesure de rebâtir le Canada et d'en faire un pays fort et souverain, un pays qui prend ses propres décisions, une nation humanitaire et compatissante, un pays uni de l'Atlantique au Pacifique.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, je félicite la députée pour son premier discours.

Je suppose qu'elle est aussi nouvelle à la Chambre que moi. Je sais fort bien comment on se sent après avoir prononcé son premier discours. C'est fantastique, mais on se dit:«Dieu merci, c'est fini!»

Même si la députée n'a pas précisé qu'il fallait mettre de l'ordre, je sais qu'elle y faisait allusion. Il est très important que les politiciens se montrent responsables au chapitre des dépenses, qu'ils soient tenus de rendre des comptes et qu'ils gèrent l'argent très soigneusement, sans se laisser emporter. Je voudrais savoir ce que pense la députée à l'égard de certaines questions et, comme la liste est longue, je vais en choisir trois.

Personnellement, il y a deux ou trois situations au Canada qui me préoccupent beaucoup. Le ministre du Développement des ressources humaines en a mentionné une en disant que plus de un million d'enfants vivaient dans la pauvreté au Canada, ce qui est totalement inadmissible.

Au haut de ma liste, il y a aussi le fait qu'il nous en coûte chaque année, pour les avions à réaction Challenger, plus de 3 millions de dollars, pour les petites voitures bleues des ministres, quelque 1,3 million de dollars et, pour les scandaleux régimes de retraite financés par l'impôt à l'intention des députés, plus de 2 millions de dollars. Cela représente quelque 10 millions de dollars.

La députée convient-elle qu'il serait plus logique de réduire ces dépenses et d'utiliser cet argent pour venir en aide aux enfants qui vivent dans la pauvreté au Canada?

Mme Ur: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses bonnes paroles et pour ses questions.

Je crois, moi aussi, que l'une des premières choses à faire-ma campagne électorale était d'ailleurs axée notamment là-dessus, l'automne dernier-est certes d'analyser les finances et la façon dont le gouvernement dépense son argent.

En ce qui concerne les exemples que me donne le député, dont celui des pensions, je dois dire que la question est souvent revenue sur le tapis aux assemblées électorales auxquelles j'ai participé. Je suis certes heureuse que le député soulève la question.


1835

Chaque fois qu'il était question du Régime de pensions du Canada, je faisais allusion aux pensions des députés. Peut-être pourrions-nous nous pencher là-dessus de cette manière. Je suis persuadée qu'on le fera dans un proche avenir et qu'on s'arrangera pour que le système fonctionne sur le même principe que le Régime de pensions du Canada.

Après ces assemblées, plusieurs personnes sont venues me dire que c'était une bonne façon de voir les choses que de rendre le système plus équitable en l'alignant sur le régime de pensions des Canadiens en général.

Je conviens certes que les gouvernements doivent réduire leurs dépenses, mais en ce qui concerne le Challenger, par exemple, il y a une question de sécurité qui entre en jeu. Le premier ministre a dit maintes fois qu'il préférerait voyager en classe économique comme toute le monde, mais ce n'est pas possible. Lorsqu'on est premier ministre, on doit respecter certaines normes. Il faut certes assurer la sécurité du premier ministre, de tout premier ministre, quel qu'il soit.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, je tiens, moi aussi, à féliciter la députée pour son premier discours à la Chambre.

J'hésite à la mettre dans l'embarras, mais je voudrais au moins donner avis de ma question. Il s'agit d'une question très sérieuse.

La députée a mentionné qu'il est dit dans le budget que toute augmentation de 1 $ des recettes fédérales se traduira par une réduction de 5 $ des dépenses. C'est un objectif louable. Je mets peut-être une nouvelle députée dans l'embarras, mais j'aimerais avoir une réponse à ma question. Quelles dépenses seront réduites? S'il est possible de réduire ainsi les dépenses, comment se fait-il qu'elles augmentent chaque année, que la dette continue d'augmenter et que le déficit soit toujours plus élevé? Comment pourrions-nous avoir un rapport de un à cinq entre l'augmentation des recettes et la réduction des dépenses?

