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Publications de la Chambre

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41e LÉGISLATURE, 2e SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 178

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 24 février 2015




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

VOLUME 147
NUMÉRO 178
2e SESSION
41e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mardi 24 février 2015

Présidence de l'honorable Andrew Scheer


    La séance est ouverte à 10 heures.

Prière



AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

(1005)

[Français]

Pétitions

Postes Canada

    Monsieur le Président, je ne croyais pas la chose possible, mais il en est ainsi. C'est encore par centaines que des électeurs de ma circonscription signent des pétitions pour demander au gouvernement d'intervenir à Postes Canada et de rétablir les services.
    Une fois de plus, je dépose, au nom de tous mes concitoyens, cette pétition qui demande au gouvernement de revoir la situation à Postes Canada.

[Traduction]

L'agriculture

    Monsieur le Président, il me fait plaisir de présenter aujourd'hui une pétition signée par de nombreux résidants de Winnipeg-Nord et de l'ensemble du Manitoba. Les signataires réclament l'adoption de politiques d'aide internationale qui soutiennent les petits agriculteurs, particulièrement les femmes, afin de reconnaître leur rôle indispensable dans la lutte contre la faim et la pauvreté.
    Il est important de souligner que les pétitionnaires demandent au gouvernement de veiller à ce que les politiques et les programmes canadiens soient élaborés en consultation avec les exploitants de petites fermes familiales et à ce qu'ils protègent le droit des petits agriculteurs de l'hémisphère Sud de conserver, d'utiliser et d'échanger librement des semences.
     Je sais que de nombreux députés de tous les partis ont déposé cette pétition, ce qui montre qu'il s'agit d'un enjeu important pour un très grand nombre de Canadiens. Je suis heureux d'avoir eu l'occasion de la présenter à la Chambre aujourd'hui.

L'environnement

    Monsieur le Président, je suis ravi de présenter une pétition en faveur de la Loi sur la responsabilité en matière de changements climatiques. Les signataires de la pétition sont préoccupés par l'inertie dont ont fait preuve les gouvernements fédéraux successifs dans la lutte contre les changements climatiques au Canada. Ils demandent au gouvernement d'investir dans des systèmes de transport en commun fiables et efficaces afin de réduire la congestion routière et la pollution dans les villes canadiennes. Plus important encore, les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada d'appuyer la Loi sur la responsabilité en matière de changements climatiques proposée par le NPD. Cette loi réduirait les émissions de gaz à effet de serre et obligerait le gouvernement à rendre des comptes à cet égard.

Le logement

    Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par des centaines de personnes qui résident dans la circonscription que je représente. Les pétitionnaires demandent au gouvernement de rétablir le financement destiné à des projets de logement coopératif abordable partout au pays.
    La Société canadienne d'hypothèques et de logement est en train de se détourner de son mandat initial et d'éliminer les subventions aux loyers proportionnées au revenu qui permettent à de nombreuses personnes de se loger au pays. Chaque nuit, 35 000 personnes se retrouvent sans abri et, tous les ans, 235 000 personnes sont aux prises avec des problèmes de logement.
    Selon les pétitionnaires, il est important que le gouvernement actuel renouvelle ces accords, qu'il rétablisse le financement destiné aux projets de logement coopératif abordable partout au pays et qu'il construise plus de logements, au lieu de réduire les possibilités offertes aux Canadiens. Je présente cette pétition au nom de mes concitoyens.

[Français]

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer une pétition signée par plus d'une centaine de personnes de Sherbrooke, qui demandent au gouvernement du Canada d'utiliser tous les outils diplomatiques qu'il a à sa disposition pour faire pression sur le gouvernement d'Arabie-Saoudite afin de libérer le blogueur saoudien Raïf Badawi qui a été, comme on le sait, emprisonné et condamné à mille coups de fouet pour avoir exprimé ses opinions sur un blogue, sur Internet, dans le but de susciter des discussions politiques dans son pays.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement d'user de tout ce qui est à sa disposition pour tenter de faire libérer M. Badawi et le ramener au Canada auprès de sa femme et de ses trois enfants.

[Traduction]

Les aliments génétiquement modifiés

    Monsieur le Président, j'aimerais présenter une pétition signée par des gens de ma circonscription qui souhaitent que tous les produits alimentaires contenant des OGM soient étiquetés en conséquence. Les pétitionnaires ne sont pas inquiets au sujet des OGM; ils pensent simplement que les consommateurs devraient pouvoir connaître la composition des produits qu'ils achètent.

L'environnement

    Monsieur le Président, je souhaite présenter deux pétitions aujourd'hui.
    La première a été signée par 375 personnes des îles du Golfe, de Victoria, de Surrey et de Kamloops. Les pétitionnaires demandent au gouvernement d'interdire définitivement la circulation de superpétroliers le long des côtes de la Colombie-Britannique.

L'aide au suicide

    Monsieur le Président, la deuxième pétition est très pertinente dans la cadre du débat qui est sur le point de commencer. Signée par des résidants de Victoria et de Saanich—Gulf Islands, la pétition demande à la Chambre de respecter la volonté des Canadiens en adoptant une mesure législative visant à fournir aux médecins des directives claires relativement à l'aide médicale à mourir.

L'agriculture

    Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour présenter une pétition signée par des centaines d'habitants de la région de Vancouver. Les pétitionnaires demandent que l'on respecte le droit des petites exploitations agricoles familiales de conserver, d'utiliser et d'échanger des semences. Ils demandent aussi au gouvernement du Canada et à la Chambre des communes de s'engager à adopter des politiques d'aide internationale qui soutiennent les petites exploitations agricoles familiales, en particulier celles dirigées par des femmes, afin de s'assurer que les politiques et les programmes du Canada soient développés à la suite d'un processus consultatif auprès de petits agriculteurs et que ces politiques protègent le droit des petits agriculteurs des pays du Sud de conserver, d'utiliser et d'échanger librement leurs semences.

[Français]

L'environnement

    Monsieur le Président, aujourd'hui, j'ai deux pétitions à déposer.
    La première concerne le Kathryn Spirit. Près de 2 000 citoyens ont signé la pétition pour que le Kathryn Spirit quitte le lac Saint-Louis, aux abords du fleuve Saint-Laurent. Le bateau est là depuis 2011 et il continue de se détériorer.
    Selon la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, le gouvernement fédéral pourrait saisir un bateau s'il a des raisons de croire qu'il est en train de nuire à l'environnement et à la santé humaine. Je peux assurer à la Chambre que les citoyens ont très peur en raison du fait que le bateau se trouve dans une eau qui est potable pour la grande région métropolitaine de Montréal. Les gens voudraient donc s'assurer que le bateau sera remorqué hors des eaux canadiennes et hors de la voie maritime.
(1010)

L'optimisme

    Monsieur le Président, la deuxième pétition appuie mon projet de loi visant la création d'une journée canadienne des Optimistes pour faire en sorte qu'on ait de plus en plus de membres Optimistes pour aider les jeunes à se développer, à développer leur potentiel et à croire en eux. Cela ferait du premier jeudi du mois de février la Journée canadienne des Optimistes.

[Traduction]

Questions au Feuilleton

    Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
    D'accord?
    Des voix: D'accord.

Initiatives ministérielles

[Travaux des subsides]

[Traduction]

Travaux des subsides

Motion de l'opposition — Le Comité spécial sur l'aide médicale à mourir

    Que a) la Chambre reconnaisse que (i) la Cour suprême du Canada a déterminé que l’interdiction à l'aide médicale à mourir viole l’article 7 de la Charte des droits et libertés, selon laquelle « chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale », (ii) la Cour suprême a suspendu la mise en oeuvre de sa décision pour 12 mois, (iii) les élections fédérales et l'ajournement d'été prévus restreignent les jours de séance restants en 2015, (iv) les Canadiens s’attendent à ce que les parlementaires prennent le leadership dans ce dossier et y contribuent de manière réfléchie et posée, (v) une discussion non partisane, posée et efficace a eu lieu sur cette question à l’Assemblée nationale du Québec, (vi) le Parlement est tenu de répondre à la décision de la Cour suprême; b) un comité spécial soit créé pour examiner la décision de la Cour suprême; que le comité consulte des spécialistes et des Canadiens et formule des recommandations concernant un cadre législatif conforme à la Constitution, à la Charte des droits et libertés et aux priorités des Canadiens; que le comité soit composé de 12 membres, dont sept membres du parti gouvernemental, quatre membres de l’Opposition officielle et un membre du Parti libéral, pourvu que le président soit issu du parti gouvernemental; qu’en plus du président, un vice-président provienne de chaque parti de l’opposition; que le comité dispose de tous les pouvoirs que le Règlement confère aux comités permanents, en plus du pouvoir de voyager, accompagné du personnel nécessaire, à l’intérieur et à l’extérieur du Canada, sujet à l’autorisation habituelle de la Chambre; que les membres siégeant à ce comité soient inscrits sur une liste que le whip de chacun des partis déposera auprès de la Greffière de la Chambre, au plus tard le 11 mars 2015; que le quorum du comité soit fixé à sept membres pour toutes les délibérations à condition qu’au moins un membre de l’opposition et un membre du parti gouvernemental soient présents; que les membres de ce comité puissent, à l’occasion et si besoin est, se faire remplacer conformément à l'article 114(2) du Règlement; que le comité fasse rapport au plus tard le 31 juillet 2015, entendu que, si le comité présente son rapport au cours de la période d’ajournement de la Chambre, lorsque ce rapport est déposé auprès de la Greffière, ledit rapport soit réputé avoir été présenté à la Chambre.
    -- Monsieur le Président, aujourd'hui, je partagerai mon temps de parole avec le député de Charlottetown.
    Plus tôt ce mois-ci, la Cour suprême du Canada a rendu un jugement historique invalidant la prohibition de l'aide médicale à mourir. Sa décision était non seulement unanime, elle était sans équivoque. La Cour suprême a ainsi déterminé qu'en ce qui concerne les adultes capables voués à d’intolérables souffrances causées par des problèmes de santé graves et irrémédiables, la prohibition actuelle prévue dans le Code criminel porte atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne d'une manière non conforme aux principes de justice fondamentale.

[Français]

    La cour s'est prononcée. C'est maintenant à nous, en tant que législateurs, d'agir.
    La mort, et toutes les façons dont elle touche nos vies, n'est pas un sujet dont il est facile de discuter. Au cours des dernières semaines, j'ai eu plusieurs conversations délicates avec ceux qui applaudissent à la décision de la cour ainsi qu'avec ceux qui la condamnent,. Même si le processus pour arriver à une nouvelle mesure législative peut être difficile et même s'il peut rendre certaines personnes mal à l'aise, il est de notre responsabilité de le faire. Nous sommes ici pour être la voix de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Nous devons engager les débats, peu importe leur difficulté. Nous devons prendre des décisions difficiles, et les Canadiens en sont conscients.
    La Cour suprême, comprenant peut-être la nature conflictuelle de ce processus, a judicieusement fixé une échéance. Elle nous a donné un an pour rédiger la mesure législative sur l'aide médicale à mourir. Dans le contexte d'une question aussi profondément personnelle et controversée, une année est à peine suffisante. Nous ne parlons pas ici d'un amendement insignifiant à une loi mineure. Lorsque la province de Québec a décidé de commencer à écrire ses propres lois sur l'aide médicale à mourir, quatre ans et demi se sont écoulés entre la création d'un nouveau comité composé de représentants multipartites et l'adoption d'une mesure législative. Pendant ces quatre ans et demi, une année complète a été consacrée à des audiences et à des consultations publiques, ainsi qu'au dépôt et au débat des amendements.
(1015)

[Traduction]

    Le processus a pris quatre ans et demi à l'Assemblée nationale du Québec, y compris une année complète de consultations et de débats. La Cour suprême nous a donné 12 mois, ce qui est un délai raisonnable. Cependant, à cause de l'ajournement d'été et des élections à l'automne, les parlementaires disposent d'à peine 12 semaines de séance pour s'occuper de cette question. Nous pouvons y parvenir, mais il n'y a pas de temps à perdre.
    Aujourd'hui, nous présentons une motion qui demande à la Chambre des communes d'agir immédiatement. Nous demandons que:
[...] un comité spécial soit créé pour examiner la décision de la Cour suprême; que le comité consulte des spécialistes et des Canadiens et formule des recommandations concernant un cadre législatif conforme à la Constitution, à la Charte des droits et libertés et aux priorités des Canadiens [...]
    Comme le député de Charleswood—St. James—Assiniboia l'a signalé, la décision de la Cour suprême nous a tracé clairement la voie à suivre pour agir rapidement, mais judicieusement. Il n'y a aucun avantage à retarder le débat. En effet, étant donné l'échéance fixée par la Cour suprême, ces consultations doivent commencer immédiatement, si la Chambre souhaite aborder la question avant les prochaines élections.

[Français]

    Lorsque j'ai questionné le premier ministre à ce sujet, la semaine dernière, il a dit à la Chambre des communes que l'aide médicale à mourir est un dossier sensible pour de nombreux Canadiens et que les convictions profondes sont exprimées des deux côtés. Ce jugement est juste. Ma conviction est profonde. Elle est fondée sur mon expérience personnelle, celle où j'ai accompagné mon père pendant les derniers moments de sa vie. Je sais que nous devons respecter les libertés et les choix de la population, tout en nous assurant qu'en tant que société, nous protégeons les plus vulnérables d'entre nous.
    Je crois que la Cour suprême a pris la bonne décision et que nos lois doivent être conformes au jugement, car il s'agit de la bonne chose à faire. Toutefois, cela est mon opinion. Il nous faut entendre ce qu'ont à dire les autres.
    La semaine dernière, le premier ministre lui-même a signalé son accord. Il a dit que nous « tiendrons de vastes consultations relativement à tous les points de vue liés à cette question difficile. » Aujourd'hui, nous pouvons commencer à tenir cette promesse.

[Traduction]

    L'expérience du Québec nous donne l'assurance qu'il est possible de débattre de cette question de manière respectueuse et responsable. Elle nous rappelle que, lorsque les partis politiques mettent de côté leurs divergences pour le bien public, cela peut encourager la coopération. Un consensus peut être atteint, même sur une question aussi complexe et délicate que les soins de fin de vie.
    Si nous ne faisons rien, si nous n'entamons pas bientôt ce débat national important, le Canada ne disposera pas de lois pour gouverner l'aide médicale à mourir. Ce type de vide législatif n'est dans l'intérêt de personne: pas les gens qui souffrent, ni les membres de leur famille qui s'inquiètent pour eux, ni les médecins compatissants qui les soignent.
    Il y avait un élément constant dans toutes les contestations judiciaires qui ont mené à la décision de la Cour suprême: personne ne voulait enfreindre la loi. Ce que ces gens demandaient — et ce que la Cour suprême nous oblige maintenant à présenter — est une loi qui énonce les restrictions concernant l'aide médicale offerte aux Canadiens qui souhaitent mourir dans la dignité.

[Français]

    La décision de la cour s'applique aux adultes sains d'esprit dont les souffrances sont intolérables et persistantes et qui ont clairement donné leur consentement à l'aide médicale à mourir. Même dans les limites de ces dispositions, comme l'a fait remarqué le premier ministre, les Canadiens ont des opinions divergentes. Ils ont des valeurs bien ancrées. Que ces valeurs reposent sur des convictions religieuses, des expériences personnelles ou une expertise professionnelle, ces voix méritent d'être entendues. Pour que nous puissions poursuivre une discussion respectueuse et responsable sur cette importante question, nous devons avoir suffisamment de temps pour entendre les Canadiens et être à l'écoute des gens concernés par cette mesure législative, de leurs familles et des spécialistes médicaux et juridiques. Une partie de ces décisions nécessite que nous abordions franchement la qualité des soins déjà offerts. Les Canadiens qui souffrent se sentent-ils adéquatement soutenus par leur communauté? Ont-ils un accès équitable aux soins palliatifs de qualité?
(1020)

[Traduction]

    Nous devons tenir une discussion à l'échelle nationale sur le droit de mourir dans la dignité, une discussion qui portera notamment sur la question de la prestation de soins empreints de compassion et de respect pour ceux qui souffrent à la fin de leur vie.
    La cour a fixé un délai. Nous avons le devoir de le prendre au sérieux, d'agir rapidement, mais de manière réfléchie, et d'assumer nos responsabilités communes en tant que législateurs. J'invite tous les députés à songer à cette responsabilité aujourd'hui et à appuyer la motion ainsi que la démarche qui y est proposée. La cour s'est prononcée; le Canada et les Canadiens attendent notre réaction.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie le chef du troisième parti de son discours sur une question extrêmement importante, qui touche évidemment tous les Canadiens.
     Puisque nous l'avons entendu hier de la bouche du secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, nous savons que le gouvernement n'a pas l'intention d'appuyer cette motion. Le leader du troisième parti croit-il encore possible que des travaux non partisans soient faits à ce sujet?
    Par ailleurs, étant donné que la santé, et donc les soins en fin de vie, relève de la compétence des provinces, comment voit-il la question du partage des pouvoirs au sens de la Constitution et le rôle du fédéral par rapport au Code criminel? En effet, la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter touche strictement le Code criminel.
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de ses deux questions.
    D'abord, je crois que, oui, nous allons pouvoir avoir un débat non partisan, informé et respectueux. On sait qu'à l'Assemblée nationale de Québec, où il y a énormément de tensions partisanes, ils ont pu avoir un débat extrêmement sensible et informé. Je trouve que ce n'est pas hors du possible pour nous ici. J'encourage tous les députés du Parlement à appuyer cette motion.
    Quant au respect des compétences, c'est une question extrêmement importante qui se devrait d'être étudiée. Je suis personnellement très encouragé par le cadre législatif qu'a avancé le Québec, mais les neuf autres provinces n'ont encore rien là-dessus. Je trouve qu'un gouvernement fédéral se doit d'essayer d'assurer la protection et le respect des droits de tous les Canadiens. Par ailleurs, je sais que cela n'est pas matière à conflit entre les provinces et le fédéral, dans ce cas-ci. Nous voulons tous la même chose, soit protéger les Canadiens et leurs droits.

[Traduction]

    Monsieur le Président, si le chef libéral s'est renseigné et connaît la réponse, peut-il dire à la Chambre quand un comité de la Chambre a-t-il jamais conçu un projet de loi? Habituellement, les comités servent à faire l'étude d'un projet de loi ou d'une question puis à faire des recommandations au gouvernement.
    D'après ce que je comprends, la motion du Parti libéral propose qu'un comité conçoive une mesure législative en réponse à la décision de la Cour suprême. J'aimerais que le chef libéral nous donne un seul exemple où la Chambre aurait eu recours à une telle façon de procéder par le passé.
    Pourrait-il aussi nous dire pourquoi il confierait cette tâche à un comité spécial plutôt qu'au Comité permanent de la justice et des droits de la personne?
    Monsieur le Président, la motion dont nous sommes saisis demande qu'un comité consulte des spécialistes au sujet d'une question que la Cour suprême a renvoyée aux Canadiens et aux législateurs. Les Canadiens s'attendent donc à ce que leurs législateurs examinent la question. À mon avis, un comité spécial dans lequel les conservateurs seront majoritaires ouvrira la voie à une collaboration responsable qui guidera le gouvernement lorsqu'il décidera de présenter une mesure législative. C'est ce que les gens attendent de nous.
    Il y a eu beaucoup d'études sur cette question, notamment en 1995 et en 2010. Le Sénat en a également fait une en 2000. Diverses personnes ont fait des études à ce sujet. Nous pouvons nous appuyer sur cette expertise.
     Quoi qu'il en soit, il est temps, pour les Canadiens, que les législateurs se penchent sur cette question importante afin que le gouvernement puisse s'inspirer des points de vue des Canadiens et des spécialistes lorsqu'il préparera et présentera un projet de loi.
(1025)
    Monsieur le Président, je voterai en faveur de la motion. En réponse à la question précédente, je me rappelle très clairement que le comité de l'environnement a, dans la foulée du Sommet sur la Terre, tenu des consultations et présenté des recommandations au gouvernement sur les mesures que ce dernier pourrait prendre en s'appuyant sur les conseils d'experts. À mon avis, c'est une approche très sensée et un pas dans la bonne direction.
    En passant, permettez-moi de dire que les membres du Parti vert, dans une discussion et un débat très difficile, ont présenté une proposition tout à fait conforme à la décision rendue par la Cour suprême. Les membres de notre parti ont décidé d'appuyer l'aide médicale à mourir.
    J'aimerais que le député de Papineau, le chef du Parti libéral, me dise si les libéraux accepteraient d'amender la motion afin que les députés dans ma situation, dont le parti a moins de 12 députés, puissent siéger à un tel comité.
    Monsieur le Président, nous sommes évidemment ouverts à la possibilité de modifier ce processus parce que nous voulons favoriser une discussion entre tous les partis et agir de manière responsable. Nous sommes disposés à accepter toute modification raisonnable qui améliorerait le processus de discussion. Nous avons hâte d'entendre de telles propositions et nous les accueillerons favorablement afin d'avoir une discussion en bonne et due forme.
    Monsieur le Président, je prends la parole au sujet de la motion du Parti libéral visant à créer un comité multipartite pour examiner la question de l'aide médicale à mourir à la suite de la récente décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Carter c. Canada.
    L'aide médicale à mourir est un sujet très personnel qui soulève les passions. Cela ne fait aucun doute. Trop souvent, lorsque des enjeux touchent des valeurs très chères aux Canadiens, ils servent de moyens pour semer la division politique. Toutefois, les Canadiens méritent une réponse de la Chambre quant à la teneur de la décision judiciaire rendue par la Cour suprême.
    Il faut préciser dès le départ que ceci n'est pas un débat sur ce qui est bien ou mal pour une personne en fin de vie. De telles décisions dépendent souvent des convictions religieuses ou morales de la personne. Cependant, pour le Parlement, il s'agit de déterminer le rôle approprié du gouvernement en vertu de la loi fondamentale du Canada, à savoir la Constitution.
    Notre pays est une démocratie, mais une démocratie constitutionnelle. Le pouvoir législatif est assujetti aux limites juridiques qui protègent les minorités et les individus contre la tyrannie de la majorité. Ces limites sont enchâssées dans la Charte des droits et libertés, et il incombe au pouvoir judiciaire de les interpréter.
    Sur la question de l'étendue des mesures que le gouvernement peut prendre pour limiter les droits des Canadiens relativement à l'aide médicale à mourir, la Cour suprême du Canada vient de nous fournir un avis clair et unanime. La disposition du Code criminel interdisant aux médecins d'aider un patient à mourir empiète de manière injustifiable sur le droit des Canadiens à la vie, à la liberté et à la sécurité de leur personne. La Cour suprême a pris sa décision après avoir interprété rationnellement la loi, à la lumière de la preuve et des meilleurs arguments qui lui ont été soumis. Et l'unanimité des juges de la Cour suprême ajoute du poids à leurs conclusions.
    Ces conclusions ne sont pas que de simples opinions. Elles sont le fruit d'une analyse juridique objective et d'un examen judicieux de la jurisprudence constitutionnelle canadienne. On compare souvent la Constitution du Canada à un arbre vivant. Quiconque pense que nous sommes en présence d'un exemple d'activisme judiciaire devrait lire l'arrêt Carter c. Canada. Il ou elle verra que cet ajout à la jurisprudence canadienne y est profondément enraciné.
    Dans sa décision, la Cour suprême indique clairement que les législateurs ne peuvent pas empêcher les adultes capables affectés de problèmes de santé prolongés, intolérables et irrémédiables de faire le choix de mourir dans la dignité.
    Cette décision est lourde de sens. La Cour suprême a décidé qu'interdire aux médecins d'aider les gens à mourir était une violation de tous les éléments de l'article 7 de la Charte concernant la vie, la liberté et la sécurité de la personne. La Cour suprême dit plus précisément que cette interdiction a pour effet de priver des Canadiens du droit à la vie en forçant certaines personnes à se suicider précocement de peur de ne pouvoir le faire plus tard à cause de leur incapacité. L'interdiction a pour effet de violer le droit des Canadiens à la liberté en les privant du droit de prendre des décisions relatives à leur intégrité corporelle et aux soins médicaux. Elle a pour effet de priver les Canadiens du droit à la sécurité de leur personne en les obligeant à subir des souffrances intolérables.
    La Cour suprême est d'avis que ces violations sont injustifiées. Compte tenu des dispositions de la Constitution, l'interdiction de l'aide médicale à mourir a un effet sans aucune commune mesure avec sa raison d'être, car elle affecte inutilement les personnes qui ne sont pas soumises à la contrainte, mais qui sont affaiblies. C'est pourquoi la Cour suprême juge que l'interdiction de l'aide médicale à mourir est nulle et non avenue dans le cas d'une personne remplissant les deux conditions suivantes: premièrement, la personne est un adulte capable qui consent clairement à mourir; deuxièmement, la personne est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.
    La fin de semaine dernière, j'étais à Charlottetown, où j'ai eu le plaisir de discuter avec des concitoyens que je représente dans cette enceinte. Ils se réjouissaient de l'arrêt de la Cour suprême du Canada. À l'instar de beaucoup d'autres Canadiens, il leur est arrivé d'accompagner des malades souffrants en phase terminale. À l'instar de beaucoup d'autres Canadiens, ils ont eu la douleur de voir des proches privés de toute dignité en fin de vie. Bon nombre d'entre eux avaient du mal à retenir leurs larmes en me racontant ce qu'ils ont vécu au chevet d'une personne brisée par la souffrance. Ces conversations montrent que le gouvernement doit absolument ouvrir un débat en profondeur sur l'aide médicale à mourir.
(1030)
    L'Association médicale canadienne appuie la décision unanime de la Cour suprême du Canada, mais elle réclame que les lois protègent les médecins qui, pour des motifs moraux ou religieux, ne peuvent pas aider un patient à mourir. L'association veut qu'on précise comment le consentement sera établi, quels garde-fous seront appliqués et de quelle manière un patient pourra réclamer une aide.
    Les médecins veulent aider les patients à toutes les étapes de leur vie, jusqu'à leur mort. La Chambre des communes a le devoir de leur donner des directives. Elle ne doit pas se défiler.
    Certaines personnes redoutent que l'arrêt de la Cour suprême entraîne involontairement des dérives, voire la victimisation de groupes vulnérables. C'est justement pour éviter toute dérive que le Conseil des Canadiens avec déficiences réclame des garanties législatives destinées à protéger les personnes vulnérables et à éviter qu'on se désintéresse des stratégies de fin de vie et des soins palliatifs qui sont actuellement offerts.
    Je tiens d'ailleurs à souligner que, selon moi, les soins palliatifs et les autres stratégies de fin de vie ne perdront pas de leur importance dans la foulée de l'arrêt de la Cour suprême du Canada. Les Canadiens continueront à avoir accès à toutes les options en matière de soins en fin de vie, qui comprendront désormais l'aide médicale à mourir, comme l'exige la Constitution.
    Les députés et la Chambre se nuiraient beaucoup s'ils ne prêtaient pas une oreille attentive aux craintes soulevées par l'Association médicale canadienne et le Conseil des Canadiens avec déficiences. Le point de vue de ces organismes et de bien d'autres explique pourquoi le Parti libéral estime qu'il faut charger un comité d'entendre des témoins, de relever leurs inquiétudes et les solutions qu'ils proposent, et de présenter un rapport rigoureux à la Chambre. Comment réussirons-nous à régler les problèmes soulevés si nous ne cherchons pas à mieux les comprendre?
    La Cour suprême du Canada a été claire: il est nécessaire de créer un régime permissif qui respecte les droits garantis par la Charte et qui protège aussi les droits des populations vulnérables et la liberté de conscience des médecins. Pourquoi le gouvernement voudrait-il alors attendre avant de se pencher sur les meilleures façons de protéger les Canadiens tout en respectant leurs droits constitutionnels?
    Je sais que certains députés d'en face n'ont pas toujours bien considéré la Charte et les juges chargés d'en interpréter les dispositions. Ce n'est pas étonnant, car les projets de loi du gouvernement et les mesures qu'il a prises ont souvent été déclarés inconstitutionnels par les tribunaux. Je n'ai pas besoin de rappeler la série de revers qu'il a subis. J'invite donc le gouvernement à profiter de l'occasion pour revoir sa façon de considérer la Constitution canadienne.
    La Cour suprême du Canada nous donne jusqu'au 5 février 2016 pour décider de l'encadrement de l'aide médicale à mourir avant qu'elle ne devienne légale au Canada. Il est de notre devoir, en qualité de représentants élus, de donner à cette question le respect, le temps et la réflexion qu'elle mérite. Il pourrait être utile de se pencher sur le travail qu'a fait l'Assemblée nationale du Québec et le projet de loi 52, et le comité parlementaire devrait les prendre en considération. Nous devons bien faire les choses.
    Je le répète, ce n'est pas une question personnelle de morale ou de religion et cela ne devrait pas l'être. C'est une question qui relève des droits constitutionnels dans une société libre et du pouvoir limité du corps législatif. Le Parti libéral demande à la Chambre de laisser de côté les partis pris politiques et d'appuyer sa motion.
    La Cour suprême du Canada a demandé à la Chambre d'indiquer la voie à suivre pour l'aide médicale à mourir. Les personnes malades et en fin de vie demandent à la Chambre de leur donner toutes les options et de respecter leurs droits et leurs libertés en vertu de la Charte. Les médecins demandent à la Chambre des directives qui respectent la liberté de conscience de chacun.
    Les Canadiens nous demandent de mettre de côté nos allégeances partisanes et d'étudier ensemble cette décision historique. Donc, est-ce que mes collègues à la Chambre sont prêts à mettre de côté leurs divisions politiques, même temporairement, pour respecter le pouvoir judiciaire de notre système de gouvernement et discuter de cette importante question?
(1035)
    Monsieur le Président, le député apporte toujours une contribution précieuse au comité de la justice, que je préside.
    J'ai seulement deux questions à lui poser.
    La motion présentée aujourd'hui par le Parti libéral est une motion de nature procédurale. Il y est question de définir les étapes à suivre, et le chef du parti a précisé qu'elle ne porte pas sur l'examen de la législation existante. Il s'agit plutôt de créer un comité dont le mandat sera lié à la procédure.
    Le chef du Parti libéral a parlé de témoins experts. Le député qui vient de prendre la parole peut-il définir qui sont ces experts? C'est une question qui touche tous les Canadiens. Comment peut-on alors définir qui est un expert et qui ne l'est pas?
    À l'heure actuelle, les comités permanents sont formés de 10 membres. En fonction de leur poids à la Chambre, les libéraux y détiennent un siège. Auparavant, les comités étaient habituellement formés de 12 membres, ce qui signifie, dans une certaine mesure, que le Parti libéral y occupait une place encore moins grande qu'à présent. Pourquoi les libéraux ont-ils choisi un comité formé de 12 membres au lieu de 10, ce qui correspond à la composition habituelle des comités permanents de la Chambre des communes?
    Monsieur le Président, je dois reconnaître que mon collègue se donne beaucoup de mal comme président pour se montrer juste envers tous les membres du comité de la justice, y compris à l'égard du seul député libéral qui y siège.
    Sa question a deux volets. Le premier porte sur la façon de définir les experts. À vrai dire, c'est une question un peu surprenante, car les membres du comité de la justice sont souvent appelés à écouter l'avis d'experts. Je présume que les experts seraient, entre autres, des éthiciens, des spécialistes des soins palliatifs, des gens de l'Association médicale canadienne, du Conseil des Canadiens avec déficiences et des représentants de gouvernements qui ont de l'expérience dans le domaine de l'aide médicale à mourir, c'est-à-dire des experts de l'étranger. Il n'y a aucune limite aux avis susceptibles d'être utiles aux Canadiens dans le cadre de cet exercice, non plus qu'à ceux qui doivent vivre avec ce type de décisions sur une base quotidienne.
    Pour ce qui est de savoir pourquoi 12 membres plutôt que 10, ça n'a pas d'importance. Ce sont des détails qui n'ont pas vraiment de poids. L'objet principal de la motion est de reconnaître qu'il s'agit d'une conversation qu'il nous fait amorcer. Les parlementaires doivent mobiliser les Canadiens. Nous devons faire confiance aux Canadiens. Ces détails ne sont que du bruit.
(1040)
    Monsieur le Président, je ne suis pas si sûre que ce ne soit que du bruit, et l'histoire me donne raison.
    Je vais revenir brièvement sur la question abordée par mon distingué collègue qui préside le comité de la justice.
    Selon la motion présentée par le chef du troisième parti, le comité aurait à formuler des recommandations. Ce comité très inéquitable aurait à se pencher sur une question d'une importance capitale qui suscite une grande variété d'opinions chez une multitude de personnes. Je ne crains pas qu'on ne puisse pas entendre tous les experts, mais la question des recommandations m'inquiète un peu plus.
    Pour aborder cette question dans le cadre d'un processus que je souhaite non partisan, ne serait-il pas préférable d'assurer une représentation équitable au sein du comité afin de signaler aux gens que le processus sera non partisan? Comme la chef du Parti vert l'a souligné, il y a lieu de se demander si on pourrait faire de la place à des représentants d'autres partis qui ne sont pas nécessairement reconnus à la Chambre, mais qui participent à la discussion puisqu'ils représentent une partie de la population?
    Monsieur le Président, ayant travaillé avec la députée au sein du comité de la justice, je puis dire qu'elle fait vraiment partie des collègues qui ont su gagner mon respect.
    La réponse courte à cette question est oui. Nous espérons que les membres du comité sauront vraiment faire abstraction de leur allégeance politique, quelle qu'elle soit, afin de défendre les intérêts des Canadiens de façon non partisane.
    Doit-on pour cela assurer une représentation équitable des partis au sein du comité? J'espère que non, mais si cette volonté était exprimée, je ne vois pas pourquoi nous y serions opposés. J'ose espérer que, pour une question de cette nature, la représentation des différents partis au sein du comité n'est pas à ce point importante. On ne saurait cependant s'opposer à une représentation équitable au sein d'un comité, et il est clair que cela enverrait le bon signal.
    Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui, qui vise à donner suite à la décision rendue récemment par la Cour suprême du Canada au sujet de l'aide médicale à mourir.
    L'aide médicale à mourir, un enjeu d'une grande complexité, suscite toute une gamme d'émotions et de réactions très vives, qui dépendent en grande partie de l'expérience de chacun. C'est avant tout une question personnelle, qui transcende les facteurs démographiques, politiques ou religieux.
    Comme l'a mentionné plus tôt le chef libéral et député de Papineau, son propre point de vue repose sur ce qu'il a vécu auprès de son père mourant. Nous avons tous vécu des expériences semblables, je crois. Personnellement, je pense par exemple aux derniers jours de mes parents, d'autres membres de la famille et de bons amis. Je crois que tous les Canadiens ont vu un de leurs proches aux prises avec une fin de vie difficile. Nous avons tous une opinion à ce sujet. Selon moi, il sera important de mener une vaste consultation auprès des Canadiens, puisque chacun a un point de vue très personnel sur la question.
    La question de l'aide médicale à mourir nous forcera à reconnaître que nous mourrons tous un jour et que nous pourrions être confrontés à des souffrances qui pourraient nous amener à demander de l'aide et du soutien à d'autres personnes. C'est une réalité incontournable de l'expérience humaine.
    J'aimerais assurer à tous les députés que notre gouvernement comprend fort bien la gravité des défis qui nous attendent. Nous nous opposerons à la motion, car nous avons l'intention de lancer bientôt des consultations constructives avec les Canadiens et les principaux intervenants pour pouvoir connaître tous les points de vue sur cette question épineuse.
    Il sera impératif pour les Canadiens de saisir aussi la nature complexe et difficile de ces questions pour lesquelles il n'existe pas de réponses simples. Nous ferons en sorte qu'au cours des mois qui viennent, les Canadiens comprennent les subtilités des questions à l'étude ainsi que la gamme d'options de soins de santé qui s'offrent actuellement aux personnes en fin de vie. Une personne peut notamment refuser de recevoir des traitements ou mettre fin aux traitements qu'elle reçoit déjà, même si cela peut entraîner sa mort. Nombre de Canadiens ignorent peut-être que c'est leur droit. Nombre d'entre eux semblent croire que c'est grâce à l'aide médicale à mourir qu'ils auront maintenant le droit de refuser la prolongation des soins en fin de vie. Nous devons faire en sorte que tout le monde comprenne ce qu'ils peuvent déjà faire légalement pour ne pas confondre ces mesures avec l'aide médicale à mourir.
    Pour être plus précis, nous sommes ici aujourd'hui parce que le 6 février 2015, la Cour suprême du Canada a conclu que les dispositions du Code criminel sur l'aide médicale à mourir sont contraires à la Charte des droits et libertés. Ce faisant, la Cour a annulé la décision qu'elle avait rendue en 1993, il y a un peu plus de 20 ans, dans l'affaire Rodriguez. Cette fois, la Cour suprême a jugé que l'interdiction privait certaines personnes de leur droit à la liberté et à la sécurité, droit qui protège le choix et l'autonomie à l'égard de décisions fondamentales touchant son propre corps. Elle a aussi conclu que les dispositions privaient certaines personnes du droit à la vie, car elles avaient pour effet de les forcer à mettre fin à leurs jours prématurément de peur de ne pouvoir le faire quand leur souffrance deviendrait insupportable. La Cour suprême a jugé que ces privations n'étaient pas conformes aux principes de la justice fondamentale. La Cour a aussi fait valoir que la Charte reconnaît la valeur de la vie et qu'elle honore le rôle que l'autonomie et la dignité jouent à la fin de cette vie.
    La Cour a rendu sa décision après s'être penchée sur le cas des demandeurs, en particulier Gloria Taylor. En 2009, Mme Taylor a appris qu'elle souffrait d'une maladie neurodégénérative fatale, la sclérose latérale amyotrophique, aussi connu sous le nom de SLA, qui entraîne un affaiblissement progressif des muscles. Les patients atteints de la SLA perdent tout d’abord la capacité d’utiliser leurs mains et leurs pieds, puis celle de marcher, de mastiquer, d’avaler, de parler et, finalement, de respirer. La Cour suprême a conclu que Mme Taylor et les personnes dans le même état que cette dernière se trouvaient ainsi devant ce que Mme Taylor a décrit comme le choix cruel entre mettre fin eux-mêmes à leurs jours alors qu’ils sont encore physiquement aptes à le faire, ou renoncer à la possibilité d’exercer un droit de regard sur le moment et la manière de mourir.
     La Cour suprême a conclu que la Charte protège le droit des adultes capables d'avoir recours à l'aide médicale à mourir s'ils y consentent clairement et s'ils souffrent de problèmes de santé graves et irrémédiables, y compris une affection, une maladie ou un handicap, lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables. La Cour suprême a donc conclu que deux dispositions du Code criminel sont anticonstitutionnels, soit celle interdisant l'aide au suicide et celle prévoyant que nul ne peut consentir à ce que la mort lui soit infligée. La Cour suprême a conclu que ces dispositions visaient à empêcher une personne vulnérable qui vit un moment de faiblesse de mettre fin à ses jours ou qu'on la force à recourir à cette solution.
(1045)
    Puisque ces lois s'appliquent à tout le monde, la Cour a jugé qu'elles violaient les droits des particuliers qui ne sont pas vulnérables et qui veulent une aide médicale à mourir lorsqu'ils ont une maladie grave ou incurable.
    La Cour a en outre confirmé que la compétence du Parlement en matière pénale comprend le pouvoir d'interdire ou de réglementer les traitements médicaux, parce qu'ils sont dangereux. Parallèlement, la Cour a affirmé que le gouvernement fédéral ainsi que les gouvernements provinciaux et les administrations territoriales peuvent légiférer à l'égard de certains aspects de la santé.
    La Cour a suspendu pendant 12 mois l'effet juridique de son verdict afin de laisser au Parlement le temps d'élaborer une mesure législative opportune. Pendant cette période, l'aide médicale à mourir reste illégale.
    Si la Cour suprême a formulé son jugement à partir du concept de l'aide médicale à mourir, je pense qu'il est important, aux premières étapes de ce débat, de faire la distinction entre le suicide assisté par un médecin et l'euthanasie volontaire. Dans le premier cas, le médecin offre au malade le moyen de mettre fin à sa vie en lui prescrivant par exemple une dose mortelle de médicament, que celui-ci s'administre. Dans le deuxième cas, le médecin entraîne la mort de quelqu'un à sa demande, habituellement par injection mortelle.
    Aux yeux de quelqu'un qui subit des souffrances intolérables et souhaite mourir avec l'aide d'un médecin, ces deux méthodes peuvent paraître identiques. Toutefois, aux termes du droit pénal actuel, il s'agit de crimes différents, sanctionnés par des peines différentes.
    En vertu de la loi actuelle, l'euthanasie volontaire est considérée comme un meurtre, même si elle est motivée par la compassion ou la pitié et même si la personne visée demande ou consent à mourir. Le meurtre est l'infraction la plus grave dans le droit pénal canadien. Il est passible d'une peine obligatoire d'emprisonnement à perpétuité. Par comparaison, un médecin qui aide une personne à se suicider commet l'infraction d'aide au suicide, qui est passible d'une peine d'incarcération maximale de 14 ans.
    Parmi les quelques pays où l'aide médicale à mourir est réglementée, certains autorisent uniquement l'euthanasie, d'autres autorisent uniquement le suicide assisté et d'autres encore autorisent les deux. Les données dont nous disposons montrent que les risques et les conséquences des deux pratiques ne sont pas les mêmes. Il est important de garder à l'esprit les distinctions entre les deux.
    La Cour suprême a indiqué clairement que sa décision portait uniquement sur les droits des personnes qui demandent de l'aide pour mourir, et non sur les droits des personnes susceptibles de fournir une telle aide, notamment les médecins. Toutefois, la décision a comme effet, sur le plan juridique, d'exiger que les médecins ne puissent plus être tenus criminellement responsables d'avoir aidé une personne à mourir ou d'en avoir activement causé la mort.
    Le fait qu'il serait maintenant légal, dans une certaine mesure, d'aider d'autres personnes à mourir soulève certaines préoccupations. Bon nombre de ces préoccupations ont été invoquées devant les tribunaux, dans l'affaire Carter, et ont servi d'arguments pour justifier la prohibition absolue de ce genre de pratique. Bien que la Cour suprême ait maintenant rejeté les arguments en faveur d'une telle prohibition, il faut tout de même tenir compte des préoccupations et des risques puisque ce sont des considérations importantes et légitimes. En effet, la juge de première instance et la Cour suprême ont clairement dit que ces risques et préoccupations étaient fondés. J'aimerais citer la juge de première instance, qui a dit ce qui suit:
[...] les risques inhérents à l'autorisation de l'aide médicale à mourir peuvent être reconnus et réduits considérablement dans un régime soigneusement conçu, qui impose des limites strictes scrupuleusement surveillées et appliquées.
    Il s'agit, à mon avis, d'un passage clé du jugement de première instance. D'ailleurs, la Cour suprême du Canada y fait référence à plusieurs reprises. Il y a de nombreux éléments à retenir dans cet extrait: premièrement, la juge de première instance estime qu'il y a des risques inhérents à l'autorisation de l'aide médicale à mourir, et ce sont les personnes vulnérables qui y seront exposées. Deuxièmement, les risques peuvent être reconnus et réduits considérablement dans un régime soigneusement conçu, qui impose des limites et des mesures de protection strictes. Toutefois, on ne peut éliminer tous les risques. Troisièmement, ces limites et mesures de protection doivent être scrupuleusement mises en oeuvre, surveillées et appliquées.
    Ce passage nous aide à comprendre le chemin qui s'étend devant nous. Nous devrons cerner les divers risques pour les personnes vulnérables afin de concevoir un régime doté de limites et de mesures de protection, qui vise à réduire au minimum ces risques. Nous devrons aussi envisager des mécanismes pour que les médecins comprennent bien la loi et sachent comment l'appliquer et pour que les autorités compétentes soient tout aussi vigilantes dans la détection des manquements à la loi et l'imposition de sanctions.
    Les tribunaux conviennent que la complaisance ne devra pas être tolérée, que ce soit dans l'élaboration d'une réponse législative ou dans sa mise en oeuvre. À mon avis, nous devrons concevoir ces mécanismes avec beaucoup de prudence. Nous en savons déjà beaucoup au sujet de ces risques. En effet, de nombreux éléments de preuve concernant ces risques ont été présentés aux tribunaux dans le cadre de l'affaire Carter.
(1050)
    Certains risques déjà cernés ont trait aux difficultés qu'ont les médecins à déterminer si la dépression ou des tiers, comme des membres de la famille, exercent une influence sur une personne qui demande qu'on l'aide à mourir. Cette préoccupation est particulièrement vive dans le cas des personnes âgées. Comme nous le savons tous, la maltraitance des aînés constitue un problème croissant. Trop souvent, des gens profitent de la confiance que leur accordent des personnes âgées. Il peut fort bien arriver qu'un enfant adulte laisse entendre à un de ses parents âgés qu'il a eu une vie bien remplie et qu'il n'est pas nécessaire qu'il continue de vivre affaibli ou malade. Des enfants adultes qui ont hâte de toucher l'héritage de leurs parents pourraient fort bien tenter de les convaincre de choisir l'aide médicale à mourir.
    En tant qu'avocat, je suis très préoccupé par le risque que des bénéficiaires sans scrupules manipulent des aînés malades ou leur fassent subir des pressions indues. Quiconque exerce le droit au Canada, en particulier le droit testamentaire et successoral, sait cela. Les avocats dans ce domaine voient des situations où des personnes âgées sont la cible de beaucoup de pression pour prendre certaines dispositions testamentaires, en particulier constituer une fiducie testamentaire, ce qui porte le problème à un autre niveau. Nous devons procéder avec grande prudence dans ce domaine. Nous espérons tous que de tels abus ne se produisent jamais, mais notre démarche ne fera que nuire aux personnes vulnérables si nous nions naïvement que cela peut arriver. La véritable question, c'est comment empêcher que cela mène à un décès non désiré.
    Une autre préoccupation à considérer, c'est le risque qu'une personne choisisse de mettre fin à ses jours en raison d'un diagnostic ou d'un pronostic erroné. Bien que la médecine soit une science, le diagnostic d'une maladie et le pronostic quand à l'espérance de vie du patient constituent une évaluation médicale difficile. Mon propre père était médecin. Il est maintenant à la retraite, et se trouve à l'hôpital d'Hamilton, en Ontario. Il m'a parlé bien de bien des cas où il avait dû revoir un diagnostic et où des résultats de tests étaient peu concluants. Je me souviens qu'il m'ait raconté, quand j'étais enfant, l'histoire d'un patient qu'il avait à Toronto il y a 40 ans. Un jeune homme s'était blessé en jouant au football à l'école secondaire. Il a passé 21 ans dans le coma. Puis, un beau jour, il s'est réveillé et est sorti de l'hôpital. Sa mère avait passé 21 ans à son chevet. La science évolue constamment. Chaque jour, nous en apprenons davantage au sujet du corps humain et de sa capacité d'autoguérison.
    Mon père a terminé ses études en médecine en 1953 et a consacré toute sa carrière à prolonger et à sauver des vies. Je m'inquiète pour les futures générations d'étudiants en médecine. Je me demande comment ils vont composer avec la responsabilité supplémentaire de considérer comment mettre fin à une vie.
     La cour a également été saisie d'éléments de preuve montrant que les personnes handicapées courraient des risques particuliers dans le cadre d'un régime trop permissif. Le juge de première instance a accepté les éléments de preuve selon lesquels les personnes handicapées risquent d'être victimes de préjudices dans le milieu médical en raison de préjugés inconscients de la part de certains médecins, qui amènent ceux-ci à présumer que la qualité de vie de ces personnes est inférieure à ce qu'elle est, subjectivement, pour ces dernières. Certains craignent que, si une personne handicapée exprime la volonté de mourir, sa demande soit trop facilement acceptée par son médecin, et qu'on ne consacre pas suffisamment de temps et d'énergie à déterminer ce qui se cache derrière cette demande pour en comprendre les raisons. De façon plus générale, les groupes de défense des droits des personnes handicapées craignent que l'aide médicale à mourir renforce soudainement les stéréotypes et les préjugés sociaux voulant que la vie des personnes handicapées a moins de valeur et est de qualité moindre que celle des autres Canadiens. Bon nombre de personnes handicapées croient qu'une telle supposition est dévalorisante. Nous devons prendre leurs craintes au sérieux.
    Comme je l'ai dit auparavant, mon point de vue repose sur l'expérience que j'ai vécue avec ma mère, qui est décédée il y a trois ans. Elle souffrait de la maladie d'Alzheimer, et les cinq dernières années de sa vie n'ont pas été faciles. Elle était confinée à un fauteuil roulant qui était trop grand pour elle. Elle avait besoin d'aide pour s'asseoir dans le fauteuil ou le quitter et pour se mettre au lit et en sortir. Bien des fois, elle ne savait même pas où elle se trouvait, qui elle était ou à qui elle parlait. Toutefois, même lors de la dernière année de sa vie, il y avait certains jours où, de façon tout à fait inattendue, elle faisait des remarques extrêmement pertinentes, savoureuses et perspicaces, des remarques bien à propos, et nous ne savions jamais quand ces moments se produiraient.
(1055)
    Il était difficile pour mon frère, ma soeur et moi de la sortir de la maison de santé où elle résidait pour qu'elle puisse assister à des événements familiaux. Il fallait toute une logistique et des soignants spéciaux, mais chaque moment passé en sa compagnie valait la peine et nous aimerions tous qu'elle soit encore parmi nous aujourd'hui.
    Bien sûr, plus généralement, les points de vue divergent chez les personnes handicapées, mais ce sont les préoccupations qu'ont soulevées les grandes organisations nationales et internationales. Il sera primordial d'entendre tous les intervenants au cours de prochains mois, afin que nous puissions mettre au point des mesures et des protections adéquates qui affirment la dignité et la valeur égales et inhérentes de tous les Canadiens, y compris des Canadiens handicapés.
    Beaucoup seront probablement d'avis que l'aide médicale à mourir est une question d'ordre privé entre un patient — qui veut vraiment et absolument mourir parce qu'il a une maladie qui lui cause des souffrances insupportables — et son médecin. La question de la légalisation de l'aide médicale à mourir semble être une question d'ordre privé.
    Du point de vue d'une personne qui veut vraiment mourir, la question peut paraître relativement simple. Toutefois, comme je l'ai expliqué, d'un point de vue public plus large, il y a beaucoup d'éléments à prendre en considération.
    Certaines personnes pourraient choisir l'aide médicale à mourir après avoir mené une vie stimulante et bien remplie, ayant réalisé tous leurs rêves, avec l'appui de leurs proches et de leurs amis. Toutefois, ce n'est pas tout le monde qui a cette chance. D'aucuns pourraient choisir la mort comme option la plus raisonnable parce qu'ils ne sont pas soutenus par leur famille, parce qu'ils sont seuls ou parce qu'ils n'ont pas les ressources nécessaires pour rendre leur vie supportable. Si ces personnes demandent à leur médecin de les aider à mourir, comment devrions-nous les traiter?
    Selon toute vraisemblance, il existe plusieurs avenues possibles dans ce dossier. Il serait essentiel d'examiner les régimes en vigueur à l'échelle internationale, comme l'ont fait les tribunaux dans l'affaire Carter. À l'heure actuelle, il semble y avoir deux catégories de régimes. Aux États-Unis, trois États — l'Oregon, Washington et le Vermont — ont légalisé le suicide assisté par un médecin en ne permettant la prescription d'une substance mortelle qu'aux malades en phase terminale. En revanche, trois pays d'Europe — la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg — ont légalisé et réglementé l'euthanasie dans le cas de personnes en proie à des souffrances intolérables causées par n'importe quel type de maladie.
    Parmi ceux qui obtiennent une aide médicale à mourir dans le cadre de ces programmes, la plupart sont des patients atteints de cancer, qui sont en fin de vie, mais on compte aussi un nombre croissant de personnes atteintes de troubles psychiatriques ou d'autres problèmes de santé non mortels. Il faudra faire des choix difficiles. En tant que société, traiterons-nous différemment la souffrance des personnes mourantes et celle des gens qui pourraient vivre encore longtemps? Prenons-nous toutes les mesures possibles pour soulager la souffrance sous toutes ses formes?
    J'aimerais en profiter pour mentionner les soins palliatifs et rendre un hommage particulier aux personnes exceptionnelles, infirmiers et infirmières, médecins et soignants, qui oeuvrent dans ce secteur. Ce sont de véritables anges, et ils méritent notre appui et nos remerciements. Des membres de ma famille ont connu une fin de vie bien plus douce parce qu'ils ont pu bénéficier de soins palliatifs. C'est un aspect dont nous devrons parler pendant le débat. Quand j'ai l'impression de vivre une dure journée au bureau, je pense aux professionnels des soins palliatifs. Que Dieu les protège.
    Comment pourrons-nous à la fois poursuivre les initiatives de prévention du suicide et offrir à certaines personnes une aide à mourir? Comment pouvons-nous amener les Canadiens à parler plus volontiers de la mort avec leur médecin et leur famille, et à prévoir les directives qu'il faudra suivre s'ils deviennent un jour incapables d'exprimer leurs souhaits?
    L'aide médicale à mourir soulève de nombreuses et importantes inquiétudes dans l'ensemble de la population. Il est en effet question de vie, de mort, de dignité humaine, de souffrances ainsi que de la valeur intrinsèque et de l'égalité de tous les Canadiens, quels que soient leur état médical, leur âge, leurs handicaps physiques et leurs problèmes. Il s'agit de questions très profondes. Le gouvernement s'oppose à la motion parce qu'il s'est engagé à mener sérieusement et efficacement de vastes consultations auprès de la population. Ces consultations prendront un certain temps, et il nous incombe de prendre le temps d'examiner attentivement tous les points de vue et toutes les possibilités qui s'offrent à nous.
    Il faut unir nos efforts pour trouver des solutions empreintes de respect et de compassion. La façon dont nous choisirons de conjuguer ces valeurs souvent contradictoires témoignera pendant longtemps du genre de société dans laquelle nous voulons vivre. À mon avis, la structure du comité spécial et le calendrier proposé dans la motion libérale ne nous permettraient pas d'examiner comme il se doit tous les aspects de cette question très grave.
(1100)
    Monsieur le Président, certains aspects dont le député a parlé, et en particulier le fait qu'il a employé l'expression « il faut unir nos efforts », montrent bien qu'il faut s'occuper de cette question.
    J'ai bien peur que les députés de Kitchener-Centre et de Saskatoon—Wanuskewin aient déjà décidé qu'il faille appliquer la disposition de dérogation, et que le député de Vegreville—Wainwright estime déjà que la période prévue n'est pas suffisante pour les conservateurs et qu'il faille prolonger le délai.
     Je pose la question au député: n'est-il pas important qu'il y ait un véritable débat social et que la discussion ne se limite pas à son caucus? Pourquoi ne pourrions-nous pas faire ce que Preston Manning propose pour bien faire les choses, c'est-à-dire laisser les gens s'exprimer au Parlement de façon transparente? Comment pourrions-nous unir nos efforts et écouter ce que les Canadiens ont à dire plutôt que de limiter le débat à une discussion privée pendant laquelle les députés conservateurs se font dire quoi faire?
    Monsieur le Président, je déplore la partisanerie qui se dégage de la question.
    Selon nous, il faut entendre ce que des dizaines de milliers voire des centaines de milliers de Canadiens ont à dire dans ce dossier, sauf que la députée sait pertinemment qu'un comité ne peut entendre qu'un très petit nombre de témoignages.
    Comme le savent les députés aujourd'hui présents qui siègent au comité de la justice, nous avons suivi un processus semblable l'an dernier relativement à l'arrêt sur la prostitution rendu dans l'affaire Bedford, lorsque nous avons étudié la législation relative à la prostitution. Même en siégeant une bonne partie de l'été à raison de six heures de témoignages par jour, nous avons pu au mieux entendre huit ou dix témoins à l'heure. Il n'y a tout simplement pas assez d'heures dans une journée pour écouter toutes les personnes qui désirent s'exprimer sur un dossier aussi important que celui-ci.
    Il faut mobiliser tous les Canadiens. Il faut procéder à de vastes consultations publiques. Il faut ensuite colliger les renseignements ainsi recueillis afin de décider comment aborder la question, puis renvoyer le tout au comité. Ces démarches seront entamées sous peu, j'en suis convaincu.
(1105)

[Français]

    Monsieur le Président, d'une part, je remercie mon collègue le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice de son discours, et d'autre part, j'ai bien écouté sa réponse à la question de la députée libérale.
    L'exemple que le secrétaire parlementaire utilise, soit le dossier de la prostitution, ne me réconforte pas nécessairement si on envisage qu'une consultation serait faite dans un sens non partisan.
    Effectivement, c'était un des problèmes dans le dossier de la prostitution en réponse à l'arrêt dans la cause Bedford. Beaucoup de gens sont venus nous dire que le gouvernement ne consultait que ceux qu'il voulait bien consulter.
    Le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice peut-il dire à la Chambre si, dans le processus que les conservateurs envisagent, les partis de l'opposition et députés qui représentent des partis non reconnus à la Chambre vont pouvoir faire partie de leur processus et si la consultation sera réellement générale?
    Je veux entendre l'opinion de tous: ceux qui sont pour l'aide à mourir, ceux qui sont contre et ceux qui sont à mi-chemin entre les deux et ceux qui sont d'accord jusqu'à un certain point.
    Je ne veux pas sentir qu'il n'y a de place que pour la vision du gouvernement, du bureau du premier ministre. En effet, c'est une question extrêmement sérieuse et émotive pour beaucoup de personnes. Elle touche beaucoup de gens que nous représentons tous à la Chambre, et ils méritent d'être entendus.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'aime bien travailler avec la députée au sein du comité de la justice.
    J'estime qu'il est possible de mener une consultation très vaste. Nous disposons d'une invention qui s'appelle Internet. Nombreux sont les Canadiens qui y ont accès, même si ce n'est pas nécessairement tout le monde. Voilà un outil que nous pourrions utiliser pour demander aux Canadiens qui veulent exprimer leur opinion de dire aux parlementaires comment traiter ce dossier.
    Nous pourrions créer une série de questions qui seraient mises à la disposition de tous les Canadiens et auxquelles ils pourraient répondre. C'est l'un des scénarios possibles. La consultation serait non partisane et pourrait être menée partout au Canada. Pour ceux qui n'ont pas accès à Internet, d'autres moyens pourraient être mis en place pour leur permettre de participer à la consultation, comme des assemblées publiques, des envois postaux ou d'autres modes de communication.
    Ensuite, les parlementaires devraient examiner les résultats ensemble pour déterminer comment aborder la question.
    Monsieur le Président, le discours du député de Mississauga—Erindale était sincère et réfléchi. Ce n'est pas sans raison que la population l'a réélu à la Chambre à maintes reprises. En effet, il est capable de présenter de façon respectueuse des exposés détaillés sur de nombreux sujets complexes, d'une manière qui relève le niveau du débat. Selon moi, c'est ce que la plupart des Canadiens souhaitent voir au Parlement.
    Le député a soulevé des préoccupations. Il a parlé de l'époque à laquelle son père pratiquait la médecine, son père qui tentait de protéger, de sauver et de préserver des vies. Il a aussi exprimé ses inquiétudes concernant les futurs médecins, qui devront composer avec les nombreux enjeux dont il est question aujourd'hui.
    Mon père était avocat dans un cabinet, et je sais que la maltraitance des aînés, comme l'a dit le député, pose des défis constants. Il faut aussi déterminer si les gens ont préparé un testament en bonne et due forme, et si leur volonté a été respectée. Souvent, c'est à l'avocat qu'incombe l'exécution du testament dans des circonstances très difficiles.
    Est-ce que le député pense aussi que la profession juridique sera confrontée à des problèmes de cette nature, car un grand nombre de Canadiens n'ont pas de testament? Ce sont des questions auxquelles nous devrons répondre collectivement à mesure que nous avancerons dans l'étude de ce dossier.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses bonnes paroles.
    Étant avocat, j'ai vu des bénéficiaires manipuler indignement des personnes malades et affaiblies et je pense que la plupart des avocats ont aussi été témoins de telles situations. Ce n'est pas une chose à prendre à la légère. J'ai vu certains collègues spécialisés en testaments et successions dénoncer de telles pratiques et refuser de certifier l'authenticité d'un testament parce qu'ils savaient que des pressions avaient été exercées sur le testateur. Cela ajoute une dimension au débat et c'est un fait que des gens peuvent être ainsi manipulés.
    Une fois que le testament est établi et que les bénéficiaires sont désignés, je crains le genre de pression que les testateurs pourraient subir pour demander de l'aide à mourir. Nous devons prendre le temps de bien réfléchir à ces questions et veiller à ce que le processus mis en place élimine autant que possible les risques que cela se produise.
(1110)
    Monsieur le Président, que compte faire le gouvernement?
    Nous proposons d'entamer des consultations. C'est une question très difficile et complexe. C'est probablement une de ces questions auxquelles aucun de nous ne veut vraiment penser, mais la Cour suprême en a saisi le Parlement et nous a dit que nous avions 12 mois pour proposer quelque chose. Nous proposons donc d'entamer le processus de manière non partisane.
    Que propose le gouvernement si ce n'est de publier sur Internet et de demander déjà une prolongation, plutôt que d'amorcer l'étude de cette question difficile?
    Monsieur le Président, il y aura un vaste processus de consultation. Je n'ai pas tous les détails que la députée me demande aujourd'hui, mais le gouvernement annoncera le processus très bientôt. Je puis assurer à la députée que la consultation sera très vaste.
    Je comprends que les libéraux veuillent faire quelque chose, mais ils s'y prennent de la mauvaise façon. Les comités parlementaires ne peuvent pas entendre des milliers de personnes.
    Pour ce qui est de la période de 12 mois, c'est la norme prévue par les tribunaux dans des cas de cette nature. Toutefois, compte tenu des circonstances particulières qui entourent cette question — une des plus importantes que nous aurons à aborder — ainsi que de l'année en cours, nous ne devrions pas nous lancer hâtivement dans un processus qui risque d'être inadéquat si nous ne prenons pas le temps d'étudier la question convenablement et prudemment, et d'entendre toutes les opinions. Un délai de 12 mois nous est imposé. Le gouvernement a la possibilité de demander une prolongation. Compte tenu des circonstances entourant la question et de l'année en cours, je crois fort probable que la cour accueille favorablement notre demande.

[Français]

    Monsieur le Président, je voudrais vous signifier que je partagerai le temps dont je dispose avec la députée de La Pointe-de-l'Île.
    Il y a des moments dans la vie d'une personne qui sont d'une importance capitale. Il n'y a rien de plus important que ce qui touche à la santé et à nos vies, que tout ce qui touche à la vie des gens que nous représentons. Nous n'aurons probablement pas de débat plus important, autre que le dossier de la sécurité, parce que, encore une fois, cela touche à la vie et aux libertés des gens que nous représentons. Ce dossier-ci est donc extrêmement important.
    Assez jeune — le mot « jeune » est relatif, vu le caucus que nous avons —, j'ai été mise brusquement devant la réalité d'expressions que je ne connaissais même pas. Quand j'avais 29 ans, nous avons appris comme cela, de façon brutale, que mon père avait un cancer. Ses jours étaient comptés, et rien ne pourrait le mener plus loin que deux ou trois mois. Même les traitements ne le mèneraient pas à plus de cinq mois. J'ai dû rétroagir face à des principes ou des concepts comme « qualité de vie » et « dignité humaine ». Il n'y a rien de pire dans la vie de quiconque que de faire face d'abord à sa propre mortalité, ensuite à celle des gens qu'il aime. Comment doit-on traiter tout cela? Je pense que notre humanisme doit ressortir en priorité.
    J'ai aussi le bonheur d'être Québécoise et d'avoir assisté au processus qui s'est enclenché au Québec dans le contexte de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité. Une de mes bonnes amies, Maryse Gaudreault, députée de Hull, était députée à l'Assemblée nationale à l'époque où son parti était au pouvoir, et elle a présidé cette commission.
    Ce qui m'a fascinée dans ce dossier, c'est que des politiciens de tous horizons ont pu se rassembler autour d'un dossier aussi complexe. Il y avait autant de positions diverses qu'il y avait de personnes autour de la table, mais celles-ci ont su mettre leurs différends de côté pour travailler pour les gens qu'elles représentaient ou, comme diraient les Anglais, for the better good. Ces gens ont fait preuve d'ouverture au cours de ce processus. C'est vrai qu'ils ont pris le temps nécessaire. À cet égard, je rejoins le secrétaire parlementaire: si on veut faire une étude en profondeur de nombreux concepts, peut-être qu'il va falloir songer au temps que nous devrons y consacrer. Cela dit, il ne faut pas attendre à demain, il faut commencer maintenant.
    Dans ce contexte, la commission a produit un rapport. Il existe une version anglophone. J'encourage les députés à consulter ce rapport sur le site du gouvernement du Québec en cliquant sur l'onglet de la Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité. C'est un modèle de coopération politique entre politiciens de toutes orientations. Qu'on les appelle comme on voudra, fédéralistes, indépendantistes ou séparatistes, qu'ils soient de gauche, de droite, de centre ou de centre-gauche, ces gens-là se sont assis autour d'une table de façon non partisane pour écouter ce que les Québécois et les Québécoises avaient à leur dire et pour écrire des recommandations.
    Cela ne s'est pas arrêté là. En effet, après cela, un comité d'experts a été créé pour essayer de produire un contexte un peu plus légal sur la question. En faisaient partie trois sommités: Me Jean-Pierre Ménard, sommité en matière de droit médical, Me Michelle Giroux et Me Jean-Claude Hébert. Cela s'est poursuivi,et il y a eu une entente à l'effet que, si le prochain gouvernement n'était pas de la couleur du gouvernement qui présidait la commission, ils allaient prendre le relais et poursuivre le processus. Cela ne s'est donc pas terminé lors du changement de gouvernement. La ministre du Parti québécois Véronique Hivon a pris la relais et a continué à mener le dossier et, par la suite, le gouvernement Couillard l'a finalisé.
    Cela montre comment un échantillonnage de gens de tous horizons se sont investis dans le dossier. Ils ont pris le temps d'écouter la population et ont tenté d'en arriver à un processus humain et respectueux des droits et des personnes plus à risque pour s'assurer de ne pas faire ce qu'on ne voudrait pas voir faire.
    Cela dit, il y a quand même une Constitution canadienne qui a dévolu tout ce qui relève de la santé aux provinces. Cela inclut les soins jusqu'en fin de vie, peu importe le moment où celle-ci se produit.
(1115)
    Je suis très respectueuse du droit du Québec, et je reconnais sans aucune réserve le droit du Québec à faire ce qu'il a fait, comme toute province dans les mêmes circonstances. Nous faisons face à la décision Carter, rendue par la Cour suprême le 6 février et qui a été sans équivoque. Elle traite de l'alinéa 241(b) du Code criminel qui dit que quiconque aide ou encourage quelqu'un à se donner la mort commet un acte criminel. Selon l'article 14 du Code criminel: « Nul n’a le droit de consentir à ce que la mort lui soit infligée [...] ».
    La Cour suprême du Canada a été très claire, et pour reprendre les mots du chef du troisième parti, clear and unanimous guidance. Ce que la Cour suprême du Canada a dit ne peut pas être plus clair. Il faudra donc faire une étude dans un contexte bien précis. La Cour suprême dit sans équivoque:
    L’alinéa 241b) et l’art. 14 du Code criminel portent atteinte de manière injustifiée à l’art. 7 de la Charte et sont inopérants dans la mesure [Il faut bien comprendre la décision de la Cour suprême] où ils prohibent l’aide d’un médecin pour mourir à une personne adulte capable qui (1) consent clairement à mettre fin à sa vie; et qui (2) est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition. La prise d’effet de la déclaration d’invalidité est suspendue pendant 12 mois.
    Cela veut dire qu'il n'y a pas 36 scénarios possibles. Cela s'est discuté partout et nous l'avons entendu. En effet, tout le monde parle de trois scénarios possibles et d'un quatrième. Le quatrième scénario serait d'obtenir une prorogation de la Cour suprême parce que nous ne serions pas capables de nous lancer rapidement dans le dossier et de faire ce que nous aurions dû commencer à faire depuis un bout de temps déjà. Au NPD, nous avons commencé à le faire bien avant la décision Carter, sachant fort bien que nous devrions faire face à cette question, même si ce n'était que parce que la population canadienne nous le demandait. J'ai de plus en plus l'impression qu'elle est en avant de nous sur la question.
    La Cour suprême du Canada a été claire. Un des trois scénarios possibles, c'est d'utiliser la clause nonobstant. Nous savons que certains collègues conservateurs sont friands de cette clause. J'étais fort aise d'entendre le ministre de la Justice nous dire qu'il n'était pas question d'utiliser la clause nonobstant. Merci, mon Dieu. Utiliser la clause nonobstant par rapport à la Charte canadienne des droits et les libertés, pour que les gens qui nous écoutent comprennent bien, cela veut dire que nous savons que nous sommes contraires à la Charte mais que, sachant cela, nous le faisons quand même. Jusqu'à maintenant, nous nous sommes tenus loin de ce genre de clause, tous partis confondus, et j'en suis fort aise.
    Le deuxième scénario est de dire qu'il ne se passe rien et que nous n'allons pas demander une prorogation auprès de la Cour suprême du Canada. Alors que se passe-t-il? Un journaliste me posait la question hier. C'est intéressant parce que plus on lit la décision, plus on y voit de choses. En fait, mon opinion, qui vaut ce qu'elle vaut, c'est que l'alinéa 241b) va continuer de s'appliquer, sauf dans le cas où ce serait la prohibition de « l’aide d’un médecin pour mourir à une personne adulte capable qui (1) consent [...], donc ce que je mentionnais tout à l'heure. Le scénario de laissez-faire ou de ne rien faire signifierait que ce serait du cas par cas quand ce serait présenté devant les tribunaux.
    Le troisième scénario, c'est de prendre le taureau par les cornes et d'apporter des précisions. Il va quand même falloir que les tribunaux sachent ce que signifie « un adulte capable », « un consentement clair à mettre fin à sa vie », « un problème de santé grave et irrémédiable (y compris une affection, une maladie ou un handicap) [qui cause] des souffrances persistantes », et ainsi de suite.
    Le caucus néo-démocrate a toutes sortes d'opinions, tout comme la population canadienne. Toutefois, je pense que nous devons écouter les Canadiens, les spécialistes et les gens qui ont un intérêt marqué pour la question afin de bien préciser comment l'alinéa 241b) doit se lire maintenant en vertu de la décision de la Cour suprême, et ce qui serait acceptable comme consentement, comme notion d'adulte, et ainsi de suite. L'idée d'un comité n'est pas mauvaise.
    Nous allons appuyer la motion libérale. Par contre, j'ai de sérieux doutes concernant la non- partisanerie du processus, compte tenu de l'historique que nous avons avec le gouvernement en place.
(1120)
    Monsieur le Président, je veux remercier ma collègue de son discours.
    C'est intéressant de voir la position qu'a adoptée le gouvernement. Les conservateurs ont indiqué qu'ils sont en faveur de consulter les gens, mais ils ne sont pas en faveur d'un comité. Apparemment, c'est un rôle pour le gouvernement seulement.
    Du point de vue de ma collègue, quel devrait être le rôle des parlementaires dans le processus de consultation? Leur rôle doit-il se limiter à simplement examiner le travail des fonctionnaires? À son avis, avons-nous un vrai rôle à jouer dans ce processus en tant que députés de l'opposition?
    Monsieur le Président, effectivement, nous, les députés, avons un rôle extrêmement important à jouer dans ce dossier, parce que nous sommes les représentants du peuple.
    Chacun d'entre nous, les 308 députés à la Chambre, représente un pourcentage de la population et, conséquemment, devrait prendre le pouls de ses concitoyens. Croit-on je n'ai pas soulevé la question dans toutes les activités que je fais dans mon comté? Je suis réputée pour être une personne de terrain. Je pose la question aux électeurs de ma circonscription. Certains me la posent directement avant même que je ne le fasse. Ils me demandent ce que je pense de la décision de la Cour suprême, et je leur renvoie la balle en leur demandant ce qu'ils pensent de cette décision, à quelle enseigne ils logent et ce qu'ils aimeraient voir.
    On sent que, sur cette question, les Canadiens sont presque plus murs et adultes que le gouvernement. Ils sont prêts à entendre ce discours. Les Québécois l'ont entendu, mais peut-être pas le reste du Canada. Cette vaste consultation, dont le secrétaire parlementaire parlait avec raison, devrait donc se faire de façon non partisane, non pas par le gouvernement, mais par le biais d'un ensemble de députés représentatifs de la Chambre, de façon à ce que nous puissions tous entendre les mêmes choses, au lieu de se demander si nous avons vraiment eu l'opinion de x, y ou z. Il faudrait que ce soit vaste et non partisan.
(1125)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je crois que les discussions de ce matin ainsi que la quantité de commentaires que nous recevons de nos électeurs suffiront à convaincre tous les députés de la grande importance et du caractère très délicat que les Canadiens prêtent à cette question. J'espère que nous prendrons suffisamment de temps pour en faire l'étude et pour sonder l'avis des Canadiens d'horizons très divers.
    Ce qui me préoccupe, au sujet des observations de ma collègue — tant dans son intervention de maintenant que dans la question qu'elle a posée plus tôt à mon collègue, le secrétaire parlementaire —, c'est qu'elle insinue que notre parti ou le gouvernement a déjà pris une décision en la matière, sans égard pour le Parlement.
    Je tiens à lui rappeler et à rappeler à tous les Canadiens que tous les partis se sont penchés sur cette question au Parlement. De 1991 à 2012, il y a eu neuf différents projets de loi d'initiative parlementaire qui ont porté précisément sur cette question. Six d'entre eux n'ont pas été adoptés.
    Ce n'est pas ce gouvernement qui prend la décision. Ce n'est pas notre parti. Le Parlement a discuté de cet enjeu, et il ne fait aucun doute pour moi que si nous avons l'intention de nous y attaquer maintenant, il nous faudra suffisamment de temps pour procéder à des consultations.
    Ma question pour la députée est la suivante: dans une année d'élection où nous disposons de nombreuses semaines à l'extérieur du calendrier parlementaire pour étudier adéquatement cette question d'importance névralgique, pourquoi s'oppose-t-elle à l'idée de prendre 12 mois complets de temps parlementaire pour le faire?
    Monsieur le Président, permettez-moi de corriger ce que le député a dit. Je ne m'oppose pas à ce qu'une étude ait lieu. Mais je m'oppose fermement à ce que le gouvernement effectue seul une consultation de 12 mois, ou peu importe le nombre de mois. Ce serait très problématique pour moi et pour notre caucus. Je pense que c'est une question trop importante pour que le gouvernement soit le seul à l'examiner.
    Cela dit, je sais que le Parlement a dû auparavant tenir compte d'autres décisions et d'autres faits. Mais la Cour suprême vient de rendre une nouvelle décision. Or, il s'agit du plus haut tribunal du pays, et, jusqu'à nouvel ordre, notre pays adhère encore au principe de la primauté du droit. Lorsque j'ai été invitée à débattre de la question avec mes collègues et qu'ils me disaient qu'il fallait s'en tenir à l'arrêt Rodriguez, je leur répondais toujours que nous serions peut-être obligés de rouvrir le dossier si la Cour suprême rendait une décision différente.
    Si tout le monde avait attendu la décision comme telle, le 6 février, nous serions tous en retard sur les événements. Ils auraient dû commencer leur réflexion avant.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de me lever aujourd'hui pour m'exprimer sur le suicide assisté et sur la motion du troisième parti à la Chambre.
    J'aimerais commencer par faire écho aux propos de tous mes collègues. Je ne vais pas me lancer dans un long débat. C'est un sujet sensible, très polarisé et qui interpelle personnellement les gens, parce qu'on a tous directement ou indirectement vécu une situation tragique où une personne qu'on connaît perd quelqu'un qu'elle aime ou que nous-mêmes perdons ou voyons une personne très proche souffrir. C'est le rôle du Parlement de guider les Canadiens et les Canadiennes dans ce genre de situation, de leur tendre la main en leur disant que nous allons les écouter, de répondre à leurs questions et de faire reculer leur insécurité.
    Le débat est nécessaire aujourd'hui, et je remercie mes collègues du Parti libéral d'avoir présenté cette motion. Comme ils le disent, nous sommes devant une décision de la Cour suprême très importante parce que, comme ma collègue de Gatineau vient de le dire, elle renverse une autre décision, soit la décision Rodriguez. Elle édicte de nouveaux principes par rapport à l'euthanasie et au suicide assisté. Comme parlementaires, il importe que nous tenions compte de cette décision, et surtout que nous écoutions les nombreux Canadiens et Canadiennes, de tous les horizons, qui demandent au gouvernement de faire quelque chose depuis longtemps.
    Ma collègue de Gatineau l'a bien mentionné, mais je peux peut-être répéter certains principes énoncés dans la décision de la cour. Dans sa décision, la cour nous indique que l'alinéa 241b) et l'article 14 du Code criminel violent le droit à la vie, le droit à la sécurité et le droit à la liberté des Canadiens et Canadiennes. Pourquoi? Parce qu'une prohibition générale n'atteint pas l'objectif qui est, il faut le dire, de protéger les personnes vulnérables contre toute incitation ou encouragement à mettre fin à leur vie. La prohibition générale vient violer le droit à la dignité. La Cour suprême parle d'autonomie décisionnelle, de liberté de la personne, de dignité de la personne. Il est important d'admettre et d'épouser ces concepts, et de renvoyer la balle aux Canadiens et Canadiennes pour qu'ils nous disent ce qu'ils en pensent et ce qu'ils attendent de leur Parlement.
    C'est dommage que les conservateurs estiment que le fait de consulter les Canadiens est un rôle qui appartient uniquement au gouvernement. C'est faux. Nous sommes tous ici en tant que parlementaires, et c'est le rôle des parlementaires et du Parlement de consulter les Canadiens et les Canadiennes.
    En ce qui concerne ce qui a été fait au Québec, j'aimerais féliciter les parlementaires québécois, au nom de tous mes collègues. Ils ont été vraiment capables de faire fi de toute la partisanerie existante en politique pour finalement adopter le projet de loi le 5 juin 2014.
    Le processus utilisé au Québec est très intéressant. Il a débuté en 2009. De 2009 à 2014, il y a eu la formulation des principes et un profond questionnement au sujet du suicide assisté par une commission spéciale qui a reçu comme mandat du Parlement d'étudier la question du droit de mourir dans la dignité. Celle-ci a consulté des experts de septembre 2010 à mars 2011.
(1130)
    Par la suite, elle a demandé à des experts juridiques de commenter ses 24 recommandations et de déposer un rapport sur les questions juridiques soulevées. Ce rapport a été déposé au gouvernement le 15 janvier 2013, ainsi qu'à une commission de la santé et des services sociaux.
    Les gens de tous les domaines touchés par cette question ont donc été consultés, qu'il s'agisse des experts juridiques ou des professionnels de la santé et des services sociaux. C'est important de le mentionner, car les provinces doivent être impliquées dans le processus, qu'il s'agisse d'un comité spécial ou d'une consultation. Le gouvernement doit comprendre que les provinces sont les premiers acteurs à fournir les soins de santé.
    Il est donc extrêmement important que les provinces fassent partie intégrante des consultations du gouvernement. Oui, il faut consulter les Canadiens, les experts juridiques et les professionnels de la santé, mais les provinces sont les premières à livrer des soins de santé. Alors, leur point de vue doit être absolument être entendu par le gouvernement.
     Ce n'est pas la première fois qu'un projet de loi traitant du suicide assisté est présenté. Dans ce cas-ci, il s'agit d'une motion, mais plusieurs projets de loi ont été présentés, dont celui de ma prédécesseure, Mme Francine Lalonde. Celle-ci a été une figure de proue en ce qui concerne la question du suicide assisté. Elle a présenté un projet de loi à plusieurs reprises en vue de modifier le Code criminel. Alors, le Parlement peut aussi s'inspirer des nombreuses initiatives des parlementaires ainsi que des débats qui ont eu lieu au Parlement.
    Les gens opposent souvent le suicide assisté aux soins de santé palliatifs ou de fin de vie, alors que les deux vont de pair. Mon collègue de Timmins—Baie James a présenté une motion pour que le gouvernement se penche sur une stratégie pancanadienne en matière de soins palliatifs, de concert avec les territoires et les provinces, visant à améliorer la qualité de vie et la dignité des gens qui sont malheureusement en fin de vie.
    Tout cela mérite que nous ayons une discussion extrêmement importante sur le rôle que va jouer le Parlement dans cet enjeu. Les principes fondamentaux de ce débat sont très importants. Il s'agit de liberté, de choix, de dignité et, surtout, de santé et de sécurité. C'est la base même des principes édictés par la Cour suprême dans l'affaire Carter c. Canada.
    Il faut travailler à ce que tous les Canadiens et les Canadiennes soient entendus et à ce qu'ils puissent mettre fin à leurs jours de façon digne. L'autonomie décisionnelle est extrêmement importante.
    Les provinces doivent être les principaux acteurs consultés par le gouvernement, mais les Canadiens et les Canadiennes doivent surtout sentir que leur gouvernement est à l'écoute et qu'il fera tout en son pouvoir pour respecter la décision de la Cour suprême et pour trouver une solution qui respecte les principes fondamentaux édictés dans l'affaire Carter c. Canada.
(1135)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue pour son discours. J'ai le plaisir de faire partie avec elle du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, qui traite des questions juridiques comme celle dont nous débattons aujourd'hui.
    J'aimerais savoir si la députée pense que cette question devrait être étudiée par le comité de la justice de la Chambre des communes ou par le comité spécial qu'on souhaite former. Deuxièmement, pourrait-elle nous dire si le délai prévu est suffisant, selon elle?
    Au cours du débat, nous avons parlé de la décision Bedford et de la suite donnée par le gouvernement à cette décision. À l'époque, le NPD avait demandé au gouvernement de s'adresser à la Cour suprême pour obtenir une prolongation du délai, de manière à ce qu'un comité puisse étudier la question. Le NPD nous répétait sans cesse: « Pourquoi se précipiter? Pourquoi se dépêcher tant? Pourquoi ne pas prendre plus de temps pour se pencher sur le dossier de la prostitution? »
    Pourrait-elle nous dire ce qu'elle en pense et nous indiquer comment ce raisonnement devrait s'appliquer dans le cas actuel?

[Français]

    Monsieur le Président, je n'aurai malheureusement pas beaucoup de temps pour répondre aux multiples questions de mon collègue.
    Ce n'est pas à moi, en tant que parlementaire, de décider quel comité est le plus approprié, que ce soit le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, un comité spécial ou un comité consultatif. C'est une décision qu'on doit prendre ici, au Parlement. Les experts de toutes les provinces, du domaine juridique ou de la santé, doivent être une partie importante de ce processus.
     C'est au gouvernement de déterminer l'échéancier approprié. Toutefois, si cela lui a pris un an pour discuter de la prostitution, je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas suivre un processus digne de ce nom pour un sujet aussi important que le suicide assisté.
    En ce qui concerne les commentaires de mon collègue sur la prostitution, j'aimerais lui rappeler que le gouvernement a attendu jusqu'à la dernière minute pour déposer un projet de loi, et c'est pourquoi on lui demandait pourquoi il voulait se dépêcher. C'était parce que le Parlement avait un an, mais le gouvernement a attendu jusqu'à la dernière minute pour présenter un projet de loi et l'expédier au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. On a même dû siéger en juillet, lorsque le Parlement ne siégeait pas, pour faire une étude en une semaine avec une soixantaine de témoins...
(1140)
    À l'ordre. L'honorable député de Trois-Rivières a la parole.
    Monsieur le Président, je suis avec beaucoup d'intérêt ce débat depuis ce matin. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que le gouvernement du Québec a fait école en la matière et qu'on aurait tout avantage à regarder la façon dont le processus s'est effectué au cours des dernières années.
    Cependant, j'étais presque agréablement surpris, ce matin, d'entendre le secrétaire parlementaire nous dire qu'il voulait faire une vaste consultation. À mon avis, c'était un bon point de départ. Là où j'ai perdu toutes mes illusions, c'est lorsqu'on nous a présenté une vaste consultation comme étant un sondage par Internet. J'aimerais voir si ma collègue peut dissiper mon inquiétude.
     Il me semble qu'une telle question comporte un aspect quantitatif quant au nombre de gens à consulter, mais surtout un aspect qualitatif. Or aucun sondage par Internet, aussi objectif soit-il, ne peut nous permettre de voir les intervenants à qui l'on s'adresse. Ainsi, nous ne pouvons pas percevoir, sur leur visage et par leur langage non verbal, le sentiment qu'ils portent face à cette question. D'ailleurs, je doute de l'objectivité que pourrait avoir un tel sondage.
     Un sondage par Internet est-il vraiment approprié pour ce type de consultation?
    Monsieur le Président, je partage les inquiétudes de mon collègue.
    On connaît la pratique des conservateurs en matière de consultation. On ne sait jamais exactement qui ils consultent, quand et comment ils le font. D'ailleurs, comme la consultation qu'ils ont faite au sujet de la prostitution, celle qu'ils feront au sujet de l'euthanasie et du suicide assisté se fera probablement aussi par Internet.
    En ce qui concerne le processus du Québec, un de mes collègues me rappelait justement que le comité spécial qui a été mandaté a voyagé partout au Québec afin d'obtenir un vaste éventail d'opinions, ce qui ne se fait pas par Internet. Il est extrêmement important de faire une vaste consultation, mais elle doit surtout se faire auprès des experts des provinces sur le terrain.

[Traduction]

     Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la députée de St. Paul's.
    Cette motion est relativement simple. Elle demande qu'un comité spécial soit formé pour demander l'opinion de spécialistes et tenir de vastes consultations auprès du public et des médecins, car il est question d'aide médicale à mourir. La Cour suprême a, en fait, abordé la nature très complexe et controversée de la question de l'aide à mourir. Nous savons que certaines personnes sont anxieuses et inquiètes à l'idée que des personnes vulnérables puissent être victimes d'abus et contraintes de décider de mettre fin à leur vie alors que ce n'est pas nécessaire. La Cour a mis ce point de vue en balance avec l'idée que certaines personnes estiment avoir besoin de mettre fin à leurs jours pour diverses raisons. En raison de la nature très complexe de cette décision et de la perception très controversée des Canadiens, nombre de groupes devraient être consultés. Il est important pour nous de gérer cette controverse dans la sphère publique et aussi de parler aux médecins à qui il reviendra de composer avec la question de l'aide médicale à mourir.
    La Cour suprême a été très claire: cette mesure législative doit être équilibrée. Ainsi, elle doit protéger les personnes vulnérables contre toute coercition, entre autres, tout en garantissant le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne pour toute:
[...] personne adulte capable qui (1) consent clairement à mettre fin à sa vie; et qui (2) est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.
     C'est particulièrement clair. La Cour suprême affirme que toute loi doit comporter des « [...] garanties adéquatement conçues et appliquées [pouvant] protéger les personnes vulnérables contre les abus et les erreurs ».  La Cour suprême a exprimé très clairement qu'il faut établir un équilibre à cet égard. Nous devons discuter de cette question avec la population. Nous devons entendre les témoignages de représentants de divers groupes, de spécialistes et de médecins.
    Les tribunaux ont également dit quelque chose de très important. Dans le contexte de la prise de décisions d’ordre médical et du consentement éclairé, les médecins sont entièrement aptes à évaluer tous les critères qui ont été mentionnés par la Cour suprême, soit qu'il doit s'agir d'une personne adulte capable, et ainsi de suite. Ce sont les médecins qui posent un diagnostic au sujet de l'état d'un patient, qui savent à quoi ressemble le pronostic de ce dernier et qui comprennent tous les choix qui s'offrent à lui pour atténuer ses souffrances et qui peuvent l'aider à évaluer les choix en ce qui concerne sa vie. Le patient doit avoir le choix de mettre fin à ses jours. Il est essentiel qu'un médecin évalue la capacité d'un patient qu'il traite.
    Lorsque je pratiquais la médecine, je passais beaucoup de temps tous les jours avec mes patients afin de leur expliquer ce dont ils souffraient exactement, de leur exposer les traitements et les interventions possibles et de leur soumettre mon pronostic afin qu'ils puissent eux-mêmes faire un choix. Nous appelons cela le consentement éclairé. Les patients reçoivent l'information nécessaire pour savoir quoi faire, où aller et quelles décisions prendre. Il s'agit tout simplement d'un autre aspect du consentement éclairé, et seuls les médecins peuvent le faire, parce qu'ils savent comment déterminer s'il s'agit d'une personne capable. Les médecins le savent si un patient fait l'objet de contraintes ou s'il est maltraité. Ils peuvent établir si le patient comprend la nature de sa maladie. Les médecins sont en mesure de savoir si la personne va s'en sortir, si elle souffre de douleurs intolérables et s'il y a encore de l'espoir. Ils sont parfaitement capables d'évaluer pareils critères lorsqu'il est question de vie ou de mort.
    Certains autres États comme l'Oregon et la Belgique, en Europe, exigent un deuxième avis lorsqu'un patient demande l'aide médicale à mourir. De nombreux médecins proposent à leurs patients d'obtenir l'avis d'un autre médecin afin que ces derniers puissent savoir s'il y a d'autres options, après quoi le patient peut faire son choix.
(1145)
    Je pense qu'il est vraiment important que les médecins puissent faire cela, et je crois que les tribunaux ont affirmé qu'à leur avis, ils le peuvent.
    Il faudrait envisager une option qui pour l'instant n'est pas largement accessible dans l'ensemble du pays, mais à laquelle pourraient recourir de nombreux patients en proie à des souffrances intolérables ou dont la condition est sans remède. Il s'agit des soins palliatifs. Ces soins ne sont pas disponibles. Je sais qu'un médecin aimerait pouvoir dire à son patient qu'il a un choix, qu'il peut se rendre dans un centre où il recevra de bons soins palliatifs, pour soulager sa douleur et recevoir les soins qui l'aideront à mourir dans la dignité. Ainsi, les malades auraient un choix, mais ce choix n'est pas possible dans l'ensemble du pays.
    Je tiens à souligner que l'Association médicale canadienne et moi-même, en tant que médecin, croyons que les soins palliatifs sont un élément essentiel dans la création d'un programme parallèle qui pourrait nous aider au moment de rédiger la mesure législative, en offrant de réelles options aux patients, leur permettant de donner un consentement éclairé.
    Les programmes de prévention du suicide doivent être maintenus, car nous savons que le fait d'être aux prises avec une maladie chronique, débilitante ou incurable entraîne une grave dépression chez de nombreuses personnes. C'est l'un des premiers effets d'un diagnostic de maladie grave ou incurable. Or, une personne dépressive n'est pas vraiment apte à prendre une décision. L'accès à des soins de santé mentale appropriés est une autre option qui n'est actuellement pas offerte aux patients qui reçoivent un diagnostic de maladie grave ou incurable. Si nous voulons agir dans ce dossier, nous devons offrir aux patients un choix véritable. Nous devons donc étendre ces programmes en fonction des besoins.
    Nous devons également consulter les médecins au sujet d'un éventuel projet de loi. L'Association médicale canadienne est claire: il faudra donner aux médecins une chance raisonnable de s'exprimer à l'égard de toute mesure législative proposée, car il ne fait aucun doute qu'ils seront appelés à jouer un rôle de premier plan.
    Nous savons en outre que l'opinion des médecins eux-mêmes est assez divisée à ce sujet. Les médecins sont déchirés entre deux grandes règles de déontologie. La première veut qu'ils tiennent compte d'abord du mieux-être du patient, ce qui pourrait bien signifier l'aider à mourir dans la dignité; la seconde veut qu'ils évitent de causer un préjudice aux patients, ce qui, selon de nombreux médecins, va à l'encontre de toute aide à mourir.
    Par conséquent, il faut établir des mesures de protection claires, à l'instar de tous les autres États qui ont légalisé le suicide assisté par un médecin. On affirme que les médecins qui ne souhaitent pas aider un patient à mourir, pour des raisons morales, religieuses ou autres, ont le devoir éthique et moral de diriger celui-ci vers un médecin qui sera disposé à le faire.
    Voilà certaines des raisons pour lesquelles les médecins doivent bénéficier d'une protection s'ils prennent une décision, comme c'est déjà le cas dans le dossier de l'avortement. Si un médecin refuse de pratiquer un avortement pour des raisons morales ou autres, il a le devoir éthique de renvoyer la patiente, si celle-ci le souhaite, à un médecin qui procédera à l'avortement.
    Il s'agit de questions très importantes, sur lesquelles il faudra entendre l'avis des médecins au moment d'élaborer la mesure législative. Nous devons examiner les pratiques exemplaires dans d'autres États. C'est un aspect important.
    Toutefois, sur le plan de la procédure, c'est très clair. La Chambre ne siégera que pendant 12 autres semaines. Si nous parvenons à convoquer d'emblée un comité chargé de parcourir le pays, d'écouter les Canadiens, de rencontrer des experts et d'entendre l'avis des médecins, nous serons en mesure — après les élections et l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement, peu importe son allégeance politique — de produire un rapport du comité en respectant l'échéance imposée par la Cour suprême.
    Le recours à des comités spéciaux n'est pas sans précédent. Il y a eu en effet des comités spéciaux qui se sont penchés respectivement sur le racolage, sur la consommation non médicale de drogues ou médicaments, sur les femmes autochtones disparues ou assassinées. Les comités parlementaires ordinaires ont d'autres rôles à jouer dans leurs fonctions d'examen de la législation et ne pourraient pas se consacrer aux tâches prévues dans ce cas-ci aussi pleinement que pourrait le faire un comité spécial, dont ce serait le seul mandat.
(1150)
    Monsieur le Président, nous débattons aujourd'hui d'une motion visant à mettre sur pied un comité qui recueillera de l'information de façon à ce que le gouvernement puisse rédiger un projet de loi en respectant le délai imparti par la Cour suprême du Canada.
    Je trouve problématique le délai de 12 semaines. Ce n'est pas beaucoup de temps. Un budget va être présenté. Nous avons les fonctions législatives habituelles qui prennent tout notre temps. Il y aura ensuite les vacances d'été, puis des élections. Rien ne va vraiment se passer avant les élections du 20 octobre, et il faudra au gouvernement quelques semaines pour s'organiser, ce qui nous amène au mois de novembre. On parle ici de quelques mois.
    Je me demande si le Parlement ne devrait pas recommander à la Cour suprême une prolongation du délai de 12 mois. Est-ce que la députée serait d'accord?
(1155)
    Monsieur le Président, le député vient de prouver la nécessité de recourir à un comité spécial plutôt qu'au comité parlementaire qui s'occupe habituellement de ces questions. Un comité spécial pourrait, pendant ces 12 semaines, se rendre partout au Canada et entendre des experts. Voilà une bonne raison de mettre sur pied un comité spécial.
    Nous parlons de personnes qui vivent aujourd’hui des douleurs intolérables. Elles vivent avec une maladie incurable et leur fin approche. Nous ne pouvons pas leur demander de patienter. Nous devons agir vite et faire de notre mieux pour recueillir le plus d’avis possible. C’est pourquoi nous devons mettre sur pied un comité spécial et non pas recourir au comité parlementaire habituel. Les gens qui souffrent ne peuvent pas attendre que nous prenions beaucoup de temps pour décider.
    Monsieur le Président, le point de vue de ma collègue, qui a exercé la médecine, enrichit beaucoup le débat.
    Je veux m’en tenir à la stratégie que semble adopter le gouvernement, qui entend demander une prolongation du délai accordé. Or, rien ne garantit que cette prolongation serait accordée. Cette stratégie est donc, à mon sens, très risquée et je voudrais que ma collègue nous en parle plus en détail. Si la Cour suprême refuse d’accorder cette prolongation, quelles seraient alors les conséquences?
    Monsieur le Président, de toute évidence, si la Cour suprême ne prolonge pas le délai, les gouvernements provinciaux élaboreront diverses lois, et nous nous retrouverons dans une situation semblable à celle que nous avons eue pour l’avortement, où certaines provinces ont légalisé l'intervention et d’autres, non. Beaucoup de problèmes apparaîtront. Selon l'endroit où ils vivent au pays, certains Canadiens ne pourront pas exercer ce que la Cour suprême a décrété comme étant un droit garanti en vertu de l’article 7 de la Charte.
    La décision a été rendue en décembre. La Chambre se réunit depuis quelque temps. Il faut faire montre de compassion. Nous parlons de mourir dans la dignité et beaucoup de gens attendent. Ils attendent depuis un an et nous leur demanderions d’attendre encore et de souffrir encore pendant plus d’une année.
    Il y a deux inconvénients à demander une prolongation à la Cour suprême: elle peut dire non et ce serait négliger la compassion dont il faut faire preuve dans ce dossier.
    Monsieur le Président, c’est avec une certaine tristesse que je prends la parole aujourd’hui, pour répondre à certains des propos tenus par des députés ministériels. C’est d’autant plus regrettable que c’était là l’occasion, pour le Parlement, de se montrer sous son meilleur jour. Ce qui est en jeu, c’est la pertinence du Parlement et la diligence qu’il doit démontrer pour donner suite à ce que la Cour suprême du Canada lui demande de faire.
    Notre parti espérait que cette motion inciterait le gouvernement à prendre la bonne décision, comme il l’a fait il y a deux ans lorsque nous avons réclamé la constitution d’un comité spécial sur les femmes autochtones disparues ou assassinées. À l’époque, le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice ne s’était pas opposé à la mise sur pied d’un tel comité. Aujourd’hui, la Cour suprême nous somme pratiquement de faire quelque chose, et tout d’un coup, les députés ministériels s’y opposent. Si leur stratégie consiste à obtenir un report du délai, je doute que la Cour suprême en accorde un si elle constate que le Parlement ne commence pas à faire ce qu’elle lui a demandé de faire.
    Je viens d’une institution dont la devise en latin est non quo sed quomodo: autrement dit, ce qui importe, ce n’est pas tant ce que nous faisons, mais la façon dont nous le faisons. Le moment est venu pour le Parlement et les parlementaires de montrer aux Canadiens qu’ils sont prêts à prendre des décisions de façon transparente, à s’attaquer à des dossiers délicats, en écoutant tous les points de vue, et non pas en ayant une attitude fermée, car les Canadiens auraient alors l’impression que le gouvernement a déjà pris sa décision et que le Parlement n’a pas son mot à dire, et la population encore moins.
    Ce débat suscite manifestement de vives réactions, et il est donc important que les Canadiens se rendent compte que nous sommes prêts à nous attaquer à cette question très délicate et à relever le défi que nous a lancé la Cour suprême, à savoir éclaircir la situation et mettre en place les garde-fous qu’elle et tous les Canadiens jugent nécessaires. En qualité de médecins, la députée de Vancouver-Centre et moi-même savons qu’il y a un moment où on ne peut rien prescrire, où il faut écouter. C’est seulement de cette façon que nous pourrons faire les choses correctement.
    C’est un travail très sérieux que nous sommes appelés à faire, mais il est très important que les Canadiens comprennent que c’est le Parlement qui a été prié de faire le travail et de consulter les Canadiens. Cela ne serait pas acceptable que le Parlement abdique devant la tâche que lui a confiée la Cour suprême du Canada et qu’il laisse un gouvernement qui a un bilan déplorable en matière de consultation des Canadiens demander à des fonctionnaires d’assister à des séances d’information pour ensuite ne pas écouter leurs comptes rendus. Nous avons la responsabilité d’élaborer un processus très transparent au moyen duquel les Canadiens seront mis au fait des témoignages que nous aurons entendus et sauront que nous les avons écoutés.
    Il faut prêter l’oreille aux experts et aux gens concernés. C’est l’occasion pour un régime démocratique entre deux élections de montrer aux Canadiens qu’ils sont entendus et autorisés à participer à l’élaboration d’une politique publique. Comme l’a dit Jane Jacobs, pour avoir une bonne politique, il faut que les décideurs puissent penser aux personnes touchées. Nous devons écouter les gens qui seront visés par ces mesures législatives et bien faire les choses.
    Les termes utilisés au paragraphe 127 du jugement, même s’ils sont clairs, comme l’a dit ma collègue, peuvent amener les Canadiens à interpréter de façons bien différentes ce qu’est une « personne adulte capable », ce que signifie « consent clairement », ce que sont des « problèmes de santé graves et irrémédiables » et ce que veut dire « lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition ». Les Canadiens peuvent également se demander ce que nous pouvons faire pour qu’ils ne soient pas intimidés et pour que les personnes vulnérables ne risquent pas de subir des préjudices.
    Je n’y vois que le refus du gouvernement de gouverner, de s’attaquer aux sujets difficiles. Il se défile et j’espère qu’il a encore le temps aujourd’hui pour saisir le moyen que lui offrent les libéraux pour montrer que le Parlement fera son travail et que le gouvernement ne se réduit pas à une administration en mode électoral qui refuse de prendre les décisions difficiles.
(1200)
    Il est très clair que le gouvernement pourrait s’y prendre de diverses façons pour traiter cet enjeu: il pourrait, entre autres, élaborer un livre blanc pour procéder à une consultation ou encore préparer un avant-projet de loi. La consultation en ligne dont il parle ne fonctionnera tout simplement pas à moins que les gens comprennent bien les questions en cause et qu’ils sachent qu’ils seront écoutés. Certains députés proposent déjà de demander une prolongation ou de recourir à la disposition de dérogation.
    Il ne fait pas de doute que la Cour suprême du Canada a travaillé à l’unisson. Il est temps maintenant que nous, les parlementaires, en fassions autant.
    J’ai assisté probablement à plus de 2 000 naissances dans ma carrière de médecin de famille, et je sentais que mon travail était de voir à ce que mes patientes se sentent en sécurité, vivent leur accouchement dans la dignité et à ce que les choses se passent selon les désirs des familles. J’ai assisté à beaucoup moins de décès, mais mon travail était aussi, dans ces cas, de veiller à ce que mes malades soient sereins, à ce qu’ils ne souffrent pas et à ce qu’ils puissent mourir dans la dignité. À la Chambre, nous avons tous nos propres expériences et nous savons tous que nous devons faire mieux.
    Il faut que nous ayons ce débat si nous voulons pouvoir régler les autres dossiers en attente, à savoir l’approche à adopter en ce qui concerne les soins palliatifs et de fin de vie, et la gestion de la douleur.
    L’article du docteur Chochinov, dans l’édition du mercredi 18 février du Star, explique bien que les médecins ne sont pas suffisamment formés en qui concerne les besoins des patients en fin de vie. L'objectif des soins est souvent mal défini. Dans le contexte de la décision de la Cour Suprême, ces questions deviennent encore plus importantes, et il va falloir que les réponses viennent non seulement des Canadiens mais aussi des écoles de médecine et des associations médicales. Pour que les personnes en fin de vie puissent faire un choix éclairé, il faut qu’elles aient accès à des soins palliatifs optimaux, dans le respect maximal de leur dignité.
    Je suis heureuse que ma mère, à la fin de sa vie, ait pu mourir dans la dignité, grâce à une pompe à analgésique qu’elle pouvait contrôler. Dans le cas de mon père, par contre, cela ne devait pas être la fin de sa vie, car il s’était fracturé la hanche. Après des souffrances insupportables, car on lui avait donné des analgésiques insuffisants, il est décédé 72 heures plus tard. Nous ne voulions pas le voir partir. Encore une fois, si nous n’avons pas une stratégie de gestion de la douleur et des soins palliatifs adéquats, nous ne pourrons pas donner aux gens de vrais choix.
    Comme les députés le savent, l’Association médicale canadienne réclame des précisions sur la façon dont les tribunaux font la distinction entre l’euthanasie et le suicide assisté par un médecin. Les Canadiens veulent que nous procédions différemment.
    Nous savons qu’il nous faut des garde-fous. Le Conseil des Canadiens avec déficiences a plaidé de façon éloquente en faveur de la protection des personnes vulnérables. Nous avons eu l’expérience du VIH-sida, à l’époque où cette maladie était un arrêt de mort. Nous savons que certains de ces malades, dont le médecin avait accepté de les aider à mourir, se sont rendu compte ensuite qu'ils étaient simplement déprimés.
    Il y a aussi des jeux de pouvoir. Des familles peuvent en vouloir à un vieillard vulnérable parce qu’elles estiment lui avoir assez donné. Souvent, elles attendent l'héritage, ou bien elles sont tout simplement fatiguées de s'occuper d'eux.
    Comme l’a souvent dit le député de Mont-Royal, notre société est jugée selon la façon dont elle s’occupe des personnes les plus vulnérables. Nous ne devons pas les laisser pour compte.
    Nous pourrions fixer des objectifs. L’Ontario s’est fixé pour objectif d'arriver à ce que 70 % des personnes de plus de 70 ans aient un testament biologique.
    Il faut que tout le monde lise Let Me Decide, de Willy Molloy. Nous devons réfléchir sérieusement aux initiatives préconisées par la Société canadienne des médecins spécialistes en soins palliatifs.
    Dame Cicely Saunders a dit:
     Vous comptez parce que vous êtes, et vous compterez jusqu'au dernier instant. Nous ferons tout notre possible pour vous aider non seulement à mourir en paix, mais à vivre jusqu'à la fin.
    Il ne fait aucun doute que les personnes qui souffrent à la fin de leur vie sont très nombreuses. Trop rares sont celles qui s'éteignent paisiblement et dans la dignité. Nous devons répondre aux attentes de la population et nous fonder sur la recherche, l'application des connaissances, les politiques, la volonté politique et les recherches appliquées pour concevoir et mettre en place un processus exemplaire.
    Tous les parlementaires doivent se pencher sur cette question. On ne peut pas laisser le gouvernement s'en occuper en cachette. Nous ne pouvons pas non plus proroger encore une fois et mettre la clé dans la porte en espérant qu'il se passera autre chose ou en attendant l'élection du prochain gouvernement.
(1205)
    Nous prions instamment les ministériels de faire ce qui s'impose et de laisser le Parlement faire son travail. La Cour suprême et les Canadiens n'en attendent pas moins de notre part.
    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les propos de la députée, et je ne peux m'empêcher de remarquer qu'elle fait preuve d'une certaine partisanerie alors que ce n'est pas approprié dans le cadre de ce débat, comme d'autres députés l'ont mentionné. Pour ce qui est du temps alloué, nous disposons déjà de 12 mois pour agir. L'ajout de 6 mois supplémentaires serait tout à fait raisonnable si c'est ce qu'il faut pour que la loi soit meilleure.
    J'aimerais rappeler à la Chambre que la députée et son parti ont eu la chance, au fil des ans, de présenter des motions lors des journées de l'opposition ou des projets de loi sur la question et ils ne l'ont pas fait. La députée a été ministre de la Santé publique sous le gouvernement précédent et elle n'a rien fait pour faire avancer ce dossier.
    J'ai déposé un projet de loi d'initiative parlementaire et j'aimerais que la députée appuie un projet de cet ordre.
    Les députés libéraux disent qu'ils sont en faveur de l'aide médicale à mourir, mais je trouve qu'ils font preuve d'hypocrisie: quand le Parti libéral a eu la possibilité de changer les choses, il n'a absolument rien fait.
(1210)
    Monsieur le Président, avec tout le respect que je dois au député, je dirais que la partisanerie vient plutôt de son côté de la Chambre.
    Nous demandons au Parlement d'effectuer un travail pertinent. Nous ne demandons pas qu'un projet de loi d'initiative parlementaire édicte la marche à suivre. Nous demandons au Parlement d'écouter ce que les Canadiens ont à dire à ce sujet. Nous disons que, pour faire le travail convenablement, le processus doit être ouvert et que, compte tenu de la pause estivale et des élections qui approchent à grands pas, ce travail doit commencer dès maintenant, et l'ensemble de la population canadienne doit y participer.
    Nous ne voulons pas que cette question soit teintée de partisanerie. Nous souhaitons mobiliser tous les partis dans le but de faire un travail pertinent, auquel participeront tous les Canadiens, au lieu d'accuser quelqu'un d'avoir fait telle ou telle chose, à tel ou tel moment. Les Canadiens ne veulent pas que nous agissions ainsi, et s'attendent certainement à ce que le député évite de le faire.
    Monsieur le Président, j'ai une question à poser à la députée, étant donné qu'elle a beaucoup plus d'expérience que moi au Parlement.
    Voyons ce que le gouvernement semble proposer. À un moment quelconque dans le futur, on entreprendra une très vaste consultation qui s'échelonnera sur une longue période. Les députés de l'opposition n'y participeront pas. Quant aux députés ministériels, c'est difficile à dire. Une demande de prolongation pourrait ou non être acceptée, après quoi, toujours à un moment quelconque dans le futur, il y aura ou non une mesure législative. Voilà ce que nous savons de la part du gouvernement à ce stade-ci du débat.
    Le plan libéral, tel qu'énoncé dans la motion, demande au gouvernement de préciser l'échéancier et la manière de mener cette consultation de sorte que le tout soit terminé en juillet. Je suppose que du 1er août à la fin octobre, les rédacteurs du ministère de la Justice pourraient faire leur travail, c'est-à-dire préparer un texte législatif inspiré du rapport qui serait présenté à la fin de juillet. Ensuite, de novembre jusqu'au 6 février, le Parlement pourrait débattre, amender, parfaire et, enfin, adopter le projet de loi.
    En tant que nouveau député qui s'adresse à une députée de longue date, je demande si c'est raisonnable.
    Monsieur le Président, j'aimerais répondre à la question en adoptant une perspective un peu différente, et préciser que l'ancien gouvernement libéral a dû s'attaquer à certains enjeux difficiles.
    Je me souviens de la question de la procréation assistée. Dès le dépôt du rapport du groupe de travail, il est devenu impératif que le ministre Rock propose quelque chose. Il a donc décidé de présenter sur-le-champ un livre blanc, lequel a été débattu en comité parlementaire.
    Il a ensuite présenté une ébauche de projet de loi, dont nous avons également discuté. Il y a aussi eu la possibilité, sauf erreur, d'en discuter au Parlement après la première lecture, comme ce fût assurément le cas pour la Loi sur les jeunes contrevenants. Le gouvernement libéral a toujours compris qu'il lui fallait l'apport du Parlement. Il nous fallait l'avis d'experts aguerris de leur expérience sur le terrain.
    J'estime du reste que l'échéancier établi par le député n'est pas vraiment envisageable si nous ne commençons pas immédiatement.
    C'est un privilège de pouvoir parler aujourd'hui de la décision de la Cour suprême du Canada au sujet de l'aide médicale à mourir. Comme nous le savons, les questions liées à la fin de la vie revêtent une grande charge émotive. Toutes les questions qui touchent à la façon dont les membres de nos familles et les êtres qui nous sont chers souhaitent terminer leurs jours ne sauraient être résolues rapidement. Cependant, quiconque a eu à venir en aide à un membre de sa famille qui traversait une période difficile comprendra que ces échanges sont essentiels pour assurer le respect des souhaits des êtres chers et pour veiller à ce que nous puissions tous mourir dans la dignité.
    Les récents sondages et la couverture médiatique sur ce sujet nous indiquent en outre qu'il ne s'agit pas d'une question purement théorique. Les Canadiens discutent de cet enjeu à table, et il est important qu'il interpelle tout autant le gouvernement. Malgré les choses qui différencient les Canadiens entre eux — qu'il s'agisse des emplois qu'ils ont eus, du style de vie qu'ils ont adopté ou de leur contribution à la société —, nous avons tous une chose en commun: nous arriverons tous un jour à la fin de notre vie.
    Cela dit, étant donné les progrès de la médecine moderne, l'évolution de la pratique médicale et le prolongement de l'espérance de vie, l'aide médicale à mourir s'inscrit désormais dans un nouveau contexte. En effet, par le passé, lorsque les Canadiens mouraient d'une maladie grave ou contagieuse, à la suite d'un accident ou de causes naturelles, c'était souvent à la maison, entourés de leurs proches. Aujourd'hui, ils passent habituellement leurs derniers jours en milieu hospitalier, souvent à la suite d'un combat long et pénible contre une maladie débilitante ou chronique.
    À son admission à l'hôpital, la personne qui a besoin de soins palliatifs ou terminaux se retrouve souvent entourée d'une équipe médicale composée d'étrangers qui s'efforcent de lui prodiguer les meilleurs soins possible, même lorsque sa mort est imminente. Dans une telle situation, le patient reçoit des soins fort attentifs sans qu'il soit nécessairement possible d'améliorer son confort jusqu'au bout, ce qui s'avère aussi pénible pour lui que pour ses proches.
    Voilà ce qui me ramène à l'arrêt de la Cour suprême. Je cite un extrait de sa conclusion:
[...] ils prohibent l’aide d’un médecin pour mourir à une personne adulte capable qui [...] consent clairement à mettre fin à sa vie; et qui [...] est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.
    Il convient de réfléchir à ces différents aspects, comme l'ont fait certains des députés qui sont déjà intervenus. Si 80 % des gens appuient cette mesure, comme on l'a entendu dire, c'est sûrement parce qu'ils ne comprennent pas toute sa portée. S'ils étaient conscients de sa portée, ils pourraient changer d'idée.
    Andrew Coyne l'a d'ailleurs très bien exprimé. Je le cite:
    Quand ils pensent à l'aide au suicide, la plupart des gens s'imaginent un adulte en pleine possession de ses facultés, apte à donner son consentement, qui vit une souffrance physique insoutenable et est atteint d'une maladie mortelle en phase terminale; une personne pour qui le suicide vient simplement rapprocher une mort déjà prochaine et inévitable.
    Il poursuit:
    Tout d'abord, la décision indique clairement que les « souffrances persistantes et intolérables » [...] peuvent être non seulement de nature physique, mais aussi de nature psychologique. Le concept de souffrance psychologique, déjà beaucoup plus difficile à cerner que la souffrance physique, remet aussi en question l'aptitude de la personne à prendre des décisions. La souffrance n'est pas davantage définie. On parle simplement de souffrances qui sont intolérables pour la personne.
    Il ajoute ensuite:
    Deuxièmement, l'autre critère que prévoit la Cour pour l'exercice de ce droit, soit la notion de « problèmes de santé graves et irrémédiables », n'indique aucunement que les jours de la personne doivent être comptés, ni même que son décès doit être probable.
    Bien des gens adoptent ce point de vue quand ils pensent à des personnes en fin de vie. Plusieurs trouvent toutefois préoccupants les commentaires portant sur la souffrance psychologique intolérable. Les associations de défense des handicapés se sont exprimées très éloquemment à ce sujet. Il faut aussi regarder ce qui se passe ailleurs, comme en Belgique, où, si je ne m'abuse, l'aide au suicide est maintenant offerte aux enfants. Tout cela montre que nous devrons faire preuve d'une grande prudence quand nous élaborerons le projet de loi.
    Dans ce contexte, il m'apparaît important de décrire les préoccupations que m'inspire la motion à l'étude.
(1215)
    Le principal problème et le plus évident, c'est le calendrier proposé. Le chef du troisième parti vient de nous dire qu'il a fallu quatre ans et demi au Québec pour élaborer sa loi. Il a fallu beaucoup de temps à cette province pour faire les choses correctement. Et il a aussi fallu beaucoup plus d'un an à la Cour suprême du Canada pour invalider l'article visé du Code criminel.
     Il faudra mener beaucoup de consultations pour pouvoir élaborer une loi rigoureuse. La députée a parlé du comité spécial sur les femmes et les jeunes filles disparues ou assassinées. Le comité avait été mis sur pied pour 12 mois, mais cette période a dû être prolongée pour qu'il puisse terminer ses travaux. Il faut aussi souligner que cela s'est fait à l'instigation des libéraux, dont la motion a été adoptée à l'unanimité, donc y compris par nous. Toutefois, les libéraux se sont vite rendu compte que la structure du comité spécial présentait un gros défaut. Il fallait que l'Association des femmes autochtones du Canada soit un partenaire à part égale, mais le comité découlant de la motion ne permettait pas aux partenaires importants de prendre part à la discussion.
    Les libéraux aiment mentionner cet exemple, mais il faut savoir que le processus proposé comportait d'importantes failles.
    L’Association médicale canadienne me semble être un grand absent parmi les partenaires. Or, il me paraît indispensable qu’elle participe activement à l’élaboration de la loi qui découlera du processus.
    Voilà ce qui me préoccupe sur le plan de l’échéancier.
    Nous savons que, tôt ou tard, un comité sera saisi de la question, mais — et c’est un aspect important — combien de députés, sur les 308 qui siègent au Parlement, seront amenés à en faire partie? Il n’y en aura que 12. Par conséquent, les 308 députés qui composent aujourd’hui le Parlement ont chacun la responsabilité d’en discuter avec des groupes et des personnes de leur circonscription. Chaque député devrait envoyer une lettre au ministre de la Justice pour lui faire part des consultations qu’il a tenues, faute de quoi, il ne serait pas à la hauteur de la responsabilité qui lui incombe.
    Le travail qui nous attend est particulièrement délicat, mais nous devons le faire correctement. La motion dont nous sommes saisis aujourd’hui est, à mon avis, trop limitative à la fois en ce qui concerne l’échéancier et en ce qui concerne la structure envisagée, puisqu’il manque à la table des partenaires indispensables. Nous savons que le comité peut faire de l’excellent travail, mais il ne peut convoquer qu’un nombre limité de témoins, pendant une durée limitée.
    Je l'ai dit et je le répète, il faut faire les choses correctement. Nous avons pris des mesures pour les patients atteints de SLA et de cancer terminal, et nous savons qu’il faut faire preuve de compassion à la fois dans ce que nous faisons et dans la façon dont nous le faisons. Nous avons beaucoup à faire, mais très franchement, la motion que les libéraux ont présentée ne va pas nous donner la solution complète que nous recherchons.
(1220)
    Monsieur le Président, j’ai écouté attentivement ma collègue d’en face, car je sais qu’elle est infirmière et qu’elle comprend parfaitement tout ce dont il est question ici.
    La députée a dit que la structure proposée, c’est-à-dire un comité, n’est pas adéquate. Au sujet du comité spécial sur les femmes autochtones disparues ou assassinées, elle a dit qu’il y aurait dû y avoir davantage de gens autour de la table. Mais lorsque le chef de notre parti a présenté la motion aujourd’hui, il s’est dit tout à fait prêt à examiner des amendements. Si je comprends bien, la députée suggère que nous ajoutions l’Association médicale canadienne à la liste des organisations présentes autour de la table. Le chef de notre parti a dit qu’il était prêt à accepter tout amendement susceptible d’améliorer le processus, et je redemande donc à la députée si c’est bien ce qu’elle propose.
    La députée a également parlé d’échéancier. La Cour Suprême nous a donné 12 mois. Le gouvernement actuel n’a toujours rien fait pour donner suite à la décision de la Cour Suprême, et trois mois sont déjà passés.
    Bref, il me semble que le délai initial était suffisant, et que nous pouvons encore le respecter. Je me réjouis également que la députée ait parlé d’un amendement à la motion. Cela veut-il dire qu’elle va l’appuyer?
    Monsieur le Président, je pense que la députée a compris que les 308 députés devaient participer à l'étude de cette question d'une grande importance. Il est de notre devoir d'organiser des tables rondes dans nos circonscriptions pour que le débat ait lieu et que nous puissions transmettre le point de vue des citoyens que nous représentons. Comme la députée le sait, les comités font partie du processus parlementaire, mais limiter l'exercice à 12 personnes disposant de très peu de temps et travailler à l'intérieur d'une structure très définie ne rendra peut-être pas justice au travail législatif très important que nous devons accomplir.
(1225)

[Français]

    Monsieur le Président, j'aimerais que ma collègue commente le discours du secrétaire parlementaire. Il disait que les consultations qui allaient être menées par le gouvernement se feraient au moyen d'un sondage par Internet.
    Pense-t-elle que ce soit là le mode de consultation approprié?

[Traduction]

    Monsieur le Président, la députée m'a peut-être mal comprise. J'ai dit que les 308 députés avaient la responsabilité de consulter leurs électeurs, de tenir des tables rondes, de recevoir des courriels. Il est certains qu'Internet pourrait être mis à contribution. Nous avons vu, pour la mesure législative sur la prostitution, des milliers de Canadiens s'exprimer. C'est un outil parmi tous les autres dont nous avons besoin, mais c'est d'abord et avant tout aux 308 députés que la responsabilité incombe.
    Monsieur le Président, j'ai écouté les commentaires de la députée avec beaucoup d'intérêt. J'ai entendu qu'il pressait d'étudier cette question, mais j'ai entendu que nous allions trop vite. J'ai entendu que nous devions en discuter avec beaucoup plus de gens, mais que 308, c'est à la fois trop et pas assez.
    Nous devons donner suite au jugement d'ici un an. Comment allons-nous répondre à Cour suprême en moins d'un an si nous ne nous mettons pas au travail immédiatement? Pourquoi la députée ne peut-elle pas ajouter les noms des personnes qu'elle voudrait qui soient consultées lors de l'étude? Qu'est-ce qui nous empêche d'avancer et de contribuer au projet de loi?
    Monsieur le Président, ce que j'ai vraiment dit au cours de mon intervention, c'est qu'il s'agit d'une tâche extrêmement importante qui est assortie d'un délai. J'ai aussi souligné qu'il a fallu quatre ans et demi au Québec pour rédiger une mesure législative qu'il jugeait adéquate et que la Cour suprême a pris un an pour rendre sa décision après avoir entendu l'affaire. Les comités jouent un rôle très important dans ce processus, mais il y a beaucoup de travail à faire pour veiller à inclure tous les intervenants intéressés et à tenir compte de toutes les opinions et réflexions pertinentes dans ce dossier.
    Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer au débat d'aujourd'hui sur la façon de réagir à la décision rendue récemment par la Cour suprême du Canada sur la question de l'aide médicale à mourir.
    Le 6 février, la Cour suprême du Canada a conclu que les dispositions du Code criminel sur l'aide médicale à mourir vont à l'encontre de la Charte. La cour a suspendu l'effet juridique de sa décision pour 12 mois afin de donner au Parlement le temps d'y donner suite de façon appropriée.
    Le gouvernement s'oppose à la motion parce qu'il est déterminé à entendre tous les points de vue dans ce dossier. Le processus de consultation donnerait aux Canadiens et aux intervenants — comme les médecins, les infirmières, les personnes handicapées et les groupes de défense des droits des patients — l'occasion de faire connaître leur point de vue et leur opinion.
    Nous ne pouvons pas minimiser l'importance de la participation de tous les Canadiens à ce débat. Il est à espérer que tous les intervenants travailleront ensemble afin de créer un régime qui répond aux besoins des personnes gravement malades qui veulent mourir pour mettre fin à une douleur intolérable, tout en protégeant les personnes vulnérables et en confirmant notre valeur commune qu'est la dignité et le mérite propres de tout être humain, peu importe son état de santé.
    Heureusement, nous ne partons pas de rien. Nous en savons déjà beaucoup sur les risques inhérents à la pratique de l'aide médicale à mourir, sur les types de garanties pouvant atténuer ces risques et sur les moyens à prendre pour contrôler le recours à cette pratique. Une grande partie de nos connaissances sur le sujet faisait partie de la preuve présentée devant les tribunaux dans l'affaire Carter. Je crois qu'il pourrait nous être utile de nous pencher sur certains documents présentés au juge de première instance. Le jugement rendu lors du premier procès regorge d'information utile sur l'application de ces lois, là où elles sont en vigueur.
    C'est certainement une question à propos de laquelle les gens peuvent avoir des points de vue différents quant à ce qui est approprié ou acceptable sur le plan social, mais nous devrions nous efforcer de nous entendre sur les faits.
    Il y a de nombreuses années, une question importante a été soulevée. On s'est demandé si la légalisation de l'aide médicale à mourir pouvait avoir un effet non souhaité en nuisant aux efforts d'amélioration de la qualité et de la disponibilité des soins palliatifs.
    À propos des soins palliatifs, je rappelle aux députés qu'en mai 2014, la Chambre des communes a adopté par une majorité écrasante la motion M-456, qui demandait au gouvernement fédéral d'établir une stratégie pancanadienne sur les soins palliatifs et les soins de fin de vie.
    Dans l’affaire Carter, après examen de la preuve émanant des endroits qui permettent une certaine forme d'aide médicale à mourir, le tribunal a constaté que les soins palliatifs n'y sont pas moins bons; en fait, plus de médecins semblent maintenant mieux comprendre les soins palliatifs que cela était le cas avant la légalisation de l’aide médicale à mourir.
    Même si le tribunal n’a pas constaté que ces améliorations étaient attribuables à la légalisation de l’aide médicale à mourir, il est encourageant de savoir que les soins palliatifs peuvent être améliorés en parallèle avec un régime d’aide à mourir. Je crois qu’il sera important de tenir compte de cela dans notre travail à venir.
    D’aucuns craignent que la légalisation de l’aide médicale à mourir puisse nuire à la relation entre le médecin et son patient, croyant que certaines personnes pourraient en venir à avoir peur de leur médecin lorsque celui-ci aura le pouvoir d’aider à mettre fin à leur vie.
    Comme société, nous devons tenir compte de cette relation dans notre cheminement. Par exemple, le tribunal a constaté qu’une loi future soigneusement conçue et dotée des mesures de protection appropriées ne devrait pas nécessairement détériorer la confiance des patients dans leur médecin ni l’intérêt porté par les médecins au bien-être de leurs patients. En outre, le risque que l’aide médicale à mourir crée des malentendus et de la méfiance peut être contrebalancé par le fait qu’elle pourrait bien également améliorer la confiance parce que la communication sera plus ouverte.
    Toutefois, il semble bel et bien que les médecins canadiens n’ont pas tous une conversation aussi franche que nous le voudrions avec leurs patients sur leur pronostic et les options qui s’offrent à eux en fin de vie.
    La perspective de légaliser l’aide médicale à mourir nous donne peut-être la possibilité d’aider les médecins à mieux intervenir dans ce domaine, pour le bien de tous les patients, et non pas seulement pour ceux qui demandent une aide pour mourir.
    La preuve présentée dans l’affaire Carter a également mis au jour des faits intéressants concernant les raisons pour lesquelles les gens demandent qu’on les aide à mourir. Je crois que la plupart des Canadiens estiment que ceux qui demandent une aide pour mourir endurent des souffrances physiques intolérables. Les médias parlent souvent de cas de gens souffrant de maladies horribles qui les conduisent à une mort douloureuse et débilitante.
    Les données recueillies là où les gens peuvent avoir accès à une aide pour mourir révèlent une toute autre réalité. En fait, le contrôle insuffisant de la douleur n’est presque jamais invoqué pour demander de l’aide. Au contraire, presque tous ceux qui ont reçu une aide pour mourir l’avaient demandé parce qu’ils souffraient d’avoir perdu leur autonomie physique, de ne plus avoir la même capacité de participer à des activités qui leur faisaient aimer la vie, de perdre le contrôle de leurs fonctions corporelles et de se sentir un fardeau pour leur famille et parce qu’ils avaient aussi l’impression de perdre leur dignité.
(1230)
    Il y a des gens qui veulent mourir à cause d'une douleur non pas physique, mais émotionnelle et psychologique. Il est important d'en tenir compte si nous voulons offrir de véritables options aux Canadiens en fin de vie.
    Les données révèlent que, partout où ces pratiques sont légales, le nombre de personnes qui accèdent à l'aide à mourir est clairement en hausse d'année en année. Même dans des endroits comme l'Oregon, où la loi est en vigueur depuis 1997, le nombre de personnes qui demandent une aide à mourir continue d'augmenter d'année en année.
    Les données révèlent un autre fait intéressant au sujet du modèle de l'Oregon. Dans cet État, seul le suicide assisté médical est légal, et cette option n'est offerte qu'aux patients en phase terminale. La loi autorise un médecin à prescrire une dose mortelle de médicament à un patient lorsqu'il y a un motif raisonnable de croire que sa maladie causera son décès dans les six prochains mois.
    Les données nous disent que, chaque année, environ un tiers des gens qui reçoivent cette prescription ne l'utilisent pas. Y a-t-il des gens qui obtiennent une prescription mortelle alors que leur volonté de mourir est temporaire où incertaine? Par ailleurs, certains disent que le seul fait d'avoir accès à cette prescription et de pouvoir l'utiliser si jamais leur situation devient insupportable suffit à alléger leur souffrance psychologique au point de pouvoir continuer à vivre.
    Les données montrent également que certaines personnes à qui l'on a prescrit une dose mortelle de médicaments meurent plus de deux ans plus tard, même si la loi prévoit qu'une ordonnance de ce type ne peut être délivrée qu'à une personne qui risque vraisemblablement de mourir dans un délai de six mois. Ce fait montre qu'il existe de véritables problèmes en ce qui concerne la capacité d'un médecin de prédire qu'une personne mourra sous peu.
    Il serait beaucoup plus difficile pour nous de contester cette décision si nous ne disposions pas de tous ces renseignements. Si nous y avons accès, c'est parce qu'au sein de chaque administration qui réglemente l'aide médicale à mourir, les médecins sont tenus légalement de signaler aux autorités compétentes qu'ils ont aidé une personne à mourir. Dans certains cas, l'autorité compétente est le ministère de la Santé de l'État; dans d'autres cas, il s'agit d'une commission spécialement créée à cette fin. Dans tous les cas, les autorités compétentes doivent recueillir et analyser des données et produire des rapports publics exposant les faits essentiels, notamment les problèmes médicaux dont souffraient les personnes qui ont bénéficié de l'aide médicale à mourir.
    Ces données ont une valeur inestimable non seulement pour le Canada, mais aussi pour d'autres pays qui débattent eux aussi de ces questions. Les exigences en matière de déclaration obligent également les intéressés à rendre des comptes, ce qui est tout aussi important. Ce ne sont là que quelques-uns des faits importants dont nous devons tous tenir compte dans le cadre du débat sur cette question.
(1235)
    Monsieur le Président, j'aimerais savoir si le député appuie la création d'un comité spécial. Il s'agirait d'un comité spécial parce que la question touche plus d'un ministère, et non pas seulement Justice; nous n'avons qu'à penser au ministère de la Santé et à d'autres ministères. Nous proposons donc de soumettre la question à un comité spécial plutôt qu'à un comité permanent.
    Le gouvernement affirme vouloir consulter les intéressés; or, rien n'empêcherait le comité spécial de tenir des audiences dans différentes régions du pays ou de tendre la main à divers professionnels et intervenants.
    À mon avis, le comité pourrait ratisser large et, surtout, on permettrait aux députés, lors des séances de comités permanents tenues dans les diverses régions, d'entendre des gens de tous les horizons. Les députés pourraient ainsi tenir compte de l'avis de ceux qu’ils représentent, c’est-à-dire les Canadiens. Cette façon de faire me semble des plus inclusives.
    Voici la question que je pose au député. Dans quelle mesure estime-t-il qu'il sera nécessaire de consulter les intéressés et d'obtenir des recommandations pour assurer la mise en oeuvre de l'arrêt de la Cour suprême?
    Monsieur le Président, il va de soi que des comités de députés seront créés, mais on ne sait pas encore quelle forme prendra la consultation. La question touche certainement plus d'un comité, que ce soit ceux de la justice ou de la santé.
     À notre avis, le comité spécial devrait être composé de tous les Canadiens, car la consultation sur cette question, qui touche bon nombre de Canadiens — la plupart des gens ont des proches qui sont passés par là —, doit être vaste et inclusive.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours, bien je n'y aie pas entendu de solution.
     Il a simplement parlé de faits et d'expériences vécus ailleurs dans le monde. Il n'a pas parlé de solution concernant le cas qui nous concerne actuellement.
    La Cour suprême vient de rendre un jugement et le Parlement a un an pour y répondre. Pourtant, le député n'a pas mentionné de solution que lui-même ou son gouvernement envisagerait pour la suite. En effet, la décision a été rendue en janvier 2015. Un an, cela nous mène donc en janvier ou février 2016. Il faut s'y mettre tout de suite.
    Quelles pistes de solutions le député propose-t-il?
    Monsieur le Président, la question est fort complexe, et la solution est la consultation inclusive de tous les Canadiens selon un format qui permettra à tous d'y participer.
     Franchement, donner une réponse aussi rapide sur une question aussi complexe est aussi difficile que prévoir, pour les médecins de l'État d'Oregon, que la mort d'une personne va survenir dans six mois, alors que, dans plusieurs cas, elle survient deux ans plus tard.
    C'est fort complexe, et les gens de cet État ne peuvent pas toujours prévoir toutes les solutions.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai constaté qu'un certain nombre de députés n'ont peut-être pas bien compris certaines des remarques que j'ai faites plus tôt. Je tiens à préciser que je crois que la Chambre et le gouvernement ont amplement le temps de mener une vaste consultation auprès des Canadiens et de présenter la mesure législative réclamée dans le délai prévu par la Cour suprême du Canada.
    Cependant, on m'a demandé si je croyais, en tant qu'avocat, qu'il serait possible de présenter une demande de prolongation. J'ai répondu qu'il est toujours possible de présenter ce genre de demande. Toutefois, le gouvernement a l'intention de mener un vaste processus de consultation et de présenter une mesure législative dans le délai fixé par la Cour suprême.
(1240)
    Je remercie le secrétaire parlementaire de ses remarques.
    Pour revenir à la question du député qui réclame une solution éclair à cet enjeu très complexe qui touche nos vies, j'aimerais rappeler à ce député que nous parlons des derniers moments de la vie d'êtres chers. Comme je l'ai mentionné dans mon intervention, en mai 2014, l'étude sur les soins palliatifs a obtenu un grand appui. Les mois ou les jours qui précèdent la mort contribuent tout autant au maintien de la dignité d'une personne que sa décision de mettre fin à sa vie. Dans le cadre de l'étude sur le suicide assisté par un médecin, nous devons certainement tenir compte des soins palliatifs, une option qui a été très bien accueillie par la Chambre.

[Français]

    Monsieur le Président, tout d'abord, j'indique que je partagerai mon temps de parole avec mon collègue le député de Trinity—Spadina.
    Je prends la parole aujourd'hui pour parler de la motion de l'opposition présentée par le chef du Parti libéral du Canada, mon collègue le député de Papineau. Cette motion comporte deux dispositions principales, soit: que la Chambre reconnaisse la décision de la Cour suprême visant l'aide médicale à mourir; et qu'un comité spécial de la Chambre soit nommé aussitôt pour consulter les experts et la population canadienne, de façon à présenter un cadre législatif sur lequel pourront être basées les lois encadrant l'aide médicale à mourir.
    Le 6 février dernier, nous avons reçu de la plus haute cour du pays une décision historique. La décision indiquait que l'alinéa 241b) du Code criminel du Canada, voulant que quiconque aide ou encourage quelqu'un à se donner la mort commette un acte criminel, et que l'article 14, voulant que nul ne puisse consentir à ce que la mort lui soit infligée, soient désormais invalidés, et ce, 12 mois après la décision du 6 février 2015. Ces mesures violent le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne garanties à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.
    Mes collègues parlementaires et moi-même avons devant nous un devoir. À notre meilleur, nous écrirons des lois dignes du peuple qui nous a élus. Chacun d'entre nous est conscient de l'émotivité et de la sensibilité soulevées par ce sujet délicat, peu importe notre opinion personnelle. Ce n'est pas seulement une question sensible, c'est aussi une question complexe. Il est très difficile de formuler des paramètres légaux qui pourront s'appliquer à un éventail de scénarios inimaginables. Devant ce défi, par contre, plutôt que de reculer, j'appuie cette motion puisqu'elle incite ce Parlement à le confronter. S'il nous reste maintenant 11 mois pour arriver à la solution, plusieurs obstacles devant nous devront être contournés dans notre horaire parlementaire, dont, bien évidemment, les élections qui interrompront le travail législatif de la Chambre cet automne.
    J'invite donc mes collègues à ne pas perdre une seconde, car la tâche devant nous est énorme. Les Canadiens méritent une solution qui protégera leurs droits et représentera leurs valeurs. C'est ce que nous pourrons livrer si nous nous mettons à la tâche maintenant et que nous sommes à notre meilleur. C'est pourquoi nous avons été élus, et c'est ce que les Canadiens méritent.
    Le domaine médical est en pleine évolution au Canada. Il suffit de mettre les pieds dans un hôpital pour savoir que le système ressent une pression toujours croissante en raison du vieillissement de la population. Toutes les données s'accordent pour le dire: les Canadiens vivent plus longtemps que jamais, et la génération des baby-boomers a déjà commencé à prendre sa retraite. Cette nouvelle réalité reflète les succès du domaine médical. Cette nouvelle génération de retraités est, tout compte fait, en excellente santé. Si les ailes gériatriques des hôpitaux sont désormais débordées, les têtes grises se font de plus en plus nombreuses dans les salles de loisir et dans les studios de yoga. Le défi du vieillissement de la population est donc le résultat de nos succès. Cela n'en fait pas moins un défi. Une nouvelle génération de personnes âgées se présente. Elles vivront plus longtemps et leurs corps vieilliront différemment en fonction des innovations médicales.
    Après avoir constitué la génération éclatante du rock and roll et la plus grande cohorte de travailleurs de notre histoire, ils sont plus nombreux que jamais à nécessiter des soins médicaux aujourd'hui. C'est tout naturel; toutefois, cela indique que la réalité du monde médical, et tout particulièrement des soins de santé pour les personnes âgées, évolue continuellement en fonction des gens qui forment cette génération. Leurs besoins physiologiques ont changé et leurs besoins médicaux aussi. De plus, le vieillissement anticipé de la population entraînera inévitablement une augmentation du nombre de personnes atteintes de cancers, par exemple, et d'autres maladies. C'est dans ce contexte que s'inscrit le débat sur l'aide médicale à mourir et, de façon plus large, sur l'avenir des soins palliatifs au Canada.
(1245)
    Comme c'est le cas de plusieurs de mes collègues et de beaucoup de Canadiens qui ont vécu des situations semblables dans leur vie, la question m'a aussi frappé lors du décès de ma mère. Elle avait été opérée à un pied et la famille lui avait demandé d'accepter cette opération. Des complications sont survenues et le verdict médical était qu'il fallait absolument amputer sa jambe. Devant la souffrance, nous avons dit à notre tendre mère qu'il lui revenait de prendre cette décision. Elle a tout de suite répondu aux médecins qu'elle voulait être enterrée avec ses deux jambes. C'était sa décision de choisir de mettre fin au traitement.
    J'ai vécu aussi la même situation avec la grand-mère adoptive de mes enfants, Olyve Pelletier, qui était en dialyse. Peu avant Noël, elle a fait venir mes enfants et toute sa famille pour leur dire qu'elle allait cesser ses traitements de dialyse. Si ces deux personnes qui me sont très chères ont pu faire ce choix, c'était parce que la justice le leur permettait.
    J'ai donc compris que ce sont les droits et souhaits des personnes âgées qui doivent diriger nos décisions concernant les soins palliatifs. Nous devons faire de la mort dans la dignité la priorité, tout en limitant la souffrance autant que possible. D'ailleurs, c'est justement l'instruction de la cour.
    Le Canada a grandement besoin d'un régime de soins palliatifs de qualité. Le système de santé n'est pas prêt à accueillir l'énorme génération, dont je viens de parler, qui devra éventuellement y avoir recours. Les fissures s'élargissent déjà. Moins de 30 % des aînés canadiens ont présentement accès aux soins dont ils ont besoin. Une nouvelle stratégie, un leadership fédéral et une coopération pancanadienne sont absolument nécessaires si nous voulons continuer à parler fièrement du meilleur système de santé au monde.
     Je ne peux m'empêcher, dans cette tâche noble mais imposante, de penser à mon expérience à l'Assemblée nationale du Québec. Il y a quelques années, le débat public avait évolué de façon constante et convaincante au Québec. Comme dans le reste du pays aujourd'hui, les vents soufflaient fortement et depuis un certain temps en faveur de nouvelles mesures entourant et permettant l'aide médicale à mourir. Le premier ministre de l'époque, M. Jean Charest, a mis en place une commission spéciale très semblable à celle demandée par la motion débattue aujourd'hui au Parlement.
    En vertu de la Constitution canadienne, le Parlement fédéral a compétence en matière de droit criminel. Selon le Code criminel, l'euthanasie et le suicide assisté sont des actes criminels. Toutefois, il appartient aux provinces d'administrer la justice et d'assurer l'application du droit criminel.
    Je rappelle que ce débat a déjà eu lieu à l'Assemblée nationale du Québec. Il s'agissait d'un débat non partisan, et il n'avait pas été question non plus de ligne de parti. Nous demandons que ces mesures soient prises ici.
    J'en profite pour féliciter aussi mes ex-collègues de l'Assemblée nationale du Québec, en particulier la présidente de cette commission, Mme Maryse Gaudreault, du Parti libéral du Québec, et Mme Véronique Hivon, du Parti québécois, qui était vice-présidente de cette commission.
    Puisque des élections approchent, la Cour suprême nous demande de nous pencher immédiatement sur la question, et c'est ce que cette motion demande.
    Je félicite encore une fois le député de Papineau et chef du Parti libéral du Canada d'avoir eu le courage de déposer cette motion et de demander à la Chambre de se pencher immédiatement sur cette question.
(1250)
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours.
    Ayant participé aux débats de l'Assemblée nationale du Québec pendant quelques années, il est certainement au fait du travail de cette commission spéciale.
    Mon collègue ne pense-t-il pas que le Parlement, en tant qu'assemblée législative, a aussi une responsabilité, comme la motion le propose, d'étudier cette question par l'entremise d'un comité et de recommander des mesures au gouvernement?
     Évidemment, les comités n'ont pas le pouvoir d'élaborer des projets de loi. Cependant, ils peuvent recommander certaines mesures au gouvernement.
    Que pense-t-il du rôle du législateur qui consiste à faire des recommandations au gouvernement, notamment en ce qui concerne la question qui nous a été soumise par la Cour suprême?
     Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.
    En effet, comme je l'ai dit, je crois que ce sujet est extrêmement important, complexe et personnel. C'est important de recourir à cette façon de faire, c'est-à-dire d'avoir un comité et un débat pancanadien. Ensuite, comme il l'a dit, ce n'est pas le comité qui va écrire ce projet de loi. Cependant, c'est important que ce comité rencontre les experts d'un peu partout et la population d'un océan à l'autre, de sorte qu'on puisse arriver à un projet de loi rapidement.
    C'est pourquoi nous disons dans la motion que le gouvernement ne devrait pas attendre pour commencer, parce qu'il ne reste que 11 mois. Nous savons que des élections arrivent. Nous devons donc nous atteler à la tâche dès maintenant, et ce, de façon non partisane et sans ligne de parti au cours de ce débat.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis on ne peut plus d'accord: il nous faut un meilleur système de soins palliatifs au Canada. Nous avons collaboré entre partis pour en discuter et mes collègues de l'autre côté on fait des recommandations à cet égard.
    J'ai toutefois deux questions. Premièrement, pourquoi se précipiter en demandant à un comité de présenter ses conclusions d'ici la fin juillet, quand nous pourrions, en cette année d'élections, examiner plus à fond la question, en faisant prolonger quelque peu le délai, ou du moins en utilisant le délai complet de 12 mois que la Cour suprême a accordé?
    Les électeurs de ma circonscription sont nombreux à communiquer avec moi à ce sujet. Encore ce matin, j'ai reçu une lettre d'un médecin, qui demande:
[...] que l'on adopte des politiques autorisant les médecins à ne pas participer à des activités et à des procédures qu'ils ne peuvent accepter en conscience, surtout lorsqu'il s'agit d'actes qui auraient pour effet de mettre fin à la vie. Les médecins ne devraient pas être obligés de participer à de tels actes ni d'adresser des patients à d'autres médecins qui seraient prêts à les poser.
    Je me demande si mon collègue conviendrait qu'il s'agit d'une mesure positive à intégrer dans la législation que proposerait le Parlement.
    Monsieur le Président, mon collègue a posé deux questions.
    En premier lieu, il a demandé quelle est l'urgence. C'est bien simple. La Cour suprême a donné 12 mois au Parlement pour faire quelque chose, alors pourquoi ne pas commencer maintenant? La Cour suprême ne se soucie pas du calendrier des travaux parlementaires. Elle sait qu'un délai de 12 mois suffit pour faire notre travail. Nous pouvons rencontrer des gens pour discuter et débattre de la question. Je peux également dire que nous avons un point de départ. L'Assemblée législative du Québec a déjà débattu de la question, alors pourquoi ne pas nous servir de cela?
    En deuxième lieu, le député a parlé d'une lettre qu'un médecin lui a fait parvenir. Nous sommes députés et, comme toujours, nous aimerions inviter les gens à nous expliquer quelles seraient les difficultés sur le plan de la santé, des finances, etc. Cela nous aiderait à rédiger un projet de loi qui convienne dans l'ensemble du pays et qui prévienne de telles difficultés.
(1255)
    Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir m'adresser au Parlement et, bien sûr, au pays, sur cette question.
    La Cour suprême du Canada a parlé. D'une façon très impérative et très claire, elle a demandé au Parlement — pas au gouvernement ou à un ministre, mais à tous les parlementaires — de se saisir de cette question et de répondre rapidement aux Canadiens qui attendent des réponses et des directives.
    C'est une question extrêmement importante. Nous avons le devoir de répondre. Je comprends, comme nous tous, la complexité de cette question et les inquiétudes qui l'entourent. Il nous incombe toutefois de nous assurer de ne pas simplement remettre cette question à plus tard. La raison est très simple: des gens souffrent. Plus nous tardons à prendre une décision, plus la souffrance de certaines personnes s'accentuera et se prolongera. De plus, on tient en haleine ceux qui souhaitent venir en aide aux gens. Leur capacité d'agir en tant que soignants est limitée par notre inaction. Il nous incombe de ne pas demander un report pendant que nous ne travaillons pas et de ne pas remettre à demain une question qui doit être débattue et tranchée aujourd'hui.
    Les députés prennent la parole à la Chambre et lisent des courriels et des lettres provenant de la circonscription qu'ils représentent. Cela nous montre que les Canadiens sont impatients de contribuer. C'est bien, très bien.
    Nous devons réagir rapidement, car si nous ne le faisons pas avant les prochaines élections, nous aurons un Parlement pris de court, ce qui imposera de nouvelles prolongations et de nouveaux délais. Ce serait tout à fait injuste.
    La Cour suprême comprend parfaitement la nature de notre cycle électoral. Elle comprend parfaitement ce que sont nos responsabilités, et elle nous en a investi.
     En même temps, nous avons de la chance. L’Assemblée nationale du Québec a déjà situé le contexte et a mis à la disposition de tous un ensemble d’éléments pouvant servir de point de départ. La chose est importante parce qu’elle signifie qu’il y a des précédents législatifs. Elle nous donne aussi un exemple d’esprit non partisan que nous pouvons, je crois, adopter pour avancer. Je voudrais donc remercier l’Assemblée nationale et la population du Québec pour le cadeau qu’elles ont fait au reste du Canada tandis que nous examinons cette question fort difficile.
    Il est également important de parler des principes qui doivent encadrer notre débat sur la question. Les personnes handicapées s’attendent en outre à ce que le Parlement protège leur dignité, les droits que leur confèrent la Charte et leur existence en tant que membres de la société canadienne.
    Quelles que soient les décisions que nous prendrons, elles porteront non seulement sur le soulagement des souffrances, mais aussi sur la protection des droits issus de la Charte et sur le maintien de la place qu’occupent les gens dans notre démocratie, place que nous ne devons pas perdre de vue dans ce processus.
    Tandis que nous parlons du processus parlementaire, disons que même si « Parlement » a pour racine « parler », le processus parlementaire se fonde aussi sur l’écoute. Nous devons écouter les tribunaux. Nous devons écouter les Canadiens. Après l’avoir fait, nous devons accepter les responsabilités que nous avons prêté le serment d’assumer en passant à l’action. Nous devons agir avec diligence.
    Comme je l’ai dit, c’est une question qui définit beaucoup de nos vies. Nous avons entendu des députés des deux côtés de la Chambre parler de l’expérience personnelle qu’ils ont vécue en s’occupant de gens qui arrivaient au terme de leur vie. Nous avons tous eu des expériences de ce genre, moi compris. J’ai vu les souffrances de ma mère dans les derniers jours de sa vie tandis qu’elle essayait de soulager la peine de ses enfants, comme le font toutes les bonnes mères. J’ai pu constater qu’il n’y avait aucun cadre, aucun moyen d’avoir une conversation rationnelle avec nos proches pour régler une crise qui est aujourd’hui présente dans bien trop de foyers.
    J’exhorte les députés à ne pas tenir compte des aspects politiques de cette question, à faire abstraction des lacunes d’un système parlementaire qui ne nous donne pas toujours l’espace ou le temps nécessaire pour discuter de ces choses, mais à ouvrir plutôt leurs cœurs et leurs esprits pour écouter ce que disent les gens de cette situation que nous avons maintenant le devoir de régler et à voter en faveur de cette motion. Faisons-en une meilleure motion. Débarrassons-la dans la mesure du possible de tout caractère partisan. Incluons les groupes qui doivent se faire entendre sur cette question. Par-dessus tout, agissons pour mettre fin aux souffrances, pour assurer plus de clarté et pour réagir rapidement à la décision de la Cour suprême.
    Ce n’est pas le moment de tergiverser. Ce n’est pas le moment d’essayer de faire un choix entre les valeurs libertaires et les valeurs humanitaires qui interviennent dans ce débat. Écoutons plutôt les Canadiens, écoutons les gens de nos circonscriptions, écoutons en tant que parlementaires pour aboutir à une réponse dont le Canada puisse être fier.
    Nous avons une base sur laquelle nous pouvons nous appuyer pour agir. Nous disposons d’un ensemble très convaincant d’arguments que nous a présenté la Cour suprême. Nous devons passer à l’action.
    J'inviterais tous les députés à appuyer la motion qu'a présentée notre chef aujourd’hui et à avancer ensemble pour régler cette question suivant la manière canadienne, avec compassion et en nous appuyant sur des principes. Par-dessus tout, agissons avec diligence pour mettre fin aux souffrances de ceux qui n’ont d’autre choix que d’attendre notre réponse.
(1300)
    Monsieur le Président, j’écoute depuis ce matin les discours prononcés dans le cadre de ce débat, et je constate que nous abordons tous la question avec la dignité qu’elle mérite.
    Ma question relève de la procédure. Le député est à la Chambre depuis relativement peu de temps. J’en tiendrai compte. Le chef du Parti libéral qui a présenté cette motion a dit aujourd’hui qu’elle portait non sur une mesure législative, mais plutôt sur l’étude des questions entourant le suicide médicalement assisté.
    Le rapport du comité serait présenté à la Chambre d’ici la fin juillet, mais il y aura des élections le 19 octobre. Par conséquent, la Chambre ne reprendra pas ses travaux avant celles-ci. J’entends dire que nous devrions régler cette affaire avant les élections, mais en fait, nous ne discutons pas d'une mesure législative puisque la motion a pour but d’étudier la question.
    Comment la Chambre peut-elle prendre une décision au sujet de cette motion avant les élections?
    Monsieur le Président, nous avons jusqu’en février 2016. D’ici là, nous aurons des élections. La motion d’aujourd’hui propose de mettre en marche un processus et de le faire avancer. Nous commencerions par de vastes consultations avec les Canadiens, au cours desquelles nous recueillerions les témoignages nécessaires auprès des intéressés, afin que l'exécutif dispose du contexte, des fondements et des renseignements nécessaires pour agir et présenter une mesure législative. Ainsi, le prochain Parlement pourra, s’il y a lieu, agir à temps pour respecter le délai fixé par la Cour suprême.
    Il est essentiel d’avancer à cet égard, car cette question requiert que le Parlement adopte une nouvelle approche. Celui-ci doit entendre davantage de Canadiens pour prendre conscience de la complexité de la tâche et de la compassion dont il faut faire preuve pour s'en acquitter. Attendre le début de la prochaine législature et prétendre qu’il est impossible d’agir comme parlementaires en dehors du Parlement reviendrait à limiter notre compréhension de la démocratie et du système parlementaire. Nous avons les moyens d’agir. La motion définit la première étape de cette procédure. À partir de là, nous serions en mesure d’aller de l’avant grâce aux bons conseils recueillis auprès des Canadiens.

[Français]

    Monsieur le Président, dans ma vie, j'ai eu des expériences de travail avec des équipes. J'ai dirigé des équipes de construction et j'ai travaillé dans toutes sortes de domaines. Chaque fois qu'on constatait qu'il y avait beaucoup de travail à accomplir, on disait toujours qu'on devait commencer tout de suite parce qu'on avait beaucoup à faire. On n'a jamais dit qu'on commencerait demain ou plus tard. C'est dur à concilier cela avec la position du gouvernement. Je crois que la seule chose qui explique cette façon de penser, c'est que le gouvernement a peur de débattre ce sujet.
    Les conservateurs sont conscients qu'ils sont incapables de faire une démarche non partisane et de faire, par exemple, ce que le Québec a réussi, avec deux gouvernements différents, sur une période de quatre ans et avec quatre partis politiques différents. C'est trop pour eux et ils ne sont même pas capables d'imaginer cela. J'aimerais que mon collègue parle davantage de cela.
(1305)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je dois admettre que c'est décevant de voir qu'un parti qui invoque constamment la clôture dans les dossiers complexes soulève la complexité comme un problème et un obstacle.
    Nous avons la capacité et la responsabilité d'agir ensemble. Les tribunaux nous ont demandé de le faire. Les Canadiens en ont fait autant et nous ont élu pour passer à l'acte. La question qui nous intéresse est peut-être la seule à laquelle nous pourrions — et nous devrions — donner suite rapidement en tirant parti de la diversité de nos expériences personnelles.
    Je suis d'accord avec les commentaires du député. Je n'ai jamais entendu de solution plus compliquée pour répondre à une urgence que celle de nous arrêter et de ne rien faire pour être en mesure de comprendre comment faire les choses plus tranquillement et réagir plus rapidement.
    Je pense que, en tant que parlementaires, nous avons la responsabilité de gouverner. Nous avons la responsabilité de faire appel aux personnes de l'autre côté de l'allée, de puiser à même nos expériences de vie, d'écouter, d'inclure et d'aller de l'avant.
    Comme je l'ai dit, avec chaque journée de retard, nous prolongeons la souffrance de quelqu'un. Avec chaque journée où le Parlement tarde à définir la question, nous créons de la confusion et suscitons la méfiance parmi les personnes dont les droits doivent être protégés par cette nouvelle mesure législative.
    Il est temps d'agir. Il est temps de gouverner. Il est temps de nous réunir pour donner une réponse aux Canadiens, comme la Cour suprême nous a demandé de le faire.
     Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Kootenay—Columbia, avec qui j'ai l'honneur de siéger au comité de la justice. C'est aussi un honneur de le connaître comme ancien agent de la GRC. J'ai énormément de respect pour son opinion sur un certain nombre de questions de justice, et il fait un travail fantastique au sein du comité.
    J'ai aussi le plaisir et l'honneur de parler aujourd'hui de la motion de l'opposition du Parti libéral. Pour être honnête, je suis reconnaissant de cette motion. Ces derniers temps, nous avons eu un certain nombre de motions de l'opposition qui portaient moins sur les questions dont les parlementaires auraient intérêt à débattre que celle-ci, qui va droit au but, et j'y suis sensible. Je crois aussi qu'il s'agit d'une question non partisane et que la discussion sur ce sujet particulièrement délicat a été très respectueuse, comme il se doit.
    Je vais consacrer la majorité de mon temps de parole aux questions de procédure. À mon avis, il s'agit d'une motion portant sur la procédure relative à une question d'intérêt public. La motion présentée aujourd'hui par les libéraux fournit une orientation en ce qui concerne cette question, une façon de l'aborder. Elle recommande que la question soit étudiée par un comité spécial. Les libéraux ont insisté sur la composition du comité: environ 60 % des membres seraient des conservateurs, 30 %, des néo-démocrates, et 10 %, des libéraux. J'ai parlé plus tôt de la structure des comités permanents, qui comptent maintenant 10 membres. Il est question ici de 12 membres, ce qui correspond à l'ancienne façon de faire. En fait, ce n'est pas important. Cela demeure un pourcentage. La nouvelle structure offrirait une présence accrue au Parti libéral au sein des comités, puisqu'il y aurait deux députés de l'opposition de moins, mais c'est ce que les libéraux ont choisi de présenter aujourd'hui.
    C'est pour cette raison que j'estime qu'il ne s'agit pas de la bonne façon de procéder en ce qui concerne cet enjeu très important. Je siège ici depuis neuf ans, et pendant cette période, j'ai été membre de plusieurs comités. Je préside le comité de la justice depuis quelques années déjà. À mon avis, si les députés veulent utiliser le temps dont les comités disposent de la meilleure façon qui soit, ils doivent consacrer celui-ci à l'étude des mesures législatives. C'est à ce moment qu'ils examinent les mots qui ont été couchés sur papier à propos de l'orientation du gouvernement ou d'un député, selon le type de projet de loi dont il est question. Le texte est là, les dispositions devant être étudiées sont là, et tous les changements sont là.
    Les députés feront une meilleure utilisation de leur temps s'ils examinent des mesures législatives. J'ai siégé à de nombreux comités qui font des études, et elles sont intéressantes. Parfois, ces études sont utiles, et parfois, elles ne le sont pas. Cette question en particulier doit faire l'objet de vastes consultations avant d'être renvoyée au comité.
    La motion présentée aujourd'hui par les libéraux propose la création d'un comité spécial qui ne serait pas chargé d'examiner un projet de loi en tant que tel. Les libéraux souhaitent que ce comité étudie la question et qu'il en fasse rapport au plus tard le 31 juillet. J'imagine que, selon eux, cette étude entraînerait la présentation, après les élections, d'un projet de loi. Compte tenu des résultats de cette étude, qui seraient publiés au plus tard en juillet, nos concitoyens ne sauraient toujours pas quelle position le Parlement souhaite prendre à cet égard. Le comité étudierait les enjeux et pourrait poser des questions. Il se pourrait que le rapport contienne des orientations et des recommandations, mais aucun projet de loi ne découlerait du processus. Évidemment, le Parlement pourrait être saisi d'un certain nombre d'options, notamment le statu quo. C'est l'une des options envisageables.
    La motion ne permettrait pas de faire avancer suffisamment le dossier pour que, en juillet prochain, les Canadiens puissent connaître la position du gouvernement et du Parlement du Canada à ce sujet. Si je me fie au libellé de la motion à l'étude aujourd'hui, ce ne serait pas du tout le cas.
    Le rapport contiendrait des recommandations, mais aucune étude réalisée par un comité ne peut obliger le gouvernement à faire quoi que ce soit. C'est la norme, qu'il s'agisse d'un comité permanent ou d'un comité spécial. Une étude ne peut pas forcer un gouvernement à faire quoi que ce soit. Même si, Dieu nous en préserve, un nouveau parti arrive au pouvoir après les élections du 19 octobre, l'étude ne pourrait pas contraindre ce gouvernement à prendre quelque mesure que ce soit.
(1310)
    La motion ne transmet pas le message que voudrait transmettre le Parti libéral et j'ai l'impression qu'elle ne donnera pas les résultats qu'il souhaite. Il s'agit d'une approche raisonnable, et je n'essaie pas de dire que ce que font les libéraux est mauvais, mais je ne crois pas que cette motion en particulier réponde aux attentes de la population.
    J'aimerais aborder un autre problème. Lorsque j'entends parler de vastes consultations, je pense immédiatement qu'on fait référence à différents groupes. En tant que président de comité, quand je convoque des témoins, j'essaie d'atteindre un certain équilibre. Tous les partis soumettent leurs demandes et, habituellement, nous essayons d'y répondre. On y parvient dans 99 % des cas, mais il arrive aussi qu'on ne puisse pas satisfaire tout le monde. Dans ces cas-là, la liste des témoins est alors proportionnelle à la composition du comité. Environ 50 % des témoins qui comparaissent ont été recommandés par les conservateurs; 40 %, par le NPD, c'est-à-dire l'opposition officielle; et 10 %, par le Parti libéral.
    Le bilan du comité de la justice montre que le nombre de témoins proposé par les conservateurs est beaucoup plus faible et représente environ 45 %. Les témoins des autres partis comblent les places restantes. Il est rare que l'on ait à discuter de lois qui traitent de questions de vie ou de mort. Si l'on fait bien les choses, c'est formidable. Si l'on se trompe, habituellement, on peut apporter des changements. Le gouvernement suivant peut aussi changer la politique ou la loi afin de l'améliorer ou de la modifier.
    Jusqu'ici, le vote le plus difficile pour moi a été celui sur l'envoi de nos militaires à l'étranger pour régler des conflits, que ce soit en Afghanistan ou, comme c'est le cas maintenant, au Moyen-Orient, parce que nous savons que des Canadiens risquent de perdre la vie. C'est justement de cela qu'il s'agit en l'occurrence, puisqu'on donne à une personne l'option de mettre fin à sa vie.
    La consultation avec les Canadiens ne doit pas se limiter aux témoins que nous choisissons d'inviter au comité. Il y a une foule de possibilités. Nous devrions tous être en mesure de mettre à profit les connaissances de ceux que nous considérons comme des experts. Certains experts en la matière ont des opinions différentes dans leur discipline particulière, mais il faut consulter la population de façon plus large.
    Selon moi, et je risque d'être partial, cette question devrait être renvoyée au comité de la justice et, au terme d'une vaste consultation au sein du comité, le gouvernement devrait présenter une mesure législative. D'après son bilan, le comité de la justice a effectué un très bon travail dans un certain nombre de dossiers très difficiles, notamment le projet de loi sur la prostitution. Ce dernier ne touchait qu'une petite partie de la population, mais celui dont nous sommes saisis touche tout le monde. Voilà pourquoi nous avons besoin d'une approche plus large.
     Je n'appuie pas la motion d'aujourd'hui, parce que le processus donne la fausse impression que nous aurons une mesure législative d'ici juillet. Le chef du troisième parti, celui qui a proposé la motion d'aujourd'hui, a indiqué que le processus n'aboutira pas à une mesure législative. C'est exactement ce qu'il a dit à la Chambre: il s'agit, selon ses dires, d'une étude, d'une consultation. Nous avons besoin d'une vaste consultation, je n'en disconviens pas. Cependant, je doute que la structure d'un comité spécial de la Chambre des communes constitue le moyen approprié de mener une telle consultation et d'élaborer une mesure législative, qui devrait plutôt être soumise au processus des comités permanents, dans le cadre duquel on inviterait des témoins à parler du projet de loi qui serait élaboré.
(1315)
    Monsieur le Président, certains points ressortent des arguments présentés par le gouvernement.
    Dans son premier point, le gouvernement semble dire que, si nous ne pouvons pas finir d'ici juillet, ce n'est même pas la peine de commencer. À mon avis, ce n'est pas un bon argument. Nous savons par exemple que les membres du gouvernement seront majoritaires au comité, de sorte que s'ils décident que le mois de juillet est trop tôt, ils peuvent se servir de leur majorité pour prolonger le délai jusqu'à la mi-août ou à un autre moment qu'ils décideront.
    Deuxièmement, le député a raison d'affirmer qu'il n'y aura probablement pas de loi avant les prochaines élections. Nous le comprenons. Toutefois, est-ce que les audiences qui auraient lieu sur le sujet ne seraient pas utiles pour le débat que l'on tiendrait sur la question pendant la campagne électorale? Ne voulons-nous pas des campagnes électorales éclairées dans ce pays?
    Monsieur le président, nous connaissons la raison de cette motion: il s'agit pour eux d'un enjeu électoral. C'est ce que vient de me demander le député. Il demande si cela devrait être au nombre des questions débattues lors des élections.
    À mon avis, ce n'est pas un enjeu électoral et ça ne devrait pas l'être. Il s'agit d'une question familiale très personnelle qui doit être convenablement débattue en tant que politique. Ce n'est pas un enjeu électoral.
    Nous ne disons pas aujourd'hui, de ce côté, que nous ne sommes pas ouverts à de larges consultations publiques. Mais il y a des questions auxquelles il faut répondre. Par exemple, est-ce que celui qui envisage l'aide médicale à mourir est le seul à décider? Est-ce qu'un conjoint peut prendre la décision, ou bien un père ou une mère s'il s'agit d'un enfant? Qui décide? Est-ce qu'un seul médecin intervient? Est-ce que les médecins ont le droit de refuser? Y a-t-il un groupe qui détermine si la personne qui prend la décision est saine d'esprit? Toutes ces questions doivent être traitées.
    À mon avis, chaque citoyen doit pouvoir donner son avis sur les questions à poser et sur les réponses à donner. Un comité parlementaire est trop restreint pour le faire.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours, dans lequel je l'ai entendu, à maintes reprises, parler de l'importance d'une vaste consultation, ce sur quoi je ne peux qu'être d'accord, dans la mesure où une vaste consultation ne signifie pas un sondage par Internet.
    La question que je veux lui poser est la suivante: avec un sujet aussi important et sensible que celui-ci, ne croit-il pas qu'il faudrait que la démarche soit parlementaire plutôt que gouvernementale, de façon à lier, ne serait-ce que moralement, le prochain gouvernement, peu importe la couleur qu'il aura?
(1320)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Je crois que, d'une certaine façon, il rejoint mon argument: pour tenir de vastes consultations, il faut faire appel aux représentants de tous les partis représentés à la Chambre, qu'ils soient ou non reconnus, et aux députés indépendants pour convenir des questions à poser et des renseignements à obtenir.
    Le député donne un exemple de consultation et tout le monde s'en tient à cela. Or, il s'agissait d'un seul élément parmi d'autres. Lorsque nous procédons à des consultations, quel que soit le sujet, nous tenons des groupes de discussion, nous faisons appel à des experts, nous posons des questions à nos concitoyens et ainsi de suite. Nous employons diverses méthodes afin d'obtenir un échantillon varié. Il faut un échantillon très varié.
    Ma belle-mère a eu le cancer des poumons. Elle a subi une opération très délicate. Elle a pris part aux essais cliniques d'une société pharmaceutique. Heureusement pour ma famille, elle a survécu. Elle est en rémission depuis plus de 10 ans maintenant. Par contre, beaucoup de ses amis qui ont pris part aux mêmes essais n'ont pas autant de chance. Nous avons même dû demander à un prêtre de lui administrer les derniers sacrements à l'hôpital. Nous aurions pu prendre des décisions différentes, mais nous ne l'avons pas fait.
    Chaque famille devrait avoir la possibilité de s'exprimer dans ce dossier; ma belle-mère aussi.
    Voilà pourquoi les consultations doivent être vastes.
    Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat que nous tenons aujourd'hui dans la foulée de l'arrêt Carter de la Cour suprême, qui a déclaré inconstitutionnelles deux dispositions du Code criminel interdisant l'aide médicale à mourir et qui a donné un an au Parlement, c'est-à-dire jusqu'au 5 février 2016, pour y donner suite.
    L'aide médicale à mourir soulève des questions d'ordre éthique, juridique et médical complexes, dont un grand nombre mettent en jeu des intérêts et des valeurs contradictoires, comme la préservation de la vie humaine, l'autonomie individuelle, la protection des personnes et des groupes vulnérables, la dignité humaine et la nécessité de soulager la souffrance. Les décisions concernant la fin de la vie sont très personnelles et délicates pour bien des Canadiens, qui ont des convictions profondes, quelle que soit leur opinion sur la question, et elles ont de vastes implications pour l'ensemble de la société.
    À ce stade peu avancé du débat, je crois que l'expérience et les données d'autres pays qui ont mis en place des régimes permissifs en réglementant l'euthanasie, l'aide à mourir ou les deux, sont des sources d'information utiles pour alimenter notre débat, y compris en ce qui a trait aux critères d'admissibilité ou aux garanties procédurales pour protéger les personnes vulnérables d'une mort injustifiée.
    Aux États-Unis, par exemple, seuls trois États permettent l'aide médicale à mourir: l'Oregon, depuis 1997, Washington, depuis 2008, et le Vermont, depuis 2013. Leurs régimes législatifs permettent aux malades en phase terminale de mettre fin à leurs jours en s'administrant une dose mortelle d'un médicament prescrit par un médecin, quoique la présence d'un médecin ne soit pas requise durant l'autoadministration du médicament.
    Les demandes de ce genre doivent répondre à certains critères: le patient doit être atteint d'une maladie terminale, qui est définie comme « une maladie incurable et irréversible qui, selon un avis médical raisonnable, entraînera la mort dans un délai de six mois »; ce doit être une personne de plus de 18 ans qui est en mesure de prendre des décisions concernant sa santé et de les exprimer; des demandes verbale et écrite doivent être soumises au médecin traitant; enfin, la demande verbale doit être confirmée au moins 15 jours après la première demande.
    La loi prévoit aussi des garanties procédurales qui définissent les responsabilités du médecin lorsqu'il donne suite à la demande. Celui-ci doit notamment confirmer que le patient est en phase terminale, que celui-ci peut prendre une décision de son plein gré, qu'on l'a bien informé de son diagnostic, de son pronostic, des possibles risques et des autres possibilités qui s'offrent à lui, hormis le médicament pour mettre fin à ses jours, et que le cas a été soumis à un deuxième médecin, qui devra confirmer le diagnostic et le respect des autres critères.
     Le médecin traitant doit aussi adresser à des services de consultation tout patient qui pourrait avoir des troubles psychiatriques ou psychologiques pouvant altérer son jugement.
    Dans le régime américain, comme dans tous les régimes permissifs, la loi prévoit que certains aspects doivent faire l'objet d'un rapport. Dans les trois États américains concernés, les médecins qui prescrivent une dose mortelle de médicament doivent en informer les autorités de la santé. Ce processus permet de recueillir des renseignements sur l'application de la loi, de les analyser et d'en faire rapport à la population. Il est indéniable que ces données seront précieuses pour le débat social qui s'amorce au Canada.
    Bien que des infractions aient été créés dans l'État de Washington et en Oregon en ce qui concerne la falsification de documents et les pressions susceptibles d'être exercées sur les patients, on n'a instauré aucun mécanisme d'application de la loi qui permette de vérifier que les médecins respectent les règles et les mesures de protection.
(1325)
    Si l'on se tourne vers les régimes européens, qui autorisent à la fois le suicide assisté et l'euthanasie, on remarque qu'il y a de légères différences.
    Contrairement à l'approche adoptée dans les États américains, les pays européens, plus particulièrement la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg, disposent de lois dont la portée est plus vaste, qui permettent de pratiquer l'euthanasie ou le suicide assisté sur une personne qui endure des souffrances insupportables, physiques ou psychologiques, en raison d'une maladie incurable, et ce, indépendamment de l'imminence de la mort.
    Depuis 2002, les patients adultes et les mineurs émancipés belges qui se trouvent dans une « dans une situation médicale sans issue et [font] état d'une souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable » peuvent demander à  être euthanasiés.
    Les patients doivent être conscients et aptes sur le plan juridique au moment de présenter leur demande, qui doit être formulée de manière volontaire, répétée et ne pas résulter d'une pression extérieure. Les garanties procédurales sont semblables à celles prévues dans les trois États américains, mais elle incluent également l'obligation de consulter un psychiatre s'il est vraisemblable que le décès ne surviendra pas dans un proche avenir.
    La loi belge a été modifiée en 2014, et elle permet maintenant l'euthanasie d'enfants de n'importe quel âge, s'ils endurent des souffrances constantes et insupportables qui ne peuvent être apaisées et s'ils risquent de mourir à brève échéance. Dans ces situations très délicates, une demande explicite doit être présentée et les parents doivent accorder leur consentement.
    Une fois l'euthanasie pratiquée, les médecins doivent soumettre un rapport détaillé à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation de l'euthanasie, un groupe de 16 experts qui établit si l'euthanasie a été pratiquée conformément à la loi et qui rapporte les cas de non-conformité au service des poursuites pénales.
    Aux Pays-Bas, bien que l'euthanasie et le suicide assisté soient tous les deux considérés comme des infractions aux termes du code pénal hollandais, la Termination of Life and Assisted Suicide Act est entrée en vigueur en 2002, exemptant de responsabilité criminelle les médecins qui posent ces actes en se conformant aux critères de soins diligents consignés dans la loi. Les critères sont encore plus larges dans ce pays, puisque les patients peuvent demander que l'on mette fin à leurs jours s'ils endurent « [...] des souffrances physiques ou psychologiques insupportables et qu'ils n'ont aucune perspective d'amélioration », et ce, sans égard du temps qu'il leur reste à vivre.
     Les adultes aptes et informés sont admissibles à une telle aide, mais aussi les enfants de 12 à 16 ans si les parents acquiescent à leur demande, de même que les mineurs de 16 à 18 ans, pour peu qu'ils en parlent à leurs parents avant de demander l'euthanasie.
    Là encore, des comités d'examen régionaux sont chargés de veiller à ce que les médecins se conforment aux critères de soins diligents consignés dans la loi, et de rapporter au service des poursuites pénales les cas de non-conformité à ces mesures de protection.
    La plupart des lois européennes permettent aussi l'euthanasie de personnes frappées d'incapacité mentale, comme des patients atteints de démence, quand ils ont rédigé, lorsqu'ils avaient encore leurs capacités mentales, des directives préalables demandant qu'on les euthanasie dans certaines circonstances.
    Dans tous les régimes permissifs, les médecins ont le droit de refuser d'aider les malades à mourir ou de les euthaniasier, et c'est ce qu'ils ont fait parfois quand il existait un traitement pouvant alléger les souffrances du patient.
    En conclusion, ce ne sont que quelques exemples des multiples dimensions de cette question qui, au cours des prochains mois, devra faire l'objet d'un examen minutieux et de discussions approfondies.
    Le gouvernement s'oppose à la motion visant à former un comité parlementaire qui mènera des consultations sur la mise en place d'un cadre législatif et la réponse à la décision Carter, et prévoit plutôt de faire participer les Canadiens, les provinces et les territoires, les membres de la profession médicale et les nombreux groupes touchés à une discussion nationale sur ces enjeux très importants.
(1330)
    C'est un débat qui nous concerne tous, individuellement et collectivement. Il porte sur nos valeurs communes, ainsi que sur notre responsabilité collective, en tant que société, de protéger nos membres les plus vulnérables.
    Monsieur le Président, par son discours, le député vient de démontrer la nécessité d'adopter la motion d'aujourd'hui et d'entreprendre cette importante étude. Le député vient d'établir une comparaison utile entre les approches préconisées aux États-Unis et en Europe à l'égard de cette question. C'est précisément sur ce genre d'information et d'expérience concrètes qu'un comité spécial devrait se pencher.
    À titre d'information, l'ouvrage d'O'Brien et Bosc dit ceci à propos des comités spéciaux, notamment ceux qui mènent ce genre d'étude:
    Chaque comité spécial est créé par un ordre de renvoi de la Chambre. Cette motion définit habituellement le mandat du comité et peut comprendre d’autres dispositions sur ses pouvoirs [...]
    L'ouvrage dit également ceci:
[...] contrairement aux comités législatifs, ils ne sont généralement pas chargés d’étudier un projet de loi, mais plutôt d’approfondir, par le biais d’une enquête, une question à laquelle la Chambre accorde une importance particulière.
    Voilà pourquoi la motion a été présentée à la Chambre.
    À l'heure actuelle, je crois qu'il y a des centaines de milliers de Canadiens, moi y compris, qui se demandent pourquoi le gouvernement n'arrive pas à entendre raison et à comprendre que nous devons commencer à nous pencher là-dessus, d'autant plus que nous avons 12 mois pour proposer un ajustement législatif approprié qui serait fondé sur nos propres expériences personnelles et professionnelles.
    Monsieur le Président, le député a dit l'essentiel de ce que j'allais répondre. La décision de la Cour suprême touchera non pas des centaines, ni même des milliers, mais des centaines de milliers de Canadiens. Un comité ne pourra jamais entendre tous ces gens.
    Nous allons mener de très vastes consultations auprès de l'ensemble des Canadiens sur une longue période afin d'entendre l'avis de tous les Canadiens concernés par cette décision de la Cour suprême.
    Monsieur le Président, l’allocution de mon collègue était très judicieuse. Je conviens avec mon collègue d’Ottawa-Sud qu’il faut agir rapidement dans ce dossier parce que nous voulons protéger les groupes vulnérables. En fait, toutes les personnes sont vulnérables lorsqu’elles sont confrontées à la mort. Nous devons donc mettre en place des mesures de protection et nous devons avoir une bonne discussion à ce sujet.
    J’aimerais que le député me dise une chose: pourquoi la mise sur pied d’un comité parlementaire composé de législateurs qui seraient appelés à voter une loi sur le sujet devrait-elle exclure une grande consultation publique?
(1335)
    Monsieur le Président, le problème que comporterait la mise sur pied d’un comité tiendrait à ce que ce comité ne pourrait entendre qu’un certain nombre de personnes au cours d’une période de temps. Ce comité ne pourrait pas entendre les très nombreux Canadiens qui veulent se prononcer sur le sujet.
    Le problème est donc de déterminer ce que nous devons faire. Excluons-nous des dizaines de milliers de Canadiens qui veulent se faire entendre? Comment choisirions-nous? Voilà le problème que pose la motion. Il y en aura qui seront favorisés, alors qu’il ne devrait pas y en avoir.
    Monsieur le Président, je ne veux pas mêler les pommes et les oranges, mais lorsqu’on examine le projet de loi C-51, les conservateurs peuvent limiter les témoignages des experts sur le projet de loi antiterroriste. Il se peut qu'ils veuillent le faire. Or, les Canadiens désirent en savoir plus sur la question et les experts veulent se faire entendre. Dans ce cas, les conservateurs cherchent à clore le débat.
    Dans l’autre cas, il semble que les conservateurs veulent ouvrir le débat aux 33 millions de citoyens et prendre deux ans pour le faire si cela est possible. Toutefois, pour le projet de loi antiterroriste, au sujet duquel les Canadiens sont très préoccupés, ils disent: « Non, nous ne voulons pas entendre ce que vous avez à dire. » Les conservateurs ont la réponse.
    J’aimerais entendre ce qu’il a à dire, étant donné tout particulièrement qu’il a été policier auparavant. Comme membre du système de justice, il devrait pouvoir me donner une bonne réponse là-dessus.
    Monsieur le Président, comparer le projet de loi C-51 avec le jugement rendu dans l’affaire Canada c. Carter exige beaucoup d’imagination, mais je dirai que 82 % des gens qui ont répondu aux consultations sur le projet de loi C-51 se sont dits en faveur de ce que fait notre gouvernement, et cela est très révélateur pour moi.
    La cause Canada c. Carter est très personnelle, et bien en dehors du champ d’intervention d’un policier. Il s’agit de la vie humaine. Il s’agit de situations où une personne doit décider avec son médecin s’il vaut mieux pour elle de continuer à vivre ou de mourir.
    Nous devons tenir une vaste consultation pour nous assurer de bien faire les choses, parce qu’il faut bien faire les choses. Je crois que la meilleure façon de procéder est de tenir une très vaste consultation, que notre gouvernement proposera et sur laquelle il ira de l’avant.

[Français]

    Monsieur le Président, j'aimerais partager le temps dont je dispose avec mon collègue de Saint-Laurent—Cartierville.
    J'ai le plaisir de parler de ce sujet difficile, car, à mon avis, c'est un sujet extrêmement important, non seulement pour moi, mais pour de nombreux Canadiens.

[Traduction]

    Je sais qu'il s'agit d'abord et avant tout d'un débat portant sur le processus, mais puisque j'ai déjà fait connaître ma position à ce sujet, je vais parler brièvement d'un autre aspect.

[Français]

    Je faisais partie de la minorité qui a voté en faveur du projet de loi du Bloc québécois, il y a quelques années. Naturellement, je suis donc en faveur de la décision de la Cour suprême.

[Traduction]

    Je crois pouvoir affirmer que j'ai peut-être un petit côté libertarien, car j'ai toujours été en faveur du droit des personnes de faire leurs propres choix, si ceux-ci ne causent pas de tort à d'autres personnes.
    J'étais en faveur du droit des couples homosexuels de faire un libre choix en ce qui concerne le mariage, car ce choix n'a absolument aucune répercussion négative sur mon propre mariage. Je suis aussi en faveur du droit des femmes de porter le niqab lors des cérémonies de citoyenneté si cela correspond à leurs croyances religieuses. Je suis en faveur du libre choix des femmes. Je suis en faveur de la décision de la Cour suprême, mais j'aimerais que nous accordions beaucoup d'attention au consentement véritable ainsi qu'à l'expansion de notre système de soins palliatifs lors de sa mise en oeuvre, car plus ce système sera solide, moins il y aura de gens qui feront le choix de mourir.
    Je comprends que même si c'est là mon point de vue, le Canada est un pays diversifié. Ma circonscription, Markham, est particulièrement diversifiée. D'ailleurs, selon Statistique Canada, il s'agit de la ville où il y a la plus grande diversité au pays. Je sais que ce ne sont pas tous les Canadiens qui seront d'accord avec moi, et je les respecte. Ils ont droit à leur opinion, que ce soit pour des raisons religieuses ou d'autres raisons.
(1340)

[Français]

    Je suis né au Québec. Jusqu'à présent, j'ai vécu la majeure partie de ma vie au Québec. Je dois donc dire que, en tant qu'ancien Québécois, je suis extrêmement fier de la mesure de l'Assemblée nationale du Québec. Les députés ont vraiment eu le courage d'agir sur cette question difficile; ils ont mis de côté leur partisanerie, et même leur idéologie personnelle; ils ont formé un comité; ils ont entendu de nombreux témoins; et, en fin de compte, ils en sont arrivés à une décision qui n'était pas seulement un consensus, mais une décision unanime.

[Traduction]

    Je propose donc à la Chambre et à mes collègues du Parlement canadien de se montrer aussi courageux que les députés provinciaux du Québec. Leur situation comportait plus d'écueils que la nôtre, en fait, puisque leur geste a précédé la décision de la Cour suprême. Pour notre part, nous agissons alors que la Cour suprême a déjà rendu sa décision. Nous pourrons donc bénéficier des paramètres et des lignes directrices déjà tracés.
    Les parlementaires fédéraux ont souvent montré une certaine lenteur et une certaine mollesse devant ces questions morales difficiles à trancher, ce qui a laissé un vide législatif. Nous devons assumer nos responsabilités de parlementaires et débattre de ces enjeux difficiles en pensant avant tout aux intérêts des Canadiens, sans nous laisser aveugler par des idéologies personnelles ou partisanes. C'est ce qu'a fait l'Assemblée nationale du Québec. C'est que nous devons être prêts à faire ici, au Parlement du Canada.
    Je suis aussi convaincu que nous gagnerions tous à adopter un processus comme celui que propose le Parti libéral, peu importe nos points de vue personnels. Supposons par exemple qu'un groupe s'oppose à la décision de la Cour suprême. Si un comité étudie le dossier et invite des témoins, ce groupe pourra présenter ses arguments en faveur d'une interprétation plus étroite de la loi, et mettre l'accent sur l'importance d'un consentement véritable et la nécessité d'accroître les soins palliatifs. Je serais d'accord avec certains de ces points, comme je l'ai déjà dit.
    Ces intervenants pourraient donc présenter leurs observations. Mais s'il n'y a pas d'étude en comité, nous serons aux prises avec un vide législatif dans lequel tout peut arriver, et ceux qui s'opposent à la décision de la Cour suprême pourraient n'avoir aucune influence sur le résultat. De la même manière, les gens qui approuvent la décision de la Cour suprême pourront aussi faire connaître leur point de vue, présenter des arguments et influencer la décision finale.
    Le Québec est, dans une certaine mesure, plus homogène que le Canada, alors je ne m'attendrais pas à une décision unanime sur cette question de la part du Parlement fédéral, certainement pas avant les prochaines élections. Cependant, il nous incombe de faire le travail que les Canadiens nous ont confié, de suivre l'exemple de nos homologues du Québec et de laisser de côté nos penchants partisans et nos croyances personnelles pour nous atteler à la tâche ardue d'écouter les Canadiens, d'entendre des témoins, de débattre jusqu'à trouver une solution qui ne plaira pas nécessairement à tout le monde, mais pour laquelle, espérons-le, nous aurons dégagé un vaste consensus à la Chambre.
    En somme, les parlementaires fédéraux devraient s'acquitter des tâches pour lesquelles ils ont été élus. Au nom des Canadiens, nous devrions nous pencher sur cette question très délicate dans le même esprit que nos homologues à l'Assemblée nationale du Québec.
(1345)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie le député de son témoignage quant à la façon de faire de l'Assemblée nationale, où les députés ont procédé de façon unanime à la suite d'une grande consultation. Ils sont arrivés à un consensus tout à fait exceptionnel sur les soins de fin de vie.
    Maintenant, je rappellerais à la Chambre que Mme Lalonde qui était députée ici — elle est malheureusement décédée — avait aussi porté ce dossier pendant plusieurs mois à la Chambre. Cela avait provoqué un long débat qui s'était terminé par un rejet de sa motion qui parlait de mourir dans la dignité. Elle a été la précurseure de cela et elle avait invité de nombreux témoins, tant du domaine médical que du domaine social, ainsi que de différents anciens partis politiques. Cela faisait qu'elle possédait un bagage de connaissances exceptionnel. Elle avait accumulé des données extraordinaires.
    Je dirais au député que j'ai été un peu surpris que le Bloc québécois, étant donné que c'est lui qui avait amené ce débat, ne soit pas invité à participer à la motion ou du moins à communiquer toutes les connaissances qu'il avait accumulées dans ce comité pour les partager avec le reste des gens.
    Je termine avec ma deuxième interrogation. Le large consensus atteint à Québec ne doit en aucun temps être changé ou contesté par un nouveau comité pancanadien qui réfléchirait dans un sens contraire. Je crois que le débat est terminé au Québec, et ce, presque dans l'unanimité. Pour ce qui est du Québec, cela doit être la politique,
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses remarques. Comme je l'ai dit, j'ai voté en faveur de ce projet de loi du Bloc. Le chef du Parti libéral a dit qu'il était ouvert à la composition de ce comité proposé. Ce n'est pas la composition du comité qui est le principal point, c'est plutôt la décision de créer un tel comité. Selon moi, le Québec est un modèle pour nous. Je ne proposerais pas de changer les décisions qu'ont prises les Québécois, ma proposition serait de reproduire à l'échelle canadienne ce qu'on a déjà fait au Québec.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son appréciation de ce que le Québec a réalisé. J'aimerais qu'il parle un peu du fait que la différence est qu'au Québec, même s'il y avait quatre partis politiques impliqués, aucun n'avait une base de droite morale devant laquelle ils ne pouvaient pas s'exprimer, contrairement à nos amis de l'autre côté qui doivent continuellement mesurer tout ce qu'ils disent, qui ne peuvent pas vraiment s'exprimer et dire quelque chose de sensible ou modéré.
    Monsieur le Président, si j'ai bien compris, je suis tout à fait d'accord avec le député sur le fait que tous les partis devraient être inclus. C'est cela le défi que nous avons. Est-ce que les conservateurs qui forment le gouvernement vont appuyer la motion? S'ils ne l'appuient pas, nous n'aurons pas de comité parce qu'ils forment le gouvernement. Toutefois, comme je l'ai dit, j'espère que la plupart des députés auront le courage d'agir et de faire ce qui est correct pour l'ensemble des Canadiens.
    Monsieur le Président, rarement une motion aura contenu en elle-même à la fois sa raison d'être et sa justification autant que celle qui est sous nos yeux aujourd'hui.
    La motion du chef libéral et député de Papineau demande qu'un comité spécial de la Chambre des communes soit créé pour examiner la décision unanime de la Cour suprême du 6 février 2015, laquelle a déterminé qu'en certaines circonstances précises, l'interdiction à l'aide médicale à mourir est contraire à la Charte canadienne des droits et libertés. La cour a donné 12 mois au Parlement pour qu'il ajuste le droit à cette réalité. Cela signifie qu'un nouvel encadrement juridique doit être mis en place pour le 6 février 2016 au plus tard, sans quoi l'aide médicale à mourir deviendra légale, sans que les balises et les paramètres nécessaires aient été clarifiés par la loi. Or l'ajournement en été et les élections générales prévues restreignent le temps de séance disponible à seulement 12 semaines d'ici le 6 février 2016.
    Les Canadiens s'attendent à ce que les parlementaires assument leur responsabilité de législateurs et mènent cette discussion importante de façon réfléchie et posée, et non dans la précipitation. Il faut donc s'y mettre maintenant. Ce comité de 12 membres, dont sept du parti gouvernemental, quatre de l'opposition officielle et un du Parti libéral, devrait lancer ses travaux dès le mois de mars et faire rapport à la Chambre au plus tard le 31 juillet 2015.
     Le comité aura ainsi eu le temps de bien consulter les spécialistes juridiques, médicaux et autres, ainsi que les Canadiens en général. Il aura pu voyager, accompagné du personnel nécessaire à l'intérieur et à l'extérieur du Canada. Il sera en mesure de formuler des recommandations sur la façon dont il faudra donner effet à l'avis de la Cour suprême, en vue d'établir un cadre juridique conforme à la Constitution, à la Charte canadienne des droits et libertés et aux priorités des Canadiens.
    Résumons le jugement de la cour: à l'heure actuelle, aux termes de l'alinéa 241b) du Code criminel quiconque aide ou encourage quelqu'un à se donner la mort commet un acte criminel, et selon l'article 14, nulle ne peut consentir à ce que la mort lui soit infligée. Ensemble, ces dispositions prohibent au Canada la prestation de l'aide à mourir.
    Ce sont précisément ces dispositions, c'est-à-dire l'alinéa 241b) et l'article 14 du Code criminel qui, selon la Cour suprême, violent l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés qui garantit le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne.
(1350)

[Traduction]

    Selon la cour, les interdictions violent de trois façons l'article 7 de la Charte sans que cela soit justifié. Premièrement, elles violent le droit à la vie en forçant certaines personnes à se suicider prématurément de peur de devenir invalides. Deuxièmement, elles violent le droit à la liberté en privant les personnes du droit de prendre des décisions concernant leurs propres intégrité physique et soins de santé. Troisièmement, elles violent la sécurité d'une personne en laissant les gens endurer des souffrances intolérables.

[Français]

    La cour a été très claire à propos de la tâche qui incombe au législateur.
    Elle écrit ce qui suit:
     Il appartient au Parlement et aux législatures provinciales de répondre, si elles choisissent de le faire, en adoptant une loi compatible avec les paramètres constitutionnels énoncés dans les présents motifs.
    La cour décrit ainsi ces paramètres au paragraphe 127:
     [...] [l'aide médicale à mourir ne s'applique qu']à une personne adulte capable qui (1) consent clairement à mettre fin à sa vie; et qui (2) est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables [...] lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.
    Les paramètres sont donc là. Il s'agit d'une personne adulte capable clairement consentante et qui est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables causant des souffrances persistantes et intolérables.
    La cour assigne aussi aux parlementaires la responsabilité d'établir comment seront conciliés les droits garantis par la Charte aux patients et aux médecins, en considérant la décision du médecin de participer à l'aide à mourir comme relevant de sa conscience.
    La cour a clairement spécifié que la tâche d'établir ces paramètres revenait aux deux ordres de gouvernement, puisque tant le Code criminel que la santé sont des compétences constitutionnelles mises en cause.
    Les députés fédéraux ont donc leurs responsabilités à assumer. Nous ne pouvons pas nous défiler. Les juges ont fait leur travail, à nous de faire le nôtre, et il faut s'y mettre dès maintenant.
    Ce ne sont pas seulement les juges qui nous rappellent à nos responsabilités. L'Association médicale canadienne veut que la loi établisse clairement le cadre légal dans lequel le médecin pourra participer à l'aide médicale à mourir, et cette association insiste sur l'amélioration des soins palliatifs au Canada. Elle l'a encore fait savoir par communiqué aujourd'hui même, en accueillant favorablement la motion du député de Papineau. De même, le Conseil des Canadiens avec déficiences veut que la loi établisse de solides balises qui empêcheront les abus. Les Canadiens en général veulent le meilleur cadre législatif possible.
    Bien sûr, l'aide médicale à mourir est une question complexe et chargée d'émotivité, mais si les législateurs n'avaient à résoudre que des questions simples, ce serait justement trop simple. C'est notre rôle que de nous pencher sur les questions d'intérêt public, si difficiles soient-elles.
    Voilà pourquoi il est incompréhensible que le gouvernement conservateur ait annoncé qu'il allait voter contre la motion du député de Papineau. Je demande à mes collègues conservateurs de revoir cette décision. Le gouvernement prétend qu'il préfère s'en remettre à un autre processus de consultation, mais il s'est bien gardé de le définir. Cela ressemble à une dérobade de sa part.
    Mais alors pourquoi nos collègues conservateurs manqueraient-ils à ce point de courage? Après tout, le comité spécial que nous demandons pourrait s'appuyer sur un nombre considérable d'études, de réflexions, d'exemples étrangers et d'expertise, dont le travail législatif accompli par notre collègue de Charleswood—St. James—Assiniboia ainsi que par des collègues du Sénat.
    Surtout, ce comité bénéficierait d'un réservoir inépuisable de bonne volonté de la part des Canadiens. Toutes et tous nous l'appuierons dans cette tâche. Nous pouvons donc y aller avec confiance.
    Nous n'avons qu'à regarder le travail accompli par nos collègues de l'Assemblée nationale du Québec. À la suite d'un processus non partisan exemplaire, ils sont parvenus à voter ensemble pour une loi sur l'aide médicale à mourir qui pourrait nous servir de repère pour établir ce qu'il conviendrait de faire dans la compétence fédérale.
(1355)

[Traduction]

    En conclusion, puisque le Parlement ne dispose que de peu de temps pour mettre en oeuvre la décision de la Cour suprême d'annuler l'interdiction visant l'aide médicale à mourir, et afin que soient tenues de vastes consultations auprès des Canadiens et d'experts sur cette question complexe et délicate, la Chambre doit agir de manière responsable en créant immédiatement un comité spécial.
    Le comité lancerait immédiatement des consultations auprès des Canadiens et des experts afin d'améliorer les soins en fin de vie, y compris les soins palliatifs, le tout, afin que nous adoptions un cadre législatif conforme à la Charte d'ici le 6 février 2016.

[Français]

    Voilà ce que les Canadiens attendent de nous, leurs députés. Voilà ce qu'ils sont en droit d'obtenir de nous. Voilà pourquoi il nous faut voter pour la motion du député de Papineau.

[Traduction]

    Puisqu'il ne reste que deux minutes avant que nous passions aux déclarations de députés, laissons-nous une certaine marge de manoeuvre et commençons immédiatement.

[Français]

    L'honorable député de Saint-Laurent—Cartierville aura cinq minutes pour les questions et les commentaires lorsque la Chambre reprendra le débat sur cette motion, probablement juste après la période des questions.

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Déclarations de députés]

[Traduction]

Le club Rotary de Mississauga-City Centre

    Monsieur le Président, j'ai été ravi de me joindre aux membres du club Rotary de Mississauga-City Centre, le 15 février, pour une cérémonie spéciale en l'honneur du drapeau canadien. Nous avons également souligné le premier anniversaire du programme Extending Seniors' Horizon, qui offre aux aînés de la formation sur les technologies de communication modernes et sur les médias sociaux.
    Bien des aînés souffrent de solitude, surtout les immigrants âgés. Ce programme permet aux aînés de briser un peu la solitude, car ils peuvent ainsi communiquer avec leurs amis et leurs proches, qui habitent souvent très loin. J'ai eu le privilège de rencontrer des aînés heureux qui participent au programme. Les fonds alloués par le gouvernement ont permis l'achat du matériel qui est utilisé lors des séances de formations spéciales.
    Je tiens à féliciter le club Rotary de Mississauga-City Centre pour cette remarquable initiative, qui est dirigée par Tim Iqbal, et à saluer les bénévoles qui participent au programme. Leur travail est fort apprécié. Le club Rotary fête ses 110 ans cette année; j'en profite donc pour saluer les membres du club Rotary de Mississauga et ceux des autres clubs du Canada et d'ailleurs dans le monde.

[Français]

La Foire du livre de Saint-Hyacinthe

    Monsieur le Président, d'ici quelques semaines, les galeries de Saint-Hyacinthe accueilleront la septième édition de la Foire du livre.
    Avec son volet garderie et CPE, son volet scolaire et son volet grand public et adultes, cet événement saura sans aucun doute plaire à tous. La Foire du livre de Saint-Hyacinthe, c'est des conférences gratuites, des causeries littéraires, des spectacles gratuits et des rencontres avec des auteurs.
    De plus, il y a de grandes nouveautés cette année: le concours littéraire Desjardins, un concours de bandes dessinées pour les élèves du primaire et un concours de poésie pour les élèves du secondaire. Ainsi, les élèves des MRC des Maskoutains et d'Acton seront invités à user de leur créativité.
    Deux porte-paroles ont été invités pour représenter chacun des volets. Auteur de la célèbre bande dessinée L'Agent Jean, très populaire auprès des jeunes âgés de 8 à 12 ans, le bédéiste Alex A. s'associe au volet primaire. L'auteur jeunesse Fredrick D'Anterny, qui signe, entre autres, les livres Les messagers de Gaïa et Les 7 cristaux de Shamballa, s'associe au volet secondaire.
    Il n'est jamais trop tôt ni trop tard pour transmettre aux jeunes le goût de la littérature et de la lecture. Voilà pourquoi je lève mon chapeau aux organisateurs de la Foire du livre de Saint-Hyacinthe. Ils ont réussi ce pari avec dynamisme et créativité.
(1400)

[Traduction]

L'aide médical à mourir

    Monsieur le Président, les Canadiens ont tendance à faire confiance à nos tribunaux, surtout à la Cour suprême, mais cette dernière s'est, à maintes reprises, prise pour le législateur au cours des 10 dernières années; plus d'une dizaine de fois, en fait. Récemment, la Cour suprême a annulé sa propre décision sur l'aide médicale à mourir et, plus important encore, une décision claire du Parlement d'interdire l'aide à mourir.
    Je tiens à signaler que, durant les délibérations, la cour a tenu compte des changements législatifs survenus en Belgique, en Suisse, en Oregon, à Washington et aux Pays-Bas, mais a ignoré le bilan législatif du Parlement du Canada.
    C'est le rôle du Parlement du Canada de rédiger des lois. Il incombe à la Cour suprême et à la police de les administrer et de les appliquer. Il semble que cette cour rebelle fonde plus souvent ses décisions sur les convictions personnelles des juges que sur la loi. Nous avons donc une Cour suprême qui méprise la loi.

La soirée des Oscar

    Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour féliciter un résidant de la Colombie-Britannique, M. Robert Bridson. Ses innovations et ses réalisations techniques dans le domaine du cinéma lui ont valu un Oscar. M. Bridson est professeur auxiliaire de mathématiques à l'Université de la Colombie-Britannique, qui est située dans ma circonscription, Vancouver Quadra. L'Académie lui a remis cette récompense parce qu'il a développé le logiciel et créé par ordinateur les modèles mathématiques utilisés pour simuler des scènes réelles dans des superproductions comme Avatar, Les Avengers: Le film, Le hobbit, et le thriller de science-fiction Gravité.
    Le succès de M. Bridson souligne l'importance sociale et économique des arts et de la culture à Vancouver et dans l'ensemble du pays. Au nom de tous les députés, j'aimerais remercier M. Bridson pour tout ce qu'il apporte au domaine des mathématiques, à l'industrie cinématographique et au secteur du divertissement. M. Bridson est une véritable source d'inspiration pour les jeunes qui souhaitent étudier ou travailler dans le domaine des mathématiques.

La fiscalité

    Monsieur le Président, en tant que mère et grand-mère, je suis extrêmement fière de faire partie du gouvernement conservateur. Nous avons présenté récemment notre nouveau plan fiscal qui sera très avantageux pour toutes les familles qui ont des enfants.
    De nombreux parents m'ont dit qu'ils étaient très heureux que le gouvernement leur permette de garder plus d'argent dans leurs poches. De nombreux grands-parents comme moi sont aussi reconnaissants au gouvernement conservateur d'aider leurs enfants et leurs petits-enfants en implantant le fractionnement du revenu pour les familles ayant des enfants, en bonifiant la prestation universelle pour la garde d'enfants, en augmentant le montant maximal qui peut être réclamé au titre de la déduction pour frais de garde d'enfants, ainsi qu'en doublant le crédit d'impôt pour la condition physique des enfants, qui sera désormais remboursable.
    Mes enfants ont toujours été heureux de voter pour leur mère. Maintenant, de nombreuses autres personnes seront tout aussi empressées qu'eux de continuer d'appuyer le gouvernement conservateur et de maintenir ce programme d'allégements fiscaux pour les familles.

Le traité de 1765 entre les Britanniques et les Inuits

    Monsieur le Président, je prends la parole pour féliciter le Conseil communautaire de NunatuKavut à l'occasion du 250e anniversaire du traité de 1765 entre les Britanniques et les Inuits. Notre parti fait preuve d'un engagement inébranlable à l'égard des Inuits de NunatuKavut et il reconnaît le caractère juste de leurs droits ancestraux et de leurs revendications concernant les titres autochtones.
    Les néo-démocrates ont toujours défendu les droits des Autochtones. L'an dernier, notre parti a adopté une résolution extraordinaire qui reconnaît les Inuits de NunatuKavut et qui confirme son engagement solennel à entreprendre des négociations honorables avec eux en vue d'un accord moderne sur les revendications territoriales. Nous demandons au gouvernement conservateur de suivre l'exemple du NPD, c'est-à-dire de travailler sincèrement et promptement à apaiser les relations avec tous les peuples autochtones, y compris les Inuits dans le centre-sud du Labrador, et d'entamer ces négociations.
     Nous invitons tous les députés à se joindre à nous pour célébrer le 250e anniversaire du traité entre les Britanniques et les Inuits, le premier et le seul en son genre. Je remercie le Conseil communautaire de NunatuKavut de ses efforts pour aider à perpétuer le souvenir de ce chapitre important de l'histoire du Canada.
(1405)

L'Ukraine

    Il y a un an cette semaine, monsieur le Président, je me trouvais au Maïdan, juste après le massacre de la centurie céleste. Des Ukrainiens étaient descendus dans la rue et avaient payé le tribut ultime pour avoir dénoncé la violence et la répression du régime Ianoukovitch.
    Hélas, encore aujourd'hui, les Ukrainiens poursuivent leur lutte pour la démocratie et le droit à l'autodétermination face aux efforts soutenus de la Russie, avide de territoires, en vue de porter atteinte à la souveraineté de l'Ukraine.
    Le Canada dénonce haut et fort la violation constante du cessez-le-feu dans l'Est de l'Ukraine par les séparatistes qui jouissent du soutien de Vladimir Poutine. Nous exhortons la Fédération de Russie et ses rebelles fantoches en Ukraine d'interrompre sur-le-champ leurs attaques, de retirer leurs armes lourdes du pays, de cesser d'y envoyer des combattants et de l'équipement, de laisser les observateurs de l'OSCE remplir leurs fonctions et d'appliquer intégralement les engagements convenus aux termes de l'Accord de Minsk.
    Comme l'a déjà dit le premier ministre, qu'il faille 5 mois ou 50 ans, nous ne reconnaîtrons absolument jamais l'occupation illégale du territoire ukrainien par la Russie.

Rotary International

    Monsieur le Président, Rotary International a célébré hier son 110e anniversaire. Le club Rotary, c'est 1,2 million de personnes — des voisins, des amis et des personnalités influentes — qui unissent leurs efforts pour apporter des changements positifs et durables à leur milieu et dans le monde entier. Je suis moi-même membre du club de Mississauga-Meadowvale et je tiens à remercier tous les autres membres du Canada et du monde entier.
    Depuis sa fondation en 1905, Rotary International s'est attaqué à de grands problèmes mondiaux et il a aidé divers organismes communautaires et internationaux, de l'ONU à la Société du timbre de Pâques, à prendre leur essor.
    Nous savons évidemment tout ce que fait le club Rotary au Canada pour l'éradication de la poliomyélite en partenariat avec la Fondation Bill et Melinda Gates et le gouvernement.
     En appliquant leurs quatre critères pour améliorer leur quartier et le monde entier, les membres du club Rotary redonnent à leur milieu et changent les choses au quotidien. Je suis convaincu que tous les députés se joignent à moi pour féliciter Rotary International de son 110e anniversaire et pour lui souhaiter bonne continuation pendant encore de nombreuses décennies.

[Français]

L'organisme Aux sources du bassin de Chambly

    Monsieur le Président, je tiens à parler d'un organisme qui me tient beaucoup à coeur. Aux sources du bassin de Chambly aide, soutient et accompagne les familles et les personnes seules dans une perspective de développement de l'autonomie en matière de sécurité alimentaire, mais aussi matérielle. Cette approche permet d'offrir gratuitement des denrées et des biens matériels tout en développant l'autonomie des ménages. Chaque année, cet organisme organise notamment la guignolée pour Chambly et Carignan.
    Samedi soir, j'ai eu le plaisir de participer au souper-défilé vintage, qui avait pour objectif d'amasser des fonds pour l'agrandissement de ses locaux, qui débordent grâce à la générosité de la population, entre autres à cause de la guignolée, mais aussi en raison de toute la collecte qui est faite au cours de l'année. Cette soirée a aussi permis de démystifier et de mettre en valeur sa friperie; j'en étais témoin.
    En terminant, et c'est le plus important, je tiens à offrir toutes mes félicitations et mon soutien à la directrice de l'organisme, Yolande Grenier, à son merveilleux CA et à tous ses excellents bénévoles. Merci à eux!

[Traduction]

La fiscalité

    Monsieur le Président, le gouvernement conservateur est un gouvernement qui préconise la réduction des impôts. C'est pour cette raison que nous avons créé le compte d'épargne libre d'impôt, comme nous l'avions promis. Il permet aux Canadiens d'épargner en vue de leur retraite, des études de leurs enfants ou de l'achat d'une maison. En fait, nous sommes fiers de dire aujourd'hui que près de 11 millions de Canadiens, quels que soient leur âge ou leur revenu, ont ouvert des comptes leur permettant d'épargner à l'abri de l'impôt.
    Selon la Financière Manuvie, le compte d'épargne libre d'impôt est le mode d'investissement préféré des Canadiens. Près de la moitié des détenteurs de CELI ont un revenu annuel inférieur à 42 000 $ et, en 2013, 75 % de tous les détenteurs de CELI gagnaient moins de 70 000 $.
    Cependant, les libéraux et les néo-démocrates augmenteront les impôts et annuleront les avantages que nous avons mis en place. Les faits parlent d'eux-mêmes. Il n'y a qu'au gouvernement conservateur qu'on puisse faire confiance pour maintenir un faible taux d'imposition pour les familles canadiennes.

Les transports publics dans le Nord de l'Ontario

    Monsieur le Président, les habitants du Nord de l'Ontario n'en peuvent plus d'être traités comme des citoyens de deuxième classe. Nous en avons assez des attaques incessantes dont le transport public fait l'objet. Nous avons vu la disparition des services aériens, comme Bearskin Airlines, et la privatisation de l'entretien des routes. En 2012, les libéraux provinciaux ont éliminé notre train; ils ont chosi le week-end de l'Action de grâces pour mettre fin au service, ce qui fait que tous les étudiants qui espéraient rentrer chez eux pour l'occasion ont été laissés en plan. Le ministre libéral s'était alors payé la tête des familles de la région en leur disant qu'elles devraient acheter des voitures si elles voulaient que leurs enfants viennent à la maison. C'est inacceptable.
     Maintenant, les libéraux s'en prennent au service d'autobus. Il est tout à fait inacceptable qu'une personne qui doit se rendre à Toronto pour recevoir un traitement contre le cancer ait à faire le pied de grue dehors, à minuit, par 45 °C sous zéro, à attendre l'autobus en provenance de Matheson, Kirkland Lake et Englehart.
    Le plan des libéraux et des conservateurs pour le Nord de l'Ontario est une mise à mort par asphyxie financière. Or le transport public est un droit. Les habitants du Nord savent qu'il n'y a que les néo-démocrates provinciaux et fédéraux sont prêts à les défendre et à défendre leur région.
(1410)

[Français]

La fiscalité

    Monsieur le Président, nous sommes fiers de mettre plus d'argent dans les poches des familles canadiennes plutôt que dans les coffres du gouvernement, comme le feraient les libéraux et le NPD.
    Notre gouvernement a instauré le compte d'épargne libre d'impôt pour aider les Canadiens à faire des économies pour leur retraite, les études de leurs enfants ou une mise de fonds sur une maison. Ces comptes sont avantageux pour l'économie canadienne. Aujourd'hui, 11 millions de Canadiens ont un compte d'épargne libre d'impôt. Ce sont des familles de toutes les classes, mais en grande majorité à revenu faible et moyen, qui choisissent l'épargne libre d'impôt.
     Alors que notre gouvernement conservateur réduit les impôts que doivent payer les familles et les aînés du Canada, les libéraux et le NPD augmenteraient ces mêmes impôts.

[Traduction]

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole pour souligner la présence à Ottawa des Inuits du Centre-Sud du Labrador, qui sont représentés par le Conseil communautaire de NunatuKavut, notamment par son président, Todd Russell. Ils sont parmi nous pour commémorer le 250e anniversaire de la signature du seul et unique traité conclu avec les Inuits du Canada avant la Confédération.
    Les Inuits du Sud du Labrador veulent être respectés à l'instar des autres Canadiens. Ils veulent pouvoir bénéficier de l'exploitation des ressources sur leurs terres. Le traité signé il y a 250 ans marquait l'établissement de bonnes relations entre les Inuits du Sud et le gouvernement. Aujourd'hui, les gens de NunatuKavut veulent que les relations soient tout aussi saines.
    Le Parti libéral fera tout son possible pour que les revendications de la population de NunatuKavut soient acceptées immédiatement et fassent l'objet de négociations de bonne foi de nation à nation. Si le gouvernement conservateur ne veut pas s'acquitter de ses obligations et entreprendre des négociations avec la population de NunatuKavut, les libéraux le feront lorsqu'ils formeront le gouvernement.
    Des célébrations auront lieu à de nombreux endroits, dans ma circonscription. Aujourd'hui, des célébrations ont lieu ici même, sur la Colline du Parlement.

La fiscalité

     Monsieur le Président, les mères et les pères devraient pouvoir prendre eux-mêmes les décisions importantes qui concernent leurs enfants. C'est pourquoi le nouvel allégement fiscal pour les familles et la bonification de la prestation universelle pour la garde d'enfants permettront à toutes les familles avec enfants de recevoir en moyenne près de 2 000 $ par année pour chaque enfant, soit près de 12 000 $ pour les six premières années de vie de l'enfant.
    Le gouvernement conservateur comprend que les parents savent ce qui convient le mieux à leurs enfants. Or, tant les libéraux que les néo-démocrates s'opposent à ce qu'on remette de l'argent dans les poches des familles. D'ailleurs, les libéraux aboliront nos allégements fiscaux et augmenteront le fardeau fiscal des familles canadiennes de la classe moyenne. Comme d'habitude, les libéraux proposent d'alourdir la dette et le fardeau fiscal.
    De ce côté-ci de la Chambre, nous n'augmenterons pas les impôts comme le feraient les libéraux et les néo-démocrates. Au contraire, nous sommes fiers de permettre aux mères et aux pères d'avoir le dernier mot sur la façon dont ils dépenseront leur argent.

La sécurité publique

    Monsieur le Président, hier soir, les députés ont fait connaître leur position en ce qui concerne la protection des libertés fondamentales des Canadiens. Il est difficile de concevoir que les députés libéraux se disant progressistes, et plus particulièrement ceux de Toronto, ont pu accorder leur appui aux conservateurs, qui ont fait adopter à toute vapeur un projet de loi portant atteinte aux libertés civiles. Ils ont reçu des directives d'en haut et ils ont dû s'y conformer.
    Le chef du Parti libéral et ses stratèges sont loin d'apporter une véritable bouffée d'air frais. En fait, ils sont plutôt revenus aux bonnes vieilles tactiques libérales du passé. Au cours des 10 dernières années, les Canadiens se sont lassés de ce genre de politique cynique.
    Les Canadiens savent qu'ils peuvent compter sur le NPD, qui se battra pour leurs principes, leurs libertés et leur sécurité. Soyons clairs: en octobre, ils pourront compter sur un gouvernement néo-démocrate qui rejettera cette mesure législative dangereuse.

La fiscalité

    Monsieur le Président, seul le gouvernement conservateur défend les intérêts des familles canadiennes. Nous avons allégé l'impôt des familles et bonifié la prestation universelle pour la garde d'enfants. Ces changements profiteront à toutes les familles ayant des enfants, dans Elmwood—Transcona comme dans l'ensemble du Canada. Que les parents travaillent, soient au foyer ou soient seuls, que la famille ait un revenu ou deux, toutes les familles ayant des enfants auront plus d'argent dans leurs poches. Les parents recevront près de 2 000 $ pour chaque enfant.
     Au lieu de laisser aux parents le soin de décider comment dépenser leur argent, les libéraux et les néo-démocrates voudraient laisser des bureaucrates prendre ces décisions et éliminer nos allégements d'impôt. Ils voudraient éliminer ces avantages et percevoir plus de taxes et d'impôts, notamment une taxe sur le carbone qui nuirait à l'emploi. Nous ne les laisserons pas faire. Le gouvernement conservateur maintiendra de faibles taux d'imposition et verra à ce que les parents aient plus d'argent dans leurs poches, comme il se doit.

QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

(1415)

[Traduction]

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, après 411 jours dans une prison égyptienne, le journaliste canadien Mohamed Fahmy a vu son nouveau procès reporté de deux semaines. Nous devons tout faire pour ramener M. Fahmy au Canada.
    Le Cabinet du premier ministre a dit qu'il avait été en contact avec les autorités égyptiennes « à tous les échelons », mais la famille de M. Fahmy et tous les Canadiens voudraient connaître la vérité. Le premier ministre a-t-il parlé directement et personnellement au président el-Sisi pour demander le retour de M. Fahmy au Canada? Oui ou non?
    Monsieur le Président, je le répète, le gouvernement a décrié le processus à maintes reprises et demandé la libération de M. Fahmy. Ce point a été soulevé à tous les échelons par le gouvernement du Canada, y compris au mien, auprès du gouvernement égyptien. Nous continuerons d'exercer des pressions jusqu'à ce que la situation soit réglée de façon satisfaisante.
    Monsieur le Président, nous avons posé une question claire au premier ministre, et la famille mérite une réponse claire.
    Le premier ministre australien a parlé directement au président égyptien. Le premier ministre du Canada a-t-il parlé au président el-Sisi d'Égypte du retour de M. Fahmy chez lui au Canada?
    Monsieur le Président, comme je l'ai dit, nous avons soulevé la question à tous les échelons et nous continuerons de le faire de façon, selon nous, efficace. Nous sommes optimistes quant à la perspective de trouver une solution, mais nous sommes déçus que l'affaire ne soit pas encore réglée. Nous continuerons d'exercer des pressions pour que M. Fahmy soit libéré.

La sécurité publique

    Je comprends que c'est un non, monsieur le Président.

[Français]

    Comme le démontre si bien le cas de M. Fahmy, des violations graves des droits de la personne peuvent être commises au nom de la sécurité nationale. C'est pour cette raison que, contrairement aux libéraux qui appuient le gouvernement les yeux fermés, nous, au NPD, croyons qu'il est essentiel d'étudier sérieusement le projet de loi C-51.
    Est-ce que le premier ministre reconnaît qu'il est primordial d'étudier ce projet de loi en profondeur et de s'assurer que les experts en matière de sécurité et en matière de droits de la personne soient non seulement entendus mais écoutés?
    Monsieur le Président, je note que ce projet de loi est fortement appuyé par la population canadienne. L'idée de comparer la situation avec ce projet de loi et la situation en Égypte est ridicule. Le projet de loi est maintenant devant le comité et j'encourage celui-ci à l'étudier aussi vite que possible pour assurer l'adoption de ces mesures pour aider la sécurité des Canadiens et des Canadiennes au cours de la vie de ce Parlement.

[Traduction]

    Monsieur le Président, il n'est pas surprenant que le gouvernement veuille éviter tout débat sérieux sur ce projet de loi.
    Il est totalement irresponsable de faire adopter à toute vapeur le projet de loi C-51 sans y prévoir des mécanismes de surveillance plus serrés. Malgré ce que le premier ministre ne cesse de prétendre, le SCRS n'est pas un organisme de surveillance. Il s'agit plutôt d'un organisme d'examen qui se penche sur les activités du SCRS après les faits. Le porte-parole du CSARS a été clair: « nous ne participons aucunement aux décisions opérationnelles. »
    Le premier ministre est-il encore d'avis que le CSARS surveille de façon adéquate le SCRS alors que le CSARS lui-même affirme le contraire?
    Monsieur le Président, le chef du NPD vient tout juste de comparer les droits de la personne au Canada et ceux en Égypte. Cela nous éclaire un peu sur sa position dans le présent dossier.
    Je tiens à lire ce que le CSARS a vraiment dit: « Notre modèle d’[examen] continu et méthodique présente [...] l’avantage de permettre une évaluation complète et impartiale de la performance du [SCRS], et nous sommes sans doute mieux placés pour repérer les problèmes potentiels en amont. » C'est le CSARS qui a dit cela.
    En outre, si les néo-démocrates se donnaient la peine de lire le projet de loi, ils constateraient que, dans certains cas, il faudrait obtenir une autorisation judiciaire avant d'exercer certains pouvoirs.
(1420)

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, il y a plus de personnes qui travaillent à la cafétéria du Parlement qu'au CSARS. Quand le premier ministre nomme au CSARS des gens comme Arthur Porter, il est difficile de croire qu'il prend le rôle de ce comité au sérieux.
    Le député de Kitchener-Centre et d'autres membres du caucus ministériel réclament que le premier ministre ait recours à la disposition de dérogation pour contourner une décision récente de la Cour suprême sur l'aide médicale à mourir. Le premier ministre peut-il garantir aux Canadiens qu'il n'aura pas recours à cette disposition pour annuler la décision unanime de la Cour suprême sur les soins de fin de vie?
    Monsieur le Président, le gouvernement a indiqué très clairement qu'il respecte les décisions des tribunaux. Nous examinons cette décision se rapportant à une question qui est évidemment très délicate et qui demeure une source de division chez les Canadiens. Je ne crois pas du tout que ce soit un enjeu partisan. Nous écouterons des Canadiens de tous les horizons avant de déterminer comment nous allons répondre à cette décision.
    Monsieur le Président, la Cour suprême a donné au Parlement un an pour mettre en oeuvre une mesure législative sur l'aide médicale à mourir. Le Parlement dispose donc de peu de temps pour répondre à cette décision d'une manière qui respecte la Charte et les priorités des Canadiens.
    Le gouvernement appuiera-t-il notre motion visant à créer un comité spécial et à consulter les Canadiens? Dans la négative, le premier ministre pourrait-il nous informer de ce qu'il prévoit faire pour s'attaquer à cette importante question?
    Monsieur le Président, je le répète: le gouvernement ne croit pas qu'il s'agit d'une question partisane. C'est un sujet très délicat sur lequel les Canadiens ont des opinions différentes et bien arrêtées.
    Le comité de la justice de la Chambre des communes a le mandat d'étudier cette question, s'il le souhaite. Cette décision lui reviendra.
    Entretemps, le gouvernement a l'intention de mener de vastes consultations auprès des Canadiens pour examiner cette décision, et nous procéderons à des consultations exhaustives avant de décider comment répondre.

[Français]

    Monsieur le Président, le Québec a eu un débat respectueux et informé sur la délicate question de l'aide médicale à mourir. La Cour suprême a donné au Parlement 12 mois pour se saisir de la question.
    Avec les 12 semaines de travail qu'il nous reste, nous avons le temps d'y arriver si nous nous y mettons maintenant.
    Comment le premier ministre compte-t-il respecter l'échéancier de la cour? Peut-il nous présenter la démarche qu'il préconise pour cet enjeu important?
    Monsieur le Président, c'est un enjeu non partisan sur lequel les Canadiens ont des opinions diverses.
     Comme le député l'a remarqué, la Cour suprême a donné au Parlement une année pour répondre. Nous sommes en train d'étudier la décision et de consulter la population canadienne. Nous ferons de pleines consultations avant de décider comment répondre.
    Monsieur le Président, comme le premier ministre n'a pas répondu non plus à la question directe du chef de l'opposition, je vais la poser à nouveau.
    Nous avons été inquiets d'entendre que l'un des députés du premier ministre a évoqué la possibilité d'utiliser la disposition de dérogation pour déroger à la décision de la cour.
    Le premier ministre peut-il confirmer clairement qu'il n'utilisera pas la disposition de dérogation pour cet enjeu important, oui ou non?
    Monsieur le Président, le gouvernement a toujours respecté les décisions de la Cour suprême. Nous allons étudier cette décision et consulter les Canadiens avant de décider comment répondre.

[Traduction]

La sécurité publique

    Monsieur le Président, le projet de loi C-51 est vertement critiqué par les experts du domaine de la sécurité, qui le disent trop vaste, vague et inefficace. Ce projet de loi sacrifie les droits et libertés des Canadiens pour donner de nouveaux pouvoirs aux services de sécurité sans la moindre surveillance supplémentaire. Plutôt que de répondre aux questions ou de remédier aux problèmes, les conservateurs font adopter le projet de loi C-51 à toute vapeur à la Chambre.
    Maintenant, vont-ils également expédier l'étude en comité? Le gouvernement s'engage-t-il à faire une étude complète et adéquate de ce projet de loi qui propose des changements radicaux en matière de sécurité?
    Monsieur le Président, je suis ravi que la Chambre ait adopté le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture hier. Je suis toutefois déçu que le NPD s'y soit opposé.
    Je crois que nous devons nous préoccuper du terrorisme au Canada. En tant qu'élus, nous devons tout faire pour donner aux policiers, aux forces de l'ordre et aux services du renseignement les outils dont ils ont besoin. Nous devons leur montrer du respect, chose qui semble impossible pour le chef de l'opposition.
    Nous défendrons les intérêts des Canadiens et les protégerons du terrorisme.
(1425)
    Monsieur le Président, voilà que le ministre se dérobe une fois de plus en semant la peur, plutôt que de promettre une étude adéquate. Cela n'a rien d'étonnant. Jour après jour, on découvre des lacunes graves dans le projet de loi C-51. Les experts préviennent qu'il risque de créer une zone juridique grise en mélangeant les rôles du SCRS et de la GRC. Des affaires risquent de demeurer en suspens, sans qu'il soit possible de porter la moindre accusation au criminel. Le projet de loi C-51 doit faire l'objet d'une étude exhaustive. Nous devons entendre le témoignage d'experts et de Canadiens préoccupés à son sujet.
    Pourquoi les conservateurs craignent-ils tant d'avoir à rendre des comptes à l'égard d'un projet de loi qui nous concerne tous?

[Français]

    Monsieur le Président, les médias nous rapportent que les néo-démocrates ne veulent même pas débattre des paramètres du comité et de l'importance d'en débattre.
    Je trouve très déplorable que le chef de l'opposition ait attaqué la crédibilité des membres du Service canadien du renseignement de sécurité. Ces gens consacrent leur vie à protéger les Canadiens. Ils respectent la loi et ils ne méritent pas de se faire traiter comme des criminels par le chef de l'opposition.
    Je lui demande de s'excuser et de respecter les gens qui travaillent pour protéger les Canadiens. Je lui demande de défendre ses idées fallacieuses avec des arguments et non des menteries.
    Je crois avoir entendu un mot antiparlementaire. Je vais consulter les « bleus ».
    L'honorable députée d'Alfred-Pellan a la parole.
    Monsieur le Président, soyons clairs.
    Nous savons que le projet de loi C-51, dans sa forme actuelle, est mal ficelé. Le gouvernement, avec la complicité des libéraux, joue avec ce qu'on a de plus précieux: nos droits et notre sécurité.
    Or, après avoir fait adopter le projet de loi à toute vapeur en deuxième lecture, voilà que le gouvernement voudrait qu'on adopte le projet de loi C-51 les yeux fermés en comité.
    Le ministre va-t-il accepter d'entendre les Canadiens et s'assurer que les anciens premiers ministres et ex-juges de la Cour suprême, qui prônent la prudence, auront la chance d'expliquer pourquoi ils trouvent que le projet de loi C-51 va beaucoup trop loin?
    Monsieur le Président, empêcher des voyageurs à haut risque de monter dans un avion, rencontrer des parents pour dissuader leur jeune de sombrer dans la radicalisation, s'assurer que les agents des Affaires étrangères partagent une information concernant la sécurité nationale avec la GRC, désactiver un site Web qui fait de la propagande haineuse, prévenir une attaque imminente contre des Canadiens; ce sont des mesures qui sont dans le projet de loi, et j'espère que nous pourrons en débattre en comité.
    Je suis impatient d'aller rencontrer les membres du comité pour en débattre.
    Monsieur le Président, moi aussi, j'espère sincèrement que nous pourrons en débattre en long et en large en comité.
    Le gouvernement prétend que le contrôle civil actuel des activités des services secrets est suffisant. Pourtant, le porte-parole du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité a contredit le ministre, hier, en confirmant que le comité n'avait qu'un rôle de surveillance limité et après coup.
     Il me semble que c'est seulement logique: si on veut donner plus de pouvoirs au Service canadien du renseignement de sécurité, il faut aussi mieux contrôler ses activités.
    Pourquoi le gouvernement refuse-t-il cette approche sensée?
    Monsieur le Président, le comité de surveillance est indépendant et fait une révision des activités.
    Toutefois, le projet de loi C-51 prévoit des mécanismes de surveillance continue, comme le consentement judiciaire et l'autorisation du procureur général. Ces gens qui veillent à notre protection ne doivent pas se faire traiter comme des criminels. Lorsqu'une personne affirme qu'ils contreviennent à la loi, c'est faux. Nous pouvons nous appuyer sur le rapport même du comité de surveillance. Les agents font un travail important et il ne faut pas miner leur crédibilité.
    Alors, j'invite les parlementaires, dans leurs débats, à respecter ceux qui nous protègent.

[Traduction]

La salubrité des aliments

    Monsieur le Président, lorsqu'on a appris qu'il y avait eu un cas d'ESB en Alberta, le ministre de l'Agriculture a affirmé que cela ne nuirait pas aux exportations. Or, dans les jours qui ont suivi, la Corée du Sud a interdit le bœuf canadien, suivie de l'Indonésie. Maintenant, le Pérou, le Bélarus et Taïwan ont eux aussi annoncé des restrictions générales. Loin de ne pas nuire, la situation fait en sorte que nous avons maintenant cinq pays qui interdisent le bœuf canadien.
    Ces restrictions commerciales auront un coût pour nos producteurs et notre économie, et l'on craint que le mouvement ne s'élargisse.
    Pourquoi les conservateurs n'ont-ils pas su protéger nos exportations de bœuf et que font-ils pour remédier aux dégâts causés jusqu'à présent?
    Monsieur le Président, l’Organisation mondiale de la santé animale a accordé au Canada le statut de pays à risque maîtrisé.
    L'Agence canadienne d'inspection des aliments et le Secrétariat à l’accès aux marchés continuent d'intervenir auprès de nos partenaires commerciaux pour s'assurer que les marchés restent ouverts et que ceux qui sont fermés rouvrent le plus rapidement possible.
     En ce qui a trait aux pays mentionnés par le député, ils ont certes imposé des restrictions temporaires mais, tout aussi importants qu'ils soient, ils ne représentent qu'un modeste pourcentage, soit environ 3 % de l'ensemble de nos échanges commerciaux.
(1430)
    Monsieur le Président, allez dire aux 3 % d'éleveurs canadiens qui viennent de perdre leur marché que c'est insignifiant.
    Il y a maintenant cinq pays qui boycottent le boeuf, un marché d'exportation d'une valeur supérieure à 70 millions de dollars. Je ne pense pas que ce soit de la menue monnaie, contrairement à ce que semble croire le ministre.
    Pour garder les marchés étrangers ouverts, nous avons besoin d'un système réglementaire très rigoureux au Canada. Les conservateurs ont réduit le budget de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Ils affirment le contraire, mais les chiffres les contredisent.
    C'est très simple. Pourquoi le gouvernement met-il en péril ce secteur qui vaut des milliards de dollars, et quand les conservateurs agiront-ils au nom de toutes les exploitations agricoles du pays et défendront-ils les intérêts des agriculteurs?
    Monsieur le Président, le député sait très bien que depuis que le gouvernement conservateur est arrivé au pouvoir, il a investi près de 1 milliard de dollars dans le système de salubrité des aliments du Canada. Résultat? Le Conference Board du Canada classe notre système de salubrité des aliments au premier rang parmi 17 pays de l'OCDE. Nous continuerons d'investir dans notre système de salubrité des aliments et sommes fiers de son bilan.

[Français]

    Monsieur le Président, à la suite des récents cas de la maladie de la vache folle en Alberta, cinq pays ont pris des mesures de restriction contre notre boeuf. La Corée du Sud, un important marché pour notre boeuf, a même fermé sa frontière. Pourtant, la semaine dernière, on nous disait que ces nouveaux cas n'auraient aucune incidence sur les exportations de boeuf canadien. Le pire, c'est que nos producteurs commençaient à peine à se remettre de la crise précédente.
    Quel est le plan du gouvernement pour protéger le gagne-pain de nos producteurs de boeuf au Canada?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le monde entier aime beaucoup les produits de viande rouge du Canada, y compris notre boeuf. Nous nous sommes d'ailleurs battus pour que les producteurs canadiens puissent vendre leurs produits sur le territoire de l'Union européenne. Évidemment, l'opposition s'est opposée à cet accord. Par ailleurs, dans le budget de 2014, nous avons consacré 200 millions de dollars supplémentaires à l'amélioration de la surveillance de l'encéphalopathie spongiforme bovine, et l'opposition a voté contre ce budget.
    Contrairement aux députés de l'opposition, nous appuyons fermement l'industrie du boeuf.

[Français]

Le commerce international

    Monsieur le Président, le libre-échange devait être la solution pour stimuler l'économie canadienne. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les résultats se font attendre. L'entente de libre-échange avec la Corée n'a pas empêché notre boeuf de se butter à une frontière fermée, et nous attendons toujours que l'entente de libre-échange avec l'Europe soit finalisée. D'ailleurs, nous n'avons toujours pas de garantie pour nos producteurs de fromage.
    Quand le gouvernement va-t-il enfin mettre la création d'emplois au coeur de sa politique commerciale?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le gouvernement se distingue parce qu'il est à l'écoute de l'industrie agricole. Nous continuons de travailler avec ses représentants et de faire tout le nécessaire pour nous assurer que cette industrie réalise des bénéfices. Cela fait deux années consécutives que le secteur de l'agriculture a des revenus inégalés, et le gouvernement adopte de nouveaux règlements et en élimine d'autres afin que les entreprises puissent avoir un bénéfice net appréciable. Nous poursuivrons dans cette voie même si l'opposition, à ses risques et périls, refuse de nous appuyer.

La fiscalité

    Monsieur le Président, depuis que les conservateurs sont au pouvoir, les familles de la classe moyenne ont beau travailler de plus en plus fort, elles ne cessent de perdre du terrain. Il semble que les conservateurs n'ont d'yeux que pour les stratagèmes qui visent à aider une minorité de bien nantis. Deux rapports publiés aujourd'hui révèlent que le projet du gouvernement de doubler le montant maximal qu'on peut investir dans un CELI va coûter des dizaines de milliards de dollars, mais qu'il ne profitera qu'aux Canadiens les plus riches. Piger dans les poches de tous les contribuables pour aider une minorité de bien nantis. N'est-ce pas un refrain bien connu?
    Ces nouveaux rapports troublants donnent-ils matière à réflexion au ministre des Finances ou est-il toujours aussi déterminé à trouver de nouvelles façons de consentir des allégements fiscaux aux riches et aux personnes qui ont de bons contacts?
    Monsieur le Président, nous sommes fiers de remettre plus d'argent dans les poches des familles canadiennes, plutôt que dans les coffres de l'État, comme le feraient les libéraux et les néo-démocrates.
    Le gouvernement conservateur a créé le compte d'épargne libre d'impôt pour permettre aux Canadiens d'économiser en vue de leur retraite, de payer les études de leurs enfants ou de faire un versement initial sur une maison. Quelque 11 millions de Canadiens possèdent un CELI, et la vaste majorité d'entre eux touchent un revenu faible ou moyen.
    Le NPD a voté contre cette mesure. Nous savons qu'il alourdirait le fardeau fiscal des Canadiens et qu'il éliminerait le CELI. Les Canadiens savent qu'ils sont bien mieux avec un gouvernement conservateur.
(1435)
    Monsieur le Président, le premier ministre a sabré le financement de la Sécurité de la vieillesse, réduit les dépenses en infrastructure urbaine, imposé les fiducies de revenu, proposé le fractionnement du revenu pour les riches, et voilà qu'il prévoit maintenant de doubler le plafond de cotisation à un CELI, chose que le directeur parlementaire du budget a qualifiée, ce matin, de financièrement irresponsable. La proposition de doubler le plafond de cotisation à un CELI est un autre stratagème des conservateurs qui coûtera cher et qui ne profitera qu'aux riches.
    Alors que les conservateurs s'acharnent à donner 100 % aux 10 % de Canadiens les mieux nantis, les familles de travailleurs se demandent ce qu'il leur reste.
    Encore une fois, monsieur le Président, le gouvernement est fier de présenter des mesures qui visent à remettre de l'argent dans les poches des Canadiens, plutôt que dans les coffres de l'État, comme le ferait le Parti libéral. Le gouvernement conservateur a créé le compte d'épargne-libre d'impôt pour permettre aux Canadiens d'économiser pour des choses qui sont importantes pour eux, comme l'éducation de leurs enfants ou peut-être la mise de fonds pour l'achat d'une maison. Onze millions de Canadiens possèdent un CELI. Près de la moitié d'entre eux touchent un revenu de moins de 42 000 $.
    Nous savons que les députés de l'opposition élimineraient le CELI et le fractionnement du revenu de pension. Alors que nous cherchons à réduire le fardeau fiscal des Canadiens, les députés de l'opposition veulent faire le contraire.

L'infrastructure

    Monsieur le Président, qu'ont en commun Kitchener, Vancouver, Burlington, Sydney, Markham, Montréal, Cambridge, Ottawa, Halifax, Toronto, Mississauga et Regina?
    J'ai discuté avec les maires de ces Villes, qui ont pour point commun quelque chose de très simple: aucune d'elles n'a touché de subvention fédérale pour ses infrastructures l'an dernier et, compte tenu des politiques de votre gouvernement, toutes s'attendent à ce qu'il en aille de même cette année. En fait, aucune de ces Villes ne recevra d'argent.
    Comprenez-vous cela? Aucune de ces Villes ne recevra d'argent. Le ministre peut-il expliquer pourquoi il dépense 29 millions de dollars pour des panneaux publicitaires, mais pas un sou pour de nouvelles infrastructures dans ces grandes villes?
    Je trouve que l'essentiel de la question s'adressait à moi et non au ministre. Je suis convaincu que le député s'efforcera de ne plus oublier de s'exprimer par l'intermédiaire de la présidence au lieu de parler directement au ministre. Le ministre de l'Infrastructure semble impatient de répondre à la question, alors je lui laisse la parole.
    Monsieur le Président, j'ai le plaisir de rappeler au député que, depuis 2006, le Canada trône au sommet du palmarès des pays du G7 au chapitre des investissements totaux, en pourcentage du PIB. C'est un chef de file.
    Nous avons lancé le plus vaste plan d'infrastructures de l'histoire canadienne, un plan assorti d'une enveloppe de 75 milliards de dollars. Les députés d'en face voudraient tout centraliser à Ottawa. Nous, nous entendons continuer d'agir en partenariat avec les provinces et les administrations municipales, comme toujours.
    Monsieur le Président, nous avons déjà entendu cette réponse. En fait, nous l'avons déjà entendue à maintes reprises.
    Il faut que le gouvernement comprenne que le programme qu'il a créé est inefficace dans les villes. Il ne fonctionne pas en milieu urbain. En fait, il est concentré en fin de période. Voilà le problème.
    Le gouvernement a réduit de 90 % les dépenses consacrées aux infrastructures. Il y a deux ans, on y consacrait 2 milliards de dollars par année. Aujourd'hui, on y consacre 200 millions de dollars. Or ces compressions nuisent aux villes.
    Ma question est très simple. Les municipalités, les villes et les Canadiens ne peuvent plus attendre. Pourquoi le gouvernement ne corrige-t-il pas dès maintenant le programme et ne dépense-t-il pas les fonds nécessaires pour que les Villes puissent de nouveau construire les infrastructures dont les Canadiens ont besoin?
    Cette année, depuis le début du programme, le Nouveau Fonds Chantiers Canada a reçu 5 milliards de dollars, et le processus suit son cours. Depuis le temps où le député était conseiller municipal, nous avons notamment réglé de nombreux dossiers: le métro de Scarborough, le prolongement de la ligne de métro Toronto-York Spadina, le train léger Sheppard et la revitalisation de la gare Union. Et je ne parle que de ce que nous avons fait à Toronto.

Le transport ferroviaire

    Monsieur le Président, une enquête sur l'accident ferroviaire survenu près de Gogama a révélé que 29 wagons avaient déraillé, que 21 avaient pris feu et qu'il a fallu six jours pour éteindre l'incendie.
    Un million de litres de pétrole brut ont été déversés. Plus troublant encore, les nouvelles normes instaurées en 2014 pour les wagons-citernes demeurent insuffisantes. Le bureau de la sécurité recommande vivement à Transports Canada d'instaurer sans tarder des normes de protection plus strictes pour que des wagons plus résistants soient utilisés.
    Quand la ministre instaurera-t-elle des normes plus élevées pour protéger les Canadiens?
    Monsieur le Président, Transports Canada a déjà retiré les wagons-citernes les moins résistants aux impacts, les DOT-111. Nous avons même agi beaucoup plus rapidement que n'importe qui d'autre à cet égard.
    Par ailleurs, compte tenu de la nature des wagons circulant entre les États-Unis et le Canada, il est très important que nous collaborions avec les États-Unis sur ces questions. C'est exactement ce que fait le ministère.
(1440)

[Français]

    Monsieur le Président, la ministre n'a pas répondu à la question.
    Les faits sont simples. Le Bureau de la sécurité des transports rapporte que les nouvelles normes adoptées en 2014 pour les wagons DOT-111 ne sont pas sécuritaires pour transporter du pétrole brut. Ils ne sont tout simplement pas assez résistants. Le BST demande à Transports Canada d'adopter des normes plus sévères pour prévenir une autre tragédie comme celle de Lac-Mégantic.
    Ma question est simple. Quand la ministre va-t-elle mettre en place des normes efficaces? Quand?

[Traduction]

    Monsieur le Président, en avril dernier, nous avons annoncé plusieurs mesures très importantes.
    Nous avons annoncé que nous allions retirer 5 000 wagons-citernes du réseau dans un délai de 30 jours. C'est chose faite. Transports Canada a aussi annoncé que, d'ici trois ans, nous allions retirer graduellement les wagons DOT-111 pour les remplacer par des wagons répondant à des normes plus élevées. Nous avons également annoncé que nous collaborions avec les États-Unis à ce que prévoira la nouvelle norme applicable aux wagons-citernes.
    Nous travaillons continuellement à ces questions. Le BST a reconnu les progrès importants que le gouvernement a faits dans ce dossier et nous continuerons sur cette lancée.

[Français]

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, les familles des 1 200 femmes et filles autochtones disparues ou assassinées cherchent elles aussi encore des réponses.
    Alors qu'elles s'apprêtent à se réunir demain pour apporter leur témoignage aux délégués provinciaux, territoriaux et fédéraux qui se réuniront vendredi, nous espérons que leurs voix seront enfin entendues et que ce gouvernement finira par comprendre que, pour aller de l'avant, il faut connaître les causes de cette violence.
    Alors, le gouvernement va-t-il enfin écouter les familles et lancer une enquête nationale publique?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le gouvernement ne perd pas de vue l'objectif et tient à prévenir toute forme de violence contre les femmes et les filles. À mon avis, tous les Canadiens savent que nous ne ménageons pas les efforts pour aider ces jeunes femmes, pour prévenir la violence contre elles et pour les protéger.
    Le gouvernement a présenté un projet de loi pour que les femmes vivant dans les réserves reçoivent l'aide dont elles ont besoin et puissent faire respecter leurs droits relativement aux biens matrimoniaux. Le gouvernement a présenté également la Loi sur la Charte des droits des victimes. Ces deux projets de loi visent à améliorer l'aide et la protection dont bénéficient les femmes lorsqu'elles en ont un besoin criant. L'opposition a systématiquement voté contre ces mesures.
    Monsieur le Président, nous ne devrions pas avoir à choisir entre l'attribution de sommes d'argent et l'établissement d'une stratégie nationale.
    Les familles des 1 200 femmes ou filles portées disparues ou assassinées au Canada méritent que des mesures concertées soient mises en oeuvre pour mettre fin à la crise. Elles méritent des réponses pour comprendre pourquoi 16 % des femmes assassinées au Canada sont des Autochtones, alors que les femmes autochtones constituent seulement 4,3 % de la population de sexe féminin au pays.
    Le gouvernement s'engagera-t-il à prendre des mesures concrètes, en collaboration avec les autorités provinciales et territoriales? Ordonnera-t-il la tenue d'une commission d'enquête publique?
    Monsieur le Président, soyons clairs. Le gouvernement fédéral aura des représentants qui participeront aux discussions, mais nous ne sommes pas pour la tenue d'une commission d'enquête nationale.
    En septembre 2014, le gouvernement a entrepris de mettre en oeuvre un plan d'action pour aider les femmes autochtones et s'attaquer au problème des crimes violents qu'elles subissent. Nous avons prévu des sommes substantielles dans ce but et nous avons la ferme intention d'aider ces femmes.
    De plus, comme je l'ai indiqué il y a un instant, nous avons présenté un projet de loi sur les droits des femmes relativement aux biens matrimoniaux et un autre projet de loi sur la Charte des droits des victimes. L'opposition n'a manifestement pas lu le plan d'action. Contrairement à elle, nous prenons bel et bien des mesures concrètes. Les députés de l'opposition veulent seulement discuter des mesures proposées, puis voter contre.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, le mouvement djihadiste international a déclaré la guerre au Canada. C'est précisément la raison pour laquelle le gouvernement a déployé les Forces armées canadiennes pour lutter contre l'EIIL.
    On entend chaque jour parler des crimes contre l'humanité commis par ce groupe terroriste. La journée d'hier n'a pas fait exception. Selon des groupes de défense des droits de la personne, des terroristes de l'EIIL ont enlevé au moins 90 personnes dans des villages chrétiens du Nord-Est de la Syrie.
    Le ministre des Affaires étrangères peut-il faire le point sur la position du Canada à l'égard de cette atrocité?
    Monsieur le Président, le groupe terroriste djihadiste EIIL cible, tue et enlève délibérément des membres des minorités religieuses. C'est tout simplement scandaleux. Le Canada condamne sans équivoque ces actes odieux.
    Nous continuerons de collaborer avec nos alliés pour lutter contre cette menace terroriste et l'éliminer. Cela s'ajoute à l'aide humanitaire considérable que le gouvernement fournit dans la région.
    Les libéraux et les néo-démocrates présentent un faux choix aux Canadiens. Il n'est pas question de choisir entre la sécurité et l'aide, car on ne peut acheminer efficacement de l'aide si la sécurité n'est pas assurée. Voilà pourquoi nous sommes déterminés à poursuivre le combat et pourquoi nous estimons qu'il est grand temps que l'opposition se joigne à nous.
(1445)

La réforme démocratique

    Monsieur le Président, les cours font passer un mauvais quart d'heure à cette loi injuste sur les élections, exactement comme nous l'avions pressenti et comme les experts l'avaient annoncé dans leurs témoignages. Les dispositions de cette loi sont à ce point problématiques que deux organismes d'importance sont prêts à réclamer une injonction. Certains articles de cette loi injuste vont clairement à l'encontre des droits garantis par la charte.
    Le ministre croyait-il vraiment que ce projet de loi douteux allait pouvoir prendre son envol sans d'importantes et coûteuses contestations judiciaires?
    Monsieur le Président, nous avons discuté de façon exhaustive de cette exigence de présenter des pièces d'identité au moment de voter. L'opposition a créé un vent de panique et a rué dans les brancards, et les Canadiens ont entendu toutes ces mises en garde. Toutefois, quand le débat est arrivé à terme, 87 % des Canadiens ont convenu qu'il était raisonnable de demander aux électeurs de présenter des pièces d'identité au moment de voter.
    Voilà ce qu'exige la Loi sur l'intégrité des élections. Nous allons défendre cette position devant les tribunaux, et nous sommes convaincus de gagner.

[Français]

    Monsieur le Président, l'inévitable s'est produit. La « déforme » électorale des conservateurs est contestée devant les tribunaux.
    Déjà, la majorité des experts, des groupes de citoyens et même certains politiciens conservateurs ont fortement dénoncé cette loi qui vise à priver certains citoyens de leur droit de vote. L'injonction que préparent le Conseil des Canadiens et la Fédération canadienne des étudiants et étudiantes n'est que la suite logique à un projet de loi bâclé.
    Pourquoi les conservateurs tentent-ils d'empêcher les étudiants de voter aux prochaines élections? De quoi ont-ils peur?
    Monsieur le Président, les libéraux et les néo-démocrates veulent permettre aux gens de voter sans pièce d'identité. Or nous pensons que c'est raisonnable de montrer une pièce d'identité pour s'identifier lors d'un vote pendant des élections.
    Heureusement, les sondages montrent que 87 % des Canadiens sont d'accord sur notre position. Notre position est raisonnable, et nous croyons que nous allons gagner en cour.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, la participation des diplomates étrangers à des événements partisans, comme une campagne de financement, peut être perçue comme une forme d'appui à un parti politique. Cela ne se fait pas de placer des diplomates étrangers dans une telle situation. Les libéraux devraient le savoir. Décidément, eux et leur chef manquent vraiment de jugement.
    Le ministre va-t-il faire un suivi auprès du Haut Commissaire du Pakistan pour faire la lumière sur la présence du consul général à une activité du Parti libéral?

[Traduction]

    Monsieur le Président, il est tout à fait inapproprié pour des dignitaires étrangers de participer à des événements partisans, et celui qu'a organisé le Parti libéral était de nature politique sans aucun doute possible.
    Il n'y a rien de mal à ce que les députés fassent état des préoccupations de leurs concitoyens à des ambassadeurs étrangers dans le cadre de réunions, mais il est tout à fait inacceptable de profiter de la présence d'un ambassadeur ou d'un représentant étranger à des fins partisanes. Ce faisant, on mine les relations entre les États, ce que le Parti libéral devrait savoir.
     Monsieur le Président, c'est avec inquiétude que les Canadiens ont lu récemment dans les médias que le consul général du Pakistan à Toronto a participé à une activité de financement du Parti libéral du Canada. Il a également participé à un événement partisan organisé pour un candidat libéral à Scarborough. Nous avons ensuite appris que l'ambassadeur de la Chine a refusé de participer à un événement lorsqu'il s'est rendu compte qu'il était organisé par le Parti libéral du Canada.
    Voilà qui illustre un véritable manque de jugement. Que compte faire le gouvernement pour veiller à ce qu'aucun parti ne se serve des diplomates étrangers au Canada à des fins partisanes?
    Monsieur le Président, la question est judicieuse. Je tiens à remercier le NPD de l'avoir posée. C'est une question pertinente. Voilà le genre de question à poser à la période des questions.
    Encore une fois, il est inapproprié que des dignitaires étrangers participent à des événements partisans. J'espère que le Parti libéral a tiré des leçons de cette grave erreur.
(1450)

Les anciens combattants

    Monsieur le Président, les conservateurs aiment faire de beaux discours à propos des courageux militaires canadiens, mais ils brillent par leur absence quand il s'agit de fournir une aide concrète. Le gouvernement a annoncé avec tambours et trompettes que les anciens militaires bénéficieraient d'un accès prioritaire aux emplois du secteur public, mais il refuse de les laisser transférer la totalité de leur pension s'ils décrochent un tel emploi.
    Pourquoi les conservateurs manquent-ils de respect envers les membres des forces armées? Pourquoi leur font-ils subir un traitement aussi injuste?
    Monsieur le Président, il n'existe aucun obstacle de ce genre à l'embauche d'anciens militaires. Je suis très fier que le gouvernement ait présenté la Loi sur l'embauche des anciens combattants, qui donne priorité aux militaires blessés en service.
    Nous examinons actuellement un petit segment particulier, celui des réservistes des forces armées. Nous voulons nous assurer qu'ils sont traités équitablement et peuvent profiter de l'excellente politique conçue pour les anciens combattants.

La défense nationale

    Monsieur le Président, voilà un autre exemple montrant que le gouvernement ne tient pas ses promesses.
    Robyn Young s'est engagée dans les Forces canadiennes à 17 ans, comme réserviste, et elle y a servi à plein temps jusqu'en 2011. En 2009, un médecin militaire a posé un mauvais diagnostic à propos de sa tumeur et effectué une chirurgie inutile. À cause de celle-ci, elle souffre maintenant d'une affection invalidante qui nuit à sa capacité de travailler. Mme Young travaille maintenant seulement à temps partiel, et elle n'a plus droit aux prestations médicales qui lui permettraient de guérir et de reprendre le travail à plein temps, prestations qu'elle aurait reçues si le médecin avait posé un bon diagnostic.
    Le ministre va-t-il aujourd'hui s'engager à corriger cette injustice, non seulement pour Robyn, mais aussi pour toutes les autres personnes qui peuvent se trouver dans la même situation qu'elle?
    Monsieur le Président, tant le ministère de la Défense nationale que les Forces armées canadiennes sont au fait de ce cas troublant. Les services de santé des Forces canadiennes effectuent d'ailleurs un examen détaillé de ce cas. Pendant cet examen, le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes continuent de payer ses frais médicaux et de répondre à ses besoins médicaux liés à son état actuel.
    Étant donné qu'il s'agit d'une question de santé, il serait inapproprié que j'en dise plus à ce sujet, compte tenu de la confidentialité garantie aux patients et de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[Français]

Le pont de Québec

    Monsieur le Président, l'ancien président de la Chambre de commerce de Québec est clair: le gouvernement fédéral est responsable du « gâchis » dans le dossier du pont de Québec; et il estime que c'est à ce dernier de payer.
    Qui a mal fait le contrat en 1995? Les libéraux. Qui est allé en cour et a perdu? Les conservateurs.
     Pendant que les conservateurs tentent de relancer la patate chaude dans la cour du CN, les citoyens de Québec attendent toujours.
    Le premier ministre va-t-il enfin respecter sa promesse, et c'est important ici, respecter sa promesse, et faire repeindre le pont de Québec?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je ne sais pas si le député se tient au courant de ce qui se passe, mais il ne fait aucun doute que le gouvernement s'est engagé à accorder 75 millions de dollars pour que le pont de Québec soit repeint. Nous agissons exactement comme nous l'avions promis.
    Les trois ordres de gouvernement accordent au total 100 millions de dollars à ce projet important, mais la responsabilité incombe au CN. Le CN s'est présenté à la table et s'est engagé à accorder toute autre somme nécessaire pour mener à bien ce projet.

[Français]

    Monsieur le Président, la ministre prétend qu'elle a fait sa part, alors qu'elle a mis 75 millions de dollars sur la table pour repeindre le pont de Québec. Le problème est que son offre est conditionnelle à la participation du CN, mais le CN n'est pas tenu de peindre le pont en raison de la négligence des libéraux. Finalement, les 75 millions de dollars de la ministre, c'est de l'argent qu'on ne verra jamais à Québec.
     Le premier ministre s'apprête-t-il à faire une autre élection en promettant de peindre le pont ou va-t-il enfin respecter sa parole et passer à l'action?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le gouvernement du Canada a offert une importante contribution en vue de régler ce problème. C'est le CN qui est responsable de l'entretien et de l'exploitation de ce pont. Par conséquent, nous demandons au CN de s'engager, de se présenter à la table et de voir à accorder les fonds nécessaires pour que ce travail puisse être effectué.

Les droits de la personne

    Monsieur le Président, ce soir, nous discuterons de la montée troublante de l'antisémitisme dans le monde entier. C'est une question importante au sujet de laquelle j'interviendrai ce soir. J'encourage tous mes collègues à participer au débat.
    J'aimerais demander au ministre du Multiculturalisme de nous expliquer pourquoi ce débat est aussi important à ce stade.
(1455)
    Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question et le leadership dont il fait preuve dans ce dossier.
    En effet, je veux remercier le député de Mont-Royal d'avoir proposé la tenue ce soir de cet important débat exploratoire. Il nous permettra de discuter de la montée de l'antisémitisme dans le monde. Des incidents sont survenus de Paris à Bruxelles, en passant par Copenhague, et même chez nous. Ces cas profondément troublants sont l'expression moderne du type de haine le plus ancien, pernicieux et durable: l'antisémitisme.
    Il ne s'agit pas que de l'ancien antisémitisme, que nous connaissons malheureusement bien, mais du nouvel antisémitisme, qui jette souvent l'opprobre sur l'État juif d'Israël en particulier.
    J'invite tous les membres à prendre part au débat de ce soir. En tant que Canadiens, nous nous unissons pour condamner la brutalité de l'antisémitisme.

[Français]

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, l'épreuve de Mohamed Fahmy continue. Il vient d'apprendre que son nouveau procès a été retardé. La possibilité de retourner en prison pèse lourdement sur lui. Il a déjà passé plus de 400 jours en prison dans des conditions exécrables.
    Pourquoi le premier ministre ne peut-il pas ramasser le téléphone et appeler le président al-Sissi pour demander que M. Fahmy soit retourné au Canada le plus tôt possible?

[Traduction]

    Monsieur le Président, M. Fahmy bénéficie de services consulaires alors, dans les faits, nous assurons son bien-être.
    Je pense qu'au lieu d'écrire des lettres à la rédaction mal informées, le député devrait prendre le temps de comprendre que notre gouvernement est très clair à tous les échelons. À titre de ministre d’État aux Affaires étrangères et consulaires, j'ai assuré à la Chambre que notre gouvernement continuera de faire des pressions. Le Canada demande que M. Fahmy soit traité comme l'ont été les autres ressortissants étrangers.

[Français]

Les langues officielles

    Monsieur le Président, alors que nous sommes tous préoccupés par la sécurité des Canadiens, les conservateurs forcent le Service canadien du renseignement de sécurité à faire des coupes importantes. C'est totalement illogique. La course à l'équilibre budgétaire se fait au détriment de la sécurité des Canadiens et du bilinguisme des agents.
    Le ministre peut-il nous dire comment il compte renforcer la sécurité tout en protégeant le bilinguisme?
    Monsieur le Président, nous prenons au sérieux les deux langues nationales de notre pays.
    Évidemment, la preuve en est la Feuille de route pour les langues officielles, l'investissement le plus complet dans l'histoire de notre pays. Il s'agit d'un financement de 1,1 million de dollars. C'est incontestable.
    Le Service canadien du renseignement de sécurité est fier d'avoir une main-d'oeuvre bilingue et diversifiée, et il continuera de servir les Canadiens à cet égard.

[Traduction]

Le développement international

    Monsieur le Président, les électeurs de ma circonscription s'inquiètent des conditions de vies des mères, des nouveau-nés et des enfants dans les pays en développement. Le gouvernement conservateur a fait figure de chef de file à l'échelle mondiale dans ce dossier, et les chiffres sont renversants. Il est estimé que, de 2010 à 2013, dans le monde entier, deux millions d'enfants malades ont été sauvés d'une mort certaine; je le répète, deux millions d'enfants ont été sauvés.
    Le ministre pourrait-il informer les Canadiens des mesures que le gouvernement a prises?
    Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée de Kildonan—St. Paul de son travail acharné et de sa question.

[Français]

    Notre premier ministre a annoncé une importante contribution qui aidera à vacciner 300 millions d'enfants et qui devrait sauver jusqu'à 6 millions de vies.

[Traduction]

    Nous collaborons avec d'autres donateurs, le secteur privé, des organisations internationales et des pays en développement afin d'obtenir des résultats.
    Nous sommes particulièrement fiers des partenariats avec l'Alliance Gavi et la fondation Bill et Melinda Gates. Nous sommes d'ailleurs ravis que M. Gates participe aux réunions qui auront lieu demain à Ottawa.

[Français]

Les ressources naturelles

    Monsieur le Président, après avoir refusé que tous les documents déposés par TransCanada dans le projet Énergie Est soient traduits en français, voilà que l'Office national de l'énergie refuse de suspendre le processus de consultation, comme le demande l'Union des producteurs agricoles du Québec.
    On ne connaît toujours pas le tracé final du projet, et plutôt que de demander à TransCanada de refaire ses devoirs, voilà que l'office va de l'avant sans se soucier des répercussions du trajet sur les terres agricoles du Québec.
    Le ministre va-t-il admettre que cette consultation en est une de façade et que le véritable processus environnemental à respecter est celui du Québec?
(1500)
    Monsieur le Président, premièrement, l'Office national de l'énergie a rempli ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles; deuxièmement, tous les documents produits par l'office national de développement doivent être publiés dans les deux langues officielles.
    Les questions sur les documents déposés par le demandeur doivent être envoyées au promoteur.

[Traduction]

La sécurité publique

    Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale affirme que le projet de loi C-51 protégerait les libertés civiles, car la mesure législative confierait les pouvoirs de surveillance aux tribunaux. Or, en 2013, le SCRS a été rabroué par le juge Richard Mosley de la Cour fédérale parce qu'il n'avait pas divulgué des renseignements pertinents et qu'il avait délibérément induit la cour en erreur.
    En fin de semaine, John Major, ancien juge de la Cour suprême, a dit que la réticence du gouvernement à améliorer la surveillance des agences d'espionnage du pays le laissait perplexe. Même les juges comprennent qu'à elle seule l'obligation d'obtenir des mandats ne saurait suffire.
    Le gouvernement se plaît à écarter les critiques des juges, qu'il qualifie de non-élus et d'interventionnistes. Que nous vaut cette brusque conversion? Pourquoi le gouvernement est-il désormais d'avis que les tribunaux exerceront une surveillance adéquate?

[Français]

    Monsieur le Président, au contraire, à deux reprises, la Cour suprême et la Cour fédérale ont renforcé les pouvoirs de notre comité de surveillance. Nous pouvons donc être très fiers.
    C'est un organisme de surveillance indépendant avec des pouvoirs étendus qui peut choisir l'étendue et le genre d'enquête qu'il fait. Il est responsable, il certifie le rapport du directeur général des services de renseignement et il enquête sur les activités à son gré sans intervention du gouvernement et sans partisanerie politique.
    Nous pouvons être fiers de notre comité de surveillance.

[Traduction]

Présence à la tribune

    Je voudrais signaler aux députés la présence à la tribune de Son Excellence Cemil Çiçek, président de la Grande Assemblée nationale de la République de Turquie.
    Des voix: Bravo!

Recours au Règlement

Questions orales

[Recours au Règlement]

    Pendant la période des questions, l'honorable ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a utilisé un terme dont, après réflexion, il devrait reparler.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai beaucoup de respect pour le décorum de la Chambre. Je m'excuse et je retire les propos non parlementaires que j'aurais pu tenir et que j'ai tenus à l'égard du chef de l'opposition.

[Traduction]

    J'en remercie le député.

AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

[Français]

Budget principal des dépenses 2015-2016

    Le président du Conseil du Trésor présente un message dont le Président donne lecture à la Chambre et par lequel Son Excellence le Gouverneur général transmet le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2016.
    J'ai un message de Son Excellence le Gouverneur général portant la signature de sa main.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Travaux des subsides]

(1505)

[Traduction]

Travaux des subsides

Motion de l’opposition — Le Comité spécial sur l'aide médicale à mourir

    La Chambre reprend l'étude de la motion.
    Lorsque nous sommes passés aux déclarations de députés, il restait cinq minutes pour les questions et observations destinées au député de Saint-Laurent—Cartierville.
    La députée de Saanich—Gulf Islands a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, j'appuie totalement la motion du Parti libéral. C'est une bonne idée d'avoir un processus aussitôt que possible.
    Est-ce que le député pense que c'est une bonne idée d'inviter les représentants des partis plus petits ainsi que les indépendants?
    Monsieur le Président, le but de la consultation est d'avoir le point de vue le plus large possible.
     La composition du comité est donc certainement quelque chose que les libéraux sont prêts à regarder de très près avec notre honorable collègue. D'ailleurs, le chef du Parti libéral, le député de Papineau, l'a dit clairement lors de son discours. Il n'y a aucun problème de ce côté-là.
    Le problème viendrait peut-être plutôt de nos amis d'en face, qui ne semblent pas vouloir y participer et qui sont incapables de clarifier quel processus de consultation ils ont eux-mêmes en tête, ce qui ressemble étrangement à une dérobade.

[Traduction]

    Monsieur le Président, la question que je pose à mon collègue concerne la nécessité de mettre sur pied un comité spécial au lieu de s'adresser à un comité permanent qui existe déjà. Lorsque nous examinons la question, nous constatons que ce qui inquiète, c'est entre autres que les commentaires peuvent venir de sources diverses, que ce soit le ministère de la Santé, de la Justice ou des Finances. Il importe que ce soit un comité spécial et qu'en fait, si l'on procède convenablement, qu'il y ait une approche très globale pour ce qui est des consultations et des intervenants invités.
    Peut-être que le député a quelque chose à ajouter à cela.
    Monsieur le Président, mon collègue a donné la réponse dans sa question. Il a énuméré toutes les raisons pour lesquelles nous avons besoin d'un comité spécial.
    J'aimerais toutefois ajouter un autre point. Si le gouvernement avait voulu utiliser un comité existant, il l'aurait fait. On verrait, dans l'ordre du jour des comités, que l'un d'eux se concentre sur cette tâche importante. Nous savons que ce n'est pas le cas. En fait, le gouvernement essaie de se défiler, d'en parler le moins possible, et nous savons pourquoi. C'est parce que les ministériels sont divisés. Nous venons d'entendre la déclaration de députés de notre collègue de Vegreville—Wainwright qui a dit que la Cour suprême méprisait la loi en raison de ses décisions. Ils sont très divisés en face, raison pour laquelle ils ne veulent pas avoir cette discussion ouverte, nécessaire et non partisane avec les Canadiens.
    Monsieur le Président, j'aimerais également poser une question à mon collègue. Le gouvernement devrait-il continuer à rester les bras croisés et à ne pas prendre les mesures qui s'imposent? Étant donné que les tribunaux ont dit que cet article serait retiré au début février, le député voit-il un risque pour les plus vulnérables si nous n'adoptons pas un cadre de protection rigoureux et clair?
    Monsieur le Président, c'est le risque. Ma collègue a effectivement raison. La cour a statué que l'aide médicale à mourir sera légale dès le 6 février 2016. Je serais toutefois très inquiet si la loi ne clarifiait pas les paramètres, et je ne suis pas le seul. Toutes les associations de personnes handicapées et de médecins disent la même chose. Il faut clarifier, par voie législative, les paramètres établis par la cour. Autrement dit, le Parlement a du pain sur la planche et nous devrions immédiatement nous atteler à la tâche.
    Monsieur le Président, à la période des questions d'aujourd'hui, le premier ministre a laissé entendre que de telles discussions devraient être confiées au comité de la justice. Cela me semble quelque peu fallacieux, car le projet de loi C-51 vient tout juste d'être renvoyé au comité de la justice. Il nous reste 12 semaines de séance pour faire quelque chose. J'aimerais savoir ce que pense le député des propos du premier ministre.
(1510)
    Monsieur le Président, mon collègue a raison. Ce dossier ne peut être confié au comité de la justice, pour les raisons qu'il a mentionnées. Il ne peut non plus être confié à un autre comité, car ils sont tous occupés à traiter d'autres dossiers et il nous reste peu de temps. Or, nous devons commencer à traiter de ce dossier dès maintenant. Voilà pourquoi il faut former un comité spécial. Le premier ministre le sait. Les conservateurs tentent d'esquiver et d'éviter la question parce qu'ils sont divisés et n'ont pas le leadership qu'il faut pour s'attaquer à cet épineux dossier, l'expliquer aux Canadiens et en discuter avec eux, de manière à avoir un projet de loi le 6 février 2016.
    Monsieur le Président, c’est un plaisir d’intervenir au sujet d’un enjeu aussi important. Je partagerai mon temps de parole avec le député de Charleswood—St. James—Assiniboia.
    Comme les députés le savent, je suis depuis longtemps liée d’amitié avec le député de Charleswood—St. James—Assiniboia. Je suis très heureuse qu’il soit parmi nous aujourd’hui, car il est l’une des personnes les plus brillantes avec qui il m’a été donné de travailler. Et c’est un plaisir de parler de cette question.
    Au moment où la Chambre discute de cette question très importante, il n’y a certainement aucun des députés présents, aucune personne qui écoute les interventions d’aujourd’hui qui ne ressente actuellement ou n’ait ressenti par le passé des inquiétudes au sujet de membres de sa famille ou d’amis aux prises avec de graves problèmes de santé. Nous nous inquiétons de leur qualité de vie et de leur bonheur, mais aussi de la possibilité qu’ils ont ou non de recevoir rapidement les soins de grande qualité dont ils ont besoin, surtout dans les derniers jours, les dernières semaines, les derniers mois de leur vie.
    Tous les Canadiens sont touchés par la question des soins prodigués avec compassion en fin de vie. Pourtant, nous ne sommes pas renseignés sur les options qui s’offrent à eux, et qui nous seront peut-être nécessaires un jour, à nous aussi. Je salue tous ceux qui offrent des soins palliatifs et travaillent directement avec les patients en fin de vie. C’est un stade très important de la vie de chacun.
    Nous pensons souvent que les soins palliatifs se résument à des soins médicaux qui permettent de gérer la douleur et les symptômes, mais c’est beaucoup plus que cela. On peut dire que les soins palliatifs aident les patients à avoir la meilleure qualité de vie possible jusqu’à la fin. Ils sont axés non seulement sur les préoccupations des patients, mais aussi sur les familles, et ils sont souvent assurés par toute une équipe. Il faut accorder une grande attention à la gestion de la douleur, de la dépression, de la confusion, et il faut être attentif à la dignité du patient. Et après le décès, les membres de la famille peuvent avoir besoin de soutien dans leur deuil.
     La question est très importante. Nous aurons tous une fin, et nous devrons tous affronter ce problème, mais de nombreux obstacles subsistent. Notre société a beaucoup évolué, mais une certaine stigmatisation s’attache toujours à la fin de vie. Un sondage que l’Association canadienne de soins palliatifs a mené récemment a révélé que 45 % des répondants avaient très peur de la mort. La société commence maintenant à admettre que la fin de la vie fait partie naturellement de l’existence, mais il faudra un certain temps avant que la majorité n’adopte ce point de vue. Il y a du travail à faire.
    Ce matin, j’ai écouté l’intervention du député de Mississauga—Erindale. Son discours m’a semblé particulièrement réfléchi et sensé parce qu’il a abordé cet aspect. Il nous a aussi parlé ce qui s’était passé dans sa vie personnelle. La société et tous les parlementaires ont commencé à prendre conscience du fait que la fin de la vie fait naturellement partie de l’existence, mais il faudra encore un certain temps avant que nous ne comprenions toute la portée de cette conception des choses.
    Il y a aussi un aspect fondamental dans la sensibilisation de l’opinion publique: les soins palliatifs sont étroitement associés à la fin de vie, mais il n’est pas rare que la notion de « soins palliatifs » soit mal perçue.
    À la fin de sa vie, ma plus jeune sœur éprouvait des problèmes cardiaques. Dans ses derniers jours, elle a reçu des soins palliatifs irréprochables. Le personnel a été très délicat à notre égard. Elle est décédée bien jeune et ces soins ont été indispensables pour qu’elle puisse mourir sans trop souffrir et bien entourée.
    Les services de soins palliatifs sont souvent associés à des mouroirs, mais dans notre cas, lorsque ma jeune sœur est décédée, ils ont aussi été un lieu de réconfort, d’amour et de compassion inégalés. Nous avons eu droit à beaucoup de soutien, comme bien d’autres gens. Mais il y a de vrais problèmes lorsque les patients sont gravement malades. Il y a des peurs réelles. Certains d’entre eux refusent d’aller en soins palliatifs. Et ils se demandent ensuite pourquoi ils n’y sont pas allés plus tôt.
(1515)
    Si on ne sait rien des soins palliatifs et autres soins en fin de vie, il est forcément difficile de les demander et d’y avoir accès. C’est une question dont il faut discuter avec un médecin. On peut penser que les soins palliatifs et de fin de vie ne peuvent être dispensés qu’à un nombre limité d’endroits, comme les hôpitaux et les foyers, mais c’est une erreur. Ils peuvent être fournis chez soi, dans des centres spécialisés, à l’hôpital, dans un foyer. Le meilleur endroit est celui correspond le mieux aux besoins du patient. Beaucoup de fournisseurs de soins de santé continuent de créer des équipes de soins palliatifs.
    Dans le cas qui nous intéresse, nous n’avons que 12 mois pour trouver une solution. Nous pouvons utiliser Internet, comme le député de Mississauga—Erindale l’a dit ce matin. Il y a bien des moyens de communiquer. La question est très importante et, à mon sens, elle ne relève pas d’un comité spécialisé. Il appartient aux Canadiens de livrer leurs réactions au Parlement. C’est à eux de tenir une discussion ouverte et de se renseigner davantage à ce sujet.
    Voici un fait intéressant. Aux Pays-Bas, M. Theo Boer faisait partie d’une équipe régionale qui a étudié la question de l’euthanasie. En 2007, il était tout à fait en faveur de l’euthanasie. Il a déclaré:
    J'ai écrit que l'euthanasie ne présentait pas nécessairement de risques de dérive [...]. En réalité, nous avions tout faux. Aujourd'hui, je me rends compte que la stabilisation du nombre d'euthanasies n'était qu'une accalmie temporaire.
    Il a prononcé ces paroles devant la Chambre des lords. Il a aussi dit qu'il avait toujours appuyé la loi sur l'euthanasie aux Pays-Bas, mais qu'après 12 ans à travailler dans le domaine, son opinion a changé. Les Pays-Bas ont adopté la loi sur l'euthanasie en avril 2001.
    Toutefois, en 2014, le professeur Boer a dit qu'il valait mieux ne pas s'embarquer là-dedans « parce qu'une fois qu'on a laissé le génie s'échapper de la lampe, on ne peut plus l'y remettre ».
    Je me demande si la loi a été adoptée trop rapidement. Est-ce que tout le pays s'était engagé à travailler en étroite collaboration? Je n'ai pas la réponse, mais le Canada est un chef de file dans de nombreux secteurs et je sais que les parlementaires de tous les partis sont très préoccupés par cet enjeu. Comme on l'a dit plus tôt, il faut travailler ensemble, on ne peut pas se contenter d'exiger la création d'un comité spécial et de lui confier tout le travail. Il faut plus qu'un comité spécial, parce que cet enjeu très personnel et extrêmement délicat touche l'ensemble des hommes, des femmes et des enfants qui habitent notre pays.
    Le professeur Boer appuyait sans réserve l'aide médicale à mourir et il a étudié la question de près. Puis, quand la loi a été présentée aux dirigeants des Pays-Bas, il a soudainement changé de discours. Il s'est mis à dire que le pays ne devait pas poursuivre dans cette voie et que la loi ne devait pas entrer en vigueur. J'aimerais le citer encore une fois:
    Il faut comprendre que de plus en plus de Néerlandais considèrent que le fait de vivre dans un établissement de santé est synonyme de souffrance insupportable. Cela m'inquiète parce que les conditions dans les établissements de santé ne s'améliorent pas du tout.
    Avons-nous examiné tous les établissements de soins? Avons-nous examiné tout ce qui doit être fait pour atténuer les problèmes en fin de vie, tant pour les jeunes que pour les plus vieux? Non, nous ne l'avons pas fait. Le débat sur cette question n'est pas aussi ouvert qu'il le devrait. Si des gens choisissent l'euthanasie parce qu'ils refusent d'être admis dans un établissement de soins, je pense que nous devrions examiner la situation dans ces établissements.
    Le professeur Boer a ajouté ce qui suit:
    Si nous n'avons pas les moyens de faire cela, j'ai bien peur qu'en 2030, un grand nombre d'euthanasies seront pratiquées parce que des gens ont une crainte mortelle des établissements de soins.
    En fin de vie, un très grand nombre de personnes entretiennent toutes sortes de peurs. Elles peuvent sombrer dans de profondes dépressions si elles ne sont pas entourées de membres de leur famille. Toutes ces choses ont été mentionnées ce matin, et je ne vais pas les répéter. Le député de Mississauga—Erindale a été très éloquent à ce sujet.
    J'encourage tous les députés à prendre leur temps, à ne rien précipiter. Il s'agit d'une question très importante.
(1520)
    Monsieur le Président, j'ai écouté la députée avec intérêt. Entre autres, elle a parlé avec passion des soins palliatifs, qui sont un élément essentiel de ce débat.
    Le printemps dernier, des parlementaires de presque toutes les allégeances sont intervenus au sujet d'une stratégie nationale de soins palliatifs de fin de vie. Ils ont dit que si une telle stratégie existait, la vaste majorité des scénarios évoqués dans les médias seraient inutiles en raison du soutien dont jouiraient les familles et les patients. Toutefois, rien de concret n'a été fait depuis. Il y a eu des discussions, mais je crains que l'inaction dans le dossier des soins palliatifs ait créé un vide juridique que les tribunaux doivent combler.
    Quelles mesures le gouvernement prendra-t-il pour donner suite à l'engagement pris par les députés dans le but de créer une stratégie pancanadienne solide en matière de soins palliatifs? Pour ce faire, il faudra travailler avec les provinces, dans le respect de leurs compétences, et veiller à ce que les gens aient accès aux soins de fin de vie dont ils ont besoin.
    Monsieur le Président, comme nous le savons, les soins palliatifs sont, en grande partie, de compétence provinciale. Nous savons également qu'à l'échelle fédérale, nous étudions maintenant la question de l'euthanasie et des soins palliatifs et nous envisageons d'entamer un dialogue sur le sujet partout au pays. Mais comment aller au fond des choses? Je crois que nous conviendrons tous qu'il faut un esprit de collaboration en vue d'amener le plus grand nombre possible de Canadiens à nous faire part de leur point de vue et de leurs idées, avant que nous saisissions un comité de ce dossier. Je sais que, tôt ou tard, c'est ce qui s'imposera. Nous devons cependant ratisser large parce qu'il s'agit d'un enjeu très important.
    En tant que parlementaires, nous avons tous un rôle à jour pour rejoindre les gens de façon non partisane. C'est une question très personnelle et très importante à laquelle est confronté notre pays aujourd'hui.
    J'ai beaucoup de considération pour le député de Charleswood—St. James—Assiniboia et je comprends très bien son point de vue. Il faut une vaste collaboration qui nous permettra de mobiliser tous les Canadiens, et ce, de manière très réfléchie, en utilisant Internet et, au bout du compte, en renvoyant la question à un comité pour nous assurer de faire un bon travail. C'est d'une importance capitale pour le bien-être des personnes qui sont en fin de vie.
    Monsieur le Président, je suis essentiellement d'accord avec ce que vient de dire la députée. Hélas, nous disposons seulement de 12 mois pour agir. Si le Parlement reste sans rien faire, l'an prochain à la même date, il n'y aura plus de loi. Concrètement, nous disposons de 12 semaines de séance pour intervenir.
    Même si je suis plutôt d'accord avec la députée, est-elle, elle, d'accord avec la stratégie en neuf points que propose Preston Manning dans un article du Globe and Mail? Comme l'écrit à si juste titre M. Manning, l'inaction n'est ni une stratégie ni une option. Voici ce qu'on peut lire relativement à son dernier point:
[...] les tribunaux, les groupes d'intérêts, les universitaires et les commentateurs ont déjà abondamment fait état des pour et des contre de l'aide médicale à mourir. C'est particulièrement important que nos élus et législateurs sollicitent l'opinion de M. et Mme Tout-le-Monde.
    Si l'inaction n'est pas une stratégie, que pouvons-nous faire, si ce n'est ce qui est proposé aujourd'hui?
(1525)
    Monsieur le Président, j'ai immensément de respect pour Preston Manning. Il a d'excellentes idées. Cependant, ce qui ressort des propos du député d'en face, c'est essentiellement qu'il faut discuter avec les gens pour comprendre leur raisonnement. Il y a les législateurs et les universitaires, bien sûr, mais ce n'est pas tout le monde. Au contraire, ils ne représentent qu'une fraction de la population.
    En ce qui concerne les préoccupations du député relativement à l'échéance de 12 mois, un élément absolument crucial, nous gagnerions à réclamer à la Cour suprême du Canada qu'elle repousse la date butoir de manière à bien faire les choses. Il ne faut pas agir de manière précipitée, comme ce fut le cas aux Pays-Bas, dont un éminent professeur favorable à l'euthanasie a dénoncé la démarche en 2004. Nous ne voulons pas commettre la même erreur au Canada. Nous tenons à bien faire les choses.
    Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour déposer, dans les deux langues officielles, la décision de la Cour suprême concernant l'affaire Carter c. Canada, puisque c'est ce dont nous parlerons aujourd'hui pour l'essentiel de la journée.
    Le député a-t-il le consentement unanime pour déposer ce document?
    Des voix: Oui.
    Des voix: Non.
    Monsieur le Président, je me reprendrai probablement plus tard.
     Je voulais déposer la décision de la Cour suprême pour que l'objet du débat soit bien clair pour tout le monde. Pour préciser les choses, je vais donc lire un long passage de la décision:
    L’alinéa 241b) et l’art. 14 du Code criminel portent atteinte de manière injustifiée à l’art. 7 de la Charte et sont inopérants dans la mesure où ils prohibent l’aide d’un médecin pour mourir à une personne adulte capable qui (1) consent clairement à mettre fin à sa vie; et qui (2) est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition.
     La cour suspend ensuite sa décision pendant 12 mois pour que nous puissions y donner suite. Elle précise que la donne est changée parce qu'il y a de nouveaux éléments d'information depuis que l'affaire Rodriguez a été entendue:
    Plus particulièrement, le droit relatif aux principes de la portée excessive et du caractère totalement disproportionné avait évolué de façon importante depuis l’arrêt Rodriguez. L’ensemble des faits législatifs et sociaux dans l’affaire qui nous occupe différait également des éléments de preuve soumis à la Cour dans l’affaire Rodriguez.
    En termes simples, la cour disposait de plus d'information, de données empiriques. C'est ce qui explique qu'elle ait pris une décision différente. La Cour continue:
    La prohibition de l’aide au suicide constitue généralement un exercice valide de la compétence en matière de droit criminel conférée au gouvernement fédéral par le par. 91(27) de la Loi constitutionnelle de 1867 et n’empiète pas sur le contenu essentiel protégé de la compétence provinciale en matière de santé. La santé est un domaine de compétence concurrente, ce qui laisse croire que les deux ordres de gouvernement peuvent validement légiférer sur des aspects de l’aide médicale à mourir, en fonction du caractère et de l’objet du texte législatif. Compte tenu du dossier qui a été soumis à la Cour, la prétention fondée sur l’exclusivité des compétences ne peut être retenue.
    Dans la mesure où ils prohibent l’aide d’un médecin pour mourir que peuvent demander des adultes capables affectés de problèmes de santé graves et irrémédiables qui leur causent des souffrances persistantes et intolérables, l’al. 241b) et l’art. 14 du Code criminel privent ces adultes du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne que leur garantit l’art. 7 de la Charte. Le droit à la vie entre en jeu lorsqu’une mesure ou une loi prise par l’État a directement ou indirectement pour effet d’imposer la mort à une personne ou de l’exposer à un risque accru de mort. En l’espèce, la prohibition prive certaines personnes de la vie car elle a pour effet de forcer certaines personnes à s’enlever prématurément la vie...
    Des gens s'enlèvent la vie et meurent prématurément pour éviter l'horreur de ce qui pourrait les attendre. C'est ce qui est dit dans le jargon juridique.
    Je vais redemander si je pourrais obtenir le consentement unanime pour déposer, dans les deux langues officielles, le jugement Carter c. Canada de la Cour suprême.
(1530)
    Le député a-t-il le consentement unanime pour déposer le document?
    Des voix: D'accord.
    Dans ce cas, monsieur le Président, j'invite les observateurs à lire la décision de la Cour suprême. C'est un texte des plus intéressants qui définit clairement les paramètres selon lesquels le Parlement peut agir.
    Ce matin, au cours du débat, on a évoqué le serment d'Hippocrate. Dans sa décision, la cour stipule clairement que les médecins ne seront d'aucune façon obligés de diriger un suicide assisté. Certains ont dit que le serment d'Hippocrate leur interdit de faire une telle chose. J'ai imprimé une copie de ce serment et j'aimerais en faire lecture à mes distingués collègues. Il s'agit ici de la version moderne, qui a été écrite en 1964 par le directeur des études de la faculté de médecine de l'Université Tufts. Nombre de facultés de médecine s'en servent. On y lit entre autres ceci:
    S'il m'est donné de sauver une vie, à la bonne heure. Mais il se peut aussi que j'aie la possibilité d'enlever la vie. Je dois considérer cette imposante responsabilité avec grande humilité et rester conscient de ma propre fragilité. Je dois par-dessus tout m'abstenir de me substituer à Dieu.
    Alors, voilà: le serment d'Hippocrate tient déjà compte des deux scénarios, soit celui de sauver une vie et celui d'y mettre fin.
    En mars 2014, j'ai présenté deux projets de loi d'initiative parlementaire sur l'aide médicale à mourir. Ces projets de loi auraient remplacé l'article 241 et créé un cadre permettant à un adulte capable de mettre fin à sa vie, s'il ou elle le souhaite, après avoir effectué toute une série de démarches et d'examens auprès d'au moins trois médecins. De nombreux mécanismes de protection étaient aussi prévus pour s'assurer que la personne savait de quoi elle parlait et qu'elle connaissait les ressources à sa disposition, comme les soins en établissement, les soins à domicile, les soins palliatifs et ainsi de suite.
    Dans mon projet de loi, il était aussi question des situations où il y aurait un décalage entre le moment où la demande est formulée et le moment où l'acte a lieu. J'étais tout disposé à accepter des amendements. Franchement, il serait préférable de procéder au moyen d'une mesure législative de ce genre. J'aurais de loin préféré que le Parlement ait la suprématie et qu'il établisse les règles, et que la Cour suprême interprète ces règles.
    Nous nous trouvons de nouveau dans une situation où les tribunaux ont préséance sur le Parlement. Ce n'est pas de cela qu'il s'agit aujourd'hui, mais des juges non élus qui ne rendent de comptes à personne de devraient pas faire des lois. C'est là le travail des représentants élus.
    Mon projet de loi est aussi à l'étude au Sénat, ce qui est un autre moyen, si le Sénat le juge opportun, de soumettre la question au comité. Je dis cela en passant à titre de suggestion.
    En terminant, je dirai que les Canadiens sont bien en avance sur les tribunaux et sur les parlementaires dans ce dossier. Un sondage de grande envergure effectué récemment a révélé que 86 % des Canadiens sont en faveur de l'aide médicale à mourir.
(1535)
    La question du sondage parlait d'une maladie ou d'une affection grave incurable accompagnée d'un état avancé de faiblesse permanent et incurable qui entraîne des souffrances intolérables.
    C'est une question difficile, mais les Canadiens sont en faveur de l'aide médicale à mourir et c'est pourquoi nous devons appuyer la décision de la Cour suprême.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Charleswood—St. James—Assiniboia d’avoir fait une intervention très mesurée et d’avoir déposé la décision de la Cour Suprême du Canada. Je sais qu’il a beaucoup travaillé sur la question, notamment en présentant deux projets de loi d’initiative parlementaire, qu’il a mentionnés, ainsi que des projets de loi au Sénat.
    Le député a raison de dire que nous devons nous assurer que le processus parlementaire qui sera retenu doit être non partisan. C’est dommage qu’elle n’ait pas été rendue plus tôt, mais maintenant que nous avons une décision de la Cour Suprême, il faut absolument y donner suite immédiatement, sans attendre que les mois passent.
    J’aimerais savoir comment le député envisage de s’y prendre. Nous sommes saisis aujourd’hui d’une motion proposant de créer un comité spécial qui entreprendrait des consultations. J’aimerais savoir si c’est l’orientation qu’il privilégie, afin que le Parlement lui-même puisse participer au débat.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée de Vancouver-Estde son attitude réfléchie dans tout ce débat, ainsi que ma collègue qui l’a précédée, la députée de Kildonan—St. Paul, de l’éloquence de ses propos.
    Pour répondre à votre question, je dirais que la motion dont nous sommes saisis aujourd’hui est une façon de procéder, mais qu’elle a ses limites, car nous n’avons que très peu de temps, et c’est notre ennemi à tous. En effet, il reste 12 semaines avant la fin de la session. Nous aurons à débattre d’un budget et de la législation qui l’accompagnera et qui est déjà en préparation. Viendra ensuite l’ajournement d’été. Je suppose également, même si je ne suis pas dans le secret des dieux, qu’il y aura des élections à l’automne. Tout cela va nous occuper pratiquement à plein temps.
    Une solution consisterait à passer par le Sénat. Il faudrait pour cela obtenir l’accord des sénateurs.
    Il y a donc plusieurs solutions, mais je pense que l’essentiel du travail se fera après les élections.
(1540)
     Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue de tout le travail qu’il a accompli, y compris des projets de loi qu’il a présentés. J’en ai parlé dans mon discours, et j'aurais été fautif de ne pas le faire. Je tiens donc à lui dire que j’apprécie beaucoup ce qu’il propose.
    Je suis sûr que si le comité spécial dont il est question est finalement mis sur pied par la Chambre, beaucoup de parlementaires aimeraient qu’il en fasse partie. De cette façon, tout le travail qu’il a accompli, y compris ses propositions législatives, serait au cœur des discussions. Toutefois, il a raison de dire que le temps nous manquera si nous ne nous mettons pas au travail immédiatement.
    Je comprends que, pour le député, le comité spécial ne soit pas une solution entièrement satisfaisante en soi. Néanmoins, comme il l’a dit, c’est déjà un pas dans la bonne direction.
    Le député a-t-il l’intention d’appuyer la motion et de convaincre ses collègues conservateurs d’en faire autant ?
    Monsieur le Président, j'ai autant de succès dans mes efforts pour convaincre mes collègues que pour convaincre le député de quoi que ce soit. Nous récolterons tous ce que nous avons semé, et il s'agit d'une question très sensible.
    Ce n'est pas une question partisane, mais elle se trouve au coeur de notre identité canadienne. Ce que nous déciderons aura des conséquences pour tous les Canadiens qui vivent aujourd'hui et tous ceux qui vivront demain. De plus, quel que soit le modèle choisi par le Canada, il fera école dans le reste du monde développé.
    Bref, je pense que nous devrions nous inspirer de ce qu'a fait le Québec sur une période de quatre ans et demi. Je pense que le Québec a accompli un excellent travail et que nous ferions bien d'examiner sa démarche.
    Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir souligné les résultats du sondage sur l'aide médicale à mourir. Je considère le sondage comme fiable parce qu'il ne comprenait qu'une seule question. Cependant, il suscite beaucoup d'autres questions, comme la question de savoir s'il faudrait que la personne fasse le choix elle-même ou si quelqu'un d'autre pourrait prendre la décision à sa place.
    Compte tenu de la connaissance que nous avons du sujet, quelles questions voudriez-vous poser au public avant que le Parlement ne se prononce?
    Je sais que le député de Burlington s'adressait au député de Charleswood—St. James—Assiniboia, alors je vais laisser ce dernier répondre plutôt que de donner moi-même mon point de vue.
    Je répondrais au député que le Président est un partisan des Roughriders de la Saskatchewan et qu'il ne pourrait pas exprimer son opinion sur la question.
    Monsieur le Président, je dirais que la seule personne qui puisse faire le choix est l'adulte capable lui-même. Ce ne pourrait être personne d'autre, ni un membre de sa famille ni une autre personne détenant une procuration. Selon moi, il faut que ce soit le principal intéressé qui donne son consentement, et personne d'autre.
    Le député semble faire certaines insinuations à mon sujet, étant donné que je suis un partisan des Roughriders de la Saskatchewan. Je suppose que, puisqu'il est un partisan des Blue Bombers de Winnipeg, il sait très bien ce qu'est la souffrance.
    Le député de Winnipeg-Nord a la parole.
    Monsieur le Président, je suis moi-même un partisan des Bombers, et je suis optimiste de nature. Je crois que nous participerons au match de la Coupe Grey cette année. J'en suis convaincu.
    Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole au sujet de cet enjeu très important. On constate d'ailleurs le très grand intérêt manifesté à l'égard de cette grande question partout au Canada, car tôt ou tard, nous devrons tous prendre des décisions très importantes. Je suppose que beaucoup de gens s'intéressent à ce qui se passe ici aujourd'hui, dans le cadre de ce débat.
    La Cour suprême a clairement préparé le terrain. Elle n'a pas rendu une décision partagée. Elle a décidé à l'unanimité qu'il faut modifier la loi. La décision de la Cour suprême oblige donc le Parlement à proposer une solution de rechange. Il nous incombe de faire preuve de leadership, car cette question revêt une grande importance pour tous les Canadiens.
    C'est essentiellement ce que nous faisons valoir dans la motion d'opposition que nous avons présentée aujourd'hui. Nous demandons au gouvernement et à l'ensemble des parlementaires d'étudier la question qui leur est soumise, d'en comprendre l'importance — je crois que c'est le cas de chacun d'entre nous — et de commencer à participer au débat. Il est peut-être encore plus important de reconnaître la nécessité de mettre sur pied le comité spécial que nous réclamons.
    Aujourd'hui, le chef du Parti libéral a exposé la situation de façon éloquente lors de ses observations préliminaires au sujet de la motion. Je le cite:
     L’aide médicale à mourir est une question complexe et profondément personnelle. Les Canadiennes et les Canadiens souhaitent qu’une véritable conversation s’engage sur les moyens de renforcer le soutien et les soins prodigués en fin de vie, notamment les soins palliatifs.
    Je crois que le chef du Parti libéral démontre pourquoi la question est importante, et pourquoi les Canadiens tiennent autant à ce que la Chambre des communes fasse preuve de leadership. Je crois que notre façon d'aborder le débat est particulièrement non partisane et transparente.
    J'aurai l'occasion de rappeler le contenu de la motion, mais la plupart d'entre nous étions présents lorsque la motion a été présentée, et nous avons dit très clairement que nous sommes ouverts aux suggestions d'amendement. Si quiconque a des idées pour rendre les consultations plus inclusives, nous sommes prêts à en tenir compte.
    Le parti a décidé de présenter cette motion dès aujourd'hui parce que le temps presse. La Cour suprême nous a donné jusqu'à la mi-février 2016 pour convenir des modifications qui permettront d'établir une norme uniforme d'un bout à l'autre du pays. Nous voulons garantir que la Chambre des communes s'occupera de ce dossier. Nous voulons éviter que la loi devienne caduque, puisqu'on finirait alors par avoir des règles différentes dans chaque province et territoire.
(1545)
    Contrairement à ce qui a été dit plus tôt, je ne crois pas qu'il faille réinventer la roue. Comme bon nombre de mes collègues l'ont déjà souligné, la province de Québec a déjà fait des progrès considérables dans ce dossier. Il a fallu beaucoup de temps à cette législature provinciale pour arriver à un consensus. Cela ne s'est pas fait du jour au lendemain. Voilà l'une des raisons pour lesquelles nous devons nous mettre au travail sans tarder.
    J'ai écouté une bonne partie des réponses aux questions et aux observations, particulièrement celles qui venaient des députés conservateurs. Ils semblent vouloir, avant tout, quelque chose de global. Ils semblent souhaiter une solution de rechange à la proposition du Parti libéral, une solution qui favoriserait davantage la participation des citoyens ordinaires comme celle des groupes intéressés et des professionnels.
    Les points soulevés aujourd'hui pourraient tous, sans exception, être traités par un comité spécial de la Chambre. Les députés le savent. Nous le savons tous. Les comités permanents de la Chambre peuvent obliger des gens à témoigner, se déplacer, établir leur horaire et reporter une échéance. Le comité spécial aurait les mêmes pouvoirs, puisque nous proposons qu'il suive le modèle des comités permanents.
    Pour que les députés comprennent le mieux possible ce que le Parti libéral suggère, j'aimerais passer en revue la motion. Il me faudra peut-être quelques minutes pour le faire, mais il est important que les gens comprennent ce que le Parti libéral propose. Ce faisant, je tiens à souligner que le chef du Parti libéral a clairement fait savoir que nous voulons que tous les partis appuient cette initiative, vu l'importance de la question, et tentent de l'aborder de façon apolitique. Je le dis pour que, si les députés entendent quelque chose qu'ils n'aiment pas nécessairement, nous puissions en discuter et faire des changements. Le principe est toujours là.
    Voici ce qui a été suggéré:
    Que a) la Chambre reconnaisse que (i) la Cour suprême du Canada a déterminé que l’interdiction à l'aide médicale à mourir viole l’article 7 de la Charte des droits et libertés, selon laquelle « chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale », (ii) la Cour suprême a suspendu la mise en oeuvre de sa décision pour 12 mois, (iii) les élections fédérales et l'ajournement d'été prévus restreignent les jours de séance restants en 2015, (iv) les Canadiens s’attendent à ce que les parlementaires prennent le leadership dans ce dossier et y contribuent de manière réfléchie et posée, (v) une discussion non partisane, posée et efficace a eu lieu sur cette question à l’Assemblée nationale du Québec, (vi) le Parlement est tenu de répondre à la décision de la Cour suprême [...]
    La motion prévoit ensuite que:
    Que a) la Chambre reconnaisse que (i) la Cour suprême du Canada a déterminé que l'interdiction à l'aide médicale à mourir viole l'article 7 de la Charte des droits et libertés selon laquelle: « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale », (ii) La Cour suprême a suspendu la mise en œuvre de sa décision pour 12 mois, (iii) les élections fédérales et l'ajournement d'été prévus restreignent les jours de séances restants en 2015, (iv) les Canadiens s’attendent à ce que les parlementaires prennent le leadership dans ce dossier et y contribuent de manière réfléchie et posée, (v) une discussion non partisane, posée et efficace a eu lieu sur cette question à l’Assemblée nationale du Québec, (vi) le Parlement est tenu de répondre à la décision de la Cour suprême [...]
(1550)
    On explique ensuite la composition du comité permanent. Notre parti n'essayait pas d'obtenir un avantage. Nous nous sommes fondés sur la composition actuelle des comités permanents. J'en ai entendu certains affirmer que nous devrions avoir davantage de représentation des libéraux. Ces propositions venaient de l'autre côté. Nous n'avons pas fait cette recommandation dans la motion, mais si des députés estiment que nous devrions changer la composition, je le répète, nous y sommes ouverts, mais au moins nous suivons le modèle d'un comité permanent qui doit comprendre, évidemment, un président et deux vice-présidents, dont un de chaque parti.
[...] que le comité dispose de tous les pouvoirs que le Règlement confère aux comités permanents, en plus du pouvoir de voyager, accompagné du personnel nécessaire, à l’intérieur et à l’extérieur du Canada, sujet à l’autorisation habituelle de la Chambre; que les membres siégeant à ce comité [...]
    On explique ensuite le processus suivi par les whips et l'on précise qu'au plus tard le 11 mars, la liste des membres du comité doit être dressée.
[...] le quorum du comité soit fixé à sept membres pour toutes les délibérations à condition qu’au moins un membre de l’opposition et un membre du parti gouvernemental soient présents; que les membres de ce comité puissent, à l’occasion et si besoin est, se faire remplacer conformément [au] Règlement [...]
    Je crois vraiment que cette règle, qui vient des comités permanents, est très importante parce que, selon les circonstances, et possiblement aussi selon la région où les audiences auront lieu, il pourrait y avoir des députés qui veulent étudier la question au sein du comité.
[...] que le comité fasse rapport au plus tard le 31 juillet 2015, entendu que, si le comité présente son rapport au cours de la période d’ajournement de la Chambre, lorsque ce rapport est déposé auprès de la Greffière, ledit rapport soit réputé avoir été présenté à la Chambre.
    En lisant la motion, j'en viens à croire qu'elle renforcerait de nombreux points que j'ai mentionnés au début de mon intervention, comme la capacité du comité spécial de faire ce qui est important pour les Canadiens et de donner suite à ce que la Cour suprême nous a demandé de faire dans le cadre de sa décision unanime.
    Le temps file. Nous ne disposons que d'un laps de temps limité pour régler la question. Si nous voulons faire un travail sérieux, nous ne pouvons pas rester les bras croisés et attendre après les prochaines élections comme certains pourraient le proposer. Selon la loi, les prochaines élections doivent avoir lieu le 19 octobre. À mon avis, nous n'aurions alors pas le temps de tenir les importantes consultations que les Canadiens méritent. Je crois qu'il reste moins de 50 jours de séance avant que la Chambre ne s'ajourne pour l'été.
    Je sais toutefois que nous disposons du temps nécessaire pour faire un examen approfondi de la question et pour produire un rapport si les députés de tous les partis mettent la main à la pâte, s'ils sont de bonne foi, s'ils souhaitent obtenir un consensus et s'ils sont prêts à faire les sacrifices nécessaires. J'ai vu de nombreux députés faire un travail extraordinaire pour mener à bien un dossier.
(1555)
    Nous devons démarrer le processus. C'est ce que cherche à faire la motion que nous débattons aujourd'hui. Si les députés croient qu'il est important d'aborder cette question, s'ils sont persuadés qu'elle est importante pour les Canadiens, ils ne devraient pas hésiter à former ce comité spécial parce qu'il n'y a rien à craindre.
    Pendant que j'écoutais les députés, j'ai pu constater que tous — conservateurs, néo-démocrates et membres de mon propre parti — se rendent compte de l'importance de cet enjeu. Si tout le monde s'entend sur la gravité de cette question et comprend que nos électeurs la jugent aussi d'une très grande importance, je crois que nous avons la responsabilité de faire tout notre possible et d'agir avec diligence pour la régler.
    Nous avons présenté une proposition concrète sur laquelle nous pouvons voter et agir. Si les députés ne croient pas que c'est la bonne façon d'avancer, ils devraient au moins proposer une autre solution et nous expliquer de quelle façon elle est complète et nous permet de répondre aux questions que les députés de toutes parts ont posées en affirmant vouloir procéder à de vastes consultations et en disant beaucoup d'autres choses.
    Pour ce qui est des consultations préconisées, la motion proposée en aborde tous les aspects, sans exception. Elle permettrait même au comité d'aller enquêter à l'étranger s'il l'estime nécessaire et si un consensus se forme à ce sujet parmi ses membres. Je crois que la Chambre donnerait son appui unanime si le comité jugeait nécessaire de visiter chaque région et peut-être même chaque province du Canada.
    Je sais, comme d'autres députés, qu'il y a de multiples points de vue sur cette question particulière. En écoutant le débat d'aujourd'hui, j'ai entendu à maintes et maintes reprises des députés donner des exemples précis. Moi aussi, j'étais présent lorsque mon père est décédé des suites de son cancer, après avoir fait des séjours dans un hôpital de soins tertiaires, un centre des sciences de la santé et enfin dans son propre logement. Tout cela n'aura duré que quelques mois. Après son logement, où ses souffrances ont été extrêmes, nous avons réussi à le faire admettre au Riverview Health Centre, qui a un programme phénoménal de soins palliatifs. J'applaudis les professionnels de la santé de ce centre pour tout ce qu'ils ont fait.
    Nous avons tous vécu des expériences dont nous pouvons parler aux autres, non seulement à la Chambre, mais aussi parmi nos électeurs.
    Je voudrais lancer un dernier appel pour dire que le comité spécial dont nous parlons peut vraiment faire l'affaire. Je sais que les parlementaires peuvent réagir sans esprit partisan. Nous pourrions alors agir d'une façon décisive qui répondrait aux voeux des Canadiens. Comblons cette lacune, ce vide qui existe. Faisons ce que la Cour suprême du Canada nous a mis au défi de faire, et faisons-le à l'unanimité. Les neuf juges de la Cour se sont prononcés. Nous pouvons faire de même. Je sais que nous en avons la capacité.
    Si nous arrivons à réfléchir ensemble, nous pouvons en arriver à un consensus, comme cela s'est déjà fait au Québec. Je crois que la volonté d'agir serait là si cette motion réunissait les appuis nécessaires.
    J'ai été heureux d'avoir l'occasion de faire part de ces quelques réflexions.
(1600)
    Monsieur le Président, j’ai écouté avec grand intérêt l’allocution de mon collègue. Je crois assurément que nous avons la capacité à la Chambre de travailler ensemble à quelque chose d’important.
    J’ai écouté le député lire la motion, qui prévoit le nombre de personnes qui siégeraient et là où elles siégeraient et ce qu’elles devraient faire. Je n’ai pas vu les termes « soins palliatifs » où que ce soit dans la motion. La motion traite du fait que « l’interdiction à l’aide médicale à mourir viole l’article 7 de la Charte des droits et libertés ». Voilà le mandat établi par le Parti libéral pour cette question.
    J’ai entendu mon collègue parler de ce nous pourrions faire pour travailler de façon apolitique: discutons et faisons des changements. Il a déclaré que nous pourrions amender la motion. Dit-il vraiment la vérité? Lorsque nous avons essayé de travailler avec cette motion, pour avoir une vision globale des soins de fin de vie, les libéraux ont affirmé avec insistance que la motion demeurera axée sur le suicide assisté. Voilà le problème: nous devons examiner toutes les questions concernant les soins de santé en fin de vie. C’est la tâche qui nous incombe. M. Harvey Max Chochinov, un éminent professeur de psychiatrie à l’Université du Manitoba, a déclaré récemment que nous sommes actuellement confrontés à une situation où nous avons le droit de mourir, mais pas celui d’avoir des soins palliatifs de qualité.
    J’aimerais demander à mon collègue pourquoi les libéraux ont dit toute la journée que nous pouvons parler des soins palliatifs si les gens le veulent. Toutefois, ils ont exclu cette question de la motion pour la faire porter uniquement sur le suicide assisté, et nous ne parlons pas de la question plus large des soins de fin de vie dont nous avons besoin.
(1605)
    Monsieur le Président, je remercie le député de ses commentaires.
    La motion porte sur la décision rendue par la Cour suprême du Canada. Je serais absolument scandalisé, et je suis sûr que tous les députés le seraient également, si les soins palliatifs étaient exclus des discussions tenues et des exposés présentés à chaque étape. Je serais absolument scandalisé si cela était le cas.
    La motion a pour objet de mettre sur pied le comité qui s’occuperait précisément de la décision rendue par la Cour suprême du Canada. Si le député peut obtenir ce consensus, et si les conservateurs sont prêts à dire qu’ils chargeront le comité permanent de l’étude et y ajouteront une autre composante, j’imagine que nous serions extrêmement heureux d’y acquiescer. Toutefois, je ne sais pas si les députés ont réellement eu cette discussion. Si c’est là le seul obstacle à l’adoption de la motion, j’imagine que nous pourrions même faire quelque chose du genre, en fait, si cela devait arriver.
    Monsieur le Président, d'autres députés présents ici et moi coprésidons le Comité parlementaire des soins palliatifs et des soins prodigués avec compassion et nous comprenons que les soins palliatifs sont essentiels.
     Guelph possède l'un des meilleurs centres de soins palliatifs au Canada. Le problème, c'est que les soins palliatifs ne sont pas de qualité uniforme au Canada et que seule une partie de la population y a accès. Honnêtement, je suis d'accord avec l'intervenant précédent qui a dit qu'il est important que nous nous penchions sur les soins palliatifs. Les idées que nous exprimons ne sont pas incompatibles.
    C'est une question controversée. Il y a ceux qui sont d'accord avec la décision de la Cour suprême et ceux qui ne le sont pas. La suspension du jugement sur l'aide médicale à mourir se terminera le 6 février 2016. En tant que Parlement, nous devons aller de l'avant et entériner le jugement de la Cour suprême.
    Ce qui m'inquiète, c'est que le 6 février arrivera rapidement et que nous n'aurons ni loi, ni mesure cohérente au Canada, et que 13 provinces et territoires canadiens adopteront des mesures différentes et incohérentes, de sorte que certaines personnes iront obtenir une aide médicale à mourir dans une autre province ou un autre territoire. Je me demande si mon collègue de Winnipeg-Nord partage mes inquiétudes et si le Parlement devrait poursuivre la discussion, notamment pour la raison que j'ai exposée.
    Monsieur le Président, je sais que mon collègue était là lorsque notre chef a soulevé cette question. Il a dit, et je cite: « En tant que législateurs, il nous incombe d’agir, ce qui veut dire mener une discussion générale des plus inclusives avec l’ensemble de la population. »
    Je pense que le chef du Parti libéral a raison. C'est effectivement notre responsabilité en tant que parlementaires. Ce serait totalement irresponsable de notre part de ne pas déployer des efforts rigoureux dans ce dossier si important. Tous nos électeurs comprendraient qu'il est de notre devoir non seulement de nous intéresser à la question mais aussi de passer à l'action, car si le Parlement du Canada ne s'attaque pas en temps opportun à cette question, nous finirons par adopter une approche fragmentaire — chose qui, selon moi, n'est dans l'intérêt de personne.
    Il faut que quelqu'un fasse preuve de leadership à la Chambre afin de combler le vide juridique qui existe actuellement et donner suite à la décision unanime de la Cour suprême du Canada concernant cette question très grave. C'est, selon moi, notre rôle en tant que parlementaires.
(1610)
    Monsieur le Président, bon nombre des objections des députés ministériels concernant la motion dont nous sommes saisis portent sur le manque de temps. Comme l'a dit, avec raison, le député de Guelph, la date limite de février 2016 approche. Il ne nous reste plus beaucoup de temps pour agir.
    On affirme donc qu'il faudra peut-être se présenter devant la Cour suprême pour demander une prolongation. C'est ce qu'a laissé entendre le secrétaire parlementaire. C'est ce qu'a laissé entendre la députée de Kildonan—St. Paul.
    Le député pense-t-il que le Parlement aurait plus de chances d'obtenir une prolongation — si c'est vraiment la chose à faire — s'il avait déjà entamé le processus, s'il avait déjà commencé à entendre des témoins?
    Prenons le président du comité des finances. Il n'est pas inhabituel pour ce comité d'entendre 300 ou 400 témoins au cours d'une période de trois ou quatre mois durant les consultations prébudgétaires. C'est faisable. J'aimerais savoir si le député pense effectivement que nous pourrions renforcer notre position auprès de la Cour suprême en entamant le processus de consultation.
    Le député soulève un bon point, monsieur le Président. Si, collectivement, nous arrivons à la conclusion qu'il vaut mieux demander une prolongation, ce serait effectivement une bonne idée si nous avions déjà un consensus parmi les députés. Nos arguments n'en auraient que plus de poids.
    J'aimerais aussi revenir sur l'opportunité de créer un comité spécial au lieu de renvoyer la question à l'un des comités permanents. N'oublions pas qu'il s'agit d'un sujet qui risque d'intéresser plus d'un comité, et pas seulement celui du ministère de la Justice, de la Santé ou des Finances. Bref, ce serait mieux si nous créions un comité spécial de la Chambre et le dotions des mêmes pouvoirs que les comités permanents. Si nous nous entendons là-dessus, nous aurons déjà parcouru un bon bout de chemin et pourrons espérer répondre aux attentes des Canadiens en prenant le leadership dans un dossier aussi important que celui-là.
    Le temps est compté. Si nous n'agissons pas rapidement, j'aimerais bien qu'on me dise quelles seront nos options. Si les conservateurs refusent d'appuyer notre motion, qu'ils nous expliquent ce que le gouvernement entend faire pour donner suite à une question aussi importante et qui, ai-je besoin de le préciser, préoccupe énormément les Canadiens.
    Monsieur le Président, j'aimerais que mon collègue tente de nous expliquer pourquoi les députés conservateurs craignent autant de voter en faveur de notre motion. Ils prétendent que le temps manque, mais plus on attend, et moins il va y en avoir, du temps. Raison de plus pour s'y mettre dès maintenant. Ils soutiennent également que ce n'est pas assez de créer un comité. Je veux bien, mais qu'ils en fassent ce qu'ils veulent du comité. Ce n'est pas...
    Le temps de parole du député est écoulé. Je laisse le député de Winnipeg-Nord répondre à ce qu'il estime être la question qui allait lui être posée.
    Monsieur le Président, j'ai cru comprendre que le problème tient au fait que le comité n'aura pas suffisamment de temps. Je rappelle que la Cour suprême a fixé une date butoir.
    Il nous reste 12 semaines. Il reste assez de temps d'ici la fin de la session parlementaire pour donner suite à la motion et produire un rapport. Ainsi, l'ensemble du Canada profiterait de l'excellent travail...
    Nous reprenons le débat. La députée de Vancouver-Est a la parole.
    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Timmins—Baie James.
    Je suis très heureuse de participer au débat d'aujourd'hui. Pour commencer, j'aimerais souligner l'importance de cette question et le fait qu'elle transcende réellement les allégeances politiques.
    Je remercie le député de Charleswood—St. James—Assiniboia des projets de loi qu'il a présentés à la Chambre. Je sais que deux sénateurs, un ancien libéral et un conservateur, ont également présenté un projet de loi. Selon moi, cela reflète la profondeur du sentiment que l'aide médicale à mourir suscite en chacun de nous.
    Le député de Charleswood—St. James—Assiniboia et moi-même avons assisté en août dernier à un forum organisé à Calgary par Mourir dans la dignité ainsi que d'autres organismes. Les gens étaient un peu étonnés qu'un député conservateur et une députée néo-démocrate participent à une même rencontre pour parler d'une cause commune. Cela dit, je crois que ce fut une discussion fructueuse. Nous étions plutôt du même avis pour ce qui est des mesures qui s'imposent.
    Je tiens également à souligner le travail incroyable qui a été accompli par un ancien député que nous avons bien connu, Svend Robinson. Il a fait de nombreuses interventions ici même au sujet de l'aide médicale à mourir. En fait, il a beaucoup travaillé avec Sue Rodriguez et l’a aidée dans son long combat juridique et médical. Elle avait un courage extraordinaire. Svend est resté à ses côtés pour l’aider à traverser toutes ces difficultés. Il n’a jamais abandonné le combat.
    Je me souviens également de Francine Lalonde, qui était une extraordinaire députée du Bloc québécois et qui a présenté un projet de loi d’initiative parlementaire sur l'aide médicale à mourir. J’ai voté en faveur de ce projet de loi. En fait, j’ai voté deux fois, parce qu’elle a présenté son projet de loi une deuxième fois. Depuis, Mme Lalonde est décédée, mais c’était un dossier qu'elle défendait passionnément. Nous profitons de l’occasion pour la remercier à nouveau de tout le travail qu’elle a accompli.
    Je pense que les députés voient bien, maintenant, qu’il s’agit vraiment d’un dossier non partisan. Et je pense que cela reflète bien ce que pensent les Canadiens en général.
    J’aimerais également rendre hommage à mon collègue de Timmins—Baie James, qui s’est dépensé sans compter dans le dossier des soins palliatifs, car c’est un volet important du débat puisque nous devons assurer l’existence d’un continuum de soins. À mon avis, les soins palliatifs et l'aide médicale à mourir ne sont pas incompatibles, au sens où ce serait l’un ou l’autre. Non, ces deux types de soins font partie d’un processus et constituent des options que nous devons offrir aux gens. J’estime qu’il faut grandement améliorer l’accès aux soins palliatifs au Canada.
    Même avec l’adoption de la motion M-406 du député de Timmins—Baie James, et le débat qui a eu lieu à la Chambre, il n’en demeure pas moins que nous avons fait très peu de progrès. Je pense qu’on peut se poser de sérieuses questions quant à la bonne foi du gouvernement, qui n’y a encore pas donné suite alors que ses propres députés avaient voté en faveur de la motion.
    Je m’en voudrais de passer sous silence des organisations canadiennes comme Mourir dans la dignité. Elles ont fait un travail incroyable, non seulement sur le plan juridique, mais aussi en ce qui concerne la sensibilisation de la population et les relations avec les collectivités et les gens intéressés à la question.
    J’ai justement participé à un forum avec Mourir dans la dignité, à Vancouver, il y a six semaines. C’était une réunion très intéressante. Toutes sortes de gens y ont assisté. Plusieurs communications y ont été présentées. C’était avant la décision de la Cour suprême du Canada. Il y a eu des discussions très sérieuses, qui témoignaient de la gravité avec laquelle les gens abordent la question. Ce qui m’a paru évident, c’est que les gens estimaient clairement que c’était une question de consentement et de choix, et que l’État — ce que la décision de la Cour Suprême montre à l’évidence — ne doit pas décider comment des adultes veulent finir leur vie, quels types de soins ils peuvent recevoir, et quand ils veulent mettre fin à leur vie, compte tenu des circonstances qui leur sont propres.
(1615)
    Je suis convaincue qu'un député peut être opposé au suicide médicalement assisté, mais appuyer la décision de la Cour Suprême du Canada, qui se fonde sur le principe selon lequel il s’agit d’une décision personnelle. Ce n’est pas à moi, pas plus qu’à un autre député, de porter un jugement.
    J’estime qu’il nous incombe — et c’est une responsabilité de taille — de donner suite à la décision de la Cour Suprême, qui a été rendue à l’unanimité. Nous devons saisir la balle au bond, et empêcher que quelqu’un ne la botte en touche au motif que la question est trop controversée ou pour une autre raison. C’est maintenant qu’il faut agir. Il y a des gens qui souffrent et qui se trouvent dans des situations extrêmement difficiles, où ils doivent prendre des décisions au sujet de leur propre vie. Pour cette raison, je remercie les députés libéraux d’avoir présenté cette motion aujourd’hui.
    Je suis d’accord avec la dernière personne qui est intervenue. Si nous n’agissons pas maintenant, quand le ferons-nous? Certains ont dit que nous n’avions pas assez de temps et que des élections allaient être déclenchées. Il y a toujours mille et une raisons de remettre les choses à plus tard. Pour ma part, j’estime qu’il y a une raison fondamentale pour laquelle nous devons agir sans attendre, c’est que pour certaines personnes, le temps compte. Si nous ne faisons pas notre travail, nous esquivons la responsabilité qui nous a été confiée par la Cour Suprême du Canada.
    À l’instar de mon collègue de Charleswood—St. James—Assiniboia, j’aurais préféré que ce soit nous, le Parlement, qui prenions cette décision, selon notre propre procédure, comme cela a été le cas au Québec, plutôt que de suivre dans le sillage de la Cour suprême du Canada. Dans cette province, ils ont fait quelque chose d’absolument incroyable. Ils ont mené à bien des consultations avant de présenter un projet de loi.
    Nous sommes aujourd’hui dans une sorte de vide. Si nous ne commençons pas dès aujourd’hui ou la semaine prochaine, nous allons laisser tomber un grand nombre de gens. Ça voudra dire que nous nous défilons; or, nous ne pouvons pas nous permettre de nous défiler sur cette question.
    La création d’un comité spécial n’est peut-être pas la solution idéale. Certains pensent peut-être qu’il faudrait une structure légèrement différente. Je suis entièrement d’accord avec mon collègue de Timmins—Baie James pour dire qu’il faudrait inclure, de façon plus officielle, la question des soins palliatifs. Si la motion est adoptée, nous ferons tout notre possible pour régler toutes ces questions.
    Il n’en reste pas moins que c’est là la motion dont nous sommes saisis aujourd’hui, et que c’est sur cette motion que nous allons voter. Je ne vois aucune raison de ne pas l’appuyer, car il s’agit de mettre en place un processus qui nous permettra à nous parlementaires, de nous acquitter de notre responsabilité face à la décision tout à fait historique de la Cour Suprême du Canada.
    En mémoire de Sue Rodriguez, de tous ceux qui ont souffert et qui ont eu le courage de mener le combat qui a mené à cette décision juridique, j’estime que nous avons le devoir d’agir maintenant. La déception sera grande si nous n’atteignons pas cet objectif et si nous esquivons notre responsabilité en invoquant toutes sortes d’excuses. Nous n’avons plus d’excuses.
    Aujourd'hui, nous devons faire notre travail de députés et mettre de côté la partisanerie. J'estime que la décision de la Cour suprême du Canada est très claire à cet égard. Elle indique que la balle est dans notre camp. Nous devons donc prendre nos responsabilités et travailler ensemble. Il faut mettre sur pied un processus de consultations. Ainsi, dans l'année qui nous est allouée, nous serons en mesure de faire le travail qui nous a été confié.
(1620)
    Monsieur le Président, je remercie la députée de Vancouver-Est de ses commentaires. Je suis ravi qu'elle ait mentionné le forum auquel nous avons assisté ensemble. Je me rappelle que c'était plutôt en juillet. C'était pendant la semaine du Stampede et le ciel était d'un bleu magnifique ce soir-là. Il faisait chaud et le forum avait lieu dans un immeuble plutôt quelconque. La salle n'était pas climatisée et il n'y avait qu'un ventilateur pour rafraîchir tout le monde. Le forum n'a pas été beaucoup publicisé, mais le niveau de participation était extraordinaire. Il y avait même des représentants des médias sur place.
    J'aimerais que la députée de Vancouver-Est donne à la Chambre un aperçu des commentaires et des impressions des personnes qui ont participé au forum.
(1625)
    Monsieur le Président, je suis heureuse de voir que le député a une meilleure mémoire que moi. Je me souviens maintenant que c'était un jour de canicule, durant le Stampede de Calgary. Ce que j'ai le plus retenu de cette réunion, c'est que les gens étaient très surpris que nous soyons là, qu'un député ministériel et une députée de l'opposition officielle assistent à la même réunion et qu'ils aient des échanges respectueux. Je me suis alors rendu compte à quel point les Canadiens sont cyniques face à la politique. Ils nous voient durant la période des questions, et c'est ce qui forge leur opinion de nous; ils ne savent pas que, dans de nombreux cas, les députés travaillent ensemble.
    La motion présentée par mon collègue de Timmins—Baie James au sujet des soins palliatifs est un autre bel exemple qui illustre comment la Chambre peut s'entendre sur un libellé et approuver une motion sur l'importance des soins palliatifs et la nécessité d'une stratégie fédérale.
    Par conséquent, j'aimerais que nous allions plus loin, que nous montions d'un cran et que nous exprimions notre volonté de travailler ensemble sur ce dossier et de veiller à ce qu'il y ait une véritable consultation démocratique, en bonne et due forme, qui aboutira au cadre législatif nécessaire.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mes collègues de ce débat qui, selon moi, s'est généralement déroulé dans un esprit de respect, sans trop de partisanerie. Je voudrais aborder une question précise qui semble susciter le plus d'inquiétudes, car une fois que les gens auront passé en revue les enjeux liés au suicide assisté par un médecin, il faudra consacrer, en toute déférence, suffisamment de temps à la réponse législative. J'aimerais donc connaître l'avis de la députée sur le délai de 12 mois que la Cour suprême a imposé au Parlement. Trouve-t-elle le délai suffisant et, le cas échéant, croit-elle qu'il s'agit de la motion appropriée pour aller de l'avant?
    Monsieur le Président, je ne connais pas toutes les raisons pour lesquelles les juges de la Cour suprême du Canada ont fixé un délai d'un an. À mon avis, c'est peut-être parce que, compte tenu du caractère crucial de cette question touchant la dignité des personnes, leur droit à la vie et leur capacité de prendre des décisions, les juges ont voulu s'assurer que le Parlement évite de digresser et de ne rien faire, ou de faire telle ou telle chose pendant telle ou telle période. Par conséquent, le délai précis d'un an, qui, selon moi, n'est pas trop court, est très important, car il nous oblige maintenant à agir. Il est plutôt déconcertant de constater que le gouvernement n'a encore donné aucune indication quant à ce qu'il entend faire. S'il a des idées, qu'il les fasse connaître. À l'heure actuelle, nous sommes saisis de cette motion, qui énonce une marche à suivre particulière.
    Je signale que si un comité spécial était constitué rapidement, rien ne l'empêcherait de se réunir au courant de l'été. Tous les étés, nous voyons des comités parlementaires se réunir. Cela est donc tout à fait possible sur le plan logistique. Si nous n'entreprenons pas dès maintenant ce processus, nous ne ferons que remettre à plus tard encore l'étude de cet enjeu.
    Monsieur le Président, comme toujours, c'est un grand honneur pour moi de m'adresser à la Chambre au nom des habitants de Timmins—Baie James. C'est d'autant plus un honneur que je succède à ma collègue de Vancouver-Est, qui s'est toujours intéressée de très près aux dossiers des soins de santé et de la fin de vie.
    Partout au pays, les gens réclament une stratégie nationale sur les soins palliatifs. J'ai récemment rencontré des médecins, des infirmières et des spécialistes des soins palliatifs à Toronto, et tous se demandent bien quelle suite on va donner à la décision de la Cour suprême et quelles seront les conséquences pour les familles et les professionnels de la santé. Il s'agit d'un sujet extrêmement profond. Les gens ne veulent plus du vide juridique et, si le Parlement ne prend pas le leadership, les professionnels de la santé vont se retrouver précisément dans la position dans laquelle ils ne veulent pas se retrouver. C'est donc à nous d'agir.

[Français]

    D'abord, je remercie la province de Québec de son processus de consultation juste et équilibré.
    Le gouvernement de l'époque a tenu un processus de consultation juste en collaboration avec les différents partis, si bien que cela a permis d'établir un plan quant aux normes sur les soins de fin de vie partout dans la province et de définir le processus concernant le problème de l'euthanasie.
    Il est donc possible de trouver une solution à ce problème, et le Québec est un modèle.
(1630)

[Traduction]

    Le gouvernement savait pertinemment que l'arrêt Carter s'en venait. Les gens qui s'intéressent aux soins de fin de vie savaient qu'il allait se passer quelque chose. La même question était sur toutes les lèvres: « que va faire le gouvernement? »
    En droit, chacun doit réparer les torts qu'il cause. Il faut convaincre le tribunal qu'on fait quelque chose. Parce que, si on ne fait rien, le tribunal va le faire à notre place.
    Avec l'arrêt unanime rendu dans l'affaire Carter, la Cour suprême, loin d'avoir circonscrit la question, l'a au contraire ouvert tout grand, plus grand que lorsqu'elle a été étudiée par le Québec, et plus grand encore que ce que le Parlement aurait pu faire. Si nous ne faisons rien, les tribunaux vont intervenir à nouveau. Il va y avoir d'autres contestations, et nous n'aurons plus le choix, comme société, de régler la question une fois pour toutes. Qui sait, alors, où le processus nous mènera? Je l'ai dit et je le répète, c'est donc à nous d'agir.
    Ce qui est frustrant également, c’est que le Parlement avait l’occasion d’agir. Nous nous sommes engagés à la Chambre des communes à élaborer une stratégie nationale pour les soins palliatifs et de fin de vie afin de travailler en consultation avec les provinces et les territoires, en reconnaissant leurs champs de compétence, et avec le milieu médical, parce qu’il existe de bons modèles de soins palliatifs de qualité au Canada. Lorsque les Canadiens savent quels services sont offerts, les craintes que soulèvent chez eux la fin de la vie changent beaucoup. Toutefois, la réalité, c’est que les services diffèrent grandement un peu partout au pays. Soixante-dix pour cent des Canadiens n’ont pas accès à des soins palliatifs de qualité. L’autre question, celle du suicide assisté et de l’euthanasie, retient donc beaucoup d’attention dans les médias.
    Ce qui m’inquiète chez les conservateurs, c’est que, s’ils n’agissent pas à l’intérieur de la prochaine année, le problème pourrait devenir beaucoup plus vaste et cela deviendrait beaucoup plus difficile pour les parlementaires d’y réagir. Nous avons la possibilité d’agir maintenant.
    J’ai écouté les députés du Parti libéral. Je suis d’accord avec eux: le Parlement peut agir et il doit le faire. Nous disposons d’une année. Nous savions que cela s’en venait. Nous pouvons le faire. Ce qui me préoccupe dans la motion libérale, c’est qu’elle est strictement axée sur la décision de la Cour suprême et non sur les questions relatives à la fin de la vie qui font partie intégrante du dossier.
    Harvey Max Chochinov vient tout juste d’écrire un excellent article sur le sujet. C’est un expert des soins palliatifs. Il craint qu’on définisse, par l'entremise de la motion, du Parlement ou des tribunaux, le droit de mourir mais pas celui d’avoir accès à des soins palliatifs de qualité. Cela serait très injuste si nous ne donnions suite qu’à la décision du tribunal, qui pourrait concerner 0,2 % de la population. Je ne veux pas réduire l’importance de ces personnes, mais 70 % de la population n’a pas accès à des soins de fin de vie de qualité.
    Nous avons la possibilité d'agir maintenant. La Cour suprême a statué que la question doit être traitée.
    Mettons de côté les querelles habituelles. Nous avons une période où nous pouvons discuter de la façon dont nous pouvons faire les choses d’une manière qui soit juste, qui fonctionne avec les provinces et qui tienne compte du fait qu’avec le vieillissement de la grande majorité de notre population, la question des soins palliatifs et des soins de longue durée est d’une importance capitale.
    Sur le plan du partage des compétences et sur celui de la planification, la question est très importante, étant donné que 1 % des Canadiens utilisent 30 % du budget de la santé. Or, bon nombre des personnes composant ce 1 % vivent les derniers mois de leur vie. Nous dépensons des sommes énormes pour les soins de fin de vie, mais ces sommes sont dépensées dans des services hétéroclites. Le stress exercé sur les patients est énorme, celui que vivent les familles peut être traumatisant et le réseau médical subit beaucoup de pression également.
    Si nous parlons aux gens qui fournissent des soins palliatifs de qualité, ils nous disent qu’une fois qu’une personne est inscrite à un programme palliatif, la famille n’a plus à se rendre à l’urgence en pleine nuit, à essayer de trouver un lit, sans savoir quoi faire. Ces situations causent un stress énorme aux familles. Or, nous avons des modèles vraiment bons à Brantford, à Sudbury et à Saskatoon et ces modèles peuvent être reproduits dans d’autres parties du pays.
    Cela me préoccupe beaucoup que nous ayons d’un côté, un vide politique et de l’autre, une motion pour la mise sur pied d’un comité. Encore une fois, je félicite mes collègues pour avoir présenté cette motion, mais comme elle ne traite pas des soins palliatifs, j’y vois un problème. Je ne peux accepter que nous traitions simplement de la décision de la Cour suprême et que nous laissions tout le reste de côté. Cela est problématique pour la société canadienne.
    Des collègues d’autres partis ont déclaré que les Canadiens se sont exprimés sur cette question. Ils s’attendent à ce que nous fassions montre de leadership. Ils s’attendent à ce que nous fassions montre d’une certaine maturité et reconnaissions que nous sommes chargés de faire certaines choses en qualité de parlementaires. Si nous ne sommes pas à la hauteur des attentes, la Cour suprême agira à notre place. Je crois que la Cour suprême du Canada a un rôle fondamental à jouer.
    La Cour suprême a dit au Parlement de s’organiser, de donner suite à sa décision dans le cours de la prochaine année, à défaut de quoi la question sera confiée aux provinces ou nous verrons encore plus de contestations devant les tribunaux. Lorsque les tribunaux se rendront compte que le Parlement ne veut pas agir, je crois qu’ils commenceront à interpréter la décision d’une manière beaucoup plus large. Or, je ne suis pas certain que les Canadiens veulent que les choses se passent ainsi.
    Nous avons la possibilité d'agir maintenant dans le domaine des soins de fin de vie et c'est une occasion importante. Il y a à peine cinq mois, nous avons discuté des soins palliatifs à la Chambre et nous avons pris un engagement à cet égard. Depuis, le gouvernement fédéral n'a strictement rien fait. Que doit penser la Cour suprême lorsqu'elle constate que le gouvernement fédéral n'a rien fait dans ce domaine?
    Nous avons la possibilité d'agir. Le gouvernement fédéral est mandaté par le Parlement pour entamer des démarches auprès des provinces et des territoires en vue de créer des soins palliatifs de qualité. Le gouvernement fédéral a aussi un rôle immense à jouer dans la prestation des soins de santé dans les collectivités des Premières Nations, qui ont très peu accès à des soins palliatifs, dans l'armée, auprès des anciens combattants, et dans les prisons.
    Le gouvernement fédéral a aussi un rôle national à jouer dans le secteur de la santé, pour dire que nous pouvons créer un fonds qui sera à la disposition des provinces pour la formation. Une des grandes préoccupations exprimées dans le milieu des soins palliatifs, c'est que, si une mesure est prise d'ici un an, les décisions de vie ou de mort seront confiées à des généralistes qui n'ont pas les compétences voulues en soins palliatifs et de fin de vie. Nous devrons traiter ces questions très complexes dans le vide, sans soutien.
    Le gouvernement pourrait, en collaboration avec les provinces, fixer des normes et mettre en place une formation pour que nous puissions procéder de manière juste et équitable, d'une façon que tous les Canadiens approuveraient, indépendamment de leurs convictions sur cette question. Nous avons tous des convictions très complexes. La qualité de vie des citoyens, indépendamment de leur situation et à quelques mois de la mort, doit être prise en considération. C'est une valeur générale que nous, Canadiens et parlementaires, sommes disposés à embrasser.
(1635)
    Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir soulevé la question des soins palliatifs auprès du Parlement.
    J'ai eu le privilège de siéger à un comité omnipartite qui a débattu de la question des soins palliatifs et l'a étudiée des mois durant avant de rédiger le rapport intitulé Avec dignité et compassion: Soins destinés aux Canadiens vulnérables. Nous nous sommes rendus dans divers établissements au Canada pour constater l'excellent travail qu'accomplissent les héros qui prodiguent des soins palliatifs. Je profite de l'occasion pour les en féliciter.
    Un élément qui me semble aujourd'hui absent du débat concerne la période de cinq mois dont nous disposons d'ici à la fin de juillet pour trouver des solutions viables. J'ai l'impression qu'il nous faudrait davantage de temps pour faire ce qu'on attend de nous. Nous aurions peut-être dû agir avant. Nous en portons tous le blâme.
    Cependant, c'est là où nous en sommes. Une phrase est revenue comme un leitmotiv dans le discours du député: « Nous avons la possibilité d'agir maintenant. » Je ne saurais mieux dire, sauf que pour saisir cette possibilité, cinq mois m'apparaissent insuffisants. Le député convient-il qu'il serait préférable de prendre notre temps et d'étudier le dossier plus en profondeur pour trouver des solutions réalisables, même pour la mosaïque de soins palliatifs qui existe actuellement au Canada?
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue de l'excellent travail qu'il a fait au sein du comité sur les soins palliatifs. J'y ai appris beaucoup de choses, et je considère que les membres du comité ont fait de l'excellent travail. Ils ont jeté les bases sur lesquelles nous pouvons maintenant nous appuyer.
    En fait, nous aimerions tous pouvoir disposer de plus de temps. C'est ce que mon propre père a dit dans ses derniers jours: « Je croyais que j'aurais plus de temps. » Nous croyons toujours qu'il y aura plus de temps. La Cour suprême a rendu sa décision. C'est ce qui m'inquiète. Je ne voudrais pas qu'on finisse par laisser un vide juridique ou qu'on invoque la disposition de dérogation pour aller à l'encontre de la décision de la Cour suprême. Celle-ci a rendu une décision. Elle a fixé une date butoir.
    J'estime que nous pouvons unir nos efforts en laissant la partisanerie de côté. Nous pourrions y travailler pendant tout l'été. Le rapport multipartite sur les soins palliatifs est excellent. Tous les députés devraient le lire, et les gens qui nous regardent à la maison devraient y jeter un coup d'oeil. Il prouve que les parlementaires peuvent faire du bon travail ensemble. Tirons-en les leçons qui s'imposent.
(1640)
    Monsieur le Président, je remercie de député de Timmins—Baie James pour la passion qu'il voue aux soins palliatifs. Il l'a très visiblement exprimée dans ses observations.
    Cette décision rendue par la cour a invalidé des dispositions du Code criminel et elle invite le Parlement à combler le vide ainsi créé s'il le juge nécesssaire. Le député clame que la motion a une portée trop étroite et qu'elle n'engage pas le Parlement à élaborer une stratégie nationale en matière de soins palliatifs.
    La motion demande que le comité propose un cadre législatif qui respecterait la Constitution, la Charte des droits et libertés et les priorités des Canadiens. En admettant qu'une stratégie nationale en matière de soins palliatifs fasse partie des priorités des Canadiens, n'est-il pas possible, dans la foulée de cette motion, et souhaitable que ce comité ne se contente pas de recommander des modifications au Code criminel, mais qu'il oeuvre aussi à élaborer un cadre législatif qui tiendrait compte des priorités des Canadiens, notamment une stratégie en matière de soins palliatifs? Ces tâches pourraient très bien faire partie du mandat du comité et, en fait, il faudrait qu'elles en fassent partie.
    Monsieur le Président, je suis tout à fait d'accord pour dire que les soins palliatifs devraient être inclus dans cette motion, mais ils n'y figurent pas. Voilà où est la question, selon moi. La question est que nous devrions inclure les soins palliatifs de manière à éviter que nous nous consacrions uniquement aux modifications à apporter au Code criminel. Nous devons nous efforcer d'embrasser l'ensemble des questions de fin de vie. Ce serait une imposture que de nous contenter de répondre à la Cour suprême et de passer à autre chose. Un mandat est nécessaire pour clarifier le rôle d'un comité. C'est la première chose que j'ai apprise au Parlement, quand j'étais jeune et que j'ai mis les pieds ici pour la première fois.
    La Cour suprême nous dit d'aller de l'avant, de prendre une décision sur le suicide assisté et de prendre acte de sa décision à elle. Nous pouvons parler d'une foule d'autres choses, mais cela ne fait pas partie du mandat, et c'est là un problème fondamental.
     Je veux féliciter mes collègues d'avoir accepté de créer un comité, mais si ce comité n'est pas disposé à examiner le problème plus vaste des soins palliatifs en fonction de la décision de la Cour suprême, alors il y a un problème. Je rappelle à tous que l'on devrait se méfier d'un mandat à ce point limité.
    Monsieur le Président, c'est un véritable honneur d'être ici aujourd'hui et de prendre part au débat initié par le Parti libéral du Canada et les membres de notre caucus. Ce n'est certainement pas la première fois que ce sujet est abordé, et je tiens à en parler moi aussi.
    Dans la circonscription que je représente, au centre de Terre-Neuve, j'ai pu acquérir une certaine expérience des soins palliatifs. Il s'agit d'une expérience toujours douloureuse pour bien des gens, et encore plus pour certains députés ici présents, qui nous ont fait part de leur expérience de manière très poignante. Je pense entre autres au député de Timmins—Baie James, qui s'est exprimé tout à l'heure, mais qui aborde régulièrement le sujet.
    Je tiens tout d'abord à lire la motion à la Chambre. La majeure partie du texte revient sur la décision de la Cour suprême et propose des moyens d'y donner suite. Il y est toutefois question aussi de procédure et de façons pour les députés d'étudier la question.
    J'ai oublié de vous dire, monsieur le Président, que je vais partager mon temps de parole avec le député de Scarborough—Guildwood.
    La motion dit en partie ce qui suit:
    Que a) la Chambre reconnaisse que (i) la Cour suprême du Canada a déterminé que l’interdiction à l'aide médicale à mourir viole l’article 7 de la Charte des droits et libertés, selon laquelle « chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale », (ii) la Cour suprême a suspendu la mise en oeuvre de sa décision pour 12 mois, (iii) les élections fédérales et l'ajournement d'été prévus restreignent les jours de séance restants en 2015, (iv) les Canadiens s’attendent à ce que les parlementaires prennent le leadership dans ce dossier et y contribuent de manière réfléchie et posée, (v) une discussion non partisane, posée et efficace a eu lieu sur cette question à l’Assemblée nationale du Québec, (vi) le Parlement est tenu de répondre à la décision de la Cour suprême [...]
    La partie qui suit propose de créer un comité spécial et en explique le mandat.
    La décision unanime des neuf juges de la Cour suprême, qui a été rendue le 6 février, confirme le jugement rendu auparavant par une juge de la Colombie-Britannique, selon qui les dispositions législatives rendant illégale l'aide médicale à mourir contreviennent à la Charte canadienne des droits et libertés. Selon la juge, ces dispositions violent de trois manières bien précises le « droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne » prévu à l'article 7 de la Charte: premièrement, elles forcent certaines personnes à s'enlever la vie prématurément par crainte d'en être incapables plus tard, ce qui les prive de la vie; deuxièmement, elles privent ces personnes du droit de prendre des décisions relatives à leur intégrité corporelle et aux soins médicaux, ce qui empiète sur leur liberté; et troisièmement, elles leur laissent subir des souffrances intolérables, ce qui empiète sur la sécurité de leur personne.
    Sur le plan constitutionnel, la Cour suprême a jugé que les prohibitions étaient disproportionnées par rapport à leur objectif et qu'elles visaient des gens qui ne sont pas susceptibles d'être contraints dans un moment de faiblesse. Cette objection contribue en grande partie au débat; j'en parlerai brièvement plus tard. Un grand nombre de citoyens, de groupes d'intérêts ou de groupes tout court ont déjà discuté ouvertement de cette question, mais non de manière officielle dans les médias sociaux en particulier, et sur la tribune des nombreux groupes d'intérêts spéciaux. Nous aimerions la tenue d'une discussion officielle, comme le propose la motion.
    La cour a déclaré que la prohibition de l'aide médicale à mourir était inopérante dans la mesure où deux conditions étaient remplies. Premièrement, la personne doit être un adulte capable qui consent clairement à mourir. Deuxièmement, elle doit être « affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition ».
    Cette décision a annulé un jugement antérieur de la Cour suprême qui remonte à l'affaire Rodriguez c. Colombie-Britannique (Procureur général), rendu en 1993. Tous se souviennent de l'histoire de Sue Rodriguez et de son combat à ce sujet, un combat vaillamment mené d'ailleurs.
    La solution a consisté à suspendre la prise d'effet de la déclaration d'invalidité pour une période de 12 mois. Cette solution n'a pas obligé les médecins à aider leurs patients à mourir, mais elle nous oblige, nous législateurs, à agir. Premièrement, nous devons discuter de la question dans l'enceinte du Parlement. Voilà pourquoi nous envisageons la constitution d'un comité spécial qui nous permettra de discuter à fond de cet enjeu.
(1645)
    Je ne pense pas qu'il faille nécessairement maintenir cette position. Il serait formidable que le comité lance un débat sur le cadre législatif, comme l'a dit mon collègue de Charlottetown, Île-du-Prince-Édouard. Il a indiqué que nous pourrions discuter du cadre législatif, et ensuite de la stratégie de soins palliatifs en tant que telle — ce qu'ont fait les députés à maintes reprises depuis mon arrivée à la Chambre il y a 10 ans —, et que cela devrait jouer un rôle important dans le débat.
    Nous avons 12 mois pour y arriver. Comme je l'ai dit plus tôt, nous disposons d'un délai plutôt serré. Puis, il faut soustraire de cette période la durée des élections fédérales à l'automne, ainsi que la relâche estivale. En réalité, nous avons jusqu'à la fin juin. C'est selon moi l'occasion rêvée de nous attaquer au problème.
    À titre d'information, les termes euthanasie et aide médicale à mourir ne sont pas synonymes, car l'euthanasie signifie mettre fin à la vie de quelqu'un par compassion, avec ou sans son consentement. L'aide médicale à mourir exige un consentement.
    Selon les résultats d'un sondage mené en 2014 par Ipsos Reid, 84 % des répondants sont d'avis qu'un médecin devrait pouvoir aider une personne à mettre fin à ses jours lorsque cette personne est un adulte qui a la capacité de prendre une décision, qui est en phase terminale, qui est affligé de souffrances insupportables et qui demande à répétition qu'on l'aide à mourir. C'est une question assez détaillée à poser au grand public, et plus de 80 % des répondants ont dit être en faveur de cette option.
    Il n'en demeure pas moins qu'il faut discuter de la manière dont cette option sera offerte dans l'ensemble du pays. Il faut d'abord se demander comment adapter le Code criminel pour rendre cette option possible — si c'est ce que veulent les Canadiens — et étudier la question.
    J'aimerais seulement citer un article de l'Association médicale canadienne, qui a publié beaucoup de documentation à ce sujet. Par ailleurs, sa position s'est assouplie au fil des années. Dans ma circonscription, j'ai abordé la question avec le Dr John Haggie, ancien président de l'Association médicale canadienne. L'AMC cite plusieurs médecins qui s'intéressent de près à ce sujet, qu'il soit question de l'aide médicale à mourir ou des soins palliatifs. Pendant près de deux ans, l'association a étudié la façon dont l'aide médicale à mourir est réglementée en Europe ainsi que dans cinq États des États-Unis.
     L'Association médicale canadienne a aussi tenu des assemblées publiques à la grandeur du pays pour recueillir les impressions de la population et des médecins. Voici ce qu'a déclaré le Dr Chris Simpson, président de l'association, pendant une entrevue:
    Nous aimerions apporter à la table notre expertise et les impressions que nous avons recueillies, afin d'en arriver à un système qui protégera scrupuleusement les personnes vulnérables tout en permettant aux gens qui en ont besoin d'obtenir une aide médicale à mourir.
    C'est ce qu'a dit le Dr Chris Simpson, président de l'Association médicale canadienne. Il a parlé du forum dont dispose l'association. Certes, celle-ci consulte la population et tient des discussions. Elle voudrait maintenant transmettre ce qu'elle a appris, mais à qui peut-elle s'adresser? Voilà une occasion en or, puisqu'elle pourrait s'adresser au comité législatif spécial qui étudierait ce dossier, comme le propose la motion d'aujourd'hui. Ce serait fantastique d'entendre les observations de l'Association médicale canadienne, puisqu'elle a déjà déployé beaucoup d'efforts dans ce dossier.
    J'aimerais citer encore quelques personnes. Parmi les médecins qui accueillent favorablement la décision figure le Dr James Downar, médecin en soins palliatifs au Réseau universitaire de santé de Toronto. En 2014, il a publié un commentaire sur l'aide médicale à mourir dans la revue de l'Association médicale canadienne. Voici une citation à ce sujet:
     D'après Downar, les législateurs devront faire intervenir des intéressés quand ils élaboreront le processus qui permettra à tous les Canadiens d'avoir accès à des médecins pouvant les aider à mourir s'ils répondent aux conditions prescrites.
    Il s'agit d'un enjeu très important pour l'Association médicale canadienne:
    Il faut aussi permettre aux médecins qui ont des objections de conscience de diriger leurs patients vers un collègue qui, lui, les aidera à mourir.
    D'autres médecins spécialisés en soins palliatifs sont très inquiets de l'arrêt de la Cour suprême. Cette décision nuira à la relation qu'ils ont avec leurs patients. Voici ce que la Dre Jessica Simon a dit:
    Nous n'avons pas pour mandat d'accélérer la fin de vie, nous permettons plutôt aux gens de profiter de la vie autant qu'ils le peuvent avant leur décès.
    Le fait de mettre intentionnellement fin à la vie d'une personne n'a rien à voir avec les soins palliatifs. Je continue la citation:
    Jamais personne ne m'a demandé de mourir pour soulager ses souffrances, parce que nous disposons d'autres outils, notamment la sédation palliative.
    Nous pouvons être d'accord ou non avec ces médecins, mais il faut que ces derniers se fassent entendre, ils doivent pouvoir exprimer leur opinion dans le cadre de nos travaux parlementaires, et c'est exactement ce que la motion nous permettrait de faire au cours de la prochaine année.
(1650)
    Monsieur le Président, je remercie mon éloquent collègue de Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor pour une autre excellente contribution au débat d'aujourd'hui. J'aimerais savoir ce qu'il pense des remarques faites sur cette question par deux commentateurs. Le premier est nul autre que Preston Manning, qui a résumé sa position en réclamant qu'on laisse les citoyens s'exprimer. Le deuxième est l'Association médicale canadienne, ou AMC, qui a publié un communiqué ce matin en faveur de la motion et en faveur de la tenue d'un débat et d'une discussion sur ce sujet. L'Association médicale canadienne et les médecins qu'elle représente sont dans une situation particulière parce que la décision Carter a invalidé une disposition du Code criminel qui visait directement les médecins. Ces derniers croient que nous devrions poursuivre cette discussion.
    J'invite mon collègue à répondre à ces deux commentateurs de l'extérieur de la Chambre, qui ont tenté de s'insérer dans le débat. J'aimerais connaître sa réaction.
(1655)
    Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné plus tôt, je me suis beaucoup fié à l'opinion de l'Association médicale canadienne parce qu'elle a beaucoup de valeur à mes yeux. Il y a d'autres institutions qui visent le même objectif qu'elle. Qu'elles soient en faveur ou non de l'aide médicale à mourir, il serait une bonne idée qu'elles soumettent leurs recommandations au Parlement et au gouvernement. Le député a raison sur ce point.
    L'AMC a fait part ce matin de son appui pour cette idée, reprenant ainsi les propos tenus par Chris Simpson. L'AMC a tenu des assemblées publiques à la grandeur du pays pour recueillir les impressions de la population, et voici que ce M. Simpson a dit sur ce sujet:
    Nous aimerions apporter à la table notre expertise et les impressions que nous avons recueillies, afin d'en arriver à un système qui protégera scrupuleusement les personnes vulnérables tout en permettant aux gens qui en ont besoin d'obtenir une aide médicale à mourir.
    Même si son poste au sein de l'Association médicale canadienne le met au service des médecins d'un bout à l'autre du pays, Chris Simpson a néanmoins son mot à dire sur cet enjeu, sur les gens qui reçoivent des soins palliatifs, sur ceux qui demandent à leurs médecins de les aider à mourir, et sur ceux qui réclament davantage de renseignements. Le fait qu'il souhaite rendre des comptes à un organisme montre qu'il serait tout à fait indiqué pour la Chambre d'appuyer la motion.
    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les commentaires de mon collègue. L'une des choses que j'ai apprises depuis le temps que je suis ici, c'est qu'il faut toujours faire preuve d'un peu de cynisme. En réalité, la motion aurait pu être présentée par n'importe qui, à n'importe quel moment. Les comités sont maîtres de leur destinée. À pratiquement chaque législature, on peut examiner une question et élaborer des rapports.
    Nous avons eu des rapports du Sénat. On a déjà élaboré des rapports. Nous avons déjà vu des mesures législatives présentées à la Chambre sous forme de projets de loi d'initiative parlementaire. Nous avons des projets d'initiative parlementaire dont est saisi le Sénat. Ceci est simplement une occasion de plus de se faire du capital politique, ce que je trouve regrettable. On ne devrait absolument pas faire de politique avec une telle question, qui divise profondément les Canadiens qui ont des idées bien arrêtées sur la question.
    Plutôt que de perdre mon temps à débattre ce genre de choses, je préférerais, à titre de député, consulter personnellement mes électeurs sur la question et intégrer leurs points de vue à un débat au cours duquel le gouvernement répondrait aux décisions qui ont été prises par la Cour suprême.
    Avec toute l'expérience qu'il possède à la Chambre, le député croit-il sincèrement que l'on puisse former un comité, rencontrer tous les Canadiens qui doivent être consultés à ce sujet selon le Parti libéral, revenir, rédiger avec toute l'expertise technique voulue un projet de loi qui réponde aux exigences constitutionnelles énoncées par la Cour suprême du Canada, déposer ce projet de loi à la Chambre, lui faire franchir les trois étapes de la procédure et en saisir le Sénat d'ici la fin de la présente législature à la fin juin?
    Monsieur le Président, oui, je suis convaincu que cela est possible. C'est aussi simple que ça. Cela s'est déjà fait auparavant et cela peut certainement se faire dans ce cas-ci. L'arrêt Carter a été rendu il y a 18 jours seulement. La présente motion tombe donc à point. Ne faisons pas de la question une pomme de discorde. Cessons de faire de la petite politique et d'accuser les autres d'en faire et passons directement à la partie où nous discutons du processus proposé pour que nous puissions mandater le comité spécial.
    Je sais que le député consulte les citoyens. Je le fais aussi. Pourquoi croit-il que le comité supplanterait cela? Ces processus de consultation peuvent être complémentaires. Ce que lui disent les citoyens de sa circonscription peut certainement servir au comité, et vice versa.
    Monsieur le Président, j'écoute ce débat depuis une bonne partie de la journée et je tiens à féliciter mes collègues de leur débat somme toute non partisan. C'est, en fait, assez encourageant. Je pense qu'il est encourageant de voir, pour ceux qui regardent, des parlementaires discuter d'une question très importante pour nous tous. Honnêtement, je pense que, au cours de la journée, le débat s'est, somme toute, déroulé de manière respectueuse.
    Nous débattons de cette question parce que la Cour suprême a rendu une décision il y a à peine 18 jours, comme le mentionnait mon collègue. Cette décision nous met la pression et, d'une façon ou d'une autre, nous serons au pied du mur le 6 février 2016. À mon avis, c'est un jugement rédigé avec soin. C'est un jugement unanime et c'est également un exemple de déférence pour le Parlement, car la Cour suprême est d'avis, à juste titre, que le Parlement est le mieux placé pour rédiger une réponse législative à sa décision.
    Nous avons, au fond, trois choix possibles.
    Nous pouvons ne rien faire. C'est une option. Si nous la choisissons, dans 12 mois, le chaos juridique régnera, et j'irais même jusqu'à dire que le chaos émotionnel régnera. Si, dans les faits, nous ne prenons aucune mesure au cours des 12 prochains mois, je ne crois pas que les Canadiens seront très impressionnés par leurs parlementaires.
    L'option suivante consiste à demander une prolongation du délai. C'est un recours tout à fait légitime que la députée de Kildonan—St. Paul a proposé, tout comme l'a fait le secrétaire parlementaire, au nom du gouvernement. Même le député de Winnipeg y a fait allusion. Je le répète, c'est là une deuxième option, et il se peut que nous entendions sur celle-ci. Cependant, je n'aimerais pas être l'avocat du gouvernement qui devra, le 5 février 2016, se présenter devant la Cour suprême du Canada pour demander cette prolongation. La première question qui franchira la bouche de la juge en chef visera à déterminer ce que nous avons fait au cours des 12 derniers mois. Si nous n'avons rien fait, je soutiens que la Cour suprême hésitera beaucoup à nous accorder cette prolongation.
    Cela nous amène essentiellement à parler de la troisième option, à savoir que nous commencions à prendre des mesures.
    Nous avons saisi la Chambre d'une motion proposant la création d'un comité spécial parce qu'à mon sens, c'est nettement mieux que de ne rien faire ou d'espérer de tous ses voeux que la Cour suprême nous accorde une prolongation dans un an.
    Le jugement de la Cour suprême touche 100 % de la population canadienne, ce qui est exceptionnel en soi; il nous incombe donc d'écouter ce que les Canadiens ont à dire. Je fais donc mien le raisonnement d'un ancien collègue et bon ami de bien des députés ici présents, Preston Manning, qui proposait dernièrement dans le Globe and Mail d'adopter un processus en neuf étapes.
     Je commencerai par sa dernière suggestion. Voici ce qu'il disait:
    Donnons la parole aux gens: les tribunaux, les groupes d'intérêts, les universitaires et les commentateurs ont déjà abondamment fait état des pour et des contre de l'aide médicale à mourir.
    Il a tout à fait raison.
    C'est particulièrement important que nos élus et législateurs sollicitent l'opinion de M. et Mme Tout-le-Monde.
    M. Manning nous lance un défi, comme la Cour suprême avant lui. Je connais un peu M. Manning, et je sais que, pour lui, c'est très important d'écouter ce que les Canadiens ont à dire.
    Dans son article, il rappelle qu'il a lui-même organisé de nombreuses rencontres avec les électeurs de Calgary-Sud-Ouest à l'époque où il était le député de cette circonscription.
(1700)
    En général, les électeurs de sa propre circonscription appuyaient l'adoption d'une mesure législative portant sur l'aide médicale à mourir. En toute honnêteté, cela allait à l'encontre de ses convictions personnelles. Par conséquent, il était intéressant de voir M. Manning gérer une situation dans laquelle les habitants de sa circonscription lui demandaient de promouvoir une mesure législative qui ne cadrait pas avec ses idées.
    Ce faisant, il a exposé un certain nombre d'aspects dont nous devons nous préoccuper.
    Il a premièrement fait valoir la nécessité de faire preuve de compassion. Au cours de la journée, j'ai entendu divers députés parler de différentes circonstances personnelles. Ces circonstances englobent l'éventail complet des expériences humaines et les ont amenés à développer des convictions profondes. Si un tel comité est constitué, il devra garder la compassion à l'esprit.
    Le deuxième argument que M. Manning a fait valoir est lié aux soins palliatifs. Je crois qu'il s'agit d'un argument pertinent, qui a d'ailleurs également été avancé par le député de Timmins—Baie James. Je pense que nous n'avons pas vraiment d'opinion en ce qui concerne la question de savoir si la motion devrait être modifiée pour faire allusion aux soins palliatifs. Toutefois, je sais que le Parti libéral accueillerait favorablement une telle suggestion.
    Notre motion a cependant été élaborée en fonction des conclusions de la Cour suprême. Je crois que bien des tensions seraient dissipées si le gouvernement du Canada et l'ensemble des autres assemblées législatives au pays se penchaient sur le rapport présenté par le comité dont ont fait partie le député de Guelph, le député de Timmins—Baie James et le député de Kitchener—Conestoga. Si on faisait cela, ce débat ne susciterait peut-être pas autant d'animosité.
    J'aimerais également parler des lois provinciales. Un grand nombre de députés, moi y compris, ont pratiqué le droit. Nous avons parfois été dans des situations où le client disait une chose et où ses proches disaient autre chose. Même quand personne n'est sur le point de mourir, il y a des conflits au sein des familles. Je n'apprends rien de nouveau à la Chambre . Il y a des conflits dans les familles, et des professionnels se retrouvent souvent entraînés dans ces conflits. Il serait très utile que les lois provinciales clarifient les dispositions concernant les testaments biologiques ou d'autres aspects.
    Le prochain point a trait aux lettres que beaucoup d'entre nous reçoivent concernant les médecins susceptibles de se retrouver dans des situations difficiles. Les personnes qui choisissent la carrière de médecin le font souvent parce qu'elles veulent sauver des vies et améliorer la qualité de vie des gens. Elles voient l'aide médicale à mourir comme une pratique incompatible avec la raison pour laquelle elles ont choisi de devenir médecins.
    Il faudra éclaircir cette question le plus tôt possible, parce que, si la correspondance que je reçois est semblable à celle qui est adressée aux autres députés, beaucoup de médecins ressentent de profonds déchirements quant au comportement à adopter en l'absence d'une véritable loi. Si le Parlement n'agit pas d'ici le 6 février 2016 afin de préciser la loi, nos collègues médecins vivront une situation très difficile. Ils ne sauront pas sur quel pied danser dans toute cette affaire.
    Alors, je termine ici. Je félicite encore une fois mes collègues pour leur participation à un débat qui me semble se tenir largement de façon respectueuse. Je pense qu'il est important que le peuple s'exprime et qu'il est important aussi que nous passions à l'action. Si nous pouvions commencer dès demain matin, j'en serais parfaitement heureux. Je n'ai aucune préférence au départ concernant le choix de former ou non un comité spécial, mais je pense qu'un comité spécial devra être formé parce que le programme de tous les autres comités est déjà très chargé.
(1705)
    Je suis conscient que nous disposons essentiellement de 12 semaines pour faire ce travail. Il est possible d'y arriver. Qui veut la fin prend les moyens, et j'espère que, ce soir, nous nous entendrons sur les moyens à prendre.
(1710)
    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours du député. Il a raison de dire que 100 % des Canadiens s'intéressent à la question de l'aide médicale à mourir.
    Lui et ses collègues ont décrit aujourd'hui le mandat du comité spécial qu'ils proposent de former et qui se réunirait périodiquement d'ici la fin de juillet. Le député pourrait-il nous dire combien de témoins le comité spécial serait capable d'entendre au cours de ses délibérations? Pourrait-il nous indiquer de manière générale qui seraient ces témoins et comment ils seraient choisis? Croit-il qu'il serait possible d'entendre toute la gamme des opinions sur le sujet?
    Le député pourrait-il en outre nous préciser ce que son collègue de Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor a dit au sujet de la possibilité de présenter et d'adopter un projet de loi élaboré par ce comité d'ici la fin de juin? Je pense que la motion elle-même prévoit que le comité siégerait jusqu'à la fin de juillet.
    Monsieur le Président, j'aurais dû dire qui veut la fin prend les moyens par l'entremise d'un avocat, mais dans le cas qui nous occupe, espérons que non.
    Songeons, par exemple, au comité des finances qui mène, chaque année, des audiences prébudgétaires depuis probablement 10 ou 15 ans. La liste des témoins est très longue: 300 ou 400 témoignages sur une période d'environ trois mois.
    Qui veut la fin prend les moyens. Un comité spécial aurait, selon toute vraisemblance, suffisamment de temps.
    Quant à la rédaction législative, je ne crois pas que la tâche soit trop difficile. Nous modifierions le Code criminel; c'est ce que nous faisons tous les jours. Je serais d'ailleurs très surpris si le ministre de la Justice n'avait pas encore reçu de réponses provisoires de la part de ses collaborateurs. La conformité à la Charte est d'une extrême importance.
    Nous pourrons y arriver si nous le voulons. À défaut de quoi, nous laisserons tomber l'ensemble des Canadiens.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue d'avoir défendu avec force la nécessité d'un tel comité ou d'un processus semblable et d'avoir fait une analogie avec les audiences prébudgétaires du comité des finances. C'était tout à fait pertinent
    La fin d'une législature ne signifie pas la fin de l'étude d'un dossier. Nous pourrions terminer le tout en juillet, comme il est proposé dans la motion. Le comité pourrait peut-être être composé principalement de députés qui auraient annoncé leur intention de ne pas se présenter aux prochaines élections, ce qui leur donnerait plus de temps.
    Le rapport pourrait même être une ébauche, comme un rapport provisoire, qui serait ensuite présenté au gouvernement, étant donné que nous aurions besoin d'une sorte de réponse législative ou d'une décision sur la mesure législative. Le gouvernement pourrait y travailler, alors que le reste d'entre nous vaquerait à d'autres affaires en prévision d'un événement en octobre, et nous savons tous de quoi il s'agit. De cette façon, lorsque nous arriverions à la nouvelle législature, nous serions prêts à poursuivre les travaux. Ce n'est pas comme si les travaux d'une législature devaient être complètement distincts de ceux de la précédente.
    Je me demande si mon collègue de Scarborough—Guildwood aimerait dire ce qu'il pense de la possibilité d'enchaîner ces deux processus parlementaires. Lorsque la Chambre recommencera à siéger, il se peut très bien que nous souhaitions que la mesure législative du gouvernement soit à un stade très précoce, qu'elle ait franchi l'étape de la première lecture plutôt que celle de la deuxième et que le processus se poursuive de cette façon.
    Monsieur le Président, mon collègue a fait là une suggestion judicieuse. Je n'avais pas songé à répartir le processus sur les deux législatures, de manière à ce que nous disposions d'un rapport en juillet et à ce que l'ébauche du projet de loi soit prête à être présentée après les élections. C'est certainement une possibilité.
    Lorsque nous avons envisagé pour la première fois de présenter cette motion aujourd'hui, j'ai suggéré, entre autres, que nous demandions au gouvernement de présenter la mesure législative à l'étape de la première lecture. J'ai proposé qu'après cette étape, les audiences commencent, de manière à ce que le débat législatif et les audiences portant sur les enjeux aient lieu simultanément.
    Cela dit, je préfère l'idée de mon collègue à la mienne. Par conséquent, si ce plan est approprié, je n'y vois pas d'objection.
    Comme il est 17 h 15, je dois interrompre les délibérations et mettre aux voix sur-le-champ toutes les motions relatives aux crédits.
    Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
    Des voix: D'accord.
    Des voix: Non.
    Le président suppléant (M. Bruce Stanton): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
    Des voix: Oui.
    Le président suppléant (M. Bruce Stanton): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
    Des voix: Non.
    Le président suppléant (M. Bruce Stanton): À mon avis, les non l'emportent.
    Et cinq députés ou plus s'étant levés:
    Le président suppléant (M. Bruce Stanton): Convoquez les députés.
(1755)
    (La motion, mise aux voix, est rejetée par le vote suivant:)

(Vote no 340)

POUR

Députés

Adams
Allen (Welland)
Andrews
Ashton
Atamanenko
Aubin
Ayala
Bélanger
Bellavance
Bennett
Benskin
Bevington
Blanchette
Blanchette-Lamothe
Boivin
Borg
Boulerice
Boutin-Sweet
Brahmi
Brison
Brosseau
Byrne
Casey
Cash
Charlton
Chicoine
Chisholm
Choquette
Christopherson
Cleary
Comartin
Côté
Cotler
Crowder
Cullen
Cuzner
Davies (Vancouver Kingsway)
Davies (Vancouver East)
Day
Dewar
Dion
Dionne Labelle
Donnelly
Doré Lefebvre
Dubé
Dubourg
Duncan (Etobicoke North)
Duncan (Edmonton—Strathcona)
Dusseault
Easter
Eyking
Fletcher
Foote
Freeland
Freeman
Fry
Garneau
Garrison
Genest
Genest-Jourdain
Giguère
Godin
Goodale
Gravelle
Groguhé
Harris (Scarborough Southwest)
Harris (St. John's East)
Hsu
Hughes
Hyer
Jones
Julian
Kellway
Lamoureux
Lapointe
Latendresse
Laverdière
LeBlanc (Beauséjour)
LeBlanc (LaSalle—Émard)
Leslie
Liu
MacAulay
Mai
Martin
Masse
Mathyssen
May
McCallum
McGuinty
McKay (Scarborough—Guildwood)
Michaud
Moore (Abitibi—Témiscamingue)
Morin (Chicoutimi—Le Fjord)
Morin (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine)
Morin (Laurentides—Labelle)
Morin (Saint-Hyacinthe—Bagot)
Mourani
Mulcair
Murray
Nantel
Nicholls
Nunez-Melo
Papillon
Péclet
Perreault
Pilon
Plamondon
Quach
Rafferty
Rankin
Rathgeber
Ravignat
Raynault
Regan
Rousseau
Saganash
Sandhu
Scarpaleggia
Scott
Sellah
Sgro
Simms (Bonavista—Gander—Grand Falls—Windsor)
Sims (Newton—North Delta)
St-Denis
Stewart
Stoffer
Toone
Tremblay
Trudeau
Turmel
Valeriote
Vaughan

Total: -- 132


CONTRE

Députés

Ablonczy
Adler
Aglukkaq
Albas
Albrecht
Alexander
Allen (Tobique—Mactaquac)
Allison
Ambler
Ambrose
Anders
Anderson
Aspin
Barlow
Bateman
Benoit
Bergen
Bezan
Blaney
Block
Boughen
Braid
Breitkreuz
Brown (Leeds—Grenville)
Brown (Newmarket—Aurora)
Bruinooge
Butt
Calandra
Calkins
Cannan
Carmichael
Carrie
Chisu
Chong
Clarke
Clement
Crockatt
Daniel
Davidson
Dechert
Devolin
Dreeshen
Dykstra
Eglinski
Falk
Fast
Finley (Haldimand—Norfolk)
Fortin
Galipeau
Gallant
Gill
Glover
Goguen
Goldring
Goodyear
Gosal
Gourde
Grewal
Harris (Cariboo—Prince George)
Hawn
Hayes
Hiebert
Hillyer
Hoback
Holder
James
Kamp (Pitt Meadows—Maple Ridge—Mission)
Keddy (South Shore—St. Margaret's)
Kenney (Calgary Southeast)
Kent
Kerr
Komarnicki
Kramp (Prince Edward—Hastings)
Lake
Lauzon
Lebel
Leef
Leitch
Lemieux
Leung
Lizon
Lobb
Lukiwski
Lunney
MacKenzie
Maguire
Mayes
McColeman
McLeod
Menegakis
Miller
Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam)
Moore (Fundy Royal)
Nicholson
Norlock
Oliver
O'Neill Gordon
Opitz
O'Toole
Paradis
Payne
Perkins
Poilievre
Preston
Raitt
Rajotte
Reid
Rempel
Richards
Rickford
Ritz
Saxton
Schellenberger
Seeback
Shea
Shipley
Smith
Sopuck
Sorenson
Stanton
Strahl
Sweet
Tilson
Toet
Trost
Trottier
Truppe
Uppal
Valcourt
Van Kesteren
Van Loan
Wallace
Warawa
Warkentin
Watson
Weston (West Vancouver—Sunshine Coast—Sea to Sky Country)
Weston (Saint John)
Wilks
Williamson
Wong
Woodworth
Yelich
Young (Oakville)
Young (Vancouver South)
Yurdiga
Zimmer

Total: -- 146


PAIRÉS

Aucun

    Je déclare la motion rejetée.
    Comme il est 17 h 56, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
    [Suite des délibérations à la partie B.]
    [Suite des délibérations consignées à la partie A.]

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Initiatives parlementaires]

[Traduction]

Le Festival de Stratford

    Que la Chambre reconnaisse la contribution culturelle et économique spéciale du Festival de Stratford à la municipalité de Stratford, au sud-ouest de l’Ontario et au Canada depuis sa fondation en 1953.
    — Monsieur le Président, je suis fier de prendre la parole pour demander à mes collègues d'appuyer la motion d'initiative parlementaire M-545, que voici: « Que la Chambre reconnaisse la contribution culturelle et économique spéciale du Festival de Stratford à la municipalité de Stratford, au sud-ouest de l’Ontario et au Canada depuis sa fondation en 1953. »
    Moi qui ai toujours défendu les arts au Canada, j'ai pu constater que les institutions artistiques, en plus d'enrichir notre culture, contribuent aussi beaucoup à l'économie de la région où elles se trouvent. Je suis donc très fier d'être le député de la circonscription où a lieu le Festival de Stratford, qui est réputé dans le monde entier.
    Le Festival de Stratford accueille certaines des productions théâtrales les plus adulées dans le monde. Sa réputation enviable attire une foule d'acteurs, de concepteurs et de metteurs en scènes prestigieux. À ses débuts, le Festival de Stratford se consacrait aux oeuvres de Shakespeare, mais son incarnation moderne dure d'avril à octobre et présente maintenant une grande variété de productions théâtrales, des tragédies de Shakespeare au théâtre contemporain en passant par les comédies musicales. Il offre vraiment de tout pour tous les goûts.
    Toutefois, ce théâtre fait bien plus que monter d’excellentes pièces. Il rayonne dans la communauté et parmi les visiteurs, leur offrant une vaste gamme de possibilités pour connaître les arts du Canada. Ces activités comprennent des soirées musicales, des visites dans les coulisses, des forums, des ateliers éducatifs et des visites aux archives du théâtre. Ces diverses expériences divertissent et informent plus de 400 000 visiteurs chaque année.
    Le gouvernement du Canada appuie depuis très longtemps le Festival de Stratford. Le 1er octobre 1981, le ministère du Patrimoine canadien a désigné les archives du festival comme élément du Programme des biens culturels mobiliers. Depuis 2007, le festival a reçu d’importantes subventions fédérales par l’entremise de programmes tels que le Fonds du Canada pour les espaces culturels, le Programme des manifestations touristiques de renom et le Programme de consolidation des arts et du patrimoine canadien. De toute évidence, le gouvernement du Canada a jugé utile d’appuyer le Festival de Stratford parce qu’il est important. Je demande à la Chambre de reconnaître cette importance.
    À part le fait qu’il contribue très sensiblement à l’enrichissement de la culture canadienne, le festival de Stratford constitue une force économique dynamique. Il assure un emploi à temps plein à 3 000 personnes. Il attire des visiteurs des quatre coins du monde, des visiteurs dont les dépenses touristiques renforcent l’économie de la région et y favorisent la prospérité du commerce de détail, du secteur de la restauration et de l’industrie de l’accueil. Dans l’ensemble, le festival de Stratford engendre chaque année une activité économique d’une valeur approximative de 140 millions de dollars. Sa contribution à l’économie du Sud-Ouest de l’Ontario est donc considérable.
    Tous les gens qui participent à la réalisation annuelle du festival, depuis son inauguration en 1953, y prennent part à cause de leur amour des arts. Forts de cette passion, ces gens se dévouent pour présenter des spectacles de qualité qui leur permettent de partager leur amour des arts et, par-dessus tout, de divertir tous les visiteurs qui assistent au festival chaque année.
    Ma circonscription, Perth—Wellington, a été enrichie par la présence du festival de Stratford. Au cours de la dernière décennie, Stratford s’est constamment classée parmi les villes du Canada qui ont la meilleure qualité de vie. Elle a récemment été classée parmi les collectivités les plus intelligentes du monde. Le récent établissement à Stratford du campus des médias numériques de l’Université de Waterloo ne se serait probablement pas produit en l’absence de ce festival de calibre mondial.
    Les braves gens de Stratford et des collectivités environnantes ont, depuis des décennies, accueilli des visiteurs venus de partout pour assister au festival et qui reviennent encore et encore, quand ils ne décident pas de s’établir dans la ville. Cela a permis à des collectivités, des cultures et des industries uniques en leur genre de se développer. Des quartiers de la ville et des villes environnantes ont pu présenter, préserver et enrichir leur propre patrimoine et leurs propres manifestations culturelles. Les gens qui sont venus travailler et vivre à Stratford ont parcouru tout le pays, diffusant et renforçant notre culture artistique et exportant nos connaissances théâtrales aux quatre coins du monde.
(1800)
    Le Birmingham Conservatory for Classical Theatre est un exemple de ce que fait le Festival de Stratford pour valoriser la communauté artistique au Canada. Le conservatoire a été créé pour inculquer à des acteurs talentueux les exigences rigoureuses de l’interprétation du théâtre classique. Chaque année, un certain nombre de diplômés du programme de théâtre se voient offrir des contrats au Festival de Stratford, une fois qu’ils ont achevé leurs études au conservatoire.
    À l’étranger, le Festival de Stratford s’est engagé dans l’initiative Sharing a Dream, un projet de développement international à Suchitoto, au Salvador. Cette région du Salvador est le théâtre de graves actes de violence depuis plusieurs décennies, et elle manque désespérément d’espaces et d’infrastructures culturels. L’objectif du projet est de reproduire les conditions dans lesquelles le Festival de Stratford s’est développé il y a plus de 60 ans, afin d’aider les habitants de Suchitoto à s’épanouir et afin de transformer la ville en un centre artistique autonome en Amérique centrale.
    Le Festival de Stratford a encouragé un grand nombre de personnes à lancer leur propre festival communautaire, en théâtre ou dans une autre discipline artistique. Le festival a contribué à convaincre les Canadiens qu’ils peuvent être des ambassadeurs culturels et qu’ils ont des choses importantes à dire. En 1952, lorsque le fondateur du Festival de Stratford, Tom Patterson, a présenté au conseil municipal de Stratford son projet de mettre sur pied un festival shakespearien, il a reçu une subvention de 125 $ pour retenir les services de conseillers artistiques. Grâce au travail acharné, au dévouement et à l’optimisme d’innombrables travailleurs et bénévoles, la subvention de 125 $ a donné lieu à un festival culturel de renommée mondiale, qui permet de créer et de préserver des milliers d’emplois locaux, tout en injectant des millions de dollars dans l’économie.
    Cette motion est un hommage à la contribution à la fois économique et culturelle que Tom Patterson et d’innombrables personnes qui ont participé au Festival de Stratford ont apportée au Canada. J’ajoute que l’adoption de cette motion sera pour le festival un outil de promotion très précieux. En effet, en conférant au Festival de Stratford cet insigne honneur, nous donnerons aux organisateurs la possibilité de dire au monde entier que ce festival revêt une importance culturelle et économique tellement grande pour notre pays qu’il a été reconnu par le Parlement du Canada.
    Pour toutes ces raisons, je demande à la Chambre des communes de rendre hommage au Festival de Stratford et de lui accorder la distinction spéciale qu’il mérite depuis longtemps. J’encourage vivement tous les députés à appuyer cette motion.
(1805)
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue d’avoir présenté cette motion. Le Festival de Stratford est en effet un joyau précieux de la culture canadienne. Nous nous en enorgueillissons tous.
    Compte tenu de la créativité artistique du festival et de sa contribution à notre identité culturelle et à notre économie, j’aimerais savoir si le député d’en face s’inquiète de voir que, depuis 2006, le financement accordé au Conseil des Arts a diminué de 2,5 % ? Le député serait-il favorable à un retour au financement de 2006 et à l’octroi d’un budget pour de nouvelles tournées internationales, qui permettrait à nos artistes de se produire sur des scènes internationales?
    Monsieur le Président, les fonds du Conseil des Arts du Canada n’ont pas diminué. Une hausse appréciable lui a même été consentie en 2006, soit une cinquantaine de millions de dollars. En ce moment, le Conseil des Arts du Canada reçoit environ 180 millions de dollars, qu’il distribue aux artistes comme bon lui semble.
    Monsieur le Président, je sais gré au député d'avoir présenté cette motion au sujet de Stratford. Nous pouvons parler des retombées économiques et culturelles des festivals de cette nature au niveau local. Il est rassurant de voir des députés intervenir à la Chambre pour reconnaître ces apports qui aident à créer le tissu social et économique de nos collectivités. La question que je pose au député se présente plutôt comme une affirmation de mon cru, et je voudrais voir s’il veut ajouter d’autres observations au sujet de sa motion.
    Monsieur le Président, je voudrais revenir sur les 125 $ que Tom Patterson a reçus en 1952. Il avait demandé 100 $ au conseil pour pouvoir se rendre à New York et y demander des conseils sur la façon de lancer le festival. Le conseil a estimé que 100 $ ne suffiraient pas et il a majoré la subvention à 125 $. L’idée du festival a surgi parce que les installations ferroviaires allaient quitter Stratford. Le CN y avait des ateliers de réparation de locomotives. M. Patterson savait que l’économie de la ville en souffrirait. Cette petite idée a grandi au point de devenir le Festival de Stratford, et le Sud-Ouest de l’Ontario a maintenant une activité économique qui vaut en tout 140 millions de dollars.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue et voisin de cette excellente initiative qui permet de reconnaître Stratford. J’y ai vu un grand nombre de pièces depuis l’époque de l’école secondaire. Nous reconnaissons volontiers que les retombées culturelles et économiques de Stratford sont extraordinaires.
    Mon collègue a parlé d’un village situé à Suchitoto, au Salvador. Le Festival de Stratford a un partenariat avec ce village. Je voudrais en savoir un peu plus sur cette initiative. J’ai de très bons amis qui viennent du Salvador, et c’est un pays que j’aime. Je voudrais que mon collègue explique un peu plus de quoi il s’agit.
    Monsieur le Président, le projet de Suchitoto est un programme qui s’appelle « Sharing a Dream ». Il est parrainé par le gouvernement du Canada, le Festival de Stratford et les Salvadoriens. On a regroupé des membres de gangs et des chômeurs et non seulement on en a fait des acteurs, mais on a aussi créé une compagnie théâtrale. Stratford envoie là-bas non seulement des acteurs lorsqu’il y a des périodes de congé, mais aussi des machinistes, des charpentiers, des électriciens et des éclairagistes. On dispense à des Salvadoriens une formation d’éclairagiste et d’électricien. Après avoir passé un ou deux ans dans ce cadre, ils obtiennent un emploi. Ce projet a aidé à mettre fin à des guerres entre gangs et il a eu un effet très positif. Ce travail est tout à l’honneur du festival et du gouvernement.
(1810)
    ×Monsieur le Président, je suis très heureuse d'intervenir à la Chambre aujourd'hui pour parler de la motion proposée par le député de Perth—Wellington. La motion se lit comme suit:
    Que la Chambre reconnaisse la contribution culturelle et économique spéciale du Festival de Stratford à la municipalité de Stratford, au Sud-Ouest de l’Ontario et au Canada depuis sa fondation en 1953.
    Bien entendu, nous devons remercier chaleureusement Tom Patterson, un journaliste de Stratford qui a vu sa ville souffrir du départ de l'industrie ferroviaire et qui rêvait d'en faire une destination culturelle en créant un festival de théâtre consacré aux oeuvres de William Shakespeare. En 1952, M. Patterson a reçu une subvention de 125 $ du conseil municipal de Stratford pour commencer à concrétiser son rêve. L'aventure débuta sous la direction de Harrison Showalter, un fabricant local de boissons gazeuses, qui présidait le sous-comité de la Chambre de commerce responsable du projet.
    Au printemps de la même année, avec l'aide de Dora Mavor Moore, une pionnière du théâtre canadien, le comité réussit à embaucher le légendaire directeur britannique Tyrone Guthrie pour occuper le poste de premier directeur artistique du festival. L'enthousiasme de Guthrie à l'idée de produire les oeuvres de Shakespeare dans un théâtre à avant-scène prolongée révolutionnaire fut contagieux au point d'attirer Alec Guinness. Celui-ci participa à la représentation inaugurale de Richard Ill au festival, le 13 juillet 1953, sur une scène créée selon les spécifications de Guthrie par la conceptrice de théâtre de renommée mondiale Tanya Moiseiwitsch. Le premier théâtre était logé sous une tente en toile géante.
     La deuxième production de la saison inaugurale est une version modernisée de Tout est bien qui finit bien, dirigée par Guthrie. Les deux productions font l'éloge de la critique, et la demande de billets est si grande que l'on décide de prolonger de deux semaines la saison de quatre semaines initialement prévue. Le rêve de Tom Patterson devient réalité.
     Robertson Davies, le célèbre romancier, dramaturge et critique canadien, a salué le Festival et en a souligné « l'importance historique, non seulement pour le Canada, mais aussi pour tous les endroits où le théâtre est pris au sérieux, c'est-à-dire pour tous les pays civilisés du monde. »
    J'ajouterais que, même si nous faisons parfois du théâtre à la Chambre, cette théâtralité ne nous distrait pas de l'importante motion qui nous occupe aujourd'hui.
    Au terme de la quatrième saison du festival, en 1956, la tente est démontée pour la dernière fois et l'on commence à travailler à une salle permanente qui sera érigée autour de la scène Moiseiwitsch. Conçu par l'architecte Robert Fairfield, le nouvel édifice est à l'époque l'un des bâtiments les plus originaux au monde pour les arts de la scène. Le tracé circulaire de son plan d'étage et son toit évoquant les pointes d'une tarte rendent un vibrant hommage au chapiteau d'origine du festival.
    J'aimerais souligner qu'une grande partie de l'information que j'ai obtenue en vue du débat sur la motion d'aujourd'hui provient du personnel du Festival de Stratford. Je tiens à remercier les archivistes et les historiens du festival dont le travail est de toute évidence fait avec amour. Je félicite l'actuelle directrice du festival, Anita Gaffney, et je la remercie de son aide et de l'information qu'elle m'a fournie au sujet du festival en vue du débat d'aujourd'hui.
    Le théâtre permanent a ouvert ses portes le 1er juillet 1957 pour la première représentation de Hamlet, avec Christopher Plummer dans le rôle-titre. Le festival a remporté un tel succès que, en 1956, il a commencé à louer l'Avon Theatre de Stratford pour des productions sans lien avec Shakespeare, y compris des productions musicales, des concerts et des projections cinématographiques.
    En 1971, le festival a établi sa troisième scène, qui a été rebaptisée en 1991 en l'honneur de Tom Patterson. En 2002, la quatrième scène du festival a été créée au Studio Theatre, qui a ouvert sa première saison avec de nouvelles oeuvres canadiennes. Depuis sa première saison, le festival de Stratford a servi de référence non seulement pour ses productions des oeuvres de Shakespeare, de Molière, d'auteurs de la Grèce antique et d'autres grands dramaturges du passé, mais également pour ses productions d'oeuvres de grands maîtres du XXe siècle comme Samuel Beckett, Anton Tchekhov, Eugene O'Neill et Tennessee Williams.
    Outre ses productions renommées d'opérettes et de spectacles musicaux, le festival a présenté — souvent pour la toute première fois — des oeuvres composées par des auteurs canadiens exceptionnels et d'autres dramaturges contemporains. Le festival a mis en vedette les plus grands acteurs, metteurs en scène et concepteurs du Canada et du monde entier, et Stratford a eu le bonheur d'accueillir sur ses magnifiques scènes des artistes de renommée internationale comme Brian Bedford, Douglas Campbell, Brent Carver, Hume Cronyn, Brian Dennehy, Colm Feore, Megan Follows, Lorne Greene, Julie Harris, Martha Henry, William Hutt, Loreena McKennitt, Richard Monette, John Neville, Nicholas Pennell, Sarah Polley, Douglas Rain, Kate Reid, Paul Scofield, William Shatner, Maggie Smith, Jessica Tandy, Peter Ustinov, et d'autres artistes parmi les plus brillants au monde.
(1815)
    La vision de Tom Patterson se perpétue aujourd'hui dans le cadre du Festival Shakespeare de Stratford. La Commission canadienne du tourisme a d'ailleurs inclus ce festival dans la collection d'expériences canadiennes distinctives. Depuis sa création, le festival a attiré plus de 26 millions de visiteurs. Il engendre chaque année 139 millions de dollars d'activité économique, crée des milliers d'emplois et génère des recettes fiscales de 75 millions de dollars.
    Plus de 95 % des visiteurs de la région assistent au Festival de Stratford. Le festival, dont le budget de fonctionnement annuel totalise 56 millions de dollars, reçoit des fonds du Conseil des arts du Canada et de Patrimoine Canada. Ces fonds, de même que les recettes au guichet, servent à appuyer des programmes de formation pour les acteurs et les metteurs en scène, la collectivité locale et les personnes qui offrent des produits et des services dans la région.
    Les néo-démocrates savent qu'il est important d'investir dans les arts. En effet, ces investissements ont une valeur intrinsèque, car ils contribuent à bâtir notre identité culturelle. Nous savons aussi que ces investissements ont une valeur économique, étant donné qu'ils créent de bons emplois et génèrent des revenus pour les collectivités locales et les petites entreprises.
     Le programme du NPD prévoit aussi le rétablissement du soutien à la culture canadienne, qui a diminué au cours des 20 dernières années, à cause de la négligence des libéraux et des conservateurs. La Coalition canadienne des arts indique que des compressions permanentes de 200 millions de dollars dans les dépenses relatives aux arts et à la culture seront mises en oeuvre en 2014-2015 en ce qui concerne le portefeuille du Patrimoine canadien. Ces compressions s'ajoutent à celles prévues dans les deux derniers budgets des conservateurs, qui ne sont pas encore entièrement mises en oeuvre. Les budgets de Téléfilm Canada, de l'Office national du film et de Bibliothèque et Archives Canada seront notamment réduits, mais la majorité des compressions visent la Société Radio-Canada.
     Par ailleurs, même si le gouvernement se réjouit d'avoir protégé le financement du Conseil des arts du Canada, en réalité, au prorata de la population, le financement que le gouvernement a accordé au conseil a diminué de 2,5 % depuis l'exercice 2005-2006.
    Toutes ces institutions ont un lien privilégié avec le Festival Shakespeare de Stratford. La CBC a déjà filmé et diffusé des productions de Shakespeare au festival. Afin de rejoindre un plus large auditoire, le festival a lancé de nouvelles initiatives excitantes; par exemple, certains spectacles seront diffusés dans des salles de cinéma des quatre coins du pays.
    Il faut que le gouvernement donne de l'argent sonnant au milieu des arts du Canada pour en assurer le succès. Ces compressions rétrogrades étouffent les libres penseurs et elles nuisent à la créativité et au renforcement de l'esprit communautaire. Concrètement, les compressions dans la culture et les arts entraînent la fermeture de commerces et créent du chômage dans les régions où les gens gagnent leur vie grâce aux arts. Ces compressions nuisent aussi à la présence du Canada sur la scène internationale.
    Je trouve incroyable que le gouvernement conservateur ne comprenne pas qu'un milieu des arts dynamique stimule l'économie, et, soyons honnêtes, il en allait aussi de même pour les gouvernements libéraux précédents; ce sont eux d'ailleurs qui ont imposé les plus grandes compressions à CBC/Radio-Canada et qui n'ont pas respecté leur promesse d'en rétablir le financement.
    Le NPD propose d'augmenter le financement du Conseil des Arts du Canada, et il envisage de créer un nouveau fonds pour faciliter les tournées internationales. Le NPD appuie ces mesures, car elles stimulent énormément les activités économiques et attirent les touristes. Il s'agit d'investissements importants pour les arts au pays et pour les Canadiens.
    Les institutions tel le Festival de Stratford sont absolument essentielles à la culture, à l'identité et à l'économie du pays. En plus de divertir, le festival a d'importantes répercussions culturelles, sociales et économiques. Il contribue à l'éducation des futures générations d'étudiants, d'artistes, d'acteurs et de metteurs en scène.
    Le soutien aux artistes et aux créateurs est crucial si l'on veut que l'économie prospère, et l'aide accordée aux événements culturels comme le Festival Shakespeare de Stratford est essentielle. Pour reprendre les mots de Prospéro dans La Tempête: « Nous sommes faits de la même étoffe que les songes, et notre petite vie, un somme la parachève. » Les réflexions de Shakespeare sur notre mortalité trouvent encore écho aujourd'hui. Les gouvernements se succèdent, mais le théâtre, sa valeur et le Festival Shakespeare de Stratford, eux, survivent. Il nous incombe à nous tous de protéger ce qui nous est si précieux afin d'en assurer la pérennité.
(1820)
    ¼Monsieur le Président, en cette journée où Ottawa est ensevelie sous la neige, je tiens à vous prévenir que mon intervention sera tout sauf un Conte d'hiver. Je vais plutôt vous raconter une histoire qui a débuté il y a plus de 60 ans, le 13 juillet 1953 pour être exact. Ce jour-là, ce qui n'était qu'un Songe d'une nuit d'été dans l'imaginaire du journaliste Tom Patterson est devenu réalité.
    Les amateurs de Shakespeare parmi mes collègues auront déjà compris de quoi je vais parler. Au nom du caucus libéral, je tiens à dire, en ma qualité de porte-parole en matière de patrimoine canadien, que nous allons appuyer la motion du député de Perth—Wellington, qui va comme suit:
    Que la Chambre reconnaisse la contribution culturelle et économique spéciale du Festival de Stratford à la municipalité de Stratford, au Sud-Ouest de l'Ontario et au Canada depuis sa fondation en 1953.
    La motion du député ministériel tombe d'autant mieux que, jusqu'ici, l'incursion du gouvernement en territoire culturel relevait plutôt de la Comédie des erreurs. Espérons qu'on n'en fera pas Beaucoup de bruit pour rien, afin que les artistes et les créateurs culturels du Canada puissent enfin pousser un soupir de soulagement et s'exclamer: « Donc, voici l'hiver de notre déplaisir. »

[Français]

    Au fait, pourquoi déposer cette motion? La question se pose, car un festival aussi réputé et prestigieux que le Festival de Stratford n'a certainement pas besoin d'une telle motion. La renommée de ce festival va bien au-delà de toutes les motions que la Chambre pourrait lui consacrer.
    La Chambre n'a jamais senti le besoin de débattre d'une motion reconnaissant la contribution économique et culturelle du Carnaval de Québec ou du Stampede de Calgary. Il ne viendrait pas à l'idée au parlement autrichien de reconnaître que le Festival de musique de Salzbourg est un grand festival. Cela va tellement de soi. De même, dire que Stratford est un brillant festival, c'est dire une évidence aussi incontestable que de dire que le Soleil brille le jour et non la nuit.
    Alors, pourquoi déposer cette motion? Ce n'est certainement pas non plus pour commencer un débat. Il n'y a pas matière à débattre, car aucune personne raisonnable ne pourrait être contre cette motion, c'est-à-dire contre le Festival de Stratford. Y a-t-il un seul député qui dira, pour citer non pas Shakespeare, mais Molière, « cachez ce festival, que je ne saurais voir »?
    Personne, bien sûr, ne dira cela du Festival de Stratford, et certainement pas un Québécois, compte tenu de la présence de tous les Québécois qui se sont produits à ce festival, à commencer par l'illustre Jean Gascon, qui en fut le directeur de 1968 à 1974.
    Remarquons que, si l'on y tient, je peux toujours trouver matière à débat. J'ai de l'imagination pour cela. Je pourrais dire, par exemple, que la motion telle que proposée ne rend pas pleinement justice au Festival de Stratford.

[Traduction]

    Pour être bien certain que Tout est bien qui finit bien, j'ajouterais en effet quelques mots à la motion du député de Perth—Wellington, comme suit: Que la Chambre reconnaisse la contribution culturelle et économique spéciale du Festival de Stratford à la municipalité de Stratford, au Sud-Ouest de l'Ontario, au Canada et au reste du monde depuis sa fondation en 1953.

[Français]

    Ce que je crois, c'est que le député de Perth—Wellington, en déposant cette motion, a simplement voulu nous faire un cadeau d'adieu avant de quitter la vie politique. Il a voulu nous faire plaisir à nous, ainsi qu'à tous ceux qui se dévouent pour le Festival de Stratford et à tous ceux qu'il aime. Alors, j'en profite et je m'abandonne au pur bonheur de déclarer toute l'admiration que j'éprouve pour le Festival de Stratford.
    Pour le plaisir de la chose, je continuerai à émailler ma tirade de citations shakespeariennes tout en demandant à mes collègues anglophones d'être indulgents pour mon accent qui, malgré tous mes efforts, restera toujours trop proche de celui de Molière ou de Tremblay pour être correctement shakespearien.
(1825)

[Traduction]

    Du Festival de Stratford, personne ne pourra crier aux Peines d'amour perdues, puisqu'il remplit son mandat à merveille: être une figure de proue du théâtre classique en Amérique du Nord, avec nul autre que Shakespeare à la barre.
    Bien qu'il s'affaire principalement à divertir son public avec des productions d'oeuvres théâtrales classiques, contemporaines et musicales, le festival s'est également brillamment acquitté d'au moins trois autres missions.
    Tout d'abord, le festival forme, développe et cultive le talent artistique au Canada. Il exploite et cultive le grand talent que notre pays a à offrir.
    Ensuite, les festivals comme le Festival de Stratford contribuent considérablement au renforcement des liens sociaux et communautaires qui nous unissent. Les efforts conjoints visant à organiser de tels festivals et la joie partagée des participants et des spectateurs le jour de l'ouverture du festival et à chaque production resserrent les liens communautaires.
    Pas plus tard que le mois dernier, j'ai eu le plaisir de visiter la magnifique ville de Stratford, de rencontrer des membres de son milieu artistique et culturel et de m'entretenir avec certains de ses citoyens. Ce qui m'a le plus frappé, c'est combien le festival est enraciné dans l'identité de chaque résidant et combien il a galvanisé leur sens de la communauté
    Enfin, les festivals artistiques stimulent la croissance économique. En tant que premier employeur en importance en ville, le Festival de Stratford contribue considérablement à la nature multidimensionnelle de la ville et de la région avoisinante, attirant des millions de touristes ainsi que des organisations artistiques et des entreprises, contribuant considérablement à l'activité économique, aux investissements et aux perspectives d'emploi.
    Au nom du Parti libéral du Canada, je remercie tout ceux qui participent à l'organisation du Festival de Stratford d'avoir su promouvoir la culture canadienne sur la scène internationale avec tant de brio et d'avoir mis en valeur le potentiel artistique et culturel du Canada sur la scène internationale. Les vers suivants écrits par le Barde dans Le Soir des Rois s'appliquent parfaitement à la pérennité du Festival de Stratford:
    [...] mais ne redoute pas la grandeur: quelques-uns naissent dans la grandeur, d’autres la conquièrent, et elle se donne librement à d’autres.
    Ce n'est pas la grandeur qui s'est donnée librement au Festival de Stratford. C'est grâce à la vision, au talent et l'acharnement qu'il a su la conquérir.
    Que les Canadiens et les habitants du monde entier célèbrent le grand succès du festival. Qu'ils viennent en grand nombre participer à cette expérience inimitable de calibre mondial.
    N'en déplaise à l'auteur de La pièce écossaise, je rappellerais ce qui suit à tous mes collègues: Voter ou ne pas voter en faveur de la motion M-545, telle n'est pas la question. Il n'y a aucun doute que nous devons voter pour.
    Monsieur le Président, je ne sais si mon collègue, qui est le porte-parole du Parti libéral au comité du patrimoine canadien, a voulu me couper l’herbe sous le pied ou si je vais quand même répéter des vers qu’il a déjà cités, non seulement parce qu’ils ont été écrits par l’immense dramaturge qu’était Shakespeare, mais aussi parce qu’ils illustrent parfaitement la question qui nous intéresse ce soir.
    Amis, parlementaires, concitoyens, je tiens non seulement à féliciter le député de Perth—Wellington, mais aussi à vous demander votre appui à la motion M-545:
    Que la Chambre reconnaisse la contribution culturelle et économique spéciale du Festival de Stratford à la municipalité de Stratford, au sud-ouest de l’Ontario et au Canada, depuis sa fondation en 1953.
    Mon bon ami a raison: nous devons décider si nous appuyons ou non la motion; telle est la question ce soir. En la présentant, le député a souligné l’importance de la contribution du secteur culturel à l’économie canadienne, par la création d’emplois. Le Festival de Stratford est un exemple exceptionnel d’une organisation qui a eu, historiquement, un impact culturel incroyable aux niveaux local, national et international.
    J’aimerais dire quelques mots sur l’impact économique de ce festival, surtout pour la ville de Stratford. En 2010, une étude du Conference Board du Canada indiquait que cette contribution atteignait presque 140 millions de dollars. C’est important quand on sait que la population de cette ville dépasse à peine 30 000 personnes.
    En outre, 76,5 millions de dollars vont directement dans les caisses des entreprises locales. Ces revenus profitent à diverses industries, notamment les hôtels, les cafés couettes, les producteurs locaux de fromages et de produits agricoles, ainsi que les commerces et les restaurants locaux. Ces entreprises locales sont l’épine dorsale de nos collectivités. C’est grâce à elles qu’elles peuvent se développer.
    Le Festival de Stratford a atteint cet objectif en jouant la carte de la collaboration avec les entreprises locales, de la valorisation des œuvres artistiques dans la collectivité, et de l’effort acharné pour concrétiser cette vision.
    Le gouvernement du Canada est fier d’appuyer le festival depuis de nombreuses années. Notre gouvernement, comme ses prédécesseurs, finance des organisations artistiques afin que les Canadiens puissent apprécier la culture et le patrimoine qu’ils ont en commun. Nous reconnaissons que les arts et la culture nous forgent une identité qui nous rend fiers d’être Canadiens.
    La reconnaissance par cette Chambre de la contribution culturelle et économique du Festival de Stratford est aussi la reconnaissance de l’impact positif que peuvent avoir les partenariats entre le secteur privé et des organisations à but non lucratif : la création d’une organisation artistique dynamique, novatrice et résiliente qui a un impact durable et positif sur la société, la culture et l’économie de la collectivité.
    Depuis 2006, le gouvernement a investi des sommes importantes dans le Festival de Stratford, en finançant des programmes du ministère du Patrimoine canadien et du Conseil des Arts. Ce financement permet de créer des milliers d’emplois en Ontario, y compris 2 500 rien qu’à Stratford.
    Si l'on tient compte des retombées économiques du festival qui s'élèvent à 139 millions de dollars, on en conclut que le rendement de l'investissement est élevé. Nous savons que l'argent que nous investissons donne des résultats économiques concrets, et les responsables du Festival de Stratford cherchent toujours à garantir sa viabilité à long terme en envisageant des moyens de créer d'autres sources de revenus.
    La fondation du Festival Shakespeare de Stratford s'est servie du programme pour obtenir le soutien du secteur privé et pour créer le fonds de dotation du festival, qui est maintenant évalué à plus de 62 millions de dollars, ce qui en fait l'un des fonds de dotation détenus par des organisations culturelles sans but lucratif les plus importants du Canada.
    J'encourage les députés à appuyer la motion, afin de reconnaître le Festival de Stratford, l'immense contribution que notre secteur culturel apporte à nos collectivités avec l'aide de ses partenaires publics et privés, et le travail acharné du député de Perth—Wellington.
    Je vais conclure mes observations précocement afin de contribuer à accélérer l'adoption de la motion, mais j'ai une dernière réflexion à vous communiquer. Avant de clore mon intervention avec cette dernière pensée, je tiens à mentionner à quel point j'ai aimé débattre avec le député de Perth—Wellington pour déterminer si le Festival Shaw à Niagara ou le Festival de Stratford offre la représentation théâtrale et artistique la plus épique du Canada.
    Une voix: Nous pouvons partager cet honneur.
    M. Rick Dykstra: Monsieur le Président, j'ai entendu mes collègues d'en face dire, d'une façon tout à fait dénuée de partisanerie, que nous pouvons partager cet honneur.
(1830)
    Je pense que la culture, la scène théâtrale et le patrimoine de Niagara et de Stratford sont des modèles d'excellence pour le reste du pays et du monde.
    Finalement, je voudrais dire au député de Perth—Wellington, qui a annoncé qu'il prendrait sa retraite à la fin de cette législature, que, comme l'a dit Shakespeare: « Il n'est pas d'héritage aussi riche que la vertu. » Si c'est vrai, le député laisse derrière lui un grand et remarquable héritage, et je suis fier d'avoir siégé avec lui à la Chambre. Le député de Perth—Wellington est un fonctionnaire dévoué, qui a déjà travaillé comme conseiller et pompier au sein de sa collectivité. Il a toujours défendu les intérêts de ses concitoyens et, en présentant cette motion ce soir, il a montré qu'il est aussi un défenseur du Festival de Stratford. Nous sommes reconnaissants de ses efforts, et son absence à la Chambre se fera sentir.
    Pour citer Shakespeare une dernière fois:
    Adieu, [mon très cher frère], porte-toi bien.
    Puissent les éléments être tendres pour toi, et ne te donner
que santé et joie! Porte-toi bien.
    Je veux souhaiter bonne chance à mon bon ami, le député de Perth—Wellington.
(1835)
    Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui au sujet de la motion à l'étude, que je félicite le député de Perth—Wellington d'avoir présentée.
    Il s'agit d'une motion qui m'enthousiasme tout particulièrement, puisque j'ai été membre de la compagnie du Festival de Stratford en 1992 et 1993.
    Petite anecdote. À l'époque, ma première production était Roméo et Juliette, dans laquelle le rôle de Juliette était joué par Megan Follows, et celui de Roméo, par Antoni Cimolino, qui est aujourd'hui le directeur artistique du festival.
    J'appuie entièrement la motion, et je vais concentrer mes observations sur la valeur intrinsèque des institutions telles que le Festival de Stratford.
    Comme nous l'avons entendu, le Festival de Stratford a une longue histoire ponctuée de nombreux épisodes intéressants. Parti de l'idée d'un citoyen de Stratford, Tom Patterson, et d'un budget de 125 $, le festival est devenu, grâce aux efforts soutenus, au dévouement et à la vision de ceux qui y ont cru, un événement d'envergure au budget annuel de 56 millions de dollars.
    Cet énorme projet, qui alimente maintenant quatre scènes à Stratford, a commencé sous un chapiteau. Né du rêve d'un seul homme, qui a su mobiliser des gens tels que sir Tyrone Guthrie et sir Alec Guinness pour le concrétiser, le festival est aujourd'hui une entreprise qui génère des retombées économiques de plus de 139 millions de dollars dans la région de Stratford. À ce point-ci, il importe de souligner la valeur intrinsèque des arts et de la culture ainsi que du Festival de Stratford.
    Comme je l'ai mentionné, le budget s'élève à quelque 56 millions de dollars par année, mais seulement 2,3 % de ce budget est financé par des subventions gouvernementales. Les subventions de projet alloués à l'occasion au festival de Stratford ne représentent que 2,3 % de son financement de base. Il génère donc des sommes incroyables.
    Cela ne veut pas dire qu'il devrait obtenir plus d'argent. Cela veut simplement dire que le retour sur investissement du gouvernement pour chaque dollar dépensé pour les arts et la culture est considérable. Ce n'est pas du un pour un, ou du un pour cinq, mais plutôt du un pour dix.
    Il ressort d'un rapport publié par le Conference Board en 2007 que les arts et la culture génèrent une activité économique de 85 milliards de dollars au Canada, alors que, à la même époque, le financement des arts s'élevait à quelque 8 milliards de dollars.
    Le festival de Stratford est né d'un investissement de 125 $ et s'est transformé en entité générant 139 millions de dollars de recettes. Pour aller un peu plus loin, la valeur du travail qu'accomplit le festival de Stratford va bien au-delà de la simple valeur pécuniaire. Chaque année, le festival engage près de 200 acteurs. Il y a près de 100 équipes créatives, 250 artisans, 80 membres du personnel de scène, 200 membres du personnel général et 170 membres du personnel administratif et responsable du financement.
(1840)
    Le Festival de Stratford crée plus de 2 500 emplois chaque saison, et il en est ainsi depuis 1953. Les chiffres étaient plus modestes au début, mais ils sont devenus ce qu'ils sont aujourd'hui.
    Ce festival a surtout fait émerger d'immenses talents, notamment de grandes figures canadiennes comme Len Cariou, Brent Carver, Megan Follows, le très apprécié William Shatner, nos chers Christopher Plummer, Douglas Campbell, Colm Feore, Eric McCormack, et j'en passe. Il a accueilli des sommités internationales comme Peter Ustinov. Il y a eu aussi John Colicos, Hume Cronyn, Uta Hagen, James Mason, Brian Bedford et Nicholas Pennell, avec qui, pour certains, j'ai déjà eu le plaisir de travailler. Voilà le calibre des artistes qui sont montés sur les planches de Stratford au fil des ans.
    Ce que je trouve extraordinaire, c'est l'apport du festival à la communauté artistique et à la société en général. Il est en effet à l'origine de la création du Conservatoire de Birmingham, où de jeunes acteurs peuvent développer leur talent en jouant aux côtés d'artistes réputés et en suivant leurs cours. En effet, Patrimoine canadien accorde 300 000 $ au festival pour que ces rencontres puissent avoir lieu.
    Le principe « donnez au suivant » est très important pour assurer la longévité des arts et de la culture dans notre pays. C'est une chose de créer des oeuvres dont les touristes et les spectateurs se souviendront, mais c'est autre chose de canaliser cette énergie pour donner à la génération suivante d'acteurs, de metteurs en scène et de dramaturges.
    Stratford est à l'origine de la création ou de la première de nombreuses pièces, dont Harlem Duet de Djanet Sears; The Swanne, une immense trilogie de Peter Hinton, ancien directeur artistique du Centre national des arts; et de Fair Liberty's Call de Sharon Pollock.
    Il est important que nous et le gouvernement comprenions la valeur des arts et de la culture, car pour chaque dollar que nous enlevons à ce secteur, nous retirons 10 $ de l'économie. Chaque dollar que nous investissons dans les arts et la culture ajoute à la valeur du travail accompli une conscience sociale, notre identité et une force de soi purement canadienne.
    Le Festival de Stratford réussit ce tour de force depuis 62 ans. Je félicite les directeurs artistiques d'hier et d'aujourd'hui. Je félicite tous ceux qui travaillent au Festival de Stratford et tous ceux qui ont contribué à le bâtir. Je félicite aussi mon collègue d'en face d'avoir présenté la motion.
    Monsieur le Président, alors que je présente pour la dernière fois une motion ou un projet de loi d'initiative parlementaire, je suis touché de certains des bons mots qu'on a eus à mon intention ce soir.
    Au fil des ans, le Festival de Stratford et sa gestion ont été l'une des choses les plus faciles à appuyer et à promouvoir dans ma circonscription. Je ne vais pas prononcer de grand et long discours parce que je sens que toutes les personnes ici présentes sont favorables aux arts et au théâtre à Stratford. C'est merveilleux.
    Sur ce, je vais simplement remercier toutes les personnes qui ont appuyé cette motion. Je les verrai au théâtre, j'en suis persuadé. Le Festival de Stratford invite tout les députés à visiter Stratford. C'est une magnifique partie du Sud-Ouest de l'Ontario qui offre le meilleur théâtre, non seulement du Canada, mais du monde entier.
(1845)
    Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
    Des voix: D'accord.
    Le président suppléant (M. Bruce Stanton): Je déclare la motion adoptée.

    (La motion est adoptée.)

[Français]

    Conformément à l'ordre adopté le mercredi 18 février 2015, la Chambre se formera maintenant en comité plénier pour étudier la motion no 16, sous la rubrique des affaires émanant du gouvernement.
    Je quitte maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en comité plénier.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

La montée de l'antisémitisme

    (La Chambre se forme en comité plénier, sous la présidence de M. Bruce Stanton, pour étudier l'affaire du gouvernement no 16.)

    Que le comité prenne note de la montée inquiétante de l'antisémitisme dans le monde, dont il a été question à une réunion de l’Assemblée générale des Nations Unies le 22 janvier 2015.
    Avant d'entamer le débat de ce soir, je tiens à rappeler aux députés le déroulement des délibérations. Chaque député qui prendra la parole se verra accorder 10 minutes pour le débat, suivies de 10 minutes pour les questions et observations. Conformément à l'ordre adopté le lundi 23 février 2015, les députés pourront partager leur temps de parole avec un collègue. Le débat prendra fin après quatre heures ou lorsque plus aucun député ne demandera la parole.
    Je rappelle aux députés que, lors d'un débat exploratoire, ils sont libres d'occuper le siège de leur choix.
    Nous pouvons maintenant commencer le débat exploratoire.

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie de l'occasion que vous me donnez de commencer ce débat important au comité de la Chambre concernant la vague croissante d'antisémitisme que nous voyons à l'échelle internationale.
    Je me permettrai de commencer par un mot de remerciement pour mon honorable collègue le député de Mont-Royal, qui a suggéré le débat de ce soir à la suite de son implication en tant que rapporteur à la session spéciale de l'Assemblée générale de l'ONU, à New York, il y a trois semaines. Je me permettrai également de souligner le bon travail de mon collègue de Lanark—Frontenac—Lennox and Addington qui, avec notre ancien collègue, Mario Silva, a coprésidé, il y a quelques années, une enquête des parlementaires de tous les partis sur la question de antisémitisme, ici, au Canada.
(1850)

[Traduction]

    Ce soir, nous sommes réunis en comité plénier pour débattre de la forme de haine la plus ancienne, la plus durable et la plus pernicieuse: l'antisémitisme.
    Malheureusement, l'histoire de l'humanité est ponctuée de diverses formes de xénophobie et de sectarisme à l'encontre de minorités religieuses et ethniques, parmi tant d'autres. Cependant, il y a une forme particulière de haine ancrée dans l'histoire, haine qui semble transcender les époques et les cultures et qui est transmise d'une génération à l'autre, d'un siècle à l'autre. Ses origines remontent à l'histoire ancienne, et pourtant, nous en voyons encore des manifestations très modernes et contemporaines. Il s'agit, bien entendu, de ce vieux fléau, de ce mal pernicieux qu'est l'antisémitisme.
    L'esprit rationnel a du mal à concevoir une telle haine irrationnelle, enracinée dans la peur, les préjugés, les mythes et les stéréotypes. Pourtant, nous ne pouvons pas nier l'évidence. Je me souviens qu'en 2009, j'étais allé déposer une couronne sur la fosse commune de Juifs massacrés lors de la « Shoah par balles », dans le ravin de Babi Yar, près de Kiev, en Ukraine. En l'espace de 72 heures, les Einsatzgruppen nazis formés de membres de la SS avaient aligné et abattu, un à un, plus de 30 000 Juifs — hommes, femmes et enfants —, dont le seul crime était d'être des Juifs.

[Français]

    Je dois admettre que, pour moi, le fait d'être là était une sorte de révélation, parce que dans notre esprit populaire, nous pensons à la Shoah comme à quelque chose d'industriel, le meurtre de personnes fait de façon industrialisée. Nous pensons à Auschwitz et à Birkenau. Toutefois, à Babi Yar, on peut voir un lieu où les soldats nazis ont tué les Juifs un par un, une personne à la fois.

[Traduction]

    C'était une tuerie à une échelle individuelle, ce n'était pas un carnage fait de façon industrialisée comme dans les camps de la mort nazis à Auschwitz-Birkenau. Cela m'a fait prendre conscience du degré de haine qui a mené à la Shoah, qui était l'aboutissement d'un siècle d'horreurs inimaginables liées à l'antisémitisme européen, lequel s'était lui-même manifesté au fil des siècles dans les pogroms, les attaques et la destruction de communautés juives.
    Quelques semaines après cette visite à Babi Yar, en Ukraine, je me suis rendu dans la grande métropole de Mumbai, dont la population correspond environ aux deux tiers de celle du Canada. J'y ai visité la maison Chabad-Lubavitch, que le rabbin Holtzberg avait aménagé en refuge pour les voyageurs juifs. Il fournissait un lit, un repas casher et une orientation spirituelle aux jeunes voyageurs juifs qui passaient en Inde.
    J'ai visité cet endroit parce que, quelques semaines auparavant, le rabbin et sa femme, Rivka, avaient été brutalement assassinés par des terroristes djihadistes qui avaient attaqué la ville de Mumbai. Ce qui est étonnant, c'est que ces terroristes ont attaqué de grandes installations comme la gare ferroviaire et l'hôtel Taj, mais qu'ils ont aussi cherché cette petite maison obscure tenue par des Juifs dans une ruelle de cette très grande ville. Je me suis rendu tout en haut, au cinquième étage, et j'ai littéralement marché dans des ruines aux relents de mort et d'antisémitisme. Je pouvais sentir l'odeur de la mort. En montant au dernier étage, j'ai regardé cette ville énorme de 20 millions d'habitants et j'ai songé au fait que, parmi ces 20 millions de personnes, les terroristes avaient ciblé cet endroit. Cette maison était comme un aimant qui attirait leur haine. Pourquoi? Parce qu'elle était habitée par des Juifs. Tout à coup, j'ai fait un lien dans mon esprit. La haine qui a guidé ces terroristes djihadistes antisémites jusqu'à la maison Chabad à Mumbai est la même que celle qui avait incité les Einsatzgruppen d'Hitler à commettre leur massacre à Babi Yar en 1940, la veille de la Pâque juive.
    Ces événements sont reliés. Ils se font écho dans le temps et dans l'histoire. Ce n'est pas une coïncidence si l'antisémitisme européen, qui a mené à la Shoah, se fondait sur certains mythes comme ce qu'on appelle les Protocoles des Sages de Sion. Le fait que des séries sur les Protocoles des Sages de Sion soient encore présentées à la télévision dans des pays arabes comme l'Égypte n'a-t-il pas un côté pervers? N'est-il pas indécent que des écoles dans le monde entier présentent des mythes et des stéréotypes antisémites vils et infâmes à de jeunes enfants, ce qui, à mon sens, est de l'abus pédagogique? Il faut parler franchement de ces situations.
(1855)

[Français]

    Quand nous voyons l'attaque au magasin Hyper Cacher, à Paris, il y a un mois; les attaques contre les synagogues à Copenhague, il y a une semaine; l'attaque au Musée juif de Belgique, à Bruxelles, en novembre dernier; et quand nous voyons les attaques contre les institutions de la communauté juive partout dans le monde, ce que nous voyons, c'est le phénomène du nouvel antisémitisme.

[Traduction]

    Nous avons vu cette transition, de ce vieil antisémitisme ranci en provenance d'Europe à ce nouvel antisémitisme violent et virulent qui se répand partout dans le monde. Ce soir, je m'unis à mes collègues de tous les partis pour condamner l'un et l'autre.
    Le Canada joue un rôle de leader pour combattre le phénomène de la haine. Nous en avons donné la preuve en joignant les rangs de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste et en en assumant la présidence il y a deux ans. Nous déployons des efforts pour sensibiliser les gens au sujet de l'Holocauste. Nous reconnaissons nos propres antécédents antisémites, ce que notre gouvernement a fait en érigeant un monument au Quai 21, en admettant l'iniquité des mesures restrictives d'immigration imposées durant la guerre aux réfugiés européens d'origine juive; en finançant des projets pour conscientiser la génération actuelle et celles qui suivront; en adoptant le principe de la tolérance zéro à l'endroit du sémitisme; et en retirant leur financement à des organismes qui donnent voix à l'antisémitisme sous le couvert de l'antisionisme. Il a toujours été dit que les Juifs n'avaient pas leur place en Europe, et maintenant les nouveaux antisémites affirment que l'on devrait interdire à Israël de prendre sa place dans le concert des nations.
    Nous appellerons ce nouvel antisémitisme par son vrai nom. Voilà pourquoi le Canada a été le premier pays au monde à se retirer du processus tendancieux de Durban II et Durban III, et pourquoi nous avons été fiers d'accueillir la Conférence de la Coalition interparlementaire pour la lutte contre l’antisémitisme, en 2010, — grâce encore une fois en bonne partie au député de Mont-Royal — , laquelle conférence a permis de publier le Protocole d'Ottawa, qui fournit une définition extrêmement utile de l'antisémitisme.
    Pour finir, permettez-moi d'en citer l'extrait suivant:
    Soyons clairs: critiquer Israël ne relève pas de l'antisémitisme, et l'affirmer est faux. Mais faire d'Israël la cible de condamnations et d'opprobres sélectifs — sans parler de nier son droit à l'existence ou de chercher à le détruire — est discriminatoire et haineux […]
    De la même façon que les Canadiens sont solidaires de la communauté juive canadienne, nous sommes solidaires de la communauté juive du monde entier, y compris de ceux qui, chaque jour, mènent une vie empreinte de dignité et de courage, simplement en maintenant un État juif démocratique, l'État d'Israël. Ce sont eux que nous défendons.
    Monsieur le président, je remercie le ministre de son intervention et de son débat passionné entourant l'antisémitisme.
    Je sais que nous avons débattu ici de certains exemples concrets auxquels je ferai allusion dans mes commentaires, mais je pense que nous devrions aussi reconnaître les événements survenus à Montréal aujourd'hui, événements qui nous ont tous choqués. Malheureusement, ces événements se produisent. Les actes posés aujourd'hui à Montréal — des graffitis nazis peints sur des voitures dans l'Ouest de la ville —, nous les condamnons tous unanimement et solidairement.
     Il y a une question que j'aimerais aborder avec le ministre et que j'avais abordée lorsqu'il était ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme. Elle concerne les événements survenus récemment en Europe, et en particulier en Hongrie. Je n'aime pas la façon dont on parle de l'antisémitisme. Dans ses commentaires, le ministre fait allusion à l'ancienne forme et à la nouvelle forme d'antisémitisme. Je suis d'avis qu'il faut l'appeler par son nom. Lorsque nous le voyons, nous le reconnaissons. Ainsi, certains partis politiques, dont un en Hongrie, intègrent l'antisémitisme dans leur programme politique.
    À l'époque où il était ministre de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme, j'ai demandé au ministre si nous ne ne devrions pas examiner notre politique d'immigration à la lumière des menaces qui pèsent sur certaines personnes, comme nous l'avons constaté en Hongrie. Je vais lire une citation et ensuite lui poser une question.
    En mai 2013, le comité des Affaires étrangères a entendu le témoignage de la présidente de Jews Indigenous to the Middle East and North Africa, Regina Waldman. Elle a parlé de ce qu'elle vivait, en tant que juive habitant en Hongrie:
     Personnellement, j'ai été humiliée par l'omniprésence de la police.
    Elle parlait alors de la difficulté de se déplacer dans ce pays.
    Toute la ville a été bloquée par des véhicules de police. Il m'a fallu beaucoup de temps pour venir ici aujourd'hui [...]
    Elle a ajouté, dans son témoignage:
[...] simplement parce que je ne pouvais pas aller dans des endroits où il y avait quelque chose qui rappelle la culture juive, que ce soit un quartier juif ou une synagogue, ni en sortir d'ailleurs.
    Elle ne pouvait même pas aller témoigner devant le comité sans subir de menaces.
    Ma question est très simple. Ne devrions-nous pas tenir compte de ce genre de choses lorsqu'il est question d'immigration et de la politique du gouvernement en matière de pays d'origine sûrs? Il arrive que le gouvernement juge qu'un pays est sûr, mais que des témoignages comme celui-ci laissent entendre que ce n'est pas vraiment le cas. Le ministre ne croit-il pas qu'il faudrait se pencher sur cette question et permettre à des personnes, comme cette amie que j'ai citée et bien d'autres, d'immigrer au Canada en raison de la menace antisémite?
(1900)
    À l'ordre, s'il vous plaît. Avant de donner la parole au ministre, j'aimerais rappeler à tous les députés que la période de questions et d'observations est de 10 minutes. Je sais qu'il y a d'autres députés qui souhaitent poser des questions, et le député vient d'utiliser près de trois minutes. Je vais donner la parole au ministre, mais j'aimerais qu'il donne une réponse plus courte.
    La parole est au ministre du Multiculturalisme.
    Monsieur le président, la question était la suivante: ne devrions-nous pas permettre à des gens d’émigrer de la Hongrie? La réponse est affirmative, bien entendu. Nous recevons des immigrants hongrois tous les ans. Tous les ressortissants de la Hongrie et de tout autre pays du monde sont libres de demander à immigrer au Canada et doivent être traités équitablement aux termes de nos règles.
    Tout comme le député, je condamne l’attitude haineuse de Jobbik, ce parti extrémiste hongrois dont il a parlé et je condamne les manifestations violentes extrêmes de haine qui ont eu lieu en Hongrie. Nous avons abordé ces préoccupations directement avec le gouvernement hongrois. Je les ai abordées directement avec le premier ministre Orban et avec Zoltan Balog, président du comité parlementaire sur les droits de la personne, les minorités et les affaires civiques et religieuses, à plusieurs occasions. J’ai même rencontré les dirigeants de la communauté juive en Hongrie. En signe de solidarité, j’ai visité la splendide synagogue de Budapest.
    Je dois informer le député que la Hongrie remplacera le Royaume-Uni à la présidence de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste. C’est le Canada qui assumait la présidence de l’alliance l’an dernier. Ce sera le tour de la Hongrie l’an prochain.
    Certes, nous étions inquiets du peu d’empressement de la Hongrie à reconnaître sa propre histoire d’antisémitisme pendant la Shoah, mais je suis heureux de dire au député qu’il y a eu un net changement d’attitude ces derniers mois, et nous espérons collaborer avec nos partenaires et travailler avec le gouvernement hongrois pendant sa présidence de l’alliance.
    Monsieur le président, le député a parlé d’une agression, d’un incident antisémite qui se serait produit à Montréal aujourd’hui et dont il a été question aux informations. Des croix gammées ont été dessinées sur des voitures et des balles ont été laissées dans des enveloppes sur des voitures, en guise d’avertissements très sérieux pour les occupants d’un immeuble d’habitation. Il y a eu des conférences antisémites ici et à London.
    Nous voulons tous nous unir pour dire haut et fort que ces menaces contre la population juive du Canada ne seront pas tolérées chez nous. Je sais que tous les députés souhaitent adopter cette attitude. Je voulais simplement demander au député ses réactions à cet incident. Je ne suis pas sûr que tout le monde soit au courant. Il n’en a été question qu’aujourd’hui aux informations.
(1905)
    Monsieur le président, je dois avouer que j’ai participé à des réunions et je n’étais pas au courant de ces incidents. Hélas, cela n’a rien de neuf, s’il est vrai qu’il y a eu des expressions de haine antisémites. Cela n’arrive que trop souvent. Soyons honnêtes. À la Chambre, nous discutons aussi ces jours-ci du terrorisme international, et notamment du terrorisme djihadiste. Il y a eu des attentats planifiés et heureusement déjoués contre des installations de la communauté juive au Canada.
    Le gouvernement a mis sur pied un projet visant à assurer la sécurité des infrastructures, projet qui offre des subventions de 50 % des coûts pour les installations vulnérables, dont des synagogues et des écoles hébraïques et des installations d’autres confessions religieuses. Si des installations ont été visées par des expressions de haine, du vandalisme ou menacées d’actes de terrorisme, nous offrirons des fonds pour améliorer la sécurité et aider à garantir la sécurité de ces groupes, car la sécurité, nous semble-t-il, relève de la responsabilité publique.
    Il ne s’agit pas seulement de condamner les discours antisémites, mais aussi d’assurer la sécurité contre les expressions violentes d’antisémitisme.
    Monsieur le président, tous les partis à la Chambre estiment que tous les Canadiens devraient pouvoir vivre en paix et jouir de la tranquillité d'esprit. C'est la première fois que j'en entends parler, mais ce qui s'est passé aujourd'hui est offensant pour nous tous. Les mesures pour accroître la sécurité sont clairement nécessaires et je suis heureux que le gouvernement s'en occupe.
    Plus tard, je vais parler de mon cas personnel, mais une des choses qui me préoccupent est que l'antisémitisme est un comportement acquis. Il arrive qu'il soit transmis de génération en génération, mais c'est quand même un comportement acquis. Je me demande si le gouvernement s'est penché sur les meilleures pratiques mises en oeuvre ailleurs dans le monde pour s'y attaquer et pour apporter des changements avant qu'il ne prenne une tournure terrible.
    Oui, monsieur le président, nous l'avons fait. Les meilleures pratiques pour combattre l'antisémitisme sont échangées dans le cadre de la Coalition interparlementaire pour la lutte contre l’antisémitisme, que le Canada a accueillie et présidée en 2010. Elle a donné lieu au protocole d'Ottawa, que j'aimerais déposer devant le comité.
    Je suis heureux d'informer le comité que le gouvernement du Canada est le seul organe exécutif d'un gouvernement dans le monde à avoir, jusqu'à maintenant, endossé et signé le Protocole d'Ottawa, qui est un condensé des meilleures pratiques visant, en partie, à lutter contre l'antisémitisme.
    L'un des antidotes les plus efficaces à l'antisémitisme est la sensibilisation à l'Holocauste, car elle touche l'essentiel du problème. C'est la raison pour laquelle nous misons beaucoup sur une plus grande sensibilisation à l'Holocauste, tant dans le système d'éducation, en fournissant du matériel pédagogique aux provinces et aux conseils scolaires, qu'auprès de la population en général.
    Pour donner un exemple au député, nous avons récemment lancé un autobus qui fait une tournée éducative organisée par le Centre Simon-Wiesenthal au Canada. Il se rendra dans des écoles pour présenter un programme traitant de l'antisémitisme et d'autres formes de xénophobie. Nous soutenons donc des projets de cette nature.
    Avant de reprendre le débat, j'aimerais simplement répondre à la demande du ministre de déposer un document. Il n'est pas possible de faire cela maintenant. Toutefois, je crois comprendre que le document est accessible au public. S'il le souhaite, le ministre pourra déposer le document pendant une séance normale de la Chambre.
    Monsieur le président, j'interviens ce soir pour parler de l'antisémitisme, plus particulièrement de la façon dont ce problème est perçu au Canada, des mesures que nous prenons pour lutter contre ce phénomène et de notre contribution à cet égard au sein de la communauté internationale.
    Nous avons tous des histoires personnelles à raconter sur les différentes formes que peuvent prendre le racisme et la xénophobie. Dans ma jeunesse, l'antisémitisme était un phénomène très évident pour moi. Mon meilleur ami, Ross Polowin, était Juif. J'ai pu constater qu'il était traité différemment de mes autres amis. J'ai eu la chance d'être élevé dans un milieu où nos parents n'étaient pas les seules personnes à s'occuper de notre éducation. Nos voisins étaient aussi présents dans nos vies. La famille Polowin m'a certainement aidé à bien des égards. Elle m'a donné un sentiment de sécurité. Elle faisait partie d'une communauté tissée très serrée.
    Cette famille m'a appris beaucoup de choses, dont les effets de l'antisémitisme sur le plan personnel. Les parents de Ross connaissaient l'histoire de ses grands-parents et la façon dont ils avaient échappé à la tyrannie de l'Allemagne nazie, ainsi qu'au stalinisme et à l'antisémitisme virulent. Dans ma jeunesse, j'ai été certainement sensibilisé à ces phénomènes.
    Au cours des années qui ont suivi, j'ai fait partie d'un groupe qui a confronté une horrible association, le Heritage Front, ici même, à Ottawa. C'est une histoire très bien documentée. Je me suis joint à d'autres activistes pour dénoncer le fait que le groupe tenait ses assemblées dans les locaux du Club des garçons et filles. En solidarité avec quiconque entendait lutter contre le racisme à Ottawa, nous avons affirmé sans équivoque que l'antisémitisme n'avait pas sa place dans notre ville. Pendant un certain temps, le Front Heritage a été une force redoutable, mais les Ottaviens ont clamé d'une seule voix que le racisme, la xénophobie et l'antisémitisme n'avaient pas leur place dans leur milieu.
    Il faut nommer les choses, qu'il s'agisse d'antisémitisme, d'homophobie, d'islamophobie ou de la nette flambée de misogynie dont nous sommes témoins dernièrement et qui est associée à la notion de culture du viol. Ces mouvances portent atteinte aux valeurs des Canadiens. Il faut les dénoncer. Il faut en comprendre la nature. Il faut les éradiquer. Nous ne devons pas faire l'autruche.
    En matière d'antisémitisme ou de xénophobie, il faut invoquer les valeurs canadiennes. Lorsque quelqu'un est ostracisé en raison de son aspect physique, de sa religion, de son identité sexuelle ou de son pays d'origine, il ne faut pas garder le silence.
    On sait ce qui se passe lorsque personne ne réagit. Les normes et les valeurs de respect et de tolérance que nous chérissons sont alors dépréciées et menacées.
    C'est difficile. Ceux parmi nous qui sont parents ou qui se souviennent tout simplement de leur jeunesse savent à quel point il peut être difficile de s'élever contre certains comportements. Toutefois, il nous faut évidemment donner l'exemple au Parlement en tant que dirigeants. Lorsque des gens se font agresser, il faut les défendre.
    Le ministre a rappelé qu'au fil de l'histoire, les Juifs ont été pris pour cible. Les raisons ne sont pas simples. Nous connaissons toutefois les conséquences. Nous savons que les personnes qui sont victimes d'attaques de ce genre à cause de leur foi — dans ce cas-ci la confession juive — sont ébranlées, agressées et considérées comme « l'autre ». Lorsqu'on considère certaines personnes comme « l'autre », il est dangereux qu'on en vienne même à nier leur appartenance à l'humanité.
    Certains ont déjà parlé des événements récents, notamment de ce qui s'est passé aujourd'hui à Montréal. Je voulais en parler parce que je sais que ce n'est pas tout le monde qui a eu l'occasion de regarder les nouvelles.
(1910)
    Nous devons intervenir pour dire que cela est inacceptable. Quand des attentats sont perpétrés contre des communautés, il faut penser à ce que cela représente pour elles de voir de nouveau des croix gammées peintes sur des voitures et d'entendre proférer des menaces. C'est plus qu'une simple déclaration. C'est un attentat qui rappelle des émotions très difficiles aux gens et ceux-ci se sentent menacés.
    Je me trouvais à Bruxelles pour assister à des réunions de l'OTAN quand les attentats de Copenhague ont eu lieu. J'ai suivi les événements, comme bien des gens. J'étais très inquiet de ce qui se passait. Cela m'a un peu rappelé ce qui est arrivé ici au mois d'octobre. On ignorait combien de personnes avaient été tuées, qui était responsable de l'attentat, et ainsi de suite. Certains faits étaient connus. Une communauté juive avait fait l'objet d'un attentat. On savait que quelqu'un avait agi en héros, comme c'est arrivé ici, pour sauver des vies. Nous avons aussi été témoins d'une réaction extraordinaire, à laquelle j'aimerais que nous puissions revenir à la Chambre. Je parle de l'esprit d'unité parmi ceux qui ont dit unanimement qu'ils n'abandonneraient pas leurs valeurs et qu'ils se rassembleraient pour lutter contre ce qu'ils avaient vécu. C'est arrivé ici les 23 et 24 octobre, et au cours des jours qui ont suivi.
    Ce qui m'a frappé, ce sont les observations du rabbin qui était non seulement un leader de la communauté à Copenhague, mais qui est allé jusqu'à annoncer la nouvelle à la famille qui avait perdu un de ses membres. C'est un rôle très difficile à assumer. Non seulement il a fait part de son témoignage et il aidé la communauté en cette période difficile, mais il a dû également annoncer à la famille la mort de l'un des leurs.
    Voici un extrait du témoignage présenté par le grand rabbin Mirvis à Copenhague. Je le cite:
    Nous sommes solidaires en cette période difficile [...] Nous ne devons jamais céder à la terreur, ni hésiter à lutter contre elle et ses causes profondes.
    Nous prions pour que les valeurs de respect, de tolérance et de paix l'emportent.
    Il aurait pu dire autre chose. Il aurait pu se taire. Il aurait pu s'en prendre aux responsables. Or, il a décidé de ne pas faire cela et de présenter un témoignage rassembleur.
    D'autres ont pris la parole. Un autre rabbin danois a dit ceci:
[...] Notre vie doit reprendre son cours normal. Le terrorisme vise à changer nos vies, mais nous ne le laisserons pas faire [...] Voilà comment il faut réagir face à la brutalité, à la cruauté et à la lâcheté des actes terroristes.
    Voici ce qu'un autre représentant de la communauté juive a dit pendant cette période:
    Je ne veux même pas envisager qu'on puisse réagir ainsi [à ces terribles attentats]. Selon moi, il faut combattre la terreur, où qu'elle se trouve.
    La première ministre danoise, de son côté, a été tout simplement extraordinaire. Voici ce qu'elle a déclaré:
    La communauté juive fait partie intégrante de notre pays depuis des siècles. Elle est chez elle au Danemark, et elle fait partie de la société danoise. Sans les Juifs, le Danemark ne serait pas le même.
    Des mots tout simples, certes, mais qui envoient un message important à un moment où les gens se sentent vulnérables et où la communauté juive est prise pour cible.
    L'antisémitisme vise à diviser, à isoler, à déchirer les gens à cause de leur identité, à permettre à la peur de prendre racine dans la population. Le meilleur remède, il va sans dire, demeure la mobilisation, la discussion et la protection, comme le disait le ministre, des plus vulnérables.
    Antisémitisme, xénophobie, misogynie, islamophobie: toutes ces mouvances cherchent à monter une partie de la population contre une autre, et nous devons nous insurger, tous autant que nous sommes. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour combattre ces idées, parce que nous nous rappelons les enseignements de l'histoire. Si nous ne nous réagissons pas et que nous laissons la haine nous envahir, alors l'humain est en péril et risque de perdre son humanité.
    Ce soir, discutons tous ensemble des moyens qui nous permettraient de faire de notre pays et de nos villes et villages des endroits où il fait bon vivre et condamnons la haine et l'intolérance.
(1915)
    Monsieur le président, nous condamnons tous sans réserve toute forme de xénophobie et de haine, comme le député et moi-même l'avons fait dans nos interventions, mais le député conviendra-t-il avec moi que l'antisémitisme semble être particulièrement durable et pernicieux? Je pose cette question parce qu'il y a là matière à débat. L'Assemblée générale des Nations Unies a décidé de tenir une séance spéciale précisément sur le problème de l'antisémitisme. Il y a notamment été question de la nature de ce mal, qui est largement considéré particulièrement durable et pernicieux.
    Je me rappelle que, il y a environ 15 ans, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, par l'entremise de son office de développement, le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme, a lancé un dialogue sur l'antisémitisme au sein du bureau. Or, certains États membres ont essayé de miner l'objet même des discussions et de faire en sorte que le débat porte plutôt sur la xénophobie en général.
    Pour ma part, je crois qu'il faut condamner et contrer toute forme de xénophobie, mais je suis aussi d'avis qu'il est important de reconnaître que l'antisémitisme est particulièrement durable. Je me demande si le député est du même avis ou s'il souhaite nous faire part de son point de vue.
(1920)
    Monsieur le président, permettez-moi de lire ce qui suit à la Chambre:
    L'antisémitisme est une manifestation de racisme, de xénophobie et d'intolérance religieuse. Au cours des dernières années, nous avons été témoins d'un nombre croissant de cas de haine, d'intolérance, de discrimination et de violence contre des personnes en raison de leur religion ou de leur croyance [...]
    Attendu que nous sommes convaincus de la nécessité de lutter contre toutes les formes d'intolérance religieuse, nous demandons à tous les États membres de:
[...] s'efforcer d'éliminer l'antisémitisme sous toutes ses formes.
    C'est la déclaration des Nations Unies dont parlait le député et à laquelle je souscris. Voilà pourquoi nous devons nommer le problème, comme je l'ai déjà dit. Voilà pourquoi nous devons le définir et le combattre. C'est la même chose que dans le cas de la misogynie.
    La xénophobie est un terme générique, mais nous devons nommer le phénomène et le comprendre pour le combattre. L'antisémitisme est unique. C'est un mal pernicieux, comme le député l'a dit, et c'est pourquoi nous devons le cerner, le nommer, le démasquer et le combattre.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais remercier mon collègue de son discours d'unité et de solidarité. J'ai trouvé ses remarques fort impressionnantes à ce titre.
    La nuit dernière encore, dans le quartier de Notre-Dame-de-Grâce, à Montréal, on a vu des actes de vandalisme qui sont manifestement de l'antisémitisme.
    Mon collègue a-t-il des commentaires à faire sur cette situation précise?
    Monsieur le président, je remercie ma collègue de sa question. Cela me touche personnellement, puisque ma mère a grandi dans ce quartier.

[Traduction]

    C'est un endroit unique pour la communauté juive. C'est un endroit qui, nous le savons, abrite une communauté juive florissante, dont l'apport à la grande ville de Montréal et au Canada est énorme. Il est extrêmement troublant qu'une pareille chose se produise, et c'est particulièrement troublant pour cette communauté.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, les séquelles sont profondes. Il ne s'agit pas seulement de quelques graffitis et quelques slogans. C'est un événement qui réveille des souvenirs douloureux chez beaucoup de gens et qui les traumatise. Des communautés entières sont traumatisées, et nous devrions nommer, comprendre et combattre ensemble le phénomène pour que de pareilles choses ne se reproduisent plus.
    Monsieur le président, au risque de trop simplifier la situation, ce qui n'est pas ce que je tente de faire, pourrions-nous dire, dans le cadre de ce qui se passe actuellement dans le monde, que l'antisémitisme s'inscrit dans un plus vaste contexte, celui du terrorisme et de toutes les cibles visées par les terroristes?
    Nous voulons intenter des poursuites contre toutes les personnes qui commettent des actes antisémites, mais comment devons-nous procéder? Jusqu'où faut-il aller pour mettre fin à ces actes? La sensibilisation est l'un des antidotes à ce problème, mais jusqu'où faut-il aller pour y mettre un terme? C'est un sujet délicat en raison d'autres mesures législatives qui sont débattues actuellement à la Chambre, mais jusqu'où devons-nous aller? Jusqu'où mes collègues croient-ils que les autorités doivent aller pour surveiller ce type d'activités et y mettre fin avant qu'elles se transforment en actes de violence?
    Nous ne pouvons empêcher les gens d'avoir certaines pensées ou d'exprimer leurs croyances, mais nous devrions certainement être en mesure de les arrêter quand il est évident qu'ils vont commettre des actes violents. Jusqu'où les autorités devraient-elles être autorisées à aller pour déterminer si quelqu'un est sur le point de commettre un tel acte et l'empêcher d'agir?
(1925)
    Monsieur le président, l'un des meilleurs moyens de traiter le problème est l'éducation, mais le droit a aussi son rôle à jouer. J'ai mentionné le groupe Heritage Front, contre lequel j'ai lutté de concert avec des membres de la communauté. Ces gens étaient des néonazis qui prônaient la haine. Ils ont utilisé les Clubs Garçons et Filles pour s'organiser. Certains d'entre nous ont affirmé que c'était une erreur, que nous devions nous servir des règlements administratifs locaux pour s'assurer que ces gens ne puissent agir ainsi.
    Il y a différents moyens de régler le problème, mais il n'y a pas qu'une seule solution. J'aimerais souligner qu'il s'agit d'un problème complexe. Comme nous l'avons constaté, il existe depuis des générations. Il ne faut donc pas lui tourner le dos. Le meilleur moyen de s'attaquer à la xénophobie, au racisme et à l'antisémitisme sous toutes leurs formes est de comprendre que pour les vaincre, il faut travailler ensemble et rester unis. Nous ne devons pas permettre aux gens d'être divisés et cela est valable pour d'autres formes de haine. Lorsque nous commençons à choisir ce qui est tolérable et ce qui ne l'est pas, et que nous ne sommes pas unis contre toutes les formes de haine, c'est alors que nous devenons moins humains.
    En fin de compte, nous pouvons avoir recours au droit. Nous pouvons avoir recours à l'éducation, mais fondamentalement, nous devons nous tendre la main les uns les autres, en tant qu'êtres humains.
    Nous passons aux questions et observations. Je tiens à rappeler à tous les députés qu'ils ne doivent pas nécessairement demeurer assis à leur place. Il incombe à la présidence de les reconnaître où qu'ils soient.
    Le député de Mont-Royal a la parole pour reprendre le débat.
     Monsieur le président, le mois dernier, j'ai eu le privilège de participer à la première réunion de l'Assemblée générale des Nations Unies sur ce que je caractériserais de recrudescence alarmante de l'antisémitisme dans le monde. Cette réunion a eu lieu à l'occasion d'une journée importante de recueillement et de remémoration. Elle a eu lieu à l'occasion du 70e anniversaire de la libération d'Auschwitz, le camp d'extermination le plus meurtrier du XXe siècle, lieu d'atrocités si horribles qu'elles sont inimaginables, bien qu'elles aient néanmoins eu lieu.
    À Auschwitz, 1,3 million de personnes ont été tuées, dont 1,1 million de Juifs. Ne nous méprenons pas: ces meurtres de Juifs ont été inspirés par le mouvement antisémite, mais l'antisémitisme, lui, est toujours vivant. Comme nous l'avons appris à nos dépens si tragiquement, ce mouvement commence avec les Juifs, mais il ne se termine pas avec les Juifs. Encore une fois, en France et ailleurs, les Juifs sont les canaris dans la mine du mal dans le monde.

[Français]

    Cela a été démontré de façon claire et tragique par les récents attentats en France, notamment au supermarché Hyper Cacher et au centre communautaire juif de Nice, les attentats en Argentine et, plus récemment, par la fusillade lors de la célébration d'une bar mitzvah à Copenhague. Pourtant, ces incidents ne sont que la plus récente manifestation d'une montée plus généralisée de l'antisémitisme en Europe et dans le monde.

[Traduction]

    J'aimerais faire part à l'assemblée ce soir de certaines réflexions et préoccupations au sujet de la condition juive, des agressions antisémites et des violations des droits de la personne, de la situation des Juifs dans le monde aujourd'hui et de la situation des régions du monde peuplées par les Juifs, de l'antisémitisme en tant que paradigme de la haine radicale et de l'Holocauste en tant que paradigme du mal radical.
    Simplement dit, la thèse sous-jacente de mon discours ce soir, thèse que j'ai également présentée à l'Assemblée générale des Nations Unies, est que nous assistons à la montée graduelle, quasi-imperceptible et parfois tolérée d'un antisémitisme à la fois nouveau et ancien, global, complexe, virulent et même mortel. Nous y assistons depuis maintenant 40 ans. Il nous rappelle celui qui se faisait sentir dans les années 1930, et sa configuration actuelle est sans égale et sans précédent depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
     Ce nouvelle antijudaïsme recoupe en partie l'antisémitisme traditionnel — le député d'Ottawa-Centre a parlé de définitions et de cadres de travail, et je vais tenter d'en donner quelques-uns — mais s'en distingue. Il a trouvé sa première expression juridique, voire institutionnelle, dans la résolution « Le sionisme est une forme de racisme » des Nations Unies — laquelle, comme l'a dit le sénateur américain Daniel Moynihan, « a donné à l'abomination de l'antisémitisme l'apparence d'une sanction internationale légale » —, mais il va beaucoup plus loin. Définir le nouvel antisémitisme nécessite pratiquement un nouveau vocabulaire. La meilleure façon de le décrire est de le considérer dans l'optique de l'antidiscrimination, du droit à l'égalité et du droit international.
    En un mot, l'antisémitisme classique ou traditionnel est la discrimination à l’égard des Juifs, la négation de leur droit de vivre en tant que membres égaux de la société où ils ont habitent, ou l’assaut contre ce droit. Le nouvel antisémitisme concerne la discrimination à l’encontre du droit du peuple juif de vivre en tant que membre égal de la famille des nations — le déni, ou l’assaut contre le droit du peuple juif de vivre —, Israël étant le « Juif collectif parmi les nations ».
    Observant les intersections complexes entre l’ancien et le nouvel antisémitisme ainsi que l'incidence du nouveau sur l'ancien, Per Ahlmark, ancien vice-premier ministre de la Suède, a conclu catégoriquement — et l'on pourrait dire avec prémonition, compte tenu des événements du XXIe siècle — il y a une quinzaine d'années, que:
(1930)
    Comparativement à la plupart des flambées antisémites précédentes, ce [nouvel antisémitisme] est souvent moins dirigé contre des particuliers juifs. Il est surtout dirigé contre les Juifs collectifs, l'État d'Israël. Ces attaques entraînent une réaction en chaîne d'agressions contre des particuliers juifs et des institutions juives [...]. Dans le passé, les antisémites les plus dangereux, étaient ceux qui voulaient un monde Judenrein, c'est-à-dire  sans Juifs. Aujourd'hui, les antisémites les plus dangereux sont ceux qui veulent un monde Judenstaatrein, c'est-à-dire sans État juif.
    Je vais résumer quatre indicateurs de ce nouvel-ancien antisémitisme. J'ai répertorié quelque 10 indicateurs, mais, en raison de contraintes de temps, je vais essayer d'en résumer quatre.
    Le premier indicateur, et sa manifestation la plus meurtrière, est ce qu'on pourrait appeler l'antisémitisme génocidaire. Ce ne sont pas des mots que j'utilise à la légère. Je fais référence à l'interdiction de l'incitation directe et publique à commettre un génocide prévue dans la Convention sur le génocide, interdiction qui a motivé la Cour suprême du Canada à écrire que « l'Holocauste n'a pas commencé dans les chambres à gaz, il a commencé par des mots ».
    Dans un jugement plus récent, le jugement Mugesera, la cour a encore une fois dit que l'incitation au génocide est un crime en soi, que des actes de génocide soient ou non commis ensuite. Malheureusement, nous avons vu quatre manifestations de cet antisémitisme génocidaire, lequel a atteint un seuil critique durant la guerre terroriste du Hamas contre Israël l'été dernier.
    Premièrement, l'incitation à la haine et au génocide pratiquée par l'Iran de Khamenei. Si j'emploie ce terme, c'est pour faire la distinction avec le peuple iranien, lui-même assujetti à une répression massive.
    Deuxièmement, la charte de mouvements terroristes comme le Hamas, qui sont publiquement voués à la destruction d'Israël et au meurtre de Juifs, où qu'ils soient.
    C'est bien connu, soit, mais peu-être que les motifs antisémites de leur charte ne le sont pas. La charte du Hamas est truffée d'affirmations antisémites selon lesquelles les Juifs seraient responsables de la Révolution française, de la Première Guerre mondiale, de la Deuxième guerre mondiale, de la Société des Nations, des Nations Unies et de la fin du califat islamique. Elle se termine en affirmant que les Juifs sont responsables de toutes les guerres dans le monde.
    Troisièmement, les fatwas ou appels au génocide lancés par les imams radicaux. À mon sens, cela ne relève pas de l'islam ordinaire. Ce n'est pas de l'islamisme. C'est une perversion de l'islam. Un certain nombre de mosquées à Berlin, à Paris, au Royaume-Uni et ailleurs ont publiquement préconisé le meurtre de Juifs, les Juifs et le judaïsme étant qualifiés d'ennemis perfides de l'islam, reléguant en quelque sorte les Juifs au rôle de Salman Rushdie dans les divers pays du monde.
    Finalement, il y a eu des manifestations haineuses en Europe, l'été dernier, et d'autres ont suivi depuis. J'ai été témoin de certaines de ces manifestations remplies d'appels au génocide, réclamant l'envoi des Juifs à la chambre à gaz, accompagnées ou suivies par l'incendie de synagogues, d'attaques perpétrées contre des centres de la communauté juive, d'attaques contre des personnes identifiées comme étant d'origine juive ou de lieux associés à cette communauté. Tout cela a incité le président du Conseil central des Juifs d'Allemagne à me dire lors de notre rencontre à Berlin, en novembre dernier, que la conjoncture était à son pire depuis l'époque nazie. Il m'a dit que des bruits montaient de la rue: « Les juifs devraient être envoyés à la chambre à gaz, les Juifs devraient être brûlés. »
    Comme l'a rapporté Roger Cukierman, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France, ces moments ont été terrifiants. On criait « mort aux Juifs » dans les rues. Dans les quatre semaines couvrant la fin de juillet et le début d'août seulement, huit synagogues ont été la cible de bombes incendiaires. J'ai entendu des propos semblables de la part du président de la communauté juive de Belgique et ailleurs.
     En un mot, Israël est le seul pays, et les Juifs, le seul peuple, à être les cibles constantes d'une incitation à la haine et au génocide cautionnée par des États, incitation qui se traduit par des attaques terroristes.
    Le deuxième indicateur est la condamnation portée à l'échelle mondiale à l'endroit d'Israël et du peuple juif. On les accuse d'être l'incarnation du mal, d'être racistes, impérialistes, colonialistes, de faire de l'épuration ethnique, d'assassiner des enfants, de pratiquer le génocide comme les nazis et comme un État nazi, d'être l'incarnation des pires maux du XXe siècle et de tous les maux du XXIe.
(1935)
    Pour faire le point sur ce deuxième indicateur et clore mon intervention, je veux rappeler que le peuple juif n'est pas seulement le seul peuple à être la cible constante d'une incitation à la haine et au génocide cautionnée par certains États, mais qu'il est aussi le seul peuple à être lui-même accusé de génocide. Voilà le type d'incitation qui mène ou qui a mené à la perpétration d'attaques terroristes à son endroit.
    Monsieur le président, il y a quelques années, j'ai été vice-président de la Commission d'enquête de la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme. Le président de cette commission était notre ancien collègue, Mario Silva. Le député de Mont-Royal était aussi un membre éminent de la commission d'enquête et il a été l'un des principaux phares derrière ce projet.
    La commission d'enquête a formulé un certain nombre de recommandations, dont la recommandation 24, qui se lit comme suit:
    Reconnaissant que le travail des Nations Unies, en ce qui concerne Israël, ne relève pas du mandat de notre Commission d'enquête, nous recommandons donc que le Comité des affaires étrangères de la Chambre des communes mène une étude sur l’équité du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, notamment en ce qui a trait à l’insistance excessive qu’il met sur la violation présumée des droits de la personne par Israël alors qu’il ignore les cas flagrants de violation de ces mêmes droits par d’autres États membres.
    Je soulève ce point parce que le comité des affaires étrangères n'est pas en mesure de le faire. Cependant, le sous-comité des droits de la personne et du développement international, qui relève du comité des affaires étrangères, peut suivre cette recommandation. Comme je préside ce sous-comité et que le député en fait aussi partie, j'aimerais savoir s'il est disposé à soulever ce point afin que le sous-comité puisse l'examiner d'ici la fin de la 41e législature.
    Monsieur le président, je pense que nous devrions soulever cette question. En fait, si j'avais eu plus de temps, j'aurais parlé de cette idée dans mon intervention.
    Un des indicateurs les plus troublants de cet antisémitisme ancien et nouveau, c'est le fait qu'on le cache derrière des valeurs publiques universelles — en d'autres mots, sous le couvert protecteur des Nations Unies, sous l'autorité du droit international, sous la culture des droits de la personne et de la lutte contre le racisme. Tous ces éléments représentent des valeurs qu'ont à coeur les députés.
    Par exemple, en ce qui concerne le couvert protecteur des Nations Unies, en décembre dernier, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté 20 résolutions visant à condamner un seul État membre de la communauté internationale. Ce pays, c'était Israël. Les Nations Unies ont adopté quatre autres résolutions de condamnation visant le reste du monde. On a ainsi montré du doigt un État membre dans un geste discriminatoire visant à le condamner.
    Pour ce qui est du fait d'invoquer le droit international, au mois de décembre, les États parties à la Convention de Genève, qui vise à protéger les droits de la personne à l'échelle internationale, ont mis seulement un État au banc des accusés, et ce, pour la troisième fois au cours des 50 dernières années. Ce pays, c'est Israël. Le Rwanda et le Darfour n'ont pas été inquiétés. Le seul État à avoir jamais été réprimandé en vertu de la Convention de Genève, c'est Israël.
    Le troisième exemple correspond à ce que le député rapporte à propos du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, le défenseur des droits de la personne. C'est un organisme qui remporte notre aval. Or, environ la moitié de ses résolutions portent condamnation contre un unique État. Environ la moitié de ses séances extraordinaires visent à porter condamnation contre un seul État.
    Pour conclure, j'ai pris la parole et j'ai comparu devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU. J'assure aux députés que, lorsqu'on prend connaissance de l'ordre du jour de n'importe quelle séance de ce conseil, le point 7 porte systématiquement sur les atteintes d'Israël aux droits de la personne dans les territoires occupés de la Palestine et le point 8, sur les atteintes aux droits de la personne dans le reste du monde.
(1940)
    Monsieur le président, au cours de mes neuf dernières années à la Chambre, nous avons beaucoup parlé des lieux et des époques où soit Israël, soit la communauté juive, ont été accusés d'actes violents ou, du moins, vilipendés.
    Lorsque j'ai pris la parole plus tôt, j'ai mentionné au ministre que nous devions effectivement mettre en place des mesures de sécurité et avoir des lois pour protéger tous les Canadiens, mais je demande au député s'il convient que la sensibilisation doit constituer un volet essentiel de nos mesures. Je ne vois pas comment nous pourrions mettre fin à l'antisémitisme autrement. Nous pouvons empêcher un incident ou en arriver à pouvoir retracer des gens, mais nous devons changer les attitudes et cela doit venir de la compréhension.
    J'aimerais l'entendre à ce sujet.
    Monsieur le président, je suis d'accord avec mon collègue pour dire que la sensibilisation est capitale. Un homme qui est un héros pour nous tous, Nelson Mandela, a parlé de la sensibilisation comme d'un agent de changement, de transformation, dans la lutte contre le racisme. Je pense que la sensibilisation est capitale, et le Protocole d'Ottawa sur la lutte contre l'antisémitisme mentionne explicitement l'importance de la sensibilisation en plus de faire d'autres recommandations, comme l'a mentionné le ministre du Multiculturalisme. Je recommande à la Chambre de donner suite aux recommandations formulées dans le Protocole d'Ottawa sur la lutte contre l'antisémitisme et d'en faire notre priorité dans nos relations avec les autres pays à cet égard.
    Monsieur le président, j'aimerais demander au député d'expliquer pourquoi l'antisémitisme est différent de toutes les autres formes de discrimination et de racisme.
    Monsieur le président, on pourrait se demander pourquoi nous tenons un débat exploratoire sur l'antisémitisme. Qu'en est-il des autres types de racisme et de discrimination dont nous devons nous soucier, comme l'a dit le député d'Ottawa-Centre?
    Certaines caractéristiques de l'antisémitisme le rendent unique.
    Premièrement, c'est la haine la plus ancienne et la plus persistance qui existe et, de ce fait, la plus meurtrière.
    Deuxièmement, c'est la seule forme de racisme de dimension mondiale, de sorte qu'il existe même dans des pays où il n'y a pas de Juifs. Je viens de lire qu'il reste seulement environ 55 Juifs au Yémen. Les militants houthis, qui contrôlent le Yémen, affirment que leur premier objectif en matière de politique étrangère consiste à cibler les Juifs.
    Troisièmement, le genre de racisme connu sous le nom d'antisémitisme est marqué par les caractéristiques dont j'ai parlé: une incitation à la haine, approuvée et orchestrée par l'État, qui peut mener jusqu'au génocide.
    Quatrièmement, comme je l'ai dit, aucune autre forme de racisme ne se cache sous des valeurs publiques universelles.
    Cinquièmement, à l'échelle mondiale, il y a une intensification dramatique des attentats antisémites contre des Juifs, des biens appartenant à des Juifs et des institutions juives. Cette pandémie de haine se traduit par le plus grand nombre d'attentats jamais perpétrés contre des Juifs, que ce soit en France, au Royaume-Uni ou dans toute l'Europe.
    En dernier lieu, on assiste à une résurgence des propos diffamatoires classiques envers les Juifs. Je n'entrerai pas dans les détails, mais il y a environ six calomnies classiques, comme celle qui concerne les Protocoles des sages de Sion. Elles ont toutes été reprises dans un contexte mondial. Aucun autre peuple et, à mon avis, aucun autre État n'est visé par une telle liste de calomnies.
(1945)
    Monsieur le président, je voudrais remercier mon collègue de Mont-Royal pour son intervention. Je sais qu'il coopère très étroitement avec le ministre du Multiculturalisme depuis des années dans le dossier de la lutte contre l'antisémitisme.
    Le député pourrait-il nous parler de son expérience personnelle dans cet important dossier, en coopération avec le gouvernement et particulièrement avec le ministre du Multiculturalisme? Pourrait-il souligner les réalisations qui ont découlé de cette coopération?
    Monsieur le président, des députés de tous les partis, si je ne me trompe pas, ont uni leurs efforts pour former la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme. Le ministre du Multiculturalisme a joué le rôle important dont il a été question tout à l'heure. Nous nous sommes rendus ensemble à Londres pour la conférence sur la lutte contre l'antisémitisme, en 2009. Le ministre y était. Il a joué un rôle central dans la tenue de la Conférence d'Ottawa sur la lutte contre l'antisémitisme, en 2010.
    À Londres et à Ottawa, les participants ont adopté des déclarations et des protocoles importants dont le ministre a parlé ce soir.
    Je termine en disant que je considère cet objectif et cet engagement comme communs aux députés de tous les partis. Le temps est venu de sonner l'alarme au sujet de cette haine mondialisée, qui est comme le canari dans la mine où le souffle du mal commence à sévir.
    Monsieur le président, l'année dernière, j'ai eu l'occasion d'assister, à Budapest, à un séminaire que mon collègue de Mont-Royal a coprésidé en compagnie de quatre parlementaires européens de Pologne, d'Espagne, de Grèce et, je crois, des Pays-Bas. Le séminaire portait sur la lutte contre la montée de l'antisémitisme en Europe. Je pense que mon collègue devrait nous parler de ce qu'il a entendu à ce séminaire, qui a été passablement instructif et révélateur.
    Ce fut une expérience troublante, monsieur le président. Des parlementaires de nombreux pays européens étaient présents. La plupart de ceux qui faisaient partie du groupe que je présidais n'étaient pas juifs, mais tous se sont dit alarmés par la montée de l'antisémitisme dont ils étaient témoins, non seulement dans leurs pays, mais jusque dans leurs assemblées législatives.
    Quel phénomène inquiétant. Je n'avais pas encore abordé la question sous cet angle, ce soir, mais ces parlementaires l'ont fait, eux. C'est dire l'importance de la sensibilisation, même auprès des assemblées législatives.
    J'espère que nous pourrons en savoir plus sur cette manifestation de la haine, et surtout sur les moyens de la combattre efficacement.
    Monsieur le président, je vais partager mon temps de parole avec le député d'Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale.
    C'est un honneur pour moi, le ministre d’État au Multiculturalisme, de prendre part à ce débat important, qui tombe à point nommé. Je félicite le ministre de la Défense nationale et ministre du Multiculturalisme et le député de Mont-Royal d'en avoir proposé la tenue.
    Partout dans le monde, les incidents antisémites sont en hausse et de plus en plus de gens nient l'existence de l'Holocauste. Que ce soit dans les rues de Paris, dans les officines politiques de Téhéran ou dans les recoins les plus sombres d'Internet, la montée de l'antisémitisme de par le monde a de quoi nous inquiéter sérieusement, parce que l'histoire nous a appris que les ennemis de la liberté et des droits démocratiques commencent trop souvent par s'en prendre aux Juifs.
    L'antisémitisme se cache aussi dans le discours de ceux qui invoquent les droits de la personne pour discréditer Israël.
    De la même façon qu'à une certaine époque, les gens boycottaient les entreprises appartenant à des Juifs, certaines personnalités influentes de la société civile appellent aujourd'hui au boycottage total de la patrie des Juifs, Israël. Cette nouvelle forme d'antisémitisme cible les Juifs en ciblant Israël et cherche à convaincre la nouvelle génération du bien-fondé de ces lubies discriminatoires. Voilà pourquoi je suis fier de dire qu'aux yeux du gouvernement, l'État juif d'Israël a le droit absolu et non négociable d'exister.
    Comme l'a dit le premier ministre lors du discours historique qu'il a prononcé devant la Knesset:
    Dans la famille des pays démocratiques, Israël représente des valeurs que notre gouvernement considère comme des articles de foi et comme des principes qui régissent la vie de notre propre nation. Donc, que ce soit face au feu ou à l’eau, le Canada se tiendra à vos côtés.
     En tant qu'amants de la liberté, nous avons l'obligation de nous souvenir de l'effet toxique de l'antisémitisme, ce mépris pour les droits de la personne et la dignité humaine qui a donné naissance aux horreurs de l'Holocauste. Nous avons l'obligation de tirer des leçons de l'Holocauste et de les appliquer au temps présent. Nous avons également l'obligation de reconnaître que cette même menace existe encore aujourd'hui.
    C'est pour cette raison que le gouvernement conservateur a investi dans un certain nombre de projets de sensibilisation et de commémoration ces dernières années, dont le Monument national de l'Holocauste ici même, à Ottawa. Ce fut un honneur pour moi de contribuer à la création de ce monument en présentant à la Chambres de communes le projet de loi connexe, qui a été appuyé par tous les partis. Ce monument percutant nous rappellera toujours ce qui risque d'arriver lorsque nous ne prenons pas ensemble position contre l'injustice sociale, la xénophobie et la discrimination.
    Pas plus tard que le mois dernier, j'ai eu le privilège insigne d'accompagner quatre survivants canadiens de l'Holocauste, Mordechai Ronen, Miriam Ziegler Friedman, Howard Chandler et Martin Baranek, qui faisaient partie des quelque 100 survivants dans le monde entier qui ont eu le courage de revenir à Auschwitz pour marquer le 70e anniversaire de la libération du camp de la mort nazi.
    Lorsque j'étais à leurs côtés aux portes du camp d'Auschwitz, j'étais profondément ému. Ils ont fait preuve d'un courage sans borne et d'une force incroyable en retournant à cet endroit aussi atroce où ils ont vécu l'enfer sur terre afin de commémorer ce qui s'est passé à cet endroit et de veiller à ce que les générations futures ne l'oublient jamais.
    J'aimerais raconter l'histoire d'un Canadien qui a survécu à l'Holocauste, Mordechai Ronen. Il est retourné à Auschwitz avec son fils, Moshe Ronen, et sa petite-fille, Sari, afin d'assister à la commémoration.
    Mordechai a grandi dans un foyer juif orthodoxe, dans une région de la Hongrie qui appartient désormais à la Roumanie. Il n'avait que 11 ans lorsque les nazis l'ont emmené avec ses parents, ses soeurs et son frère, à la fin de 1943. La famille a été amenée au camp de concentration d'Auschwitz, le camp de la mort nazi. À leur arrivée, Mordechai, son père et son frère ont été séparés de sa mère et de ses soeurs, qu'il n'a plus jamais revues.
    Il a fallu de nombreuses années avant que Mordechai raconte à sa famille l'horreur et le traumatisme de l'Holocauste. Le sentiment d'être perdu, la terreur constante et les souffrances qu'il a vécus au camp sont incompréhensibles pour le commun des mortels, et malgré cela, lorsqu'il y est retourné, c'est avec la résilience propre aux survivants qu'il a déclaré ceci: « Je ne suis pas victime, mais victorieux. J'ai survécu, et je suis revenu pour dire au monde que ces atrocités ont été commises, et qu'il faut veiller à ce qu'elles ne se reproduisent jamais. »
(1950)
    Monsieur le président, 70 ans ont passé depuis la libération du camp d’Auschwitz. Pour nous tous, il est troublant de voir toute la haine et la xénophobie qui se déchaîne à bien des endroits dans le monde non seulement contre les Juifs, mais aussi contre d’autres groupes, comme les Rohingyas en Birmanie. Et 30 ans ont passé depuis les incidents du Temple d’or. Comme le député doit le savoir, à divers endroits, il semble y avoir un mouvement de haine presque institutionnalisé à divers niveaux et à l’égard de divers groupes.
    Il y a un mot que les auditeurs de ce soir ne comprennent pas forcément. Il m’a fallu un moment pour arriver à le comprendre. Je l’ai noté, car j’ai pensé que je l’utiliserais ce soir. Ce mot, c’est pogrom, et il s’agit d’une émeute violente dont le but est de massacrer ou de persécuter un groupe ethnique ou religieux particulier. La définition ajoute cependant que les pogroms visent spécialement les Juifs. J’ai trouvé frappant que le lexicographe prenne la peine de préciser que les observations qui ont mené à la définition avaient un lien avec le traitement réservé aux Juifs.
    Selon le gouvernement actuel, quel est le rôle de l’État dans la sensibilisation des Canadiens pour empêcher ce fléau de se répandre?
(1955)
    Monsieur le président, il est important de sensibiliser les Canadiens et les générations montantes à ce type de haine et à l’Holocauste. Le Canada a adopté une position très ferme sur la sensibilisation à l’antisémitisme en appuyant un certain nombre de projets qui lui ont été soumis et un ou deux autres qui ont été signalés, surtout au sujet de l’Holocauste, de façon à assurer que restent vivantes dans la mémoire les histoires de ceux qui ont survécu à l’Holocauste.
    Je me souviens de ma première rencontre avec un survivant de l’Holocauste. Cela a influencé le travail que j’allais faire par la suite et c’est aussi grâce à cette rencontre, notamment, que j’ai pu présenter le projet de loi prévoyant la création d’un monument national pour rappeler l’Holocauste. Ma femme a été la première personne non juive à participer à un voyage appelé la Marche des vivants. Elle se souvient de cette expérience qu’elle a vécue dans sa jeunesse et elle m’en a beaucoup parlé. En fin de compte, c’est vraiment une question de sensibilisation, et la sensibilisation peut prendre diverses formes.
    Si j’ai voulu un monument national pour rappeler l’Holocauste, c’est parce que cela sort des manuels. On peut apprendre bien des choses dans un manuel, mais cela ne se compare pas au fait d’aller quelque part et de pouvoir voir quelque chose. Je me suis rendu au Yad Vashem et au Musée de l’histoire des Juifs polonais, en Pologne, et je sais qu’il y a d’autres monuments de par le monde qui peuvent nous apporter beaucoup plus qu’un manuel. C’est dans ce sens que doit aller notre action.
    Monsieur le président, je suis également allé visiter le camp d’Auschwitz il y a quelques années avec un survivant, dont la première expérience, après avoir été séparé de sa famille, qu’il espérait retrouver, croyant qu’il se trouvait dans un camp de travail, et après avoir été soumis à l’épouillage, a été de voir un juif âgé qui cherchait ses lunettes sur le sol se faire tuer à coup de bottes par un nazi. Il n’a pas tardé à s’apercevoir que ce n’était pas un camp de travail et que cela n’allait pas bien se terminer. Je suis heureux de dire que Max Eisen a survécu.
    Ici même, au Canada, il se produit de troublants incidents d’antisémitisme. J’ai vu des articles de Gilles Proulx, ancien animateur à la radio, qui a publié un article dans Le Journal de Montréal. Invité à expliquer ses propos, il a dit que la diaspora juive aurait, selon des allégations, le pouvoir d’amener Washington, Paris ou Ottawa à se soumettre à ses exigences. Ce sont là encore les mythes dont le député de Mont-Royal a parlé tout à l’heure. Il y a eu aussi la protestation de Toronto au sujet du conflit entre Israël et le Hamas. Selon un reportage du Toronto Sun, un manifestant aurait crié: « Les juifs contrôlent les médias, les banques et les gouvernements, ils contrôlent tout. » Enfin, Radio-Canada a décidé de ne pas censurer l’animateur d’une émission de RDI qui s’est dit d’accord avec les auditeurs qui appelaient et comparaient les juifs aux nazis.
    Ces incidents troublants se sont produits au Canada. Que pense le député de ces incidents survenus chez nous?
    Monsieur le président, il est indéniable que ces incidents se produisent. Ce qui importe, c’est qu’ils soient condamnés le plus vigoureusement possible pas seulement par le gouvernement, mais aussi par des personnalités en vue dans leur milieu.
    Nous devons aussi nous assurer qu’il n’y a aucun flou: ce qui est mal est mal. Si les incidents se produisent dans un établissement ou une organisation, il faut les boycotter. Il faut tracer la ligne, il faut dire que ce qu’ils font est mal, que nous n’allons plus le tolérer, que nous allons les dénoncer. Ce qui importe, c’est d’en faire une question de bien ou de mal et de nous placer toujours du côté de ce qui est bien.
    Monsieur le président, je suis honoré de prendre la parole aujourd'hui pour répondre aux préoccupations exprimées par tous ceux qui attachent de l'importance aux droits de la personne et à la dignité, soit la montée actuelle, partout dans le monde, de l'antisémitisme, une situation qui est certes très inquiétante. La résurgence de l'antisémitisme est telle qu'à mon avis, tout le monde devrait s'inquiéter de cette forme de discrimination la plus virulente.
    Ce qui est aussi très inquiétant, c'est que l'antisémitisme joue en quelque sorte le même rôle que le fameux canari dans la mine, comme le député de Mont-Royal l'a déjà mentionné aujourd'hui: ce phénomène nous avertit qu'il existe un poison encore plus toxique, la haine raciale, qui vit dans le coeur et dans l'esprit de certaines personnes au sein de notre société.
    S'il en est ainsi, c'est parce que lorsque des gens pensent qu'il est facile ou acceptable de détester les Juifs, simplement parce qu'ils sont d'origine ou de confession juive, il n'est alors pas difficile de franchir un pas de plus en matière de discrimination et d'inclure de plus en plus de religions et de groupes ethniques, ce qui a des conséquences de plus en plus graves. En tant que peuple libre, nous devons faire preuve d'une grande vigilance et opposer un refus net à cette forme de discrimination.
    D'autres députés ont parlé de la montée de l'antisémitisme en Europe, comme en témoignent les attaques qui ont eu lieu à Paris ainsi que la prolifération des sites Web et des blogues qui inventent de toutes pièces des allégations horribles au sujet des Juifs et d'Israël. Cette situation est très troublante et alarmante.
    Malheureusement, c'est aussi ce que des députés et moi avons entendu en 2010 pendant les audiences organisées par la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme, de même qu'en novembre 2010 lors de la conférence de la Coalition interparlementaire de lutte contre l'antisémitisme, tenue ici même à Ottawa.
    C'est pourquoi nous avons approuvé le protocole d'Ottawa pendant ce sommet.
    En 2010, nous avons remarqué une tendance qui se poursuit toujours en Europe et en Amérique du Nord. Il s'agit d'une nouvelle stratégie diabolique qu'emploient les adeptes de l'antisémitisme du XXIe siècle. Au lieu de s'attaquer directement aux personnes d'origine juive, ils adoptent une stratégie détournée faite de critiques inacceptables à l'égard de la patrie des Juifs, Israël.
    Je tiens à être très clair. Dans une société libre comme la nôtre, il est tout à fait acceptable, voire encouragé, de formuler des critiques légitimes à propos d'un État et de débattre de ses politiques. Nous en avons de multiples exemples ici même à la Chambre. Toutefois, quand les commentaires visent systématiquement à diaboliser un État, qu'ils n'expriment pas un simple désaccord avec ses politiques mais reposent sur une haine raciste, ils sont inacceptables et doivent être critiqués.
    La semaine contre l'apartheid israélien, qui se déroule sur les campus du Canada, me semble être de cet ordre. Il ne s'agit pas d'un débat raisonné sur les politiques et les gestes d'un État, mais d'un effort concerté visant à diaboliser l'État d'Israël, à attaquer sa légitimité et à nier aux Juifs le droit d'y trouver une patrie sûre.
    Pourquoi des gens appuieraient-ils un mouvement qui prône l'aliénation des droits et le boycottage de l'État israélien ainsi que l'imposition de sanctions dans toutes les sphères de l'économie et du développement d'Israël? Pourquoi des gens voudraient-ils punir et censurer des universitaires canadiens qui ne font qu'appuyer Israël?
    Je crois que la plupart des gens qui participent à de telles activités sont soit trop occupés pour vérifier les faits concernant Israël — après tout, cet État démocratique n'occupe qu'un minuscule territoire dans une région fort agitée —, soit tout simplement naïfs.
    Je crois cependant que certains partisans de ces mouvements ont des intentions préjudiciables, racistes et haineuses. Ils utilisent ces groupes pour faire la promotion de l'antisémitisme. Quelle autre conclusion pouvons-nous tirer de ces gestes qui n'ont d'autre but que de diaboliser Israël et le peuple juif?
    Pourquoi n'y a-t-il pas de boycottage contre l'Angola, l'Iran, le Congo ou la Corée du Nord ou encore de semaine contre l'apartheid dans ces pays? La réponse se trouve pour l'essentiel dans le rapport que la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l’antisémitisme a publié en 2011.
    La montée de l'antisémitisme dans le monde m'inquiète, mais je m'inquiète d'autant plus de ce qui se passe ici même. Dans ma circonscription, des graffitis antisémites ont été peints sur des maisons et des synagogues, et une semaine contre l'apartheid israélien a eu lieu à l'Université McMaster.
    Nous savons que, dans son rapport, la coalition indique que la lutte contre l'ignorance et les préjugés repose avant tout sur la sensibilisation des Canadiens et leur courage de dénoncer ce type de comportement. Cela inclut certainement tous les députés qui participent au débat ce soir.
    Cette lutte exige que les Canadiens fassent preuve de vigilance quand des paroles antisémites sont prononcés ou que des actes antisémites sont commis. Nous ne pouvons pas tolérer ce genre de choses. Il faut avoir le courage de tenir tête aux brutes racistes qui profèrent des insultes et des menaces pouvant intimider même les âmes les plus intrépides.
    Bien que ce soit plus facile à dire qu'à faire, si des insultes et des menaces sont les pires choses que nous devons endurer, nous nous en tirons à bon compte. En effet, dans les autres pays qui ne sont pas aussi libres et tolérants que le nôtre, ce genre de comportement discriminatoire risque fort de mener à du harcèlement. Il pourrait aussi mener à une perte de biens et, dans certains cas extrêmes, à la torture ou pire encore.
(2000)
    Nous avons vu comment les germes de la discrimination semés en Europe il y a approximativement 80 ans se sont transformés en quelque chose de bien plus sinistre. Je ne veux pas dire que cela se produira ici, au Canada, mais plutôt que, lorsque nous prononçons les mots « plus jamais », nous devrions toujours veiller à joindre le geste à la parole. Nous devons freiner l'antisémitisme, et ne jamais le laisser prendre de l'ampleur.
(2005)
    Monsieur le président, comme nous l'avons répété à maintes reprises ce soir, l'éducation est cruciale. À mon avis, tout commence au foyer.
    Mon collègue vient de parler des semaines contre l'apartheid organisées dans certaines universités canadiennes. Comment sommes-nous censés éduquer les gens alors que des établissements canadiens dits d'enseignement supérieur, comme McMaster, York et autres, encouragent et approuvent ce genre de manifestations? Je suis tout simplement abasourdi par le fait que les administrations d'établissements d'enseignement supérieur permettent cela.
    J'aimerais entendre l'avis de mon collègue à ce sujet. Je sais qu'il a des liens avec McMaster. A-t-il abordé le sujet avec son administration?
    Oui, monsieur le président; non seulement ai-je abordé le sujet auprès de l'administration de l'université, mais je me suis également rendu sur le campus pour confronter quelques-uns de ces gens qui fomentent la haine. Ce que j'ai trouvé rassurant, c'est que beaucoup de gens qui croisent les manifestants qui crachent leur venin antisémite leur disent de rentrer chez eux, de se taire, de ficher le camp du campus et d'aller prêcher leur haine ailleurs. C'est plutôt réconfortant. Cependant, il faut toujours demeurer vigilant.
    J'ai mentionné plus tôt combien je suis heureux que nous tenions ce débat ce soir. Je suis également reconnaissant envers mes collègues d'avoir dénoncé l'antisémitisme ici à la Chambre, mais j'aimerais également inviter mes collègues à participer aux efforts de sensibilisation afin de saisir toutes les occasions qui s'offrent à eux pour dénoncer l'antisémitisme et la discrimination raciale, autant chez eux que dans le reste du pays et du monde.
    Monsieur le président, il a été mentionné que, depuis le début de l'histoire de l'humanité, d'autres peuples ont souffert de discrimination et de génocide. Je suis d'origine ukrainienne et j'ai beaucoup travaillé sur des questions telles que l'Holodomor. Toutefois, la seule constante dans toute l'histoire, ce sont les actions antisémitiques de gouvernements et de peuples à l'encontre du peuple juif. Il est important qu'il y ait une éducation, une sensibilisation et des mesures telles que la création du Monument national de l'Holocauste et du Musée canadien pour les droits de la personne, qui contribuent énormément à transmettre les leçons tirées de l'Holocauste.
    J'aimerais demander à mon cher collègue comment nous pouvons, en tant que politiciens, contribuer à lutter contre l'antisémitisme au Canada et dans le monde et à le stopper.
    Monsieur le président, l'un des moyens est de participer à la Coalition interparlementaire de lutte contre l'antisémitisme. Un autre moyen, que j'ai mentionné plus tôt, est de saisir toutes les occasions pour dénoncer l'antisémitisme et nous assurer que les gens savent quelle est notre position à ce sujet.
    Un autre moyen est d'appuyer des personnes telles que Madeleine Levy, une habitante de ma circonscription, qui visite sans relâche les écoles pour inciter les élèves à participer à la Marche des vivants et amener les enseignants à éduquer les élèves au sujet de l'Holocauste et de l'antisémitisme afin de les aider à comprendre dès le jeune âge ce qu'est la haine raciale et à quel point l'antisémitisme est pernicieux et attrayant.
    Le ministre a mentionné tout à l'heure le fait que même la politique canadienne, il y a de nombreuses années, était telle que le moindre Juif était un Juif de trop. Cela entache gravement notre histoire, et je me réjouis que nous ayons érigé un monument sur la côte Est intitulé « Wheel of Conscience », pour que nous veillions à faire notre part, que nous disions jamais plus, et que nous éduquions les gens. L'antisémitisme s'est même emparé d'un pays libre comme le Canada.
    Appuyer les initiatives personnelles de Canadiens qui tentent d'améliorer les choses et d'éduquer les gens au sujet de l'antisémitisme et de l'Holocauste est une autre façon de contribuer à l'éducation des générations à venir.

[Français]

    Monsieur le président, c'est un de ces moments où je suis particulièrement fière d'appartenir à un parti qui a toujours condamné sans équivoque l'antisémitisme.
    Lutter contre le racisme et la haine est au coeur de ce qu'être néo-démocrate signifie. D'ailleurs, dès 1938, le CCF, l'ancêtre du NPD, était le seul parti à la Chambre des communes à se battre sans ambiguïté et de façon unie pour faire en sorte que le Canada devienne un havre sécuritaire pour les réfugiés juifs fuyant les nazis en Europe.
    Tout au long de la Seconde Guerre mondiale, le CCF a continué de se battre sans cesse et de se porter à la défense de ces réfugiés, et ce, malgré un climat d'antisémitisme qui régnait alors au sein du gouvernement et du pays en général.
    Malheureusement, l'antisémitisme est une tendance qui se poursuit, comme on le constate encore de nos jours, tout comme la haine sous toutes ses formes.
    Il y a deux semaines à peine, des centaines de tombes juives ont été profanées dans un cimetière près de Strasbourg, en France. À Bruxelles, en mai 2014, un tireur a ouvert le feu en direction d'un musée juif, tuant quatre personnes. Évidemment, on a vu la tuerie, après les événements de Charlie Hebdo, dans une épicerie casher. Plus tôt ce mois-ci, deux attaques perpétrées dans la capitale danoise ont fait deux morts et cinq blessés parmi les policiers.
    L'an dernier, lors des élections générales de la Hongrie, le parti d'extrême droite Jobbik a remporté plus de 20 % des suffrages, ce qui en fait le troisième parti de l'Assemblée nationale de Hongrie. Un vote sur cinq est allé à ce parti d'extrême droite, dont les leaders appelaient notamment à dresser une liste des Juifs parce que ces derniers pouvaient représenter un risque pour la sécurité nationale. Cela fait peur et rappelle de mauvais souvenirs. Il s'agit pourtant d'un pays qui a ironiquement été désigné comme un pays soi-disant sûr par notre actuel gouvernement conservateur.
    Oui, l'antisémitisme est bien vivant, pas seulement en Europe, mais aussi au Moyen-Orient. On n'a qu'à penser à certaines déclarations de l'ancien président de l'Iran et à d'autres un peu partout dans le monde, incluant au Canada. Plusieurs considèrent le Canada comme un des pays les plus sûrs pour la diaspora juive. Je pense que nous pouvons tous nous en réjouir. Toutefois, cela n'a pas toujours été le cas. Longtemps, l'antisémitisme a été trop répandu.
     Par exemple, même après la Seconde Guerre mondiale, la population juive canadienne a été victime de discrimination. Des médecins juifs ne pouvaient pas être nommés dans les hôpitaux; il n'y avait pas de juges juifs; les avocats juifs étaient exclus de la plupart des cabinets; il y avait très peu ou pas d'enseignants juifs; et les infirmières, ingénieurs et architectes juifs devaient cacher leur identité pour trouver des emplois dans leur domaine. Souvent, certains réfugiés pouvaient ne pas avoir accès à l'école française, ce qui pouvait éventuellement leur causer des problèmes d'intégration très réels. Certains d'entre eux vivent dans ma circonscription.
    Je parle du passé, mais le présent n'est pas tout à fait rose non plus. Encore ici, de nombreux Canadiens juifs déclarent être victimes de harcèlement et de menaces violentes.
    Hier, la nuit passée, dans le secteur de Notre-Dame-de-Grâce, à Montréal, des croix gammées ont été tracées à l'aérosol sur quatre véhicules qui se trouvaient dans le stationnement privé de Montréalais de confession juive. On parle aussi de balles de fusil et de menaces de mort qui sont sans aucun doute des actes violents d'antisémitisme.
(2010)
    Enfin, l'antisémitisme, et de manière plus générale la haine ethno-religieuse, est un problème d'ampleur mondiale. Toutefois, j'aimerais parler des espoirs, parce que la coexistence pacifique, le respect mutuel et les interactions fructueuses entre les membres de toute confession et de toute origine est aussi possible.
     J'aimerais donner quelques exemples. En Israël, le Conseil de coordination interreligieuse a créé un réseau pour que juifs, chrétiens et musulmans se rencontrent et apprennent les uns des autres, dans le but de contribuer à façonner une société qui transcende les guerres et les inimitiés.
    La semaine dernière, trois organisations juives se sont jointes à 15 autres interconfessionnels pour exprimer leur crainte que le gouvernement américain marginalise les Américains musulmans. Ces groupes sont venus à la défense des Américains musulmans. Ce genre de chose me donne de l'espoir. Ici, au Canada, nous avons un programme qui s'appelle FAST. Je m'excuse parce que je ne connais que l'acronyme en anglais. Je ne sais pas s'il y en a un a en français. Il s'appelle FAST pour Fighting Antisemitism Together. Ce sont des gens d'affaires non juifs qui s'unissent à des leaders de la communauté pour faire de l'éducation et entreprendre diverses mesures pour lutter contre l'antisémitisme.
    J'aimerais terminer mon intervention sur un message d'espoir. Il faut travailler à combattre l'antisémitisme. Pour ce faire, je suggère que nous nous inspirions d'une figure religieuse très importante qui n'est ni juive, ni chrétienne ni musulmane. Il s'agit du dalaï-lama, qui nous disait que les problèmes que nous avons aujourd'hui, comme les conflits violents, la destruction de la nature, la pauvreté et la faim, sont des problèmes d'origine humaine qui peuvent être résolus par le déploiement d'efforts humains et par la compréhension et le développement d'un sentiment de fraternité, et qu'il nous faut cultiver une responsabilité universelle les uns envers les autres et à l'égard de la planète que nous partageons.
    Puisque j'ai commencé sur ma fierté d'appartenir à un parti qui, depuis des décennies et depuis le tout début de son existence, s'est battu contre l'antisémitisme, j'aimerais terminer sur les paroles de quelqu'un d'autre qui m'a beaucoup marquée. Il s'agit de Jack Layton, qui disait « Mes amis, l'amour est cent fois meilleur que la haine. »
(2015)

[Traduction]

    Monsieur le président, je remercie la députée de Laurier—Sainte-Marie de ses observations.
    Plus tôt aujourd'hui, j'ai noté une citation qui me touche depuis longtemps:
    Les néo-démocrates croient depuis longtemps que tant que certains d'entre nous sont privés de liberté, nous sommes tous privés de liberté. Tant que certains d'entre nous sont persécutés, nous sommes tous persécutés.
    Plus tôt, mon collègue d'Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale a parlé de l'Université McMaster. Comme le savent les gens, il y a eu un attentat à la bombe incendiaire contre un temple hindou Samaj à Hamilton peu après les événements du 11 septembre. Les racistes pensaient que c'était une mosquée. Le député a également mentionné la semaine contre l'apartheid israélien. Il y a également eu un incident lorsque l'une des professeures a porté un niqab, ce qui a causé un problème.
    Je pense qu'il est vraiment important d'examiner l'Holocauste, ou la période le précédant immédiatement, et ce qui est arrivé aux Juifs en Allemagne. Ils ont perdu leur voix. Ils ont perdu le droit d'être eux-mêmes et de défendre leur cause, quel que soit le problème.
    Par conséquent, je suis d'accord que, en ce qui concerne la semaine contre l'apartheid israélien, nous devons nous mobiliser et essayer de changer le cours des choses. Nous devons nous mobiliser, que ce soit à l'égard du problème causé par un niqab ou de toute activité de lutte contre le racisme.
    Un décret imposant une façon d'agir pyramidale, cela ne fonctionne pas et n'a jamais fonctionné. Nous devons protéger la liberté d'expression des gens, afin qu'ils puissent transmettre le message qui changera l'histoire.
    L'antisémitisme a la plus longue histoire; plusieurs intervenants l'ont dit ce soir. Depuis des siècles, les Juifs sont victimes d'antisémitisme. Nous devons protéger la voix de nos collectivités afin de lutter contre cette forme de racisme.
(2020)
    Monsieur le président, mon collègue a abordé un aspect qui me touche personnellement. Je pense que les gens ici à la Chambre savent que je ne parle pas souvent de ma situation personnelle dans le cadre des débats. Or, le débat d'aujourd'hui me touche de très près. Je crois que nous sommes tous dans le même bateau. Soit nous demeurons à flot tous ensemble, soit nous coulons tous ensemble. C'est la politique de la division qui a donné lieu aux événements qui se sont produits en Allemagne. C'est pour cette raison que la politique de la division me trouble autant.
    Nous avons aussi beaucoup parlé d'éducation. Quelqu'un a mentionné que l'éducation se fait aussi à la maison, entre autres. L'éducation comporte bien des aspects. Il y a quelques décennies, j'ai lu un livre intitulé Treblinka. Cela fait si longtemps que je ne me souviens plus du nom de l'auteur. Quoi qu'il en soit, ce livre m'a permis de comprendre énormément de choses, qui m'ont marquée à jamais et qui sont à l'origine de mon engagement social et politique.
    Monsieur le président, je remercie ma collègue de ses observations et de son engagement profond à l'égard de cette question.
    Nous avons parlé de certains actes qui sont commis, comme peindre des croix gammées sur des voitures, par exemple. Certains de ces actes sont violents. Certains sont destructeurs et causent du tort aux gens. Jusqu'où les autorités devraient-elles aller pour tenter d'empêcher ces actes, si elles s'aperçoivent que des gens en parlent ou complotent pour les commettre, que ce soit par Internet ou par d'autres moyens, où les gens peuvent être observés?
    Il s'agit d'un sujet délicat en ce moment à la Chambre, comme je l'ai mentionné plus tôt, lorsque j'ai parlé d'une autre mesure législative dont nous discutons. Ma collègue peut-elle nous dire jusqu'où, à son avis, les autorités doivent pouvoir aller pour empêcher ces actes lorsqu'ils seront vraisemblablement violents?
    Monsieur le président, je ne prétends pas que l'intervention de la police ou d'autres instances n'est pas nécessaire. Il s'agit d'ailleurs du coeur du débat et c'est une question que nous abordons souvent des deux côtés de la Chambre.
    À mon avis, l'éducation est la façon de procéder la plus sage, la plus efficace à long terme. Elle permet d'obtenir des résultats durables et de favoriser des changements importants. Il faut remonter à la source et faire de la prévention. Il est évident que la prévention ne guérit pas tout. On ne peut pas toujours atteindre la perfection, mais une chose est certaine: nous ne réglerons rien du tout si nous ne nous attaquons pas à l'origine du problème. On peut comparer la situation actuelle à celle d'un arbre malade, dont les racines seraient affectées par la maladie.
    Je sais que certaines personnes de l'autre côté n'aiment pas l'expression « causes profondes ». Je l'aime bien, pour ma part. Si on ne se concentre pas sur les causes profondes et qu'on se contente d'adopter des solutions temporaires, on ne résoudra pas le problème à long terme.
    Monsieur le président, je m'attendais en gros à ce genre de réponse, mais j'aimerais aller un peu plus loin. Je suis d'accord pour ce qui est des causes profondes et de l'éducation. Nous sommes tous d'accord à ce sujet. Jusqu'où les autorités devraient-elles être autorisées à aller pour déterminer si quelqu'un est sur le point de commettre un acte violent? Nous ne parlons pas ici des causes profondes. Nous parlons d'une personne qui est sur le point de commettre un acte violent. Jusqu'où les autorités devraient-elles être autorisées à aller pour détecter la situation et prévenir la violence? Il faudrait déterminer si une personne est sur le point de faire cela, que ce soit au moyen d'Internet ou d'une autre méthode. Jusqu'où les autorités devraient-elles être autorisées à aller pour empêcher un tel acte?
    Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il faut se pencher sur les causes profondes. Cependant, nous devons prévenir les actes de violence. Jusqu'où devrions-nous aller?
    Monsieur le président, nous ne devrions pas aller trop loin pour éviter de porter atteinte aux valeurs mêmes que nous tentons de protéger, comme la dignité humaine et les libertés civiles. Chaque fois que nous faisons cela, nous avons aussi besoin de mécanismes de surveillance.
(2025)
    Monsieur le président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Lanark—Frontenac—Lennox and Addington.
    Je trouve profondément tragique que, en 2015, la Chambre soit contrainte de reconnaître une fois de plus que l'antisémitisme existe toujours au Canada et ailleurs dans le monde. Malgré tous les efforts des parlementaires et de leurs concitoyens ainsi que la vigilance et la détermination d'entités comme B'Nai Brith Canada, principal organisme juif de défense des droits de la personne, actif au Canada depuis 1875, la haine originelle de l'humanité, c'est-à-dire l'antisémitisme, se porte encore ignoblement bien, chez nous comme à l'étranger.
    Le plus récent rapport annuel de B'Nai Brith Canada sur les incidents antisémites, celui d'avril 2014, fait état d'une hausse de 21,6 % et de 7,7 % respectivement des actes de vandalisme et de violence à l'échelle du pays par rapport à l'année précédente. Voici ce que Frank Dimant, qui vient de prendre sa retraite du poste de PDG de l'organisme après 36 années de service, a affirmé à propos du rapport:
    Que l'antisémitisme latent au Canada ait bondi de 49 % en 10 ans devrait gravement préoccuper tous les Canadiens.
    Cela dit, M. Dimant estime que les chiffres ne disent pas tout. Je le cite de nouveau:
    Les gens qui nous appellent font état d'une appréhension croissante au sein de la population canadienne [...] la haine des Juifs fait maintenant tellement partie du discours normatif qu'elle en a perdu son caractère répréhensible.
    Les Canadiens se souviennent sûrement de brèves périodes au cours des dernières décennies où ou pouvait croire, naïvement peut-être, que l'antisémitisme était un phénomène ignoble du passé. Nous constatons toutefois la résurgence de cette haine, qu'elle prenne une forme traditionnelle ou hybride. Dans ma circonscription, Thornhill, il y a des cas de vandalisme et de graffitis antisémites. On voit par exemple des croix gammées surmontant l'étoile de David. À Montréal, des bombes incendiaire ont été lancées dans des entreprises juives et des cimetières juifs ont été profanés. Lors de périodes de tensions au Moyen-Orient, certains rassemblements anti-Israël de Calgary, Mississauga et Toronto ont dégénéré en manifestations ouvertement antisémites parfois violentes. Dans un trop grand nombre de campus universitaires, on souligne la Semaine contre l'apartheid israélien.
    La Semaine contre l'apartheid israélien et le mouvement Boycott, désinvestissement et sanctions constituent de l'antisémitisme hybride. Les organisateurs de cette semaine et de ce mouvement déclarent qu'ils ne sont pas antisémites et qu'ils n'ont rien contre les Juifs, mais qu'ils en ont seulement contre Israël, l'État sioniste. Le mot « sioniste » est même devenu une façon détournée de désigner les Juifs chez les gens qui incitent à la haine.
    Le gouvernement a toujours affirmé qu'Israël avait le droit de se défendre. La seule démocratie du Moyen-Orient fait constamment l'objet de menaces et d'attentats commis par des entités terroristes et des quasi-États. Et je passe sous silence les menaces concrètes et emphatiques en provenance de l'Iran.
    Israël n'est pas parfait. Le gouvernement admet aussi le droit de formuler des critiques justifiées. Le premier ministre a toutefois dit ceci:
[...] peu importe les lacunes d’Israël, ni l’existence, ni les politiques de ce pays ne sont responsables des pathologies présentes dans cette partie du monde.
    J'étais fier de faire partie de la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme. Je crois que mon collègue de Lanark—Frontenac—Lennox and Addington en parlera plus en détail, mais, pour conclure, j'aimerais me reporter à une conclusion importante du rapport de la commission d'enquête de la coalition. Il mentionne que critiquer Israël n'est pas antisémite en soi, mais que de lui nier le droit d'exister ou de chercher à le détruire peuvent être considérés comme des actes antisémites.
    La commission a aussi recommandé que les forces policières de tout le Canada soient mieux formées pour faire face à l'antisémitisme, que les universités en fassent plus pour contrer la Semaine contre l'apartheid israélien, que la sensibilisation aux droits de la personne occupe une plus grande place dans les programmes d'accueil des néo-Canadiens et, enfin, que le comité des affaires étrangères de la Chambre se penche sur le fait que les Nations Unies:
[...] mettent trop l'accent sur les atteintes présumées aux droits de la personne par Israël tout en fermant les yeux sur les violations flagrantes des droits de la personne par d'autres États membres.
    Tout comme je crois que la vigilance est le prix de la liberté, la résistance perpétuelle est essentielle dans la lutte contre l'antisémitisme et la défense de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit.
(2030)
    Monsieur le président, je ne pense pas qu'il y ait un seul député qui puisse ne pas faire le constat de l'escalade et de la montée horribles de l'antisémitisme auxquelles nous assistons dans le monde aujourd'hui. Je m'interroge là-dessus parce que nous savons que divers pays, dont fait partie le Canada, s'efforcent de trouver des moyens de prévenir l'antisémitisme et d'éduquer les gens.
    Le député peut-il nous dire quels efforts ont donné de bons résultats dans le monde, en ce qui a trait à la lutte contre l'antisémitisme, et quelles graines ont été semées pour que les peuples puissent vivre ensemble en harmonie?
    Monsieur le président, mon collègue vient de poser une question très difficile.
    Comme le démontrent des siècles d'histoire de l'humanité et comme je l'ai indiqué, l'antisémitisme est la haine originelle de l'humanité. C'est un phénomène générationnel qui connaît des hauts et des bas. Après l'Holocauste, une prise de conscience nouvelle a eu lieu. On s'est efforcé, comme ce fut notamment le cas en Allemagne et dans le reste de l'Europe, de comprendre les origines de l'extrémisme. Comme l'a indiqué tout à l'heure le député de Mont-Royal, les mots ont été les premiers pas vers les chambres à gaz.
    Et comme je l'ai dit à la fin de mon intervention, si la vigilance éternelle est fondamentale pour la préservation de nos libertés, la résistance perpétuelle contre l'antisémitisme, partout où il prend racine, l'est tout autant.
    Le Canada s'exprime souvent sur cette question dans les rencontres internationales. Il le fait presque chaque année à l'Assemblée générale des Nations Unies et sur d'autres tribunes. Je pense que c'est l'une des constantes principales non seulement des politiques intérieures du Canada, mais également de sa politique étrangère.
    Monsieur le président, le débat d'aujourd'hui tombe à point, surtout en raison de ce qui s'est passé à Montréal aujourd'hui. En effet, des croix gammées ont été peintes sur des voitures et des balles ont été laissées sur place pour intimider la communauté juive.
    Pendant que nous parlons d'éduquer et de sensibiliser davantage les gens pour éradiquer de notre société et des cultures du monde entier la haine contre le peuple juif, on constate une montée de la violence. Davantage de moyens sont employés pour promouvoir l'antisémitisme, notamment l'antisionisme, qui se caractérise par le refus de reconnaître que l'État d'Israël est un pays. Il y a une recrudescence de la violence perpétrée par des groupes comme l'État islamique, qui veut établir son califat et, dans la foulée, éliminer tous les Juifs et les autres qui ne croient pas à ce qu'ils considèrent comme leur religion.
    Je me demande si le député de Thornhill peut parler du fait que nous vivons à une époque dangereuse de notre histoire et que nous devons dépasser ce stade. On pourrait croire qu'une société éduquée comme la nôtre, où les moyens diffuser de l'information sont nombreux, serait plus pacifique et plus conciliante à l'égard des autres cultures et des autres religions. Pourtant, cette haine horrible, ce fléau qui semble se propager dans le monde entier, existe toujours.
    Monsieur le président, je crois que cela témoigne de la lutte éternelle que nous devons mener contre l'aspect le plus ignoble de la nature humaine. Par exemple, lors des activités que les campus universitaires organisent chaque année dans le cadre de la semaine contre l'apartheid israélien, il y a eu des manifestations de haine souvent flagrantes. Les semeurs de haine ne tentent même pas de cacher leurs intentions derrière des euphémismes. À cause de ce qui s'est passé à l'Université Concordia, il y a 10 ans, ou à l'Université York, à Toronto, qui est tout près de ma circonscription, il y a des étudiants juifs qui refusent de prendre part à des activités auxquelles tout étudiant participe habituellement pendant ses études universitaires, simplement parce qu'ils sont intimidés. Certains sont allés jusqu'à dissimuler tout signe qui pourrait révéler leur origine juive.
    Les incidents survenus aujourd'hui à Montréal, les graffitis ignobles et les balles utilisées pour faire de l'intimidation sont d'autres manifestations de haine parmi les plus flagrantes. Encore une fois, il faut que des voix s'élèvent dès demain à Montréal pour dénoncer les événements d'aujourd'hui.
(2035)
    Monsieur le président, je prends la parole aujourd'hui pour parler brièvement de l'expérience que j'ai acquise à titre de coprésident de la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme. La coalition a publié ce rapport en 2011 à la suite d'audiences exhaustives. À partir du matériel recueilli et des témoignages, notre ancien collègue Mario Silva et moi avons dirigé la publication d'un livre sur l'antisémitisme intitulé Tackling Hate: Combating Antisemitism: The Ottawa Protocol.
    L'un des enjeux qui est ressorti à l'époque a aussi été mentionné pendant le débat de ce soir. Comme ce phénomène me frustre toujours au plus au point, j'ai décidé d'y consacrer les cinq minutes dont je dispose.
    Certains soutiennent que, si on parle d'antisémitisme, il faut aussi parler de l'autre haine qui est son pendant, l'islamophobie. Il s'agit selon moi d'une fausse dichotomie. On peut avoir des discussions légitimes qui se concentrent sur l'antisémitisme, comme le proposent certains. On peut aussi avoir des discussions légitimes si, comme le proposent d'autres personnes, on considère antisémitisme comme le prototype de toutes les formes de haine et de déshumanisation de l'autre. Ces deux points de vue et ces deux discussions sont valables.
    Il est approprié de souligner que, parmi toutes les grandes populations du monde, les Juifs sont la seule à avoir fait l'objet d'une tentative d'extermination délibérée et systématique. Aucun événement sur la planète n'a atteint l'ampleur de l'Holocauste. La situation des Juifs dans les années 1940 est donc tout à fait unique. Mais malgré cela, on peut aussi voir l'antisémitisme et les Juifs comme un bon indicateur des autres formes de discrimination, d'abus et de haine.
    Il est toutefois fort inapproprié de prétendre que nous ne devrions pas discuter de l'antisémitisme au Canada et à l'étranger sans parler d'islamophobie. La raison en est très simple.
    Lorsqu'il est question d'islamophobie, il est très clair qu'il n'est pas question des incidents isolés qui ont eu lieu, par exemple, dans la foulée du 11 septembre, lors desquels des musulmans avaient été pris pour cibles dans notre pays. Je peux donner de nombreux exemples. En fait, j'ai tout une série d'essais qui ont été publiés, et c'est sans parler des mémoires qui ont été présentés à la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme, selon lesquels nous devrions plutôt débattre des actions manifestement racistes d'Israël, qui pratiquerait l'apartheid. Il est très choquant d'associer le sionisme au racisme, comme l'a déjà fait l'Assemblée générale des Nations Unies. Il s'agit presque toujours de stéréotypes qui dépeignent très injustement Israël, et certains prétendent que, si nous ne réglons pas cette question, nous ne devrions pas parler d'antisémitisme. Cela soulève un enjeu important. On avance ainsi que les Juifs, et, dans le présent cas, les Juifs canadiens, sont d'une façon ou d'une autre collectivement responsables des actions d'un pays dont ils ne sont pas citoyens. Ils seraient en quelque sorte responsables des actions d'un groupe sur lequel ils n'ont aucun pouvoir.
    Je me permets d'établir un parallèle. Aux fins de la discussion, imaginons qu'il y a actuellement une augmentation de l'hostilité envers les Chinois, comme c'était le cas à l'époque du « péril jaune » vers la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle. À cette époque, les citoyens chinois faisaient l'objet d'une discrimination systémique de la part du gouvernement et de leurs concitoyens. Il y a eu des actes de violence collective contre les Chinois de la côte Ouest du Canada et des États-Unis. Imaginons qu'une personne intervienne pour dire que nous ne pouvons pas parler de la discrimination exercée contre les Chinois tant que nous ne nous sommes pas occupés des violations des droits de la personne commises dans la République populaire de Chine et que nous n'avons pas abordé la façon dont les Tibétains sont traités par la Chine. Imaginons qu'elle nous dise que nous ne pouvons pas nous pencher sur les cas de discrimination contre les Chinois que nous observons dans notre pays. Ce serait complètement ridicule. Je suis d'avis que derrière cette soi-disant inquiétude pour les Tibétains — qui, croyez-moi, méritent que nous nous préoccupions vraiment de leur sort — se cacherait réellement une forme de racisme. C'est là où je voulais en venir en établissant ce parallèle.
    Il est tout à fait légitime de considérer l'islamophobie comme une forme de discrimination qui n'a pas sa place dans notre société.
(2040)
    Il est légitime de discuter de toutes les formes de discrimination. Nous pouvons les examiner collectivement ou individuellement, mais nous ne devrions jamais blâmer collectivement des groupes pour des problèmes dont ils ne sont pas à l'origine. C'est un problème intellectuel de taille. Je crois que nous ne devrions jamais nous aventurer sur cette voie.
    Monsieur le président, je tiens à remercier mon collègue d'avoir présidé la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l’antisémitisme. Nous avons passé beaucoup de temps tôt le matin à la mettre sur pied. Je lui suis très reconnaissant de ses efforts.
    Ma question sera courte afin que le député puisse développer sa réponse à son aise.
    Le mouvement de boycottage, de désinvestissement et de sanctions en est même venu à prendre pour cibles des universitaires canadiens qui appuient Israël. J'aimerais donner à mon collègue l'occasion de se prononcer là-dessus et de nous parler de la différence entre la politique internationale et la politique intérieure.
    Essentiellement, monsieur le président, le mouvement BDS encourage les institutions et les particuliers à se dessaisir de leurs investissements dans les sociétés qui contribuent à l'économie d'Israël, qui font affaire avec Israël ou qui ont des installations en Israël. On propose d'imposer toutes sortes de sanctions, notamment sur le plan académique, et on incite dans une certaine mesure les responsables à tenir compte de considérations autres que le mérite professionnel lorsqu'ils choisissent les professeurs à promouvoir.
    Nous sommes nombreux à avoir été à l'université. Nous savons bien que certains étudiants refusent de prendre une position qui pourrait nuire à leurs résultats scolaires. Dans bien des cas, les étudiants sont exposés à de subtiles pressions.
    Lorsque j'étais à l'université dans les années 1980, je faisais très attention de ne pas révéler le fait que je n'étais pas nécessairement un adepte du marxisme dans les dissertations que je soumettais à certains professeurs. C'est un phénomène universel, et ces pressions sociales sont considérables.
    Toutefois, en général, l'idée d'isoler Israël et d'appliquer des critères différents à son égard, puis de dire que nous devrions donc boycotter le pays et désinvestir, rappelle presque invariablement la comparaison avec l'apartheid en Afrique du Sud sous le régime blanc. Bien sûr, d'un point de vue objectif, il n'y a aucune ressemblance entre les deux pays. Le parallèle est complètement inapproprié, mais on le ressasse sans cesse, surtout durant la semaine contre l'apartheid israélien qui, malheureusement, est un slogan de marketing bien pensé. Il est difficile de le mentionner sans répéter le message de ceux qui prétendent qu'il y a un lien quelconque entre l'apartheid en Afrique du Sud et Israël.
    Monsieur le président, le député a parlé de la semaine contre l'apartheid israélien, cette manifestation dégoûtante qui se tient sur les campus de nos collèges. Il a mentionné que ce qui s'est passé en Afrique du Sud est à l'origine de l'apartheid.
    J'ai eu le privilège de participer à un forum parlementaire international avec un député de l'Afrique du Sud qui est le chef de l'un des partis locaux. Il a lancé un mouvement opposé, appelé Defend, Advocate and Support Israel, ou DASI, visant à défendre et à soutenir Israël. Kenneth Meshoe est Africain noir et a vécu sous l'apartheid. Il a dit « Donnez-moi un exemple de ce que vous qualifiez d'apartheid en Israël et je vous expliquerai pourquoi vous avez tort ».
    Kenneth a lancé ce mouvement et il essaie de recruter environ 25 jeunes Africains noirs pour aider à diffuser, partout dans le monde, le message que cette insulte contre Israël, une forme moderne d'antisémitisme, d'antisionisme, est en fait totalement déconnectée de la réalité et une insulte aux souffrances endurées par ceux qui ont vécu l'apartheid.
    J'aimerais savoir ce qu'en pense le député. Était-il au courant? Y a-t-il quelque chose que nous pourrions faire pour encourager ce mouvement ou aider certains de ces jeunes à venir au Canada pour nous aider à orienter notre discours public?
(2045)
    Monsieur le président, je dois admettre que je ne connaissais pas ce mouvement. Cela me semble une bonne idée.
    Honnêtement, la meilleure chose que l'on puisse faire pour Israël et sa place dans le monde est tout simplement de le traiter comme n'importe quel autre État du monde et d'appliquer à son endroit les mêmes règles. Si Israël agit de manière inappropriée, viole le droit international ou commet des attaques inacceptables, on doit le traiter comme on traiterait n'importe quel autre État dans une pareille situation. On doit appliquer les mêmes normes, sans compromis, comme pour n'importe quel autre État. C'est la meilleure façon de donner à Israël la place qui lui revient dans le monde.
    Par ailleurs, toute cette attention portée sur Israël à l'ONU a pour effet de détourner l'attention des nombreuses violations des droits de la personne perpétrées dans tant d'autres pays dans le monde qui, franchement, n'ont absolument rien à voir avec Israël. C'est devenu une échappatoire pratique.
    Ce ne sont même pas les pays intéressés ou concernés par le manège visant à délégitimiser Israël parce qu'ils ne l'aiment pas qui perpétuent ce processus; ce sont simplement des pays qui veulent détourner l'attention de leurs propres violations des droits de la personne.
    Monsieur le président, j'aimerais revenir sur ce que disait l'orateur précédent. Je crois que, tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas trouvé une façon de mettre fin à l'antisémitisme, nous n'aurons aucune chance de mettre fin aux autres formes de discrimination, comme l'islamophobie, pour ne nommer que celle-là. Nous devons absolument enrayer ce fléau.
    J'aimerais parler un peu de mon expérience personnelle. La députée de Laurier—Sainte-Marie a parlé un peu de son vécu par rapport à l'antisémitisme et de la façon dont cela l'a affectée, et j'ai moi aussi quelques anecdotes à ce sujet. En 1959, j'étais encore un jeune garçon et j'habitais une petite ville appelée Plaster Rock, au Nouveau-Brunswick — c'est d'ailleurs dans cette ville qu'un train a déraillé l'an dernier. Il n'y avait pas de Noir ou de Juif dans la communauté où j'ai grandi. Certes, il y avait des tensions entre francophones et anglophones, mais nous n'avions jamais entendu parler de racisme.
    Pendant l'été de mes 12 ans, alors que j'étais devant la maison, j'ai vu passer une voiture Dodge 1949. Je n'oublierai jamais cet événement, il est gravé dans ma mémoire. Un homme et une femme se disputaient sur le siège arrière de la voiture et, soudainement, ils ont jeté par la fenêtre de la voiture une boîte à chaussures remplie de photos. Comme n'importe quel autre garçon l'aurait fait, j'ai commencé à ramasser les photos. Pendant de très nombreuses années, j'ai considéré que cette journée était la plus triste de ma vie: les photos avaient certainement été prises par des gardiens travaillant à Auschwitz.
    Il y avait une photo de ces abat-jours faits à partir de peau humaine tatouée dont on a tous entendu parler. De temps à autre, la photo de femmes toujours vivantes que l'on pousse vers une fournaise me revient à l'esprit.
    Pendant un long moment, j'ai tenté de comprendre ce que je venais de voir. Je n'avais que 12 ans: je ne comprenais pas comment on pouvait commettre de tels actes et j'ignorais que les gens sur les photos étaient des Juifs. J'ai décidé de conserver les photos.
    Ma grand-mère avait une vieille machine à coudre munie d'une armoire. C'est là que j'ai caché les photos parce que je n'arrivais pas à croire qu'il pouvait s'agir d'autre chose que des photos tirées d'un film horrible. Il m'a fallu beaucoup d'années avant de prendre pleinement conscience de cette réalité, car, comme j'habitais dans une localité bienveillante, je ne comprenais pas ce qu'était le racisme.
    C'était évidemment à peu près à l'époque où se déroulait l'intrigue des films Exodus et Jugement à Nuremberg. Mon père aimait beaucoup m'emmener au cinéma. C'était la première fois que sur un écran, dans un film, on montrait des corps se faire bulldozer.
    Je ne peux pas exprimer le sentiment que j'ai éprouvé lorsque j'ai fait le lien entre les photos que j'avais trouvées et le film que je voyais quelques années plus tard. C'est à ce moment-là que j'ai commencé à saisir toute l'horreur des événements qui s'étaient produits. Je ressens toujours ce sentiment aujourd'hui, et il me pousse à faire respecter les principes de justice et à protéger tous nos concitoyens.
    Puis, les années ont passé, et je me suis investi dans le mouvement syndical. J'étais simple délégué au conseil du travail du district d'Hamilton. J'ai alors connu un homme qui devait être dans la soixantaine, Al Smith. C'était probablement l'homme le plus affable et le plus gentil que l'on puisse espérer rencontrer. Il mesurait environ cinq pieds et deux pouces. Il avait passé de 10 à 20 ans au sein du comité des droits de la personne de ce conseil du travail.
    Un jour où j'étais au bureau, M. Smith, qui avait été chargé d'assister au nom du conseil du travail à un événement où il avait payé quelque chose, a apporté le reçu pour se faire rembourser. Lorsque la jeune femme a voulu lui rendre sa monnaie, cet homme adorable qui avait lutté pendant 40 pour les droits des gens a refusé une pièce de 5 ¢ en disant: « Oh non, ce serait bien trop youpin de ma part d'accepter de reprendre cet argent. » Je me souviens de m'être dit que l'antisémitisme était tellement insidieux, qu'il s'était tellement intégré à notre culture que même les Juifs utilisaient un mot comme « youpin ».
    Ce soir, les intervenants, l'un après l'autre, ont tous répété la même chose: une fois de plus dans notre histoire, l'antisémitisme est en hausse.
    Nous pouvons débattre d'Israël. Nous pouvons débattre de Gaza, de l'OLP ou de tout ce que nous voulons, mais il n'en reste pas moins que l'antisémitisme prend de l'ampleur. Or, nous ne sommes pas impuissants.
(2050)
    Je crois profondément dans les vertus du dialogue, de la communication et du débat. Lorsqu'on est confronté à la haine, on doit y faire face. Quoi qu'on pense de la semaine contre l'apartheid israélien, il faut le dire. Je redoute vivement que, en étouffant le débat dans les établissements d'enseignement supérieur, on ouvre finalement la porte à une autre forme de haine.
    C'est à la Chambre qu'il convient de débattre de tout cela. Oui, ce sont des débats qui touchent de près certaines personnes, pour diverses raisons. Beaucoup de députés représentent des circonscriptions qui comportent une communauté juive ou musulmane.
    Il m'est arrivé quelque chose à Hamilton. Trois jours après les attentats du 11 septembre 2001, il y a eu un attentat à la bombe incendiaire contre un temple hindou Samaj. Un groupe a alors été mis sur pied, la Strengthening Hamilton's Community Initiative, dans le but de faire face au racisme. Les deux hommes qui ont perpétré l'attentat contre le temple avaient cru qu'il s'agissait d'une mosquée. Le racisme ne comprend pas grand-chose, et ceux qui le pratiquent et qui posent de tels gestes sont plutôt horribles.
    Ces actes, qui ont été commis pendant une période où Israël combattait encore une fois à Gaza, ont poussé des personnalités influentes des communautés musulmanes et juives et de bien d'autres communautés à émettre des communiqués communs sur ce qui s'était produit. Voilà la preuve que des gens ayant des points de vue très différents peuvent unir leurs forces. C'est important. Il faut trouver une façon de le faire comprendre dans le monde entier. Certains gouvernements semblent se réjouir que différents groupes ethniques, comme les Juifs ou les Arabes, ou des groupes religieux, comme les chrétiens, les musulmans, les Rohingyas, les Tamouls ou tout autre groupe, s'accusent mutuellement d'être différents ou inférieurs ou de voler les emplois et les terres des autres.
    Voici un exemple de ce qui peut arriver si on tolère de telles choses. Les néo-démocrates parlent souvent à la Chambre de l'Iran. En fait, la propagande et les discours haineux du gouvernement iranien ciblent Israël, mais ils masquent en fait les horreurs que celui-ci fait subir à son propre peuple. Le mois dernier, quelque 90 personnes ont été pendues en Iran. Je ne sais pas combien il y a eu de pendaisons l'an dernier, mais ce doit être des centaines. Il y a quelques années, nous croyions qu'il y avait un soulèvement populaire en Iran et qu'une démocratie était en train d'éclore, mais nous nous rappelons aussi le massacre qui a eu lieu dans les rues. Nous nous souvenons tous de la jeune fille qui a été tuée; en fait, elles étaient plusieurs.
    Je ne prétends pas connaître la réponse, mais je comprends une chose: c'est que nous devons maintenir la communication. Le Canada doit rester un chef de file dans ce dossier parce qu'il est l'un des rares pays que je connaisse où il peut y avoir des débats publics objectifs. J'avais l'habitude de blaguer avec mes amis à Hamilton. Il y a un parc au centre de Hamilton, le parc Gore, et je disais que, au Canada, nous pouvions nous hisser sur une boîte dans le parc Gore et dire tout ce que nous voulions à condition de ne pas prêcher la haine. Nous pouvons dire que nous n'aimons pas le premier ministre, non pas que je ferais une chose pareille, mais nous pouvons le faire dans notre démocratie. Nous sommes libres de le faire. Si nous tentions notre chance aux États-Unis, dans un parc à New York, et que nous nous hissions sur une caisse à savon pour lancer des diatribes, nous nous retrouverions dans une voiture de police. Or, les États-Unis se prétendent le pays le plus libre de la terre. Non, c'est le Canada et c'est la raison pour laquelle nous devons prendre les devants dans la lutte contre l'antisémitisme.
    C'est notre pays que bien des pays écoutent et nous avons mis en place les programmes et donné le ton dans notre propre pays pour que tous, Juifs, Arabes et n'importe qui d'autre, soient aussi bien accueillis et soient en sécurité. Ce qui s'est passé à Montréal aujourd'hui est carrément choquant.
(2055)
    Monsieur le président, je suis d'accord avec le député en ce qui concerne la communication et le fait que nous ne pouvons pas étouffer le débat. Nous devons maintenir les canaux de communication ouverts et trouver le moyen de parler de ce qui est juste et de ce qui ne l'est pas.
    Je félicite aussi le député, qui a coprésidé les rencontres d'Ottawa sur le protocole qui ont permis de dégager des enjeux, de définir la haine véritable et d'autres problèmes dont la Chambre doit s'occuper sans détour. Le débat de ce soir permet à tous d'exprimer leur appui à un consensus et de dire que nous sommes du même avis.
    Il a été question de certains établissements d'enseignement supérieur. Je sais qu'ils ont un rôle à jouer en matière de responsabilité. Pour ce qui est de maintenir les canaux de communication ouverts, de résoudre les problèmes et de déterminer ce qui est inacceptable, que pense le député de la responsabilité qui incombe aux universités, par exemple, relativement à l'expression de cette haine? Comment pouvons-nous l'arrêter?
    Monsieur le président, j'aimerais dire d'emblée que je n'ai pas la sagesse de Salomon. En tant que démocrate, je sais à quel point la lutte pour la défense du droit à la démocratie et à la libre expression est extrêmement difficile, mais je ne crois pas qu'on ait le droit de promouvoir la haine. Nous avons des lois contre la promotion de la haine, et elles devraient être appliquées lorsque cette infraction est commise.
    Je ne vais porter aucun jugement à l'égard d'un groupe en particulier dont je n'ai pas entendu parler de façon concrète, mais si quelqu'un sème la haine, il faut y remédier. Il y a des conseils d'administration au sein des universités. Le problème, c'est que les autorités ne peuvent rien faire tant que les propos en question n'ont pas été tenus dans leur établissement. Je suis sûr que cela complique la situation.
    Je m'attends à ce que la plupart des conseils d'administration de ces universités prennent les mesures qui s'imposent après un cas de promotion de la haine ou un autre incident comme celui dont j'ai parlé à propos du niqab à l'Université McMaster. Une rencontre a eu lieu. J'y ai assisté parce que j'étais en ville cette semaine-là. Nous avons parlé du caractère injuste de la situation. Selon moi et bien d'autres personnes présentes, cela n'était pas du même ordre que la semaine contre l'apartheid israélien. Cependant, comment assurer le juste équilibre dont parle le député? Il m'est tout simplement impossible de répondre à cette question.
(2100)
    Monsieur le président, la dualité de l'identité et de la vie des Juifs est probablement un phénomène unique dans l'histoire du Canada.
    D'une part, sur le plan individuel et collectif, en particulier dans les démocraties occidentales, les Juifs bénéficient d'un degré d'acceptation inégalé et peuvent contribuer à la société comme les autres citoyens des pays où ils vivent. Cela est manifeste au Canada, où les Juifs se sont dotés d'institutions solides et où ils forment une communauté capable de faire sa contribution dans toutes les sphères de l'activité humaine.
    En outre, malgré les menaces, Israël a su faire sentir fortement sa présence au Moyen-Orient sur les plans culturel, scientifique et militaire, et contribue aux progrès dans le monde dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la littérature.
    D'autre part, nous assistons à la montée d'une vieille haine, que nous croyions tous disparue à jamais, une haine qui signifie que les Juifs ne peuvent pas se promener tranquillement dans les rues de certaines capitales parmi les plus civilisées du monde s'ils portent une tenue qui les identifie comme Juifs. Ils risquent leur vie, et l'oppression sociale et psychologique qu'ils doivent affronter quotidiennement dans certaines de ces capitales donne froid dans le dos.
    Parallèlement à ce phénomène, l'existence d'Israël est menacée par ceux qui lui nient le droit d'exister et qui, en même temps qu'ils nient l'Holocauste, sont déterminés à le répéter.
    Quelle est la genèse de cette haine? Quelles en sont les raisons, qu'elles soient psychologiques, historiques, théologiques ou politiques? D'où vient cette haine et pour quelle raison se perpétue-t-elle à travers les millénaires? Si nous pouvions communiquer avec les enfants, nous serions capables de contrecarrer ce sentiment et de l'empêcher de se répandre, mais nous n'y sommes pas encore parvenus.
    La société canadienne est diversifiée. C'est une société extraordinairement harmonieuse où les gens sont libres de pratiquer leur religion, selon leurs croyances, et d'adhérer aux orientations qu'ils veulent. C'est une société où les gens de toutes les races et de toutes les religions sont capables de s'épanouir. Bien que le problème de l'antisémitisme existe au Canada, il ne représente pas le même genre de menace que dans d'autres pays.
    Quelles leçons pouvons-nous tirer de la situation actuelle et que pouvons-nous proposer comme solution au problème, afin de protéger la communauté et, espérons-le — à long terme du moins —, prévenir le développement de ce cancer avant que ne ressurgisse l'horreur d'un passé encore trop récent?
    Monsieur le président, je vais considérer qu'on me fait un compliment extraordinaire en me demandant de répondre à l'une des questions les plus difficiles jamais posées.
    Je pense qu'il faut revenir des siècles en arrière pour trouver la source de cette haine, qui a été enseignée de façon systématique. Elle s'est propagée de collectivité en collectivité, par ce qu'on appelle la rumeur publique.
    Aujourd'hui, si on assiste à une montée de la haine, c'est entre autres à cause des communications. En Égypte, où il y a eu une révolution, ainsi qu'en Syrie et dans d'autres pays, où les gens se sont soulevés contre le gouvernement, il y a un objet commun qui fait partie de ce phénomène: le iPhone. C'est un moyen de communication. Lorsqu'on s'entretient avec des aînés au Tim Hortons, ils nous racontent toutes sortes de choses qu'ils ont lues sur Internet et ils sont fermement convaincus qu'elles sont vraies. Personne ne peut dire pourquoi ils croient ces choses. La haine est l'une de ces choses. La xénophobie en est une autre.
    Les communications, qui sont omniprésentes aujourd'hui, jouent un rôle dans la propagation incontrôlée de la haine visant divers peuples, mais plus particulièrement le peuple juif. C'est non seulement inconcevable, mais aussi triste.
    Encore une fois, je reviens au fait que nous avons des lois contre la propagande haineuse. Il faut s'attaquer aux propos haineux qui sont diffusés par Internet, par n'importe qui. Le problème qui se pose lorsqu'on essaie de trouver ces personnes, c'est qu'elles utilisent des lieux fantômes et différents serveurs pour propager ce message. Certaines personnes ont développé des techniques très perfectionnées pour diffuser ces messages.
    Les images diffusées par l'EIIS, qui n'en finissent plus de choquer le monde, montrent que ces gens ont des moyens professionnels à leur disposition. Ces vidéos, aussi horrifiantes soient-elles, ont été planifiées et orchestrées par des professionnels. Ceux qui propagent la haine sur Internet ne s'y prennent pas autrement.
    Je crois qu'il s'agit d'une des clés qui explique l'explosion de haine à laquelle nous assistons actuellement. Les temps sont durs, et en Europe comme dans les grandes capitales du monde où les gens se révoltent et où la haine se répand encore une fois, le chômage est élevé, surtout chez les jeunes. Tous les éléments sont là pour que la population cherche des boucs émissaires. On nous raconte souvent qu'à l'époque, les Juifs étaient ceux qui avaient de l'argent; que c'était eux qui contrôlaient le milieu des affaires et, partant, les capitaux du monde. Toutes ces histoires ont survécu aux générations, et on les raconte encore aujourd'hui, même si les choses ont changé.
(2105)
    Monsieur le président, avant toute chose, j'aimerais informer la Chambre que je vais partager mon temps de parole avec mon ami et collègue, le député de Mississauga-Est—Cooksville.
    Je suis reconnaissant de pouvoir parler d'un sujet aussi important. Il faut absolument que nous poursuivions nos efforts de sensibilisation, auprès de la génération actuelle et de celles qui vont suivre, car nous avons eu de nombreux exemples ce soir des effets toxiques et néfastes que peut avoir la haine antisémite et xénophobe. Poursuivons nos recherches sur l'Holocauste et sur les moyens de prévenir les génocides et continuons à en parler.
    Ces idées relèvent de bien plus que de la croyance et de la conviction. J'oserais même dire qu'il s'agit d'obligations morales. En fait, le plus important sondage mondial jamais mené sur les attitudes antisémites, réalisé en 2013 par l'Anti-Defamation League, nous montre précisément pourquoi nous ne devons surtout pas nous taire. Plus de 53 000 personnes provenant de plus de 100 pays ont été interrogées, ce qui a donné des résultats pour le moins alarmants. Je retiens notamment que 35 % des répondants n'ont jamais entendu parler de l'Holocauste et que, parmi ceux qui en ont entendu parler, près du tiers estiment qu'il s'agit d'un mythe ou à tout le moins d'une grave exagération de l'histoire.
    Le Canada est fermement résolu à commémorer l'Holocauste, à poursuivre les recherches sur ce sujet et à faire connaître cette partie de l'histoire partout dans le monde. Ainsi, nous empêcherons que de telles atrocités ne se reproduisent. D'année en année, le Canada continue de respecter son engagement, et sa détermination à cet égard doit demeurer constante. Le gouvernement du Canada est fier d'être associé au Musée de l'Holocauste Yad Vashem, qui se trouve en Israël. Au cours de la dernière année, le gouvernement a aussi agi aussi à titre de partenaire d'autres organisations dans le cadre de projets éducatifs et commémoratifs.
    J'ai eu la chance de me rendre en Israël, en 2013, en compagnie d'une délégation de députés de tous les partis. J'y suis aussi allé en 2014, en compagnie du très honorable premier ministre. J'ai visité Yad Vashem lors de ces deux voyages et j'ai été bouleversé par ce que j'y ai vu et appris. Les Juifs et les non-juifs du monde entier peuvent aller en Israël et visiter ce musée qui se trouve sur le territoire juif moderne, afin de comprendre l'ampleur du massacre que fut l'Holocauste. Ce qui se trouve dans ce musée a de quoi émouvoir n'importe quel être humain.
    En outre, la deuxième conférence annuelle de la Coalition interparlementaire pour le Combat contre l'Antisémitisme s'est tenue dans notre capitale nationale, à Ottawa, en novembre 2010. Elle a réuni des parlementaires et des experts des quatre coins de la planète pour mener la lutte contre l'antisémitisme mondial et elle a débouché sur ce qu'on appelle le protocole d'Ottawa. Le Canada a fait un pas de plus en signant le protocole à l'automne 2011 afin de souligner son engagement et d'encourager d'autres États à lui emboîter le pas.
    Le Canada a une fière histoire de promotion des droits de la personne et de lutte contre la haine et la discrimination. Le gouvernement appuie un effort mondial coordonné de lutte contre la haine et l'antisémitisme et le protocole d'Ottawa est une étape importante dans cet effort.
     L'engagement profond de notre pays à l'égard de la commémoration de l'Holocauste et de l'éducation a été renforcé lorsque le Canada a accepté la responsabilité de présider l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste, l'AIMH, en 2013-2014, un organe intergouvernemental composé de 31 États membres, chargé de promouvoir la commémoration de l'Holocauste ainsi que l'éducation et la recherche sur l'Holocauste. Durant l'année de notre présidence, nous avons organisé, à Toronto, une grande conférence internationale sur la commémoration de l'Holocauste et l'éducation sur l'Holocauste. Cette conférence était l'un des nombreux autres événements et initiatives visant à promouvoir l'éducation et la recherche sur l'Holocauste, ainsi qu'à confronter et contrer la résurgence mondiale de l'antisémitisme.
    Nous sommes fiers d'avoir pu obtenir, à la conférence de Toronto, un consensus sur une définition correcte du déni et de la distorsion de l'Holocauste. Cela a permis à l'AIMH d'être mieux placée pour cibler, surveiller et contrer efficacement la forme la plus extrême d'antisémitisme à l'échelle mondiale.
     La présidence canadienne de l'AIMH a pris fin l'an dernier et nous avons passé le flambeau au Royaume-Uni. Toutefois, nous restons résolument dévoués à cet organisme et à la commémoration de l'Holocauste, ainsi qu'à l'éducation et à la recherche sur l'Holocauste.
    En terminant, il nous incombe de résister, en permanence, à tous les efforts visant accepter que l'antisémitisme comme une chose normale ou de compréhensible, car une fois acceptée comme telle par l'opinion publique, cela pourrait avoir des conséquences inimaginables.
(2110)
    Monsieur le président, beaucoup de discours prononcés dans le débat exploratoire de ce soir m'ont bouleversée. Lorsque nous convenons d'une seule voix de condamner l'antisémitisme, comme c'est le cas ce soir, la difficulté consiste à trouver ce que nous pouvons faire et à formuler des recommandations de manière à ce que le Canada, plus que tout autre pays, rejette l'antisémitisme. Je pense ce que serait un objectif louable.
    Nous devons rejeter le racisme sous toutes ses formes, tout comme nous devons rejeter les préjugés, les phobies et toute attitude xénophobe ou ancrée dans la haine ou la superstition. Dieu seul sait d'où peut bien provenir cette haine.
    Pour en revenir à l'histoire de l'antisémitisme au Canada, je constate qu'elle n'est pas glorieuse. Ainsi, j'ai découvert que, il y a des années, Pierre Berton, l'un de mes auteurs favoris, a mené une enquête, une petite expérience, à propos de l'antisémitisme. Il a demandé à deux jeunes femmes de postuler des postes de sténographe sous deux pseudonymes. Celle qui employait le nom Grimes a été convoquée à des entrevues. Par contre, l'autre, qui utilisait le nom Greenberg, même si elle était aussi qualifiée et qu'elle postulait les mêmes postes, soit n'a pas reçu d'appel, soit s'est fait dire que le poste avait été pourvu. M. Berton a répété l'expérience en effectuant des réservations dans un club de golf.
    Tout cela remonte à la fin des années 1940. Nous connaissons également l'histoire du St. Louis, qui a été contraint de rebrousser chemin à son arrivée dans le port d'Halifax.
    Si nous voulons éliminer et rejeter pour toujours l'antisémitisme de la société canadienne, il faut reconnaître qu'il était profondément ancré dans notre culture et que les choses s'améliorent. Il ne fait aucun doute que l'antisémitisme est moins présent de nos jours, mais nous ne pouvons pas nous contenter des progrès accomplis. Comme l'a dit mon collègue de Richmond Hill, il faut continuer de dénoncer et de condamner tous les actes antisémites, où qu'ils se produisent, pour pouvoir les éliminer de notre société.
(2115)
    Monsieur le président, je remercie la députée de Saanich—Gulf Islands de ses observations et du point qu'elle a soulevé.
    Il n'est pas nécessaire de revenir des décennies en arrière pour constater l'existence de l'antisémitisme et ses effets. Comme la députée et bien d'autres députés l'ont dit ce soir, l'antisémitisme existe toujours. Voici l'exemple d'un horrible, ignoble et consternant mouvement de haine raciste qui se manifeste l'été depuis quelques années ici-même au Canada, plus précisément à Queen's Park, à Toronto, la capitale provinciale.
    La Journée mondiale d'al-Qods a été créée par la République islamique d'Iran en 1979. Elle a pour but de favoriser l'opposition au sionisme et appelle à l'élimination de l'État d'Israël.
    Voilà ce qui se produit. Le gouvernement libéral de l'Ontario permet à des gens d'organiser une manifestation à Toronto à l'occasion de la Journée mondiale d'al-Qods, au milieu de l'été. Une énorme haine et d'horribles actes antisémites ressortent de ces activités, mais le gouvernement provincial ne répond pas à l'appel de la population — surtout de la communauté juive, mais aussi de la population en général —, qui réclame qu'on ne permette plus à ces gens de manifester comme ils le font.
    Une recherche rapide avec Google produit des images de certaines pancartes qu'on pouvait voir à cet événement au coeur même de Toronto. Je vais lire quelques pancartes que portaient des manifestants, dont certains étaient des enfants, dirais-je à ma collègue de Saanich—Gulf Islands et à tous les députés ici, ce soir.
    L'une d'elles dit « Israël, tes jours sont comptés » D'autres disent: « Pour que la paix règne dans le monde, Israël doit être détruit », « Israël est un régime terroriste » et « Le sionisme est du terrorisme » Comme si ces commentaires n'étaient pas assez effroyables, l'une dit: « Israël est une maladie. Nous sommes le remède. » Ce sont des pancartes que portaient des Canadiens au coeur de Toronto, en juillet ou à la fin de juin 2014. On a permis cela.
    Il nous incombe à tous — comme citoyens, comme députés, comme leaders communautaires, comme gens d'affaires — de prendre la parole pour que ce genre de choses n'aient pas lieu dans notre collectivité, car les enfants voient ces actes et en tirent les mauvaises conclusions.
    Monsieur le président, je suis très honoré de prendre la parole à la Chambre pour participer à ce débat.
    Il y a quelques semaines, des gens partout dans le monde ont marqué le 70e anniversaire de la libération des prisonniers du camp d'Auschwitz-Birkenau, un des lieux les plus connus pour les atrocités particulièrement sadiques, brutales et indicibles qui y ont été commises par les nazis. Les gens se sont rassemblés pour rendre hommage aux victimes et aux survivants de cette période horrible et inhumaine de l'histoire. J'ai eu l'honneur de me joindre à eux pour commémorer ces crimes parmi les plus horribles.
    À l'origine, Auschwitz-Birkenau devait être un grand camp de concentration pour les membres de la résistance et de l'intelligentsia polonaises. En 1941-1942, il a été agrandi en vue de ce que les Allemands appelaient « la solution finale », autrement dit l'extermination des juifs. Six millions d'hommes et de femmes, dont trois millions d'enfants, ont été assassinés durant l'Holocauste simplement parce qu'ils étaient juifs. C'est ce à quoi l'antisémitisme a mené dans une Europe supposément civilisée. Ce fut une époque cauchemardesque.
    À l'approche de la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'énormité de l'Holocauste commença à être exposée à la face du monde grâce aux efforts déployés par des gens comme Jan Karski. Il est vital de continuer à méditer sur l'histoire dans le contexte moderne. Comme l'a dit le premier ministre, le souvenir de l'Holocauste et des souffrances subies par ses victimes et leur famille:
[…] nous aide à rester convaincus, au plus profond de notre cœur, que nous devons tout mettre en œuvre, par nos actes et nos paroles, afin de demeurer fermes face aux forces de l’intolérance de même que vigilants face aux génocides. Ce ne sont que par ces efforts continus que nous pourrons nous assurer que de telles atrocités ne se reproduiront plus jamais.
    Disons simplement que nous ne devons jamais oublier. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher qu'il y ait un autre génocide, une autre Shoah. C'est le genre de résolution que nous devons prendre tous les jours, chaque fois que l'occasion se présente. Cela est d'autant plus vital à un moment où les incidents antisémites et le déni de l'Holocauste persistent dans le monde entier.
    Soixante-dix ans après la libération d'Auschwitz-Birkenau, le camp de concentration et d'extermination nazi créé par les Allemands, les députés présents, les pays observateurs et les partenaires internationaux permanents de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste ont réaffirmé ensemble leur appui inconditionnel à la déclaration de Stockholm, qui a été adoptée il y a 15 ans, et leur détermination à rendre hommage à la mémoire des victimes de l'Holocauste, à défendre cette terrible vérité, à dénoncer ceux qui voudraient la déformer ou la nier, et à combattre l'antisémitisme et le racisme sous toutes ses formes.
    C'est la raison pour laquelle nous nous associons aussi avec B'nai Brith Canada pour investir dans un groupe de travail national qui se consacre à l'éducation et à la recherche sur l'Holocauste, ainsi qu'à sa commémoration. Le groupe de travail réunit des universitaires, des juristes, des enseignants, des survivants de l'Holocauste et des représentants communautaires afin de favoriser la recherche et l'éducation sur l'Holocauste au Canada. Notre pays est à l'avant-plan de la lutte internationale contre l'antisémitisme. Notre pays a été le premier à annoncer son retrait du processus corrompu de Durban aux Nations Unies parce que nous ne voulions pas laisser la bonne réputation du Canada être entachée par un processus qui devait supposément combattre le racisme, mais qui faisait en réalité la promotion de l'antisémitisme.
    Voilà la déclaration qu'ont faite à Ottawa des parlementaires de partout dans le monde, il y a quatre ans, en élaborant le protocole d'Ottawa, lorsque nous avons été les hôtes de la réunion de la Coalition interparlementaire de lutte contre l'antisémitisme. Parmi les engagements inscrits dans le protocole se trouve un appel aux chefs d'Églises de différentes confessions, que l'on a invités à combattre toutes les formes de haine et de discrimination, y compris l'antisémitisme. Le protocole invitait les gouvernements à établir un groupe de travail international pour détecter et surveiller les manifestations de haine sur Internet, à consigner tous les crimes haineux, y compris les crimes antisémites, ainsi qu'à exprimer leurs inquiétudes au sujet de l'antisémitisme sur les campus.
(2120)
    L'Holocauste fut un crime contre l'humanité pareil à nul autre dans l'histoire de l'humanité, et il a fondamentalement changé la perception qu'a le monde des actes de génocide ainsi que la façon dont il les traite.
    À mesure que les survivants quittent ce monde et que leurs voix s'éteignent, nous avons l'obligation morale d'enseigner aux générations futures les horreurs de la Shoah. Nous devons tirer les leçons de ce sombre chapitre de l'Histoire, afin d'en prévenir à tout jamais la répétition.
    Monsieur le président, j'ai grandi dans un quartier de York Mills et je suis allé à l'école avec beaucoup de fils et de filles de survivants de l'Holocauste. Je suis moi-même d'origine estonienne. Ma famille a vu les Soviétiques et les nazis déferler sur notre pays, puis a vécu sous l'occupation soviétique avant de fuir. Beaucoup de membres de notre famille qui n'ont pas fui l'Estonie y ont trouvé la mort aux mains du régime communiste soviétique, y compris dans des camps de concentration semblables à ceux de l'Allemagne nazie et de son empire de l'époque, où se sont retrouvés des parents de mes amis.
    Nous avons grandi en échangeant sur nos expériences. Je me souviens de la vive émotion ressentie en apprenant cette histoire d'une grande importance, ces horreurs du XXe siècle. La conscience de ces horreurs nous a amenés à prendre l'engagement solennel de ne jamais les laisser se reproduire. Voilà pourquoi, de mon point de vue, ce que nous entendons dernièrement relève de l'impensable puisque, au cours de mon enfance et de mon adolescence, je n'aurais jamais pu imaginer que des gens puissent un jour dire des choses pareilles au Canada et dans le reste du monde. La vague d'antisémitisme qui s'abat sur nous est bien réelle. C'est un phénomène alarmant, et nous entendons des paroles jamais prononcées auparavant.
    Je crois qu'un débat comme celui-ci est très important, car, dans ma jeunesse, lorsque nous entendions parler des événements de la Seconde Guerre mondiale, des horreurs des camps de concentration et de l'Holocauste, ces événements ne remontaient qu'à quelque 25 années. Ils étaient encore tout frais à la mémoire des gens.
    Aujourd'hui, nous devons admettre que beaucoup de temps s'est écoulé depuis cette période. Il y a maintenant 70 à 75 ans que ces événements ont été découverts. Voilà pourquoi il est aussi important de nous souvenir de ces horreurs, qui pourraient se reproduire si la haine de l'antisémitisme et les atrocités qui y sont associées ne sont pas dénoncées sans réserve.
    Je sais que mon collègue est de descendance polonaise, et qu'il a également été témoin d'une grande partie des horreurs qui ont été commises en Pologne. Il a parlé d'Auschwitz-Birkenau. Évidemment, il a lui-même été profondément marqué par l'horrible tyrannie du communisme et du fascisme qui a assombri le XXe siècle au point où la civilisation de l'époque méritait à peine d'être associée à l'image que l'on se fait de la civilisation moderne.
    J'aimerais entendre son avis sur la façon dont cette expérience nous a influencés pendant notre jeunesse, sur les changements que nous voyons maintenant, et sur les leçons que nous devrions en tirer.
(2125)
    Monsieur le président, oui, je suis né en Pologne et j'ai grandi là-bas. Je suis né neuf ans après la guerre, pas très loin d'Auschwitz, en fait, à environ 120 kilomètres de là. Je me souviens d'avoir visité Auschwitz quand j'avais à peu près 12 ans. Je ne pense pas que j'avais alors pleinement compris l'ampleur de ce qui s'était passé là-bas.
    Pendant ma jeunesse, j'ai visité de nouveau cet endroit plusieurs fois. Je me pose toujours la même question, et je ne pense pas que j'obtiendrai un jour une réponse. Comment des êtres humains ont-ils pu faire subir de telles choses à d'autres êtres humains? Je me demande aussi toujours comment des choses aussi terribles, de telles atrocités, ont pu être commises par l'un des pays les plus avancés de l'Europe. Comment ce pays a-t-il pu utiliser ses connaissances scientifiques et ses ressources pour construire un endroit, une usine, où l'on tuait d'autres êtres humains et s'en débarrassait?
    Nous savons tous, ou plutôt, nous devrions tous savoir qu'il faut tirer des leçons de l'histoire et de ce qui s'est passé là-bas. C'est la propagande haineuse et le racisme qui peuvent mener à des actes inimaginables, et c'est une chose que nous ne devons jamais perdre de vue. Nous devons enseigner à toutes les nouvelles générations ce qui peut se produire lorsqu'on essaie de dresser les gens les uns contre les autres parce qu'ils sont différents, parce qu'ils prient d'une autre façon, parce qu'ils pratiquent une autre religion ou parce que leur apparence est différente. Nous ne devons jamais accepter que de tels actes se reproduisent un jour.
    Monsieur le président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole, malgré ma voix rauque, dans le cadre de cet important débat.
    Il s'agit d'un débat important à bien des égards. Nous vivons à une époque agitée. L'histoire nous a appris que, en période de bouleversements, certaines choses se produisent immanquablement. Il semble que, depuis toujours, lorsque l'économie va mal, on pointe du doigt les immigrants: « Les immigrants nous volent nos emplois; ils nous privent de possibilités. » Lorsque c'est le climat politique qui est en proie à des agitations, on dirait qu'on constate une montée de l'antisémitisme.
     Deux de mes collègues, le député de Mont-Royal et mon collègue du sous-comité des droits de la personne, ont affirmé que la montée de l'antisémitisme et l'antisémitisme même sont assimilables, de bien des façons, au canari dans la mine de charbon.
    La recrudescence de l'antisémitisme s'accompagne souvent d'une montée des autres formes de haine. L'antisémitisme n'est rien d'autre que de la haine, ni plus ni moins que de la haine pure. Cette haine vise un groupe particulier pour une raison bien précise, raison qui est créée de toutes pièces par un groupe pour des motifs bien précis.
    Il faut vraiment comprendre ce processus. Et pour le comprendre, il faut retourner plus loin dans le passé. Je dirais qu'il faut retourner avant l'Holocauste, puisque la cause de l'Holocauste existait depuis des siècles.
    L'Holocauste est le fruit d'une haine bien ancrée à l'endroit des Juifs. Cette idée n'a pas jailli spontanément d'un esprit fou. Cette haine, comme toutes les haines, s'est établie au fil des siècles.
    Des États ont sanctionné cette haine des Juifs. Nous avons célébré l'apport du Festival de Stratford tout à l'heure, et cela me fait penser au Marchand de Venise, de Shakespeare. Cette pièce a été écrite en 1623, je crois. Bien que plusieurs y voient une pièce antisémite, il s'agissait plutôt d'un commentaire social, selon moi, conçu pour montrer l'hypocrisie de la vie européenne des années 1600 et des époques précédentes.
    On peut aussi penser au rite ancien de la Pâque juive pratiqué par nos soeurs et nos frères juifs, qui occupe une place importante dans leur culture. Il commémore tous les torts causés au peuple juif. Il commémore la libération des Juifs d'Égypte et l'Holocauste. Il commémore tous les grands événements antisémites qui ont marqué l'histoire.
    Il est important de reconnaître l'antisémitisme comme un véritable fléau, j'en conviens parfaitement. Toutefois, il est aussi important de toujours chercher à en apprendre davantage sur les sources de cette haine et sur les façons de la dissiper.
(2130)
    Puisque la haine est un comportement acquis, il me semble que l'on pourrait apprendre à ne plus haïr. Nous devons apprendre à nos enfants ce que cela signifie que d'être Juif et leur expliquer en quoi les Juifs sont différents de nous. Il faut leur faire comprendre que cette différence ne constitue pas une menace à notre identité, car c'est cette crainte qui est à l'origine de toute cette haine. Elle est à l'origine de la haine dont mes ancêtres étaient victimes et que nous devons encore endurer de nos jours. Nous sommes encore obligés de nous battre.
    Le dicton « N'oublions jamais » est très important. C'est la raison pour laquelle un tel débat est si important. Nous devons nous souvenir de ce dont nous sommes capables.
    Le député qui m'a précédé a dit qu'il était surpris de ce que les êtres humains pouvaient se faire les uns aux autres. Malheureusement, j'ai grandi dans un monde qui était conscient de tout le mal que nous pouvions causer à notre prochain, ce qui m'a aidé à comprendre le travail qui m'attendait et ce que je devais faire. Je poursuis sur cette voie avec les jeunes de ma collectivité en leur parlant et en les encourageant à se tenir debout et à garder la tête haute.
    La sensibilisation est indispensable si nous voulons éradiquer l'antisémitisme, la xénophobie, la misogynie et toutes les formes de haine contre d'autres personnes motivées par des raisons quelconques. Il nous incombe en tant que leaders d'assurer cette sensibilisation. Nous devons prendre le temps d'apprendre et ne pas nous cacher derrière des dogmes et des discours creux. Nous devons prendre le temps d'apprendre d'où vient ce problème afin qu'il ne se reproduise plus.
    Je remercie toutes les personnes qui ont contribué au débat de ce soir. Malgré l'heure tardive, il est encourageant de voir que nous comprenons que nous devons travailler ensemble pour lutter contre la montée de l'antisémitisme partout dans le monde et les gestes horribles d'intolérance raciale et religieuse qui en découlent.
    Mes collègues qui siègent au sous-comité des droits de la personne et moi-même entendons régulièrement ce genre d'histoire. C'est parfois déconcertant. Cependant, il nous incombe en tant que leaders et que simples citoyens de faire en sorte que ces voix ne soient pas tues, de ne pas oublier ce que nous avons fait, de ne pas oublier ce dont nous sommes capables, mais aussi de ne pas oublier ce que nous pouvons contribuer à la lutte contre de tels comportements, comme ceux qui ont donné lieu aux actes perpétrés dans mon ancien quartier de Notre-Dame-de-Grâce. C'est à nous qu'il incombe de veiller à ce que de tels actes ne restent pas sans réponse, et à ce qu'ils ne soient jamais oubliés par l'histoire.
(2135)
    Monsieur le président, trouvant qu'il faisait un peu frisquet à la Chambre, je suis allée dans l'antichambre pour y chercher mon foulard. Peut-être est-ce un heureux hasard que j'aie décidé de porter celui-ci ce soir, mon foulard aux maintes couleurs. On dirait presque qu'il illustre notre solidarité envers nos amis juifs.
    Je suis toujours très fière de partager le repas du Seder avec mes très bons amis, Sam Goldstein et sa femme Shelly, ou encore avec mes bons amis Julius et Etta Suraski. C'est toujours un plaisir de pouvoir prendre le deuxième repas du Seder avec mes bons amis Carla et Robin Silver à Richmond Hill. Ils m'ont beaucoup appris. Ces occasions sont toujours pleines de joie et de bonheur, non seulement parce qu'on y mange très bien mais grâce à l'amitié qui nous unit et aux nouvelles expériences culturelles que j'acquiers.
    Lorsque j'ai été élue pour la première fois, je faisais partie d'un groupe d'enquête présidé par mon bon ami, le député de Leeds—Grenville. C'était toute une enquête que nous avons entreprise. J'aimerais citer certaines des observations du rabbin Bulka incluses dans le rapport. J'ai lu le rapport à plusieurs reprises, mais je m'arrête toujours sur la partie où il dit:
    Comment peut-on combattre l'antisémitisme? La réponse est très simple selon moi: il faut sensibiliser les gens, encore et encore. Il faut former une armée de petits fantassins et ces fantassins, ce seront les enfants de la nouvelle génération. Nous devons le faire par égard pour eux. Nous devons, par égard pour le patrimoine que nous ont légué nos pères fondateurs, voir à ce que tous les enfants soient si bien inoculés contre la haine avant leur entrée à l'université, donc pendant leurs études primaires et secondaires, qu'ils rejetteront toute forme de haine.
     Le député pourrait-il nous dire comment on pourrait, d'après son expérience, intégrer cet enseignement au programme scolaire afin que les enfants sachent repérer ces exemples de haine et les rejeter, comme l'a dit le rabbin?
(2140)
    Monsieur le président, l'histoire est écrite par les vainqueurs, comme le dit l'adage. Pour cette raison, de grands pans d'histoire concernant les contributions de différents peuples ne figurent pas dans nos programmes scolaires. Voilà l'une des modifications qu'on pourrait apporter. Il faudrait tenir compte non seulement des événements qu'ont vécus les Juifs, mais aussi de leurs contributions et de celles de tous les autres peuples.
    Cette éducation doit aussi se faire à la maison, selon moi. Je n'ai pas d'enfants, mais j'ai eu de nombreuses discussions avec mon neveu et ma nièce au fil des ans. Mon neveu a maintenant 25 ans et ma nièce, 16 ans. Nous parlons des relations entre les races et de l'histoire du peuple juif.
    J'ai eu l'immense plaisir de célébrer le Seder avec mon ami le plus cher et mes proches; j'ai grandi aux côtés de cet ami, et je suis allé au secondaire avec lui, là où j'ai obtenu l'éducation dont j'avais besoin. J'en ai parlé avec mon neveu et ma nièce. Ça commence par de si petits gestes, par nos proches, par nos enfants. Si nous étions capables d'inciter les conseils scolaires, notamment, à modifier leur programme d'études pour y inclure tout le monde, au lieu de simplement dire que tel ou tel peuple a été opprimé, on pourrait changer les choses. Les enfants considéreraient alors que les Juifs et les autres persécutés font partie intégrante de notre société, ils ne penseraient plus à eux en fonction de ce qu'ils ont enduré.
    Monsieur le président, je tiens à revenir sur la dernière question et poser la question suivante au député. Celui-ci a dit qu'il avait commencé à discuter avec son neveu et sa nièce lorsque ces derniers étaient encore tout jeunes. Il a notamment été question ce soir du fait que les universités sont des terreaux fertiles où l'on inculque cette haine, pensons à la semaine contre l'apartheid israélien, et nous aussi avons parlé d'autres enjeux qui ont fait de l'antisémitisme un sujet d'intérêt au Canada. Il semble que, si l'on veut éradiquer cette haine, l'antisémitisme, il faille s'attaquer à la racine du problème.
    Le député pourrait-il nous dire quelle pourrait être la solution à son avis? Que pourrions-nous retirer du débat de ce soir afin d'obtenir des résultats positifs?
    Monsieur le président, en tant que dirigeants, nous devons montrer l'exemple par les gestes que nous posons. Le but des universités et des établissements d'enseignement supérieur est de débattre, de contester et d'apprendre. Tâchons donc de veiller à ne pas réprimer le débat. La tolérance de ce genre de discussion est un des critères permettant de mesurer la force d'une démocratie.
    Comme l'a dit plus tôt mon collègue, le député de Hamilton-Est—Stoney Creek, nous avons déjà des lois interdisant les propos haineux. Quiconque contrevient à cette loi devrait être poursuivi avec toute la rigueur de la loi. Ce serait bien mal servir nos intérêts, cependant, que de réprimer ce pourquoi nous luttons. Il incombe aux universités de veiller au maintien d'un débat sain; cela dit, quiconque enfreint les lois contre les discours haineux devrait être poursuivi avec toute la rigueur de la loi.
(2145)
    Monsieur le président, j'aimerais aborder une question qui, à ma connaissance, n'a pas été soulevée ce soir.
    Il est important de faire la distinction entre la réponse appropriée des personnes qui ne sont pas antisémites, comme les habitants d'Israël même qui remettent en question les gestes du gouvernement au pouvoir, sans pour autant caractériser d'antisémite tout geste critiquant la politique étrangère ou intérieure d'Israël.
    C'est une question très délicate, et c'est justement pourquoi il faut être très clair. Il ne fait absolument aucun doute que l'antisémitisme est inacceptable à la base, mais les groupes comme Voix juives indépendantes dénoncent les gestes de l'État d'Israël qu'ils considèrent illégaux sans pour autant être antisémites.
    Je me demande si mon collègue a des observations à faire à ce sujet. C'est une question très délicate, bien plus même que certaines des questions abordées ce soir. Il est fort possible que celle-ci ne fasse pas l'unanimité.
    Monsieur le président, ce n'est pas une question à laquelle je suis en mesure de répondre pour l'instant. J'estime toutefois qu'il faut faire attention de ne pas brouiller les limites entre le débat politique et le débat culturel. L'antisémitisme, en soi, est un phénomène anticulturel, mais le débat sur les gestes que pose Israël et les gestes qu'il ne pose pas est de nature politique.
    Je pense que, d'entrée de jeu, il faut veiller à ne pas brouiller les limites entre les discours politiques et les discours culturels, ou anticulturels.
    Monsieur le président, avant de commencer, je signale que je partagerai mon temps de parole avec le député d'Ajax—Pickering, qui est aussi ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration.
    D'entrée de jeu, j'aimerais rappeler aux députés qu'en 1945, après avoir saisi toute l'horreur de la Shoah, le monde entier a dit d'une même voix « plus jamais ». Ces mots ne doivent pas être vides de sens, il faut qu'ils deviennent un appel à l'action, un appel à résister à ces fléaux que sont l'antisémitisme et le racisme sous toutes leurs formes. Ces paroles doivent inciter les gens à faire front commun et à rester unis lorsqu'ils sont exposés à tant de haine.
    Ce soir, les députés de tous les partis ont parlé d'antisémitisme avec beaucoup d'éloquence. J'aimerais parler un peu plus de mon expérience personnelle.
    Comme beaucoup de députés le savent, mon père a été le seul membre de sa famille à survivre à l'Holocauste. Il a été détenu à Auschwitz, et il avait 12 ans lorsqu'il a été envoyé dans le ghetto de Lodz. Avant le début de la guerre, en 1939, ce ghetto comptait 225 000 Juifs, sur un total de 600 000 habitants. À la fin de la guerre, les Juifs de Lodz n'étaient plus que 300.
    En 1944, mon père et mon grand-père faisaient partie du dernier groupe à avoir été sorti du ghetto et amené à Auschwitz. Ma grand-mère et le jeune frère de mon père avaient déjà été amenés à un autre camp de la mort deux ans plus tôt; il s'agissait de Chelmno, situé non loin de Lodz, où les Allemands avaient préparé leurs camionnettes. Ce n'étaient pas des camionnettes ordinaires. La fumée d'échappement était réacheminée dans l'arrière des camionnettes de manière à asphyxier tous les passagers.
    Mon père a été conduit à Auschwitz en 1944 lorsque le ghetto de Lodz a fini par être liquidé. Là-bas, un agent de la SS a envoyé mon grand-père vers les chambres à gaz, et mon père aux travaux forcés.
    Mon père n'a jamais dit mot de ce qui s'est passé. À son arrivée au Canada en 1947, il n'avait rien de plus qu'un numéro tatoué sur le bras, la chemise qu'il avait sur le dos et, surtout, le coeur rempli d'espoir, comme tant d'immigrants qui arrivent au Canada. Il a fondé une famille ici. Il y a fait sa vie. Il a choisi l'espoir plutôt que le désespoir.
    J'ai grandi dans le quartier de Bathurst Manor à Toronto, qui compte un grand nombre de survivants de l'Holocauste. Bon nombre des parents de mes amis en étaient. Lorsque nous étions gamins, nous voulions tous savoir ce que nos parents avaient vécu, mais nous n'osions pas le leur demander, car nous savions intuitivement que ce serait déplacé, car la douleur se manifestait dans leurs yeux lorsqu'ils abordaient le sujet. Nous ne leur posions donc aucune question, et nous avons grandi sans savoir.
    Il y a quelques mois, un homme qui habite dans la circonscription de York-Centre a communiqué avec moi. Il m'a appelé et m'a demandé si mon père s'appelait Abram Adler et venait de Lodz. Je lui ai répondu que oui, et il m'a dit qu'il avait une histoire à me raconter. Il m'a dit qu'il avait connu la famille de mon père dans le ghetto et qu'il devait me dire quelque chose à ce sujet. Il m'a raconté qu'avant que les Allemands bouclent le ghetto, au printemps 1940, mon oncle, Chaim, faisait partie d'un groupe de Juifs qui sortaient la nuit, après le début du couvre-feu imposé par les Allemands, et faisaient passer clandestinement de la nourriture et des vêtements pour les orphelinats accueillant des enfants juifs. Il m'a dit qu'une nuit, on a demandé à Chaim de conduire le camion, car il était le seul qui savait le faire. Tous les membres du groupe se sont fait prendre par les Allemands. Ils ont tous dû se coucher face contre terre dans la rue, devant l'orphelinat, et ils ont tous été abattus d'une balle dans la tête. Il m'a ensuite raconté que les SS sont entrés dans l'orphelinat et ont assassiné tous les enfants. Cet homme était d'avis que je devais connaître cette histoire.
(2150)
    J'ai aussi une autre histoire, cette fois à propos d'amis de mes parents. L'homme était un survivant, qui avait marié une Canadienne. Je me rappelle que mes parents disaient qu'il se réveillait presque toutes les nuits en criant, avec des sueurs froides. Sa femme devait placer un drapeau du Canada et un drapeau des États-Unis au pied de leur lit pour le rassurer lorsqu'il se réveillait, pour qu'il sache qu'il était en sécurité. Les rêves qu'ils faisaient étaient abominables, car il se souvenait alors de ce qu'il avait subi pendant la Shoah.
    C'est dans ce contexte que j'ai grandi, étant l'enfant d'un survivant de l'Holocauste. Lorsque j'assistais à la bar-mitsva de mes amis, des centaines de personnes étaient présentes, mais à ma propre bar-mitsva, mes grands-parents n'étaient pas là.
    Lors des célébrations de Rosh Hashanah et de la Pâque juive, il y avait des sièges vides à la table, car les grands-parents, les oncles, les tantes, les cousins et les cousines n'étaient pas là. Voilà les circonstances, le contexte, le résultat de l'antisémitisme que nous, les Juifs, avons dû endurer en Europe pendant les années 1940.
    Tout a commencé avec des mots, qui ont ensuite conduit à des gestes. Voilà pourquoi c'est tellement important. Nous parlons ici d'un débat exploratoire. Il ne s'agit pas d'un débat, mais plutôt d'une entente. Prenons note de la situation. En tant que peuple, nous, Canadiens, vivons dans une grande démocratie. Nous défendons les valeurs canadiennes et, en tant que pays démocratique, il nous incombe de défendre ces valeurs que sont la démocratie, la liberté et la primauté du droit.
    Quand une seule personne est persécutée, nous sommes tous persécutés. Nous avons tous le devoir de nous serrer les coudes, de nous mobiliser et de lutter contre les fléaux que sont le racisme, la haine et l'antisémitisme.
    Monsieur le président, je remercie le député de son discours émouvant. En tant qu'enfant de survivants de l'Holocauste, qui connaît cette histoire dans le contexte intime d'une famille, peut-il nous dire comment le Canada se comporte en tant que chef de file et comment le monde réussit à se souvenir de l'Holocauste? Le gouvernement conservateur s'est engagé à maintes reprises à l'égard de cet objectif, mais, de toute évidence, nous devrons redoubler d'efforts pour que toutes les régions du monde se souviennent de la tragédie et des horreurs indicibles de la Shoah.
(2155)
    Monsieur le président, je remercie le ministre de ses bons mots.
    En soi, le Canada fait bonne figure. Le premier ministre a refusé d'assister à une rencontre du Commonwealth qui avait lieu du Sri Lanka. Il a dénoncé publiquement l'agression russe en Crimée et en Ukraine. Il a aussi assuré Israël de notre solidarité. Toute notre politique étrangère repose sur ce principe.
    Le Canada fait aussi bonne figure au chapitre de la promotion de ses valeurs, mais ce qui se passe ailleurs dans le monde donne à réfléchir. Les Canadiens doivent dénoncer les incidents antisémites qui ont lieu en Europe, les meurtres de Juifs à Copenhague, à Paris et ailleurs dans le monde, mais le reste de nos concitoyens, ailleurs dans le monde, doivent faire de même et dénoncer eux aussi ces atrocités.
    Je me souviens de ce que disait le pasteur allemand Martin Niemöller, quand j'étais jeune: « D'abord, ils sont venus chercher les socialistes. Je m'en fichais: je n'étais pas socialiste. Ensuite ils sont venus chercher les syndicalistes. Je m'en fichais, je n'étais pas syndicaliste. Quand ils sont venus chercher les Juifs, il n'y avait plus personne pour protester. »
    Nous ne pouvons plus nous permettre de nous retrouver dans une situation semblable. Plus jamais. Voilà pourquoi je suis aussi fier d'être Canadien et de faire partie d'un gouvernement et d'un Parlement qui défendent aussi vigoureusement leurs principes. J'en veux pour preuve le fait que ce soir, tous les députés de tous les partis ont dénoncé haut et fort l'antisémitisme et ont fait bloc pour s'attaquer de front à ce terrible fléau.
    Monsieur le président, je suis reconnaissant d'avoir l'honneur de participer au débat de ce soir. J'aimerais remercie les députés de tous les partis qui ont rendu ce débat possible. Par-dessus tout, je tiens à remercier mes collègues ministériels, dont beaucoup sont présents ce soir, qui donnent le meilleur d'eux-mêmes pour la cause sur laquelle reposent les fondements de notre société.
     Mon collègue, le ministre de la Défense nationale, a dit ce soir, comme nous nous le disons tous lors des nombreuses occasions dans l'année où ce doit être dit, que l'antisémitisme est la plus ancienne des haines et la plus ancienne des tragédies irrationnelles du comportement humain. Il représente la quintessence même des attaques contre les valeurs qui nous sont si chères: la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit.
     Notre détermination à faire face à ce fléau, où qu'il se manifeste, est un réengagement envers nos valeurs canadiennes et les valeurs qui font la grandeur de notre pays, de la société en général et de l'humanité à laquelle nous appartenons. C'est une grande leçon d'humilité que de prendre la parole à la suite du député qui se décrit comme le fils d'Abram Adler, de Lodz. Il ne peut y avoir de récit plus émouvant, pour nous qui prenons part à un débat comme celui de ce soir, que celui d'un survivant de l'Holocauste.
    N'oublions pas que, malgré ces tragédies et les efforts institutionnalisés de la communauté internationale de ne jamais oublier et de ne jamais permettre que cette tragédie se répète, nous vivons dans un monde où l'antisémitisme n'est en fait que trop omniprésent. Songeons aux attaques récentes perpétrées partout en Europe ou au régime agressif, belligérant et rapace à Moscou qui est prêt à faire des dons à des groupes antisémites d'extrême droite partout en Europe. Cela rappelle l'alliance conclue entre Staline et Hitler qui a fait en sorte que la Seconde Guerre mondiale soit une tragédie effroyable.
    Des groupes djihadistes partout dans le monde, surtout concentrés en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et en Asie du Sud, sont à l'origine de tragédies indicibles, tuent d'innombrables civils et font systématiquement l'apologie de l'antisémitisme dans leurs discours obscènes. Il n'y a pas que l'EIIL. Al-Qaïda est toujours actif. Ce groupe compte 1 000 filiales. Il y a les Frères musulmans qui viennent apparemment de se lancer à nouveau dans le djihad à la fin janvier.
    Dans l'Allemagne nazie, les Juifs étaient privés de leur citoyenneté, de leurs droits naturels, et même de leur droit d'exister. De nos jours, il y a des gens au sein des groupes djihadistes et dans des dizaines d'États-nations qui essaient de priver l'État d'Israël de son appartenance à la communauté internationale, de limiter son droit d'exister, et de s'en prendre aux droits naturels de cette nation. Tous ces gens commettent la même faute, la même violation des droits fondamentaux que représente l'antisémitisme.
    Nous sommes fiers de faire partie d'un gouvernement solidaire qui défend les principes du protocole d'Ottawa, et qui veut surveiller et éliminer ce genre de haine, qu'elle se manifeste sur Internet ou ailleurs. Nous faisons partie du premier gouvernement au monde à s'être retiré de la Conférence d'examen de Durban des Nations Unies, ou Durban II. Nous avons refusé de laisser le Canada ternir sa réputation en prenant part à un événement où l'antisémitisme se manifestait ouvertement sous les auspices des Nations Unies, notamment par la distribution de copies de l'ouvrage Les Protocoles des Sages de Sion, et par l'emploi de symboles ouvertement antisémites.
(2200)
    L'ancien président de l'Iran, Mahmoud Ahmadinejad, nous a donné raison, puisqu'il s'est servi de Durban II pour promouvoir sa propre vision particulièrement horrible et virulente de l'antisémitisme. Nous continuerons sur cette voie afin que le Canada soit un chef de file pour ceux qui luttent contre cette haine, ceux qui font la promotion de nos valeurs, et ceux qui, dans le monde entier, reconnaissent que l'antisémitisme est un fléau qui menace nos valeurs depuis des siècles.
    Monsieur le président, nous avons souligné que le Canada s'en tirait plutôt bien et nous avons parlé de la situation dans d'autres pays.
    Il a souvent été question des Nations Unies ce soir. Bien des intervenants ont souligné, et je suis bien d'accord, que les Nations Unies ont laissé tomber la cause de l'antisémitisme. Il est souvent arrivé que des organes des Nations Unies condamnent, à l'unanimité ou à la majorité, Israël; aucune autre nation n'a été si souvent blâmée.
    Il est donc difficile de faire preuve d'optimisme quand on voit la communauté internationale, incarnée par les Nations Unies, prendre des mesures pour éliminer l'antisémitisme.
    Je sais que mon collègue ministre a beaucoup d'expérience sur la scène internationale, qu'il soit question de l'ONU et de politique internationale. Je me demande s'il pourrait nous dire ce qu'il pense de l'état actuel des choses aux Nations Unies et de l'approche que cet organisme et les États membres ont adoptée pour relever collectivement ce défi. Et, à son avis, qu'est-ce qu'un membre relativement mineur de l'ONU comme le Canada pourrait faire pour changer un tant soit peu le cours des choses?
(2205)
    Monsieur le président, mon distingué collègue d'Edmonton-Centre vient de poser une excellente question.
    Elle nous rappelle que les Nations Unies servent à atteindre certains objectifs. Il s'agit d'un endroit où les États membres peuvent discuter de questions d'ordre humanitaire et de sécurité internationale. Il n'existe pas d'autre tribune comme celle du Conseil de sécurité. On peut y faire des progrès dans des dossiers comme celui de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, dans lequel le Canada, en particulier le premier ministre, fait preuve de leadership.
    Toutefois, ces dernières années, les Nations Unies sont de moins en moins accueillantes pour des causes qui méritent d'être au centre de l'attention de la communauté internationale. L'une de ces questions, c'est l'antisémitisme. Les Nations Unies sont loin d'être un centre d'excellence ou de discussion dans la lutte contre ce fléau. En fait, l'organisation accueille plutôt ceux qui crachent leur haine et leur poison en leur accordant une tribune où ils peuvent s'exprimer haut et fort.
    Ce phénomène se produit de trois façons différentes. Tout d'abord, il existe des tribunes comme celle de la conférence de Durban, où des antisémites peuvent s'exprimer librement et avancer des faits qui sont non seulement inexacts et faux sur le plan historique, mais qui traduisent aussi de la haine envers un groupe précis. Il est honteux que les Nations Unies s'associent à des événements semblables.
    Ensuite, il y a le fait que, aux Nations Unies, bon nombre de protagonistes étatiques et non étatiques rejettent existence d'Israël et réclament une guerre sainte, un djihad, pour le faire disparaître. On parle pourtant d'un membre votant des Nations Unies. Aucun autre État membre des Nations Unies ne voit sa légitimité et ses frontières ainsi non reconnues, voire niées, par des dizaines d'autres membres des Nations Unies. Or, au lieu de demander à ces dizaines de pays en quoi l'existence d'une démocratie ayant elle-même déterminé sa Constitution et ses institutions leur pose problème, les Nations Unies n'ont que trop tendance à s'en prendre à Israël.
    En outre, il y a l'ambivalence des Nations Unies à l'égard du terrorisme, en particulier du djihadisme islamique. L'ONU a bien eu quelques éclats de lucidité, notamment en dressant des listes de terroristes membres d'Al-Qaïda et de talibans et en faisant quelques autres contributions au combat mondial, mais, pour l'essentiel, elle reste étrangement silencieuse, refusant de pointer du doigt les protagonistes étatiques et non étatiques fautifs et encore plus de leur imposer des sanctions. J'insiste d'ailleurs sur l'expression « protagonistes étatiques », car des protagonistes étatiques continuent bel et bien à soutenir des organisations telles que le groupe État islamique, Al-Qaïda, les Frères musulmans et bien d'autres encore qui, en plus de s'en prendre aux civils et de faire la guerre, souvent par factions interposées, font de l'antisémitisme l'une de leurs marques de commerce.
    Monsieur le président, je partage avec plaisir mon temps de parole avec le député de Mont-Royal, qui — j'estime qu'il convient de le dire — est l'historien, l'érudit du Parlement et notre conscience collective sur les questions touchant les droits de la personne. Il est aussi l'un des grands artisans du Protocole d'Ottawa. J'aimerais beaucoup savoir un peu mieux ce qu'il pense de la question qui nous occupe.
    J'ai bien aimé la discussion de ce soir. Elle m'est très utile, et il y a deux messages essentiels qui doivent être redis.
    Premièrement, l'antisémitisme ne doit pas être toléré, peu importe l'endroit où il se produit, que ce soit aux frontières d'Israël, dans une capitale européenne ou, Dieu nous en garde, en territoire canadien.
    Le deuxième message est évidemment qu'il ne s'agit pas de discours creux et qu'il faut agir et s'engager à protéger la population. Il faut pouvoir dire fermement aux personnes menacées par l'antisémitisme que de tels actes ne se produiront plus jamais.
    Les députés se demandent peut-être ce que le député d'Humber—St. Barbe—Baie Verte peut bien avoir à ajouter au débat. Or, j'ai un point de vue intéressant à faire connaître.
    Je suis Terre-Neuvien d'origine irlandaise. Bien des Terre-Neuviens le sont. En 1968, les gens de ma circonscription ont décidé que la meilleure personne pour les représenter à la Chambre était un homme qui s'appelait Jack Marshall.
    Jack était Juif. Les Juifs étaient nombreux dans la circonscription que je représente, mais ce n'est pas pour cela que nous avons voté pour lui, et ce n'est certainement pas cela qui nous a empêchés de voter pour lui. Il était le meilleur candidat pour ce poste. En fait, il était tellement populaire et il défendait si efficacement les intérêts des anciens combattants partout au pays, de même qu'il défendait tous les dossiers qui comptaient pour sa circonscription et pour les habitants de Humber—St. George's—St. Barbe, comme elle s'appelait à l'époque, que le premier ministre du Canada a été forcé de l'élever au rang de sénateur parce que c'était le seul moyen de libérer le siège. C'était un représentant extraordinaire.
    Le choix de son successeur a été étrangement paradoxal. Une élection partielle a eu lieu quand Jack Marshall a été promu au Sénat, où il a très bien servi son pays et tous les anciens combattants ayant jamais porté l'uniforme. Son successeur était un jeune homme qui s'appelait Fonse Faour. C'était un Canadien d'origine libanaise de 24 ans. Nous n'avons pas voté pour lui parce qu'il était d'origine libanaise et ce n'est pas cela qui nous a empêchés de voter pour lui. Nous avons voté pour lui parce qu'il était le meilleur candidat pour ce poste. Par conséquent, de mon point de vue, tout est possible. Nous sommes ainsi faits.
    C'est avec ces pensées en tête que je suis parti pour Israël l'année dernière. Je voulais en savoir davantage. Nous avons pu assister à de très bonnes séances d'information et nous avons rencontré le représentant canadien auprès de l'Autorité palestinienne. Quatre jours après notre arrivée là-bas, le Hamas a commencé à tirer des roquettes sur Israël, à l'aveuglette, dans le seul but de tuer des civils innocents. Le Hamas, une organisation terroriste, était en train de se livrer aux activités qu'on lui connaît.
    Ce fut l'expérience la plus marquante qu'on puisse imaginer. J'ai vécu une métamorphose intellectuelle.
    L'antisémitisme est bien réel. On le voit beaucoup sévir dans le monde. Les événements de Montréal nous prouvent qu'il est en hausse. Est-il en hausse partout? Je pense que oui.
    Hier, en raison de mes activités de militant de la paix et de défenseur du droit d'Israël d'exister et de se protéger, j'ai reçu un message d'une personne de ma circonscription qui m'accusait d'agir comme un nazi lorsque j'exprime sincèrement la conviction que la paix est possible, qu'Israël a le droit d'exister et qu'il faut agir concrètement contre l'antisémitisme.
    Voilà les perspectives qu'un homme de Terre-Neuve-et-Labrador qui est député aux Communes peut offrir pour contribuer au débat actuel. Nous devons non seulement affirmer que l'antisémitisme est intolérable, mais nous devons également faire comprendre à la communauté juive, à ceux qui militent pour la paix et l'harmonie, que nous n'avons pas l'intention de rester les bras croisés, peu importe dans quel pays ou dans quelle région du Canada nous vivons.
(2210)
    Je conclus mes observations sur ces propos. Cet enjeu devrait retenir l'attention de tous les députés. Nous avons le devoir d'agir et de protéger. C'est un devoir qui nous incombe à tous.

[Français]

    Monsieur le président, je suis à la Chambre depuis le début de ce débat. Je n'ai pas encore posé de question ni fait de commentaires, j'écoutais mes collègues parler. J'écoutais aussi mon collègue qui a pris la parole tout à l'heure.
    J'avoue avoir du mal à comprendre. Peut-on considérer que critiquer l'État d'Israël ne veut pas forcément dire être antisémite? L'antisémitisme est un racisme envers l'autre, le peuple juif. L'antisémitisme est une haine et une forme de racisme, une violence incroyable.
    Toutefois, j'écoute mes collègues et je ne comprends plus vraiment. C'est comme si le fait de critiquer l'État d'Israël équivalait à être antisémite. J'ai du mal à comprendre cela. Je pense qu'on peut critiquer les politiques d'un État et ne pas être antisémite. Il y a des Juifs, en Israël, qui critiquent aussi l'État d'Israël, et il y a des Juifs à l'extérieur d'Israël qui peuvent aussi critiquer les politiques d'Israël.
    Il faut faire attention de ne pas tout mélanger. L'antisémitisme, l'islamophobie, le racisme envers les Noirs ou toute forme raciale, c'est une chose, et critiquer les politiques d'un État, c'est autre chose.
    Peut-être ai-je mal compris mes collègues, mais j'avoue que j'avais parfois du mal à suivre. Je demanderais donc à mon collègue qui vient de prendre la parole si on peut critiquer l'État d'Israël sans être accusé d'antisémitisme.
(2215)

[Traduction]

    Monsieur le président, la députée a considérablement embrouillé les messages et les débats. J'aimerais préciser, à la lumière de mon expérience en Israël, où j'ai assisté aux travaux de la Knesset, que les débats sont plutôt intenses par moments. Les Israéliens se démarquent par leur avant-gardisme. Israël, une nation tout à fait démocratique, sait à la fois servir la démocratie et s'en servir. Il y a des débats perpétuels.
    Signalons que personne, pendant notre débat à la Chambre, n'a dit que ceux qui critiquent Israël sont nécessairement antisémites. Nous avons plutôt dit, très clairement et d'un commun accord, que l'antisémitisme est un phénomène bien réel ancré dans la haine. Il ne trouve pas sa source dans les critiques, dans les discours de personnes de bonne foi, ou dans des valeurs honnêtes. Il trouve plutôt sa source dans la haine. Il incite à la violence et mènera à une ère d'intolérance.
    Si ce message a semé la confusion dans l'esprit de la députée, je crains qu'il soit aussi mal interprété ailleurs. C'est pourquoi nous devons parler haut et fort, avec conviction et clarté, pour faire savoir que l'antisémitisme est une forme de haine et de violence qui ne sera pas tolérée. Il y a une place pour toutes les personnes en quête de paix, ouvertes à toutes les cultures et à tous les citoyens, et ouvertes à des discussions comme celles que nous avons tenues dans Humber—St. Barbe—Baie Verte. Voilà le message que nous pourrions tous retenir.
    Monsieur le président, je félicite mon collègue de Terre-Neuve-et-Labrador de ses observations éclairées et inspirantes. Je le remercie d'avoir mentionné Jack Marshall, éminent collègue et important contributeur au Canada, et aussi d'avoir parlé du vandalisme et des menaces antisémites qui ont eu lieu aujourd'hui à Montréal. Peut-être les députés ignorent-ils que l'incident a eu lieu sur le chemin de la Côte-Saint-Luc, qui borde ma circonscription. Beaucoup des électeurs de la circonscription m'ont fait part de leurs préoccupations dans la foulée de ces événements survenus plus tôt.
    Mais surtout, je suis heureux que le député de Terre-Neuve-et-Labrador m'ait si aimablement donné l'occasion de partager son temps de parole et m'ait invité à parler du Protocole d'Ottawa sur la lutte contre l'antisémitisme, un instrument essentiel dans la lutte contre l'antisémitisme au Canada et à l'étranger. Je m'en fais un plaisir, car beaucoup de députés en ont parlé ce soir. D'autres ont parlé de l'importance de l'éducation. Ces deux thèmes se rejoignent dans le Protocole d'Ottawa, un instrument éducatif dynamique qui informe les décisions politiques. J'aimerais en citer un extrait, car je pense que cela pourrait contribuer à notre apprentissage ce soir.
    Plus tôt, le ministre des Finances a demandé ce qui est à la source de l'antisémitisme. Le Protocole d'Ottawa en parle justement. Il dit:
    Nous sommes consternés par la recrudescence de la diffamation classique à l'endroit des Juifs, qui comprend les affirmations suivantes:
    Les libations de sang (les Juifs utiliseraient du sang d'enfants dans leurs sacrifices rituels)
    Les Juifs, « empoisonneurs de puits », et donc responsables de tous les maux du monde.
    Le mythe des « nouveaux Protocoles des sages de Sion », faux document fabriqué par le régime tsariste proclamant un complot mondial juif dont le but ultime est la domination du monde et accusant les Juifs de contrôler les gouvernements, l'économie, les médias et les institutions publiques.
    L'ironie qui consiste d'une part à nier l'existence de l'Holocauste et de l'autre à dénoncer la nazification des Juifs.
    Enfin, le Protocole d'Ottawa donne une définition de l'antisémitisme, qui s'inspire de celle élaborée par l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes, qui porte aujourd'hui le nom d'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne. Pour une raison qui m'échappe, elle ne s'y trouve plus, mais comme elle est citée dans de très nombreux programmes pédagogiques et initiatives parlementaires, je la reprends ici. La voici, telle qu'on la trouve dans le Protocole d'Ottawa. Elle couvre à la fois ce qu'on appelle l'antisémitisme « traditionnel » et le nouvel antisémitisme:
    Exemples actuels non exhaustifs d'attitudes antisémites dans la vie publique, les médias, les écoles, au travail et dans la sphère religieuse:
    Je vais me contenter de deux exemples, mais il y en a sept au total:
    Appeler à tuer et à faire souffrir les Juifs, de même que soutenir ou justifier ces exhortations, au nom d'une idéologie radicale ou d'une vision religieuse extrémiste.
    Faire des allégations mensongères, déshumanisantes, diabolisantes ou stéréotypées sur les Juifs en tant que tels ou sur le pouvoir des Juifs en tant que collectivité — par exemple les mythes sur une conspiration mondiale juive ou sur les Juifs contrôlant les médias, l'économie, le gouvernement ou les autres institutions de la société.
    Le protocole traite ensuite d'une question très importante: il donne des exemples de manifestations d'antisémitisme relatives à l'État d'Israël. Voici un extrait tiré du protocole:
     Nier au peuple juif le droit à l'autodétermination, en prétendant par exemple que l'existence de l'État d'Israël est une entreprise raciste.
    Pendant la journée de Martin Luther King, je me suis souvenu que Martin Luther King Jr. avait l'habitude de dire qu'en niant au peuple juif le droit à l'autodétermination, on le privait d'un droit dont peuvent se prévaloir tous les pays du monde, y compris les pays d'Afrique, et que l'on faisait ainsi preuve d'antisémitisme.
    Le protocole cite aussi l'exemple suivant:
    Faire preuve d'une double morale en exigeant d'Israël un comportement qui n'est attendu ni requis d'aucun autre pays démocratique.
    Soyons clairs: comme tous les autres pays, Israël doit assumer ses responsabilités en cas de violation des droits de la personne et du droit international humanitaire.
(2220)
    Ce n'est pas parce qu'ils ont toujours souffert ou en raison de l'Holocauste que les Juifs sont plus égaux devant la loi. Personne ne peut affirmer qu'Israël est au-dessus des lois. Par contre, comme le montre l'exemple de ce soir, on refuse systématiquement l'égalité devant la loi à Israël, surtout sur la scène internationale. Le problème, ce n'est pas que les normes en matière de droits de la personne s'appliquent à Israël, mais qu'elles ne sont pas appliquées uniformément à tous les autres pays. Ce n'est pas qu'Israël doit respecter les droits de la personne, car il le doit, mais que les droits d'Israël méritent d'être, ni plus ni moins, respectés de la même manière.
    Un autre exemple, c'est l'idée d'utiliser les symboles et les images associés à l'antisémitisme classique — y compris les allégations voulant que les Juifs aient tué Jésus, entre autres — pour représenter Israël ou les Israéliens, ou de comparer les politiques israéliennes actuelles à celle des nazis, ou de tenir les Juifs collectivement responsables de toutes les mesures prises par l'État d'Israël. Mais, de toute évidence, comme on peut le lire dans le protocole, les critiques à l'égard d'Israël, tout comme celles dirigées à l'égard de n'importe quel pays, ne peuvent pas être qualifiées d'antisémites.
    Je terminerai en citant une de mes déclarations figurant dans le protocole d'Ottawa:
    Soyons clairs: le fait de critiquer Israël n'est pas antisémite, et prétendre le contraire est inacceptable. Par contre, isoler Israël au motif de condamnations sélectives et d'opprobre — sans parler de lui refuser le droit d'exister ou de chercher à le détruire — est discriminatoire et haineux, et affirmer le contraire est malhonnête.
    Puisque le Protocole d'Ottawa conclut en demandant aux parlementaires en particulier d'adopter la définition pratique d'antisémitisme de l'EUMC, laquelle ne semble plus être en vigueur, et d'entériner son application dans la loi existante, je demande à tous les députés d'utiliser le Protocole d'Ottawa pour lutter contre l'antisémitisme comme référence-cadre pour l'ancienne et la nouvelle définition d'antisémitisme et d'en faire le modèle pour comprendre l'antisémitisme, pour élaborer nos politiques à cet égard et pour déterminer les mesures que nous prenons à l'échelle nationale et internationale.
(2225)
    Monsieur le président, nous avons ce soir une discussion très posée, et je suis heureux qu'il ne s'agisse pas d'un débat. Je tiens à remercier le député du leadership incroyable dont il fait preuve dans le dossier des droits de la personne en général et, plus particulièrement, dans celui de la lutte contre l'antisémitisme.
    Je tiens à assurer au député que, même si je suis un disciple de Jésus Christ et qu'il utilisait ses propres termes pour parler de Jésus, les Églises dont nous sommes membres dans ce parti considèrent certainement que la foi juive est la fondation de notre confession, et nous apprécions le peuple juif. Je sais qu'il sait déjà cela, mais je souhaitais faire ce commentaire publiquement et le remercier de son bon travail.
    Aujourd'hui, j'ai été consterné de voir certaines des choses qui se sont produites à Montréal. Je saurais gré au député, qui est de cette région, de nous dire ce qu'il en pense. Je tiens à ce que le député et tous nos amis juifs sachent que nous leur témoignons notre solidarité.
    Monsieur le président, ce qui a troublé les gens aujourd'hui, à Montréal, et, comme je l'ai dit, dans une partie de ma circonscription et celle d'à côté, ce n'est pas seulement l'acte de vandalisme à caractère antisémite, mais aussi la menace qui l'accompagnait. C'est la nature haineuse de la menace qui a troublé et perturbé les gens.
    Il a été question de sensibilisation ici, ce soir, et toute démarche préventive doit en tenir compte, car la sensibilisation à l'antisémitisme, à son histoire, à ses dangers et au risque que ce problème puisse s'étendre au-delà de la communauté juive, si elle est bien intégrée et se reflète dans les comportements, contribuera au bien-être des juifs, mais aussi de l'ensemble de la société.
    Monsieur le président, c'est un honneur pour moi de participer au débat de ce soir sur la montée de l'antisémitisme dans le monde.
    Ce soir, je vais partager mon temps de parole avec le député de Willowdale. Je lui suis d'ailleurs reconnaissant de prendre aussi la parole.
    Il est bien connu que la promotion et la défense de la liberté de religion sont une priorité de la politique étrangère canadienne. Nous croyons que les sociétés qui protègent la liberté de religion ou de croyance sont plus susceptibles de protéger tous les autres droits universels et libertés fondamentales. Par l'intermédiaire du Bureau de la liberté de religion créé au sein du ministère des Affaires étrangères et dirigé par l'ambassadeur Andrew Bennett, le Canada s'active sur la scène internationale à combattre l'antisémitisme et d'autres formes d'intolérance fondées sur la religion ou les croyances.
    Le Fonds pour la liberté de religion appuie trois initiatives de lutte contre l'antisémitisme.
    Le fonds soutient le mandat du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE, au moyen d'une enveloppe de 500 000 $ destinée à la promotion de la liberté de religion, surtout à la lumière de la montée de l'antisémitisme et de la discrimination que subissent les chrétiens et les musulmans dans certains États membres de l'OSCE. Le projet vise à favoriser l'adoption de normes internationales en matière de liberté de religion, en particulier dans le centre de l'Asie et le sud du Caucase.
    Le fonds a également appuyé la fondation d'Auschwitz-Birkenau en lui versant 400 000 $ pour l'aider à préserver le lieu commémoratif d'Auschwitz-Birkenau, qui figure sur la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO.
    La Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste de 2015 de l'UNESCO constitue le plus récent projet à jouir de l'appui du fonds. D'une valeur de 100 000 $, le projet vise à mobiliser les décideurs pour favoriser l'adoption de politiques de promotion de l'éducation sur l'Holocauste, de prévention des génocides et de sensibilisation à l'Holocauste au moyen de divers outils pédagogiques. Le 27 janvier dernier, bon nombre de députés et de ministériels ont assisté aux cérémonies émouvantes qui se sont tenues dans le monde entier.
    Comme le savent les députés, le Canada est devenu en 2009 un membre en bonne et due forme de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste. L'ambassadeur Andrew Bennett a été nommé en mars 2014 à la tête de la délégation canadienne auprès de cet organisme.
    Le Canada encourage activement tous les États à adopter une politique de tolérance zéro envers l'antisémitisme. Les États peuvent notamment devenir membre de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste et appuyer les principes établis dans le Protocole d'Ottawa. Ce protocole a été conclu à la suite d'une vague inquiétante d'antisémitisme qui a déferlé au Canada, notamment sur les campus de nombreuses universités.
    Je tiens à féliciter le député de Mont-Royal pour son intervention et à le remercier des définitions et des importantes mesures qu'il nous a expliquées.
    Le Protocole d'Ottawa exhorte les universités à combattre l'antisémitisme:
[...] avec la même énergie qu'elles mettent à lutter contre les autres formes de haine. Plus précisément, les universités devraient être invitées à définir clairement ce qu'on entend par antisémitisme, à en fournir des exemples concrets et à veiller à l'application stricte de leur code de conduite, et ce, tout en protégeant la liberté d'expression et le principe de la liberté universitaire [...] La discrimination ne devrait être aucunement tolérée dans le milieu universitaire.
    Le Canada doit continuer à lutter contre l'antisémitisme en utilisant tous les moyens dont il dispose. Je suis heureux d'être l'un de ceux qui militent en faveur de l'application de la politique de la tolérance zéro tant dans nos universités qu'ailleurs dans le monde. Les mots « plus jamais » doivent résonner haut et fort: plus jamais l'holocauste, plus jamais l'antisémitisme. Il ne faut ménager aucun effort pour lutter contre ce fléau.
(2230)
    Monsieur le président, en raison des contraintes de temps, je propose à mon collègue, s'il le souhaite, de parler de façon plus détaillée des autres éléments du Protocole d'Ottawa. Il a surtout parlé de la partie concernant les universités. Toutefois, le protocole contient d'autres paragraphes qui exhortent les parlementaires à agir, et je me demandais s'il voudrait parler d'un ou de plusieurs de ces paragraphes.
    Monsieur le président, le Protocole d'Ottawa était important parce qu'il définissait clairement des enjeux qui devaient être mis de l'avant et discutés. Aujourd'hui, nous avons l'occasion incroyable de nous réunir en tant que collègues pour discuter ensemble de ces enjeux et nous entendre clairement pour dire que ce problème doit être réglé.
    Le député parle du Protocole d'Ottawa. Je veux aborder un élément que j'ai trouvé particulièrement bouleversant.
    La commission d'enquête a malheureusement conclu que le fléau de l'antisémitisme s'aggrave au Canada, surtout sur les campus de nos universités.
    Le rapport donne de nombreux exemples d'antisémitisme sur divers campus, y compris l'incident déplorable qui est survenu à l'Université York en 2008 lorsque des étudiants juifs fréquentant cet établissement ont été pourchassés par une foule qui les narguait et tenait des propos antisémites, les forçant à se barricader dans la résidence Hillel.
    Il y a tout un tas d'autres exemples, mais il est important que nous déterminions où ce genre d'incident se produit et que nous tenions les coupables responsables de leurs actes. Le Protocole d'Ottawa nous donne les outils et les capacités nécessaires pour atteindre ces objectifs.
(2235)

[Français]

    Monsieur le président, je vais remercier mon collègue de son discours et remercier également mon collègue de Mont-Royal d'avoir précisé que critiquer l'État d'Israël n'est pas antisémite.
    J'aurais deux questions à poser à mon collègue.
    D'une part, je suis personnellement une sémite. Je viens du Moyen-Orient. En tant que personne ayant des ancêtres qui ont partagé cette langue qui est la langue sémite, je suis sémite. Dire le mot « antisémite » est-ce que cela veut forcément dire « antijuif » ou contre tous les sémites? J'aimerais avoir cette précision du point de vue de la définition. En même temps, lorsqu'on dit « antisémite », est-ce qu'on fait référence à tous les sémites? Je suis sémite, mais je ne suis pas juive. Je suis chrétienne. C'est un peu particulier et je voulais préciser ce point-là.
    Je voudrais aussi avoir l'opinion de mon collègue. A-t-il constaté, comme moi, sur le terrain, une augmentation de l'islamophobie et une augmentation de l'antisémitisme ou de l'« antijuif » si on veut? Je me demandais s'il y avait un lien corrélatif entre la montée de l'islamophobie et celle de l'antisémitisme? Est-ce qu'au fond, la peur du terrorisme, de la radicalisation et de l'extrémisme violent n'amène pas une espèce d'islamophobie? En même temps, avec les débats sur la fameuse charte de la laïcité et les accommodements raisonnables, tous ces débats qui ne sont pas inutiles, à mon avis, mais qui sont détournés de leur vrai sens, on en vient à ce que la population et les médias en rajoutent...
    À l'ordre, on n'a pas assez de temps pour la réponse.
    La parole est à l'honorable député de Don Valley-Ouest.

[Traduction]

    Monsieur le président, je suis pas certain qu'il soit possible de répondre brièvement à la question, mais permettez-moi de revenir sur un aspect dont le député de Mont-Royal a parlé tout à l'heure, c'est-à-dire la citation du Protocole d'Ottawa:
[...] le fait de critiquer Israël n'est pas antisémite et prétendre le contraire est inacceptable. Par contre, isoler Israël au motif de condamnations sélectives et d'opprobre — sans parler de lui refuser le droit d'exister ou de chercher à le détruire — est discriminatoire et haineux, et affirmer le contraire est malhonnête.
    Pour répondre à une partie de la question de la députée, qui abordait beaucoup de choses, je dirai que toute forme de haine est inacceptable dans notre société et qu'il faut trouver une façon de s'y attaquer. On constate actuellement que l'EIIL et le terrorisme au Moyen-Orient nous inquiètent tous profondément et que toute la Chambre s'en alarme.
    J'estime qu'il faut trouver un moyen de régler ces problèmes. Il est question ce soir de la recrudescence de antisémitisme dans le monde entier. Mais nous, au Canada, nous pouvons nous concentrer un peu mieux sur les questions qui sont plus d'actualité ici, et ce qui s'est produit aujourd'hui à Montréal en est un exemple flagrant.
    J'ai récemment eu l'occasion d'accompagner le premier ministre en Israël. Avec un groupe de députés, je me suis rendu à la frontière avec la Syrie et la Jordanie, où nous avons accueilli des réfugiés qui traversaient la frontière. Ceux qui occupent notre fonction ont le privilège de pouvoir voir des endroits et des choses que bien des gens n'ont pas l'occasion de voir. Je dois dire que j'ai été profondément attristé en voyant les enfants, les aînés et les autres personnes qui traversaient la frontière en transportant tous les effets personnels qu'ils pouvaient porter. Ils fuyaient la haine, la guerre qui menaçait leur vie, et des conditions incompréhensibles pour notre société. C'est contre cela que nous luttons.
(2240)
    Monsieur le président, je remercie chaleureusement mes collègues d'être encore éveillés à cette heure tardive pour écouter le dernier intervenant. Comme je suis le dernier intervenant, non que je veuille en tirer un avantage personnel, j'aurai la satisfaction d'avoir conclu le débat de ce soir sur cette question importante.
     Comme mes collègues l'ont souligné, il est urgent de s'attaquer à la montée inquiétante de l'antisémitisme dans le monde, non seulement à l'échelle internationale, mais aussi au Canada.
    J'aimerais donc axer mes observations sur les mesures que notre pays a prises et doit continuer de prendre pour lutter contre la montée de l'antisémitisme sur notre propre territoire.
     Notre stratégie, qui consiste à recueillir des données normalisées à l'échelle nationale sur les crimes motivés par la haine, révèle que les Juifs forment le groupe religieux le plus susceptible d'être la cible de crimes haineux, et ce, même si les Juifs représentent moins de 1 % de la population canadienne. Par conséquent, le gouvernement a adopté, à juste titre d'ailleurs, une approche ferme à l'égard des organisations qui font la promotion de la haine des Juifs, qui nient publiquement la réalité historique et l'ampleur de l'extermination des Juifs pendant l'Holocauste ou qui font l'apologie du terrorisme.
    Le Canada se rend également compte que trop souvent, nous ne prenons pas suffisamment de mesures pour garantir que les membres de la société, et plus particulièrement les jeunes générations, se souviennent des leçons de l'Holocauste. Le gouvernement du Canada a donc pris, à l'échelle nationale, des mesures importantes afin de renseigner les Canadiens et de protéger les communautés à risque.
    Parmi les mesures qui ont été prises à l'échelle nationale, mentionnons le Programme de financement des projets d'infrastructure de sécurité pour les collectivités à risque, qui a été créé en 2011 et qui permet aux organisations à but non lucratif de présenter une demande de financement afin d'améliorer les infrastructures et les systèmes de sécurité dans les lieux de culte et les centres communautaires vulnérables aux crimes motivés par la haine. Les communautés à risque, y compris la communauté juive au Canada, se sont prévalues du programme afin de pouvoir se sentir davantage en sécurité dans leurs lieux de culte et lors de leurs rassemblements communautaires.
    Dans ma propre circonscription, Willowdale, une synagogue et des écoles juives ont été la cible de graffitis racistes. Elles ont profité du programme afin de renforcer les mesures de sécurité sur les lieux.
    Le gouvernement du Canada continue également à mettre au point ses systèmes de collecte de données sur les crimes motivés par la haine. Conjugués à la formation policière, ces systèmes permettent aux autorités de mieux lutter contre la violence à l'endroit de certains groupes à risque, comme la communauté juive.
    Outre ces mesures, le gouvernement s'est penché sur les antécédents navrants d'antisémitisme du Canada. Il est tout particulièrement important que le Canada examine ouvertement son rôle dans la mise en oeuvre de la politique de la tolérance zéro à l'égard des Juifs, laquelle empêchait les réfugiés juifs de trouver refuge au Canada après avoir fui l'Allemagne nazie, dont le gouvernement appliquait une politique d'antisémitisme. Cette politique canadienne honteuse s'est manifestée par le refoulement du MS St. Louis, qui transportait des réfugiés juifs, dont beaucoup ont péri dans l'Holocauste après avoir été renvoyés en Europe, alors occupée par les nazis.
    L'épisode de l'Holocauste est une leçon clé de l'histoire de l'antisémitisme, une leçon que nous ne pouvons pas oublier. Le Monument national de l'Holocauste sera inauguré à Ottawa à l'automne, en souvenir des victimes de l'Holocauste et en hommage aux survivants.
    Le monument incitera les Canadiens à réfléchir aux responsabilités que nous devons tous assumer quant à la protection des droits et de la dignité de la personne. De plus, le Musée canadien pour les droits de la personne, qui a ouvert ses portes en septembre 2014 à Winnipeg, abrite une exposition permanente consacrée à l'Holocauste.
    Je tiens à dire à mes honorables collègues que personne ne devrait être pointé du doigt en raison de sa foi ou de son ethnie. Nous ne pouvons pas ignorer le risque que nous fait courir l'antisémitisme si nous ne le jugulons pas avant qu'il nous entraîne sur une pente très dangereuse, ainsi qu'en font foi les événements récents en Europe. Comme le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile l'a dit il y a deux semaines, aux Nations Unies, à New York, ceux qui menacent l'existence du peuple juif représentent un grave danger pour nous tous.
    Je voudrais terminer en disant que j'ai eu, moi aussi, le plaisir d'accompagner le premier ministre en Israël et d'y visiter le Musée de l'Holocauste. L'une des parties du musée qui m'a le plus ému commençait par une inscription: « les justes parmi les nations ». En hébreu, on dit « khassidey umot ha-olam ». Ce sont les non-Juifs qui ont risqué leur vie, pendant l'Holocauste, pour aider des Juifs à échapper à l'extermination nazie. Je précise qu'on ne retrouvait parmi eux aucun Européen de l'Ouest à l'époque.
    Deux diplomates chinois, Pan-Jun Shun et Feng-Shan Ho, ont délivré plus de 3 000 visas que des Viennois ont pu utiliser pour se rendre dans un tiers pays.
(2245)
    De plus, à cette même époque, le diplomate japonais Chiune Sugihara a fait la même chose pour aider des Viennois.
    En tant que Canadiens et en tant que non-juifs, nous devrions nous inspirer de ces hommes. Il faut mettre un terme à l'antisémitisme et c'est à nous de prêcher par l'exemple afin de sauver ce qui nous tient à coeur et de faire en sorte que l'harmonie règne dans le monde.
    Comme il est 22 h 46, conformément au paragraphe 53(1) du Règlement, le comité s'ajourne et je quitte le fauteuil

    (Rapport est fait de l'affaire du gouvernement no 16)

[Français]

    La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre s'ajourne donc à demain, à 14 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
     (La séance est levée à 22 h 46.)
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