Passer au contenu
;

JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 047 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 9 février 2011

[Enregistrement électronique]

(1545)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne entame sa 47e séance en ce mercredi 9 février 2011.
    Vous avez l'ordre du jour sous les yeux. Nous poursuivons l'examen du projet de loi C-54, Loi modifiant le Code criminel (infractions d'ordre sexuel à l'égard d'enfants).
    J'ai demandé à la greffière de distribuer aux membres le rapport du comité aux fins d'approbation à la fin de la présente séance. Une dizaine de minutes sera réservée à cette fin. À ce moment, M. Ménard aura également quelque chose à dire au sujet de notre séance de lundi.
    Afin de nous aider dans notre examen du projet de loi C-54, nous accueillons trois témoins. D'abord, à titre personnel, M. William Marshall, directeur de Rockwood Psychological Services.
    Bienvenue, et pardonnez-nous notre retard. Notre autobus a été légèrement retardé. Merci d'avoir patienté.
    Nous accueillons également, par vidéoconférence, M. Randall Fletcher, de Charlottetown à l'Île-du-Prince-Édouard. Il est spécialiste de la déviance sexuelle au Bureau du procureur général de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Bienvenue.
    Nous accueillons aussi, par vidéoconférence, Stacey Hannem, de Brantford en Ontario. Elle est présidente du Comité d'examen des politiques de l'Association canadienne de justice pénale.
    Bienvenue à vous également.
    Je crois qu'on vous a déjà expliqué la procédure. Chacun de vous aura 10 minutes pour présenter son mémoire et il y aura ensuite une période de questions.
    Monsieur Marshall, nous allons commencer par vous.
    J'ai l'habitude de patienter, puisque j'ai passé les deux derniers jours au tribunal. Vous savez comment c'est, alors, vous n'avez pas à vous excuser.
    J'aimerais vous expliquer brièvement ce que je fais et pourquoi je suis ici. J'ai enseigné à l'Université Queen's pendant 28 ans. J'ai pris ma retraite en 2000 à l'âge de 65 ans, car la loi m'y obligeait, mais j'ai poursuivi mes recherches et mes travaux cliniques sur les délinquants sexuels. En fait, nos travaux incluent maintenant d'autres catégories de délinquants. De plus, je dirige un programme pour les délinquants sexuels dans deux prisons fédérales.
    Je suis également directeur des groupes expérimentaux dans un établissement pour les troubles mentaux, à Brockville, où sont jumelés les services de correction et les services de santé mentale de la province. Je mets sur pied des groupes expérimentaux pour tous les délinquants de cet établissement de 100 lits, dont 25 sont réservés à l'unité des délinquants sexuels.
    Depuis 42 ans maintenant, j'effectue des recherches sur les délinquants sexuels et je leur offre des traitements. En 1973, j'ai établi le premier programme de traitement à Service correctionnel du Canada à la suite d'une infraction horrible commise par un délinquant qui avait été remis en liberté.
    Je dois dire que, depuis la fin des années 1980, lorsqu'Ole Ingstrup est devenu commissaire du Service correctionnel du Canada, il a procédé à une transformation de l'organisme. Aujourd'hui, à mon avis, c'est, de loin, le meilleur au monde. Il avait pour mandat de protéger adéquatement le public grâce à des établissements sécuritaires d'où les détenus ne pouvaient pas s'évader — d'ailleurs, très peu ont réussi à s'échapper —, mais aussi de financer toute une gamme de programmes de réadaptation qui, au fil des ans, se sont montrés extrêmement efficaces.
    Malheureusement, au cours de la dernière année, Service correctionnel du Canada a changé sa stratégie et réduit sensiblement le nombre de programmes offerts. Il a notamment mis fin à tous les programmes offerts par des psychologues aux délinquants sexuels à risque très élevé, élevé et modéré, malgré les résultats remarquables. D'ailleurs, aucun programme au monde n'a été plus efficace. J'avais l'habitude de m'en vanter partout où j'allais. Je fais de la consultation dans 26 pays, et je vantais nos excellents établissements et l'efficacité de Service correctionnel du Canada.
    C'est pourquoi je suis très déçu de constater ce relâchement en matière de réadaptation. Si je me fie aux données que nous avons, je crois que les nouveaux programmes n'auront que très peu ou pas d'impact sur les taux de récidive. N'oublions pas que les innocentes victimes de ces délinquants sont, pour la plupart, des femmes et des enfants.
    Lorsqu'on propose de modifier les peines imposées aux délinquants sexuels, il faut tenir compte de l'objectif visé et déterminer si la peine est juste ou s'il faut offrir des programmes de réadaptation. Il est clair que le modèle américain s'appuie sur des peines sévères, mais il suffit d'examiner le système carcéral des États-Unis pour se rendre compte que cette stratégie est extrêmement inefficace et coûteuse.
    Concernant la durée des peines, les travaux des criminologues de l'Université Carleton, dirigés par Don Andrews, ainsi que les données et le grand nombre de métaanalyses que nous avons montrent que l'impact des peines plus longues est très minime. Ce n'est pas la bonne voie à suivre. Cette stratégie augmente les taux de récidive. Je peux vous fournir les références pour ces documents — je ne me souviens pas des titres, mais je pourrais vous les faire parvenir si cela vous intéresse.
    Si on veut imposer des peines plus sévères, il faut réfléchir aux raisons qui nous poussent dans cette direction. Étant donné que notre voisin du Sud a déjà emprunté cette voie, nous devrions examiner les résultats.
    Comme je l'ai déjà dit, non seulement les peines plus sévères semblent entraîner une augmentation du taux de récidive, mais elles mènent inévitablement — et ça se voit déjà — à un surpeuplement de nos prisons. Cela n'a jamais été un problème, mais ce l'est de plus en plus, et ça ne s'améliorera pas. En fait, même si vous fournissez les ressources nécessaires à la réadaptation, le surpeuplement des prisons vient annihiler vos efforts.
    J'ai visité un nombre incalculable de prisons aux États-Unis. Elles sont tellement surpeuplées, qu'il est tout à fait impossible d'offrir des traitements aux détenus. D'ailleurs, la majorité des États ont déjà jeté l'éponge. Mais, au moins, ils admettent que c'est impossible. Alors, ils n'essaient même pas. Malheureusement, cela signifie que la majorité des délinquants sexuels — ou, à tout le moins, un grand nombre d'entre eux — se retrouvent dans des programmes pour prédateurs sexuels violents, car ils n'ont pas eu la possibilité de réduire leur niveau de risque avant de se présenter devant... Vous savez, je trouve la Constitution des États-Unis vraiment étrange; je ne sais pas comment elle permet une telle situation. Peu importe....
    Je crois qu'il ne faut pas oublier que des peines plus sévères mèneront inévitablement à un surpeuplement des prisons, ce qui viendra entraver tout effort de réadaptation. Service correctionnel du Canada a déjà commencé à compromettre sérieusement sa réputation internationale quant à la façon dont nous traitons les délinquants de toutes sortes, notamment les délinquants sexuels.
    Je n'ai rien de particulier à dire au sujet des infractions à caractère sexuel, sauf que certaines me paraissent un peu inhabituelles.
    Je crois que la définition de l'inceste est plutôt inhabituelle, car elle inclut des adultes consentants — des frères et soeurs, par exemple — qui ont des relations sexuelles ensemble et qui sont considérés au même titre qu'une personne qui agresse sexuellement sa fille, même si cette dernière est âgée de 17 ans. Je crois que ce sont deux choses complètement différentes. J'ignore si l'on peut établir cette différence dans la loi. J'imagine qu'il faut s'en remettre aux juges, et leurs décisions seront sujettes à interprétation.
    Je pense aussi à l'exhibitionnisme. Certains exhibitionnistes — très peu, en fait — finissent par commettre des actes plus dangereux. Je crois qu'il faut distinguer entre l'exhibitionniste qui s'expose devant des adultes, et celui qui s'expose devant des enfants. Évidemment, cette distinction est établie, mais parmi le premier groupe, très peu commettent des actes plus dangereux. Je crois qu'une peine minimale de 90 jours pour un exhibitionniste qui en est à sa première infraction, c'est plutôt sévère.
    Déjà qu'être identifié comme un exhibitionniste dans les journaux aura des conséquences très graves sur la vie, la famille et les enfants du délinquant, une peine d'emprisonnement de 90 jours serait insignifiante. À mon avis, on ne peut pas faire grand-chose pour lui en 90 jours. Ça ne ferait qu'ajouter inutilement à son fardeau. Donc, je vous encourage à laisser tomber les peines minimales pour les exhibitionnistes, même dans le cas d'infractions punissables par procédure sommaire de 30 jours, afin que le catalyseur...
    Ce qu'il faut en matière de réadaptation, et je sais que vos préoccupations vont bien au-delà de la réadaptation... Ce qu'il faut pour la plupart des délinquants sexuels dangereux, plus particulièrement les hommes qui agressent les enfants, peu importe la sévérité de l'agression, c'est... Je crois qu'il s'agit d'une infraction sérieuse et je suis tout à fait d'accord pour que ces agresseurs aillent directement en prison. Mais, pour combien de temps? Quelle peine serait utile?
    Ces délinquants doivent être emprisonnés pendant au moins trois ans pour que leur réadaptation soit satisfaisante. La raison, c'est que, en plus de leurs problèmes de nature sexuelle, la plupart de ces hommes sont également colériques ou toxicomanes. Il faut donc les soumettre à d'autres programmes. Mais, je dois dire que la portée et la qualité de ces autres programmes dans le système carcéral fédéral ont considérablement diminué.
(1550)
    Bien sûr, il y a aussi toutes les modalités administratives et le déplacement des détenus d'un établissement à un autre. Donc, il faut des peines d'au moins trois ans. C'est ce que je recommande dans le cas d'agressions sexuelles, que ce soit contre des adultes ou des enfants. Cela serait plus logique, à mon avis.
    Je vous ai remis quelques copies du document sur l'efficacité des programmes offerts aux délinquants sexuels dans le système carcéral fédéral. J'espère que vous les avez.
(1555)
    Oui, mais malheureusement, le document n'est pas traduit. Nous allons le faire traduire et en remettrons une copie aux membres du comité.
    Je suis désolé.
    Le président: Ça va.
    M. William Marshall: J'ai grandi en Australie. La seule langue qu'il faut apprendre là-bas, c'est la version australienne de l'anglais...
    Des voix: Oh, oh!
    M. William Marshall: ... et je ne parle pas français.
    Je suis désolé, mais votre temps est écoulé. Si vous avez autre chose à ajouter, vous pourrez le faire lors de la période des questions.
    Passons à M. Randall Fletcher.
    Monsieur Fletcher.
    Je vais me présenter brièvement. Je travaille pour le bureau du procureur général de l'Île-du-Prince-Édouard. En gros, je rencontre tous ceux qui sont reconnus coupables d'une infraction d'ordre sexuel dans cette province.
    Notre situation à l'Île-du-Prince-Édouard est une peu différente, parce que nous sommes en mesure d'offrir des traitements à tous ceux qui sont reconnus coupables. De plus, la majorité des gens qui plaident coupables ou qui sont reconnus coupables doivent subir une évaluation complète avant le prononcé de leur sentence. Donc, au moment de décider de la peine, le juge a en main l'avis d'un spécialiste concernant le niveau de dangerosité du délinquant, la nature de l'infraction, les moyens pour réduire le risque de récidive, et les traitements et les moyens de contrôle externes nécessaires.
    En me préparant pour la séance d'aujourd'hui, je me suis en fait dit que je ne pourrais probablement pas mieux exprimer mon point de vue qu'en citant l'énoncé de position de l'ATSA, l'Association for the Treatment of Sexual Abusers. L'organisme compte environ 3 000 membres, dont la grande majorité mène des travaux de recherches et des travaux cliniques. M. Marshall, qui parlait juste avant moi, a déjà été président de l'ATSA.
    En novembre 1996, les gens de l'association ont publié leur exposé de position. J'en citerai des extraits. Ils ont dit:
Il est important de comprendre que les délinquants sexuels ne sont pas tous pareils. En fait, ce groupe hétérogène regroupe des gens de divers groupes d'âge, avec divers profils psychologiques et divers antécédents criminels.

