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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 014 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 25 mars 2014

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour tout le monde. Je déclare ouverte cette 14e séance du Comité permanent du patrimoine canadien. À l'ordre du jour, nous procédons à l'examen de l'industrie canadienne de la musique.
    Aujourd'hui, nous accueillons pendant la première heure Alain Lauzon, de la Société du droit de reproduction des auteurs compositeurs et éditeurs du Canada, la Sodrac. De Connect Music Licensing, nous entendrons Victoria Shepherd. Nous entendrons aussi Brad Keenan, le directeur de l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, et de Faber Drive, David Faber.
    Nous avons donc trois groupes différents, et chacun aura droit à huit minutes. Je m'en tiendrai à l'ordre du jour et nous commencerons donc avec M. Lauzon. Vous avez huit minutes, monsieur.

[Français]

    Monsieur le président, je suis très heureux de représenter la SODRAC ici aujourd'hui. Je tiens à vous remercier de votre invitation à participer à l'examen de l'industrie canadienne de la musique.
    Une société de gestion collective comme la nôtre est, avant tout, un outil économique de défense des droits que se sont donnés collectivement les auteurs, les compositeurs et les éditeurs. Les redevances que perçoivent les sociétés de gestion collective au Canada, et partout ailleurs dans le monde, pour l'exercice des droits consentis aux créateurs par les différentes lois sur le droit d'auteur représentent souvent leur seule source de revenus. Nous ne le dirons jamais assez, ces redevances sont la base de leur rémunération. Elles sont leur unique salaire.
    Les représentants des associations professionnelles de musique, dont les membres sont les premiers bénéficiaires des programmes de soutien gouvernementaux, seront sans aucun doute beaucoup mieux placés que nous pour répondre à vos questions sur le degré d'atteinte des objectifs du gouvernement relativement à son soutien. Cependant, le fait que le gouvernement ait confirmé la permanence de ses programmes de soutien à l'industrie est une très bonne nouvelle. Mon intervention portera donc davantage sur les effets des changements technologiques sur la création, la distribution et la consommation de la musique au Canada, ainsi que leurs conséquences pour les auteurs, les compositeurs et les éditeurs que nous représentons.
    Voici d'abord quelques statistiques qui décrivent la situation et les enjeux de l'industrie. Comme vous le savez, depuis plus de 10 ans, l'industrie de la musique — particulièrement celle de la musique enregistrée — a été la première et la plus durement touchée par le passage au numérique partout dans le monde. Le Canada n'a pas fait exception. Selon les statistiques de Music Canada pour la période de 2001 à 2012, publiées par la Fédération internationale de l'industrie phonographique, ou IFPI, la valeur des revenus pour la musique enregistrée sur support physique est passée de 765 millions de dollars en 2001 à 217 millions de dollars en 2012. Cette décroissance représente une perte de revenus cumulée de plus de 3,147 milliards de dollars.
     Quant au numérique, il n'a commencé à vraiment générer de revenus qu'en 2004, pour atteindre 196 millions de dollars en 2012, avec des revenus cumulés de 787 millions de dollars. Le marché canadien de la musique enregistrée a donc essuyé une perte nette de 2,380 milliards de dollars de 2001 à 2012. Pour le marché francophone du Québec, la décroissance est du même ordre, toute proportion gardée, bien que la baisse des ventes se soit amorcée avec quelques années de décalage.
    En 2012, le Canada occupait le 7e rang du marché mondial de la musique enregistrée avec une valeur totalisant 454 millions de dollars. Cette somme se divisait comme suit: la musique enregistrée sur support physique 48 %, le numérique 43 %, les droits d'exécution 7 % et les droits de synchronisation 2 %. À l'échelle mondiale, selon le Digital Music Report 2014 que l'IFPI vient tout juste de publier, les ventes de musique enregistrée ont progressé de 0,8 % en 2013, avec une augmentation des ventes numériques de 4,3 % pour atteindre une proportion de 39 % des revenus globaux de l'industrie. En fait, actuellement, le numérique représente plus de 50 % des ventes dans seulement trois des 10 plus gros marchés mondiaux. En ce qui a trait au numérique en 2013, 67 % était du téléchargement et 33 % de la lecture en transit, ou streaming.
    Quelles sont les perspectives du marché au Canada au cours des prochaines années? Les statistiques démontrent qu'en 2010 le marché de la musique enregistrée a atteint un plancher au Canada et qu'après plus d'une décennie de décroissance sa valeur a commencé à augmenter. Dans une étude publiée en 2013, le Futuresource Consulting estime que cette progression devrait se poursuivre jusqu'en 2014 et, par la suite, régresser de 1 % à 2 % par année jusqu'en 2017. À ce moment-là, le numérique devrait représenter 78 % des ventes et la musique enregistrée sur support physique 22 %. On voit que le numérique a provoqué des changements dramatiques dans l'industrie de la musique. Une multitude de nouveaux modes de diffusion des oeuvres s'offre maintenant aux consommateurs, mais dans le marché actuel, les sources de redevances qui, avant, permettaient à bon nombre de créateurs d'exercer décemment leur art ne suffisent plus à assurer leur subsistance.
    En ce qui a trait aux nouveaux modèles de distribution numérique qui ont émergé, nous savons maintenant que le téléchargement ne pourra combler les baisses des ventes de musique enregistrée sur support physique.

  (1105)  

    Nous savons également que pour ce qui est des modes de distribution des oeuvres fondés sur l'accès en ligne, que les revenus générés proviennent des abonnements ou de la publicité, ceux-ci ne sont pas des modèles économiques viables pour les créateurs.
    Actuellement, l'accessibilité sans précédent aux oeuvres musicales que permettent les services et les technologies numériques est un élément clé de la richesse de l'offre aux consommateurs et de la prospérité des intermédiaires que sont les fournisseurs d'hébergement, les fournisseurs d'accès, les moteurs de recherche, etc. Toutefois, bien que ces intermédiaires doivent surtout leur réussite économique à l'accès aux oeuvres qu'ils fournissent, la chaîne de transmission des retombées financières n'assure pas un partage adéquat avec les créateurs dont les redevances ne cessent de diminuer. Une juste contrepartie pour l'exercice des droits d'auteur est essentielle à notre culture parce qu'elle assure la vitalité de la création. Et cela doit rester vrai dans l'environnement numérique.
    Par conséquent, nous croyons qu'il faut maintenant instaurer un véritable équilibre entre le milieu de la création, les intermédiaires numériques et les consommateurs. En adoptant de nouvelles mesures pour favoriser la création, la croissance économique et le rayonnement des oeuvres musicales dans l'environnement numérique, il est essentiel de reconnaître concrètement l'importance du rôle et de la valeur de la création. Il faut, pour cela, intégrer pleinement les créateurs dans un écosystème viable où ils pourront continuer d'être les moteurs de notre culture et de notre économie, comme ils l'ont toujours fait.
    Voici des pistes de solutions pour renforcer le soutien aux créateurs et aux entrepreneurs de l'industrie de la musique canadienne.
     La reconnaissance de la valeur de la création et des auteurs passe, à l'échelle sociale, par la mise en oeuvre de mesures éducatives qui permettent à chacun de comprendre comment les créateurs et les ayants droit sont rémunérés.
    Dans l'environnement numérique, les consommateurs et le public en général bénéficient d'un accès de plus en plus large et instantané aux oeuvres de création. Il est nécessaire de rappeler à tous, par des campagnes d'information récurrentes, que la vitalité de notre culture repose avant tout sur les créateurs, et que l'accès à leurs oeuvres est un privilège dont il faut assurer la pérennité.
    Il est nécessaire de mieux comprendre comment et à qui profite précisément la valeur générée par l'accès aux oeuvres. Il faut prévoir un financement spécifique pour des études qui permettront de comprendre l'évolution des modèles économiques et les modes de partage de la valeur créatrice.
    Il faut responsabiliser les acteurs de l'économie numérique qui font bénéficier aux consommateurs canadiens la facilité d'accès aux oeuvres musicales, et ce, afin d'instaurer un meilleur partage de la valeur générée par leurs activités.
    Il est important de réviser la réglementation encadrant les services et les intermédiaires numériques pour faire en sorte que leurs activités se déroulent dans des conditions comparables à celles des autres secteurs de l'économie.
    Il faut repenser et réactualiser de façon positive le régime de la copie privée qui existe dans la Loi sur le droit d'auteur.
    Il est aussi important de créer de nouveaux incitatifs, fiscaux ou autres...

  (1110)  

    Je vous remercie monsieur Lauzon.

[Traduction]

    Vous donnons la parole à Victoria Shepherd. Vous avez huit minutes, madame.
    Je vous remercie de m'offrir cette occasion de comparaître devant vous. Je m'appelle Victoria Shepherd et j'interviens au nom de Connect Music Licensing, qui représente environ 1 800 titulaires de droits. Nos membres sont propriétaires de la grande majorité des enregistrements sonores et vidéos de musique qui sont entendus et regardés au Canada. Nous comptons parmi nos membres de grandes compagnies indépendantes d'enregistrement et beaucoup d'artistes indépendants.
    La Loi sur le droit d'auteur stipule que personne ne peut copier d'enregistrement sonore ou copier et diffuser des vidéos de musique sans l'autorisation du titulaire des droits. C'est ce qu'on appelle des droits exclusifs. Il peut être compliqué et cela peut prendre beaucoup de temps, à la fois pour les titulaires de droits que pour les utilisateurs de la musique de négocier directement les permis pour chacun des enregistrements sonores et des vidéoclips. Par exemple, si je souhaite diffuser un vidéoclip sur ma chaîne de télévision, comme Invincible de Hedley, je dois m'adresser à la maison de disques pour en obtenir l'autorisation et négocier un tarif approprié. Si un télédiffuseur veut diffuser de nombreuses vidéos, cette démarche d'obtention de permis au cas par cas représenterait un fardeau administratif des plus lourds tant pour les titulaires de droits que pour les utilisateurs de la musique.
    Connect Music Licensing a été fondé il y a 30 ans, sous le nom de AVLA, pour Audio-Video Licensing Agency. C'est un groupe de titulaires de droits qui s'est uni pour tenter de rehausser l'efficacité du marché. Si un télédiffuseur veut diffuser de nombreuses vidéos musicales, un seul permis obtenu auprès de Connect Music Licensing donne accès à tout le répertoire de nos membres, pour un paiement unique. Un rapport d'utilisation est remis à Connect Music Licensing, et les fonds sont distribués à nos membres. L'adhésion à notre organisme est gratuite. Nous ne faisons que déduire les coûts de nos activités, nous fournissons ainsi les services qui sont parmi les plus abordables du monde.
    Nous pensons qu'il est absolument essentiel de faire en sorte que les titulaires de droits puissent tirer des revenus de leur oeuvre. Nous avons recensé trois domaines où, selon nous, le gouvernement peut intervenir utilement: la sensibilisation du marché, l'offre de ressources additionnelles à la Commission du droit d'auteur, et un mécanisme pour faire en sorte que l'utilisation de la musique dans les institutions publiques se fasse en vertu de permis.
    Le gouvernement du Canada a créé d'importants droits pour les créateurs qui assurent des revenus aux artistes et aux compagnies d'enregistrement. Nous devons veiller à ce que le marché soit informé de ses obligations à l'égard de ces droits.
    MusikWorks, au Royaume-Uni, a mené des études qui démontrent l'effet positif de la musique sur l'image de marque, les ventes et la productivité. L'étude menée en 2012 a notamment conclu que 80 % des propriétaires de pubs et de bars sont convaincus que les clients et le personnel se plaindraient s'ils ne diffusaient plus de musique; 86 % estiment que la musique catalyse le climat d'anticipation d'une foule lorsqu'elle est jouée avant un événement; et 83 % déclarent que le silence rend un endroit inamical et peu accueillant.
    Le site Web de Service Canada fournit des renseignements utiles sur le lancement d'une entreprise. Il semblerait conforme aux objectifs du gouvernement de fournir aussi des renseignements sur l'utilisation de la musique dans les entreprises au Canada. En soulignant la contribution positive de la musique au succès des entreprises, Service Canada pourrait fournir les renseignements dont ont besoin les entreprises pour faire en sorte que les titulaires de droits soient rémunérés pour cette contribution.
    Le Fonds de la musique du Canada offre une occasion de sensibiliser les titulaires de droits aux divers flux de revenus associés à leur musique. On pourrait ainsi présenter, pour chaque demande de financement, une section sur les divers flux de revenus qui sont à la disposition des créateurs. Il pourrait y avoir dans les formulaires de demande une section où le demandeur peut confirmer avoir compris les structures de revenus, et confirmer son adhésion actuelle ou prévue à l'organisation qui peut l'aider à tirer ses revenus si la demande était approuvée. Même dans les cas où les demandes de financement sont rejetées, les titulaires de droits auraient au moins reçu cette information. Nous devons nous assurer qu'aucune source potentielle de revenu pour les titulaires de droits ne soit pas exploitée pour cause d'un manque d'information.
    Outre les droits exclusifs qu'administre Connect Music Licensing, la Loi sur le droit d'auteur prévoit aussi l'obligation pour l'utilisateur de la musique de payer pour son utilisation, mais elle n'habilite pas le titulaire de droits à autoriser ou à interdire l'utilisation de son oeuvre. Ce serait des droits de rémunération, comme le droit de faire jouer ou de communiquer des enregistrements sonores en public. La Commission du droit d'auteur est le tribunal qui établit les tarifs et les modalités liés à ces droits.
    La Commission du droit d'auteur fournit de précieux services aux titulaires de droits et aux utilisateurs de la musique. Elle assure le paiement lié à l'utilisation, et offre une certitude au marché. Cependant, comme elle manque de ressources, le processus prend énormément de temps. Une décision de la commission peut prendre jusqu'à deux ans, relativement à un permis. Pendant ce temps, les titulaires de droits peuvent ne recevoir aucune rémunération pour les nouvelles utilisations de leur musique, et les utilisateurs de musique n'ont aucune certitude relativement à leurs obligations de paiement pour l'utilisation de la musique.
    Le gouvernement du Canada s'est engagé à l'égard du développement d'un marché numérique efficace. La Commission du droit d'auteur du Canada ne devrait pas être perçue comme un obstacle à une entreprise ou un handicap. Elle devrait plutôt être considérée comme un bureau de développement des entreprises. Elle a besoin de ressources pour pouvoir prendre des décisions qui sont adaptées au rythme du développement des technologies. Pour attirer de nouveaux services numériques au Canada, il est impératif que ces services sachent exactement quelles seraient leurs obligations de paiement.

