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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 122 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 novembre 2018

[Enregistrement électronique]

  (0850)  

[Français]

     Conformément à l'article 108(3) du Règlement, nous poursuivons l'étude de la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
    Ce matin, nous avons le plaisir de recevoir M. Michel Doucet.
    Monsieur Doucet, je vous souhaite la bienvenue.
    Nous ferons comme à l'habitude. Vous avez une dizaine de minutes pour faire votre présentation, et ensuite, nous ferons un tour de table de questions et de commentaires.
    Monsieur Doucet, nous vous écoutons.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Tout d'abord, je tiens à remercier les membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui sur l'important projet de modification de la Loi sur les langues officielles du Canada.
    Lorsqu'on vit à l'extérieur de la ville d'Ottawa et de la province de l'Ontario, et surtout qu'on vit dans les provinces de l'Atlantique, on a souvent l'impression d'être oublié par les instances du gouvernement fédéral. C'est toujours avec une certaine surprise et une certaine joie que l'on reçoit une invitation à venir vous adresser la parole.
    Je n'ai pas l'intention de parler trop longtemps, car je préfère plutôt répondre à vos questions.
     Je me permettrai cependant de faire quelques commentaires d'ouverture et d'émettre certaines idées concernant le projet de modification de la Loi sur les langues officielles.
    Comme vous le savez, la Loi sur les langues officielles a été adoptée en 1969. Le député Samson et moi étions là à ce moment et nous nous en souvenons. Nous étions aussi là lorsqu'elle a été remplacée en 1988 — M. Arseneault n'était pas encore né — par une nouvelle loi qui s'inspirait de dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés adoptée en 1982, notamment d'articles posant le principe de l'égalité de statut du français et de l'anglais — l'article 16 — et garantissant le droit d'être servi dans la langue officielle de son choix par les institutions fédérales — l'article 20.
    Cette loi prévoyait donc un dispositif qui permettrait de mettre en oeuvre les dispositions de la Charte. À l'époque, cette loi a été reçue favorablement par les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Faut-il aujourd'hui la modifier? C'est fort probable, car je suis d'avis que les lois doivent régulièrement être révisées afin de répondre aux changements de la société. Est-il nécessaire de tout recommencer du début? Je ne le crois pas. Les fondements de la Loi de 1988 sont toujours bons. Il suffit, à mon avis, d'en améliorer et d'en préciser certaines parties afin qu'elles répondent aux besoins du Canada de 2018.
    Je tiens cependant à préciser que la Loi ne peut pas devenir une réponse à tous les problèmes et défis que connaissent les communautés minoritaires. Nous vivons dans un régime fédéral où les provinces ont certaines compétences qui leur sont exclusives. Si nous ne voulons pas nous retrouver dans des débats judiciaires sans fin, il faudra respecter le partage des compétences entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, tout en assurant l'épanouissement et le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
    Cela dit, il est essentiel que les provinces assument également leurs responsabilités en ce qui concerne la protection des communautés de langue officielle en situation minoritaire, notamment des communautés francophones hors Québec. On ne doit pas donner l'impression que les questions touchant aux langues officielles ne sont que la responsabilité du gouvernement fédéral. Des provinces comme le Nouveau-Brunswick doivent assumer pleinement leurs responsabilités dans ce domaine.
    Je sais que, compte tenu de ce qui se passe actuellement, il est difficile de concevoir que les provinces puissent accepter d'assumer leur rôle, mais nous ne pouvons pas non plus croire que le gouvernement fédéral pourra tout régler par une simple loi.
    J'ai une liste des modifications ou des sujets qui pourraient être abordés dans la nouvelle loi. Je vais les survoler rapidement. Vu le temps qui m'est donné, je préfère répondre à vos questions.
    Évidemment, je reviens sur le bilinguisme des juges à la Cour suprême du Canada. Il faudrait modifier le paragraphe 16(1) de la Loi, mais cette simple modification ne sera pas suffisante. Il faudra également modifier l'article 5 de la Loi sur la Cour suprême, qui concerne la composition de celle-ci.
    Puisque je suis juriste, je souligne qu'il faudrait un contrôle de la capacité des juges et des tribunaux à s'exprimer dans les deux langues officielles. Actuellement, c'est une autoévaluation qui est faite par les candidats à la magistrature, et on sait que c'est souvent insuffisant.
    Il faudrait également qu'il y ait une valeur égale des décisions rendues dans les deux langues officielles.
    J'ai déjà soumis une suggestion il y a plusieurs années déjà, mais j'y reviens. Je parle d'une protection législative pour le Programme de contestation judiciaire.
    Je recommande une autre modification, qui a trait à la mise en oeuvre de la spécificité. J'aimerais simplement apporter une précision. Évidemment, j'ai lu les mémoires présentés par la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick demandant que la spécificité du Nouveau-Brunswick soit reconnue dans la Loi sur les langues officielles. Je dois avouer que je vois des problèmes à cette demande. S'il faut que la Loi sur les langues officielles reconnaisse toutes les spécificités des provinces, on n'en finira plus. Cependant, on pourrait le faire par règlement.
    Je crois que, récemment, il y a eu une modification au règlement sur la prestation des deux langues officielles reconnaissant que, là où il y a une école de la minorité, il doit y avoir une offre active. On pourrait aller encore plus loin. Le règlement fédéral sur la spécificité devrait reconnaître également la spécificité des provinces.
    En d'autres mots, je ne comprends pas — j'ai dû me rendre jusqu'en Cour suprême du Canada pour forcer la Gendarmerie royale du Canada à respecter les obligations linguistiques au Nouveau-Brunswick — pourquoi le gouvernement fédéral ne reconnaîtrait pas que, sur l'ensemble du territoire du Nouveau-Brunswick, l'offre active existe de fait, étant donné que le Nouveau-Brunswick a choisi, lui, d'étendre ses obligations à l'ensemble de son territoire. On pourrait faire la même chose en Ontario et reconnaître qu'une offre active existe dans les régions désignées par la Loi sur les services en français.
    Ensuite, il faut préciser ce qu'on entend par « mesures positives » dans la partie VII de la Loi. Je n'aime pas que les gens me disent qu'une mesure positive est tout ce qui n'est pas négatif; ce n'est pas suffisant. Par règlement, on devrait définir ce qu'on entend par des mesures positives.

  (0855)  

     Je serais prêt à répondre à des questions sur cet aspect, puisque j'ai été mené la poursuite judiciaire faisant suite à l'abolition du Programme de contestation judiciaire. De mon point de vue, les avocats du gouvernement fédéral avaient une interprétation assez bizarre es mesures positives. Nous pourrons y revenir.
    En ce qui concerne les pouvoirs du commissaire aux langues officielles, il faut évidemment parler de l'établissement d'un tribunal des droits linguistiques. Contrairement à ce que l'on peut croire, ce n'est pas une idée nouvelle, puisque cela avait déjà été proposé par Victor Goldbloom quand il était commissaire aux langues officielles. Cette idée a été reprise plusieurs fois dans les années 1990. Ayant moi-même siégé au Tribunal canadien des droits de la personne, je ne comprends pas pourquoi la Loi sur les langues officielles ne pourrait pas prévoir un système similaire, où le Commissariat aux langues officielles serait responsable des enquêtes, mais référerait au tribunal des droits linguistiques les dossiers pour lesquels il n'obtient pas la collaboration des institutions fédérales. Le tribunal aurait le pouvoir d'émettre des ordonnances coercitives, tout comme le fait le Tribunal canadien des droits de la personne.
    Ce sont donc les modifications en question. Il y en a d'autres sur lesquelles nous pourrons revenir lors de notre discussion.
    Le Canada fêtera cette année les 50 ans de la Loi sur les langues officielles. Les droits reconnus dans cette loi quasi constitutionnelle sont des droits fondamentaux ancrés dans notre engagement envers l'égalité et le respect des minorités.
    Ces valeurs sont malheureusement remises en question par certains gouvernements, et je tiens à rappeler ici que le gouvernement de l'Ontario n'est pas le seul en cause. Bien qu'elle soit moins accrocheuse et que l'on en parle moins à l'échelle nationale, la situation au Nouveau-Brunswick est également source d'inquiétude, même si l'on y attaque les droits linguistiques d'une façon moins visible.
    J'aimerais parfois que soit aboli le Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, car cela mobiliserait davantage les gens. En effet, depuis quelques années, on constate une érosion inquiétante de l'engagement politique — tous partis confondus, et je ne fais pas de politique — en faveur des droits linguistiques au Nouveau-Brunswick. Évidemment, l'arrivée de l'Alliance des gens sur la scène provinciale augmente cette inquiétude.
    Le principe, l'objet et la nature des droits linguistiques sont maintenant bien établis. Je fais miens les propos de l'honorable Michel Bastarache, un collègue, devant le Comité alors qu'il jugeait inacceptable que nous nous retrouvions encore devant les tribunaux en 2018 pour la mise en oeuvre de droits linguistiques reconnus depuis 50 ans.
    D'ailleurs, comme la trilogie de 1986 l'a montré, les tribunaux non plus n'ont pas une approche immuable. Il ne faut pas tenir pour acquis qu'ils interpréteront toujours nos droits de façon excessivement généreuse. C'est pour cela qu'il faudrait aujourd'hui bâtir sur les acquis obtenus ces dernières années.
    J'ai parfois l'impression que nous passons notre temps à réinventer la roue, que nous recommençons continuellement ces mêmes batailles que nous croyions pourtant avoir gagnées. Il vient un temps où l'on se demande s'il existe vraiment une volonté politique de mettre en oeuvre les droits linguistiques. Je me demande même si une loi sur les langues officielles révisée, même s'il s'agit de la meilleure loi sur terre, changera quoi que ce soit à cet état de choses si la volonté politique de mettre ces droits en oeuvre n'est pas présente.
    Ce qu'il faut changer, à Ottawa et dans certaines provinces, c'est la perception qu'a la majorité de l'égalité linguistique. En d'autres mots, les droits linguistiques ne sont pas uniquement l'affaire des minorités, ils sont également l'affaire de la majorité, dont il faut changer la perception. Malheureusement, ce changement ne viendra ni d'une loi ni des tribunaux; il viendra d'un message et d'un engagement politiques de la part de tous les acteurs politiques.
    Je vous remercie de votre attention. Je suis prêt à répondre à vos questions.

  (0900)  

    Merci beaucoup, monsieur Doucet.
    Commençons immédiatement notre tour de table par M. Clarke.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je suis toujours honoré de commencer les rondes de questions.
    Monsieur Doucet, nous sommes contents de vous recevoir au Comité. Au nom des membres, j'aimerais vous remercier de votre engagement d'une vie envers les langues officielles.
    C'est une cause que je défends depuis l'âge de 15 ans à peu près. Cela fait donc 48 ans.
    Exactement. J'ai entendu dire du bien de vous, bien entendu.
    J'y vais d'emblée: préférez-vous l'instauration d'un tribunal administratif des droits linguistiques ou l'octroi de pouvoirs coercitifs au commissaire aux langues officielles?
    Je préférerais un tribunal administratif plutôt que des pouvoirs coercitifs accordés au commissaire aux langues officielles. Celui-ci a une relation particulière avec les institutions fédérales, qu'il doit maintenir. Il serait difficile, d'une certaine façon, d'octroyer au commissaire le pouvoir d'imposer des pénalités tout en lui demandant de conserver cette relation particulière qui lui permet d'encourager les institutions à corriger le tir dans certaines situations.
    Je préférerais évidemment voir un tribunal avec des experts capables d'évaluer, comme cela se fait au Tribunal canadien des droits de la personne. Par contre, si l'option d'un tribunal n'est pas retenue, il faudra augmenter les pouvoirs du commissaire. À l'heure actuelle, ce dernier peut faire des recommandations, mais ces dernières, très souvent, ne mènent malheureusement pas aux changements attendus.
     J'aimerais creuser davantage la question du tribunal avec vous. Je suis très heureux de constater que vous avez siégé au Tribunal canadien des droits de la personne.
    Je l'ai fait pendant 10 ans.
    Excellent.
    Comment cela fonctionne-t-il lorsqu'un tribunal veut ordonner à un ministère ou à un organisme central gouvernemental — et non à un individu — de payer une pénalité pécuniaire ou d'effectuer un remboursement? Plusieurs personnes m'ont dit que cela n'avait aucun sens d'obliger un ministère à payer des pénalités au gouvernement.
    Cela fonctionnait très bien au Tribunal canadien des droits de la personne. Lorsqu'un ministère ou une institution fédérale était reconnu coupable d'une violation de la Loi canadienne sur les droits de la personne, le Tribunal pouvait émettre une ordonnance.
    Ce pouvait être une ordonnance coercitive obligeant l'institution, d'ici telle date, à apporter tel et tel changement ou à établir un programme de sensibilisation des fonctionnaires aux exigences de la Loi. De plus, s'il considérait que le ministère avait posé un geste ayant fait perdre de l'argent au plaignant, le Tribunal pouvait émettre une ordonnance à cet effet et exiger du ministère qu'il compense la personne pour la perte subie en raison de la violation de ses droits. Le Tribunal avait également la possibilité d'ordonner le paiement de dommages-intérêts punitifs pour atteinte psychologique à la personne, mais également de dommages-intérêts non pécuniaires.
    C'est ce qui se fait au Tribunal canadien des droits de la personne. Ce dernier n'accorde pas de dommages-intérêts dans tous les cas, mais il a le pouvoir de le faire s'il considère que l'institution ne respecte pas ses obligations de façon assez évidente. Cela peut paraître bizarre, mais le message que cela envoie des points de vue symbolique et public est très fort. Lorsqu'une institution est condamnée à payer des dommages-intérêts punitifs, je crois que le message est assez clair.
    De mémoire, savez-vous si le Tribunal a déjà ordonné le paiement de gros montants?
    Il y a une limite. Par exemple, pour les dommages-intérêts punitifs ou non pécuniaires, la limite est de 20 000 $ dans chaque cas, si ma mémoire est fidèle. Par contre, dans le cas des pertes pécuniaires subies par une personne, le montant des dommages-intérêts pouvait être assez substantiel.
    Le plus important n'est pas nécessairement les dommages-intérêts proprement dits, mais plutôt le fait que le Tribunal émette une ordonnance. Bien que certaines personnes semblent dire qu'une ordonnance n'est pas importante, il s'agit dans ce cas-ci de lier les parties et de forcer l'institution à corriger un comportement. L'ordonnance du Tribunal constitue plus qu'une simple recommandation; l'institution se voit ordonnée d'apporter des changements, et ce, avec un échéancier, sous peine d'outrage au tribunal.

