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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 033 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 26 avril 2012

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Français]

    A l'ordre, s'il vous plaît. Nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Aujourd'hui, le 26 avril 2012, c'est la séance no 33. Conformément à l'article 108 du Règlement, nous étudions la situation des droits de la personne en Birmanie ou Myanmar.

[Traduction]

    Nous accueillons aujourd'hui des témoins du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Greg Giokas et Lisa Rice Madan, tous deux de la Division de l'Asie du Sud-Est et de l'Océanie. Nous accueillons aussi Jeff Nankivell et Leslie Norton, de l'ACDI.
    À la fin de la séance, après les témoignages, nous avons quelques travaux à huis clos, notamment un compte rendu que je dois faire de ma récente visite à notre comité principal.
    Normalement, les exposés durent une dizaine de minutes. Je vais dire une évidence: plus nous consacrons de temps aux exposés, moins il en reste pour les questions. Nous adapterons la durée des questions en divisant le reste du temps en six parties égales.
    Mme Sgro essayait d'attirer mon attention. Mes excuses. Ce sera ensuite M. Marston.
    Je remplace aujourd'hui M. Cotler, retenu par la maladie. J'ai une autre séance où je dois me rendre, à l'étage, où je devrai me rendre, après quoi je reviendrai. Nous avons le quorum. Je voulais m'en assurer. Je vais devoir partir une dizaine de minutes et j'espère revenir pour le reste de la séance.
    Merci.
    Monsieur Marston.
    À la fin de la séance, je vais devoir partir parce que j'ai une déclaration à faire à la Chambre.
    Très bien.
    À l'étape des travaux du comité, il n'y a pas de votes. Il s'agit d'un rapport que nous avons à faire rapport. Au besoin, nous pourrons peut-être nous retenir ici les uns les autres. En fait, vous savez probablement déjà en quoi les travaux consistent.
    Passons aux témoins. Je crois savoir que M. Giokas, du MAECI, prendra la parole en premier. Monsieur, je vous invite à présenter votre exposé.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir invité à m'adresser à vous aujourd'hui.
    Je suis responsable de la Direction générale de l'Asie du Sud et du Sud-Est et de l'Océanie au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Cela englobe les directions chargées des relations bilatérales du Canada avec la Birmanie.

[Traduction]

    Le ministre des Affaires étrangères, John Baird, était en Birmanie le 8 mars 2012. II s'agissait de la première visite officielle d'un ministre des Affaires étrangères du Canada dans ce pays. II a dit que le Canada espérait que les progrès accomplis à ce jour se poursuivent et mènent à d'autres réformes. II a ajouté: « Nous surveillerons tout particulièrement les élections partielles du 1er avril. »
    Le 24 avril 2012, le ministre Baird a annoncé que le Canada suspendrait certaines de ses sanctions contre la Birmanie, qui comptaient parmi les plus dures du monde.

[Français]

    Permettez-moi d'abord de brosser un bref tableau de la situation en Birmanie. Celle-ci a servi à orienter la politique canadienne au cours des dernières décennies.

[Traduction]

    La Birmanie est un pays de près de 60 millions d'habitants, situé au carrefour de l'Asie, à la frontière de l'Inde, de la Chine et de la Thaïlande. La majorité birmane est largement bouddhiste, mais le gouvernement reconnaît 135 races nationales qui appartiennent, de manière générale, à sept grands groupes ethniques. Ces groupes se concentrent surtout dans les régions frontalières au relief accidenté et représentent ensemble environ 40 p. 100 de la population du pays, bien qu'ils occupent jusqu'à 60 p. 100 de son territoire.
    La Birmanie a environ la même superficie que l’Alberta, mais son territoire comprend près de 2 000 kilomètres de côtes et de nombreuses îles dans la mer d'Andaman. Le pays, colonie britannique jusqu'à la fin des années 1940, a la chance de posséder d'abondantes ressources naturelles, y compris du bois, des pierres et des minéraux précieux ainsi que des ressources énergétiques comme des gisements de gaz naturel et un potentiel hydroélectrique.
    Malgré cette abondance, en raison de décennies de conflits, principalement dans les régions frontalières à majorité ethnique, et d'un régime militaire répressif, le peuple birman compte parmi les plus pauvres de la région. Selon les derniers chiffres publiés par le PNUD, la Birmanie se classe au 141e rang sur 187 pays selon l'Indice du développement humain. II s'agit du pays le moins développé de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est. L'espérance de vie moyenne y est d'à peine plus de 65 ans.

  (1310)  

[Français]

    Depuis plus de deux décennies, la situation des droits de la personne en Birmanie suscite constamment des préoccupations. Cela comprend des questions telles que la répression de manifestants, la détention de prisonniers politiques et de sévères restrictions aux libertés fondamentales, y compris la liberté de presse, la liberté d'expression et la liberté de réunion. De plus, il est bien établi que des membres du régime militaire birman ont commis de manière systématique des violations flagrantes au chapitre des droits de la personne contre des civils, plus particulièrement contre des membres de minorités ethniques, y compris le travail forcé, des exécutions extrajudiciaires et des violences sexuelles.
    Au fil des ans, le Canada a toujours dénoncé ouvertement la situation des droits de la personne en Birmanie en faisant connaître ses préoccupations à ce sujet par les voies bilatérales toutes les fois où cela était possible, y compris dans des enceintes internationales telles que l'Assemblée générale et le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. S'agissant des préoccupations précises que nous avons soulevées, il convient de mentionner la détention de centaines de prisonniers politiques, des affrontements ainsi que des violations dans des régions peuplées par des minorités ethniques.

