Passer au contenu
Début du contenu

CIMM Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Promouvoir l’équité dans les décisions d’immigration du Canada

Introduction

Comme dans tout système d’immigration moderne, les décisions et la différenciation sont des éléments fondamentaux du système d’immigration canadien. Fait encore plus notable, dans les ambassades, les hauts-commissariats et les centres de traitement du Canada répartis un peu partout dans le monde, des agents des visas sont appelés chaque jour à décider les demandes qui seront acceptées et celles qui seront rejetées. Par leurs décisions, ils permettront à certains requérants de poursuivre leurs ambitions ou de répondre à leurs besoins en venant au Canada ou en y demeurant. Mais d’autres requérants verront leurs ambitions frustrées ou leurs besoins niés, souvent à un coût personnel considérable.

Les décisions des agents des visas et la différenciation qu’ils exercent ne se produisent pas sans motifs. Les agents doivent interpréter et appliquer les critères de programmes ainsi que la législation et les politiques en matière d’immigration. Leurs décisions doivent également tenir compte des lois et de la jurisprudence, des choix stratégiques, des priorités de financement et de traitement, des options d’établissement et des interventions en matière d’application de la loi. Il s’agit d’un ensemble de jugements et de choix qui inévitablement favorise certains requérants au détriment d’autres.

Dans le présent rapport, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes (le Comité) examine les résultats différentiels découlant des décisions d’immigration et du système d’immigration canadien. Il ne fait aucun doute que les critères et les règles d’un programme donné peuvent être justifiés et explicites. Dans son système de points pour évaluer les demandes d’immigration permanente, par exemple, le Canada accorde des points aux requérants selon leur niveau de scolarité et leurs compétences professionnelles. Le présent rapport passe en revue la justification de certains critères de programme compte tenu de leurs effets variés sur différents groupes de requérants. Il examine également des séries de décisions reposant sur des facteurs injustifiés et souvent implicites, comme la race ou le pays d’origine du requérant. Abordant certains programmes et règles, des témoins ont fait valoir que les deux types de résultats différentiels peuvent constituer des préjugés, de la discrimination et du racisme systémique.

Le présent rapport est le résultat de l’étude du Comité portant sur les résultats différentiels dans les décisions d’immigration, étude que le Comité a entreprise le 22 mars 2022 à la suite de la motion adoptée le 1er février 2022[1]. Entre le début et la fin de l’étude, le 4 mai 2022, le Comité a entendu 29 témoins et reçu 6 mémoires. L’étude survient après une autre, celle-là concernant le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers (les taux d’acceptation étant uniformément plus faibles pour les étudiants soumettant une demande à partir d’un pays africain).

La présente étude et le rapport qui en découle ont permis d’élargir la portée de l’étude précédente sur les étudiants étrangers et d’examiner de plus près d’autres programmes d’immigration comme les permis de travail et les aides familiaux. Dans le rapport, on examine aussi en détail les résultats différentiels chez les employés et les partenaires d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) et dans l’ensemble du système d’immigration canadien. On s’attarde aussi aux effets différentiels de l’infrastructure et des outils de traitement d’IRCC.

Le rapport du Comité sur les résultats différentiels aborde aussi les préjugés et le racisme dans la culture organisationnelle d’IRCC et son réseau, de même que les récentes mesures prises par le Ministère pour confronter cette réalité. Dans l’été qui a suivi la dénonciation universelle du racisme systémique et des autres formes de racisme dans la foulée du meurtre de George Floyd par un policier blanc en mai 2020 aux États-Unis, IRCC a mis sur pied un Groupe de travail antiracisme afin de comprendre le racisme présent dans ses activités et ses effectifs et de le combattre. Les résultats du sondage qu’il a réalisé auprès de ses employés en novembre 2020 et les groupes de discussion qu’il a tenus en mars 2021 avec 55 employés (à majorité des personnes racisées) ont révélé que la perception du racisme au sein d’IRCC dépendait principalement de la race et de l’origine ethnique des participants. De nombreux participants racisés ont fait état de microagressions, de préjugés raciaux dans l’embauche, du faible nombre de gestionnaires racisés et d’un manque de culture et de processus pour combattre le racisme à IRCC. Les employés racisés craignent également que les préjugés et le racisme dans les activités et la culture ministérielles ne se répercutent sur les politiques et les décisions des agents des visas[2].

Le présent rapport est structuré généralement par les types de résultats que les décisions d’immigration peuvent avoir. Le chapitre 1 résume les témoignages concernant les résultats différentiels pour les requérants découlant de la législation et des politiques ou de leur application. Il y est notamment question des délais de traitement différents et des arriérés pour divers programmes et groupes démographiques. Le chapitre 2 porte sur les effets éventuels des décisions touchant la technologie, l’emplacement et le financement des bureaux des visas d’IRCC et de ses partenaires dans le réseau d’immigration, et les fonds octroyés pour l’établissement. Le chapitre 3 examine les résultats éventuels des préjugés ou du racisme conscients et inconscients des employés d’IRCC – résultats qui ont aussi ultimement des conséquences sur les refus, les délais de traitement et l’infrastructure pour les requérants.

Résultats différentiels pour les requérants

Certaines populations peuvent obtenir des résultats différentiels quant au succès de leurs demandes et aux délais de traitement. Le Comité a appris que ces résultats peuvent différer selon la race du requérant ou d’autres critères imputables à la conception du programme ou en raison d’une interprétation et d’une application différentes de la législation et des règles des programmes.

Législation et politiques

La présente partie s’intéresse d’abord aux résultats différentiels découlant de la législation et des politiques. Elle résume certains programmes et politiques qui, selon ce que le Comité a entendu, se traduisent par des traitements différentiels, des préjugés et du racisme implicites dans leur structure : politique sur les réfugiés, aides familiaux, étudiants étrangers, et parrainage par un époux ou la famille.

Programme des réfugiés et réponse à la situation en Ukraine

La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) renferme une longue liste d’objectifs en matière de protection des réfugiés, notamment que le programme des réfugiés vise avant tout à sauver des vies et à protéger les personnes déplacées et persécutées[3]. Au Canada, les demandes de statut de réfugié sont traitées par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) au moyen de la définition de réfugié contenue dans la Convention relative au statut de réfugiés de 1951 des Nations Unies et son Protocole de 1967[4]. Les individus qui risquent de subir la torture ou un traitement cruel et inhumain s’ils retournent dans leur pays d’origine peuvent également demander l’asile.

Outre les demandeurs du statut de réfugié qui arrivent à la frontière, le programme des réfugiés d’IRCC s’adresse également aux personnes qui souhaitent se réinstaller au Canada. Les réfugiés parrainés par le gouvernement sont les personnes les plus vulnérables et ils sont recommandés à IRCC par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) ou d’autres organisations avec lesquelles IRCC a conclu des ententes[5]. Le Canada possède aussi un programme de parrainage privé grâce auquel des parrains au Canada recommandent des requérants à IRCC[6]. Selon le type de parrainage privé envisagé, il peut être exigé que les requérants recommandés à IRCC aient obtenu le statut de réfugié auprès du HCR ou du pays dans lequel ils ont temporairement trouvé asile. Enfin, le Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas vise les réfugiés désignés pour une réinstallation par le HCR qui seront parrainés par le secteur privé, mais dont les coûts d’établissement seront partagés avec IRCC[7].

Pendant les deux années qui ont précédé la pandémie, le Canada a accueilli le plus grand nombre de réfugiés dans le monde : 28 000 réfugiés en 2018[8] et 30 087 réfugiés en 2019[9]. Le HCR indique qu’en 2019, 43,4 % des réfugiés réinstallés au Canada provenaient du Moyen‑Orient; 42,1 %, d’Afrique; 12,4 %, d’Asie; 0,5 %, des Amériques; et 0,08 %, d’Europe[10]. La pandémie a interrompu la réinstallation de réfugiés en raison des restrictions de voyage alors en vigueur. Aujourd’hui encore, la pandémie continue de perturber la réinstallation de réfugiés, mais dans une moindre mesure puisque ces derniers continuent d’arriver au Canada et qu’IRCC a trouvé des façons d’atténuer les risques[11].

Dans la dernière année, pendant la pandémie, le Canada a réagi à deux grandes crises internationales. La chute de Kaboul (Afghanistan) aux mains des talibans en août 2021 a entraîné la création de programmes spéciaux visant à accorder la résidence permanente à des Afghans ayant une relation durable avec le Canada (18 000 personnes), aux membres de la famille élargie d’anciens interprètes ayant servi auprès des Forces armées canadiennes (5 000 personnes), et a des Afghans au titre d’un programme humanitaire. Le Canada devrait ainsi accueillir 40 000 Afghans[12].

Par la suite, l’attaque de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, a provoqué le plus grand déplacement de population en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale. Au moment de rédiger le présent rapport, près de sept millions d’Ukrainiens, la plupart des femmes et des enfants, avaient fui leur pays pour se réfugier plus à l’ouest[13]. IRCC a réagi en adoptant une série de mesures, dont l’Autorisation de voyage d’urgence Canada-Ukraine (AVUCU)[14] qui permet à des Ukrainiens et aux membres de leur famille de toute nationalité de venir au Canada en tant que résidents temporaires pendant un maximum de trois ans. Ils peuvent également obtenir gratuitement un permis de travail ouvert pour travailler chez presque n’importe quel employeur canadien ou un permis d’études pour s’inscrire à un programme d’enseignement au Canada[15]. Il est désormais plus facile d’aller à des bureaux de collecte de données biométriques grâce à l’ouverture de nouveaux centres à Varsovie (Pologne) et à Berlin (Allemagne)[16]. Les Ukrainiens qui viennent au Canada en provenance de certains pays sont admissibles à des visas sans vignette, ce qui élimine la nécessité de remettre son passeport une fois la demande approuvée.

D’après Anila Lee Yuen, présidente et directrice générale du Centre for Newcomers, « ce que perçoit la population en général, c’est que les mesures prises à l’égard des personnes déplacées varient selon leur lieu d’origine[17] ». Cette multitude de réponses complique la tâche des agences d’établissement, qui doivent expliquer la situation à leurs clients :

[N]ous constatons qu’il est beaucoup plus facile pour les citoyens ukrainiens de venir au Canada. Cela pose problème lorsque nous devons expliquer à nos clients et à la communauté pourquoi les choses sont différentes pour des communautés racialisées – qu’elles soient syriennes, irakiennes, qu’elles viennent de Colombie en Amérique du Sud ou d’ailleurs, ou du Pendjab potentiellement en tant que réfugiées politiques de l’Inde – et tous ces différents endroits qui sont racialisés. Bien que nous soutenions la communauté ukrainienne et toutes les communautés, il existe une énorme différence. La seule que nous pouvons voir est la race[18].

Même en ce qui concerne la réponse d’IRCC aux personnes fuyant l’Ukraine, le Comité a appris que les traitements peuvent varier. Siham Rayale, directrice des affaires étrangères au Conseil national des musulmans canadiens, a déclaré « que toutes les personnes qui sont actuellement en Ukraine, par exemple, [doivent être] traitées de manière juste et équitable, et que les non-ressortissants de l’Ukraine ne [doivent pas être] négligés en faveur des Ukrainiens blancs[19] ». Elle a expliqué au Comité que, selon les estimations de l’Organisation internationale pour les migrations, le nombre de non-ressortissants de l’Ukraine pourrait atteindre 60 900 personnes, principalement d’Asie du Sud et d’Afrique[20]. « Ce qui en résulte est un processus d’admission des réfugiés à deux vitesses qui accorde la priorité aux Européens blancs et met en danger les groupes racialisés », a-t-elle indiqué.

Caroline Xavier, sous-ministre déléguée à IRCC, a expliqué au Comité que le Ministère est conscient de la population mixte qui fuit l’Ukraine et « que dans certains cas, des personnes qui fuient peuvent trouver refuge plus directement dans les pays voisins, où elles peuvent retourner dans leur pays d’origine[21] ». Nous ne savons pas dans quelle mesure ces options sont réalisables pour les réfugiés racisés en Ukraine, puisque le Comité n’a entendu aucun témoin ayant connu cette situation ou ayant travaillé auprès de réfugiés racisés coincés en Ukraine qui essaient de se mettre en sécurité. Quant aux différences qui distinguent énormément les programmes offerts aux Afghans de ceux offerts aux Ukrainiens, l’honorable Sean Fraser, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, a insisté sur deux grandes distinctions : premièrement, les Ukrainiens ont pu se rendre dans des pays où leurs demandes et leurs données biométriques ont pu être traitées, tandis que les Afghans auxquels le Canada a fait une promesse précise se « trouvent sur un territoire où les talibans ne les laissent pas quitter le pays et où [ils] ne peuvent pas transiter en toute sécurité à travers ou en dehors de l’Afghanistan[22] ». Deuxièmement, selon IRCC, qui a été influencé à ce sujet par ses homologues européens, l’on s’attend à ce que la plupart des Ukrainiens restent temporairement, jusqu’à ce qu’il soit sécuritaire pour eux de retourner dans leur pays[23]. Étant donné qu’aucun témoin n’a fait part au Comité de ses préoccupations concernant le processus mis en place par IRCC pour aider à mettre les Afghans en sécurité, aucun témoignage n’est fourni sur la façon d’éliminer les obstacles soulevés par le ministre.

