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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 040 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 juin 2012

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, je déclare ouverte la 40e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
    Nous accueillons aujourd'hui des témoins afin de poursuivre notre étude de l'utilisation des terres et du développement économique durable.
    Deux témoins sont ici avec nous dans la salle aujourd'hui. L'autre témoin, monsieur Le Dressay, comparaît par vidéoconférence.
    Nous commencerons par nos premiers témoins, John Gailus et Christopher Devlin. Je vous remercie beaucoup de prendre la peine de témoigner aujourd'hui, malgré votre horaire chargé.
    Nous vous laisserons la parole pour environ 10 minutes. Nous vous saurions gré de respecter le temps qui vous est accordé pour faire vos exposés. Nous entendrons ensuite M. Le Dressay, puis passerons aux questions des membres du comité.
    Je vous remercie encore de vous joindre à nous. Je vous laisse la parole.
    Je m'appelle John Gailus, partenaire chez Devlin Gailus, un cabinet d'avocats de Victoria, en Colombie-Britannique. Nous sommes avocats, mais ne nous en tenez pas rigueur. Je suis accompagné de mon partenaire, Christopher Devlin.
    Je me présenterai en indiquant que je suis membre de la nation Haida, originaire de la bande Skidegate, qui habite à l'extrême Ouest du Canada.
    Après mes études en droit, j'ai travaillé pendant quatre ans et demi comme agent de la gestion et de la location des terres de ce qui s'appelait alors le ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord. J'ai fini par obtenir une promotion, si on peut appeler cela ainsi, et suis devenu agent principal de la gestion et de la location des terres pour la côte Ouest de la Colombie-Britannique.
    J'étais alors responsable d'un grand nombre de dossiers relatifs à la désignation et à la location des terres — y compris les conflits afférents, comme celui du parc Musqueam —, ainsi qu'à l'ajout aux réserves et à la création de réserves. J'ai pour ainsi dire créé une sorte de créneau et ai décidé qu'exploiter mon diplôme en droit. Je suis passé au secteur privé en 1999 et y travaille depuis.
    Nous nous occupons presque exclusivement des Premières nations et des organisations autochtones. J'espère que nous pourrons vous faire partager notre expérience des écueils et des problèmes que nous entrevoyons en matière de politique.
    Nous considérons que le travail que vous accomplissez est extrêmement important. Vous effectuez une étude des plus exhaustives. Je pourrais probablement parler pendant bien plus que 10 minutes. Je m'efforcerai aujourd'hui de vous donner une vue d'ensemble de la situation. Nous pourrons également répondre aux questions que vous pourriez avoir et peut-être vous donner des exemples précis.
    Tout d'abord, j'ai consulté une partie des témoignages que vous avez entendus. Nous ne sommes pas nécessairement d'accord avec le fait que la Loi sur les Indiens freine le développement économique. Ce sont en fait les politiques et peut-être leur application qui causent des délais. Mais c'est ainsi partout, je crois. Sauf peut-être au gouvernement fédéral, il faut habituellement demander l'approbation d'un autre ordre de gouvernement pour exploiter des terres. Qu'on soit dans une municipalité ou une province, il faut obtenir les permis nécessaires pour réaliser un projet.
    Le problème, selon moi, vient souvent du fait que les promoteurs et les prêteurs tiers ne connaissent pas bien le processus ou ne sont pas disposés à l'apprivoiser.
    La loi est là, mais les politiques que je vois sont plutôt uniformisées et ne sont pas proportionnelles aux projets. Je suis convaincu que d'autres témoins vous l'ont fait remarquer. Essentiellement, qu'on construise un dépanneur ou un centre commercial, il faut respecter la même politique. Si on veut construire une station-service ou une usine de gaz naturel liquéfié, il faut suivre la même politique pour obtenir une approbation.
    Que font alors les Premières nations? Eh bien, elles font fi de la loi, entreprennent les travaux et construisent leurs stations-services et leurs parcs de roulottes, et ce, sans détenir les permis nécessaires. Cette non-conformité pourrait constituer une énorme responsabilité éventuelle pour les Premières nations, mais aussi pour l'État.
    Il y a pourtant des occasions qui s'offrent. Et nous avons constaté que malgré la Loi sur les Indiens et les obstacles, les exemples de développement réussi abondent. Comme nous travaillons en Colombie-Britannique, je vous donnerai celui de Park Royal. La nation Burrard Tsleil-Waututh construit de nombreux condominiums. La bande Musqueam, malgré le conflit, est une Première nation florissante. À cela s'ajoutent les Cowichan, qui ont un centre commercial, la bande de St. Mary's et la bande de Campbell River.
    Ces réserves ont toutes en commun le fait d'être situées à proximité de centres urbains. Dans le domaine du développement économique, la géographie jouera un rôle substantiel au chapitre du développement sur les réserves.
    Les communautés isolées ne bénéficieront pas des mêmes occasions que les bandes de Musqueam et de Westbank. On ne peut donc pas y appliquer le même modèle.
     Mais ces Premières nations peuvent aussi profiter d'un certain nombre d'occasions à l'extérieur des réserve, comme dans les domaines du pétrole, du gaz, de l'exploitation minière et de la foresterie. Des occasions de développement économique s'offrent à elles, mais c'est souvent à l'extérieur de la réserve.
    Nous considérons que la LGTPN constitue un bon pas en avant, mais les Premières nations héritent souvent de problèmes de gestion des terres qu'AINC n'a pas résolus. Elles passent beaucoup de temps à tenter de régler des conflits territoriaux entre leurs membres, cherchant à déterminer qui a droit à quelle parcelle de terre, mettant ainsi en veilleuse le développement économique.
    Je tiens à parler brièvement de l'ajout aux réserves. Je sais que d'autres témoins ont traité de la question. Le processus est clairement lourd. Nous négocions souvent avec la province, qui veut garder toutes les ressources dans le territoire, les municipalités et les tierces parties intéressés. Il peut être long de démêler tous ces intérêts dans le processus d'ajout aux réserves. J'ai déjà réussi à faire un tel ajout en trois semaines quand je travaillais au gouvernement fédéral, mais c'était en vertu d'une ordonnance de la cour. Le gouvernement peut faire vite quand on le lui ordonne.
    En ce qui concerne le besoin social, les Premières nations doivent réaliser des études pendant des années avant d'en arriver à négocier l'acquisition des terres. Il faut effectuer des études et des évaluations environnementales, et peut-être négocier avec les tierces parties. Je crois que quelque chose ne va pas dans le processus.
    Permettez-moi de parler brièvement de la politique sur les bandes ou les réserves nouvelles, qui concerne les situations où un groupe cherche à créer sa propre bande ou à sortir d'une bande existante. Ce processus est, selon moi, voué à l'échec. La Première nation doit financer le processus elle-même et prouver que cela ne fera pas augmenter le budget. C'est un exemple criant d'un aspect de la politique qu'il faut modifier. Il n'y a pas de commune mesure entre une nation qui montre qu'elle a un besoin social et obtient du financement, et une autre qui doit financer le processus elle-même.
    En Colombie-Britannique, on constate que l'ajout aux réserves ne se fait pas si une Première nation est en train de négocier un traité. Les traités négociés jusqu'à maintenant ont retiré aux terres visées le statut de réserve, comme dans le cas des Nisga'a, des Tsawwassen et des Maa-nulth. Les gouvernements considèrent inutile d'effectuer l'ajout aux réserves quand la conclusion d'un traité est imminente, puisque les terres perdront essentiellement leur statut de réserve dans le cadre du processus. De façon générale, les politiques de désignation, de location ou d'ajout doivent être adaptables et souples. C'est souvent un problème pour les avocats. Ayant déjà travaillé au gouvernement, je peux vous dire que j'y ai déjà été confronté quand une politique ne semblait pas convenir à un cas particulier.
    Ce qui manque, c'est le développement économique. Ce n'est pas une priorité pour AADNC — je crois que c'est l'acronyme qui a cours maintenant —, du moins aux termes de la Loi sur les Indiens. Le ministère n'affecte pas les ressources humaines et financières pour résoudre ces questions. Ce n'est pas nécessairement la faute de ceux qui travaillent d'arrache-pied, car ils assument une charge de travail considérable. Pour réussir à favoriser le développement économique des Premières nations, il faut investir des ressources humaines et financières en conséquence.
    Voilà ce que j'avais à vous dire.

  (1545)  

