Passer au contenu
Début du contenu

INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 126 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 19 septembre 2018

[Énregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

[Traduction]

    Bienvenue à la 126e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie. Nous allons poursuivre notre examen prévu par la loi de la Loi sur le droit d'auteur.
    Avant de commencer, nous devons prendre quelques minutes pour régler quelques questions d'ordre administratif. Je souhaite officiellement la bienvenue à Mme Celina Caesar-Chavannes.
    Bienvenue. Vous êtes officiellement membre du Comité.
    Des députés: Bravo!
    Le président: De ce côté-ci, MM. Michael Chong et Dan Albas sont aussi membres officiels.
    Bienvenue et félicitations.
    Nous devons donc élire un vice-président.
    Monsieur le président, je propose M. Albas comme vice-président du Comité.
    Y a-t-il d'autres propositions?
    Je déclare M. Dan Albas élu premier vice-président par acclamation.
    Des députés: Bravo!
    Merci, monsieur le président.
    Maintenant que c'est réglé, permettez-moi de vous présenter les témoins très intéressants que nous recevons aujourd'hui. Nous accueillons M. Jérôme Payette, directeur général de l'Association des professionnels de l'édition musicale; M. Christian S. Tacit, procureur et avocat-conseil, et M. Christopher Copeland, avocat-conseil, tous deux du Consortium des opérateurs de réseaux canadiens inc.; M. Mathieu Plante, président, et Mme Stéphanie Hénault, directrice générale, de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma; et enfin, M. Michael Paris, directeur des Affaires juridiques et chef de la Protection des renseignements personnels, de l'Association des cinémas au Canada.
    Chaque groupe aura droit à un maximum de sept minutes pour présenter un exposé. Nous passerons ensuite à la période de questions.
    Nous allons commencer par l'Association des professionnels de l'édition musicale.

[Français]

    Monsieur Payette, vous avez la parole pour sept minutes.
    Monsieur le président et chers membres du Comité, c'est avec grand plaisir que je m'exprime devant vous aujourd'hui à propos de cette très importante révision de la Loi sur le droit d'auteur.
    L'Association des professionnels de l'édition musicale, ou APEM, représente les éditeurs musicaux québécois et francophones du Canada. Nos membres contrôlent 830 maisons d'édition comportant 400 000 oeuvres musicales.
    Partenaires des auteurs-compositeurs, les éditeurs musicaux soutiennent la création d'oeuvres musicales, les valorisent et les administrent. Typiquement, une maison d'édition musicale travaille avec plusieurs auteurs-compositeurs pour la création de nouvelles oeuvres et représente des catalogues de chansons existantes. Les éditeurs sont en quelque sorte les agents des auteurs-compositeurs et de leurs oeuvres. Ils sont les professionnels de la gestion du droit d'auteur.
    J'aimerais souligner que l'APEM est membre de la Coalition pour une politique musicale canadienne, qui a produit un document de 34 pages, dont vous avez certainement eu copie. Pratiquement toute l'industrie de la musique appuie ce document.
    L'APEM a tout de même ciblé quelques points à aborder avec vous aujourd'hui.
    Je vais passer tout de suite au point 1, qui propose de modifier les dispositions sur les services réseau, qui s'appliquent de manière indifférenciée à un large éventail d'entreprises.
    L'article 31.1 de la Loi sur le droit d'auteur est en quelque sorte la règle canadienne d'exonération. Le texte sous « Services réseau » permet à un prestataire de « services liés à l'exploitation d'Internet » qui « fournit des moyens permettant la télécommunication ou la reproduction » du contenu protégé de ne pas être tenu responsable de la violation du droit d'auteur et de ne pas payer les détenteurs de droits.
    Selon la manière dont la Loi est rédigée actuellement, des entreprises offrant des services aussi divers que l'accès à Internet, le stockage d'information dans le nuage, les moteurs de recherche ou les plateformes de partage telles que YouTube, Facebook ou Instagram bénéficient de manière indifférenciée de l'exception sur les services réseau. Pourtant, ces entreprises fournissent des services bien différents: un fournisseur d'accès Internet fournit une connexion à Internet; un service de stockage permet d'entreposer des fichiers et de les rendre disponibles pour un usage privé; un moteur de recherche classe les résultats en fonction de mots clés; les services de partage comme YouTube rendent disponibles des contenus à des millions d'utilisateurs, élaborent des algorithmes de recommandation, font de la promotion, organisent les contenus, vendent de la publicité et récoltent les données des utilisateurs.
    Le développement d'Internet peut avoir été difficile à prévoir, mais aujourd'hui, on sait que ces entreprises n'offrent pas tous les mêmes services. La Loi sur le droit d'auteur doit dorénavant prendre en considération le spectre d'activités de ces entreprises et faire en sorte que leurs responsabilités ne soient pas nécessairement les mêmes.
    Je vais être clair. Je crois que toutes ces entreprises devraient rémunérer les ayants droit, car elles utilisent du contenu protégé par le droit d'auteur à des fins commerciales. Toutefois, les fournisseurs d'accès Internet pourraient avoir des responsabilités différentes de celles de YouTube, par exemple. Les fournisseurs d'accès Internet devraient rémunérer les détenteurs de droits tout en participant à la lutte contre le piratage de manière plus active, tandis que les services de partage devraient être tenus d'obtenir des licences en bonne et due forme pour l'ensemble du répertoire qu'ils rendent disponible.
    Le 12 septembre, soit la semaine dernière, le Parlement européen a adopté une directive sur le droit d'auteur qui va en ce sens. Cette directive établit que les fournisseurs de services de partage de contenu en ligne tels que YouTube réalisent un acte de communication au public et doivent conclure des contrats de licence équitables et appropriés avec les détenteurs de droits, et ce, même pour les contenus mis en ligne par les utilisateurs.
    De plus, les services de partage devront faire preuve d'une plus grande transparence quant aux utilisations qu'ils font du contenu. Donc, les utilisateurs vont pouvoir continuer de mettre en ligne des contenus, mais les services de partage vont devoir signer des accords avec les sociétés de gestion collective, payer pour l'utilisation qu'ils font des contenus et faire preuve de transparence. Je crois que le Canada devrait s'inspirer de cette approche européenne.
    Je vais clore le premier point en parlant de l'ALENA.
    Nous savons que les États-Unis, à la demande des grandes entreprises technologiques, font pression pour que le chapitre sur la propriété intellectuelle comporte des règles d'exonération inspirées de leur Digital Millennium Copyright Act. Si le Canada acceptait cette demande, il serait très difficile, voire impossible, de changer sa propre loi afin qu'elle corresponde à la réalité d'aujourd'hui.
    Le deuxième point que je veux aborder est la nécessité de rendre le régime de copie privée technologiquement neutre et de mettre en place un fonds de transition.
    Les revenus annuels découlant des redevances pour copie privée remis aux créateurs de musique ont baissé de 89 %, passant de 38 millions de dollars en 2004 à moins de 3 millions de dollars en 2016. Comme l'a dit l'économiste Marcel Boyer, c'est « le vol du siècle », et ce n'est pas parce que cela dure depuis des années que c'est devenu acceptable.
    L'esprit de la loi canadienne de 1997 n'est plus respecté, simplement en raison de l'évolution technologique. Il faut profiter de l'actuel réexamen de la Loi sur le droit d'auteur pour rendre le régime de copie privée technologiquement neutre et ainsi permettre que des redevances soient exigibles pour une variété d'appareils, dont les tablettes et les téléphones intelligents. On exigerait cette redevance des fabricants et des importateurs d'appareils.

  (1535)  

    En Europe, la redevance moyenne équivaut à 2,80 $ par téléphone intelligent. Il serait très surprenant que le prix moyen d'un iPhone X passe de 1 529 $ à 1 532 $ à la suite de l'instauration d'une redevance pour copie privée. Ce coût ne serait pas transféré au consommateur.
    Enfin, la chute spectaculaire des revenus de copie privée nécessite la mise en place d'un fonds de transition de 40 millions de dollars, comme l'a demandé la Société canadienne de perception de la copie privée. Les libéraux étaient d'accord, et il est plus que temps que ce fonds se concrétise.
    Le troisième point propose d'étendre la durée de protection du droit d'auteur à 70 ans après la mort de l'auteur. Dans la vaste majorité des pays de l'OCDE, la durée de protection est de 70 ans, alors qu'au Canada, elle n'est que de 50 ans après la mort de l'auteur.
    En matière d'exportation, les détenteurs de droits canadiens sont désavantagés, puisque leurs oeuvres sont assujetties à une protection moindre à l'international. Les lois canadiennes ne devraient pas agir comme un frein à la valorisation internationale de nos oeuvres et de nos créateurs.
    Pour les éditeurs de musique, que je représente, porter la durée à 70 ans après la mort de l'auteur signifie davantage de revenus à être investis dans le développement de la carrière des auteurs et des compositeurs canadiens d'aujourd'hui.
    Au quatrième point, il est question de préciser et d'éliminer des exceptions. Le nombre d'exceptions contenues dans la Loi sur le droit d'auteur et la nature celles-ci privent les détenteurs de droits de revenus qu'ils devraient normalement toucher. Je n'ai pas le temps de vous présenter aujourd'hui toutes les exceptions qu'on devrait modifier dans la Loi sur le droit d'auteur. Un document de la Coalition pour une politique musicale canadienne revoit en détail ces exceptions.
    Je vais terminer par le cinquième point, soit l'importance d'avoir une commission du droit d'auteur fonctionnelle.
    Je suis bien au fait que des travaux sont en cours dans le but de réformer la Commission du droit d'auteur du Canada. Je m'en réjouis, je trouve que c'est une excellente nouvelle. J'aimerais simplement souligner l'importance de cette réforme pour l'application de la Loi sur le droit d'auteur.
    Actuellement, cette commission prend beaucoup de temps pour rendre des décisions, ce qui est incompatible avec l'environnement d'aujourd'hui. L'incertitude entourant la valeur des droits d'auteur nuit aux éditeurs, aux auteurs-compositeurs et à l'ensemble des intervenants de l'industrie de la musique.
    Je vous remercie.

  (1540)  