  (0905)  

    Effectivement.
    En ce qui a trait à la gouvernance, préféreriez-vous que la Loi relève complètement du Conseil du Trésor ou du Conseil privé?
    Je laisserai à d'autres le soin de répondre pour ce qui est de la gouvernance.
    Pour moi, ce qui est encore plus important, c'est qu'il y ait une volonté politique d'assurer la mise en oeuvre complète de ces droits. Peu importe qu'il s'agisse du Conseil privé, du Conseil du Trésor, de Patrimoine canadien ou d'un autre organisme: s'il n'y a pas cette volonté, la question de la gouvernance n'y changera rien. Le message doit venir d'en haut, c'est-à-dire des instances politiques, qui doivent reconnaître que ces droits sont fondamentaux et les mettre en oeuvre.
    Par contre, c'est aléatoire.
    Advenant un gouvernement moins intéressé, quelle institution préféreriez-vous?
    À ce moment, on se retrouverait devant les tribunaux.
    Quoi qu'il en soit, quelle institution préféreriez-vous? Patrimoine canadien n'a aucun pouvoir.
    Si le gouvernement n'est pas intéressé, je doute que, pour leur part, les institutions qui auraient à mettre la Loi en oeuvre soient intéressées.
    C'est vrai.
    Je regarde ce qui se produit chez nous, au Nouveau-Brunswick. Le manque d'intérêt des gouvernements successifs a fait en sorte que les institutions et les différents ministères n'ont pas grand intérêt à mettre en oeuvre la loi provinciale sur les langues officielles. Ce manque d'intérêt et de volonté transcende tous les partis politiques.
     À mon avis, le message le plus important doit venir d'en haut, directement du bureau du premier ministre, qui doit affirmer qu'il s'agit d'une valeur fondamentale. S'il ne livre pas ce message, il sera évidemment possible d'espérer que les institutions vont assurer cette mise en oeuvre. Cependant, si le gouvernement ne pousse pas les institutions à agir et s'il ne s'agit pas d'une priorité pour lui, je doute que cela devienne une priorité pour elles: elles en feront alors à leur tête.
    L'exemple parfait en est le Nouveau-Brunswick, qui a 50 ans d'histoire en matière de langues officielles. La province a une très belle loi, one a des garanties constitutionnelles, mais la volonté de mettre en oeuvre cette loi n'existe pas. Or, aussi longtemps que cette volonté n'y sera pas, il sera impossible de changer la culture de l'administration publique.
     Merci, monsieur Clarke.
    Puisque nous parlons du Nouveau-Brunswick, nous allons passer à M. Arseneault.
    Merci, monsieur le président.
    Professeur Doucet, ou devrais-je dire maître Doucet...
    Cette époque est terminée.
    En 1988, je commençais mes études de droit. Il y avait alors toute une brochette de jeunes professeurs qui allaient acquérir éventuellement une certaine notoriété au pays.
    En 1969, vous n'étiez pas né.
    Oui, mais j'étais jeune.
    J'aime bien l'idée d'un tribunal des droits linguistiques pour les raisons que vous avez évoquées. On parle de plus en plus de séparer le pouvoir d'enquête du commissaire et de donner au tribunal le pouvoir de prendre des mesures coercitives. Je vais poursuivre dans le sens où allait mon collègue M. Clarke.
    En matière de droits de la personne, il y a des ordonnances et des dédommagements pécuniaires, mais comment peut-on établir des dommages pécuniaires dans le cas des droits linguistiques? C'est quand le porte-monnaie est touché que les gens réagissent et s'ajustent un peu. Or la situation est différente, ici.
    Cela n'a pas été très développé en matière de droits linguistiques. Jusqu'à maintenant, on cherchait plutôt à établir l'existence d'un droit et à obtenir des ordonnances déclaratoires des tribunaux. On n'a pas vraiment beaucoup évolué, en matière linguistique, quant aux dommages-intérêts liés à une violation des droits. Or il y a des dommages. On peut penser ici à l'affaire Thibodeau, où l'on a considéré la possibilité de dommages-intérêts. D'autres problèmes sont survenus et ont constitué un empêchement.
    Dans le cas d'Ambulance Nouveau-Brunswick, je représente deux clients qui subissent un préjudice non pécuniaire énorme. Malheureusement, comme on ne peut pas obtenir cette compensation, la situation est difficile. Le fait qu'on n'ait jamais ordonné de dommages-intérêts pour une violation des droits linguistiques ne signifie pas qu'il est impossible de le faire.
    Je comprends bien cela, mais avez-vous une idée, de façon pratique, de la manière dont cela pourrait se faire? C'est un début. Supposons que, demain matin, un tribunal soit chargé de la question des droits linguistiques, notamment en milieu minoritaire.

  (0910)  

    On lui accorde le pouvoir d'ordonner des dommages-intérêts s'il juge a approprié de le faire. Les dommages-intérêts ne sont pas une science exacte, comme les mathématiques. Vous et moi, qui sommes avocats, le savons. Je suis aussi arbitre dans le domaine des relations industrielles. Étant donné que j'ordonne parfois des dommages-intérêts, je peux vous dire que ce n'est pas une science exacte. Cela dépend de la preuve qui est présentée, mais également de la façon dont cette preuve est perçue par le juge ou la personne qui est présente.
    Il va falloir établir une jurisprudence et des critères, c'est évident. En matière de droits linguistiques, on ne s'est pas beaucoup penché là-dessus jusqu'à maintenant. On s'est beaucoup plus employé à faire reconnaître les droits et à obtenir des ordonnances déclaratoires pour que les droits soient respectés, mais on s'est très peu aventuré dans le domaine des dommages-intérêts. Les chercheurs devraient peut-être s'intéresser un peu plus à cette dynamique, à cette dimension.
    On peut même demander des dommages-intérêts dans certains cas en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. C'est prévu à l'article 24 de la Charte. S'il s'agit d'une violation d'un droit de la Charte, en l'occurrence d'une violation d'une obligation linguistique, on peut ordonner des dommages-intérêts. On pourrait également le faire en vertu de la Loi sur les langues officielles. Si vous me demandez s'il y a une formule mathématique selon laquelle une violation correspond à un montant donné, comme on le précise notamment dans certaines jurisprudences traitant de blessures personnelles, je vous répondrai que cela n'existe pas.
    Ce serait une toute nouvelle ère. Un nouveau processus devrait être développé.
    Absolument.
    Il y a de la place pour cela.
    Il faut le faire. Je crois qu'il faut maintenant être plus agressif quant aux recours qu'on demande.
    J'aimerais vous dire, étant donné que le temps est compté, de ne pas hésiter à communiquer par écrit à la greffière du Comité des suggestions ou d'autres informations que vous aimeriez nous soumettre. Ce serait précieux pour le Comité.
    Mes autres questions sont d'ordre général et ne portent pas nécessairement sur la Loi. Nous avons entendu de nombreux témoignages de juristes. Pour votre part, vous avez dit que, même si nous avions la meilleure loi au monde, il faudrait changer la perception voulant que les droits linguistiques au Canada ne concernent que la minorité. C'est un point important, qui n'est pas anodin. Qu'entendez-vous par là, en pratique, dans le cadre de la modernisation de la Loi, et que peut faire le gouvernement fédéral en ce sens?
     Je crois qu'il faut faire en sorte que la majorité, au Canada, réalise que la reconnaissance des deux langues officielles est une valeur fondamentale de notre fédération. Il faut sensibiliser les gens, que ce soit à l'école, à l'université, dans les clubs sociaux ou partout ailleurs, à cette valeur fondamentale, et non pas simplement à l'avantage économique. Oui, cet aspect est important, mais je suis parfois agacé lorsque les gens me parlent uniquement de la valeur économique des deux langues officielles. Si nous avions cinq langues, en effet, leur valeur économique serait importante, mais nous devons faire en sorte que la population canadienne, la majorité, comprenne l'importance des langues officielles, que ce soit pour la paix sociale ou simplement parce qu'elles existent.
    J'ai eu l'occasion de travailler partout dans le monde. Or j'aurais de la difficulté à nommer un seul pays où la dimension linguistique n'est pas importante. Elle existe partout, et au Canada, notre façon de l'aborder a consisté à reconnaître l'égalité des deux langues officielles dans notre Constitution, la loi suprême du pays, et dans la Loi sur les langues officielles. Nous avons donc une obligation sociétale, celle de faire comprendre à la majorité l'importance de cette loi. Le fédéral doit appuyer des initiatives et faire comprendre l'importance des langues officielles, leur importance au sein du système scolaire, ainsi que les raisons pour lesquelles nous avons une loi sur les langues officielles.
    Je crois que nous avons mal fait cela jusqu'à maintenant. Dans ma province, le Nouveau-Brunswick, qui est également la vôtre, cela a été très mal fait. On perçoit les droits linguistiques et la Loi sur les langues officielles comme le problème de la minorité uniquement, alors que cela touche tout le monde, la majorité comme la minorité. Nous ne mettons pas en valeur cet aspect.
    Merci beaucoup, monsieur Arseneault.
    Nous allons maintenant passer à M. Choquette.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Doucet, je vous remercie d'être parmi nous. C'est toujours avec plaisir que nous vous recevons au Comité permanent des langues officielles.
    Je vais d'abord traiter du Programme de contestation judiciaire. Je viens d'apprendre que vous étiez présent lorsqu'il a été aboli. Vous suggérez de l'intégrer à la Loi, de façon à s'assurer de ne plus revivre une telle situation.
     Est-ce que je me trompe? Quelle est votre interprétation?
    Que ce soit dans la Loi sur les langues officielles ou dans une autre loi, je voudrais qu'on n'ait pas à revivre une situation où, par une décision réglementaire, le programme ou la politique serait aboli. Je crois que le Programme de contestation judiciaire est essentiel pour les communautés. Je l'ai utilisé. Je dirigeais la poursuite pour la FCFA lorsque le Programme de contestation judiciaire a été aboli. Selon moi, ce programme essentiel a permis de développer les droits à l'égalité et les droits linguistiques au Canada. Il faut le maintenir. Si on le faisait par l'entremise d'une loi, il faudrait tenir un débat au Parlement pour l'abolir.

  (0915)  

    Le retour d'un certain programme de contestation judiciaire, qui a pris la forme d'un groupe d'experts pendant un temps, est une grande victoire que vous avez remportée pour les Canadiens et les Canadiennes. Comment avez-vous réussi cela? En vertu de quelle partie de la loi...
    Nous n'avons pas gagné.
    D'accord.
     Nous avons plaidé le dossier devant la Cour fédérale. Nous avons fait valoir, en évoquant la partie VII de la Loi, qu'il y avait une violation. La partie VII, qui avait été modifiée en 2005, était devenue justiciable des tribunaux. Nous avons plaidé tout le dossier, mais la veille du jour où le juge devait rendre sa décision — il nous avait fait part d'une date —, la FCFA et le gouvernement se sont mis d'accord pour établir le Programme d’appui aux droits linguistiques, le PADL.
    Je ne sais pas si nous avons gagné ou perdu. J'ai toujours dit qu'il aurait été intéressant de mettre la main sur la décision écrite pour savoir comment le juge interprétait la partie VII. J'espère que ce sera possible un jour. Que nous ayons gagné ou perdu, il aurait été intéressant de connaître cette interprétation. En effet, cela nous aurait éclairé sur la portée de la partie VII.
    Présentement, la fameuse décision du juge Gascon redéfinit la partie VII. Pour ma part, ce n'est pas du tout de cette façon que je l'interprétais. Je pense que la plupart des juristes, dont vous faites partie, ne l'interprétaient pas non plus de cette façon.
    À votre avis, comment devrait-on réviser la partie VII et la manière dont on conçoit les mesures positives? Je suis l'une des personnes — il y en a évidemment d'autres au Canada — à avoir soumis une plainte sur l'entente relative à Netflix. Un rapport préliminaire a été fait par la suite. Je pense qu'il aurait été différent sans la fameuse décision du juge Gascon. Or, en raison de cette décision, la partie VII ne veut plus rien dire. Nous ne pouvons plus dire quoi que ce soit. On considère que, si les communautés sont consultées, il s'agit d'une mesure positive, et que pour le reste, on n'a qu'à se débrouiller.
     Je ne dirais pas qu'elle ne veut plus rien dire. Malgré la décision du juge Gascon, on devrait quand même continuer à analyser la partie VII.
    À l'époque, le gouvernement fédéral a donné l'argument suivant. Il a dit que la partie VII n'était pas touchée du fait qu'un programme avait été supprimé, tout comme il fallait regarder l'ensemble de la forêt et non l'arbre qui avait été coupé, et que si la forêt était toujours vivante, cela ne pouvait pas être une mesure négative. À ce moment-là, j'avais demandé au juge combien d'arbres on devait couper avant que la forêt ne commence à disparaître et qu'il ne soit trop tard pour sauver les choses.
    Selon moi, la partie VII est essentielle. Il faut définir ce qu'est une mesure positive, et je crois qu'on devrait le faire immédiatement par voie de règlement et en consultant les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada.
    Quand on parle de mesures positives, on sait tous ce que cela veut dire, mais en même temps, on ne le sait pas. C'est le genre de disposition qui donne très souvent de l'urticaire aux avocats. Des termes comme « personne raisonnable » doivent être définis pour avoir un contenu. Il faudrait définir ces mots en consultant avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire, parce que ce sont elles qui savent le mieux comment des mesures peuvent avoir un impact négatif ou positif sur elles.
    La décision du juge Gascon est en appel. Au fond, le gouvernement est aussi mis en cause dans cet appel. On pourrait s'asseoir avec la FCFA et le QCGN pour définir ce que sont des mesures positives et établir des règlements pour la partie VII.
    Exactement. Il serait préférable de faire cela plutôt que d'attendre une décision judiciaire qui va définir, ou pas, ce qu'est une mesure positive.
    Qu'on porte en appel la décision du juge Gascon est une chose, mais cela n'empêche pas le gouvernement de trouver une solution pour définir ce qu'est une mesure positive.
    J'ai vécu cela trop souvent dans ma propre province, où le gouvernement donne comme argument que, comme c'est devant les tribunaux, il ne peut pas y toucher. Or je n'accepte pas cet argument. Au contraire, je crois que, bien que ce soit devant les tribunaux, on peut continuer à travailler en vue d'améliorer l'interprétation qu'on donne d'une mesure positive.
    Merci, monsieur le président.

  (0920)  

    Monsieur Samson, vous avez la parole.
    Monsieur Doucet, je vous remercie beaucoup pour votre leadership dans ce domaine et dans la protection des droits des minorités. Vous avez toujours été un acteur important à cet égard et nous comptons encore sur vous aujourd'hui.
    Je commence à me faire vieux.
    Vous avez abordé des points un peu différents de ceux qu'ont soulevés les autres témoins. Vous avez pédalé autour de territoires similaires mais avez apporté quelques points avec lesquels j'aimerais m'amuser un peu.
    Ce serait mieux d'avoir un cours de droit pendant trois heures où on pourrait se parler.
    On peut faire cela.
     Nous pourrions peut-être nous rencontrer pour prendre quelques bières à l'extérieur des cours. Bref, il y a une cinquantaine de questions que j'aimerais vous poser, mais je vais me concentrer sur une ou deux d'entre elles.
    Nous avons abordé au cours du dernier mois la question des deux peuples fondateurs, qui est essentielle. Vous avez dit que la majorité devait comprendre cela. Je suis entièrement d'accord avec vous. Cette question a été mal présentée, mal comprise et mal appuyée. Cela dit, dépendre de la Loi pour faire tout le travail devient plus complexe. Je ne veux pas diminuer l'importance d'inclure des outils dans la Loi. J'ai vécu des expériences auprès de certains politiciens, que je ne nommerai pas. Je connais plusieurs sous-ministres, en particulier au Nouveau-Brunswick. À l'un d'entre eux, j'ai dit que je comprenais qu'il ne se demande pas ce qu'il pouvait faire pour aider les Acadiens en allant se coucher le soir; je lui ai aussi dit que, par contre, il avait la responsabilité et le devoir de bien comprendre les choses. Cette volonté est nécessaire.
    Fournir des outils peut aider à soutenir la volonté, mais il y a des politiciens qui veulent survivre. Ils disent vouloir aider la minorité francophone, par exemple en Nouvelle-Écosse, mais ils se demandent comment ils vont justifier cela auprès de la majorité. La question devient alors complexe. Il faut leur fournir des outils. Je vais vous donner un exemple. En Nouvelle-Écosse, on octroyait des fonds supplémentaires aux conseils scolaires de langue anglaise pour qu'ils offrent de la formation aux nouveaux arrivants qui ne parlaient ni le français ni l'anglais. On leur offrait cette formation en anglais.
     J'ai réagi en disant que, pour notre part, nous avions la responsabilité d'instruire en français les Acadiens assimilés qui arrivaient dans nos écoles à l'âge de cinq ans et qui ne parlaient pas la langue utilisée dans l'établissement, soit celle de l'un des peuples fondateurs. Au début, on m'a opposé un refus, mais cette réflexion a fait en sorte que nous avons reçu des fonds pour les élèves qui arrivaient dans les écoles et ne parlaient pas la langue employée dans l'établissement.
    Voici un autre exemple. Je trouve que le gouvernement actuel de la Nouvelle-Écosse favorise beaucoup l'appui aux francophones. Ce n'était pas le cas lorsque le gouvernement Dexter, que tout le monde a connu, était au pouvoir. Le NPD n'appuyait pas la minorité. C'est incroyable, mais c'est ce que nous avons vécu. Le gouvernement actuel dit qu'il existe une volonté, mais il se tourne aussi vers des outils. Par exemple, il dit que les conseils scolaires francophones sont liés à la Charte et à la Constitution et que, pour cette raison, il va les aider. La Nouvelle-Écosse est la première province au pays à considérer la possibilité d'établir une loi en français, en matière d'éducation, destinée uniquement aux francophones.
    Mon préambule est toujours plus long que ma question. Cela dit, la volonté ne se cultive pas nécessairement au moyen d'une loi. Je me demande donc quels points essentiels de la Loi permettent d'offrir aux gens faisant preuve d'une assez bonne volonté les outils nécessaires pour faire valoir cela à la majorité anglophone.
    Je ne voudrais pas donner l'impression de m'opposer à l'idée qu'on modifie la Loi sur les langues officielles. Au contraire, j'y suis favorable. En passant, je tiens à dire que j'ai eu le privilège de représenter les Acadiens de la Nouvelle-Écosse dans le dossier des circonscriptions électorales. Ce fut pour moi un honneur. Dans la salle, nous faisions face à des portraits de Jonathan Belcher, le procureur général qui a signé l'ordonnance de déportation.
    À mon avis, ce n'est pas dans la Loi qu'on va trouver la façon de fournir des outils aux gens. Je crois que cela doit venir d'un message politique que chacun d'entre vous va livrer. En d'autres mots, si les instances politiques ne sont pas, elles aussi, convaincues de la valeur de la Loi ou de l'égalité et qu'elles n'en font pas une priorité, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les fonctionnaires le fassent et à ce que la population le comprenne. Cela doit venir d'en haut.

  (0925)  

    Présentement, nous relions la volonté aux outils. Pour moi, c'est important. Cela dit, le gouvernement fédéral, qui représente les deux peuples fondateurs, a des responsabilités à cet égard et transfère des fonds aux provinces, ne peut-il pas établir une disposition linguistique?
     Absolument. Si c'était la question, ma réponse est oui. À mon avis, les dispositions linguistiques énoncées dans les programmes fédéraux sont trop tièdes. Il faudrait qu'elles soient beaucoup plus claires et disent aux provinces que c'est cela, et rien d'autre. Actuellement, ce qui se produit...
    Vous savez ce qui se passe quand on nomme des juges, qu'il s'agisse du juge Gascon ou d'autres. C'est pour cela que la common law est dangereuse. La common law nous aide, mais ce qui arrive, c'est que les juges ont différentes valeurs.
    Absolument.
    Je ne critique pas la politique. Ce que je veux dire, c'est que les conservateurs nomment à des postes des gens dont les valeurs seront plutôt conservatrices. C'est ce qu'on voit dans le cas de Trump. Pendant les 30 prochaines années, ce sera dur pour les États-Unis.
    Merci beaucoup, monsieur Samson. Pourriez-vous ne pas trop frapper sur la table? Cela doit être dur pour les oreilles des interprètes quand vous le faites.
    Madame Fortier, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Nous avons une conversation très animée autour de la table. Nous aussi faisons un examen approfondie de la question. Plusieurs mémoires ont été présentés.
    J'aimerais que nous étudiions en profondeur les mesures qui pourraient être prises pour renforcer les relations fédérales-provinciales-territoriales dans les ententes de transfert du fédéral aux provinces pour appuyer l'épanouissement des communautés linguistiques minoritaires, tout en laissant les provinces être les responsables de leurs politiques en matière de services en français.
    Selon vous, quelles mesures positives faudrait-il mettre en place?
    Évidemment, il y a différents programmes de transferts fédéraux. Par exemple, en ce qui concerne le Programme des langues officielles dans l'enseignement, le PLOE, il faudrait que les communautés minoritaires de chacune des provinces s'impliquent davantage dans les ententes qui en découlent. Cela assurerait que les ententes correspondent aux réels besoins des communautés et non pas à ce dont le gouvernement croit que les communautés ont besoin.
    Il doit aussi y avoir une reddition de comptes à l'égard de ce genre d'ententes. Si on donne de l'argent à une province pour de l'enseignement dans l'une ou l'autre langue officielle, cette dernière doit rendre des comptes sur l'utilisation de cet argent afin de s'assurer qu'elle l'a dépensé aux fins prévues, et les communautés doivent avoir un certain droit de regard.
    Prenons ce qui se passe à l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple. Il est certainement inquiétant que des sommes soient utilisées pour d'autres fins que celles prévues en vertu du PLOE.
    En ce qui concerne les autres obligations, les programmes de formation de la main-d'oeuvre ou d'autres, je crois que...
    Il y a aussi les domaines de la santé, de la petite enfance et de la justice.
    Oui. C'est difficile, parce que ces domaines, tout comme celui de l'enseignement, sont aussi de compétence provinciale. Les provinces ne veulent pas que le fédéral viennent s'immiscer dans leurs champs de compétence. Sauf que, si le fédéral, par son pouvoir de dépenser ou par d'autres méthodes, décide de financer certains programmes, il doit faire comprendre aux provinces de manière très claire et précise qu'il a une obligation fondamentale, tant en vertu de la Charte que de la Loi sur les langues officielles, de s'assurer que les deux communautés de langue officielle sont bien représentées ou respectées dans ces ententes.
    Le problème, actuellement, c'est qu'on inscrit ces engagements dans les ententes mais que, par la suite, on oublie qu'elles y sont, de sorte qu'on ne cherche pas à s'assurer que les provinces ont bel et bien respecté les engagements qu'elles ont pris.
    J'ai souvent l'impression qu'on le fait par réflexe et qu'ensuite, on oublie de le faire et on passe à autre chose. L'important est de l'inscrire dans les ententes et de faire un suivi l'année suivante pour s'assurer qu'on a bien utilisé l'argent et tenu compte des communautés minoritaires.