    Merci beaucoup, monsieur Gailus.
    Nous laisserons maintenant la parole à M. Le Dressay pour 10 minutes.
    M'entendez-vous bien, monsieur Le Dressay?
    Oui. Nous vous cédons la parole pour 10 minutes. Merci beaucoup de vous joindre à nous.
     C’est un privilège de témoigner devant votre comité. Au fil des années, j’ai vu le comité promouvoir les initiatives des Premières nations et améliorer les lois qui les concernent. Vos recherches et vos travaux sont importants pour les Premières nations et pour tout le Canada.
    En guise de présentation, je dirai que je suis le directeur de Fiscal Realities Economists. Nous sommes un groupe d’économistes établis à Kamloops et à Georgina Island, en Ontario.
    Il y a une vingtaine d’années, Manny Jules, alors chef de bande, nous a demandé des conseils sur la manière d’accélérer la croissance économique de sa communauté. C’est ainsi qu’a débuté un projet de recherche et de développement qui dure depuis 20 ans, avec la Commission de la fiscalité des premières nations, quelques autres Premières nations et un bureaucrate qui croyait dans la croissance mue par l’investissement, M. Bob Kingsbury.
    Nous nous considérons comme les économistes les plus fortunés du monde, parce que nous avons eu la possibilité de mêler la science du développement à l’art de la politique et de faciliter des investissements de centaines de millions de dollars sur les terres des Premières nations. C’est un honneur de décrire au comité ce que nous avons appris durant cette période. Nous avons présenté un mémoire sur nos recherches et nos suggestions. Ma déclaration portera donc sur quatre questions qui pourraient vous intéresser.
    Premièrement, qu’est-ce qui crée des disparités économiques chez les Premières nations? La réponse est simple et évidente pour quiconque s’est rendu sur des terres des Premières nations. Les Premières nations ne reçoivent pas leur part de l’investissement privé au pays. L’investissement crée des emplois et des revenus publics. Il permet aux collectivités d’offrir des services locaux de qualité et des infrastructures qui attirent d’autres investissements. C’est le cercle vertueux de la croissance que connaissent la plupart des collectivités. L’investissement peut provenir de sources externes comme une nouvelle entreprise qui s’installe dans une collectivité ou de sources internes comme des citoyens qui investissent dans le logement ou qui démarrent une entreprise.
    Au lieu du cercle vertueux de la croissance, de nombreuses Premières nations sont piégées dans le cercle vicieux de la dépendance. Ce cercle vicieux débute avec des transferts publics insuffisants pour construire des infrastructures commerciales de qualité, offrir des services locaux de qualité et corriger les lacunes institutionnelles créées par la Loi sur les Indiens. Il en découle un mauvais climat des affaires, de sorte que les Premières nations n’attirent pas d’investissements privés, ce qui entraîne moins d’emplois et moins de revenus publics, et le cycle de la dépendance envers les transferts recommence à nouveau.
    La deuxième question que vous pouvez poser est pourquoi y a-t-il si peu d’investissements sur les terres des Premières nations? En 1999, mon associé Greg Richard et Jasob Calla, un économiste qui travaillait pour nous à l’époque, ont réalisé une importante étude qui a démontré que les coûts de la réalisation d’un projet d’investissement sur les terres les mieux situées des Premières nations étaient de quatre à six fois plus élevés que sur des terres comparables hors des réserves. Pour nos économistes, c’était toute une découverte. Si l’on peut abaisser les coûts des affaires pour les Premières nations, on peut créer un cercle vertueux.
    La prochaine question est qu’est-ce qui explique ces coûts élevés des affaires? Beaucoup de nos travaux ont porté sur ce sujet depuis 20 ans. D’abord, un sain climat de l’investissement donne un rôle au secteur public et au secteur privé. Le secteur privé recherche un taux de rendement concurrentiel obtenu grâce à un avantage de lieu, de ressources, de main-d’oeuvre ou de technologie. Le secteur public appuie ces décisions privées par des droits de propriété privée protégés et sûrs, des infrastructures de qualité, de bons services locaux et un gouvernement transparent et sensible, à un taux d’imposition raisonnable.
    Les coûts élevés des affaires sur les terres des Premières nations ne découlent pas du manque de compétitivité du secteur privé des Premières nations, mais plutôt du manque de compétitivité du secteur public des Premières nations. En règle générale, les infrastructures, les services locaux, les droits de propriété, les pouvoirs des gouvernements locaux et la capacité administrative des Premières nations sont inférieurs à la moyenne nationale. Autrement dit, de nombreuses Premières nations ne possèdent pas le cadre institutionnel nécessaire pour faciliter l’investissement privé.
    Dans le système actuel, avec beaucoup de patience et de ressources, il est possible de corriger un grand nombre de ces lacunes institutionnelles. Dans la bande Tk’emlups à Sun Rivers, où se trouve notre bureau, une acre de terre se vendait à 8 000 $ en 1996. Quatre ans plus tard, la valeur d’une acre de terre est grimpée à plus de 500 000 $ après que la bande Tk’emlups a créé le meilleur cadre juridique, administratif et d’infrastructure possible en vertu de la Loi sur les Indiens, à un coût de plusieurs millions dollars. De même, à Westbank, une acre de terre se vendait à 10 000 $ en 1991. De nos jours, une acre de terre coûte près de 750 000 $, mais il a fallu pour cela 15 ans et de nombreux millions dollars, un accord en matière d’autonomie gouvernementale, de nouvelles infrastructures et de nombreuses lois.
    C’est possible. Mais la dernière question qui pourrait vous intéresser est comment améliorer le climat de l’investissement pour les Premières nations rapidement et de manière efficace par rapport aux coûts? Nous avons observé que les changements apportés par les Premières nations qui ont réussi ont quatre caractéristiques communes.

  (1550)  

    Premièrement, ils nécessitent un leadership des Premières nations. Deuxièmement, ils doivent être facultatifs, pour que les Premières nations puissent exercer leur liberté de choix. Troisièmement, la réussite suppose l’appui des institutions des Premières nations, qui aident à mettre en place les structures juridiques et administratives. Enfin, lorsque des lois doivent être adoptées, ces changements nécessitent la volonté politique du gouvernement fédéral et parfois des gouvernements provinciaux.
    Si ces éléments sont en place, voici cinq suggestions qui pourraient aider les Premières nations intéressées à créer un climat de l’investissement plus concurrentiel.
    Premièrement, donner le choix aux Premières nations intéressées d’avoir le même système de droits de propriété collectifs et individuels que les autres Canadiens. Cela pourrait se faire par l’entremise de la Loi sur le droit de propriété des Premières nations proposée, qu'on appelle parfois LDPPN.
    Deuxièmement, donner aux Premières nations intéressées le choix d’adopter un cadre juridique clé en mains plus harmonisé avec celui des territoires adjacents. Cela pourrait se faire par l’entremise de la LDPPN proposée. Les Premières nations intéressées économiseraient ainsi des années de mise en oeuvre et des millions de dollars. Les Premières nations n’auront plus à fabriquer la voiture du développement économique avant de pouvoir la conduire.
    Troisièmement, encourager les Premières nations à améliorer leur relation financière en participant à la Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations, appelée LGFSPN. Cette loi marque le début d’une nouvelle relation financière, où les Premières nations ont des responsabilités claires en matière de dépenses et des pouvoirs exclusifs en matière de revenus afin de pouvoir effectuer ces dépenses. La LGFSPN devrait être améliorée de manière à donner plus de pouvoirs en matière de revenus, comme la TPSPN, et à favoriser des transferts fondés sur une formule transparente afin que les Premières nations soient mieux en mesure d’offrir des services de qualité et de bâtir des infrastructures concurrentielles.
    Quatrièmement, offrir un plus grand nombre de bourses aux étudiants intéressés par les certificats d’accréditation en administration fiscale dans les Premières nations et en économie appliquée des Premières nations accordés par le Tulo Centre of Indigenous Economics. Cette formation se fonde sur nos recherches des 20 dernières années et sur les réussites de la Commission sur la fiscalité des premières nations pour apprendre aux étudiants comment corriger les lacunes institutionnelles et faciliter les investissements sur les terres des Premières nations. Plus de 70 étudiants des Premières nations ont suivi certains de ces cours, et des bourses accrues permettaient à un plus grand nombre d’étudiants de bâtir cette capacité administrative nécessaire.
    Enfin, accélérer les ajouts aux réserves. Pour les Premières nations sans accès aux marchés et sans avantages comparatifs, les ajouts aux réserves représentent des débouchés économiques et un espoir. Le processus actuel des ajouts aux réserves est beaucoup trop lent et trop coûteux. Les ajouts pourraient être accélérés en exploitant davantage la LGFSPN et le potentiel de la LDPPN proposée.
    Aucun de ces changements suggérés n’est coûteux et certains d’entre eux ne nécessitent qu'une loi. Les avantages pour les Premières nations du Canada pourraient être importants. Accroître la productivité des terres des Premières nations en facilitant les investissements pourrait réduire grandement la disparité entre les Premières nations et les autres Canadiens. De plus, les membres des Premières nations sont le groupe de la population active canadienne qui augmente le plus rapidement.
    La pérennité des programmes sociaux du Canada dépendra de plus en plus de la productivité des Premières nations. C’est pour cette raison que le travail de votre comité est si important.

  (1555)  

    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous entamerons maintenant nos tours de questions.
    Nous accordons la parole en premier à Mme Crowder pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins, y compris M. Le Dressay, de comparaître aujourd'hui.
     Monsieur Devlin, nous nous sommes déjà rencontrés dans le cadre des délibérations du présent comité. Je suis ravie de vous revoir.
    Monsieur Le Dressay, je ne m'attends pas à obtenir de réponse à la question suivante. Vous avez indiqué, dans votre exposé, que les Premières nations ne reçoivent pas leur part d'investissement. J'ajouterais qu'elles n'obtiennent pas non plus leur part du gâteau des ressources exploitées sur leurs terres traditionnelles. Ce n'est pas que l'investissement, mais également les ressources qui existent déjà.
    J'ai une question pour M. Gailus. Merci de votre exposé.
    Je suis originaire de Colombie-Britannique et je vis sur les territoires traditionnelles du peuple Cowichan. Je connais très bien le centre commercial qui y est construit. Certains des projets que vous avez évoqués font toutefois intervenir des certificats de possession. Par exemple, le centre commercial de Cowichan appartient à un certain nombre de familles.
    Quand nous étions à Westbank, le chef et le conseil ont indiqué que les certificats de possession présentent certainement des occasions de développement économique, mais aussi de grandes difficultés en raison de ce qui s'est passé avant l'instauration du gouvernement autonome ou de la LGTPN.
    Pourriez-vous nous dire ce que le comité devrait recommander au sujet des certificats de possession, le cas échéant?
    En ce qui concerne le centre commercial de Cowichan, le terrain a été cédé, selon l'ancien terme. Les revenus sont toutefois versés aux anciens titulaires des certificats de possession. Ils ont donc utilisé le processus officiel prévu à cette fin. Je sais que la majorité des terres des Westbank font l'objet de certificats de possession. Je crois toutefois que les autres terres dont j'ai parlé sont ce que nous appelons des terres de bande.
    Je suppose qu'AADNC a maintenant pour politique de ne pas accorder de bail d'une durée supérieure à 49 ans à un titulaire de certificat de possession et demandera probablement le consentement du conseil. Il est déjà arrivé qu'un titulaire ait développé ses terres sans l'autorisation du conseil, procédant aux branchements d'égout et d'aqueduc, pour venir ensuite réclamer un bail auprès d'AINC, ce qui a donné lieu à un litige. Mon nom figure partout dans ce dossier — du nom de Tsartlip —, parce que je me suis évertué à rectifier la situation quand j'étais agent des terres.
    Nous n'avons pu jeter de pont au-dessus de l'abîme, si je puis m'exprimer ainsi, qui divisait ce titulaire qui voulait développer ses terres et le conseil, qui lui opposait un refus parce qu'il comptait garder ces terres pour les membres de la communauté, même si elles faisaient l'objet d'un certificat de possession.
    Du point de vue pratique, au regard du dossier Tsartlip et de la politique, il n'y a pas beaucoup de projets d'envergure sur les terres visées par des certificats de possession à moins que le conseil ne soit de la partie. Comme c'est le cas quand une Première nation veut entreprendre un projet à grande échelle et a besoin de services, auquel cas elle s'adresse à la municipalité en donnant l'exemple du dossier Tsartlip, si c'est le conseil qui est responsable des égouts et de l'aqueduc, il devra alors donner son aval pour que le projet aille de l'avant.

  (1600)  

    Vous avez la parole, monsieur Devlin.
    J'allais simplement ajouter qu'à certains égards, ce n'est guère différent de ce qui se passe quand on est en présence d'un groupe de petits propriétaires en fief simple. Si on envisage un projet d'envergure, il faudra soit que tous les petits titulaires de certificat de possession se réunissent pour constituer une parcelle de terre que l'on peut exploiter de façon rentable — dans l'exemple de Cowichan, la terre a été cédée avec l'assentiment des titulaires, qui s'attendent à recevoir une part de la location —, soit qu'un membre de la bande achète des terres des divers titulaires pour constituer cette parcelle.
    Sachez également qu'il faut, du point de vue de la réglementation, non seulement obtenir le consentement du conseil de bande aux fins de développement, même si les terres sont visées par un certificat de possession, mais également déterminer qui profitera des revenus découlant du développement économique sur ces terres; par exemple, si les revenus locatifs tendent à revenir aux titulaires de certificat de possession, en quoi l'ensemble de la bande en profite-t-il?
    Voilà le genre de questions que le conseil doit résoudre, surtout quand il a affaire à un titulaire de certificat très entreprenant, qui a acquis une parcelle de terre suffisamment grande pour y construire un vaste magasin-entrepôt, par exemple, et en tirer des revenus substantiels. Le conseil lui demandera alors, et avec raison, quel avantage le reste de la bande en retirera. Ces questions suscitent des tensions. Le conseil peut imposer des taxes ou d'autres mesures, comme le ferait une municipalité, mais la question fait toujours l'objet de débats.
    Me reste-t-il du temps?
    Le président: Vous avez une minute et demie.
    Mme Jean Crowder: En une minute et demie, pouvez-vous nous expliquer tout ce qui se passe en Colombie-Britannique au sujet de la protection constitutionnelle aux termes du paragraphe 91(24) et l'abandon du titre ancestral quand les bandes adhèrent aux traités?
    Je sais que certaines bandes ont trouvé un moyen de résoudre la question, mais l'obligation de céder les terres ou d'abandonner la protection constitutionnelle suscite des tensions en Colombie-Britannique. D'aucuns font valoir que le Canada adopte cette position parce qu'il souhaite abandonner son rôle de fiduciaire. Qu'en pensez-vous?
    Oh, je dispose d'une minute ou moins.
    L'affaire suscite en effet de vives tensions. La Première nation doit souvent faire un choix politique. Si on leur propose d'abandonner les terres de leur réserve en échange des conditions prévues au traité, elles doivent peser le pour et le contre.
    Le jeu en vaut-il la chandelle?
    Un grand débat fait certainement rage au sujet de la nature et de la valeur de l'intérêt collectif à l'égard du titre ancestral afférent aux réserves par rapport à celles des occasions économiques qui sont plus faciles à saisir quand les terres ne sont pas des réserves. Par exemple, au bout du compte, les terres visées par les traités offertes en Colombie-Britannique sont une forme de fief simple.
    Les terres relèvent toujours des Premières nations, mais peuvent être achetées et vendues. Cela même à des quiproquos fondamentaux que chaque communauté doit résoudre. Chacune prend des décisions différentes. Certaines refusent et l'intérêt collectif l'emporte, auquel cas elles trouveront d'autres manières d'exploiter le potentiel économique, alors que d'autres choisiront de profiter du potentiel économique plus facilement accessible qu'offre le fief simple.
    Merci beaucoup.
    Nous laissons maintenant la parole à M. Payne pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins qui se trouvent dans la salle ainsi que M. Le Dressay qui a comparu par vidéoconférence. Votre témoignage nous est essentiel puisqu'il s'agit d'une étude très importante, comme vous l'avez déjà indiqué.
    Je voudrais m'adresser tout d'abord à M. Le Dressay. Dans votre document de recherche intitulé « Comparaison entre l'expansion de limites municipales et les ajouts aux réserves », vous signalez que le processus des ajouts aux réserves est trop lent, trop complexe et trop mal connu. Bien des témoins qui ont comparu devant nous sont également de cet avis.
    Pourriez-vous nous dire quelles pratiques exemplaires relatives à l'expansion des limites municipales il faudrait appliquer au processus d'AR?

  (1605)  

    Oui.
    Premièrement, ce document de recherche fait ressortir une statistique intéressante des projets que nous avons comparés. Le processus d'expansion des limites municipales est six fois moins long que le processus des ajouts aux réserves.
    Il y aurait deux raisons à cela. Premièrement, les municipalités peuvent beaucoup plus facilement accroître leurs limites parce que leurs pouvoirs et leurs compétences augmentent parallèlement. Lorsqu'une réserve veut procéder à un ajout, le dossier passe du gouvernement provincial au gouvernement fédéral. Il y a donc des problèmes d'harmonisation.
    Deuxièmement, le gouvernement fédéral n'est pas en mesure de... je ne devrais pas employer cette expression. C'est tout comme une partie de ping-pong fiscal. Je m'explique: lorsqu'il devient responsable d'une terre, le gouvernement fédéral est susceptible d'être tenu d'assumer le coût de mise en valeur de cette terre. Il voudra alors s'assurer de la viabilité économique et, partant, de la viabilité fiscale de cette terre. Ce processus exige beaucoup de temps à une Première nation.
    Que pourrait-on faire pour accélérer le tout? Deux choses.
    Tout d'abord, les Premières nations devraient adopter beaucoup de lois pour harmoniser leur processus en fonction des régimes provinciaux. Dans le bref mémoire que j'ai remis, j'ai indiqué qu'il manque essentiellement 30 ou 40 lois sur la gestion des terres.
    Un cadre juridique clés en main, permettrait de combler cette lacune et favoriserait une harmonisation avec le régime provincial, ce qui accélérerait considérablement le processus d'ajout aux réserves.
    En outre, les Premières nations doivent prouver la viabilité et le potentiel économique. Je ne parlerai plus d'une partie de ping-pong fiscal. C'est davantage une question de croissance bénéfique à l'ensemble de la région.
    Je pense que le processus d'AR peut se révéler un moteur économique, ce qu'estiment la plupart des Premières nations. Il faut préalablement combler le plus rapidement possible les lacunes institutionnelles.
    Dans votre mémoire, vous indiquez également que le processus d'AR pourrait être plus rapide si on recourait davantage à la Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations et à la loi proposée sur le droit de propriété des Premières nations.
    Quels seraient les avantages de ces deux lois? Comment permettraient-elles d'accélérer le processus?
    La LGFSPN accélérerait le processus, car elle prouverait que les Premières nations peuvent au moins combler des lacunes institutionnelles, disposant des pouvoirs nécessaires en matière de production de recettes et de prestation de services. Pour les administrations municipales, cela joue un rôle crucial dans l'établissement des services d'entente. On cherche à aider les Premières nations à conclure ces ententes de service et à montrer aux administrations municipales que les AR ne leur font pas perdre des recettes fiscales, mais que ces ententes leur seront avantageuses. Il faudrait certes insister sur cet aspect pour accélérer cette partie des négociations.
    La loi proposée sur le droit de propriété des Premières nations comporterait selon moi deux éléments susceptibles d'accélérer le processus d'AR. Premièrement, comme cette loi proposerait un cadre juridique clés en main, les processus d'approbation et de gestion du patrimoine, notamment, seraient déjà passablement harmonisés.
    Deuxièmement, le droit de propriété étant très similaire à celui qui existe pour les terres autochtones à l'extérieur des réserves, le transfert à un tiers serait beaucoup plus simple, la seule différence étant que ces terres relèveraient dorénavant d'une autre autorité.
    Tous les aspects du processus d'AR seraient beaucoup plus rapides.

  (1610)  

    Très bien.
    Vous avez employé l'expression « cadre juridique clés en main » à quelques reprises. Ce cadre juridique s'appliquerait-il à toutes les Premières nations? On nous répète souvent que chacune a des enjeux et des traditions qui lui sont propres entre autres choses. Je me pose donc des questions.
    Tout d'abord, il faudrait naturellement que cela soit facultatif. Les Premières nations auraient le choix. Dans toute la mesure du possible, ce cadre juridique devrait favoriser l'harmonisation régionale. Un cadre juridique clés en main pour Terre-Neuve serait différent de celui dont disposerait la Colombie-Britannique, parce que les circonstances sont différentes d'un endroit à l'autre. Toutefois, il s'agirait de cadres juridiques similaires, à quelques exceptions près.
    J'ai oublié votre autre question.
    Il n'y en avait qu'une seule. Elle portait sur le cadre juridique et son application à toutes les Premières nations.
    Votre temps de parole est presque écoulé.
    Dommage! J'aurais eu une autre question.
    Merci.
    Merci infiniment.
     Nous entendrons maintenant Mme Bennett, qui dispose de sept minutes.
    Monsieur Le Dressay, il est naturellement question de la loi proposée sur le droit de propriété des Premières nations dans la première de vos quatre recommandations. Comme vous le savez, on nous a fait part de nombreuses préoccupations lorsque nous nous sommes déplacés dans l'ensemble du pays, principalement en ce qui concerne la menace presque existentielle à l'intégrité de la réserve. Des enclaves pourraient être créées.
    Même lorsque M. Jules a comparu, il a pu nommer uniquement quatre ou cinq réserves que le tout intéressait. Il semble donc que la majorité des chefs et des conseils de bande ne soient vraiment pas intéressés.
    Dans la foulée des questions posées par M. Payne au sujet du cadre juridique clés en main, je me demandais si un tel cadre n'est possible qu'en vertu de la loi proposée. Votre troisième et votre quatrième recommandations seraient-elles possibles sans un tel cadre?
    Un cadre juridique clés en main n'est possible que dans le cadre d'une loi fédérale, comme celle proposée. C'est dans celle-ci que devrait figurer ce cadre juridique. Je ne dis pas que d'autres solutions ne sont pas possibles.
    La capacité administrative est-elle possible sans le droit de propriété? Bien sûr que oui.
    Vous avez fait allusion à des enclaves. Je voudrais préciser un aspect à cet égard. En général on s'explique mal — et ce fut certainement mon cas jusqu'à ce qu'un chef de la bande des Kitselas me précise qu'il y a une distinction entre une propriété en fief simple et une propriété du gouvernement. Selon lui, on pense qu'une propriété en fief simple constitue un droit de propriété. Il m'a conseillé de faire l'expérience toute simple suivante: « Arrêtez de payer vos taxes foncières et vous saurez qui est le propriétaire. »
    La loi proposée portera certainement sur cet aspect. Lorsque le gouvernement détient un droit de propriété, cela lui confère non seulement le droit de propriété, mais il peut également prendre les décisions sur la terre en question. Il détient les pouvoirs d'imposition, les droits réversifs et les droits d'expropriation.
    Or, le gouvernement détient ces derniers pouvoirs, quel que soit le propriétaire. Je viens de la Colombie-Britannique. Si j'achetais une terre en Saskatchewan, elle ne deviendrait pas soudainement une partie de la Colombie-Britannique. Elle fait encore partie de la Saskatchewan, parce que le gouvernement détient les pouvoirs sous-jacents ainsi que les droits réversifs et d'expropriation.
    La loi proposée aurait le même effet. Les Premières nations seraient toujours compétentes, détenant les pouvoirs d'imposition, les pouvoirs d'expropriation ainsi que les droits réversifs, et ce, quel que soit le propriétaire.

  (1615)  

    Ce qu'on a fait valoir, ce sont les risques entraînés par la vente d'une terre à quelqu'un ne faisant pas partie de la collectivité.
    Je devrais peut-être demander aux deux premiers témoins ce qu'ils pensent de la loi proposée et de la raison pour laquelle les autres Premières nations semblent si peu intéressées?
    Je n'ai pas examiné la mesure législative proposée, mais revenons à la question de la propriété foncière en fief simple. Vous avez évoqué des questions existentielles et la question du titre ancestral des terres des réserves reconnu par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Garron. À mon avis, beaucoup de Premières nations prennent le tout très au sérieux.
    Il existe, je pense, une distinction fondamentale entre les terres autochtones en milieu urbain et semi-urbain d'une part et les terres autochtones dans les régions éloignées, où vivent la majorité des Premières nations. À vrai dire, celles en région éloignée ne valent pratiquement rien à moins que le sous-sol recèle du pétrole.
    Un cadre législatif n'aurait aucun effet dans ces collectivités rurales. Malgré la Loi sur les Indiens et les cadres juridiques en vigueur, il n'est pas toujours possible de tabler sur les perspectives économiques dans une région éloignée dépourvue d'un secteur industriel. Il vous sera impossible de construire un Walmart dans une réserve éloignée. Il n'y aurait pas suffisamment de clients. C'est souvent le principal facteur.
    Lorsqu'il s'agit de collectivités urbaines et semi-urbaines ou lorsqu'il s'agit de collectivités établies le long d'une route principale facilitant le transport, les questions de propriété et de droits de propriété deviennent plus pertinentes. Cependant, la plupart des Premières nations se trouvent dans les régions éloignées. C'est la principale raison pour laquelle, selon moi, très peu se disent intéressées. Comme mon collègue l'a mentionné, les collectivités avantagées sur le plan géographique sont celles qui, à juste titre, mènent le débat sur cette question.
    Je suis d'accord avec M. Devlin.
    Les questions existentielles portent en fait sur la nature de ces terres et les relations avec le gouvernement fédéral si le modèle de propriété en fief simple était adopté plutôt que...
    Revoyons la définition de « réserve »: parcelle de terrain dont la Couronne est propriétaire et qu’elle a mise de côté à l’usage et au profit d’une bande. Pour de nombreuses Premières nations, il y a va de la confiance du public.
    Outre les aspects financiers, cette confiance du public disparaîtrait si le gouvernement proposait d'adopter la propriété en fief simple. La même question se pose en ce qui concerne la négociation du traité en Colombie-Britannique. C'est pourquoi de nombreuses Premières nations n'acceptent pas un tel modèle lorsqu'elles abandonnent le titre ancestral et que les terres dans leur réserve sont assujetties au modèle de propriété en fief simple.
    Merci beaucoup.
    Nous cédons maintenant la parole à M. Wilks, qui dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également nos témoins. Mes questions s'adresseront tout d'abord à M. Le Dressay.
    Dans sa décision rendue en 2000 dans l'affaire Bande indienne de Musqueam c. Glass, la Cour suprême du Canada a établi que, pour déterminer le juste loyer payable, la valeur courante des terrains de la réserve équivalait à 50 p. 100 de celle d'un terrain analogue situé à l'extérieur de la réserve pour tenir compte des facteurs liés au fait que les terrains font partie d'une réserve.
    Depuis, on s'est servi de cette décision pour justifier la différence entre la valeur courante d'un terrain dans une réserve et celle d'un terrain analogue à l'extérieur d'une réserve.
    Dans le document intitulé « The Financial Impact Of Effective Real Estate Markets on First Nation Lands », on indique que les Premières nations de Westbank et de Kamloops notamment ont mis en oeuvre des systèmes de propriété et des structures de gouvernance favorables au marché pour les projets résidentiels, qui ont fait monter la valeur des terres des réserves jusqu’à un niveau semblable à celui des terres hors des réserves.
    Qu'est-ce qui influence le plus la valeur courante d'un terrain situé dans une réserve: le code foncier, les règlements de zonage ou autre chose?

  (1620)  

    Dans le mémoire que nous vous avons soumis, nous examinons toutes les exigences auxquelles les Premières nations devraient satisfaire en matière de gouvernance. Nous avons divisé le tout en trois.
    Nos conclusions reposent sur les recherches que nous avons menées pour examiner ce qui se passe du début d'un investissement jusqu'à sa fin. Nous avons essayé de déterminer ce qui favoriserait la sécurité et la certitude en ce qui concerne le droit de propriété, l'accès aux services locaux, le coût de ceux-ci et le crédit disponible. Nous avons dressé la liste des lois les plus susceptibles de se révéler efficaces à cet égard.
    La Première nation de Westbank a adopté plusieurs de ces lois. À Sun Rivers, où se trouve notre bureau, la plupart des terrains étaient assujettis à ce qu'on appelle des ententes d'aménagement et de prestations de services municipaux. L'essentiel consiste à fournir une certitude suffisante aux investisseurs, ce qui est tout à fait possible, comme je l'ai mentionné. Cependant, il faut beaucoup de temps et d'argent. C'est pourquoi nous préconisons d'adopter un cadre juridique clés en main, et je le répète de nouveau.
    Lorsque vous accordez aux Premières nations la compétence législative, ce qui est tout à fait conforme au droit des Premières nations à l'autonomie gouvernementale, celles-ci doivent par contre se mettre à la tâche et élaborer ces lois. C'est à peu de choses près comme si on leur donnait une auto en pièces détachées en leur disant: « C'est à vous de l'assembler, et votre économie sera florissante. »
    Nous n'agissons pas ainsi avec les autres ordres de gouvernement au Canada. Nous disons plutôt: « Voici les clés de l'automobile. C'est à vous de prendre les décisions stratégiques pour développer votre économie. »
    C'est pourquoi je suis un ardent défenseur du cadre juridique clés en main.
    Vous avez dit également que l'emplacement est ce qui nuit le plus à la valeur des propriétés foncières. Que proposez-vous pour les membres des communautés éloignées des Premières nations?
    Je vais vous donner une réponse différente. J'espère qu'on arrivera à une piste de solution. Je crois qu'il est toujours préférable d'avoir un certain accès au crédit que de ne pas en avoir du tout.
    J'aimerais prendre un peu de recul. On retrouve trois acteurs dans chaque économie: les gouvernements, les entreprises et les ménages.
    Les gouvernements, comme vous le savez sans doute mieux que quiconque, ont des contraintes budgétaires. Le Trésor a des limites. Les ménages sont limités par leur revenu et leur crédit. Enfin, les entreprises sont limitées par leur capacité de négocier et d'investir.
    Si vous pouvez réduire l'une ou l'autre de ces contraintes, vous améliorez le fonctionnement de ces économies. Même dans des régions isolées, il est préférable d'avoir un certain accès au crédit — pour améliorer les droits de propriété pour les résidents, par exemple — que de n'avoir aucun accès au crédit. Il y a au moins de l'amélioration.
    Comme les deux autres témoins l'ont mentionné, il est possible d'exploiter les ressources. Je crois qu'un autre de vos collègues a également parlé de l'importance de partager les recettes de l'exploitation des ressources sur les territoires traditionnels. Il y a des possibilités pour ceux qui n'ont peut-être pas des avantages comparatifs directs du fait de leur emplacement ou de leur main-d'oeuvre.
    Merci.
    Pouvez-vous décrire brièvement comment les droits de tenure à bail fonctionnent sur les terres des réserves et quels en sont les avantages économiques pour les collectivités des Premières nations?
    Je crois que les droits de tenure à bail à des fins commerciales sont choses courantes, tant sur les terres des Premières nations qu'ailleurs. Avec des droits de tenure à bail à des fins résidentielles, selon la nature de ces fins résidentielles, vous pouvez avoir des valeurs comparables.
    Quant aux propriétés résidentielles à long terme, les gens qui vendent des maisons à Sun Rivers en parlent peu. Il y a de très beaux terrains à Kamloops. Lorsque les gens ont découvert qu'on obtenait une tenure à bail — dans ce cas, c'était un bail de 114 ans parce qu'il y avait une période de développement, puis un bail de 99 ans —, 65 p. 100 des gens ont donné leur consentement et 35 p. 100 s'y sont opposés.
    Je dirais d'abord qu'effectivement, la tenure à bail est un droit de propriété efficace. Est-ce le plus efficace au Canada? Non, pas d'un point de vue résidentiel.
    Monsieur le président, je vais céder le reste de mon temps de parole à M. Payne.

  (1625)  

    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question que je n'ai pas pu poser à M. Gailus
    Je sais que vous vous spécialisez dans le domaine des ajouts aux réserves. Avez-vous des recommandations à faire, en 30 secondes ou moins, sur la façon dont on pourrait améliorer le système actuel?
    Je crois qu'il y aura toujours la possibilité de retard. Je ne crois pas qu'il existe une solution universelle.
    Je parle de proportionnalité. Si vous avez un vendeur consentant... Nous parlons de fief simple, de la Couronne qui achète une terre et la transforme en réserve, et il n'y a pas ces obstacles que posent les intérêts de tiers ou les pourparlers avec la province ou la municipalité. La politique doit régler ces questions, ou encore le fait que de petites superficies sont remises aux réserves.
    En Colombie-Britannique¸ on a eu le règlement des revendications relatives aux terres retranchées. Depuis longtemps, des églises s'étaient approprié des terres, comme dans la circonscription de Mme Crowder. Ces cas prennent autant de temps à régler que les cas où des lignes de transport d'électricité traversent les terres et où vous devez négocier avec la municipalité pour obtenir des services.
    Il faut une politique qui est assez souple pour régler les cas faciles. Il ne s'agit pas d'avoir un processus accéléré, mais de se doter de directives qui nous permettent, dans certains cas, de foncer tête baissée. Il n'est pas nécessaire de suivre les 13 étapes énoncées dans la politique pour que les choses fonctionnent.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Genest-Jourdain pour cinq minutes.

[Français]

    Bonjour, messieurs Devlin, Gailus et Le Dressay.
    J'ai apprécié chacune de vos interventions. J'aimerais néanmoins vous signaler humblement qu'à mon avis, vous avez omis de mentionner un élément qui assure l'avancement socioéconomique au sein d'une communauté, et c'est la thésaurisation des capitaux. Il s'agit en fait de la mise en commun des biens pécuniaires découlant de l'utilisation des ressources, lesquelles sont communautaires et doivent profiter à l'ensemble de la population.
    Pour ma part, je suis natif d'une communauté établie au Nord du Québec, à la frontière du Labrador, et dont le nom est Uashat. Je suis trop souvent témoin d'une chose, dans ces communautés à l'échelle de la circonscription, ainsi qu'à Mamit Innuat. En fait, ce sont les gens d'affaires de la communauté qui bénéficient d'une empreinte réelle et qui s'emparent des ressources naturelles ou établissent leurs commerces sur une parcelle de terre de la communauté. Dans ma langue, on dit que ces gens-là sont minachta, c'est-à-dire qu'ils ne partagent pas. Ultimement, eux-mêmes ou leur propre famille sont les seuls à bénéficier de ces avantages. Ils se soucient assez peu de les redistribuer pour le bien collectif. Dans une communauté qui fonctionnait foncièrement selon un modèle de partage, c'est peut-être là la limite du modèle matérialiste et capitaliste.
    Je vous soumets le tout en souhaitant que vous me fassiez part de vos réactions.

[Traduction]

    Merci de poser cette question.
    J'ai travaillé pour des communautés qui ont l'intérêt commun à coeur et qui refusent d'émettre des certificats de possession à quiconque. Ce sont toutes des terres communales et il n'y a aucun certificat de possession. Aucune terre n'est subdivisée. Par contre, nous avons aussi travaillé pour des communautés dont les terres sont pratiquement toutes subdivisées. Il n'y a presque plus de terres communales, si bien que le développement économique pour la bande devient extrêmement difficile sur l'ensemble de la réserve.
    Partout, il y a des personnes qui profitent des situations dans lesquelles elles se trouvent. Je ne crois pas que ce soit là le sens de votre question. Je crois que vous voulez plutôt savoir ce qui peut être fait légalement. Il est très important de comprendre que d'une province à l'autre et parmi ce qui était autrefois les agences indiennes, les politiques étaient différentes. Dans certains cas, on a fait preuve de négligence, mais, dans d'autres cas, on a essayé de faire des Premières nations de petits fiefs simples de banlieue.
    Chez certaines Premières nations avec lesquelles nous avons travaillé, toute la réserve a été subdivisée en certificats de possession. Par conséquent, certaines personnes qui avaient la chance d'avoir accès à une route dans le cadre de cette subdivision ont pu profiter de leurs certificats de possession, tandis que d'autres, qui avaient des parcelles de terre de même taille, ont vu leurs terrains enclavés, parce que l'agence indienne de l'époque n'autorisait pas la construction de routes. Il y a donc ces iniquités parmi les propriétaires fonciers dans les réserves, mais ces iniquités sont davantage le résultat de ce dont M. Gailus a parlé dans sa déclaration préliminaire, c'est-à-dire les problèmes légués par l'administration de l'ancien ministère des Affaires indiennes.
    Une partie des problèmes maintenant, lorsque ces communautés souhaitent procéder à un développement à grande échelle, consiste à régler ces questions qui n'ont pas été résolues. Dans notre système capitaliste, on ne peut blâmer celui qui a eu la chance d'avoir une terre le long d'une route ou qui a pu acheter le CP de son frère ou de sa soeur et qui en a fait une parcelle sur laquelle se trouve maintenant un McDonald's, une station-service, voire un petit centre commercial ou un grand hôtel. Ces personnes se tirent très bien d'affaire en comparaison avec leur cousin dont la terre est enclavée et qui n'a pas accès à une route. Ce sont des problèmes très difficiles à régler pour les Premières nations.
    Je ne crois pas que les problèmes dont on a hérité puissent tous être réglés par une loi globale. Je crois que vous devez examiner la situation de chaque communauté, l'histoire de ces collectivités et essayer de régler ces problèmes au cas par cas.

  (1630)  

    Il reste environ 10 secondes, si vous voulez ajouter un commentaire, monsieur Gailus.
    M. John Gailus: Pas en 10 secondes.
    Le président: Très bien.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Clarke, pour cinq minutes.
    J'aimerais remercier les témoins de leur présence. C'est fantastique d'avoir quelqu'un qui participe à notre séance par vidéoconférence également, pour témoigner devant notre comité.
    Dans le cadre d'un des exposés, on a dit que les coûts du développement économique sont de quatre à six fois plus élevés pour une Première nation que pour une collectivité non autochtone, et on a parlé aussi des problèmes à surmonter. Au cours des dernières années, plusieurs modifications ont été apportées au contexte juridique, politique et économique des terres de réserve grâce à des mesures législatives d'application volontaire ou optionnelle, comme la Loi sur la gestion des terres des premières nations, qui vise à éliminer les obstacles que pose la Loi sur les indiens au développement économique et à l'investissement dans les réserves.
    Quel a été l'impact de ces mesures sur les initiatives et les perspectives économiques des Premières nations, collectivement et individuellement? Si l'un de vous aimerait tenter de répondre à cette question, allez-y.
    Je crois que cette question m'est adressée.
    Oui.
    La Loi sur la gestion des terres des premières nations, la Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations et la Loi sur le développement commercial et industriel des Premières nations visaient toutes à régler ce problème particulier, à savoir que les coûts liés à la pratique des affaires sur les terres des Premières nations sont trop élevés. Ils sont trop élevés parce que le cadre juridique et administratif ainsi que l'infrastructure qui existe à l'extérieur des terres des Premières nations font défaut. Il faut trouver une façon de combler cette lacune.
    Oui, la LGTPN pourrait être très efficace pour combler cette lacune. Certaines Premières nations l'ont d'ailleurs utilisée dans ce sens.
    J'ai indiqué tout à l'heure qu'on pouvait remédier à ce problème encore plus rapidement avec une partie du cadre juridique qu'offre la LGTPN, si on avait plutôt une approche clés en main pour éviter aux Premières nations d'avoir à élaborer maintes et maintes lois. Elles pourraient simplement disposer de ce cadre juridique pour prendre de bonnes décisions stratégiques et encourager le développement. C'est un élément de la LGTPN qui pourrait être amélioré.
    L'autre chose que j'ai mentionnée au sujet du coût des affaires est la sécurité du droit de propriété. Le coût élevé des affaires sur les terres des Premières nations vient en grande partie de tout le travail que doivent faire les avocats pour que les investisseurs aient un droit de propriété aussi sûr que possible. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il est possible aussi d'atténuer cette contrainte particulière grâce à la loi proposée sur le droit de propriété.
    Toutes ces mesures sont d'application volontaire et optionnelle. Il est extrêmement important pour les Premières nations d'avoir des options et qu'elles puissent s'en prévaloir, si elles le souhaitent, pour faciliter les investissements.

  (1635)  

    Quels facteurs pourraient inciter les Premières nations à opter pour ces divers régimes?
    Bien souvent, ce sera l'occasion qui se présente. S'il y a des perspectives économiques et que ces régimes les aident à profiter de ces occasions, il est plus probable qu'elles adhèrent à ces régimes.
    Parfois, la Première nation voudra confirmer ses compétences et elle saisira cette occasion pour le faire et pour s'affranchir de la Loi sur les Indiens. Vous trouverez ce type de motivation chez certaines Premières nations. Toutefois, ce sera ultimement le leadership qui s'exerce au sein de ces communautés, ainsi que les décisions qui sont prises par la communauté.
    Quels facteurs peuvent avoir un impact sur les résultats du développement économique?
    Les résultats dépendent de votre capacité à créer un climat propice à l'investissement, si l'emplacement est votre principal avantage. Tout dépend de ce qui constitue votre avantage comparatif. Si vous voulez développer votre économie par l'exploitation des ressources, la réponse à cette question est différente. Mais si l'emplacement est votre principal avantage, alors le résultat dépendra de votre capacité à donner une certitude à l'investisseur — pour tirer profit de votre emplacement — en comparaison avec votre voisin, à l'intérieur de votre région.
    Monsieur Devlin, je pense que vous vouliez répondre à l'une de ces questions.
    Oui. Je voulais dire deux choses en réponse à ces questions.
    Voici la première. L'un des coûts économiques provient des problèmes non résolus dont j'ai parlé tout à l'heure. Un de nos clients a adopté un code de gestion de terre d'une Première nation et a passé les trois ou quatre dernières années à essayer de régler certaines questions non résolues. Il n'a pas réussi à aller de l'avant parce qu'il est encore aux prises avec des problèmes et un imbroglio d'intérêts juridiques sur cette réserve qu'a légués l'administration du gouvernement canadien.
    Même si vous avez la loi en place, ou le code en place, vous êtes encore aux prises avec des intérêts juridiques qui n'ont pas été réglés par l'administration précédente. Ces problèmes vous empêchent d'aller de l'avant, même si vous avez un code en place ou autre chose.
    Voici la deuxième chose. Il y a un autre facteur auquel on ne pense pas toujours, à savoir que la taille et la capacité des Premières nations varient énormément. Certaines Premières nations comptent de 5 000 à 10 000 membres. Elles ont donc une bien meilleure capacité pour ce qui est du personnel et des cadres institutionnels nécessaires à l'investissement. Or, dans une communauté de 250 personnes, très peu d'adultes ont une éducation suffisante qui leur permette de jouer un rôle de leadership et de comprendre les régimes juridiques. Le nombre de personnes qui peuvent diriger cette communauté est limité.
    Les perspectives économiques peuvent être bonnes, mais seule une poignée de personnes dans cette collectivité ont la capacité de tout faire — diriger la communauté, administrer le logement et rédiger les lois. Il peut donc être difficile d'exploiter le potentiel économique d'une communauté en raison de sa taille, même si elle se trouve dans un endroit privilégié. Si vous n'avez que 250 personnes, vous avez peu de ressources sur lesquelles vous pouvez compter.
    Merci beaucoup, monsieur Devlin.
    Monsieur Bevington, nous allons maintenant vous donner la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Je vais commencer avec M. Gailus. J'aimerais voir ce que vous connaissez de la capacité du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord pour ce qui est de la gestion des terres, d'après votre expérience. Ce ministère dispose-t-il d'une capacité, d'un personnel suffisant pour procéder à tout l'éventail de changements qui sont requis — les intérêts de tiers qui doivent être analysés pour chaque transaction foncière?
    En bref, non.
    Parlez-nous de votre expérience à cet égard.
    Certainement. Je parle surtout de ma propre expérience personnelle, qui remonte à un certain temps déjà, mais j'ai encore beaucoup de contact avec des gens qui travaillent au ministère. Mon travail vise entre autres les désignations, les ententes de bail et ce genre de choses.
    Selon moi, il y a deux problèmes. Premièrement, les transactions que doit traiter un agent de la gestion et de la location des terres sont de plus en plus complexes. Pour les Premières nations qui ne sont pas visées par la LGTPN ou celles qui sont parvenues à l'autonomie gouvernementale, les transactions peuvent être très complexes et il faut demander l'aide du ministère de la Justice. Les avocats du ministère font partie de ce processus, et vous avez aussi les responsables de la gestion des terres qui traitent de ces questions complexes et qui, bien souvent, ne peuvent les régler en temps opportun.
    Il y a un problème de ressources pour ce qui est des transactions que je fais pour mes clients, par exemple. Mes délais se calculent en semaines, tandis que les délais du ministère et ceux du ministère de la Justice se calculent en mois. L'occasion qui se présentait peut donc nous échapper, compte tenu des retards qu'occasionne cette situation.
    Bien souvent, cet agent peut être débordé et avoir trop de travail, ou bien c'est l'avocat du ministère de la Justice. Il est parfois difficile de dire où le processus achoppe, mais il me semble qu'il n'y a pas assez d'organisations compétentes pour régler ces problèmes.
    Il y a un important roulement de personnel au service des terres. Je peux traiter avec un agent des terres aujourd'hui, et ce sera quelqu'un d'autre demain, et il m'est souvent difficile de mettre cette personne au fait du dossier.

  (1640)  

    Monsieur Le Dressay, lorsque vous dites que les coûts de réalisation d'un projet sont de quatre à six fois plus élevés et que vous parlez de la différence avec les terres situées à l'extérieur des réserves qui sont sous le contrôle d'une municipalité, quelle comparaison pouvez-vous faire?
    Parlez-vous de terrains à l'extérieur des réserves pour lesquels on part de zéro? Est-ce que c'est ce que vous comparez dans votre structure de coûts?
    En fait, dans le cadre de notre étude, nous avons examiné des projets réussis. Nous nous sommes penchés sur la réalisation d'un projet, et les quatre endroits que nous avons examinés étaient Sept-Îles, Siksika, qui est à l'extérieur de — j'essaie de me souvenir du nom de la ville albertaine — Squamish et Kamloops.
    Nous avons examiné quatre projets de Premières nations réussis et quatre projets de collectivités voisines réussis. Nous avons évalué chaque étape du projet — garantie du droit de propriété, négociation de l'accord, etc. Nous avons évalué chaque élément et comparé les coûts, et c'était de quatre à six fois plus long et plus cher. Elles font partie des terres de Premières nations les mieux situées au Canada; vous pouvez vous imaginer à quel point les coûts sont élevés pour d'autres terres.
    Est-ce en bonne partie attribuable au coût de la construction d'infrastructures?
    Dans presque tous les cas, oui, mais une bonne partie des coûts les plus élevés étaient liés à la certitude en ce qui concerne le droit de propriété. Fournir une certitude suffisante aux investisseurs était l'une des différences majeures, et c'est en raison du manque de cadre juridique en général pour les Premières nations.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à M. Rickford, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et je remercie les témoins.
    C'est un peu difficile, car j'ai passé un certain temps à examiner une bonne partie du travail que vous faites tous les trois, et lorsque j'ai réalisé que je n'avais que cinq minutes pour vous poser des questions, j'étais dans tout mes états.
    À cette fin, compte tenu du travail important des trois témoins, je recommande à l'analyste que nous tenions compte d'eux pour la deuxième partie, car il y a beaucoup de travail à faire — et je le dis de façon égoïste — sur certaines questions dont vous avez brièvement parlé dans l'une de vos dernières réponses, Christopher, concernant les petites collectivités et certains des problèmes que présentent les capacités de développement économique, que ce soit sur une réserve ou hors réserve. Le Cercle de feu et les collectivités concernées m'intéressent, de même que la façon dont cela cadrera avec le travail, et j'aimerais connaître vos impressions.
    Pour les deux ou trois dernières minutes qu'il me reste, je veux parler des AR, car on y revient constamment, et je pense que nous aimerions tous qu'il y ait des changements. Le comité sénatorial examine abondamment le sujet. Nous n'avons pas eu l'occasion de nous pencher là-dessus.
    John, je vais vous poser une question brève, qui concerne le processus de trois semaines, le cas d'AR qui s'est peut-être réglé le plus vite dans l'histoire. En environ une minute, pourriez-vous nous dire s'il y a eu une évaluation pour savoir pourquoi et comment cela pourrait être fait en trois semaines, ou était-ce simplement, de prime abord, une situation qui a été rapidement réglée par les tribunaux.

  (1645)  

    Je pense qu'il s'agit de l'affaire Charles c. Conseil de bande de Semiahmoo. Des terres avaient été cédées pour des installations frontalières qui n'ont jamais été construites. La Cour d'appel fédérale a donc rendu une ordonnance et le dossier s'est retrouvé sur mon bureau et on m'a dit, « réglez-le ». Obtenez les 14 ou 16 signatures dont nous avons besoin pour obtenir un décret à ce sujet en un mois.
    Le juge a été très clair. Il a dit qu'il voulait nous revoir dans un mois, que nous négocions la compensation et qu'il fallait que ces terres soient ajoutées aux réserves.
    Y a-t-il eu une évaluation, John? Puisqu'en tant qu'avocats, nous nous retirons habituellement de toute décision ou de tout processus...
    En toute honnêteté, non. Le seul avantage, c'est que c'était déjà des terres de la Couronne fédérale, et nous n'avons donc pas eu à traiter avec la province. Il s'agissait simplement de transférer l'administration et le contrôle des terres de Travaux publics à AINC. Il n'y avait pas d'obstacles liés aux études et, heureusement, nous pouvions utiliser une description légale. Le processus était assez simple.
    J’y reviendrai une autre fois. Je veux poser une question à M. Le Dressay concernant deux choses auxquelles il faut faire attention. Premièrement, j’ai entendu beaucoup de maires dire que le problème, c'est que les administrations municipales, parce qu'elles obtiennent leurs pouvoirs de la province, sont ni plus ni moins sous sa tutelle. C’est ce que nous avons entendu. Il faut donc faire attention lorsque nous faisons des comparaisons, mais j’ai lu avec grand intérêt Comparaison entre l’expansion des limites municipales et les ajouts aux réserves, un document bref, mais clair, qui indique que puisque l’ELM est définie dans une loi, la certitude est plus grande, et par opposition, bien entendu, les AR sont définies dans une politique et sont donc moins clairs. Les critères ne sont pas précis. Les avocats cherchent souvent des évaluations.
    À la page 2, vous présentez une description de pratiques exemplaires. Cela m’intéresse vraiment et je veux vous donner l’occasion aujourd’hui de nous dire si vous pensez que cela s’applique à l’ensemble des AR, indépendamment si c’est pour le développement économique — parce que nous savons que parfois, ce n’est pas le cas. Est-ce un modèle que le comité pourrait examiner, puisque nous tentons de trouver des solutions à cet égard?
    Bien sûr, je soutiens les pratiques exemplaires que nous avons proposées, mais en tant que membres du comité, il vous faut également tenir compte de l'idée de rendre le processus d’AR plus similaire à l’ELM, de se servir d'une partie des pratiques exemplaires relativement à l'expansion des limites municipales. Bien entendu, ce qui rend l'ELM plus simple, c’est qu’on ne change pas d'autorité. C’est en quelque sorte la différence fondamentale entre les deux processus. Comment peut-on faire en sorte que ce changement se fasse plus en douceur?
    L’expansion des limites municipales inclut de bonnes pratiques: bonne planification, bonne communication et bons processus publics pour rassurer les gens touchés par le changement. Toutefois, il y a des aspects juridiques concernant l’harmonisation qui rassureraient aussi ceux qui donnent des conseils juridiques aux gouvernements provinciaux et fédéral, et je pense qu’il y a vraiment une possibilité.
    Je pense donc que l'efficacité des pratiques exemplaires dépend du cadre juridique qui rend les AR possibles et, bien sûr, comme vous l'avez dit, ils sont définis dans une politique.
    Merci beaucoup, monsieur Le Dressay.
    Nous passons à Mme Hughes, qui dispose de cinq minutes.

  (1650)  

    Bonjour, et je vous remercie beaucoup de nous donner votre point de vue.
    Je vais parler d’un aspect un peu différent. J’ai beaucoup de questions à poser, mais je sais que je vais manquer de temps.
    Le comité discute notamment des lacunes en matière d’environnement dans les réserves, qui se traduisent par un affaiblissement de la santé et un niveau inférieur de bien-être des gens de la collectivité.
    De même, nous avons remarqué que le sujet a été abordé dans le rapport d’un institut sur la gouvernance des Premières nations qui vient d’être publié. D’après le rapport, près du quart des adultes autochtones vivent dans des logements surpeuplés et plus de 50 p. 100 vivent dans des maisons contaminées de moisissures. Plus du tiers des adultes ne peuvent pas boire leur eau.
    Quelles sont les répercussions sur la population active et le bien-être économique des collectivités des Premières nations, et quelles solutions recommanderiez-vous concernant les lacunes en matière de santé et d’environnement dans les réserves? Il ne faut pas oublier que cela s’inscrit dans le développement économique. Comme vous le savez, s’il n’y a pas d’infrastructure, peu importe les changements apportés, on ne pourra pas attirer les changements positifs voulus.
    Madame Hughes, est-ce que vous posez la question à une personne en particulier?
    N'importe qui peut répondre.
    Je peux commencer, si vous le voulez. Je serai bref.
    C’est une question complexe. La cause du surpeuplement et des logements inadéquats est vraiment un gros problème en soi. Il y a des problèmes systémiques de logement dans les réserves. Si nous revenons sur ce que M. Le Dressay a dit au sujet de la Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations, et si on améliore les régimes financiers des réserves, il est à espérer que de meilleures pratiques comptables soient adoptées, ce qui permettrait alors aux Premières nations de continuer à obtenir des subventions pour le logement chaque année.
    L’un des problèmes —et je l’ai déjà dit —, c’est que lorsque l’on a de petites collectivités peu instruites, les gens ne comprennent pas comme ils le devraient. Il y a un agent des terres ailleurs dans le pays qui ne s’est jamais rendu dans la collectivité, n’a pas de liens personnels avec elle et dit qu’elle n’aura pas de subvention l’année suivante. La situation des logements se détériore, et des générations de personnes vivent dans des logements.
    De plus, il y a des habitations inférieures aux normes dans les réserves. C’est en partie une lacune réglementaire et un problème de contrat local.
    Si la gestion financière et la réglementation étaient meilleures, le Canada, je l'espère, donnerait plus de ressources pour le logement, et les gens pourraient alors vivre dans de meilleures conditions.
    Je vais m’arrêter ici pour que tout le monde ait la chance de répondre.
    Monsieur Le Dressay, je pense que vous vouliez intervenir aussi.
    Je vais poursuivre dans la même veine que Chris.
    Les Premières nations sont loin d’avoir les mêmes outils de financement que les administrations municipales, qui financent généralement les infrastructures par des sources fixes. Elles ont l’impôt foncier. Elles ont de l’argent en réserve. Les administrations municipales ont recours à des droits d’aménagement ou à quelque chose de similaire. Très souvent, elles utilisent des contributions du secteur privé ou de promoteurs, qui sont un peu différentes, et elles ont recours au financement par débenture. De plus, elles dépendent des transferts des provinces, des territoires ou du gouvernement fédéral.
    Sans le recours à la Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations, les Premières nations n'auraient que deux ou trois de ces moyens de financement. Par conséquent, elles sont loin d’avoir la capacité financière de payer pour l’infrastructure que l’administration municipale a. C’est quelque chose qui pourrait être avantageux pour les Premières nations.
    L’autre question portait davantage sur les problèmes environnementaux. Je présume que le comité étudiera la question. Quel régime en la matière s’applique aux terres des Premières nations? Est-ce une combinaison de pratiques d’évaluation provinciales? Bien entendu, ce devrait être la loi fédérale en matière d’environnement, mais au bout du compte, comment cela se manifeste-t-il sur les terres des Premières nations? Pour éviter les problèmes environnementaux, il est vraiment possible de créer un système de gestion de l’environnement beaucoup plus homogène pour les terres.

  (1655)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Seeback, pour les cinq dernières minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Christopher, je voulais revenir rapidement sur un sujet dont vous avez parlé. Vous avez mentionné brièvement la Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations. Il y a donc deux choses, n’est-ce pas? Il y a aussi l’article 83, qui donne le pouvoir d’imposer des taxes foncières pour les droits de tenure à bail. Il y a aussi la LGFSPN — cela fait beaucoup de lettres.
    Je crois qu’environ 120 Premières nations imposent des taxes foncières dans des réserves et que 79 sont visées par la LGFSPN. Quelles sont les principales différences entre les deux régimes?
    John ou Christopher...?
    Il y a longtemps que j'ai examiné...
    Je pense qu’en fait, M. Le Dressay est probablement le mieux placé pour répondre à la question, mais pour l’essentiel, si une Première nation est régie par la LGFSPN, c’est volontaire, et on adopte un régime de gestion financière beaucoup rigoureux, n’est-ce pas? Aux termes de l’article 83, on adopte un règlement, et c’est tout.
    Le cadre institutionnel en place est plus rigoureux et plus approfondi avec la LGFSPN, et je crois que le ministère incite fortement les Premières nations qui veulent s’engager sur la voie des impôts sur la propriété foncière…
    Une voix: à...
    M. Kyle Seeback: ... à s'assujettir à la LGFSPN.
    Monsieur Le Dressay, voulez-vous intervenir?
    Je le ferai assez simplement, je l'espère.
    Aux termes de la LGFSPN, une Première nation peut avoir une cote de crédit. Ce n’est pas le cas dans le cadre de l’article 83 de la Loi sur les Indiens.
    Il faut se demander pourquoi. La réponse est très simple. La Loi sur les Indiens ne fournissait pas, et de loin, la certitude quant à la réglementation requise pour toute personne qui veut une cote de crédit, tandis que la LGFSPN a tous ces aspects. Une cote de crédit donne accès au capital.
    Encore une fois, et n’importe qui d’entre vous peut répondre, quels sont les principaux avantages économiques d’un régime d’impôt foncier, à votre avis? Je pense que certains sont évidents, mais d’autres le sont moins.
    Puis-je répondre en premier?
    M. Christopher Devlin: Certainement.
    M. John Gailus: Oui.
    M. André Le Dressay: Il y a un ouvrage récent... Si l'on fait exception de l'auteur de Freakonomics, Steven Levitt, il est plutôt rare qu'un économiste accède à la notoriété. Ce fut le cas pour deux de nos collègues qui ont rédigé Why Nations Fail, un ouvrage où ils analysent la situation de différents pays du monde. Ils en sont arrivés à la conclusion suivante:
Pour prospérer, un État doit pouvoir garantir la protection des droits de propriété et assurer un lien étroit entre le régime d'imposition local et les services offerts à la communauté pour la majorité des citoyens.
    Après avoir étudié la conjoncture dans différents pays de la planète, ils ont donc conclu qu'un développement économique efficace doit passer par la protection des droits de propriété et de bons systèmes d'imposition foncière dans les cadres desquels les citoyens sont disposés à payer leurs taxes pour recevoir en échange des services de qualité. J'estime donc que l'impôt foncier joue un rôle crucial dans le développement économique. Pour les citoyens, c'est le régime qui présente le lien le plus manifeste entre imposition et services, d'autant plus que les services en question ont pour effet d'accroître la valeur de leurs propriétés. Ainsi, l'impôt foncier peut être un outil extrêmement précieux pour améliorer la situation économique des Premières nations.
    M. Kyle Seeback: Monsieur Gailus.
    Je suis d'accord en tous points avec ce que dit M. Le Dressay.
    Il y a un aspect qui est souvent négligé lorsqu'il est question de développement économique. Ainsi, une Première nation disposant d'un régime d'imposition foncière, que ce soit en vertu de la LGFSPN ou de l'article 83 de la Loi sur les Indiens, peut s'en servir, surtout si elle se trouve en milieu urbain et à proximité d'une municipalité, pour attirer des entreprises en fixant un taux d'imposition plus bas, par exemple.
    On ne parle guère de cette possibilité, mais c'est assurément une suggestion que nous faisons à nos clients en leur indiquant qu'il pourrait être préférable pour eux de miser sur des taux d'imposition concurrentiels par rapport aux municipalités avoisinantes afin d'attirer des entreprises.
    J'ajouterais une dernière chose en soulignant encore une fois que l'imposition foncière n'est pas une panacée. Comme pour tous les éléments dont nous discutons, c'est la localisation qui peut prévaloir. Nous avons des clients dans l'arrière-pays. Ils pourraient bien instaurer un régime d'imposition foncière, mais ils ne feraient qu'imposer leurs propres membres et personne d'autre. Alors, même avec toute la sécurité que procure un régime foncier et une assiette fiscale, cela ne leur donnerait rien de plus.
    Même la TPSPN peut être difficile à faire passer dans les collectivités rurales où il n'y a pas vraiment... Cela devient en fait un simple transfert d'argent, plus souvent qu'autrement, et même une telle mesure n'est pas nécessairement facile à accepter pour les collectivités éloignées. Alors, plus vous êtes rapprochés d'un centre urbain ou semi-urbain, plus un tel régime peut être avantageux pour le développement économique.

  (1700)  

    Je crois vous avoir entendu affirmer très clairement que vous recommandez à vos clients le régime de la LGFSPN, plutôt que celui de l'article 83.
    M. Christopher Devlin: Oui.
    Merci beaucoup, monsieur Seeback.
    Je pense que nous allons revenir à M. Genest-Jourdain qui a une brève question.

[Français]

     Monsieur Le Dressay, comprenez-vous bien le français? Recevez-vous l'interprétation?

[Traduction]

    Ma mère en serait bien heureuse.

[Français]

    Vous avez un prénom et un nom de famille francophones.
    Dans votre intervention, vous avez parlé de la ville de Sept-Îles comme d'un exemple de réussite. Je me trompe peut-être, mais quoi qu'il en soit, vous vous êtes déplacé sur le terrain. Je me demande si on a porté à votre attention le fait que le taux de suicide dans la réserve de Uashat-Maliotenam, tout près de la ville de Sept-Îles, est le plus élevé de la province, et même du Canada. Aussi, plus de la moitié des adultes sont dépendants de l'aide sociale et il y a des problèmes sociaux qui dépassent l'entendement, notamment la dépendance des jeunes aux drogues dures. Cela commence vers l'âge de 9 ans ou de 10 ans.
    Est-ce que cela a fait partie de votre analyse du succès sur le plan économique et de l'élévation socioculturelle et économique?
    Je vous cède la parole.

[Traduction]

    Notre étude a été menée en 1998 en lien avec l'arrivée d'un magasin Sobey's comme principal locataire d'un centre commercial et les différentes retombées qui s'ensuivaient. Comme vous le savez, la communauté dont vous nous parlez jouxte la municipalité de Sept-Îles. Ce fut pour nous l'occasion de comparer le temps nécessaire pour réaliser un projet semblable à Sept-Îles, par rapport à la réserve de Uashat.
    Pour ce qui est des indicateurs socioéconomiques, notre étude portait principalement sur les coûts associés à la réalisation de ce projet.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Un grand merci pour cet éclaircissement.
    Je vais profiter de ma prérogative de président pour vous poser une question. C'est au sujet du pouvoir de désignation préalable au statut de réserve. Dans certaines provinces, on peut procéder à des désignations semblables pour permettre aux Premières nations d'amorcer des projets sur des terres qui seront annexées dans le cadre du processus d'ajout aux réserves.
    Je me demandais si l'un d'entre vous a déjà mené une analyse pour déterminer si ce processus permet vraiment d'accélérer le soutien au développement économique dans les cas où le processus d'ajout aux réserves s'éternise. J'aimerais aussi savoir si vous avez effectué une analyse comparative entre les gouvernements qui permettent des servitudes sur les terres visées par les ajouts aux réserves, par rapport à ceux qui exigent que ces terres soient totalement libérées avant d'être annexées à la réserve?
    Êtes-vous en mesure de nous dire si nous devrions formuler une recommandation en faveur de la désignation préalable au statut de réserve et à la possibilité d'amorcer des projets avant que le processus ne soit terminé ou concernant l'acceptation des servitudes dans le cadre de l'ajout aux réserves?
    Je pense que je peux répondre.
    J'ai pris de petites notes. Je crois que c'est autorisé dans certaines provinces des Prairies. Il s'agit de terres assujetties à des droits fonciers issus de traités.
    À mon avis, on peut certes accélérer les choses en procédant parallèlement au processus d'ajout à la réserve, plutôt que de façon séquentielle. On nous a parlé du processus de désignation et des retards qui peuvent y être associés, car il faut souvent tenir deux votes étant donné qu'une double majorité est exigée. Il m'apparaît très logique de tenir un vote avant que le statut de réserve soit octroyé et de cheminer parallèlement avec deux décrets distincts.
    Je veux vous dire d'expérience... Revenons en arrière. Pour ce qui est des servitudes préalables au statut de réserve pouvant être converties en intérêts en vertu de la Loi sur les Indiens une fois le statut de réserve octroyé, il y a deux décrets qui vont de pair, le 11 et 12 par exemple.
    Je pense qu'il serait judicieux de recommander pour ces terres lorsque l'on doit composer avec des servitudes, à savoir s'il faut octroyer des intérêts fédéraux... J'en ai certes eu l'expérience avec un des processus d'ajout aux réserves qui faisait l'objet d'une revendication particulière. Il y avait des servitudes et nous avons dû négocier pour les terres visées des baux en vertu de la LIF, qu'on appelle aujourd'hui la LIFDRF. Il fallait tenir compte de ces servitudes dans le processus d'ajout à la réserve. Nous ne les avons pas converties en intérêts en vertu de la Loi sur les Indiens. Il s'agissait simplement de baux fédéraux visant ces terres. Selon moi, c'est certes une recommandation que votre comité pourrait formuler, en tout cas assurément pour les secteurs dont on a détecté le potentiel économique et où ce processus pourrait être mené à terme.

  (1705)  

    Vous avez parlé de double majorité. Je me demandais si vous aviez des suggestions à ce sujet, si vous estimez que la double majorité est nécessaire ou si vous pensez qu'on pourrait réduire les exigences dans le cas de l'ajout aux réserves afin d'éviter les obstacles pouvant découler de l'impossibilité de tenir les deux votes requis.
    Selon moi, le processus de désignation est problématique sous deux aspects, dont celui de la double majorité requise. Cela fait partie des conséquences imprévues de l'arrêt Corbiere qui portait sur les élections dans les réserves. À la suite de cette décision, les exigences relatives à la désignation ont été mises à jour. Ainsi les membres à l'extérieur de la réserve ont pu participer au processus et être pris en compte dans le cadre de la double majorité.
    L'un des problèmes, comme on peut le constater également lors des élections générales, c'est le taux de participation qui se situe à 30 ou 40 p. 100 des membres. Le ministère pourra vous fournir ces chiffres, mais je suis persuadé que c'est le cas pour les nations visées par l'article 74, celles qui tiennent leurs élections en vertu de la Loi sur les Indiens.
    Les votes des citoyens qui ne se donnent pas la peine de participer au scrutin après avoir reçu leur trousse par la poste sont comptabilisés comme des abstentions, et un second vote devient nécessaire. Il va de soi que le processus de désignation doit demeurer en place. Je pense que ses origines remontent à la Proclamation royale et sans doute avant cela. Ce n'est pas quelque chose qui va disparaître.
    Il faudrait toutefois chercher à déterminer si 50 p. 100 plus 1 est le seuil qui convient pour établir le quorum. Selon les principes du droit des sociétés, quel est le quorum requis pour un vote?
    Le second problème découle de l'affaire Hill, je crois. La cour a indiqué que l'approbation du ministre ou du sous-ministre était requise, lorsqu'un second vote est nécessaire. Cela donne lieu à une situation plutôt étrange. Alors qu'un agent régional à Vancouver, par exemple, celui avec lequel on transige le plus souvent, a pu signer l'avis pour le premier référendum, il faut passer à travers toute la bureaucratie pour obtenir du ministre ou du sous-ministre l'autorisation de tenir un second scrutin.
    J'ai été surpris de voir que le MAINC n'interjetait pas appel de cette décision, car une simple modification législative aurait suffi pour préciser que la personne qui a approuvé le premier vote peut faire de même pour le second.
    C'est une situation vraiment frustrante avec laquelle j'ai dû composer à quelques reprises.
    Nous sommes conscients que votre travail sur le terrain vous permet de bien comprendre la situation. Merci pour ces précisions.
    Nous en sommes arrivés à la fin de la liste des intervenants.
    Je remercie grandement nos témoins de leur participation. Comme certains de mes collègues l'ont indiqué, je suis persuadé que nous ferons encore appel à votre expertise. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd'hui. Merci énormément.
    Chers collègues, nous aurions quelques points à régler concernant les travaux du comité.
    Je vous ai distribué un document qui est en fait un extrait des lignes directrices concernant les relations entre la presse et les députés. Certaines questions à ce sujet ont été soulevées devant le Comité de l'éthique. Vous verrez qu'il y a au deuxième paragraphe des indications générales quant aux prises de vue rapprochées des documents et au fait que nous ne sommes pas autorisés à permettre aux représentants des médias d'avoir accès aux documents en notre possession.
    Nous demandons donc aux membres des comités de bien vouloir respecter ces exigences convenues entre les médias et les députés. Je n'en étais pas moi-même conscient avant que la question soit soulevée devant le Comité de l'éthique. J'ai jugé important de communiquer l'information à mes autres collègues.
    Par ailleurs, nous ne devrions pas tenir de séance jeudi de cette semaine, car nous serons sans doute encore en train de voter en Chambre. Nous en avons avisé les témoins prévus. Nous ne voulions pas les faire déplacer pour qu'ils doivent ensuite rentrer bredouilles. Je voulais simplement vous en informer.
    Merci beaucoup.
    Encore une fois, un grand merci à nos témoins.
    La séance est levée.
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