[Traduction]

    Face à ces violations des droits de la personne et des libertés fondamentales, le Canada, de concert avec d'autres pays occidentaux, a imposé une série de sanctions diplomatiques et économiques et d'autres mesures contre ce pays. Cela comprend la suspension de l'aide publique au développement, l'interdiction d'y exporter des armes, l'ajout à la liste des pays visés, son exclusion de l'Initiative d'accès aux marchés pour les pays les moins avancés et enfin, en 2007, une interdiction globale des importations, des exportations et des investissements en application de la Loi sur les mesures économiques spéciales.
    Ces sanctions visaient à bloquer tous les échanges commerciaux avec la Birmanie, sauf pour ce qui est des exportations de marchandises à des fins humanitaires telles que des vivres ou des médicaments expédiés par suite d'une catastrophe naturelle, sauf si le ministre des Affaires étrangères délivre une licence d'exportation spéciale. En conséquence, en 2011, la valeur des échanges avec la Birmanie s'élevait à environ 60 000 $, pour ce qui est des importations, et à un peu plus de 800 000 $ pour les exportations, principalement des instruments médicaux.
    Dans ce contexte, j'aimerais maintenant faire le point sur les changements les plus récents en Birmanie.
    En novembre 2010, le pays a organisé ses premières élections générales depuis 20 ans. Aung San Suu Kyi était alors toujours assignée à résidence, et son parti a boycotté le scrutin, mais un certain nombre d'autres partis d'opposition y ont participé. Le ministre canadien des Affaires étrangères et d'autres membres de la communauté internationale ont critiqué le processus électoral, qu'ils considéraient comme entaché de nombreuses irrégularités et, de toute évidence, ni libre ni équitable.
     Aux termes de l'actuelle constitution birmane, 25 p. 100 de tous les sièges au Parlement sont réservés à des députés nommés par le régime militaire. Le parti associé au régime, le Parti de la solidarité et du développement de l'Union, a remporté une majorité écrasante de 76,5 p. 100 des autres sièges en jeu.
    Le nouveau Parlement s'est réuni pour la première fois au début de 2011 et l’investiture d'un nouveau gouvernement civil, dirigé par le président Thein Sein, a eu lieu au printemps de la même année. Cela représentait l'aboutissement du plan d'action pour la démocratie élaboré par le régime militaire.
    Depuis, le gouvernement birman s'est engagé, de manière remarquable, sur la voie des réformes, ce qui s'est déjà traduit par une amélioration de la situation des droits de la personne, et il a promis de prendre d'autres mesures en ce sens. Au printemps de 2011, un petit nombre de prisonniers politiques ont été libérés dans le cadre d'un processus plus général d'amnistie. Mais surtout, plus de 200 prisonniers ont été libérés en octobre 2011. Et, en janvier 2012, 650 autres ont été libérés, y compris plusieurs dissidents et personnalités politiques bien connus.
    Quelques jours avant les élections de 2010, l'assignation à résidence d'Aung San Suu Kyi a été levée. À ce jour, sa sécurité et sa liberté de mouvement dans le pays sont pour l'essentiel protégées contrairement aux occasions antérieures, ou elle avait été libérée brièvement, mais avait continué à être victime de harcèlement, pour finalement être arrêtée de nouveau.
    En août 2011, et une fois de plus en avril de cette année, elle a rencontré personnellement le président. De même, elle a rencontré à plusieurs occasions d'autres hauts responsables du gouvernement. Elle a déclaré publiquement que, selon elle, le président était sincèrement déterminé à engager des réformes.
     Par suite de changements aux lois électorales du pays, à la fin 2011, son parti a décidé de se réinscrire et, en définitive, de participer aux élections partielles qui se sont tenues le 1er avril 2012. Ces élections partielles visaient à combler 48 sièges dans les assemblées nationales et d'État, devenus vacants l'année dernière par suite de nominations au Conseil des ministres, car les ministres birmans ne peuvent continuer à siéger en tant que députés.
    Les élections partielles dans trois circonscriptions de l'État de Kachin ont été annulées et un candidat de la Ligue nationale pour la démocratie a été déclaré inéligible dans une autre. Malgré cela, la ligue a remporté 43 des 44 sièges mis aux voix, Aung San Suu Kyi ayant elle-même présenté sa candidature et remporté un siège pour la première fois. II s'agit là d'un tournant historique, même si la ligue n'occupe que 7 p. 100 des sièges au Parlement.

  (1315)  

    Les autres progrès comprennent la signature d'accords de cessez-le-feu entre le gouvernement et la plupart des groupes ethniques armés. Des affrontements entre le gouvernement et ces différents groupes se poursuivaient par intermittence depuis des décennies, et avaient éclaté dans l'est de la Birmanie après les élections de 2010, de sorte que de nouveaux cessez-le-feu constituent un changement salutaire. Ils doivent maintenant être suivis de pourparlers et d'accords de portée plus générale à l'appui de la paix et de la réconciliation. À cet égard, nous nous réjouissons de constater que le gouvernement semble vouloir engager le dialogue.
    Ces changements et plusieurs autres donnent à penser que la Birmanie commence enfin à adopter une orientation plus démocratique et porteuse d'espoir. Toutefois, plusieurs préoccupations subsistent. On croit en effet qu'un nombre important de prisonniers politiques, probablement des centaines, sont toujours détenus. Le Canada continue d'exhorter le gouvernement birman à libérer sans condition tous les prisonniers politiques encore détenus. Malgré des cessez-le-feu dans d'autres régions, les combats se poursuivent dans l’État de Kachin, et des organisations de défense des droits de la personne continuent à faire état de pratiques telles que la pose de mines sur des terres appartenant à des villageois, le recrutement d'enfants-soldats et de personnes forcées de servir de porteurs, et des violences, y compris des violences sexuelles, contre des civils. Qui plus est, les organisations humanitaires internationales ont beaucoup de mal à accéder aux régions touchées par des conflits. Dans son rapport le plus récent, publié en mars 2012, le rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme au Myanmar, Tomás Quintana, a salué les changements constructifs en Birmanie, mais a appelé l’attention sur plusieurs autres domaines nécessitant des améliorations importantes, y compris le traitement des prisonniers, la conformité de certaines lois et de certaines dispositions de la Constitution aux normes internationales des droits de la personne, et la réforme du système judiciaire.

[Français]

    Je serai heureux de répondre à vos questions sur la situation en Birmanie et sur la politique du Canada à l'égard de ce pays.

[Traduction]

    Je serai heureux de répondre à vos questions sur la situation en Birmanie et la politique du Canada à l'égard de ce pays.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup. L'exposé a duré exactement le temps qu'il fallait. Je contrôle toujours ce genre de chose. Vous avez pris 10 minutes et 15 secondes, ce qui est aussi près de la perfection qu'on peut raisonnablement l'espérer.
    Je présume, monsieur Nankivell, à vous voir remuer vos papiers, que vous faites l'exposé au nom de votre organisme.
    Très bien. Allez-y.
    Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité.
    Je vous remercie de l'invitation à comparaître cet après-midi. Je suis heureux d'être parmi vous. En ma qualité de directeur général régional de l'Asie à la Direction générale des programmes géographiques, je suis responsable de la mise en oeuvre des programmes de développement bilatéraux de l'ACDI en Asie, à l'exception des programmes pour l'Afghanistan et le Pakistan. Ma collègue, Leslie Norton, directrice générale de l'assistance humanitaire internationale à la Direction générale des programmes multilatéraux et mondiaux, est responsable des programmes d'aide humanitaire internationale de l’ACDI.

