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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 037 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 16 novembre 2022

[Enregistrement électronique]

  (1630)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à la 37e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes.
    Comme d'habitude, je vais faire quelques rappels. La réunion d'aujourd'hui se tient en format hybride. La caméra ne montrera que la personne qui parle, ce qui veut dire qu'on ne vous verra pas nécessairement si vous n'avez pas la parole. Bien entendu, les captures d'écran sont interdites.
    Nous avons quelques remplaçants. M. Fayçal El‑Khoury remplace M. Drouin.
    Monsieur El‑Khoury, nous sommes heureux de vous accueillir au comité de l'agriculture.
    Je suis ravi d'être avec vous.
    C'est fantastique de voir de nouveaux députés se joindre à nous et de faire partie du meilleur comité sur la Colline.

[Français]

     Aujourd'hui, Mme Andréanne Larouche remplacera M. Yves Perron à partir de 18 heures.

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion que le Comité a adoptée le lundi 30 mai 2022, nous poursuivons notre étude sur l'insécurité alimentaire mondiale.
    Nous accueillons aujourd'hui, en fait, notre dernier groupe de témoins. Je remercie tous ceux qui sont venus témoigner et ceux qui sont avec nous aujourd'hui.
    Nous accueillons, à titre personnel, M. Michael Fakhri, rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation aux Nations unies. Il témoigne par vidéoconférence. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Fakhri.
    Dans la salle, nous accueillons Dave Carey, vice-président, Relations avec le gouvernement et l'industrie, de la Canadian Canola Growers Association. Monsieur Carey, nous sommes heureux de vous voir.
    Nous accueillons aussi Charles Stevens, président du conseil d'administration, de l'Association des fruiticulteurs et des maraîchers de l'Ontario. Monsieur Stevens, je vous souhaite la bienvenue au Comité.
    Nous accueillons enfin Mark Hemmes, président, de la Quorum Corporation. Il témoigne par vidéoconférence.
    Chers collègues, vous remarquerez que nous avons quatre témoins pour terminer ce qui était au programme. Nous voulions nous assurer d'entendre tous les témoins sur la liste, et c'est pourquoi ils sont au nombre de quatre aujourd'hui.
    Sans plus tarder, je vais demander à M. Fakhri de commencer.
    Vous avez cinq minutes.
    En tant que rapporteur spécial des Nations unies, je suis les yeux, les oreilles et la bonne conscience du système des Nations unies pour ce qui est du droit à l'alimentation, ce qui veut dire que le Conseil des droits de l'homme des Nations unies m'a confié le mandat de lui faire rapport régulièrement, de même qu'à l'Assemblée générale des Nations unies, sur les questions liées à la faim, la malnutrition et la famine qui touchent les droits de la personne.
    Au cours des deux dernières années et demie, j'ai eu un point de vue unique sur la crise alimentaire. J'ai consulté des gouvernements et des communautés dans toutes les régions du monde. De plus, j'ai eu des contacts directs avec des représentants de plus d'une dizaine d'organisations internationales, et ce, aux niveaux opérationnels et aux niveaux les plus élevés. J'ai vu à quel point les femmes sont en grande majorité les victimes de la discrimination et de la violence, tout en étant celles qui doivent nourrir leur famille et leur communauté.
    En 2021, le nombre d'enfants astreints au travail dans le monde a atteint 160 millions. Il s'agit de la première hausse en 20 ans, principalement dans le secteur agricole. Les travailleurs, les paysans, les pasteurs et les pêcheurs sont essentiels pour que nous puissions tous manger, mais ils sont traités comme étant sans importance. On vole, occupe et décime les terres des peuples autochtones à des taux génocidaires.
    En raison de tout ce qui précède, l'Assemblée générale des Nations unies m'a demandé l'an dernier de faire rapport sur la crise alimentaire déclenchée par la pandémie de la COVID‑19. Je suis heureux de vous faire part aujourd'hui de quelques-unes de mes conclusions. Je vous parle en tant qu'expert international, mais je dois aussi mentionner que j'ai exercé le droit plusieurs années en Ontario avant d'occuper ce poste.
    Ce qu'il faut retenir avant tout, c'est qu'il n'existe pas encore de coopération et de coordination sur la scène internationale pour lutter contre la crise alimentaire. En l'absence de coopération et de coordination pour le droit à l'alimentation, il sera très difficile de mettre fin à cette crise.
    À mon avis, le Comité de la sécurité alimentaire mondiale est le mieux placé pour élaborer un plan de coopération et de coordination internationales. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un problème de longue date. La malnutrition et la faim étaient à la hausse avant la guerre en Ukraine et avant la pandémie de la COVID‑19, et même si cette guerre et la pandémie se terminaient demain, nous serions encore aux prises avec une crise alimentaire mondiale qui ne ferait qu'empirer.
    J'en viens à mon rapport. Premièrement, j'ai recensé les problèmes structuraux qui nous empêchent de lutter contre la crise alimentaire, soit l'augmentation des taux d'endettement dans tous les pays, un système de commerce international qui ne sert pas à répondre aux besoins réels des gens, et une augmentation de la concentration des systèmes alimentaires entre les mains des grandes entreprises. Deuxièmement, j'ai recensé les mesures qui peuvent être prises dans l'immédiat et celles qui peuvent l'être pour répondre aux besoins à long terme.
    Dans l'immédiat, je recommande aux gouvernements de s'inspirer de ce qui a bien fonctionné pendant la pandémie. Nombre de gouvernements ont commencé à mettre fin aux mesures prises pendant cette période, mais ces mesures sont la preuve de ce qu'il est possible de faire pour assurer le droit à l'alimentation. Je suggère donc de rendre ces programmes permanents, et non d'y mettre fin.
    À long terme, je recommande que tous les pays effectuent la transition vers l'agroécologie. L'agroécologie est une pratique qui repose sur la science, le savoir ancestral et la justice sociale. C'est une pratique qui vise à imiter les processus écologiques, c'est‑à‑dire que les objectifs qui consistent à accroître la biodiversité et à améliorer la justice ne font qu'un.
    J'explique aussi dans mon rapport comment les gouvernements peuvent réaffecter les budgets existants et utiliser leurs plans nationaux de lutte contre la faim pour effectuer la transition vers l'agroécologie. Trois mesures s'imposent: premièrement, offrir aux travailleurs un processus de transition juste; deuxièmement, garantir des droits territoriaux solides et procéder à une vraie réforme agraire; et troisièmement, obliger les entreprises à rendre des comptes.
    Enfin, j'explique pourquoi il est important d'affirmer explicitement le droit à l'alimentation. Il importe de se rappeler que le Canada est tenu, en tant que partie au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et que partie à la Convention relative aux droits de l'enfant, de satisfaire à ses obligations internationales de protéger le droit à l'alimentation.
    Pour le dire simplement, le droit à l'alimentation veut dire que chacun a le droit à des aliments sains. Les gens ont accès à des aliments sains dans des marchés stables et équitables ou s'ils ont accès à des terres et aux ressources naturelles. De plus, le droit à l'alimentation nous procure un cadre international très précis qui favorise la coopération internationale.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Je vous remercie beaucoup.

  (1635)  

    Je vous remercie, monsieur Fakhri.
    Je cède maintenant la parole à M. Carey pendant un maximum de cinq minutes.
    Je remplace notre président agriculteur, Mike Ammeter, qui préside une réunion du conseil d'administration tout près d'ici en ce moment même.
    La question de l'insécurité alimentaire mondiale est complexe et comporte de multiples facettes. Elle est liée notamment à des facteurs géopolitiques et socioéconomiques et aux conflits armés. Ce sont des forces sur lesquelles un groupe d'agriculteurs, et dans une certaine mesure, le gouvernement canadien, n'a aucun contrôle.
    Aujourd'hui, je veux vous parler de ce que nous pouvons faire au Canada pour produire plus d'aliments pour les humains et les animaux et plus de carburant afin d'accroître nos exportations agricoles pour nourrir la planète. L'agriculture canadienne n'a pas encore atteint tout son potentiel et nombre d'obstacles qui empêchent les agriculteurs d'accroître leur productivité sont liés aux infrastructures, aux lois et aux règlements nationaux, des éléments qui relèvent de notre contrôle comme pays.
    Dans le peu de temps dont je dispose, je vais vous parler des cinq facteurs les plus importants qui permettraient aux agriculteurs canadiens de se trouver en bonne position pour accroître de manière durable leur production et, au bout du compte, de produire plus de produits.
    Un de ces facteurs est le transport. Il faut accroître la transparence du réseau ferroviaire au Canada et la confiance à son égard, investir dans des infrastructures souples et résilientes, et prendre des mesures immédiatement pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans le rapport du groupe de travail sur la chaîne d'approvisionnement qui vient d'être publié.
    Les principales recommandations qui profiteraient au secteur agricole seraient d'étendre la distance d'interconnexion de 30 kilomètres; de réviser le mandat de l'Office des transports du Canada et lui donner l'indépendance, l'autorité et le financement correspondant nécessaires pour s'acquitter de ce mandat; créer un groupe de travail sur la chaîne d'approvisionnement des transports en matière de main-d'œuvre avec une solide représentation du secteur agricole; accroître et améliorer les données sur la chaîne d'approvisionnement. Tous nos efforts ne serviront à rien si nos produits ne peuvent se rendre sur les marchés.
    Le deuxième facteur concerne les engrais. Après l'eau, les engrais à base d'azote sont le deuxième intrant le plus important dans la culture du canola.
    Toute réduction dans les émissions des engrais doit continuer à se faire sur une base volontaire en misant sur les incitatifs qui vont amener les agriculteurs à adopter des pratiques exemplaires additionnelles afin d'améliorer leurs activités agricoles qui sont déjà efficaces et durables. Les incitatifs qui donnent les meilleurs résultats sont ceux qui leur offrent un retour sur investissement. La mesure de la réduction des émissions doit être basée sur l'intensité pour permettre aux agriculteurs d'accroître leurs rendements sur la même superficie de terres afin de répondre à la demande actuelle et future. Il faut soutenir les agriculteurs durables et novateurs du Canada en misant sur l'accroissement de la productivité, l'utilisation des pratiques exemplaires et une mesure des émissions basée sur l'intensité et l'efficacité.
    Le troisième facteur concerne les produits de protection des récoltes. Le Canada possède un système de réglementation de classe mondiale et les produits que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, ou ARLA, réglemente ont permis des avancées économiques et environnementales importantes sur les fermes. Ces outils protègent les récoltes des agriculteurs contre les pressions des ravageurs et les maladies et jouent un rôle important dans la durabilité du canola. Un contrôle efficace des mauvaises herbes permet le travail de conservation du sol, augmente la santé des sols, réduit l'utilisation de carburant, séquestre le carbone et élimine jusqu'à 750 000 tonnes d'émissions de gaz à effet de serre par année.
    Le programme de transformation de l'ARLA a créé de l'incertitude et remet en cause la réputation du Canada et son engagement à l'égard de la science et des évaluations basées sur les risques. Les évaluations doivent être faites en temps opportun et reposées sur les meilleures données scientifiques possible pour favoriser les investissements et l'adoption des technologies de pointe afin de produire plus de canola de manière durable et de préserver la compétitivité de nos agriculteurs sur la scène internationale. Nous devons promouvoir une prise de décision basée sur la science, rétablir la confiance dans le système de réglementation du Canada et éviter d'adopter une approche fondée sur le danger comme l'Union européenne.
    Le quatrième facteur concerne la sélection des végétaux. La sélection des végétaux jouera un rôle important dans les mesures prises par les agriculteurs pour relever les défis liés à la sécurité alimentaire mondiale et aux changements climatiques. Les agriculteurs doivent avoir accès aux variétés de semences les plus récentes conçues à l'aide des technologies de pointe, comme les manipulations génétiques. Pour profiter de ces avancées, nous avons besoin que l'Agence canadienne d'inspection des aliments nous fournisse des documents d'orientation fiables, transparents et clairs le plus tôt possible.
    Le cinquième facteur concerne le fonds de roulement. Comme toute entreprise familiale, les agriculteurs veulent investir dans leur exploitation; toutefois, les activités agricoles exigent beaucoup de capitaux, la plupart des pièces d'équipement importantes coûtant des centaines de milliers de dollars. Notre association appuie donc sans réserve le projet de loi C‑234 et félicite le Comité de son travail pour son adoption lundi dernier. En l'absence de sources de carburant viables et d'infrastructures pour permettre aux agriculteurs de remplacer le gaz naturel et le propane, le projet de loi C‑234 leur offrira une aide économique indispensable et améliorera au bout du compte l'environnement, l'empreinte des agriculteurs et leur viabilité économique.
    Le dernier projet de loi dont nous voulons parler est le C‑244, ou le droit de réparer, actuellement à l'étape de la deuxième lecture. Les agriculteurs ont besoin que leurs pièces d'équipement fonctionnent dans les périodes critiques comme l'ensemencement et les récoltes. Notre association appuie le projet de loi C‑244, car il permettra aux agriculteurs de choisir qui peut diagnostiquer et réparer leurs pièces d'équipement, ce qui leur fera épargner un temps précieux et de l'argent, et réduira les prix en accroissant la concurrence.
    En terminant, il est crucial que le Canada mise sur ce que nous pouvons faire pour accroître de manière durable notre production agricole primaire. Pour ce faire, nous avons besoin d'un cadre législatif et réglementaire prévisible qui repose sur la science et qui favorise les investissements et l'innovation.
    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de témoigner aujourd'hui.

