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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 28 mars 1996

AFFAIRES COURANTES

LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ

    Projet de loi C-251. Adoption des motions de présentationet de première lecture 1329

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-252. Adoption des motions de présentationet de première lecture 1329
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 1329

LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION

    Projet de loi C-253. Adoption des motions de présentationet de première lecture 1330

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

LA CONSOMMATION D'ALCOOL

LA BFC CHILLIWACK

L'ÉGALITÉ DES PROVINCES

LA FISCALITÉ

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1330

LES PRIX DE L'ESSENCE

QUESTIONS AU FEUILLETON

    Le président suppléant (M. Kilger) 1330

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

    Projet de loi C-19. Reprise de l'étude à l'étape durapport 1331
    M. Leblanc (Longueuil) 1331
    Report du vote sur la motion 1333
    Report du vote sur la motion 1333

LA LOI SUR LES BANQUES

    Projet de loi C-15. Étape du rapport 1333

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

    Le président suppléant (M. Kilger) 1333

MOTIONS D'AMENDEMENT

    Motions nos 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9 et 10 1334
    Report du vote sur la motion no 1 1337
    Report du vote sur la motion no 9 1337
    Report du vote sur la motion no 4 1339
    Motions nos 11, 12 et 13 1339
    Report du vote sur la motion 1344
    Report du vote sur la motion 1344
    Report du vote sur la motion 1344

LOI SUR LE MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

    Projet de loi C-11. Étude à l'étape du rapport, avec des propositions d'amendement 1344

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

    Le président suppléant (M. Kilger) 1344

MOTIONS D'AMENDEMENT

    Motions nos 1, 2, 4 et 6 1344
    M. Hill (Prince George-Peace River) 1358

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES SCIENCES ET LA TECHNOLOGIE

LES PHARES

L'UNIVERSITÉ POLYTECHNIQUE RYERSON

L'ÉRADICATION DE LA VIOLENCE

CUBA

LA SOCIÉTÉ AÉROPORTS DE MONTRÉAL

LES JEUNES DE BURLINGTON

LA JUSTICE

M. TRAN TRIEU QUAN

    Mme Gagnon (Québec) 1365

LA LOCATION DE VOITURES

    Mme Brown (Oakville-Milton) 1365

LES RÉCLAMATIONS TERRITORIALES DES NISGA'A

LA SOCIÉTÉ LINCOLN FABRICS LTD.

LA SAISIE DE MATÉRIEL INFORMATIQUE À DESTINATION DE CUBA

LA SOMALIE

L'AÉROPORT INTERNATIONAL DE MIRABEL

LA VIOLENCE

LES MINES TERRESTRES

    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 1366

QUESTIONS ORALES

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

LA DÉFENSE NATIONALE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1369

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

LA DÉFENSE NATIONALE

LES DROITS D'AUTEUR

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1370
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1370

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

LA RADIODIFFUSION ET LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

    M. Leblanc (Longueuil) 1371
    M. Leblanc (Longueuil) 1371

LE COMMERCE

LA DÉFENSE NATIONALE

LES IMMIGRANTS INVESTISSEURS

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 1373
    M. Martin (LaSalle-Émard) 1373

REVENU CANADA

LE CENTRE DE FUSION MAGNÉTIQUE DE VARENNES

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

L'ASSURANCE-MALADIE

L'ENVIRONNEMENT

QUESTION DE PRIVILÈGE

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

    M. Martin (LaSalle-Émard) 1375

RECOURS AU RÈGLEMENT

LANGAGE NON PARLEMENTAIRE

    M. Speaker (Lethbridge) 1376

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1378

LES VOIES ET MOYENS

AVIS DE MOTION

MESSAGE DU SÉNAT

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LE MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

    Projet de loi C-11. Reprise de l'étude à l'étape du rapport,ainsi que de la motion no 5 1378
    Report du vote sur la motion 1381
    Motions nos 7, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 17 1381
    Adoption des motions nos 7 et 11 à 17 inclusivement 1384
    Adoption de la motion no 8 1384
    Adoption de la motion no 9 1386
    Adoption de la motion no 10 1386
    Report du vote sur la motion 1386

SANCTION ROYALE

SANCTION ROYALE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

    Projet de loi C-18. Étude à l'étape du rapport 1387

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

MOTIONS D'AMENDEMENT

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 1387
    Adoption de la motion no 1 1388
    Adoption des motions nos 2 et 4 1389

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET AFFAIRES JURIDIQUES

    Adoption de la motion 1389

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

    Projet de loi C-18. Reprise de l'étude à l'étape du rapport, ainsi que de l'étude des motions nos 3 et 5 1389
    Adoption de la motion no 3 1390
    Adoption de la motion no 5 1390
    Motion portant approbation 1390
    Adoption de la motion 1390

LOI SUR LE PROGRAMME DE PROTECTION DES TÉMOINS

    Projet de loi C-13. Motion de troisième lecture 1390
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1394

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

    Proposition et adoption de la motion 1395

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA LOI CANADIENNE SUR LES SOCIÉTÉS PAR ACTIONS

    Projet de loi C-204. Motion de deuxième lecture 1395

MOTION D'AJOURNEMENT

LES PIPELINES

LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION


1329


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 28 mars 1996


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-251, Loi modifiant la Loi canadienne sur la santé (conditions de versement).

-Monsieur le Président, ce projet de loi est nécessaire, en l'absence d'un protocole qui soit organisé et géré au niveau national pour déclarer les maladies infectieuses. Même si le ministère de la Santé a récemment publié un protocole de déclaration, celle-ci est purement volontaire et donc inadéquate.

L'inertie du gouvernement fédéral face à cette importante question me préoccupe énormément. Chaque année qui passe, les politiques fédéraux ne prennent pas les mesures qui s'imposent au sujet de ce programme tout à fait essentiel et on met de plus en plus de vies en danger inutilement.

Les employés des services d'intervention d'urgence du Canada, comme les pompiers, risquent constamment leur vie pour assurer la sécurité de nos collectivités, mais le gouvernement n'a pas encore eu la décence d'offrir à ces gens une protection accrue dans le cadre de leur travail.

Ces employés sont la proie de tout un éventail de maladies contagieuses dans l'exercice de leurs fonctions.

C'est pourquoi il faut mettre sur pied une procédure par laquelle les hôpitaux pourront informer rapidement ces employés lorsque les patients dont ils se sont occupé ou qu'ils ont transportés dans leur véhicule sont porteurs d'une maladie transmissible, comme l'hépatite ou le sida.

La communication rapide et efficace de faits essentiels comme celui-ci est la première étape à suivre pour empêcher que l'exposition à une maladie transmissible ait des effets beaucoup plus graves. La procédure de déclaration donne la possibilité de procéder aux tests voulus et de traiter rapidement les maladies transmissibles.

Mon projet de loi préconise l'établissement d'un système semblable à celui qui est prévu dans la loi américaine correspondante que le gouvernement a récemment adoptée et qui répond aux préoccupations concernant les procédures officielles à suivre pour aviser les employés des services d'intervention d'urgence qui ont été en contact avec une maladie.

Pour apaiser les craintes concernant l'invasion de la vie privée des patients, le projet de loi renferme des garanties sur la confidentialité des renseignements.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous sommes maintenant sur le point d'entrer dans un débat sur ce projet de loi. La coutume veut qu'on donne une brève explication de al mesure. Le député pourrait-il conclure son intervention?

M. Gouk: Bien entendu, monsieur le Président. Le dernier gouvernement conservateur était opposé à l'adoption de ce projet de loi pour toutes sortes éventail de raisons, mais l'opposition libérale était fortement en faveur de cette mesure, du moins en principe. J'espère que je peux obtenir. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Il est clair que nous nous lançons dans un débat et qu'il n'est pas question d'expliquer le projet de loi. Je vais poursuivre.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LE CODE CRIMINEL

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-252, Loi modifiant le Code criminel (mines).

-Monsieur le Président, je suis heureux, aujourd'hui, de présenter de nouveau mon projet de loi d'initiative parlementaire qui vise à interdire l'importation, l'exportation et l'utilisation de mines terrestres et de dispositifs antipersonnel. Chaque année, ces engins tuent ou mutilent plus de 25 000 personnes dans le monde. Ils sont surtout destinés à tuer des civils.

Le principal argument contre cette interdiction est d'ordre militaire. Or, il est détruit aujourd'hui par le Comité international de la Croix-Rouge qui vient de publier un document dissipant ces mythes militaires.

J'espère que nous saurons mettre le sectarisme politique de côté et que nous souscrirons à cet important projet de loi humanitaire pour sauver des milliers de vies chaque année.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)


1330

LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-253, Loi modifiant la Loi sur l'accès à l'information (sociétés d'État).

-Monsieur le Président, mon projet de loi a pour objet d'assujettir toutes les sociétés d'État à la Loi sur l'accès à l'information. Actuellement, les sociétés d'État, comme la Société canadienne des postes, ne sont pas visées par la Loi sur l'accès à l'information, même si elles sont financées à même les recettes fiscales.

Les Canadiens paient pour obtenir ces services et ils ont le droit de savoir si on fait un bon usage de leur argent. Au mois d'octobre, le vérificateur général a publié un rapport caustique sur le fonctionnement des sociétés d'État.

Le projet de loi vise à rendre les sociétés plus transparentes et à les obliger à rendre des comptes aux contribuables. Bon nombre de Canadiens réclament ces modifications, et j'ai bon espoir que la Chambre se pliera à la volonté de la population pour appuyer ce projet de loi.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je désire présenter deux pétitions à la Chambre aujourd'hui. La première porte sur la fiscalité de la famille. Elle vient de Penticton, en Colombie-Britannique.

Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la gestion d'un foyer et le soin d'enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

(1010)

Ils ajoutent que la Loi de l'impôt sur le revenu est discriminatoire à l'égard des familles qui choisissent de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques et de personnes âgées.

Les pétitionnaires demandent donc humblement au Parlement de prendre des mesures pour supprimer la discrimination fiscale contre les familles qui décident de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques et de personnes âgées.

LA CONSOMMATION D'ALCOOL

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient d'Edmonton, en Alberta.

Les pétitionnaires souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut entraîner des problèmes de santé ou d'affaiblir les facultés. Plus particulièrement, on peut prévenir le syndrome d'alcoolisme foetal et les malformations congénitales liées à la consommation d'alcool en évitant de consommer des boissons alcoolisées durant la grossesse.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de promulguer une loi exigeant que des étiquettes de mise en garde soient apposées sur toutes les bouteilles de boissons alcoolisées afin de renseigner la population, en général, et les femmes enceintes, en particulier, sur les risques associés à la consommation d'alcool.

LA BFC CHILLIWACK

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je continue à l'occasion de recevoir des pétitions des gens de la Colombie-Britannique qui sont encore très bouleversés par ce qui arrive à la BFC Chilliwack. Puisqu'on continue d'inaugurer des édifices et de construire des infrastructures là-bas, ils estiment que le gouvernement gaspille beaucoup d'argent en fermant entièrement cette installation. Cette pétition porte sur cette préoccupation.

L'ÉGALITÉ DES PROVINCES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition concerne le nouveau ministre chargé de la Constitution. Les pétitionnaires demandent au Parlement de garantir l'égalité de toutes les provinces en refusant de désigner une province comme société distincte, si cela a pour conséquence de conférer à cette province un statut ou des pouvoirs spéciaux dont ne jouissent pas toutes les autres provinces. J'espère que le gouvernement et le ministre écoutent.

LA FISCALITÉ

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de déposer une pétition venant de mes électeurs d'Abbotsford, d'Aldergrove et de Langley, en Colombie-Britannique. Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas imposer les prestations d'assurance-maladie et d'assurance dentaire et d'écarter l'idée d'une telle mesure tant qu'il n'y aura pas une révision exhaustive du régime fiscal et de ses répercussions sur la santé des Canadiens.

J'appuie entièrement cette pétition.

LES PRIX DE L'ESSENCE

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter deux pétitions dûment certifiées qui ont trait à l'établissement des prix de l'essence.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce que toutes les questions restent au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

> 1331


1331

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 mars 1996, du projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, dont un comité a fait rapport, ainsi que de la motion no 3.

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir encore ce matin de prendre la parole sur le projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, et particulièrement sur la motion no 3 que j'ai présentée à la Chambre.

Durant le référendum, au Québec, nous avons beaucoup parlé de partenariat économique avec le reste du Canada, ce qui faisait partie de notre projet principal. On pense que cet Accord de mise en oeuvre sur le commerce intérieur est un pas dans la bonne direction qui permettra d'accélérer un peu le processus de cet accord de partenariat entre le Québec et le reste du Canada.

Je parlerai du rôle du ministre de l'Industrie. Il joue un rôle très important en ce qui concerne la croissance économique, la productivité, la compétitivité et l'emploi. Il y a de la réglementation, et ce projet de loi sur l'Accord sur le commerce intérieur nous paraît très positif en ce qui concerne la productivité, la compétitivité et l'emploi au Québec et au Canada.

Actuellement, il y a beaucoup de réglementations qui font en sorte que faire du commerce entre les provinces nous paraît parfois plus difficile que faire du commerce avec les États-Unis, ce qui est complètement inacceptable. Dans ce sens, ce projet de loi nous paraît intéressant.

(1015)

Le risque de déréglementer cause parfois certains problèmes d'ajustement et c'est dans ce sens que, dans la motion no 3 que nous proposons, nous demandons d'aller un peu moins rapidement en ce qui concerne la déréglementation dans certains cas particuliers.

Cela risque de déstabiliser certains secteurs très particuliers du commerce intérieur. Cela peut entraîner des faillites, des pertes d'emplois. Alors, une planification à long terme et un échéancier un peu plus long dans certains secteurs permettraient d'éviter ce genre de dégâts, toutes ces faillites, pertes d'emplois et autres.

La motion no 3 porte particulièrement sur le transport. L'industrie du transport en est une très importante ici, au Canada. Nous transportons différentes marchandises, il y a beaucoup d'activités et un volume d'affaires très important et cela permet à nos industries interreliées de pouvoir recevoir leurs marchandises à temps. Cela devient un secteur très important dans notre développement économique et pour faciliter une meilleure productivité de nos petites et moyennes entreprises.

La motion no 3 porte particulièrement sur le transport en vrac de nos petites entreprises québécoises. J'expliquais à un député du gouvernement l'importance de cette partie des règlements. J'ai rencontré l'Association des transporteurs en vrac, des camions, qui sont de petites entreprises familiales. Ça veut dire que c'est un père de famille qui possède un camion, qui fait du transport très local, dans son village de campagne. Il transporte du gravier, des grains ou différentes choses, mais il les transporte vraiment à l'intérieur du Québec et dans un rayon très court.

Au Québec, actuellement, nous avons une réglementation pour ce genre de transport. Il est bien certain que nous sommes d'accord pour libéraliser le transport, mais cette partie du commerce est très particulière, principalement au Québec. Beaucoup de ces transporteurs constituent la seule entreprise qui fait vivre leur famille et ce sont aussi des personnes qui souvent se sont engagées dans des emprunts pour acheter un camion ayant parfois une valeur de 100 000 $, 125 000 $ .Elles viennent de le faire et s'inquiètent vraiment du fait que, maintenant, un transporteur pourrait avoir un permis fédéral et ne serait pas lié aux règlements de transport en vrac du Québec.

Cela voudrait dire qu'ils ne seraient pas liés en ce qui concerne la tarification du transport. Il y a plusieurs règlements, que je ne veux pas énumérer, qui gèrent ce genre de secteur d'activité. Par exemple, il y a quatre principes. Au Québec, dans ce secteur très particulier de transport, on octroie non pas un permis de transport à une entreprise, mais pour un camion. C'est un permis par camion. Ça veut dire que ça se limite vraiment à quelqu'un qui possède un camion. Il doit faire du transport dans un rayon très local.

Quand il doit faire des soumissions, par exemple, à des municipalités ou faire des routes dans son coin, il doit demander un minimum pour transporter ces marchandises alors que, dans cette nouvelle entente, quelqu'un pourrait avoir un permis fédéral, mais ne serait pas lié à ces règlements.

Au fond ce qu'on demande, c'est un sursis. On demande que le ministre se prononce pour donner un échéancier de deux, trois ou quatre ans. On pourrait peut-être évaluer exactement pour permettre à ces petites entreprises très locales de s'ajuster, pour qu'au moins elles ne se fassent pas faire une concurrence déloyale à cause d'autres sortes de permis qui seraient émis par leur région.

(1020)

Cela nous apparaît très important parce qu'on court le risque que ces petites entreprises familiales fassent faillite. Cela crée un désordre économique assez important dans les régions éloignées des grands centres, dans les villages ou les petites villes. C'est quand même important, ça joue un rôle important en ce qui concerne par exemple la maintenance de ces camions et les gens qui vivent de ce petit commerce sont très inquiets. Le désordre économique pourrait être désastreux.

Tout ce qu'on demande au ministre et ce qu'on demande dans le fond par la motion no 3 c'est:

[. . .] l'élimination des dispositions incompatibles entre l'Accord sur le commerce intérieur et les lois et règlements du Québec régissant le transport en vrac par camion.
On voudrait que la reconnaissance de ce type de commerce figure dans la loi; ce genre de commerce est très particulier au Québec. Je pense que cela ne nuirait pas du tout à la libéralisation du transport


1332

entre les provinces. C'est lié directement à des gens qui font du transport très, très local. Dans ce sens-là la motion nous paraît très importante pour ce genre de commerce.

Si le gouvernement ne comprend pas cette importance-là, on demande au moins au ministre de nous donner signe de vie qu'il donnerait la possibilité d'une période de deux, trois ou quatre ans de transition avant d'appliquer vraiment cette loi, pour permettre à ces petites entreprises de pouvoir survivre encore un certain temps.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je veux parler brièvement aujourd'hui de l'amendement proposé par le Bloc au projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur.

La motion du Bloc ressemble beaucoup à l'amendement que les libéraux ont présenté relativement à la motion du Parti réformiste qui voulait qu'un comité parlementaire étudie les allégations de sédition contre le Bloc. L'amendement que les libéraux ont demandé d'apporter à cette motion supprimait tous les mots avant et après «que» et ne laissait vraiment rien de la motion initiale.

En présentant cet amendement, les bloquistes disent qu'ils ne veulent pas vraiment porter attention à cet accord sur le commerce intérieur qu'ils ont signé ou qu'ils n'ont aucune confiance dans le mécanisme de règlement des différends. De deux choses l'une. Dans les deux cas, ils disent qu'ils veulent faire abstraction de cet accord ou passer outre au mécanisme de règlement des différends et qu'ils veulent avoir de nouvelles négociations avec le gouvernement fédéral dans le domaine du transport en vrac par camion.

Cela me montre que le Bloc n'a absolument aucune confiance dans l'accord initial et qu'il se méfie du mécanisme du règlement des différends. Je peux comprendre certaines des préoccupations des bloquistes à ce sujet. Le mécanisme de règlement des différends est inefficace et peut se révéler être une très longue procédure. Cependant, c'est un mécanisme qui a été accepté, lorsqu'ils ont signé l'accord, et je pense qu'il mérite d'être mis à l'essai, ce qui n'a pas encore été fait. Il sera impossible de le faire vraiment, tant que la Chambre n'aura pas adopté le projet de loi que cette motion modifie. Le projet de loi C-19 va mettre en oeuvre l'Accord sur le commerce intérieur. Le mécanisme de règlement des différends est tellement souple qu'il devrait largement suffire à protéger le secteur du camionnage dont traite cette motion.

Dans cet accord, on retrouve toute une liste d'objectifs légitimes qu'une province peut avoir et qui lui donneront la possibilité de contourner l'objet de l'accord. Ces objectifs reposent sur la sécurité publique, l'ordre public, la protection de la vie et de la santé des êtres humains, des animaux ou des plantes, la protection de l'environnement, la protection des consommateurs, la protection de la santé, de la sécurité et du bien-être des travailleurs, ainsi que les programmes d'action positive pour les groupes défavorisés.

(1025)

Ces prétendus objectifs légitimes peuvent être présentés devant un groupe spécial, en l'occurrence par le Québec à propos de son industrie du transport en vrac par camion. Le Bloc devrait sûrement avoir confiance que ce groupe spécial les examinerait pour déterminer si cette industrie peut continuer à fonctionner d'une façon différente par rapport au reste du pays ou si rien ne justifie qu'elle bénéficie d'un traitement spécial.

La motion du Bloc est vraiment une tentative pour ne pas tenir compte de l'accord et contourner le mécanisme de règlement des différends. Une fois que le projet de loi sera adopté et mis en oeuvre, ce mécanisme fera en sorte que cinq membres du groupe spécial, choisis sur une liste de 65, décident si faut obliger l'industrie du camionnage du Québec, en l'occurrence, à respecter l'esprit de l'accord ou lui accorder une protection spéciale.

Deux des membres du groupe spécial proviendront de la liste fédérale, deux d'une liste provinciale, d'une province autre que le Québec, et ces quatre membres désigneront un président. Il y aura cinq membres des gouvernements fédéral et provincial, et un président qui décideront des questions soumise au groupe spécial.

Je défie les bloquistes d'expliquer pourquoi ils doutent tant que ce processus puisse remédier au problème qu'ils tentent de régler en proposant leur amendement aujourd'hui.

Il faut donner une chance à ce processus et voir s'il fonctionne. J'en conviens, bon nombre des parties, des penseurs et des gens qui ont examiné l'accord font peu confiance au mécanisme de règlement des différends tel qu'il est présenté. Je doute fort qu'il fonctionne, mais donnons-lui une chance. Si nous constatons qu'il ne fonctionne pas, nous le resserrerons et lui donnerons des dents.

Si le gouvernement du Québec s'inquiète du traitement que l'accord donnera à son industrie du camionnage, qu'il porte sa cause devant un groupe spécial. Quand le projet de loi sera adopté, il pourra mettre à l'essai le mécanisme de règlement des différends. Il pourrait d'abord soumettre la question au processus de négociation. Si le problème persiste, il le en fera part à un groupe spécial qui tranchera.

Le Parti réformiste n'appuiera pas cette motion, parce qu'elle va à l'encontre de l'accord et du mécanisme de règlement des différends. Je doute qu'elle mérite l'appui de la Chambre.

M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, après avoir écouté l'amendement proposé par le député du Bloc québécois, je puis dire que cette proposition aurait un seul effet: lier les mains du gouvernement et l'empêcher de tenir les engagements qu'il a pris dans l'accord sur le commerce intérieur. L'amendement modifierait


1333

unilatéralement les dispositions convenues par toutes les provinces et le gouvernement fédéral.

Il s'agit simplement ici d'un projet de loi de mise en oeuvre. L'amendement proposé empêcherait le gouvernement fédéral d'honorer les obligations sur lesquelles toutes les parties se sont entendues. Je soupçonne en fait que cet amendement a été proposé à l'instigation de ceux qui, au Québec, voudraient maintenir certains obstacles au commerce.

(1030)

Dans son exposé au Comité de l'industrie, l'Association des camionneurs artisans du Québec a dit clairement souhaiter le maintien de mesures en place pour imposer des restrictions dans le transport intraprovincial de produits en vrac. Ces mesures reposent sur la législation québécoise, dont l'efficacité dépend de la partie III de la Loi sur les transports routiers. Dans l'accord sur le commerce intérieur, le gouvernement fédéral a accepté d'abroger cette disposition. Fait intéressant, le gouvernement québécois a accepté, en signant l'accord, que cet article soit abrogé.

Le Bloc québécois essaie de gagner sur les deux tableaux. Il ne peut pas abattre les barrières commerciales d'une main et les soutenir de l'autre. Or, c'est bien l'effet qu'aurait l'amendement bloquiste.

En outre, l'amendement exigerait, concrètement, que le gouvernement fédéral ne se conforme pas en tout point à l'accord sur le commerce interne. Il serait inacceptable que le gouvernement renie ses obligations pour plaire à un seul groupe d'intérêts qui souhaite le maintien de barrières commerciales.

Si le gouvernement québécois voulait modifier l'accord auquel il a déjà adhéré, il devrait rouvrir les discussions avec les 12 parties à l'accord, et pas uniquement avec le gouvernement fédéral.

Il est carrément inacceptable de modifier le projet de loi pour se soustraire aux obligations prévues par l'accord. C'est pourquoi le gouvernement n'est pas en faveur de l'amendement proposé.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 3. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 3 est différé.

La Chambre abordera maintenant les votes par appel nominal différés à l'étape du rapport du projet de loi.

Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est différé jusqu'au lundi 15 avril à 18 h 30, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus 15 minutes.

* * *

(1035)

[Traduction]

LA LOI SUR LES BANQUES

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-15, Loi modifiant la législation sur les institutions financières et édictant une loi nouvelle, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le président suppléant (M. Kilger): Il y a 13 motions d'amendement inscrites au Feuilleton à l'étape du rapport du projet de loi C-15, Loi modifiant la législation sur les institutions financières et édictant une loi nouvelle.

[Français]

Les motions nos 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9 et 10 seront groupées pour les fins du débat, mais elles seront mises aux voix de la façon suivante: le vote sur la motion no 1 s'appliquera aux motions nos 2, 3, 5, 6, 7 et 10; la motion no 9 sera mise aux voix séparément.

[Traduction]

Les motions nos 4 et 8 seront groupées aux fins du débat. Le résultat du vote sur la motion no 4 s'appliquera à la motion no 8.

[Français]

Les motions nos 11, 12 et 13 seront groupées pour les fins du débat mais elles seront mises aux voix de la façon suivante: le vote sur la motion no 11 s'appliquera à la motion no 13; la motion no 12 sera mise aux voix séparément


1334

Je vais maintenant soumettre les motions nos 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9 et 10 à la Chambre.

[Traduction]

MOTIONS D'AMENDEMENT

Le président suppléant (M. Kilger): Groupe no 1, motion no 1. M. Peters. . .

Mme Catterall: Monsieur le Président, si vous le demandez, vous constaterez qu'il y a consentement unanime à la Chambre pour considérer que les motions du premier groupe ont été lues.

Le président suppléant (M. Kilger): Pour plus de clarté, diriez-vous également lues et appuyées?

Mme Catterall: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

L'hon. Douglas Peters (pour le ministre des Finances) propose:

Motion no 1
Il est proposé que l'article 41 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par:
a) substitution, aux lignes 28 et 29, page 39, de ce qui suit:
«une fusion de celle-ci, ou l'a forcée à le faire, à la portion de la»; et
b) substitution, à la ligne 2, page 40, de ce qui suit:
«dans les circonstances, à».
Motion no 2
Il est proposé que l'article 45.1 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par:
a) substitution, aux lignes 23 et 24, page 47, de ce qui suit:
«reçues ou détenues, la date déterminée est prise en compte, que le droit ait»;
b) substitution, aux lignes 30 à 33, page 47, de ce qui suit:
«sant de prolonger la durée du dépôt aux taux d'intérêts fixés au moment où les sommes ont été sollicitées ou reçues, la date ultérieure est prise en compte,»; et
c) substitution, à la ligne 37, page 47, de ce qui suit:
«veler ou de réinvestir les sommes aux».
Motion no 3
Il est proposé que l'article 70 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par substitution, à la ligne 38, page 61, et à la ligne 1, page 62, de ce qui suit:
«qui suit soit la prise de contrôle de la société soit l'entrée en vigueur du présent article, la der-».
Motion no 5
Il est proposé que l'article 76 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par substitution, aux lignes 8 à 10, page 64, de ce qui suit:
«que les fonctions des deux postes seront bien exercées et que les fonctions du poste d'actuaire seront exercées de façon».
Motion no 6
Il est proposé que l'article 95 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par substitution, à la ligne 39, page 72, de ce qui suit:
«l'ordonnance permettant à la société de».
Motion no 7
Il est proposé que l'article 115 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par substitution, aux lignes 31 et 32, page 88, de ce qui suit:
«qui suit soit la prise de contrôle de la société soit l'entrée en vigueur du présent article, la der-».
Motion no 9
Il est proposé que l'article 157 de la version anglaise du projet de loi C-15 soit modifié par substitution, aux lignes 13 à 22, page 108, de ce qui suit:
«this section, the onus of proving
(a) that the company was not insolvent lies on the directors and the shareholders of the company; and
(b) in the case of the directors, that there were reasonable grounds to believe that the company was not insolvent when a dividend was paid or shares were redeemed or purchased for cancellation or that the payment of a dividend or a redemption of shares did not render the company insolvent lies on the directors.»
Motion no 10
Il est proposé que l'article 165 du projet de loi C-15 soit modifié par substitution, à la ligne 24, page 120, de ce qui suit:
«sanctionnée au cours de la deuxième session».
M. Barry R. Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, au sujet des motions qui ont été groupées aux fins du débat, soit les motions nos 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9 et 10, je interviendrai très brièvement pour dire à la Chambre qu'il s'agit de modifications de forme et d'éclaircissements visant à assurer la cohérence entre les deux versions du projet de loi.

En jetant un coup d'oeil aux diverses motions, il me paraît évident qu'elles ont le caractère que je viens de décrire, et je ne pense pas qu'elles exigent un long débat à la Chambre ce matin. Les députés constateront que ces motions assurent la cohérence entre les versions anglaise et française du projet de loi. Il s'agit de modifications de forme, d'éclaircissements qui ne présentent probablement d'intérêt que pour des avocats.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Déjà, monsieur le Président? Je croyais que le gouvernement n'avait rien à dire, mais de là à prendre seulement deux minutes pour présenter dix amendements, c'est quand même court.

Ce matin nous apprenions à 9 h 15, donc à peine une heure avant le début du débat au sujet des amendements concernant le projet de loi C-15, que le gouvernement avait décidé de proposer à son propre projet de loi une série de dix amendements.


1335

(1040)

Nous déplorons cette façon de faire qui est presque devenue une pratique courante de ce gouvernement d'arriver à la toute fin, comme ça, en nous lançant, en nous jetant sur la table littéralement des amendements pour faire en sorte de semer de la confusion dans le débat, de tenter, par certaines astuces, c'est déjà arrivé par le passé, et ce et ce matin, on a examiné très sérieusement l'ensemble des amendements, de nous passer différentes choses, de nous passer un sapin. C'est inacceptable pour un gouvernement responsable de se conduire de la sorte, surtout pour un projet de loi comme le projet de loi C-15 touchant les institutions financières, qui est d'une importance capitale pour l'avenir du secteur, et surtout le secteur des valeurs mobilières.

Le secrétaire d'État et l'adjoint du ministre, je ne sais pas pour qui ils se prennent, mais j'ai l'impression qu'avec ces dix amendements, ils sont arrivés un peu comme l'a fait Moïse avec ses dix commandements, sauf qu'on est dans un Parlement, où la démocratie doit jouer, où l'information du public doit primer ainsi que la transparence. N'eut été de l'intelligence de mes collègues de l'opposition et du soutien technique que nous avons à notre service de recherche, nous aurions été embêtés ce matin face à ce «pitchage» systématique de nouveaux amendements.

Je rappelle, et nous en avons discuté l'année dernière, que le projet de loi C-15, anciennement le projet de loi C-100, frappe de plein fouet un domaine de juridiction exclusive aux provinces, celui des valeurs mobilières, qui regroupe l'ensemble des actifs liquides, actions, bons, obligations.

C'est un champ de juridiction exclusif des provinces en fonction de deux articles de la Constitution canadienne. Le premier, le 92.13, traite de la propriété des droits civils dans la province. Le deuxième, le paragraphe 92.16, stipule que, généralement, toutes les matières d'une nature purement locale ou privée dans la province relèvent des provinces.

Depuis le début du débat concernant le projet de loi sur les institutions financières, nous avons eu droit à des demi-réponses à nos questions, à des demi-vérités face à nos interrogations sur le fait que le projet de loi empiétait carrément dans un champ exclusif aux provinces.

Le projet de loi C-15 notamment, par la mise en place d'un système pancanadien de compensation et de règlement des paiements empiète sur des compétences déjà exercées, par exemple, par la Commission québécoise des valeurs mobilières, et c'est la même chose pour l'Ontario et la Colombie-Britannique, et par l'inspecteur général des institutions financières du Québec.

Cette situation entraîne des chevauchements coûteux pour les contribuables. Les libéraux sont devenus maîtres. Ils rajoutent des chevauchements, en particulier dans le secteur des valeurs mobilières. Qui paie pour cela? Ce sont les contribuables. Non seulement on ajoute des chevauchements coûteux, mais on ajoute aussi des inefficacités administratives, puisque les institutions financières québécoises seront soumises à des doubles contrôles.

Pourquoi en arriver à contrôler un secteur qui est fort bien contrôlé et depuis longtemps, un secteur de juridiction exclusif du Québec? Pourquoi le gouvernement fédéral fait-il preuve d'autant de paternalisme? Pourquoi le gouvernement fédéral veut-il mettre en tutelle les différentes institutions provinciales, en particulier celles du Québec?

Nous l'avons déploré, nous le déplorons aujourd'hui et nous déplorerons surtout le fait que, dans les dix commandements de Moïse ou plutôt dans les dix propositions présentées par le secrétaire d'État et l'adjoint du ministre des Finances, rien ne répond aux exigences de l'opposition officielle, rien ne répond aux critiques faites par différentes provinces concernant cet empiétement du gouvernement fédéral.

S'agissant des valeurs mobilières de façon particulières, le deuxième problème auquel ne répond ni le projet de loi C-15, ni la version modifiée proposée par le gouvernement à partir de dix amendements, c'est le fait que, s'agissant des valeurs mobilières de façon particulière, ce n'est pas une question de parti, ce n'est pas une question de souverainisme versus fédéralisme, c'est une question fondamentale au Québec.

Même Daniel Johnson disait, dans une lettre qu'il adressait, le 16 février 1994, alors qu'il était premier ministre du Québec, qu'il n'était pas question-parce qu'il était déjà prévu à ce moment-là que le gouvernement fédéral empiéterait dans le domaine des valeurs mobilières-pour le gouvernement fédéral d'empiéter dans ce secteur, que le gouvernement du Québec refuserait et garderait jalousement ses prérogatives dans ce secteur.

(1045)

Daniel Johnson le disait, lui qui est un allié de ces gens, un allié même trop inconditionnel parfois. Il écrivait au ministre des Affaires intergouvernementales à ce moment, pour revenir sur le consensus québécois-parce qu'il y a consensus au Québec sur cette juridiction exclusive en matière de valeurs mobilières-et ce gouvernement non seulement ne répond pas à ses propres alliés, mais fait même fi des articles précis de la Constitution canadienne.

Troisième problème, je l'ai mentionné tout à l'heure, au-delà des domaines de compétence, les institutions financières du Québec de même que les épargnants seront victimes du double emploi qu'Ottawa entend imposer. Il en résultera des coûts supplémentaires et un manque de cohérence sur le marché des valeurs mobilières, car n'oublions pas que les différents agents qui oeuvrent dans le secteur des valeurs mobilières, comme dans tous les autres secteurs concernant les marchés financiers, ont besoin d'une clarté, d'une cohérence et de stabilité. On sait que le secteur financier a besoin de stabilité.

Au lieu de cela, au lieu d'introduire de la cohérence, cette stabilité tant recherchée par tous les marchés financiers à travers le monde, le gouvernement fédéral, avec son projet de loi C-15, arrive avec ses gros sabots en disant: «Nous aussi allons mettre en place des institutions. Nous aussi permettrons à la Banque du Canada, à l'inspecteur général des institutions financières canadiennes d'intervenir dans le domaine des valeurs mobilières.» Une telle attitude est inacceptable.

En août dernier, le secrétaire d'État aux institutions financières comparaissait au Comité des finances. À toutes les questions que nous lui avons posées sur l'envahissement du champ des valeurs mobilières par le gouvernement fédéral, un champ de juridiction


1336

exclusif au Québec en particulier, le secrétaire d'État, il sera obligé de l'admettre aujourd'hui, nous a répondu n'importe quoi. Il nous a affirmé n'importe quoi. On avait même l'impression que le secrétaire d'État ne connaissait même pas son projet de loi.

On avait l'impression, lorsqu'on référait précisément à des clauses, que le secrétaire d'État s'était fait préparer ce projet de loi par des hauts fonctionnaires et qu'il avait le mandat de présenter un résumé. Toutes les fois qu'on lui disait que le fédéral avait l'intention d'investir le champ des valeurs mobilières, il nous disait que non. Toutes les fois qu'on lui disait que le fédéral préparait le terrain à un envahissement systématique de ce secteur, il disait: «Voyons, où voyez-vous cela dans le projet de loi?»

Nous avions beau lui présenter des articles précis. . .

[Traduction]

M. Campbell: Monsieur le Président, je m'excuse d'interrompre mon honorable collègue en invoquant le Règlement, mais je suis un peu déconcerté.

Nous discutons d'une série de motions, regroupées par la présidence aux fins du débat, visant à apporter des amendements de forme, pour clarifier certains points et assurer la cohérence entre les deux versions. Mon honorable collègue a dit qu'elles sont au nombre de dix, mais il n'y en a que huit. Il n'est pas très fort en calcul. Quoi qu'il en soit, il s'engage dans un débat sur la portée générale du projet de loi sans rien dire du tout de ces motions. Je crois comprendre que certaines de ses préoccupations font l'objet de motions qui seront groupées aux fins du débat et que l'on pourra en discuter un peu plus tard ce matin.

Le député pourrait-il clarifier la situation?

Le président suppléant (M. Kilger): J'espère que les députés se montreront indulgents envers la présidence, car, comme il s'agit d'un projet de loi de nature technique, il m'est très difficile d'appliquer les règles de la pertinence. Je sais, bien sûr, que le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a souvent abordé les questions financières au nom de son parti. Si la présidence doit faire preuve de bonne foi, je veux bien. J'aurais énormément de mal à déterminer si les observations faites par le député au sujet des motions qui ont été regroupées en fonction de la décision que j'ai rendue un peu plus tôt sont pertinentes ou non.

[Français]

Alors, en ce qui concerne la question de pertinence, je ne suis pas en mesure de porter un jugement à savoir si la pertinence s'applique ou non dans un projet de loi très technique, mais je prête bonne foi au député de Saint-Hyacinthe-Bagot qui, quand même, connaît très bien les dossiers financiers ici, depuis déjà quelques années.

(1050)

M. Loubier: Monsieur le Président, si on réfère aux 10 amendements présentés, scindés en trois groupes par les représentants du gouvernement, parce qu'il y en a 10-je ne sais pas où il a pris son chiffre de huit, peut-être que l'on discute des huit premiers-il y a 10 amendements proposés.

Ce que je dis par rapport à cela, au nom des mes collègues, c'est qu'il n'y a aucun de ces amendements qui répond au nombreuses interrogations que nous avons présentées depuis tout près d'un an. Ça fait tout près d'un an que les problèmes sont sortis du projet de loi qui en découlait, et le secrétaire d'État, en particulier, au mois d'août, dans le cadre des travaux du Comité des finances était là pour répondre à nos questions. Chaque fois qu'on lui posait des questions sur des problèmes qu'on soulevait, qui ne sont pas résolus. . .

[Traduction]

M. Grubel: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis très confus. J'écoute le débat et je suis prêt à discuter du premier groupe de motions, c'est-à-dire des motions 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9 et 10. Je les ai comptés trois fois et il y a huit motions. De quoi parle le député?

Le président suppléant (M. Kilger): Encore une fois, vous placez la présidence dans une situation très difficile, lorsque vous remettez en question la pertinence des observations faites au sujet d'amendements proposés à un projet de loi qui est très technique. Si le député le désire, la présidence lui permettra d'intervenir dans le débat sur les motions appropriées.

J'aimerais qu'on laisse le député de Saint-Hyacinthe-Bagot terminer son intervention dans le temps qui lui reste, soit environ deux minutes, compte tenu des interruptions attribuables aux rappels au Règlement qui ont été faits, et ce, conformément à nos procédures.

[Français]

M. Loubier Monsieur le Président, je dirais peut-être à mon collègue du Parti réformiste que s'il veut comprendre ce que l'on dit, il n'a qu'à écouter. Je pense que ce serait une bonne solution et, d'ailleurs, il n'écoute pas souvent nos arguments puisqu'il prépare les siens pendant que nous développons les nôtres. Et c'est comme cela depuis deux ans et demi.

Je disais donc que les amendements proposés par le gouvernement ne répondent aucunement au dépôt du projet de loi initial, le projet de loi C-100 qui est devenu le projet de loi C-15, et que lors de sa comparution au Comité des finances, le secrétaire d'État nous a raconté des bobards. Le secrétaire d'État nous a dit qu'il n'était pas de l'intention du gouvernement d'investir dans le champ des valeurs mobilières. Depuis ce temps-là, nous avons raffiné notre analyse. Nous avons même revu le projet de loi C-15 pour des questions de concordance avec l'ancien projet de loi, le projet de loi C-100. Depuis ce temps-là, nous avons eu le discours du Trône qui parlait clairement du rétablissement d'une Commission des valeurs mobilières canadienne.

Alors, c'est ma conclusion par rapport aux 10 amendements proposés. Nous allons nous opposer à ces amendements-là parce qu'ils ne répondent aucunement aux attentes. C'est du petit maquillage, des choses cosmétiques, des virgules, des points présentés ce matin, à une heure d'avis, pour déstabiliser un peu l'opposition et la discussion autour de ce projet de loi pour créer de la confusion


1337

auprès de la population, pour nous faire taire aussi, étant donné la gravité de ce projet de loi, en faisant axer nos interventions sur 10 propositions, je vous dirais, un peu futiles par rapport à la gravité du projet de loi.

[Traduction]

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, il y a effectivement dix motions, qui sont réparties en deux groupes. Le député, qui parle constamment de dix amendements, confond manifestement les deux groupes. Toutefois, je vais maintenant suivre l'orientation donnée par la présidence et parler simplement des motions du premier groupe, soit les motions nos 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9 et 10. Je les ai bien examinées.

Toutes, sauf une, concernent des modifications à apporter à la version française du texte. Je comprends et je lis le français, mais je ne suis pas un spécialiste du jargon des juristes qui est employé ici. J'ai toute confiance dans la compétence et l'intégrité des personnes qui ont rédigé ce projet de loi au ministère des Finances et je crois que celui-ci est régulier et correct.

Par conséquent, je tiens à dire que le Parti réformiste appuie ces propositions d'amendement. J'espère que le débat ira de l'avant et que nous en finirons avec cette affaire. Notre temps est trop précieux pour le perdre à parler ici de choses qui n'ont rien à voir avec les motions. Lorsque le projet de loi C-15 sera lu pour la troisième fois, nous aurons l'occasion de faire valoir nos objections fondamentales à l'égard du projet de loi. J'espère que nous pourrons adopter rapidement aujourd'hui ces motions.

(1055)

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est reporté. Les résultats du vote s'appliquent aussi aux motions nos 2, 3, 5, 6, 7 et 10.

Le vote porte maintenant sur la motion no 9. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est reporté.

Nous passons maintenant au groupe no 2, que forment les motions nos 4 et 8.

L'hon. Douglas Peters (au nom du ministre des Finances) propose:

Motion no 4
Il est proposé que l'article 70 du projet de loi C-15 soit modifié par adjonction, après la ligne 2, page 62, de ce qui suit:
«(5) Les paragraphes (2) à (4) ne s'appliquent pas à une personne ou entité qui, à leur entrée en vigueur, exploite une entreprise au Canada sous une raison sociale prohibée.»
Motion no 8
Il est proposé que l'article 115 du projet de loi C-15 soit modifié par adjonction, après la ligne 33, page 88, de ce qui suit:
«(5) Les paragraphes (2) à (4) ne s'appliquent pas à une personne ou entité qui, à leur entrée en vigueur, exploite une entreprise au Canada sous une raison sociale prohibée.»
M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, en écoutant mon collègue d'en face, le député de Saint-Hyacinthe-Bagot, j'ai été tenté d'intervenir à propos du deuxième groupe d'amendements, pour raconter à la Chambre une histoire que j'ai entendue au sujet d'avocats qui présentent leur plaidoyer. L'un d'eux prend la parole et parle pendant plusieurs heures, tandis que, quand vient son tour, l'autre dit: «Je vais suivre l'exemple de mon collègue et ne présenter aucun argument.»

Ces deux motions, qui sont groupées aux fins du débat, traitent encore une fois d'un détail technique. La loi interdirait à une filiale non assujettie à la réglementation fédérale d'une institution qui elle y est assujettie d'utiliser les mots Trustco ou Lifeco. Cela évitera une certaine confusion dans la population et garantira que les Canadiens ne soient pas induits en erreur lorsqu'il s'agit de savoir si une institution financière est réellement assujettie à la réglementation fédérale.

Des représentants qui ont comparu devant le comité et qui ont participé aux consultations organisées par le ministère nous ont souligné que l'interdiction pure et simple de l'utilisation de tels mots par des entités qui les emploient depuis longtemps serait coûteuse pour les entreprises visées et causerait une grande confusion dans la population d'un océan à l'autre. Par conséquent, certai-


1338

nes dispositions de droits acquis ont été incluses, et les motions nos 4 et 8 viennent les clarifier davantage.

Je suis certain que le député d'en face va maintenant prendre la parole pour s'engager dans un débat et commencer à parler de l'objectif général du projet de loi; ce serait certes intéressant, mais nous en avons discuté lors des autres étapes.

(1100)

Je vois que nous avons un troisième groupe de résolutions que les députés d'en face viennent tout à coup de présenter. Tout ce que le député a dit à propos des motions du gouvernement qu'il a reçues à la dernière minute et qu'il n'a pas eu le temps d'examiner vaut aussi pour les siennes. Les motions nos 11, 12 et 13 sont groupées aux fins du débat.

Pour éviter d'enfreindre la règle de la pertinence, je ne parlerai toutefois pas des motions du député avant que la Chambre ne soit rendue à cette étape.

[Français]

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, dans le groupe no 2, deux motions ont été ajoutées. À la motion no 4, le ministre des Finances propose:

Que l'article 70 de la version française du projet de loi C-15 soit modifié par adjonction, après la ligne 2, page 62, de ce qui suit:
«(5) les paragraphes (2) à (4) ne s'appliquent pas à une personne ou entité qui, à leur entrée en vigueur, exploite une entreprise au Canada sous une raison sociale prohibée.»
Le secrétaire parlementaire nous parle d'ajout d'une technicalité.

Également, à la motion no 8, le ministre des Finances nous propose:

Que l'article 115 du projet de loi C-15 soit modifié par adjonction, après la ligne 33, page 88, de ce qui suit:
«(5) Les paragraphes (2) à (4) ne s'appliquent pas à une personne ou entité qui, à leur entrée en vigueur, exploite une entreprise au Canada sous une raison sociale prohibée.»
C'est la même chose. Encore une fois, le secrétaire parlementaire nous parle d'ajout de technicalités.

Monsieur le Président, j'aimerais, par votre entremise, demander au secrétaire parlementaire: Pourquoi, ce matin, s'être limité à l'ajout de technicalités? Pourquoi ne pas l'avoir fait avant, lors du dépôt, de la présentation du projet de loi C-15? Lors de la première session, ce projet de loi avait été déposé sous l'appellation de projet de loi C-100.

Pourquoi ne pas avoir déposé devant cette Chambre ces prétendues technicalités à ce moment-là, alors que le ministère des Finances a à son service des centaines et des centaines de fonctionnaires? Comment expliquer que le secrétaire parlementaire ou le ministère nous arrive, ce matin, comme le disait mon collègue de Saint-Hyacinthe-Bagot, vers 8 h 30 ou 9 h 00, avec des amendements? En entrant au bureau, ce matin, on nous a apporté ces amendements.

Encore une fois, le gouvernement libéral ne fait pas ses devoirs. Le gouvernement libéral bâcle son travail. Le but n'est pas de mieux renseigner la population, d'apporter des éléments techniques précis pour améliorer, pour bonifier le projet de loi. Le but unique est d'essayer, pour éviter les critiques acerbes de l'opposition officielle, de la déstabiliser à 9 h 15 le matin.

Lorsqu'on doit discuter d'un projet de loi aussi important, on nous arrive soudainement avec dix amendements. Le secrétaire parlementaire, voyant qu'il ne peut répondre aux objections de l'opposition officielle, nous dit, dans un deuxième temps, que ce n'est pas plus important que ça, qu'il ne faut pas se casser la tête avec ça, que ce sont purement des éléments techniques, des technicalités. Pourquoi, à ce moment-là, ne pas les avoir déposés lors du dépôt du projet de loi?