[Français]

    En Birmanie, les défis en matière de développement sont importants. En effet, selon le Rapport mondial sur le développement humain 2011 des Nations Unies, la Birmanie se classe au 149e rang des 187 pays répertoriés, selon un indice composite mesurant le revenu par habitant, l'espérance de vie et la scolarisation. Dans les régions frontalières où perdurent les conflits entre l'armée nationale et des groupes ethniques non étatiques armés, il est prouvé que la pauvreté a atteint un niveau considérablement supérieur à la moyenne nationale en Birmanie. En plus de freiner le développement socioéconomique à long terme dans les régions touchées, ces conflits de longue date ont entraîné un déplacement généralisé de la population à l'intérieur de la Birmanie et une migration au-delà de la frontière du pays.

  (1320)  

[Traduction]

    De 1950 à 1988, le Canada a offert à la Birmanie une aide publique au développement évaluée à 100 millions de dollars. Cette aide est allée aux secteurs de l’agriculture, de la foresterie, de la santé et du développement industriel, et parfois à l’aide alimentaire.
     À la suite du massacre perpétré en 1988 par l'Armée birmane contre des manifestants qui s'exprimaient en faveur de la démocratie, le Canada a suspendu son aide bilatérale au développement en Birmanie. En 2007, il a instauré des sanctions plus sévères par l'application de son Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Birmanie. Aux termes de ces sanctions, seules les organisations ayant obtenu un permis spécial auprès du ministère des Affaires étrangères pouvaient fournir une aide au développement autre qu'une aide humanitaire.
    Bien que l’allégement des sanctions lève cette contrainte quant à l'apport d'une aide bilatérale au développement à long terme en Birmanie, le Canada n'a pas actuellement de programme de développement bilatéral en Birmanie et ne fournit aucune aide publique au développement directement à son gouvernement.
    Les sanctions canadiennes permettaient de fournir une aide humanitaire aux personnes touchées par une crise en Birmanie. Comme elle le fait ailleurs dans le monde, l’ACDI fournit une aide humanitaire en fonction des besoins et en réponse aux appels lancés par les organisations humanitaires d'expérience des Nations Unies, le Mouvement de la Croix-Rouge et les ONG canadiennes.
     En Birmanie, l'ACDI a fourni une aide humanitaire aux personnes touchées par les catastrophes naturelles, les conflits, et le statut d'apatride. Entre les exercices financiers 2009 et 2011, elle a offert à la Birmanie une aide humanitaire évaluée à environ 29 millions de dollars. De cette somme, 25 millions de dollars ont été versés à la suite du cyclone Nargis, qui a frappé le sud de la Birmanie en mai 2008, faisant 140 000 morts et touchant gravement 2,4 millions de personnes. Cette somme comprend 11,6 millions de dollars que le gouvernement du Canada a fournis grâce à un fonds mis en place pour égaler les dons de charité versés par des Canadiens à la suite de la catastrophe.
    L'appui de l’ACDI a permis aux organisations humanitaires d'obtenir de bons résultats tels que la fourniture d'aide alimentaire de survie à environ un million de personnes, des matériaux pour des abris d'urgence pour plus de 350 000 familles et des articles essentiels de secours et produits d'hygiène à plus de 800 000 personnes.

[Français]

    L'aide humanitaire que l'ACDI a fournie à la Birmanie au cours des exercices financiers 2011 et 2012 comprenait une somme de 3,5 millions de dollars allouée au Programme alimentaire mondial des Nations Unies. Grâce à ces fonds, en 2011, le PAM a pu fournir dans l'État de Rakhine un panier mensuel de denrées alimentaires pendant la saison creuse, qui dure six mois, à 70 000 ménages particulièrement vulnérables. Il a aussi encouragé 113 000 élèves à rester sur les bancs d'école en leur offrant une ration de riz chaque mois.

[Traduction]

    Depuis 1988, l'ACDI fournit une aide aux migrants, aux réfugiés et aux Birmans déplacés par l'entremise d'une approche « d'assistance dans les régions frontalières ». Le programme actuel, qui se nomme le Programme d'assistance dans les régions frontalières de la Birmanie, sera mis en oeuvre jusqu'en 2015 par Inter Pares, une organisation non gouvernementale canadienne, et il est doté d'un budget de 15,9 millions de dollars sur cinq ans.
    Ce programme fournit des vivres, du combustible et des abris à environ 145 000 réfugiés dans les camps en Thaïlande, de même que des soins de santé à 500 000 Birmans déplacés qui vivent dans des régions frontalières. Je signale la présence parmi nous aujourd'hui de membres d'Inter Pares.
    Dans le cadre de ce programme, grâce au soutien de l’ACDI, plus d'un million de cas de paludisme, d'infections respiratoires aiguës, de tuberculose et de malnutrition sévère ont été traités. En outre, ce programme aide à améliorer la capacité de plus de 50 organisations de la société civile de consulter, de consigner et de diffuser des renseignements sur les droits de la personne, y compris les droits des femmes et la viabilité de l’environnement.
     C'est avec plaisir que ma collègue, Leslie Norton, et moi-même répondrons à vos questions, avec nos collègues des Affaires étrangères.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Très bien. Il nous reste 26 minutes, ce qui n'est pas divisible par 6. Nous allons donc donner à chacun 6 minutes, dans l'espoir qu'il nous reste 2 minutes pour des réponses particulièrement intéressantes.
    Nous commencerons par M. Hiebert.