  (1640)  

    Je vous remercie, monsieur Carey.
    Je cède maintenant la parole à M. Stevens pour un maximum de cinq minutes.
    Je représente l'Association des fruiticulteurs et des maraîchers de l'Ontario.
    La sécurité alimentaire du Canada en ce qui concerne nos fruits et légumes frais est à un niveau très bas et inquiétant. Selon le département du Commerce des États-Unis, en 2021, plus de 75 % des légumes frais et 80 % des fruits frais sur le marché canadien étaient importés.
     Cependant, le Canada peut jouer un très grand rôle dans la lutte contre l'insécurité alimentaire mondiale pour certaines cultures. Pour certaines cultures maraîchères qui bénéficient de grandes économies d'échelle et de conditions de croissance favorables, comme les légumes de serre, nous sommes d'importants exportateurs. En 2021, les Canadiens ont réussi à exporter pour 2 milliards de dollars de légumes frais vers d'autres pays et pour 3 milliards de dollars supplémentaires de fruits et légumes surgelés dans le monde entier.
    Des politiques agricoles solides sont essentielles pour accroître notre sécurité alimentaire nationale et notre capacité à contribuer à la sécurité alimentaire mondiale. C'est pourquoi nous sommes ici.
     Par exemple, le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture a publié en 2021 une étude montrant que les pénuries de main-d'œuvre dans les exploitations agricoles canadiennes ont entraîné des pertes de ventes de 2,9 milliards de dollars. Nous ne sommes pas les seuls à avoir un problème à ce sujet, comme vous le savez. D'autres études sur les programmes de protection du revenu de l'Ontario pour les exploitations agricoles montrent que sans certains de ces programmes, 95 % des exploitations agricoles seraient durement touchées, y compris la mienne, soit dit en passant. Ce ne sont là que deux exemples de la corrélation directe entre les politiques gouvernementales et notre capacité à produire des aliments pour les Canadiens et le monde entier.
     J'ai quelques éléments concernant les politiques dont il faut s'occuper pour nous aider à résoudre ce problème.
    Il faut protéger le programme des travailleurs étrangers temporaires, y compris le Programme des travailleurs agricoles saisonniers qui comble le vide saisonnier que ne comblent pas les autres programmes offerts à l'année. Si nous perdons ce programme, ou s'il est modifié de la mauvaise façon, nous allons cesser nos activités.
    Il faut veiller à ce que les programmes de gestion des risques commerciaux soient solides et accessibles. N'érigez pas de barrières aux programmes, en imposant trop rapidement de nouvelles conformités communes. L'adoption serait...

  (1645)  

    Je m'excuse, monsieur Stevens. J'arrête le chronomètre. Je sais que M. Perron avait un peu de difficulté avec l'interprétation.
    Pouvez-vous entendre l'interprétation maintenant?
    Très bien, le problème est réglé.
    Monsieur Stevens, désolé de vous avoir interrompu. Vous pouvez poursuivre.
    D'accord.
    Il faut ramener les agriculteurs à l'agriculture en rationalisant les processus d'inspection du gouvernement. Ils sont compliqués et interminables, surtout les vérifications de l'intégrité du programme des travailleurs temporaires. Il y a eu 11 vérifications dans ma ferme l'an dernier. Quand j'ai commencé, il n'y en avait aucun. Cela n'aide pas l'agriculteur lorsqu'il est stressé et en pleine récolte d'avoir quelqu'un qui vient faire une vérification. En fin de compte, il n'a rien à se reprocher, et cela ne fait qu'alourdir son fardeau.
    Il faut instaurer une protection financière pour les producteurs de fruits et légumes frais au Canada, qui fera écho à la politique instaurée aux États-Unis, en adoptant rapidement le projet de loi C‑280, la Loi sur la protection financière pour les producteurs de fruits et légumes frais. Notre produit est périssable. Nous ne pouvons pas le récupérer lorsqu'il y a une faillite.
    Il faut mettre en place un code de conduite pour les épiceries afin de protéger les exploitations agricoles canadiennes contre les risques de pratiques anticoncurrentielles des grands détaillants, qui mettent à rude épreuve les exploitations familiales.
     Il faut corriger le désavantage concurrentiel des agriculteurs canadiens en raison des droits de douane sur les engrais en élaborant un programme de remboursement ou de remise de la taxe juste et équitable.
    Il faut s'assurer que les agriculteurs disposent des outils dont ils ont besoin pour protéger leurs cultures en augmentant le financement du Centre de la lutte antiparasitaire, qu'il ne faut pas confondre avec l'ARLA. L'ARLA a reçu un peu d'argent l'autre jour, mais le Centre de lutte antiparasitaire est l'outil que nous utilisons pour informer les agriculteurs de l'industrie des fruits et légumes des nouvelles technologies de protection des cultures. C'est l'élément clé, parce que sans lui, nous sommes voués à l'échec. C'est très important.
    J'ai terminé. Je vous remercie beaucoup.
     Je vous remercie, monsieur Stevens.
    Monsieur Hemmes, vous êtes en ligne, mais votre caméra n'est pas allumée.
    Nous vous voyons maintenant.
    Vous avez la parole pendant un maximum de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci au Comité pour cette invitation à participer à la réunion d'aujourd'hui.
    Je m'appelle Mark Hemmes et je suis président de Quorum Corporation, une entreprise établie à Edmonton. Quorum assure le suivi du traitement des céréales des Prairies canadiennes et du système de transport afférent au nom de Transports Canada et d'Agriculture et Agroalimentaire Canada depuis juin 2001.
    Je crois que vous disposez tous de mes notes d'allocution. Je vous les ai envoyées il y a quelques jours, donc je ne vais pas tenter de vous les lire en entier.
    Puisque mon expertise et mes connaissances reposent sur la logistique et la chaîne d'approvisionnement au sein de l'industrie canadienne des céréales, mes remarques vont porter sur la façon dont l'industrie canadienne peut et ne peut pas apporter son aide dans le cadre de l'insécurité alimentaire mondiale.
    L'insécurité alimentaire mondiale préoccupe bien des gens depuis des années en raison de la demande croissante engendrée par l'augmentation de la population et un niveau de vie plus élevé, dans un contexte où la production et l'approvisionnement fluctuent en fonction des conditions météorologiques régionales et des perturbations de la chaîne d'approvisionnement, qu'elles soient d'origine humaine ou naturelle. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a envenimé la situation. Ainsi, mes remarques traiteront à la fois de nos difficultés à court et à long termes.
    À court terme, l'invasion de l'Ukraine par la Russie est venue bousculer un équilibre déjà précaire entre l'offre et la demande mondiales de céréales et de produits céréaliers, ce qui n'est pas sans rappeler l'incidence que la pandémie a eue sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement mondiale. À titre d'exemple, la moyenne triennale de la production mondiale de blé était de 752 millions de tonnes métriques, tandis que le marché mondial de l'exportation était d'environ 177 millions de tonnes métriques. Plus de la moitié des exportations mondiales étaient assurées par quatre pays, soit l'Ukraine, la Russie, les États‑Unis et le Canada, l'Ukraine et la Russie représentant environ 31 % de ces exportations. La majorité passe par des ports de la mer Noire afin de répondre à la demande en Europe, au Moyen‑Orient et en Afrique du Nord.
    De l'avis général de l'industrie, l'offre provenant de cette région sera réduite de moitié, sinon plus, durant la guerre et pendant un certain temps après celle‑ci. Bref, le marché mondial sera en quête d'environ 26 millions de tonnes métriques de blé, perdues dans la foulée de la guerre.
    La production annuelle de blé et de blé dur de l'Ouest canadien ces cinq dernières années était en moyenne de 28,9 millions de tonnes métriques, avec un report moyen de trois millions et demi de tonnes métriques. À l'échelle nationale, nous consommons annuellement environ six millions de tonnes métriques, le reste, soit tout le surplus que nous cultivons, étant exporté, ce qui représente environ 26 millions de tonnes métriques. Dans le document que je vous ai envoyé, il y a un graphique qui illustre essentiellement de quelle façon nous arrivons à un tel résultat.
    Les sociétés céréalières et les exportateurs de céréales du Canada ont des engagements de longue date auprès de marchés mondiaux établis, dont un grand nombre sont des pays sous‑développés et en développement. Bien que les volumes de production de cette année dans l'Ouest canadien soient de nouveau conformes à la moyenne quinquennale, la quantité totale disponible pour combler la baisse de l'offre due à la guerre est infime.
    À cela s'ajoutent les difficultés logistiques relatives à l'approvisionnement des régions qui seront les plus touchées par le déficit de l'offre, c'est‑à‑dire le Moyen‑Orient et l'Afrique du Nord. Il faudrait logiquement passer par Thunder Bay et la voie navigable ou les ports de l'Est canadien.
    Bien que les terminaux du port de Thunder Bay aient une capacité plus qu'adéquate, il faudrait accroître la capacité de la voie navigable, soit en augmentant le nombre de laquiers ou le nombre de laquiers océaniques ayant les dimensions maximales permises dans les écluses, ce qui augmenterait les coûts de transport comparativement au trajet actuel, qui passe normalement par les ports de la côte Ouest.
    Le transport direct par train aux ports de l'Est du Canada exigerait une capacité ferroviaire supplémentaire sous forme de wagons et de ressources, ce qui accentuerait la demande faite à un système déjà sous pression. Il faudrait tenir compte de ces contraintes si on envisageait d'acheminer des céréales aux régions touchées.
    À plus long terme, cela dit, la production canadienne de céréales connaît une croissance annuelle moyenne de 3 % en raison de meilleures données agronomiques, tandis que la consommation nationale demeure sensiblement la même. Il pourrait donc être possible d'éventuellement augmenter les exportations de céréales et de produits céréaliers du Canada de sorte à pallier l'insécurité alimentaire mondiale.
    Afin d'accommoder cette croissance, les sociétés céréalières du Canada ont investi massivement dans l'accroissement de la capacité de leur réseau de silos de collecte et de leurs installations tant dans les ports de l'Ouest que de l'Est du pays. Obtenir l'accès aux ports par l'intermédiaire des réseaux ferroviaires, comme l'a déjà mentionné M. Carey, est toutefois difficile pour toutes ces sociétés.