De façon générale, les témoins ont déclaré au Comité que les délais d’attente des différents groupes de réfugiés peuvent varier au gré des priorités et des quotas du gouvernement. Comme l’a dit Jennifer Miedema, directrice générale de Remember Ministries, une organisation de bienfaisance non confessionnelle, « [l]’affectation des ressources indique les priorités ou les populations favorisées[24] ».

Étant donné que le Canada s’en tient au nombre de réfugiés prévu dans ses plans ministériels annuels, les écarts entre les résultats des groupes de réfugiés peuvent être très prononcés, car les réfugiés qui sont acceptés rapidement une année font en sorte que d’autres réfugiés doivent patienter jusqu’à l’année suivante[25].

Le gouvernement du Canada classe également les types de programmes de réfugiés en ordre de priorité. Jennifer Miedema a expliqué :

Les ressources ne semblent pas être affectées au traitement des demandes de parrainage privées de réfugiés, ce qui porte à croire qu’elles ne sont pas prioritaires. Les délais de traitement actuels pour les réfugiés parrainés par le secteur privé qui viennent de l’Éthiopie, du Kenya, du Soudan et de l’Afrique du Sud vont de 31 à 37 mois. Dans le cas des réfugiés en Malaisie et en Thaïlande, le délai est de 37 mois. Pour les réfugiés au Pakistan, il est de 38 mois. Pour ceux au Liban, il est de 46 mois – presque quatre ans[26].

La répartition inégale des délais se traduit par une répartition inégale de la souffrance. Le Comité a appris que dans certains camps et régions, les réfugiés vivent dans des conditions terribles et doivent composer avec des pénuries constantes de carburant, de médicaments et d’aliments[27]. Jennifer Miedema a noté que l’espoir d’un établissement éventuel peut être dommageable après de longues périodes d’attente et maints reports :

Soulever les espoirs d’un réfugié a quelque chose de sacré. Ces espoirs, une fois soulevés, après la transmission de la demande, l’attente qui dure des mois, parfois deux ans, sans que le bureau des visas donne signe de vie, puis trois ans d’attente, ou presque, pour une entrevue – c’est extrêmement difficile pour la santé mentale. Ça se répercute sur la santé physique. Ça change la dynamique familiale, les unions matrimoniales et tant d’autres choses[28].

À la lumière des témoignages qu’il a entendus, le Comité recommande :

Équité et impartialité du programme des réfugiés

Recommandation 1

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada veille à ce que le programme des réfugiés soit impartial et équitable à l’égard des populations vulnérables, dans le respect de ses obligations internationales, et adopte une approche uniforme dans ses réponses aux crises.

Application des mesures spéciales aux crises humanitaires

Recommandation 2

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada applique les mesures spéciales offertes aux Ukrainiens, notamment celle permettant de parrainer les membres de la famille élargie, aux citoyens d’autres pays et régions confrontés à des crises humanitaires.

Augmenter le nombre de réfugiés acceptés en période de crises humanitaires

Recommandation 3

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada augmente le nombre total de réfugiés acceptés au Canada en période de crise, et qu’il n’annule pas ni ne retarde les demandes d’autres candidats déjà en attente.

Examen de l’équité raciale

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada procède à un examen complet de l’équité raciale de son système pour les immigrants et les réfugiés, notamment sa législation, sa réglementation, ses politiques et ses priorités.

Accorder la priorité aux réfugiés parrainés par le secteur privé

Recommandation 5

Que, compte tenu d’un arriéré considérable d’au moins trois ans, le gouvernement du Canada s’assure d’avoir des ressources supplémentaires pour traiter en priorité les demandes provenant de réfugiés parrainés par le secteur privé.

Aides familiaux

Le Programme des aides familiaux résidants était la voie d’accès originale, dans la LIPR, que les travailleurs temporaires dans cette profession devaient emprunter pour devenir résidents permanents[29]. Les critères du programme ont varié au fil du temps pour répondre aux problèmes de main-d’œuvre touchant les ressortissants étrangers. Le programme a été remplacé en 2014 par deux programmes pilotes de cinq ans : la catégorie de la garde d’enfants et la catégorie des soins aux personnes ayant des besoins médicaux élevés. Lorsqu’IRCC a consulté des parties prenantes pour concevoir ses programmes pilotes, il a créé la Voie d’accès provisoire pour les aides familiaux afin de permettre aux personnes ayant mal compris les conditions du programme précédent de demander la résidence permanente. Les programmes actuellement en vigueur (la catégorie des gardiens d’enfants en milieu familial et la catégorie des aides familiaux à domicile) permettent aux personnes à charge d’un aide familial, comme ses enfants et son époux, de venir au Canada grâce à un permis d’études ou de travail[30].

Avant l’entrée en vigueur des programmes actuels, de nombreux aides familiaux ignoraient que s’ils acceptaient un travail en tant que travailleurs étrangers temporaires ayant un simple permis de travail, ils n’étaient pas automatiquement sur la voie d’accès à la résidence permanente. MD Shorifuzzaman, consultant réglementé en immigration canadienne chez Guide Me Immigration Inc., a décrit les programmes pilotes de 2014 comme « dramatiques pour ces travailleurs sans défense, qui sont séparés de leurs familles, sans emploi, sans aide médicale et sans moyen évident de devenir résidents permanents[31] ».

S’ils veulent satisfaire aux conditions pour obtenir la résidence permanente, les aides familiaux doivent notamment prouver, au moyen d’un test de langue, qu’ils maîtrisent l’anglais ou le français; cette exigence s’est révélée un obstacle majeur. Debbie Douglas, directrice générale de l’Ontario Council of Agencies Serving Immigrants, a expliqué au Comité que les exigences en matière de test de langue pour les aides familiaux qui souhaitent obtenir le statut de résident permanent, puis la citoyenneté, n’ont aucun sens. Ces personnes « ont déjà prouvé qu’elles étaient capables de communiquer. Elles possèdent certainement assez la langue pour accomplir leur travail[32]. »

Avant et après la pandémie, le Programme des aides familiaux résidants avait les délais d’attente les plus longs. En 2020, le temps moyen de traitement d’une demande de visa était de 57 mois et 2 jours; en 2021, il atteignait 68 mois et 1 jour. Au 31 décembre 2021, on s’attendait à un arriéré de 15 621 demandes pour le Programme pilote destiné aux gardiens d’enfants en milieu familial. On recensait également 1 639 demandes en attente pour le Programme des aides familiaux résidants.

Arlene Ruiz, consultante et agente de recrutement en immigration autorisée et réglementée chez Alexene Immigration & Employment Services, a expliqué au Comité qu’un fort pourcentage des aides familiaux proviennent des Philippines. Les délais d’attente pour le traitement de leurs demandes sont responsables de la fin de mariages, sans compter que leurs enfants vieillissent et perdent leur statut de personnes à charge. Elle a dit : « Je crois qu’il [le racisme] joue un grand rôle. Je ne dirais pas que c’est dû essentiellement au racisme, mais je crois qu’il joue un grand rôle[33]. »

Caroline Xavier a parlé d’un plan ambitieux qu’IRCC s’est donné en avril 2021 qui a permis de terminer le traitement des demandes de près de 6 000 personnes, aides familiaux et membres de leur famille, avant la fin de décembre 2021[34]. Elle a indiqué que les prochaines étapes consistent notamment à répondre « aux demandes plus anciennes[35] ». Toutefois, Steven Meurrens, avocat spécialisé en immigration, a indiqué qu’à « l’heure actuelle, [le manque de transparence d’IRCC est] un problème énorme. Les délais de traitement indiqués sur le site Web d’IRCC sont inexacts. Sur le site Web lui-même, on dit qu’ils sont inexacts. Encore une fois, ce n’est que par le recours à la Loi sur l’accès à l’information que nous avons appris que presque aucun dossier d’aide familial n’a été traité depuis 2019[36] ». Arlene Ruiz a pour sa part dit ceci : « [Les aides familiaux] ont l’impression d’être relégués au second plan. Ils se sentent négligés et sans importance[37]. »

Conscient de la souffrance vécue par ces aides familiaux qui travaillent si fort, le Comité recommande :

Résidence permanente pour les aides familiaux de toute catégorie

Recommandation 6

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada accorde plus de ressources au traitement rapide des demandes de résidence permanente des aides familiaux de toute catégorie.

Étudiants étrangers et Volet direct pour les études

L’article 30 de la LIPR dispose que les étrangers ne peuvent pas étudier au Canada sans y être autorisés. L’étudiant étranger qui demande un permis d’études[38] doit démontrer qu’il répond aux conditions énoncées dans la LIPR et dans le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (RIPR), notamment en prouvant qu’il possède des ressources financières suffisantes[39]. Il doit également présenter une lettre d’acceptation d’un établissement d’enseignement désigné (EED)[40] et des documents de voyage valides.

En 2018, IRCC a lancé un processus de demande simplifié et accéléré à l’intention des étudiants étrangers admissibles[41]. Le Volet direct pour les études (VDE) s’adresse aux étudiants étrangers provenant des pays suivants : Chine, Inde, Philippines, Vietnam, Maroc, Pakistan, Sénégal, Antigua-et-Barbuda, Brésil, Colombie, Costa Rica, Pérou, Saint-Vincent-et-les Grenadines, et Trinidad-et-Tobago[42]. Les étudiants doivent réussir un test de langue (Système international de tests de la langue anglaise [IELTS] ou Test d’évaluation de français [TEF]), et démontrer qu’ils ont payé leur première année d’études et qu’ils possèdent un certificat de revenu garanti de 10 000 $ CAN. Caroline Xavier a indiqué au Comité que le Ministère achevait d’étudier la possibilité d’intégrer le Bangladesh au VDE[43]. Le Ministère prévoit de terminer son évaluation à l’automne 2022[44].

D’après Beba Svigir, directrice générale de la Calgary Immigrant Women’s Association, des clients de son organisme ont remarqué, dans le cas des permis d’études, « les règles discriminatoires dans le traitement des demandes d’immigration provenant de certains pays par rapport à d’autres ». « Le délai de traitement dans le Volet direct pour les études va jusqu’à 20 jours pour les 14 pays qui figurent sur la page Web d’IRCC, tandis que le délai de traitement dans le processus de demande de permis d’études normal peut varier entre 90 et 300 jours[45]. » S’il est vrai que le Volet direct pour les études est un programme accéléré, il n’est pas offert à la plupart des pays et son délai de traitement est beaucoup plus rapide que pour les autres programmes.

IRCC a aussi créé un programme pilote pour le Nigéria appelé Nigeria Student Express, mais ses conditions sont différentes de celles du Volet direct pour les études, principalement les aspects financiers. Gideon Christian, président de l’African Scholars Initiative, a déclaré au Comité que « [l]es mécanismes du ministère pour les visas d’études ont été conçus de manière à en rendre encore plus difficile l’obtention par les Africains pour la poursuite de leurs études au Canada[46] ». Il a parlé des exigences de test d’anglais du programme Nigeria Student Express; pourtant, la langue d’enseignement au Nigéria est l’anglais. Il a conclu que « [c]ette obligation subtilement discriminatoire aboutit inévitablement à des décisions défavorables non seulement pour les Nigérians mais pour les Africains aussi[47] ».

Services d’établissement et résidents non permanents

Les services d’établissement aident les nouveaux arrivants à s’adapter à la vie au Canada. IRCC a conclu des ententes avec plus de 550 fournisseurs dans tout le Canada pour offrir divers programmes, comme de l’orientation, de la formation linguistique et des services d’emplois[48]. Normalement, IRCC subventionne ces agences pour qu’elles offrent des services aux résidents permanents uniquement[49].

Anila Lee Yuen a indiqué qu’à « l’heure actuelle, IRCC ne permet pas aux organismes d’établissement comme le [sien] d’offrir des services aux résidents temporaires ou aux demandeurs d’asile[50] ». Elle a aussi informé le Comité que l’accès aux services d’établissement fondé sur le statut d’immigration constitue, ni plus ni moins, un traitement différentiel et discriminatoire. Elle a parlé de demandeurs du statut de réfugié au Canada qui n’ont pas accès à de l’aide et des « effets néfastes » de cette situation à long terme, particulièrement sur les enfants et les petits‑enfants[51]. Tirant profit de l’expérience acquise pendant la pandémie de COVID-19, elle a déclaré au Comité que « [n]ous devrions faire un effort concerté, surtout en temps de crise, pour pouvoir offrir aux gens de l’aide dans leur langue maternelle[52] ». Elle a ajouté que les services devraient aussi être offerts dans des langues autres que l’anglais et le français.

Financement des services d’établissement pour les travailleurs étrangers temporaires et les demandeurs du statut de réfugié présents au pays

Recommandation 7

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada subventionne les organismes d’établissement pour qu’ils offrent des services aux travailleurs étrangers temporaires et aux demandeurs du statut de réfugié présents au pays, tout en respectant la compétence du Québec en matière d’acceptation et d’intégration des nouveaux arrivants.