... La perception que bien des gens se font des délinquants sexuels a été façonnée par la couverture médiatique des délinquants sexuels les plus dangereux, qui ont également, dans bien des cas, tué leurs victimes. Évidemment, ces gens ont commis d'effroyables crimes et méritent de subir l'opprobre de la population. Cependant, il est important de comprendre que le délinquant sexuel typique ne leur ressemble pas.
    Les gens de l'ATSA affirment que les délinquants sexuels varient énormément en fonction de leur niveau d'impulsivité et de récidive, du risque qu'ils représentent pour le public et de leur volonté de modifier leur comportement. Ils poursuivent en disant que les politiques publiques efficaces tiennent compte du caractère unique de chaque délinquant sexuel au lieu de mettre en pratique une approche universelle.
    Cela rejoint en quelque sorte le commentaire de M. Marshall au sujet de la difficulté de rédiger une loi qui tient compte de toutes ces nuances. Selon moi, lorsque vous commencez à imposer des peines minimales, vous empêchez un peu les juges d'utiliser leur pouvoir discrétionnaire et d'adapter la peine et les autres éléments comme l'ordonnance de probation en fonction des besoins de l'accusé.
    Brièvement, en ce qui concerne les propos de M. Marshall au sujet de l'efficacité de l'emprisonnement, j'ai eu la chance d'assister à la présentation de Paul Gendreau, titulaire d'un doctorat, qui travaille à l'institut de justice du Nouveau-Brunswick. Il a dit que dans les années 1950 et 1960, lorsque les prisonniers canadiens passaient plus de temps derrière les barreaux, le taux de récidive était en fait plus élevé de 2 p. 100. Que le délinquant purge une brève peine ou qu'il n'en purge pas, cela n'influe pas sur le taux de récidive. Autrement dit, deux personnes ayant commis la même infraction ont le même taux de récidive même si l'un va en prison et l'autre pas.
    Selon une étude, si des délinquants à faible risque sont incarcérés avec des délinquants à risque élevé, cela augmente le risque de récidive de 1 p. 100 pour les délinquants à risque élevé et de 6 p. 100 pour les délinquants à faible risque. C'est une conséquence de la surpopulation carcérale.
    Au milieu des années 1970, il a été prouvé qu'une supervision étroite associée à peu de traitement ou à pas de traitement du tout haussait le taux de récidive de 1 p. 100. Imposer une amende, sans peine, le réduisait de 3 p. 100. Les camps de réadaptation l'augmentaient de 1 p. 100. Le dépistage de drogues le réduisait de 1 p. 100. La surveillance électronique l'augmentait de 3 p. 100. Les divers types de consultations le réduisaient de 11 p. 100.
    Des résultats similaires ont été observés par Don Andrews, qui a examiné les études existantes pour trouver les facteurs communs de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas. Il a examiné plus de 30 études et a remarqué que le fait de purger une peine uniquement augmente le taux de récidive de 7 p. 100, et le taux augmente selon la sévérité de la peine. Purger une peine tout en suivant un traitement réduit le taux de récidive de 15 p. 100.
    Manifestement, les moyens efficaces ne correspondent pas à ceux auxquels les gens pensent peut-être. Les efforts pour rendre plus sécuritaires les collectivités doivent tenir compte des données provenant des recherches. M. Gendreau a conclu en disant qu'à Service correctionnel Canada les méthodes auxquelles ils ont recours et les méthodes efficaces sont parfois deux choses bien distinctes.
(1600)
    En ce qui concerne le taux de récidive pour les délinquants sexuels, encore une fois, le public croit en général que tous les délinquants sexuels récidiveront un jour ou l'autre. En fait, c'est tout le contraire. Une recherche canadienne a conclu qu'en général le taux de récidive — on entend par récidive une nouvelle accusation ou condamnation — se situait à 14 p. 100 sur une période de 5 ans, à 20 p. 100 sur une période de 10 ans, et à 24 p. 100 sur une période de 15 ans.
    C'est aussi important de comprendre que les délinquants sexuels n'ont pas tous le même taux de récidive. Sur une période de 15 ans, 35 p. 100 des délinquants qui agressent de jeunes garçons non apparentés récidiveront. À l'opposé, sur la même période, 13 p. 100 des auteurs d'actes incestueux récidiveront. Les délinquants qui agressent de jeunes filles non apparentées se retrouvent entre les deux.
    Il est aussi important de noter que ceux qui ont déjà commis d'autres infractions d'ordre sexuel ont deux fois plus de risque de récidiver que ceux qui en sont à leur première infraction. La majorité des Canadiens accusés d'une infraction d'ordre sexuel en sont à leur première offense.
    Pour ce qui est de l'efficacité des traitements offerts aux délinquants sexuels, les premières études éprouvaient de la difficulté à être statistiquement significatives. En résumé, cela veut dire que si je lance une pièce de monnaie dans les airs 10 fois et qu'elle tombe 8 fois sur face, ce résultat pourrait être attribuable à la chance. Par contre, si je la lance 100 fois et qu'elle tombe 80 fois sur face, cela serait statistiquement significatif.
    Lorsque j'ai débuté dans le domaine il y a 23 ans, selon les auteurs et les gens à qui je parlais, tous s'entendaient pour dire que, pour être efficace, le traitement devait être d'une durée de deux à cinq ans et se dérouler selon une approche ouverte, c'est-à-dire sans contenu établi et sans critères précis pour en déterminer la fin.
    Des études ont utilisé un échantillon de 100 personnes, un taux de base de récidive de 50 p. 100 pour les délinquants non traités et une réduction de 40 p. 100 de la récidive; elles ont obtenu un résultat non statistiquement significatif. Ce problème a été résolu grâce à un projet de recherche de données en collaboration avec l'ATSA dirigé par Karl Hanson. Il travaille à la division de la recherche correctionnelle de Sécurité publique Canada, qui a défini les normes d'efficacité des traitements et a effectué une méta-analyse de toutes les anciennes études.
    En se fondant sur les autres études, celle-ci a conclu qu'en moyenne les programmes de traitement réduisaient le risque de commettre de nouveau une infraction d'ordre sexuel de 16,8 p. 100 à 12,3 p. 100. Lorsque nous évaluons seulement les traitements actuels, ceux qui étaient reconnus comme étant les plus efficaces à l'époque, le taux de récidive passait de 17,4 p. 100 pour les délinquants non traités à 9,9 p. 100 pour les délinquants traités. Les programmes de traitement en milieu communautaire semblaient être plus efficaces que les traitements offerts dans le milieu carcéral, parce qu'il est plus difficile d'offrir des traitements dans un environnement hostile aux délinquants et qui ne favorise pas l'ouverture et le changement.
    Donc, voici ce que nous avons appris. Que le délinquant purge une brève peine ou qu'il n'en purge pas, le taux de récidive demeure stable. De longues peines de prison augmentent le risque de récidive, et purger une peine tout en suivant un traitement le diminue grandement. C'est vrai non seulement pour les délinquants sexuels, mais aussi pour la population carcérale en général. Nous savons aussi que les traitements les plus efficaces pour les délinquants sexuels mettent en pratique ce qui a été appris par les recherches et sont offerts dans la communauté.
    Lorsque vous adoptez une loi, vous devez être conscients des répercussions non voulues. L'augmentation des peines minimales entraînerait aussi un besoin accru de cellules et de personnel carcéral. Ce sera sûrement vrai en particulier dans les systèmes carcéraux provinciaux, où les ressources pour les traitements sont déjà limitées. Donc, plus d'argent sera investi dans les éléments que nous savons inefficaces et moins le sera dans ceux qui le sont.
    Plus les délinquants sexuels ont passé de temps derrière les barreaux, plus ils ont de la difficulté à réintégrer la société. Parmi les gens que je traite, j'ai remarqué, entre autres, que les délinquants capables de se trouver un emploi à leur sortie de prison sont souvent ceux dont les employeurs ont préservé l'emploi. Lorsqu'il s'agit d'une peine relativement courte, c'est possible. Cependant, dans le cas de longues peines, les employeurs ne veulent pas le faire ou ne le peuvent tout simplement pas.
    Vous devez aussi tenir compte de l'augmentation chez les délinquants sexuels du sentiment d'aliénation et du sentiment d'être étiquetés comme étant moins fiables, plus sujets à la récidive et moins recommandables que les gens qui commettent d'autres types de crimes. À leur tour, ces éléments peuvent les pousser à s'isoler sur les plans social et affectif, ce qui semble augmenter le risque de récidive.
(1605)
    L'un des avantages d'être dans une petite province comme l'Île-du-Prince-Édouard, c'est que parfois nous sommes en mesure d'opter pour une approche plus complète. Nos prisonniers peuvent commencer leur traitement alors qu'ils purgent encore leur peine. Des agents de correction les escortent jusqu'à mon bureau où les détenus participent à des séances de thérapie de groupe. Nous essayons de faire en sorte qu'ils effectuent au moins le tiers de leur traitement après leur remise en liberté. Ainsi, ils acquièrent des moyens de modifier leur comportement alors qu'ils sont dans un environnement sécurisant, puis ils peuvent les mettre en pratique à leur sortie de prison avec l'aide de leur groupe de traitement.
    Voici ce qui m'inquiète: l'augmentation des peines minimales limitera les ressources disponibles dans le système carcéral pour payer les quarts supplémentaires nécessaires pour permettre aux agents de correction d'escorter les délinquants sexuels aux séances de thérapie de groupe. Je n'insisterai jamais assez sur l'importance de leur permettre de sortir de l'environnement carcéral et de se trouver dans un cadre sécurisant qui leur permet d'être à l'aise, de s'exprimer et de se pencher sur leurs problèmes.
    C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment.
    Merci. Pourriez-vous préciser un élément?
    La position que vous venez de présenter, est-ce celle du procureur général de l'Île-du-Prince-Édouard?
    Oui. Mon exposé a été examiné en prévision d'une autre présentation que je devais faire; j'ai reçu son aval.
    Donc, le procureur général est d'accord avec le contenu de votre exposé.
    Il sait ce qui s'y trouve et m'a donné son accord pour le faire. Donc, oui.
    D'accord.
    Passons maintenant à Mme Hannem.
    Vous avez 10 minutes.
    Je parle aujourd'hui au nom de l'Association canadienne de justice pénale. Je suis présidente du Comité d'examen des politiques. Je suis aussi professeure dans le programme de criminologie ici à l'Université Wilfrid Laurier. J'ai passé les neuf dernières années à travailler et à faire de la recherche dans les cercles de soutien et de responsabilité, un programme de réintégration communautaire pour les délinquants sexuels libérés.
    Le point de vue que je vais vous donner représente celui de l'Association canadienne de justice pénale et il se fonde également sur mon expérience de travail et de recherche.
    Nous aimerions souligner que l'Association canadienne de justice pénale, l'ACJP, appuie sincèrement les efforts qui sont déployés pour protéger les enfants des agressions sexuelles. Les observations que nous faisons aujourd'hui ne signifient pas que nous sommes contre l'esprit du projet de loi, mais nous sommes très préoccupés par certaines mesures qu'il contient.
    Nous croyons très fermement que tous les changements apportés à la loi doivent se fonder sur des recherches qui montrent qu'ils vont fonctionner, qu'ils empêcheront les agressions sexuelles d'enfants de se produire ou qu'ils réduiront le taux de récidive — il en va de même pour tout autre crime d'ailleurs.
    Nous avons certaines préoccupations face au projet de loi C-54. Elles reposent sur trois problèmes fondamentaux.
    En ce qui concerne le premier problème, comme on y a déjà fait allusion, peu de recherches viennent appuyer l'idée que les peines minimales obligatoires ont un effet dissuasif; c'est-à-dire que la majorité des recherches révèlent que peu importe la durée et la gravité de la peine, ce type de mesures n'a pas vraiment d'effet dissuasif.
    En fait, en 2002, Gabor et Crutcher ont analysé des recherches et des documents pour le ministère de la Justice et ont découvert que les effets dissuasifs étaient très marginaux pour ce qui est des infractions liées à la conduite en état d'ébriété et de celles liées aux règlements sur les armes à feu. Cela... [Note de la rédaction: difficultés techniques] ... effets dissuasifs pour des crimes plus graves ou violents. En outre, comme on l'a mentionné, plus la peine est longue, moins on a de chance de voir se concrétiser la réduction du taux de récidive que nous souhaitons.
    Ce que nous savons, c'est que les peines minimales obligatoires coûtent cher aux contribuables. Elles donnent lieu à l'envoi d'un plus grand nombre de personnes en prison pour des périodes plus longues. Dans certains cas, elles donnent lieu à des peines qui sont fondamentalement injustes, c'est-à-dire qu'elles ne tiennent pas compte des particularités de l'affaire; par exemple, et comme M. Marshall l'a souligné avec éloquence, c'est le cas de la très large gamme d'infractions qui entrent dans la catégorie de l'inceste.
    Nous sommes très préoccupés. En tant que comité, qu'association, nous avons toujours condamné le recours à des peines minimales obligatoires parce que nous croyons simplement que rien ne justifie une telle dépense de fonds publics qui ne donnerait que très peu de résultats.
    Ensuite, le deuxième problème majeur que nous pose le projet de loi C-54, c'est ce qui pourrait résulter des changements apportés à l'ordonnance judiciaire qui vient restreindre l'accès aux technologies comme Internet et les ordinateurs pour les ex-prisonniers en liberté conditionnelle. Nous croyons que ces changements pourraient nuire à la capacité d'un ex-délinquant à se réinsérer dans la société, à obtenir un emploi ou à poursuivre des études.
    Nous trouvons que les changements apportés au libellé pour dire que les ex-prisonniers ne peuvent pas utiliser des ordinateurs ou des technologies pour quelque raison que ce soit, sauf dans un cadre judiciaire, sont tout simplement inadmissibles, étant donné les répercussions que cela pourrait avoir sur la capacité de ces gens à pouvoir fonctionner dans une société si dépendante des technologies. Comme vous pouvez le constater, je suis présentement à Brantford.
    De plus, j'ai travaillé avec un ex-délinquant qui a purgé sa peine dans un pénitencier fédéral. Après sa sortie de prison, il est retourné à l'école, a obtenu un baccalauréat et il poursuit maintenant ses études à la maîtrise; il n'aurait jamais pu faire tout cela s'il n'avait pas pu utiliser un ordinateur ou Internet.
    J'exhorte le comité à envisager de conserver le libellé original de ce passage selon lequel on interdit l'utilisation d'un ordinateur et des technologies dans le but de communiquer avec des personnes âgées de moins de 16 ans. Il me semble qu'on restreint considérablement cette liberté.
(1610)
    Le troisième problème que nous pose le projet de loi C-54, c'est qu'on y érige en infraction le fait de rendre accessible à un enfant du matériel sexuellement explicite en vue de faciliter la perpétration à son égard d'une infraction d'ordre sexuel. Nous trouvons que cette catégorie d'infraction est très large et en fait, qu'elle est probablement trop large pour être appliquée comme il se doit. Pour faire en sorte que des erreurs judiciaires ne se produisent pas, dans le mémoire que nous avons soumis au comité, nous signalons que les nouvelles nous montrent beaucoup de situations où des parents sont inquiets du contenu sexuellement explicite qu'on fournit à leurs enfants dans les cours d'éducation sexuelle. Dites-moi, y a-t-il un risque qu'un parent insinue qu'un enseignant leurre des élèves...? Il reviendra aux tribunaux d'établir quelle était l'intention de l'enseignant, mais d'ici là, la vie et la carrière d'une personne auront peut-être été totalement détruites.
    On comprend mal pourquoi le fait de fournir du matériel explicite ne serait pas visé par les dispositions législatives actuelles sur le leurre d'enfant. On comprend mal également en quoi ces mesures législatives protégeront les enfants. Les recherches nous disent que la majorité des adolescents ont déjà vu du matériel pornographique ou sexuellement explicite sur Internet, peu importe qu'ils l'aient fait exprès ou non. Je ne crois pas que cette disposition protégera les enfants comme on le prévoit.
    En plus d'être préoccupée par les problèmes que j'ai mentionnés, l'ACJP s'inquiète des effets cumulatifs qu'entraînerait l'adoption de mesures législatives en matière de justice criminelle qui sont inefficaces. Chaque fois que nous adoptons une nouvelle loi qui n'a pas d'effet dissuasif, qui ne réduit pas le taux de récidive, on investit de l'argent et des efforts pour appliquer des mesures inefficaces, et on prive d'argent des programmes qui pourraient être efficaces. Vous dites donc que vous protégez les Canadiens de la victimisation et des agressions, mais dans certains cas, les mesures adoptées peuvent avoir l'effet contraire en minant différentes choses qui pourraient fonctionner.
    Comme on l'a déjà dit aujourd'hui, nous devons investir plus d'argent et de ressources dans des programmes et des traitements qui conviennent aux gens qui ont été condamnés pour des infractions d'ordre sexuel. À maintes reprises, il a été démontré que cela fonctionne. Comme on l'a dit, et comme M. Marshall l'a mentionné, à une certaine époque, les programmes du Canada étaient reconnus sur la scène mondiale, et d'autres pays s'inspiraient de notre démarche. Maintenant, j'ai bien peur que les ressources aient tellement diminué que ce n'est plus le cas.
    Nous avons besoin d'argent pour les programmes d'orientation afin de traiter les victimes d'agressions sexuelles. Les sommes qu'on consacre aux prisons et à l'incarcération, ce qui est inefficace, seraient mieux investies si elles servaient à aider les victimes. Nous avons besoin d'appuis constants pour les programmes et les initiatives qui se sont déjà révélés efficaces pour la réduction du taux de récidive des délinquants sexuels. Les cercles de soutien et de responsabilité ne constituent qu'un exemple de ces types de programmes qui, comme les programmes de traitement psychiatrique ou psychologique, se sont aussi révélés efficaces.
    Nous devons éduquer les parents et les enseignants sur les signes avant-coureurs d'actes d'agressions sexuelles et de déviance sexuelle. Nous avons besoin de ressources pour aider les adultes inquiets à obtenir de l'aide pour les enfants qui risquent d'être victimes d'agression ou de devenir des agresseurs. Nous avons besoin de ressources et d'appui pour les sociétés d'aide à l'enfance partout au Canada qui s'occupent régulièrement d'enfants exploités et qui sont souvent impuissantes face à leur situation.
    C'est le genre de solutions qui préviendront la victimisation. À long terme, elles pourraient être beaucoup plus efficaces.
    Notre association est d'avis que les changements proposés par le projet de loi C-54 n'auront pas l'effet désiré de réduire la victimisation et de dissuader les prédateurs sexuels.
    Je vous remercie de votre attention.
(1615)
    Merci.
    Les membres du comité poseront maintenant leurs questions.
    Monsieur Lee.
    Je remercie les témoins d'avoir donné leur point de vue.
    Monsieur Marshall, dans les articles 11 et 12 du projet de loi, on augmente la durée de la peine minimale obligatoire, qui passerait de 45 à 90 jours. Le fait de doubler la peine minimale permettrait-il d'atteindre un objectif sur le plan de la politique publique? Voyez-vous une utilité ou un avantage quelconque à le faire, ou bien s'agit-il plutôt d'une question tendancieuse?
    Non, pas vraiment. Je ne sais pas ce que nous pourrions faire de 45 jours supplémentaires. Nous ne pourrions certainement pas commencer quelque traitement que ce soit. En toute honnêteté, étant donné qu'une période de 90 jours, ce n'est même pas suffisant pour préparer mentalement une personne à suivre un traitement lorsqu'elle sera de retour dans la collectivité, je ne vois pas l'intérêt.
    Avez-vous des observations à faire, monsieur Fletcher ou les autres intervenants?
    Je ne vois pas non plus en quoi ce serait bénéfique. En raison des peines provinciales, qui tendent à être plus courtes de toute façon, il se peut que ce soit un peu plus difficile en ce qui a trait au moment du traitement.
    Je crois que le plus grand problème, c’est qu’il en résulterait probablement un accroissement des dépenses pour embaucher des agents de correction et augmenter le nombre de cellules, et une réduction du financement destiné au traitement.
    Madame Hannem...? Vous n'êtes pas obligée de répondre si...
    Allez-y.
    Je partage leur avis, mais j'ajouterais que le fait de doubler la peine minimale obligatoire pourrait avoir de graves répercussions sur les délinquants qui ont une famille, car ils pourraient perdre leur emploi ou ne pas être capables d'en obtenir un après leur libération, ce qui aurait probablement de très graves conséquences sur leur famille.
    D'accord.
    Monsieur Marshall, pendant que vous faisiez vos observations, bien que cela ne fasse pas directement partie du projet de loi... Je parle des programmes destinés aux délinquants qui sont condamnés pour des infractions d'ordre sexuel. Vous dites que vous avez remarqué une réduction de fait — ou du moins, une réduction — du nombre de programmes ou du financement des programmes destinés à ce type de délinquants, avec qui vous travaillez.
    Je vais poser la même question à M. Fletcher.
    Pouvez-vous nous dire les raisons de ces coupures ou de ces réductions? Il semble que ces fonds soient essentiels au traitement des délinquants.
(1620)
    En ce qui concerne le traitement des délinquants sexuels dans le système fédéral, les coupures ont consisté à ce qu’il n’appartienne plus aux psychologues de fournir des services de traitement. C’était le bagage de connaissances... Je ne sais pas s’il importait qu’il s’agisse de psychologues, mais ces personnes avaient au moins une maîtrise ou un doctorat et un niveau de scolarité suffisamment élevé pour offrir des traitements efficaces. On les a retirées complètement du système et on les remplace maintenant par des gens qui suivront un programme de formation de deux semaines et qui n’ont pas nécessairement le niveau de scolarité requis pour gérer les programmes.
    Ce que nous savons au sujet du traitement des délinquants sexuels, c'est que si on gère le traitement comme on suit une recette, et que les gens qui offrent ce service n'ont pas vraiment les aptitudes et procèdent comme s’il s’agissait de psychoéducation, les effets seront presque absents. Si l'on a des thérapeutes compétents, les effets seront remarquables.
    Merci.
    Monsieur Fletcher.
    Je ne peux vraiment pas faire de commentaires à cet égard. Je ne suis pas en mesure de vous dire pourquoi on a pris cette décision dans le système fédéral. Je peux vous dire qu'il n'y a rien de semblable dans le système provincial de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Toutefois, je suis certainement d'accord avec M. Marshall sur le fait que pour que le traitement soit efficace, il faut que la personne qui le donne ait une formation poussée. Il faut également que des fonds soient consacrés à la mise à jour de la formation. À mesure que de nouvelles recherches ont lieu, il faut suivre le rythme, en particulier pour ce qu'on tend à considérer comme les pratiques exemplaires de traitement.
    D'accord.
     Il semble qu'on assiste actuellement à une surenchère des peines. Si, au moyen du projet de loi, nous augmentons la durée des peines, mais que nous ne faisons rien au sujet des programmes, quelles sont les chances de succès des changements que nous apporterons à la politique publique à votre avis?
    Je m’adresse tout d’abord à nos témoins qui ne sont pas sur place: M. Fletcher ou Mme Hannem.
    Si l’on met de côté les conséquences qui en résulteraient, comme la réduction des fonds consacrés au traitement, je ne pense pas que cela aura un effet quelconque. On ne parle pas d’une très grande augmentation de la peine minimale. La question c’est de savoir s’il y aura des effets positifs.
    Est-il probable que la peine plus sévère aspirera tout l’argent qui, autrement, pourrait être utilisé, par exemple, pour les traitements?
    Oui. C’est ce que M. Marshall et la Dre Hannem disent tous les deux. On puise dans l’argent destiné aux traitements.
    Les systèmes provinciaux ont déjà de grandes difficultés causées par certaines mesures législatives qui ont été adoptées dans le but de changer la durée des peines pour d’autres types de comportement criminel. Dans la province de l’Île-du-Prince-Édouard, on vient de construire une énorme annexe au centre correctionnel provincial, ce qui est en train de provoquer une vraie crise financière dans le système. Jusqu’à maintenant, il n’y a pas eu de répercussions sur mes services, mais c’est surtout en raison de la priorité que ma province leur donne. Si la tendance se maintient, il est évident que moins de fonds seront accessibles.
    Monsieur Marshall.
    Il est intéressant que Service correctionnel du Canada réduise la prestation de services de traitement destinés aux délinquants, alors que Pamela Yates, qui travaille pour le Service correctionnel du Canada ici à Ottawa, a fait une étude dans le cadre de laquelle elle a examiné les coûts et les avantages de fournir un traitement aux délinquants sexuels. D’après ses calculs, chaque dollar investi dans des programmes destinés aux délinquants sexuels fait économiser six dollars au Service correctionnel du Canada, car, ce faisant, on sort les hommes de prison plus tôt et comme ils ne récidivent pas, ils n’y retournent pas.
    La raison pour laquelle ils demandent… Je ne crois pas du tout que ce soit fondé, mais la raison que donne SCC pour remplacer les psychologues, c’est qu’il n’est pas capable d’en recruter. C’est peut-être vrai dans le Nord de l’Alberta, mais c’est tout à fait faux dans la plupart des autres provinces. Dans la plupart des grandes villes, c’est tout à fait faux.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Ménard. Vous disposez de sept minutes.