  (0930)  

    Récemment, le ministre Brison a annoncé des modifications au Règlement sur les langues officielles qui portent, notamment, sur la partie IV de la Loi. Il y est question d'indicateurs de vitalité, par exemple ce qui se passe dans les écoles.
    Que pensez-vous de cela? Comment peut-on obtenir des données probantes sur la réalité non seulement des communautés, mais également du fait français partout au pays?
     L'alinéa 32(2)a) de la Loi sur les langues officielles prévoyait déjà qu'il ne fallait pas tenir compte uniquement de la démographie, mais aussi des spécificités des communautés.
    À l'époque, en 1990, j'avais comparu devant le comité parlementaire qui étudiait le Règlement de la Loi, pour dire qu'il fallait aller au-delà de la démographie et regarder la spécificité. Malheureusement, on n'en a pas tenu compte à ce moment-là. Je suis donc heureux de la modification qui a été apportée depuis pour demander de tenir compte de certaines institutions, comme les écoles, dans le cadre de la mise en oeuvre du Règlement.
    À mon avis, nous pouvons aller encore plus loin et c'est à cela que je faisais référence tout à l'heure. Je sais que plusieurs groupes ont demandé de reconnaître ces spécificités dans la Loi elle-même. Malheureusement, je ne suis pas d'accord: nous aurions alors une spécificité pour le Québec, une autre pour la Nouvelle-Écosse, une troisième pour le Nouveau-Brunswick, et le reste, et la Loi deviendrait réellement ingérable. Cependant, nous pourrions le faire dans le Règlement.
    Ainsi, ce dernier pourrait énoncer qu'il respecte les droits linguistiques reconnus dans une province. Par exemple, rien ne devrait obliger un francophone du Nouveau-Brunswick à faire la preuve d'une demande importante pour obtenir un service d'un organisme fédéral. J'ai dû me rendre jusqu'en Cour suprême contre la GRC à cet égard, mais l'arrêt ne s'applique malheureusement qu'à la GRC. En fait, il devrait s'appliquer à toutes les institutions fédérales, parce que le Nouveau-Brunswick a accepté de reconnaître l'égalité des communautés linguistiques.
    Nous pourrions faire de même pour l'Ontario et reconnaître les spécificités juridiques des provinces pour élargir la portée du Règlement.
    J'ai une dernière question à vous poser. Si nous n'avons pas suffisamment de temps, vous pourrez peut-être nous faire part plus tard de vos idées à cet sujet.
    Je suis la députée d'Ottawa—Vanier et, depuis décembre dernier, la capitale nationale est officiellement bilingue. De quelle façon pourrions-nous renforcer la Loi sur les langues officielles pour y enchâsser le bilinguisme de notre capitale? Je sais que certains en discutent, et je crois que vous avez quelques idées sur la question.
    Effectivement, cette question m'a toujours préoccupé.
    J'estime que la capitale d'un pays officiellement bilingue comme le Canada se doit de projeter l'image de cette valeur fondamentale qu'est l'égalité des deux langues officielles au pays. Par contre, je sais que les municipalités sont de compétence provinciale. Cependant, la municipalité d'Ottawa est spéciale, car elle vit grâce au gouvernement fédéral. Sur ce plan, je ne verrais donc aucun problème à ce que l'on reconnaisse cette spécificité et que l'on enchâsse cette obligation dans la Loi sur les langues officielles.
    Ottawa est une ville chanceuse. Vous pourriez déménager la capitale du Canada à Moncton. Les retombées économiques qu'une capitale nationale apporte à une région sont énormes. Ottawa vit grâce au fait qu'elle est la capitale du Canada et elle doit refléter cela.
    Je prends toujours l'exemple de Washington. Je ne parle pas du comté de Washington au Maryland ni de la ville de Washington en Virginie, mais bien de Washington, D.C., dans le district de Colombia. C'est la capitale fédérale des États-Unis. Dans ce contexte, je crois que nous devons en faire plus pour assurer le bilinguisme à Ottawa.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Blaney.
    Monsieur Doucet, je vous remercie de votre présentation de ce matin.
    Il s'agit de ma première réunion depuis un bon moment et vous nous avez fourni une très bonne entrée en matière en parlant des éléments que vous souhaiteriez voir dans une version modernisée de la Loi sur les langues officielles.
    Je retiens deux éléments de votre présentation: votre vision d'un Canada dont les deux langues officielles sont égales et la nécessité d'un leadership politique.
    Dans son préambule, que je ne répéterai pas, M. Samson a, je crois, touché à un point essentiel. Comment pouvons-nous rendre la langue française attirante pour les anglophones? Par exemple, quand j'entends un de mes collègues politiciens anglophones faire des efforts pour apprendre le français et s'exprimer dans cette langue, je me dis qu'il est ambitieux et qu'il veut avancer. En effet, on sait qu'il faut maîtriser les deux langues pour occuper de hautes fonctions politiques. Que pouvons-nous faire pour donner le goût du français aux jeunes anglophones des écoles primaires de l'Ontario, de l'Ouest ou de l'Atlantique? Il me semble que ce serait bon pour eux, que cela leur permettrait de découvrir la culture francophone et que cela façonnerait notre identité. C'est une question ouverte, et j'aimerais vous entendre à ce sujet.

  (0935)  

     Je dois vous dire que je serais très triste si j'étais unilingue, parce qu'une partie du monde ne me serait pas ouverte. Je trouve très triste de ne connaître que deux langues. J'aimerais pouvoir parler trois, quatre, cinq et même six langues. Dans un restaurant d'un petit village du Portugal, j'ai rencontré un jeune Portugais de 18 ans qui parlait huit langues. Je le trouvais beaucoup plus intelligent et beaucoup plus chanceux que moi.
    Parler une autre langue est une ouverture sur le monde et sur une autre façon de penser. Je ne suis pas un spécialiste de ce domaine, mais je lis sept ou huit journaux francophones et anglophones canadiens en me levant le matin. La perception de la même nouvelle est tellement différente que je me demande très souvent si nous vivons dans le même pays. Si tout le monde pouvait comprendre la culture de l'autre et lire l'information de l'autre, ce serait bien.
    Comment faire apprécier la musique francophone aux jeunes? Je sais que la culture américaine est omniprésente tant chez les francophones que chez les anglophones, mais on doit faire un effort pour faire connaître la musique francophone. Sur le plan des auteurs, sur le plan de la recherche... J'aimerais connaître trois, quatre langues. Je ne serais pas la même personne si je ne connaissais qu'une seule langue. C'est pour cela que c'est très important.
    J'ajouterais ceci. On a parlé très souvent de deux peuples fondateurs, mais selon moi, il y en a trois. Il ne faut pas oublier les peuples autochtones.
    Les programmes d'éducation et linguistiques sont du ressort des provinces. Je partage votre point de vue selon lequel plus on en parle, mieux c'est.
    Je vais revenir à la modernisation de la Loi et à sa partie VII. Au fond, vous trouvez que les mesures positives sont comme des voeux pieux et que, dans les faits, elles ne veulent rien dire. Tant qu'à être pour la vertu et ne rien faire, n'y aurait-il pas un champ d'action sur lequel la modernisation de la Loi pourrait se concentrer? Comment les Canadiens pourraient-ils redécouvrir les langues officielles? Au fond, c'est l'objectif visé. La modernisation de la Loi sur les langues officielles ne devrait-elle pas avoir pour objectif de valoriser la richesse qu'il y a à maîtriser une autre langue, qui vient avec une culture et une perspective qui lui sont propres?
    Dans la composition de votre comité, il y a deux membres de la communauté anglophone, mais je crois que les langues officielles doivent être l'affaire de l'ensemble de la députation fédérale, et pas seulement celle des députés francophones. Les langues officielles doivent devenir aussi importantes pour les gens de l'Alberta que pour ceux de la Nouvelle-Écosse ou du Nouveau-Brunswick. Cela doit faire partie de votre volonté de faire changer le Canada. C'est important.
    D'accord.
    Puisque vous parlez de nos collègues anglophones, je vais céder le reste de mon temps de parole à M. Genuis.
    Je vous remercie, monsieur Blaney.
    Je veux que ce soit clair pour mon collègue: j'apprends le français non pas par ambition, mais parce que j'aime les langues et qu'elles m'intéressent.
    Monsieur Doucet, je suis un député albertain. J'ai le sentiment que beaucoup de jeunes de l'Alberta voudraient suivre des cours de français au secondaire. Or ils n'ont pas beaucoup d'occasions de parler cette langue par la suite, de sorte qu'ils peuvent perdre la capacité de la parler. C'est la même chose pour les fonctionnaires qui sont bilingues mais qui n'ont pas souvent l'occasion de parler le français. De temps en temps, on demande des services en français, mais ce n'est pas très courant.
    Avez-vous des suggestions à nous faire pour que les fonctionnaires et les autres personnes qui ont suivi des cours de français puissent le pratiquer? Dans les faits, le français n'est pas très utilisé dans notre société.
    J'aimerais connaître une solution facile à ce problème. J'ai souvent entendu ce dont vous venez de parler. J'ai eu des étudiants qui étaient issus de l'immersion et ils me disaient la même chose, c'est-à-dire qu'après le secondaire, ils n'avaient pas l'occasion de parler français.
    Évidemment, c'est un choix personnel. On peut maintenant écouter la télévision en langue française dans toutes les régions du pays. Les postes de radio francophones sont accessibles partout au pays. On peut aussi créer des clubs pour parler français.
    Je parle un peu espagnol. Quand je n'ai pas l'occasion de voyager dans des pays hispanophones, mon espagnol est beaucoup plus faible. Si je voulais le maintenir, je lirais et j'écouterais des choses en espagnol. C'est un choix personnel. Si un individu veut maintenir sa connaissance d'une langue, c'est à lui d'utiliser les moyens à sa disposition.
    Au Canada, plusieurs moyens peuvent être utilisés pour ce faire, que ce soit des livres, des journaux, des postes de radio et de télévision en français. J'écoute régulièrement la télévision en anglais et je lis aussi dans cette langue. C'est ce qui me permet de maintenir ma connaissance de l'anglais, mais c'est une question personnelle.

  (0940)  

     Merci.
    Madame Lambropoulos, vous avez la parole.
    Je suis l'anglophone dont on parlait, qui siège à ce comité et qui vient du Québec. Ayant l'occasion d'être ici et de voir un bon nombre d'anglophones qui viennent de partout au Canada, je peux dire que les anglophones vivant à l'extérieur du Québec ont souvent plus qu'intéressés d'apprendre le français parce que cela ne leur est pas imposé.
Cependant, les anglophones du Québec ont davantage tendance à parler anglais entre eux et à ne pas vouloir apprendre le français parce que c'est leur façon de protéger leur propre langue dans leur province. On parle des manières de promouvoir le français, et je pense à des mesures positives qui ne les forceraient pas nécessairement à parler français, mais qui leur fourniraient, comme l'a dit M. Genuis, plus d'occasions de le faire une fois leur cours secondaire terminé. La semaine dernière, des observatrices provenant de Toronto m'ont dit envier le fait que nous nous exprimions si bien en français parce que nous venons du Québec. Elles m'ont dit vouloir vraiment apprendre le français. On n'entend pas la même chose de la part des élèves anglophones du Québec, pour les raisons que je viens d'évoquer.
    Vous avez dit que le gouvernement pourrait faire un suivi relativement aux ententes entre les provinces et le fédéral. J'aimerais savoir comment, concrètement, vous recommandez qu'on le fasse. Comment pourrait-on exercer ce droit de regard à l'égard des ententes et de ce qu'elles ont pu réaliser?
    Par exemple, plusieurs des ententes relatives au PLOE contiennent déjà une disposition voulant que la province rende compte au fédéral de l'utilisation des fonds. Malheureusement, le plus souvent, on ne s'en préoccupe pas. La disposition est là, mais on ne fait pas le suivi. Je crois donc qu'il y aurait lieu de s'assurer que ce suivi est fait. Si c'est inscrit dans la loi, on doit voir à ce que ce soit fait.
    Je ne sais pas si j'ai le temps d'ajouter quelque chose rapidement au sujet de votre premier commentaire. Le Nouveau-Brunswick est la seule province officiellement bilingue au Canada et 75 % des francophones y sont bilingues. Là où le bât blesse, c'est du côté des anglophones. En effet, moins de 17 % d'entre eux sont bilingues. Ce pourcentage est même plus bas que la moyenne nationale. Le fait que la seule province officiellement bilingue du pays donne une telle image du bilinguisme m'attriste et me déçoit énormément.
    Je vous remercie. Je suis d'accord avec vous; je pense que tout le pays devrait essayer de devenir bilingue. Nous avons la chance de pouvoir le faire.
    Je reviens à ma question.
    Oui, excusez-moi.
    Nous allons moderniser la Loi, c'est certain. Vous avez parlé d'un suivi, mais j'aimerais savoir qui le ferait et comment.
     Ce serait le ministère responsable qui signe les ententes avec les provinces. Qu'il s'agisse du PLOE, des ententes de formation de la main-d'oeuvre ou de celles concernant la santé, des responsables établissent ces ententes. Ce serait donc à eux de s'assurer que les obligations sont respectées.
    J'ai souvent l'impression qu'on considère toutes les autres obligations comme étant importantes, mais qu'on ne s'attarde pas sur celles touchant les langues officielles. On ne demande pas de rendre compte de la façon dont les objectifs ont été réalisés. Comme je l'ai dit tout à l'heure, on inclut les dispositions par réflexe et non parce qu'on veut s'assurer que la province ou les autres parties respectent ces obligations. J'ai vu cela dans plusieurs domaines.

  (0945)  

    Je vous remercie.
    Me reste-t-il du temps de parole?
    Il vous reste une minute.
    Maître Doucet, on parle de l'obligation du fédéral d'appliquer des mesures positives, mais la fameuse division du pouvoir, des compétences provinciales et fédérales, est toujours présente. Les provinces sont facilement scandalisées quand on en arrive à cela.
    Un paragraphe de la partie VII porte sur les mesures positives visant à mettre en oeuvre l'engagement fédéral en matière de langues officielles. Disons qu'un ministère fédéral, peu importe lequel, veut transférer des fonds à une province — une minorité francophone de cette province demande des écoles, par exemple.
     Si la province ne répond pas à ce besoin, le ministère pourrait décider de retenir une partie des fonds qu'il lui alloue pour s'assurer que ses mesures positives sont appliquées. Est-ce que ce serait un moyen de défense constitutionnel pour régler cette guerre des compétences?
     Quand, en 2005, on a modifié la partie VII, j'ai comparu devant le comité parlementaire. Un ajout à cette partie concernant le respect des compétences des provinces m'inquiétait.
     L'éducation est de compétence provinciale. Pour le gouvernement fédéral, il deviendrait probablement difficile, par son pouvoir de dépenser et dans le cadre de ces ententes, de dicter aux provinces comment utiliser l'argent qu'il leur donne.
    Par contre il pourrait fort bien demander aux provinces de rendre des comptes, d'expliquer comment elles ont dépensé l'argent et d'impliquer les communautés. À l'époque, je savais déjà que cette disposition reviendrait nous hanter à un moment donné, et je l'avais dit au comité. C'est ce qui arrive maintenant. Les provinces disent que le fédéral peut faire certaines choses, mais toujours dans le respect de leurs compétences. Je comprends cela, car nous avons un régime fédéral.
    Le fédéral ne pourrait pas s'immiscer dans le domaine de l'éducation postsecondaire ou de l'éducation en général, mais il pourrait demander aux provinces de rendre compte de leur utilisation des fonds.
    Merci beaucoup, monsieur Arseneault.
    Monsieur Doucet, je vous remercie beaucoup de votre présentation et de vos réponses aux questions des membres du Comité. Je vous dis un grand merci.
    Nous allons suspendre la séance quelques minutes.

  (0945)  


  (0955)  

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(3) du Règlement, nous étudions la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
    Nous avons le plaisir ce matin d'accueillir le Quebec Community Groups Network, représenté par Geoffrey Chambers, président, et Stephen Thompson, directeur, Politique, recherche et affaires publiques. Je vous souhaite la bienvenue.
    Comme d'habitude, vous disposerez de 10 minutes pour faire un exposé, puis nous passerons aux questions des membres du Comité.
    Nous vous écoutons.
    Merci et bonjour, messieurs Paradis, Clarke et Choquette ainsi que les autres membres du Comité. Je m'appelle Geoffrey Chambers et je suis le président du Quebec Community Groups Network, un organisme à but non lucratif qui relie 58 organismes communautaires de langue anglaise de partout au Québec. Nous sommes au service de la communauté anglophone du Québec, qui est une communauté minoritaire de langue officielle. Je suis accompagné aujourd'hui de Stephen Thompson, notre directeur de la politique, de la recherche et des affaires publiques.
    J'ai quelques points à mentionner avant de commencer.
    Je tiens à réitérer que nous condamnons la décision prise par le gouvernement de l'Ontario d'abolir le Commissariat aux services en français et d'annuler la création d'une nouvelle université francophone. Les Québécois anglophones sont solidaires des Franco-Ontariens et de tous les Canadiens francophones en situation minoritaire. Nous comprenons le combat qu'ils mènent et nous les appuyons. Nous sommes avec eux et ils peuvent compter sur notre soutien.
    Nous aimerions également souligner le leadership des sénateurs Tardif et Cormier et de vos honorables collègues du Comité sénatorial permanent des langues officielles, qui ont incité le gouvernement du Canada à se pencher sur le règlement sur les langues officielles et à tenir la discussion nationale sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles que nous avons actuellement, dans le cadre de laquelle nous comparaissons aujourd'hui.
    Enfin, nous profitons de l'occasion pour offrir notre soutien indéfectible à la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada et affirmer que nous appuyons les principes et les concepts énoncés dans le mémoire qu'elle a présenté au Comité. Nous avons les mêmes objectifs, à savoir améliorer le fonctionnement de la Loi sur les langues officielles et faire progresser les droits linguistiques de tous les Canadiens.
    Il ne fait aucun doute que la loi doit être modernisée et que ce travail doit être effectué et terminé rapidement. La décision rendue par la Cour fédérale dans l'affaire FFCB c. Canada et l'immobilisme du commissaire aux langues officielles pour ce qui est de répondre aux plaintes déposées en vertu de la partie VII existent bel et bien. Le rapport Borbey-Mendelsohn de l'année dernière sur la dualité linguistique dans la fonction publique fédérale a mis en lumière les difficultés constantes auxquelles sont confrontés les Canadiens anglophones et francophones pour faire respecter leurs droits en vertu des parties IV et V de la loi. De nombreuses institutions fédérales ne respectent pas leurs obligations en vertu de la partie VI de la loi en ce qui concerne l'embauche de membres de notre communauté dans les milieux de travail au Québec.
    La Loi sur les langues officielles est essentielle pour les Québécois anglophones. Cette loi est la seule mesure législative sur les droits linguistiques qui protègent les intérêts des Québécois anglophones en tant que communauté. Elle établit des droits quasi constitutionnels pour les anglophones québécois, y compris le droit de recevoir des services fédéraux en anglais, la représentation des anglophones au sein de la fonction publique fédérale et le droit des travailleurs anglophones de travailler en anglais. En outre, la loi fournit un cadre pour le financement grandement nécessaire des institutions et des réseaux de la communauté.
    Je vais céder la parole à Stephen.
    J'ai été ravi de pouvoir écouter ce matin le témoignage de Michel Doucet. Nous sommes tous les deux membres du comité consultatif sur les données linguistiques de Statistique Canada, qui s'est réuni hier.
    En ce qui a trait à la modernisation de la loi, je vais expliquer les principes qui ont guidé notre réflexion, qui doivent être intégrés à la nouvelle loi.
    Premièrement, il y a le principe de l'égalité des deux langues officielles. Aucun statut distinct ne peut être accordé et la loi ne peut pas non plus être rédigée de façon à ce qu'il y ait des approches différentes pour chaque langue. Grâce à des consultations efficaces, on peut faire preuve de souplesse lorsqu'il s'agit de répondre aux besoins uniques des communautés de langue officielle en situation minoritaire et d'atteindre l'égalité.
    Deuxièmement, la nouvelle loi devrait prévoir des consultations obligatoires rigoureuses à tous les niveaux, y compris un mécanisme officiel pour tenir des consultations au niveau national, et prévoir des ressources suffisantes à cet égard. C'est une grande préoccupation pour les Québécois anglophones, qui ne sont pas à même de participer de manière égale aux discussions sur les langues officielles au niveau national, et leur présence n'est pas suffisamment visible malgré la taille de leur communauté.
    Notre mémoire contient des recommandations précises. Je vais en mentionner quelques-unes.
    Les parties IV, V, VI et VII de la loi sont étroitement liées, mais pourtant, elles sont mises en oeuvre séparément sans qu'il y ait une reddition de comptes cohérente. Comment une institution peut-elle respecter ses obligations en vertu de la partie IV si elle ne compte pas parmi son personnel un nombre suffisant de Canadiens issus de la communauté minoritaire de langue officielle ou bien permettre à des fonctionnaires fédéraux d'apprendre et de travailler dans la langue officielle de la minorité? Dans quelle mesure les institutions et organisations des communautés minoritaires de langue officielle sont-elles visibles aux yeux des institutions fédérales, qui s'engagent à prendre des mesures pour accroître la vitalité des langues, mais qui excluent les Canadiens issus de la communauté minoritaire de langue officielle des milieux de travail dans les régions? Appliquer isolément les parties IV à VII de la loi ne fonctionne pas.
    Nous attirons également l'attention du Comité sur le problème du sous-emploi des Canadiens anglophones au sein de la fonction publique fédérale au Québec à l'extérieur de la région de la capitale nationale. Plusieurs institutions fédérales ne respectent pas leurs obligations en vertu de cette partie de la loi, qui est vague et nécessite un règlement en vue de la rendre applicable.
    La partie VII de la loi doit être plus claire et prévoir une reddition de comptes. En outre, le ministre des langues officielles doit obtenir le pouvoir de mettre en oeuvre les engagements qu'il a pris. Nous insistons également sur l'ajout de dispositions rigoureuses sur la transparence afin que tous les bénéficiaires des fonds fédéraux investis en vertu de la partie VII rendent compte de l'utilisation de ces fonds, y compris les gouvernements provinciaux et territoriaux. La loi doit également inclure des définitions claires pour les concepts de « mesures positives », « favoriser l'épanouissement » et « appuyer le développement » des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il faut également éliminer des expressions comme « en consultation avec », qui impliquent une responsabilité, sans toutefois que des pouvoirs y soient rattachés.
    Nous souhaitons également que le rôle du commissaire aux langues officielles soit plus précis et qu'on mette sur pied un tribunal administratif doté du pouvoir d'imposer des sanctions pour des infractions à la loi.

  (1000)  

    Les objectifs du QCGN, dans le cadre de cette discussion, sont non seulement d'offrir des suggestions sur la façon de rendre la loi plus efficace, mais également de saisir cette occasion pour renforcer les droits linguistiques des Canadiens. Comme je l'ai dit dans mon exposé, nous croyons fermement que les minorités linguistiques anglophones et francophones sont dans le même bateau, et c'est dans cet esprit que nous formulons les trois objectifs suivants.
    Dans la partie V, qui porte sur la langue de travail, l'article suivant commence bien:
L'anglais et le français sont les langues de travail dans toutes les institutions fédérales. Les fonctionnaires et les employés de toutes les institutions fédérales ont le droit d'utiliser l'une ou l'autre des langues officielles.
    Mais ensuite, cet article limite sévèrement ces droits, en fonction de la géographie. Toutefois, la technologie a rendu les limites géographiques, en matière de travail, largement obsolètes. De plus, la décision d'établir l'administration centrale d'une institution nationale à l'extérieur de la région de la capitale nationale crée souvent la situation absurde qui consiste à imposer aux bureaux des obligations liées aux services bilingues au public, en raison de la nature de leurs services, sans que les travailleurs de ces bureaux aient le droit de travailleur dans leur langue officielle.
    En ce qui concerne les relations avec les employés, chaque fonctionnaire fédéral doit avoir le droit d'utiliser la langue officielle de son choix et le droit d'apprendre une langue seconde.
    La partie III de la loi prévoit déjà un certain nombre d'obligations pour les cours et les tribunaux fédéraux en matière d'administration de la justice. Ces obligations devraient être maintenues et renforcées de façon importante. Les juges de la Cour suprême devraient pouvoir comprendre les langues officielles choisies par les parties, sans l'aide d'un interprète.
    De plus, la loi devrait créer une obligation fédérale en vertu de la partie VII pour encourager et aider les gouvernements provinciaux, afin d'assurer que l'accès à l'ensemble du système de justice est offert dans les deux langues officielles. Il n'est pas très utile d'avoir un juge bilingue si le greffier ne peut pas travailler dans la langue de la minorité et que d'autres fonctions du tribunal ne sont pas disponibles.
    Les parties IV, V et VI de la loi devraient s'appliquer à toutes les entreprises privées sous réglementation fédérale. Les seules entreprises privées du Québec qui ne sont pas assujetties à la Charte de la langue française sont des entreprises sous réglementation fédérale comme les banques à charte, les entreprises de télécommunications et les sociétés de transport.
    Les propositions visant à élargir le champ d'application de la Charte de la langue française à ces entités ne seraient pas seulement incohérentes sur le plan constitutionnel, mais elles auraient aussi pour effet de fragmenter les droits linguistiques constitutionnels en fonction du territoire, ce qui représenterait une menace inacceptable pour les minorités linguistiques francophones et anglophones de partout au pays.
    En revanche, élargir la portée de la Loi sur les langues officielles pour l'appliquer aux entreprises sous réglementation fédérale permettrait non seulement de corriger un problème qui existe dans la loi du Québec, mais aussi de s'assurer que ces entreprises profitent des retombées économiques qui découlent des activités dans les deux langues officielles du Canada d'un bout à l'autre du pays et de créer des droits linguistiques en vertu de la loi pour des milliers de travailleurs dans les entreprises sous réglementation fédérale partout au pays.
    Cela offrirait également le droit de travailler dans les entreprises sous réglementation fédérale et de recevoir leurs services dans la langue de la minorité dans chaque province. Ce serait donc un gain à la fois pour les minorités francophones et anglophones et pour les populations majoritaires francophones et anglophones d'un bout à l'autre du pays.
    Merci beaucoup. Nous avons hâte de répondre à vos questions.