Exécution de la loi et application des politiques

Les témoins ont illustré les résultats différentiels ou biaisés découlant de l’exécution de la loi et de l’application des politiques, en plus de relever les différences explicites dans la législation et les programmes. Ils ont fait valoir que, dans certains volets et programmes d’immigration, le succès d’une demande dépend de facteurs qui n’ont parfois rien à voir avec les critères d’admissibilité, que ces critères soient justes ou injustes. Christian Blanchette, recteur de l’Université du Québec à Trois-Rivières, a déclaré ce qui suit : « On exige des candidats qui proviennent du continent africain qu’ils fournissent des données biométriques avant que l’on puisse traiter leur dossier. Ces candidats doivent traverser à peu près tout le continent africain pour se rendre au point de service où il est possible [de fournir leurs] données biométriques. Cela demeure une barrière fondamentale à l’accès au Canada, tant pour les mieux nantis que pour ceux qui ont peu de moyens[53]. »

Jusqu’à ce qu’une demande ait été acceptée, rejetée, abandonnée ou retirée, elle est traitée par un agent des visas d’IRCC ou par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR). Toutes les demandes provenant de demandeurs du statut de réfugié présents au Canada sont traitées par la CISR au Canada; les autres sont traitées soit dans l’un des quatre centres de traitement au Canada, soit dans l’une des 206 missions du réseau d’IRCC réparties à travers le monde[54]. Le choix du centre de traitement dépend habituellement du programme d’immigration et du pays d’où la demande a été soumise. Depuis 2016, IRCC peut également réacheminer les demandes dans d’autres missions de son réseau mondial afin de les traiter plus efficacement[55].

Permis d’études et taux de refus des pays africains

Les résultats différentiels imputables à l’exécution de la loi et à l’application des politiques sont nettement plus évidents dans le cas des taux de refus des permis d’études pour étudiants étrangers des étudiants étrangers provenant de pays africains. Comme l’indiquait le Comité dans son rapport précédent, Traitement différentiel dans le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers au Québec et dans le reste du Canada, le gouvernement du Canada et les établissements d’enseignement désignés (EED) recrutent activement dans les pays africains et de nombreux étudiants africains sont acceptés dans les EED. Cela est particulièrement vrai pour les EED francophones, qui comptent sur le recrutement d’étudiants étrangers en Afrique francophone[56]. Pourtant, les données d’IRCC révèlent que les taux de refus d’étudiants africains sont grandement supérieurs à ceux de la plupart des autres régions. Ainsi, en 2021, 72 % des étudiants provenant de pays africains avec une forte population francophone ont vu leurs demandes rejetées, même s’ils avaient été acceptés par un EED au Canada. De même, les agents des visas ont rejeté 68 % demandes d’étudiants provenant de pays africains comptant une forte population anglophone. Or, le taux de refus global moyen en 2021 était de seulement 40 % (figure 1 à la page 30). Ce taux chute à 35 % dans le cas des étudiants provenant d’autres régions que l’Afrique[57].

On peut faire valoir que les taux de refus supérieurs des étudiants africains reflètent les conditions d’admissibilité des permis d’études concernant les revenus (le PIB par habitant est relativement faible dans de nombreux pays africains)[58]. En effet, les données d’IRCC indiquent que l’un des deux principaux motifs donnés par les agents des visas pour rejeter la demande d’un étudiant africain est que ce dernier ne peut pas prouver qu’il possède des ressources financières suffisantes[59]. Toutefois, Lou Janssen Dangzalan, avocat en immigration, a indiqué dans son mémoire soumis pendant l’étude sur les étudiants étrangers que le PIB par habitant est uniquement lié au taux de refus dans une fourchette de revenus de PIB par habitant, de 3 000 $ à 15 000 $ – une fourchette à laquelle de nombreux pays d’Afrique francophone ne correspondent pas[60]. Il a été impossible de confirmer ces chiffres au moyen des données mises à la disposition du Comité; d’autres recherches plus approfondies sont nécessaires. Lorsqu’il a été interrogé au sujet des taux de refus des étudiants d’Afrique francophone, cependant, le ministre Fraser a admis qu’IRCC peut « apporter d’importantes améliorations » aux processus de recrutement et d’acceptation des demandeurs provenant d’Afrique[61].

Pendant la présente étude, le Comité a appris que les taux de refus de permis d’études pourraient défavoriser encore davantage les étudiants africains ayant des enfants – du moins, les parents provenant de certains pays africains. Beba Svigir a signalé que les « les clientes qui viennent [au Canada] du Nigéria avec un visa d’étudiant n’amènent généralement pas leurs enfants avec elles, car le taux de refus est plus élevé lorsque des enfants sont inclus dans la demande de permis d’études[62] ». Les parents peuvent inclure leurs enfants dans leur demande, mais cette affirmation laisse entendre qu’ils sont peut-être forcés de choisir entre, d’une part, réduire encore davantage leurs chances de succès pour obtenir un permis d’études, et, d’autre part, obtenir un permis d’études en laissant leurs enfants dans leur pays, mais être forcés de soumettre une autre demande pour faire venir leurs enfants une fois qu’ils étudieront au Canada[63]. Les forts taux de refus qui frappent les étudiants africains pourraient dont avoir des conséquences pour les requérants et leurs familles – même pour la minorité de requérants qui réussissent à obtenir un permis d’études.

Pendant l’étude précédente du Comité sur les étudiants étrangers, plusieurs témoins ont souligné que les taux de refus moyens pour les permis d’études ont nettement augmenté depuis dix ans[64]. Si l’on examine les taux de refus moyens de 2016 à 2020 en gardant à l’esprit les taux de refus pour les permis de travail et les visas de résident temporaire (VRT) (figure 1), les requérants qui demandent un permis d’études sont confrontés au taux de refus le plus élevé; ce taux de refus a atteint un sommet de 49 % en 2020, avant de revenir à 40 % (le taux moyen en 2019) en 2021. Les taux de refus pour les permis de travail et les VRT ont également progressé durant la même période, avant de reculer quelque peu en 2021 et en 2020 respectivement. Des recherches supplémentaires sont requises pour confirmer cette tendance, mais certains témoins ont fait valoir que la hausse des taux de refus pour les permis d’études se reflète également dans l’augmentation du taux de refus pour les étudiants africains[65].

Figure 1 — Taux de refus pour les permis de travail, les permis d’études et les visas de résident temporaire, 2016–2021 (%)

La figure 1 est un graphique à barres qui illustre les taux de refus pour les demandes de permis de travail, de permis d’études et de visas de résident temporaire, de 2016 à 2021. C’est en 2020 que le taux de refus des demandes de permis d’études a été le plus élevé (49 %).

Note :     Les taux de refus sont calculés ainsi : [refusés/(refusés + acceptés)] x 100.

Source : Figure préparée par les auteurs au moyen de données tirées d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, CIMM 7.8 – Demandes traitées de 2015 à la mise en œuvre de Chinook, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 17 février 2022, 27 avril 2022, annexe A.

Il n’y a pas que les étudiants qui souffrent du taux élevé de refus; les EED en font aussi les frais. Christian Blanchette, recteur de l’Université du Québec à Trois-Rivières, a raconté l’expérience de l’Université du Québec à Trois-Rivières :

Entre 2014 et 2021, [l’Université du Québec à Trois-Rivières] a eu une croissance des inscriptions des étudiants internationaux de 142 %. Si l’on affine la recherche et qu’on la circonscrit autour du bassin africain, l’augmentation est de 280 % pour la même période. […] Cependant, depuis les trois dernières années, pour chaque étudiant qui parvient à obtenir un permis d’étude et à commencer un baccalauréat à Trois‑Rivières, neuf essuient un refus[66].

Le taux de refus élevé de l’Université du Québec à Trois-Rivières est semblable à celui des étudiants africains, car les pays d’Afrique francophone sont une source importante d’étudiants étrangers pour l’université. Christian Blanchette a affirmé au Comité qu’« à l’[Université du Québec à Trois-Rivières], nous ciblons d’abord le bassin africain, parce que nous ne fonctionnons qu’en français. Or cela constitue un impact majeur[67]. » Les taux de refus sont tout aussi élevés pour la plupart des EED francophones du Québec : « [l]a moyenne du Québec oscille entre 39 et 48 %[68] ». Recrutant dans des régions ayant des taux de refus moins élevés, comme la Chine et l’Inde, les EED anglophones réussissent pour leur part à avoir un taux d’acceptation plus élevée pour leurs étudiants étrangers[69]. Au tableau 2, qui dresse la liste des grandes universités québécoises, on constate que le taux de refus en 2021 parmi les établissements francophones s’élevait à 55 %; par contre, il n’était que de 17 % dans les établissements anglophones (tableau 1).

Tableau 1 — Taux de refus pour les universités anglophones du Québec, 2021

Demandes refusées

Demandes traitées

Taux de refus (%)

Université Bishop’s

121

461

26

Université Concordia

1 048

4 612

23

Université McGill

257

3 137

8

Total

1 426

8 210

17

Source : Tableau préparé par les auteurs au moyen de données tirées d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, document parlementaire 8555-441-98, Q-98, question écrite posée par Alexis Brunelle‑Duceppe (Lac‑Saint‑Jean), 25 novembre 2021, p. 121 à 141 du document PDF.

Tableau 2 — Taux de refus pour les universités francophones du Québec, 2021

Demandes refusées

Demandes traitées

Taux de refus (%)

Université de Montréal

864

3 813

23

Université de Sherbrooke

520

1 488

35

Université du Québec

24

48

50

Université du Québec à Chicoutimi

2 005

3 347

60

Université du Québec à Montréal

1 067

3 270

33

Université du Québec à Rimouski

1 275

1 787

71

Université du Québec à Trois-Rivières

6 698

8 473

79

Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue

81

268

30

Université du Québec en Outaouais, pavillon Alexandre-Taché

758

1 027

74

Université Laval

1 493

3 319

45

Total

14 785

26 840

55

Source : Tableau préparé par les auteurs au moyen de données tirées d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, document parlementaire 8555-441-98, Q-98, question écrite posée par Alexis Brunelle‑Duceppe (Lac‑Saint‑Jean), 25 novembre 2021, p. 121–141 du document PDF.

Dans l’ensemble, les faibles taux de délivrance de permis d’études aux étudiants africains nuisent de façon disproportionnée aux étudiants africains, aux EED francophones canadiens et, par extension, aux communautés universitaires auxquelles ces étudiants se seraient joints.

Permis de travail et taux de refus des pays d’Asie du Sud

Dans le même ordre d’idées, des témoins ont affirmé que les taux de refus sont élevés pour les demandeurs de permis de travail provenant d’Asie du Sud. Gurpartap Kals, consultant en immigration, Kals Immigration, a remarqué que les refus de permis de travail sont nettement plus fréquents dans certains bureaux des visas. Par exemple, « en 2018, le centre de réception des demandes de visa (CRDV) de Chandigarh, en Inde, a refusé 66 % de toutes les demandes de permis de travail reçues, alors qu’à Sydney, en Australie, le taux de refus demeurait à seulement 17 %[70] ». Steven Meurrens a fait observer qu’ « avant 2016, IRCC publiait chaque trimestre les délais de traitement et les taux d’acceptation pour tous ses programmes. […] Elle montrait ce qui s’était fait dans un bureau donné et était très utile. IRCC a arrêté de le faire après 2015. Le site Web du gouvernement dit actuellement qu’on a arrêté parce qu’IRCC ne voulait publier que des renseignements globaux. Même si IRCC a peut-être pour objectif de faire traiter toutes les demandes de la même façon, peu importe le bureau des visas, je pense que tout le monde sait que ce n’est pas le cas dans la pratique[71]. »

Au sujet des demandes de permis travail au titre des programmes des candidats des provinces, des témoins ont fait remarquer que les requérants d’Asie du Sud obtiennent, pour une raison inconnue, des taux de refus élevés. Parlant encore des bureaux des visas, Gurpartap Kals a dit :

Après qu’une province ait sélectionné un candidat pour qu’il obtienne un permis de travail et entre au service d’un employeur au Canada, il faut attendre environ deux ans avant d’obtenir la décision définitive du gouvernement fédéral sur la délivrance du permis de travail. Supposons le cas d’un demandeur qui vient de l’Inde. Le taux de refus est d’environ 83 % au bureau de New Delhi. Mais si une personne ou un demandeur vient d’Australie, le taux de refus n’est que de 34 %, comme je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire[72].

Décrivant le programme Candidats immigrants pour la Saskatchewan (PCIS)[73], MD Shorifuzzaman a dit au Comité qu’« un nombre considérable de demandes de permis de travail présentées par l’entremise du programme, et qui proviennent surtout du Bangladesh, de l’Inde et de quelques pays asiatiques, sont rejetées tous les mois[74] ».

Ces deux témoins ont indiqué que leurs clients recevaient souvent des motifs génériques et vagues pour expliquer le rejet de leurs demandes[75]. MD Shorifuzzaman a donné en exemple l’explication générique et fourre-tout donnée par les agents des visas : « Je ne suis pas convaincu que vous allez quitter le Canada à la fin de votre séjour, compte tenu de vos actifs et de votre situation financière, ou de l’objet de votre visite, ou de vos liens avec le pays de résidence, de votre emploi actuel ou de vos antécédents de voyage[76]. »

Des recherches plus poussées sont nécessaires pour examiner les liens entre les bureaux des visas et les taux de refus et entre les programmes des candidats des provinces et les taux de refus. De telles recherches devraient également tenir compte d’autres facteurs, comme le revenu et l’âge des requérants. Si on examine les données d’IRCC mises à la disposition du Comité, on constate que les taux de refus en 2021 pour les travailleurs indiens (27 %) et bangladais (50 %) étaient nettement supérieurs à la moyenne globale de 13 %. Le taux de refus de requérants australiens se situait à 20 %[77].