  (1115)  

    D'après un rapport de la Recording Industry Association of America, en 2013, les revenus de diffusion en mode continu ont compté pour 21 % du revenu total de l'industrie. Au Canada, c'est moins de 7 %. Imaginez un investisseur qui veut créer un nouveau service de diffusion de musique au Canada, mais on lui dit que pendant deux ans, il n'en connaîtra pas le coût. Une commission du droit d'auteur efficace et qui a des ressources suffisantes contribuerait à attirer de nouvelles entreprises numériques au Canada.
    Une troisième chose que peut faire le gouvernement, c'est de veiller à ce que les institutions publiques qui utilisent la musique aient obtenu les permis à cette fin. Cet exemple souligne encore une fois l'importance de l'octroi de permis pour l'utilisation de la musique. Chez Connect Music Licensing, nous serions ravis de collaborer avec vous en ce sens.
    Nous sommes convaincus que la sensibilisation des marchés générera des revenus accrus pour les titulaires de droits et aidera les utilisateurs de la musique à se conformer à leurs obligations juridiques. L'octroi de ressources additionnelles à la Commission du droit d'auteur lui permettra de fonctionner efficacement en tant que bureau de développement des entreprises et, ce faisant, de créer de nouveaux revenus pour les titulaires de droits. En veillant à ce que toute utilisation de musique dans les institutions publiques soit assortie de permis, on créera un standard pour les autres utilisateurs de musique.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
    Nous laissons maintenant la parole à Brad Keenan, directeur exécutif de l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, qui est accompagné d'un musicien canadien, David Faber.
    Vous avez huit minutes à vous deux.
    Je vous remercie, monsieur le président et membres du comité.
    Je suis le directeur de la Société de gestion du droit d'exécution publique de l'ACTRA, et sa division, la Recording Artists' Collecting Society, qu'on désigne sous l'acronyme de RACS.
    Je tiens à remercier le comité de nous avoir invités à participer à ces importantes discussions. Je suis heureux que nous ayons pu nous faire accompagner de l'un des artistes-interprètes les plus célèbres du Canada, Dave Faber, du groupe Faber Drive. Il vous parlera des réalités de la vie d'un artiste-interprète professionnel au Canada.
    Tout d'abord, j'aimerais vous expliquer un peu le contexte et la perspective de ce que fait la RACS. Elle recueille et distribue aux artistes-interprètes les redevances qui leur sont dues pour l'exécution en public et la copie à usage privé de leurs oeuvres. Nous représentons plus de 3 500 artistes-interprètes à l'échelle nationale et des milliers d'autres dans le monde entier en vertu d'accords de réciprocité avec d'autres organisations de gestion collective comme la RACS.
    Depuis 1998, la RACS a distribué plus de 35 millions de dollars à des artistes-interprètes, ce qui représente un revenu important pour des milliers de musiciens canadiens. Il importe de souligner que notre exposé et les commentaires que nous faisons aujourd'hui ont l'appui de la Fédération canadienne des musiciens et de ses 15 000 membres.
    Bien que les artistes que nous représentons ont des carrières d'envergure variable, ils ont cela en commun qu'ils sont tributaires de divers flux de redevance pour pouvoir vivre de leur art. La grande majorité des gens que nous représentons sont des petits propriétaires d'entreprises qui ne vivent pas que d'un seul chèque de paye émanant d'un seul employeur, mais qui doivent tirer des redevances de leurs droits d'auteur à l'échelle nationale et à l'étranger, qui bien souvent sont la pierre angulaire de leur carrière professionnelle.
    Nous nous inquiétons de changements récemment apportés à la Loi sur le droit d'auteur qui, dans bien des cas, ont affaibli ces droits et, par voie de conséquence, l'industrie canadienne de la musique. Puisque votre comité se penche sur l'industrie canadienne de la musique, nous aimerions porter à votre attention divers enjeux importants qui influent sur la capacité de nos membres de tirer un revenu durable et, partant, sur la capacité de produire et de distribuer de la musique canadienne.
    Nous parlons tout d'abord du préjudice qu'a fait subir aux artistes-interprètes l'échec du Canada à moderniser ses règles concernant la copie à usage privé. Le deuxième problème, dont vous parlera mon ami Dave, est la volatilité du revenu pour les artistes-interprètes d'année en année, tout au long de leur carrière.
    Le droit perçu pour les copies à usage privé a longtemps été un mécanisme efficace et équilibré d'appui de l'industrie canadienne de la musique. D'un côté, les consommateurs peuvent faire des copies pour leur usage personnel et de l'autre, les créateurs sont justement rémunérés pour ces copies privées.
    Il y a 10 ans, les titulaires de droits de l'industrie canadienne de la musique tiraient un revenu global de 35,6 millions de dollars par année pour la copie à usage privé de leurs oeuvres sur des disques compacts vierges. Aujourd'hui, ce montant a chuté et est maintenant bien inférieur à 10 millions de dollars, alors que les copies à usage privé se faisaient de moins en moins avec des systèmes désuets d'enregistrement audio et de plus en plus avec des enregistreurs numériques.
    Il n'est pas juste que les artistes qui ont créé la musique enregistrée ne soient pas rémunérés pour l'exploitation de leur musique sur ces dispositifs. Nous tenons à souligner que la décision qu'a prise le gouvernement canadien de ne pas appliquer les droits pour les copies pour usage privé aux enregistreurs numériques va à l'encontre de l'orientation qu'a prise l'un des plus importants partenaires commerciaux du Canada et de la position qu'il a adoptée à l'égard de son industrie de la musique.
    Le mois dernier, le Parlement européen a adopté une résolution relativement à la préservation des droits perçus sur les copies pour usage privé dans l'Union européenne. Les grands principes qui sous-tendent cette résolution du Parlement européen valent d'être lus et nous en parlons dans le document que nous avons remis à la greffière du comité ce matin. Je précise qu'au coeur de la résolution et du plan d'action qui y est assorti se trouve l'entendement fondamental du préjudice que subirait l'industrie de la musique si les droits perçus sur les copies pour usage privé étaient tout simplement abandonnés en Europe. Nous craignons que ce soit précisément ce qu'a fait le Canada récemment. Nous pensons que les effets néfastes de cette décision continueront d'être ressentis dans les années à venir.
    Par conséquent, nous encourageons le gouvernement canadien et toutes les parties à se pencher à nouveau sur l'éventuelle modernisation des règles relatives à la copie pour usage privé, afin qu'elle reflète la manière dont les consommateurs font des copies numériques de nos jours. Notre partenaire commercial européen assume un rôle de chef de file en cherchant des solutions, et nous devrions en faire autant. Nous recommandons vivement que le gouvernement canadien modernise la partie de la Loi sur les droits d'auteur relative aux copies pour usage privé, dans le cadre de l'examen qui doit être bientôt fait de l'article 92.
    Je vais maintenant laisser la parole à Dave qui vous donnera un aperçu de l'incidence de cette décision sur les artistes-interprètes. Pour vous le présenter, je vous dirai que le groupe de Dave, Faber Drive, a reçu deux disques d'or et deux disques de platine simples. Ils ont reçu plusieurs prix de la chanson la plus populaire de SOCAN et un prix décerné dans le cadre des Canadian Radio Music Award, en plus d'avoir été en lice des prix Juno pour le meilleur nouveau groupe. Ils ont signé jusqu'à maintenant 604 disques, dont le propriétaire est Chad Kroeger de Nickelback. Dave est l'un des artistes-interprètes les plus populaires du Canada.

  (1120)  

    Comme n'importe quelle autre personne à son compte travaillant dans une des industries culturelles canadiennes, les artistes de studios d'enregistrement comme moi ont tendance à connaître de grands écarts dans leur revenu annuel. Nos revenus atteignent leur maximum lorsque nous sortons un album et partons en tournée pour en faire la promotion, mais entre les différents projets d'enregistrement, nos revenus chutent vertigineusement. Contrairement aux employés, les personnes à leur compte n'ont pas accès à bon nombre des aides, comme l'assurance-emploi, auxquelles d'autres Canadiens ont accès pour les aider à joindre les deux bouts pendant les transitions entre emplois.
    Mon groupe a travaillé très fort et a eu la chance de connaître un certain succès, mais il a dû traverser des périodes difficiles pour y arriver. La réalité est que même aujourd'hui, comme bon nombre de musiciens de carrière, je dois m'adonner à d'autres emplois pour payer les factures. Lorsque nous avons commencé, à nos débuts, j'ai démissionné de mon travail pour me concentrer sur cette occasion, mais cela m'a forcé à fréquenter la banque alimentaire et emprunter de l'argent auprès de mes amis et de ma famille, ce qui n'est pas rare pour bon nombres de musiciens qui essaient de s'en sortir dans une industrie concurrentielle et exigeante.
    Ça, c'était à nos débuts, il y a 8 ans. Passons maintenant à aujourd'hui, trois albums plus tard, et je reçois toujours l'aide de ma famille pour me permettre d'être un musicien professionnel au Canada. Désormais, avec une famille dont je dois assurer la subsistance, y compris une femme magnifique et quatre enfants extraordinaires, j'ai un emploi où je fais couler du béton pour que nous puissions subsister pendant que je travaille sur un quatrième album. En outre, deux des trois membres de mon groupe travaillent à temps plein également, ce qui fait en sorte que notre prochain album prendra beaucoup plus de temps que prévu à aboutir.
    Notre profession n'est pas si différente des autres. Elle exige des années de pratique, de dévouement et de risques si l'on veut faire de la musique.
    Je ne suis pas seul. J'ai vu d'innombrables groupes voir le jour et disparaître au fil des ans, juste parce qu'ils n'avaient pas de soutien approprié. J'ai de nombreux amis que l'on entend aujourd'hui à la radio, ici, au Canada, et qui dépendent des chèques de la RACS et de toutes leurs petites sources de revenus pour payer les choses de base comme le loyer, l'essence et la nourriture.
    Il est essentiel de recevoir une rémunération équitable pour l'utilisation de notre travail. Les chèques de redevance que nous recevons de la RACS nous aident à payer les factures de base, sachant que lorsque l'on diffuse votre chanson à la radio, l'artiste en reçoit un petit paiement en retour. Comme je viens de le dire, ces petits paiements font souvent la différence et aident à payer le loyer, à acheter de la nourriture et à acheter de l'essence.
    Mais on pourrait en faire davantage. À l'heure actuelle, les artistes doivent payer des taux d'imposition marginale élevés pour une année de succès ponctuelle. Pour résoudre ce problème, la RACS de l'ACTRA et d'autres organisations de créateurs ont demandé au gouvernement de restaurer l'étalement du revenu aux fins d'impôt pour les artistes canadiens. Grâce à une telle mesure fiscale, les revenus fluctuants d'un artiste sont étalés sur une période s'étalant sur plusieurs années pour permettre un taux d'imposition préférentiel pour une année donnée, où son revenu est supérieur.
    Plusieurs pays de l'Union européenne, y compris le Royaume-Uni, ont adopté une telle approche. Elle fonctionne. Elle permet d'aplanir les choses en termes de revenus, éliminant les points les plus hauts et les points les plus bas. Ce faisant, elle apporte une certaine prévisibilité fiscale aux projets des artistes, ce qui facilite ensuite l'essor de nos industries culturelles et qui est avantageux pour notre économie, en général.
    La RACS appuie également la création d'une exemption fiscale fédérale pour la première tranche de 10 000 $ de redevances qu'un artiste touche sur son travail. Une telle exemption serait en accord avec la déduction fiscale des redevances qui est en place au Québec depuis 1995.
    Merci David.
    Si vous me permettez de conclure, je voudrais encore une fois remercier le comité de nous avoir invités à comparaître. Merci au greffier, au personnel et certainement aux interprètes, car je suis quelqu'un qui parle certainement vite.
    Avec ces idées, nous espérons pouvoir travailler ensemble pour améliorer l'industrie de la musique canadienne dans son ensemble.
    Merci.
     Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au premier tour de questions. Il s'agit d'un tour où les questions dureront sept minutes. Nous allons commencer par M. Weston.

[Français]

  (1125)  

Je veux d'abord remercier nos invités. Ce qu'ils ont dit était très intéressant.

[Traduction]

    Tout d'abord, à titre d'éclaircissement, j'aimerais m'assurer que la société pour la reproduction des droits n'a rien à voir avec la politique d'enfant unique. Désolé, c'était une blague.
    Des voix: Oh, oh!
    M. John Weston: Il s'agit d'une question sérieuse. Vous nous avez exposé des points vraiment intéressants.
    Ce qui m'intrigue le plus, c'est cette question des copies privées. J'ai tout le temps cette conversation avec mes adolescents: que peut-on copier; que ne peut-on pas copier? J'ai été avocat en droit international et donc je prends la question des droits intellectuels très au sérieux, mais chez les adolescents, on n'a pas vraiment cette culture.
    Pensez-vous qu'il y ait lieu de commencer à sensibiliser les jeunes dans les écoles et leur parler de l'importance de ce que vous faites, David, pour leur instiller ce sentiment de la valeur? Vous avez parlé de la valeur et de l'importance de la création et des créateurs. Devrions-nous commencer jeunes? Nous sommes ici en train de parler à des législateurs pour essayer de créer une approche différente en matière de taxation, ce qui est vraiment utile, mais j'aimerais simplement vous poser une question: avez-vous une opinion sur le moment où cette éducation doit commencer?
    Je peux commencer.
    Je sais que Victoria a parlé d'éducation.
    J'ai une fille de 25 ans. Elle a grandi en périphérie de l'industrie de la musique, car j'y suis depuis plus de 20 ans. Ainsi, elle connaît la différence entre ce qui aide ces personnes à gagner leur vie et ce qui ne les aide pas et donc elle a commencé très tôt. Pour nous tous, il s'agit d'une question d'éducation et le plus tôt sera le mieux et il ne faut pas hésiter sur la quantité.
    Je ne dirais pas qu'il s'agit d'une zone grise, mais ce n'est pas une zone facile à comprendre par rapport aux limites et à ce qui est acceptable et pas acceptable. Étant donné qu'il s'agit d'un contenu que l'on peut transférer grâce à la technologie, ce n'est pas comme du vol à l'étalage dans une épicerie. C'est quelque chose qu'on ne voit pas. Mais il y a une différence entre ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas et plus on commence cette éducation tôt, mieux c'est.

[Français]

    Si vous me le permettez, je vais ajouter quelque chose.
    Au Québec, il y a de nombreuses discussions dans les universités au sujet de travaux qui sont effectués par des étudiants et qui sont du plagiat. Vous êtes avocat. Pour ma part, quand j'étais jeune, on nous montrait dès l'école primaire que copier dans un livre constituait du plagiat. Le plagiat, la propriété intellectuelle et la musique regroupent les mêmes choses. Je pense qu'il faut sensibiliser les jeunes à cette réalité dès leur plus jeune âge. Il semble qu'au cours des 10 ou 15 dernières années, la liberté associée à Internet nous ait fait perdre cette valeur.
    Merci bien.
    Monsieur Lauzon, vous avez parlé de l'accès à la musique dont jouissent déjà les consommateurs et du développement de cet accès.
     Est-ce à dire, du point de vue du gouvernement, qu'on a réussi à accroître le marché pour les consommateurs? S'agit-il d'une réussite, non seulement pour les créateurs, mais aussi pour les consommateurs?
     On voit aujourd'hui que les consommateurs ont de plus en plus accès à des services légaux. Ce qui s'est passé au cours des dix dernières années a été au détriment du marché de la musique enregistrée, soit des producteurs, des artistes, des interprètes et des créateurs. C'est aux consommateurs que cela a profité. C'est un phénomène important.
    Dans le domaine du numérique, une société comme la nôtre est en mesure d'octroyer des licences à des utilisateurs et à des intermédiaires. Le problème est que beaucoup de gens qui utilisent de la musique ont un modèle de gestion conçu en fonction de la musique, sans toutefois que la loi crée un équilibre entre les revenus de ceux qui ont créé la musique et l'accès des consommateurs à cette même musique.
    Quand nous étions jeunes, l'accès à la musique se faisait par l'entremise de la radio, de captations en direct et d'achats. C'était contrôlé. Aujourd'hui, ça l'est moins. Le fait de pouvoir bénéficier de cet accès est un grand avantage pour le consommateur. Il faut qu'il en soit conscient. Ce n'est pas gratuit.

  (1130)  

    Selon vous, le défi concerne maintenant surtout les créateurs.

[Traduction]

    Victoria, j'ai trouvé que vous étiez très claire. Vous nous avez donné trois suggestions très précises.
    Vous avez parlé d'information et donc implicitement vous nous avez parlé d'éducation, n'est-ce pas?
    Absolument.
    Je me demande si vous pourriez nous en dire un petit peu plus, car le gouvernement se soucie également beaucoup d'améliorer la force de nos créateurs, de nos merveilleux musiciens et artistes.
    David, nous disposons d'une incroyable tradition au Canada. Le monde est fier de nous.
    Pourriez-vous nous en dire davantage au sujet de l'information et de l'éducation?
    Certainement. En réalité, il y a une chose sur laquelle j'aimerais attirer l'attention du comité et c'est le fait que Music Canada a publié un rapport intitulé « The Next Big Bang ». Ou le prochain Big Bang. On y identifie plusieurs piliers qui pourraient faire en sorte d'améliorer et d'assurer le succès à venir de l'industrie.
    L'un de ces piliers était l'éducation. Dans leur rapport, ils parlent de l'importance de l'éducation musicale dans les écoles. Je crois que ce qui est intrinsèquement lié à ça, en plus de la solution plus immédiate que nous avons proposée, comme l'information du Fonds de la musique du Canada et l'information sur le site Web de Service Canada, c'est que nous enseignions à nos jeunes, à nos enfants depuis le début, que tout le monde aime la musique et que tout le monde le sait et que la valeur de la musique, ce n'est pas uniquement ce qu'elle nous fait ressentir, mais qu'il y a également de la valeur à être un créateur et qu'il y a de la valeur à apprécier la musique.
    Lorsque vous avez des organisations qui font ce genre d'études qui montrent combien la musique est importante pour les affaires, combien elle améliore l'expérience de la clientèle et rapporte plus d'argent et que les gens qui ont créé cette musique devraient également bénéficier, c'est ce que fait Connect Music Licensing.
    Je crois qu'il est crucial d'avoir une culture de la compréhension. Je suis convaincue que les Canadiens ne souhaitent pas ne pas rémunérer les créateurs. Je ne pense pas que ce soit là notre processus mental. Je crois que c'est uniquement parce qu'ils ne sont pas au courant.
    Les organisations comme Connect Music Licensing travaillent en tout temps. Nous contactons les détenteurs de droits; nous contactons les utilisateurs. Je crois que nous faisons un très bon travail, mais je crois que si nous avions un système d'envergure nationale en place, cela nous aiderait immensément.
    D'accord, merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Mme Mathyssen et à M. Nantel pour sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Je tiens à vous remercier toutes et tous. J'ai appris quelque chose d'important aujourd'hui et j'apprécie la clarté de vos exposés.
    J'aimerais pouvoir vous poser une question à chacun et chacune d'entre vous, mais M. Nantel est très jaloux et je dois partager mon temps.
    Je vais commencer par vous, monsieur Lauzon.
    Lorsque votre temps s'est écoulé, vous veniez tout juste de commencer à parler du projet de loi C-11. J'aimerais vous donner l'occasion de terminer ces remarques et de nous parler des défis auxquels votre industrie est confrontée par rapport au projet de loi C-11.
    Je crois que Brad a parlé plus en détail de la question des copies privées auxquelles nous sommes confrontés. Brad et moi siégeons tous les deux à la Commission des droits d'auteur à titre de membres.
    Comme je l'ai mentionné, les copies privées sont un enjeu que l'on examine de près en Europe et la valeur de cet enjeu n'est pas amoindrie mais plutôt amplifiée pour les Européens avec lesquels nous travaillons et il y a également la valeur de la copie privée pour le créateur, l'artiste, l'auteur-compositeur et les étiquettes de disque également, car cela rapporte de l'argent directement à ceux qui ont créé ces oeuvres. Cette partie est très importante. C'est la première chose à propos du projet de loi C-11.
    La deuxième chose est que le projet de loi doit être adopté, bien évidemment, celui qui est entré en vigueur en 2012. Ce qui est triste, c'est que au cours des 15 dernières années, nous avons eu des gouvernements minoritaires et qu'avec tout cela, ça ne s'est pas fait. Il faut l'adopter. Le projet de loi est-il bon à 100 %? Non. Mais le problème auquel nous sommes confrontés à l'heure actuelle avec le projet de loi C-11, c'est le fait que nous risquons d'avoir un grand nombre de causes devant les tribunaux au cours des prochaines années. J'ai participé à deux ou trois des décisions de la Commission du droit d'auteur. Nous allons devoir aller devant la Cour suprême également, car de nouveaux concepts s'en viennent dans le projet de loi C-11 et nous devrons faire face à cela bien évidemment.
    Certaines des exemptions qui faisaient partie du projet de loi C-11 ne nous ont pas facilité la tâche. Spécialement avec les radiotélédiffuseurs, cela a fait ressortir une situation dans laquelle les revenus peuvent diminuer à l'avenir. Il s'agit d'une situation à laquelle nous devons faire face. Au cours des cinq prochaines années, on est censé revoir la question. J'espère que la décision sera la bonne et que l'on examinera l'objectif visé au cours des cinq prochaines années. Je crois qu'il nous faudra ajuster un bon nombre de choses. Plus précisément, comme je l'ai dit, nous devons remettre dans l'équation la valeur de la musique et avoir un équilibre avec les revenus qui viennent de... dans les poches des artistes et des créateurs. Voilà principalement le problème que nous avons à l'heure actuelle.
    J'ai 6 000 membres qui sont créateurs et qui sont éditeurs et ils ont exactement la même chose. La première question que je leur ai posée était de savoir s'ils vivaient de leur musique. Il n'y a pas tant de gens que ça qui vivent de leur musique aujourd'hui. À l'époque, ils pouvaient en vivre, car leur marché était plus important. Comme je l'ai expliqué, le problème est lié au développement de la technologie. On ne peut pas revenir en arrière. Il nous faut aller dans l'avenir, sauf que les revenus qui proviennent des nouveaux services, le modèle d'affaires dont se servent les créateurs — et lorsque je dis créateurs, je nous inclus tous là-dedans — même s'il y aura plus de revenus à tirer du numérique à l'avenir avec les services de balladodiffusion en continu et tout cela, le niveau de revenus qui se retrouvera dans la poche des auteurs-compositeurs et des artistes n'est pas suffisant dans ce genre de modèle d'affaires.

  (1135)  

    D'accord. Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Nantel, mais nous allons formuler des recommandations. La première de ces recommandations devrait-elle indiquer que, quoique l'on fasse, nous devrions garantir la survie de ces merveilleux créateurs?
    Absolument.

[Français]

    Ma collègue a raison de dire que c'est un sujet qui nous passionne énormément, moi en particulier. Je tiens à vous remercier tous les quatre d'être ici parmi nous.
    Monsieur Faber, j'ai bien entendu votre message au sujet de l'étalement du revenu. C'est une mesure que nous avons toujours favorisée. Cela nous apparaît une mesure très pratique pour faire face à la moisson pour les artistes qui n'est pas annuelle, mais plutôt en phase cyclique. Une telle mesure leur faciliterait certainement la vie.
    Les points de vue des témoins sont tous très pertinents, pour nous qui cherchons à mieux comprendre les enjeux auxquels fait face une industrie, mais je dois vous dire, monsieur Faber, que le vôtre l'est particulièrement. Votre carrière a été caractérisée par un grand succès en 2008 et 2009. Vous avez vécu de front le changement du modèle d'affaires qui a littéralement pillé vos ventes par la suite.
    Vous avez dit que les membres de votre groupe ont des jobs à temps plein; c'est spectaculaire. Il y a ici un artiste qui fait partie de notre patrimoine et qui doit avoir une autre source de revenus. Comme vous êtes l'auteur-compositeur principal de vos oeuvres, vous avez eu accès à plus de revenus, mais vos musiciens doivent avoir des emplois à temps plein.
    On discute de toutes sortes de sujets relativement à l'industrie du disque, mais quelqu'un ici est clairement atteint du mal des créateurs et n'arrive plus à vivre de sa création. C'est un exemple évident et c'est ce qu'il faut aborder.
    Monsieur Lauzon, vous êtes membre de la Commission du droit d'auteur. En fait, vous n'en êtes pas membre, mais vous avez évidemment affaire à elle. Je pose la question à chacun d'entre vous. Quelles recommandations aimeriez-vous voir dans le rapport de cette étude?
    Ma collègue a parlé des ressources de la Commission du droit d'auteur. Cette commission, qui est une institution mise sur pied par le gouvernement, est une excellente plateforme comparativement à ce qui existe dans plusieurs autres pays. D'autres pays, par exemple l'Angleterre, sont venus voir ce que fait la Commission du droit d'auteur. C'est un organisme qui détermine la valeur d'un droit, lorsqu'on ne peut pas en arriver à une entente, ce qui est une excellente chose parce que ça permet d'aller plus loin.
    Quant à la question de savoir si les décisions prennent du temps à être prises, la réponse est oui. De plus, des ressources supplémentaires devraient être accordées à la Commission du droit d'auteur.
    Nous recommandons que la commission ait une date limite pour remettre ses rapports et qu'on lui accorde des ressources supplémentaires à cet égard. De cette façon, les utilisateurs et nous-mêmes serions moins dans le vide lorsque les gens viendraient investir dans leur entreprise au Canada.

  (1140)  

    Merci.
    Monsieur Dion, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins de leur présence parmi nous.
    Je voudrais reprendre la question de M. Nantel et vous demander de résumer le plus succinctement possible les changements que vous voudriez qu'on apporte à la politique fédérale sur la musique et que vous voudriez voir figurés dans le rapport de ce comité.

[Traduction]

    Monsieur Faber et Monsieur Keenan, si j'ai bien compris vous avez deux demandes. Pouvez-vous les répéter.
    D'accord. Je vais commencer.
    Ce que j'aimerais que ce comité recommande, au nom des artistes canadiens, est de ne pas laisser le régime de la copie privée au Canada mourir d'une mort lente et naturelle, ce qui est le cas à l'heure actuelle. Le fait qu'il ait diminué, passant de 34,6 millions de dollars à moins de 10 millions de dollars en l'espace d'à peine une année signifie que des amis comme Dave Faber ou moi-même avons été privés de cet argent.
    Ce que j'aimerais que ce comité fasse, c'est de recommander l'examen et l'étude minutieuse de ce que nos partenaires commerciaux internationaux font pour trouver des solutions dans ce domaine. Si l'Union européenne peut chercher des solutions, nous devrions nous attendre à ce que le gouvernement canadien...
    C'est ça le problème, mais quelles sont les solutions que vous aimeriez nous voir mettre en oeuvre? Nous comprenons le problème. Maintenant nous recherchons des solutions.
    Notre solution est d'étudier celles qu'ont trouvées nos partenaires commerciaux internationaux et de les rapatrier ici, à l'intérieur des frontières canadiennes, pour résoudre le problème qui fait en sorte que les artistes canadiens perdent de l'argent et voient leurs revenus réduits.
    Monsieur Faber, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je crois que l'étalement du revenu est une très bonne solution également.
    Nous comprenons.
    Madame Shepherd, vous êtes arrivée avec une liste de choses que vous aimeriez voir adopter.
    Oui, effectivement. Il y a trois choses que nous aimerions voir dans vos recommandations pour un examen de l'industrie de la musique.
    La première chose consisterait à sensibiliser le marché afin que les détenteurs de droits sachent comment accéder aux fonds et que les usagers de la musique respectent leur obligation de payer pour l'utilisation de la musique.
    La deuxième chose serait de fournir des ressources additionnelles à la Commission du droit d'auteur. Aidons-la à poursuivre ses travaux au même titre qu'une entreprise de développement des affaires.
    Cela se fait-il au sein même du Fonds de la musique du Canada ou à l'extérieur?
    Je parlais en termes généraux, et pas nécessairement uniquement par rapport au Fonds de la musique du Canada. En tant que partie intégrante d'une étude globale de l'industrie, il s'agit des trois piliers que nous aimerions inclure là-dedans.
    La troisième chose est un engagement de la part du gouvernement pour faire en sorte que toutes les institutions dont il est responsable se servent de licences pour l'utilisation de musique. Il s'agirait d'un excellent exemple à suivre pour le reste du pays.

[Français]

    Monsieur Lauzon, êtes-vous favorable à tout ce que vous venez d'entendre? Avez-vous quelque chose à ajouter?
    C'est certain que je suis bien d'accord avec ce qui a été dit sur la copie privée et la formation. Cependant, il faut aussi regarder l'ensemble des études qui ont été faites.
    Dans beaucoup d'autres pays, des études ont été faites. Par exemple, en Angleterre, il y a eu une étude avec Google sur les services illégaux. Enfin, sans dire « illégaux », disons plutôt les services pour lesquels la musique est utilisée sans qu'on ne puisse accorder un droit. Un soutien doit être offert par des subsides. Ce sont des études sur lesquelles on doit se pencher.
    L'autre chose sur laquelle on doit également se pencher, c'est l'équilibre par rapport à la valeur de la création. En Europe, il y a une grande discussion actuellement sur les projections par rapport à la valeur de la musique et les intermédiaires. On se demande quel rôle ceux-ci jouent et le rôle social qu'ils doivent jouer à l'égard de la création.
    On a mis l'accent, avec raison, sur le développement technologique. Ce dernier n'est rien s'il n'y a pas de contenu. Le contenu, c'est la base. Ce sont les racines d'un arbre qui doit fleurir. Alors, on doit regarder ces choses. On doit enquêter sur la valeur de la musique et le partage qui doit se faire entre les intervenants tout au long de la chaîne de la musique enregistrée.

  (1145)  

[Traduction]

    Madame Shepherd, vous avez identifié trois points, mais en fait votre présentation était plus détaillée et j'ai grandement apprécié cela.
    Est-ce que votre proposition est complètement nouvelle ou bien est-ce que vous la faites valoir depuis un certain temps déjà? Quel genre de rétroaction avez-vous reçue?
    Je vais commencer par la Commission du droit d'auteur. M. Lauzon a abordé ce point également. Si vous regardez le rapport de Musique Canada intitulé The Next Big Bang, ou Le prochain Big Bang, on y fait également la promotion de ressources additionnelles pour la Commission du droit d'auteur.
    La notion d'éducation du marché est constamment présente chez Connect Music Licensing ainsi que chez tout autre collectif de détenteurs de droits d'auteur au Canada. Nous déployons des efforts individuels et donc vous allez probablement entendre parler de nous, mais vous allez également probablement entendre parler de la RACS de l'ACTRA et de la SODRAC. S'il y avait un endroit centralisé d'où l'on pourrait communiquer le message: « Voilà ce dont vous avez besoin, ici les utilisateurs de musique et là les détenteurs de droits », cela permettrait d'accélérer la répartition et l'acheminement des revenus.
    En ce qui concerne ce que l'on demande au gouvernement, par rapport aux licences de l'utilisation de la musique dans ces institutions, il s'agit là d'une ramification des travaux que Connect Music Licensing entreprend de toute façon. Dans un monde parfait, chaque utilisateur de musique au Canada paierait exactement aux créateurs ce qu'il leur doit et chaque détenteur de droits au Canada aurait accès à chaque sou de chaque source de revenu à sa disposition.
    Merci.
    Si nous faisions ce que vous demandez, qu'est-ce que cela coûterait au consommateur? Quelqu'un devra payer.
    Est-ce que vous vous adressez à moi en particulier, ou à tous les témoins?
    Oui, c'est à vous que je pose la question.
    Très bien.
    Eh bien, pour ce qui est d'informer le marché, je pense que les deux premières solutions que j'ai proposées lors de mon exposé ce matin — s'assurer qu'il y ait de la place sur un site Web — ne coûteraient pas très cher. Les intéressés demanderaient à Service Canada la démarche à suivre pour lancer leur propre entreprise. On leur dirait quels formulaires remplir, quels impôts payer et on leur fournirait de l'information sur ce qui se fait dans leur domaine.
    Parallèlement, lorsque des parties intéressées demandent de l'argent pour créer de la musique, il serait bien que le Fonds de la musique du Canada ait une section les informant qu'une fois qu'elles ont créé leur musique, elles peuvent en tirer de l'argent pas seulement de la vente et des tournées, mais en percevant des droits. Là aussi, je suis certaine que les détenteurs de droits et Connect Music Licensing seraient ravis de faciliter l'accès à cette information en collaboration avec le gouvernement.
    Je n'ai pas de réponse au sujet des ressources institutionnelles pour la commission du droit d'auteur, mais je crois fermement que si nous pouvons renforcer son rôle en tant que bureau de développement des affaires, les nouveaux revenus pourraient contribuer au financement de ces ressources.
    Pour ce qui est du troisième élément, l'octroi de licence des institutions, cela découle de l'information et de la facilitation, et Connect Music Licensing est là pour vous aider.
    Merci.
    Monsieur Dykstra, vous avez sept minutes.
    J'aimerais approfondir la question de l'éducation, car elle me semble très intéressante.
    Tout d'abord, je vous remercie d'être venus. J'apprécie le fait que vous ayez pu vous libérer. Plusieurs d'entre nous avons beaucoup à apprendre. Ces audiences nous permettent de nous informer.
    En ce qui concerne l'éducation, une des choses à faire c'est d'aller dans les salles de classe pour que les jeunes comprennent tout le travail que demande la création de musique, la création d'oeuvres culturelles, si vous voulez, et qu'ils comprennent au moins que cela coûte quelque chose ou qu'ils sachent qu'il faut qu'un prix y soit associé et qu'il faut qu'ils obtiennent leur musique de manière légitime.
    Je me demandais — pendant que John vous posait la question au sujet de l'éducation et que vous y répondiez — de quelle manière nous pourrions mettre en oeuvre une telle stratégie.
    Aujourd'hui, je me suis concentrée uniquement sur ce que fait Connect Music Licensing, c'est-à-dire percevoir les sommes dues aux détenteurs de droits et les leur remettre.
    Au risque de me répéter, je vous recommande vivement de lire The Next Big Bang, le rapport de Music Canada puisqu'il a justement examiné la question de l'éducation et ce qui pourrait être fait en salle de classe. Je pense que cela pourrait tout simplement être un volet de l'éducation du marché.
    Je vous recommande instamment ce rapport. Il est disponible sur son site Web et il est mis à jour régulièrement.

  (1150)  

    Très bien, merci.
    J'ai trouvé intéressant qu'un grand nombre de personnes qui connaissent l'existence du ministère du Patrimoine canadien se concentrent tous sur le Fonds de la musique du Canada et sur le moyen d'avoir accès à cet argent pour lancer leur carrière. J'ai trouvé cela fascinant. Ce n'est pas l'angle que vous avez abordé. En fait, vous vous êtes présenté comme un entrepreneur, un travailleur autonome qui essaie d'avoir assez de succès dans son entreprise pour pouvoir être indépendant et de pouvoir gagner votre vie et permettre au reste du groupe et tous ceux qui travaillent pour vous d'en faire de même.
    Vous avez présenté cela d'une manière très intéressante. J'aimerais que vous me parliez de votre accès à des ressources comme le Fonds de la musique du Canada. Lorsque votre groupe a commencé à se faire connaître et que vous êtes devenu plus populaire, vous vous êtes rendu compte que les tournées coûtent de l'argent, qu'il faut de l'argent pour composer de la musique, etc. À cette époque-là, est-ce que vous pensiez souvent au ministère du Patrimoine canadien ou au Fonds de la musique du Canada ou est-ce que vous essayiez plutôt de vous débrouiller sans demander l'aide du gouvernement?
    En général, notre maison de disques obtient des subventions pour aider à financer les tournées et l'enregistrement des disques. En général, nous ne nous préoccupons pas tellement nous-mêmes de trouver l'argent, car c'est la maison de disques qui s'occupe de ce genre de questions.
    Lorsqu'on débute, la maison de disques fournit de l'aide, mais après quelques années, en général, elle cesse de fournir cette aide. Elles aident encore, mais elles souhaitent que nous devenions indépendants financièrement. C'est difficile, mais c'est tout ce que je peux vous dire à ce sujet.
    Vous avez parlé de l'étalement du revenu et de la recherche d'une façon différente de payer des impôts, mais de payer des impôts sur un niveau de revenus plus uniforme plutôt que de payer de l'impôt sur des revenus très élevés pendant une année alors que vos revenus de l'année suivante seront peut-être beaucoup plus bas. Vous savez, je ne suis pas un fiscaliste et vous non plus, mais quelle serait la portée d'une telle mesure?
    J'ai déjà été membre du Comité des finances et lors des consultations prébudgétaires, on nous faisait des exposés à ce sujet. Les travailleurs autonomes ont souvent de bonnes années qui peuvent être suivies de mauvaises années et l'étalement du revenu leur permettrait de payer un peu moins d'impôt pour les très bonnes années et un peu plus pour les années un peu plus difficiles.
    Je me demande sur combien d'années vous aimeriez étaler le revenu.
    Probablement trois ou quatre ans, car souvent les choses changent d'une année à l'autre. L'an dernier, notre facture d'impôt était très élevée, car l'année précédente avait été vraiment très bonne pour nous. L'ennui, c'est que nous devons payer l'impôt l'année suivante. C'est assez dur. C'est une des raisons pour lesquelles j'ai été obligé de retourner couler du béton. Je coule du béton maintenant depuis quelques mois parce que nous n'avons tout simplement pas les moyens de payer ces impôts. C'est une grosse facture. C'est la principale raison.
    L'autre chose, et cette question s'adresse peut-être davantage à Brad, c'est ce que vous avez dit que vous faites pour vous assurer que les gens sachent... Je vais recommencer.
    Il semble que la plupart des jeunes ne sachent pas trop comment fonctionne l'industrie, c'est-à-dire comment obtenir de la musique. Lorsque j'étais jeune, nous achetions des disques et des CD. C'était notre seul moyen d'avoir accès à la musique, donc, automatiquement, dans la plupart des cas, nous payions pour un album. Aujourd'hui, c'est beaucoup plus facile. Quel rôle est-ce que vous ou votre maison de disques avez à jouer pour informer les gens?
    Je suis très intrigué par cette idée d'un programme d'éducation nationale que les écoles et les commissions scolaires pourraient utiliser pour faire comprendre aux jeunes que les artistes essaient de gagner leur vie et qu'ils ne les aident pas en volant leurs oeuvres.

  (1155)  

    En ce qui concerne un volet éducatif, c'est une initiative avec laquelle nous serions certainement d'accord. Les plus jeunes, et même certains adultes ne comprennent pas comment les musiciens gagnent leur vie. On s'imagine que ces gens-là mènent une vie remplie de tapis rouges, de smokings, de robes de bal, de fêtes somptueuses, de palaces et de Lamborghini; dans les faits, les situations comme celle décrite par Dave sont courantes, et bien différentes.
    Music Canada, dans son rapport, aborde la question de l'éducation, et Victoria en a parlé aujourd'hui. Il s'agit, entre autres, d'expliquer aux gens comment les artistes gagnent leur vie, qu'ils ont plusieurs sources de revenus, comme les ventes d'album réelles ou virtuelles, la vente d'articles promotionnels, et les tournées. Toutes ces sources de recettes — auxquelles s'ajoutent les droits perçus pour une chanson diffusée à la radio, pour les reproductions pour usage privé, et ainsi de suite — s'additionnent et composent le revenu. Il faut bien expliquer la situation, et créer des ressources vers lesquelles se tourner afin de bien comprendre comment les artistes gagnent leur vie.
    C'est bien différent de... Prenez l'exemple de quelqu'un qui se rend tous les jours au travail, n'a qu'un employeur, qu'un chèque de paie. Cette somme ne provient pas de sources multiples. C'est parfois difficile à comprendre, car notre perception est biaisée par ce que l'on voit à la télévision, dans les films, et ainsi de suite.
    Selon nous, l'intégration au système éducatif national devrait se faire tôt, plutôt que tard, dans la scolarité, et de manière cohérente.
    Merci beaucoup.
    Il ne nous reste que quelques minutes, mais je vais céder la parole à M. Lapointe.

[Français]

    Monsieur Lapointe, vous disposez de quatre minutes.

[Traduction]

    Monsieur Faber, si vous me permettez...

[Français]

    Je vous remercie de votre présence parmi nous aujourd'hui.
    J'aimerais profiter de l'occasion pour utiliser votre expérience comme un cas de figure, plus précisément pour parler des conséquences de l'état actuel de l'industrie pour les auteurs-compositeurs et les créateurs de chansons.
    Comme band, vous connaissez un bon succès en pop rock qui n'est quand même pas une musique alternative écoutée par peu de gens. Vous avez enregistré jusqu'ici trois albums.
    Pourriez-vous nous dresser un portrait un peu plus précis de la situation? Vous êtes auteur-compositeur dans band qui a du succès au Canada. À quoi ressemblent vos sources de revenu en comparaison avec ce que vous recevez comme auteur-compositeur? Malgré le fait que vous ayez un bon succès avec votre band, le touring et tout le reste, dans votre cas, à quoi ressemblent ces ressources?

[Traduction]

    Dans mon cas, je dirais que mes trois sources de revenus principales sont les concerts, les tournées, mais surtout les redevances que je perçois en tant qu'auteur-compositeur, ainsi que par la RACS de l'ACTRA. Je crois qu'il s'agit là de mes trois principales sources de revenus.

[Français]

    Pouvez-vous me donner un aperçu de la diffusion de vos albums en termes de ventes de CD et de téléchargements?

[Traduction]

    La chanson G-Get Up and Dance! a été notre plus grand succès, avec plus de 120 000 copies vendues au Canada. Nous avons également remporté des disques d'or pour quelques autres chansons.
    Pour ce qui est du support CD, je ne crois pas que nous ayons vendu plus de 20 000 copies de chaque album.

[Français]

    Donc, si j'ai bien compris, pour une formation de pop rock comme la vôtre, 120 000 téléchargements représentent un hit.
     C'est exact?

[Traduction]

    Oui, je dirais qu'une chanson à grand succès comme Call Me Maybe de Carly Rae Jepsen se vendra à 200 000 ou 300 000 exemplaires. La chanson G-Get Up and Dance! s'est hissée jusqu'en deuxième position des palmarès radio Top 40 au Canada, et il s'en est vendu de 120 000 à 130 000 exemplaires.

[Français]

    Dans l'état actuel de l'industrie, qu'est-ce que cela représente pour votre groupe au chapitre des revenus potentiels?
    L'idée ici est d'en venir à comprendre pourquoi les membres d'un groupe qui connaît du succès soient encore obligés d'avoir un emploi le jour après trois albums. Je voudrais simplement que les gens comprennent bien la situation.

[Traduction]

    Pardon, avez-vous dit...?

[Français]

    En tant qu'ingénieur du son, j'ai longtemps été proche de cette industrie. Je veux faire comprendre aux gens qu'en 1982, un succès comme le vôtre permettait de vivre dignement pendant au moins cinq ou dix ans, ce qui n'est plus le cas.
     Comme vous avez une expérience directe de cette situation, j'aimerais que vous nous parliez de votre réalité et des raisons pour lesquelles vous n'arrivez pas à vivre dignement malgré un pareil succès.

  (1200)  

[Traduction]

    Pour être tout à fait honnête avec vous, je ne saurais comment répondre à cette question, mais c'est peut être un problème de perception. Les gens qui nous voient sur les ondes de Much Music pensent qu'on est riche. Ils pensent qu'on est millionnaire, qu'on possède un manoir. Trois de nos chansons se sont hissées à la première place des palmarès de Much Music, mais j'habite encore un appartement dans le sous-sol de mes beaux-parents. Ils sont très gentils et m'offrent leur appui. C'est comme ça, de nos jours, être musicien. Le fait de passer à la télé ou d'avoir une chanson numéro 1 à la radio ne fait pas de nous des personnes riches, millionnaires, qui se promènent en Ferrari

[Français]

    Je pense que M. Lauzon voulait aussi formuler un commentaire.

[Traduction]

    Nous allons devoir conclure, mais je vous laisse 15 secondes.
    Il y a 20 ans, à l'époque des disques, chaque disque comportait de 13 à 15 chansons. Peu importe qu'ils se vendent à 20 000, 50 000 ou 100 000 exemplaires, les droits perçus pour chaque album vendu étaient multipliés par 15. On prélevait 8,3 cents par chanson du disque. Cela représentait près d'un dollar pour l'auteur-compositeur. Si on vend 20 000 exemplaires du disque, et que cela rapporte environ 1 $ par disque... Maintenant, avec le téléchargement, on vend les chansons à l'unité. Pour obtenir la même chose, il faut en vendre...
    ... 10 fois plus.
    ... ou 15 fois plus, seulement pour gagner la même chose que par le passé. On a également des rentrées d'argent grâce à la diffusion, aux spectacles, et ainsi de suite. C'est pourquoi, en ce qui concerne l'éducation... Voilà notre tâche principale: bien informer les gens.
    Sur ce, nous allons devoir conclure, je suis désolé. Nous accueillons un autre groupe de témoins. Mais je tiens à vous remercier de votre présence. Nous apprécions votre contribution à cette étude.
    Merci beaucoup. La séance est suspendue.

  (1200)  


  (1205)  

    La séance reprend.
    Tout d'abord, nous avons quelques problèmes techniques avec l'interprétation, mais le service est bel et bien assuré. Parfois, l'anglais prend la place du français et vice versa. Si la langue que vous entendez n'est pas celle de votre choix, tentez de changer de canal. Nous tentons de corriger la situation. La diffusion du comité se fait dans les deux langues, mais les canaux sont peut-être intervertis.
    Passons maintenant à notre second groupe de témoins.
    Nous accueillons aujourd'hui Solange Drouin, vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ).
    Nous accueillons également Stuart Johnston, président de la Canadian Independent Music Association, accompagné de Shauna de Cartier, présidente.
    De Vancouver, en Colombie-Britannique, M. Robert D'Eith, de la Music BC Industry Association se joint à nous par vidéoconférence.
    Nous allons commencer par Mme Drouin. Vous avez huit minutes, madame.

[Français]

[Traduction]

    Silence dans la salle, s'il vous plaît. Le premier exposé commence.
     Le chronomètre n'est pas encore en marche. Votre temps de parole commence maintenant.
    Merci, et j'espère que nous pourrons poursuivre nos discussions après 13 heures.
    Votre temps de parole de huit minutes débute maintenant.
    Merci.

[Français]

    Je m'appelle Solange Drouin et je suis vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l'ADISQ.
    J'aimerais d'abord vous remercier de nous avoir invités à participer à l'étude que vous avez commencée sur l'industrie canadienne de la musique et, entre autres, sur son financement.
    D'abord, j'aimerais dire quelques mots sur notre association. L'ADISQ est une association professionnelle qui représente les producteurs de disques, de spectacles et de vidéos oeuvrant principalement dans le marché de langue française du Canada.
    Notre association a plus de 35 ans et nous sommes actifs dans tous les domaines où les intérêts de nos membres sont en jeu — formation de la main-d'oeuvre, relations de travail, financement des entreprises, radiodiffusion et télécommunications —, ainsi qu'en promotion collective.
    Pour bien comprendre la réalité des deux marchés canadiens, francophone et anglophone, rappelons brièvement l'organisation de ce secteur au niveau mondial.
    Dans le monde, trois compagnies se partagent 80 % du marché. Ces compagnies, vous les connaissez. Ce sont Warner, Universal et Sony. Les autres 20 % du marché mondial sont occupés par une multitude de petites entreprises indépendantes dont la proportion et le poids, dans un marché, varient grandement d'un pays à l'autre.

  (1210)  

[Traduction]

    Un instant, s'il vous plaît. Pour l'instant, nous n'entendons pas l'interprétation vers l'anglais. Veuillez patienter un moment, s'il vous plaît. Je suis désolé de ce contretemps.
    Donc, vous ne me comprenez pas si je parle français. C'est extraordinaire.
    Veuillez patienter un instant. Nous croyons pouvoir régler ce problème technique.
    Madame Drouin, auriez-vous l'amabilité de recommencer votre exposé?
    Mme Drouin: Bien sûr.
    Le président: Nous sommes sincèrement désolés de ce petit problème technique.
    Ce n'est pas grave. Je comprends.

[Français]

    Je vais faire un test.

[Traduction]

    Est-ce que tout fonctionne?
    Oui, on dirait que ça fonctionne sur le canal anglais.
    Très bien, reprenons.
    Merci. Nous remettons le chronomètre en marche.
    Je vais reprendre du début.

[Français]

    Je m'appelle Solange Drouin et je suis vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l'ADISQ.
     J'aimerais d'abord vous remercier de nous avoir invités à participer à l'étude que vous avez commencée sur l'industrie canadienne de la musique et, entre autres, sur son financement.
    D'abord, j'aimerais dire quelques mots sur notre association. L'ADISQ est une association qui représente les producteurs de disques, de spectacles et de vidéos oeuvrant principalement dans le marché de langue française du Canada.
    Notre association a plus de 35 ans et elle est active dans tous les domaines où les intérêts de nos membres sont en jeu — formation de la main-d'oeuvre, relations de travail, financement des entreprises, droit d'auteur, radiodiffusion et télécommunications —, ainsi qu'en promotion collective.
    Pour bien comprendre la réalité des deux marchés canadiens — francophone et anglophone —, rappelons brièvement l'organisation de ce secteur au niveau mondial.
    Dans le monde, trois compagnies se partagent 80 % du marché de la musique. Ces compagnies, vous les connaissez. Ce sont Warner, Universal et Sony. Les autres 20 % du marché mondial sont occupés par une multitude de petites entreprises indépendantes dont la proportion et le poids, dans un marché, varient grandement d'un pays à l'autre.
    Il existe une grande distinction entre la pratique de ces trois grands groupes et celle des sociétés indépendantes. Les majors concentrent leurs efforts à développer la carrière d'un nombre limité d'artistes sur un marché le plus large possible. De leur côté, les indépendantes, que la CIMA et l'ADISQ représentent, visent surtout à développer la carrière des artistes locaux, d'abord et avant tout sur le marché local.
    Au Canada, cette logique de développement a cours avec une nuance très importante pour le Québec. En 2011, alors que les majors ne sortaient que 13 % des albums d'artistes canadiens, les indépendantes, représentées par la CIMA et l'ADISQ, étaient responsables de 87 % des albums de nos artistes.
    Par contre, les majors s'emparent d'environ 70 % des revenus totaux de l'industrie canadienne, surtout grâce à la distribution des artistes internationaux. Cela signifie que l'activité de distribution des majors des artistes internationaux est très importante, laissant ainsi souvent peu de place aux artistes locaux sur leur propre marché.
    Sur le marché francophone canadien, la situation est différente. Le nombre d'artistes locaux associés aux majors est minime, même anecdotique. Les sociétés indépendantes sont responsables de plus de 95 % des albums des artistes locaux, et ces artistes occupent, bon an mal an, entre 40 % et 50 % de la totalité des ventes au Québec.
    Cela dit, bien que les résultats en parts de marché soient fort différents entre le marché anglophone et le marché francophone canadiens, il est clair que les grands responsables du développement de la carrière des artistes d'ici sont les indépendantes, que nous représentons, et non les multinationales.
    Je vous mets donc en garde contre ceux qui prétendent représenter l'ensemble du secteur canadien de la musique, alors que la majorité de leurs revenus est tirée de la distribution des artistes internationaux.
    Au regard du financement public du secteur canadien de la musique, qu'est-ce que cela signifie? L'objectif poursuivi par le gouvernement canadien en matière de financement public de la musique est et a toujours été de s'assurer qu'il sert à donner accès au public canadien à un réservoir durable de musique d'ici, tout en favorisant les grands responsables de ces productions, à savoir les entreprises et les artistes canadiens. Ce financement a augmenté au fil des ans jusqu'à atteindre 25 millions de dollars.
    D'ailleurs, dans le dernier budget fédéral, l'entièreté de cette somme a été pérennisée, à notre plus grande satisfaction. Ces sommes ont été gérées par un nombre limité d'administrateurs que sont Musicaction, FACTOR et Patrimoine canadien. Ces entreprises et ce ministère ont atteint une très belle maturité dans leurs programmes, qu'ils ont développés avec une logique d'intervention correspondant aux besoins exprimés par le milieu canadien de la musique.
    Cela dit, est-ce que le financement public permet de répondre à tous les besoins de l'industrie? Certainement pas. Par contre, à son niveau actuel, il joue toujours, quoique plus difficilement, son rôle de levier essentiel pour maintenir un certain niveau de production de contenus musicaux nationaux et un rayonnement adéquat conséquent. Mais pour combien de temps encore?

  (1215)  

    Vous le savez, le milieu de la musique a subi de grands bouleversements depuis le développement rapide des technologies numériques. Que l'on pense seulement — vous en avez entendu parler — à la baisse dramatique du nombre de ventes de disques. Tous les marchés dans le monde ont connu des baisses allant de 30 à 60 % de leur marché. Dans certains cas, les ventes numériques ont amorti un peu la chute sans jamais la freiner.
    Au Québec, par exemple — c'est un chiffre important —, alors que nous vendions 13 millions d'albums physiques en 2005, nous en vendions 6 millions en 2013. Toutefois, ce n'est pas le seul changement majeur à être survenu dans notre secteur.
    Dans son rapport publié la semaine dernière, l'International Federation of Phonographic Industry, l'IFPI, est catégorique. L'avenir de notre industrie se dirige résolument vers la consommation de la musique par l'entremise des services de musique en ligne qui donnent accès à un très large répertoire. Ce sont des services comme DEEZER, Spotify, rdio, Beatsmusic et Google play.
    Selon l'IFPI, il y aurait aujourd'hui dans le monde des services qui rendraient disponibles au public 38 millions de chansons. Cette nouvelle réalité transforme complètement le niveau et la forme des revenus que peuvent tirer tous les partenaires du processus de création du contenu musical. Alors que la vente d'un CD générait des dollars à se répartir entre les partenaires, les services de musique en ligne légaux génèrent une multitude de microrevenus à chaque passage d'une chanson. Cela nous conduit à un paradoxe difficile à expliquer.
    Alors que la musique n'a jamais été aussi disponible et utilisée, les revenus qu'elle génère pour les partenaires de la production de contenus n'ont jamais été aussi maigres. Car, il faut bien se le dire, il y a des revenus et ils sont importants. Toutefois, ce sont d'autres acteurs que ceux du monde de la musique qui les accaparent et les gardent. Il est quand même aberrant de penser qu'un secteur important de notre économie fait largement usage d'un bien, en l'occurrence la musique, pour vendre son propre service — qu'on pense à Google ou à un service d'accès à Internet — sans pour autant rémunérer les propriétaires du bien qu'il utilise pour vendre son service.
    Serait-il pensable, par exemple, qu'en agriculture, on laisse sans rémunération les producteurs de blé au motif que les distributeurs rendent ce blé accessible au public et qu'ils doivent donc soutenir leur réseau de distribution? Ce serait totalement impensable et aberrant.
    Le gouvernement canadien et certains de ses organismes ont entre les mains plusieurs outils qui permettraient de corriger cette situation totalement déséquilibrée dans le domaine de la musique, notamment par ses compétences en matière de droit d'auteur, de réglementation de la radiodiffusion et des télécommunications, de fiscalité internationale, de financement et ainsi de suite. Plus le gouvernement canadien tardera à agir en utilisant ses outils, plus il sera nécessaire d'injecter de l'argent public dans le secteur canadien de la musique pour assurer aux Canadiens l'accès à leur musique.
    Il m'apparaît tout à fait injuste de penser que le gouvernement fera porter un plus grand poids sur les épaules des contribuables canadiens pour le développement de notre secteur, alors qu'il serait possible de faire contribuer les principaux utilisateurs de notre musique qui, dans plusieurs cas, sont des entreprises étrangères.
    Nous demandons donc au comité de porter une attention particulières dans ses travaux pour identifier de façon prioritaire les actions à prendre rapidement face à ces grands utilisateurs de musique pour favoriser un accès durable au public canadien de notre musique dans toute sa richesse et sa diversité.

  (1220)  

[Traduction]

    Nous pourrons approfondir pendant la série de questions. Je vous remercie.
    Passons maintenant à Stuart Johnston et Shauna de Cartier de la Canadian Independent Music Association. Vous avez huit minutes en tout.
    Bonjour. Je suis président de la Canadian Independent Music Association. Je suis accompagné aujourd'hui par Shauna de Cartier, propriétaire de la maison de disques et de gérance d'artistes torontoise Six Shooter Records, et actuelle présidente du conseil d'administration de mon organisation.
    Merci beaucoup de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui.
    Vous avez tous et toutes un rôle très important à jouer dans le succès de l'industrie de la musique au Canada, et nous tenons à vous en remercier du fond du coeur. Nous nous en voudrions également de ne pas profiter de l'occasion pour remercier le gouvernement fédéral qui, en plus de renouveler le fonds de la musique du Canada l'a fait sur le long terme. Cette décision envoie un message clair à la communauté des affaires, qui sait maintenant qu'elle pourra compter sur cet appui pendant plusieurs années, ce qui est très important compte tenu de la planification sur trois à cinq ans faite par les compagnies de disques.
    Il faut bien comprendre que l'industrie de la musique au Canada n'est pas homogène. Elle est composée d'un ensemble de petites entreprises canadiennes, dont la moitié sont à propriétaire unique et dont 10 % génèrent plus de 500 000 $ de recettes annuelles. Il s'agit d'entrepreneurs et d'artistes qui travaillent sans relâche afin de pouvoir vivre de leur passion.
    Mon organisation est l'association professionnelle nationale à but non lucratif qui représente le secteur de l'industrie musicale indépendante anglophone qui appartient à des intérêts canadiens. Notre mission principale est de défendre, appuyer, et promouvoir l'industrie de la musique, et ce, tant au Canada qu'à l'étranger. Nous comptons 220 membres, situés dans les 10 provinces et un territoire. Collectivement, nos membres sont responsables d'environ 2 200 emplois directs, et représentent plus de 5 100 artistes. Nos membres participent à tous les aspects de l'industrie de la musique et des secteurs connexes, il s'agit notamment de maisons de disque, de producteurs, de gérants, et d'autres professionnels de l'industrie de l'enregistrement et de la vidéo.
    Pris dans son ensemble, le secteur de la musique canadienne en langue anglaise est imposant. Il contribue au moins 303 millions de dollars par année au PIB du pays, et emploie plus de 13 000 personnes. Un indicateur économique important pour tous les secteurs est la mesure du rapport d'intensité, soit la proportion de son activité économique qui reste dans l'économie canadienne. Selon des recherches effectuées par notre association, chaque tranche de 10 millions de dollars de recettes générées par l'industrie indépendante ajoute 8,2 millions de dollars à l'économie canadienne, soit un rendement de 82 %.
    D'un simple point de vue fiscal, les gouvernements fédéral et provinciaux du Canada reçoivent, annuellement, un bon taux de rendement de la part de l'industrie de la musique canadienne. En 2011, le secteur de l'industrie musicale indépendante en langue anglaise a payé 93,2 millions de dollars en impôt aux gouvernements provinciaux et fédéral. En moyenne, chaque dollar de fonds publics octroyé à l'industrie de la musique dans le cadre de programmes tels que le fonds de la musique du Canada a généré 1,22 $ d'impôt, ce qui représente un profit net pour les gouvernements.
    Excusez-moi un instant.
    Je pense que M. D'Eith a des problèmes.
    Je pense que si vous changez de canal, vous pourrez entendre la version anglaise. Est-ce que ça fonctionne?
    Vous ne pouvez pas changer de canal vous-même?
    Ça va. J'entends l'anglais maintenant. Ça va, ne recommencez pas.
    Je suis désolé pour les pépins.
    Allez-y.
    Très bien, ça va. Merci.
    Notre industrie doit cependant relever bon nombre de défis. En tant que petites entreprises qui découvrent et font évoluer des artistes canadiens, qui créent et mettent en marché de la musique, notre principale difficulté est l'accès aux capitaux. En général, les banques ne prêtent pas d'argent à l'industrie de la musique. Nous produisons de la propriété intellectuelle. Nos chansons sont éphémères. C'est pourquoi les gouvernements sont d'importants partenaires. Les capitaux de démarrage que vous fournissez contribuent à la réussite commerciale, aux retombées économiques, et à la création d'emplois dans notre industrie.
    La concurrence, à l'échelon national et international, est un défi constant. À titre d'exemple, et comme l'a évoqué Solange, les grandes maisons de disques comme Sony, Warner et Universal, sont à la fois nos principaux partenaires commerciaux et nos principaux concurrents. Comment est-ce possible? En fait, environ 85 % des indépendants comme la maison de disque de Shauna ont recours aux services de distribution de l'une des grandes compagnies de disques, ou encore signent des ententes de promotion et de commercialisation avec ces dernières. C'est une relation de symbiose à plusieurs égards, et c'est à l'avantage de toutes les parties.
    Néanmoins, de façon plus générale, nos petites entreprises doivent se battre pour obtenir une part du marché et de l'espace sur les tablettes, qu'il s'agisse de tablettes physiques ou numériques. Par exemple, Universal, depuis qu'elle a acquis la maison de disques EMI britannique, possède près de la moitié de la totalité du marché. L'an dernier, plus de 76 % des disques vendus au Canada ont été enregistrés par des artistes de renommée internationale, signés par les grandes maisons de disques, tels que Beyoncé et Lady Gaga. La part du marché national revenant aux artistes canadiens était de 23 % l'année dernière, dont 14 % d'artistes indépendants anglophones et francophones. Nous nous réjouissons du fait que 60 % des ventes enregistrées par les artistes canadiens l'ont été par des membres de la CIMA ou de l'ADISQ. Quarante pour cent des ventes canadiennes provenaient d'artistes relevant d'une grande maison de disque.
    Reste qu'il est difficile pour des entreprises canadiennes, de la taille de celle de Shauna, de rivaliser contre les grandes maisons de disque, qui ont des moyens financiers considérables et une grande force de mise en marché à l'échelle internationale. Voilà pourquoi ces entreprises canadiennes ont besoin d'appuis constants pour la production, la mise en marché et la promotion.
    Les changements technologiques de la dernière décennie ont eu des répercussions importantes sur l'industrie. Le piratage numérique et le partage illégal de données sont monnaie courante depuis près de 10 ans, et la technologie a influé sur le comportement des consommateurs. Par le passé, nous avions un marché d'albums. Mais, de nos jours, les consommateurs préfèrent acheter des chansons à l'unité, ou encore écouter de la musique en flux continu, ce qu'on appelle également la location de musique. Ces changements ont bouleversé le modèle de revenu de l'industrie. Le nombre d'unités vendues et les recettes par unité ont chuté de façon spectaculaire. Le secteur mise dès lors davantage sur une diversification des revenus, une multitude de sources, tantôt publique, tantôt privée, ainsi que sur les fonds pour la radiodiffusion obtenus du CRTC pour le développement de contenu canadien (DCC).
    Les avancées numériques ont à la fois aidé et nui à l'industrie. Il n'a jamais été aussi facile d'enregistrer et de distribuer de la musique à l'échelle internationale. La communication avec les admirateurs est plus directe et plus interactive que jamais. Cependant, bien que l'enregistrement amateur soit plutôt bon marché, l'enregistrement professionnel coûte de plus en plus cher, et il y a une stratification des coûts de production. Il s'avère de plus en plus difficile d'attirer l'attention du marché, de se démarquer. Les ressources dans le domaine sont pour nous une priorité.
    La technologie, à elle seule, ne peut garantir que l'oeuvre d'un artiste sera entendue, ou découverte. Le marché musical est également international. La musique ne connaît pas de frontières, c'est pourquoi nos efforts de mise en marché, de communication avec les admirateurs, et de promotion de nos artistes doivent se faire sur plusieurs fronts à la fois. Par conséquent, l'exportation est un élément clé de notre stratégie internationale. Or, contrairement à nombre de ces principaux concurrents, le Canada n'a pas d'organisation officielle consacrée à l'exportation de musique. Ces dernières années, notre association a assumé ce rôle, de facto, grâce à l'appui et aux partenariats avec l'ADISQ, Music BC, et d'autres associations de l'industrie de la musique. Le gouvernement est un de nos partenaires clés, et se doit de continuer à l'être, alors que nous explorons, ensemble, de nouveaux débouchés sur les marchés étrangers.
    Shauna.

  (1225)  

    Je suis venue pour vous donner un exemple concret du Fonds de la musique du Canada en action. J'ai déménagé à Toronto en 2000 avec un prêt de 15 000 $ de mon frère et deux cartes de crédit. Après quatre ans de travail acharné, je suis devenue admissible au fonds FACTOR. Depuis, j'ai monnayé ce soutien afin de lancer plus de 80 albums de dizaines d'artistes canadiens, et de coordonner des milliers de concerts dans le monde entier. J'ai également lancé un festival près d'Edmonton qui attire une dizaine de milliers de personnes. Maintenant, plus de 50 personnes gagnent leur vie grâce à Six Shooter. Les disques Six Shooter est un exemple typique de la façon par laquelle votre soutien peut avoir un effet multiplicateur et se convertir en infrastructure canadienne d'une industrie culturelle dynamique.
    Pour terminer, bien que le secteur et la commercialisation de la musique aient des aspects multidimensionnels, il reste que tout commence par une chanson. Le milieu de la musique indépendante canadienne fait oeuvre de pionner dans la découverte et le développement des artistes, et dans leur commercialisation partout au monde.
    Les clés de notre secteur restent la production, la commercialisation et les tournées. Ce sont les trois piliers de notre secteur, mais tout commence par la musique. Aussi, les programmes du Fonds de la musique du Canada doivent continuer d'appuyer ces éléments clés. Ils sont essentiels à notre secteur. Ces programmes font en sorte que les artistes puissent être rémunérés convenablement, et assurent le succès de notre musique non seulement au Canada mais partout au monde, et ce grâce à des stratégies d'affaires solides. Tout nouveau programme devrait être financé en dehors du financement de base du Fonds de la musique du Canada.
    Je vous remercie de reconnaître la valeur qu'apporte la musique canadienne à notre pays, tant sur le plan culturel que financier.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Vancouver, où nous attend Robert D'Eith, directeur exécutif de la Music BC Industry Association. J'espère que les problèmes techniques ont été réglés.
    Vous avez huit minutes, monsieur.

  (1230)  

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'appelle Bob D'Eith. Je suis le directeur exécutif de la Music BC. Je suis également le président suppléant du Conseil canadien des associations de l'industrie musicale.
    Permettez-moi de vous donner un peu de contexte. Music BC est une association provinciale qui représente l'industrie de la musique. Nous offrons des services de représentation et de développement artistique, des programmes de sensibilisation à l'industrie musicale, des occasions de réseautage, et des initiatives de commercialisation des exportations et du financement. Nous avons 1 000 membres en règle.
    Le conseil est un groupe représentant les associations provinciales et territoriales de l'industrie de la musique. Il représente environ 10 000 artistes, maisons de disque, éditeurs, gérants, studios et producteurs qui proviennent de partout au Canada. Son mandat est d'être le porte-parole national des associations provinciales et territoriales de l'industrie de la musique. Ses membres sont Music Newfoundland and Labrador, Music Nova Scotia, Music Prince Edward Island, Music NB, Music and Film in Motion Northern Ontario, Manitoba Music, SaskMusic, Alberta Music, Music Yukon, Music NWT et Music BC. Pour plus de clarté, j'appellerai ce regroupement l'AIM (association de l'industrie musicale). Veuillez noter que Music Ontario est gérée par la CIMA et ne fait donc pas partie de notre organisation.
    Voilà pour le contexte.
    Le Conseil canadien des associations de l'industrie musicale et Music BC souhaiteraient remercier le gouvernement du Canada ainsi que le ministère du Patrimoine canadien d'avoir renouvelé le fonds de la musique. Ces fonds ont créé des partenariats privés tels que FACTOR et Musicaction et cela a permis au Canada de s'établir en tant que chef de file dans le monde de la musique. Par rapport à notre population, nous avons fait connaître un grand nombre d'artistes de réputation internationale et je crois que cela est en grande partie attribuable au soutien public que l'on accorde à l'industrie de la musique au Canada. Je vous en remercie.
    Les membres de l'AIM ont grandement profité du programme d'initiative collective de Patrimoine Canada qui était géré par FACTOR. Ces programmes ont permis à l'AIM d'appuyer les collectivités de bon nombre de façons. Cela a permis de sensibiliser les artistes et l'industrie de la musique grâce à divers programmes touchant notamment le développement des compétences en marketing des médias sociaux ou encore le marketing en ligne, les réservations, les tournées, les contrats musicaux pour la télévision et les films, l'élaboration d'initiatives numériques en ligne telles que la base de données nationale pour les tournées. Il y avait également le financement de la commercialisation à l'exportation dans les marchés clés tels que South by Southwest, The Great Escape au Royaume-Uni et BIGSOUND en Australie, pour ne vous en nommer que quelques-uns. Ces programmes ont permis de faire intervenir des acheteurs internationaux dans des programmes comme Showcase PEI, BreakOut West et les ECMA. Nous avons pu créer des partenariats dans l'industrie musicale tels que la Western Canadian Music Alliance, qui produit BreakOut West. De plus, cela a permis d'avoir des conférences extraordinaires et de célébrer le talent canadien dans, notamment, les Western Canadian Music Awards, les ECMA, CMW et North by Northeast. Ces programmes sont fantastiques et sont essentiels à la santé de l'industrie musicale canadienne. Nous voulons particulièrement remercier le gouvernement d'avoir ainsi continué d'appuyer la musique canadienne.
    Si vous me le permettez, j'aimerais maintenant vous mettre un peu en contexte sur la situation régionale.
    Napster a bien entendu changé tout le paysage de l'industrie en 2000. Même si le Napster initial n'est plus des nôtres, il a mené à l'érosion du contrôle qu'exerçaient les maisons de disque principales sur la distribution à l'échelle internationale. Au cours des 10 années suivantes, il y a eu un changement fondamental dans la distribution à l'échelle internationale de la musique enregistrée. Les ventes physiques, qui représentaient l'assise même de la stabilité financière des maisons de disque, ont chuté de manière spectaculaire partout dans le monde. Malheureusement, des outils de téléchargement légitimes en ligne, tels que iTunes, n'ont pas permis de combler l'écart. Par conséquent, le revenu mondial des ventes de disques a été réduit de moitié et les maisons de disque principales ont dû réduire considérablement leurs effectifs.
    Au cours des années 1970 jusqu'aux années 1990, les maisons de disque reconnaissaient le fait que les artistes avaient besoin de peaufiner leur talent au fil de plusieurs albums. La plupart des maisons de disque importantes de l'époque ne s'attendaient pas à voir un retour sur leur investissement jusqu'à ce que l'artiste ne fasse paraître son troisième album. À l'heure actuelle, bon nombre d'artistes sont chanceux s'ils font sortir un simple. L'environnement est tellement compétitif. Les artistes ne signent d'habitude pas de contrat sans avoir investi considérablement eux-mêmes ou avoir été promus par une maison de disques indépendante.
    Au Canada, environ 80 % des maisons de disque indépendantes et toutes les maisons de disque importantes se retrouvent à Toronto. En revanche, les artistes nouveaux et en émergence se retrouvent partout au Canada. Un effort concerté a été déployé par Musique Canada afin de faire fructifier l'industrie centrée en Ontario. Cela a fait en sorte que le gouvernement ontarien a créé un fonds de 45 millions de dollars pour les sociétés localisées en Ontario. Cela comprend les maisons de disque importantes étrangères.

  (1235)  

    C'est une initiative sans précédent dans l'histoire du financement canadien. Heureusement, grâce au lobbying de la part de CIMA, le secteur indépendant ontarien a également réussi à avoir accès à ce financement.
    À l'heure actuelle, les rapports annuels indiquent que 59 % du financement de FACTOR sont versés à l'Ontario. Cinquante pour cent du financement de Radio Starmaker CCD sont également versés à cette province. Au Canada anglais, la plupart du financement entrepreneurial musical est attribué aux sociétés ontariennes. Étant donné que 80 % de ces sociétés se retrouvent dans le sud de l'Ontario, cela peut sembler logique, mais, du point de vue régional, cela crée un certain déséquilibre.
    L'industrie musicale a été redéfinie en raison des pressions de marché. Comme je l'ai dit, afin d'attirer l'attention des maisons de disque importantes, telles que Shauna, les artistes nouveaux et émergents sont souvent obligés de se produire eux-mêmes. On constate ce phénomène partout au pays, dans les collectivités grandes ou petites. À l'échelle nationale, les artistes et leurs équipes créent des micro-entreprises afin de pouvoir développer leur carrière. Au cours des 10 dernières années, l'aide que leur fournissent les associations musicales provinciales et territoriales a crû de manière exponentielle.
    Bien que le Conseil canadien des associations de l'industrie musicale soit le premier à reconnaître et à louer le travail extraordinaire que fait MEC, FACTOR, Musicaction et Radio Starmaker, nous vous soumettons respectueusement que les changements à apporter dans le marché devraient mener à un plus grand développement artistique à l'échelle locale. Il y a des modèles qui fonctionnent. Nous avons ainsi créé en Colombie-Britannique un programme intitulé Peak Performance Project. Ce programme permet d'allier sensibilisation, marketing et promotion, et utilise chaque sou qui a été versé en commandites. Cela nous permet également d'être actifs à l'échelle locale. Et cela a connu un énorme succès. Nous avons ainsi eu deux personnes qui ont gagné un prix Juno, des douzaines de disques qui ont été enregistrés, des tournées internationales et beaucoup de temps d'antenne.
    Les associations de l'industrie musicale fournissent un développement artistique local. Nous aimerions que le ministère du Patrimoine canadien envisage un rééquilibrage. En d'autres termes, du point de vue de l'Association des industries musicales, nous aimerions que l'on dépense plus de fonds dans les régions pour promouvoir le développement des artistes à l'échelle locale.
    Pour conclure, j'aimerais répéter que les associations de l'industrie de la musique et le Conseil canadien des associations de l'industrie musicale appuient pleinement les points de vue exprimés par l'ADISQ et la CIMA dans les allocutions précédentes. Il ne fait aucun doute que FACTOR, Radio Starmaker et MEC sont des programmes qui sont tout à fait essentiels. Nous souhaitons simplement un rééquilibrage.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Monsieur Boughen, vous avez sept minutes.
    J'aimerais remercier les représentants de l'industrie de la musique de passer une partie de la journée avec nous. Nous apprécions votre point de vue. Je suis ravi de vous avoir entendus.
    Il me semble qu'il y a plusieurs organisations différentes qui prennent part à l'industrie de la musique. Est-ce que les divers groupes ont tenté de se rassembler en un seul groupe, qui réunirait non seulement les artistes, mais également les administrateurs et les développeurs? Est-ce que l'industrie a envisagé de créer un tel groupe ou n'en a-t-il pas encore été question?
    Oui. Il existe plusieurs organisations qui représentent les divers aspects liés à l'industrie de la musique. Comme je l'ai dit au début de mon allocution, l'industrie n'est pas homogène. Chaque composante individuelle a besoin d'avoir sa propre voix, car elle est unique.
    Cela dit, l'industrie se rallie autour de bon nombre d'enjeux ou programmes et services. Je ne sais pas si vous l'avez remarqué, mais nous nous connaissons tous. Nous connaissons les intervenants du panel précédent et nous nous connaissons tous autour de la table. Shauna et Bob siègent tous les deux à mon conseil. Nous travaillons également souvent avec l'ADISQ.
    Alors oui, nous nous rassemblons à titre d'industrie. Comme je l'ai mentionné, la CIMA agit à titre de bureau d'exportation. Nous ne pourrions pas le faire sans l'appui de nos partenaires dans l'industrie. Nous nous apprêtons à mettre sur pied un groupe pour coordonner tous ces efforts, partager les renseignements, les stratégies sur le marché et pour travailler ensemble. En d'autres termes, nous travaillons ensemble au besoin, mais nous défendons séparément les particularités de nos clientèles respectives.

  (1240)  

    D'accord.
    J'ai une question générale, que j'adresse à tous. Selon vous, quel est le rôle du gouvernement pour favoriser l'industrie et l'aider à croître, tout en continuant sur la voie où tout semble avancer à un bon rythme? Les autres témoins ont proposé quelques suggestions portant sur l'impôt sur le revenu.
    Selon vous, comment le gouvernement pourrait-il s'impliquer pour faciliter la poursuite de la croissance et des avancées?

[Français]

    À ce sujet, nous préconisons une approche très large. On ne peut pas considérer l'industrie de la musique sous un seul angle. La musique doit être créée, produite, commercialisée, diffusée et distribuée. Il faut donc que l'ensemble de ces composantes soit pris en compte. Vous voulez parler aujourd'hui de financement. Si vous nous demandez s'il faudrait plus d'argent, nous allons évidemment vous répondre oui, mais nous sommes conscients que les finances publiques sont ce qu'elles sont.
    Par contre, pour ce qui est des droits d'auteur, vous disposez d'autres outils en tant que gouvernement. Comme je le disais, il y a notamment la réglementation et la fiscalité internationale, au sujet de laquelle vous avez d'ailleurs lancé une consultation dans le cadre du budget. Il faut considérer tous ces outils de façon globale en vue d'aider l'ensemble de l'industrie sous toutes ses facettes. On ne peut pas la « saucissonner » et lui appliquer une approche en silo; il faut la considérer globalement. Cela passe par l'éducation, bien sûr, et c'est important, mais ça implique une longue période. Or nous souhaitons que les effets se fassent sentir le plus rapidement possible. Étant donné l'état de l'industrie, il ne faut pas attendre d'avoir marqué des points en matière d'éducation pour intervenir sur d'autres plans.

[Traduction]

    En tant qu'artiste, Shauna, quelle est votre opinion? Quel rôle le gouvernement peut-il jouer pour vous aider à poursuivre votre carrière?
    Je dois préciser que je ne suis pas une artiste.
    M. Ray Boughen: Oh, excusez-moi.
    Mme Shauna de Cartier: J'ai une maison de disques, et je suis également gérante d'artistes. À titre de gérante d'artistes, je travaille en étroite collaboration avec des artistes et des interprètes qui enregistrent des disques et font des tournées nationales et internationales.
    Je ne saurais trop insister sur l'importance du soutien de FACTOR. Grâce à la fondation, un artiste qui a du mal à s'en sortir peut trouver une façon de produire son disque, de faire même seulement une tournée au Canada, de partir de Vancouver pour aller à Edmonton, Winnipeg et Toronto. C'est ce que nous savons faire. Ce soutien, je pense, a permis la création d'une infrastructure, ici au Canada, d'une communauté indépendante et durable. Ce que nous voulons dire, principalement, c'est que nous sommes heureux que le financement soit permanent, en quelque sorte.
    Nous avons de nombreuses autres idées. Par exemple, tous les artistes indépendants ont besoin d'aide pour exporter leurs oeuvres. C'est ce que fait la CIMA. Nous aurions besoin de soutien pour faire mieux et plus, mais nous ne voulons pas que cela se fasse aux dépens de ce qui est important: la production, le marketing et les tournées.
    Qu'est-ce qui est le plus important? On en a parlé déjà ce matin.
    C'est la production, comme l'enregistrement des disques, le marketing, qui est assez évident, et les tournées.
    Bien. Merci.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Il vous reste environ une minute.
    Puis-je intervenir?
    Oui, allez-y, Bob.
    Merveilleux.
    Je suis tout à fait d'accord avec Shauna. Je pense que les programmes existants sont excellents. Merci de continuer de les appuyer.
    Comme je l'ai dit, je pense qu'un écart a été créé en raison de l'industrie au niveau régional. Je pense que les artistes ont besoin de se perfectionner pour plaire aux maisons de disques comme celle de Shauna, les grandes maisons de disques, et les autres. Je pense réellement que nous avons besoin d'une stratégie afin d'aider les artistes à sortir de chez eux et à se faire remarquer de l'industrie. Un écart a été créé, et je pense que si nous avions une stratégie pour aller de l'avant, nous pourrions combler cet écart un peu mieux.
    Nous faisons du bon travail; FACTOR fait un excellent travail en ce sens, mais je pense qu'il y a d'autres possibilités de combler cet écart au niveau régional.

  (1245)  

[Français]

    Monsieur Nantel, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais m'assurer d'une chose, monsieur D'Eith. M'entendez-vous en français ou en anglais?

[Traduction]

    Je vous entends en anglais présentement.

[Français]

    Bon, c'est merveilleux. Je ne savais pas que j'avais le don d'ubiquité linguistique.
    Tout d'abord, je tiens à vous dire à quel point je trouve fantastique de voir ici un groupe de gens qui proviennent de partout au Canada et qui ont des intérêts artistiques et culturels communs. Je trouve ça très enthousiasmant. Je pense que nous apprenons tous beaucoup.
    De toute évidence, cette industrie vit des défis spéciaux intimement liés à la technologie. Il faut être bon joueur et reconnaître que l'industrie du disque est très heureuse des sommes qui ont été sécurisées. On parle de 25 millions de dollars. Vous avez dit à plusieurs reprises que c'est tant mieux pour le gouvernement dans ce cas.
     Par ailleurs, les gestionnaires de programmes font un bon travail en ce qui a trait à la production et à l'activité fondamentale dont on a parlé jusqu'ici. Ces enveloppes, ces fonds et cette expertise gouvernementale, tout cela y correspond bien. J'aimerais vous entendre parler du fait qu'il va falloir alléger notre façon d'analyser et bouger plus rapidement pour faire face à ces changements.
    Madame Drouin, vous avez cité des chiffres provenant de l'IFPI qui indiquent jusqu'à quel point on s'en va vers la diffusion en mode continu. Je vais vous donner un exemple. Hier, en me préparant pour la réunion d'aujourd'hui, j'ai découvert qu'il y avait un nouvel album de Hall and Oates. Cela révèle mon âge. Hall and Oates est un duo des années 1970. Je l'ai tout écouté, je n'ai rien payé et ce n'était pas illégal. Il y a donc un problème. Ce n'est pas le fait que ce soit gratuit. En effet, c'est tant mieux pour tout le monde, mais une entente a été signée avec ces services de diffusion en mode continu. J'aimerais savoir si les conditions sont favorables pour vous. Comment signe-t-on une telle chose? On entend et on lit partout que ces ententes ne permettent d'avoir que des revenus minuscules. Allez-vous pouvoir renouveler de telles ententes? Avez-vous le soutien de nos politiques d'État pour le faire?
    Être payé, c'est un minimum quand les gens entendent une chanson. On aimerait, en plus, être vu. On aimerait que les artistes soient vus. C'est pour ça que je vais vous laisser la parole. Il est important de connaître le point de vue des compagnies indépendantes et non seulement celui des grandes compagnies.
     On sait qu'Avril Lavigne vient de Napanee, mais il est certain que les outils de promotion sont développés aux États-Unis et que c'est une grosse machine. Les artistes qui sont représentatifs de notre réalité culturelle sont ce qui devrait préoccuper le Comité permanent du patrimoine canadien.
    J'aimerais vous entendre là-dessus, madame Drouin, monsieur Johnston, madame de Cartier et monsieur D'Eith.
    Monsieur Nantel, il faut mettre en contexte cette somme de 25 millions de dollars. Cela a été mis en place autour de 1998. On a alors augmenté l'aide à ce secteur. À l'époque, il y avait un rendement du capital investi qui était encore intéressant. Il était possible de vendre des albums et d'investir dans la production d'un album. Mme de Cartier a parlé de tournées. Il y avait des revenus intéressants à l'époque et la somme de 25 millions de dollars jouait un rôle de levier intéressant.
    Maintenant, les revenus s'écroulent. Certaines personnes ont dit — à tort, selon moi — que les revenus découlant de la vente de musique enregistrée s'écroulaient, mais que nous pouvions récupérer de l'argent en faisant des spectacles. C'est faux pour les artistes locaux et canadiens qui n'ont pas de carrière internationale. En effet, des gens comme Madonna ou comme Rihanna peuvent décider de présenter un spectacle à Toronto, à Montréal, à Washington ou à Boston. Cependant, un artiste québécois ne peut pas rester en Gaspésie plus de quatre jours s'il n'y a pas assez de public. Il est faux de prétendre que les artistes locaux peuvent récupérer des sommes significatives en faisant des spectacles. Les revenus perdus en ventes de disques constituent vraiment des pertes importantes.
    Cependant, je vous invite à regarder du côté des revenus qui nous échappent. Je lisais ce matin que Google et Facebook vont avoir, en 2014, des revenus de publicité sur téléphone mobile de 21 milliards de dollars alors que ces compagnies ne retournent aucune somme d'argent dans l'industrie du contenu, qui pourtant produit une grosse partie de leurs services. Ce n'est peut-être pas tous leurs services car les gens s'informent avec Google et font d'autres choses avec Facebook, mais il est clair qu'une bonne part de ces deux services consiste en du divertissement et de la musique. Comment se fait-il que ces 21 milliards de dollars en publicité échappent complètement à ceux qui leur fournissent un bien qu'ils revendent et qu'il n'y ait pas de rendement au chapitre de l'investissement? Il faut de la réglementation. Vous avez du pouvoir sur le plan des droits d'auteur. C'est ce qui pourrait rétablir tout cela.

  (1250)  

    Madame Drouin, puisqu'il ne reste qu'une minute et demie, je vais céder la parole à M. Johnston.
    Il y a quelques années, des ententes ont été conclues entre divers intervenants. Il y avait des stations de radio commerciales qui diffusaient de la musique, et comme la situation financière était bonne, il était possible de contribuer davantage. On peut tout de suite faire ici un parallèle, monsieur Johnston, entre les revenus colossaux dont parlait Mme Drouin et qui proviennent des exploitants sur Internet et votre situation en tant que fournisseur de la matière première. La question pourrait même être posée à des gens qui travaillent dans le domaine de la vidéo, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Bref, je pense que qui créent doivent être rémunérés. Voilà ce qui est fondamental. Notre industrie doit maintenant tirer des recettes de nombreuses sources. Selon le vieux cliché, c'était auparavant un secteur que l'on comptait en dollars. On compte maintenant en sous, et il faut trouver ces sous d'une multitude de sources.
    De façon générale, le fait que le gouvernement participe aux discussions est excellent, parce qu'il s'agit réellement d'un partenariat public-privé conclu entre l'industrie musicale et le gouvernement. Il y a de l'argent du secteur privé. Il y a de l'argent du secteur public. Il y a de l'argent qui vient des diffuseurs. Il y a toutes sortes de sources qui joignent leurs efforts pour contribuer.
    Nos entrepreneurs, qui sont de petites entreprises, ont besoin de deux choses seulement. Ils ont besoin de temps et d'argent. S'ils n'ont pas le temps, ils ont besoin d'argent. Puisque ce sont des petites entreprises et qu'il n'y a que des propriétaires uniques, ce capital provenant de multiples sources, dont une source importante est le secteur public, les aide à faire les investissements nécessaires dans leurs artistes et à investir dans les stratégies dont elles ont besoin du point de vue du marketing, des tournées, de la promotion et ainsi de suite.
    Je ne réponds pas directement à votre question. Nous pourrions parler de ce sujet précis pendant une heure et demie, mais il est extrêmement important de déterminer autant que possible d'où viennent ces dollars, lorsque certaines personnes exploitent le contenu créé par d'autres.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Dion, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie Mme Drouin, M. Johnston, Mme de Cartier et M. D'Eith d'être parmi nous aujourd'hui.
    Je crois que nous allons nous entendre sur le défi, à savoir la chute des revenus entraînée par l'arrivée des nouvelles technologies. Maintenant, il faut trouver des solutions.

[Traduction]

    Monsieur Johnston et madame de Cartier, vous vous êtes présentés ici avec des propositions très précises. J'aimerais savoir si vous aimeriez en exposer une avec plus de détails.
    J'ai été intrigué par votre proposition voulant que le CRTC dispose de pouvoirs réglementaires afin d'amener les diffuseurs à alimenter le fonds de développement du contenu canadien. Aimeriez-vous étoffer cette proposition pour le comité?
    Oui, bien sûr. Il s'agit d'un domaine où il faudra uniquement un changement de réglementation, selon nous.
    À l'heure actuelle, le CRTC procède à un examen de la radio pour déterminer les politiques à venir au sujet des diffuseurs, de la Loi sur la radiodiffusion, et ainsi de suite.
    Le CRTC a de nombreux défis à relever, notamment celui de faire respecter par les diffuseurs la réglementation sur le Fonds de développement du contenu canadien. Ils doivent verser un demi pour cent de leurs recettes chaque année dans ce fonds, qui soutient l'industrie musicale, et jusqu'à 6 % de la valeur d'une licence lorsque celle-ci est vendue, comme dans l'entente entre Bell et Astral.
    La conformité est un très grand problème. L'an dernier, un million de dollars a été laissé sur la table parce que dans 266 cas, la redevance n'as pas été payée en temps opportun par les diffuseurs.
    Comment le CRTC peut-il faire appliquer cette mesure? Notre solution, en partie, consisterait à donner des pouvoirs réglementaires au CRTC, s'il ne les a pas déjà, ce qui reste à savoir, et de lui permettre d'imposer des frais de retard. Ce ne serait pas nouveau. Les entreprises de téléphone les imposent déjà. Eh bien, lorsque les entreprises de téléphone oublient de payer leurs cotisations au fonds, une amende supplémentaire de 2 % pourrait être ajoutée. Il existe une façon simple de changer l'autorité réglementaire afin d'inciter les diffuseurs à respecter leurs obligations.
    C'est un des éléments qui devrait être envisagé, selon nous.

  (1255)  

[Français]

    Madame Drouin, vous avez terminé votre présentation en disant qu'il faudrait développer des outils.
     Est-ce un des outils que vous recommanderiez?
    Certainement. D'ailleurs, la CIMA l'a proposé dans son mémoire. Nous avons appuyé cette mesure, mais elle vise les radiodiffuseurs traditionnels actuels. Il ne faut surtout pas les oublier, parce qu'ils sont encore très importants dans notre paysage de diffusion de la musique. Il ne faut jamais oublier qu'on n'est pas passés tout à fait dans un autre monde. On est encore dans un monde traditionnel, si je puis dire. Ces radiodiffuseurs ont un impact important.
    Il y a autre chose. Le CRTC a le pouvoir de réglementer tous les services de radiodiffusion sur Internet. Or il a choisi de ne pas les réglementer en renouvelant une exemption pour les nouveaux médias. Personnellement, je ne pense pas qu'il faille absolument reproduire la réglementation s'appliquant à la radio de façon bébête et calquée aux nouveaux services de diffusion de la musique. Il faut l'adapter.
    Nous avons demandé au CRTC, lorsqu'il a analysé le renouvellement de cette exemption, de commencer à faire quelque chose. Sur Internet, il y a plusieurs choses et les gens font le jeu de l'amalgame. Il y a tellement de choses à faire que cela force les gens à ne rien faire.
    Il faut examiner Internet pour ce qu'il est, c'est-à-dire plusieurs choses. Il y a les télécommunications, à savoir les conversations téléphoniques sur Internet, qu'il ne faut pas réglementer, bien sûr, car il s'agit de la liberté d'expression. Cependant, il y a des services commerciaux sur Internet, tout comme des services de radiodiffusion de musique moyennant des frais d'abonnement. Pourquoi cela nous échappe-t-il?
    Il faut examiner toutes les facettes d'Internet et se pencher sur cette question. Il faut faire un pas dans la bonne direction et commencer à réglementer certains services sur Internet. Sur le plan technologique, il est possible de le faire. C'est une question politique si on ne le fait pas.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur D'Eith, cette question fait-elle partie de ce que vous appelez, à la fin de votre présentation, la nécessité d'un rééquilibrage?
    Excusez-moi, quelle était votre question?
    Nous parlons de la nécessité de revoir le pouvoir réglementaire du CRTC. J'aimerais savoir si vous avez quelque chose à dire à ce sujet.
    L'un des principaux problèmes liés au financement pour le développement du contenu canadien consiste à déterminer exactement à qui appartient cet argent. Nous avons toujours adopté la même position: une fois que l'argent pour le développement du contenu canadien y est, il devrait réellement appartenir à l'industrie musicale. Ce n'est toujours pas clair. S'agit-il de l'argent des radios ou de notre argent? C'est quelque chose qu'il faudrait préciser.
    Il devrait s'agir de l'argent du secteur, et nous devrions disposer du pouvoir discrétionnaire nécessaire pour faire ce que nous avons besoin de faire avec ce financement. Ce n'est pas clair. Je pense que le gouvernement pourrait prendre position et tenter de le préciser.
    Pour ce qui est des autres questions de réglementation concernant le CRTC, il est certainement important de s'assurer que le financement pour le développement du contenu canadien est dépensé de façon adéquate, en temps opportun, et que nous obtenons l'argent.
    Pour ce qui est du rééquilibrage, nous avons déjà constaté que de nombreuses stations radiophoniques préfèrent que l'argent demeure dans leur communauté. L'un des problèmes qu'ont les stations, c'est que lorsque cet argent se retrouve dans un bassin central, il ne revient pas toujours à la communauté locale.
    Dans le cadre du programme de 5,2 millions de dollars que nous avons lancé avec le groupe Pattison Broadcast, par exemple, l'argent destiné au développement du contenu canadien est demeuré à l'échelle locale. Ainsi, cela a permis d'équilibrer l'équation à l'échelle nationale. Il est très important d'avoir un certain équilibre entre les programmes nationaux et régionaux.
    Merci beaucoup.
    Merci. Nous n'avons plus de temps.
    J'aimerais remercier nos témoins. Nous apprécions la contribution que vous avez apportée à notre étude. Nous espérons que vous pourrez voir ce que nous avons fait au cours des prochains mois.
    Merci d'avoir été ici aujourd'hui.
    La séance est levée.
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