  (1005)  

    Merci, monsieur Chambers.

[Français]

     Commençons notre tour de table par M. Blaney.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Chambers. Je voulais vous féliciter d'appuyer la communauté franco-ontarienne. Il est très intéressant de voir nos minorités unir leurs efforts lorsqu'elles font face à des situations qui les concernent.
     Cela m'amène à ma question. Comme j'ai eu l'occasion de vous le dire lors de notre première rencontre, je suis originaire de Sherbrooke, une ville où anglophones et francophones cohabitent harmonieusement. Récemment, lorsque le premier ministre est allé à Sherbrooke dans le cadre d'une tournée de consultations, une question lui a été posée en anglais, à laquelle il a répondu en français sous prétexte qu'il était au Québec. Quelques jours auparavant, il était en Ontario, où une question lui a été posée en français, à laquelle il a répondu en anglais parce que, j'imagine, il était en Ontario.
    Avez-vu pu corriger le tir et contrer cette perception de cloisonnement linguistique? Sinon, que pouvons-nous faire? Il a beaucoup été question de direction politique pour permettre aux francophones et aux anglophones de s'exprimer dans leur langue n'importe où au pays ou au Québec.
    Comme vous le savez, nous avons soulevé une objection lors de cet événement. Nous étions un peu déçus, parce que les citoyens qui se sont présentés à Sherbrooke pour poser des questions avaient l'intention d'aborder des sujets qui auraient dû être discutés en anglais.

[Traduction]

    Je pense que l'enjeu dont a été saisi le premier ministre était une erreur. Je pense que la réponse du gouvernement, à la suite de ces événements — car ils n'étaient pas entièrement isolés —, a été assez positive.
    Nous poursuivons un dialogue sur ces enjeux et nous tentons de déterminer l'attitude correcte, polie et conciliante à adopter dans différentes circonstances linguistiques. Nous n'avons pas toujours la bonne réponse, mais nous devons tenter d'y parvenir aussi souvent que possible.
    Je crois que les événements auxquels vous avez fait référence illustrent un problème qui, à mon avis, se résout lentement, mais sûrement.
    En ce qui concerne la question des Québécois anglophones, c'est une population vieillissante. Il y a des besoins liés aux soins de santé et à la possibilité d'être servi dans sa langue maternelle — si je peux décrire la situation de cette façon. À votre avis, étant donné que vous êtes l'une des meilleures personnes pour répondre à cette question, de nos jours, quel est le plus gros défi auquel fait face la population anglophone du Québec?
    Il y a plusieurs problèmes généraux, mais je pense que vous avez fait référence à ce que nous considérons probablement comme la question la plus urgente, à savoir que le droit des Québécois anglophones de recevoir des services de santé dans leur langue est limité aux obligations précises codifiées dans ce qu'on appelle un « plan d'accès ». Ainsi, un Québécois anglophone ne peut pas entrer dans un établissement de soins et demander à recevoir certains services en anglais, à moins que l'établissement ne constate qu'elle a l'obligation écrite d'offrir ces services en anglais.
    La plupart de ces plans ont huit ans, ils sont désuets et ils ne correspondent pas à la structure institutionnelle qui a été modifiée il y a quatre ans par le projet de loi 10 du Québec. Nous travaillons très fort avec le gouvernement provincial pour établir une nouvelle série de plans. Tant que ces plans ne sont pas en oeuvre, ce droit — qui, à notre avis, devrait être un droit absolu, mais qui est en fait un droit d'accès limité aux situations où un tel service est défini, et il faut régler cette situation — est notre priorité.
    Il y a manifestement de nombreux autres enjeux. Par exemple, dans le cadre de la réforme de l'éducation qui fait l'objet de discussions, il se peut que nos établissements d'éducation soient menacés. Cela pourrait être assez inquiétant, mais ce n'est pas encore le cas. Des collectivités marginalisées de la province ont beaucoup de difficulté à obtenir des services, car il s'agit d'un petit nombre de personnes dans plusieurs régions éparses.
    Il y a donc d'autres éléments qui doivent faire l'objet de discussions.
    Toutefois, je crois que vous avez dit que les services de santé et les services sociaux étaient notre priorité, et c'est bien le cas.

  (1010)  

[Français]

     Être servis dans votre langue et préserver vos institutions sont donc deux de vos grandes priorités.
    Exactement.
    J'ai fait le tour, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Blaney.
    Madame Lambropoulos, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    Vous avez dit que les anglophones du Québec étaient sous-employés de façon chronique dans la fonction publique fédérale. À votre avis, pourquoi la fonction publique fédérale ne respecte-t-elle pas ses obligations à l'égard des Québécois anglophones et que pourrait-on faire à cet égard?
    Pour atténuer un peu ces propos, oui, dans l'ensemble, nous sommes sous-représentés au Québec. Certains établissements réussissent très bien à cet égard, mais manifestement, d'autres n'y arrivent pas du tout.
    Le Service correctionnel du Canada emploie environ 3 700 personnes au Québec, dont environ 150 anglophones. Les effets de cette situation sont évidents dans le cas d'un prisonnier anglophone qui se trouve dans le Centre fédéral de formation de Laval ou dans l'Établissement de Donnacona.
    Je ne crois pas que cela ait été fait de façon délibérée. Je ne crois pas qu'il y ait un méfait quelconque dans ce cas-ci. C'est juste qu'ils ne se rendent pas compte de la situation.
    Par exemple, les Québécois anglophones sont surreprésentés dans l'Agence des services frontaliers du Canada. En effet, les collectivités anglophones ont tendance à être situées le long de la frontière, et ces emplois ont tendance à nécessiter des employés bilingues. Il s'ensuit que si vous connaissez un oncle ou que vous avez un père ou une soeur ou que vous connaissez quelqu'un qui travaille là-bas... Ce sont des contacts, comme nous le savons tous, qui permettent d'obtenir un emploi.
    Lorsqu'il s'agit de milieux de travail tel le Service correctionnel du Canada, EDSC, Défense nationale ou certains autres établissements qui n'ont pas ce type de relations avec la collectivité, les jeunes ne peuvent pas profiter de ces contacts et ils ont de la difficulté à obtenir un emploi.
    Cela dit, l'an dernier, nous avons rencontré le greffier du Conseil privé. En effet, M. Wernick s'intéresse beaucoup à cette question. Nous travaillons actuellement avec le Conseil fédéral du Québec et la Commission de la fonction publique afin de trouver des façons d'accroître le nombre de Québécois anglophones qui travaillent dans la fonction publique fédérale au Québec.
    À votre avis, existe-t-il d'autres façons de veiller à ce que ce problème soit résolu?
    Cela revient aux relations. C'est lié à la sous-représentation des Québécois anglophones dans la fonction publique provinciale au Québec. Les jeunes Québécois ne se voient tout simplement pas travailler pour le gouvernement. C'est une question d'éducation dans les écoles. Il s'agit d'inspirer les jeunes à chercher un emploi dans le secteur public provincial et fédéral, et de veiller à ce que leurs efforts soient bien accueillis.
    Vous avez également mentionné que vous faites partie du comité consultatif de Statistique Canada sur les statistiques linguistiques. Que faites-vous exactement dans ce comité? Vous penchez-vous seulement sur les minorités linguistiques ou sur les langues en général?
    Statistique Canada a plusieurs comités consultatifs. L'un d'entre eux se penche sur les statistiques linguistiques. Le statisticien ou la statisticienne en chef nomme les membres du comité pour une période déterminée. Chaque membre est nommé individuellement. Les membres du comité se réunissent quelques fois par année.
    Ce comité ne se penche pas spécifiquement sur les langues officielles, mais sur les statistiques linguistiques en général. J'encourage les membres de votre comité à poser ces questions aux représentants de Statistique Canada. Je crois qu'ils comparaîtront plus tard ce mois-ci, et je vous encourage donc à leur poser vos questions sur ce comité consultatif.
    J'ai une dernière question. À votre avis, tous les Canadiens sont-ils représentés adéquatement dans les statistiques linguistiques générales?
    À titre de membre de ce comité consultatif, il me serait difficile de formuler des commentaires sur ce sujet. Le comité est composé de 12 membres, dont deux Québécois anglophones.
    Y a-t-il des représentants autochtones?
    Il y a un représentant du gouvernement du Nunavut.

[Français]

     Merci beaucoup, madame Lambropoulos.
    Monsieur Choquette, c'est votre tour.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Chambers et monsieur Thompson, d'être ici aujourd'hui. C'est très intéressant de constater que tout le monde est motivé et solidaire des Franco-Ontariens. C'est très intéressant de voir cela. Même les représentants du QCGN sont ici pour dire que nous devons protéger les collectivités d'un bout à l'autre du Canada, les collectivités anglophones, bien sûr, mais aussi les collectivités francophones. Je vous remercie de votre soutien. C'est très important. Tous les Québécois ont également offert leur soutien, et c'est très intéressant de voir cela.
    Vous avez parlé de la partie VI sur l'effectif au Québec. Vous avez parlé du programme du Service correctionnel du Canada, et du fait que la partie IV et la partie V — si je me souviens bien — sont distinctes, mais qu'elles devraient être plus inclusives et non considérées séparément. Pouvez-vous approfondir ce sujet?

  (1015)  

    Permettez-moi de revenir à l'exemple du Service correctionnel du Canada. En raison de la nature des services que fournit cet organisme aux prisonniers, il doit les offrir dans les deux langues officielles.
    Toutefois, s'il n'y a pas suffisamment d'employés anglophones en vertu de la partie VI, il est moins probable que des employés puissent parler aux prisonniers. Le jour où j'ai visité le Centre fédéral de formation, par exemple, on m'a assuré que tous les gardiens pouvaient, en tout temps, parler aux prisonniers en anglais et en français. On nous a amenés dans une unité où tous les prisonniers étaient anglophones, et il s'est avéré qu'aucun des deux gardiens en fonction ne pouvait parler anglais. C'est manifestement un problème de sécurité et cela entraîne aussi toutes sortes d'autres problèmes.
    C'est pour la partie VI et la partie IV. Permettez-moi d'aborder la partie V. Étant donné qu'il y a très peu de services offerts — car il y a un très petit nombre de gardiens anglophones et on n'a pas la capacité nécessaire de fournir les services de la partie IV pour la langue de travail —, les représentants du Service correctionnel du Canada nous ont dit que des gardiens francophones bilingues échouaient volontairement à l'examen linguistique, afin de ne pas avoir à s'occuper des prisonniers anglophones. Cela mine la partie V.
    Les établissements d'éducation qui fournissent des services d'éducation de niveau secondaire et collégial aux détenus anglophones de l'établissement correctionnel sont le cégep francophone local et la commission scolaire francophone locale. Cela concerne la partie VII, car des établissements anglophones locaux ne sont pas appuyés par l'établissement fédéral.
    Les exemples fournis dans notre mémoire représentent un microcosme de la façon dont toutes les parties de la loi devraient être intégrées et de ce qui se produit lorsqu'elles ne le sont pas.
    Au-delà de la création de liens — c'est évidemment la première étape —, il nous faut un dispositif actif pour examiner ces modèles de service et déterminer comment obtenir une bonne solution, et ce sera très différent selon les contextes. Mais tant que personne n'est responsable de cela, les administrateurs de ces programmes ont de nombreuses autres responsabilités et ils font de leur mieux pour s'acquitter de leurs autres obligations, et s'ils échouent en matière de langues officielles, il n'y a aucune conséquence négative et aucune correction n'est apportée.
    Je ne cherche pas nécessairement une approche punitive, mais il n'y a aucun résultat et cela n'incite pas à régler le problème.
    Merci.
    L'autre chose dont je voulais parler avec vous, c'est l'élargissement de la portée de la Loi sur les langues officielles pour englober les entreprises sous réglementation fédérale. C'est énorme, c'est nouveau et c'est intéressant, mais à votre avis, comment cela se concrétisera-t-il? Quels sont les obstacles potentiels et comment pouvons-nous mettre cela en oeuvre sans faire face à trop d'obstacles?
    La plupart des entreprises sous réglementation fédérale ont un profil national et elles ont déjà des profils de services qui leur permettent d'établir de bonnes relations avec leur public dans les deux langues officielles, et je crois donc que les télécommunications n'auront aucun problème à cet égard.
    Toutefois, cela pourrait être un peu plus compliqué pour les grandes entreprises de transport. Nous pensons que l'une des raisons pour lesquelles Air Canada est constamment en conflit avec le régime des langues officielles, c'est que l'entreprise a l'impression d'avoir plus d'obligations liées aux coûts et à certains services que leurs concurrents ne sont pas tenus d'offrir. Eh bien, ce n'est pas parce que Air Canada a déjà été une société d'État qu'une personne qui s'attend à être servie en français choisira un vol d'Air Canada de Montréal à Toronto ou de Montréal à Vancouver, parce que WestJet n'a pas d'obligation officielle à cet égard. Ces entreprises devraient s'engager de la même façon envers nos priorités nationales. Il y aura peut-être une certaine résistance, mais je crois que c'est une question de réglementation et que le gouvernement devrait affirmer qu'il faut répondre à cette exigence pour mener des activités au Canada.
    Dans la plupart des autres contextes — et je donnerai bientôt la parole à Stephen, car il est expert dans ce domaine —, dans les études que nous avons mentionnées, les entreprises ne feraient probablement pas face à des coûts supplémentaires élevés ou à des règlements trop intrusifs.

  (1020)  

    Industrie Canada a publié un rapport — je crois l'avoir fourni à votre analyste, mais si ce n'est pas le cas, je le lui enverrai. C'était il y a quelques années. Vous vous souviendrez que le NPD avait proposé un projet de loi qui aurait permis d'appliquer la Charte de la langue française aux entités fédérales au Québec et qu'à l'époque, Industrie Canada a mené une très bonne étude sur les effets de cette initiative et a examiné la situation.
    Comme Geoffrey vient de le mentionner, Industrie Canada a conclu qu'il n'y aurait pas vraiment d'effets sur le secteur bancaire. La Banque Royale du Canada a reçu des prix de l'Office québécois de la langue française. Donc, au Québec, les banques à charte mènent actuellement leurs activités conformément à la Charte de façon volontaire.
    Quels seraient les effets sur les entreprises sous réglementation fédérale? Cela ne les affecterait probablement pas beaucoup, mais je crois que le message qu'on tente de faire passer, c'est l'idée que cela entraînerait d'énormes avantages économiques pour ces entreprises. Vous m'avez demandé comment nous procéderions. Ce serait une décision politique, mais je crois que nous ne devons pas procéder en disant aux entreprises qu'elles devront se conformer à la Loi sur les langues officielles, mais en leur faisant plutôt comprendre qu'elles devraient tenir compte des avantages dont elles pourraient profiter et de la satisfaction que pourraient éprouver leurs clients si elles menaient leurs activités dans les deux langues officielles au Canada.
    Merci.
    Nous entendrons maintenant Mona Fortier.

[Français]

     Bonjour.
    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    De J'aimerais commencer par souligner votre appui aux francophones de l'Ontario, qui a été particulièrement bien reçu, et honnêtement, à titre de Franco-Ontarienne moi-même, j'ai vraiment apprécié que vous ayez été si prompts pour appuyer la communauté, et je sais que la communauté l'a beaucoup apprécié aussi. Je vous remercie donc de cette collaboration et je vous remercie d'avoir été si vites sur la gâchette, comme on dit.
    même, je tiens à dire qu'en tant que Franco-Ontarienne, je comprends qu'il n'y a pas de formule universelle quand on examine la loi, donc si une chose fonctionne pour les francophones, elle ne fonctionnera pas nécessairement pour les anglophones. Je comprends que nos réalités diffèrent.
    M. Blaney vous a posé des questions sur les défis qui se posent et pour moi, c'est toujours une occasion d'apprendre à mieux comprendre non seulement les défis, mais aussi les solutions que vous voulez proposer, pour que nous puissions les appuyer et témoigner de notre appui à la communauté anglophone du Québec dans la prochaine loi.
    Je comprends les réalités propres aux services de santé. Il faut mieux harmoniser les transferts et veiller à ce qu'il y ait des dispositions linguistiques pour le Québec. Je ne sais pas trop comment procéder, ni comment les formuler, toutefois. Vous avez lancé quelques idées. Voudriez-vous peut-être continuer de nous expliquer exactement ce que nous devrions changer dans cette loi pour répondre à vos besoins?
    Si vous me le permettez, j'aimerais commencer par réagir à la première chose que vous avez dite. La population francophone organisée de l'Ontario est un modèle pour son aptitude à défendre ses droits et à exercer un leadership efficace sur les enjeux qui la touchent pour la communauté anglophone du Québec.
    Si l'on se reporte 50 ans en arrière, on pourrait dire que la communauté anglophone du Québec jouissait d'une meilleure situation pour ce qui est des institutions auxquelles elle avait accès et des facteurs socioéconomiques, mais comme nous le savons, les Québécois anglophones s'en tirent moins bien économiquement que tout autre groupe linguistique au Canada en ce moment, donc le modèle a changé.
    De même, la relation avec notre gouvernement provincial est telle que nos institutions se dégradent. Il est peut-être vrai qu'il y a plusieurs hôpitaux qui ont tous été construits par la communauté il y a 50 ans, mais aujourd'hui, ce sont tous des hôpitaux bilingues qui servent tout le monde. Ce sont de bons hôpitaux, et ils sont en général capables de nous offrir de bons services dans notre langue, mais je dis « en général » parce qu'il y a aussi des exemples qui montrent que ces services s'érodent. L'Hôpital de Sherbrooke, que M. Blaney a sans doute connu pendant son enfance, a disparu. Il a été éliminé suite à la promesse que l'obligation d'offrir des services en anglais serait transférée au CHUS, mais cela n'a pas été le cas. Les règles ont changé en cours de route, et cette promesse est morte.
    Nous avons besoin de mécanismes pour nous attaquer à ces problèmes. Les Franco-Ontariens se sont justement dotés de mécanismes du genre. Leur commissaire en est un exemple, et je souligne que nous sommes très inquiets de voir son poste aboli. Nous aimerions qu'il y ait aussi quelqu'un au Québec qui puisse intervenir en cas de réduction des services. Il n'y a pas de commissariat du genre au Québec.
    Il y a beaucoup d'autres exemples que je pourrais vous donner, mais ce serait trop long. Je vous parle surtout de structures provinciales, mais nous aimerions que le gouvernement fédéral joue un rôle actif à l'appui de ce genre de chose.
    Pour revenir à une autre chose que vous avez mentionnée, le gouvernement fédéral nous fournit un soutien actif, mais il est souvent détourné, si bien que les communautés elles-mêmes finissent par ne pas y avoir accès à cause d'un manque de transparence et de reddition de comptes dans le système de transfert actuellement. Je sais que le gouvernement fédéral a affirmé souhaiter améliorer la façon dont ces fonds sont versés. Je sais qu'il se heurte à de la résistance. Nous voudrions que vous sachiez...

  (1025)  

    Cette résistance vient-elle de la province ou...
    Oui. Je suppose qu'en ce moment, il y a un dialogue entre le gouvernement fédéral et les diverses provinces, puisque huit provinces refusent toujours de signer les nouvelles ententes de transfert ou ne les ont toujours pas approuvées, si bien que les fonds sont retenus.
    Il y a des institutions ou organisations provinciales de langue minoritaire qui disent « nous ne recevons pas notre financement et c'est terrible », mais si nous voulons d'un régime raisonnable à long terme, je pense qu'il vaut la peine d'avoir le dialogue que la ministre Joly entreprend actuellement. Nous l'en félicitons, mais ce devrait être une démarche récurrente. Ce devrait être inscrit dans la loi et non seulement une chose à laquelle une bonne et diligente ministre ferait attention maintenant. Ce devrait toujours être, selon la loi, une qualité structurelle du fonctionnement du système.
    Dans le domaine de la justice, pouvez-vous faire à peu près tout en anglais dans le système judiciaire ou y a-t-il beaucoup de difficultés là aussi?
    Encore une fois, le système judiciaire de la province du Québec s'est érodé.
    Depuis six ans, je crois, il n'y a plus de formation dans les deux langues pour les greffiers de la cour, donc il y a de moins en moins de greffiers de la cour bilingues, de sorte que dans les faits, il devient impossible de tenir un procès bilingue, mais il n'y aura jamais de procès dans une seule langue, parce que tous les participants ont le droit individuel d'utiliser la langue de leur choix. Même si toutes les parties sont anglophones ou si toutes les parties sont francophones, une seule personne peut arriver et témoigner dans une autre langue, donc il faut que le système judiciaire soit prêt à les entendre.
    De plus, les jugements ne sont pas traduits, de sorte que les jugements rédigés en anglais ne sont pas rendus publics, qu'ils ne sont pas utilisés ou qu'ils ne deviennent pas des précédents en langue française, et vice versa.
    Encore aujourd'hui, ils n'adoptent pas de lois bilingues. Pour la version anglaise de toute loi modifiée à la deuxième lecture, le projet de loi est habituellement soumis dans les deux langues, mais les amendements ne sont « drafted »... Je m'excuse, je devrais m'en tenir à une seule langue.

[Français]

     C'est correct.

[Traduction]

    Ils ne sont rédigés qu'après l'adoption de la loi, et souvent assez mal, ce qui pose des problèmes bien réels dans le Code civil, pour faire le lien entre les deux lois. Par conséquent, cela crée des problèmes bien concrets pour les juges.
    Je pourrais continuer ainsi. Il y a beaucoup de problèmes structurels. Nous avons commencé par l'exemple de la Cour suprême, parce que c'est une question exclusivement fédérale et qu'elle est très symbolique, mais structurellement, il y a beaucoup de problèmes plus communs qui pourraient être soulevés.

[Français]

    Je vous remercie.
     Monsieur Rioux, vous avez la parole.
    Je vous remercie d'être parmi nous.
    Au Québec, il y a eu un parti séparatiste au pouvoir qui a probablement contribué à empêcher le développement du bilinguisme dans l'ensemble du Canada. Les communautés francophones ont été oubliées. Je pense que le Québec vient de redécouvrir les francophiles du Canada, qui sont au nombre de 2,7 millions.
    Avez-vous l'impression qu'il y a un changement au Québec quant à l'acceptation de la communauté anglophone? Croyez-vous que cette acceptation pourrait faire en sorte que le pays soit, non pas théoriquement, mais réellement bilingue?

  (1030)  

    C'est un point très important. Pour nous, le défi consiste à être acceptés et à participer à la vie collective d'une façon qui permette à la majorité de nous considérer comme des Québécois à part entière.

[Traduction]

    Nous y travaillons très fort. Je pense que nous réalisons déjà de bons progrès. Comme Mme Lambropoulos l'a souligné, ce n'est pas encore parfait.
    La plupart des Québécois anglophones ont décidé de déménager au Québec ou d'y rester, mais ils ont des cousins, des amis ou des camarades de classe qui ont décidé que le jeu n'en valait pas la chandelle et qui vivent désormais à Mississauga, qui est un endroit magnifique, mais ce n'est pas Montréal.
    Cette décision personnelle de la part de familles et de personnes témoigne d'un engagement envers toutes les qualités de la culture québécoise. Nous n'en sommes pas rendus au point où les deux solitudes sont totalement chose du passé, mais nous faisons des progrès énormes. Je pense que nos relations avec les francophones hors Québec, qui connaissent des défis similaires aux nôtres, nous aident à avancer et contribuent à créer le sentiment d'appartenance que nous essayons d'établir.