Des témoins ont rapporté que les taux de refus élevés pour les travailleurs d’Asie du Sud nuisent grandement à l’économie des provinces et des régions, comme la Saskatchewan, qui recrutent dans cette partie du globe. MD Shorifuzzaman a témoigné que le refus constant des demandes en provenance de l’Asie du Sud dans le cadre du PCIS persiste, même si « [l]e principal objectif du programme des candidats immigrants de la Saskatchewan est d’aider les employeurs à embaucher des travailleurs étrangers qualifiés pour répondre à leurs besoins immédiats en main-d’œuvre[78] ».

Gurpartap Kals a également dit qu’« un traitement différentiel [sous la forme de différents taux de refus des bureaux des visas] se [fait] sentir non seulement sur l’économie canadienne, mais aussi sur l’économie de la Saskatchewan, chez nous, à Saskatoon. Les employeurs sont incapables de trouver les employés dont ils ont besoin pour occuper des emplois justifiés, et ils veulent développer leurs entreprises[79]. »

Revenir aux données ventilées par bureau des visas

Recommandation 8

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada revienne aux mises à jour trimestrielles pour chacun de ses bureaux des visas.

Équité procédurale tout au long du processus de prise de décisions

Recommandation 9

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada respecte son propre mandat et applique les règles d’équité procédurale tout au long du processus de prise de décisions; qu’il fournisse aux candidats une évaluation juste et impartiale de leur demande et leur donne réellement l’occasion d’obtenir une réponse à leurs préoccupations concernant leur demande, non seulement sur papier, mais aussi en pratique; et qu’il rende ses décisions rapidement.

Parrainage familial et requérants racisés

Le Comité a appris que les règles sur le parrainage familial sont aussi souvent appliquées de façons qui désavantagent certains requérants racisés.

La LIPR précise que la réunification des familles est un objectif d’immigration[80]. Les membres de la catégorie du regroupement familial sont sélectionnés pour devenir résidents permanents en fonction de leur relation avec le requérant (époux, conjoint de fait, enfant ou parent d’un citoyen canadien, personne inscrite comme Indien aux termes de la Loi sur les Indiens ou résident permanent)[81]. Le requérant au Canada parraine un membre de sa famille qui habite à l’étranger et s’engage à répondre à ses besoins fondamentaux pendant une période définie[82]. Les enfants sont généralement considérés des personnes à charge tant qu’ils ne sont pas mariés et qu’ils ont moins de 22 ans[83].

Mariages

Le RIPR fixe les critères pour s’assurer qu’un mariage a été contracté de bonne foi et est authentique. Le mariage doit être valide selon les lois du pays où il a été contracté et selon les lois canadiennes. Les époux devaient avoir au moins 18 ans au moment du mariage. Les mariages par procuration – mariages où les futurs époux ne sont pas présents au même endroit pendant la cérémonie – sont interdits[84].

Sabreena Ghaffar-Siddiqui, professeure et membre du Comité directeur de l’Ontario, Centre canadien de politiques alternatives, a parlé de deux types de préjugés lorsqu’IRCC évalue les mariages : en appliquant un concept canadien du mariage et en présumant qu’il y a fraude.

[L]orsque nous regardons le dossier d’un demandeur d’une région rurale du Botswana, où les relations et les mariages diffèrent beaucoup, nous nous servons d’une norme canadienne pour évaluer l’authenticité du mariage, d’un point de vue ethnocentrique, subjectif et discriminatoire, et nous nous attendons à trouver un menteur ou un tricheur à cause de stéréotypes raciaux associés à la région […] Le principal objectif de la politique devrait être de réunir des gens, pas de trouver des tricheurs. Or, la quantité de ressources utilisées pour tenter de prouver que ces relations ne sont pas réelles est disproportionnée […] Il est rare qu’un Américain ou un Européen doive fournir les mêmes preuves. Les taux de refus pour ces pays sont très faibles[85].

L’imam Yusuf Badat a aussi décrit les difficultés de sa congrégation, habituée aux mariages arrangés :

Concernant l’authenticité du mariage, il arrive qu’il y ait des mariages arrangés entre des adeptes de l’Islam très conservateurs ou très attachés aux traditions. Dans ces cas, il n’y a pas de fréquentations avant le mariage. Les familles se rencontrent et arrangent un mariage. Quand les époux sont interrogés sur le moment où les fréquentations ont commencé ou les lieux où ils se rencontraient avant le mariage, ils ne savent pas quoi répondre[86].

Fatima Filippi, directrice générale du Rexdale Women’s Centre, a rapporté au Comité des questions d’entrevue inappropriées qui créent des obstacles et sont particulières à des populations racisées : « Nos clientes musulmanes ont maintenant aussi commencé à nous dire qu’on leur pose des questions de nature sexuelle concernant leur relation avec leur époux[87]. »

Voices4Families a constaté que les demandeurs « ont été désignés pour passer des entrevues […] en fonction de “pratiques culturelles et/ou sociales typiquesˮ et des croyances des employés de l’immigration locaux. […] Nous sommes mis dans une situation où nous devons prouver à l’agent la raison pour laquelle nous n’avons pas eu un mariage “culturelˮ[88]. » Des préoccupations concernant les délais pour les entrevues et la façon dont celles-ci ont été menées ont également été soulevées.

À la lumière du témoignage qu’il a entendu, le Comité recommande :

Enregistrer les entrevues avec les demandeurs

Recommandation 10

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada enregistre les entrevues que mènent ses fonctionnaires avec les demandeurs afin d’éviter tout malentendu.

Améliorer les entrevues relatives au parrainage d’un époux

Recommandation 11

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada collabore avec des intervenants externes, y compris des dirigeants de groupes confessionnels, afin d’établir des pratiques exemplaires ainsi qu’une nouvelle formation et de nouvelles directives pour aider les agents des visas à reconnaître et à comprendre les différentes normes culturelles en matière de mariage et à interroger les demandeurs en tenant compte des différences culturelles pour évaluer l’authenticité d’une relation.

Utiliser le « Formulaire de déclaration sur les répercussions du parrainage familial »

Recommandation 12

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada envisage d’utiliser le « Formulaire de déclaration sur les répercussions du parrainage familial » pour recueillir des témoignages afin de mieux comprendre les obstacles liés à ce processus.

Veiller à l’application stricte du paragraphe 22(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

Recommandation 13

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada veille à ce que le paragraphe 22(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés soit rigoureusement appliqué, afin que l’intention de s’établir au Canada ne nuise pas à l’obtention d’un visa de résident temporaire.

Permettre la sollicitation d’un permis de travail ouvert pendant le traitement de la demande

Recommandation 14

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada permette aux demandeurs de parrainage de conjoint à l’étranger de solliciter un permis de travail ouvert pour leur conjoint pendant le traitement de leur demande.

Respecter la norme de traitement de 12 mois

Recommandation 15

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada respecte la norme de service de 12 mois pour le traitement des demandes de parrainage de conjoint.

Visas de résident temporaire pour les membres de la famille

Fatima Filippi a aussi parlé de racisme explicite et implicite lorsque des personnes provenant de pays pour lesquels un visa est exigé se font refuser leur demande de visa pour venir visiter un membre de leur famille mourant et que l’on justifie le refus en disant qu’on craint « qu’elles ne retournent pas dans leur pays ou qu’elles présentent une demande dans un bureau intérieur afin d’obtenir le statut de réfugié, ou encore qu’elles disparaissent dans le système d’une quelconque façon ». Elle a ajouté que « lorsque des proches veulent prendre soin d’une personne malade ici au Canada et ont besoin de notre soutien pour le faire », leur refuser un visa est très préoccupant[89].

Voices4Families a parlé du problème des VRT refusés si une demande de parrainage d’époux pour la même personne a déjà été déposée. Le paragraphe 179b)[90] du RIPR autorise un agent d’IRCC à délivrer un visa de visiteur s’il est convaincu que la personne quittera le Canada à la fin de son séjour. Le 30 octobre 2020, IRCC a publié des lignes directrices à l’intention de ses agents des visas qui traitent les demandes ayant une double intention (le concept juridique qui permet à une personne ayant demandé la résidence permanente de venir au Canada avec un visa temporaire)[91]. Selon les lignes directrices : « Si un époux ou un conjoint de fait est en mesure de convaincre l’agent, selon la prépondérance des probabilités, qu’il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée si sa demande de résidence permanente est refusée, conformément à l’article R179, l’agent peut délivrer un visa de résident temporaire (VRT)[92] ». Voices4Families a signalé que ces lignes directrices n’ont pas résolu le problème[93].

Dans le cas des voyageurs n’ayant pas besoin de visa[94], les conjoints peuvent venir au Canada pendant que leur demande de résidence permanente est traitée. Ils ont uniquement besoin d’une autorisation de voyage électronique (AVE)[95]. Pemi Gill, directrice générale, Réseau international, IRCC, a expliqué que les AVE et les VRT ne sont pas comparables en raison de la conception différente de leur programme[96]. L’AVE communique des informations sur l’entrée d’un voyageur au Canada tandis que le VRT examine plus en détail les raisons de la visite.

Le Comité recommande :

Visas de résident temporaire pour les familles séparées

Recommandation 16

Que, par défaut, les agents d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada délivrent des visas de résident temporaire aux personnes dont la demande de parrainage d’époux est en attente de traitement, et que le seul motif de refus possible soit l’inadmissibilité.

Délais de traitement, arriérés et parrainage familial

Certains requérants ont des expériences différentes quant aux délais de traitement ou aux arriérés en raison du programme d’immigration qu’ils ont choisi ou de leur pays de résidence – une situation très évidente dans le cas du parrainage familial.

Pour la plupart des programmes d’immigration et de réfugiés, IRCC établit une norme de service qui fixe le délai maximum dans lequel il doit traiter 80 % des demandes reçues. En 2021, par exemple, la norme de service était de 12 mois pour toutes les demandes de parrainage familial, et de 60 jours pour les demandes de permis d’études soumises de l’extérieur du Canada[97]. Pour leur part, les bureaux des visas au Canada et à l’étranger doivent aussi atteindre des objectifs annuels de demandes traitées[98].

Les résultats sont inégaux. Ainsi, en janvier 2022, IRCC estimait que les délais de traitement des demandes de permis d’études, de permis de travail et de visas de résident temporaire étaient respectivement de 86 jours (norme de service : 60 jours), de 85 jours (norme de service : 60 jours) et de 84 jours (norme de service : 14 jours)[99]. Le 31 mars 2022, IRCC a annoncé que ces estimations sont désormais dynamiques et mises à jour hebdomadairement. Dans le cas des demandes de VRT, l’estimation est maintenant fondée sur les délais de traitement des six à huit semaines précédentes. Pour la plupart des services concernant la résidence permanente et la citoyenneté, les estimations correspondent aux délais de traitement des six derniers mois[100]. Dans une réponse écrite transmise au Comité, IRCC a fourni des données sur les délais de traitement de plusieurs volets pour la période allant de 2015 au 30 avril 2022 (voir ci‑dessous les tableaux 3 et 4). Dans les deux tableaux, les données sont ventilées par année et par type de demande. Dans le cas du volet de résidence temporaire, le délai se calcule en jours, tandis que celui pour la résidence permanente se calcule en mois.

Tableau 3 — Délais de traitement pour les demandes de certains types de visa de résident temporaire traitées entre 2015 et 2022 (30 avril), en jours

Type de demande

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022 (30 avril)

Permis d’études

31

26

36

36

26

146

78

88

Permis de travail

42

47

56

57

44

147

71

62

Visas de résident temporaire

13

15

18

21

18

79

62

72

Source : IRCC, CIMM 19.14 – Délais actuels et historiques de traitement des visas depuis 2015, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 28 juillet 2022.

Tableau 4 — Délais de traitement pour les demandes de certains types de visa de résident permanent traitées entre 2015 et 2022 (30 avril), en mois

Type de demande

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022 (30 avril)

Réfugiés parrainés par le secteur privé

43,9

54,3

30,6

23,7

21,6

11,2

34,9

35,4

Réfugiés pris en charge par le gouvern. fédéral

12,7

12,9

28,7

25,7

15,1

21,2

25,1

25,4

Programme des aides familiaux résidants

48,8

36,1

58,1

64,7

54,9

91,5

75,9

82,2

Programme de garde d’enfants

1,7

1,4

3,6

1,4

6,3

18,8

27,2

29,9

Programme pour les besoins médicaux élevés

1,9

2,0

3,4

1,8

6,2

Époux et conjoints de fait

19,3

17,8

17,3

13,0

12,7

17,1

18,2

19,6

Enfants et autres catégories du regroupement familial

18,9

18,4

17,0

13,4

14,6

20,1

23,6

27,8

Parents et grands‑parents

74,2

70,5

77,9

32,0

18,4

26,7

30,6

33,4

Note :     Au moins 10 dossiers sont requis par type de demande pour calculer les délais de traitement. Le symbole « – » indique que moins de 10 dossiers ont été traités. Une case vide indique qu’aucune donnée n’était disponible.

Source : IRCC, CIMM 19.14 – Délais actuels et historiques de traitement des visas depuis 2015, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 28 juillet 2022.

Bons ou mauvais, dans l’ensemble, les résultats dissimulent des écarts importants dans les délais de traitement des demandes selon le programme auquel elles ont été soumises et le pays d’où elles proviennent – des écarts qui peuvent correspondre à des profils ethniques ou raciaux. Mais plus encore, de grands écarts existent entre les délais de traitement des demandes provenant de pays pour lesquels le Canada exige un visa et des demandes provenant de pays exemptés d’un visa. On semble faire, en partie, une distinction entre les populations racisées et non racisées.

Plus précisément, le Comité a entendu parler d’écarts dans les délais de traitement d’une demande de résidence temporaire ou permanente selon le pays d’origine du requérant ou le bureau des visas traitant la demande. Gurpartap Kals a souligné que « le délai de traitement ou d’attente pour les demandes de super visa en provenance de l’Australie est de 106 jours, alors qu’il est de 456 jours pour les mêmes demandes provenant du Pakistan[101] ». Dans la même veine, Voices4Families a indiqué que, à l’heure actuelle, « certains bureaux des visas prennent 248 jours (8,3 mois) pour remplir une demande de VRT. […] Dans d’autres bureaux, comme celui des Philippines, le traitement prend six jours, selon ce qui était publié sur le site Web d’IRCC le 8 décembre 2020[102]. » Les témoins avaient des opinions divergentes quant à l’effet de la discrimination consciente ou inconsciente sur les arriérés de demandes. Certains ont parlé de racisme et d’inégalités racisées entre les requérants[103], tandis que d’autres ont mentionné des facteurs non raciaux, comme les retards provoqués par les mesures prises pour ralentir la propagation de la COVID-19[104].

Les résultats différentiels relatifs aux délais de traitement fondés sur la race et d’autres facteurs implicites étaient plus évidents dans le cas du programme de regroupement familial. Le Comité a entendu que la durée du traitement des demandes de parrainage familial pourrait s’expliquer par la discrimination fondée sur l’âge et la race.

En résumé, des témoins ont fait valoir que le traitement des demandes de parrainage familial provenant de Chine, d’Afrique et d’Asie du Sud peut être retardé parce que les agents des visas scrutent ces demandes à la loupe et que celles-ci nécessitent plus d’attention et de suivi[105]. Fatima Filippi a déclaré ce qui suit au sujet du parrainage familial :

Dans la pratique, IRCC aurait apparemment scruté à la loupe les demandes de parrainage familial provenant principalement de demandeurs racialisés. […] Les demandes de parrainage d’un époux pour l’Inde sont examinées à la loupe pour vérifier l’existence de fraudes liées aux mariages. Les demandes de parrainage d’un enfant pour la Chine et de nombreux pays africains sont scrutées pour vérifier l’authenticité des relations parents-enfants[106].

La même vigilance exercée contre les fraudes qui génère des soupçons envers les demandes et se traduit par un nombre plus élevé de refus pour les requérants de certains pays – par exemple l’Inde, la Chine et les pays africains – entraîne également des retards.

Les demandes de parrainage d’un époux où un couple ne correspond pas parfaitement à l’image du couple moyen font également l’objet d’une attention accrue. Vishal Ghai, représentant de Voices4Families, a décrit ce qui se passe lorsque l’un des conjoints à plus de 30 ans : « Malheureusement, quand un dossier est signalé comme étant “complexe”, il n’y a aucun échéancier […] [alors que le traitement d’]une demande standard pour toute personne de moins de 30 ans est de 12 mois[107]. » Voices4Families a vu certains de ses dossiers être jugés complexes – au lieu de simples – en raison d’une différence d’âge, de culture, de religion ou de statut socio-économique entre les deux conjoints, ou si l’un d’eux a déjà été divorcé. La désignation « complexe » entraîne inévitablement des retards et frappe souvent les requérants racisés de certaines régions, comme l’Afrique et l’Asie du Sud[108].

De même, un examen plus détaillé et la désignation « complexe » amènent souvent les agents des visas à exiger d’autres documents, dont certains sont difficiles à obtenir et coûteux. Des témoins ont indiqué que, dans le cas du parrainage familial d’enfants, les requérants racisés – surtout ceux d’Afrique – sont souvent priés de fournir des tests d’ADN coûteux et parfois difficiles à obtenir[109]. Dans les cas de parrainage d’un époux, les couples dont le dossier est jugé « complexe » doivent répondre à des questions détaillées pendant une entrevue de suivi. Vishal Ghai a dit qu’il n’existe aucun échéancier précisant quand ces entrevues doivent se tenir. Elles sont souvent brèves quand elles ont finalement lieu, mais il faut parfois attendre des années avant qu’IRCC n’en fixe le moment[110]. Les agents des visas peuvent également demander des filtrages de sécurité supplémentaires. Les exigences sans cesse plus poussées pour les requérants de certains pays et ayant certaines caractéristiques amplifient encore davantage certains obstacles préexistants pour les personnes qui souhaitent préparer une demande et vérifier son statut, comme l’absence d’un branchement fiable à Internet dans certains pays et régions[111]. L’obtention d’un résultat différentiel augmente le risque d’en avoir un autre; ultimement, une demande est encore plus retardée.

Les longs délais de traitement qui frappent les demandes de parrainage familial touchant des enfants peuvent également faire en sorte que ces enfants n’aient plus l’âge d’admissibilité. En effet, au moment où la demande est enfin traitée, les enfants peuvent être trop vieux pour être considérés des personnes à charge. Ils doivent alors soumettre leur propre demande à titre d’immigrants indépendants. Parmi les conséquences des délais de traitement des demandes de parrainage d’époux mentionnées par Voices4Families, signalons les enfants qui se retrouvent longtemps séparés de leur père ou de leur mère; le manque d’intimité physique entre conjoints pendant des années; le fait que les gens reportent la possibilité d’avoir des enfants ou changent leur plan pour leur famille; l’abandon d’une carrière ou d’ambitions parce que l’avenir est incertain; un niveau de stress élevé et, dans certains cas, de graves problèmes de santé mentale[112].

Dans l’ensemble, les préoccupations de sécurité semblent toucher les candidats de certains volets plus que d’autres. Par exemple, les retards de traitement occasionnés par les vérifications de sécurité touchent davantage les demandeurs du statut de réfugié présents au Canada que les autres candidats. Dans une réponse écrite au Comité, IRCC indique qu’au 11 mai 2022, le traitement de 1 994 demandes (sur 672 796) du volet de résidence temporaire et de 766 demandes (sur 57 154) du volet de résidence permanente s’était prolongé au-delà de la norme de service publiée et n’avait pas encore été finalisé en raison de vérifications de sécurité qui avaient été retardées. Dans les deux volets, cela représentait moins de 1 % de toutes les demandes dans l’arriéré. Par contre, 35 % des demandes provenant de demandeurs du statut de réfugié présents au Canada avaient dépassé le délai maximal de 55 jours prévu pour la vérification de sécurité[113].

Exécution de la loi par l’Agence des services frontaliers du Canada

Des gens signalent également un traitement différentiel de la part de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC). L’ASFC relève du ministre de la Sécurité publique[114] et applique la LIPR. L’ASFC est chargée notamment des fonctions suivantes :

  • contrôle des personnes aux points d’entrée – à la frontière et dans les aéroports[115];
  • mesures d’exécution de la LIPR, notamment en matière d’arrestation, de détention et de renvoi[116].

Le Comité a entendu parler d’allégations de racisme et de préjugés de la part des agents de l’ASFC. Fatima Filippi a déclaré que son organisation avait entendu des commentaires de agents comme « ces groupes essaient simplement d’escroquer le système, qu’ils sont des menteurs ou qu’ils tentent de resquiller » à l’égard de demandeurs racisés du statut de réfugié déboutés et menacés de renvoi[117]. Selon elle, « [c]ela devient problématique lorsque nous traitons avec certains agents dans certaines régions, en Ontario, et que nous essayons de leur faire surmonter ces préjugés qu’ils ont » à n’importe quelle étape du processus[118].

Beba Svigir, de la Calgary Immigrant Women’s Association, a dit au Comité que leurs clients avaient affirmé avoir été victimes de racisme pendant le processus de renvoi. Cette situation a amené « [l]a communauté philippine [à avoir] […] des craintes et des inquiétudes quant à son engagement dans tout type de système social et […] dans les aides gouvernementales, en raison de ses expériences inhérentes avec le système[119] ».

Aleks Selim Dughman-Manzur, co-directeur exécutif, Programmation et plaidoyer, Rainbow Refugee Society, a aussi décrit les gestes de agents aux points d’entrée :

Nous avons remarqué que les réfugiés de pays africains sont beaucoup plus susceptibles d’être détenus. Le racisme contre les Noirs est pire pour les personnes dont l’identité de genre diffère et pour les personnes transsexuelles. L’évaluation de l’agent pour déterminer qui représente une menace ou qui se soustraira vraisemblablement au renvoi a également tendance à reposer sur des préjugés inconscients ou des stéréotypes[120].

Il a expliqué que les pouvoirs de l’ASFC en matière de détention et de renvoi « ont un effet négatif important sur les réfugiés LGBTQI, qui se poursuit jusqu’au règlement de leur dossier. Les gens ont peur d’appeler la police par crainte que leurs renseignements soient transmis à l’ASFC. Certains endurent des situations de violence plutôt que d’appeler la police. Les femmes transgenres de couleur sont touchées de manière disproportionnée[121]. » Il a insisté que « [t]ous les efforts pour s’attaquer au racisme systémique dans notre système d’immigration et de détermination du statut de réfugiés doivent se traduire par une surveillance civile de l’ASFC[122] ». Déposé le 27 janvier 2020, le projet de loi C-3 aurait confié à la commission des plaintes qui surveille la Gendarmerie royale du Canada la tâche de surveiller également l’ASFC[123]. Bien que ce projet de loi soit mort au Feuilleton en août 2020, un projet de loi semblable, le projet de loi C-20, a été déposé le 19 mai 2022[124].

Prenant en considération les effets durables sur les populations racisées et marginalisées de leurs interactions avec l’ASFC, le Comité recommande :

Surveillance de l’Agence des services frontaliers du Canada

Recommandation 17

Que le gouvernement du Canada crée un organe indépendant de surveillance de l’Agence des services frontaliers du Canada, dont le mandat consisterait notamment à lutter contre le racisme et à recevoir les plaintes à ce sujet.

Formation contre le racisme et les préjugés inconscients à l’Agence des services frontaliers du Canada

Recommandation 18

Que le gouvernement du Canada mette en place une formation de type séminaire, obligatoire, régulièrement offerte et axée sur la lutte contre les préjugés et le racisme ainsi que sur la sensibilisation aux différences culturelles, à l’intention de tout le personnel de l’Agence des services frontaliers du Canada, des cadres jusqu’aux agents de première ligne.

Résultats différentiels de l’infrastructure d’Immigration et des décisions de financement

Les requérants peuvent obtenir des résultats différents en matière de demandes et de traitement en raison de facteurs comme la race et le pays d’origine de leurs demandes, mais le Comité a aussi entendu des témoignages sur les résultats injustes et partiaux de l’infrastructure d’immigration, du financement et des décisions touchant la technologie employée pour le traitement des demandes. Bien qu’ils ne visent pas directement les décisions concernant les demandes d’immigration, les choix d’IRCC et de ses partenaires peuvent influencer subtilement les refus, les longs délais de traitement et, une fois qu’une personne arrive au Canada, les résultats de l’établissement de celle-ci au pays, sans compter que leurs choix peuvent aussi avoir des répercussions sur la vie des partenaires et des employés d’IRCC. Dans le système d’immigration, un résultat différentiel peut avoir un effet domino.

Outils électroniques et intelligence artificielle

Les décisions d’IRCC quant aux outils électroniques et à l’intelligence artificielle et à leur utilisation dans le traitement des demandes risquent d’influencer les taux de refus. En 2014, le gouvernement du Canada a modifié la LIPR afin de donner au ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration et au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile le pouvoir d’utiliser la technologie dans l’administration et l’application des programmes d’immigration du Canada[125]. Comme il est indiqué dans la Gazette du Canada, « [c]es modifications législatives ont été élaborées dans le but d’appuyer l’utilisation plus large des outils électroniques au sein du système d’immigration afin de pouvoir gérer le traitement d’un nombre sans cesse grandissant de demandes d’immigration[126] ». Tant dans sa précédente étude sur les étudiants internationaux que dans celle portant sur les résultats différentiels, le Comité a entendu des inquiétudes au sujet de deux outils électroniques de traitement des demandes qu’IRCC a adoptés depuis cette modification législative : le logiciel Chinook et l’analyse avancée des données.

Comme nous le verrons, l’analyse avancée des données et le logiciel Chinook sont des outils à la puissance et au fonctionnement très différents. Or, les témoins pendant la présente étude ont exprimé des inquiétudes semblables pour ces deux outils destinés à appuyer la prise de décisions par les agents des visas. Les inquiétudes visaient l’un ou l’autre des outils, ou les deux, et soulignaient les risques qu’ils posent :

  • 1) reproduire ou accroître les préjugés ou le racisme conscients ou inconscients au moyen des données, des instructions et des mots-clés utilisés;
  • 2) réduire l’attention accordée aux caractéristiques propres à chaque demande et à son contexte; et
  • 3) accroître l’utilisation de motifs exagérément vagues et normalisés pour expliquer les refus[127].

S’il est vrai que les préjugés, l’analyse superficielle des dossiers et les explications obscures devancent largement l’utilisation de ces outils, l’analyse avancée des données et le logiciel Chinook risquent de généraliser ces problèmes de façon exponentielle et de les rendre encore plus difficiles à détecter. Parallèlement, certains témoins se sont réjouis du potentiel de ces outils pour améliorer la prestation et l’intégrité des programmes[128].

Analyse avancée des données

À IRCC, le terme « analyse avancée des données » désigne des techniques statistiques qui utilisent les données pour classer les demandes selon leur degré de complexité. Il renvoie également à l’apprentissage machine, un procédé par lequel un algorithme se développe – c’est‑à-dire qu’il apprend – au fil du temps grâce à ses données de formation initiale et à de nouveaux intrants. IRCC utilise l’analyse avancée des données depuis 2018 pour :

aider à trier plus d’un million de demandes de VRT présentées depuis des pays où le volume de demandes est élevé [principalement la Chine et l’Inde], et pour en faciliter le traitement. Depuis, il a été démontré que le système permettait d’évaluer les dossiers simples 87 % plus vite, certains demandeurs pouvant ainsi recevoir une décision plus rapidement. En outre, le système assume une part importante des tâches administratives et répétitives liées au tri des demandes, ce qui permet aux agents d’IRCC de se concentrer sur l’évaluation des demandes et la prise de décisions définitives [en gras dans l’original][129].

Le 24 janvier 2022, le Ministère a annoncé qu’il élargissait l’application de l’analyse avancée des données pour trier et traiter toutes les demandes de VRT soumises à partir de l’étranger[130]. Dans une réponse écrite au Comité, le Ministère indique également qu’il emploie l’analyse avancée des données pour trier les demandes de la catégorie des époux ou conjoints de fait soumises au Canada[131].

Demandes de visa de résident temporaire provenant de l’extérieur du Canada

Figure 2— Arbre décisionnel d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada pour les demandes de visa de résident temporaire provenant de l’étranger

Figure 2 est une image qui décrit l’information fournie ci-dessous dans le texte.

Source : IRCC, CIMM 19.12 – Comment identifier les dossiers simples et complexes, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022, p. 2.

Comme l’illustre la figure 2, le système d’analyse avancée des données vérifie en trois étapes la recevabilité et l’admissibilité des VRT provenant de l’étranger :

  • 1) Le modèle applique des « règles opérationnelles » élaborées par des agents des visas chevronnés pour déterminer si une demande est complexe. Les règles opérationnelles « identifient les demandes de clients nécessitant des pièces justificatives supplémentaires (par exemple, une lettre de consentement pour un enfant voyageant seul) ou présentant des caractéristiques connues pour entraîner une probabilité plus élevée d’irrecevabilité ou d’interdiction de territoire (par exemple, une condamnation pénale antérieure)[132] ». Si le système conclut que la demande est complexe, le dossier ne peut être traité par le modèle. Un agent des visas doit examiner la demande selon la procédure habituelle pour confirmer sa recevabilité et son admissibilité[133].
  • 2) Le système trie automatiquement les demandes restantes, moins complexes, en trois niveaux, selon leur degré de complexité. L’algorithme s’appuie sur l’apprentissage machine et sur un « ensemble de règles découlant d’une analyse de milliers de décisions effectuées par des agents[134] ».
  • 3) Les agents des visas passent en revue les demandes des deux niveaux les plus complexes, en suivant les procédures habituelles, tandis que les demandes les plus simples – celles de faible complexité – reçoivent une décision favorable concernant leur recevabilité[135].

Enfin, des agents prennent la décision définitive concernant les demandes simples en s’appuyant sur une vérification subséquente de l’admissibilité. S’ils détectent des problèmes, ils peuvent revérifier les critères de recevabilité[136]. IRCC souligne que l’admissibilité et toutes les décisions finales sont toujours prises par un agent des visas, y compris les refus[137].

Demandes des époux ou conjoints de fait soumises au Canada

Figure 3 — Arbre décisionnel d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada pour les demandes de la catégorie des époux ou conjoints de fait soumises au Canada

Figure 3 est une image qui décrit l’information fournie ci-dessous dans le texte.

Source : IRCC, CIMM 19.12Comment identifier les dossiers simples et complexes, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022, p. 3.

Comme l’illustre la figure 3, les demandes des époux ou conjoints de fait soumises au Canada suivent un processus similaire à celui des demandes de VRT, mais avec des étapes moins complexes :

  • 1) Le modèle « utilise des règles créées par des agents et par des algorithmes d’analytique avancée afin de trier automatiquement les demandes entre le “bac vert” ou le “bac régulier”[138] ».
  • 2) Les demandes dans le « bac régulier » sont traitées par des agents des visas en suivant les procédures habituelles. « Bien que ces demandes soient considérées comme étant plus complexes, la grande majorité sont approuvées par les agents[139]. »
  • 3) Les demandes dans le « bac vert » reçoivent une détermination positive de leur recevabilité pour le répondant et le demandeur principal sur la seule base de l’évaluation effectuée par le modèle. La décision concernant l’admissibilité et la sélection est prise par les agents, en suivant les procédures habituelles[140].
Assurance de la qualité et risque de préjugés

Comme le Comité l’a indiqué dans son rapport intitulé Traitement différentiel dans le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers au Québec et dans le reste du Canada, IRCC soumet ses programmes d’analyse avancée des données à une vérification approfondie de la qualité[141]. Ainsi, le triage au moyen de l’analyse avancée des demandes de VRT présentées depuis l’étranger a passé une évaluation d’incidence algorithmique obligatoire[142] à l’égard des modèles analytiques qu’il utilise[143]. Les agents des visas vérifient en permanence les résultats de ces systèmes, notamment en examinant chaque jour 10 % des demandes classées dans le niveau 1 pour confirmer l’évaluation produite par le système par rapport aux résultats produits par les agents des visas[144].

IRCC examine actuellement les résultats de son programme, mais le Comité a appris que, puisque le système repose sur les décisions antérieures des agents des visas, il est possible de recréer facilement dans le présent les décisions biaisées et racistes du passé. Autrement dit, si les préjugés et le racisme entachent encore les décisions et les règles dans certains bureaux des visas, ces erreurs et préjugés survivront éventuellement sous la forme d’algorithmes officiels[145], comme le premier algorithme qui trie les demandes selon leur degré de complexité en se fondant sur les règles établies par des agents chevronnés.

L’apprentissage machine peut, de façon plus subtile, faire en sorte que le deuxième algorithme apprenne et se développe en s’appuyant sur des données passées contaminées par des préjugés et des résultats différentiels. Comme Gideon Christian l’a expliqué :

Le problème est que, historiquement, vous collectez des données qui semblent comporter des biais à l’encontre d’un groupe particulier de personnes ou d’un continent particulier. Lorsque vous utilisez ces données pour former un algorithme d’IA, ce que l’algorithme d’IA fait est simplement de régurgiter ces biais. Cette fois, c’est encore plus difficile, car l’identification du problème se complexifie[146].

Les préjugés peuvent également être introduits par de nouvelles données sur les résidents temporaires « non conformes » qui sont ajoutées et qui entraînent le deuxième algorithme de triage. Cela est difficile à juger, étant donné que ces données ne sont pas rendues publiques. Mario Bellissimo, avocat spécialisé en droit de la citoyenneté et de l’immigration et en protection des réfugiés à la Bellissimo Law Group Professional Corporation, a affirmé que « nous ne sommes donc pas en mesure de déterminer et d’évaluer l’équité procédurale potentielle ou le parti pris dans ces décisions sur la conformité[147] ».

Dans l’ensemble, plusieurs témoins ont fait valoir que l’analyse avancée des données pourrait être appelée à remplacer l’humain pour évaluer un dossier – l’humain, lui, peut tenir compte des vulnérabilités et des exceptions qui ne correspondent pas aux algorithmes du programme ou aux données grâces auxquelles le programme est formé ou entraîné[148]. Un témoin a indiqué que les requérants et les avocats pourraient avoir de la difficulté à comprendre les réponses toutes faites d’un algorithme et à les contester, car ils n’ont pas le droit de voir les codes ou les données qui les produisent[149]. Dans le même ordre d’idées, Beba Svigir a estimé que les décisions de haut niveau fondées sur des technologies sophistiquées sont particulièrement difficiles pour les populations vulnérables qui peuvent être grandement touchées par ces décisions, mais qui possèdent rarement les ressources, l’accès à la technologie et les connaissances pour y réagir[150].

En fin de compte, les mesures d’assurance de la qualité destinées à atténuer les erreurs dans l’utilisation d’analyse avancée des données pourraient se révéler suffisantes pour éliminer les préjugés et le racisme dans le fonctionnement du système. Cela étant dit, étant donné l’histoire et les résultats différentiels qui persistent dans les décisions d’IRCC – et, comme nous le verrons plus loin, les pratiques d’embauche et la culture d’IRCC – le risque que les préjugés se perpétuent demeure. Même si les activités d’assurance de la qualité se poursuivent, Mario Bellissimo a souligné que la réglementation gouvernementale n’oblige pas IRCC à soumettre régulièrement son programme à des évaluations de l’incidence algorithmique, malgré l’évolution de la portée et du fonctionnement du programme[151]. Compte tenu du manque de transparence dans l’utilisation d’analyse avancée des données et du risque que l’on perpétue des préjugés et de la discrimination historiques et modernes, le Comité recommande :

Exiger une évaluation indépendante de Chinook, des outils électroniques et de l’intelligence artificielle

Recommandation 19

Que le gouvernement du Canada exige qu’une évaluation et une surveillance indépendantes et obligatoires de Chinook, des outils électroniques et de l’utilisation accrue de l’intelligence artificielle dans les services d’immigration soient effectuées par des experts en sécurité informatique; qu’il vise une plus grande transparence à l’égard de l’évaluation d’incidence algorithmique, de l’évaluation de la protection des renseignements personnels et des consultations sur le caractère équitable du recours à ces technologies; et qu’il étudie les cas du Royaume-Uni et des Pays-Bas, qui ont tous deux, dans les deux dernières années, suspendu l’utilisation des systèmes algorithmiques en raison de leur partialité discriminatoire.

Le Comité réitère également ses recommandations précédentes :

Mettre en œuvre les recommandations relatives à l’intelligence artificielle et aux outils électroniques contenues dans le Rapport 8

Recommandation 20

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada mette en œuvre les recommandations liées à l’utilisation de l’intelligence artificielle et des outils électroniques qui sont contenues dans le Rapport 8 – Traitement différentiel dans le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers au Québec et dans le reste du Canada.

Logiciel Chinook

Lorsqu’on le compare aux techniques d’apprentissage machine et aux modèles prédictifs et statistiques sophistiqués employés par les programmes d’analyse avancée des données pour trier les demandes, on constate que le logiciel Chinook est décidément bien peu raffiné. Selon IRCC, le logiciel « simplifie les étapes administratives qui seraient autrement requises par des agents dans le traitement des demandes de résidence temporaire[152] ».

En 2018, IRCC a déployé le logiciel Chinook dans quelques bureaux des visas pour accroître l’efficience et l’uniformité des décisions touchant les demandes de résidence temporaire. Le logiciel fonctionne en tandem avec le Système mondial de gestion des cas (SMGC) et le complète; il est maintenant utilisé, sur une base volontaire, dans de nombreux bureaux des visas partout dans le monde pour traiter les demandes de VRT, de permis d’études et de permis de travail. Ces bureaux utilisent à la fois le SMGC et le logiciel Chinook, mais le SMGC demeure le système où est consignée l’information. Pour protéger les renseignements personnels et éviter les dossiers doublons, toutes les décisions et notes sont conservées uniquement dans le SMGC[153].

Conçu et créé au départ dans Excel, le logiciel Chinook est composé d’un ensemble de modules. Plusieurs de ces modules peuvent être utilisés indépendamment les uns des autres. Un fonctionnaire d’IRCC, Andie Daponte, a décrit dans un affidavit soumis à la Cour fédérale dans l’affaire Abigail Ocran c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, les modules du logiciel Chinook :

Module 1 : Gestion des dossiers – Ce module permet à l’utilisateur d’attribuer lui-même des demandes ouvertes en fonction de ses tâches de traitement. Par exemple, un expert en admissibilité peut s’attribuer des demandes ouvertes qui sont prêtes pour les évaluations de l’admissibilité. Le module 1 est une fonctionnalité facultative qui n’est pas utilisée dans tous les bureaux de migration où Chinook a été mis en œuvre.

Module 2 : Évaluation préalable – Ce module présente un modèle à un adjoint de programme pour l’exécution des tâches d’évaluation préalable, comme la confirmation des documents à l’appui, la vérification de la capacité financière d’un client et la documentation des antécédents de voyage. Les notes d’évaluation préalable du module 2 doivent être importées dans le champ correspondant du SMGC. Après le transfert des données dans le SMGC, les décideurs peuvent voir le contenu du champ des notes d’évaluation préalable du SMGC dans le rapport du module 3 après la prochaine extraction de l’[entrepôt de données d’entreprise, un référentiel électronique d’information du Ministère]. Le module 2 est une fonctionnalité facultative qui n’est pas utilisée dans tous les bureaux de migration où Chinook a été mis en œuvre.

Module 3 : Décideur – Les décideurs utilisent ce module. Le module présente aux décideurs le rapport du module 3, qui fournit le contenu des demandes attribuées dans un seul rapport. À cette étape du traitement, et à l’extérieur de Chinook, les décideurs continuent d’avoir accès aux demandes papier ou aux documents électroniques et au SMGC, ce qui permet aux décideurs d’examiner des renseignements et des documents supplémentaires venant d’une demande ou du SMGC. […]

Module 4 : Après la décision – Les décideurs utilisent ce module. Le module est présenté sous forme de fenêtre de dialogue contextuelle aux décideurs lorsqu’ils sélectionnent un champ de données de la colonne D, le champ « Action », dans le rapport du module 3. Le module enregistre la décision et, si les décideurs refusent une demande après examen, il fournit un générateur de notes pour aider à rédiger des motifs. […]

Module 5 : Gestion des indicateurs – Ce module permet à un utilisateur de Chinook de soumettre des demandes pour ajouter, renouveler ou modifier des « indicateurs de risque » et des « indicateurs de mots locaux ». Un administrateur de Chinook est en mesure d’approuver de telles demandes au moyen de ce module. Les « indicateurs de risque » approuvés et les « indicateurs de mots locaux » sont ensuite présentés aux décideurs dans le module 3, le cas échéant[154].

IRCC affirme que le logiciel Chinook n’influence pas les décisions prises. Comme l’indique une réponse d’IRCC : « Chinook ne modifie pas la façon dont les décisions sont prises. Ce sont toujours les agents, et non la feuille de calcul de Chinook, qui prennent la décision relativement à une demande de résidence temporaire et fournissent la justification[155]. » Contrairement à l’analyse avancée des données, le logiciel ne confirme même pas si une demande est recevable ou non.

Cependant, même lorsqu’il est utilisé comme tabulateur, le logiciel Chinook peut modifier la façon dont une demande est perçue et encourager les agents des visas à lire une demande avec moins d’attention. Selon Steven Meurrens, on ne sait pas exactement « s’il permet ou non aux agents de traiter rapidement des dossiers, éventuellement en vrac, sans lire l’intégralité des demandes[156] ». Or, comme s’est demandé Mario Bellissimo : « Dans les cas où de multiples écrans liés à divers demandeurs sont ouverts en même temps, comme dans les systèmes Chinook […] ne risquons-nous pas de perdre le caractère individuel du processus[157]? » Ces préoccupations rejoignent celles exprimées par des témoins lors de l’étude sur les étudiants internationaux[158]. Pendant cette étude, Lou Janssen Dangzalan avait fourni au Comité, à titre de renseignements contextuels, des documents internes d’IRCC sur l’intelligence artificielle obtenus grâce à une demande d’accès à l’information. Sa demande visait notamment une liste de projets de modernisation dressée en janvier 2020 par IRCC – une liste où est indiquée comme « active » une tâche pour permettre aux agents de rejeter et de régler des demandes en bloc (Chinook)[159]. La liste et les documents connexes ne fournissent pas d’autres détails sur ces refus en bloc ni sur leur place dans le processus d’évaluation globale.

Pendant la présente étude, des témoins ont aussi souligné l’effet inconnu des « indicateurs de risque » et des « mots-clés ciblés locaux » dans le module 5. Étant donné que l’on n’a pas accès à ces mots ni à ces facteurs, le processus – et son influence éventuelle sur les taux de refus et les résultats différentiels – demeure opaque[160]. Le logiciel ne repose pas sur l’apprentissage machine, mais il pourrait néanmoins influer sur la façon dont les décideurs comprennent et évaluent les demandes.

En fin de compte, sans renseignements supplémentaires, il est difficile de déterminer les effets éventuels du logiciel Chinook sur les demandes et sur certaines populations. Comme l’indiquait le Comité dans son rapport précédent, Traitement différentiel dans le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers au Québec et dans le reste du Canada, IRCC ne semble pas appliquer au logiciel Chinook le même processus rigoureux d’assurance de la qualité qu’il fait subir à son programme d’analyse avancée des données[161]. Un témoin a déclaré que les taux de refus des demandes de permis d’études qui augmentent (sans cesse) depuis cinq ans (figure 1 à la page 30) confirment probablement l’effet global du programme sur les décisions – une affirmation également faite dans l’affaire Abigail Ocran c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration[162]. Si l’on se fie aux données qu’IRCC a fournies au Comité, en 2021, 14 % des demandes de permis d’études, 20 % des demandes de VRT et 7 % des demandes de permis de travail ont été traitées au moyen du logiciel Chinook. Lorsqu’on compare les taux de refus aux taux moyens de 2021, les demandes traitées avec le logiciel Chinook ont obtenu des taux de refus plus élevés : 51 % pour les permis d’études (moyenne de 40 %), 42 % pour les VRT (moyenne de 26 %) et 20 % pour les permis de travail (moyenne de 13 %). Les taux de refus plus élevés des demandes traitées avec le logiciel Chinook doivent cependant être examinés plus en détail. Pour le moment, le logiciel Chinook est seulement utilisé pour traiter les demandes de visa soumises à l’étranger, alors que les moyennes globales pour chaque catégorie regroupent les demandes soumises au Canada et à l’étranger – une différence qui pourrait potentiellement fausser la comparaison[163].

Distribution du réseau international de bureaux d’immigration

En bref, le degré de difficulté que représentent la préparation et la mise à jour d’une demande a une incidence sur les délais de traitement et les refus. Cette situation est facilitée ou compliquée par les décisions d’IRCC et de ses partenaires quant à l’emplacement de leurs bureaux de traitement des demandes de visa et centres de réception des demandes de visa (CRDV), et aux médecins qu’ils peuvent désigner pour effectuer les examens médicaux des requérants. Les décisions sont bien entendu limitées par les circonstances sur le terrain, mais ils choisissent tout de même les bureaux auxquels ils octroient des fonds; leurs décisions peuvent donc avoir des conséquences négatives pour les gens qui soumettent une demande à partir de régions moins bien desservies.

Bureaux des visas à l’extérieur du Canada

Les bureaux des visas situés à l’extérieur du Canada sont souvent chargés de recevoir les demandes provenant de plus d’un pays[164]. Les décideurs sont des Canadiens ou du personnel local; ils reçoivent la formation régulière dispensée par IRCC. Dans une réponse écrite, IRCC a expliqué :

dans des environnements complexes où la présence du gouvernement du Canada est réduite et [où il y a] de multiples priorités, la capacité du ministère à s’engager auprès des autorités locales pour valider les documents, à cerner les tendances potentielles en matière de fraude, et à promouvoir les programmes d’immigration grâce à la diplomatie des migrations, peuvent tous être affectés[165].

Dans son rapport sur les étudiants étrangers, Traitement différentiel dans le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers au Québec et dans le reste du Canada, le Comité a indiqué que le traitement des demandes de permis d’études pourrait être plus long dans certains bureaux des visas parce que ceux-ci reçoivent un fort volume de demandes[166]. Pendant l’étude sur les étudiants internationaux, certains témoins craignaient aussi que les bureaux des visas qui traitent les demandes de permis d’études provenant de nombreux pays ne soient pas en mesure de comprendre les conditions locales de chacun d’entre eux[167]. Nombre de témoins ont mentionné le centre de traitement situé à Dakar, au Sénégal, qui « dessert un total de 16 pays et un bassin de 276 millions de personnes […] l’un des ratios les plus élevés pour un bureau des visas canadien dans le monde[168] ». C’est d’ailleurs le centre de traitement central pour toutes les demandes de visa provenant d’Afrique francophone. Pendant la présente étude, plusieurs témoins ont également formulé l’hypothèse que les taux de refus soient plus élevés dans les bureaux des visas surchargés et sous-financés, car les agents n’ont pas suffisamment de temps pour évaluer chaque demande adéquatement[169].

Dans son examen de 2021-2022 de la prestation de services en Afrique subsaharienne, le Ministère a noté une « augmentation significative du volume de demandes provenant de nombreux pays » dans la région[170]. Par conséquent, IRCC a indiqué qu’il augmente les ressources dans la région. Caroline Xavier a également dit au Comité qu’un bureau des visas serait probablement ouvert au Cameroun par suite de la politique stratégique pour attirer des immigrants francophones d’Afrique. Elle a expliqué les nombreuses conditions qui peuvent mener à l’ouverture d’un bureau des visas. Le volume de demandes n’est pas le seul critère, car il faut aussi veiller à offrir un milieu de travail sûr aux employés. D’ailleurs, a-t-elle rappelé au Comité, la décision d’ouvrir un bureau des visas doit aussi faire l’objet de discussions avec Affaires mondiales Canada[171].

Prenant en considération les aspects pratiques et la sécurité sur le terrain, le Comité recommande :

Accroître le nombre de bureaux des visas dans les régions mal desservies

Recommandation 21

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada hausse, pour tous ses bureaux des visas, le ratio de financement par nombre de demandes traitées, embauche plus d’agents des visas et ouvre de nouveaux bureaux des visas dans les régions mal desservies, si les conditions de sécurité le permettent.

Centres de réception des demandes de visa

Le gouvernement du Canada a confié à 163 centres de réception des demandes de visa (CRDV) situés un peu partout dans le monde la responsabilité de certains services, dont la collecte de données biométriques – la photographie et la prise des empreintes digitales nécessaires pour toutes les demandes d’immigration[172].

De l’avis de Christian Blanchette l’obligation pour les requérants de fournir leurs données biométriques avant que leurs demandes de permis d’études soient traitées représente un obstacle en Afrique compte tenu du nombre limité de CRDV dans cette région : « Ces candidats doivent traverser à peu près tout le continent africain pour se rendre au point de service où il est possible [de fournir leurs] données biométriques. Cela demeure une barrière fondamentale à l’accès au Canada, tant pour les mieux nantis que pour ceux qui ont peu de moyens[173]. » Il a affirmé : « Cette situation peut avoir des répercussions et engendrer un biais culturel, ethnique ou économique[174]. »

Pour cette raison, le Comité recommande :

Accroître le nombre de centres de collecte des données biométriques

Recommandation 22

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada examine comment il peut accroître le nombre de centres de collecte de données biométriques afin d’offrir aux requérants plus d’options à proximité de leur domicile.

Médecins désignés et examens médicaux

Caroline Xavier, d’IRCC, a expliqué que, au Canada et ailleurs dans le monde, il y a 577 médecins désignés autorisés; ces médecins ont le droit d’effectuer des examens médicaux à des fins d’immigration[175]. Elle a affirmé que les médecins désignés doivent se conformer aux normes qu’IRCC a établi et être prêts à participer aux évaluations et aux processus de son réseau. Cela pourrait expliquer pourquoi certains pays n’ont pas de médecin désigné; dans d’autres cas, il pourrait simplement s’agir d’un nombre insuffisant de médecins[176].

Voices4Families a expliqué que, d’après l’expérience de l’organisme, quand les demandes de parrainage familial sont soumises au Canada puis expédiées à l’étranger pour traitement, les membres de la famille doivent passer rapidement un examen médical. Or, en raison des délais de traitement des demandes de parrainage familial, les résultats des examens médicaux expirent sans que cela soit la faute de requérant. D’après l’organisme, la période de validité des résultats devrait être prolongée ou les requérants devraient être exemptés d’avoir à passer un autre examen médical. Voices4Families a également proposé, en guise de solution de rechange, qu’un deuxième examen médical soit effectué au Canada, si cela s’avère nécessaire[177].

Jennifer Miedema a donné l’exemple d’un réfugié érythréen au Soudan du Sud qui avait été accepté, mais dont le dossier avait été mis en attente en raison de la pandémie. « [N]ous avons constaté, fin 2021, que [les résultats] de sa visite médicale avai[en]t expiré[s] en février 2021, mais personne ne l’en avait prévenu. On a demandé au candidat d’essayer d’obtenir un nouveau rendez-vous, mais on ne trouve pas, dans le Soudan du Sud, de médecins agréés[178]. »

Le Comité recommande :

Résultats d’examen médical expirés

Recommandation 23

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada autorise les requérants approuvés dont les résultats d’examen médical sont expirés en raison des longs délais de traitement à venir au Canada et qu’il les informe de subir un second examen médical au Canada, le cas échéant.

Décisions concernant le financement des services d’établissement

Pour être acceptées, les demandes d’immigration sont triées au moyen de la technologie et leur traitement dépend de la disponibilité des agents des visas et des médecins. Les requérants acceptés comme résidents permanents peuvent être favorisés ou désavantagés par un autre ensemble de décisions : les organismes d’établissement que l’on doit financer et la somme qu’on leur donne. Le Comité a entendu dire que les organismes d’établissements dont les services s’adressent à une clientèle immigrante racisée, particulièrement aux femmes racisées nouvellement arrivées, sont sous-financés et font l’objet d’une surveillance excessive.

En effet, IRCC ne subventionne qu’un petit nombre d’organismes d’établissement dont les services s’adressent aux femmes.

Beba Svigir, directrice générale de la Calgary Immigrant Women’s Association, a toutefois expliqué que, actuellement, il y a « un énorme problème de quantité […] de services qui existent et qui sont financés par IRCC plus particulièrement pour les femmes ». Il s’agit « des services adaptés, [allant des] services de garde à toutes sortes d’autres problèmes, y compris les problèmes de violence familiale avec lesquels nous devons traiter de plus en plus[179] ». IRCC subventionne bien la Calgary Immigrant Women’s Association, mais l’association est l’un des rares organismes d’établissement destinés aux femmes – du moins, selon ce qu’on peut comprendre au moyen des rapports de données d’IRCC et de ses déclarations. Beba Svigir a ajouté :

Nous sommes donc un exemple concret de la façon dont IRCC a merveilleusement bien compris ce type d’investissement et les avantages qui en découlent pour les femmes immigrantes. Toutefois, nous ne sommes qu’une minuscule composante dans l’ensemble du pays et cette composante devrait être multipliée au centuple. En effet, il devrait y avoir 100 organismes qui font ce travail au pays, et de nombreux organismes le font. Donc, pour un échantillon de l’investissement, je suis certaine qu’IRCC pourrait examiner tous les organismes pour les femmes au Canada afin d’obtenir des données désagrégées et constater les avantages qui en découlent[180].

De l’avis de Beba Svigir, IRCC finance insuffisamment les organismes qui visent les besoins particuliers des immigrantes et ne mesure ni ne reconnaît comme il se doit les avantages que procurent les organisations féminines existantes. Deux témoins ont fait valoir que les services d’établissement destinés aux femmes sont essentiels[181]. Fatima Filippi a expliqué : « En tant que femmes, nous savons qu’il est important de pouvoir soutenir notre famille. L’absence de ces systèmes de soutien crée des problèmes familiaux et sociétaux supplémentaires ici au Canada, et dans les pays d’origine[182]. »

Le sous-financement des services d’établissement destinés aux immigrantes et le peu d’attention qui leur est accordée ont des conséquences pour les femmes les plus vulnérables, en particulier les femmes racisées[183]. Le sous-financement reflète également les types d’organismes auxquels IRCC fait appel actuellement pour fournir des services d’établissement. D’après Anila Lee Yuen, « [a]u cours de la dernière décennie peut-être, les groupes communautaires ethnoculturels n’ont généralement pas été inclus dans le financement » – des groupes qui représentent « l’appui offert à notre communauté [immigrante][184] ». De façon générale, le peu d’attention portée au genre et à la race dans le financement des services d’établissement pourrait éventuellement miner le succès et la confiance de nombreux immigrants. Fatima Filippi a décrit la contradiction entre le fait d’accueillir des immigrantes racisées et celui de leur offrir peu de services une fois qu’elles sont arrivées au Canada :

C’est désastreux. […] On vous souhaite la bienvenue dans un Canada ouvert et multiculturel, mais ensuite la réalité vous frappe et on vous traite différemment. C’est alors que vous remettez en question la dynamique du pays et que vous vous demandez si vous avez pris la bonne décision[185].

Le Comité a appris par ailleurs que les organismes subventionnés par IRCC pour servir les immigrantes racisées font l’objet d’une plus grande surveillance. Même si on fait abstraction de ses effets sur le genre et la race, le modèle de financement d’IRCC pour les organismes d’établissement désavantage les petits organismes. Le Ministère interdit en effet à tous les organismes qu’il subventionne de consacrer plus de 15 % de leur budget à leurs frais administratifs; or, les petits organismes doivent quand même avoir un personnel et un soutien administratif minimum et ils ne peuvent pas réaliser des économies d’échelle. Fatima Fillipi a indiqué que « le plafond de financement de 15 % pour les frais administratifs d’une organisation ne permet pas d’aller bien loin lorsqu’on a un budget de 1 million de dollars, provenant d’une subvention. Les organisations qui disposent d’un budget de 10 millions de dollars pourront mieux administrer le contrat et servir les clients avec ce financement de 15 %[186]. »

Des données empiriques laissent entendre qu’IRCC scrute parfois les justifications budgétaires des organismes d’établissement dont les services sont destinés aux femmes racisées de beaucoup plus près que celle des autres organismes d’établissement. Fatima Fillipi a décrit l’expérience du Rexdale Women’s Centre :

En tant qu’organisation de femmes qui travaille auprès des communautés de femmes racialisées, on nous a demandé de fournir des détails supplémentaires que les autres fournisseurs du secteur n’ont pas eu à fournir. Citons notamment une ventilation détaillée des coûts du budget administratif que les autres fournisseurs du secteur n’ont pas été tenus de fournir. On nous a également demandé ces renseignements pour justifier le pourcentage administratif exigé par IRCC, même si les contrats indiquent clairement que nous pouvons réclamer jusqu’à 15 %[187].

Fatima Fillipi a appris plus tard que la race de l’agent d’établissement d’IRCC ainsi que le fait que le Rexdale Women’s Centre dessert principalement des femmes racisées pourraient expliquer les examens approfondis que doit subir le centre :

Nous comprenons maintenant que si l’agent d’établissement était issu d’une communauté racialisée – dans ce cas‑ci, il l’était –, il devait faire preuve d’une plus grande diligence raisonnable afin de justifier sa recommandation et de fournir la preuve qu’il gérait efficacement notre contrat et notre dossier.
Un agent d’établissement qui a maintenant quitté le ministère m’a raconté qu’à son retour du bureau après avoir visité mon agence, on l’a réprimandé et on lui a demandé ce que cela faisait de travailler avec une organisation de femmes, comme si notre portefeuille était dégradant et de moindre valeur par rapport à la gestion d’autres portefeuilles[188].

L’examen plus approfondi des justifications budgétaires du Rexdale Women’s Centre pourrait être une expérience unique et un fait isolé. Or, comme l’a laissé entendre Fatima Fillipi, une surveillance plus rigoureuse pourrait aussi être attribuable à des résultats différentiels plus vastes, voire du racisme dans le processus de financement par IRCC des services d’établissement – des résultats et un racisme éventuels qui méritent de faire l’objet d’une enquête plus poussée. Compte tenu de ce témoignage, le Comité recommande :

Bonifier le financement alloué aux groupes communautaires ethnoculturels

Recommandation 24

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada bonifie le financement alloué aux groupes communautaires ethnoculturels pour appuyer leur travail.

Recueillir des données désagrégées sur les organismes offrant des services aux nouvelles arrivantes

Recommandation 25

Que le gouvernement du Canada recueille des données désagrégées sur le niveau de financement accordé aux organismes qui offrent des services et du soutien aux nouvelles arrivantes au Canada, avec une ventilation plus poussée pour ceux dont les services sont destinés aux femmes racisées.

Prévenir la gestion discriminatoire et partiale des contrats des organismes d’établissement

Recommandation 26

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada veille à ce que les organismes qui offrent des services aux femmes racisées, ainsi que les agents d’IRCC affectés à la gestion de leurs contrats, ne fassent l’objet d’aucune pratique discriminatoire ni d’aucun préjugé de la part des fonctionnaires d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

En fin de compte, les décisions d’IRCC en matière de technologie, d’infrastructure et de financement pourraient avoir des conséquences pour les employés et les partenaires du Ministère, les requérants et les immigrants. Fatima Filippi a dit ceci au sujet du financement des services d’établissement lorsqu’elle a décrit les effets croisés de différents types de préjugés et de traitements différenciés :

Ce n’est pas seulement un aspect du système; c’est d’une certaine façon dans tout le système que les choses deviennent problématiques. Le traitement différencié ne commence pas seulement à un endroit pour s’arrêter à un autre. Il touche tout le système, et c’est ce que nous constatons[189].

Dans la foulée des sondages réalisés par IRCC et des groupes de discussion que le Ministère a tenus avec des employés qui ont permis de recenser des expériences de racisme et de discrimination chez son personnel, de nombreux témoins ont suggéré que le problème se situe dans la culture et les pratiques d’emploi d’IRCC. Les décisions des agents des visas et d’IRCC reflètent les préjugés et le racisme inconscients et conscients rapportés par certains employés racisés du Ministère.

Résultats différentiels pour les employés d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada

Perception du racisme au sein du Ministère

Après la condamnation généralisée du meurtre de George Floyd, un homme noir, par un policier blanc aux États-Unis, IRCC a lancé sa propre enquête sur le racisme dans ses rangs en procédant à un sondage auprès de ses employés. Composé principalement de questions à choix multiples, le sondage s’adressait aux employés dans tout le Ministère – y compris aux agents des visas dans les missions à l’étranger. Environ 30 % des employés y ont répondu; la moitié d’entre eux était des personnes racisées[190]. Le Ministère a ensuite chargé Pollara Strategic Insights, un cabinet de consultants, de tenir des réunions de suivi : au total, dix rencontres de groupe de deux heures chacune ont permis d’obtenir la rétroaction de 54 employés, dont la majorité était des personnes racisées.

Les réponses au sondage et aux réunions de discussion sont en deux volets. D’abord, dans une description qui s’applique à la fois aux réponses au sondage et aux commentaires provenant des groupes de discussion, Pollara Strategic Insights a noté que la perception des préjugés et du racisme dépendait principalement de l’origine raciale et ethnique des répondants. Il n’est peut-être pas surprenant de constater que la perception du racisme variait selon les groupes raciaux. Deuxièmement, parmi les répondants racisés, des « proportions importantes […] estiment que le racisme est un problème au sein du Ministère »; ce résultat correspond également aux conclusions du sondage initial[191]. Par exemple, à la question « Les personnes de races/origines ethniques différentes ont-elles autant de possibilités que les Blancs? », 74 % des Noirs et 55 % des Sud-Asiatiques ont indiqué que les employés racisés avaient moins de possibilités; parmi les employés non racisés, seulement 17 % partageaient cette opinion[192].

Résumant les résultats des groupes de discussion dans un rapport, Pollara Strategic Insights a écrit que les groupes avaient rapporté des incidents de racisme à IRCC, notamment des microagressions. Par exemple, certains répondants ont mentionné « [d]es références internes répandues à certaines nations africaines comme “les 30 nations corrompues” », et des stéréotypes de Nigérians « particulièrement […] peu dignes de confiance ». D’autres ont évoqué « [d]es superviseurs et des employés non racialisés [qui] utilisent le mot “ghetto” pour désigner des secteurs du Ministère où la représentation des employés racialisés est élevée[193] ».

Les répondants ont signalé par ailleurs des préjugés raciaux dans les processus d’embauche et un nombre insuffisant de gestionnaires racisés. Ils ont souligné le manque de culture et de processus pour lutter contre le racisme au sein du Ministère. Les employés ont également fait part d’expériences de racisme propres aux affectations à l’étranger, comme un racisme plus explicite parmi le personnel canadien à l’étranger et une exclusion professionnelle et sociale du personnel racisé à l’étranger par des Canadiens non racisés[194].

Dans l’ensemble, les participants étaient sceptiques quant au succès des efforts d’IRCC pour lutter contre le racisme au sein du Ministère. Ils considéraient le racisme comme profondément enraciné. Les suggestions des employés pour assurer le changement comprenaient l’analyse des données internes sur la représentation raciale dans l’embauche et la promotion, la promotion d’une culture antiraciste dans laquelle les incidents racistes sont traités immédiatement et la création d’un ombudsman permanent contre le racisme[195].

Initiatives antiracisme

En réaction au sondage initial, IRCC a mis sur pied un Groupe de travail antiracisme (GTAR) en juillet 2020. Le Comité a écouté le témoignage de Farah Boisclair, directrice du GTAR à IRCC, qui a déclaré que le groupe de travail avait pour tâche « de décrire à quoi ressemble la lutte contre le racisme dans les différentes parties de l’organisation. […] Cela va de la politique à l’examen des programmes en passant par l’élaboration d’une optique anti-raciste[196]. » De la fin de l’été 2020 à novembre 2021, le GTAR a formé trois sous-comités pour approfondir la lutte contre le racisme; ils sont axés sur la gestion des personnes, les politiques d’immigration et la prestation de services aux clients. Le Ministère a aussi lancé une série de consultations auprès de ses employés[197].

Le 22 janvier 2021, le greffier du Conseil privé, en sa qualité d’administrateur de la fonction publique, a lancé un appel à l’action pour bâtir une fonction publique diversifiée, équitable et inclusive[198]. À l’été 2021, Catrina Tapley, alors sous-ministre d’IRCC, a indiqué « que nous faisons des efforts pour rendre notre propre organisation plus représentative et inclusive », en parallèle avec un travail réalisé afin

d’améliorer les résultats en matière d’équité pour nos clients et les Canadiens. Nous avons mis en œuvre notre nouvel outil d’évaluation des répercussions raciales, qui favorise une approche et une analyse antiracistes dans l’élaboration des politiques, ce qui vient compléter l’optique plus large et intersectionnelle de l’ACS+. Nous examinons la façon dont nous percevons les préjugés dans la prise de décisions en matière d’immigration[199].

En mai 2021, tous les membres du comité exécutif d’IRCC[200] avaient pris les engagements suivants :

  • 1) Promouvoir activement la lutte contre le racisme et communiquer les attentes et les résultats afin d’engendrer un changement positif de culture à IRCC.
  • 2) