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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 10 mars 1994

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE RAPPORT SUR LA RÉMUNÉRATION DES PARLEMENTAIRES

LE PROJET DE LOI C-16

    Projet de loi C-16. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 2083

PÉTITIONS

LES CARTES DE TUEURS EN SÉRIE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion sur le budget 2084
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 2089
    M. Bernier (Gaspé) 2095
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 2097
    M. Leblanc (Longueuil) 2106
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 2107
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 2110

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 2113

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion sur le Budget 2113
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 2113

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES FEMMES DANS LES ARTS ET LA CULTURE

LA CRÉATION D'EMPLOIS

LE PÈRE ALBERT LACOMBE

LE TIBET

LES PROSTITUÉES ANONYMES

LA SEMAINE QUÉBÉCOISE DE LA DÉFICIENCE INTELLECTUELLE

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 2119

LA PAUVRETÉ

    M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry) 2119

LA PEINE CAPITALE

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 2119

LES PROGRAMMES SOCIAUX

LES GARDERIES

    M. O'Brien (London-Middlesex) 2120

L'ARCHEVÊQUE DE SARAJEVO

LE PARTI LIBÉRAL

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 2120

LE BILINGUISME

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 2121

LES PÊCHEUSES DE TERRE-NEUVE ET DU LABRADOR

LA SEMAINE INTERNATIONALE DE LA FEMME

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

QUESTIONS ORALES

LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2122
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2122
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2122
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2122
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2123

LA DÉFENSE NATIONALE

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

L'EMPLOI

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2125

L'ÉDITION

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 2125
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 2125

L'AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE POUR LES AUTOCHTONES

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2126
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2126

LE MAINTIEN DE LA PAIX

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2126

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 2127
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 2127

LE COMMERCE INTERNATIONAL

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2128

LES DÉPUTÉS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2128
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 2128

LA FISCALITÉ

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2128

L'IMMIGRATION

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

AFFAIRES COURANTES

LA PRÉSENCE DES TROUPES CANADIENNES EN EX-YOUGOSLAVIE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    Reprise de l'étude de la motion sur le budget. 2134
    M. Tremblay (Rosemont) 2139
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 2139
    M. Chrétien (Frontenac) 2142
    M. Tremblay (Rosemont) 2144
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 2148
    M. Breitkreuz (Yellowhead) 2148
    Mme Ringuette-Maltais 2150
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 2154
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 2156
    Report du vote sur la motion 2159

2083


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 10 mars 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à quatre pétitions.

* * *

LE RAPPORT SUR LA RÉMUNÉRATION DES PARLEMENTAIRES

Mme Marlene Catterall (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor): Monsieur le Président, au nom du président du Conseil du Trésor, je dépose ce matin, dans les deux langues officielles, le rapport sur la rémunération des parlementaires rédigé par le cabinet Sobeco, Ernst and Young.

[Français]

Le rapport dont le titre est La rémunération des député(e)s et sénateurs canadien(ne)s examine les indemnités et les avantages des membres du Parlement.

[Traduction]

Le gouvernement renvoie ce rapport à la Commission Lapointe qui est chargée d'étudier les indemnités des parlementaires.

* * *

LE PROJET DE LOI C-16

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) demande à présenter le projet de loi C-16, Loi approuvant, mettant en vigueur et déclarant valide l'entente conclue entre Sa Majesté la Reine du chef du Canada et les Dénés de Colville Lake, Déline, Fort Good Hope et Fort Norman, ainsi que les Métis de Fort Good Hope, Fort Norman et Norman Wells, représentés par le conseil tribal du Sahtu, et modifiant une autre loi.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

LES CARTES DE TUEURS EN SÉRIE

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter une pétition au nom d'électeurs de la circonscription de Victoria-Haliburton qui s'opposent avec véhémence à l'importation de cartes de tueurs en série.

Cette pétition vient allonger la liste des Canadiens opposés aux cartes qui glorifient les tueurs en série et qui envoient un message négatif de violence aux jeunes de notre pays.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement du Canada à modifier la loi canadienne de manière à interdire légalement l'importation, la distribution, la vente et la fabrication de cartes de tueurs, et à informer les fabricants de ces cartes que leurs produits, s'ils sont destinés au Canada, seront saisis et détruits.

Je tiens à signaler que la première signature sur cette pétition est celle d'une jeune fille de 18 ans, ma fille.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

(Les questions auxquelles une réponse verbale est donnée sont marquées d'un astérisque.)

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, le gouvernement répond aujourd'hui à la question Q-1.

[Texte]

Question no 1-M. Taylor:

Quelles sont les intentions du gouvernement au sujet du système de sécurité automatisé envisagé pour le parc historique national du Fort Battleford, en Saskatchewan, pour quelles raisons procéderait-on à ce changement, et à quels essais a-t-on soumis le système envisagé afin de s'assurer de son bon fonctionnement?
L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): L'intention du gouvernement est d'installer un système de sécurité au lieu historique national du Fort Battleford. Le système sera mis en place dans cinq bâtiments historiques, ainsi que dans l'atelier d'entretien, le bureau de l'administration, le centre d'accueil des visiteurs et le garage-entrepôt d'ici le 31 mars 1994.

2084

Les raisons pour ces changements, qui économiseront approximativement 5l 000 $, sont les suivantes:

1. L'installation d'un système électronique de sécurité avait été approuvée dans le plan de gestion de 1989 du lieu historique national du Fort Battleford.

2. Après que la mise en place du système eut été approuvée, les deux agents de sécurité du lieu historique ont été mutés au service des visiteurs tout en conservant le même salaire.

3. Une offre permanente principale a été établie avec le Corps des Commissionnaires pour que cette société fournisse des services de sécurité de manière temporaire jusqu'à ce que l'installation du système électronique soit terminée.

4. Aux termes de l'offre permanente principale conclue avec le Corps canadien des Commissionnaires, pour la période du 1er avril 1990 au 31 mars 1994, les coûts annuels de fonctionnement et d'entretien s'élèveront en moyenne à 58 019 $.

5. On estime les coûts de l'installation du système automatique à 60 000 $. Les coûts de fonctionnement et d'entretien, évalués d'après les systèmes existants, devraient s'élever au maximum à 5 000 $ par an.

Le système automatique permettra donc d'économiser environ 51 000 $ par an, à compter du 1er avril 1994. En un an, les frais d'installation auront été amortis. Les sommes économisées pourront être utilisées selon les directives du plan de gestion approuvées.

Le choix du type de système a été fait en fonction des critères les plus sévères: tout le matériel devait être conforme aux normes de l'Association canadienne de normalisation ou à celles des Laboratoires des assureurs du Canada; le système devait recevoir l'agrément du Commissaire fédéral des incendies et de Travail Canada; le choix s'est fait uniquement parmi les systèmes actuellement installés dans les bureaux de diverses entreprises et dans ceux du gouvernement; d'autres lieux historiques nationaux ont utilisé un système de sécurité semblable avec succès.

[Traduction]

Le vice-président: Une réponse a été donnée à la question mentionnée par le secrétaire parlementaire.

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.


2084

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1010)

[Traduction]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 9 mars, de la motion: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement.

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine): Monsieur le Président, c'est la première fois qu'un membre du Parti libéral prend la parole au nom de la population de Beaches-Woodbine, et je suis fière d'être cette personne-là.

Pendant la campagne électorale, j'ai dit aux électeurs de Beaches-Woodbine que nous pouvions avoir à la fois la justice sociale et des emplois, que ces deux éléments ne s'excluaient pas l'un l'autre.

Le budget présenté par mon éminent collègue, le ministre des Finances, reflète en grande partie cet engagement que j'ai pris envers la population de ma circonscription. Le ministre des Finances a réussi à établir un judicieux équilibre entre la nécessité de mettre de l'ordre dans les finances publiques et la nécessité non moins importante de veiller à ce que le Canada reste une société vraiment juste.

Ce fragile équilibre revêt une très grande importance pour la population de Beaches-Woodbine et le reste des Canadiens.

Notre engagement de longue date en faveur de la justice sociale constitue la marque de notre société, la caractéristique qui nous distingue des autres pays. Si les députés pensent que j'exagère, ils n'ont qu'à demander aux millions de personnes qui ont quitté leur pays ces dernières décennies et ont choisi de leur plein gré de devenir des Canadiens. Leur présence ici a contribué à faire du Canada un modèle vivant et dynamique de vie en commun, un modèle pour le monde entier.

Notre société est réellement remarquable et nous devrons, dans le débat national qui est sur le point d'avoir lieu, tout faire pour que cette société reste vraiment juste et pour que nous puissions tous en être fiers.

Nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour arrêter la croissance du déficit, pour le ramener à un niveau facile à gérer et pour mettre en place une politique économique solide mettant l'accent sur la création d'emplois. Le budget présenté par le ministre des Finances est une première mesure importante dans cette voie.

Le budget n'est toutefois qu'une des initiatives prises par le gouvernement libéral. Il vise principalement à mettre de l'ordre


2085

dans les finances de notre pays ausi vite qu'il est humainement possible de le faire.

Ce qui m'inquiète davantage dans cette équation, c'est l'aspect de la justice sociale qui fait notre distinction en tant que grande nation humanitaire.

À la veille de nous engager dans le débat national sur le système de sécurité sociale, je me sens quelque peu incertaine de l'issue.

Les pressions exercées par la récession sur l'économie et le filet de protection sociale semblent avoir donné lieu à un sentiment de panique. Tout le monde semble être impatient de voir le gouvernement faire quelque chose.

J'ai promis aux habitants de Beaches-Woodbine de travailler pour la justice sociale et le redressement de la situation de l'emploi. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour m'assurer que l'on accorde à l'examen du filet de protection sociale le temps qu'il faudra pour que cela se passe d'une façon qui en vaille la peine.

On parle beaucoup des pressions exercées par les programmes sociaux sur l'économie. Cependant, nous devons aussi tenir compte des pressions exercées par l'économie sur les programmes sociaux. Bien qu'il y ait certains trous dans notre filet de protection, celui-ci a très bien résisté malgré tout ce qu'on a exigé de lui.

Selon moi, le système de sécurité sociale qu'il nous faut dans les années à venir devra être apte à répondre aux besoins des Canadiens, du berceau à la tombe. Nous aurons besoin d'un système qui soit à la fois complet, de type holistique, accessible à tous et flexible. Il arrive souvent que les gens ne soient pas visés par les programmes.

Il peut s'agir d'un supplément de revenu garanti. Nous avons une forme de supplément de revenu garanti depuis un bon bout de temps au Canada. Dans l'est du Canada, le régime de sécurité de la vieillesse et l'assurance-chômage constituent en effet une forme de supplément de revenu garanti.

Il nous faudra cependant consentir à des choix fondamentaux. Ainsi, le marché du travail s'oriente vers les emplois de valeur inférieure, de courte durée et à temps partiel qui sont à la hausse. Quels choix s'imposeront en ce qui concerne le perfectionnement professionnel, les garderies et la planification de la retraite?

Non seulement le programme national de garderies d'enfants est nécessaire si nous voulons des programmes de perfectionnement et de recyclage adaptés à nos besoins, mais il s'agit là, à mon avis, d'une responsabilité que nous devons assumer collectivement à l'égard de nos enfants. Le bien-être matériel et la santé mentale des enfants sont un gage pour l'avenir, car ces derniers deviendront des adultes sains de corps et d'esprit.

(1015)

Les jeunes d'aujourd'hui sont les dirigeants de demain. Mardi, j'ai assisté à une conférence sur la jeunesse à Toronto. Quelque 200 jeunes, de toutes classes sociales, y étaient présents. Il y avait des jeunes qui avaient touché des prestations d'aide sociale et participaient maintenant à un programme d'emploi des jeunes. Il y avait des diplômés d'université sans travail. Il y avait, enfin, des parents seuls vivant de l'aide sociale. Ces jeunes avaient une chose en commun: leur désir de travailler et leur crainte que la génération du baby-boom, la nôtre, ne se préoccupe pas de leur sort, ne les comprenne pas, ne soit pas au courant de leurs difficultés ni prête à tout faire pour résoudre les problèmes qui les accablent.

Ils ont formulé des observations très sensées sur les points forts et les points faibles des programmes actuels d'assistance sociale et j'ai jugé leurs recommandations extrêmement pratiques et réalistes. Voici quelques exemples de ce qu'ils ont dit.

L'un d'eux a précisé que, une fois en 10e année, la plupart des enfants savaient ce qu'ils allaient faire. Ils restaient à l'école ou ils décrochaient. Il s'est demandé pourquoi on ne pouvait donc pas offrir un programme d'apprentissage comme choix de carrière à ce moment-là. Un autre a signalé qu'on lui avait demandé de retourner vivre chez ses parents pour avoir droit à de l'aide à l'emploi et à la formation alors qu'il n'avait pas vécu chez lui depuis l'âge de 15 ans et il voulait qu'on lui dise pourquoi il devrait le faire maintenant.

Un autre encore a dit qu'il avait dû abandonner son cours collégial, car l'aide financière aux étudiants n'était pas suffisante et l'empêchait d'être admissible à des prestations d'assistance sociale. Il a ajouté qu'il devait 3 000 $ en prêts étudiants, mais qu'il n'avait toujours pas terminé ses études. Il voulait être décorateur d'intérieurs.

«Il faut rétablir les subventions aux étudiants.»

Ces jeunes se considèrent comme la génération perdue. Ils m'ont demandé si le gouvernement entendait vraiment répondre à leurs besoins. J'ai répondu que si nous ne faisions rien à ce stade-ci et ne prenions pas rapidement des mesures, nous serions tout à fait négligents et extrêmement stupides. Ils constituent notre avenir et nous devons répondre à leurs besoins.

Les programmes sociaux coûtent peut-être plus que nous ne le souhaiterions au départ, mais à long terme, ils nous permettent d'épargner. Les gens qui travaillent paient des impôts et ils seront en mesure de créer d'autres emplois en mettant sur pied leurs propres entreprises.

Un programme complet de services de garde d'enfants permet aux parents de travailler et donne des enfants plus sains de corps et d'esprit, ce qui entraînera à l'avenir une réduction de nos coûts sociaux.

Enfin, la prestation des programmes ne doit pas nécessairement être aussi coûteuse qu'à l'heure actuelle. Si nous avons recours à une approche intégrée plutôt que sélective et que nous utilisons toutes les infrastructures actuelles, comme les écoles, pour y installer des garderies, tout en faisant appel au secteur du bénévolat, et que nous instaurons en plus un guichet unique pour les trois ordres de gouvernement, nous pourrions peut-être épargner de l'argent. On ne doit pas inévitablement sacrifier la justice sociale à la relance économique. En fait, je crois qu'un excellent système de justice sociale favorisera le développement économique.

Je le répète, je suis la première, depuis la Confédération, à représenter les gens de Beaches-Woodbine dans cette enceinte au nom du Parti libéral et je considère cela comme un honneur. S'il est question de Beaches dans le nom de ma circonscription, c'est dû au fait qu'on y trouve les plus belles plages de la région du Grand Toronto. Tous les étés et même toute l'année, des milliers de gens de l'extérieur viennent dans la région et deviennent pour quelques heures des habitants honoraires de ce coin de pays.


2086

Notre festival de jazz international attire plus de 60 000 mordus de jazz de toute l'Amérique du Nord. Notre festival de la famille reflète notre attachement profond à la famille et à la collectivité qui fait de Beaches un endroit où il fait si bon vivre.

La partie Woodbine de ma circonscription comprend les rues bordées d'arbres qui vont jusqu'au quartier appelé Little India, à l'intersection de Gerrard et Coxwell, les magasins de l'avenue Danforth qui sont tenus par des familles, les bungalows de personnes âgées de East York, qui sont dignes de cartes postales, et les appartements en hauteur de Crescent Town qui sont en grande partie habités par des immigrants. Cela semble attrayant, n'est-ce pas?

La diversité caractérise Beaches-Woodbine et représenter cette circonscription constitue un défi exigeant, mais satisfaisant. On n'y trouve aucune usine ni aucun siège social de grande société, mais il y a un grand nombre de petites entreprises. Nous comptons beaucoup sur les emplois offerts à l'extérieur de la circonscription. C'est pourquoi nous devons absolument insister pour que Toronto ait sa juste part des avantages du programme des infrastructures et de tous les autres programmes devant stimuler l'économie.

Si Toronto connaît la prospérité, il en ira de même pour Beaches-Woodbine. J'entends bien exploiter toutes les occasions pour que Toronto ait sa juste part de la croissance et de la prospérité du Canada et qu'elle y contribue équitablement.

Tout le pays doit se faire entendre à la Chambre dans ce débat sur le budget, puisqu'il y est question du régime de sécurité sociale, de la défense, des soins de santé et d'autres questions nationales. Nous ne pouvons absolument pas nous arrêter à notre circonscription et à notre région. Il est plus important que jamais d'unir nos voix et de nous exprimer comme un seul pays, une seule nation et un seul peuple.

(1020)

Monsieur le Président, vous pouvez avoir l'assurance que la population de Beaches-Woodbine sera bien représentée dans ce débat national. Nous nous ferons entendre.

Le vice-président: Félicitations à la députée pour ce qui, je crois, est son premier discours.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord féliciter ma collègue d'en face des propos qu'elle vient de tenir. Depuis que j'entends les discours sur le Budget, je pense que c'est la première occasion qui nous est offerte par un député libéral, qui attache autant d'importance à la justice sociale, qui dit au gouvernement de prendre son temps dans la réforme qu'il veut envisager, qu'il veut faire, de prendre le temps d'examiner dans son entier toute la problématique pour créer justement une sorte de justice sociale qui permettra, et c'est surtout ce qui m'a frappé, d'assurer un avenir meilleur pour nos jeunes, et de cela je l'en félicite. Tout au long de son discours, elle est revenue continuellement sur l'avenir des jeunes qui doivent continuer à vivre dans ce pays. Et à ce moment-là, je pense qu'au sein de son caucus, de la façon dont elle a prononcé son discours, je suis certain que plusieurs oreilles seront attentives à ce qu'elle a avancé, et ce pour le bénéfice et l'avantage des jeunes, qu'ils soient Québécois ou Canadiens.

Je comprends ce que l'honorable députée vient de mentionner, parce que moi-même j'ai oeuvré pendant de nombreuses années avec des adolescents, des adolescentes. Et les problèmes que vous avez soulevés, que vous avez entendus lors de différents témoignages, je les ai entendus moi-même. Et laissez-moi vous dire, madame, que je vous félicite.

Avant de conclure, j'aimerais vous demander quels moyens vous entendez prendre pour permettre au caucus libéral de partager vos opinions?

[Traduction]

Mme Minna: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses aimables commentaires.

Mon caucus discute très franchement de ces questions. Comme vous le savez, nous avons amorcé un processus tout à fait hors de l'ordinaire. En général, un comité permanent de la Chambre ne tient pas d'audiences publiques avant le dépôt à la Chambre d'une mesure législative ou même d'une proposition. C'est pourtant ce que nous faisons à l'heure actuelle. Nous nous adressons aux Canadiens pour connaître leur avis.

Une fois que le ministre aura déposé à la Chambre ses propositions, sous la forme d'un document de travail et non encore d'une mesure législative, nous parcourrons de nouveau le pays pour dialoguer avec tous les Canadiens qui veulent nous faire part de leur opinion. Nous voulons atteindre le plus de gens possible afin de discuter des propositions, des idées que nous voulons partager et du genre d'avenir que nous voulons bâtir.

Je multiplierai les démarches et continuerai de me battre au sein de mon caucus. Bon nombre de mes collègues partagent d'ailleurs mon avis. Cela ne me demandera pas tellement d'efforts, puisque les membres de mon caucus accordent beaucoup d'importance à la justice sociale. Nous ne devrions pas nous en faire beaucoup à ce sujet.

Lorsque le projet de loi sera déposé à la fin de l'année, nous aurons alors l'occasion de tenir d'autres consultations sur la mesure législative elle-même.

Je tiens à préciser aux députés d'en face que nous aurons tout le temps voulu non seulement pour transmettre nos idées, mais également pour trouver des solutions, les mettre au point et en discuter avec les Canadiens. Personnellement, j'ai l'intention de tenir deux ou trois consultations publiques dans ma circonscription. Tous les députés pourront faire de même. En fait, je crois que le ministre nous invitera tous à tenir des consultations aussi vastes que possibles à ce sujet.

Je reste persuadée que ce processus, loin de miner l'engagement qui me lie à la cause de la justice sociale depuis 20 ans, ne fera que le renforcer.

(1025)

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants): Monsieur le Président, comme c'est la première fois que je prends officiellement la parole à la Chambre des communes, je veux tout d'abord m'adresser à mes électeurs d'Annapolis Valley-Hants. Je les remercie de m'avoir fait confiance pour représenter leur point de vue au Parlement et je tiens à ce qu'ils sachent que c'est pour moi


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un honneur et un privilège que d'avoir été élu ici. Julia, Patrick, Kelly et moi-même nous estimons extrêmement chanceux de vivre dans la vallée, dont la beauté naturelle est rehaussée par la chaleur et la générosité de ses habitants.

Si mes collègues libéraux et moi-même avons été appelés à former le gouvernement, en octobre dernier, c'est parce que nous nous sommes engagés à créer des emplois et à assurer une croissance économique soutenue. Le présent budget constitue un premier pas dans la réalisation de cette promesse que nous avons faite. En effet, il assure un équilibre entre le renouveau économique, la réforme de la politique sociale et la réduction du déficit, un équilibre sur lequel s'appuieront la création d'emplois et la croissance.

Ce budget témoigne d'une restructuration fondamentale des efforts que nous déployons pour atteindre à cet équilibre, de telle sorte que nous puissions passer d'un système passif à un système actif. Les modifications que nous proposons d'apporter vont faire mal, mais cette nouvelle démarche active va stimuler la créativité des électeurs d'Annapolis Valley-Hants et de tous les Canadiens.

Je sais qu'il y a beaucoup de chômeurs dans ma circonscription et cela me peine beaucoup. C'est facile à dire pour quelqu'un comme moi qui a la chance d'avoir un emploi. Toutefois, je vais employer toutes mes énergies à favoriser la démarche qui stimulera la création d'emplois dans ma circonscription.

Récemment, j'ai eu l'occasion de visiter la BFC Greenwood et de m'entretenir avec le commandant et le personnel de la base. J'ai pu aussi rencontrer les membres de la force régulière et de la force de réserve en poste à Camp Aldershot. J'ai été extrêmement impressionné par le dévouement, la détermination et le grand professionnalisme de ces militaires. Ces centres ne sont que peu touchés par le budget, mais je vais veiller à ce que les emplois, militaires et civils, y soient assurés à long terme.

Comme le budget en fait foi, l'un des meilleurs moyens de stimuler la croissance économique et la création d'emplois, c'est d'appuyer le secteur de la petite entreprise. Je me suis entretenu avec nombre de petits entrepreneurs de ma circonscription qui croient que le gouvernement fédéral peut jouer un rôle très actif pour aider la petite entreprise non seulement à survivre, mais encore à prendre de l'expansion et à créer des emplois. En outre, je collabore très étroitement avec le secteur agricole de ma région, qui constitue le pilier de la petite entreprise dans la collectivité d'Annapolis Valley-Hants. En travaillant en collaboration avec le groupe consultatif local, nous pouvons mieux déterminer quelles mesures le gouvernement et le secteur agricole peuvent prendre conjointement pour créer des emplois.

J'ai également travaillé avec plaisir en étroite collaboration avec des institutions de premier ordre comme le Centre de la petite entreprise de l'Université Acadia. De tels centres ne se contentent pas de faire la promotion des réseaux communautaires locaux, ils fournissent aussi de très utiles services d'information pour aider les gens à mettre leur entreprise sur pied.

Selon un récent sondage effectué par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, l'imposition, par le gouvernement, d'un gel ou d'une réduction des charges sociales représentait l'une des premières conditions pour que les propriétaires de petites entreprises embauchent davantage d'employés.

Le gouvernement a écouté. En réduisant les cotisations d'assurance-chômage des petites entreprises, nous leur avons donné le stimulant nécessaire pour les amener à investir et à embaucher. Je me réjouis que le ministre des Finances ait annoncé la création d'un fonds d'investissement et d'un réseau technologique canadiens. Il s'est également engagé à travailler de concert avec les banques pour donner aux petites entreprises un meilleur accès aux capitaux.

Outre qu'elles favorisent les petites entreprises, un certain nombre de mesures importantes prévues dans le budget jettent les bases d'une reprise économique. Tout d'abord, le programme national d'infrastructure progresse rapidement. En Nouvelle-Écosse, la contribution du gouvernement fédéral à ce programme sera de 69 millions de dollars en deux ans. Annapolis Valley-Hants est une circonscription surtout rurale, aussi la qualité des infrastructures y est-elle impérieuse pour la prospérité des entreprises et des habitants.

Des organismes de ma région ont présenté plusieurs propositions originales et j'espère qu'elles seront retenues.

(1030)

La prolongation du programme d'accession à la propriété qui permet d'utiliser les fonds d'un REER constitue un autre élément important du budget. Avant l'exposé budgétaire, j'avais reçu de nombreuses lettres d'agences immobilières et d'associations de constructeurs de maisons d'Annapolis Valley-Hants qui appuyaient ce programme. Tous affirmaient que l'industrie de la construction domiciliaire jouerait un rôle central dans la reprise économique canadienne et que, en prolongeant ce programme, le gouvernement favoriserait cette reprise.

Le budget prévoit également 50 millions de dollars par année pour le Programme d'aide à la remise en état des logements. Cela aussi stimulera le secteur de la construction domiciliaire et la création d'emplois.

Cependant, notre engagement à aider les travailleurs à acquérir les compétences nécessaires pour trouver des emplois valorisants représente l'aspect le plus marquant de notre initiative de rationalisation de l'économie. Je promets aux habitants d'Annapolis Valley-Hants que je travaillerai d'arrache-pied à l'atteinte de cet objectif.

En investissant dans des programmes comme le Service jeunesse et le programme d'apprentissage, nous aiderons les jeunes Canadiens à acquérir les compétences nécessaires pour trouver des emplois à long terme.

J'ai reçu, la semaine dernière, plus d'une douzaine d'appels téléphoniques de groupes et de personnes désireuses de soumettre des propositions pour le Service jeunesse. Je travaillerai en étroite collaboration avec les jeunes et les groupes d'intérêts


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dans ma circonscription pour les aider à tirer parti de ces importants programmes.

En ce qui concerne l'éducation et la formation, je voudrais profiter de cette occasion pour vous parler d'un programme qui est actuellement en cours dans ma circonscription. Il s'agit d'un programme de recyclage technologique parrainé par un organisme sans but lucratif, Nova Knowledge, avec la collaboration du gouvernement fédéral et d'un certain nombre d'organismes du secteur privé.

Le but de ce programme consiste à recueillir des ordinateurs usagés auprès des organismes qui projettent d'en acheter de nouveaux. Ces ordinateurs usagés sont ensuite distribués dans les collèges communautaires de la province, où ils sont réparés et remis à neuf par les étudiants avant d'être envoyés dans de nombreuses écoles de la Nouvelle-Écosse.

Je suis fier de dire que des étudiants d'Annapolis Valley-Hants ont été les premiers à participer à ce programme dans la province. En effet, les étudiants du campus Kingstec du Nova Scotia Community College, à Kentville, ont déjà remis à neuf plus de 20 ordinateurs, qui ont été distribués dans les écoles publiques. C'est à ce genre de programmes novateurs que le gouvernement s'intéresse.

Nous travaillons avec tous les intervenants afin d'offrir des programmes de formation valables qui seront utiles tant à l'économie locale qu'à l'économie nationale, maintenant et au cours des années à venir. Un aspect important de notre engagement à l'égard de l'éducation et de la formation est notre détermination à voir à ce que les assistés sociaux aient accès à des programmes de perfectionnement professionnel.

Il est clair que l'ancien système ne fonctionne pas. Nous devons accroître le nombre d'emplois disponibles. Nous devons adopter une approche plus active. Lorsque nous offrons de l'aide aux Canadiens, nous devons également leur donner la possibilité d'acquérir les compétences nécessaires pour trouver un emploi acceptable. Parallèlement à cela, nous devons aider les petites et moyennes entreprises et créer un climat économique fertile.

Comme l'ont dit le ministre des Finances et le ministre du Développement des ressources humaines, la réforme de notre régime d'aide sociale nous permettra de réinvestir nos ressources dans des initiatives visant à trouver des façons novatrices de redonner des emplois aux gens. À cet égard, j'étais très heureux d'entendre que le gouvernement versera 800 millions de dollars au cours des deux prochaines années pour des projets pilotes afin que nous puissions aider à la formation des chômeurs.

Je suis convaincu que ce budget mettra le Canada sur la voie de la croissance économique et de la création d'emplois. Je crois que ces initiatives auront un effet positif dans ma circonscription, Annapolis Valley-Hants. Je suis fier de voir que, en tant que gouvernement, nous respectons nos engagements.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, je désire poser une question très brève au député. Dans son discours, il mentionne que le déficit est assez raisonnable, mais c'est le plus gros déficit qui n'a jamais été annoncé par un gouvernement, un déficit de 39 milliards. Est-ce qu'il croit que ce déficit est acceptable? Est-ce qu'il n'aurait pas plutôt la volonté d'essayer d'influencer son gouvernement afin qu'il y ait un réexamen des dépenses, de telle façon qu'on fasse vraiment les coupures nécessaires et qu'on se dégage d'une marge de manoeuvre pour réellement créer de l'emploi non seulement dans le domaine des infrastructures où ce sont des emplois moins spécialisés, mais aussi pour tout autre type d'emploi?

(1035)

[Traduction]

M. Murphy: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Il faut dire que nous nous préoccupons effectivement du déficit. Nous avons passé beaucoup de temps à tâcher d'expliquer le problème aux députés d'en face.

Je n'en mets pas moins l'accent sur le déficit, car il faut le réduire et nous y travaillons, mais il faut également nous rappeler que nous devons créer des emplois dans un climat favorable à la croissance économique, laquelle contribuera en retour à réduire le déficit. Il s'agit d'une action parallèle, à double objectif, que nous devons mener à cet égard.

J'ai voulu insister seulement sur la création d'emplois, sur la formation et sur le développement d'un bon climat économique parce que, dans ma circonscription, je peux changer quelque chose en travaillant avec les gens. J'ai certainement eu l'occasion au fil des jours de discuter avec notre ministre des Finances et avec les députés de notre parti. Oui, nous nous efforçons effectivement de réduire le déficit. Je ne peux qu'encourager les députés d'en face à se joindre à nous dans cet effort.

Je me suis fait élire au Parlement pour contribuer à redonner du travail aux gens et à relancer l'économie du pays. J'ai oeuvré trente ans dans le domaine de la psychiatrie, et je sais ce que c'est que la dépendance. Je veux voir les gens devenir plus indépendants. Voilà un objectif pour le Canada, pour les députés d'en face et pour notre parti. J'espère bien améliorer la situation à cet égard par mon travail ici au Parlement.

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, je félicite le député de son exposé. J'ai été vivement impressionné par les points qu'il a fait ressortir. Il a indiscutablement décrit le problème de déficit que nous avons, mais l'équation est très simple. Il a insisté sur le renouveau économique. Si, par le truchement des programmes dont il a parlé, nous mettons davantage l'accent sur ce renouveau, nous viendrons certainement à bout du problème.

Son raisonnement concernant notre passage du mode passif au mode actif m'a beaucoup impressionné. C'est un premier pas dans la lutte au déficit. J'ai aussi trouvé très intéressant le programme qui consiste à remettre à neuf des ordinateurs usagés et à les envoyer ensuite à des écoles.

Grâce à ce programme-que je souhaiterais mettre en oeuvre dans ma circonscription-on fait d'une pierre deux coups: on permet d'abord à des gens d'apprendre à réparer des ordinateurs et de se perfectionner, puis, en envoyant ces appareils remis à neuf à d'autres établissements, on permet à d'autres personnes d'apprendre à les utiliser et, partant, d'améliorer leurs compétences.


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Il ne fait aucun doute que l'informatique fait partie de notre vie actuelle et de notre avenir. Le passage du mode passif au mode actif m'a donc vivement impressionné. J'en remercie le député.

M. Murphy: Monsieur le Président, je crois depuis longtemps que c'est là la voie à suivre. Cette solution n'est pas facile, mais je crois que le passage du mode passif au mode actif nous permet de mettre à profit notre créativité. On permet ainsi aux gens-et c'est ce que fait le parti ministériel-de créer de nouvelles perspectives et des possibilités d'emploi; le gouvernement seconde en quelque sorte les efforts déployés. Il n'en est pas l'instigateur, mais il les seconde pour faciliter la mise sur pied de petites et moyennes entreprises et la relance économique.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, le gouvernement dans son dernier budget s'en est pris aux plus démunis. Entre les personnes âgées, les chômeurs et les bailleurs de fonds du Parti libéral, les personnes âgées et les chômeurs n'ont malheureusement pas fait le poids, c'est inacceptable. Et aussi, les Québécois et les Québécoises, les Canadiens et les Canadiennes sauront, dorénavant, s'en rappeler en temps et lieu.

Nous ne dénoncerons jamais assez les coupures de 7,5 milliards de dollars effectuées dans les programmes sociaux et particulièrement dans l'assurance-chômage. Nous affrontons actuellement des difficultés économiques énormes, qu'une reprise lente et peu créatrice d'emploi ne soulagera que superficiellement.

Le filet de sécurité que les citoyens canadiens se sont donné n'a jamais été jusqu'à ce jour aussi essentiel au support des individus, des familles et des communautés dans le besoin. Et c'est précisément à ce moment-ci que le ministre a choisi de trouer le filet de sécurité.

(1040)

Dans les domaines de l'assurance-chômage, le budget s'attaque à tous les aspects du programme: durée et pourcentage de prestations réduits; seuil établi à 40 semaines pour se qualifier à l'assurance-chômage, et ce, pour toute personne qui est à son premier emploi; hausse de 10 à 12 semaines avant d'être admissible aux prestations, décision qui va toucher très fortement, entre autres, les travailleurs saisonniers.

À ce propos, MM. Serge Côté et Normand Anctil du Groupe de recherche interdisciplinaire sur le développement régional de l'est du Québec de l'UQAR viennent de publier une étude réalisée en collaboration avec le minsitre du Développement des ressources humaines. On y apprend entre autres que dans la ville de Rimouski 25 p. 100 des chômeurs sont des travailleurs saisonniers, alors que le taux grimpe à 50 p. 100 dans le reste du territoire, ce qui représente pour l'ensemble 37 p. 100 des prestataires. De plus, cette étude nous apprend que 83 p. 100 de ces travailleurs saisonniers souhaitent ardemment trouver un emploi régulier et de longue durée, ce qui remet en cause le préjugé ancré que ces travailleurs sont des paresseux heureux de leur sort.

Le ministre camoufle sournoisement les coupures de prestations sous le couvert de l'aide aux femmes démunies, tout en instaurant un contrôle inacceptable de la vie privée de ces femmes qui auront droit à des prestations majorées uniquement après avoir prouvé à des fonctionnaires-pas toujours très compréhensifs ni sympathiques-qu'elles ont des personnes à charge et sont le seul soutien de famille. De plus, les femmes dont le seul tort est celui d'apporter un deuxième revenu à la famille subiront de façon discriminatoire une baisse de prestations.

Le ministre inaugure ainsi une politique d'intrusion dans la vie privée des femmes, niant ainsi leur droit de vivre ou de cohabiter avec les personnes de leur choix, bien souvent en vue d'économiser pour en arriver tout juste à joindre les deux bouts.

Qu'en est-il du logement social dans ce budget? Le ministre avait pris un engagement personnel pendant la campagne électorale qu'un gouvernement libéral assurerait comme il se doit à plus de un million de foyers canadiens un logement convenable et à prix modique. Au lendemain de son budget, on constate que le ministre a oublié sa promesse. En effet, en 1989, les sommes allouées étaient de 133 millions, elles sont passées à 41 millions en 1993, pour être réduites à néant en 1994, aucune somme n'étant allouée à la construction de nouveaux logements sociaux dans ce budget.

Encore pire, le gouvernement refuse aux municipalités d'utiliser le programme d'infrastructure pour la création de logements coopératifs et sociaux. Pourtant, la construction de ces logements est rentable: par l'économie sur le prix du loyer, elle stimule la consommation des locataires; elle diminue les dépenses sociales de refuge, de soupe populaire et de maisons d'hébergement; et elle offre une plus grande sécurité aux personnes âgées à faible revenu qui ne peuvent accéder aux centres d'accueil privés, trop chers pour leurs moyens.

Le ministre devrait ouvrir les yeux car la réalité est catastrophique. Dans ma circonscription, l'appauvrissement s'observe par le fait que 40 p. 100 des ménages doivent consacrer plus de 30 p. 100 de leur revenu aux frais de logement, et les personnes âgées qui seront touchées soit par l'élimination du crédit d'impôt, soit par la modification de leur régime de pension, comme nous le savons maintenant, verront leur situation se détériorer.

Pendant que le gouvernement coupe et oublie de créer des jobs, il laisse ses amis tranquilles. En effet, la contribution des entreprises aux recettes de l'État a diminué au cours des dix dernières années. Si le ministre avait le courage d'instaurer un impôt minimum sur les entreprises, comme il en existe un aux États-Unis, les contribuables seraient épargnés et pourraient peut-être même bénéficier d'une baisse d'impôt sans qu'on ait à toucher aux programmes sociaux.

Au moment où tous les Canadiens sont pris à la gorge par la TPS, le ministre a encore une fois épargné les porteurs de quelque 25 milliards d'actions inscrites en bourse, alors qu'il aurait tiré des revenus substantiels en les soumettant à cette taxe.

Je poursuivrai maintenant ce discours en regardant de plus près certains aspects du plan des dépenses du ministère du Patrimoine canadien. Le Budget annonce la mise en oeuvre du livre rouge qui prévoit un investissement de 60 millions de dollars sur trois ans dans le domaine de la culture. Voilà une excellente


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nouvelle quand vous pensez qu'il s'agit d'argent neuf, mais tel n'est pas le cas. Il s'agit en fait, comme le spécifie le plan budgétaire, «d'initiatives financées par des réaffectations ministérielles internes».

(1045)

D'une main, le gouvernement coupe; de l'autre, il réinvestit. La main gauche ne sait pas où elle va couper, la main droite ne sait pas où elle va réinvestir, j'espère que l'Esprit saint éclairera le premier ministre et le ministre des Finances et que la nouvelle trinité renseignera cette Chambre le plus rapidement possible.

Toutes les prévisions budgétaires concernant le ministère du Patrimoine canadien sont dans la même veine: elles sont de peu d'utilité pour savoir en effet où se dirige le gouvernement. Il serait bon, à ce chapitre, que le ministre du Patrimoine canadien fasse comprendre au Cabinet l'importance de la culture, non seulement au plan de l'identité nationale, mais en tant que moteur économique important, et je dirais même de plus en plus important.

Il est encore désolant que l'incohérence gouvernementale rejaillisse sur des organismes aussi importants que Radio-Canada et Téléfilm Canada au moment où les grandes industries de demain sont celles des télécommunications et du divertissement. Pour Radio-Canada, on maintient les coupures de 100 millions en 1995 et en 1996. De plus, la Société devra, au cours des années qui viennent, s'arranger avec son déficit structurel qui représentera un total de 169 millions d'ici 1996.

En somme, le ministre des Finances dit à Radio-Canada: Coupez vous-même, assumez-en l'odieux. Nouveau Ponce Pilate, il s'en lave les mains, propres ou sales.

Qui plus est, le gouvernement répète à qui veut l'entendre qu'il garantit un budget quinquennal à Radio-Canada, mais on se rappellera que c'est ce même gouvernement qui, lors de la dernière campagne électorale, garantissait à la population le maintien des programmes sociaux. À peine quatre mois après la prise du pouvoir, ces garanties, juré, craché, se sont évanouies. Vous comprendrez alors pourquoi nous travaillerons ardemment à la souveraineté du Québec afin de ne plus être ici dans trois ans, alors que ce gouvernement se sera dit, redit et dédit de toutes ses promesses.

Pour ce qui est de Téléfilm Canada, ce budget maintient la coupure de 10 p. 100 annoncée par le précédent gouvernement sur les budgets d'opération. Ainsi, Téléfilm se voit dans l'obligation de remettre dix millions au Conseil du Trésor pour l'année 1994-1995. La coupure totale de plus de 116 millions sur cinq ans est maintenue au moment même où l'implantation de nouvelles technologies et l'arrivée des canaux spécialisés représentent une demande presque illimitée pour du matériel culturel canadien et québécois.

Le gouvernement libéral n'a pas de meilleure idée que de couper les ailes d'un organisme culturel essentiel. Toutefois, pour nous faire croire que la culture le préoccupe, le gouvernement a exempté Téléfilm Canada de la coupure additionnelle de 5 p. 100.

Pour les communautés francophones et acadiennes, il faut se réjouir de la réinstallation du Fonds pour les contestations judiciaires dont elles avaient décrié l'abolition. Ce fonds a permis de faire connaître le droit à l'éducation en français au Canada. Toutefois, j'aimerais souligner ici que malgré cette reconnaissance juridique, la mise en application de ce droit laisse amplement à désirer au Canada.

Dans un autre ordre d'idées, je souligne que récemment le ministre du Patrimoine canadien a injecté des sommes fabuleuses dans la promotion de ce qui est un échec, le fédéralisme canadien. Voici quelques exemples.

Pour des stratégies de communication, 16 millions; pour négocier les changements constitutionnels pour les autochtones, 27 millions; pour le programme Mieux connaître le Canada, 6 millions; pour une meilleure compréhension entre Canadiens, 15 millions; pour la Fête du Canada, 3,6 millions, soit 48 p. 100 de plus que ce qui était prévu; pour souligner le 125e anniversaire de la Confédération, 22 millions; pour 42 médailles du 125e, 1,3 million.

Le temps presse et je m'en voudrais de terminer ce discours sans aborder brièvement la question du sport amateur, principalement le Programme d'aide aux athlètes. Le ministre du Patrimoine s'est rendu à Lillehammer, il a rencontré les athlètes et a accordé une entrevue à la télévision. En réponse aux questions de nos deux médaillés d'or québécois, Gaétan Boucher et Sylvie Bernier, il a admis qu'il fallait revoir la politique d'aide aux athlètes.

À ce chapitre, le budget a joui de sa dernière hausse en 1985. Pour compenser la perte de pouvoir d'achat due à l'inflation, il aurait fallu hausser les indemnités du Programme d'aide aux athlètes d'au moins 43 p. 100. Qu'a fait le ministre du Patrimoine? Il a accepté une diminution du budget de 7 p. 100 qui fera baisser l'aide moyenne par athlète de 5 500 à 5 100 par année.

Le gouvernement fédéral qui s'est précipité pour récupérer les médaillés d'or des derniers Jeux au nom de la fierté nationale leur offre comme récompense la plus haute décoration qui soit, mais comme encouragement quotidien, une vie sous le seuil de la pauvreté.

(1050)

[Traduction]

M. Julian Reed (Halton-Peel): Monsieur le Président, je voudrais évoquer quelques souvenirs, après avoir entendu les propos de la députée de Rimouski-Témiscouata. En 1967, j'ai eu le grand honneur de visiter la circonscription de la députée avec 200 scouts de l'ouest de l'Ontario. C'était l'année du centenaire, et nous avons parcouru 3 600 milles, puisqu'on parlait


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encore de milles à l'époque. Nous avons visité notamment la rive sud du Saint-Laurent et les Maritimes.

Le soir, nous avons campé à Rimouski, dans un champ à côté de l'école secondaire. C'est peut-être toujours un terrain vacant, je l'ignore. Nous avons été accueillis magnifiquement par les citoyens de la ville et un club philanthropique dont le nom m'échappe. Nous avons eu droit à un dîner typique de la région, avec de la dinde et du lièvre. Ce fut une soirée mémorable.

Notre français n'était pas fameux et les gens de l'endroit ne connaissaient pas très bien l'anglais non plus. Toutefois, lorsque nous sommes rentrés au camp, après le dîner, nous avons trouvé tous les jeunes de Rimouski rassemblés au camp pour un grand feu de joie. Nous avons constaté que nous pouvions chanter ensemble, et nous avons chanté dans les deux langues jusque vers les 3 heures du matin. Nous avons enfin pu nous reposer et reprendre le trajet en autocar, et nous nous sommes tous rappelés cette soirée comme l'une de nos expériences les plus merveilleuses.

J'ai trouvé très intéressant que la députée parle de la nécessité de protéger l'identité nationale. Je suis d'accord avec elle. Il semble bien que, par les temps qui courent, aucun appui pour notre dualité et notre identité nationales ne soit de trop. Je suis d'accord avec elle, mais j'ai du mal à la suivre lorsqu'elle dit que c'est une cause perdue. Je tiens à dire que, pour ma part, je ne crois pas que ce soit une cause perdue, loin de là. C'est ce qui fait notre différence, en Amérique du Nord, c'est ce qui fait notre grandeur.

Voici ma question. Au début de son intervention, la députée a dit que le gouvernement s'en prenait aux plus défavorisées de nos personnes âgées. Pense-t-elle vraiment que les 25 p. 100 de personnes âgées qui sont dans les tranches supérieures de revenu, c'est-à-dire en haut de 25 000 $, sont les plus défavorisées des personnes âgées? C'est une affirmation que je contesterais.

Je conçois que les personnes âgées méritent notre soutien et notre protection, mais je crois que beaucoup de celles qui sont dans les tranches de revenu supérieures sont d'accord pour aider le Canada à résoudre ses problèmes financiers.

Le vice-président: À l'ordre, je vous prie. La question a été posée. C'est au tour de la députée de répondre.

[Français]

Mme Tremblay: Monsieur le Président j'ai mentionné deux choses. Et là, je tiens à rassurer mon honorable collègue que même lorsque nous serons souverains, il pourra revenir à Rimouski, on fera encore des parties sur le bord de la plage, on y fera un feu, et on sera encore capables de chanter.

Je pense que les personnes âgées, les personnes retraitées, n'ont pas eu la chance de vivre dans le même contexte que, nous, nous vivons. Ils n'ont pas eu la chance d'accumuler autant de choses que nous. Il y en a quelques-uns, je ne sais pas combien, peut-être qu'on pourrait demander au ministre des Finances combien ils sont dans son club de millionnaires, mais je ne pense pas que ce soit le cas de la majorité des citoyens âgés de notre pays. Je pense qu'ils ont besoin d'être aidés.

(1055)

Je reviens avec le fait qu'il y avait des idées, il y en a plein. J'en ai mentionné deux: l'impôt minimum sur toutes les entreprises; la perception de la TPS sur les transferts d'actions cotées à la bourse. On n'aurait pas eu besoin de toucher à personne, ni aux programmes sociaux. Tant que l'on n'aura pas fait la réforme des partis politiques, tant que le financement des partis politiques sera encore lié aux grosses caisses et aux grosses entreprises, il n'y aura jamais un gouvernement dans cette Chambre qui aura le courage de modifier la Loi sur l'impôt et de taxer ceux qui ont du fric.

Finalement, si on touchait aux entreprises et aux endroits où on peut aller chercher de l'argent, on arriverait, comme aux États-Unis, à baisser l'impôt des contribuables, non pas à le hausser comme on le fait tout le temps au Canada. On n'est plus capables de payer. Tant et aussi longtemps que le gouvernement ne comprendra pas cela, on s'en va encore plus vers la faillite.

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, nous arrivons aujourd'hui au terme du temps prévu par le Règlement de la Chambre pour le débat du discours sur le budget. Depuis quelques jours déjà, les députés ont eu l'occasion de manifester leurs préoccupations à l'égard des dispositions prévues dans ce budget. Cependant, la question que nous sommes en droit de nous poser est la suivante: Quel usage fera le gouvernement des points de vue qui auront été exprimés dans cette Chambre sur ce Budget?

Devant l'intransigeance brutale du gouvernement à l'égard de la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean, force est de constater que la réponse à cette question semble s'imposer d'elle-même: Rien! Le gouvernement n'entend rien faire des différents points de vue qui auront été exprimés au cours de ce débat. Le gouvernement n'entend pas prêter l'oreille et prendre en considération les arguments avancés par les députés de cette Chambre. Ma collègue de Rimouski-Témiscouata faisait justement état, il y a quelques minutes, de quelques suggestions qu'elle a faites en Chambre et que le gouvernement n'a pas prises en considération d'aucune manière.

Ce gouvernement, qui se targuait pourtant il n'y a pas si longtemps de vouloir consulter le Parlement et la population avant de procéder à la rédaction de son budget, n'a pas su enrichir sa réflexion des opinions, suggestions et préoccupations qui lui ont été présentées. Atteint de «consultationite» aiguë, le gouvernement libéral a investi d'importantes sommes d'argent dans la tenue de simulacres de conférences prébudgétaires, dont il ne s'est peu ou pas inspiré.

Mais en organisant ces conférences hautement médiatisées, lesquelles étaient alimentées par une série de ballons d'essai qui laissaient présager le pire aux contribuables canadiens, le gouvernement a sciemment entretenu une atmosphère d'austérité qui a eu pour effet qu'une grande majorité de nos concitoyennes et concitoyens étaient tout à fait disposés à faire leur part dans cette bataille à finir avec le déficit, dans la mesure où les sacrifices demandés auraient été équitables pour toutes les couches de la société.


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Qu'a fait le gouvernement de ce consensus implicite qui s'était installé au sein de la population canadienne et de cet admirable mouvement de solidarité collective qui semblait s'en dégager? Il l'a bêtement laissé s'effriter en présentant un Budget qui, conçu de façon à ne pas créer trop de vagues, s'avère fort décevant. En quelque sorte, ce budget traduit l'impuissance du gouvernement canadien devant l'ampleur de la catastrophe qui affecte les finances publiques.

Après le problème du chômage, la question du déficit est l'une de celles qui préoccupe le plus les Québécois et les Canadiens. Le présent gouvernement a cherché à s'attaquer simultanément à trois objectifs: premièrement, favoriser la croissance économique; deuxièmement, juguler l'augmentation des dépenses publiques afin de réduire le déficit; et, troisièmement, la réalisation à tout prix des promesses formulées au cours de la campagne électorale. Ce faisant, le gouvernement est littéralement passé à côté des deux objectifs auxquels il aurait dû accorder le plus d'importance, à savoir la réduction du déficit et la création d'emplois.

Il semble que ce gouvernement n'a pas été en mesure d'atteindre ces deux cibles à la fois. En fait, au lieu de viser les problèmes, il a plutôt choisi de viser les citoyens eux-mêmes, et en particulier les plus démunis.

En effet, 60 p. 100 de la trop faible baisse du déficit prévue pour l'exercice 1995-1996 est attribuable aux nouvelles mesures qui réduisent les sommes allouées aux chômeurs. De plus, le gouvernement augmente le fardeau fiscal des gens âgés et élimine une exonération d'impôt qui bénéficiait à la classe moyenne.

Attardons-nous pour un moment sur la question du déficit structurel, lequel représente approximativement 3,5 p. 100 du produit intérieur brut. Le Bloc québécois, de même que bon nombre de Québécoises et de Québécois, sont convaincus que la source du déficit mirobolant du Canada est imputable aux structures mêmes de ce pays. Le fédéralisme ne peut exister sans l'inefficacité inhérente aux chevauchements multiples, au gaspillage d'énergie et à des politiques contradictoires.

(1100)

En outre, le déficit structurel trouve sa source dans le gigantisme bureaucratique de l'appareil gouvernemental. Que fait le gouvernement dans le budget 1994-1995 pour améliorer les mauvaises méthodes de gestion qui existent et se perpétuent au sein de cet appareil? Que fait-il pour éliminer les gaspillages que le vérificateur général s'est évertué à dénoncer à moult reprises dans ses rapports successifs? Très peu de chose.