[Français]

    L'étude de ce projet de loi non seulement nous a permis d'entendre d'autres témoins et de mieux comprendre le sujet, mais a suscité chez nous en général une réflexion profonde, parce qu'il s'agit vraiment d'un type de criminalité que l'on considère la conséquence d'anomalies psychologiques. Généralement, on considère ces gens comme malades. Ça ne veut pas dire, par ailleurs, qu'ils inspirent de la pitié pour leur maladie, mais bien souvent le contraire.
    Quand vous parlez de traitement en général, parlez-vous d'un traitement qui les amène à ne plus avoir les pulsions psychologiques anormales qui leur font poser ces gestes, ou bien d'un traitement qui les amène à contrôler ces pulsions qui demeurent présentes et à ne pas passer à l'acte lorsqu'elles se manifestent?
(1625)

[Traduction]

    Le but du traitement est de les aider à répondre aux besoins qu'ils cherchent à satisfaire de façon si inappropriée et si dommageable sur des gens innocents. Il s'agit de les aider à développer les compétences et les capacités, les attitudes envers les autres et envers eux-mêmes, qui leur permettent de répondre à leurs besoins de façon acceptable socialement. Il ne s'agit pas tant de guérir leur obsession qui les pousse par exemple à agresser des enfants, que de leur fournir les capacités et les forces qui les amèneront à satisfaire leurs besoins de façon acceptable en société, sans avoir à agresser sexuellement des enfants.
    Les objectifs de traitement de ces programmes sont issus de la recherche selon laquelle les caractéristiques éventuellement modifiables des délinquants sont celles qui permettent en fait de prévoir la récidive. Le traitement ne concerne que les caractéristiques qui permettent de prévoir la récidive. On les appelle facteurs criminogènes. L'un de ces plus grands facteurs est la difficulté d'entrer en relation. Si vous ne pouvez pas répondre à vos besoins dans des relations efficaces, alors vous allez chercher ailleurs. Pour certains hommes, cela signifie des relations multiples, pour d'autres, l'alcool et pour d'autres encore malheureusement, cela signifie agresser sexuellement des enfants ou des femmes.
    Il y a toute une gamme de questions qui me prendrait un certain temps à vous expliquer. Voilà l'un des points typiques dont nous nous occupons, et la seule raison pour laquelle nous le faisons, c'est qu'il porte sur des lacunes dans les compétences qui ont permis de prévoir la récidive.