  (1325)  

    Merci à tous d'être ici. Je vous sais gré de votre présence et de l'information que vous avez fournie
    Je voudrais savoir pour commencer s'il y a eu un progrès parallèle en ce qui concerne les autres libertés, notamment la liberté de la presse, comme complément des réformes que le gouvernement de la Birmanie a entreprises pour réformer la démocratie.
    Les signes sont très prometteurs, mais il reste à voir comment au juste les choses évolueront d'ici un ou deux ans. Le fait est qu'il y a eu des élections convenables et qu'Aung San Suu Kyi qui, par le passé, ne pouvait être vue dans des photos ou images publiques, ni être entendue dans des déclarations... Ses photos pavoisaient le pays tout entier, elle a pris la parole en public et elle s'est présentée aux élections. C'est une première étape importante.
    Au cours des 18 derniers mois, on a commencé à débloquer Internet. Au dernier compte, 30 000 sites Web avaient été débloqués. Twitter et Facebook, ce genre de chose. On libère donc les réseaux sociaux pour permettre les communications à l'interne, par exemple.
    Plus de 200 publications, surtout dans le domaine sportif et le divertissement peuvent paraître, mais les informations sont toujours soumises à une censure. Quant à savoir si la censure est complète ou non, c'est une autre question. C'est le genre de chose que nous voulons examiner au fur et à mesure.
    Comme vous le savez, le ministre a annoncé la suspension des sanctions, mais il a ajouté que nous étions disposés à les rétablir si la situation le justifiait. Voilà où nous en sommes.
    Selon une information de presse aujourd'hui, le président annonce qu'il proposera une nouvelle loi sur la radiodiffusion. La première loi du pays sur les médias est en voie d'élaboration et elle sera probablement mise en vigueur d'ici la fin de l'année.
    [Note de la rédaction: inaudible]
    Là encore, nous verrons. L'évolution se fait dans la bonne direction sur bien des fronts, mais la situation est difficile. Comme mon collègue et moi l'avons signalé, le pays est appauvri. Il est sous régime militaire depuis des dizaines d'années. Il a été coupé d'une grande partie du monde. Il y a beaucoup à faire. Il faudra doser avec soin le développement des différentes libertés nécessaires dans une société démocratique et libre, qui est la base de la prospérité économique, tout en garantissant une certaine prospérité économique pour que les gens aient l'assurance de bien gagner leur vie pendant que s'opère la transformation.
    Monsieur Giokas, j'ai remarqué dans votre déclaration d'ouverture qu'il y a eu des élections complémentaires le 1er avril, mais qu'au moins trois des élections dans l'État de Kachin, dans le Nord, ont été suspendues. Elles l'ont été à cause de la violence, si je comprends bien. Nous avons également entendu parler de persécutions religieuses soutenues, de l'incendie d'églises et d'autres incidents dans cette région. Pourriez-vous nous donner une idée de ce qui se passe dans différentes enclaves du pays? La situation générale est favorable, mais il subsiste des inquiétudes particulières au sujet de certaines régions, comme celles des musulmans Rohingya, dans le Sud.
    Tout à fait. C'est une chose qui nous inquiète. Il y a des zones d'insurrection, de conflit, notamment du côté des Kachins. Il est difficile de vous donner une évaluation directe, car nous n'avons pas encore sur le terrain des gens qui peuvent se rendre dans ces régions et faire enquête. Cela se rattache à l'ouverture que nous espérons. Nous espérons aborder des questions comme celles-là avec le gouvernement de Birmanie.
    Sur le plan de la liberté religieuse, il y a indéniablement des sujets d'inquiétude. La Birmanie figure aussi sur la liste américaine des pays où les libertés religieuses sont menacées.
    La réponse brève à la question est une répétition des raisons pour lesquelles nous suspendons l'application des sanctions et voulons suivre de près l'évolution de la situation afin de prodiguer des encouragements, mais aussi de veiller à ce que les choses se passent dans le respect des règles et en tenant compte comme il se doit des préoccupations qui ont justifié les sanctions au départ.

  (1330)  

    Avez-vous une idée du nombre de prisonniers politiques qui sont toujours en captivité? Avec la levée des sanctions, qui est une récompense pour un bon comportement, gardons-nous une certaine influence ou un certain engagement, dans les circonstances? Les Birmans obtiennent la liberté d'accès à nos marchés, à nos exportations, mais nous reste-t-il de l'influence pour aider à faire libérer ces prisonniers et favoriser d'autres réformes?
    Autant que nous puissions comprendre, et c'est dans une grande mesure une évaluation, une estimation, il y a des raisons de s'inquiéter des prisonniers de conscience ou des prisonniers politiques toujours détenus. Il pourrait y en avoir des centaines même un millier, d'après nous, mais il s'agit d'estimations.
    La vraie question, et c'est sans doute ce pour quoi nous sommes ici aujourd'hui, est de savoir ce que nous pouvons faire pour encourager, faciliter et soutenir le développement et l'évolution de la démocratie. La suspension des sanctions nous permet d'aborder ces questions. Perdons-nous de l'influence ou en obtenons-nous davantage? Nous ne le savons pas encore. Mais l'enthousiasme que le monde, que les Canadiens ont manifesté, que nos alliées et les gens de ces pays ont manifesté pour l'ouverture de la Birmanie aux principes démocratiques, pour l'adoption apparemment sincère de ces principes, appuyée par des mesures qui témoignent de la volonté d'appliquer des lois démocratiques, d'accepter le débat au Parlement... Pour la première fois, les ministres répondent à des questions sur les sujets fondamentaux que sont l'atténuation de la pauvreté et les principes de la liberté et de la justice. Les Birmans font les bonnes choses. Il faut encourager cette évolution, et nous espérons établir des contacts pour prodiguer des encouragements plus appuyés.
    Merci.
    Monsieur Marston, à vous, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous. Avant les élections, lorsque nous avons appris que 159 observateurs seraient admis dans le pays, nous avons senti comme une vague de changement sur de nombreux fronts. À nos yeux, il s'agit d'un changement très important.
    Ma question porte sur les dernières élections et ce qui s'est passé sur le terrain et dans les bureaux de scrutin. Selon les comptes rendus, les élections se sont-elles déroulées de façon assez libre, loin du niveau d'intimidation observé par le passé? N'importe qui peut répondre; je ne m'adresse à personne en particulier.
    La réponse brève est oui, il y a eu des sujets d'inquiétude. Aung San Suu Kyi en a souligné elle-même. Apparemment, des personnes décédées ont été inscrites sur la liste des électeurs, par exemple.
    On pourrait parler de divers aspects du processus électoral dans chacune des circonscriptions, mais, à bien des égards, le résultat est éloquent. S'il y a eu fraude électorale de quelque importance par ceux qui avaient intérêt à pratiquer cette fraude, ils ont certainement échoué. Nos observateurs sur le terrain disent que les choses se sont assez bien passées, mais ils n'avaient pas un droit d'accès suffisant; ils ont observé plus qu'ils n'ont surveillé. Le processus n'a pas été vraiment examiné de façon très détaillée par des spécialistes de l'observation des élections.
    La réponse simple à la question, c'est que les résultats sont éloquents.
    Des pays qui ont une bien meilleure réputation que la Birmanie ont encore aujourd'hui beaucoup de problème d'élections. Par rapport au traitement réservé aux gens par le passé, nous devons admettre qu'il y a eu une évolution très sérieuse.
    Dans la documentation à notre disposition, je remarque que, parmi les 16 minorités ethniques, sept n'ont pas signé de cessez-le-feu. Je crois qu'il faut être très optimiste à ce sujet. Avez-vous des renseignements sur les raisons pour lesquelles elles ne l'ont pas fait? Quelles sont les chances qu'elles le fassent?

  (1335)  

    Nous avons toujours espoir, bien sûr. Nous avons remarqué que le gouvernement civil ne contrôle pas forcément les militaires. Il a ordonné l'application de cessez-le-feu, mais certains de ses ordres n'ont pas été respectés.
    La question fondamentale à laquelle nous revenons sans cesse, ce sont les raisons qui poussent le gouvernement birman à agir comme il le fait. Il obéit essentiellement à ses propres intérêts. Nous sommes disposés à accorder de l'aide, mais il a ses propres intérêts et, d'après ce qu'il dit, c'est ce qui le motive. Il sait qu'il doit gérer des tensions ethniques dans le pays. Il agit donc sur ce front. La réussite dépendra de l'attitude des groupes en cause, dont certains ont leurs propres problèmes à régler. Il y a eu néanmoins des progrès. Nous espérons qu'il y en aura encore, et nous croyons que le gouvernement birman souhaite faciliter le progrès en prenant un grand nombre de mesures judicieuses. Mais il n'a pas encore un contrôle total.
    Comme nous le verrons peut-être dans d'autres réponses au cours des échanges, je signale qu'il y a un problème énorme de capacité. Les Birmans vont de l'avant résolument avec des réformes qu'ils n'ont pas vraiment les moyens d'appliquer correctement. C'est l'un des enjeux majeurs qui peuvent faciliter ou entraver l'évolution vers la prospérité et la sécurité, vers des relations paisibles et harmonieuses en Birmanie.
    Nous avons aussi le problème de ceux qui ont fui leur pays et vont vouloir rentrer. Ce sera un autre lourd fardeau. Pour ce qui est de la carotte et du bâton, le bâton semble avoir donné des résultats. Ce sont les sanctions qui nous ont menés là. Je ne crois pas que quelque indication permette de dire que les militaires auraient apporté ces changements s'ils n'y avaient pas été contraints.
    Dans l'examen périodique récent de l'ONU, après la visite du rapporteur spécial, on signale les mauvais traitements infligés aux personnes interrogées. Y a-t-il quelqu'un du ministère ou de l'agence qui a pris part à cet examen périodique pour représenter le Canada? Non? Le gouvernement doit normalement s'appuyer sur des gens comme vous pour avoir des conseils. Il me semble que, si on veut examiner la situation dans un pays, il faut avoir une assez bonne information générale pour faire le travail.
    Le processus des examens périodiques de l'ONU nous permet de faire des observations, mais nous n'avons pas participé directement à cet examen-ci.
    Je voulais savoir si nous y avions pris part ou s'il y avait des fonctionnaires que nous pourrions contacter, car cela nous donnerait un point de vue différent. La documentation qui sert à votre travail serait une excellente source d'information pour le comité.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Marston.
    Ce sera maintenant M. Sweet.
    On ne s'étonnera pas que j'appuie la position du gouvernement, qui a décidé de lever les sanctions. L'Union européenne a fait la même chose. Les États-Unis ne l'ont pas encore fait. Ils ont rappelé la situation qui persiste.
    Je suis très favorable, très enthousiaste devant ce qui se passe, bien sûr. Nous nous réjouissons tous qu'Aung San Suu Kyi soit non seulement libre qu'elle ait aussi pu se faire élire. C'est extraordinaire. Mais il reste de la place pour un peu de cynisme. Ces élections ont été âprement disputées, mais libres et justes, d'après ce que nous avons pu observer. Elles portaient sur seulement 10 p. 100 des sièges, les ministres ne pouvant rester députés.
    Je me demande si cela ne doit pas calmer l'enthousiasme devant cette évolution. Je pose cette question dans un esprit positif, dans l'esprit de ce que tout le monde ressent devant la tournure des choses en Birmanie ou au Myanmar.
    Chose certaine, compte tenu des échéances électorales, c'est en 2015 que les élections générales doivent avoir lieu.
    Cela donne un point de repère vraiment utile des deux points de vue. Cela amène aussi le gouvernement birman à comprendre que ces élections seront observées de très près, et ce sera un contrôle correct effectué non par de simples observateurs, mais par des gens capables d'exercer une solide surveillance.
    Acceptons oui comme réponse pour l'instant, partons de là et voyons jusqu'où nous pouvons aller, mesurons les progrès pour tous les éléments importants qui sont favorables et qui doivent se manifester. Mais le pays aura besoin d'un renforcement de ses capacités.
    Notre ministre a exprimé de l'intérêt pour les échanges parlementaires ou les contacts avec le gouvernement birman. Il a dit publiquement que ce serait un bon point de départ d'établir des contacts non seulement avec les partis d'opposition, mais aussi avec des membres du gouvernement. Qu'est-ce que c'est, être député dans une démocratie qui fonctionne? Comment gérer les nombreuses tensions et pressions, les exigences et les différentes pressions sociales qui s'exercent?

  (1340)  

    À dire vrai, il y a également un lien avec le problème des capacités et le fait qu'il faut beaucoup de réformes. Au fond, l'histoire, les institutions, l'expérience démocratiques ne sont pas au rendez-vous. Les Birmans ont besoin de mentors et de repères pour progresser.
    Autre chose. On entend dire depuis la Birmanie qu'Aung San Suu Kyi et son parti ont de réelles réserves au sujet du serment d'office qu'il faut prêter. Cela m'amène à une autre question que j'avais à poser. Le gouvernement birman a-t-il donné quelque indication voulant qu'il soit disposé à aborder à long terme la question des 25 p. 100 des sièges réservés aux militaires? Pour nous, c'est tout à fait contraire à la démocratie. Ce n'est vraiment pas ainsi que fonctionne une démocratie constitutionnelle. Avez-vous eu des indications du gouvernement birman à cet égard?
    Ce que nous avons, ce sont essentiellement des documents publics et des informations de presse. Le président Thein Sein se trouvait au Japon lorsque la question a surgi et, selon les informations, il n'était pas à l'aise pour discuter du serment que les députés doivent prêter pour accéder au Parlement.
    Depuis, la position a un peu évolué et il semblerait qu'un élément de solution viendra sous peu. Honnêtement, vu de loin, cela ne semblait pas nécessairement le meilleur enjeu à aborder dès le départ, mais c'était une question importante. Le problème qui préoccupe les nouveaux députés, c'est la constitution, qui réserve 25 p. 100 des sièges aux militaires. Pour modifier la constitution, il faut l'appui des trois quarts des députés. Cet appui n'est pas là. Avec le temps, il faudra le mobiliser pour modifier cet élément de la constitution.
    Pour l'instant, je dirais qu'il s'agit dans une grande mesure d'une question interne à laquelle nous attachons un vif intérêt, mais si les Birmans veulent se doter d'une démocratie qui fonctionne, ils devront aborder ces questions de façon démocratique. Ce n'est pas la conception la plus attirante de la démocratie, mais elle n'est pas inusitée dans bien des pays où il y a eu des coups d'État, où les militaires ont pris le pouvoir ou bien là où les militaires participent beaucoup à la gouvernance. Il faut bien des années, des dizaines d'années pour en sortir. C'est là une manifestation très claire et concrète de ce problème. C'est ce que prévoit la constitution: 25 p. 100. C'est obligatoire. On voit donc clairement ce qu'il convient de changer.
    Quant à la question du serment, nous espérons qu'elle se réglera sous peu.
    Vous avez raison. Nous posons ces questions depuis la cité d'Émeraude, avec des siècles de démocratie derrière nous. Il est certain que nous voulons examiner ces indicateurs.
    J'ai aussi une question à poser au sujet des ONG. C'est un autre moyen d'évaluer la situation. Obtiennent-elles maintenant un meilleur accès?

  (1345)  

    Je crois savoir qu'oui. Jeff pourra peut-être en dire un peu plus. Nous croyons que les ONG internationales, notamment, peuvent travailler dans les domaines où elles veulent agir, mais de façon limitée. Selon nos informations, il y a généralement un bon soutien pour l'action dans les domaines de la santé et de l'aide humanitaire, et les organisations peuvent travailler.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Sgro, soyez bien à l'aise pour poursuivre.
    Merci beaucoup.
    Il est agréable que vous accueillir parmi nous aujourd'hui.
    Dans le même ordre d'idées, à propos des préoccupations au sujet des capacités et de notre immense désir que les choses continuent d'évoluer favorablement... En ce qui concerne les capacités, quels sont les moyens dont les Affaires étrangères ou l'ACDI disposent pour aider à atteindre l'objectif ultime? Quels sont les moyens que le ministère ou l'agence possèdent pour apporter aux Birmans l'aide dont ils ont besoin pour progresser?
    Je vais en parler très brièvement, après quoi je céderai la place à mon collègue, qui a aussi un peu d'information à donner, je crois, sur le fonctionnement des ONG.
    Nous aurons une mission à partir de notre ambassade à Bangkok et un fonctionnaire ou deux qui viendront d'Ottawa pour voir quels programmes nous pourrions envisager. Nous avons appliqué quelques programmes modestes à l'extérieur de la Birmanie, bien sûr. Mais il est temps de considérer ce que nous pouvons faire au moyen des mécanismes existants pour apporter un soutien.
    Généralement, le Canada arrive à faire pas mal de choses avec les moyens qu'il a. Je dirais donc que nous avons un bon point de départ. Nous avons des capacités dans des domaines qui intéressent les Birmans. Le premier élément dont le ministre a parlé, ce sont les contacts parlementaires, l'échange d'information et le soutien.
    Le ministère s'occuperait de cet aspect. Je cède la parole à mon collègue de l'ACDI.
    Merci.
    D'abord, j'ajouterai quelque chose à la réponse de mon collègue à la question de l'accès pour les ONG. Grâce à ses programmes d'aide dans les zones frontalières, l'ACDI a une toute petite lucarne qui lui donne un aperçu de la vie en Birmanie. Nous travaillons indirectement avec plus d'une cinquantaine d'ONG établies en zone frontalière, dans les pays voisins, surtout en Thaïlande, mais aussi ailleurs. Certaines relatent des faits anecdotiques qui indiquent une amélioration dans la capacité d'action. Certaines ont des gens qui vont en Birmanie et en reviennent. Certaines organisations du secteur des médias que nous appuyons disent que leurs sites Web ne sont plus bloqués en Birmanie. Elles peuvent voir d'où sont les visiteurs sur les sites, et il y a une indéniable augmentation du nombre de visites de lecteurs en Birmanie. C'est réconfortant.
    Par ailleurs, l'accès est une question vraiment importante pour quiconque veut apporter de l'aide en Birmanie, notamment dans les régions frontalières et là où il n'y a pas eu d'accord de cessez-le-feu. Il est très difficile de rejoindre les populations de ces zones-là. Le plus souvent, il s'agit de minorités dites ethniques, et il est très difficile de les joindre depuis l'intérieur de la Birmanie. Il peut aussi être difficile de le faire depuis l'extérieur du pays.
    Des faits anecdotiques donnent à penser qu'il y a eu des changements clairs au cours des six derniers mois, mais il reste des difficultés énormes à surmonter.
    Quant à la capacité d'apporter de l'aide, l'ACDI suit de très près l'évolution de la situation en Birmanie. Les changements qui ont eu lieu sont réconfortants. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, nous avons donné une aide humanitaire, et nous avons aussi apporté de l'aide aux personnes déplacées et aux réfugiés dans les zones frontalières.
    Pour l'instant, l'ACDI n'instaure pas de programme bilatéral en Birmanie. Nous observons attentivement la situation. Nous avons en Asie du Sud-Est du personnel qui a des contacts avec d'autres organismes donateurs: les agences de l'ONU et les institutions financières internationales, la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement, et des pays comme le Royaume-Uni, l'Australie et les États-Unis. Nous communiquons avec eux pour savoir ce qu'ils font, mais, comme M. Giokas l'a dit, la capacité du Canada d'intervenir sur le terrain est extrêmement limitée pour l'instant.

  (1350)  

    Quelles mesures le gouvernement birman doit-il prendre pour donner au monde l'assurance qu'il est vraiment dans la voie des réformes?
    Il doit plus ou moins mettre en place ce dont il parle. Il ne s'est pas limité aux beaux discours. Il a joint le geste à la parole. Très souvent, dans des situations semblables, on fait des déclarations pour satisfaire les auditoires étrangers, mais les gestes concrets vont à l'encontre de l'intention réelle ou présumée des déclarations. Le gouvernement semble faire ce qu'il dit, soit mettre en place des éléments démocratiques dans les institutions et libérer les médias et la population.
    Il doit régler beaucoup de conflits aux frontières, trouver une issue. C'est un élément clé. Il fait des efforts, mais il doit persévérer. J'imagine qu'il faudra en arriver à un contrôle civil plus acceptable de toutes les institutions de gouvernement.
    Il y a aussi le développement économique. C'est sur ce plan que les sanctions ont probablement agi. Les autorités voudront attirer des investissements. Elles voudront créer de l'emploi, susciter de l'activité économique pour la population. Sans cela, il est probable que tout le reste sera difficile. Il faudra donc développer l'économie, et c'est là que l'expertise, la technologie, l'innovation et les aptitudes de l'Ouest seront commodes. Pour que tout cela réussisse, il faudra mettre en place les mécanismes voulus.
    Dans l'état actuel des choses, il faudrait une société courageuse et audacieuse pour investir dans ce contexte. L'infrastructure fait cruellement défaut. Il n'y a à peu près aucune téléphonie cellulaire, si bien que les communications sont difficiles. Le gouvernement a été contrôlé par les militaires qui, pendant un certain temps, garderont des liens personnels et matériels avec les infrastructures importantes et le développement en Birmanie. Il faudra travailler à un ensemble d'institutions et à une architecture propres à attirer les investissements dont les autorités auront besoin pour créer de la prospérité dans le pays.
    Toutes ces choses-là vont de pair avec le développement de la démocratie. Si on nie les libertés fondamentales des gens, on ne les laisse pas libérer leur capacité d'innovation non plus. Si on les laisse libérer leur capacité d'innovation tout en évitant les émeutes dans les rues, il faut leur donner des emplois rémunérés ou leur faire sentir qu'il y a des débouchés, de l'espoir, un avenir pour eux et leurs familles.
    Voilà où nous en sommes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Van Kesteren, s'il vous plaît.

  (1355)  

    Merci de comparaître. Il est agréable de vous accueillir.
    Jeff, je suis curieux. Comme vous le savez, les efforts de l'ACDI sont concentrés surtout en Afrique, mais nous discutons des moyens de nous associer aux industries pour développer l'aide. Je crois que nous vous avons accueillis à l'une de nos séances récemment.
    Nous venons d'entendre qu'il n'y a pas beaucoup d'activité industrielle, mais qu'en est-il du microfinancement? Y a-t-il des possibilités? Nous savons que, lorsque la Birmanie commencera à émerger de cette période sombre, son industrie et son commerce... Cela a souvent été le meilleur moyen d'aider d'autres pays.
    Y a-t-il des possibilités de microfinancement? Est-ce qu'on a commencé à l'offrir? En ce moment, l'ACDI s'occupe-t-elle de cette question en Birmanie?
    L'ACDI ne s'occupe pas de cela en Birmanie, car elle n'a pas de programme bilatéral dans ce pays, et elle n'en met aucun en place.
    En ce qui concerne les autres pays donateurs et les organisations multilatérales, nous croyons savoir qu'en matière d'aide au développement, étant donné les très faibles capacités du pays, la pauvreté et les besoins sur le terrain, ces organisations s'occupent des besoins élémentaires en matière de santé et d'éducation. Elles aident à régler les problèmes d'eau et d'hygiène et à lutter contre les maladies infectieuses. Il faut s'attaquer à ces problèmes d'urgence.
    Il ne fait aucun doute que la voie de l'avenir, pour le développement économique de pays comme la Birmanie, c'est de commencer par le développement à la base, et le microfinancement joue un rôle critique à cet égard. Il serait prématuré de spéculer au sujet de ce que cela peut vouloir dire pour l'ACDI. C'est l'une des choses que nous examinons, comme vous l'avez appris au cours d'autres séances. C'est une chose que nous envisageons partout dans le monde lorsque nous considérons les difficultés du développement économique et d'une croissance économique durable.
    Peut-être pourrais-je m'adresser directement aux Affaires étrangères.
    Vous avez dit qu'il faudrait une société courageuse pour s'établir en Birmanie en ce moment. Y a-t-il des entreprises canadiennes qui ont des activités en Birmanie à l'heure actuelle?
    Aucune. Les sanctions ont été très efficaces.
    N'y a-t-il aucun changement à cet égard en ce moment? Y aura-t-il des débouchés lorsque les sanctions seront levées?
    Bien sûr. Des sociétés canadiennes pourraient maintenant s'intéresser à la Birmanie, étudier les possibilités économiques, les possibilités d'investissement. Le ministre n'a annoncé la suspension des sanctions que cette semaine.
    Qui a comblé le vide, lorsque la plupart des sociétés de l'Ouest se sont retirées?
    La Chine, la Thaïlande et l'Inde aussi, jusqu'à un certain point.
    Le pays a d'abondantes ressources minières. Il y a aussi du gaz, et il y a des gisements qui... Aux termes des sanctions américaines et européennes, les droits des sociétés déjà actives là-bas ont été protégés. Chevron a poursuivi ses activités. La française Total est la présence occidentale la plus importante en Birmanie. Nous croyons qu'elle y a une centaine d'employés. Ce n'est pas très important comme présence étrangère dans le secteur pétrolier et gazier.
    C'est le résultat des sanctions. Il n'y a pas beaucoup d'activité économique. Il y a des investissements provenant d'un nombre restreint de pays qui ont des intérêts précis, qui sont aussi leurs intérêts propres. Le pays finit par avoir besoin de ce type d'activité économique, et il fait attention aux moyens de l'attirer. C'est pourquoi nous croyons, d'après tout ce que nous avons appris jusqu'à maintenant, que nous assistons à un effort très sincère d'ouverture du pays aux institutions démocratiques pour assurer la prospérité et à la stabilité à la population.

  (1400)  

    Il vous reste une minute.
    Vous avez dit tout à l'heure que vous encouragiez les parlementaires à se rendre là-bas. Le ministère des Affaires étrangères a-t-il songé à des missions à cet égard? Est-il possible d'envoyer une délégation là-bas? Est-ce une chose que vous avez envisagée?
    Pas encore. L'annonce du ministre, l'intérêt qu'il a manifesté pour des contacts avec le Parlement birman, tout cela est très récent.
    Puis-je utiliser les dernières secondes pour revenir sur mes autres questions?
    Nous avons observé des progrès extraordinaires dans le pays sur le plan des réformes démocratiques, et je tiens à le reconnaître. Mais je veux aussi revenir brièvement sur ce qui se passe dans l'État du Kachin, car c'est tout à fait unique. L'armée birmane a rompu un cessez-le-feu de 17 ans. Elle est très active. Selon les informations de Human Rights Watch, elle y a envoyé des bataillons.
    Je me demande pourquoi. Alors qu'il y a ces avancées des réformes démocratiques dans le reste du pays, il y a une intensification tragique de la violence et du conflit dans l'État du Kachin, dans le Nord. Y a-t-il un rapport avec les ressources naturelles qui s'y trouvent? Avec l'influence de la Chine, à propos d'un pipe-line transnational dans la région? Qu'en pensez-vous?
    Je ne peux vous livrer que de simples réflexions, littéralement, car nous n'avons pas de réponses concrètes à beaucoup de ces questions. Ce sont là autant d'excellentes questions que nous devrons poser au gouvernement birman: que se passe-t-il? Un élément important des progrès à accomplir, ce sera de comprendre clairement pourquoi cela se produit toujours, ce qu'il faut faire pour y mettre un terme et assurer une plus grande stabilité sociale dans cette région qui est riche en ressources. Il y a là-bas un groupe ethnique avec lequel le gouvernement birman a eu et continue d'avoir des difficultés.
    Alors que la paix s'établit, que des progrès sont enregistrés, que l'enthousiasme surgit et que des pays sont prêts à établir des contacts, nous nous demandons toujours ce qu'il faut faire pour mettre un terme à ce conflit.
    Ce sera maintenant M. Jacob.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Giokas ou à Mme Rice Madan.
    Dans votre déclaration d'ouverture, vous avez dit ce qui suit:

Dans son rapport le plus récent, publié en mars 2012, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme au Myanmar, M. Tomas Quintana, a salué les changements constructifs en Birmanie, mais a appelé l'attention sur plusieurs autres domaines nécessitant des améliorations importantes, y compris le traitement des prisonniers, la conformité de certaines lois et de certaines dispositions de la Constitution avec les normes internationales des droits humains, et la réforme du système judiciaire.
    En 2011, dans le cadre du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, le Canada a fait des recommandations très précises au gouvernement du Myanmar concernant les forces de l'ordre, la formation nécessaire en matière de droits de l'homme, l'interdiction d'employer des mines antipersonnel, la coopération en vue de laisser circuler librement dans tout le pays l'information sur la situation des droits de l'homme, les normes visant à limiter les restrictions aux libertés fondamentales d'expression, de réunion, d'association, de presse et de religion ainsi que la réforme du système judiciaire. On recommandait aussi d'enquêter sans tarder sur les exécutions extrajudiciaires, l'enrôlement d'enfants soldats, les actes de torture, les sévices sexuels, le travail forcé ainsi que l'esclavage, et de libérer immédiatement les détenus qui étaient emprisonnés uniquement en raison d'activités politiques pacifiques, de leur appartenance ethnique ou religieuse.
    Est-ce que ces recommandations sont toujours pertinentes en 2012?
    Oui, elles le sont toujours à certains égards. C'est exactement la question que nous posons pour pouvoir suivre le développement démocratique et social de ce pays. Il reste que, grosso modo, les instances législatives ont fait du bon travail depuis environ un an. Ces gens ont aussi créé une commission nationale sur les droits de l'homme. Le rôle judiciaire est toujours un peu difficile, mais les autorités semblent également prêtes à considérer des améliorations dans ce domaine. La constitution de 2008 comporte des dispositions sur les droits fondamentaux des citoyens. On peut citer une série d'éléments qui donnent de l'espoir dans la mesure où on y note des progrès. Cependant, quand on regarde la liste des attentes du Canada, par exemple, on voit qu'elle est vraiment longue.
    On a été surpris par la volonté qui a été exprimée et par la capacité de traduire cette volonté par des actes. C'est la raison pour laquelle les sanctions du Canada et d'autres pays sont maintenant suspendues. Il y a un désir et une volonté de s'engager de façon productive envers ce pays, et ce, à plusieurs niveaux.

  (1405)  

    Il semble donc que les bottines suivent les babines, comme on le dit en bon français. On présume qu'il s'agit là de bonne foi.
     Je sais que le Canada, l'Europe et les États-Unis, notamment, font preuve d'ouverture face à la bonne foi que semble démontrer concrètement ce pays, mais concernant la réalisation de ces recommandations et l'amélioration de ces droits, y a-t-il des délais précis?
    Pas exactement. Il faut dire que ce processus impliquant le gouvernement en est à ses débuts. Il faudrait discuter de tout cela et déterminer quels sont les normes, les étapes, les éléments mesurables et ainsi de suite.
    Cependant, comme nous l'avons constaté plus tôt dans le cadre de la séance d'aujourd'hui, des élections sont prévues pour 2015. Or, pour assurer non seulement le bien-être du pays, mais aussi notre confiance à l'égard des développements et des progrès que ce pays veut réaliser, il va falloir que des améliorations mènent à des élections générales et que, cette-fois-ci, elles soient libres et justes. Le fait de viser cet objectif, afin de travailler ensemble et de réaliser les améliorations nécessaires pour que des élections mènent le pays à une deuxième étape de développement, est profitable autant pour le gouvernement birman que pour nous.
    J'aime l'expression « travailler ensemble ».
     Merci, monsieur le président. Je n'ai plus de questions à poser.

[Traduction]

    Parfait. Six minutes pile.
    Merci beaucoup. Nous remercions les témoins d'avoir comparu.
    Le temps file, et nous avons quelques questions à boucler concernant les travaux du comité. Je vous remercie tous, et je vous invite à vous retirer pour que nous puissions siéger à huis clos.
    Merci beaucoup. Nous allons suspendre la séance brièvement pour que les gens puissent se retirer.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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