L'une des solutions mises de l'avant par le gouvernement est de couper les paiements de transfert aux provinces de 2 milliards de dollars, dont 466 millions en 1995-1996 et 1,54 milliard de dollars en 1996-1997. Bien sûr, le ministre des Finances se défend en disant qu'il injectera 800 millions de dollars pour financer de nouvelles approches en matière de sécurité sociale. Mais quelles sont ces nouvelles approches? Peut-il nous garantir qu'elles n'aboutiront pas, encore une fois, à l'immixtion du gouvernement fédéral dans les champs de compétence exclusive des provinces.

Il est inquiétant de constater qu'une des solutions retenues par le gouvernement est d'augmenter le fardeau fiscal des personnes âgées à revenu moyen et celui des contribuables de la classe moyenne en général. Comment justifier la décision de réduire le crédit en raison de l'âge? En tout, de 1994 à 1997, cette mesure entraînera une ponction de 490 millions de dollars dans les revenus des personnes âgées, alors qu'au même moment les contribuables à revenu élevé profitent encore d'abris fiscaux.

Dans un autre ordre d'idées, lorsque le Bloc québécois a proposé la relance du marché de l'emploi et la réduction du taux de chômage, il n'a pas demandé au gouvernement de pelleter, comme on dit, ses problèmes dans la cour du Québec et des autres provinces. La réforme de l'assurance-chômage ne favorisera ni une motivation au travail ni, bien entendu, une augmentation du nombre d'emplois disponibles. Elle créera, en fait, de nouveaux assistés sociaux.

Les hésitations du gouvernement sont inexplicables et inexcusables dans la mesure où nous sommes dans une situation où chaque minute perdue aggrave la situation des finances publiques et ajoute à la souffrance des individus et des familles qui subissent les affres du chômage et de la pauvreté.

Le gouvernement semble miser principalement sur le redressement de la situation économique pour renflouer ses coffres. Les expériences récentes nous ont appris à nous méfier de tels calculs. Nous aurions plutôt dû nous attendre à des mesures énergiques de la part de ce gouvernement, or il n'en est rien.

Le Mouvement Desjardins, la Caisse de dépôt et placement du Québec et le Conference Board prévoient tous que le taux de chômage tournera autour de 10 p. 100 en 1995. D'où vient donc le pourcentage, plus ou moins réaliste et franchement trop optimiste, de 8 p. 100 avancé par le gouvernement?

La lenteur de la reprise est essentiellement causée par une charge fiscale indue et par un taux de chômage inacceptable. Ne nous étonnons pas si la maison Gallup a pu constater en novembre dernier que la participation à l'économie souterraine se présente comme une solution acceptable pour 33 p. 100 des Canadiens et 42 p. 100 des Québécoises et Québécois.

Pour pallier le problème du sous-emploi, le gouvernement ne propose, aux Québécois et aux Canadiens, qu'un seul véritable programme, celui des infrastructures. C'est mieux que rien, mais ce n'est pas grand-chose et c'est loin d'être la solution à tous nos problèmes. Qui plus est, la courte vue avec laquelle ce programe a été conçu est affolante. En effet, il ne procurera que 45 000 emplois temporaires, et cela, dans des secteurs de l'économie plutôt pauvres en ce qui a trait à la valeur ajoutée, ce qui ne favorise en rien la compétitivité du Canada par rapport à ses concurrents internationaux. Les 437 000 chômeurs québécois sont en droit de se poser des questions sur la bonne foi de ce gouvernement.

Et pourtant, à un moment où tous les outils disponibles doivent être utilisés de la façon la plus efficace possible, le gouvernement ne semble pas comprendre que l'amélioration de la capacité de produire et d'exporter des milliers de PME à travers le Canada et le Québec constitue une avenue créatrice d'emploi et génératrice de richesse. Le gouvernement admet que deux


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millions d'emplois reposent sur les exportations qui, elles, représentent plus du quart du produit intérieur brut. Il convient de plus que la priorité doit être mise sur l'augmentation des exportations des PME qui ne représentent que 10 p. 100 du volume total des exportations. Mais ces voeux, malheureusement, ne s'accompagnent pas de gestes concrets.

Le ministre du Commerce international a lui-même affirmé que les mesures mises en place pour favoriser l'expansion des PME sont insuffisantes et surtout sous-utilisées et donc inadéquates. Plusieurs députés ont reçu des plaintes de la part de dirigeants de petites et moyennes entreprises qui regrettent de ne pas avoir accès à l'information, à l'expertise et au support logistique qui leur seraient nécessaires pour percer les marchés étrangers. Il est donc urgent que le gouvernement redresse la situation et fasse en sorte qu'une information qu'on nous dit existante leur soit rendue accessible.

(1105)

Mais ces constats ne constituent que la pointe de l'iceberg. Les vrais problèmes des petites et moyennes entreprises viennent du traitement que leur réserve les banques et de leur manque d'accès au financement. Sur cette question, le ministre ne propose rien de concret, si ce n'est qu'un vague forum de discussion entre lui et les institutions financières canadiennes sans, bien entendu, inclure les principales intéressées, à savoir les petites et moyennes entreprises. Encore une fois, tous les verbes utilisés par le ministre MacLaren sont conjugués au futur. Malheureusement, le moment n'est plus aux discussions et aux voeux pieux mais à l'action.

Enfin, on sait que les gouvernements de certaines provinces et en particulier le gouvernement du Québec ont fait par le passé des efforts pour favoriser l'expansion des petites et moyennes entreprises. Que fait le fédéral actuellement pour coordonner ses activités avec celles des provinces? Le fait est que les programmes d'aide aux petites et moyennes entreprises, particulièrement dans le secteur de l'exportation, sont non seulement insuffisants, mais souvent concurrents et contradictoires.

Les solutions sont reportées à plus tard. Après avoir crié au loup pendant plusieurs semaines, le gouvernement a finalement livré un budget ni chair, ni poisson, qui a réussi le coup de force de déplaire à tout le monde. Ne dérogeant pas à la désormais traditionnelle politique de gestion à la petite semaine, la montagne aura encore une fois accouché d'une souris.

Ce budget nous rappelle étrangement une administration pas si lointaine que les libéraux décriaient pourtant à grands cris. Comme les budgets présentés par les gouvernements précédents, le Budget Martin n'atteint qu'imparfaitement tous les objectifs que le gouvernement s'était fixés.

Ce budget ne s'attaque nullement au déficit. Il ne prévoit pas de mesures suffisantes de création d'emplois. Il s'attaque aux programmes sociaux plutôt que d'éliminer le gaspillage et les chevauchements coûteux dans les dépenses publiques. On pouvait presque penser, monsieur le Président, et je termine là-dessus, que c'est Michael Wilson ou Don Mazankowski qui se trouvaient dans les bottines de travail du ministre Martin le 22 février dernier. Et cela, ce n'est certainement pas de bon augure pour le Canada et le Québec.

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Verchères de ses observations, que j'ai trouvées fort intéressantes. Cependant, j'ai quelques remarques à faire. Il a dit que l'une des raisons qui expliquent le coût élevé du fédéralisme réside dans l'existence de chevauchements et de double emploi dans les programmes provinciaux et fédéraux. Il a souligné ce facteur.

Dans ce contexte, serait-il d'accord pour dire qu'on ferait des économies et qu'on réduirait le déficit si le Québec redonnait au gouvernement fédéral le pouvoir qu'il exerce maintenant sur la politique de l'immigration, comme le veut la Constitution et comme cela se fait dans les autres provinces? Ne croit-il pas que ce serait une bonne idée?

[Français]

M. Bergeron: Dans un premier temps, monsieur le Président, je voudrais remercier mon collègue pour sa question.

Tout d'abord, il a fait un commentaire sur le passage de mon discours où je traitais plus particulièrement de la question des coûts inhérents au régime fédéral. J'ai parlé évidemment des chevauchements coûteux, des dédoublements, mais j'aurais également pu parler du saupoudrage des deniers publics all across Canada pour, comme qui dirait, défendre les intérêts régionaux et ménager les susceptibilités régionales. C'est un des aspects du fédéralisme canadien qui, dû à l'ampleur, à l'étendue de son vaste territoire, constitue justement un des problèmes financiers de ce pays.

Le député suggérait, comme mesure de réduction des dédoublements, le fait que le gouvernement du Québec se retire du dossier de l'immigration. D'abord, je trouve un peu odieux que le gouvernement qui est en face de nous ne fasse que prendre note du fait qu'on trouve que les dédoublements sont coûteux. D'abord, on aurait pu s'attendre de votre part à ce que vous ne fassiez pas que prendre note, mais que vous agissiez très énergiquement dans le dossier des dédoublements et des chevauchements entre les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral. D'autre part, le gouvernement du Québec a négocié avec le gouvernement fédéral une entente particulière au niveau de l'immigration qui, dans un certain sens, n'implique pas de coûts additionnels pour l'État fédéral et pour le gouvernement du Québec. Il s'agit simplement d'un transfert en ce qui concerne la gestion des dossiers des immigrants ou des postulants au statut d'immigrant qui s'opère par cette entente particulière. À mon sens, la proposition du député est un peu inappropriée; d'autre part, elle relève plus du gouvernement du Québec que des prérogatives de l'opposition officielle.

(1110)

[Traduction]

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je remercie le député pour son discours, mais je ne pense pas que nous devrions être aussi négatifs même si nous sommes dans l'opposition. Le député démolit le budget, mais ne propose rien en échange. L'opposition officielle, même ceux de ses membres qui siègent de ce côté-ci de la Chambre, ne propose rien de concret. Le député dit que les banques font la vie dure aux petites entreprises, il parle de la croissance de l'économie souterraine, de tout ce qui ne va pas au Canada. J'estime qu'en tant que députés nous devons faire ressortir les aspects positifs du budget,


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comme le fait que le gouvernement fédéral versera 3,5 milliards de dollars à la province de Québec sous forme de paiements de péréquation.

Quand le député va-t-il reconnaître ces aspects-là au lieu de répéter sans relâche que le dédoublement des programmes provinciaux et fédéraux est le principal problème qui assaille le pays? À force de répéter cela, les gens vont finir par le croire. Il y a, à mon avis, de nombreux éléments positifs.

Le député va-t-il reconnaître que la Chambre apporte une contribution positive au Québec et à toutes les autres provinces?

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, c'est déjà la deuxième occasion que j'ai d'échanger directement avec mon collègue de St. Albert sur les questions budgétaires, et à chacune de ces occasions, j'ai l'impression que le député de St. Albert ne porte pas très attention au discours que je prononce.

On a souligné, à titre d'exemple, la question des dédoublements comme étant un des facteurs d'inefficacité budgétaire du régime fédéral; on aurait pu en nommer quelques autres. Alors, s'il le désire, je pourrai m'entretenir en particulier avec lui ou faire tout simplement un discours sur tous les facteurs inhérents au régime fédéral qui entraînent des coûts faramineux pour ce pays.

Vous avez suggéré, et je trouve cela un peu triste, que l'opposition officielle ne fait que relever les points négatifs et qu'elle ne propose rien de positif. Je dois malheureusement constater que vous n'avez pas dû être souvent dans cette Chambre pour avancer un tel propos, puisque l'opposition officielle a incessamment, depuis le début des travaux de cette Chambre, amené plusieurs propositions du point de vue budgétaire que le gouvernement n'a pas pris en considération, ce que je soulignais d'ailleurs dans mon discours sur le Budget.

D'autre part, le député suggérait également que le Canada était un beau grand pays et qu'on devait reconnaître que le gouvernement fédéral donnait beaucoup au Québec en paiements de péréquation. Je vous signalerai que les paiements de péréquation consistent en de l'assurance-chômage et de l'aide sociale et qu'on ne doit pas se gratifier, se féliciter de recevoir d'un État fédéral non pas des investissements en matière de recherche et développement, non pas des investissements créateurs d'emploi, mais simplement des investissements qui témoignent de la pauvreté de la société québécoise dans ce régime fédéral.

Le vice-président: En passant, permettez-moi de vous dire qu'il vaudrait mieux que vous vous adressiez à la Présidence plutôt qu'au député, même si vous êtes près l'un de l'autre. Nous reprenons le débat.

[Traduction]

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington): Monsieur le Président, je suis honoré de pouvoir prendre la parole au sujet d'une mesure aussi importante que le budget fédéral. Je considère ce budget comme un document historique qui établit le cadre nécessaire pour bâtir un Canada renouvelé, prospère et juste.

Comme il s'agit ici de mon premier discours à la Chambre, je me permets de souligner que l'immense privilège que j'ai de prendre la parole aujourd'hui constitue également un moment historique. En effet, je suis le premier représentant libéral de Hastings-Frontenac-Lennox and Addington depuis que David Wright Allison a battu sir John A. Macdonald en 1883. C'est en effet un privilège que de recevoir la confiance et les bons voeux de ses électeurs. Je tâcherai de faire en sorte que le gouvernement réponde aux préoccupations des habitants de ma circonscription.

Hastings-Frontenac-Lennox and Addington s'étend du lac Ontario, au sud-ouest, et du Parc Algonquin, au nord, jusqu'à la région des Mille-Îles, au sud-est.

(1115)

Lorsque je voyage dans ma circonscription et que je m'arrête dans des endroits comme Bancroft, Madoc, Marmora, Stirling, Napanee, Arden, Shabort Lake et mon propre village, Camden-Est, je reçois de nombreuses paroles d'encouragement. Je reçois également des conseils d'ordre général et des suggestions précises au sujet des questions avec lesquelles nos collectivités rurales sont aux prises. J'attache une grande importance à cette contribution des habitants de Hastings-Frontenac-Lennox and Addington et je leur remercie de leur appui et de leurs judicieux conseils.

Je remercie également les centaines de personnes qui m'ont si généreusement donné de leur temps lors de la récente campagne électorale. Aujourd'hui, je suis fier de représenter tous les habitants de cette circonscription.

Je voudrais également remercier publiquement ma femme, Reta, et Kayla Rebecca, notre fille, pour leur amour et leur soutien.

Un des messages que je reçois continuellement, c'est que les Canadiens désirent que le gouvernement leur présente un plan ouvert et transparent de relance socio-économique. Mes électeurs n'en espèrent pas moins. En fait, c'est ce que le budget de 1994 met en branle: un cadre de relance socio-économique.

Notre objectif est clair: stimuler la croissance en ciblant nos dépenses sans exiger de nouveaux impôts. Il suffit de voir avec quelle rapidité le gouvernement a commencé à financer des initiatives qu'il avait promises pendant la campagne électorale. Dans notre parti, nous prenons au sérieux notre plate-forme électorale, le livre rouge.

Le programme national d'infrastructure a été rapidement mis en oeuvre. Dans ma seule circonscription, 44 municipalités et cinq conseils scolaires s'affairent à préparer leurs propositions. Il ne fait aucun doute dans mon esprit et dans celui des habitants des régions rurales qu'il y a de nombreux projets d'infrastructure valables.

J'ai reçu des exemplaires de propositions d'un certain nombre de municipalités de ma circonscription, qui compte le plus grand nombre de milles de route que n'importe quelle autre circonscription de l'Ontario. J'ai pris connaissance de certains projets de réfection des routes, et je peux attester que bien des artères très fréquentées ne sont pas encore asphaltées. Les avantages des


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améliorations proposées sont nombreux. Outre les perspectives d'emploi qu'offre la construction de routes, il ne faut pas oublier l'avantage que cela représente pour l'économie touristique locale. De bonnes routes permettent aux habitants et aux touristes de se rendre rapidement et, ajouterai-je, sûrement d'un lieu à un autre.

Les projets d'infrastructure peuvent même peut-être sauver des vies.

Je viens d'une petite entreprise. Dans ma localité, j'étais propriétaire d'un magasin général. Les habitants de ma circonscription sont propriétaires de petites et moyennes entreprises, travaillent dans ces entreprises ou sont clients. Quatre-vingt pour cent des emplois dans les régions rurales sont créés par des entreprises locales.

Je suis heureux de faire remarquer que ce budget appuie les petites et moyennes entreprises. Par les mesures qu'il prévoit en vue d'aider les petites entreprises, il est le fondement du renouveau économique de notre pays.

L'une des plaintes les plus courantes que l'on entend de la part des gens d'affaires dans ma circonscription concerne la difficulté d'obtenir des prêts à des fins d'investissement ou d'expansion. Durant la campagne électorale, le Parti libéral a reconnu ce problème et a promis d'y remédier.

Le gouvernement travaille maintenant en consultation avec les institutions financières et les entreprises à l'élaboration d'un code qui régirait les prêts aux petites entreprises. Le gouvernement a pour rôle de servir d'intermédiaire honnête entre les parties. En consultant les intéressés, le gouvernement prouve sa volonté et sa capacité de faire face au problème de l'accès aux capitaux.

Ce n'est qu'en travaillant avec les banques et avec les entreprises clientes que nous pourrons ensemble atteindre l'objectif commun de notre pays: améliorer le climat commercial et accroître notre compétitivité dans le monde.

Ce budget montre que le gouvernement sait non seulement mener des consultations, mais aussi écouter et agir.

Accroître les charges sociales aurait en fait imposé un fardeau aux entreprises et aurait été un obstacle à la création d'emplois. Le gouvernement s'est empressé de réduire les taux de cotisation d'assurance-chômage.

On sait que nos bureaux sont assaillis de demandes de renseignements sur les programmes à l'intention de la petite entreprise. J'y vois la preuve que les Canadiens veulent monter de nouvelles entreprises. Les Canadiens sont confiants dans leur savoir-faire et leurs compétences. Les Canadiens ont des plans qui ne demandent qu'à être réalisés. Enfin, les Canadiens recherchent activement les ressources qui s'offrent à eux.

Comme toujours, mes collaborateurs se feront un plaisir de fournir des renseignements sur les programmes destinés à la petite entreprise à tous les électeurs qui en feront la demande.

(1120)

Il est tout à fait logique que mes collaborateurs et mes électeurs puissent avoir accès rapidement à toute l'information disponible. Ils doivent pouvoir entrer directement en contact avec les fonctionnaires qui connaissent parfaitement la nature et la portée des divers programmes gouvernementaux conçus pour la petite entreprise.

D'ici l'an prochain, le gouvernement aura établi un Centre canadien de services aux entreprises dans chacune des provinces. Il s'agit d'un efficace réseau à guichet unique, axé sur les programmes gouvernementaux. Ce n'est qu'un exemple de plus des moyens mis en place pour favoriser la croissance de la petite entreprise. Avec ce budget, le gouvernement crée toutes les conditions nécessaires à un puissant renouveau socio-économique.

Toujours sur le plan économique, je me réjouis des perspectives que laisse entrevoir la création du Fonds d'investissement canadien et du Réseau technologique canadien, deux composantes qui viennent grossir l'arsenal des moyens mis en oeuvre pour assurer la reprise au Canada.

Par-dessus tout, ce qui m'encourage, c'est de voir notre gouvernement se lancer dans une réforme en profondeur de notre système de sécurité sociale. Ce n'est pas en sabrant à gauche et à droite dans les programmes sociaux que nous allons réaliser des économies. Nous n'avons pas le même mandat que le gouvernement précédent. Nous n'avons pas été élus pour démolir le filet de sécurité sociale, mais bien pour rebâtir un système qui soit accessible à l'ensemble des Canadiens. Tel est notre mandat et c'est dans cette perspective que s'inscrit notre budget pour 1994.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de son discours. Cependant, je voudrais aussi souligner que je ne partage pas tous les points qu'il a mentionnés et je commencerai par la fin de son discours pour illustrer les choses sur lesquelles je ne suis pas d'accord.

Lorsque le député mentionne que son gouvernement n'a pas été élu pour couper les programmes sociaux, je me pose la question à savoir si on a lu le même Budget, puisqu'on y voit que le ministère des Finances va couper 725 millions de dollars cette année dans les programmes d'assurance-chômage. Est-ce que le député est conscient de l'impact que cela aura dans des régions comme les Maritimes, comme l'est du Québec, où on vit malheureusement d'industries saisonnières?

Ce sont des choses qui nous sont nécessaires pour le moment. C'est un objectif que l'on aimerait avoir nous aussi dans ces régions de pouvoir travailler 52 semaines par année, cependant on a besoin d'outils. Ils nous disent qu'ils n'ont pas reçu ce mandat, mais c'est pourtant ce qu'ils sont en train de faire. On nous dit qu'ils veulent réformer, réorganiser les acquis sociaux au Canada, cependant je voudrais être bien sûr que dans la bouche des libéraux, réformer ne veut pas dire couper et diminuer l'aide. Que vont-ils nous offrir en échange?

[Traduction]

M. McCormick: Je remercie le député de sa question. Il est certain que les quelques dernières semaines où j'ai siégé au Comité de développement des ressources humaines qui a entendu, cette semaine, des témoins 12 heures et demie par jour-et je


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vais y retourner bientôt-m'ont donné des informations privilégiées.

Il est clair que nos programmes ne visent pas à priver les gens de leurs moyens de subsistance et à les laisser mourir de faim. Par contre, nous considérons que les différents niveaux de gouvernement, et cela comprend les provinces, toutes les provinces, et le gouvernement fédéral, consacrent déjà beaucoup d'argent au système, mais il semblerait que la force du système soit dans l'administration par les municipalités.

On peut économiser beaucoup d'argent au niveau de l'administration, et c'est ce que nous étudions. Les économies réalisées pourraient être utilisées pour améliorer le bien-être de la population canadienne.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Je félicite le député de son premier discours. Je voudrais simplement attirer son intention sur un point de son analyse du budget du gouvernement.

Il faut regarder la triste réalité qu'apporte ce budget.

(1125)

Je veux parler des 100 milliards de dollars de dette qui s'ajouteront aux 500 milliards que nous avons déjà accumulés. Comment le député va-t-il convaincre les entreprises que leur expansion, leur croissance ou leurs autres initiatives de ce genre ne seront pas gênées lorsque le gouvernement sera forcé de relever les taxes et les impôts?

M. McCormick: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Il est certain que lorsque je retourne dans ma circonscription et que je parle aux gens d'affaires au long des 5000 milles de routes-je ne pense pas qu'ils me disent cela parce que je suis député libéral-beaucoup se plaignent du gouvernement. Je l'ai fait aussi pendant des années et je continue de le faire, mais ces gens estiment qu'il y a déjà un nouveau sentiment de confiance dans l'air. Bien sûr qu'ils critiquent, mais ils reconnaissent aussi que l'atmosphère a changé, que la confiance revient et que la situation s'améliore.

Vu mes antécédents de petit entrepreneur, je suis certainement heureux de parler de la dette. Les collègues du député qui siègent au comité permanent ne perdent d'ailleurs aucune occasion de rappeler aux témoins qui se présentent devant nous que nous avons une dette. Beaucoup d'entre nous croient que pour réduire la dette de façon réaliste, c'est-à-dire sans ruiner le pays, le seul moyen est de créer des emplois.

C'est pourquoi nous attachons beaucoup d'importance à la façon dont nous influons sur le pays, et ce que nous voulons, c'est créer le milieu qui assurera la croissance de l'entreprise.

Le vice-président: Je félicite le député de son premier discours. Le député de Vancouver-Est pour le débat.

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Monsieur le Président, tansi. En cri, l'une des langues autochtones, tansi veut dire «allô».

Étant immigrante, j'estime approprié d'utiliser ce mot dans le premier discours que je prononce à la Chambre. J'ai déjà pris la parole pour faire des déclarations ou poser des questions, mais c'est le premier discours que je prononce officiellement à la Chambre, comme l'ont fait avant moi beaucoup de personnes importantes.

La circonscription que je représente, Vancouver-Est, est l'une des plus intéressantes et des plus diversifiées de tout le Canada. Elle va de la rue Cambie, à l'ouest, jusqu'au chemin Boundary, à l'est, et du quai, au nord, à jusqu'à la route de Grandview, en zigzag, au sud.

Je ne m'imagine pas représenter une autre circonscription. J'ai choisi Vancouver-Est en raison du travail que j'ai effectué dans cette région depuis 20 ans et je suis très heureuse de ce choix. Vancouver est une ville fort attrayante.

Depuis 1966, année où je suis arrivée d'Italie, Vancouver s'est développée à pas de géant et est en train de devenir une métropole internationale. Avec ses nombreux immigrants et ses habitants très intéressants qui représentent le tissu de notre pays, Vancouver-Est est un microcosme du Canada.

Les Chinois représentent plus de 30 p. 100 de la population de Vancouver-Est. Viennent ensuite les Anglais, qui représentent 16 p. 100 de la population, les Italiens, qui ont déjà formé le groupe le plus nombreux, les autochtones et les divers autres groupes ethniques dont les Philippins, les Vietnamiens, les Indo-Canadiens, les Latino-Américains, pour ne nommer que ceux-là.

Les immigrants forment 45 p. 100 de la population de Vancouver-Est. Près de six personnes sur dix ne parlent pas anglais. Vancouver-Est compte également l'une des populations autochtones urbaines les plus importantes du Canada. Le port de Vancouver se trouve à Vancouver-Est, tout comme de nombreux syndicats.

Vancouver-Est compte plusieurs centres culturels, notamment le centre d'accueil autochtone, le Native Education Centre, le centre culturel chinois, le centre culturel italien, le centre communautaire croate et le Gudwara Sikh.

On trouve à Vancouver-Est un service de police et plusieurs petites entreprises familiales. Quartier pittoresque de la ville comptant des artères importantes comme la promenade Commercial, la rue Powell et Gastown, la rue Pender avec son quartier chinois et la rue Hastings, Vancouver-Est compte de nombreux habitants dévoués qui viennent en aide aux nombreux nécessiteux du quartier et sont le coeur et l'âme de la circonscription. Ces gens oeuvrent dans des centres comme le Centre Carnegie, les maisons de quartier, les églises, les sièges d'organisations sans but lucratif.

Je tiens à les remercier pour le merveilleux travail qu'ils font et je remercie aussi les électeurs de Vancouver-Est qui ont cru en ce que j'avais à leur offrir et qui ont voté pour moi. Je ne les décevrai pas, mais j'ai maintenant besoin d'eux plus que jamais. Je remercie aussi mon fils David et tous ceux qui m'ont appuyée,


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qui ont travaillé avec moi pendant la campagne électorale et qui m'ont permis de gagner l'élection.

(1130)

Le facteur humain a été l'élément le plus important de la campagne. Si j'ai demandé à prendre la parole au sujet du budget, c'est qu'il contient beaucoup de mesures nécessaires à une circonscription comme celle de Vancouver-Est. Ce budget, le premier du nouveau gouvernement, reprend le contenu du livre rouge qui a permis au Parti libéral de se faire élire.

Le budget est la première mesure prise par le nouveau gouvernement pour rendre sa dignité à la population, par la création d'emplois et le rétablissement de la confiance envers le gouvernement. Je voudrais cependant parler de certaines questions importantes pour Vancouver-Est et pour le Canada.

Le budget ne contient aucune hausse d'impôt, ce qui était tout un défi à relever. Il permet également une utilisation plus équitable de l'assurance-chômage et réduit les cotisations d'assurance-chômage, de sorte que les petites entreprises pourront réinvestir les fonds ainsi récupérés dans la création d'emplois. Cet autre défi avait été lancé par les petites entreprises elles-mêmes.

Le budget contient également des mesures d'aide au secteur du logement au moyen du Programme d'aide à la remise en état des logements, prévoit le maintien des subventions au logement à l'intention des personnes pauvres vivant dans les réserves, des projets d'aide aux victimes de violence familiale et l'utilisation du Régime enregistré d'épargne-retraite pour l'achat d'une première maison. Nous souhaiterions que les subventions accordées pour l'achat d'habitations soient plus élevées, mais je crois que le temps est venu de faire montre d'un sens de l'innovation et de trouver des sources privées de financement, tout en trouvant les moyens de maintenir notre système de subventions qui fait l'admiration du monde entier.

Un programme d'infrastructure a été créé dans l'intérêt immédiat et futur du réseau de transport et du tourisme. Le Programme de nutrition prénatale et le Programme d'aide préscolaire aux autochtones sont deux très importantes mesures créées à l'intention des nouveau-nés. Le budget rétablit le Programme de contestation judiciaire et annonce la création de la Fondation canadienne des relations raciales qui répond à un besoin de toutes les minorités.

Le Centre d'excellence pour la santé des femmes et le Forum national sur la santé sont deux importantes mesures de prévention des maladies. Il y également le Service jeunesse, le programme d'apprentissage pour jeunes, les programmes d'alphabétisation qui visent à aider les jeunes à devenir autonomes et à bien débuter dans la vie. Il y a aussi le programme d'unification des familles durant l'Année de la famille.

[Français]

Tout cela a été fait par le ministre des Finances, avec l'appui et les conseils des députés au gouvernement. Le ministre des Finances a su respecter les demandes des Canadiens et des Canadiennes et a souvent changé la direction du budget selon les conseils reçus de ses collègues.

Le ministre des Finances a aussi anticipé que l'année prochaine on pourra compter sur les résultats des consultations dans les domaines de la défense, des ressources humaines et de l'immigration. Je crois que ce budget est un très bon exemple de changement de direction de la part du gouvernement.

[Traduction]

Ce que je trouve très important, c'est ce changement d'orientation qui fait davantage appel au secteur privé pour la création d'emplois. Depuis trop longtemps nous comptons sur le gouvernement pour cela. En offrant des incitatifs aux entreprises, le ministre des Finances leur donne l'occasion de prendre de l'expansion et de créer des emplois. Même la réforme de l'assurance-chômage est un premier pas en faveur d'un engagement plus profond de la part des travailleurs.

Pendant la campagne électorale, nombre de mères seules de ma circonscription m'ont appelée. Elles désiraient échapper à l'assistance sociale, recevoir une formation et travailler. Ce budget répond à leurs demandes.

En tant que femme, je suis très heureuse que, pour la première fois, un budget tienne compte des besoins des femmes. C'est le début de quelque chose, j'en suis sûre.

Évidemment, nous aimerions pouvoir financer davantage certains programmes, mais malheureusement notre situation économique ne nous le permet pas et nous devons tous faire notre part dans un esprit de coopération. Bien sûr que nous aimerions aussi que le déficit prévu soit beaucoup moins élevé, mais cela ne pourrait se faire qu'aux dépens de tous les Canadiens qui cherchent du travail.

Un écrivain d'Ottawa, Mark Hill, a essayé de se débarrasser du déficit et de la dette, et après avoir procédé à des compressions généralisées et réduit de 25 p. 100 les budgets de la Sécurité de la vieillesse, de l'assurance-chômage, des soins de santé, de l'assistance sociale et de l'éducation, et ce, en plus des autres compressions, il a conclu en disant que même si on condamnait les personnes âgées à la pauvreté, si on ne soignait pas les malades et si on refusait de nourrir et de loger les pauvres de façon décente, il nous faudrait quand même souffrir pendant 22 ans avant d'avoir complètement remboursé notre dette.

[Français]

En conclusion, je voudrais mentionner un fait qui me trouble beaucoup. Dès 1976, j'ai fait partie de groupes dont l'initiative directe était de garder le Québec à l'intérieur du Canada. Quand je suis arrivée en 1966, le Québec faisait partie du Canada, et cela doit continuer.

(1135)

Je veux offrir mon aide aux députés du Québec qui désirent un Canada uni et désirent aussi l'appui d'une Canadienne d'origine italienne, de l'ouest du Canada, qui parle français et qui est intéressée en un Canada uni.

[Traduction]

Le vice-président: Permettez-moi de féliciter la députée pour son premier discours à la Chambre.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je félicite également la députée pour son premier discours à la Chambre. Comme je l'ai déjà dit, notre première intervention à la Chambre est toujours un événement très spécial de la vie politique des députés. Félicitations.


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Je serai très brève. Je veux parler de la question des emplois et de la création d'emplois. Dans le budget dont nous sommes saisis, les compressions de 725 millions de dollars dans le programme d'assurance-chômage équivalent à 40 000 emplois. Un programme d'infrastructure de 6 milliards de dollars équivaut à 65 000 emplois. Soixante-cinq mille plus quarante mille, cela ne fait certainement pas 1,2 million. Or, c'est là le nombre de Canadiens qui sont actuellement en chômage.

J'ai vraiment de la difficulté à comprendre comment, en créant plus de 100 000 emplois, on redonnera du travail à plus de 1,2 million de Canadiens. La députée peut-elle m'expliquer cela?

Mme Terrana: Monsieur le Président, je sais que c'est inquiétant et que cela ne comble que 10 p. 100 des besoins.

Dans le cadre du programme d'infrastructure, des fonds sont aussi réservés à la construction de centres culturels, car nous n'avons pas seulement besoin de routes et d'infrastructures. Quinze pour cent des fonds prévus sont destinés à d'autres programmes.

Je signale que c'est une occasion de plus de créer de l'emploi. Je précise en outre que nous ne pouvons pas créer 1,2 million d'emplois dès le premier budget tout en nous attaquant au déficit et en tâchant d'améliorer l'économie canadienne.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, j'aimerais également remercier la députée pour la qualité de son discours. On est plusieurs ici à avoir dû le faire, et la première fois c'est toujours assez impressionnant.

Mon commentaire porterait sur une remarque qu'elle a faite dans son discours sur le changement de direction apporté par le nouveau gouvernement. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, ne partageons aucunement cela, si on regarde les éléments significatifs du budget. Par exemple, c'est un budget déficitaire record; on n'a jamais vu cela un montant prévu de 39 milliards de déficit. On augmente le nombre de semaines nécessaires pour avoir droit aux prestations d'assurance-chômage, on diminue le nombre de semaines pendant lesquelles les gens vont recevoir des prestations. Cela m'apparaît beaucoup plus de la continuité dans les politiques du gouvernement conservateur antérieur.

C'est pour cela d'ailleurs que les Canadiens et les Québécois ont beaucoup de difficultés à accepter le travail qui résulte de ce Budget. Pendant la semaine de congé que l'on a eue, les gens me disaient: Vous avez encore accouché d'une souris, vous nous parlez pendant deux mois de la gravité de la situation, et finalement il n'y a pas de coupures, et le petit train continue comme il allait avant.

Je voudrais faire une deuxième remarque qui sera très brève. La députée dit qu'elle voudrait participer avec les députés du Québec à construire un Canada uni. Je l'inviterais plutôt à une participation dont le but serait que l'espace canadien, l'espace québécois puissent se doter de structures pour être capables de faire face à la compétition mondiale des prochaines années. Et là-dessus, le fédéralisme canadien ne correspond plus du tout à la forme de structures qui va nous permettre d'être compétitifs sur le marché mondial.

Mme Terrana: Monsieur le Président, avant tout, j'aimerais commenter la deuxième remarque du député. Je voudrais dire que le fait que le Québec ait essayé de se séparer du Canada depuis plusieurs années a aussi eu un effet sur l'économie du pays. Ces problèmes ne sont pas confinés qu'au Québec, mais dans tout le Canada, on le sait. Mais je crois que l'union fait la force, comme on dit en Italie. Je ne sais ce que l'on dit en France, mais nous, on dit que l'union fait la force.

Au sujet du premier commentaire qui a trait au changement de direction, je crois qu'il y a eu vraiment un changement de direction. Il s'agit du premier budget et il a été présenté après seulement quatre mois de gouvernement. Et je crois qu'il s'agit de la première de deux étapes; la deuxième étape viendra l'année prochaine. Le budget pourra être commenté à ce moment parce que je crois qu'on aura alors tous les résultats des consultations. L'opposition peut trouver que, en effet, on a vraiment des raisons de faire ça et on veut vraiment faire du bien au pays.

(1140)

[Traduction]

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam): Monsieur le Président, au nom du whip du Parti réformiste, je voudrais signaler à la Chambre que, conformément à l'article 43 du Règlement, les membres de notre parti qui interviendront relativement à cette motion partageront leur temps de parole.

Je suis très heureuse de me pencher sur une question qui revêt beaucoup d'importance pour les Canadiens. La semaine dernière, j'ai passé un certain temps dans ma circonscription de Port Moody-Coquitlam; c'était la première fois depuis la présentation du budget que j'avais une période assez longue pour rencontrer des particuliers et des groupes. Les gens m'ont fait part de trois grands sujets de préoccupation et j'en aborderai deux aujourd'hui.

Il y a tout d'abord le budget, puis l'immigration. Ces deux questions touchent directement les craintes des citoyens ordinaires au sujet de l'orientation future du Canada et des débouchés qui s'offriront à l'avenir.

La plupart des Canadiens voient le budget de février 1994 comme une mesure de colmatage, une tentative, aussi modeste soit-elle, pour empêcher que le déficit n'augmente encore davantage et qui ne les a pas trop touchés personnellement. Comme il fallait s'y attendre, ceux dont le gagne-pain est directement menacé à cause de la fermeture de bases, de gels de salaires et le reste, sont furieux. Il en va de même d'autres personnes qui ont suivi de près l'évolution de notre économie au cours des dernières décennies.

Je trouve que ce budget est un échec et que tous les Canadiens auraient raison d'être furieux.

Notre dette et notre déficit sont tellement importants qu'ils touchent tous les particuliers et toutes les entreprises qui doivent payer des impôts exorbitants. La rémunération des gens est réduite de beaucoup par les impôts et cela se répercute sur leur pouvoir d'achat. Notre dette accumulée de plus de 500 milliards


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de dollars est l'une des plus importantes par habitant parmi les pays industrialisés et elle va avoir des répercussions catastrophiques sur le commerce, les emplois et notre niveau de vie.

Le sous-ministre des Finances a reconnu hier que le fardeau fiscal des particuliers et des sociétés au Canada était plus élevé que dans n'importe quel autre des principaux pays industrialisés, à l'exception de la France. Le tiers des impôts que nous versons est consacré au service de la dette. Cet argent ne sert pas à répondre aux besoins de notre pays.

Permettez-moi d'illustrer le problème: à chaque seconde, 1 300 $ en paiement d'intérêts sur la dette disparaissent, de quoi employer deux Canadiens pendant une semaine. Les sommes qui s'envolent ainsi en six secondes pourraient nourrir une famille de quatre pendant un an. Dans les dix minutes de mon intervention, la dette aura augmenté de 780 000 $. Il faudrait à un citoyen moyen 20 ans pour gagner autant.

Rappelez-vous que ce n'est pas de l'argent que nous devons simplement à des Canadiens, comme certains pourraient aimer à le croire. En réalité, ce que nous exportons le plus en tant que nation, ce sont les dollars que nous devons verser à des prêteurs étrangers chaque année.

Pourtant, dans ce budget, les dépenses gouvernementales pour l'année à venir ont augmenté, en fait, de 2 milliards de dollars. Comme dans le cas de si nombreux budgets précédents, on tient pour acquis des recettes accrues et de meilleures conditions économiques nous permettant de résoudre nos problèmes d'endettement. Ce n'était pas vrai à l'époque et ce n'est pas plus vrai maintenant.

Le problème est trop grave pour être reporté à plus tard car ce sont les générations futures qui hériteront non seulement des promesses, mais aussi de l'énorme fardeau découlant de notre inaptitude actuelle à régler ce problème. Nous devons réduire nos dépenses et les Canadiens doivent être prêts à affronter la question franchement et honnêtement.

La situation actuelle exige que l'on examine tous les domaines de dépenses et de capital humain. Voilà pourquoi le débat sur le budget est le moment idéal pour examiner la question de l'immigration.

Prise à part, cette question a été reléguée au rang des sujets tabous; on lui attribue trop facilement des étiquettes et elle est trop souvent liée à des motifs suspects. Nous devons examiner de près nos ressources humaines et financières dans ce domaine comme dans tous les autres.

Comme le Globe and Mail l'a affirmé dans son numéro du 150e anniversaire: «Le plus grand sujet des années 1990 sera celui de notre capacité à vivre selon nos limites dans un monde déjà trop taxé par nos excès.»

Notre monde est devenu un lieu de déplacement des capitaux et des êtres humains. De récents rapports dans les médias nous rappellent que les dossiers de l'économie et de l'immigration ne nous appartiennent pas en exclusivité.

(1145)

La Bosnie est l'un des quelque 50 théâtres connus de guerre civile à l'heure actuelle. Jusqu'à 22 millions de personnes auront besoin d'aide alimentaire en Afrique cette année. Il existe environ 20 millions de réfugiés de par le monde, ainsi que 24 millions de personnes déplacées à l'intérieur de leurs propres pays. Le tiers de la main-d'oeuvre mondiale, soit plus de 820 millions de personnes, est en chômage ou vit sous le seuil de subsistance.

Le dilemme se creuse à mesure qu'on prend conscience qu'il n'existe aucune solution facile. La Convention de Genève de 1991 ne peut répondre adéquatement à ces nouvelles exigences. Il faut entreprendre le plus tôt possible une coopération internationale afin d'élaborer des solutions communes à long terme.

La politique d'immigration du Canada est l'une des plus généreuses au monde. Nous acceptons, par habitant, plus de réfugiés à titre d'immigrants reçus que tout autre pays du globe. Le 2 février dernier, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a annoncé que le niveau d'immigration visé pour cette année serait de 250 000, soit 1 p. 100 de la population canadienne. Ce pourcentage est le double de celui de l'Australie ou des États-Unis, qui sont les deux autres pays qui accueillent le plus grand nombre d'immigrants.

Nous sommes fiers de nos politiques humanitaires et multiculturelles et pourtant, selon un article du Vancouver Sun, des études récentes sur l'immigration montrent que les planificateurs fédéraux ne peuvent pas prévoir au juste l'effet de ces nouvelles arrivées au Canada. Les rapports et les études sont contradictoires. Même le rapport du Conseil des arts du Canada de 1991, qui est fréquemment cité, recommande que l'immigration corresponde à 1 p. 100 de la population uniquement au bout de 25 ans.

Depuis les années 1970, le nombre des immigrants varie constamment au Canada et, d'à peine 84 000 qu'il était en 1985, il dépasse les 200 000 depuis trois ans. Le taux d'immigration suit généralement les tendances économiques et fléchit dans les périodes difficiles. Les plus fortes hausses font suite à un besoin précis, comme cela s'est produit au début du siècle, lorsque des nombres records d'immigrants sont venus peupler les vastes prairies de l'Ouest.

Les études semblent indiquer que l'immigration influe peu sur l'économie; ce n'est ni un stimulant ni un obstacle qui compte. Or, cela semble dépendre des conditions à l'accueil et de la capacité des immigrants de s'adapter aux besoins du pays. Ces deux facteurs ont considérablement changé depuis quelques années.

Le Canada et les Canadiens sont confrontés à un énorme défi économique alors même qu'ils doivent s'ajuster aux nouvelles conditions du marché mondial. Notre endettement nous désavantage de plus en plus. Les nouvelles technologies exigent qu'il y ait des changements importants chez les travailleurs qui traversent des temps difficiles; les emplois sont disparus, autant pour celui qui ne possède aucune formation que pour l'étudiant ou le cadre moyen.

Le taux de chômage s'établit actuellement à 11,4 p. 100 et même davantage si l'on tient compte des chômeurs qui ont abandonné la recherche d'emploi ou des travailleurs sous-employés. Il faut ajouter à cela une politique d'immigration qui fera venir 2,5 millions de nouveaux arrivants au cours de la prochaine décennie. Plus de la moitié des immigrants qui appartiennent à la catégorie des réfugiés ou de membres d'une famille ne possèdent pas les compétences qu'exige la nouvelle situation économique.

Il y a eu une baisse des immigrants de la catégorie des indépendants, soit ceux qui possèdent des compétences professionnelles et linguistiques, leur taux est passé de 54 p. 100 en 1954 à 27 p. 100 en 1992. En contrepartie, pendant ce temps, le taux d'immigration aux fins de réunion des familles s'est accru dans les


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mêmes proportions. Les immigrants qui ne parlent ni l'anglais ni le français ne représentaient généralement que 10 p. 100 des nouveaux arrivants: l'an dernier, ce pourcentage a grimpé de près de la moitié, de sorte que plus de 100 000 des 250 000 immigrants ne possédaient aucune des langues officielles du Canada.

J'ai vu ce que ces pourcentages veulent dire dans la réalité en visitant une école de Port Moody la semaine dernière. La bonne moitié des élèves de cette école sont inscrits au programme d'anglais langue seconde. Arrivés dans un tout nouveau pays depuis à peine deux, trois ou quatre jours, les écoliers prennent leur place dans la salle de cours, bombardés de nouveaux sons et de nouvelles images.

Les décisions prises ici, à Ottawa, en matière d'immigration se traduisent par des pressions de plus en plus nombreuses exercées sur les budgets des commissions scolaires locales et sur les enseignants surmenés. La formation linguistique des nouveaux immigrants coûte actuellement plus de 100 millions de dollars par année aux contribuables canadiens.

L'élément vital de notre pays, ce sont ses habitants. Le gouvernement tente de manipuler cet élément de toutes sortes de façons afin de trouver un remède aux malaises qui frappent notre pays. L'immigration permettra-t-elle vraiment de sauver nos pensions? Arrêtera-t-elle l'hémorragie de nos recettes?

De plus en plus, il faut appliquer des solutions d'urgence pour pallier les graves séquelles que laissent les décisions prises antérieurement, soit l'éclatement des préjugés raciaux, le nombre accru d'immigrants qui comptent sur les services sociaux, la hausse de la fraude en matière d'aide sociale et de la criminalité chez les nouveaux arrivants et les pressions exercées sur notre système d'éducation.

(1150)

En toute honnêteté, je crois qu'il est temps de réexaminer les solutions appliquées. La politique d'immigration et les principes fondamentaux qui la sous-tendent doivent être réexaminés.

La semaine dernière, j'ai rencontré des représentants d'une organisation offrant des services aux immigrants chinois. Leur plus grand souci n'était pas de promouvoir la culture de ceux qu'ils représentent. Leur rôle est de fournir aux nouveaux arrivants les outils dont ils ont besoin pour refaire leur vie dans le pays qu'ils ont choisi. Les dirigeants de telles organisations ont besoin de plus en plus de ressources pour satisfaire aux besoins toujours croissants d'un nombre de plus en plus grand d'immigrants. Leur but ultime est de réussir à intégrer ces nouveaux Canadiens dans un nouveau pays prospère. À l'heure actuelle, leur efficacité se trouve réduite par la politique d'immigration et leur espoir d'un pays prospère s'évanouit devant la politique économique.

Il est donc de notre devoir de nous poser la question suivante: sur quoi se fonde une politique gouvernementale qui invite un nombre record d'immigrants et préside à la reclassification des nouveaux arrivants à une époque où l'avenir est incertain?

J'exhorte tous les députés de tous les partis à examiner de façon attentive et responsable notre politique d'immigration, pour des considérations véritablement humanitaires. En tant que députés, nous nous devons de garder la porte d'entrée au nom de tous ceux qui vivent sur notre territoire et de ceux qui se sont joints à nous. Par conséquent, nous devons adopter des mesures qui ont fait leurs preuves, qui offriront d'excellentes perspectives et qui favoriseront l'unité.

M. Peter Adams (Peterborough): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté les observations de la députée. Je dois dire que je les ai trouvées très contradictoires. J'ignore d'où la députée tient certains documents qu'elle cite.

Sans les immigrants, la province de l'Ontario, qui est celle que je connais le mieux-mais je suis persuadé que les statistiques sont à peu près les mêmes partout-aurait vu sa population décroître chaque année au cours de la dernière décennie. Dans le cas du Québec, la diminution aurait été encore plus marquée. Ce qui importe peut-être davantage pour nous tous, c'est que, en Ontario, la population était déjà à peu près au quart composée de personnes âgées. C'est là un aspect de la question. Je ne vois pas comment la députée concilie cela avec l'état de notre économie.

L'autre chose, c'est que les immigrants-et je veux parler ici des nouveaux arrivants et non des émigrants établis, dont je suis-dans ma circonscription, contribuent presque toujours à la collectivité. Ils acceptent souvent des emplois qui ne sont pas à la hauteur de leur compétence et ils travaillent très dur. Ils commencent par louer un appartement, puis ils achètent une maison modeste et y apportent petit à petit des améliorations. Ils veillent aussi à faire instruire leurs enfants.

La députée a aussi parlé d'un taux d'immigration équivalent à 1 p. 100 de la population canadienne. Elle sait pertinemment que l'immigration n'a jamais atteint un tel taux au Canada. Notre pays s'est déjà fixé cela comme objectif et c'est l'objectif actuel, mais l'immigration n'a jamais atteint 1 p. 100.

La députée a parlé de la Bosnie. Elle a parlé du chômage. Elle a parlé de compassion et d'humanité à l'égard des habitants d'autres pays. Se rend-elle compte que, rien qu'au cours de sa vie, la population mondiale va non seulement doubler, mais bien quadrupler? À supposer, soit dit en passant, que la députée ait une longévité moyenne, mais je lui souhaite longue vie. Que sommes-nous censés faire, au Canada, pendant que la population mondiale doublera, puis doublera encore?

Pour la gouverne de la députée, je dirai que 1 p. 100 de notre population-qui constitue notre objectif actuel en matière d'immigration-cela correspond à l'augmentation quotidienne de la population mondiale à l'heure actuelle. Allons-nous construire un mur autour de notre pays pour nous protéger de cette explosion démographique alors que notre population vieillira et s'enrichira de plus en plus sans se soucier des habitants des autres pays?

Mme Hayes: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations et ses questions. Je dois dire que je trouve, moi aussi, ses observations contradictoires.

Mon intervention portait essentiellement sur les nouveaux immigrants au Canada et j'estime que nous devons leur donner des possibilités lorsqu'ils arrivent et que nous devons aussi donner des possibilités aux Canadiens qui sont déjà ici. Cela devrait être notre objectif premier.

(1155)

Je n'ai rien dit au sujet d'un taux d'immigration de un pour cent, mais c'est notre objectif. Je crois que nous convenons que c'est l'objectif fixé par le gouvernement.


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Aucune étude ne dit que nous devons adopter cet objectif de un pour cent. Néanmoins, je l'ai dit tout à l'heure, je vois surgir des problèmes. Selon des chiffres publiés aujourd'hui dans le Globe and Mail, plus de la moitié des Canadiens jugent que nous acceptons trop d'immigrants. J'en conclus qu'il y a un problème de perception auquel nous devons nous attaquer.

D'où vient cette perception? En général, les nouveaux immigrants s'installent dans trois centres urbains. Ils arrivent donc dans des centres déjà soumis à des pressions et où il n'y a pas d'emplois. Le malaise vient de l'impression que nous ne pouvons pas nous occuper d'eux parce que nous n'avons pas su prévoir comment répondre à leurs besoins.

Le député a lui-même donné dans sa question les raisons qui font que notre politique d'immigration est ce qu'elle est. Le gouvernement veut faire augmenter les fonds dans les caisses de retraite parce qu'il a mal géré ces fonds dans le passé. Si les tendances actuelles se maintiennent, les caisses de retraite seront bientôt vides. Est-il juste que nous prenions des mesures pour réduire le taux de chômage des immigrants si cela laisse moins d'emplois pour la population canadienne?

Je conviens que l'immigration est nécessaire et qu'elle constitue un atout pour le Canada si elle est administrée sagement. Où est la sagesse dans notre politique actuelle? C'est à cette question qu'il faut répondre.

M. Ron MacDonald (Dartmouth): Monsieur le Président, franchement, je trouve les remarques de la députée fort troublantes.

La députée vient de dire que, selon les résultats d'un sondage publiés dans le journal aujourd'hui, il y a manifestement un problème. Peut-être que ce problème est aggravé du fait que des gens, qui se disent des leaders, prennent la parole ici et dans les assemblées législatives provinciales et font des remarques qui portent la population à croire que les immigrants sont un fardeau pour la société canadienne, sans donner de preuves à l'appui.

C'est très dangereux de faire, à la Chambre des communes, un discours qui donne de la crédibilité à un argument qui n'a absolument aucun fondement. La réalité, ce n'est pas que les immigrants deviennent un fardeau excessif pour nos grandes villes. La réalité, c'est que nous voyons arriver au Canada de plus en plus d'immigrants dont la couleur de la peau est différente de la nôtre, des immigrants qui viennent d'endroits comme l'Asie. Il semble que ce soit cela le problème. Je voudrais que la députée fasse quelques observations à ce sujet.

Mme Hayes: Monsieur le Président, je vais certainement faire quelques observations au sujet de ce que vient de dire le député.

