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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 125 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 3 décembre 2018

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour à tous et bienvenue à la 125e séance du Comité permanent de la condition féminine. Cette réunion est publique. Aujourd'hui, nous allons poursuivre notre étude sur le réseau de refuges et de maisons de transition qui desservent les femmes et leurs enfants affectés par la violence faite aux femmes et la violence par un partenaire intime.
    C'est pourquoi je suis heureuse d'accueillir Josie Nepinak, directrice générale de l'Awo Taan Healing Lodge Society qui se joint à nous par vidéoconférence. Nous entendrons ensuite Viviane Michel, présidente de Femmes autochtones du Québec inc.
    Je vais céder la parole à Mme Nepinak qui aura sept minutes. Je vous ferai signe lorsque votre temps sera presque écoulé.
     Vous avez la parole.
     Je vous remercie pour cette présentation. Je m'appelle Josie Nepinak.
    Tout d'abord, je vous envoie mes salutations de Calgary. Calgary est située, comme vous le savez probablement, sur le territoire des Premières Nations visées par le Traité no 7. Il fait beau aujourd'hui.
     Je suis ici pour parler de l'Awo Taan Healing Lodge Society. L’organisme a été créé en 1992 pour offrir un soutien et des conseils holistiques aux femmes et aux enfants qui fuyaient la violence. Awo Taan signifie bouclier, protecteur en langue pied-noir. Son nom représente une approche de protection et de soutien sûre et adaptée à la culture contre la violence familiale.
    Notre vision consiste à offrir des services aux familles vivant en paix et notre mission, à offrir un éventail de services de soutien à toute personne touchée par la violence familiale.
     J'aimerais d'abord vous dire qu'il y a 46 refuges d'urgence en Alberta. Selon les statistiques, jusqu'à 60 % des femmes et des enfants qui fréquentent ces refuges en Alberta sont autochtones. Par conséquent, pour orienter notre travail, nous avons élaboré des principes directeurs, dont j'aimerais vous parler un peu. Nous valorisons le savoir traditionnel des aînés et le transfert du savoir sacré. Nous reconnaissons et valorisons l'esprit et l'intégrité de toutes les personnes touchées par la violence.
     Nous croyons que la guérison nécessite une intervention multidimensionnelle comprenant des interventions, la mise en place de refuges sûrs, des services spirituels et culturels, des services de proximité et de l'information aux victimes et aux agresseurs, ainsi que la sensibilisation du public et l'application des lois pertinentes. Nous croyons également que la violence découle de traumatismes intergénérationnels et que l’éducation dans les communautés a un rôle à jouer dans la guérison de ces traumatismes.
    Nous sommes régis par un conseil d'administration constitué de bénévoles, qui assurent collectivement la direction et la surveillance de nos activités. Je dirige une équipe multidisciplinaire qui offre une gamme de services et de programmes aux femmes autochtones et à leur famille, dont des soins post-traumatiques reposant sur les forces et des soins tenant compte de la violence en vue de favoriser la guérison, la fierté, l'estime de soi et l'identité culturelle des Autochtones.
    Notre cadre autochtone pour la guérison et le bien-être est notre document de travail et notre modèle de prestation de services. Nous y trouvons les outils requis pour la guérison et le bien-être, ainsi que des stratégies adaptées à la culture et répondant aux besoins. Le cadre établit une gamme de services adaptés à la culture des Autochtones et de leur famille.
    Nous sommes en service depuis 25 ans, et, au cours de ces années, nous avons élaboré notre programme de soins et notre programme de guérison et de bien-être en mettant l'accent sur les soins tenant compte de la violence. Nous évaluons également notre cadre en permanence pour déterminer si nos services sont pertinents ainsi que pour évaluer l'incidence de notre travail entourant les services adaptés à la culture et tenant compte du traumatisme.
     Au cours des 25 dernières années, nous avons créé des programmes et des services et élaboré des stratégies pour les Autochtones. Les personnes elles-mêmes — nos mères et nos enfants, les gens des communautés, nos partenaires — ont indiqué que les modèles autochtones sont les plus utiles pour permettre de comprendre et de connaître les caractéristiques des services adaptés à la culture.
    Par conséquent, nous sommes passés de la prestation de services d'urgence à la prestation d'une gamme de programmes adaptés à la culture pour répondre aux besoins immédiats et à long terme des familles touchées par la violence. Nous avons un certain nombre de programmes, et je n'en mentionnerai que quelques-uns. Nous avons le programme de refuge d’urgence et le programme pour la prévention de la violence familiale. Nous avons un programme de services de proximité en milieu rural. Nous avons un programme de soutien aux Autochtones et un programme de mentorat pour les jeunes. Tous ces programmes, à l'exception du refuge d'urgence pour femmes, sont également offerts aux hommes et aux membres des familles touchés par la violence afin qu'ils puissent participer au processus de guérison familiale.
    Nous préférons appeler notre refuge un pavillon principalement parce que nous savons avec les soins adaptés au traumatisme que les femmes qui arrivent au refuge ont déjà vécu de multiples traumatismes, que ce soit dans les pensionnats ou pendant la Rafle des années 60, et qu'elles ont perdu leur langue, leur culture et leur cérémonie. Le pavillon représente mieux le processus de guérison.

  (1535)  

    Nous avons 32 lits et nous offrons une gamme complète de services en refuge d'urgence. Nous travaillons 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et nous offrons des services à toutes les femmes qui fuient la violence. Ces services comprennent le soutien d'urgence en cas de crise, l'hébergement d'urgence, le soutien culturel, le mentorat, la gestion intensive des cas, la guérison dans la communauté et l'éducation.
    Nous avons un programme novateur de soins aux enfants et un programme de réconciliation et de guérison post-traumatiques, ce qui est relativement nouveau pour nous. Le programme de réconciliation et de guérison repose sur une approche améliorée de counselling et de soutien pour les femmes qui restent au pavillon. Nous avons un psychologue autochtone qui tient compte des traumatismes, alors nous offrons du counselling adapté à la culture, aux traumatismes et à la violence pour favoriser la guérison de toutes les formes de violence et de mauvais traitements.
    Le pavillon est financé en majeure partie par la province de l'Alberta, par la division du soutien aux sans-abri.
     Nous venons de publier le Comprehensive Report: Building a Case to Explore the Impact of Indigenous Trauma-Informed Care and Other Promising Practices at the Awo Taan Healing Lodge Society. La portée des travaux englobait l'élaboration d'un modèle logique de programme et un examen de la pertinence des documents internes, des réalisations et des résultats, ainsi que de notre mode de fonctionnement, de notre prestation et de notre efficacité. Nous avons également procédé à une revue de la littérature externe sur les cadres, les modèles, les principes et les stratégies adaptés à la culture pour la prévention de la violence familiale dans les refuges d'urgence pour femmes, principalement au service des femmes autochtones.
    Ce que nous allons faire, puisque nos sept minutes sont écoulées...
    Oh, je suis...
    Ne vous en faites pas.
    Vous pourrez en dire plus lors des périodes de questions.
    D'accord.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à Viviane Michel.
     Vous avez sept minutes.

[Français]

     [Le témoin s'exprime en langue autochtone.]
    Bonjour à tous. Je me permets toujours de remercier le Créateur de m'avoir conduite ici saine et sauve, et je remercie la nation anishinabe de nous accueillir dans son vaste territoire.
    Je m'appelle Viviane Michel et je suis la présidente de Femmes autochtones du Québec.
    Femmes autochtones du Québec représente 10 nations au Québec, incluant la population urbaine. Dans notre organisation, nous avons ce qui s'appelle le Réseau des maisons d'hébergement pour femmes autochtones. Il y a 13 maisons d'hébergement dans notre réseau, et deux autres viendront bientôt s'y ajouter pour les Naskapies et les Eeyous, qui en seront à leur troisième maison d'hébergement.
    Je salue aussi le Comité permanent de la condition féminine, que je remercie d'inclure Femmes autochtones du Québec dans ce processus.

[Traduction]

    Viviane, pourriez-vous ralentir un peu, pour que les interprètes puissent avoir le temps de traduire?

[Français]

     D'accord. Vous comprendrez que sept minutes, ce n'est pas beaucoup, mais je suis habituée à parler vite.
    Je vais répondre aux deux questions que vous nous avez envoyées, en commençant par le financement et les programmes fédéraux existants liés aux refuges et aux maisons de transition.
    En 1990, nous avons mis sur pied une maison d'hébergement financée par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ce ministère fédéral nous a accordé 143 000 dollars pour financer cette maison régionale, laquelle dessert neuf communautés innues. Un montant de 143 000 dollars, c'était peu. En plus des frais d'exploitation de la maison, il couvrait les salaires de quatre intervenantes, d'une coordonnatrice et d'une directrice. Cela était vraiment très minimal. Par comparaison, la ville avait sa propre maison d'hébergement pour les femmes victimes de violence, qui était financée à hauteur de 450 000 dollars par la province. Vous constaterez l'écart assez flagrant qu'il y avait déjà entre les niveaux fédéral et provincial en matière de financement.
    À l'heure actuelle, ce financement n'est pas uniforme. Les maisons d'hébergement dans les communautés sont financées par le fédéral. En milieu urbain, par contre, elles sont financées par le provincial parce qu'elles ne sont pas à l'intérieur d'une communauté. Dans certains cas, le financement des maisons d'hébergement autochtones est géré par le conseil de bande, ce qui peut entraîner des difficultés. À titre d'exemple, une femme a rapporté une agression sexuelle perpétrée par un chef de bande, ce qui a poussé le conseil de bande a empêché la maison d'hébergement autochtone d'offrir du soutien à cette femme. On peut voir les questions politiques que peuvent parfois créer des lacunes dans la gestion des maisons d'hébergement. Il est donc nécessaire d'uniformiser le financement et de confier la gestion des fonds directement aux maisons d'hébergement autochtones.
    Le personnel des maisons d'hébergement pour femmes autochtones a besoin de formation continue. Les intervenantes s'investissent de tout leur coeur dans leur travail. Un grand nombre de cas, d'une grande variété, leur sont acheminés, dont des dénonciations d'agression sexuelle ou de crise suicidaire, entre autres. Il est donc nécessaire de mettre à leur disposition des activités de formation pour renforcer leurs compétences et les outiller afin qu'elles puissent offrir une meilleure aide, peu importe les situations auxquelles elles font face.
    Le financement doit couvrir les salaires des intervenantes. Dans les communautés, ces salaires varient beaucoup d'une maison d'hébergement autochtone à l'autre et ne sont pas à la hauteur du travail des employées. Ces facteurs contribuent au taux de roulement élevé des employées des maisons d'hébergement autochtones, dont plusieurs quittent leur emploi ou tombent en congé de maladie. Il est prioritaire d'avoir en poste des employées mieux formées et outillées par, pour et avec des Autochtones, afin que leurs interventions soient conformes à cette culture.
    Votre deuxième question portait sur le nombre de lits. Le manque de lits est particulièrement problématique à Montréal et à Québec, dont les maisons d'hébergement accueillent une clientèle plus importante. En communauté, par contre, le problème est parfois tout autre, puisque les lits peuvent être inoccupés, comme à Schefferville, une petite communauté où tout le monde se connaît et où il est vraiment très difficile d'assurer une certaine confidentialité.
    J'en arrive aux recommandations.
    Mes sept minutes sont-elles passées?

  (1540)  

[Traduction]

    Vous avez deux minutes.