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer au Consortium des opérateurs de réseaux canadiens.
    Monsieur Tacit, vous avez la parole pour sept minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, le Consortium des opérateurs de réseaux canadiens est une association industrielle sans but lucratif formée de plus de 30 fournisseurs de services Internet concurrents de toutes tailles.
    Je tiens à souligner d'emblée que le Consortium prend la violation du droit d'auteur très au sérieux. De fait, aujourd'hui, un certain nombre de ses membres sont des entreprises de distribution de radiodiffusion qui sont soit titulaires d'une licence, soit exploitées en vertu d'une ordonnance d'exemption. Notre message principal est que le régime d'avis et avis continue à établir un équilibre raisonnable entre les droits des propriétaires de contenu et les internautes pour répondre aux allégations de violation en ligne du droit d'auteur et pour atteindre les objectifs éducatifs connexes.
    Toutefois, les expériences vécues par les membres du Consortium montrent qu'il faudrait apporter quelques modifications légères au régime. Plus précisément, le Consortium propose les recommandations suivantes.
    Premièrement, la Loi devrait obliger les propriétaires de contenu à envoyer des avis qui contiennent uniquement les éléments prescrits par la Loi. Une telle disposition empêcherait les parties d'abuser de ces avis et de les utiliser pour transmettre des demandes de règlement, des annonces publicitaires ou d'autres formes de contenu non pertinent.
    Deuxièmement, il faudrait exiger que les avis soient fournis simultanément en format texte et en code lisible par machine. Ainsi, les FSI pourraient plus facilement choisir comment les traiter, soit manuellement ou automatiquement, selon l'envergure de leurs activités.
    Troisièmement, les propriétaires de contenu devraient être obligés d'envoyer les avis exclusivement aux adresses électroniques réservées aux violations et accessibles au public que les FSI enregistrent auprès de l'American Registry for Internet Numbers. Ainsi, les avis seraient toujours envoyés aux adresses électroniques que les FSI souhaitent utiliser pour les traiter.
    Quatrièmement, il faudrait limiter le nombre d'avis qu'un titulaire du droit d'auteur peut envoyer à un FSI concernant une violation alléguée liée à une adresse IP précise à un avis par période donnée, par exemple, 48 heures. Une telle disposition éviterait que les FSI soient inondés d'avis multiples visant les mêmes adresses IP et la même violation.
    J'aimerais maintenant vous présenter les raisons pour lesquelles l'approche recommandée par la coalition FairPlay Canada, que j'appellerai simplement « la coalition », et d'autres mesures plus strictes devraient être rejetées. Notre analyse est fondée sur un cadre de proportionnalité qui prend en considération la détermination de l'envergure du problème, l'évaluation des avantages et des coûts de la solution proposée, ainsi que l'équité.
    Les membres de la coalition, qui comprennent les fournisseurs de contenu et les FSI verticalement intégrés les plus importants au Canada, n'ont pas lésiné pour commanditer et trouver des études privées qui montrent que les répercussions financières des violations du droit d'auteur sur les propriétaires de contenu sont tellement désastreuses que la solution proposée par la coalition est nécessaire. Aucun autre organisme ne dispose des ressources requises pour bien répondre à l'ensemble des propositions présentées par la coalition. Heureusement, ce n'est pas nécessaire. L'an dernier, durant l'instance du CRTC ayant pour objet l'évaluation de la demande déposée par la coalition de mettre en oeuvre son régime administratif de blocage de contenu, des intervenants tels que le Canadian Media Concentration Research Project (le CMCRP) et le Centre pour la défense de l'intérêt public ont utilisé des données publiques pour montrer que l'envergure des violations du droit d'auteur en ligne et leurs répercussions sur les propriétaires de contenu sont loin d'être aussi inquiétantes que la coalition souhaite nous le faire croire. Conséquemment, il n'est pas nécessaire d'adopter le régime proposé par la coalition.
    En ce qui concerne les avantages, rien ne sert d'instaurer le genre de régime recommandé par la coalition si un tel régime est en grande partie inefficace. Le blocage d'adresses IP, le blocage de serveurs de noms de domaines ou de DNS et le recours à l'inspection approfondie des paquets ou à l'IAP sont toutes des méthodes qui peuvent être contournées par divers moyens techniques, y compris les réseaux privés virtuels ou les RPV. En outre, les techniques de blocage finissent parfois par bloquer tant les sites Web qui respectent le droit d'auteur que ceux qui le violent.
    Quant aux coûts, il y en a à la fois pour le secteur public et le secteur privé. Du côté du secteur privé, les parties comme les FSI doivent débourser de l'argent pour respecter le régime. De plus, comme il est inévitable que du contenu non interdit soit bloqué à cause de la façon dont les techniques de blocage fonctionnent, ces parties s'exposent à des litiges. Du côté du secteur public, les coûts comprennent les frais supplémentaires liés à l'établissement et au maintien du régime administratif, ainsi que l'érosion de valeurs juridiques et démocratiques comme la liberté d'expression, la confidentialité des communications et la prévention de la surveillance inutile, valeurs qui font actuellement partie des principes du transport commun et de la neutralité du Net.

  (1545)  

    C'est pour cette raison que nous vous recommandons de faire preuve de prudence face à la pente glissante vers laquelle nous mènent les demandes des membres de la coalition et d'autres. Au début, la majorité des grands fournisseurs de contenu et des FSI verticalement intégrés appuyaient le régime d'avis et avis. Puis, ils se sont ralliés à la coalition. Peut-être qu'ils déclareront maintenant, comme la MPA, qu'on devrait pouvoir déposer des injonctions contre les FSI pour bloquer du contenu et qu'on devrait limiter les règles refuges visant les FSI. Ensuite, ils affirmeront peut-être que la seule façon d'empêcher le contournement du blocage est en interdisant complètement les RPV, qui sont utilisés couramment pour protéger les données privées et pour permettre la liberté d'expression.
    Les propriétaires de contenu pourraient aller encore plus loin; ils pourraient préconiser un régime d'avis et retrait, sans la moindre supervision judiciaire ou administrative.
    Les Canadiens ne devraient pas avoir à payer les coûts exorbitants associés à ces solutions, et rien de tout cela n'est nécessaire. La Loi sur le droit d'auteur prévoit déjà un mécanisme qui permet aux propriétaires de contenu de demander des injonctions pour faire retirer du contenu violant le droit d'auteur. On peut trouver le critère de ce qui constitue une approche raisonnable au sein d'une société libre et démocratique dans une analyse faite par le CMCRP de 40 pays de l'OCDE et de l'Union européenne: 18 d'entre eux bloquent rarement des sites Web, 18 les bloquent sur ordonnance d'un tribunal et seulement 4 les bloquent au moyen de procédures administratives.
    Si, malgré ces arguments, le Parlement adopte une solution comme celle proposée par la coalition, pour des questions d'équité, il devra aussi autoriser les FSI à recouvrer les frais d'instauration et de gestion des mécanismes de blocage. Ces frais peuvent être considérables; ils peuvent même forcer les petits FSI à fermer leurs portes s'ils ne sont pas recouvrés.
    Toutefois, nous exhortons le Comité à recommander au Parlement de maintenir le régime actuel d'avis et avis, en y apportant les modifications mineures que nous vous avons proposées. D'autres mesures plus strictes devraient être rejetées.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Michael Paris, de l'Association des cinémas au Canada.
    Vous avez droit à sept minutes.
    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs.
    Je suis ici au nom de l'Association des cinémas au Canada; par souci de concision, je l'appellerai aussi aujourd'hui par son sigle: la MTAC. Nous sommes l'organisation commerciale qui représente les intérêts des exploitants de plus de 3 000 écrans de cinéma partout au Canada. Nous sommes exactement ce que notre nom laisse entendre. Nos membres vendent les billets et le maïs soufflé, et ils font en sorte que les films soient présentés de la façon prévue par les créateurs: au grand écran.
    Entre autres, la MTAC représente les exploitants de salles dans les négociations avec les sociétés de gestion et elle intervient dans des séances comme celle-ci. Cela étant dit, nous ne participons pas souvent à des délibérations sur le droit d'auteur et nous vous remercions de nous avoir invités. Nous ne sommes pas une société ou un organisme qui intervient régulièrement dans les questions de droit d'auteur, bien que ces questions aient certainement une incidence sur nos membres et que nous payions des redevances à certaines sociétés de gestion.
    Je vais vous présenter rapidement quelques faits que vous ne connaissez peut-être pas sur les exploitants de salles. D'abord, les exploitants louent les films aux distributeurs, et nous gardons moins de 50 % de chaque billet que nos membres vendent. Ils n'ont aucune influence sur le contenu des films qu'ils présentent, alors si vous en avez assez de voir des suites, je vous recommande d'en parler aux producteurs.
    Nous formons un secteur de l'industrie cinématographique, et plus de 80 % des exploitants de salles sont des entreprises détenues et gérées par des Canadiens. Des centaines d'exploitants sont des entreprises familiales situées à des endroits de toutes tailles. De plus, nous employons des milliers de Canadiens et nous sommes un des plus grands pourvoyeurs de premiers emplois.
    Nous sommes aussi une industrie en proie à des perturbations importantes. Comme l'indique une étude récente menée par Téléfilm, bien que les cinémas attirent encore occasionnellement deux tiers des Canadiens, les Canadiens se tournent de plus en plus vers la diffusion continue. Les choix de divertissement prolifèrent, et les exploitants de salles n'ont jamais été soumis à une si grande concurrence.
    Tout cela étant dit, il y a un dossier qui a été soulevé devant le Comité et qui intéresse la MTAC depuis toujours; il s'agit de la proposition, faite par des membres de l'industrie de la musique, de modifier la définition du terme « enregistrement sonore » contenue dans la Loi. C'est le seul sujet dont je vais parler aujourd'hui, et je serai très bref.
    Dans le contexte de l'examen de la Loi, un groupe d'intervenants dirigé par des maisons de disques multinationales et des filiales canadiennes a investi des ressources considérables dans la promotion de l'idée qu'il existe une faille dans le domaine du droit d'auteur. Ce groupe prédit un avenir sombre pour les créateurs, un avenir menacé où la technologie leur fera perdre encore plus de terrain si l'on ne répond pas aux demandes du groupe en modifiant la Loi.
    Ce que le groupe propose, c'est de modifier la définition d'un enregistrement sonore contenue dans la Loi en retirant l'exclusion des bandes sonores d'oeuvres cinématographiques lorsqu'elles accompagnent celles-ci. À partir de maintenant, je vais employer simplement le terme « film », si vous le voulez bien. Le seul but de cette modification est d'ouvrir un flux de redevances que les exploitants de salles auraient à payer, ce qui fournirait à ce groupe une part des recettes des salles de cinéma.
    La MTAC est d'avis que la définition actuelle du terme « enregistrement sonore » prévue par la Loi établit un juste équilibre entre les créateurs, les titulaires des droits et les exploitants. La modification proposée par certains membres de l'industrie de la musique aggravera les perturbations technologiques que les exploitants subissent déjà. Elle risque aussi de miner encore davantage le rôle des salles de cinéma comme vitrine principale pour les créateurs canadiens au sein des industries cinématographiques nationale et mondiale.
    Aussi, la proposition n'est pas nouvelle. De 2009 à 2012, la MTAC s'est défendue avec succès lors de poursuites judiciaires engagées par des membres de l'industrie de la musique, qui soutenaient que la définition actuelle d'un enregistrement sonore devrait être interprétée comme n'excluant pas les trames sonores, alors qu'elle les exclut expressément. Il a fallu attendre la décision de la Cour suprême du Canada en 2012 pour clore le dossier.
    Contrairement à ce que certains continuent de répéter, la définition d'un enregistrement sonore n'est ni arbitraire, ni inéquitable, ni injustifiée. Comme les tribunaux l'ont conclu, l'exclusion est tout à fait intentionnelle et elle reflète l'équilibre établi par de sages législateurs entre les créateurs, les titulaires de droit d'auteur et les exploitants.
    Aujourd'hui, ces intervenants demandent au Comité de reprendre le travail là où leurs litiges se sont arrêtés. Or, la modification proposée continue de poser les mêmes problèmes qui ont été relevés par les tribunaux.
    La première chose que je dirais, c'est que la modification n'est pas aussi simple qu'ils le prétendent. Elle demanderait de remanier considérablement la Loi pour éliminer les absurdités que les tribunaux ont soulevées dans leurs décisions et d'autres iniquités qui seraient créées par la modification. Je n'ai pas le temps de toutes les présenter, mais je vais mentionner celle que je trouve la plus critiquable: la modification créerait un système de doubles redevances, car les créateurs et les titulaires de droit d'auteur recevraient de l'argent au début, lorsque leurs oeuvres sont incluses dans un film, et à la fin, lorsque le film est présenté. C'est exactement pour cette raison que l'exclusion a été établie, et la Loi traite les oeuvres d'autres créateurs de la même manière lorsque ces oeuvres sont incluses dans un film.

  (1550)  

    Cela n'a jamais été une subvention. Les droits voisins compensent l'utilisation non contrôlée des enregistrements sonores qui peut être faite sans la participation de la maison de disques. Toutefois, pour avoir le droit d'utiliser de la musique dans un film, il faut obtenir une licence, pour laquelle les cinéastes ont déjà versé une compensation. Cette compensation est établie expressément dans un contrat. Les droits d'inclusion sont négociés directement avec le titulaire de droit d'auteur et ils sont acquis à l'échelle mondiale pour permettre la distribution mondiale et la présentation du film comme un seul produit, et non comme une collection d'oeuvres.
    Les recettes mondiales des salles de cinéma dépendent de ce modèle de distribution, et ce sont ces recettes qui paient les frais des cinéastes, y compris les paiements versés aux intervenants de l'industrie de la musique.
    C'est à peu près tout ce que je peux dire dans le peu de temps qui m'est accordé. Nous soumettrons un mémoire détaillé au Comité plus tard cette semaine, au nom de nos membres. Merci de l'invitation et de votre attention. Je serai ravi de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Pour la dernière présentation, nous avons la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma.
    La parole est à Mme Stéphanie Hénault et à M. Mathieu Plante.
    Nous aimerions vous parler du travail des auteurs comme scénaristes et de la façon dont la Loi sur le droit d'auteur pourrait enrichir à long terme la culture et l'économie canadiennes.
    Tout d'abord, permettez-moi de vous parler de notre organisme, la SARTEC. Sa mission est de protéger et de défendre les intérêts professionnels, économiques et moraux de tous les auteurs de langue française qui sont des travailleurs autonomes dans le domaine de l'audiovisuel au Canada. Elle négocie des ententes collectives avec les producteurs, conseille les auteurs quant à leurs contrats, perçoit en leur nom des redevances et contribue au respect de leur travail.
    Nos ententes collectives interdisent la cession de droits, mais elles accordent aux producteurs des licences d'exploitation du texte sous forme d'oeuvres audiovisuelles, elles encadrent la possibilité d'octroyer des licences à d'autres fins et elles permettent aux auteurs de percevoir des redevances des producteurs ou des sociétés de gestion collective, selon le type d'exploitation. Tout cela est précisé dans les ententes.
    Les scénaristes sont des créateurs qui consacrent leur vie à écrire et à imaginer les récits des héros et des valeurs canadiennes. Leurs scénarios sont la source d'oeuvres audiovisuelles qui rassemblent, émeuvent, font rire et réfléchir, font rayonner notre culture, notre pays, et font la promotion de sa grande richesse. Les retombées qu'ils génèrent sont des plus positives pour l'économie et le mieux-être des Canadiens. Pour que notre production audiovisuelle canadienne soit compétitive, nous avons la responsabilité de mettre en place dans la Loi des mécanismes modernes permettant aux créateurs d'être adéquatement rémunérés pour le fruit de leur travail.
    Il ne faut pas oublier que, pour faire son travail, l'auteur doit pouvoir accorder les droits liés à son oeuvre moyennant rémunération, que ce soit en vue d'un film, à une compagnie de théâtre pour une pièce ou à un éditeur dans le cas d'un livre. L'auteur doit avoir la capacité de monnayer les droits d'adaptation de son scénario et de bénéficier de ses retombées. Il s'agit d'un travailleur autonome qui assume souvent seul le risque de la création de son oeuvre. La Loi doit donc lui permettre d'atténuer ce risque, pour qu'il continue de créer et soit assuré de revenus décents dans l'économie numérique.
    Selon nous, la Loi doit permettre à nos enfants qui en ont le désir et le talent de rêver, eux aussi, de travailler un jour comme créateurs.