Vous dites que je n'ai aucune preuve, que je n'ai fait que répéter quelque chose que j'ai vu dans le journal. La preuve que j'ai, c'est justement que c'était écrit dans le journal. C'est comme cela que les Canadiens voient la situation. Qu'allons-nous faire à cet égard? Je vous défie de justifier les chiffres qui sont utilisés actuellement dans le cadre de la politique d'immigration. On ne trouve aucune justification pour ces chiffres dans le monde entier, sauf au Canada, ni dans les études qui ont été faites.

Le vice-président: Je demanderais aux députés d'essayer de dire «le député» au lieu de «vous». Cette façon de procéder est censée tempérer le débat, et je crois qu'elle nous serait profitable à tous.

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, je prends la parole pour participer au débat sur le premier budget présenté à la 35e législature. Mes électeurs attendent de moi que j'apporte dans le débat une nouvelle perspective et un peu de bon sens en parlant de la façon dont le gouvernement dépense l'argent des contribuables, à quelles fins et avec quels résultats.

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Ma circonscription de la côte ouest englobe la moitié de l'île de Vancouver de même que la moitié de la côte continentale de la Colombie-Britannique.

Ma circonscription suscite beaucoup de richesse. Sa contribution à notre produit intérieur brut est une des plus élevées du pays, sinon la plus élevée. Son économie est axée sur l'exploitation des ressources naturelles. Nous avons cinq usines de pâtes et papiers et les deux machines à fabriquer le papier les plus rapides au Canada, des exploitations forestières, trois grandes exploitations minières, des scieries, des pêcheries et une industrie touristique très développée.

Mes électeurs contribuent beaucoup à la richesse du pays, mais ils ne jouissent pas du niveau de services offerts dans d'autres parties du pays. Il ne s'agit pas d'avoir plus de fonctionnaires. Nous avons déjà en moyenne 8 000 fonctionnaires fédéraux, provinciaux ou municipaux par circonscription au Canada. Ce qu'il faut, c'est une réduction et un meilleur déploiement des effectifs et l'établissement de priorités dans les services.

Le gouvernement fédéral a supprimé des postes de gardiens de phare et d'agents des pêches, soit les gens et les institutions qui assurent les services de façon irremplaçable sur le terrain. Nous savons tous que les réductions de services et d'effectifs devraient se faire au niveau de la direction intermédiaire et supérieure, pas sur le terrain.

Il y a lieu de croire que le gouvernement fédéral songe à fermer les bureaux des pêches dans les petites localités côtières de ma circonscription. Cette politique entre complètement en contradiction avec l'engagement du gouvernement à maintenir les bureaux de poste ruraux au Canada, par exemple, et est nuisible aux activités pratiques d'application des règlements et aux mesures concernant l'habitat. Ces décisions de principe envoient un message très négatif aux localités rurales. Elles envoient également un message à ceux qui se demandent si le gouvernement fédéral a la compétence voulue pour gérer cette ressource.

C'est la seule ressource gérée par le fédéral, et il ne sait même pas bien s'y prendre. Dans les secteurs de la pêche commerciale et sportive, on se demande où vont les priorités du ministère des Pêches et des Océans en matière d'application des règlements, d'habitat et de budget. Tout le monde a présent à l'esprit l'effondrement des pêches de la côte est.

Je passe maintenant au document budgétaire. Il est très décevant pour moi et mes électeurs de parler des problèmes des pêches auxquels je viens de faire allusion quand on considère que les dépenses fédérales augmentent. Le gouvernement prévoit en


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même temps une croissance des recettes de 8 p. 100 alors qu'elles avaient diminué l'année dernière. C'est absurde.

Permettez-moi de situer la dette nationale dans le contexte d'une circonscription. Le service de la dette nationale, réparti proportionnellement, coûte annuellement 17 millions de dollars à la région de Powell River. C'est de l'argent jeté par les fenêtres. Le coût total des services locaux fournis par la région de Powell River pour les services de police et de lutte contre les incendies, la collecte des ordures, l'aqueduc, les égouts, les trottoirs, les rues et tous les autres services locaux importants équivaut aussi à 17 millions de dollars par année. Si cela ne fait pas ressortir l'extravagance des dépenses fédérales et les conséquences qui en découlent, je ne vois pas ce qui peut le faire.

On peut d'ailleurs établir des comparaisons semblables entre la dette nationale et les dépenses d'autres administrations locales de ma circonscription, comme Campbell River. En Colombie-Britannique, la loi interdit à nos administrations locales d'accumuler des déficits. La dette et le déficit affaiblissent la Confédération, et le gouvernement fédéral risque de devenir impuissant à résoudre le problème. Le gouvernement ferait mieux de s'attaquer aux augmentations de dépenses. Pendant l'actuelle législature, il n'est pas essentiel de hausser les impôts.

Permettez-moi de parler du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Le taux de croissance des budgets de la plupart des ministères a été plafonné à 3 p. 100 au cours de la dernière législature. Le ministère des Affaires indiennes a toutefois échappé à cette règle. Il faudrait au moins que son budget soit gelé à son niveau de 1993-1994.

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Depuis l'exercice financier 1988-1989, le budget du ministère des Affaires indiennes a augmenté de 1,6 milliard de dollars, ce qui représente une hausse moyenne de 275 millions par année. On prévoit que, durant le présent exercice, les dépenses de ce ministère augmenteront de 396 millions de dollars par rapport à 1993-1994, ce qui représente une hausse de 8,6 p. 100. Comparons cela au budget de fonctionnement d'Environnement Canada, qui totalise 737 millions de dollars. L'augmentation dont bénéficie le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien représente près de la moitié du budget total d'Environnement Canada.

Quelqu'un peut-il croire qu'il est possible de maintenir de telles hausses de dépenses ou penser que des facteurs démographiques les justifient? Selon le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, il y a 997 000 autochtones au Canada. Les dépenses totales que le gouvernement fédéral engage pour les autochtones dépassent maintenant 7 milliards de dollars ou 28 000 $ par famille de quatre personnes. Ces dépenses ont-elles permis aux autochtones d'être davantage autonomes?

La multitude de programmes et de services fournis pour les affaires indiennes par d'autres ministères complique une situation déjà fort complexe quant aux programmes et à leur exécution.

Il n'est pas nécessaire de chercher bien loin pour trouver, au sein du ministère des Affaires indiennes, des exemples de lacunes en matière d'obligation de rendre compte. Depuis plus de 20 ans, le vérificateur général s'inquiète de la gestion des programmes et de l'exécution des services au sein de ce ministère. Dans son rapport de 1993, il dit que la Stratégie canadienne de développement économique des autochtones est une fonction où le manque d'information appropriée sur le rendement et l'évaluation empêche les collectivités autochtones, le gouvernement et le Parlement d'exiger ou de rendre des comptes. Ces lacunes ont coûté environ un milliard de dollars au contribuable depuis 1989.

Le vérificateur général a ajouté que le ministère ne pouvait pas faire la preuve que les objectifs de la stratégie étaient atteints.

Autre exemple. En 1992-1993, les Indiens inscrits et les Inuit ont reçu des services de santé non assurés pour un total de 422 millions de dollars. Ce programme relève du ministère de la Santé nationale et du Bien-être social. Le vérificateur général affirme dans son rapport de 1993 que les coûts de ce programme auraient pu être réduits de 85 millions de dollars ou de 20 p. 100 si les services avaient été offerts conformément aux directives et principes du programme national.

Le vérificateur général conclut que l'information qui lui a été fournie sur le programme reste bien en deçà de ce qu'on peut qualifier de divulgation raisonnable et adéquate.

Il est évident que des réformes s'imposent. Si le budget du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien était bloqué à son niveau de 1993-1994, cela provoquerait une remise en question des priorités qui n'a que trop tardé. La situation actuelle paralyse toute créativité.

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour dire que j'appuie le premier budget de notre gouvernement, qui a été déposé le 22 février par mon collègue, le ministre des Finances.

Ce budget mérite d'être approuvé par la Chambre parce qu'il constitue un cadre solide qui stimulera la croissance économique et pavera la voie à la responsabilité et à la modération à long terme en matière de finances publiques. En ma qualité de députée d'Edmonton-Nord-Ouest, je trouve ce budget fort encourageant parce qu'il traite de questions qui ont été soulevées par la population de ma circonscription pendant la campagne électorale, à savoir la création d'emplois, la réduction du déficit et des réformes importantes des programmes sociaux du Canada.

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En outre, je voudrais souligner quelques nouvelles concernant des activités de mon ministère, Ressources naturelles Canada.

Je voudrais d'abord parler des éléments du budget qui touchent mes électeurs de la circonscription d'Edmonton-Nord-Ouest. Le taux de chômage est élevé dans ma circonscription. Cependant, à l'aide de ce budget, le gouvernement contribuera à ramener la prospérité et à redonner espoir non seulement aux citoyens d'Edmonton, mais encore à tous les Canadiens.

Il y parviendra, notamment, en stimulant la création d'emplois par le secteur privé. Dans ma circonscription, la plus


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grande partie des emplois seront créés par les petites entreprises puisqu'elles sont plus nombreuses, se chiffrant à plus de 5 000.

Le budget reconnaît l'importance de la petite entreprise, il favorise sa croissance et encourage sa créativité et son initiative naturelles. Par exemple, nous avons diminué les cotisations d'assurance-chômage. Les entreprises économiseront ainsi 300 millions de dollars par année, qu'elles pourront réinvestir dans la création d'emplois. Le gouvernement consultera les banques pour l'élaboration d'un code de conduite pour le crédit aux petites entreprises.

Le budget prévoit aussi l'ouverture de centres des services aux entreprises dans toutes les provinces afin de faciliter la communication entre les entreprises et le gouvernement. Il crée aussi un fonds d'investissement canadien pour aider les petites entreprises à accéder au capital de risque dont elles ont grand besoin.

Ce budget traite également de la réforme des programmes sociaux, une réforme dont nous avons grandement besoin. Notre système de sécurité sociale a été conçu pour une ère différente et ne répond plus aux besoins des Canadiens. Des centaines de milliers de Canadiens sont en chômage, sont sous-employés, dépendent de l'aide sociale, trouvent le système injuste et peu stimulant et vivent dans la pauvreté.

Nous allons entreprendre cette réforme des programmes sociaux, au Canada, en mettant en oeuvre un vaste réseau de consultations qui fera appel aux autres paliers de gouvernement, au secteur privé, aux députés et aux habitants des circonscriptions qu'ils représentent. Au cours des prochains mois, les habitants d'Edmonton et d'autres régions auront de nombreuses possibilités de participer à ces consultations, et je les invite à saisir ces possibilités.

J'aimerais maintenant parler d'un autre élément-clé du budget, la réduction du déficit.

Comme l'a déclaré mon collègue, le ministre des Finances, les mesures prises dans le budget ramèneront le déficit de 45,7 milliards de dollars, en 1993-1994, à 39,7 milliards de dollars, en 1994-1995, et à 32,7 milliards de dollars, en 1995-1996. Il s'agit du budget qui, depuis dix ans, fait le plus pour réduire les dépenses.

L'un des principaux éléments du programme de réduction du déficit est la réduction importante des dépenses de la défense, une diminution de quelque 1,9 milliard de dollars au cours des trois prochaines années. On a annoncé, dans ce budget, la fermeture ou la restructuration de 21 bases et unités des Forces canadiennes. Même si ces décisions n'étaient pas faciles à prendre, elles montrent que le gouvernement a tenu sa promesse et qu'il a fait les choix difficiles qui s'imposaient pour lui permettre de reprendre le contrôle des dépenses.

Rien qu'en Alberta, les réductions des dépenses de défense permettront de réaliser des économies nettes d'environ 44 millions de dollars par an. À Edmonton, une ville fière de sa longue tradition militaire, nous savons que nous devons faire notre part pour veiller à ce que nos forces armées, quoique réduites, demeurent efficaces.

Plusieurs activités de la BFC Edmonton seront transférées à d'autres bases. Ainsi, l'escadron de recherches et de sauvetage sera transféré à Yellowknife et l'escadron de transport aérien, à Trenton et à Winnipeg. Ces changements et d'autres permettront de réaliser des économies nettes d'environ 36 millions de dollars par an.

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Par ailleurs, la Lord Strathcona Horse Brigade sera transférée de la BFC Calgary à la BFC Edmonton. En réduisant la durée du parcours jusqu'au Camp Wainwright, le principal terrain de manoeuvre de cette brigade, et en fermant les casernes Harvery, le gouvernement permettra aux contribuables d'économiser six millions de dollars par année. En outre, la fermeture de la BFC Penhold fera économiser annuellement deux millions de dollars supplémentaires.

Le gouvernement estime que, depuis de nombreuses années, notre infrastructure de défense dépasse de loin les besoins probables et raisonnables dans ce domaine. Les annonces de compressions reflètent la réalité des années 90: avec la fin de la guerre froide, il faut repenser et restructurer la présence militaire du Canada à l'étranger.

Le budget vise également à favoriser une plus grande égalité sociale de tous les Canadiens. Dans ce budget, le gouvernement investit dans les soins de santé des femmes, ainsi que dans le bien-être des enfants, des jeunes et des autochtones. Ces questions revêtent une très grande importance pour moi, tout comme pour beaucoup d'habitants de ma circonscription.

Je suis très heureuse de signaler plusieurs annonces qui découlent des promesses que nous avons faites aux Canadiens dans le livre rouge. Le budget prévoit le financement d'un centre d'excellence pour la santé des femmes, un programme de nutrition prénatale pour les femmes enceintes à faible revenu, un programme d'aide préscolaire à l'intention des autochtones, un nouveau Service jeunesse et des programmes de stage et d'apprentissage pour les jeunes.

J'estime que ces programmes, qui répondent aux besoins de ces groupes et de ces personnes, auraient dû exister depuis longtemps. La mise en oeuvre de ces initiatives montre que le gouvernement est bien déterminé à favoriser l'égalité de tous les Canadiens.

En outre, ces programmes représentent une mesure importante en vue de relever le défi que le ministre des Finances a précisé dans le discours du budget, celui de mettre en place des programmes sociaux faisant appel au sens des responsabilités, des programmes qui soient abordables.

Plusieurs aspects des mesures annoncées par le ministre des Finances auront un impact direct sur les femmes de ce pays. Par exemple, les modifications proposées au régime d'assurance-chômage aideront les femmes. Comme l'a dit le ministre des Finances, ce sont souvent les femmes qui subissent de plein fouet les conséquences des perturbations économiques et des tensions sociales.

Durant nos consultations budgétaires, a-t-il poursuivi, un certain nombre de questions ont été soulevées concernant les disparités qui existent dans le régime fiscal et les programmes de soutien du revenu.

Pour être précis, le taux des prestations d'assurance-chômage sera ramené à 55 p. 100, mais sera de 60 p. 100 pour les personnes ayant un revenu modeste et des enfants ou des parents âgés à charge. Nombre de ces personnes sont des mères seules. Des modifications seront également apportées aux dispositions régissant les travailleurs qui quittent leur emploi volontairement


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ou sont renvoyés pour inconduite. Cette mesure traduit les préoccupations de nombreuses femmes qui se sont opposées à la mise en place de ces dispositions par l'ancien gouvernement.

En outre, je suis très heureuse de voir que le ministre des Finances a annoncé qu'il donnerait suite aux recommandations du comité fédéral-provincial du droit de la famille, qui examine le régime fiscal des pensions alimentaires, ainsi que les niveaux de ces paiements et les mesures d'exécution.

Ces mesures répondent aux besoins particuliers des femmes. Elles répondent également à la nécessité urgente de réformer le système dépassé de sécurité sociale, au Canada, afin de veiller à ce que ce système incite les gens à travailler et encourage l'indépendance et non la dépendance.

De plus, le ministre des Finances a inscrit dans le budget bon nombre de mesures qui sont de nature à susciter renouveau et dynamisme sur le plan économique. Au nombre de ces mesures figure notamment le programme d'infrastructure. En Alberta, les investissements destinés à l'amélioration des infrastructures et à la création d'emplois s'élèveront à 518 millions de dollars. La création d'emplois de courte et de longue durée, surtout dans les collectivités aux prises avec un taux de chômage élevé, comme c'est le cas à Edmonton, est une nouvelle réjouissante.

Qui plus est, le programme d'infrastructure favorisera une plus grande compétitivité aux niveaux national, provincial et local, et sera très bénéfique pour l'environnement.

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Par exemple, le conseil municipal d'Edmonton envisage la réalisation de divers projets, dont la construction d'un important échangeur relié à une route pour camions, des travaux d'amélioration à l'usine d'épuration Gold Bar et le développement de son système de parcs de River Valley.

Ces programmes vont contribuer à faire en sorte qu'Edmonton continue d'être non seulement un lieu où il fait bon faire des affaires, mais également une ville réputée pour sa qualité de vie.

Jusqu'ici j'ai fait ressortir certains aspects du budget qui touchent directement les électeurs d'Edmonton-Nord-Est. J'aimerais maintenant aborder des dossiers relevant de mes fonctions de ministre des Ressources naturelles.

Je tiens d'abord à souligner le fait qu'au sein de l'industrie, le secteur des ressources naturelles est la pierre angulaire de l'économie canadienne. Dans le cadre de nos politiques économiques générales et par l'intermédiaire de mon ministère, le gouvernement s'engage à faire en sorte que les secteurs de l'énergie, des mines et des forêts continuent d'offrir des emplois aux Canadiens, de stimuler l'activité économique dans des centaines de collectivités de toutes les régions du Canada et de faire pencher la balance commerciale en notre faveur.

Avant de toucher un mot des propositions budgétaires concernant ces secteurs industriels, je voudrais faire état de deux préoccupations exprimées par les Albertains dans le cadre des discussions qui ont mené à l'élaboration de ce budget. Premièrement, avant le discours du budget, certains Albertains craignaient fortement que le gouvernement fédéral n'impose unilatéralement une taxe sur les hydrocarbures. Or, le ministre des Finances n'a pas imposé de taxe sur les hydrocarbures.

Deuxièmement, le ministre des Finances n'a pas abaissé les dégrèvements fiscaux dans le cas des entreprises privées de services publics.

Une des choses sur lesquelles le nouveau gouvernement va insister, c'est le partenariat avec tous les principaux intéressés, notamment les autres nivaux de gouvernement, l'industrie, les syndicats, etc. Finie l'époque où les gouvernements pouvaient imposer des solutions sans consulter ceux qui seront les plus touchés.

Le but de la Loi sur le transfert de l'impôt sur le revenu des entreprises d'utilité publique, que l'on peut abréger de façon pas très élégante en Loi sur le TIREUP, est de réduire les disparités fiscales entre les provinces et d'équilibrer la situation entre les sociétés d'utilité publique qui sont la propriété de l'État et celles qui sont privées, et leurs clients partout au Canada.

Les principaux bénéficiaires de cette loi sont les provinces qui ont des sociétés privées d'utilité publique comme l'Alberta, la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard. En vertu de la Loi, le gouvernement fédéral retourne aux provinces 85,5 p. 100 de l'impôt sur le revenu payé par ces sociétés.

Le gouvernement n'abolit pas la Loi sur le TIREUP, mais il prolonge les limites actuelles à sa croissance. Les Albertains ne sont pas particulièrement visés. En fait, leurs sociétés d'utilité publique sont plutôt mieux traitées par le gouvernement fédéral que par leur propre gouvernement provincial.

En 1990, le gouvernement de l'Alberta a aboli son programme équivalent au programme fédéral en vertu de la Loi sur le TIREUP.

Je voudrais maintenant parler des modifications touchant les déductions pour amortissement au titre de la catégorie 34. Cette catégorie autorise actuellement l'amortissement accéléré du matériel utilisé pour la cogénération, la récupération de chaleur, les énergies renouvelables dont le chauffage solaire actif, les petites installations hydro-électriques, l'énergie du bois et des déchets municipaux et l'énergie éolienne.

Le budget supprime la catégorie 34, mais crée une nouvelle catégorie élargie. La catégorie 34 avait été créée en 1976 et visait à encourager les entreprises à réduire le gaspillage énergétique et à utiliser des sources d'énergie renouvelable.

Sur le plan de l'efficacité, les normes de la catégorie 34 sont celles de la technologie des années 70. Vu que le but de l'amortissement accéléré est d'encourager l'utilisation de technologies de pointe, les normes devaient être révisées, et c'est ce que fait la nouvelle catégorie.

(1225)

En ce qui concerne les énergies renouvelables, nous avons créé une nouvelle catégorie élargie qui comprendra trois nouvelles sources d'énergie renouvelable. L'énergie photovoltaïque, l'énergie géothermique pour la production d'électricité et le méthane provenant des décharges et des installations de traitement des eaux usées font maintenant partie de cette nouvelle catégorie.


2105

Les initiatives entreprises dans le cadre de cette nouvelle catégorie contribueront à l'atteinte des objectifs du gouvernement en matière de réduction des gaz à effet de serre. En outre, le gouvernement examine un éventail de mesures conformément au mécanisme national de coordination des questions atmosphériques. Cette étude englobe plusieurs mesures visant à accroître l'utilisation de formes d'énergie renouvelable au Canada.

Certains ont reproché à ce budget de ne favoriser en rien la prospection minière au Canada. Tout d'abord, je voudrais préciser que le Parti libéral du Canada a été le seul à proposer un programme sur le secteur minier durant la campagne électorale.

J'ajoute que ce budget a été l'un des premiers depuis des années à répondre aux préoccupations du secteur minier, et les modifications fiscales touchant la régénération minière dont je vais parler tout à l'heure prouvent que le gouvernement entend bien assurer l'avenir de ce secteur au Canada.

Dans la politique d'exploitation des ressources minérales que nous avons établie, nous notons les graves répercussions économiques de la perte des réserves de minerai attribuable à des travaux de prospection insuffisants à la base. Le ministre des Finances a tenu compte de mes craintes au sujet des réserves de minerai et de la prospection minière.

Il a également pris en considération les préoccupations d'organismes comme le Comité de défense du Nord, l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs et les diverses associations régionales de prospecteurs et d'entrepreneurs. Cependant, même si le gouvernement souhaite prendre immédiatement des mesures pour stimuler la prospection minière et d'autres activités économiques souhaitables, il doit tenir compte des contraintes que lui impose la situation financière actuelle du pays.

Je devrais en outre signaler que cette question est examinée dans le cadre d'un processus de consultation, le projet d'exploration minière à Whitehorse. Comme les députés le savent, c'est l'industrie qui est à la base de cette initiative à laquelle participent les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les autochtones, les groupes environnementalistes et d'autres intéressés.

Le secteur minier a joué un rôle important dans la croissance économique de notre pays avant même la Confédération. Je le répète, il a démontré qu'il entendait assumer ses responsabilités à l'égard du Canada en mettant sur pied le projet d'exploration minière à Whitehorse. À la fin de septembre dernier, sous le titre «Les mines: une industrie à appuyer», l'industrie minière a lancé une campagne d'information impressionnante que mon ministère appuie de tout coeur.

Cette campagne renferme un plan en dix points qui demande au gouvernement de modifier les règles actuelles de la Loi de l'impôt qui régissent le financement de la régénération minière afin d'encourager les investissements dans les nouvelles mines. En quelques mots, la régénération minière, c'est le processus qui consiste à désaffecter et à remettre en valeur les mines épuisées, après leur fermeture. Il s'agit de ramener le site en cause à son état antérieur ou mieux. Les députés comprendront facilement que ce processus coûteux vient réaffirmer notre engagement à l'égard du développement durable.

En apportant des modifications aux règlements sur les fonds de régénération minière, le ministre des Finances a amélioré l'équité du système fiscal. Le gouvernement a adopté une position plus juste tant à l'égard des petites que des grandes entreprises. Les petites entreprises exploitant une seule mine sont ainsi mises sur un pied d'égalité avec les grandes sociétés minières.

Grâce à la nouvelle mesure, de telles petites entreprises pourront profiter directement d'une déduction dans la mesure où les gouvernements provinciaux exigent qu'elles contribuent à un fonds de régénération minière.

(1230)

Bref, la mesure prise par le ministre des Finances est bénéfique pour la protection de l'environnement, elle instaure une plus grande équité dans le système fiscal et augmente l'encaisse des petites et des grandes entreprises minières.

Cette mesure représente aussi, pour le gouvernement du Canada, un investissement annuel d'environ 15 millions de dollars dans l'industrie minière. Je crois qu'elle répond à certaines des préoccupations formulées dans la campagne «Les mines: une industrie à appuyer». Elle contribuera aussi à l'amélioration du climat pour les investisseurs, sans donner lieu à ce qui pourrait être considéré comme une intervention imprudente d'un point de vue financier.

Je devrais ajouter qu'il est faux de croire que cette nouvelle mesure crée un système de double imposition pour les entreprises minières. Bien que les gains des fonds soient ajoutés deux fois au revenu imposable, il existe aussi une déduction équivalant au montant des dépenses engagées pour la régénération. Par conséquent, en réalité, les revenus de ce fonds ne sont imposés qu'une seule fois.

Enfin, j'aimerais souligner plusieurs mesures annoncées par le ministre des Finances et qui auront un effet bénéfique sur les secteurs clients du ministère des Ressources naturelles.

Comme je le disais plus tôt, on estime que la réduction des cotisations d'assurance-chômage laissera aux entreprises 300 millions de dollars qui devraient servir à remettre les gens au travail. Je suis convaincue que cela poussera les petites entreprises qui travaillent dans les secteurs de l'énergie, des mines et de la forêt, d'un bout à l'autre du pays, à embaucher davantage.

Par ailleurs, on s'attend que le Service jeunesse fournisse aux jeunes Canadiens l'occasion d'acquérir une précieuse expérience pratique dans le secteur forestier. Le programme d'apprentissage permettra à d'autres jeunes Canadiens d'acquérir une expérience précieuse dans les trois secteurs qui relèvent de mon ministère.

Le réseau technologique représente un premier pas vers l'établissement de liens plus étroits entre les laboratoires fédéraux de recherche et de développement, les universités et le secteur privé. Ces liens seront d'autant plus importants lorsque tous les pays du monde chercheront à se brancher sur l'autoroute électronique pour améliorer leur compétitivité.

Outre l'accroissement possible de la demande en produits de la forêt, le Programme d'aide à la remise en état des logements


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pourrait également entraîner un accroissement de la demande en produits consommant peu d'énergie mis au point par l'industrie, en collaboration avec CANMET, organisme de mon ministère chargé de la recherche et de la technologie.

La redéfinition de la participation du Canada au programme spatial donnera un nouvel élan au développement du secteur de la télédétection dans lequel le Canada excelle. Comme le savent les députés, le Centre canadien de télédétection, qui est une division du secteur des levés, de la cartographie et de la télédétection de mon ministère, a presque a lui seul catapulté le Canada dans le domaine spatial au début des années 70.

Monsieur le Président, je vois qu'il me reste guère de temps.

Le président suppléant (M. Kilger): J'allais justement demander à la ministre de me dire de combien de temps elle avait encore besoin.

Mme McLellan: Deux minutes.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre consent-elle à l'unanimité à donner à la ministre le temps de conclure?

Des voix: D'accord.

Mme McLellan: Monsieur le Président, les deux dernières activités que j'ai mentionnées ne témoignent que d'une infime partie du rôle important de mon ministère dans le développement de l'expertise du Canada en sciences et en technologie.

Je puis assurer aux députés que le ministère des Ressources naturelles tient à améliorer l'efficacité de ses activités, afin de contribuer au maximum à l'amélioration des ressources du Canada en sciences et en technologie, parce qu'elles sont un élément majeur dans nos perspectives de croissance économique et de création d'emplois.

En terminant, à titre de députée d'Edmonton-Nord-Ouest et de ministre des Ressources naturelles, je demande instamment à la Chambre d'appuyer les mesures annoncées par mon collègue, le ministre des Finances, à l'occasion du premier budget du gouvernement.

Le Canada devra relever des défis importants d'ici le siècle prochain. Ces mesures sont autant d'interventions préliminaires utiles et fructueuses, qui rendront le Canada plus concurrentiel sur les marchés mondiaux et redonneront du travail aux Canadiens.

On a beaucoup parlé de la foi que manifestait le gouvernement dans le concept du développement durable. Évidemment, nous devons avancer avec précaution vers cet objectif, pour nous assurer que nos décisions respecteront un équilibre entre les facteurs environnementaux et économiques.

(1235)

Pour le moment, nous devons progresser prudemment en matière de développement durable. Nous savons très bien que, si nous nous faisons mal comprendre des intervenants du marché, notre pouvoir de sensibilisation aux questions environnementales pourrait en prendre un coup. Tous les Canadiens doivent chercher à équilibrer leurs objectifs environnementaux et financiers. C'est aussi simple que cela.

En conclusion, je crois que ce budget rallumera la confiance des Canadiens, le genre de confiance qu'il faut pour que des centaines de milliers de nos concitoyens retournent sur le marché du travail et satisfassent leur désir d'apporter une contribution positive à l'avenir de notre grand pays.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, je pense que la secrétaire d'État au Développement des Ressources humaines n'a pas très bien compris le budget, en tout cas pas de la même façon que moi. D'une part, je ne comprends pas que, en tant que secrétaire d'État au Développement des Ressources humaines, elle ait laissé le ministre des Finances augmenter de 800 millions les cotisations à l'assurance-chômage. D'autre part, je ne comprends pas non plus, elle qui doit aider les citoyens à mieux s'en sortir, qu'elle ait également laissé le ministre des Finances augmenter la période d'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage. Comment se fait-il qu'elle ait aussi laissé le ministre des Finances réduire le nombre de semaines de prestations d'assurance-chômage? Devant ces faits, il me paraît évident que la ministre n'a pas beaucoup d'influence auprès du ministre des Finances.

Elle a également parlé de recherche et de développement. J'aimerais lui rappeler que, au moment où on se parle, on dépense un milliard de dollars de plus par année en Ontario qu'au Québec en recherche et développement, ce dont je l'avise, car elle devrait à l'avenir surveiller et faire en sorte que l'équité soit remise en place.

Elle a également parlé des infrastructures, que cela créerait beaucoup d'emplois. Je lui dirais qu'il n'en est rien, puisqu'en augmentant de 800 millions les cotisations à l'assurance-chômage, c'est autant d'argent de moins que les consommateurs pourront dépenser. D'une main, on diminue le pouvoir d'achat de 800 millions de dollars, et de l'autre, on donne un milliard de dollars pour les infrastructures, ce qui égale zéro pour la création d'emplois.

Si on examine le Budget, on peut dire qu'il ne s'agit pas d'un budget visant à créer des emplois, mais bien à diminuer les emplois.

De plus, l'impôt des entreprises est augmenté de 1,7 milliard, l'impôt et taxes des particuliers, de 1,8 milliard, et ce pour les trois prochaines années.

Si on pense que tout cela va créer des emplois, je pense que cela aura exactement l'effet contraire. C'est pourquoi je suis complètement en désaccord avec la secrétaire d'État. Et là j'en viens à ma principale question puisqu'elle la concerne directement. Comment se fait-il que, en tant que responsable, elle ait laissé le ministre des Finances augmenter les cotisations à l'assurance-chômage pour l'année en cours et réduire les prestations à l'assurance-chômage? Autrement dit, elle laisse le ministre des Finances faire le contraire de ce qu'elle devrait faire dans son propre ministère, qui est d'assurer un meilleur confort aux citoyens?

[Traduction]

Mme McLellan: Monsieur le Président, mon collègue semble se méprendre sur ce que je suis et ce que je fais. Je ne suis pas la


2107

secrétaire d'État responsable des ressources humaines mais la ministre des Ressources naturelles. Il y a une différence, même si je suis prête à reconnaître que les ressources humaines constituent notre ressource naturelle la plus importante. Cela dit, je voudrais répondre à certaines des observations faites par mon savant collègue.

(1240)

En ce qui concerne l'assurance-chômage, la réforme du système est déjà engagée, comme je l'ai déjà indiqué. Nous mettrons en oeuvre un processus de consultation étendu auprès de la population canadienne, mais d'ici là nous nous intéresserons d'abord aux personnes qui sont le plus dans le besoin et nous verrons à ce que leurs prestations soient haussées. Les personnes à faible revenu ayant des personnes à leur charge, que ce soit des enfants, des personnes âgées ou des parents handicapés, verront leurs prestations passer à 60 p. 100.

En ce qui concerne les emplois et la création d'emplois, je voudrais rassurer mon collègue; le gouvernement considère la petite entreprise comme la principale source d'emploi au Canada.

Je rappelle à ce sujet les mesures prises par le ministre des Finances et le gouvernement en vue d'encourager les petites entreprises à créer des emplois. Le ministre des Finances a lancé un défi aux petites entreprises dans le budget et je n'ai aucune raison de croire qu'elles ne sauront pas relever ce défi et créer des milliers, voire des dizaines de milliers d'emplois à la grandeur du pays.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, en concluant sa réponse à la question précédente, la ministre a dit qu'elle avait toutes les raisons de croire que le monde des affaires allait relever le défi et créer plusieurs milliers d'emplois. Si c'est le cas, pourquoi mettre en oeuvre un programme des infrastructures qui coûtera aux contribuables encore six milliards de dollars?

Dans son discours, la ministre a demandé notre appui en faveur du budget qu'a déposé le ministre des Finances. Elle a parlé de la création d'emplois par les petites entreprises. Pourquoi donc aurions-nous besoin d'un programme des infrastructures de six milliards de dollars qui alourdira notre fardeau fiscal et endettera davantage les contribuables, alors que nous savons et soutenons depuis longtemps qu'il faut d'abord réduire les impôts et permettre aux entreprises de faire leur travail pour que commence la création d'emplois.

En parlant de l'assurance-chômage, elle a félicité le gouvernement d'avoir réduit les prestations d'assurance-chômage. Il faut se rappeler que, le 1er janvier, le gouvernement avait augmenté ces prestations et que c'est cette hausse qu'il supprime aujourd'hui. L'effet net est donc nul. Le gouvernement a donc tort de se vanter de réduire les prestations d'assurance-chômage.

La ministre loue ce budget qui ramène le déficit à 32 milliards de dollars. Or, la ministre a reconnu que le montant tomberait de lui-même au cours de la prochaine année pour s'établir à 41 milliards de dollars.

Je demande donc à la ministre pourquoi elle sollicite notre appui alors que le ministre a présenté un morne budget qui n'a pas été accepté par les Canadiens, qui l'accusent de ne s'être même pas attaqué au déficit et qui s'endette encore de 100 milliards de dollars.

La ministre aurait-elle l'obligeance d'expliquer pourquoi nous devrions appuyer le budget déposé par le ministre, parce que ce n'est pas du tout mon avis?

Mme McLellan: Monsieur le Président, en ce qui concerne le programme d'infrastructure et les petites entreprises, permettez-moi de dire qu'effectivement ces dernières créeront des emplois au Canada, mais sait-on ce qu'il leur faut pour créer des emplois, rénover et reconstruire l'infrastructure? Il leur faut des réseaux de transports publics, des routes et des systèmes d'égouts qui soient en bon état, ainsi que de l'air pur. Voilà ce dont elles ont besoin pour relever la concurrence partout dans le monde.

Il est intéressant de noter que nos principaux concurrents mondiaux, notamment l'Allemagne, le Japon et les États-Unis, consacreront plusieurs milliards de dollars au cours de la prochaine décennie pour rénover leurs infrastructures. Pourquoi? Parce qu'ils savent que le secteur public est responsable de fournir la base et les matériaux qui permettent ensuite au secteur privé de faire de son mieux pour créer de la richesse et remettre les gens au travail.

(1245)

Voilà pourquoi le gouvernement, qui s'est engagé à l'égard de la planification à long terme, s'engage à court terme à rénover les infrastructures au Canada.

[Français]

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Monsieur le Président, je suis heureux de me lever en cette Chambre aujourd'hui pour prendre la parole au nom de mes concitoyens et concitoyennes de Mégantic-Compton-Stanstead en ce qui concerne le Budget déposé dernièrement par le ministre des Finances. Je peux vous assurer que les gens de mon comté, comme ceux de partout ailleurs au Québec et au Canada, ont pris connaissance de ces mesures et, tout comme nous de l'opposition officielle, sont très préoccupés par les conséquences qu'aura ce budget dans leur quotidien.

Lorsque, dans les derniers jours, je réfléchissais à ce que j'allais dire au cours de ce débat, mon attention a été attirée par la une du quotidien La Tribune du samedi 5 mars dernier et j'en ai même été saisi. Deux manchettes ont, dans les faits, retenu mon attention. Je voudrais préciser que le journal La Tribune, qui appartient au groupe Power Corporation, n'a rien à voir avec le Bloc québécois et n'est en aucune façon sympathisant du Bloc québécois. J'inviterais mes collègues des deux côtés de la Chambre à s'abonner à ce quotidien qui, soit dit en passant, parle de la région de l'Estrie. En lisant la page éditoriale, ils comprendront que ce journal n'a rien à voir avec les positions habituellement adoptées par le Bloc québécois.

Comme je viens de le mentionner, ce quotidien est vendu en Estrie et même au-delà, donc, naturellement, il couvre égale-


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ment le comté de Mégantic-Compton-Stanstead que j'ai l'honneur de représenter en cette Chambre.

Je le disais tantôt, deux manchettes ont, dans les faits, retenu mon attention. La première se lisait comme suit, et je veux la montrer à mes collègues députés: «Records d'assistés sociaux.»

Dans ma région, 21 539 personnes ont reçu un chèque d'assurance-chômage en janvier dernier, selon les données fournies par le ministère du Développement des ressources humaines. Pouvons-nous décemment parler de développement des ressources humaines avec un tel taux de chômage? En plus, 17 600 personnes ont touché un chèque d'aide sociale pendant la même période, sans tenir compte des dépendants autant des personnes qui ont reçu de l'assurance-chômage et de l'aide sociale. C'est donc 28,6 p. 100 de la population active qui se retrouve sans travail.

Or, c'est précisément à ces gens démunis que le gouvernement libéral s'est attaqué en déposant le Budget 1994-1995, dont le ministre des Finances se fait le défenseur inébranlable.

La deuxième manchette de ce journal est une déclaration du premier ministre canadien qui a suscité-non pas la manchette, mais la déclaration du premier ministre-les applaudissements de 700 personnes venues l'écouter au cours d'un déjeuner offert par la Chambre de commerce de Saskatoon. Je présume que lors de ce déjeuner il devait y avoir très peu de chômeurs et de chômeuses. Cette manchette se lit comme suit, et on rapporte les paroles du premier ministre: «Arrêtez de vous plaindre. Il est temps d'arrêter de geindre, de laisser tomber la Constitution et de penser à créer des emplois.» Et le premier ministre en remet: «Arrêtez de pleurnicher, vous savez de quoi je parle, et vous progresserez.»

Les propos du premier ministre révèlent un mépris inadmissible à l'endroit de ces milliers de personnes qui se retrouvent en chômage, non pas en raison de leur propre turpitude, mais bien en grande partie à cause de l'incurie administrative manifestée par tous les gouvernements fédéraux des 20 dernières années, en particulier celui de l'ex-gouvernement de Pierre Elliot Trudeau dont l'actuel premier ministre a été le ministre des Finances, l'un des initiateurs de la monstrueuse spirale du déficit qui a abouti à une dette de plus de 500 milliards de dollars.

(1250)

On comprend, d'autre part, que le premier ministre ait été applaudi par les mieux nantis de notre société, alors que ce gouvernement maintient intact le régime scandaleux des fiducies familiales.

Je veux souligner un autre effet pervers de ce budget, en rapport également avec le dossier de l'assurance-chômage. Je me réfère à l'étude réalisée par trois économistes de l'Université du Québec à Montréal, MM. Pierre Fortin, Pierre-Yves Crémieux et M. Marc Van Audenrode. À quelles conclusions ces économistes en arrivent-ils?

Ils font remarquer que les nouvelles mesures concernant l'assurance-chômage sont, dans leur ensemble, plus sévères que la réforme conservatrice de 1990, réforme qui avait suscité les hauts cris des représentants de l'actuel gouvernement libéral, qui étaient alors dans l'opposition, et exigent des chômeurs qu'ils assument, par la réforme de l'assurance-chômage que l'on entreprend maintenant, 60 p. 100 des nouvelles compressions budgétaires annoncées par ce gouvernement.

En effet, «les toutes nouvelles compressions sont de l'ordre de 4,1 milliards de dollars, dont 2,4 proviennent des économies réalisées grâce aux changements du programme d'assurance-chômage», nous révèlent les trois économistes québécois.

Quand on prend connaissance de mesures semblables, comment peut-on présumer de la bonne foi du gouvernement lorsqu'il prétend vouloir améliorer les régimes de sécurité du revenu en procédant à une réforme en profondeur, alors qu'avant même que la première ligne de cette réforme ne soit connue, l'on sait déjà que le gouvernement actuel entend couper 5 à 6 milliards dans l'assurance-chômage et on ne sait combien dans le programme d'assistance publique du Canada? Pas plus tard qu'hier, le ministre du Développement des ressources humaines ainsi que le premier ministre annonçaient, en dehors de cette Chambre, que non seulement ils allaient couper dans l'assurance-chômage et dans l'aide sociale, mais également dans les pensions de vieillesse.

En conclusion, j'implore le ministre des Finances d'intercéder auprès du premier ministre pour que celui-ci fasse preuve davantage de compassion face aux démunis et de bon sens dans l'administration fédérale. Si le gouvernement veut vraiment réaliser une économie de 280 millions sur le dos du Québec, il n'a qu'à lui confier l'administration de la formation professionnelle comme le demande l'ensemble des intervenants du Québec, et il réalisera ainsi une économie de 250 millions par année, tout en s'assurant que des services de qualité supérieure seront offerts aux personnes en recherche d'emploi.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, je voudrais poser la question suivante à mon collègue: Croit-il que les victimes qu'il a mentionnées pendant son discours le sont devenues à cause des politiques de l'ancien gouvernement conservateur, ou sont-elles victimes des politiques du nouveau gouvernement libéral en place depuis un peu plus de quatre mois? Donc, ces gens sont des victimes de quelle politique? Voilà ma première question. J'aimerais qu'on me donne une réponse très honnête à une question très spécifique.

En outre, je veux lui adresser une deuxième question. Il a dit que le premier ministre du Canada, le très honorable Jean Chrétien, avait fait un discours où il a indiqué qu'il fallait avoir une attitude positive, qu'il fallait arrêter de se plaindre, etc.

(1255)

Croit-il vraiment que ce premier ministre ciblait les gens qui sont au chômage ou ceux qui reçoivent de l'aide sociale? Franchement, c'est ce que j'ai compris, et si c'est le message qu'il donnait, je suis très, très déçu parce qu'aucun député, d'aucun parti en cette Chambre, que ce soit le premier ministre ou quelqu'un d'autre, ne souhaiterait un tel malheur à qui que ce


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soit. Si j'ai mal compris, j'aimerais être corrigé; si j'ai bien compris, j'aimerais qu'il supprime ce commentaire.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Monsieur le Président, je répondrai d'abord à la première question de mon collègue, lorsqu'il se réfère à la responsabilité de son gouvernement par rapport à l'état de la situation de l'économie canadienne. Je vais revenir sur ce que je viens de dire au cours des dix dernières minutes, et dont l'étude faite par les économistes de l'Université du Québec fait mention de façon très éloquente. Je rappelle les chiffres, toujours selon cette étude des économistes qui, incidemment, a été publiée dans le journal La Presse de lundi dernier, et je cite:

Le budget fédéral prévoit en effet une diminution nette du déficit de 8 milliards pour l'exercice financier 1995-1996. Cependant, un peu moins de la moitié de ces compressions avaient déjà été proposées par le budget conservateur précédent.
Les toutes nouvelles compressions libérales sont donc de l'ordre de 4,1 milliards. De cette somme, 2,4 milliards proviennent des économies réalisées grâce aux changements au programme d'assurance-chômage.
Donc, la responsabilité appartient autant au gouvernement précédent qu'à l'actuel gouvernement car en fait on a simplement changé de nom, on est passé des conservateurs aux libéraux, mais les mesures sont les mêmes.

Alors, oui, il y a une responsabilité de l'actuel gouvernement et il y a une responsabilité pour l'état dramatique, au niveau économique, dans lequel on se retrouve présentement. Je l'ai dit, l'actuel premier ministre, lorsqu'il était ministre des Finances il y a une quinzaine d'années et plus, a été un de ceux qui a commencé cette tragédie des déficits qui fait qu'aujourd'hui on se retrouve avec une dette qui dépasse les 500 milliards.

Sur le deuxième point, je répondrai à mon collègue que je crois que les gens de tous les partis sont sincères lorsqu'ils s'apitoient sur le sort des chômeurs et des chômeuses ou des assistés sociaux partout au Canada, sauf que c'est sur les gestes, sur les actions qu'on juge un gouvernement.

Dans ce budget, cher collègue, les coupures qui sont faites s'adressent aux chômeurs et aux chômeuses. Je reprends l'exemple des fiducies familiales au sujet desquelles on ne fait rien, alors qu'on aurait pu aller chercher là immédiatement des sommes importantes.

Si le premier ministre ou les membres du gouvernement ne s'adressent pas aux chômeurs et chômeuses lorsqu'ils disent d'arrêter de se plaindre, je voudrais qu'ils m'indiquent à qui ils s'adressent. Les chômeurs que j'ai rencontrés dans ma circonscription au cours de la semaine dernière se sentent touchés par ces remarques.

M. René Laurin (Joliette): Monsieur le Président, nous en sommes aujourd'hui à la quatrième journée de débat sur le budget de 1994-1995. Ce budget prévoit des dépenses principales de 160,7 milliards de dollars, lesquelles seront supérieures au revenu anticipé de 39,7 milliards de dollars.

Bien que le déficit prévu reflète une légère diminution de 0,2 p. 100 par rapport à l'année 1993-1994, il n'en demeure pas moins un fardeau immense pour les Canadiens et les Canadiennes, et particulièrement pour ceux et celles de la classe moyenne, ceux et celles de la classe des plus démunis.

(1300)

En effet, ce budget demande aux chômeurs de se serrer davantage la ceinture. Il demande à la classe moyenne de renoncer à des augmentations de salaire, qu'elle a pourtant sacrifiées depuis les quatre dernières années. Il demande aux personnes âgées de réduire leur propre sécurité. Il demande aux petites et moyennes entreprises d'attendre encore la reprise économique qui viendra, naturellement, avec la fin de la récession. Il demande aux municipalités qui, dans plusieurs cas, n'en ont pas les moyens de s'endetter encore plus pour améliorer leurs infrastructures et créer quelques milliers d'emplois non durables.

Par ailleurs, ce budget rassure les mieux nantis de notre société en maintenant la plupart des avantages qui leur permettront d'agrandir la marge de richesse les séparant de leurs concitoyens moins fortunés. Les riches pourront continuer de s'enrichir à l'aide d'abris fiscaux. Les grandes familles pourront continuer de soustraire leur fortune à l'emprise du fisc par le maintien des fiducies familiales. Les grandes compagnies pourront continuer d'encaisser des millions de dollars de profits non imposés grâce aux paradis fiscaux. Les 90 000 compagnies qui, en 1987, ont réalisé 27 milliards de dollars de profits sans payer un sous d'impôt, selon le professeur Léopold Lauzon, pourront continuer leurs activités sans craindre le fisc. L'économie souterraine pourra continuer de s'épanouir.

Pourtant, à elle seule, la contrebande des spiritueux, selon l'Association des distillateurs canadiens, représenterait un manque à gagner de 1,2 milliard de dollars annuellement pour l'ensemble des gouvernements au Canada. En novembre dernier, la maison de sondage Gallup a demandé aux Québécois et aux Canadiens s'ils avaient contribué à l'économie souterraine durant les 12 derniers mois; 33 p. 100 des Canadiens et 42 p. 100 des Québécois ont avoué, candidement, avoir payé comptant des achats en vue d'éviter le paiement des taxes imposables.

En fait, tout se passe comme s'il était normal que dans notre société qu'on favorise l'émergence de deux catégories de citoyens, c'est-à-dire les démunis avec leur lot d'indigence et de pauvreté et les riches avec leur exclusivité de confort et d'abondance. La noble définition de la société juste préconisée par les libéraux fédéraux, depuis l'époque de M. Trudeau, est très loin de la réalité et de la perception qu'en ont les Canadiens.

Le déficit budgétaire canadien est un mal chronique et le gouvernement fédéral est le premier responsable de l'endettement public du Canada puisque près de 80 p. 100 de la dette totale du secteur public canadien lui est attribuable. Pourtant, le vérificateur général nous confirme que depuis quelques années le gouvernement fédéral exerce un assez bon contrôle de ses dépenses budgétaires. C'était vrai aussi dans les derniers temps du gouvernement conservateur. Qu'en est-il alors?

Pour bien comprendre où se situe la source du problème de l'endettement fédéral, il faut savoir que la dette est le résultat de l'accumulation des déficits à travers le temps. Or, si nous examinons l'évolution du déficit par rapport au PIB, nous sommes


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forcés de constater que la source de l'explosion de la dette se situe principalement sous le règne des libéraux.

En effet, de 1970 à 1985, le rapport du déficit sur le PIB est passé d'un surplus de 0,3 p. 100 à un déficit de 8,5 p. 100 du PIB, un sommet inégalé depuis.

(1305)

Il faut noter aussi qu'habituellement la croissance des recettes budgétaires suit de près celle du PIB. Par contre, pendant l'année financière 1992-1993, les recettes budgétaires du gouvernement fédéral ont diminué de 0,41 p. 100 malgré une croissance du PIB de 2,6 p. 100 pendant la même période.

Depuis, le phénomène s'aggrave. En effet, selon les prévisions du ministère des Finances, les recettes budgétaires seront à la baisse de 3,74 p. 100 pendant l'année financière 1993-1994, soit une baisse de 4,592 milliards de dollars. Ce résultat est plus que confirmé par les résultats des huit premiers mois de la présente année financière, puisque les recettes budgétaires du fédéral affichent une baisse de 5,2 p. 100 par rapport à la même période l'année précédente.

Or, pendant les deuxième et troisième trimestres de 1993, le PIB a augmenté respectivement de 3,6 p. 100 et de 3,7 p. 100 en taux annuel. La baisse des revenus provient surtout de l'impôt sur le revenu des particuliers, une autre indication que le seuil de tolérance fiscal des contribuables a été dépassé.

Malgré l'ampleur du déficit et de la dette nationale, les contribuables canadiens accepteront peut-être qu'un effort additionnel et ultime leur soit demandé, à condition qu'il soit réparti équitablement sur toutes les classes de la société et sur tous les agents économiques qui la composent; à condition aussi que leurs sacrifices et privations servent vraiment et exclusivement à l'amélioration de leur situation économique, personnelle et collective. Pour garantir aux contribuables canadiens que ces conditions soient respectées et que l'objectif soit atteint, il incombe au gouvernement de mettre en place, immédiatement, des mécanismes de mesures propres à informer la population adéquatement et rapidement.

Tout étant relatif et complexe à la fois, il n'est pas facile pour le commun des mortels de se faire une idée juste de la situation financière du pays. Comme il arrive souvent que les spécialistes divergent d'opinions quant à la meilleure façon de régler la situation économique du pays, je comprends facilement qu'il soit difficile pour un citoyen non averti de faire un choix judicieux entre ses intérêts personnels immédiats et les intérêts supérieurs de la nation à plus long terme.

Par contre, il faut croire en la capacité de M. Tout-le-Monde de porter un jugement collectif adéquat si on lui fournit des informations claires et précises, ou encore des indicateurs simples. Dans ce contexte, et comme le souligne le vérificateur général, au chapitre 5 de son rapport à la Chambre des communes, il est primordial que le gouvernement donne à la population et à ses représentants élus, les outils nécessaires pour comprendre les bases du problème.

Il faut qu'à l'aide d'instruments simples et d'informations périodiques et fréquentes, les Canadiens puissent évaluer les prévisions et les réalisations du gouvernement et obtiennent la justification des écarts entre les deux.