[Français]

    Pourriez-vous répéter plus lentement?
    Il vous reste deux minutes.
    Notre première recommandation est d'octroyer un financement de base au Réseau des maisons d'hébergement pour femmes autochtones pour favoriser la formation et les échanges entre les maisons d'hébergement autochtones, au même titre qu'au Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale et à la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes au Québec.
    Deuxièmement, il faut élargir les champs de services offerts en maison d'hébergement afin qu'ils correspondent davantage aux besoins et aux réalités des femmes autochtones vivant une situation de violence familiale et conjugale, ainsi qu'à la culture et aux traditions autochtones.
    En troisième lieu, nous recommandons de mettre en oeuvre des services destinés aux hommes ayant des comportements violents ou subissant de la violence. Ces derniers doivent prendre part au processus de guérison des nations autochtones.
    Quatrièmement, il faut consacrer dans les communautés plus de ressources humaines pour traiter de violence familiale et conjugale.
    Notre cinquième recommandation est d'établir des protocoles d'entente interorganisations entre les maisons d'hébergement autochtones et allochtones, avec les policiers, les services sociaux, la Direction de la protection de la jeunesse et toutes les ressources susceptibles d'oeuvrer dans le domaine de la violence conjugale.
    Sixièmement, il faut sensibiliser les femmes autochtones au processus juridique entourant une situation de violence familiale et conjugale, notamment l'accompagnement juridique, le dépôt des plaintes, et le reste.
    En septième lieu, nous recommandons d'assurer un filet de sécurité pour les femmes autochtones vivant une situation de violence familiale et conjugale en leur offrant un choix de services adaptés à leurs besoins et à leurs réalités.
    Notre huitième recommandation est d'assurer un meilleur soutien financier aux services de police autochtones en favorisant la formation et le recrutement de femmes policières.
    Neuvièmement, il faut prévoir des ressources spécifiques pour venir en aide aux familles de femmes autochtones disparues ou assassinées.
    Notre dixième et dernière recommandation est de lancer une campagne de sensibilisation dans le but de venir en aide aux aînées qui subissent de la violence de toutes sortes.
    Je crois avoir respecté le temps qui m'était imparti.

  (1545)  

[Traduction]

    Vous êtes fantastique.

[Français]

     Merci!

[Traduction]

    Nous en sommes à sept minutes deux secondes, pile dans le temps, et c’est en incluant les deux minutes.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer aux questions.
     Nous allons commencer un tour de sept minutes avec Pam Damoff.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à nos deux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Madame Nepinak, je remarque qu'en plus du travail que vous avez fait avec le refuge, vous avez également travaillé avec l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, ainsi qu'avec le groupe consultatif d'experts de l'Observatoire canadien du fémicide pour la justice et la responsabilisation.
    Ma question porte sur la fréquence de l’utilisation des armes à feu dans la violence familiale. Dans mes discussions avec des responsables de refuges, j'ai souvent entendu dire que les armes à feu étaient utilisées, non seulement pour commettre des agressions contre des femmes, mais aussi pour menacer les femmes, leurs enfants et leurs animaux de compagnie afin de forcer les femmes à demeurer dans une relation. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Absolument, c’est le cas.
    La semaine dernière, l'observatoire canadien sur la violence familiale a publié un document dans lequel on pouvait lire que la majorité des femmes autochtones assassinées l'ont été par des coups de couteau et que les armes à feu sont utilisées principalement pour assassiner des femmes en milieu rural, comme dans les collectivités agricoles, etc.
    Je conviens qu’il est très probable que les armes à feu soient utilisées pour menacer les membres de la famille pour qu’ils demeurent dans la même situation.
    Je me demande si vous pourriez tous les deux commenter... Vous travaillez en milieu urbain, et un certain nombre de femmes autochtones viennent en milieu urbain. Vous en avez parlé toutes les deux. Les défis auxquels elles font face sont différents dans les réserves et dans les villes.
     Comment le gouvernement fédéral peut-il aider les femmes en milieu urbain en particulier à trouver un refuge? Y a-t-il quelque chose que nous devrions faire différemment?
     Je vais peut-être commencer par Viviane, puis nous vous donnerons la parole, Josie.

[Français]

    J'ai déjà été intervenante dans une maison d'hébergement pour femmes victimes de violence. Dans les communautés, où tout le monde se connaît, l'une des grandes préoccupations est la confidentialité. Une femme victime de violence qui souhaite dénoncer son agresseur doit être assez solide sur ses deux jambes, parce qu'elle doit faire face à la famille, aux amis et à son entourage. Il arrive même assez fréquemment que la personne auprès de qui elle doit se plaindre soit le propre frère de l'agresseur. Compte tenu de ces préoccupations au sein des communautés, les femmes n'ont généralement pas envie de dénoncer leur agresseur lorsqu'elles sont victimes de violence. En ville, par contre, il est plus facile d'assurer cette confidentialité puisque le territoire est un peu plus vaste et que tout le monde ne sait pas où se trouve la maison d'hébergement. Ce sont des différences dont nous devons tenir compte.
    À l'intérieur des communautés, il y a beaucoup de travail à faire pour sécuriser les maisons d'hébergement. Par exemple, le Centre d'hébergement Tipinuaikan, à Sept-Îles, se trouve dans la communauté, et certains hommes savent que c'est une maison d'hébergement pour femmes victimes de violence. Tout ce processus, notamment les liens avec la police et la façon de sécuriser les lieux, doit être revu par les tables de concertation. Il faut aussi considérer le défi financier. Qui va payer la majorité des coûts de sécurisation des lieux? On sait que les maisons d'hébergement sont en mode de survie économique.

  (1550)  

[Traduction]

    Aimeriez-vous ajouter autre chose, Josie?
    Oui. Bien souvent, les besoins sont très différents. Les femmes qui viennent de villages nordiques et éloignés et qui arrivent au refuge Awo Taan ont souvent perdu leur culture, leur identité et leur soutien culturel et elles sont isolées.
    Très souvent, le financement ne permet pas d’avoir les ressources nécessaires pour continuer à fournir les services de guérison qui sont nécessaires dans les refuges en milieu urbain. Par exemple, s’il n’y a pas d’aînés, si la langue n’est pas la même, si la culture n'est pas présente et qu'il n'y a pas de cérémonies dans les refuges, cela aura une incidence sur le bien-être holistique de la femme et la probabilité qu’elle retourne dans une situation violente. Souvent, nous n'avons pas les fonds et le soutien nécessaires pour élaborer cette stratégie.
    Il ne me reste qu'un peu plus d'une minute, alors permettez-moi de vous interrompre.
    Lorsque nous avons fait une étude sur les femmes autochtones dans le système de justice, nous avons beaucoup parlé des pavillons de ressourcement. Nous avons souvent entendu dire que beaucoup des femmes qui arrivent dans un pavillon de ressourcement sont exposées pour la première fois à la culture autochtone. Elles doivent apprendre. Elles doivent être exposées à la culture. Je me demande si vous voyez la même chose dans les refuges.
    Nous le voyons aussi beaucoup dans les refuges. Je pense que c'est parce que d'autres ne l'ont jamais offert auparavant. Awo Taan, à Calgary, est le premier à ma connaissance, du moins dans la province, à offrir des services adaptés à la culture. Pourtant, 60 % des femmes qui arrivent dans les refuges sont autochtones.
    Viviane, accordez-vous une place à la culture autochtone dans les refuges?

[Français]

     Les services varient selon les maisons d'hébergement. Certaines maisons d'hébergement offrent davantage de services conformes à la culture, comme avoir une tente dans la cour arrière. Le Réseau des maisons d'hébergement pour femmes autochtones comporte un autre avantage, et c'est que la langue parlée par les intervenantes de la maison est la même que celle qui est parlée dans la communauté, comme l'innu ou le naskapi. Cela permet aux femmes victimes de violence de s'exprimer sans contrainte linguistique.

[Traduction]

    Très bien.
     Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Rachael Harder, qui a sept minutes.
    Vous avez la parole.
    Madame Nepinak, j'aimerais que vous me parliez un peu de ce qui se passe lorsque les trois semaines sont écoulées. Je crois comprendre que les femmes qui arrivent au refuge ne peuvent y rester que trois semaines, et ensuite, il doit se passer quelque chose. Quand les trois semaines sont écoulées, qu'arrive-t-il à ces femmes? Où vont-elles?
    Je crois souvent que nous nous attendons à des miracles en trois semaines, ce qui n'est pas juste pour les femmes et les enfants qui arrivent. En général, dans les familles autochtones, la femme est dans la vingtaine. Elle a habituellement trois enfants.
     Nous nous attendons à ce qu'elle trouve un logement, dans les 21 jours, et un soutien au revenu. Si elle a des problèmes liés à la protection de ses enfants ou à des ordonnances de protection d'urgence, ou si elle essaie simplement de sauver sa vie pendant ces trois semaines... il est parfois très difficile de vivre dans un établissement communautaire, comme un refuge, dans lequel il y a des règles.
     Elle pourrait nous demander une prolongation. Elle ne trouve peut-être pas de logement. Elle peut attendre d’avoir un rendez-vous avec les responsables du soutien aux sans-abri ou du soutien au revenu. Nous accordons des prolongations, et nous l’avons fait à maintes reprises, ce qui signifie qu'il y a de moins en moins de femmes qui peuvent être accueillies au refuge, parce qu'il y a des retards dans d'autres domaines. Parfois, les systèmes ne fonctionnent pas tous comme nous le souhaitons. Nous gardons les femmes jusqu'à ce qu'elles trouvent un endroit où aller, qu'elles aient de l'argent pour le loyer et ce genre de choses.

  (1555)  

    Quel est le séjour moyen d'une femme dans votre refuge?
    Environ 30 jours. Parfois, nous en avons eu qui sont restées jusqu'à trois mois.
    Les femmes qui quittent le refuge après 30 jours ou 3 mois — peu importe — où vont-elles?
    Elles vont dans des logements publics. Certaines d'entre elles vont dans des logements de deuxième étape, et nous offrons des services sur le terrain et des services de soutien à ces femmes. Certaines retournent dans leur communauté. Il peut s'agir d'une communauté près de Calgary, comme la nation Siksika, la nation Tsuut'ina ou Stoney Nakoda. Cela dépend de l'endroit où elles vont. Certains retournent dans les communautés du Nord. Il y a beaucoup de solitude et d'isolement.
    Est-ce que beaucoup de ces femmes retournent dans leur foyer d'origine?
    Selon certaines recherches, je me souviens qu'il y a quelques années, jusqu'à 45 % des femmes retournaient à la maison. Il y a plusieurs raisons à cela.
    La première est le manque de logements sûrs et abordables à Calgary, et l'autre est le réseau social qu’elles ont dans leur communauté. Il pourrait s'agir de la langue ou simplement du fait d'être avec leur famille et d'avoir ce filet de sécurité. Bien que d’autres facteurs entrent encore en ligne de compte... leur maison n'est peut-être pas sûre, mais vaut-il mieux être avec sa famille et trouver cette sécurité au sein de la famille, plutôt que se retrouver dans un petit appartement louche et être isolé, à Calgary?
    Diriez-vous, alors, qu'il faut augmenter les mesures de soutien au logement dans tout le continuum de service?
    Absolument. Des logements de deuxième étape, des services plus complets pour les femmes qui réintègrent la collectivité si, disons, elles restent à Calgary...
     Si elles retournent dans leur communauté, de quel soutien ont-elles besoin? Il n'y a pas de bon mécanisme de communication à cet égard. Si une femme est ici à Calgary et qu'elle retourne à Saddle Lake, par exemple, de quoi a-t-elle besoin lorsqu'elle rentre? Nous ne disposons pas de ces mécanismes. Nous n'avons pas la capacité de faire ce suivi lorsqu'elle nous quitte.
    Ces femmes sortent de situations dangereuses. Elles ont été maltraitées. Je suis sûre qu'il y a souvent des questions juridiques en cause, et peut-être des accusations qu'elles voudraient porter. Quels types de soutien sont offerts à ces femmes, si elles veulent aller dans cette voie?
    Au centre Awo Taan, il n'y a pas beaucoup de soutien. Nous n'avons pas de personnel de soutien pour les tribunaux, parce que nous n'avons pas les ressources nécessaires.
     Parfois, le processus est aléatoire. Parfois, nous demandons à quelqu'un d'un autre programme d’accompagner la femme au palais de justice et de lui expliquer le processus. Nous n'avons pas de personnel... parfois, nous aimerions avoir élaboré ce programme, lorsque des incohérences commencent à se manifester et que nous constatons que nous n’offrons pas un bon service.
    Viviane, avez-vous quelque chose à ajouter? Vous pourriez peut-être nous dire où les femmes ont tendance à aller lorsqu'elles sont restées au refuge pendant un certain temps.
    On a dit que 45 % des femmes retournent dans leur situation initiale. Diriez-vous que vous avez constaté la même chose dans votre centre?

[Français]

     Lorsque nous accueillons des femmes dans les maisons d'hébergement pour femmes victimes de violence, elles sont très vulnérables. Elles vivent des situations où elles sont en perte de pouvoir. Lorsque nous accueillons ces femmes, nous leur donnons le temps de se reposer. Elles sont vraiment fatiguées émotionnellement et psychologiquement. Par la suite, lors de leurs rencontres avec les intervenantes, un plan de soins sont établis.
    Le séjour varie d'une maison à l'autre. Certaines maisons peuvent garder les femmes jusqu'à six mois, pour autant qu'elles continuent de suivre leur plan de soins. Il peut s'agir de rencontres individuelles, de démarches judiciaires ou encore de rencontres avec des experts. En tant qu'intervenantes, nous n'avons pas l'expertise d'une psychologue, donc une psychologue peut faire une partie du travail. Il peut aussi y avoir un suivi avec un travailleur social, parce que ce sont parfois les travailleurs sociaux qui dirigent les femmes en situation de violence vers nos services. Lors de leur séjour, tout ce travail continue de se faire.
    La plupart du temps, elles retournent chez elles, effectivement. Il faut comprendre que ces femmes aiment leur mari, mais elles n'aiment pas leurs comportements violents envers elles. Par ailleurs, la peur est tellement flagrante chez les victimes de violence; elles ont toujours peur de partir à jamais. Elles deviennent craintives et très dépendantes de la personne.

  (1600)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, Viviane.
    Nous allons maintenant passer à Sheila Malcolmson, qui a sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Je remercie les deux témoins de leur travail.
    Pouvez-vous toutes les deux me donner un aperçu de l'écart entre la demande pour les services de sécurité que vous offrez et votre capacité de les fournir? Combien de femmes qui demandent de l'aide se la voient refuser?
    Je peux répondre à cette question en premier.
    En moyenne, chaque année, nous répondons à environ 2 500 appels de crise. L'an dernier, nous avons fourni un refuge à 250 femmes et à 275 enfants. Nous refusons environ 1 200 femmes et enfants par année.
    Où vont ces femmes? Nous les aiguillons vers d'autres refuges de la ville de Calgary. Il y a deux autres refuges d'urgence.
    Nous avons constaté toutefois que certaines femmes autochtones ne sont pas à l'aise avec l'idée d'aller dans des refuges traditionnels. Voici pourquoi: on y manque de compréhension. C'est surtout une question de compréhension culturelle. Il est possible qu’il n'y ait aucun intervenant à la peau brune dans le refuge. Il se peut que personne ne parle leur langue ou qu’elles n’aient aucune histoire ni expérience en commun. Il se peut également qu’elles se retrouvent devant quelqu’un qui ne comprend tout simplement pas. Le racisme a une incidence. La femme n'est pas nécessairement à l'aise.
    Par conséquent, nous avons constaté que les femmes attendent d'être admises dans notre refuge autochtone, ce qui les rend encore plus vulnérables.
    Merci.
    Merci.
     Viviane, combien de demandes sont refusées?

[Français]

     Il y a deux sortes de demandes. D'une part, il y a les demandes d'hébergement. D'autre part, il y a les demandes d'écoute, ce qui peut se faire aussi par téléphone. Parfois, ce sont d'anciennes résidantes qui ont simplement besoin de parler. Il y a ces deux côtés.
    Aucune demande n'est écartée. Lorsque les femmes appellent, elles vont être acceptées et elles vont suivre le processus. Il faut vraiment que ce soit elles qui en fassent la demande par téléphone. Cela ne peut pas passer par un intermédiaire. Par la suite, si la maison est pleine, nous devons diriger les femmes vers des maisons d'hébergement non autochtones. Il y a toujours une maison d'hébergement allochtone dans les environs.

[Traduction]

    Merci.
    Il y a à peine deux ans, en novembre 2016, nous avons accueilli le Comité des Nations unies pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. L'une des observations formulées était que le comité était toujours préoccupé par l'absence de stratégie ou de plan cohérent qui permettrait d'améliorer les conditions socioéconomiques des communautés autochtones, en particulier celles des femmes autochtones, et de s’attaquer aux causes profondes de la violence dont elles sont victimes.
    Dans son rapport sur le Canada en avril dernier, la rapporteuse spéciale chargée de la question de la violence contre les femmes a fait observer qu'il devrait y avoir un plan d'action dirigé par les Autochtones et appuyé par des ressources adéquates qui assurerait la fourniture d'un nombre suffisant de logements, de maisons de transition et de refuges, dont les communautés autochtones ont particulièrement besoin, lesquels devraient être gérés par les communautés et utilisés comme une plaque tournante pour d'autres services nécessaires au rétablissement et à l'autonomisation, conformément à l'approche fondée sur les droits de la personne. Elle a ajouté que le plan d'action national devrait permettre de relever des défis précis et de fournir davantage de services aux femmes autochtones dans les régions éloignées où les victimes ont de la difficulté à avoir accès aux services.
     Avez-vous constaté que des mesures ont été prises pour donner suite à l'une ou l'autre de ces recommandations et qui ont changé le fonctionnement de votre groupe et la vie des femmes que vous servez?

  (1605)  

    Je peux répondre à cette question la première.
    Je crois que nous devons comprendre qu’il y a une guerre ouverte contre les femmes autochtones au Canada, sans même mentionner les milliers de femmes autochtones disparues et assassinées. Pour s'attaquer à ces failles, il faut commencer à envisager une stratégie globale à long terme, assortie de financement. Cette stratégie doit être dirigée par les femmes autochtones du pays, en particulier par les femmes autochtones qui sont expertes dans le domaine de la violence familiale et qui sont en mesure de comprendre les politiques ou la façon dont elles fonctionnent... et de voir à ce que ces lacunes en matière de financement soient comblées.
    L’autre point, c’est que nous parlons souvent des Premières Nations rurales et éloignées en opposant les régions rurales aux zones urbaines. Je pense qu’il faut envisager de laisser tomber les limites territoriales afin d'assurer un financement équitable pour tous les refuges et pavillons autochtones au pays. Très souvent, lorsque les femmes vont dans un refuge des Premières Nations... J’ai parlé à mes collègues de Calgary et des environs. Le financement est très différent pour les refuges des Premières Nations dans une réserve, où les directeurs des refuges doivent régulièrement faire l’épicerie dans leur propre garde-manger pour nourrir les femmes et les enfants, c'est horrible.
    C’est vraiment horrible.
    Merci de l’avoir énoncé si clairement.
    Merci.
    Viviane, avez-vous quelque chose à ajouter?

[Français]

    Évidemment, nous allons parler de l'importance des maisons de transition de deuxième étape. Lorsque les femmes ont fini leur séjour en maison d'hébergement, un suivi doit encore être fait. Si elles vont en ville, il faut une maison de deuxième étape, évidemment. Cela va les préparer à avoir une autonomie financière et à fonctionner par elles-mêmes.
    Par ailleurs, lorsque de la consultation doit être faite, nous insistons sur l'inclusion des Premières Nations, c'est-à-dire autant des femmes des Premières Nations que des personnes qui travaillent avec ces victimes. Nous allons donc parler de l'inclusion, de la consultation et de la concertation lorsqu'il s'agit de faire un plan de fonctionnement stratégique pour contrer la violence.
    Dans son ensemble, la violence est tellement vaste. À Femmes autochtones du Québec, nous avons lancé en mars un plan d'action contre les agressions sexuelles et nous devons encore relancer les communautés. Vous pouvez aller consulter notre plan d'action dans notre site Web. C'est un plan qui nous permettra d'être en mouvement et d'aborder les cas d'agressions sexuelles.
    Ce que nous remarquons de plus en plus, à l'intérieur des maisons d'hébergement, c'est qu'il n'y a aucun financement pour les femmes qui désirent quitter leur situation de violence. Alors, qui va assumer les coûts?

[Traduction]

     Merci beaucoup, Viviane.
    Je suis heureuse que vous ayez pu lire toutes mes indications.
    Mme Viviane Michel: C’était très bien fait.
    Nous allons maintenant céder la parole à Emmanuella Lambropoulos, pour sept minutes.
    Vous avez la parole, Emmanuella.
    J’aimerais commencer par remercier les deux témoins d’être ici aujourd’hui.

[Français]

     Ma première question s'adresse à Mme Michel.
    Je sais que votre organisme fait plus que s'occuper des maisons d'hébergement pour femmes. Comment votre organisme collabore-t-il avec les différentes maisons d'hébergement pour femmes autochtones? Que faites-vous exactement? Comment aidez-vous tout ce monde à se rassembler?
    Femmes autochtones du Québec a un réseau de 13 maisons d'hébergement autochtones. Nous y allons selon les demandes des maisons d'hébergement. Si elles ont besoin de plus de formation sur la protection de la jeunesse, par exemple, nous allons préparer deux jours de formation sur ce sujet. Nous aidons aussi les femmes victimes de violence à avoir accès à des services juridiques.
    Nous outillons les maisons d'hébergement, nous leur fournissons de la formation pour qu'elles soient un peu plus autonomes et nous répondons à leurs besoins. Ce n'est pas notre organisation qui prend des décisions pour les maisons d'hébergement. Ces maisons nous soumettent des recommandations et des propositions, et nous leur donnons alors la formation nécessaire.
    Je vous remercie.
    J'imagine que vous connaissez assez bien les besoins de ces maisons d'hébergement.
    Ma collègue vous a demandé s'il y avait des espaces culturellement adaptés pour les femmes autochtones. Vous avez dit offrir des services dans la langue natale de chaque femme. Est-ce que les femmes qui viennent vous voir parlent une langue autre que l'anglais ou le français? Parlent-elles leur langue autochtone ou est-ce qu'elles ne connaissent pas vraiment leur culture?

  (1610)  

    Une maison d'hébergement en milieu urbain présente cette particularité que la clientèle est variée ou issue de plusieurs nations autochtones. On peut dire que la nation inuite, par exemple, est présente à Montréal. Il y a aussi les Anishinabes et les Mohawks qui vivent dans des endroits différents.
    Les femmes ne parlent pas toutes ces langues. C'est donc le français ou l'anglais qui est principalement parlé dans les maisons d'hébergement en milieu urbain. Quant aux femmes des autres maisons d'hébergement, elles parlent la langue de l'endroit où elles se trouvent.
    D'accord.
    Vous avez aussi recommandé qu'on élargisse le genre de services offerts aux femmes autochtones pour qu'ils correspondent mieux à leurs besoins. En quoi ces services seraient-ils différents de ceux qu'on offre aux autres femmes?
    Par exemple, les campagnes de sensibilisation et de prévention peuvent être limitées. Il peut n'y avoir que quatre intervenantes qui doivent couvrir trois quarts de travail. Comment, alors, peuvent-elles faire de la prévention et de la sensibilisation? Il n'y a pas suffisamment de personnel.
    Au sein des communautés, c'est plus facile, car tout le monde sait qu'il y a une maison d'hébergement, mais en milieu urbain, comment peut-on savoir si on a accès à une maison d'hébergement? Ce sont deux situations assez différentes.

[Traduction]

    Combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez trois minutes.
    J’ai une question, mais c'est peut-être que j'en sais très peu sur le sujet. Je serais heureuse que vous m’aidiez.
    Comme Pam l’a mentionné, beaucoup de témoins que nous avons entendus dans le cadre de l’étude précédente sur l’incarcération des femmes autochtones nous ont révélé que beaucoup de ces femmes avaient perdu, en grande partie, leurs références culturelles. Elles ne se sentaient plus appartenir à leur culture à cause du système des pensionnats que leurs parents ou certaines d’entre elles avaient connu.
    Diriez-vous que la situation est différente au Québec? Ont-elles un lien plus fort avec leur culture que dans le reste du Canada? Ou est-ce la même chose au Québec également?

[Français]

     Je vous dirais qu'au Québec le problème lié au fait de ne pas connaître sa culture est minime. Les 13 maisons d'hébergement accueillent des personnes qui font partie de la communauté, parlent leur propre langue et connaissent leur culture. Du côté urbain, il se peut que le manque de liens existe, mais ce problème est très minime. Ces femmes arrivent de leur propre nation et sont déjà rattachées à leur culture et à leur langue.
    D'accord, je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Pour commencer notre deuxième tour, nous allons maintenant donner la parole à Ron Liepert.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps avec mon collègue.
    Je suppose que l’un ou l’autre d’entre vous pourrait répondre à cette question, mais comme je représente une circonscription de Calgary, Mme Nepinak pourrait peut-être commencer.
    Avez-vous des données approximatives sur le nombre de clientes régulières — faute d'un meilleur terme — que vous devez accueillir, celles qui reviennent une deuxième ou une troisième fois? Y a-t-il des données à ce sujet? Sinon, donnez-moi simplement une idée. Est-ce que cela arrive souvent ou presque jamais?

  (1615)  

    Il est certain que la province de l’Alberta dispose de ces données, par l'entremise de nos bailleurs de fonds et des organismes de soutien aux sans-abri. À notre pavillon, environ 15 % des femmes reviennent au refuge.
    Il faut comprendre que différentes circonstances motivent ces retours. Il peut s'agir d'une nouvelle relation. Cela peut être parce que la première fois qu'elles sont reparties, elles n'étaient pas prêtes, alors elles choisissent de revenir. La violence familiale est un cycle. Elle est appelée à s'intensifier, ce qui amène les personnes à fuir.
    Oui, nous voyons certaines femmes revenir.
    Même si leur nombre n’est pas très élevé, diriez-vous que l’une des raisons pourrait être qu'il n'y a pas de système de soutien adéquat en place lorsqu'elles rentrent, surtout si les mêmes circonstances les attendent au retour?
    Oh, tout à fait, cela a beaucoup à voir avec cela. Je viens de donner l’exemple d’une femme qui retourne dans une collectivité du Nord, disons à Saddle Lake. Il nous est difficile de lui offrir des services de transition et de soutien externe lorsqu’elle rentre à la maison. Nous n’avons pas de mécanismes en place pour établir des liens avec sa collectivité afin de concevoir des plans de sécurité et des mesures de soutien. Nous n’avons tout simplement pas les ressources pour le faire.
    D’accord. Je cède la parole à Mme Harder.
    En fait, mes questions seraient les mêmes pour vous, Viviane. Je vais simplement répéter les questions que mon collègue vient de poser.

[Français]

    Pour les femmes victimes de violence, le fait de partir et de revenir ensuite à la case départ est une réalité. Certaines réussissent à partir définitivement à la suite des procédures judiciaires qui ont été entamées, mais d'autres n'arrivent même pas à déposer une plainte parce que la peur les en empêche.
    Je suis d'accord avec Mme Nepinak pour dire que la communication en continu ne se maintient pas en raison de l'éloignement de la maison et de la personne. Encore là, pour ne pas mettre en danger la personne qui subit de la violence, il faut éviter de téléphoner chez elle. C'est elle qui doit trouver moyen d'établir la communication. De la même façon, je pense que, pour le soutien continu, chaque maison d'hébergement fait appel à la travailleuse sociale, qui est de la communauté.

[Traduction]

    Il vous reste une minute.
    D’accord.
    Je suppose que ma seule autre question concerne le fait que, dans la plupart des cas, c’est un homme qui est violent envers une femme et qu'elle doit fuir la situation pour trouver un endroit sûr. Est-ce qu'on travaille également avec lui pour l’aider à faire de leur foyer un endroit sûr où elle pourra retourner, que ce soit dans l’immédiat, alors qu'elle n'est pas avec lui, ou dans les semaines et les mois qui suivront?

[Français]

    Je crois que le besoin de travailler avec les hommes qui ont des comportements violents est immédiat. Il faut rétablir ou créer des endroits où on peut le faire.
    En effet, le système fait que, s'il y a des plaintes et une accusation, l'accusé va passer du temps en prison, mais sans qu'on traite son problème. Par contre, au sein des Premières Nations, nous avons nos propres moyens d'en arriver à une solution, soit le processus de guérison. Celui-ci apporte un changement vraiment radical chez les personnes qui le suivent.
    Au sein du système judiciaire, la personne va aller en prison et son problème de violence ne sera jamais abordé. Voilà le hic. En plus des mesures judiciaires, il devrait y avoir des moyens afin d'aider la personne à résoudre son problème, qui consiste à exercer ses pouvoirs sur une autre personne. C'est donc une lacune du système judiciaire québécois.

[Traduction]

     Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Eva Nassif.
    Vous avez cinq minutes, Eva.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos deux témoins de leur présentation.
    Je commence par vous, madame Michel. Je vous remercie d'être venue du Québec.
    Parlez-nous des femmes que vous renvoyez chaque année en raison d'un manque de lits dans vos 13 maisons d'hébergement au Québec.
    Mme Nepinak nous a dit que son organisation recevait chaque année 2 500 femmes alors que, si j'ai bien compris, elle ne peut en accepter que 250 et qu'elle doit en refuser 1 200 par année. C'est énorme.
    Parlez-nous de ce qu'il se passe au Québec, s'il vous plaît.

  (1620)  

    J'ai travaillé dans une maison d'hébergement où nous avons voulu établir un centre de jour aussi, justement pour faire de la prévention et de la sensibilisation. C'est un centre régional. Cela veut dire qu'il y a seulement quatre chambres avec deux ou trois lits, selon les types de familles qui peuvent être accueillies.
    Je peux dire que, dans une maison d'hébergement régionale, quatre chambres, ce n'est pas beaucoup. Une maison vraiment éloignée, par exemple à Schefferville, peut recevoir quatre femmes et leurs enfants. C'est certain que la femme ne partira pas sans ses enfants.
    Pour ce qui est du nombre, je ne peux pas vous répondre, parce que je ne travaille pas à l'interne dans le moment. Toutefois, nous faisons partie du réseau d'hébergement.
    Nous pourrons vous envoyer les statistiques sur les maisons d'hébergement. Cela nous fera plaisir de le faire.
    Vous devez savoir s'il y a un grand manque ou si c'est suffisant pour répondre aux besoins au Québec.
    Êtes-vous au courant? Même si vous ne connaissez pas les chiffres exacts, pouvez-vous nous donner un aperçu?
    Je vous dirai que, non, ce n'est pas suffisant. On a parlé de confidentialité, tout à l'heure. Dans une communauté, tout le monde se connaît.
     Par exemple, à Schefferville, les gens ne voudront pas aller à la maison d'hébergement qui est juste à côté, parce qu'on y connaît les travailleuses et que, justement, tout le monde va savoir qui est à la maison d'hébergement. Cela peut être un grand obstacle.
    Les femmes vont donc vouloir aller dans une autre maison d'hébergement, que ce soit à Québec ou à Sept-Îles, selon ce qui est le plus près. Elles vont choisir elles-mêmes où elles veulent se rendre.
    Avez-vous des données sur les causes de cette violence contre les femmes? Est-ce à cause de problèmes de santé mentale, de la toxicomanie, de l'alcoolisme?
    Si on devait dire d'où vient cette violence, je crois qu'il faudrait parler de l'héritage du colonialisme. Notre peuple a quand même vécu en harmonie avec tout ce qui l'entourait, en le respectant, entre autres. En raison de cet héritage, les valeurs ont changé. La violence a donc été exercée davantage.
    En ce qui concerne la valeur des relations, autrefois, nous avions des rapports égalitaires. À présent, avec la colonisation et la Loi sur les Indiens, plus de pouvoirs ont été donnés aux hommes. Le système paternaliste s'est imposé par la suite.
    J'ai une autre question à vous poser.
     Au sein de votre organisme, vous dites outiller les intervenantes des 13 maisons d'hébergement. Vous donnez des formations et offrez des programmes pour les jeunes, et le reste.
     Quels moyens utilisez-vous pour aider les jeunes à comprendre comment procéder en vue de diminuer la violence contre les femmes? Quel genre d'éducation offrez-vous aux jeunes?
    Ce que nous offrons, c'est la formation aux intervenantes. Chaque maison d'hébergement va donc établir son plan auprès des jeunes. Cela peut se faire par des jeux ou des ateliers de sensibilisation. Toutefois, je ne peux pas vous répondre plus en détail.
     Je peux cependant vous répondre en ce qui concerne la formation qu'on donne directement aux intervenantes en fonction de leurs besoins.
     Le programme n'existe donc que pour les intervenantes, pas pour les femmes qui arrivent avec leurs enfants, par exemple.
    Femmes autochtones du Québec n'offre pas ces programmes. Ils sont offerts par les maisons d'hébergement.
    D'accord.
    Savez-vous quels services elles offrent exactement?
    Lorsque je travaillais dans les maisons d'hébergement, une intervenante jeunesse faisait des activités avec les jeunes, toujours sur le thème de la violence, évidemment. Cependant, il faut faire attention, parce qu'il faut considérer que, lors du départ de l'intervenante, le travail reste encore à faire.
    Un emploi d'été pour étudiant avait donc été créé mais, par la suite, durant le reste de l'année, nous n'avions pas d'intervenante pour travailler directement avec les jeunes.
    Employiez-vous les mêmes étudiants chaque été? Vous étiez admissibles au programme d'emploi pour les étudiants?
    Oui.
    Je vous remercie.
    Merci.

[Traduction]

     Absolument parfait. Fantastique.
    Je n’avais pas calculé, mais...
    Vous avez très bien fait cela.
    Au nom du Comité, je tiens à remercier Josie Nepinak, d'Awo Taan Healing Lodge, et Viviane Michel, de Femmes autochtones du Québec inc.
    Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes, puis nous reprendrons avec notre prochain groupe de témoins.

  (1620)  


  (1625)  

    Si tout le monde pouvait regagner sa place, nous allons entendre notre prochain groupe de témoins.
    Dans notre deuxième groupe de témoins, nous accueillons Shar Chowdhury, intervenante en soutien à la transition au Minwaashin Lodge, et de Pauktuutit Inuit Women of Canada, nous avons Rebecca Kudloo, présidente, et Samantha Michaels, conseillère principale en matière de politiques.
    Je vais céder la parole à Shar.
     Vous avez sept minutes.
    Je m’appelle Shar Chowdhury et je suis intervenante en soutien à la transition au Minwaashin Lodge, ici à Ottawa, qui est rattaché à notre refuge pour femmes autochtones, le Oshki Kizis Lodge. Je parle ici au nom de notre directrice générale, Mary Daoust, et de la directrice du refuge, Frances Daly.
    J’occupe ce poste depuis 16 ans. Nos intervenants en soutien à la transition travaillent auprès des femmes autochtones qui fuient la violence et ils les aident à répondre à tous les besoins pratiques qui en découlent. Il pourrait s’agir d’un programme de traitement, d'un logement, de revenus ou de la planification de leur sécurité. Il pourrait s’agir de n’importe quelle chose pratique dont une femme a besoin pour aller de l’avant et se créer une vie plus sûre. C’est mon travail.
    Je vais vous faire un bref historique de Minwaashin et du refuge. Minwaashin a vu le jour en 1993 sous le nom de Centre de soutien aux femmes autochtones, mais il s’appelle maintenant Minwaashin Lodge — Centre de soutien aux femmes autochtones. Le Centre avait travaillé à l’ouverture d’un refuge qui serait adapté aux besoins particuliers des femmes autochtones, métisses et inuites. L’Oshki Kizis Lodge a ouvert ses portes en 2001 grâce au don d’un immeuble avec vocation de refuge pour femmes victimes de violence, mais sans financement gouvernemental. À l’époque, il était considéré comme un refuge pour les sans-abri et les victimes de violence faite aux femmes.
    À l’époque, les autres refuges traditionnels pour femmes victimes de violence étaient entièrement financés par le gouvernement et le foyer Oshki Kizis a reçu le plein financement en tant que refuge pour femmes victimes de violence en 2008. J’aimerais souligner que l'Oshki Kizis Lodge est le seul refuge pour les femmes autochtones qui fuient la violence dans tout l’est de l’Ontario. Nous accueillons des femmes des Premières Nations, des Métisses et des Inuites de partout au Canada, y compris des collectivités et des réserves éloignées du Nord.
    Souvent, elles s’enfuient à cause du manque de confidentialité et de sécurité dans les petites collectivités, comme cela a été mentionné dans un autre groupe de témoins. Les travailleurs communautaires et le personnel des refuges, bien souvent, sont soit leurs tantes ou leurs cousins, alors elles ne peuvent pas agir dans l'anonymat pour échapper à la violence. C'est ainsi qu’elles se retrouvent à Ottawa, une grande ville un peu plus anonyme.
    La façon dont elles arrivent ici est... Parfois, elles viennent du Nunavut, par exemple, et elles viennent pour un traitement médical, ou elles accompagnent une personne qui doit avoir un traitement médical ici à Ottawa, et elles y voient l'occasion de s’évader et d'éviter de retourner dans leur collectivité.
    Il y a aussi des femmes qui viennent de partout au pays. Nous avons eu une femme de l’Ouest, qui tentait de fuir son conjoint violent. Elle est allée à Calgary, je crois, puis s’est déplacée vers l’est, mais il réussissait toujours à la retrouver. Elle est enfin arrivée à Ottawa où, jusqu’à maintenant, il ne l’a pas trouvée. Ottawa est une ville plus anonyme et c'est parfois ce que ces femmes recherchent.
    Pour ce qui est des chiffres, notre refuge compte 21 lits. Il est toujours plein. Nous accueillons environ 90 femmes et 70 enfants par année. Nous refusons en moyenne quatre femmes par semaine. Sur ces quatre femmes, il y en a au moins deux qui fuient la violence. Parfois, certaines appellent parce qu'elles sont sans abri, et non parce qu'elles fuient la violence.
    C’est le rythme habituel des choses. Donc, nous refusons au moins une centaine de femmes par année en raison du manque de places au refuge. Nous essayons d’accommoder les femmes. Même s'il n'y a que 21 lits, nous sortons des lits de camp. Nous les faisons dormir sur le canapé qui se trouve dans les aires communes et que nous utilisons lors des cérémonies ou des réunions. Lorsque nous faisons cela, par contre, nous ne recevons aucuns fonds supplémentaires pour le lit, la nourriture, l’électricité ou l’eau utilisée par ces personnes de plus que nous essayons d’accueillir.
    Si elles n'obtiennent pas une place chez nous, à Oshki Kizis, souvent, la ville essaiera de les placer dans des refuges pour sans-abri. Je ne sais pas combien d’entre vous viennent d’ici, mais ce sont des endroits comme les Bergers de l’espoir. Dans ces endroits, le risque pour la sécurité des femmes autochtones est assez élevé. Bien souvent, leur conjoint violent y reste, lui aussi. Nos femmes, celles qui sont aux prises avec des problèmes variés, qui ont peut-être des dépendances, sont encore plus à risque lorsqu’elles s’adressent aux Bergers.

  (1630)  

     Ensuite, ce que nous constatons est qu’elles font des choix qui les mettent en danger, parce qu’elles ne peuvent pas s'installer chez nous. Elles choisiront peut-être de retourner vers un partenaire violent. Elles peuvent coucher sur un divan chez l'un et chez l'autre dans des circonstances moins qu’idéales ou traîner dans la rue plutôt que de rester dans d'autres refuges que le nôtre.
    Je voulais émettre une analyse qui pourrait susciter une certaine réflexion, puis des conséquences de devoir refuser des femmes... Oh, j’en ai déjà parlé, mais je voulais simplement vous faire part de cette analyse. Il est important de comprendre que le traumatisme essentiel et le traumatisme intergénérationnel subis à la suite du génocide historique, politique, culturel et spirituel des communautés autochtones de même que les effets de la colonisation ont fait en sorte que ces communautés sont beaucoup plus exposées à la violence en général et à la violence par un partenaire intime en particulier. Cela se traduit par un grand besoin de logements sûrs et adaptés aux besoins des Autochtones.
    J’ai une chose à dire au sujet de la situation dans son ensemble. Pour les gens qui vivent à Ottawa, je pense qu’il faut comprendre que nous parlons de places dans un refuge. Avons-nous suffisamment d’espace? S'agit-il simplement de mettre plus de lits ou de construire plus de refuges pour régler le problème? Je pense que nous devons aussi examiner la situation dans son ensemble. Il règne actuellement une crise du logement à Ottawa. Il n’y a pas suffisamment de logements abordables ou subventionnés. Cela signifie que les femmes restent plus longtemps dans des refuges d’urgence, parce qu’elles n'arrivent pas à se loger. Cela empêche les femmes nouvellement en crise d'avoir accès au refuge. C'est un problème.
    Certains d’entre vous savent peut-être qu’il y a de nouvelles initiatives provinciales, comme les prestations de logement transférables, qui permettent aux femmes d’obtenir un loyer au prix du marché, ce qui constitue généralement un défi pour les femmes.
    Je me prépare à conclure. D’accord.

  (1635)  

    Oui, vous devez conclure. Nous allons conclure. Cela vous donnera l’occasion... Lors de la période de questions, nous pourrons y revenir, si vous êtes d’accord.
    D’accord.
    Nous allons maintenant passer à — s'il vous plaît, Terry, aidez-moi — Pauktuutit Inuit Women of Canada.
    Je m’en remets à l’experte, Mme Kudloo.
    Rebecca et Samantha, vous disposez de sept minutes en tout.
     Ullukuut, mesdames et messieurs les députés, madame la présidente, mesdames les vice-présidentes, invités et employés.
    Pauktuutit est une organisation nationale qui représente les femmes inuites au Canada. Nous dirigeons et appuyons les femmes inuites dans le cadre de notre travail et tenons compte de leurs intérêts et de leurs priorités uniques, qui sont aussi les nôtres. Nous travaillons pour le mieux-être social, culturel, politique et économique des femmes inuites, de leurs familles et de leurs collectivités.
    Notre territoire est important dans notre culture et pour notre mode de vie. Notre population est de 65 000 habitants et la plupart vivent dans 51 collectivités de l’Inuit Nunangat. La plupart de ces collectivités sont petites, isolées et accessibles uniquement par avion. De plus, au cours des dernières années, il y a eu un afflux d’Inuits dans les espaces urbains, surtout des femmes.
    En 2015, le premier ministre Justin Trudeau s’est engagé à assurer l’égalité des sexes pour les femmes au Canada. Le gouvernement fédéral s’est également engagé à la réconciliation avec les peuples autochtones. Notamment, la ministre de la Condition féminine, Maryam Monsef, a reçu le mandat de veiller à ce qu’aucune personne fuyant la violence familiale ne se retrouve sans endroit où aller, en élargissant et en soutenant le réseau de refuges et de maisons de transition du Canada.
    Malgré cela, la violence faite aux femmes et aux filles inuites est demeurée une crise systémique nationale qui exige des mesures urgentes, éclairées et concertées. Au taux de 14 fois la moyenne nationale, soit le taux le plus élevé observé parmi tous les groupes de femmes au Canada, la violence frappe chez les femmes inuites et constitue une des principales causes évitables de blessures et de mortalité. La violence familiale est aggravée par la pauvreté, le chômage, la toxicomanie, les logements surpeuplés et les taux de suicide qui, selon les estimations, sont de 9 à 20 fois plus élevés que la moyenne nationale.
    Selon Statistique Canada, en 2016, plus de la moitié des Inuits de l’Inuit Nunangat vivaient dans des logements surpeuplés, comparativement à 8,5 % des Canadiens non autochtones. Le surpeuplement extrême, les logements insalubres et le manque de logements abordables et disponibles empêchent de nombreuses femmes et leurs enfants d’échapper à la violence, et ce, dans l’un des climats les plus rigoureux du monde. De plus, notre population est très jeune et croît rapidement, plus de 50 % des Inuits ayant 25 ans ou moins. Le nombre de personnes mal logées augmentera considérablement si on ne trouve pas de solution à la pénurie matérielle de logements.
    Même avec les taux de violence les plus élevés au pays, plus de 70 % des collectivités dans l'ensemble de l’Inuit Nunangat n’ont pas de refuge sûr pour les femmes. Souvent, les maisons des membres de la famille et des amis sont surpeuplées et on y souffre d’insécurité alimentaire. Les services d'intervention en cas de crise et les services de counselling sont également limités. Celles qui sont victimes de violence et de mauvais traitements dans leur foyer ne trouvent souvent pas d'endroit sécuritaire dans leur propre collectivité. Un billet d’avion vers une autre collectivité peut coûter des milliers de dollars, ce qui est hors de portée pour la plupart, surtout en temps de crise. Dans ces cas, les travailleurs sociaux locaux doivent prendre des dispositions pour envoyer une femme dans une autre collectivité par avion.
    Il y a eu trop de cas où l'absence de solutions sécuritaires dans l’Inuit Nunangat a entraîné des pertes de vie.

  (1640)  

     Les programmes et les services sont souvent sous-financés et non viables, pas plus qu'ils ne sont adaptés aux Inuits ou uniformes d'une collectivité à l'autre. Dans le Nord, de nombreux postes de travailleurs en santé, en santé mentale et en services sociaux sont laissés vacants. Dans les quelque 15 refuges et maisons de transition sécuritaires en activité, les taux d’occupation très élevés, combinés au défi quotidien de répondre aux besoins de fonctionnement et de ressources humaines, contribuent au roulement élevé du personnel...
    Excusez-moi, pourriez-vous ralentir un peu pour les interprètes?
    Bien sûr.
    Ils contribuent au taux élevé de roulement du personnel en raison de l’épuisement professionnel, du manque de soutien par les pairs et souvent, d’une formation inadéquate en raison de l’isolement géographique et des ressources financières limitées. Fréquemment, il y a un manque de financement à long terme, car le financement est généralement axé sur des projets et limité dans le temps. Il s'ensuit que la viabilité est un défi constant.
    De plus, il n’y a pas de maisons de deuxième étape dans l’Inuit Nunangat. Pourtant, elles sont souvent essentielles pour soutenir la quête des femmes qui souhaitent revenir à une vie sans violence. En cas de violence, les femmes inuites sont régulièrement aux prises avec un manque criant de services et de soutien pour échapper à cette violence et se remettre de ses répercussions. Le manque d’accès à des solutions sécuritaires peut forcer les femmes à déménager à des milliers de kilomètres de leur territoire vers des centres urbains.
    Vivre dans une ville du sud du Canada peut créer énormément d'isolement. Sans soutien et sans services pertinents et culturellement adaptés pour surmonter les nombreux effets de leurs expériences traumatiques, de nombreuses femmes demeurent en danger et peuvent avoir à affronter d'autres défis qui, trop souvent, les rendent plus vulnérables à la violence et aux mauvais traitements.
    Enfin, la responsabilité du logement et des refuges sécuritaires pour les femmes relève des provinces et des territoires. Services aux Autochtones Canada offre des subventions de fonctionnement aux refuges situés dans les réserves et rembourse également le coût des services de refuge hors réserve utilisés par les membres des Premières Nations résidant ordinairement dans les réserves.
     Veuillez ralentir un tout petit peu, s’il vous plaît. Merci.
    Les refuges destinés aux femmes inuites dans l’Arctique n’ont pas accès à ce financement parce qu’ils ne sont pas situés dans une réserve. Cela empêche expressément le développement de refuges dans le Nord. Cela contrevient également à l’article 22 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, qui stipule que:
Les États prennent des mesures, en concertation avec les peuples autochtones, pour veiller à ce que les femmes et les enfants autochtones soient pleinement protégés contre toutes les formes de violence et de discrimination et bénéficient des garanties voulues.
    Tout comme le gouvernement finance les refuges dans les réserves, il doit financer les refuges dans les collectivités inuites. En 2018, cette situation n’est plus acceptable.
    Chaque femme et chaque fille inuite mérite de vivre à l’abri de la violence dans son foyer et dans sa collectivité. Afin d'assurer la sécurité, la guérison et le bien-être à long terme des femmes et des filles inuites, Pauktuutit recommande que les femmes inuites, en partenariat avec le gouvernement fédéral, mettent en oeuvre une stratégie holistique qui respecte les valeurs culturelles et garantit l’accès à un continuum de services et de ressources de grande qualité en matière de prévention, d’intervention et de suivi post-intervention.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons entamer notre série de questions de sept minutes avec Marc Serré.
    Marc, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de l'information qu'elles nous ont communiquée. Elle nous sera d'une très grande utilité pour notre étude.
    Je vais poursuivre avec le Minwaashin Lodge.
    Vous avez parlé du prix des loyers. Des témoins précédents nous ont dit que l'achat d'une maison serait une solution pour les femmes qui ont séjourné temporairement dans un refuge. D'après votre expérience, les femmes ont-elles l'argent pour acheter une maison, ont-elles la capacité de le faire?
    Non, je n’ai jamais entendu parler d'achat de maison. Je ne connais pas de femme qui ait acheté une maison après avoir quitté notre refuge. Il y a de nouvelles initiatives provinciales pour ce qu'on appelle les programmes d'allocations de logement transférables. Si la femme touche un revenu de l’aide sociale, la province lui versera des prestations minimales d'appoint, disons, 250 $ à ajouter à son allocation-logement de l’aide sociale pour accroître ses chances de trouver un logement.
    Ces programmes soulèvent beaucoup de critiques de notre part et de celle d'organismes communautaires de lutte contre la violence faite aux femmes. Les femmes qui obtiennent cette subvention l'obtiennent parce qu'elles figurent sur la liste prioritaire des femmes qui fuient la violence. Or, premièrement, ce montant ne leur permet pas de payer un loyer — le prix des logements étant beaucoup plus élevé. Deuxièmement, si elles parviennent à en trouver un, elles font face aux préjugés racistes. Les propriétaires donnent rendez-vous à trois ou quatre personnes, et nos femmes ne sont jamais choisies. Elles sont victimes de racisme. En plus, il n'est pas rare qu'il se fasse de la surenchère. Un propriétaire annonce un logement locatif à tel prix, nos femmes se présentent... C'est arrivé à l'une d'elles. Quelqu'un d'autre se présente avant elle et offre 100 $ de plus par mois, alors bien sûr, le propriétaire loue à cette personne. Nos femmes ne peuvent pas entrer en compétition avec le reste de la population, elles n'ont ni la capacité ni les ressources pour le faire.
    Donc, oui, il y a beaucoup de barrières.

  (1645)  

    Merci.
    Ma prochaine question s’adresse à vous deux.
    En ce qui concerne les sphères de compétence, selon d'autres témoins, le soutien financier provincial serait encore plus élevé que le soutien fédéral. La situation est sûrement un peu différente à Ottawa, mais laissez-moi vous poser une question sur le ressort des municipalités et des provinces. Dans le cas de Pauktuutit, j'aimerais creuser un peu plus profond pour comprendre certaines des recommandations.
    Pour ce qui est de vos problèmes entourant le financement... Vous avez mentionné qu'il n'existe même pas de maison de deuxième étape et que cela est bien la preuve que nous devons trouver une meilleure façon de financer le modèle. Quelles seraient vos recommandations à cet égard, en ce qui concerne les sphères de compétence? Vos recommandations vont-elles davantage du côté du gouvernement fédéral?
     Je vais commencer, puis je céderai la parole à Rebecca.
    Notre priorité numéro un est, évidemment, de pouvoir offrir à chaque femme et à chaque enfant des solutions de rechange sûres, mais la réalité est que la construction d’un refuge dans une collectivité où il n’existe pas d’autres options de logement — qu’il s’agisse d’une maison de transition ou d'une maison de deuxième étape — est une solution symbolique. Les femmes qui ont la chance de vivre dans une collectivité où il y a un refuge peuvent rester là pendant trois jours. Mais elles peuvent aussi y séjourner pendant six semaines. Quoi qu'il en soit, où peuvent-elles aller lorsque la plupart des gens vivent déjà dans des logements surpeuplés? Les listes d’attente sont longues, l'attente peut durer des années.
    Le financement doit se faire sous la forme d'un investissement simultané. Oui, il faut assurer des solutions de rechange sécuritaires, adaptées aux besoins des femmes inuites — qui ne sont pas nécessairement les mêmes qu'au Sud — et les mettre en oeuvre dans le Nord, mais il faut aussi investir massivement dans la guérison et dans le logement. Je ne pense pas que nous puissions aborder ces questions dans une optique unidimensionnelle.
    Il est certain que nous préconisons la mise en place de milieux de vie encadrés pour aider les femmes à se reprendre en main, que ce soit par le travail, par l'acquisition de compétences de vie ou par le counselling, mais la réalité est la suivante: « Où iront-elles après cela? » C’est là qu'est le danger, c'est là qu'elles courent le plus de risques. Les femmes font des choix avisés: si elles n’ont nulle part où aller avec leurs enfants, elles ne partent pas.
    J'aimerais ajouter quelque chose au sujet de la guérison.
     Lorsque 30 enfants ont été agressés sexuellement par un prêtre dans ma collectivité, nous avons mis sur pied un service de counselling communautaire. Nous avons commencé par offrir des services de counselling liés aux agressions sexuelles contre les enfants, puis nous nous sommes vite rendu compte des besoins criants de la collectivité. Nous nous sommes donc penchés sur toutes les formes de violence familiale. Il vient un temps où je crois fermement que pour guérir, il faut assumer la responsabilité de sa propre guérison. Nous embauchons un travailleur communautaire. Bien entendu, nous employons un travailleur social pleinement qualifié depuis le début, c'est-à-dire 30 ans. Dans une petite collectivité, le counselling donne des résultats, il faut appuyer ce service. Les Inuits, nos gens, devraient avoir un endroit où aller pour obtenir des services de counselling dans leur langue, s’ils le souhaitent. Je suis convaincue que c'est un moyen efficace.
     Il est vraiment difficile de convaincre des personnes aussi qualifiées de venir vivre dans une petite collectivité. Elles ne restent jamais. Pourtant, c'est tellement important d'établir une relation soutenue avec un conseiller. Les gens en ont assez de répéter leur histoire. S'ils doivent répéter leur histoire chaque fois qu’un nouveau travailleur social ou qu'un travailleur en santé mentale arrive dans la collectivité, la guérison ne peut pas avancer.

  (1650)  

    Je sais que vous avez à peine les fonds suffisants pour survivre en faisant ce que vous faites déjà. Avez-vous des recommandations précises pour venir en aide aux agresseurs, des programmes pour les hommes? Nous avons accueilli des représentants d'organismes de Halton et de London, qui sont allés parler aux élèves des écoles secondaires. Avez-vous des recommandations précises concernant les hommes autochtones?
    Pauktuutit a un projet intitulé « Engaging Inuit Men and Boys ». Nous envisageons les choses dans la perspective la plus holistique possible. Pour aider les femmes, il faut commencer à aider les hommes aussi. Le projet a beaucoup de succès auprès des hommes. Lorsque nous tenons un atelier dans une collectivité, les hommes forment des groupes. Le projet est très populaire.
    J’aimerais ajouter une petite chose. Dans le cadre du programme dont j'ai parlé, nous recevons des renvois de la part des tribunaux pour des services de counselling.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Rachael Harder, pour sept minutes.
    Avec plaisir. Merci.
    Madame Kudloo, ma première question s’adresse à vous.
    Vous avez déclaré il y a quelques minutes: « [...] il faut assumer la responsabilité de sa propre guérison. » Pourriez-vous expliquer ce que vous entendez par cette affirmation?
    Oui. Pour administrer un programme comme celui dont j'ai parlé — le volet counselling —, nous avons besoin de l’appui du gouvernement. Nous avons eu la chance de recevoir du soutien de notre communauté pour démarrer. Nous avons fait un vaste travail d'éducation sur l'agression sexuelle des enfants et ses répercussions sur les victimes, car dans une petite collectivité, il arrive que l'agresseur reçoive plus de soutien que la victime.
    Il faut beaucoup de courage et d’énergie pour se lancer dans quelque chose comme cela, essayer d’éduquer les gens et les amener à reconnaître que si personne ne fait rien, ces comportements ne s'arrêteront jamais.
    J’ai entendu des femmes victimes de violence dire qu'elles avaient besoin d'un endroit où aller pour devenir maître de leur guérison et aller de l’avant. Je ne dis pas que l’agresseur peut demeurer impuni. Loin de là. Il est responsable de ses actes et doit en assumer la responsabilité. Il doit payer pour ses actes.
    Cependant, beaucoup de femmes m’ont affirmé que jusqu’à ce qu’elles aillent à cet endroit où elles ont pu s'approprier leur guérison et croire en elles-mêmes, en leur valeur, leur dignité, leur force et leur capacité d'aller de l'avant, jusqu'à ce qu'elles en arrivent là, elles retournaient perpétuellement à une situation déplorable où elles se plaçaient en position de vulnérabilité.
    Est-ce quelque chose que vous constatez dans votre travail sur le terrain?
    Oui. Je pense que nous avons encore beaucoup de chemin à faire pour informer certaines femmes de leurs droits. Beaucoup d’entre elles ne connaissent pas leurs droits fondamentaux.
    Samantha, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Oui.
    Absolument. J'aimerais revenir sur ce que Rebecca a dit au sujet de la prévention, de l’éducation et de la sensibilisation. J'adhère à tout ce que vous dites, mais je pense qu’il faut aussi revenir à l'essentiel, qui est de veiller à ce que ces femmes aient encore des endroits où aller, parce que personne ne peut guérir ou être en sécurité dans un climat toxique. Nous devons tenir compte du fait que les actes de violence proviennent d'un milieu de violence et que la victime doit être retirée de ce milieu jusqu’à ce que les mesures de soutien puissent être réunies de façon holistique.
    Je suis d’accord pour dire que la prévention, l’éducation et la sensibilisation sont certainement des choses que nous cherchons à améliorer.

  (1655)  

    Exactement. La question est de savoir ce qu'il adviendra de ces femmes si elles n’ont pas la possibilité d’aller... De toute évidence, elles ont trouvé la force de quitter une situation dégradante, et c’est un acte de bravoure et de courage extraordinaire, mais si nous ne leur offrons pas de solution de rechange, beaucoup d'entre elles y retourneront.
    Comment leur donner les moyens de repartir à zéro?
    La question est qu’elles sont forcées de revenir. Si elles sont nombreuses à prendre la décision de partir vers le Sud à la recherche de possibilités, que ce soit en matière d’éducation ou d’emploi, pour changer de mode de vie ou pour une autre raison, c'est qu'elles sont poussées à le faire. Nous appelons cela la migration, mais j'y vois plutôt un éternel scénario de réinstallation forcée, parce qu’en l'absence de services, de programmes et de ressources dans la collectivité, elles n'ont souvent d'autre choix que de partir plus au Sud, ou alors elles y vont pour suivre leurs enfants, peu importe.
    Nous constatons que les femmes sont disproportionnellement touchées par ce problème dans les grands centres urbains.
    En outre, dans le Sud, d'autres difficultés les attendent, parce qu’elles sont vulnérables. Certaines personnes profitent d'elles. Elles n’ont aucun soutien quand elles arrivent là-bas.
    Madame Chowdhury, voulez-vous intervenir?
    J'écoutais ce que vous disiez tout à l'heure. Vous vous demandiez comment nous pouvions donner aux femmes les moyens de faire des choix. Était-ce bien le sens de votre question?
    Comment leur donner les moyens de commencer une nouvelle vie?
    J’écoutais ces propos et je me disais que nous avions besoin de ressources. Ce n'est pas seulement une question de programmes et de mesures de soutien. Puisque c'est de cela que nous parlons, j’aime rêver grand. Construisons plus de logements. Offrons plus d’options de logement. Si nous voulons donner aux femmes l'autonomie nécessaire pour faire des choix, il faut mettre en place des mesures concrètes.
    De toute évidence, l'autonomisation nécessite un travail intérieur, pour bâtir l'estime de soi et avoir confiance en soi, mais il faut aussi que les conditions externes soient présentes pour qu'elles puissent se dire: « Je vais travailler pour atteindre cet objectif ».
    Je pense que le plus difficile est l'absence de ressources ou de services, d'outils pratico-pratiques qui permettent d'accomplir de réels progrès.
     Pouvez-vous nous dire si des femmes âgées se présentent à votre centre et, dans l’affirmative, quels sont les besoins particuliers de ce groupe démographique?
    Oui, nos grands-mères y viennent.
    Pouvez-vous nous parler un peu des besoins particuliers de ce groupe démographique?
    J'essaie de passer rapidement en revue chacune des femmes avec lesquelles j'ai déjà travaillé. C’est ce que vous m’avez vue faire. Mais aussi, rien que de savoir...
    Je peux vous dire quels sont les problèmes, selon moi. C’est un peu le cas de tout le monde, mais pour les femmes âgées, le fait d'être déracinées de leur communauté, de venir jusqu'ici et de ne pas pouvoir recevoir de services dans leur langue... Ce genre de choses constitue des barrières. À ces difficultés s'ajoute un sentiment d'isolement accru, elles se demandent où elles iront à partir d'ici, si elles quittent leur communauté et leur famille.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Sheila Malcolmson. Vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Au cas où il y aurait une mauvaise interprétation, je suis sûre que ma collègue conservatrice ne voulait pas dire que si une femme est assassinée tous les six jours au Canada, c'est en raison de l'attitude des femmes. C’est la violence qui les tue.
    Ce qu’il y a de bien triste dans ce que cette étude nous montre, c’est que lorsque les femmes demandent de l’aide, elles sont souvent refoulées. Dans le Nord, les problèmes sont particulièrement graves. Comme vous l’avez dit, à moins d’être assez riche pour acheter un billet d’avion, les femmes ont deux choix: rester à la maison et subir la violence ou laisser derrière elles tous les soutiens qu'elles ont dans la collectivité, devenir vulnérables et risquer de tomber dans d'autres formes de violence ou d'exploitation. C’est un problème très grave.
    L’un des tout premiers témoins que nous avons entendus était Condition féminine Canada. Les experts et le personnel de l'organisme fédéral nous ont dit la même chose que Pauktuutit. Environ 70 % des 53 collectivités inuites n’ont pas accès à des refuges. C’est bien connu au sein du gouvernement. Cela n’a pas changé depuis les trois années que ce gouvernement qui se décrit comme un gouvernement féministe, un gouvernement des Premières Nations et des Autochtones, est au pouvoir.
    Pourquoi est-ce que les choses n’ont pas encore changé, selon vous?

  (1700)  

    Je n’ai pas la réponse.
     C’est pour le moins navrant. Nous pensions qu'une ère de changement était enfin venue, et pourtant, rien n'a changé pour les femmes.
    En ce qui concerne le manque de refuges, j’aimerais ajouter ceci. En 35 ans de travail dans ce domaine, j'ai connu 30 femmes et leurs enfants qui ont été assassinés chez eux.
    Trente? C'est incroyable.
    Voilà pourquoi nous disons que les Inuits sont un peuple distinct et qu'ils ont des besoins distincts. Il est très difficile d’obtenir des ressources dans le Nord en raison des coûts de construction élevés. J’ai mentionné que les femmes, lorsqu'elles subissent de mauvais traitements, sortent à -30 °C ou -40 °C pour s’enfuir — imaginez si en plus, elles ont des enfants.
    C’est une autre raison de ne pas partir. Les femmes qui le font, et qui demandent de l’aide, sont particulièrement en danger et leurs enfants sont menacés.
    Dans le cadre de cette étude, nous essayons d’obtenir l’appui du gouvernement fédéral pour que les ressources soient uniformes partout au pays. Avez-vous une idée de recommandation que vous souhaiteriez lire dans notre rapport final et qui vous ferait dire: « Ça y est, ils ont compris. Si le gouvernement dit oui, les choses vont changer. »
    Nous demandons toujours plus de refuges, mais nous demandons aussi des programmes de guérison adaptés à notre peuple, comme celui que j’ai mentionné, qui est axé sur la communauté et offert dans notre langue.
     Je pense aussi à l'importance de consulter les régions, parce qu'il n'existe pas de solution unique. Ce qui fonctionne à Hamilton, en Ontario, par exemple, ne fonctionnera pas nécessairement à Rigolet, au Nunatsiavut. Ils ont une... Ce n’était peut-être pas un bon exemple. Quoi qu'il en soit, je pense que tout programme doit être conçu en consultation avec les femmes inuites, pour les communautés inuites, en tenant compte des réalités du Nord.
    Pour faire suite à la question que quelqu’un a posée sur les hommes et les garçons, nous entendons souvent dire que les hommes et les garçons éprouvent eux aussi de grandes difficultés. Le soutien holistique sur lequel Rebecca insiste tant est vraiment très important.
    Il faut aussi comprendre que les familles fonctionnent différemment — et dans certains contextes, elles tiennent à fonctionner différemment — et qu’il ne peut y avoir un modèle unique de refuge. Nous devons trouver les meilleures solutions pour assurer la sécurité des femmes et de leurs enfants au sein même de leurs collectivités, sans qu'elles soient forcées à fuir vers d’autres communautés ou vers le Sud, si tel n’est pas leur choix. Et bien souvent, honnêtement, ce ne l'est pas.
    Merci beaucoup aux témoins. Vos conseils nous seront précieux pour la rédaction de notre rapport.
    Madame la présidente, si vous me le permettez, pendant que j’ai la parole...
    Vous ne pouvez rien promettre. Ce sont les libéraux qui vont dicter cela.
    En tout cas, ce sera au moins dans mon rapport.
    Pendant que j’ai la parole, puis-je revenir à la motion dont j’ai donné avis il y a quelques semaines, au sujet de la stérilisation forcée des femmes autochtones?
    Oui. Avez-vous la motion, pour que tout le monde puisse l’entendre de nouveau?

  (1705)  

    La motion a été modifiée par le greffier et elle est en train d’être distribuée.
    Fantastique.
    La motion que j’ai présentée à l’origine visait à inviter la ministre de la Santé, mais certains membres du Comité nous ont dit qu’il serait plus approprié de convoquer la ministre des Services aux Autochtones, Jane Philpott. La greffière a accepté de modifier le texte de la motion en conséquence.
    La question a été bien décrite dans les médias. Il y a des histoires atroces. Nous pensions qu’il s’agissait de choses qui s'étaient passées autrefois. Or, il se trouve que, pas plus tard qu’en 2017, en Saskatchewan, des femmes autochtones se sont fait dire, après avoir accouché, qu’elles ne pourraient même pas tenir leur bébé dans les bras à moins d'accepter de se faire ligaturer les trompes.
    Certaines femmes qui participent au recours collectif ont dit qu’elles ne savaient même pas qu’elles avaient été stérilisées. C’est déchirant, et ce sont des histoires atroces.
    Je pense que ce comité serait un bon endroit pour que nous entendions directement la ministre parler du leadership que le gouvernement apporte pour s’assurer qu’aucune province ni aucun territoire ne puisse agir de la sorte.
    Je vais lire la motion:
Que le Comité demande à la ministre des Services aux Autochtones Canada de comparaître au plus tard en décembre 2018, pour informer le Comité des efforts déployés par le gouvernement pour mettre immédiatement fin à la pratique de la stérilisation forcée de femmes autochtones, conformément au mandat de la ministre de « renouveler la relation de nation à nation avec les peuples autochtones, pour qu'elle soit fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la collaboration et le partenariat » et de l’engagement pris par le gouvernement de respecter l'article 7(2) de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, et que cette réunion soit télévisée et dure au moins une heure.
    Excellent.
    Y a-t-il des questions ou commentaires?
    Nous allons commencer par Pam.
    Tout d’abord, je peux assurer aux témoins que leurs témoignages seront inclus dans notre rapport.
    Au sujet de la motion, j’aimerais proposer un amendement qui dit « ou des fonctionnaires du ministère ». C'est une question d'emploi du temps. Il peut être difficile de faire comparaître la ministre.
    Je sais que nous sommes tous profondément préoccupés par les nouvelles qui sont parues et que nous partageons l’indignation de tous les Canadiens à l’égard du sort de ces femmes.
    Je vais proposer un amendement, compte tenu de l’échéancier, afin que nous puissions essayer d’obtenir des réponses sur ce qui se passe. Je sais que la ministre — je lui ai parlé moi-même — s'intéresse de très près à ce dossier et qu’elle est tout aussi préoccupée que nous par ces événements.
    D’accord.
     L’amendement vise à inclure les fonctionnaires du ministère si la ministre ne peut venir.
    Y a-t-il des commentaires sur l’amendement?
    Allez-y, Sheila.
    Je dirais que si la ministre ne peut venir, ce sera décevant. C’est absolument une question de leadership. Les aspects que nous devons soulever et les questions que nous devons poser exigent une réponse du leadership politique, et non pas du personnel.
    Je comprends que c’est peut-être une sorte de soupape de sécurité, mais j’insiste pour que ce soit la ministre qui vienne.
     Eva, vous aviez un commentaire?
    Nous n’avons que la semaine prochaine. À cause du peu de temps et du court préavis, au lieu de n'avoir personne pour nous parler, les fonctionnaires de la ministre pourront... Ils sont informés. Ils savent ce qu’ils font et ils l’aident. Ils nous donneront un bref... Si elle ne peut pas venir, c’est mieux que de n’avoir personne.
    Sheila, allez-y.
    C’est juste. J’ai donné avis il y a deux semaines, et nous aurions pu voter à ce moment-là, mais les conservateurs nous ont refusé la permission de le faire.
     La ministre est certainement au courant. Dans d’autres comités, cette question a été soulevée et rejetée. On a donc comme l’impression que le gouvernement ne veut pas en parler. La ministre sait que nous y tenons, et je l’exhorte vivement à accepter l’invitation.
    Pam, allez-y.
    Je sais que Rachel Blaneya interrogé la ministre à ce sujet en comité. Je crois que la ministre Philpott comparaît également devant le Comité de la santé, où les gens peuvent poser des questions à ce sujet. Ce n’est pas comme si ces ministres n’ont pas comparu devant les comités pour répondre à ces questions.
    C’est tout ce que nous avons à dire.
    Y a-t-il d’autres questions ou commentaires avant le vote?
    Bob, alle-y.
    J’aimerais mettre la question aux voix.
    Mettons l’amendement aux voix, bien sûr, en premier.
    L’amendement vise à inclure un représentant du ministère. Devons-nous le lire, ou est-ce que tout le monde est d’accord sans lire l’amendement au complet?

  (1710)  

    Pourrions-nous avoir un vote par appel nominal, s’il vous plaît?
    D’accord.
    (L’amendement est adopté par 7 voix contre 1. [Voir le Procès-verbal])
    Y a-t-il d’autres commentaires au sujet de la motion complète, avec l’amendement, ou sommes-nous prêts pour le vote?
    (La motion modifiée est adoptée.)
    La présidente: Excellent. Y a-t-il autre chose?
    Bon, reprenons et faisons repartir la montre.
    Bob, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci encore à nos témoins.
    Des questions juridiques ont été soulevées de temps à autre au cours de notre discussion d’aujourd’hui. Ces femmes ont-elles habituellement accès à des conseils juridiques? Je suis sûr qu’elles doivent se retrouver dans des situations juridiques, peut-être aux suites d'une agression en réaction à une attaque, en train de faire l’objet d’une accusation d’agression, ou quoi que ce soit d’autre. J’imagine qu’il y a beaucoup de questions juridiques. En général, y a-t-il quelqu'un pour s'occuper d'elles parmi le personnel? Ont-elles facilement accès à des conseils juridiques?
    Ma question s’adresse à quiconque voudra y répondre.
    Ici, dans une ville comme Ottawa, nous avons des travailleurs de soutien transitoires qui mettent les femmes en contact avec l’aide juridique et les avocats.
    Nous les accompagnons voir les avocats. Je dois dire, cependant, que beaucoup d'entre elles s'abstiennent de présenter une plainte. Elles ne se prévalent pas du système de droit de la famille en ce qui concerne le droit de garde et de visite, mais nous leur offrons des options. Nous offrons du soutien pour assurer le suivi. C’est disponible ici, et nous les appuyons dans tous les aspects juridiques relevant de la Société d’aide à l’enfance. Nous les aidons à trouver un avocat pour les représenter, pour les aider à récupérer leurs enfants.
    Ainsi, le système d’aide juridique serait disponible si elles choisissaient de l’utiliser.
    Oui.
    Madame Kudloo, allez-y.
    Dans le Nord, il y a un énorme arriéré dans le système des cours de circuit, et les femmes attendent des mois et des mois pour que leur cour... Vous savez, si le mari va aux tribunaux, il va falloir attendre. Ce n’est pas...
    Je suis désolée, l’anglais est ma langue seconde, et parfois j’ai...
    Si vous voulez aller plus loin...
     Je pense que le système des cours de circuit, comme Rebecca vient de mentionner, est vraiment un point de départ tout désigné pour mesurer l’inefficacité du système de justice dans le Nord. Il y a certainement un manque d’accès à la justice. Il y a un manque de connaissance des droits, un aspect dont Rebecca a également parlé et sur lequel nous travaillons fort.
     Nous entreprenons un projet avec la société juridique du Nunavut pour examiner la Loi sur l’intervention en matière de violence familiale. C’est une question qui me tient énormément à coeur, et je veux absolument comprendre les ordonnances de protection d’urgence, d'interdiction et de non-communication. On verra bien, mais ces ordonnances ne sont pas très efficaces quand on vit dans une localité de moins de 1 000 habitants où il y a une seule épicerie et tout le monde se connaît. Il y a certainement différents éléments qui entrent en jeu.
    La cour de circuit visite habituellement les villages de deux à six fois par année, et cela dépend des conditions météorologiques. La visite peut être retardée indéfiniment, ce qui place les femmes dans une position très vulnérable. Une fois qu'un cas est signalé, le risque de violence mortelle augmente et la justice laisse à désirer à cet égard.
    De plus, comme Shar vient de le dire, on est terrifié à l’idée de dénoncer les faits, bien sûr, de crainte de perdre la garde des enfants, etc. De plus, les gens et les établissements ne soutiennent pas la victime, voire adoptent un ton accusateur contre elle.
    Vous m’avez amené à une de mes nombreuses autres questions. Combien de langues sont parlées dans les localités inuites? Il y a 51 localités et 165 000 Inuits, ou quelque chose comme ça.

  (1715)  

    C’est 65 000.
    Parlent-ils tous la même langue? Je ne le crois pas.
    Ils parlent la même langue, mais il y a différents dialectes. Lorsque vous offrez des services à des personnes qui ont différents dialectes, la traduction coûte parfois cher.
    Bien.
    Une autre question a été soulevée. J’ai été contrarié lorsque le chemin de fer de Churchill a eu un problème, mais je sais que nous l’avons réglé. Il y a maintenant de l’argent destiné à Nanisivik pour créer le nouveau poste de ravitaillement de la Garde côtière dans le Nord. Nous avons entendu parler de navires de croisière qui arrivent dans ces localités. Une situation économique plus forte dans le Grand Nord aiderait-elle à aplanir les difficultés que vivent les gens?
    Je sais que dans bien des cas, dans le Sud et dans ma circonscription, les capacités d’adaptation s’effondrent souvent lorsque les finances s’effondrent. Conviendrait-il d’accorder plus d’attention à la conjoncture économique, surtout dans le Grand Nord?
    Juste avant de venir ici, j’ai eu une réunion avec Agnico, une mine d’or à Baker Lake. Les travailleurs travaillent deux semaines d'affilée et prennent ensuite deux semaines de congé. Toutes les femmes restent à la maison et doivent s'arranger pour survivre avec les enfants. Nous envisageons de lancer une industrie artisanale pour elles; les femmes aiment travailler à la maison. Nous étudions les possibilités.
    Je vais demander à Samantha de vous parler un peu du réseau des femmes d’affaires que nous dirigeons au conseil de Pauktuutit.
    La situation est un peu différente dans l’ensemble de l'Inuit Nunangat, car le taux de chômage est élevé. Je pense que c’est deux fois plus que dans le Sud. Cependant, les femmes occupent plus d'emplois que les hommes, ce qui peut créer ses propres tensions. La plupart du temps, même si elles ont plus d’emplois, elles sont moins bien payées. Elles peuvent occuper des postes inférieurs. On le voit assez souvent.
    Oui, nous y travaillons certainement à Pauktuutit. Nous avons créé le réseau des femmes inuites en affaires pour reconnaître que beaucoup de femmes participent de différentes façons à une économie informelle et qu’elles peuvent toutes en faire partie. Nous aidons à promouvoir le mentorat en affaires et toutes sortes de compétences et de perfectionnement, mais il y a de nombreux défis en matière de garde d’enfants — le manque d’accès, de disponibilité et d’abordabilité — qui empêchent les femmes de participer à l’économie officielle si elles choisissent de le faire.
    C’est en grande partie à cause de politiques sociales qui ne sont tout simplement pas harmonisées. Il y a beaucoup de divergences. Les politiques de logement social y sont pour beaucoup.
     C’est très intéressant, parce que si c’est la femme qui fait de l’argent, cela pourrait créer un problème, comme vous l’avez laissé entendre.
    Merci de ces renseignements.
    C’était un excellent travail.
    Avant de céder la parole à Rachael, j’ai une question, qui n'est pas du tout partisane. Je sais que tout le monde s'étonne que je veuille vraiment poser une question aujourd’hui.
    Vous dites qu’il y a 65 000 personnes qui vivent dans environ 51 localités. Comment est-ce réparti? Est-ce que certaines localités comptent peut-être 100 habitants et d’autres, 10 000? Pourriez-vous préciser, en comparant les plus grandes et les toutes petites?
    Je vais laisser tout le monde parler après.
    Nous avons de plus grands centres comme Iqaluit, la capitale, ainsi que Rankin Inlet. Il y a probablement entre 2 000 et 3 000 habitants.
    Avez-vous dit entre 2 000 et 3 000?
    Iqaluit en compte 7 000.
    D’accord.
    Iqaluit en compte 7 000, mais une petite ville comme la mienne en compte 1 800. Plus on monte, comme à Grise Fiord... Je ne connais pas la population exacte, mais c’est peut-être 200.

  (1720)  

    Excellent. Je viens de Sparta, alors 200 personnes, je vois exactement ce que cela représente. Merci beaucoup, Rebecca.
    Je vais maintenant céder la parole à Rachael Harder, pour cinq minutes.
    Madame Kudloo, vous pourriez peut-être nous parler un peu des particularités du logement au Nunavut.
    La raison pour laquelle je pose la question, c’est que j’ai eu l’occasion de me rendre sur place. J’ai visité 11 localités dans la région du Nord en mars, dans la région de l’île de Baffin, et j’ai eu l’occasion de parler directement avec des femmes de l’insécurité à laquelle elles sont confrontées en matière de logement.
    Bien sûr, vous y avez fait allusion, mais vous pourriez peut-être parler un peu plus du fait que l’accession à la propriété n’est pas vraiment une option. Ces femmes sont à la merci de l’État pour qu'on leur fournisse un logement. Il y a une énorme pénurie, de sorte que nous voyons des familles s'entasser les unes sur les autres dans leur maison.
    Lorsque les femmes ont accès à un refuge et qu’elles y restent un certain temps, elles finissent par vouloir s’en aller et s’installer dans un logement sûr, mais c’est évidemment difficile. Pourriez-vous nous en parler un peu?
    Beaucoup de nos gens vivent dans des habitations à loyer modéré, et il y a une longue liste d’attente. Les gens attendent parfois des années pour obtenir une maison. Si une femme veut obtenir son propre chez-soi, je pense que son nom s'ajoutera à la toute fin de la liste, à moins qu’il s’agisse d’une urgence.
    L’accession à la propriété n’est pas vraiment une option. Pour certains d’entre nous qui sommes propriétaires, les coûts d’entretien sont très élevés, à moins qu'un membre de la famille puisse s'en occuper gratuitement. On compte sur des entreprises pour venir faire des réparations, et c'est très dispendieux. Il faut avoir un emploi bien rémunéré pour payer la note. Les coûts du carburant et des services municipaux sont très élevés.
    Merci.
    Madame la présidente, j’aimerais présenter ma motion maintenant. C’est sur avis.
    Est-ce que tout le monde a une copie de la motion?
    Allez-y, Rachael.
     Ma motion se lit comme suit :
Que le Comité invite la ministre de Condition féminine Canada à l'informer de son nouveau mandat, étant donné que Condition féminine Canada change de nom pour devenir le ministère des Femmes et de l’Égalité des genres, au plus tard le mercredi 13 février 2019, et que cette réunion dure au moins une heure.
    Madame la présidente, la raison pour laquelle je demande que cette motion soit adoptée aujourd’hui, c’est que, tel qu’il est énoncé dans la motion, ce ministère est passé de la simple condition féminine à l’égalité des genres. Dans la lettre de mandat originale... Nous n’avons pas vu de suivi de la part du premier ministre, ce qui est une autre raison pour laquelle je voudrais inviter la ministre à comparaître devant le Comité, afin que nous puissions mieux comprendre le mandat.
    Dans la lettre de mandat originale que le premier ministre a écrite à la ministre Monsef, il dit:
Nous nous sommes également engagés à relever la barre en matière d’ouverture et de transparence au sein du gouvernement. Il est temps de sortir le gouvernement de l’ombre pour que celui-ci soit réellement au service de la population. Le gouvernement et les renseignements du gouvernement devraient être ouverts par défaut. Si nous voulons que les Canadiens et les Canadiennes aient confiance en leur gouvernement, nous avons besoin d’un gouvernement qui fait confiance aux Canadiens. Si nous faisons des erreurs, nous devons les reconnaître sur-le-champ. Les Canadiens et les Canadiennes n’exigent pas de nous que nous soyons parfaits, mais ils s’attendent à ce que nous soyons honnêtes, ouverts et sincères dans nos efforts pour servir l’intérêt public.
    Il ajoute que cela comprend « un engagement significatif envers les députés de l’opposition, les comités parlementaires et la fonction publique; un dialogue constructif avec les Canadiens et les Canadiennes, la société civile et les partenaires, y compris les représentants des milieux d’affaires, du monde syndical et du secteur public élargi, ainsi que les organisations sans but lucratif et les organismes de bienfaisance ».
    Madame la présidente, je soulève cette question parce que j’ai présenté cette motion il y a quelques semaines et qu’elle a été rejetée par les députés libéraux autour de cette table. Je ne comprends pas très bien pourquoi ils l’ont mise en veilleuse, sachant qu’elle serait alors rejetée à cause de la date qui y figurait.
    J’ai donc changé cette date au 13 février 2019, ce qui nous donne un peu plus de temps pour convoquer la ministre. Étant donné que le premier ministre s’est engagé à faire preuve d’ouverture et de transparence, et que la ministre de ce ministère a été appelée à être ouverte avec les membres du Comité, y compris ceux de l'opposition, je proposerais cette motion et je demanderais que nous puissions convoquer la ministre et lui poser des questions au sujet de son nouveau mandat, afin que nous puissions mieux faire notre travail au sein du Comité.

  (1725)  

    À ce sujet, la motion n’a pas été rejetée. Le débat a été interrompu. Je tiens à ce que ce soit clair.
    Sheila, vous avez la parole pour les questions et commentaires.
    Merci, madame la présidente.
    J’ai une motion. Je propose que les mots « et que la séance soit... ».
    Est-ce un amendement?
    C’est un amendement. La motion se lirait comme suit: « et que la séance soit télévisée ».
    D’accord.
    Y a-t-il d’autres questions ou commentaires?
    (L’amendement est rejeté. [Voir le Procès-verbal])
    La présidente: Y a-t-il d’autres interventions sur la motion principale visant à faire comparaître la ministre avant le 19 février 2019?
    (La motion est rejetée.)
    La présidente: Voyons où nous en sommes côté temps.
    Sonia, je vais vous laisser poser une seule question, parce que je regarde l’heure. Je sais que vous avez été patiente, alors nous allons vous accorder deux ou trois minutes. Allez-y.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie toutes de votre présence et de votre témoignage.
    Madame Kudloo, croyez-vous que le projet « Engaging Inuit Men and Boys » fait une différence?
    Je pense que oui. C’est très populaire. Nous essayons de nous rendre dans le plus grand nombre de localités possible grâce au financement que nous obtenons. Je pense qu’une trentaine d'hommes se présentent habituellement, ce qui est un nombre élevé pour un petit village. Il y a eu beaucoup d’intérêt, et les présidents des conseils chargés des revendications territoriales avec lesquels je siège à Inuit Tapiriit Kanatami se sont montrés très intéressés à accueillir davantage d'événements de la sorte dans leurs localités respectives.
    Viviane Michel, du groupe précédent, nous a dit que la plupart des femmes aiment leur partenaire, mais qu’elles n’aiment pas leur comportement. Ce genre de counseling profitera donc aux 51  localités.
     Avez-vous entendu parler de la ligne d’assistance 24 heures sur 24 appelée Talk4Healing? Certaines localités ont un service d’assistance téléphonique pour les femmes. Ce service est-il offert dans toutes les localités, ou seulement dans quelques-unes?
     Je sais qu’il y a des lignes d'assistance nationales, bien sûr, mais je ne sais pas combien d’entre elles peuvent répondre en inuktitut et ses divers dialectes aux femmes qui appellent. Il ne faut pas oublier non plus que beaucoup de femmes n’ont pas accès à un téléphone. Certaines oui, d'autres non. En temps de crise, c’est peut-être quelque chose qu’on risque de leur enlever.
    C’est très bien, et je vois certainement l’utilité d’une ligne d'assistance, mais si on est dans une situation critique dans une localité isolée à des milliers de kilomètres de là et que l'on a besoin d’aide sur-le-champ, c’est loin d’être suffisant.
    C'est bon.
    Au nom du Comité, Shar, Rebecca et Samantha, merci d’être venues. Vous nous avez donné des renseignements très intéressants.
    Je vous rappelle que le mercredi 5 décembre, le Comité se réunira pour discuter de ce qui suit. Nous examinerons le plan de travail et le communiqué de presse pour l’étude sur les femmes âgées, ainsi que les instructions de rédaction aux analystes pour l’étude sur les refuges et les maisons de transition. Nous discuterons également des prochaines étapes du projet de rapport sur les obstacles auxquels font face les femmes.
    À mercredi.
    La séance est levée.
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