[Français]

    Les autres témoins ont-ils une réponse à la question?

[Traduction]

    Je suis certainement d'accord avec ce que dit M. Marshall. Il faut comprendre qu'une personne qui commet une infraction sexuelle n'est pas malade. Elle ne souffre pas d'un processus pathologique. Elle n'est pas née avec quelque chose de différent qui la pousse à avoir ce comportement. Il s'agit d'un comportement appris. À un moment donné dans sa vie, elle a appris à satisfaire ses besoins affectifs et psychologiques par ce type de comportement, et elle le fait parce qu'elle ne sait pas comment faire autrement. C'est sur ce point que se concentre le traitement.
    L'une des tendances actuelles de traitement est ce qu'on appelle parfois le modèle de « bonne vie ». En effet, si vous enseignez à quelqu'un comment mener une bonne vie où ses besoins sont satisfaits, vous n'aurez pas à vous inquiéter qu'il ne s'engage dans des comportements criminogènes, non pas parce qu'il a la volonté de ne pas le faire, mais tout simplement parce qu'il n'en a pas envie.

[Français]

    Si on vous donnait les fonds que vous estimez nécessaires pour fournir de pareils traitements, quel serait le pourcentage visé de non-récidive?

[Traduction]

    Eh bien, j'aimerais qu'il soit de zéro, comme tout le monde d'ailleurs.

[Français]

    Croyez-vous pouvoir atteindre l'objectif zéro si on vous donnait assez d'argent pour élaborer des programmes? Croyez-vous que la science d'aujourd'hui puisse permettre de développer des programmes et d'empêcher toute récidive?

[Traduction]

    Non, c'est un rêve, tout comme celui que nous avons de guérir le cancer ou de l'éliminer complètement. Nous n'en sommes pas encore là.
    Je peux vous dire que ce que nous savons maintenant est remarquablement plus complet que ce que nous savions quand j'ai commencé à le faire. Si vous regardez les effets du traitement, vous verrez qu'ils sont clairement liés à cette tendance plus moderne de traitement des facteurs criminogènes. C'est ce qui a vraiment apporté des changements profonds.
    Toutes ces recherches sont vraiment canadiennes. Il n'y en a pas beaucoup à l'extérieur du Canada qui ont fait une grande différence dans la capacité de traitement efficace. Sur une période de 10 ans, notre programme de traitement a obtenu un taux de récidive de 5 p. 100. J'aimerais qu'il soit beaucoup plus bas, mais il est nettement meilleur que celui du programme d'il y a 10 ans qui se situait entre 9 et 10 p. 100.
(1630)

[Français]

    Ah bon. Maintenant...

[Traduction]

    Je dirais que je suis d'accord: on aimerait évidemment que le taux soit de zéro pour cent. Lorsqu'on parle de quelque chose d'aussi complexe que le comportement humain, on aura toujours des gens qui, pour une raison ou pour une autre, résistent au traitement ou sur lesquels le traitement ne marche pas efficacement. Par ailleurs, les programmes de traitement ne sont pas tous les mêmes.
    À l'Île-du-Prince-Édouard, le taux de récidive sans traitement prévu pour un niveau de risque donné varie de 13 à 17 p. 100. Le taux de récidive sur une période de cinq et dix ans pour les personnes qui ont eu un traitement va de 3 à 4 p. 100. Cela montre bien son efficacité. J'aimerais pouvoir l'abaisser encore plus, mais je ne sais pas jusqu'où on peut aller en ce sens.

[Français]

    Je vais passer à un autre sujet. J'ai pratiqué le droit criminel durant toute ma carrière d'avocat, donc depuis 1966. Je ne suis pas particulièrement spécialisé en cette matière, je n'ai pas défendu beaucoup de ces causes, mais, de l'opinion générale, lorsque les gens déclarés coupables de crimes contre des enfants arrivent en prison, ils sont très difficiles à protéger parce que les autres détenus s'attaquent à eux. C'est ce que l'on constate.
    Monsieur Marshall, vous avez sûrement dû connaître de telles situations. Comment alors entreprend-on un traitement? Pouvez-vous nous parler de la manière dont on s'occupe des gens dans ces circonstances? C'est curieux parce que personne ne m'en a parlé jusqu'à maintenant — à moins que la situation ne soit bien spéciale au Québec. Je crois pourtant que c'est ce qui se passe de façon générale. En conséquence, la possibilité d'emprisonnement de gens qui ont goûté à la prison est mince puisqu'ils n'ont vraiment pas envie d'y retourner.

[Traduction]

    Monsieur Ménard, vous avez dépassé votre temps d'environ une minute.
    Je vous donnerai 15 secondes pour répondre.
    Vous pouvez revenir sur le sujet à la prochaine série de questions, d'accord, monsieur Ménard?
    Si vous pouviez répondre très rapidement.
    Ce que j'ai fait en Ontario — et je le fais encore — est de choisir certaines prisons pour appliquer les programmes. Ainsi, les délinquants de toute sorte qui se portent volontaires pour les suivre vont dans ces prisons. Le harcèlement des délinquants sexuels y est très faible, parce que les harceleurs savent bien qu'ils prendront le bus à destination de ce que les prisonniers appellent la prison des gladiateurs.
    Merci.
    Monsieur Comartin, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci aux témoins ici présents.
    Monsieur Marshall, j'aimerais connaître davantage vos antécédents, car vous vous êtes présenté avec beaucoup de modestie. Vous avez reçu l'Ordre du Canada pour le travail que vous avez fait dans ce domaine, n'est-ce pas?
    Oui, c'est cela.
    Selon mes notes, vous avez également publié plus de 300 articles, dont 16 livres, n'est-ce pas?
    Il y en a aujourd'hui 375.
    Trois cent soixante-quinze aujourd'hui? D'accord.
    Vous avez dit avoir conseillé jusqu'à 26 pays dans le domaine des délinquants sexuels.
    C'est exact.
    Y compris tout dernièrement — à partir de 2003, je crois — le Vatican à cause de tous les problèmes qu'il a eus avec les agressions sexuelles commises par des prêtres.
    Oui.
    À propos de la décision prise de retirer les psychologues l'an dernier, y a-t-il d'autres explications que les coûts?
    On prétend ne pas pouvoir recruter suffisamment de psychologues, ce qui n'est certainement pas vrai au Québec, en Ontario, et dans la plupart des provinces — et certainement pas en Colombie-Britannique. C'est peut-être vrai dans certaines régions éloignées du Nord des Prairies, mais il ne me semble pas que... Vous savez, vous ne jetez pas tous les psychologues dehors pour la simple raison que vous ne pouvez pas les faire venir dans le Nord de l'Alberta. Cela me semble être une stratégie complètement stupide.
    Vous savez où se trouvent les prisons au Canada, les plus importantes prisons?
    Oui, à peu près.
    Et en particulier, celles qui accueillent ces prisonniers?
    Et où sont appliqués ces programmes, oui.
    La plupart seraient dans des grandes villes ou leurs environs où il y aurait suffisamment de psychologues pour faire le travail.
(1635)
    C'est exact, oui.
    Monsieur Fletcher, je vous prierais de répondre à cette question aussi. Nous avons entendu certains témoignages lundi, et je vous entends tous les deux dire le contraire aujourd'hui: que la pédophilie est une maladie mentale, qu'elle n'est pas curable, mais qu'on peut la traiter. Acceptez-vous cette évaluation?
    Vous pouvez commencer, monsieur Marshall.
    Ensuite, pourrais-je avoir la réponse de M. Fletcher?
    Je pense tout simplement que ce n'est pas la bonne façon d'aborder le problème. On préfère considérer un grand nombre de comportements humains qui sont persistants, non pas comme des pathologies, mais comme des comportements appris et habituels qui satisfont certains besoins. Il s'agit alors de voir dans quelle mesure ces besoins peuvent être satisfaits de façon plus appropriée et moins nuisible pour soi-même et autrui. Il est préférable d'aborder le problème de cette façon.
    La notion de « guérison » s'applique à des choses comme les maladies physiques, ce qui est tout à fait logique, mais je ne crois pas qu'elle s'applique à ces cas. Ce que nous essayons de faire est de réduire la tendance à blesser les autres dans la poursuite des mêmes besoins que le reste d'entre nous poursuivons, mais de façon plus appropriée et moins destructrice. C'est l'objectif des programmes. C'est notre façon de voir les choses. Nous n'y pensons pas en termes psychiatriques.
    Je suis désolé, monsieur Fletcher, juste avant de vous céder la parole...
    Monsieur Marshall, vous êtes psychologue et non psychiatre, n'est-ce pas?
    Oui. Mais il ne s'agit pas d'une dispute entre psychologues et psychiatres, simplement d'une construction différente sur la façon d'envisager le problème.
    D'accord.
    Monsieur Fletcher, êtes-vous aussi psychologue?
    Non, je dois préciser que je suis travailleur social clinicien. J'ai travaillé dans des cliniques de santé mentale et des hôpitaux psychiatriques. Puis, il y a environ 23 ans, je me suis spécialisé et j'ai reçu une formation dans ce domaine.
    Mais pour répondre à votre question, je suis d'accord avec M. Marshall. C'est quelquefois affaire de sémantique. Pour moi, la maladie mentale est un processus biologique comme la schizophrénie, où l'on peut voir des modifications biologiques. Aucune recherche n'a fait état de tel processus chez les pédophiles. Même au sujet des agresseurs d'enfants, si vous consultez le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux c'est le terme « pédophile » qui est utilisé en Amérique du Nord, principalement pour le diagnostic de troubles mentaux. Or, bien des gens que je vois et qui ont agressé sexuellement un enfant ne peuvent même pas être diagnostiqués de pédophilie, notion qui se rapporte en réalité à quelqu'un qui a une préférence sexuelle persistante pour les enfants prépubères.
    Les raisons d'agresser sexuellement un enfant n'ont parfois rien à voir avec l'orientation sexuelle. C'est un comportement choisi — quelque chose d'appris, que l'ont fait pour trouver une sorte de soulagement d'un besoin affectif ou psychologique et que l'on continue à faire en l'absence d'autres choix.
    Madame Hannem, je ne pense pas que le comité vous ait déjà entendue ou ait entendu des représentants de votre association. Pourriez-vous nous parler de l'Association canadienne de justice pénale ou ACJP?
    L'ACJP est l'une des organisations non gouvernementales les plus anciennes regroupant des professionnels et particuliers intéressés par les questions de justice pénale. Elle a été fondée en 1919. Nous avons en fait témoigné à maintes reprises devant des comités des deux chambres. J'ai été présidente du comité pendant environ quatre ans et ai témoigné à plusieurs reprises. D'autres membres ont aussi témoigné...
    Nous avons plus de 800 membres dans tout le Canada, dont la plupart sont des professionnels ou qui ont fait quelques études en justice pénale. Nous essayons de tirer parti des connaissances individuelles et collectives de nos membres pour fournir une analyse équilibrée et fondée sur la recherche dans le domaine des politiques de justice pénale au Canada.
    Quels sont les antécédents professionnels de la plupart de vos membres?
    Il y a tout un éventail. Certains ont été travailleurs correctionnels, policiers, travailleurs sociaux, psychologues ou criminologues; certains font de la recherche ou enseignent à l'université ou dans les collèges. Nous avons un très large éventail de gens et d'expertise.
    M. Marshall et vous avez parlé de la réputation qu'avait le Canada, et je mets l'accent sur l'emploi du passé. Des organismes internationaux ont-ils reconnu que nous étions le chef de file mondial du traitement des agresseurs sexuels d’enfants?
(1640)
    Tout à fait, mais pas seulement pour les délinquants sexuels, les délinquants en général. Les programmes canadiens dans le domaine du développement des compétences cognitives et une multitude d'autres programmes sont largement reconnus par d'autres pays partout dans le monde qui les imitent et essaient de copier ce modèle. Malheureusement, le fait d'avoir retiré des prisons les psychologues qualifiés entraîne un énorme déficit... [Note de la rédaction: difficultés techniques]... mettre en oeuvre ce genre de programme de façon efficace.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Woodworth, pour sept minutes.
    Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Madame Hannem, je vous prie de m'excuser. Je n'ai pas entendu vos compétences professionnelles; je ne sais donc pas si vous êtes avocate ou non. L'êtes-vous?
    Non. J'ai un doctorat en sociologie et je suis professeure en criminologie.
    Merci.
    Je crois vous avoir entendu dire que vous connaissez bien les cercles de soutien et de responsabilité. Est-ce exact?
    Oui. Je travaille et je fais de la recherche depuis 10 ans.
    Donc, vous savez que l'an dernier, le gouvernement a renouvelé le financement national de ce programme, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Si je me souviens bien, l'an dernier, ce financement a augmenté, du moins légèrement. Est-ce exact?
    Je crois que oui. Je l'ai constaté quand on l'a annoncé. Je ne connais pas les chiffres.
    Merci.
    Ce financement vient de Service correctionnel Canada, je pense, n'est-ce pas?
    Service correctionnel Canada fournit du financement, et il y a eu du financement provenant du Centre national de prévention du crime.
    Je ne sais pas pourquoi, mais votre voix semble se briser, et je ne peux pas vous entendre. Si vous pouviez parler un peu plus fort, je vous en serais reconnaissant.
    Vous avez dit qu'une partie du financement vient de Service correctionnel Canada et d'autres sources fédérales. Ce programme est conçu pour aider à la réhabilitation et à la réintégration des délinquants sexuels, n'est-ce pas?
    Oui.
    Merci. Certains des commentaires que j'ai entendus aujourd'hui, à savoir que le gouvernement abandonnait complètement son rôle dans ce domaine, me préoccupaient. Je suis donc heureux d'entendre qu'au moins, ce programme semble avoir été un peu renforcé.
    Il y a deux jours, nous avons entendu le témoignage d'avocats — ou d'un avocat en particulier — selon lequel les tribunaux ont fait de la prison la règle pour les sentences des délinquants sexuels, en particulier pour les cas d'infractions à l'égard des enfants. Êtes-vous au courant de cela?
    Je dirais que c'est exact.
    Je crois vous avoir entendue dire que vous êtes professeure de criminologie, titulaire d'un doctorat en criminologie. Donc, pourriez-vous nous dire pourquoi les tribunaux ont convenu de faire de l'incarcération des délinquants sexuels une règle?
    Il y a plusieurs raisons pour lesquelles un tribunal peut décider d'infliger une peine d'emprisonnement. L'une d'elles est pour son effet dénonciateur. On a longtemps pensé que si le public...
    Un instant, s'il vous plaît. Puis-je vous arrêter, s'il vous plaît?
    M. Ménard a un rappel au Règlement.