Les Canadiens doivent être bien informés, et rapidement, des conséquences futures de leurs choix dans l'immédiat. Par exemple, si on avait bien expliqué aux Canadiens que les révisions apportées au plan économique de 1992 dans le Budget de 1993 avaient fait augmenter de 8 milliards de dollars le déficit prévu pour 1993, et si on leur avait expliqué clairement que cela pourrait se traduire par une augmentation de la dette accumulée de 65 milliards de dollars six ans plus tard, cela aurait démontré que l'impact raté des objectifs du gouvernement entraîne parfois des coûts futurs non négligeables. C'est du huit pour un, en l'espace de six ans. C'est ce genre d'information dont les contribuables ont besoin pour comprendre l'urgence de la situation.

(1310)

Plus les Canadiens seront informés sur la situation financière du gouvernement, moins ils risquent d'être exploités par des intérêts douteux, et mieux ils seront en mesure de comprendre lorsque des décisions difficiles seront prises.

Je terminerai en vous disant que si le gouvernement actuel croit sincèrement qu'il lui est possible d'atteindre les objectifs économiques et financiers recherchés par le présent Budget, qu'il ait le courage de ses convictions et qu'il donne immédiatement à la population les mécanismes d'évaluation appropriés pour que tous les Canadiens soient en mesure de juger bien avant les prochaines élections si leur choix démocratique de ce gouvernement a été le bon choix.

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Je dirai au député d'en face, monsieur le Président, que j'ai été très étonné qu'il ne signale pas, dans le cours des observations qu'il a présentées aujourd'hui sur le budget, les deux initiatives dont il a parlé dans son allocution prébudgétaire et qu'il a expressément demandé au gouvernement d'inclure dans le budget.

Je parle de l'allocution que le député a présentée lors de la journée de consultation sur le budget et au cours de laquelle il a parlé avec passion et avec conviction de la nécessité de maintenir le régime d'accession à la propriété, qui permet aux acheteurs d'une première maison d'utiliser une partie de leur REER à cette fin.

Je me souviens d'avoir alors pris la parole pour dire au député qu'il avait été très convaincant.

Nous avons fait ce que le député nous avait demandé de faire puisque, comme vous le savez, cette mesure est prévue dans le budget mais, chose plutôt curieuse, le député n'en a pas soufflé mot.

Son idée était bonne et elle fait désormais partie du programme global prévu dans le budget en vue de redonner du travail aux Canadiens. Le député n'ignore pas que, à la faveur des faibles taux d'intérêt qui sont imposés à l'heure actuelle, les jeunes familles pourraient avoir la chance d'acquérir une première maison, stimulant par la même occasion la création d'emplois dans le secteur de la construction.

Redonner du travail aux Canadiens, c'est ce que nous essayons de toutes nos forces de faire, et le député a eu là une excellente idée. Je m'étonne, toutefois, qu'il n'ait pas signalé que le ministre des Finances y avait donné suite.


2111

Je tiens à dire au député qu'il n'est pas très raisonnable de s'intéresser seulement aux quelques lacunes que peut présenter le budget en ce qui concerne les chômeurs. Nous savons tous ici que ce budget est particulièrement dur pour les chômeurs, mais nous nous efforçons de leur redonner du travail.

Il me semble que le député aurait dû saluer les mesures budgétaires qui favorisent la petite entreprise, en particulier l'étude que nous menons au Comité de l'industrie en vue de mettre davantage de capitaux à la disposition de la petite entreprise. Beaucoup de députés du Bloc y participent de façon très constructive.

Ce que je veux faire valoir au député, c'est que si ce budget mérite peut-être des critiques constructives, l'opposition doit néanmoins reconnaître qu'il prévoit aussi de bonnes mesures.

(1315)

Nous avons, en tant que députés, la responsabilité de redonner espoir aux gens qui s'efforcent de relancer notre économie. Le député n'en conviendra-t-il pas?

[Français]

M. Laurin: Monsieur le Président, je ne voudrais pas que mon collègue soit trop déçu de ne pas avoir entendu mes remerciements. Toutefois, il me fait plaisir de lui dire aujourd'hui merci pour une des nombreuses mesures qu'on avait suggérées et qui a été maintenue par le Parti libéral.

Comme il n'y en a pas eu beaucoup, vous conviendrez que je ne peux pas les remercier pendant dix minutes, cela prendrait trop de temps. Je préfère lui laisser le soin de me rappeler qu'il m'avait félicité et cela m'a d'ailleurs fait grandement plaisir.

Quant aux autres mesures, particulièrement sur le chômage, je voudrais signaler, et je l'ai d'ailleurs signalé dans mon discours, que les démunis allaient peut-être encore une fois accepter un effort ultime, un effort additionnel. On en parle dans nos comtés lorsqu'on rencontre les gens. Si les gens ordinaires pouvaient avoir la garantie que leur effort ultime, consenti allait servir à améliorer leur situation financière, à réduire le déficit du pays, je pense que ces gens-là seraient d'accord pour le faire. Cela à condition aussi de ne pas être les seuls à mettre de l'argent dans le plateau. C'est ce qu'on n'a pas encore obtenu du gouvernement.

Les démunis sont touchés, la classe moyenne est touchée, mais les plus riches de la société ont conservé leurs principaux privilèges. Ils ne sont touchés que symboliquement. C'est ce que les plus démunis trouvent inacceptable. Ils se disent: Si nous faisons partie intégrante de cette société, en faisons-nous partie intégrante seulement lorsqu'il faut faire un effort fiscal? Est-ce que nous sommes là seulement pour payer? Sommes-nous là aussi pour recevoir nos privilèges?

L'humble privilège que peut obtenir une personne démunie c'est de toucher le chèque d'assurance-chômage lorsqu'elle est en période d'inactivité, involontaire la plupart du temps. Au lieu d'accorder cela aux plus démunis, on a augmenté les conditions pour avoir accès à l'assurance-chômage.

Je ne pense pas qu'on soit dans une société juste, tant réclamée, tant défendue par les libéraux, et il me fera plaisir, dans un prochain discours, de remercier le député d'en face et son gouvernement s'ils veulent bien accéder aux nombreuses autres demandes que nous avons faites.

Le président suppléant (M. Kilger): Je veux me joindre à tous mes collègues en Chambre aujourd'hui, tant d'un côté que de l'autre, pour vous remercier de votre coopération aussi.

Je donne maintenant la parole au député de Rosedale.

[Traduction]

M. Bill Graham (Rosedale): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté que je prends la parole pour la première fois à la Chambre des communes. Avant de présenter mes observations sur le budget, je voudrais décrire ma circonscription à l'intention de mes collègues.

Je suis très fier de représenter la population de la circonscription de Rosedale et de remplacer le grand libéral qui a été le dernier député libéral de Rosedale, l'honorable Donald Macdonald. Je ne prétends pas être du même calibre que lui, mais je suis sûr que vous, monsieur le Président, et tous ses amis à la Chambre savez à quel point ce serait une tâche difficile.

Je voudrais commencer en faisant remarquer à mes collègues que le nom de Rosedale ne donne peut-être pas une idée juste de toute la diversité de ma circonscription. Je voudrais énumérer tous les secteurs couverts par Rosedale. Ma circonscription s'étend de Davisville jusqu'aux rives du lac et inclut des quartiers intéressants comme Moore Park, Rosedale proprement dit, Cabbagetown, Regent Park, Moss Park, Crombie Park et St. Lawrence.

Ma circonscription compte six grands hôpitaux, une partie de l'Université de Toronto et la nouvelle université Ryerson, de même que d'autres établissements de haut savoir.

Le quartier financier de Toronto, avec les rues King et Bay, dont le nom n'est plus à faire, si je puis dire, se trouve aussi dans ma circonscription. C'est là que cinq grandes banques ont leur siège et que beaucoup d'autres institutions financières ont des bureaux. Osgoode Hall, siège du système de justice de la province de l'Ontario, se trouve dans Rosedale, de même que de nombreux théâtres de réputation locale ou nationale, dont le Théâtre français de Toronto, et quelque 18 coopératives. De plus, je suis convaincu que les députés seront intéressés d'apprendre que la ferme Riverdale est dans ma circonscription. Elle n'est peut-être pas assez grande pour me donner de la crédibilité aux yeux de mes collègues de la campagne, mais au moins, cette ferme est là


2112

pour nous rappeler, à nous citadins, que nous devons toujours être conscients des questions concernant les régions rurales.

(1320)

Quant à la population de Rosedale, elle est un mélange urbain complexe, un microcosme, pour reprendre l'expression d'autres députés, de la société où nous vivons, et j'irais même jusqu'à dire, un microcosme du monde où nous vivons et auquel nous devons nous adapter. C'est une circonscription dynamique qui, je dirais, représente ce que le Canada a de meilleur à offrir.

Le quartier Rosedale fait contraste, à certains égards, avec St. James Town, Regent Park et Moss Park, où il y a beaucoup de gens qui vivent dans des logements sociaux, beaucoup de personnes âgées, de mères seules et d'autres personnes qui doivent travailler fort pour arriver à joindre les deux bouts. Cependant, tous sont unis par le même désir d'avoir un bon gouvernement, un gouvernement qui a un bon sens de l'équilibre et qui cherche avant tout à défendre leurs intérêts. C'est, à mon avis, ce que notre gouvernement a fait dans ce budget.

Nous avons un nombre considérable de nouveaux Canadiens dans notre circonscription. Certains sont arrivés chez nous en tant qu'immigrants, d'autres en tant que réfugiés. Ce sont tous des gens honnêtes et travailleurs qui, grâce à leurs compétences, vont contribuer à faire avancer notre pays dans la tradition de nos ancêtres.

La circonscription compte également la plus importante population homosexuelle au Canada, ce qui donne encore plus de diversité à notre collectivité et vient enrichir bien des aspects de notre vie, notamment sur la scène artistique et culturelle. Ces gens comptent sur le gouvernement actuel pour donner suite aux promesses non tenues de beaucoup de gouvernements précédents en veillant à ce qu'ils ne soient plus victimes de discrimination, tant dans leur vie personnelle que dans leur vie professionnelle, afin qu'ils puissent jouer un rôle actif dans notre société. Ils ont le droit de vivre dans un monde où ils ont les mêmes chances que les autres, et nous leur devons bien cela.

[Français]

Il y a aussi une communauté française dans ma circonscription qui n'est pas nombreuse mais importante, une communité fière, diverse, et qui contribue pleinement à notre culture et à notre économie; une communauté francophone et canadienne, qui regarde la présence du Québec dans notre fédération comme un atout et comme une inspiration pour leur avenir linguistique et culturel. Et elle espère, cette communauté, que nos amis québécois et nos amies québécoises le savent.

[Traduction]

Cette diversité présente des défis et des possibilités. Le budget dont nous discutons aujourd'hui reflète un grand nombre des ces défis et possibilités. À mon avis, ce qui fait la force de ce budget, c'est l'équilibre entre les divers impératifs financiers qui l'ont influencé, les chemins qu'il trace pour l'avenir et son incidence sur la vie des Canadiens. Ce budget est avant tout axé sur les gens. Il ne les immole pas sur l'autel de quelque dogme financier.

Les habitants de ma circonscription ont bien accueilli ce budget. Les travailleurs indépendants du quartier Rosedale étaient heureux de voir qu'ils pourront continuer de cotiser à leur REER et assurer ainsi leur avenir financier afin de ne pas devenir un fardeau pour les futurs contribuables de notre pays.

Les petites et moyennes entreprises étaient heureuses de voir qu'on a maintenu les initiatives qui les concernent et qu'on a tenu compte de leurs préoccupations, ce qui leur permettra d'être plus compétitives dans ce monde complexe où nous vivons.

Les nouveaux Canadiens, dont j'ai parlé plus tôt, cherchent des façons de mettre leurs langues, leurs cultures et leurs compétences au profit des petites et moyennes entreprises afin de leur ouvrir des portes sur les marchés étrangers. Le budget nous oriente dans cette direction. Les compétences de ces nouveaux Canadiens représentent une ressource que nous nous devons d'utiliser pour notre bien commun, car c'est l'avenir du Canada et l'avenir du monde qui sont en jeu. C'est un point que le budget fait ressortir de façon particulière.

(1325)

Les gens de ma circonscription qui vivent dans des logements subventionnés considèrent les mesures de développement des ressources humaines annoncées dans le budget comme un excellent début d'une politique visant à mettre fin à leur dépendance et à leur rendre le contrôle de leur vie afin qu'ils puissent mener une vie productive sans avoir à compter sur l'aide gouvernementale qu'ils méprisent.

Au cours du congé de la semaine dernière, j'ai eu l'occasion de vivre un moment de très grande fierté dans ma circonscription. Je suis allé à une assemblée au Collège George Brown où, grâce à une subvention du gouvernement du Canada, la Goodwill Industries a pu atteindre et former des gens à qui il avait jusqu'alors été impossible de recevoir une formation. Certains d'entre eux avaient des infirmités, certains avaient eu des problèmes de drogue, bref, ils avaient tous souffert de problèmes qui les avaient empêchés de prendre leur vie en main. Ils ont pu s'inscrire à un programme de formation, grâce à une subvention gouvernementale qui leur a permis de le suivre avec succès, et 70 p. 100 d'entre eux avaient déjà obtenu un emploi le soir même où ils recevaient leur diplôme.

Quand j'entendais hier le chef du Parti réformiste parler de la nécessité d'effectuer des compressions budgétaires et de prendre des mesures draconiennes, je ne pouvais m'empêcher de revoir les sourires sur le visage des diplômés et des membres de leur famille, et la fierté avec laquelle ils recevaient leur diplôme au terme de ce programme. Il s'agit en effet du genre de programmes que le gouvernement actuel établit pour permettre aux gens de retourner sur le marché du travail. Ces gens-là représentent

2113

une ressource que notre société ne peut se permettre de gaspiller. Le budget à l'étude nous donne les outils pour y veiller.

Voilà pourquoi je suis fier d'en parler au nom des habitants de ma circonscription, de quelque condition sociale qu'ils soient.

Je suis particulièrement fier de cet élément du budget, car il conserve au gouvernement libéral un rôle essentiel et constructif qu'appuient les gens de tous les horizons de ma circonscription.

Même le monde universitaire connaît de nombreux problèmes financiers. Je parlais l'autre jour avec le recteur de l'Université de Toronto qui me disait que la réduction du montant des cotisations d'assurance-chômage, que l'université doit payer, représente une contribution importante. Comme les universités sont de très gros employeurs, cette mesure contribuera de façon appréciable à assurer leur stabilité financière.

Les députés d'en face ont ridiculisé le programme d'infra-structure en n'y voyant rien d'autre que de simples travaux de construction, mais le recteur de l'Université de Toronto m'a dit qu'il offre à son institution de haut savoir une excellente occasion de mieux travailler à former les jeunes Canadiens qui nous feront entrer dans le XXIe siècle.

Pourquoi dénigrer des réalisations comme celles-là uniquement par sectarisme politique? Juste avant que je prenne la parole, le ministre a fort bien expliqué que nous devons nous occuper de nos infrastructures. Nous devons tous réaliser que ce programme d'infrastructure met à contribution des travailleurs intellectuels tout autant que des ouvriers. Je suis fier de faire partie d'un gouvernement qui s'en est rendu compte et qui a vu la nécessité de procéder à un renouveau et de se tourner vers l'avenir.

En conclusion, permettez-moi de revenir à ce que j'ai dit au début. Je profite de ma première intervention à la Chambre pour remercier les gens de Rosedale de m'avoir élu. Je ferai de mon mieux pour les représenter et pour défendre les intérêts de mon pays et je m'emploierai à réaliser les objectifs de ce gouvernement qui, avec ce budget, a mis en place les éléments essentiels pour que notre pays soit productif et que notre avenir soit serein.

M. Milliken: Monsieur le Président, j'ai beaucoup hésité à interrompre la période des questions et observations qui va faire suite au discours de mon éminent collègue, mais je me demande si je peux obtenir le consentement unanime de la Chambre pour que nous revenions à la présentation de rapports par des comités permanents et spéciaux. J'ai en main un rapport de comité qui intéressera sûrement les députés et que j'aimerais déposer maintenant.

Le président suppléant (M. Kilger): Le secrétaire parlementaire a-t-il l'assentiment de la Chambre?

Des voix: D'accord.

2113

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 10e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, concernant les affaires émanant des députés que le comité a retenues comme pouvant faire l'objet d'un vote.

Conformément au paragraphe 92(2) du Règlement, ce rapport est adopté dès son dépôt sur le Bureau.

Normalement, ce rapport n'aurait pas dû être déposé avant demain. Il y a eu une entente selon laquelle, si le gouvernement le présentait cet après-midi pour que les députés prennent connaissance des affaires retenues, l'heure réservée aux affaires émanant des députés ne commencerait pas demain, mais lundi.

En conséquence, je propose, et je crois avoir à ce sujet le consentement unanime:

Que l'étude des affaires émanant des députés commence le lundi 14 mars 1994, à 11 h 00.
(La motion est adoptée.)

_____________________________________________


2113

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1330)

[Français]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Monsieur le Président, il me fait plaisir de faire un bref commentaire concernant mon collègue de Rosedale, avec qui j'ai eu l'occasion de voyager, il y a quelques semaines, à Vancouver. J'ai pu apprécier l'homme davantage et je crois qu'il est de ceux à qui on pourrait attribuer le titre de gentilhomme, tel qu'on l'entendait au Moyen Âge, c'est-à-dire un homme qui manifeste une ouverture d'esprit sincère à l'endroit de l'ensemble de ses collègues de la Chambre. Je ne doute aucunement de sa sincérité lorsqu'il parle ou lorsqu'il manifeste le souhait que les Québécois et les Québécoises se sentent chez eux à l'intérieur de la Fédération canadienne.

Je veux lui dire également que si les Québécois et les Québécoises devaient, dans un avenir rapproché, choisir de s'assumer et ainsi faire en sorte que le Québec devienne un pays souverain, les Québécois et les Québécoises seront toujours heureux et intéressés à maintenir des liens avec des voisins qui manifestent cette ouverture d'esprit, comme c'est le cas de mon collègue de Rosedale.


2114

Je le félicite pour ses propos et je souhaite que nous puissions effectivement maintenir ce genre de relation, quel que soit l'avenir qui nous est réservé.

M. Graham: Monsieur le Président, je remercie infiniment mon collègue pour les très gentilles paroles qu'il a dites à mon égard, et qui a quand même pu réserver une certaine chose, à la fin, qui nous donnera peut-être l'occasion d'être plus opposants que nous le sommes aujourd'hui.

J'aimerais mettre un peu d'emphase sur ce que je disais au sujet de Rosedale. Je lui suggère ce qui suit: ce n'est pas seulement une question que les Québécois et les Québécoises soient bien accueillis dans l'autre partie du Canada, mais je vous jure, monsieur le député, que l'attitude de la province de Québec, ce que le Québec, les Québécois et les Québécoises ont pu réussir en gardant leur culture et leur langue, sert d'inspiration pour la francophonie hors Québec, y inclus la francophonie qui règne aussi dans ma circonscription.

Je vous demande, par vos actions et par ce que vous ferez à l'avenir, de ne pas mettre en péril cette fleur si fragile qui doit être alimentée par vous, par nous et par toutes les personnes de cette Chambre, ainsi que dans le reste du Canada, pour qu'elle fleurisse comme votre culture a pu s'épanouir au Québec.

[Traduction]

M. Paul Steckle (Huron-Bruce): Monsieur le Président, à l'occasion de ma première intervention à la Chambre, je veux d'abord féliciter notre Président et les vices-présidents de l'impartialité dont ils ont fait preuve en dirigeant les travaux de la Chambre.

La courtoisie et la politesse sont actuellement de mise à la Chambre, ce qui ne s'était pas vu souvent ces derniers temps. À mon avis, tous les députés, indépendamment de leur allégeance politique, montrent aux Canadiens qu'il est possible de procéder à des échanges et à des débats sérieux et d'exprimer certaines divergences de vues dans le respect et la dignité.

Je veux prendre quelques instants pour parler de ma circonscription et des gens merveilleux qui m'ont choisi pour les représenter et devenir leur porte-parole à Ottawa.

Ma circonscription, celle de Huron-Bruce, est située sur la rive est du lac Huron. Elle comprend tout le comté de Huron et la moitié sud du comté de Bruce.

(1335)

Cette belle circonscription s'étend de Grand Bend, dans le sud, à Southampton, dans le nord, et comprend des villes et villages comme Kerkton, Dublin, Teeswater, Zurich et, à l'extrême est, Paisley. Elle compte 43 municipalités en tout.

Ma circonscription est sans doute l'une des plus authentiquement rurales et agricoles de tout le Canada. Sa vocation est nettement agricole, car les productions porcine, bovine, laitière et avicole sont très importantes.

Le climat convient bien à la culture des haricots, notamment des haricots blancs, des céréales et du colza. J'ajoute que ma propre localité, Zurich, revendique le titre de capitale canadienne du haricot. Goderich prétend être la plus jolie ville du Canada, mais on y trouve aussi les installations de Champion Road Graders, entreprise qui fabrique des niveleuses et d'autres machines de voirie. Je suis heureux de voir certaines de ses machines dans les rues d'Ottawa. Un peu plus au nord du lac Huron, nous trouvons la centrale nucléaire Bruce, la plus grande du monde.

Parmi les Canadiens célèbres qui sont originaires de Huron-Bruce, notons Paul Henderson qui, en 1972, a marqué le point victorieux dans la célèbre série qui a opposé le Canada à la Russie.

Timothy Eaton, après avoir immigré au Canada, s'est d'abord installé dans la localité d'Usborne, dans le sud-est de ma circonscription.

Kipple Disney, grand-père de l'illustre Walt Disney, s'est établi dans une exploitation agricole familiale, à Bluevale. C'est là que Elias, père de Walt, est né. Il a fréquenté l'école centrale de Goderich.

Une autre célébrité originaire de ma circonscription nous a fait honneur plus récemment. Il s'agit de Lloyd Eisler, de Seaforth ou, comme il préférerait qu'on le dise, d'Egmondville. Avec Isabelle Brasseur, de la circonscription de Richmond-Wolfe, il a remporté une médaille de bronze aux 17e Jeux olympiques d'hiver, à Lillehammer, en Norvège.

Je remercie avec une sincère gratitude tous ceux qui ont travaillé et voté pour moi dans la circonscription de Bruce-Huron. Leur amitié et leur encouragement ont été pour moi une récompense suffisante dans une tâche qui, par moments, semblait impossible.

Le plus important dans ma vie a été ma famille, ma femme Kathy et nos deux fils, Cam et Brian, leurs femmes, Kathy et Bonnie, et nos deux petits-fils, Brent et Shawn. Ils ont tous soutenu mes efforts pour me faire élire et ils m'ont toujours grandement encouragé pendant mes longues années de politique municipale. Je les remercie de leur affection.

C'est l'Année de la famille, ce qui m'incite à réfléchir aux orientations à prendre dans nos politiques sociales. Mon point de vue, que partagent sans doute nombre de députés, celui de Central Nova notamment, c'est que la vie est sacrée de la conception à la mort naturelle. C'est une idée sur laquelle il y a évidemment une certaine divergence d'opinions. Je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre part au débat et de parler de cette question, entre autres, en cette tribune démocratique.

Avant les élections, les Canadiens avaient perdu confiance en leurs représentants et institutions politiques. J'estime qu'avec l'avènement d'un nouveau gouvernement ils sont revenus sur leurs positions et qu'ils font de nouveau confiance à leurs élus.

Durant les élections, les électeurs avaient le choix entre des partis proposant des idées et des politiques nettement différentes. En tant que libéraux, nous estimons que la population devrait savoir pourquoi elle vote, et c'est pourquoi nous avons énoncé nos politiques dans notre fameux livre rouge.


2115

Par une écrasante majorité, les Canadiens ont choisi notre parti et, ce qui importe le plus, nos politiques. C'est ici qu'entre en jeu le facteur de la confiance. Quel meilleur moyen, pour la classe politique, de gagner la confiance des Canadiens que de remplir ses promesses à la lettre? Ce n'est pas nécessairement une idée nouvelle, mais c'en est une qu'on a oubliée pendant trop longtemps.

Le gouvernement doit avoir la confiance de la population s'il veut réussir à effectuer les nécessaires réformes dans une foule de domaines, qu'il s'agisse de la sécurité sociale, des affaires étrangères ou de la défense.

En outre, la population fait davantage confiance aux institutions du pays parce qu'il ne s'est jamais tenu autant de consultations et de débats ouverts que dernièrement dans l'affaire des activités de maintien de la paix en Bosnie et celle des essais des missiles de croisière dans le nord du Canada. Cela a montré que la Chambre des communes pouvait servir de tribune pour la tenue de débats constructifs sur des sujets d'intérêt national.

Et ce n'est que le début. C'est pourquoi j'ai hâte aux débats à venir et que d'autres changements soient apportés pour améliorer encore notre rôle de député.

(1340)

Si nous examinons le budget présenté le mois dernier par le ministre des Finances, nous voyons que les engagements pris dans le livre rouge sont respectés presque point par point. Si je me reporte à la page 107 du livre, je n'y vois aucune promesse qui n'a pas été tenue.

Comme je l'ai dit aux habitants de ma circonscription, la teneur du budget ne devrait être une surprise pour personne. Cela devrait par-dessus tout accroître la confiance des gens dans leurs représentants. Je suis également fier de ce budget que je n'éprouve aucun problème à défendre et à vendre aux habitants de ma circonscription. C'est un budget équilibré, d'une portée considérable, qui prépare le terrain en vue de la future réforme pour l'amélioration des programmes et des services.

Ces dernières semaines, j'ai parlé avec un grand nombre d'habitants de ma circonscription et j'ai eu plusieurs entrevues avec les médias. Tout le monde était positif quant au budget. À mon avis, ce que les gens aiment dans ce budget, c'est qu'il est réaliste. Les gens en ont assez des budgets qui promettent l'impossible et n'aboutissent à rien. Ce budget est réaliste tant sur le plan de la réduction du déficit que des prévisions économiques et de la création d'emplois.

Nous avons exposé aux gens les graves problèmes politiques auxquels notre pays est confronté, dont un déficit qui est monté en flèche à 45 milliards de dollars, bien plus que ce qui était prévu.

Nous, libéraux, croyons en la nécessité de remettre de l'ordre dans les finances du pays. C'est pourquoi le ministre a présenté un budget qui devrait en trois ans permettre d'atteindre un ratio de cinq contre un entre la réduction des dépenses et l'augmentation des recettes. Cela est un bon départ si nous voulons réaliser l'objectif de réduction du déficit à 3 p. 100 du PIB d'ici trois ans. Encore une fois, cela se trouvait dans le livre rouge et c'est ce que les Canadiens ont appuyé.

Je voudrais dire à tous ceux et à toutes celles qui prétendent que le gouvernement n'est pas allé assez loin que nous n'allons pas laisser tomber les gens dans le besoin ou courir le risque de redégringoler dans une récession en procédant à des compressions et à des réductions, en dépensant sans compter ou en faisant fi des conséquences quand les chômeurs sont au nombre de 1,6 million, quand le nombre des assistés sociaux monte en flèche et quand le taux de pauvreté infantile atteint les 30 p. 100. Ce n'est surtout pas le moment d'abandonner tous ces gens.

Ceux qui sont partisans de plus fortes compressions oublient que nous n'en sommes pas arrivés là du jour au lendemain et qu'il faudra beaucoup de temps, d'équité et de compassion pour nous en sortir. Ils oublient qu'ils n'habitaient pas une autre planète pendant que le déficit s'accumulait. Ils ont élu et appuyé les gouvernements qui agissaient de la sorte et, de surcroît, ils ont bénéficié de ces largesses comme tout le monde.

Évitant les mesures radicales, nous devons adopter une approche pondérée, fondée sur l'établissement d'un cadre favorable à la croissance économique, au rétablissement de l'équilibre budgétaire et à la création d'emplois.

Ce budget vise la création d'emplois non pas à la manière des gouvernements de jadis qui créaient eux-mêmes les emplois, mais en favorisant l'éclosion d'un climat propice et en dotant les entreprises des moyens de créer des emplois.

Cela dit, je ferai observer que le gouvernement voulait investir dans les infrastructures de ce pays. Ces investissements vont permettre au Canada de rester concurrentiel face à la mondialisation accrue des marchés. Cette mesure créera de 50 000 à 60 000 emplois.

Le ministre a prêté une oreille attentive aux Canadiens qui souhaitaient une réduction du déficit sans augmentation des impôts. Ces gens voulaient que l'on procède à une réforme sans faire des compressions draconiennes dans les programmes destinés aux plus démunis. Ils étaient favorables à la création d'emplois. Ils désiraient une réduction systématique et graduelle du déficit. Ils étaient partisans des investissements dans la recherche et le développement. Ils aspiraient au renouveau et à la revitalisation de l'activité économique. Enfin, ils voulaient que notre régime fiscal soit plus juste et équitable.

Le budget répondant à ces aspirations, je suis fier d'y souscrire.

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui exprimer non seulement mon insatisfaction envers le budget que le ministre des Finances a présenté le 22 février, mais aussi l'insatisfaction des habitants de ma circonscription, New Westminster-Burnaby.

J'ai pris connaissance de leurs opinions dernièrement à une assemblée publique qui avait été organisée expressément pour examiner le budget et les priorités financières de notre pays. J'avais osé annoncer un peu partout la tenue d'une assemblée publique à l'ancienne mode où chacun pouvait donner son opinion sur le budget devant tout le monde. Au cours de cette assemblée, qui a duré deux heures, de nombreuses personnes se sont présentées au micro.


2116

(1345)

Les ministres auraient dû être là. Ils auraient entendu les gens dire que les libéraux n'ont pas de mandat politique pour faire ce qu'ils sont en train de faire dans ce budget. Aucun bon mot n'a été dit au sujet de ce budget. Cependant, les gens ont trouvé un soulagement dans la décision du gouvernement de ne pas annoncer de nouvelles dépenses importantes pour des projets grandioses et peu judicieux. La plupart se sont plaints de l'absence, dans le budget, d'initiatives de création d'emplois à long terme. Ce budget n'a fait naître aucun espoir.

Ce gouvernement a été élu parce qu'il avait promis de faire des changements. Or, on le constate avec ce budget, rien n'a changé.

Il avait promis, dans le budget, de réparer les égouts et de remettre en état les routes. Je dirai simplement qu'il ne s'agit pas d'emplois à long terme qui nous permettront d'être présents sur la scène internationale.

Dans le budget, le ministre des Finances a annoncé que le gouvernement retirait son aide au projet d'accélérateur de particules KAON en Colombie-Britannique. Je présume qu'il est plus important d'asphalter de vieilles routes que de maintenir le Canada à la fine pointe des sciences et de la technologie.

Je me souviens de la campagne électorale, lorsque les libéraux faisaient des promesses d'emplois et de changements aux Canadiens. Pendant qu'ils étaient dans l'opposition, les libéraux avaient accusé le gouvernement conservateur d'avoir laissé le taux de chômage grimper à 11,2 p. 100. Le livre rouge des libéraux, qui ressemble maintenant à un livre écrit à l'encre rouge, promettait de redonner du travail aux Canadiens et de réduire le taux de chômage.

Lorsque les chômeurs de New Westminster-Burnaby ont regardé la présentation du budget à la télévision, ils s'attendaient, je répète, s'attendaient à ce que le ministre des Finances leur donne un emploi ou, du moins, l'espoir d'en trouver un et qu'il présente un plan pour casser le taux de chômage.

Eh bien, dans son ultime prédiction, le ministre des Finances a bel et bien prédit un taux de chômage moins élevé, une réduction formidable de 0,1 p. 100. Les Canadiens d'un bout à l'autre du pays ne pouvaient en croire leurs oreilles: 0,1 p. 100! Cela est incroyable de la part d'un parti qui avait passé toute la campagne à promettre des emplois. Nous l'avons tous entendu: nous avons le plan, nous avons l'équipe, faites-nous confiance.

Le ministre des Finances veut nous faire croire qu'il y aura davantage d'emplois l'année prochaine et que c'est à ce moment-là que l'économie s'améliorera. Le mandat confié au gouvernement était clair comme de l'eau de roche: changer les choses, réduire radicalement les dépenses, prendre une nouvelle orientation et ainsi relancer l'économie. Ce mandat ne consistait pas à réorganiser simplement quelques affaires et espérer que l'économie s'améliorerait toute seule.

Les gens de New Westminster-Burnaby savent que, dans la situation difficile que nous connaissons actuellement, il existe un lien direct entre un haut taux de chômage et les dépenses et les impôts élevés que renferme ce budget.

Le gouvernement doit se mettre au régime. Pour commencer, il aurait dû plafonner toutes les dépenses fédérales à 153 milliards de dollars, ce qui aurait ramené le déficit à 27,8 milliards au lieu des 39,7 milliards qui sont prévus. Cela aurait été un objectif général assez modeste qui aurait envoyé le message voulu aux marchés internationaux qui nous jugent en définitive.

Au lieu d'essayer de réduire les dépenses fédérales, le gouvernement les augmente de 3,3 milliards de dollars en les faisant passer de 160,3 milliards de dollars à 163,6 milliards de dollars.

Si le ministre des Finances n'avait rien fait du tout, le déficit fédéral de 1994-1995 se serait élevé à 41,2 milliards de dollars. Cependant, comme le gouvernement est obligé de présenter un budget, le ministre a mis ses nouvelles bottes et il a réduit le déficit d'à peine 1,5 milliard de dollars.

Les gens de New Westminster-Burnaby se demandent comment les dépenses fédérales peuvent être aussi élevées. Eh bien, étant donné que je m'occupe notamment des questions de justice et des affaires juridiques, je vais m'attarder sur certaines dépenses dans ce domaine.

Il est, par exemple, incroyable qu'on continue de subventionner certains groupes spéciaux. Ainsi, la Commission de réforme du droit, qui a été rétablie dans ce budget, avait des dépenses de 4,8 millions de dollars en 1992-1993, de 4,9 millions de dollars en 1991-1992 et de 5 millions de dollars en 1990-1991, tout cela pour un groupe d'universitaires qui n'avait aucun compte à rendre mais qui était chargé de rédiger des rapports obscurs, pour la plupart oubliés le lendemain de leur publication.

Eh bien maintenant, les contribuables vont devoir payer la note pour ce groupe de réflexion libéral qui, sous le couvert d'une parfaite neutralité politique, prêchera les dogmes libéraux. Les partis politiques reçoivent leurs propres fonds de leurs partisans. Or, dorénavant, les contribuables vont financer un groupe de réflexion libéral. On revient à la bonne vieille façon de penser de l'ère Pearson-Trudeau. Je crois que nous devrions aider les universitaires légitimes travaillant dans nos universités à des travaux de recherche sur la politique juridique du gouvernement. Nous n'avons pas besoin de la sociologie appliquée d'une Commission de réforme du droit.

Le Programme de contestation judiciaire est un autre exemple de gaspillage. En 1992-1993, on y a consacré, en fait, 1,06 million de dollars. En 1993-1994, on prévoyait y affecter 1,26 million de dollars. Or, selon le Budget principal des dépenses, il devrait nous coûter 3,35 millions de dollars en 1994-1995. Quel merveilleux régime de retraite pour les avocats, du moins ceux d'allégeance libérale, qui seront retenus pour s'en occuper.

Si je semble cynique, c'est parce que je m'aperçois que plus ça change, plus c'est pareil, qu'on a droit à l'ancienne façon de penser au Canada de la part d'un homme du passé qui défend une idéologie budgétaire désuète mal adaptée à la nouvelle économie mondiale.

(1350)

Le Programme de contestation judiciaire a été créé en 1978 afin d'aider financièrement des particuliers à défendre des causes constitutionnelles fondées sur le droit à l'égalité et les droits linguistiques. En 1982, on a inclus dans le programme les causes fondées sur la Charte des droits.

La portée du programme a changé radicalement et il sert maintenant de tremplin, aux frais des contribuables, aux féministes radicales, aux gays et lesbiennes et autres groupes sociaux qui veulent modifier le paysage politique par la porte arrière,


2117

c'est-à-dire par les tribunaux, au lieu de faire valoir leurs revendications par la voie du scrutin.

Les nominations au comité de sélection du programme seront douteuses et financièrement très coûteuses puisque les décisions ne seront pas pondérées par les forces du marché. Si une cause mérite d'être défendue devant la Cour suprême du Canada, la population canadienne l'appuiera volontiers. Toute cause qui ne serait pas agréée par la collectivité ne devrait pas pouvoir être défendue en justice.

On sait également que les augmentations d'échelon de rémunération sont gelées, ce qui cause beaucoup d'émoi dans les rangs de la GRC. Or, le gouvernement dépense des millions de dollars pour les contestations judiciaires et une commission. Où sont donc les priorités du gouvernement? La situation économique est précaire.

Le gouvernement aurait dû réduire d'abord le financement des groupes d'intérêts spéciaux. Le Comité canadien d'action sur le statut de la femme a reçu 300 000 $ par année depuis 1991, sauf l'an dernier où il a touché 270 000 $. Le gouvernement verse plus de 250 000 $ à cet organisme, qui se plaint pourtant que ce montant est insuffisant.

En supprimant l'aide financière à tous les groupes de défense spéciaux, le gouvernement éliminerait deux problèmes. Premièrement, le gouvernement réduirait substantiellement ses dépenses et mettrait fin aux querelles et rivalités qui surviennent entre les groupes dès que le gouvernement réduit leur budget. On mettrait ainsi fin à la division au sein de nos communautés.

La communauté internationale a accordé un bref sursis au gouvernement du Canada et retient son souffle. Je ne suis pas convaincu que les libéraux puissent ou veuillent livrer la marchandise. Les réformistes avaient demandé le dépôt d'un mini-budget à l'automne afin de parer à ce qui est en train de se produire, en particulier en ce qui concerne l'accroissement des avoirs liquides.

Les investisseurs sont de moins en moins attirés par le Canada, et les capitaux fuient vers l'étranger. Cette tendance va s'aggraver jusqu'à ce qu'il y ait une ruée sur le dollar.

À l'heure actuelle, le Canada épuise ses réserves d'or et de devises pour acheter des dollars canadiens sur le marché international, dans le seul but d'empêcher notre monnaie de se déprécier trop rapidement. C'est la vieille loi de l'offre et de la demande qui s'applique, en l'occurrence. Le problème, c'est que le Canada n'a pas les moyens de soutenir ce genre de défense bien longtemps.

Le Canada pourra perdre le bénéfice des anciens avantages que sont la stabilité politique et la perspective d'un bon rendement. En effet, si on ajoute l'instabilité politique du Québec au malaise financier général, nous sommes en droit de nous attendre à une réaction majeure de la part des pays étrangers.

Si nous ne redressons pas nous-mêmes la situation, la communauté internationale le fera à notre place, et de façon brutale. Le comportement passé constitue le meilleur indicateur du comportement à venir. Or, depuis 1984 au moins, la communauté mondiale a fait confiance aux gouvernements canadiens qui ont promis de façon répétée de régler le problème du déficit et de l'impôt proportionnel, mais tous les budgets successifs ont maintenu le statu quo.

Nous nous voyons maintenant dans l'obligation de produire des budgets équilibrés pendant de nombreuses années à cause des mesures économiques prises depuis quelques années. Le traitement est connu, mais il reste à avoir le courage de l'appliquer. Il faudra entreprendre un régime-choc pour mettre fin aux excès et recouvrer la santé et la douleur devra être partagée également entre tous.

Si l'on veut instaurer un leadership fondé sur l'exemple, les premières étapes devront toucher le fonctionnement de la colline du Parlement et les dépenses générales engagées aux niveaux supérieurs.

À l'heure actuelle, le fardeau n'est pas partagé équitablement. Ce budget renferme 18 nouveaux programmes de dépenses mis en place pour des raisons idéologiques. Les frais de la dette sont sous-estimés, ce qui donne des prévisions très risquées. Les marchés financiers internationaux vont patienter jusqu'à l'automne tout au plus.

Le Parlement est le lieu où le gouvernement vient demander au peuple la permission de prélever des impôts et de dépenser. C'est donc cette Chambre qui doit assumer les conséquences financières pour la nation. Ce sont les députés qui doivent décider des mesures à prendre.

Ceux du camp réformiste, qui sont très près de leurs collectivités, ont prêté l'oreille aux observations des gens et ont amorcé le mouvement. Toutefois, les députés qui ne sont pas des réformistes doivent bien disposer d'au moins 100 moyens différents pour faire pression auprès de ceux qui se cramponnent aux anciennes façons de penser. En jargon psychologique, on dirait que les comportements en matière de dépenses révèlent le caractère profond des personnes.

Disons tout de go que ceux qui entretiennent des convictions devraient aussi avoir le courage d'agir. Si nous croyons vraiment en nos actions, nous pourrons voguer vers un nouveau Canada où l'égalité sera la norme, la compassion notre principe conducteur, l'humilité notre mode de vie et la vérité, la source même de nos paroles.

(1355)

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de son discours, mais j'aimerais toutefois lui demander de vérifier ses calculs.

Il s'en prend aux dépenses minimes qu'engagera le gouvernement en rétablissant la Commission de réforme du droit, mais par ailleurs critique la décision parfaitement raisonnable de ce dernier concernant l'accélérateur de particules KAON. Il devrait savoir qu'un tel établissement coûterait, au bas mot, plus de 200 millions de dollars par an aux contribuables canadiens, en frais d'investissement et de fonctionnement.

Étant donné ce coût astronomique et la nature futuriste de ce projet, les organismes consultatifs du gouvernement fédéral que sont le Conseil national de recherches, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le Conseil des sciences du Canada, ainsi qu'un comité du Conseil consultatif national des sciences et de la technologie constitué par l'ancien premier ministre, se sont unanimement prononcés contre une telle dépense qui ne pouvait se justifier compte tenu des priorités du

2118

Canada en matière de science et de technologie et du niveau actuel des dépenses dans ces domaines, du fait des autres besoins auxquels nous devons répondre.

Le député a passé sous silence les ressources considérables prévues dans le budget pour mettre en oeuvre les promesses contenues dans le livre rouge telles que l'amélioration du programme d'aide à la recherche industrielle et la création d'un réseau technologique canadien. Il n'a dit mot des importantes dépenses consacrées à la diffusion de la technologie.

Ces dépenses profiteront aux nombreuses petites et moyennes entreprises qui sont le moteur de l'économie canadienne. L'économie canadienne repose sur les PME; c'est pourquoi le gouvernement a concentré ses efforts sur ces dernières.

M. Forseth: Monsieur le Président, tout dépend de ce qu'on estime devoir être les priorités fondamentales d'un gouvernement. J'ai dit que la façon dont il dépensait les deniers publics était révélatrice des courants philosophiques et des principes dont il s'inspirait.

Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre aborde maintenant les déclarations de députés en application de l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


2118

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES FEMMES DANS LES ARTS ET LA CULTURE

Mme Jane Stewart (Brant): Monsieur le Président, je veux rendre hommage aux nombreuses Canadiennes qui ont fait une contribution importante au domaine des arts et de la culture. Les arts et la culture ont grandement influé sur l'évolution du tissu social du Canada, de même que sur la croissance économique de notre pays.

Les exemples que nous donnent d'extraordinaires artistes du spectacle comme Karen Kain, des auteurs comme Margaret Laurence et des artistes comme Keterina Mertikas, me sont une véritable source d'inspiration.

Je suis fière de compter parmi mes électeurs des femmes comme Linda Schuyler, qui s'est vu décerner récemment l'Ordre du Canada pour 1994, en reconnaissance de sa contribution hors pair dans le monde des médias. Mme Schuyler s'est surtout fait connaître à titre de créatrice et de productrice déléguée d'une série télévisée qui a été saluée unanimement par le public, Les enfants de la rue Degrassi.

Virginia Little est, pour sa part, directrice musicale du Little String Orchestra de Brantford. Dernièrement, Mme Little a été choisie citoyenne de l'année dans le domaine des arts par le Brantford Regional Arts Council.

En tant qu'artistes de spectacle, entrepreneurs ou bénévoles, les Canadiennes se distinguent dans le monde des arts et de la culture. Je les félicite et les en remercie.

* * *

[Français]

LA CRÉATION D'EMPLOIS

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Monsieur le Président, la Fondation de l'entrepreneurship vient de lancer une nouvelle initiative intitulée «Une quarantaine en faveur de l'emploi». La fondation s'est associée avec de nombreux organismes régionaux afin de susciter des initiatives locales de création d'emplois. Le programme Défi Emplois de la fondation veut apporter sa contribution dans chaque localité afin de favoriser l'éclosion de nouvelles entreprises créatrices d'emplois.

Je tiens à féliciter le Mouvement Desjardins d'avoir mis son réseau de caisses populaires au service de la fondation pour appuyer le programme Défi Emplois. Il faut saluer Desjardins pour son implication sociale, car, en plus de participer au programme Défi Emplois, le Mouvement Desjardins participe au Forum pour l'emploi, à Qualité Québec et à la Chaire Desjardins en développement des petites collectivités.

(1400)

Il est regrettable qu'on ne retrouve pas le même dynamisme chez ce gouvernement pour proposer des mesures de création d'emplois au Québec et au Canada.

* * *

[Traduction]

LE PÈRE ALBERT LACOMBE

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je tiens à souligner l'anniversaire de naissance du père Albert LaCombe, né le 28 février 1827.

Originaire de St-Sulpice, au Québec, le père LaCombe a fondé l'établissement de St-Albert, en 1861, ainsi que plusieurs missions en Alberta, dont Saint-Paul des Cris.

Il a oeuvré auprès des peuples autochtones de l'Alberta, notamment les Cris et les Pieds-noirs. Il a contribué à l'acceptation, sans violence, du projet de construction du chemin de fer Canadien Pacifique. Lors de la rébellion de 1885 dirigée par Louis Riel, il a été un facteur d'apaisement dans la région. À titre de conseiller, il a participé aux négociations du traité no 8.

Linguiste accompli, le père LaCombe a rédigé un dictionnaire et une grammaire cris et a traduit la Bible en différentes langues autochtones.

Bref, je tenais à proclamer le père LaCombe grand Albertain et grand Canadien.


2119

LE TIBET

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, nous marquons aujourd'hui le 35e anniversaire du soulèvement des Tibétains contre l'occupation de leur petit pays pacifique par la Chine.

Chaque année, à la même date, je prends la parole à la Chambre pour demander au gouvernement de protester auprès du gouvernement chinois contre les violations massives des droits de la personne au Tibet, la destruction de l'environnement de ce pays et le refus de son droit à l'autodétermination.

Au cours de la dernière année, les arrestations politiques ont augmenté de 30 p. 100 et ont inclus des enfants et des religieuses tibétaines.

Hier, la Chine a réussi encore une fois à convaincre les Nations unies de mettre de côté la résolution critiquant son bilan au chapitre des droits de la personne. C'est une tragédie!

Le peuple tibétain a toujours adopté une attitude de non-violence à l'égard de cette question et, en 1989, le Dalaï Lama a reçu le prix Nobel de la paix.

J'espère que le gouvernement canadien se penchera sur cette question avec positivisme dans son examen de la politique étrangère. On ne saurait fermer l'oeil sur les violations des droits de la personne au Tibet et ailleurs.

* * *

LES PROSTITUÉES ANONYMES

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Monsieur le Président, les histoires à succès ne sont pas rares chez les femmes, mais certaines sont plus touchantes que d'autres.

Paige était une prostituée. Dans son enfance, elle avait été agressée sexuellement et, malgré ses efforts pour mener une vie normale, elle s'est retrouvée dans la rue et s'est mise à consommer de plus en plus de drogues au point où elle avait des convulsions quand elle ne se droguait pas.

Après s'être prostituée pendant de nombreuses années, Paige a eu la chance d'entendre parler d'une femme qui avait mis sur pied l'organisme Prostituées Anonymes. Dès lors, une nouvelle vie a commencé pour elle.

Les refuges pour femmes battues, les centres de désintoxication et les centres de réadaptation pour toxicomanes sont devenus son nouvel environnement. En 1991, Paige a mis sur pied un groupe de Prostituées Anonymes en Colombie-Britannique. Elle fait maintenant partie d'un comité spécial de citoyennes formé de femmes élues qui viennent en aide à d'autres femmes.

La semaine dernière, j'ai participé pour la première fois à une réunion de ce comité. J'ai rencontré Paige et aussi Cindy-Lou. Ces femmes ne sont que deux des nombreuses femmes qui ont eu la chance de se sortir du milieu de la prostitution. Paige a besoin d'être soutenue dans son entreprise. Des maisons de transition sont indispensables pour permettre aux prostituées de s'en sortir.

En cette Semaine internationale de la femme, je tiens à rendre hommage à cette jeune femme qui a réussi alors que tout était contre elle.

[Français]

LA SEMAINE QUÉBÉCOISE DE LA DÉFICIENCE INTELLECTUELLE

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul): Monsieur le Président, du 13 au 19 mars prochain se déroule au Québec la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, une tradition au cours de laquelle parents, amis, intervenants et personnes ayant une déficience intellectuelle organisent, à travers le Québec, diverses activités afin de sensibiliser la population aux réalités vécues par les personnes présentant une déficience intellectuelle et celles vécues par leurs familles.

J'invite mes honorables collègues du Québec, et ceux des autres provinces, à se joindre aux diverses activités de cette semaine dont le thème est «J'ai ma place dans ma famille. . .et ailleurs?».

En cette année de la famille, je voudrais féliciter tous mes commettants de Verdun-Saint-Paul et en particulier l'équipe du Droit de Vivre qui travaillent bénévolement pour les déficients intellectuels en milieu familial.

* * *

LA PAUVRETÉ

M. Laurent Lavigne (Beauharnois-Salaberry): Monsieur le Président, l'Assemblée des évêques réunissait dernièrement un groupe de personnes influentes, afin de développer des solutions pour contrer le gouffre de la pauvreté qui ne cesse de s'accentuer et qui cause de plus en plus de dommage et de souffrance dans notre société.

Les solutions proposées par ce groupe d'experts réitèrent encore une fois les demandes pressantes effectuées par plusieurs groupes et organismes auprès du gouvernement, lequel fait toujours la sourde oreille.

La pauvreté n'est pas uniquement une statistique, monsieur le Président, elle a surtout un visage, celui des hommes et des femmes qui souffrent et qui tentent, par tous les moyens, de retrouver leur dignité.

(1405)

Le Bloc québécois appuie cette démarche et va faire en sorte que les recommandations de ce regroupement d'experts ne restent pas lettre morte auprès du gouvernement.

* * *

[Traduction]

LA PEINE CAPITALE

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, en février, la presse a rapporté que le solliciteur général avait promis une réforme radicale de la Commission nationale des libérations conditionnelles, à la suite de l'enquête sur la libération de Robert Leech, un détenu qui, en 1972, avait été condamné pour viol à la prison à perpétuité et dont la libération a mené au meurtre sadique de Jewel Gamble, à Regina, en 1992.

À présent que M. Leech a été condamné pour la deuxième fois à la prison à perpétuité, nous nous demandons quelles mesures le gouvernement va prendre pour veiller à ce que M. Leech ne sorte jamais de prison et ne commette pas de nouveau crime. Au cas où


2120

M. Leech parviendrait une nouvelle fois à déjouer le régime de libération conditionnelle, sera-t-il relâché dans notre collectivité?

Étant donné les sondages nationaux qui révèlent tous que la majorité des Canadiens sont en faveur d'un référendum exécutoire sur le rétablissement de la peine de mort, je demande au nom de la majorité silencieuse que le gouvernement présente une mesure législative accordant aux électeurs ce qu'ils désirent, c'est-à-dire un référendum exécutoire sur la peine de mort.

* * *

LES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest): Monsieur le Président, la faim et la pauvreté sont des problèmes très réels dans la région de l'Atlantique. La Food Bank Society of Halifax-Dartmouth a récemment publié les résultats d'une vaste enquête sur les utilisateurs des banques alimentaires de la région métropolitaine. Cette enquête nous rappelle tristement le sort de membres souvent oubliés de notre société.

On a ainsi constaté que les clients des banques alimentaires ont des revenus très inférieurs au seuil de pauvreté, puisque 94 p. 100 avaient moins de 1 000 $ par mois. Les rares qui avaient un peu plus de 1 000 $ par mois avaient des familles de quatre personnes ou plus. Parmi les clients des banques alimentaires, 44 p. 100 avaient connu des jours où ils n'avaient rien à manger. Beaucoup sont des parents qui se privent de nourriture pour que leurs enfants en aient.

Voilà la preuve que nos programmes sociaux ne fonctionnent pas. Voilà la preuve d'un besoin réel de réforme!

* * *

LES GARDERIES

M. Pat O'Brien (London-Middlesex): Monsieur le Président, nous devons veiller à ce que les lois de l'impôt tiennent compte des besoins des femmes travaillant à leur propre compte tout autant que ceux des hommes qui travaillent à leur compte.

La proportion des femmes au travail qui ont des enfants d'âge pré-scolaire est maintenant de 68 p. 100. La majorité de ces femmes travaillent à plein temps ou gèrent une entreprise et ne peuvent réclamer leurs frais de garderie à titre de dépenses d'entreprise.

La garde des enfants est un service essentiel de soutien à la famille; elle fait partie intégrante de l'aptitude d'une société à assurer un meilleur revenu. Étant donné que c'est la carrière des femmes qui est encore la plus touchée par les soins à donner aux enfants, en considérant les frais de garderie comme une dépense d'entreprise, on inciterait certainement les femmes à mieux développer leurs compétences de chefs d'entreprises et leur ingéniosité.

Il me semble que la garde des enfants est bien davantage une dépense d'entreprise que l'inscription à un club social, des billets d'abonnement à des événements sportifs ou la location d'une automobile de luxe.

Durant cette Semaine internationale de la femme, je me joins aux femmes du Réseau canadien des agricultrices, à mes électeurs et particulièrement aux femmes de London-Middlesex pour prier le gouvernement d'adopter une loi qui permettrait de déduire les frais de garderie à titre de dépenses d'entreprise.

* * *

L'ARCHEVÊQUE DE SARAJEVO

M. Janko Peric (Cambridge): Monsieur le Président, Mgr Vinko Puljic, archevêque de Sarajevo, est des nôtres aujourd'hui.

Après avoir vécu 22 mois de siège dans la ville de Sarajevo, Mgr Puljic a reçu dimanche l'autorisation de la FORPRONU de quitter la capitale de la Bosnie-Herzégovine, ravagée par la guerre.

Monseigneur Puljic a toujours prêché en faveur d'un dénouement juste et pacifique du conflit qui déchire la Bosnie-Herzégovine, ainsi que pour la coexistence harmonieuse de tous ses habitants.

Au mépris du danger, l'archevêque est demeuré à Sarajevo pour diriger la distribution de l'aide humanitaire dont avaient désespérément besoin tous les citoyens de Bosnie et de Croatie.

J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à Mgr Puljic en croate.

[Note de l'éditeur: Le député parle en croate.]

* * *

[Français]

LE PARTI LIBÉRAL

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, les libéraux sont au pouvoir depuis à peine quatre mois, mais voilà qu'apparaît déjà le vrai visage du nouveau gouvernement. Élu grâce au programme emprunté au NPD, il a recours maintenant pour gouverner aux pratiques et aux politiques des conservateurs de droite.

(1410)

Quand vient le temps de traduire dans un budget le livre rouge, ce ne sont pas les corporations et les familles riches, mais plutôt les démunis, les chômeurs entre autres, qui devront mener la lutte au déficit. La fameuse réforme de la TPS, tant attendue, consistera en une opération de camouflage, c'est-à-dire cacher la taxe dans un prix global, l'appliquer à tous les biens, y compris la nourriture.

Les libéraux parlaient du renforcement du tissu social, plutôt ils divisent la société. Les retraités devraient sacrifier leur pension en faveur des programmes de formation pour les jeunes.

Le vrai visage des libéraux, maintenant, est là parce que leur maquillage électoral a coulé.

2121

[Traduction]

LE BILINGUISME

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, le gouvernement a beaucoup parlé d'une nouvelle notion d'intégrité en politique. Le premier ministre a récemment, dans une intervention à la Chambre, refusé de dénoncer le fait que le chef de l'opposition faisait la promotion du séparatisme à l'étranger. Par contre, le gouvernement reproche à mon parti d'être contre le bilinguisme.

Je prends aujourd'hui la parole pour prier tous les députés de cesser d'échanger des insultes et de s'en tenir aux faits. Le fait est que nous sommes en faveur du bilinguisme individuel et régional. Ce que nous contestons, c'est la Loi sur les langues officielles et les dépenses ridiculement élevées qu'elle engendre.

Un député ministériel nous a demandé de fournir des données exactes sur les coûts. Nous avons tenté d'obtenir ces chiffres, mais le gouvernement refuse de nous les fournir, parce qu'il ne les connaît pas. Nos recherches montrent que les coûts directs et indirects représenteraient entre deux et quatre milliards de dollars par année.

Je mets le gouvernement au défi de nous faire part des coûts véritables et d'ouvrir le débat sur cette question à la Chambre.

* * *

LES PÊCHEUSES DE TERRE-NEUVE ET DU LABRADOR

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest): Monsieur le Président, comme nous célébrons la Semaine internationale de la femme, je veux faire connaître à la Chambre un groupe de femmes très particulier, celui des pêcheuses de Terre-Neuve et du Labrador.

Nous parlons souvent des hommes qui tirent leur subsistance de la mer, mais le sort des femmes qui sont pêcheuses de métier est presque oublié. Ces braves femmes affrontent l'océan glacial jour après jour pour subvenir aux besoins de leur famille. Tout le monde est égal à bord d'un bateau de pêche.

À cette époque où l'activité diminue dans le secteur de la pêche, le travail est difficile, et les pêcheuses de Terre-Neuve et du Labrador ont prouvé qu'elles sont à la hauteur. Leurs efforts sont un élément important de la culture collective, à Terre-Neuve. En cette Semaine de la femme, nous devons célébrer leurs mérites et leur détermination.

* * *

LA SEMAINE INTERNATIONALE DE LA FEMME

Mme Colleen Beaumier (Brampton): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à l'occasion de la Semaine internationale de la femme pour inviter tous les députés à se joindre à moi pour honorer toutes celles qui offrent leurs services à leurs collectivités respectives en tant que bénévoles.

On les trouve dans les bidonvilles du tiers monde aussi bien que dans les centres communautaires du voisinage. On parlera de leur courage et de leur abnégation dans les livres d'histoire et on les cite dans les journaux d'aujourd'hui. Elles travaillent courageusement et bénévolement pour leurs collectivités et elles sont prêtes à consacrer des années à diverses causes.

Tout au cours de l'histoire, de bien des façons, les femmes ont servi leurs collectivités respectives de façon courageuse et tout à fait désintéressée.

Cette semaine nous offre l'occasion de réfléchir aux réalisations des femmes dans le monde entier. Elle ne serait pas complète si on oubliait de mentionner leurs efforts déployés à titre de bénévoles dans leurs collectivités.

J'exhorte tous les députés à reconnaître toutes ces années où les femmes ont servi avec dévouement leurs concitoyens partout dans le monde.

* * *

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à la Chambre pour faire valoir une cause que tous les députés appuieront, j'espère.

Michelle et David Gebe, deux électeurs de ma circonscription, Markham-Whitchurch-Stouffville, sont très fiers de la petite Erin-Denise qu'il ont eue le 10 février. Ils sont devenus parents grâce à une adoption effectuée par l'intermédiaire des services sociaux de l'Ontario. Pour M. et Mme Gebe, c'est vraiment un événement très heureux.

Or, ils se sont opposés à un obstacle de taille lorsqu'ils ont demandé des prestations de maternité en vertu du programme d'assurance-chômage. À titre de parents adoptifs, ils n'ont droit qu'à dix semaines de prestations d'assurance-chômage au lieu des 30 semaines prévues dans le cas d'une mère naturelle.

Je demande humblement au gouvernement d'enquêter sur les inégalités manifestes que présentent les mesures législatives sur l'assurance-chômage et de corriger ce problème. Des parents adoptifs comme David et Michelle ont droit de recevoir l'aide et l'encouragement du gouvernenmet fédéral. Ils ont besoin de notre appui.

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2121

QUESTIONS ORALES

(1415)

[Français]

LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.


2122

Les véritables intentions du gouvernement se précisent en matière de réforme des programmes sociaux. En effet, le ministre du Développement des ressources humaines confirmait hier sa volonté de remettre en question les programmes des pensions de vieillesse. Pourtant, lors de la campagne électorale, le chef du Parti libéral dénonçait avec virulence les intentions du Parti réformiste de couper les pensions de vieillesse en disant, et je cite, «que ce n'est pas très recommandable».

Pourquoi le premier ministre considère-t-il aujourd'hui recommandable l'idée de couper les pensions de vieillesse alors que ce ne l'était pas, juste avant d'affronter l'électorat? Pourquoi s'acharne-t-il aujourd'hui sur les personnes âgées, et pourquoi renie-t-il son engagement de ne pas toucher aux pensions de vieillesse?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je l'ai dit et je le répète, nous n'avons pas l'intention de toucher aux pensions de vieillesse, et ceux qui veulent lancer des canards comme celui-là essayent de faire peur aux gens.

Ce que nous devons faire, c'est étudier les problèmes sérieux qui existent avec le Régime de pensions du Canada. C'est un programme à très long terme, et nous savons que, dans les années 2005 et 2010, le financement de ce programme sera compliqué.

Comme nous voulons très bien faire notre travail, nous essayons d'anticiper les problèmes que nous aurons lorsque nous formerons encore le gouvernement en l'an 2010.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, plutôt que de faire de la politique-fiction, le premier ministre devrait regarder d'où viennent les canards qui sont lancés. Qu'il regarde du côté de son ministre du Développement des ressources humaines et qu'il nous dise s'il endosse ses propos irresponsables de forcer la population à faire ce choix odieux entre la formation des jeunes ou les pensions de vieillesse.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je dois dire clairement que j'ai très confiance au ministre qui fait un travail considérable pour essayer de réformer les choses qui en ont besoin au Canada. Il est important de nous assurer, comme Canadiens, qu'on puisse redonner la dignité du travail aux assistés sociaux et aux chômeurs. C'est ce que le ministre tente de faire actuellement et je pense qu'il fait un très bon travail en consultant les provinces et tous les intéressés.

Je pense qu'il n'y a pas de lien à établir avec ce que j'ai mentionné tout à l'heure. À cause du vieillissement de la population on prévoit, après l'an 2000, des problèmes pour le Régime de pensions du Canada. Il est important que notre gouvernement commence à étudier ces problèmes immédiatement, et le ministre fait un travail exceptionnel pour essayer de rendre leur dignité aux travailleurs canadiens.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Voilà justement, monsieur le Président, le genre de propos ambigus qui va raviver les appréhensions qui animent aujourd'hui les personnes âgées au Canada et au Québec.

Maintenant qu'on voit un gouvernement qui est en train de s'attaquer à l'universalité du régime des pensions de vieillesse, il faut demander au premier ministre s'il faut en conclure qu'il a délibérément caché ses véritables intentions durant la campagne électorale?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, on ne peut pas être plus clair que je l'ai été à la première question. Il est fort probable que les trois questions avaient été préparées d'avance, alors il les a lues. J'ai dit qu'on n'avait pas l'intention de toucher aux pensions de vieillesse. Il faut arrêter d'essayer de faire peur aux gens. Ce ne peut être plus clair que les propos que je viens de tenir à l'instant.

Ce qui me plaît, dans un certain sens, c'est de voir le Bloc québécois dans cette Chambre qui défend le statu quo canadien tous les jours. Alors que nous voulons réformer, ils ne veulent pas que nous touchions au Canada du tout; on devrait garder le Canada tel qu'il est. Nous voulons faire des réformes pour tous les citoyens du Canada, y compris ceux du Québec.

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

La politique du gouvernement est de plus en plus claire. Après s'être attaqué aux chômeurs, le gouvernement a maintenant dans sa mire les personnes âgées. Il augmente en effet de 500 millions sur trois ans leur fardeau fiscal en réduisant leur crédit d'impôt. De plus, le ministre du Développement des ressources humaines nous annonce qu'il va réviser les programmes sociaux les concernant.

(1420)

Au lieu de s'attaquer aux pensions des personnes âgées, pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas le courage de sabrer dans les paradis fiscaux?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, pour répondre à la question que pose le député et à celle que soulevait avant lui son chef, je signale à ceux qui désirent connaître les intentions de notre gouvernement, qu'ils n'ont qu'à consulter la page 64 du budget où nous nous engageons à accroître considérablement les programmes de sécurité de la vieillesse au cours des quatre ou cinq prochaines années. La réponse à leurs questions se trouve là.

Nous essayons de transmettre le message suivant: au cours des deux prochaines décennies, le nombre de Canadiens admissibles à diverses prestations aura doublé. Nous voulons que la prochaine génération jouisse de la même sécurité que la génération actuelle. Cependant, nous devons trouver une façon de financer le tout.

Cela signifie qu'il faut dès aujourd'hui utiliser plus efficacement une grande partie des régimes de retraite et des REER pour favoriser la création d'emplois et l'essor économique au Canada afin que nos jeunes puissent trouver un emploi et payer les pensions de demain. Voilà ce que nous tentons de faire.


2123

[Français]

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau): Monsieur le Président, les libéraux, en 1985, pourfendaient les conservateurs qui voulaient éliminer l'indexation des pensions de vieillesse. Où sont donc passées, en 1994, les convictions des libéraux qui maintenant s'attaquent directement à l'existence même des pensions de vieillesse?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, la seule personne ici qui se soit déjà attaquée aux prestations que reçoivent les personnes âgées, c'est le chef de l'opposition à l'époque où il faisait partie du gouvernement précédent. Il est la seule personne à l'avoir fait.

Nous ne cherchons qu'à renforcer et à préserver le système en prévision de l'avenir. Nous ne voulons pas réduire le budget pour l'instant. Nous n'envisageons aucune mesure remettant en question l'universalité du régime. Tout cela est clairement indiqué dans le budget.

Nous envisageons simplement de tenir des consultations auprès de tous les Canadiens afin d'étudier en détail la sécurité future des Canadiens et les façons d'utiliser les capitaux des caisses de retraite pour investir au Canada et veiller à la saine gestion du RPC et du système des paiements.

La génération actuelle doit se poser la question suivante: que pouvons-nous faire immédiatement pour veiller à ce que les Canadiens de demain vivent aussi bien que les personnes âgées d'aujourd'hui?

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale et a aussi trait aux répercussions sociales du budget.

Le ministre a parlé de plans visant à réduire de 16 000 membres l'effectif des forces armées canadiennes. Pour beaucoup d'entre nous à la Chambre, cette réduction d'effectif mettra à l'épreuve la capacité du gouvernement d'aider les travailleurs qui doivent quitter un secteur à trouver un emploi productif dans un autre secteur.

Quelles mesures précises son ministère et le ministère du Développement des ressources humaines prennent-ils pour aider ces 16 000 Canadiens à trouver des emplois productifs dans d'autres secteurs?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, mon collègue, le ministre de l'Industrie, pourrait peut-être parler du programme de conversion de la défense dont il est responsable.

Les programmes que nous offrons à nos fonctionnaires et à nos militaires sont originaux et audacieux. Il y a ce que nous appelons les indemnités de départ améliorées, pour les inciter à prendre des retraites anticipées, et aussi des fonds de recyclage ainsi que diverses allocations qui les aideront à faire la transition à laquelle le député s'intéresse tant.

Le gouvernement s'est engagé dans le programme de conversion de la défense, qui est un programme mené sur une grande échelle. Je travaillerai en étroite collaboration avec mon collègue, le ministre de l'Industrie, pour que la conversion se fasse au fur et à mesure de la réduction de l'effectif de nos forces armées.

(1425)

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je tiens à rappeler au ministre qu'il ne s'agit pas ici de 16 000 camions ou chars d'assaut, mais bien de 16 000 personnes qui ont des familles.

Je demande au ministre s'il serait prêt à fournir à la Chambre un registre contenant les noms de ces 16 000 personnes afin que nous puissions voir combien d'entre elles seront poussées vers l'assurance-chômage, l'aide sociale ou des emplois sans avenir et combien arriveront vraiment à trouver des emplois productifs dans cette nouvelle économie dont parle le ministre de l'Industrie.

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, le chef du Parti réformiste a certainement une drôle de vision de la démocratie. Il veut que la vie privée des Canadiens soit étalée au grand jour à la Chambre des communes. Nous ne faisons pas cela dans le domaine fiscal ni dans celui de la santé, et nous ne le ferons pas non plus dans le domaine de la défense. Je n'en reviens pas que le Parti réformiste prêche de telles idées inspirées d'Orwell, des idées que nous rejetons totalement.

Nous respectons la vie privée des gens. Nous nous préoccupons beaucoup des personnes qui vont perdre leur emploi, comme en témoignent, je crois, les déclarations que j'ai faites après la présentation du budget.

Si le député examine les indemnités de cessation d'emploi qui ont été annoncées et qu'on est en train de négocier pour chacune des bases visées et pour les autres services touchés au ministère, il verra que nous traitons ces gens avec la plus grande générosité.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, le ministre reconnaîtra-t-il alors que ce qui arrive à ces 16 000 personnes qui seront mises à pied par son ministère est une bonne indication de la capacité du gouvernement à aider les chômeurs en général?

Autrement dit, si le gouvernement ne peut pas guider 16 000 personnes mises à pied par ce ministère vers une nouvelle économie, comment peut-on croire qu'il est capable de le faire pour 1,6 million de chômeurs canadiens?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, le député n'a manifestement pas lu les documents budgétaires ni écouté les discours que j'ai prononcés.


2124

Ces personnes auront droit à de généreuses indemnités de cessation d'emploi, et nous devrons probablement légiférer pour aller au-delà de ce qui est prévu dans les conventions collectives existantes en ce qui concerne le réaménagement des effectifs.

Il est évident, d'après les discussions que nous avons eues avec les syndicats, que ceux-ci sont mécontents du nombre de personnes qui seront mises à pied graduellement sur une période de quatre ans, mais ils reconnaissent que la fin n'est pas pour demain, que tout se fera selon un processus bien réglementé où chaque employé sera traité de façon juste et équitable.

Je trouve cela plutôt ironique que le député se réveille soudainement, deux semaines après la présentation du budget, pour plaider la cause de ces 16 500 personnes qui seront mises à pied graduellement, lui qui parle de réductions beaucoup plus draconiennes dans la fonction publique depuis déjà quelques années.

* * *

[Français]

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, je peux comprendre la frustration du député qui n'a jamais de question à poser. Il aimerait bien en poser à son gouvernement.

Hier, à propos de la fermeture éventuelle du Collège militaire de Saint-Jean, le ministre de la Défense nationale déclarait et je cite:

Comme beaucoup d'autres, j'étais contre, et le premier ministre aussi. Nous aurions aimé pouvoir nous en tirer sans fermer ce collège. Cependant, sur le plan budgétaire, il nous a semblé, selon les analyses de rentabilisation, que la meilleure chose à faire était de concentrer les activités au collège de Kingston. . .
Le ministre de la Défense peut-il nous certifier aujourd'hui que la décision de fermer le Collège militaire de Saint-Jean a été prise «uniquement» pour des raisons d'économie d'argent et non pas pour des raisons politiques?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, la réponse est certainement oui.

[Traduction]

Je devrais expliquer qu'en examinant nos projets de compressions budgétaires, si nous avions pu éliminer d'autres installations excédentaires, nous l'aurions fait. Il était logique de rationaliser les collèges. Moi-même et mes collègues avons exposé ici tous les arguments à ce sujet. Naturellement, il n'est jamais agréable d'éliminer l'emploi de 16 500 personnes et de provoquer des répercussions aussi difficiles pour diverses localités. La décision a été vraiment difficile à prendre, mais, en dernière analyse, j'ai établi la liste des établissements à fermer, et la liste a été incorporée au budget. C'est une décision que nous défendrons. La fermeture des deux collèges, Royal Roads et le CMR, est regrettable, mais la décision est irrévocable.

(1430)

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, le ministre déclarait également: «Quand je témoignerai devant le Comité permanent chargé d'examiner le Budget des dépenses, j'aurai toute l'information pertinente et à jour, à ce moment-là.

Les gens ne comprennent pas la décision du ministre. Ils se préparent, à Saint-Jean, à une grande manifestation pour contester la décision du ministre. Pourquoi le ministre refuse-t-il obstinément de dévoiler les chiffres maintenant? Serait-il en train de les tripoter pour justifier sa décision?

Le Président: Je sais que parfois quand nous posons des questions, les mots nous échappent un peu. Je suis certain que le mot tripoter pourrait être modifié par l'honorable député.

M. Gauthier (Roberval): Je poserai ma question avec plus de gentillesse. Le ministre est-il en train de manipuler, d'arranger ou d'organiser. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Donc, vous voulez dire «expliquer». L'honorable ministre a la parole.

[Traduction]

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, je m'en remets à votre jugement, mais le député laisse entendre que je me suis livré à de très mauvais procédés. En temps normal, j'exigerais des excuses, mais comme le député est nouveau à la Chambre, nous pouvons peut-être passer l'éponge.

Tous les chiffres seront disponibles mardi prochain. En fait, nous avons fourni les chiffres concernant toutes les fermetures de bases à tous les députés concernés, quel que soit leur parti. Nous avons été tout à fait ouverts. Comme le député le sait, j'ai organisé des séances d'information avec mon ministère, avec le Parti réformiste et avec le Bloc québécois. Nous avons été complètement ouverts. Nous n'avons rien à cacher.

C'est vraiment au comité que l'on pourra faire un examen beaucoup plus détaillé de la question. Le député pourra avoir toute la journée pour ça. J'y passerai toute la journée et toute la soirée s'il le faut rien que pour lui faire plaisir.

* * *

L'EMPLOI

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

De l'aveu même du ministre, le gouvernement devra dépenser 92 000 $ pour créer un emploi dans le cadre de son programme d'infrastructure. Par contre, la réduction des cotisations d'assurance-chômage permettra de créer un emploi dans le secteur privé au coût de 50 000 $.

Voici ma question: si, en réduisant les impôts, il crée deux fois plus d'emplois qu'en dépensant les deniers publics, pourquoi le


2125

gouvernement envisage-t-il encore de mettre en oeuvre un programme d'infrastructure aussi inefficace, alors qu'il peut simplement réduire les impôts?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Monsieur le Président, le programme d'infrastructure a été lancé à la demande des municipalités de toutes les régions du Canada, celles-ci s'étant rendu compte que, pour créer des emplois dans notre pays et redonner du travail aux Canadiens, nous avons besoin de maintenir dans nos localités des infrastructures qui nous permettront d'attirer les investisseurs et d'accroître notre compétitivité en cette période de mondialisation des échanges.

Le programme visait à réaliser cet objectif, d'une part, et à redonner du travail aux Canadiens, d'autre part. Il est mis en oeuvre en collaboration avec les gouvernements provinciaux et les municipalités qui l'appuient unanimement partout au Canada.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire.

Hier, le sous-ministre des Finances a reconnu que les taux d'imposition des sociétés et des particuliers en vigueur au Canada sont les deuxièmes en importance parmi ceux de tous les pays industrialisés. Le ministre sait sûrement qu'il existe un lien direct entre les taux d'imposition élevés et les taux de chômage élevés.

Le ministre a-t-il un plan à long terme de création d'emplois s'appuyant sur la réduction des taux d'imposition au Canada?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, le sous-ministre des Finances a dit des choses très intéressantes lors de la réunion d'hier. En fait, il est indiscutable que le fardeau fiscal des Canadiens est très lourd aux niveaux fédéral, provincial et municipal. C'est certainement là un obstacle important à la création d'emplois.

(1435)

C'est justement pour cette raison que, dans le dernier budget, le gouvernement propose de réduire ses dépenses de cinq dollars pour chaque dollar de nouvelle recette.

C'est aussi pour cette raison que le ministre du Développement des ressources humaines a pu annoncer dans le budget une réduction des cotisations d'assurance-chômage, qui sont en fait une taxe à l'emploi. Nous avons commencé à nous attaquer à ce mal qui mine la création d'emplois au Canada.

* * *

[Français]

L'ÉDITION

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Hier, le ministre de l'Industrie nous a dit que le gouvernement a cédé ses intérêts dans Ginn Publishing à une compagnie étrangère à la suite d'un engagement verbal. On ignore toujours l'identité de la personne ayant contracté cette entente verbale.

Le ministre du Patrimoine connaît-il, lui, l'identité de la personne qui a donné cet accord? S'il ne peut pas nous divulguer dans cette Chambre le nom de cette personne, peut-il au moins nous assurer qu'il en connaît vraiment l'identité?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, il n'est pas de l'usage de cette Chambre d'aller porter des accusations à l'égard de personnes que l'on nomme. Et je ne voudrais faire ni l'un ni l'autre, ni porter une accusation ni nommer personne. Mais il y a des dates. La date est 1992. Et je crois avoir exprimé l'opinion que la responsabilité au niveau ministériel avait dû être portée par les ministres qui avaient les portefeuilles appropriés en 1992.

Bien sûr, c'est une question qui est compliquée, qui est délicate. Je me suis déjà exprimé sur ce sujet. Je pense qu'il y a des décisions qui ont été prises. Il fallait nettoyer ce qui était resté derrière ces décisions, et c'est ce que nous avons fait, au bénéfice de l'industrie des publications au Canada.

M. Bouchard: Il est tout mêlé, lisez ma carrière.

M. Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, il y a un ministre de mêlé. . .

Le Président: À l'ordre. L'honorable députée de Rimouski-Témiscouata a la parole.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, comment le ministre peut-il continuer de donner son appui à la transaction de Ginn Publishing alors que lui et son collègue de l'Industrie ont déclaré hier, à leur sortie de la Chambre, qu'ils n'avaient jamais vu l'opinion légale du ministère de la Justice sur laquelle ils se fondent pour appuyer cette transaction controversée?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Je crois, monsieur le Président, que ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit. Ce que j'ai dit c'est que je n'ai pas vu un contrat qui, ayant été oral, naturellement n'est pas visible. Et ce que j'ai dit c'est que ces échanges oraux laissent des traces, ils laissent des traces.

Je peux rassurer notre collègue. Oui, j'ai vu l'opinion qui a été émise. Alors j'ai répondu à sa question, et je peux la rassurer: J'ai vu l'opinion qui a été émise.

* * *

[Traduction]

L'AUTONOMIE GOUVERNEMENTALE POUR LES AUTOCHTONES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Hier, le ministre a annoncé à la Chambre que c'est au Manitoba qu'on tentera l'expérience de l'autonomie gouvernementale. Comme des dizaines de milliers d'autochtones sont en cause et


2126

que tous les Canadiens seront touchés, au bout du compte, le ministre dira-t-il à la Chambre comment il définit l'autonomie gouvernementale pour les autochtones du Manitoba?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, c'est une question difficile.

Des voix: Oh, oh!

M. Irwin: C'est vrai. Je suis sérieux. Je n'ai jamais assimilé la supériorité numérique à la supériorité intellectuelle. Je voudrais pouvoir collaborer avec le député, car, si le Parti réformiste tient à l'autosuffisance, à l'autonomie gouvernementale, à l'auto-détermination, il y a des questions sur lesquelles nous allons devoir nous entendre tous ensemble.

(1440)

Réaliser l'autonomie gouvernementale, ce n'est pas comme préparer un budget. Il ne s'agit pas de modifier des chiffres, mais des opinions, des mentalités, et nous voulons que ce soit une oeuvre commune. Nous avons donc entamé des entretiens, et ils seront fort longs, avec les chefs du Manitoba. Les échanges seront difficiles, nous ne nous faisons pas d'illusions. Mais nous y arriverons.

Notre engagement à l'égard de l'autonomie gouvernementale, de l'autodétermination et de l'autosuffisance figure dans le livre rouge. La difficulté de la tâche ne nous fera pas renoncer. J'espère que le député nous épaulera.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, ce concept d'autonomie gouvernementale est sans doute difficile à définir, mais si le gouvernement du Canada prend un engagement à cet égard, je pense qu'il vaudrait mieux qu'il sache de quoi il s'agit. C'est là où nous voulons en venir.

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre avec qui il négocie et comment il laissera les autochtones ratifier toute entente définitive en matière d'autonomie gouvernementale?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Le député n'ignore sans doute pas qu'il existe un mécanisme au sein des Premières nations, des assemblées et des conseils de bande pour procéder à la ratification.

Comme nous l'avons dit dès le début, nous tiendrons des discussions avec les autochtones pendant une période de six mois. De plus, nous le ferons dans un cadre acceptable pour les Premières nations. Ce sera fait. Il y aura ratification. Ce sera fait démocratiquement et je suis convaincu qu'à la fin nous en arriverons tous ensemble à un résultat dont le député sera très fier en tant que Canadien.

* * *

[Français]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Certains économistes et fiscalistes recommandent au ministre d'étendre la TPS au secteur de l'alimentation. En novembre 1989, l'opposition libérale a dénoncé, dans un rapport déposé en cette Chambre: «les membres libéraux du Comité des finances ne peuvent admettre l'imposition des produits alimentaires de base.»

Est-ce que le ministre entend donner suite à cette recommandation d'étendre la taxe sur les produits et services au secteur de l'alimentation?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je suis en train de répondre à une question dont le sujet est déjà à l'étude en comité parlementaire. Cela étant dit, vous savez fort bien que le but de ce comité est vraiment d'écouter les Canadiens et les Canadiennes afin d'obtenir leurs points de vue.

Ce n'est certainement pas le rôle du gouvernement de dire aux Canadiens qu'ils n'ont pas le droit d'exprimer leur point de vue, c'est une des libertés fondamentales de notre pays. Je pense que le comité est en train de faire un excellent travail et nous l'appuyons.

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, c'est l'opinion du ministre qui intéresse les citoyens.

Le gouvernement libéral peut-il prendre l'engagement qu'il écarte d'emblée l'hypothèse de taxer les biens alimentaires, comme l'avaient fait les mêmes libéraux lorsqu'ils étaient dans l'opposition?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, nous sommes en train vraiment de parler d'un comité sur lequel siègent plusieurs des collègues du parti du député. Il s'agit d'un comité qui a un rôle très important à jouer d'ici à la fin juin, moment où il remettra son rapport. Nous n'avons vraiment pas l'intention, en tant que gouvernement, d'inhiber ce débat. On veut le tenir, on veut écouter les Canadiens, et cela me surprend que le député ait peur d'écouter la voix de la population.

* * *

[Traduction]

LE MAINTIEN DE LA PAIX

M. Bill Graham (Rosedale): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre et concerne la situation des troupes canadiennes dans l'ex-Yougoslavie.

Si je comprends bien, l'engagement qu'a pris le gouvernement de maintenir des troupes dans la région se termine le 31 mars. Le premier ministre peut-il indiquer à la Chambre si le gouvernement entend garder des troupes dans l'ex-Yougoslavie ou dans la région des Balkans après l'expiration de notre engagement actuel?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je crois que le ministre des Affaires étrangères fera une déclaration à cet égard plus tard aujourd'hui.

Je voudrais toutefois informer la Chambre que toutes les troupes ont bel et bien été retirées de Srebrenica. Ce soir, nos soldats auront accompli leur mission avec grand succès. Au nom de tous les Canadiens, je tiens à les féliciter. En dépit d'une


2127

situation extrêmement difficile, ils ont protégé la vie de 30 000 Musulmans pendant une longue période.

(1445)

Je suis très heureux d'informer la Chambre qu'ils sont sortis de cette situation dangereuse.

[Français]

Je désire ajouter que l'on a appris il y a quelques moments, dans un communiqué de presse, que le Pape avait reçu 50 soldats du 22e Régiment. Il leur a transmis ses félicitations et ses remerciements pour la position qu'ils ont tenue afin d'essayer de maintenir la paix dans l'ancienne Yougoslavie. Je pense que nous devons nous aussi féliciter tous ces soldats qui ont vécu des moments très difficiles et qui s'en sont sortis extrêmement bien.

Des voix: Bravo! Bravo!

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Le vendredi 4 mars, j'ai participé, à Preeceville, en Saskatchewan, à un rassemblement de plus de 1 200 propriétaires d'armes à feu qui sont extrêmement mécontents du nouveau règlement fédéral relatif au contrôle des armes à feu.

Il y a au Canada deux types de propriétaires d'armes à feu: les citoyens respectueux de la loi et les criminels. Selon le Centre canadien de la statistique juridique, moins de un dixième de un pour cent des propriétaires enregistrés d'armes de poing se servent de leurs armes pour commettre un crime.

Le ministre peut-il nous dire en quoi un contrôle plus strict des propriétaires responsables d'armes à feu protège davantage les bons citoyens?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, la loi actuellement en vigueur pour faire en sorte que les armes à feu sont utilisées, rangées et entretenues de façon sécuritaire vise à faire prendre conscience aux Canadiens que les armes à feu sont dangereuses en soi.

Que leurs propriétaires entendent les utiliser à des fins légales ou autres, le fait est que notre gouvernement a décidé, à juste titre je crois, que toute personne souhaitant acquérir ou utiliser une arme à feu doit être assujettie aux mesures de contrôle prévues par la loi.

Quant à l'utilisation criminelle ou abusive d'armes à feu, nous sommes en train de prendre une série de mesures pour y mettre fin. Nous sommes à resserrer les mesures de contrôle à la frontière en ce qui concerne la contrebande d'armes en provenance des États-Unis.

Le député n'ignore pas que, comme le prévoit notre programme, nous entendons prendre des mesures précises pour nous assurer que les criminels ne puissent pas acquérir d'armes à feu. Nous allons proposer des mesures en ce sens afin que les Canadiens soient protégés contre l'utilisation abusive des armes à feu.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, les propriétaires d'armes à feu de la Saskatchewan ne contestent pas que toute arme à feu doit être utilisée de façon sécuritaire et correcte. Toutefois, ils m'ont prié de demander au ministre en quoi un contrôle plus strict des propriétaires honnêtes et responsables d'armes à feu va empêcher les criminels de se procurer des armes par des voies illégales.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je me suis entretenu avec les chefs de police de Moncton, Fredericton, Edmonton et, la semaine dernière, avec celui de ma circonscription, soit Etobicoke, près de Toronto.

Tous m'ont très nettement affirmé que les armes utilisées lors de délits criminels ont souvent été volées à de bons propriétaires d'armes à feu qui n'ont pas su les ranger correctement ou les mettre en sécurité et qui ne font pas suffisamment preuve de prudence à cet égard.

La loi, le règlement et les mesures administratives de contrôle auxquels le député fait allusion visent à bien faire comprendre à tous les Canadiens qui possèdent une arme à feu qu'il faut observer un minimum de sécurité à l'égard de ces armes afin de réduire la possibilité qu'elles soient volées et utilisées à des fins criminelles.

* * *

(1450)

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, à l'issue d'une récente visite à Washington, le ministre des Affaires étrangères affirmait que le Canada avait fait d'importantes concessions diplomatiques aux États-Unis, notamment sur la question des frappes aériennes en Bosnie, de la station spatiale Freedom, et de l'Accord de libre-échange nord-américain. Le ministre espérait, et je le cite: «. . .que cela va transpirer au niveau de certaines questions commerciales entre nos deux pays.»

Après l'extraordinaire pied-de-nez de la Commission américaine du commerce international renversant la décision d'un groupe spécial d'experts sur la question du bois d'oeuvre, et alors que nous subissons une offensive américaine sans précédent dans les dossiers de l'uranium, de la bière, du blé et de l'acier, le ministre du Commerce international pense-t-il vraiment que la stratégie de son collègue des Affaires étrangères porte fruit?

[Traduction]

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international): Monsieur le Président, les discussions que nous avons avec les États-Unis sur un certain nombre de questions commerciales se poursuivent.

Les Américains nous ont signalé qu'ils avaient l'intention de poursuivre leurs démarches en ce qui concerne le bois d'oeuvre, par exemple, même si cela ne servira qu'à confirmer la décision du groupe spécial.


2128

Ces derniers jours, des progrès ont été réalisés dans le conflit du blé qui oppose nos deux pays. Nous espérons régler de façon définitive ce différend grâce aux discussions qui se poursuivent dans le domaine agricole.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au premier ministre. Compte tenu de l'importance des intérêts économiques en jeu, le premier ministre ne croit-il pas qu'il est temps pour lui d'intervenir personnellement dans ce dossier auprès de son homologue américain pour mettre fin au harcèlement dont sont victimes les industries canadiennes?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous faisons constamment des représentations auprès des autorités américaines. Au cours des conversations que j'ai eues avec le président des États-Unis dans les dernières semaines, je lui ai fait part que, dans certains dossiers, nous trouvons qu'ils pèsent un peu trop sur la pédale et que nous ne sommes pas tout à fait satisfaits. J'espère que cela donnera de bons résultats.

Évidemment, avec le niveau de commerce que nous avons avec les États-Unis, près de 80 p. 100 de nos échanges commerciaux se font avec ce pays, c'est normal qu'il y ait des irritants ici et là, mais nous nous assurons que nos représentations sont faites le mieux possible. Je dois remercier le chef de l'opposition, quand il était à Washington, d'avoir lui-même soulevé certains problèmes qui intéressaient tous les Canadiens et demandé aux Américains de bien nous traiter.

* * *

[Traduction]

LES DÉPUTÉS

M. Darrel Stinson (Okanaga-Shuswap): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Les auteurs du rapport sur la rémunération des parlementaires qui a été déposé aujourd'hui proposent une augmentation du salaire des députés, qui passerait de 64 000 $ à 88 000 $. Selon le président du Conseil du Trésor, ce rapport représente une première mesure importante visant à aider le gouvernement à découvrir ce que les contribuables jugent acceptable.

Le premier ministre admettra-t-il à la Chambre qu'une augmentation de 40 p. 100 n'est pas admissible, même si elle est répartie sur deux, quatre ou six ans?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, ce rapport avait été commandé par le gouvernement précédent et le salaire des députés, comme celui de tous les fonctionnaires, est gelé.

Nous avons reçu ce rapport. Il a été renvoyé à une commission qui est chargée, après les élections, d'étudier la rémunération des députés.

Pour l'instant, comme le prévoit très clairement le budget, le salaire des députés est gelé.

M. Darrel Stinson (Okanaga-Shuswap): Monsieur le Président, ce rapport prévoit la tenue de discussions avec certains Canadiens.

Le premier ministre envisagera-t-il de consulter les centaines de milliers de Canadiens qui ont été licenciés au cours des trois dernières années et qui n'ont pas reçu de généreuses indemnités de départ ni de pensions plaquées or?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous avons souvent parlé de cela.

(1455)

Le salaire des députés est gelé pour l'instant. Une commission a été créée par le Parlement du Canada pour examiner de façon objective toute cette question. La commission s'acquittera de ses fonctions et fera rapport à la Chambre des communes.

Je peux comprendre que le député s'estime trop bien rémunéré. Je partage son avis.

* * *

LA FISCALITÉ

M. John Finlay (Oxford): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Avant de poser ma question, monsieur le Président, je voudrais dire que la plupart des électeurs de ma circonscription, la plupart des Canadiens et la plupart des députés à la Chambre félicitent le ministre des Finances pour son budget magistral et équilibré.

On pouvait lire dans le London Free Press du 7 février dernier une dépêche de la Presse canadienne selon laquelle 20 millionnaires canadiens ont payé moins de 100 $ en impôt sur le revenu en 1991 et que 190 Canadiens qui gagnent plus d'un quart de million de dollars n'ont déclaré aucun revenu imposable en 1991.

Le ministre peut-il donner l'assurance à la Chambre que les échappatoires fiscales qui permettent de telles situations seront éliminées au cours de la présente année?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, le député a fait une observation et a posé une question. Je le félicite pour son observation qui a certainement permis de relever le niveau du débat à la Chambre.

La réponse à sa question est simple. Il me donne l'occasion d'affirmer à quel point nous tenons à instaurer un régime fiscal juste.

Comme il le sait, certaines personnes ne paient pas d'impôt en raison de pertes d'entreprise ou d'intérêts sur des emprunts. Il semble que le principal moyen de se soustraire au fisc soit l'exemption pour gains en capital de 100 000 $ que nous avons justement éliminée dans le budget.


2129

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Le 26 janvier dernier, j'ai posé une question au ministre à propos de la déportation d'une cinquantaine de réfugiés salvadoriens de Montréal. Le ministre n'a toujours pas réglé ce problème.

Aujourd'hui, ce groupe de Salvadoriens s'est rendu à Ottawa-et plusieurs se trouvent ici dans les tribunes-pour exiger du ministre une solution juste et équitable, compte tenu que la situation politique s'est beaucoup aggravée au Salvador.

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! La question est un peu longue. Je demanderais au député de poser sa question.

M. Nunez: Monsieur le Président, qu'attend le ministre pour utiliser les pouvoirs que lui confère la Loi sur l'immigration et accorder, pour des motifs humanitaires, la résidence permanente au Canada à ce groupe de ressortissants?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je trouve la déclaration de mon ami un peu incroyable, parce qu'il m'a demandé de rencontrer ces 50 réfugiés du Salvador. Mes fonctionnaires ont rencontré ce groupe trois fois, à Montréal. Le député a demandé que cette réunion ne se tienne pas ici, en premier lieu.

[Traduction]

À la suite de ces trois rencontres entre ces demandeurs du statut de réfugié et mes fonctionnaires, et à cause de l'inquiétude qui peut subsister après le réexamen automatique des dossiers des requérants salvadoriens, on accordera en outre un réexamen automatique à tous les requérants qui n'auront pas réussi à obtenir le statut de réfugié. De cette façon, nous pourrons être doublement sûrs, grâce à ce recours, qu'il aura été bien établi que ces personnes peuvent rentrer sans danger au Salvador.

* * *

(1500)

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de l'honorable John Todd, ministre du Développement économique et du Tourisme dans le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je voudrais également signaler aux députés la présence à notre tribune de Son Excellence Monseigneur Vinko Puljic, archevêque de Sarajevo.

Des voix: Bravo!

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES INITIATIVES PARLEMENTAIRES

M. John Nunziata (York-Sud-Weston): Monsieur le Président, je voudrais soulever la question de privilège à propos du 10e rapport du Comité permanent de la gestion de la Chambre. Ce rapport porte sur les affaires émanant des députés. Je voudrais démontrer aux députés que le processus qu'on a suivi empiète sur mon droit de député de faire progresser l'étude de mesures d'initiative parlementaire.

La Chambre siège depuis maintenant près de deux mois, mais nous n'avons pas encore été saisis d'aucune affaire émanant des députés. Voici ce que dit l'alinéa 94(1)a) du Règlement:

Le Président prend toutes les dispositions nécessaires pour assurer le déroulement ordonné des affaires émanant des députés. . .
Telle est votre responsabilité, monsieur le Président. Je soutiens que vous avez également pour responsabilité de veiller à ce que le processus soit équitable pour tous les députés.

Or, le processus qu'on a suivi jusqu'ici me paraît inéquitable. Il empiète sur les droits de certains députés, notamment les miens en ce qui concerne la mesure d'initiative parlementaire que j'ai présentée le 17 février, visant à modifier la Loi sur les jeunes contrevenants.

Le dixième rapport du comité a pour conséquence que le projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai présenté et dont j'ai promis à mes électeurs de faire progresser l'étude au Parlement est en fait bloqué par un petit comité qui s'est réuni à huis clos et a choisi, selon des critères que j'ignore, les projets de loi et les motions qui feront l'objet d'un vote à la Chambre.

Voici ce que je propose à votre réflexion, monsieur le Président. Comme vous le savez, le comité doit choisir cinq projets de loi et cinq motions qui seront débattus à la Chambre et feront l'objet d'un vote. Le comité devait tenir compte de certains facteurs dans ses délibérations.

Après ses réunions en coulisse, après ses discussions à huis clos auxquelles, comme député, je n'ai pu assister, le comité a décidé quels projets de loi étaient d'intérêt national, seraient débattus trois heures à la Chambre et étudiés par un comité, et feraient l'objet d'un vote. Quels sont ces projets de loi?

Dans sa grande sagesse, le comité a décidé que de désigner le hockey comme sport national du Canada était plus important que des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. Il a aussi décidé qu'il était plus important que la Chambre consacre du temps à un projet de loi sur un régime de protection des témoins, puisque cela touche beaucoup de Canadiens.

Le Président: Je suis sûr que le député voudra dire précisément comment il a été porté atteinte à ses privilèges pour qu'il ne puisse s'acquitter de ses fonctions à la Chambre. J'invite le député à en venir aux faits.


2130

M. Wappel: J'invoque le Règlement, monsieur le Président.

(1505)

Le Président: Je m'occuperai d'abord de la question de privilège, et je reviendrai là-dessus après.

M. Nunziata: Comme le gouvernement et l'opposition se sont engagés à réformer la Chambre des communes, nous avons sûrement le droit, à titre de députés, de déposer des projets de loi et de nous attendre à ce qu'ils soient sérieusement étudiés, si la volonté de réforme de la procédure parlementaire est sincère.

Le Président: À l'ordre. Je pense que le député n'ignore pas que le rapport a été adopté par la Chambre. Je lui suggère de saisir le comité de cette question. Je lui recommande, à ce point-ci du moins, de songer à procéder de cette façon plutôt que de soulever la question de privilège.

Si le député veut que je détermine si sa question de privilège est fondée, je vais étudier la question.

M. Nunziata: Puis-je terminer mon intervention, monsieur le Président?

Le Président: Je croyais que vous aviez terminé.

M. Nunziata: Non, je n'avais pas fini.

Le Président: Continuez, mais veuillez être bref.

M. Nunziata: Je ne savais pas, monsieur le Président, qu'il fallait être bref quand on soulevait la question de privilège. On s'attendrait au contraire à avoir tout le temps voulu pour s'expliquer pleinement.

Je vais conclure. Je vous demande, en tant que Président de la Chambre et gardien de l'équité, de veiller à ce que les députés puissent contribuer d'une manière significative aux travaux de la Chambre, à ce qu'ils puissent examiner le processus.

Il ne convient pas de demander à des gens qui ont pris ces décisions manifestement injustes de se prononcer à nouveau sur les mêmes questions.

Je vous demande, Monsieur, à titre de Président de la Chambre, de prendre une décision à ce sujet.

Le Président: Je remercie le député. Je vais étudier la question et informer la Chambre de ma décision très bientôt.

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, en réalité, le seul. . .

Le Président: Le député soulève-t-il la même question de privilège?

M. Wappel: Oui, monsieur le Président, et elle me touche personnellement. Elle découle des observations que le député a faites et a directement rapport avec ces observations.

Le Président: J'entendrai la question de privilège qui découle de la même question de privilège.

M. Wappel: Monsieur le Président, le député, que j'ai écouté très attentivement, a mentionné le projet de loi concernant la protection des témoins, qui se trouve à être mon projet de loi. Je ne savais même pas qu'il avait été choisi pour être mis aux voix.

Néanmoins, je voudrais dire au député et aux autres que, moi aussi, pendant la campagne électorale, j'ai promis à mes électeurs, si j'étais réélu, de tenter, entre autres choses, de présenter un programme national de protection des témoins. C'est ce que j'ai dit aux dizaines de milliers de signataires de pétitions un peu partout dans le pays, pétitions que j'ai présentées à la Chambre. Je suis très froissé des observations que le député a faites sur ce projet de loi.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je comprends le problème soulevé, mais je pense que Votre Honneur admettra que l'argument du député de York-Sud-Weston ne donne pas matière à soulever la question de privilège à la Chambre.

Ce dont il se plaint, c'est de la décision du comité, et nous avons entendu l'inverse de la part du député de Scarborough-Ouest. Je reconnais que la tâche du comité est difficile, surtout à l'étape de la première sélection, car il lui faut choisir 10 des 30 articles de l'ordre de priorité pour qu'ils fassent l'objet d'un vote.

Le député de York-Sud-Weston s'est d'abord plaint du temps qu'il a fallu avant d'en venir à la détermination. S'il a lu les règles relatives aux initiatives parlementaires, il sait qu'on ne peut pas commencer à les étudier avant que le Feuilleton ne porte des articles provenant d'au moins 30 députés. Il se trouve qu'il a fallu un certain temps dans cette législature avant que le nombre requis de députés aient déposé assez de motions et de projets de loi pour que l'on procède à un tirage au sort.

(1510)

Lorsque le nombre a été atteint, on a fait le tirage au sort. Un sous-comité du comité que je préside s'est réuni, et il a fait rapport au comité. Ce sous-comité s'est réuni trois fois cette semaine. Il a présenté son rapport au comité ce matin. Ce rapport a été adopté immédiatement et déposé à la Chambre qui l'a approuvé.

Le député de York-Sud-Weston était ici lors de la précédente législature. Il sait que cette procédure existe depuis des années et que c'est la pratique de la Chambre depuis longtemps, en tout cas c'était déjà en vigueur lorsque j'ai été élu, en 1988. Je ne sais pas quand cette procédure a été initialement adoptée. Elle a été légèrement modifiée au cours de la dernière législature afin d'augmenter le nombre de fois où les députés peuvent présenter des projets de loi d'initiative parlementaire à la Chambre et les mettre aux voix.


2131

Il est dommage que son projet de loi n'ait pas été choisi. Tous les projets de loi que le comité a examinés étaient importants, mais il en a conclu que certains devaient être examinés en priorité, c'est-à-dire qu'ils soient mis aux voix.

Son projet de loi sera examiné à la Chambre, pendant une heure. Il se peut qu'à la fin de cette heure, la Chambre consente à ce qu'il soit mis aux voix, je l'ignore. La décision ne m'appartient pas.

Je peux lui dire que ce n'est pas une question sur laquelle vous pouvez vous prononcer, Votre Honneur. Voici ce que dit à ce sujet la 6e édition de Beauchesne, au paragraphe 760(3), à la page 230:

Le président de la Chambre a plus d'une fois expliqué qu'il n'avait pas compétence pour statuer en matière de procédure des comités, ceux-ci étant et devant être parfaitement libres de mener leurs délibérations à leur guise.
Je vous inviterais donc, Votre Honneur, à demander au député de York-Sud-Weston d'adresser au comité les critiques qu'il pourrait avoir. Il peut aller devant le comité et présenter de nouveau son projet de loi. Cependant, il avait, comme tous les autres députés, la possibilité de le présenter au sous-comité, qui a rendu une décision.

J'estime que cette décision était juste. Il avait autant de chances que les autres députés de la Chambre qui avaient présenté des projets de loi. Il se trouve que le comité n'était pas d'accord avec lui. C'est pourquoi il se plaint aujourd'hui.

À mon avis, ce n'est pas une question de privilège. Le comité a agi correctement. Son rapport a été déposé à la Chambre aujourd'hui et adopté. J'estime qu'il n'y a pas matière à soulever la question de privilège ici. En fait, le comité a fait preuve d'une très grande prudence dans cette affaire et a bien tenu compte de tous les facteurs.

Le Président: Ayant entendu les divers points de vue sur la question de privilège, je suggère que le député de York-Sud-Weston comparaisse devant le comité. Le fait est que le rapport a été adopté par la Chambre des communes et que la présidence ne peut renverser cette décision. Cela n'empêche pas le député de comparaître devant le comité à une date ultérieure pour défendre son point de vue.

À mon avis, il est clair, à ce stade, qu'il n'y a pas matière à soulever la question de privilège, que le rapport a été adopté et que cette décision ne peut être et ne sera pas renversée par la présidence. Ainsi, j'aimerais que nous mettions cette question de privilège de côté.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! La présidence a pris sa décision. J'ai pris une décision et je ne reviendrai pas dessus. Cette question de privilège est terminée.

Y a-t-il des députés qui voudraient soulever d'autres questions de privilège ou invoquer le Règlement? La députée de Beaver River a la parole pour un rappel au Règlement.

Mme Grey: Monsieur le Président, disons, pour résumer, qu'il existe un processus. Le secrétaire parlementaire vient tout juste d'en parler.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je suis sûr que la députée comprendra que cette question de privilège est terminée. À moins qu'elle ne souhaite faire un recours au Règlement ou soulever une autre question de privilège, je voudrais que nous poursuivions les travaux de la journée.

S'il n'y a pas d'autres recours au Règlement ou questions de privilège, je passerai aux travaux de la Chambre.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, j'aimerais connaître, de la part de mon collègue, le leader du gouvernement à la Chambre, quels seront les principaux éléments qui intéresseront la Chambre dans les prochains jours.

(1515)

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, aujourd'hui la Chambre termine le débat sur le budget.

Demain, vendredi, la Chambre étudiera le projet de loi C-5 sur le Tarif des douanes et le projet de loi C-6 sur les opérations pétrolières.

Lundi, mercredi et jeudi prochains seront des jours réservés à l'opposition. Mardi, toutefois, la Chambre étudiera une motion présentée par le ministre des Affaires étrangères visant à constituer un comité mixte spécial de la Chambre et du Sénat pour examiner la politique étrangère du Canada.

Nous annoncerons plus tard les projets de loi que la Chambre étudiera le vendredi 18 mars.

Cela dit, je signale que des consultations ont eu lieu et je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que nous revenions à la période des déclarations ministérielles afin que le ministre des Affaires étrangères puisse faire une déclaration et que les porte-parole de l'opposition puissent y répondre. Étant donné que les consultations ont déjà eu lieu, je voudrais qu'on demande le consentement unanime pour que le ministre des Affaire étrangères puisse faire sa déclaration.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que le ministre des Affaires étrangères puisse faire une déclaration maintenant?

Des voix: D'accord.

2132


2132

AFFAIRES COURANTES

[Français]

LA PRÉSENCE DES TROUPES CANADIENNES EN EX-YOUGOSLAVIE

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de remercier mes collègues à la Chambre de me permettre de faire cette déclaration en ce moment.

J'aimerais informer la Chambre qu'une décision a été prise, à l'occasion de la réunion du Cabinet ce matin, au sujet de la présence des troupes canadiennes en ex-Yougoslavie.

Vous vous souviendrez, monsieur le Président, qu'en janvier dernier le gouvernement avait consulté la Chambre au sujet de l'avenir de nos troupes dans cette région. Lors du débat, une majorité de parlementaires s'étaient exprimés en faveur du maintien de la présence canadienne au sein de la Force de protection des Nations Unies en ex-Yougoslavie. La Chambre avait alors jugé que le Canada contribuait de façon importante aux objectifs d'empêcher une escalade et un débordement de cette guerre, de rechercher un règlement négocié du conflit et de participer à l'effort d'aide humanitaire en cours. Elle avait également réaffirmé l'attachement du Canada à sa tradition de maintien de la paix, à la promotion de la stabilité et de la sécurité en Europe, et finalement à la recherche d'une solution négociée à la question des Balkans.

Il me fait plaisir d'annoncer aujourd'hui que, tenant compte de ce débat qui a eu lieu et à la lumière de l'évolution des dernières semaines, le gouvernement a décidé de prolonger la présence des troupes canadiennes, dont le mandat actuel vient à échéance le 31 mars, pour une période additionnelle de six mois.

Des voix: Bravo!

M. Ouellet: Cette présence sera maintenue à son niveau actuel et, dans le cadre de cette décision, le gouvernement envisagera la possibilité de redéployer une partie de ses troupes canadiennes sur le théâtre du conflit, si cela était le souhait du commandement de la Force de protection des Nations Unies, afin d'appuyer au maximum l'effort de paix engagé.

En prenant cette décision, le gouvernement a tenu compte des progrès encourageants qui ont été enregistrés sur le terrain. En particulier, des cessez-le-feu ont été négociés et respectés à Sarajevo. Nous avions tout à l'heure en cette Chambre la présence de l'archevêque de Sarajevo, et il me paraît tout particulièrement approprié de faire cette déclaration au moment où toutes les parties essaient de trouver une solution de paix à Sarajevo. Également, nous devons dire que les mêmes efforts de cessez-le-feu sont négociés un peu partout à travers la Bosnie centrale. Des négociations sérieuses ont été engagées entre les parties au conflit. L'aéroport de Tuzla est passé au contrôle des Nations Unies et, finalement, notre compagnie à Srebrenica a pu quitter l'enclave pour regagner son bataillon à Visoko.

(1520)

Je peux donc dire aujourd'hui que tous les soldats canadiens ont terminé à Srebrenica une mission remarquable qui est tout à l'honneur de l'armée canadienne.

Nous nous trouvons maintenant dans une situation où des étapes importantes ont été franchies en vue d'une solution pacifique, grâce notamment à l'accord intervenu entre Croates et Musulmans de Bosnie en vue de former une confédération. Il est important de souligner l'intervention diplomatique importante des Américains qui ont convié, à Washington, les représentants croates et musulmans et les ont aidés et assistés dans cette démarche qui est un pas très important vers la paix.

Également, des cessez-le-feu ont été négociés qui ont eu pour effet de favoriser un meilleur climat de négociation, de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire et de réduire le risque pour toutes les troupes impliquées sur le terrain.

Le Canada a participé pleinement aux discussions diplomatiques qui ont entouré cette évolution, tant à l'OTAN qu'au sein des Nations Unies et ailleurs. Le Canada, sur la scène internationale, a le devoir de faire connaître ses divergences de vue, mais il a aussi l'obligation de protéger l'unité des pays alliés. C'est ce qu'a fait le premier ministre du Canada lors du Sommet de l'OTAN à Bruxelles. En s'objectant vigoureusement à une escalade militaire et en privilégiant davantage une opération diplomatique, le Canada a retardé l'utilisation des forces de frappes aériennes qui auraient pu être utilisées en janvier dernier.

Aujourd'hui, sans l'utilisation des forces de frappes aériennes, l'aéroport de Tuzla est libéré, nos soldats sont sortis de Srebrenica et le processus de paix est résolument poursuivi. Le Canada, à sa manière, a bien servi la cause de la paix.

Dans ces conditions, la présence des troupes canadiennes est plus importante que jamais. Nous nous devons de continuer d'appuyer l'effort de la communauté internationale sous la direction des Nations Unies afin de consolider les acquis des dernières semaines et de permettre que d'autres progrès soient accomplis dans la mise en oeuvre des cessez-le-feu et des accords négociés. De plus en plus, nous devons le dire, les troupes canadiennes seront employées à exercer la fonction traditionnelle de gardiens de la paix en plus de poursuivre la tâche de faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire.

[Traduction]

Je fais aussi remarquer ici que le Canada continuera de participer activement à l'effort international visant à aider la Yougoslavie par d'autres moyens. Nous continuerons de participer financièrement à l'action de diverses agences internationales oeuvrant dans le secteur humanitaire et de mettre à la disposition de l'ONU des vols militaires afin d'acheminer cette aide. Nous continuerons de faciliter la mise en oeuvre des sanctions des Nations Unies au moyen, notamment, des unités navales qui sont sur place.

De plus, le Canada est disposé à poursuivre son action dans d'autres secteurs non militaires, comme le prouve la présence sur le terrain d'un contingent important de membres de la Gendarmerie royale du Canada et d'experts civils. Nous poursui-


2133

vrons en outre nos efforts au niveau diplomatique afin de trouver une solution à ce conflit.

Pour terminer, permettez-moi de souligner tout spécialement l'excellent travail qu'accomplissent les militaires canadiens en ex-Yougoslavie, en dépit de conditions parfois très difficiles. Leur contribution à la paix est quelque chose dont le Canada peut être fier et que cette Chambre ne peut qu'applaudir.

(1525)

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg): Monsieur le Président, l'opposition officielle a participé activement, le 25 janvier dernier, au débat dans cette Chambre sur l'avenir des opérations de maintien de la paix et celui de l'engagement du Canada en Bosnie.

C'est en toute sincérité que le Bloc québécois a décidé de changer pleinement sur cette question épineuse et pressante d'actualité. Pendant un certain moment, l'opinion publique a été ébranlée sur l'apparente inutilité de nos efforts et le danger couru par nos soldats, les coûts de l'opération et la complexité de la situation politique et militaire qui prévaut en Bosnie. Les résultats fort encourageants des derniers jours en Bosnie sont cependant de nature à redonner confiance aux Québécois et aux Canadiens envers notre action là-bas.

De l'avis du Bloc québécois, les missions canadiennes sont, avec l'ACDI, un grand sujet de fierté québécoise et canadienne. Les deux sont à l'origine de la crédibilité du Canada dans le monde.

Il aurait été facile de baisser les bras, de ramasser tous nos équipements et de partir, mais ce n'est pas ainsi que le Canada s'est acquis une solide réputation de gardien de la paix, prêt à fournir un effort supplémentaire pour la maintenir, comme l'a déjà mentionné le chef de l'opposition.

La vérité, c'est que le premier ministre a été pour le moins imprudent quand il a évoqué, à son départ de Bruxelles, au début du mois de janvier, la possibilité d'un retrait canadien unilatéral de la mission de paix en Bosnie. Aujourd'hui, le gouvernement rassure enfin ses alliés, avec qui il se doit d'agir en concertation. Il ne pouvait, en effet, rompre le pacte de solidarité que le Canada a courageusement tissé avec ses partenaires du Conseil de l'Atlantique.

Le gouvernement a donc décidé, après avoir inquiété tous ses partenaires engagés au sein de la force de protection des Nations Unies en ex-Yougoslavie, de prolonger la présence des troupes canadiennes, dont le mandat actuel venait à échéance le 31 mars, pour une période additionnelle de six mois.

Toutefois, le Canada refuse de répondre favorablement à l'appel urgent du secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, qui réclame des Casques bleus supplémentaires en Bosnie. Puisque la consolidation du processus de paix nécessite un plus grand nombre de contingents de Casques bleus, le Bloc québécois a demandé maintes fois au gouvernement de reconsidérer sa décision de ne pas envoyer de Casques bleus additionnels en Bosnie.

D'ailleurs, sur cette question, la presse, aujourd'hui, fait largement état de l'avis du général canadien Lewis McKenzie, qui fut commandant des forces de l'ONU pour le secteur de Sarajevo au début de la guerre.

À son avis, et je cite: «Si l'ONU ne parvient pas à convaincre les pays membres à fournir des troupes supplémentaires d'ici à un mois, l'occasion de paix aura été ratée».

Le gouvernement doit revenir sur sa décision et répondre favorablement à l'appel urgent qui lui est adressé, afin de s'assurer que les succès de paix obtenus à ce jour soient confortés et maximisés vers une paix complète.

Enfin, je voudrais souligner encore une fois le courage et la dignité avec lesquels nos militaires s'acquittent de la tâche difficile qui leur a été confiée outre-mer. Ils méritent notre admiration et notre soutien le plus entier. Nous avons aussi une pensée pour les proches qui vivent eux aussi des moments très difficiles.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer): Monsieur le Président, je tiens à remercier le ministre, ainsi que le gouvernement, d'avoir autorisé la Chambre à tenir un débat sur la Bosnie en janvier. Nos électeurs ont été nombreux à nous écrire pour vanter la qualité des échanges. Je voulais vous exprimer mes remerciements.

Ce débat a permis à la fois aux députés et à la population canadienne d'intervenir dans le dossier. Les gens ont ainsi été amenés à écouter ce qu'on disait là-dessus et à lire sur le sujet, afin d'en discuter en connaissance de cause. Nécessaire, cette forme de consultation contribue de surcroît à redonner confiance dans le processus parlementaire qui a souffert précisément du peu d'empressement des gouvernements précédents à solliciter l'avis de la population.

La situation qui règne dans l'ancienne Yougoslavie n'est pas du genre facile à résoudre. Comme nous l'avons dit au cours du débat, aucune des factions en guerre n'est tout bonne ou tout mauvaise et l'on ne saurait espérer que les choses se règlent d'elles-mêmes.

(1530)

À l'instar du ministre, nous sommes satisfaits du travail que nos troupes ont accompli et continuent d'accomplir. Leurs actions sont de nature à susciter la fierté nationale et à nous rendre fiers de notre appartenance au Canada. L'utilité de l'aide humanitaire dispensée est indiscutable et il ne fait aucun doute que notre présence a fait la différence.

Le prolongement du cessez-le-feu, décidé il y a quelques semaines, semble manifester chez les belligérants une volonté de régler autrement leurs différends. Nous devrions les y aider.

Comme il nous semble voir apparaître la lumière au bout du tunnel, nous souscrivons à la mesure annoncée aujourd'hui. J'aurais aimé cependant que l'on nous précise son coût approxi-

2134

matif. On ne saurait faire des déclarations à la Chambre sans chiffrer le coût des mesures annoncées.

Il va de soi que ça va nous coûter plus cher si l'on intensifie l'aide humanitaire, effectue plus de vols militaires, assure l'application des sanctions de l'ONU par le truchement de la GRC, d'experts civils, et ainsi de suite. Il faut tenir compte de l'ampleur de notre crise financière chaque fois que nous avons une décision de quelque importance à prendre.

Le vice-président: Je vois le député de Kamloops se lever. Y a-t-il consentement unanime pour que le député de Kamloops exprime la position de son parti?

Des voix: D'accord.

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, je remercie à nouveau mes collègues de la Chambre des communes pour cette générosité.

J'ai cru qu'il serait à propos de joindre ma voix aux autres pour remercier le ministre des Affaires étrangères de la déclaration qu'il a faite aujourd'hui à la Chambre. Il a respecté la toute nouvelle tradition selon laquelle le débat a lieu à la Chambre des communes; comme l'a déclaré mon ami du Parti réformiste, nous sommes heureux de pouvoir ainsi faire connaître notre opinion au nom de nos électeurs et de nos partis et de donner notre avis sur les mesures à prendre.

Comme notre porte-parole, le député de Burnaby, l'avait dit à l'époque, on devrait maintenir la présence des Canadiens et perpétuer la tradition quant au rôle du Canada dans le maintien de la paix; il a affirmé que notre présence était cruciale.

Je suis heureux de voir que le ministre a pris le temps d'annoncer la décision du gouvernement à la Chambre aujourd'hui. Nous appuyons et encourageons une telle démarche.

En terminant, j'aimerais simplement ajouter que nous tenons à reconnaître la contribution extraordinaire des militaires canadiens dans la pacification de cette partie du monde en plein conflit et, comme mon collègue du Bloc québécois l'a fait plus tôt, reconnaître l'appui des familles. Elles aussi ont porté le fardeau de l'effort accompli par leurs amis, parents et autres êtres chers en poste dans la région de l'ex-Yougoslavie.

Cette initiative ne va pas sans coût. Nous devons en tenir compte, mais pour le moment, si notre contribution, ajoutée à celle des autres pays qui représentent les Nations Unies, peut apporter un peu de paix dans une région du globe où nous avons vu se produire certains gestes tout simplement barbares, ce coût est justifié.

Je tiens à remercier encore une fois le ministre pour la déclaration qu'il a faite à la Chambre aujourd'hui. Nous l'approuvons et sommes très satisfaits de voir que nos troupes contribueront à la pacification et au maintien de la paix pendant les six prochains mois.


2134

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE BUDGET

L'EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Le vice-président: Avant que le député de Crowfoot n'entame son premier discours,

[Français]

je désire informer la Chambre que, en raison de la déclaration ministérielle, la période des initiatives ministérielles sera prolongée de 14 minutes, conformément à l'article 33(2)b) du Règlement. La parole est à l'honorable député de Crowfoot.

[Traduction]

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je profite de mon premier discours à la Chambre pour vous féliciter de votre nomination au poste de vice-président. Je tiens à vous exprimer tout le respect et le sens de l'honneur que m'inspire votre carrière politique. Je considère comme un honneur de prononcer mon premier discours à la Chambre alors qu'un de mes concitoyens albertains occupe le fauteuil.

(1535)

Je tiens tout d'abord à remercier les électeurs de Crowfoot qui m'ont accordé le privilège de les représenter à Ottawa. La circonscription de Crowfoot compte essentiellement des agriculteurs, des éleveurs et des employés du secteur tertiaire, qui sont tous de bons travailleurs, francs et honnêtes.

Je me suis engagé à défendre les intérêts de mes électeurs avec la même ouverture que celle dont ils font preuve dans leurs vies personnelles. Je vis à Camrose, le plus important centre urbain de Crowfoot, avec mon épouse Glenna et mes quatre enfants, Anne-Marie, Jackie, Spencer et Sterling, que j'aime et qui me manquent beaucoup. Je suis conscient de la situation que vivent les députés et leurs familles, qui doivent demeurer séparés les uns des autres pendant de longues périodes.

Je suis fier de représenter la circonscription qui porte le nom d'un grand chef pied-noir, Crowfoot. La bande des Pieds-Noirs n'habite plus dans ma circonscription mais son chef actuel, Striker Crowfoot, est un descendant direct du chef Crowfoot. Les membres d'un comité de caucus, dont je fais partie, l'ont rencontré il y a quelque temps et nous avons beaucoup apprécié sa présence et sa sagesse.

Ma circonscription couvre une superficie plus étendue que celle de la Nouvelle-Écosse; il me faut donc déployer beaucoup d'énergie pour me rendre d'une région à l'autre de la circonscription afin de consulter mes électeurs. Je suis néanmoins déterminé à écouter les nombreuses opinions et préoccupations dont me font part les habitants de Crowfoot et à faire entendre leurs points de vue dans la capitale nationale.


2135

Pendant la campagne électorale, j'ai constaté beaucoup de colère, de déception et un sentiment de trahison chez mes électeurs, qui estiment que les politiques et le gouvernement ont trahi la confiance que la population avait placée en eux; que les députés n'ont pas joué franc-jeu et n'ont pas fait preuve de bon sens et qu'ils n'ont pas su gérer les affaires du pays de façon responsable.

Les Canadiens savent que la stabilité de toute organisation, qu'il s'agisse d'une entreprise familiale, d'une église ou d'une organisation communautaire, est fondée sur la loi fondamentale de l'économie selon laquelle on ne peut constamment dépenser plus que ce qu'on produit. Une organisation qui ne respecte pas cette règle est vouée à la disparition.

Pendant plus de 20 ans, les Canadiens ont vu le gouvernement violer cette loi économique fondamentale. En agissant ainsi, le gouvernement a donné l'impression qu'il était au-dessus des lois, et qu'il pouvait outrepasser impunément les principes économiques qui régissent le secteur privé.

Le gouvernement fédéral n'a jamais eu un budget équilibré en 20 ans. Il refuse simplement de vivre selon ses moyens. Avec ce budget, le gouvernement actuel montre qu'il n'est pas différent des gouvernements conservateurs et libéraux qui l'ont précédé et qui nous ont amenés au bord de la ruine.

Notre gouvernement n'a pas tenu compte de l'énorme danger que représentent les dépenses et l'imposition à outrance pour la sécurité économique de nos concitoyens et de la nation. Il fait preuve de mépris envers les principes économiques qui régissent le secteur privé, ce qui pourrait avoir, en bout de ligne, des conséquences extrêmement graves pour tous les habitants de notre pays.

La plus grande menace à la stabilité financière de l'individu et de la famille, c'est le pouvoir illimité du gouvernement de nous confisquer nos richesses à grands coups d'impôts. Le gouvernement fédéral a haussé les impôts plus de 35 fois au cours des dix dernières années, ce qui a augmenté le fardeau fiscal de la famille canadienne moyenne de près de 1 900 $.

Le Fraser Institute affirme que nous versons maintenant plus de 50 p. 100 de ce que nous gagnons aux trois ordres de gouvernement, sous forme d'impôts. Malgré la somme faramineuse que le gouvernement fédéral enlève chaque année aux contribuables, nous sommes toujours endettés de plus d'un demi-billion de dollars et, encore cette année, nous ajouterons 40 milliards à cette rondelette somme.

C'est l'aboutissement de la gestion désespérément mauvaise que fait le Canada des questions budgétaires et monétaires et d'une absence de sens des responsabilités qu'on n'aurait jamais pu voir dans le secteur privé. Tandis que les politiciens noyaient la nation dans les dettes, ils s'accordaient des pensions si outrancièrement élevées que M. Clark aura reçu plus de trois millions de dollars en pension de retraite, à l'âge de 75 ans, et Perrin Beatty, près de cinq millions.

Ces politiciens se retirent avec un chèque de pension mensuel plus élevé que le salaire moyen des travailleurs canadiens. C'est injuste et inacceptable.

(1540)

La perception selon laquelle la classe politique fait fi des pratiques et procédures appropriées est renforcée depuis cinq ans par la violation presque quotidienne par les députés de la règle de droit qui régit le fonctionnement de la Chambre des communes.

Pratiquement tous les jours, au cours de la législature précédente, les Canadiens pouvaient être témoins à la télévision d'une infraction à l'article 16 du Règlement, alors que des députés interrompaient les délibérations en criant, en hurlant et en se lançant des insultes. Les Canadiens ont pu constater ce mépris total des règles qui régissent le déroulement des travaux de l'institution même qui décide des lois du pays.

Lorsque des députés se moquent de la règle de droit dans cette enceinte, peut-on se surprendre alors que des gens de l'extérieur décident eux aussi de ne pas respecter la loi?

Si, en tant que députés, nous ne pouvons maîtriser nos propres sentiments et émotions, pourquoi les gens pourraient-ils nous faire confiance pour gouverner les affaires du pays?

Il n'est pas surprenant alors que les Canadiens aient perdu confiance dans leur gouvernement et que les politiciens soient si méprisés dans tout le pays. On ne se montre pas digne de la confiance des gens qui se sentent alors trahis.

Quel est le résultat de ce sentiment des Canadiens? Eh bien, leur réaction prend deux formes. Tout d'abord, ils ont décidé sur le plan politique de détruire complètement le gouvernement conservateur, de décimer le caucus néo-démocrate et d'élire 52 députés réformistes qui ont fait campagne sur un programme basé sur l'austérité, la réduction des impôts et la réforme parlementaire.

Leur réaction économique à cette trahison est beaucoup plus inquiétante. En effet, elle a entraîné la formation d'une économie souterraine qui représenterait quelque 100 milliards de dollars par année. Les gens refusent d'être assujettis à un régime fiscal qu'ils considèrent injuste et qui, selon eux, menace leur survie personnelle et celle de leur famille. Ceux qui vivent près de la frontière américaine vont faire leurs achats aux États-Unis pour ne pas payer la TPS et d'autres taxes et un nombre croissant de citoyens normalement respectueux de la loi sont prêts, malgré les risques de poursuites, à acheter des cigarettes et d'autres produits de contrebande afin d'échapper aux taxes élevées. Ces gens rejettent notre régime fiscal, car ils le considèrent injuste et ils jugent qu'il remet en question leur survie économique.

Ils voient le gouvernement faire des dépenses inconsidérées et gaspiller l'argent des contribuables de toutes parts et ils se sentent trahis. Ils voient un système judiciaire en déroute, un système de libération conditionnelle qui relâche des criminels dangereux qui continuent à violer et à tuer; une Loi sur les jeunes contrevenants qui ne tient pas responsable de sa conduite criminelle un enfant de 10 ans; ils voient des lois incapables de protéger la société contre les actes criminels. Des mesures légis-


2136

latives mal conçues tel le projet de loi sur le contrôle des armes à feu qui s'en prend aux citoyens respectueux de la loi et non à l'usage criminel des armes à feu.

Les Canadiens assistent à des déferlements successifs de népotisme et à ses effets dévastateurs et avilissants sur l'intégrité des politiciens et du gouvernement et sur leur réputation aux yeux des électeurs. Et maintenant, voilà que le premier ministre leur dit qu'il trouve écoeurant et révoltant de leur accorder le droit à la parole dans des dossiers importants, à caractère moral, telle la question de l'euthanasie.

Le premier ministre ne se prive pourtant pas de rappeler à cette Chambre que les Canadiens ont su prendre la décision qui s'imposait au moment des élections. Il n'y avait alors rien de révoltant ni d'écoeurant à ce qu'ils participent à l'élection de leur député. Mais dès lors qu'il a accédé au poste de premier ministre, il est soudain devenu le détenteur de la vérité.

À cette attitude, qui était la marque des gouvernements Trudeau et Mulroney avant d'être celle du premier ministre actuel, nous devons une nation écrasée par les impôts et une dette énorme, ainsi qu'un système judiciaire incapable de protéger les biens des Canadiens et leur personne.

Malgré toutes les consultations prébudgétaires tenues d'un bout à l'autre du pays, cette attitude condescendante demeure. Les Canadiens n'ont pas demandé que la dette augmente de 100 milliards, et pourtant c'est bien ce que font les libéraux avec ce budget.

Le gouvernement n'a pas annoncé aux Canadiens son intention d'accroître ainsi la dette pas plus qu'il ne les a informés des dangers qu'il y avait à ajouter 100 milliards à une dette qui atteignait déjà un demi-billion de dollars.

Pourquoi ce budget ne dit-il rien des conséquences qu'aura ce geste sur notre pays, nos concitoyens, nos programmes sociaux, notre stabilité économique, notre cote de crédit à l'étranger et le million d'enfants qui, nous dit-on, vivent dans la pauvreté? Comment l'ajout d'encore 100 milliards de dollars à la dette nationale pourrait-il diminuer le sentiment de trahison éprouvé par un nombre croissant de Canadiens?

(1545)

Le budget démontre que le gouvernement ne se soucie pas de la dette nationale. Le gouvernement dépensera trois milliards de dollars de plus cette année que l'an dernier. Il va chercher encore plus d'argent que l'an dernier dans les poches des Canadiens et cet argent est tout simplement perdu pour l'économie. Ce budget démontre que le gouvernement ne se soucie pas le moins du monde des dangers que l'accroissement incessant de la dette fait peser sur les Canadiens.

Les anciens gouvernements, y compris les gouvernements libéraux, ne s'inquiétaient pas des dangers de l'endettement. Les libéraux avaient laissé une dette de 200 milliards de dollars en 1984. Les conservateurs n'ont pas pu mettre un frein à la croissance de cette dette et y ont eux-mêmes ajouté 300 milliards de dollars.

Le gouvernement actuel promet de faire grossir ce monstre d'encore 100 milliards de dollars au cours des trois prochaines années sans tenir aucun compte des conséquences dévastatrices de cette dette pour le Canada et les Canadiens.

Comme mes concitoyens, je trouve tout à fait inacceptable l'irresponsabilité des gouvernements formés par les vieux partis et dont témoigne le budget. Par la force de la loi, ces gouvernements ont imposé aux Canadiens la tyrannie de l'endettement et de la taxation à outrance. La mauvaise gestion de nos affaires financières et monétaires par le gouvernement actuel et par ses prédécesseurs détruit notre économie.

La vie de la nation est tributaire de la santé de l'économie et de l'esprit du peuple. Les sentiments de colère et de déception se répandent partout et minent cet esprit.

Rien ne fera disparaître ces sentiments tant que les Canadiens ne pourront pas faire confiance aux gens qu'ils ont choisis pour les gouverner. Le budget aurait pu marquer un nouveau départ. Il aurait pu venir au secours de notre économie ravagée et nourrir l'esprit et l'espoir de notre peuple. Il n'en est rien.

En terminant, je voudrais souligner les aspects positifs du budget, parce qu'il en a. Des députés des deux côtés y ont fait allusion. Personnellement, je vois ces aspects positifs comme des meubles neufs que l'on installerait dans une maison en flammes.

[Français]

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le budget présenté par mon collègue le ministre des Finances, le 22 février.

Le budget fédéral a établi un plan d'action responsable pour reprendre le contrôle sur le déficit et ramener les Canadiens au travail. Le Budget repose sur la nécessité de s'attaquer au déficit, de réformer les programmes sociaux et de concevoir des plans d'aide aux chômeurs.

Le budget met en évidence la conviction de notre gouvernement qu'en travaillant de concert avec les Canadiens, nous devons faire les changements nécessaires pour améliorer notre économie. Les dispositions du budget auront certainement des répercussions considérables pour les Canadiens, mais je suis convaincu que le ministre des Finances est arrivé à une approche équitable entre les restrictions sur les dépenses et les autres mesures qui favoriseront la croissance économique.

Selon le ministre des Finances, l'objectif du budget est, et je cite: «Nous suivrons une approche équilibrée dans notre processus de réforme fondamentale afin de créer des emplois, maintenir notre appui à ceux et celles qui en ont besoin et réduire le déficit.» La nature variée de l'économie canadienne accorde une importance toujours croissante à la rapidité, à la fiabilité et certainement, évidemment, aux coûts du réseau de transport.


2137

Les transports sont le moteur des exportations de ce pays et évidemment sont aussi un facteur critique dans la compétitivité de l'industrie canadienne. L'importance de l'efficacité des transports se traduit de façon marquante dans la proportion des prix d'exportation attribuable aux coûts de transport. Entre 18 et 45 p. 100 du prix de vente de nos matières premières, tels le charbon, les produits forestiers, le grain et le bois d'oeuvre correspond aux coûts du transport. Les transports représentent environ 5 p. 100 du coût des biens manufacturés exportés, et dans certains cas peuvent même atteindre jusqu'à 17 p. 100.

(1550)

Quant à l'industrie des transports, c'est un employeur important au Canada, qui assure plus de 442 000 emplois directs et 378 000 emplois indirects, dont un bon nombre dans les deux secteurs sont spécialisés.

[Traduction]

Le secteur des transports dans notre pays fait face à de nombreux défis de taille. Un réseau de transport efficace est essentiel dans le contexte des changements résultant de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce et l'Accord de libre-échange nord-américain. La mondialisation des marchés et l'évolution des échanges commerciaux ont poussé le Canada à porter son attention au trafic nord-sud en pleine croissance ainsi qu'aux exportations et voyages plus nombreux à l'étranger.

Il faut aussi continuer de répondre à nos besoins en transport est-ouest; ces derniers pourraient croître à l'avenir grâce aux négociations fructueuses sur le commerce intérieur et à l'amélioration de l'accès au marché pour nos matières premières à la suite des négociations de l'Uruguay Round.

Toutefois, nos industries des transports, notamment les compagnies aériennes et les sociétés ferroviaires, ont subi et continuent de subir des pertes considérables. Les deux principaux transporteurs aériens au Canada éprouvent de graves difficultés financières. Seul le temps nous dira s'ils pourront survivre.

Les progrès récents réalisés à cet égard, par exemple la décision d'Air Canada d'abandonner ses poursuites contre les Lignes aériennes Canadien International au sujet du réseau Gemini et d'autres questions, montrent bien que notre gouvernement est déterminé à travailler de concert avec l'industrie pour essayer d'améliorer sa viabilité commerciale et sa capacité de faire face à la concurrence sur le marché mondial.

Nous examinerons avec intérêt toute proposition que pourraient nous présenter le CN et le CP en vue de fusionner ou encore de rationaliser leurs activités d'un bout à l'autre du Canada. Dans l'évaluation que nous ferons de toute proposition de rationalisation ferroviaire, il faudra trouver l'équilibre entre les besoins des utilisateurs et les intérêts des travailleurs. Je tiens cependant à dire que, pour moi, pour le gouvernement et pour le ministère, ce sont les intérêts des contribuables canadiens qui doivent passer avant tout.

Notre décision tiendra compte des changements dynamiques que connaissent l'industrie ferroviaire et l'économie nord-américaine, dont l'importance croissante du trafic nord-sud, la concurrence et l'intégration intermodales, la possibilité de concurrence accrue venant de nos voisins du Sud-et cette possibilité existe certainement-les progrès technologiques et les économies éventuelles.

VIA Rail est une autre entité qui relève de notre ministère et dont l'avenir est très incertain. Si VIA Rail n'arrive pas à réaliser des gains sur le plan de l'efficience et à rationaliser ses activités, cette société coûtera beaucoup plus cher que maintenant aux contribuables canadiens.

Nous devons reconnaître que certains des réseaux de transport du Canada sont surdéveloppées et beaucoup trop subventionnés: 95 p. 100 de tous les passagers et du fret aérien transitent par seulement 25 p. 100 de nos très nombreux aéroports; 84 p. 100 du trafic ferroviaire est transporté sur 33 p. 100 des voies ferrées; et 80 p. 100 du trafic portuaire transite par seulement 5 p. 100 de nos ports.

Nous dépensons beaucoup d'argent au Canada pour les transports. Dans le Budget des dépenses principal, le gouvernement a exprimé l'intention de dépenser 619 millions de dollars pour la Garde côtière canadienne, 710 millions pour le système de navigation aérienne, et 430 millions pour les aéroports. Nous consacrerons également 331 millions de dollars aux services ferroviaires voyageurs, 159 millions aux services de traversier, près de 650 millions au transport du grain dans l'Ouest en vertu de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, et plus de 100 millions au transport des marchandises dans l'Est du pays conformément à la Loi sur les subventions au transport des marchandises dans la région de l'Atlantique et à la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les provinces Maritimes.

Ce sont des chiffres énormes qui dépassent l'entendement de la plupart des Canadiens, mais ce sont des chiffres qu'il va falloir examiner très sérieusement.

[Français]

Nous devons séparer l'utile de l'essentiel, l'essentiel qui doit être au coeur du réseau des transports de l'avenir. Des décisions difficiles s'imposent. Et, dans ce contexte, le Budget m'oblige, en tant que ministre des Transports, à discuter avec mes collègues provinciaux de l'élaboration d'un réseau intégré et très efficace de transport de surface des marchandises et de la redistribution des subventions afin d'améliorer l'efficacité du réseau entier. Il est évident que, par exemple, le réseau routier national doit être amélioré. Les ministres des Transports fédéral et provinciaux sont convaincus de ce qui doit être fait, mais maintenant c'est aux ministres des Finances fédéral et provinciaux aussi bien qu'aux premiers ministres de s'entendre sur une solution à savoir comment on va payer pour ces travaux.

(1555)

[Traduction]

Nos maigres ressources financières doivent être consacrées à la création d'un réseau de transport économique, intégré et multimodal. Il faudra pour cela combiner plusieurs des éléments dont nous disposons déjà dans le secteur des transports pour en arriver à avoir le meilleur système possible. Cela représentera sans doute un défi très difficile à relever pour l'industrie, surtout pour les compagnies ferroviaires et les sociétés aériennes qui se débattent pour trouver des façons moins coûteuses d'exploiter


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leurs services. Le gouvernement doit cependant lui aussi relever le défi de faire davantage avec des ressources très limitées.

Pour notre part, à Transports Canada, nous ajoutons nos propres initiatives de réduction des coûts pour nous adapter aux dispositions du nouveau budget de mon collègue. Nous poursuivons des politiques constituées d'un mélange d'intégration modale, de pragmatisme, d'innovation et de réalisme pratique. Nous nous concentrons sur des solutions qui seront importantes pour l'avenir du Canada plutôt que sur le romantisme et la nostalgie du passé, aussi importante que puisse être la vision que Pierre Burton se fait du Canada.

Grâce à une hausse de la taxe sur le transport aérien, le budget permettra de réduire le fardeau du contribuable au chapitre des transports et de faire payer une plus grande partie du coût par les usagers des divers réseaux.

[Français]

Transports Canada offre de nombreux services. Les usagers paient 42 p. 100 des 2,1 milliards de dollars que coûtent ces services; évidemment, les contribuables, 58 p. 100.

Nous allons nous assurer que ceux qui bénéficient directement d'un service ou d'une installation en paient une part équitable. La Commission royale sur le transport des voyageurs au Canada et la Commission d'examen de la Loi sur les transports nationaux ont toutes deux appuyé fortement un meilleur équilibre au chapitre des frais payés par les contribuables et les usagers. Je tiens à souligner que la hausse des redevances proposées par Transports Canada pour 1994-1995 ne sert qu'à compenser l'érosion des ressources du ministère causée par l'inflation.

[Traduction]

Le moment est venu pour le gouvernement d'envisager de nouvelles façons d'assurer ses services. Dans son budget, le ministre des Finances a dit que le gouvernement examinerait la possibilité de mettre en application le principe de la commercialisation à Transports Canada.

Je crois fermement que le secteur privé peut s'acquitter du travail. Au Canada, s'il est un moment tout indiqué pour laisser s'acquitter du travail ceux qui sont le mieux en mesure de le faire, c'est bien actuellement.

Nous examinerons toutes les possibilités de collaborer avec le secteur privé pour fournir des services de transport aux Canadiens. Nous n'hésiterons pas à demander au secteur privé de faire ce qu'il peut faire mieux que quiconque. Cependant, nous veillerons aussi à ce que le gouvernement continue de formuler des politiques et d'assurer des services adéquats à tous les Canadiens.

Les solutions traditionnelles du passé ne nous permettent plus de répondre promptement aux besoins qui évoluent rapidement. Il n'est pas nécessaire qu'un gouvernement soit le propriétaire et l'exploitant d'un réseau pour atteindre les objectifs de sa politique officielle. À mon avis, la commercialisation est une solution très attrayante puisqu'elle permet d'appliquer des critères commerciaux à des services qui, auparavant, étaient souvent fournis par le gouvernement.

La commercialisation peut revêtir bien des formes-des services gouvernementaux aux entités sans but lucratif, aux organismes de services spéciaux et aux sociétés d'État, et elle peut comprendre la privatisation ou une combinaison de ces différentes composantes. Mais quelle qu'en soit la forme, elle nous oblige à adopter une approche commerciale plus efficace, mieux adaptée aux besoins de la clientèle et moins tributaire des deniers publics. Entre autres avantages, mentionnons une meilleure planification des immobilisations, l'accès au financement du secteur privé, un processus d'approbation plus rapide, de nouvelles technologies pouvant être mises en oeuvre plus facilement et une plus grande participation des usagers et de la clientèle.

Le potentiel de commercialisation est énorme, notamment en ce qui concerne le système de navigation aérienne, l'administration de la voie maritime du Saint-Laurent, les chemins de fer secondaires, la garde côtière. À mon avis, la commercialisation dans ces domaines et dans de nombreux autres secteurs d'activité gouvernementale peuvent se traduire par des économies importantes pour les contribuables et par un meilleur service pour la clientèle. Toute démarche visant la commercialisation sera évidemment conforme à l'engagement du gouvernement de maintenir des normes de sécurité élevées dans le secteur du transport au Canada.

(1600)

Nous ne pouvons pas exiger plus des usagers que nous n'exigeons de nous-mêmes. Aussi, je suis heureux de signaler à la Chambre que les nouvelles initiatives de gestion relativement aux frais généraux de Transports Canada se traduiront par des économies annuelles d'environ 50 millions de dollars. Au cours des quatre ou cinq prochaines années, environ 1 000 postes au sein de notre ministère seront supprimés.

Les frais généraux seront réexaminés annuellement et, dans ce contexte, les gestionnaires de Transports Canada savent que je tiens absolument à ce que les employés qui seront touchés par ces changements soient traités avec considération et d'une manière équitable, conformément à la politique du gouvernement sur le réaménagement des effectifs.

Au fil des ans, Transports Canada a réalisé d'importantes compressions des dépenses relativement à l'utilisation de ses installations et de ses services. Dans l'ensemble, de l'exercice 1985-1986 à l'exercice 1993-1994, la réduction nette des dépenses a été de 500 millions de dollars.

Au cours de la même période, l'effectif a été réduit de 2 400 années-personnes, soit plus de 11 p. 100. J'ajouterai que ces réductions ont été réalisées malgré l'augmentation de la plupart des indicateurs globaux de la charge de travail.

J'ai parlé de certaines des questions propres au transport qui doivent être examinées dans le contexte de notre nouveau budget. Je suis d'avis que les éléments du budget et les mesures que nous prenons de concert avec les usagers des services de transport représentent un programme national équilibré, pour satisfaire les besoins du pays.

Le gouvernement est déterminé à aider les Canadiens à bâtir une économie plus forte. Nous entendons mettre de l'avant des politiques susceptibles d'accroître immédiatement l'efficacité


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des transports et de protéger les emplois, sans compromettre la sécurité.

Les Canadiens veulent être maîtres de leur avenir, tout en respectant leur passé. J'ai déclaré à maintes reprises qu'il ne fallait pas oublier l'âge d'or des chemins de fer canadiens, mais qu'il fallait aussi tenir compte de la réalité. Pour dire comme Geoffrey Simpson dans l'introduction de son livre Faultlines, le chemin de fer national était le rêve du XIXe siècle.

J'estime qu'aujourd'hui le rêve de la plupart des Canadiens, au moment où nous essayons d'établir un équilibre équitable entre nos ressources et les services que nous offrons à la population, consiste davantage en un maintien de programmes sociaux comme l'assurance-maladie.

Les temps ont changé, et nous devons nous adapter. Compte tenu de l'extraordinaire contribution de plusieurs secteurs de l'industrie des transports au développement du Canada, je sais qu'il est très difficile pour bien des gens d'accepter ces changements.

J'estime que les Canadiens souhaitent aussi que leur gouvernement dispose des moyens pour maintenir les programmes, les politiques et les services fondamentaux et qu'il puisse s'adapter aux nouvelles priorités.

Un système de transport intégré et abordable n'est pas un rêve du passé. À l'aube du XXIe siècle, pareil système devient une nécessité nationale.

[Français]

M. Benoît Tremblay (Rosemont): Monsieur le Président, j'ai écouté l'honorable ministre des Transports et il y a un point sur lequel je suis d'accord avec lui, c'est que si le réseau des chemins de fer actuel correspond au rêve canadien, ce rêve canadien est largement dépassé.

En écoutant son discours, j'ai pu conclure que le ministre des Transports est devenu en quelque sorte un filiale du Conseil du Trésor, parce qu'il nous a dit essentiellement qu'il faut diminuer les coûts et augmenter les tarifs. J'attendais une certaine perspective de l'avenir.

On nous dit que s'il y a une fusion entre le CN et le CP, on va l'examiner. Mais qu'est-ce que le ministre attend pour exiger qu'il y ait une fusion en donnant des lignes claires sur le maintien des services essentiels, la diminution des coûts afin de rendre les services compétitifs?

(1605)

Pourquoi le ministre attend-il que le CN et le CP viennent faire une proposition, alors qu'on nous dit aujourd'hui que ça prendra encore, au minimum, une année, et entre-temps, comme on le sait, ils vendront des actifs. Plusieurs de ces terrains ont des lignes de chemins de fer et des actifs importants seront transformés et transférés à des filiales immobilières de ces entreprises qui sont d'une grande valeur et qui ont sans doute été acquis pour très peu, avec l'aide du gouvernement.

Il y a un autre dossier encore plus important pour l'avenir et le ministre des Transports n'a pas jugé bon d'en faire la moindre mention. Lorsqu'on pense que le projet du train à très grande vitesse Québec-Windsor, qui est un dossier d'avenir, qui est un dossier de nouvelles technologies, qui est un dossier qui peut correspondre, qui a des besoins non seulement de transport, mais des besoins de développement de technologie pour des marchés de plusieurs milliards en Amérique du Nord, alors, le croirez-vous, monsieur le Président, le ministre des Transports n'a pas mentionné un mot sur le projet de train à très grande vitesse.

Est-ce que le ministre des Transports pourrait nous donner un peu de perspectives pour l'avenir?

M. Young: Monsieur le Président, en ce qui a trait aux commentaires de mon honorable collègue au sujet de la fusion qui est le sujet de discussion entre les responsables de CN et de CP, ce qu'on a dit c'est qu'on va certainement regarder la proposition qui pourrait être faite au gouvernement du Canada, comme l'actionnaire de CN.

Il y a évidemment une volonté de notre part de regarder toutes ces possibilités. Pour ceux qui connaissent un peu le réseau des chemins de fer au Canada, ils savent que déjà, dans les provinces de Terre-Neuve et de l'Île-du-Prince-Édouard, il n'y a pas de services de chemins de fer. À l'est du Canada, à l'est de Sherbrooke, il n'y aura plus rien pour le CP après le mois de janvier.

Mon honorable collègue y était lorsque toutes ces choses ont été décidées par le gouvernement précédent. Pour notre part, on va certainement écouter ce que ces deux lignes auront à suggérer. On est très conscients du besoin de trouver un système efficace qu'on peut maintenir au Canada, mais on insiste que tous les éléments du secteur des transports doivent être intégrés dans un système qui est efficace et dont on a les moyens de se payer.

Les abandons de lignes continueront certainement. Il n'y a pas de doute que le contribuable canadien n'est pas en mesure de soutenir un système, à la fin du XXe siècle, qui était sans doute efficace il y a 30 ou 40 ans passés, mais on essaie de le faire d'une façon aussi équitable, aussi juste que possible, tenant compte d'autres alternatives.

En ce qui a trait au TGV, mon honorable collègue sait sans doute qu'il y a une étude déjà en cours faite par les gouvernements du Québec, de l'Ontario et du Canada, une étude de plusieurs millions de dollars, qui doit être achevée au printemps avec un rapport qui nous sera disponible, je l'espère, à l'été. Je crois que ce serait très mal vu de ma part de m'exprimer sur la question de savoir si on doit avoir un système de TGV, oui ou non, avant d'écouter nos collègues de la province de Québec et ceux de l'Ontario, parce qu'on pense que ces gens-là ont travaillé fort et méritent d'être écoutés lorsqu'ils nous soumettent un rapport.

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je félicite le ministre de son discours, qui était très cons-


2140

tructif. Il est certain que nous devons nous soucier de l'efficacité et l'obtenir à un coût raisonnable.

Telle est l'orientation que le ministre a choisie. Il est réconfortant que les nouvelles idées qui jaillissent sont des nouvelles idées que nous n'avons pas vues depuis des dizaines d'années. Je félicite le ministre.

Les aéroports, notamment les plus petits, ont coûté des millions aux contribuables. C'est regrettable, mais c'est parfois nécessaire, parce que les petits aéroports n'arrivent pas à se financer par les taxes d'atterrissage, l'expansion, etc.

Chez moi, l'aéroport d'Abbotsford, où se tient le spectacle aérien international d'Abbotsford, essaie depuis quelques années d'avoir sa propre administration. Le gouvernement fédéral aurait pu économiser l'argent du contribuable, et l'administration locale se serait chargée de l'aéroport.

(1610)

Nous avons eu par le passé de nombreuses discussions avec l'ancien gouvernement, mais nous nous sommes heurtés à la bureaucratie et c'est ainsi qu'ont avorté des entretiens qui auraient pu être fructueux.

Le ministre voudrait-il nous dire ce qu'il adviendra de ces petits aéroports? Le ministre est-il prêt à envisager de les céder aux localités qui veulent avoir leur propre administration aéroportuaire?

M. Young: Monsieur le Président, je répondrais à mon collègue que peut-être dans le cas d'un petit aéroport, mais certainement pas dans le cas d'un grand. Tout le monde est au courant de la situation à Abbotsford, de son grand spectacle aérien.

Je peux donner au député l'assurance que le gouvernement entend non seulement faciliter le transfert de la responsabilité des activités aéroportuaires aux collectivités dans tout le pays, mais également favoriser davantage le processus.

Je ferai observer que les budgets d'exploitation des petits aéroports, de façon générale, ne devraient pas poser trop de problèmes. Néanmoins, force nous est de reconnaître qu'il n'est pas toujours possible de disposer de capitaux. Trouver des capitaux n'est pas chose facile. On ne parvient pas aisément à trouver les fonds nécessaires au maintien des services assurés dans les aéroports à leur niveau actuel.

Nous tenons à être parfaitement équitables dans ce dossier. Nous avons exprimé notre intention d'appliquer partout la même politique, qu'il s'agisse de Pearson ou d'un autre grand aéroport canadien. Nous entendons donc examiner toutes les options possibles concernant les aéroports gérés par le gouvernement, y compris la privatisation.

J'ai dans l'idée que nous allons recommander une forme d'administration locale dotée d'un certain degré de responsabilité. Néanmoins, dans les cas où ce sont des membres de la collectivité, parfaitement au fait de leurs besoins, qui gèrent ces aéroports dans le cadre d'une quelconque forme de partenariat avec le gouvernement du Canada, il n'y a pas de doute que le contribuable canadien y trouvera son intérêt. Nous nous proposons d'agir ainsi très prochainement.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le ministre des Transports qui mentionnait que dans le domaine des aéroports, il y aurait des investissements importants de faits, selon le Budget en tout cas, de l'ordre de 470 millions de dollars, si j'ai bien compris.

D'autre part, j'ai noté la réponse qu'il a donnée au député de Rosemont tout à l'heure sur le fait qu'il ne pouvait pas s'engager dans un projet de TGV compte tenu qu'une étude est en cours. J'aimerais faire remarquer au ministre, et je terminerai pas une question, que dans le cas de l'agrandissement et de la modernisation de l'aéroport Jean-Lesage, les études sont toutes faites. Elles sont sur les tablettes et elles attendent que le ministre et que le ministère des Transports consentent à y apporter des sous.

Je voudrais lui rappeler qu'au cours de l'été 1993, cet aéroport-là a été doté du statut d'aéroport international. Mais on a l'impression, mis à part cet attribut-là qu'on lui a prêté, qui est en fait une petite parure, une petite décoration, l'aéroport Jean-Lesage est nettement dans une situation de pauvreté par rapport à des aéroports comme Halifax, Winnipeg, Edmonton. Nous ne disposons pas du tiers de l'espace de ces installations-là.

Est-ce que, au cours de l'année 1994, le ministre entend faire quelque chose pour donner à cet aéroport, qui est de statut international, l'ampleur pour répondre aux besoins. Cela fait un consensus d'ailleurs dans tout le milieu.

M. Young: Monsieur le Président, je suis très conscient de la situation à l'Ancienne-Lorette de l'aéroport Jean-Lesage, l'aéroport de la ville de Québec. Vous avez raison de dire que les études ont été faites, les propositions, les devis ont été préparés, tout cela, et je regrette d'être obligé d'informer mon honorable collègue qu'on n'a pas réussi à tout faire dans quatre mois. Cela fait longtemps, lorsqu'on a commencé à faire la révision de ces dossiers, que les plans étaient en marche, que les discussions avaient eu lieu, que les représentations avaient été faites, et je regrette que l'administration en place n'ait pas réussi à achever le projet de l'aéroport Jean-Lesage, l'aéroport de Québec.

Mais je tiens à l'assurer qu'on est en train de mettre de l'avant les propositions basées sur les coûts qui ont été établis pour faire les travaux qui s'imposent à l'aéroport international de Québec, et j'espère avoir une réponse assez tôt. Cependant, puisqu'on est en train de parler de budget, les chiffres auxquels je faisais référence dans mon discours, généralement, sont attribués aux opérations des aéroports plutôt que pour la construction du côté capital. J'espère que l'on pourra rendre une décision, et on tiendra compte des commentaires de l'honorable collègue lorsqu'on prendra ces décisions-là.

(1615)

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, il me fait plaisir, à mon tour, de donner mon point de vue sur le Budget déposé par le ministre des Finances le 22 février dernier.

En tant que membre du Comité permanent des ressources humaines et porte-parole de l'opposition officielle en matière de formation et de jeunesse, vous ne serez pas surpris, monsieur le Président, de me voir traiter davantage des conséquences socia-


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les du Budget, et plus particulièrement, de celles qui risquent d'affecter l'avenir de notre jeunesse.

Tout d'abord, je parlerai des modifications à apporter au régime d'assurance-chômage parce qu'à mon avis c'est là que le gouvernement libéral a le plus mal agi depuis son élection. Pourtant, le chômage n'est-il pas notre principal problème?

En 1989, vous le savez, il y avait un million de chômeurs; en 1993, il y en avait 1,6 million, soit 60 p. 100 de plus. Contrairement aux discours prononcés par les libéraux quand ils étaient dans l'opposition et lors de la dernière campagne électorale, ils continuent de suivre la même politique que les conservateurs, c'est-à-dire qu'ils préfèrent s'attaquer aux chômeurs et aux chômeuses plutôt que de chercher à créer des emplois.

Ils ont ainsi choisi de maintenir les augmentations prévues aux cotisations d'assurance-chômage décidées antérieurement par les conservateurs. Même si le ministre des Finances a avoué hier, lors de la période des questions, trouver aberrante cette situation, il la laisse pourtant perdurer encore un an, dans l'espoir semble-t-il que la réforme des programmes sociaux actuellement à l'étude pourra lui procurer l'argent nécessaire pour soutenir, selon lui, la création de 40 000 nouveaux emplois l'année prochaine.

Pourquoi ne pas l'avoir fait dès cette année, alors que le gouvernement n'a pas hésité à annuler le contrat des hélicoptères et faire marche arrière dans la privatisation de l'aéroport Pearson? Geler les cotisations à l'assurance-chômage en janvier dernier aurait été plus simple que de les réduire dans un an.

De façon générale, les changements à l'assurance-chômage feront en sorte qu'il faudra travailler plus longtemps pour être éligibles à des prestations moins importantes et moins longues.

Une étude réalisée par des professeurs du Département des sciences économiques de l'Université du Québec à Montréal révèle que plus de la moitié des coupures annoncées dans le dernier Budget fédéral seront supportées par les chômeuses et les chômeurs canadiens.

En ajoutant des barèmes différenciés pour les prestations, le gouvernement divise les chômeurs en deux catégories: les chômeurs à faible revenu avec des enfants à charge et les autres. Pour justifier une telle décision, le gouvernement évoque une supposée notion d'équité. Or, c'est plutôt une brèche importante dans le principe d'universalité qui existe dans nos programmes sociaux depuis leur création, c'est introduire une discrimination basée sur le statut.

Par exemple, qu'adviendra-t-il de la notion d'équité lorsque deux conjoints en sont réduits au chômage? Lequel des deux aura droit à la prestation la plus élevée? Le temps ne me permet pas d'en énumérer davantage, mais il y aurait bien d'autres exemples. Plus il y aura de différences dans les normes d'application, plus un contrôle sera nécessaire. Après avoir connu, au Québec, les boubous macoutes, verra-t-on les Martin macoutes ou les Axworthy macoutes?

Un autre effet pervers de la réforme de l'assurance-chômage c'est sa dimension de pelletage dans la cour des provinces. En réduisant la durée des prestations et en en retardant l'admissibilité durant cette période de pénurie d'emplois, cette réforme forcera un plus grand nombre de personnes à recourir à l'aide sociale, donc, plus de dépenses en perspective pour les provinces et moins de dignité pour les individus.

(1620)

De plus, cela va disqualifier un nombre plus grand de personnes dans divers programmes de formation, car, vous le savez, la majorité des programmes fédéraux en matière de formation s'adressent actuellement aux prestataires d'assurance-chômage.

Par ailleurs, en réduisant la période de prestations, la réforme d'assurance-chômage va pousser certains individus à accepter des emplois précaires, souvent mal rémunérés et qui n'ont rien à voir avec leur champ de compétence. En les obligeant à accepter une situation de survie avec un travail mal rémunéré, ces personnes auront moins de disponibilité pour chercher un emploi qui leur conviendrait mieux.

Est-ce là la nouvelle philosophie du développement des ressources humaines par le nouveau gouvernement? L'expérience du chômage conduit souvent les individus affectés vers de nouveaux emplois précaires. La réforme touche les travailleurs honnêtes qui cherchent activement du travail et qui ont de la difficulté à trouver un nouvel emploi stable, dans le contexte économique actuel.

Plusieurs études démontrent que plus de 90 p. 100 des chômeurs le sont devenus en raison d'une cessation bien involontaire ou parce qu'ils cherchent leur premier emploi. La plupart ne contrôlent pas la durée de cet emploi. Le problème n'est pas que les chômeurs ne veulent pas travailler, mais parce qu'il n'y a pas assez de travail pour tout le monde.

Dans un deuxième temps, j'aimerais rappeler à cette Chambre quelques statistiques sur la jeunesse canadienne et québécoise: 17,5 p. 100 des jeunes Canadiens et 20 p. 100 des jeunes Québécois sont actuellement chômeurs, pour un total de plus de 600 000 individus; au Canada comme au Québec, le taux de décrochage au secondaire se situe aux alentours de 30 p. 100; selon un rapport du Conseil permanent de la jeunesse du Québec, près de 40 p. 100 des jeunes Québécois vivent actuellement dans la pauvreté; et à l'échelle canadienne, ce sont deux millions de jeunes de moins de 30 ans qui vivent sous le seuil de la pauvreté.

Or, le budget du gouvernement fédéral n'annonce rien de vraiment nouveau pour les jeunes. Le Service jeunesse, annoncé avec beaucoup de fracas dans le livre rouge, semble représenter le seul projet du gouvernement fédéral pour notre jeunesse. Des rencontres ont eu lieu en décembre et en janvier dernier à ce sujet, mais aucun rapport ou compte rendu n'a été publié jusqu'à maintenant.

Au dernières nouvelles-on pourrait dire «aux dernières nouvelles», parce qu'on a obtenu, comme ça, des copies qui avaient circulé au moment de ces consultations-le Service jeunesse ne viserait à rejoindre que 2 500 jeunes la première année, 5 000 la deuxième année et 10 000 au bout de trois ans. Est-ce là une


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réponse adéquate aux 600 000 jeunes chômeurs au Canada? Nous pensons que non.

De plus, il n'offrirait que 61 $ par semaine aux jeunes qui résident encore dans leur milieu familial, et 121 $ par semaine à tous les autres. Posez-vous la question suivante: Accepteriez-vous un tel traitement pour vos propres jeunes en âge de travailler?

Et encore pire, le projet Service jeunesse semble davantage orienté, pour l'instant, vers des tâches occupationnelles, sans lien direct avec le marché du travail, comme c'était le cas du projet Katimavik, aboli par les conservateurs en 1986.

Or, tous les organismes voués à la jeunesse consultés jusqu'ici par le Comité permanent des ressources humaines disent que les jeunes, lorsqu'ils quittent l'école, ont besoin d'expériences pratiques et qualifiantes pour les conduire à de véritables emplois. Le gouvernement fédéral aurait intérêt à subventionner davantage les organismes déjà en place, au lieu de créer une nouvelle structure telle que le Service jeunesse.

En guise de conclusion, étant membre du Comité permanent du développement des ressources humaines, j'aimerais faire état de ce que j'ai entendu au cours des dernières semaines. Dans le cadre des audiences publiques, plusieurs groupes et personnes sont venus donner leur point de vue sur la réforme des programmes sociaux. Or, ce qui me frappe jusqu'ici, c'est que la majorité ne semble pas en faveur d'une réduction de ressources, bien au contraire. D'autres tendances se manifestent également. Ainsi, il y a une opinion assez généralisée en faveur d'une grande décentralisation de la gestion des programmes sociaux et d'une implication accrue des communautés locales.

(1625)

Aussi, il devient de plus en plus évident, dans le cadre de cette consultation, qu'il existe deux réalités sociales au Canada et deux attentes différentes envers le gouvernement fédéral.

En effet, certains groupes au Canada anglais souhaiteraient une plus grande présence du gouvernement fédéral dans le domaine de la sécurité sociale, voire même l'application d'un plus grand nombre de normes nationales; à l'opposé, les groupes et organismes québécois ont en général une vision complètement différente. Ils sont davantage tournés vers le gouvernement du Québec. Mais la tendance majeure chez tous les groupes est une inquiétude marquée devant la situation de l'emploi. De toute évidence, il faudra rassembler toutes les ressources disponibles et cibler tous nos efforts vers une augmentation du nombre d'emplois.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au député.

L'opposition officielle parle de réduire le déficit, mais veut encore que l'on augmente les paiements de transfert fédéraux. Elle parle de réduire le déficit en diminuant l'administration publique, alors que les paiements de transfert fédéraux et les programmes sociaux représentent 60 à 70 p. 100 du budget. Pour y parvenir, il faut absolument réduire les paiements de transfert fédéraux aux provinces.

Quand le député va-t-il comprendre qu'en insistant pour faire appuyer des programmes sociaux lucratifs par le gouvernement fédéral, il est loin de favoriser la réduction du déficit?

[Français]

M. Dubé: Monsieur le Président, ma réponse sera peut-être, aux oreilles du député, une répétition de ce qui a déjà été dit. Je pense qu'il est parfois bon de répéter.

Premièrement, au chapitre de la formation professionnelle, il a été clairement établi, personne n'a contesté ces chiffres, que l'élimination des dédoublements au niveau de la formation de la main-d'oeuvre entraînerait une économie, au Québec, de 250 millions de dollars, et si on extrapole pour l'ensemble du Canada, cela ferait un milliard de dollars. C'est un premier niveau.

Le Bloc québécois ne s'est jamais caché pour dire qu'il fallait faire des réductions au niveau des dépenses militaires, mais nous avons aussi parlé des dépenses relatives aux frais d'administration. En ce sens, nous rejoignons plusieurs observations de votre parti. Mais il y a une autre question qu'il faut considérer: les jeunes au chômage. Laisser les jeunes qui ont terminé leur université, leur cégep, qui se sont souvent endettés pour des sommes considérables, les laisser sans emploi, c'est en même temps privé le gouvernement, dans les années futures, d'un revenu important qui pourrait servir à financer l'ensemble de ses dépenses. Laisser les jeunes en chômage signifie plus de dépenses et moins de revenu. Réfléchir à court terme à cette question serait très important.

C'est toujours grave d'être au chômage, mais dans le cas des jeunes il y a des études qui démontrent qu'un jeune laissé sans emploi en lien direct avec sa formation ou ses capacités plus de deux ans peut conduire-et c'est l'observation largement répandue-à un découragement total et à des comportements bien involontaires. Cela risque d'amener des problèmes sociaux très importants qui pourraient représenter un coût social très important, donc des dépenses futures considérables, et surtout, des gens qui ne pourront pas plus tard contribuer à payer le déficit.

(1630)

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, en réponse à l'exposé budgétaire du ministre des Finances, j'aimerais faire une rétrospective à trois volets. Tout d'abord, j'aimerais parler de la dernière campagne électorale, parler du purgatoire du Parti libéral fédéral, les neufs années qu'il a passées de ce côté-ci de la Chambre, et parler également des neufs années du Parti conservateur au pouvoir.

Lors de la dernière campagne électorale, le parti au pouvoir, sous la gouverne de son chef, a suscité beaucoup d'espoirs dans la population. Les Québécois, tout aussi bien que les Canadiens, ont eu droit à la panoplie traditionnelle de promesses électorales et de slogans auxquels ils ont cru sincèrement pendant un moment.

Aujourd'hui, le réveil est brutal. On réalise soudainement que ce n'était pas un cauchemar, mais bel et bien la réalité qui nous frappe sauvagement en plein visage, encore une fois. Le change-


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ment de cap que les libéraux proposaient devient vite vide de sens, de toute signification, et la population a droit à cette continuité monotone, conservatrice, absente de toute rigueur et de toute équité.

Ce gouvernement, ce gouvernement d'en face, a promis à la population, et cela sans aucune retenue, une relance majeure de l'emploi, et je cite ici une partie de ce qu'il promettait: «Nous mettrons les citoyens de ce pays au travail, une fois pour toutes», disait-il. Mensonge, mensonge!

Les Québécois et les Canadiens sont tombés dans un piège. Ce parti, qui forme aujourd'hui le gouvernement, est loin de l'innovation qu'il nous promettait dans le livre rouge: «Lorsque nous formerons le gouvernement, nous innoverons, nous jetterons un regard neuf sur nos difficultés. Nous n'aurons pas recours aux recettes habituelles». Mensonge, mensonge!

Défense nationale, fonction publique, assurance-chômage: mêmes cibles, mêmes compressions que les gouvernements précédents, conservateurs ou libéraux.

De plus, ce gouvernement a trompé la confiance des travailleurs moyens, des personnes âgées et des plus démunis, en leur faisant miroiter des perspectives d'avenir intéressantes soit par un travail valorisant, soit par des programmes sociaux humains et raisonnables.

Il est bien évident que les gens de mon comté de Frontenac, tout comme ceux des autres comtés, une fois leur vote acquis, ont été ignorés, bafoués par ce gouvernement, et le Budget en est la preuve évidente. Comme le disait si bien Félix Leclerc: «La veille des élections, il l'appelait son fiston, le lendemain, comme de raison, il en avait oublié son nom.»

Les contribuables moyens du comté de Frontenac et d'ailleurs ont été trompés et ils devront en payer la note. Le ministre des Finances prévoit un accroissement des revenus de 15 p. 100 pour 1995-1996.

Cette hausse des revenus devra se faire par le biais d'impôts supplémentaires prélevés auprès des contribuables appartenant à la classe moyenne, car, en effet, sur 10 millions de contribuables, près de 85 p. 100 d'entre eux déclarent des revenus de moins de 30 000 $. Nous avons là une mesure injuste et scandaleuse.

Les personnes âgées aussi goûtent à la même médecine, en perdant progressivement leur crédit d'impôt, pendant que les dividendes sur les actions et les fiducies familiales ne sont toujours pas imposés. C'est l'équité même du système fiscal qui est réprimé par ce gouvernement d'en face.

(1635)

Comment vais-je expliquer aux sans emploi du comté de Frontenac, que ce soit de Thetford Mines, d'East Broughton, de Saint-Méthode, de Coleraine ou de Plessisville, que ce gouvernement libéral n'a aucun plan de relance pour eux et qu'il n'a envisagé aucune, je dis bien aucune, perspective d'emploi à long terme?

Comment vais-je expliquer aux gens du comté de Frontenac que dans ce budget on ne retrouve aucune mesure pour stimuler la croissance économique ni aucune mesure relative au développement de l'emploi, et cela pour un gouvernement qui s'est fait élire en clamant haut et fort son engagement ferme de créer des emplois sérieux pour que les gens retrouvent leur dignité et qu'ils reprennent espoir?

Pourtant, le deux objectifs des Canadiens, et tout particulièrement des Québécois et des Québécoises, sont clairs et bien définis. Ils souhaitent d'abord avoir un gouvernement qui les mette au travail tout en ayant une vision globale d'une politique d'emploi, et ensuite ils exigent du gouvernement une administration rigoureuse des fonds publics, surtout en temps de récession.

Comment expliquer aux chômeurs et aux chômeuses du comté de Frontenac que dorénavant leur période de prestations sera écourtée, que leur chèque sera amputé de 2 p. 100 et qu'ils devront travailler plus longtemps pour être éligibles aux prestations d'assurance-chômage, et tout cela pour faire leur part dans la réduction du déficit? Comment vais-je leur expliquer, à ces chômeurs, qu'alors qu'ils doivent se serrer la ceinture, le député de Hull-Aylmer, le ministre des Affaires intergouvernementales, dépense plus de 150 000 $ en frais de déplacement pour prononcer une courte allocution-écoutez bien-sur les bienfaits d'une saine gestion?

Comment leur expliquer que le ministre des Finances a dépensé 800 000 $, près de un million de dollars, pour des consultations publiques? Comment expliquer à la présidente du Club de l'âge d'or de la paroisse Saint-Alphonse de Thetford Mines que 800 000 personnes de 65 ans et plus verront leur exemption pour personnes âgées réduite ou tout simplement annulée suivant leur revenu, alors qu'au même moment le gouverneur général organise une soirée fort dispendieuse pour souligner l'ouverture de la 35e législature?

Les gens de mon comté ne font plus confiance aux politiciens fédéraux traditionnels. Ils font souvent preuve de cynisme et d'indifférence à leur égard. Cela, le ministre des Finances l'a constaté durant la dernière campagne électorale lors de son passage à Thetford Mines, au Balmoral, où à peine 30 personnes l'accueillaient à une soirée de financement populaire à 30 $ le couvert. Ce n'était pas 3 000, mais à peine 30 électeurs.

Le budget est inéquitable en ce sens qu'il épargne les riches, souvent des amis du régime, qui contribuent allègrement à sa caisse électorale et dont le système de lobby fort et bien structuré est efficace pour influencer les politiques du ministère des Finances.

Avec ses belles bottines Kodiac à demi lacées, notre ministre des Finances n'avait rien, absolument rien d'un de nos travailleurs dans les mines d'amiante et encore moins l'air d'un gros et d'un bon travailleur. Ici, il faut bien le reconnaître, c'est une scène disgracieuse que seuls des acteurs, des comédiens chevronnés peuvent jouer; seulement, les spectateurs n'ont pas aimé la farce, et surtout pas avoir été le dindon de cette farce.


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(1640)

Enfin, même si les astuces du ministre des Finances, pendant la période prébudgétaire, n'ont pas échappé à la population, en effet, ce vieux truc de la psychose de la douleur longtemps annoncée d'avance, pour faire avaler une pilule très amère, n'a trompé personne.

Cependant, et je termine là-dessus, la pilule a fait son effet. Les gens de mon comté sont amèrement déçus. Ils en ont des nausées. Ils se sentent trahis et victimes parce qu'ils sont la cible sur laquelle on vise à répétition. Comme critique à l'environnement, je ne peux m'empêcher de commenter brièvement le budget de ce ministère.

Le vice-président: Comme c'est maintenant la période des questions et commentaires, je veux bien céder la parole au député de Rosemont qui, en principe, doit être à sa place. Je peux attendre, s'il veut bien retourner à sa place rapidement.

M. Benoît Tremblay (Rosemont): Merci, monsieur le Président, de votre extrême gentillesse. J'aimerais que mon collègue de Frontenac, qui est critique de l'environnement pour le Bloc québécois, nous donne son point de vue sur le Budget et l'environnement, si vous le permettez.

M. Chrétien (Frontenac): Je voudrais remercier le député de Rosemont. C'est une question fort pertinente, parce que vous savez très bien, monsieur le Président, qu'en 1994 économie et environnement vont de pair. D'autant plus que c'était dans le livre rouge une partie fort importante. Comme le député de Rosemont est un environnementaliste averti lui aussi, il s'intéresse à l'environnement, je voudrais en profiter pour décrier le budget face à l'environnement.

En effet, le ministère de l'Environnement est un des rares-vous verrez par la suite pourquoi j'en parle-à voir son budget augmenté. On ne peut qu'apprécier, bien sûr, une augmentation de 4,1 p. 100. Cependant, quelques mesures sont boîteuses. Écoutez bien cela: Le budget du Plan d'action Saint-Laurent, Phase II, augmentera de 18,4 millions. Je me réjouis, bien sûr, de cette initiative qui permettra la mise en oeuvre de la Phase II du projet. Cette augmentation prouve que ce programme donne d'excellents résultats. Alors, pourquoi l'entente de cette deuxième phase, qui devait être signée-et cela est étrange-en décembre avec le gouvernement du Québec, n'est toujours pas signée, et pire que ça, on ajoute 18,4 millions à cette partie?

Il semblerait également que 40 p. 100 de la pollution du fleuve Saint-laurent provient du déversement des Grands Lacs. Or, à la lumière du dernier rapport de la Commission mixte internationale qui nous a été présenté il n'y a pas trois semaines, nous savions que la pollution des Grands Lacs a des répercussions sur la santé des êtres humains. Malgré cela, le gouvernement libéral d'en face diminue le budget alloué pour la dépollution des Grands Lacs de 5 millions, puis on sait que 40 p. 100 de la pollution qui arrive dans le fleuve Saint-Laurent arrive des Grands Lacs.

Une voix: Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas!

M. Chrétien (Frontenac): Oui, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Donc, d'une main, on augmente le budget pour dépolluer le fleuve et, de l'autre, on diminue celui du cours d'eau le plus pollué, soit les Grands Lacs. C'est à se demander où est passée la cohérence du développement durable, monsieur le Président.

Je termine là-dessus, et je remercie tous mes honorables confrères et collègues, ainsi que mes consoeurs, de m'avoir écouté si gentiment.

Le vice-président: À l'ordre! Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Bourassa-L'immigration.

(1645)

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je suis très heureux, d'abord en tant que député de York-Ouest, de participer au débat sur le budget de notre gouvernement.

Les budgets portent sur bien des choses, entre autres, sur des grands objectifs. Lorsque le gouvernement et, plus particulièrement, le ministre des Finances ont abordé ce budget, eux et le Parlement avaient essentiellement deux objectifs à atteindre.

D'un côté, il y avait la population canadienne qui comptait sur le gouvernement et le Parlement pour qu'ils tentent d'une façon responsable de freiner les dépenses et de réduire le déficit et la dette. De l'autre côté, il y avait ces mêmes gens qui s'étaient exprimés lors de la récente campagne électorale et qui avaient exigé essentiellement un renouveau économique, un peu d'espoir dans l'économie, une stratégie et un plan pour redonner du travail aux Canadiens.

Ce sont là en substance les deux aspects que le ministre des Finances et, bien sûr, le Parlement ont dû prendre en compte dans ce budget et que, à mon avis, ils devront examiner pendant la durée de la présente législature et le mandat du gouvernement. Ces deux objectifs ne sont pas faciles à atteindre. Ils sont très réels et très valables et, en même temps, ils constituent des priorités qu'ont exprimées les simples citoyens du Canada.

Nous avons parlé des compressions budgétaires de 8 milliards de dollars. Nous avons parlé de la fermeture de bases militaires. Tout près de ma circonscription, une de ces bases a été fermée. Il n'est pas facile de prendre des décisions de la sorte. Il n'est pas facile de transférer des emplois de la base militaire à un autre secteur de notre économie. En fait, on a débattu de cette question il y a quelques instants, pendant la période de questions ou observations. Pourtant, je crois que les Canadiens comprennent.

Dans les budgets, il faut aller au-delà des simples chiffres qui composent le bilan. Les budgets constituent aussi un document qui devrait susciter de l'espoir au sein de la population, et le


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sentiment que les engagements budgétaires et monétaires ont été respectés.

Je voudrais prendre les quelques minutes qui me sont accordées pour parler de l'objectif concernant les emplois et les efforts pour maintenir ce sentiment d'espoir dans l'économie. À la Chambre, il y a des députés qui ont proposé des compressions beaucoup plus draconiennes pour tenter de freiner le déficit et la dette. Or, cela a un prix. Nous n'obtenons rien gratuitement et, en fait, le but ultime de ce budget était d'équilibrer ces deux volets.

Durant la dernière campagne électorale, j'ai entendu dire que le volet de la création d'emplois et de la croissance économique était non seulement important pour les aspirations futures des Canadiens à la recherche d'un emploi, mais représentait aussi une solution à long terme au problème de la dette et du déficit. En tant que député venant de la région du Grand Toronto, je suis particulièrement sensible au genre de mandat que les Canadiens ont confié à ce gouvernement parce qu'ils étaient convaincus que nous étions en mesure de leur offrir cet espoir sur le plan économique.

Je viens d'une ville qui, contrairement à ce qu'on croit, n'est pas la ville «pleine aux as» de la Confédération. Elle a certes un côté brillant dont nous sommes fiers. Mais il y a aussi un autre côté de Toronto, où la misère chronique témoigne du désespoir que connaît cette ville depuis plusieurs années et où nous avons aussi été touchés par une récession économique terrible.

Il fut un temps où l'on aurait pensé que Toronto aurait été à l'abri, étant donné que l'on onsidère parfois l'Ontario et Toronto comme le moteur de l'économie, en tous cas comme le coeur de l'industrie manufacturière de ce pays. Il fut un temps où nous avions l'impression que Toronto était à l'abri des ravages d'une récession nationale.

(1650)

Mais la réalité est là, bien visible. Jamais on n'a vu de telles queues aux banques d'alimentation et un tel nombre d'assistés sociaux. Des Canadiens qui, pour la première fois de leur vie, se trouvaient au chômage, étaient gênés de venir me voir le samedi-jour que je réserve aux habitants de ma circonscription-car ils avaient honte de me demander de les aider à remplir une demande de prestations d'assurance-chômage et à trouver un emploi qui leur permettrait de retrouver leur dignité.

Je connais bien la question. Ces dernières années, la région du Grand Toronto et, en fait, d'autres régions du Canada n'ont pas eu la vie facile. Après avoir vécu cela et vu la réalité, nous avons mené une campagne fondée en grande partie sur les moyens de relancer l'économie, en insistant sur la création d'emplois et la croissance économique. C'est ce qui a décidé de l'issue de la campagne électorale.

De nombreuses autres questions ont été abordées mais la préoccupation nationale la plus pressante était de choisir celui qui avait la réponse et qui saurait capter l'imagination en proposant un moyen de créer la croissance économique et, en fait, l'espoir économique. À mon avis, le budget qui a été présenté a répondu à cette attente. Il a tenu ses promesses à l'égard des petites entreprises et il a donné suite à de nombreuses promesses que nous avions faites dans le discours du Trône et pendant la campagne électorale.

Je me souviens que lorsque je siégeais de l'autre côté de la Chambre durant la dernière législature, j'avais présenté durant une journée d'opposition une motion concernant la contraction du crédit à laquelle les petites entreprises faisaient face au Canada. J'avais proposé la tenue d'un débat sur cette question parce que, à l'instar de nombreux autres députés de la présente législature et de la précédente, j'avais rencontré de nombreux propriétaires de petites et moyennes entreprises qui ne réussissaient pas à obtenir l'heure juste des institutions prêteuses.

Ces entrepreneurs s'étaient bien acquittés de leurs responsabilités envers les institutions prêteuses, ils avaient de bonnes idées et de bons projets, de bonnes réalisations à leur actif au sein de leur communauté. Ils voulaient non seulement faire prospérer leurs entreprises et réaliser leurs idéaux et leurs rêves, mais aussi tirer profit de la croissance économique. Or, ils furent nombreux à voir leurs demandes refusées.

Je crois qu'il faut changer les habitudes des banques au Canada. Il en a été question dans le livre rouge et durant la campagne. Nous avons parlé de la nécessité d'encourager et d'amener les institutions prêteuses à se doter de moyens et de structures plus efficaces pour faire face aux réalités propres aux petites entreprises.

Le ministre des Finances a donné suite à cette idée dans le budget en annonçant la création d'un groupe de travail chargé de trouver une solution au problème de la contraction de crédit en collaboration avec les dirigeants des petites entreprises et ceux des institutions prêteuses. Je crois que la contraction du crédit est une réalité. Nous ne prétendons pas qu'il faille en imputer tout le blâme aux institutions prêteuses, loin de là. Toutefois, ces institutions ont un rôle capital à jouer dans l'économie nationale et c'est pourquoi elles doivent faire un pas de plus afin de donner des bases solides au réseau constitué de près d'un million de petites entreprises d'un bout à l'autre du pays.

Pourquoi les banques, les parlementaires, les professeurs d'économie et les économistes reconnaissent-ils spontanément que les petites et moyennes entreprises sont responsables de 80 à 85 p. 100 de la création d'emplois? Pourquoi, dans ce cas, les prêts consentis aux petites et moyennes entreprises par les cinq ou six plus grosses banques, si on y inclut la Banque Nationale du Canada, ne représent-ils que 25 p. 100 de l'ensemble du portefeuille de prêts aux entreprises? Cela signifie que 75 p. 100 de tous les prêts consentis à des entreprises vont à des sociétés multinationales. Pourquoi? Comment expliquer que les petites entreprises, qui créent 85 p. 100 des emplois, ne reçoivent que 25 p. 100 ou à peu près des prêts consentis aux entreprises, selon l'Association des banquiers canadiens?

(1655)

Je ne veux pas dire que nous devons déterminer à qui les banques doivent prêter. Je ne veux pas dire qu'elles ne doivent


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pas défendre les intérêts de leurs actionnaires. Je ne dis pas aux banques de cesser de s'inquiéter au sujet de leur crédit.

Tout ce que je veux dire, c'est que si les politiciens et le Parlement doivent modifier leurs méthodes de travail dans un monde qui évolue rapidement, les banques devraient peut-être aussi repenser leur façon de fonctionner.

C'est facile de comprendre qu'une institution de prêt préfère prêter dix fois dix millions de dollars que 200 fois 200 000 $. Évidemment, cela prend beaucoup plus de temps, et c'est plus compliqué. En outre, les grandes sociétés ont probablement des plans d'entreprise clairs et précis et leurs propres comptables, au contraire des petites et moyennes entreprises. Servir ces dernières exige donc plus de temps. Si les emplois doivent venir du secteur de la PME, les banquiers-dont le permis est délivré exclusivement par le Parlement, au moyen d'une loi-ont le devoir de collaborer davantage avec nous et avec les petites entreprises, afin de résoudre ce problème de contraction du crédit.

Si nous faisions cela, imaginez le million de petites entreprises qui verraient le jour aux quatre coins du pays, et la création d'emplois qui en résulterait. Je suis donc très enthousiaste à l'idée de mettre sur pied un groupe de travail qui serait chargé de favoriser cette collaboration. Je suis très heureux que la Banque Impériale de Commerce ait nommé un protecteur de la PME, un vice-président principal chargé d'étudier les plaintes des petites et moyennes entreprises, relativement à leurs demandes de prêt, et de redresser les torts.

Certains diront que c'est peu de chose, mais il s'agit quand même d'un progrès important pour ce qui est de modifier peut-être la façon dont les établissements de crédit traitent les petites et moyennes entreprises. Ainsi, je crois que le budget a tenu ses promesses envers la petite entreprise, et il faut ajouter à cela les autres mesures annoncées par mon collègue, le ministre des Finances, notamment, bien entendu, la décision d'abaisser le taux de cotisation à l'assurance-chômage, qui va créer, en chiffres nets, quelque 40 000 emplois grâce aux millions de dollars qui seront ainsi épargnés. Le budget va également dans le sens du programme d'infrastructure. Il y en a qui vont prétendre qu'il n'a rien de bon, que c'est là une mesure inutile par laquelle on vient s'immiscer dans le secteur de la construction.

Durant la campagne électorale, l'ancienne première ministre avait presque ridiculisé le type d'avantages qu'en retireraient le secteur de la construction et tout ce qui l'entoure dans tout le pays, comme s'il ne fallait attacher aucune importance aux travailleurs de la construction, aux membres des divers corps de métiers et à l'infrastructure de nos villes.

Il faut parler aux maires des municipalités. Beaucoup de députés dans cette enceinte ont fait de la politique au niveau municipal. J'ai commencé là. Mon expérience n'a duré que deux ans, mais je peux parler en connaissance de cause du nombre de projets qui seraient restés sur les tablettes et n'auraient jamais vu le jour faute d'un partenariat avec les niveaux supérieurs de gouvernement. Ainsi, lorsque j'ai siégé au conseil municipal de North York, j'ai pu constater que la Ville, qui ne pouvait compter que sur l'impôt foncier, n'était pas en mesure de financer entièrement bon nombre de ces projets.

Maintenant, nous avons un partenariat, un programme sur lequel nous pouvons compter. Nous ne prétendons pas que c'est la solution à tous nos problèmes, mais il offre quand même à la Ville de North York et à d'autres villes du pays la possibilité de n'avoir à financer qu'un tiers de ces projets. Ces derniers auraient deux objectifs. Tout d'abord, ils leur permettraient d'améliorer leurs installations, leur infrastructure municipale, ce qui est tout à fait essentiel pour accroître notre compétitivité. Que les députés le veuillent ou non, c'est un élément important de l'équation.

(1700)

En outre, on va pouvoir ainsi créer des emplois dans un secteur économique clé. J'étais à Windsor la semaine dernière et en ce qui concerne le secteur de l'automobile, les gens de l'endroit se réjouissaient de voir que les trois grands entendaient accroître de façon marquée leurs activités dans les mois et les années à venir. On prévoit une excellente reprise dans le secteur de l'automobile. C'est là un indicateur économique très important.

Cependant, c'est également vrai dans le secteur des métiers et de la construction domiciliaire. Il est certain que chez nous, dans le Grand Toronto, où ce secteur de l'économie est au point mort depuis trop longtemps, on considère cela comme un rayon d'espoir, une vraie solution, monsieur le Président.

La création de 50 000 à 60 000 emplois directs d'un bout à l'autre du Canada permettra de remettre les gens au travail, d'encourager l'économie locale, car il y aura des retombées et des emplois indirects découleront de ces emplois directs.

Enfin, grâce à ce programme, nous allons améliorer la qualité de nos villes, de nos collectivités et de nos quartiers. Quel pays peut se permettre de ne pas améliorer les infrastructures dans ses villes ou municipalités? Nous cherchons tous à améliorer nos maisons et, ce faisant, nous améliorons nos quartiers.

Prenons l'exemple de Montréal qui, sauf le respect que je dois aux Montréalais, illustre parfaitement comment, si l'on n'améliore pas les infrastructures, on risque de réduire la capacité de soutenir la concurrence de façon efficace. Je me rends à l'occasion à Montréal, puisque la famille de ma femme y habite, et je crois qu'on peut voir au fil des ans que l'incapacité ou le manque de volonté d'améliorer les infrastructures a eu une incidence sur la vie économique de ce centre urbain.

Troisièmement, dans ce budget, on s'est engagé envers la formation. Nous savons qu'il faut relever le niveau de formation et d'éducation de nos travailleurs. Nos électeurs et nos collègues citent souvent certains modèles européens-on parle souvent de l'Allemagne-et ils disent qu'il faut mieux préparer les Canadiens, les jeunes aussi bien que les travailleurs déplacés d'un secteur économique qui doivent parfaire leur éducation ou leur formation.


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Dans notre budget, nous nous engageons à investir, au cours des deux ou trois prochaines années, près de un milliard de dollars dans le domaine de la formation. Le budget prévoit la mise sur pied d'un programme d'apprentissage en collaboration avec le secteur privé, non pas uniquement dans le cadre d'un grand programme gouvernemental, mais bien de concert avec les industries canadiennes. Seul le partenariat permettra d'atteindre le succès escompté pour ces programmes de formation.

Le budget respecte notre engagement à doter notre pays et nos gens des outils appropriés. C'est une autre façon d'améliorer notre infrastructure nationale. Si nous donnons aux Canadiens les compétences et les outils qu'il faut, nous perfectionnons les habiletés et les talents au Canada.

Le budget mise aussi sur les jeunes en prévoyant le Service jeunesse. Il s'agit d'un autre programme, mais nous avons tellement entendu les Canadiens nous dire, au cours de la campagne électorale et, bien sûr, par la suite, à quel point ils s'inquiètent pour l'avenir de leurs enfants. Nous présentons un projet; nous ne disons pas que c'est une panacée mais, lorsqu'il sera en place, c'est environ 15 000 jeunes chaque année qui participeront à un projet à l'extérieur de leur collectivité. Ces Canadiens apprendront à mieux connaître leur pays tout en acquérant cette première expérience si importante qui leur permettra d'entamer une carrière.

(1705)

Vous avez indiqué, monsieur le Président, que mon temps était presque écoulé. J'aurais dû chronométrer mes observations, parce que je voulais aussi m'arrêter sur l'innovation, la nouvelle situation économique, les compétences professionnelles et l'esprit d'initiative en affaires qu'apportent au Canada les immigrants que j'ai l'honneur de servir en tant que ministre.

Je ferai ces observations une autre fois; pour l'instant, je suis disposé à répondre aux questions, s'il y en a.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, j'aimerais commenter plusieurs affirmations que le ministre a faites au sujet du budget, mais comme vous allez limiter mon temps de parole, je m'en tiendrai à deux observations seulement.

Je voudrais tout d'abord parler de la question du déficit. Le ministre a mentionné que la réduction du déficit entraînera des coûts. Cela ne fait aucun doute. Il a même laissé entendre que l'application de mesures plus sévères que celles prévues par le gouvernement actuel ferait trop mal aux Canadiens.

Le ministre a-t-il songé aux autres coûts, c'est-à-dire aux coûts associés au manque de mesures suffisantes pour réduire le déficit? Le gouvernement a reconnu que notre déficit gonflera de 100 milliards de dollars au cours des trois prochaines années, à un taux d'intérêt disons de 8 p. 100. Autrement dit, l'intérêt sur cette somme supplémentaire nous coûtera 8 milliards de dollars. Évidemment, il reviendra aux contribuables canadiens d'assumer ces frais. J'ai bien peur que cela fera augmenter les taxes et les impôts.

Le ministre a également parlé des petites entreprises et du fait que les établissements bancaires hésitent à leur prêter de l'argent pour qu'elles améliorent leurs opérations. Je suis d'accord avec le ministre. D'ailleurs, nous avons, nous aussi, mené une enquête auprès des petites entreprises pendant et même avant la campagne électorale. Selon les dirigeants des petites entreprises, la meilleure chose que le gouvernement pourrait faire pour eux serait de réduire les taxes et les impôts et les tracasseries administratives. Que le gouvernement cesse de presser le citron et nous pourrons prospérer, nous disaient-ils. L'économie redémarrera, les gens auront plus d'argent, ils dépenseront davantage et nos entreprises pourront prospérer.

Le ministre a-t-il songé aux répercussions à plus long terme qu'aura une attaque aussi molle contre le déficit, car nous aurons alors accumulé une dette de 600 milliards de dollars? Il nous faudra contracter de nouveaux emprunts, puisque, même si le gouvernement réussit à réduire le déficit à 3 p. 100 du PIB, comme il le souhaite, nous devrons tout de même emprunter 25 milliards de dollars la dernière année.

Le ministre croit-il vraiment que c'est la meilleure façon de procéder?

M. Marchi: Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir attiré mon attention sur le désir des petites entreprises de voir réduits à la fois la bureaucratie et les impôts.

Je crois que ce sont là les mots mêmes que le ministre des Finances a utilisés concernant les petites entreprises, lorsqu'il a présenté son budget. La retenue à la source, la réduction des tracasseries administratives et la possibilité de prendre de l'expansion d'une façon prévisible sont les éléments mêmes que prévoient le budget pour les petites entreprises.

Le député et moi-même sommes sur la même longueur d'onde, je crois, pour ce qui concerne ce que le budget réserve aux petites entreprises.

Quant au déficit et à la dette, nous sommes manifestement d'accord pour ne pas nous entendre. Le parti du député a certes fait valoir, au cours de la dernière campagne électorale et depuis, que nous devrions faire davantage. Au Canada, certains observateurs ont estimé que nous imposions trop de compressions alors que d'autres étaient de l'avis opposé. Cela veut probablement dire que nous avons bien agi au bon moment.

Notre budget est le premier à être présenté après les neuf années de règne d'un gouvernement conservateur qui s'était fait un point d'honneur de réduire la dette et le déficit. Nous savons tous qu'il a misérablement failli à la tâche. Nous estimons que la véritable solution réside dans la démarche des 3 p. 100 à laquelle nous nous sommes engagés dans notre livre rouge et à laquelle le député a fait allusion.

Ce budget est un premier pas dans la bonne direction. En favorisant la relance de l'économie, une certaine création d'emplois et une reprise de confiance dans le marché, il va certes nous permettre de nous attaquer au problème du déficit et de la dette. C'est une question d'équilibre entre la stimulation de l'économie et la réduction de la dette et du déficit. Le budget de mon collègue, le ministre des Finances, assure un équilibre entre ces


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deux postes qui préoccupent tout autant l'un que l'autre les Canadiens. Les deux sont prioritaires.

(1710)

Je crois que nous arriverons à mener les deux à bien si nous trouvons un équilibre entre une réduction responsable de nos dépenses gouvernementales, que nous avons déjà effectuée, et une relance économique qui soit certes à la satisfaction des Canadiens.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais essayer à nouveau-j'ai déjà essayé à plusieurs reprises-de comprendre la question du financement du programme d'infrastructure.

Le budget de ce programme est censé être de six milliards de dollars: deux milliards provenant des municipalités, deux milliards des gouvernements provinciaux et deux milliards du gouvernement fédéral. À la fin du programme, nous aurons dépensé six milliards de dollars.

Le ministre a déclaré que les municipalités étaient en faveur de ce programme. Un maire m'a dit que son programme de travaux publics ne serait modifié en rien par le programme d'infrastructure. La seule différence sera que le propriétaire foncier ne verra que le tiers de la note habituelle parce que les gouvernements fédéral et provinciaux paieront les deux autres tiers.

Pas étonnant que les politiciens municipaux soient en faveur du programme. Nous devrons supporter un fardeau respectable aux paliers fédéral et provincial. Quoi qu'il en soit, c'est le même contribuable qui paie, peu importe quel palier de gouvernement fournit les fonds.

Ma question est évidente. Le ministre pourrait-il nous dire ce que nous aurons au bout de deux ans, si ce n'est six milliards de dollars en moins et 60 000 emplois temporaires qui disparaissent, car je crois que c'est bien 60 000 emplois que prévoit le gouvernement au cours des deux ans? Que nous restera-t-il au bout de deux ans à part quelques immobilisations et les rares emplois qui seront créés pour l'entretien des infrastructures? Comment ce programme, dont la note sera assez salée, bénéficiera-t-il à l'emploi?

M. Marchi: Monsieur le Président, le député nous fait part de l'opinion d'un seul maire. Il devrait savoir que la Fédération canadienne des municipalités a été un grand partisan et un instigateur de ce programme. En fait, certains membres ont même laissé entendre que nous aurions dû aller encore plus loin.

Je n'entends pas beaucoup de municipalités ni de gouvernements provinciaux critiquer ce programme. Je crois que le député ne voit pas tous les bienfaits d'un tel programme d'infrastructure.

Oui, il y a les emplois, et c'est important. J'ai mentionné qu'il ne s'agit là que d'un seul programme. Nous ne prétendons pas que la relance économique au Canada dépend uniquement du programme d'infrastructure. Nous disons simplement que c'est un élément important de cette relance.

Ensuite, ce programme nous permettra d'améliorer nos infrastructures. Que le député le veuille ou non, ces infrastructures ont besoin d'être modernisées si nous voulons que nos villes soient concurrentielles.

Enfin, ces infrastructures améliorées attireront les entreprises et les investisseurs à venir chez nous. On a soumis à la Ville de Toronto certaines propositions qui, si elles se concrétisent, attireront un plus grand nombre de touristes qui, à leur tour, injecteront encore plus d'argent dans l'économie. Il ne s'agit pas ici de simplement réparer les trottoirs ou les ponts, même si c'est important aussi. Nous essayons de faire preuve de créativité et d'innovation dans la mise en place des infrastructures nécessaires pour essayer d'attirer les touristes et les organisateurs de congrès et aider ainsi certaines municipalités à avoir une économie plus prospère.

Je ne crois pas que nous devions nous laisser intimider par les propos négatifs que le député tient au sujet du programme d'infrastructure. C'est un important secteur de notre économie. Je pense que, si nous relançons ce secteur ainsi que d'autres secteurs, comme l'industrie de l'automobile et celle de la construction résidentielle, grâce à des programmes tels que le programme d'infrastructure et le programme d'accès à la propriété, nous contribuerons grandement à revitaliser notre économie et à remonter le moral des Canadiens. Franchement, nous venons de traverser une période fort difficile tant sur le plan économique que sur le plan psychologique.

(1715)

Je crois que si les gens voient que les choses bougent, ils reprendront confiance, et la confiance est un élément essentiel de l'équation économique.

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, il y a environ deux semaines, avant le congé de la Chambre, mon collègue, le député de Nanaïmo-Cowichan, a parlé de la Loi sur les langues officielles et des raisons justifiant une réduction des coûts de sa mise en application.

Je vais expliquer comment modifier la Loi sur les langues officielles de manière qu'elle soit juste et équitable pour tous les Canadiens.

L'année 1994 marque le 25e anniversaire de la Loi sur les langues officielles. Cette loi, adoptée par le gouvernement Trudeau en 1969, puis modifiée par l'administration Mulroney en 1988, devait unir notre pays, mettre un terme à l'injustice dont les Canadiens français étaient victimes et neutraliser le séparatisme au Québec.

Des auteurs respectables comme le distingué Québécois Christian Dufour nous apprennent toutefois ceci: certains oublient que ce n'est pas le bilinguisme qui a fait ce pays, qu'il ne


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saurait assurer sa survie et qu'il pourrait même entraîner sa destruction.

Ceux d'entre nous qui ont vécu et passé la majeure partie de leur vie loin du centre des pouvoirs à Ottawa approuvaient peut-être l'intention première du bilinguisme officiel, qui a été fort bien décrite dans le discours du Trône de 1968 du premier gouvernement Trudeau comme étant l'expression du lien essentiel entre la justice et l'unité nationale.

Nous nous demandons si la Loi sur les langues officielles a vraiment instauré une justice en matière de langues officielles. Si la loi comporte autant de lacunes que nous le croyons et que, partant, elle est injuste, quel effet cela a-t-il sur l'unité canadienne?

J'estime que, tant qu'elle ne sera pas reformulés, complètement, la politique en matière de langues officielles ne pourra être juste et équitable comme le prévoit son objectif.

J'aimerais porter à l'attention de mes collègues un seul aspect du bilinguisme officiel, pour leur prouver à quel point la politique actuelle laisse à désirer et pour leur montrer comment une révision attentive et réfléchie de cette politique pourrait grandement contribuer à unifier le pays parce qu'elle permettrait de supprimer des facteurs de discorde institutionnels qui dressent les anglophones contre les francophones et les majorités des provinces contre leur minorité.

Dans sa forme actuelle, la Loi sur les langues officielles oblige le gouvernement fédéral à fournir des services en anglais dans les régions du Québec et en français dans les régions des neuf autres provinces où la demande le justifie.

La loi ne définit toutefois pas la notion de demande justifiée. Au lieu de présenter une définition claire et facile à comprendre, la loi dit que c'est au cabinet fédéral qu'il appartient de décider ce que signifie une demande qui le justifie.

La loi recommande de tenir compte de l'importance de la population de la minorité de langue officielle, mais on peut également, selon les termes de l'article 32 de la loi, tenir compte «de tout autre critère que le gouverneur en conseil juge indiqué».

Ce qu'il faut comprendre par cette disposition de la loi, c'est que lorsque la Loi sur les langues officielles a été adoptée, la Chambre n'a jamais discuté, en fait n'a jamais eu la chance de discuter du niveau ou de l'étendue des services dans la langue minoritaire qui paraissaient les plus appropriés. La prestation de services dans la langue de la minorité est l'aspect le plus délicat de la loi sur le plan politique, mais cela est établi pratiquement en secret par un décret du conseil.

Quand des décisions très litigieuses sont élaborées en secret au lieu de l'être à l'occasion d'un débat ouvert dans l'assemblée du peuple, à la Chambre des communes, le manque d'information qui en résulte prête aux rumeurs et aux insinuations. Les théories de complot finissent par être prises au sérieux.

(1720)

Cela peut à son tour engendrer le soupçon, le ressentiment, le préjugé et finalement la haine pour des raisons linguistiques. Voilà pourquoi il faut réécrire l'article 32 de la Loi sur les langues officielles afin d'éliminer le pouvoir arbitraire du gouverneur en conseil.

Il faudrait inscrire à la place une définition claire et facile à comprendre des critères en fonction desquels une région du pays pourrait être déclarée district bilingue. Cette définition pourrait faire l'objet d'un débat ouvert de sorte que la formule qui en résulte constitue un compromis juste et modéré entre les aspirations légitimes des minorités linguistiques du Canada et les préoccupations légitimes de nos populations majoritaires.

Ce que je propose n'est guère une idée nouvelle. La Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme avait été la première à le recommander il y a près de 30 ans. Même avant cela, le principe du district bilingue ouvertement défini, appelé aussi bilinguisme territorial, existait depuis des décennies dans les lois finlandaises.

En Finlande, ce régime a favorisé un sentiment d'unité nationale tant dans la majorité finnoise que dans la minorité suédoise qui est enviable, si on compare avec la situation canadienne.

De toute évidence, il n'est pas possible pour l'instant de dire catégoriquement quelle définition mes honorables collègues voudront donner de ce qu'est une demande suffisante s'ils ont l'occasion de revoir le principe et d'en débattre librement.

Cependant, j'ai bon espoir qu'ils optent pour une définition moins large que celle que le Cabinet fédéral a décrétée le 1er janvier 1992. Cette définition est si banale qu'elle rend obligatoires les services en anglais à Barkmere, au Québec, où il n'y a que 20 anglophones, et en français dans l'île de Baffin, où dix ministères et organismes, dont la GRC, la SRC et le ministère des Pêches et des Océans, doivent fournir des services bilingues pour 220 francophones.

Je suppose que mes collègues mettraient un terme à cette comédie qui fait que Toronto a été désignée bilingue, pour les services fédéraux, même si le français y vient au 11e rang, derrière des langues comme le chinois, l'italien et l'espagnol.

Je ne pense pas non plus qu'ils maintiendraient les services en anglais dans l'est de Montréal, où ils sont un affront pour une population francophone homogène, qui sent tout de même son patrimoine linguistique gravement menacé.

Je crois que mes collègues adopteraient une définition de l'expression «demande suffisante» qui serait très semblable à celle que défend la Fédération canadienne des municipalités. Cette définition prévoit que des services seraient fournis dans une ville, une municipalité ou un district rural uniquement si la population de la minorité en cause répond à deux critères.

La minorité doit être supérieure à un certain pourcentage de la population locale et supérieure à un certain nombre. La Fédéra-


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tion utilise le nombre de 5 000 comme minimum et chiffre absolu, et 10 p. 100 comme plus faible pourcentage acceptable.

Si on applique ces critères, la vaste majorité des francophones hors-Québec et la plupart des anglophones du Québec auraient droit de recevoir des services dans leur langue; de plus, la décision de fournir ces services ne serait plus laissée à l'arbitraire et prise dans le secret comme maintenant.

En somme, les droits de la minorité et de la majorité seraient respectés. Les Canadiens s'approcheraient ainsi d'une véritable justice linguistique et, partant, d'une unité nationale solide et durable.

En guise de conclusion, j'attire l'attention des députés sur un autre important anniversaire. En 1994, nous ne célébrons pas seulement le 25e anniversaire de la Loi sur les langues officielles, mais aussi le cinquantenaire du jour J. Un demi-siècle s'est écoulé depuis que nos pères ont laissé leur vie sur les plages de Normandie pour que nous puissions vivre dans un pays dirigé par un gouvernement libre et démocratique.

Profitons donc de l'occasion pour honorer leur mémoire en modifiant la loi par la suppression de ses aspects secrets et arbitraires. Peut-être pourrons-nous ensuite nous sentir dignes de la liberté qu'ils nous ont léguée en héritage.

(1725)

Mme Colleen Beaumier (Brampton): Monsieur le Président, laissez-moi dire aux députés ce que le bilinguisme officiel a fait pour les Canadiens. Je suis unilingue et les choix qui s'offraient à moi n'étaient pas extraordinaires. Les possibilités non plus.

Mes enfants sont bilingues. La langue est plus qu'une simple question de communication, c'est une autre façon de penser. Je voudrais rappeler au député que le bilinguisme n'est pas responsable de la polarisation et de la division que notre pays connaît aujourd'hui. C'est l'ignorance et l'intolérance qui en sont responsables, pas les 200 et quelques citoyens dont il a été question et qui reçoivent des services dans les deux langues. Ce n'est pas ça qui cause les divisions que connaît notre pays aujourd'hui. C'est l'intolérance.

M. Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, comme ma collègue, je suis unilingue. Mes enfants aussi ont appris le français à l'école publique. Il est certain que plus une personne connaît de langues, plus elle est complète. Cependant, lorsque le bilinguisme officiel a été institué dans ce pays, nous n'avions pas deux mouvements séparatistes bien constitués. Ces mouvements sont apparus plus tard.

Je pense que la Loi sur les langues officielles a fait beaucoup pour plonger ce pays dans la situation où il est actuellement. Nous n'avons qu'à regarder les 54 députés du Québec qui siègent de l'autre côté.

[Français]

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria): Monsieur le Président, je remercie ma collègue unilingue anglophone de l'Ontario pour ses propos. Toutefois, j'aimerais, en premier lieu, apporter une correction.

[Traduction]

La Loi sur les langues officielles ne dit pas «là où la demande est suffisante», mais «là où le nombre le justifie».

Je voudrais aussi souligner à mon collègue qu'il y a quelques années- j'avais été invitée à assister à une fête en mémoire de Saint-Jean-Baptiste à Calgary. La communauté francophone de Calgary, province d'où vient le député de Yellowhead, était en liesse. Elle était très heureuse d'être réunie et de retrouver des cousins venus de partout au Canada. Elle était aussi heureuse d'inviter d'autres Albertains à célébrer sa culture.

[Français]

En français, on dit «enlever les oeillères», «regarder plus loin que son nez,» et puis lorsqu'on dit que la Loi sur les langues officielles n'a jamais été débattue dans cette Chambre, je crois que le député devrait regarder à nouveau les journaux. D'autant plus que lors du rapatriement de la Constitution en 1982, il y a eu des mois et des mois de débat à l'échelle du pays, non pas seulement à l'intérieur de cette Chambre, mais à l'échelle du pays, et tous les Canadiens, d'un bout à l'autre du pays, ont réaffirmé leur engagement face au bilinguisme au Canada.

(1730)

J'aimerais aussi mentionner au député que mon beau-père, il y a 50 ans, un Maltais, un francophone du Nouveau-Brunswick, était là en Hollande au jour J et était un des fiers participants de sorte qu'aujourd'hui, au Canada et dans tous les États du Commonwealth, comme en Europe, on a une démocratie, on a une tolérance.

J'aimerais aussi dire à l'honorable député que si on a une opposition officielle qui ne semble pas faire son affaire, je peux aussi lui dire que la philosophie de son parti ne fait pas la mienne.

[Traduction]

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, je comprends très bien les émotions et les commentaires de la députée. Je comprends aussi que nos philosophies ne se rejoignent pas.

La députée a parlé d'enlever les oeillères et de regarder plus loin que son nez. Puisqu'elle parle d'enlever les oeillères, je voudrais lui signaler qu'en Alberta, nous n'avons pas mis en oeuvre les lois 101 et 178.

D'ailleurs, la fête en l'honneur de Saint-Jean-Baptiste à laquelle elle a assisté à Calgary aurait eu lieu même s'il n'y avait pas eu de bilinguisme officiel. Cette fête existait avant que le bilinguisme officiel ne soit institué dans ce pays. Je pense que si nous récrivons les dispositions de la Loi sur les langues officielles, elle continuera d'exister encore longtemps.

M. Charlie Penson (Peace River): Je veux aujourd'hui unir ma voix à celles de mes collègues qui se plaignent du budget que le gouvernement nous a présenté le 22 février. Ce budget n'est pas seulement décevant, comme l'ont laissé entendre certains députés, il est catastrophique.


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Le gouvernement dit qu'il veut créer des emplois, mais ce budget ne fait rien pour cela, à cause des lourds impôts dont tous les Canadiens doivent s'acquitter, maintenant et pour bien des années à venir. Cette situation est le résultat direct de l'incapacité du gouvernement à réduire le niveau excessif de ses dépenses.

La Chambre de commerce du Canada affirme que les impôts ont un effet destructeur pour les emplois, pour ses 170 000 membres. Chaque dollar que le gouvernement lève en impôts est un dollar qui n'a pas servi à la création d'emplois. En outre, ce budget est catastrophique pour le commerce à l'exportation, parce qu'il entrave notre capacité de profiter pleinement d'un marché en or.

Nous venons de signer deux très importants accords commerciaux, l'ALÉNA et le GATT, qui réduisent les droits de douanes imposés sur nos produits, partout dans le monde. Je félicite sincèrement notre gouvernement pour le rôle qu'il a joué dans la conclusion de ces accords.

Notre ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a accompli un travail remarquable pour l'ouverture de marchés à l'étranger. Le Canada s'est acquis une réputation de leader mondial en collaborant à la création du GATT, après la Seconde Guerre mondiale, puis à la nouvelle Organisation mondiale du commerce.

Mais nos efforts resteront vains si nous ne donnons pas à nos industries une chance d'affronter leurs concurrents sur un pied d'égalité. Nos sociétés, qu'elles soient petites, moyennes ou grandes, ne peuvent pas s'établir sur les marchés étrangers et exploiter ces créneaux efficacement. Leurs résultats décevants sur le marché intérieur leur nuisent. Le gouvernement leur nuit en refusant de prendre ses responsabilités sur le plan fiscal. Elles ne peuvent s'établir solidement sur le marché intérieur parce que leurs clients sont surtaxés et que leurs frais d'exploitation sont très élevés. Cela leur laisse peu de ressources pour livrer une concurrence énergique à l'étranger.

Actuellement, notre principal partenaire commercial, les États-Unis, où vont 80 p. 100 de nos exportations, connaît une croissance incroyable. La reprise commence aussi à se faire sentir grâce à une augmentation prometteuse de nos exportations.

(1735)

Si seulement ce budget avait annoncé très clairement que nous mettions de l'ordre dans nos finances, le secteur des affaires aurait réagit de façon incroyable. Les gens d'affaires auraient été incités à investir, à prendre des risques, à agrandir leurs entreprises et à engager de nouveaux employés puisque la promesse d'un allégement fiscal aurait été quasiment à leur portée.

En refusant de nous attaquer franchement au déficit, nous renonçons à une occasion unique de progresser et de nous implanter fermement sur les marchés d'exportation. Le Canada est un pays commerçant. Nous n'avons tout simplement pas la population qui permet les économies d'échelle requises par bon nombre d'entreprises. Notre compétitivité internationale est cruciale pour notre capacité de croissance et de création d'emplois.

La Chambre de commerce du Canada mène une grande enquête à l'heure actuelle auprès de 2 000 organismes membres et de 1 000 entrepreneurs afin de déterminer quels sont les obstacles à la création d'emplois. Les gens d'affaires doivent énumérer les cinq principaux éléments qui amélioreraient leur capacité de créer des emplois. Devinez quel est le premier élément sur la liste de réponses: régler le problème de la dette et du déficit fédéral.

Cela s'explique par le fait que le déficit et la dette obligent le gouvernement à exiger un impôt excessif. En fait, l'impôt sur le revenu des particuliers a plus que doublé au cours des 10 dernières années et les taxes de vente et d'accise ont grimpé de près de 75 p. 100. Les consommateurs disposent donc d'un revenu disponible bien inférieur à ce qu'il était et les entreprises canadiennes doivent répondre à une demande intérieure bien plus restreinte.

Un article dans le quotidien The Globe and Mail de ce matin indiquait qu'à l'exception de la France, parmi tous les pays industrialisés, c'est au Canada que les personnes et les sociétés sont le plus lourdement imposées. Cette déclaration vient de notre propre sous-ministre des Finances.

Pis encore, la dette de 500 milliards de dollars et l'obligation de refinancer environ la moitié de cette somme chaque année éloignent les autres emprunteurs. Lorsque le gouvernement fédéral emprunte des sommes colossales, il fait concurrence à l'industrie privée pour le capital disponible. Cela réduit d'autant les sommes consacrées au financement de l'expansion des entreprises privées. En outre, cela contribue à faire grimper les taux d'intérêt réels bien au-delà du niveau où ils devraient se situer.

Soixante-dix pour cent des entreprises qui ont répondu à l'enquête de la Chambre de commerce affirment qu'à l'heure actuelle, il en coûte beaucoup plus cher pour faire affaire au Canada que dans les autres pays. C'est inquiétant, mais ce qui l'est encore bien davantage, c'est que 22 p. 100 des répondants ont l'intention de déménager la totalité ou une partie de leur entreprise à l'extérieur du Canada à cause des impôts trop élevés et du coût des règlements du gouvernement.

Lorsque les impôts sont trop élevés, les entreprises ne peuvent tout simplement pas survivre et soutenir la concurrence à l'étranger. Bon nombre d'entre elles sont forcées de faire payer ces impôts aux consommateurs en augmentant leurs prix. Si cela veut dire qu'elles ne peuvent pas vendre leurs produits à l'étranger, elles n'ont plus qu'à aller s'installer là où ça leur coûtera moins cher d'être en affaire.

Ce budget aurait dû lancer le processus de réduction des dépenses publiques, mais il n'en a rien fait. Tout au contraire, les dépenses ont augmenté. Il ne suffit pas de promettre qu'on s'y mettra vraiment l'an prochain ou peut-être l'année d'après.

On aurait pu faire des compressions dans bien des domaines. De toute évidence, les programmes sociaux, qui représentent la part du lion dans le budget fédéral, doivent cibler les plus démunis.

Le chef et d'autres membres du Parti réformiste ont déjà abordé la question. Ce budget aurait dû montrer aux Canadiens que le gouvernement avait la création d'emplois à coeur. Nous savons tous, ou du moins nous devrions tous savoir, que c'est le


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secteur privé, particulièrement les PME, qui crée des emplois, pas le gouvernement.

Ce budget aurait dû montrer aux Canadiens et à la communauté internationale que le gouvernement avait à coeur de réduire son énorme déficit. Si le gouvernement n'arrive pas à ramener ses dépenses au même niveau que ses recettes, comment allons-nous donc pouvoir nous attaquer à cette dette sans cesse grandissante? En fait, la communauté internationale s'inquiète de notre incapacité à réduire les dépenses publiques et à contrôler nos dépenses excessives, et agit en conséquence.

Les taux d'intérêt sont en hausse au Canada. Cette augmentation est due, en bonne partie, au fait que les investisseurs étrangers n'ont pas confiance en notre capacité de financer notre dette. Des taux d'intérêt élevés signifient que le refinancement de la dette fédérale coûtera plus cher, ce qui ne fera qu'aggraver le problème.

On crée des emplois en allégeant la fiscalité. N'obligeons pas les gens d'affaires canadiens à soutenir la concurrence avec un bras attaché dans le dos. Pour que les impôts puissent diminuer, il faut que le gouvernement arrête de dépenser plus qu'il ne perçoit, pas l'année prochaine, ni l'année d'après, immédiatement.

(1740)

M. Paul Zed (Fundy-Royal): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté et d'humilité que je prends aujourd'hui la parole à la Chambre des communes en tant que député libéral de la circonscription de Fundy-Royal. J'en suis fier parce que le ministre des Finances a donné suite à l'engagement pris par le premier ministre envers tous les Canadiens en présentant un budget qui propose un plan de gestion équilibré du pays et, plus précisément, un renouveau économique, la réduction du déficit et l'application de réformes nécessaires aux programmes sociaux.

Le budget investit dans les compétences des Canadiens et soutient les petites et moyennes entreprises qui ont été et continuent d'être la principale source de création d'emplois au Canada.

La population du Nouveau-Brunswick et celle de la circonscription de Fundy-Royal surveillent le budget et le gouvernement parce que, pour la première fois dans son histoire, Fundy-Royal a élu un représentant libéral.

C'est pour moi un honneur de représenter la population de Fundy-Royal et je suis heureux de pouvoir dire aujourd'hui au ministre des Finances que les habitants de ma circonscription approuvent le budget. Je tiens à offrir au ministre des Finances les félicitations et le soutien de la population d'une des circonscriptions les plus diversifiées du Canada atlantique, dont plus de la moitié de la population travaille dans trois grandes villes, soit Saint John, Moncton et Fredericton.

La circonscription compte également les plus vieilles industries du continent, notamment des mines de charbon à Grand Lac et des exploitations agricoles dans les comtés de King et de Queen. On y trouve aussi des industries plus nouvelles comme celles de la potasse et de la transformation alimentaire et des industries traditionnelles comme la pêche, l'industrie du bois d'oeuvre et l'exploitation de boisés. Bien sûr, nous avons aussi l'industrie touristique, qui exploite notamment la baie de Fundy et ses puissantes marées et le Parc national de Fundy où l'on trouve parmi les plus beaux paysages du Nouveau-Brunswick, province aux mille panoramas.

Les habitants de Fundy-Royal sont des gens de foi, foi en Dieu, en eux-mêmes, les uns aux autres et foi dans leur pays. Ils sont un bel échantillon du reste de la population canadienne et je suis voué à la défense de leurs intérêts, des valeurs familiales, des exploitations agricoles familiales et des entreprises familiales.

Les petites entreprises et les travailleurs autonomes du Nouveau-Brunswick sont le moteur de l'économie de Fundy-Royal. J'estime d'ailleurs que le budget leur propose un plan d'action adapté à leurs besoins.

Ce budget est différent de tous les autres qui l'ont précédé dans l'histoire canadienne parce qu'il tient compte des besoins du peuple. Il est le fruit de consultations sans précédent auprès de la population canadienne, aux quatre coins du pays. Le budget tient compte des préoccupations de la population. Il s'attaque dès maintenant au déficit et nous trace clairement la voie dans cette direction pour l'avenir.

Ce budget épargne 300 millions de dollars en cotisations d'assurance-chômage qui pourront être réinvestis dans des petites entreprises, afin de créer de nouveaux emplois. Il rétablit en outre le Programme d'aide à la remise en état des logements et stimule ainsi le secteur de la construction. Il rend permanent le Régime d'accession à la propriété. Il va améliorer l'accès des petites entreprises aux capitaux. On établira des centres de services aux entreprises dans chacune des provinces, afin d'offrir un guichet unique pour les services gouvernementaux.

Avec ce budget, nous entreprenons un processus qui conduira au remplacement de la TPS impopulaire et rien ne plaira plus aux gens de ma circonscription que la disparition de cette taxe qui les a frappés plus durement que toute autre chose.

Les gouvernements ne peuvent résoudre tous nos problèmes, mais de ce côté-ci, nous savons qu'ils doivent donner l'exemple car les gens de Fundy-Royal, à l'instar de tous les Canadiens, en ont assez des gouvernements qui font le contraire de ce qu'ils disent.

(1745)

En parcourant Fundy-Royal, ma circonscription, je me suis aperçu qu'il y avait deux choses qui inquiétaient les gens: le manque d'emplois et l'endettement du gouvernement. La plupart des gens s'accordent pour dire que ces problèmes sont reliés. Étant donné que près de 37 p. 100 des recettes fiscales fédérales vont au service de la dette, les ressources dont le gouvernement dispose pour investir dans l'éducation, l'infrastructure et les programmes sociaux sont très limitées.

Même s'il est facile de reconnaître qu'une dette et des déficits excessifs ont des répercussions négatives sur notre pays, ce qui est mal compris, c'est qu'environ un tiers de la dette fédérale est due à des créanciers étrangers auxquels nous versons des mil-


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lions de dollars par année en intérêts. Nous perdons ainsi des recettes fiscales et la possibilité de contrôler notre propre destin.

Il est temps de prendre les mesures pour remédier à cette situation. Je crois que le moment est venu de remplacer les Obligations d'épargne du Canada par les obligations sur la dette du Canada. Il serait possible d'affecter directement au service de la dette extérieure les recettes tirées de la vente de ces obligations et on pourrait ramener le niveau d'endettement à l'extérieur de 33 p. 100 à 20 p. 100 environ en cinq ans.

Une proposition de ce genre aurait des avantages importants. Les Canadiens détiendraient une plus grande partie de notre dette et les intérêts seraient versés à des Canadiens plutôt qu'à des Japonais ou des Allemands.

Je souscris entièrement au projet du ministre des Finances de réduire de 3 milliards de dollars les sommes affectées aux activités gouvernementales au cours des trois prochaines années. Cependant, je crois que nous devons effectuer des compressions encore plus importantes. Selon moi, nous pouvons y parvenir en adoptant dans cette enceinte une loi forçant les divers ministères à réduire leurs dépenses de 5 p. 100 par année jusqu'à concurrence de 20 p. 100.

On pourrait peut-être commencer par se baser sur les cinq derniers rapports annuels du vérificateur général pour trouver les secteurs sur lesquels il faut se pencher immédiatement.

Je voudrais dire quelques mots sur le libre-échange au Canada. Depuis les élections fédérales, le Canada est entré dans le plus grand bloc commercial du monde, pourtant, nous n'avons pas encore le libre-échange à l'intérieur de nos propres frontières. Il faut éliminer les obstacles au commerce interprovincial. Les progrès déjà enregistrés à ce chapitre m'encouragent, mais il est clair que nous avons encore un bon bout de chemin à parcourir.

Les Canadiens des provinces atlantiques ont maintenant l'habitude des cycles de prospérité et de déclin qui secouent souvent le monde et qui, plus souvent encore, étouffent leur région. Lorsque le monde éternue, le Canada atlantique attrape une pneumonie. Nous, des provinces atlantiques, sommes prêts à faire notre part pour que le Canada puisse s'intégrer au nouvel ordre économique mondial. Nous savons l'importance de la gestion de l'information, des programmes de formation scientifique nationaux de qualité et de la mise au point de techniques d'économie d'énergie.

Nous porterons notre partie du fardeau, mais nous voulons aussi participer au rêve canadien.

Au moment où notre gouvernement provincial rationalise ses dépenses et ses services, je crois qu'il faut prendre un engagement en faveur de la vitalité du port de Saint John. Ces deux dernières années, nous avons constaté que les brise-glace du Saint-Laurent ne sont pas toujours plus forts que mère nature et que le port de Saint John peut jouer un rôle important dans le réseau national de transports.

Nous avons aussi un tronçon de la Transcanadienne de première classe qui va de St. Stephen à Moncton en passant par Saint John et Sussex. Nous entendons beaucoup parler ces temps-ci de l'autoroute de l'information. Dans le sud du Nouveau-Brunswick, nous voulons entendre parler davantage de l'autoroute de la prospérité économique, d'une autoroute économique qui relierait les collectivités et leur permettrait de prospérer.

Je consacrerai toutes mes énergies à faire en sorte que le sud du Nouveau-Brunswick, la locomotive de l'économie de ma province, obtienne sa juste part des fonds gouvernementaux, sa juste part pour les ports et sa juste part pour les routes.

(1750)

Je suis fermement convaincu que le ministre des Transports se fera l'ardent défenseur de ces intérêts. Le budget n'est que la première de nombreuses étapes que les Canadiens doivent franchir ensemble pour se donner un avenir où la croissance économique sera sûre et où les emplois seront plus nombreux et plus assurés.

Les Canadiens peuvent bâtir cet avenir, je le crois, mais ils devront travailler fort. Il faudra renouer avec la tradition canadienne qui faisait qu'on se souciait de son voisin, qu'on travaillait pour ceux qui ne le pouvaient pas ou ne trouvaient pas de travail.

Fundy-Royal, l'une des premières collectivités en Amérique du Nord, a nourri ces traditions pendant des siècles. Je sais que mes électeurs apprécient le réalisme du ministre des Finances, le courage et la détermination dont le premier ministre a fait preuve depuis les élections en assurant un leadership honnête, juste et réceptif.

Pour conclure, je remercie humblement les électeurs de Fundy-Royal qui ont mis leur confiance en moi et qui, pour la première fois dans l'histoire canadienne, ont appuyé le Parti libéral. Je leur promets de continuer à travailler fort, à les écouter attentivement et à agir avec détermination en leur nom.

M. George S. Rideout (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon voisin. Ce qui donne tout son intérêt à sa circonscription, c'est qu'elle est voisine de la mienne. C'est un plaisir que de l'entendre déclamer les vertus du sud du Nouveau-Brunswick et la contribution qu'il fait à l'ensemble du pays.

J'ai écouté ce que le député de Fundy-Royal avait à dire au sujet de la valeur de ce budget et d'une approche équilibrée pour relancer l'économie. Je suis sûr que, par manque de temps, il n'a pas pu parler de l'extraordinaire programme d'infrastructure et de l'importance qu'il aura pour toutes les municipalités de sa circonscription.

Pour les petites collectivités, c'est l'occasion de faire des travaux mineurs dans les réseaux d'égouts ou d'eau et pour les programmes de recyclage ou programmes de ce genre. Je suis sûr que, s'il avait plus de temps, il parlerait de cela.


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Je veux lui donner l'occasion de parler des avantages qu'il y a à remettre les Canadiens au travail grâce au programme d'infrastructure et de donner aux municipalités de sa circonscription les programmes indispensables au développement économique et à la croissance des petites communautés.

Je demande donc au député s'il appuie la position du gouvernement en ce qui concerne le programme d'infrastructure?

M. Zed: Monsieur le Président, le programme d'infrastructure a été accueilli très favorablement.

En fait, il y a 32 municipalités dans Fundy-Royal et, comme on peut l'imaginer, il est difficile de répartir équitablement les avantages de ce programme important entre ces différentes municipalités. La plupart d'entre elles ont dit, par l'entremise de la Fédération canadienne des municipalités, qu'elles désiraient y participer.

Comme le député de Moncton le sait, les membres de la Fédération ont pu exprimer leur intérêt pour ce programme auprès du parti qui formait alors l'opposition officielle. Le Parti libéral les a écoutés et a adopté ce programme. Je peux dire au député que ce programme est très positif. L'année prochaine, je serai probablement parmi ceux qui seront ici pour souhaiter qu'il se poursuive.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, j'ai commencé à m'enthousiasmer, il y a quelques instants, lorsque le député a mentionné qu'environ le tiers de la dette nationale était due à des pays étrangers. Cela signifie que l'économie canadienne est privée de montants très élevés qui sont versés en intérêts à ces pays. Puis, j'ai été réellement excité lorsqu'il a dit que la suppression des barrières commerciales provinciales serait énormément avantageuse pour le Canada.

(1755)

J'allais lui proposer de se joindre au Parti réformiste lorsqu'il a répondu à son collègue qu'il souscrivait au programme d'infrastructure. Or, il faut avouer que nous empruntons ici six milliards de dollars pour mettre en oeuvre un projet qui créera peut-être 60 000 emplois, mais ces emplois disparaîtront après deux ans. Nous ne faisons que payer les intérêts sur cet emprunt.

Une voix: Pendant des années et des années.

M. Zed: Monsieur le Président, je pense que le député nous laissera tous savoir si quelqu'un, ou une des municipalités de sa circonscription, tire profit de cet important programme d'infrastructure.

Il sera intéressant de savoir combien de collectivités de la circonscription du député en bénéficieront. Il sera encore plus intéressant, bien sûr, de savoir comment le parti du député réagira à quelques-unes des autres initiatives importantes prévues dans ce budget.

Je voudrais dire au député que je suis heureux d'entendre qu'il s'intéresse au moins à certaines des choses que j'avais à dire. J'ai hâte de collaborer avec lui aux choses sur lesquelles nous nous entendons.

Le vice-président: Le député de Fraser Valley-Ouest a la parole, mais je lui demanderais d'être bref. Encore une fois, je demanderais aux députés de dire «le député» et non «vous», surtout quand le Président est tout près.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je dois revenir sur le commentaire concernant le nombre de municipalités et de circonscriptions qui participeront au programme d'infrastructure. Si elles ne veulent pas y participer, c'est parce que seulement un tiers du coût va être attribué à l'impôt foncier. Le reste va entrer dans l'impôt fédéral et dans l'impôt provincial.

Je tiens à rappeler au député que chaque contribuable paie à trois niveaux, aux trois paliers d'imposition.

Que restera-t-il dans deux ans, quand six milliards de dollars auront été dépensés? Que restera-t-il au contribuable canadien, à part une certaine forme de structure du capital?

M. Zed: Monsieur le Président, voici ce qui restera. Nous aurons doté notre pays des égouts, des systèmes de distribution d'eau, des ponts, des routes et des autres projets communautaires dont nous avons besoin et qui vaudront des milliards et des milliards de dollars, alors que, sans ce programme, rien de tout cela n'existerait. Il sera intéressant de voir si des projets seront entrepris dans la circonscription du député, grâce à l'argent des contribuables, et si ce programme sera bien accueilli dans votre circonscription, monsieur le Président.

Une voix: Allez leur dire ça.

M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, je veux donner aux députés deux exemples précis de la façon dont les municipalités voient, en fait, le programme d'infrastructure. Il n'y a pas très longtemps, on m'a dit dans une localité de ma circonscription qu'on allait s'occuper des égouts de la rue principale. Le conseiller municipal m'a avoué que ces travaux devaient être effectués l'an prochain, mais qu'on allait les avancer d'une année en raison du programme d'infrastructure.

Dans une deuxième localité, et il n'y a aucune raison qu'on me raconte des histoires, on m'a dit qu'on allait moderniser la patinoire couverte, alors que ces travaux devaient être effectués dans deux ans.

Mon avis est que nombre des travaux qui sont effectués dans le cadre du programme d'infrastructure ne devraient pas être faits à coup d'emprunts. J'aimerais bien connaître l'avis du député à ce sujet.

M. Zed: Monsieur le Président, à mon avis, le fait que ces deux municipalités aient fait savoir qu'elles allaient avancer la date des travaux est précisément le but du programme. Ce n'est pas un programme unique. Il ne faut pas considérer le program-


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me d'infrastructure comme une initiative unique. Il entre dans le cadre d'une initiative plus vaste lancée par le gouvernement.

(1800)

Monsieur le Président, vous venez juste de nous apporter la preuve dont nous avions besoin. Le fait que les deux municipalités mentionnées aient décidé d'avancer les travaux veut dire que des emplois vont être créés dès maintenant, plutôt que plus tard.

[Français]

Le vice-président: Il semble y avoir un autre député du Parti libéral qui désire prendre la parole, l'honorable député de Hamilton-Wentworth, ainsi que deux autres députés. Peut-on obtenir le consentement unanime de la Chambre pour accorder 10 minutes à chacun des trois députés, pour un total de 30 minutes?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, un vent de changement fondamental balaie en ce moment le pays et le budget du présent gouvernement en est la preuve évidente. Ce changement est de nature à garantir la prospérité d'un Canada uni à l'aube du XXIe siècle.

D'autres intervenants ont traité de différents aspects des dispositions financières du budget: modifications apportées à l'assurance-chômage, compressions des dépenses en matière de défense, nouvelles règles concernant l'exemption pour gains en capital, et que sais-je encore. Pour ma part, je voudrais attirer l'attention sur deux autres aspects qui, à eux deux, revêtent, à mon avis, une plus grande importance que tous les autres réunis.

Je veux parler des nouveaux incitatifs à l'intention de la petite entreprise et de l'affectation des dépenses à la recherche et au développement. Lorsqu'on associe ces deux concepts, une vérité fondamentale apparaît: on a, d'un côté, la situation économique telle qu'elle est aujourd'hui et, de l'autre, les réjouissantes perspectives d'avenir.

Voici d'abord quelques faits historiques. Pendant la plus grande partie du XXe siècle, la production industrielle canadienne a été dominée par de grandes sociétés étrangères, la plupart ayant leur siège social aux États-Unis et en Grande-Bretagne. La recherche et le développement, la recherche scientifique appliquée à l'industrie, si vous préférez, c'était l'affaire des sociétés mères, et non de leurs filiales canadiennes. Or, le pouvoir de faire de la recherche scientifique de qualité pour l'industrie est un bien national qui ne doit pas être partagé avec les États-Unis, la Grande-Bretagne, le Japon, l'Allemagne, la France ou n'importe quelle grande puissance économique. C'est une réalité internationale.

La réponse du Canada au problème qui se posait en 1916 a consisté à établir des laboratoires financés par le gouvernement et d'en confier l'administration au Conseil national de recherches. Je souhaite qu'un jour les députés aillent faire un tour du côté du vieil édifice du CNR, situé au 100 de la promenade Sussex et érigé pendant la Crise des années 30. C'est non seulement l'un des édifices les plus intéressants d'Ottawa, pour son architecture, mais c'est aussi un souvenir vivant, dont chaque brique nous parle d'un temps révolu. Ses minuscules laboratoires sont un témoignage de cette époque de l'histoire où le Canada a finalement décidé d'investir dans nos cerveaux et dans nos idées. C'est un lieu qui rappelle les réalisations de Banting, Rutherford, Best et tous les pionniers canadiens de cette ère du nucléaire.

La fondation du Conseil national de recherches du Canada est une expérience qui n'avait pas son semblable en Grande-Bretagne ou aux États-Unis, mais ses débuts ont été plutôt lents. Les scientifiques sont comme les artistes: s'il n'y a pas de conditions attachées au financement, ils préfèrent faire de la recherche fondamentale. Ils préfèrent explorer le monde des idées plutôt que de chercher leurs applications pratiques pour l'avancement technologique d'un pays. La plupart d'entre eux préféreraient être des Einstein plutôt que des Edison.

Les premiers temps, la recherche exécutée au Centre national de recherches du Canada empruntait les voies complexes des travaux scientifiques et ne portait fruit que rarement.

C'est la Seconde Guerre mondiale qui a tout changé. La France est tombée en 1940. L'avance des armées d'Hitler terrorisait toute l'Europe. Les États-Unis restaient toujours neutres. Le ciel de Londres s'illuminait, la nuit, des éclairs causés par l'explosion des bombes. Le Canada restait le seul allié d'importance de la Grande-Bretagne. C'est alors que le Conseil national de recherches a vraiment trouvé sa justification, parce que la Grande-Bretagne avait besoin de plus que des hommes et des armes, elle avait besoin de la science.

En collaboration avec les universités canadiennes, le Conseil a entrepris un éventail incroyablement large de recherches appliquées: nouveaux explosifs, radars, sonars, armes chimiques, recherche à haute altitude. Je suis convaincu qu'aucun autre pays n'a, autant que le Canada, mis ses cerveaux à contribution dans l'effort de guerre, compte tenu de son importance économique et de sa population.

(1805)

Je m'excuse si je parle du passé plutôt que du présent, mais c'est que nos actions et nos attitudes actuelles sont principalement déterminées par ce que nous savons ou ignorons de notre propre histoire.

Mes collègues du Bloc, par exemple, épousent la cause du séparatisme parce qu'ils perçoivent une menace historique uniquement dans une perspective québécoise. Or, les Canadiens de toutes les provinces progressent ensemble et ils l'ont toujours fait. Le problème, c'est qu'aucun d'entre nous, Québécois, Albertains ou Néo-Écossais, ne tient vraiment compte de notre passé collectif, de nos réalisations en tant que Canadiens.

Combien parmi les 295 députés ici présents savent que le Canada a été le deuxième pays au monde à se doter de l'énergie nucléaire? Le premier réacteur nucléaire, à l'extérieur des États-Unis, à atteindre un stade critique a été construit tout juste en amont d'Ottawa, à Chalk River. Dès 1945, le Canada avait pris de l'avance sur la Grande-Bretagne, la France et même l'Union soviétique. Le Canada a alors déclaré vouloir utiliser l'énergie nucléaire uniquement à des fins pacifiques, et il a tenu parole depuis.


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Le Conseil national de recherches a joué un rôle déterminant dans le développement du programme nucléaire canadien. Après la guerre cependant, la recherche nucléaire et la recherche militaire se sont déplacées vers d'autres organismes ou vers le ministère de la Défense nationale. Le Conseil national de recherches est revenu essentiellement à la recherche fondamentale.

Pendant ce temps, l'économie de succursales au Canada connaissait un boom alors que les sciences appliquées, la recherche et le développement industriels tiraient de l'arrière. Au cours des années 60 et 70, les sociétés mères étrangères de filiales canadiennes se sont peu intéressées, pour la plupart, à la promotion de la recherche au Canada.

Aujourd'hui, la situation connaît un bouleversement tout aussi radical que celui qui est survenu après la Seconde Guerre mondiale, sauf qu'aujourd'hui les deux instruments du changement sont l'ordinateur au lieu des armes et une récession économique au lieu de la guerre.

Réfléchissons-y. Jusqu'à il y a une dizaine d'années, un scientifique qui voulait résoudre des équations complexes ou effectuer des analyses statistiques poussées devait disposer d'un ordinateur coûtant plusieurs millions de dollars, que seules les grandes sociétés avaient les moyens de se payer. Aujourd'hui, il peut faire le même travail avec un micro-ordinateur 486, à 1 000 $. S'il relie son appareil par modem à d'autres ordinateurs et à des systèmes d'information, ce scientifique a au bout des doigts une puissance qui excède celle des plus puissants superordinateurs et il peut travailler à partir de son bureau ou dans sa propre demeure.

Quant aux grandes sociétés, qu'elles appartiennent à des intérêts étrangers ou nationaux, elles battent partout en retraite. Comme les grands magasins d'autrefois, elles subissent la concurrence impitoyable des petites entreprises qui ne sont pas alourdies par la bureaucratie des grandes sociétés. Même IBM, qui a longtemps été au premier rang des sociétés de premier ordre, réduit ses effectifs, car elle prévoit des résultats financiers moins brillants.

Je ne peux m'empêcher de vous donner un exemple tout à fait opposé dans ma propre circonscription, celui de la société Westcam. Elle occupe un ensemble de vieux immeubles qui ne paient pas de mine tout près d'une terre à bois rurale. Elle emploie moins de 100 personnes. Elle fabrique des appareils photographiques d'espionnage, qui peuvent prendre la photo d'un timbre-poste à des milles de distance. Son marché est hautement spécialisé, mais il est mondial. C'est une petite entreprise.

La haute technologie, la petite entreprise, c'est justement ce sur quoi porte notre budget. C'est une nouvelle ère qui s'ouvre. Les grosses sociétés n'ont plus la part du lion en matière de recherche et de développement. L'innovation technologique va venir des petites entreprises et non des grandes et le budget de notre gouvernement en tient compte.

Voyons ce qu'on y dit. Il est question de fournir des capitaux aux petites entreprises en créant un fonds d'investissement canadien et en exerçant des pressions sur les banques. On veut également réduire la paperasserie. Il s'agit de donner aux petites entreprises l'argent nécessaire pour engager des scientifiques et des ingénieurs, de créer des réseaux leur permettant de partager avec d'autres leurs connaissances technologiques et commerciales, ainsi que d'établir des priorités pour les travaux de recherche subventionnés directement par le gouvernement.

Il est vrai que certains projets feront les frais de cette nouvelle orientation; c'est le cas du financement du projet d'accélérateur de particules KAON, en Colombie-Britannique et de la participation du Canada à la station spatiale américaine, un autre projet de prestige que de nombreux scientifiques américains considèrent comme un gaspillage injustifié d'argent en fonction des connaissances scientifiques qu'il permettrait d'obtenir.

(1810)

Le Canada devrait se retirer de ce projet et c'est ce que nous faisons. Quelles mesures prenons-nous à la place? Le Canada investit 800 millions de dollars dans un nouveau programme spatial de la télédétection et de communication par satellites. Historiquement, dans ce domaine, nous avons été à la fine pointe de la technologie. Nous sommes connus dans le monde entier pour nos prouesses dans ce secteur et nous le devons en grande partie aux petites et moyennes entreprises et non aux multinationales.

On a également redonné un nouveau souffle au Conseil national de recherches. Pendant des années, sous le gouvernement précédent, il a subi une réduction régulière de ses crédits. Les conservateurs affirmaient dans la presse qu'ils attachaient beaucoup d'importance aux sciences, mais ils affamaient l'institution même qui a fait plus pour la science au Canada que tout autre organisme.

Dans ce budget, notre gouvernement a décidé de sauver le Conseil et de mettre un terme aux compressions prévues par les conservateurs. Cet organisme peut à nouveau respirer.

Les perspectives d'avenir sont excellentes. Les Canadiens ont un talent incroyable pour ce qui est des innovations. Je me fiche de savoir si nous nous considérons comme des Québécois ou des Torontois ou encore des gens de l'Est ou de l'Ouest, il n'en demeure pas moins que nous sommes l'un des peuples les plus doués de talents variés du monde.

Notre force réside dans notre tolérance, notre diversité et notre recherche constante de nouvelles idées. Nous partageons tous ces qualités. C'est le cas à la Chambre, de tous les côtés, que nous soyons libéraux, bloquistes ou réformistes et en ce sens, je tiens à dire à tous mes collègues que nous ne faisons qu'un.

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, en réponse au Budget du ministre des Finances, j'aimerais mettre en relief, dans mon point de vue, l'absence totale de prise en compte par le gouvernement des recommandations du rapport du vérificateur général.

Le Canada vit présentement une crise majeure. La dette accumulée est de 500 milliards et plus, et le déficit annuel est désormais de 41 milliards. C'est-à-dire qu'à chaque année, ce pays ingérable gagne moins qu'il ne dépense et s'enfonce inévitablement vers la faillite économique.

Les grandes corporations et détenteurs de capitaux nous affirment qu'une diminution de leurs profits par l'entremise d'un système fiscal plus équitable causerait des dommages irréparables à l'économie.

Ainsi, disent-ils, le gouvernement doit couper dans des dépenses budgétaires. Le momentum étant parfait, le monde des affaires, les décideurs de la haute finance, suggèrent le démantèlement de ce qui reste de l'État Providence. Le néo-conservatisme des années 1980 a rejoint le ministre des Finances de l'actuel


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gouvernement libéral puisqu'il approuve entièrement l'approche des grandes corporations, et son Budget le prouve.

En effet, ce discours sur le budget nous annonce que le gouvernement canadien s'apprête, au cours des trois prochaines années, à faire des coupures de plus de 7,5 milliards dans les programmes sociaux et plus particulièrement dans celui de l'assurance-chômage. Le gouvernement évite donc de s'attaquer de front aux grands intérêts financiers, tout en ignorant le gaspillage de son appareil administratif et les mauvaises méthodes de gestion de ses hauts fonctionnaires et de ses propres décideurs politiques.

J'aimerais, dans un premier temps, rappeler à la Chambre quelques-unes des observations du vérificateur général concernant la mauvaise gestion et le gaspillage des fonds publics, que l'on retrouve dans son dernier rapport, et dont le ministre des Finances n'a absolument pas tenu compte dans la rédaction de son Budget.

Le gouvernement ne s'attaque pas au déficit structurel puisqu'il évite de s'attaquer au gaspillage et à la mauvaise gestion. Voici, en bref, quelques exemples de gaspillage. La flotte automobile du fédéral dépasse les 500 millions et elle continue à être enrichie à un rythme de 4 000 voitures par année; Investissement Canada a dépensé 132 000 $ pour aménager un nouveau bureau, cuisine et salle de bain pour la nouvelle présidente, alors que le bureau de son prédécesseur, situé dans le même édifice, offrait ces commodités. Les frais de déplacement en avions gouvernementaux Challenger ont atteint 54 millions de dollars, dont plus de la moitié pour les déplacements des seuls ministres. Selon le vérificateur général, ces montants sont équivalents à des coûts horaires par vol de 19 650 $. Plus de 800 fonctionnaires, qui ont reçu un paiement forfaitaire pour quitter la fonction publique fédérale, ont par la suite été réembauchés. Quelque 30 millions de dollars ont été ainsi gaspillés.

(1815)

La Commission canadienne des grains a versé à titre gracieux-et je vous rappelle qu'un paiement à titre gracieux est un paiement auquel n'est liée aucune obligation légale et qui est fait comme un don dans l'intérêt public-un montant total d'environ 657 000 $ à des producteurs pour les indemniser pour les pertes causées par la faillite d'une entreprise de nettoyage de semences, qui était titulaire d'une licence de la commission.

Quelles sont les mesures dans ce budget qui visent à éliminer de tels gaspillages? Et ce n'est là que la pointe de l'iceberg. Aucune mesure. Et que dire de la mauvaise gestion au coeur de l'administration publique qui, depuis l'ère des libéraux de la fin des années 1960 et des années 1970, est devenue une pratique généralisée. Le vérificateur général en donne plusieurs exemples, que nous avons regroupés en trois types problématique: l'évaluation des programmes, les chevauchements de ces divers programmes et une perspective plus générale de quelques dépenses qui indiquent la mauvaise gestion du gouvernement.

Au chapitre de l'évaluation des programmes, pour dénoncer cette mauvaise gestion des fonds publics, le vérificateur met l'emphase, dans son rapport de 1993, sur le manque flagrant d'un processus rigoureux d'analyse des dépenses gouvernementales. Ce dernier recommande que les programmes soient évalués selon les résultats obtenus, de façon à guider les décisions politiques. Le Bloc québécois en a déjà fait état, mais il faut le répéter, puisque rien dans ce budget ou dans la politique libérale ne laisse entrevoir une quelconque préoccupation par ce problème d'évaluation des programmes.

Sur le plan quantitatif, entre 1989 et 1992, les dépenses reliées aux évaluations des programmes ont chuté de 28 p. 100. Cela a eu pour conséquence que le nombre d'évaluations des programmes a fortement baissé. En effet, en 1987-1988, 99 rapports d'évaluation de programmes ont été effectués, alors qu'en 1992 ils ont chuté à 80. Toujours selon le rapport du vérificateur, en 1991-1992, les dépenses de 16 programmes totalisaient 125 milliards de dépenses gouvernementales, et sur ces 16 programmes, seulement deux ont été évalués de manière exhaustive. Les évaluations ne portent pas sur les programmes les plus importants sur le plan des dépenses. En effet, on estime que deux fois moins de programmes supérieurs à 250 millions de dollars sont évalués par rapport à ceux inférieurs à ces montants.

Sur le plan qualitatif, en plaçant les services d'évaluation dans les ministères, les besoins immédiats des gestionnaires l'emportent sur les besoins du gouvernement et de l'intérêt public en général. Interrogé par le vérificateur général, les responsables de l'évaluation des programmes du ministère ont répondu qu'ils considèrent que le rôle le plus important d'une évaluation est d'aider la direction à régler les problèmes organisationnels. Ils négligent donc la fonction essentielle de l'évaluation d'un programme, qui est de vérifier l'efficacité de celui-ci, de les mettre en question, de les remettre en question si nécessaire, et ce, dans un souci d'allocation maximale des ressources. Il est à noter que ce type d'information serait le plus utile au Parlement en rapport avec la prise de décision des allocations de ressources, et au public en général, dans son évaluation des performances du gouvernement. En fait, on demande aux parlementaires de travailler en aveugle et d'allouer des ressources sans connaître la situation.

Le vérificateur mentionne dans son rapport, et je le cite: «Au cours des années 1990, l'évaluation de programmes devait être appelée à jouer un rôle de premier plan au chapitre de la gestion des dépenses de l'État, car elle peut aider à la prise de décision judicieuse visant à contrôler l'augmentation de cette dette publique.» Malgré cette mise en garde ou, si l'on veut, cette suggestion du vérificateur général, rien dans le Budget du gouvernement libéral ne laisse entrevoir une telle orientation.

Les chevauchements demeurent l'une des causes majeures de tant de gaspillage et d'une mauvaise gestion de fonds. Le pouvoir fédéral de dépenser dans les domaines de compétence provinciale, 24 p. 100 des chevauchements au niveau de ces programmes, et le pouvoir de légiférer dans les domaines partagés, 76 p. 100, sont à l'origine des chevauchements et rien, encore une fois, dans le budget du gouvernement ne laisse entrevoir une quelconque volonté de modifier la politique libérale traditionnelle dans ce domaine.

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Les chevauchements de programmes sont en partie responsables de la mauvaise administration des fonds publics, donc ils sont responsables de l'accroissement du coût de l'action gouvernementale. Il est plus économique de confier à une seule administration la responsabilité exclusive des services offerts simultanément, il en va de soi. Souvent, les chevauchements n'ajoutent rien à la qualité des interventions gouvernementales, au contraire. On pourrait utiliser de façon beaucoup plus ration-

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nelle et pertinente le personnel et les équipements affectés. Souvent aussi, les mesures mises en place par les deux paliers de gouvernement s'annulent, le caractère concurrentiel, sinon conflictuel, des relations fédérales-provinciales rend difficile la coordination des programmes parce qu'aucun gouvernement n'est prêt à faire des concessions majeures quant aux objectifs et aux priorités qui lui appartiennent en propre.

Enfin, la duplication des programmes est un facteur inflationnaire au sein de l'économie canadienne puisqu'une augmentation de la quantité d'information dont les administrés doivent disposer pour être en mesure de profiter des services et de l'aide financière disponible, ou pour se conformer aux lois et aux règlements, se traduit par une multiplication des démarches pour obtenir cette information et donc par une augmentation du personnel voué à une tâche somme toute improductive.

En conclusion, il nous apparaît incompréhensible que le ministre des Finances, dont la volonté de s'attaquer au déficit semble être une priorité, n'ait pas tenu compte des recommandations du vérificateur général en matière de gaspillage et de mauvaise gestion des fonds publics. Dans le but d'éliminer le gaspillage, les dépenses inutiles et la mauvaise gestion à l'intérieur de l'appareil gouvernemental, au nom du Bloc québécois, je réitère la demande faite au gouvernement de créer un comité parlementaire d'analyse et de révision des dépenses budgétaires, poste par poste.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, avant d'entrer dans mes remarques portant spécifiquement sur le budget présenté le 22 février, il m'apparaît pertinent de rappeler qu'un budget, c'est un instrument que se donne le gouvernement dans la poursuite de ses objectifs. Or, pour retrouver les objectifs que s'était fixés le Parti libéral, il convient de revenir aux propos que le chef et ses candidats ont exposés durant la campagne électorale.

Que disaient-ils? Qu'il fallait redonner l'espoir, qu'il fallait remettre le monde à l'ouvrage, qu'il fallait ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB, qu'ils allaient défendre l'universalité des programmes sociaux et des programmes de santé contre les coupes sombres annoncées par les conservateurs et désirées par le Parti réformiste, qu'il fallait investir dans les infrastructures pour lesquelles les besoins de situaient à 20 milliards de dollars.

Poursuivons notre recherche de cohérence. Immédiatement après les élections, le premier ministre a annoncé l'élimination du contrat des hélicoptères qui s'est traduit par des centaines de pertes d'emplois de haute technologie au Québec sans aucune compensation, en dépit de l'iniquité proverbiale des dépenses de la Défense nationale au Québec: 538 $ par habitant en Nouvelle-Écosse, 62 $ au Québec.

Une autre façon de prendre la mesure des objectifs que le gouvernement s'était donnés est de revenir au contenu du discours du Trône. Qu'on me permmette de faire ressortir l'absence de volonté de répondre aux vrais problèmes.

À part les infrastructures, et quelle cure d'amaigrissement elles auront subie, passant de 20 milliards de dollars avant la campagne électorale à un maigre 6 milliards, aucune mesure concrète pour relancer l'emploi sur une base durable. Au contraire, le gouvernement annonce la perte de 40 000 emplois reliés à l'augmentation du taux de cotisation d'assurance-chômage pour l'année 1994.

Aucune volonté de réduire les dépenses de fonctionnement de l'appareil gouvernemental. Pas non plus de volonté pour une réforme de la fiscalité canadienne. Dans la foulée du gouvernement précédent, il annonce qu'il s'engagera dans les prochaines années dans une réforme du régime de la sécurité sociale.

Comment pouvions-nous espérer un autre budget que celui présenté à cette Chambre le 22 février dernier, à la suite d'un discours du Trône aussi anémique? Le miracle n'aurait-il pas pu se produire? Rappelons-nous les échanges à la Chambre dans les semaines qui ont précédé le Discours du Trône.

Chaque fois que l'opposition officielle a interrogé le gouvernement sur des questions aussi importantes que la dette, le déficit, la fiscalité, la sauvegarde du filet social, les fiducies familiales, la création d'emplois ou le sort réservé aux jeunes, le gouvernement s'est toujours caché derrière le même paravent: Attendez le budget, toutes les réponses y seront. C'était la panacée, le nirvana du ministre des Finances. Quelle comédie, quel théâtre de mauvais goût!

La semaine dernière, le 28 février plus exactement, j'ai vécu un exercice démocratique avec les commettants de ma circonscription. Je les avais invités à venir partager nos préoccupations réciproques.

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Chez la quarantaine de personnes présentes, un large consensus s'est installé autour des questions des fiducies familiales, des échappatoires, abris et paradis fiscaux. Ces commettants sont profondément scandalisés par l'inaction du gouvernement et par l'absence de mesures appropriées dans le Budget du ministre des Finances.

Ces électrices et ces électeurs ne comprennent pas non plus que le Parti libéral, après avoir combattu le Plan Valcourt, s'attaque avec des pics de démolisseurs aux prestations des chômeurs. Selon trois économistes de l'UQAM, qui ont sans doute plus de crédibilité que le ministre des Finances, les chômeurs à eux seuls assument 60 p. 100 des économies que le gouvernement fédéral prétend réaliser dans ses engagements financiers.

Les gens de ma circonscription, à juste titre, mettent en parallèle ce traitement fait aux plus démunis et les dépenses somptuaires faites dans les ambassades, avec les généraux et les ambassadeurs qui continuent de se promener en limousine, une armée où le nombre d'officiers est plus grand que le nombre de soldats, et où il y aurait plus de généraux que de tanks.

Les gens rencontrés chez moi ne comprennent pas que le ministre des Finances s'attaque aux exemptions fiscales des personnes âgées et qu'il refuse de revoir en profondeur le régime fiscal. Ils n'acceptent pas non plus que le gouvernement fédéral, qui a souvent prétendu avoir le mandat de défendre les minorités dans le pays, s'attaque au seul collège militaire francophone d'Amérique, en dépit de l'avis de tous les intervenants, y com-

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pris de ceux du ministère de la Défense nationale. Par ce geste, le gouvernement nous montre son vrai visage.

Parlons maintenant de l'aide aux pays en développement. Dans le contexte économique actuel et dans celui de l'état des finances publiques, il convient d'analyser les décisions budgétaires ou administratives que le gouvernement prend dans le secteur de l'aide aux pays en développement.

Cette analyse est cependant rendue plus difficile, car il y a quelque temps le gouvernement a fait part de son intention de réexaminer l'ensemble de la politique étrangère canadienne. Aussi est-il délicat d'étudier le budget et les dépenses pour l'aide publique au développement dans la perspective de la poursuite de ces nouveaux objectifs, ceux-ci n'étant pas encore définis.

Une autre difficulté vient du fait que l'ACDI n'a déposé son rapport annuel pour l'année 1991-1992 qu'en janvier 1994. Ce rapport n'a donc pas encore fait l'objet d'une analyse critique par le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.

À cet égard, nous sommes en droit de nous interroger sur les critères utilisés par le gouvernemnt pour sabrer dans le budget de l'aide au développement.

L'une des attentes du Bloc québécois face au budget était une augmentation substantielle du financement des organisations non gouvernementales, quitte à réduire les programmes d'aide bilatérale souvent contestés par les intervenants du milieu.

Nous croyons que la part accordée aux ONG devrait être nettement supérieure à ce qu'elle est actuellement, car leur action à travers le monde est l'une des plus efficaces dans le domaine, puisqu'elles agissent directement auprès des populations les plus pauvres et que leur mode de gestion est léger. Le gouvernement canadien ne consacre que 10 p. 100 de l'APD aux ONG.

C'est trop peu et le ministre des Affaires étrangères est d'accord avec vous, puisqu'il affirmait en Chambre, le 9 février dernier, que le gouvernement ferait tout en son pouvoir non seulement pour maintenir, mais aussi pour augmenter ce pourcentage qui leur est consacré.

Le ministre n'a pas tenu promesse, pas plus que le ministre des Finances ne sera en mesure de le faire avec l'annonce, dans le présent budget, de son intention d'accorder 0,7 p. 100 du PIB, une norme reconnue à l'échelle internationale à l'aide au développement. En effet, comment pourra-t-il faire augmenter ce ratio qui est actuellement de 0,4 p. 100 du PIB avec une réduction de 2 p. 100 de l'enveloppe de l'aide internationale et un maintien des ressources à ce niveau pour la prochaine année.

Le gouvernement pourra-t-il nous faire part de son tour de magie, à moins que sa solution réside dans une diminution du PIB canadien au cours des prochaines années?

Le Bloc québécois croit qu'au-delà des motifs économiques qui servent de raisons pour couper dans l'aide au développement le gouvernement canadien aurait avantage à réexaminer les coupures qui sont faites depuis quelques années. Plusieurs motifs nous conduisent à cette prise de position.

Le premier a trait au prestige et à la réputation du Canada sur la scène internationale relativement à ses efforts en matière d'aide au développement. Nous voyons ici un élément primordial de toute l'orientation de la politique étrangère canadienne. Des coupures dans l'enveloppe de l'aide au développement par le Canada auront sûrement un impact très négatif sur l'image qu'il projette sur la scène internationale, en plus d'avoir un effet d'entraînement potentiel sur d'autres pays.

Un autre aspect, le plus important à nos yeux, que le gouvernement canadien aurait dû prendre en considération, se rapporte à la dimension humanitaire de l'aide internationale.

En résumé, le Bloc québécois croit que le gouvernement n'a pas démontré beaucoup de cohérence en ce qui concerne les mesures budgétaires relatives à l'aide internationale. Nous attendons maintenant le processus d'examen de la politique étrangère et espérons que celle-ci ne sera pas aussi décevante que ne l'est le présent budget.

Nous souhaitons surtout que la nouvelle orientation de la politique d'aide internationale ne soit pas subordonnée aux éléments négatifs de ce budget, et que le gouvernement canadien saura établir des objectifs respectueux des besoins des pays les plus pauvres et des attentes des intervenants du milieu de la coopération internationale au Canada.

[Traduction]

Le vice-président: Comme il est 18 h 29, conformément au paragraphe 84(6) du Règlement, je dois maintenant interrompre les délibérations et mettre immédiatement aux voix toute motion nécessaire pour mettre fin à l'étude de la motion des voies et moyens no 6.

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté le mardi 8 mars 1994, le vote par appel nominal est différé jusqu'au mercredi 16 mars 1994, à 18 h 30.

Le vice-président: Comme il est 18 h 30, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 30.)