  (1555)  

    Pour ce faire, nous vous demandons essentiellement cinq choses. Aujourd'hui, le temps dont nous disposons nous oblige à vous présenter seulement trois d'entre elles.
    Premièrement, nous demandons que soient éliminées les exceptions injustes introduites en 2012 dans la Loi sur le droit d'auteur et dont souffrent les créateurs canadiens. Nous continuons vivement à dénoncer ces exceptions. En effet, elles compromettent la capacité de nos scénaristes à continuer d'écrire nos histoires, ce dont le Canada doit pourtant s'assurer.
    Deuxièmement, nous demandons que soit étendu aux oeuvres audiovisuelles le régime de copie pour usage privé. Les créateurs et les producteurs canadiens de l'audiovisuel sont les grands oubliés de ce régime, lequel fonctionne pourtant bien dans la majorité des pays d'Europe et ailleurs.
    Troisièmement, nous demandons que soit ajoutée une présomption de cotitularité du droit d'auteur de l'oeuvre audiovisuelle. Conformément à la jurisprudence canadienne, la Loi devrait préciser que le scénariste et le réalisateur sont présumés être les cotitulaires du droit d'auteur de l'oeuvre audiovisuelle. Le scénariste écrit le texte, une oeuvre littéraire qui guidera l'ensemble des collaborateurs subséquents vers l'oeuvre audiovisuelle. Pour sa part, le réalisateur fera des choix créatifs permettant de transformer le texte en une oeuvre audiovisuelle, choix qui en influenceront la facture.
    Le scénario décrit le plus concrètement possible le film à faire. En l'écrivant, le scénariste crée le récit. Il en décrit les personnages, leurs intentions, leurs comportements, leurs dialogues et leur évolution. Il énonce le film à faire scène par scène, incluant ses lieux, sa temporalité et son environnement sonore. De son côté, le réalisateur dirige les interprètes, les concepteurs et les techniciens pour que le travail du scénariste prenne sa forme audiovisuelle. Les choix de sa direction influenceront le style, le rythme, le ton et le son du film.
    Nous vous invitons donc à reconnaître que l'auteur du scénario, de l'adaptation et du texte parlé ainsi que le réalisateur sont présumés être les cotitulaires du droit d'auteur lié à l'oeuvre audiovisuelle. Nous n'aurions pas d'objection à ce que l'on tienne compte également de l'auteur des compositions musicales spécialement créées pour l'oeuvre.
    Finalement, nous demandons que la Loi soit modernisée pour que la protection qu'elle accorde aux oeuvres passe de 50 ans à 70 ans après la mort de l'auteur et pour qu'elle respecte mieux la propriété intellectuelle dans le cas d'oeuvres audiovisuelles numérisées et diffusées sur des plateformes numériques. Un mémoire plus explicite à ce sujet vous sera transmis ultérieurement.

  (1600)  

    Avant de terminer, je me permets de vous rappeler la fonction première de la Loi sur le droit d'auteur, qui est de protéger la propriété intellectuelle des créateurs pour leur permettre d'être rémunérés pour l'utilisation de leur travail.
    Nous croyons que vous avez le devoir d'encourager leur capacité à long terme de continuer à rassembler, à divertir, à émouvoir, à faire rire ou réfléchir, à faire rayonner notre pays, à promouvoir nos valeurs et à contribuer à notre fierté. Pour ce faire, nous croyons qu'il faut actualiser certaines des dispositions de la Loi pour la mettre au diapason des meilleures pratiques internationales associant les créateurs aux retombées économiques de leurs oeuvres.
    Nous vous remercions.
    Merci beaucoup de toutes vos présentations.
    Nous allons commencer la période de questions.

[Traduction]

    Nous allons passer directement à M. Longfield.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour les exposés concis que vous avez préparés pour nous et que vous nous avez présentés. Nous sommes ici pour trouver la bonne voie à suivre, et vos exposés nous aideront à y arriver.
    J'ai quelques questions; je vais m'adresser d'abord à M. Payette.
    Vous avez parlé d'apporter des changements à la Commission du droit d'auteur. J'ai rencontré un groupe de musiciens à Guelph récemment, et ils m'ont aussi parlé de la Commission. Ils étaient d'avis, entre autres, que la Commission du droit d'auteur devrait compter des musiciens.
    Avez-vous une opinion sur la composition de la Commission du droit d'auteur? Devrions-nous inclure des musiciens, des éditeurs et toute la gamme de parties prenantes?
    Je ne connais pas très bien les procédures de la Commission du droit d'auteur parce que ce sont surtout les sociétés de gestion qui se présentent devant elle. Je crois comprendre qu'il s'agit, grosso modo, d'un tribunal qui fixe les tarifs; c'est donc très technique.
    Je ne sais pas si la Commission devrait compter des musiciens, mais bien sûr, elle devrait comprendre des gens qui sont prêts à reconnaître la valeur de la musique créée.
    D'accord. Merci. Je m'interrogeais simplement sur la pleine mesure de l'observation.
    De plus, pour poursuivre sur la part qu'un artiste reçoit habituellement pour une interprétation en direct par rapport à une interprétation enregistrée ou publiée, avez-vous une idée de l'écart entre les deux? Certains musiciens ont dit que la façon de pouvoir être payés de nos jours, c'est de donner des concerts en direct, que les paiements pour les services de diffusion en continu ou les éditeurs ont baissé si radicalement qu'ils ont dû repenser la façon de commercialiser leur produit.
    Il existe différents types de professionnels dans l'industrie de la musique. On peut être un auteur-compositeur qui ne fait pas de prestations sur scène, mais dans le cas d'un auteur-compositeur qui est également un interprète, les spectacles sur scène sont devenus importants pour gagner sa vie.
    En ce qui concerne principalement les services de diffusion en continu, je dirais que nous devrions examiner ce que le Parlement européen a fait la semaine dernière et essayer d'obtenir plus d'argent des services. Je pense que c'est très important. Ils ont dit que les services de partage, par exemple, comme YouTube, devront payer pour toutes les diffusions. Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle. Ils ne paient que pour les diffusions qui sont commercialisées. Si un utilisateur publie quelque chose en ligne, sur YouTube, par exemple, aucun versement de fonds n'est effectué à l'heure actuelle. Cependant, si nous suivons ce qui se fait en Europe, des fonds seraient versés aux détenteurs de droits selon... Je pense que l'on parle de « communication au public » en Europe.
    C'est merveilleux. C'est utile. Lorsque nous examinons nos accords commerciaux avec l'Europe, ce qui comprend les ententes sur la propriété intellectuelle, et la façon de commercialiser en Amérique du Nord et en Europe, nous pouvons constater que la décision européenne pourrait avoir une influence. Cependant, c'est une décision récente, alors nous n'avons pas vraiment étudié la question, mais c'est très utile d'entendre vos premières impressions.
    Je pense que c'est un excellent exemple à suivre qui offre un bon équilibre pour les détenteurs de droits plutôt que d'avantager les grandes sociétés internationales. Elles n'ont pas toujours les licences et ne paient pas toujours pour la musique utilisée.
    Merci.
    Vous venez d'aborder une autre question à laquelle je pensais, à savoir la différence entre un auteur-compositeur et un interprète. Lorsque l'on pense à Aretha Franklin qui interprète la chanson Respect d'Otis Redding, elle n'a pas été payée pour cela. Elle a changé la signification de la chanson. Plutôt que ce soit un homme qui se fasse respecter par la femme à son retour à la maison, elle a vraiment changé la signification de la chanson dans son interprétation, mais elle n'a pas été payée pour cela.
    En ce qui concerne les revenus entre les interprètes et les auteurs, est-ce que c'est quelque chose qui a changé au fil des ans? Devrions-nous nous pencher sur cette question, du point de vue de la loi?

  (1605)  

    Je ne connais pas l'exemple. Je sais qui est Aretha Franklin, et je connais la chanson. Je pense qu'il y a un droit d'auteur sur la chanson, mais il y a également eu rémunération pour l'enregistrement de la chanson. Je pense qu'elle a touché de l'argent avec l'enregistrement de la chanson. Je ne connais pas le cas, mais il y a une rémunération prévue pour les interprètes. Je pense qu'il est normal que les auteurs soient rémunérés également. Les gens qui écrivent les chansons sont importants.
    Oui. J'imagine que c'est en lien avec l'interprétation de la chanson, alors merci de cette remarque. Il est bien triste que nous l'ayons perdue cet été.
    Permettez-moi de m'adresser à Mathieu et à Stéphanie pour examiner la façon dont un auteur canadien gagne sa vie en 2018 et les nouvelles tendances en matière de droit d'auteur. Je pouvais voir un lien entre l'Association des cinémas du Canada et le paiement des créateurs de musique et des interprètes par rapport aux auteurs qui sont rémunérés pour écrire des scénarios et des scripts. Savez-vous s'il y a une différence? Sont-ils payés à peu près les mêmes montants ou de la même façon?
    Je pourrais peut-être me renseigner auprès de Michael Paris pour savoir s'il y a un consensus ou s'il y a des connaissances dont vous pourriez nous faire part.

[Français]

    Nous n'avons pas discuté de ces questions. Cela étant dit, l'apport du scénariste au film est plus fondamental que celui du compositeur de musique.
    Vous cherchez à savoir si nous appuyons la revendication d'une rémunération additionnelle lors de la diffusion du film. Nous devrions y réfléchir. En principe, nous sommes toujours d'avis que les créateurs devraient être rémunérés non seulement lorsqu'ils créent, mais aussi proportionnellement aux utilisations qui sont faites de leur oeuvre. La proposition qui est faite vise une rémunération additionnelle en fonction de l'utilisation. La communauté des créateurs partage ce point de vue et juge que c'est important.

[Traduction]

    C'est exact. Quel accent met-on sur les créateurs?

[Français]

    On appelle cela être associé à la vie économique de l'oeuvre: si un film ou une émission de télévision connaît un très grand succès, il devrait être possible d'y être associé et d'en retirer des bénéfices.

[Traduction]

    Je suis désolé, mais nous n'avons plus de temps.
    Je suis certain que vous pourrez vous adresser à lui à nouveau. Nous n'avons plus de temps pour l'instant.
    Nous allons maintenant passer à M. Lloyd.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être venus aujourd'hui. Nous avons passé de nombreuses heures à examiner cette question, et maintenant que nous sommes de retour de la pause estivale, il est bien de nous rafraîchir la mémoire.
    Je vais adresser mes premières questions à vous, monsieur Payette. Vous avez peut-être entendu parler récemment que l'artiste Bryan Adams a pris la parole devant le comité du patrimoine, où il a formulé une recommandation liée à ce que nous appelons le droit réversif des musiciens. Au Canada, vous avez un droit réversif 25 ans après votre décès, et aux États-Unis, il est de 35 ans, et pas forcément après votre décès. Ce peut être durant votre vie.
    J'espérais que vous auriez une observation à faire sur ce témoignage et que vous nous fassiez part du point de vue de vos intervenants.
    Je ne pense pas qu'il serait nécessaire de l'inclure dans la loi. Les compositeurs doivent signer une cession de droits pour travailler avec un éditeur de musique, et ils ne le font même pas, car ils font leurs propres affaires.
    Il n'existe aucune disposition dans la loi qui empêche que ce dont nous discutons soit appliqué dans un contrat. Vous pourriez dire qu'après 35 ans, le droit d'auteur revient au compositeur. Il est déjà possible de le faire si nous voulons le faire, et je pense qu'il y a une différence entre la propriété et la rémunération. Je pense que ce qui est important pour les détenteurs de droits d'auteur, c'est la rémunération, et nous devrions nous concentrer là-dessus. Quelle importance devrions-nous accorder au droit d'auteur et combien d'argent pouvons-nous donner à l'industrie de la musique?
    Je conclurai en disant que les éditeurs de musique ont des listes de droits d'auteur qui génèrent des sources de revenus constantes, qui sont utilisées pour réinvestir dans les nouveaux talents. Il ne faut pas l'oublier. C'est le modèle d'affaires des éditeurs de musique.

  (1610)  

    Je ne suis pas certain si vous avez entendu la déclaration que M. Adams a faite au comité du patrimoine, mais vous dites qu'il n'y a aucun droit réversif ferme au Canada, que c'est un système de marché assez libre et ouvert. On peut céder ses droits pour une période aussi longue ou brève que l'on veut, et tout est une question de négociation.
    Oui, vous pouvez faire ce que vous voulez.
    D'accord, il sera très intéressant pour nous d'examiner la question plus à fond.
    Vous avez également évoqué les règles européennes récentes relatives aux filtres de contenu. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la façon dont ces règles ont une incidence sur l'industrie?
    Je ne faisais pas référence aux filtres de contenu, mais plutôt à ce qu'on a fait en Europe, et plus particulièrement en ce qui concerne l'article 13. Les Européens ont dit que c'est une communication au public même si l'oeuvre a été téléchargée par un utilisateur.
    À l'heure actuelle, si j'affiche du contenu en ligne, c'est protégé. Si c'est du contenu généré par l'utilisateur, la plateforme n'est pas tenue de payer et n'est même pas tenue d'avoir une licence. Le changement fera en sorte que les plateformes seront obligées d'avoir une licence et de payer les détenteurs de droits, même pour du contenu généré par l'utilisateur, et elles devront faire preuve d'une plus grande transparence. Ces entreprises ne sont pas transparentes à propos de ce qui est utilisé, et c'est le contenu des détenteurs de droits et des créateurs qui est affiché, et on ne sait pas ce que l'on en fait.
    Pensez-vous que si nous adoptons un modèle comme celui des Européens, nous améliorerons la transparence?
    Oui, exactement, et il y aurait des taux plus élevés pour l'ensemble de l'industrie de la musique, tout le contenu en ligne, et je pense que ce qu'ils cherchent à faire en Europe, c'est d'obliger YouTube et d'autres à payer davantage les détenteurs de droits.
    Merci.
    Mes prochaines questions s'adressent à vous, monsieur Tacit. La Cour suprême a été récemment saisie d'une affaire liée au recouvrement des coûts pour les fournisseurs de services Internet, et j'aimerais que vous nous en disiez un peu plus sur les répercussions de cette affaire sur vos intervenants et que vous nous fassiez part de vos idées pour l'avenir.
    Nous sommes d'avis que si les fournisseurs de services Internet sont tenus par la loi d'offrir certains services pour aider à faire respecter le droit d'auteur ou à relever les atteintes au droit d'auteur, ils devraient être indemnisés.
    En fait, les fournisseurs de services Internet sont les compagnies de téléphone du monde actuel. Leur rôle consiste à offrir du contenu, et non pas à le remettre en question ou à l'examiner, et je ne pense pas que dans une société démocratique, nous voulons changer cela. S'ils sont tenus de s'acquitter d'une fonction exigée par l'État, alors l'État devrait les indemniser, ou un mécanisme devrait être en place, peut-être pas par l'entremise de l'État, mais par l'entremise des parties qui ont un intérêt personnel ou commercial à faire valoir leurs droits d'être rémunérées.
    À combien estimez-vous le coût pour qu'un fournisseur de services Internet s'acquitte de ces fonctions?
    Les coûts peuvent varier considérablement. On a des fournisseurs de services Internet importants qui ont des outils d'automatisation et des entreprises familiales qui procèdent manuellement, si bien que les coûts varient énormément. Je ne suis pas en mesure de vous fournir une réponse. Des études ont été menées dans le passé sur le régime d'avis dans le cadre desquelles on essayait de maîtriser les coûts, à tout le moins durant cette période particulière.
    Nous ne nous sommes pas attardés sur cette question au cours des dernières années, car elle a été mise de côté quand le gouvernement a décidé de ne pas indemniser les fournisseurs de services Internet pour le traitement des avis. Étant donné qu'aucun règlement n'a été adopté pour autoriser un frais et que la loi et le régime d'avis à l'époque étaient stables, nous ne nous sommes pas attardés sur le sujet, à tout le moins pas en tant qu'association, mais il existe probablement des données, et nous pourrions assurer un suivi si vous le souhaitez.
    D'après vous, les technologies font-elles baisser les coûts de transaction? Pensez-vous qu'il y a de nombreuses possibilités de réduire les coûts pour les fournisseurs de services Internet?
    Les nouvelles technologies diminuent les coûts de tout ce que nous faisons.
    Seriez-vous moins contre l'idée alors, si les coûts diminuaient considérablement?
    Le coût, c'est le coût. Que ce soit 1, 10 ou 100 dollars, je ne pense pas que le principe de recouvrement des coûts soit différent.
    Là encore, si vous êtes tenus de faire quelque chose qui établit les coûts entre des intérêts privés, si les droits sont appliqués, même si ce sont des droits légaux, vous devriez être rémunérés.

  (1615)  

    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Masse.
    Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    C'est le mouvement européen que nous avons vu la semaine dernière, mais la Music Modernization Act a aussi été adoptée la semaine dernière aux États-Unis, un accord bipartisan que 80 sénateurs ont signé.
    Certains soutiennent que la collaboration est plus élevée que jamais car des fournisseurs comme Google, Amazon et Apple s'orientent vers la production. Ils s'intéressent davantage à la protection du contenu original car leurs investissements vont dans cette direction en quelque sorte.
    Comme première question aux témoins, je veux connaître la position du Canada. Il y a la décision européenne et la décision américaine. Où nous situons-nous, surtout du point de vue de votre organisation, dans les liens internationaux et nord-américains? D'après vous, quelle est votre position à la lumière des changements complexes qui sont apportés en Europe et aux États-Unis? Si vous ne connaissez pas la situation aux États-Unis, votre opinion changera-t-elle lorsque vous comprendrez cette décision qui a été prise concernant les droits d'auteur en musique hier à Washington?
    Je pense que le Canada accuse un retard à bien des égards. La durée de protection est de 50 ans partout. Elle est de 70 ans dans les pays de l'OCDE, aux États-Unis et en Europe. Le piratage est le pire problème. Le régime d'avis est extrêmement faible. Nous devons à tout le moins pouvoir donner un préavis et supprimer le contenu.
    La fixation du prix est un bon système pour l'instant, mais il n'est pas efficace. Je pense que nous devons corriger adéquatement la Loi sur le droit d'auteur.
    Quelqu'un d'autre veut-il intervenir à ce sujet?
    Pourrais-je faire une observation sur le régime d'avis et le régime d'avis et de retrait?
    Oui. J'aimerais entendre le point de vue international de votre organisation, car vous n'êtes pas un cas isolé au Canada en ce qui concerne les décisions en matière de rémunération en lien avec le droit d'auteur notamment.
    Nos partenaires européens et l'influence des Américains qui viennent ici auront une incidence directe sur votre capacité de faire le travail ici au Canada. J'aimerais entendre ce que vous avez à dire là-dessus. Ce sont des changements radicaux qui viennent d'être mis en place. Ils faisaient partie de nos accords commerciaux et ont été discutés dans le cadre d'échanges privés. Certains éléments se trouvent actuellement dans l'ALENA et d'autres dans un autre accord commercial.
    Je suis curieux à propos de ces éléments en évolution. On se regarde le nombril en ce qui concerne les droits d'auteurs, par l'entremise de ce processus et d'un examen quinquennal de notre loi. La réalité est que le monde a évolué depuis que nous avons adopté notre loi et entamé l'étude.
    Si vous avez quelque chose à dire, je serais intéressé de l'entendre.
    Je veux aborder un point précis. L'argument que j'ai fait valoir plus tôt était que les fournisseurs de services Internet sont des fournisseurs publics. Ils sont censés transmettre les données. Pour les amener à lutter contre la contrefaçon de manière plus proactive, vous demandez maintenant aux fournisseurs de services Internet de faire fi de leur intérêt économique personnel de se dégager de leur responsabilité relativement au contenu. C'est, à mon sens, une proposition très dangereuse dans une société libre et démocratique.
    Outre les coûts que les fournisseurs de services Internet assument, même s'ils pouvaient être indemnisés, je pense que c'est une pente glissante. C'est la raison pour laquelle nous nous opposons à toutes les mesures proposées par la coalition sur le régime d'avis et de retrait. Il n'y a pas que les intérêts des fournisseurs de services Internet. C'est une question de valeurs démocratiques globales pour le pays.
    Je sais que j'ai dit que j'allais seulement parler d'un point, mais je peux aborder ce sujet brièvement.
    La MTAC est membre de la coalition FrancJeu, et nous appuyons vivement cette initiative. D'après ce que je comprends, en ce qui concerne la proposition, l'observation qui a été formulée plus tôt était que la Loi sur le droit d'auteur offre actuellement un redressement par injonction pour ceux qui veulent donner suite à une violation. Aucun avocat dans la salle ne sera étonné si je dis, « Il n'existe pas de droit sans recours ». Le redressement par injonction est un recours pratique. On n'a pas à chercher plus loin pour voir combien d'injonctions ont été accordées en lien avec la Loi sur le droit d'auteur. C'est la raison pour laquelle la coalition FrancJeu propose une entité distincte pour traiter ces types de demandes.
    Je ne propose pas de parler au nom des fournisseurs de services Internet sur le fardeau en matière d'observation des règles en lien avec les ordonnances pour limiter l'accès à du contenu qui viole le droit d'auteur relevé par l'entité. C'est un peu au-delà de mes compétences, mais nous discutons depuis 20 ans de la façon d'intervenir efficacement dans les cas de violation. Je pense qu'un examen de la loi et une étude attentive et sérieuse des propositions de la coalition FrancJeu s'imposent.
    Je suis désolé de ne pas pouvoir fournir plus de contexte sur les changements qui ont été mis en place aux États-Unis hier, mais je signale que ce même système existe au Royaume-Uni et ailleurs. Le Comité devrait se pencher là-dessus.

  (1620)  

[Français]

    Vous demandiez quelle avait été la réaction de notre organisme à la suite de la directive du Parlement européen. Nous nous en sommes réjouis. D'ailleurs, le monde entier se réjouit de la directive qui a été adoptée par une très grande majorité des députés du Parlement européen, le 12 septembre.
    À notre avis, c'est un modèle de sagesse dont vous devriez vous inspirer, car il agirait en faveur de notre économie et de notre culture. Les revenus des créateurs ont diminué. Pourtant, l'utilisation de leurs oeuvres a été multipliée et s'est élargie. Il est temps de trouver un moyen de permettre aux créateurs canadiens et à l'industrie culturelle canadienne de récupérer l'argent qui sort du pays et qui n'y revient pas.
    Par exemple, la directive demande que les fournisseurs de services de partage de contenu, comme YouTube, concluent des contrats de licences équitables et appropriés avec les ayants droit. C'est quelque chose dont nous devrions nous inspirer.
    Malheureusement, je n'ai pas pris connaissance de ce que vous évoquiez aux États-Unis, mais nous allons nous y intéresser. Peut-être pourrons-nous vous fournir des indications additionnelles dans le mémoire que nous vous soumettrons.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je suis désolé, nous devons passer à un autre intervenant.
    Monsieur Graham, vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Payette et madame Hénault, je vais commencer par vous.
    Existe-t-il d'autres cas, qu'il s'agisse d'un bien, d'un produit ou d'autre chose que l'on possède, où la durée des droits dépasse la durée de vie de la personne qui en a la possession?
    J'ai entendu dire à deux reprises qu'on devrait augmenter la durée du droit d'auteur de 50 ans à 70 ans après la mort de l'auteur. Y a-t-il d'autres situations où, sur le plan économique, on conserve quelque chose après sa mort?
    Pour à peu près tout ce qu'on possède, il existe un droit de propriété. Après la mort, on le transfère à ses enfants. Si j'achète une maison, à ma mort, elle sera donnée à mes enfants. Le droit de propriété ne prend pas fin après une date précise. Voilà ce que je peux dire pour répondre à votre question.
    Cela répond à ma question. Le bien est donc transféré aux enfants ou à quelqu'un d'autre. Cela ne demeure pas la propriété de la personne, 70 ans après sa mort. Alors, pourquoi faites-vous cette demande?
    En fait, c'est la même chose. La durée de protection est transférée aux enfants, d'habitude. Je crois que la Convention de Berne disait que l'idée de la durée de protection de 70 ans était d'avoir, pour deux générations de descendants, une protection de l'oeuvre qui avait été créée. C'était l'esprit derrière la protection de 70 ans.
    Prolonger la durée de protection jusqu'à 70 ans après la mort équivaut à couvrir près de quatre générations. Pourquoi est-ce justifiable de demander une durée supérieure à 50 ans?
    Cela génère aussi des revenus pour les entreprises. Il n'y a pas que des particuliers qui peuvent être titulaires du droit d'auteur. Par exemple, des entreprises d'édition musicale peuvent le contrôler.
    Généralement, les liens de propriété n'ont pas de date de fin. C'est étrange qu'il y en ait une pour le droit d'auteur.
    Oui, mais une entreprise n'est pas quelque chose qui meurt.
    Permettez-moi d'ajouter une précision.
    Prenons le cas où je suis grand-mère et que je crée une oeuvre. La durée de 70 ans correspond à l'espérance de vie de mon petit-enfant. C'est comme si on vous disait que votre maison ne serait à vous que durant deux générations et que, après cela, tout le monde pourrait y habiter. Il y a une limite.
    À notre connaissance, l'ensemble des pays élargissent la durée de protection. Au Canada, le fait que la durée soit de 50 ans entraîne une perte de revenus. Lorsque les oeuvres canadiennes sont exploitées dans d'autres pays où la durée de protection est de 70 ans, l'argent perçu par les sociétés de gestion collective reste là-bas. Il ne revient pas ici, puisque c'est la loi du pays d'origine qui s'applique.
    Selon notre compréhension, ce n'est pas commercialement avantageux de refuser d'étendre cette protection à 70 ans.

  (1625)  

    Monsieur Payette, plus tôt, vous avez parlé d'imposer des frais de 3 $ lors de l'achat d'appareils comme les iPhone.
    Cela nous ramène à ce même débat que nous avons tenu, il y a 25 ou 30 ans, en ce qui concerne les disques compacts. En faisant pareille demande, présume-t-on que tous les utilisateurs sont des pirates?
    Non, nous ne présumons rien de ce genre.
    Pourquoi ne pas inclure ces frais dans le prix d'achat des oeuvres, au lieu de l'imposer lors de l'achat d'appareils?
    Par exemple, si j'ai 128 gigaoctets dans mon appareil, mais que je ne l'utilise pas pour écouter de la musique, pourquoi devrais-je payer pour cela?
    Ce que nous proposons, c'est que des redevances soient prélevées à l'achat. C'est un système qui existe en Europe et qui est très répandu. J'ai ici une liste de pays que je peux vous nommer: l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, la Croatie, la France, la Hongrie, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal et la Suisse ont adopté des régimes de copie privée. Il s'agit de redevances.
    C'est le même principe qui existait pour le CD, et nous voulons que cela continue. Je crois que c'était l'intention, en 1997. La Loi n'a peut-être pas été écrite de manière à être technologiquement neutre, mais cela aurait dû être le cas.
    Nous parlions tout à l'heure du système de notification et de retrait, ce qu'on appelle communément le système « notice and take down ». Est-ce justifiable sans l'ordre d'un juge ou de la cour?
    Je ne connais pas les détails de fonctionnement de ce système. Je peux cependant vous dire que le système actuel ne fonctionne pas. Plusieurs pays ont adopté des mesures plus importantes pour protéger le contenu, que ce soit le système de notification et de retrait ou le système de notification et de non-réitération des infractions, ce qu'on appelle le système « notice and stay down ».
    J'en profite pour dire, en réponse à la question, que si notre régime de droit d'auteur est plus faible que celui de tous les pays qui nous entourent et avec lesquels nous sommes en concurrence, que ce soit les pays d'Europe ou les États-Unis, cela nous désavantage. Cela apporte moins de revenus autonomes aux industries créatives. C'est vraiment à notre désavantage de ne pas fonctionner comme les pays qui nous entourent.

[Traduction]

    Monsieur Tacit, vous avez dit que vous aimeriez voir un système d'avis et qu'il y ait des limites, par exemple quant au nombre d'avis pour une même adresse IP et une même infraction.
    Combien d'avis reçoivent vos membres pour des infractions? Est-ce que ces messages font l'objet d'un DDoS?
    M. Copeland est bien placé pour répondre à cette question parce que c'est lui qui gère cela pour notre entreprise.
    Tout dépend de la taille du fournisseur de services Internet et du nombre d'utilisateurs finaux. Il peut y en avoir quelques centaines ou des milliers, même des dizaines de milliers et plus. C'est directement proportionnel au nombre d'utilisateurs. Plus ils sont nombreux, plus le risque que certains d'entre eux commettent des infractions est grand et le volume d'avis augmente.
    Pouvez-vous appliquer un avis et fermer le système ou procéder à un filtrage sans violer cette neutralité?
    Je ne le crois pas.
    C'est ce qui nous préoccupe. Sans la supervision des tribunaux, on risque fort de fragiliser les valeurs démocratiques de la liberté de parole et d'expression. Nous avons ces mesures de protection parce que les tribunaux sont les protecteurs ultimes de notre Constitution et de nos valeurs démocratiques. Il n'est pas nécessaire de faire autre chose. Je veux aussi souligner que les avis et le régime d'avis ne sont pas simplement un outil dont personne ne se soucie. Dans notre pratique, nous voyons des propriétaires de contenu qui vont devant les tribunaux pour obtenir des renseignements sur les utilisateurs afin de les poursuivre lorsqu'ils remarquent des infractions multiples à partir d'une adresse IP. Ces gens sont au Canada et peuvent se faire poursuivre pour dommages-intérêts d'origine législative. Ils peuvent recevoir une ordonnance d'injonction pour violation du droit d'auteur. Il n'y a aucune raison pour que ces recours ne soient pas disponibles.
    L'autre chose, c'est que bien que les fournisseurs de services Internet soient protégés, s'ils s'engagent de manière délibérée et répétée dans ce genre d'activités, la protection ne s'applique plus en vertu du paragraphe 27(2.3) de la Loi sur le droit d'auteur. Nous n'avons pas à aller très loin ni à compromettre nos valeurs pour régler ce problème.
    Il ne me reste que cinq secondes environ, et j'aimerais vous faire une demande, rapidement.
    Vous avez dit que vous receviez des avis dont la portée dépassait celle de la loi. Est-il possible pour vous de nous transmettre, plus tard, des exemplaires de ces lettres que reçoivent vos utilisateurs et dont le contenu dépasse largement ce qui est prévu dans la loi?
    Nous pourrions vous transmettre des documents caviardés.
    Merci. Je vous en suis reconnaissant.
    Si vous pouviez les transmettre au greffier, ce serait très bien. Merci.
    Monsieur Albas, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence ici aujourd'hui. C'est un sujet fascinant et je vous remercie de nous faire part de votre point de vue.
    J'aimerais commencer avec M. Tacit.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé d'intégration verticale. Bon nombre d'entre nous connaissent bien ce concept, mais j'aimerais savoir à quels types de fournisseurs de services Internet vous faites référence.

  (1630)  

    Les plus importants, ceux qui ont le plus de ressources et qui mènent la coalition FrancJeu, sont Bell, Rogers, Shaw, Vidéotron, etc.
    Ce sont donc ceux qui participent à la création, à la distribution et au contenu...
    Oui. Soit directement ou par l'entremise de groupes affiliés.
    Vous dites qu'il y a quelques options. Si l'on mettait en place un programme comme celui proposé par FrancJeu, il y aurait des coûts rattachés à cela. Vous avez dit que l'État pourrait s'en charger, ce qui veut dire les contribuables canadiens, ou une partie d'entre eux.
    Encore une fois, il est question de proportionnalité, parce que dans certaines régions, bien sûr, les fournisseurs de services Internet sont beaucoup plus petits et visent des marchés à créneaux, surtout dans les régions rurales, et cette proportionnalité aurait une plus grande incidence sur eux. Est-ce exact?
    Cela dépend de leur taille et des mesures technologiques exigées.
    Par exemple, vous ordonnez à un fournisseur de services Internet de réaliser une inspection approfondie des paquets, qui vise à inspecter les en-têtes de paquet qui en disent beaucoup sur le type de trafic. Si l'on utilise cette méthode pour détecter les infractions — et nous ne parlerons pas de l'efficacité de cette méthode, mais disons qu'elle est efficace —, alors il en coûtera facilement 100 000 $ pour chaque boîte d'IAP. Pour un petit fournisseur de services Internet, qui a deux à quatre employés, cela peut entraîner la fermeture de l'entreprise.
    Surtout dans les régions rurales où le réseau est plus petit...
    Peu importe où ces fournisseurs se trouvent.
    ... ou un réseau qui coûte très cher à alimenter.
    Oui.
    Donc, l'autre solution consiste à demander aux entreprises médiatiques qui exigent le retrait de s'en charger, et elles refileraient la facture à leurs clients. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Si nous empruntons cette voie, les consommateurs ou les citoyens canadiens — ou une partie d'entre eux — devront inévitablement régler la note.
    Il faut que quelqu'un d'autre que cette personne — la partie innocente qui doit faire le travail — le fasse.
    En ce qui a trait à ces outils automatiques, mon collègue M. Lloyd a fait valoir que la nouvelle technologie semblait...
    Je sais que bon nombre de jeunes — et des moins jeunes aussi, probablement — jouent à des jeux vidéo avec une musique en arrière-plan. Ils génèrent leur propre contenu et le partage avec d'autres pour divers jeux. Cette musique qui joue en arrière-plan pourrait déclencher l'un de ces retraits automatiques si la technologie était... parce qu'il y a des protections associées à la satire, au partage individuel et à d'autres.
    On risquerait de cibler ces gens, non?
    Possiblement, oui, parce que l'inspection des paquets — qui mène au blocage — ne fournit pas suffisamment d'information sur le contexte de transmission de ces paquets. Vous avez raison: certains pourraient être autorisés et d'autres non.
    Vous avez dit plus tôt que si nous mettions en place un tel système, les fournisseurs de services Internet songeraient à leurs intérêts économiques plutôt qu'à d'autres valeurs.
    Pouvez-vous nous parler d'un cas où un fournisseur de services Internet aurait à prendre une telle décision? Encore une fois, nous leur demandons de réglementer le comportement des autres, ni plus ni moins. Il se peut qu'il s'agisse d'exploitation pour moi, mais que pour d'autres, ce soit du contenu généré par l'utilisateur, qui leur appartient.
    Pourriez-vous nous donner quelques exemples à titre comparatif?
    Si dans la diffusion du contenu, la question a été soulevée...
    En passant, il y a déjà des dispositions qui empêchent les fournisseurs de services Internet et d'autres participants de cet écosystème de profiter de la protection si une ordonnance de la cour fait état d'une infraction et qu'ils décident de l'ignorer. Il est assez clair qu'ils ne doivent pas procéder ainsi.
    Toutefois, lorsqu'il n'y a aucune détermination juridique permettant de dire « je crois qu'ils font cela de façon délibérée et je vais bloquer leur trafic », alors l'entreprise de télécommunications prend le rôle du juge pour déterminer ce qui doit passer dans ses fils. C'est pourquoi je dis que c'est très... Si j'étais fournisseur de services Internet, j'aurais tendance à me montrer conservateur et si la sanction est très importante — disons que je risque de subir d'importants dommages-intérêts d'origine législative —, je serai peut-être plus tenté de courir le risque de me faire poursuivre par la partie si je me trompe, parce que ces dommages-intérêts seront moins importants que les dommages-intérêts d'origine législative, surtout pour les infractions récurrentes, où chaque jour est considéré comme étant une nouvelle infraction, ou peu importe. Je m'immiscerais peut-être dans ce trafic parce que je me préoccuperais de ma responsabilité.
    Nous ne voulons pas que les entreprises de télécommunications se retrouvent dans cette situation.

