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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 109 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 2 octobre 2018

[Énregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    C'est ce que j'utilise comme marteau à défaut d'en avoir un en ce moment.
    Merci à tous d'être venus ce matin à la séance du Comité permanent de la défense nationale.
    Même si l'étude portant sur la contribution du Canada aux opérations de maintien de la paix internationale tire à sa fin, je suis heureux que le Comité ait l'occasion d'entendre les témoins d'aujourd'hui pour enrichir la discussion.
    Nous accueillons Mme Kathryn White de l'Association canadienne pour les Nations unies et Mme Beth Woroniuk du Réseau Femmes, paix et sécurité — Canada. M. Bruce Jones de Brookings Institution se joint à nous par vidéoconférence à partir de Washington, D.C. Nous entendrons également M. David Bercuson du Centre for Military, Security and Strategic Studies, à partir de Calgary, en Alberta.
    Je cèderai d'abord la parole à Mme Kathryn White.
    Étant donné que quatre personnes doivent prendre la parole et que le temps est limité, je vous demanderais de bien vouloir conclure votre intervention en 30 secondes si je vous fais signe. Ainsi, les membres du Comité pourront poser des questions.
    Madame White, la parole est à vous.
    Monsieur le président, distingués membres du Comité, Beth, David, Bruce, chers collègues, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous. Je prends la parole au nom d'un organisme national de la société civile datant de 73 ans, plus précisément de son conseil et de ses 35 000 membres de partout au pays. Je représente également la société civile à l'échelle mondiale à titre de présidente élue de la Fédération mondiale des associations pour les Nations unies.
    Dans le difficile contexte géopolitique actuel, l'une des grandes idées en coopération internationale que les pays membres de l'ONU partagent toujours est la suivante: tous croient aux initiatives d'aide, de développement et de maintien de la paix. En 2015, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté à l'unanimité les objectifs de développement durable qui doivent servir de cadre pour les programmes jusqu'en 2030. Ils incluent notamment des engagements ambitieux visant l'éradication de la pauvreté extrême. Le consensus mondial veut que ce soit le chemin à suivre pour maintenir la cohésion en ce qui concerne les enjeux planétaires. Votre comité, dans le cadre de son rôle de gouvernance, a examiné l'évolution des réalités entourant les missions de maintien de la paix menées par l'ONU. Comme vous le savez, les citoyens canadiens ont depuis longtemps du respect pour ce rôle historique, depuis le moment où Lester B. Pearson a utilisé ses brillantes habiletés diplomatiques dans le cadre de l'important déploiement au Sinaï.
    Je reconnais également les contributions novatrices dans les domaines disciplinaires, militaires et autres que le gouvernement du Canada apporte aux missions de maintien de la paix de l'ONU depuis de nombreuses années.
    Je tiens à féliciter le gouvernement du Canada et le ministre de la Défense nationale qui font preuve de leadership et d'esprit d'innovation en améliorant la protection des enfants, en accroissant la participation des femmes dans les opérations de paix, en annonçant la création du poste d'ambassadrice des femmes, de la paix et de la sécurité et en renforçant les capacités de la société civile. Vous connaissez les documents qui appuient ces initiatives. Je crois que, lorsque nous unissons nos forces pour favoriser une sécurité inclusive, les opérations de maintien de la paix s'en trouvent renforcées.
    Je suis aussi fière des contributions de l'Association canadienne pour les Nations unies, notamment la mobilisation des jeunes sur les questions de la consolidation et du maintien de la paix par l'entremise d'une série de consultations. De plus, nous avons organisé une conférence en marge de la Réunion des ministres de la Défense de l'ONU il y a près d'un an à Vancouver.
    Évidemment, nous sommes fiers de faire partie des membres fondateurs du Réseau Femmes, paix et sécurité, mais je laisserai le soin à ma collègue d'en parler davantage.
    Voici quelques-unes de nos recommandations.
    Nous saluons l'initiative Elsie.
    Nous mettons toutefois en garde contre les risques associés aux récompenses en argent pour le déploiement de femmes dans les opérations de paix par des pays qui n'en ont pas l'habitude. Il est possible que cette approche crée des pressions pour effectuer plus d'un déploiement par année. Il faut garder en tête ces questions, et je ne doute pas que nous le ferons.
    J'encourage également l'investissement continu dans la participation des femmes aux opérations de paix au niveau local. Encore une fois, ma collègue en parlera davantage.
    Je vais me pencher sur un point précis parce que je sais que vous vous rendrez à New York. Je demande au Canada de nommer 10 conseillers en matière d'égalité entre les sexes rattachés au Département des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Je ne parle pas de très haut gradés, mais plutôt de gens qui seront déployés sur le terrain avec les troupes. Je suis ravie que le chef d'état-major appuie l'idée. Nous comptons un conseiller en matière d'égalité entre les sexes au Mali, mais l'initiative est différente. La recommandation permettrait d'assurer une cohésion et une cohérence entre tous les pays contributeurs de troupes, et je crois qu'elle est réalisable. Je vous souligne que le Pentagone vient d'annoncer, à la fin de la semaine dernière, l'investissement de 1 million de dollars dans la formation des conseillers en matière d'égalité entre les sexes. C'est une bonne nouvelle compte tenu des circonstances.
    En ce qui concerne le poste d'ambassadrice, nous saluons aussi cette initiative. Je vous exhorte à tenir compte du fait que ce doit être une femme qui est en mesure de parler aux forces armées avec assurance tout en étant à l'écoute des femmes ordinaires qui n'ont pas l'habitude d'être consultées sur ces questions.
    Je passe à la mobilisation de la société civile. La protection des civils est une question de plus en plus épineuse et complexe dans les opérations modernes de maintien de la paix, particulièrement en raison des menaces asymétriques, comme vous le savez. Ces menaces ciblent souvent la population civile. Il me semble que les Forces canadiennes ont reçu une formation adéquate sur les fonctions de G9, mais je souhaiterais que la participation des femmes et de la société civile s'étende à l'ensemble de la structure de commandement et qu'on cherche de nouvelles façons de mobiliser la société civile pour protéger ses membres sur le terrain. Cette approche contribue à une sécurité globale et inclusive, et je pense que le Canada a été un chef de file en la matière en ce qui concerne le développement, la diplomatie et la défense ainsi que, bien sûr, la gouvernance et l'égalité des sexes.

  (1105)  

    Nous saluons l'initiative intitulée Action pour le maintien de la paix, qui a été lancée par le secrétaire général des Nations unies. Je suis heureuse que le Canada soit l'un des 148 pays signataires.
    En ce qui concerne les jeunes, la paix et la sécurité, nous alimentons de plus en plus les conflits. Nous favorisons la radicalisation chez les jeunes. Il me semble que le Canada pourrait jouer un rôle dans ce domaine. Grâce aux études mondiales, à notre travail, ainsi qu'à l'examen du Secrétariat de l'ONU sur la résolution 2250 portant sur la jeunesse, la paix et la sécurité, nous savons que les jeunes sont à la recherche d'un emploi valorisant et d'une direction, et certains vivent dans des États fragiles ou en déroute. Le Canada pourrait apporter sa contribution, y compris en ce qui concerne la défense.
    Enfin, à propos de l'avenir du maintien de la paix, compte tenu des opérations en cours, dont une grande partie a lieu sur le continent africain, il nous semble que nous devons favoriser les initiatives diplomatiques afin que le rôle de premier plan de l'Union africaine et de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest soit de plus en plus reconnu. Nous devons les appuyer et investir dans celles-ci afin qu'elles apportent aussi leur contribution.
    Je tiens également à souligner le rôle historique de leader que le Canada a joué dans le déploiement des forces policières. De plus en plus, nous nous trouvons en milieu urbain. Les forces policières détiennent les compétences pour travailler dans ce contexte. Je vous incite donc à maintenir l'avantage stratégique du Canada dans ce domaine.
    Au sujet de la formation pour les opérations de paix, vous ne serez pas surpris d'apprendre que je suis au courant de vos discussions sur la perte du Centre Pearson pour le maintien de la paix et sur la possibilité de rétablir une structure semblable. Je vous encourage à également tenir compte de l'aspect touchant la réflexion, c'est-à-dire l'établissement de politiques, la présentation d'idées novatrices et la communication de pratiques prometteuses.
    Il est vrai que les forces militaires font un excellent travail de formation, y compris en ce qui concerne la reconnaissance de leur rôle dans la mobilisation de la société civile. C'est toutefois différent de ce que peut faire un organisme indépendant. Je vous exhorte donc à aussi étudier cette question.
    Je vous ai distribué des documents qui sont importants. Il y a une copie de la Charte des Nations unies qui commence par les mots suivants: « Nous, peuples ». Voilà pourquoi nous avons uni nos efforts pour appuyer le maintien de la paix dans le monde. Nous consolidons ainsi la paix dans notre pays.
    Je vous ai également remis une copie de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui fête son 70e anniversaire. La première ébauche du document a été écrite au crayon, et non au stylo, par John Humphrey. Cette version se trouve dans le sous-sol de l'Université McGill. Nous devrions tous en tirer une fierté. Nous sommes ici aujourd'hui parce que nous aspirons à vivre dans un monde à l'image de cette déclaration.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame White.
    Madame Woroniuk, la parole est à vous.

  (1110)  

    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité et chers témoins. Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je suis coordinatrice du Réseau Femmes, paix et sécurité — Canada. Nous sommes un réseau bénévole comptant plus de 20 organismes et plus de 60 particuliers. Notre objectif principal est de surveiller les mesures et les engagements pris par le gouvernement canadien sur les questions touchant les femmes, la paix et la sécurité. Nous nous voyons comme un allié essentiel du gouvernement. Nous applaudissons lorsqu'il y a des avancées, mais nous ne nous gênons pas pour demander des améliorations ou souligner des lacunes. Le gouvernement a reconnu le rôle important qui est joué par le réseau.
    Mon point de départ concernant les opérations de maintien ou de soutien de la paix du Canada est quelque peu différent de celui de la majorité des témoins à comparaître dans le cadre de votre étude. Je tiens à remercier le Comité d'avoir fait une place à un point de vue différent, celui d'une civile et d'une militante des droits des femmes — un point de vue féministe, si j'ose dire. Ce type de voix n'est pas toujours entendu dans les discussions sur le maintien de la paix ou la sécurité. Les femmes activistes des pays où se déroulent des opérations de maintien de la paix nous répètent sans arrêt qu'elles ne sont pas invitées à la table des discussions. Je remercie donc le Comité de nous avoir invités aujourd'hui.
    Souvent, on considère que le programme sur les femmes, la paix et la sécurité remonte à l'an 2000, moment où le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 1325. La résolution a reconnu le rapport important entre la sécurité des femmes et la sécurité des États en plus d'ouvrir la porte aux analyses sur ces liens et synergies. Pourtant, les organismes de femmes travaillaient à faire connaître leur point de vue sur la paix et la sécurité bien avant.
    De façon générale, on parle d'un programme à quatre piliers: premièrement, favoriser la participation des femmes aux initiatives de rétablissement de la paix et à toutes les formes de résolution des conflits, y compris les opérations de maintien de la paix; deuxièmement, protéger contre la violence sexuelle liée aux conflits ou s'y attaquer; troisièmement, prévenir les conflits armés à la source; quatrièmement, faire en sorte que le relèvement après les conflits profite aux hommes et aux femmes et, dans la mesure du possible, contribue à réduire les disparités entre les genres.
    Je vous renvoie au rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, intitulé Le programme relatif aux femmes, à la paix et à la sécurité: Une occasion pour le Canada de devenir un chef de file mondial. Présenté à la Chambre il y a près de deux ans, cet excellent rapport comprend des recommandations sur les opérations de soutien de la paix. J'encourage votre comité à étudier ces recommandations.
    J'exhorte également le Comité à consulter le Plan national d'action du Canada consacré aux femmes, à la paix et à la sécurité afin de veiller à ce que toutes les recommandations renforcent les engagements qui y sont pris. La ministre Freeland a lancé le plan il y a moins d'un an. Signé par sept ministres, il présente un ensemble complet de cibles ambitieuses qui, si elles sont atteintes, feront du Canada un chef de file mondial sur les questions des femmes, de la paix et de la sécurité. Le plan d'action national prend de nombreux engagements visant le maintien de la paix, les opérations de soutien de la paix et les déploiements du Canada à l'étranger. Nous exhortons le Comité à faire en sorte que ses recommandations reconnaissent ces engagements et y prennent appui.
    Pendant le temps de parole qu'il me reste, j'aimerais me concentrer sur quatre points: l'Initiative Elsie, l'importance de prendre en compte le contexte général s'appliquant à l'objectif de déployer plus de Canadiennes dans les opérations de paix, l'introduction de la question des sexes dans les approches canadiennes du maintien de la paix et les cas d'exploitation et d'agressions sexuelles commis par des Casques bleus.
    Ma collègue a parlé de l'Initiative Elsie. En novembre dernier, le Canada a annoncé cette initiative en l'honneur d'Elsie MacGill, une ingénieure en aéronautique avant-gardiste. Comme d'autres l'ont expliqué, il s'agit d'un projet pilote visant à accélérer l'accroissement de la participation significative des femmes aux opérations de soutien de la paix des Nations unies. Malgré des objectifs de longue date en la matière, les progrès ont été extrêmement lents. En ce moment, un peu moins de 11 % des forces policières de l'ONU et environ 5 % des militaires déployés sont des femmes.
    L'Initiative Elsie comprend des travaux de recherche sur ce qui fonctionne, une assistance technique aux pays contributeurs de troupes et de forces policières pour s'attaquer aux obstacles et un fonds mondial pour encourager le déploiement de plus de femmes dans les opérations de paix, ce qui est loin de faire consensus, comme ma collègue l'a relevé.
    Il est important de souligner que l'Initiative Elsie est novatrice et qu'elle recèle un énorme potentiel. C'est un exemple du leadership dont peut faire preuve le Canada aux Nations unies. Cependant, je soulèverai trois grandes préoccupations.
    Premièrement, l'Initiative Elsie vise à encourager les autres pays à accroître la participation des femmes aux missions. Il semble plutôt contradictoire d'exhorter les autres à augmenter les pourcentages de femmes sans appliquer la même approche ici. Il est vrai que nous avons appris la semaine dernière que le Canada entreprendra le même type d'évaluation des obstacles pour les femmes que celui des pays partenaires de l'initiative. C'est une excellente nouvelle.

  (1115)  

    Deuxièmement, comme l'a souligné Mme Baruah devant le Comité, l'argument voulant que l'augmentation de la participation des femmes mène à une efficacité accrue des opérations de la paix soulève de grandes préoccupations. Tous les membres des opérations de soutien de la paix doivent contribuer à rendre les interventions plus efficaces en ce qui concerne la violence fondée sur le sexe, et non seulement les femmes.
    Troisièmement, les efforts du Canada pour appuyer les opérations de paix de l'ONU doivent se fonder sur une vision d'ensemble. Il faut soutenir et financer toute la gamme des initiatives d'intégration des principes de l'égalité des hommes et des femmes aux opérations de maintien de la paix. Déployer plus de femmes sans viser la capacité globale des opérations de maintien de la paix à répondre à l'ensemble des questions relatives à l'égalité des sexes ne nous mènera pas très loin. Je décrirai bientôt ce que cela suppose.
    Je passe maintenant au deuxième point que je voulais soulever: l'importance d'examiner l'ensemble des possibilités et des défis associés au déploiement de plus de Canadiennes dans le cadre des initiatives de maintien de la paix. Nous appuyons fermement la volonté du Canada d'augmenter le pourcentage de femmes dans les missions à l'étranger, mais on nous a prévenus que les conditions doivent être mises en place pour assurer leur réussite. Il ne suffit pas de s'attarder aux chiffres seulement. Il faut s'attaquer à des enjeux institutionnels, culturels, structurels, comportementaux et logistiques dans les opérations de soutien de la paix pour garantir leur efficacité. Il est essentiel que les femmes dans les opérations de paix aient accès à la formation, à l'aide médicale, à l'équipement et aux installations dont elles ont besoin.
    De plus, les recherches montrent que les femmes dans les opérations de paix sont victimes de harcèlement et d'agressions de la part des autres Casques bleus. Il est crucial de comprendre et de cibler les problèmes de sexisme et d'homophobie dans le secteur de la sécurité. Les efforts du Canada pour y arriver, au moyen d'initiatives comme l'opération Honneur, doivent donner des résultats si nous voulons être un défenseur crédible sur la scène internationale. Les leçons tirées de ces initiatives peuvent également être communiquées aux pays contributeurs. C'est une question importante pour le maintien de la paix en général ainsi que pour l'apport canadien à toute mission.
    Le troisième sujet touche l'intégration des perspectives sur l'égalité des sexes dans le domaine du maintien de la paix. Il est important de souligner qu'il y a des engagements canadiens et mondiaux qui ne se limitent pas à accroître le nombre de femmes dans les opérations de maintien de la paix. On vise également à intégrer les principes de l'égalité des hommes et des femmes. Ainsi, il faut notamment comprendre comment les conflits armés en général, et les opérations de maintien de la paix en particulier, ont des répercussions différentes pour les hommes et les femmes.
    Le ministère canadien de la Défense nationale a reconnu l'importance de ces connaissances. J'ai entendu le discours éloquent que le chef d'état-major, le général Vance, a donné sur le sujet, et je n'ai aucun doute sur son engagement. Nous sommes heureux de constater que les choses avancent au sein du ministère et des Forces armées canadiennes, par l'entremise de la mise en oeuvre de la directive du chef d'état-major de la Défense pour l'intégration de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies.
    Cela dit, beaucoup de travail reste à faire pour développer des compétences, créer une formation vraiment efficace et établir des lignes directrices dans tous les secteurs, de l'approvisionnement aux relations avec les populations locales. Il faut notamment effectuer une analyse comparative entre les sexes — avec l'appui de conseillers en matière d'égalité entre les sexes, comme mes collègues en ont parlé — sur tous les sujets, y compris la primauté du droit, la protection des civils et la réforme du secteur de la sécurité. Il faut mener des consultations auprès des organismes de femmes sur le terrain. Il faut inclure les questions spécifiques aux sexes comme la violence sexuelle liée aux conflits dans les mandats des missions. Il faut améliorer les données sur les genres ainsi que les activités de renforcement des capacités et de formation au sujet des analyses et des perspectives sur l'égalité des sexes, ce qui inclut la participation des organismes de femmes. Il est important qu'une telle formation s'adresse aux dirigeants, et non seulement aux simples soldats. Il faut également prévoir des programmes visant l'accroissement de la participation des femmes à la reconstruction après les conflits, le déploiement de conseillers en matière de protection des femmes ainsi que l'amélioration des rapports sur ces enjeux.
    Le Plan national d'action du Canada souligne l'importance de la société civile et des organismes de femmes. Les interactions entre les opérations de paix et la population locale sont cruciales. Selon les témoignages de femmes sur le terrain, leur principale interaction avec les Casques bleus est le passage des véhicules qui soulèvent la poussière en traversant leur village. Il y a beaucoup à faire afin que le personnel des opérations de soutien de la paix, les militaires comme les civils, ait les compétences et les capacités nécessaires pour interagir efficacement avec les populations locales. Pour y arriver, il devrait s'appuyer sur les compétences, les connaissances et l'expertise des militants et des organismes de défense des droits des femmes de la région.
    Le dernier enjeu à souligner est celui de l'exploitation et des agressions sexuelles. L'une des principales bavures qui entachent la réputation des opérations de maintien de la paix de l'ONU est un problème de longue date: les Casques bleus qui commettent des actes de violence, y compris des agressions sexuelles, contre les gens qu'ils devraient protéger. Malgré l'indignation généralisée que le problème a soulevée, il s'est révélé particulièrement difficile à éradiquer.
    De nombreuses recommandations ont toutefois été présentées. Par exemple, la campagne Code Blue de l'organisme AIDS-Free World milite en faveur d'un mécanisme judiciaire spécial en faisant valoir que les enquêtes et les poursuites doivent être séparées des processus internes de l'ONU.

  (1120)  

    Le Canada s'est exprimé sur l'importance de s'attaquer efficacement aux cas d'exploitation et d'agressions sexuelles dans les rangs de l'ONU. Nous appelons à une vigilance soutenue, tant à l'ONU que dans l'ensemble des opérations de soutien de la paix auxquelles le Canada participe.
    En conclusion, je tiens à reconnaître le travail accompli jusqu'à ce jour par le ministère de la Défense nationale, les Forces armées canadiennes, la GRC et Affaires mondiales Canada. Cependant, les enjeux sont complexes, et il y a encore du travail à faire pour que le rendement du Canada soit digne des ambitions qu'il a présentées dans le contexte mondial.
    Je terminerai en citant les mots de l'infatigable ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, qui a affirmé ceci la semaine dernière à New York: « Nous devons intégrer le féminisme au maintien de la paix. Il est temps de mettre fin au patriarcat dans les missions de maintien de la paix. »
    Merci de l'invitation et de votre attention. J'ai hâte de participer aux discussions.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Jones, vous avez 10 minutes.
    Merci.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité et distingués témoins, je vous remercie de m'accueillir aujourd'hui. C'est un plaisir de vous parler, même si je dois le faire à distance.
    J'ai pensé qu'il serait pertinent que je revienne un peu en arrière pour parler des contributions actuelles du Canada dans le contexte plus large de l'évolution des conflits et du maintien de la paix. Je le ferai brièvement.
    Selon moi, il est utile de comprendre que depuis la fin de la guerre froide, nous avons vu trois principales phases d'évolution des opérations de maintien de la paix des Nations unies.
    La première a eu lieu de la fin des années 1980 jusqu'au milieu des années 1990. De façon charitable, on pourrait la qualifier de phase d'expérimentation: les Nations unies essayaient de nouvelles formes de maintien de la paix après la guerre froide. Il y a eu quelques réussites au Mozambique, au Salvador et ailleurs, mais également une suite d'échecs cuisants sur le plan stratégique en Somalie, au Rwanda, en Bosnie, en Angola et ailleurs.
    Ces expériences ont mené à la deuxième phase, que je décrirais comme la période de réforme. Elle a été principalement dirigée par Kofi Annan, à partir du moment où il est devenu secrétaire général. Pendant cette période, l'ONU a augmenté de façon marquée la taille de ses déploiements par rapport aux combattants auxquels elle faisait face. On a observé des améliorations substantielles des fonctions de commandement et de contrôle; une reconnaissance que le principe fondamental d'impartialité des Casques bleus n'empêchait pas l'ONU de lutter contre les saboteurs et autres individus tentant de miner les accords de paix; et l'adoption d'une approche multidimensionnelle, c'est-à-dire l'intégration des instruments relatifs à la sécurité, à l'économie et à l'aspect humanitaire dans un cadre politique général.
    La forte croissance des opérations de maintien de la paix pendant cette phase, du milieu des années 1990 à 2010, est étroitement liée et a certainement contribué à un phénomène — on ne peut pas vraiment dire qu'elle l'a causé — dont on ne parle pas beaucoup: la baisse de 40 % des guerres dans le monde et la chute de 80 % des grandes guerres. Les missions de maintien de la paix des Nations unies, ainsi que celles d'autres acteurs comme l'OTAN et les organismes régionaux, ont joué un rôle crucial dans la chute marquée des guerres dans le monde pendant cette période.
    La troisième phase, que nous vivons en ce moment, est celle qui suit le printemps arabe. Nous avons observé la fusion de deux programmes: celui de la lutte contre le terrorisme, d'un côté, et celui de la gestion des guerres civiles, de l'autre. De 2010 à aujourd'hui, plus de 90 % des décès découlant des combats ont eu lieu dans des guerres impliquant une organisation terroriste. Autrement dit, il n'est plus possible de séparer les enjeux de gestion des guerres civiles et ceux de la lutte contre le terrorisme. Les conflits présentent toute une gamme de niveaux de difficulté, d'extrêmement difficile, comme en Syrie, à moins difficile, comme au Mali. Nous faisons face à de nouveaux défis, peu importe où se trouvent les conflits sur le spectre.
    Pour les pays comme le Canada, la situation crée trois options pour contribuer à la gestion des conflits.
    D'abord, il y a le déploiement par l'entremise de l'OTAN, ce que nous avons fait en Afghanistan, comme vous le savez. L'OTAN offre des avantages considérables, notamment en ce qui concerne la force militaire et les capacités antiterroristes, ainsi que d'importants désavantages. L'OTAN s'est montrée plutôt maladroite sur l'aspect multidimensionnel de ses opérations. Dans de grandes parties de l'Afrique et du monde arabe, je crois qu'elle fait face à un important désavantage dès le départ par rapport à la perception de légitimité ou d'illégitimité d'une plateforme venant de l'Ouest.
    Les coalitions de pays volontaires représentent la deuxième option. Elles sont déployées plus efficacement ces dernières années. Il y a la très connue Coalition mondiale contre Daech, mais également le G5 Sahel et la force multinationale contre Boko Haram. Ces coalitions sont très efficaces. Elles ont le désavantage d'opérer dans un cadre juridique discutable avec une légitimité contestable, en plus de ne pas avoir les outils multidimensionnels que les Nations unies, dans les meilleures conditions, ont pu offrir.
    Je qualifierais la troisième option d'opérations renforcées de maintien de la paix des Nations unies. C'est ce qui se passe dans le Sud du Liban, au Mali et en République démocratique du Congo. Les Nations unies continuent d'y opérer dans un cadre relativement traditionnel de maintien de la paix, notamment en adoptant une approche impartiale, mais avec une force de frappe beaucoup plus grande et une capacité nettement supérieure à lutter contre les saboteurs et autres individus voulant faire dérailler les accords de paix ou menacer autrement la paix et la stabilité du pays en question.
    Les Nations unies doivent alors obtenir — ce n'est pas facultatif, c'est nécessaire — la participation de fournisseurs de contingent perfectionné, comme les Néerlandais, les Chinois et les Canadiens, pour assurer la réussite des missions. De mon point de vue, le cadre juridique est appelé à évoluer pour reconnaître que les Nations unies seront dans certains cas une partie au conflit. Il n'y a rien de mal à occuper ce rôle; c'est une catégorie juridique pleinement reconnue. Les Nations unies devraient parfois se considérer comme une partie au conflit.

  (1125)  

    Pour cela, il faut vouloir utiliser la force contre les agents perturbateurs et les groupes décidés à amoindrir le sentiment de sécurité de la population civile, à fragiliser un accord de paix et à compromettre la stabilité du pays en question, et il faut que l'ONU soit à fond derrière cette solution.
    Je pense que toutes ces conditions sont, au moins en grande partie, réunies au Mali, où les Forces canadiennes sont maintenant déployées, bien sûr. J'ai applaudi la décision du Canada de déployer son contingent au Mali, comme j'avais applaudi la contribution du Canada à la FIAS en Afghanistan. C'est très important que le Canada ait choisi de prendre part aux missions de maintien de la paix plus dur des Nations unies. C'est l'antiterrorisme dans sa version la plus douce, mais la facette la plus dure du maintien de la paix. C'est à ce niveau-là qu'il faut changer.
    Nous vivons maintenant dans un monde où les Casques bleus sont, en gros, seulement déployés quand il y a des composantes antiterroristes. Nous devons évoluer et développer nos capacités en la matière si nous voulons avoir les outils nécessaires pour gérer les États fragiles et les guerres civiles en nous appuyant sur une composante antiterroriste.
    En participant aux opérations au Mali, le Canada s'est affirmé bien plus qu'il ne l'avait fait dans les dernières années, ce qui lui a permis de mettre de l'avant le cadre stratégique aux Nations unies et de devenir un ardent défenseur de l'évolution de ces outils aux Nations unies.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Jones.
    Nous allons passer aux questions maintenant, et je donnerai d'abord la parole à M. Gerretsen. Allez-y.
    Ma question est pour Mme White. Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui.
    En mars 2018, l'Association canadienne pour les Nations unies a publié une lettre au rédacteur en chef qui disait notamment: « Les Canadiens comprennent l’utilité et l’urgence de confronter le climat d’instabilité et de conflit partout dans le monde [...] » Dans le même éditorial, il était ensuite écrit que votre organisation a « commandé un sondage dont 88 % des répondants, tous genres, âges et partis politiques confondus, appuient, appuient vivement ou ne rejettent pas le déploiement de soldats et de policiers parmi les forces maintien de la paix de l’ONU ».
    Pouvez-vous nous parler plus en détail des résultats de ce sondage?
    Bien sûr, avec plaisir.
    Il est important de noter, je pense, que seulement 11 % des répondants se disent opposés ou fortement opposés. C'est parmi les 60 ans et plus qu'on observe l'appui le plus fort. L'appui le plus fort s'observe aussi... En fait, les chiffres sont plutôt bons, tous azimuts. C'est notre maison de sondage qui s'est occupée de ventiler nos données.
    Je vais juste intervenir ici parce que le temps dont je dispose est limité.
    Si vous ne savez pas précisément, expliquez-nous, incidemment, pourquoi selon vous l'appui est le plus fort chez les plus de 60 ans.
    Comme je l'ai dit, je suis sociologue. Aussi, j'hésite à me prononcer là-dessus. J'imagine que cette tranche d'âge se compose de gens qui ont l'expérience et des souvenirs des opérations de maintien de la paix des Nations unies à une autre époque.
    Je suis d'accord avec vous. Un certain nombre de témoins ayant comparu devant le Comité ont fait observer que peu d'efforts semblent faits, au pays, pour sensibiliser la population à l'importance que revêtent les missions de maintien de la paix.
    Pensez-vous que multiplier les campagnes de sensibilisation ou les programmes éducatifs sur l'importance des missions de maintien de la paix serait bénéfique, en ce qui concerne non seulement nos relations avec d'autres pays, mais aussi notre sécurité intérieure?