J'aimerais également ajouter que les amendements proposés par les libéraux, encore une fois ce matin, ne répondent aucunement aux demandes répétées du Bloc québécois. Où, dans les motions du deuxième groupe, les motions nos 4 et 8, comme dans les huit motions précédentes, peut-on trouver un allègement à la réglementation gouvernementale? À quel endroit peut-on trouver l'élimination des dédoublements et chevauchements qui, depuis deux ans, sont dénoncés par l'opposition officielle?

L'opposition officielle a demandé, depuis plusieurs mois, de laisser les lois québécoises jouer leur rôle. Encore une fois, le gouvernement fédéral libéral préfère accroître son envahissement dans les champs de juridiction du Québec. En fin de compte, ces deux amendements, comme les huit précédents, ne sont, comme l'a dit mon collègue de Saint-Hyacinthe-Bagot, que cosmétiques.

Mon collègue de Saint-Hyacinthe-Bagot parlait également ce matin des dix commandements de Moïse. Je crois qu'il était très généreux de faire allusion, concernant ces dix amendements, aux dix commandements de Moïse parce qu'au moins, dans les dix commandements de Moïse, il y avait une très grande sagesse. Je ne vois nulle trace de sagesse, de sagacité ou de lumière dans les amendements du secrétaire parlementaire. Je pense que si le secrétaire parlementaire avait un minimum de décence, il retirerait ces dix amendements.

[Traduction]

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, je trouve que c'est une bien étrange interprétation du fonctionnement de la démocratie. Cela témoigne d'un manque de compréhension du degré de complexité de certaines des questions techniques liées aux projets de loi financiers de ce genre.

Ce projet de loi comporte nombre de lacunes, mais on le critique en disant que le gouvernement s'est montré disposé à répondre aux préoccupations publiques au sujet d'une proposition. À mon avis, cela montre que le gouvernement est à l'écoute. Nous vivons dans une société qui tient compte des gens touchés plus particulièrement


1339

par la loi. Je félicite le gouvernement d'avoir apporté ces modifications.

Ce n'est pas un très bon projet de loi. Toutefois, en ce qui touche ces deux articles, je félicite le gouvernement d'avoir fait ce qu'il a fait. L'enregistrement de noms déjà enregistrés était matière à contestation. Nous en avons entendu parler au Comité des finances et je suis convaincu que c'est une bonne mesure. C'est pourquoi le Parti réformiste appuiera les deux propositions d'amendement figurant au groupe no 2.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est reporté. Le résultat de ce vote s'appliquera aussi à la motion no 8.

(1105)

[Français]

Nous allons procéder maintenant au groupe no 3, soit les motions nos 11, 12 et 13.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ) propose:

Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-15, à l'annexe, par substitution, aux lignes 7 et 8, page 125, de ce qui suit:
«règlement ou la compensation des opérations utilisant des de-».
Motion no 12
Qu'on modifie le projet de loi C-15, à l'annexe, par adjonction, après la ligne 21, page 127, de ce qui suit:
«(2.1) Nulle directive ne peut être prise en vertu du présent article à l'égard d'un établissement participant qui est membre d'un système de compensation et de règlement d'opérations sur valeurs mobilières par des chambres de compensation.»
Motion no 13
Qu'on modifie le projet de loi C-15, à l'annexe, par adjonction, après la ligne 2, page 136, de ce qui suit:
«PARTIE III
SYSTÈMES DE COMPENSATION ET DE RÈGLEMENT
D'OPÉRATIONS SUR VALEURS MOBILIÈRES
24. Les articles 1 à 23 s'appliquent aux systèmes de compensation et de règlement d'opérations sur valeurs mobilières et aux chambres de compensation exploitant un tel système dans la mesure où ils pratiquent le règlement ou la compensation des paiements.
25. Les pouvoirs définis par la présente loi ne peuvent être exercés, à l'égard d'un système de compensation et de règlement d'opérations sur valeurs mobilières ou d'une chambre de compensation exploitant un tel système, qu'en vue de contrôler le fonctionnement du règlement et de la compensation des paiements et de prévenir le risque systémique afférent uniquement au règlement et à la compensation des paiements.»
-Monsieur le Président, je suis très heureux de débattre de vrais amendements après avoir passé une série d'amendements cosmétiques, du maquillage aussi.

Comme je le précisais dans ma première intervention, ce projet de loi empiète de façon systématique dans un champ exclusif, un champ de juridiction exclusif aux provinces, qu'on appelle le domaine des valeurs mobilières. Ce champ est très bien délimité dans la Constitution canadienne, à l'article 92.13 sur la propriété des droits civils dans la province et à l'article 92.16 qui traite généralement de toutes les matières d'une nature purement locale ou privée dans la province, qui sont de juridiction provinciale.

Nous avons combattu le premier projet de loi, le projet de loi C-100 sur cette base d'envahissement, de duplication et de chevauchements créés délibérément par le gouvernement libéral. Les trois amendements que nous proposons, n'en déplaise aux réformistes qui, rappelons-le, n'étaient pas là pour faire leur job, au cours de la dernière session, pour critiquer le projet et examiner le projet de loi C-100, les trois amendements proposés ont trait au système de compensation et de règlement des paiements. Ils visent justement à écarter le gouvernement fédéral de ce champ de juridiction exclusif aux provinces.

(1110)

Autrement dit, par l'entremise de ces trois amendements, nous disons clairement et simplement, dans la mesure où nous pouvons le faire dans des termes juridiques, au gouvernement fédéral de se mêler de ses affaires.

Le premier amendement retire, en fait, les mots «valeurs mobilières» de l'article original, de sorte que la juridiction fédérale ne s'étendent pas à ce champ de juridiction provinciale. Le deuxième amendement, l'amendement no 12, vise à soustraire des directives fédérales des institutions participant à des chambres de compensation pour valeurs mobilières.

La modification précédente enlevait au gouvernement fédéral le pouvoir de créer une chambre de compensation, et cette modification-ci, la deuxième modification, lui enlève le pouvoir de réglementer les chambres de compensation provinciales. C'est tout à fait ce que nous recherchons, épurer ce projet de loi de tout envahissement dans un champ de juridiction provinciale.

Le troisième amendement concerne le système de compensation et de règlement d'opération sur des valeurs mobilières. Cet amende-


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ment limite le pouvoir de réglementation fédéral aux activités de règlements de paiements et non aux institutions susceptibles de le pratiquer.

De plus, l'intervention fédérale ne peut se faire que pour des raisons se rattachant à la gestion du risque systémique, comme le prétendait le secrétaire aux institutions financières et le ministre des Finances, et pour aucune autre raison. C'est à cela que nous nous sommes attaqués depuis le début, lorsque nous avons argumenté en défaveur du projet de loi. C'est ça qui est devenu le projet de loi C-15.

Alors voici pour les amendements, et j'invite les députés de cette Chambre, des trois partis, à appuyer ces amendements qui seraient bénéfiques, dans les relations fédérales-provinciales en particulier.

[Traduction]

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Ça par exemple, monsieur le Président, c'est incroyable. Lorsque nous avons discuté des huit premières motions regroupées par la présidence, le député de Saint-Hyacinthe-Bagot s'est indigné que l'on ait proposé des amendements à la dernière minute car cela ne laissait pas le temps de les étudier.

Ce raisonnement vaut ici aussi. Le député le sait et il a suivi exactement les mêmes règles que nous en présentant des propres propositions d'amendement très complexes sans nous avoir donné le temps de les comprendre. Plus tôt, il accusait le gouvernement, mais pour expliquer ses trois propositions, regroupées pour le débat, il n'a parlé que trois minutes. J'imagine que l'on pourrait dire ici que ce qui est bon pour l'un l'est aussi pour l'autre. Me suis-je trompé?

Une voix: Ne fais pas à un autre ce que tu ne voudrais pas que l'on te fasse.

M. Campbell: Nous avons beaucoup de références aux Dix Commandements, mais je ne me lancerai pas dans cette voie. Heureusement pour le secrétaire d'État aux Institutions financières internationales il n'a pas à s'inquiéter de religion en plus de toutes ses autres préoccupations.

Mais parlons des questions de fond. Je voudrais répondre sur le fond aux trois propositions d'amendement de l'opposition, qui font partie de ce groupe et que nous n'appuierons pas.

Si les systèmes de compensation et de règlement ne sont pas soigneusement conçus, ils peuvent être à l'origine d'un grave risque systémique, c'est-à-dire du risque que les problèmes d'une institution financière s'étendent à d'autres et déstabilisent l'ensemble du système. Dans un marché des services financiers en pleine mondialisation, ce risque existe. Si nos systèmes ne sont pas correctement conçus, les problèmes qui surviennent ailleurs dans le monde pourraient s'étendre au système financier canadien.

Le député peut bien tempêter, mais nous parlons d'un rôle qui convient tout à fait à une banque centrale et pas à un organisme de réglementation des valeurs mobilières.

Le projet de loi C-15 établit un cadre de protection adéquate contre les risques, un cadre bien conçu et concurrentiel pour ce qui est de la marge et des coûts de la compensation et du règlement. Il permettra aux institutions financières canadiennes de mieux soutenir la concurrence. Le projet de loi sur la compensation et le règlement se tient et vise plusieurs objectifs importants. Il donne explicitement à la Banque du Canada un rôle de surveillance des systèmes de compensation et de règlement qui présentent un risque systémique. La banque joue déjà un rôle clé mais informel à cet égard.

Le projet de loi donne officiellement à la banque la responsabilité de surveiller ces systèmes comme cela se fait partout dans le monde. Toutefois, il vise à superviser seulement ceux qui posent un risque au système financier. Il ne vise pas à réglementer les marchés financiers connexes. C'est à juste titre qu'il rentre dans le cadre de compétence du gouvernement fédéral. Ce qui est tout aussi important, c'est qu'il répond à la nécessité de garantir la sécurité et la solidité de notre système financier et à ce que tous les Canadiens attendent du gouvernement fédéral. Ce rôle de supervision de la banque est, comme je l'ai dit plus tôt, semblable au rôle que jouent les banques centrales ailleurs.

(1115)

Deuxièmement, le projet de loi C-15 donne à la Banque du Canada les pouvoirs dont elle a besoin pour participer aux systèmes de compensation et contribuer à leur fonctionnement sûr, efficace et rentable. Ces pouvoirs seront importants dans le contexte du système de transfert de sommes importantes que le secteur financier est en train de planifier avec la Banque du Canada. Ce système, qui facilitera le transfert électronique de sommes importantes, remplacera le système actuel sur papier.

Dans le moment, la Banque du Canada n'a pas les pouvoirs nécessaires pour envoyer et recevoir des paiements sur ce qui s'appellera le STSI. Le projet de loi C-15 lui donne les pouvoirs qui lui permettront de contribuer au fonctionnement de ce système de bien des façons.

Il y a un niveau de contrôle du risque qui permettra au Canada de satisfaire à des normes internationales et de contribuer à la compétitivité de nos institutions financières à l'échelle mondiale. Cela renforce aussi ce que je crois être le rôle important du gouvernement, qui est d'établir un cadre donnant aux institutions financières la capacité et la motivation de reconnaître et de contrôler les risques auxquels elles doivent faire face.

Un autre exemple de système de compensation et de règlement qui bénéficiera directement de ce meilleur contrôle du risque est le nouveau système de compensation des valeurs mobilières de l'État. Ce système, qui a été mis sur pied par la Caisse canadienne de dépôt de valeurs, contient des mécanismes de contrôle du risque qui sont acceptés par les autorités fédérales et provinciales. Le fait de placer toutes les valeurs mobilières du gouvernement sur ce système réduira les coûts pour le gouvernement en tant qu'émetteur ainsi que pour les autres participants au système.

La troisième fonction majeure, et la dernière dont je veux parler relativement à cet important projet de loi, consiste à renforcer les modalités d'application des conventions de positionnement en vertu de la législation sur la faillite et l'insolvabilité. Les systèmes de


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compensation dépendent en grande partie du positionnement des paiements pour réduire le risque de crédit entre les participants et pour réduire les risques systémiques. Sans une certitude légale, les conventions de positionnement peuvent être remises en question lorsqu'elles sont le plus nécessaire, au moment où un participant fait faillite.

La confirmation que les conventions de positionnement sont légalement valables et non vendables dans le cas d'une liquidation ou d'une restructuration constitue un élément essentiel de ce projet de loi.

Mon temps de parole est presque épuisé. J'insiste sur le fait que le projet de loi vise en grande partie à assurer l'efficacité et la stabilité du système financier, qu'il contribue à notre compétitivité internationale et nous aidera à respecter nos obligations internationales du point de vue de la qualité et de la sécurité du système.

Aussi, j'exhorte les députés à rejeter les amendements irréfléchis proposés par l'opposition.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, je ne voudrais pas retarder les travaux de la Chambre, mais j'aimerais ajouter quelques précisions aux remarques que vient de faire le secrétaire parlementaire.

La plupart des gens au Canada ne comprennent pas vraiment ce qui se passe quand ils rédigent un chèque et l'envoient à un oncle dans une autre province; ils ne comprennent pas vraiment comment la banque obtient l'argent et comment l'argent est transféré. Tout se fait sur un système comparable à une autoroute qui relie toutes les banques, les courtiers et autres qui ont y ont accès. Les débits et les crédits sont transmis à la vitesse de signaux électroniques.

Les arrangements qui dirigent ce trafic doivent être mis à jour régulièrement compte tenu des innovations technologiques, de l'évolution de la situation économique et de la mise au point de nouveaux instruments, de l'apparition de problèmes comme la faillite, etc. Ces progrès se constatent dans le reste du monde et si le Canada veut être compétitif, il doit suivre le mouvement.

Essentiellement, nous établissons des règles et des normes à l'intention des véhicules qui empruntent cette route. Nous établissons des signaux afin de diriger le trafic. Il est clair que ce qui se passe au bout de cette autoroute n'est influencé d'aucune façon par les règles qui régissent le trafic sur l'autoroute. Le système tout entier est comparable à un bien public; il doit être protégé.

(1120)

Le Bloc prétend que l'établissement de règles destinées à accroître l'efficacité de cette autoroute et la transmission d'informations interfère avec la souveraineté nationale et empiète sur les droits des gouvernements provinciaux. Je ne crois pas que ce soit juste. C'est comme avoir une autoroute qui traverserait le pays d'un bout à l'autre. Avoir une autoroute où le trafic se fait de façon efficace et en toute sécurité ne gêne pas la culture qui se développe aux deux bouts de cet autoroute.

Pareillement, je pense que les institutions financières qui se développent dans chaque province ont la possibilité de préserver cette caractéristique locale d'être réglementées, d'être encouragées. Tout cela dépend du gouvernement provincial. Ce projet de loi ne traite pas de ces questions et je serai le premier à m'opposer à tout empiétement du gouvernement fédéral sur les droits des provinces à l'égard de ce qui se passe dans le secteur financier au bout de cette autoroute et à tous ses points d'accès pour effectuer les opérations de compensation entre les institutions financières au Canada.

Le Parti réformiste s'oppose donc à ces amendements et votera en conséquence lorsqu'ils seront mis aux voix.

[Français]

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire a reproché à mon collègue du Bloc québécois de n'avoir parlé que trois minutes sur nos trois amendements très techniques, déposés comme les siens, à la dernière minute ce matin. Je vais tâcher, au cours des dix prochaines minutes, d'apporter plus d'éclairage au secrétaire parlementaire pour qu'il puisse mieux comprendre nos trois amendements.

Le projet de loi C-15 qui est devant cette Chambre aujourd'hui est en quelque sorte un bill omnibus fait de mesures éparses qui n'ont pour seul objectif que de renforcer la surveillance et la réglementation du champ des services financiers au Canada. Dans son ensemble, le projet modifie plusieurs lois sur les services financiers et abolit la Loi sur les sociétés d'investissement.

Nous ne nous opposons pas au principe du projet de loi, mais à certaines mesures proposées, car ces mesures empiètent carrément dans des champs de juridiction provinciaux. Afin d'éliminer ces empiétements dans les champs des provinces, le Bloc québécois propose donc trois amendements au projet de loi.

Les amendements proposés sont liés au système de compensation et de règlement des paiements. Ils visent à écarter le gouvernement fédéral de ce champ de juridiction provincial. Le premier amendement propose:

Qu'on modifie le projet de loi C-15, à l'annexe, par substitution, aux lignes 7 et 8, page 125, de ce qui suit: «règlement ou la compensation des opérations utilisant des devises étrangères»
Cet amendement retire donc les mots «valeurs mobilières» de l'article original, de sorte que la juridiction fédérale ne s'étende pas à ce champ de juridiction provinciale.

Le deuxième amendement vise, pour sa part, à modifier le projet de loi C-15, à l'annexe également, en ajoutant, après la ligne 21 de la page 127, ce qui suit:

«(2.1) Nulle directive ne peut être prise en vertu du présent article à l'égard d'un établissement participant qui est membre d'un système de compensation et de règlement d'opérations sur valeurs mobilières par des chambres de compensation.»
Cet amendement de nature technique a pour but de soustraire des directives fédérales des institutions participant à des chambres de compensation pour valeurs mobilières. Le premier amendement, en fait, enlève au gouvernement fédéral le pouvoir de créer une cham-


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bre de compensation, et le second amendement lui enlève le pouvoir de réglementer les chambres de compensation provinciales.

Le troisième amendement modifie le projet de loi C-15, à l'annexe, en ajoutant après la ligne 2, page 136, une Partie III où l'on précise les champs d'application d'un système de compensation et de règlements d'opération sur valeurs mobilières et où on en restreint également le pouvoir de réglementation. Cet amendement limite en fait le pouvoir de réglementation fédérale aux activités de règlement de paiements.

(1125)

En outre, l'intervention fédérale ne peut se faire que strictement pour des raisons se rattachant à la gestion du risque systémique et pour aucune autre raison. Ce dernier amendement vise donc un encadrement beaucoup plus serré de l'activité du système de compensation et de règlement d'opération sur valeurs mobilières.

Pourquoi avoir présenté ces trois amendements? Parce que ce projet de loi C-15 apporte des modifications qui, du point de vue des provinces, dans notre cas du point de vue du Québec, nous apparaissent totalement inadmissibles.

La plus importante modification propose l'élargissement du mécanisme des paiements de la Banque du Canada au domaine des valeurs mobilières. Cette mesure dédouble les mécanismes de compensation déjà encadrés par la Commission des valeurs mobilières du Québec et permet au gouvernement fédéral de s'immiscer dans la réglementation des valeurs mobilières, qui est un champ de compétence provinciale. Nous nous opposons donc fortement, monsieur le Président.

Également dans le projet de loi C-15, la Société d'assurance-dépôts du Canada pourrait fixer ses primes de participation en fonction du risque que représente une institution financière, y compris les institutions à charte québécoise qui sont déjà réglementées par la Régie d'assurance-dépôt du Québec, où le critère de participation utilisé est la valeur des dépôts.

Il y aurait donc deux normes d'évaluation, et celle basée sur le risque pourrait désavantager les institutions québécoises en raison de leur petite taille relative-en effet, les entreprises de grande taille sont souvent considérées comme moins risquées-et en raison du fait que le Québec est doté de son propre régime d'assurance-dépôts dont les primes ne sont pas liées au risque.

Une troisième modification importante, le surintendant aux institutions financières aurait des pouvoirs accrus lui permettant de liquider des institutions à charte québécoise. Que de conflits en perspective entre les diverses instances provinciales et fédérales à ce chapitre.

Le projet de loi C-15 modifie neuf lois importantes actuellement en vigueur: les lois sur les institutions financières (banques, compagnies de fiducie et de prêt, compagnies d'assurances et également associations sur les coopératives de crédit), les lois sur les liquidations et les restructurations, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur l'Association canadienne des paiements et la Loi sur les sociétés d'investissement qui disparaît.

Le Québec est déjà présent dans le système de compensation via la Commission québécoise des valeurs mobilières et l'Inspecteur général des institutions financières. Le projet de loi C-15, par son annexe I, créera de nouveaux chevauchements en soumettant carrément les institutions financières du Québec à des directives et des ordonnances de la Banque du Canada.

Le projet de loi C-15 utilise le prétexte du contrôle du risque systémique pour permettre à Ottawa de s'ingérer dans ce domaine. Le gouverneur de la Banque du Canada se réserve le droit d'émettre des directives non seulement aux chambres de compensation, mais également aux institutions financières participantes, et ce, sans égard à leur charte.

Des institutions essentiellement québécoises, comme la Fiducie Desjardins, la firme de courtage Lévesque, Beaubien, Geoffrion, et plusieurs autres, pourront être directement touchées par les directives et ordonnances de la Banque du Canada.

Par ce projet de loi C-15, le gouvernement fédéral démontre plus une préoccupation de s'arroger de nouveaux pouvoirs que de s'assurer de la mobilité des institutions financières et de la sécurité des épargnants.

Ce projet de loi illustre à nouveau la dynamique centralisatrice d'Ottawa. Le projet de loi C-15 constitue une ingérence inacceptable dans le secteur des valeurs mobilières que même Daniel Johnson fils avait dénoncée, à titre de premier ministre du Québec en février 1994, ce à quoi faisait allusion mon collègue du Bloc québécois ce matin.

Ces nouvelles prérogatives du gouverneur de la Banque du Canada vont donc carrément à l'encontre d'une autre demande traditionnelle du Québec. Même au-delà des domaines de juridiction provinciale, les institutions financières du Québec et les épargnants seront victimes du double encadrement qu'Ottawa entend imposer. Il en résultera des coûts supplémentaires, des inefficacités administratives et un manque de cohérence dans tout le système.

(1130)

En guise de conclusion, afin de minimiser tous ces risques dans un système qui est déjà trop lourd, trop réglementé, à une époque où l'équilibre budgétaire passe par moins de règlements et moins de ressources disponibles pour appliquer ces règlements, à une époque où il faut donner une bouffée d'oxygène à tous les contribuables, plus de marge de manoeuvre à nos institutions financières et à l'ensemble de nos entreprises au Canada et au Québec, j'inviterais les députés de cette Chambre, en toute bonne foi, et le secrétaire parlementaire également, à appuyer les trois amendements déposés par le Bloc québécois ce matin.

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais également intervenir sur les trois amendements proposés par le Bloc québécois. On sait que le projet de loi C-15, qui est déposé aujourd'hui, même si ce n'est pas un projet de loi majeur comme les autres projets de loi déposés en Chambre, constitue quand même un ensemble de modifications à toute une série de lois existantes, comme mon collègue le faisait remarquer.


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Même si nous n'avons pas d'opposition de principe à ce projet de loi, qui vise en fait à augmenter la réglementation des services financiers au Canada, nous avons cependant énormément d'appréhensions, et les amendements que nous déposons aujourd'hui en Chambre reflètent exactement ces appréhensions.

Ce projet de loi ne constitue pas la révision des lois des institutions financières, mais cette révision viendra plus tard, on le sait, car un livre blanc est en cours. Nous considérons que ce projet de loi, tel qu'il est déposé aujourd'hui, constitue, dans les faits, un pas en avant. C'est la préparation du terrain pour la prise de contrôle des valeurs mobilières au Canada.

Quels sont nos amendements? Mon collègue en a lu quelques-uns et je les répète très brièvement. Au premier amendement, dans les faits, on enlève les mots «valeurs mobilières» à un texte. Le fait d'enlever ces mots fait en sorte que nous retirons de la juridiction fédérale le terme «valeurs mobilières», parce que nous croyons que ce champ de juridiction est strictement provincial et que la loi, telle qu'elle est actuellement, devrait s'appliquer à toute autre chose, mais pas directement aux valeurs mobilières.

Le deuxième amendement en est un qu'on a ajouté et qui vise à soustraire des directives fédérales les institutions participant déjà à des chambres de compensation pour valeurs mobilières. Que va-t-on faire avec ça? Des dédoublements, bien sûr. Cela existe déjà dans les provinces.

Le troisième amendement limite le pouvoir de réglementation fédérale aux activités de règlement de paiements et non aux institutions susceptibles de le pratiquer. Comme mon honorable collègue le soulignait, nous voulons qu'elle se rattache strictement à la gestion du risque systémique et qu'elle ne soit pas employée pour aucune autre considération.

Pourquoi exactement avons-nous déposé ces motions? Je reprends quelques-uns des arguments pour que ce soit bien clair, étant donné que c'est un texte extrêmement technique. Nous assistons actuellement à la préparation, à la mise en oeuvre, à la mise en place d'un système canadien de compensation qui sera chapeauté éventuellement par la Banque du Canada.

Or, et cela fait partie de nos réserves, le Québec exerce déjà une présence dans ce secteur par le biais de la Commission québécoise des valeurs mobilières et l'inspecteur général aux institutions financières, comme les autres provinces. Le projet de loi C-15, par son annexe I, créera de nouveaux chevauchements coûteux, en soumettant les institutions financières du Québec à des directives et à des ordonnances de la Banque du Canada.

Le projet de loi C-15 se sert du prétexte-et on se sert souvent de prétextes, je reviendrai là-dessus à la fin-du contrôle du risque systémique pour permettre à Ottawa de s'ingérer dans ce domaine. Or, le gouverneur de la Banque du Canada a admis, le 20 juin dernier, que ces risques étaient maîtrisés par un contrôle accru du système de transfert des paiements de grande valeur. Également, par l'article 6 à l'annexe I qui mettra en oeuvre le Système canadien de compensation, le gouverneur de la Banque du Canada se réserve le droit d'émettre des directives non seulement aux chambres de compensation, mais également aux institutions financières participantes, et ce, sans égard à leur charte. Ainsi, le projet de loi C-15 permettra au gouverneur d'émettre des directives et des ordonnances à des institutions comme, par exemple, Fiducie Desjardins.

Deuxièmement, ce qu'on fait avec ce projet de loi, on organise des modifications aux prérogatives du Surintendant aux institutions financières et à la Loi sur les liquidations. Le projet de loi C-15 octroie davantage de pouvoirs au Surintendant aux institutions financières et on a souligné, depuis que nous sommes ici, que dans presque tous les projets de loi fédéraux, on concentre toujours davantage de pouvoirs dans les mains de ceux qui l'ont, qu'ils soient ministres ou qu'il s'agisse du Surintendant des institutions financières.

En élargissant les prérogatives du Surintendant aux institutions financières du fédéral, il en résultera des dédoublements coûteux et de l'inefficacité.

(1135)

En effet, au chapitre des institutions à charte québécoises, l'inspecteur général des institutions financières du Québec exerce déjà des contrôles, de sorte que les nouveaux pouvoirs du surintendant fédéral viendront dédoubler ceux qui existent déjà. Ces chevauchements son coûteux pour les contribuables, on le sait, on n'arrête pas d'en parler en Chambre, pour les institutions financières à charte québécoises et aux prises avec des problèmes d'insolvabilité.

Le projet de loi C-15 risque de se traduire par des signaux discordants entre autorités québécoises et autorités fédérales, et l'on parle de cela également depuis le début qu'on est ici en Chambre. À cet égard, rappelons que la concurrence entre les gouvernements ne sera jamais rentable pour la population. La situation dans la formation de la main-d'oeuvre, dont il y a un consensus évident au Québec depuis de très nombreuses années entre tous les intervenants et qui n'est pas encore réglé, il se perd au moins 250 millions par années là-dedans. L'élargissement des prérogatives du surintendant risque également d'entraîner un débat judiciaire opposant Ottawa et Québec, et laissant pour compte les institutions financières en difficulté et les épargnants qui auraient investi de l'argent.

En résumé, si cette loi ne vas pas dans le sens des amendements du Bloc québécois, il y aura, effectivement, et je reprends les deux ou trois thèmes, empiétement des champs de juridiction provinciaux-même les fédéralistes au Québec recommandent que le gouvernement du Canada ne fasse pas cela-il y aura chevauchement et dédoublement coûteux, et il y aura, bien sûr, augmentation de l'inefficacité.

On ne peut que déplorer que dans la plupart des projets de loi déposés en Chambre, on serait toujours en train de dénoncer les mêmes choses, et le gouvernement se sert de toutes sortes de moyens pour tenter de centraliser toujours davantage. On invoque toutes sortes de choses: la mondialisation des marchés, les risques systémiques, les compétitions internationales. On vient d'invoquer l'inventivité technologique, donc pour des raisons technologiques maintenant on va être obligé de centraliser toujours davantage, et c'est extrêmement dommage qu'au moment où le gouvernement tient un discours public où il annonce qu'il est possible de s'entendre avec les provinces par des moyens de règlement, dans les lois on fait exactement le contraire. On centralise toujours davantage à Ottawa.


1344

En terminant, mon honorable collègue du Parti réformiste disait que toute cette autoroute qui est en train de se construire demande à être réglementée de façon de plus en plus précise, et de plus en plus centralisée, il disait qu'aux deux bouts de cette autoroute, la culture ne sera pas dérangée. La culture commence par le plein contrôle de tous ses leviers économiques, et si le Québec se laisse vider comme ça à chaque projet de loi qui se passe en Chambre, s'il n'y a pas des mécanismes de défense pour défendre les positions traditionnelles du Québec, ne serait-ce qu'en fonction de la constitution, alors la culture, éventuellement, va disparaître.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): La question porte sur la motion no 11. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est différé. Le vote par appel nominal s'appliquera également à la motion no 13.

La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 12.

(1140)

Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

La Chambre abordera maintenant les votes par appel nominal différés à l'étape du rapport du projet de loi.

Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est reporté au lundi 15 avril, à 18 h 30, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus 15 minutes.

* * *

[Traduction]

LOI SUR LE MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-11, Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines et modifiant ou abrogeant certaines lois, dont un comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le président suppléant (M. Kilger): Il y a 17 motions d'amendement inscrites au Feuilleton à l'étape du rapport du projet de loi C-11, Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines et modifiant ou abrogeant certaines lois. Aux fins du débat, les motions seront groupées de la façon suivante:

[Français]

Groupe no 1, les motions nos 1, 2, 4 et 6.

[Traduction]

Groupe no 2, la motion no 3.

[Français]

Groupe no 3, la motion no 5.

[Traduction]

Groupe no 4, les motions nos 7, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 17.

[Français]

Groupe no 5, les motions nos 9 et 10.

[Traduction]

Les députés peuvent consulter les documents à la table du greffier pour savoir comment s'appliqueront les résultats des votes pour chacun des groupes de motions. La présidence rappellera à la Chambre au moment du vote la manière dont le résultat du vote s'appliquera aux différentes motions. Le débat porte maintenant sur les motions nos 1, 2, 4 et 6.

MOTIONS D'AMENDEMENT

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.) propose:

Motion no 1
Qu'on modifie le projet de loi C-11 en supprimant l'article 4.
Motion no 2

1345

Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 5, en supprimant les lignes 6 à 9, page 3.
Motion no 4
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 21, par substitution, aux lignes 12 à 15, page 6, de ce qui suit:
«21. Le ministre peut déléguer ses attributions, à titre individuel ou collectif, à la Commission ou à tout autre organisme ou toute personne qu'il désigne.»
Motion no 6
Qu'on modifie le projet de loi C-11 en supprimant l'article 37.
-Monsieur le Président, j'aborderai les amendements que je propose au projet de loi C-11 dans l'ordre où ils ont été groupés, en commençant par le groupe no 1. Les amendements proposés par le Parti réformiste, soit les motions nos 1, 2, 4 et 6, traitent tous du nouveau poste de ministre du Travail et du ministère créé en conséquence.

En ce qui concerne la motion no 1 du Parti réformiste, l'article 4 du projet de loi autorise le premier ministre à nommer un ministre du Travail. Nous nous opposons à cette disposition. La seule raison pourquoi nous avons un ministre du Travail, c'est que le premier ministre devait trouver une place au sein du Cabinet pour le député de Saint-Henri-Westmount.

Le gouvernement n'a pas jugé nécessaire d'avoir un ministre du Travail durant les deux premières années de son mandat. En effet, il n'y a aucune nécessité de créer ce poste. Cette disposition laisse à la discrétion du premier ministre la décision de nommer ou non un titulaire à ce poste. Franchement, ce nouveau ministère est coûteux et inutile. Les responsabilités confiées à ce ministre pourraient être assumées par le ministre du Développement des ressources humaines.

(1145)

Je sais que par le passé il y a déjà eu des ministères du travail, mais à l'époque le Cabinet était énorme. De nos jours, les Canadiens veulent un gouvernement moins important, pas plus important.

La motion no 2 porte sur le paragraphe 3 de l'article 5. Notre amendement vise à supprimer le paragraphe 3. Ce paragraphe prévoit la nomination d'un sous-ministre du Travail, poste inutile si un ministre du Travail n'est pas nécessaire.

Passons à l'article 21, qui fait l'objet de la motion no 4 du groupe no 1. L'amendement supprimerait toute mention du ministre du Travail dans cet article. Il n'est absolument pas nécessaire de donner au ministre du Travail le pouvoir d'agir au nom du ministre du Développement des ressources humaines.

Je propose que l'article 21 soit modifié de façon à se présenter comme suit: «Le ministre peut déléguer ses attributions, à titre individuel ou collectif, à la Commission ou à tout autre organisme ou toute personne qu'il désigne.»

Comme avec la motion no 1, nous sommes opposés à la création d'un ministère du Travail, de ce fait nous nous opposons à ce que des pouvoirs soient délégués à un ministre du Travail.

Le groupe no 1 qui contient la motion no 6. L'article proposé prévoit la marche à suivre au cas où il ne serait pas nommé de ministre du Travail. Ses fonctions sont réattribuées conformément à cet article.

Si on n'a pas besoin d'un ministre du Travail, on ne devrait pas avoir besoin de réattribuer explicitement ses responsabilités. Elles devraient tout simplement être absorbées par le ministère sans qu'il en soit fait mention dans la loi d'autorisation.

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais parler un peu du projet de loi C-11 et de ses répercussions sur les programmes du gouvernement en matière de main-d'oeuvre.

J'aborde directement la question, car l'objectif principal des amendements du Parti réformiste est de faire croire que la présence du ministre du Travail est inutile et que son rôle au sein du gouvernement du Canada, ainsi que la vie des travailleurs qui relèvent de la compétence fédérale, ne sont pas importants.

Les députés m'ont probablement entendu dire que ce projet de loi nous permettrait de faire de grands pas dans le dossier de l'emploi et de mieux aider les Canadiens à relever les défis auxquels ils sont confrontés partout au pays. Il réunira les services des ressources humaines de plusieurs ministères sous un même toit, celui du ministère du Développement des ressources humaines.

À la barre de ce nouveau ministère, se trouve le ministre du Développement des ressources humaines, qui en assure la direction. Il peut sembler bizarre pour certains que la présence d'un ministre du Travail soit aussi nécessaire. Après tout, le ministère du Travail est l'un de ceux qui seront intégrés à DRHC.

Examinons un peu les fonctions du ministre du Travail avant de rejeter ou d'accepter les amendements proposés par le Parti réformiste. Ces fonctions sont décrites à l'article 4 du projet de loi: «Il peut être nommé à titre amovible, par commission sous le grand sceau, un ministre du Travail.» Au paragraphe 4(2), le projet de loi dit: «Les attributions du ministre du travail s'étendent d'une façon générale à tous les domaines de compétence du Parlement liés au travail.»

L'une des principales responsabilités du ministre est donc le Code canadien du travail. Le code régit les relations du travail, la santé et la sécurité au travail et les normes de travail, mais uniquement dans les domaines de compétence fédérale.

Le code constitue une part importante du tissu économique du Canada. Il a une incidence sur la vie professionnelle d'un million de Canadiens. Il s'applique aux mécaniciens de chemins de fer, et je dois inclure aussi les chefs de train puisque c'était ma profession antérieurement, aux débardeurs, aux camionneurs et aux manutentionnaires de céréales, aux téléphonistes et aux caissiers et caissières des banques. Ces gens s'adressent à nous pour assurer des relations du travail stables, la santé et la sécurité au travail et des milieux professionnels productifs et justes.


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La mise en application du Code canadien du travail est une responsabilité importante, mais le ministre du Travail administre aussi d'autres lois, notamment la Loi sur le Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail. Ce centre produit et diffuse des renseignements sur la santé et la sécurité au travail et aide à protéger la vie et la santé des travailleurs canadiens.

(1150)

Il y a, en fait, de très nombreuses lois qui relèvent de la responsabilité du ministre du Travail, des lois qui traitent de sécurité, de justice, d'équité et d'autres questions. Toutes relevaient de l'ancien ministère du Travail. Il n'y a pas grand chose qui a changé, le ministre du Travail conserve les mêmes responsabilités, et pourrait même en avoir quelques nouvelles, sauf en ce qui concerne le Programme d'adaptation des travailleurs âgés.

Tout ce que le ministre du Travail a à faire, se trouve dans le cadre d'une organisation restructurée, unifiée et efficace. Cela réduit les frais, sans priver le ministre du Travail des services ou des installations nécessaires pour ces affaires importantes. Il faut se souvenir que ces affaires comprennent le mouvement syndical canadien, les relations de travail, les conditions de travail, l'équité en matière d'emploi pour tous les travailleurs et beaucoup d'autres choses.

Ce serait de grandes responsabilités pour n'importe qui, mais le ministre du Développement des ressources humaines a bien d'autres choses sur son assiette. Par conséquent, il est logique d'avoir une personne qui se consacre entièrement à ces sujets bien définis. Le projet de loi contient les définitions et fixe les distinctions nécessaires.

L'année écoulée a montré qu'il y a plus de travail qu'il n'en faut pour garder un ministre du Travail très occupé. Le ministre travaille en ce moment à l'harmonisation des lois et règlements fédéraux concernant la santé et la sécurité au travail avec ceux des provinces et des territoires. Le ministre a également été très actif dans le domaine des relations industrielles.

En mai dernier, le ministre nommait une commission d'enquête pour étudier les relations du travail dans le domaine des activités portuaires, de la manutention des grains et autres secteurs réglementés au niveau fédéral sur la côte ouest.

En juin, le ministre a créé un groupe de travail pour examiner les parties du Code canadien du travail qui traitent des relations de travail. C'est la partie I, mais le ministre veut également moderniser les deux autres parties du Code et le travail là-dessus continue.

Le ministre examine le programme du travail de sorte qu'il fonctionne mieux et soit plus efficace, tout en restant conforme à l'Accord nord-américain sur la coopération en matière de travail.

Comme les députés le voient, la restructuration n'a pas gêné le programme du travail. Je prétends même qu'elle a redonné de l'énergie à ce programme. Nous avons constaté une excellente continuité entre l'ancien système et le nouveau. Nous avons également vu comment une approche intégrée peut conduire à des améliorations du bien-être économique et social des Canadiens: relations industrielles, création d'emplois et formation. Tous ces sujets sont reliés et tous devraient être considérés dans le même cadre holistique.

La suppression des programmes liés au marché du travail du ministère du Développement des ressources humaines serait une très grave erreur. Après tout, le ministère du Développement des ressources humaines existe depuis 1993 et ça marche. Nous savons que les programmes liés au marché du travail, ça marche aussi. Le ministère réalise des économies. Il offre une vision cohérente des besoins du Canada en ressources humaines. À une époque où les technologies changent presque toutes nos façons de faire, ce genre de vision nous est plus que jamais nécessaire.

Quand j'invite mes collègues à appuyer ce projet de loi, je ne leur demande pas de sauter dans l'inconnu. Je leur demande plutôt de croire à l'évidence. Je leur demande de comprendre l'importance d'un ministre du Travail dans le tableau d'ensemble.

C'est un argument très spécieux que le Parti réformiste avance quand il dit que le gouvernement a été sans ministre du Travail pendant les deux premières années pour des raisons politiques. Pour ma part, j'estime que, au bout de deux ans, le gouvernement s'est rendu compte qu'il avait fait erreur et qu'il avait besoin d'un ministre du Travail parce que le savoir-faire que l'on exige du ministre du Travail est très particulier et que, dans ce domaine, on a constamment besoin d'une personne qui s'occupe d'abord et avant tout des droits des employés fédéraux.

C'est au premier ministre et au nouveau ministre du Travail que nous devons le fait d'être revenu à la situation qui prévalait dans les années 1900, alors que le ministère du Travail figurait parmi les quatre premiers ministères créés au sein du gouvernement. Au fil des ans, nous avons reconnu que le travail est très important. Nous reconnaissons qu'il est très important d'avoir un ministre du Travail.

J'invite donc les députés à rejeter carrément la suggestion de l'opposition que le ministère du Développement des ressources humaines n'en a que faire d'un ministre du Travail.

(1155)

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été forcé d'intervenir sur ce groupe d'amendements quand je me suis rendu compte que quelqu'un voulait éliminer le poste de ministre du Travail.

Je veux parler des remarquables compétences de la personne qui occupe actuellement ce poste. Je suis persuadé qu'elles vont impressionner tous les Canadiens.

Je dois me demander pourquoi quelqu'un voudrait supprimer le poste de ministre responsable des travailleurs. Pourquoi ne voudrions-nous pas d'un ministre du Travail? Examinons la question un instant.

Si on adoptait cet amendement, les travailleurs canadiens ne seraient plus représentés au Cabinet. Imaginez les répercussions de cela. Cette proposition vient des réformistes qui prétendent repré-


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senter la base, être le sel de la terre et défendre les intérêts des travailleurs, des gens ordinaires. Tout dépend de la journée où nous leur parlons. Ils affirment représenter tout un éventail de choses. Au moins, de temps à autre, ils prétendent être le parti du Canadien moyen.

Que demandent aujourd'hui ces députés à la Chambre? Ils veulent qu'on supprime le poste de ministre responsable des travailleurs, la personne qui siège au Cabinet pour les représenter. J'espère que, au cours de la prochaine campagne électorale, tous les travailleurs obtiendront une copie de cet amendement et qu'on le distribuera le plus largement possible.

Qu'une personne soit syndiquée ou non, le principe demeure le même. Les réformistes ne veulent plus que les travailleurs soient représentés au Cabinet. Que les gens travaillent pour une compagnie de chemin de fer relevant de la compétence du gouvernement fédéral, un aéroport, une station de télévision, une station de radio, une société d'État, à n'importe quel poste, le gouvernement fédéral ou le syndicat du blé, le député de Kenora n'est pas sans savoir qu'ils relèvent de la compétence du gouvernement fédéral et non des assemblées législatives provinciales. Le ministre du Travail est leur représentant au Cabinet.

Je sais que la députée ne peut intervenir à nouveau sur ses amendements, mais peut-être que d'autres membres de son caucus qui ont participé à la rédaction de ces amendements peuvent préciser à la Chambre pourquoi il est souhaitable et nécessaire d'abolir le poste de ministre du Travail, la personne chargée de représenter les travailleurs au Cabinet. J'ai du mal à accepter cela.

Les réformistes veulent également supprimer la disposition donnant au Cabinet la possibilité de décider d'avoir un sous-ministre du Travail. Bien entendu, c'est optionnel. Ce n'est pas obligatoire. C'est une option qui s'offre au gouvernement. Les réformistes veulent restreindre ou supprimer cette option, en plus d'abolir le poste de ministre.

J'ignore combien de temps le Parti réformiste a réfléchi à tout cela. Je suppose qu'il y a beaucoup d'improvisation dans leur discours. Je le dis en toute déférence. Je demande à tous les députés pourquoi on voudrait éliminer le poste de ministre du Travail et priver les travailleurs du Canada d'une voix au Cabinet.

[Français]

Je me demande si les travailleurs et les travailleuses d'un bout à l'autre du pays qui ont voté, lors des élections partielles, il y a quelques jours, savaient que le Parti réformiste voulait retirer de la table du Cabinet leurs représentants. Et ayant pris connaissance de ce fait-ils sont en train d'en prendre connaissance par le fait qu'ils vont sans doute être au courant des amendements dont nous discutons aujourd'hui-je me demande s'ils seraient, le peu d'entre eux qui l'étaient, tentés de voter à nouveau pour le Parti réformiste? Voudraient-il voter pour eux, sachant que leurs représentants à la table du Cabinet disparaîtraient, s'évaporeraient-imaginez-vous faire disparaître l'honorable député de Saint-Léonard, pas lui-même en personne, mais en tout cas son poste? On voudrait faire disparaître le ministre du Travail du Cabinet et qu'il ne représente personne.

(1200)

Les travailleurs ne seraient représentés par personne. Zip, zéro, selon le Parti réformiste. Est-ce que ça a du bon sens, comme l'honorable député le dit? C'est épouvantable.

[Traduction]

Prenons un instant pour parler de la personne extrêmement compétente qui occupe actuellement ce poste, le député de Saint-Léonard.

[Français]

L'honorable député de Saint-Léonard était, jusqu'à récemment, secrétaire d'État aux affaires parlementaires. C'est un député d'une très longue expérience. Il a fait ses études à l'Université Sir George Williams et il a également fait carrière dans le domaine de la comptabilité. Il est comptable agréé, il a une carrière politique très élégante et intéressante. Il a été conseiller scolaire, il a été président d'un très grand conseil scolaire au pays. Il a été élu député fédéral en 1984, réélu en 1988 et réélu en 1993. Et on voudrait faire disparaître cette personne du Conseil des ministres. Comme je l'ai dit tout à l'heure, on ne veut pas faire disparaître le député lui-même, mais sa présence au Cabinet.

J'entends certains députés d'en face chahuter et j'ai presque envie de le faire moi-même face à cette proposition du Parti réformiste de vouloir faire disparaître le député de Saint-Léonard du Cabinet. Non, ça ne se fait pas, et ça ne se fera pas, heureusement, parce que les travailleurs et les travailleuses du Canada, quand ils entendront dire, plus tard aujourd'hui ou demain, que les députés réformistes veulent faire disparaître le poste de ministre du Travail, ils et elles rappelleront à l'ordre les députés réformistes.

Quand les députés réformistes prendront l'avion pour se rendre chez eux, cet après-midi, demain ou je ne sais pas quand, je suis sûr que les employés des sociétés aériennes les accueilleront peut-être un peu moins chaleureusement lorsqu'ils monteront à bord de l'avion, sachant qu'on voulait faire disparaître leur représentant au Conseil des ministres.

Voilà ce qu'on veut faire au sein du Parti réformiste. C'est un scandale. Je vous le dis, c'est un scandale. D'un bout à l'autre du pays, les gens se révolteront contre cette suggestion, d'autant plus que les Canadiens et Canadiennes connaissent déjà la très grande qualité de l'individu qui détient le poste, le député de Saint-Léonard, avec ses très bonnes qualifications et son élégance. Ce grand orateur de la Chambre des communes, ce grand défenseur des travailleurs, on voudrait l'empêcher de siéger au Cabinet. Imaginez-vous cela. C'est scandaleux, et les Canadiens n'accepteront jamais qu'on fasse disparaître leur représentant au Conseil des ministres, surtout pas quand le représentant est aussi excellent que le député de Saint-Léonard.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, je pense qu'il est important, au moment où on entreprend l'étude des amendements au projet de loi C-11, qu'on rappelle l'objectif, au départ, du projet de loi. Ce projet de loi vise à


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créer un ministère du Développement des ressources humaines. Ça fait déjà trois ans qu'il est opérationnel, en passant, mais le gouvernement a agi sans l'accord du Parlement et là, on essaie de régulariser la situation.

Ce qu'il est important de savoir, c'est que ce projet de loi, en résumé, va concrétiser l'empiétement systématique dans le secteur de l'éducation, de la main-d'oeuvre, et il permettra pour la première fois au fédéral, dans une loi, d'intervenir à volonté dans tous les secteurs qui sont reconnus de juridiction provinciale depuis longtemps.

(1205)

Le deuxième aspect, je pense, c'est qu'il s'agit d'un ministère qui est un monstre bureaucratique qui va regrouper des secteurs tout à fait différents l'un de l'autre. On peut être un peu étonnés par cet amendement proposé par le Parti réformiste, parce que c'est comme concrétiser ce monde bureaucratique que de vouloir éliminer la nomination possible d'un ministre du Travail. Cela me paraît même aller à l'encontre des visions du Parti réformiste, sur une meilleure emprise des politiques des députés, des ministres sur l'action du gouvernement. Un très gros ministère fait que le ministre est souvent très dépendant des positions véhiculées par les hauts fonctionnaires.

On en a la preuve la plus flagrante avec l'obstination actuelle du ministère de vouloir maintenir une réforme de l'assurance-chômage dont personne ne veut au Québec et au Canada. À force de se faire raconter des histoires par les bureaucrates, et peut-être aussi par d'autres groupes de la société qui ont avantage à ce qu'on détériore les conditions de travail des gens, on en arrive à la réalité que nous connaissons aujourd'hui. Il ne faut pas amplifier le problème. Je pense que l'amendement réformiste doit être rejeté.

Essayons de voir un peu ce que cela signifierait de ne plus avoir de ministre du Travail. Souvenons-nous, lorsque des situations d'urgence sont survenues, comme celle qui existait alors qu'on a eu besoin d'une loi spéciale, le gouvernement a jugé qu'on avait besoin d'une loi spéciale dans le domaine du transport ferroviaire. S'il n'y avait pas de ministre spécifique du Travail, cela pourrait créer des situations très difficiles. Le ministre du Développement des ressources humaines ne pourra pas consacrer tout le temps nécessaire à ces activités-là. Il faut qu'il y ait une espèce d'indépendance d'esprit par rapport à des dossiers qui sont très liés.

Au ministère du Développement des ressources humaines, on s'occupe des questions de pensions. Souvent, le ministre du Travail aura à nommer des gens pour les négociations, des conciliateurs qui devront intervenir dans des conflits de travail où ce même genre de situation est en question, et il pourrait être en conflit d'intérêts. C'est donc avantageux que le gouvernement puisse nommer un ministre du Travail.

Une autre raison importante pour les années à venir, c'est qu'il faut absolument que se concrétise la réforme du Code du travail qui est promise depuis si longtemps et sur laquelle le gouvernement piétine. Si on décidait d'aller dans le sens de l'amendement réformiste, ce serait une excuse de plus de la part du gouvernement pour prendre six mois, huit mois, un an ou deux ans de plus pour faire ces modifications au Code du travail. Cependant, si quelqu'un est identifié au Cabinet comme responsable de cela, on pourra lui demander en avril, en mai, en juin si, effectivement, les consultations entreprises vont résulter en une modification du Code du travail. Est-ce que oui ou non, on va avoir finalement une Loi antibriseurs de grève qui couvrira les champs de juridiction fédérale? Il faut un ministre pour pouvoir répondre à la question.

Si quelqu'un d'autre dans le Cabinet est identifié comme responsable, cela passera dans l'ensemble des dossiers et cela paraîtra plus normal qu'il y ait un retard comme c'est le cas présentement dans le cadre des modifications du Code du travail.

Pour donner un autre exemple, au cours des dernières semaines, on a étudié en comité un projet de loi pour permettre aux industries nucléaires d'être régies par le Code du travail des provinces, lorsque c'est pertinent.

S'il n'y avait eu qu'un seul ministre, on aurait eu plus de difficulté à faire accepter les choses, comme par exemple le fait qu'il y ait un sous-comité qui se penche sur ce problème. Si on avait eu besoin d'entendre le ministre en même temps au Comité du développement des ressources humaines et au Comité du travail, s'il n'y avait eu qu'une seule personne, elle n'aurait pu être aux deux endroits en même temps. C'est un exemple pour montrer que cet amendement serait très néfaste aux relations de travail au Québec et au Canada. Je pense qu'on va devoir le rejeter.

Pourquoi le poste de ministre du Travail est-il important? Pourquoi faut-il qu'il puisse continuer et que le gouvernement puisse en nommer un lorsqu'il le juge pertinent? C'est pour que les dossiers aboutissent. Le dossier de la Loi antibriseurs de grève, j'en parlais tout à l'heure, est très important dans notre société. On a deux réalités. Il y a a des travailleurs, des citoyens qui sont couverts par des mesures leur permettant d'avoir des relations de travail beaucoup plus saines, d'égal à égal avec l'employeur. De l'autre côté, il y a des travailleurs qui n'ont aucune protection en ce sens.

Si le gouvernement fédéral ne met pas assez d'énergie, ne démontre pas de façon claire et nette qu'il a la volonté de régler ce problème et qu'il ne le règle pas, cela découlera en une répétition de situations comme celle vécue à la compagnie Ogilvie.

(1210)

Souvenez-vous de cette grève, pas en l'an 1920, mais en 1995, qui faisait s'affronter, sur les lignes de piquetage, des travailleurs, avec des fiers-à-bras engagés par la compagnie pour faire entrer des travailleurs qui n'étaient pas syndiqués. Une situation déplorable-oui, des briseurs de grève-une situation qui fait pourrir les relations de travail et qui, même lorsque l'on signe une convention collective ensuite, prend des mois à se régulariser et souvent ne se replace jamais. Ce genre de situation nuit beaucoup aux relations de travail. Si on n'a pas un ministre du Travail à qui on peut demander de rendre des comptes, on va être dans une situation encore plus difficile pour régler la situation.

Finalement, quel est l'objectif visé par l'amendement du Parti réformiste? Si l'on parlait tout simplement d'économie de coûts, il faudrait s'assurer que les économies ne soient pas des investissements que l'on fait mourir. Si on en vient à la conclusion qu'il n'y a


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plus de ministre du Travail, on va en venir aussi à la conclusion que c'est un secteur qui n'est pas important.

Il y a peut-être une autre raison, par exemple, que le Parti réformiste aurait constaté-et cela est un peu la responsabilité du gouvernement-, c'est qu'après l'arrivée du nouveau ministre du Développement des ressources humaines, la première personne qui a été nommée comme ministre du Travail est une personne, finalement, qui est arrivée de l'extérieur du Cabinet. Elle est venue comme responsable de la question référendaire, et on avait l'impression que le gouvernement avait créé ce poste uniquement pour permettre à cette personne d'entrer au Cabinet.

Cela a vraiment créé une image très négative, et aujourd'hui on a changé de personne responsable. C'est certain que pendant tous les mois où l'ancienne ministre du Travail était en fonction, comme elle a consacré la majorité de son temps à la question référendaire, il y a plusieurs dossiers qui auraient dû évoluer et qui n'ont pas évolué, et possiblement que le Parti réformiste pense que cette situation qui a été vécue il y a plusieurs mois, va se répéter ad nauseam et que l'on n'aura jamais quelqu'un qui va vraiment y consacrer tout son temps.

Je pense que c'est plus par le travail en cette Chambre, par la période des questions et par les critiques que l'on doit faire sur l'efficacité du ministre du Travail que l'on va pouvoir régler cette situation. Si, effectivement, le ministre actuel consacre la majorité de son temps à l'organisation politique parce qu'il est le ministre responsable de l'organisation électorale au Québec pour le Parti libéral du Canada, on pourra juger s'il a consacré plus de temps à l'organisation politique de son parti que pour les travailleurs, et ceux-ci auront à évaluer sa performance et voir s'il a été efficace.

Non seulement les travailleurs, mais les employeurs aussi parce que l'on se rend compte de plus en plus que pour que le Canada et le Québec soient compétitifs, il est important qu'il y ait plus de concertation, de communion de pensées en fonction d'objectifs pour être capables de bien se situer sur les marchés mondiaux et faire face à la compétition.

Pour ces raisons, il m'apparaît que l'amendement du Parti réformiste, même avec la bonne volonté qu'il peut y avoir derrière sa présentation, ne correspond pas aux besoins du Québec et du Canada, parce que l'on a besoin d'un ministre du Travail, et on a besoin, à court terme, d'une réforme du Code du travail et de nouvelles lois contre les briseurs de grève.

[Traduction]

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Madame la Présidente, je viens de Windsor, une ville où le mouvement syndical est très présent. La population de Windsor surveille de près les réformistes. Bien sûr, elle entretient peu d'espoir à leutr égard. Ce parti a reçu environ 4 500 votes dans ma circonscription aux dernières élections. Pourtant, j'ai entendu dire que les réformistes croyaient avoir des chances. Je peux leur garantir que, au cours de la prochaine campagne électorale, les députés libéraux de Windsor n'hésiteront pas à dire aux électeurs que le Parti réformiste cherche à éliminer le seul représentant syndical qui siège au Cabinet.

Personne ne devrait être étonné. Le Parti réformiste s'oppose à la plupart des objectifs du mouvement syndical.

Le mouvement syndical vise à améliorer les conditions des travailleurs et des travailleuses. Le Parti réformiste s'y oppose. Le mouvement syndical demande l'équité en matière d'emploi. Le Parti réformiste s'y oppose. Le mouvement syndical et, en fait, tous les travailleurs et les travailleuses du Canada veulent l'égalité des hommes et des femmes sur le marché du travail. Le Parti réformiste s'y oppose. Le mouvement syndical cherche à assurer une certaine protection en temps de grève, notamment une loi interdisant le recours à des briseurs de grève. Le Parti réformiste s'y oppose.

(1215)

Le Parti réformiste s'oppose non seulement aux questions qui préoccupent particulièrement les travailleurs, mais aussi aux questions d'intérêt général où le mouvement syndical a pris les devants dans notre société. Les réformistes s'opposent à la Loi canadienne sur la santé et aux principes qui y sont énoncés. Ils s'opposent au contrôle des armes à feu, un dossier sur lequel les syndicalistes canadiens se sont prononcés sans la moindre ambiguïté. Ils s'opposent à la réforme du Régime de pensions du Canada; ils veulent éliminer le RPC. Ils s'opposent à la réforme de l'assurance-chômage. Ils s'opposent aux modifications concernant les droits de la personne. Ils s'opposent à la réduction du déficit avec prudence et compassion.

Ces gens, qui sont en majorité des hommes, s'opposent à presque tout ce que le gouvernement tente de faire pour les travailleurs et les travailleuses du Canada. En fait, on devrait appeler le chef du tiers parti M. Non lorsqu'il est question de mesures concernant le travail.

J'ai un message pour M. Non. Les travailleurs et les travailleuses du Canada le surveillent. En fait, les travailleurs et les travailleuses de Windsor le surveillent de très près. Cette motion est tout simplement symptomatique de la grande maladie du Parti réformiste, à savoir ce que j'appelle le syndrome du «Je vais très bien, Ti-Jean». C'est le syndrome de ceux qui dissent: «J'ai ce qu'il me faut. Je me suis bien débrouillé. Je ne suis pas responsable des autres». Notre gouvernement ne voit pas les choses de cette façon. Cela ne nous satisfait pas.

Notre gouvernement veut que les syndicats soient représentés à la table lorsque le Cabinet prend des décisions et qu'il prend des initiatives de politique. Il importe pour le gouvernement qu'il y ait là quelqu'un qui a l'expérience du syndicalisme, qui comprend les travailleurs et les travailleuses et qui veut obtenir ce qu'il y a de mieux pour eux. Il importe que le gouvernement ait quelqu'un là, surtout au cours de cette période cruciale où il consultera les syndicats et leur demandera de présenter leur point de vue à la table.

Qui aurait-on pu choisir de mieux que l'ancien et l'actuel ministres du Travail? Mon collègue, le whip en chef du gouvernement, a


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fait valoir quelques-unes de ses compétences. Une des choses qu'il a oubliées, c'est que lorsque le ministre actuel est arrivé au Canada, il a d'abord été organisateur syndical dans l'industrie du vêtement, à Montréal. Qui pouvait-on choisir de mieux pour parler à la table du Cabinet au nom des travailleurs et des travailleuses du Canada?

C'est au cours de la dernière session que d'autres et moi-même nous sommes familiarisés avec le ministère du Développement des ressources humaines. J'ai siégé au comité du même nom. C'est un ministère énorme. Franchement, il a besoin de plus qu'un timonier à la barre. Lorsque le premier ministre a envisagé la création et l'évolution de ce ministère, il a eu la sagesse, il me semble, de reconnaître que le secteur du travail méritait une attention spéciale. Et voici que nous avons maintenant ce ministre qui est bien établi dans le milieu du travail et qui va veiller à ce que nous ayons le code du travail et les autres mesures dont nous avons besoin.

La Loi sur le Développement des ressources humaines ne change rien aux pouvoirs statutaires du ministre du Travail. Celui-ci va continuer d'être cité dans les lois fédérales du travail telles que le Code canadien du travail, la Loi sur les justes salaires et les heures de travail, la Loi sur l'indemnisation des agents de l'État et la Loi sur la santé des non-fumeurs qui fait partie de ce mandat.

La Loi sur les ressources humaines prévoit aussi que le ministre ait recours aux services, aux installations et aux employés du ministère du Développement des ressources humaines. Le gouvernement n'est pas en train de créer un nouveau ministère. Il est en train de s'assurer qu'on s'occupe à temps plein des préoccupations des travailleurs et des travailleuses du Canada.

Pourquoi le Parti réformiste s'insurge-t-il contre cela? Je l'ignore. Je suppose que c'est l'idée de M. Non.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je crois qu'il est de mon devoir de prendre la parole pour répondre à certaines des remarques les plus grotesques formulées par le whip du gouvernement et d'autres députés d'en face. Ils doivent sûrement savoir que, si nous avons proposé ces amendements, c'est parce que les dépenses gouvernementales inconsidérées nous préoccupent et que nous voulons faire épargner quelques dollars aux contribuables canadiens. C'est ce qui a motivé notre motion sur les attributions du ministre du Travail.

(1220)

Je tiens à dire que le Parti réformiste n'a absolument aucune leçon à recevoir du Parti libéral fédéral ni du gouvernement en ce qui concerne les relations de travail et la façon de traiter les Canadiens. Notre programme montre clairement que nous reconnaissons le droit des travailleurs canadiens de former des syndicats, de faire la grève pacifiquement et de négocier des conventions collectives. Nous comprenons cela parfaitement et nous l'acceptons. Notre programme reconnaît cela. Toute affirmation contraire n'est que le fruit de l'imagination des doreurs d'image libéraux.

Ce que nous voulons faire ressortir aujourd'hui, c'est le fait que le poste de ministre du Travail est demeuré sans titulaire dans le premier Cabinet du premier ministre. Il a formé un Cabinet sans ministre du Travail. La raison en était bien simple. Ce ministère avait déjà été éliminé par Kim Campbell et était considéré comme faisant partie des attributions et relevant de la gestion du ministère du Développement des ressources humaines. Soudainement, les libéraux ont eu besoin de quelqu'un du Québec pour diriger leur campagne sur l'unité canadienne. Ils ont donc créé un poste et y ont nommé quelqu'un qui était censé leur donner une visibilité et mener la campagne sur l'unité nationale.

À voir la tournure des événements, je pense que ce fut un échec sur toute la ligne, mais ils s'en sont toutefois sortis. C'est néanmoins pour cette raison qu'ils ont créé le poste. Ils l'ont créé pour des raisons purement politiques, afin de donner un poste à une nouvelle venue à la Chambre, afin de lui faire une place au sein du Cabinet, ce qui devait leur donner une visibilité au Québec.

Passons maintenant à la question générale de savoir comment le gouvernement s'occupe des relations de travail et si celles-ci se sont améliorées depuis que le poste de ministre du Travail a un titulaire. Comme je l'ai dit, il y a des leçons à tirer de la façon dont le gouvernement s'occupe des relations patronales-syndicales, mais elles ne sont pas positives. S'il y a un gouvernement qui a ménagé la chèvre et le chou à cet égard, c'est bien le gouvernement actuel.

J'aimerais bien savoir combien de députés en face ont promis durant la campagne d'annuler la directive sur le réaménagement des effectifs de la fonction publique. Je me demande combien ont promis durant la campagne de licencier 45 000 fonctionnaires fédéraux à défaut de savoir comment s'y prendre pour résoudre le problème de la dette et du déficit. Je me demande combien d'entre eux ont fait campagne sur cette promesse.

Je me demande combien d'entre eux ont dit: «Vous avez droit à la négociation collective, mais, dès qu'il y aura une grève dans les ports, nous adopterons une loi pour vous forcer à retourner au travail. Autrement dit, vous avez le droit, mais nous ne vous laisserons pas l'exercer.» Je me demande combien de députés libéraux ont fait campagne là-dessus.

Je me demande combien de membres du mouvement ouvrier savent que le ministre du Développement des ressources humaines n'adresse même pas la parole au président du Congrès du travail du Canada. Il lui a dit: «Nous n'avons rien à discuter, alors va te faire voir.» Je me demande combien d'entre eux sont allés à Hamilton et ont dit: «Je suis fier de dire que notre ministre n'adresse pas la parole au président du Congrès du travail du Canada.»

C'est un peu tiré par les cheveux que de dire que le Parti réformiste est contre les syndicats. Le Parti réformiste est d'avis qu'il faut trouver des solutions pour mieux travailler ensemble, pour que le système de négociations collectives fonctionne bien. Comme nous le savons tous, il y a des endroits où la grève n'est pas


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la solution, en raison des services essentiels, et où ni les travailleurs ni les contribuables canadiens ne sont protégés.

Nous avons proposé d'appliquer l'arbitrage obligatoire des offres finales dans ces secteurs. Nous l'avons dit ouvertement. Il vaut mieux que ce soit clair dès le départ plutôt que de dire: «Nous vous laisserons négocier, puis, à la dernière minute, nous interviendrons en adoptant une loi vous forçant à retourner au travail. Vous n'avez aucun droit. Même les droits que vous obtiendrez dans les négociations collectives, nous les annulerons quand nous le voudrons.»

Le gouvernement a un dossier lamentable dans les questions syndicales. C'est pitoyable.

(1225)

Quand le gouvernement dit que les syndicats exigent l'équité salariale, c'est sans doute vrai que les dirigeants de certaines de ces organisations le font. Si les libéraux descendaient de leur tour d'ivoire, s'ils descendaient des hautes sphères de la théorie, s'ils rencontraient des membres de la base, s'ils demandaient à ces gens-là combien de personnes devraient être engagées en fonction de la couleur de leur peau, de leur sexe ou de certains quotas à remplir, que répondraieont-ils? Ils répondraient presque personne. Il est certain que ceux qui font partie des catégories en question ne diront pas que c'est une bonne chose.

C'est un cas où le gouvernement dit qu'il écoute quand cela lui chante. Mais il a l'ouïe très sélective. Cela fait partie du problème lorsque vous êtes à Ottawa trop longtemps: vos oreilles s'engourdissent et la langue vous va dans tous les sens. Ces symptômes frappent régulièrement le gouvernement. Il n'a pas compris ce que les Canadiens veulent vraiment pour la main-d'oeuvre. Il joue aux devinettes, dit une chose et son contraire et essaie de faire porter au Parti réformiste la responsabilité de son échec dans le dossier de la main-d'oeuvre.

La motion visant à éliminer le poste de ministre du Travail ne veut pas dire que les questions de main-d'oeuvre ne sont pas importantes. Il est évident que ces questions sont capitales pour la santé économique du Canada. La capacité de bien travailler ensemble, de régler les griefs en milieu de travail, d'être capable de faire avancer en milieu de travail des dossiers importants pour la population sont toutes de bonnes choses. Cependant, il est faux de dire que rien de cela n'est possible à moins d'avoir un ministre supplémentaire avec le personnel et le budget correspondants.

D'ailleurs, le premier Cabinet du gouvernement n'avait pas de ministre du Travail. Que s'est-il passé? Le monde s'est-il écroulé? Le monde ouvrier est-il tout à coup tombé sous la coupe d'un tyran? Non, pas du tout. Ce poste n'est pas nécessaire. On pourrait économiser, éliminer un poste qui se prête à des nominations politiques. Les travailleurs du Canada ne s'en porteraient pas plus mal s'ils savaient que leurs programmes de santé, d'assurance-chômage et autres sont sous la responsabilité du ministre chargé de les administrer.

En ce moment, le ministre du Développement des ressources humaines affirme qu'il ne parlera pas au président du Congrès du travail du Canada. Qu'est-ce qu'est censé faire l'autre ministre? Le supplier de discuter? C'est son travail de discuter. On se demande sur quelle planète les libéraux vivent. Le gouvernement doit avoir plus de candidats à caser et plus de faveurs à distribuer qu'il y a de postes disponibles, c'est pourquoi il en a créé un autre.

Ce poste n'est pas nécessaire pour le bien des travailleurs canadiens. C'est pourquoi nous proposons de l'éliminer. Cela fera économiser beaucoup d'argent aux contribuables sans nuire en quoi que ce soit au marché du travail canadien.

M. George Proud (secrétaire parlementaire du ministre du Travail, Lib.): Madame la Présidente, je tiens à donner l'heure juste au sujet de qu'a dit il y a quelques instants un député d'en face, à savoir que le ministre du Travail ne rencontre pas le président du Congrès du travail du Canada. Le ministre du Travail a déjà rencontré à plusieurs reprises le président de cet organisme. En fait, ils ont même eu une rencontre dès 8 heures ce matin.

M. Strahl: Le ministre du Développement des ressources humaines?

M. Proud: Il s'agit là d'autre chose.

Il est ridicule qu'un parti à la Chambre soutienne que 750 000 travailleurs canadiens ne devraient pas avoir de ministre désigné pour administrer la loi qui les régit. Il en a toujours été ainsi. Ces derniers temps, nous n'avions pas de ministre, mais je ne puis comprendre que quelqu'un déclare à la Chambre que ces travailleurs ne méritent pas d'avoir un ministre pour les représenter.

Le ministère du Travail existe depuis longtemps. Il a été regroupé avec le ministère du Développement des ressources humaines. Il existe au Canada d'autres organismes qui relèvent de ministres et de ministères.

La raison, du point de vue du ministre, est que le ministère est l'un des quatre ministères fondateurs du ministère du Développement des ressources humaines en 1993. En attendant que la première personne à occuper ce portefeuille, c'est-à-dire Mme Robillard, entre en fonctions, c'était le ministre Axworthy qui a agi à sa place.

(1230)

Je crois qu'en vertu du Code canadien de travail, qui a été examiné tout récemment et auquel des changements sont imminents, le ministre du Travail doit être sur place pour veiller à la situation. Dans des secteurs d'activité comme l'industrie du débardage, l'industrie du rail et l'industrie aérienne, il est préférable que des personnes puissent s'occuper directement des situations qui s'y produisent de temps à autre.


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J'ai peine à croire que certaines personnes y voient là un gaspillage d'argent. Je ne crois pas que ce soit le cas. Les problèmes à régler dans ces situations conformément au Code canadien du travail sont les conditions de travail, la sécurité et la santé au travail et les négociations collectives. Quand un groupe de Canadiens aussi nombreux est en cause, il est vraiment irresponsable de la part d'un parti de recommander qu'il n'y ait pas de ministre responsable.

Étant donné les propositions de modifications aux parties I, II et III du Code canadien du travail, le ministère lui-même sera très occupé au cours des semaines et des mois à venir. Nous devons également prévoir d'autres situations.

Si nous examinons aujourd'hui le nombre de conventions collectives qui arriveront à échéance et les négociations qui vont avoir lieu dans diverses industries qui relèvent du ministère du Travail, on se rend compte que des problèmes vont se produire dans certains cas avant la fin de l'année et que les services du ministère seront nécessaires. Il est très important, lorsque des situations semblables se produisent, que les dirigeants des deux parties puissent s'asseoir avec le ministre désigné.

C'est tout à fait nécessaire. Je ne comprends pas tout à fait les raisons qui motivent la position adoptée par le Parti réformiste. Ils semblent vouloir éliminer ce poste, mais, pour quelles raisons, ce n'est pas clair. Le député qui est intervenu, il y a quelques instants, a fait allusion à notre capacité d'établir de bonnes relations de travail. Le Parti libéral a été au pouvoir pendant de nombreuses années au cours du siècle qui tire à da fin et les relations de travail dans notre pays n'en ont pas grandement souffert.

Je ne pense pas que le parti d'en face ait quoi que ce soit à m'apprendre sur la façon d'appliquer les lois du travail. Chaque fois que les syndicats ont voulu connaître mon avis sur une question qui leur était soumise, je n'ai jamais refusé de leur parler et je ne refuserai jamais de leur parler, tant que je serai dans la vie publique.

Ces dernières années où j'ai servi au sein du gouvernement, je n'ai jamais été contre les syndicats. J'ai certainement aidé à régler des conflits dans l'exercice de mes fonctions. J'ai été ministre du Travail à un autre palier de gouvernement. Je crois que si nous continuons à travailler avec les parties, nous pouvons régler les conflits. Ce ne serait pas nécessairement le cas avec un énorme ministère et un ministre qui a tellement d'autres domaines sous sa responsabilité.

Je crois donc que la nomination, l'an dernier, par le premier ministre d'un ministre du Travail était vraiment nécessaire. Nous devons maintenir ce poste et faire fond là-dessus. Certains jours, je pourrais me dire en faveur d'un ministère spécial. Toutefois, étant donné la situation actuelle, je suis sûr que, avec la fusion des quatre ministères, nous pouvons compter sur les ministres, les sous-ministres, leurs adjoints et le personnel pour administrer efficacement le Code canadien du travail. Pour moi, le Code canadien du travail est une loi très importante.

(1235)

Le rapport Sims a été présenté récemment au ministre. Des consultations se tiendront bientôt d'un bout à l'autre du pays pour vérifier si les intéressés veulent y apporter des changements et, si oui, lesquels. Quand les conditions sont les mêmes depuis longtemps, on a tendance à croire qu'il faut les changer. Or, il arrive que tout marche comme sur des roulettes et qu'aucun changement important ne soit nécessaire.

Il est nécessaire d'avoir un ministre du Travail. Cela a été démontré, au cours des derniers jours, avec le projet de loi qui a été étudié à la Chambre. Il est le résultat d'un effort sincère de la part de tous, les trois partis y ayant contribué. C'est le ministre qui a présenté la mesure. Il faut continuer. Les gens qui sont soumis à cette loi ont besoin d'une personne, qui qu'elle soit, qui se charge de faire connaître leurs problèmes, leur situation et leurs suggestions, à mesure que nous tentons d'améliorer la situation.

Même dans le meilleur des cas, la gestion des ressources humaines comporte toujours une certaine part d'affrontement. C'est ainsi. Il faut bien le dire. Nous avons tous des moyens à proposer pour faciliter les relations de travail. Quand même, quand on remet en question les éléments de base d'un contrat de travail ou qu'on négocie le règlement d'un conflit, si mineur soit-il, il en résulte habituellement un véritable affrontement. C'est la raison d'être du ministre et des conciliateurs qui relèvent de ce ministre.

J'en ai dit assez. Je ne vois absolument pas pourquoi un parti à la Chambre viendrait nous dire maintenant que nous n'avons pas besoin de ce ministère. C'est un ministère très important, que nous devons maintenir et développer.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, quand nous avons vu le projet de loi C-96-qui est devenu le projet de loi C-111-pour la première fois, nous avons été extrêmement perturbés, parce que ce projet de loi qui crée un nouveau ministère, le ministère du Développement des ressources humaines, en réalité, institutionnalise les chevauchements avec l'ensemble des provinces et, bien sûr, avec le Québec. Il le fait d'une façon telle qu'il est extrêmement difficile d'amender ce projet de loi.

L'apôtre Saint-Paul disait: «La lettre tue mais l'esprit vivifie.» Il est extrêmement difficile d'amender cette loi, parce que les mots qui sont là, en fait, traduisent un esprit et cet esprit est celui du ministère du Développement des ressources humaines qui, sans définir ce que c'est, octroie à un ministre du gouvernement fédéral une juridiction sur ce qui est l'ensemble du développement des ressources humaines au Canada, alors qu'on le sait, la Constitution de 1867 en a fait d'abord la responsabilité générale des provinces, responsabilité générale qui a été amendée de façon très précise pour prévoir des pensions de vieillesse, pour prévoir des allocations familiales et pour prévoir un régime d'assurance-chômage.

Au-delà de ces trois amendements constitutionnels, la responsabilité des provinces demeure entière. Or, ce que fait ce projet de loi, c'est comme d'effacer la responsabilité générale des provinces et


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faire qu'un ministre fédéral se substitue à cette responsabilité générale et se donne les moyens, avec l'argent de tout le monde, de le faire. Alors, le problème dans le projet de loi C-96 n'est pas que le ministre du Développement des ressources humaines peut désigner un ministre du Travail. Non. Le problème, c'est le ministre du Développement des ressources humaines. Là est le problème. Le ministère du Développement des ressources humaines est un héritage conservateur.

(1240)

Je sais qu'il n'y a pas beaucoup de collègues d'en face ou d'à côté qui vont le réclamer. Mais s'il n'y avait pas eu Kim Campbell qui, avec son gouvernement qui a régné environ 100 jours, a décidé de fusionner plusieurs ministères dans le but avoué, et qui lui a coûté cher, de faire une réforme générale des programmes sociaux que les libéraux, sur leur grand dieu, ont juré qu'ils ne le feraient jamais, il n'y aurait pas aujourd'hui, j'en suis absolument certaine, de ministère du Développement des ressources humaines, parce que c'était un chambardement important.

Cependant, les hauts fonctionnaires qui ont proposé à Mme Campbell de faire cela, eux, sont toujours là. Et je voudrais dire à mes collègues de ce côté, qui sont pour l'instant à ma gauche mais je sais que c'est une façon de les désigner, autrement ce serait abusif, que lorsqu'il y a moins de ministres, ce sont les hauts fonctionnaires qui mènent, et il faut être bien clair là-dessus.

Je pense qu'on peut voir une filiation très nette entre ce qui avait été émis à la fin du gouvernement des conservateurs et ce que le gouvernement libéral a produit. Cette réforme des programmes sociaux, je suis certaine que les conservateurs auraient pu la faire avec la différence que cette fois-là, les libéraux, s'ils avaient pu être dans l'opposition quelque part, auraient été farouchement contre parce que c'est une réforme qui est parfaitement inacceptable.

Parlons du ministère du Travail. Le ministère du Travail canadien existe. Même si on enlevait le pouvoir au ministère du Développement des ressources humaines de le nommer, le premier ministre a toujours le pouvoir de nommer un ministre du Travail. Alors cet amendement-là, pour moi, n'aurait pour effet, s'il était adopté, que d'empêcher le ministre du Développement des ressources humaines de nommer un ministre désigné. C'est le seul effet que cela peut avoir. Ça ne peut pas avoir pour effet d'empêcher le premier ministre de nommer un ministre du Travail.

Alors, parlons du ministère du Travail. Le ministère du Travail est le résultat, lui aussi, d'un héritage historique. Peut-être est-il bon pour les fédéralistes de rappeler que s'il n'y avait pas eu le Conseil privé de Londres, en 1925, pour rendre un jugement qui ramenait là aussi la juridiction sur les relations de travail dans les provinces, eh bien, les relations de travail auraient dépendu du gouvernement fédéral. Mais, je dirais heureusement, il n'en est rien, sauf pour les travailleurs qui relèvent-sans entrer dans le jargon-du gouvernement fédéral et des entreprises qui ont une fonction qui est reconnue comme étant de nature nationale, donc devant dépasser la juridiction d'une seule province.

Le ministère du Travail au Canada, sur le plan social, est désormais à la traîne, et le problème que nous avons avec le ministère du Travail, ce n'est pas qu'il y en ait un, et celui que nous avons avec la ministre du Travail, ce n'est pas qu'il y ait une ministre, mais ce sont les positions qu'elle a tenues. La ministre du Travail, dans le conflit du rail, aurait eu l'occasion de donner une impulsion nouvelle à des positions de concertation entre employeurs et travailleurs.

Au lieu de cela, elle a préféré donner une impulsion à des relations de travail qui reposeraient sur l'intérêt premier des employeurs. Je dirais tant pis, mais c'est dommage. C'est dommage, parce que le Canada ne se sortira pas des problèmes dans lesquels il est si, non seulement l'actuel ministre du Travail et l'ensemble du gouvernement, y compris le ministre du Développement des ressources humaines, n'ont pas, à l'endroit des travailleurs organisés, une autre attitude que celle qu'ils ont manifestée récemment.

(1245)

C'est une attitude qui est indigne d'un gouvernement qui s'appelle libéral, mais c'est surtout une attitude qui est impropre à créer ce qu'ils disent vouloir rechercher, c'est-à-dire une amélioration de la situation économique et sociale.

Un ministre du Travail est important pour autant qu'il aide à faire en sorte que les relations de travail dans les entreprises qui relèvent de sa juridiction obéissent à des règles qui laissent un rapport de force entre les parties. Un rapport de force, on pourrait utiliser une autre expression, c'est la capacité des parties de pouvoir se parler et de s'écouter.

Quand une partie, quand les employeurs sont tellement forts qu'ils se fichent des travailleurs-l'inverse est extrêmement rare-quand une partie est tellement forte qu'elle se fiche des autres, c'est toujours dangereux, y compris au plan économique, parce que les travailleurs ont à leur disposition une force qui peut être une force terrible. Disons-nous une chose, les travailleurs peuvent être forcés de travailler, ils ne peuvent pas être forcés de bien travailler. Ils ne peuvent pas être forcés de donner tout ce qu'ils ont d'imagination et de motivation.

Sans toute cette imagination, sans toute cette motivation, sans tout cet engagement des travailleurs, toute économie bat de l'aile. Il me semble qu'au Canada le ministre du Travail, le ministre du Développement des ressources humaines, le gouvernement devrait se préoccuper beaucoup plus de faire en sorte que les travailleurs aient des conditions de travail et de sécurité sociale décentes, justement pour s'assurer que cette productivité sociale et économique puisse se produire.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Madame la Présidente, à mon tour, comme je fais partie du Comité du développement des ressources humaines, comme représentant de l'opposition officielle, j'aimerais m'objecter à l'amendement suggéré par le Parti réformiste. Cet amendement veut faire disparaître-comme l'a dit le whip du gouvernement-le ministre du Travail. Il veut faire disparaître la possibilité de nommer un ministre du Travail.

Par magie ou simplement par un amendement, en votant, cela fait paraître une fonction importante. Je voudrais ajouter mes propos à ceux de la députée de Mercier qui a rappelé tout ce que pourrait faire un ministre du Travail au Canada dans certains conflits. Elle a rappelé à juste titre, et j'aimerais le faire à mon tour, le rôle qu'aurait pu jouer la ministre du Travail de l'époque dans le dossier du chemin de fer. J'en sais quelque chose dans mon comté où il y a 500 travailleurs du CN qui sont regroupés autour de la gare de triage à Charny. Ils étaient à ce moment-là très insatisfaits du travail de la ministre du Travail de l'époque.


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De là à dire qu'il faut faire disparaître ce poste, alors que le ministère du Développement des ressources humaines, si on élimine la partie du budget qui est réservée au paiement des intérêts, on se rend compte que c'est presque la moitié du budget du gouvernement fédéral qui est affecté au Développement des ressources humaines. La tâche du ministre du Développement des ressources humaines est vraiment considérable sans qu'on lui ajoute l'obligation d'être en plus le ministre du Travail.

Si on éliminait ce poste de ministre du Travail et qu'on le confiait au ministre du Développement des ressources humaines, parfois ce dernier serait placé dans des conditions délicates ou difficiles.

(1250)

Le ministre du Développement des ressources humaines doit gérer non seulement de l'argent, mais des ressources humaines, qui sont déployées dans tous les secteurs du Canada, et des ressources financières qui sont affectées dans les organismes et entreprises. Je ne dirais pas que c'est de les placer dans une position de conflit d'intérêts, mais ça les place dans une position délicate.

Il est très sain et très important de conserver un poste distinct pour le ministère du Travail. C'était là le sens de mes propos et je conclus là-dessus.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Nous passons maintenant au groupe no 2, motion no 3.

[Traduction]

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.) propose:

Motion no 3
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 20, par substitution, aux lignes 4 à 11, page 6, de ce qui suit:
«20. En vue de faciliter la formulation, la coordination et l'application des politiques et programmes relatifs aux attributions énoncées à l'article 6, le ministre peut conclure un accord avec un organisme public provincial après avoir obtenu l'agrément du lieutenant-gouverneur en conseil de la province et peut conclure un accord avec une province, un groupe de provinces, une institution financière ou toute personne ou organisme-autre qu'un organisme public provincial-de son choix.»
-Madame la Présidente, nous en sommes maintenant à la motion no 3 du groupe 2, un amendement à l'article 20. L'article, tel qu'il est actuellement rédigé, donne au gouvernement fédéral le pouvoir de passer outre aux gouvernements provinciaux et de donner des subventions ou autre chose, sans demander d'abord l'approbation du gouvernement provincial. C'est inacceptable. Le ministre ne devrait pas être en mesure de passer outre aux gouvernements provinciaux.

Si le gouvernement croit à la décentralisation, comme il le prétend, il devrait être prêt à consulter les gouvernements provinciaux plutôt qu'à demander l'adoption d'une mesure législative qui lui permette de passer outre à ces gouvernements.

En vertu de cet article, le ministre pourrait choisir de privatiser ou de donner à contrat certains services du ministère du Développement des ressources humaines. Si cela devait se faire, cela devrait être en relation directe avec les gouvernements provinciaux, et non en laissant une porte ouverte pour pouvoir s'adresser à d'autres organismes. Le pouvoir devrait aller directement aux gouvernements provinciaux et non indirectement à un des ces organismes, comme le permettrait le projet de loi.

(1255)

Par conséquent, mon amendement modifierait l'article 20 pour qu'il se lise comme suit:

En vue de faciliter la formulation, la coordination et l'application des politiques et programmes relatifs aux attributions énoncées à l'article 6, le ministre peut conclure un accord avec un organisme public provincial après avoir obtenu l'agrément du lieutenant-gouverneur en conseil de la province et peut conclure un accord avec une province, un groupe de provinces, une institution financière ou toute personne ou organisme-autre qu'un organisme public provincial-de son choix.
Je pense que cet amendement est un compromis raisonnable. N'est-ce pas? Le gouvernement fédéral a un accès direct au lieutenant-gouverneur de chaque province. Par conséquent, il me semble que cette consultation n'est pas trop demander. Je pense, une fois de plus, que c'est un compromis plus que raisonnable.

Je crois également que le gouvernement induit les Canadiens en erreur et ne traite pas honnêtement avec les provinces. Je rappelle au gouvernement une récente visite que le nouveau ministre des Ressources humaines a fait dans le Grand Toronto. Le ministre ne s'est pas adressé au gouvernement provincial, il est allé directement à un organisme ou à un groupe et a annoncé une subvention de 4 millions de dollars pour la garde des enfants. Que dit ainsi le gouvernement fédéral aux provinces? «Nous allons vous donner moins d'argent en paiements de transfert, mais nous voulons toujours être perçus comme les bons gars, alors nous allons agir indépendamment, passer outre au gouvernement provincial et nous allons jouer au Père Noël. Plutôt que de travailler en collaboration avec les gouver-


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nements provinciaux nous allons essayer de les faire paraître sous un mauvais jour. Nous allons les représenter en Harpagon.»

Ce qui est pire, c'est que le ministre responsable au gouvernement de l'Ontario, M. Tsubouchi, n'était même pas au courant de cela. Il l'a lu dans les journaux.

Le gouvernement clame sans arrêt qu'il collabore avec les provinces, qu'il entretient de bonnes relations avec elles, qu'il les consultent. Ma foi, je me demande ce qu'en dirait M. Tsubouchi.

Cette disposition qui, en matière de prestation de services, permet au ministre de court-circuiter les provinces pour traiter directement avec des instances inférieures doit être modifiée. Nous ne demandons rien de déraisonnable au gouvernement. Le lieutenant-gouverneur est très étroitement associé au gouvernement fédéral. C'est fort raisonnable. Ensemble, nous pourrions aboutir à un compromis là-dessus.

Le Parti réformiste aime bien collaborer avec le gouvernement quand il le peut. Si le gouvernement présente une mesure législative qui nous semble bonne, nous travaillerons à la faire adopter. Si nous estimons qu'elle n'est pas parfaite, nous nous emploierons à la modifier et à la faire adopter ensuite. Le gouvernement doit se montrer tout aussi empressé à collaborer avec les représentants élus de la population canadienne. Ce n'est pas ce qu'il nous a été donné de voir à la Chambre jusqu'ici.

Dans sa version actuelle cette disposition équivaut à une ponction fiscale ou, si vous préférez, à une usurpation de pouvoirs. Nous croyons que ce pouvoir doit rester entre les mains des provinces. Grâce à cette disposition, le gouvernement ne serait pas tenu de négocier directement avec les gouvernements provinciaux, surtout avec ceux que ne seraient pas trop favorables à certaines initiatives fédérales. Je ne pense pas que le gouvernement est honnête. S'il a du fil à retordre avec certains gouvernements, et il peut prévoir facilement que les gouvernements s'y opposeront, il peut ainsi se tirer d'affaire. Je ne pense pas qu'il est honnête. Nous devrions y voir, d'où l'utilité du compromis.

Si le gouvernement maintient catégoriquement que telle n'est pas son intention, qu'il est empressé de collaborer avec tous les gouvernements provinciaux et ne s'inquiète pas de ce que certains d'entre eux ne soient pas d'accord avec lui, et donc qu'il n'entend pas aller de l'avant avec la mesure législative, il n'a qu'à se mettre d'accord avec le Parti réformiste sur ce bon amendement. Qu'il accepte le compromis, qu'il montre aux gouvernements provinciaux qu'il se fie à eux, qu'il veut collaborer avec eux et qu'il ne se livre pas à une tentative aussi grossière que de les court-circuiter.

(1300)

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, je suis ravi de pouvoir prendre la parole au sujet de cette motion.

Je commencerai par demander où était la députée. Elle a peut-être été absente au cours des dernières semaines qui ont suivi la présentation du discours du Trône et du budget, qui énonçaient l'engagement du gouvernement à négocier avec les provinces dans des sphères de compétence provinciale, par exemple, la formation et l'éducation. Il n'y a pas très longtemps, nous avons fait parvenir à tous les députés copie d'une lettre que nous avons envoyée à toutes les provinces. Cette lettre explique ce sur quoi nous voudrions négocier en ce qui concerne les accords qui aideront les Canadiens à réintégrer le marché du travail.

Il semble étrange que le Parti réformiste vienne de présenter un amendement, l'amendement précédent, dans le premier groupe portant sur les efforts pour économiser de l'argent. Il soutient qu'il faut se débarrasser du ministre et du sous-ministre du Travail parce qu'ils constituent un gaspillage de l'argent des contribuables.

Dans l'amendement suivant, le Parti réformiste veut créer une toute nouvelle bureaucratie sous la direction du lieutenant-gouverneur en conseil. Cela signifie qu'un quelconque comité ou un groupe de fonctionnaires devra se réunir, aux frais des gouvernements provinciaux, pour examiner chaque accord-il y en a des milliers, selon le ministère du Développement des ressources humaines-que nous concluons avec des organismes dans les provinces.

Je ne suis pas certain de comprendre où le Parti réformiste veut en venir. Ce parti préconise l'élimination du double emploi et des chevauchements. Les réformistes se demandent pourquoi cela prend si longtemps. Ils n'arrêtent pas de nous dire: «Vous prenez tellement de temps à faire quoi que ce soit qu'il n'est pas étonnant que vous ne parveniez jamais à terminer le travail.» Or, voici que le Parti réformiste, qui veut que nous agissions très rapidement, nous propose un amendement qui aurait pour effet de nous faire perdre des mois chaque fois que nous voulons faire avancer la discussion sur un dossier. Cette proposition ajoute de toute évidence une autre étape au processus de négociation, qui deviendrait probablement très long, pour en arriver à conclure certains accords sur presque tous les dossiers. La députée devrait clarifier cela.

Nous avons dit dans le discours du Trône, et le ministre du Développement des ressources humaines a été très clair à ce sujet dans ses lettres aux autorités provinciales, que nous voulions conclure des conventions collectives cadres. Ces conventions de base concerneraient les travailleurs qui ne sont pas syndiqués ou qui n'ont peut-être pas eu l'occasion de conclure une convention collective qui fasse l'objet d'un vaste consensus général des provinces et du gouvernement fédéral pour transférer à la province la responsabilité de régler les problèmes ou permettre au gouvernement fédéral de conclure un accord avec des organismes de façon ad hoc, sur la base d'une convention collective cadre en particulier.

C'est ce que nous proposons de faire. C'est ainsi que nous allons réaliser des économies. C'est ainsi que nous permettrons aux gouvernements de travailler plus efficacement. Si la députée et d'autres de ses collègues nous suggèrent de créer une toute nouvelle bureaucratie et une toute nouvelle couche de double emploi parce qu'ils


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croient au mythe voulant que le gouvernement fédéral cherche à duper les provinces ou ne se soucie pas des problèmes et cherche simplement à se faire du capital politique à ce sujet, je ne crois pas qu'ils ont bien suivi le débat.

J'ai vraiment beaucoup de mal à comprendre les arguments du Parti réformiste aujourd'hui. Comme on l'a déjà dit, le premier amendement proposait d'éliminer une partie des coûts en supprimant la fonction de ministre du Travail, sous prétexte qu'il ne ferait rien. Or, nous savons à quel point il est important pour le fonctionnement général du gouvernement et pour les Canadiens et les Canadiennes dont le secteur d'activités relève de la compétence fédérale.

Voilà qu'on nous propose maintenant un amendement nous suggérant d'investir beaucoup d'argent dans un processus dont nous n'avons nul besoin. Une fois que nous aurons fini de négocier avec les provinces-et nous reconnaissons et acceptons le fait que le cas de chacune des provinces sera différent-nous pourrons nous consacrer à la tâche qui nous a été confiée, c'est-à-dire aider les gens à retrouver du travail en leur donnant les outils et les compétences pour réussir.

(1305)

Je tiens à souligner que nous concluons des milliers d'accords chaque année dans chaque province avec divers organismes. Imaginez le genre de cauchemar bureaucratique que le Parti réformiste nous suggère de créer avec cet amendement. Je recommande de le rejeter complètement.

Le fait reste que le discours du trône et les lettres adressées par le ministre du Développement des ressources humaines aux différentes provinces sont éloquentes quant à l'intention du gouvernement fédéral en ce qui concerne ses relations avec les provinces. Nous n'avons pas besoin d'une autre couche de bureaucratie pour nous aider à accomplir notre travail.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, l'amendement du Parti réformiste ne vise pas tellement à créer un cauchemar, comme on vient de le dire, je pense qu'il vise à maintenir le cauchemar existant. Si on le lit bien, dans la première partie-on peut dire que c'est intéressant-on voudrait que le ministre fédéral puisse conclure un accord avec un organisme public provincial après avoir obtenu l'accord du lieutenant-gouverneur en conseil de la province. On a dit: «Tant mieux, cela va respecter la juridiction des provinces et la juridiction du Québec.»

Mais il y a également un autre paragraphe où on y lit: «Il peut conclure un accord aussi avec une province, un groupe de provinces, une institution financière ou toute personne ou organisme autre qu'un organisme public provincial de son choix.» C'est donc un amendement qui vise à concrétiser le fouillis actuel qui existe en formation de la main-d'oeuvre. Il ne fait que faire une photo de ce que le fédéral fait déjà. C'est un amendement un peu inutile.

Prenons des exemples concrets. Dans cette situation, ça veut dire qu'un organisme comme la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, qui est un organisme public provincial, ne pourrait signer un accord avec le gouvernement fédéral sans avoir l'autorisation de sa province. Cela peut peut-être se défendre. Mais cela veut aussi dire qu'une institution financière, par exemple la Banque de Montréal ou le Mouvement Desjardins, n'importe quelle institution financière, pourrait aussi signer ce type d'entente sans nécessairement avoir l'accord du Québec.

Et là, on voit se produire exactement ce qu'on retrouve actuellement dans le milieu. Toutes sortes d'organismes peuvent intervenir dans le domaine de la formation, avec une reconnaissance, avec moins de reconnaissance, avec des critères, en respectant les objectifs du ministère de l'Éducation ou en les respectant moins. On a la situation cacophonique actuelle où les deux gouvernements interviennent. Le gouvernement qui a la responsabilité de la formation de la main-d'oeuvre, qui a la responsabilité de l'éducation n'a pas le contrôle sur la façon dont la formation se donne.

On arrive sur le marché du travail avec des gens qui sont allés chercher un diplôme d'études collégiales, par exemple, en technique de bureau, et à côté des gens qui ont suivi un cours qui porte quel que nom que ce soit, mais qui n'est pas attesté comme tel par le ministère de l'Éducation. Et souvent les gens qui aboutissent sur le marché du travail avec ces formations ont la surprise de leur vie quand ils arrivent devant l'employeur. À leur avis, ils ont obtenu de bonne foi une formation dont on leur a dit qu'elle leur permettrait d'avoir accès au marché du travail, et soudainement, on se rend compte que quelque chose manque. Étant donné qu'ils n'ont pas la formation requise par le ministère de l'Éducation, ils ne peuvent pas avoir les diplômes équivalents, ce qui crée toutes sortes de difficultés.

C'est exactement ce que le Parti réformiste propose à l'amendement présentement devant nous. Surtout quand on dit: «[. . .] une institution financière ou toute personne ou organisme [. . .].»

Donc, rien n'empêcherait le gouvernement fédéral de signer un contrat avec un individu en dehors ou dans le cadre des plans prioritaires de développement de la main-d'oeuvre d'une région du Québec. On est dans cette situation aujourd'hui. Le Québec a mis sur pied des comités de main-d'oeuvre pour que, dans chacune des régions, il puisse y avoir une planification des besoins de main-d'oeuvre et qu'on le fasse pour maximiser la création d'emplois, afin d'obtenir des résultats intéressants.

Et à côté, avec la situation actuelle qui est concrétisée par l'amendement du Parti réformiste, le gouvernement fédéral peut donner des contrats de formation à des personnes à l'intérieur de cette région sans l'inscrire nécessairement dans les priorités que les intervenants de la région se sont données.

Le résultat sera de perpétuer les dépenses inutiles qu'on retrouve dans ce domaine actuellement. Les 250 millions en gaspillage, ce qu'avait reconnu un ministre fédéraliste du Québec, par le gouvernement libéral du Québec qui précédait le Parti québécois au pouvoir, ces 250 millions, ce sont dans ces comportements qu'ils se retrouvent, dans le fait qu'il y a souvent formation de gens dans deux réseaux différents pour le même marché du travail et, en tout de ligne, on forme des gens qui n'ont pas d'emploi.


1357

(1310)

Tout le monde est de bonne foi: les gens qui avaient acheté le cours du fédéral et ceux qui ont été formés. Ces derniers suivent le cours à temps plein pendant une année, arrivent sur le marché du travail et se font dire: «C'est dommage mais, à côté, il y a des gens qui ont suivi une formation de trois ans au niveau professionnel et on a décidé de leur donner priorité». L'inverse se présente aussi, mais on a souvent formé des gens qui n'ont pas d'opportunité d'emploi en bout de ligne.

C'est ça, la réalité aujourd'hui. On se demande pourquoi il y a tant d'emplois disponibles, qu'il y a également tant de chômeurs et qu'on ne réussit pas à faire l'équation entre les deux. Le bilan fait par l'OCDE, qui est un organisme international qui a une certaine crédibilité par rapport à la question de l'emploi, dit que le Canada était mal foutu en termes de système de formation de la main-d'oeuvre. C'est une des raisons principales pour lesquelles, en termes de compétitivité, on a eu beaucoup de mal à se positionner par rapport aux autres pays.

Dans la réalité, dans le concret, ça se vit avec ces situations. Une personne qui se rend au centre d'emploi et qui dit qu'elle est au chômage et qu'elle voudrait être formée, on lui offre une formation qui regroupe un certain nombre de personnes par rapport à des objectifs donnés. Elle s'inscrit dans cette formation, elle suit le cours pendant une année et, en bout de ligne, elle se retrouve dans un cul-de-sac, parce que la formation acquise n'a pas permis d'avoir les attestations pertinentes pour déboucher sur le marché du travail correctement.

Cela crée également une compétition indue entre les travailleurs. C'est pour cela qu'il serait important de clarifier cette chose tout autrement. Ce n'est pas un amendement du type de ce que le Parti réformiste propose qui réglera la situation. Ce qui aurait réglé la situation, c'est que le gouvernement fédéral actuel enregistre le résultat référendaire, comprenne ce qui lui a été dit, même par le directeur général du Conseil du patronat du Québec, qu'il fallait qu'il se retire du secteur de la main-d'oeuvre et que, dans ce secteur-là, qu'on soit des fédéralistes ou des souverainistes, il y a un consensus global au Québec pour que ce soit le Québec qui soit responsable de tout ce qui est mesure active d'emploi, qu'il est le seul gouvernement qui peut intervenir dans ce secteur.

Donc, il faudra plus qu'un amendement de ce type pour corriger la situation, d'autant plus que celui-là reflète ce qui existe déjà. C'est pour cela que nous voterons contre un amendement de ce type qui, finalement, n'est que de la poudre aux yeux. On demanderait plutôt au gouvernement de reconsidérer sa position et qu'il finisse par reconnaître le consensus québécois en matière de main-d'oeuvre, qu'il accepte que l'efficacité repose dans le fait qu'on puisse donner au gouvernement le plus près des gens la responsabilité de les former, de leur donner la formation adéquate, de faire qu'on n'ait plus, à l'avenir, à faire de différence entre un assisté social et un chômeur, et entre quelqu'un qui ne reçoit pas de chèque d'un gouvernement et quelqu'un qui en reçoit, qu'on ait une intervention globale, une politique active d'emploi.

La première façon de le faire est d'éviter qu'il y ait deux gouvernements qui interviennent dans les mêmes plates-bandes. C'est pour cela que nous voterons contre cet amendement du Parti réformiste.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Madame la Présidente, je m'associe aux propos du député de Kamouraska-Rivière-du-Loup qui sont très pertinents, parce que ce que nous étudions aujourd'hui, c'est la création officielle du ministère du Développement des ressources humaines.

Il faut rappeler que ce projet de loi est dans le décor depuis un bon bout de temps, parce que, l'automne dernier, c'était le projet de loi C-96. Aujourd'hui, parce qu'il y a eu prorogation, on l'appelle maintenant le projet de loi C-11. Dans les faits, c'est un vieux projet de loi en discussion au Parlement et on se rappellera tout le contexte où le gouvernement, à mi-mandat, a voulu tout d'un coup donner l'impression qu'il avait de nouveaux projets, de nouveaux programmes à présenter à la population.

On fait un remaniement ministériel, on présente un nouveau discours du Trône et on fait beaucoup de bruit autour de cela pour donner l'illusion d'un changement, alors que l'on constate dans les projets de loi dont on discute depuis la nouvelle session, qu'il n'y a rien de nouveau. Ce sont tous d'anciens projets de loi. À un tel point qu'on en a fait-et je m'en souviens parce que je fais partie du Comité du développement des ressources humaines-l'étude article par article en comité.

Nous, de l'opposition officielle, on avait mené une bataille à ce niveau, parce que l'on trouvait que le gouvernement profitait d'une occasion de rendre officiel son ministère du Développement des ressources humaines, qui regroupe des secteurs existant autrefois dans d'autres ministères et qui gérera la moitié du budget disponible une fois qu'on a payé les intérêts de la dette. Le ministère du Développement des ressources humaines est considérable. Ce qui est pire, et c'est pourquoi l'opposition officielle le dénonçait, c'est l'ingérence accrue du gouvernement fédéral dans les domaines de juridiction des provinces. L'amendement proposé par le Parti réformiste rejoint un peu notre objectif, mais pas suffisamment, car il laisse encore la possibilité au gouvernement fédéral, une fois de plus, de s'ingérer dans les affaires des provinces.

(1315)

Je suis critique en matière de formation et jeunesse, donc le secteur de l'éducation me préoccupe. Nous savons que le secteur de la formation professionnelle fait l'objet d'un gros débat au Québec, surtout d'un consensus. Mais ce projet de loi, même avec l'amendement qui est proposé, n'empêche aucunement le ministre du Développement des ressources humaines d'intervenir dans la formation professionnelle. Comme on le dit dans le projet de loi: «[ . . . ] peut conclure un accord avec une province, un groupe de provinces, une institution financière ou toute personne ou organisme autre-et là, on en met-qu'un organisme public provincial de son choix.» Cela laisse encore beaucoup trop de latitude au ministre du Développement des ressources humaines pour intervenir dans les champs de juridiction des provinces, notamment en formation professionnelle.


1358

Or, évidemment, nous avons mis de l'énergie au moment de l'étude article par article, et nous le faisons encore aujourd'hui, parce que ces amendements nous permettent d'en discuter et d'indiquer clairement à la population du Québec qu'il faut s'y objecter. Pour nous, le champ de l'éducation est crucial, tout comme celui de la formation et nous réalisons qu'à force de faire durer des débats, à force de trouver toutes sortes de stratagèmes pour passer du temps, il risque de s'installer une espèce de lassitude. Les gens disent: «Oui, mais ce sont toujours les mêmes débats, toujours les mêmes choses». Nous laissons le temps passer et finalement, les gens peuvent se lasser, ils peuvent se tanner de tels débats.

Pourtant, c'est quelque chose d'extrêmement important. On n'aime pas parler de Constitution, et le gouvernement disait que le Bloc québécois voulait juste parler de la Constitution. Mais en présentant ce projet de loi, en continuant de vouloir faire adopter ce projet de loi, le gouvernement nous entraîne dans un débat constitutionnel, puisqu'il veut se faire autoriser par le Parlement, il veut obtenir l'appui du Parlement, de la Chambre des communes, pour pouvoir s'ingérer davantage dans les affaires des provinces. Nous sommes contre cela.

Récemment, quelqu'un a fait un inventaire des programmes en formation professionnelle. Il y avait 108 programmes différents au provincial et au fédéral ensemble. Il y a des milliers de personnes qui sont en attente de cours de formation professionnelle. En raison du dispersement des ressources, il y a des gens qui ne peuvent pas avoir droit à des cours de formation professionnelle, parce que les budgets, étant mis dans une province, dans un secteur ou dans une région, sont utilisés.

Pendant ce temps-là, le fédéral continue de l'autre côté. Sans compter qu'il y a là-dedans des exclus, ce qu'on appelle les «sans chèque». Le système actuel, c'est le double système. Le fédéral, par son action, veut faire en sorte de diminuer le nombre de prestataires d'assurance-chômage et on adresse d'abord des cours de formation professionnelle, ou encore des programmes de développement de l'employabilité pour sortir les gens de l'assurance-chômage sans leur garantir un emploi.

(1320)

Pendant ce temps, le gouvernement provincial a vu les conséquences des coupures de l'assurance-chômage, entre autres, qui ont une conséquence immédiate sur l'augmentation du nombre d'assistés sociaux. Le gouvernement se voit un peu dans la balance, par voie de conséquence, obligé de faire des programmes qui visent à sortir les assistés sociaux aptes au travail à suivre une formation pour sortir de l'assistance sociale. Parfois après cela ils réussissent à trouver une «jobine», une job à temps partiel et se retrouvent de nouveau à l'assurance-chômage. Cela se produit dans beaucoup de cas.

J'ai vu dans mon comté quelqu'un qui m'a raconté son expérience personnelle de cinq ans où de cours en cours, de période d'assurance-chômage à période d'aide sociale, à période de travail précaire, cela n'en finissait plus. Cela est un aspect.

Il y a aussi ceux qui sont actuellement exclus par l'un et par l'autre palier de gouvernement, c'est-à-dire les sans chèque. C'est comme notamment les femmes qui veulent retourner sur le marché du travail, qui après avoir passé des années avec des enfants jeunes, deux ou trois enfants, ont envie dans la quarantaine ou avant, de retourner sur le marché du travail. Comme elles n'ont pas eu de prestation d'assurance-chômage dans les dernières années, elles n'ont pas droit à ces cours.

Il y a beaucoup de gens que le système exclut. Encore une fois, nous de l'opposition officielle faisons la bataille sur quelque chose d'extrêmement important, c'est-à-dire d'essayer d'expliquer à la population canadienne, aux députés du gouvernement de ne pas aller aussi loin dans leur volonté, dans la volonté du gouvernement de s'ingérer, d'encadrer, de se mêler de ce qui ne le regarde pas parce que ce n'est pas dans la Constitution, et ensuite de se contredire avec les promesses du premier ministre. Au moment du référendum il avait dit qu'il se retirait de la formation professionnelle.

Malgré ce qu'on a vu la semaine passée, non seulement des élus de l'Assemblée nationale, mais aussi des intervenants socio-économiques importants lors du sommet à Québec, malgré des gens qui représentent le Conseil du patronat, cette motion était même proposée par Ghislain Dufour, président du Conseil du patronat, malgré cela le gouvernement fédéral continue son petit bonhomme de chemin, continue sur son erre d'aller, compte sur la lassitude de la population, compte sur la lassitude des journalistes qui couvrent moins ce débat. Il pense que de toute façon avec le temps cela intéresse moins de monde. C'est aussi dangereux pour l'avenir du Québec.

C'est pour cela que nous, de l'opposition officielle, faisons front commun et on souhaiterait que les organismes, pendant qu'il est encore temps, fassent connaître aussi leur désaccord face à cela. Malgré la tentative du Parti réformiste, l'amendement ne va pas diminuer l'ingérence du gouvernement fédéral, bien au contraire le gouvernement fédéral vient de le dire par ses représentants qui ont pris la parole plus tôt, ils veulent continuer dans ce domaine en officialisant le ministère du Développement des ressources humaines. À mon avis, ce dernier est presque un monstre. Cela réunit le champ de la formation professionnelle en plus des services d'emploi, cela touche les pensions de vieillesse, les prestations aux enfants et pour la famille, les services de garde. C'est considérable.

[Traduction]

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je trouve vraiment incroyable que le Bloc québécois s'oppose à cette motion.

Les députés réformistes ont étudié cet article, et estiment que la motion est tout à fait appropriée et très raisonnable. Il n'est pas inutile de revenir sur cet article pour que les auditeurs comprennent exactement de quoi il s'agit. L'article se lit ainsi:

En vue de faciliter la formulation, la coordination et l'application des politiques et programmes relatifs aux attributions énoncées à l'article 6, le ministre peut conclure un accord avec une province, un groupe de provinces, un organisme public provincial, une institution financière ou toute personne ou organisme de son choix.


1359

(1325)

Au premier abord, il semble très raisonnable d'accorder ce pouvoir au ministre. Nous étions toutefois d'avis, comme ma collègue l'a expliqué,-on nous qualifie de peureux et parfois de paranoïaques-que des précautions s'imposaient, dans un domaine comme celui-ci qui, comme le Bloc québécois le soutient, est avant tout de ressort provincial. Nous estimions qu'il fallait assurer un équilibre des pouvoirs.

Ma collègue a proposé ce qui nous semple un amendement très raisonnable en ajoutant simplement dans cet article le passage suivant: «après avoir obtenu l'agrément du lieutenant-gouverneur en conseil de la province». C'est simplement de cela dont nous débattons actuellement; nous ne discutons pas d'un long amendement légaliste formulé dans un jargon obscur, mais d'un amendement très simple qui permettrait aux provinces de surveiller le gouvernement. Je tiens à rappeler que le gouvernement se targue constamment de consulter les provinces, de discuter et d'entretenir avec elles d'excellentes relations de travail.

Les réformistes ont des doutes à ce sujet. Contrairement au député de Kenora-Rainy River, ils se souviennent très bien de certaines mesures que le gouvernement actuel a adoptées au cours de la 35e législature, tel le projet de loi C-68, sur les armes à feu.

Le gouvernement avait-il l'appui des provinces dans ce dossier, quand on sait que cinq d'entre elles et les deux territoires se sont clairement opposés au projet de loi qui, faut-il le rappeler à la Chambre, aura des répercussions financières directes sur les administrations provinciales et territoriales lorsque le gouvernement fédéral les invitera à procéder à l'enregistrement de toutes les armes d'épaule au Canada?

Des mesures comme celles-là ont des répercussions économiques énormes et bien précises sur les provinces. Pourtant, le gouvernement leur donne arbitrairement force de loi et va de l'avant, quoi qu'il en soit. C'est une crainte que nous avons dans ce domaine aussi. Le ministre, lorsqu'il se heurtera à une certaine résistance des provinces, pourrait tout simplement passer outre, aller de l'avant, mettre en place des programmes et s'attendre à ce que les provinces en assument les frais administratifs ou autres.

Un incident survenu à la Chambre en novembre et en décembre derniers est également digne de mention, notamment pour les députés de la Colombie-Britannique. Le gouvernement a décidé d'accorder un droit de veto constitutionnel aux régions du pays. Dans sa sagesse, il a décidé arbitrairement encore une fois, sans grand préavis, que la Colombie-Britannique constituait une région. Au moment où il jonglait avec l'idée d'accorder ce droit de veto, le gouvernement pensait simplement à réunir la Colombie-Britannique aux trois provinces des Prairies.

Par conséquent, les provinces sont plus que craintives quand on voit ce genre d'article qui, de prime abord, comme je l'ai dit au début de mes observations, semble assez raisonnable. Les réformistes estiment qu'un système de freins et contrepoids est nécessaire. Nous ne comprenons pas pourquoi, dans ce cas particulier au moins, le Bloc québécois est contre.

Pourtant, ce parti se préoccupe toujours des pouvoirs des provinces. Cet amendement prévoit qu'avant d'aller de l'avant et d'instituer des programmes qui auraient un effet marqué sur les provinces, le ministre devrait faire approuver ces programmes par le lieutenant-gouverneur, y compris le lieutenant-gouverneur du Québec dans le cas des programmes faisant l'objet d'une entente bilatérale entre le gouvernement du Québec et celui du Canada. Il n'empêche que quelques députés du Bloc québécois ont dit qu'ils voteraient contre cet amendement. Franchement, je trouve étonnant qu'un parti qui tente toujours d'obtenir plus de pouvoirs pour sa province vote contre un amendement qui aurait précisément cet effet-là.

(1330)

M. George S. Baker (Gander-Grand Falls, Lib.): Madame la Présidente, j'ai quelques mots à dire sur la proposition d'amendement et sur l'affirmation voulant que le Parti réformiste du Canada soit le parti qui protégera les droits des provinces et qui empêchera l'empiétement du gouvernement fédéral sur leurs droits.

Il est très étrange d'entendre le Parti réformiste du Canada faire des remontrances à ce sujet au Parti libéral et au Bloc québécois. Le programme réformiste annonce des empiétements sur les domaines de compétence des provinces. Dans leur bible, leur budget de l'an dernier, les réformistes affirment que, en plus des cieux et des aéroports, des océans et des voies maritimes, ils privatiseraient aussi les routes et les ponts. Si les routes et les ponts ne sont pas sous la responsabilité des provinces, j'aimerais bien savoir de qui ils relèvent. Ce n'est pas seulement une ingérence dans les affaires des provinces, c'en est aussi une dans les affaires des Canadiens.

Imaginez un peu les grandes entreprises qu'il faudrait, parce qu'elles devraient être très grandes, pour construire les autoroutes, comme cela est dit noir sur blanc dans leur programme. Évidemment, il faudrait payer pour circuler sur ces routes. C'est le programme réformiste.

Le parti qui affirme qu'il ne veut pas que le gouvernement du Canada s'ingère dans les affaires des provinces est le même parti qui laisse entendre dans sa brochure d'information qu'il faut réduire les paiements de transferts de 35 p. 100. Imaginez un peu l'ampleur de l'ingérence que cela représenterait dans les affaires des gouvernements provinciaux du Canada atlantique. Ces compressions de 35 p. 100 sont mentionnées dans la bible du Parti réformiste du Canada, ce qu'il est convenu d'appeler le budget des contribuables.

Imaginez les compressions de 34 p. 100 préconisées par le Parti réformiste dans le Régime d'assistance publique du Canada. N'est-ce pas là une ingérence dans les domaines de compétence des provinces? C'est un programme à frais partagés également entre les provinces et le gouvernement du Canada. Le Parti réformiste dit: «Réduisons de 34 p. 100. Réduisons les paiements de péréquation de 35 p. 100.»

Ce n'est pas tout. Voyez par exemple l'intrusion que constituent, dans le champ de compétences des provinces, les attaques des députés réformistes contre le système d'assurance-maladie. Nous connaissons les qualificatifs qu'ils emploient à ce sujet. On trouve


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les mots «intolérablement coûteux et superflu». Ces mots proviennent de l'énoncé de politique du Parti réformiste, ce soi-disant budget des contribuables, cette bible, et il ne s'agit pas ici de la version autorisée, mais dans le version non autorisée puisque personne en dehors du Parti réformiste ne l'autoriserait.

N'est-ce pas une intrusion dans le champ de compétence des provinces que de leur dire que le régime d'assurance-maladie, celui-là même dont nous dépendons, est intolérablement coûteux et superflu? N'est-ce pas une intrusion dans le champ de compétence des provinces, pour ne pas dire une information trompeuse? Ces mots sont tirés du budget des contribuables. Je consulte ce document presque chaque jour et je l'ai ici sous les yeux.

Les réformistes affirment qu'ils vont confier à des entreprises privées la construction de routes, d'autoroutes et de ponts mais que le public devra en payer le coût. N'est-ce pas là une intrusion? Ils sont prêts à réduire les paiements de péréquation de 35 p. 100 et le régime d'assistance publique du Canada de 34 p. 100. Les réformistes disent qu'il faudrait se débarrasser du système d'assurance-maladie parce qu'il est intolérablement coûteux.

Mais que font-ils ensuite? Quelles mesures approuvent-ils? Ils approuvent tous les importants allégements fiscaux qu'ils puissent accorder aux plus grandes entreprises présentes au Canada.

(1335)

Ils ont trépigné de joie lorsque le Sénat nous a renvoyé récemment un projet de loi qui proposait une réduction de 50 p. 100 de l'impôt payé par les plus grandes entreprises multinationales présentes au Canada. Ils sautaient de joie quand il proposait une réduction de 30 p. 100 de la taxe sur les intérêts qui fuient à l'extérieur du Canada. Ils trépignaient de joie et en redemandaient au Sénat. Pour eux c'est une bonne chose que de renoncer aux redevances sur tous les impôts qui fuient à l'extérieur du pays.

Les réformistes veulent réduire les versements aux provinces, des choses qui sont de compétence provinciale. Ils déclarent ensuite en Chambre que ce projet de loi constitue une intrusion dans les champs de compétence provinciale. Ils devraient retourner à leur manuel, à leur politique. Ils devraient manifester une certaine charité à l'endroit des Canadiens.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, cet amendement du Parti réformiste est surprenant. Je l'aurais appuyé s'il avait précédé toute entente que le ministre du Développement des ressources humaines devait faire dans le cadre d'une province. Ce n'est pas le cas.

Ce projet de loi est l'illustration du mal canadien. Le mal canadien, c'est celui d'un pays où il y a plusieurs stratégies pour les mêmes personnes et les mêmes territoires. Il y a une stratégie de développement des ressources humaines, il y a une stratégie de développement tout court, parce qu'on ne peut pas avoir de développement sans développement des ressources humaines. Il y en a une qui est faite par le Québec et une qui est faite par le Canada, pour les mêmes personnes, et cela ne marche pas. Ce n'est pas étonnant que ça ne marche pas. Il ne peut pas y avoir deux stratégies pour les mêmes personnes et les mêmes objets.

Une entreprise qui aurait deux stratégies ne durerait pas longtemps. Un organisme public qui a deux stratégies est voué à l'échec. Un ménage qui a deux stratégies pour élever ses enfants va avoir des problèmes qui ne se régleront pas non plus et qui sont voués à l'échec. C'est impossible d'avoir deux stratégies.

Or, ce projet de loi institutionnalise encore plus les deux stratégies, deux stratégies concurrentes sur les mêmes objectifs pour les mêmes personnes. Comment démêler ces attributions que se donne le ministre en utilisant une expression qui n'est nulle part définie, qui englobe développement des ressources humaines? Les ressources humaines, ce sont les personnes pour autant qu'elles sont considérées comme des ressources, c'est-à-dire qu'elles contribuent à l'épanouissement.

Le développement des ressources humaines, le ministre du Développement des ressources humaines se donne des compétences sur le développement des ressources humaines au Canada, en vue d'améliorer le marché de l'emploi, de promouvoir l'égalité et la sécurité sociale.

Dites-moi ce qui reste pour le Québec là-dedans. Rien. Il se donne les pouvoirs afférents, les pouvoirs de faire les politiques, d'édicter les règlements, de déléguer à qui il veut, et d'étendre sa capacité de contracter avec n'importe quel organisme, toute institution financière, pour l'atteinte de ces objectifs-là.

(1340)

Le ministre du Développement des ressources humaines devient le ministre du Développement des ressources humaines totales. Il ne laisse pas de place. C'est lui qui va négocier. Et l'instrument principal de sa négociation est le fait qu'avec les coupures à l'assurance-chômage, il se soit amassé un surplus qui, d'ailleurs, sans le projet de loi C-12, sera, l'année prochaine, de 10 milliards. Pourtant, il a coupé dans les programmes d'éducation, de santé et d'aide sociale qui vont faire que, cette année et l'année prochaine, des coupures dramatiques devront être faites par les provinces, notamment le Québec.

Il n'est pas étonnant que, s'inspirant de ses pouvoirs, le ministre, par le projet de réforme de l'assurance-chômage, se propose de donner de l'aide, des prestations au chapitre de la formation, de l'aide aux travailleurs indépendants, ce que nous appelons les mesures actives, à des personnes qui ont déjà bénéficié de l'assurance-chômage depuis trois ans. Il élargit la clientèle. Dans cinq ans, je vais vous dire que cela ira chercher une grande partie des gens qui ont besoin de l'assurance-chômage. En conséquence, sa juridiction continuera d'envahir l'ensemble des champs.

Ce n'est pas qu'une question de chicane entre paliers de gouvernement. C'est beaucoup plus tragiquement l'incapacité de chacun de ces gouvernements d'atteindre les objectifs. C'est ça, le vrai


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problème. Et le vrai problème est justement dans la conception qu'on se fait, au gouvernement fédéral, de l'intervention fédérale.

Au gouvernement fédéral, il est évident qu'on ne fait pas confiance aux provinces. Et comme on ne fait pas confiance aux provinces, comme on ne fait pas confiance au Québec, on essaie de se substituer au Québec. Mais au Québec, le consensus sur un grand nombre de sujets, ou la volonté majoritaire dans un grand nombre d'autres est telle, qu'on est loin de faire confiance au gouvernement fédéral pour l'atteinte de nos objectifs.

Vous le savez, on est venu bien près, le 30 octobre, à 52 000 voix près, de faire la souveraineté du Québec. Et pour un grand nombre de Québécoises et de Québécois, la raison de le faire est la nécessité de s'organiser pour qu'une bonne fois, le monde qui a des besoins, toutes ces ressources qui ne demandent pas mieux que de se développer puissent avoir les moyens de le faire.

Ce projet de loi est malheureusement l'expression d'une incapacité de se répartir les tâches au mieux pour la population. Le gouvernement fédéral décide: «C'est moi qui le fais ou c'est moi qui décide qui, comment, à quel coût et avec quelle direction.» Au niveau du gouvernement du Québec, avec la population derrière le gouvernement du Québec, on dit: «C'est nous. Nous sommes un peuple et une nation et c'est nous qui devons décider de ces mêmes objectifs et de l'application de ceux-ci.»

J'aurais souhaité, après le 30 octobre, que du côté du gouvernement, on comprenne que, quelle que soit l'avenir, il y va du bien-être du monde ordinaire, de l'ensemble de la population qui a, au Québec, un grand besoin que les ressources rares soient bien utilisées.

(1345)

Pour qu'elles soient bien utilisées, il ne peut pas y avoir deux stratégies d'utilisation, parce que cela peut entraîner des gaspillages importants, des gaspillages en termes de fonctionnaires. Ces fonctionnaires peuvent avoir à administrer des programmes qui se contrecarrent l'un l'autre, qui ne vont pas dans la même direction. Ils peuvent perdre un temps fou seulement à se coordonner, au lieu que l'argent serve à aider les gens, à les appuyer également, mais dans un sens qui soit clair.

J'aurais souhaité qu'on soit capable d'en arriver à faire ça, quel que soit l'avenir. Je ne peux pas penser que, au gouvernement du Canada, on pourrait jouer avec le bien-être de la population pour donner préséance à des impératifs politiques, constitutionnels. Or, malheureusement, ce qui s'est passé sur ce projet de loi m'a montré que, au contraire, le cynisme gouvernemental est grand et que le bien de la population passe, pour eux, nécessairement par leurs décisions.

[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole sur la motion no 3 concernant le projet de loi C-11. Je veux discuter plus précisément de la proposition du Parti réformiste, qui permettrait aux provinces de continuer d'avoir leur mot à dire dans la manière dont les choses sont administrées au niveau provincial quand des politiques fédérales les touchent de près.

Je veux aussi discuter de certaines préoccupations exprimées par le député de Gander-Grand Falls, qui a fait des observations qu'on pourrait presque qualifier d'hystériques au sujet de ce que le Parti réformiste entend faire si un jour il prend le pouvoir. Je crois que nous devons être bien clairs au sujet du projet de loi C-11.

Le député et plusieurs de ses collègues de la région de l'Atlantique sont inquiets après avoir constaté la performance réalisée par le Parti réformiste aux dernières élections complémentaires-et ils ont de bonnes raisons de l'être. Ils ont vu un parti qui n'avait aucun partisan ou très peu dans cette région, aux élections de 1993, menacer soudain de ravir leurs sièges. Ils ont raison de s'inquiéter, parce que les électeurs de la région de l'Atlantique savent très bien qu'ils ont été mal servis par le système. Ils sont fatigués d'endurer des taux de chômage de 20 ou 25 p. 100. Ils sont fatigués de l'absence de prospérité dans leur région. Ils sont fatigués de ne pas avoir l'infrastructure sur laquelle les autres Canadiens peuvent compter.

Le député de Gander-Grand Falls a pris la parole pour dénoncer le fait que le Parti réformiste veuille placer des péages sur toutes les routes. Or, cette histoire n'est qu'un mythe. Je crois qu'il confond avec les trolls sous les ponts.

Ce que notre parti a dit, c'est que les habitants du Labrador devraient avoir une route convenable. Au lieu d'envoyer de l'argent un peu partout dans le monde pour y construire des routes, nous faisons valoir que les habitants du Labrador méritent bien une route digne de ce nom pour relier les deux grands centres de la région. Nous faisons valoir que le gouvernement fédéral ne devrait pas affecter des deniers publics à la construction de loges luxueuses dans des patinoires couvertes ou de terrains de jeu de boules pour les ministres au centre de Toronto. Nous faisons valoir que les fonds prévus pour l'infrastructure doivent servir uniquement à cette fin. Ce n'est ce qui s'appelle une approche radicale.

Je voudrais rectifier certaines observations que le député de Gander-Grands Falls a formulées à propos de la statégie de réduction des dépenses que propose le Parti réformiste. Le député a dit que nous voulions nous en prendre à l'assurance-maladie. Je rappelle à la Chambre et au député qu'au chapitre des soins de santé, le gouvernement sabre quatre fois plus que notre parti ne l'ait jamais réclamé. Le gouvernement procède à des compressions de l'ordre de 3,2 milliards de dollars dans le budget des soins de santé. Il ferme des hôpitaux et réduit le nombre de lits d'hôpital dans tout le pays parce qu'il n'a pas eu le courage de réduire les dépenses à l'occasion de son premier budget. S'il avait eu ce courage, notre économie serait beaucoup plus saine aujourd'hui. Nos programmes sociaux jouiraient d'une sécurité financière à long terme.

(1350)

Je voudrais aussi toucher un mot sur l'enseignement supérieur. Ce jeu de massacre dans le domaine de la santé, le gouvernement l'a étendu à celui de l'enseignement supérieur. Il a comprimé le budget de l'enseignement supérieur six fois plus que ne le réclamait le Parti réformiste; c'est du 600 p. 100.

Dans le Budget des contribuables de 1995, nous proposions de supprimer 200 millions de dollars. Le gouvernement opte pour une réduction de 1, 2 milliard de dollars. C'est incroyable. Voilà ce qu'il en coûte de toujours remettre à plus tard. Si le gouvernement s'était


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attaqué plus vigoureusement au déficit, il ne serait pas obligé de pratiquer des coupes aussi dramatiques aujourd'hui. Les Canadiens paient maintenant très chèrement sa lenteur à agir.

Je voudrais également toucher un mot sur ce que le député de Gander-Grand Falls a récemment dit au sujet des banques. Nous avons eu un débat là-dessus ce matin. Il a abordé cette question. Il a parlé de la nécessité de tenir les institutions financières responsables de leurs gestes.

Pourquoi n'a-t-il pas mentionné qu'il est resté les bras croisés alors que son parti prenait 250 000 $ aux banques? Pourquoi n'a-t-il pas réagi lorsqu'on a fait cela? Je ne me rappelle pas l'avoir entendu reprocher à son parti d'avoir pris tout cet argent. Qu'a-t-il fait de son attitude moralisatrice dans ce cas-là? Il l'a laissée de côté.

Je ne l'ai pas vu intervenir au sujet de la motion réformiste l'autre jour, lorsque nous avons proposé de corriger la situation au Labrador, quand notre parti a présenté une motion pour examiner l'accord sur les chutes Churchill pour que les gens du Labrador puissent profiter de leur propre travail, au lieu d'envoyer tout cet argent au Québec.

Je n'ai pas entendu le député de Gander-Grand Falls alors. Où était-il? Pourquoi ne s'est-il pas porté à la défense des gens de Terre-Neuve et du Labrador? Il prétend défendre sa province. Où était-il? Il était absent. Il n'avait absolument rien à dire.

En ce qui concerne la défense des provinces, le député n'a pas de quoi se vanter. Il a laissé tomber les gens qu'il représente. On a pu en constater les conséquences au Labrador l'autre jour, ainsi qu'à Humber. Nous commençons à voir certains de nos vis-à-vis paniquer au sujet des prochaines élections.

En toute franchise, cela leur va bien. Il est temps que les gens de la région de l'Atlantique soient bien servis. Ce n'est pas ce qui se produit aujourd'hui. Je tiens à dire au député d'en face que la prochaine fois, il devrait se faire entendre. Quand nous venons défendre sa propre province, la prochaine fois, les gens se rangeront du côté des réformistes.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les non l'emportent.

Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Nous passons maintenant au groupe no 3, motion no 5.

[Traduction]

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.) propose:

Motion no 5
Qu'on modifie le projet de loi C-11 par adjonction, après la ligne 24, page 10, du nouvel article suivant:
«32.1 Au plus tard le cinquième jour de séance de chaque chambre du Parlement suivant le 31 janvier, le ministre fait déposer devant elle le rapport d'activité de son ministère pour l'exercice précédant cette date.»
-Madame la Présidente, cet amendement prévoit le dépôt d'un rapport annuel à la Chambre par le ministre du Développement des ressources humaines.

Pour l'instant, le projet de loi C-11 n'exige pas le dépôt d'un rapport annuel du ministère. Je crains que ce ne soit là pour le gouvernement une manière de cacher de l'information aux Communes et aux Canadiens.

(1355)

Selon moi, tous les ministères devraient être tenus de publier un rapport annuel, qui devrait de surcroît être déposé au Parlement, à qui les ministères ont des comptes à rendre.

Dans le cadre du nouvel examen des programmes, le gouvernement fédéral entend modifier la présentation des prévisions budgétaires. Il laisse entendre que, dans quelques années, elles seront de consultation plus facile, et qu'elles comprendront des renseignements plus utiles et plus pratiques. Le gouvernement semble dire que les rapports annuels sont si généraux qu'ils sont quasi inutiles.

Tous les projets de loi prévoyant la création d'un nouveau ministère ont éliminé l'obligation du rapport annuel. Notre amendement obligerait le gouvernement à continuer de produire un rapport annuel pour ce ministère.

Le processus d'amélioration des prévisions budgétaires nous laisse sceptiques. Il faudrait tout au moins poursuivre la publication des rapports annuels jusqu'à ce que ces améliorations soient apportées. Entre temps, la suppression des rapports annuels réduira l'information que le gouvernement fournit au public canadien.

Nous savons tous que le livre rouge promettait un gouvernement plus transparent. Est-ce bien là de la transparence? Plus de rapports annuels? Ce n'est pas mon avis.

La mission du Parti réformiste est de changer le mode de gouvernement. Les libéraux ont l'occasion de montrer qu'ils sont disposés à être plus ouverts, pour que les Canadiens aient plus facilement accès à toute l'information sur le fonctionnement du gouvernement.

1363

Il ne devrait pas y avoir de secret. Qu'est-ce que le gouvernement essaie de cacher?

C'est l'argent des contribuables que les libéraux dépensent. Les Canadiens devraient savoir où va leur argent. En s'opposant à notre amendement, le gouvernement prouvera aux Canadiens qu'il ne se soucie guère de rendre des comptes et de faire preuve de transparence. Que cherche-t-il à cacher? Il y a quelque chose de louche là-dedans.

Est-ce simplement une autre tactique qu'utilisent les libéraux pour camoufler leur insuccès dans la lutte qu'ils mènent au déficit? Ils refusent de rendre les activités du ministère publiques et même de publier un rapport annuel sur ce ministère.

Le ministère dont nous parlons est énorme. À cause des libéraux, les Canadiens seront incapables de suivre son évolution. Bien sûr, le gouvernement déclare que le budget s'améliorera. Mais pourquoi devrions-nous croire aujourd'hui ce gouvernement qui a déjà promis d'abolir la TPS?

Serait-ce que ce que nous ne savons pas ne peut nous faire du mal? C'est peut-être la raison pour laquelle le gouvernement n'a pas mentionné la dette dans son budget. N'en parlons pas et le problème s'envolera. Les libéraux devraient, au contraire, en parler. Ils devraient admettre qu'ils sont responsables de l'augmentation de la dette depuis 1968 et s'attaquer franchement au problème de la dette. Ils n'en font rien.

J'insiste sur le fait que nous devrions avoir un rapport annuel sur les activités de ce ministère. J'estime que l'ajout des amendements proposés par le Parti réformiste améliorerait grandement le projet de loi C-11. Grâce à ces amendements, le ministère pourra s'attaquer plus directement aux problèmes et aura plus de comptes à rendre au Parlement.

______________________________________________


1363

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES SCIENCES ET LA TECHNOLOGIE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, l'excellence dans les domaines des sciences, de la technologie et des mathématiques est essentielle à l'édification et au maintien d'une économie canadienne plus novatrice. L'avenir du Canada est tributaire du leadership dont nous saurons faire preuve au chapitre des innovations technologiques.

Le discours du Trône et le budget du 6 mars ont tous deux souligné l'importance d'établir des principes directeurs qui amélioreront l'efficacité et la polarisation des efforts fédéraux déployés en matière de sciences et de technologie.

À mon avis, le Canada réussira dans ces secteurs si nous veillons à ce que nos enfants acquièrent les connaissances dont ils auront besoin pour relever les défis.

Le mois dernier, le premier ministre a annoncé les lauréats de 1995 des prix du premier ministre pour l'excellence dans l'enseignement des sciences, de la technologie et des mathématiques. Ces prix reconnaissent le travail d'enseignants de l'élémentaire et du secondaire qui, dans ces domaines, ont exercé une influence très positive sur leurs élèves.

Je saisis l'occasion qui m'est offerte pour rendre hommage à une lauréate de ma circonscription, celle de Lambton-Middlesex, Mme Carol Browne, enseignante en première année à l'école Metcalfe Central.

* * *

LES PHARES

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, en automatisant les phares de la Colombie-Britannique, le ministre des Pêches et des Océans réduit la sécurité maritime sur la côte ouest.

(1400)

Le littoral de la Colombie-Britannique est constitué de longs fjords profonds, d'eaux agitées et dangereuses et de vastes superficies inhabitées. Il est unique, et les conclusions d'études sur d'autres littoraux ne s'appliquent pas nécessairement à celui de la Colombie-Britannique.

Des navires de croisière, des vraquiers, des traversiers, des bateaux de pêche commerciale et sportive, des embarcations à bord desquelles prennent place des touristes et des plaisanciers circulent constamment dans l'étroit passage entre l'archipel de la côte ouest et la partie continentale de la Colombie-Britannique. Plus de 15 000 navires-citernes ont navigué dans les eaux de la Colombie-Britannique en 1995.

Un effectif humain peut fournir des rapports météorologiques précis et récents sur les conditions de navigation aérienne et maritime et il peut observer l'activité côtière, alors que les stations automatisées ne peuvent transmettre qu'une gamme de données recueillies mécaniquement et beaucoup plus circonscrites. Si un système est défectueux ou cesse de fonctionner, ce qui s'est déjà produit, nous risquons des pertes de vie ou des désastres écologiques.

Les réductions des dépenses sont importantes, mais elles sont injustifiées lorsqu'elles sont faites au prix de la sécurité sur nos voies navigables. En cas de danger, rien ne peut remplacer un phare pourvu d'un gardien.

* * *

L'UNIVERSITÉ POLYTECHNIQUE RYERSON

M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, à Toronto, dans Rosedale, ma circonscription, l'université polytechnique Ryerson célébrera la fin d'un projet d'infrastructure qui créera 47 années-personnes.

Ryerson est une institution particulière d'enseignement qui offre un programme éducatif unique à ses étudiants. C'est est un atout de taille pour la ville de Toronto et pour l'ensemble du pays.

La cérémonie d'aujourd'hui illustre aussi comment le programme d'infrastructure créé par le gouvernement a permis à un large éventail d'institutions de construire ou d'améliorer leurs installations. Il a été démontré que le programme, que certains ont qualifié de programme pour l'industrie de la construction, a été bien plus que cela. L'exemple que je donne aujourd'hui démontre comment il peut jouer un rôle utile dans l'éducation des citoyens canadiens. Il


1364

constitue aussi un exemple concret de la collaboration entre les gouvernements fédéral et provinciaux.

Je félicite le président Lajeunesse ainsi que toute la communauté universitaire de Ryerson pour avoir mené à terme cet important projet.

* * *

[Français]

L'ÉRADICATION DE LA VIOLENCE

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, la vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien a annoncé ce matin, en compagnie des dirigeants des entreprises de radiotélévision canadienne, le lancement d'une campagne nationale anti-violence sous le thème «La violence, à vous de réagir».

Cette campagne, qui s'échelonnera tout au long de l'année, mettra l'emphase sur la violence dont sont victimes les femmes et les enfants. Ce projet multimédia a pour objectif de sensibiliser la population à l'influence qu'exerce sur nous la violence et sur les moyens dont nous disposons pour l'enrayer.

De nombreux ministères du gouvernement canadien, les réseaux de télévision et radio, les organismes communautaires ainsi que la firme Cossette Communication-Marketing ont rendu possible la réalisation de ce projet. Nous sommes heureux d'être associés à cette importante initiative et nous invitons toute la population à emboîter le pas avec nous dans cette grande entreprise d'éradication de la violence.

* * *

[Traduction]

CUBA

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, récemment, le groupe Pastors for Peace a essayé d'apporter de l'aide humanitaire-des fournitures médicales, des ordinateurs et des modems-à Cuba en passant par les États-Unis. Les ordinateurs étaient destinés au projet médical cubain INFOMED.

Le mois dernier, ces biens ont été saisis par les douaniers américains, qui ont usé d'une force totalement inacceptable en invoquant une loi américaine interdisant le commerce avec l'ennemi. Cinq membres de Pastors for Peace, y compris le Canadien Brian Rohatyn, font la grève de la faim depuis le 21 février pour protester contre la brutalité scandaleuse des États-Unis.

J'exhorte notre ministre des Affaires étrangères à mettre fin à son silence et à réclamer la restitution des fournitures médicales données par des Canadiens, à condamner fermement le blocus illégal et immoral de Cuba de même que la loi Helms-Burton, qui est illégale.

La population du Canada doit être solidaire de la population de Cuba en cette période très difficile.

[Français]

LA SOCIÉTÉ AÉROPORTS DE MONTRÉAL

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Transports a déclaré dans cette Chambre que les problèmes des aéroports de Montréal ne le concernent pas, puisque la gestion des aéroports a été confiée à ADM. C'est là une réponse bien facile pour se déresponsabiliser.

Le ministre abdique devant ses responsabilités politiques en se cachant derrière une entente de gestion qu'il a lui-même négociée. Or, la situation difficile que vivent actuellement les aéroports de Montréal est en grande partie due aux mauvaises décisions prises dans ce dossier par Ottawa depuis les années 1970.

C'est le gouvernement fédéral qui est responsable du transport aérien au Canada. C'est donc ce gouvernement qui a négocié et qui a signé le bail actuel avec ADM, ce qui lui donne des responsabilités. Il doit demander à ADM de procéder à de véritables consultations avant de prendre sa décision.

* * *

[Traduction]

LES JEUNES DE BURLINGTON

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je veux prendre la parole aujourd'hui au nom des jeunes de Burlington. Notre gouvernement s'est fait fort de montrer la confiance qu'il accordait aux Canadiens, en particulier les jeunes.

(1405)

Dans ma circonscription, Burlington, j'ai eu l'honneur de décerner à huit étudiants diplômés du niveau secondaire une récompense pour leur contribution exceptionnelle à leur école, à leur communauté et à l'ensemble du Canada.

Les plus récents récipiendaires du prix de civisme Paddy Torsney, députée, sont: Stephen Chiu, Lisa Dawn Moody, Angela Minnett, Danielle Buick, Jessica Kristina Hodgson, James Roberts, Jennifer Craig et Aimmie Halchuk.

Je demande à l'ensemble des députés de se joindre à moi pour féliciter ces jeunes Canadiens. Ils ont su relever les défis de l'avenir. Ils sont notre avenir.

* * *

LA JUSTICE

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, au grand désarroi de la famille Robert, de North Bay, en Ontario, le ministre de la Justice a nommé M. John Desotti à la magistrature de l'Ontario. Le ministre a pris cette décision en dépit du fait queM. Desotti fait toujours l'objet d'un examen de la part du Barreau du Haut-Canada.

M. Réginald Robert est décédé un mois avant que le barreau ne rende sa décision dans la plainte que M. Robert avait portée trois ans plus tôt contre John Desotti. Dix-sept jours avant que son épouse, Mme Valérie Robert, une citoyenne âgée, ne mette un terme à cette affaire au nom de son époux décédé, le ministre de la Justice a


1365

accordé l'immunité à John Desotti. Le nouveau juge a été soustrait à l'autorité du barreau et se trouve désormais hors d'atteinte de la famille Robert.

Qu'avait à dire le ministre de la Justice au sujet de cet abus de pouvoir de sa part? Il a répondu que si Mme Robert n'était pas satisfaite, elle pouvait toujours traîner M. Desotti en justice. Il est temps que le premier ministre intervienne en faveur de la famille Robert et s'occupe du ministre qui est passé outre aux droits d'un citoyen âgé.

* * *

[Français]

M. TRAN TRIEU QUAN

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, M. Tran Trieu Quan a été injustement condamné à la prison à vie par un tribunal vietnamien, qui a mis moins d'une journée pour entendre la cause. Par ailleurs, l'enquête d'Interpol a prouvé queM. Quan était victime d'une fraude causée par son client, Excel Cotton International. Quant au gouvernement canadien, il a reconnu que M. Quan servait de bouc émissaire au gouvernement du Vietnam.

Or, le 11 mars, la Ville de Québec adoptait à l'unanimité une motion rappelant que le Parti libéral s'est engagé, dans le livre rouge, à recourir à la politique d'aide au développement pour défendre les droits de la personne à l'étranger et réclame donc que le gouvernement du Canada suspende immédiatement toute aide économique, culturelle et sociale au Vietnam, jusqu'à ce que ceM. Quan ait été libéré et rapatrié.

Le Bloc québécois appuie la résolution de la Ville de Québec et demande au gouvernement d'agir.

* * *

[Traduction]

LA LOCATION DE VOITURES

Mme Bonnie Brown (Oakville-Milton, Lib.): Monsieur le Président, l'industrie automobile est d'une importance cruciale pour l'économie canadienne. Les concessionnaires automobiles, une composante de cette industrie, se sentent aujourd'hui menacés. La location représente en moyenne 40 p. 100 de leurs affaires et ce pourcentage augmente chaque année.

Voilà que les banques à charte veulent qu'on les autorise à se lancer dans cette entreprise très lucrative de la location. À mon avis, si nous permettons aux banques de le faire, nous risquons de compromettre la stabilité et le succès des concessionnaires au Canada. À long terme, la concurrence diminuerait et des milliers d'emplois pourraient être perdus.

Je prie instamment le secrétaire d'État responsable des Institutions financières d'aider les concessionnaires automobiles qui vendent et louent des voitures en interdisant aux banques de se lancer dans la location automobile.

* * *

LES RÉCLAMATIONS TERRITORIALES DES NISGA'A

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le Président, le 22 mars, un événement historique a eu lieu en Colombie-Britannique. Le chef Joe Gosnell, le ministre John Cashore et le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien ont signé un accord de principe avec le peuple Nisga'a sur leurs terres, dans la vallée de la Nass.

La signature de cet accord a été un grand événement pour les habitants de la Colombie-Britannique et pour les participants invités à cette cérémonie. J'y étais. Beaucoup de monde y était. Malheureusement, pour une raison que j'ignore, le député de Skeena a décidé de ne pas y participer

Il a fallu plus de vingt ans de négociations au peuple Nisga'a pour parvenir à cet accord. Il a fallu des heures et des semaines de travail et d'entretiens. Il a fallu 129 ans pour que ce processus aboutisse.

Monsieur le Président, ne pensez-vous pas que nous devrions tous célébrer la réparation honorable d'un tort historique? Qualifier cela d'apartheid, comme le font certains de mes collègues du Parti réformiste, c'est refuser de reconnaître que l'apartheid est issu d'un décret et non pas de négociations.

Je sais qu'il existe des préoccupations des deux côtés, mais soyons fiers de cette réussite. Travaillons ensemble, en tant qu'égaux.

* * *

LA SOCIÉTÉ LINCOLN FABRICS LTD.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de signaler à la Chambre que des initiatives d'amélioration de la qualité ont été prises à la société Lincoln Fabrics Ltd., une PME de ma circonscription, St. Catharines.

(1410)

La société fabrique des tissus vendus dans le monde entier, des tissus à armure large, des matières artificielles pour appliques de voiture, des fournitures de vêtement et d'autres produits connexes. Elle est un fournisseur de nombreuses multinationales, ainsi que du gouvernement du Canada.

Je félicite la société Lincoln Fabrics, qui s'est vu décerner les titres de reconnaissance de la qualité QS-9000 et ISO-9002. Cette entreprise est le premier fournisseur de matières de ce genre en Amérique du Nord à atteindre ce haut niveau de qualité dans ses activités de fabrication et de gestion.

Je félicite le président de Lincoln Fabrics, M. Dave Howes, le vice-président à la fabrication, M. Michael Loney, et tous les employés, pour le bon travail qu'ils font.


1366

[Français]

LA SAISIE DE MATÉRIEL INFORMATIQUE À DESTINATION DE CUBA

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, les 31 janvier et 17 février derniers, les officiers de la douane américaine procédaient à la saisie de matériel informatique à destination de Cuba. Ce matériel était pourtant destiné aux hôpitaux cubains dans le cadre d'un programme de l'Organisation mondiale de la santé.

De plus, le 21 mars, un porte-parole du gouvernement canadien à San Diego déclarait ne pas avoir l'intention d'intervenir pour faire libérer l'équipement saisi. Cela fait également plus de 36 jours que quatre membres de l'organisation Pastors for Peace et un caravanier canadien font la grève de la faim pour obtenir la remise du matériel informatique.

Qu'attend le ministre des Affaires étrangères pour se porter à la défense des organismes d'aide humanitaire envers Cuba, comme il l'a fait hier à Washington pour les compagnies canadiennes qui transigent avec ce pays? Cela reste une énigme tout aussi difficile à résoudre que de savoir où est passée la compassion humaine du gouvernement.

* * *

[Traduction]

LA SOMALIE

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, le fait que des fonctionnaires de la Défense nationale aient détruit des documents sur la Somalie est une autre preuve de camoufflage, mais ce n'est que le dernier incident à avoir affligé le ministre de la Défense.

En février, le ministre signale que la déclaration de son chef d'état-major, qui a dit que le Canada n'était pas prêt au combat, était conforme à la politique du gouvernement.

En janvier, un enquêteur somalien se fait voler des dossier et se voit menacé de poursuites pour avoir dit que les généraux qui lui avaient mis des bâtons dans les roues avaient posé un geste déplacé. La commission de la Somalie dit craindre que les avocats du MDN n'intimident d'éventuels témoins.

En avril 1995, le directeur général des affaires publiques enfreint la consigne de silence du ministre pour dénoncer un rapportd'autopsie confidentiel.

En mars 1995, le ministre remplace la commissaire à la Somalie, Mme Anne Doyle, l'accusant d'être en conflit d'intérêts et déplorant de ne pas avoir été mieux informé.

En janvier 1995, on voit des vidéos montrant les soldats du Régiment aéroporté tenant des propos racistes à des Somaliens et se livrant à un bizutage. Le ministre de la Défense fait fi des conseils et dissout le régiment, ce qui constitue une mesure expéditive de nature politique.

[Français]

L'AÉROPORT INTERNATIONAL DE MIRABEL

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, alors que la solidarité et l'appel à la cohésion se font entendre dans le dossier des aéroports de Montréal, voici que le Bloc québécois étale son opportunisme politique et ajoute à la confusion entourant l'avenir de Mirabel.

Hier, le chef de l'opposition officielle a étalé une fois de plus au grand jour sa faible connaissance des dossiers politiques du Québec en déclarant, et je cite: «que la décision plus récente de construire l'aéroport de Mirabel a nui considérablement au trafic aérien à Montréal.»

Comment le député bloquiste de Roberval peut-il ainsi condamner Mirabel en prétextant qu'il nuit à l'économie de Montréal, alors que les députés de son propre caucus se sont publiquement manifestés en faveur de la survie de l'aéroport de Mirabel? Devons-nous comprendre des propos du chef bloquiste que sa déclaration d'hier servait tout simplement, comme il est habitué à le faire, à préparer le terrain à la décision que s'apprête à annoncer son chef, Lucien Bouchard?

* * *

[Traduction]

LA VIOLENCE

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Monsieur le Président, la violence faite aux femmes et aux enfants a une influence profonde sur chacun d'entre nous, sur nos collectivités et sur notre pays. Je suis heureuse que le gouvernement fédéral continue à prendre des mesures positives pour enrayer la violence, de concert avec les autres secteurs de la société qui sont des partenaires actifs dans cet entreprise.

L'Association canadienne des radiodiffuseurs mérite des félicitations toutes spéciales à l'occasion du lancement d'une nouvelle campagne nationale ayant comme thème fort approprié: «La violence, à vous de réagir». Grâce à la coopération entre radiodiffuseurs privés et plusieurs ministères fédéraux, le message sera transmis à toutes les localités du pays.

Une série d'articles sur la violence familiale, parus récemment dans le Toronto Star, relataient des cas véridiques, mettant en vedette l'importance de ce problème dans toutes ses dimensions.

J'espère que ces récits pousseront tous les Canadiens à prendre part à cette entreprise nationale de prévention de la violence.

* * *

LES MINES TERRESTRES

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Ref.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour présenter de nouveau mon projet de loi visant à interdire l'importation, l'exportation et la production de mines terrestres et de dispositifs antipersonnel au Canada. Ce projet de loi a pour objet de donner au Canada un rôle de premier plan dans l'interdiction de dispositifs haineux qui n'ont pas leur place dans la conduite d'une guerre moderne.

1367

(1415)

Cest une initiative qu'a avalisée aujourd'hui le Comité international de la Croix-Rouge, lorsqu'il a publié les conclusions d'une étude sur l'efficacité et l'utilisation de mines antipersonnel à des fins militaires. Ce document contredit l'idée que les mines sont des armes efficaces et conclut que l'utilité limitée des mines à des fins militaires n'en justifie absolument pas l'utilisation dans le cadre de conflits réels en raison des conséquences épouvantables qu'elles peuvent avoir pour l'humanité. Je tiens à féliciter le CICR pour son rapport.

J'aimerais demander à tous les députés à la Chambre de se joindre à moi pour d'appuyer mon projet de loi qui demande l'interdiction de ces dispositifs haineux.

______________________________________________


1367

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le 12 mai 1995, nous questionnions le gouvernement au sujet des événements survenus en Somalie. À ce moment-là, le ministre de la Défense déclarait, et je le cite: «Nous voulons être sûrs que la lumière sera faite. Le gouvernement n'a rien à cacher. Il veut la vérité». Or, moins d'un an plus tard, le commissaire à l'information nous apprend que des officiers militaires ont délibérément falsifié et éliminé des informations concernant cette affaire.

Ma question, toute simple, s'adresse au ministre de la Défense nationale. Nous voulons savoir qui sont ces militaires qui ont falsifié des documents, quel est leur grade, sous les ordres de qui ils travaillaient et quelles sanctions ont-ils encourues pour leur geste?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit hier, les faits contenus dans la lettre deM. Grace sont conformes à ceux qu'a révélés l'enquête de la police militaire. Nous prenons certainement ces allégations au sérieux.

En fait, ce sont des gens du ministère, en l'occurrence le sous-ministre et l'ancien chef d'état-major de la défense, qui ont signalé ce problème à M. Grace, le commissaire à l'information. C'est le ministère qui a informé M. Grace après avoir appris qu'il y avait eu des irrégularités.

Nous sommes certainement préoccupés par ce que le commissaire à l'information a dit dans sa lettre, mais, comme une enquête de la police militaire est en cours avec tout ce que cela comporte et comme les faits révélés par cette enquête concordent avec ceux décrits dans la lettre de M. Grace, je ne peux pas répondre à la question posée par le député, car cela pourrait nuire à toute personne pouvant faire l'objet de poursuites judiciaires à cet égard.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, c'est toujours très difficile d'obtenir des renseignements quand ça touche les forces armées, dans ce Parlement. On aimerait ça que le gouvernement nous démontre que c'est lui qui mène, de temps en temps.

Maintenant qu'on sait qu'il y a des documents qui ont été falsifiés par des gens de l'armée canadienne pour cacher la vérité, quelle crédibilité peut-on accorder maintenant aux 450 000 pages de documents qui ont été fournis par l'armée canadienne à la Commission d'enquête sur la Somalie? Quelle crédibilité?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je peux vous garantir à vous et à tous les députés de la Chambre que le ministère de la Défense nationale a fait et continuera de faire tout ce qu'il peut pour s'assurer que tous les documents pertinents sont remis à la commission d'enquête.

Comme il y a des dizaines de milliers de pages de documents pertinents, le ministère a eu un peu de difficulté à rassembler ces documents et à les remettre à la commission. Cela a aussi causé des problèmes à la commission, mais nous travaillons avec elle pour aplanir ces obstacles.

Le député a mentionné qu'il n'est pas capable d'obtenir des renseignements du ministère de la Défense et s'est dit insatisfait de ma réponse précédente. Le gouvernement attache beaucoup d'importance aux principes de justice fondamentaux, et nous devons voir à ce qu'aucun de ces principes de justice ne soit violé à l'égard de toute personne pouvant être impliquée dans cette affaire.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, je comprends bien que le gouvernement soit préoccupé, mais quand les préoccupations du gouvernement n'affectent en rien ce qui se passe dans l'armée, c'est plutôt inquiétant. Le ministre devrait savoir ça.

(1420)

On veut savoir, car c'est la population qui paie pour l'armée canadienne, s'il s'est posé des gestes qui sont extrêmement répréhensibles, qui sont très graves.

Le premier ministre ne réalise-t-il pas qu'il y a un problème de crédibilité, même pour son gouvernement, alors que le ministre de la Défense refuse systématiquement de dévoiler quelque information que ce soit au sujet d'événements aussi graves que ceux-là, et surtout quand on considère que chaque fois qu'on a soulevé un sujet en cette Chambre concernant l'armée, il a presque fallu mener l'enquête du Parlement pour faire avancer les choses, tant le ministre est toujours très préoccupé par ce qui se passe mais qui ne fait


1368

rien jamais rien de concret, et qu'il n'y a jamais de mesures réelles d'apportées pour corriger les choses?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, puisque nous parlons de crédibilité, tirons les choses au clair une fois pour toutes.

C'est le ministre des Pêches qui, en avril 1993, lorsque le Parti libéral formait l'opposition, a réclamé une enquête sur toute la question du déploiement des troupes en Somalie. Une fois élu, notre gouvernement a tenu sa promesse après s'être assuré qu'une telle commission ne nuirait pas au processus judiciaire qui était déjà en cours devant la cour martiale.

À propos de l'incident dévoilé récemment, comment le député peut-il parler de la crédibilité du gouvernement lorsque ce sont des fonctionnaires du gouvernement, en l'occurrence le sous-ministre et le chef d'état-major de la défense, qui ont signalé cette affaire très troublante au commissaire à l'information? Il y a eu une enquête interne par la police militaire.

Si le député ne trouve pas cela suffisant, il y a également eu une enquête par une tierce partie, le commissaire à l'information. Il a rendu son jugement. Ce jugement a été rendu public hier, et des mesures seront prises. Les faits exposés dans son rapport sont conformes à ceux exposés dans le rapport de la police militaire. Ce dernier a été remis aux avocats du ministère. C'est tout ce que je peux dire sur cette question à ce moment-ci sans risquer de nuire aux parties pouvant être impliquées dans cette affaire.

* * *

[Français]

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le 29 février dernier, le solliciteur général du Canada, questionné par le député de Bellechasse au sujet de la présence d'un espion à la solde de l'ex-URSS au sein du SCRS répondait, et je cite: «Le directeur du SCRS m'a assuré qu'il n'y a pas de taupe au sein de ce service.»

Aujourd'hui, un mois plus tard, le solliciteur général maintient-il toujours la même déclaration?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Oui, monsieur le Président.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le solliciteur général répondait également, le 29 février dernier, au député de Bellechasse ce qui suit, et je cite :«En ce qui concerne l'ancien employé contractuel du SCRS, cette affaire concerne la gestion interne du service et je ne peux en parler pour des raisons de confidentialité.»

Le solliciteur général a aujourd'hui le devoir et la responsabilité d'informer cette Chambre sur toute l'affaire. Je lui demande siM. Pierre Roy n'a pas justement été congédié parce qu'il était en possession de renseignements mettant en cause la direction du SCRS dans le dossier du présumé espion à la solde de l'ex-URSS.

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, on m'a informé que M. Roy n'était pas un employé régulier du service, il était un employé contractuel, et on n'a pas renouvelé son contrat.

* * *

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, dans son rapport sur le traitement de l'affaire de la Somalie au ministère de la Défense nationale, le commissaire à l'information, John Grace, dit avoir trouvé les indices d'une vaste entreprise de camouflage au MDN. Des documents ont été détruits, altérés ou maquillés et des ordres illicites ont été donnés aux subalternes.

Au lieu de vider l'abcès, le ministre de la Défense nationale a jugé plus important de se porter à la défense du général Boyle en soulignant que celui-ci avait été induit en erreur par ses subordonnés.

Le ministre de la Défense est-il d'avis que, tant que lui et ses officiers supérieurs sont induits en erreur par leurs subalternes, ils n'ont pas à assumer la responsabilité de ce qui se passe au ministère de la Défense?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, contrairement à ce que le député vient de dire, ce n'est pas moi qui ai dit hier que le chef de l'état-major, le général Boyle, avait été induit en erreur par des subordonnés.

(1425)

Cela se trouvait dans la lettre de M. Grace, qui a dit très explicitement que l'actuel chef de l'état-major de la défense n'avait en rien été mêlé aux actes répréhensibles exposés dans sa lettre.

Nous n'essayons pas de cacher quoi que ce soit. Comment le député peut-il nous accuser de dissimulation alors que c'est le ministère qui s'est adressé au commissaire à l'information, a demandé son aide dans cette affaire et a collaboré avec lui dans l'enquête?

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, lorsque quelque chose va mal à son ministère, le ministre rejette toujours la responsabilité sur quelqu'un d'autre que les autorités. Les Canadiens ne peuvent l'accepter.


1369

Le ministre a cafouillé dans l'affaire des vidéos du régiment aéroporté-les vidéos I, II et III. Lorsque les avocats du MDN ont intimidé des témoins et ainsi jeté le discrédit dans l'enquête sur l'affaire somalienne, il a laissé faire. Il a approuvé sans vérification des promotions et des nominations contestables comme celles d'Anne-Marie Doyle et du colonel Peter Kenward. Nous avons maintenant le camouflage pratiqué par le MDN.

Si le ministre de la Défense nationale n'est pas prêt à accepter la responsabilité des actes de son ministère, s'il ne peut pas exiger de comptes des hauts dirigeants sur ce qui se passe au ministère, va-t-il remettre sa démission?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, vous me pardonnerez, mais si je faisais appel à l'indulgence de la Chambre et empiétais sur votre temps, je pourrais faire un plaidoyer aussi éloquent, en arrivant aux mêmes conclusions, à propos du chef du Parti réformiste.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre dirige un ministère de 10 milliards de dollars. Il est responsable de la sécurité nationale et internationale des Canadiens.

Au cours des deux dernières années, il est devenu très clair, hélas, que le MDN échappe à tout contrôle, que des officiers supérieurs font fi de la loi et que le ministre ne veut pas ou ne peut pas y faire quoi que ce soit.

Comme le ministre ne répond pas, je demande au premier ministre s'il assume la responsabilité du chaos qui règne au MDN et s'il exigera la démission de son ministre incompétent.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le problème de la Somalie a débuté lorsque nous formions l'opposition. Nous avons nous-mêmes demandé une enquête. Le problème existait avant notre accession au pouvoir.

Nous essayons d'aller au fond de l'affaire. Une enquête se déroule en ce moment. Nous avons élargi le mandat de la commission pour être certains que la lumière soit faite sur toute l'affaire et que les Canadiens sachent ce qui s'est passé dans cette affaire, qui est survenue avant notre arrivée au pouvoir.

Quant au ministre de la Défense nationale, je n'accepterais pas sa démission même s'il me la présentait, car, dans les circonstances, il fait un excellent travail. Nous l'appuyons sans réserve, et nous sommes fiers de lui.

* * *

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, en août 1994, le gouvernement fédéral annonçait avec beaucoup d'éclat qu'il demandait à 26 ministères et organismes fédéraux de mettre en place des plans d'action pour répondre aux besoins des francophones hors Québec. Or, aux dires mêmes du commissaire aux langues officielles, cette initiative est un échec.

Ma question s'adresse à la vice-première ministre. À défaut de donner suite à ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles, la ministre du Patrimoine va-t-elle finir par comprendre qu'elle cautionne ainsi l'assimilation des francophones qui atteint 38 p. 100 en Ontario et 75 p. 100 en Colombie-Britannique?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le meilleur vaccin contre l'assimilation, c'est d'avoir un pays qui s'appelle le Canada qui protège les droits des minorités d'un océan à l'autre.

(1430)

Ce matin, à Ottawa, on a lancé le théâtre franco-ontarien, où on va avoir le droit, chez nous, d'aller voir du théâtre en français. Il faut dire aussi que, dans le contexte de 41-42, j'ai déjà été personnellement en contact avec le nouveau président du Conseil du Trésor, pour nous assurer que le taux de reconnaissance tel que mentionné par M. Goldbloom, qui était déjà à 80 p. 100, atteigne plutôt 100 p. 100. C'est ce à quoi nous aboutissons avec 41-42.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, l'assimilation actuelle, c'est le Canada qui l'a créée. Au lieu de se gargariser avec des semblants de mesures, que fera la ministre du Patrimoine pour donner suite au dernier rapport du commissaire aux langues officielles qui affirme que, depuis la mise en oeuvre de cette initiative gouvernementale, les francophones ont perdu des services plutôt que d'en gagner?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, j'ai déjà rencontré le commissaire aux langues officielles, et la vérité, je sais que ça fait mal au Bloc québécois, mais la vérité c'est que, actuellement au Canada, il y a plus de jeunes canadiens qui parlent les deux langues que dans n'importe quelle autre période de notre histoire.

Allez-vous reconnaître le travail du député d'Ottawa-Vanier? Allez-vous reconnaître le travail du député de Madawaska-Victoria? Allez-vous reconnaître le travail du député de Timiskaming-French River? Allez-vous reconnaître que, ici, il y a 16 députés francophones hors Québec qui représentent avec fierté leurs commettants dans leur langue? C'est la langue de tout le Canada?

* * *

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens sont à juste titre fiers de leurs forces armées. C'est pourquoi les événements de ces derniers jours sont tellement tragiques.


1370

La Chambre ne peut pas rester inactive et permettre que le manque de leadership à la Défense détruise la confiance que la Chambre, les médias et les Canadiens ont dans leurs troupes.

Est-ce que le ministre de la Défense nationale va mettre la politique de côté, prendre en considération la réputation de notre armée et, par suite, démissionner de sorte qu'un nouveau leadership puisse redresser la situation?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le premier ministre a répondu à cette question.

M. Solberg: Si j'étais à votre place, je ne serais pas aussi sûr de moi, Dave.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, en tant qu'ancien membre des forces armées, je connais l'importance du leadership. Je connais l'importance du moral, et je sais que le moral des troupes a été anéanti, au cours de l'année écoulée, par le manque de leadership. Cependant, la plupart de nos soldats sont des professionnels dévoués comme le montre le travail courageux de ceux qui ont réalisé que ce qu'on leur demandait de faire était répréhensible et qui on choisit la voie honorable, malgré le grand risque personnel.

Est-ce que le ministre va faire ce qui est honorable? Va-t-il faire preuve véritablement de leadership et accepter la responsabilité de ce qui s'est passé et par conséquent démissionner?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je ne veux pas répéter la même réponse.

Le député parle de ne pas faire de politique avec cette question et je pense que c'est un bon conseil. Je demande au Parti réformiste de ne pas en faire non plus. Cela n'a rien à voir avec les hommes et les femmes qui servent actuellement en Bosnie ou en Haïti.

C'est en rapport avec un problème très difficile qui s'est produit avant que le gouvernement soit élu, un problème très difficile à traiter, car nous devions nous assurer que nous étions justes avec l'institution et avec les principes de justice fondamentale.

Je m'inquiète, comme les députés de l'autre côté, au sujet des récents événements, en particulier des faits qui figurent dans la lettre de M. Grace. Si le député lisait la lettre de M. Grace il verrait qu'en l'occurrence le ministère a agi de façon extrêmement responsable en obtenant des opinions extérieures, en ayant une enquête extérieure ainsi qu'une enquête de la police militaire. S'il y a eu faute, nous réagirons de la façon appropriée.

En tant qu'ancien membre de l'armée, le député connaît certainement le système de justice militaire et le respecte, parce qu'il l'a appuyé le temps qu'il a passé dans les forces armées.

(1435)

[Français]

LES DROITS D'AUTEUR

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, les fonctionnaires du ministère du Patrimoine ont annoncé la phase I de la Loi sur les droits d'auteur pour la mi-avril. Il était temps, le milieu culturel attend depuis tellement longtemps le dépôt de cette loi. Cependant, on peut se demander quel prix a payé la ministre pour faire accepter son projet de loi à son caucus.

Ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine. Est-ce qu'elle confirme que la législation sur le droit d'auteur sera déposée à la mi-avril, et s'engage-t-elle à y reconnaître les droits voisins, et ce, de manière concrète et réelle, et non pas seulement de manière symbolique?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà annoncé, avant que mes fonctionnaires comparaissent devant le Comité permanent du patrimoine, que j'avais l'intention de déposer, après Pâques, le projet de loi en question. Le député d'en face pourra l'analyser lorsqu'il sera déposé.

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, je désire poser une question complémentaire.

La ministre peut-elle nous garantir qu'elle ne profitera pas de la présentation d'un nouveau projet de loi sur les droits d'auteur pour ajouter des exceptions et ainsi diminuer les droits de nos créatrices et de nos créateurs?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'attends avec impatience la réaction du député d'en face qui devrait peut-être célébrer le fait qu'après dix ans d'un autre gouvernement, nous sommes capables d'aller de l'avant avec un projet de loi qui est important pour la reconnaissance des droits des artistes et des droits des producteurs pour la première fois dans l'histoire du Canada.

* * *

[Traduction]

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, hier, le solliciteur général du Canada m'a accusée de ne pas savoir qu'un ancien employé du SCRS avait quitté ce service, mais aujourd'hui, les médias rapportent qu'il a avoué lui-même ne pas connaître les circonstances entourant le départ de cette personne.

Permettez-moi de lui dire ce qui s'est vraiment passé. Le service a obligé l'employé à prendre sa retraite il y plus de deux mois, mais en lui accordant une pension de retraite complète.

Le ministre peut-il expliquer pourquoi il n'a pas fourni ce renseignement à la Chambre lorsqu'il a eu l'occasion de le faire?


1371

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons pas l'habitude de traiter à la Chambre de questions touchant le personnel, surtout depuis que la Loi sur la protection des renseignements personnels s'applique à des renseignements de cette sorte.

De toute façon, peu importe comment la députée essaie de s'en sortir, elle a avancé une allégation voulant qu'une taupe ait été employée au SCRS au moment où elle parlait. Elle avait tort alors et elle a encore tort aujourd'hui.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, le ministre doit assurer la sécurité nationale du pays.

Le SCRS a admis que, après avoir entendu huit témoins en cinq jours, il partageait mes inquiétudes quant aux activités de la personne en cause, mais que, n'ayant pu trouver de véritables preuves, il ne pouvait confirmer l'allégation. Pierre Roy était près de trouver des preuves lorsque les dirigeants, à l'administration centrale du SCRS, lui ont soudainement ordonné de mettre fin à son enquête.

Le ministre peut-il expliquer pourquoi on a mis fin à cette enquête?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je croyais que la députée lirait à la Chambre un paragraphe d'une lettre que je lui ai fait parvenir juste avant la période des questions, qui se lit comme suit:

Le directeur a affirmé que la personne visée par ces allégations avait démissionné au début de janvier. Il m'indique aussi que le départ de cet employé n'était pas lié à des questions de loyauté. Le directeur m'assure que cette personne n'était ni un agent du KGB, ni une «taupe» russe.
Pourquoi la députée n'a-t-elle pas lu cette lettre au lieu de me laisser la tâche de le faire?

* * *

[Français]

LA RADIODIFFUSION ET LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre et ministre du Patrimoine.

Hier, visiblement de bonne foi, le ministre de l'Industrie a dit que le décret sur la propriété étrangère dans les sociétés mères des entreprises de télécommunications et de radiodiffusion était adopté. Or, ce n'est pas le cas.

Il y a déjà quatre mois que le gouvernement a annoncé, dans un communiqué officiel, qu'il harmoniserait les règles de propriété étrangère. Comment la ministre peut-elle justifier que ce décret n'ait pas encore été encore adopté par le Cabinet?

(1440)

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est inscrit à l'ordre du jour du Cabinet pour le 23 avril.

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, la ministre réalise-t-elle que son inaction qui a duré si longtemps a créé une injustice entre les entreprises de télécommunication? Cela les a mises en meilleure position concurrentielle que celles de la radiodiffusion.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, cela fait à peine quelques semaines que j'occupe ce poste. Deuxièmement, ce qui m'étonne franchement c'est que si on suivait la politique telle que décrite par le député d'en face, on irait tout à fait à l'encontre de la politique culturelle telle que proposée, entre autres par l'Union des artistes.

J'espère que le député ne veut pas mettre en danger la culture canadienne avec une politique qui pourrait justement mettre les entreprises de télécommunication et les radiodiffuseurs dans une situation où le contenu canadien serait en danger. J'espère que cela ne reflète pas la politique du Bloc québécois.

* * *

[Traduction]

LE COMMERCE

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

Les exportations sont extrêmement importantes pour notre économie canadienne en pleine croissance. Les producteurs, les transformateurs et les fabricants sont très inquiets des mesures que le gouvernement américain a prises récemment au sujet des exportations vers Cuba.

Le ministre peut-il expliquer aujourd'hui à la Chambre et à tous les Canadiens la situation en ce qui concerne nos exportations vers Cuba et les conséquences de la loi adoptée récemment aux États-Unis?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui concerne nos exportations vers Cuba, le député sera heureux d'apprendre qu'elles ont doublé, en fait, en 1995, par rapport à 1994.

Nous avons également des investissements de plus de 200 millions de dollars à Cuba. Nous défendons les intérêts des Canadiens face au projet de loi Helms-Burton en présentant des instances au gouvernement américain. Mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, est à Washington aujourd'hui pour présenter ces instances à son homologue.

Je me suis déjà entretenu de cette question avec mon homologue américain et je vais continuer à le faire. Nous avons également déposé une lettre de plaintes aux termes de l'ALENA et nous allons poursuivre nos actions afin de pouvoir défendre les intérêts des


1372

Canadiens et dire clairement aux États-Unis qu'en ce qui concerne l'établissement de notre politique étrangère et de notre politique commerciale, nous allons le faire nous-mêmes, et les Canadiens peuvent tout à fait légalement commercer avec Cuba, exporter vers ce pays et y investir.

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, revenons un peu sur la question du ministre de la Défense nationale et de la destruction de documents. Voyons à quel moment cela s'est produit.

La première fois qu'on a parlé de camouflage, c'était en octobre 1995. À ce moment, le ministre a dit à la Chambre: «Dès que nous saurons pourquoi cela s'est produit, nous rendrons cette information publique.» Des mois ont passé. Le ministre n'a pas rendu l'information publique. C'est une organisation externe qui nous a communiqué les détails de cet incident et nous ignorons toujours ce que le ministre a fait pour châtier les coupables et corriger le problème.

À la place, il tente encore une fois de dissimuler ses échecs derrière des mesures administratives secrètes. Des documents ont été détruits et le ministre continue à faire des cachettes.

Va-t-il prendre la décision qui s'impose dans ce cas et donner sa démission pour redonner confiance aux Canadiens?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, d'abord, c'est le chef du Parti réformiste qui parle de déloger les responsables du problème et des infractions, comme s'il était plus au courant de la situation que le Commissaire à l'information, comme s'il avait des éléments de preuve et connaissait les faits.

Maintenant, c'est le député qui soutient que les réformistes sont d'avis que la situation devrait être réglée en un jour, alors que j'ai déclaré à la Chambre que nous irions au fond de cette histoire.

Nous sommes témoins de la justice selon les réformistes, qui consiste à porter des accusations et à tirer des conclusions sans même rechercher les faits.

(1445)

Le ministère, le chef d'état-major de la défense, le sous-ministre et moi-même avons agi de manière responsable. Quand nous avons eu besoin d'aide de l'extérieur, j'ai dit à la Chambre des communes que, si nous n'étions pas satisfaits des mécanismes d'examen internes, nous nous adresserions à un organisme externe.

Nous avons donc communiqué avec M. Grace. Il a ouvert une enquête. Il vient de rendre publiques ses constatations. CommeM. Grace et le rapport de la police militaire le recommandent, laissons la justice suivre son cours.

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, ce n'est ni le ministère de la Défense nationale ni son ministre qui ont demandé ces renseignements d'une organisation externe. C'est M. McAuliffe du réseau CBC. Toute cette affaire est délicate. Le rapport du Commissaire à l'information paru hier, qui fait état de la destruction et de la falsification de documents à la Défense nationale, frappe au coeur de notre système, pas seulement à la Défense nationale, mais à tout le gouvernement.

Les commissaires enquêtant sur la mission en Somalie doivent pouvoir se fier aux documents du ministère de la Défense nationale. Les journalistes comptent sur l'accès à l'information pour faire leur travail, tout comme les parlementaires et les Canadiens partout au pays.

Le fait que le ministre gère mal son ministère menace leur confiance. Le ministre est responsable de ses fonctionnaires. Il avait été clairement mis au fait des problèmes. Va-t-il démissionner?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas l'intention de répondre à cette tirade, sauf que je dirai sans la moindre ambiguïté-car j'ai des preuves à l'appui et je peux déposer les documents sur la table de la Chambre des communes- que c'est le sous-ministre qui a attiré l'attention du Commissaire à l'information sur ces problèmes. Il y a eu une enquête par suite de l'initiative du ministère, et non de la personne en question, qui a demandé des renseignements en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

* * *

[Français]

LES IMMIGRANTS INVESTISSEURS

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Le rapport Sharwood, déposé en septembre 1995, prévoyait la création, d'ici juillet 1996, d'un guichet unique où seraient acheminés tous les investissements des immigrants. La fiducie ainsi créée investirait du capital à risque auprès des petites et moyennes entreprises canadiennes.

La ministre peut-elle nous garantir que les décisions qu'elle prendra dans ce dossier n'entraîneront aucune révision forcée du programme québécois d'immigrants investisseurs, comme ce serait le cas si elle appliquait le rapport Sharwood à la lettre?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes en train de réexaminer le programme d'investisseur pour les immigrants. C'est très clair, il y a un moratoire sur ce programme présentement. Nous sommes en train de trouver de nouvelles façons pour que le programme soit plus efficace à l'échelle du Canada, mais je peux assurer le député de Bourassa qu'en aucune manière le nouveau programme ne va porter atteinte aux résultats positifs du programme du Québec.

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, je remercie la ministre pour sa réponse, mais nous avons des doutes, vu l'expérience que nous avons vécue avec son prédécesseur. La ministre peut-elle formellement s'engager à consulter le gouvernement du Québec avant de procéder à des changements qui auraient un impact négatif sur un programme québécois des plus performants, et à respecter intégralement la juridiction du Québec en cette matière?


1373

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la consultation est déjà en cours avec le gouvernement du Québec.

* * *

[Traduction]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, la question de la TPS devient de plus en plus étrange d'un jour à l'autre. Nous entendons maintenant une rumeur absurde-j'espère, du moins, qu'elle l'est-selon laquelle le gouvernement fédéral est prêt à dépenser 1,2 milliard de dollars pour harmoniser la TPS avec la taxe de vente de trois des plus petites provinces du pays. Fait à remarquer, les réductions des transferts aux universités du pays s'élèveront également à 1,2 milliard de dollars.

Le ministre des Finances désespère-t-il de faire oublier sa promesse relative à la TPS au point d'être disposé à dépenser 1,2 milliard de dollars pour sauver la peau de la vice-première ministre tout en réduisant du même montant le financement des universités?

(1450)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Cela vaut bien plus que cela, monsieur le Président.

Je voudrais simplement citer la position la plus récente du Parti réformiste sur la TPS: «Nous félicitons le gouvernement de ses efforts pour harmoniser la taxe avec celle des provinces.» Cependant, il a admis que ce serait un objectif politique très difficile à atteindre.

La question se pose donc: Pourquoi ne nous aidez-vous pas si vous estimez que c'est une bonne idée? Pourquoi posez-vous jour après jour des questions insignifiantes auxquelles nous avons répondu vingt fois? Est-ce parce que vous n'avez rien de mieux à dire?

Le Président: Et c'est reparti, vous oubliez la présidence.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, la Chambre respecterait davantage l'opinion du ministre des Finances sur l'imposition si son entreprise payait des impôts au Canada.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Je demande aux députés de bien vouloir s'en tenir à la fonction administrative du ministre.

M. Solberg: Monsieur le Président, je crois fermement qu'il faut prêcher par l'exemple. Le leadership va de pair avec l'intégrité et la capacité de faire des choix. L'une des choses qui me déconcertent au sujet de l'approche du gouvernement quand il parle d'harmonisation, c'est que cela va coûter des milliards de dollars. En Ontario et en Colombie-Britannique seulement, le coût pourrait atteindre 3,2 milliards de dollars. Or, le gouvernement comprime les dépenses de santé du même montant.

Est-ce que le ministre des Finances est en train de dire qu'il est prêt à dépenser 3,2 milliards de dollars pour sauver la peau de la vice-première ministre et, en même temps, à diminuer d'un montant identique les dépenses de santé? Est-ce que c'est cela qu'il veut dire?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il y a certes un important débat à faire à la Chambre au moment où nous nous apprêtons à effectuer des changements structurels profonds. Dans le cas de la TPS, le gouvernement a l'intention de procéder à des changements structurels, comme il le fait dans d'autres secteurs. Des ajustements seront sûrement nécessaires pour verser des compensations.

Je suis tout à fait disposé à amorcer un tel débat avec les députés du Parti réformiste, du moins ceux qui se sont montrés capables de le faire.

Je n'ai pas l'intention, toutefois, de débattre de la question avec le député. L'accusation qu'il a portée au début de son intervention est totalement fausse. Je soulève d'ailleurs la question de privilège et lui demande de retirer ses propos.

* * *

REVENU CANADA

M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national.

Revenu Canada et Citoyenneté et Immigration Canada ont récemment retrouvé à Port Lacolle, au Québec, un enfant de quatre ans qui avait été kidnappé en Allemagne, le 19 mars, par son père qui n'en avait pas obtenu la garde.

La secrétaire parlementaire pourrait-elle expliquer le rôle que joue Revenu Canada dans la recherche d'enfants portés disparus ou kidnappés?

[Français]

Mme Sue Barnes (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député pour sa question.

[Traduction]

Revenu Canada a mis en oeuvre en 1986 son programme sur les enfants portés disparus. Les agents des douanes sont particulièrement bien placés pour observer les enfants qui entrent au Canada et ont reçu une formation pour discerner les enfants dont la sécurité risque d'être en danger et pour identifier les personnes soupçonnées d'avoir kidnappé des enfants.

En 1991, notre programme a été reconnu à l'échelle internationale et, en 1995, Revenu Canada, la GRC et Citoyenneté et Immigration ont collaboré pour lancer une initiative appelée «Nos enfants portés disparus». Chaque ministère joue un rôle nécessaire dans l'application de ce programme.

Depuis la mise sur pied de ce programme sur les enfants portés disparus, on a réussi à retrouver 450 enfants disparus ou kidnappés.


1374

(1455)

[Français]

LE CENTRE DE FUSION MAGNÉTIQUE DE VARENNES

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles. Dans le dernier budget, le gouvernement mettait fin au financement du Centre de fusion magnétique de Varennes, et ce, sans aucune consultation avec le Québec, qui fournit pourtant 50 p. 100 des fonds alloués à ce programme.

Puisque son ministère ne consacre que 15 p. 100 de ses budgets de recherche et développement en énergie au Québec, comment la ministre peut-elle encore une fois couper au Québec, alors que l'on sait que son ministère a toujours favorisé Hydro Ontario, quasi unique bénéficiaire de l'aide fédérale en matière d'énergie nucléaire?

[Traduction]

Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, la ministre a répondu à cette question. Elle a dit qu'il nous fallait faire des choix. Un de ces choix fut le projet CANDU qui rapporte d'importants bénéfices au Québec. La vente à l'étranger d'un seul réacteur CANDU-6 pourrait générer plus de 100 millions de dollars et 4 000 années-personnes en contrats accordés à des sociétés québécoises.

Le ministère des Ressources naturelles a récemment créé au Québec un laboratoire de recherche sur l'énergie qui se spécialise dans les secteurs énergétiques prioritaires du gouvernement fédéral, soit l'énergie renouvelable, le rendement énergétique et la mise au point de systèmes énergétiques pour les collectivités éloignées.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, la réponse que vient de donner la secrétaire parlementaire ne fait que confirmer ce que j'affirmais dans ma question.

Comment la secrétaire parlementaire peut-elle justifier que son gouvernement coupe les vivres à la recherche sur la fusion magnétique, alors que le Japon, l'Australie, la Chine ainsi que de nombreux pays de l'Union européenne considèrent prometteur ce domaine de recherche et augmentent leur niveau de financement?

[Traduction]

Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, en matière de recherche et développement, le Québec reçoit sa juste part.

Les dépenses de R-D au Québec représentent 23 p. 100 de l'ensemble, ce qui correspond à sa population et à son PIB.

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, la ministre du Patrimoine aime bien intervenir à la Chambre pour dire que le pays va éclater si nous ne sauvons pas Radio-Canada.

Elle n'arrête pas de faire son numéro patriotique, mais, l'ennui, c'est que la ministre elle-même et son gouvernement sabrent dans le budget de Radio-Canada. Elle ne peut avoir raison partout. Elle préconise un financement spécial pour cette institution, mais, comme nous le savons maintenant d'après les propos qu'elle a tenus hier à l'émission Morningside, elle n'a aucune idée nouvelle à ce sujet.

Reconnaîtra-t-elle que, malgré qu'elle n'arrête pas de parler de cette institution canadienne et de sa détermination à la sauver, elle n'a absolument aucun plan financier à cet égard?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux pas comprendre comment le Parti réformiste peut avoir le culot de critiquer le travail que nous accomplissons en tâchant de trouver de nouvelles sources de financement pour Radio-Canada, alors que la position officielle que ce parti a adoptée à l'égard de cette institution, c'est qu'il fallait la supprimer.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le regret de constater que la vice-première ministre ne sait pas que le Parti réformiste a pour position de privatiser, non de supprimer, Radio-Canada. Nous voulons maintenir une entreprise commerciale rentable.

La ministre semble agir un peu comme une boutiquomane dans son ministère. Elle a trouvé, ses sous-ministres ne savent trop où, 6 millions de dollars pour un programme de drapeaux et 150 000 $ pour la crosse. Il est encore plus intéressant de voir ce qu'elle a fait à propos de Radio Canada International: des 16 millions qu'elle a trouvés pour financer Radio Canada International, la moitié provient du budget de Radio-Canada. Elle a ainsi privé cette institution de 8 millions de dollars.

Elle n'a aucun plan. Reconnaîtra-t-elle qu'elle n'a aucun plan pour sauver Radio-Canada?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suppose que je ne devrais pas m'étonner d'être traitée de boutiquomane, qui est bien sûr un défaut qu'on attribuerait uniquement à une femme, par le député qui, pas plus tard que ce matin, assistait à un atelier de l'Association canadienne des radiodiffuseurs visant à éliminer les stéréotypes.

(1500)

Les membres du conseil d'administration de Radio-Canada étaient non seulement heureux, mais très enthousiastes à l'idée d'investir de nouveau dans Radio Canada International, car, à l'instar du gouvernement du Canada, ils considèrent cette institution comme une voix importante et essentielle pour le Canada à l'aube du XXIe siècle.


1375

Je regrette simplement que la politique culturelle du Parti réformiste vaille encore moins qu'une tasse de café.

* * *

L'ASSURANCE-MALADIE

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

Le représentant au Commerce des États-Unis, Mickey Kantor, a fourni une interprétation assez dangereuse de l'annexe 2 de l'ALENA et de ses répercussions sur les fournisseurs canadiens de services de santé sans but lucratif.

Étant donné que la position prise par M. Kantor donnera aux grandes entreprises américaines spécialisées dans les soins de santé accès à notre régime d'assurance-maladie, je voudrais demander au ministre canadien du Commerce international s'il s'unira au ministre de la Santé de la Colombie-Britannique, Andrew Petter, et aux autres provinces pour rejeter clairement la position des États-Unis. Défendra-t-il le régime d'assurance-maladie du Canada?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous avons déjà défendu le régime de soins de santé du Canada. Nous avons précisé, dans l'annexe 2 de l'ALENA, que notre régime de soins de santé était protégé.

Nous avons examiné de près la situation avec nos conseillers juridiques et nous croyons que la protection déjà prévue est suffisante.

Toutefois, les provinces qui veulent assurer une meilleure protection à certains de leurs programmes peuvent les faire inscrire à l'annexe 1 d'ici la fin du mois. Les provinces ont tout le loisir de le faire.

Nous estimons que notre régime de soins de santé devrait être protégé et il le sera.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, deux conférences qui ont eu lieu récemment à Yellowknife et à Inuvik ont encore une fois mis en évidence le problème de la pollution de l'Arctique et la nécessité de promouvoir le développement durable dans cette région.

La secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement pourrait-elle expliquer ce que le ministre entend faire pour que ces conférences portent fruit?

Mme Karen Kraft Sloan (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

M. Hill (Prince George-Peace River): Et, comme par hasard, vous avez une réponse!

Mme Kraft Sloan: J'ai justement une réponse, en effet.

Comme les députés le savent sûrement, l'écosystème de l'Arctique est très fragile et il est victime des polluants toxiques qui proviennent de la région arctique et des pays au sud.

Le député et moi-même avons participé à la conférence des parlementaires de l'Arctique qui a eu lieu à Yellowknife et, plus tard, la même semaine, le ministre de l'Environnement et celui des Affaires indiennes et du Nord canadien ont participé à celle des ministres de l'Arctique qui a eu lieu à Inuvik.

Je suis très heureuse de pouvoir dire que, dans la foulée de ces deux conférences, le ministre de l'Environnement a annoncé la création d'un conseil de l'Arctique qui se réunira cet été. Ce conseil examinera les problèmes auxquels font face les pays circumpolaires de l'Arctique.

En tant que Canadiens, nous devrions être très fiers de cet effort de coopération internationale.

Le Président: Ceci met fin à la période des questions, mais le ministre des Finances veut soulever la question de privilège.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il va sans dire que, dans le feu du débat, un certain nombre d'entre nous se laissent aller à des mouvements de colère et à des réactions émotives et disent des choses qui ne sont pas vraies ou qu'ils regrettent. Cela m'est certes déjà arrivé moi-même.

En pareil cas, il est normal que nous nous rétractions lorsqu'on nous signale l'erreur de nos propos. Je demande au député de Medecine Hat de revenir sur la déclaration qu'il a faite en préambule à sa question. Je puis lui assurer que cette déclaration est absolument erronée et sans fondement aucun. Je demande au député de se rétracter.

(1505)

Le Président: Le député est actuellement présent à la Chambre. Si le député veut répondre à la requête du ministre des Finances, je lui accorderai la parole.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, ceci ne relève pas de la question de privilège. Je tiens à signaler aussi que beaucoup de promesses ont été faites aux Canadiens à l'égard de la TPS. Je tiens à soulever la question de privilège à ce sujet.

Le Président: Comme l'a fait remarquer le ministre, il est vrai que, dans le feu du débat, on fait parfois des déclarations que l'on croit exactes, mais qui ne le sont pas entièrement.

Cela est déjà arrivé quelques fois. Le ministre soulève la question de privilège, mais je dirais qu'il s'agit plutôt d'une divergence de vues. Le ministre a clarifié officiellement son point de vue sur cette déclaration.


1376

Je juge que cela ne relève pas de la question de privilège et qu'il est bien établi qu'un député a fait une déclaration qui a été réfutée par un autre. Cela relève certes du débat et non de la question de privilège.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LANGAGE NON PARLEMENTAIRE

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'attire votre attention sur le commentaire 485 du Beauchesne, qui porte sur les expressions non parlementaires. C'est à la page 147.

485.1) L'utilisation d'expressions non parlementaires peut être signalée à la Chambre par le président ou par n'importe quel député. Le député qui en prend l'initiative doit invoquer le Règlement et non soulever une question de privilège.
2) Sauf pendant la période des questions, c'est au moment même où a été prononcée l'expression incriminée qu'il faut la relever en invoquant le Règlement. On ne doit pas attendre.
Le député. . .

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. . .

Une voix: Laissez-le terminer.

Une voix: Il est en train de s'expliquer.

Le Président: J'écoute le rappel au Règlement du leader parlementaire du gouvernement. Il invoque le Règlement.

M. Gray: Monsieur le Président, les mots dont s'est plaint le ministre des Finances sont clairement non parlementaires et, par conséquent, doivent lêtre retirés.

À cet égard, je cite le commentaire 484 du Beauchesne:

3) Le président ne permet pas qu'un député, à la Chambre des communes, se laisse aller à des critiques contre la Chambre en tant qu'institution politique. . .
J'attire votre attention sur la suite, monsieur le Président:

. . .prête des motifs indignes aux actes d'un ou de plusieurs députés dans un cas particulier. . .
Je prétends que c'est ce que le député de Medicine Hat a fait de la manière la plus incorrecte et inacceptable.

J'ajoute que nos règles établissent clairement que, lorsqu'un député affirme une chose qu'il sait être vraie ou fausse, sa parole doit être acceptée. Le ministre des Finances a fait une déclaration sur des questions qu'il connaît et, à mon avis, tous les députés, et en particulier le député de Medicine Hat, doivent l'accepter comme vraie.

Des précédents très précis établis ici au fil des ans permettent de conclure que le député de Medicine Hat a utilisé une expression qui est clairement antiparlementaire et, par conséquent, il doit retirer ses paroles, sinon il subira la sanction que vous jugerez bon de lui imposer, monsieur le Président.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous avez rendu une décision à cet égard. Vous avez rendu une décision suite à l'intervention du leader parlementaire.

(1510)

Le Président: Veuillez prendre vos places. Le député de Lethbridge a la parole au sujet du même rappel au Règlement.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement au sujet de ce qui se passe ici. Je vous renvoie à ce que dit Beauchesne, à la page 6, sur les décisions du Président.

Monsieur le Président, vous avez rendu une décision au sujet de cette affaire, disant qu'il ne s'agissait pas d'une question de privilège. Vous avez ensuite dit, pour terminer, qu'il s'agissait plutôt d'une divergence de vues.

Le leader parlementaire du Parti libéral a ensuite pris la parole et contesté la décision du Président. Selon Beauchesne, il est très clair, monsieur le Président, que vous êtes l'autorité suprême. Vous êtes la personne élue par la Chambre et, lorsque vous rendez une décision, c'est la décision de la Chambre.

Si le leader parlementaire du Parti libéral veut contester votre autorité, qu'il le fasse directement et non de façon détournée.

Le Président a fait connaître sa décision et cette décision doit être respectée par la Chambre.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je crois que lorsque vous rendrez votre décision, au sujet de ce rappel au Règlement, il y aura trois points à retenir.

Comme le leader à la Chambre l'a dit, le langage antiparlementaire est un sujet de rappel au Règlement. J'aurais également pu faire valoir que dans le cas du député, il y avait matière à question de privilège, mais cette possibilité a été exclue. Cela ne nie pas pour autant le fait qu'il subsiste un rappel au Règlement.

Premièrement, le leader à la Chambre a porté à l'attention de la Chambre une situation de désordre causée par l'emploi de langage antiparlementaire; deuxièmement, il a fait valoir que le fait de prêter des intentions est inadmissible dans tous les cas; et, troisièmement, une allégation a été faite, en vertu de laquelle le ministre a été accusé d'avoir commis un acte qui, au pire, pourrait être considéré comme un acte criminel, c'est-à-dire le fait de ne pas avoir payé ses impôts.

Ces trois éléments combinés constituent certainement une situation inacceptable dans le parlement d'une démocratie moderne. Je demande au Président de statuer que le langage employé est antiparlementaire en vertu de quelque définition que ce soit et de tous les précédents.

Dans le passé, la présidence a statué que le fait de ridiculiser les mots employés par un député à la Chambre constituait un sujet de rappel au Règlement nécessitant une rétractation. Des allégations


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selon lesquelles un autre député avait, dans le passé, fait des déclarations fausses avaient également dû être retirées. La présidence avait également demandé le retrait de propos incendiaires. Finalement, même les députés qui ont jugé bon de mimer l'intonation d'autres députés ont dû se rétracter.

Si tous ces comportements sont antiréglementaires, ce genre d'accusation contre le ministre des Finances du pays devrait certainement être retirée.

M. Gray: Monsieur le Président, je voudrais simplement. . .

Des voix: Assoyez-vous.

Le Président: Je vais écouter les députés au sujet de ce rappel au Règlement. Je donne maintenant la parole au député de Medicine Hat pour un rappel au Règlement.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais, si possible, que nous en terminions avec cette question.

Je voudrais aussi, si possible, citer certains documents que j'estime fiables et qui feront comprendre à la présidence la raison de mes propos durant la période des questions. Si l'on m'y autorise, peut-être les députés de l'autre côté qui ont trouvé à redire à mon langage comprendront-ils.

(1515)

Le Président: Je crois que nous nous enfonçons de plus en plus dans le débat au lieu de nous en tenir au rappel au Règlement.

La situation est assez délicate, surtout pour la présidence. J'ai décidé que ce qu'avait soulevé le ministre des Finances à la Chambre n'avait rien à voir avec une question de privilège. C'est une affaire classée.

J'ai maintenant devant moi un rappel au Règlement sur des propos soit-disant antiparlementaires adressés par un député à un de ses collègues. J'ai des citations qui m'ont été fournies par les deux parties apparemment pour appuyer leur argument.

Je trouve regrettable, chers collègues, que durant la période des questions, nous nous écartions des responsabilités administratives des députés pour tomber dans des domaines qui n'ont rien à voir avec ces responsabilités. J'ai demandé à la Chambre, à plusieurs reprises, tant aux députés qui posent les questions qu'à ceux auxquels ces questions s'adressent, d'essayer d'employer des tournures qui ne débordent pas sur des questions de nature plus personnelle.

J'aimerais, à ce stade, si vous m'en accordez le temps, me reporter non seulement au hansard, mais aussi aux bandes. Si, comme on le prétend-même si je n'ai pas eu cette impression à ce moment-là-un langage antiparlementaire a été utilisé, je demande à la Chambre de me permettre au moins d'examiner les preuves, d'y réfléchir un peu et, au besoin, d'en reparler à la Chambre.

En ce qui concerne donc ce rappel au Règlement, à moins que vous n'ayez d'autres renseignements à me fournir, je préférerais donc prendre l'affaire en délibéré, relire le hansard, ré-écouter les bandes et, au besoin, en reparler à la Chambre. D'accord?

Des voix: D'accord.

Le Président: Le député serait-il assez aimable, s'il a des renseignements à me fournir, de me les fournir en privé pour que je les examine?

J'ai un autre rappel au Règlement du député de Kootenay-Est au sujet d'une question totalement différente.

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. En répondant à une question que je lui ai posée aujourd'hui, la vice-première ministre m'a accusé de sexisme. Je trouve que c'est très malheureux qu'elle fasse une telle remarque justement le jour où l'Association canadienne des radiodiffuseurs présente son programme pour contrer la violence. Elle ne comprend évidemment pas que les boutiquomanes peuvent aussi être des hommes.

Le Président: C'est une question de débat, et non un rappel au Règlement.

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, il arrive souvent, avec ces questions de débat, ces intenventions liées à la question de privilège et ces rappels au Règlement, que les députés s'interpellent de part et d'autre de la Chambre. Malheureusement, j'ai entendu le député d'Okanagan-Shuswap traiter notre whip en chef du gouvernement de «jackass. . .

(1520)

Des voix: Oh, oh!

Mme Torsney: Je ne crois pas que ce soit très correct.

Le Président: Chers collègues, je crois que nous nous renvoyons la balle. Le Président ne peut pas tout entendre ce qui est dit au cours de la période des question ou durant les débats.

Si des termes comme celui que la députée de Burlington a mentionné ont été utilisés, le Président ne les a certes pas entendus. Je vous en conjure, n'utilisez pas ce genre de langage entre vous. Cela ne peut qu'attiser l'animosité des deux côtés.

La députée de Burlington a signalé le fait. Je n'ai pas entendu ce terme. Je crois que nous nous renvoyons la balle de part et d'autre aujourd'hui, avec des accusations et des contre-accusations, ce qui ne peut rien apporter de bon à aucun d'entre nous, à mon avis.

Mme Torsney: Monsieur le Président, au cours de la dernière campagne électorale, le troisième parti a vertement dénoncé le manque de décorum à la Chambre. Je crois que la réaction des députés d'en face, quand j'ai fait ce rappel au Règlement, est

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révélatrice, parce qu'elle montre que les députés savaient que leur collègue avait employé ce terme. Ils ont continué à l'employer et. . .

Le Président: Chers collègues, je vous exhorte de nouveau à éviter d'utiliser ce genre de langage, s'il est vrai que ces termes ont été employés. C'est antiparlementaire et nous ne tolérerons pas cela à la Chambre.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, j'étais sur le point de me demander si je ne devrais pas faire un rappel au Règlement pour pouvoir poser la question du jeudi. Je voudrais demander à mon honorable collègue de nous dire si ça vaudra la peine de revenir après le congé de Pâques.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord remercier la Chambre pour les progrès accomplis ces derniers jours relativement à notre programme législatif.

Nous allons poursuivre nos travaux cet après-midi conformément à la liste fournie jeudi dernier par le ministre du Travail. Des discussions sont en cours qui devraient aboutir à ce que nous passions, en fin d'après-midi ou demain, à la troisième lecture du projet de loi C-13, Loi sur le programme de protection des témoins, puis au projet de loi C-16 sur les contraventions. Je crois qu'on s'est mis d'accord pour faire franchir au projet de loi C-16 toutes les étapes du processus législatif dans cette Chambre.

Si, demain, après en avoir terminé avec ces deux projets de loi, il nous reste du temps, le gouvernement est prêt à demander que la Chambre s'ajourne. À l'ajournement, la Chambre entamera les deux semaines du congé pascal.

À notre retour, les lundi et mardi 15 et 16 avril, la Chambre terminera le débat sur le budget. Le mercredi 17 avril, nous reprendrons la liste que nous suivons actuellement, là où nous nous serons arrêtés aujourd'hui. Si nous avançons plus vite aujourd'hui que ce que j'ai prévu, je communiquerai avec les députés d'en face pour décider de ce que nous rajouterons au programme de cette semaine-là.

Quoi qu'il en soit, je donne préavis à la Chambre que, pas plus tard que le vendredi de la semaine de la rentrée, le gouvernement a l'intention de commencer le débat sur la mesure législative mettant en oeuvre le budget de 1996.

* * *

LES VOIES ET MOYENS

AVIS DE MOTION

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 83(1) du Règlement, je dépose un avis de motion des voies et moyens visant à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur l'accise, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur le bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et la Loi sur la marine marchande du Canada, et je demande que l'étude de la motion soit inscrite à l'ordre du jour.

* * *

(1525)

[Français]

MESSAGE DU SÉNAT

Le vice-président: Collègues, j'ai l'honneur de faire savoir à la Chambre que le Sénat lui a transmis un message pour l'informer qu'il a adopté sans amendement le projet de loi suivant: Le projet de loi C-10, Loi portant pouvoir d'emprunt pour l'exercice 1996-1997.

______________________________________________


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LE MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-11, Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines et modifiant ou abrogeant certaines lois, dont le comité a fait rapport avec propositions d'amendement; ainsi que de la motion no 5.

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous débattons d'un amendement du Parti réformiste, la motion no 5 du troisième groupe. Dans la motion, le député nous demande de retourner à l'ancienne façon de faire, c'est-à-dire la présentation de rapports annuels à la Chambre.

Je voudrais dire à la Chambre que la proposition du Parti réformiste est quelque peu bizarre, dans la mesure où il place cet amendement dans la Partie II du projet de loi, soit celle qui porte sur la Commission de l'emploi et de l'assurance du Canada. D'abord, j'arrive mal à comprendre pourquoi l'amendement se trouve dans la Partie II. Nous trouvons cela un peu bizarre.

De même, les députés savent que la tendance est plutôt à l'élimination des rapports annuels puisque les informations qu'ils renferment se trouvent dans la Partie III du Budget des dépenses. Les députés savent aussi que, en ce qui concerne la Partie III du Budget des dépenses, l'un des éléments les plus importants de la réforme à l'étude, c'est que, lorsqu'on les reçoit, les rapports annuels n'ont plus aucune pertinence pour le travail que l'on fait ici, dans la plupart des cas.

La députée de Mission-Coquitlam a expliqué la raison d'être de cet amendement. Or, en leur qualité de députés de l'opposition, les membres de son parti voient des espions russes partout; ils sont persuadés qu'on ne peut faire confiance au gouvernement du Canada, que celui-ci va manquer à sa promesse d'améliorer le Budget des dépenses. Ils estiment donc qu'ils doivent se protéger en demandant des rapports annuels que personne ne lit et qui sont telle-


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ment désuets qu'ils représentent un véritable gaspillage d'argent pour le gouvernement du Canada.

Voilà donc une autre motion du Parti réformiste. D'une part, il prêche l'économie, mais d'autre part, il présente une motion qui nous coûtera de l'argent. Nous pouvons faire mieux en révisant le processus afin qu'il corresponde mieux aux besoins des parlementaires et que la partie III du Budget des dépenses soit plus pertinente.

Je terminerai en rappelant ce que j'ai déjà dit au sujet de certaines propositions singulières du Parti réformiste. Le gouvernement n'a pas vraiment le choix; il doit rejeter cette proposition qui ne vise qu'à produire en double des informations déjà offertes ailleurs. Combien leur faut-il d'informations à ces gens? Ou bien ils savent lire ou bien ils ne le savent pas. On ne peut continuer à leur remettre des documents à répétition. Ils disent encore qu'il y a des espions russes partout et que les libéraux font partie du problème.

Les réformistes ne devraient pas être aussi paranoïaques. Je peux affirmer en toutte connaissance de cause que la plupart des gens en cette Chambre sont ici pour des raisons valables. Ils se préoccupent du sort du pays et veulent assurer son unité. Il n'existe aucune conspiration. Le plus tôt les réformistes admettront que nous voulons tous travailler dans l'intérêt du pays, le plus tôt nous serons libérés des motions insensées comme celle-ci.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir intervenir sur cet amendement.

On peut se demander au départ pourquoi le Parti réformiste a senti le besoin de présenter un amendement de ce type. Il y a fondamentalement une très bonne raison.

(1530)

Les informations du ministère du Développement des ressources humaines qui sont disponibles sont très abondantes, mais pas très claires. Très souvent, on a un ensemble d'informations, mais pas dans un style ou selon une interprétation qui nous permette de voir ce que les choses disent. Et s'il y a un domaine dans lequel on aurait besoin que les choses soient claires, c'est celui-là.

Par exemple, si on regarde les déclarations du ministre hier sur les gens qui sont de mauvais utilisateurs de la Loi sur l'assurance-chômage, il mêle qui est un mauvais utilisateur, qui est un fraudeur et qui est quelqu'un qui a tout simplement mal compris comment la règle s'applique. Qui d'entre nous est capable de comprendre l'ensemble des règles de la Loi sur l'assurance-chômage? Dans la situation actuelle et selon l'information disponible, plusieurs personnes peuvent dire à peu près n'importe quoi là-dessus.

C'est pour cette raison qu'il est important qu'on ait des informations plus claires pour qu'on reposer nos jugements sur des choses concrètes, sur des résultats réels, sur des faits et non pas s'en servir pour faire valoir nos perceptions qui ne sont pas nécessairement exactes.

Il peut être important de pouvoir évaluer une loi, par exemple comme celle sur l'assurance-chômage et de se demander: «À l'intérieur de ça, qu'avons-nous fait de l'argent, qu'avons-nous fait pour ce qui est de l'activité de la main-d'ouvre, quelle a été l'efficacité de ces activités et de quelle façon ont-elles eu des résultats concrets?» Surtout, il faut avoir cette information le plus tôt possible, parce que ce n'est pas que de l'information factuelle pour dire comment ça s'est passé, il faut également s'en servir pour modifier les façons de faire, les comportements et avoir des politiques plus actives.

Dans notre champ d'action, on se rend compte très souvent que, par exemple, il y a aujourd'hui croissance économique, mais sans création d'emploi. Pour qu'un gouvernement puisse s'ajuster rapidement, pour que le Parlement puisse suggérer des choses intéressantes de ce côté, il faut qu'il dispose de l'information le plus tôt possible. Avec les outils électroniques dont on dispose aujourd'hui, il devrait être possible de produire l'information plus rapidement.

Il y a également un autre élément. Le système de Développement des ressources humaines Canada est terriblement compliqué. Il est très difficile et complexe d'évaluer l'efficacité réelle. C'est sûr qu'une partie de cette complexité est due au fait que le gouvernement fédéral intervient dans plein de champs d'action qui ne sont pas les siens directement, que beaucoup de sommes sont versées au chapitre des paiements de transfert à d'autres paliers de gouvernement, et le citoyen a beaucoup de difficulté à évaluer la réalité de ce qui est vécu. On retrouve cela aujourd'hui dans les différentes informations et perceptions que l'on voit dans l'opinion publique sur la question de la réforme de l'assurance-chômage.

Ceux qui vivent actuellement la réalité à l'assurance-chômage, ceux qui sont en chômage, ceux qui ont vu que, cette année, ils n'ont plus le nombre de semaines nécessaires pour faire le tour de l'horloge pour être sûrs d'avoir un revenu décent toute l'année comprennent très bien ce que cela veut dire parce que leur portefeuille est touché, parce que l'argent dont ils ont besoin pour assurer leur vie quotidienne est touché.

Par contre, les gens peuvent dire, à partir des chiffres, comme le ministre l'a dit hier, qu'il y a plus de 100 000 fraudeurs. Qu'est-ce que c'est, des fraudeurs, à l'assurance-chômage? Comment peut-on décortiquer cela? Quelle partie de ce groupe représente simplement des gens qui ont fait des gestes de bonne foi? Il faudrait vérifier si ces gens ont vraiment été pénalisés et reconnus comme fraudeurs ou s'ils n'ont pas plutôt tout simplement été reconnus comme ayant eu une mauvaise interprétation.

Je vais vous donner un exemple. L'année passée, on a soulevé la question de l'assurabilité. Vous savez que les gens qui sont en affaires, qui sont dans une entreprise peuvent, à certaines conditions, être assurables si ces conditions sont respectées, c'est-à-dire si le lien d'emploi n'est pas trop impliquant pour ce qui a trait aux décisions dans l'entreprise, etc.

Depuis un an, on a demandé quelle était la position du gouvernement là-dessus. Vont-ils faire des choses? Vont-ils corriger des situations? On a dit: «Oui, c'est un problème, il y a un engorgement», mais on n'est jamais capable d'obtenir des données exactes sur cela. C'est le genre de données qu'il serait intéressant d'avoir


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dans un rapport pour qu'on puisse régler un tel problème une fois pour toutes.

Il ne s'agit pas d'un problème de nature politique, ce n'est pas une question de choix partisan, de choix politique, d'idéologie ou d'orientation, c'est une question de voir si quelque chose ne fonctionne pas sur le plan administratif et d'y trouver une solution. La façon de le réaliser est d'obtenir l'information pertinente pour le faire.

Quand on sait que des centaines de cas, qui sont engorgés dans une région, aux bureaux de Revenu Canada, pourraient être traités de façon décentralisée dans les bureaux de Développement des ressources humaines Canada, quand on a ces chiffres, quand on les a dans des rapports, qu'on peut les comprendre et qu'on voit les délais qu'il devrait y avoir, à partir de ce moment-là, il s'agit tout simplement d'avoir le courage politique d'appliquer des solutions afin d'y apporter des corrections.

(1535)

Dans ce sens-là, l'amendement proposé par le Parti réformiste manifeste au moins cette frustration d'avoir devant nous un très gros appareil administratif plein d'information, mais qui dépose cette information goutte à goutte.

Prenons un autre exemple. Nous avons présentement sur la table quelques amendements déposés, des amendements très minimes qui ne modifieront pas grand-chose aux aspects inéquitables de la réforme de l'assurance-chômage, mais nous ne sommes pas capables de savoir du ministère quel va être l'impact économique, qu'est-ce qui va se passer avec ces amendements. Ce type d'information, lorsque nous le laissons traîner, cela laisse encore place à beaucoup d'interprétation inutile.

Donc, on peut dire que l'amendement présenté est légitime, que nous devrions obtenir l'information nécessaire pour que les citoyens sachent le plus rapidement possible quel est le résultat de l'efficacité d'un ministère, que les parlementaires le sachent aussi, que les membres du Comité des ressources humaines le sachent afin que nous puissions réagir le plus tôt possible.

Regardons l'effet des dates. Si le rapport est déposé suffisamment tôt, nous pouvons faire l'interprétation des résultats, voir l'impact tout de suite sur l'année budgétaire suivante, et apporter les correctifs pertinents. Si l'information est transmise trop tard, on a un retard d'un an à chaque fois, et à ce moment-là lorsqu'on apporte la solution, le problème est déjà rendu ailleurs. Donc, on a des gestes à poser de ce côté-là.

Il serait important aussi, en termes d'information, que le gouvernement fédéral puisse nous dire clairement sa vision en termes de chiffre de ce qui a été avancé depuis plusieurs années sur les dédoublements, sur les coûts qui sont engendrés par l'intervention des deux gouvernements sur la question de la main-d'oeuvre.

Comment se fait-il que dans le rapport annuel du ministère, celui-ci n'est pas écrit noir sur blanc? Est-ce que c'est parce que, effectivement, les coûts confirment la réalité que le Bloc québécois dénonce, c'est-à-dire qu'il faudrait absolument que le gouvernement fédéral se retire? Ou si c'est parce que nous ne sommes jamais allés chercher les données, ce qui serait encore plus grave, parce que c'est se fermer les yeux sur une réalité qui n'est pas tolérable et qui devrait être changée, se fermer les yeux et dire: «On continue dans le même sens simplement parce nous pensons que nous avons raison et que nous sommes le gouvernement fédéral.»

Je serais étonné qu'on ait ce genre d'attitude. Ce doit être parce que nous n'avons pas réussi à mettre sur pied des mécanismes pour obtenir l'information plus rapidement, et aujourd'hui dans notre société, l'information c'est le pouvoir. C'est avec l'information que nous pouvons faire changer les choses, c'est avec l'information que nous pouvons ajuster nos programmes à la réalité que les gens vivent. Dans ce sens-là, l'amendement est intéressant.

Est-ce que le gouvernement va être attentif à l'amendement qui est présenté? Je le souhaite, et je souhaiterais tout au moins qu'il y ait des modifications sur la façon dont l'information nous est disponible, afin de s'assurer que nous ayons l'information la plus exacte possible pour prendre des décisions.

Pensons, par exemple, à l'ensemble des études qui ont été commandées par le gouvernement par rapport à la réforme de l'assurance-chômage. Huit études sur 23 ont été rendues publiques. Où sont les 15 autres? Que renferment ces études? Est-ce que, effectivement, nous sommes devant une situation où tout simplement il n'y avait pas d'éléments de contenu intéressants, ou si c'étaient des éléments qui allaient à l'encontre de ce que le gouvernement avait déposé dans sa réforme?

Ce sont des questions que nous nous posons, et que nous avons le droit de se poser, et ce sont des choses qui justifient encore une fois que nous recherchons de l'information qui est plus claire pour que nous puissions comprendre l'argument derrière l'amendement du Parti réformiste. Nous souhaitons que le gouvernement arrive avec des outils de gestion de l'information qui soient plus efficaces pour que nous puissions traiter les gens plus correctement, en bout de ligne, et pour que les citoyens québécois et canadiens qui sont à l'emploi, qui sont en chômage, qui sont en recherche d'emploi aient le maximum de chances de bénéficier des meilleurs services possibles.

Nous ne retrouvons toujours pas cette information dans le projet de loi C-96, et nous voudrions avoir l'information nécessaire pour être capables d'agir sur la réalité. On voudrait que parmi les 750 000 chômeurs qui existent aujourd'hui au Canada, on puisse trouver ceux qui peuvent compléter leur formation, aller vers les emplois disponibles et éliminer tout le chômage qui peut exister au Canada.

(1540)

Donc, en résumé, l'amendement semble intéressant. Il devrait être écouté par le gouvernement et je souhaite que, après, nous puissions avoir un système d'information de gestion qui soit le plus adéquat possible.

Le vice-président: La Chambre est elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

[Traduction]

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.


1381

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Le vote par appel nominal sur la motion proposée est différé.

L'hon. Sheila Copps (pour le ministre du Développement des ressources humaines) propose:

Motion no 7
Qu'on modifie le projet de loi C-11, par adjonction, après la ligne 12, page 17, du nouvel article suivant:
«46.1 L'article 30 de la Loi d'exécution du budget 1995 et l'intertitre «Interprétation» le précédant sont abrogés.»
Motion no 8
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 49, par substitution, aux lignes 9 à 17, page 18, de ce qui suit:
«a) il est loisible, pour l'application de la présente loi, de permettre l'accès aux renseignements obtenus à cette fin par un fonctionnaire, commis ou employé du ministère du Revenu national, du ministère des Finances ou du ministère des Approvisionnements et Services, ou par la Commission de l'assurance-emploi du Canada:».
Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-11, par adjonction, après la ligne 34, page 32, du nouvel article suivant:
«92.1 L'article 96.1 de la même loi est remplacé par ce qui suit:
96.1 Malgré toute autre disposition de la présente loi, le ministre peut permettre l'accès aux renseignements détenus par la Commission ou le ministère du Développement des ressources humaines-notamment ceux recueillis dans le cadre de l'application de la présente loi ou des règlements-au commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, au ministre de la Justice et au procureur général du Canada pour les fins des enquêtes, des pour suites et des activités en matière d'extradition au Canada en ce qui concerne les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité.»
Motion no 12
Qu'on modifie le projet de loi C-11 en supprimant l'article 101.
Motion no 13
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 102
a) par substitution, aux lignes 4 à 7, page 39, de ce qui suit:
«102. En cas de sanction du projet de loi C-7, déposé au cours de la deuxième session de la trente-cinquième législature et intitulé Loi»;
b) par substitution, aux lignes 10 à 17, page 39, page 40,de ce qui suit:
«ou abrogeant certaines lois:»
a) à l'entrée en vigueur de l'article 61 de ce projet de loi ou à celle du para-»;
c) par substitution, aux lignes 46 et 47, page 39, et à la ligne 1, de ce qui suit:
b) à l'entrée en vigueur de l'article 61 de ce projet de loi ou à celle de l'article»; et
d) par substitution, aux lignes 17 à 19, page 40, de ce qui suit:
c) à l'entrée en vigueur de l'article 61 de ce projet de loi ou à celle de l'article».
Motion no 14
Qu'on modifie le projet de loi C-11 en supprimant l'article 103.
Motion no 15
Qu'on modifie le projet de loi C-11 en supprimant l'article 104.
Motion no 16
Qu'on modifie le projet de loi C-11 en supprimant l'article 105.
Motion no 17
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 106 , par substitution, aux lignes 30 à 36, page 43, de ce qui suit:
«106. En cas de sanction d'un projet de loi intitulé Loi concernant les règlements et autres textes, y compris leur examen, enregistrement, publication et contrôle parlementaire, et modifiant certaines lois en conséquence, déposé au cours de la deuxième session de la trente- cinquième législature, à».
M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous en sommes maintenant au groupe no 4.

Je voudrais donner à tout le monde à la Chambre une explication générale des amendements au projet de loi C-11, Loi visant à constituer le ministère du Développement des ressources humaines, qui en est actuellement à l'étape du rapport et faire quelques observations.

Le projet de loi C-11 existait avant la prorogation. Il s'appelait alors le projet de loi C-96 et avait été présenté le 7 juin 1995, lors de la première session de la législature. Il avait été adopté en deuxième lecture, le 28 novembre 1995, puis renvoyé au Comité permanent du développement des ressources humaines. Le comité a étudié le projet de loi en décembre et janvier. Puis, comme nous le savons tous, la Chambre a prorogé.

Le projet de loi a été réinscrit au Feuilleton le 7 mars sous son nouveau numéro, C-11, et c'est de celui-là dont nous parlons aujourd'hui. Pour rétablir le projet de loi, il fallait qu'il soit identique à celui de la précédente session et replacé à la même étape. Cela signifie également qu'il était nécessaire que le projet de loi soit réexaminé par ceux qui l'avaient préparé afin de déterminer si des amendements étaient nécessaires en raison de la prorogation.

Cet examen a été fait et il a été déterminé que des amendements étaient nécessaires parce que le projet de loi C-11 doit maintenant prendre en considération le fait que des mesures législatives proposées au cours de la session précédente ont été adoptées. Autrement dit, il faut changer les clauses conditionnelles dans le projet de loi sur le développement des ressources humaines, par exemple celles qui disent: «si ce projet est adopté avant ce projet de loi», pour tenir compte du fait que ce sont maintenant des lois adoptées et non des projets de loi.


1382

(1545)

Dans ce contexte, on propose 11 amendements à la Loi sur le développement des ressources humaines. Tous ces amendements résultent du fait que le projet de loi C-11 doit être mis à jour pour tenir compte de l'adoption d'un certain nombre de projets de loi au cours de la session précédente.

Dans certains cas, cela signifie que les amendements vont par paires. Un amendement met à jour le projet de loi C-11 pour témoigner de l'adoption d'un projet de loi antérieur, tandis qu'un autre amendement supprimera la mention au conditionnel du projet de loi sur le développement des ressources humaines, la clause «si ce projet de loi est adopté», là où c'est nécessaire. Si un député s'intéresse aux aspects très techniques et quelque peu complexes et arides de ces changements particuliers, je serais bien prêt à les expliquer à la Chambre. C'est l'essentiel des différentes motions très techniques et fort générales.

Sur ce, je voudrais, cet après-midi, faire quelques observations sur le projet de loi proprement dit. Nous en arrivons au terme de notre discussion à l'étape du rapport et de l'examen de toutes les différentes motions qui ont été présentées à la Chambre. En même temps, je voudrais tenter de dissiper quelques-uns des mythes qui ont été débattus à la Chambre, spécialement par les députés du Bloc, qui ont passé beaucoup de temps à parler de ce qui est absent du projet de loi, au lieu de ce qu'il renferme. J'ai pensé qu'il serait bon de passer un peu de temps à parler de ce qui se trouve dans le projet de loi.

Nous ne parlons pas de nouveaux changements organisationnels, ni de nouveaux pouvoirs législatifs, ni de modifications dans les relations fédérales-provinciales. Nous traitons d'un simple projet de loi d'ordre administratif pour donner un fondement législatif à un ministère qui est déjà à l'oeuvre depuis 1993, à savoir Développement des ressources humaines Canada.

Certains feront des acrobaties pour tenter de décrire le projet de loi C-11 comme une sorte de stratagème compliqué qui a été manigancé dans l'intention de ravir du pouvoir constitutionnel aux provinces. Il faut me croire, le gouvernement n'a aucun plan de ce genre dans sa manche.

Le projet de loi C-11 ne fait qu'une chose. Il réunit en un seul ministère, qui s'appelle désormais Développement des ressources humaines Canada, des attributions analogues qu'exerçaient autrefois plusieurs ministères différents.

J'exhorte tous les députés à reconnaître Développement des ressources humaines Canada comme une organisation simplifiée et efficace, centrée sur le service envers ses clients. Après tout, les Canadiens ont besoin, à juste titre, des efforts en ressources humaines les plus intégrés et les plus centrés que la Chambre et notre fonction publique puissent déployer. L'ancien régime allait à l'encontre de ce plan d'action novateur.

Par exemple, Travail Canada s'occupait des relations et des normes en milieu de travail, tandis qu'Emploi et Immigration Canada se chargeait d'offrir un soutien du revenu aux chômeurs et de combler des postes vacants avec des personnes disponibles et qualifiées. En même temps, le Secrétariat d'État traitait des questions d'équité et Santé et Bien-être Canada s'occupait de la sécurité du revenu à long terme. Cela signifie quatre grandes organisations complexes qui travaillaient de façons différentes et souvent contradictoires à des questions interdépendantes qui touchent au coeur même de la vie au travail et au foyer des Canadiens.

Ce projet de loi réunit toutes ces fonctions en un seul ministère simplifié. N'oublions pas que ce ministère existe déjà. Tout ce que fait ce projet de loi, c'est d'énoncer simplement et clairement les activités que DRHC exerce déjà tous les jours.

Le projet de loi C-11 signifie aussi qu'il sera moins coûteux de trouver les méthodes souples, imaginatives et novatrices dont nous avons besoin. Nous ne pouvons pas nous permettre de retarder plus longuement la réorganisation. Nous devons aux Canadiens de trouver de nouvelles façons de leur offrir des emplois et de la formation pour les aider en ces temps difficiles et imprévisibles.

Par exemple, il y a des années, les employés d'usines avaient généralement besoin de moins de connaissances et de compétences pour s'acquitter de leur travail. De nos jours, cependant, il est nécessaire d'avoir des connaissances et des compétences relativement supérieures pour de nombreux emplois dans des usines. En fait, des exigences supérieures font partie intégrante du nombre croissant d'emplois dans tous les secteurs. En réponse à cette nouvelle réalité, le nouveau ministère Développement des ressources humaines Canada rassemble les morceaux dont nous avons besoin pour être florissant dans une économie mondiale basée sur le savoir. Ce nouveau ministère aborde de façon globale les questions socio-économiques et la formation.

Ce projet de loi a une autre dimension captivante qui servira à accroître la capacité du Canada de relever les défis de l'économie moderne. Le projet de loi C-11 bâtit de nouvelles structures que le gouvernement fédéral peut utiliser pour travailler, en partenariat avec les provinces, afin de résoudre certains des problèmes qui nous ont tous tiraillés dans le passé.

(1550)

Même si le ministère n'a pas encore été officiellement créé aux termes de la loi, il permet déjà d'utiliser ces structures coopératives pour fournir, de concert avec les provinces, des services innovateurs et efficaces aux Canadiens de tout le pays. Je voudrais partager quelques exemples avec mes collègues.

À Terre-Neuve et au Labrador, on offre, dans le cadre d'un programme, des bons de formation qui donnent la possibilité aux jeunes défavorisés de poursuivre leurs études. Jusqu'à maintenant, près de 3 000 jeunes ont profité de cette aide, et environ un tiers d'entre eux avaient reçu auparavant de l'aide sociale. Beaucoup de ces jeunes seraient incapables de poursuivre leurs études sans notre aide. Quand je dis notre aide, je veux dire celle de DRHC et celle de Terre-Neuve et du Labrador.

Depuis deux ans, le ministère aide 300 000 étudiants à payer leurs études. C'est notamment grâce à lui que 24 000 jeunes ont réussi à trouver des emplois assez bien rémunérés qui leur offrent certaines possibilités pour leur avenir. Avec l'aide provinciale, 60 000 autres Canadiens marginalisés ont acquis de nouvelles compétences et décroché des emplois. Ces programmes donnent aux Canadiens la possibilité de se préparer en prévision des nouvel-


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les réalités économiques qui touchent tant de monde parmi nous de nos jours.

DRHC entend également offrir un meilleur service et il a déjà obtenu des résultats très impressionnants. Les personnes âgées peuvent dorénavant obtenir des services à quatre fois plus d'endroits qu'avant 1993. Il faut deux fois moins de temps pour traiter certaines demandes et il y a pratiquement deux fois plus de points de service.

C'est le type de service et de programmes que DRHC offre, que les Canadiens veulent et dont ils ont besoin. Le projet de loi C-11 et DRHC n'ont rien à voir avec de nouveaux pouvoirs. Ce sont de nouvelles façons d'utiliser les pouvoirs déjà établis pour offrir, avec un maximum d'efficacité et de concert avec nos partenaires, des services hautement intégrés et rentables.

DRHC est la sentinelle qui protège l'équité et l'égalité des chances auxquelles tous les Canadiens accordent tant d'importance. Le projet de loi C-11 fait en sorte que cette sentinelle poursuive son travail.

Sous une forme ou une autre, ce projet de loi fait l'objet d'un examen très approfondi depuis un certain temps déjà. Le moment est venu de reconnaître qu'on a répondu à toutes les préoccupations. Il faut aller de l'avant et adopter le projet de loi C-11. L'après-midi a été très long. Nous avons parlé de beaucoup de Russes et de taupes, ainsi que de toutes les craintes paranoïaques de l'opposition.

Je veux garantir à la Chambre qu'il s'agit d'un ministère modernisé dont le seul but est de s'assurer que nous offrons les services aux Canadiens au mieux de notre capacité, de la façon la plus efficiente et la plus rentable possible.

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais commenter brièvement les propos du député.

Je crois savoir que les motions 7, 8, 11, 12, 13, 14, 15, 16 et 17 du groupe 4 sont des amendements proposés par le gouvernement et portent sur certains aspects techniques du projet de loi C-11. Je reconnais que les observations du député étaient pertinentes et que ces motions portent surtout sur des modifications de forme. Bien que je convienne que le projet de loi C-11 soit essentiellement d'ordre administratif, car il vise à constituer le ministère du Développement des ressources humaines, je m'interroge sur la méthode et la procédure employées en ce qui concerne les derniers amendements.

Nous disposons d'un processus démocratique à la Chambre. Je souhaite qu'on en use un peu plus pour donner aux députés de l'opposition le temps de se pencher sur ces amendements avant la onzième heure. Par souci démocratique, il faut nous accorder le temps d'y jeter un coup d'oeil. Même si le gouvernement affirme que ce ne sont que des modifications de forme, nous avons le droit, en tant que représentants élus, de disposer d'assez de temps pour en prendre connaissance, en soupeser les conséquences et voir si ce que le député ministériel a dit est vrai.

(1555)

Quoi qu'il en soit, même si je n'ai pas eu le temps de les examiner de près, je suis maintenant prête à me prononcer sur les amendements du groupe 4 proposés par le gouvernement.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, le groupe de motions no 4 est à l'image du projet de loi en soi, effectivement. Le secrétaire parlementaire, tout à l'heure, faisait un peu l'éloge de l'ensemble du projet de loi. Il disait que le Bloc avait parlé de choses qui n'étaient pas dans la loi, mais à l'extérieur de la loi.

Il faut quand même se rendre compte de ce que le gouvernement fédéral a fait depuis plusieurs années, soit d'intervenir dans le champ des provinces sur la question de la main-d'oeuvre sur des bases qui n'étaient pas législatives, et de présenter un projet de loi, de faire adopter une motion qui crée l'équivalent du ministère de l'Éducation du Canada.

Ce n'est pas une loi purement administrative, ce n'est pas une loi qui vient tout simplement faire un portrait de la situation actuelle. C'est donner de la légitimité à une démarche qui ne correspond pas aux pouvoirs conférés aux provinces et au fédéral.

Cette marge qui est donnée dans la loi, on la retrouve dans le groupe no 4 avec la même confusion. Dans les amendements qu'on y retrouve, la question pour les citoyens est la suivante: Jusqu'où le gouvernement peut-il se donner le droit d'aller chercher de l'information personnelle?

À la motion no 8, on parle de l'ajout des ministères du Revenu national, des Finances, de celui des Approvisionnements et Services. À la motion no 11, on parle du ministère de la Justice, du procureur général du Canada pour les fins d'enquête, ce, aux fins des crimes de guerre.

Il y a là des éléments importants qui touchent la confidentialité. Étant député depuis deux ans et demi, j'ai vraiment senti la force de l'appareil bureaucratique face à l'individu, comment, lorsqu'il y a une enquête sur une situation, dans le cadre de la Loi sur l'assurance-chômage, par exemple, c'est l'inverse de ce qu'on retrouve dans les tribunaux habituels. La personne est déclarée coupable jusqu'à ce qu'elle prouve le contraire, alors que dans le système judiciaire, c'est l'inverse.

Souvenons-nous des amendements apportés à la loi la dernière fois qui interdisaient à des personnes de recevoir de l'assurance-chômage, comme dans le cas du bénéficiaire qui a dû prouver qu'il n'avait pas été congédié pour telle ou telle raison. On peut être en position de s'interroger beaucoup sur les objectifs du gouvernement lorsqu'il veut élargir le champ d'enquête de cette façon.

Est-ce que cela ne s'inscrit pas dans une continuité de la chasse aux chômeurs plutôt que de la chasse au chômage? On pense qu'on va régler la question du chômage en faisant que les gens qui sont dans des situations difficiles, qui vivent dans une réalité où ils ne


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sont pas sensibles tous les jours à la complexité d'une loi, se retrouvent de plus en plus pénalisés par cette loi.

C'est pour cela qu'avant d'adopter un amendement autorisant le gouvernement à faire des croisements d'information avec le ministère du Revenu national et celui des Finances, avec le ministère des Approvisionnements et Services, et dans d'autres cas, avec le ministère de la Justice, le procureur général du Canada, il faut s'assurer que ces choses se font dans le respect du droit à la confidentialité de certaines informations.

En parallèle, on pourrait dire que si on avait le même genre d'exigences pour les gens qui ont des fiducies familiales ou qui profitent de tout autre processus d'évitement fiscal, si on avait les mêmes exigences d'information, est-ce qu'on n'aurait pas un taux de gens qui ne sont pas conformes à la loi beaucoup plus élevé que celui que l'on retrouve chez les chômeurs, chez les gens qui se servent de ce programme social?

Est-ce qu'il n'y a pas deux poids deux mesures dans ce genre d'amendement?

(1600)

Ce sont des questions qu'on peut se poser. On peut se demander si le gouvernement n'est pas en train de compléter par la bande le travail qu'il fait de l'autre côté avec la réforme de l'assurance-chômage, s'il n'est pas en train de créer un climat où on veut pénaliser les gens qui se servent du régime et on veut s'assurer de les traquer jusque dans les moindres détails, quitte à ce que parfois, on aille trop loin en termes de recherche d'information.

Il y a déjà eu des expériences au Canada dans d'autres secteurs par rapport à ça. On a déjà vu où ça mène en matière d'aide sociale lorsqu'on s'arroge le droit d'intervenir, d'aller chercher toutes sortes d'informations dans toutes sortes de domaines concernant une personne. Il y a là-dedans quelque chose qui, à un moment donné, devient immoral. Quand on connaît la puissance du matériel informatique pour chercher ce type d'information, cela nous amène à nous interroger et à être très hésitants avant de voter en faveur d'un tel amendement.

J'invite donc le gouvernement et le Parti réformiste à réfléchir avant de voter en faveur de cet amendement. Tous les députés en Chambre ont vu, dans leur circonscription, des citoyens se présenter à leur bureau et leur expliquer comment, devant l'appareil administratif, ils sont un peu impuissants, comment il est difficile de faire face à une lettre qui vous informe que vous n'êtes pas admissible à l'assurance-chômage, alors que ça fait trois années consécutives que vous occupez le même emploi et que, soudainement, quelqu'un s'est réveillé quelque part ou a décidé d'interpréter une règle différemment. Quand ils se font bloquer leur chèque et que c'est leur seul revenu, les citoyens ne sont pas équipés pour faire face au gouvernement pour remonter dans l'appareil.

Je pense qu'il faudrait donner une chance égale au citoyen et lui permettre d'avoir une défense adéquate de ses points de vue et s'assurer que les informations qu'on donne à titre confidentiel à l'une ou l'autre partie ne vont pas nécessairement servir à toutes sortes de fins, parce que, à ce moment-là, on crée un climat de méfiance qui n'est pas sain et qui ne rend pas justice aux citoyens, ce qui fait que, dans notre société, on devient très craintifs par rapport aux interventions de l'État. Je pense que le gouvernement doit réfléchir à cette question avant de voter en faveur de tels amendements.

[Traduction]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion 7, dans le groupe

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent. Je déclare la motion no 7 adoptée. Je déclare donc les motions nos 11 à 17 adoptées.

Le vice-président: Le vote suivant porte sur la motion no 8. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent. Je déclare la motion adoptée.

Le vice-président: Nous passons maintenant le débat sur le groupe no 5.

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.) propose:

Motion no 9
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 50, par substitution, à la ligne 37, page 18, de ce qui suit:
«des Approvisionnements et Services ou de la Société canadienne des postes, à la».

1385

Motion no 10
Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 76
a) par substitution, à la ligne 13, page 25, de ce qui suit:
«76. (1) L'alinéa 33(2)a) de la Loi sur la sécu-»;
b) par substitution, aux lignes 18 et 19, page 25, de ce qui suit:
«Services, de Statistique Canada ou de la Société canadienne des postes, à la Commission de l'assurance-emploi du»;
c) par substitution, aux lignes 26 à 30, page 25, de ce qui suit:
«Commission leur délègue, dans la mesure où ces renseignements portent»; et
d) par substitution, à la ligne 32, page 25, de ce qui suit:
«sur le montant d'une prestation, ou que leur»;et
e) par adjonction, après la ligne 34, page 25, de ce qui suit:
«(2) Le paragraphe 33(3)a) de la même loi est remplacé par ce qui suit:
a) le fait pour le ministre du Revenu national ou son délégué de permettre l'accès, pour l'application de la présente loi, au ministre, ou à tout autre agent du ministère du Développement des ressources humaines que celui-ci a désigné à cette fin, à un rapport donnant des renseignements dont il dispose sur tout demandeur ou prestataire, ou son conjoint:».
M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je ne parlerai pas longtemps de ces deux motions, parce qu'elles sont exactement semblables à celles du groupe no 4 que nous venons de débattre.

(1605)

Il s'agit encore une fois de motions de forme. Je voudrais que tout le monde sache ce que représentent les motions 9 et 10. J'expliquerai brièvement leur objet aux députés de l'opposition. S'ils veulent en discuter plus longuement, ils sont libres de le faire. Toutefois, il ne faudrait pas retarder davantage l'adoption de ce projet de loi.

L'article 50 est modifié afin de tenir compte d'une modification apportée à un article de la Loi sur les allocations spéciales pour enfants, par suite de l'adoption de l'ancien projet de loi C-54.

Les députés se souviennent que ce projet de loi C-54, qui proposait des modifications de forme, a été adopté au cours de la dernière session et modifiait à la fois la Loi sur la sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les allocations spéciales pour enfants et la Loi sur l'assurance-chômage. Le projet de loi C-54, adopté par le Parlement au cours de la dernière session, comprend déjà ce changement de libellé. C'est un autre cas de pairage. Quand nous y serons, l'article 104, qui renferme les aspects conditionnels de ce changement de libellé au projet de loi constituant le ministère DRH, sera supprimé. Nous avons fait cela à l'égard du groupe précédent. Nous l'avons déjà fait.

La motion no 10 modifie l'article 76 à trois places. Elle y ajoute un alinéa pour tenir compte du fait qu'il y aura désormais deux paragraphes plutôt qu'un seul.

L'alinéa b) apporte une modification qui avait été faite à l'article de la Loi sur la sécurité de la vieillesse par suite de l'adoption du projet de loi C-54, que je viens de mentionner.

L'alinéa c) apporte une autre modification qui avait été faite à l'article de la Loi sur la sécurité de la vieillesse par la même occasion. Puisque le projet de loi C-54 a précédé le projet de loi constituant le ministère DRH, la motion met à jour le titre du ministre responsable de ce ministère.

Encore une fois, toutes les propositions ci-dessus feront l'objet d'un pairage. L'aspect conditionnel de cette modification figure à l'article 104 du projet de loi constituant le ministère DRH. L'article 104 sera donc supprimé.

Voilà donc le débat très ardu et assez complexe que nous avons tenu pour expliquer pourquoi nous avons dû apporter des modifications. À la décharge du gouvernement, je dirai qu'en ce qui concerne les observations de la députée réformiste, il aurait été assez difficile de lui communiquer les modifications longtemps d'avance, étant donné que les Chambres ont été prorogées et que nous avons pris le temps soumettre le projet de loi à des spécialistes du ministère, pour qu'ils veillent à ce qu'il reflète bien la nouvelle réalité.

Nous ne cherchons pas à agir dans le secret et de façon antidémocratique. Ces choses doivent être faites. Au nom du gouvernement et en mon nom personnel, je puis garantir à la députée que ce ne sont que des modifications de forme, qui n'ont aucun effet sur la subs-tance du projet de loi ni sur les activités du ministère.

Je profite de l'occasion pour remercier la Chambre d'avoir pris le temps d'écouter les explications de ces amendements, qui sont nécessaires pour que le projet de loi reflète la réalité.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, ces deux amendements ont un effet très spécial. D'un côté, on va réduire l'information disponible qui pouvait être donnée à des gens, par exemple, sur le montant d'une prestation ou la qualité d'un prestataire. D'un autre côté, on augmente le nombre de personnes à qui l'information est disponible, c'est-à-dire des intervenants gouvernementaux. On parle même d'ajouter la Société canadienne des postes, pour les gens qui peuvent avoir accès aux dossiers.

La Société canadienne des postes, il ne faut pas l'oublier, ce n'est plus comme tel un organisme gouvernemental, c'est une société de la Couronne avec beaucoup de marge de manoeuvre, dont le mandat est en train d'être revisé. On pourrait se retrouver dans une situation où on donne accès à l'information à un organisme quasi privé, ce qui pourrait sûrement créer des problèmes significatifs.

Ce dont on parle, c'est de pouvoir retracer du courrier, un envoi fait à une personne et pour lequel on aurait besoin, de la Société canadienne des postes, de trouver la raison pour laquelle le courrier ne se rend pas ou à quel endroit il a finalement abouti. De ce côté-là, je pense qu'il y a des éléments un petit peu dangereux.

(1610)

On enlève également la délégation aux provinces de l'utilisation de certains renseignements. On ferme la porte aux provinces mais on donne un accès à plusieurs organismes. On enlève le droit à l'information sur certains aspects pour les citoyens mais on le donne à plusieurs organismes fédéraux.

1386

Je pense que ce type d'amendements entre dans la même ligne que ceux dont on parlait précédemment, c'est-à-dire que l'appareil gouvernemental se donne encore plus de possibilités d'intervention et le citoyen voit un petit plus disparaître la confidentialité de certaines données le concernant. Il faudra toujours être prudents face à de telles situations. De plus en plus, avec les moyens modernes de communication, on entre dans la vie privée des gens et ce n'est pas nécessairement approprié de le faire.

L'opposition officielle sera contre la proposition faite dans cet amendement.

[Traduction]

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, ces deux amendements me posent le même problème que les articles initiaux. C'est pour cela que le Parti réformiste a proposé des amendements.

Je me préoccupe du fait que nous ne sommes pas au courant de certaines choses qui se font. C'est pour une bonne raison que je propose cet amendement pour qu'on produise un rapport annuel. J'espère que le gouvernement songera à l'incorporer au projet de loi C-11.

Par ailleurs, il me semble important qu'on ne court-circuite pas les provinces ou qu'on ne donne pas l'impression de le faire. C'est pourtant ce que le projet de loi semble faire. C'est vraiment ce que le libellé permet de croire. Voilà ce qui me préoccupe.

Ces deux amendements donnent au gouvernement plus de possibilités pour intervenir. Voilà la préoccupation que je devrais soulever en tant que députée. La motion no 9 ajoute Postes Canada à la liste.

Le porte-parole du gouvernement ne m'a pas encore répondu à propos des répercussions que cette disposition pourrait avoir. On ne nous a donné aucune explication à la Chambre à ce sujet. Il faudrait nous l'expliquer à la Chambre. Cela me préoccupe.

Tant que je n'aurai pas obtenu d'explications claires, je ne serai pas prête à me prononcer en faveur des motions nos 9 et 10. Dans ce cas, le Parti réformiste votera contre.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 9. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent. Je déclare la motion no 9 adoptée avec dissidence.

Le prochain vote porte sur le motion no 10. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent. Je déclare la motion no 10 adoptée avec dissidence.

[Français]

Le vice-président: La Chambre abordera maintenant les votes par appel nominal différés à l'étape du rapport du projet de loi.

Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

[Traduction]

Le vice-président: Comme le whip du gouvernement l'a indiqué, le vote par appel nominal sur la motion est reporté au lundi 15 avril 1996, à 18 h 30, heure à laquelle les députés seront convoqués par un appel d'au plus 15 minutes.

______________________________________________

1386

LA SANCTION ROYALE

(1615)

[Français]

Le vice-président: J'ai l'honneur d'informer la Chambre qu'une communication dont voici le texte a été reçue de Rideau Hall:

Résidence du Gouverneur général
Ottawa

le 28 mars 1996

Monsieur,
J'ai l'honneur de vous aviser que le très honorable Antonio Lamer, juge en chef de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de Gouverneur général suppléant, se rendra à la Chambre du Sénat aujourd'hui, le 28 mars 1996, à 16 h 10, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.
Veuillez agréer, monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération.
Le sous-secrétaire politique, programme et protocole,
Anthony P. Smyth

______________________________________________


1386

SANCTION ROYALE

Le gentilhomme huissier de la verge noire apporte le message suivant:

1387

Monsieur le Président, c'est le désir du très honorable suppléant de Son Excellence le Gouverneur général que cette honorable Chambre se présente à lui immédiatement à la Chambre du Sénat.
En conséquence, le Président et les membres des Communes se rendent au Sénat.

(1625)

Et de retour:

Le Président: J'ai l'honneur d'informer la Chambre que, lorsqu'elle s'est rendue auprès du très honorable suppléant de Son Excellence le Gouverneur général dans la Chambre du Sénat, le très honorable suppléant de Son Excellence a bien voulu donner, au nom de Sa Majesté, la sanction royale aux projets de loi suivants:

Projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur les juges-Chapitre no 2.
Projet de loi C-10, Loi portant pouvoir d'emprunt pour l'exercice 1996-1997-Chapitre 3.
Projet de loi C-21, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1996-Chapitre 4.
Projet de loi C-22, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1997-Chapitre 5.
[Traduction]

En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député d'Oxford-Les pipelines; le député de Bourassa-La ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

______________________________________________


1387

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-18, Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Cinq motions d'amendement sont inscrites au Feuilleton à l'étape du rapport du projet de loi C-18, Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois.

(1630)

La motion no 1 fera l'objet d'un débat et d'un vote distincts.

Les motions nos 2 et 4 seront regroupées pour le débat, et le vote sur la motion no 2 vaudra pour la motion no 4.

Les motions nos 3 et 5 seront débattues ensemble, mais elles feront l'objet de votes distincts.

J'appelle maintenant la motion no 1.

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.) propose:

Motion no 1
Qu'on modifie le projet de loi C-18, à l'article 4, par substitution, à la ligne 3, page 2, de ce qui suit:
«a) l'exécution des lois et décrets ou règlements fédéraux ne ressortissant pas de droit à d'autres ministères fédéraux ou à l'un de leurs titulaires, et touchant de quelque manière que ce soit à la santé de la population;
a.1) la promotion et le maintien du bien-être».
-Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je propose un amendement à l'article 4 du projet de loi C-18, autrefois C-95. Essentiellement, l'amendement rétablit un article de la Loi sur le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, loi qui remonte à 1944 et a bien servi les Canadiens pendant un demi-siècle.

Comme la Chambre le sait, le style de rédaction des lois évolue avec le temps. C'est pourquoi le projet de loi C-95, tel que libellé au départ, proposait une description plus contemporaine des responsabilités du ministre de la Santé.

Les rédacteurs de cette mesure législative m'ont, à maintes reprises, affirmé, à moi et à d'autres, que le projet de loi C-95, tel qu'étudié à l'étape de la deuxième lecture, n'aurait pas grandement modifié les responsabilités du ministre de la Santé relativement à l'exécution de certaines lois. D'autres, par contre, étaient moins convaincus.

Je vais commencer par bien préciser l'objet de l'amendement. Il vise à insérer au paragraphe 4(2) après «Les attribution du ministère en matière de santé comprennent notamment» ce qui suit: «l'exécution des lois et décrets ou règlements fédéraux ne ressortissant pas de droit à d'autres ministères fédéraux ou à l'un de leurs titulaires, et touchant de quelque manière que ce soit à la santé de la population.»

L'amendement vise à rassurer la population qui pourrait croire que le gouvernement cherche à ne pas être tenu responsable de l'exécution des lois. La Loi sur le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social renferme actuellement une disposition similaire.

Il n'est plus nécessaire de mentionner la sécurité sociale et le bien-être de la population du Canada depuis la création du ministère du Développement des ressources humaines. Cette disposition a été éliminée dans le but d'améliorer le libellé du projet de loi. Elle était devenue redondante, parce que le paragraphe 4(1) décrit déjà le mandat général du ministre en matière de santé et parce que des lois précises, comme la Loi sur les aliments et drogues, signalent que le ministre est également responsable de l'exécution de ces lois.


1388

Cependant, de nombreux Canadiens devenus séropositifs à la suite de transfusions de sang craignent que l'absence de cette disposition rende le ministre moins responsable de l'exécution de ces lois, et en particulier de la Loi sur les aliments et drogues.

D'ailleurs, Mme Lori Stoltz, l'avocate qui représentait les transfusés séropositifs à la commission d'enquête Krever, m'a mentionné que, à son avis, le projet de loi enlève toute responsabilité au ministre de la Santé.

Nous devons être sensibles aux préoccupations des gens qui sont devenus malades après avoir utilisé un produit qu'ils avaient toute raison de croire parfaitement inoffensif. Au lieu de nous lancer dans un débat juridique pour déterminer si le retrait de la disposition antérieure enlève effectivement des responsabilités au ministre, il me semble qu'il serait beaucoup plus constructif de prendre des mesures pour dissiper les doutes de la population.

Le projet de loi C-18 vise à confirmer la création du ministère de la Santé et à définir le mandat du ministre responsable et non pas à limiter la responsabilité du gouvernement.

L'essentiel et la substance du projet de loi se trouvent au paragraphe 4(1). Il prévoit que le ministre de la Santé a la responsabilité de toutes les questions relevant de la compétence du Parlement pour ce qui concerne la promotion et la protection de la santé des Canadiens.

(1635)

Le projet de loi reconnaît que le rôle du ministère de la Santé est crucial lorsqu'il s'agit de protéger la population contre les dangers pour la santé. Cela comprend l'évaluation des médicaments et des instruments médicaux afin de s'assurer que ces produits thérapeutiques sont sûrs et ont vraiment les propriétés que leur prêtent leurs fabricants.

Une catastrophe comme la transmission du VIH par l'intermédiaire du système du sang ne doit jamais se reproduire. Les efforts que nous déployons pour maintenir un système de santé de grande qualité et accueillant à prix abordable sont renforcés par la création d'un nouveau ministère de la Santé et la loi de mise en oeuvre de Santé Canada garantit que les ressources et les activités du ministère servent à relever les défis de politique et de financement qui se posent à notre système national de protection de la santé.

Le projet de loi prévoit que le ministère continue à collaborer étroitement avec tous les intervenants du secteur de la santé et la population canadienne. Santé Canada va assurer un leadership national et demeurer un partenaire actif et à part entière dans toutes les questions intéressant la santé des Canadiens. C'est pourquoi il est proposé que les responsabilités du ministre de la Santé comprennent l'administration de la législation de la santé.

L'amendement vise à rassurer les Canadiens qui craignaient que la suppression de certaines dispositions de l'ancienne loi n'entraîne une réduction des responsabilités du ministre. Plutôt que de se prononcer, le gouvernement a décidé à juste titre de ne pas prendre de risques et de rétablir la formulation originale de la Loi constituant le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social. Je suis fier d'apporter cet amendement.

Le Président: J'ai oublié de vous signaler que toutes les interventions seront de dix minutes et ne seront suivies d'aucune période de questions et d'observations.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le projet de loi C-95, présenté initialement à la Chambre, me semblait une mesure très simple. Je me suis interrogé sur la nécessité de passer beaucoup de temps à débattre de ce qui ne semblait être qu'un changement de nom.

Comme on m'avait confié ce dossier, j'avais déjà épluché attentivement le projet de loi et j'estimais que l'obligation de rendre compte du ministre et sa responsabilité à l'égard des questions liées à la santé étaient complètes. Cependant, les spécialistes qui ont passé le projet de loi au peigne fin m'ont signalé certaines sujets de préoccupation. Ils m'ont signalé un problème qui pourrait se poser relativement à la responsabilité ministérielle. La motion du député de Fredericton-York-Sunbury réglerait le problème.

La responsabilité ministérielle n'a rien de superflu. Elle est absolument obligatoire. Quiconque tenterait de modifier cela s'aventurerait en terrain très glissant. La commission Krever a mis en évidence le problème de la responsabilité ministérielle. Cette enquête montre que notre système de réglementation peut comporter des lacunes, que ceux qui l'administre pour la population canadienne ne sont pas parfaits. Actuellement, la commission Krever est paralysée par des contestations judiciaires provenant de diverses sources.

La responsabilité ministérielle est extrêmement importante. C'est pour cette raison que j'appuie l'inclusion de cette disposition dans le projet de loi C-95 et que je vais recommander aux membres de mon caucus d'en faire autant.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

( La motion no 1 est adoptée.)

(1640)

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.) propose:

Motion no 2
Qu'on modifie le projet de loi C-18, par adjonction, après la ligne 20, page 9, du nouvel article suivant:
«Loi sur l'organisation du gouvernement (organismes fédéraux)
«23.3 La définition de «ministre», à l'article 66 de la Loi sur l'organisation du gouvernement (organismes fédéraux), est remplacée par ce qui suit:
«ministre» Le ministre de la Santé.»

1389

Motion no 4
Qu'on modifie le projet de loi C-18 en supprimant l'article 36.
-Monsieur le Président, ces amendements sont simplement des amendements de forme au projet de loi C-18. Comme d'autres députés l'ont dit, la mesure législative à l'étude correspond à l'ancien projet de loi C-95. Ces deux amendements sont nécessaires principalement parce que le projet de loi a été présenté de nouveau à la suite de la prorogation du Parlement.

La Loi sur l'organisation du gouvernement a maintenant force de loi, et ces deux amendements au projet de loi C-18 sont donc nécessaires. Il est proposé d'ajouter une nouvelle disposition, l'article 23.3, afin de préciser que, dans la Loi sur l'organisation du gouvernement, le mot «ministre» désigne le ministre de la Santé.

Comme vous le savez, monsieur le Président, l'ancien ministère s'appelait le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social et le ministre était celui de la Santé nationale et du Bien-être social. Cet amendement modifie simplement le titre du ministre conformément au reste du projet de loi.

La motion no 4 supprime l'article 36, une modification conditionnelle ayant le même effet que ce qui était prévu dans l'ancien projet de loi C-65. La Loi sur l'organisation du gouvernement modifie des lois établissant 15 organismes fédéraux et elle prévoit la dissolution de 7 organismes fédéraux. En ce qui concerne Santé Canada, elle prévoit la dissolution du conseil de fiducie du Fonds canadien de recherches de la reine Elizabeth II, fonds qui vient en aide à la recherche sur les maladies infantiles. Elle n'élimine pas le fonds. L'administration de ce dernier relève désormais du Conseil de recherches médicales. C'est simplement le conseil de fiducie qui est éliminé.

Il n'y a vraiment rien d'autre à dire à propos de ces deux amendements. J'espère qu'ils seront adoptés rapidement.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(Les motions nos 2 et 4 sont adoptées.)

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET AFFAIRES JURIDIQUES

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je crois savoir qu'il y a eu des négociations entre les partis au sujet d'une ébauche d'ordre de renvoié. C'est une question qui a été discutée au cours de la dernière session et qui porte sur l'examen de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Je propose:

Que conformément à son mandat concernant la Révision globale de la Loi sur les jeunes contrevenants (Étape II) et particulièrement afin d'observer comment le système judiciaire pour la jeunesse fonctionne dans la pratique, que le Comité permanent de la justice et des questions juridiques (6 membres): quatre (4) du Parti libéral, incluant la Présidence, un (1) du Bloc québécois et un (1) du Parti Réformiste, soit autorisé à se déplicer à Halifax, Sydney (N.-É.) et Charlottetown (Î.P.-É.) du 21 au 26 avril 1996 afin de tenir des audiences publiques, de visiter les installations et des lieux où sont offerts des programmes à l'intention des jeunes contrevenants et de rencontrer les intervenants dans le processus et que le personnel nécessaire accompange le Comité.
(1645)

Je crois savoir, monsieur le Président, qu'il y a consentement unanime.

Le Président: Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?

Des voix: D'accord.

Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

* * *

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-18, Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.) propose:

Motion no 3
Qu'on modifie le projet de loi C-18, à l'article 35, par substitution, aux lignes 20 et 21, page 13, de ce qui suit:
«35. En cas de sanction du projet de loi C-8, déposé au cours de la deuxième session».
Motion no 5
Qu'on modifie le projet de loi C-18, à l'article 37, par substitution, aux lignes 8 à 14, page 14, de ce qui suit:
«37. En cas de sanction d'un projet de loi intitulé Loi concernant les règlements et autres textes, y compris leur examen, enregistrement, publication et contrôle parlementaire, et modifiant certaines lois en conséquence, déposé au cours de la deuxième session de la trente- cinquième législature, le».
-Monsieur le Président, ces deux motions ressemblent aux deux précédentes. Ce sont des modifications de pure forme proposées au projet de loi C-18, qui sont dues au fait qu'il a fallu présenter de nouveau l'ancien projet de loi C-95 par suite de la prorogation du Parlement.

À l'article 35 du projet de loi, il est proposé de remplacer le renvoi à l'ancien projet de loi C-7, connu autrement sous le titre de Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Le projet de loi C-7 est devenu le projet de loi C-8, le renvoi doit donc être modifié.

En outre, à l'article 37 du projet de loi, il est proposé de supprimer le renvoi au projet de loi C-84, Loi sur les règlements, et de dire simplement un projet de loi.

Le projet de loi sur le ministère de la Santé a été présenté de nouveau au Parlement avant le projet de loi sur les règlements. Le


1390

numéro de ce dernier n'était pas connu à ce moment-là, rendant nécessaire la présente modification de forme.

Il est clair que ces modifications n'influent en rien sur le fond du projet de loi en cause. Encore une fois, je plaide en faveur de son adoption rapide.

Le Président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le Président: Le vote porte sur la motion no 3. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(La motion no 3 est adoptée.)

Le Président: Le prochain vote porte sur la motion no 5. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(La motion no 5 est adoptée.)

L'hon. Sheila Copps (au nom du ministre de la Santé, Lib.) propose: Que le projet de loi modifié soit agréé.

Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

* * *

(1650)

LOI SUR LE PROGRAMME DE PROTECTION DES TÉMOINS

L'hon. Sheila Copps (au nom du leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.) propose: Que le projet de loi C-13, Loi instaurant un programme de protection pour certaines personnes dans le cadre de certaines enquêtes ou poursuites, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat en troisième lecture sur le projet de loi C-13, Loi sur le programme de protection des témoins.

La plupart des députés savent sans aucun doute que ce programme vise à offrir la meilleure protection possible à nos témoins et à nos sources.

Le projet de loi donnerait des bases légales au programme de protection des témoins et des sources de la GRC.

[Français]

Au nom du solliciteur général, je tiens à remercier les membres du Comité permanent de la justice et des questions juridiques pour le temps et l'énergie qu'ils ont consacrés à l'examen de ce projet de loi l'automne dernier.

Au cours de cette période, le comité a entendu des personnes de divers milieux, notamment des policiers, des représentants d'organismes d'aide aux victimes, des experts en droit et un ancien témoin.

Il a aussi entendu mon honorable collègue, le député de Scarborough-Ouest, dont l'intérêt pour la question de la protection des témoins est bien connu et qui a grandement contribué à stimuler la discussion sur cette importante question.

Le gouvernement a pris bonne note des préoccupations légitimes qui ont été exprimées durant les audiences du Comité et il en a tenu compte dans les modifications apportées au projet de loi initial.

Ainsi, le projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui est meilleur et plus solide que celui qui avait été déposé en première lecture.

Le Comité mérite tous nos remerciements à cet égard.

Les changements proposés dans la loi rendront plus transparent et plus efficace l'actuel Programme de protection des ressources et des témoins de la GRC, en place depuis 1984 en tant que programme administratif, et ce, en lui procurant un fondement législatif et réglementaire solide.

Nous créons un programme de protection des témoins doté d'un fondement législatif.

Cette loi aura un effet important, celui de stimuler davantage, dans le domaine public, le Programme de protection des sources et des témoins de la GRC. L'obligation de rendre compte quant au fonctionnement du Programme de protection des sources et des témoins de la GRC sera précisée.

Bien entendu, l'identité des sources et des témoins restera secrète, mais les critères de sélection ainsi que la portée et l'étendue de la protection à offrir seront clairs et transparents.

Grâce à ces dispositions législatives, les participants au programme et la GRC, qui l'administre, comprendront bien leurs droits et leurs obligations, ainsi que l'ampleur et la portée de la protection et des avantages assurés. Cela devrait aussi prévenir tout malentendu éventuel entre la GRC et les personnes protégées.

Au total, les changements apportés au Programme de protection des sources et des témoins de la GRC répondront tant aux besoins des services de police qu'à ceux des témoins et des sources éventuels qui ont besoin de protection.

Les changements proposés assureront, d'abord, des critères d'admission des témoins clairement définis; un traitement uniforme des cas dans l'ensemble du pays; un exposé clair des responsabilités et des obligations des administrateurs du programme et des personnes qui y participent; et une structure de gestion mieux définie à l'intérieur de la GRC pour le fonctionnement quotidien du programme,


1391

ce qui renforcera l'obligation de rendre compte; également, un mécanisme de règlement des plaintes et la présentation, par le commissaire de la GRC, d'un rapport annuel au solliciteur général sur le fonctionnement du programme, rapport devant être déposé à la Chambre des communes.

Les organismes d'application de la loi provinciaux et municipaux pourront encore avoir recours, comme ils l'ont fait par le passé, au Programme de protection des sources et des témoins de la GRC, selon une formule de recouvrement des coûts.

(1655)

Le projet de loi ne vise toutefois pas à remplacer des programmes de protection des témoins administrés par des provinces ou des municipalités, ni à établir un programme national.

Par de brèves observations, j'ai tenté de présenter aussi clairement que possible les éléments clés du projet de loi. Je suis persuadé que les députés de cette Chambre se rendent compte à quel point le Programme de protection des sources et des témoins constitue un puissant instrument d'application de la loi.

Cependant, je sais qu'il reste encore des questions concernant des aspects du programme. J'aimerais maintenant en aborder certaines, et en particulier celles que l'honorable députée de Saint-Hubert a soulevées. Lors du débat en deuxième lecture du projet de loi, la députée de Saint-Hubert a demandé au gouvernement d'éclaircir trois points fondamentaux.

Le premier point touche le budget affecté au nouveau programme; le deuxième concerne le temps qu'il faudra pour mettre en place le programme une fois le projet de loi adopté; enfin le troisième porte sur le nombre de personnes qui devraient participer au programme. Ces questions sont importantes et si vous me le permettez, j'aimerais d'abord parler de la question du budget.

À l'heure actuelle, les coûts annuels du Programme de protection des sources et des témoins de la GRC s'élèvent à 3,4 millions de dollars. Je suis heureux de dire à la Chambre que ce projet de loi n'entraînera aucunement d'autres coûts additionnels. Le coût moyen par cas est de 30 000 $ et environ 60 p. 100 de ces cas coûtent moins de 20 000 $.

En deuxième lieu, la députée de Saint-Hubert souhaitait savoir combien de temps il faudrait après l'adoption du projet de loi pour que le nouveau programme devienne opérationnel.

Encore une fois, le projet de loi adopté, la GRC nous assure que le nouveau programme pourrait être opérationnel en l'espace de quelques semaines seulement. Cependant, il importe de noter que le programme actuel de protection des sources et des témoins se poursuivra tant que les changements proposés ne seront pas entrés en vigueur.

Le troisième et dernier point soulevé par ma collègue de Saint-Hubert a trait au nombre de personnes qui devraient participer au programme chaque année. Encore une fois, à tout moment, entre 80 et 100 personnes, y compris les membres de leurs familles, participent au programme activement. Ce nombre moyen ne devrait pas changer dans un avenir prévisible.

Je tiens à ajouter que ce n'est pas grâce à la protection des sources et des témoins que nous parviendrons à enrayer le crime avec violence ou même le crime organisé. Toutefois, il s'agit là d'un élément important des techniques d'enquête dont disposent les responsables de l'application de la loi, élément qui, à mon point de vue, aide considérablement la police dans sa lutte constante contre le crime organisé et les activités criminelles graves au Canada.

Nous devons donc nous assurer qu'il continue d'en être ainsi.

[Traduction]

Pendant la campagne électorale, nous avions promis de rendre nos foyers et nos rues plus sûrs. Depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons respecté notre engagement.

Jusqu'à maintenant, nous avons adopté le projet de loi C-45, devenu loi en janvier dernier, qui réformait le système correctionnel et les mises en liberté sous condition. Nous avons aussi apporté des améliorations aux banques de données du Centre d'information de la police canadienne afin d'aider à dépister, au moment de l'embauche comme employé rémunéré ou bénévole, les personnes susceptibles de commettre des abus sexuels contre des enfants.

Nous avons institué un système d'identification national pour aider les procureurs généraux à s'occuper plus efficacement des délinquants à haut risque. Nous avons également adopté une loi complète sur les armes à feu. Nous avons créé un conseil national de la prévention du crime et modifié la Loi sur les jeunes contrevenants.

La Loi sur le programme de protection des témoins est une autre de nos grandes mesures visant à accroître la sécurité et la protection de tous les Canadiens. Je crois que tous les députés reconnaissent l'importance du projet de loi et l'appuieront.

Je tiens à remercier tous les députés de tous les partis qui ont déjà exprimé leur appui au projet de loi. J'espère pouvoir compter encore sur eux pour l'adopter rapidement.

(1700)

[Français]

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir aujourd'hui de traiter du projet de loi C-13 à la Chambre des communes. Cela concerne naturellement la protection des témoins. C'est un élément peu banal dans les annales policières, naturellement, et important aussi dans le fait d'aider le processus judiciaire, non seulement à trouver les criminels, mais aussi à poursuivre les gens qui font partie du crime organisé. C'est également un élément très fragile, de la corde sensible, parce que vulnérable. Le crime organisé, de par sa définition, est composé de plusieurs personnes et ces gens-là, tissés très solidement, deviennent extrêmement difficiles à pénétrer, autant par les agents de la GRC, du SCRS ou qui que ce soit.

Dans le cadre de nos fonctions, nous avons aussi comme devoir d'aider le processus judiciaire, de faciliter les lois et les applications des lois pour les gens qui ont à faire appliquer le processus judiciaire en première ligne, et j'ai nommé naturellement les policiers dans la grande majorité des cas.

Il est important, en 1996, que le pays soit doté d'une pareille loi. Elle aurait dû être déjà en vigueur depuis longtemps, mais pour toutes sortes de raisons, nous en sommes rendus aujourd'hui à délibérer sur cette loi.

L'objectif, ne faut-il pas l'oublier, concerne toujours l'amélioration de la qualité de la vie. On ne passe pas une loi pour passer une loi, on passe une loi pour aider le processus et le projet de loi C-13 cherche, en bout de piste, à améliorer la qualité de la vie et à mieux


1392

faire respecter la justice qui, elle, devient, par conséquent, beaucoup plus efficace. C'est un outil de travail simplement, et non pas une révolution en soi, comme cela se passe ailleurs.

L'expérience démontre que le recours à des témoins qui fournissent des éléments de preuve ou collaborent à des enquêtes policières au risque de se causer du tort ou d'en causer à leur famille, est souvent l'un des moyens les plus efficaces dont dispose notre système de justice pour lutter contre le crime, en particulier le crime organisé. L'objectif de la loi sur le Programme de protection des témoins est de voir à ce que notre programme fédéral de protection des témoins continue d'offrir la meilleure protection possible aux sources et aux témoins éventuels.

Il est un peu surprenant que le projet de loi C-13, qui lui-même émane du projet de loi C-78 que dépose l'honorable solliciteur général, soit, à toutes fins utiles, similaire à un projet de loi que cette Chambre a déjà adopté le 26 septembre et qui est le projet de loi C-206, déposé par l'honorable député de Scarborough-Ouest et adopté en première lecture le 1er février 1995.

Les seuls changements qu'il a été possible de noter, en réalité, sont que l'indemnisation des témoins peut être meilleure en vertu d'un projet de loi tel que déposé. D'autre part, désormais, avec le projet de loi C-13, le commissaire de la Gendarmerie royale sera chargé de faire les arrangements avec les témoins ou leur procureur visant à leur protection.

Sous l'empire du projet de loi C-206, tel qu'adopté le 26 décembre dernier, comme je le disais tout à l'heure, le solliciteur général avait l'autorité pour conclure les ententes avec les témoins. Cela facilitait, bien sûr, dans l'exercice du système parlementaire dans lequel nous vivons, le contrôle via la responsabilité ministérielle des activités gouvernementales à cet égard.

Nous avions, comparativement, entre autres, aux États-unis, pris un certain retard par rapport à nos voisins américains qui, depuis 25 ans déjà, ont une législation qui s'applique dans les 50 États de l'Union relativement à la protection des témoins. C'est une législation publique, connue de tous et en vertu de laquelle les citoyens peuvent connaître leurs droits.

Mais ce système était rendu nécessaire dû au fait qu'aujourd'hui, les responsables des autorités policières négocient à la pièce avec chacun des témoins qu'ils veulent faire comparaître devant les tribunaux, ce qu'on appelle des délateurs.

(1705)

Donc, à ce moment-là, ça rend la chose un peu ambiguë pour ces gens-là, qui ont une loi à faire appliquer. Ça la rend ambiguë pour toutes sortes de facteurs, pour les facteurs médiatiques, bien entendu, mais aussi sur quoi on va se baser pour négocier des ententes à la pièce, soulignons-le.

Donc, je ne crois pas que l'on puisse se satisfaire de dispositions à la pièce, de décisions qui procèdent suivant le bon plaisir de ceux et celles qui occupent des fonctions policières à un moment donné. Je pense plutôt que l'idée d'avoir une législation qui s'appliquera à l'ensemble du territoire canadien est une idée qui va améliorer la situation des témoins, particulièrement en matière criminelle et spécialement dans le cas des crimes graves.

Le processus, tel qu'il est enclenché à l'heure actuelle, a quand même des petits défauts. C'est qu'il y a toujours un peu de publicité qui se fait autour de ces événements et qui entache les vrais objectifs du mandat que le projet de loi C-13 préconise.

Les policiers négocient avec les criminels soit pour de l'argent, souvent, ou pour des réductions de peine. En ce qui concerne les réductions de peine, on a eu un cas récemment en Ontario, principalement à Toronto, qui a fait la manchette pour toutes sortes de raisons. Naturellement, dans le cas qui nous préoccupe-parce que c'est souvent la même chose qui se produit, on peut le prendre en exemple-on se rend compte très facilement que, sans la contribution du témoin délateur-dans ce cas-ci, c'était une dame-il aurait été très difficile au processus judiciaire de voir reconnaître un coupable de délits très graves.

On n'utilise pas la protection des témoins pour des riens non plus. On l'a vécu dans beaucoup de cas. Je pense que tous et chacun ici peuvent relater des faits que l'on a, soit vécus ou dont on a été mis au courant par les médias. Cependant, cela peut être sujet à interprétation. Par exemple, est-ce que ça veut dire qu'on encourage le crime que d'octroyer des sommes d'argent ou des réductions de peine à des témoins délateurs? C'est une façon de voir la chose, mais il faut regarder un peu plus loin que cela. Il faut voir un peu plus loin, il faut être un peu plus sérieux et avouer que, finalement, c'est plutôt encourager la délation qui, elle, mène à l'arrestation de l'individu et souvent de groupes d'individus et à leur reconnaissance de culpabilité.

Donc, on nettoie un peu la société de personnes qui ne s'insèrent dans la société que pour profiter, soit du système ou de certaines facilités, de la faiblesse de certaines organisations, me direz-vous, mais ça fait partie d'un ensemble. Il ne faut pas non plus se leurrer avec ça. Si la loi n'existait pas, il n'y aurait tout simplement pas de délation.

Les gros criminels n'oeuvrent jamais seuls, qu'à de très rares exceptions. Si les gros criminels, ceux qui oeuvrent seuls, oeuvrent encore, ils ne sont pas encore pris et on n'en entend pas parler non plus. Donc, ce n'est pas eux qui nous dérangent tellement. Ceux qui oeuvrent en groupe, les gros, oeuvrent dans des domaines comme la drogue, entre autres, le blanchiment d'argent. Donc, on parle de dossiers qu'on peut voir toutes les semaines à la télévision.

On en invente de toutes les sortes, toutes les semaines, dans toutes sortes de domaines: fabrication de fausse monnaie, fabrication de cartes, vol de cartes de crédit à très grosse échelle. On achète des terrains dans des pays avec de l'argent noir et on les revend. On pourrait donner des exemples à n'en plus finir.

(1710)

Ce sont des organisations; on ne peut pas faire ça tout seul, une personne ne peut pas se promener et aller acheter du matériel avec de l'argent propre en ayant de l'argent noir dans sa valise, en ayant vendu de la drogue. Cela ne finit pas. Non, non, il y a des étapes à cela. Il faut des gens, et parmi ces gens on risque de trouver des


1393

délateurs. Les délateurs, eux, méritent finalement qu'on les protège lorsque vient le moment de témoigner.

Entre autres, je peux citer un fait vécu sur la Côte-Nord, dans mon comté, plus principalement à Sept-Îles où on avait saisi plusieurs tonnes de hasch, de stupéfiants. On avait arrêté un très gros morceau à l'époque, le patron de la mafia, Vito Rizutto, pour ne pas le nommer, ce n'est pas un secret. Il y avait dans le décor de l'enquête un délateur. On parlait, si je me rappelle bien, de 18 personnes, des matelots sur le bateau jusqu'au grand patron lui-même qui se trouvaient à l'intérieur de la petite prison de Sept-Îles qui compte 23 places. Donc à 18, je n'ai pas besoin de vous dire qu'ils remplissaient la prison, pas à peu près.

Il y avait aussi à l'intérieur un délateur, un capitaine de bateau. Je m'en souviens très bien. Depuis ce temps-là il n'en mène pas large non plus, d'autant plus que l'enquête a échoué pour toutes sortes de raisons qui seraient un peu longues à expliquer.

Je me souviens qu'à ce moment on avait offert au délateur, à la pièce aussi, on lui avait offert certaines protections policières, un changement d'identité, peut-être des sommes d'argent, je ne sais pas trop. Grâce à ces ententes, il acceptait naturellement de parler. Il avoua. À l'époque j'étais agent des services correctionnels, j'avais donc eu l'occasion de lui parler, de parler à tout le monde, mais je lui avais posé la question suivante: Est-ce que tu te commettrais si tu n'avais pas ce système?

On offrait naturellement de protéger sa famille, lui-même aussi, changement d'identité, etc. Il a été très catégorique, c'était hors de question. C'était le silence total, plutôt que de parler, si on n'offrait rien d'autre, si on n'offrait pas ce système de protection, ce qui est un peu normal dans la période où on vit actuellement, si on veut réussir à attraper de gros morceaux.

D'autant plus qu'on ne parle pas non plus de 100 000 personnes à soudoyer, de 100 000 personnes à protéger, qui doivent changer d'identité. J'écoutais tout à l'heure mon confrère du parti d'en face qui disait, si je me souviens bien, qu'il s'agissait en moyenne de 30 000 $ par personne, et souvent des montants de 20 000 $. C'est très rare. J'ai vu une fois environ 100 000 $ en Colombie-Britannique il y a quelques années. Je pense qu'on reste avec cette idée-là.

Le député d'en face a bien fait de le souligner, la majorité, la moyenne est environ 30 000 $. Est-ce qu'on peut qualifier que c'est bon ou que ce n'est pas bon? On donne quand même cela à quelqu'un qui a commis un crime, ne l'oublions pas. Il ne faut pas jouer à l'autruche non plus. Je dis que c'est un compromis que nous devons faire pour en arriver à améliorer le système judiciaire tel qu'il est, et surtout son application.

Améliorer le système judiciaire, fabriquer une loi pour fabriquer une loi, tout le monde peut le faire. Il s'agit de se faire élire et on fabrique des lois, mais encore faut-il que ces lois soient facilement applicables par ce que j'appelle les gens de première ligne, les policiers qui, eux, arrêtent les gens, et qui enquêtent sur les dossiers. Il faut leur donner le moyen législatif nécessaire pour les autoriser à le faire, de telle sorte qu'ils ne se retrouvent plus coincés comme ils le sont aujourd'hui dans un processus qui fait que le plus gros risque est de voir leur photo en première page d'un journal à scandales disant qu'ils ont offert X, Y et Z à tel criminel.

Il faut que ces gens-là soient mieux protégés mieux qu'ils ne le sont à l'heure actuelle. Je pense que C-13 rencontre une bonne partie de son objectif en agissant de la sorte.

Quand on parle de protéger les témoins, il a été souligné, et je le rappelle, qu'entre 80 et 100 personnes sont touchées. Dans les 80 ou 100 personnes il y a aussi de la famille.

(1715)

Il ne faut pas oublier que les gens, tous autant que nous sommes, ont des familles. Nous commettons des gestes et nous ne voulons pas que nos familles écopent. Nous devons être responsables, bien entendu, mais personne n'est parfait. Nous devons faire face à nos responsabilités.

La délation veut dire que le criminel visé par le geste s'en prendra automatiquement à des points sensibles de l'individu, dans la mesure où il pourra le faire. Donc si on protège seulement l'individu sans tenir compte de la famille, ça ne sert strictement à rien. À ce moment-là, parmi les 80 à 100 personnes par année que la justice aide de cette manière à se protéger face au monde criminel, il est justifiable de le faire. Il y a des membres de la famille, des enfants, des épouses ou des maris, selon le cas.

À ce moment-là, je pense qu'on englobe assez bien un système de protection qui n'est pas parfait, soulignons-le. Il n'est pas parfait parce qu'il est fait par des individus, et nous ne sommes pas parfaits, peu importe qui nous sommes. Mais si on cherche à s'améliorer, on compense beaucoup, à ce moment-là.

Les problèmes sont souvent vécus dans les délais de la commission du crime. Quand on arrête un individu, il se passe énormément de choses dans sa tête, c'est tout à fait logique et normal, du moment où on l'incarcère, etc. Les policiers l'interrogent, il fait une délation, il y a un million de questions qui se posent. On peut facilement imaginer l'état de panique que ces individus peuvent vivre. C'est absolument incroyable.

Mais attention, il y a des délais. Si on n'offrait pas une protection des individus, inévitablement le monde criminel les rejoindrait, directement ou indirectement, et, par la suite, ces gens pourraient simplement être appelés peut-être à oublier certains faits lorsqu'arriverait le temps de témoigner devant les tribunaux.

Disons que le projet de loi C-13 aide la mémoire. C'est un peu humoristique de dire ça, mais si on enlevait le système de protection des témoins, je suis convaincu que les gens perdraient rapidement beaucoup de mémoire. Mais en les protégeant, les témoins oublient moins vite, ils collaborent davantage et le système judiciaire, lui, est mieux protégé.

Il est également important de bien comprendre qu'il faut protéger cette société par le biais des lois que nous faisons et qu'il n'y a pas de faute à utiliser les mêmes méthodes que le monde criminel qui utilise les points faibles pour aller chercher ces gens en ne lésinant sur rien pour arriver à ses fins.

Pour cette raison, et je terminerai là-dessus, nous sommes en faveur du projet de loi C-13. Il n'est pas parfait, bien entendu, mais c'est un bon pas en avant qui nous fait un peu rejoindre d'autres pays qui ont déjà dans leur législation des mesures du genre.


1394

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour parler du projet de loi C-13, Loi sur le programme de protection des témoins.

Si je comprends bien, ce projet de loi établirait pour la première fois un cadre législatif pour le programme de protection des témoins de la GRC, qui est en place depuis 1984 sous forme de lignes directrices et de politiques internes.

Le Parti réformiste reconnaît le besoin d'une mesure législative de ce genre. Les témoins ont besoin de protection contre les dangers auxquels ils sont exposés, particulièrement lorsque leurs témoignages se rapportent à des activités liées au crime organisé comme le trafic de stupéfiants, la contrebande de tabac et d'alcool, la vente illégale d'armes à feu ou d'autres complots en vue de commettre des crimes graves.

(1720)

La décision de dénoncer des criminels peut être difficile. Si nous voulons que justice soit faite, nous devons prendre des mesures concrètes pour protéger contre tout danger les gens qui acceptent de témoigner. En termes simples, sans le témoignage de la personne qui communique à un policier et, par la suite, à un tribunal, sa connaissance d'une activité criminelle ou d'un complot, personne ne serait accusé ni, par conséquent, reconnu coupable de ces crimes.

Depuis 1962, la violence et le crime organisé ont connu un essor sans précédent au Canada. Les politiciens ne peuvent plus nier cette réalité. Partout où il est possible de faire de l'argent illégalement, l'élément criminel s'organise pour vaincre la loi. Un bon exemple de cette activité criminelle organisée est la violence des bandes de motards et les guerres territoriales que ces dernières se livrent dans les rues de notre pays.

Les milieux policiers ne sont pas sans savoir que les Hell's Angels sont en guerre avec les Outlaws pour savoir qui aura le contrôle des activités lucratives comme le commerce de la drogue, la prostitution et la contrebande. Les attentats à la bombe continuent de se produire à Montréal et ailleurs; les gens meurent pendant que les barons du crime font de l'argent. Ces tueries doivent cesser si nous voulons rétablir l'ordre public dans les rues des villes canadiennes.

Le Parti réformiste est déterminé à rétablir l'ordre public. C'est dans cette optique que nous avons examiné le projet de loi C-13. Nous voyons certains problèmes et avons proposé des amendements qui renforceraient le projet de loi. J'espère que le gouvernement ne fera pas la sourde oreille à nos observations et à nos propositions.

Le budget affecté au programme de protection des témoins au Canada permettra d'accueillir entre 70 et 80 personnes par année. Le maigre budget de 3,4 millions de dollars établi par le solliciteur général est fondamentalement insuffisant, compte tenu des ressources qui sont nécessaires pour infiltrer le milieu du crime organisé et repérer et recruter des criminels disposés à servir d'informateurs. La GRC pourrait intensifier ses efforts en ce sens si elle disposait de plus de ressources.

Le Parti réformiste est préoccupé non seulement par l'insuffisance du financement du programme de protection des témoins mais aussi par l'absence de vision du cabinet du solliciteur général et de l'ensemble du gouvernement libéral en ce qui concerne l'administration des affaires publiques canadiennes, et en particulier la criminalité.

Au lieu de financer des groupes d'intérêts spéciaux qui défendent les droits des criminels, le solliciteur général ferait bien de s'occuper plutôt de la sécurité du public et d'affecter des ressources aux programmes d'application de la loi et à la défense des droits des victimes.

Le projet de loi C-13 contribue à renforcer le programme de protection des témoins de la GRC. La Chambre doit cependant se pencher aussi sur certains problèmes. En effet, le projet de loi C-13 maintient la convention concernant les directives et la politique interne régissant le programme de protection des témoins de la GRC, en vertu de laquelle le commissaire de la GRC exerce un pouvoir et une autorité absolus à l'égard des questions suivantes.

Aux termes de l'article 5 du projet de loi C-13, le commissaire a le pouvoir et l'autorité absolus de désigner les bénéficiaires du programme. Aux termes de l'article 9, le commissaire peut, à son entière discrétion, mettre fin à la protection d'un bénéficiaire s'il le juge indiqué. Aux termes de l'article 11, il peut divulguer l'identité d'un témoin ou d'un bénéficiaire ainsi que l'endroit où il se trouve. Enfin, aux termes de l'article 14, le commissaire peut conclure un accord avec un organisme chargé de l'application de la loi, avec le procureur général d'une province ou avec toute autre autorité provinciale.

J'exhorte tous les députés à examiner ces pouvoirs et l'opportunité de laisser le commissaire de la GRC jouir d'une autorité aussi étendue. En outre, en ce qui concerne les accords conclus entre les parties au programme de protection des témoins, je tiens à signaler que dans sa forme actuelle, le projet de loi ne contient aucun mécanisme de règlement des différends ou de procédure d'appel pour les organismes, agents ou bénéficiaires, pour leur permettre de faire valoir leurs préoccupations.

Il est indispensable d'inclure un tel mécanisme dans le projet de loi. Prenons par exemple les préoccupations exprimées par les deux témoins qui se sont présentés au Comité permanent de la justice et des questions juridiques. L'un d'eux était policier et représentait des douzaines de services policiers des quatre coins du pays, ainsi que leurs membres.

(1725)

Dans l'état actuel des choses, les témoins qui bénéficient d'une protection peuvent s'adresser à la Commission des plaintes du public pour lui faire part de conditions qui les inquiètent concernant la protection qu'ils reçoivent, mais ils ne peuvent pas s'adresser au solliciteur général. Selon moi, ce processus ne convient guère.

La plupart des services de police ont un agent chargé de surveiller les personnes interrogées, qui veille à renvoyer ces personnes au service approprié. Ce genre d'arrangement donne la possibilité de faire appel si le commissaire rend une décision insatisfaisante, et

1395

pourrait aussi servir en cas de différends entre un service de police particulier et la GRC, par l'intermédiaire de l'ACI.

J'exhorte les députés à appuyer la motion présentée le 20 novembre 1995, à l'étape du rapport, pour qu'on modifie le projet de loi C-13, à l'article 5 a) par substitution, à la ligne 28, page 2, de ce qui suit: «Sous réserve des autres dispositions de»; et b) par adjonction, après la ligne 31, page 2, de ce qui suit: «Toute décision prise par le Commissaire ou un officier de la Gendarmerie au nom de celui-ci en vertu des articles 5, 9, 11 ou 14 de la présente loi est susceptible de contrôle par le ministre à la demande d'un organisme chargé de l'application de la loi.» Cet amendement rendrait le programme beaucoup plus efficace, donnant plus de souplesse à ces organismes dans la réalisation de leurs enquêtes sur le crime organisé.

Passons maintenant au deuxième amendement proposé par le Parti réformiste, qui traite de la présentation du rapport annuel sur le fonctionnement du programme durant l'année précédente. Il n'existe aucune disposition prévoyant que le rapport doit être présenté au Comité permanent de la justice et des questions juridiques, et le projet de loi ne dit rien de ce que le rapport devrait comporter. C'est ridicule.

Combien de fois mes collègues libéraux ont-ils, à la Chambre, fait des reproches aux gouvernements précédents pour des questions de transparence et de responsabilité? Combien de fois le gouvernement, agissant comme. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Ces libéraux s'en prennent à moi, madame la Présidente. Nous parlons de la loi sur la protection des témoins, et ils s'en prennent à moi. La période des questions doit avoir été dure.

Combien de fois le gouvernement, lorsqu'il agissait en tant que loyale opposition de Sa Majesté, a attaqué les autres pour vouloir adopter une mesure législative inadéquate, qui n'allait pas du tout? Souvent. À mon avis, la réponse à cette double question, c'est très souvent.

Quand ils étaient du côté de l'opposition il y a quelques années, ils critiquaient la même chose que nous critiquons aujourd'hui. Félicitations.

Une voix: C'est de l'hypocrisie.

M. White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Je ne suis pas sûr de l'orthographe du mot hypocrite. Je suis sûr que c'est quelque part dans le dictionnaire.

Une voix: Hypogrits.

M. White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Libéraux ou conservateurs, c'est du pareil au même. Je donne donc à mes collègues de l'autre côté la possibilité de tirer une leçon de leurs erreurs passées. Ce n'est pas facile pour eux de comprendre.

Assurons-nous que le projet de loi C-13 ne rate pas la cible. Appuyons l'amendement proposé par le Parti réformiste: Qu'on modifie le projet de loi C-13, à l'article 16, pour que chaque rapport comporte les renseignements suivants: a) le nombre d'accords conclus et les organismes chargés de l'application de la loi en cause; b) le nombre de demandes présentées; c) la somme moyenne dépensée par accord; d) le nombre d'accords auquel il a été mis fin et la raison de leur résiliation; e) le nombre et les genres d'infractions commises par les bénéficiaires; f) la somme totale prélevée sur le Trésor pour l'application de la présente loi; g) les mesures de coopération établies entre le Gendarmerie et les autres organismes chargés de l'application de la loi pour la protection des témoins; et h) le nombre de témoins étrangers admis au Canada et le nombre de témoins canadiens réinstallés hors du Canada.

* * *

(1730)

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Madame la Présidente, si vous le demandiez, je crois que vous constaterez que la Chambre consent à l'unanimité à adopter la motion suivante, qui a été approuvée par les whips de tous les partis. Je propose:

Que le Comité permanent du développement des ressources humaines soit autorisé à enregistrer ses visioconférences de l'étude du projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada, pour fins de télédiffusion.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime pour que la motion soit présentée?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

______________________________________________


1395

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI CANADIENNE SUR LES SOCIÉTÉS PAR ACTIONS

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) propose: Que le projet de loi C-204, Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions (incapacités des administrateurs), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Madame la Présidente, lors de la première session de la législature, j'ai présenté le projet de loi C-345, Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Il n'a jamais été étudié à la Chambre, mais il est présenté à nouveau sous la forme du projet de loi C-204.

Il y a un an et demi environ, j'ai assisté à un dîner offert par le président de la chambre de commerce de Mississauga. Je connaissais très bien le conférencier invité. On a présenté celui-ci comme un sénateur du Canada, président directeur général de l'une des plus grandes et des plus influentes sociétés du Canada et membre du conseil de quelque 26 autres sociétés. Je me suis dit qu'il devait être très occupé.


1396

Dans la vie du monde corporatif, les conseils d'administration jouent un rôle extrêmement important. Ils ont beaucoup de responsabilités. On trouve, dans les journaux, de nombreux articles sur la responsabilité des administrateurs et sur la difficulté de trouver des gens compétents, prêts à devenir des administrateurs, étant donné l'énorme travail et la lourde responsabilité.

Essentiellement, si un administrateur sait, ou devrait savoir, que les difficultés d'une société ont causé des préjudices à un actionnaire ou à un autre groupe d'actionnaires, il peut être tenu personnellement responsable, jusqu'à concurrence de la valeur de tous ses biens personnels. Ce n'est pas une situation à prendre à la légère.

Cela dit, étant donné mes antécédents à titre de comptable agréé, j'ai connu l'ancienne Loi sur les corporations canadiennes qui a été remplacée par la nouvelle Loi sur les sociétés par actions. Il y a une loi fédérale et des lois provinciales, mais les règles se ressemblent. Elles sont fonction du lieu de constitution en corporation, mais elles visent toutes le même but. Les lois sur les sociétés, qu'elles soient fédérales ou provinciales, fournissent les lignes directrices et les règles que les sociétés doivent respecter dans la gestion de leurs affaires.

Les administrateurs ont des responsabilités très précises et importantes. Ils doivent s'acquitter activement de ces responsabilités. Bien sûr, ils courent toujours le risque omniprésent d'être en conflit d'intérêts, soit intentionnellement, soit par inadvertance. On comprendra bien sûr qu'on puisse se poser la question du nombre de postes d'administrateur qu'un individu peut occuper à la fois tout en assumant ses responsabilités de façon satisfaisante, au moins dans une mesure raisonnable.

(1735)

Les compagnies varient en genre et en taille. Certaines sont très complexes, comme Bell Canada. D'autres consistent en un seul individu constitué en société. Il serait très difficile de fixer un chiffre.

Après avoir écouté la présentation du conférencier invité à parler au dîner du président de la chambre de commerce de Mississauga, j'ai été frappé que quelqu'un qui était sénateur et qui avait du travail à faire en tant que sénateur, pouvait être également président-directeur général d'une importante compagnie canadienne et membre du conseil d'administration de quelque 26 sociétés. Quelque chose m'échappe. À mon avis, il y a un problème. C'est la raison d'être du projet de loi C-204.

Permettez-moi de décrire rapidement les fonctions et responsabilités d'un administrateur. Dans les deux sens du mot, ils ont le devoir et l'obligation de voir à ce que tout soit fait conformément à la loi. Si les choses ne sont pas faites conformément à la loi et si, de ce fait, quelqu'un subit des pertes ou des torts, ils doivent en accepter la responsabilité.

Je pourrais m'étendre très longtemps sur la question, mais j'aimerais m'arrêter à plusieurs points importants. Pensons par exemple au devoir d'honnêteté, au devoir de loyauté et au devoir de diligence.

Par diligence j'entends, entre autres, qu'il faut être présent aux réunions. Un administrateur n'est pas obligé d'être présent à toutes les réunions du conseil d'administration, mais il doit y assister aussi souvent que possible car il peut être tenu responsable de transactions dont il n'a pas connaissance.

La diligence implique également qu'il a le devoir de ne pas compter sur les autres membres du conseil d'administration. Un administrateur ne peut éviter ses responsabilités et s'en remettre entièrement aux autres administrateurs. S'il le fait, c'est à ses risques et périls. Ceux qui s'en remettent à leurs co-administrateurs et aux autres membres de la direction devraient être sommés de s'expliquer. S'en remettre aux autres membres de la direction constitue un autre manquement. Les administrateurs qui agissent de la sorte le font à leurs risques et périls et ne devraient pas abdiquer leur responsabilité qui est de gérer la société.

Il y a également la question du recours à des experts de l'extérieur. On ne s'attend pas à ce que les administrateurs soient des spécialistes dans tous les domaines et ils doivent fréquemment s'en remettre à l'avis d'experts. Ils ont la responsabilité d'aller chercher des connaissances autres que les leurs pour s'acquitter de leurs responsabilités en tant qu'administrateurs.

On utilise l'expression administrateur de complaisance. Être administrateur de complaisance, administrateur fantoche ou honoraire, ou administrateur à temps partiel ne diminue pas les responsabilités d'un administrateur à moins qu'il n'en soit relevé par consentement unanime des actionnaires.

Si le député de Broadview-Greenwood était présent aujourd'hui, il parlerait de la question de la concentration du pouvoir des sociétés. Le cercle des sociétés dont les conseils d'administration sont reliés-par l'intermédiaire de personnes qui sont membres des mêmes conseils d'administration-et qui semblent s'entraider et s'appuyer mutuellement est un problème qui en inquiète beaucoup.

Les administrateurs de complaisance, ou ce que j'appelle des administrateurs fantoches, reçoivent des gratifications à la signature et des options d'achat d'actions simplement pour que leur nom puisse être associé à celui de la compagnie. Ils ne s'intéressent pas à l'entreprise et n'ont aucune intention de participer à ses affaires. Cela ne regarde que leur conscience. Ils agissent ainsi à leurs propres risques. Or, qui parle au nom des actionnaires ou des autres parties intéressés, comme les banques ou les sociétés de crédit qui ont prêté de l'argent, ou au nom des créanciers qui ont fait des avances à la société, lorsque les administrateurs sont là, non pas pour participer et s'acquitter de leurs responsabilités, mais pour que l'on puisse utiliser leur nom à titre de symbole ou pour donner de l'importance au conseil d'administration. Ce sont des accusations que je ne porte pas à la légère. C'est quelque chose qui se produit.

Si l'on poursuit la liste des tâches qui reviennent à ne rien faire, l'inaction n'est pas une excuse. Même si un administrateur n'a pas participé à un acte illégal, il n'est pas nécessairement excusé aux termes de la loi.


1397

(1740)

Il y a ensuite le fait de ne rien voir. Un administrateur qui a connaissance d'un acte illégal commis par des dirigeants doit remplir ses fonctions à l'égard de la compagnie et faire ce qui est nécessaire dans les circonstances pour réparer les torts ou, à tout le moins, les porter à l'attention des actionnaires. Dans le cas d'un administrateur de complaisance, comment peut-il s'acquitter de cette responsabilité?

Il y a le devoir d'être compétent. Un administrateur n'a pas besoin de faire preuve, dans l'exercice de ses fonctions, d'une compétence plus grande que celle qui est normalement attendue d'une personne ayant ses connaissances et son expérience. Si l'administrateur ne se présente pas, alors qu'il a été choisi pour ses compétences ou son expertise, comment peut-il s'acquitter de cette responsabilité?

Finalement, il y a le devoir de prudence. La prudence exige que l'administrateur fasse preuve de bon sens.

Ayant examiné tout cela, je voulais parler au ministre de l'Industrie et à des fonctionnaires qui ont la responsabilité de faire appliquer la Loi canadienne sur les sociétés par actions.

Je siégeais au Comité de l'industrie lorsqu'il a étudié le projet de loi C-12, Loi modifiant la Loi sur les sociétés par actions. La modification proposée en vertu du projet de loi C-12 était l'élimination de l'article 16. L'Institut canadien des comptables agréés, dont je suis membre, a conféré avec des comités de la Chambre à de nombreuses occasions. Il s'inquiétait beaucoup de l'élimination de l'article 16.

Essentiellement, cet article exempte les sociétés et, en particulier, les grandes sociétés privées incorporées au niveau fédéral de leur obligation de soumettre des états financiers en conformité de leurs documents d'incorporation en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Cela inquiétait l'Institut qui voyait là un avantage indu pour les sociétés privées par rapport aux sociétés publiques. Pourtant, je ne sais pourquoi les hauts fonctionnaires de l'époque ont décidé que c'était correct. Nous avons regardé certaines des sociétés qui pourraient tirer profit de cela et pourquoi cela pourrait se produire.

Dans le droit provincial, certaines entités n'ont pas besoin de soumettre des états financiers ou l'identité de leurs vérificateurs. Cela inquiétait l'Institut canadien des comptables agréés du simple fait qu'ils sont dans le secteur de la vérification et qu'il voulait protéger l'intégrité de leur industrie, ce dont je ne saurais les blâmer. Plus important, en permettant aux sociétés privées de ne pas soumettre d'états financiers, on leur donnait un avantage injuste par rapport aux sociétés publiques.

Qu'est-ce que cela signifie en termes concrets? Cela signifie qu'une société comme Walmart peut venir au Canada, prendre le contrôle d'une grande chaîne et se tailler une large place chez nous. Où est-elle constituée en corporation? Elle est constituée en corporation au Nouveau-Brunswick. Pourquoi? Parce que, au Nouveau-Brunswick, la loi n'exige pas des sociétés privées qu'elles produisent des états financiers.

De toute évidence, c'était un cas où pas assez de sociétés se constituaient en corporation en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Une société qui est incorporée au Nouveau-Brunswick peut faire affaire dans tout le Canada. Il n'existe pas de restrictions en la matière. Il n'est pas nécessaire que l'on soit incorporé dans chacune des provinces. Il y a bien des divergences quant aux exigences en matière de déclaration entre les diverses administrations, mais Walmart fait affaire partout au Canada, même si cette société est incorporée au Nouveau-Brunswick.

J'y vois là un exemple du genre de raisonnement qui a cours chez certains fonctionnaires du ministère de l'Industrie. Je tiens à le citer parce que je crois que c'est le même genre de raisonnement qui préside actuellement à l'étude des modifications proposées à la Loi sur les sociétés par actions.

J'ai reçu une lettre au nom du ministère de l'Industrie. J'avais posé quelques questions, ils ont répondu à quelques-unes d'entre elles, mais cela n'a fait que susciter d'autres questions chez moi.

Mon projet de loi, le projet de loi C-204, serait une première dans les annales canadiennes, compte tenu de cette restriction quant au nombre de postes d'administrateur dont on peut être titulaires en même temps. Cela n'existe dans aucune administration provinciale. Ce serait du jamais vu. Cela ne cause certainement aucun problème. C'est la chose à faire.

L'autre argument avancé a trait au fait que la Loi canadienne sur les sociétés par actions présuppose que les sociétés et leurs investisseurs, dont la plupart sont maintenant de grandes institutions, sont en mesure de déterminer les qualités qu'ils souhaitent trouver chez leurs administrateurs. Or, c'est absolument le cas. C'est ce qu'ils font. Ils sont en mesure de déterminer si tel ou tel administrateur fait l'affaire, compte tenu des objectifs que s'est fixé le conseil d'administration.

(1745)

Si une société a pour objectif d'attirer un administrateur fantoche pour que son conseil d'administration soit bien vu auprès du public, elle peut le faire, mais qui représente-t-elle? Elle représente les membres du conseil d'administration et les dirigeants de la société dans son propre intérêt. En quoi est-ce dans l'intérêt de l'actionnaire ordinaire? En quoi est-ce dans l'intérêt des intervenants qui accordent du crédit et du financement? En quoi est-ce dans l'intérêt des concurrents, s'il y a des risques de conflits d'intérêts imprévus ou non décelés au départ?

La question de l'autoréglementation et de l'abandon des règles me préoccupe. Au ministère de l'Industrie et au Comité sénatorial des finances et des banques, on effectue actuellement un examen très important, où l'on commence à examiner quelques règlements et règles, car la responsabilité des administrateurs est une question extrêmement importante. J'ai souligné quelques-unes des raisons pour lesquelles un administrateur devrait faire preuve de diligence et de prudence, d'honnêteté et ainsi de suite. Il est là pour une raison. C'est la norme qui a été établie.


1398

Je constate que le milieu des dirigeants d'entreprise et le Comité sénatorial des banques et des finances tentent actuellement d'assouplir ou d'embrouiller ces responsabilités pour qu'il soit beaucoup plus facile à plus de gens de devenir des administrateurs de complaisance. Si les normes ne sont pas imposées, si nous n'avons pas des règles efficaces et rigoureuses sur les responsabilités des administrateurs de société, quelles garanties peuvent avoir les intervenants, les actionnaires, les investisseurs, etc., que leurs intérêts sont protégés chaque fois que quelque chose se produit dans cette société?

Permettez-moi de donner un exemple. La compagnie d'assurance-vie La Confédération est une grande institution financière qui éprouve de gros problèmes. Il faudra des années pour les régler. Tous les députés à la Chambre ont reçu des informations d'employés de Bell Canada au sujet de leurs régimes de retraite. Nous avons entendu la même histoire et les mêmes allégations selon lesquelles il y avait au conseil d'administration de la compagnie d'assurance-vie La Confédération des représentants de Bell Canada et on a modifié les régimes de retraite pour transférer une partie des investissements d'une institution à La Confédération, apparemment au moment où un représentant de Bell siégeait au conseil.

Maintenant, La Confédération a perdu beaucoup d'argent et ses pertes sont réparties entre tous les intéressés, c'est-à-dire les employés. Ils viennent maintenant demander l'aide des députés. Ils disent qu'ils ont cru de bonne foi que le conseil d'administration, et plus particulièrement le représentant de leur société qui siégeait à ce conseil à l'époque défendrait leurs intérêts mais qu'il n'en a rien fait et qu'ils veulent donc que Bell Canada les indemnise.

Je ne connais pas en détail les faits entourant cette affaire et je ne prétends en rien que qui que ce soit s'est comporté de façon malhonnête. Cependant, je soulève cette question, car c'est un exemple concret du type de choses dont nous devons nous méfier. Cela signifie que nous devons dépendre des conseils d'administration pour bien agir au bon moment et pour être là lorsque nous en avons vraiment besoin.

Il ne s'agit pas de se baser sur l'expérience au Canada pour affirmer que nous n'avons pas besoin de règles, car il n'y a jamais eu de problème. Ce n'est pas la question. Des règles s'imposent pour s'assurer qu'il n'y a pas de problème, et c'est là le point essentiel.

S'agit-il d'une question importante? Bien sûr que oui. Une organisation appelée la Fondation canadienne pour la vérification intégrée a maintenant formé un groupe de travail actif qui examine les questions de gestion des organismes publics et privés. Le vérificateur général du Canada fait partie de ce groupe de travail pour une raison et une raison seulement: toute la question de la gestion et du contrôle de nos sociétés et des organismes publics et privés est un grave sujet de préoccupation. On décèle des risques auxquels il faut s'attaquer.

Je n'accepte absolument pas la position des gens de l'industrie qui affirment que les sociétés devraient s'autoréglementer, que nous devrions les laisser agir à leur guise, à leur propre risque. Je ne crois pas que ces sociétés pensent toujours, dans tous les cas, à leurs actionnaires. Elles ne pensent pas toujours non plus à leurs créanciers. Elles ne pensent pas toujours à leurs employés qui risquent de perdre leur emploi si elles font faillite. De temps à autre, les sociétés se demandent sur quels administrateurs elles peuvent compter pour bien paraître. C'est sur ce type de choses que les Canadiens veulent, selon moi, en savoir davantage.

(1750)

Y a-t-il un autre signe qui nous permet de dire que les entreprises canadiennes et les gens concernés attachent de l'importance à toute cette question? En décembre 1995, l'Institut canadien des comptables agréés a préparé un document conseillant les administrateurs sur le processus de gestion aux fins de contrôle.

Le document explique dans son avant-propos qu'il se donne avant tout pour but, non seulement d'examiner la direction de la société, mais aussi d'évaluer l'efficacité du conseil d'administration et d'examiner avec quel succès les membres du conseil d'administration ont évalué leur rôle et leurs responsabilités et s'en sont acquittés dans le cadre du contrôle global de l'organisation.

J'ai parcouru le document et je l'ai étudié jusqu'à un certain point. Il aborde plusieurs questions, dont la formulation des politiques concernant les candidats choisis aux postes d'administrateur, l'examen des compétences des candidats et l'évaluation de la performance du conseil d'administration et éventuellement des administrateurs souvent nommés à un comité, comme le comité des candidatures ou le comité de régie.

L'Institut canadien des comptables agréés a soulevé d'intéressantes questions dans ce document. Les auteurs ont également parlé de valeurs et notamment des valeurs éthiques de la société, et examiné la question de savoir s'il était peu évident ou peut-être inopportun que quelqu'un fasse partie d'un conseil d'administration. Ils voulaient traiter de questions concernant l'administrateur, savoir si ce directeur possédait l'information, la compétence ou la franchise nécessaires. Ils ont traité des qualités requises pour faire partie d'un conseil d'administration.

En conclusion, on se demande comment ces qualités peuvent s'appliquer à quelqu'un qui ne siège à un conseil d'administration que pour la forme ou pour le lustre qu'il apporte à la société. Le véritable problème en l'occurrence tient au conflit d'intérêts. La mesure à l'étude propose essentiellement de limiter à dix le nombre de postes d'administrateur que quelqu'un peut occuper à la fois, compte tenu de la fréquence des réunions du conseil d'administration, du nombre de ses autres responsabilités et du temps de préparation nécessaire.

Cette mesure ne s'applique cependant pas aux sociétés dans lesquelles quelqu'un détient plus de 5 p. 100 des actions, ni aux cas où quelqu'un est propriétaire de la société ou en détient une grande part des actions. Elle s'applique plutôt aux cas où quelqu'un fait partie du conseil d'administration de sociétés dont il détient une part négligeable des actions, et au sein duquel il ne siège que pour la forme.


1399

Bien qu'il ne s'agisse pas d'une mesure devant faire l'objet d'un vote, j'espère avoir soulevé dans l'esprit des députés certaines questions à propos des postes d'administrateur de sociétés et surtout celle de savoir si ces responsabilités sont bien remplies et protégées ou non en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Madame la Présidente, étant donné que c'est la première fois que je prends la parole à la Chambre pendant que vous occupez le fauteuil de la Présidence, permettez-moi de vous féliciter pour votre nomination.

Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi C-204 que présente mon collègue d'en face, le député de Mississauga-Sud. Mon collègue commençait son allocution en disant que l'idée lui était venue, en fait, de proposer cet amendement au projet de loi parce qu'il avait rencontré un sénateur qui siégeait, semble-t-il, sur 26 conseils d'administration. Mon collègue en a déduit que le sénateur voulait sans doute, par là, augmenter son renom, mais peut-être qu'il y a d'autres prémisses tout aussi valables. Compte tenu de la nature du travail de sénateur, il avait amplement le temps de siéger sur 26 conseils d'administration.

Ce projet de loi, présenté par mon collègue, vise à modifier la Loi canadienne sur les sociétés par actions, et il a pour objectif de limiter le nombre de postes d'administrateur que peut détenir concurremment une seule personne détenant moins de 5 p. 100 des actions conférant un droit de vote dans une compagnie. Mon collègue semble appuyer son projet de loi sur la prémisse suivante, ou sur la base qu'une personne qui est administrateur de plus de 10 sociétés ne peut remplir correctement son mandat.

Il est vrai que l'administrateur d'une société a plusieurs responsabilités qui sont d'une grande importance, comme l'a souligné mon collègue, et qui revêtent un caractère très sérieux. La loi lui impose plusieurs de ces responsabilités et il a à remplir des fonctions extrêmement spécifiques.

Mon collègue qui dépose ce projet de loi se pose la question suivante: Quelle est la limite à laquelle un directeur ou un administrateur ne peut plus s'acquitter correctement de ses responsabilités?

(1755)

Il semble que, selon lui, une personne ne peut plus s'acquitter correctement de ses responsabilités s'il détient un poste d'administrateur dans plus de dix compagnies. Je ne sais pas sur quoi le député se base pour dire qu'une personne ne peut plus s'acquitter de ses responsabilités s'il est administrateur de plus de dix compagnies. Pourquoi serait-il ou ne serait-il pas en mesure de s'acquitter de ses fonctions s'il administre neuf compagnies? Pourquoi serait-il ou ne serait-il pas en mesure de s'acquitter de ses fonctions s'il en administre douze? C'est une question qui demeure sans réponse.

Lorsqu'une personne est mandatée par les actionnaires pour être sur le conseil d'administration d'une société par actions, la loi l'oblige à remplir certaines obligations. L'administrateur a le devoir de remplir ces obligations. Il doit gérer la société dans l'intérêt de celle-ci, comme le ferait un bon père de famille, selon l'expression consacrée. Il est responsable de ses actes devant les actionnaires et devant la loi.

L'administrateur peut-être reconnu personnellement responsable, par exemple s'il fait mauvais usage des fonds de la compagnie, ou s'il détourne des fonds de la compagnie, ou encore s'il rend la compagnie insolvable.

L'administrateur a le devoir d'être honnête, loyal, prudent et diligent. Il ne doit pas faire entrer ses intérêts personnels en conflit avec les intérêts de la compagnie qu'il administre, bien sûr. Il doit assister aux réunions du conseil de direction, cela va de soi. Je ne commencerai pas à vous énumérer tout ce qu'un administrateur doit faire ou ne pas faire. Je crois que tout le monde ici en a une bonne idée dans l'ensemble.

Pour vous dire franchement, je ne vois vraiment pas l'utilité du projet de loi de mon honorable collègue. Pourquoi vouloir modifier la Loi sur les sociétés par actions en modifiant un seul article, l'article 105, pour ajouter un détail qui est, à toutes fins pratiques, inutile selon moi? Pourquoi vouloir empêcher une personne de détenir un poste d'administrateur dans plus de dix compagnies? Une seule personne peut faire partie du conseil de direction de 13 compagnies, par exemple, et très bien remplir ses fonctions, tout comme une autre personne peut être administrateur d'une seule compagnie et faillir à ses devoirs et à ses responsabilités. Tout dépend de la personne. Certains peuvent le faire et d'autres pas.

De plus, les administrateurs d'une société sont responsables devant les actionnaires et doivent rendre des comptes. Si ces derniers ne sont pas satisfaits, ils n'ont qu'à les destituer de leurs fonctions par un vote de non-confiance.

La Loi sur les sociétés par actions est également très claire sur ce sujet. Un administrateur qui commet un acte illégal ou qui va à l'encontre des intérêts de la compagnie est passible de sanctions et d'amendes qui sont très sévères. Il n'est donc pas dans son intérêt de défier la loi ou de commettre des actes qui lui seraient répréhensibles.

Je crois que toute personne qui est saine d'esprit et raisonnable-et il se peut qu'il y en ait qui ne le soient pas-sait ce qu'elle est capable de faire et d'accomplir. Un administrateur connaît ses devoirs et les responsabilités qui lui sont imposées dans le cadre de sa fonction d'administration d'une compagnie. Ce ne serait donc pas dans son intérêt de faillir à la tâche qui lui est assignée, car il connaît les conséquences qui s'y rattachent. Alors, je vous pose la question: Pourquoi prendrait-il la chance de siéger sur le conseil de direction de plusieurs compagnies s'il sait qu'il n'est pas capable de le faire?

Enfin, j'aimerais vous démontrer que les arguments que mon collègue utilise dans son mémorandum pour appuyer son projet de loi sont loin de démontrer la nécessité d'inclure la modification qu'il veut apporter à la Loi sur les sociétés par actions.

Premièrement, mon collègue déclare:

[Traduction]

«Un administrateur n'est pas tenu d'assister à toutes les assemblées du conseil. Il devrait y être le plus souvent possible, étant donné le risque qu'il ait à répondre d'opérations dont il ne serait pas au courant.»

[Français]

Il est certain qu'à une occasion ou une autre, un administrateur peut être incapable d'aller à une réunion du conseil de direction. Toutefois, dans toute société qui est quelque peu organisée, un ordre


1400

du jour et un procès-verbal sont distribués aux administrateurs. Habituellement, lorsque quelqu'un prend une décision qui concerne la compagnie, les personnes qui sont responsables sont mises au courant de la décision. J'ose croire que la personne qui ne peut assister à une telle réunion aura assez d'intelligence pour demander à ses confrères ce qui s'y est dit ou ce qui s'y est fait. Les administrateurs de compagnies sont conscients de cela.

Le deuxième argument employé par mon collègue est le suivant:

[Traduction]

«Un administrateur ne peut décliner ses responsabilités en laissant toute la charge à ses collègues. C'est à ses propres risques qu'il se fie aux autres administrateurs. Le fait qu'il compte sur des adjoints et des cadres n'est pas indiscutable.»

[Français]

Quand vous faites partie d'un conseil de direction, vous faites partie d'une équipe de travail. Un administrateur se doit de faire confiance à ses confrères, sinon, c'est toute l'équipe qui en souffrira.

(1800)

Imaginez-vous, si les administrateurs ne se faisaient pas confiance les uns les autres, ce qui arriverait? Cela sèmerait la zizanie au sein même du conseil. Si les administrateurs ne s'entendent pas, c'est alors la compagnie ou la société qui va en souffrir et, par la même occasion, cela occasionnera le mécontentement des actionnaires. Ces derniers peuvent alors destituer le conseil de direction. Ce n'est donc pas dans l'intérêt d'un administrateur de douter, forcément, a priori, des autres dirigeants.

Un autre argument employé par mon collègue est le suivant:

[Traduction]

Les administrateurs se fient aux cadres à leurs propres risques et ils ne devraient pas abdiquer leurs fonctions de gestion de la société.

[Français]

Habituellement, c'est le conseil de direction qui prend les décisions concernant la compagnie et les directeurs exécutifs ou les directeurs d'exploitation les appliquent sur le terrain. Le directeur exécutif, qui s'occupe quotidiennement de la compagnie, participe au conseil de direction et doit faire un compte-rendu des activités de la compagnie aux administrateurs.

On choisit habituellement une personne en qui tous ont confiance pour diriger la compagnie. S'il y a des risques à s'en remettre à son directeur exécutif, ce sont des risques normaux. Il se peut qu'une personne ne soit pas honnête, c'est une possibilité, mais ça peut arriver n'importe où et n'importe quand. On ne peut pas savoir si, a priori, une personne est honnête ou pas. L'argument de mon collègue n'en est pas un.

Je pourrais continuer longtemps comme cela, mais ça ne servirait à rien. Aucun des arguments que m'a servi mon collègue ne m'a permis de voir la nécessité absolue d'amender la loi dans le sens qu'il le propose.

Je vais vous lire la recommandation qui l'a conduit à proposer ce projet de loi, et qui commence comme suit:

[Traduction]

Afin de protéger ou de faire valoir l'importance des fonctions et des responsabilités d'un administrateur, de minimiser le risque de conflits d'intérêts et de protéger les investisseurs, les sociétés et les employés, une personne ne peut être administrateur de plus de dix sociétés dans lesquelles elle détient moins de 5 p. 100 des actions conférant un droit de vote.

[Français]

Les devoirs et les responsabilités d'un administrateur sont clairement définis dans la Loi sur les sociétés par actions. Les personnes qui sont administrateurs savent pertinemment bien quels sont leurs devoirs et leurs responsabilités. Ils connaissent les conséquences de leurs actes ou de leur inaction, parce que cela aussi c'est dans la loi.

Je ne vois pas du tout comment le projet de loi C-204 viendra diminuer les conflits d'intérêts au sein d'une compagnie. Malheureusement, des conflits d'intérêts, il y en aura toujours. Mon collègue de Mississauga-Sud a fait un bien bel effort, et je pense qu'il a fait une analyse approfondie en présentant ce projet de loi. Je suis convaincu qu'il y a mis beaucoup de temps, mais je dois vous dire que je ne vois pas du tout l'idée ou l'utilité de modifier la Loi sur les sociétés par actions pour y inclure une modification qui, à toutes fins utiles, n'a aucun impact positif.

[Traduction]

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole au sujet du projet de loi C-204 présenté par le député de Mississauga-Sud. Je suis passablement d'accord avec mon collègue bloquiste; j'ai un peu de mal à comprendre le but visé par le projet de loi.

Il semble que le député s'inquiète moins de la compétence des administrateurs qu'il ne cherche à savoir s'ils s'acquittent des responsabilités pour lesquelles ils ont été élus, s'ils sont responsables, s'ils agissent fidèlement à la mission qui leur a été confiée.

Il y a une différence fondamentale entre faire ce qu'on est censé faire, ce qui est attendu de soi, et ne pas y parvenir parce qu'on siège à un trop grand nombre de conseils d'administration. Ce dernier argument n'est pas nécessairement vrai.

En fait, le projet de loi ajoute un infime détail à l'article 105, qui dit ceci: «Si une personne est administrateur de dix sociétés dans lesquelles elle détient moins de cinq pour cent des actions, elle ne peut être nommée à un autre poste d'administrateur.»

La loi actuelle me semble claire. Elle dit que ne peuvent être nommées administrateurs les personnes qui ont moins de 18 ans. Comme il s'agit parfois de gérer des millions de dollars, cela semble raisonnable. Il faut avoir au moins l'âge de voter.

(1805)

La deuxième incapacité est celle de toute personne qui a été jugée, par un tribunal canadien ou autre, ne pas être saine d'esprit. Il va de soi qu'on veut des administrateurs sains d'esprit. Troisièmement, une personne qui n'est pas un individu ne peut être nommée. Je ne vois pas trop ce que cela veut dire, mais c'est ce qui est écrit.


1401

Il est dit que personne n'est jugé incapable parce qu'il ne détient pas d'actions de la société en cause. Autrement dit, un administrateur peut être nommé même s'il ne détient pas d'actions de la société. Il est nommé au sein de la société ou au conseil d'administration parce qu'on l'a jugé compétent pour jouer ce rôle.

Il faudrait examiner les fonctions qu'un administrateur est censé exercer. Il s'agit, à mon avis, de fonctions assez importantes. Elles ne sont pas nombreuses, mais très exigeantes.

«Les administrateurs et les dirigeants doivent, dans l'exercice de leurs fonctions, agir avec intégrité et de bonne foi au mieux des intérêts de la société; avec le soin, la diligence et la compétence dont ferait preuve, en pareilles circonstances, une personne prudente. Les administrateurs et les dirigeants doivent observer la présente loi, ses règlements d'application, les statuts, les règlements administratifs ainsi que les conventions unanimes des actionnaires.»

Voilà qui décrit très clairement le mandat des administrateurs. Les administrateurs doivent agir avec intégrité, avec la diligence et la compétence dont ferait preuve, en pareilles circonstances, une personne prudente.

Un administrateur peut-il remplir ces fonctions pour plus d'une société ou d'une entreprise? Bien sûr, surtout s'il s'agit d'une série de petites entreprises. Un administrateur peut être associé à plusieurs sociétés, parce que le rôle d'un conseil d'administration n'est pas nécessairement de gérer l'entreprise. Son rôle premier consiste plutôt à définir l'orientation de la société, à élaborer une politique d'ensemble qui donnera à la société une identité et une raison-d'être, qui lui confiera une mission à remplir pour réaliser ce qu'elle veut faire au sein de la société ou de la communauté où elle évolue.

Qu'arrive-t-il alors dans le cas d'une grande entreprise? Prenons, à titre d'exemple, une société que nous connaissons tous, une des sociétés les plus gigantesques du Canada, le Canadien Pacifique. C'est l'une de nos grandes sociétés au Canada. Je me rappelle très bien que cette société était censée être évaluée. Beaucoup de gens ont demandé combien valait le Canadien Pacifique.

Il y a une dizaine d'années, un groupe de comptables agréés a été chargé de répondre à cette question. Il lui a fallu cinq années pour vérifier tous les livres, l'actif et le passif, du Canadien Pacifique et essayer d'en déterminer la valeur nette.

Au bout de ces cinq années, les conclusions de ce groupe ne valaient plus rien puisque déjà désuètes. La société valait plus ou moins selon les dépenses engagées et les variations de l'économie. Le groupe a donc décidé que la valeur réelle de cette société était une affaire d'opinion.

Comment un administrateur, même un administrateur du Canadien Pacifique, peut-il savoir exactement ce qui se passe au sein de sa société? Il ne peut pas. C'est manifestement impossible.

Cette loi fait ressortir très clairement que ces choses-là doivent être déléguées. Le député le sait pertinemment. Il vient de dire en présentant son projet de loi que des comptables agréés doivent pouvoir faire des vérifications afin que nous puissions vraiment donner une orientation et un sens à une société donnée.

Les dispositions de la loi actuelle sont très claires là-dessus. Un conseil d'administration n'est pas responsable. Conformément aux articles 118, 119 et 122, un administrateur n'est pas responsable s'il se fie en toute bonne foi aux états financiers de la société qui lui sont présentés par un agent de la société ou au rapport écrit du vérificateur représentant assez fidèlement la situation de la société ou encore le rapport d'un avocat, d'un comptable, d'un ingénieur, d'un évaluateur ou de toute autre personne qui a une certaine crédibilité de par sa profession.

(1810)

Il est évident qu'un conseil d'administration qui suit les conseils des professionnels qui sont à son service fait preuve de plus de prudence, de responsabilité, d'honnêteté et d'intérêt pour sa société qu'un administrateur qui assume toute la responsabilité et qui croit tout savoir parce qu'il a le devoir de se montrer prudent et honnête. Il ne serait pas honnête pour un administrateur de s'arranger pour tout savoir ce qui se passe dans sa société. Pour vraiment faire son travail, il doit compter sur les professionnels qui savent ce qui se passe et dont le travail est de lui fournir une information qu'il peut évaluer.

Il faut être compétent pour faire cela. La loi nous dit très clairement que c'est précisément ce que l'on attend d'un conseil d'administration. Laisser entendre que l'administrateur devrait être compétent prête tout simplement à confusion.

Ce qu'on laisse entendre, c'est que quelqu'un qui détient au moins 5 p. 100 des actions d'une société pourrait être administrateur dans un nombre illimité de sociétés. Le seul facteur déterminant semble être le fait de posséder moins de 5 p. 100 des actions. On semble établir un lien direct entre la capacité d'administrer et le pourcentage d'actions qu'une personne détient dans une société.

C'est ridicule. C'est insensé. Je ne pense pas que le pourcentage d'actions qu'une personne détient dans une société la rendra plus ou moins compétente. Il existe un intérêt pécuniaire, c'est vrai, mais cela ne rend pas quelqu'un apte à prendre de bonnes décisions. C'est une question tout à fait différente. Nous devons reconnaître ce genre de nuances.

Il a aussi été question de la responsabilité, du fait qu'un administrateur peut être tenu responsable. Il devrait l'être. S'il n'exerce pas les responsabilités qui lui ont été confiées, s'il ne s'acquitte pas des responsabilités que la société ou la loi lui ont conférées, il devrait alors être tenu responsable. Il ne peut toutefois être tenu responsable si, à sa connaissance, il a obtenu les meilleurs conseils possibles et s'il en a tenu compte avant de prendre une décision.

Cela veut-il dire qu'il obtiendra toujours les bons conseils? Non. Cela veut-il dire qu'il prendra toujours les bonnes décisions? Non. Cela veut-il dire qu'il peut faire une erreur, qu'il peut s'appuyer sur


1402

les meilleurs conseils dont il dispose et se tromper quand même? Oui.

Voici en quoi consiste la responsabilité: A-t-il, de son point de vue, agi dans l'intérêt de la société et l'a-t-il fait en s'appuyant sur les meilleurs conseils disponibles? Si c'est le cas, le nombre de postes d'administrateur qu'il occupe n'a aucune importance.

M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-204, Loi modifiant la Loi canadienne sur les sociétés par actions.

Le député de Mississauga-Sud a présenté ce projet de loi d'initiative parlementaire en vue d'interdire à toute personne de siéger au conseil d'administration de plus de plus de dix sociétés par actions constituées en vertu de lois fédérales dont elle détient moins de 5 p. 100 des actions avec droit de vote.

Je comprends les idéaux qui ont motivé le député. Les personnes qui investissent dans des sociétés constituées en vertu des lois fédérales veulent être certaines que les administrateurs accomplissent leur devoir.

Aussi efficace et dévouée qu'elle soit, il y a une limite à l'énergie ou à l'attention qu'une personne peut consacrer à une entreprise lorsqu'elle assume un volume excessif de responsabilités. D'après le député de Mississauga-Sud, personne ne peut vraisemblablement remplir convenablement les devoirs et les responsabilités du poste d'administrateur de plus de dix sociétés.

Le député veut remédier à cette situation par voie législative. Le projet de loi interdirait à toute personne de siéger au conseil d'administration de plus de dix sociétés dont elle détient moins de 5 p. 100 des actions. En outre, il prévoit de lourdes amendes: jusqu'à 25 000 $ pour la première infraction, et jusqu'à 50 000 $ pour la deuxième.

J'ai deux grandes questions à poser au sujet de ce projet de loi. Premièrement, faut-il adopter une loi pour créer un système de régie d'entreprise qui dissuade les gens d'accepter plus de responsabilités qu'ils ne peuvent raisonnablement en assumer? Deuxièmement, le projet de loi est-il le bon moyen et est-ce le bon moment pour traiter de cette question?

Permettez-moi d'examiner ces deux questions. D'abord, devrions-nous légiférer sur le nombre de conseils d'administration auxquels une personne peut siéger? Cette mesure constituerait une première en droit canadien des sociétés. Comme aucun autre ordre de gouvernement au Canada ne limite directement le nombre de postes d'administrateur qu'une personne est autorisée à occuper, il ne faut pas prendre cette question à la légère. Aucune province n'a jugé bon de limiter le nombre de postes d'administrateur. Pourtant, les provinces s'interrogent probablement elles aussi sur la capacité des administrateurs de remplir leurs obligations s'ils sont surchargés de travail parce qu'ils ont accepté trop de postes.

(1815)

Elles ont plutôt adopté l'approche de la Loi sur les sociétés par actions, qui privilégie un régime où les entreprises se régissent elles-mêmes. C'est parce que l'on croit que les sociétés et les investisseurs sont mieux placés que les législateurs pour déterminer quelles qualités doivent posséder les directeurs.

Je trouve cela normal. Les lois sur la régie d'entreprise établissent le fondement qui donne aux cadres, aux investisseurs et aux créanciers la certitude que le système fonctionne avec équité et transparence.

Je ne suis pas seul à penser qu'il serait déplacé de limiter par une loi le nombre de postes d'administrateur qu'une personne peut occuper. En décembre 1994, le comité sur la régie d'entreprise au Canada mis sur pied par la bourse de Toronto publiait un rapport intitulé Where were the directors?, c'est-à-dire «où étaient les administrateurs?» Le comité a souligné qu'il ne fallait pas seulement raffermir la régie d'entreprise, mais que le public devait avoir l'impression qu'elle avait été raffermie. Il a présenté des recommandations sur l'évaluation des administrateurs en poste et sur le recrutement, la nomination et l'orientation des nouveaux.

Pour le choix des administrateurs, le comité recommandait que le conseil d'administration de chaque société nomme un comité composé exclusivement d'administrateurs de l'extérieur dont la majorité n'auraient aucun lien entre eux. Ce comité serait chargé de proposer des candidats au conseil d'administration et d'en évaluer régulièrement les membres. Le conseil d'administration prendrait la décision finale sur le choix du candidat après avoir étudié les recommandations du comité des candidatures.

Apparemment, cette façon de faire reçoit beaucoup d'appuis. Le comité sur la régie d'entreprise n'était pas composé uniquement de représentants du milieu des affaires, mais aussi d'investisseurs institutionnels ainsi que de représentants du milieu universitaire et d'autres groupes s'intéressant à la régie d'entreprise. Autrement dit, le secteur privé lui-même devrait mettre en place un processus rigoureux de sélection des administrateurs.

La Bourse de Toronto a mis en oeuvre les lignes directrices du rapport concernant la divulgation des pratiques relatives à la régie des sociétés comme condition d'admission à la cote.

En préparant ce rapport de la Bourse de Toronto, les auteurs ont reçu des suggestions voulant qu'on adopte des lignes directrices limitant le nombre de conseils d'administration auxquels une personne peut être nommée. Voici ce que les auteurs ont dit sur la question: «Même si nous reconnaissons qu'il doit y avoir une limite au nombre de nominations, nous avons conclu que des lignes directrices ne sont pas nécessaires. Au moment d'évaluer les qualités d'un candidat, le comité des candidatures tiendra compte des autres engagements de la personne, de ses ressources et du temps qu'elle pourra consacrer au conseil d'administration.»

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Si le rapport de la Bourse de Toronto conclut que des lignes directrices ne sont pas nécessaires, je crois qu'il ne conviendrait pas que la Chambre prenne une mesure encore plus draconienne en adoptant un projet de loi à cet égard. Laissons les sociétés décider de ce qui est le mieux pour elles. La limite qu'on imposerait dans une telle mesure législative serait arbitraire. Pourquoi déciderions-nous qu'une personne ne peut pas être membre de plus de dix conseils d'administration? Pourquoi pas cinq ou quinze? Qui sommes-nous à la Chambre pour décider de la limite à imposer? C'est une décision que nous devons laisser à la discrétion de ceux qui choisissent les membres de leurs conseils d'administration.

Je vais maintenant passer au deuxième point qui me préoccupe au sujet de cette mesure législative. Le projet de loi C-204 est-il vraiment le bon moyen et est-ce maintenant le bon moment de soulever cette question? Comme la Chambre le sait, le gouvernement est en train d'entreprendre un vaste examen de la Loi sur les sociétés par actions. Certaines modifications d'ordre technique ont été apportées à cette loi à la dernière session au moyen du projet de loi C-12. Le ministre de l'Industrie nous a dit à ce moment-là que ces changements n'étaient que la première phase d'un processus qui conduirait à la première réforme de la Loi sur les sociétés par actions en 20 ans.

En préparant la phase 2 de la réforme, le gouvernement a tenu de vastes consultations avec tous les éléments du milieu des affaires, les actionnaires, les gestionnaires, les administrateurs et les conseillers juridiques de sociétés, pour déterminer quels changements il faudrait apporter et comment.

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Ces consultations ont revêtu plusieurs formes. Premièrement, Industrie Canada a commencé dès 1994 à rencontrer des gens d'affaires, des investisseurs et des avocats-conseils de sociétés partout au Canada. Il s'agissait de consultations préliminaires. Les réponses reçues par Industrie Canada lui ont permis de commencer à mettre l'accent sur les domaines qui, selon les milieux d'affaires, avaient le plus besoin d'une réforme.

Suite à ces consultations préliminaires, neuf documents d'étude ont été rédigés pour examiner de façon très détaillée les questions relatives à la Loi sur les sociétés par actions jugées prioritaires. Les études ont notamment porté sur la responsabilité des directeurs, les délits d'initiés, les communications aux actionnaires, les offres publiques d'achat, l'aide financière aux directeurs et au personnel, les exigences de résidence concernant les directeurs, les ententes unanimes des actionnaires, les privatisations, les transactions et les modifications de forme.

Je dois cependant signaler à la Chambre que la question du nombre excessif de postes d'administrateur n'a pas été soulevée.

Industrie Canada a reçu de nombreuses réponses aux propositions de réforme contenues dans ces documents d'étude. Le ministère projette de consulter les clients une fois encore pour discuter en détail de ces documents. Les réponses aideront le gouvernement pour la préparation des modifications à la Loi sur les sociétés par actions.

Je signale à la Chambre qu'en vertu du projet de loi C-12, le ministre de l'Industrie doit recommander au Parlement, au plus tard en juin 1997, des modifications plus importantes à la loi.

Entre temps, une autre ronde de négociations a eu lieu pour permettre à préciser les domaines où il y a lieu de procéder à une réforme de la régie des sociétés au Canada. Les membres du Comité sénatorial des banques et du commerce ont récemment tenu des audiences à la grandeur du pays sur les façons de réformer la législation concernant la régie des sociétés et le comité procède actuellement à la rédaction de son rapport. Le comité présidé par le sénateur Michael Kirby a rencontré des présidents directeurs généraux, des présidents, des membres de conseil d'administration et des investisseurs. Le comité a demandé à ces importants représentants des milieux d'affaires de discuter des questions concernant la régie des sociétés en général et de répondre à des questions stratégiques fondamentales reliées aux questions à l'étude à Industrie Canada.

L'autre endroit contribue utilement en mettant les compétences et les connaissances des sénateurs à contribution pour aider le gouvernement à cerner les solutions possibles en vue de la réforme de la régie des sociétés. C'est un excellent exemple de la façon dont la Chambre des communes et l'autre endroit peuvent travailler ensemble pour améliorer le processus législatif.

Ces efforts aboutiront à une loi que le ministre de l'Industrie déposera l'an prochain. Un comité de la Chambre sera alors en mesure d'étudier le projet de loi attentivement et de recommander des amendements. Autrement dit, nous disposons déjà d'un processus très perfectionné qui permettra de faire une évaluation détaillée de la question soulevée par le député de Mississauga-Sud relativement à cette question.

La question d'une limite du nombre de postes d'administrateur qu'un individu peut détenir constituera un sujet de discussion approprié dans le cadre des consultations d'Industrie Canada, ou encore pour les fins des travaux de l'autre endroit et même pendant les travaux du Comité permanent de l'industrie.

J'ai bon espoir que la question recevra toute l'attention voulue. Je ne crois pas cependant que le moment soit venu d'adopter une loi qui irait à l'encontre des pratiques de régie des sociétés actuellement en vigueur ailleurs au Canada.

Laissons le député de Mississauga-Sud faire part de ses préoccupations devant les autres tribunes que j'ai mentionnées. Je ne crois pas que la Chambre devrait appuyer ce projet de loi.

Le vice-président: Puisqu'aucun autre député ne désire prendre la parole, le député de Mississauga-Sud peut résumer et clore le débat. Normalement, nous disposons encore de deux ou trois minutes.

M. Szabo: Monsieur le Président, je remercie tous les députés qui ont pris part à ce débat. Il est très important de soulever des problèmes et des questions dans cette enceinte, même si l'on ne s'entend pas clairement sur certains points particuliers.

Toutefois, je voudrais revenir sur un ou deux points que des députés ont soulevés. Premièrement, on a soulevé la question du pourcentage magique de 5 p. 100. Si une personne détient une

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participation de plus de 5 p. 100, le nombre de sociétés ne s'applique pas.

Les députés doivent savoir que la question n'est pas qu'il y ait un seuil de 5, 10, 15 ou 20 p. 100. La question est qu'il doit y avoir une limite à la participation d'une personne et c'est ce point qui serait sujet à modification. C'est donc sans conséquence. Ces 5 p. 100 ne signifient rien, encore que, sur la recommandation du Bureau des affaires émanant des députés, ce pourcentage est conforme au seuil qui a été fixé pour des projets de loi similaires où la personne a une participation. Cela fait partie des recommandations du personnel du Bureau des affaires émanant des députés de la Chambre des communes.

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La deuxième question était pourquoi limiter à dix le nombre de sociétés dont une personne peut être l'administrateur? Encore une fois, c'est seulement un chiffre. Ce chiffre pourrait être 15, comme il pourrait être 20 ou 100. Une chose dont nous pouvons être sûrs, c'est que ce chiffre ne peut être 1 000. Personne ici ne serait d'accord pour qu'une personne soit membre du conseil d'administration de 1 000 sociétés distinctes dans lesquelles elle détiendrait une participation de moins de 5 p. 100. Si c'est le cas, le principe de mon projet de loi est absolument faux.

Il doit y avoir une limite à partir de laquelle une personne ne peut assumer des responsabilités fondamentales. Si ce chiffre pose un problème aux députés, aux membres du Comité de l'industrie et au secrétaire parlementaire de Saskatoon-Dundurn, qui a si bien parlé, qu'on en propose un autre. Nous savons qu'il se situe entre 5 et 1 000. C'est sujet à modification.

Une bonne partie de l'argument du secrétaire parlementaire portait sur la question de savoir pourquoi ce député soulevait cette question maintenant, alors que nous sommes en plein milieu d'autres travaux. Le député a tout à fait raison. Ce n'est pas le bon moment.

Cependant, je n'ai aucun contrôle sur le tirage au sort et l'inscription de mes projets de loi au Feuilleton. Ça fait presque deux ans que mon projet de loi est là. Il s'est finalement rendu au début de la liste. Je m'en suis saisi dès que je l'ai pu. Je comprends le député, mais c'est indépendant de ma volonté. J'ai bien l'intention de soulever cette question.

Je rappelle aux députés que le ministère des Institutions financières est actuellement saisi d'une question importante pour les Canadiens. Elle a rapport à la compagnie d'assurance-vie La Confédération. On m'a dit que des poursuites avaient été engagées contre un administrateur pour un montant de 1 milliard de dollars. C'est très grave. L'affaire sera certainement étudiée, analysée et vérifiée durant plusieurs années.

Je répète ce que j'ai dit au début de mon intervention au sujet des circonstances qui ont mené à la formulation de ce projet de loi. J'ai assisté à un dîner offert par la chambre de commerce de Mississauga où un sénateur avait été invité comme conférencier. On a présenté celui-ci comme un sénateur du Canada très actif, PDG de l'une des plus grandes et des plus influentes sociétés du Canada ainsi que membre du conseil de 26 autres sociétés, tout cela en même temps.

Quand j'ai entendu cette présentation, j'ai été impressionné, mais je me suis surtout demandé comment quelqu'un pouvait cumuler des postes de sénateur et de PDG en s'acquittant de toutes ces responsabilités que tout le monde étudie, parce qu'elles sont si importantes? C'est une question de pure forme. Je ne sais pas s'il existe une réponse, mais quand j'entends le secrétaire parlementaire admettre que, après neuf documents de travail et consultation avec des gens d'affaires, des investisseurs, des conseils d'entreprises et tous les autres intéressés, cette question n'a pas encore été abordée, je trouve cela très étrange.

Je suis très heureux d'avoir été le premier à soulever cette question avec la présentation du projet de loi C-204.

[Français]

Le vice-président: Collègues, la période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée, et l'ordre est rayé du Feuilleton.

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