  (1635)  

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Baylis.
    Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vais commencer par m'adresser à M. Payette.
    Vous avez décrit un changement dans la loi en Europe. Selon ce que j'ai compris, ce changement donne aux sociétés de gestion collective la possibilité de négocier ou de lancer des poursuites.
    Pouvez-vous nous en parler un peu plus, s'il vous plaît?
    Oui, bien sûr.
    Ce changement renforce le pouvoir des sociétés de gestion collective et leur donne le droit d'établir des accords pour tout le contenu mis en ligne. Actuellement, du contenu est mis en ligne par les utilisateurs, et nous sommes tous d'accord pour que les utilisateurs puissent mettre du contenu en ligne. Ce qui va changer, c'est que les plateformes vont devoir payer pour le contenu mis en ligne par les utilisateurs. Donc, YouTube devra payer pour ce que les utilisateurs mettent en ligne.
    Ce sera négocié.
    Oui.
    Est-ce qu'on donne le droit de négocier ou est-ce qu'on force la négociation?
    Comme il est établi qu'il y a une communication publique, même quand c'est du contenu généré par les utilisateurs, il y a un droit à respecter. Les plateformes n'ont donc pas le choix de négocier avec les sociétés de gestion collective.
    Ce sera donc négocié par les sociétés de gestion collective. En effet, il serait quasi impossible de négocier avec chaque utilisateur. Par exemple, si je créais une petite chanson et que je la mettais sur YouTube, j'imagine que je ne pourrais pas négocier un tel accord.
    Ce serait les sociétés de gestion collective qui négocieraient.
    La loi précise-t-elle que ce sont ces sociétés qui négocient?
    Je pense que c'est mentionné dans le texte qui a été adopté en Europe.
    De toute façon, dans certains cas, il y a déjà des ententes. Par exemple, YouTube a conclu des ententes avec la SOCAN, mais seulement pour la partie qui est monétisée au moyen de la publicité. Quand le contenu protégé n'est pas lié à une publicité, aucun revenu n'est versé aux ayants droit. Il faut comprendre que YouTube en profite quand même, parce que cette plateforme retire les données, attire des utilisateurs et organise le contenu. Elle fait toutes sortes de choses, mais elle ne paie rien pour le contenu.
    Donc, si YouTube veut mettre sur Internet une série de chansons qui sont protégées ou dont les droits sont gérés par une société de gestion collective, YouTube doit payer cette société de gestion collective ou entamer des négociations en vue de déterminer un certain montant à payer.
    C'est cela. Au Canada, les négociations sont généralement validées par la Commission du droit d'auteur.
    C'est en vue de déterminer la valeur du contenu.
    C'est cela.
    D'accord.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Hénault?
    Je suis d'accord sur ce qu'a dit M. Payette. C'est aussi la compréhension que j'en ai.
    Cela toucherait-il aussi les scénaristes?
    Oui, parce que les scénaristes perçoivent, en Europe et au Canada, des redevances de certains diffuseurs. Au Québec, cela se fait plus particulièrement par l'entremise de la SACD, une société de gestion collective européenne qui a aussi un bureau à Montréal. Nos scénaristes reçoivent des redevances de certains diffuseurs par l'entremise de la SACD. Lorsque les oeuvres de nos scénaristes sont diffusées en Europe, la directive européenne nous réjouit, mais il faut quand même régler le décalage qu'il y a entre le système européen et le système canadien.
    Très bien, merci.

[Traduction]

    Monsieur Paris, je m'adresse à vous pour en savoir plus au sujet des enregistrements sonores. Votre argument s'oppose à celui des musiciens. Vous dites qu'ils sont payés deux fois.
    Qu'est-ce qu'ils demandent que vous ne voulez pas leur donner? Si je peux poser la question ainsi.
    Ils demandent de retirer de la définition d'enregistrement sonore l'exception relative aux bandes sonores des oeuvres cinématographiques lorsqu'elles accompagnent celles-ci. L'enregistrement sonore n'est pas comme une chanson; le son d'une explosion ou tout ce que vous entendez sur la piste audio d'un film est un enregistrement sonore. La définition d'un enregistrement sonore aux fins de l'article 19, lorsqu'elle correspond à ce que je vous décris, donne lieu à un flux de redevances, tandis qu'un enregistrement sonore qui n'accompagne pas la bande sonore d'une oeuvre cinématographique... C'est seulement lorsqu'elle accompagne le film que l'exception s'applique. Si la bande sonore du film joue à la radio, par exemple, les droits voisins s'appliquent et des redevances sont payées.
    Ce que les musiciens veulent, c'est d'éliminer cette exception, ce qui voudrait dire qu'à chaque fois qu'un film est projeté dans un cinéma, il y aurait des redevances pour tous les effets sonores et toutes les chansons. C'est à cela que nous nous opposons.

  (1640)  

    Ce qui vous préoccupe, ce sont les chansons ou les effets sonores? Ce sont deux choses différentes. Il serait impossible de payer pour chaque effet sonore. Disons qu'une personne compose une belle chanson, qui est utilisée dans un film. Vous voulez faire un paiement au départ, mais ne pas à payer des redevances courantes. C'est bien cela?
    C'est l'équilibre que l'on maintient actuellement.
    C'est ce qui se passe en ce moment.
    Oui.
    Il en va de même pour un danseur qui crée une chorégraphie. À l'heure actuelle, cette personne peut exiger un taux au départ, mais ne peut pas ensuite être rémunérée en vertu de la loi lorsque la chorégraphie est utilisée dans un film. On reconnaît que le film forme un tout. C'est à cela que nous nous opposons: le paiement, par les exploitants, de redevances pour chaque chanson, chaque effet sonore ou chaque numéro de danse qui se trouve dans un film. Nous sommes en désaccord avec cela.
    Nous revenons à M. Albas. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci. Je vais partager mon temps de parole avec M. Lloyd; je l'espère.
    Je veux faire suite aux questions de mon collègue M. Baylis.
    Monsieur Paris, à ce sujet, certains films ont été tournés il y a près de 100 ans et sont parfois remastérisés; ils ont été reformatés pour de plus petits écrans comme ceux des téléphones, par exemple. Je me demande comment on pourrait percevoir des redevances pour la diffusion continue. Au moins, dans votre domaine, il y a des exploitants. Ils peuvent dire: « Je vais charger x dollars à la porte; voici combien de personnes ont vu le film, alors je peux payer en fonction de cela. » Or, pour une oeuvre qui est utilisée de toutes sortes de façons, ce qu'on demande ici c'est de verser des redevances chaque fois qu'elle est diffusée en continu ou en ligne.
    J'ai regardé Monsieur Smith au Sénat sur Google, qui offre un service gratuit. J'espère que M. Tacit ne devra pas le retirer du Web. Vous pourriez peut-être nous expliquer comment fonctionneraient ces coûts pour les diverses plateformes; pour les exploitants et pour la diffusion en continu.
    Bien sûr. La disposition à laquelle je fais référence ici, c'est l'article 19. Vous mettez ma mémoire à l'épreuve, mais selon mon souvenir, l'article fait référence à toute forme de communication publique ou à la communication de l'oeuvre par l'entremise des télécommunications. Je ne suis pas ici au nom d'un service de diffusion en continu et je ne suis pas un avocat spécialiste du droit d'auteur, mais selon ce que je comprends cela s'appliquerait à la diffusion en continu.
    Dans le cas hypothétique auquel vous faites référence, Monsieur Smith au Sénat est une oeuvre historique et l'exploitant paierait le distributeur qui détient les droits de ce film. Nous prendrions une partie des ventes de billets au cinéma, puisqu'il s'agit d'une représentation publique. Les gens entrent au cinéma et regardent le film.
    Si vous supprimez l'exemption qui donne aux détenteurs des droits voisins ou qui permet d'associer des redevances à une représentation publique ou à la télécommunication de l'oeuvre, alors nos droits dépasseraient l'obligation du distributeur et nous devrions payer des redevances au créateur ou à l'interprète de l'enregistrement qui a été intégré à un film.
    À notre avis, nous avons atteint un équilibre parce que lorsque vous vendez vos droits afin que votre travail fasse partie d'un film, vous ne pouvez pas vous prévaloir aussi de vos droits voisins, qui visent à rémunérer l'artiste lorsque la communication publique de son travail est hors de son contrôle. Pensons par exemple aux chansons diffusées à la radio. La maison de disques ne donne pas sa permission chaque fois qu'une chanson tourne à la radio. Les droits voisins existent pour permettre que des redevances émanent de l'utilisation incontrôlée et peut-être involontaire de l'oeuvre, tandis que dans un film, l'utilisation d'une chanson, d'un numéro de danse, d'un monologue ou peu importe est tout à fait intentionnelle, négociée et rémunérée dès le départ.
    À notre avis, en demandant aux exploitants de payer une autre fois, on bouleverse l'équilibre qui a si bien servi l'industrie cinématographique jusqu'à présent.
    Je vais prendre la parole, rapidement. Ma question porte sur le même sujet. Combien de personnes ont à leur emploi les gens que vous représentez, environ?
    Je peux vous parler de Cineplex. C'est de l'ordre de dizaines de milliers de personnes.
    Donc, si nous adoptons la recommandation d'inclure les redevances sur le son, il y a le double prélèvement dont vous parlez. Est-ce que cela vous désavantage nettement par rapport aux entreprises comme Netflix et Prime Video?

  (1645)  

    Oui, bien sûr, et vous posez une excellente question. Nous avons divers désavantages concurrentiels, et que Netflix ne paie pas de taxes ici n'est pas le moindre de ces désavantages. Il y a d'autres coûts que Netflix ne paie pas nécessairement, comme les frais de classification des films, et les services de diffusion sont épargnés de tous les coûts qu'une entreprise traditionnelle doit assumer. Dans la situation qui nous intéresse, je suppose que de telles redevances s'appliqueraient aussi bien aux exploitants qu'aux services de diffusion — si je ne me trompe pas —, et c'est donc une couche supplémentaire de coûts. Ce que cela représente pour les grandes chaînes est une chose, mais c'est une tout autre chose pour les cinémas indépendants.
    Je reviens à ce que mon collègue a dit des FSI. Si vous exploitez un cinéma doté d'un seul écran...
    Mais cela va faire disparaître des emplois dans votre industrie.
    Oui, tout à fait. Cela va faire disparaître des emplois, ainsi que des cinémas.
    Merci beaucoup.
    C'est à vous, madame Caesar-Chavannes. Vous avez cinq minutes.
     Merci. Je vais partager mon temps avec M. Lametti.
    Je vous remercie de votre présence.
    Je vais continuer dans la même veine que M. Lloyd. Monsieur Paris, quelles sont les incidences des redevances qu'on exigerait pour les enregistrements ou les trames sonores, une fois qu'ils sont en possession de l'exploitant ou utilisés dans son établissement? Quelles sont les incidences, outre les autres éléments du film? Si nous commençons par dire que ces redevances doivent être payées — vous avez mentionné la chorégraphie, ainsi que d'autres éléments —, et que nous nous engageons dans cette voie, quelles sont les incidences pour les exploitants et, en plus, pour bon nombre de ces commerces, dont certains sont des commerces familiaux et d'autres n'ont qu'un écran? Quelles sont les incidences, au-delà de cela?
    Pour répondre très brièvement à cela, je dirais que ce serait un coût d'exploitation supplémentaire, un coût d'exploitation plus élevé. Je ne suis pas en mesure maintenant de vous dire ce que cela représente ou de quantifier cela. Nous réagissons à la proposition telle qu'elle se présente maintenant.
    Quant à parler de ce que cela représenterait pour d'autres sociétés de gestion collective, je peux seulement vous dire que la proposition dont je parle aujourd'hui provient de l'industrie de la musique. Elle ne vient pas d'ailleurs. Mais quand vous vous mettez à traiter une catégorie de créateurs différemment, il est évident qu'il y aura un effet d'entraînement. Je pense qu'on risque de voir un peu cela. Les incidences des coûts d'exploitation supérieurs dépendront de la position commerciale de la chaîne ou de l'exploitant du cinéma particulier.
    Je peux vous dire très généralement — un des honorables membres du Comité y a fait allusion précédemment, et je suis sûr que tout le monde sera d'accord — que l'économie créative vit d'importantes perturbations. L'étude de Téléfilm indique que les exploitants doivent faire concurrence aux services de diffusion, mais je dirais que nous devons aussi faire concurrence à toutes les autres formes de divertissements extérieurs qui existent: les activités sportives, les concerts, les musées, tout ce qu'il y a sur votre téléphone. Les coûts d'exploitation qui s'ajoutent, c'est de l'argent que les exploitants de cinémas indépendants ne peuvent pas investir dans le cinéma, ce qui comprend les salles, la technologie, l'embauche de jeunes pour leur premier emploi, et ainsi de suite.
    Monsieur Lametti, vous avez deux minutes et demie.
    Je pense que ce que vous nous demandez tous de faire, c'est de nous pencher sur les positions initiales entre le droit d'auteur et le contrat, dans le sens que vous voulez que nous disions si l'auteur doit être payé à l'avance en vertu d'un contrat ou s'il doit obtenir des redevances additionnelles par la suite.

[Français]

    C'est la même chose en ce qui concerne la cotitularité, dont M. Plante et Mme Hénault viennent de parler. Pour nous, il s'agit de déterminer si l'auteur doit être payé une seule fois, à l'avance, en vertu d'un contrat, ou par la suite, au moyen de redevances liées au droit d'auteur.
    Monsieur Payette, il est surprenant que vous n'ayez pas de point de vue sur ce que M. Adams a proposé hier. À l'heure actuelle, le paragraphe 14(1) de la Loi sur le droit d'auteur prévoit, pour les auteurs, la réversibilité du droit d'auteur 25 ans après leur mort. Ce que M. Adams a demandé hier, c'est que ce soit établi à 25 ans après la création de l'oeuvre.
    Il est très important pour vous de prendre position là-dessus, n'est-ce pas?
    Si vous me le permettez, je vais préciser mon point de vue à ce sujet. Je crois que c'est 25 ans après la mort de l'auteur...
    C'est ce que dit la Loi actuelle.
    Oui. Il demande que le droit d'auteur soit redonné 35 ans après, mais, comme je l'ai dit, cela peut être négocié dans le cadre d'un contrat.
    Oui, mais cela change la position de base, le pouvoir qu'on a au début, n'est-ce pas?
    Oui, bien sûr. Ma position est claire: je ne crois pas que cela devrait être incorporé à la Loi. Si M. Adams avait voulu récupérer ses droits d'auteur après 35 ans, il aurait pu le faire de nombreuses façons. Il aurait pu notamment négocier cela à la base ou décider ne pas faire affaire avec un éditeur. Plusieurs possibilités s'offraient à lui.
    Je ne pense pas que ce soit là que se situe le débat autour de la révision de la Loi. Il s'agit en réalité de déterminer comment on peut aller chercher des revenus pour les auteurs et les créateurs.

  (1650)  

    C'est exactement ce que M. Adams proposait, à savoir qu'il faut donner plus de pouvoir aux auteurs dès le début, précisément au moyen d'un droit de réversibilité après 25 ans.
    En effet.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Masse, vous avez deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Paris, pour avoir une idée des coûts que vous devriez subir — vous ne pouvez pas les quantifier, compte tenu de ce qui est proposé —, quels seraient les éléments administratifs de cela? Vous êtes peut-être en mesure de quantifier cela. Je sais que vous ne pouvez pas préciser ce que cela coûte. Peu importe où va l'argent, je suis simplement curieux à propos du traitement, à moins que ce ne soit pas un facteur du tout.
    Dans la documentation de Music Canada, je pense qu'ils estiment que le coût des redevances additionnelles qui seraient exigées des diffuseurs et des exploitants s'élèverait à environ 45 millions de dollars. Ce montant n'est cité nulle part. Je ne sais pas si c'est plus ou moins que cela, mais c'est leur estimation approximative.
    En ce qui concerne la façon dont cela serait administré, j'imagine qu'il faudrait avoir un tarif de la Commission du droit d'auteur qui serait négocié et payé. Je ne suis pas sûr de pouvoir vous parler en détail de la façon dont cela serait administré. Je peux vous dire que, d'après moi, ils organiseraient cela comme le font les autres sociétés de gestion collective pour la réalisation de leur mandat.
    Est-ce qu'on peut dire qu'il y a une façon facile d'intégrer cette nouvelle proposition à l'infrastructure existante, sur le plan de l'administration, ou qu'il n'y a pas de façon facile? Ou est-ce plutôt quelque chose qui exigerait un nouveau modèle?
    Je ne pense pas pouvoir parler du fardeau administratif.
    Puis-je en parler? En ce moment, les cinémas paient déjà les détenteurs de droits. Ils ont des ententes avec la SOCAN. Selon le tarif 6, les cinémas doivent payer 1,50 $ par siège, par année, à la SOCAN, pour la perception et l'administration. D'après ce que je comprends, pour les enregistrements sonores, ce serait l'autre côté. Ce serait pour la chanson et l'enregistrement de la chanson qu'ils auraient à payer une société de gestion collective, comme Re:Sound.
    Comme je l'ai dit. Ce n'est nouveau pour personne. Nous payons des tarifs à certaines sociétés de gestion collective. Je dis que je m'attends à ce que ce soit organisé d'une façon très semblable, mais cela dépendrait vraiment de la société de gestion collective avec laquelle nous traitons et de ce qu'on nous demande en réalité. Dans la situation qui nous intéresse, pour les enregistrements sonores, je pense que ce serait une autre société de gestion collective que la SOCAN, peut-être plusieurs sociétés de gestion collectives. J'imagine que ce serait administré de la même façon, comme avec Re:Sound.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous en sommes à la fin de ce tour. Il nous reste assez de temps pour faire un deuxième tour de trois questions de sept minutes.
    Nous revenons à M. Jowhari.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins. Je vais partager mon temps avec M. Baylis.
    J'ai une question à poser à M. Payette.
    Je vais vous faire part de certaines données. C'est une préoccupation que j'ai, à propos des données que j'ai regardées. C'est lié à la baisse du revenu médian des musiciens et des chanteurs. Selon les données que j'ai vues, entre 2010 et 2015, les revenus des éditeurs de musique canadiens ont augmenté pour passer de 148,3 millions de dollars à environ 282 millions de dollars. Au cours de la même période, le revenu médian d'un particulier qui travaille à temps plein dans l'industrie canadienne de la musique a également augmenté. Il s'agit de producteurs, de réalisateurs, de chorégraphes, de chefs d'orchestre, de compositeurs et d'ingénieurs.
    Cependant, le revenu médian des musiciens et chanteurs a baissé d'environ 800 $, entre 2010 et 2015. Pouvez-vous me dire ce qui expliquerait cela, d'après vous?
    Il y a des rôles différents, pour les auteurs, les compositeurs ou les artistes. Les éditeurs de musique représentent les auteurs-compositeurs. Si les éditeurs de musique font plus d'argent, les auteurs-compositeurs en font plus aussi. Cependant, de manière générale, il y a peut-être eu moins de spectacles, ou les auteurs-compositeurs particuliers ont fait moins d'argent parce qu'il y a plus d'auteurs-compositeurs. Le principal problème, c'est que le nouvel environnement numérique paie moins que l'environnement traditionnel. Pour les auteurs-compositeurs, les compositeurs et les musiciens, c'est très...

  (1655)  

    D'après vous, est-ce que des modifications pourraient être apportées à la Loi sur le droit d'auteur pour améliorer la situation des musiciens et des chanteurs, sur le plan des revenus?
    Bien entendu, si les musiciens et compositeurs recevaient plus d'argent de YouTube ou d'autres services en ligne, cela leur faciliterait la vie.
    D'accord. Merci.

[Français]

    Madame Hénault, vous avez parlé de l'idée voulant que les scénaristes et les réalisateurs deviennent cotitulaires des droits d'auteur. Je veux comprendre pourquoi.
    Vous attendez-vous à recevoir plus d'argent ou désirez-vous simplement disposer de ce droit? Pourriez-vous m'expliquer le raisonnement sur lequel repose cette idée?
    En ce qui concerne les redevances perçues par les sociétés de gestion collective ici et à l'extérieur, au Canada nous sommes pénalisés du fait que la présomption de cotitularité n'est pas inscrite dans la Loi sur le droit d'auteur. Cela affaiblit la capacité de la SACD, notamment, de percevoir des redevances pour les réalisateurs à l'extérieur du pays.
    Nous vous demandons de le préciser dans la Loi. Cette précision ne représente pas une révolution; c'est conforme à la jurisprudence. Nous demandons que cette présomption soit incluse dans la Loi.
    Nous vous avons décrit le travail du scénariste et du réalisateur sur l'oeuvre audiovisuelle. Il coule de source que ce sont les premiers titulaires de l'oeuvre audiovisuelle en soi. C'est une précision que nous cherchons à apporter afin de donner à des sociétés de gestion collective étrangères un levier pour percevoir ces droits au nom de Canadiens pour des diffusions à l'étranger, là où il y a des régimes de copie privée en audiovisuel, par exemple. Dans certains pays, par exemple en Europe, il y a des collèges où les producteurs, les interprètes et les auteurs sont ensemble pour percevoir les droits de la copie privée. Des réalisateurs y sont aussi.
    Selon cet exemple, cela inclut aussi les producteurs. J'ai de la difficulté à dire que le producteur, qui va choisir beaucoup de choses dans la fabrication d'un film, n'est pas un auteur.
    Le producteur n'est pas un auteur. Le producteur engage des auteurs et des créateurs, mais il ne crée rien; il administre une production. Il va chercher des licences pour produire et exploiter le film. Il va partager ses revenus avec les scénaristes. Dans nos ententes collectives, si un auteur a écrit tout seul un scénario de série télévisée, il va négocier un contrat d'écriture. S'il y a des revenus, il touchera des redevances. Cet élément est fondamental. Si, au Canada, on ne reconnaît pas que, en plus de la rémunération pour le travail, on puisse bénéficier de la rémunération pour le succès remporté, aucun créateur ne voudra faire ce travail.
    D'accord, merci.

[Traduction]

    Je vous remercie de partager votre temps, monsieur Baylis.
    Je crois que M. Masse a vraiment cerné un des points cruciaux que je vois comme étant la source des préoccupations: les nouveaux accords conclus en Europe et aux États-Unis. Nous pourrions facilement voir nos ressources créatives quitter le Canada pour aller sur les marchés où vous pouvez en fait vous faire payer pour la création de produits et d'oeuvres.
    Le marché au Canada ne fonctionne pas. Quelqu'un fait de l'argent, mais pas les musiciens ni les créateurs. Je crois que nous devons examiner cela très soigneusement et peut-être même accélérer notre étude pour présenter des conclusions, de sorte que nous puissions protéger les créateurs au Canada. Nous créons des emplois de classe moyenne, grâce à cela, mais ce que nous avons maintenant, c'est soit des personnes appauvries, soit des personnes très prospères, dans l'industrie. Il n'y a pas de milieu. Le marché ne fonctionne pas.
    Est-ce qu'un de vous pourrait me dire rapidement si ce sont les éditeurs qui font de l'argent, et les services numériques...? Les entreprises numériques font énormément d'argent, et les artistes ne profitent pas d'une partie des profits. Comment pouvons-nous orienter notre étude pour être en mesure d'approfondir encore plus cette question?
    Par exemple, les éditeurs de musique partagent soit 50 % ou 75 % — ou un autre pourcentage, mais c'est en général entre 50 % et 75 % — avec les auteurs. Bien entendu, ils travaillent pour les auteurs. C'est ce qu'ils font. Il est normal qu'ils se fassent payer. Le problème, c'est qu'il n'entre pas assez d'argent dans le système. L'argent n'y est pas, parce que les entreprises numériques font beaucoup d'argent avec le contenu. C'est là le problème. Vous avez raison. Si nous n'avons pas une protection suffisante du droit d'auteur au Canada, nous sommes désavantagés par rapport à nos autres partenaires.