[Français]

    C'est inaudible. Cela fait plusieurs fois qu'on se plaint. Je m'étais mis à écouter l'interprétation française parce que je comprenais mieux ainsi, or je m'aperçois maintenant que l'interprète a de la difficulté aussi à comprendre le témoin en anglais et ne peut donc plus traduire plus de la moitié de ce qui est dit.
    Y a-t-il un moyen de régler le problème de son? J'avais déjà de la difficulté à entendre le témoin en anglais.

[Traduction]

    C'est pourquoi je suis passé au français, parce qu'habituellement, je comprends l'anglais, mais je...
    Oui.
    Je crois que ce que vous dites, monsieur Ménard, c'est qu'en ce moment, le témoin de Brantford n'est pas assez clair, au point où même nos interprètes ont de la difficulté à traduire. Est-ce exact?
    Je ne pense pas que le témoin soit en cause.
    Le président: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
    M. Serge Ménard: Je pense que c'est le système audio.
    Oui, cela pourrait être le système audio. Vous avez raison.
    Monsieur Lee.
    Monsieur le président, je n'ai pu m'empêcher de penser que l'emplacement du dispositif de prise de son ou du microphone avait son importance.
    Le témoin de Brantford sait-il où se trouve le microphone?
(1645)
    Il est possible qu'il soit au plafond.
    Oh... D'accord. Ce n'est pas de mon ressort.
    Bien.
    Monsieur Woodworth.
    Je demande du soutien technique.
    Entretemps, cela aiderait-il si je parlais plus fort?
    Oui.
    Oui.
    En fait, monsieur le président, c'est ce que j'allais proposer. J'ai remarqué que selon le côté vers lequel le témoin est tourné et selon qu'elle termine ses phrases ou non, le volume s'améliorait ou empirait. Si elle était capable de maintenir un volume constant, je pense que nous pourrions nous en tirer.
    D'accord.
    Monsieur Woodworth, voudriez-vous poursuivre?
    Je demanderais simplement au témoin de parler fort, du moins pour le moment.
    Merci.
    Donc, ce que je vous demandais de faire pour nous, madame Hannem, c'est de nous donner une idée des raisons qui ont porté les tribunaux à croire que l'incarcération devrait être la règle pour les délinquants sexuels, en particulier ceux qui ont commis une infraction à l'égard d'enfants.
    Parfois, les tribunaux utilisent la prison comme moyen pour dénoncer l'exploitation sexuelle des enfants, afin que le public sache clairement que ce n'est pas acceptable et que nous ne voulons pas tolérer ce genre de comportement.
    Il faudrait que vous demandiez à chacun des juges de vous parler des détails de chacune des causes dont ils s'occupent, parce que dans certains cas, on connaît très bien le tort considérable qui a été fait aux enfants et aux victimes, et que l'emprisonnement est nécessaire pour avoir la capacité d'offrir des programmes et de...
    Puis-je vous arrêter un instant? Parce que ma question ne portait pas sur des cas précis, mais plutôt sur l'idée selon laquelle les tribunaux ont dit que cela devrait être la règle. À votre connaissance, en votre qualité de criminologue, la dénonciation est-elle la seule raison pour laquelle les tribunaux indiquent que l'incarcération devrait être la règle?
    Je ne suis pas au courant qu'un juge ait dit que l'incarcération devrait être la règle. Je pense qu'ils procèdent au cas par cas. Si vous voulez parler de généralisation...
    D'accord. Dans ce cas... Je m'excuse de vous interrompre; c'est simplement parce que je n'ai pas beaucoup de temps. Plus tôt, j'ai cru vous avoir entendue dire oui, lorsque je vous ai demandé si vous étiez au courant que les tribunaux en avaient fait une règle, mais maintenant vous venez de me dire que vous ne l'êtes pas.
    Pour ce qui est des sentences, oui, je suis au courant que la tendance penche assez régulièrement du côté de l'incarcération.
    J'aimerais revenir sur une autre question au sujet de laquelle je pense vous avoir entendue dire — et je fais bien attention d'utiliser le mot « pense », parce que j'ai eu des problèmes avec le volume, mais je crois vous avoir entendue dire que vous aviez le sentiment que c'était... je pense que vous avez même utilisé l'expression « dépassent les bornes »... pour ce qui est inscrit dans le projet de loi à propos des restrictions sur l'accès aux ordinateurs par les personnes reconnues coupables d'infractions sexuelles. Ai-je bien compris?
    Oui.
    D'accord. J'ai aussi cru vous entendre dire que vous croyez qu'en matière de sentences, on devrait donner un grand pouvoir discrétionnaire aux juges. Est-ce bien ce que vous avez dit?
    Oui.
    Bien. Êtes-vous au courant qu'en réalité, cette loi laisse la sentence à la discrétion du juge et indique simplement que le juge peut ajouter une condition pour restreindre l'accès à Internet? Ensuite, le juge peut le permettre conformément aux conditions imposées par le juge. Je me demande comment je peux interpréter votre opposition à cette mesure étant donné que vous pensez que les juges devraient jouir d'un plus grand pouvoir discrétionnaire en matière de sentences.
    Je ne suis pas d'avis qu'ajouter que le juge peut imposer des conditions spécifiques va nécessairement de pair avec la disposition précédente, qui dit que les délinquants ne peuvent pas utiliser Internet pour quelque raison que ce soit, sauf quand un juge dit qu'ils le peuvent.
    La disposition précédente, qui indique simplement qu'ils ne peuvent pas l'utiliser pour communiquer avec des enfants, me semble beaucoup plus précis et à propos, pour ce qui est des comportements que nous voulons empêcher.
    Quand nous aurons terminé, j'aimerais que vous lisiez le paragraphe 26(2) du projet de loi. Vous constaterez qu'en réalité, ces deux dispositions ne font que permettre au juge de le faire et lui donner le pouvoir discrétionnaire d'imposer ces conditions. Le juge n'est pas tenu de le faire.
    Je vais devoir me contenter de conclure que lorsqu'il est question de donner aux juges le pouvoir discrétionnaire de garder les gens en liberté, voilà le genre de discrétion à laquelle vous êtes favorable, tandis que lorsqu'il est question de donner aux juges la discrétion d'imposer des conditions qui limitent les activités des contrevenants, vous n'y êtes pas favorable. Est-ce exact?
(1650)
    Non.
    M. Stephen Woodworth: D'accord. Alors pourquoi...
    Un instant.
    ... n'êtes-vous...
    Nous allons devoir arrêter ici.
    Le temps est déjà écoulé?
    Oui. Vous pourrez continuer au prochain tour.
    Nous allons passer à Mme Dhalla, pour cinq minutes.
    Soit dit en passant, bienvenue au comité, madame Dhalla. Je crois que c'est une première, du moins depuis que je siège au comité.
    En effet, je pense que c'est une première. C'est un plaisir de remplacer mon collègue qui est à l'étranger et de pouvoir discuter d'une question importante.
    Ce matin, j'ai eu l'occasion de lire les courriels que mes électeurs m'ont envoyés. L'un d'eux provenait d'un père très, très préoccupé dont la fille avait été bouleversée. Dans son courriel, il indiquait que sa fille de 12 ans avait reçu, sur son téléphone cellulaire, la photo d'une partie du corps d'un homme. Le père est immédiatement allé au poste de police pour le signaler. Il a été frustré par la façon dont on s'est occupé de lui, mais il m'a exhortée à m'assurer que nous prenions des mesures plus énergiques à ce sujet, parce que ce sont des crimes abominables qui ont des répercussions sur les jeunes.
    Dans mes recherches, je constate qu'il y a beaucoup d'opinions divergentes concernant les solutions possibles pour régler ce problème. Une autre question a été soulevée par certaines personnes, dont les gens de Canada Family Action, qui ont affirmé que la terminologie elle-même doit être modifiée: il faut remplacer « pornographie juvénile » par « matériel d'exploitation sexuelle d'enfants ».
    Monsieur Marshall, compte tenu de votre grande expertise, je voulais entendre votre point de vue, à savoir s'il faut changer la définition ou ajouter à la définition déjà inscrite dans le Code criminel.
    Je comprends le désir de changer la définition. Cela ne me pose aucun problème.
    Pour revenir à la détresse bien compréhensible de ce père, je veux réitérer que je pense que tous les hommes qui agressent des enfants devraient aller en prison; la question est de savoir pour combien de temps et ce que nous pouvons faire avec eux pendant qu'ils y sont. Je ne serais pas en désaccord avec l'idée d'infliger des sentences d'emprisonnement à tous les agresseurs d'enfants, au contraire. Je dirais que je sais ce qu'ils font mieux que quiconque ici.
    Madame Hannem, le fait que la définition n'a pas été modifiée, ou qu'on n'a pas appelé cela du « matériel d'exploitation sexuelle d'enfants » nous a-t-il empêchés de poursuivre des personnes?
    Je ne sais pas s'il existe des cas qui seraient pertinents...
    Mme Ruby Dhalla: D'accord.
    Mme Stacey Hannem: Je ne vois aucun problème à modifier l'expression, si c'est ce que vous voulez savoir.
    Merci.
    Monsieur Marshall, par rapport au fait que ces personnes doivent être emprisonnées, je pense que c'est une chose sur laquelle la plupart des parlementaires qui sont ici s'entendent, du moins, je l'espère. Mais comme beaucoup de témoins et vous l'avez indiqué, le traitement est aussi important. Encore une fois, j'aimerais avoir votre avis sur la durée de ces sentences. Au Parlement, une des questions qui ont été soulevées maintes et maintes fois porte sur le coût de construction de tous ces pénitenciers. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet?
    Je parlais seulement des agresseurs d'enfants. Je ne pense pas qu'il soit vraiment pertinent d'envoyer des exhibitionnistes, surtout les délinquants primaires, en prison. À mon avis, cela cause un tort considérable à leur vie de toute façon, ce qui rend leur réadaptation plus difficile et augmente le risque qu'ils récidivent. Mais pour ce qui est des agresseurs d'enfants... Je suis désolé, mais pourriez-vous répéter votre question?
    Concernant les agresseurs d'enfants, je suis entièrement d'accord avec vous quand vous dites qu'ils doivent aller en prison, mais que recommanderiez-vous comme sentence? Je vois que le projet de loi prévoit les faire passer de 14 à 90 jours. À titre d'expert, que recommandez-vous par rapport à cela?
    Que ce soit 45 ou 90 jours, ce n'est certainement pas suffisant pour les envoyer en thérapie. S'ils sont prêts à entrer dans un programme de traitement en milieu communautaire et qu'il s'agit d'un programme de traitement en milieu communautaire qui a fait ses preuves, alors cela me semble plutôt satisfaisant.
    Comme l'a dit M. Fletcher, les données disponibles indiquent que les programmes de traitement en milieu communautaire sont un peu plus efficaces — la différence est plutôt minime — que les programmes institutionnels. Ce que fait Service correctionnel Canada et ce que tentent de faire les services correctionnels de l'Ontario, c'est de leur faire commencer le traitement en prison et de faire en sorte que le traitement se poursuive lorsqu'ils sont remis en liberté dans la collectivité. Au fil des ans, Service correctionnel Canada a financé des programmes de traitement en milieu communautaire et les a choisis soigneusement pour être au courant de ce qui est fait.
(1655)
    Quelle devrait être la durée de ce programme?
    Cela dépend de la personne, dans une grande mesure. Les hommes les moins à risque ont probablement besoin de six mois à un an de traitement, soit dans la collectivité soit en prison. Ce sont ceux qui posent le moins de problème.
    Merci.
    Monsieur Ménard, vous avez cinq minutes.

[Français]

    J'aimerais revenir sur un sujet soulevé par mon collègue M. Woodworth avec d'autres témoins, et c'est lié un peu aux réponses que vous avez données à Mme Dhalla.
    Je crois qu'en effet, les cours d'appel ont établi qu'en matière d'infractions sexuelles contre des enfants — pas d'infractions sexuelles de façon générale —, la règle devrait être l'emprisonnement, mais sans préciser, évidemment, la durée de la peine qui est déterminée en fonction de la loi et des circonstances individuelles. Croyez-vous que cette règle soit justifiée?

[Traduction]

    Une peine minimale...?

[Français]

    Peu importe, je vous demande votre opinion. Croyez-vous que cette règle soit justifiée, c'est-à-dire que s'il doit y avoir des traitements, on puisse imposer des peines plus ou moins longues, et poursuivre les traitements par la suite?

[Traduction]

    Oui. Ces gens ont certainement besoin d'un traitement après leur sortie de prison, surtout les cas à risque modéré et élevé, pour qui il est certain qu'ils en ont besoin. Dans le cas de certains hommes à faible risque, si vous avez une peine courte, tout ce que cela fait, c'est nous permettre de les préparer pour qu'ils poursuivent le traitement une fois qu'ils seront de retour dans la collectivité.

[Français]

    Vous croyez donc que cette règle est justifiée.

[Traduction]

    Probablement, oui.

[Français]

    Je voudrais revenir sur le sujet que j'avais mis de côté. Vous avez constaté aussi que, de façon générale, les délinquants sexuels contre les enfants sont extrêmement mal reçus en prison et, en fait, très souvent, ils sont battus et doivent vivre en isolement lorsqu'il n'y a pas de prison séparée. Selon mon expérience, ça les terrorise. Cette terreur est-elle salutaire en ce qui a trait à la modification de leurs comportements futurs?

[Traduction]

    Eh bien, en fait, d'après mon expérience, du moins dans la région de l'Ontario, ce problème est loin d'être aussi sérieux qu'on le laisse souvent entendre. Je pense que la plupart des délinquants — les agresseurs d'enfants en particulier — qui arrivent en prison croient qu'ils feront l'objet de harcèlement physique et verbal. Ce qu'ils constatent, une fois en prison — parce que, comme je l'ai dit, dans la région de l'Ontario, il y a des prisons axées sur des programmes précis —, c'est que la situation est beaucoup moins grave qu'ils le croyaient. Je veux dire, il y a un certain harcèlement, mais verbal et, généralement, cela ne se traduit pas par une quelconque agression physique.
    Cela se produit un peu plus fréquemment dans le système correctionnel provincial de l'Ontario où il y a un problème plus sérieux de surpeuplement dans les prisons. Je crois que c'est beaucoup plus lié au surpeuplement, pour être franc. Je pense que si vous mettez plus de gens en prison pendant des périodes de temps plus longues, ce genre de harcèlement augmentera et cela aura pour effet de diminuer la capacité de ces délinquants de bien fonctionner dans un programme de traitement.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Rathgeber, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins pour votre comparution ici cet après-midi et pour votre expertise sur cette question très importante.
    Monsieur Marshall, si vous permettez que je commence par vous, il n'est pas clair dans mon esprit pourquoi il est plus facile de traiter un délinquant sexuel à l'extérieur d'un établissement qu'à l'intérieur d'un établissement. Ayant visité de nombreux établissements avec des membres du comité de la sécurité publique, il me semble qu'il s'agit d'un milieu très structuré. De toute évidence, les gens ont l'avantage d'avoir beaucoup de temps et ne sont pas distraits par des engagements familiaux ou professionnels.
    Pourriez-vous m'expliquer pourquoi? J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi vous croyez qu'il est beaucoup plus difficile de traiter une personne ayant un trouble de la sexualité à l'extérieur de la structure d'un établissement pénitentiaire.
(1700)
    En fait, les données dont j'ai parlé ont été mises de l'avant par M. Fletcher. C'est le résultat d'une méta-analyse d'une très grande envergure, comptant des milliers de sujets. Vous regardez les différences qu'il y a, et elles sont assez légères, à vrai dire, entre les effets du traitement dans la collectivité et ceux du traitement en établissement. Il y a un facteur de confusion liée au fait qu'il y a presque inévitablement plus d'hommes à risque plus faible dans les programmes de traitement dans la collectivité qu'il y en a dans les programmes offerts dans les établissements. Alors, pour être honnête avec vous, je n'attache pas une trop grande importance à cette question.
    Je pense que ce dont nous avons besoin, c'est d'un traitement dans les établissements et d'un traitement dans les collectivités, et cela est particulièrement vrai dans le cas des hommes dont le degré de risque se situe plus haut dans le spectre. Chose certaine, nous ne pouvons pas les laisser sortir après le traitement et penser que cela aura réglé le problème. Service correctionnel Canada a toujours été d'avis que ces hommes doivent participer à un traitement continu dans la collectivité, et c'est également le cas de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Elle en fait une condition de libération. Je pense moi-même que c'est très sensé.
     Il y a des hommes qui se situent dans la partie inférieure du spectre, en particulier, les exhibitionnistes, par exemple, mais probablement aussi certains des délinquants sexuels primaires et, probablement, certains des délinquantes plus âgés qui commettent une infraction pour la toute première fois, qui pourraient être traités efficacement dans la collectivité. S'ils reçoivent une peine courte, le travail que nous devons faire, c'est d'essayer de les préparer pour continuer le traitement une fois qu'ils seront de retour dans la collectivité. S'ils reçoivent une peine courte, il n'y a probablement pas de conditions qui leur sont imposées qui exigeraient qu'ils suivent un traitement, et cela est bien dommage.
    Docteur Fletcher, partagez-vous l'opinion de votre collègue qui dit que la différence de traitaibilité, faute d'un meilleur terme, est légèrement plus élevée ou moins élevée à l'intérieur ou à l'extérieur des murs d'un établissement?
    Premièrement, je tiens à préciser encore une fois que je n'ai pas de diplôme de doctorat, alors, vous ne devriez pas vous adresser à moi comme étant le Dr Fletcher.
    Fondamentalement, je suis d'accord avec M. Marshall sur cette question: vous avez besoin de traitement aussi bien en établissement qu'à l'extérieur de l'établissement. L'établissement assure un milieu sécurisé où le comportement peut au moins être maîtrisé. Vous pouvez commencer à consacrer un peu plus de temps au traitement.
    Mais lorsque vous pensez aux étapes que les gens doivent franchir lorsqu'ils apprennent des choses, premièrement, vous pouvez apprendre au niveau cognitif, mais cela n'a pas véritablement de prise tant que vous ne mettez pas cette connaissance en pratique. Alors, en fin de compte, vous devez avoir un certain traitement dans la collectivité, où vous appuyez la personne et lui montrez comment appliquer ce qu'elle a appris dans ses activités quotidiennes réelles, dans son couple, dans ses relations avec les membres de la famille et avec les employeurs, et où vous lui montrez à faire face au stress économiques d'avoir à gagner sa vie — ce genre de choses.
    La partie appliquée de ce processus donnera de meilleurs résultats dans l'environnement le plus naturel, dans la collectivité où vous vivez, mais vous voulez certainement commencer à apprendre cela dans l'établissement. Pour ceux qui posent un risque substantiel, il devient important que ces personnes puissent commencer à faire cela en établissement. J'aimerais simplement souligner...
    Merci. Je vais vous interrompre ici. Je n'ai que peu de temps à vous consacrer, monsieur Fletcher.
    Vous avez présenté un certain nombre de données statistiques concernant l'augmentation ou la diminution des récidives, je crois, faisant intervenir un certain nombre de techniques différentes pour traiter les gens présentant un comportement de déviance sexuelle. Je pense que le chiffre le plus élevé que vous avez cité était une diminution de 11 p. 100 pour les agresseurs qui ont bénéficié de services de consultation. Ai-je bien compris?
    Oui. Ce sont des données statistiques générales s'appliquant à n'importe quel type de comportement criminel. Ce sont des études qui ont été réalisées avec des populations de criminels en général.
    C'est exact. Alors, vous serez d'accord avec moi pour dire qu'une très grande proportion des personnes qui ont eu des comportements de déviance sexuelle ne sont pas touchées par les programmes qui leur sont offerts, qu'il s'agisse de la consultation, de la prison ou d'autres formes de traitement...?
    Non, non. Elles seront touchées par le traitement. Le traitement fonctionne.
    Eh bien, comment mesurez-vous votre succès? Lorsque vous dites qu'il y a une diminution de 11 p. 100, est-ce que cela signifie que cette personne est guérie ou est-ce que cette personne continuera tout simplement à commettre des agressions, mais à une fréquence moindre?
(1705)
    Premièrement, vous devez comprendre qu'il s'agit d'un chiffre très prudent. Il est fondé sur un grand nombre de programmes de traitement, dont certains sont efficaces et d'autres, non, touchant certaines personnes qui sont très dangereuses et à risque élevé et certaines qui présentent un risque plus faible. Alors, pour ce que vous cherchez à savoir, la façon de mesurer, c'est que vous examinez un échantillon apparié de personnes qui n'ont pas subi de traitement et vous regardez le taux de récidive chez ces gens sur une période de 5, 10 ou 15 ans, et ensuite, vous comparez ce chiffre au taux de récidive observé chez les gens qui ont subi un traitement.
    La grande étude dont je disais qu'elle a été réalisée dans le cadre de la banque de données en collaboration a révélé que, de façon générale, vous obtenez une réduction allant, je pense, de 17 à 9,9 p. 100. Il s'agit d'une diminution importante.
    Merci.
    Pour notre prochaine question, nous allons donner la parole à Mme Dhalla.
    Petit rappel, apparemment M. Marshall doit nous quitter vers 16 h 45, alors, pour ceux d'entre vous qui veulent lui poser des questions, c'est le temps ou jamais.
    Madame Dhalla, pour cinq minutes.
    Je ne sais pas si je vais prendre la totalité des cinq minutes.
    Je me demande simplement, compte tenu de l'expertise de tous les témoins qui sont présents, quel conseil donneriez-vous aux parents, peut-être dans une perspective de prévention ou proactive, pour faire en sorte que leurs enfants ne soient pas victimes de ces agresseurs d'enfants? Que peuvent faire les parents pour aider à prévenir une telle situation?
    Les agresseurs d'enfants recherchent des enfants qui sont vulnérables, alors, plus les parents consacreront d'efforts pour augmenter la faculté de récupération de leurs enfants, mieux ce sera, et le meilleur moyen d'y parvenir, c'est l'amour, le soutien, l'encouragement et la reconnaissance de leur succès, et ainsi de suite. C'est la meilleure stratégie. Cela ne garantit pas une sécurité absolue, mais cela réduit de façon très marquée les chances que cela se produise.
    Les méthodes fondées sur la peur ne fonctionnent pas. J'ai écrit un livre avec un collègue en Australie au sujet de la prévention des abus sexuels. Un des éléments de ce livre, c'était comment nous pouvions donner aux parents les moyens nécessaires pour réduire les chances d'agressions de sorte que leurs enfants soient protégés.
    Cela n'élimine pas complètement le risque, mais cela permet de le réduire considérablement. Les méthodes fondées sur la peur ne fonctionnent pas. Elles ne parviennent qu'à faire en sorte que les enfants aient peur de tout le monde.
    Quel conseil donneriez-vous à cet électeur, le père qui a écrit dans ma circonscription de Brampton—Springdale, concernant l'image — qu'il considère pornographique — que sa fille a reçue?
    Premièrement, je lui dirais à quel point je suis désolé que sa petite fille ait été exposée à une image aussi dégoûtante et je lui dirais de donner à sa fille tout le soutien, tout l'amour et toute l'affection possibles pour l'aider à faire face à cette situation. C'est profondément regrettable.
    Madame Hannem, à partir de votre expertise...?
    Je suis d'accord avec M. Marshall pour dire que les parents doivent soutenir leurs enfants. Ils doivent être présents activement dans la vie de leurs enfants. Plus la relation entre les parents et l'enfant est étroite, plus l'enfant se sentira à l'aise de se confier à ses parents pour leur dire que quelqu'un qui n'aurait pas dû le faire s'est glissé dans leur entourage.
    Selon mon expérience, il est peu probable qu'il s'agisse d'une image aléatoire envoyée à un cellulaire aléatoire. Il devait probablement y avoir une certaine forme de relation préexistante dans cette affaire, et si les parents avaient été au courant de cette relation et de la façon dont elle a évolué, ils auraient peut-être pu faire quelque chose.
    Mais encore une fois, je dirais à cette famille que je suis désolée de ce qui leur est arrivé. Elle devrait avoir tout l'appui nécessaire pour aider l'enfant, surtout à la lumière du fait que beaucoup d'hommes qui deviennent des agresseurs sexuels ont eux-mêmes été victimes d'agression dans le passé. Par conséquent, il est absolument nécessaire que les enfants victimes d'abus sexuel fassent l'objet d'une intervention et d'un traitement rapides et qu'ils reçoivent de l'aide.
    Merci.
    Merci.
    Je vais donner la parole à M. Petit, mais je veux m'assurer de poser une question à M. Marshall avant qu'il parte.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez fait une distinction entre l'inceste, l'exhibitionnisme et l'agression d'enfants. Vous avez dit que les agresseurs d'enfants devraient aller en prison. Je pense que vous avez parlé de trois ans au minimum. Vous ai-je bien compris?
    Eh bien, nous avons besoin de trois ans pour les traiter efficacement. Alors, si on leur impose une peine fédérale, alors, plutôt que d'imposer deux ans, on devrait imposer trois ans de manière que nous puissions les faire participer à un traitement. Mais on pourrait leur imposer deux ans moins un jour, disons, et les envoyer dans un établissement provincial; ils recevraient un traitement efficace dans ces établissements et ensuite, ils feraient la transition dans un programme de traitement dans la collectivité.
(1710)
    Très bien. Alors, ce que vous dites, c'est qu'une peine plus longue n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Cela pourrait être utile pour ce délinquant, n'est-ce pas?
    Eh bien, « plus longue », dans le système fédéral... Trois ans n'est pas une peine plus longue. C'est considéré comme ce qu'il y a de plus court parmi les peines fédérales.
    Très bien, mais disons cinq ans. Pour obtenir le traitement dont il a besoin, il faut souvent que le délinquant soit incarcéré pendant des périodes de temps plus longues, n'est-ce pas?
    Oui.
    Merci.
    Monsieur Petit, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Marshall, ainsi que les deux autres témoins, merci de vos témoignages.
    Puisque vous devez partir dans quelques minutes, semble-t-il, c'est à vous que je poserai la question. Vous avez entendu la question de notre président à propos de peines plus longues afin de pouvoir suivre un bon traitement. Notre gouvernement a déposé le projet de loi C-39 sur la libération conditionnelle pour faire en sorte qu'elle soit méritée. Vous êtes au courant du fait qu'on ne peut pas obliger un prisonnier à suivre un traitement. Si la personne ne veut pas suivre de traitement, elle va tout simplement purger sa peine et sortir de la prison par la suite. Êtes-vous favorable à ce qu'un prisonnier soit obligé, s'il purge une peine fédérale de deux ou trois ans, de suivre des traitements avec des professionnels — naturellement — pour que, lorsqu'il aura purgé sa peine, il ait au moins mérité sa sortie? Présentement, on ne peut pas obliger un prisonnier à le faire. C'est la première question que j'ai à vous poser.
    Ma deuxième question est...

[Traduction]

    Je ne peux retenir qu'une certaine quantité d'information à la fois. J'ai 75 ans.
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    D'accord. Alors allez-y, répondez.

[Traduction]

    Je ne pense pas que vous ayez besoin d'imposer un traitement par la force. Dans sa conception actuelle, le système fonctionne de cette manière de toute façon. Essentiellement — par exemple, dans la région de l'Ontario —, la personne est placée dans un établissement axé sur un programme, ce qui est un endroit beaucoup plus agréable que n'importe quel des autres choix possibles. Cela motive la personne à suivre un traitement parce que sa présence à cet endroit est conditionnelle, non seulement à ce qu'elle se présente dans la salle de traitement, mais également à ce que sa participation au traitement soit active et efficace. La Commission des libérations conditionnelles voit la chose du même oeil. Si, en tant que délinquant sexuel, vous n'avez pas suivi avec efficacité et succès un traitement, vous n'aurez pas votre libération conditionnelle.
    À cause de ces deux facteurs, dans l'établissement où nous assurons nos principaux programmes, l'établissement de Bath, 96,2 p. 100 de tous les délinquants sexuels admissibles à un traitement ont une participation active et efficace. Parmi les rares pour qui ce n'est pas le cas, certains font l'objet d'une ordonnance d'expulsion et ne voient l'intérêt de le faire parce que les choses suivront leur cours de toute manière.
    Je ne pense pas qu'il y ait de problème. À mon avis, le système actuel fonctionne remarquablement bien pour ce qui est d'inciter les délinquants sexuels à participer aux programmes de traitement.

[Français]

    Monsieur Marshall, selon le système que nous avons aujourd'hui, lorsqu'un juge condamne une...
    M'entendez-vous?

[Traduction]

     Un peu plus fort, s'il vous plaît...?

[Français]

    Vous connaissez le système pénitentiaire, vous connaissez les règles d'un sixième et d'un tiers. Vous savez que si un juge condamne une personne à six ans de prison pour agression sexuelle, elle peut sortir de prison au bout d'un an. Après avoir purgé un tiers de la peine, il est aussi possible d'en sortir. Êtes-vous favorable à ce qu'on oblige cette personne à mériter sa sortie? Êtes-vous favorable à ce qu'on oblige un prisonnier à s'amender en suivant des traitements qui pourraient l'aider à sortir de prison à un certain moment, et faire en sorte qu'il soit beaucoup plus fonctionnel au sein de la société? Les peines seraient alors plus longues. C'est ce qui est important. On parle ici de peines plus longues. Pensez-vous que si on impose des peines plus longues, on aura plus de chances de réhabiliter les individus?

[Traduction]

    Eh bien, pour ce qui est de rendre le traitement obligatoire et de dire qu'ils doivent y participer, je pense personnellement que cela aura pour effet de détruire leur motivation à suivre le traitement. Ils vont tous venir s'asseoir sur une chaise et faire semblant de suivre le traitement. C'est un problème que nous avons eu dans le passé, lorsque j'ai commencé à faire cela. Ce n'est pas vrai à l'heure actuelle: nous n'avons pas de difficulté à amener la plupart de ces gens à participer activement au traitement.
    Les programmes de traitement des délinquants sexuels de Service correctionnel Canada comptent le taux de récidive le plus faible dans le monde. Il n'y a pas de doute là-dessus, n'est-ce pas? Je m'opposerais totalement au fait de rendre le traitement obligatoire. En ce moment, le système fonctionne dans sa forme actuelle. N'essayez pas de le réparer, il fonctionne.
(1715)
    Merci.
    Je veux respecter votre horaire, monsieur Marshall. Vous devez vous rendre à la gare, alors nous vous excusons, mais nous allons garder les deux autres témoins ici pendant quelques minutes encore.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Dechert, pour cinq minutes.
    Monsieur Comartin.
    Monsieur le président, j'en appelle au Règlement. La question de M. Petit comportait une affirmation fausse, à savoir que le droit d'être libéré après avoir purgé un-sixième de sa peine s'applique à ce genre d'infractions. En fait, ce n'est pas le cas, parce que ces infractions sont traitées comme des infractions avec violence, de sorte que la question du sixième de la peine ne s'applique pas dans ce cas. Je voulais simplement le préciser aux fins du compte rendu. L'affirmation qui a été faite est erronée.
    Je comprends cela, mais ce n'est pas un rappel au Règlement.
    Je donne la parole à M. Dechert, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, mesdames et messieurs, de nous faire part de vos opinions aujourd'hui. Je suis désolé de n'avoir pas pu interroger M. Marshall, mais peut-être aurons-nous l'occasion de nous reprendre.
    J'ai écouté très attentivement ce que chacun d'entre vous avait à dire. J'apprécie d'avoir entendu vos points de vue au sujet de la réadaptation et du traitement des délinquants, mais je n'ai pas entendu grand-chose au sujet des effets pour les enfants victimes d'agressions sexuelles.
    Comme vous le savez peut-être, au cours des derniers jours, nous avons entendu des groupes qui représentaient des victimes, et parmi lesquels se trouvaient des personnes ayant elles-mêmes été victimes d'abus sexuels au cours de leur enfance. On nous a raconté des histoires très difficiles à propos du temps nécessaire pour qu'une victime se remette du traumatisme psychologique, si je peux dire, causé par son agression.
    On nous a raconté le cas d'une jeune femme qui avait été agressée sexuellement pendant une assez longue période par un voisin, je crois, et qui, finalement, après de nombreuses années à garder tout cela en dedans, a dénoncé son agresseur. Elle est passée par le difficile processus d'une poursuite. Le délinquant a été reconnu coupable et a immédiatement été renvoyé chez lui pour purger une peine avec sursis, dans la maison juste en face de chez elle. Elle s'est sentie si lésée, et a tellement eu l'impression qu'elle valait moins que rien, vu la façon dont le système de justice avait traité son cas, qu'elle a tenté de se suicider.
    Tout d'abord, j'aimerais demander à chacun de vous si vous possédez une expérience dans le traitement de personnes victimes d'agressions sexuelles durant leur enfance. Si c'est le cas, peut-être pourriez-vous nous parler des effets à long terme pour les victimes de telles infractions. Quel est, selon vous, l'impact pour les victimes si elles constatent qu'un délinquant ne sera condamné à aucune peine d'emprisonnement pour le crime qu'il a commis contre elles?
    Peut-être que la Dre Hannem pourrait-elle commencer.
    Je ne possède pas d'expertise clinique dans le traitement des jeunes victimes d'abus sexuels.
    À mon avis, l'affaire que vous avez mentionnée était une grave erreur judiciaire, en ce sens que le juge aurait dû savoir qu'ils étaient voisins. Je n'arrive pas à m'expliquer ce genre de peine.
    Je vais devoir vous demander pardon, mais j'ai un cours qui va commencer dans la salle au cours des cinq prochaines minutes, et il faut que je parte. La salle n'est pas réservée pour plus longtemps.
    Docteure Hannem, je tiens à vous remercier d'avoir comparu comme témoin. Nous allons vous laisser partir.
    Peut-être pourrions-nous demander à M. Fletcher de rester pour quelques minutes encore.
    Monsieur Fletcher.
    Pour répondre à la question, avant de me spécialiser et de travailler auprès des délinquants sexuels, j'ai oeuvré au sein d'un service général de santé mentale où j'ai traité des adultes qui avaient été victimes d'agressions sexuelles durant leur enfance. De plus, dans le cadre de ma pratique auprès des délinquants sexuels, je travaille en étroite collaboration avec les services d'aide aux victimes, y compris celles ayant subi des agressions sexuelles.
    Ce que je peux vous dire, c'est que, encore une fois, on ne peut considérer qu'il existe une solution unique à cette question. La situation des victimes varie énormément selon le niveau, la gravité, la durée et le type de conséquences néfastes qu'elles subissent. Beaucoup de facteurs peuvent être en cause, dont l'infraction comme telle, le fait qu'on l'ait signalée immédiatement ou non, ou le fait qu'on ait obtenu de l'aide ou pas.
    Il est certain que je ne suis pas contre l'idée d'imposer des peines de prison aux délinquants sexuels. Bien souvent, cela a pour effet d'éliminer le sentiment de culpabilité des victimes, surtout chez les enfants. Il est fréquent que des enfants aient l'impression que, d'une façon ou d'une autre, ce qui est arrivé était leur faute.
    Une autre mesure intégrée au programme que j'administre consiste en ce que, dans la mesure du possible, une fois le délinquant rendu à un stade de progrès suffisant dans son traitement, nous offrons à la victime une reconnaissance du crime commis. Cela peut prendre la forme d'une lettre, d'une rencontre en personne, si la victime le choisit, ou même d'une vidéo où le délinquant reconnaît qu'il a mal agi, que sa victime ne le méritait pas et qu'elle n'avait en aucune façon encouragé ces actes. Le délinquant reconnaîtra aussi de façon très précise de quelle façon il a pu causer du tort à la victime. Parmi tout ce que j'ai pu observer auprès des victimes, c'est cette mesure qui semble la plus bénéfique pour elles.
(1720)
    Je suis content que vous l'ayez reconnu. Beaucoup de victimes nous ont dit qu'à leurs yeux, une peine de prison était nécessaire, et que cela leur procurait une estime d'eux-mêmes.
    L'un des objectifs poursuivis par notre gouvernement au moyen de cette mesure législative est de répondre aux préoccupations des victimes, qui sont souvent laissées de côté dans ce genre de discussion. Nous croyons qu'il est temps de tenir compte de leurs préoccupations à elles aussi.
    C'est une bonne chose de s'occuper des délinquants et de leurs besoins — des façons d'assurer leur réadaptation et leur réinsertion dans la société —, mais nous devons également nous soucier des victimes et veiller à répondre à leurs besoins.
    Merci.
    Je tiens à remercier M. Fletcher d'avoir comparu devant notre comité.
    Nous allons également vous libérer, monsieur Fletcher.
    Chers membres, nous devons encore traiter quelques questions relatives à nos travaux.
    Me serait-il possible de faire une dernière remarque?
    Veuillez être très bref.
    En ce qui a trait à la durée de la peine et à l'effet qu'elle peut avoir sur un traitement, il importe de comprendre que si une personne se voit infliger une peine provinciale, qui peut aller jusqu'à deux ans moins un jour, le juge a également le pouvoir discrétionnaire d'y ajouter une période de probation — et dans le cas des délinquants sexuels, les juges le font pratiquement toujours —, d'au plus trois ans.
    Ce que cela signifie, c'est qu'en plus du temps passé en prison, où il aura accès à un traitement, un délinquant pourra se voir infliger une probation assortie d'un traitement obligatoire et d'une règle selon laquelle, s'il ne suit pas le traitement, il pourra être accusé d'un manquement aux conditions de probation et écoper d'une peine d'emprisonnement supplémentaire.
    Merci beaucoup.
    Chers membres du comité, nous avons distribué le septième rapport du comité de direction, le sous-comité.
    Avez-vous eu l'occasion d'y jeter un coup d'oeil? Ce dont nous avons besoin, c'est d'une motion d'approbation...
    Nous vous écoutons, monsieur Ménard.

[Français]

    Je crois que nous attendons cinq témoins lundi, sauf erreur. Ce sont tous des témoins de grande qualité. Leurs noms ont été mentionnés au cours de témoignages antérieurs. Il y a, par exemple, M. Hanson, M. Quinsey et leur homologue francophone — même s'il ne porte pas un nom français — M. Van Gijseghem. Je crois que les gens de Québec le connaissent. Donc, cela fait trois personnes qui sont vraiment parmi les témoins les plus qualifiés que nous aurons entendus. Je crois qu'il y aura deux autres témoins.
    De les recevoir tous les cinq ensemble, de leur donner 10 minutes pour faire leur présentation et de consacrer seulement sept minutes par parti aux questions, je crois que c'est un peu les insulter. Il faut se rappeler qu'ils se déplacent pour venir nous rencontrer. De plus, je suis d'avis que nous allons avoir des réponses en profondeur de la part de gens qui ont une grande expertise. Je comprends qu'on ait pris la décision un peu vite, mais je préférerais que l'on forme deux groupes de témoins qui seraient entendus lundi et mercredi et que nous reportions le vote à la séance suivante. Leurs témoignages pourraient contribuer à accélérer le processus.
(1725)

[Traduction]

    Eh bien, je ne sais quoi dire. Nous avons eu cette discussion à notre dernière réunion. Je crois que M. Ménard a proposé quatre témoins; M. Comartin en a fait autant.
    Monsieur Ménard, ce n'est qu'aujourd'hui que vous nous avez soumis les noms des deux autres témoins que vous souhaitez maintenant convoquer...
    Est-ce juste?
    Une voix: Oui.
    Le président: Oui. Donc, il est bien tard. Nous avions deux mois. Nous avons eu cette discussion à notre dernière réunion. Il s'est écoulé deux mois avant que quelqu'un propose des témoins; tout à coup, nous avons reçu à la dernière minute toutes ces propositions de témoins, que nous avons convenu de recevoir.
    Aujourd'hui, la greffière a reçu les noms de deux autres témoins.
    Puisque M. Comartin est de retour, nous voulions simplement vous informer que vous vouliez aussi...
    [Note de la rédaction: inaudible]... et je l'ai convaincu du bien-fondé de mon propos, et il s'est maintenant rangé de mon côté. Je lui demanderai d'en faire autant en ce qui concerne une toute autre question, monsieur le président.
    Monsieur Comartin, je voulais simplement vous mettre au courant. Vous vouliez aussi que les représentants de Statistique Canada comparaissent.
    M. Joe Comartin: Oui.
    Le président: Ils n'étaient pas libres les trois jours où nous étions en quelque sorte convenus d'entendre des témoignages. Cependant, il se trouve qu'ils étaient disponibles le jour où nous avions prévu d'effectuer l'étude article par article; alors à titre provisoire, nous les avons inscrits à l'horaire pour le début de la séance du mercredi. Ainsi, nous nous ajustons à leurs disponibilités, mais ils viendront le même jour où nous entreprendrons notre étude article par article, sous réserve d'autres discussions du comité. Je vous faisais simplement part des dernières informations.
    Je pense que ce qui me préoccupait... J'ai tenté d'entrer en communication avec quelqu'un de Statistique Canada pour pouvoir préciser les renseignements particuliers que je veux obtenir, et que le comité aurait selon moi avantage à considérer, mais personne ne me rappelle. Je persisterai, mais peut-être qu'un message du bureau du président aiderait.
    Je serai certainement heureux de vous offrir mon aide pour que vous puissiez obtenir de l'information à l'avance. Ce pourrait être utile.
    Je crains fort que, comme ils l'ont déjà fait par le passé, les gens de Statistique Canada montrent... Ce dont M. Ménard et moi nous plaignons, c'est qu'on ne voit rien à l'avance. Ils arrivent ici avec leur livre, et ce n'est qu'à ce moment-là que nous le voyons. Il y a des points particuliers à considérer relativement à l'historique de certaines de ces dispositions, et je pense qu'il est important que le comité comprenne ce qui est arrivé.
    Je vais demander à la greffière d'aviser Statistique Canada que nous aimerions beaucoup obtenir une copie de leur exposé à l'avance, d'ici lundi matin. Cela vous paraît-il raisonnable?
    M. Joe Comartin: Ce serait bien.
    Le président: Nous vous le ferons parvenir le plus rapidement possible...
    M. Joe Comartin: Merci.
    Le président: ... parce que nous tentons de satisfaire tout le monde.
    Mais en ce qui concerne les noms des deux derniers témoins, je veux dire... ils ont été remis aujourd'hui à la greffière. Donc, M. Ménard veut que nous consacrions un jour de séance supplémentaire aux témoins. Qu'est-ce que le comité souhaite faire?
    Monsieur Dechert.
    En tout respect, monsieur le président, je ne souhaite pas revenir sur tout ce dont nous avons discuté à la séance du sous-comité. Mais je crois que tout le monde sait que nous étions tombés d'accord, en décembre, pour consacrer quatre séances à l'étude du projet de loi C-54. Nous avons eu une pause de deux semaines, au cours de laquelle les gens ont eu amplement le temps d'examiner la mesure législative et de proposer des témoins. Apparemment, plusieurs ne l'ont pas fait.
    Nous sommes revenus. Nous avons eu une autre réunion du sous-comité, puis nous avons convenu de consacrer près de deux fois plus de temps à l'étude du projet de loi. Nous sommes tombés d'accord pour le traiter en sept séances. Or, dès la séance suivante, voilà qu'on nous demande d'augmenter de nouveau la quantité de temps qui y sera consacré. Il faut respecter les engagements que nous avons pris lors de la réunion du sous-comité, sinon, le comité ne pourra pas fonctionner de façon raisonnable.
    Nos témoins nous ont dit que cette mesure législative est très importante et que, chaque jour de retard que nous prenons, des enfants sont victimes d'agressions sexuelles. Je pense que c'est un projet de loi que les gens veulent nous voir traiter rapidement.
    Nous sommes tous conscients de la possibilité que nous ne soyons pas ici à compter de la fin mars, en raison de la menace de déclenchement d'élections printanières. Je crois qu'aucun de nous... Tous les partis ont dit croire qu'il y a certainement une large part — si ce n'est la totalité — de ce projet de loi qui est importante, et qu'ils l'appuient. En tant que députés, il nous incombe à tous de faire de notre mieux pour adopter ce projet de loi, puis le renvoyer à la Chambre et, espérons-le, au Sénat, avant ces élections qui risquent d'être déclenchées vers la fin du mois de mars.
(1730)
    Monsieur Ménard, si vous me le permettez, j'aimerais faire une proposition. Cela pourrait fonctionner. Il me vient à l'esprit que le lundi, nous pourrions diviser le groupe de témoins en deux, soit un groupe de deux personnes et un groupe de trois personnes. Si nous faisons cela, comme vous le savez, l'ordre des interventions sera modifié, ce qui donnera davantage de temps à l'opposition pour interroger les témoins que si nous effectuions un tour de table complet.
    Lorsque nous effectuerions le tour de table, les quatre premières interventions dureraient sept minutes, puis les trois suivantes, cinq minutes. À ce moment-là, nous aurons terminé, n'est-ce pas? Ensuite, on aurait un second tour de table selon cette même formule. Si vous additionnez tout le temps que cela représente, l'opposition disposera d'une période bien plus longue. Cela pourrait répondre à la préoccupation de M. Ménard quant au fait qu'il pourrait manquer de temps pour poser des questions.
    Si nous divisons effectivement le groupe de témoins, cela voudra dire que le gouvernement aura moins de temps pour poser des questions; mais peut-être est-ce un compromis possible pour respecter l'échéancier prévu tout en tenant compte de votre préoccupation.

[Français]

    Je vous en serais très reconnaissant, si c'est ce que vous faites. Je reconnais que je suis fautif, mais c'est que la chose est importante.
    Merci beaucoup de cette proposition.

[Traduction]

    J'ai simplement besoin de l'approbation... Le gouvernement est-il favorable à ce qu'on procède ainsi?
    Je suis navré. Je ne vous ai pas entendu.
    La proposition consiste en ce qu'au lieu d'avoir un unique groupe de témoins, nous en aurions deux, ce qui, comme vous le savez, donnerait un peu plus de temps à l'opposition, et un peu moins de temps au gouvernement, pour poser des questions, mais...
    Oui. Le même jour...
    ... nous le ferions en respectant quand même l'échéancier.
    Oui.
    Très bien. Je pense que cela fait consensus. C'est formidable.
    Pourrions-nous, dans ce cas, adopter ce rapport?
    Une voix: Oui.
    Le président: Monsieur Comartin.
    Je serai bref, car je dois partir, mais recevrons-nous d'autres témoins mercredi, ou il y aura seulement Juristat?
    Il y aura seulement Juristat.
    Y a-t-il une motion visant à adopter le rapport du comité de direction? Monsieur Lee?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: La motion est adoptée. La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU