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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 050 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 28 octobre 2022

[Enregistrement électronique]

  (1300)  

[Français]

    Je déclare la séance ouverte.
     Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue à la 50e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
    Je tiens à souligner que cette réunion a lieu sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.

[Traduction]

    Conformément à l'ordre de renvoi que la Chambre a adopté le mardi 31 mai 2022, le Comité se réunit pour étudier le projet de loi C‑18, la Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada.
    La réunion se déroule en formule hybride, tel qu'il est prévu à l'ordre adopté le jeudi 22 juin 2022.
    Les députés présents dans la salle savent déjà comment procéder pour entendre les interprètes. Voici quelques instructions pour la gouverne des personnes qui participent à nos travaux à distance, et notamment pour les témoins.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Si vous nous joignez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone au bas de votre écran pour l'activer, et mettez‑le en sourdine quand vous n'intervenez pas. Dans l'application Zoom, vous trouverez les options pour les services d'interprétation au bas de votre écran. Cliquez sur le petit globe pour sélectionner l'anglais ou le français. Je vous rappelle enfin de toujours vous adresser à la présidence.
    C'est tout pour ce qui est des instructions.
    Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion, et qu'ils utilisent du matériel approuvé par la Chambre des communes.
    Je vous remercie.
    Je vais rapidement vous présenter nos témoins. Je vais garder Mme Charette pour la fin parce qu'elle n'est pas encore des nôtres.
    J'avise les témoins qu'ils disposeront d'un temps de parole de cinq minutes, peu importe s'ils se présentent à titre individuel ou au nom d'un organisme. Nous vous laissons le soin de choisir un porte-parole. Je vais pousser un cri, littéralement, pour vous indiquer qu'il reste 31 secondes. Je vais vous en avertir très clairement. Nous devons respecter l'horaire pour avoir le temps de poser toutes nos questions et d'entendre toutes les réponses, et de donner la chance à tous de participer pleinement.
    Sans plus tarder, je vous présente les témoins.
    Nous recevons M. Konrad von Finckenstein, l'ancien président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ainsi que Mme Annick Charette, la présidente de la Fédération nationale des communications et de la culture. De Meta Platforms Inc., nous accueillons M. Kevin Chan, le directeur des politiques mondiales, et M. Marc Dinsdale, directeur, Partenariats médiatiques au Canada. Enfin, M. Matthew Hatfield représentera OpenMedia, dont il est le directeur des campagnes.
    Je vais inviter M. von Finckenstein à commencer.
    Monsieur von Finckenstein, êtes-vous prêt? Vous disposez de cinq minutes.
    Merci.
    Merci, madame la présidente, de l'invitation à me prononcer sur le projet de loi C‑18.
    Comme vous le savez, le projet de loi a pour objet de réglementer les intermédiaires de nouvelles numériques afin de renforcer l'équité sur le marché canadien des nouvelles numériques et de contribuer à sa viabilité. La raison pour laquelle cette mesure législative est proposée peut être résumée en quelques mots: actuellement, les éditeurs de nouvelles locaux ne sont pas indemnisés suffisamment pour le contenu de nouvelles qu'ils publient sur les plateformes numériques.
    Pour corriger le tir, le projet de loi prévoit un processus de négociation obligatoire entre les plateformes, qu'on appelle les intermédiaires de nouvelles numériques, ou INN, et les éditeurs de nouvelles, appelées les entreprises de nouvelles admissibles, ou ENA. Le processus est fort simple. Les INN doivent s'autodésigner et les ENA sont autorisées par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC. Ils doivent négocier, c'est obligatoire, et ils doivent le faire de bonne foi. En cas d'échec des négociations, ils doivent participer à des séances de médiation. S'ils ne trouvent pas de terrain d'entente, il y aura arbitrage sur l'offre finale. Toutes ces étapes se déroulent sous l'égide du CRTC, qui désigne les parties, gère le processus, choisit les arbitres et prodigue ses avis du début à la fin.
    Mon intention aujourd'hui n'est pas de critiquer la raison d'être du projet de loi ou la méthode adoptée. Je vais plutôt me concentrer sur les difficultés liées à la mise en œuvre. Cela dit, il ne faut pas en déduire que j'appuie le projet de loi.
    Il va sans dire que la mise en œuvre de ce projet de loi ajoutera un défi considérable pour le CRTC. Mon regard est celui d'un ancien président. Pour que la mise en œuvre soit efficace, le projet de loi doit être précis et objectif. C'est très aidant pour l'administrateur, alors qu'un texte vague et une trop grande latitude discrétionnaire entraîneront invariablement leur lot de demandes, de contestations et de retards.
    J'aurais cinq points particuliers à porter à votre attention.
    Premièrement, à qui et à quoi s'applique le projet de loi? Comment les INN sont-ils identifiés? Selon le projet de loi, ils doivent s'autodésigner et en aviser le CRTC. Le critère établi est l'existence d'un déséquilibre important entre le pouvoir de négociation de l'exploitant et celui de l'entreprise de nouvelles. L'existence de ce déséquilibre est déterminée en fonction de facteurs comme la taille de l'intermédiaire, le fait que son marché lui donne ou non un avantage stratégique, ou qu'il occupe ou non une position de premier plan au sein du marché.
    Les notions de taille, de marché, d'avantage stratégique et de position de premier plan sont toutes empruntées aux lois sur la concurrence et sont fortement tributaires du contexte. Elles n'ont pas un sens objectif. J'ai plutôt l'impression qu'il sera très compliqué d'identifier les INN. On demande aux entreprises de s'autodésigner et on donne au CRTC le pouvoir d'obliger la production de renseignements pour établir si un répondant est un INN. Il faut modifier le projet de loi pour que la désignation des INN incombe au ministre, et qu'elle se fasse par la voie d'une mesure réglementaire, après consultation du commissaire de la concurrence.
    Deuxièmement, à qui profite ce projet de loi? Sur demande, le CRTC doit reconnaître qu'une entreprise est une ENA si elle est « une organisation journalistique canadienne qualifiée » au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu — je n'ai rien à redire sur cette partie —, et si elle produit du contenu de nouvelles « qui est axé principalement sur des questions d'intérêt général et qui rend compte d'événements actuels », et si « elle emploie régulièrement au moins deux journalistes » au Canada, si elle exerce des activités au Canada et si elle produit du contenu de nouvelles « qui n'est pas axé principalement sur un sujet donné ».
    Cette définition est très large. Elle n'exclut pas les acteurs gouvernementaux, les acteurs politiques déclarés ni les acteurs étrangers. Aucune norme journalistique n'y figure, et on peut même penser qu'elle englobe les radiodiffuseurs, qui font déjà l'objet d'une réglementation. Il faut modifier cet article pour y stipuler que les ENA doivent appartenir à des intérêts canadiens et être sous contrôle canadien, qu'elles doivent respecter les normes journalistiques du code de déontologie de la Society of Professional Journalists, et que les radiodiffuseurs autorisés, leurs affiliés et les agents gouvernementaux ne peuvent pas être des ENA.
    Troisièmement, le projet de loi habilite le CRTC à soustraire un INN de son application s'il a un accord avec une ENA. L'accord doit prévoir une indemnisation juste pour le contenu de nouvelles produit par l'entreprise de nouvelles. C'est justifié puisque c'est l'essence même du projet de loi.

  (1305)  

    Les choses se gâchent après, quand il est exigé que les accords « assurent qu'une partie convenable de l'indemnisation soit utilisée par les entreprises de nouvelles pour soutenir la production de contenu de nouvelles locales, régionales et nationales », et qu'ils « ne laissent pas l'influence des entreprises » et ainsi de suite. Tous ces points, pris ensemble, font partie de l'objet de la loi et devraient figurer dans l'article exposant cet objet.
    Il vous reste 30 secondes.

  (1310)  

    En dernier lieu, une disposition accorde une préférence indue et inverse le fardeau de la preuve. Essentiellement, une ENA qui estime qu'un INN fait de la discrimination à son endroit peut s'en plaindre au CRTC. Il fera enquête et imposera une pénalité s'il y a violation. Ces dispositions témoignent d'une totale méconnaissance du rôle des INN. Ils prennent des millions de décisions tous les jours. Ils…
    Merci, monsieur von Finckenstein.
    Je vous demanderais de conclure. Votre temps de parole est terminé.
    D'accord. Merci.
    Le rôle des INN est mal compris. C'est pourtant simple. Les décisions sont prises par un ordinateur, et elles se comptent par millions. Il faudrait, en cas de plainte, exiger que l'INN explique le fonctionnement de son algorithme et fasse la démonstration que les décisions sont équitables, qu'elles ne sont pas injustes ou infondées, par exemple. Dans ce cas, la disposition qui inverse le fardeau de la preuve, qui signifie qu'une allégation est vraie à moins d'être réfutée, aurait tout son sens puisque c'est l'algorithme de l'INN qui serait en cause. L'INN conçoit et configure l'algorithme, et il devrait être en mesure de donner la preuve qu'il ne discrimine ou ne défavorise personne.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup, monsieur von Finckenstein.
    Madame la greffière, pouvez-vous m'avertir quand Mme Charette sera en ligne? Je ne la vois pas. Merci à l'avance de me tenir au courant.
    Je passe maintenant à Meta Platforms.
    Messieurs Chan et Dinsdale, avez-vous déterminé lequel d'entre vous nous présentera la déclaration préliminaire?
    Bien. Nous vous écoutons, monsieur Chan. Vous avez cinq minutes.

[Français]

     Madame la présidente, membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C‑18, la Loi sur les nouvelles en ligne.

[Traduction]

    Nous sommes ici pour faire part au Comité de nos réserves concernant un projet de loi qui risque d'avoir des conséquences indésirables au fil du temps.
    Nos réserves sont de trois ordres. Nous remettons en question le partage réel de la valeur entre les plateformes et les éditeurs de nouvelles, les conséquences indésirables du paiement pour la libre commercialisation et le risque d'étouffer l'innovation.
    Premièrement, le cadre du projet de loi actuel repose sur la présomption que Meta tire un avantage indu de sa relation avec les éditeurs de nouvelles, alors que c'est l'inverse. La plateforme Facebook aide les éditeurs de nouvelles. Meta ne récupère pas et n'indexe pas de liens ou de contenus de nouvelles. À l'instar de toutes les entreprises, de tous les organismes sans but lucratif, des organismes publics ou politiques, les éditeurs de nouvelles canadiens choisissent de partager des liens de leurs sites Web sur Facebook pour élargir leur audience et augmenter leur lectorat. Par ricochet, cela leur permet de vendre plus d'abonnements et d'espaces publicitaires.
    Au Canada, nous estimons que les fils d'actualité Facebook génèrent plus de 1,9 milliard de clics par année pour les éditeurs inscrits. C'est de la publicité gratuite pour leurs contenus sous la forme de liens publiés, dont la valeur est estimée à plus de 230 millions de dollars. Autrement dit, c'est ce qu'auraient dû dépenser les nouveaux éditeurs pour obtenir le même résultat sur Facebook si l'accès n'y était pas gratuit.

[Français]

    Nous voyons donc que Facebook aide déjà les éditeurs canadiens à hauteur de centaines de millions de dollars par année.

[Traduction]

    Deuxièmement, la loi sur les nouvelles en ligne forcerait Meta à acheter aux organismes d'information le contenu que les éditeurs publient gracieusement sur Facebook. Nous serions carrément forcés de payer les éditeurs pour leur donner de la publicité gratuite sur Facebook, qui comme je viens de le dire s'est chiffrée à 230 millions de dollars l'année dernière. Cet arrangement serait pour le moins étrange et certainement peu orthodoxe.
    Dans le contexte économique actuel, et dans la mesure où nous privilégions les investissements à long terme dans le métavers et la croissance du secteur des microvidéos pour rivaliser avec la concurrence et répondre aux préférences des utilisateurs, on nous demande d'adopter un système dans lequel les éditeurs nous vendraient le volume de contenus de leur choix, sans limite de prix. J'espère que vous conviendrez avec moi qu'aucune entreprise ne peut fonctionner de cette façon.
    Troisièmement, pour que la réglementation soit efficace, elle doit reposer sur des faits. Nous militons depuis longtemps pour l'adoption d'une réglementation qui établit des règles claires et équitables pour tous, mais aussi pour un réseau Internet libre et ouvert, qui favorise la créativité et la concurrence. Cependant, comme l'ont dénoncé des experts indépendants, une politique qui subventionne de manière inéquitable les entreprises médiatiques traditionnelles qui s'adaptent difficilement au cyberespace risque de nuire à la concurrence, de réduire la confiance dans les médias et de compliquer davantage la transition vers les modèles numériques.
    Dans un rapport récent, le directeur parlementaire du budget ne fait qu'effleurer ces préoccupations bien réelles. Selon son analyse, la part du lion ira aux radiodiffuseurs, y compris le radiodiffuseur public, et les journaux devront se contenter de 25 %. Après cinq années d'écoute et de soutien des entreprises de nouvelles numériques, mais aussi d'apprentissage auprès d'elles, je peux vous dire que je trouve très inquiétant de constater que le projet de loi C‑18 les laisse encore plus perdantes. Nous exhortons le Comité à faire plus de place aux témoignages des innovateurs du milieu canadien des nouvelles numériques de la prochaine génération.
    Je tiens à dire que le Canada occupe une place très importante pour Meta.

  (1315)  

[Français]

     Les Canadiens pourront toujours utiliser Facebook pour garder contact avec leurs amis et leur famille, pour créer des communautés et pour faire croître leurs entreprises.

[Traduction]

    Toutefois, advenant l'adoption de ce projet de loi préjudiciable, qui repose sur des prémisses témoignant d'une totale incompréhension du fonctionnement de Facebook et qui créerait des formes de responsabilité financière sans précédent à l'échelle mondiale pour des liens ou du contenu de nouvelles, nous nous devons d'être transparents quant à la possibilité que nous reconsidérions l'autorisation du partage de contenu de nouvelles au Canada sur Facebook.
    Comme toujours, nous restons disposés à collaborer avec le Comité et le gouvernement pour trouver des solutions fondées sur des faits et respectueuses des intérêts de l'ensemble des Canadiens.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Chan.
    Je donne maintenant la parole à M. Hatfield.
    Vous disposez de cinq minutes. Nous vous écoutons.
    Bonjour à tous. Je m'appelle Matt Hatfield et je suis le directeur des campagnes chez OpenMedia, un groupe communautaire du Canada qui représente près de 220 000 personnes qui militent pour un réseau Internet libre, accessible et exempt de surveillance.
    Je m'adresse à vous depuis le territoire non cédé des nations Stó:lo, Tsleil-Waututh, Squamish et Musqueam.
    Aujourd'hui, je vous invite à réfléchir à la question de savoir qui est visé par le projet de loi C‑18, et qui ne l'est pas. Qui produit du contenu journalistique de grande qualité, digne de bénéficier des subventions et de la promotion exigées par le gouvernement, et qui n'en produit pas? À combien ont-ils droit, et le public obtiendra‑t‑il un jour une réponse transparente et juste à ces questions?
    Nous pensons que le gouvernement essaie de se défiler parce qu'il ne veut pas répondre à ces questions extrêmement sensibles. Néanmoins, il y répond à son insu en proposant le projet de loi C‑18. En esquivant ces questions, le gouvernement contribue à des réponses encore plus imprécises, impénétrables et inéquitables, et potentiellement préjudiciables au lien de confiance avec le journalisme.
    C'est un problème réel, que le projet de loi C‑18 tente de résoudre. Les Canadiens doivent avoir accès à du contenu journalistique de qualité, fiable et fondé sur des faits vérifiés, et ils ont besoin qu'on leur offre beaucoup de ce type de contenus. Notre démocratie en dépend.
    Les plateformes numériques gigantesques, avec Google et Meta en première ligne, font énormément d'argent au Canada. Il est tout à fait juste de leur demander d'en redonner une plus grosse partie pour soutenir les besoins des Canadiens. C'est pourquoi nous appuyons la taxe sur les services numériques, mais c'est aussi pourquoi nous aimerions débattre d'un projet de loi beaucoup plus simple, qui taxerait directement ces gros joueurs.
    Le lien entre revenus et diffusion sur les plateformes est une pilule empoisonnée et hautement toxique. Les nouvelles ne sont pas une source importante de revenus pour les plateformes, les données le prouvent, et il est très rare qu'un reportage d'une importance vitale pour la société devienne viral.
    Le lien entre le soutien à la production d'information et le nombre de liens partagés et de clics incite fortement les plateformes et les éditeurs de nouvelles à trouver des moyens de tromper le système, ce qui nuit à la diffusion de nouvelles de qualité. Dans ce modèle, les fonds ne vont pas là où se trouvent les réels besoins. Des subventions sont versées à ceux à qui la production de nouvelles rapporte déjà beaucoup, mais rien n'est fait pour soutenir la renaissance de médias d'information disparus ou l'émergence de nouveaux médias. La survie des médias d'information dépend du succès continu des plateformes numériques, au grand détriment de leur crédibilité et de leur indépendance.
    De plus, parce que le projet de loi C‑18 fait primer les liens et les clics sur les critères plus tangibles du journalisme d'intérêt public, il sera très facile d'être reconnu comme média d'information qualifié, encore plus que sous le régime déjà très défaillant des organisations journalistiques canadiennes admissibles, les OJCA. La barre est placée tellement bas que des médias de qualité douteuse, des usines à clics et même des acteurs étrangers malveillants pourraient avoir droit à la promotion et aux subventions obligatoires.
    Pour toutes ces raisons, nous estimons que si des amendements importants n'y sont pas apportés, le projet de loi C‑18 aura un effet dévastateur sur la qualité et la diffusion du contenu journalistique canadien, de même que sur la confiance du public à son égard.
    Le financement est mal distribué. Le ministre Rodriguez a déclaré que le soutien du projet de loi C‑18 n'intéresse pas vraiment les petits éditeurs de nouvelles, même si des centaines d'entre eux disent le contraire. La situation est particulièrement difficile pour les petites communautés du Canada qui ont perdu leurs principaux médias et pour les salles de presse régionales désertées et forcées de réduire leurs activités.
    Le projet de loi C‑18 ressuscitera‑t‑il les médias locaux? Non. Il n'offre rien aux communautés qui ont perdu leurs sources privilégiées d'information. Même si un petit média local voit le jour, il devra atteindre une certaine taille pour avoir droit à du soutien, en sachant que c'est un objectif probablement irréaliste.
    Le projet de loi incitera‑t‑il les grands services de nouvelles à réengager du personnel pour leurs divisions locales désertées? Comment feraient-ils cela, et surtout pourquoi le feraient-ils? Quelle entreprise sensée engagerait du personnel pour soutenir un processus journalistique local lent et coûteux alors qu'elle tire ses revenus essentiellement du contenu le plus viral et des plus gros pièges à clics dans les médias sociaux? Comment est‑ce concevable quand on sait que le projet de loi C‑18 promet aux télédiffuseurs et aux radiodiffuseurs, et principalement aux géants comme Bell, Rogers et Radio-Canada, qu'ils empocheront 75 % des revenus?
     Le Comité a critiqué, à raison, les accords secrets entre Google, Meta et les éditeurs de nouvelles. Alors pourquoi le projet de loi C‑18 ne propose‑t‑il aucune solution? On ne regagnera pas la confiance du public si on ne fait rien pour régler les problèmes liés à ces accords sur les revenus, si on permet qu'ils soient encore plus importants et encore plus secrets, et si on laisse encore plus de latitude au CRTC, au gouvernement et aux plateformes elles-mêmes pour exercer leur influence en sous-main. En vertu du projet de loi C‑18, les accords négociés resteront secrets, tout comme le processus de qualification comme OJCA et les motifs d'approbation ou de rejet des demandes. Ce n'est certainement pas le bon moyen pour renforcer la confiance à l'égard de l'information.
    Notre principale inquiétude concerne l'incidence du projet de loi C‑18 sur nos publications en ligne. Quel type de contenu est le plus partagé sur Facebook et sur Twitter? Pensez-vous que ce sont les longs reportages d'enquête très fouillée…

  (1320)  

[Français]

     J'invoque le Règlement, madame la présidente.

[Traduction]

    Je vais arrêter mon chronomètre quelques instants pour éviter d'empiéter sur le temps de quelqu'un.
    Monsieur Champoux, allez‑y.

[Français]

    Je suis désolé et je prie M. Hatfield de me pardonner cette interruption, mais les interprètes nous signalent qu'il parle extrêmement vite et qu'il leur est difficile de suivre son allocution.
     Serait-il possible, madame la présidente, de demander à M. Hatfield de ralentir un peu son débit pour permettre aux interprètes de bien faire leur travail? Je vous remercie.
    Je suis désolé, monsieur Champoux. Je vais parler un peu plus lentement.

[Traduction]

    Merci, monsieur Champoux.
     Notre principale inquiétude concerne l'incidence du projet de loi C‑18 sur nos publications en ligne. Quel type de contenu est le plus partagé sur Facebook et sur Twitter? Pensez-vous que les internautes vont préférer les longs reportages d'enquête très fouillée dans lesquels nous demandons des comptes aux leaders ou les publications racoleuses, les textes d'opinion sans mentions de sources et les pièges à clics carrément trompeurs?
    Le projet de loi C‑18 risque de donner encore plus de place à ces contenus. Il encouragera les médias légitimes à en produire davantage pour augmenter leur diffusion et les indemnités qu'ils en tireront. Il offre à ceux qui font dans le journalisme à sensation, aux usines de contenus et de pièges à clics une réelle possibilité d'avoir accès aux subventions et à la promotion obligatoires des plateformes. Il interdit aux plateformes de faire quoi que ce soit qui ferait primer le contenu provenant de médias de qualité supérieure comme le National Post ou le Globe and Mail sur celui de toute autre publication d'une source qualifiée.
    Il vous reste 30 secondes.
    Je ne suis pas toujours ravi de ce que je vois défiler sur les plateformes, mais je ne veux certainement pas que le gouvernement empire sciemment les choses. Malheureusement, c'est ce que le projet de loi C‑18 propose pour l'instant.
    Les membres de la communauté OpenMedia ont envoyé près de 8 000 courriels aux députés pour leur demander d'apporter des correctifs essentiels au projet de loi C‑18. Nous aspirons tous à un écosystème de l'information foisonnant et florissant au Canada mais, sans une réforme de fond, il existe un risque considérable que le projet de loi C‑18 empire les choses au lieu de les améliorer.
    Merci.
    Merci, monsieur Hatfield.
    Je vais maintenant donner la parole à Annick Charette, la présidente de la Fédération nationale des communications et de la culture.
    Madame Charette, vous disposez de cinq minutes. Je vais vous avertir quand il vous restera 30 secondes. Allez‑y.

[Français]

    La Fédération nationale des communications et de la culture représente 86 syndicats du domaine de la culture et de l'information au Québec, dont les principaux syndicats des médias d'information.
    D'entrée de jeu, j'aimerais vous dire que notre première préoccupation est de maintenir au Québec une presse professionnelle, forte, indépendante, diversifiée et en bonne santé financière. Nous voulons aussi que la presse conserve sa capacité à offrir une diversité de points de vue, qui reflètent tant les régions que la trame multidimensionnelle de la population canadienne. Nous voulons aussi qu'elle soit présente sous toutes ses formes partout au pays.
    Un trop grand nombre de médias ont déjà fermé boutique, en grande partie parce que les revenus publicitaires, source traditionnelle de revenus des médias d'information, ont été détournés par les plates-formes numériques.
    Pour atteindre ces objectifs, il est impératif de corriger les dysfonctionnements de marché, notamment le rapport de force démesuré exercé par les plates-formes numériques face aux médias d'information du fait qu'elles accaparent une part importante des revenus commerciaux associés à l'information journalistique. C'est pourquoi des dispositions législatives nous apparaissent extrêmement nécessaires pour réguler adéquatement et équilibrer les rapports commerciaux entre les médias d'information et les plates-formes numériques toutes-puissantes et, si j'ose dire, menaçantes dernièrement.
    La Fédération nationale des communications et de la culture soutient le projet de loi C‑18 au nom de ses membres, mais aussi au nom du public canadien, car l'information professionnelle est un pilier de la démocratie. Un peuple bien informé est un peuple qui fait des choix éclairés, ce que tout le monde souhaite, je crois.
    Nous voulons cependant attirer l'attention des législateurs sur certains aspects qui nous semblent perfectibles.
    Premièrement, les pouvoirs d'ordonnance d'exemption octroyés au CRTC, qui permettent d'exempter des plates-formes et de négocier de nouvelles ententes, sont trop larges et risquent de miner de façon importante la contribution effective du projet de loi C‑18 au renforcement de la diversité des voix dans le domaine de l'information médiatique.
    Nous tenons grandement à ce que soit préservée l'existence des médias de moins grande envergure, qui répondent notamment aux besoins particuliers de certaines communautés et régions. Quelques ententes majeures signées avec des médias nationaux ne devraient pas miner la capacité de plus petits joueurs de faire valoir leurs droits.
    Deuxièmement, le projet de loi C‑18 devrait permettre la négociation pour un ensemble plus important de médias d'information, y compris les médias locaux qui ne comptent qu'un journaliste à temps plein et les médias émergents numériques, qui ne sont pas basés sur la même structure que les médias écrits traditionnels. Nous pensons aussi que les entreprises médiatiques qui font du journalisme spécialisé devraient être prises en compte.

  (1325)  

[Traduction]

    Je voudrais invoquer le Règlement, madame la présidente.
    Oui. Merci.
    Madame Charette, les interprètes ont du mal à vous suivre. Pouvez-vous ralentir un peu le débit?
    Merci.

[Français]

     Par contre, la loi ne devrait s'appliquer qu'aux entreprises médiatiques qui respectent certains critères de nature déontologique en matière de pratiques journalistiques. Je pense, par exemple, à la présentation de plusieurs points de vue divergents sur des sujets d'intérêt public, à la vérification de la validité et de la véracité des informations transmises, et à la rectification d'informations transmises s'étant avérées erronées. Le respect d'un code de déontologie journalistique reconnu dans la presse occidentale est un point de référence fiable pour déterminer le caractère professionnel d'une entreprise d'information. La loi devrait enfin traiter les radiodiffuseurs publics de la même façon que les entreprises de nouvelles privées.
    Troisièmement, il nous apparaît nécessaire d'empêcher les plate-formes numériques d'adopter des mesures de rétorsion qui entraveraient la négociation et l'arbitrage.
     Enfin, notre mémoire contient certaines recommandations relatives au processus d'arbitrage, ainsi qu'aux pouvoirs du vérificateur indépendant. À nos yeux, ces pouvoirs sont absolument essentiels pour garantir que les retombées du projet de loi percoleront directement dans les salles de nouvelles, au bénéfice du journalisme.
    Ce réinvestissement d'argent nouveau dans le travail des journalistes est incontournable si nous voulons assurer la pérennité d'une information de qualité. Les pouvoirs du vérificateur pourraient être élargis pour lui permettre, par exemple, de rendre compte des effets d'une ordonnance d'exemption sur le marché canadien des nouvelles numériques.
    Par ailleurs, il faudrait que la loi s'applique à l'ensemble des entreprises qui exploitent une plateforme de média social ou un moteur de recherche diffusant des contenus de nouvelles.
    Pour terminer, j'aimerais souligner que les plateformes numériques ont le devoir moral de retourner une partie de leurs gains obtenus grâce au travail d'autres entreprises. Dans quel système économique l'exploitation de la propriété d'un tiers est-elle un droit?
    De même, toute bonne entreprise citoyenne qui tire des profits substantiels de l'exploitation d'un élément aussi vital pour une société démocratique que la presse professionnelle a le devoir de réinvestir une partie de ces profits dans la vitalité des entreprises journalistiques qui en sont la source.
    L'incroyable puissance économique et le rapport de force disproportionné créés par l'étalement des technologies de l'information ne devraient jamais l'emporter sur les intérêts supérieurs d'une nation et sa souveraineté en matière de régulation.
    Je vous remercie de votre temps.
    Merci, madame Charette.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à la période des questions.
    J'informe les témoins que le temps alloué englobe les questions et les réponses. Je vous demanderais donc d'être succincts et précis pour que nous puissions poser plus de questions à tous les témoins.
    Nous allons entamer les tours de six minutes.
    Mme Rachael Thomas, vous serez la première. Vous avez six minutes.
    Ma première question s'adresse à M. Chan, de Meta.
    Monsieur Chan, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé d'Internet libre et de son importance pour stimuler la concurrence, en ajoutant que le projet de loi leur sera plutôt préjudiciable.
    C'est aussi l'avis du créateur d'Internet, sir Tim Berners‑Lee. Quand l'Australie a présenté sa loi, il a affirmé qu'elle menaçait l'essence même d'Internet, un réseau censé offrir un espace vaste et ouvert pour échanger des idées et collaborer librement.
    J'aimerais vous entendre à ce sujet. Comment le projet de loi est‑il préjudiciable à Internet ou, comme d'aucuns l'ont suggéré, démolit‑il Internet?
    Merci beaucoup de poser cette excellente question.
    C'est au cœur des préoccupations de beaucoup de monde, pas seulement des plateformes. Pour le dire très simplement, les liens sont la pierre angulaire d'Internet. Ils permettent de naviguer entre les sites et ils facilitent de manière efficace la libre circulation de l'information et, par conséquent, la liberté d'expression.
    Nous n'avons jamais vu, nulle part dans le monde, une tentative de réglementer la libre circulation de l'information en imposant un coût lié aux liens. C'est totalement inédit à l'échelle mondiale. C'est aussi totalement inadapté si on considère ce qu'est un lien et comment il fonctionne.
    J'ajouterais que c'est aussi contraire à une décision rendue par la Cour suprême du Canada en 2011 que j'ai imprimée avant de venir ici et qui dit ceci: « En bref, l'Internet ne peut donner accès à l'information sans les hyperliens. Or, limiter l'utilité de ces derniers […] aurait pour effet de gravement restreindre la circulation de l'information et, partant, la liberté d'expression ».

  (1330)  

    Madame Thomas, je crois que vous avez obtenu la réponse à votre question. En avez-vous d'autres?
    Oui, merci. Ma connexion est instable et je vous perds de temps à autre. Je suis désolée.
    La question suivante sera pour M. Hatfield, d'OpenMedia.
    Monsieur Hatfield, vous avez évoqué la nécessité pour les Canadiens d'avoir accès à des sources d'information de qualité. Vous avez dit aussi qu'il faut des sources diversifiées pour préserver la santé de notre système démocratique, mais que le projet de loi C‑18 ne remplit pas cet objectif, même s'il y est énoncé. Vous semblez même suggérer qu'il nuirait à l'innovation, à la créativité et à la variété des sources d'information.
    Pourriez-vous nous dire comment exactement?
    En effet, c'est ce que j'ai affirmé. Je vais rebondir sur ce que M. Chan vient de dire. Le projet de loi impose un coût pour l'information de qualité, mais il laissera l'information de mauvaise qualité circuler gratuitement. Apparemment, ce modèle va favoriser la diffusion plus large et plus rapide de l'information de qualité. Est‑ce que ce sera le cas selon vous? Nous n'avons pas besoin de ce coût pour soutenir le journalisme de qualité. Il existe d'autres options de financement. Malheureusement, ce n'est pas ce dont les rédacteurs du projet de loi C‑18 ont décidé.
    Concernant l'inquiétude suscitée par la propagation d'information de mauvaise qualité, il est clair qu'il sera tentant pour les médias existants d'accroître le contenu de mauvaise qualité. Le projet de loi C‑18 propose des normes si peu élevées pour être reconnu comme média d'information de qualité qu'il laisse le champ libre aux campagnes de désinformation de tout un éventail d'acteurs malveillants au Canada. Je pense entre autres aux usines et aux pièges à clics, qui propagent des messages du genre « les médecins n'en croient pas leurs yeux » et pour qui cette législation risque d'être très profitable. Des acteurs étrangers hostiles, des groupes comme Russia Today et beaucoup d'autres groupes qui ont un réel intérêt à tromper les Canadiens chercheront certainement des moyens de profiter de cette législation pour parvenir à leurs fins.
    Merci, monsieur Hatfield.
    Je crois que je voudrais vous entendre davantage à ce sujet. Je comprends que les coûts pour les liens pourraient avoir une incidence sur la variété des contenus, mais qu'en est‑il des possibilités de qualification offertes à de nouvelles sources? Y aura‑t‑il un effet bénéfique pour la diversification des contenus en ligne? Des médias ethniques ou d'autres médias de plus petite taille pourront-ils garder leur part de marché ou seront-ils au contraire pénalisés?
    Oui, ça nous préoccupe également. Nous ouvrons la porte à certains mauvais joueurs tout en la fermant à des entreprises nouvelles, plus petites et plus innovantes. Comme le financement a été attribué en fonction de la répartition actuelle sur les plateformes, les plateformes qui prospèrent le plus aujourd'hui sont celles qui reçoivent la plus grande partie de cet argent. Il est impossible de faire en sorte que ces fonds engendrent de nouveaux modèles qui, dans les faits, pourraient réussir sans ce soutien au journalisme.
    Merci, monsieur Hatfield.
     Monsieur Chan, on a dit que le marché connaît une perturbation des revenus publicitaires. De toute évidence, ces revenus se déplacent du papier vers le virtuel. Je me demande simplement, alors... Tout ce projet de loi repose sur le postulat qu'il faille d'une quelconque façon tenir compte des pertes de revenus publicitaires ou compenser ces pertes pour maintenir à flot certaines sources d'information, ou à tout le moins leur permettre de surnager.
     Je me demande ce qu'en pense Meta.

  (1335)  

    Vous avez un peu moins de 30 secondes pour répondre, monsieur Chan.
    Je répondrais simplement que comme les événements récents l'ont démontré, dans l'industrie de la publicité, personne n'est à l'abri des forces du marché, de ces forces extrêmement concurrentielles, et ce, pas plus mon entreprise que les autres. Mais il serait faux de prétendre que les plateformes numériques comme Facebook sont à l'origine de ce mouvement. Si on se reporte aux reportages à ce sujet, le mouvement remonte au début des années 2000, bien avant la naissance de Facebook et bien avant que nous commencions à monétiser notre activité.
    Merci beaucoup. Je crois que le temps est écoulé.
     Je donnerai maintenant la parole aux libéraux, plus précisément à M. Anthony Housefather.
     Monsieur Housefather, vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Tout d'abord, je trouve assez ironique de constater qu'à sa dernière présence ici, M. Chan était incapable de me dire le montant des revenus publicitaires dérivés par Facebook au Canada, mais qu'aujourd'hui il puisse extrapoler la valeur qu'offre Facebook aux éditeurs pour les liens vers lesquels l'entreprise les dirige.
     Essentiellement, je vais vous poser plusieurs questions. Si je pose une question qui demande une réponse par oui ou par non, je m'attends à ce que vous répondiez par oui ou par non.
     La semaine dernière, Facebook s'est dit déçu de ne pas avoir été invité par le Comité.
     Monsieur Dinsdale, est‑ce que Facebook a à un moment ou à un autre contacté la présidente ou la greffière du Comité pour demander à comparaître?
    Je ne suis pas au courant de ces détails. Ce n'est pas une réponse que je...
    J'ai vérifié hier auprès de la greffière, et la réponse était non.
     À la dernière comparution de Facebook, monsieur Chan et monsieur Dinsdale, j'ai posé plusieurs questions sur l'expérience de Facebook en Australie, où votre entreprise menaçait de bloquer des pages à cause d'une loi semblable au projet de loi C‑18. Facebook a mis sa menace à exécution, provoquant un chaos d'une semaine. À ce moment, vous avez dit que vous ne pouviez pas répondre et que vous ignoriez ce qui se passerait en Australie. Le Comité a alors convoqué Mark Zuckerberg, votre PDG, qui aurait pu répondre aux questions. Il a ignoré notre convocation.
     Considérant que M. Dinsdale a la semaine dernière fait la même menace au Canada concernant la fermeture de pages, et que M. Chan a réitéré cette menace dans son témoignage d'aujourd'hui, j'ose espérer que vous êtes maintenant tous deux en mesure de nous parler de l'expérience australienne.
     Divers dénonciateurs ont affirmé que pour planifier la fermeture en Australie, Facebook avait fait préventivement signer des ententes spéciales de non-divulgation à de nombreux membres de son personnel.
     Monsieur Dinsdale, est‑ce que vous exigez normalement aux employés de votre entreprise de signer des ententes de non-divulgation pour les grands événements Facebook?
    Encore une fois, monsieur, cet aspect ne relève pas de mon champ d'activité. Je ne serais pas en mesure de répondre à cette question précise.
    Est‑ce qu'on vous a demandé, à vous ou à M. Chan, de signer une entente de non-divulgation pour planifier une future fermeture au Canada?
    Je vous répondrais, monsieur, que nous sommes venus ici dans un esprit de coopération pour tenter de discuter de la substance du projet de loi, et pour faire valoir qu'advenant l'adoption du projet de loi tel qu'il est proposé, nous pourrions être obligés d'envisager l'opportunité d'une telle mesure.
    Je vous ai posé une question précise. Est‑ce que vous…
    Monsieur Housefather…
    Monsieur Chan, la question s'adresse à M. Dinsdale.
     Monsieur Dinsdale…
    M. Kevin Chan: Je pense que la question s'adressait à nous deux.
     M. Anthony Housefather: Ma question s'adressait à M. Dinsdale.
     Monsieur Dinsdale, est‑ce qu'on vous a demandé, à vous ou à quelqu'un de votre connaissance, de signer une entente de non-divulgation particulière en vue de planifier une fermeture au Canada?
    Monsieur, je vous le répète, nous sommes ici pour discuter du fond du projet de loi dans un esprit de coopération. Ce que je peux dire, c'est que si le projet de loi est adopté sans modification, nous pourrions être obligés de nous demander s'il faut prendre de quelconques mesures.
    Je suppose que je vais considérer vos propos comme un refus de répondre si vous l'avez fait ou non. Pour moi, c'est plutôt une réponse affirmative.
    Monsieur Housefather, vous pourriez me le demander, parce que je...
    Monsieur Chan, vous pourrez parler quand on vous posera une question. Vous ne pouvez malheureusement pas intervenir maintenant.
    Selon des documents provenant de lanceurs d'alerte australiens, même si Facebook a déclaré que l'interdiction ne devait viser que les médias d'information, « les dirigeants savaient que le processus de classification des nouvelles en vue de la suppression de pages était si large qu'il engloberait vraisemblablement les pages du gouvernement et des autres services [de santé et] sociaux ».
    En fait, le blocage a touché plus de 170 000 pages, y compris celles du ministère des services d'urgence et de lutte contre les incendies, du Conseil de l'itinérance, de Suicide Prevention Australia, d'organismes d'aide aux victimes de violence domestique, du Kids' Cancer Project, du Royal Children's Hospital, du Jewish Holocaust Centre, des agences de lutte contre les incendies et de sauvetage des États pendant la saison des incendies, ainsi que des administrations municipales et territoriales.
     Facebook a alors déclaré qu'il s'agissait d'une « erreur technique » que l'entreprise « travaillait à corriger », en qualifiant de « catégoriquement et manifestement fausse » toute allégation voulant que Facebook ait agi délibérément.
     Monsieur Dinsdale, êtes-vous d'accord pour dire qu'il s'agissait d'une erreur technique et qu'il n'y a eu aucune tentative de bloquer ces pages?
    D'après ce que je comprends, et comme nous l'avons dit, c'est que tous ces blocages ont été faits par erreur et ont été rectifiés le plus rapidement possible.

  (1340)  

    Étrangement, ils semblent avoir été rectifiés dès que le Sénat a approuvé le projet de loi révisé avec les amendements proposés par Facebook. L'équipe d'intervention de Facebook a pu le faire quelques minutes seulement après l'adoption des amendements par le Sénat, soit huit jours après les blocages initiaux.
     Pouvez-vous expliquer un tel écart, monsieur Dinsdale? Comment se fait‑il que ces pages ne pouvaient être restaurées rapidement, mais que soudainement, quand le Sénat a approuvé le projet de loi révisé que Facebook avait renégocié, les pages ont été rétablies comme par magie?
    Cela me semble un peu — en tout respect — spéculatif. Je ne peux que réitérer notre réponse: toutes les erreurs commises ont été corrigées dans les meilleurs délais.
    Je veux bien, mais il appert — encore une fois selon des lanceurs d'alerte — que Facebook n'a pas utilisé de « méthode canari standard » pour tester la précision avec laquelle cet algorithme pouvait détecter ou empêcher un surblocage avant une action. Même s'il était clair que le nombre de sites touchés était beaucoup plus élevé que ce qu'on admettait publiquement, ce qui aurait normalement déclenché une mise en pause ou un recul du processus de blocage, la haute direction a ordonné que le blocage s'applique totalement en quelques heures.
     Comment, alors, pouvons-nous croire qu'il s'agissait d'une erreur technique? Avez-vous fait un post-mortem en Australie, et pouvez-vous nous assurer que la même chose ne se reproduira pas au Canada?
    Vous avez 30 secondes pour répondre, monsieur Dinsdale.
    Merci, madame la présidente.
     Encore une fois, ce que je peux répondre, c'est que si le projet de loi est adopté sans modification et que nous sommes forcés d'envisager cette option, nous essaierons alors de le faire avec un maximum de consultation et de transparence. Je ne suis certainement pas en mesure de préciser ce qui en découlera. Je peux clairement réitérer que les erreurs commises en Australie n'étaient pas plus que cela — des erreurs.
    Merci beaucoup, monsieur Housefather et monsieur Dinsdale.
     Je vais maintenant céder la parole à M. Champoux du Bloc québécois, pour six minutes.
    Allez‑y, monsieur Champoux.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Merci aux témoins de leur présence au Comité aujourd'hui pour parler de cet important projet de loi sur lequel nous travaillons.
    Comme M. Housefather, tout à l'heure, je suis assez heureux de voir que M. Chan a retrouvé son cartable qui contient les chiffres de Facebook. En effet, la dernière fois qu'on lui a posé des questions sur les revenus de Facebook, il a été plutôt difficile d'obtenir des réponses. Je vais donc en profiter.
    Monsieur Chan, j'imagine que vous vous souvenez d'avoir discuté l'an dernier avec M. Jean‑Hughes Roy, un professeur réputé qui se consacre beaucoup à la question des médias sociaux. Dans une entrevue à TVA, il disait que, selon lui, il est évident qu'une partie des revenus de Facebook — et de Google aussi, mais parlons de Facebook aujourd'hui — passe par le contenu journalistique.
    Lors de votre conversation avec lui, vous vous rappellerez peut-être lui avoir dit que le fait d'avoir bloqué l'accès au contenu journalistique en Australie en guise de protestation n'avait eu aucune incidence sur les revenus de votre société.
    Regardons un peu les chiffres. Vous pouvez les contester, si vous voulez, mais M. Roy arrive à des résultats fort intéressants et nous apprend que les revenus publicitaires moyens par utilisateur de Facebook sont d'environ 82,21 $. Donc, au prorata et selon les chiffres de 2017, les Québécois auraient fait gagner à votre entreprise environ 451,2 millions de dollars américains. Je suis peut-être trop précis avec mes virgules, on peut arrondir.
    Monsieur Chan, êtes-vous d'accord avec ces chiffres?
    Ce n'est pas moi qui ai vérifié ces chiffres. Nous pouvons continuer avec votre hypothèse, mais je ne peux pas confirmer ces chiffres.
    D'accord. Allons-y.
    En 2018, Mark Zuckerberg a déclaré que le pourcentage du contenu médiatique était autour de 4 % avec le nouvel algorithme de Facebook. On présume donc que les revenus provenant du contenu journalistique de Facebook représentent, en sol canadien, autour de 23 ou 24 millions de dollars. On parle des revenus relayés par les médias de chez nous.
    Reconnaissez-vous ces chiffres? Êtes-vous d'accord avec cela?
    Non. Je pense qu'il y a un manque ou un problème de logique avec cette façon de calculer.
     En effet, le pourcentage de contenu sur Facebook n'est pas égal au pourcentage de revenus. Les gens mettent des milliards et des milliards d'éléments de contenu sur Facebook. N'importe quelle personne, que ce soit un Canadien ou un Québécois, peut voir jusqu'à près de 1 000 éléments de contenu par jour. La majorité de ce contenu n'est vu par personne, parce qu'il y a trop de contenu, et pas assez d'heures dans une journée.

  (1345)  

    Donc, selon vous, les revenus qui proviennent du partage de contenu journalistique ne valent rien pour Facebook, et les médias ont complètement tort de penser que Facebook devrait contribuer.
    Pourtant, vous avez signé des ententes avec des entreprises médiatiques australiennes, notamment une grosse entente de trois ans avec News Corp Australia. Si le contenu journalistique ne vaut rien pour Facebook et ne lui rapporte rien, pourquoi avez-vous accepté de si bon cœur, si vous me permettez l'ironie, de signer de telles ententes et de revenir sur votre décision de bloquer l'accès au contenu? Si cela ne vaut rien pour vous et si cela ne rapporte rien à Facebook, pourquoi, dans ce cas, être revenu en arrière et avoir signé ces ententes?
    Il faut être clair: nous n'avons pas signé d'ententes commerciales pour payer pour du marketing qui est déjà gratuit. Nous avons signé des contrats commerciaux en Australie, et aussi au Canada, pour développer de nouveaux modèles d'innovation pour la plateforme et pour des outils en lien avec Internet. Les gens qui ont fait ce genre de commentaires ont peut-être mal compris.
    Nous n'avons jamais payé, où que ce soit dans le monde, pour du marketing gratuit. Nous n'avons jamais payé pour des liens, nous ne payons pas présentement pour des liens et nous ne voulons vraiment pas le faire, parce que cela briserait quelque chose de très important, non seulement pour notre plateforme, mais pour Internet, car Internet appartient à tout le monde.
     Oui, bien sûr. Il n'existe pas de prix Nobel de générosité, mais je pense qu'on devrait en créer un pour Facebook, monsieur Chan.
    Madame Charette, je vais vous poser une question sur laquelle nous pourrons revenir lors d'un prochain tour de questions, parce qu'il nous reste peu de temps dans celui-ci. Je voudrais parler avec vous de l'importance de mettre en place des critères de qualité journalistique. Je pense que c'est un sujet important à la Fédération nationale des communications et de la culture.
     En 30 secondes, pouvez-vous me dire ce que vous entendez par là? Que devrait-on mettre en place à même la loi pour s'assurer que les entreprises journalistiques reconnues et admissibles sont des entreprises de qualité?
    Ce qui est traditionnellement reconnu comme étant le code d'éthique journalistique souligne l'importance de traiter d'une diversité de points de vue et de ne pas avoir d'orientation idéologique. Pour la Fédération, le critère de qualité journalistique est très important sur le plan de la reconnaissance professionnelle.
    Je crois que c'est Google qui a suggéré que tous les groupes produisant un journal pourraient demander à être rétribués, et ce, même s'ils ne produisent qu'un journal mettant de l'avant leur propre orientation au lieu du fruit d'un travail journalistique professionnel.
    Je ne pense pas qu'on devrait reconnaître les entreprises de presse sur la base du nombre de journalistes qu'elles emploient, mais plutôt en fonction du professionnalisme de leur travail, reconnu selon des critères assez précis. D'ailleurs, la Loi de l'impôt sur le revenu énonce certains critères pour reconnaître des entreprises de presse professionnelles. Ce sont ces critères qui devraient être mis de l'avant, pas le nombre de journalistes permanents.

[Traduction]

     Merci, madame Charette.
     Nous passerons maintenant à M. Julian du NPD, pour six minutes.
    Monsieur Julian, pour six minutes.
    Madame la présidente, je vais remplacer M. Julian aujourd'hui.
    D'accord, monsieur MacGregor, vous avez six minutes.
    Merci.
     Merci à tous nos témoins. Je vais faire de mon mieux pour remplacer aujourd'hui M. Julian dans la discussion du projet de loi C‑18. Je remercie tous les intervenants de leurs commentaires.
     Madame Charette, je commencerai par vous.
     Durant votre déclaration liminaire, je prenais des notes, et je partage entièrement vos préoccupations et votre volonté de préserver la robustesse et la diversité du paysage médiatique québécois, mais je pense que cette nécessité s'applique également à plusieurs autres régions du Canada. Je sais qu'aux yeux de la FNCC et de nombreux autres intervenants, le projet de loi C‑18 établit des critères trop restrictifs pour que les organes d'information soient admissibles aux négociations avec les géants du Web.
     J'ai quelques questions pour vous. Tout d'abord, si les seuils d'admissibilité prévus au projet de loi C‑18 demeuraient inchangés, qu'adviendrait‑il des milliers de petites entreprises d'information, dont beaucoup sont sans but lucratif, comme les postes de radio et de télévision communautaires au Canada et au Québec?

  (1350)  

[Français]

    Je considère qu'il faut avoir une qualification de presse professionnelle pour y être admissible. Il faut que ce soit une salle de presse professionnelle avec un journaliste qui répond à des critères d'éthique journalistique. La demande d'une entreprise faisant simplement de l'animation radio n'est pas valable, selon moi.
    Plusieurs petits médias régionaux, notamment des médias écrits qui n'ont qu'un seul journaliste permanent, devraient effectivement pouvoir être reconnus publiquement quand leur travail est mis de l'avant par une plateforme de partage comme Facebook ou Google. Pour la multiplicité et la diversité des voix, il est donc très important de tenir compte de ces petits médias. On ne peut pas penser que, parce qu'il y a des ententes signées avec des grands médias nationaux, cela va couvrir l'ensemble des possibilités.
     Tout le monde a souffert de l'accaparement des revenus publicitaires par les plateformes numériques. De leur côté, les petits médias n'ont pas su subsister, parce qu'ils n'avaient pas d'autres façons de se redéployer, que ce soit en ligne ou autrement. Il est essentiel que ceux qui restent soient préservés.
    Au Québec, la Coopérative nationale de l'information indépendante, qui a repris six grands journaux régionaux, a publié des chiffres concernant Facebook. La Coopérative a constaté une diminution de 22 % à 23 % des consultations en ligne référées par Facebook depuis un an. En effet, on constate un enfermement grandissant chez Facebook, qui privilégie désormais des éléments de contenu autonomes ne contenant pas de liens Internet, évitant ainsi au lecteur de devoir sortir de l'environnement de Facebook pour consulter ce contenu. Selon notre analyse, c'est ce qui a causé la diminution des taux de fréquentation des sites des médias de la Coopérative.
     Il faut savoir que tant La Presse que les journaux de la Coopérative ne sont rémunérés que si un utilisateur est redirigé vers le contenu du site Internet d'un de ces journaux par un lien affiché par le produit consommé sur Facebook. En l'absence d'un tel lien, que Facebook omet de plus en plus dans ses publications, le journal n'est pas rémunéré et perd des revenus. J'espère avoir été claire.

[Traduction]

    Parfait, merci de votre réponse.
     Ma deuxième question se rattache à la première. J'aimerais aborder un article précis du projet de loi, soit l'article 27, qui traite de l'admissibilité. Quels amendements la FNCC proposerait-elle d'apporter à cet article pour que le seuil d'admissibilité soit abaissé de manière à inclure davantage de petits organes d'information, qu'ils soient à visée commerciale ou sans but lucratif? Je pense que cela devrait nous aider dans l'étude article par article du projet de loi.

[Français]

     Permettez-moi de me référer à l'article 27. Je ne connais pas tous les articles par cœur.
    S'agit-il des radiodiffuseurs publics?

[Traduction]

    C'est l'article sous « Entreprises de nouvelles admissibles: désignation », l'article 27 sous le titre « Admissibilité ».

[Français]

    Comme je le disais, nous croyons fermement que tous les médias d'information professionnels devraient être admissibles, peu importe leur taille. Cela vise aussi ceux qui se consacrent à des domaines précis, qu'il s'agisse de l'économie ou des arts et de la culture. Par ailleurs, certains grands médias publient des cahiers économiques, culturels ou sportifs, qui constituent de l'information générale. Nous ne comprenons pas pourquoi le journaliste professionnel qui s'intéresse au sport, à la culture ou à l'économie ne pourrait pas tirer profit de cette entente à titre individuel.
    Nous croyons également que les salles de presse des diffuseurs publics, même s'il n'y en a pas tant que cela, devraient elles aussi être admissibles, parce que ces derniers produisent aussi du contenu. À titre d'exemple, nous payons tous pour le contenu produit par Radio-Canada. Si cette entreprise est rétribuée, ce sont tous les Canadiens qui en bénéficieront, en fin de compte.

  (1355)  

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Il vous reste 20 secondes.
    Je m'en tiendrai à cela, madame la présidente.
    Merci beaucoup. Je sais que vous remplacez aujourd'hui M. Julian, et que c'est là une grosse commande, mais vous vous en êtes fort bien tiré. Merci.
     Passons maintenant au tour de questions suivant. Les interventions seront de cinq minutes.
     Nous allons commencer par Mme Gladu, du Parti conservateur.
     Vous avez cinq minutes, madame Gladu.
    Merci, madame la présidente, et merci également aux témoins présents aujourd'hui.
     Je suis ravie de constater que mes collègues libéraux commencent à se rendre compte qu'à défaut d'y apporter d'importants amendements, ce projet de loi pourrait avoir des conséquences négatives imprévues, comme le blocage par Meta du contenu de 22 millions de Canadiens.
     Ma question s'adresse à M. Chan. En Australie, lors du blocage de contenu et après qu'une législation similaire au projet de loi canadien eut ensuite été proposée, des amendements ont été demandés et mis en place. En quoi consistaient ces amendements, et lesquels devrions-nous apporter au projet de loi C‑18 pour éviter les mêmes conséquences négatives?
    Si vous le permettez, j'aimerais simplement apporter une rectification concernant la série précédente de questions, où je n'ai pu intervenir même si j'avais des réponses très claires. Je pense qu'il est important, aux fins du compte rendu, que le Comité entende la vérité. Je précise que je n'ai jamais signé d'entente de non-divulgation, et je jugerais hautement inapproprié qu'on prétende le contraire.
     À mes yeux, il est juste de dire — et l'équipe voulait simplement que je rectifie les choses — que nous avons effectivement cherché à comparaître devant le Comité, et je crois qu'on nous a dit de nous attendre à une invitation. Mais vous conviendrez tous — et c'est peut-être important que j'explique le processus, parce que tout le monde n'a pas l'occasion et la chance de comparaître — qu'on ne peut évidemment pas s'imposer à un comité; il faut être invité.
    Je voulais simplement remettre les choses au clair sur ces deux points.
    Oui, c'était très clair, s'assurer que le Comité devait inviter Meta et l'entendre.
     Alors, quels changements devons-nous apporter au projet de loi C‑18 pour nous assurer de ne pas subir les mêmes conséquences que l'Australie?
    Nous allons proposer au Comité un certain nombre d'amendements en temps opportun.
    Allez-vous les soumettre par écrit?
    Oui.
    Excellent. C'est tout ce dont j'ai besoin, alors. Merci.
    J'ai une question pour M. Hatfield. Je n'ai que cinq minutes.
     Je crains également que même si le projet de loi vise à protéger les petits organismes de nouvelles qui ont perdu des revenus, les critères établis empêchent la participation des entreprises ayant un seul journaliste ou quelques journalistes à temps partiel; de plus, ces critères n'exigent même pas l'application des normes élémentaires de journalisme — nous disons au Canada qu'ils peuvent s'autodéfinir — et ils sont axés sur l'information générale.
     Je crains que ces critères excluent par exemple les médias ethniques. Souvent, il s'agit d'entreprises familiales ou de petites organisations, qui ne sont pas nécessairement considérées comme des organes d'information générale. Partagez-vous cette crainte?
    Oui, tout à fait. À mon avis, le problème tient au fait que les critères établis mettent l'accent sur les caractéristiques organisationnelles: employer deux journalistes ou axer d'une certaine façon le contenu. Les critères ne semblent pas s'intéresser à la qualité du produit: « Faites-vous du bon journalisme? Contribuez-vous au discours public au Canada? »
    Nous pensons qu'il faudrait modifier ces deux aspects — en resserrer un et relâcher le second — pour obtenir un résultat qui satisfera vraiment la population.
    Je déplore également que le gouvernement détermine maintenant qui est inclus et qui est exclu, et qu'il récompense les grands conglomérats médiatiques au détriment des petits organes de presse visés au départ. Cela ne semble certainement pas contribuer à la liberté d'expression et à la liberté de presse.
     Êtes-vous d'accord, monsieur Hatfield?
    Entièrement d'accord. Personne ne veut que le gouvernement décide qui fait de la bonne information. C'est une éventualité franchement inquiétante, si on y pense deux secondes.
     En même temps, la façon dont le gouvernement a mis cela en place... Il a empêché les entités privées de porter ces jugements, et créé un nouveau système où personne ne s'interroge vraiment sur la qualité du contenu diffusé. C'est en fait une ingérence indue dans le droit qu'ont les plateformes comme Meta, Google ou autres de prendre ces décisions. D'après moi, les gens souhaitent que ce soient les médias les plus dignes de confiance, comme le National Post, le Wall Street Journal ou le Globe and Mail, qui figurent en tête de leurs flux de nouvelles.

  (1400)  

    Parfait, je vous remercie.
     Monsieur Chan, pensez-vous également que ce projet de loi mine la liberté d'expression au Canada?
    Oui. Comme je l'ai dit précédemment, il est problématique d'y inclure ce qui constitue dans les faits un péage sur les liens. Cette mesure finira par engendrer de graves frictions. C'est une érosion de la liberté d'expression.
     J'ajouterais, madame Gladu, que...
    Adressez-vous à la présidence, s'il vous plaît.
    Madame la présidente, j'ajouterais que cette mesure est doublement problématique, car 2022 est l'année où le Canada préside la Coalition pour la liberté en ligne, qui milite fortement pour un Internet libre et ouvert.
    Merci beaucoup, monsieur Chan.
     Madame Gladu, je suis désolée, mais votre temps est écoulé.
     Nous allons maintenant passer à M. Chris Bittle, du Parti libéral.
    Allez‑y, monsieur Bittle, pour cinq minutes.
     Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je déplore vivement que Facebook pique une colère sur la scène publique pour comparaître devant le Comité, et refuse ensuite de répondre aux questions à moins qu'il ne s'agisse des questions faciles et amicales lancées par les conservateurs. Tant qu'à y être, pourquoi n'avez-vous tout simplement pas tenu une conférence de presse conjointe avec les conservateurs pendant que vous menaciez la population canadienne?
     Monsieur Dinsdale, vous venez ici menacer les Canadiens — les menacer de faire ce que vous avez fait en Australie, c'est‑à‑dire retirer les soutiens et les informations sur les vaccins, les centres de prévention du suicide et les services d'incendie. Vous avez mis en danger la vie des Australiens, et vous venez ici pour menacer d'infliger la même chose aux Canadiens. C'est proprement choquant. Meta a le comportement d'un requin de l'industrie, tout en disant: « Ne nous réglementez pas. Nous sommes des entreprises socialement responsables ».
     C'est vraiment incroyable quand on regarde ce qui s'est passé en Australie...
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    Allez‑y, madame Thomas.
    Il est déjà arrivé, dans ce comité, qu'en tant que présidente vous avez jugé irrecevables des allégations comme celle de M. Bittle ou des accusations portées contre un témoin. Je me demande si vous envisagez de faire de même dans ce cas.
    Cette décision m'appartient, madame Thomas. M. Bittle pose des questions très musclées, mais je ne pense pas qu'il manque de respect au témoin.
     Merci.
    Madame la présidente, j'espère que mon temps d'intervention a été mis en pause. Je n'ai même pas posé de question.
    Oui, il l'a été.
    Merci.
     On nous a parlé de la générosité de Facebook, qui a fourni pour 230 millions de dollars de liens, mais d'un autre côté, « Nous allons également nous accaparer de tous les revenus publicitaires de vos agences de presse », ce qui est une générosité pour le moins intrigante. Facebook laisse entendre que ces mesures ébranleront Internet, mais Microsoft — qui en sait peut-être un peu plus sur Internet que moi — nous dit le contraire. Cela n'a pas été le cas en Australie. Cela ne se reproduira plus. On ne fait que perpétuer l'alarmisme.
    Allons en Australie, si vous voulez bien. Le 17 février 2001, la Chambre des représentants a adopté le projet de loi initial. Le lendemain, on a assisté à un surblocage, y compris de tous les sites mentionnés par M. Housefather. La réponse officielle donnée par Facebook le jour 2, soit le 18 février, était que le blocage se déroulait comme prévu.
     Monsieur Dinsdale, est‑ce que c'était une erreur, comme vous l'avez prétendu tantôt?
    Monsieur Bittle, je ne suis évidemment pas en mesure de commenter les communications qui ont lieu à ce moment à…
    Encore une fois, pourquoi n'avez-vous pas...
    Excusez-moi.
     J'ai eu un peu de difficulté à entendre la réponse de M. Dinsdale. Je vais arrêter le chronomètre et le laisser répondre à nouveau, car je n'ai pas entendu sa réponse. Il y avait de l'écho.
    Merci, madame la présidente.
     Je dirais également que nous voulions, avec la communication de la semaine dernière, signaler à quel point le projet de loi est impraticable pour notre entreprise, et que nous n'aurions peut-être pas l'occasion d'exprimer ces préoccupations. Nous vous sommes reconnaissants de pouvoir vous faire part de ces inquiétudes. Nous espérons que nous pourrons forger une loi davantage fondée sur des informations probantes, qui tiendra compte du mode de fonctionnement des plateformes et d'Internet.
    Merci.
     Allez‑y, monsieur Bittle.
    Une autre question, et une autre non-réponse de Facebook, une entreprise qui a exigé de comparaître ici. Devrais‑je me contenter de poser des questions faciles, monsieur Dinsdale? C'est ce que vous souhaitez? J'ai déjà eu affaire à Facebook dans des comités — à M. Chan — et au mépris de Meta envers le processus parlementaire... M. Housefather en a parlé plus tôt. J'ai appris aujourd'hui qu'aux États-Unis un juge a condamné Meta à une amende de 25 millions de dollars pour avoir enfreint intentionnellement et à répétition les lois américaines sur le financement des campagnes électorales. Nous savons maintenant ce que Facebook et Meta pensent du processus démocratique.
     En bout de piste, dans des communications dévoilées par des lanceurs d'alerte, nous avons vu M. Zuckerberg célébrer le résultat, ce résultat qui a mis en danger la vie des Australiens. Était‑ce une erreur de la part de M. Zuckerberg?

  (1405)  

    Monsieur, encore une fois, je pense que nous avons reconnu publiquement que des erreurs ont été commises. Encore une fois, notre but aujourd'hui est de formuler nos préoccupations concernant le projet de loi, et nos préoccupations sur...
    C'est basé sur...
    ... représentation de la relation entre les éditeurs et...
    Excusez-moi, monsieur Dinsdale, mais c'est mon temps de parole.
     Cette mesure législative est basée sur le modèle australien. Je crois que la plupart des gens le savent. Vous avez proféré la même menace: de mettre en danger la vie des Canadiens. Je suppose que la question à poser est la suivante: vous avez mis en danger la vie de milliers, voire de millions d'Australiens; êtes-vous prêt à faire la même chose aux Canadiens?
    Je pense que ce projet de loi est...
    La question ne s'adressait pas à vous, monsieur Chan
    Désolé, je ne m'en étais pas rendu compte. Je pensais que c'était une question générale posée à Meta.
    Non, elle s'adressait à M. Dinsdale. J'étais au courant. Merci.
    Je...
    Vous devriez probablement écouter, monsieur Chan.
    Oh, j'écoute très attentivement.
    Allez‑y, monsieur Dinsdale.
    Encore une fois, monsieur — comme l'a dit M. Chan —, la loi australienne a pour conséquence que nous ne payons pas, en fait, pour les liens. Un modèle basé sur le modèle australien est à certains égards inapplicable, car nous ne sommes pas désignés en Australie.
    Vous avez 30 secondes.
    Les accords que nous avons conclus en Australie [inaudible] autrement que pour le partage de liens, etc.
    Je comprends, monsieur Dinsdale.
     Encore une fois, c'est décevant de voir brandir ces tactiques de requins de l'industrie, qui menacent les parlementaires et les Canadiens. Je ne manquerai pas de contacter Whistleblower Aid et sa PDG Libby Liu pour lui demander de présenter un briefing au Comité, parce que les tactiques employées par Facebook et Meta en Australie pour mettre impunément en danger la vie des gens... Vous dites que c'était une erreur, mais ce n'est pas ce qui ressort de la correspondance et des courriels que vous avez échangés avec votre chef de la direction. Vous vous présentez ici sans avoir la volonté ou la capacité d'en parler. Votre conduite est vraiment honteuse, monsieur.
    Je dirais que M. Bittle a déformé...
    Merci, monsieur Bittle. Votre temps est écoulé.
     Nous passerons maintenant à M. Champoux du Bloc québécois, pour deux minutes et demie.
    Monsieur Champoux, je vous en prie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame Charette, j'aimerais continuer la discussion sur la qualité du journalisme et sur la façon dont on peut s'assurer que les entreprises de nouvelles admissibles sont des entreprises sérieuses.
    On nous a envoyé des propositions d'amendement. Par exemple, Google souhaite que nous supprimions l'article 51 du projet de loi, qui interdirait notamment une prétendue préférence indue. Selon Google, cette mesure va empêcher sa plateforme et d'autres plateformes d'appliquer des politiques et de fournir des fonctionnalités qui élèvent les sources d'information fiables par rapport au contenu de qualité inférieure. Si on interprète cela comme il faut, cela revient à dire qu'on se fierait à Google pour juger de ce qui est du contenu fiable et de ce qui ne l'est pas.
    En tant que fédération qui représente un grand nombre de journalistes et de salles de nouvelles, que pensez-vous de cette proposition et de cette affirmation?
     À la base, ce projet de loi, qui est inspiré de l'expérience de l'Australie et du Bureau de la concurrence, tente de réguler des relations économiques entre diverses entreprises et d'en corriger le déséquilibre actuel. C'est vraiment ce dont il est question.
    Je trouve intéressant que le journalisme professionnel soit déjà assujetti à des normes. En effet, la plupart des entreprises journalistiques au Canada sont surveillées par des conseils de presse qui vérifient la qualité de leurs publications et qui peuvent être interpellés par le public ainsi que par divers groupes d'intérêts si, par exemple, une publication est mal orientée ou ne respecte pas les normes en matière de journalisme. Des entreprises de presse qui acceptent que ces conseils surveillent la qualité de leurs publications, on en retrouve partout au Canada et en Europe. C'est ce que font les entreprises de presse professionnelles.
     Prenons l'exemple d'un journalisme de qualité, qualifié. J'ai parlé de critères...
    Vous avez parlé des critères d'admissibilité pour une organisation journalistique canadienne qualifiée...

  (1410)  

    Ce sont les mêmes.
    ... mais ces critères traitent plutôt d'admissibilité au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[Traduction]

    Vous avez 30 secondes.

[Français]

    Pour ma part, ce dont je parle et que je souhaiterais voir, c'est davantage des critères garantissant la qualité. Je parle ici de normes journalistiques, déontologiques. Il en a été question plus tôt.
     Selon vous, est-ce que cela devrait être inscrit dans le projet de loi et, éventuellement, dans la Loi, de sorte que cela n'incombe pas au CRTC ou à un autre organisme?
    Il serait vraiment bon que les organismes admissibles...

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Charette.
    Je vais maintenant donner la parole au NPD.
     Monsieur MacGregor, vous avez deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
     Monsieur Chan, c'est à vous que j'aimerais poser mes questions.
     Je vais être franc avec vous. J'ai eu quelques inquiétudes au sujet de votre entreprise et de son influence sur nos institutions démocratiques et sur notre société civile.
     Mon rôle principal à la Chambre des communes est celui de porte-parole en matière de sécurité publique. Je siège au Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Plus tôt cette année, nous avons produit un rapport sur l'extrémisme violent à motivation idéologique, et nous avons entendu des témoignages assez accablants sur le rôle joué par les entreprises de médias sociaux, notamment en ce qui concerne la désinformation et les fausses nouvelles.
     Dans votre article du 21 octobre, vous avez menacé de devoir vous demander si Facebook continuerait à autoriser le partage de contenu d'actualités au Canada.
     Est‑ce vraiment ce qui se passe ici? Vous avez eu toutes ces preuves accablantes contre votre entreprise sur son rôle dans le partage de la désinformation et de la mésinformation. Envisagez-vous sérieusement d'aggraver la situation en vous débarrassant du journalisme crédible, qui est l'un des remparts d'une société démocratique? Est‑ce ce qui se passe ici, monsieur Chan?
    Il est important de préciser que, sur Facebook, ce que vous voyez, ce sont les conversations et les communications de 21 millions de Canadiens. Ce sont leurs opinions, et ce sont les échanges qu'ils ont entre eux et avec leurs amis et leur famille. C'est ce que vous voyez sur Facebook.
     Cela dit, mon collègue a peut-être quelques idées sur la vérification des faits, l'idée générale de la désinformation et la façon dont elle se rapporte au projet de loi C‑18, que les législateurs pourraient trouver utiles. Si vous le permettez, je vais demander à M. Dinsdale d'essayer de répondre à cette question.
    Je vous remercie.
     Il est important de prendre en compte que nous avons le plus grand réseau de vérification des faits au monde, toutes plateformes confondues. Il compte 90 vérificateurs de faits agréés par le réseau international de vérification des faits, qui est une filiale du Poynter Institute.
     Nos principaux piliers sont les suivants: nous identifions, nous examinons et nous agissons sur le contenu. Les vérificateurs des faits eux-mêmes sont en mesure de chercher le contenu qu'ils souhaitent vérifier. Ensuite, ils l'examinent. Nous utilisons également l'intelligence artificielle pour ce travail, pour suggérer des choses. Ils l'examinent ensuite et sont en mesure d'apposer des étiquettes comme « faux », « modifié », « partiellement faux », etc.
     La partie importante de la loi, qui, je pense, a été soulignée par M. von Finckenstein et M. Hatfield, concerne les préoccupations concernant le fait que les clauses sur la préférence indue dans le projet de loi ne nous permettent pas de diminuer la diffusion de la désinformation dans ce sens. Cela devrait préoccuper tout le monde.
    Merci beaucoup, monsieur Dinsdale.
     Nous passons maintenant aux conservateurs.
     Monsieur Waugh, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
     Il était intéressant, l'autre jour, d'entendre le ministre du Patrimoine déclarer que 468 médias ont fermé dans ce pays depuis 2008. Je dirai également que bon nombre de ces médias qui ont fermé leurs portes étaient Bell Media, Rogers, National Post et Torstar. Ce sont ces mêmes organisations qui veulent profiter de l'assiette au beurre qu'est le projet de loi C‑18. C'est vraiment intéressant.
     Ce que le ministre n'a pas dit dans son témoignage, c'est que plus de 200 entreprises de nouvelles — des organisations indépendantes — ont ouvert dans ce pays.
     Je voulais simplement faire cette déclaration parce que ce projet de loi ne va pas sauver les médias dans ce pays. Nous avons vu Bell, Rogers, National Post et Torstar s'effondrer dans de petites communautés comme Swift Current, Lloydminster, Prince Albert, Yorkton, Red Deer, Kelowna et Kamloops. Je pourrais continuer ainsi longtemps. Si le groupe d'experts pense que ce projet de loi va sauver les médias ruraux, qu'il se détrompe. Les gens obtiennent leurs nouvelles un peu différemment.
     Je vais m'adresser à M. von Finckenstein.
    Vous êtes l'ancien président du CRTC. Comme vous le savez, vous n'avez aucune expérience en matière de réglementation des nouvelles ou même en matière de concurrence. Je viens de vous dire combien de médias ont fermé dans ce pays. Tout à coup, le CRTC va maintenant avoir le pouvoir de déterminer quels sont les avantages des éditeurs de nouvelles et quelle est la définition de « journaliste », et il supervisera l'arbitrage, y compris le choix de l'arbitre.
     Pensez-vous, monsieur von Finckenstein, que le projet de loi C‑18 devrait attribuer au CRTC un rôle aussi important que celui‑ci?

  (1415)  

    Je vous remercie de cette question.
     Le but de ma présence ici aujourd'hui était d'essayer de dire que la loi actuelle, telle qu'elle est, ne fonctionne pas. Elle doit être modifiée. J'ai axé mon propos en supposant que nous utilisons le concept proposé par le gouvernement, à savoir, la négociation obligatoire entre les plateformes et les éditeurs de presse. Pour que cela fonctionne, les changements que j'ai proposés — je vous ai donné quelques ébauches d'amendements — sont un minimum.
    Est‑ce une bonne façon de procéder? Est‑ce vraiment une fonction dont le CRTC peut et doit s'acquitter? Pour ma part, je ne l'ai jamais fait. Je ne peux même pas en parler, car cela dépend des dirigeants et des ressources disponibles. À mon avis, le concept dans son ensemble n'est pas la bonne façon de procéder.
     Si vous voulez subventionner les éditeurs de presse, vous pouvez le faire d'une myriade d'autres façons. Cela me semble inutilement compliqué. Si vous le faites — et je suppose que ce projet de loi sera adopté —, il devrait au moins être modifié comme je l'ai indiqué.
    Définissez ce qu'est un « intermédiaire de nouvelles numériques ».
    C'était mon premier point. La définition d'intermédiaire de nouvelles numériques dans la loi est totalement inapplicable. Elle se fonde sur toutes sortes de concepts et pas sur des objectifs. Tout dépend du contexte. Ils viennent tous de la concurrence. Je le sais parce que j'ai été commissaire à la concurrence pendant sept ans. Appliquer cela serait très difficile.
     Par conséquent, je recommande d'oublier que les gens s'identifient eux-mêmes ou que le CRTC les identifie. Donnez au ministre le pouvoir de les identifier par voie de règlement, mais il devrait consulter le commissaire à la concurrence pour qu'il le fasse de façon éclairée et systématique en fonction de la compétence en matière de concurrence.
    Définissez ce qu'est un « journaliste ».
    Il y a beaucoup de questions à ce sujet. Qu'est‑ce qu'un journaliste? Nous avons diverses définitions que vous pouvez utiliser.
     Je présume que si ce projet de loi entre en vigueur, le CRTC publiera des lignes directrices sur ce qu'il considère comme un journaliste. Il se fonde sur les précédents.
    Je dirais, parce que j'en étais un, que le journaliste a certainement changé au fil des ans. Je crois que le public a, en fait, souhaité un changement dans le journalisme. Nous avons vu le radiodiffuseur public diriger de très près ses journalistes dans leurs reportages. Nous avons vu cela non seulement avec la Loi sur les mesures d'urgence, mais aussi avec d'autres choses ici au Parlement.
     Le CRTC est‑il capable de gérer quelque chose qu'il n'a jamais eu à gérer auparavant? Il s'occupe de la radio et de la télévision, et maintenant nous lui demandons de s'occuper, essentiellement, du secteur de la presse. En est‑il capable?
    Merci, monsieur Waugh. Vous avez dépassé le temps imparti. Je vais devoir refuser la réponse pour l'instant. J'espère que quelqu'un pourra reprendre le sujet.
     Je passe maintenant la parole aux libéraux, à Lisa Hepfner.
    Madame Hepfner, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Nous parlons de bon journalisme aujourd'hui, alors j'aimerais attirer l'attention du Comité sur un article du Wall Street Journal de mai dernier dont le titre veut dire: Facebook a délibérément semé le désordre en Australie pour influencer une nouvelle loi, selon des dénonciateurs. Voici ce que dit cet article:
L'an dernier, lorsque Facebook a bloqué les nouvelles en Australie en réaction à un projet de loi qui obligerait les plateformes à payer les éditeurs pour leur contenu, elle a également supprimé les pages des hôpitaux, des services d'urgence et des organismes caritatifs australiens. La société a publiquement qualifié d'« accidentel » le chaos qui en a résulté.
À l'interne, l'attaque préventive a été saluée comme un coup de maître stratégique.
Selon les documents et les témoignages de Facebook déposés auprès des autorités américaines et australiennes par des dénonciateurs, le géant des médias sociaux aurait délibérément mis en place un processus trop large et peu rigoureux pour supprimer les pages — permettant à des pans entiers du gouvernement et des services de santé australiens d'être pris dans son filet au moment même où le pays lançait la vaccination contre la COVID.
L'objectif, de dire les dénonciateurs et les documents, était d'exercer une force de négociation maximale sur le Parlement australien, qui votait la première loi au monde obligeant les plateformes comme Google et Facebook à payer les organes de presse pour leur contenu.
Bien qu'elle ait déclaré qu'elle ne visait que les organes d'information, la société a utilisé, pour décider des pages à supprimer, un algorithme dont elle savait qu'il toucherait certainement plus que les éditeurs, selon les documents et les personnes connaissant bien le dossier.
    Monsieur Dinsdale, est‑ce vrai? Les ravages sur l'Australie étaient-ils délibérés?

  (1420)  

    Je vous remercie de cette question.
     Encore une fois, je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à cette question autrement qu'en disant que je n'étais pas impliqué en Australie. Je comprends que des erreurs ont été commises. Nous avons parlé de ces erreurs. Nous voulons éviter que cela se reproduise, et c'est pourquoi nous voulons faire preuve de transparence devant le Comité.
    Merci.
     Je vais continuer et terminer. L'article se poursuit comme ceci:
Les documents montrent également que de multiples employés de Facebook ont essayé de sonner l'alarme au sujet des conséquences et de proposer des solutions, pour ne recevoir qu'une réponse brève ou tardive de la part des dirigeants de l'équipe responsable.
Après cinq jours qui ont semé le désordre dans tout le pays, le Parlement australien a modifié le projet de loi au point qu'un an après son adoption, ses dispositions les plus sévères n'ont pas été appliquées à Facebook ou à sa société mère, Meta Platforms Inc.
« Nous avons atterri exactement là où nous le voulions », de dire Campbell Brown, responsable des partenariats de Facebook, qui a insisté pour que l'entreprise adopte une position agressive, dans un courriel de félicitations à son équipe quelques minutes après que le Sénat australien a voté pour approuver le projet de loi édulcoré à la fin de février 2021.
Le directeur général de Facebook, Mark Zuckerberg, et la directrice de l'exploitation, Sheryl Sandberg, ont également adressé des félicitations, Mme Sandberg saluant le « l'intelligence de la stratégie » et la « précision de l'exécution ».
    Est‑ce bien ce qui s'est passé, monsieur Dinsdale?
    Je répète, je n'étais pas impliqué en Australie.
    Je vais donc demander à M. Chan.
     Est‑ce bien ce qui s'est passé?
    Je ne suis pas au courant, moi non plus.
    Je pense que ce qui est important, cependant...
    Merci.
    Vous avez répondu à ma question.
    Je veux vous parler du fond du projet de loi.
    Permettez-moi de poursuivre, monsieur Chan.
     Je vous ai entendu dire dans votre déclaration liminaire que Meta ne bénéficie pas injustement des nouvelles et que, en fait, c'est l'inverse qui est vrai. Mais nous savons tous que la principale source de succès de Facebook réside dans les données qu'il recueille auprès de ses utilisateurs — 22 millions, je crois, d'après Mme Gladu tout à l'heure.
     Êtes-vous en train de nous dire que les données que vous recueillez sur les personnes qui partagent et lisent des nouvelles n'ont aucune valeur pour Facebook?
    Je le dirais simplement de cette façon, je suppose. En 2017, 5 % du contenu était potentiellement dans le domaine des nouvelles. Ce chiffre est maintenant passé à 3 %.
    Combien de temps les gens consacrent-ils aux actualités sur votre plateforme? Pouvez-vous nous donner des chiffres?
    Je ne les ai pas. Nous n'en tenons pas compte. Mais ce que je peux vous dire...
    Votre mesure la plus importante est le temps passé sur cette plateforme. Nous savons que vous suivez combien de personnes passent du temps sur un contenu spécifique, mais vous dites que vous ne suivez pas le temps que les gens passent sur les nouvelles sur votre plateforme.
    Je suppose que je peux répondre différemment, si vous me le permettez, en précisant que les Canadiens nous disent qu'ils veulent moins de nouvelles sur Facebook, pas plus. Nous nous efforçons de répondre à cette demande.
    Avez-vous des statistiques à l'appui que vous pouvez partager avec notre comité?
    Je crois que nous avons... Nous avons été clairs à ce sujet depuis février 2021. Nous pouvons voir s'il y a quelque chose. Ce n'est pas seulement la préférence déclarée des Canadiens sur Facebook, mais peut-être que si vous me permettez de partager une étude...
    Il vous reste 30 secondes.
     Nous avons déjà entendu à ce comité que vous avez conclu des ententes avec des éditeurs au Canada. Pourquoi le feriez-vous si cela n'avait aucune valeur pour vous?
    Nous l'avons fait pour encourager une transition plus robuste vers le numérique, afin de ne pas nous retrouver dans une situation où les médias traditionnels continueraient en quelque sorte la même approche...
    D'accord. Je vous remercie. Je crois que mon temps est écoulé.
    Je vous remercie de vos questions. Oui, votre temps est écoulé.
     J'aimerais que le Comité sache que nous avons le temps, si tout le monde est très concis, de faire un autre tour complet.
    Je donne maintenant la parole à M. Shields, du Parti conservateur, pour un troisième tour.
     Monsieur Shields, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
     Je trouve cela intéressant avec certains des témoins et leurs commentaires.
     Monsieur Chan, êtes-vous une entreprise privée auprès de laquelle les gens achètent de la publicité?

  (1425)  

    Je suis désolé, monsieur Shields... Est‑ce que les gens achètent de la publicité pour la placer sur Facebook? Oui.
    C'est exact. Je vous remercie.
     Une chose que j'ai entendue de la part des publications de journaux en particulier — les hebdomadaires — est que le gouvernement fédéral avait l'habitude d'acheter des centaines de millions de dollars en publicité dans les journaux. Ils ont déplacé cela vers votre type d'entreprise. Le gouvernement fédéral a‑t‑il, en un sens, comme l'Australie, déplacé sa publicité vers votre plateforme?
    Eh bien, monsieur Shields, je ne connais pas le chiffre exact, mais j'ai évidemment vu de la publicité du gouvernement du Canada sur notre site, alors je présume qu'il y en a une certaine quantité, oui.
    Une chose que les gens de la presse disent, surtout dans le secteur des hebdomadaires, c'est que si le gouvernement voulait soutenir l'hebdomadaire, il renverrait sa publicité sur cette plateforme. Le gouvernement fait de l'argent quand il vous l'envoie. Maintenant, les journaux hebdomadaires disent, « S'il vous plaît, renvoyez‑le-nous », parlant de la publicité.
     Merci.
    Monsieur von Finckenstein, vous avez dit que le CRTC n'était pas en mesure de s'en occuper parce qu'il ne l'a pas fait auparavant. Sommes-nous en présence d'une situation à la ArriveCAN, c'est‑à‑dire d'une entreprise qui sous-traite ensuite un peu partout pour essayer de faire ce qu'il faut? Comment pensez-vous que le CRTC relèvera ce défi?
    Eh bien, je ne dirige pas le CRTC en ce moment, alors tout ce que je peux faire, c'est de supposer. Je dirais qu'ils vont surtout essayer de créer une spécialité interne pour faire face à ce problème. En tant que mesure temporaire, ils peuvent se tourner vers l'extérieur, engager des consultants et sous-traiter ou quelque chose du genre. Il est clair que cela fera désormais partie de leur fonction principale. Ils s'efforceront d'acquérir les connaissances expertes nécessaires pour le faire à l'interne, comme ils l'ont fait pour tout ce qui leur a été confié.
    C'est un bon point, dans le sens où ils envisagent probablement une transition en faisant cela. Vous pensez qu'ils iront chercher des consultants. Vous avez été dans une telle situation lorsque des choses sont arrivées au CRTC. Le processus sera donc long, même en période de transition, pour essayer de gérer cette loi.
     Vous devez comprendre comment le CRTC fonctionne. Le CRTC est une cour d'archives. Il ne se contente pas de prendre des décisions. Il a un problème et il le rend public. Il demande des soumissions. Il reçoit des soumissions. Il tient une audience. L'audience peut se dérouler en personne ou sur papier. Puis, après l'audience, le commissaire, avec l'aide du personnel, prend certaines décisions, qui deviennent alors publiques.
    C'est un long processus. On ne le fait pas à partir de scénarios. On le fait en fonction de ce que l'on a été mandaté de faire par la loi et en tenant compte des observations des gens qui comparaissent devant vous, qui sont touchés par la loi et qui recommandent de faire A, B ou C.
    Ce que vous dites par ça, c'est que, dans un sens, vous mettez en place un processus fortement quasi judiciaire, qui, sur le plan juridique — quasi judiciaire — exige beaucoup de travail pour mettre en place toute l'infrastructure, l'infrastructure humaine, pour l'accompagner.
    Si cette loi est adoptée et promulguée, le CRTC commencera par tenir des audiences — peut-être une méga audience sur le sujet, ou des audiences distinctes sur des questions précises — afin d'obtenir les observations des personnes concernées. Il les rassemblera ensuite et en fera un plan réalisable.
     Par exemple, la question de savoir ce qu'est un intermédiaire de nouvelles numériques a été discutée ici aujourd'hui. Il cherchera à obtenir la contribution de tout le monde — en supposant que la loi n'est pas modifiée de sorte que le mandat très vague décrit dans cette section ait une certaine forme, une certaine structure — et il produira une politique, une directive, afin que les gens puissent comprendre ce que c'est.
     Après tout, l'enjeu de tout ça est de rendre les choses prévisibles, d'établir des règles pour que les gens sachent ce qu'elles sont et puissent s'y conformer.
    Ce serait la même situation pour la définition du journalisme.
    C'est l'un des problèmes. Il est très difficile de définir le journalisme.
     Je me souviens de l'époque où nous avons conclu l'accord de libre-échange. J'étais l'avocat en chef de cet accord, et la question s'est posée de savoir ce qu'était un journaliste pour déterminer à qui on pourrait autoriser l'entrée temporaire au Canada. Il y a eu un énorme débat entre nous et les Américains, et un énorme débat au Parlement pour savoir si nous avions bien ou mal fait les choses. Le journalisme est un beau concept général, mais il défie toute définition précise, ou il est très difficile...

  (1430)  

    Merci.
     Monsieur Hatfield, la question que vous avez posée, pour ce qui est de limiter les personnes qui pourraient y être... J'ai eu l'expérience, dans les années 1960, d'avoir participé à certains des premiers journaux autochtones, tandis qu'ils tentaient de le faire. Est‑ce que le genre de...
    Monsieur Shields, votre temps est largement écoulé. Je vous remercie beaucoup. Vous avez dépassé de beaucoup votre temps de parole.
    C'est au tour de M. Housefather pour cinq minutes. Merci.
    Merci, madame la présidente.
     Je voudrais tout d'abord dire que le Comité peut bien sûr inviter qui il veut comme témoin, mais normalement nous commençons par une liste de personnes qui ont signifié à notre greffière qu'elles souhaitent comparaître. Selon notre greffière, jusqu'à hier, personne de Meta n'avait demandé à comparaître.
     J'aimerais demander ceci à M. Dinsdale. Monsieur, vous avez été la première personne — je crois que c'était le 21 octobre — à prononcer ce que j'appellerai une « menace » — et vous pouvez ne pas l'appeler une menace —, disant que Facebook retirerait le contenu des nouvelles au Canada. Monsieur Dinsdale, avez-vous pris cette décision de votre propre chef, ou avez-vous consulté d'autres personnes chez Facebook afin de déterminer si vous alliez faire une telle déclaration?
    Je pense que vous pouvez comprendre que tout ce dont nous parlons ne se produit pas de manière isolée, que ce dont nous essayons de parler, ce sont les préoccupations que nous avons au sujet de la loi, et que nous sommes très heureux et reconnaissants d'avoir l'occasion d'en parler aujourd'hui. Le fait que la loi ne décrit pas la relation entre les éditeurs et les plateformes comme vous voudriez...
    Je demandais simplement si vous aviez parlé avec quelqu'un d'autre chez Facebook. Je suppose, d'après votre réponse, que votre réponse est oui.
    Avant que vous ne fassiez cette déclaration, Mark Zuckerberg vous a‑t‑il dit de faire cette déclaration? Avez-vous reçu l'approbation du siège central en Californie pour ce qui est de cette déclaration?
    Une conversation directe avec M. Zuckerberg serait plutôt au‑dessus de ma tête, monsieur.
    Vous a‑t‑on dit qu'il vous autorisait à faire cette déclaration? Vous a‑t‑on dit qu'il l'approuvait?
    Je ne pense pas qu'il y ait eu de telles discussions à cet égard. Nous sommes un groupe qui examine ces choses d'un point de vue mondial et d'un point de vue local, et tout ce qui a été fait faisait partie des conversations sur l'impact des projets de loi et ce qu'ils pourraient être au Canada, mais essentiellement il n'y a pas eu de directive dans ce sens.
    Ce sera la dernière question sur ce sujet, je vous le promets.
     L'équipe canadienne n'aurait pas l'autorité de prendre une telle décision ou de faire une telle remarque de sa propre initiative. Vous aviez certainement, selon vous, le soutien de votre conseil d'administration et de votre équipe de direction en Californie pour faire cette déclaration, n'est‑ce pas?
    Encore une fois, monsieur, dans le contexte dans lequel nous parlons de ces choses, je suis au courant des communications au sein du groupe de personnes avec lesquelles je travaille et de certaines des choses qui s'y passent, mais je pense que l'on peut présumer sans crainte que nous ne prenons pas de risques et que nous ne déclarons rien en quoi l'entreprise ne croit pas.
    Bien sûr. De toute évidence, Facebook a pour habitude de menacer de certaines mesures les gouvernements des pays dont les lois ne vous plaisent pas, comme vous l'avez fait en Australie et au Canada, ce qui, selon les dénonciateurs, a été applaudi par Mme Sandberg et M. Zuckerberg.
    Monsieur, il s'agissait d'exprimer nos préoccupations à l'égard du projet de loi et de ses éventuels résultats.
    Mais vous n'avez pas seulement exprimé vos préoccupations à l'égard du projet de loi. Cela aurait été une chose. Vous avez menacé de prendre une mesure qui toucherait 21,5 millions d'utilisateurs au Canada.
    Je crois, monsieur, que nous avons exprimé nos préoccupations à l'égard du projet de loi et que nous voulions être transparents quant aux conséquences involontaires qu'il pourrait avoir.
    Eh bien, il s'agirait de conséquences très intentionnelles. Les conséquences voulues seraient que Meta prendrait la décision qu'elle avait l'intention de prendre de retirer aux utilisateurs canadiens la capacité de voir les nouvelles.
     Laissez-moi vous demander ceci, monsieur Dinsdale. Comme vous vous en souvenez peut-être, Facebook a confirmé par des reportages qu'il avait ajusté manuellement ses algorithmes pendant la semaine de l'élection américaine de 2020 pour favoriser les marques de nouvelles faisant autorité afin d'accroître l'intégrité de l'information. Pourquoi auriez-vous fait cela si les nouvelles n'ont aucune valeur?
    Je crois que M. Chan était sur le point de répondre à une partie de cette question également. Je pense que le mouvement de nos utilisateurs... Comme il l'a indiqué, la préférence de nos utilisateurs s'éloigne des nouvelles.
     Nous le constatons également dans les reportages indépendants. Nous le voyons dans le Reuters Digital News Report, où les gens ont répondu à un sondage à cet égard; 21 % des personnes sur Facebook ont dit qu'elles avaient l'impression de voir trop de nouvelles ou qu'elles aimeraient en voir moins. Seuls 3 % ont dit qu'elles aimeraient en voir plus.
    Quand on regarde les mouvements qui se produisent au sein de notre plateforme... Nous allons dans le sens de cette préférence des utilisateurs.

  (1435)  

    Bien sûr, mais ce que vous menacez de faire, c'est de supprimer les nouvelles qui font autorité et de laisser la désinformation sur votre plateforme.
    Monsieur, comme je l'ai déjà dit...
    Je ne vous ai pas posé de question.
     Monsieur Chan, vous avez parlé des accords que vous avez actuellement avec les éditeurs canadiens. Vous avez dit que ce ne sont pas des accords de licence commerciale. Allez-vous fournir à ce comité les détails de ces accords? Je vous rappelle que nous pouvons les exiger.
    Eh bien, je suis ravi que nous vivions dans une démocratie libérale et que nous fonctionnions dans une économie de marché. Comme vous pouvez le comprendre, tout type d'accord commercial que nous avons conclu avec des partenaires est régi par la loi et la primauté du droit. Je ne peux pas faire cela, même si... Je crois que c'est quelque chose que vous avez demandé à une publication, et je doute qu'elle puisse le faire.
     Je ne l'ai pas avec moi non plus, d'ailleurs.
    Merci, monsieur Chan. Votre temps est écoulé. Je suis désolé.
    Nous passons à M. Champoux du Bloc.
     Monsieur Champoux, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Ce n'est un secret pour personne que les technologies ont beaucoup évolué. Avant, il y avait les journaux qui nous envoyaient les nouvelles par écrit. Par la suite, la radio est arrivée dans les années 1930 et 1940, puis il y a eu les salles de nouvelles radiophoniques et, finalement, la télévision. Tous ces médias produisaient eux-mêmes leurs contenus journalistiques grâce à leurs salles de nouvelles.
    Le marché a énormément changé à l'arrivée d'Internet, comme on le sait. Le monde entier a complètement changé ses habitudes de vie. À la différence des médias traditionnels, les médias sociaux ne produisent pas eux-mêmes le contenu qu'ils offrent à leurs abonnés. Cela représente donc vraiment une concurrence inhabituelle pour l'industrie des médias, qui est pourtant habituée à s'adapter. Si on ne protège pas adéquatement nos salles de nouvelles et nos médias d'information, c'est simple: ils vont disparaître. Qui produira alors du contenu journalistique de qualité?
    Je pense que la réponse est dans la question.
    Monsieur von Finckenstein, vous êtes contre la façon dont le projet de loi C‑18 est ficelé. Je ne vous demande pas d'approuver ou de désapprouver ce que je viens de dire. Cependant, je pense qu'en tant qu'ancien président du CRTC, vous êtes conscient que l'industrie du journalisme et des médias de nouvelles doit être encadrée d'une certaine façon.
     Si elle ne l'est pas par le truchement d'un projet de loi comme celui-ci, lequel oblige les entreprises qui partagent le contenu d'information produit par nos salles de nouvelles à négocier des ententes, que voyez-vous comme solution pour permettre aux entreprises de nouvelles de recevoir leur juste part de ce marché désormais grandement accaparé par les plateformes en ligne?
    Il est vraiment difficile de répondre à cette question.
     Si on veut subventionner les nouvelles, je crois qu'on doit le faire avec un système plus simple. Prenons l'exemple du Fonds des médias du Canada, qui demande un certain montant à toutes les entreprises qui distribuent des films, et le place dans un fonds pour ensuite le distribuer aux personnes qui font les films.
    On pourrait aussi...

[Traduction]

    Merci, monsieur von Finckenstein.
     Je crois que nous n'avons plus de temps, monsieur Champoux.

[Français]

    Merci, monsieur von Finckenstein.

[Traduction]

    Nous avons maintenant M. MacGregor du NPD pour deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
     Monsieur Chan, c'est à vous que j'aimerais adresser ma question.
     Sur le site Web de Meta, vous avez une section sur la lutte contre la désinformation. Vous affirmez que vous « empêchez la propagation de fausses nouvelles, supprimez le contenu qui viole [vos] politiques et donnez aux gens... des renseignements » pour qu'ils puissent prendre des décisions éclairées. J'essaie de voir comment cette déclaration sur votre site — cet engagement — concorde avec la menace que vous envisagez de faire peser, à savoir si vous allez autoriser la diffusion de nouvelles réelles. Si vous menacez de retirer des liens....
    Comment allez-vous vous assurer que vous combattez réellement la désinformation, si le journalisme n'est pas autorisé sur votre site? Ne comprenez-vous pas que de nombreux utilisateurs de Facebook comptent sur votre plateforme pour obtenir des renseignements exacts, notamment ceux provenant des médias locaux? Je pense que l'élimination de ces liens de nouvelles affaiblira encore plus notre démocratie. Pensez-vous qu'il soit moral pour Facebook de faire cela, de proférer ce genre de menace?

  (1440)  

    Eh bien, ce que nous comprenons, c'est que les Canadiens veulent moins de nouvelles sur Facebook, pas plus. Je pense que vous avez raison de dire que les utilisateurs peuvent vouloir voir de bons renseignements. C'est pourquoi nous nous associons, par exemple, avec l'Agence de la santé publique du Canada. C'est pourquoi nous nous associons à Élections Canada. Il s'agit de fournir de bons renseignements aux Canadiens.
     Je pense que ce que vous soulevez, cependant, est notre préoccupation dominante concernant le projet de loi C‑18. Nous avons entendu d'autres experts indépendants dire que s'il y a une obligation de ne pas privilégier certaines publications, ce à quoi M. von Finckenstein fait peut-être allusion, alors l'approche que nous avons adoptée pour réduire ou déclasser ces nouvelles nous sera retirée. C'est du moins ce que d'autres experts ont dit; le cas échéant, je crains que le projet de loi C‑18 n'exacerbe le problème et ne le règle pas, avec tout le respect que je vous dois.
     Je vous remercie pour cette question de fond. J'essaie de vous donner une réponse substantielle. J'espère que c'est utile.
    Madame la présidente, je vais m'arrêter là. Il ne me reste que 30 secondes.
     Je vous remercie.
    Merci beaucoup, monsieur MacGregor.
    Je passe maintenant à Mme Gladu pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Je vais commencer par parler de certaines des choses qu'a dites le ministre du Patrimoine lorsqu'il a témoigné, et de ses remarques. L'une d'elles est que cette loi n'a pas pour but de rendre obligatoire le paiement des liens.
     Monsieur Hatfield, est‑ce une caractérisation exacte, à votre avis?
    Je ne pense pas que quiconque sache vraiment comment sera déterminé ce sur quoi les paiements sont fondés. En ce qui concerne la diffusion des liens, du contenu et des clics, il semble que ce soient les seuls critères qui sont quantifiables dans ce projet de loi. C'est soit cela, soit les perceptions du CRTC, juste le sentiment qu'il doit y avoir une quantité intangible de valeur supplémentaire livrée dans le texte du projet de loi.
    Merci.
     Monsieur Chan, pensez-vous que cette loi vise à rendre obligatoire le paiement des liens?
    Oui, parce que si l'on prend la façon dont ce projet de loi est construit, sa portée est sans précédent, dans l'ensemble. Il ingère toute définition possible de tout contenu de nouvelles, jusqu'à la définition sans précédent d'un hyperlien.
     Je vais vous donner un exemple très simple. Si vous allez à votre publication préférée au Canada sur Facebook, sur la page Facebook, faites‑la défiler. Voyez combien de liens vous comptez par rapport à, je ne sais pas, un autre contenu. Vous saurez, rien qu'en faisant cela, ce que nous essayons de mettre en place avec ce projet de loi, ou ce que nous essayons de compter. La grande majorité, la prédominance, ce sont les liens.
     Oui. Il est clair pour moi qu'il s'agit d'un mandat de paiement des liens, ce qui n'est pas ce que le ministre du Patrimoine a dit. Il a également témoigné qu'il avait une liste d'intermédiaires de nouvelles numériques, mais qu'il ne voulait pas la partager avec le groupe. Maintenant, ces intermédiaires de nouvelles numériques...
    Monsieur von Finckenstein, je pense que vous avez parlé du fait qu'un meilleur mécanisme serait que le ministre puisse désigner qui est l'intermédiaire de nouvelles numériques, parce que la définition est si peu claire et dans certains cas, elle peut être inconstitutionnelle. Ils disent que ce sont tous les intermédiaires de nouvelles numériques qui sont sous le contrôle du gouvernement fédéral, et jusqu'à présent, cela veut dire aucun.
     Ma question pour vous est la suivante. Si le ministre a la liste, comme il l'a dit, pensez-vous qu'elle devrait être partagée avec ce groupe avant que nous approuvions le projet de loi C‑18?
     Il serait certainement utile qu'il le fasse, comme exemple de ce qu'il a en tête et de la façon dont il interprète la loi. Cela dit, si la loi reste telle quelle, il faudra attendre la décision du CRTC... ou en fait, ce sera la décision des intermédiaires de nouvelles numériques qui doivent se présenter et s'identifier volontairement et être acceptés par le CRTC. De même, le CRTC peut demander à ceux qui ne se sont pas manifestés de fournir ce renseignement afin que le CRTC puisse décider s'il s'agit d'un intermédiaire de nouvelles numériques ou non, d'après les critères très souples énoncés dans le projet de loi.
    Le CRTC a‑t‑il l'expérience poussée de déterminer qui est un intermédiaire de nouvelles numériques?
    Pas du tout. Comme je l'ai déjà mentionné, les critères sont tous fondés sur des concepts de concurrence, ce qui n'est pas du ressort du CRTC. Il peut, bien sûr, demander l'aide du bureau de la concurrence, mais il vaudrait mieux, comme je l'ai dit, qu'il s'agisse vraiment d'une décision du gouvernement disant qui sont les principaux intermédiaires de nouvelles numériques et que ceux‑ci devraient contribuer. Il devrait expliquer comment il est arrivé à cette décision selon les critères énoncés dans la loi.

  (1445)  

    Merci.
     Une autre préoccupation que j'ai est que parfois, lorsque les coûts sont uniformes dans une certaine direction... Par exemple, si Google et Meta doivent payer pour les liens, il arrive que ces choses se répercutent sur le consommateur, car quelqu'un doit payer pour maintenir les marges bénéficiaires des entreprises privées qui peuvent prendre des décisions commerciales indépendantes.
    Monsieur Chan, d'après vous, y a‑t‑il une possibilité que ce soient les Canadiens qui finissent par devoir payer pour accéder à des liens de nouvelles?
    Oh, mon Dieu, c'est une question financière.
     Honnêtement, je l'ignore, mais je crois que vous avez raison sur... Comme tout bon fonctionnaire des finances vous dira, les taxes sont notoirement « poreuses », et je pense que c'est une chose à laquelle tout le monde devrait penser en général, mais, évidemment, nous n'avons jamais eu de conversation à ce sujet.
     Je dirais cependant... Vous m'avez interrogé sur les amendements. Un gros amendement qui donnerait...
    Je n'ai qu'une demi-minute, monsieur Chan, alors je vous demanderais d'envoyer vos amendements au Comité.
    Monsieur Hatfield, dans le contexte d'un Internet ouvert et libre, pensez-vous que faire payer les gens pour un lien puisse détruire toute l'ouverture de l'Internet tel que nous le connaissons?
    Cela empire les choses. Nous rendons plus difficile le partage de bons renseignements, de sorte que plus de mauvais renseignements sont communiqués. Le projet de loi ne devrait pas être établi de cette façon.
    Je vous remercie, madame Gladu.
    Je me pencherai maintenant sur la dernière question.
    Nous passons aux libéraux et à M. Bittle.
    Monsieur Bittle, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Hatfield, je parcourais votre site Web et j'y ai lu que la moitié de vos revenus sont des dons de source communautaire. Y a‑t‑il aussi des géants qui contribuent au financement de votre organisation, par exemple Google?
    Oui, au moins la moitié de nos revenus sont de petits dons de source communautaire. Google a fait des dons au cours de notre dernière année financière, mais pas cette année. Cependant, Google a fait partie des donateurs dans le passé. Nous n'acceptons de personne un don qui dépasserait 15 %.
    Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur Chan, j'aimerais aller un peu plus loin. Vous avez dit plus tôt dans votre témoignage que les marchés que vous avez conclus ne sont pas des accords commerciaux, mais plutôt des marchés visant à créer des modèles novateurs avec les éditeurs. Est‑ce exact?
    J'ai dit que les accords commerciaux que nous avons établis avec divers éditeurs visent à favoriser l'adoption de nouveaux comportements qui encourageraient l'innovation numérique.
    C'est intéressant! Quand on vous a dit plus tôt que c'était des accords commerciaux, vous l'avez nié, mais quand M. Housefather a demandé des marchés, ils sont devenus des accords commerciaux de sorte que vous n'ayez pas à...
    M. KevinChan: Je ne voudrais pas les appeler...
    M. Chris Bittle: Je me répète, monsieur Chan, ne parlez pas en même temps que moi. Cela nuit à l'interprétation. Veuillez attendre que j'aie fini de parler.
    Je sais que vous méprisez ce que nous faisons, et vous et moi avons déjà eu une telle conversation dans le passé au sujet de divers textes de loi, et l'histoire se répète.
    Si c'est... peu importe ce dont il s'agit relativement à un marché pour...
    J'ai un rappel au Règlement.
    Oui, madame Thomas. Vous avez un rappel au Règlement.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame la présidente, M. Bittle choisit de parler directement au témoin et, encore une fois, il le harcèle et lui prête des intentions. Il ne convient absolument pas de parler directement au témoin au lieu de s'adresser à vous, la présidente, et ensuite, il est incorrect de prêter des intentions au témoin.
    Je vous remercie beaucoup d'avoir souligné ce point, madame Thomas.
    J'ai moi aussi constaté que des témoins ne se sont pas adressés à moi et ont parlé directement à la personne qui les interroge. J'ai dit clairement que les témoins doivent s'adresser à la présidence. Je pense que plusieurs personnes violent légèrement les règles, et je ne suis pas intervenue afin de favoriser la présentation des questions et des réponses.
    Je ne parle pas de la conduite des témoins. Nous savons qu'ils ne sont ici que pendant peu de temps; ils risquent donc de ne pas comprendre toutes les règles.
    M. Bittle est ici depuis un certain temps et, en sa qualité d'ancien avocat, il comprend l'importance de suivre les règles.
    Madame la présidente, peut-être pourriez-vous éclairer notre lanterne ici?
    Je vous remercie beaucoup, madame Thomas.
    Si j'estime que M. Bittle manque de respect d'une façon ou d'une autre, je le lui dirai.
    Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur Bittle, veuillez continuer.
    Je crois que Mme Thomas regarde trop l'émission Law & Order. Je ne sais pas où le Règlement parle du harcèlement des témoins, mais je sais gré aux conservateurs de défendre Facebook chaque fois que c'est possible. Nous n'obtenons pas beaucoup de réponses, à moins qu'il ne s'agisse d'une question facile des conservateurs.
    Je reviens à mon point initial: au cours de votre témoignage, vous avez dit que c'était tantôt un marché pour favoriser l'innovation et tantôt que c'était un accord commercial...

  (1450)  

    Madame la présidente, j'ai un rappel au Règlement.
    Madame Thomas, nous disposons de très peu de temps, et j'aimerais vraiment que cet intervenant puisse poser ses questions aux témoins et qu'ils y répondent.
    S'agit‑il d'un rappel au Règlement tout à fait nouveau? Nous sommes en fait en train de suivre l'ordre du jour. S'il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement, qu'en est‑il? Est‑ce une question de renseignement ou un point de privilège? De quoi s'agit‑il, madame Thomas?
    Je vous remercie.
    Madame la présidente, vous adoptez un mode de fonctionnement plutôt discriminatoire. Dans le passé, vous m'avez rappelée à l'ordre exactement pour le même comportement que celui de M. Bittle maintenant. En fait, je suis loin d'être aussi méprisable que lui; par conséquent, je vous prie d'être équitable dans vos décisions, madame la présidente.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Thomas.
    Je serai équitable en prenant mes décisions.
    Monsieur Bittle, veuillez continuer l'exposé de votre question.
    Non, vous ne l'êtes pas.
    Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais signaler dans un rappel au Règlement que je fais preuve d'un plus grand respect. On vient de me qualifier de « méprisable ». Je suppose que c'est la façon dont les conservateurs vont fonctionner.
    Revenons à mon point initial. Monsieur Chan, dans votre témoignage, vous parlez tantôt d'un marché favorable à l'innovation et tantôt d'un accord commercial, et, s'il s'agit d'une action gouvernementale, c'est une taxe. Comment pouvez-vous expliquer la différence entre ces deux ou trois choses? Votre témoignage change d'un point à l'autre, tout dépendant de la personne qui vous interroge.
    J'aimerais voir la transcription, car je ne crois pas avoir jamais utilisé le mot « taxe ». Tout d'abord, que cela soit clair!
    En second lieu — je suis désolé d'avoir à attirer l'attention sur ce point, mais la logique m'échappe ici, et je dois donc le dire —, les meilleurs marchés commerciaux, je l'espère, mèneront toujours à des résultats novateurs.
    Je vous remercie beaucoup. Je crois que vous avez dit que « les taxes sont poreuses ». Ce sont vos mots exacts. Je crois que vous venez tout juste de les employer...
    C'était des propos généraux. Vous le savez...
    Monsieur Chan, vous avez comparu suffisamment devant des comités pour savoir que vous ne devez pas parler en même temps que les députés. Je sais que vous prétendez respecter le processus, mais cela s'est produit devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, quand vous avez comparu devant nous et que vous essayiez de me huer. La tactique de requin de la finance que votre entreprise emploie est manifeste. Au moins, nous pouvons faire preuve d'un peu de respect l'un pour l'autre au cours du présent processus, et vous pourrez ensuite avoir votre conférence de presse conjointement avec les conservateurs.
    Monsieur Dindsdale, savez-vous si l'entreprise envisage de menacer le gouvernement des États-Unis d'Amérique, car je sais que le Congrès américain est en train d'examiner un projet de loi semblable?
    Monsieur, je répète que nous sommes ici aujourd'hui pour essayer, d'une façon responsable, de partager avec le Comité nos préoccupations au sujet du projet de loi. Nous nous concentrons sur...
    Excusez-moi, monsieur Dinsdale. Vous êtes venu ici pour menacer la population du Canada, et je vous demande si vous planifiez de faire la même chose aux États-Unis. Ou, comme c'est une entreprise américaine, le gouvernement des États-Unis ne sera pas menacé? Juste les gouvernements du Canada et de l'Australie?
    Je me répète, monsieur. Nous sommes ici, je pense, pour essayer de partager notre point de vue sur la loi canadienne et sur la fausse perception du législateur au sujet de l'échange de valeur entre éditeurs et plateformes, et pour contester le fait que nous devrons payer pour avoir ensuite le droit de fournir des services de marketing gratuits aux éditeurs. Nous sommes ici pour faire valoir les préoccupations qui sont exprimées par les éditeurs indépendants et selon lesquelles ce projet de loi risque d'étouffer l'innovation.
    Il vous reste 10 secondes, monsieur Bittle. Aimeriez-vous vous en servir?
    Non, je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous devons arrêter nos travaux aujourd'hui à 15 heures exactement.
    À titre de présidente, je voulais dire, après avoir observé et écouté les délibérations, que j'ai entendu à maintes reprises des personnes s'interroger sur le journalisme. Quand nous avons fait une étude en 2017 sur cette même question, je présidais alors le comité du patrimoine. Ce qui était très clair, c'était que les organismes que l'on appelle des agences de presse au Canada sont assujettis à des règles très différentes qu'ils doivent respecter. Leurs nouvelles doivent être vérifiables, et leurs textes ne doivent insulter personne ni contenir des menaces. Le Code criminel les astreint à certaines consignes obligatoires.
    Selon moi, la question se pose de savoir si cela vaut pour des entreprises telles que Google, Facebook ou Meta relativement à leur propre capacité. Nous vivons en une ère de désinformation. Sont-elles assujetties aux mêmes contraintes internationales, quant à la vérifiabilité et à l'obligation de rendre compte, que l'est la presse écrite? C'est une question que je voulais poser.

  (1455)  

    Madame la présidente, voulez-vous que je réponde?
    Oui, s'il vous plaît, répondez très rapidement.
    D'accord. Je crois que la difficulté, et peut-être que cela touche l'essence même du projet de loi C‑18, réside dans le fait que, quand nous parlons de ce qui est sur ces plateformes et sur Internet, nous parlons du discours du peuple. Les paroles du peuple sont assujetties à des paramètres différents, j'ose le dire, que ceux qu'un rédacteur en chef applique quand il décide de ce qui doit paraître dans un journal.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous avons encore trois minutes, je crois. Je recevrai une motion d'ajournement de la présente séance.
    Je remercie les témoins de leur présence. Je sais que le débat a été houleux à certains moments, mais je vous remercie d'être venus. Nous vous savons gré de nous communiquer vos points de vue.
    Je propose de lever la séance.
    Je vous remercie, madame Gladu.
    La séance est levée.
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