  (1130)  

    Oui.
    D'accord. Merci.
    Avez-vous des idées sur la manière dont le gouvernement peut contribuer à aider la société civile à améliorer le dialogue sur la question des opérations de maintien de la paix et la sensibilisation à ce sujet ? Comment fait-on, de nos jours, pour atteindre les moins de 60 ans?
    De fait, les chiffres en ce qui les concerne sont aussi très convaincants, et je serai heureuse de vous montrer les données ventilées du sondage.
    Comme je l'ai dit, la participation des jeunes est extrêmement importante en ce qui concerne les médias sociaux, même malgré les risques de radicalisation. Nous ne vivons pas dans une bulle, nous ne sommes pas à l'abri de tout cela. Ainsi, plus les jeunes sont informés et plus ils jouent un rôle actif... C'est aussi une simple question de bonne gouvernance. En d'autres termes, ils participent à ce genre de processus décisionnel aux côtés de leur gouvernement et ainsi de suite.
    Nos propres travaux ont montré... Je vous ai dit que nous menions des consultations auprès des jeunes, soit les moins de 30 ans. Je dirais que, même pouvoir avoir une présence dans le système scolaire, comme nous l'avons fait par le passé... Vous remarquerez que les données ont été ventilées selon l'éducation formelle, informelle ou non formelle. On entend par éducation non formelle des activités comme le basketball, et cetera, et par éducation informelle les Clubs Garçons et Filles, avec lesquels l'Association canadienne pour les Nations unies travaille en étroite collaboration dans le cadre de la National Youth Serving Alliance.
    Vous avez parlé de deux manières de faire cela: l'une par l'intermédiaire des médias sociaux, ce qui est manifestement important — tout le monde est d'accord, je pense —, et l'autre par l'intermédiaire des programmes scolaires. Savez-vous, même de manière anecdotique, comment nous nous situons par rapport à d'autres pays en ce qui concerne notre capacité et notre désir d'inclure cela dans les programmes scolaires et de sensibiliser la jeune génération?
    Tout à fait. Je le sais parce que nous faisons partie de la Fédération mondiale des associations pour les Nations unies, qui représente plus de 100 pays dans le monde. J'encourage le gouvernement du Canada à appuyer certains des programmes éducatifs de l'Association canadienne pour les Nations unies. En d'autres termes, j'encourage le gouvernement à nous permettre de lancer le dialogue avec les jeunes Canadiens.
    Nous n'avons même pas à commencer de zéro. Nous n'avons qu'à profiter de l'expertise de l'Association canadienne pour les Nations unies à cet égard.
    Oui, nous savons quelques petites choses là-dessus. Nous faisons des sondages, nous collaborons avec différents gouvernements et ainsi de suite, et bien sûr, nous avons la volonté de faire cela. Au Canada, on parle de « matériel éducatif » au lieu de « programme scolaire » parce que, bien entendu, il s'agit d'une compétence provinciale. Nous avons des relations avec des écoles, des universités et des collèges partout au Canada, et nous serions heureux de continuer sur la lancée.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute et vingt secondes.
    Votre organisation a publié un rapport intitulé La contribution canadienne aux missions de maintien de la paix des Nations Unies. Dans ce rapport, vous discutiez du rôle du Canada dans les opérations de maintien de la paix dans le contexte de 2013. Vous dites, en particulier, qu'en dépit du bilan exemplaire du Canada en matière de missions onusiennes de maintien de la paix, « l’ampleur de sa contribution, tant en termes de Casques bleus que de pourcentage du coût des missions de maintien de la paix, est en nette régression [...] La mesure dans laquelle l’engagement futur du Canada aux missions de maintien de la paix de l’ONU sera maintenu ou accru reste à voir. »
    Pouvez-vous comparer la contribution que le Canada a faite aux missions de maintien de la paix en 2013 et aujourd'hui? Quels changements voyez-vous?
    Nous avons fait d'énormes changements, selon moi, dont notre récent déploiement au Mali bien entendu. Il ne s'agit pas seulement des chiffres; mes collègues l'ont dit. Nous contribuons aussi à renforcer le rôle de la société civile et nous jouons un rôle actif — que cela vienne du chef d'état-major de la défense ou de notre ministre — en parlant de la participation des femmes, de la paix et de la sécurité. Le Canada a un rôle de premier plan aux Nations unies en ce qui concerne ces questions.
    Le gouvernement du Canada a fourni des fonds aux Nations unies pour faire des recherches sur les jeunes, la paix et la sécurité avec des jeunes gens. Il ne s'agit pas simplement de déploiement. Le déploiement a aussi beaucoup changé, et la communauté internationale l'a reconnu.
    Merci.
    Monsieur Martel, vous avez la parole pour sept minutes.

[Français]

  (1135)  

[Traduction]

    Je vais poser ma question en français.

[Français]

    Elle s'adresse à vous, madame Woroniuk.
    D'après vous, les Nations unies en font-elles assez pour assurer le progrès au Mali? De son côté, le Canada devrait-il en faire plus?

[Traduction]

    Je vous remercie de votre question.
    Je ne suis pas une spécialiste de la mission au Mali. Cependant, en ce qui concerne la présence des femmes dans les opérations de maintien de la paix, je dirai d'une manière générale qu'il y a encore du travail à faire. Les Nations unies pourraient et devraient en faire plus. Il est important que nous ayons des initiatives comme l'initiative Elsie et que, d'une manière générale, le Canada clame haut et fort son soutien aux femmes dans les missions de maintien de la paix. Comme ma collègue l'a dit, il est aussi important que nous cherchions des manières de donner un rôle aux populations locales et aux organisations de femmes, en particulier.

[Français]

    Vous pensez donc que le Canada en fait assez.
    D'après vous, les Nations unies en font-elles assez? Je m'excuse, mais je n'ai pas bien compris votre réponse. Je vous ai demandé si les Nations unies et le Canada pouvaient en faire plus en ce qui a trait aux femmes.

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, je ne connais pas précisément la situation au Mali, mais on n'a cessé de nous dire que, d'une manière générale, les Nations unies pourraient en faire plus. Le fait, que quand les budgets des opérations de maintien de la paix baissent, les postes de conseillers en matière d'égalité des sexes sont les premiers supprimés, a suscité des inquiétudes. Il y a vraiment lieu de s'inquiéter de ce que ces questions soient considérées comme moins qu'essentielles ou moins qu'importantes. Quand l'argent fait défaut, une partie du travail fait avec les populations locales et de la formation sur les questions d'égalité des sexes est supprimée par les missions.
    Oui, les Nations unies pourraient en faire plus d'une manière générale pour respecter leurs engagements à propos de la place des femmes dans les opérations de maintien de la paix.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Monsieur Bezan, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Combien de temps ai-je?
    Vous avez environ quatre minutes.
    Monsieur Jones, vous parlez des trois voies que le Canada peut emprunter dans le cadre des activités de lutte contre le terrorisme qui s'avèrent nécessaires de nos jours. Vous avez parlé de l'OTAN et de la coalition des pays volontaires, comme en Irak et Syrie en ce moment. Vous avez aussi parlé de durcir les opérations onusiennes de maintien de la paix.
    D'autres témoins nous ont dit que nous devions faire plus au titre du chapitre VII. Est-ce à cet égard que vous croyez que le durcissement des opérations onusiennes de maintien de la paix devrait se faire? Il y aurait plus d'opérations antiterroristes et de ressources militaires sur le terrain afin de favoriser un règlement pacifique dans ces régions occupées par des terroristes en butte à une volonté insurrectionnelle.
    La manière dont les opérations sont organisées au Mali est plutôt complexe, je crois: les Français s'occupent des activités directes de lutte antiterroriste de haut niveau et les Nations unies ont un rôle plus large. Même dans ce contexte, les Nations unies doivent avoir à leur disposition des pays capables, en termes de contingents de soldats envoyés sur place, de faire face aux attaques d'Al-Qaïda au Maghreb islamique et d'autres groupes du genre.
    Depuis le milieu des années 1990, presque toutes les opérations se sont déroulées en vertu du chapitre VII. C'est la norme, à ce stade. Il y a lieu de se demander quelle est la nature et la qualité des pays qui envoient des soldats. Si une opération est lancée en vertu du chapitre VII, mais que les pays participants ne peuvent envoyer qu'un petit nombre de soldats, se pose alors la question de ce qu'ils font là, de quels pouvoirs ils ont et de ce qu'ils peuvent véritablement faire.
    Au Mali, au Liban et au Congo, les trois pays dont j'ai parlé, sont intervenus des pays dont les contingents de soldats étaient importants et qui avaient la volonté d'utiliser les manières les plus fortes dans le domaine du maintien de la paix. Dans ces cas-là, les Nations unies ont pu mettre en oeuvre leur mandat d'une manière plus efficace.
    Vous avez dit ceci en ce qui concerne les opérations de maintien de la paix: « Malheureusement, en raison des règles des Nations unies, les décisions prises par le Département de l'appui aux missions sont toujours assujetties aux obscures et lourdes procédures du Département de la gestion, qui supervise les opérations du Secrétariat. Ce système double est à l'origine de l'inefficacité de certaines pratiques essentielles et de la redondance inutile d'autres pratiques. »
    Vous pouvez peut-être nous dire si les Nations unies sont parvenues à moderniser un tant soit peu les opérations de paix, ou de rétablissement de la paix ou de maintien de la paix — quel que soit le vocable que vous souhaitez utiliser —, les activités quotidiennes, en fait, les décisions de gestion.

  (1140)  

    Oui, il y a eu des progrès à cet égard. Personne ne prétendra que les Nations unies sont efficaces. Ce n'est pas le cas. C'est une institution éminemment inefficace.
    Sous le dernier secrétaire général, des progrès ont été faits et les pratiques en matière de gestion des opérations de paix se sont améliorées. Le Département de l'appui aux missions est plus indépendant qu'avant, ce qui fait que certaines pratiques nécessaires dans le cas d'opérations complexes sur le terrain sont moins gênées par la lourdeur bureaucratique caractéristique du Département de la gestion. Néanmoins, il reste du travail à faire.
    Merci.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Une minute environ.
    Pas plus tard que le mois dernier, vous avez écrit: « Plusieurs forces opérationnelles multinationales se sont déployées directement dans des zones touchées à la fois par la guerre civile et le terrorisme transnational. » Parlant du Mali, vous avez poursuivi par ces mots: « Dans une région fragile, caractérisée par une mauvaise gouvernance et des ressources limitées, cette force conjointe cible les opérations transfrontalières menées par des réseaux criminels et des groupes terroristes afin de prévenir la violence, la radicalisation et la corruption. »
    Est-il juste de dire qu'il n'y a pas de paix à maintenir dans cette région? Est-il juste de dire, quand on se penche sur le G5 Sahel, qui bénéficie du soutien des Français et de l'Alliance des Nations unies, que nous devrions lutter contre le terrorisme et arrêter de parler de maintien de la paix parce que la situation y est si chaotique?
    Les activités de maintien de la paix sont en constante évolution depuis longtemps. Il est très rare, de nos jours, que des troupes soient déployées dans un contexte de paix parfaite et qu'il ne s'agisse que de la mise en oeuvre d'accords. Il y a presque toujours des sous-groupes, des groupes partiaux ou des factions dissidentes qui essaient de rompre la paix ou de la fragiliser. Durant ce que j'ai appelé la période des réformes, après le milieu des années 1990, les Casques bleus devaient être prudents et lutter contre les agents perturbateurs et d'autres encore qui tentaient de torpiller la paix. Il faut oublier l'idée qu'on peut instaurer une paix parfaite et stable.
    Le Mali est très loin de cela. Vous y avez des acteurs qui veulent instaurer la paix, des acteurs qui essaient de la négocier et d'autres, comme Al-Qaïda au Maghreb islamique, qui ne veulent rien entendre de la paix.
    Vous devez être en mesure d'opérer dans ces deux réalités différentes simultanément. D'un côté, il y a des groupes avec lesquels vous pouvez travailler pour faire avancer un processus politique tout en maintenant la pression sur les agents perturbateurs pour les dissuader d'agir, et de l'autre, il y a Al-Qaïda au Maghreb islamique et d'autres encore contre lesquels vous devez vous battre. Ces deux réalités sont au coeur de la gestion des guerres civiles. La paix parfaite, soit une situation dans laquelle on se contente d'assurer la mise en oeuvre d'accords à cet effet, est extrêmement rare.
     Monsieur Garrison, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par poser deux brèves questions à M. Jones, pour poursuivre dans la même veine.
    Vous avez parlé des trois voies que le Canada pouvait suivre en matière de maintien de la paix. Quand vous en avez parlé, vous n'avez pas dit grand-chose sur ce qui se passe une fois la paix instaurée. Diriez-vous que ces trois options donnent les mêmes résultats une fois un accord de paix conclu?
    Non. En fait, je pense que l'une des véritables forces des Nations unies, c'est le caractère multidimensionnel de ses opérations, qui se prêtent mieux à la phase post-conflit. L'OTAN, en dépit de ses efforts répétés pour adopter une approche plus multidimensionnelle, est plutôt lamentable à cet égard. Cette institution ne sait tout simplement pas comment s'y prendre avec l'Afghanistan. Elle ne fonctionne tout simplement pas de cette façon. Les coalitions de pays volontaires s'y essaient. La Coalition mondiale contre Daech a pris un certain nombre de mesures créatives, mais elle ne fait que commencer. Les Nations unies savent très bien assurer la transition d'une phase très intensive de maintien de la paix à une phase post-conflit, même si la distinction est floue pour la raison que j'ai décrite. Je pense, en fait, qu'il s'agit d'un atout certain pour les Nations unies.
    La manière dont les Nations unies s'organisent en ce qui concerne son aide au développement et ses relations avec la Banque mondiale laisse encore à désirer. Cela s'améliore progressivement. Cependant, elle part de beaucoup moins loin que les coalitions de pays volontaires et l'OTAN.

  (1145)  

    Diriez-vous que les Nations unies s'en sortent aussi mieux pour ce qui est de ne pas perdre de vue le processus de paix pendant le conflit?
    Oui. C'est la chose la plus importante que les Nations unies aient apprise depuis le milieu des années 1990, à savoir que c'est toujours le processus de paix qui doit guider les décisions. On déploie des contingents de soldats, on déploie des ressources économiques, on affecte ses hommes à des missions, et cetera, mais toujours en essayant de faire progresser le processus de paix. Vous avez vu le rapport du groupe d'experts des Nations unies de 2016 qui parlait de la primauté de la politique, et c'est de cela qu'ils parlaient. C'est toujours en fonction du processus de paix, avec toutes ses contraintes et ses limites, qu'il faut organiser ses ressources.
    Merci, monsieur Jones.
    Je me tourne vers nos deux autres témoins. Merci d'être ici aujourd'hui.
    Dans vos présentations, vous avez tous deux fait référence aux mesures que nous devons prendre pour que les femmes qui sont déployées réussissent mieux. Nous allons peut-être commencer avec Mme Woroniuk. Vous pourriez nous dire si vous avez des recommandations particulières à faire quant à ces mesures.
    D'abord, je pense qu'il est important que les seuls dangers auxquels les femmes se retrouvent confrontées soient ceux dont elles avaient connaissance quand elles se sont engagées. J'ai parlé à des femmes déployées dans le cadre d'opérations de paix, et je pense qu'elles sont tout à fait prêtes à prendre les mêmes risques que tous les autres Casques bleus. Toutefois, elles devraient être en sécurité dans leur caserne, ne pas être menacées par d'autres Casques bleus, ni être victimes de violences de leur part. Nous devons nous occuper de cela.
    Ensuite, nous devons nous assurer que la formation est adéquate et s'applique à tout le monde, et que les femmes ont les mêmes occasions de se former que les hommes. Nous devons aussi nous assurer que les installations et les équipements répondent aux besoins des hommes et des femmes. Je vais vous donner un exemple tout simple: les femmes utilisent encore des sacs à dos qui ne sont pas adaptés au corps des femmes. Nous devons réfléchir à l'approvisionnement et à l'équipement.
    Nous devons aussi nous assurer que nous donnons les mêmes chances aux femmes. On entend souvent dire que les femmes déployées dans le cadre d'opérations de paix sont, en fait, reléguées à des tâches administratives. Ce n'est généralement pas la raison pour laquelle elles se sont engagées. Les femmes devraient avoir les mêmes chances que les hommes et se voir offrir les mêmes défis à relever qu'eux.
    Il y en a d'autres, mais je vais laisser un peu de temps à ma collègue pour qu'elle puisse répondre.
    Merci.
    Je vais mettre la barre un peu plus haut et parler des femmes en position de leadership. Quand on parle d'élaborer de nouveaux cadres de travail juridiques et de processus qui sont sclérosés et ainsi de suite, cela signifie que les femmes doivent jouer un rôle actif, un point, c'est tout. Nous savons que les sociétés florissantes et prospères en bénéficient. Nous savons que les opérations de maintien de la paix en bénéficient aussi.
    Je voudrais aussi soulever la question de la lutte contre le terrorisme et de l'égalité des sexes. Les femmes sont des actrices et des agentes, même dans des dossiers comme la lutte contre le terrorisme. Je conseille au Comité de ne pas se contenter de parler de donner aux femmes des rôles de premier plan dans ce domaine-ci en particulier. Le problème est généralisé. Comme je l'ai dit plus tôt, on parle de toute la chaîne de commandement militaire, et ce, jusqu'à la coopération civilo-militaire au niveau G9. C'est un point important, selon moi, qui ne devrait pas être accessoire.
    Vous avez devancé ma prochaine question. Que pouvons-nous faire pour qu'il y ait plus de femmes dans ces postes de haut niveau et pour que les hommes occupant ce genre de postes reçoivent des formations complémentaires quand ils travaillent aux côtés de femmes dans le domaine de la paix et de la sécurité?
    Laquelle de vous deux veut répondre en premier?
    Je me lance. Une des manières de le faire, je pense, à la base, c'est par l'intermédiaire de conseillers en égalité des sexes. Comme je l'ai dit, le Canada pourrait apporter ainsi sa pierre à l'édifice, au Département des opérations de maintien de la paix, et cela aurait des effets concrets. Je vais faire un peu d'humour: c'est la saison. Vous avez peut-être vu l'affiche qui clame: « Ma saison préférée, c'est celle de la chute des feuilles et du patriarcat. »
    Nous devons, d'une certaine manière, avoir une vision plus large des femmes en tant qu'agentes et actrices. Nous avons vu surgir chez nos voisins du Sud des problèmes plutôt alarmants. Sur le plan de la représentation, je pense qu'au Canada, cela signifie encourager les femmes à participer à l'administration de leur collectivité aussi. Il y a de nombreuses manières de le faire. L'une d'elles... En fait, j'aimerais aussi vous dire qu'on observe, à l'Association canadienne pour les Nations unies, la plus grande diversité et la culture la plus opposée au racisme qui soient au pays, et c'est ainsi depuis plus de 20 ans.
    Une des choses qui me tiennent à coeur, quand nous parlons de race et de diversité, c'est que nous nous assurions d'établir le contact avec les jeunes garçons blancs et marginalisés des régions rurales et que nous ne laissions personne de côté afin qu'ils sachent que participer est bénéfique pour tout le monde.

  (1150)  

    Excusez-moi, je...
    Entendu. Nous aurons peut-être le temps de revenir là-dessus. Je vais devoir donner la parole à M. Robillard.
    Vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leurs excellents témoignages.
    Mes questions seront posées en français et s'adresseront à Mme White.
    Compte tenu de l'adoption des résolutions 1325 et 1889 du Conseil de sécurité des Nations unies, la priorité est-elle accordée à la participation des femmes aux efforts de résolution des conflits comme élément fondamental du maintien de la paix et de la sécurité internationale?
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    C'est une question importante, selon moi. Je dirai que, d'une certaine manière, la résolution 1325 parle avant tout de l'émancipation des femmes. La résolution 1889 est aussi intéressante et importante; elle parle seulement des femmes en tant que victimes, cependant. Nous devons nous occuper des deux aspects de la question.
    Ma collègue a parlé d'exploitation et d'agressions sexuelles dans un contexte militaire, parfois des Casques bleus contre des Casques bleus. En même temps, nous devons faire en sorte que les femmes puissent jouer des rôles de leadership et de gouvernance, notamment pendant les périodes suivant les conflits. Je me concentre surtout sur le maintien de la paix, par opposition aux opérations d'établissement ou de consolidation de la paix. Les possibilités sont infinies, dans ce cas, pour répondre à votre question et à d'autres questions. Avoir de bons porte-parole masculins qui posent ce genre de questions est très important si on veut progresser.

[Français]

    Compte tenu de la résolution 2242 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée en 2015, qui fixe comme objectif de doubler le taux actuel de participation des femmes aux opérations de paix d'ici 2020, comment les efforts du Canada dans le cadre de l'Initiative Elsie pour la participation des femmes aux opérations de paix contribueront-ils à atteindre ces objectifs?

[Traduction]

    C'est une question importante. Je crois que cette résolution aura des effets réels. En quelque sorte, elle crée de nouvelles normes, un nouveau processus normatif qui établit l'importance d'inclure les femmes. J'ai parlé plus tôt d'un certain nombre de risques; par exemple, il ne faut pas qu'on pousse les femmes au sein des forces armées à effectuer deux missions par année. Bien honnêtement, le Canada est le meneur à cet égard. Je pense que la moyenne de participation des femmes dans les forces armées des pays de l'OTAN est de 5 à 10 %. Au Canada, cette moyenne s'élève à près de 15 %, et je crois Jonathan Vance lorsqu'il affirme vouloir faire grimper ce chiffre à 25 %. Voilà le genre d'initiative qui peut changer les choses. Comme je l'ai dit, la seule condition est celle liée aux risques, bien sûr.

[Français]

     Dans quelle mesure les préoccupations liées aux femmes, à la paix et à la sécurité sont-elles intégrées aux mandats des opérations de maintien de la paix des Nations unies, aux efforts de médiation et aux activités humanitaires et de développement?

[Traduction]

    C'est loin d'être négligeable. Le Canada n'est pas le seul pays à croire au féminisme et à avoir des attentes envers les Nations unies, et plus particulièrement envers le Département des opérations de maintien de la paix. Je suis heureuse d'annoncer, comme vous le savez peut-être, que Jean-Pierre Lacroix était ici dans le cadre de la réunion des ministres de la Défense des Nations unies et qu'il a accepté de se pencher sur ces enjeux. Comme l'a dit mon voisin, collègue et ami, il y a de nombreuses questions à régler, mais lorsque des dirigeants disent que les femmes doivent participer à ces discussions, cela fait avancer les choses, quoique lentement.

  (1155)  

    J'aimerais ajouter que les Nations unies ont réalisé trois études d'envergure en 2015. Je suis certaine que beaucoup de personnes ont fait allusion à celle qui a été menée par le Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix. Au cours de la même année, une autre étude a été réalisée au sujet de la mise en oeuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité. L'une des principales constatations de cette étude, c'est que les pays sont bien disposés à proclamer leur appui aux résolutions et aux efforts des femmes pour rétablir la paix, mais que le financement n'y est pas.
    Les États membres des Nations unies négligent systématiquement de joindre le geste à la parole et d'accorder du financement à cet important dossier. Cette lacune a été soulevée à l'échelle mondiale, et c'est ce qui empêche la concrétisation des mesures prévues dans ces résolutions.

[Français]

    Les opérations de maintien de la paix des Nations unies comportent-elles un volet de prévention des conflits? Le cas échéant, quels sont les éléments de ce volet et comment sont-ils mis en oeuvre?

[Traduction]

    Ce volet s'inscrit dans le cadre d'une approche globale qui consiste notamment à traiter avec les États fragiles et en déroute et à favoriser la gouvernance générale et le développement. En quelque sorte, nos investissements — ceux du Canada et ceux de l'ONU dans son ensemble — sont consacrés au développement. Je reviendrai sur les objectifs de développement durable.
    La pauvreté, aggravée par les répercussions des changements climatiques et l'accès inéquitable à l'éducation, notamment, est à l'origine de nombreux conflits. Comme je l'ai dit dans mon exposé, le problème n'est pas seulement l'accès à des emplois, en particulier pour les jeunes hommes, mais c'est aussi l'accès à des emplois valorisants. Évidemment, la définition d'un emploi valorisant évolue constamment. Ces emplois pourraient être rares à mesure que l'intelligence artificielle progresse, par exemple.
    Oui, vous pouvez être rassurés, mais je vous encourage tout de même à exercer votre rôle de gouvernance pour continuer à exhorter les Nations unies à se concentrer sur le processus en entier: le développement, le maintien et la consolidation de la paix, les opérations de paix, et ainsi de suite.
    Merci.
    Nous passons maintenant à la période de questions de cinq minutes. La première intervention de cinq minutes sera celle du député Fisher.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence et de leur témoignage aujourd'hui.
    Madame White, dans votre mémoire intitulé L'extrémisme: une approche axée sur les femmes, la paix et la sécurité, vous mentionnez que le rôle des femmes est souvent perçu comme étant celui d'artisanes de la paix et qu'on met généralement moins l'accent sur leur rôle d'agentes actives dans les conflits. Vous dites aussi que les femmes assument divers rôles en lien avec l'extrémisme violent, dont ceux de victimes, d'auteures et d'artisanes de la paix.
    Si nous continuons d'encourager les femmes à participer aux opérations de maintien de la paix et d'en recruter davantage — madame Woroniuk, vous avez parlé de l'initiative Elsie, par exemple —, croyez-vous qu'il y a davantage de chances que les missions parviennent à contrer l'extrémisme violent? Selon vous, quels rôles peuvent jouer les femmes afin que les opérations de maintien de la paix aient plus de chances de réussir?
    Tout d'abord, il nous incombe de considérer les femmes comme des agentes de façon générale, comme vous l'avez mentionné. Je vais essayer de répondre à cette question. Je répondrai tout d'abord que nous avons besoin des données. Nous devons faire les recherches. Nous en sommes à l'étape de l'apprentissage. D'ailleurs, le Canada pourrait faire preuve de leadership dans ce dossier en recueillant les données qualitatives et quantitatives nécessaires pour plonger dans les détails de cette question — je pense à Bruce, ici, puisqu'il est un universitaire —, et en recueillant des points de données. Une occasion s'offre à nous ici.
    La triste vérité, c'est que nous ne le savons pas encore. En fait, ceux d'entre nous qui sont allés en mission nous disent que, souvent, les femmes dans les États en situation de conflit ne se réjouissent pas vraiment de voir les gardiens de la paix. Elles veulent un retour à la paix, mais il n'est pas suffisant, pour elles, de simplement apercevoir les Casques bleus.
    Je suis optimiste. Il y a des raisons de croire que la présence de femmes dans les opérations de paix et au sein du régime de consolidation de la paix améliorera les choses, parce que les femmes verront les rôles qu'elles jouent. Ces rôles vont changer, évidemment. Comme vous le savez, en Afghanistan, ainsi que dans d'autres pays où le système patriarcal prime, nous faisons des progrès en ce qui concerne l'égalité des sexes en général. Nous savons que nous en bénéficions largement dans nos propres sociétés au chapitre de la paix, de la primauté du droit, de la prospérité, et ainsi de suite.
    Il y a des raisons de croire que cela aura des répercussions positives. Votre question est importante parce que je pense que le Canada est en mesure de participer à la collecte de données.

  (1200)  

    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste deux minutes.
    Je crois que cela prendra plus de deux minutes.
    Beth, voulez-vous aussi répondre à la dernière question?
    Une partie de l'intéressant travail visant à lutter contre l'extrémisme violent ou le terrorisme est effectué au niveau local et comprend les efforts déployés par les organisations féminines pour faire participer les collectivités et les jeunes hommes. Ce sont souvent ces personnes qui ont recours aux contre-discours et qui vont au fond de la question lors des discussions. Elles vont même rencontrer de jeunes hommes qui sont susceptibles d'être radicalisés.
    Ces organisations se heurtent à trois problèmes. Tout d'abord, elles n'ont pas le financement nécessaire pour faire leur travail. Ensuite, elles peinent souvent à se faire entendre par les autorités locales. Par exemple, des organisations féminines en Afghanistan ont tenté à de nombreuses reprises d'avertir les autorités locales que des phénomènes de radicalisation se concrétisaient. Hélas, on ne les a pas prises au sérieux; il y a eu par la suite des attaques contre des autobus et des ventes d'armes à feu. Finalement, elles font souvent l'objet de répression de la part de leur propre gouvernement lorsqu'elles tentent d'effectuer leur travail.
    Je pense qu'il faut porter une attention particulière au travail très important que les organisations féminines effectuent sur le terrain pour lutter contre le terrorisme.
    Qui est-ce qui n'a pas pris les avertissements au sérieux?
    Les autorités locales et les dirigeants locaux pensent souvent que les femmes n'ont rien d'important à dire au sujet des enjeux politiques.
    Merci, monsieur le président.
    C'est votre tour, monsieur Bezan.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question à vous poser à tous, mais je vais d'abord m'adresser à M. Jones. En 2015, lorsque vous avez comparu devant le comité des relations étrangères du Sénat pour parler des opérations de paix, vous avez dit que l'une des priorités était de mettre un terme à l'exploitation et aux agressions sexuelles — des actes qui entraînent l'érosion de la légitimité des opérations de maintien de la paix à l'échelle locale et internationale. Le Canada et de nombreux autres pays sont présents au Mali. Dans quelle région les problèmes d'exploitation sexuelle sont-ils les plus présents? Parmi les pays partenaires du Canada, lesquels violent le code de conduite en matière de respect des femmes et des filles?
    Vous avez aussi parlé de vos préoccupations concernant le comportement de certains soldats de pays partenaires dans les efforts de maintien de la paix des Nations unies, ainsi que des pays qui sont souvent considérés comme misogynes. Que pensez-vous de cela?
    Il s'agit d'un sujet de préoccupation constant. Certaines situations qui se sont produites en République centrafricaine étaient particulièrement scandaleuses, et bon nombre de troupes provenant de pays partenaires y étaient.
    Le problème est toujours le même: les Nations unies n'ont pas vraiment le pouvoir juridique ni la capacité opérationnelle de poursuivre les soldats qui adoptent un comportement répréhensible ou les commandants qui acceptent un tel comportement. Cela doit relever des pays hôtes. Dans une telle situation, le Canada pourrait faire preuve de leadership en ayant recours aux formes appropriées de reddition de comptes pour ses troupes.
    Une question comme celle-là relève-t-elle donc de la Cour pénale internationale? Je sais que tous ces pays ont leurs propres mesures législatives; ici, nous avons la Loi sur la défense nationale et notre système de cour martiale, mais lorsque ce sont nos propres soldats et nos propres troupes qui agissent ainsi, ne devrions-nous pas renvoyer ces cas à la Cour pénale internationale?
    Je ne crois pas qu'on puisse parler de crimes de guerre aux termes de la définition qu'en fait la CPI. Plus concrètement, il faudrait d'abord que les autorités nationales entreprennent des procédures. Ainsi, s'il s'agit d'un cas d'exploitation sexuelle ou d'agression sexuelle commise par un soldat canadien, ce seraient les autorités canadiennes qui devraient faire enquête et de tenir les coupables responsables de leurs actes.
     Le point que je tentais de faire valoir, c'est que différents pays n'ont pas pris les mesures requises pour intervenir lorsque de tels cas surviennent. Les Nations unies ne peuvent les contraindre à le faire. L'organisation est plus sélective qu'avant quant aux pays qui peuvent contribuer aux efforts en fonction de l'existence de telles mesures. Le Canada pourrait faire preuve de leadership en encourageant les autres pays qui s'impliquent beaucoup à mettre en place des mécanismes nationaux de responsabilisation.

  (1205)  

    Madame Woroniuk, allez-y.
    À ce sujet, la question de la compétence concernant les mesures à prendre lorsque de tels actes sont commis dans le cadre d'opérations de soutien est un obstacle, puisque les mesures disciplinaires ou les peines ne peuvent être imposées que par le pays contributeur de troupes dont le soldat est issu. C'est pour cette raison qu'une des suggestions qui ont été faites hors de l'ONU est la création d'un organisme indépendant pour mener ces enquêtes. Nous savons qu'il est souvent très difficile pour une organisation de se surveiller elle-même et d'enquêter sur elle-même.
    S'il y avait un moyen de soumettre la question à une entité hors de l'ONU qui pourrait examiner la situation et faire des recommandations, même si cela ne permettrait pas de régler complètement la question de la responsabilisation des auteurs des crimes, cela nous aiderait à mettre en place de nouvelles normes ou de nouvelles méthodes de travail et viendrait mettre en lumière certaines des préoccupations en question.
    Qu'en est-il des sanctions à l'endroit des pays qui ne font rien pour tenir responsables les soldats qui commettent de tels actes ou qui ont des comportements répréhensibles? Dans le cas des types d'actes criminels dont nous parlons, si ces pays ne poursuivent pas ces personnes et ne les traduisent pas devant une cour martiale, ne devrions-nous pas — en toute équité — sanctionner ces pays et possiblement refuser qu'ils participent aux missions de paix de l'ONU?
    Comme l'a affirmé un des autres témoins, certaines préoccupations sont présentement soulevées quant à la participation de troupes de différents pays. Je ne suis pas sûre que des sanctions auraient l'effet voulu, car je crois qu'il s'agit aussi d'un problème lié à la structure du pouvoir et aux relations avec les communautés locales.
     De plus, lorsque surviennent des cas d'exploitation et d'agressions sexuelles, il ne s'agit que d'un symptôme de problèmes plus complexes qu'il faut résoudre concernant la façon dont les acteurs des opérations de paix, civils ou militaires, devraient interagir avec les populations locales. C'est un signal indiquant qu'il y a un problème ailleurs et qu'il faut cerner ce problème et chercher des solutions.
    Madame White, est-ce que l'ACNU considère qu'il serait judicieux de nommer et pointer du doigt, à tout le moins, les pays qui n'ont pas adopté le code de conduite?
    Encore une fois, votre question est très importante et j'aimerais qu'il existe une réponse simple.
    Vous aurez constaté que les pays qui contribuent le plus de troupes sont souvent des pays où la structure militaire de commandement et de contrôle n'est pas aussi disciplinée. Ils ne sont parfois pas aussi bien équipés que d'autres pour aller sur le terrain. Il s'agit, en quelque sorte, le plus souvent de pays où le patriarcat est fort. Ces militaires se retrouvent dans des situations de conflit où les femmes sont vulnérables et ont besoin de nourriture et d'un endroit où s'abriter. Il faut un certain courage moral tant du côté du commandement que du côté du contrôle. Cependant, pensez aux jeunes, des deux côtés, que nous plaçons en situation de danger moral, honnêtement.
    Tout ça pour dire que c'est une situation délicate. Comme l'a dit mon collègue Bruce, la CPI n'est pas l'endroit où traiter ces affaires. Cependant, comme il suggérait, nous pouvons offrir la formation et la discipline nécessaires aux autres pays afin que les changements requis soient mis en oeuvre. Ils le seront éventuellement.
    Merci.
    Monsieur le député Spengemann, allez-y.
    Monsieur le président, merci beaucoup.
    Je veux profiter de l'occasion pour vous demander des conseils politiques très concrets. Une des populations les plus vulnérables des récents conflits est la communauté LGBTI. Il y a eu des atrocités horribles, souvent commises de façon systémique, dans des pays comme l'Irak, la Syrie, la Libye et de nombreux autres pays dans cette région.
    Le 14 octobre, quelques semaines avant que notre comité se rende à New York, la Chambre des communes enverra une délégation à l'Union interparlementaire, un forum où se réunissent les parlementaires de partout dans le monde. Cette organisation est même plus vieille que l'ONU. Elle compte 176 pays membres et on y discute beaucoup de paix et de sécurité.
    La question des droits de la communauté LGBTI ne se trouve jamais à l'ordre du jour. Certains pays, bien connus, se mobilisent pour que cette question soit rejetée, démocratiquement, et qu'on n'en discute jamais.
     D'après vos connaissances, vos contacts et votre expérience, quelles solutions devrions-nous mettre en oeuvre ou envisager pour que, dans les situations de conflit, ce segment de la population civile soit mieux protégé qu'il l'a été par le passé?

  (1210)  

    C'est quelque chose de très important. Encore une fois, une des solutions est de cerner et de soutenir les groupes de résistance, les organismes et les groupes locaux qui militent dans ce domaine. Ce sont les militants qui connaissent le mieux la situation et qui demeurent sur place pendant un conflit. Ce ne sont pas des ONG internationales qui finiront par quitter le pays; pourtant, nos programmes d'aide et nos opérations de soutien de la paix comprennent très peu de mécanismes pour venir en aide à ces groupes, les renforcer et financer leurs priorités, leurs programmes et leurs efforts pour surmonter les obstacles devant eux.
    Dans le même ordre d'idées, une autre question importante est la façon dont le Canada soutient ceux qui défendent les droits de la personne. Affaires mondiales dispose de lignes directrices concernant ceux qui défendent les droits de la personne et le soutien canadien qui leur est offert, et ces lignes directrices sont présentement en cours de révision.
    Différents organismes au Canada demandent que ces nouvelles lignes directrices reflètent les besoins des femmes qui défendent les droits de la personne et les droits de la communauté LGBTI. Une des différences importantes qui existent, c'est que de nombreux hommes qui défendent les droits de la personne sont victimes de la répression de l'État ou de ses représentants, mais de nombreuses femmes qui défendent les droits de la personne et les gens dont l'orientation sexuelle ne suis pas la norme doivent faire face à la désapprobation des membres de leur famille, parce que ces personnes contreviennent aux normes de la communauté en matière d'orientation sexuelle. Je pense qu'il faut en être conscient et nous assurer que nos lignes directrices permettent de soutenir les militants sur le terrain.
    Du point de vue opérationnel, est-ce que les gardiens de la paix ont les moyens nécessaires pour cerner ces populations et les protéger? Selon les informations que vous possédez, ont-ils eu à le faire lors de situations récentes?
    D'après ce que j'ai compris, il s'agit d'un nouvel élément — la protection des populations LGBTQI — sur lequel il faudra s'attarder davantage. Il y a un lien avec les relations avec les populations locales en général, mais tenir compte des groupes qui ont des besoins particuliers est une priorité importante pour l'avenir.
    Les questions liées à l'orientation sexuelle ne correspondent pas exactement aux questions concernant l'égalité des sexes. Au sujet des conseillers en matière d'égalité entre les sexes que vous proposez, les 10 conseillers en matière d'égalité entre les sexes dont vous avez parlé au début seraient-ils en mesure de jouer ce rôle et de renforcer les mécanismes de maintien de la paix et de se charger de protéger les populations LGBTI?
    Comme j'ai moi-même soulevé cette question, j'avouerai que c'est tout à fait possible. Encore une fois, une partie de ce que peut faire le Canada — et vous pourrez même le faire dans vos déploiements —, c'est de porter cette question à l'attention... Une partie de la solution passe par la sensibilisation. Vous avez affirmé que, dans de nombreux pays, ces questions sont taboues, qu'on n'en parle pas, etc. Les questions concernant la communauté LGBTQI se trouvent à peu près là où en étaient les questions liées à l'égalité entre les sexes il y a 30 ans.
    Merci de cette précision.
    Il me reste 30 secondes. Très rapidement, est-ce que les 10 conseillers en matière d'égalité entre les sexes seraient financés par le Canada ou est-ce qu'il s'agirait de Canadiens?
    C'est ce que je propose, qu'ils soient financés par le Canada.
    Ils pourraient être d'autres nationalités.
    D'accord, monsieur le président, merci. Je crois que je n'ai pas tout à fait utilisé tout le temps qui m'était imparti, mais je n'ai pas d'autres questions.
    Merci.
    Madame Gallant, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Jones, vous avez écrit que les cyberarmes et l'intelligence artificielle étaient les deux principales menaces à l'horizon. Pouvez-vous donner au Comité des détails quant à la menace que fait peser l'intelligence artificielle sur la sécurité internationale, maintenant et dans le futur?
    Dans le contexte du maintien de la paix ou en général?
    En général, pas seulement pour les opérations de maintien de la paix.
    Prenons la question en deux étapes. Je crois que nous assistons déjà à la première phase de la compétition stratégique entre les États-Unis, la Chine, la Russie et d'autres pays concernant l'utilisation de l'intelligence artificielle et des cyberarmes et leur intégration dans les affaires militaires et dans la concurrence économique stratégique. Dans ce contexte géopolitique, cette question évoluera très rapidement.
    Je crois que la deuxième étape, qui est tout aussi préoccupante, est la possibilité pour des groupes non étatiques de se servir d'applications commerciales d'intelligence artificielle téléchargeables et d'autres logiciels pour accroître leurs capacités à utiliser des drones à distance, à mener des attaques avec des essaims de drones, à manipuler les médias sociaux, etc., à la fois pour des attaques directes contre des gouvernements ou des gardiens de la paix dans le contexte d'un conflit ou pour des attaques terroristes dans d'autres contextes.
    Il s'agit de deux problèmes fort différents, mais je crois que la plupart des théâtres, pour ainsi dire, qu'ils soient géopolitiques ou opérationnels, verront de plus en plus les cyberarmes et l'intelligence artificielle être mises à contribution.
    Le groupe armé État islamique est bien en avance sur les autres groupes non étatiques quant à l'utilisation de l'intelligence artificielle pour alimenter ses plateformes de recrutement à l'étranger. D'autres groupes suivront le pas.

  (1215)  

    En ce qui concerne le groupe armé État islamique et l'utilisation qu'il fait de l'intelligence artificielle, quelles sont les applications dont il se sert, outre la reconnaissance faciale, par exemple?
    Plusieurs des outils de recrutement utilisés par le groupe ont recours à des logiciels fondés sur l'intelligence artificielle qui sont beaucoup plus efficaces pour ratisser les médias sociaux et cerner les gens à cibler pour le recrutement ou la mobilisation. C'est un peu la même chose que les Russes font en matière de désinformation.
    C'est surtout dans le secteur des médias sociaux et de la communication que ces outils ont été utilisés jusqu'à maintenant. Je pense que nous les verrons — pas nécessairement le groupe armé État islamique, mais des groupes non étatiques — de plus en plus se servir de tels outils pour améliorer leur capacité militaire, pour utiliser des drones ou d'autres instruments de la guerre.
    En ce qui concerne les applications émergentes de l'intelligence artificielle, compte tenu du rôle qu'elles jouent sur la scène de la sécurité mondiale et de celui qu'elles sont appelées à jouer dans les champs de bataille du futur, est-ce que les parlementaires devraient en discuter?
    Absolument.
    Je crois qu'il n'y a pas un seul secteur de la paix et de la sécurité où les cyberarmes et l'intelligence artificielle ne sont pas au coeur de la dynamique pour déterminer qui fait des gains en matière de capacités et qui prend du retard. Cette question devra être au coeur de toute discussion liée à la sécurité internationale dans les années à venir.
    Le comité de la sécurité publique serait l'un des endroits où il faudrait en discuter, notre comité aussi en particulier, le comité de la défense nationale...
    Honnêtement, je ne connais pas précisément la séparation des responsabilités au sein des comités parlementaires au Canada, mais, ce qui est sûr, c'est que l'ensemble des comités qui discutent de la sécurité publique, de la politique étrangère et des politiques en matière de sécurité internationale sont concernés. Ils devraient tenir compte de l'intelligence artificielle et d'autres technologies émergentes en tant que moteurs de la transformation rapide du paysage de la géopolitique et de la compétition non étatique.
    Au cours des dernières années, avez-vous eu l'occasion d'interagir avec les ambassadeurs de différents pays de l'OTAN, par exemple avec l'ambassadeur du Canada à l'OTAN?
    Pas avec l'ambassadeur du Canada à l'OTAN précisément, mais avec plusieurs autres ambassadeurs, dont celui des États-Unis, à plusieurs reprises.
    Lorsque c'est une femme qui occupe le poste d'ambassadeur à l'OTAN, diriez-vous qu'elle peut influer directement sur les politiques et les orientations concernant les mesures prises par l'OTAN?
    Je dirais, dans une faible mesure.
    C'est que, vous le savez très bien, je crois, les politiques de l'OTAN se décident dans les capitales. Les ministres des Affaires étrangères et de la Défense sont très impliqués dans l'élaboration des politiques de l'OTAN, tant pour des opérations précises qu'en général.
    Les ambassadeurs peuvent ensuite amplifier le mouvement et disposent d'une certaine latitude. Les ambassadeurs à l'ONU ont plus de pouvoir, en règle générale. Certains ambassadeurs peuvent avoir un impact plus grand que d'autres, mais c'est plutôt rare. Ce sont vraiment les capitales qui prennent les décisions, dans la plupart des cas.
    Nous allons devoir en rester là. Il y aura une autre période à la fin et je suis certain que vous en aurez plus à nous dire.
    Nous passons maintenant à Mme Dzerowicz.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je veux remercier tous les intervenants pour leurs excellentes présentations.
    Je vais commencer par vous, monsieur Jones, si cela vous va.
    Je ne siège pas depuis longtemps au Comité, alors j'ai bien apprécié que vous commenciez par donner une vue d'ensemble — nous sommes aujourd'hui dans la période post-Printemps arabe. La complexité des conflits a changé, l'identité des adversaires à défaire pour obtenir la paix, des fauteurs de troubles et des terroristes a complètement changé, alors nos efforts de rétablissement et de maintien de la paix doivent aussi changer.
    J'ai également apprécié que vous donniez une idée claire des opérations de l'ONU dans des pays comme le Mali, et que vous expliquiez que la réussite de la mise en oeuvre des objectifs de ces pays et que l'augmentation de leurs chances de réussite dépendaient vraiment de la qualité des pays contributeurs de troupes. Grâce à la discussion que vous et certains des autres participants avez amenée aujourd'hui, je comprends mieux le rôle du Canada au Mali. Je vous en suis très reconnaissante.
    Un des éléments que vous avez mentionnés — et qui mène à ma question — est que la participation du Canada au Mali nous donne la légitimité de promouvoir certaines politiques à l'ONU. Comme certains de mes collègues se rendront à l'ONU, pourriez-vous nous en dire plus quant aux politiques dont nous devrions faire la promotion à l'ONU?

  (1220)  

     Merci.
    Il y a un débat au Secrétariat. Il y a un débat entre les pays membres au sujet de ce que cela signifie pour l'ONU que des opérations de maintien de la paix se déroulent dans des contextes où il y a du terrorisme. C'est une position inconfortable pour l'ONU. C'est un contexte incertain. Tout cela entraîne des préoccupations.
    Il est très important pour le Canada de tirer des leçons en temps réel de ses opérations au Mali afin de s'en servir dans les discussions concernant les politiques à l'ONU. Il faut redéfinir le concept d'impartialité afin de tenir compte du fait que, si vous êtes confronté à un groupe comme l'AQMI, qui ne soutiendra jamais un processus de paix, il faudra constamment des opérations de défense contre l'AQMI, qu'elles soient menées par les Français ou par l'ONU, cela fait partie du processus de mise en oeuvre d'un accord de paix. Cette question n'est pas théorique. Cela fait partie de la réalité de repousser les limites de l'impartialité lorsque les opérations de paix doivent faire face à des saboteurs de la paix stratégiques ou à des fauteurs de troubles permanents.
    Au sein du Secrétariat, le bureau juridique et le bureau du maintien de la paix le comprennent, mais on sent une hésitation et une nervosité, surtout en raison de la très grande nervosité des pays africains qui ont une tradition de maintien de la paix et des pays asiatiques plus petits qui ont été les principaux contributeurs au cours des dernières années. Ils n'ont pas les capacités dont dispose le Canada pour se défendre ou pour entreprendre des opérations plus offensives. Ils ne veulent pas se retrouver dans un contexte où on leur demande de maintenir la paix avec plus de fermeté alors qu'ils n'ont pas la capacité de le faire.
    On ne peut pas s'en sortir, à moins que des pays comme le Canada, la Hollande et d'autres qui ont des capacités plus avancées fassent partie de ces opérations et qu'ils aillent à New York pour défendre ce changement de politique.
    C'est une explication très utile. Merci beaucoup.
    Il ne me reste pas beaucoup de temps. Monsieur Jones, j'aimerais pouvoir revenir à vous sur quelques points. Cependant, je vais me tourner vers Mmes White et Woroniuk.
    Je vous remercie de cette excellente conversation.
    En tant que femme qui a uniquement travaillé dans des milieux de travail dominés par les hommes — le milieu des affaires et la politique —, j'ai appris que, pour que les femmes puissent laisser leur marque, il faut arriver rapidement au point de masse critique. Nous sommes présentement dans ce que j'appellerais la « phase d'inconfort ». Une des questions que je n'arrive pas à résoudre dans notre discussion, c'est que, si nous sommes à 5, 10 ou 15 %, comment pouvons-nous arriver à 30 % aussi rapidement que possible, afin d'en arriver à la masse critique qui nous permettra d'obtenir du changement? C'est ma première question.
    Deuxièmement, c'est au sujet du parrainage comparativement au mentorat. Comment se fait-il qu'il faille que les femmes commandantes soient parrainées par un homme commandant dans les opérations internationales de maintien de la paix, dans les contextes de paix et de conflit, pour pouvoir occuper ces postes de commandement?
    Troisièmement, il faut créer des groupes où les femmes pourront se soutenir entre elles, en contexte de paix et en contexte de guerre.
    Je me demande si l'une de vous deux peut expliquer comment nous pourrions y arriver. D'abord, êtes-vous d'accord? Ensuite, comment pouvons-nous faire bouger les choses dans ces situations? Merci.
    D'abord, merci de votre question. Je vais me lancer. En fait, je vais aussi parler un peu de Kerry Buck, qui vient tout juste de quitter son poste d'ambassadrice à l'OTAN et qui a eu une influence marquée sur l'avancement des politiques.
    Je veux aussi mentionner ma collègue et amie Clare Hutchinson, qui est RSSG en matière d'égalité entre les sexes à l'OTAN. Elle défend ses causes de façon courageuse. Pour répondre à votre question, elle a réussi à se sentir confortable pour défendre ses positions dans ce contexte. Je suis aussi heureuse de dire que le RSSG de l'OTAN a parlé de « l'effet Hutchinson ».
    Je vois que nous avons peu de temps.
    D'une certaine façon, il faut aussi reconnaître que les femmes qui choisissent une carrière militaire ne le font habituellement pas dans le but de participer à des opérations de maintien de la paix. Elles le font, parce qu'elles veulent faire partie de l'effectif ou du corps ou parce qu'elles veulent contribuer de différentes façons. Ainsi, d'une certaine façon, il s'agit de créer un forum où mener cette discussion de façon à inclure leurs soeurs et leurs frères d'armes dans la conversation.
    Honnêtement, je présume que les femmes comme vous, qui ont réussi à percer dans des professions dominées par les hommes... Vous jouez un rôle en matière de gouvernance, mais il y a une composante de la société civile pour celles d'entre nous qui avons eu le privilège de faire valoir la place des femmes dans ces contextes également. Je vous remercie d'avoir amené le sujet.

  (1225)  

    Merci.
    Monsieur le député Garrison, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie M. Spengemann d'avoir parlé des questions liées à la communauté LGBTQI, parce qu'il est bon de voir ces questions être soulevées par une autre personne que le gai de service. Je crois aussi que ces questions sont très pertinentes dans le contexte de ce dont nous discutons ici.
    Mesdames White et Woroniuk, vous avez toutes deux parlé de la nécessité de rééduquer les hommes, pour ainsi dire, sur les questions concernant les femmes, la paix et la sécurité. J'aimerais que vous parliez davantage des propositions précises concernant la façon d'y arriver aux niveaux supérieurs.
    Je crois que c'est une importante question. Nous nous rendons souvent dans des réunions pour parler des femmes, de la paix et de la sécurité où 95 % des gens dans la salle sont des femmes. Je crois qu'il y a différents problèmes. Un de ces problèmes est le leadership. Il est vraiment important que le soutien et la légitimité relatifs à cette question viennent d'abord d'en haut.
    C'est là où le général Vance a vraiment fait avancer les choses, parce qu'il a pris cette question au sérieux. Je crois que nous pouvons grandement nous inspirer de son exemple. Souvent, on obtient un appui symbolique sur ces questions, mais les hommes commandants ne viennent pas aux cours, n'assistent pas aux discussions et ne participent pas aux débats. Ils vont souvent envoyer une femme à leur place ou ils trouveront une excuse pour ne pas y aller. Compte tenu des structures dans le domaine militaire et celui de la sécurité, le leadership joue un rôle essentiel. Il faut affirmer que le changement doit venir d'en haut. Les hommes doivent mettre la main à la pâte.
    Nous disposons maintenant de données prouvant que ces questions sont de réelles questions de sécurité. Les recherches montrent que les accords de paix durent plus longtemps lorsque les organisations de femmes sont impliquées. Il y a même des recherches qui montrent que les sociétés où les relations hommes-femmes sont plus équitables risquent moins de faire la guerre à leurs voisins. En plus d'être la meilleure chose à faire, étudier les questions liées aux femmes, à la paix et à la sécurité est aussi la chose la plus brillante à faire pour forger la paix et pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.
    Il y a donc des arguments, mais bien des gens dans la salle ne croient pas à ces arguments. Je crois qu'il faut plus de discussions et plus de recherche. Quel sera le point de bascule ou quelle sera la goutte qui fera que les gens prendront cette question au sérieux et qu'ils considéreront qu'il s'agit d'un point de départ légitime? Je crois que faire participer des gens d'horizons plus variés est un point de départ très important. Le dicton, si je me souviens bien, veut que les questions militaires soient trop sérieuses pour être laissées aux mains des militaires. Je crois que cela s'applique dans ce cas.
    Madame White, allez-y.
    Je vais faire écho à ma collègue sur ces questions. Je crois que vous ne serez pas surpris d'apprendre que, parfois, lorsqu'il est question de formation pour les haut placés, tout à coup, les gens se désistent, parce qu'ils ont autre chose de plus important à faire. Il me semble que les dirigeants pourraient faire en sorte que ce soit obligatoire.
    Je pense que l'apprentissage fondé sur l'empathie peut avoir une valeur réelle directe — tout comme votre présence à la table pour dire « moi aussi ». Nous sommes des femmes, à l'évidence, alors cela aussi a un effet.
    Merci.
    Compte tenu de l'heure et du nombre de députés qui ont mentionné avoir d'autres questions à poser, je vais donner à chacun d'eux cinq minutes de plus.
    Je vais commencer par M. Bezan.
    Merci, monsieur le président.
    Madame White, vous avez envoyé une lettre d'opinion concernant la mission au Mali. Vous avez parlé des défis liés à la corruption, à la criminalité, à l'extrémisme et à l'érosion de la capacité de l'État à assurer la sécurité au Mali. Comme l'ont souligné plusieurs témoins, il sera peut-être impossible d'en arriver à la paix. La situation là-bas est désastreuse.
    Le Canada en fait-il assez pour aider le Mali?
    Il est toujours possible d'en faire plus. C'est une importante question. Je crois que, même dans la prémisse de votre question, on comprend qu'il faudra s'attaquer à la corruption rampante au moyen des institutions financières et de la Banque mondiale. De nombreux pays d'Afrique perdent près d'un billion de dollars à cause de la corruption.
    Pensez à ce que nous pourrions faire pour changer les choses. Pensez à faire participer les jeunes dans ces pays à la réflexion sur les emplois du futur et sur ce qu'ils peuvent faire. Comme je vous l'ai dit plus tôt, il n'y a pas que l'emploi pour enrayer le risque de radicalisation; il y a aussi l'engagement réel. Le Canada peut certainement apporter sa contribution dans ce domaine également.
    Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il nous suffirait de faire pleuvoir les dollars, car je crois que nous avons les ressources humaines, les compétences générales et les leçons que nous avons apprises dont nous pouvons aussi directement nous servir, notamment au sein de la société civile par des relations entre les peuples, qu'il s'agisse des femmes, des jeunes ou de la communauté LGBTI. Imaginons qu'un membre de la communauté dise: « C'est difficile aussi au centre-ville de Toronto, mais voici des mesures que vous pourriez prendre. »
    Parfois, on a l'impression que des petites mesures du genre ne pourront pas avoir l'effet de l'envoi de troupes et de matériel, mais je peux vous le dire, c'est par de telles mesures qu'on parvient à maintenir la paix.