[Français]

    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Rioux.
    Monsieur Clarke, vous disposez de quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur Chambers et monsieur Thompson, je vous remercie d'être ici.
     Le printemps dernier, j'ai lu votre mémoire concernant votre proposition de modernisation de la loi. Je l'ai trouvée très sensée et très détaillée. Vous touchiez tous les aspects de la loi.
    J'aimerais savoir précisément, ce matin, si vous préféreriez qu'il y ait un tribunal administratif ou un commissaire doté de pouvoirs coercitifs pour faire respecter la loi, puisqu'il faut parfois sévir.
    Quelle option préféreriez-vous?
    Je pense que M. Doucet a bien exposé notre pensée. Je pense que M. Johnson de la FCFA a également été clair à ce sujet la semaine dernière.
    Nous avons proposé la création d'un tribunal administratif dans notre mémoire. Nous ne sommes ni avocats, ni spécialistes en la matière. Nous croyons seulement que cela devrait relever d'un tribunal administratif. Nous aimerions que ce tribunal s'apparente un peu au Tribunal canadien des droits de la personne. Nous hésitons à vous recommander de conférer plus de pouvoirs au commissaire, parce qu'il ne nous semble pas logique que la personne qui mène enquête ait également le pouvoir de sévir. Il serait peut-être mieux que cela se fasse à part, par principe de droit. Encore une fois, nous ne sommes pas avocats, mais par principe...
    Le rôle du commissaire consiste surtout à promouvoir et à... L'ancien commissaire Graham Fraser a été extrêmement éloquent en décrivant son pouvoir d'aller un peu partout à Ottawa pour discuter discrètement avec les sous-ministres. Ce serait une chose vraiment difficile à faire pour un shérif armé jusqu'aux dents.
    Quel rôle voulons-nous confier au commissaire? Il ne faut pas oublier que le Programme d'appui aux droits linguistiques avait pour rôle d'éduquer la population et de favoriser les langues officielles, un rôle que le Programme de contestation judiciaire n'a pas. La seule personne en ville à assumer cette fonction à l'heure actuelle est le commissaire. À quel point voulons-nous donc ajouter cette fonction à sa liste et que ses rôles entrent en conflit? C'est la raison pour laquelle nous privilégions l'idée d'un tribunal.
    Le commissaire doit être un ardent défenseur des droits linguistiques. Comme Stephen l'affirme, on lui nuirait en lui confiant le rôle d'arbitre ou de shérif.
    Assurément, mais y a-t-il quoi que ce soit que vous aimeriez changer au commissariat?
    Nous aimerions que le commissaire continue de recevoir des ressources raisonnables pour exercer sa fonction de réception des plaintes et qu'il ait les outils nécessaires, en vertu des parties IV à VII pour agir en bonne et due forme pour traiter les plaintes reçues. Nous savons qu'à l'heure actuelle, ses pouvoirs manquent de clarté, donc nous aimerions tous que ce soit corrigé et clarifié.

  (1035)  

    J'ai une dernière petite question à vous poser rapidement : préféreriez-vous que toutes les lois de gouvernance relèvent du Conseil du Trésor ou du Conseil privé?
    Nous préférons rester un peu évasifs sur ce point, parce que c'est une question de modèle gouvernemental, et nous ne sommes pas des spécialistes de la question. Il semble y avoir des réserves à l'idée de confier cette tâche au Conseil du Trésor, puisqu'il s'agit d'un mécanisme d'application de la loi, essentiellement, plutôt que d'un mécanisme de défense des droits, bien que ses activités s'étendent à l'ensemble du gouvernement, donc l'idée se défend.
    Les activités du Conseil privé s'étendent aussi à l'ensemble du gouvernement, bien sûr, mais je crois comprendre que la tendance générale est de ne pas lui confier de responsabilités administratives.
    Voulons-nous confier cette responsabilité à une entité qui a de forts pouvoirs administratifs, mais qui n'a pas de liens profonds avec tous les ministères qui doivent être influencés ou à une entité présente dans tous les ministères qui doivent être influencés, mais qui ne se souciera pas du tout de la Loi sur les langues officielles et n'a que... C'est un choix difficile, et honnêtement, nous renvoyons la balle dans votre camp. C'est vous les experts. Nous voulons d'un mécanisme qui fonctionne. Nous ne pouvons pas définir de l'extérieur quel mécanisme nous semblerait vraiment parfait.
    Nous serions portés à croire que ce pourrait certainement être fait sous l'égide du Comité et que pendant ces consultations et celle de la ministre, il serait très intéressant d'entendre un groupe d'anciens greffiers du Conseil privé...
    C'est juste.
    ... pour leur poser la question. Ce sont eux les experts de l'appareil gouvernemental, et ils pourraient nous aider à trouver la bonne formule.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Arseneault, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Si possible, je vais partager mon temps avec M. Samson, de la Nouvelle-Écosse.

[Traduction]

    Je vous remercie d'être ici, monsieur Chambers et monsieur Thompson. C'est toujours un plaisir d'accueillir ici les gens du QCGN. Chaque fois que je vous vois ou que j'entends vos divers représentants ici, j'ai l'impression d'entendre parler de tous les défis que nous connaissons.

[Français]

en Acadie ou dans la francophonie à l'extérieur du Québec.

[Traduction]

    Cette question semble peut-être un peu hors sujet, mais concernant les minorités linguistiques, comme vous le savez, nous venons tout juste de rétablir le Programme de contestation judiciaire qui avait été aboli par le gouvernement conservateur de Harper. Est-ce un outil que le QCGN a déjà utilisé?
    La communauté anglophone l'a utilisé dès sa création, et il est souvent utilisé sur les enjeux pan-nationaux qui nous tiennent à coeur.
    Dans une vie antérieure, j'ai été directeur exécutif d'Alliance Québec. Nous sommes alors intervenus dans l'affaire des droits linguistiques au Manitoba. J'étais au Manitoba, et quand Sterling Lyon a dit...
    C'était il y a longtemps.
    Oui, c'était dans le cadre du Programme de contestation judiciaire. Il y a de nombreux autres exemples qu'on pourrait citer depuis ce temps. Ce programme a été très important pour protéger nos droits, mais il importe de souligner qu'il s'agit d'un outil national pour créer un ensemble de principes dont toutes les minorités de langues officielles peuvent bénéficier.
    Nous sommes très heureux de le voir rétabli, puisqu'il a toujours été très important pour nous dans toute son histoire.
    Je ne sais pas si vous le savez, mais je pense que nous avons déjà entendu James Shea comme témoin représentant le QCGN. C'est l'un des experts membres du comité...
    Oui, nous sommes très heureux de voir qu'il y a une personne de cette qualité membre du comité chargé de déterminer qui pourra bénéficier de ce programme. La nomination de James Shea est excellente, c'est un choix judicieux, d'après moi.
    Pour revenir à la modernisation de la loi, j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Je sais que M. Thompson a mentionné que vous n'êtes pas avocats, et je peux vous dire que ce n'est pas un problème, étant moi-même avocat, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez des pouvoirs dont jouirait un tribunal indépendant si nous modernisions la loi en ce sens.
    Je ne me souviens pas de l'article exact, mais il y a un article de la Loi sur les langues officielles qui prescrit les pouvoirs d'enquête du commissaire. J'essaie de me rappeler la conversation que j'ai eue avec nos avocats à ce sujet. Ils font partie des Juristes Power. Ils sont venus vous voir la semaine dernière.
    Oui, mais par exemple, prenons l'idée d'un tribunal indépendant du commissaire. Je pense que vous aimeriez que ce soit un tribunal administratif indépendant qui soit chargé de se pencher sur ces questions.
    Je pense que le modèle que nous préconisons est celui du Tribunal canadien des droits de la personne. Peut-être que si nous avions une discussion plus en profondeur avec les membres de ce tribunal pour déterminer s'il y a des pouvoirs qu'ils n'ont pas mais qu'ils aimeraient avoir, nous voudrions proposer un modèle plus musclé, mais ce serait certainement un bon point de départ.
    Il faut s'interroger sur le concept de la responsabilité devant le tribunal. La responsabilité sera-t-elle institutionnelle ou individuelle? S'il y a une responsabilité individuelle devant le tribunal, les gens feront peut-être beaucoup plus attention.

  (1040)  

    S'il me reste du temps, puis-je laisser une minute à mon collègue de la Nouvelle-Écosse?
    Vous pouvez lui laisser une minute.
    Où est la responsabilité dans le partage?
    Vous avez une minute.
    Une minute, et j'ai quatre questions, je ne sais pas par où commencer.
    Un député: Commencez par une.
    M. Darrell Samson: La plus simple, c'est...
    Un député: Et le préambule?
    M. Darrell Samson: Il n'y a pas de préambule.
    L'an dernier ou l'année précédente, un ministre s'était vu confier la responsabilité d'appuyer la communauté anglophone du Québec. Je crois que c'était très bien et que cela avait été bien accueilli. Où en sommes-nous à ce chapitre?
    Eh bien, il n'y a pas de ministre nommé à ce titre au sein du Cabinet actuel. Le Cabinet est assez petit, et l'explication qu'on nous a donnée, c'est que pour cette raison, c'est le premier ministre qui assumera cette responsabilité. Avec l'aide d'un adjoint parlementaire, nous avons demandé de rencontrer le premier ministre. Si c'est lui qui doit être responsable de notre dossier, nous aimerions avoir la chance de lui parler. Nous avons déjà rencontré l'adjoint parlementaire.
    C'est un modèle qui n'est pas sans mérite. Nous l'essaierons en toute bonne foi. Ce n'est évidemment pas aussi flatteur pour la communauté que d'avoir un ministère, comme en Ontario.
    Nous direz-vous comment cela se passe?
    Sans faute.
    Je crois que vous avez reçu 5,3 millions de dollars de plus dans le plan d'action. Comment avez-vous accueilli cela?
    Comme vous pouvez l'imaginer, cela a été accueilli positivement. Nous sommes très heureux que le ministère entreprenne de définir comment tout cela sera déployé en collaboration avec la communauté, et nous participons actuellement à des consultations très productives, donc cela va très bien.
    Excellent.
    Concernant le règlement, comment avez-vous accueilli les modifications au règlement? S'appliquent-elles à vous, dans quelle mesure et comment ont-elles été accueillies?
    Concernant le règlement, nous avons extrêmement bien été consultés par le Conseil du Trésor et tous les participants à l'examen réglementaire. Nos préoccupations ont été prises en compte dans les propositions, donc nous en sommes très contents.
    Bravo de votre bon travail, parce qu'il est très bien articulé, très bien reçu et très bien exécuté. Merci.

[Français]

     Merci, monsieur Samson.
    Monsieur Choquette, vous avez trois minutes.
    Un instant, s'il vous plaît. La sonnerie se fait entendre et les lumières s'allument pour nous appeler à voter à la Chambre. Je demande le consentement unanime pour permettre à M. Choquette de prendre ses trois minutes.
    Des députés: D'accord.
    C'est bien parce que c'est M. Choquette!
    C'est bien. Allez-y, monsieur Choquette.

[Traduction]

    J'aimerais avoir trois minutes pour conclure rapidement, parce qu'en trois minutes, je n'aurai pas le temps d'ajouter quoi que ce soit d'autre. J'aimerais seulement utiliser ces trois minutes pour vous demander une conclusion sur la façon dont vous voyez la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
    Il y a deux éléments sur lesquels nous voulons insister auprès de vous aujourd'hui. Nous voulons d'abord souligner l'importance de la crise actuelle qui frappe l'Ontario et à quel point nous apprécions de voir tout le monde se serrer les coudes, à quel point nous estimons nécessaire de continuer de le faire.
    Le plus important à long terme, toutefois, au-delà de l'objet de cette rencontre, c'est l'importance de la Loi sur les langues officielles elle-même. Nous devons souligner à quel point c'est un bon outil et combien des modifications relativement modestes et peu controversées — il ne s'agit pas d'une refonte en profondeur de la loi — pourraient la rendre plus efficace et en faire un véritable mécanisme pour favoriser l'unité au pays.
    L'une des caractéristiques qui fait du Canada ce qu'il est, c'est l'importance de ses deux langues officielles. J'ai eu le privilège de participer au symposium du commissaire Boileau à Toronto, hier. L'un des conférenciers y parlait de tous les pays du monde à avoir des fonctions constitutionnelles bilingues. Il y en a environ 52 sur 195, ce qui représente environ le quart des pays du monde. Le modèle qui nous est proposé fait école et est cité en exemple par les autres pays du monde. Bien d'autres pays ne s'en tirent pas aussi bien que nous.
    Comme nous avons ces outils — et c'est une chose très saine pour le pays —, il est très constructif d'essayer de les rendre un peu plus efficaces encore et de continuer de déployer toute l'énergie et l'attention que vous y accordez. Nous voulons favoriser cela et vous aider de toutes les façons possibles.
    Merci infiniment.
    Merci beaucoup, monsieur Chambers et monsieur Thompson. Nous vous remercions infiniment de vos exposés et de vos réponses aux questions et observations des membres du Comité.

[Français]

     Nous nous retrouverons jeudi. Je vous rappelle que la réunion aura lieu à l'édifice du Centre et qu'elle sera télévisée. Nous y recevrons les commissaires de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick.
    La séance est levée.
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