  (1650)  

    Dans le cadre de réunions antérieures qui portaient ou non sur le sujet, ce comité a probablement appris que les exportateurs de céréales fondent avant tout leur plan promotionnel sur la capacité ferroviaire qu'ils pensent obtenir. Les plans de transport des céréales par train pour la campagne agricole à venir, qui sont publiés en août, ne tiennent pas compte de l'actuelle production accrue. Ainsi, l'accès à la capacité ferroviaire est depuis longtemps et demeure une préoccupation majeure pour tous les exportateurs de céréales, et elle continuera de l'être si les conditions actuelles...
    Monsieur Hemmes, nous allons nous en tenir à cela, si possible. Je sais que mes collègues voudront vous poser des questions, ce que nous allons faire dès maintenant.
    Madame Rood, vous avez la parole pendant au plus six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être présents aujourd'hui pour traiter de ce sujet important.
    Je vais m'adresser à M. Stevens.
    Au cours des derniers jours, j'ai eu d'excellentes rencontres avec nos producteurs de fruits et de légumes de l'Ontario. Puisque ma famille fait partie de cette industrie depuis longtemps, je comprends certaines des difficultés qu'elle éprouve actuellement.
    Nous sommes un fournisseur de fruits et de légumes de grande qualité non seulement au Canada, mais dans le monde entier. Comme vous l'avez dit dans votre déclaration, nous exportons beaucoup de nos légumes cultivés en serre.
    Je me demande si vous pourriez aborder la question du coût des engrais et de la réduction de leur emploi que le gouvernement souhaite imposer aux agriculteurs. Quelles seront les conséquences pour notre sécurité alimentaire, ici, au Canada? Quelles seront les conséquences pour nos producteurs et leur capacité à obtenir les rendements et les superbes récoltes que nous avons, tandis que le nombre d'agriculteurs dans le secteur des fruits et des légumes frais au Canada ne cesse de baisser à l'heure actuelle?
    Rien de plus simple: il y a des mesures législatives ou une politique qui augmentent les coûts pour les agriculteurs, et ce sont leurs profits qui écopent. Quand vous faites cela, vous réduisez les fonds qu'ils pourraient consacrer à l'innovation, au développement de leur entreprise et à l'expansion de l'industrie. Les temps sont vraiment durs quand le prix de l'un de vos ingrédients clés double en l'espace d'un an. Je sais que c'est probablement plus dur pour les industries des céréales et des oléagineux.
    Même dans nos activités horticoles, la technologie nous permet d'utiliser strictement l'engrais nécessaire. Le fonctionnement de cette technologie est phénoménal. Je ne sais pas si le gouvernement comprend que notre maîtrise croissante de cette technologie contribue à réduire les émissions.
    Comme je l'ai dit, c'est une politique qui prive l'industrie de fonds. Vous ne pouvez pas faire cela. Au Canada, nous avons une occasion en or d'être un leader clé en agriculture. Nous avons les ressources en eau et les terres, mais nous avons besoin de politiques qui nous propulsent au lieu de nous freiner.

  (1655)  

    Corrigez‑moi si je me trompe, mais ce que je comprends de vos remarques, c'est que, en tant qu'agriculteurs, si nous ne pouvons pas réduire nos intrants, nous ne pourrons plus être concurrentiels par rapport aux importations de fruits et de légumes frais qui viennent du monde entier, où nous ne pouvons pas contrôler le mode de production, ce qui est utilisé comme engrais ni les règlements en vigueur.
    C'est bien cela?
    C'est exact. Les fruits et légumes... Nous sommes dans un marché libre accessible au monde entier. Nous n'avons pas la moindre protection.
    Vous m'amenez à ma prochaine question, sur la protection financière dont bénéficient les personnes qui œuvrent dans le secteur des aliments périssables.
    Pourriez‑vous nous dire plus en détail en quoi il est important de veiller à disposer de mécanismes pour protéger les agriculteurs canadiens, afin qu'ils puissent continuer à cultiver des aliments pour la population canadienne, et de quelle façon nous pouvons assurer la souveraineté et la sécurité alimentaires dans notre propre pays?
    Évidemment, il y a le projet de loi C‑280, qui est entre les mains du gouvernement à l'heure actuelle. Nous serions ravis qu'il soit adopté. Voyez‑vous, les États‑Unis nous ont protégés quand nous avons pris des fruits et légumes et sommes allés aux États‑Unis. Ils avaient leur propre fiducie réputée, comme on l'appelle, puis ils l'ont retirée. Nous ne les protégions pas quand ils offraient des produits au Canada, donc ils nous ont tapé sur les doigts. Nous devons intégrer cela afin d'offrir une réciprocité et d'obtenir la même protection des deux côtés de la frontière.
    Il n'y a pas de frais pour le gouvernement. C'est une fiducie réputée. Il n'y a pas d'argent en jeu, mais cela place l'agriculture... Quand mes producteurs apportent des pommes aux États‑Unis, et que cette entreprise fait faillite, nous sommes les premiers sur la liste des créanciers à payer. Nous passons avant les banques, car il n'y a pas d'autres façons de faire: nous ne pouvons pas reprendre ces fruits. Ils seraient avariés et nous serions vraiment désavantagés.
    C'est très simple. Nous y travaillons depuis 20 ans et n'avons pas encore vu son adoption. Votre appui serait super. Au bout du compte, nous serions protégés pour chaque dollar, car il y a des entreprises qui achètent des fruits et des légumes... C'est le cas au Canada également, par exemple quand vous allez aux marchés des produits alimentaires à Montréal. Cela nous protège des gens qui font faillite et qui ne payent pas les agriculteurs.
    Monsieur Stevens, la taxe sur le carbone et, comme nous l'avons entendu, le fait qu'elle va tripler, s'avèrent l'un des coûts les plus importants pour certains agriculteurs. Le projet de loi C‑234 a franchi l'étape de l'étude du comité hier. Pourriez‑vous en parler un peu?
    Je vais vous le demander de but en blanc: si les serriculteurs ne profitaient pas d'une exemption au titre de la taxe sur le carbone à l'heure actuelle, quelles seraient les conséquences pour eux et ce secteur? Est‑ce que ce projet de loi contribuerait à garder en activité les producteurs de fruits et de légumes, en Ontario et ailleurs au pays?
    Il ne vous reste malheureusement que 10 secondes, monsieur Stevens, mais allez‑y.
    D'accord.
    Eh bien, pour ce qui est des serriculteurs, la taxe sur le carbone est énorme dans cette industrie. Nous avons une certaine protection, mais elle va une fois de plus nous empêcher d'être concurrentiels. Il me semble que nous ne procédons ainsi qu'au Canada pour l'instant, et les fruits et légumes des États‑Unis vont être importés. Ils vont prendre plus de place, tandis que nous allons en perdre.

  (1700)  

    Merci.
    Passons à M. Turnbull, qui se joint à nous virtuellement.
    La parole est à vous pendant six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Monsieur Fakhri, je vais probablement avoir des questions pour vous. Je suis reconnaissant envers tous les autres témoins, mais c'est votre rôle en particulier et votre point de vue qui m'intéressent, car je les trouve fort intéressants si nous voulons ajouter de l'expertise à cette conversation. Je crois que vous apportez un point de vue assez unique.
    Monsieur Fakhri, est‑ce que les tendances mondiales dans nos systèmes alimentaires sont une source de grande préoccupation pour vous en matière de sécurité alimentaire?
    Merci pour votre question, monsieur Turnbull.
    Elles le sont assurément. Comme je l'ai dit, et je vais préciser un peu mon point, même si la guerre prenait fin demain et que la pandémie se terminait demain, nous serions tout de même en pleine crise alimentaire. La guerre en Ukraine, pour poursuivre sur les propos d'un autre témoin, a envenimé des problèmes existants. Au départ, quand la guerre s'est déclarée, la raison de la fluctuation des prix n'était pas forcément une question d'offre et de demande. C'étaient les marchés des produits de base qui étaient en cause.
    Les marchés des produits de base ne sont pas réglementés. Ils sont essentiellement influencés par le marché des produits de base américain, à Chicago. Depuis leur déréglementation en 2000, la spéculation est possible. La fluctuation des prix des céréales ne reflète donc pas forcément l'offre et la demande, mais plutôt la peur et la panique des spéculateurs. Le marché ne fonctionne pas comme il le devrait, et ce qui se passe sur les marchés internationaux ne fait qu'aggraver le problème.
    L'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, est au point mort. Les États membres n'arrivent pas à s'entendre sur l'Accord sur l'agriculture, en négociations depuis 25 ans. Le consensus est que cet accord est obsolète, mais il n'y a pas de consensus sur la façon d'aller de l'avant. C'est l'un des problèmes d'ordre structurel.
    Enfin, le système alimentaire génère environ le tiers des gaz à effet de serre. Les Nations unies ont tenu un sommet sur les systèmes alimentaires en 2021, et le consensus mondial est que tout le monde doit transformer son système alimentaire. Il y a mésentente sur la façon de faire et l'orientation à adopter, et c'était ma proposition sur l'agroécologie. Cela demandera beaucoup de travail, mais nous devons nous y mettre dès maintenant.
    Merci.
    Merci pour cette réponse.
    Simplement à titre de suivi, l'ancien rapporteur spécial, Olivier De Schutter, a visité le Canada dans le cadre d'une mission il y a 10 ans, puis a rédigé un très bon rapport, que j'ai lu et relu à maintes reprises au fil des ans, et que je suis retourné consulter. Il y déclare ceci:
Depuis les années 1950, le Canada est passé à des modes de production à grande échelle et à forte consommation d'intrants, ce qui a conduit à des pratiques agricoles de moins en moins viables et à une augmentation des niveaux d'émissions de gaz à effet de serre, de contamination des sols et de déclin de la diversité biologique.
    Il précise en outre que la libéralisation des marchés en agriculture découlant des ententes de libre‑échange a eu pour effet de réduire le revenu net des agriculteurs et d'augmenter leur dette. Il affirme que la baisse du prix à la production par rapport au prix des intrants et au coût de la vie entraîne la réduction constante des marges de profits, ce qui force les agriculteurs à accroître leur production simplement pour maintenir leur revenu, un point qu'il explore en détail.
    Diriez‑vous que cette tendance à adopter une agriculture à plus grande échelle qui exige plus d'intrants, qui favorise la concentration d'entreprises et qui fait croître le coût des intrants, puis baisser le revenu et augmenter la dette des agriculteurs, bref ce besoin d'adopter la maxime « Plus c'est gros, mieux c'est », va à l'encontre d'une véritable solution en matière d'insécurité alimentaire mondiale?
    En effet, je partage entièrement cet avis.
    Encore une fois, pour vous donner un exemple précis, le problème des engrais et des semences génétiquement modifiées, du point de vue du marché — il y a un problème écologique, bien sûr, et nous pourrons en parler —, c'est qu'ils créent une dépendance à l'égard d'un nombre de plus en plus restreint de sociétés.
     D'après ce rapport d'il y a 10 ans, et jusqu'à maintenant, les entreprises s'achètent de plus en plus entre elles, de sorte que le pouvoir se concentre entre les mains de quelques-unes. Les agriculteurs, les consommateurs et les systèmes alimentaires du monde entier sont tous à la merci d'un petit nombre de personnes. Il est difficile de briser ce petit cercle de pouvoir.
    Sur le plan écologique, l'abandon progressif des engrais n'est pas seulement une question d'émissions. C'est une question d'épuisement des sols. Les engrais finissent par épuiser les nutriments du sol. Il existe des techniques plus régénératrices, mais il faut un choix conscient et une politique solide pour s'engager dans cette voie et aider les agriculteurs et les travailleurs à effectuer la transition. Les gouvernements doivent commencer dès aujourd'hui pour amorcer cette transition vers l'avenir.

  (1705)  

    Oui.
    Vous avez parlé de solutions résilientes. Je remarque que le 15 novembre, je crois, vous avez fait une intervention devant l'Assemblée générale, si je ne me trompe pas, ou du moins c'est à cette date que le tout a été publié sur votre site Web. Vous avez évoqué des « solutions résilientes telles que les marchés localisés, les réserves alimentaires publiques et les systèmes publics de distribution alimentaire, ainsi que l'agroécologie ».
    Pouvez-vous nous en parler? Encore une fois, il s'agit d'une question de contraste, car je pense que vous faites une distinction entre des solutions résilientes et des solutions qui représentent essentiellement le « statu quo » et qui continuent presque à exacerber les vulnérabilités actuelles de notre système alimentaire. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Merci.
    Répondez en 35 ou 40 secondes, si vous le pouvez.
    Je vous remercie.
    Entendu.
     Je suis d'accord pour dire que le statu quo — l'idée de produire plus par tous les moyens nécessaires — n'est pas la voie à suivre. En général, à l'échelle mondiale, la production de nourriture est largement suffisante. Le problème est de savoir comment produire.
    Il existe des solutions à mettre en valeur. Je propose ces solutions particulières, en m'appuyant sur des données scientifiques et des politiques. Le travail est déjà en cours. La question est de savoir comment en élargir la portée, comment relier tous ces éléments différents et comment nourrir les gens à l'échelle nationale, mais aussi comment exporter. Il existe une dynamique des exportations, que l'on peut comprendre, mais nous ne pouvons pas continuer à faire les choses comme d'habitude. Nous ne pouvons pas simplement injecter plus de fonds dans le problème actuel. Il faut toujours penser au pouvoir. Qui a le plus de pouvoir? Qui n'en a pas assez? S'agit‑il des peuples autochtones, des petits agriculteurs, voire des travailleurs?
    Je vous remercie.
    Merci à vous deux.

[Français]

     Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Fakhri, vous dites qu'il faut quand même protéger le pouvoir des petits producteurs et éviter de tomber dans une mondialisation démontée. C'est une piste intéressante.
    Croyez-vous que le Canada, par exemple, aurait avantage à préserver un système comme celui de la gestion de l'offre pour les secteurs qui sont touchés et qui arrivent à réguler les prix et la qualité de leurs produits, sans du tout nuire à l'exportation de produits qui sont gérés différemment?

[Traduction]

     Merci, monsieur Perron.
     Je conviens qu'il faut mettre l'accent sur les petits producteurs, mais j'ajouterais que, idéalement, ce sont les petits producteurs qui s'engagent à adopter des pratiques qui améliorent la biodiversité et qui respectent également les droits de la personne, comme les droits des travailleurs, les droits des femmes et les droits des peuples autochtones. Il ne s'agit pas de n'importe quel petit producteur. Je parle de ceux qui sont les plus résilients parce qu'ils agissent comme gardiens des terres. Voilà le genre de petits producteurs que j'ai à l'esprit.
    Pour répondre à votre question, les gens exigent des prix stables depuis plus de 100 ans. Le Canada a, de tout temps, réussi à maintenir des prix stables grâce à des systèmes de gestion de l'offre. Aujourd'hui, il est possible d'envisager des marchés stables et équitables non seulement par le recours à la gestion de l'offre — qui joue toujours un rôle et qui gagne en popularité sur la scène mondiale —, mais aussi par l'établissement de droits du travail solides. Je pense que cela assure également une certaine stabilité et une certaine résilience.
     Soutenir ces chaînes d'approvisionnement locales est également, selon moi, tout à fait valable...

[Français]

     Je m'excuse, monsieur Fakhri. Je dois vous interrompre.
    Vous dites que la gestion de l'offre est de plus en plus populaire à l'international. Je comprends que c'est un concept qu'on devrait peut-être exporter. Plutôt que de saborder la gestion de l'offre par petites bouchées, on devrait peut-être l'exporter dans les pays en développement. Cela pourrait aider à créer une base agricole, ce qui n'empêcherait pas de destiner les produits complémentaires au commerce international.
    Ai-je bien compris?

[Traduction]

    J'ajouterais, monsieur Perron, qu'il ne s'agit pas seulement de gérer l'offre, mais de stabiliser les prix de manière plus générale.
    Il existe une foule d'outils. La gestion de l'offre en est un exemple important. Je pense qu'il y a lieu de mettre à contribution l'expérience canadienne. Plus important encore, ce qui manque depuis les années 1980, c'est un système international de stabilisation des prix et de gestion de l'offre. De 1930 à 1980, la politique agricole internationale reposait sur un système de gestion de l'offre, le tout coordonné à l'échelle internationale.
    Je ne réclame pas un autre système de gestion de l'offre. Je pense que, dans le contexte actuel, nous devons envisager une coordination internationale qui prévoit un élément de stabilisation des prix par différents moyens. L'idée d'avoir des stocks de nourriture n'est pas seulement une question de gestion de l'offre; c'est aussi une question de source d'alimentation...

  (1710)  

[Français]

    Merci beaucoup. Je suis désolé de vous couper la parole, mais nous n'avons pas beaucoup de temps de parole et j'aimerais vous poser d'autres questions.
    Vous avez mentionné un autre point qui m'intéresse beaucoup, soit le taux d'endettement des entreprises agricoles. Quand on veut préserver la sécurité alimentaire internationale, mais d'abord la sécurité alimentaire nationale, il faut s'assurer que nos productions agricoles sont viables. Vous semblez sonner l'alarme au sujet du taux d'endettement des entreprises agricoles. Je le fais moi aussi. Trouvez-vous que nos entreprises agricoles sont suffisamment soutenues par rapport à ce qui se fait à l'international?
    Quand vous parlez de transition environnementale, j'aime la portion où vous dites qu'il est important de reconnaître les gestes positifs en mettant en œuvre des incitatifs positifs pour les producteurs. Pouvez-vous nous en parler davantage?

[Traduction]

    Merci, monsieur Perron.
     Malheureusement, je ne peux pas me prononcer trop précisément sur le niveau d'endettement des producteurs canadiens. Je peux toutefois parler du niveau d'endettement des gouvernements du monde entier.
    Je suis d'accord avec vous. La seule façon dont la transformation aura lieu — la seule façon dont les systèmes alimentaires feront la transition vers un système qui est juste, stable et durable —, c'est par l'appui actif et explicite du gouvernement grâce à des incitatifs, à des programmes directs et à un soutien direct. On ne peut pas se contenter d'une approche passive. Cela n'a pas fonctionné au cours des 30 dernières années, et les gouvernements du monde entier se rendent compte que la seule façon d'assurer la viabilité du secteur agricole et, en général, du secteur alimentaire, c'est d'avoir des politiques alimentaires très consciencieuses et très cohérentes qui appuient le bon genre de producteurs.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Fakhri.
    Je me tourne rapidement vers M. Carey.
    Bonjour, monsieur Carey. C'est toujours un plaisir de vous voir.
    Nous parlons de l'endettement des entreprises agricoles. J'aimerais vous entendre parler de ce sujet. Pourriez-vous répondre à la question que je viens de poser à M. Fakhri?

[Traduction]

    Je n'ai pas les chiffres exacts, monsieur Perron, mais la dette agricole n'a jamais été aussi élevée. Les agriculteurs sont certainement surendettés, et je pense que leurs liquidités suscitent également beaucoup de préoccupation. Les agriculteurs ont tendance à manquer de liquidités. Ils ont beaucoup d'argent immobilisé dans des acres de terre et des pièces équipement, mais du point de vue des liquidités, la dette agricole a atteint des sommets inégalés. Tout ce qui pourrait l'accroître ne serait pas une bonne politique alimentaire.

[Français]

    J'aimerais parler du soutien direct que le gouvernement peut apporter pour la transition énergétique environnementale. Quelle est l'importance de reconnaître les gestes positifs posés par nos producteurs? Comment cela devrait-il être rétribué?

[Traduction]

     Absolument. Je pense que les agriculteurs veulent également que leurs réalisations soient reconnues. Comparativement à d'autres pays dans le monde, disons les États-Unis, notre niveau de conservation, en matière d'acres de cultures sans labour, est beaucoup plus élevé que celui de nos voisins du Sud.
    Je suis tout à fait d'avis qu'il faut chercher à inciter les agriculteurs à en faire plus sur leur ferme. On pourrait notamment compenser les frais liés à l'échantillonnage des sols, qui coûte très cher. Les coûts associés à l'équipement agricole de précision, fabriqué sur mesure, sont très élevés. La réponse est donc oui, mais encore faut‑il que ces mesures soient fondées sur des incitatifs. Il faut privilégier la carotte, et non le bâton.

[Français]

     Merci, messieurs Carey et Perron.
    Je cède maintenant la parole à M. MacGregor pour six minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Monsieur Carey, j'aimerais commencer par vous. Je suis heureux que vous ayez abordé le sujet des engrais, car nous avons certes constaté beaucoup de confusion. Je pense que le gouvernement n'a pas pris le temps de bien expliquer sa politique avant de la mettre en œuvre. Je sais que, compte tenu de la volatilité des prix, les agriculteurs feront certainement tout ce qu'ils peuvent pour réduire leur utilisation.
    Nous avons beaucoup parlé des 4B et du fait qu'il ne peut y avoir de sécurité alimentaire sans sécurité agricole. Nous avons déjà évoqué les niveaux d'endettement élevés. Nous savons que les coûts des intrants sont assez horribles pour un grand nombre de producteurs. En plus de la gestion des 4B, de nombreux agriculteurs montrent la voie à suivre en matière d'intensification écologique. Ils portent vraiment attention à la microbiologie du sol. Ils s'efforcent d'imiter la nature le plus fidèlement possible.
    Comment le gouvernement fédéral peut‑il s'y prendre pour placer sur un piédestal ces agriculteurs qui donnent l'exemple en vue de vraiment essayer d'amener un plus grand nombre de leurs compatriotes et camarades à adopter les mêmes pratiques?
    En effet, même il y a deux générations de cela, on labourait sans cesse la terre pour lutter contre les mauvaises herbes. Chaque fois qu'il y avait une sécheresse, on voyait les débris de terre et la poussière voler partout.
     Je pense que, compte tenu des réalités, nous devons élaborer des politiques agricoles fédérales intelligentes et sensées qui permettent aux agriculteurs d'innover et d'être concurrentiels, car le coût des mesures dont nous parlons ici est incroyablement élevé. Par exemple, le coût d'un semoir de précision, avec lequel on peut planter des semences directement dans le chaume de l'année dernière sans avoir à le labourer... On peut planter des semences déjà traitées aux pesticides, ce qui signifie qu'on n'a pas besoin de les pulvériser, et on peut appliquer l'engrais en même temps — c'est donc un seul trajet au diesel. Le coût d'un tel système est d'environ 600 000 $.
    Notre vice-président habite dans le centre de l'Alberta, et sa ferme fait 5 000 acres. En 2020, sa facture d'engrais s'élevait à 316 000 $. Cette année, elle était de 670 000 $, et il prévoit que l'année prochaine, elle sera de plus de 700 000 $. Voilà un exemple, et sachez qu'il en fait un usage aussi judicieux que possible.

  (1715)  

    Nous avons un peu de mal avec l'interprétation.

[Français]

    Voilà. C'est revenu.

[Traduction]

    Nous allons revenir à vous, monsieur Carey.
    Oui, il s'agit d'inciter les agriculteurs à faire ce qui s'impose, et si nous allons débloquer des fonds, les agriculteurs doivent être en mesure d'utiliser cet argent comme il se doit. Les programmes doivent pouvoir fonctionner à la ferme.
    Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant m'adresser à M. Stevens.
    Il y a bien des années, lorsque j'étais adolescent, j'ai travaillé dans une exploitation de bleuets pendant quatre étés consécutifs, et je me souviens de la panique qui s'installait lorsqu'on avait ces semaines de canicule en juillet, car on devait cueillir les bleuets à la hâte dans les buissons.
     Vos producteurs doivent composer avec le problème des déchets alimentaires au quotidien. C'est dû à la nature périssable des produits. Il faut donc être très efficace. Il faut se dépêcher.
     Nous savons que le gaspillage alimentaire a toujours été un énorme problème dans de nombreux secteurs. À votre avis, que devrait faire le gouvernement fédéral pour aider votre industrie à s'y attaquer? Je sais que certains députés d'autres assemblées législatives ont tenté d'établir un projet de loi prévoyant une stratégie nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire. Qu'en pensez-vous?
    Oui, je vous remercie de poser la question.
     Les bleuets qui ne sont pas cueillis descendent dans le sol et produisent de l'énergie et tout le reste. Je ne considère pas cela comme un gaspillage total. C'est certes un gaspillage d'énergie pour les gens, mais on obtient parfois de l'engrais. C'est un gaspillage pour nous, parce que nous voulons avoir de quoi manger, mais ce ne l'est pas du point de vue du produit et du sol.
    Dans le cas des fruits et légumes, Dame Nature ne nous laisse pas de répit. La plus grosse facture dans l'industrie des fruits et légumes est celle de la main-d'œuvre. Nous avons besoin d'une main-d'œuvre constante à laquelle nous pouvons faire appel pour pouvoir récolter les fruits et légumes lorsque la pluie s'annonce.
    Par ailleurs, il y a maintenant des machines qui cueillent les bleuets, mais c'est seulement pour certains marchés.
    J'aimerais poser une dernière question.
    J'ai terminé.
    Je vous en suis reconnaissant. Merci.
    Monsieur Fakhri, j'aimerais vous poser ma dernière question. Vous avez dit que la guerre en Ukraine et la pandémie ont envenimé les problèmes structuraux qui existent depuis longtemps dans le système alimentaire international.
    Je suis curieux de vous entendre, car vous travaillez pour la plus grande organisation internationale qui soit, mais deux de ses États membres sont activement en guerre l'un contre l'autre. Voilà qui doit être parfois un peu gênant durant les réunions.
     Pouvez-vous nous dire à quoi cela ressemble, sachant qu'un membre permanent du Conseil de sécurité est engagé dans une guerre assez brutale en ce moment?
    Je vous remercie de votre question.
    À titre de précision, je suis un expert indépendant. C'est un poste bénévole. Je suis parfois l'un des rares intervenants qui peuvent parler librement dans ces salles. Ce que je n'ai pas en ressources, je le compense en liberté.
    J'ai été invité à fournir de l'information au Conseil de sécurité. D'ailleurs, je suis heureux d'annoncer que l'ambassadeur russe et l'ambassadeur américain ont tous deux déclaré que mes observations étaient justes et franches.
     Pour répondre à votre question, le problème qui se pose, selon moi, en ce qui concerne les États-Unis et la Russie, c'est qu'ils sont présents dans toutes ces tribunes multilatérales — j'ai déjà comparu devant le Conseil de sécurité, l'Assemblée générale, et j'en passe —, et la seule chose sur laquelle ils s'entendent toujours, c'est le refus de travailler de façon multilatérale et de s'engager en faveur des droits de la personne. C'est le cas, même s'ils sont des ennemis qui sont en guerre et qui déstabilisent tout.
    Sur le plan international, j'attends un leadership de la part de quelqu'un qui peut venir faire pression dans ces tribunes multilatérales pour une coordination et une coopération internationales. Le Canada a joué un rôle dans le passé. Je pense qu'il a été un intermédiaire honnête dans le passé. Je suis convaincu qu'il peut jouer un rôle aujourd'hui. Je n'ai pas vu cela dans ces tribunes.
     Je veux inviter le gouvernement du Canada à intensifier son rôle international et à rallier les gens autour de la coopération et de la coordination internationales.

  (1720)  

    Merci, monsieur Fakhri.
    Merci, monsieur MacGregor.
    La parole est maintenant à M. Steinley. Vous avez un maximum de cinq minutes.
    Ma première question s'adresse à M. Hemmes.
    L'un des problèmes de sécurité que j'entrevois, c'est la chaîne d'approvisionnement. Pouvez-vous nous parler de l'importance de l'interchangeabilité pour assurer l'acheminement de nos produits vers les marchés? L'interchangeabilité jouerait-elle un rôle important à cet égard?
    C'est l'une des recommandations formulées par le groupe de travail sur la chaîne d'approvisionnement.
    Je pense que l'une des choses qu'il faut retenir concernant la recommandation du groupe de travail sur la chaîne d'approvisionnement au sujet de la possibilité d'interchanger certains aspects du trafic, c'est que cela est vraiment axé sur les mouvements des marchandises vers les États-Unis et le Mexique. Cela ne résout pas le problème de l'insécurité alimentaire mondiale. Cela réduit certainement les coûts, car il est maintenant question d'avoir la possibilité d'utiliser différents transporteurs, plutôt que d'être absolument lié au transporteur ferroviaire qui vous dessert.
    Il y a quelques années, une expérience a été menée sur une période de trois ans. Elle s'appelait « extended interswitching », ou si vous préférez, « interconnexion étendue ». Au cours de sa dernière année, cette expérience a permis aux parties qui y ont pris part d'économiser près de 15 ou 20 millions de dollars en coûts de fret ferroviaire, alors...
    C'est parfait. Merci beaucoup.
    J'ai cinq minutes, et j'ai encore quelques questions. Merci beaucoup, monsieur Hemmes.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Carey.
    Il y a environ 60 produits que l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire doit examiner. Si ces examens ne se font pas, quelle incidence cela aura‑t‑il sur l'approvisionnement alimentaire dans notre pays?
    Merci de la question.
    Nous représentons les 43 000 producteurs de canola du Canada, et ces 43 000 producteurs comptent sur l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. Or, l'Agence manque de ressources et de personnel depuis des années. Une partie de nos représentations ont porté là‑dessus.
    La préoccupation que nous avons... Pour répondre directement à votre question, disons que nous prenons note de l'augmentation de la charge de travail de l'Agence et que nous restons à l'affût des examens spéciaux qui sont déclenchés chaque fois qu'un pays du Codex prend une décision sur une unité. Nous craignons que de mauvaises décisions soient prises parce que le personnel de l'Agence est pressé, qu'il travaille sous pression et qu'il ne dispose pas de ressources adéquates.
    C'est une préoccupation énorme, car les produits de protection des cultures sont parmi les choses les plus importantes pour la sécurité alimentaire et l'agriculture moderne.
    Merci beaucoup, monsieur Carey. Je vous remercie.
    Nous avons entendu des témoignages intéressants aujourd'hui.
    J'aimerais vous poser une question. Vous représentez 43 000 producteurs. C'est beaucoup de producteurs qui ont une connaissance pratique de notre secteur agricole.
    Grâce à l'innovation et à la technologie — comme vous en avez parlé —, c'est‑à‑dire la culture sans labour, le semis direct et la rotation des cultures, croyez-vous que les sols cultivés de notre pays sont en meilleure santé aujourd'hui qu'ils ne l'étaient il y a 15 ou 20 ans?
    Absolument. Il n'y a aucun doute là‑dessus.
    La quantité de matière organique qui peut s'accumuler dans le sol parce que nous ne le labourons pas, parce que nous n'avons pas à nous débarrasser de toutes ces mauvaises herbes, parce que nous avons des cultures génétiquement modifiées qui sont tolérantes aux herbicides, parce que nous avons des produits comme le glyphosate, permet d'éviter l'émission d'énormes quantités de GES et permet également aux agriculteurs de planter directement dans le sol.
    La notion de durabilité que l'on associait à ce fermier américain représenté dans une peinture gothique est tout simplement fausse. L'agriculture à la ferme n'a jamais été aussi durable que maintenant. Les producteurs veulent faire ce qu'il y a de mieux. Je pense qu'essayer d'identifier les bons et les mauvais producteurs est contre-productif. Je crois par ailleurs que l'agriculture et les agriculteurs du Canada sont directement liés à la terre. Ils ont leur argent. Ils sont liés à la succession des terres. Leur argent est lié à la terre.
    Donc, oui, en ce qui concerne la durabilité à la ferme et la santé des terres, il y a un continuum, et nous devons améliorer cela. Il reste que les choses n'ont jamais été mieux que maintenant et que cela est en grande partie attribuable aux produits de protection des cultures, à la biotechnologie — notamment l'édition génomique — et à l'accès aux engrais.
    Merci beaucoup.
    Je pense qu'à l'heure actuelle, l'idée d'essayer de dépeindre l'agriculture comme un ensemble de fermes corporatives n'est pas utile. Je sais que la taille moyenne des exploitations agricoles en Saskatchewan est d'environ 1 300 acres. C'est encore beaucoup de gens. Ils ont grandi sur ces fermes et ils protègent l'environnement et le sol parce que c'est important pour eux, non seulement pour leurs résultats financiers, mais aussi parce qu'ils se soucient de ce qu'ils vont laisser à la prochaine génération.
    Je tiens simplement à préciser que je pense que nos producteurs agricoles font un travail extraordinaire et que quiconque veut les rabaisser fait fausse route. Au Canada, les émissions de l'agriculture représentent 8 % de l'ensemble des émissions. C'est un objectif que le monde entier devrait s'efforcer d'atteindre. Nous sommes la référence en matière de durabilité environnementale et d'agriculture, et c'est quelque chose dont nous devrions être très fiers en tant que pays et dont le gouvernement devrait être très fier lui aussi. Je pense que pour ce qui est des émissions générées par le secteur agricole, tous les autres pays du monde se situent autour de 26 %. Nous sommes un chef de file, et nous devrions en être très fiers.
    Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui.

  (1725)  

    Quatre-vingt-quinze pour cent des fermes canadiennes sont des entreprises familiales. Les fermes s'agrandissent, parce qu'elles ont besoin de s'agrandir. Cela coûte très cher à l'achat. Vous ne pouvez pas avoir un tas de fermes de 100 acres qui ont chacune une moissonneuse-batteuse.
    Pour ce qui est de l'intensité des émissions agricoles, nous sommes restés à environ 8 % au cours des 20 dernières années, mais nous avons augmenté notre production de 50 % avec ces mêmes émissions.
    Je pense que je suis d'accord avec vous pour dire que nous sommes sur la bonne voie.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Carey.
    Merci, monsieur Steinley.
    Nous allons maintenant passer à Mme Taylor Roy pour un maximum de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais laisser un peu de temps à M. El‑Khoury, qui aimerait aussi poser une question.
    Je veux simplement dire que, pendant mon enfance, j'ai travaillé dans une ferme de Holland Marsh. Je ramassais des carottes et des laitues, et je sais que les choses ont changé depuis. Ce que nous produisons maintenant a changé en fonction du commerce et des domaines où nous sommes concurrentiels.
    Vous avez parlé un peu des normes internationales, de la façon dont nous faisons les choses au Canada et de la nécessité d'être concurrentiels. Ce qui me préoccupe, c'est que si nous nous en tenons au plus petit dénominateur commun... Je veux dire que la sécurité alimentaire au Canada a toujours été excellente. Nous produisons des aliments de grande qualité. Je suppose qu'il y a deux façons de procéder. La première consiste à dire: « Eh bien, nous ne devrions pas apporter d'améliorations. Nous ne devrions pas être les meilleurs possible en la matière, parce que nous sommes en concurrence avec des pays qui n'apportent pas ces améliorations. » L'autre solution est de dire comme nous l'a dit l'envoyé spécial de la Nouvelle-Zélande, à savoir que nous avons en fait un produit de qualité supérieure.
    Maintenant, surtout dans le secteur des fruits et légumes, monsieur Stevens, nous avons des produits de qualité supérieure au Canada à cause de la façon dont ils sont cultivés, nous avons la sécurité alimentaire, nos normes et tout le reste, et nous devrions être en mesure de commercialiser nos produits en fonction de ces particularités. Je comprends tout à fait que les choses sont différentes pour les cultures de base.
    Une chose qui me préoccupe, c'est la culture de ces aliments et le commerce, mais laissez-moi revenir un peu en arrière, car ce dont je voulais vraiment parler, c'est de la terre.
    Nous avons besoin de main-d'œuvre, mais nous avons besoin de terres et de bons sols. En Ontario, en particulier, je pense que ces deux choses sont en danger. Dans ma circonscription d'Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill, il y a des fermes, des terres agricoles, qui sont en train de disparaître. Certains des propriétaires veulent que le zonage de leurs terres soit changé, alléguant qu'après des années et des années d'agriculture, la qualité du sol est maintenant rendue lamentable.
    La santé du sol, évidemment, et le fait d'avoir des terres sont deux choses importantes. Que répondriez-vous à cela, monsieur Stevens, dans le contexte de l'Ontario et du phénomène que je viens d'évoquer?
    Merci d'avoir posé la question. C'est une excellente question.
    Je crois que dans 100 ans, il n'y aura plus d'agriculture en Ontario. Statistique Canada a effectué un recensement de l'agriculture en 2016. À ce moment‑là, 175 acres étaient retirés de la production chaque jour pour faire place à d'autres activités économiques et au logement. En 2021, le recensement de l'agriculture, qui a lieu tous les cinq ans, a permis d'établir que cette perte était passée à 319 acres par jour. Si l'on divise l'ensemble de la superficie des terres agricoles — et pas seulement celles utilisées pour les fruits et légumes — par ce chiffre, on arrive à la conclusion que la production aura disparu dans 100 ans.
    Je sais que la politique foncière est de compétence provinciale, en quelque sorte...
    Oui. Alors, que peut faire le gouvernement fédéral? Permettez que j'intervienne pour demander quelle est la solution. Que pouvons-nous faire pour remédier à cela?
    Nous avons besoin de meilleures politiques sur l'utilisation des terres pour préserver les terres agricoles numéro un, deux, trois et quatre, grâce auxquelles l'agriculteur pourra gagner sa vie. Les maisons devraient peut-être être construites sur les terres cinq, six et sept, c'est‑à‑dire sur celles qui ne lui permettront pas de gagner sa vie. Je sais qu'il s'agit un peu d'une partie de souque à la corde. Nous avons besoin de logements.
    Je parlais à Doug Ford l'autre jour. Il a dit: « Nous allons soutenir l'agriculture. » Or, le voilà maintenant qui dit qu'il va « ouvrir » les ceintures vertes pour construire plus de maisons. C'est une crise.
    Nous n'aurons pas besoin de matériel de protection des cultures, et nous n'aurons pas besoin de main-d'œuvre, les deux éléments clés pour l'industrie horticole. Nous avons aussi de l'eau. Nous avons un quart de l'eau douce du monde à notre porte, et nous avons le climat.
    Merci beaucoup. Oui, je pense que c'est quelque chose dont nous devons nous préoccuper.
    Je veux simplement m'assurer que M. El‑Khoury aura lui aussi la chance de poser une question, mais je vous remercie de votre réponse.

[Français]

     Je remercie les témoins d'être parmi nous.
    Ma question s'adresse à M. Fakhri.
    D'après vous, de quelle manière le Canada pourrait-il devenir un leader mondial dans la mise en œuvre du droit à l'alimentation au sein de la société internationale?
    Dans les études et les recherches que vous avez faites, avez-vous pris en considération les effets des changements climatiques sur le secteur de l'agriculture?

  (1730)  

[Traduction]

    Enfin, que pensez-vous du fait d'utiliser ce changement de paradigme — de la sécurité alimentaire à la souveraineté alimentaire — comme moyen de supprimer l'influence que les cartels exercent sur le secteur alimentaire?
    Monsieur Fakhri, nous n'avons que 15 ou 20 secondes, mais je vais vous donner un peu plus de temps. Il se peut que, pour être équitable, je réduise la durée de la troisième série de questions, mais je veux que M. El‑Khoury puisse avoir réponse à sa question, donc c'est vous qui avez la parole.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur El‑Khoury.

[Traduction]

    Que peut faire le Canada? À la session du Comité de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies, à Rome, le Canada peut jouer un rôle de chef de file et rassembler les pays. Au cours des prochains mois, nous mettrons les bouchées doubles à Rome, au Comité de la sécurité alimentaire mondiale, pour que les gouvernements s'unissent et négocient un plan international.
    Le Canada peut jouer un rôle de chef de file. Il est resté impassible. Il est resté en retrait. Il peut prendre les devants.
    Pour ce qui est de l'effet des changements climatiques, le problème de la concentration aux mains des grandes entreprises ne concerne pas seulement les agriculteurs ou les exploitations agricoles familiales. Il s'agit de savoir qui possède les semences — les semences génétiquement modifiées appartiennent aux entreprises, ce qui réduit la biodiversité — et qui possède les intrants. Les engrais et les autres intrants sont eux aussi dominés par les grandes entreprises. Pour parvenir à la souveraineté alimentaire, pour redonner le pouvoir aux producteurs, aux consommateurs et aux gens ordinaires, il nous faut un système résilient apte à soutenir les petits producteurs et les exploitations familiales, et à leur redonner le pouvoir. Les semences ne devraient pas appartenir aux entreprises. Les semences sont la vie. En brevetant les semences et en nous appuyant sur des organismes génétiquement modifiés, nous mettons nos vies entre les mains des sociétés et non entre celles des agriculteurs.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous allons poursuivre avec M. Perron.
    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Stevens, vous avez parlé de la protection financière pour les fruits et légumes périssables. Je pense que vous avez bien fait le tour de la question. Vous avez parlé de 20 années.
    Selon vous, pourquoi cette protection financière n'est-elle pas en place, puisque cela ne coûte rien au gouvernement et qu'une telle mesure vous aiderait considérablement?
    Vous avez aussi parlé de la main-d’œuvre et d'un problème important lié aux travailleurs étrangers temporaires. Avez-vous des recommandations précises à faire au Comité afin que nous les transmettions au gouvernement?
    Si vous n'avez pas de recommandations à faire pour le moment, pouvez-vous les transmettre plus tard au Comité?

[Traduction]

    En ce qui concerne la main-d'oeuvre, lorsque nous commandions nos hommes et nos femmes des îles, cela prenait un mois avec Service Canada. Nous avions l'habitude de passer nos commandes et en un mois, c'était fait. Maintenant, il faut compter six mois. Nous devons nous organiser six mois d'avance pour que Service Canada s'en occupe. Service Canada ne fait pas son travail à temps pour que nous puissions faire le nôtre.
    Par ailleurs, les syndicats ont diffusé beaucoup de nouvelles négatives, parce qu'ils veulent syndiquer les 17 000 travailleurs de l'Ontario, en plus de ceux du reste du Canada, afin de recueillir l'argent des cotisations. Ils nous traînent devant les tribunaux tous les trois ou quatre ans, et nous gagnons chaque fois. Il reste qu'il faut arrêter de dire des choses négatives sur ce qui se passe. Je traite mes travailleurs comme je traite mes travailleurs locaux. Presque tous les agriculteurs traitent leurs travailleurs aussi bien que leurs travailleurs locaux. S'ils ne le faisaient pas, ce serait la faillite. J'ai un homme qui est avec moi depuis 34 ans. Ils sont essentiels. Nous n'aurions pas d'industrie horticole au Canada sans cette main-d'œuvre.
    Je sais que le gouvernement a mis en place un système de vérification. J'ai fait l'objet de nombreuses vérifications. Je n'ai jamais eu de problème. Ils peuvent relever une petite chose qui s'est produite, mais en fin de compte, le système ne fait pas son travail.

[Français]

     Pourquoi la protection financière n'est-elle pas encore en place?
    Je vous demande de répondre à ma question en cinq secondes, car je crois que mon temps de parole est écoulé.

[Traduction]

    Je n'ai pas compris votre question. J'ai des problèmes.

[Français]

    Monsieur Perron, je suis désolé, mais votre temps de parole est écoulé.
    Normalement, je suis généreux pour ce qui est du temps de parole accordé à chaque député, mais il faut maintenant passer à un autre intervenant.
    Monsieur MacGregor, vous disposez de deux minutes et demie.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Fakhri, j'aimerais m'adresser à vous.
    C'était très préoccupant d'écouter votre exposé sur l'augmentation importante du travail des enfants qu'occasionne l'insécurité alimentaire. Cela donne à réfléchir. J'ai en fait été assez troublé par le rôle que joue la finance internationale dans ce type d'exploitation. Je sais pour l'avoir vu au cours de mes recherches que notre propre Régime de pensions du Canada a détenu des participations dans des sociétés dont l'indice d'exploitation minière responsable est très bas dans les unités. Des investissements ont aussi été faits dans des entreprises du secteur de l'alimentation et des boissons qui ont recours au travail forcé quelque part dans leurs chaînes d'approvisionnement.
    À votre avis, si nous voulons nous attaquer à ce problème, c'est‑à‑dire comment le travail forcé ou le travail des enfants est lié... Nous savons aussi que ces personnes sont dans un état de vulnérabilité extrême et qu'elles sont rendues là où elles peuvent être exploitées. Avez-vous des idées sur la façon dont le Canada pourrait devenir un chef de file dans la lutte contre ce phénomène?

  (1735)  

    Je vais parler de principes directeurs et vous laisser le soin de trouver le rôle du Canada.
    Ce qui se passe souvent dans ces chaînes d'approvisionnement, c'est que les entreprises ont recours au travail des enfants, mais comme elles n'embauchent pas directement les enfants, elles disent: « Eh bien, nous ne sommes pas au courant. Nous n'avons aucun contrôle. » Ce n'est pas nécessairement vrai. Je pense qu'une surveillance accrue et la responsabilisation des entreprises dans les chaînes d'approvisionnement... C'est la question que tout le monde se pose.
    Par ailleurs, la meilleure façon de réduire le travail des enfants est de soutenir leurs familles. Personne ne veut envoyer son enfant travailler de cette façon. S'ils le font, c'est par nécessité. Par conséquent, le fait de soutenir les travailleurs, de soutenir financièrement les familles et de s'assurer qu'elles ont accès à une protection sociale, de veiller à ce que les travailleurs aient le droit de se syndiquer... Je l'ai constaté à maintes reprises et c'est vrai dans tous les pays: lorsque les travailleurs peuvent s'organiser et se syndiquer, ils bénéficient de la protection sociale dont ils ont besoin. Cela fait augmenter leurs salaires, cela crée une stabilité en matière d'emploi, cela leur procure un lieu de travail sécuritaire. Ils n'ont pas besoin d'envoyer leurs enfants travailler. Il y a une corrélation directe: plus vous permettez aux travailleurs du monde entier de se syndiquer, plus cela réduit le travail des enfants. Il y a aussi, ensuite, le fait de les soutenir à l'école. Les écoles ne sont pas seulement des lieux d'enseignement. C'est dans les écoles que nous nourrissons les enfants, que nous prenons soin d'eux.
    Donc, soutenir les familles et soutenir les écoles sont les meilleurs moyens d'endiguer le travail des enfants.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Il nous reste un peu de temps, après quoi nous passerons aux instructions pour la rédaction. Je sais que nous avons légèrement dépassé l'heure, mais j'estime qu'il est très important d'entendre nos témoins.
    Monsieur Barlow, vous n'avez pas de plus de cinq minutes pour intervenir, mais vous avez jusqu'à cinq minutes pour le faire, si vous le souhaitez.
    Merci, monsieur le président. Je vous suis reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée d'intervenir.
    Nos témoins ont livré d'excellents témoignages aujourd'hui.
    Monsieur Carey, vous avez parlé de l'importance de l'innovation et de la technologie lorsqu'il s'agit d'améliorer les rendements en matière d'agriculture et de santé des sols. Au printemps dernier, Santé Canada a jugé que l'édition génomique était sans danger, mais la ministre de l'Agriculture semble maintenant s'être dégonflée et avoir interrompu l'élaboration de la réglementation à ce sujet.
    Quelle importance cela revêt‑il lorsque nous parlons de nouvelles variétés de semences qui, je le répète, nous aident à assurer la sécurité alimentaire, mais aussi la souveraineté alimentaire dans d'autres pays qui seraient en mesure d'utiliser certaines de ces nouvelles variétés de semences pour garantir leur propre sécurité alimentaire? Dans quelle mesure est‑il important de franchir la ligne d'arrivée?
    Je vais aborder la question sous deux angles, celui de l'agriculture et celui de la compétitivité.
    Santé Canada a publié ses lignes directrices sur l'édition génomique pour les aliments, mais l'ACIA doit également publier ses lignes directrices sur la biosécurité et les aliments pour animaux. En général, nous nous attendions à ce que les lignes directrices pour les aliments prennent le plus de temps, mais ce travail est terminé. Désormais, nous attendons, je crois, essentiellement les signatures de l'ACIA; donc le deuxième élément. Toutefois, ce tabouret a trois pattes.
    Ce travail est d'une importance capitale. Ce qui est intéressant, c'est que la modification génétique est très coûteuse. Il n'y a pas beaucoup d'entreprises qui réalisent ce travail. M. Fakhri a raison à ce sujet. La modification génétique coûte des millions de dollars. Au Canada, il n'y a que quelques variétés de cultures qui sont réellement génétiquement modifiées. Par conséquent, la grande majorité des acres ensemencés ne sont pas consacrés à des OGM. En revanche, ce qui est intéressant, c'est que l'édition génomique est très peu coûteuse. En fait, nous prévoyons que, dans le secteur du canola, il y aura un plus grand nombre de semenciers, que ce soit de petites entreprises ou des entreprises en démarrage, qui pourront utiliser la technologie CRISPR‑Cas9 et faire les choses différemment, ce qui nous semble très intéressant. Le canola pourrait‑il régler son propre azote? Pourrait‑il utiliser l'azote plus efficacement, pourrait‑il améliorer sa résistance aux sécheresses ou aux maladies?
    Il est bon pour les agriculteurs d'obtenir des directives claires en matière d'édition génomique. C'est bon pour l'innovation canadienne. Il est probable que nous observions également le démarrage d'un plus grand nombre d'entreprises. Le Canada compte à lui seul plus de 200 ensemenciers, et le marché mondial est relativement restreint. Ce qui est également intéressant, c'est que ces entreprises pourraient aussi avoir des retombées positives sur l'environnement. Il faut que l'édition génomique franchisse la ligne d'arrivée... Le reste du monde est parvenu à ce stade, à l'exception de l'Union européenne. L'Argentine, le Brésil, l'Amérique du Sud, les États-Unis et l'Australie disposent de directives claires en ce qui concerne la manière de faire passer un produit de la recherche à la commercialisation, en passant par le développement. Nous avons juste besoin que cela soit clairement expliqué aux entreprises, afin qu'elles puissent investir ici, au Canada, et pour que les producteurs de canola disposent de plus d'options d'achat lorsqu'ils visitent leurs détaillants locaux.
    Je vous remercie de vos réponses.
    M. Stevens a déjà eu l'occasion de répondre à cette question, alors je veux donner à M. Carey la possibilité de le faire, puis j'ai une question à poser à M. Hemmes.
    Cette semaine et la semaine dernière, nous avons certainement eu un grand nombre de discussions avec de nombreux groupes d'intervenants du secteur agricole au sujet de l'incidence de la politique de réduction des émissions provenant des engrais. En ce qui concerne le canola, quelle serait cette incidence du point de vue des pertes en matière de production et de rendement, et de votre capacité à respecter vos engagements? Si vous réduisez votre recours aux engrais, quelle sera l'incidence de cette mesure sur la santé des sols et la durabilité économique des exploitations agricoles de vos membres?

  (1740)  

    Le canola est l'une des meilleures cultures énergétiques pour la séquestration du carbone. Les besoins du canola sont l'eau, puis l'azote. Le canola ne peut pas produire son propre azote; il a besoin d'en obtenir. L'azote est l'élément clé du rendement. Il y a 35 ans, disons, le rendement du canola en Alberta était de 20 boisseaux par acre. Aujourd'hui, il oscille entre 50 à 60 boisseaux par acre, grâce à l'utilisation de l'azote.
    D'autres types d'azotes efficaces sont en voie d'être élaborés, mais ils sont très chers et encore difficiles à obtenir. Des gains d'efficacité ont donc été réalisés à cet égard, mais il serait incroyablement préjudiciable, non seulement pour le canola, mais aussi pour l'ensemble des secteurs d'éliminer un outil comme celui‑là pour atteindre un objectif arbitraire.
    Je précise encore une fois que c'est ce continuum d'innovation dans le domaine des produits de protection des cultures et des engrais qui permet aux agriculteurs de pratiquer l'agriculture de précision, de sorte que, lorsque nos membres agriculteurs conduisent leurs moissonneuses-batteuses en utilisant le GPS et le système d'information géographique pour planter leurs semences, la bonne semence est plantée au bon endroit avec la parfaite quantité d'azote. Si l'azote n'est pas nécessaire, les agriculteurs ne l'utilisent pas. Habituellement, la facture la plus importante des producteurs de canola est celle de l'azote. Ils utilisent l'azote, parce qu'ils doivent le faire. Ils tentent de devenir plus efficaces.
    L'abandon des innovations, des OGM, des biotechnologies ou des produits de protection des cultures nuirait à la durabilité environnementale des exploitations agricoles. Les agriculteurs peuvent choisir les fournisseurs auprès de qui ils achètent leurs produits, et ils le font certainement. Ils constatent la valeur de ces produits, et c'est la raison pour laquelle ils signent des accords d'utilisation de la technologie pour avoir accès à la biotechnologie. Ils ne sont pas forcés de le faire.
    Merci, monsieur Carey.
    Je suppose que, là encore, quelques-uns des autres témoins qui ont soutenu que le sol contient ces nutriments diffusaient des informations erronées. Par exemple, dans de nombreux cas dans la région d'Holland Marsh, les nutriments ne sont pas présents dans le sol sans l'application d'engrais. C'est cette application qui apporte les nutriments et qui vous permet de cultiver certains de ces produits.
    Monsieur Hemmes, j'ai une brève question à vous poser. J'ai appris aujourd'hui une statistique intéressante, à savoir que, parmi les 400 ports du monde entier, le port de Vancouver obtient le 396e rang, ou un classement de ce genre, en matière d'efficacité.
    En ce qui concerne la chaîne d'approvisionnement, je sais que le réseau ferroviaire est votre spécialité, et je vous suis certainement reconnaissant de vos connaissances en la matière. Il s'agit peut-être d'une vaste question. Le port de Vancouver est‑il un goulot d'étranglement critique en ce qui concerne non seulement la gestion de notre chaîne d'approvisionnement en vue d'assurer la sécurité alimentaire ici, au Canada, mais aussi le rôle que nous jouons dans la sécurité alimentaire du monde entier?
    Monsieur Hemmes, M. Barlow a atteint exactement ses cinq minutes de temps de parole, mais je vais être généreux et vous accorder environ 30 secondes. Vous pourrez nous faire parvenir par écrit toute information que vous n'aurez pas eu le temps de nous communiquer.
    Je m'excuse, monsieur Barlow. M. Hemmes n'est plus en ligne. Nous n'aurons donc pas à nous préoccuper de la réponse à cette question.
    Nous allons maintenant passer à la dernière série de questions posées par Mme Valdez. Nous avons emprunté un peu de temps à M. El‑Khoury, alors je vous conseille de vous en tenir à quatre minutes et demie de temps de parole.
    Merci à tous les témoins qui se sont joints à nous aujourd'hui.
    Monsieur Fakhri, je vais vous envoyer quelques questions. Pouvez-vous nous dire comment les directives sur le droit à l'alimentation ont contribué à réduire l'insécurité alimentaire mondiale?
    Si l'on examine le traité international et les directives, on constate que le droit à l'alimentation attire l'attention de tous — et nous avons entendu des observations de ce genre aujourd'hui — sur l'importance de la mise en commun des connaissances et des technologies et de la coopération internationale, mais, surtout, il attire l'attention sur les intervenants qui ont le pouvoir et sur ceux qui devraient l'avoir.
    Je pense que, de nos jours, tout le monde s'entend pour dire qu'en fin de compte, le pouvoir doit être entre les mains des producteurs, des petits agriculteurs et des travailleurs du secteur de la distribution et des consommateurs. Ils devraient être en mesure de choisir ce qui constitue une bonne alimentation, non seulement du point de vue de l'environnement, mais aussi d'un point de vue culturel.
    Le droit à l'alimentation fournit un cadre très particulier et, en fin de compte, il s'agit d'une obligation légale; ce n'est pas seulement un choix politique.
    Je tiens également à souligner que, du point de vue des droits de la personne et d'un point de vue scientifique, les engrais appauvrissent le sol à moyen et à long terme. Vous pouvez obtenir un coup de pouce pendant quelques années, mais le ruissellement des engrais entraîne une violation des droits de la personne, car — et nous l'avons observé à maintes reprises — il viole le droit à la santé et le droit à l'environnement. Les engrais créent davantage de problèmes à moyen et à long terme.
    Le droit à l'alimentation nous apporte une compréhension systémique non seulement de l'agriculture, mais aussi de l'existence humaine dans ce système, c'est‑à‑dire le système alimentaire sous tous ses aspects.
    Merci.

  (1745)  

     Merci.
    Au cours de votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné plusieurs recommandations qui pourraient être mises en oeuvre à court terme. Compte tenu de vos compétences, quelle est l'option la plus réalisable que vous avez demandée aujourd'hui et que nous pourrions mettre en œuvre dès maintenant?
    Merci, madame Valdez.
    La solution que j'ai vu fonctionner à maintes reprises est celle d'un système universel de repas pour les enfants en milieu scolaire, qui consiste à fournir des repas gratuits et sains à tous les enfants dans les écoles, sans établir un système visant à déterminer qui est digne de ces repas et qui ne l'est pas. Pour que cette solution fonctionne vraiment, mettez les écoles en relation avec des producteurs locaux qui sont déterminés à assurer la biodiversité et des droits de la personne. Ainsi, vous disposerez d'un système d'approvisionnement qui établira une relation entre les producteurs locaux et nos écoles. Nous soutiendrons à la fois les systèmes alimentaires locaux et nos enfants.
    Nous avons déjà vu cette mesure fonctionner. Elle a fonctionné de manière étonnante au Brésil, sous un régime antérieur. Il a été prouvé que cette mesure fonctionne très bien. Cela exige des efforts, mais je crois que c'est l'une des façons de résoudre le problème.
    Le deuxième moyen, en cas de besoin, consiste à effectuer des transferts directs qui donnent aux gens de l'argent liquide lorsqu'ils en ont le plus besoin, et non à mettre en place des systèmes de bons ou de coupons alimentaires, comme c'est le cas aux États-Unis. Voici ce que nous avons vu fonctionner: lorsque les gens ont besoin de se procurer de la nourriture, donnez-leur de l'argent. Ils savent comment nourrir leur famille. Ils savent comment dépenser leur argent. Cette approche semble fonctionner.
    Ce sont les deux solutions qui ressortent le plus. J'en ajouterais une autre: trouver des moyens de soutenir directement les producteurs locaux qui sont déterminés à assurer la biodiversité et des droits de la personne.
    Merci.
    Merci.
    La parole est à vous, monsieur Turnbull.
    Il vous reste un peu plus d'une minute, monsieur Turnbull.
    Cela ne pose pas de problème. Merci.
    Monsieur Fakhri, je vous remercie de nouveau du témoignage que vous avez apporté aujourd'hui.
    Je terminerai en parlant du fait que notre ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social a annoncé aujourd'hui une consultation publique sur l'élaboration d'un programme national d'alimentation en milieu scolaire au Canada, un programme qui n'existait pas auparavant. Je suis très enthousiaste à ce sujet. Je sais qu'il y a une coalition de volontaires dans l'ensemble du Canada qui travaillera à l'élaboration du programme grâce à l'engagement financier du gouvernement fédéral. Je crois que le témoignage que vous avez apporté aujourd'hui en témoigne.
    Je voulais vous poser d'autres questions, mais je n'ai pas le temps. Peut-être que votre rapport, que vous avez mentionné à plusieurs reprises, pourrait être déposé auprès du Comité, si vous le voulez bien. Cela nous permettrait alors de tirer parti de certaines de vos observations et de vos compétences. Je pense que nous pourrions tous en bénéficier.
    Je vous remercie encore d'être venu aujourd'hui. Je valorise vraiment votre point de vue et votre travail.
    Merci, monsieur Turnbull.
    Je l'avais envoyé plus tôt, mais je vais le renvoyer pour m'assurer que vous l'avez tous reçu.
    Merci, monsieur Fakhri, et merci, monsieur Turnbull.
    En ma qualité de président, je vais exercer mon droit de poser une brève question.
    Monsieur Carey, nous avons beaucoup parlé des engrais et de l'objectif de réduction des émissions provenant des engrais qui a été établi par le gouvernement. J'ai déclaré dans le Globe and Mail et à la Chambre — tout comme vous — qu'il doit s'agir d'une mesure volontaire. Je crois que jusqu'à maintenant, le gouvernement a déclaré qu'il s'agit justement d'une mesure volontaire, mais il est bon d'essayer de réduire les émissions d'oxyde de diazote.
    Au cours des conversations que vous avez eues dans le cadre de vos nombreuses réunions avec des intervenants et des groupes avec lesquels vous travaillez, le gouvernement a‑t‑il résolument veillé à ce que ce soit un objectif volontaire? Je crois que la ministre Bibeau a déclaré officiellement que c'était le cas. Je veux juste m'assurer que c'est effectivement le cas.
    Oui. C'est exact. Toutes les interactions que nous avons eues jusqu'à maintenant avec le gouvernement, y compris avec la ministre Bibeau — elle a assisté aujourd'hui à la réunion de notre conseil —, indiquent qu'il s'agit toujours d'un objectif volontaire. Nous n'avons vu aucun changement à cet égard. Nous savons que les choses peuvent changer, mais pour l'instant, cet objectif n'est pas lié à une réglementation.
    Votre affirmation est exacte, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Carey.
    Chers collègues, cela conclut notre séance d'aujourd'hui.
    En votre nom, permettez-moi de remercier MM. Fakhri, Carey et Stevens, ainsi que M. Hemmes, qui a malheureusement été forcé de quitter la réunion un peu plus tôt, de leur travail dans le domaine de l'agriculture et des témoignages qu'ils ont apportés aujourd'hui. Ils ont été très utiles à chacun de nous.
    Chers collègues, nous allons maintenant passer à huis clos, afin d'avoir quelques conversations et de formuler des commentaires au sujet des paroles prononcées par nos témoins, tant aujourd'hui qu'auparavant.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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