(1835)

Mme Ur: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question. C'est incontestablement une bonne question, et je ne prétends pas être ministre des Finances. Cependant, je pense que le ministre a donné à maintes reprises de très bonnes réponses à cette question pendant la période des questions. Plusieurs compressions ont été faites, notamment en annulant le contrat d'acquisition d'hélicoptères et en réduisant le budget de la défense. Nous avons entendu toutes ces questions et toutes ces réponses pendant la période des questions. Tout a été très bien expliqué. Tout ce qu'on a à faire, c'est de lire les documents budgétaires pour y trouver les réponses.

Je remercie le député pour sa question.

[Français]

M. Robichaud: Monsieur le Président, le député qui va se lever à l'instant n'aura pas assez de temps pour terminer son discours. Je me demande s'il y aurait consentement unanime afin de lui permettre de finir son discours de 10 minutes avant que la question ne soit mise aux voix.

Le vice-président: Est-ce que la Chambre est d'accord pour qu'on accorde 10 minutes au député qui prendra la parole afin qu'il puisse terminer son discours?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

M. Alex Shepherd (Durham): Monsieur le Président, je veux parler en faveur du budget présenté par le ministre des Finances.

Mon collègue a parlé du plan cinq pour un. Ce soir, je vais parler du plan deux pour un, c'est-à-dire deux réductions de dépenses pour une augmentation de dépenses.

Tout d'abord, je voudrais parler des mesures que le ministre des Finances a prises en ce qui concerne la fonction publique. Je suis certain que nos fonctionnaires d'un bout à l'autre du pays travaillent fort et partagent l'engagement du gouvernement à l'égard d'un Canada prospère. Il y a des gens qui pensent que la prolongation du gel des salaires, qui permettra d'économiser 500 millions de dollars en 1994-1995 et 620 millions en 1995-1996, est une mesure sévère.

Je tiens à signaler que cela ne représente qu'une réduction de 2,2 p. 100 de la masse salariale de la fonction publique fédérale.

Je sais que beaucoup d'entre nous sont au courant de réductions beaucoup plus importantes que cela imposées aux employés des sociétés nationales et internationales dans nos circonscriptions. Je voudrais citer les résultats d'une étude de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui a analysé les données du recensement de 1991.

Cette étude révèle que, dans tous les secteurs d'emploi examinés, les fonctionnaires fédéraux sont les mieux payés dans toutes les classifications, et ce, dans toutes les régions urbaines du pays. Les fonctionnaires fédéraux sont payés en moyenne 13,9 p. 100 plus cher que les travailleurs du secteur privé qui occupent des postes équivalents.

Quel genre de message ces données envoient-elles à nos travailleurs et à nos contribuables?

J'ai été incapable de trouver des cas semblables dans d'autres pays du monde. Au moment où nous négocions des accords commerciaux internationaux comme l'ALENA et le GATT dans le but de rendre notre secteur privé plus compétitif, nous découvrons que les fonctionnaires fédéraux sont surpayés par rapport à leurs homologues du secteur privé.

Je remarque que le ministre des Finances a essayé de corriger ce grave problème en proposant un gel des salaires dans l'espoir d'éviter les mises à pied. Cela étant dit, je reconnais que le nombre de mises à pied prévues dans le secteur militaire dépasse de beaucoup les 17 000.

Non seulement la structure salariale à la fonction publique ne suit pas celle du secteur privé, mais beaucoup de mes électeurs me disent qu'ils ont de la difficulté dans leurs contacts avec les fonctionnaires. Il arrive souvent que ces derniers ne retournent pas les appels ou ont des horaires de travail qui vont à l'encontre du concept du service au public. Je sais qu'il y a de nombreux de fonctionnaires consciencieux, mais il semblerait qu'il y a beaucoup à faire pour améliorer le service à la fonction publique fédérale.


1836

(1840)

Je voudrais maintenant aborder mon deuxième point, qui porte sur les dépenses prévues dans le budget. Je veux parler ici des programmes sociaux.

Le ministre du Développement des ressources humaines a souvent dit que nos programmes sociaux avaient été conçus pour une autre époque. Notre pays subit des changements structurels importants. À cause de ces changements, les gens de ma génération, qui pensaient avoir une carrière pour la vie, se retrouvent maintenant sans emploi et incertains de leur avenir.

Nous devons tendre la main à ces gens et leur donner non seulement de l'espoir, mais aussi les outils nécessaires pour trouver d'autres emplois. Il ne suffit pas de parler de recyclage et de former les gens à des emplois qui n'existent pas maintenant et qui n'existeront pas dans un avenir rapproché.

Les gouvernements doivent faire montre de leadership en planifiant les besoins de formation de l'avenir. Voilà pourquoi le gouvernement fédéral doit conserver son pouvoir de dépenses discrétionnaires dans ce domaine, à l'échelle du pays, pour fixer des normes nationales en matière de formation.

Qu'en est-il de notre système actuel d'assistance sociale? Il ne peut plus être maintenu. Nous créons des ghettos sociaux où nous subventionnons les gens pour ne rien faire, ce qui entraîne une perte de dignité personnelle. Nous devons faire mieux.

Les prestations que nous versons au Canada en vertu de notre régime d'assurance-chômage sont supérieures de 20 p. 100 en moyenne à celles qu'on paie aux États-Unis et dans les autres pays du G-7. J'ai toujours cru que l'argent est de l'énergie restaurée. C'est la façon humaine de transformer le travail en liquidité.

Par exemple, si je paie quelqu'un 25 $ à la porte du parlement pour me conduire à la gare ferroviaire, il utilisera sa voiture et dépensera des ressources naturelles et du temps. Donner de l'argent aux gens simplement pour leur permettre de subsister est une insulte à l'intelligence humaine. Nous devons utiliser l'assurance-chômage et les autres formes de transfert aux particuliers pour les aider à se relever et à prendre leur vie en mains. Je parle d'utiliser ces fonds pour les envoyer acquérir de nouvelles compétences, de sorte que chacun puisse profiter des nouveaux défis d'une économie en pleine évolution.

Je vais maintenant passer à mon dernier argument en faveur du budget, c'est-à-dire le secteur de la petite et moyenne entreprise. On a déjà beaucoup parlé ici de cette question, et on a fait grand cas des relations entre ces entreprises et le monde bancaire.

Je tiens à signaler à la Chambre que ces institutions regroupent moins de 6 p. 100 de tous les dépôts au Canada. Critiquer ce secteur, c'est-à-dire les banques, c'est un peu comme essayer de réparer une embarcation qui fait eau pour traverser les Grands Lacs. Cela ne fera pas l'affaire, même si nous la réparons.

Je remarque que le ministre a choisi d'étudier les régimes de retraite et la manière de les utiliser pour financer plus efficacement les PME. C'est nettement une orientation souhaitable.

Le ministre a aussi attiré l'attention sur un certain nombre d'initiatives que le gouvernement a prises dans le budget. Il y a notamment le fonds canadien d'investissement, les stratégies de maillage des entreprises et l'établissement de centres de services aux entreprises afin que celles-ci puissent obtenir tous les services gouvernementaux au même guichet. L'autoroute électronique compte parmi ces initiatives.

Le chemin de fer a aidé à bâtir notre pays à une époque où les routes facilitaient les communications. Enfin, le téléphone a fait son apparition, permettant aux gens de communiquer encore plus efficacement. Notre diversité et le fait que nous sommes passablement éparpillés sur un grand territoire nous a amenés à devenir le grand expert mondial en matière de communications.

Pendant que nous débattons nos problèmes internes, comme les collègues qui sont à ma gauche continuent de le faire, le monde poursuit sa route. Nous devons passer à la quatrième étape dans la construction de notre pays. Notre défi, c'est maintenant de rejoindre tous les individus par l'autoroute électronique afin que tous puissent échanger, peu importe leur langue et leur culture.

(1845)

Je suis fier de constater que le gouvernement a fourni un financement pour ce projet très valable, conscient que cette initiative, avec d'autres dans le secteur de la PME, sera cruciale pour assurer un nouvel avenir à tous les Canadiens.

[Français]

Le vice-président: Je pense bien qu'on a compris qu'il n'y aura pas de période de questions et commentaires de cinq minutes, parce qu'il est déjà très tard. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Il est de mon devoir, conformément à l'article 84(4) du Règlement, d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire pour disposer du sous-amendement dont la Chambre est maintenant saisie.

Le vote porte sur le sous-amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter le sous-amendement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur du sous-amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

1837

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté le mardi 22 février 1994, le vote par appel nominal est différé au mardi 8 mars 1994 à 18 h 30.

_____________________________________________


1837

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité avec l'article 38 du Règlement.

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, mardi de cette semaine, j'ai pris la parole à la Chambre pour poser au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien une question d'une grande importance pour moi, pour mes collègues et, de façon particulière, pour les membres des bandes de Slave Lake.

Le ministre a manifestement préféré ne pas répondre à la question, ce qui était un marque d'irrespect envers moi-même, ainsi qu'envers les grands chefs et les chefs qui avaient signalé la chose à mon attention.

Il ne s'agissait pas d'une question que je posais de ma propre initiative. Nous avions communiqué avec des députés qui étaient présents à cette réunion entre le ministre et les bandes de Slave Lake. Ils m'ont dit qu'ils avaient jugé insultant et choquante la conduite du ministre à cette réunion. Selon eux, ses propos à l'égard des réformistes étaient véritablement de nature raciste.

Voyant que le ministre n'avait pas répondu à ma question, le député de Nanaïmo-Cowichan l'a reprise un peu plus tard pendant la période des questions.

Prié de fournir une réponse claire et directe, le ministre a de nouveau évité la question. Il a dit qu'il était sûr que les réformistes ne détestaient pas les Indiens, mais il a refusé de dire si, oui ou non, il avait affirmé devant un groupe d'autochtones que les réformistes détestaient les Indiens et se voulaient les défenseurs des Blancs. J'estime que le député, en tant que ministre, a le devoir et la responsabilité de répondre à cette question.

(1850)

Comme d'autres membres du Parti réformiste, j'ai établi, au cours des années, des liens étroits avec de nombreuses personnes et de nombreux leaders des premières nations. Ce genre de commentaire, dans la bouche d'un ministre, équivaut à une attaque raciste et diffamatoire contre les députés du Parti réformiste. Cela nous discrédite aux yeux des autochtones et de tous les Canadiens. Devant une question de cette importance, nous ne demandons pas moins qu'une réponse claire et honnête.

J'étais à la Chambre aujourd'hui lorsque cette question a été posée au ministre, pour la troisième fois, pratiquement dans les mêmes termes. J'ai également les «bleus» qui contiennent sa réponse et, une fois de plus, il ne dit pas clairement si, oui ou non, il a fait cette déclaration. Il ne parle que d'une partie de la déclaration qui traite de la haine du Parti réformiste pour les Indiens, mais il ne dit rien de l'autre partie de la question selon laquelle nous chercherions à nous faire les défenseurs des Blancs.

Bien qu'il me semble que le ministre ait fait quelques progrès dans le sens du règlement de cette question, je dirais que, pour mes collègues du Parti réformiste et moi, elle n'est pas encore résolue.

Nous avons reçu des personnes présentes, lorsque cette déclaration a été faite, un affidavit commun de huit leaders autochtones qui ont signé, sous serment devant un notaire, un document exposant ce qui s'est produit à cette réunion. Je suis prêt à déposer la copie de ce document immédiatement.

J'estime que le ministre devrait conclure cette affaire pour que nous puissions poursuivre nos travaux et qu'il puisse s'occuper des affaires de son ministère.

M. Jack Iyerak Anawak (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien):

[Le député parle en inuktitut]

[Traduction]

Monsieur le Président, comme vous le savez, mon intervention porte sur un commentaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien qui aurait affirmé que les membres du Parti réformiste haïssent les Indiens. Comme le député l'a signalé, la question a été soulevée à la Chambre plus tôt cette semaine. À cette occasion, le ministre a déclaré pour sa défense qu'il ne pensait pas avoir dit une telle chose.

Aujourd'hui, le ministre a de nouveau affirmé catégoriquement devant la Chambre qu'il ne croit pas que les députés réformistes, pas plus que les autres d'ailleurs, haïssent les Indiens. Il se conçoit facilement qu'il ne croie pas une chose pareille. Le ministre a profité de l'occasion pour inviter tous les députés à mettre de côté leurs intérêts sectaires pour que nous puissions tous, d'un commun effort, bâtir sur des bases nouvelles nos relations avec nous, les peuples autochtones du Canada.

Les peuples autochtones nous ont dit que la reconnaissance de leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale devrait être la pierre angulaire de ces nouvelles relations. Par conséquent, le ministre a rencontré de nombreux chefs de tous les coins du pays pour discuter de questions diverses, dont le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

Le député a demandé au ministre de répondre à un groupe en particulier, en se reportant à une réunion à laquelle il a assisté, ce à quoi le ministre a répondu clairement, et il l'a encore répété aujourd'hui, que ce n'est pas ce qu'il pense. Il dit s'être informé auprès d'autres députés qui ont assisté à la même réunion, et ceux-ci ne se rappellent pas qu'il ait dit une telle chose.

1838

(1855)

L'ÉDITION

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle): Monsieur le Président, le 22 février j'ai demandé au ministre du Patrimoine canadien pourquoi son gouvernement n'a pas respecté les exigences de la Loi sur Investissement Canada et a en fait autorisé Paramount à acquérir les sociétés d'édition Maxwell Macmillan et Ginn Publishing.

La loi interdit à une entité non canadienne d'acquérir une société d'édition sous contrôle canadien.

Or, le gouvernement lui-même détenait 51 p. 100 des intérêts de Ginn Publishing, par l'entremise de la CDIC. Dans le cas d'une entité non canadienne qui désire vendre une entreprise canadienne existante telle que Maxwell Macmillan, la loi exige que le vendeur prouve que les investisseurs canadiens ont pu participer pleinement et en toute équité au processus d'appel d'offres. Dans les deux cas, le gouvernement n'a tout simplement pas tenu compte de la loi.

Dans le cas de Ginn Publishing, le gouvernement prétend qu'il a dû vendre sa part de 51 p. 100 à Paramount en raison d'une obligation juridique.

Les Canadiens voudraient que ce contrat soit rendu public afin de déterminer en quoi consiste cette obligation, qui l'a contractée, quand et où. Même si cette obligation existe effectivement, le gouvernement a renégocié des engagements pris par l'ancien gouvernement conservateur, par exemple l'aéroport Pearson et le contrat des hélicoptères.

Le ministre de l'Industrie a également affirmé qu'on n'avait pas manifesté beaucoup d'intérêt.

Permettez-moi de citer le Toronto Star du 22 février:

Une des principales maisons d'édition du Canada, Canada Publishing Corporation, insiste sur le fait que ses manifestations d'intérêt répétées envers la société étaient constamment repoussées.
Le président de la société, M. Ron Besse, affirme que le gouvernement promettait toujours de publier un prospectus sur Ginn mais qu'il ne l'a jamais fait.
Après l'arrivée au pouvoir des libéraux, M. Besse a de nouveau envoyé ses avocats à Ottawa pour explorer encore une fois la possibilité d'acquérir Ginn. Le lendemain, il recevait un appel de Paramount lui demandant ce qu'il voulait.
Autrement dit, c'est Paramount qui parle au nom du ministre et du gouvernement et non le ministère même.

Dans le cas de Maxwell Macmillan, il s'agit d'une acquisition directe, et la loi stipule que les Canadiens doivent avoir une chance pleine et juste de soumissionner.

Quels efforts a-t-on faits pour trouver des acheteurs canadiens? Pourquoi l'acquisition de Maxwell Macmillan n'a-t-elle pas été examinée par Investissement Canada dans le cadre de l'examen élargi que la loi exige parce que Paramount a, à son tour, été acheté par Viacom?

Le gouvernement aurait pu tenir le haut du pavé dans ses négociations avec Paramount, mais, je le répète, il ne l'a pas fait.

Le gouvernement aurait pu agir pour empêcher que le secteur de la publication de matériel destiné notamment aux études secondaires et universitaires ne soit dominé par des entreprises américaines. Le fait qu'il ne l'ait pas fait a consterné toute la communauté culturelle.

Comme Keith Kelly, directeur national de la Conférence canadienne des arts, l'a dit: «Qu'est-ce qui va empêcher des intérêts étrangers de mettre la main sur d'autres entreprises culturelles canadiennes?»

On se demande si les ministres qui ont pris cette décision savaient vraiment ce qu'ils faisaient. Étaient-ils mal informés? Sinon, est-ce que le gouvernement libéral va avoir la même politique que son prédécesseur?

On lit dans le livre rouge:

À l'heure de la mondialisation des échanges et de l'explosion des technologies de l'information, les frontières entre les pays s'estompent. Le Canada doit plus que jamais favoriser son développement culturel. Or, le gouvernement conservateur a délibérément fragilisé nos institutions culturelles nationales.
L'acquisition de Maxwell Macmillan and Ginn par Paramount fragilise justement nos institutions culturelles nationales.

Je demande à ce gouvernement: Est-ce cela sa politique de développement culturel? Est-ce un présage de ce qui nous attend?

M. David Walker (secrétaire parlementaire du ministre des Finances): Monsieur le Président, c'est la première occasion que j'ai de vous féliciter de votre nomination. Je vous souhaite mes meilleurs voeux de succès. J'ai travaillé avec vous dans mon caucus et j'ai beaucoup apprécié la contribution que vous y avez faite, et je serai heureux de collaborer avec vous à la Chambre.

C'est avec plaisir que je vais répondre aux questions du député de Regina-Qu'Appelle. Je voudrais également donner plus de détails sur l'information déjà communiquée à tous les députés, de manière que l'honorable représentant puisse mieux comprendre les événements qui ont mené à cette transaction.

Donnant suite à une directive du gouvernement précédent, la CDIC a acheté à Paramount 51 p. 100 de Ginn en 1989. Compte tenu de la politique de l'édition de livres alors en vigueur et connue comme la «politique de Baie-Comeau», Paramount, qui s'appelait alors Gulf & Western Industries Inc., avait acheté Ginn dans le cadre d'une grande acquisition d'une filiale américaine. Elle a dû par la suite se départir d'un bloc de contrôle dans Ginn en faveur de Canadiens.

Puisque les efforts déployés par Paramount pour trouver un acheteur canadien n'ont pas abouti, le gouvernement, par l'intermédiaire de la CDIC, a acheté 51 p. 100 des actions de Ginn pour 10,3 millions de dollars. Au même moment, la CDIC recevait l'ordre de vendre ses actions à des Canadiens dès que l'occasion s'en présenterait.

En négociant la cession forcée des actions avec Paramount, le gouvernement conservateur a reconnu que sa politique sur les acquisitions indirectes dans le secteur de l'édition avait changé aussi, même si la CDIC conservait ses actions dans GINN, Paramount aurait eu le droit de les racheter au prix payé par la CDIC.

En outre, sur le plan technique, la CDIC avait bien acheté la société Ginn en 1989, mais il restait un certain nombre de questions juridiques et commerciales à régler avec Paramount avant

1839

que les actions puissent être offertes à des Canadiens. La CDIC avait réussi à régler certaines de ces questions, mais pas toutes.

Entre-temps, la CDIC a reçu des demandes de renseignements de Canadiens qui envisageaient d'acheter la société Ginn, et on a dressé une liste d'acheteurs éventuels. Cependant, contrairement à l'affirmation du député, on n'a refusé aucun acheteur éventuel. En réalité, la CDIC n'était pas en mesure de chercher activement un acheteur pour ses actions de Ginn, tant que certaines questions n'étaient pas réglées, notamment un accord de distribution complexe.

En janvier 1992, l'annonce par l'ancien gouvernement de sa nouvelle politique en matière d'édition a donné à Paramount le droit juridique de racheter les actions de Ginn que détenait la CDIC. Dès lors, la CDIC avait les mains liées puisqu'elle ne pouvait pas envisager la vente à une société canadienne à moins que Paramount refuse d'exercer son droit de rachat de 51 p. 100 du capital social de Ginn.

Agir autrement aurait exposé la CDIC et le gouvernement à des poursuites judiciaires. Paramount a décidé d'exercer son droit de rachat des actions de Ginn pour le prix que la CDIC avait payé au début, soit 10,3 millions de dollars. Le gouvernement devait mener à bien la transaction entamée par ses prédécesseurs.

[Français]

Le vice-président: Conformément à l'article 38(5) du Règlement, la motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 heures.)