  (1700)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Albas, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour tous vos témoignages.
    L'une des préoccupations que j'ai... J'en ai beaucoup. Je me préoccupe de l'incapacité des musiciens de subvenir aux besoins de leur famille et de faire respecter leurs droits. C'est important. Je m'inquiète aussi beaucoup de l'innovation et de la façon dont les gens peuvent produire du nouveau contenu. J'ai entendu des histoires, comme celle de la façon dont une personne va écrire une chanson et la publier sur YouTube. Mais parce que chaque jour, il s'ajoute des années de contenu sur YouTube, la plateforme ne peut absolument pas retenir les services d'assez de personnes pour tout regarder. J'ai entendu parler de cas où, à cause de ces filtres, vous aurez tout à coup le message: « Nous sommes désolés, mais vous portez atteinte aux droits de quelqu'un d'autre. » Et le contenu est alors retiré. C'est du contenu nouveau et original. De toute évidence, la technologie n'est pas encore au point. Je pense à certaines nouvelles règles dont on parle en Europe, et je m'inquiète de ce qu'elles entraînent le retrait de contenu légitime, que ce soit le cas d'une personne qui critique une pièce ou qui produit du nouveau contenu, qu'il s'agisse de musique utilisée à des fins satiriques ou pour faire une critique, etc.
    Je vois qu'il y a un équilibre, mais j'aimerais en entendre un peu plus sur la façon dont vous abordez un problème comme celui-là, où la technologie... En particulier en Europe, où les exigences sont beaucoup plus sévères, je m'inquiète de ce que ces règles visant le contenu obligent les applications du même genre que YouTube à exclure des innovations légitimes, ou des critiques légitimes, et ainsi de suite.
     Monsieur Payette.
    Je ne crois pas que la plus grande menace à l'économie créative du Canada soit le manque d'argent qui entre dans le système. YouTube a déjà une technologie — le système Content ID — pour identifier les détenteurs de droits. Ils ont des dispositions en Europe pour protéger les petites entreprises ou l'utilisation de contenu en ligne à des fins éducatives, alors cela ne représente pas une menace pour l'innovation. Il faut juste qu'ils rémunèrent mieux les propriétaires du contenu. Nous devons aller de l'avant avec cela. L'Europe a effectivement envisagé cela.
    Il faut que je souligne qu'il y a eu beaucoup de mésinformation sur ce qui s'est passé en Europe. Google a consacré des dizaines de millions de dollars au lobbying, et il y a eu beaucoup de mésinformation. Les membres du Parlement européen ont examiné cela et ont finalement donné leur accord, avec une forte majorité, après avoir compris ce que le nouveau texte proposé allait accomplir. Le texte a été largement accepté. Je pense que c'était à 429 voix contre 226, ou quelque chose de ce genre. Je crois que l'Europe se soucie de la liberté d'expression et de l'innovation, mais elle se soucie aussi des détenteurs de droits et de l'industrie créative. C'est ce qui a été démontré.
     J'aimerais croire que les législateurs font toujours la bonne chose et votent toujours dans le bon sens. Il y a toutefois un équilibre à trouver entre l'établissement et le maintien des droits des créateurs, et de ceux des citoyens. Qui juge de cela? Ce qui se produit, c'est qu'avec Google et les filtres automatiques, nous n'avons pas la certitude que tout le monde est traité justement. Certains Canadiens... Je pense que Justin Bieber a fait ses débuts sur YouTube. Je comprends ce que vous dites.
    Cependant, de l'autre côté, bon nombre de ces règles ne sont apparues que récemment, en Europe. Est-ce bien le cas?
    Oui, et je crois que les choses changent, et qu'il est temps que nous changions. Vous avez parlé d'équilibre. Si nous regardons les entreprises numériques et les titulaires de droits, selon les données publiées par la SOCAN, l'auteur-compositeur moyen fait 30 $ par année. Ce n'est pas assez d'argent. Combien font Google ou YouTube? Il y a beaucoup d'argent là-dedans, et il ne va pas aux créateurs, car il n'y a pas de juste équilibre.
    Je dirais que les deux modèles sont très différents. L'un est conçu pour servir Internet d'une façon différente, et l'autre est conçu pour servir les gens qui aiment ce genre de musique.
    Je vais laisser le reste de mon temps à M. Lloyd.
    C'est à vous aussi que je vais poser mes questions, monsieur Payette. On dirait que les questions d'aujourd'hui s'adressent surtout à vous.
    Nous avons parlé des problèmes de compétitivité. En ce moment, nous nous occupons de l'ALENA, et nous avons des taxes et des règlements. Nous nous battons toujours pour que le Canada soit un meilleur endroit où investir. Nous pensons toujours à cela dans l'optique des industries traditionnelles, mais notre secteur culturel est aussi un élément très important, et croissant, de notre économie.
    Le Canada est-il un endroit concurrentiel pour faire de la musique? Est-il concurrentiel sur le plan culturel? Sinon, que pourrions-nous faire d'après vous pour rendre le Canada plus concurrentiel?
    Monsieur Tacit, vous aurez peut-être après quelques observations à faire à ce sujet.

  (1705)  

    Je crois que sur le plan culturel, oui, nous avons de solides créateurs et un système qui permet une culture pleine de vitalité.
    En ce qui concerne le droit d'auteur et la rémunération... Il faut comprendre que le droit d'auteur, ce n'est pas une subvention. C'est un revenu privé qui vient de l'exploitation de l'oeuvre.
    Cela revient vraiment à la compétitivité du Canada: le manque d'argent qui vient des services numériques, ou l'absence de solutions robustes, législatives ou autres, concernant la question du droit d'auteur. Les choses devraient se produire plus vite. Nous devons vraiment apporter des changements pour suivre la cadence de ce qui se passe en Europe et aux États-Unis, afin d'être plus concurrentiels sur le plan du droit d'auteur.
    Qui profite de notre manque de compétitivité? Qui sont les principaux bénéficiaires de notre manque de compétitivité concernant le droit d'auteur?
    Ceux qui profitent de la faiblesse de nos règles visant le droit d'auteur sont les utilisateurs et, principalement en ce moment, les plateformes en ligne et les entreprises numériques.
    Monsieur Tacit, avez-vous une opinion là-dessus? Les plus petits FSI sont-ils concurrentiels au Canada? Existe-t-il de la concurrence actuellement?
    Vous ne voulez pas lancer ce débat maintenant. Il ne reste pas suffisamment de temps.
    Nous venons tout juste de participer à une étude de marché organisée par le Bureau de la concurrence et nous avons discuté de tous les problèmes anticoncurrentiels graves qui existent au Canada pour le secteur des plus petits FSI. Je ne voudrais pas nous détourner du sujet qui nous concerne, mais je transmettrai volontiers, à vous-même et à quiconque le désire, les résultats de cette étude. Il existe des barrières structurelles importantes en matière de compétitivité.
    Est-ce que cela concerne directement les droits d'auteur... ?
    Je ne crois pas. Il en va de la concurrence en général. Je ne voudrais pas m'aventurer dans des domaines que je connais moins et qui ne relèvent pas de mon expertise.
    Cependant, s'il faut recadrer les choses en l'ère du numérique entre les fournisseurs de services de diffusion et ceux qui affichent leur contenu sur une plateforme numérique et ainsi de suite, qu'on le fasse, et le Comité fera des recommandations dans ce sens, parce que la donne évolue. Ce que je ne voudrais pas compromettre, parce qu'il s'agit d'un élément fondamental de la compétitivité de notre pays, c'est la primauté du droit. Nous sommes essentiellement un État de droit, et nous défendons les droits de la personne. Les gens viennent ici, et sont venus en grand nombre récemment, justement pour cette raison. Si nous nuisons à cette structure, nous allons également porter un coup à notre compétitivité.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Masse, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis bien tenté, mais je ne mordrai pas à l'hameçon. Le secrétaire parlementaire, M. Lametti, connaît bien ma position en ce qui concerne le régime d'avis simple, ainsi que de notification et de retrait. Je ne veux nullement faire monter ma tension artérielle en abordant le sujet.
    J'aimerais dire une seule chose, cependant. Nous avons recueilli plusieurs témoignages sur les problèmes liés à YouTube. Loin de moi d'être critique, mais j'aimerais tout au moins présenter une perspective différente.
    Quelqu'un a dit que Justin Bieber a lancé sa carrière sur YouTube, mais il reste que YouTube a énormément profité de cette relation. En fait, si vous allez sur YouTube maintenant, vous y verrez une annonce pour les hamburgers d'une chaîne de restauration. YouTube héberge, entre autres, des vidéos de Fortnite. La plateforme YouTube profite énormément de ses relations avec les auteurs de vidéos à succès... Dans bien des endroits, on court des risques dans la sphère publique en publiant des vidéos sur YouTube. Les gens devraient y réfléchir.
    Or, notre comité participe à un examen quinquennal. Nous allons faire des recommandations au ministre si nous arrivons à nous entendre en comité. Les décisions n'ont pas encore été prises.
    Voilà ce qui se passe ici. Aucun projet de loi n'a été déposé. Pour ce faire, il faudrait tout d'abord que le ministre accepte de revenir et de répondre aux questions du Comité, et ce, dans les délais impartis par la loi. Il pourrait ensuite y avoir une prolongation, ce qui nous occasionnerait beaucoup de retard. À cela s'ajouteraient d'éventuelles instructions spécifiques pour le Parlement si nous voulions modifier la loi, auquel cas nous présenterions des modifications à la Chambre des communes. Ensuite il faudrait suivre une série d'étapes législatives pour acheminer les modifications au Sénat et les faire adopter.
    C'est toute une tâche à accomplir, et il y a différentes façons de procéder.
    Avez-vous des commentaires sur ce que nous devrions faire, les priorités... Que diriez-vous si, par exemple, nous ne faisions rien? Il se peut que rien ne se produise d'ici 2019 ou 2020. Compte tenu de la loi actuelle, c'est une réalité. J'aimerais bien savoir ce que vous en pensez. Cela nous sera fort utile, notamment en raison de ce qui se passe en Europe et aux États-Unis depuis hier.

  (1710)  

    Je vais répondre très brièvement. En ce qui concerne l'unique question qui m'intéresse, à savoir la définition des enregistrements sonores, nous sommes très satisfaits du statu quo et nous ne souhaitons pas que le Comité y touche.
    D'accord. C'est ce que je voulais savoir.
    J'ai une observation. Le fait de faire avancer un dossier ne correspond pas toujours au progrès. Ce n'est pas parce que les choses se font que ce sont forcément de bonnes choses. Nous devons décider ce qu'il convient de faire à l'échelle du pays. Nous devons trouver le juste équilibre compte tenu de tous les droits et du cadre actuel.

[Français]

    Comme je l'ai dit, je crois que les dispositions sur les services réseau doivent être revues.

[Traduction]

    Le régime d'exonération canadien doit être examiné, parce que pour l'instant le champ est vaste et diverses entreprises sont exploitées en vertu du régime actuel. Il y a notamment les plateformes numériques, et l'Europe a pris des mesures à l'égard de ce secteur. Voilà un constat.
    La reproduction à des fins personnelles est un dossier important. Il existait un système qui rapportait 40 millions de dollars par année, mais parce que la loi n'était pas neutre sur le plan technologique, maintenant il ne génère que quelques millions. Ce sont deux dossiers connexes sur lesquels il faudra se pencher.

[Français]

    Pour encourager l'innovation, il est fondamental que la rémunération suive. Nos scénaristes les plus talentueux qui écrivent des séries télévisées, qui se lèvent à 6 heures et qui finissent à 22 heures pour créer des oeuvres audiovisuelles ayant de très grandes cotes d'écoute au Canada français, sont de moins en moins bien rémunérés, malgré le fait que leurs séries télévisées soient davantage diffusées. Pour les encourager à continuer leur travail, il faut changer les choses. Sinon, dans très peu de temps, les scénaristes ne voudront plus faire ce métier, et leurs enfants non plus, une fois adultes. Dans les secteurs où la rémunération ne suit pas, le talent ne suit pas non plus.
    Comme l'a mentionné M. Payette, il s'est effectué un transfert de valeur non pas vers nos diffuseurs locaux, mais vers des diffuseurs étrangers, vers les GAFA qui monétisent énormément le contenu culturel. Il faut rétablir un équilibre, sinon ce ne sera pas intéressant pour notre créativité et notre innovation culturelle, pour l'économie que cela génère, pour le tourisme que cela amène ni pour les valeurs canadiennes.
    Certes, la culture a un aspect économique, mais il faut aussi la préserver, car c'est fondamental. Nous avons la responsabilité économique de nous assurer que des créateurs talentueux restent ici et peuvent vivre de leur travail.

[Traduction]

    J'ai mentionné Fortnite. Si certains députés ne connaissent pas le jeu, dites-le-moi la prochaine fois que vous irez en ligne, et je vous le montrerai.
    Sur ce, j'aimerais remercier nos témoins d'être venus et d'avoir fait part de leurs expériences et de leurs connaissances. De toute évidence, nous sommes saisis d'un énorme dossier complexe. Il nous reste beaucoup de pain sur la planche.
    Ce sont des questions difficiles qui valent la peine d'être posées parce que nous avons besoin de renseignements. Voilà ce qui nous aidera à rédiger notre rapport.
    Et comme on le dit bien dans l'industrie du cinéma, c'est le clap de fin. Nous avons terminé.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU