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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 26 mai 1994

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LOI SUR LA SOCIÉTÉ DE DÉVELOPPEMENT DE L'INDUSTRIE CINÉMATOGRAPHIQUE CANADIENNE

    Projet de loi C-31. Adoption des motions portant présentation et première lecture 4431

PÉTITIONS

LES PERSONNES ÂGÉES

LA LOI SUR LE DIVORCE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET

    Projet de loi C-17. Étape du rapport 4431

DÉCISION DU PRÉSIDENT

MOTIONS D'AMENDEMENT

    Motions nos 1 à 11 inclusivement 4432
    M. Leblanc (Longueuil) 4439
    Report du vote sur la motion no 1 4441
    Motions nos 12 à 15 4442
    M. Harper (Calgary-Ouest) 4442
    M. Harper (Calgary-Ouest) 4443
    Report du vote sur la motion 4447
    Motions nos 16, 17, 18 et 39. 4447
    Rejet des motions nos 16, 17, 18 et 39 4449
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 4449
    M. Bernier (Gaspé) 4457
    Report du vote sur la motion no 19 4460
    Motions nos 23 à 38 4460
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 4460
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 4460
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 4460
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 4460
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 4460

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'ÉTHANOL

LE STATUT DE RÉFUGIÉ

LE MAINTIEN DE LA PAIX

LE FESTIVAL DE STRATFORD

L'ENVIRONNEMENT

LE DÉCÈS DE M. JOHN WINTERMEYER

LE CIRQUE DU SOLEIL

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LES OLYMPIADES DE MATHÉMATIQUES

LE MOIS DE LA FIBROSE KYSTIQUE

L'INDUSTRIE CINÉMATOGRAPHIQUE

LE PROJET HIBERNIA

LES CHAMPIONS DU HOCKEY JUNIOR «A»

LE MOIS DE L'OUÏE

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 4464

LE MAINTIEN DE LA PAIX

JEAN-PIERRE PAQUET ET ANDRÉE MASSICOTTE

QUESTIONS ORALES

LE DÉVELOPPEMENT DE LA FRANCOPHONIE CANADIENNE

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

    M. Gauthier (Roberval) 4465
    M. Gauthier (Roberval) 4466

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 4467
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 4467

LES SOINS DE SANTÉ

L'HÉPATITE C

LES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    M. Harper (Calgary-Ouest) 4468
    M. Harper (Calgary-Ouest) 4469

L'HÉPATITE C

LE COMMERCE INTERPROVINCIAL

L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

AVCORP INDUSTRIES

L'AGRICULTURE

LES ÉLECTIONS EN AFRIQUE DU SUD

    Mme Stewart (Northumberland) 4472

LES AFFAIRES INDIENNES

LA TAXE SUR LES HYDROCARBURES

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 4472
    M. Breitkreuz (Yellowhead) 4473

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    M. Gauthier (Roberval) 4473

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET

    Projet de loi C-17. Reprise de l'étude à l'étape du rapportet des motions nos 23 à 38 inclusivement 4473
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 4473
    M. Leblanc (Longueuil) 4491

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI SUR LA PROTECTION DES TÉMOINS

    Projet de loi C-206. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture 4493
    M. Breitkreuz (Yellowhead) 4496

MOTION D'AJOURNEMENT

LE COMMERCE EXTÉRIEUR

L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS ALIMENTAIRES

LE TRAITÉ SUR LE SAUMON DU PACIFIQUE


4431


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 26 mai 1994

La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à trois pétitions.

* * *

[Français]

LOI SUR LA SOCIÉTÉ DE DÉVELOPPEMENT DE L'INDUSTRIE CINÉMATOGRAPHIQUE CANADIENNE

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien) demande à présenter le projet de loi C-31, intitulé Loi modifiant la Loi sur la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

PÉTITIONS

LES PERSONNES ÂGÉES

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plus de 2 000 résidants de mon comté de Québec-Est et de la région. Les pétitionnaires veulent attirer l'attention du Parlement sur la situation des aînés au Québec, dénoncer les récentes mesures adoptées par le gouvernement, dont les coupures au niveau du crédit d'impôt en raison de l'âge et les processus inhumains qu'ils veulent implanter, comme le système de boîtes vocales.

(1010)

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de s'abstenir de prendre quelque mesure que ce soit pour réduire leur revenu et rendre difficile d'accès les services destinés aux aînés. J'appuie sans réserve cette pétition et j'exhorte le gouvernement à y donner suite.

[Traduction]

LA LOI SUR LE DIVORCE

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'aimerais présenter une pétition au nom de mes électeurs, les pétitionnaires demandant au gouvernement de modifier la Loi sur le divorce de manière à y inclure une disposition garantissant aux grands-parents un droit de visite de leurs petits-enfants.

J'ajoute ainsi le nom de 600 pétitionnaires aux milliers d'autres que j'ai déjà présentés. J'aimerais que les Canadiens de toutes les régions soient sensibilisés aux besoins des grands-parents et des petits-enfants de nos jours.

Mme Beryl Gaffney (Nepean): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je présente une pétition signée par 400 Canadiens qui demandent au Parlement de modifier la Loi sur le divorce de manière à y inclure une disposition reconnaissant que la relation entre les grands-parents et les petits-enfants est naturelle et fondamentale, que le fait de refuser à des grands-parents le droit de visiter leurs petits-enfants peut constituer une forme de violence à l'égard de ces aînés et avoir des répercussions émotionnelles très préjudiciables à la fois sur les grands-parents et les petits-enfants et que, en aucun cas, un père ou une mère n'a le droit, sans raison sérieuse, de dresser des obstacles entre un enfant et ses grands-parents.

À mon avis, nous avons, à titre de parlementaires, une obligation importante, celle de protéger les droits des grands-parents. J'encourage donc tous les députés à le faire.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Toutes les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-17, Loi modificative portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 février 1994, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement.


4432

DÉCISION DU PRÉSIDENT

Le Président: Il y a 39 motions d'amendement inscrites au Feuilleton des Avis pour ce qui concerne l'étape du rapport du projet de loi C-17, Loi modificative portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 février 1994.

[Français]

Les motions nos 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11 seront groupées pour les fins du débat, mais elles seront mises aux voix de la façon suivante:

a) Le vote sur la motion no 1 s'appliquera aux motions nos 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11.

b) Si la motion no 1 est adoptée, il ne sera pas nécessaire de procéder au vote sur la motion no 4.

c) Si la motion no 1 est rejetée, il faudra mettre la motion no 4 aux voix.

[Traduction]

Les motions nos 12, 13, 14 et 15 seront groupées pour les fins du débat, mais elles seront mises aux voix de la façon suivante:

a) La motion no 12 sera mise aux voix séparément.

b) Si la motion no 12 est adoptée, il ne sera pas nécessaire de mettre la motion no 13 aux voix, mais il faudra que la Chambre procède au vote sur la motion no 14, lequel vote s'appliquera à la motion no 15.

c) Si la motion no 12 est rejetée, il faudra mettre la motion no 13 aux voix et le vote sur cette motion s'appliquera aux motions nos 14 et 15.

[Français]

Les motions nos 16, 17, 18 et 39 seront groupées pour les fins du débat. Le vote sur la motion no 16 s'appliquera aux motions nos 17, 18 et 39.

[Traduction]

Les motions nos 19, 20, 21 et 22 seront groupées pour les fins du débat et mises aux voix de la façon suivante:

a) Le vote sur la motion no 19 s'appliquera aux motions nos 20 et 22.

b) Si la motion no 19 est adoptée, il ne sera pas nécessaire de mettre la motion no 21 aux voix.

(1015)

c) Si la motion no 19 est rejetée, il faudra procéder au vote sur la motion no 21.

[Français]

Les motions nos 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37 et 38 seront groupées pour les fins du débat et mises aux voix de la façon suivante:

a) Le vote sur la motion no 23 s'appliquera aux motions nos 27, 28, 29, 30, 32, 34, 35, 36, 37 et 38.

b) Si la motion no 23 est adoptée, il ne sera pas nécessaire de mettre les motions nos 24, 25, 26, 31 et 33 aux voix.

c) Si la motion no 23 est rejetée, il faudra procéder aux votes suivants:

i) Le vote sur la motion no 24 s'appliquera à la motion no 25.

ii) Les motions nos 26, 31 et 33 seront mises aux voix séparément.

[Traduction]

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. John Williams (St-Albert) propose:

Motion nos 1, 2 et 3
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 2.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 3.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 4.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot) propose:

Motion no 4
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 5, par adjonction après la ligne 29, page 3, de ce qui suit:
«(7) À l'expiration de la prorogation des régimes de rémunération prévue aux paragraphes 5(1), 5(3) et aux paragraphes (2.1) et (2.2), ces paragraphes sont soumis à l'examen d'un comité soit de la Chambre des communes, soit du Sénat, soit mixte, constitué ou désigné par le Parlement pour étudier l'application de la présente loi. Le comité procède à l'examen détaillé de l'application de ces paragraphes. Dans l'année suivant le début de l'examen ou dans le délai supérieur autorisé par la Chambre des communes, il présente au Parlement son rapport, dans lequel il fait état notamment des modifications qu'il juge souhaitables.
(8) Il est interdit de proroger à nouveau les régimes de rémunération visés par les paragraphes 5(1) et 5(3) et les paragraphes (2.1) et (2.2) avant que la Chambre n'ait étudié le rapport présenté en vertu du paragraphe (7).»
M. John Williams (St-Albert) propose:

Motions nos 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 5.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 6.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 7.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 8.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 9.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 10.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 11.
(1020)

M. Williams: Monsieur le Président, je prends la parole ce matin pour me prononcer sur le projet de loi C-17. Pour commencer, il faut dire que, comme il s'agit d'un projet de loi omnibus, c'est-à-dire d'une mesure législative qui porte sur de nombreux points, le projet de loi C-17 comporte des choses que nous appuyons et d'autres qui nous inspirent des réserves.

Nous avons demandé au gouvernement de scinder le projet de loi en fonction de ses parties constituantes, ce qu'il a refusé.


4433

Nous n'avions donc pas d'autre choix que de proposer ces amendements si nous voulions insister sur le fait que nous approuvons certaines de ses composantes, mais pas toutes. Même si nous serons dans l'obligation de voter contre le projet de loi dans sa totalité, nous voulons signaler que nous souscrivons à certaines parties de cette mesure, d'où nos motions de ce matin.

Nous approuvons essentiellement les dispositions qui prévoient le gel des salaires dans le secteur public. Tout le monde sait que notre pays est confronté à un grave problème d'endettement et de déficit et tout ce qui peut contribuer à atténuer ce problème va dans le sens des intérêts de notre pays.

Toutefois, comme le Parti réformiste l'a fait observer à maintes reprises, l'actuel gouvernement ne devrait pas se contenter de se tourner du côté de ses fonctionnaires pour leur soutirer quelques sous de plus, s'il tient vraiment à résoudre son problème d'endettement et de déficit. Tout le monde sait maintenant que si, non contents de bloquer la rémunération du secteur public, nous éliminions tous les fonctionnaires du pays afin d'économiser tout ce qui est possible de l'être sur le chapitre de la rémunération de ces gens-là, nous ne pourrions pas supprimer ne serait-ce que la moitié de notre déficit annuel.

Si l'actuel gouvernement pense pouvoir équilibrer son budget en s'en prenant aux fonctionnaires fédéraux, il fait donc fausse route. Par contre, l'idée qu'il faut réaliser des économies supplémentaires parce que chaque sou économisé est précieux vaut son pesant d'or.

Voici certains points que j'aimerais faire valoir. L'un d'eux concerne non seulement le gel des salaires pour une période de deux ans de plus, mais également la suspension des augmentations par échelon.

En tant que député de la circonscription de St. Albert, où la Gendarmerie royale du Canada assure les services de police, j'ai reçu de nombreuses suggestions touchant cet organisme. Lorsqu'un stagiaire sort de l'école de formation de la GRC, il voit sa rémunération augmenter deux fois par an pendant les trois années qui suivent, jusqu'à ce qu'il ait atteint l'échelon de rémunération d'un agent de police. En raison de cette modification, les augmentations auxquelles auraient droit ces nouveaux agents de la GRC seront maintenant gelées.

Il s'ensuivra une inégalité entre le traitement versé aux nouveaux agents de la GRC affectés à la surveillance d'un quartier et le traitement versé à ceux qui sont déjà en fonction. Ce n'est pas que les agents de la GRC refusent de faire leur part, mais ils peuvent être mutés d'une région du pays à une autre plus souvent que tout autre fonctionnaire; or, pour quelqu'un qui déménage d'une région rurale de l'Alberta ou de la Saskatchewan au centre-ville de Vancouver, le coût de la vie change considérablement.

On leur demande pourtant d'accepter le même traitement que lorsqu'ils sont entrés dans la GRC et de renoncer aux augmentations semi-annuelles qui amèneraient leur traitement au même niveau que celui versé à tout autre agent de ce corps policier.

(1025)

La criminalité est à la hausse. Nous en avons discuté à maintes occasions à la Chambre. Nous devrions peut-être songer à reconnaître à sa juste valeur le travail d'un corps policier qui maintient l'ordre public au Canada. Comment peut-on espérer réussir à aussi peu de frais? Nous ne rémunérons pas suffisamment ces agents qui risquent souvent leur vie pour assurer notre protection et nous demandons aux nouvelles recrues de faire cela pour un traitement moins que raisonnable.

Nous sommes en faveur d'un gel des traitements dans la fonction publique. Le Parti réformiste veut, par tous les moyens, s'assurer qu'on fait tous les efforts pour venir à bout de cet horrible déficit qui nous accable. C'est peut-être une mesure modeste, mais c'est une mesure que nous appuyons, quoique avec des réserves dans certains cas.

Comme je l'ai dit au début, au moment du vote, nous nous opposerons à l'adoption de l'ensemble de ce projet de loi, mais nous tenons à dire clairement que nous appuyons pour l'essentiel la disposition du projet de loi C-17 qui concerne le gel des traitements dans la fonction publique.

Par ailleurs, nous sommes fondamentalement en faveur des dispositions touchant la rémunération dans les autres secteurs que ceux dont j'ai parlé, en particulier celle qui prévoit le gel du traitement actuel des députés. Nous avons toujours voulu lancer un message clair à la population canadienne, en faisant preuve de leadership.

Durant la dernière campagne électorale, les réformistes ont notamment proposé de faire preuve de leadership et de montrer aux Canadiens que le gouvernement et les parlementaires qu'ils ont élus donnent l'exemple et sont prêts à faire leur part pour leur garantir un gouvernement efficace et pas trop coûteux, à un moment où le mot «compression» doit être notre mot d'ordre.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur les amendements regroupés présentés par le Parti réformiste et le Bloc québécois, d'autant plus que ce projet de loi, dans son ensemble, me tient particulièrement à coeur.

Pourquoi me tient-il particulièrement à coeur? Parce qu'à mon avis, c'est la traduction du manque de transparence généralisé dont ce gouvernement a fait preuve depuis qu'il tient les rênes de l'administration publique canadienne.

Que présente-t-on dans cette partie? Je suis agréablement surpris, en partant, j'aimerais vous le signaler, de la position du Parti réformiste en ce qui concerne cette section du projet de loi C-17 parce que, depuis le début des débats et même lors de l'étude en sous-comité-celui qui s'est penché sur l'ensemble des dispositions du projet de loi C-17-le Parti réformiste n'a pas démontré une préoccupation, mais pas du tout, face au sort que ce gouvernement a réservé aux fonctionnaires jusqu'à présent. Il ne s'est pas dit un traître mot de la part du Parti réformiste


4434

sur le droit fondamental à la libre négociation collective, chose que le Bloc québécois a défendue depuis le début.

Alors, nous sommes agréablement surpris que le Parti réformiste présente ces amendements parce que supprimer l'ensemble de ces dispositions concernant le gel salarial des fonctionnaires de la fonction publique canadienne signifie que le Parti réformiste, in extenso, revient à de meilleures dispositions face à des droits fondamentaux comme celui de la négociation collective. Cela veut dire, si on se fie au raisonnement et aux actions du Parti réformiste posées ce matin en présentant ces motions, que ces gens-là ont de meilleures dispositions maintenant face à la négociation collective comme telle, face aux droits des travailleurs et qu'ils seraient prêts à revenir, je dirais, à l'ancien système qui consistait à se parler, qui consistait, pour le gouvernement et ses fonctionnaires, à alimenter un dialogue constructif, une synergie sur l'ensemble des conditions de travail.

(1030)

Cela veut dire qu'ils sont en faveur des nouveaux modèles qu'on nous présente un peu partout dans le monde, qui font que la collaboration entre les travailleurs de l'État et le gouvernement permet d'en arriver à des solutions constructives pour contrôler les finances publiques ou l'évolution de ces finances publiques pour en arriver à des déficits annuels moins considérables que ceux qu'on retrouve année après année dans l'administration publique canadienne.

Je suis surpris de cela. Je suis surpris, et d'ailleurs si nous avons présenté une motion qui oblige le gouvernement à revenir à l'expiration, c'est-à-dire les dispositions salariales pour les travailleurs de l'État, revenir à la Chambre pour débattre la reconduction ou les modifications à cet égard, c'était justement par souci de réalisme. On se disait qu'on ne présenterait pas une ou des motions qui supprimeraient l'ensemble de ces dispositions puisque le gouvernement étant majoritaire va voter contre.

Notre motion est plus réaliste et celle du Parti réformiste va plus loin dans ce qu'on a comme conviction profonde, mais elle est digne de réalisme dans le sens qu'à l'expiration des dispositions de cette partie du projet de loi C-17 concernant la rémunération des employés de l'État, nous demandions un débat démocratique. Nous demandions la transparence aussi, chose dont ce gouvernement n'a pas fait preuve depuis le début de ce débat.

Je vais donner un exemple du manque de transparence et de l'attitude du gouvernement qui veut nous passer n'importe quoi, n'importe quel sapin, en vitesse, à la sauvette, à partir d'un projet de loi omnibus comme celui qu'on nous présente ce matin. Vous savez que le sous-comité qui a dû se pencher sur le projet de loi C-17 devait avoir, au départ, deux jours et demi d'audiences publiques. Vous imaginez les dispositions de ce projet de loi qui sont fondamentales, en particulier au niveau de l'assurance-chômage, dont on aura l'occasion de débattre au cours de la journée, le gouvernement voulait nous faire une forme de filibuster, mais à l'envers.

Le gouvernement voulait nous imposer des dispositions fondamentales à l'intérieur d'un projet omnibus, et n'eût été des actions prises par le Bloc québécois à ce sous-comité, nous n'aurions pas eu deux semaines d'audiences publiques avec pas moins de cent témoins durant ces audiences.

La transparence n'étouffera pas ce gouvernement. Nous l'avons vu aussi dans le cas du projet de loi concernant l'aéroport Pearson. On a voulu encore une fois nous passer à la sauvette quelque chose de fondamental, sans régler d'aucune façon que ce soit le problème des lobbyistes au Canada.

C'est le sens de la motion que le Bloc québécois présente et qu'à l'expiration des arrangements salariaux entre le gouvernement fédéral et ses employés, le débat public se fasse de façon transparente, que le gouvernement supporte l'odieux des décisions qu'il aura à prendre et qu'on démontre à la face du monde que ce gouvernement, même s'il est nouveau, est complètement dépassé dans les relations qu'il veut établir entre ses travailleurs et son administration.

On ne fonctionne plus comme cela, en imposant, qu'on soit d'accord ou non avec un gel salarial n'y change rien, mais imposer comme un dictateur, imposer un système de rémunération forcé pour les employés de l'État a plusieurs conséquences désastreuses.

La première, c'est de démotiver les gens. La deuxième fait en sorte qu'on impose un bâillon aux représentants syndicaux. Vous savez que ces représentants syndicaux ont des choses à dire. Ils ont à faire leur part, ils l'ont démontré par le passé.

J'ai été agréablement surpris quand, dès le début de février, en vue du dépôt du budget du gouvernement, les syndicats de la Fonction publique ont proposé des sacrifices pour eux-mêmes qui, souvent, allaient plus loin que le simple gel qu'on leur a imposé, la matraque qu'on leur a imposée. Ils proposaient des avenues constructives pour réduire le déficit annuel, pour améliorer l'efficacité dans l'administration de la Fonction publique, pour en arriver à cette belle synergie qu'on retrouve un peu partout dans le monde et qui est totalement absente ici parce qu'on a un gouvernement qui est dépassé, qui est désuet.

(1035)

Il préfère éviter les débats comme le premier ministre le fait dans le cas de la Constitution, éviter les débats plutôt que d'affronter les vrais problèmes, plutôt que de prendre les vraies décisions et plutôt que de les prendre en concertation et, je dirais, dans un esprit fraternel.

Et c'est cela le sens de la motion présentée par le Bloc québécois, c'est justement de forcer un débat public, d'en arriver à débattre publiquement non seulement de la rémunération des employés de l'État, mais de l'ensemble des coûts salariaux, de l'efficacité de l'appareil administratif, des suggestions qui sont même faites par des syndicats.

Alors, avec la motion qu'on présente, nous revenons, en Chambre, à l'expiration des dispositions salariales prévues dans


4435

le Budget, et comme je le mentionnais tout à l'heure, n'eût été de nous et si nous n'avions pas eu ce souci de réalisme en prenant en considération que ce gouvernement profite honteusement de sa majorité pour nous imposer tout ce qu'il veut, nous aurions présenté, possiblement, au niveau de cette section du projet de loi C-17 concernant la rémunération des travailleurs de l'État, des motions du même style que celles du Parti réformiste.

Mais, par souci de réalisme, nous savons fort bien que les résolutions des motions vont probablement être battues par le gouvernement, alors nous présentons une voix, je dirais, avec notre motion, une voix réaliste, qui est probablement «achetable» par nos amis libéraux, s'ils ont ce souci, justement, de la transparence et de la démocratie.

S'ils votent contre la motion que nous présentons, ça confirmera que ce gouvernement a des choses à cacher, manque de courage politique, n'a pas de vision et se fout éperdument de ses employés d'État, de l'évolution des finances publiques et même des améliorations qu'on pourrait apporter ensemble à cet appareil gouvernemental lourd, désuet, ankylosé, tout comme les membres de ce gouvernement.

M. Walker: Je pense qu'il y a des changements dans le texte.

M. Loubier: Je remercie monsieur le député de m'avoir rappelé mes obligations techniques. Nous avons noté ce matin qu'après impression du document sur les motions, il y avait un manque de concordance entre la version anglaise et la version française, pour en arriver à deux versions qui sont totalement identiques.

Et les erreurs se retrouvent au niveau de la version française. Je peux vous proposer les amendements, si on a l'unanimité de la Chambre. Ce ne sont pas des amendements, finalement, ce sont des corrections. Si on a l'unanimité, je vous les lirai. J'apprécierais que vous les acceptiez. Alors, vous voulez que je les lise, madame la Présidente?

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime pour accepter l'amendement du député de Saint-Hyacinthe-Bagot?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Voulez-vous les lire pour qu'elles puissent être consignées au hansard?

M. Loubier: À la motion numéro 4, où on dit au point 7:

À l'expiration de la prorogation des régimes de rémunération prévue aux paragraphes 5(1), 5(3) et aux paragraphes (2.1) et (2.2), ces paragraphes sont soumis à l'examen d'un comité
Vous enlevez le «soit», donc ça devient: «d'un comité de la Chambre des communes». Ça va? Et vous enlevez «soit du Sénat, soit mixte», parce que ça devient uniquement un comité de la Chambre.

Je poursuis: «comité de la Chambre constitué ou désigné par le Parlement», ça devient «par la Chambre», pour être conforme au texte anglais et à la dernière ligne, lorsque nous lisons «des modifications qu'il juge souhaitables», vous remplacez cette partie de la phrase par «de l'opportunité de tout autre prorogation des régimes de rémunération». Alors, je vous remercie, madame la Présidente.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Alors, si je comprends bien, au paragraphe 8, il n'y a pas de changements.

Je reconnais l'honorable whip du gouvernement.

(1040)

M. Alfonso Gagliano (Saint-Léonard): Madame la Présidente, ce matin, j'aimerais participer à ce débat. Après avoir écouté le critique de l'opposition officielle en matière de finances nous dire que le gouvernement avait des choses à cacher, qu'on faisait des choses en cachette, je ne peux laisser se terminer le débat sur cette motion et laisser ceux qui nous écoutent avec cette impression qui est tout à fait erronée, et je veux que ce soit consigné au compte rendu de cette Chambre.

Ce gouvernement a été un des premiers à établir un processus ouvert à des consultations, tout d'abord dans cette Chambre où on a eu des journées spéciales pour débattre du processus budgétaire. Le ministre des Finances a tenu des consultations publiques à travers le pays, donc télévisées, et non pas seulement pour les gens qui pouvaient participer à ce débat, mais aussi où les gens pouvaient les suivre par le biais de la télévision et même devant les comités.

Le député se référait au comité où on en était venu, au début, à un accord. D'ailleurs, on a eu des audiences de deux jours avec tous les membres du comité. Lorsque l'opposition a demandé plus de temps, on leur en a accordé. D'ailleurs, on fonctionne avec un ordre de la Chambre qui stipule qu'aujourd'hui et lundi seront deux jours de débat sur les motions, après qu'on en ait débattu en comité à l'étape du rapport.

Alors, lorsqu'on nous dit que le gouvernement veut passer cela en vitesse, qu'on fait tout en cachette, c'est le contraire. C'est justement ce gouvernement libéral qui a instauré un processus ouvert où tout le monde peut participer. Dans la réforme parlementaire qu'on a faite au début, à l'ouverture de cette Chambre, on a établi que lors du prochain budget, le Comité des finances, dont le député est membre, aura l'occasion de participer à la préparation du budget, et non pas comme cela se faisait auparavant, où on apprenait ce qu'il contenait seulement lorsque le ministre des Finances arrivait en Chambre pour faire son discours.

Alors, il est faux de dire que le gouvernement libéral veut faire des changements en vitesse et en cachette, car tout a été fait publiquement. On le fait encore et on va continuer à le faire. Alors, je voulais m'assurer qu'on voie l'autre côté de la médaille, comme on dit, et que les gens qui nous écoutent puissent entendre l'autre version.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Madame la Présidente, je désire intervenir sur cette série d'amendements, parce que finalement on retrouve là un débat qui, au Canada et dans les provinces canadiennes, au Québec, tourne en rond depuis plusieurs années. Dans un sens, on peut souscrire à ce que le Parti réformiste propose comme amendements, soit le retour à la libre négociation plutôt qu'à des décisions imposées par l'État, par rapport à la rémunération des employés. En même temps, on semble ne pas tirer leçon du passé. On est devant une


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situation finalement où la négociation dans le secteur public a des composantes un petit peu différentes de ce qu'elles peuvent être dans le secteur privé.

Le gouvernement, dans le cadre de ses consultations budgétaires, dans le cadre de ses consultations sur la gestion en général, aurait pu nous présenter une vision différente de celle des conservateurs. Là, on nous sert encore l'ancienne sauce des conservateurs, servie un peu à la libérale. Finalement, au niveau de la négociation dans le secteur public, il y aurait sûrement des solutions permanentes à mettre en place pour éviter la situation présente où le gouvernement est encore obligé, parce qu'il n'a pas réagi à temps, d'imposer des conditions salariales à ses employés, plutôt que d'avoir réussi à développer des relations de travail qui permettraient d'en arriver à des ententes et de mettre en place un contrat social réel avec les travailleurs de l'État.

C'est probablement pour cela que les deux partis d'opposition ici veulent des amendements significatifs, car ce projet de loi laisse le message que les employés du gouvernement ne sont pas assez productifs, qu'ils ne travaillent pas suffisamment fort et qu'ils ne doivent pas être rémunérés en conséquence, alors que la réalité est tout autre. La très vaste majorité des travailleurs du secteur public, comme ceux du secteur privé d'ailleurs, font très bien leur travail et méritent qu'on ait le courage, la ténacité et l'originalité de développer un modèle de négociation qui soit adéquat.

(1045)

Lors de nos premiers mois en Chambre, on a pu intervenir sur la question de la loi spéciale pour le port de Vancouver, où là encore le gouvernement a adopté une attitude qui brime en partie sa volonté et sa capacité de négocier des ententes acceptables. Aujourd'hui, on est devant la réalité du projet de loi, et on doit composer avec la réalité de celui-ci. On n'en est malheureusement pas à définir un régime de négociation qui aurait été le fruit d'un consensus entre le gouvernement employeur et les représentants de ses employés, les syndiqués et tous les travailleurs du secteur public.

Il y aurait donc, pour ces raisons, nécessité pour le gouvernement de recevoir les amendements de l'opposition. À la limite, les amendements du Parti réformiste nous apparaissent intéressants parce qu'ils ramènent au moins la discussion au point de départ, c'est-à-dire à une négociation libre. Mais cette négociation libre entre un État employeur et ses employés demande un encadrement différent de la négociation dans le secteur privé. Il est certain que même si on adopte les amendements du Parti réformiste, il y aura d'autres étapes à mettre en place.

Il m'apparaît que la position des partis d'opposition est beaucoup plus conforme à la réalité que l'on veut donner à nos interventions en relations de travail. Le message que l'opposition veut donner aux Canadiens et aux Québécois, c'est beaucoup plus le fait qu'on est là pour traiter avec équité notre personnel, et non pas de façon systématique où année après année, on change de gouvernement, des conservateurs aux libéraux, et que c'est du pareil au même. On est passé d'un gouvernement à un autre, et on ne voit aucune différence dans ce dossier, comme dans plusieurs autres.

Il me semble important que l'on écoute un peu ce qui se fait comme expérience originale un peu partout concernant cela. Il doit y avoir des données qui existent sur la rémunération des gens du secteur public et du secteur privé. Au Québec, on a ça au niveau de l'Institut de rémunération, et on se rend compte que depuis 10, 15 ans, lentement, la rémunération du secteur public est rejointe par le secteur privé. Les histoires qu'on entendait sur les fonctionnaires surpayés sont de moins en moins vraies. On est de plus en plus en parité entre les parties là-dessus.

Si on s'en va vers la parité, je pense qu'il faudrait s'organiser pour qu'il y ait une négociation qui soit la plus libre possible en tenant compte des particularités de l'État employeur. C'est en ce sens que nos amendements allaient, c'est-à-dire de trouver des façons de surveiller l'action du gouvernement, parce qu'il semblait avoir déjà fait son lit. Cela a un impact majeur sur le budget de l'année actuelle, les décisions qui, dans le fond, sont déjà prises par le gouvernement. On se disait qu'on devrait assurer une surveillance adéquate et se donner la chance de voir ce que cela va donner comme résultat afin de pouvoir, à court terme, peut-être pour la prochaine année, trouver une nouvelle façon d'avoir des relations de travail qui impêcheraient la démotivation des employés et qui nous permettraient d'atteindre les objectifs de productivité que l'on doit avoir dans la fonction publique, mais qui ne se calcule pas seulement par la diminution des coûts de rendement, mais aussi par la satisfaction des employés.

Le premier niveau de satisfaction qu'il faut avoir chez les employés, ce sont les besoins de base. Lorsqu'on ne satisfait pas ces besoins, on s'en va dans une situation où les gens ne veulent pas aller au deuxième ou au troisième niveau. C'est très bien connu dans le jargon des spécialistes en motivation de personnel qu'il faut satisfaire les besoins de base avant de demander à quelqu'un de contribuer plus. Lorsqu'on ne satisfait pas ce niveau, on peut faire appel à tout autre niveau de motivation et il n'y a pas d'écoute.

J'invite donc le gouvernement à recevoir les amendements de l'opposition, que ce soit du Parti réformiste ou du Bloc, qui l'un comme l'autre vise à ramener la négociation à plus de réalisme et à plus de chances égales pour les deux parties. J'espère que le gouvernement sera à l'écoute des projets d'amendements qui sont déposés.

(1050)

M. André Caron (Jonquière): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que j'interviens sur l'amendement du Parti réformiste et celui de mon parti pour dénoncer l'attitude du gouvernement libéral qui reprend la politique du Parti conservateur en venant mettre fin à ce que j'appellerais la libre négociation dans les conventions collectives de la Fonction publique.

J'ai vécu deux fois des situations comme celle-là où l'État intervient pour changer les règles du jeu et imposer sa volonté. Je vous assure que ce sont des situations qui ont des répercussions importantes, non sur la motivation, mais sur l'esprit des travailleurs qui sont frappés. Il est sûr que les travailleurs qui ont à oeuvrer pour l'État, qui doivent assurer un service, continuent de le faire. À ce titre, j'ai observé les gens de mon entourage, quand, au Québec, nous avons dû subir deux lois de cette nature. Les employés ont continué de bien faire leur travail, sauf que, à ce moment-là, quelque chose a changé. On dirait que les gens


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regardent avec plus suspicion, moins de confiance, leur employeur, et leur employeur, actuellement, c'est l'État.

Alors, je suis d'avis qu'intervenir dans la libre négociation de la part de l'État est un geste qui doit être fait dans des situations extrêmes, et je ne crois pas que nous sommes dans cette situation actuellement. Quelle est la situation actuelle? On est face à des gouvernements qui ont perdu le contrôle de leurs dépenses. Ces gouvernements-là doivent poser des gestes politiques pour signifier à la population au moins qu'ils ont à coeur ses intérêts.

Quel est le premier geste? C'est de trouver un bouc émissaire; le bouc émissaire, c'est le fonctionnaire, c'est le travailleur de l'État. On va dire: «Le travailleur coûte cher, nous allons couper son salaire.» Mais quand on regarde, en bout de ligne, ce qui a été coupé par rapport à la dette du Canada, ce n'est souvent pas grand-chose mais, politiquement, cela permet à des politiciens sans envergure de dire: «Oui, il y a beaucoup de dépenses, mais, souvenez-vous, nous avons coupé le salaire des fonctionnaires.» Je pense que cela devient simplement un alibi pour un gouvernement qui a perdu le contrôle de ses dépenses.

Un autre aspect que je voudrais faire ressortir est le suivant. Nous vivons dans un État de droit. Il est sûr que le gouvernement peut faire les lois qu'il veut, mais il faut que ces lois soient considérées comme justes et adéquates par la population. Et quand une loi est jugée par l'ensemble de la population comme étant douteuse, comme étant inadéquate, je pense qu'on sort un peu d'une situation où on est en État de droit. En fait, on entre dans une situation où l'État veut imposer ses diktats. On entre dans une situation où l'arbitraire s'installe. On est face à une situation où des gens disent: «Oui, nous allons négocier telle entente; nous allons participer de bonne foi à un processus de négociation collective», mais il y a toujours quelqu'un quelque part qui peut dire non. Le contrat qui a été signé de bonne foi, le contrat pour lequel des gens ont réfléchi, pour lequel des gens ont voté dans des assemblées générales syndicales, est dénoncé de façon unilatérale et arbitraire.

Alors, je me prononce sur les amendements qui ont été déposés par mon parti, et si cet amendement est rejeté, l'amendement du Parti réformiste qui prône un retour à la libre négociation me semblerait beaucoup plus acceptable que ce que nous trouvons dans le projet de loi où on constate que, encore une fois, l'État qui a mal administré, le gouvernement qui veut présenter une image d'administrateur rigoureux à la population se trouve un bouc émissaire et frappe ses travailleurs pour éviter de regarder ailleurs.

Et nous autres, députés du Bloc québécois qui sommes à Ottawa depuis six mois, savons qu'ailleurs il y a des choses à couper. Il y aurait des choses à examiner. C'est d'ailleurs ce que mon parti voulait faire dès le début de la session en présentant un projet de mise sur pied d'un comité spécial qui devait examiner toutes les dépenses de l'État.

(1055)

Toutes les dépenses de l'État, ce sont aussi les salaires, mais également toutes les choses qui s'achètent, les choses qui se vendent, les choses qui sont souvent, même à l'oeil d'un amateur, mal planifiées et qui entraînent des dépenses beaucoup plus importantes que celles reliées aux coupures qu'on pourrait faire en gelant le salaire des fonctionnaires de l'État.

Je voterai en faveur de l'amendement qui est présenté par mon parti et contre la proposition principale qui est présentée par le gouvernement libéral qui vient mettre fin à ce que j'appelle un régime de libre négociation dans la Fonction publique.

Mme Francine Lalonde (Mercier): Madame la Présidente, je veux à mon tour dénoncer d'abord, et vivement, le fait qu'on traite dans un même projet de loi de conditions aussi importantes pour une grande partie de cette société québécoise et canadienne, non seulement, comme nous allons en parler plus tard, des dispositions touchant l'assurance-chômage, mais en même temps de celles touchant Radio-Canada, et touchant, et c'est sur quoi je vais parler maintenant, la fonction publique.

Nombreux ont été les travailleurs de la fonction publique qui ont écouté les sirènes libérales leur disant: Changez de régime, revenez avec les libéraux à un régime de libre négociation. Nombreux, nombreuses, ils ont été à nous dire leur déception amère alors que quelques mois seulement après que le nouveau gouvernement ait pris le pouvoir, quelques mois seulement après, à l'occasion d'un projet de loi omnibus, il poursuit le gel des salaires déjà amorcé.

Il est important de savoir, en effet, que ce n'est pas un premier gel. Pour la plupart des personnes concernées, ce sera la poursuite de ce gel salarial.

Les travailleurs du secteur public sont une ressource. Une ressource qui est celle qui exerce, à la place des citoyens qui ne le peuvent pas, dans bien des cas, les services dont on a besoin comme société, que ce soit au Québec ou dans le reste du Canada.

La conséquence de ce refus d'engager un véritable dialogue à une table de négociation, cette conséquence est innommable en termes de, prenons des mots économiques, productivité. Parce que la façon dont on vous traite engage souvent la façon dont on réagira. Bien sûr, on pense pouvoir forcer quelqu'un à travailler parce qu'il y a une paye, quelle qu'elle soit, au bout. Mais on ne peut jamais engager quelqu'un à donner tout ce qu'il a, sauf s'il le veut bien. Une des conditions fondamentales pour que les travailleurs et travailleuses, où qu'ils soient, donnent, et nous avons besoin partout en ce moment que ce soit comme ça, le meilleur d'eux-mêmes, c'est qu'ils se sentent respectés.

Que dans une disposition d'un projet de loi, qui par ailleurs touchait des dispositions aussi importantes que l'assurance-chômage, dispositions qui ont pris presque toute la place parce qu'elles s'adressent aux personnes les plus démunies de la société, que dans quelques paragraphes on dispose ainsi de la dignité des travailleurs du secteur public, on peut penser que c'est le résultat d'une certaine arrogance.

Les libéraux sont au début de leur mandat. Ils sont à un moment où ils auraient pu s'engager dans un processus de négociation.

(1100)

Mettre toutes les chances du côté d'un règlement, y compris d'un règlement qui engagerait les travailleurs à la restriction. Un


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règlement de ce type suppose qu'on échange, qu'on troque, mais qu'en partant, on mette les cartes sur la table et qu'on respecte la partie adverse ou la partie vis-à-vis.

Les conditions à réunir, il me semble que les libéraux les avaient, puisqu'ils arrivaient avec l'auréole d'un gouvernement qui n'a pas été là depuis longtemps et qui était dans des temps, disons, de meilleure conjoncture économique. Or, faisant ce qu'ils ont fait, faisant ce qu'ils s'apprêtent à confirmer, ils menacent ou même, je pense que si je disais le fond de ma pensée, ils se sont enlevé des chances de rétablir un vrai dialogue avec leurs employés et ces employés, rappelons-le, ils sont les employés de l'État, et ils rendent des services qu'autrement on ne pourrait se donner.

Oui, souvent, ils ont mauvaise réputation. Mais, souvent aussi, par les personnes qui les connaissent bien, qui connaissent les coupures et les problèmes qu'ils ont, qui connaissent la charge de travail qu'ils abattent, qui connaissent, par exemple, qu'ils sont ceux qui vont répondre aux personnes âgées qui ont des problèmes en tenant compte de leurs problèmes et en les connaissant bien, infiniment mieux que des boîtes vocales par lesquelles on veut les remplacer, il y a beaucoup de citoyens et citoyennes, aussi, qui savent qu'ils peuvent compter sur leur fonction publique.

Et cette fonction publique, on a besoin qu'elle donne le meilleur d'elle-même et ce n'est pas en la traitant comme on le fait qu'on y parviendra, au contraire! C'est donc pour cette raison et pensant que le gouvernement ne reviendrait pas sur le gel, mais en invitant le gouvernement à se donner les moyens, même s'il aura rendu extrêmement difficile son recours à la négociation, c'est donc en invitant le gouvernement à se donner les moyens par la revue de l'ensemble de la situation dans un comité des Communes préoccupé, justement, que cette fonction publique puisse avoir les conditions qui puissent lui permettre de donner le meilleur d'elle-même, c'est dans ces conditions qu'on a soumis l'amendement qui est là, qu'on pense que le gouvernement pourrait adopter, qui serait au moins le signe qu'il s'engage, malgré la dureté des positions qu'il prend, à revoir l'ensemble.

Et il pourrait commencer dès maintenant à préparer ce retour à la libre négociation. Alors, c'est l'esprit dans lequel nous avons formulé cet amendement et nous espérons que nous aurons l'appui de toute la Chambre non seulement pour l'adopter, mais ensuite pour le mettre en oeuvre.

Mme Monique Guay (Laurentides): Madame la Présidente, j'aimerais dire à quel point nous sommes surpris de l'amendement de la motion du Parti réformiste, et j'aimerais beaucoup le féliciter. Je pense qu'il a peut-être eu une vision beaucoup plus réaliste de la fonction publique d'aujourd'hui et qu'il a pris la bonne décision.

La démotivation des employés de la Fonction publique est à un point tel que je pense qu'il est grand temps que le gouvernement ouvre ses yeux. Elle a déjà eu un gel de salaires depuis plusieurs années et ce qu'on a fait cette année, c'est simplement de reporter ce gel encore une fois.

C'est absolument irresponsable de la part du gouvernement libéral. Il aurait pu, avec toute la volonté qu'il a, négocier, une fois encore, avec la fonction publique afin de pouvoir trouver un terrain d'entente pour que ce soit beaucoup plus réaliste. Le gouvernement nous a prouvé, depuis qu'il est au pouvoir, qu'il refuse de couper là où ça compte.

(1105)

On parle encore des abris fiscaux, et c'est un sujet qui demeure tabou dans cette Chambre. Les seuls qui en parlent, c'est nous et évidemment les réformistes. On parle des fiducies familiales. Combien de fois a-t-on demandé des études à cet effet? On n'a encore pas de réponse ici du gouvernement. C'est impossible d'obtenir des réponses sur ces sujets.

Notre économie n'est pas à son meilleur. Il ne faut pas s'illusionner. On sait très bien que l'économie n'est pas prête à faire un grand départ cette année. Si le gouvernement décidait de bien rémunérer sa fonction publique, probablement qu'il aiderait énormément l'économie parce que c'est une roue, l'économie. Quand on rémunère bien nos employés, ces gens font des achats et ils font tourner la roue. Plus on gèle les salaires, plus les prix montent, moins les gens feront fonctionner l'économie. C'est tout à fait normal.

Le gouvernement a vraiment fait ses choix cette fois-ci. Encore une fois, ce sont encore les mêmes qui paient la facture. Ici, en cette Chambre, on a parlé constamment des plus démunis. On a parlé du logement social, entre autres, à maintes et maintes reprises, mais le gouvernement ferme entièrement les yeux sur ce sujet, et on a parlé de la classe moyenne, qui est notre fonction publique.

J'ai des parents qui travaillent dans la fonction publique, qui sont responsables de gros départements et qui me disent que le taux d'absentéisme et de maladie dans la fonction publique est à un point tel que c'en est problématique. Il y a une démotivation et quand il y a démotivation, évidemment il y a des problèmes d'absentéisme, de maladie, de dépression nerveuse, et tout ce que vous voudrez, qui suivent. Avec un taux de famille monoparentale qui augmente sans cesse, un gel de salaire est absolument inacceptable.

Je ne veux pas aller à l'autre extrême et dire qu'il faut tout donner, mais il faut peut-être donner la libre négociation. C'est ce qui est important dans ce domaine. Je suis très heureuse de voir nos amis réformistes changer leur fusil d'épaule. J'appuie la motion du Bloc québécois et j'espère que pour une fois, le gouvernement prendra enfin de bonnes décisions, qu'il s'assoira et décidera de négocier. Il a l'occasion de le faire alors qu'il est en début de mandat, pour prouver qu'il est un bon gouvernement. Il devrait s'asseoir avec les fonctionnaires, renégocier la situation et vraiment faire qu'on ait une fonction publique qui soit efficace, et non pas une fonction publique insatisfaite depuis de nombreuses années.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Madame la Présidente, je voudrais parler de l'amendement proposé par le Bloc dans le cadre de ce groupe de motions et mettre les choses au point sur deux questions, la négociation collective, d'une part, et l'objectif de nos amendements, d'autre part.

Tout d'abord, au début du débat sur ce groupe de motions, le député de Saint-Hyacinthe-Bagot s'est dit surpris et stupéfait de voir que nous avions changé d'idée. Il croyait que le Parti réformiste était contre la négociation collective, mais que ces amendements montraient en quelque sorte que nous avions chan-


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gé d'idée et que nous étions maintenant en faveur de négociations dans le secteur public.

Je voudrais que les choses soient claires. Notre parti est pour la négociation collective. Nous sommes pour le fait que des gens se regroupent et se syndicalisent. Nous sommes d'accord pour qu'ils aient le droit de grève. Cependant, nous n'acceptons pas qu'ils prennent la population en otage et que les employeurs ne puissent engager d'autres travailleurs pour les remplacer au besoin. C'est sur ce plan que nous croyons qu'il faut faire en sorte que le secteur public ressemble un peu plus au secteur privé.

Je veux donc faire comprendre au député de Saint-Hyacinthe-Bagot que nous ne sommes pas revenus carrément sur notre position sur cette question.

Je voudrais ensuite mettre les choses au point quant à l'aspect fourre-tout du projet de loi C-17 que le gouvernement nous a présenté. Nous nous offusquons du culot et de l'arrogance du gouvernement qui a choisi de regrouper cinq ou six domaines économiques en un seul projet de loi en essayant de forcer l'opposition à l'adopter sans nous permettre de remettre en question le bien-fondé des dispositions dans chaque domaine ou d'évaluer chaque élément séparément.

Le Parti réformiste a dû élaborer une stratégie. Il s'agissait en quelque sorte de présenter des amendements à ce projet de loi d'ensemble afin de forcer la tenue d'un débat.

(1110)

Ce qui se passe dans le cas présent découle de la stratégie du Parti réformiste qui est, selon nous, dans l'intérêt de tous les Canadiens. Nous pouvons discuter de chacune de ces cinq catégories séparément au lieu de les prendre toutes en paquet; on évite ainsi de semer la confusion dans l'esprit de tout le monde.

Nous souhaitons préciser les parties du projet de loi auxquelles nous souscrivons et celles auxquelles nous nous opposons. En ce qui concerne le vote sur les groupes de motions dont nous sommes saisis aujourd'hui relativement à ce projet de loi, je tiens à avertir les députés du Bloc qui nous félicitent d'avoir changé d'idée, qu'il n'en est rien.

Ne vous étonnez pas si nous votons contre nos propres amendements dans ces groupes de motions.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Madame la Présidente, il me fait plaisir aujourd'hui de dire quelques mots en ce qui concerne le projet de loi C-17 et ce groupe d'amendements proposés par le Parti réformiste et de parler un petit peu de la façon dont on traite tous ces amendements. Je pense qu'il y en a plus d'une trentaine. Bien sûr, on en a regroupé une dizaine et on a décidé de voter sur ces dix amendements.

En tout cas, en ce qui me concerne, on peut dire qu'à l'intérieur de ces dix amendements, il y en a pour lesquelsje serais en faveur et d'autres contre. Comme on m'oblige à voter sur un groupe d'amendements, ça m'embarrasse fortement.

Ceci dit, j'aimerais parler un petit peu d'assurance-chômage, la façon dont le gouvernement actuel traite cette société. On dit que c'est une société d'État, mais le gouvernement la traite comme si c'était sa propre affaire. Alors, il décide du jour au lendemain d'augmenter, par exemple, les cotisations d'assurance-chômage, de diminuer le nombre de semaines d'accessibilité aux prestations d'assurance-chômage et d'augmenter le nombre de semaines de travail pour avoir accès à l'assurance-chômage.

Alors, c'est un dur coup pour les employés. C'est un dur coup pour les employeurs qui doivent payer des cotisations plus élevées, ainsi que pour les employés qui doivent aussi payer une cotisation plus élevée. Dans un moment où la récession est forte, je me demande comment le gouvernement peut considérer qu'il est raisonnable et responsable d'agir de la sorte.

Madame la Présidente, encore une fois, pour ne traiter que des employeurs, je me rends compte que les petites et moyennes entreprises qui auront à subir cette augmentation de cotisation vont encore une fois nuire à leurs possibilités de réussir. . .

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je voudrais qu'on précise si nous étudions toujours la partie I, sur la rémunération du secteur public, et non la partie V, sur l'assurance-chômage.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Nous étudions effectivement le groupe de motions qui portent sur la partie I, c'est-à-dire sur la rémunération.

[Français]

M. Leblanc (Longueuil): Alors, si le fardeau est très élevé pour les entreprises, il l'est aussi pour les employés. Je dois aussi dire que le gouvernement, en diminuant le nombre de semaines d'accessibilité à l'assurance-chômage, causera un effet négatif, ce qui va coûter très cher aux provinces, particulièrement au Québec.

Actuellement, le fait de diminuer ce nombre de semaines d'assurance-chômage, fera en sorte que bien sûr, ces gens-là, au moment où ils n'auront plus de prestations, parce qu'ils arriveront à ce stade plus rapidement, forcément iront voir le gouvernement du Québec, le département de l'assistance sociale, pour demander de l'aide.

Alors, au Québec, on dit que cela va coûter possiblement 500 millions de dollars de plus pour aider ces chômeurs qui ne recevront plus d'assurance-chômage.

(1115)

Cela veut dire que le gouvernement fédéral, sournoisement, décide de rejeter le fardeau de ces dépenses, celui des gens qui n'ont pas d'emploi, sur les provinces. C'est malhonnête, à mon avis, et c'est irresponsable.

On le voit dans d'autres secteurs. On l'a vu, par exemple, au moment où on a mis en place l'assurance-maladie. Les provinces ne voulaient pas accepter que le fédéral se mêle de la santé, puisque c'était de juridiction provinciale. À cette époque, le fédéral disait: «Ne vous inquiétez pas, on va établir les règles nationales, on va contrôler la santé et les règlements sur la santé et nous allons aussi, bien sûr, fournir 50 p. 100 de l'argent nécessaire pour les services de santé. On va percevoir l'argent des citoyens et le redonner aux provinces-on ne disait pas ça, bien sûr-mais on va faire un beau cadeau aux provinces, on va payer 50 p. 100 des services de santé.» Il ne disait jamais que cet argent-là venait des poches des citoyens par leurs impôts et leurs taxes, bien sûr.


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Alors, le fédéral a pris le contrôle de la santé en disant que c'était une politique nationale canadienne sur la santé. Mais aujourd'hui, il ne paie plus 50 p. 100, il ne paie que 30 p. 100, et les provinces paient 70 p. 100 de la facture de la santé. Pendant ce temps, le fédéral se dit encore le grand maître d'oeuvre de la santé.

Ce qui se passe au niveau du chômage, c'est à peu près la même chose, mais on le fait encore de façon plus sournoise. On dit qu'on diminue le nombre de semaines d'accessibilité nécessaires et on retourne la facture, autrement dit, aux provinces qui devront subir le fardeau pour que les gens puissent continuer à manger et à dormir à la chaleur en hiver, dans ce pays au climat rigoureux. C'est de la pure hypocrisie.

On dit aussi que le gouvernement consulte beaucoup. C'est vrai, on consulte beaucoup, mais on n'écoute pas beaucoup. On fait beaucoup à sa tête. Consulter, cela veut généralement dire entendre ce que les gens ont à nous dire, mais on ne les écoute pas, dans le sens qu'on ne respecte pas leurs opinions. C'est ce que cela veut dire.

Au moment où le gouvernement a décidé d'augmenter les cotisations, il a dit qu'il se retirait davantage des programmes d'assurance-chômage. Quand je cotise, je veux aussi m'occuper de l'éducation, mais je n'aurai pas le temps d'en parler, je vais particulièrement vous entretenir de ce qui s'est passé, de ce que j'ai entendu, moi, dans les comités au cours des années passées. Par exemple, au moment où le gouvernement a décidé d'augmenter les cotisations, il a dit: «Je me retire davantage des programmes d'assurance-chômage, mais, puisque je cotise, je veux aussi m'occuper de l'éducation.» Comme je n'aurai pas le temps d'aborder ce sujet, je parlerai particulièrement de ce qui s'est passé, de ce que j'ai entendu, moi, dans des comités dans les années passées.

Le Conseil de patronat et les syndicats ont dit: «Écoutez, si on est obligés de payer, nous, employés et employeur, la majorité ou la totalité de l'assurance-chômage, pourquoi le gouvernement continuerait-il à gérer l'assurance-chômage?» Le Conseil du patronat disait, par exemple: «Si nous et l'employé payons, pourquoi ce ne serait pas nous qui aurions la responsabilité de gérer l'assurance-chômage?»

Il ne faut pas confondre, pour éclairer la population, assurance-chômage et formation de la main-d'oeuvre. On a mêlé tout ça, mais dans le fond, ce que les employés et les employeurs paient pour l'assurance-chômage, on retrouve à peu près les mêmes sommes; les autres sommes vont à la formation de la main-d'oeuvre. Encore une fois, le fédéral se mêle de ce qui ne le regarde pas. Sournoisement, il prend l'argent que les citoyens et les entreprises cotisent pour faire de la formation de la main-d'oeuvre dans un domaine qui ne le regarde pas. Ce sont les provinces qui devraient faire la formation de la main-d'oeuvre.

Alors, l'employeur et l'employé disent: «Écoutez, nous, on serait prêts à gérer cette société d'assurance-chômage, puisque c'est nous qui payons. Et, à ce moment-là, on prendra nos responsabilités.» Le gouvernement ne fera pas toutes sortes de règles irréalistes, qui ne correspondent pas, souvent, à la réalité des besoins. L'employeur et l'employé disent: «On devrait gérer nous-mêmes. À ce moment-là, on serait probablement plus responsables aussi. On ne mettrait pas à la porte un employé, comme ça, à la légère; et un employé ne quitterait pas l'entreprise à la légère non plus. Il serait conscient que s'il pose ces gestes-là, cela aurait pour effet une augmentation des cotisations d'assurance-chômage.»

Personnellement, je crois qu'il faut responsabiliser davantage les gens en leur donnant la possibilité de gérer leur propre assurance-chômage. Cela serait un bel exemple dont pourrait se servir la Commission de l'assurance-chômage et la faire gérer par les employés et les employeurs.

(1120)

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je voudrais clarifier quelque chose pour l'édification des députés. Quand on regroupe des motions, c'est parce qu'elles traitent d'un seul sujet. Donc, la motion no 1 touche à la rémunération.

[Traduction]

Les motions sur lesquelles les députés seront appelés à se prononcer sont regroupées selon les parties du projet de loi et le groupe de motions dont nous sommes maintenant saisis porte sur la rémunération. Je le précise uniquement pour éviter que les députés s'interrogent à ce sujet.

M. Hermanson: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Ai-je raison de croire que, si un député intervient une fois sur une motion, il ne peut y revenir ensuite? Dans ce cas-ci, si le député intervient, par exemple, au sujet de la rémunération, a-t-il le droit de prendre à nouveau la parole à propos de l'assurance-chômage? Il ne faudrait pas que nous puissions faire valoir deux fois les mêmes arguments.

La présidente suppléante (Mme Maheu): En ce moment, nous débattons la motion no 1, qui porte sur la partie I, la rémunération.

M. Hermanson: Madame la Présidente, pourriez-vous simplement clarifier si le député qui est intervenu au sujet de l'assurance-chômage pourra revenir à nouveau sur l'assurance-chômage, lorsque la Chambre sera saisie du groupe de motions sur l'assurance-chômage?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Les députés qui demandent à intervenir dans le débat peuvent se prononcer sur chaque groupe de motions.

[Français]

M. René Laurin (Joliette): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner l'occasion de parler sur cette motion, tout d'abord parce que je suis responsable du dossier du renouveau de la fonction publique et deuxièmement parce que je connais le fonctionnement des négociations syndicales ayant été moi-même un président d'un syndicat d'enseignants.

Lorsqu'on veut rehausser la motivation des employés, la première chose à faire c'est de respecter ses employés. Non seulement en les respectant par des formules conventionnelles reconnues par tout le monde, mais aussi par un dialogue constant dans lequel on prête attention aux arguments qui sont fournis par la partie syndicale, surtout lorsque ces arguments nous sont donnés dans le but d'améliorer la situation. Les fonctionnaires de la


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fonction publique étaient conscients que le gouvernement avait des problèmes financiers, que le gouvernement avait un extrême problème de dette et qu'il devait trouver des moyens de remédier à la situation. Les syndicats de la fonction publique ont même suggéré des moyens au gouvernement d'atteindre ses objectifs sans qu'ils soient les seuls à être pénalisés.

Le gouvernement ne semble pas avoir daigné même discuter de de ces arguments de façon sérieuse. Il a plutôt imposé un gel des salaires, et non seulement un gel des salaires, mais un gel de la graduation d'échelon, ce qui, pour ces gens, représente non seulement un recul dans l'immédiat, mais un recul pour le reste de leurs jours. Ceux qui sont à l'approche de leur retraite verront leur retraite calculée sur un salaire moyen des cinq ou six dernières années, et ce salaire des cinq ou six dernières années aura été un salaire gelé.

On a la chance d'avoir des employés, d'avoir une fonction publique compétente, et tous s'accordent pour reconnaître qu'au gouvernement fédéral, la fonction publique est très compétente. Les députés qui sont ici depuis quelques années nous l'ont répété. Nous avons eu l'occasion de nous en rendre compte nous mêmes lorsque nous avons commencé à travailler dans cette Chambre avec l'aide de la fonction publique.

(1125)

Ce n'est pas tout de dire que ces gens sont compétents, que ces gens méritent notre respect, et ensuite ne pas les considérer, ne pas écouter ce qu'ils ont à nous dire sur les moyens à prendre pour régler les problèmes du gouvernement.

Quand on demande la collaboration de quelqu'un, la meilleure façon de l'obtenir, ce n'est pas en lui donnant des coups de pied dans le bas du dos. Si on veut que quelqu'un travaille en collaboration avec soi, il ne suffit pas de lui dire qu'il est gentil, aimable et intelligent, et après retourner du revers de la main ce qu'il va nous suggérer pour améliorer la situation.

La façon dont le gouvernement s'est conduit pour geler le salaire de ses employés, sans consultation sérieuse parce qu'on peut prétendre qu'il y en a eu une consultation, on les a rencontrés, on leur a parlé, et après on a décidé de passer une loi. Ce n'est pas ce que j'appelle une consultation sérieuse. Une consultation sérieuse, c'est parfois faire un échange de moyens.

C'est pourquoi nous demandons aujourd'hui que le gouvernement soit obligé, avant de prendre de telles décisions, de soumettre ses intentions à un comité de la Chambre, de soumettre ses intentions au public, qu'on puisse en discuter publiquement pour que les gens jugent si les décisions qui ont été prises ne l'ont pas été trop rapidement ou au détriment d'une classe de la société qui, malheureusement, depuis dix ans est toujours celle sur laquelle on tape. C'est toujours la classe moyenne qui est visée et c'est pourtant à cette classe-là qu'on demande de payer le plus d'impôt. C'est la meilleure vache à lait fiscale des dix dernières années, et on est en train de la faire disparaître sans même l'écouter, sans même avoir de considération pour la part fiscale qu'elle fournit à la nation.

À mon avis, ce n'est pas une façon d'instituer et de maintenir de bonnes relations patronales et ouvrières et j'espère que la motion qui est présentée maintenant devant cette Chambre saura trouver des appuis, non seulement pour rendre justice à une classe de la société, mais pour montrer aussi que le gouvernement est soucieux de prendre en considération tous ceux et celles de notre société qui sont prêts à collaborer, les faire collaborer dans une juste mesure, non pas au-delà de leurs moyens, non pas en deça de leurs moyens.

Le gouvernement doit comprendre ce qu'il est équitable de prendre à cette catégorie d'employés de l'État afin de maintenir leur motivation, de maintenir leur crédibilité, de maintenir leur enthousiasme et de maintenir aussi le respect qu'ils ont toujours eu pour leur employeur.

J'espère qu'on saura leur rendre la pareille et qu'à l'avenir on invitera ces gens à s'asseoir à la même table pour maintenir le climat de confiance qui doit continuer d'exister dans la Fonction publique.

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément aux dispositions de l'article 76.1(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Le vote par appel nominal s'appliquera également aux motions nos 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11.

M. Crête: À quelle date, madame la Présidente?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Jusqu'à lundi soir, à la fin du débat, lundi.

(1130)

M. Loubier: Madame la Présidente, qu'advient-il de la motion no 4? Est-elle mise aux voix immédiatement ou le vote sera-t-il pris lundi soir sur cette motion?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Cela dépend des résultats du vote sur la motion no 1.


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M. Loubier: Alors si la motion no 1 est rejetée, cela voudrait-il dire que la motion no 4, lundi soir, sera votée?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Oui, c'est cela.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot) propose:

Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 12, par adjonction, après la ligne 30, page 6, de ce qui suit:
«(3) L'une ou les deux chambres du Parlement désignent ou constituent un comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte chargé spécialement de suivre de façon permanente l'application du présent article.»
[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest) propose:

Motions nos 13, 14 et 15
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 12.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 13.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 14.
[Français]

M. Loubier: Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur cette partie du projet de loi C-17 avec l'amendement proposé par le Bloc québécois, c'est-à-dire de désigner un comité du Parlement qui suivra de façon permanente l'application du présent article.

Ce présent article concerne les accords fiscaux convenus entre le gouvernement fédéral et les provinces concernant le Régime d'assistance publique du Canada. Ce projet spécifique touche, en particulier, le gel de la contribution fédérale au Régime d'assistance publique du Canada.

Le Régime d'assistance publique du Canada a souvent fait l'objet de critiques acerbes, de critiques qui étaient fort justifiées à certains égards, et en particulier lorsqu'on considère que ce régime, dans le RAPC proprement dit, est un régime à frais partagés entre le gouvernement fédéral, mais partagé 50-50, 50 p. 100 du régime est défrayé par le gouvernement fédéral et l'autre 50 p. 100 par les provinces.

La plus grosse critique qui a été faite au cours des dernières années, c'est qu'en ayant une répartition comme ça, en pourcentage, on favorisait, de ce fait, les provinces les plus riches du Canada, qui pouvaient investir dans des programmes, dans des mesures d'assistance publique, et espérer avoir une contribution exactement de moitié du gouvernement fédéral.

Je vous dirais qu'à ce sujet, le précédent gouvernement a apporté un correctif assez équitable à certains égards, plus équitable ou plus démocratique, plus social, comme amendement, que l'actuel gouvernement, qui le présente comme gel général.

Ce que les conservateurs ont fait, c'est qu'ils ont plafonné les contributions du gouvernement fédéral au programme du RAPC pour les trois provinces les plus riches du Canada, et avec raison. Ils ont plafonné pour l'Ontario, pour l'Alberta et pour la Colombie-Britannique.

Le gouvernement libéral arrive en place et décide de plafonner pour l'ensemble des provinces canadiennes, peu importe que ces provinces soient riches ou pauvres.

(1135)

Alors, je vous dirais que le gouvernement libéral est moins libéral que ne l'a été le gouvernement conservateur précédent. Je vous dirais que c'est à l'image de ce qu'on nous sert depuis le 26 octobre au matin, sous des couverts de sociale démocratie, sous des couverts, même à certains égards, de socialisme. On nous impose des règles qui ne sont pas tout à fait sociales démocrates. On nous impose une attitude aussi, comme on l'a mentionné lors du débat précédent, qui n'est pas tout à fait transparente et qui n'est pas tout à fait juste lorsqu'il est question, par exemple, d'équité interprovinciale ou lorsqu'il est question d'équité fiscale en général.

Madame la Présidente, le simple fait de plafonnner le RAPC, j'ajoute aussi à cela les fonds pour l'éducation postsecondaire, par ailleurs, va coûter au bas mot, uniquement en 1995-1996, à peu près 2 milliards de dollars aux provinces canadiennes.

Si je vous disais l'expression de ce qu'on a appelé et de ce qu'on continue à appeler encore au Québec du «pelletage» fédéral dans la cour des provinces, du «pelletage» fédéral à cause de l'incapacité, justement, de l'administration actuelle, tout comme de l'administration précédente, qui a été dénoncée, mais vertement, par les actuels membres du gouvernement, leur incapacité à reprendre le contrôle des finances publiques, mais le reprendre de façon responsable, et non pas en «pelletant», comme on le fait depuis le 26 octobre au matin, les problèmes financiers sur le dos des provinces, et lorsque ce n'est pas sur le dos des provinces, on «pellete» la mauvaise conjoncture économique ou on impute le mauvais état des finances publiques canadiennes sur le dos des souverainistes, les souverainistes qui créent de l'instabilité, les souverainistes qui créent des taux d'intérêt très élevés, alors que c'est l'incompétence du ministre des Finances actuel à gérer, justement, correctement les finances publiques canadiennes et à gérer proprement ces finances publiques-là, sans faire ce «pelletage» du côté des provinces, qui est responsable justement de la crise économique, qui est responsable aussi de l'évolution des finances publiques, de l'évolution catastrophique des finances publiques.

Nous déplorons cette attitude de l'actuel gouvernement, tout comme nous avons déploré le plafond imposé aux paiements de péréquation lorsque nous avons eu à débattre de cette question. Dans un cas comme dans l'autre, on retrouve la même situation, on retrouve derrière ces décisions éhontées, derrière ces décisions irréfléchies, la même incompétence des gestionnaires de l'actuel gouvernement.

Je vous rappellerai à cet égard qu'on se dit toujours dans cette Chambre, que le gouvernement actuel tout comme les représentants du Parti réformiste se disent toujours être de grands Canadiens, alors qu'ils briment-et je me rappelle fort bien le débat que nous avions eu sur la péréquation-alors qu'ils crachent ou qu'ils mettent à la poubelle un des principes fondamentaux du fédéralisme canadien qui est le fédéralisme fiscal, qu'on impose des plafonds sur des postes de dépenses comme celui de la péréquation qui est pratiquement la base de ce fédéralisme fiscal et qu'on applaudit ce plafond ou ce gel en sachant fort bien qu'on brise un des principes fondamentaux du régime qu'ils défendent comme grands Canadiens, ces gens. Alors, il n'y a plus rien qui fonctionne dans ce régime.

De toute façon, je pense que nous avons fait le bon choix, nous du Bloc québécois. Nous avons fait le choix de quitter ce régime.


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L'amendement que nous proposons sur cette question du plafonnement des transferts fédéraux en vertu du régime du RAPC veut faire en sorte justement qu'à toutes les fois qu'on appliquera les décisions de gel, de plafonnement ou de coupure à ces programmes fondamentaux, il y aura un débat autour de cela, le gouvernement, justement, soutiendra l'odieux à toutes les fois et se fera dire: «Voyez, votre régime, avec une base fondamentale qu'on appelle la péréquation ou les transferts en fonction de l'assistance publique du Canada, votre régime est vicié. Votre régime taxe les provinces impunément et il consiste uniquement à faire ce pelletage éhonté des problèmes financiers du gouvernement fédéral dans la cour des provinces.»

(1140)

Je vous dirais aussi que c'est suivre l'évolution de ces mauvaises décisions, de ces décisions honteuses de l'actuel gouvernement, de faire le suivi des impacts, car il y en aura des impacts. Quand vous dites que vous gelez l'ensemble des contributions à toutes les provinces canadiennes, y compris les provinces les plus pauvres, celles qui en arrachent le plus à l'heure actuelle au niveau du nombre d'assistés sociaux, au niveau du sous-emploi en général, dont le Québec et les Maritimes, cela ne peut faire autrement que de conduire à des situations catastrophiques sur le plan économique et sur le plan social.

Cette décision de l'actuel gouvernement s'ajoute à l'autre dont nous aurons l'occasion de débattre cet après-midi, le Régime d'assurance-chômage, où, encore une fois, on accepte que des communautés entières, en particulier du Québec et des Maritimes, soient complètement déstabilisées, soient démoralisées alors qu'elles ne sont pas dans un contexte pour subir des décisions fâcheuses.

Nous aurions pu, nous aussi, parler d'une suppression de cette partie du projet de loi C-17, sauf que nous sommes, contrairement aux députés du Parti réformiste, des gens responsables. Nous savons qu'il y a eu des accords fiscaux signés entre les provinces et le gouvernement fédéral et c'est pour cela que nous n'avons pas cru bon, surtout devant un gouvernement majoritaire, présenter une suppression de ces articles.

Nous proposons toutefois la transparence, l'honnêteté et surtout que ce gouvernement soit responsable devant la Chambre, soit responsable devant la population canadienne pour des décisions aussi honteuses, décisions qu'il prend depuis son élection et qui vont totalement à l'encontre de son programme de Parti et de la vision-parce qu'ils se disent des visionnaires, ces gens-là-, de la vision qu'ils véhiculent depuis qu'ils sont au gouvernement. Je vous soumets cet amendement en invitant les membres du Parlement à voter en sa faveur.

[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Madame la Présidente, je prends aussi la parole au sujet des motions proposées à l'étape du rapport du projet de loi C-17, Loi d'exécution du budget, et notamment ici des motions intéressant les articles 12, 13 et 14 relatifs aux arrangements fiscaux.

Nous débattons quatre motions, dont trois que j'ai moi-même proposées, et je tiens à expliquer encore une fois pourquoi j'ai proposé ces motions. Nous avons contesté ce projet de loi à cause de son caractère fourre-tout et nous insistons pour que chaque article de ce projet de loi fourre-tout soit débattu ici, à la Chambre des communes, parce que nous estimons qu'il y a là matière à plusieurs projets de loi.

J'ai longuement invoqué le Règlement à ce sujet à l'étape de la deuxième lecture, et je comprends que la présidence a rejeté mon recours au Règlement sur la base d'un précédent, et je respecte cette décision. Mais je n'en trouve pas moins qu'il est malheureux que l'on se fie ici aux précédents puisque cette nouvelle législature nous fournit l'occasion de corriger les torts du passé et de changer les pratiques contestables que nous avons adoptées, plus particulièrement celle, ces dernières années, de présenter des projets de loi fourre-tout en matière budgétaire.

Je tiens à dire quelques mots aujourd'hui, à l'étape du rapport, de l'article du projet de loi qui intéresse les arrangements fiscaux, plus particulièrement en ce qui concerne le Régime d'assistance publique du Canada et la Loi sur le transfert de l'impôt sur le revenu des entreprises d'utilité publique. C'est avec beaucoup de réticence que nous appuyons ces aspects du projet de loi, quoique mes amendements nous permettent de débattre cette partie du projet de loi.

Je parlerai tout d'abord de l'article 12 concernant le Régime d'assistance publique du Canada. Le gouvernement profite ici du budget pour bloquer dans l'immédiat les paiements de transfert aux provinces au titre du RAPC à leurs niveaux actuels.

(1145)

Le gouvernement prévoit ainsi économiser 466 millions de dollars au cours de la prochaine année financière, 1995-1996. Dans le budget, il promettait une réforme des programmes sociaux dans un esprit de coopération entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

Dans ce domaine, le gouvernement adopte certaines des mesures que nous avions proposées, mais il avance sans plan et provoque des frictions avec les provinces. Je souligne également qu'il est évident que la promesse de coopération ne s'est pas concrétisée, ce qui a été illustré par le refus, en avril dernier, de quelques provinces d'assister aux réunions prévues pour les informer des progrès de la réforme des programmes sociaux entreprise par le gouvernement fédéral.

J'invite le gouvernement à prendre garde de faire avec l'aide sociale la même erreur qu'il a faite avec les soins de santé, c'est-à-dire envahir un champ de compétence provinciale-du point de vue constitutionnel, l'aide sociale est strictement de compétence provinciale-en imposant aux provinces des normes nationales au moyen du Régime d'assistance publique du Canada et de sa réglementation, puis en diminuant progressivement les fonds qu'il leur accorde sans leur laisser la liberté de s'adapter au changement en modifiant leurs programmes et leurs objectifs en fonction des nouveaux niveaux de financement.

Il est évident que cette façon de faire risque de susciter la colère des provinces parce que, en réduisant leur pouvoir de dépenser, le gouvernement fédéral leur rend plus difficile la mise en oeuvre de la politique sociale actuelle et pourrait aussi limiter leur capacité de mettre en oeuvre les réformes qui seront proposées plus tard.

Bien sûr, il faut réduire le déficit national, mais cela doit se faire selon un plan. Ce plan doit être élaboré de concert avec les provinces. Il faut éviter un partenariat boiteux où le gouverne-


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ment fédéral prend des décisions unilatérales concernant les accords de transfert, mais sans modifier les programmes élaborés à une époque où les formules de financement étaient plus généreuses.

L'article 12 du projet de loi gèle les contributions fédérales à leur niveau actuel, mais je souligne aussi que cet article perpétue certaines anomalies dont le système discriminatoire envers les provinces dites riches, l'Alberta, l'Ontario et la Colombie-Britannique, et surtout envers ces deux dernières où, au fil des ans, les réductions unilatérales et discriminatoires du niveau de financement du RAPC ont eu de sérieuses répercussions.

Ainsi, en Ontario, la part fédérale du coût du RAPC est passée de 50 p. 100 à 29 p. 100. Ce n'est qu'une anomalie. Il y a aussi le cas du Québec. On m'a fait remarquer que le cas du Québec n'était pas du tout clair dans le projet de loi.

Aux fins du RAPC, le Québec a un accord d'abattement fiscal avec le gouvernement fédéral. J'aimerais bien que le gouvernement précise comment le gel des transferts se répercutera sur cet accord.

[Français]

À cause de ces difficultés, je voudrais féliciter l'honorable député de Saint-Hyacinthe-Bagot pour son amendement, sa motion numéro 12, qui veut établir un comité du Parlement pour étudier de façon continuelle l'application de cette politique actuelle. C'est important, en l'absence d'une stratégie générale du gouvernement fédéral avec les provinces, d'avoir un tel comité, et j'ai suggéré au Parti réformiste d'appuyer la motion du Bloc québécois.

[Traduction]

Je voudrais terminer en faisant quelques remarques au sujet des articles 13 et 14 du projet de loi, qui concernent la Loi sur le transfert de l'impôt sur le revenu des entreprises d'utilité publique. Ces articles visent à prolonger le gel de ces transferts aux provinces, qui continueront d'être réduits d'un montant égal à 10 p. 100 du montant versé en 1989-1990.

Mon parti et moi-même appuyons ces dispositions avec encore moins d'enthousiasme que nous appuyons celles concernant les transferts au titre du RAPC. Évidemment, les transferts aux provinces dans ce secteur ne devraient pas être réduits.

(1150)

Il ne faut pas oublier que le but de ces transferts fiscaux est de rembourser aux provinces qui ont des entreprises de services publics appartenant au secteur privé une partie des recettes fiscales perçues par le gouvernement fédéral. Ces sommes sont transférées aux provinces où se trouvent ces entreprises. Dans le cas de l'Alberta, qui reçoit une grande part de ces transferts, ce sont les clients des entreprises visées qui bénéficient des sommes versées par le gouvernement fédéral.

Il ne s'agit pas là de paiements spéciaux. Ces transferts visent simplement à faire en sorte qu'il n'y ait aucune discrimination fiscale à l'égard des provinces et des particuliers qui se trouvent à être des clients d'entreprises de services publics appartenant au secteur privé plutôt qu'au secteur public.

Alors que ces transferts devraient être totalement maintenus, je comprends pourquoi le gouvernement juge à ce moment-ci qu'il ne peut pas le faire et qu'il doit poursuivre cette politique établie malheureusement par le gouvernement précédent.

Nous appuyons cette mesure même si ce n'est pas avec enthousiasme. Nous espérons toutefois que la situation pourra être réévaluée un jour lorsque nous aurons un plan qui nous permettra de remettre de l'ordre dans nos affaires financières dans un délai raisonnable.

En conclusion, je voudrais simplement dire, relativement à ces amendements, que nous reconnaissons la nécessité d'une réforme importante et d'une certaine réduction des transferts fédéraux aux provinces pour équilibrer le budget. Ces mesures ne représentent pas la meilleure façon de procéder, mais c'est celle que le gouvernement a choisie. Nous sommes très inquiets de l'absence d'un plan d'ensemble et d'une stratégie globale, mais nous sommes prêts à appuyer ces mesures de façon provisoire.

Je tiens à rappeler à la Chambre encore une fois que j'ai moi-même proposé certains amendements pour permettre ce débat, mais je recommanderais à mon caucus d'appuyer l'amendement du Bloc pour qu'on étudie de façon particulière les transferts au titre du RAPC.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Madame la Présidente, j'étais curieuse d'entendre le député. Je vais, à mon tour, parler sur l'amendement proposé par le Bloc québécois, qui est un amendement qui appelle à la surveillance par un comité de l'ensemble de l'administration de cette clause.

Quand on dit RAPC, entre nous, c'est du jargon: Régime d'assistance publique du Canada est l'ensemble du nom. Le Régime d'assistance publique du Canada, qui provient, lui aussi, des impôts prélevés chez l'ensemble des Québécois et Canadiens, a été établi après la forte récession de 1957 à 1961 et la constatation que le nombre de personnes pauvres et le nombre de personnes pauvres qui étaient des travailleurs en chômage avait fortement augmenté.

D'ailleurs, au début, pendant trois ans, il s'est appelé Régime d'assistance chômage. Ce régime, qui a été négocié avec les provinces, mais qui est une loi fédérale, assure qu'un certain nombre de dépenses vont être financées à 50 p. 100. Comme l'a dit mon collègue de Saint-Hyacinthe, ce régime a donc, d'une certaine façon, favorisé les provinces les plus riches, puisqu'elles pouvaient faire davantage de dépenses qui seraient financées à 50 p. 100. Je donne pour exemple les services de garde, les logements subventionnés.

Pour ce qui est de l'aide sociale, il est évident que selon la générosité des régimes de chacune des provinces, le coût encouru au niveau du Régime d'assistance publique du Canada se trouvait à varier. Alors, d'un côté, la pauvreté, le nombre de personnes qui répondaient à cette malheureuse définition, et de l'autre, la décision par la province de se donner un régime x, y ou z.

(1155)

Ce que fait le Budget, c'est de transformer radicalement les conditions, l'espèce de contrat moral qu'il y avait entre les provinces et le Canada. Transformer, parce que désormais les sommes reçues par les provinces ne pourront dépasser celles reçues au 31 mars 1995.


4445

Mais je dois ajouter, madame la Présidente, que le Régime d'assistance publique du Canada est promis à beaucoup plus de modifications parce que le même budget annonce, à toutes fins pratiques, la fin ou la renégociation de ce régime. La consultation du ministre du Développement des ressources humaines qui est également, on le sait, annoncée dans le même budget, cette consultation porte sur un réaménagement de l'aide sociale. L'aide sociale, pourtant, est de juridiction complètement provinciale, et ceci est sans ambiguïté.

Quand le gouvernement, ainsi, d'une part gèle les sommes qui vont être versées au chapitre du Régime d'assistance publique du Canada, il transforme les conditions dans lesquelles les provinces se trouveront. D'autre part, il transforme évidemment les règles pour les autres programmes qui existent en vertu de ce régime. J'ajoute, ce qui est extrêmement important, qu'on va parler un peu plus tard des modifications à l'assurance-chômage. Or, les modifications à l'assurance-chômage vont avoir pour effet d'augmenter le fardeau des provinces au chapitre de l'aide sociale.

Il faut donc constater que le Budget et le présent projet de loi omnibus changent de deux façons très importantes les conditions dans lesquelles les provinces, qui déjà avaient des problèmes, vont se retrouver pour faire face à la pauvreté parce que c'est ce dont on parle, de la pauvreté des personnes qui sont sans revenu, qui n'ont aucune source de revenu leur permettant finalement de survivre. Avec ce qu'on leur donne dans chacune des provinces, il n'y a pas de quoi vivre, mais bien à peine de quoi en arracher.

Ce à quoi on touche, ce sont donc ces sommes qui étaient la contribution, la répartition de la contribution des provinces les plus riches vers les provinces les plus pauvres pour aider les personnes qui ont de la difficulté, qui n'ont pas d'autre revenu, pour aider ces personnes, je le répète, non pas à vivre mais à survivre.

Dans ces conditions, l'amendement est bien modeste. Nous aimerions bien que le Parti réformiste ainsi que le gouvernement acceptent de l'intégrer au bill omnibus. En réalité, ce qu'il nous permettra de faire ce sera de mettre en lumière les conditions d'application de cette loi, les conditions par lesquelles chacune des provinces lutte contre la pauvreté.

Je dois ajouter que j'ai le sentiment que, compte tenu de la réforme entreprise par le ministre, déjà ces sommes seront, aux termes prévus par la loi, engagées bien autrement, et que nous aurons dans cette Chambre, d'ici quelques mois, des débats fort houleux si les réformes qui se préparent sont celles auxquelles je pense. Mais je vais attendre.

Je voudrais souligner pour ceux et celles qui le diraient, donc je réponds avant à l'argument: Ah! mais vous les souverainistes, au Québec, qu'avez-vous? D'un côté vous êtes «bénéficiaires» de la péréquation et du Régime d'assistance publique du Canada et de l'autre, vous voulez vous retirer de la fédération canadienne. Oui, parce que nous avons, non seulement, la conviction, mais la certitude, parce que nous avons travaillé sérieusement sur toutes ces matières, que le Québec, avec tous les pouvoirs d'un pays souverain pour développer son économie et lutter contre la pauvreté, serait mieux en mesure de venir en aide aux personnes qui en ont besoin. Il pourrait se donner les mesures de logement social et de services de garde dont il a besoin, plutôt que de continuer, d'une part, à recevoir une pitance qui est constamment comptée, diminuée, conditionnée et de ne pas, de l'autre côté, disposer des moyens qui lui permettent de rendre son économie vraiment performante avec des travailleurs qui ont la formation professionnelle nécessaire parce que là, les deniers lui sont comptés. Ces deniers viennent de la poche de ces mêmes Québécois et Québécoises.

(1200)

Alors, cet amendement est un amendement bien modeste, mais qui, nous l'espérons, nous permettra de continuer à montrer que les conditions de l'application de cette loi n'ont aucun sens.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Madame la Présidente, je voudrais réitérer la philosophie de notre parti appliquée au débat du projet de loi à l'étude aujourd'hui.

Nos amendements ont pour objet de nous permettre d'exprimer clairement notre appui à certaines parties du projet de loi, tout en nous réservant la possibilité de ne pas appuyer les amendements que nous avons proposés quand ils feront l'objet d'un vote. Nous avons été forcés de procéder ainsi parce que le gouvernement voulait simplement regrouper une série de mesures et les faire adopter sans débat ni examen adéquats.

Nous estimons important que tout le monde ait la possibilité de discuter de chacune des mesures particulières selon ses propres mérites, selon ses propres motifs, plutôt que de le faire en bloc. La philosophie ou la stratégie politique que nous avons appliquée en l'occurrence présente un certain avantage en ce sens qu'en ayant maintenant forcé la tenue d'une discussion sur cinq domaines différents, nous pouvons nous concentrer sur chacun de ces domaines et faire clairement comprendre quelles sont les mesures que nous appuyons et quelles sont celles que nous désapprouvons, et cela de la part de tous les partis représentés à la Chambre.

L'ennui avec un projet de loi omnibus, c'est qu'il regroupe des mesures législatives sans rapport les unes avec les autres. Cela constitue un double aveu.

D'abord, que les simples députés, ou du moins les députés ministériels, n'ont pas d'apport véritable aux projets de loi importants. Il y a tant de sujets regroupés, tant de sujets à examiner, que l'ensemble est trop difficile à comprendre pour une personne.

Deuxièmement, cela montre à quel point le système des comités est inefficace. Si on espérait vraiment obtenir un apport des comités, on n'enverrait jamais un projet de loi aussi vaste que celui-ci à un seul comité. Il comporte cinq différents éléments, cinq parties différentes, et ne devrait pas être confié à l'étude d'un seul comité. Les députés, et surtout ceux du parti ministériel, pourraient en faire un meilleur examen, un examen adéquat.

Dans les cours de comptabilité donnés dans la plupart des écoles, on répète qu'il faut toujours rechercher la simplicité.

Maintenant que le gouvernement a l'occasion de ne pas faire avaler de force des projets de loi volumineux aux Canadiens ou à l'opposition, il serait bien qu'il applique une nouvelle méthode, plus simple et plus transparente, et commence à scinder les projets de loi pour qu'on puisse discuter de chaque question


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séparément. J'encourage le gouvernement à adopter ce genre de philosophie, car ce serait avantageux pour tout le monde.

Nous sommes favorables à l'article concernant les arrangements fiscaux avec les provinces, en partie parce qu'il adopte certains des principes et des politiques que le Parti réformiste préconisait dans son plan de zéro en trois, c'est-à-dire zéro déficit en trois ans.

Au début, on a beaucoup critiqué notre projet de ramener le déficit à zéro en trois ans. Les libéraux ont dit que nos compressions étaient trop draconiennes, que notre proposition de réduire de 6 p. 100 le budget de cette année était exagérée. Je constate toutefois que, lorsqu'il a pris la parole devant les membres du Conseil canadien des chefs d'entreprises, le ministre des Finances a dit envisager, pour le budget de l'an prochain, des compressions qui pourraient atteindre 12 p. 100. Si les 6 p. 100 que nous proposions cette année pour le plafond des dépenses sont trop draconiens, que dire alors de ces 12 p. 100? Nous pourrions montrer au gouvernement où ces compressions peuvent être pratiquées.

(1205)

Notre programme de suppression du déficit en trois ans prévoyait un programme de travail obligatoire ainsi que des mesures constructives et il donnait aux gens l'espoir de faire autant avec moins d'argent; il reconnaissait le fait que nous devons tous commencer à vivre selon nos moyens. Nous savons que les Canadiens doivent vivre selon leurs moyens. Le gouvernement est le seul à ne pas reconnaître que le problème vient du déficit et de la dette, et il ne cherche pas de façons de réduire les dépenses.

Je veux simplement faire observer que lorsque le gouvernement reconnaît cela-et il y a en l'occurrence une économie importante de 466 millions de dollars à réaliser grâce à ce gel-nous l'appuyons, nous le félicitons et nous l'encourageons à prendre d'autres mesures semblables.

Une voix: Nous le ferons.

M. Silye: Un député d'en face dit: «Nous le ferons.» Nous leur rappellerons cette promesse.

Le gouvernement doit aussi prendre garde de répéter à l'égard de l'aide sociale la même erreur que celle qu'il commet au sujet des soins de santé qui, comme les députés le savent, sont un autre objectif du Régime d'assistance publique du Canada et des transferts aux provinces. Le gouvernement a promis une réforme de la sécurité sociale fondée sur un effort coopératif entre le gouvernement fédéral et les provinces. De toute évidence, rien de tel ne se produit. Le refus de certaines provinces d'assister à une séance d'information sur les soins de santé en est la preuve.

Le gouvernement commet la même erreur dans le cas de ce programme d'aide sociale et réduit sa participation financière, comme il doit le faire et le fait effectivement. Cependant, il doit laisser aux provinces la latitude voulue pour s'adapter à cette évolution et répartir leurs ressources judicieusement.

On ne peut pas punir une province en l'obligeant à réduire ses dépenses ou à trouver d'autres moyens pour payer ces programmes, qui ne sont que partiellement subventionnés par le gouvernement fédéral. Alors que les contributions fédérales auraient dû être plus élevées, le gouvernement central a décidé de réduire son financement, si bien que les provinces doivent chercher les moyens de payer les programmes et faire des compressions. Nous savons qu'il y a là un problème, mais nous souhaiterions que le gouvernement en soit plus conscient.

À l'heure actuelle, même si l'aide sociale relève strictement des provinces, aux termes de la Constitution, le gouvernement fédéral applique des normes nationales au moyen de la Loi sur le Régime d'assistance publique du Canada et du règlement qui en découle. Cela nous inspire quelques préoccupations. Contrarier les provinces par des compressions qui réduiront le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral risque de compliquer les négociations sur les réformes de la politique sociale que le ministre du Développement des ressources humaines envisage pour l'automne.

Dans l'ensemble, nous admettons qu'une réforme en profondeur s'impose et que le gouvernement fédéral doit réduire ses paiements de transfert aux provinces pour équilibrer le budget. Nous avons des inquiétudes au sujet du plan d'ensemble ou de la stratégie.

M. Walker: Madame la Présidente, en réponse à une question qui a été posée plus tôt, les amendements que nous proposons ne touchent pas les points d'impôt.

[Français]

M. André Caron (Jonquière): Madame la Présidente, il s'agit d'un amendement qui a été présenté par le Bloc québécois, sur lequel je veux donner mon avis, et c'est un amendement à une proposition de la loi C-17 qui préconise un gel de la contribution fédérale au Régime d'assistance publique du Canada.

Vous savez que le Régime d'assistance publique du Canada est le fruit d'une contribution du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux.

(1210)

Et dans la proposition qui est faite par le gouvernement dans le projet de loi C-17, il s'agit de geler, après mars 1995, la contribution du gouvernement fédéral.

Le Régime d'assistance publique du Canada est un régime qui a été élaboré dans les années 1950 et 1960 et qui vise à établir une justice sociale envers des catégories de citoyens canadiens qui, pour une raison ou pour une autre, ne peuvent pas toujours subvenir à leurs besoins propres.

Alors, c'est un régime qui vise vraiment les besoins fondamentaux d'un certain nombre de nos concitoyens. Dans la mesure qui est proposée par le gouvernement, il s'agit de geler de façon unilatérale la contribution du gouvernement fédéral.

Je veux, avec mon parti, dénoncer cette façon de faire. Il s'agit d'un amendement qui arrive dans un projet de loi et qui va avoir des conséquences énormes, des conséquences que nous autres, parlementaires, pouvons difficilement évaluer à ce moment-ci, mais nous savons, nous de l'opposition, que les conséquences seront graves pour certaines parties de la population.

Et c'est dans ce sens que mon parti a fait un amendement, dans lequel on demande qu'un comité permanent soit mis sur pied pour que l'on puisse étudier toute cette question, de façon que, en tant que députés, nous sachions quelles sont les conséquences pratiques sur les plus démunis de notre société d'une proposition comme celle du gouvernement libéral actuel, parce qu'il faut, en


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toute conscience, regarder les conséquences des gestes que nous posons en tant que parlementaires.

Je pense que ce n'est pas inadéquat de vouloir vraiment tenir compte des conséquences peut-être graves qui vont résulter des lois que nous adoptons ici. Alors, c'est important que la population, par la voix de ses députés, puisse être mise au courant des situations qui peuvent résulter d'une proposition comme celle que le gouvernement libéral nous fait actuellement.

Je veux aussi dénoncer cette façon de faire qui a cours dans plusieurs ordres de gouvernement, c'est-à-dire que par une mesure qui a l'air un peu anodine, on va geler des transferts d'argent à d'autres niveaux de gouvernement. C'est ce qu'on appelle envoyer ses problèmes ailleurs, c'est ce qu'on appelle au Québec pelleter ses problèmes, pelleter ses responsabilités dans la juridiction du voisin.

Et c'est exactement ce que le gouvernement fédéral fait actuellement, parce que, que va-t-il se passer? Le gouvernement provincial ou les gouvernements provinciaux auront moins de contributions. Les gouvernements provinciaux devront, soit pour maintenir le niveau des services actuels, dépenser plus, peut-être s'endetter, ou ils devront assumer l'odieux des coupures qui seraient faites dans des programmes qui touchent les plus démunis de notre société.

Mais, à ce moment-là, le gouvernement fédéral va s'en laver les mains. Le gouvernement fédéral va dire: «Moi, j'ai simplement fait des coupures dans les transferts et c'est le gouvernement provincial qui a décidé de ne pas faire de dépenses supplémentaires pour contrebalancer la coupure qui a été faite.»

Alors, à ce moment-là, je trouve que c'est malhonnête et que c'est hypocrite, parce que le gouvernement qui présente cette mesure sait très bien ce qui va se passer, mais il envoie sa mesure, envoie sa loi et en 1995, en 1996, en 1997, quand les provinces seront dans l'obligation soit de couper dans les services aux plus démunis de notre société, soit d'emprunter pour maintenir ses services, ce seront les gouvernements provinciaux qui auront l'odieux des mesures qui seront alors prises.

Alors, je pense qu'en tant que parlementaires, nous devons assumer la responsabilité de nos actes. Si nous voulons faire des coupures dans les programmes sociaux, il faut le dire. Il ne faut pas laisser les autres le faire en les mettant dans des situations où ils n'ont pas d'autres solutions que de le faire et cette façon de procéder est coutumière du gouvernement libéral actuel.

(1215)

On sait qu'il y a actuellement une réforme en cours. M. Axworthy, le ministre du Développement des ressources humaines, l'a annoncée. Il y a des comités qui sont à l'étude. Il y a des experts qui ont été embauchés pour définir une position gouvernementale. Au Comité permanent des ressources humaines, on étudie des façons de faire. Mais on n'a pas de projet, de plan d'ensemble du gouvernement. On apprend les choses par bribes. On apprend que peut-être du côté de l'assurance-chômage il va y avoir des coupures, que peut-être du côté de l'assistance sociale il va y avoir des coupures, que peut-être du côté des prêts et bourses aux étudiants il y aura des réaménagements. Mais ces choses-là arrivent de façon disparate, dispersée, ce qui fait que, à un moment donné, la population canadienne n'est pas en mesure d'apprécier l'ensemble de la réforme. Et nous, parlementaires, nous ne sommes pas en mesure de dire à notre population les objectifs que nous poursuivons et le résultat que nous voulons atteindre dans quelques années.

Alors, l'exemple qui nous est présenté actuellement d'une proposition qui semble anodine mais qui va avoir des conséquences importantes sur une bonne partie de nos concitoyens les plus démunis est un exemple patent de la façon hypocrite et souvent mensongère qui est utilisée pour administrer actuellement le pays et prévoir une politique sociale envers les plus démunis de notre société.

Il est évident que je voterai contre la proposition principale du gel des transferts fédéraux et que je voterai pour l'amendement de mon parti qui vise la création d'un comité permanent qui verra à prendre la mesure de toutes ces propositions et à en voir les conséquences de façon que, comme parlementaires, il nous soit possible de répondre devant nos concitoyens des mesures que nous avons prises face à des projets de loi qui ont des conséquences aussi importantes que celui qui est devant nous maintenant.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Avant de poursuivre le débat, j'aimerais rappeler à l'honorable député qu'il n'est pas coutume de mentionner en Chambre le nom des ministres ou des députés.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote!

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion no 12?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à l'article 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est différé.

[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke) propose:

Motions nos 16, 17, 18 et 39
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 15.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 16.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 17.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 32.
(1220)

-Madame la Présidente, pour commencer, bien qu'on ne prononce pas de noms à la Chambre, je voudrais préciser que je m'appelle Gouk. Je ne voudrais pas que les gens pensent que le Parti réformiste compte déjà 53 députés.

Nous avons proposé cet amendement pour nous permettre de traiter de diverses parties du projet de loi. La première fois que j'ai pris la parole sur ce projet de loi, j'ai fait remarquer qu'il


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s'agissait d'un projet de loi omnibus. Ce genre de projet de loi comporte tellement de parties n'ayant presque rien à voir entre elles qu'il est impossible de choisir les éléments qu'on veut appuyer et ceux qu'on veut rejeter.

Si le projet de loi comporte des dispositions tout à fait inacceptables, il faut le rejeter en bloc. C'est pourquoi nous avons présenté cet amendement afin de pouvoir traiter séparément les différentes parties du projet de loi.

En ce qui concerne les subventions au transport, comme je l'ai déjà dit, c'est un élément du projet de loi que je puis appuyer, en principe du moins. J'ai également dit à ce moment-là que le gouvernement n'avait pas vraiment bien étudié ces questions. S'il l'avait fait, il aurait constaté que dans bien des secteurs, y compris les subventions pour le transport du grain de l'Ouest et les subventions pour le transport régional dans les provinces atlantiques, il aurait pu réduire ses coûts et réaliser le même niveau ou un niveau plus élevé d'économies sans pénaliser les gens à qui les subventions étaient initialement destinées.

On pourrait aussi le faire de telle manière que les subventions seraient réduites tout en faisant réaliser des économies aux intéressés si on s'attaquait à d'autres éléments de gaspillage et à l'inefficacité. À mon avis, c'était du travail bâclé de la part du gouvernement et, depuis la dernière fois que j'ai abordé le sujet, je n'ai rien constaté qui laisse entendre qu'il est prêt, cette fois-ci, à s'atteler à la tâche.

Une bonne partie de l'exercice pourrait être accomplie en comité. Je crois que c'est précisément le rôle des comités. Il est malheureux que le gouvernement juge bon de regrouper les différents aspects touchant le budget en un unique projet de loi omnibus, nous obligeant ainsi à adopter ou à rejeter la mesure législative en bloc.

L'Accord de Charlottetown est un bel exemple du désastre auquel cela peut conduire. En effet, cet accord est peut-être le projet de loi le plus fourre-tout qui ait jamais été concocté par un gouvernement. On sait qu'il a été rejeté par la plupart des Canadiens qui, en l'examinant, ont dit: «Il y a peut-être de bonnes choses là-dedans, mais il y en a d'autres que nous ne pouvons pas supporter, de sorte qu'il n'est pas question de voter oui, comme le voulait le précédent premier ministre.» Résultat: la plupart des Canadiens, dans leur propre intérêt, l'ont rejeté.

Maintenant, depuis le précédent premier ministre jusqu'à l'actuel premier ministre, sans oublier tous les membres de son Cabinet, on ne cesse de nous rappeler ce rejet chaque fois que nous soulevons une question qui revêt une certaine importance pour les Canadiens. On nous sert toujours le même refrain: «Nous vous l'avons proposé, vous l'avez refusé en rejetant l'Accord de Charlottetown. Ne revenez plus à la charge avec cela.»

La même manoeuvre se poursuit avec le projet de loi C-17. Le projet de loi C-17 est ainsi conçu qu'il comporte probablement des choses qui sont bonnes et que nous souhaiterions voir se réaliser. C'est comme si, après avoir réclamé que le gouvernement réduise ses dépenses, nous faisions maintenant machine arrière en rejetant les initiatives gouvernementales. En fait, nous trouvons ici des mesures qui sont de nature à faire réaliser des économies et nous y souscrivons. Les subventions au transport font partie de ces mesures que, en principe, nous appuyons.

Un exemple des dispositions qui, à mon sens, n'ont pas leur place dans ce projet de loi, c'est la question des emprunts par la SRC. Non content d'emprunter encore à un point tel qu'il ne sera même pas en mesure d'en payer l'intérêt, le gouvernement veut maintenant étendre ce droit à ses diverses sociétés d'État afin qu'elles puissent emprunter sans que cela figure dans sa dette nationale.

En ce qui concerne les subventions au transport, je serais plutôt d'accord, notamment à propos d'une réduction dans le cas des céréales, mais je demande, pour ne pas dire j'exige, que le gouvernement en profite pour se pencher sur les lacunes du système de transport. Il a été amplement démontré qu'il ne suffit pas d'injecter de l'argent dans le système de transport pour assurer l'acheminement des céréales et que ce n'est pas cela que veulent les agriculteurs.

Nous devons à la fois réduire les coûts le plus possible et apporter les améliorations qui s'imposent. À mon avis, si nous nous débarrassions de tous les services inefficaces, nous pourrions presque entièrement supprimer les subventions sans nullement pénaliser les agriculteurs, qui sont dans une situation désespérée à cause de l'inaction du gouvernement.

(1225)

Il en va de même pour les subventions accordées à la région de l'Atlantique. Le gouvernement pourrait réduire ces subventions dans bien des secteurs s'il en améliorait certains autres qui désavantagent la région de l'Atlantique. J'ai mentionné, entre autres, les services de brise-glaces qui sont assurés sans frais aux expéditeurs, afin de garder un port ouvert alors que des ports libérés des glaces demeurent sous-utilisés. Cette situation est désavantageuse pour la région de l'Atlantique.

Comme je l'ai dit, je ne vois aucun inconvénient à ce qu'on maintienne ce service, mais les expéditeurs devraient en payer les frais, qui s'élèvent à 20 millions de dollars par année. Cela compenserait de beaucoup le montant des subventions que le gouvernement envisage de réduire, réduction qui pénalise la région de l'Atlantique.

J'ai également mentionné les subventions de développement économique. On pourrait les réduire également si le gouvernement agissait au sujet des barrières commerciales interprovinciales qui, dans le cas de la région de l'Atlantique, entraînent des coûts supérieurs à toutes ses subventions de développement économique.

J'appuierai la partie du projet de loi qui traite des subventions au transport à condition que le projet de loi soit scindé. Il sera très difficile d'appuyer les autres parties du projet de loi s'il n'est pas scindé et examiné article par article, afin qu'on puisse en supprimer les parties qui sont ridicules.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Madame la Présidente, je ne parlerai pas longtemps sur cette section du projet de loi C-17 puisqu'à mon avis, il n'y a pas de problèmes majeurs avec les dispositions administratives sur le transport contenues dans ce projet de loi.

Mon intervention porte sur le manque de sérieux du Parti réformiste lorsque vient le temps d'analyser, article par article,


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un projet de loi. On vient nous dire de façon tout à fait loufoque qu'on veut supprimer l'ensemble des articles de cette section du projet de loi tout en reconnaissant qu'il y a certaines dispositions qui peuvent être bénéfiques. Je n'ai jamais vu une telle chose. J'ai déjà vu des politiciens pas sérieux, mais on s'attendrait à un peu plus de sérieux de la part du Parti réformiste.

S'ils avaient proposé des amendements constructifs pour cette partie du projet de loi, il me semble que cela aurait été de bon augure pour l'analyse globale du projet de loi. Je vois qu'ils sont incapables de le faire, ils ne sont pas sérieux. D'autant plus qu'on vient de dire qu'il y a certaines dispositions là-dedans qui favorisent le transport des céréales de l'Ouest. Ils n'ont pas été élus ailleurs que dans l'Ouest et ils présentent, globalement, des amendements pour supprimer l'ensemble de ces dispositions, y compris les dispositions concernant le transport des céréales de l'Ouest, le fameux Crow's Nest Pass Agreement.

Est-ce qu'ils parlent à leurs électeurs, ces gens-là? Comme ils le prétendent, ils font de la politique un peu différente. On parle de questions «faxées» par les citoyens, ils auraient dû aller voir leurs électeurs directement, surtout les agriculteurs de l'Ouest et les transporteurs de l'Ouest pour leur demander leur avis plutôt que de se conduire de façon tout à fait irresponsable en proposant de tels amendements.

J'ai remarqué aussi que chaque fois qu'on parlait de mauvaises choses dans les projets de loi, y compris à partir de la motion présentée par le Parti réformiste, aussitôt que ça allait à l'Est du Manitoba, c'était nécessairement mauvais. Regardez, comme on a donné en exemples les mauvaises mesures de cette partie du projet du loi. On disait: «Par exemple, dans les Maritimes on aurait pu faire payer les usagers pour la surveillance des glaces.» Ils sont déjà assez écrasés ces gens-là. J'ai pu le constater à la lumière des auditions que nous avons tenues sur le projet de loi C-17, en sous-comité, en particulier sur la portion de l'assurance-chômage, qu'on arrête d'illustrer-les réformistes sont très forts là-dessus-l'inefficacité en parlant uniquement des régions maritimes.

La même chose, lorsqu'on parle de subventions au développement régional. Je trouve que ça fait dur un peu. Je tenais à le souligner, ça n'ajoute rien, ça n'enlève rien à la motion présentée, sauf que je trouve que l'attitude du Parti réformiste aujourd'hui est déplorable.

(1230)

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les non l'emportent.

Je déclare donc les motions nos 16, 17, 18 et 39 rejetées.

(Les motions nos 16, 17, 18 et 39 sont rejetées.)

M. Monte Solberg (Medicine Hat) propose:

Motions nos 19 et 20
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 18.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 19.
[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata) propose:

Motion no 21
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 20, par substitution, à la ligne 8, page 10, de ce qui suit:
«visée, de même qu'une indication des fins pour lesquelles elle se propose d'emprunter des fonds et de ses projets de remboursement de ces fonds.»
[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat) propose:

Motion no 22
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 20.
[Français]

Mme Tremblay: Madame la Présidente, le projet de loi du gouvernement veut modifier les règles de l'assurance-chômage, les règles du Régime d'assistance publique du Canada, les règles de la négociation en imposant un gel des salaires à ses employés, alors qu'il pige partout dans les poches des contribuables, qu'il accorde encore à la Société Radio-Canada un pouvoir d'emprunt de 25 millions de dollars qui pourrait être augmenté, prévoit la loi, par une loi des crédits.

Je voudrais d'abord dénoncer le projet de loi omnibus qui devient, entre les mains d'un gouvernement, un outil pour camoufler des changements de cap importants du gouvernement. Ce projet de loi est une soupe dans laquelle on a mis trop d'ingrédients et particulièrement trop épicée au goût des plus démunis.

Cela dit, j'aimerais mettre l'accent sur le pouvoir d'emprunt que le gouvernement veut accorder à la Société Radio-Canada. Une marge de crédit est, selon les règles de l'art, généralement accordée aux individus et aux institutions financières qui savent compter, qui gèrent bien leurs entreprises ou qui ont des projets de croissance avec des études de marché à l'appui, ou encore qui


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font balancer leurs livres, bref, qui ont une réputation financière à la hauteur de leur requête.

Or, c'est loin d'être le cas de la Société Radio-Canada. Voyons la situation de plus près. Selon les données préparées par les hauts fonctionnaires du ministère du Patrimoine canadien, le déficit de la Société Radio-Canada passera de 41 millions de dollars, cette année, à 78 millions de dollars l'an prochain, et ceci en excluant les coupures budgétaires d'avril 1993. À ces prévisions, il faut ajouter au moins 100 millions de dollars que le ministre du Patrimoine canadien a déclaré vouloir récupérer des coffres de la Société au cours des cinq prochaines années.

Le ministre du Patrimoine canadien a également annoncé qu'il aimerait voir la Société Radio-Canada moins dépendante des revenus publicitaires. Ces revenus représentent 26,3 p. 100 des ressources de l'entreprise en 1994, soit près de 400 millions de dollars, sur un budget total de 1,5 milliard.

(1235)

Plusieurs mesures draconiennes ont été prises jusqu'à maintenant par la direction de la Société Radio-Canada afin de redresser son déficit structurel. À l'aide d'un document publié par le professeur Lauzon, je veux rappeler quelques-unes de ces mesures qui n'ont finalement rien réglé, qui n'ont surtout pas permis à la Société d'équilibrer ses livres, et certaines de ces mesures font encore très mal. Il y a eu l'abolition de 2 800 postes, depuis 1984, incluant certaines mises à pied, la restructuration des services de télévision des réseaux français et anglais, la transformation de trois stations de télévision locale en réémetteurs, la conversion de huit stations en bureaux de production d'informations, dont trois transformées finalement en réémetteurs, l'annulation de toute la programmation régionale autre que les nouvelles. L'économie de cette mesure devrait représenter 46 millions de dollars.

Incidemment, il est impossible pour la citoyenne que je suis d'obtenir des chiffres sur les coûts d'exploitation de la station de Radio-Canada à Québec. Quiconque vient de l'est du Québec a la vive impression que ce bureau a bénéficié des économies qui devaient être réalisées avec la fermeture de Rimouski, Matane et Sept-Îles. Mais quand on veut de l'information à Québec, on nous répond: «Dommage, il y a la concurrence; on ne peut vous fournir ces informations.»

Je poursuis la litanie des coupures faites par la Société Radio-Canada pour réduire son déficit. Il y a la réduction de 12 millions de dollars dans les dépenses du réseau de télévision. Une autre coupure apparente vise justement le bureau du Président de cette Chambre où le service de chaîne parlementaire a été transféré à son bureau, faisant ainsi, en apparence, économiser à Radio-Canada 5 millions de dollars, mais continuant à coûter 5 millions de dollars aux contribuables dans une autre enveloppe tout simplement.

Une autre coupure consiste au financement par le ministère des Affaires extérieures d'un service réduit de Radio-Canada International à l'étranger, faisant ainsi, paraît-il, économiser 20 millions de dollars à la Société Radio-Canada, mais coûtant 20 millions au ministère des Affaires étrangères. Ce sont là des mesures qui trompent la population et qui sont honteuses.

Mais ce ne sont pas tous les services de Radio-Canada qui ont connu des coupures, qui ont fait leur part dans ce contexte de restrictions budgétaires. L'argent sorti des régions a été tout simplement transféré aux réseaux.

Ainsi, selon une étude faite par le Syndicat des journalistes de Radio-Canada, et je cite: «Contrairement à l'idée véhiculée, les fermetures de stations régionales en 1991 n'ont pas entraîné une réduction des coûts de programmation télé; elles ont plutôt provoqué un transfert des fonds vers les réseaux. Si on compare les coûts de programmation télé de 1991 et de 1992, on s'aperçoit que les coûts de la production télé en régions ont baissé de 40 millions, que les coûts des contributions des régions au réseau ont aussi baissé de 7,1 millions.» Une émission produite en région est le SRC Bonjour que nous connaissons très bien, qui est produite ici à Ottawa.

Donc, en réalité, une diminution, me diriez-vous, de 47 millions de dollars. Au contraire, si on regarde les chiffres, les coûts des réseaux ont augmenté de 60,7 millions de dollars. Ce sont là encore des exemples du camouflage que fait ce gouvernement et cette Société. Il en a coûté 13 millions de plus que les économies qu'on devait réaliser. Donc, le réseau a profité de la fermeture de nos stations de télévision locales et cela fait encore très mal. Nous ne le prenons toujours pas, et c'est aussi clair que ça.

Je voudrais également ici parler d'une autre réalité qui a été vite occultée par le président de la Société Radio-Canada et par le ministre du Patrimoine canadien, soit celle de la disproportion du financement entre les services français et anglais de Radio-Canada et de la Canadian Broadcasting Corporation.

Le 5 avril dernier, la Coalition pour la défense des services français de Radio-Canada qui est composée, je le rappelle, de représentants des techniciens, journalistes, musiciens, recherchistes, artistes de la maison, ont rendu public un rapport dévoilant que la différence de financement entre les deux réseaux atteignait maintenant 76,4 millions de dollars. Le réseau de la SRC a un budget de 69 millions, alors que la CBC a un budget de 146,1 millions.

Ainsi, une heure d'émission télé à la CBC coûte en moyenne 37 400 $, alors qu'elle coûte 18 390 $ à la Société Radio-Canada. La production des nouvelles françaises coûte en moyenne 7 000 $ l'heure alors que la même production coûte 18 000 $ l'heure à la société d'État en anglais. Pourtant, une nouvelle, c'est une nouvelle.

(1240)

La comparaison de la moyenne des coûts pour la production de dramatique est tout aussi choquante: 68 000 $ au réseau français contre 99 000 $ pour le réseau anglais. Malgré cette disproportion de financement, qui ne retrouve sa vraie justification que dans le racisme culturel, l'auditoire de la Société Radio-Canada est le même que celui de la CBC. Avec une cote d'écoute moyenne selon les BBM de 13,6 p. 100, la Canadian Broadcasting Corporation a un auditoire d'approximativement 2,8 millions de dollars; alors que la Société Radio-Canada a un auditoire de 33 p.


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100, soit 2,2 millions d'habitants. Il n'y a donc pas de raison pour cette disproportion de financement dans les réseaux.

Récemment, la Société Radio-Canada achetait pour la somme de 28 millions de dollars les droits de radiodiffusion des Jeux olympiques d'Atlanta. Les réseaux concurrents en offraient 10 millions. La Société estime qu'elle pourra réaliser des ventes de 35 millions de dollars, ce dont doutent les experts dans le domaine. La Société comblera-t-elle son manque à gagner avec ses nouvelles marges de crédit? C'est la question que tout citoyen ou toute citoyenne se pose aujourd'hui.

Devant ce que d'aucuns pourraient qualifier de gestion financière laissant à désirer, le Bloc québécois, au nom des contribuables canadiens et québécois, veut que la Société Radio-Canada soit responsable devant le Parlement de son recours à sa marge de crédit. Nous avons donc déposé un amendement en ce sens pour demander que la Société soit obligée de venir devant le Parlement expliquer pourquoi elle veut emprunter et comment elle entend rembourser. Ça ne sert à rien de donner à cette société le pouvoir d'emprunt si elle continue à être incapable de se gérer sainement.

[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour parler de la partie IV du projet de loi C-17, qui donnerait pouvoir d'emprunt à la Société Radio-Canada.

Cela pose plusieurs problèmes. Premièrement, le gouvernement s'est engagé à demander un examen de la gestion et du financement de la Société Radio-Canada. Or, alors que cet examen n'a pas encore été effectué, il a réorganisé le financement de la SRC à deux reprises.

Dans le premier cas, le gouvernement a révoqué la décision de l'ancien gouvernement conservateur de réduire les dépenses et de les ramener de 350 à 250 millions de dollars en quatre ans. Il a prévu dans son budget une disposition accordant à la SRC un pouvoir d'emprunt de 25 millions de dollars de façon à lui laisser suffisamment de flexibilité pour pouvoir fonctionner davantage comme une entreprise privée.

Je ne vois pas très bien comment le fait de pouvoir emprunter 25 millions de dollars va permettre une plus grande efficacité de gestion, alors que les crédits de 1,1 milliard provenant de l'argent des contribuables n'y ont pas suffi.

D'un côté, le gouvernement dit vouloir que la question du financement fasse l'objet d'un examen, mais, de l'autre, il change les formules de financement existantes. Cela défie toute logique!

Il est évident à mes yeux que la disposition ayant pour but d'octroyer un pouvoir d'emprunt à cette société est prématurée, étant donné l'annonce faite par le gouvernement. D'un point de vue pratique, le fait de permettre à la SRC de faire des emprunts n'a aucun sens.

La SRC n'est pas une entreprise privée. Elle n'a pas, au sens propre du terme, d'actionnaires ou de clients auxquels elle doit rendre des comptes. Elle n'est pas absolument tenue de s'efforcer d'être efficace, car ce n'est pas essentiel. Bref, la réalisation de bénéfices ou la faillite ne sont pas une préoccupation constante.

Dans ce genre d'organisation, on trouve toujours à dépenser. La décision d'autoriser la SRC de faire des emprunts risque plus d'accroître la dette nationale que l'efficacité de cette société.

Le document budgétaire laisse entendre que le service public de radiodiffusion pourrait être autorisé à emprunter un montant supérieur à 25 millions de dollars avec l'approbation du Parlement. Le plafond de 25 millions de dollars est en fait artificiel. Comment le gouvernement en est-il arrivé à ce chiffre? Quelles mesures vont l'empêcher de passer à 50 ou à 100 millions de dollars? Qui sera ultimement responsable des dettes contractées par la société?

(1245)

En général, quand une loi renferme des dispositions de ce genre, on est tenté de les utiliser et on trouve une raison de le faire. La loi des dépenses excessives veut que les institutions financières qui n'ont pas de compte à rendre dépensent tous les fonds qui leur sont confiés sans souci d'efficience.

Lorsqu'il a comparu devant le Comité permanent du patrimoine canadien le 12 avril dernier, le président de la Société Radio-Canada, M. Anthony Manera, a reconnu que cette société prévoyait un déficit de 180 millions de dollars de ses recettes de toutes provenances au cours des quatre prochaines années. La société d'État accuse un déficit de 45 millions de dollars au titre de son budget de fonctionnement et ses recettes totalisent environ 1,4 milliard de dollars.

Toute entreprise qui ferait face à une telle crise financière devrait d'abord mettre de l'ordre dans ses finances avant d'alourdir son passif. Le fait d'emprunter pour réduire une dette équivaut à utiliser une carte Visa pour payer sa dette à Mastercard. Même dans la meilleure des hypothèses, la Société Radio-Canada devrait effectuer des investissements judicieux et disposer de beaucoup de temps et de chance pour pouvoir réaliser des économies d'échelle avec son pouvoir d'emprunt.

Autoriser une société endettée à alourdir sa dette aux frais du public, c'est faire preuve d'une piètre gestion et d'une irresponsabilité morale. Le nouveau pouvoir d'emprunt aurait apparemment pour but de permettre à la société d'investir dans l'achat de systèmes et d'équipement qui feront réaliser des économies à long terme.

En quoi consistent ces investissements? Quels en sont les risques? Quel en sera le rendement? Qui sera responsable en cas d'échec? Il faudrait répondre à ces questions avant même d'examiner la requête de la Société Radio-Canada.

On a même proposé de percevoir des droits auprès des télédiffuseurs privés ou d'instituer des frais d'abonnement au câble pour financer la Société Radio-Canada au détriment de ses concurrents et du public. La société d'État ne peut puiser à la fois dans les poches des contribuables et compter sur les ressources


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du marché. Elle gagnerait ainsi sur tous les plans sans être obligée de devenir rentable ou concurrentielle.

Pour ce qui est de son mandat, la Société Radio-Canada rencontre beaucoup de difficultés. Ainsi, l'auditoire du réseau anglais de la Société Radio-Canada connaît une baisse constante depuis 1990-1991. Le réseau anglais n'attire plus que 13,3 p. 100 de l'auditoire, ce qui a amené le président du CRTC, M. Keith Spicer, à dire à M. Manera, au cours d'une récente audience sur le renouvellement des permis, que la société baissait dans les cotes d'écoute et qu'elle risquait de tomber dans l'oubli.

Comment la société d'État voit-elle la programmation américaine durant les heures de grande écoute et la kyrielle de feuilletons américains qui occupent les ondes entre 13 heures et 18 heures? Comment la Société Radio-Canada explique-t-elle le recul de sa programmation artistique et des émissions pour enfants depuis 1987? Tout cela, ajouté aux percées technologiques, nous amène à nous demander si la Société Radio-Canada a vraiment sa raison d'être.

Des chaînes spécialisées et l'autoroute de l'information sont devenues les mots-clés des années 90. A-t-on encore besoin d'un radiodiffuseur public quand on sait que les gens pourront choisir entre 500 canaux offrant un produit semblable à celui de la SRC et moins cher? La SRC a présenté une offre pour exploiter, sous le nom de Festival, l'une de ces chaînes spécialisées.

Comme le Parlement n'a pas modifié son mandat, est-il même correct, pour la SRC, d'établir et d'exploiter de nouveaux réseaux de télévision? Il faut aussi se demander si la SRC nuit à ses obligations actuelles en présentant une soumission pour l'obtention d'une autre chaîne. Il faut tenir compte, tant de la programmation qu'elle est tenue de fournir légalement que de la gestion de ses rares ressources.

De plus, il serait important d'examiner d'un oeil critique la gestion des programmes et la production de copies à la SRC. Les Canadiens critiquent souvent les programmes américains adaptés à la canadienne qui se retrouvent sur nos ondes. Entre-temps, le public ne fait plus autant confiance à la SRC depuis qu'elle a avancé l'heure de diffusion des nouvelles de 22 heures à 21 heures et qu'elle l'a ensuite retournée à l'heure initiale.

Dans l'exercice futile qui consiste à constamment soutenir la SRC, il y a des questions importantes à considérer en ce qui concerne les emprunts. Voici quatre questions auxquelles il faut absolument répondre. Comment la SRC générera-t-elle des profits pour rembourser les prêts qui lui ont été consentis?

Deuxièmement, l'article 19 du projet de loi dit: «Par dérogation à la Loi sur la gestion des finances publiques, la partie VII de cette loi ne s'applique pas aux dettes contractées par la Société.» Je ne sais toujours pas, après avoir consulté la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur la radiodiffusion, si l'État ou la SRC seraient, au bout du compte, responsables des dettes de cette société.

(1250)

Troisièmement, quelles lignes directrices le gouvernement a-t-il établies pour l'exercice de ce pouvoir d'emprunt?

Quatrièmement, pourquoi le gouvernement permet-il même à la SRC de faire des emprunts? Du point de vue financier, ne vaudrait-il pas mieux privatiser certaines de ses activités et réaliser des économies importantes qui pourraient ensuite être utilisées pour financer de nouveaux projets rentables?

Il est évident que l'utilisation, pour revitaliser la SRC, de mesures normalement réservées aux entreprises qui livrent concurrence sur le marché privé mine l'intégrité de cette société, comme radiodiffuseur public. Toute mesure spéciale visant à générer des capitaux pour la SRC comme des prêts, des frais d'abonnement ou des droits de permis, constituerait un avantage injuste si la SRC devait, en plus d'être largement financée par l'État, présenter, pour certains services, une meilleure offre que celle de ses homologues du secteur privé.

Compte tenu de ces facteurs et de l'évolution de la technologie, il faut s'interroger sur le rôle de la SRC. Pour toutes ces raisons, notre parti n'appuiera pas les dispositions sur le pouvoir d'emprunt.

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges): Madame la Présidente, j'aimerais moi aussi dire quelques mots au sujet du projet de loi C-17. Je traiterai plus précisément de l'article 18 du projet de loi qui concerne le pouvoir d'emprunt et la modification de la Loi sur la radiodiffusion qui permettrait d'accorder à la Société le pouvoir d'emprunter auprès du Trésor.

Tout d'abord, ce projet de loi, qui porte exécution de certaines dispositions du budget et découle du budget déposé il y a quelques mois, vise plusieurs objectifs. Je suis surpris que mon collègue de Medicine Hat n'ait pas consacré une bonne partie de son discours à louanger ce projet de loi puisqu'il propose en grande partie des restrictions budgétaires qui feront mal de diverses façons selon les régions du pays, mais qui seront forcément douloureuses car, le ministre des Finances et le premier ministre l'ont répété à maintes reprises, nous nous sommes engagés à remettre en ordre notre maison financière et le projet de loi C-17 fait de grands pas en ce sens.

À la lumière des commentaires de mon collègue de Medicine Hat, permettez-moi d'aborder directement la proposition de modification de la Loi sur la radiodiffusion.

Cette modification donnerait à la Société la souplesse que toute société ayant un chiffre d'affaires de un milliard de dollars doit avoir à mon avis, en l'autorisant à contracter des emprunts, jusqu'à un maximum de 25 millions de dollars, auprès du Trésor et des institutions bancaires canadiennes, par le truchement de marges de crédit et de crédit commercial et par l'émission d'obligations ou d'autres effets de commerce.

Je crois que cette mesure constituerait une étape importante de notre campagne de soutien pour la Société en lui permettant d'améliorer l'efficience de son fonctionnement et d'entreprendre d'autres opérations, acceptables pour le gouvernement, qui lui procureraient un rendement de ses investissements. C'est


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peut-être dans ce contexte que je trouve les objections du député de Medicine Hat très surprenantes. Il est intéressant de noter qu'il n'a pas dit ce qu'il avait l'intention de faire aujourd'hui. Il a précisé ce que son caucus allait faire.

Je tiens à dire à mon collègue de Peace River que je suppose que c'est là un autre exemple de la notion de vote libre défendue par le Parti réformiste. On se lève maintenant pour dire ce que tout le caucus va faire. Qu'en est-il du vote libre qui était la règle dans ce merveilleux parti que j'en suis venu à admirer? Où est donc le chef de ce parti aujourd'hui, quand j'aimerais lui demander pourquoi, tout à coup, il permet au député de Medicine Hat de museler un parti partisan des votes libres?

J'ouvre une parenthèse. D'un côté, le député de Medicine Hat reproche au projet de loi d'accorder à la Société Radio-Canada un pouvoir d'emprunt et d'un autre côté, nous entendons nos vis-à-vis parler parfois avec éloquence de la nécessité d'accroître l'efficience du gouvernement et des sociétés d'État. Là encore, je tiens à lui dire qu'on ne peut gagner sur les deux tableaux, n'est-ce pas?

(1255)

Les sommes que la Société Radio-Canada pourra emprunter aux termes de ce projet de loi ne serviront qu'à réduire ses frais de fonctionnement. Il n'est certainement pas question qu'on s'en serve pour acheter des billets de loterie ou effectuer de folles dépenses. . .

M. Penson: Ce serait peut-être un meilleur investissement.

M. Simmons: Le député de Peace River pense que ce pourrait être un meilleur investissement. Je lui dirais que les députés du Parti réformiste vivent d'espoir.

Les fonds empruntés permettront donc de réduire les frais de fonctionnement ou d'investir dans certaines entreprises. Les économies réalisées au niveau du fonctionnement découleraient d'investissements dans du matériel et des projets d'immobilisations pour lesquels la période de recouvrement est de quatre ans ou moins. À l'heure actuelle, la Société Radio-Canada ne peut profiter de ces débouchés à cause d'un manque de ressources financières et de la nécessité dans l'immédiat de moderniser ses installations et son matériel vétustes dans tout le pays.

Pour vous donner un bon exemple de la façon dont ce pouvoir d'emprunt proposé pourrait aider la Société Radio-Canada, il suffit de parler de l'entente qu'elle a conclue pour se désaffilier de sa station de Pembroke, en Ontario et utiliser plutôt des tours de retransmission qui lui ont coûté 2,2 millions de dollars.

Si on tient compte des sommes que la Société Radio-Canada n'a plus à verser à sa station affiliée et des coûts d'utilisation des tours, on s'aperçoit que dans les années qui ont suivi, la Société Radio-Canada a réalisé des économies nettes de 374 000 $ annuellement. En outre, elle a touché des recettes publicitaires supplémentaires de un million de dollars à la suite de sa décision de se désaffilier de sa station de Pembroke. Ainsi, un investissement de 2,2 millions de dollars a été remboursé en moins de trois ans. Il est indispensable que la Société Radio-Canada ait la latitude voulue pour entreprendre des initiatives de ce genre.

Il faut bien garder à l'esprit que la SRC n'obtiendrait jamais l'autorisation d'utiliser ces fonds empruntés pour compenser un manque à gagner et ainsi avoir recours au financement par le déficit.

Je signale encore une fois à mon collègue de Medicine Hat que je réponds ainsi à l'une des questions qu'il a posées. S'il suit bien le débat, il obtiendra la réponse à toutes ses questions, que nous avons bien entendues. Nous les avons non seulement entendues, mais nous les avions prévues, parce que ce sont quelques-unes des questions justifiées, qui doivent être posées. Personne n'a reproché au député de Medicine Hat de s'être montré irréfléchi. Ses questions étaient très réfléchies, mais il saute un peu vite aux conclusions. Il décide que c'est une mauvaise mesure avant même de l'avoir bien examinée. Je lui concède tout de même le mérite d'avoir su poser les bonnes questions.

Je lui répète que la SRC ne serait jamais autorisée à utiliser ces fonds empruntés pour compenser un manque à gagner et assurer ainsi le financement par le déficit. Le gouvernement s'y est engagé. C'est une condition qui sera inscrite dans l'entente entre le gouvernement et le ministre des Finances, d'une part, et la SRC, d'autre part.

En vertu de cette disposition, la limite d'emprunt de la SRC serait de 25 millions de dollars. Un protocole d'entente entre le ministre des Finances et la SRC établirait, comme je viens de le dire, les modalités régissant le pouvoir d'emprunt. La condition première, pour la SRC, serait l'obligation d'obtenir l'approbation du ministre des Finances, conformément aux lignes directrices du ministère, pour toutes les opérations effectuées en vertu de cette disposition.

Certaines réserves ont été exprimées une fois de plus sur cette question, surtout par mes amis du Parti réformiste. D'une certaine façon, ce n'est rien de surprenant, parce que nous savons qu'ils sont en faveur de l'abolition ou de la privatisation de la SRC. Je respecte ce point de vue en tant que politique de parti. Ni moi ni mon parti n'approuvons ce point de vue, mais c'est certainement une opinion que je respecte. C'est absolument contraire à notre position. C'est un point de vue diamétralement opposé à ce que nous croyons. Nous considérons la SRC comme une institution culturelle essentielle à notre pays.

(1300)

En même temps, je ne peux m'empêcher de mentionner aux députés réformistes, qui insistent si souvent sur l'importance d'avoir un sens pratique, que leur position manque un peu d'uniformité. Les événements et ce que nous avons dit sur la question montrent bien que nous voulons dans ce projet de loi traiter la Société Radio-Canada davantage comme une entreprise.

Enfin, on s'est inquiété de l'imputabilité envers le Parlement. Il s'agit d'un problème que devrait régler la procédure selon laquelle le pouvoir d'emprunt serait inclus dans le plan annuel que la Société doit présenter à la Chambre des communes.

Pour revenir à la comparaison avec une société ayant un chiffre d'affaires de un milliard de dollars, disons, premièrement, que le montant de 25 milliards de dollars dont il est question est relativement peu élevé et, deuxièmement, le gouver-


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nement prend les précautions qu'il faut pour qu'on procède d'une façon raisonnable.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Madame la Présidente, dans le projet de loi C-17, on mentionne que le gouvernement peut autoriser un emprunt de 25 millions de dollars. Et là, je me questionne. Où ira cet argent? Est-ce que ça ira dans les grandes villes ou davantage dans les régions périphériques?

Vous savez, madame la Présidente, chez nous, à Matane, Rimouski et Sept-Îles, nous avons été pénalisés énormément. Nous sommes dans un milieu rural. La population n'est pas tellement nombreuse et à ce moment-là, on dirait que, comme il y a peu d'électeurs et d'électrices, on peut nous siphonner comme on veut. Nous, du monde rural, ça nous fait mal.

Combien de ces millions serviront à rétablir les stations de la Société Radio-Canada à Rimouski, Matane et Sept-Îles? Dans notre monde moderne, les communications jouent un rôle extrêmement important. Dans les petites paroisses qui sont isolées de 8, 10 et 15 kilomètres, les gens aujourd'hui ont décidé de prendre la parole.

Samedi dernier, j'étais à Urgence rurale à Saint-Marcellin, une petite région de 300 personnes, et ces gens-là, pour une fois, au lieu de faire venir des docteurs de l'université, ont pris la parole. On leur a demandé: «Qu'est-ce que vous voulez chez vous?» Ils ont raconté des choses extraordinaires. Depuis 15 ou 20 ans, ces personnes se sont prises en main et ont fait, je dirais, presque des miracles, avec des moyens très minimes, très petits, très modestes. Ils ont fait des choses pour ne pas que leur paroisse soit fermée. Ils m'ont dit: «Monsieur le député, comment se fait-il que pour ce qui est de Radio-Canada à Matane, Rimouski et Sept-îles, on n'ait plus de service? On les invite chez nous, à Urgence Rurale, mais jamais ils ne vont venir nous couvrir, nous sommes beaucoup trop petits. Les petites paroisses ne sont pas importantes pour eux.»

À ce moment-là, je me suis posé une question: Où iront-ils les 25 millions de dollars? S'ils ne viennent pas chez nous, à ce moment-là, c'est un manque incroyable. Vous savez qu'il y a peut-être un jeu politique également à l'intérieur de tout cela. Duplessis disait: «Moins les gens seront instruits, plus j'aurai de votes». Il disait d'autre part: «Nous avons le meilleur système d'éducation au monde au Québec». Évidemment, à ce moment-là, ce n'était pas vrai.

(1305)

Alors, est-ce qu'on veut nous couper de la communication? Parce que si on ne peut pas communiquer ensemble, cela crée l'ignorance. L'ignorance est la chose la plus triste, la plus dégueulasse au monde.

Chez nous, nous réclamons que les stations de Radio-Canada puissent donner des services. Aujourd'hui, ces services-là, on ne les a pas. Pourtant, il y a encore dans ce pays des régions qui peuvent communiquer entre elles, mais on communique différemment. Nous sommes obligés de passer par le téléphone. C'est un moyen très primaire, peut-être, sauf que la télévision peut nous rassembler.

Chez nous il y a les îles de la Madeleine, il y a Sept-Îles, il y a Matane, il y a Rimouski, et on ne peut plus se parler ensemble. Tant et aussi longtemps qu'on ne pourra plus se parler, cela fera l'affaire des gouvernements. Parce que nous sommes isolés, nous sommes presque des insulaires et nous avons quand même un dynamisme incroyable, et ce dynamisme, on ne peut pas le porter aux bons endroits.

La région du Bas-Saint-Laurent, comme je le disais tout à l'heure, la région de la Gaspésie, des îles, de la Côte-Nord n'ont plus, depuis quelques années, accès comme auparavant à leur propre moyen de communication, et c'est très pénible.

Si on veut valoriser les gens, si on veut qu'ils se comprennent, si on veut se stimuler de façon collective, il faut pouvoir se parler et la télévision, Radio-Canada, c'est un moyen excellent. Si Radio-Canada se dit qu'on ne veut pas qu'on donne cet argent aux provinces et qu'on en fasse Radio-Québec, qu'on en fasse des chaînes de télévision communautaire, à ce moment-là, avec les moyens qu'on aura, avec l'argent qu'on ne quémande pas car c'est de l'argent qui nous est dû, des impôts que nous payons, à ce moment-là on pourra quand même se défendre, se défendre dignement et se défendre facilement.

Quand on a fermé les trois stations, ou à peu près fermé, pour que nous soyons desservis par Québec. . . Je veux bien que nous soyons desservis par Québec. Les journalistes de Québec qui sont sûrement très compétents, que connaissent-ils de nos régions? Qu'en savent-ils? Est-ce qu'ils savent qu'il n'y a pas d'université dans ma circonscription? Est-ce qu'ils savent qu'il n'y a qu'un cégep? Qu'est-ce qu'ils savent de l'Est du Québec? Qu'est-ce qu'ils savent de l'entente fédérale-provinciale? Absolument rien, mais absolument rien. Est-ce que les journalistes de Québec connaissent le taux de chômage dans nos circonscriptions? Ils n'en savent rien. Ils vont faire la grande nouvelle le soir, ce sera très beau, cela va passer, bien sûr, mais ils ne savent absolument rien. Ces nouvelles-là, même s'ils veulent les faire le plus objectivement possible, évidemment, très souvent elles sont empreintes d'ignorance et parfois elles ne sont pas forcément équitables.

Nous coupons des liens entre nous. Nous sommes aujourd'hui à l'heure planétaire. Nous sommes dans un monde où les communications nous viennent de tous les pays du monde. Nous avons de tous ces pays des nouvelles immédiates tandis que dans ma circonscription, dans nos circonscriptions, il nous faut deux, trois, quatre jours, une semaine avant d'avoir une nouvelle. Dans notre territoire à nous.

(1310)

Est-ce que ce n'est pas offensant? Est-ce que ce n'est pas frustrant? Moi, je me dis qu'il y a 25 millions de dollars à dépenser. Ces 25 millions de dollars devraient revenir en région. Je le réclame de tout coeur et je sais que mes collègues de l'autre côté, qui comprennent, j'espère qu'ils comprennent les problèmes du monde rural, j'espère qu'ils diront un mot pour nous retourner l'ascenseur, parce que nous payons, nous aussi. Nous payons bien des choses à tout le Canada. Et c'est normal. Mais, l'ascenseur ne nous revient pas aussi souvent qu'on devrait l'avoir.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Madame la Présidente, si je prends la parole aujourd'hui, c'est pour contester la partie ou le groupe de dispositions du projet de loi C-17, soit les articles 18 à 20, qui autorise la Société Radio-Canada à emprunter jusqu'à


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25 millions de dollars et même plus, si nécessaire, au moyen d'une loi spéciale.

Quand le gouvernement libéral et les Canadiens comprendront-ils que de tels emprunts constituent en fait non pas du capital engagé, mais bien du capital d'emprunt qui ne fera, au bout du compte, qu'accroître le déficit du gouvernement?

Au cours du présent exercice financier, le gouvernement va accroître la dette de 41 milliards de dollars, lui faisant ainsi franchir la barre des 550 milliards de dollars. N'est-ce pas cette dette et le service de la dette qui ont amené la récession, mis 1,7 million de Canadiens en chômage et forcé d'innombrables entreprises à fermer leurs portes?

Pourquoi le gouvernement s'obstine-t-il à prêter de l'argent qu'il n'a pas? Quand comprendra-t-il qu'il doit tout autant que les Canadiens réduire ses dépenses?

Les sociétés d'État comme la Société Radio-Canada traversent sans heurt ces périodes difficiles, en dépensant l'argent des contribuables sans penser au lendemain.

Dans le communiqué que le ministère des Finances a publié le 16 mars dernier sur le projet de loi C-17, le ministre déclare ceci:

La loi vise à mettre en oeuvre des initiatives qui nous aideront à atteindre notre double objectif de création d'emplois et de réduction du déficit.
Je le demande à tous les députés et à tous les contribuables qui nous regardent à la télévision: en quoi le fait d'emprunter 25 millions de dollars, en sus du 1,1 milliard de dollars de l'argent des contribuables que reçoit la Société Radio-Canada à l'heure actuelle, peut-il bien réduire le déficit? La Société Radio-Canada va-t-elle engager d'autres personnes dont les impôts vont entraîner un profit pour le gouvernement?

C'est une contradiction dans les termes. C'est comme dire que plus on dépense d'argent, plus on épargne. La Société Radio-Canada n'est pas une société à but lucratif. Toute somme qu'on lui accorde ne peut donc qu'ajouter au déficit. C'est une société dont la cote a chuté et la seule façon qu'elle ait de générer le moindrement de recettes est de diffuser des émissions américaines qui ne reflètent pas bien la culture canadienne.

Est-ce conforme à la logique libérale des promesses en l'air que de se montrer généreux avec l'argent des autres pour faire oublier les vrais problèmes de notre pays, à savoir une dette importante, un service de la dette coûteux et des impôts élevés visant à payer des subventions somptuaires?

Les députés libéraux ont dit ici que 85 p. 100 des vrais emplois sont créés par le secteur privé. À mon avis, il serait préférable de créer des emplois à long terme et utiles en accordant pour 1,1 milliard de dollars de réductions d'impôts et de taxes que de verser cet argent à Radio-Canada.

Si le gouvernement veut vraiment faire la promotion de l'identité et de la fierté canadiennes, qu'il laisse le secteur privé créer des emplois à long terme et utiles pour les Canadiens. Le gouvernement devrait réglementer, administrer, adopter des lois et défendre les frontières, et cesser d'intervenir sur le marché en finançant à grands frais des sociétés d'État et des programmes de création d'emplois à court terme qui ne profitent qu'à quelques-uns et non à l'ensemble de la société.

Si le gouvernement fédéral estime que le contenu canadien des émissions de télévision est capital, qu'il adopte des règlements en ce sens, qu'il ne paie pas pour atteindre des quotas. Laissons la loi de l'offre et de la demande décider quelles émissions seront diffusées et quelles émissions disparaîtront.

Je crois qu'il est temps d'envisager une privatisation partielle de Radio-Canada. Actuellement, les Canadiens ne regardent pas Radio-Canada.

Lors des récentes audiences sur le renouvellement de la licence du réseau anglais de Radio-Canada, le président du CRTC, Keith Spicer, a déclaré aux journalistes que la CBC avait vu sa part d'auditoire passer de 15 p. 100 en 1990-1991 à 13,5 p. 100 en 1992-1993. M. Spicer ajoutait: «Vos cotes d'écoute sont en chute libre.»

C'est là un parfait exemple de ce qui se passe lorsque des entreprises n'évoluent pas dans un climat concurrentiel. Elles sont moins stimulées et donnent un produit qui, de façon générale, est de moins bonne qualité. Dans le secteur privé, les entreprises dans cette situation ferment leurs portes. Ce n'est cependant pas le cas de Radio-Canada qui bénéficie du soutien du gouvernement et à qui, en plus, le projet de loi vient donner la possibilité d'emprunter.

(1315)

Quand le gouvernement se rendra-t-il compte que Radio-Canada fait partie du problème et non de la solution? Quand cessera-t-il d'accorder sans compter des fonds à Radio-Canada? Quand créera-t-il le climat propice aux investissements et cessera-t-il d'investir de l'argent qu'il n'a pas? Le secteur privé comprend la situation. Il est temps que les ministres comprennent eux aussi.

La croissance du secteur privé renforce la confiance et ouvre des portes. Elle montre aux investisseurs que notre pays est désireux et capable de faire concurrence aux autres pays.

Le gouvernement libéral devrait faire savoir aux investisseurs, aux prêteurs et aux entreprises, tant au Canada qu'à l'étranger, que notre pays accueille favorablement la concurrence loyale dans un marché libre de toute ingérence de la part du gouvernement, ce qui comprend les subventions. Seul ce message pourrait amener des capitaux propres aux entreprises et permettre au gouvernement de se retirer d'entreprises comme Radio-Canada, Petro-Canada et Postes Canada et de céder sa place à des gens qui connaissent bien ces domaines.

Pour le moment, Radio-Canada paie des millions de dollars pour la diffusion de comédies américaines. M. Spicer dit que le réseau s'est engagé dans cette voie simplement parce qu'il traverse une période difficile. Que fait-on alors de la responsabilité ou de la justification?

En tant qu'homme d'affaires, je sais que les sociétés tant publiques que privées commencent, après un certain temps, à perdre de vue leurs objectifs globaux. Peut-être que les paroles de M. Spicer montrent que Radio-Canada est elle-même en train de s'éloigner de ses objectifs initiaux qui consistent à présenter


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des émissions canadiennes de qualité et à promouvoir la culture et le talent canadiens.

Selon M. Spicer, la privatisation partielle ou totale de Radio-Canada éviterait à cette société de tomber dans l'oubli en l'absence d'un plan de sauvetage.

La privatisation de Radio-Canada assujettirait cette société aux règles du marché, tant sur le plan des bénéfices que sur celui des sanctions. Même une privatisation partielle réduirait le déficit sans causer de perte d'emplois. Les sociétés privées ont prouvé maintes et maintes fois qu'elles peuvent être plus efficaces et plus efficientes que les sociétés d'État. Un service qui coûte 1 $ dans le secteur privé coûte 3 $ dans le secteur public.

Les investissements privés motivent, tandis que les investissements publics obligent-et ils obligent les mauvaises personnes, c'est-à-dire les contribuables, sans que ceux-ci aient leur mot à dire. Dans le secteur privé, il faut prendre les décisions rapidement pour saisir les possibilités d'investissement qui se présentent. Les entreprises qui prennent ces décisions souffrent ou bénéficient ensuite des conséquences. On reproche depuis longtemps aux sociétés d'État d'être incapables de prendre pareilles décisions, ce qui s'explique en grande partie par le fait qu'elles ne sont pas suffisamment motivées à le faire et qu'elles n'ont pas assez de comptes à rendre, le gouvernement agissant comme un filet de sécurité.

Qui est congédié si une émission coûteuse n'est pas mise en ondes? Qui en entend parler? Qui, au bout du compte, paie pour l'extravagance et les erreurs?

La participation du gouvernement donne à ces sociétés une sorte de longévité financière que les entreprises du secteur privé n'ont pas, longévité qui devient par conséquent un fardeau pour les contribuables. Elle encourage une concurrence déloyale au sein de l'industrie, entre ceux qui ont des comptes à rendre à leurs actionnaires et ceux qui peuvent puiser sans cesse dans les coffres de l'État.

La privatisation permettrait aussi au gouvernement d'améliorer sa situation financière. La vente d'actifs lui permettrait de réduire ses besoins monétaires pour l'année, lesquels s'élèvent à 41 milliards de dollars pour cet exercice, et de rembourser une partie de notre dette cumulative de plus de 516 milliards de dollars.

C'est la privatisation totale ou partielle de la SRC, et non un pouvoir d'emprunt de 25 millions de dollars, qui aiderait le gouvernement à vraiment atteindre les deux objectifs du ministre des Finances, soit la création d'emplois et la réduction du déficit.

À 11 heures ce matin, l'horloge du Jugement dernier évaluait notre dette nationale à 516 293 742 299,79 $. Depuis 11 heures ce matin, la dette a continué d'augmenter à raison de 1 473,50 $ à la seconde, la dette de chaque contribuable s'élevant ainsi à 36 730,20 $.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Madame la Présidente, C-17 est un projet de loi omnibus qui comprend plusieurs éléments très différents allant de coupure dans l'assurance-chômage au transport des grains dans l'Ouest, le transport dans les provinces Maritimes, y compris une marge de crédit pour la Société Radio-Canada.

(1320)

En fait, le projet de loi C-17 touche, directement ou indirectement, 16 lois fédérales, 11 directement et 5 indirectement. Cela manifeste, d'après moi, le manque de transparence du gouvernement fédéral, malgré sa promesse, durant les élections, de fournir cette transparence.

Le projet de loi C-17 est le pire cas qu'on peut illustrer du manque de volonté du gouvernement fédéral d'être ouvert quand on fourre plusieurs lois dans un sac et on demande aux députés de voter globalement. À l'intérieur de C-17, plusieurs éléments sont positifs, d'autres sont négatifs. Je m'oppose carrément, évidemment, aux réductions de l'assurance-chômage, ce qui est vraiment très grave au Canada.

Quant à la marge de crédit de 25 millions pour la Société Radio-Canada, c'est de cette partie du projet de loi C-17 que je veux parler dans les prochaines dix minutes. On ne peut pas s'opposer à ce que la Société Radio-Canada ait une marge de crédit de 25 millions de dollars. Bien sûr, il y a plusieurs arguments qui peuvent être avancés pour donner raison à la Société Radio-Canada. Le député de Burin-Saint Georges disait tantôt que the intention is to put the financial house in order.

Il y a plusieurs autres raisons, dont peut-être l'achat d'équipement nouveau ou la restructuration. La question n'est pas nécessairement la marge de crédit de 25 millions de dollars, autant que le contrôle. Savoir comment cet argent sera dépensé, pourquoi il sera dépensé et comment il sera remboursé. C'est ça la question. Si ce gouvernement avait un souci de transparence, il ferait en sorte que ce crédit de 25 millions de dollars, comme d'ailleurs toutes les dépenses de Radio-Canada, soit scruté, ici même au Parlement. Il est évident aux aveugles qu'il y a un manque de bonne gestion à Radio-Canada.

J'ai quelques exemples à donner du manque de bonne gestion à Radio-Canada. Cela traduit essentiellement l'esprit de ce gouvernement. Il y a un manque de gestion des choses financières dans le gouvernement de façon générale. À Radio-Canada, c'est d'autant plus évident. D'abord, nous, au Parlement, nous ne pouvons pas regarder en détail les dépenses de Radio-Canada. Il ne semble pas y avoir de plan d'entreprise; s'il y en a un, il a été «tabletté» depuis longtemps. Mais depuis quelques années, cette mauvaise gestion nous crée des problèmes très graves. Alors que ce gouvernement cherche de l'argent dans les poches des chômeurs, dans les crédits d'impôt des aînés, on semble témoigner de gaspillages éhontés de la part de la Société Radio-Canada.

J'oserais même poser des questions concernant le fait que la Société Radio-Canada semble vouloir de plus en plus favoriser le réseau anglais au détriment du réseau francophone. Donc, au sujet de la mauvaise gestion, c'est plutôt évident. Imaginez-vous que depuis 1984, depuis 10 ans, on a coupé environ 2 000 postes à Radio-Canada. On a fait des coupures assez radicales, par exemple, dans la production régionale. En 1990-1991, il y a eu des coupures de 46 millions de dollars dans la production régionale.


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Et puis, même le ministre du Patrimoine canadien annonce tout récemment une coupure additionnelle de 100 millions de dollars qui s'échelonnera sur cinq ans. Des coupures assez imposantes à Radio-Canada, des mises à pied, des pertes d'emplois, des pertes de services dans des régions, alors qu'en même temps Radio-Canada a augmenté sa part du marché publicitaire.

(1325)

En 1979, Radio-Canada avait seulement 15 p. 100 de la part du marché publicitaire, et en 1992, cela a augmenté jusqu'à 25 p. 100, c'est-à-dire que sa part de marché publicitaire a presque doublé en dix ou quinze ans. Ses revenus, donc, ont conséquemment doublé ou augmenté considérablement.

Donc, on a eu des coupures draconiennes dans le budget du personnel de Radio-Canada, on a eu des augmentations du marché de publicité et, malgré tout cela, le déficit de Radio-Canada ne cesse de grimper. En 1992, 1993, 1994, 1995, on a épongé le déficit de Radio-Canada à même le surplus généré par les fonds de pension des employés, et on prévoit que ce même déficit s'établira, en 1995-1996, à 41 millions de dollars. Selon les propres données de Radio-Canada, il va augmenter à 78 millions de dollars pendant l'année financière 1998-1999. Mais mon Dieu, qu'est-ce qui ne marche pas à Radio-Canada?

On se pose de sérieuses questions sur le fonctionnement de Radio-Canada, la gestion de Radio-Canada. C'est évident que c'est mal géré, il n'y a pas de contrôle, c'est un peu comme le gouvernement fédéral, d'ailleurs, un genre de bateau en pleine mer qui est en train de couler.

Tout ce qu'on demande de ce côté-ci de la Chambre, ce n'est pas de s'opposer nécessairement à la marge de crédit de Radio-Canada, parce que Radio-Canada, c'est évidemment, un réseau important, il y a des journalistes de qualité, une compétence dans ce réseau qu'on veut garder. Donc, on ne s'oppose pas nécessairement à cette marge de crédit, mais on aimerait quand même avoir le pouvoir, au Parlement, d'examiner où va cet argent et pourquoi le déficit augmente malgré les coupures et malgré l'augmentation de la part du marché publicitaire à Radio-Canada.

C'est une demande élémentaire. Et si le gouvernement fédéral avait vraiment un souci de transparence, on nous l'accorderait. Mais bien sûr, le gouvernement ne nous l'accordera pas, parce qu'il a évidemment la force du nombre, il va passer cette loi peu importe les bonnes raisons d'apporter des améliorations.

Les coupures sont graves, même que, par exemple, je viens de vous mentionner qu'en 1991-1992, il y a eu des coupures de 108 millions de dollars dans le budget de Radio-Canada, et savez-vous qu'il en a coûté 129 millions de dollars pour faire ces coupures de 108 millions de dollars? La restructuration, c'est-à-dire tous les services qu'on a mis en place pour faire en sorte que les coupures se fassent, a coûté 29 millions de dollars de plus que les coupures.

Il y a eu une augmentation des coûts de production depuis 1988 jusqu'en 1993 de 177 millions de dollars dans le réseau de Radio-Canada, et cela me porte à conclure qu'il se peut que dans cette mauvaise gestion de la part de Radio-Canada-et effectivement, si j'avais eu plus de temps, j'aurais pu le démontrer-qu'il y a de l'argent qui soit transféré à CBC au détriment de Radio-Canada.

De toute façon, en conclusion, nous, de notre part, aimerions bien sûr avoir le droit, au Parlement, d'examiner l'utilisation de cette marge de crédit de 25 millions de dollars à Radio-Canada.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Sur la même motion, je reconnais l'honorable député de Témiscamingue.

(1330)

M. Yvan Bernier (Gaspé): Madame la Présidente, ce n'est point une insulte d'être confondu avec le député de Témiscamingue, mais je laisserai à ce dernier l'occasion de parler en son nom tout à l'heure.

Je suis heureuse de prendre la parole sur la troisième partie du projet de loi omnibus concernant le pouvoir d'emprunt de Radio-Canada. Comme mes collègues l'ont dit tout à l'heure, le Bloc québécois n'est pas un empêcheur de tourner en rond. Le Bloc québécois a présenté une motion, de façon à ce qu'on ait un peu plus de transparence dans la gestion de Radio-Canada, mais comme on est des bons gestionnaires nous aussi, on comprend que la société de la Couronne a besoin de pouvoir d'emprunt pour être capable d'opérer. Alors que cet emprunt serve sous marge de crédit ou qu'on soit obligés d'acheter d'autres actifs pour financer de nouvelles choses, nous allons accorder notre appui à cela.

Cependant, ce qui nous chatouille, c'est le manque de transparence dans la gestion de Radio-Canada. Ce manque de transparence où on a vu qu'il y a eu des mesures de gestion qui ont été établies, mais malgré tout cela, malgré qu'on augmente les revenus et qu'on en baisse certains, on est encore en déficit. Il y a un déficit structurel et c'est comme une forme de cancer, cela ronge tout le temps chez Radio-Canada.

Pourquoi je parle de cancer, madame la Présidente? Cela m'amène à un deuil qu'on a vécu chez nous en Gaspésie par rapport à ce manque de transparence et de volonté d'écouter la population, et il s'agit de la fermeture que Radio-Canada a faite en région. On a fermé trois stations de télévision à Sept-Îles, à Rimouski et à Matane.

Le manque de transparence que je reproche là-dedans, c'est comme si le gouvernement avait demandé ou permettait à la société de faire le job de bras, le job sale. «Ce sera toi qui fera ça.» C'est comme si on avait voulu couper les moyens de communication des gens de l'est du Québec, et principalement de la Gaspésie.

Cette fois-ci, on dirait que le gouvernement a un peu honte de se présenter lui-même pour emprunter de l'argent. On dit à Radio-Canada: «Toi, tu iras cette fois-ci». Je regrette, mais tant que les Québécois vont faire partie de cette fédération, tant qu'ils feront partie du Canada, ce sont des payeurs de taxe, ils ont droit de regard.

On nous a amputé de ce qu'on considérait notre fierté, c'est-à-dire notre moyen de communication. Maintenant, on nous demande de fermer les yeux et de permettre à Radio-Canada d'emprunter jusqu'à un maximum de 25 millions de dollars sans en savoir plus. L'objectif de la motion est justement que l'on puisse savoir à quoi vont servir ces fonds-là et surtout comment la Société Radio-Canada entend rembourser cela. Comme je l'ai dit, tant que le Québec va faire partie du Canada, on va devoir payer une partie de cet emprunt-là, on va devoir payer une partie du déficit. On se chicanera dans le temps comme dans le temps pour savoir quelle sera la partie, mais tant et aussi longtemps


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qu'on va être ici, nous souhaitons qu'il y ait un peu plus de transparence.

Je pense que le Parlement du Canada doit bien aux Canadiens et aux Québécois des explications. Les gens sont capables de comprendre. Ce ne sont pas des «valises», si on veut utiliser une belle illustration, ils n'ont pas une «poignée dans le dos». La preuve, c'est que les meilleurs cotes d'écoute se retrouvent à l'heure des nouvelles, l'heure des magazines d'information. Or, c'est donc que les gens ont une soif de comprendre. Ils ont une soif de connaître ce qui se passe. Et à titre de parlementaires à la Chambre des communes, on se doit d'être à l'écoute de la demande des gens. Mais je ne pense pas qu'on l'ait assez fait par le passé.

Alors, cela nous inquiète de voir que l'on puisse accorder un chèque en blanc à la Société, sans savoir ce qu'elle va faire avec ce chèque. Qu'on nous dise que nous avons besoin d'un pouvoir d'emprunt de 25 millions de dollars, parce que dans l'erreur que nous avons commise de fermer les stations de télévision régionale, nous avons besoin de recapitaliser en région et une partie de ces 25 millions de dollars va servir à cela. J'applaudirais parce qu'au moins on nous dirait ce qui se passe. Mais là on dit: «On emprunte 25 millions de dollars». À quoi vont-ils servir? Je pense que ce soir, si les gens écoutent toujours le canal de la Chambre, parce qu'à défaut parfois d'avoir les nouvelles directement de leur député aux nouvelles locales, les gens écoutent la câblodistribution.

(1335)

Alors ce soir ils vont pouvoir entendre que leur député de Gaspé souhaite que la Société Radio-Canada réfléchisse comme il faut à la réouverture et à la réparation de l'erreur des fermetures des stations régionales, et qu'ensuite la Société Radio-Canada nous indique comme il faut, comme bon gestionnaire, à quoi vont servir les 25 millions de dollars, et qu'on puisse, nous, à titre de parlementaires, voir où cela va aller.

Peut-être que si les demandes de la Société Radio-Canada étaient amplement détaillées, correctement justifiables, peut-être que le Bloc québécois serait un des premiers à leur dire: Eh bien, écoutez, votre demande est tellement raisonnable, votre marge de manoeuvre de 25 millions de dollars n'est pas suffisante, nous serions peut-être les premiers à vouloir l'augmenter. Mais comprenez notre crainte. Un chèque en blanc de 25 millions de dollars est quelque chose d'impensable. On est en 1994. Les gens sont en droit de savoir.

Pourquoi est-ce que j'insiste tellement là-dessus? J'ai parlé de la fermeture. J'ai dit qu'on serait d'accord avec la marge de manoeuvre de 25 millions qu'ils veulent, c'est le manque de transparence.

Je ne voudrais pas m'arrêter ici en passant sous silence qu'on reconnaît l'excellence des artisans et des artistes de la Société Radio-Canada. On a nos idoles. On a Marylin qui fait de la politique municipale à 19 heures; on a aussi des Bernard Derome qui font les nouvelles. C'est donc dire que les Québécois, et j'imagine le reste des Canadiens, sont partagés en ce sens-là. Ils ont besoin de divertissement mais ils ont aussi besoin d'information. Cette information, j'en conviens, elle coûte quelque chose. Il faut que le Parlement, par ces mesures administratives, permette à la Société de pouvoir respecter le mandat que le Parlement canadien lui a accordé. Cependant, dans ce besoin d'information, les gens de la Gaspésie, les gens de l'Est, je tiens à le répéter, se sentent lésés.

Actuellement nous assistons, dans nos bulletins de nouvelles, à la diffusion de nouvelles à partir de Québec. Je n'ai rien contre les nouvelles de Québec, j'ai de bons amis à Québec, à Québec-Est, les députés de ces circonscriptions, cependant, les nouvelles provenant de ces régions nous intéressent moins parce qu'on a besoin de savoir ce qui se passe dans notre ville, ce qui se passe dans le village voisin. Ce sont des nouvelles qui sont tout aussi importantes. Au même titre, madame la Présidente, si on vous diffusait chez vous des nouvelles en provenance de Gaspé. Vous allez dire: quelle magnifique région! Mais vous allez moins vous sentir concernée par les nouvelles qui en proviennent. Bien sûr, on vous accordera à la fin du bulletin deux ou trois minutes concernant votre localité. C'est bien peu. C'est ce qui se passe dans notre cas.

C'est pourquoi, à titre de député du Bloc québécois, je tenais à m'exprimer aujourd'hui en cette Chambre sur le fait que, oui comme gestionnaire je suis d'accord qu'il faut des outils de gestion pour la Société Radio-Canada. Je suis cependant outré du manque de transparence dans l'intention du gouvernement à agir et je tiens à spécifier que si on désire impliquer tous les Canadiens là-dedans, n'oublions pas qu'on vient de faire un affront aux gens de l'est du Québec, aux Gaspésiens, en fermant leur station régionale. Et si on veut me convaincre de la maturité de Radio-Canada, qu'on nous indique qu'on va réparer le tort qui a été commis.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Madame la Présidente, je voudrais renchérir sur les propos de mon prédécesseur parce qu'en tant que député de la même région, de l'est du Québec, quand on voit apparaître la possibilité de pouvoir d'emprunt pour Radio-Canada, la question qu'on se pose est la suivante: Pour quoi faire? Finalement on a été très échaudés par le passé.

Quand on pense qu'on a coupé 46 millions de dollars lorsqu'on a fermé des stations régionales, qu'on a supprimé 100 postes de spécialistes en communication, en radio-télévision, et qu'en même temps on ajoutait 61 millions de dollars dans les réseaux, il y comme un déséquilibre.

(1340)

Donc, après cette expérience, on se dit: «Si on a fait cela dans le passé et que maintenant on veut s'ajouter un pouvoir d'emprunt, qu'allons-nous faire avec?»

Un autre bel exemple, ce sont les Jeux d'Atlanta de 1996. Pour les Jeux olympiques, Radio-Canada a présenté une proposition de 28 millions de dollars. C'est de la surenchère absolument inacceptable, quand on pense que TVA avait proposé 10 millions de dollars pour la même couverture.

La différence des 18 millions sera-t-elle prise à même cette marge d'emprunt-là? Est-ce avec cela qu'on va assurer le paiement un peu démesuré, surtout quand on pense que les sommes qu'on met là-dedans servent à assurer la couverture d'un événement qui est de courte durée, alors qu'on a fait des coupures qui privent nos régions d'une couverture adéquate, mais là, à l'année longue?

J'échangerais facilement les trois semaines des Jeux d'Atlanta pour une station de télévision dans l'Est du Québec et sur la Côte-Nord, qui permettrait une couverture à l'année, qui nous permettrait de savoir comment les gens chez nous assurent leur


4459

vie, comment ils se prennent en main et définissent où ils veulent aller.

Vous ne serez donc pas étonnés que, finalement, ce que nous demandons, nous du Bloc québécois, par rapport à ce pouvoir d'emprunt-là, c'est la transparence. On sait que Radio-Canada dépose un plan d'entreprise depuis quelques années déjà au ministre, mais on n'a jamais vu ces plans d'entreprise ici, en Chambre. Radio-Canada n'est pas seulement un produit qui fabrique des conserves. C'est une entreprise qui a à assurer un mandat de communication dans le Canada.

De ce fait, on pourrait s'attendre à ce qu'elle ait à rendre compte au Parlement du Canada de la façon dont elle assume son travail, pour qu'on puisse voir, non pas faire de la censure, mais voir de quelle façon elle dépense l'argent, et on pourrait commencer à appliquer cela, notamment sur l'utilisation qui va être faite de ce pouvoir d'emprunter.

De quelle façon on va avoir utilisé les 25 millions de dollars qui vont avoir coûté des intérêts? Est-ce que cela sera sur des projets qui reçoivent l'assentiment de l'ensemble du milieu canadien et du milieu québécois? Est-ce que ce sont des projets qui vont permettre un meilleur service à la population du Québec et du Canada, ou bien cela sera-t-il consacré à des projets qui, finalement, sont comme un peu la cerise sur le sundae, où on ajouterait un peu de chair sur l'os dans des secteurs qui sont déjà couverts?

Il m'apparaît donc important qu'on puisse s'assurer de la façon dont cela va être dépensé. On est d'autant plus sensible à l'importance de cette transparence que lorsqu'on fait la liste des déficits prévus de Radio-Canada, malgré des coupures notamment dans les stations régionales dans les années passées, on prévoit pour 1995-1996 un déficit de 41 millions de dollars; en 1996-1997, 54 millions de dollars; en 1997-1998, 65 millions de dollars, et en 1998-1999, 78 millions de dollars.

Donc, si le pouvoir d'emprunt contribue à augmenter ce déficit sans ajouter aux services, c'est sûr que nous ne pourrons pas donner notre aval à de tels gestes. Ce qu'on veut, c'est pouvoir connaître le budget de Radio-Canada, où il va, comment il est dépensé, et surtout, comment on s'organise pour donner les services à l'intérieur du Québec et du Canada, de telle façon que toutes les populations aient une information adéquate.

Je vais vous donner un exemple de cela. Il y a deux semaines, je suis allé agir à titre de commissaire à des audiences communautaires organisées par le mouvement Dignité rurale et par le Ralliement gaspésien sur la nécessité de pouvoir conserver le train de Chaleur, en Gaspésie.

La couverture de presse qu'on a eue là-dessus était intéressante. La couverture médiatique au niveau de la télévision l'a été beaucoup moins, pas parce que les techniciens ou les spécialistes en communication, les annonceurs de l'Est du Québec ne sont pas de qualité, mais lorsqu'on a deux ou trois personnes pour couvrir un territoire comme le nôtre, sur des centaines et des centaines de kilomètres, c'est évident qu'on ne peut pas assurer le même service que lorsqu'on a des stations sur place qui permettent d'aller donner un service adéquat.

Et on voit là tout le danger de la désintégration sociale qui peut résulter du fait qu'on n'a pas de réseau de communication qui nous permette de nous définir en tant que région. Là-dessus, il y a une volonté qui ne s'effacera jamais d'assurer des services adéquats de radio-télévision.

(1345)

Et on est en démarches, depuis que la fermeture a été faite, pour s'assurer que les services vont être offerts à nouveau et qu'on va pouvoir avoir chez nous des experts, des gens qui peuvent assurer la couverture adéquate de notre région, autant pour les gens à l'intérieur de la région que pour assurer la diffusion vers l'externe.

Donc, oui, on pourrait dire que le pouvoir de Radio-Canada d'emprunter est quelque chose de pertinent, comme pour toute autre entreprise qui peut avoir, à un moment donné, à faire des emprunts. Mais, pour ça, il faut que ce soit une entreprise qui nous prouve que, effectivement, elle utilise des fonds de façon adéquate et juste et aussi qu'elle remplit son mandat, qui est d'assurer la communication à la grandeur du Canada.

Il faut sortir de l'image que nous a laissée le gouvernement conservateur précédent qui, que ce soit dans le cas de VIA Rail, de la Société canadienne des postes ou de la Société Radio-Canada, s'est mis à définir le mandat de ces sociétés nationales comme étant le mandat de sociétés privées, alors qu'elles ont un mandat qui doit tenir compte de la réalité de l'ensemble du pays.

Dans ce contexte, on voudrait sensibiliser le gouvernement à la nécessité que, s'il y a pouvoir d'emprunt pour Radio-Canada, il a à déposer ici en Chambre l'utilisation qui aura été faite des sommes prévues par ces emprunts, que ce soit sous forme de marges de crédit ou autres.

J'espère que les députés du côté du gouvernement seront sensibles à cet amendement et qu'ils vont voter avec nous autres pour être certains que, au moins, on saura où va notre argent.

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

[Français]

M. Loubier: Madame la Présidente, est-ce que vous parlez de la motion de ma collègue?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Il s'agit des motions 19, 20, 21 et 22, et le vote portera sur la motion 19, proposée par M. Solberg.

[Traduction]

Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.


4460

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est différé. Le vote par appel nominal s'appliquera également aux motions nos 20 à 22.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville) propose:

Motion no 23
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 21.
(1350)

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier) propose:

Motion no 24
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 22, par substitution, à la ligne 31, page 10, de ce qui suit:
«cinquante-sept pour cent de sa rémunéra-».
Motion no 25
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 22, par substitution, à la ligne 13, page 11, de ce qui suit:
«cinquante-sept pour cent de sa rémuné-».
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): propose:

Motion no 26
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 2.
[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville) propose:

Motions nos 27, 28, 29 et 30
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 22.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 23.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 24.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 25.
[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup) propose:

Motion no 31
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 26:
a) par substitution, à la ligne 26, page 13, de ce qui suit:
«48.1 (1) Par dérogation à l'article 48, le taux»;
b) par substitution, aux lignes 29 à 31, page 13, de ce qui suit:
«a) la période de cinq mois commençant le 1er janvier 1994, 3,07 p. 100 des rémunérations assurables de cette période;
b) pour la période de sept mois commençant le 1er juin 1994, 3 p. 100 des rémunérations assurables de cette période;
c) pour l'année 1995, 3 p. 100 des rémunérations assurables de cette année;
d) pour l'année 1996, 3 p. 100 des ré-»; et
c) par adjonction, après la ligne 36, page 13, de ce qui suit:
«(2) Pour l'application du paragraphe 50(1), de l'article 51, de l'alinéa 75(1)p) et du paragraphe 75(5) à l'année 1994, les périodes mentionnées aux alinéas (1)a) et b) sont chacune assimilées à une année au sens de ces dispositions.»
[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville) propose:

Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 26.
[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier) propose:

Motion no 33
Qu'on modifie le projet de loi C-17, à l'article 27, par substitution, à la ligne 41, page 13, de ce qui suit:
«l'approbation de la Chambre des communes, donnée par résolution de cette dernière,».
[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville) propose:

Motion no 34
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 27.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot) propose:

Motion no 35
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 28.
(1355)

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville) propose:

Motions nos 36, 37 et 38
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 29.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 30.
Qu'on modifie le projet de loi C-17 en supprimant l'article 31.
-Madame la Présidente, je tiens à dire encore une fois à la Chambre pourquoi nous proposons ces motions. Nous nous opposons à l'utilisation par le gouvernement d'un projet de loi omnibus pour mettre en oeuvre certaines dispositions budgétaires au lieu de présenter des projets de loi distincts pour chaque loi qu'il propose de modifier.

Je voudrais aujourd'hui parler plus particulièrement des modifications proposées à la Loi sur l'assurance-chômage. Je suis intervenu dans le débat du projet de loi C-17 le 14 avril, à l'étape de la deuxième lecture, et j'ai dit à ce moment-là que le Parti réformiste était généralement favorable aux modifications proposées à la Loi sur l'assurance-chômage, en soutenant cependant que le gouvernement n'allait pas assez loin. Même si nous estimons qu'on aurait pu apporter d'autres améliorations aux dispositions de la loi en la matière, nous sommes disposés à voter en faveur des modifications proposées dans la mesure à l'étude.

4461

Il y a cependant d'autres dispositions du projet de loi C-17 que nous ne pouvons pas appuyer, par exemple celles concernant le pouvoir d'emprunt accordé à la Société Radio-Canada. Par conséquent, pour faire connaître notre opposition à certaines dispositions du projet de loi, nous devons voter contre le projet de loi en entier.

Comment exprimer nos points de vue et ceux de nos électeurs quand nous sommes forcés de voter pour ou contre un projet de loi omnibus portant sur des sujets aussi divers? Comment pouvons-nous le faire? Si ce projet de loi était subdivisé logiquement dans tous ses éléments, le processus démocratique s'en trouverait facilité. Il serait possible de voter de façon éclairée en s'appuyant sur l'analyse de chaque partie du projet et les réactions des électeurs.

Voilà la raison d'être de notre motion. Loin de faire de l'obstruction, nous sommes pratiques. Nous voulons que les procédures de la Chambre soient bien comprises par les électeurs, et les projets de loi d'ensemble ne sont pas une façon logique de procéder. Les électeurs nous ont élus pour donner au Parlement des idées qui reposent sur le bon sens, et je crois que les électeurs seraient d'accord sur notre position au sujet des projets de loi omnibus et des motions que nous avons présentées aujourd'hui.

Je vais maintenant parler spécifiquement de chacune des modifications au projet de loi C-17 que nous appliquerions en ce qui concerne la Loi sur l'assurance-chômage. Je vais les commenter au fur et à mesure.

Pour commencer, le projet de loi ramènerait les cotisations pour 1995 et 1996 de 3,07 $ à 3 $ les 100 $ de gains assurables. Le Parti réformiste est généralement d'accord sur cette mesure, mais il demande au gouvernement d'envisager d'autres réductions des taxes sur la masse salariale. Si c'est bien là un moyen de créer des emplois, pourquoi ne pas trouver d'autres moyens de réduire ces taxes?

Deuxièmement, le projet de loi abaissera les prestations à 55 p. 100 des gains assurables, contre 57 p. 100 maintenant. Le Parti réformiste appuie cette mesure, mais il demande au gouvernement de les abaisser encore plus, pour les faire correspondre à ce qui est versé dans les autres pays de l'OCDE et lutter contre la dépendance à l'égard du régime.

Troisièmement, le projet de loi augmente les prestations pour les gagne-petit qui ont des personnes à charge, les portant à 60 p. 100 des gains assurables au lieu de 57 p. 100. Le Parti réformiste est d'accord, car cette mesure commence à orienter le programme vers ceux qui en ont le plus besoin, ce qui doit être l'objectif de nos programmes sociaux.

Quatrièmement, le projet de loi allonge la période de référence nécessaire pour devenir admissible. Elle passe de dix semaines. . .

Le Président: Le député aura amplement le temps de poursuivre son intervention après la période des questions.

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


4461

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ÉTHANOL

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton): Monsieur le Président, l'éthanol est présenté comme un additif subventionné pour l'essence, un additif qui présente des avantages sur le plan de l'environnement.

Toutefois, le département américain de l'Énergie a révélé ce mois-ci qu'une évaluation de l'éthanol avait montré que les inconvénients pèsent plus lourd que les avantages, si on tient compte de l'argent à dépenser et de la pollution créée par la distillation. En fait, l'éthanol serait d'un intérêt négligeable pour améliorer la qualité de l'air.

Aux États-Unis, des groupes environnementaux comme le Sierra Club se sont publiquement prononcés contre l'utilisation d'éthanol à cause des coûts, de l'utilisation d'engrais et de la pollution que la production peut occasionner.

L'expérience américaine révèle que les retombées économiques pour les agriculteurs sont minimes.

Quiconque dépense les deniers publics doit pouvoir compter sur des résultats positifs. Avant de nous lancer dans cette aventure, n'oublions pas les contribuables et soyons prêts à leur expliquer exactement ce qu'ils obtiendront en retour de leur argent.

* * *

[Français]

LE STATUT DE RÉFUGIÉ

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, de très graves problèmes minent la crédibilité du processus de révision pour motifs humanitaires des cas refusés des revendicateurs du statut de réfugié. Malgré le fait que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration connaisse, et ce depuis le mois de mars, ces problèmes, les expulsions ont continué sans interruption et sans que le ministre ne s'en préoccupe outre mesure.

Le rapport Davis Wallman est très clair: le processus manque de compassion, il est arbitraire et il met en danger la vie de centaines de personnes que l'on expulse dans leur pays d'origine où les droits de la personne sont constamment violés.

Il y a lieu de s'interroger sérieusement à savoir si le Canada respecte toujours ses obligations internationales ou s'il adopte de plus en plus une attitude pointilleuse et méfiante.

Le ministre ne peut plus se retrancher derrière des études et comités. Il doit agir immédiatement!


4462

[Traduction]

LE MAINTIEN DE LA PAIX

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, je suis rentré au Canada hier après avoir participé à une visite que le Comité mixte spécial de la défense a rendue à nos troupes en Bosnie et en Croatie, et je puis dire que nous avons constaté qu'elles considèrent leur rôle et leurs activités là-bas avec beaucoup d'enthousiasme.

Même s'ils n'y sont que depuis peu de temps, nos gens se sont vite adaptés à la situation dans laquelle ils doivent exercer leurs fonctions. Ils se sont rapidement familiarisés avec la région dont ils sont responsables et les gens avec qui ils doivent négocier pour en arriver à un règlement pacifique des nombreux problèmes non encore résolus.

Nos forces doivent faire preuve de beaucoup de détermination, de diplomatie, de patience, de compassion et de compréhension, et elles se sont encore surpassées.

La population locale les respecte pour leur professionnalisme, leur dévouement, leur impartialité et leur fermeté.

Certes, nous sommes encore loin d'avoir réglé tous les problèmes, mais tous les Canadiens doivent être fiers du rôle que le Canada joue par l'entremise de ses forces armées dans l'ancienne Yougoslavie.

* * *

LE FESTIVAL DE STRATFORD

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour inviter tous les députés et tous les Canadiens à assister au Festival de Stratford, le théâtre de répertoire national de langue anglaise du Canada.

Le lancement officiel de la 42e saison du Festival de Stratford, le joyau du sud-ouest de l'Ontario, aura lieu le lundi 30 mai. La troupe de théâtre de répertoire la plus réputée de l'Amérique du Nord se produira sur trois scènes de calibre mondial dans une petite ville reconnue pour ses espaces verts, ses boutiques et ses restaurants. C'est une grande réussite culturelle.

Le théâtre atteint tous les ans le plus haut niveau d'excellence artistique tout en attirant des milliers de visiteurs qui injectent des millions de dollars dans l'économie locale.

Cette année, la saison prendra fin le 13 novembre et offrira dix extraordinaires productions. J'espère vous y voir.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

Mme Roseanne Skoke (Central Nova): Monsieur le Président, on peut trouver dans ma circonscription, Central Nova, un excellent exemple de la façon dont le gouvernement, l'industrie et la collectivité collaborent pour respecter l'environnement.

Ces dernières années, l'usine de pâte à papier Scott Maritimes, dans ma circonscription, a travaillé sans relâche avec la Nouvelle-Écosse pour améliorer la qualité des effluents qui sont déversés dans la lagune adjacente de Boat Harbour.

La Scott Maritimes Limited modifie actuellement ses installations de traitement pour respecter le règlement du gouvernement fédéral sur les effluents des fabriques de pâtes et papiers. De plus, la province, en tant que propriétaire des installations de traitement de Boat Harbour, a proposé de construire un pipeline pour déverser les effluents traités un kilomètre plus loin, dans le détroit de Northumberland, au lieu de les déverser dans la lagune de Boat Harbour.

Monsieur le Président, sachez que le projet de construction d'un pipeline fait actuellement l'objet d'une première évaluation environnementale d'Environnement Canada en collaboration avec d'autres ministères fédéraux et la province pour que l'on puisse en étudier les incidences sociales et environnementales.

Comme première étape, des fonctionnaires fédéraux rencontreront au début de juin des pêcheurs, des groupes d'autochtones et d'autres organisations locales.

* * *

LE DÉCÈS DE M. JOHN WINTERMEYER

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui rendre hommage à John Wintermeyer, anciennement de Kitchener, en Ontario, qui est décédé récemment après avoir mené un long combat contre la maladie de Lou Gehrig.

John Wintermeyer a dirigé, autrefois, le Parti libéral de l'Ontario. Même s'il n'a jamais été élu, il a toujours défendu les principes les plus nobles de la politique et a toujours été un pilier de sa collectivité et de son église.

(1405)

Trois de ses soeurs et son beau-frère, qui est mon oncle préféré, sont ici à Ottawa, aujourd'hui. Je demanderais à tous les députés de se joindre à moi pour rendre hommage à feu John Wintermeyer.

* * *

[Français]

LE CIRQUE DU SOLEIL

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, j'aimerais souligner aujourd'hui le dixième anniversaire du Cirque du Soleil, organisation qui peut être fière de son succès à l'échelle internationale.

Au fil des ans, de nombreux prix sont venus confirmer l'indéniable talent de ces artistes, dont la médaille d'or du 2e Festival international de cirque de Gênes, la médaille d'or du 15e Festival mondial du cirque de demain, présenté à Paris, ainsi que plusieurs autres distinctions en Europe, en Asie et en Amérique.

Après dix ans d'histoire, le Cirque du Soleil contribue encore aujourd'hui, de manière remarquable, à l'affirmation du Québec


4463

dans le monde avec ses 580 employés, dont 162 artistes, et son budget d'opération de plusieurs millions de dollars.

Six millions cinq cent mille spectateurs ont déjà assisté à l'une ou l'autre de leurs représentations et on en attend 1,5 million pour cette année.

Voilà un bel exemple de succès que connaissent les Québécois lorsqu'ils prennent en main leur destinée.

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Monte Solberg (Medicine Hat): Monsieur le Président, hier, j'ai reçu un certain nombre de lettres qui m'ont été adressées par des élèves de 10e année de la classe de sciences sociales de l'école Senator Gershaw de Bow Island, en Alberta.

L'une d'elles dit ceci:

Monsieur,

J'ai décidé de vous écrire au sujet d'une question qui me préoccupe, la Loi sur les jeunes contrevenants.
Comme je n'ai que quinze ans, la question des jeunes contrevenants me touche de plus près qu'un adulte. Il n'y a pas longtemps, j'ai vu à la télévision un jeune garçon de dix ans déjà expert en vol de voitures. Il a avoué ses crimes, sachant qu'il pouvait s'en tirer et que tout ce que la police pouvait faire, c'était lui tirer les oreilles.
Je trouve épouvantable que nous protégions les criminels. Il y a environ une semaine, à Medicine Hat, un jeune a poignardé un autre jeune. Son nom n'a pas été divulgué. Pourquoi? Qui a commis le crime? Pourquoi protégeons-nous l'enfant qui a poignardé un de ses compagnons de classe? C'est nous qui devrions être protégés, pas lui.
Est-ce vraiment ce que nous voulons au Canada? Ce sont là les générations qui seront un jour responsables de notre grand pays. Que va-t-il advenir?
Je vous prie d'agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Adam Larsen

* * *

LES OLYMPIADES DE MATHÉMATIQUES

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey): Monsieur le Président, en tant qu'ancien professeur à l'école secondaire de West Hill à Owen Sound, je peux dire par expérience que la majorité des étudiants sont de bons citoyens.

Les députés ne peuvent pas savoir combien je suis fier de ces jeunes qui vont reprendre le flambeau et représenter le Canada au XXIe siècle.

Je prends la parole aujourd'hui pour féliciter Chris Hendrie, de l'école secondaire de West Hill, à Owen Sound. Chris vient d'être sélectionné pour faire partie, avec un petit nombre d'élèves d'autres régions du Canada, de l'équipe olympique canadienne de mathématiques.

Cet été, Chris ira à Vancouver pour se préparer en vue des olympiades internationales de mathématiques et, de là, se rendra à Hong Kong pour représenter, avec le reste de l'équipe, le Canada à ce concours mondial. Les membres de l'équipe sont sélectionnés par la Société mathématique du Canada, sous la direction de George Gwyenther, de St. John's, Terre-Neuve.

L'équipe canadienne se compose de quatre élèves du Grand Toronto, d'un élève de St. John's, Terre-Neuve, et d'un élève de Owen Sound.

* * *

LE MOIS DE LA FIBROSE KYSTIQUE

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra): Monsieur le Président, mai est le Mois de la fibrose kystique. C'est l'occasion de nous sensibiliser aux énormes défis que doivent affronter ceux et celles qui sont atteints de la fibrose kystique. Il s'agit d'une maladie héréditaire qui affecte surtout le système respiratoire des enfants en bas âge et qui cause des dommages irréparables, mortels, aux poumons.

Depuis 1960, les bénévoles de la Fondation canadienne de la fibrose kystique s'emploient à améliorer le sort des personnes atteintes de la fibrose kystique et à y trouver un remède. Grâce à la recherche et à de meilleures formes de traitement, l'espérance de vie de ces malades est passée de moins de quatre ans à plus de 30 ans.

J'exhorte tous les députés à appuyer l'oeuvre de la Fondation canadienne de la fibrose kystique et à rendre hommage aux chercheurs qui se consacrent à la recherche de la cause et du remède de cette maladie.

* * *

[Français]

L'INDUSTRIE CINÉMATOGRAPHIQUE

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le réalisateur torontois Atom Egoyan qui a mérité le prestigieux prix de l'Association internationale des critiques de films dans le cadre du Festival international du film de Cannes 1994 pour son film Exotica.

Jeune cinéaste de 33 ans, Atom Egoyan s'est rapidement distingué par son talent, son intelligence et son audace créatrice avec des films tels que Family Viewing, Speaking Parts et The Adjuster qui ont obtenu de grands succès sur la scène internationale.

(1410)

[Traduction]

Depuis qu'il a produit son premier long métrage en 1985, il a su réaliser des oeuvres qui attirent un public de plus en plus nombreux, aussi bien au Canada qu'à l'étranger. Exotica est le premier film canadien de langue anglaise qui soit présenté dans le cadre de la compétition officielle du festival de Cannes, depuis 1985. Cet honneur représente à l'évidence une étape importante pour la reconnaissance de notre industrie cinématographique.


4464

[Français]

LE PROJET HIBERNIA

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Monsieur le Président, la publication, cette semaine, d'une nouvelle étude sur le projet Hibernia nous donne une nouvelle fois l'occasion d'exprimer l'inquétude des Canadiens et des Québécois face au gouffre financier que constitue ce mégaprojet. L'étude de deux professeurs de l'Université Memorial à Terre-Neuve illustre clairement la folie de ce projet qui s'abreuve à coups de milliards de dollars de fonds publics simplement pour rester en vie. Même le secrétaire général de l'OPEP mettait en cause, cette semaine, la viabilité économique du projet.

Par son refus obstiné de faire la preuve de la rentabilité d'Hibernia auprès de la population, le gouvernement canadien fait encore une fois la démonstration de son irresponsabilité dans la gestion des fonds publics. Il demande ainsi à la population de continuer à appuyer aveuglément cette honteuse et injustifiable dilapidation des fonds publics.

* * *

[Traduction]

LES CHAMPIONS DU HOCKEY JUNIOR «A»

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, je suis très heureux d'annoncer que la Coupe Centennial de hockey junior «A» a été conquise cette année par les Olds Grizzlies, une équipe qui vient du pays de la rose sauvage, l'Alberta.

Les efforts magnifiques déployés par l'entraîneur, ses assistants et l'équipe tout entière ont permis aux Grizzlies de demeurer invaincus pendant toute la durée du tournoi à la ronde. Les Grizzlies se sont mesurés à d'excellentes équipes comme les Élites de Châteauguay de l'Ontario et du Québec, les Redwings de Weyburn, en Saskatchewan et au Manitoba, les Spartans de Kelowna, en Colombie-Britannique, et les Bulldogs d'Antigonish, en Nouvelle-Écosse.

Cet exploit n'aurait pas été possible sans le travail des centaines de bénévoles qui non seulement sont propriétaires de l'équipe, mais en assurent la direction courante. En ces temps de restrictions budgétaires, nous avons ainsi le parfait exemple de personnes qui ont su consacrer une partie de leur temps à une cause qui leur tient à coeur, sans attendre de gratification monétaire.

Les électeurs de Wild Rose sont fiers de ce que l'équipe a accompli et de sa contribution au sport canadien.

LE MOIS DE L'OUÏE

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury): Monsieur le Président, je suis heureux de rappeler à la Chambre que mai est le Mois de l'ouïe. C'est l'occasion de rappeler l'importance de l'ouïe dans la communication et de sensibiliser le public au problème de la surdité et à l'importance de protéger l'ouïe.

Plus de un million de Canadiens, principalement des personnes âgées, sont atteintes de perte d'audition. Des personnes qui sont aux prises avec ce problème peuvent avoir besoin, pour communiquer, de ressources supplémentaires comme le langage gestuel, des services d'interprétation orale et des dispositifs de télécommunication qui leur permettent d'utiliser le téléphone.

De nombreux organismes nationaux, provinciaux et régionaux comme l'Association des sourds du Canada, l'Association des malentendants canadiens et la Société canadienne de l'ouïe s'efforcent d'améliorer les conditions de vie des Canadiens sourds et malentendants en leur fournissant divers services et en défendant leurs intérêts.

Nous devons reconnaître les défis auxquels font face les personnes atteintes de perte d'audition et nous devons exhorter les Canadiens à protéger l'ouïe, qui est un précieux moyen de communication.

* * *

LE MAINTIEN DE LA PAIX

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke): Monsieur le Président, le Comité mixte spécial sur la politique de défense du Canada arrive à peine des audiences et réunions tenues au siège de l'OTAN à Bruxelles.

Nous avons aussi séjourné, voyagé et vécu avec les 2 000 soldats canadiens qui font un travail extraordinaire afin de faire respecter les règles de maintien de la paix des Nations Unies dans l'ex-Yougoslavie.

En accompagnant nos soldats dans la vaste région qu'ils patrouillent sur terre et sur mer, nous avons constaté la dévastation causée par la guerre et les gestes inhumains posés par l'homme contre son prochain, qui demeurent incroyables pour ceux qui n'en sont pas témoins ou qui n'ont pas été mis au courant de la situation sur place.

Nos Canadiens accomplissent un travail de premier ordre. Ils sont d'un dévouement et d'un professionnalisme exemplaires. Ils remplissent des tâches humanitaires et vont bien au-delà de leur devoir. Ils font respecter les règles des Nations Unies en traitant les infractions d'une main ferme et ils sont respectés.

Les soldats sont bien déçus de voir que leurs efforts en vue de représenter le Canada ne sont pas reconnus dans les médias et notamment par la Société Radio-Canada. Bon nombre des reportages transmis au pays passent par la BBC.

Allez, les médias canadiens, donnez à nos troupes toute la reconnaissance qu'elles méritent et au Canada la première place qui lui revient en matière d'efforts en faveur de la paix.

4465

(1415)

JEAN-PIERRE PAQUET ET ANDRÉE MASSICOTTE

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion aujourd'hui de féliciter deux fonctionnaires dévoués.

Les députés se souviendront que récemment, en Arabie saoudite, des infirmières étrangères ont été harcelées et agressées par les autorités locales. À cette occasion, un de mes électeurs, M. Terry Wood, a passé toute une fin de semaine à tenter d'obtenir des renseignements au sujet de sa fille, car il craignait qu'elle n'ait été touchée par cet incident. Fort heureusement, ce ne fut pas le cas.

M. Wood est extrêmement reconnaissant de l'aide qu'il a reçue de la part des deux agents qui assuraient la permanence aux Affaires étrangères durant cette fin de semaine, Jean-Pierre Paquet et Andrée Massicotte. Selon M. Wood, ils ont été bien au-delà des exigences de leur poste et ont réellement fait un effort supplémentaire pour lui venir en aide et apaiser ses inquiétudes.

Lorsqu'un membre de votre famille est en difficulté, de tels incidents prennent une grande importance et, de toute évidence, M. Paquet et Mme Massicotte l'ont reconnu.

Les efforts accomplis au nom de M. Wood font honneur au ministère des Affaires étrangères et à toute la fonction publique et on doit les féliciter grandement.

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4465

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE DÉVELOPPEMENT DE LA FRANCOPHONIE CANADIENNE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine. Dans un mémoire présenté aujourd'hui à la Commission des langues officielles, la Fédération des communautés francophones et acadienne invoque l'urgence d'adopter une politique globale de développement de la Francophonie canadienne. D'après la Fédération, cette absence de politique globale empêche le gouvernement fédéral de s'acquitter des responsabilités qui lui incombent en vertu de la Loi sur les langues officielles.

Ma question est la suivante: Le ministre reconnaît-il l'urgence et la nécessité de mettre en oeuvre immédiatement une politique globale de développement de la Francophonie canadienne puisque la Fédération prétend et affirme, aujourd'hui, que l'absence d'une telle politique explique l'échec de la concertation interministérielle et le glissement dans l'application de la Loi sur les langues officielles?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je suis heureux de dire qu'une telle politique est sur la planche à dessin. Déjà beaucoup de choses ont été réalisées et nous allons les intégrer de façon à remplir toutes les responsabilités dont nous devons nous occuper en matière de langues officielles, tel que prescrit par la loi.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, voici un gouvernement qui est au pouvoir depuis six mois et qui répond devant un état d'urgence: «l'affaire est sur la table à dessin.» Ce n'est pas assez.

Je demande au ministre comment il peut refuser de s'engager immédiatement à adopter dans les semaines qui vont suivre cette politique générale et globale pour développer la Francophonie, et je cite la Fédération pour montrer l'urgence de la situation: «Le taux d'assimilation qui gagne du terrain et la situation socio-économique se détériore.»

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, le chef de l'opposition ne semble pas avoir regardé de près ce que nous faisons au cours des mois présents. Nous avons augmenté des subventions à différents endroits de la Francophonie au Canada. Nous avons exempté la gestion scolaire de coupures budgétaires. Nous avons négocié et sommes en train de négocier toute une série d'accords avec des organismes minoritaires et avec des gouvernements provinciaux. S'il veut avoir toute la liste des choses qui ont été faites, je serai enchanté de la lui fournir.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, les compliments que se décerne le ministre ne semblent pas avoir touché la Fédération des communautés francophones et acadienne elles-mêmes puisque, aujourd'hui, c'est un cri d'alarme qu'elles ont lancé.

Je demanderais en particulier au ministre de s'engager aujourd'hui à créer l'agence centrale fédérale réclamée par la Fédération des communautés francophones et acadienne pour enrayer l'assimilation, et je cite: «qui poursuit son travail dévastateur.»

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, il semble bien que nous ne parlons pas aux mêmes personnes. Le chef de l'opposition va chercher de l'information auprès de mécontents, moi je vais chercher mon information auprès des gens avec qui je négocie et je le fais pour assurer la survie et l'expansion de ces communautés à travers tout l'ensemble du Canada et non pas pour me faire du capital politique pour les fins que nous savons.

* * *

LE COLLÈGE MILITAIRE ROYAL DE SAINT-JEAN

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales. La semaine dernière, le ministre des Affaires intergouvernementales annonçait une entente avec le gouvernement du Québec dans le dossier du Collège de Saint-Jean, preuve disait-il que le fédéralisme fonctionne bien.


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(1420)

Mardi dernier, le ministre déclarait en cette Chambre, et je cite:

Nous avons eu clairement une rencontre des esprits sur un certain nombre de choses qui vont faire partie de la négociation finale. Mais quant à la négociation finale, comme je l'ai indiqué la semaine dernière, l'accord final n'est pas encore prêt.
Monsieur le Président, hier, à l'Assemblée nationale du Québec, le ministre de l'Éducation, qui est l'interlocuteur du ministre des Affaires intergouvernementales, déclarait: «Au moment où on se parle, je n'ai pas encore reçu ce que j'ai demandé, c'est-à-dire la proposition fédérale écrite sur laquelle je pourrai évidemment avoir une base de négociation et échanger.»

Comment le ministre peut-il laisser croire qu'un accord avec le Québec est imminent, alors que son collègue confirme qu'il n'a même pas reçu le document de base pour commencer à négocier?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique): Monsieur le Président, je ne peux que répondre ce que j'ai répondu à la dernière question et informer le député de l'opposition que le ministre de l'Éducation, M. Chagnon, a maintenant reçu une proposition écrite.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, le ministre, au lieu de dire n'importe quoi sur le sujet, ne convient-il pas que le problème auquel il fait face actuellement, c'est que son collègue de la Défense refuse obstinément de laisser porter les activités militaires au Collège Saint-Jean, comme l'exige le gouvernement du Québec?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique): Monsieur le Président, contrairement à ce que laisse entendre le député de l'opposition, le ministre de la Défense m'a été d'une très grande utilité pendant toutes les négociations, et lorsque nous aurons conclu un accord, je pense que la preuve sera là, claire et évidente.

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Il a déclaré à de nombreuses reprises qu'il soumettrait à la Chambre des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants avant l'ajournement d'été. Or, en comptant la journée d'aujourd'hui, il ne reste plus que 21 jours de séance au cours de la présente session.

Le ministre peut-il nous préciser exactement à quel moment nous serons saisis de ces modifications et chose plus importante encore, quand elles auront force de loi selon lui?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement suit parfaitement son programme. Comme nous l'avons dit au départ, nous entendons présenter durant le mois de juin des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. Si nous pouvons compter sur la collaboration de tous les partis, je m'attends à ce que nous puissions leur donner force de loi très rapidement.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, il y a des modifications qu'il serait possible d'apporter rapidement et facilement à la Loi sur les jeunes contrevenants. Ainsi, pour ce qui est des critères concernant l'âge, il pourrait être question de 10 à 16 ans plutôt que de 12 à 18 ans.

Mon collègue de New Westminster-Burnaby a récemment soumis cette proposition sous forme de motion d'opposition, mais elle a été rejetée par le gouvernement et l'opposition officielle.

Pourquoi le ministre hésite-t-il à répondre de façon décidée aux demandes des Canadiens qui souhaitent qu'on apporte immédiatement certaines modifications qui, après consultations avec les leaders parlementaires, pourraient être adoptées avant l'ajournement d'été?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement montrera son esprit de décision dans le projet de loi dont nous saisirons la Chambre à cet égard. Cependant, comme je l'ai dit clairement aux députés à d'autres occasions, nous entendons aborder la Loi sur les jeunes contrevenants de deux façons. Tout d'abord, nous allons présenter un projet de loi renfermant certaines modifications et demander à la Chambre de les examiner, afin qu'elles puissent être mises en oeuvre immédiatement.

Ensuite, je vais renvoyer la loi dans son ensemble au Comité permanent de la justice et des questions juridiques qui devra l'examiner en profondeur d'un bout à l'autre, maintenant qu'elle en est à sa dixième année d'application. Le comité devra entendre des témoins et laisser les Canadiens lui faire part de leurs préoccupations, s'entretenir avec les gens les plus touchés par cette loi et décider une fois pour toutes si dans les circonstances actuelles, la Loi sur les jeunes contrevenants demeure la meilleure formule de justice applicable aux jeunes au Canada.

Voilà les deux étapes que nous envisageons: premièrement, un projet de loi renfermant des modifications précises; deuxièmement, un examen approfondi de la loi dans les mois à venir par le comité permanent.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, j'ai encore certaines craintes bien réelles, car pendant neuf ans, lorsque les conservateurs étaient au pouvoir, les Canadiens se sont fait promettre que l'une des priorités du gouvernement était justement de réexaminer la Loi sur les jeunes contrevenants. Lorsque le solliciteur général a annoncé récemment qu'on allait retarder la création promise d'un fichier national de personnes ayant agressé des enfants, certains ont craint que le gouvernement libéral ne fasse les mêmes vaines promesses.

(1425)

Le ministre va-t-il garantir aux Canadiens que malgré les divisions bien connues au sein de son parti sur cette question, il va tenir sa promesse de soumettre immédiatement, et je souligne


4467

le terme, des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants que la Chambre pourra étudier rapidement?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je peux dire qu'il n'y a aucune division au sein de mon parti à ce sujet.

Le fait est que nous respectons les engagements que nous avons pris durant la campagne électorale en présentant les modifications figurant dans le projet de loi dont la Chambre sera saisie dans les semaines à venir.

En ce qui concerne le fichier national, je me dois de corriger l'impression laissée par le député selon laquelle ce projet ne va pas aboutir ou va être retardé. Le fait est que nous allons publier aujourd'hui ou demain le document de travail dont on a parlé à la Chambre sur les mesures à prendre pour créer le fichier et qu'en consultation avec les Canadiens, les députés de cette enceinte et nos homologues provinciaux, notre gouvernement va concevoir et mettre en place, en adaptant probablement pour commencer le système du Centre d'information de la police canadienne, un fichier des personnes qui ont été reconnues coupables d'avoir agressé sexuellement des enfants; il sera prêt à l'automne de cette année.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Les déclarations du vérificateur général du Canada nous confirment que le ministre du Développement des ressources humaines s'est lancé dans une réforme des programmes sociaux sans avoir en main les informations nécessaires pour établir un véritable diagnostic. Le vérificateur général a également déploré le manque de collaboration entre Ottawa et les provinces.

Le ministre reconnaît-il, comme le signale le vérificateur général, qu'il s'est lancé dans une réforme des programmes sociaux sans être prêt et que sa hâte ne s'explique que par son empressement à répondre aux impératifs budgétaires du ministre des Finances qui n'a trouvé rien de mieux que de réduire son déficit sur le dos des plus démunis?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je voudrais répondre à l'honorable députée par une citation qui vient directement du vérificateur général. Il a dit: «Je ne trouve rien de mal à sa façon de procéder». La réponse est claire. Le vérificateur général trouve qu'il n'y a pas de problème avec notre façon de procéder. Il a demandé d'autres évaluations et je suis d'accord avec lui. C'est la raison pour laquelle nous avons un accord avec toutes les provinces sur un échange d'informations au sujet des programmes sociaux.

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, étant donné que cette réforme des programmes sociaux n'est pas incluse dans le livre rouge; étant donné que les libéraux n'avaient pas daigné bon prendre l'information à ce moment-là; étant donné qu'ils ne sont pas mandatés pour faire cette réforme, le ministre reconnaît-il que la réforme devra reposer sur une pleine satisfaction des provinces et qu'en conséquence elle doit être associée étroitement au processus, contrairement à ce qu'il fait jusqu'à maintenant?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, nous avons reçu cette semaine un rapport de Statistique Canada faisant état d'une étude très approfondie montrant que le régime d'assurance-chômage influait fortement sur la façon dont les emplois étaient créés dans notre pays, qu'il avait un effet néfaste.

Nous avons reçu un rapport important du Centre canadien de recherche en politiques de rechange établi sur deux études faites par des économistes du Québec, qui disait que le chômage engendrait des coûts importants au Canada. Pas plus tard qu'hier, nous recevions un rapport du conseil de planification familiale de Toronto qui affirmait ceci:

Si nous négligeons de créer des programmes innovateurs pour éviter que les jeunes familles finissent par être exclues de la société, l'avenir du Canada est vraiment incertain.
Trois rapports distincts publiés cette semaine signalent la nécessité d'une réforme de nos programmes sociaux. Notre mandat nous a été confié par des gens qui s'inquiètent de l'avenir du Canada, et non par les députés d'en face, qui ne s'en préoccupent absolument pas.

* * *

(1430)

LES SOINS DE SANTÉ

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

La semaine dernière, les quatre premiers ministres de l'Ouest ont conjointement demandé qu'un des dix premiers ministres provinciaux copréside, avec le premier ministre canadien, le Forum sur les soins de santé qui doit avoir lieu prochainement.

Les soins de santé sont une responsabilité des provinces, qui en assument d'ailleurs une grande partie des coûts. Compte tenu de cette situation, la ministre de la Santé convient-elle que les premiers ministres provinciaux devraient avoir davantage voix au chapitre en ce qui concerne non seulement l'administration des soins de santé, mais aussi le processus décisionnel qui s'y rattache, et qu'un premier ministre provincial devrait coprésider cette importante réunion qui aura lieu sous peu?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je réponds avec plaisir à la question de la députée.

Le Forum national sur les soins de santé doit servir d'outil de consultation au premier ministre et à son gouvernement. Les ministres de la santé du gouvernement fédéral et des provinces y sont invités pour discuter de problèmes et prendre des décisions, de même que les premiers ministres provinciaux.


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Nous n'entendons certes pas restreindre les pouvoirs des premiers ministres provinciaux qui viendront discuter ni retirer le processus décisionnel qui revient aux ministres de la santé.

Au Forum national sur les soins de santé, il sera question de problèmes à long terme et de ceux que soulèvent couramment le régime et la santé en général. Il faut se rappeler que je suis ministre de la Santé et non simplement des soins de santé.

Mme Deborah Grey (Beaver River): J'ai une question supplémentaire, monsieur le Président.

Mardi, la ministre de la Santé a déclaré qu'elle avait été contrainte de retenir des fonds destinés à la Colombie-Britannique pour les soins de santé parce qu'elle devait faire observer la Loi canadienne sur la santé.

Le gouvernement fédéral néglige commodément une disposition de cette loi qui l'engage à financer 50 p. 100 des coûts de la santé et des soins de santé. À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral assume moins de 35 p. 100 de ces coûts.

La ministre peut-elle expliquer pourquoi elle applique aussi ardemment certaines parties de la Loi canadienne sur la santé, mais laisse le gouvernement fédéral négliger l'engagement qu'il a pris aux termes de cette même loi d'assumer 50 p. 100 de tous les coûts des soins de santé?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je recommande à la députée d'examiner plus attentivement la Loi canadienne sur la santé. Cette loi énonce cinq principes, mais elle ne prescrit aucun pourcentage de financement.

Nous avons clairement indiqué pendant la dernière campagne électorale et dans notre livre rouge que nous appuyons les principes de la Loi canadienne sur la santé. Ce sont des principes que nous respectons, contrairement à nos vis-à-vis qui, au cours de la campagne électorale, n'ont jamais mentionné qu'ils étaient en faveur de la surfacturation et d'un régime de santé à deux niveaux.

Nous avons clairement fait connaître notre position. Ce parti-là devrait avoir honte.

* * *

[Français]

L'HÉPATITE C

Mme Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé. La ministre déclarait en cette Chambre, le 11 mai dernier, et je cite: «Toute personne qui craint d'avoir contracté l'hépatite C à cause d'une transfusion sanguine a peut-être intérêt à consulter son médecin. Tous les Canadiens qui ont une crainte à cet égard auraient avantage à suivre ce conseil.»

Au-delà de cette déclaration fracassante, la ministre a-t-elle quand même décidé de prendre ses responsabilités et d'intervenir auprès des fonctionnaires de son ministère pour faire en sorte que les gens susceptibles d'être contaminés soient enfin rejoints?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, nous avons maintenant une commission d'enquête sur le sang contaminé. Cette commission siège aujourd'hui même et elle étudie toutes les questions qui se rapportent aux problèmes qu'il peut y avoir avec les transfusions sanguines.

Je vous signale, monsieur le Président, que toutes ces questions nous inquiètent beaucoup.

(1435)

Nous voulons appuyer la Commission Krever de toutes les façons possibles. C'est ce que nous faisons et nous attendons avec beaucoup d'impatience leur rapport. Nous savons que la Commission va nous donner certaines directives et nous étudierons la question selon ces délais.

Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, les victimes de l'hépatite C sont les victimes de la pire des négligences dans l'histoire du système de santé canadien et 75 p. 100 d'entre eux ignorent toujours leur état.

Contrairement à la déclaration du responsable du Bureau de biologie de son ministère, la ministre sait-elle qu'il existe un traitement pouvant venir en aide aux porteurs de l'hépatite C et que ce fait justifie amplement qu'elle fasse dès maintenant le nécessaire pour rejoindre ces personnes?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, nous nous inquiétons vivement des problèmes associés aux maladies transmises par des transfusions sanguines. Voilà pourquoi nous avons décidé de prolonger le délai accordé au juge Krever pour présenter son rapport. Nous savons qu'il doit étudier en profondeur tous ces problèmes.

Je suis heureuse de préciser que nous songeons également à lui accorder des fonds supplémentaires pour lui permettre de terminer ses travaux.

* * *

LES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant.

Hier, le Sénat a approuvé des modifications au projet de loi C-18 afin que les limites des circonscriptions électorales soient révisées avant les prochaines élections. Toutefois, le leader du gouvernement au Sénat a fait savoir que l'une des lacunes du processus actuel résidait dans le manque de surveillance des commissions indépendantes et non partisanes de révision des limites des circonscriptions électorales.

Le premier ministre suppléant peut-il nous expliquer quelle sorte de surveillance le gouvernement juge nécessaire en la matière? Pourquoi le gouvernement n'appuie-t-il pas le caractère indépendant des commissions?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement appuie le fait que des commissions indépendantes fixent les limites des circonscriptions électorales.

Ce que nous disons, toutefois, c'est que ce processus n'a pas été vraiment examiné depuis sa création en 1964 et c'est pourquoi la Chambre a convenu avec nous de le soumettre à l'étude du


4469

Comité parlementaire de la procédure. Je suis impatient de lire le rapport préliminaire de ce comité.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, je me réjouis de constater que le gouvernement appuie l'indépendance des commissions, qui ont maintenant terminé leur travail ou presque, au coût de plus de cinq millions de dollars.

Certes, il n'est pas vraiment prioritaire pour le gouvernement de mettre fin à ce processus. Le premier ministre suppléant peut-il assurer à la Chambre que la seule raison pour laquelle on pourrait encore stopper ce processus serait de donner suite à la proposition de mon parti qui a été reprise par le ministre du Revenu national, à savoir bloquer ou réduire le nombre des sièges à la Chambre des communes?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, la proposition du député mérite d'être examinée par le Comité parlementaire de la procédure.

Avant de décider de bloquer ou de réduire le nombre des sièges, il faut songer que les habitants de certaines régions de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, qui ont connu une explosion démographique, souhaitent que des circonscriptions additionnelles soient créées.

Les Britanno-Colombiens seront intéressés d'apprendre que le Parti réformiste ne souhaite pas que des circonscriptions additionnelles soient créées dans leur province.

* * *

[Français]

L'HÉPATITE C

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

La Commission Krever siège déjà depuis six mois et elle va encore siéger vraisemblablement pour un moment. Pendant ce temps-là, la vie de certains de nos citoyens et citoyennes est en danger. Je réitère la question à la ministre: Qu'entend-elle faire pour avertir les gens dont la vie est en santé?

(1440)

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je suis bien heureuse de parler des gens qui sont en bonne santé. Je pense qu'ils n'ont pas besoin de se faire dire qu'ils sont en santé. Votre question est vraiment extraordinaire, mais je crois comprendre que le député a fait un lapsus.

Laissez-moi vous assurer que nous sommes très intéressés, et il est entendu, je l'ai dit auparavant en cette Chambre, que lorsqu'on a des traitements médicaux, on prend toujours un certain nombre de chances. Rien n'est garanti à 100 p. 100. Il est entendu que si nous pensons qu'il peut y avoir des effets secondaires, les gens devraient certainement consulter leur médecin. C'est un avis, mais entre-temps, nous sommes intéressés de savoir ce que le juge Krever nous dira des circonstances qui prévalent dans la contamination du sang et en ce qui concerne les gens qui ont eu des transfusions sanguines.

Le Président: Je voudrais simplement vous rappeler que vous devez toujours vous adresser à la Présidence.

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, la ministre réalise-t-elle qu'il y a des gens qui vont mourir alors qu'elle est inactive, alors qu'elle attend les résultats de la Commission Krever? La ministre entend-elle agir pour sauver la vie de ces personnes dont la vie est en danger?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, mais voyons, on s'énerve bien! Écoutez là, les gens ont raison de se sentir assez en sécurité. Quand on a des problèmes, on va voir le médecin; on a tous les moyens possibles dans ce pays pour être très bien traités. Quand on parle de l'hépatite C, ce n'est pas exactement la même chose que le SIDA. Il faut être raisonnable, monsieur le Président.

* * *

[Traduction]

LE COMMERCE INTERPROVINCIAL

Mme Judy Bethel (Edmonton-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Les obstacles au commerce interprovincial coûtent aux Canadiens jusqu'à sept milliards de dollars et, pendant que les discussions sur leur abolition perdurent, de nombreuses possibilités d'affaires leur échappent. Certaines provinces coopèrent, tandis que d'autres créent toutes sortes de difficultés qui nuisent à l'élimination de ces obstacles coûteux pour les Canadiens.

Le ministre peut-il dire à la Chambre ce qu'il fait pour amener les provinces à collaborer et pour négocier une entente avant juin, comme il a été prévu?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, la députée d'Edmonton-Est soulève une question très importante. Je suis sûr que la plupart des Canadiens trouvent très étonnant que le Canada ait signé des ententes commerciales internationales mais ait été incapable de trouver le moyen d'éliminer des obstacles au commerce interprovincial qui, à l'échelle internationale, seraient inacceptables.

Cependant, je suis heureux de pouvoir dire à la Chambre que les discussions progressent. Les ministres de toutes les provinces et des territoires qui sont membres du comité des ministres du commerce intérieur travaillent d'arrache-pied pour parvenir à un accord avant la date butoir du 30 juin.

Étant donné les dispositions favorables de toutes les provinces, il y a de fortes chances que nous parvenions à une bonne entente-cadre générale et à des ententes complètes dans certains secteurs, ce qui constituera un excellent point de départ pour la poursuite des négociations.

Je dois dire que je trouve l'esprit de coopération de toutes les provinces très encourageant, quoique je doive faire état d'une certaine déception devant les représailles lancées par l'Ontario en réaction aux résultats des éliminatoires de la Coupe Stanley.


4470

L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Il devient de plus en plus évident que le mandat et le fonctionnement de l'Agence canadienne de développement international nécessitent un examen approfondi. L'OCDE, le milieu universitaire et le vérificateur général ont tous réclamé des changements à l'ACDI. On entend souvent dire que le mandat de l'ACDI va peut-être à l'encontre des objectifs humanitaires des Canadiens.

Le ministre présentera-t-il une mesure habilitante afin que le Parlement, et non le Cabinet, puisse définir le mandat de l'ACDI après un débat sur la question?

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, l'ACDI a un mandat clairement défini qui consiste à favoriser le développement durable dans les pays en développement.

(1445)

Le député est bien au courant de la situation puisqu'il a assisté ce matin à une réunion où le Conseil canadien pour la coopération internationale a témoigné devant un comité mixte sur la politique étrangère et a rendu hommage à l'ACDI pour la réputation très enviable qu'elle s'est faite dans de nombreux pays où elle oeuvre.

Le député sait que nous procédons actuellement à un examen approfondi de notre politique étrangère, notamment de questions telles que l'aide étrangère et la défense. Si le député a des recommandations à faire, il n'a qu'à les présenter au comité mixte chargé de l'examen de la politique étrangère, qui pourra les examiner. Il faudra cependant que le comité permanent des affaires étrangères donne son accord.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, une partie du problème tient bien sûr au fait que le Parlement n'a pas la possibilité de donner des instructions à l'ACDI, puisqu'elle est une création du Cabinet et ne relève pas de la Chambre des communes.

Afin de rassurer la direction de l'ACDI, les ONG canadiennes ainsi que les Canadiens, le ministre présentera-t-il cette mesure habilitante visant à recentrer la mission de l'ACDI sur les véritables nécessiteux du monde entier?

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je transmettrai la question du député au ministre. Encore une fois, il sait bien à quel endroit il devrait faire cette recommandation.

Je ne suis pas d'accord avec le député quand il dit que l'ACDI n'a pas de comptes à rendre au Parlement. Le vérificateur général vient de faire une vérification très approfondie des programmes de l'ACDI dans trois pays asiatiques en particulier et a fait un rapport très élogieux à l'endroit de l'ACDI.

Il y a donc reddition de comptes. Nul n'est plus conscient que les employés de l'ACDI de la nécessité de tirer le meilleur parti des deniers publics parce qu'ils savent à quel point il est difficile de mobiliser ces fonds, et ils les dépensent à très bon escient. Ils se donnent des objectifs et mettent en oeuvre des programmes leur permettant de les atteindre. Le député devrait savoir qu'avant la mise en oeuvre d'un programme, les gouvernements provinciaux sont consultés, de même que les dirigeants des ONG.

* * *

[Français]

AVCORP INDUSTRIES

M. Réjean Lefebvre (Champlain): Monsieur le Président, la compagnie AVCORP Industries, qui fait de la sous-traitance dans l'industrie aérospatiale, a été associée au programme des hélicoptères EH-101 et se trouve en difficultés financières parce qu'elle attend impatiemment un dédommagement du gouvernement fédéral tel que promis par le premier ministre après l'abandon de ce contrat. Cette compagnie cherche désespérément à se reconvertir vers des marchés civils.

Le ministre de l'Industrie ne réalise-t-il pas que son retard à dédommager les entreprises qui ont été pénalisées par l'abandon du contrat des hélicoptères menace dangereusement la survie de plusieurs d'entre elles, dont AVCORP?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je crois qu'il était bien clair au moment où le gouvernement a annoncé sa décision de mettre fin au contrat en ce qui concerne les hélicoptères qu'il n'y aurait pas de compensations pour les compagnies concernées, sauf pour les contrats entre le gouvernement et les compagnies.

[Traduction]

Il était très clair, et c'est ce que le chef de l'opposition devrait essayer de comprendre, qu'aucune indemnité n'était offerte en dehors des dispositions des contrats. La question des contrats est en train de se régler par voie de négociation, et peut-être par le biais de recours en justice.

Quant à la question générale de la reconversion de l'industrie de défense, nous en avons discuté à maintes occasions à la Chambre. La politique de reconversion de l'industrie de défense comporte de nombreux éléments.

Il existe un programme gouvernemental destiné à aider les entreprises à se reconvertir des marchés militaires vers les marchés civils ou à servir les deux types de marchés. Ce programme est connu sous le nom de PPIMD.

[Français]

Ce programme se nomme PPIMD, en français, et depuis que ce gouvernement est au pouvoir, depuis le mois de novembre, nous avons accepté 41 propositions reliées au PPIMD, dont 39 étaient pour des compagnies pour des usages civils ou bien pour double usage.

M. Réjean Lefebvre (Champlain): Monsieur le Président, l'exemple de la compagnie AVCORP ne démontre-t-il pas clai-


4471

rement au ministre qu'un programme de reconversion des industries militaires est plus qu'urgent, et se souvient-il que le Parti libéral du Canada s'y était engagé pendant la dernière campagne électorale?

(1450)

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, nous avons effectivement pris des engagements au sujet de la reconversion de l'industrie de défense et nous les respectons.

Avec leur position, les bloquistes mêlent tout, car ils semblent penser que le contribuable canadien est prêt à s'asseoir et à signer des chèques pour aider les entreprises.

Nous sommes disposés à nous asseoir avec les directeurs des entreprises et à les aider à trouver des mesures stratégiques pour conquérir leurs marchés, nous sommes prêts à les aider à trouver de nouveaux produits et de nouvelles solutions à leurs problèmes. Mais si le député croit que nous avons des fonds inépuisables à injecter dans les entreprises, il n'a pas lu le livre rouge. Nous avons dit que nous réduirions les subventions aux entreprises, et c'est ce que nous continuons de préconiser.

* * *

L'AGRICULTURE

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire.

En décembre dernier, le gouvernement a donné suite à une recommandation du Tribunal canadien du commerce extérieur préconisant un contingent annuel d'importation de boeuf désossé de 72 000 tonnes. Cette mesure s'imposait pour éviter à l'industrie canadienne du boeuf des torts considérables. Le gouvernement vient de porter le contingent à 85 000 tonnes.

Pourquoi le gouvernement ne tient-il pas compte de la recommandation du TCCE, abandonnant ainsi l'industrie canadienne du boeuf à son sort?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, le gouvernement est loin d'abandonner l'industrie canadienne du boeuf à son sort. La recommandation du TCCE à laquelle le gouvernement a donné suite en décembre dernier disait aussi que nous devions surveiller l'évolution de la situation pour tenir compte de tout changement.

Une chose étonnante s'est produite cette année: le contingent établi en 1994, qui était de l'ordre de 72 000 tonnes, allait être entièrement utilisé très tôt dans l'année, ce que personne n'avait prévu, parmi ceux qui ont participé au processus. Lorsque nous nous sommes aperçus que le contingent était sur le point d'être épuisé, il y avait, selon les estimations, quelque 12 000 ou 15 000 tonnes de produits en transit, dont le prix avait été fixé plus bas, mais qui, à cause des délais de transport, auraient été d'un prix plus élevé à l'arrivée au Canada et soumis à de la surtaxe. Les chiffres ont donc été rajustés de manière à tenir compte, entre autres choses, des produits en transit, dont le traitement aurait été injuste parce que leur prix aurait été plus élevé à leur arrivée au Canada.

Nous continuons d'observer la situation. Nous avons aujourd'hui et demain des entretiens sur l'importation de boeuf désossé, et nous ferons de notre mieux pour adopter une position très équilibrée qui tiendra compte de tous les intérêts canadiens.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, je remercie le ministre de sa réponse. Mais je tiens à lui faire remarquer que les éleveurs ont encaissé une baisse de 20c. la livre depuis janvier. À l'heure actuelle, les exportations de boeuf de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande aux États-Unis sont à la baisse alors que les exportations de boeuf de ces deux mêmes pays au Canada ont augmenté de 47 p. 100. Nos éleveurs sont forcés d'expédier. . .

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je demanderais au député de poser sa question.

M. Hoeppner: Mes excuses, monsieur le Président. Pourquoi le ministre met-il l'industrie canadienne de l'élevage en danger et pourquoi permet-il l'exportation d'emplois de l'industrie canadienne de la transformation du boeuf?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, ce n'est sûrement pas mon intention, ni celle du gouvernement, ni celle de tous les Canadiens, que de mettre l'industrie canadienne de l'élevage en danger.

Depuis un certain temps, si nous avons connu toutes sortes de difficultés dans notre secteur du grain, le secteur de la viande rouge, l'industrie du boeuf notamment, est au nombre de ceux qui ont obtenu de bons rendements; il est évident que nous allons l'aider le plus possible.

Je comprends fort bien le point que le député a soulevé au sujet de la nécessité de garantir la viabilité de cette industrie, y compris le secteur de la transformation, pour l'avenir. C'est évidemment un des facteurs dont le gouvernement tiendra compte quand il prendra des décisions relatives aux importations.

* * *

[Français]

LES ÉLECTIONS EN AFRIQUE DU SUD

M. Réginald Bélair (Cochrane-Supérieur): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire d'État déléguée aux affaires africaines et latino-américaines. Comme la très grande majorité des Canadiens, j'ai applaudi le succès des élections, le mois dernier, en Afrique du Sud. J'étais aussi particulièrement fier du rôle proéminent que le Canada a joué en appuyant le processus démocratique en Afrique du Sud.

(1455)

La ministre peut-elle informer cette Chambre, aujourd'hui, de la façon dont le gouvernement canadien va venir en aide au nouveau gouvernement Mandela et ses concitoyens Sud-Africains, surtout en cette période d'après-élection, qui est cruciale pour l'avenir de ce pays?


4472

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, hier, j'ai eu le plaisir de déposer à la Chambre le rapport de la délégation canadienne chargée d'observer le déroulement des élections en Afrique du Sud, un événement pour le moins historique. J'ai toujours dit, et je le répète à la Chambre aujourd'hui, que les élections ne sont, pour l'Afrique du Sud, que la première étape, mais une étape très critique sur la voie de la démocratie.

Je suis très heureuse d'annoncer à la Chambre aujourd'hui que le Cabinet a déclaré que l'Afrique du Sud était désormais pleinement admissible à l'aide publique au développement. Grâce à ce processus, nous pourrons aider l'Afrique du Sud à devenir une démocratie.

Aujourd'hui, j'ai réuni un groupe de Canadiens qui se sont intéressés de près à l'Afrique du Sud jusqu'à maintenant, un symposium d'organisations non gouvernementales, de médias, de gens d'affaires et de représentants du gouvernement, pour voir comment nous pouvions utiliser l'aide publique au développement pour aider l'Afrique du Sud à devenir une démocratie.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes. On apprend ce matin que le ministre des Affaires indiennes a donné à l'ex-président du Parti libéral du Canada, Me Michel Robert, le mandat de négocier l'établissement d'un territoire Mohawk autonome à Kanesatake. Le ministre a établi comme première priorité le projet d'agrandissement du cimetière autochtone.

Tous reconnaissent l'importance de régler la question du cimetière autochtone. Par ailleurs, le ministre des Affaires indiennes s'engage-t-il à ce que le dossier des oubliés d'Oka, dossier qui traîne depuis deux ans, ne soit pas relégué aux oubliettes par son négociateur, Me Michel Robert?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, si je comprends bien le préambule du député, il s'interroge sur la confiance qu'on peut avoir dans le négociateur qui a été nommé. Je tiens à souligner que ce négociateur était président de l'Association du Barreau canadien.

Des voix: Oh, oh!

M. Irwin: D'accord. Le Bloc convient qu'il est très compétent et jouit d'une grande réputation.

Quant au processus, tout est prêt. À mon avis, le processus se déroulera de façon méthodique: le cimetière, les maisons au nord de la route 344, celles au sud de la 344, la Seigneurie des Deux-Montagnes, les doléances passées au sujet du logement, la collaboration avec la collectivité mohawk pour rattraper un peu le retard dans le programme de responsabilité financière.

Ce que je voulais, c'est un processus qui se déroulerait de façon pragmatique. À mon avis, avec Michel Robert comme négociateur, c'est ce qui se produira. En outre, j'ai communiqué avec un membre de la magistrature du Québec, au palier de la Cour suprême. Si nous en obtenons l'autorisation, nous aurons non seulement M. Robert, mais également un magistrat très éminent qui agira comme médiateur et facilitateur. Je crois que le député sera heureux de cette façon de procéder.

[Français]

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau): Monsieur le Président, je n'ai jamais mis en doute la compétence de Me Michel Robert, mais par contre, je me permets de demander au ministre des Affaires indiennes s'il peut nous indiquer s'il y a un lien à établir entre le mandat qu'il vient de confier à Me Michel Robert dans le dossier d'Oka et le fait que Me Robert siège actuellement au comité de surveillance du Service canadien du renseignement de sécurité?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, il s'agit là d'une façon discrète de porter atteinte à la réputation d'une homme des plus intègres, et c'est inacceptable.

Il était président de l'Association du Barreau canadien et membre de l'Association internationale du barreau et de l'American College of Trial Lawyers. En voulez-vous plus? Conseiller au Centre des relations industrielles, membre de la Commission royale d'enquête sur l'union économique et les perspectives de développement du Canada, la commission McDonald, membre du Conseil privé et, soit dit en passant, membre du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité.

(1500)

Il est acceptable à nos yeux et à ceux de la collectivité mohawk et, personnellement, je n'accepte pas ce genre d'atteinte à la réputation d'un homme d'une aussi grande intégrité.

Nous devrions nous réjouir que des hommes de cette trempe soient disposés à venir du Québec pour aider le pays.

Des voix: Bravo!

* * *

LA TAXE SUR LES HYDROCARBURES

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Dernièrement, le premier ministre de l'Alberta, son prédécesseur et les dirigeants du champ de pétrole ont fait part de leurs préoccupations au sujet de l'imposition d'une taxe sur les hydrocarbures.

Questionné à ce sujet par mon collègue de Prince George-Peace River, le ministre des Ressources naturelles avait répondu que, pour avoir une réponse définitive, nous devrions interroger le ministre des Finances. Le ministre des Finances pourrait-il

4473

donc faire savoir à la Chambre si le gouvernement a, oui ou non, l'intention d'imposer une taxe sur les hydrocarbures?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, je ne crois pas que le député ait suivi ce qui s'est dit dernièrement à la Chambre à ce propos. Le Parti réformiste est le seul à avoir parlé d'une taxe sur les hydrocarbures.

Nous n'avons jamais parlé de taxe sur les hydrocarbures. Cela n'est pas dans nos intentions. Il semble que ce soit dans celles du Parti réformiste.

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, laissons de côté cette spéculation. Nous sommes vraiment préoccupés étant donné que le Programme énergétique national a été imposé au début des années 80 par un gouvernement libéral et qu'il a été désastreux pour l'Alberta et l'Ouest.

Le gouvernement va-t-il mettre fin aux spéculations et répondre à la question? Ce gouvernement a-t-il l'intention d'imposer une taxe sur les hydrocarbures? Oui ou non?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, le député ne sait pas ce que veut dire «non». Nous n'avons jamais parlé de taxe sur les hydrocarbures. Reportez-vous au livre rouge. Voyez-vous quelque chose dans le livre rouge à ce sujet? Non, il n'y a rien à ce sujet dans le livre rouge. Cela ne fait pas partie de notre politique, un point, c'est tout.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à la tribune de Son Excellence Ahmed Abdulaziz Al-Sadoun, président de l'Assemblée nationale du Koweït, et de sa délégation de parlementaires en visite au Canada.

Des voix: Bravo!

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, je voudrais demander à mon collègue, le leader du gouvernement à la Chambre, de nous informer de l'ordre des travaux pour les prochains jours.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, voici le programme hebdomadaire des travaux de la Chambre. Nous examinons aujourd'hui, à l'étape du rapport, le projet de loi C-17, qui porte exécution du budget.

Demain, la Chambre examinera plusieurs projets de loi. Premièrement, le projet de loi C-26 concernant la Bibliothèque nationale, le projet de loi C-30 concernant les mesures d'aide aux travailleurs et enfin le projet de loi S-2 concernant des conventions fiscales internationales.

Si nous progressons très rapidement, nous pourrions aussi examiner le projet de loi déposé aujourd'hui par le ministre du Patrimoine canadien concernant des mesures d'aide à la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne.

Lundi, la Chambre poursuivra l'étude du projet de loi C-17 à l'étape du rapport et, mardi, le projet de loi sera lu pour la troisième fois. Mercredi, la Chambre examinera d'autres projets de loi, ce qui reste à confirmer, mais je m'attends à ce que le projet de loi C-18 figure sur la liste. Enfin, le jeudi 2 juin est un jour désigné.

(1505)

Finalement, je voudrais mettre fin aux rumeurs qui circulent toujours à cette époque-ci de l'année au sujet de la date d'ajournement pour les vacances d'été.

Comme d'habitude, ces rumeurs ne sont pas fondées. On a dit que l'ajournement pourrait survenir vers le 10 juin, mais le gouvernement a l'intention d'appliquer le calendrier parlementaire prévu dans le Règlement et d'ajourner le 23 juin.

Je signale qu'il y a plus d'une quinzaine de projets de loi qui attendent encore d'être examinés. Les députés peuvent donc s'attendre à ce que la Chambre siège en soirée pendant les dix jours qui précéderont l'ajournement, comme le prévoit le Règlement.

C'est ce que j'ai à déclarer.

_____________________________________________


4473

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-17, Loi modificative portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 février 1994, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, ainsi que des motions nos 23 à 38 inclusivement.

Le président suppléant (M. Kilger): Je crois savoir qu'il reste encore six minutes au député de Yorkton-Melville. Je lui donne donc la parole.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, j'ai déjà signalé que nous ne pouvions accepter le projet de loi omnibus dont nous sommes saisis ici. Il comporte des parties que nous approuvons, mais aussi une partie que nous désapprouvons, ce qui fait que nous allons devoir voter contre l'ensemble de ses dispositions. C'est inacceptable! Je vais poursuivre mes observations au sujet du projet de loi C-17. J'en étais à ma quatrième observation, soit les mesures touchant la Loi sur l'assurance-chômage.

Ce projet de loi porte de 10 à 12 le nombre minimum de semaines qu'il faut travailler pour être admissible aux prestations d'assurance-chômage. Le Parti réformiste souscrit à cette


4474

mesure. Il demande même au gouvernement de songer à sévir encore plus vigoureusement contre les bénéficiaires chroniques.

Ma cinquième observation a trait au fait que ce projet de loi permet à un plus grand nombre d'employés qui quittent volontairement leur emploi ou qui sont licenciés pour un motif valable de toucher des prestations d'assurance-chômage. Le Parti réformiste s'oppose à cette mesure parce que cela porte désormais à 43 le nombre de motifs valables que peuvent invoquer ceux qui quittent leur emploi pour être admissibles aux prestations d'assurance-chômage. Est-il bien nécessaire d'en dire plus?

Enfin, ce projet de loi réduit la durée des prestations et il contient des dispositions particulières à l'égard des régions où le taux de chômage est élevé. Le Parti réformiste souscrit à cette mesure parce qu'elle encouragera les travailleurs à se déplacer vers les régions où les chances de trouver un emploi sont meilleures.

Comme les députés peuvent le constater, sur les six grandes modifications proposées à la Loi sur l'assurance-chômage, le Parti réformiste en appuie cinq. Si ce projet de loi s'en était tenu à ces mesures, le Parti réformiste y aurait souscrit en bloc.

En ce qui concerne le projet de loi C-17, j'ai mesuré les réformes de l'assurance-chômage qui y sont proposées à une seule aune, le contribuable. Au cours des quelques minutes qu'il me reste, j'aimerais toucher un mot des principes qui, selon nous, doivent présider à la conception et à l'élaboration d'un véritable régime d'assurance-chômage.

Aux yeux des réformistes, le régime actuellement en vigueur ne tient plus d'un véritable programme d'assurance-chômage. Voilà des années que les politiciens usent et abusent de ce régime. C'est presque géré comme un programme de sécurité sociale. Dans bien des régions du Canada, les gens sont tellement déroutés qu'ils croient que l'assurance-chômage est un droit.

De nombreux Canadiens considèrent l'assurance-chômage comme une prérogative qui ne suppose aucune obligation. On entend souvent les travailleurs dire qu'ils ont payé pour bénéficier de ce service, et qu'ils ont donc le droit d'en profiter aussi longtemps qu'ils le veulent. Et c'est ce qu'ils font.

La majorité des travailleurs qui ont payé de l'assurance-chômage année après année sans jamais en retirer en ont assez. Ils en ont assez de payer la facture pour la minorité qui en retire année après année.

Les employeurs qui y cotisent en ont assez de subventionner ceux qui abusent du programme d'assurance-chômage pour garder captifs leurs employés. Les réformistes croient qu'il est temps de revenir aux principes fondamentaux et de rétablir l'objectif premier de l'assurance-chômage, qui doit être un programme financé et administré par les employeurs et les employés afin d'assurer un revenu temporaire à ceux qui perdent leur emploi de façon inattendue.

(1510)

Nous savons que le ministre du Développement des ressources humaines essaie actuellement de mettre au point un plan d'action en vue de la réforme des programmes sociaux. Les réformistes espèrent que, ce faisant, le ministre gardera ces principes fondamentaux à l'esprit. Le gouvernement nous dit qu'il est à l'écoute. J'espère que c'est vrai.

Je vais simplement vous énumérer ces principes sans explication, parce que le temps me presse.

1) Les programmes sociaux devraient être conçus de façon à éliminer tout recoupement entre les procédures administratives fédérales et celles des autres gouvernements.

2) Les programmes sociaux devraient être structurés de façon à réduire au minimum les distorsions économiques et les éléments de dissuasion et encourager ainsi les utilisateurs à devenir plus productifs pour l'économie.

3) Les programmes sociaux se divisent en deux catégories, les suppléments de revenu et l'assurance-revenu. Les deux types de programme devraient être soutenables financièrement, mais seuls les programmes d'assurance-chômage peuvent s'auto-financer.

4) Les programmes d'assurance-chômage devraient s'appuyer sur les véritables principes en vigueur dans le domaine de l'assurance. Cela signifie que les travailleurs qui font des demandes répétées et les employeurs qui mettent régulièrement à pied leurs employés devraient payer des cotisations plus élevées.

5) Les programmes d'assurance-chômage devraient être démocratiques, c'est-à-dire qu'ils devraient être administrés par les employeurs et les employés qui versent les cotisations.

6) Les résultats des programmes d'assurance-chômage doivent être publics. Tous les Canadiens devraient recevoir un état de compte annuel leur indiquant combien ils ont versé au programme et combien ils ont retiré en prestations.

7) Les programmes d'assurance-chômage devraient traiter tous les Canadiens sur un pied d'égalité, sans égard à la région où ils habitent. Les normes d'admissibilité variant selon les régions, les prestations complémentaires pour certaines régions et les autres formes de discrimination régionale devraient être interdites.

8) Les programmes d'assurance-chômage devraient être conçus de telle façon qu'il soit pratiquement impossible d'abuser du système. Il devrait être possible d'éliminer presque totalement le recours abusif aux programmes d'assurance-chômage, s'ils sont complètement autofinancés et administrés par les travailleurs et les employeurs.

9) Toute réforme à grande échelle des programmes sociaux administrés par le fédéral devrait être approuvée par l'électorat dans le cadre d'un programme national.

Si le gouvernement veut vraiment réformer le programme d'assurance-chômage, il devrait envisager sérieusement d'appliquer ces principes.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, j'aurais aimé disposer de plus de temps pour m'exprimer sur chacun des amendements que nous avons proposés. Cependant, comme la procédure nous oblige à nous exprimer une fois sur


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l'ensemble des amendements sur cette section qui traite de l'assurance-chômage, je ferai donc un survol général.

Je commencerai par dire, à la suite de l'intervention de mon collègue du Parti réformiste, que je trouve absolument étrange qu'il ne sache pas combien il paie à l'assurance-chômage et combien il reçoit. Pour faire son rapport d'impôt, il faut connaître ces choses.

Cette réforme de l'assurance-chômage coupe le Canada en deux. Les partisans d'un Canada uni et d'une grande unité canadienne sont les premiers, sans avoir averti tous leurs partisans qui ont voté pour eux dans les Maritimes, à avoir attaqué-et c'est ainsi qu'il faut l'exprimer-donc, à avoir attaqué l'économie des provinces Atlantiques et celle du Québec. Globalement, ces réformes soutireront de l'économie du Québec et des provinces Atlantiques-et vous n'avez pas fini de nous entendre répéter ça à nos collègues d'en face-plus de 1,3 milliard de dollars par année. Ça en prend des petits programmes d'infrastructures pour équivaloir à ce que cela représente pour l'économie.

Nous prétendons, nous de l'opposition, que le gouvernement n'a pas pensé aux retombées économiques, parce que des mesures budgétaires, cela a de l'influence sur la conjoncture économique. Dans une période où la croissance est extrêmement faible, lente et où elle ne s'accompagne pas de création d'emploi, soutirer des sommes aussi importantes de l'économie déjà mal foutue des provinces de l'Est, c'est mettre en danger, alors qu'on utilise des mots différents-et je dis bien «des mots différents»-on met en danger ce pourquoi on se gargarise.

(1515)

Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur deux des amendements que nous avons faits. Mes collègues parleront des autres, mais je veux, moi, parce qu'on n'en pas beaucoup parlé, dire que la disposition à l'article 22, qui se lit comme suit:

«(1.1) Pour l'application de l'alinéa (1 b)»,. . .)
Cela a l'air du chinois, mais c'est pour que les personnes qui sont responsables, qui ont des personnes à leur charge, puissent avoir 60 p. 100 du revenu de la prestation hebdomaire maximale. Pour que cela s'applique, nous voulons qu'il incombe à la Commission de prouver que le prestataire n'a pas droit à l'application de ce taux.

Je m'explique. C'est jusqu'à 390 $ par semaine qu'une personne ayant des personnes à charge pourrait avoir droit à ce 60 p. 100. Trois-cent quatre-vingt-dix dollars par semaine pour quelqu'un qui a des personnes à sa charge, ce n'est vraiment pas beaucoup, sauf que le gouvernement, en introduisant une mesure d'assistance dans un programme d'assurance, pose des problèmes importants qui peuvent se traduire par des mesures inquisitoires auprès des personnes qui bénéficieraient de ces mesures d'assistance, au lieu des mesures générales d'assurance.

Alors, nous avons apporté un amendement pour que la preuve que doit faire la personne qui bénéficiera du 60 p. 100 soit une preuve prima facie, une preuve de première évidence, et qu'il incombe à la commission de faire la preuve qu'elle n'a pas le droit à ce taux.

Il y a une autre disposition dont je voudrais parler et sur laquelle nous avons proposé un amendement également, c'est celle qui peut avoir l'air absolument anodine, qui permet au ministre, à sa discrétion, de cesser l'application des mesures prévues à l'assurance-chômage pour des travailleurs devenus chômeurs dans des régions qui seront soumises à un projet-pilote.

Alors, si vous avez le bonheur ou le malheur de faire partie d'un projet-pilote, à partir de ce moment-là, les dispositions habituelles de la loi ne s'appliquent plus, et ça, à la seule discrétion du ministre. Nous estimons que cela n'a aucun sens et c'est pour cela que nous voulons que ce soit l'approbation de la Chambre des communes qui soit donnée par résolution pour qu'au moins il y ait débat public, il y ait examen de chacun de ces projets-pilotes parce que lorsqu'on est soumis, je le répète, à un projet-pilote, il peut y avoir des avantages, mais il ne faut jurer de rien et il est important que le ministre ne puisse pas, à sa discrétion, modifier l'ensemble des conditions qui s'appliquent aux travailleurs devenus chômeurs.

Le ministre pourrait dire «Je ne ferai jamais cela», la loi existe indépendamment de la personne qui en est investie, et c'est absolument important pour nous, et nous conjurons les collègues d'en face d'accepter cet amendement. Ils n'ont sans doute pas pensé à l'énormité du pouvoir absolument discrétionnaire qu'il confère au ministre en lui laissant toute la latitude pour enlever à n'importe quelle personne qui autrement avait droit à l'assurance-chômage de n'importe quelle région les droits auxquels cette personne a droit en vertu de la loi.

Monsieur le Président, ce projet de loi omnibus pour nous est une honte, non pas que nous ne comprenions pas que le gouvernement ait des problèmes budgétaires, qu'il doive s'attaquer au déficit, nous l'avons dit à plusieurs reprises.

(1520)

Nous n'admettons d'aucune façon que cela se fasse, non seulement sur le dos des personnes qui deviennent vulnérables en perdant leur emploi, mais également sur le dos de ces personnes dans les régions dont l'économie est la plus vulnérable.

Je vais conclure là où j'ai commencé. Celles et ceux qui se drapent dans l'identité canadienne, en réalité, se livrent à un camouflage honteux parce que les mesures qui vont être prises s'attaquent directement à l'économie, et d'une façon très importante, à l'économie des provinces Atlantiques, encore beaucoup plus qu'à celle du Québec, mais ils s'attaquent cruellement à celle du Québec également. La population des provinces Atlantiques représente 8 p. 100 de la population et elle va avoir droit à 26 p. 100 des coupures. Tous les programmes de réadaptation des pêcheurs de la pêche de fond de l'Atlantique ne pallieront pas, et loin de là, ces coupures draconiennes.

Puisqu'il me reste deux minutes, je vais dire que le gouvernement, sans doute, n'a pas pensé à l'effet dépressif que ces mesures auront sur l'économie. Il est important que dans la tête de chaque citoyen on sache que quand les gouvernements redistribuent à des chômeurs l'argent pris dans nos poches, cet argent-là va immédiatement dans l'économie. Il ne sert pas à faire de la spéculation ou à acheter des biens de grand luxe qui sont généralement importés. Cela va directement dans l'économie. Cela sert à payer les loyers qui, autrement, seront plus difficiles à percevoir, si tant est que quelqu'un a besoin de percevoir les loyers. Cela rend la vie plus difficile aux petits commerçants parce que cela alimente les petits commerces, et cela rend bien sûr la vie


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plus difficile aux familles qui autrement comptent sur ces dispositions.

Bien sûr, on va dire: Oh, mais il y a des personnes qui vont abuser, et abuser, et abuser au sens où elles ont recours à répétition à l'assurance-chômage. Je vais vous dire quelque chose, n'importe laquelle de ces personnes qui ont recours à répétition à l'assurance-chômage changerait sa situation pour quelqu'un qui en paie depuis 25 ans et qui a toujours eu un bon emploi.

Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, dans le comté de Laurentides, celui que je représente, le taux de chômage est de 18 p. 100. Nous sommes bien loin du taux de chômage national. Il faut être quelque peu naïf pour croire que les récentes actions du gouvernement libéral puissent faire baisser ce taux de chômage.

Tout ce que vous avez fait depuis le 25 octobre dernier, vos décisions et vos actions ne représentent qu'une goutte d'eau dans l'océan. Par votre faux optimisme et vos discours pompeux, vous tentez d'induire en erreur la population en lui disant que votre affaire fonctionne et qu'elle porte fruit. En fait, ce sont des miettes que vous parsemez à droite et à gauche. Vous visez la précarité et le très court terme. Au Québec et dans mon comté, la période préélectorale produit ses habituels jobs.

Les ministres du Parti libéral, provinciaux et fédéraux, annoncent ici et là de l'aide financière dans le cadre du Programme d'infrastructures. Ainsi, on crée ou on maintient quelques emplois temporaires, des jobs de courte durée. Le gouvernement d'en face se contente et se réjouit de son action miraculeuse.

Mais où sont les véritables visions, monsieur le Président? Où sont les plans à plus long terme qui nous permettraient d'envisager une économie plus stable, plus créatrice d'emploi? Au lieu de s'attaquer sérieusement au problème et de réfléchir sérieusement à des solutions, les ministres d'en face se promènent et se prennent pour des porteurs de bonne nouvelle.

Les gens d'en face gèrent à la petite semaine. Ils gèrent le quotidien et attendent de voir ce qui arrivera demain. Les chômeurs et chômeuses de Laurentides savent très bien que rien n'a changé. Pour eux, il n'y a plus de jobs disponibles depuis que vous êtes sur les banquettes d'en face.

(1525)

Ce qu'ils savent cependant, c'est qu'après l'assurance-chômage, il y a l'assistance sociale. C'est cela, la réelle contribution des libéraux à l'économie. C'est cela la vraie vérité, voilà ce qui se passe réellement dans nos comtés.

Le fédéral pellette ses responsabilités dans la cour des provinces. Ce transfert, un processus honteux, démontre bien la mollesse et l'inertie des libéraux. De l'assistance sociale, de l'assurance-chômage coupées, des jobs sans lendemain, des impôts augmentés pour la classe moyenne et de belles paroles, évidemment, constituent les seuls fruits produits par le gouvernement du livre rouge.

Le projet de loi C-17 du ministre des Finances, ce véritable fourre-tout post-budgétaire, vient introduire des modifications à la Loi sur l'assurance-chômage. Plusieurs modifications nous sont absolument inacceptables. L'amendement de mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup concernant la modification du taux de cotisation vient rapprocher la date de changement de ce taux.

Nous voulons mettre fin le plus tôt possible à une mesure qui nuit à l'emploi. Au lieu d'attendre le premier janvier 1995 pour ramener le taux à 3 dollars du 100, nous demandons que le taux soit ramené à 3 p. 100 le premier juin 1994. Les libéraux n'ont pas démontré une grande honnêteté sur cette question du taux, puisque c'est eux-mêmes qui l'ont augmenté de 3 $ à 3,07 $ le premier janvier 1994.

Et maintenant, ils jouent la grande comédie en disant à la population qu'ils corrigent ce taux trop élevé, alors qu'eux-mêmes viennent de l'augmenter. Le processus ne baigne pas dans l'honnêteté et les libéraux en rajoutent en faisant miroiter qu'ils créeront 40 000 emplois par la correction de ce taux.

D'une part, si le gouvernement est si confiant de l'impact positif de la baisse du taux, pourquoi alors l'a-t-il augmenté le premier janvier 1994, et pourquoi retarde-t-il sa baisse au premier janvier 1995?

D'autre part, ce mirage de 40 000 emplois n'est qu'un scénario, une hypothèse basée sur l'ancienne formule du taux qui devait atteindre 3,30 $ le premier janvier 1995. Cette baisse du taux vient simplement éliminer une nuisance à l'emploi et justement, selon les chiffres très discutables du ministre, réduire des pertes d'emplois.

À ce que je sache, réduire des pertes d'emplois n'égale pas création d'emplois. Maintenir des emplois, arrêter des pertes d'emplois contraint le taux de chômage à ne pas augmenter, alors que créer des emplois fait baisser le taux de chômage. Mais pour les libéraux, c'est la même chose.

Leur recette de l'emploi, de fort mauvais goût, mélange tous les éléments, sans leur connaissance, sans dosage et sans nuance, et ensuite, ils lancent leur produit dans la population en espérant que les gens avaleront tout cela bêtement.

Détrompez-vous! La population sait très bien ce qui se passe dans la réalité de tous les jours. Les gens de mon comté veulent des actions et des résultats palpables. Les gens de Laurentides veulent du travail. Ils sont prêts à se former, à se reformer, à se recycler pour acquérir les outils nécessaires afin de répondre aux besoins des marchés du travail.

Les 30 p. 100 de sans-emploi de mon comté, je le répète, 30 p. 100, veulent voir la lumière au bout du tunnel. Ils demandent au gouvernement de mettre de l'avant des programmes qui les aideront à retourner au travail, du travail à long terme, des emplois qui leur permettront de s'assurer une certaine sécurité. Pas toujours et encore des petits jobs de quelques semaines, créés par des programmes qui ne visent que l'obtention des semaines nécessaires de travail pour retourner sur l'assurance-chômage!

De cette façon, on tourne en rond. Le gouvernement ne fait que cautionner ce cycle, ce cercle vicieux dans lequel sont emprisonnés les travailleurs. Il faut modifier notre façon de faire, changer


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notre approche afin d'atteindre des résultats plus intéressants, plus profitables, et pour les travailleurs, et pour les employeurs.

Les nouvelles modifications au Régime d'assurance-chômage viennent relever la barrière d'accès à ses prestations. Dans mon comté, ces changements attaqueront un grand nombre de travailleurs incapables d'accumuler les 12 semaines obligatoires à cause d'une économie régionale assise sur l'industrie touristique. Pour eux, c'est une entrée directe à l'assistance-sociale. Un beau coup du gouvernement libéral! Les décideurs d'en face n'ont jamais réalisé que des travailleurs avaient toutes les misères du monde à accumuler ces fameuses semaines.

(1530)

Les libéraux en rajoutent: vous travaillez plus, mais on vous en donne moins; moins de semaines de prestations et moins grosses, les prestations; moins d'argent à dépenser, pouvoir d'achat à la baisse, l'économie remercie des travailleurs, ne crée pas d'emploi, et la spirale continue.

Les libéraux coupent dans l'assurance-chômage sans pouvoir offrir aux travailleurs des alternatives. On fonctionne à l'envers de l'autre côté de la Chambre. La logique des processus libéraux ne respecte pas le bon sens. C'est inquiétant et décourageant pour les électeurs de mon comté. Cela démontre nettement que les libéraux considèrent davantage les chiffres que la situation des personnes.

Je demande donc aux libéraux d'appuyer notre amendement concernant le taux de cotisation. S'ils sont si certains des effets positifs de cette baisse, ils ne peuvent rejeter notre proposition. Reste à voir s'ils ont le courage et la volonté de le faire, ce dont je doute fortement.

[Traduction]

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Monsieur le Président, je suis heureuse de parler du projet de loi C-17 et particulièrement des articles relatifs à l'assurance-chômage.

Le Canada a toujours été fier, et avec raison, des prestations d'assurance-chômage qui étaient versées au pays. Durant ce que l'on a appelé le débat sur le libre-échange, le Nouveau Parti démocratique a exprimé certaines inquiétudes; il a notamment dit craindre qu'après la signature de l'entente, on ne tente d'américaniser notre régime d'assurance-chômage, tout comme bien d'autres éléments, les soins de santé par exemple.

Ce projet de loi ne propose pas de véritable réforme de la loi; il ne vise pas l'élaboration d'un système qui répondrait vraiment aux besoins des chômeurs; il a plutôt comme objectif des mesures encore plus régressives qui attaqueraient les chômeurs au lieu de régler la grave question du chômage.

Durant la session précédente, au cours des discussions sur le projet de loi C-21, présenté par l'ancien gouvernement conservateur, et le projet de loi C-113, l'opposition libérale s'est opposée avec véhémence aux mesures régressives proposées dans ces deux projets de loi. Toutefois, les articles concernant l'assurance-chômage dans le projet de loi C-17 vont bien plus loin que les mesures régressives proposées dans les deux projets de loi tant décriées par les députés d'en face lorsqu'ils étaient dans l'opposition; ces derniers proposent maintenant des mesures semblables, mais encore plus poussées.

Pour montrer à quel point le régime d'assurance-chômage a changé au pays, je vous dirai par exemple qu'en 1989, 90 p. 100 des chômeurs étaient admissibles à l'assurance-chômage. À peine quatre ans plus tard, après le saccage du régime par le gouvernement conservateur, 65 p. 100 seulement des chômeurs étaient admissibles.

Soyons clairs; il s'agit d'un régime d'assurance. Le gouvernement précédent a retiré au gouvernement fédéral ses obligations en matière de financement de l'assurance-chômage. C'est maintenant un régime d'assurance financé par les employeurs et les employés. Le mot assurance signifie que le fait de payer vous donne droit à des prestations éventuelles.

J'ai été vraiment estomaquée de voir que le gouvernement libéral nous présentait une mesure législative pire encore que celle du gouvernement conservateur. Je suis sûre qu'il n'y a pas un Canadien qui s'attendait à ce que le présent gouvernement soit pire que le précédent, ce n'est donc pas une mince surprise que de voir ce que fait ce projet de loi.

Je voudrais donner quelques exemples précis. Tout d'abord, le projet de loi C-17 créera un système d'évaluation des moyens pour déterminer le niveau des prestations. Ce qui est inquiétant là-dedans c'est que les régions à chômage élevé sont encore plus touchées que celles où il l'est moins. Je ne comprends pas que les provinces et les territoires ne poussent pas les hauts cris, comme par le passé, car tout ce que fait ce projet de loi c'est leur transférer la responsabilité de s'occuper des chômeurs pendant qu'ils cherchent du travail. Une fois de plus, c'est ce que fait le gouvernement.

(1535)

La durée de paiement des prestations a été uniformément réduite, au moment même où le chômage prolongé devient un problème. Par le passé, la durée du chômage parmi les Canadiens était beaucoup plus courte que maintenant. En fait, ce qui est encore plus révoltant c'est qu'il n'y a plus que 59 p. 100 des Canadiens qui ont un emploi à plein temps.

Un rapport publié cette semaine, «The Ousiders», signale des niveaux de pauvreté et de chômage que l'on n'avait pas vus depuis la dépression.

D'une part, nous avons un système économique en crise, car pour beaucoup trop de gens ce n'est pas simplement une période de récession, mais bien une dépression; et d'autre part, nous avons un gouvernement libéral qui dit: «Nous allons prendre une nouvelle voie», mais qui prend en réalité une voie encore plus mauvaise que celle du précédent gouvernement en ce qui concerne les chômeurs.


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En février, lorsque le budget a été présenté, 60 cents de chaque dollar éliminé du budget étaient pris chez les chômeurs, par le biais de suppressions d'emplois et de réductions dans les programmes sociaux.

Il y a une deuxième chose très inquiétante au sujet de ce projet de loi que je vais rapprocher directement du livre rouge dont on nous parle tant. Dans le livre rouge, on peut lire ce qui suit: «Les citoyens sont mécontents parce qu'ils ne sont pas consultés, parce que leurs vues ne sont pas prises en compte, parce que les affaires publiques, lorsqu'elles deviennent cruciales, sont traitées à huis clos. Un gouvernement libéral adoptera un train de mesures pour rétablir la confiance dans les institutions publiques.»

Que font les libéraux au moyen de ce projet de loi? Je n'ai jamais vu enlever au Parlement autant de pouvoirs depuis sept ans que je suis à la Chambre des communes. Aux termes de ce projet de loi, en particulier de la partie sur les projets pilotes, le gouvernement, et non le Parlement, définira seul les règles et la nature de tels projets.

Le gouvernement prévoit des crédits de 20 milliards de deniers publics. Il déclare que les partis élus n'auront pas un mot à dire sur l'élaboration du programme, car il s'en chargera tout seul. Voilà précisément ce qui rend les gens cyniques face aux gouvernements majoritaires et c'est tout à fait contraire aux promesses du livre rouge.

Les mesures régressives sur l'assurance-chômage minent complètement la confiance qu'a pu susciter l'examen de la politique sociale entrepris par le ministre du Développement des ressources humaines. Le ministre et le gouvernement disent qu'ils vont étudier attentivement les modifications à apporter au régime. Les néo-démocrates approuvent cet examen. Nous savons que le régime ne fonctionne pas, que, de nos jours, les jeunes familles s'appauvrissent plus rapidement et que le fossé entre les riches et les pauvres se creuse sans cesse. Nous sommes d'accord avec cet examen.

Or, qu'est-ce que le gouvernement est en train de faire? Il a dit qu'il allait consulter tout le monde. Les documents secrets qui ont fait l'objet d'une fuite cette semaine font état de son intention de dépenser plus de un million de dollars, mais ce n'est pas pour promouvoir l'examen de la politique sociale. En même temps, dans un projet de loi qu'il garde dans l'ombre, il établit les paramètres mêmes de la nouvelle politique sociale.

Le ministre du Développement des ressources humaines doit rendre des comptes aux Canadiens. Qu'en est-il de l'examen, alors qu'en vertu de ce projet de loi, le ministère des Finances a arrêté la politique?

Nous sommes saisis d'un projet de loi bien hypocrite, du moins en ce qui concerne tant les promesses des libéraux, du temps qu'ils étaient dans l'opposition, que leur engagement actuel à consulter les Canadiens.

Toute la population, en particulier les membres du Nouveau Parti démocratique, s'inquiète du réseau des services sociaux et de la façon dont il faudrait le réformer. Je me permets de mentionner certaines solutions possibles.

Le gouvernement n'a pas présenté de véritable politique d'emploi.

(1540)

J'espère que le gouvernement appuiera le projet de loi d'initiative parlementaire sur le plein emploi que je propose et qui sera débattu le mois prochain. Si le gouvernement avait élaboré un vrai plan, il aurait pu ramener le taux de chômage à environ 9,5 p. 100, ce qui lui aurait permis d'épargner la somme de 2,4 milliards de dollars qu'il envisage de retrancher dans le budget pour l'année en cours.

Si le gouvernement se consacrait réellement à l'élaboration d'un programme de plein emploi, nous n'aurions pas besoin d'apporter des changements au régime d'assurance-chômage et nous n'en parlerions même pas. Les Canadiens devraient cesser de croire que le chômage ne coûte rien et que nous pouvons régler ce problème en nous attaquant encore aux chômeurs.

Le Nouveau Parti démocratique s'oppose carrément aux mesures que le gouvernement a proposées en matière d'assurance-chômage. Ces mesures ne font rien pour régler les grands problèmes de notre société. Au contraire, elles les aggravent.

Je ne crois pas que les Canadiens aient élu le gouvernement pour qu'il rende la vie plus difficile à des millions de Canadiens. C'est pourtant ce que fait le gouvernement libéral en proposant ce projet de loi. J'espère que les provinces et les territoires s'opposeront également aux mesures contenues dans le projet de loi.

Malheureusement, on ne parle plus de véritable réforme ou des vives inquiétudes des Canadiens. Le nouveau mot d'ordre, ce sont les compressions à outrance, comme on peut le constater dans le projet de loi. Les coûts du chômage, tant sociaux que financiers, sont énormes. Nous le savons, mais nous ne réussirons pas à réduire ces coûts en aggravant la situation ou en cherchant à confier le problème à d'autres.

J'ai reçu des milliers de lettres, de pétitions et de cartes de gens qui sont également contre ces changements. Je partage leur avis, car les changements ne régleront pas les grands problèmes de notre société.

En terminant, j'espère que les membres du gouvernement reliront les discours qu'ils ont prononcés dans le cadre des débats sur les projets de loi C-21 et C-113. À l'époque, ils s'opposaient à des mesures beaucoup moins draconiennes que celles qu'ils proposent, eux-mêmes, aujourd'hui. Vous devriez avoir honte. Voilà ce que j'avais à dire au Parti libéral.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, je suis très heureux, même presque ému de pouvoir me prononcer sur les amendements proposés à la section concernant l'assurance-chômage du projet de loi C-17. J'aimerais ouvrir une parenthèse pour indiquer aux Québécois et aux Canadiens que ce gouvernement a essayé, dès le début du processus d'examen du projet de loi C-17, en sous-comité, pour lequel j'étais le porte-parole de l'opposition officielle, de passer en douce, de passer en sourdine, de passer hypocritement, l'une des plus


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importantes réformes, sinon la plus importante réforme jamais apportée aux programmes sociaux.

Le dernier Budget, le premier et dernier Budget du ministre des Finances, prévoit des coupures, au cours des trois prochaines années, de 5,5 milliards de dollars dans le fonds d'assurance-chômage. Cinq milliards et demi de dollars absorbés à plus de 50 p. 100 par deux régions spécifiques, soit les Maritimes, région qui n'est pas reconnue pour avoir une croissance économique fulgurante, surtout ces dernières années avec la situation qu'on retrouve dans le secteur des pêches, et l'autre région très touchée, mon pays, le Québec, qui lui aussi absorbera une grande part de la ponction que le gouvernement fédéral se propose de faire au fonds d'assurance-chômage par l'entremise du Budget libéral.

Seulement pour l'année prochaine, alors que les Maritimes représentent 8,5 p. 100 de la population, elles absorberont 26 p. 100 des 2,4 milliards de dollars que le gouvernement fédéral coupera et drainera du fonds d'assurance-chômage. Le gouvernement ira chercher 630 millions de dollars dans la poche et sur le dos des chômeurs des Maritimes.

(1545)

Le Québec absorbera pour sa part, l'année prochaine seulement, 31 p. 100 des coupures effectuées à l'assurance-chômage, soit 535 millions de dollars. Encore une fois, ce gouvernement, dont je vois des représentants imminents, ira les chercher sur le dos des chômeurs, sur le dos des plus démunis.

Voilà comment ce gouvernement traite les chômeurs. Voilà comment ce gouvernement prétend vouloir créer des emplois. Voilà comment ce gouvernement se comporte de façon cavalière avec ceux et celles qui ne méritent pas justement qu'on les traite de cette façon étant déjà affligés par le malaise, la plaie du sous-emploi généralisé au Québec, dans les Maritimes et un peu partout à travers le Canada. Mais est-ce qu'on doit se surprendre de cela?

Quand j'ai entendu, il n'y a pas si longtemps, le premier ministre parler des chômeurs comme étant des buveurs de bière, qu'ils devraient délaisser la bière pour aller se chercher du travail, je me suis dit: Voilà un homme d'État, voilà un visionnaire. Voilà quelqu'un justement qui a brandi combien de fois un livre rouge en disant qu'eux, ils se souciaient de l'emploi. Voilà un chef d'État qui faisait preuve d'un cynisme, du jamais vu au Québec comme au Canada, un cynisme affreux face aux chômeurs.

Je sais par ailleurs que l'actuel premier ministre a déjà été député du comté de Beauséjour dans les Maritimes, qu'il est conscient, normalement, il devrait connaître, il a fait son job-j'en doute quelquefois lorsque je le vois agir comme premier ministre-mais il devrait connaître la réalité socio-économique des Maritimes, connaître aussi les implications des coupures qu'il propose lui-même comme chef de gouvernement, les coupures qu'il propose à l'assurance-chômage. Il devrait savoir que ces coupures auront un impact considérable sur l'ensemble des communautés des Maritimes déjà écrasées par la fin d'une des plus importantes industries de leur région, c'est-à-dire les pêches et par d'autres difficultés de relance et de redéploiement industriel ou de diversification de l'économie des Maritimes.

N'eut été du Bloc québécois, n'eut été du travail, de l'intensité qu'on y a mis, le sous-comité qui devait analyser le projet de loi C-17, et en particulier sa portion relative à la réforme de l'assurance-chômage, n'aurait siégé que deux jours et demi; une journée pour entendre les hauts fonctionnaires nous expliquer le contenu du rapport et une journée et demie pour entendre les témoins. Nous avons, par notre détermination, obtenu une extension des comparutions d'à peu près deux semaines. Mais même deux semaines, ce n'est pas suffisant. C'est la plus grande réforme jamais faite aux programmes sociaux depuis la création de l'assurance-chômage. Ce que j'ai entendu pendant ces deux semaines-là, c'était le désarroi de gens de la région de la Gaspésie par exemple.

Je parlais ce matin avec mon collègue, le député du Bloc québécois de Gaspé, qui me soulignait que dans sa région seulement, dans son comté, il n'y a pas moins de 27 p. 100 de chômeurs. Il y a des gens qui seront affectés mais de façon considérable par l'augmentation du nombre de semaines requis prévu dans le projet pour pouvoir bénéficier de l'assurance-chômage, augmentation du nombre de semaines de 10 à 12 semaines exigées pour pouvoir recevoir des prestations d'assurance-chômage. Mon collègue de Gaspé me rappelait que le mois dernier, il n'y avait que 42 p. 100 des chômeurs qui avaient pu recueillir 10 semaines de travail, donc qui avaient pu se qualifier avec les nouvelles règles imposées par ce gouvernement, qui avaient pu se qualifier pour l'assurance-chômage. D'autres ne peuvent pas se rendre à 12 semaines. Dans ces régions ressources, dans ces régions mono-industrielles, dans ces régions où le travail saisonnier est quelque chose de très courant, rares sont les endroits où on peut aller chercher plus de 10 semaines de travail.

(1550)

Je vous dirais que, au cours des deux semaines et demi d'audience du sous-comité sur le projet de loi C-17, des gens des provinces Maritimes sont venus nous voir en disant que les mesures contenues dans ce projet de loi déstabiliseraient complètement des communautés, amèneraient la plupart des travailleurs saisonniers, des pêcheurs déjà éprouvés par la crise de la pêche, à passer de l'assurance-chômage à l'aide sociale et que cette aide sociale serait prise à même les coffres peu garnis des provinces Maritimes, comme on le sait.

Quand j'ai vu comment mes collègues libéraux traitaient de façon cavalière ces gens de Terre-Neuve, du Nouveau-Brunswick, d'un peu partout dans les Maritimes et en particulier de la péninsule acadienne, je n'ai pas pu faire autrement que de trouver ça révoltant. Ces gens nous ont apporté des arguments, à nous et au gouvernement, en disant que le gouvernement les frappait de plein fouet avec des mesures, sans qu'il y ait à côté certaines compensations, certaines mesures de développement économique ou de diversification de la base économique, certaines mesures de réinsertion sur le marché du travail. On les attaquait de plein fouet, on leur coupait les vivres et on disait: Advienne que pourra, ces gens devront passer ou casser.

J'ai même vu, et je peux vous dire que j'en suis encore tout bouleversé, tout ému, des membres de ce gouvernement mettre à la porte des gens qui avaient fait des centaines de kilomètres en auto, parce qu'ils n'avaient pas les moyens de prendre l'avion. Ils sont partis de la péninsule acadienne et aussi de Terre-Neuve pour venir exprimer leur désarroi et le crier. Et ces gens-là n'ont


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même pas eu le courage de les écouter jusqu'au bout; ils les ont mis à la porte.

J'ai même vu un soir où il n'y avait aucun député libéral, aucun député du Parti réformiste, seulement un député du Bloc québécois, alors que des gens venaient des Maritimes pour exprimer leur désarroi, encore une fois.

J'ai été outré de ce débat en comité et je vois que ce cynisme caractéristique du gouvernement libéral se traduit un peu partout dans leur attitude, dans les mesures qu'ils mettent en place. Je peux vous dire que mes électeurs et électrices du comté de Saint-Hyacinthe-Bagot, comme les électeurs et électrices de tous les comtés de mes collègues, et probablement aussi ceux des comtés libéraux, en ont un peu soupé de ce cynisme, de ce sarcasme devant des choses fondamentales, devant l'étalement d'une misère humaine qui est considérable à l'est du Manitoba.

Je m'intéresse entre autres à un des amendements, celui concernant la suppression de l'article 28. Il s'agit d'éliminer la nouvelle grille de semaines requises pour avoir droit à des prestations et de revenir aux dispositions initiales. Des régions qui n'ont pas le choix à l'heure actuelle que de s'accrocher à quelque chose, de s'accrocher à un espoir, voient le nombre de semaines requis pour bénéficier de l'assurance-chômage passer de 10 à 12 semaines.

Ce que j'ai entendu depuis trois semaines m'a convaincu plus que jamais qu'il est important que l'on traite les gens avec respect, par exemple ceux du Labrador, quand on parle du Labrador. On nous a présenté des statistiques qui montraient que plus de 65 p. 100 des gens, des communautés complètes, se retrouvaient au chômage à une période ou l'autre de l'année. Ces gens seront frappés de plein fouet par ce projet de loi.

Je demande un peu de compassion pour ces gens-là. Que le Parlement accepte les amendements proposés relatifs à l'assurance-chômage et que le gouvernement mette en place des mesures de diversification ou de renforcement de la base industrielle et de réinsertion sur le marché du travail. Ces gens-là ont besoin d'espoir.

[Traduction]

M. David Walker (secrétaire parlementaire du ministre des Finances): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole au sujet de ces motions et que je répondrai, en fait, au porte-parole du Bloc québécois.

Je suis absolument ravi d'avoir un auditoire aussi vaste aujourd'hui. Il suffit parfois d'être directement en contact avec le paradoxe de la politique canadienne pour mieux comprendre ce qui se passe et j'espère vraiment que le député aura l'occasion de m'entendre ici. Voici un homme qui a été l'un des champions du programme de l'assurance-chômage. Qu'est-ce que le programme de l'assurance-chômage?

(1555)

C'est l'un des plus grands instruments d'unité nationale que nous n'ayons jamais eus. Peu importe la région du pays que vous habitiez, des règles existent. Il y a aussi des exceptions à ces règles, car nous avons veillé dans toute la mesure du possible à ce que, quelle que soit la situation économique de votre coin de pays, vous puissiez participer au programme de l'assurance-chômage.

Il y a ici un parti dont le seul but est de détruire notre pays. Et que fait ce parti? Il défend un programme qui profite à tous les Canadiens et c'est là le genre d'hypocrisie qui a de quoi rendre le gouvernement fou. Oui, c'est un programme très important et, oui, les Canadiens de la région de l'Atlantique méritent d'être protégés et soutenus. Les députés de ce parti doivent comprendre qu'il s'agit d'un programme national qui nécessite une participation nationale. Au cours des 50 dernières années, aucun autre programme n'a aidé davantage les régions défavorisées de notre pays.

Un autre problème avec l'opposition, c'est que sa façon de déformer jour après jour ce qui se passe au comité contribue à induire la population en erreur.

Permettez-moi de clarifier ici officiellement ce qui s'est passé au comité. Au début des audiences, aucun groupe n'avait exprimé le désir de prendre la parole au sujet de ce projet de loi. Nous nous étions entendus avec les députés de ce parti pour attendre une semaine que des groupes se manifestent.

Tout à coup, même s'ils avaient eux-mêmes dit qu'une semaine suffirait, ils tombent dans la plus vile forme de politique et décident, sans doute pour appâter les journalistes, de nous accuser de couper court au débat.

Deuxièmement, plusieurs semaines avaient été prévues pour donner aux personnes intéressées le temps de se manifester. Tous les groupes sans exception qui avaient demandé à être entendus l'ont été. Tous ont été écoutés et ont pu répondre aux questions.

Le gouvernement est allé au devant de la population pour être certain que son programme serait compris et pour que tous les groupes ayant de vraies bonnes idées pour la réforme et pour l'amélioration du système, qu'ils viennent de Gaspé, du Canada atlantique ou du centre-ville de Toronto, obtiennent des réponses à leurs questions.

Le gouvernement est très fier de la façon dont il a mené le débat sur un projet de loi aussi compliqué que celui-là et de la façon dont il a organisé les audiences et a donné à tous ceux qui voulaient se faire entendre la possibilité d'exprimer leur point de vue.

[Français]

M. André Caron (Jonquière): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je participe au débat sur la réforme proposée de l'assurance-chômage. J'ai déjà dénoncé certains aspects de cette réforme et je veux aujourd'hui attirer l'attention de la Chambre sur la mesure proposée qui vise à réduire à 3 $ le taux de cotisation de l''assurance-chômage le 1er janvier 1995.

Vous savez que ce taux est passé à 3,07 $ le 1er janvier 1994 et que le gouvernement, dans son budget, a énoncé la mesure suivante:


4481

Les mesures relatives à l'assurance-chômage, proposées dans le Budget, permettront au gouvernement de ramener le taux de cotisation à 3 $ en 1995... D'ici la fin de 1996, cette mesure permettrait la création de 40 000 emplois de plus que si l'on avait permis une hausse du taux cotisation.
Qu'est-ce qu'on nous dit? On nous dit qu'il y a eu une hausse du taux de cotisation à l'assurance-chômage. Cette hausse-là qui s'est faite pendant le règne du gouvernement libéral actuel, le 1er janvier 1994, aurait coûté 9 000 emplois au Canada, mais le gouvernement l'a quand même appliquée.

En 1996, le montant projeté serait de 3,30 $ et le gouvernement nous annonce que si ce montant-là était demandé, compte tenu des coûts qui seraient reportés sur les employeurs, cela coûterait environ 31 000 emplois. Si l'on additionne les deux on constate que cela fait 40 000 emplois. Pourtant, dans le budget, on nous parle de la création de 40 000 emplois.

Je pense que cela illustre bien une certaine façon de faire de ce gouvernement, comme j'ai pu le constater au cours des six derniers mois.

(1600)

On nous montre des chiffres sur des choses qui seraient peut-être advenues si autre chose s'était produit. Ce que les gens voient c'est qu'il y aurait eu création d'emploi. Quarante mille emplois, c'est presque autant que ce que le gouvernement prévoit avec le programme d'infrastructures.

Pendant ce temps il y a des gens au chômage dans ma région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, région qui a besoin de développement industriel. C'est une région, particulièrement ma circonscription, où de grandes industries ont fait la fortune de leurs travailleurs et travailleuses et celle de la population environnante. De grandes entreprises comme l'Alcan ou la compagnie Abitibi-Price ont payé des salaires intéressants et ont amené dans la région une richesse évidente.

Mais ce temps-là est un peu passé. Ces grandes industries sont en voie de reconversion et il y a certaines rumeurs dans la région, à l'effet que, peut-être, le niveau d'emploi baisserait encore plus que le niveau actuel.

Vous savez que des usines comme l'Alcan à Arvida et Abiti-Price à Kénogami ont probablement coupé d'un bon tiers au moins leur niveau d'emploi au cours des dernières années. Par conséquent ma région compte beaucoup de chômeurs. Les gens espèrent que les gouvernements vont prendre les mesures nécessaires pour qu'il y ait une relance de l'emploi et de nouveau une certaine richesse.

Que trouve-t-on dans le budget du gouvernement actuel? Une mesure hypothétique qui, si elle avait été appliquée, aurait vu la suppression d'un certain nombre d'emplois mais comme le gouvernement la retire, moins d'emplois seront perdus.

Et cela est présenté comme étant de la création d'emploi. Je pense que les gens des régions sont inquiets, surtout dans des régions comme la mienne, qui sont des régions ressources, qui sont des régions où la grande industrie, traditionnellement, a exploité les richesses naturelles et a développé des produits primaires.

L'Alcan fabrique de l'aluminium primaire pour l'exportation, pour la fabrication de produits industriels. L'Abitibi-Price de Kénogami fabrique du papier et du carton pour l'exportation. Nos régions ont vécu de l'existence de ces entreprises mais compte tenu de la diminution de postes, les gens sont inquiets.

Des gens ont perdu leur emploi et il y en a d'autres qui se sentent menacés de perdre le leur. Que nous propose le gouvernement dans son budget pour assurer un certain avenir à ces gens-là? Premièrement il nous propose des coupures de l'assurance-chômage à un moment où les gens en ont particulièrement besoin, et deuxièmement il ne nous propose aucune mesure concrète de création d'emploi.

On nous parle de mesures hypothétiques comme celles que je dénonce actuellement, on fait état aussi du programme d'infrastructures, mais ce sont des choses qui s'installent tranquillement. Même dans ce programme d'infrastructures, j'ai pu constater que certains gouvernements municipaux en profitent pour faire payer par le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial des travaux qu'ils auraient faits de toute façon.

Comme programme amenant de la création d'emploi, on peut quand même avoir certains doutes, parce que certains de ces travaux auraient été réalisés de toute façon. Ce n'est donc pas la création de nouveaux emplois, ce n'est même pas la création d'infrastructures nouvelles qui feraient que, plus tard, on aurait une assise économique plus forte, on fait tout simplement payer par le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial des travaux qui auraient été faits de toute façon.

Je m'étonne donc de ce qu'un parti a fait campagne en disant que les mots-clés, au Canada, c'était l'emploi, c'était jobs, jobs, jobs et de voir le résultat obtenu en lisant le budget.

Les chômeurs, les gens de ma région, les propriétaires de petites entreprises, ceux qui veulent lancer de nouveaux produits, qui veulent bâtir, qui veulent faire avancer cette région qui a fêté son 150e anniversaire de fondation il y a deux ou trois ans, ces gens-là sont déçus.

(1605)

Ces gens-là, pour certains, avaient espéré beaucoup du gouvernement actuel. Vous allez dire que dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, les candidats du Bloc québécois ont peut-être eu autour de 65, 66 et même 75 p. 100 du vote comme mon chef, M. Bouchard, dans la circonscription de Lac-Saint-Jean.

Vous allez dire qu'il n'y a peut-être pas beaucoup de gens qui avaient cru aux mirages, qui avaient cru aux belles promesses du Parti libéral, mais il y avait quand même des gens qui avaient regardé le programme du Parti libéral et s'étaient dit qu'il y avait peut-être certaines mesures dans tout cela qui feraient qu'on serait mieux nantis économiquement.

Peut-être que ces gens ont voté pour le parti en se fondant sur ces promesses-là et ils constatent aujourd'hui qu'il n'y a rien de tel qui se fait après six mois, et à la suite d'une longue préparation. On dit que le gouvernement du Parti libéral est là simplement depuis six mois, sauf que cela fait un an ou un an et demi que tout le processus de préparation de son programme électoral était en marche. On peut dire alors que le plan du Parti libéral existe quelque part depuis un an et demi.


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Un an et demi plus tard, les gens de ma région qui ont besoin de développement, qui ont besoin de programmes nouveaux, qui ont besoin d'un nouvel élan pour relancer leur économie, ces gens regardent le programme gouvernemental et ne voient rien qui puisse répondre à leurs besoins.

Je pense qu'il est important que les cotisations d'assurance-chômage baissent. Il est sûr que c'est une pression qui est forte sur les employeurs. Mais si c'était aussi important que cela et si on doit s'en vanter si fort, comment se fait-il que cette réduction ne prenne pas effet au 1er juin comme mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup le propose?

Comment se fait-il qu'on attende encore un an pour pouvoir donner de l'espoir à des gens, pour pouvoir créer des emplois? Parce que si on dit que cette mesure avait fait perdre 9 000 emplois au 1er janvier, si actuellement on l'annulait on pourrait formuler l'hypothèse que cela créerait 9 000 emplois. Qu'est-ce que le gouvernement libéral attend pour créer 9 000 emplois? Il attend au mois de janvier, il attend que les gens soient encore plus désespérés, qu'un certain nombre de personnes qui sont actuellement au chômage aillent à l'aide sociale. Qu'est-ce que le gouvernemet attend?

On voit bien, dans le fond, que le gouvernement n'avait pas de politique ferme et qu'il a continué d'appliquer la politique qui avait été décidée par l'ancien gouvernement conservateur, parce que cette hausse de cotisation qui a pris effet le 1er janvier était dans les plans du Parti conservateur.

À ce moment-là, pour terminer, je suis obligé de constater que ce nouveau souffle économique, ce nouvel espoir pour les travailleurs, pour les chômeurs, qui avait été semé par le Parti libéral du Canada lors de la dernière campagne électorale, ne s'est pas concrétisé. J'appuierai avec plaisir l'amendement de mon collègue qui veut que la cotisation d'assurance-chômage proposée soit immédiatement mise en vigueur, soit au 1er juin, de façon à ce que les emplois qu'on peut créer, qu'on les crée le plus vite possible.

[Traduction]

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord): Monsieur le Président, je suis heureux que le député ne dispose que de dix minutes pour induire les Canadiens en erreur au sujet de cette mesure législative.

Un des orateurs de son parti a utilisé plus tôt l'expression «mon pays, le Québec». Si c'est le cas, il n'est pas au bon endroit. S'il veut représenter le Québec, je lui signale que le Québec est représenté au Sénat et aussi par le premier ministre de cette province. Le député représente seulement une circonscription.

Nous discutons aujourd'hui du projet de loi C-17, qui porte sur le régime d'assurance-chômage. C'est un régime pour tous les Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Nous versons tous des cotisations à ce régime pour pouvoir être admissibles aux prestations.

Peu après le Deuxième Guerre mondiale, on a demandé à Winston Churchill d'expliquer la différence entre le communisme et le capitalisme. Il a répondu que, si le capitalisme était la répartition égale de la richesse, le communisme était la répartition égale de la misère.

Si le Canada n'est pas assez bien pour certains députés du Bloc, si le Canada n'est pas assez bien pour qu'ils partagent avec les autres Canadiens la prospérité que connaît notre pays, il est certain que ceux qui s'opposent à ce projet de loi garantissent aux habitants du Québec une répartition égale de la misère.

(1610)

Je demande à mes collègues d'appuyer cette mesure législative parce qu'elle favorise la création d'emplois. Au cours des deux derniers mois, le gouvernement a créé 115 000 emplois. Il est le seul gouvernement à jouir d'une cote de popularité de 58 p. 100 au Canada aujourd'hui. Nous devons continuer dans cette voie jusqu'à ce que nous arrivions à redonner des emplois au plus grand nombre possible de Canadiens et à réduire le taux de chômage dans tout le pays.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, l'honorable député qui m'a précédé mentionnait qu'on ne représentait pas nécessairement le Québec ou notre circonscription. Je lui rappelerai que le mandat qu'on a reçu est de défendre les intérêts du Québec et c'était dit très clairement. C'est d'ailleurs pour cela que les gens du Québec ont choisi les gens du Bloc Québécois, parce que les candidats du Parti libéral ne représentaient pas la voie d'avenir qu'ils considéraient nécessaire pour eux.

Aujourd'hui, je prends la parole beaucoup plus pour parler des propriétaires de PME qui, dans ma circonscription, cherchent des mesures simples et réelles de création d'emploi. Quand je pense aux gens de Fibre de verre Rioux, par exemple, à Sainte-Françoise, à MT moulage sous pression, à FF Soucy Prelco, ce sont de petites ou moyennes entreprises-dans le cas de la compagnie de papier, c'est quand même assez gros-qui veulent des programmes simples, des gestes qui leur permettent rapidement de contribuer à la société en créant des emplois.

Le programme des infrastructures, c'est de la poudre aux yeux, ça donne une couverture politique intéressante, une belle image, ça crée un certain nombre d'emplois, reconnaissons-le, mais il y a des mesures beaucoup plus simples et beaucoup plus claires, mais qui, malheureusement, n'apportent pas la couverture politique que le gouvernement cherche et semble absolument vouloir.

Dans l'amendement que je propose, c'est tout simple, il s'agit de ramener tout de suite à 3 p. 100 la contribution de l'employeur à l'assurance-chômage plutôt que de faire le jeu d'artifice que le gouvernement a mis sur la table et qui est très machiavélique. On a créé une nouvelle sorte d'emploi. Avant, il y avait les emplois à temps plein, à temps partiel ou temporaires, maintenant, il y a les emplois dont on évite la disparition. On se glorifie de créer 40 000 emplois, parce qu'on en évite la disparition.

Je pense que le message que l'on doit donner aux Canadiens et aux Québécois présentement est un message de confiance et la façon de faire ça, c'est d'avoir des gestes positifs, des gestes qui indiquent aux industriels que c'est le temps d'investir, que c'est le temps d'aller de l'avant. Il ne faut pas poser des gestes contraires, des gestes qui restreindront leur engagement économique ou qui feront en sorte qu'ils devront se retenir dans la façon dont ils


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veulent contribuer à la solidarité qui permettra de créer des emplois et faire en sorte que les beaux jours reviennent.

Ce gouvernement-ci préfère donner des messages qui sont très ambigus. En même temps qu'on nous dit qu'on veut créer des emplois, dans une région comme la Gaspésie qui a un taux de chômage de 27 p. 100, on fait en sorte que ça leur prendra trois semaines de travail de plus pour avoir droit à l'assurance-chômage et de plus, ils auront droit aux prestations pendant moins de temps. Cela ramène la confiance, ça! Dans le même projet de loi, on dit aux employés de la fonction publique qui ont quand même des salaires intéressants, que ça va assez mal qu'on est obligés de geler leur salaire et qu'on ne peut pas vraiment les payer comme ils le méritent. Donc, on transmet un autre message négatif.

On a l'impression d'entendre le vieux message conservateur. Ça ressemble à ce qui se passait avant que Franklin Roosevelt ne prenne le pouvoir aux États-Unis juste après la crise. On disait à ce moment-là: «Il faut couper les dépenses. Coupons, coupons le plus possible et surtout, ne créons pas d'emplois, ils se créeront d'eux-mêmes.» Ce que je dis dans l'amendement présent, c'est qu'on devrait donner un message clair, un message précis aux industriels, leur donner une marge de manoeuvre tout de suite, le plus tôt possible, et particulièrement, que ça devrait être dirigé vers une industrie comme l'industrie touristique.

Il y a beaucoup d'emplois pendant l'été, des emplois saisonniers. C'est le temps de donner un message pour remettre les gens au travail, afin que les employeurs, avec les économies qu'ils feront, puissent contribuer plus facilement à la création d'emploi.

(1615)

Il ne s'agit pas seulement d'une question de sous et d'effets mathématiques. Il y a un effet psychologique là-dedans aussi. Là-dessus, le gouvernement libéral actuel est passé à côté de la coche. C'est d'ailleurs pour ça que son budget a obtenu un si faible taux de satisfaction auprès des électeurs.

Donc, j'inviterais les députés de l'autre côté de la Chambre, et particulièrement ceux qui vivent dans les Maritimes, qui vivent dans les régions qui sont plus particulièrement influencées par une économie saisonnière, d'accepter de voter dans le sens de l'amendement que l'on propose.

Imaginez-vous demain le message qu'on donnerait aux employeurs comme quoi le gouvernement s'est rendu compte que la façon la plus simple de créer des emplois, c'était de permettre aux PME d'agir rapidement, sans bureaucratie, sans ajout de système, sans demander à trois niveaux de gouvernement de décider si un bout de trottoir devrait être autorisé. On permettrait plutôt à des propriétaires de petites entreprises d'investir directement l'argent qu'ils économiseraient en ne l'envoyant pas dans le système bureaucratique.

J'espère que là-dessus, les députés du gouvernement vont comprendre, eux qui ont été élus sur le slogan de jobs, jobs, jobs, que les slogans politiques, lorsqu'on ne les réalise pas, c'est ce qui nuit le plus à la crédibilité des hommes et des femmes politiques.

Au Canada, à l'automne 1993, on a changé de gouvernement parce qu'on en voulait un qui mettrait l'emphase sur la création d'emplois par des gestes concrets, des gestes réalistes. Vous avez l'occasion aujourd'hui d'en faire un, en adoptant cet amendement, et j'espère que c'est ce que vous allez faire.

[Traduction]

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester): Monsieur le Président, étant donné que je représente la circonscription de Cumberland-Colchester, dans la belle province de Nouvelle-Écosse, qui fait partie des provinces maritimes, et comme le député vient de parler de nous à plusieurs reprises, j'estime important d'exprimer certains des points de vue dont les entreprises des Maritimes m'ont fait part à propos du projet de loi C-17 et de notre budget.

En Nouvelle-Écosse, nous avons environ 90 000 entreprises comptant moins de 50 employés. Nous avons une population légèrement inférieure à 900 000 habitants. Cela représente une proportion d'une petite entreprise pour neuf habitants dans notre province. Ces gens d'affaires me disaient: «Si seulement nous pouvions avoir moins de charges sociales, de cotisations d'assurance-chômage à payer; si seulement nous pouvions avoir moins de cotisations pour accident du travail à payer et ce genre de frais qui nous empêchent d'embaucher plus d'employés, nous pourrions en faire de la création d'emplois.» Voilà le message que les dirigeants de petites entreprises m'ont adressé, en ma qualité de députée représentant les provinces maritimes.

Je tiens donc à affirmer que c'est la petite entreprise dans notre belle province de Nouvelle-Écosse qui fera davantage pour créer des emplois, et en faisant notre part, en modifiant certaines des charges sociales, nous faisons beaucoup pour stimuler la croissance économique et la création d'emplois dans le secteur des affaires.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, la chance m'est donnée pour une deuxième fois de prendre la parole sur le projet de loi C-17. Il est d'une importance capitale pour moi en tant que Québécois de ne pas passer sous silence les changements importants que compte apporter le gouvernement à la Loi sur l'assurance-chômage.

Ces changements toucheront particulièrement l'est du Canada, les Maritimes et le Québec. Les libéraux tentent de minimiser les pertes que subira le Québec en faisant miroiter des créations d'emplois. Il est utopique de croire que la population se laissera berner de la sorte, car il faut le dire, dans les faits, il n'y aura aucune création d'emplois dans ce cas-ci. C'est ce que je vais tenter de vous démontrer aujourd'hui.

Le projet de loi C-17, en modifiant le nombre de semaines d'emplois assurables nécessaires, touche particulièrement la région de l'Est du Canada, et par le fait même le Québec. En effet, comme je l'ai dit précédemment, seules les régions du Canada ayant un taux de chômage élevé seront touchées par les modifications apportées au nombre de semaines d'emploi assurables. En chiffres, cela représente six régions québécoises sur treize et sept régions des Maritimes sur treize. De plus, 95,6 p. 100 des prestataires d'assurance-chômage québécois seront directement touchés par les modifications relatives au nombre de semaines nécessaires pour se qualifier pour le régime d'assurance-chômage.


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(1620)

Les gens de mon comté seront directement touchés par ces nouvelles mesures. Nous avons reçu des centaines de lettres me demandant d'intervenir pour éviter que le système d'assurance-chômage soit modifié de la sorte. Il s'agit de lettres de contestation provenant de contribuables qui, comme moi, ne peuvent accepter ces changements importants à l'assurance-chômage. C'est pour eux que je prends la parole aujourd'hui et c'est pour eux aussi que je m'oppose au projet de loi C-17. C'est pour mes électeurs et aussi pour tous ceux du Québec et du Canada qui seront la cible des modifications apportées à la Loi sur l'assurance-chômage que je m'oppose aujourd'hui.

M. Robichaud: Pas de problème!

M. Sauvageau: Est-ce que je peux continuer, monsieur le député? Je vous remercie beaucoup de votre politesse et de votre attention, c'est très gentil.

M. Robichaud: Je répondais à votre collègue.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre!. Je peux simplement écouter un discours à la fois. Je demanderais à l'honorable député de Terrebonne de continuer.

M. Sauvageau: Monsieur le Président, il y en a pour qui ce n'est pas important de faire perdre des emplois ou des prestations d'assurance-chômage. Pour nous, ce l'est.

L'impact sur les travailleurs de l'est du Canada et du Québec est donc considérable. Il est malhonnête et illogique d'adopter des mesures pénalisant spécialement une région précise. Ces contribuables paient des impôts et participent au régime d'assurance-chômage au même titre que les autres contribuables canadiens. Ils donnent leur part alors qu'ils récoltent des miettes.

Encore une fois, l'attitude du gouvernement fédéral nous démontre l'importance d'agir rapidement pour que cesse ces irrégularités. Un Québec souverain saurait très bien administrer son système d'assurance-chômage. Les coupures, voire économies, que tente de réaliser le fédéral nous démontre à quel point notre système fédéral est une aberration avec ses dédoublements qui coûtent aux Québécois et aux Canadiens des millions de dollars chaque année. Les libéraux coupent là où ça fait le plus mal, car les prestataires d'assurance-chômage seront les premières victimes de ce chaos économique.

Examinons maintenant les supposées créations d'emplois que la diminution des cotisations apporterait. Présentement, le taux de cotisation est de 3,07 $ par tranche de 100 $. Les libéraux comptent les réduire à 3 $, et ce, le 1er janvier 1995. Il est opportun de faire ici un aparté pour rappeler aux Québécois et aux Canadiens que ce sont eux, les libéraux, qui ont augmenté le taux de 3 $ à 3,07 $ et qui l'ont voté en décembre.

Selon les calculs des libéraux, la diminution prévue l'an prochain permettra la création de 40 000 nouveaux emplois pour 1996. Nous n'avons pas besoin d'une analyse financière exhaustive pour comprendre qu'il n'y aura aucune création d'emplois mais plutôt une préservation d'emplois. Il s'agit de deux notions très différentes qu'ils ne semblent pas comprendre.

Résumons de façon simple l'évolution des cotisations au régime d'assurance-chômage. En 1993, elles étaient de 3 $ par tranche de 100 $. En 1994, elles sont passées à 3,07 $ par tranche de 100 $. Et les prévisions pour 1995 étaient de les faire passer à 3,30 $ du 100 $.

Le nouveau plan du gouvernement est le suivant: 3 $ du 100 $ en 1993, 3,07 $ en 1994 et un retour à 3 $ pour 1995. On revient donc au montant de 1993. Ainsi, logiquement, rien ne se perd, rien ne se crée, comme disait Einstein. Ils ne le comprennent pas cependant.

Cependant, ce n'est pas comme cela que les libéraux font le calcul. Selon eux, si nous avions conservé l'ancienne formule de calcul, nous aurions subi une perte de 9 000 emplois en 1994 et de 31 000 pour 1995.

En ramenant les cotisations à 3 $, en 1995, les libéraux font le calcul suivant: 9 000 emplois sauvés en 1994 et 31 000 en 1995, pour un total de 40 000 emplois créés. C'est tout à fait faux. Comme nous l'avons souligné précédemment, un simple calcul nous permet plutôt d'arriver à un grand total de zéro. En effet, la hausse effectuée par les libéraux pour l'année en cours a fait perdre plus de 9 000 emplois. Si on rétablit le taux à 3 $, comme en 1993, on ne fera que récupérer 9 000 emplois. Beau chiffre! Ainsi, nous ne parlons pas de 40 000 emplois créés, mais plutôt de 31 000 emplois préservés pour 1995 et 9 000 emplois retrouvés après les avoir perdus l'année précédente.

(1625)

Il ne faut pas tenter de tromper la population en lui faisant miroiter une promesse aussi vide de sens. Les gens ne se laissent plus berner de la sorte. Cessons de promettre des coquilles vides et attaquons-nous aux véritables problèmes. Il est vrai que le chômage est un grave problème au Québec et au Canada, mais il ne faut pas laisser croire à la population qu'on peut le régler aussi facilement.

Que le gouvernement cesse de croire qu'il peut assumer seul le rôle de créateur d'emploi. Les PME, comme on l'a dit précédemment, seront et sont les principales créatrices d'emploi et ce serait, par exemple, par une aide gouvernementale accrue à ces employeurs que le taux de chômage pourrait baisser. Tout le monde attend impatiemment la reprise économique qui, malheureusement, se fait attendre.

Les actes du gouvernement doivent démontrer une volonté réelle de surmonter les difficultés économiques que vivent les gens du Québec et du Canada depuis trop d'années déjà. La confiance qu'ils accordent à leurs gouvernants n'est pas inconditionnelle et nous devons démontrer aux électeurs la volonté du gouvernement à sortir le pays du gouffre économique dans lequel il s'enlise, et ce n'est pas ce que nous voyons.

Qu'on arrête de faire des promesses vides de sens ou des lois ayant des répercussions économiques néfastes sur la population. Il faut plutôt démontrer une volonté concrète de sortir de l'impasse économique.

Vous direz peut-être que nous critiquons sans apporter de solutions. Eh bien, détrompez-vous. Mon confrère, le député de Kamouraska-Rivière-du-Loup a soumis à la Chambre des amendements au projet de loi C-17 qui pourraient contribuer à éviter ces pertes d'emploi.

Pourquoi, en effet, ne pas baisser le taux de cotisation à 3 $ par tranche de 100 $ au 1er juin 1994 au lieu d'attendre au 1er janvier 1995? Il s'agit de 9 000 emplois, environ 9 000 familles qui


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sont touchées directement pour attendre encore six mois supplémentaires. A-t-on les moyens de se payer 9 000 chômeurs de plus? Sûrement pas! Ces travailleurs ne préféreraient-ils pas obtenir leur salaire plutôt que des primes d'assurance-chômage qui, est-ce utile de le rappeler, sont escamotées par le projet de loi C-17?

En conclusion, nous sommes en présence d'un projet de loi qui n'est pas acceptable pour une grande partie des électeurs. Qu'on arrête de faire croire aux gens qu'ils gagneront là où il n'y a rien à gagner. Les citoyens ne se laisseront pas berner encore une fois par le gouvernement. Ce qu'ils veulent, c'est une véritable reprise économique, de vrais jobs. Allons de l'avant vers un regain économique qu'attend depuis trop longtemps déjà la population de mon comté et du Québec.

[Traduction]

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je n'avais pas l'intention de participer à ce débat, mais j'ai entendu ce matin les remarques du député de Saint-Hyacinthe-Bagot et je n'ai pas pu résister à la tentation de prendre la parole, car il a essayé de faire du gouvernement un monstre. Il a essayé de faire croire que le gouvernement était un tyran et qu'il ne devrait pas faire adopter ce projet de loi à toute vapeur à la Chambre.

J'ai cru utile de clarifier notre position, afin qu'on évalue à leur juste valeur les déclarations parfaitement erronées du député de Saint-Hyacinthe-Bagot. Il sait que le gouvernement n'a pas utilisé la manière forte pour faire adopter ce projet de loi. Il laisse entendre que le gouvernement fait adopter ce projet de loi à toute vapeur à la Chambre.

À titre de secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, lequel s'est montré plus que juste dans toutes les négociations sur les travaux de la Chambre, j'estime qu'une mise au point s'impose, ce que je vais faire immédiatement.

Je n'arrive pas à comprendre ce qui a pu donner pareilles idées au député de Saint-Hyacinthe-Bagot, mais j'imagine qu'il a feuilleté les fascicules du hansard des dernières années et qu'il a lu les discours de l'opposition libérale lors de la dernière législature.

Nous faisions alors face à un gouvernement qui avait toujours recours à la manière forte. Jamais un autre gouvernement n'a eu recours à la clôture et à l'attribution de temps aussi souvent que lui. Le député doit avoir lu nos discours et, la seule conclusion à laquelle je puisse arriver, c'est qu'il a décidé de s'en inspirer à l'étape du rapport de ce projet de loi, parce que, après tout, il s'agit d'une mesure législative de nature budgétaire.

Le gouvernement précédent a utilisé la clôture pour presque tous les projets de loi sur le budget qu'il a présentés. Nous n'y avons pas eu recours en l'occurrence. Je tenais à le préciser. Il n'y a pas eu d'attribution de temps pour l'étude de ce projet de loi. Le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a eu amplement de temps pour exprimer son opinion et il le sait pertinemment. Il a laissé sous-entendre le contraire ce matin. Aussi, si je prends la parole cet après-midi, c'est pour faire cette mise au point.

(1630)

Voyons ce qu'il en est et laissons de côté les anciens discours prononcés par les libéraux lors de la dernière législature. Voyons ce qui s'est vraiment passé au sujet de ce projet de loi, durant l'actuelle législature.

Le projet de loi a été déposé le 16 mars. Il est passé à l'étape de la deuxième lecture le 25 mars, neuf jours s'étant donc écoulés depuis la première lecture. Avant la deuxième lecture, les députés des deux côtés ont eu amplement de temps pour prendre connaissance du projet de loi et examiner ses dispositions et les Canadiens en ont aussi eu suffisamment pour obtenir copie du projet de loi et l'examiner.

Le projet de loi est passé à l'étape de la deuxième lecture le 25 mars. Un certain nombre de députés ont pris la parole ce jour-là. Le projet de loi a été remis à l'étude le 11 avril, et un certain nombre de députés ont pris la parole, puis le 14 avril et, là encore, un certain nombre de députés sont intervenus. Enfin, le 15 avril, le projet de loi a été appelé de nouveau et, une fois terminées toutes les interventions, il a été adopté en deuxième lecture. Plus personne ne voulait prendre la parole. Le débat s'est terminé le 15 avril faute d'intervenants.

Soixante et onze députés ont pris part au débat. Certains l'ont même fait deux fois. Je suis d'ailleurs du nombre. Le député de Saint-Hyacinthe-Bagot et tous ses collègues ont eu amplement l'occasion d'intervenir à l'étape de la deuxième lecture. Le projet de loi a donc été adopté en deuxième lecture et il a été renvoyé au Comité permanent des finances.

Le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a laissé entendre ce matin que l'étude du projet au comité s'était faite à toute vapeur, en une semaine. Le projet a été renvoyé au comité le 19 avril. J'ignore pourquoi la date diffère de celle du dernier jour du débat, le 15 avril, mais, chose certaine, le projet a été renvoyé au comité le 19 avril au plus tard, et il n'en est revenu qu'hier.

Comment le député peut-il parler d'une semaine? J'ai l'impression que c'est beaucoup plus. C'était hier le 25 mai, et le comité a reçu le projet le 19 avril. Une semaine? Plutôt cinq, il me semble. Ce qui s'est passé, en fait, c'est que le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a soudain constaté que le projet de loi faisait l'objet d'une certaine opposition et qu'il était préférable de se rallier au mouvement. Jusque-là, il n'avait pas fait grand-chose pour s'y opposer.

Pendant l'étude au comité, il a constaté qu'il y avait des opposants. Qu'a-t-il fait? Il a vite consulté le compte rendu de la dernière législature et retrouvé des discours. Que fallait-il faire? Il a lu tous les précédents. Il s'est dit que la première chose à faire était d'attaquer le gouvernement et de le faire passer pour un fier-à-bras.

Au comité, il a commencé par prétendre que le gouvernement utilisait des méthodes de fier-à-bras. Il a fait la même chose à la Chambre ce matin. En portant une telle accusation, il pensait faire croire à la population que le gouvernement enfreignait le Règlement.


4486

Le gouvernement n'enfreint aucunement le Règlement. Il s'agit d'un projet de loi de mise en oeuvre du budget qui a été présenté à la Chambre et ses mesures ont été annoncées dans le budget. Le ministre a déjà dit ce qu'il y aurait dans ce projet de loi. Ce dernier a été présenté à la Chambre le 16 mars, après le dépôt du budget. Il a été largement débattu à la Chambre depuis cette date. Soixante et onze députés ont eu l'occasion de prendre la parole à ce sujet à l'étape de la deuxième lecture. Le comité a tenu des audiences pendant cinq semaines.

Le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a évidemment pris tout son temps au comité. Il a eu largement l'occasion d'étudier le projet de loi aux séances du comité et ce matin, ce qui ne l'empêche pas d'avoir le culot de se plaindre, de se lamenter et d'y aller de ses ridicules jérémiades suivant lesquelles le gouvernement agit en fier-à-bras et fait adopter ce projet de loi par la force. Rien n'est plus faux.

Le Parti réformiste n'en a pas soufflé mot, car il le sait. Il sait que le gouvernement a agi parfaitement dans les règles dans cette affaire et qu'il a accordé tout le temps voulu à l'opposition pour débattre le projet de loi à toutes les étapes.

Tous les partis se sont entendus pour limiter le débat à deux jours à l'étape du rapport et à un jour à l'étape de la troisième lecture. C'est une bonne entente à laquelle tous les partis ont souscrit, et elle accorde suffisamment de temps pour débattre le projet de loi. Nous avons donc toute la journée d'aujourd'hui et celle de lundi pour le faire. Ce sont de longues séances.

À la demande de l'opposition, nous avons choisi des jours de séance plus longs pour ce débat. Au lieu de vendredi, nous avons choisi la journée de lundi pour que le débat soit plus long. À l'étape du rapport, les députés sont limités à des discours de dix minutes de toute façon, de sorte qu'ils ont amplement de temps pour exprimer leur point de vue. Ce ne sont pas des tactiques de fier-à-bras. C'est une entente juste et sensée en ce qui concerne ce projet de loi.

Les députés ont également eu amplement l'occasion d'analyser le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture ainsi qu'aux séances du Comité permanent des finances et de son sous-comité qui l'a étudié.

Je sais que le secrétaire parlementaire du ministre des Finances a passé de longues heures à écouter les jérémiades du député de Saint-Hyacinthe-Bagot qui a décidé de s'opposer au projet de loi à la fin du processus. Je sais qu'il a fait preuve d'une grande patience en endurant de nombreuses heures de débat. Je sais que les députés réformistes ont été soumis au même genre de traitement. Mais nous y avons tous survécu.

(1635)

Pourquoi alors se plaindre aujourd'hui à la Chambre? Pourquoi ne pas reconnaître que le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a fait un bon arrangement et qu'il a eu amplement l'occasion d'exprimer son opposition? Chose certaine, il s'oppose au projet de loi. Il a des réserves à son sujet. J'ai déjà fait partie de l'opposition. J'avais coutume de tenir des discours semblables à celui qu'il nous a tenu, mais j'avais des raisons de le faire.

Mme Brushett: Vous ne vous plaigniez pas.

M. Milliken: J'avais des raisons de le faire et bien sûr, je ne me plaignais pas.

[Français]

M. Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, j'entends depuis cinq minutes le secrétaire parlementaire parler de la façon dont, dans les discours, on a traité les gens qui sont venus témoigner devant les comités de la Chambre des communes.

Il n'a pas parlé depuis le début, du vrai débat qui est sur le projet de loi C-17. J'ai l'impression qu'il nous fait perdre notre temps. Il dit qu'on perd notre temps, mais dans le fond, c'est lui qui nous le fait perdre.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. Ce n'est pas vraiment un rappel au Règlement, c'est plutôt une question de débat.

Alors, je donne à nouveau la parole à l'honorable secrétaire parlementaire afin qu'il complète son intervention.

M. Milliken: Monsieur le Président, j'ai presque terminé mes remarques de toute façon.

[Traduction]

Je me réjouis de ce que le député prête une oreille attentive à mes propos.

Je tenais à signaler que le secrétaire parlementaire du ministre des Finances a été un modèle de patience dans ses démarches concernant ce projet de loi. Je sais qu'il s'y est investi beaucoup et qu'il a fait des pieds et des mains pour que l'opposition puisse participer pleinement aux débats sur ce projet de loi, aussi bien à la Chambre qu'au comité. L'offre a été tenue. Le gouvernement n'a pas eu recours à l'intimidation pour faire adopter ce projet de loi à la Chambre.

Je peux comprendre que le député ne soit pas d'accord avec certains éléments du projet de loi. Je reconnais que, lorsqu'on gouverne, il y a des décisions qui sont plus difficiles à prendre que d'autres. Par ailleurs, je respecte les décisions que le ministre des Finances a cru bon devoir prendre dans le cas qui nous occupe.

Je crois que c'était le député de Terrebonne qui a laissé entendre que le ministre des Finances n'aurait pas dû introduire les modifications proposées et qu'il aurait dû réduire le taux de cotisation au fonds de l'assurance-chômage à compter du 1er janvier de cette année plutôt qu'à compter de l'année prochaine. Or, c'est pour des motifs de prudence, aussi bien sur le plan financier que budgétaire, que le ministre a pris cette décision. Il a opté pour l'année prochaine, et je respecte sa décision.

À vrai dire, l'accueil que la presse canadienne, les médias et les milieux des affaires en général ont réservé à son budget a été très positif. Et cela, en dépit des cris poussés par les réformistes qui réclamaient des mesures plus vigoureuses contre le déficit et en dépit des mêmes jérémiades des bloquistes. Ils se sont également plaints de la trop faible réduction du déficit.


4487

Je vois que mon temps tire à sa fin. Je pourrais poursuivre encore longtemps à propos de ce projet de loi. Je suis heureux d'avoir pu formuler mes observations et expliquer les procédés que le gouvernement a employés dans le cas de cette mesure législative.

[Français]

M. Gaston Péloquin (Brome-Missisquoi): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral nous présente aujourd'hui son projet de loi C-17, issu du Budget que le ministre des Finances a déposé en cette Chambre, il y a quelques semaines.

Les mesures touchant l'assurance-chômage contenues dans ce projet de loi visent deux choses: premièrement, le ministre veut renflouer en partie les coffres de l'État en puisant l'argent dans la poche de la majorité des chômeurs et chômeuses du pays. Deuxièmement, il tente de créer l'illusion que son projet de loi contient des mesures équitables envers ceux et celles qui ont perdu leur emploi.

Le ministre a dû s'adonner à de multiples contorsions législatives pour réussir à atteindre les deux objectifs qu'il s'était fixés. Vous conviendrez avec moi, monsieur le Président, que le projet de loi C-17, comme la plupart des initiatives que ce gouvernement libéral a déposées à la Chambre depuis le début de son mandat, manque de cohérence et de consistance, c'est le moins que l'on puisse dire.

Les libéraux se sont toujours vantés d'être non seulement les créateurs, mais les seuls vrais défenseurs de nos programmes sociaux canadiens.

(1640)

Combien de fois durant la dernière campagne les avons-nous entendus clamer l'importance de préserver l'intégrité de ces programmes? Dieu sait combien de chemises ils ont déchirées en public, quand ils étaient dans l'opposition! À cette époque, rien ne leur semblait plus important que les programmes sociaux canadiens. Chaque fois que les conservateurs osaient proposer la moindre petite modification à la Loi sur l'assurance-chômage, les libéraux montaient derechef aux barricades afin de secourir le filet de sécurité sociale canadien.

L'actuel premier ministre du Canada se prenait alors pour le Robin des Bois du Canada, grand protecteur de la veuve et de l'orphelin et toujours prêt à se porter à la défense des plus démunis. Il nous répétait alors l'importance pour le Canada de clairement se distinguer des États-Unis, et que la meilleure façon de le faire était de maintenir la qualité des programmes sociaux offerts à la population. L'assurance-chômage semblait alors faire partie de la liste des intouchables de notre ami Robin.

Mais voilà, la prise du pouvoir semble avoir provoqué plusieurs changements dans la noble philosophie des compagnons libéraux. Le nouveau ministre des Finances ne semble pas avoir eu de difficulté à endosser le costume du shérif de Nottingham, un rôle qui, je dois en convenir, semble avoir été créé pour lui.

Tout aussi insensible et impitoyable que le célèbre personnage de la légende, il a non seulement continué à taxer outrageusement la population, mais il a décidé de s'en prendre sauvagement aux plus vulnérables d'entre nous: les personnes âgées et les sans-emploi.

Ainsi, le projet de loi C-17 fait passer le taux des prestations d'assurance-chômage de 57 à 55 p. 100 du salaire assurable des prestataires.

Voilà donc atteint le premier objectif que le ministre des Finances s'était fixé en déposant son Budget: économiser de l'argent sur le dos des chômeurs et ainsi faire payer une partie de son déficit par ceux et celles qui, dans le fond, ne sont que des victimes de la mauvaise administration des fonds publics par le gouvernement fédéral.

Si ces gens se retrouvent dans cette situation pénible qu'est le chômage, ce n'est certainement pas par choix. Il faut plutôt regarder du côté des politiques fédérales des 30 dernières années en matière d'emploi pour trouver la source du problème. Le manque de vision à long terme dans des domaines comme la formation professionnelle sont les seuls responsables de la précarité des emplois.

Le deuxième objectif du ministre: celui de créer l'illusion que les mesures qu'il propose sont justes et progressistes. Il a donc décidé de donner un cadeau à 15 p. 100 de ceux qu'il a affligés avec son projet de loi. Ainsi, il fait passer de 57 à 60 p. 100 le taux de prestation des chômeurs à faible revenu qui ont une personne à charge. Comme si les gens n'étaient pas assez intelligents pour voir que le gouvernement vient chercher des millions de dollars dans les poches des sans-emploi et ne verse ensuite que des miettes à certains d'entre eux. L'oasis que nous promettait le ministre n'était donc qu'un mirage. L'illusionnisme n'a pas marché, cette fois. Le truc ne prend plus au Canada et encore moins au Québec.

Le premier ministre nous répétait l'année dernière à quel point les Canadiens étaient chanceux de pouvoir profiter de nos programmes sociaux. Il nous rappelait combien les Américains doivent être jaloux de notre système de sécurité sociale. Il est peut-être temps de rappeler au ministre que, dans plusieurs États américains, le taux de prestation d'assurance-chômage tourne autour de 50 p. 100 du salaire assurable moyen. Les libéraux, en faisant passer le taux canadien de 57 à 55 p. 100 pour la majorité des prestataires, font ce qu'ils ont toujours reproché aux conservateurs: rendre notre niveau de vie de plus en plus semblable à celui des Américains. Il n'y a vraiment de quoi se péter les bretelles, monsieur le Président.

(1645)

On se rapproche dangereusement de la situation qui prévaut aux États-Unis et les libéraux ne font rien pour arrêter le mouvement depuis qu'ils sont au pouvoir. Le projet de loi C-17 n'est qu'un exemple parmi tant d'autres du manque de respect que le gouvernement actuel démontre envers la population. Notre Ro-


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bin des Bois national a perdu beaucoup de prestige depuis qu'il est en charge de la forêt de Sherwood canadienne.

En effet, les libéraux ont jusqu'ici renié tellement de promesses électorales, ils ont pris des mesures si contradictoires avec leur philosophie traditionnelle, que la population canadienne et québécoise en est venue à ne voir en lui qu'un petit, un bien petit, Petit Jean.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Avant que nous reprenions le débat, il est de mon devoir, conformément à l'article 38, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: l'honorable députée du Yukon-Le commerce extérieur; l'honorable député de London-Middlesex-L'étiquetage des produits alimentaires; l'honorable député de Vancouver Quadra-Le Traité sur le saumon du Pacifique.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole sur ce projet de loi et je voudrais poser certaines questions à la Chambre, dont la suivante: C'est quoi un chômeur et une chômeuse?

Dans mon comté de Matapédia-Matane, un chômeur et une chômeuse est celui ou celle qui ne veut pas l'être. C'est celui ou celle qui veut travailler. Je m'aperçois que les libéraux, avec leurs infrastructures, c'est de la blague, parce que ça ne donne pas de travail dans nos comtés ou très, très peu.

Chez nous, on s'est dit: «On va se prendre en main». On a fait des efforts incroyables, mais il y a beaucoup de personnes dans mon comté qui, évidemment, reçoivent des prestations d'assurance-chômage. Ce n'est pas parce qu'elles le veulent, c'est parce qu'elles y sont obligées. Je vais vous dire pourquoi elles y sont obligées, c'est parce qu'elles sont éloignés des grands centres comme Québec, Montréal, et évidemment Toronto, parce qu'il y a beaucoup de choses qui s'en vont à Toronto.

Chez nous, on a énormément de misère à faire une deuxième transformation et ça veut dire ceci: tout ce que nous faisons, d'une façon matérielle, physique, ça s'en va à l'extérieur. À ce moment-là, évidemment, c'est très saisonnier. Les personnes voudraient bien une deuxième ou une troisième transformation. On le désire depuis tout le temps, sauf qu'on nous dit que le transport est tellement dispendieux, qu'on ne peut pas faire une deuxième ou une troisième transformation.

Chez nous, nous avons du bois. Nous avons été reconnus l'an passé comme la capitale forestière de tout le Canada et nous avions quelque chose de merveilleux. Mais quand arrive une deuxième ou une troisième transformation-et comme exemple de deuxième transformation, il y a les cages à homards ou les clôtures à neige-on ne peut même pas faire cela chez nous. Pourquoi? Parce que le transport est trop lourd à défrayer. Ça veut dire que nous envoyons tout cela en vrac pour le faire transformer à l'extérieur. Les gens veulent travailler.

(1650)

Savez-vous ce qu'on a fait chez nous? On a dit qu'on allait se mettre ensemble. Il y a eu Opération dignité. Des personnes se sont prises en main, ont fait des choses incroyables, ont mis leur énergie, même leur argent pour arriver à quelque chose. La première Opération dignité a contribué à créer certains emplois. Ce n'est pas suffisant. Qu'a-t-il fallu faire après? Il a fallu faire le Ralliement populaire. Dans le ralliement populaire, nous sommes descendus dans la rue, nous avons provoqué un peu les gouvernements et nous avons pu obtenir certaines choses. Ces choses-là sont quand même minimes. C'est énormément d'énergie pour créer quelques emplois.

Et là que propose le gouvernement libéral? Chez nous, en plus d'avoir fait tous les efforts possibles et imaginables, en plus d'avoir créé des sociétés d'aménagement où les propriétaires se mettaient ensemble, pour se donner du travail, ils mettaient leur lot en commun, ils disaient aux autres personnes: «Vous pouvez travailler sur mon lot, venez travailler sur nos lots». Ils venaient travailler et c'était bien. Mais même là on se demande si on pourra continuer ça, si on sera assez généreux-pas généreux parce que la forêt c'est un investissement-si on va être assez justes pour donner notre part, la part qu'on peut réclamer avec une grande dignité. On n'est même pas sûrs que le plan Canada-Québec, les ententes fédérales-provinciales seront renouvelées.

Pour nous, ce sont des emplois. On n'est même pas sûr que le plan de l'Est sera renouvelé. Pour nous, ce sont des emplois. Quand on parle de couper quelques semaines-de 10 à 12 semaines-, pour les gens de Montréal, de Toronto, de Vancouver, c'est peut-être très peu de choses deux semaines, mais pour nous, dans notre région, deux semaines c'est incroyable comme c'est long et lourd. L'hiver, chez nous, c'est long. Je suis parti de Matapédia, et je voyais les arbres, en haut de Montmagny, avec leurs feuilles. Ici, je vois le Festival des tulipes; chez nous, il n'y en a pas, les tulipes ne sont pas sorties encore. Le Comité des ressources naturelles devait venir dans mon comté et ils m'ont dit qu'ils ne pouvaient pas y aller parce qu'ils ne pourraient pas aller dans les sentiers forestiers à cause de la neige. Ce n'est pas tout à fait vrai, j'étais relativement fâché qu'on ne puisse venir chez nous et qu'ils aient donné comme raison qu'il y avait encore de la neige.

Ça veut dire que la saison est très courte chez nous. Et pour le chômage quand la saison est très courte, une semaine, deux semaines, c'est peut-être dix semaines ailleurs. C'est ce qui est aberrant. Dans tout le Canada, on se dit: «Beau, grand Canada, beau pays». Moi je dis qu'il est bien dommage qu'il y ait des disparités. Il y a autre chose, il faut tenir compte de chacune de nos régions. Les sociétés sont parties de chez nous et elles ont créé des emplois. Là, sur le plan forestier, on dit que l'entente fédérale-provinciale, c'est 50/50.

(1655)

On commence à hésiter à renouveler cette entente-là pour cinq ans. Le plan de l'Est, on commence à hésiter à le renouveler pour cinq ans. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que chez nous, c'est une incertitude constante.

C'est quelque chose de terrible, chez nous. Ailleurs au Canada, c'est peut-être à un moindre degré. Mais je parle de ce que je connais et je vous dis que chez nous, c'est terrible. Est-ce que de l'autre côté, on ne pourrait pas comprendre que 10 à 12 semaines-et je donne juste cet exemple-là-cela a peut-être beaucoup plus de conséquences chez nous qu'ailleurs.


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Aux Îles-de-la-Madeleine, c'est encore pire. Les pêcheurs des îles ont un métier très saisonnier et ils font cela en six ou sept semaines. Ils peuvent peut-être prolonger jusqu'à dix semaines au maximum. Pour eux, on a beau s'ingénier et songer à tous les moyens possibles et imaginables, mais si on ne peut pas prolonger, on fait quoi?

Si on ne se rend pas à 12 semaines, on va faire quoi, aux Îles de la Madeleine? On va aller sur la sécurité du revenu. Ça veut dire que le fédéral, concrètement, envoie cela aux provinces et il leur dit de payer. Est-ce cela, la péréquation? Est-ce que c'est ça, la péréquation? Je me le demande, mais j'espère que ce n'est pas cela.

Chez nous, si on ne nous comprend pas, si chez nous on passe de 57 p. 100 à 55 p. 100, c'est presque une tragédie. Si nous sommes descendus dans la rue avec Opération Dignité, si nous sommes descendus dans la rue avec le Ralliement populaire, qu'est-ce qui nous reste à faire, maintenant?

Jamais je ne voudrais que les gens soient violents. Je leur demande d'être très calmes, mais la vapeur monte et j'espère que de l'autre côté, on va comprendre que dans certaines régions du Canada, du Québec, il y a quelque chose à faire et si on ne le fait pas, je ne sais pas ce qu'on peut faire. À un moment donné, quand on n'a plus à manger, qu'est-ce qu'il nous reste à faire? Qu'est-ce qu'il nous reste à faire?

On peut être patients, évidemment, et essayer de se créer un emploi, évidemment, mais il y a peut-être autre chose à faire et ce sont les gens de l'autre côté qui devraient le faire.

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, à mon tour, j'aimerais appuyer les amendements proposés par mon collègue du comté de Kamouraska-Rivière-du-Loup, amendements relatifs à l'augmentation des cotisations. Il suggère, évidemment, le retour à la cotisation de l'année dernière, autant pour les travailleurs que pour les entreprises.

Il y a aussi les amendements proposés par ma collègue, la députée de Mercier, qui elle, s'inquiète du pouvoir accru que veut se donner le ministre du Développement des ressources humaines via le projet de loi sur l'assurance-chômage relativement à des régions où seront situés des projet pilotes.

Alors, c'est pour cela qu'elle suggère que ces modifications ou ces dispositions soient prévues au moins par une résolution de la Chambre des communes. Il y a aussi l'amendement à l'article 28 proposé par mon collègue de Saint-Hyacinthe, qui lui, évidemment, propose de supprimer l'article 28. L'article 28, pour ceux qui nous écoutent, a trait au nombre de semaines qui maintenant sera rendu nécessaire pour être admissible à l'assurance-chômage.

(1700)

Cette loi, rappelons-le, réduit la période d'admissibilité à l'assurance-chômage, de couverture de l'assurance-chômage, réduit la période, augmente la période pour y être admissible et, en plus, réduit de 57 à 55 p. 100 l'indemnité que les gens vont recevoir en fonction du salaire gagné précédemment.

Parmi les rôles d'un député, il y a celui de représenter l'opinion de ses électeurs. À l'instar de mon collègue de Matapédia, depuis les derniers mois, j'ai rencontré beaucoup de monde, et des gens sont venus me rencontrer à mon bureau de comté. Je vais me servir de ces témoignages de gens qui sont venus me dire dans le comté de Lévis pourquoi ils s'opposaient aux coupures dans l'assurance-chômage, coupures importantes. Rappelons-le, 1,300 milliard de dollars par année. C'est 300 millions de plus que le projet d'infrastructures que le gouvernement entend mettre en vigueur, en collaboration avec les municipalités et les gouvernements provinciaux. Soit dit en passant, ce programme qui vise à créer de l'emploi, en réalité, s'il y a un niveau de gouvernement où cela va coûter moins cher pour appliquer, c'est bien au niveau fédéral puisque les retours d'impôt, les retours de la TPS, ils en bénéficient à ce moment-là.

Je ne veux pas m'éloigner du sujet, on parle de l'assurance-chômage. Donc, coupures de 1,300 milliard de dollars, c'est très important. Qu'est-ce que les électeurs de mon comté me disent? D'abord, je vais vous parler du groupe imposant, important des travailleurs de la MIL Davie. Cela fait sourire certains députés d'en face, mais la situation n'est pas à se réjouir. Les députés d'en face devraient écouter cette situation plutôt que de se réjouir. Ne pas écouter et rire pendant qu'on parle d'une situation dramatique que vivent des centaines de travailleurs de la MIL Davie, qui étaient 3 000 l'année dernière, qui en sont rendus à 1 200! Au cours des prochaines semaines, ils vont descendre à 700 ou 800, et au cours des prochains mois, le chantier MIL Davie risque de disparaître. Pourquoi? Parce que, entre autres, on refuse, le ministre de l'Industrie l'a annoncé encore aujourd'hui, il n'entend pas créer de nouveaux programmes pour permettre aux industries militaires de se convertir au civil.

Le gouvernement fait la sourde oreille à la MIL Davie pour le traversier des Îles de la Madeleine. Le gouvernement fait la sourde oreille pour le Smart Ship, pour aider à cette entreprise où il y avait 3 000 travailleurs l'année dernière. Au moment où le parti libéral écrivait, faisait connaître son livre rouge, 3 000 travailleurs; au moment où l'actuel premier ministre est allé visiter les travailleurs, une semaine avant la fin de la campagne électorale, il a dit: Je vais m'en occuper. Qu'est-ce qui est arrivé avec la MIL Davie? Rien! Pendant cette même campagne électorale, au débat des chefs, l'actuel premier ministre a dit à une réponse qu'il n'avait pas l'intention de couper dans les programmes sociaux. Qu'est-ce qu'il fait: 1,300 milliard de dollars de coupures à l'assurance-chômage avec le projet de loi C-17, 1,300 milliard. Cela, c'est pour les travailleurs de la MIL Davie.

Il y a aussi les travailleurs de la construction qui eux, vous le savez, ont vécu et vivent encore une période difficile, qui sont victimes du chômage saisonnier. Ils sont allés à mon bureau; ils sont allés à tous les bureaux des députés de la région, un peu partout, et aussi à celui du premier ministre pour lui dire que cela n'avait pas de bon sens.

(1705)

La situation de la construction est grave. On a besoin d'une certaine sécurité. L'assurance-chômage c'était ça. Coupures dans le programme d'assurance-chômage. Pendant ce temps-là, si on créait de l'emploi, programme de développement de l'emploi dont une partie était payée à même les fonds de l'assurance-chômage. Des centaines, des centaines d'organismes, au Québec, au Canada, attendent une réponse du gouvernement dans les


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programmes de développement d'emploi. Pas de réponse. Des mois.

Vous savez, il ne faut pas faire incomber toute la faute au gouvernement actuel. L'ancien gouvernement, juste avant l'élection, avait vidé tous les fonds du programme de développement d'emplois et engagé des fonds qui continuent dans le présent exercice financier. Au lieu de cela, on annonce une réforme des programmes sociaux dont on se sert parfois pour masquer une absence de décision, mais il faut des projets pilotes. Dans le cas des jeunes, je suis porte-parole de la jeunesse, les jeunes m'en parlent de la précarité, au Québec, 19 p. 100 des jeunes de 20 à 24 ans sont au chômage, 19 p. 100, 400 000 jeunes au Canada sont au chômage pendant que le gouvernement amène des projets de loi pour leur dire de continuer leurs études, augmentons le plafond de l'endettement. On coupe dans l'assurance-chômage, on allonge la période d'admissibilité à l'assurance-chômage. Les jeunes qui prennent des jobs qu'on peut appeler des jobines, parfois plusieurs emplois à temps partiel à gauche et à droite, à un moment donné ils n'ont pas assez pour avoir droit à l'assurance-chômage. À quoi sont-ils condamnés? À l'aide sociale.

Qu'est-ce qu'on offre? Service jeunesse. Après avoir commencé à 61 $ par semaine pour 2 500 jeunes au Canada, et cela va commencer seulement cet automne, on est rendu à 150 $ par semaine, 150 $ par semaine pour 2 500 jeunes au Canada. On ose couper dans l'assurance-chômage.

Ce gouvernement qui, dans l'opposition, s'opposait à l'ancien ministre de l'Emploi dont je peux donner le nom, M. Valcourt. . .

Une voix: Il était incompétent.

M. Dubé: Oui, il était incompétent, mais vous faites la même chose, et vous faites pire! Vous continuez dans le sens de l'ancien gouvernement. Vous réduisez encore la période d'assurance-chômage. Vous augmentez, vous laissez monter, appliquer les augmentations prévues pour les cotisations.

M. Robichaud: Vous parlez fort!

M. Dubé: Oui, je parle fort, monsieur, parce que la situation est inquiétante, la situation est dramatique. L'heure n'est pas au rire pendant qu'il y a des centaines de milliers de chômeurs qui nous écoutent actuellement, qui souffrent. Ils viennent nous le dire dans nos comtés.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! Je comprends que c'est un sujet de grande importance et que cela apporte un débat animé. Je voudrais quand même céder la parole pour les quelques minutes qui restent au député de Lévis.

M. Dubé: Monsieur le Président, j'ai l'air indigné. Je n'en ai pas seulement l'air, je le suis, devant l'insensibilité qu'on manifeste actuellement pour une clientèle, pour les plus démunis de notre société. Ce n'est pas une clientèle qui va dans les cocktails, ce n'est pas une clientèle qui va à des activités sociales auxquelles les députés de la Chambre des communes sont invités et auxquelles je participe le moins possible, seulement lorsque je crois que c'est dans l'intérêt de faire des représentations.

Pendant que ces gens-là voient leur pouvoir d'achat diminuer. Ce n'est pas rien. Pouvoir d'achat pour faire quoi? Payer les loyers, payer la nourriture, payer ce que demandent les enfants pour aller à l'école. Je vois tous le jours, dans mon comté, dans ma région, la région de Québec, la basse-ville de Québec, ceux qui ne sont pas allés se promener pendant la fin de semaine, des centaines de familles qui parfois en sont à la dernière semaine avant d'atteindre le bien-être social. Ils s'inquiètent pour manger. On n'a pas le droit d'en rire, on doit prendre des mesures. Il me semble que le gouvernement, au moment où il voulait amorcer la réforme des programmes sociaux, aurait dû donner un autre message, un message d'espoir, non pas un message de diminution de dépenses dans les programmes sociaux, mais un message de projets de travail. . .

(1710)

Une voix: Des jobs, jobs, jobs!

M. Dubé: Mais on les attend toujours vos jobs!

Là-dessus, monsieur le Président, je ne me laisserai pas provoquer. Je vais me calmer et demander à ce gouvernement, pendant qu'il en est encore temps, par rapport au projet de loi C-17, d'être conséquent avec les positions qu'il avait lorsqu'il formait l'opposition et d'être sensible également à ce que des milliers de travailleurs ont fait le 1er mai dans les différentes plus importantes villes du pays.

[Traduction]

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, je viens seulement de commencer à préparer cette intervention et je compte donc sur vous pour m'arrêter si je dépasse le temps qui m'est attribué.

Certaines parties du projet de loi C-17 sont acceptables, en ce qui me concerne. J'aurais toutefois préféré que le gouvernement introduise des projets de loi distincts pour chaque loi qu'il se propose de modifier. J'aurais notamment préféré que les modifications proposées à la Loi sur l'assurance-chômage fassent l'objet d'un projet de loi distinct.

Comme nous le savons, le gouvernement a proposé dans son budget des modifications au régime d'assurance-chômage. Nous appuyons le sens de ces changements: réduction de la durée maximale des prestations, augmentation de la période minimale d'admissibilité et réduction des cotisations d'assurance-chômage versées par les employeurs. Toutefois, le Parti réformiste estime que le gouvernement n'est pas allé assez loin.

Les modifications auraient pu aller beaucoup plus en profondeur. En fait, le moment convient tout à fait pour dire que le Parti réformiste est d'accord avec l'idée de redonner au régime d'assurance-chômage sa forme première, c'est-à-dire d'en refaire un programme financé et administré conjointement par les employeurs et les employés et dont la fonction consiste à fournir un revenu temporaire aux personnes qui perdent leur emploi de façon imprévue.

N'est-ce pas ce que doit être ce programme? Ne devrait-il pas être un programme autosuffisant? Ne doit-il pas servir dans des cas bien précis? Oui, lorsqu'un travailleur perd son emploi de


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façon inattendue. Pourtant, au Canada, des travailleurs saisonniers touchent des prestations d'assurance-chômage avec une régularité quasi mécanique.

Si l'économie canadienne était bien portante, si elle générait des excédents inutilisés que l'on ne saurait plus à qui verser, tant mieux, et peut-être pourrait-on excuser quelques abus. Cependant, nous savons tous que les cotisations versées au régime d'assurance-chômage ne couvrent pas, et de loin, ses coûts actuels.

Le programme ne fonctionne pas comme il avait été prévu à l'origine, c'est-à-dire comme un moyen sincère et humain d'aider les personnes qui, sans que ce soit nécessairement de leur faute, se retrouvent tout à coup sans emploi et sans revenu. Ces gens cotisent de bonne foi au régime d'assurance-chômage en espérant qu'ils pourront y faire appel si jamais ils en ont besoin.

La première loi sur l'assurance-chômage a été adoptée en 1940 et a été modifiée à de nombreuses reprises depuis. À ses débuts, en 1941, l'assurance-chômage était limitée aux travailleurs à temps plein. Les travailleurs à temps partiel et les salariés touchant un traitement élevé et bénéficiant de la sécurité d'emploi en étaient exclus. Petit à petit, le régime a été étendu pour en venir à inclure les travailleurs saisonniers à haut risque de même que les travailleurs peu menacés de perdre leur emploi comme les fonctionnaires et les enseignants. Environ 90 p. 100 des travailleurs canadiens sont maintenant couverts par le régime d'assurance-chômage. Pour leur part, les députés et les sénateurs n'ont pas encore décidé d'y adhérer.

La réforme faite par les libéraux en 1971, lorsque Bryce Mackasey était le ministre responsable du régime, est particulièrement digne de mention. M. Mackasey a rendu le régime beaucoup plus généreux en y ajoutant des critères de pondération régionaux et des prestations de maternité.

Par la suite, on a tenté de remédier aux dégâts, mais le succès a été mitigé. Le gouvernement conservateur a créé la commission Forget en 1985, mais n'a pas eu le courage de donner suite à son excellent rapport. Les modifications apportées au régime par les conservateurs en 1990, notamment la majoration des cotisations, le raffermissement des critères d'admissibilité, l'utilisation d'une partie des cotisations pour la formation professionnelle, étaient des pas dans la bonne direction, mais restaient nettement insuffisantes.

De quelle réforme le régime d'assurance-chômage a-t-il besoin?

(1715)

Des décennies de manipulations inspirées par des motifs politiques ont produit des défauts graves dans notre régime d'assurance-chômage. Ce régime est discriminatoire. Les variations régionales des normes d'admissibilité et de la durée des prestations font que les prestataires bénéficient d'un traitement plus généreux dans les régions du pays où le taux de chômage est plus élevé.

Cela crée donc des injustices. Simplement parce qu'elle habite une certaine région, une personne peut être admissible à des prestations beaucoup plus élevées qu'une autre personne, même si les deux ont versé les mêmes cotisations au régime.

Ce régime favorise le chômage. Après la réforme de l'assurance-chômage effectuée par les libéraux en 1971, notre régime est devenu le plus généreux du monde. Des prestations excessivement généreuses créent ce que les économistes appellent le chômage induit. En termes simples, cela veut dire que les gens sont tentés de ralentir leur recherche d'emploi pour profiter au maximum de leurs prestations.

Notre régime d'assurance-chômage crée du découragement et de la dépendance, car l'un ne va pas sans l'autre. Quand on peut travailler 10 semaines et toucher des prestations d'assurance-chômage pendant 40 semaines, on n'est pas vraiment tenté de trouver un emploi plus stable. Le fait d'accorder des prestations d'assurance-chômage aux pêcheurs et aux autres travailleurs saisonniers a eu pour effet d'encourager ces travailleurs à rester dans des industries en déclin. Ce régime est devenu un régime inefficace de soutien du revenu plutôt qu'un régime d'assurance sociale.

Les politiciens ont ajouté tellement de caractéristiques spéciales au régime d'assurance-chômage-le traitement préférentiel accordé à certaines régions, l'admissibilité des travailleurs saisonniers, les prestations de maternité, d'adoption et ainsi de suite-qu'on a perdu de vue le but initial de l'assurance-chômage, qui était de fournir un revenu temporaire en cas de perte d'emploi imprévisible et involontaire.

Ces problèmes et d'autres en matière d'assurance-chômage ont été signalés dans plusieurs études, et notamment dans celle que je viens de mentionner, celle de la commission Forget constituée en 1985 par les conservateurs peu après leur arrivée au pouvoir. Or, ces derniers n'ont pas eu le courage d'effectuer les réformes que tous les analystes impartiaux de l'assurance-chômage s'accordent à recommander, c'est-à-dire réformer le régime de sorte qu'il traite les gens sur un pied d'égalité, faire concorder les prestations avec celles qui sont versées à l'étranger et cesser d'utiliser l'assurance-chômage pour subventionner les industries saisonnières. Il faudrait plutôt résister aux intérêts spéciaux bien implantés.

Les conservateurs ont trouvé plus commode d'oublier. Le Parti réformiste préconise au contraire de faire de l'assurance-chômage un programme raisonnable et durable d'assurance sociale. Comme avec tous les programmes sociaux, la réforme sera entreprise avec précaution, en tenant bien compte des attentes que les gens en sont arrivés à avoir. Il serait souhaitable d'opérer graduellement la réforme de l'assurance-chômage à un sommet du cycle des affaires, quand le chômage est relativement faible.

Pour résumer en terminant, le Parti réformiste rendra au régime d'assurance-chômage son objectif initial et fondamentalement sain consistant à assurer un revenu temporaire en cas de perte imprévue d'emploi.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, vous avez mentionné plus tôt qu'il s'agissait d'un débat très important. Je pense que vous aviez tout à fait raison.

Lorsque j'écoutais le secrétaire parlementaire nous dire qu'il y avait eu, depuis le 15 mars dernier, de très longs débats au cours desquels les gens ont eu le temps de s'exprimer, il avait raison. Il a raison qu'il y a eu beaucoup de débats, beaucoup de consultations dans les comités et cela a duré longtemps. On a interviewé et questionné des gens d'affaires et des chômeurs. Il y a même eu une petite tournée à travers le Canada pour écouter les gens à ce


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sujet. On sait qu'on a écouté, bien sûr, mais on n'a tenu compte d'à peu près rien. C'est ça, le malheur.

Aujourd'hui, on nous dit qu'il y a eu beaucoup de consultations, beaucoup de débats. Bien sûr, il y en a eu et je le répète. Là, on nous disait cet après-midi qu'il y avait eu trop de débats, qu'il fallait en finir, qu'il fallait passer au vote le plus rapidement possible. Ce n'est pas correct. C'est être injuste envers la population et la tricher que de dire qu'il y a eu beaucoup de consultations. Eh bien oui, on a fait beaucoup de consultations, mais on n'écoute pas. On ne tient pas compte des recommandations, et c'est ça le problème.

Alors, pour nous du Québec, ces mesures sont dramatiques.

(1720)

Nous avons 12,6 p. 100 de chômage, à l'heure actuelle, tandis que la moyenne canadienne est de 11 p. 100. Ça veut dire qu'il y a 1,6 p. 100 de plus de chômeurs au Québec que dans le reste du Canada.

Ça veut dire qu'il y a plus de chômage, et quand on réduit le nombre de semaines accessibles au chômage, ça veut dire qu'on diminue d'autant les sommes d'argent du fédéral qui vont être injectées au Québec. Ça veut dire que c'est le Québec qui doit s'occuper, après le chômage, de ces gens-là qui n'ont plus de sous pour survivre. Alors, le Québec va dépenser des dizaines de millions de dollars de plus, strictement par cette mesure.

C'est pour ces raisons-là aussi que nous ne sommes pas tellement pressés de passer ce projet de loi-là, qui est dramatique pour le Québec. Ça, c'est une des bonnes raisons aussi. Le gouvernement, aussi, se vante, bien sûr, d'être un gouvernement qui veut créer des emplois. Alors il dit que s'il crée des emplois, il y aura moins de chômeurs et, bien sûr, on réglera une partie du problème.

Mais, malheureusement, le gouvernement n'a pas, en tout cas, au moment où on se parle, depuis son accession au pouvoir, pris de mesures qui me fassent comprendre qu'il va diminuer le chômage. Premièrement, il a augmenté les cotisations d'assurance-chômage, puisqu'on parle de chômage aujourd'hui, et ces cotisations vont coûter aux entreprises et aux citoyens environ 800 millions de dollars.

Ça veut dire qu'il y a 800 millions de dollars qu'on retire de la poche des consommateurs. Ça veut dire qu'il y a 800 millions de dollars de moins de consommation. Si on pense qu'avec cela, on crée des jobs, on se trompe fortement. On dit de l'autre main qu'on va injecter à peu près les mêmes sommes dans les infrastructures.

Les infrastructures, c'est un projet de trois ans, tandis que l'assurance-chômage, ça semble être un projet de loi qui va durer longtemps. Ça veut dire qu'on n'a absolument rien créé. Le rendement emploi des infrastructures vient d'être diminué d'autant par l'augmentation des cotisations d'assurance-chômage.

Strictement dans ces deux secteurs, on rend à zéro, justement, le rendement emploi. Il n'y a aucun emploi qui va être créé là-dedans. Le gouvernement, aussi, va augmenter de 1,5 milliard de dollars les impôts des particuliers d'ici les trois prochaines années et va augmenter aussi de 1,5 milliard de dollars les impôts aux entreprises dans les trois prochaines années. Trois milliards de dollars, c'est-à-dire un milliard de dollars par année. Un autre milliard de dollars d'augmentation d'impôt et de taxe aux entreprises et aux particuliers.

Ceci veut dire, encore une fois, qu'il y a un milliard de dollars de moins d'argent que les consommateurs pourront dépenser. Et la plupart de cet argent-là, bien sûr, va aller pour payer les intérêts, soit à des prêteurs américains ou des prêteurs japonais ou des prêteurs européens. Même ces milliards-là ne serviront pas du tout à la création d'emplois, à la consommation canadienne, c'est-à-dire que cet argent-là va sortir du pays.

Quand on pense que le gouvernement prétend créer des emplois avec des petites mesures qu'il met en place, il se trompe fortement. Il n'y aura définitivement pas de création d'emplois venant des mesures gouvernementales.

S'il y a des créations d'emplois, elles vont venir particulièrement des petites et moyennes entreprises qui sont innovatrices et qui font en sorte que l'on crée des emplois. Alors, le gouvernement, dans le fond, n'a pas de vision à long terme.

Le gouvernement, comme on dit au Québec, prend des mesures de bouche-trou, on appelle ça boucher des trous. Vous savez, au lieu de refaire la route à neuf, on fait des réparations, on bouche les trous. Ça passe pour un petit bout de temps, mais il n'y a pas de vision à long terme.

On dit aussi qu'on va mettre un pansement sur les bobos. On soigne le bobo pour un instant, mais on ne règle jamais le vrai problème fondamental. Pour le vrai problème fondamental, il y a quelques solutions, bien sûr, qu'on connaît, qui sont évidentes et à propos desquelles le gouvernement continue à faire la sourde oreille, à ne pas vouloir comprendre. Il a des raisons, mais nous ne sommes pas d'accord, nous, en tout cas, du Bloc québécois.

La première raison, c'est qu'on dit au gouvernement d'être un gouvernement centralisateur. Vous voulez absolument continuer à vous occuper de la main-d'oeuvre, de la santé, de l'éducation, alors que ce sont des domaines de juridiction provinciale. Ces dédoublements-là coûtent une fortune. Pas juste une fortune en coûts monétaires, en argent, mais coûtent une fortune en inefficacité. Il y a beaucoup d'incohérence entre les gouvernements, entre les projets, entre les programmes et les règlements qu'on y met sont souvent incohérents entre les programmes provinciaux, comme ceux de la province de Québec en particulier, que je connais le mieux, et ceux du fédéral. Cela fait en sorte qu'on gêne les opérations, on empêche nos petites et moyennes entreprises de s'épanouir, de grandir et de pouvoir évoluer suivant leur désir.

(1725)

Si on veut créer des emplois, il faut permettre à nos entreprises de s'épanouir. C'est comme ça qu'on crée des emplois, pas en augmentant les cotisations à l'assurance-chômage, pas en pénalisant les chômeurs. On ne crée pas des emplois en pénalisant les chômeurs ou les assistés sociaux. On crée des emplois en donnant le nécessaire à nos petites et moyennes entreprises pour qu'elles puissent s'épanouir. Ce n'est pas ce que le gouvernement fait, il fait exactement le contraire.

Là encore, il y a cette folie du gouvernement libéral, particulièrement, d'être un gouvernement centralisateur. Il veut tout contrôler à partir d'Ottawa. C'est une folie! Tout le monde sait que le résultat d'une croissance économique dépend de la décentralisation. Les grandes sociétés comme General Motors, Ford, le font très bien. Elles responsabilisent leurs usines, elles les

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mettent même en compétition les unes avec les autres, alors que le gouvernement fédéral veut absolument tout contrôler ici à Ottawa. C'est une folie. C'est ce qui fait que le Canada s'en va vers la faillite.

Nous nous enfonçons jour après jour, et les gens le savent. Les gens d'affaires, les investisseurs internationaux le savent. Où investissent-ils maintenant, les investisseurs? Ils vont investir aux États-Unis, en Europe, au Japon ou dans les pays de l'Asie. On n'investit plus au Canada comparativement à ce qu'on investissait avant. Pourquoi? Parce que le climat économique n'est pas avantageux. Le problème fondamental de l'emploi vient du fait que le Canada ne gère pas ses affaires de manière rentable pour nos entreprises, alors elles quittent le pays. Dernièrement, un sondage de la Chambre de commerce du Canada rapportait que 20 p. 100 des entreprises canadiennes quittent ou sont sur le point de quitter le Canada pour s'en aller aux États-Unis. C'est dramatique ça.

Le gouvernement lui-même crée le chômage par son entêtement à vouloir tout gérer ici. Comment voulez-vous que le gouvernement fédéral passe des lois et des règles nationales alors que la culture et l'économie du Québec sont complètement distinctes de celles de l'Ontario, des Maritimes ou de l'Ouest? Pour faire face à la compétition internationale, à l'ouvertures des marchés où les marchés sont libres, il faut que nous soyons des compétiteurs à la fine pointe. Pour être des compétiteurs à la fine pointe, il faut être capable de ne pas gêner nos entreprises, et actuellement, c'est ce qui arrive. Ne vous posez pas de questions, c'est ce qui arrive.

Le gouvernement devrait investir un peu plus dans la technologie et faire des choix plus équitables. L'Ontario reçoit 1,2 million de dollars de plus en sciences et technologie que le Québec, c'est ce qui crée le plus de chômage au Québec. De plus, j'ai découvert une chose très importante cette semaine. D'après une étude, il y a 100 000 emplois de plus en Ontario qu'au Québec, au seul niveau des fonctionnaires fédéraux. Cela représente encore une somme très importante. Si le Québec a plus de chômage que l'Ontario, c'est parce que le fédéral sert très mal le Québec. C'est pour cela d'ailleurs qu'on veut la souveraineté du Québec.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Je veux simplement rappeler à la députée de Calgary-Nord, avant de lui donner la parole, qu'à 17 h 30 la Chambre doit passer aux initiatives parlementaires.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, je suis certaine que les députés seront navrés d'apprendre que je ne dispose que de trois ou quatre minutes. Je trouve très intéressant que les députés bloquistes demandent sans cesse à la poule aux oeufs d'or de pondre davantage alors que, d'un autre côté, ils veulent tuer cette poule.

Je pense que je peux enrichir ce débat de quelques observations. Je dois d'ailleurs certaines de ces idées à Mme Karen Selick.

Ces jours-ci, le taux de chômage au Canada dépasse les 11 p. 100. La plupart des gens savent probablement cela, mais ce qu'ils ignorent peut-être, c'est qu'à Hong Kong, il est d'environ 1,5 p. 100. C'est là le taux que les économistes considèrent comme étant celui du plein-emploi. On considère en effet que ce 1,5 p. 100 de chômeurs est principalement constitué de personnes en train de changer d'emploi. C'est aussi le cas d'environ 1,5 p. 100 de nos 11 p. 100 de chômeurs, mais qu'en est-il des autres 10 p. 100?

Comme 1997 approche à grands pas et que de nombreux habitants de Hong Kong cherchent désespérément à sortir de là avant que la Chine ne prenne le contrôle, on pourrait penser que Hong Kong connaît une grave récession économique et que le taux de chômage y est très élevé. Curieusement, il n'en est rien. Pourquoi? En partie, parce qu'il n'y a pas d'assurance-chômage là-bas.

Il existe une hypothèse, corroborée par des économistes, selon laquelle l'existence de l'assurance-chômage accroît le chômage. Une théorie économique peut prévoir et expliquer cette conclusion, et des études empiriques ont corroboré cette théorie.

J'ai cru utile de faire part aux députés de ces brillantes constatations puisqu'ils examinent cette question.

Le président suppléant (M. Kilger): Je dois reconnaître que la députée a très bien calculé son temps.

Comme il est maintenant 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LOI SUR LA PROTECTION DES TÉMOINS

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 20 avril, de la motion: Que le projet de loi C-206, Loi prévoyant la réinstallation et la protection des témoins, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Rex Crawford (Kent): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour deux raisons. La première, c'est pour remercier le député de Scarborough-Ouest d'avoir saisi la Chambre de cette importante question aujourd'hui.

Comme le secrétaire parlementaire du solliciteur général l'a si bien fait remarquer pendant la première heure de débat, le député de Scarborough-Ouest mérite les remerciements de tous les députés pour les nombreux mois de dur travail qu'il a consacrés à ce projet de loi, pour sa détermination et son engagement envers cette question et nombre d'autres questions importantes liées à la justice. Il doit être félicité. Sa détermination et son dévouement lui attirent des éloges qui rejaillissent sur toute la Chambre.

Ma deuxième raison, c'est que je veux aborder un aspect particulier du projet de loi C-206, à savoir l'étendue du programme de protection. Plus précisément, je voudrais examiner plus en détail les catégories de personnes qui pourraient être considérées comme admissibles au programme de protection des témoins.

Nous connaissons tous le concept de la protection des témoins de la Couronne qui témoignent contre des criminels. C'est sur ce genre de témoins que porte le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui. Je suis convaincu que les députés se rendent


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compte que le procès est l'aboutissement de nombreux mois, voire d'années, de travail assidu de la police et du ministère public.

Les témoins sont d'une importance capitale dans ce processus, mais il y a un autre groupe de personnes dont les activités sont tout aussi importantes et qui agissent souvent au péril de leur vie. Ces personnes se meuvent dans l'espace nébuleux entre le tribunal et le monde interlope. Il s'agit des informateurs et des collaborateurs.

Les activités de ces deux catégories de personnes sont cruciales pour recueillir des preuves à l'appui d'une accusation devant un tribunal. Les informateurs sont des gens qui communiquent des renseignements à la police sur les activités de criminels. Ils sont habituellement rémunérés pour leur travail et sont souvent eux-mêmes des criminels.

Tout comme les témoins, les informateurs risquent d'être victimes d'attentats si leur collaboration avec la justice est rendue publique. La trahison n'est pas prise à la légère dans les milieux criminels et est souvent punie de mort.

Les collaborateurs ne sont pas seulement des informateurs rémunérés pour les renseignements qu'ils donnent. Ils jouent un autre rôle. Le mot «collaborateur» laisse entendre que cette personne agit sous les ordres de la police pour prendre des actions concrètes qui peuvent faciliter le déroulement des enquêtes.

(1735)

Ainsi, dans le cadre d'une enquête sur la drogue, on peut se servir d'un collaborateur pour introduire un agent d'infiltration auprès d'un ou de plusieurs suspects. Le rôle de collaborateur peut présenter des risques supplémentaires, car il ne s'agit pas simplement de divulguer des renseignements, mais également de travailler activement contre des réseaux de criminels seuls ou en bande. Ce genre de travail est en soi éminemment dangereux.

La plupart des informateurs et des collaborateurs sont motivés par l'appât du gain et leurs actes obéissent rarement à des sentiments altruistes. Certes, les motifs de ces gens peuvent être suspects, mais il n'en reste pas moins que leur concours est nécessaire. L'emploi d'informateurs et de collaborateurs s'impose si l'on veut lutter efficacement contre le crime organisé et, souvent, leur aide ne nous est garantie que si nous leur offrons une protection adéquate.

Grâce à cette forme de protection garantie, nous pouvons neutraliser les menaces de violence auxquelles les criminels ont recours pour tenir les informateurs possibles à leur merci.

Les programmes de protection offrent des refuges sûrs pour les criminels qui cherchent des moyens de sauver leur peau. Pour eux, la seule issue possible peut être de se rendre aux autorités. Nous devons adopter une stratégie globale à l'égard de toutes ces questions si nous souhaitons une mesure législative qui soit vigoureuse et durable.

C'est pour cette raison et parce que le concours des informateurs et des collaborateurs est essentiel aux enquêtes de la police que nous devons établir toutes les catégories de personnes pouvant figurer dans tout programme de protection.

Dans ce contexte, la Chambre me permettra d'expliquer comment je comprends la situation aux États-Unis, car je crois que cela pourra nous faciliter l'étude du projet de loi.

Le Marshal's Service Witness Security Program, créé aux États-Unis en 1971, vise uniquement la criminalité organisée et d'autres infractions graves. Comme son nom l'indique, le programme consiste uniquement à assurer la protection des personnes qui témoignent dans des poursuites criminelles fédérales importantes. Les informateurs de la police qui ne viennent pas témoigner en cour ne peuvent bénéficier de la protection du programme.

Le programme américain vise à obtenir des témoignages qui conduiront à la condamnation de grands criminels. Les ressources du programme, qui compte actuellement une liste de 500 témoins par année, sont déjà utilisées pleinement. Les informateurs de la police qui ne témoignent pas demeurent sous la responsabilité des services de police. Cette restriction pourrait engendrer des difficultés pour les services de police canadiens.

Avant d'agir, nous devons examiner attentivement les catégories de personnes qui seraient admissibles à un programme canadien de protection des témoins. Si nous agissons trop vite, nous risquons de nous imposer des limites comme les Américains l'ont fait avec leur programme fédéral.

Il y a sans doute lieu de prévoir des restrictions quant au type de cas où une protection pourra être accordée, mais le fait de limiter l'accès du programme de protection aux témoins seulement, sans examiner en profondeur les questions sous-jacentes, irait à l'encontre du but recherché.

La loi pourrait également régir d'autres sujets connexes, par exemple la façon de protéger les libérés conditionnels et les probationnaires pendant qu'ils purgent leur peine.

Mis à part les considérations d'ordre pratique, je crois que l'État a la responsabilité morale de protéger les personnes qui aident les autorités dans les enquêtes criminelles. Cela demeure vrai même si de nombreux individus louches qui bénéficient de la protection du programme sont jugés par l'opinion publique indignes de profiter de l'argent des contribuables.

Je souligne de nouveau, cependant, que peu importe le caractère de ces personnes, les accords de protection sont essentiels à l'efficacité de la lutte contre les criminels et la criminalité organisée. Le projet de loi, qui vise à réinstaller et à protéger les témoins, soulève une importante question. Le projet de loi pourrait constituer la première étape d'un plan d'action général visant à assurer des services de protection aux personnes qui aident les autorités dans les enquêtes et poursuites criminelles.

(1740)

Il faudra peut-être aller au-delà du programme de protection proposé dans le projet de loi et examiner la possibilité d'assurer les services de protection à toutes les catégories de témoins, d'informateurs et de collaborateurs. En faisant moins, nous agirions à l'encontre de l'objet et de l'esprit du projet de loi et de l'intention du député qui l'a parrainé.


4495

Je félicite le député de Scarborough-Ouest, avec qui je partage les mêmes opinions sur bien d'autres sujets. Je suis heureux d'avoir participé à ce débat.

[Français]

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui à l'occasion du débat sur l'adoption du projet de loi C-206 intitulé Loi prévoyant la réinstallation et la protection de témoins.

L'honorable député de Scarborough-Ouest, parrain de ce projet de loi, mérite d'être félicité par nous tous dans cette Chambre pour avoir présenté une question qui occupe l'attention des organismes d'application de la loi non seulement au Canada mais aussi dans le monde entier.

Depuis 10 ans, le besoin de protection des témoins n'a cessé de grandir en proportion directe de l'accroissement de la violence chez les criminels qui font cavalier seul et chez ceux qui font partie du crime organisé. On n'a seulement qu'à se souvenir des bulletins d'information à la télé hier soir et ce matin pour s'apercevoir des menaces faites, et je pense aux menaces faites en Italie à l'endroit de certains juges et d'autres par un criminel lorsqu'il comparaissait devant un tribunal. Ne serait-ce, donc, que pour cette seule raison, le projet de loi de l'honorable député est pertinent et vient certainement à point.

Au cours des délibérations sur le projet de loi C-206, le Programme de protection des sources et des témoins de la Gendarmerie royale du Canada a souvent été mentionné. Pour des raisons évidentes, la GRC hésite à dévoiler quoi que ce soit à ce sujet. Cependant, comme il s'agit du principal programme de ce genre au Canada, il faut que nous ayons une idée de son ampleur et de son efficacité pour bien comprendre toutes les questions que soulève ce projet de loi d'initiatives parlementaires.

Voilà pourquoi je me réjouis de l'occasion qui m'est fournie de donner à la Chambre un aperçu général du Programme de protection des sources et des témoins de la GRC.

D'abord, permettez-moi de le replacer dans son contexte. Les programmes de protection des témoins ont toujours été étroitement liés aux enquêtes sur le crime organisé. Le terme «crime organisé» englobe des activités criminelles fort diverses, notamment le trafic d'importantes quantités de drogue, le meurtre, les voies de fait graves, le blanchiment de l'argent ainsi que l'extorsion et le vol qualifié. Comme vous le savez également, on alléguait fortement que le crime organisé était au centre du dossier de la contrebande dans ma circonscription, dans la vôtre et ailleurs.

Plus souvent qu'autrement, ceux qui commettent ces crimes comptent également sur la peur et l'intimidation pour réduire au silence les témoins et les informateurs éventuels. Toutefois, la protection des témoins a aujourd'hui une portée beaucoup plus large. Il est troublant de constater depuis quelques années la tendance qu'ont des criminels isolés à miser sur la peur et sur l'intimidation. Je reviens à mes propos de tantôt. Ce sont des gens prêts à tout pour éviter d'être condamnés ou encore pour se venger des témoins.

Par conséquent, un nombre croissant ont besoin de protection à cause du rôle qu'ils ont joué dans des causes et qui n'ont rien à voir avec le crime organisé. C'est pour faire face à ce besoin croissant de protection des témoins et des informateurs, et en raison de la priorité donnée à la lutte contre les grandes organisations nationales et internationales se livrant au trafic de drogue, que le Programme de protection des sources et des témoins de la GRC a été créé en 1984.

Ces mises sur pied reposent également sur plusieurs autres facteurs.

(1745)

Mentionnons le besoin accru de recourir à des informateurs plutôt qu'à des agents d'infiltration de la GRC pour pénétrer dans les organisations criminelles complexes. Dans un deuxième temps, il y a la montée des crimes avec violence au Canada. Troisièmement, il y a des manifestations évidentes de l'activité extrémiste et des terroristes au Canada. Et finalement, facteur plus important encore, la jurisprudence sur la divulgation des renseignements par la suite de l'adoption de la Charte des droits et libertés.

Tous ces facteurs ont contribué à la croissance du Programme de protection des témoins de la GRC.

Destiné à l'origine uniquement à la GRC, il permet maintenant d'assurer des services de protection aux témoins et informateurs des services de la police provinciaux et municipaux partout au Canada.

Beaucoup de ces services se fient entièrement à la GRC pour assurer cette protection, mais certains des plus importants ont créé leurs propres unités. Ils ne font pas appel à la GRC que pour obtenir son aide dans des cas où c'est nécessaire pour faciliter un changement d'identité.

[Traduction]

Au milieu des années 80, la plupart des personnes qui participaient au programme de protection des témoins de la GRC étaient associées au trafic de la drogue mais, comme je l'ai dit, cela a changé dernièrement.

Aujourd'hui, de plus en plus de gens qui participent à ce programme le font à la suite d'infractions au Code criminel, comme des meurtres et des voies de fait graves. De toute évidence, même s'il se produit, chaque année, des milliers de cas de voies de fait graves au Canada, ce ne sont pas tous les témoins qui sont admissibles à la protection. La GRC et les autres corps policiers doivent faire preuve de jugement quand ils décident des personnes qui sont admissibles et de celles qui ne le sont pas.

Ces précautions toutes naturelles sont prises pour veiller à ce qu'il n'y ait pas trop de témoins et d'informateurs par rapport aux ressources humaines et financières prévues pour les différents programmes de protection des témoins.

Au cours des dix dernières années, les programmes de protection des témoins de la GRC et des autres services de police se sont révélés très efficaces pour protéger les témoins contre des criminels qui, auparavant, pouvaient user de menaces et de violence pour éviter d'être accusés et déclarés coupables. Le succès du


4496

programme de protection des témoins de la GRC et des autres corps de police parle de lui-même.

En dix ans, aucun mal n'a été fait aux nombreux témoins et informateurs et aux membres de leurs familles qui ont été réinstallés. Il s'agit là d'un point très important. Autrement dit, nous devons tenir compte de l'efficacité de ce programme jusqu'à maintenant.

Chaque année, la GRC réinstalle en moyenne cinquante témoins. Une dizaine d'entre eux aident d'autres services de police. Il en coûte, en moyenne, 1,1 million de dollars par an pour maintenir le programme de protection des témoins de la GRC.

Si l'on ajoute à cela le coût des ressources humaines nécessaires, cela s'élève, au total, à plus de 3 millions de dollars par an. Si l'on se fie aux tendances actuelles, les coûts de ce programme vont probablement augmenter, car on protège de plus en plus de gens. Cependant, ces coûts sont relativement peu élevés si l'on tient compte de l'influence des témoins et des informateurs sur les criminels et sur le crime organisé.

Il n'y a pas de preuve plus accablante que le témoignage de première main d'un complice en qui l'on avait confiance qui étale les rouages d'une organisation criminelle ou d'un témoin qui a assisté à un crime grave et qui peut en identifier les auteurs.

Qu'elles soient témoins ou informateurs, ces personnes sont extrêmement précieuses pour la police et l'appareil judiciaire, de même que pour la société. Très souvent, il serait impossible d'obtenir ces renseignements autrement, peu importe le montant d'argent qu'on serait prêt à y mettre. C'est surtout vrai dans le cas de la lutte antidrogue.

Le programme de protection des témoins de la GRC a incité les informateurs et les témoins à s'avancer, à aider la police et à témoigner en cour contre d'importants trafiquants de drogues nationaux et internationaux même si l'on sait que ces organisations ont coutume de remettre les coups qui leur sont faits. Ces témoins ont contribué à la poursuite d'enquêtes en fournissant des renseignements cruciaux de première main qui, autrement, auraient coûté très cher en ressources policières, humaines et autres.

(1750)

Pour effectuer des enquêtes importantes, la police doit souvent recourir à des techniques comme l'écoute téléphonique à long terme, la surveillance intensive et les efforts d'infiltration de groupes cibles à l'aide d'agents secrets. Ces techniques sont habituellement plus coûteuses que la protection d'un témoin ou d'un informateur.

Depuis le début de son programme de protection des témoins, la GRC s'est constitué un réseau de membres et de contacts chevronnés. Des agents de la GRC sont sur place dans toutes les provinces et dans les territoires pour aider à réinstaller et à protéger les témoins, pour obtenir des changements d'identité sûrs et pour fournir les documents provinciaux nécessaires à l'authentification de ces changements.

Au quartier général, à Ottawa, des membres de la GRC ont élaboré une politique nationale de protection des témoins ainsi que des procédures et des contacts pour faciliter les modifications qui doivent être apportées aux nombreuses banques de données fédérales lorsqu'un témoin ou un informateur reçoit une nouvelle identité.

Un programme de protection des témoins constitue un moyen de lutte contre le crime qui doit, dans une certaine mesure, être géré sous le sceau du secret. Si des renseignements au sujet des méthodes et des procédures policières étaient divulgués, des criminels pourraient s'en servir pour retrouver leurs accusateurs et leur faire du mal, sans parler de l'effet de dissuasion que cela aurait sur les futurs témoins. C'est pour cette raison que la protection des témoins est une des techniques de lutte contre le crime les plus délicates qu'utilise la police.

La GRC est bien consciente de l'importance et de la nécessité pour tous de prendre suffisamment de précautions. Cela est vrai, que le témoin ou l'informateur ait besoin d'une protection complète ou uniquement d'une protection d'urgence à court terme pendant les audiences du tribunal.

La GRC assure également le même service de qualité à tout autre service de police qui demande des conseils ou une aide directe à cet égard.

La protection des témoins n'est pas un remède aux crimes violents ou au crime organisé, mais elle représente une arme importante dans l'arsenal de la lutte contre le crime afin d'enquêter sur ceux qui participent au crime organisé et à d'autres crimes graves au Canada, et de les condamner. Bref, la protection des témoins n'est pas sur le point de disparaître.

Le programme de protection des sources et des témoins de la GRC et d'autres programmes de protection des témoins mis en oeuvre jusqu'ici au Canada font constamment l'objet de révisions, de changements et d'améliorations pour faire en sorte qu'ils complètent le système pénal et contribuent à protéger efficacement les témoins.

À mon avis, le projet de loi C-206, qui prévoit la réinstallation et la protection des témoins, fait partie intégrante de ce processus de changement et d'amélioration.

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-206, Loi sur la protection des témoins. Les députés réformistes demandent que de nombreuses améliorations et d'importants changements soient apportés au système canadien de justice pénale. Les réformistes, certains députés de l'autre côté et, en fait, la plupart des Canadiens veulent que le gouvernement s'attaque à plusieurs fronts.

La Loi sur les jeunes contrevenants et le régime de libération conditionnelle doivent être renforcés. Des lignes directrices plus strictes doivent être mises en oeuvre en ce qui concerne la détermination de la peine dans le cas des personnes condamnées. La protection des citoyens respectueux de la loi doit faire partie intégrante d'une refonte majeure du système de justice pénale. La réforme pénale et la possibilité de rétablir la peine capitale sont deux autres points auxquels on devrait s'attaquer.

Le projet de loi C-206, un projet de loi d'initiative parlementaire qui prévoit la réinstallation et la protection des témoins, est


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un pas dans la bonne direction. Ce projet de loi d'initiative parlementaire est important et ne s'est fait que trop attendre. Les programmes de protection des témoins qui existent actuellement ont été administrés sans aucune uniformité. Le Canada n'a pas de programme national de protection des témoins, ce qui est plutôt paradoxal, étant donné que, dans notre système, le Code criminel relève du gouvernement fédéral.

Je félicite donc le député de Scarborough-Ouest des efforts qu'il a déployés pour essayer de remédier ne serait-ce qu'à un aspect du système, un aspect qui améliorera la façon dont la justice fonctionne dans notre pays.

(1755)

On se plaint depuis quelque temps du manque de protection adéquate des témoins et du manque d'uniformité dans la façon dont sont traités ces derniers au Canada. Comment s'étonner que les Canadiens perdent la foi dans le système de justice pénale quand l'État n'est pas capable d'assurer une protection uniforme aux témoins, à ces gens sur lesquels il compte pour faire condamner les responsables du crime organisé dans ce pays?

L'introduction d'un programme national de protection des témoins n'est qu'un pas dans la voie de la réforme du système de justice au Canada. Peut-être ne peut-il y avoir de réforme exhaustive du système de justice pénale si l'on ne s'attaque pas à l'ensemble du système juridique. Il y en a qui pensent que notre système de justice pénale est en très mauvais état à cause de la prolifération des avocats, ce qui a peut-être quelque chose à voir dans l'engorgement des tribunaux, aux niveaux criminel et civil.

On commence à dire aux États-Unis que la place accrue que prennent les avocats dans la société américaine coûte, en fait, des milliards et des milliards de dollars par année. Chez nos voisins du sud, il y a dix fois plus de diplômés en droit que de diplômés en génie.

Au Japon et dans d'autres pays où la production industrielle par habitant est supérieure à celle des États-Unis, c'est le contraire qui est vrai, à savoir qu'il y a dix fois plus de diplômés en génie que de diplômés en droit. Je suppose que notre situation se compare davantage à celle des États-Unis.

Il est intéressant de noter qu'il y a 100 000 avocats à Washington seulement. La capitale américaine a l'un des plus forts taux de criminalité aux États-Unis. Il semble que la prolifération des avocats et celle des lois aillent de pair. Une partie de la solution consiste à reconnaître qu'il se pose peut-être un problème.

Les gens réclament un procès équitable, mais rapide dans le cas des causes criminelles; cependant, les tribunaux sont surchargés à cause de la croissance d'un système qui, comme nous le savons tous, est beaucoup trop lourd. Il faut qu'on ait non seulement l'impression qu'on rend justice aux intéressés, qu'on applique la loi comme il se doit, mais également que ce soit bien le cas et ce, de la façon la plus efficiente possible.

La Loi sur les jeunes contrevenants est une question extrêmement controversée au Canada. Elle représente une autre lacune de notre système de justice pénale. Le Parti réformiste croit, à l'instar de la plupart des Canadiens, qu'on doit punir les criminels et protéger les citoyens respectueux des lois et leurs biens, avant de viser tout autre objectif.

Or, la loi actuelle va tout à fait à l'encontre de ce but. Ce sont les jeunes contrevenants qui sont protégés et non les citoyens respectueux des lois. Les jeunes âgés de 12 à 17 ans abusent du système. Ils sont passibles d'une peine maximale de cinq ans pour meurtre. Dans le cas d'un vol à main armée et d'une agression sexuelle avec violence, ils ne peuvent être condamnés qu'à une peine maximale de trois ans. Pour des délits moindres comme le vandalisme, les jeunes contrevenants se font souvent seulement taper sur les doigts puisqu'on les force simplement à effectuer des travaux communautaires. Dans de nombreux cas, on n'applique même pas cette sentence minimale.

Que fait au juste le gouvernement relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants? Nous n'avons droit qu'à de vagues affirmations comme celles qu'on nous a encore servies cet après-midi durant la période des questions, mais à aucune mesure concrète.

Un autre signe évident de la faillite de notre système de justice pénale réside dans les libérations conditionnelles. Le détenu est pratiquement assuré d'obtenir d'office une libération de ce genre après avoir purgé un tiers de sa peine. Cette libération ne devrait être accordée que pour bonne conduite et la remise de peine ne devrait pas être supérieure au quart de la peine initiale. Il faut cesser de nommer par favoritisme des gens à la Commission nationale des libérations conditionnelles.

En 1987, la Commission canadienne sur la détermination de la peine, nommée par le gouvernement fédéral, a proposé une réforme du système des libérations conditionnelles. Jusqu'à maintenant, rien n'a été fait. Peut-être que tout ce système bureaucratique devrait être aboli. Qu'attend donc le gouvernement pour agir à ce sujet?

Une autre lacune du système de justice pénale réside dans la Charte canadienne des droits et libertés elle-même. Les articles 7 à 14 portent sur les droits juridiques des accusés. L'interprétation donnée par les tribunaux à ces articles a rendu le travail des policiers et des procureurs de la Couronne plus difficile en ce qui concerne la détention, la perquisition et la saisie, l'interrogation et la capacité de faire juger rapidement les accusés.

(1800)

On pourrait même dire que la Charte des droits et libertés entrave la justice au Canada, parce qu'elle protège les criminels et ne tient aucun compte des droits des victimes. Le contrevenant doit indemniser la victime dans toute la mesure du possible. Pourtant, c'est le contrevenant qui est protégé dans toute la mesure du possible par la Charte des droits.

Certains réclament l'abolition de la Charte des droits et libertés, dont des députés et des ministres de gouvernements provinciaux.

La Grande-Bretagne, de qui nous avons hérité une bonne partie de notre système de gouvernement et de notre droit criminel, ne possède pas de charte écrite des droits et libertés. Pourtant, je ne crois pas qu'on puisse dire que les droits de la personne sont gravement menacés au Royaume-Uni.


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De toute évidence, le système de justice pénale du Canada est mal en point. Les Canadiens respectueux de la loi réclament que la Loi sur les jeunes contrevenants et le système de libération conditionnelle soient révisés. Ils réclament que le système de justice pénale joue en leur faveur, et non en faveur des criminels.

C'est triste que les Canadiens doivent attendre que des projets de loi d'initiative parlementaire soient adoptés, un à la fois, pour obtenir des améliorations à leur système de justice pénale, mais c'est un début. Encore une fois, je félicite le député de Scarborough-Ouest d'avoir fait ce qu'il fallait, et j'appuie ses démarches relatives au projet de loi C-206. J'appuie le projet de loi, comme-je l'espère-tous les députés.

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton): Monsieur le Président, comme d'autres députés l'ont mentionné, le projet de loi sur la protection des témoins vise surtout ceux qui aident les autorités en cas de poursuites criminelles, en particulier lorsqu'il est question de crime organisé. Étant donné l'accent qui est mis sur le crime organisé, il vaut la peine de définir brièvement cette expression dans le contexte du projet de loi dont la Chambre est saisie.

Si l'on comprend bien la menace que le crime organisé fait peser sur notre société, on reconnaît l'importance de cette mesure et la nécessité de l'étudier attentivement. Il faut inscrire dans la loi une garantie de protection à accorder à ceux qui sont disposés à fournir des éléments de preuve contre des responsables du crime organisé.

Tous les policiers, notamment ceux de la GRC et des services provinciaux et municipaux, sont confrontés au crime organisé. D'autres représentants de l'autorité jouent aussi un rôle important. Entre autres, il y a les responsables fédéraux de l'Immigration et de la Citoyenneté qui collaborent avec la police dans les affaires impliquant l'entrée illégale d'immigrants et le trafic illicite de papiers d'identité faux ou volés. De même, les responsables de Douanes et Accise travaillent en étroite collaboration avec la police concernant la circulation de drogues, d'armes, de boissons et de tabac de contrebande, de technologies protégées ou de diverses marchandises importées ou exportées illégalement.

Dans le secteur judiciaire, les procureurs de la Couronne du gouvernement fédéral et des provinces doivent évidemment intenter des poursuites devant les tribunaux et obtenir des condamnations.

Tous ces responsables veulent qu'on élabore et qu'on applique les lois et les programmes les plus efficaces possible pour lutter contre le crime organisé. Cette volonté s'explique facilement en raison de la grave menace que le crime organisé fait peser sur la société canadienne.

La raison d'être du crime organisé est simple: faire le plus d'argent possible et minimiser le risque de se faire prendre, en formant des groupes et des réseaux organisés. Pour réaliser illégalement des profits, les membres du crime organisé poursuivent diverses activités qui sont aussi complexes que celles des multinationales légitimes.

Prenons par exemple les activités de blanchiment. Le blanchiment des produits de la criminalité par l'intermédiaire d'institutions et d'entreprises légitimes bouleverse le fonctionnement de l'économie légitime, en introduisant des pratiques déloyales et illégales telles que l'évasion fiscale. Le crime organisé joue un rôle déterminant dans le maintien et l'expansion de l'économie parallèle puisqu'il alimente le commerce avec des marchandises volées ou entrées en contrebande.

Il en résulte d'énormes pertes fiscales pour le gouvernement et de piètres services pour la population. Chaque Canadien honnête paie pour les profits illégaux que réalisent les membres du crime organisé, et pas seulement en dollars et en cents.

De nombreuses activités du crime organisé, notamment le trafic de stupéfiants et le jeu, peuvent avoir de graves répercussions sur nos jeunes et sur nos familles.

(1805)

La violence associée au crime organisé attise les craintes de la population. Dans certains milieux, les criminels organisés ont recours à la violence et à l'intimidation pour dominer les membres d'une collectivité et ainsi contribuer à isoler certains groupes de notre société. À mesure que le produit du crime organisé augmente, la possibilité de soudoyer des agents de la Couronne et de corrompre les institutions démocratiques s'accroît.

Les groupes organisés menacent la légitimité du gouvernement et encouragent le mépris des autorités légales et des institutions publiques. Au niveau international, le crime organisé menace la souveraineté du Canada et sa capacité de surveiller ses frontières.

Permettez-moi de vous décrire brièvement l'action du crime organisé afin de mieux illustrer l'étendue et la gravité du problème.

Le crime organisé sévit sur la scène locale. Les réseaux de prostitution des jeunes dans les centres urbains en offrent un exemple particulièrement triste et affligeant. Dans bien des cas, les activités des criminels locaux sont liées de près ou de loin à d'autres activités au pays.

Au niveau interprovincial, le crime organisé pose un problème particulier, puisque les autorités ont beaucoup plus de mal à surveiller les allées et venues des criminels qui oeuvrent dans plusieurs provinces afin de mettre un terme à leurs activités.

Il y a aussi le crime organisé transnational, où certains Canadiens sont impliqués dans le trafic de produits illicites. L'initiative que le gouvernement a récemment lancée pour combattre la contrebande montre à quel point cette forme de crime organisé s'est développée. De la même manière, les crimes économiques transnationaux et le blanchiment de l'argent par des Canadiens ou par des étrangers par l'intermédiaire d'institutions canadiennes ou internationales constituent une menace sérieuse contre l'intégrité de nos systèmes financier et économique.


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Enfin, il y a le problème très délicat et croissant que représente le crime organisé à l'échelle internationale. C'est ainsi que des réseaux criminels étrangers collaborent avec des criminels canadiens ou utilisent leurs services. On ne peut pas trouver de meilleur exemple de cela que le trafic international de la cocaïne et de l'héroïne qui est aux mains de cartels de stupéfiants extrêmement bien financés, bien organisés et impitoyables.

Ces entreprises criminelles ont deux choses en commun, la violence et l'intimidation. La violence et l'intimidation servent à faire régner la discipline au sein des organisations criminelles, à conquérir une part des marchés illicites et à empêcher les victimes de collaborer avec la police. C'est là un point crucial en rapport avec ce projet de loi, car la violence crée un climat de peur qui peut vraiment décourager quelqu'un de collaborer avec la police et le système judiciaire.

Pour briser la consigne du silence du crime organisé, il faut pouvoir protéger les gens qui sont disposés à aider les autorités dans leurs enquêtes criminelles. Comme le reconnaît ce projet de loi, il nous faut un système qui encourage les gens à témoigner contre les membres du crime organisé.

Pour résumer, voici quelques observations générales sur ce que devrait être, à mon avis, un programme de protection lié au problème du crime organisé.

D'abord, il faut s'assurer que le programme tienne compte des besoins de toutes les autorités policières et d'application de la loi qui ont affaire au crime organisé.

Ensuite, tout genre de crime organisé est grave. En établissant les paramètres du programme, il faut donc s'assurer qu'il tienne compte du plus large éventail possible de délits commis par le crime organisé.

Enfin, je signale que le crime organisé international et transnational constitue un problème croissant dans le contexte de la mondialisation économique et politique. Par conséquent, un programme de protection doit tenir compte de la nécessité d'une collaboration entre les organismes canadiens et leurs homologues étrangers.

Je crois que ce projet de loi prévoyant la réinstallation et la protection des témoins est important en ce qu'il signale à la population canadienne la nécessité de légiférer à l'égard d'un programme de protection qui aide les autorités à mener des enquêtes et des poursuites criminelles. Toutefois, il faut avant tout examiner cette possibilité à la lumière des critères que je viens d'énumérer.

(1810)

M. Pat O'Brien (London-Middlesex): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler moi aussi du projet de loi C-206, Loi prévoyant la réinstallation et la protection des témoins.

Après avoir écouté ce qui s'est dit jusqu'à maintenant durant le débat sur ce projet de loi, je constate que nous sommes tous d'accord sur l'importance de donner aux Canadiens un programme de protection des témoins qui soit efficace et efficient. Nous semblons aussi être d'accord pour dire que le meilleur moyen d'atteindre ce but, c'est d'adopter une mesure législative à cet égard. Les avantages manifestes d'une mesure législative sont la responsabilité, la transparence et l'universalité.

Pour ce qui est de la responsabilité, il ne fait pas de doute qu'un ministre devrait être responsable de l'administration de ce service important devant le Parlement. Bien que je reconnaisse que la nature même de ce programme exige un niveau élevé de confidentialité, ses principes fondamentaux et ses caractéristiques devraient être du domaine public.

Il y aurait moins de confusion quant au but et à la portée d'un programme de protection des témoins si les principes fondamentaux, les procédures et les critères relatifs à un tel programme étaient clairement définis dans une loi. Lorsqu'on parle du principe de l'universalité, cela veut dire que la protection des témoins devrait être accessible à tous les Canadiens, pourvu qu'ils satisfassent aux critères d'admissibilité.

Il y a également d'autres aspects qu'il serait bon d'inclure dans un projet de loi, dont beaucoup ont été mentionnés durant ce débat. Ce que je veux dire c'est que, une fois que nous sommes tous convaincus que le meilleur moyen d'offrir un bon programme de protection des témoins aux Canadiens est d'adopter un projet de loi à cet égard, nous devons ensuite nous demander ce que nous voulons inclure dans ce projet de loi en plus des principes fondamentaux et des paramètres du programme.

Comme nous l'avons déjà appris, la protection des témoins est un élément complexe de la lutte contre le crime, des poursuites de droit pénal et de la sécurité publique. Elle fait intervenir beaucoup de gens et de ministères du gouvernement. Elle crée beaucoup de travail administratif. Dans quelle mesure devrions-nous préciser dans un texte législatif les dispositions administratives que nécessite un programme de protection des témoins?

Une chose est sûre: un programme de protection des témoins inefficace pourrait avoir de fâcheuses conséquences pour les personnes visées. Nous devons prendre bien garde de ne pas créer un programme sans disposer des outils permettant sa mise en oeuvre efficace.

Bien sûr, pour ne rien oublier des aspects qu'il faudrait prévoir dans une mesure législative, il faut posséder une excellente compréhension de tous les détails complexes d'un service de protection des témoins. Cela nous place devant un dilemme puisqu'il existe très peu de spécialistes de la question. Personne à la Chambre, même si le débat nous a permis d'en apprendre beaucoup sur un tel service, ne saurait se poser en spécialiste de la protection des témoins.

Loin de moi l'idée de rabaisser ici les efforts déployés par mon collègue de Scarborough-Ouest ou de minimiser les connaissances qu'il possède de toute évidence sur la question. Bien au contraire, il mérite toutes nos félicitations. Sachant à quel point les renseignements sur la protection des témoins sont rares et à


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quel point il est difficile de mettre la main sur ceux qui existent, il faut applaudir le député d'avoir pu présenter le projet de loi C-206. Tout ce que je veux dire, c'est que, comme dans tout projet de loi, nous devrions tenir compte de l'avis des spécialistes du domaine.

Nous pouvons trouver en Australie un exemple récent d'initiative du même genre. Vers la fin des années 1980, il y a eu dans ce pays un examen parlementaire de la protection des témoins. Le Joint Committee on the National Crime Authority a produit son rapport final en 1988, après avoir entendu un grand nombre de témoignages et examiné un grand nombre de mémoires de la part de policiers, d'avocats, d'universitaires et même de témoins protégés.

Nous avons la chance de pouvoir profiter de l'expérience australienne, étant donné surtout le manque d'information en matière de protection des témoins. Je voudrais faire partager à la Chambre certaines des observations et des recommandations du comité et passer également en revue certains aspects du projet de loi sur la protection des témoins qui a été présenté au parlement australien en mars 1994.

Les députés trouveront intéressant d'apprendre que ce projet de loi propose la mise sur pied d'un programme national de protection des témoins dont la mise en oeuvre sera confiée à la police fédérale australienne.

(1815)

Pour commencer, le comité reconnaissait clairement qu'il était essentiel de protéger les témoins pour faire enquête sur le crime organisé et en traduire les responsables devant les tribunaux; il reconnaissait en outre que la vaste majorité des individus qui bénéficiaient de cette protection étaient des informateurs, et plus particulièrement des agents de police.

Je cite le rapport:

En réalité, la majorité des témoins qui pourraient avoir besoin de protection auront été mêlés d'une certaine façon aux activités criminelles à propos desquelles ils témoignent.
On ne saurait donner trop d'importance à ce fait. La protection et la réinstallation de personnes ayant des antécédents criminels ou des relations avec des criminels ont d'importantes implications. Je recommanderais de tenir tout particulièrement compte de ce fait dans un éventuel projet de loi sur la protection des témoins afin d'assurer la sécurité publique et le succès général d'un programme de protection des témoins.

Le projet de loi australien traite clairement de cette question importante. Par exemple, l'article 7 dresse la liste des renseignements que le témoin doit dévoiler avant de bénéficier du programme. La plupart se rapportent à d'éventuelles obligations civiles, dont les dettes, la faillite, d'autres engagements financiers, et aussi le détail des antécédents criminels du requérant.

Cette disposition répond au problème pratique, mais très important, complexe et coûteux, lié à la protection de témoins qui ont des dettes non réglées sous leur ancien nom. Elle permet en effet au commissaire de la police fédérale australienne de mettre fin à une entente avec un témoin si ce genre de dettes n'a pas été révélé avant qu'un témoin ait été admis au programme.

Voilà le genre de question pratique qu'il faudra prendre en considération quand on légiférera en matière de protection des témoins afin que le programme qui sera éventuellement mis sur pied puisse bien fonctionner.

Le comité a également reconnu l'importance d'un processus efficace de changement d'identité et de documentation et a fait plusieurs recommandations à cet égard. L'article 22 du projet de loi australien reflète l'intention de l'une de ces recommandations en considérant comme une infraction le fait de divulguer illégalement des renseignements sur l'identité d'un témoin ou des renseignements susceptibles de nuire à sa sécurité. Voilà un autre aspect important de la protection des témoins dont il faudra tenir compte dans le projet de loi.

Il est par ailleurs indispensable au succès de la réinstallation d'un témoin de lui fournir rapidement des documents établis sous sa nouvelle identité. En fait, c'est la clé du succès de tout programme de protection des témoins. Si l'on peut mettre en place un processus efficace de changement d'identité et de documentation en adoptant des dispositions législatives autorisant l'administration de cette fonction et prévoyant des sanctions en cas de divulgation, nous devrions alors examiner en profondeur pareilles dispositions législatives.

Je n'ai parlé que de quelques-unes des dispositions contenues dans le projet de loi de l'Australie. Il importe de souligner que ce projet de loi traite de façon détaillée de nombreuses considérations administratives pratiques. Si j'ai parlé de ce projet de loi à la Chambre et des observations que le comité parlementaire mixte australien a formulées dans son rapport, c'est pour faire ressortir la nécessité d'examiner cette question d'une manière exhaustive. Ce sont là des aspects qu'il faut examiner avant que le gouvernement puisse, en son âme et conscience, aller de l'avant avec un projet de loi concernant un programme de protection des témoins.

En terminant, je propose que nous mettions à profit l'expérience de notre partenaire du Commonwealth et que nous adoptions une méthode semblable à la sienne quant à l'importante question de la protection des témoins au Canada.

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de participer au débat sur le projet de loi C-206, mesure prévoyant la réinstallation et la protection des témoins. Je félicite le député de Scarborough-Ouest d'avoir proposé ce projet de loi.

La peur qu'éprouvent les témoins nous fait perdre de nombreuses causes. La sécurité des familles est de la plus haute importance si nous voulons que les témoins puissent donner leur témoignage sans craindre des représailles d'éléments criminels. J'ai travaillé trois ans dans les services de libération conditionnelle de l'Ontario, ce qui m'a permis de comprendre à fond les problèmes qui existent dans notre système pénal. Les détenus vivent dans une crainte constante, redoutant d'être désignés comme des faux jetons. Et les faux jetons ont une espérance de vie très courte dans le système carcéral.

(1820)

Des gangs venant de tous les segments de la population se retrouvent en prison, et ils exercent un contrôle dans les établissements pénitentiaires. Si un témoin qui est lui-même un crimi-


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nel veut changer de vie, le projet de loi C-206 lui donnera l'occasion de donner des témoignages précieux et de se refaire une vie après sa comparution.

Les membres innocents des familles pourront aussi échapper aux milieux du crime dont ils sont prisonniers. La réforme de notre système de justice pénale pourrait se faire au moyen de projets de loi d'initiative parlementaire, notamment celui du député de Scarborough-Ouest.

J'ai aussi une certaine expérience dans un organisme appelé Crime Stoppers, que j'ai contribué à mettre sur pied et dont j'ai été le premier président à Lindsay. J'ai pu constater que l'anonymat était la clé du succès. C'est un organisme qui offre des récompenses pour obtenir les témoignages nécessaires à une condamnation. Les juges accordent des mandats de perquisition sur la foi des informations de Crime Stoppers, car ils savent qu'elles viennent de sources très proches du crime.

Il est même arrivé que des gens appellent de la prison de Lindsay pour obtenir une caution de Crime Stoppers. Les gens sont incités à témoigner parce qu'ils n'ont pas à craindre d'aller en prison et d'y côtoyer des criminels dans ce cas. Cela prouve que s'ils ne risquent rien les gens viendront témoigner contre des criminels qui n'ont aucun respect pour la vie et la santé des témoins et qui feraient n'importe quoi pour empêcher un témoin de témoigner contre eux dans un procès où ils risquent la prison.

Le projet de loi C-206 est une étape importante dans la lutte contre le crime organisé. Les bandes de jeunes, de criminels adultes et d'autres éléments du monde du crime ne sont pas traduits devant les tribunaux de peur des représailles contre les témoins. Si ce projet de loi réussit à régler ce problème, j'aurai sûrement la satisfaction, en tant que député, d'avoir fait quelque chose pour améliorer notre système judiciaire en faisant en sorte que les gens puissent témoigner sans crainte de représailles et soient capables de vivre une vie normale par la suite.

Ce projet de loi sera bénéfique pour les Canadiens. Tous les députés devraient l'appuyer et faire en sorte que la protection des témoins soit un droit de tous les Canadiens. Ce projet de loi privera les criminels de cette arme toute puissante dont ils se servent, à savoir l'intimidation. Enlevons-leur cette arme, et toute la société en profitera.

J'appuie sans réserve ce projet de loi. J'espère qu'il sera adopté et que tous les députés l'appuieront, et qu'ils en appuieront d'autres à venir, peu importe qu'ils soient présentés par nous ou nos amis d'en face. Si ces projets de loi sont sensés, s'ils nous aident à rendre notre société plus sûre, nous devrions les appuyer, inviter tous les députés à le faire et même proposer des amendements s'il le faut.

Ce projet de loi doit être adopté parce qu'il améliorera la qualité de vie au Canada.

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-206, Loi prévoyant la réinstallation et la protection des témoins.

Le député de Scarborough-Ouest, qui a présenté le projet de loi à la Chambre, mérite nos félicitations, car l'objet du projet de loi préoccupe non seulement les autorités policières canadiennes, mais celles du monde entier.

Depuis une dizaine d'années, la nécessité de protéger les témoins s'est accrue considérablement et de façon directement proportionnelle à l'augmentation du nombre d'actes de violence perpétrés par des criminels et par la criminalité organisée. Ne serait-ce que pour cette seule raison, le projet de loi arrive au bon moment.

(1825)

Pendant le débat sur le projet de loi C-206, on a parlé à plusieurs reprises du programme de protection des témoins et des informateurs de la Gendarmerie royale du Canada. Pour des raisons évidentes et tout à fait légitimes, la GRC demeure discrète au sujet de ce programme. Toutefois, comme il s'agit du plus important programme de protection des témoins au Canada, nous devons en savoir un peu plus sur sa portée et son efficacité pour bien comprendre toutes les questions que soulève le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis.

C'est pourquoi je suis heureux d'effectuer aujourd'hui à la Chambre un survol général du programme de protection des témoins de la GRC.

J'expliquerai d'abord le contexte. Les programmes de protection des témoins ont toujours été liés de près aux enquêtes sur la criminalité organisée. L'expression «criminalité organisée» englobe une vaste gamme d'activités criminelles, dont le trafic de drogue à grande échelle, le meurtre, les voies de fait graves, le blanchiment de l'argent, l'extorsion et le vol qualifié. Plus souvent qu'autrement, les auteurs de ces actes ont recours à la peur et à l'intimidation pour s'assurer le silence de témoins et d'informateurs en puissance.

La protection des témoins a cependant aujourd'hui un champ d'application plus étendu. Depuis quelques années, on assiste à un phénomène inquiétant: les criminels solitaires ont recours à la peur et à l'intimidation, car ces individus sont prêts à tout pour éviter d'être condamnés ou pour se venger. C'est pourquoi un nombre grandissant de personnes ont besoin de protection à cause de leur rôle dans des affaires qui n'ont rien à voir avec la criminalité organisée.

Le programme de protection des témoins et des informateurs de la GRC a été créé en 1984 pour répondre au besoin grandissant de protection des témoins et des informateurs et en raison de l'importance grandissante accordée à la lutte contre les grandes organisations nationales et internationales de trafic de drogue.

Plusieurs autres facteurs ont contribué au lancement du programme, notamment un besoin accru d'utiliser des renseignements confidentiels plutôt que d'avoir recours à des agents doubles de la GRC pour infiltrer des organisations criminelles sophistiquées, le monde grandissant de crimes avec violence comme au Canada, l'existence évidente d'activités extrémistes et terroristes, mais surtout la jurisprudence en matière de divulgation des renseignements qui a suivi l'adoption de la Charte des droits et libertés. Voilà autant de facteurs qui ont contribué à

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accroître l'importance du programme de protection des témoins de la GRC.

Créé à l'origine uniquement pour la GRC, le programme fournit maintenant des services de protection aux services de police provinciaux et municipaux partout au Canada.

Bien que bon nombre de services de police s'en remettent entièrement à la GRC pour assurer la protection des témoins, les plus importants ont créé leur propre unité de protection des témoins. Ces grands services de police ne sollicitent l'aide de la GRC que dans les cas où une intervention fédérale est nécessaire pour faciliter le changement d'identité d'un témoin ou d'un informateur.

La plupart des bénéficiaires du programme de protection des témoins de la GRC, au milieu des années 80, étaient liés aux grandes opérations de contrebande des drogues. Toutefois, comme je l'ai déjà mentionné, cela a changé depuis peu. Aujourd'hui, un grand nombre de bénéficiaires du programme de protection sont des gens qui ont quelque chose à voir avec des infractions au Code criminel, telles que le meurtre et les voies de fait graves.

À l'évidence, les témoins ne sont pas tous admissibles à un programme de protection, malgré les milliers de voies de fait graves qui se produisent chaque année au Canada. Néanmoins, la GRC et les autres services de police doivent faire preuve de discernement au moment de décider qui est ou n'est pas admissible à un programme de protection.

Par ce critère de bon sens, on souhaite que le nombre des témoins et des informateurs ne soit pas supérieur aux ressources humaines et financières affectées aux divers programmes de protection des témoins.

Au cours des dix dernières années, les programmes de protection des témoins de la GRC et des autres services de police sont devenus de très efficaces outils de lutte contre les criminels qui, auparavant, pouvaient user de menaces et d'actes violents contre les témoins de leurs crimes dans l'espoir d'échapper aux poursuites et aux condamnations.

Le succès des programmes de protection des témoins de la GRC et des autres services de police est évident. Sur le grand nombre de témoins et d'informateurs, ainsi que de leurs familles, qui ont été réinstallés en dix ans, aucun n'a été blessé.

La GRC gère une cinquantaine de programmes de protection des témoins en moyenne par an. Sur ce nombre, dix se déroulent en collaboration avec d'autres services de police. Les coûts directs de fonctionnement du programme de protection des témoins de la GRC s'élèvent en moyenne à 1,1 million de dollars par an. Si on ajoute à cela les coûts liés aux ressources humaines, on obtient un résultat d'un peu plus de trois millions de dollars par an.

(1830)

D'après les tendances actuelles, le coût du programme augmentera probablement à mesure qu'un plus grand nombre de personnes bénéficieront d'une protection. Mais ce coût est relativement minime si on le compare aux conséquences qu'ont les témoins et les informateurs sur les criminels et le crime organisé.

Il n'y a pas d'élément de preuve plus dévastateur que le témoignage de première main d'un complice en qui l'on avait toute confiance qui dévoile les secrets d'une organisation criminelle, ou celui d'un témoin qui a vu un grave crime se commettre et qui peut en identifier les auteurs.

Qu'elles soient témoins ou informateurs, ces personnes représentent des atouts précieux pour la police et le système judiciaire. Dans bien des cas, aucune autre méthode d'enquête ne peut remplacer leur témoignage.

Cela est particulièrement vrai pour la lutte antidrogue, où l'existence du programme de protection des témoins de la GRC a incité des informateurs et des témoins à se présenter à la police, à l'aider et à témoigner en cour contre d'importants réseaux nationaux et internationaux de trafiquants de drogues, en dépit de la capacité éprouvée de ces réseaux d'imposer des châtiments violents.

Ces témoins ont contribué à la poursuite d'enquêtes en fournissant des renseignements cruciaux qui, autrement, auraient coûté très cher en ressources policières, humaines et autres.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.

_____________________________________________


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MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LE COMMERCE EXTÉRIEUR

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Monsieur le Président, le 21 avril, j'ai posé au ministre responsable du Commerce international une question précise relativement à l'attaque contre les céréaliculteurs canadiens, y compris les attaques lancées par certaines personnes aux États-Unis, qui menacent d'envoyer des missiles minuteman au Canada.

J'avais alors soulevé cette question de façon générale, dans le cadre de la politique commerciale du Canada, notamment de la politique commerciale de ce gouvernement, et de ce qu'elle signifiait pour les Canadiens, en particulier pour les producteurs de blé, surtout le blé dur qui continue de faire l'objet d'un différend avec les États-Unis.


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Nous avons appris le 24 mai qu'afin d'essayer de régler ce différend le ministre avait simplement confirmé qu'il existait, afin de mettre fin à la guerre commerciale, une proposition canadienne selon laquelle Ottawa éliminerait une subvention au transport du grain acheminé par chemin de fer via Thunder Bay, ce qui nuit de toute évidence à l'industrie du transport à Thunder Bay. En fait, le réacheminement ne me semble pas être la solution à cette guerre commerciale, mais me semble plutôt créer un nouveau problème pour les Canadiens dans une autre industrie.

Quand j'ai posé cette question au ministre, j'ai également soulevé la question de l'ALENA. Il m'a rappelé bien entendu que le différend avec les États-Unis à propos du blé ne relevait pas de l'ALENA, mais du GATT. J'en suis bien sûr tout à fait consciente.

Toutefois, nous avons assisté depuis le 21 avril à une détérioration de nos relations commerciales avec les États-Unis qui m'inquiète. Le ministre a fait un certain nombre de déclarations établissant un lien entre ces différends et l'ALENA que ce gouvernement a promulgué le 1er janvier 1994.

Avant le 1er janvier, avant les élections de 1993, les libéraux avaient indiqué dans le fameux livre rouge, souvent cité: «Les deux accords de libre-échange sont très imparfaits. Un gouvernement libéral les renégociera.»

Il semble qu'après avoir voulu mettre en oeuvre l'ALENA le 1er janvier, le gouvernement veuille maintenant faire marche arrière. Voici ce que le Toronto Star rapportait, dans son édition du 25 mai: «Hier, faisant les remarques les plus dures qu'on ait entendues, ces dernières années, de la part d'un ministre canadien, le ministre a accusé l'administration du président Bill Clinton d'avoir fait une utilisation de plus en plus arbitraire du droit commercial des États-Unis pour nuire aux exportations canadiennes de blé, de bois d'oeuvre et d'autres produits et d'avoir courbé l'échine devant des intérêts régionaux.»

(1835)

Toujours selon cet article, le ministre a cessé de parler d'abroger l'Accord de libre-échange nord-américain si le différend se poursuivait, mais aurait déclaré, au cours de la même entrevue, que l'ALENA se trouvait actuellement dans une position incertaine.

Mon parti soutient depuis longtemps que l'ALENA est non seulement incertain, mais aussi désavantageux pour le Canada. Hier, un autre journal, le Globe and Mail, rapportait que le ministre avait dit que les procédures de règlement des différends par un groupe spécial pourraient donner lieu à une discussion beaucoup plus vaste.

De toute évidence, le harcèlement des États-Unis sur cette question se poursuit à maints égards. Les agriculteurs savent ce qu'ils ont perdu avec l'ALENA et la politique commerciale du gouvernement libéral en général. Les producteurs de bois d'oeuvre savent ce qu'ils ont perdu en vertu de la politique commerciale libérale. Les travailleurs en chômage des industries manufacturières ou de service savent ce qu'ils ont perdu avec la politique commerciale des libéraux. C'est pour cela que je voudrais demander au ministre ou à son représentant de nous dire ce que la politique commerciale libérale a apporté aux Canadiens.

Tout ce que l'on voit, c'est que le gouvernement veut faire marche arrière, maintenant qu'il constate que l'ALENA n'est pas dans l'intérêt des Canadiens, et que sa mise en oeuvre entraîne l'élimination des subventions au transport ferroviaire, notamment. Je voudrais demander cela au représentant du ministre. Dans de très nombreux domaines, les Canadiens savent ce qu'ils ont perdu avec la politique commerciale des libéraux. Est-ce que le représentant du ministre pourrait nous expliquer ce que les Canadiens ont gagné?

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, pour répondre à la députée, l'Accord de libre-échange nord-américain nous donne, grâce aux améliorations obtenues par notre gouvernement, un meilleur accès au marché mexicain et vient compléter l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis en nous permettant de vendre plus facilement nos produits et nos services sur le marché américain.

Les États-Unis sont notre plus important partenaire commercial et l'inverse est également vrai. En 1993, le total des échanges bilatéraux entre nos deux pays s'est élevé à 256 milliards de dollars. Nos exportations vers les États-Unis ont été supérieures de près de 30 milliards de dollars à nos importations de ce pays. Étant donné l'importance de ces échanges, il est normal que des différends surgissent. Ce qui importe, c'est de se rappeler que dans 95 p. 100 des cas, ce commerce s'effectue sans problème.

Je peux garantir à la Chambre et à ma collègue d'en face qu'un règlement satisfaisant des négociations agricoles avec les États-Unis constitue l'une des principales priorités de notre gouvernement. La question a été soulevée au plus haut niveau et elle a fait l'objet de discussions entre le premier ministre et le président des États-Unis. En outre, les ministres du Commerce international ainsi que de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire n'ont pas ménagé leurs efforts dans le cadre de négociations avec les États-Unis, afin d'en arriver à une entente respectant les intérêts de l'industrie agricole canadienne.

Le ministre du Commerce international vient de revenir de Washington où il a rencontré des membres du gouvernement américain et en a profité pour défendre là encore avec vigueur la position du Canada. En ce qui concerne les grains, les États-Unis ont choisi de s'attaquer à la question des exportations canadiennes vers les États-Unis en recourant au GATT et non à l'ALENA.

Le 3 mai, ils ont avisé officiellement le GATT de leur intention de renégocier les tarifs sur le blé et l'orge en vertu de l'article XXVIII du GATT. À la suite de cet avis, le Canada et les États-Unis ont 90 jours pour essayer de parvenir à une entente satisfaisant les deux parties sur plusieurs questions agricoles.

Faute d'un accord dans ce délai de 90 jours et si les Américains décident d'imposer des restrictions sur le blé et l'orge en provenance du Canada, nous avons le droit, aux termes du GATT, de prendre des mesures de rétorsion. Au besoin, nous exercerons les droits que nous confère le GATT en réponse aux mesures commerciales que les États-Unis pourraient prendre.


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Je tiens à souligner que notre gouvernement souhaite encore parvenir à un règlement négocié de ces questions et continuera d'essayer de réaliser cet objectif durant la période de 90 jours en question afin de défendre au mieux les intérêts de l'industrie agro-alimentaire canadienne. Les ministres du Commerce international et de l'Agriculture rencontreront leurs homologues américains le mois prochain pour trouver une solution.

En conclusion, je voudrais rappeler à tout le monde que les échanges bilatéraux de produits agricoles et agro-alimentaires entre le Canada et les États-Unis représentent plusieurs milliards de dollars. Il est dans l'intérêt du Canada et des États-Unis que ces échanges s'accentuent dans les deux sens, au profit des deux pays.

(1840)

L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS ALIMENTAIRES

M. Pat O'Brien (London-Middlesex): Monsieur le Président, le 21 février dernier, j'ai pris la parole à la Chambre pour poser une question au ministre de l'Agriculture au sujet de la possibilité d'élargir à d'autres produits la règle exigeant que les produits alimentaires vendus au Canada portent une étiquette indiquant leur pays d'origine. Le ministre s'était alors dit d'accord avec ce concept et avec le fait qu'il faudrait poursuivre les discussions à cet égard avec les divers secteurs de l'industrie agro-alimentaire.

En avril, j'ai posé une question au secrétaire parlementaire du ministre, toujours sur la question de l'indication du pays d'origine sur les étiquettes, en ajoutant que j'avais appris à une réunion de la Middlesex Federation of Agriculture que les agriculteurs du Canada craignaient qu'une entente ait été conclue-une entente secrète je suppose-entre le Canada, le Mexique et les États-Unis pour qu'on laisse tomber l'idée d'exiger l'indication du pays d'origine sur les étiquettes. Le secrétaire parlementaire m'a bien assuré que ce n'était pas le cas.

Je veux revenir brièvement sur cette question, aujourd'hui, parce que, comme nous le savons tous, il est dans notre intérêt d'acheter des produits canadiens. Je préfère certainement acheter des produits canadiens, y compris les produits agro-alimentaires, comme beaucoup d'autres Canadiens, je pense. Franchement, jusqu'à un certain point, je crois que beaucoup de Canadiens sont prêts à payer un peu plus pour avoir un produit fait au Canada ou cultivé au Canada, dans le cas de l'agro-alimentaire.

Nous avons probablement, et même certainement, les produits alimentaires les plus sûrs du monde. C'est sûrement ce que les agriculteurs de ma circonscription, London-Middlesex, veulent m'entendre dire, et je l'affirme avec conviction en tant que Canadien de milieu urbain. Si ces produits sont un peu plus chers sans que les agriculteurs canadiens n'y soient pour rien, je suis prêt à payer la petite différence. J'espère et je suis même sûr qu'il en est de même pour beaucoup de Canadiens.

Je m'interroge au sujet des étiquettes que nous voyons dans les magasins d'alimentation. Il y a une chose dont j'ai discuté avec le secrétaire parlementaire et le ministre ainsi qu'avec de nombreux députés. Il arrive souvent, dans les magasins d'alimentation, qu'on voie en très gros caractères «Emballé au Canada» et au-dessous, en caractères minuscules, presque illisibles, «Produit de Californie», de Caroline du Sud ou que sais-je encore.

L'acheteur inexpérimenté-ce que je suis puisque je ne fréquente pas beaucoup les magasins d'alimentation, préférant laisser cette corvée à un membre de ma famille plus qualifié, c'est-à-dire ma femme-pourrait facilement croire qu'il achète un produit d'origine canadienne, alors que seul l'emballage est canadien.

J'ai deux questions à poser au secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire.

D'abord, le gouvernement envisagera-t-il d'élargir à d'autres produits la règle exigeant que les produits alimentaires vendus au Canada comportent une étiquette indiquant leur pays d'origine, ou du moins d'en discuter avec l'industrie agro-alimentaire du Canada?

Ensuite, le ministre et le gouvernement ne s'inquiètent-ils pas au sujet des normes de sécurité en vigueur pour les produits agro-alimentaires importés dans notre pays? Je pose la question parce que nous avons tous entendu des histoires d'horreur au sujet d'aliments importés. Prenons, par exemple, le poulet du sud des États-Unis. L'ancien mais non moins illustre député de Lambton-Middlesex aime à raconter des horreurs au sujet des poulets qui nous viennent des États-Unis, et qui sont traités de telle façon que si les consommateurs canadiens le savaient, ça les rendrait malades, et les empêcherait même d'en acheter.

Je me demande donc si c'est une question qui préoccupe le ministre et le secrétaire parlementaire, voire même notre gouvernement.

(1845)

Pour résumer, j'ai deux questions à poser. L'indication du pays d'origine sur les étiquettes continuera-telle à faire l'objet de discussions avec les agriculteurs canadiens pour déterminer au moins dans quelle mesure ils y tiennent? Je sais que cela peut être un désavantage pour nos produits à l'étranger. Et ensuite, jusqu'à quel point vérifie-t-on si les produits agro-alimentaires importés au Canada répondent à nos normes de salubrité, pour s'assurer non seulement qu'ils sont acceptables, mais encore qu'ils sont en tous points comparables aux produits agro-alimentaires canadiens pour ce qui est de leur salubrité?

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, je répondrai avec plaisir aux questions du député.

À la première, je réponds oui, le ministère poursuivra ses efforts et il reste ouvert au dialogue quant à l'étiquetage des produits alimentaires au Canada.

Pour ce qui est de la deuxième question, il existe au Canada des prescriptions précises en matière d'indication du pays d'origine sur les produits alimentaires vendus au détail au pays. Ces prescriptions sont énoncées dans les règlements appropriés pour tous les aliments désignés dans la Loi sur l'inspection des viandes, la Loi sur les produits agricoles au Canada ou la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation.

Les règles s'appliquent à ces produits aux fins des inspections des services de santé, que les aliments soient produits au pays ou

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importés. Notre principal objectif a toujours été et continuera d'être la salubrité des produits agro-alimentaires.

Les exigences fédérales et provinciales en matière d'étiquetage des produits agro-alimentaires étaient en place bien avant la signature de l'Accord de libre-échange nord-américain et elles n'ont pas été modifiées par l'entrée en vigueur de cet accord.

Les produits importés et uniquement emballés au Canada devront toujours porter la marque du pays d'origine. Toutefois, s'ils sont hautement transformés et qu'il y a nettement valeur ajoutée, ils seront désignés comme produits du Canada.

Dans le cadre de l'ALENA, on a négocié certaines règles sur la détermination du pays d'origine. Ces règles serviront aux services des douanes. À cet égard, les douanes américaines exigent que tout produit importé porte une indication du pays d'origine tandis que le Canada n'exige pas le marquage des produits agro-alimentaires pour les douanes.

Durant les négociations, le Canada a réussi à faire remplacer les règles de marquage tout à fait discrétionnaires des États-Unis par un ensemble de règles très claires et fondées sur la classification tarifaire. Ainsi, le Canada disposera d'un meilleur mécanisme pour veiller à ce que les États-Unis appliquent des règles plus uniformes aux exportations du Canada vers les États-Unis.

Les ministères gouvernementaux concernés s'assurent présentement que les nouvelles règles n'entraîneront pas des coûts inutiles pour les exportateurs canadiens et qu'elles seront favorables aux produits canadiens conditionnés aux États-Unis et retournés au Canada pour y être vendus.

LE TRAITÉ SUR LE SAUMON DU PACIFIQUE

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans.

Le 26 avril dernier, j'ai interrogé le ministre des Pêches et des Océans sur l'impasse des récentes négociations concernant le Traité sur le saumon du Pacifique. Cette impasse entraîne de graves conséquences pour l'industrie canadienne des pêches.

Depuis de nombreuses années maintenant, le Canada prend des mesures pour protéger le poisson. Malheureusement, nos voisins américains ne se sont pas toujours efforcés pour assurer des stocks de poisson viables. Aujourd'hui, ils sont forcés d'interdire la pêche du saumon de montaison, à cause de la destruction de l'habitat, et d'imposer un moratoire sur la pêche dans le détroit de Juan de Fuca par suite d'une mauvaise gestion des pêches dans le passé et de la destruction d'un trop grand nombre de poissons.

Je crois comprendre que les négociations ont déraillé à cause de l'intransigeance des négociateurs de l'Alaska et de leur refus de souscrire aux objectifs justes et équitables définis par le Canada. Les Américains doivent sûrement comprendre que si nous avons partagé des stocks de poisson et qu'ils ont détruit ou réduit d'une manière catastrophique la viabilité des stocks de poisson de l'Oregon et de l'État de Washington dans le détroit Juan de Fuca, nous voulons, en tant que Canadiens, trouver une solution qui ne pénalisera pas le Canada d'avoir adopté des mesures de conservation judicieuses, alors que nos voisins du sud n'ont rien fait de semblable.

Déjà l'an dernier, nous avons pour ainsi dire versé à l'industrie américaine de la pêche une subvention d'environ 65 millions de dollars, soit la valeur des poissons canadiens capturés par les pêcheurs américains. On nous demande maintenant d'interdire ou de réduire considérablement notre pêche pour compenser les piètres mesures de gestion adoptées à l'égard des ressources halieutiques que le Canada et les États-Unis se partagent. Nous devrions ainsi réduire nos prises d'une manière draconienne, obliger les bateaux canadiens à rester à quai et mettre au chômage des pêcheurs canadiens.

J'estime que cette situation est inacceptable pour ma province, la Colombie-Britannique, et pour l'ensemble du Canada. Je demande au secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans quelles autres mesures nous pourrions prendre pour relancer les négociations. Si cela s'avère impossible, quelle autre mesure le gouvernement du Canada pourrait-il prendre dans le cadre des pourparlers sur la pêche du saumon du Pacifique pour éviter que la situation ne dégénère en une guerre entre tous les pêcheurs?

M. Harbance Singh Dhaliwal (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de sa question. Je sais quelle importance revêt cette question pour la Colombie-Britannique et le député.

En guise d'introduction, je dirai que nous sommes très inquiets de la position du gouvernement américain. En fait, sa position sur les ententes en matière de pêche est absolument déraisonnable. Il veut prendre plus de poisson dans nos eaux, mais que nous en prenions moins dans les siennes. Il veut que le Canada l'aide à préserver ses stocks de poisson, mais il n'est pas prêt à faire de même pour les nôtres. Il veut un accès accru au saumon canadien parce que ses stocks sont bas, mais refuse d'accorder le même traitement au Canada.

Sa position sur le principe de l'équité est absolument déraisonnable. Aux termes du Traité sur le saumon du Pacifique, le principe de l'équité veut que chacun des pays ait droit à des quotas de pêche équivalant à sa propre production de saumon.

Ce juste équilibre n'a jamais été mis en oeuvre par les États-Unis. Le déficit canadien a plus que doublé au cours des quatre dernières années et il atteint actuellement environ 56 millions de dollars par année. Au lieu de reconnaître ce fait, les Américains voudraient, cette année, que le déficit atteigne 100 millions.

La position du Canada est claire. Nous faisons tout notre possible pour négocier avec les États-Unis un arrangement qui soit juste et responsable pour les deux pays.

Le premier ministre en a parlé au président Clinton qui a accepté de s'en mêler. Récemment, le négociateur canadien a rencontré les gouverneurs des États qui ont accepté de poursuivre cette affaire avec l'administration américaine.

Le ministre des Pêches et des Océans est actuellement à Washington pour rencontrer des membres du Congrès et des hauts fonctionnaires. La province de Colombie-Britannique a

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accepté d'aider en exposant la position du Canada aux guides d'opinion des États-Unis.

Indépendamment de tout cela, notre position est parfaitement claire. Nous ne sommes pas prêts à permettre aux Américains de continuer à récolter le produit des efforts des Canadiens. Il y a maintenant trop longtemps que le Canada reporte la décision de se montrer ferme face aux négociateurs américains.

Je tiens à ce que l'on sache qu'il n'en sera pas ainsi cette année, nous serons fermes.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la motion d'ajournement est adoptée d'office.

En conséquence, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 51.)