  (1230)  

    Lorsque vous parlez de la question des contributions réfléchies, est-ce qu'elles fonctionneront et seront efficaces dans les opérations au Mali?
    Oui, si des gens comme vous maintiennent la pression sur le gouvernement quant aux attentes à son endroit. Nous ne pouvons qu'affirmer que c'est ainsi que le Canada entend voir les choses et agir. En tant que membre respecté de la communauté internationale élargie, nous allons demander aux autres de suivre notre exemple.
    Monsieur Jones, qu'en est-il des contributions réfléchies? Est-ce que ce sera une contribution suffisante du Canada dans le cadre de la mission au Mali en particulier?
    Je suis désolé, je ne comprends pas tout à fait ce que vous voulez dire par « contributions réfléchies » du Canada. S'agit-il de contributions assorties de conditions ou...
    J'imagine que c'est la rhétorique du gouvernement libéral, qui veut montrer qu'il décidera de façon intelligente du type de capacité envoyée. Au Mali, c'est une force opérationnelle aérienne pour les évacuations sanitaires et pour le soutien logistique. Une des choses qu'on ne nous a pas dit au sujet de ces fameuses contributions réfléchies, c'est qu'elles seraient également employées pour soutenir les opérations de lutte au terrorisme du G5 Sahel. Je voulais simplement avoir votre point de vue quant à la contribution du Canada à la mission au Mali et à ce qui devrait être fait pour assurer le succès de la mission.
    Je dirais qu'il y a deux choses, toutes deux assez difficiles à obtenir. L'une de ces choses, qui pourrait découler de ces discussions, c'est une affirmation claire de la nature bipartisane de l'appui. Je suis à Washington, alors je n'ai pas vraiment de leçons de bipartisme à donner, mais en règle générale, lorsqu'un pays peut communiquer que la volonté ne vient pas seulement du gouvernement et qu'il y a un appui plus large, les capacités déployées par le gouvernement gagnent en influence et le maintien dans le temps de cet engagement devient important.
    Écoutez, nous avons deux choix. Nous pouvons avoir un système onusien très faible et incapable de contribuer à la stabilisation de pays comme le Mali ou nous pouvons avoir un système onusien un peu plus efficace et, pour cela, il faut que des pays comme le Canada participent aux éléments plus musclés des opérations. Je trouvais qu'il était important que le Canada soit présent au Mali. J'étais un peu déçu d'apprendre que sa contribution se limiterait à une force opérationnelle aérienne et aux opérations de sauvetage. J'aurais voulu que le Canada joue un rôle semblable à celui des Néerlandais, qu'il en fasse un peu plus. Peut-être que la contribution canadienne sera appelée à changer à mesure que le Canada en apprendra davantage au sujet du Mali en maintenant une présence dans le pays et en adaptant ses opérations.
    Encore une fois, un des éléments est la contribution apportée au Mali. L'autre est la façon de former et d'outiller à neuf l'ONU afin qu'elle devienne un instrument efficace pour aider à stabiliser les États fragilisés aux prises avec des problèmes de terrorisme de faible amplitude, une capacité dont nous avons besoin.
    Merci.
    Le député Spengemann a la parole.
    Merci beaucoup.
    L'étude que nous menons est très ambitieuse, tout comme le rapport que nous allons présenter. Nous ne serons pas en mesure de répondre à chacune des questions, mais je crois qu'il est important que le Comité signale tout élément pertinent et qu'il cerne les questions qui devraient être étudiées plus en profondeur par d'autres comités, voire par le nôtre.
    Est-ce que l'un de vous a des commentaires à nous soumettre au sujet de la réforme de l'ONU en matière de maintien de la paix dans les décennies à venir?
    En fait, Bruce, allez-y.
    Il y a deux volets. Le premier consiste en une série de réformes annoncées par le secrétaire général Guterres pour l'intégration de certains bureaux régionaux dans le maintien de la paix. Il s'agit de réformes tout à fait acceptables de la structure de gestion qui n'auront pas vraiment d'effet sur les politiques. Il s'agit d'améliorations utiles du point de vue administratif.
    La vraie réforme — et je vais me répéter — proviendra de la participation de pays comme la Hollande, le Canada, l'Espagne et la Chine, entre autres, aux éléments plus musclés des opérations de maintien de la paix de l'ONU. C'est ce qui amènera un débat et des changements aux politiques quant à l'organisation requise pour soutenir plus efficacement ces efforts.
    L'administration de l'ONU, la réforme de l'ONU, n'est plus en phase avec les défis auxquels nous serons confrontés sur le terrain et la situation ne changera pas tant qu'il n'y aura pas ce genre d'échanges entre les pays qui déploient des troupes et qui ont un poids politique à New York.
     J'ai parlé de la façon dont nous définissons l'impartialité, des fondements légaux de nos opérations dans certains de ces contextes. Tout cela doit évoluer. C'est là que se trouve le besoin de réforme en matière de politiques. Changer l'emplacement des chaises et les liens de subordinations connexes, c'est correct. Cependant, le vrai changement doit se faire en tenant compte du fait que nous sommes dans une époque ou la lutte contre le terrorisme et la gestion des guerres civiles sont maintenant fusionnées et il faut comprendre les incidences pour les politiques.

  (1235)  

    Mesdames White et Woroniuk, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J'ajouterais simplement que je crois que l'autre élément important au sujet de la réforme de l'ONU est de s'assurer que les engagements en matière de droits des femmes et d'égalité entre les sexes en fassent partie. On a beaucoup travaillé sur la question de la parité hommes-femmes dans la haute direction de l'ONU, mais je crois qu'il est aussi important d'examiner les engagements relatifs aux analyses en fonction des sexes et à l'intégration du principe d'égalité entre les sexes et de faire en sorte que ces enjeux soient pris au sérieux dans le cadre de la réforme de l'ONU et qu'ils ne soient pas traités séparément.
    Je suis d'accord avec ma collègue, évidemment, mais je proposerais que, dans le cadre de votre étude, vous abordiez certaines des menaces émergentes en matière de cybersécurité et d'intelligence artificielle. De plus en plus, nous voyons des pays intervenir dans les élections et mener d'autres actions du genre. Vous comprenez que ces menaces deviendront plus complexes et difficiles à contrer. On parle presque d'une réforme de la doctrine ou d'une mise à jour de la doctrine et des structures légales, ce qui revient à ce dont parlait Bruce également.
    Nous avons constaté que les médias sociaux peuvent alimenter la perturbation des pays où se trouvent des Casques bleus en situation dangereuse. On ne parle pas d'un problème éventuel; il s'agit d'un problème actuel et je vous invite à l'étudier. Je sais que l'ACNU réunira bientôt certaines des sommités en matière de sécurité de l'Arctique, du climat et des océans. Ces éléments sont bien plus interreliés, pour étendre encore davantage votre étude...
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, je suis heureux d'offrir la dernière minute à mes collègues s'ils veulent poser une brève question.
    Monsieur Gerretsen, vous êtes le prochain, alors vous pouvez soit prendre cette minute...
     Quelqu'un d'autre?
    Vous êtes le prochain à poser des questions. Nous allons passer directement à votre question. La parole est à vous.
    D'accord.
     Madame Woroniuk? C'est bien comme cela qu'on le prononce?
    Oui. Si vous voulez le prononcer à l'ukrainienne, c'est « Voroniouk ».
    M. Mark Gerretsen: Oui, je pense que c'est plus facile.
    M. James Bezan: Nous sommes quelques-uns à avoir des origines ukrainiennes autour de la table.
    Je veux vous poser une question au sujet du poste d'ambassadeur annoncé par la ministre Freeland la semaine dernière. Il y a d'ailleurs eu une motion présentée à la Chambre à ce sujet. Je me demande si vous pourriez donner votre avis au sujet de certaines des opinions émises par des spécialistes au sujet de ce poste.
    Je pense en particulier à Matthew Legge, qui a suggéré que le poste comprenne trois grands rôles. Le premier serait de contribuer aux politiques au Canada; le deuxième serait de représenter le Canada sur certaines tribunes internationales; le troisième serait de parcourir le pays afin d'obtenir, sur le terrain, l'apport des Canadiens en général. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et le rôle qu'un tel ambassadeur devrait avoir selon vous.
    Merci beaucoup de cette question. Nous sommes très heureux de l'annonce de ce poste et nous nous en réjouissons.
     Les membres de notre réseau réclament depuis longtemps la nomination d'un champion de haut niveau pour soutenir la mise en oeuvre des nombreux engagements du Canada concernant les femmes, la paix et la sécurité. Nous croyons fermement que le principal objectif de ce poste devrait être de catalyser la mise en oeuvre des engagements qui ont déjà été pris.
    Le Plan d'action national pour les femmes, la paix et la sécurité est un document complexe. Il comprend une approche pangouvernementale. De nouveaux ministères y ont maintenant adhéré, mais tous — qu'il s'agisse de Sécurité publique, de Condition féminine ou d'Affaires mondiales — participent à la mise en oeuvre du Plan d'action national. Nous croyons que cet ambassadeur doit jouer un rôle critique d'introspection pour favoriser la collaboration entre tous ces ministères. Il s'agit du premier rôle que vous avez décrit, concernant les politiques, mais cela va plus loin. Il n'est pas question de concevoir les politiques, mais de veiller à ce que les ressources nécessaires pour la mise en oeuvre des engagements déjà pris soient en place pour qu'elle puisse se faire.
    Pour nous, le deuxième rôle — la représentation du Canada sur certaines tribunes internationales — devrait en fait être le troisième et être moins important pour ce poste. Assurément, la participation des Canadiens dans les discussions devrait être une partie importante du mandat de l'ambassadeur.

  (1240)  

    Je reviens sur le troisième commentaire que vous avez fait relié à la discussion que j'ai eue avec Mme White au sujet de la sensibilisation et de l'importance de sensibiliser le public canadien à la nécessité pour le Canada de participer aux efforts de maintien de la paix partout dans le monde, diriez-vous que ce poste pourrait jouer une partie de ce rôle ou qu'il serait souhaitable qu'il le fasse?
    J'ose espérer que ce poste ne s'attardera pas seulement au maintien de la paix, mais qu'il sera également axé sur la paix et la sécurité en général en termes d'implication du Canada dans le monde et de sa participation à l'édification de la paix, pas seulement au maintien de la paix. Assurément, nous avons vu que, lorsque les gens commencent à aborder ces questions, il y a un réel intérêt et une réelle curiosité sur des questions comme, disons, pourquoi une famille syrienne s'est retrouvée au Canada. Pourquoi parrainons-nous un réfugié syrien? Quelles sont les causes du conflit syrien?
    En ce qui concerne la possibilité d'aborder ces questions du point de vue des femmes, de la paix et de la sécurité en particulier, ou, plus largement, en ce qui concerne le rôle que joue le Canada dans le monde, je crois que les Canadiens souhaitent vraiment comprendre comment tous ces éléments sont liés.
    Nous avons déjà mené quelques études, notamment au sujet de l'OTAN et du NORAD. Une des choses intéressantes que j'ai notées depuis que je siège à ce comité, c'est que, avec le déclin de l'intérêt et de la volonté de s'impliquer, nous avons également constaté qu'il semblait y avoir un déclin de l'engagement du Canadien moyen et de la compréhension de l'importance du maintien et de la promotion de la paix partout sur la planète.
    Nous avons vu cela dans le cas de l'OTAN. De moins en moins de Canadiens comprennent l'importance de l'OTAN, et c'est la même chose dans le cas du NORAD.
    J'aimerais que vous répondiez également à la question que j'ai posée à Mme White. À quel point est-il important de continuer de sensibiliser les Canadiens à l'importance de cet engagement? À quel point est-il important de sortir du carcan politique que nous semblons avoir créé et de lancer la discussion dans l'espace public?
    Je crois qu'il est important de ne pas se limiter à une seule question. Une des questions qui semblent susciter le plus d'intérêt est celle de la signification de la sécurité et des différentes façons de la comprendre. La définition de la sécurité dépend-elle de qui vous êtes et d'où vous vous situez dans le contexte? Je crois que la question n'est pas seulement « Pourquoi l'OTAN est importante? », mais « Qu'est-ce que la sécurité? » Quel est le rôle du Canada pour assurer la sécurité ailleurs dans le monde et comment toutes ces questions nous affectent en tant que Canadiens?
    C'est un peu la trame de fond: soutenir les autres. D'accord.
    Merci.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de monsieur le député Fisher.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Un point semble se dégager de cette étude, et nous l'avons beaucoup dit: les choses ont bien changé depuis la dernière fois où nous avons véritablement participé à des opérations de maintien de la paix, et le rôle des Casques bleus a également beaucoup changé. En tant que Canadiens, notre rôle n'est plus seulement celui d'observateurs, comme c'était peut-être le cas dans le passé. Bien qu'il soit important de tirer des leçons du passé, il est aussi important de reconnaître que les opérations de maintien de la paix seront bien différentes de toutes celles auxquelles nous avons participé.
    Ma question s'adresse à Mme White. Les autres témoins voudront peut-être intervenir également, mais je partagerai les deux dernières minutes et demie de mon temps de parole avec la députée Dzerowicz.
    L'approche actuelle de maintien de la paix que nous mettons au point et favorisons est-elle beaucoup plus réaliste? Sommes-nous sur la bonne voie?
    Je crois que oui, car je suis persuadée que les membres des Forces canadiennes sont très bien entraînés, qu'ils sont disciplinés et respectés. Ils doivent l'être pour aller en mission. Je pense aussi que les Forces canadiennes ont tiré des leçons de l’expérience en Afghanistan, ainsi que des missions antérieures plus sombres, et notamment de l’approche de sécurité inclusive. D'après moi, c'est vraiment nécessaire.
    J'ai mentionné le fait qu'Antonio Guterres avait encouragé la prise de mesures et que nous avions participé aux efforts. Comme vous le savez, lorsque divers pays partenaires dépêchent des troupes, le but est que chacun sache qu'il peut compter sur les autres. Les leçons tirées éclairent aussi, à bien des égards, nos décisions sur l'orientation à prendre. Nous sommes bien placés pour offrir cet entraînement, transmettre nos connaissances et même recueillir des renseignements. Nous inspirons de plus en plus de respect à cet égard.
    Pour ce qui est de notre approche à l'égard des déploiements, entre autres, je vous ai donné une liste de recommandations. Les Allemands et les Néerlandais, par exemple, s'engagent pour plusieurs années, alors que nous y allons pendant six mois. Nous envoyons de jeunes Canadiens en stage aux Nations unies, et les hôtes disent toujours qu'ils souhaiteraient pouvoir les garder plus longtemps. Dans un pays en conflit, il est facile d'imaginer qu'un engagement à plus long terme, même si nous effectuons une rotation de l'expertise et des contributions, serait très apprécié.

  (1245)  

    J'aimerais entendre ce que les deux autres témoins ont à dire. J'ai vu M. Jones hocher la tête, mais il ne reste que deux minutes et demie, et j'ai promis de partager ce temps de parole avec la députée Dzerowicz.
    Il vous reste trois minutes. Il ne reste qu'une autre personne, et nous disposons d'un peu plus de temps. Si vous souhaitez poursuivre, vous le pouvez, et je reviendrai à la députée Dzerowicz par la suite.
    D'accord.
    Beth — votre prénom est plus facile à prononcer.
    Mes parents ont choisi mon prénom justement pour cette raison.
    Je suis d'accord avec Kate, nous semblons être sur la bonne voie. Je pense que c'est très important de tirer parti des leçons apprises au pays dans la manière dont nos organismes de sécurité reflètent les valeurs canadiennes et dont nous agissons en fonction des valeurs canadiennes et de nous servir de ces leçons à l'étranger, non seulement dans le cadre de missions précises, mais aussi dans les efforts que nous déployons à différents moments auprès des Nations unies. Si nous continuons en ce sens, je pense que nous aurons des bases solides.
    Merci.
    Monsieur Jones, il reste une minute. Je vous ai vu hocher la tête, mais cela ne figure pas au compte rendu.
    Oui, j'appuie fortement la notion d'engagement à plus long terme. J'espère que le Canada a appris de ses premières expériences au Mali — ce qui lui donnerait une meilleure idée de la situation sur le plan du renseignement et des politiques —, qu'il augmentera sa contribution et demeurera engagé, tant par ses efforts de maintien de la paix que par des outils politiques et de développement. C'est impossible d'apporter une énorme contribution en six mois; c'est seulement possible durant une plus longue période. Les six premiers mois devraient servir d'exercice d'apprentissage qui, idéalement, se poursuivra et permettra de s'améliorer.
    Nous allons passer au député Garrison, puis nous terminerons avec la députée Dzerowicz.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Woroniuk, au début, vous avez parlé de quatre piliers. Nous avons parlé de la participation des femmes à tous les niveaux du processus et des opérations de paix, ainsi que de la prévention de la violence sexuelle et de la protection des victimes. Cependant, nous n'avons pas vraiment abordé les deux autres piliers, c'est-à-dire le rôle des femmes dans la prévention des conflits et un plan de rétablissement après un conflit qui profiterait aux personnes des deux sexes.
    Je souhaite vous donner l'occasion de parler un peu de ces deux éléments, puisque nous n'en avons pas véritablement discuté. Nous avons consacré peu de temps à ce qui lie les opérations de paix et de maintien de la paix à la prévention ou aux situations d'après-conflit.
    Je vous remercie de l'avoir souligné. Je pense que l'une des forces et l'un des éléments intéressants du programme sur les femmes, la paix et la sécurité, c'est d'essayer de mettre de l'avant cette approche holistique. L'un des principaux points soulevés est que, dans ce dossier, l'amélioration de la sécurité des femmes en période de guerre n'est pas le seul travail à accomplir. Ce n'est pas notre objectif.
    Nous essayons plutôt de prévenir les conflits avant qu'ils n'éclatent. Cela exige divers types d'investissements, du développement, la détection précoce des conflits, un contre-discours à l'extrémisme violent. Il est aussi important que ce soit dans le programme, comme nous le savons, et d'autres témoins ont parlé des avantages de dépenser un dollar pour prévenir un conflit par rapport aux centaines de dollars qu'il en coûte une fois que le conflit armé a éclaté. D'après moi, il faut s'efforcer davantage de s'attaquer aux causes profondes des conflits.
    De plus, il est important d'examiner ce qui se passe après les conflits. Nous nous apercevons que, lors des conflits, les normes sexuelles changent parfois. Les femmes assument des rôles différents en raison des bouleversements. Après les conflits, il faut qu'il y ait des possibilités pour les femmes et les hommes sur le plan de l'emploi et de la démobilisation.
    Dans le cas d'anciens membres des forces armées, un des grands problèmes est ce qui se passe en Colombie, entre autres. Les femmes membres des Forces armées révolutionnaires de Colombie qui sont démobilisées se voient souvent offrir une formation pour travailler dans un salon de coiffure ou un salon de beauté. Il s'agit de femmes très motivées ayant de nombreuses compétences techniques. En raison de ces compétences, elles sont de plus en plus recrutées comme narcotrafficantes. Pourtant, officiellement, tout ce qu'on leur offre, c'est un emploi dans un salon de coiffure.
    Il faut analyser ces éléments et la manière dont nous rétablissons la paix.

  (1250)  

    Madame Dzerowicz, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Jones, je vais commencer par vous. Je reviens sur la question de mon collègue M. Fisher au sujet de la contribution du Canada au Mali. Pensez-vous qu'il s'agit d'une contribution positive à l'objectif des Nations unies qui consiste à créer des conditions favorables à la paix?
    Vous avez dit que vous auriez souhaité que le Canada participe aux éléments plus musclés des opérations de maintien de la paix et qu'il reste un peu plus longtemps, mais croyez-vous que, de façon générale, il s'agit d'une contribution positive?
    Oui, absolument. Les interventions efficaces de maintien de la paix nécessaires dans ce genre de conflits ne seraient pas possibles sans le transport aérien et le soutien à la surveillance que fournit le Canada. Cependant, ce n'est qu'un début. Les pays qui envoient d'importants contingents de soldats doivent en faire plus.
    Absolument. Je comprends très bien. Vous avez expliqué clairement la nécessité des échanges sur les connaissances acquises sur le terrain dans le cadre de ces opérations et de ces efforts de haut niveau, et de la présentation des résultats aux Nations unies pour l'élaboration des politiques afin que nous puissions pousser l'organisation dans la bonne direction pour relever les défis liés au maintien de la paix sur le plan international au XXIe siècle. C'est bien ancré dans mon esprit, et je vous remercie beaucoup de nous l'avoir expliqué.
    Madame Woroniuk, je souhaite revenir à vous. Avez-vous une réponse à ma question de tout à l'heure? Je me demande particulièrement comment faire pour arriver à cette masse critique qui est nécessaire pour que les femmes observent ce changement. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, et si vous avez des recommandations.
    L'un des objectifs de l'initiative Elsie est de comprendre les obstacles auxquels sont confrontées les femmes, tant lorsqu'elles se joignent à des organismes de sécurité que lorsqu'elles sont en déploiement. En effet, il est très intéressant que les femmes soient déployées à l'étranger à un taux inférieur à celui auquel elles deviennent membres de leurs forces armées nationales. Il faut donc tenir compte d'autres obstacles.
    L'un des points très importants dont il a été question est que beaucoup de ces obstacles sont propres au contexte. Une femme au Ghana doit relever des défis différents de ceux d'une femme au Bangladesh. Cependant, certains des problèmes qui ont été soulevés sont certainement liés au harcèlement sexuel. Certaines femmes ne partent pas en mission parce qu'elles ont peur et à cause des histoires que leur ont racontées d'autres femmes au sujet des dangers qui les attendent en mission. Parmi les raisons, il y a aussi le manque de soutien familial et la durée des congés. Il y a même des femmes qui ne partent pas en mission pour des questions techniques. Le Département des opérations de maintien de la paix a des normes minimales. L'une d'elles consiste à être en mesure de conduire une automobile à transmission manuelle et, dans beaucoup de forces militaires, les femmes ne reçoivent pas cette formation. Certains problèmes sont faciles à régler, comme ce dernier: il suffit d'offrir cette formation afin que les femmes puissent bénéficier du même accès à leur arrivée dans les forces armées.
    C'est un volet très important qui est examiné. Nous essayons de comprendre ces obstacles et d'avancer. Je pense que ces obstacles ne sont pas les mêmes au Canada et à l'étranger.

  (1255)  

    Vous avez dit que nous devions recueillir davantage de données afin de savoir comment faire des pas de géant et transcender la situation.
     Monsieur Jones, je crois avoir entendu que nous devons penser davantage à prévenir les conflits avant qu'ils n'éclatent, et que nous devons penser davantage à l'étape post-conflit, une fois que nous en saurons plus sur la nouvelle situation et le travail que nous avons à faire.
    Pour ce qui est du maintien de la paix internationale au Canada, quelles sont vos recommandations pour prévenir les conflits, en tenant compte de leurs causes profondes?
    Je dois dire que je suis de la vieille école dans ce domaine. L'un des meilleurs analystes de conflits du dernier quart de siècle a écrit un article au début des années 1990, qualifiant la prévention des conflits d'alchimie pour le nouvel ordre mondial.
    La politique, c'est la politique. Nos interventions sont mauvaises. Nous ne comprenons pas les sociétés où nous intervenons. Honnêtement, la prévention des conflits est une idée qui me laisse très sceptique, à moins qu'il ne soit question d'une transformation à long terme en matière de développement étalée sur des décennies, à laquelle nous participons et devrions participer.
    Je m'intéresse davantage à la stabilisation des situations de conflits. Cela exige de faire échouer les plans de ceux qui tentent de nuire aux accords de paix ou à l'État. Il est parfois facile de revenir aux notions de prévention et de processus politiques, entre autres, mais en fin de compte, il y aura toujours des groupes qui essaieront de compromettre la paix et la stabilité de ces pays, et il faut les tenir en échec. Voilà comment on protège les civils. Voilà comment on améliore la situation d'un pays.
    Je sais que j'ai l'air très récalcitrant, mais parfois, ces notions plus conciliantes font que les véritables défis à relever semblent moins clairs.
    D'accord, merci beaucoup.
    Merci.
    Avant que nous terminions, je donne la parole à M. Bezan.
    Merci.
    J'ai un petit rappel au Règlement, monsieur le président.
    En ce qui concerne la prochaine réunion, jeudi, nous n'avons toujours pas reçu l'avis de convocation ni la liste des témoins. Il est donc difficile pour nous de nous préparer en vue de ces réunions. Je pense que ce serait la moindre des choses de recevoir les avis 48 heures à l'avance, mais idéalement 72 heures à l'avance, afin que nous ayons la chance d'effectuer nos recherches sur les témoins, de trouver des citations et de connaître la position des témoins sur diverses questions. Cela nous permet, de notre côté, d'organiser au moins une petite réunion préalable afin de discuter d'une stratégie.
    Plus nous avons de temps, mieux c'est. Je pense que c'est important. Il s'agit de respecter notre privilège, en tant que parlementaires, de faire le travail qui nous est confié.
    Je respecte vos observations. Je pense que c'est généralement ce que nous faisons au Comité. La greffière du Comité s'en chargera dès la levée de la séance.
    Je remercie les témoins qui ont contribué à cette conversation très importante.
    Pour ceux qui se poseraient la question, M. Bercuson est pris dans un bouchon à Calgary, en pleine tempête de neige. Nous avons échangé des courriels, et il nous transmettra les commentaires qu'il aurait faits s'il s'était joint à nous par vidéoconférence.
    Ne peut-il pas se joindre à nous jeudi?
    Nous lui avons demandé, mais il n'est pas disponible. Le mieux que nous puissions faire, c'est d'obtenir ses commentaires par voie électronique, et ils seront ajoutés à notre rapport.
    Je vous remercie tous d'être venus et d'avoir participé aux discussions sur ce sujet très important.
    La séance est levée.
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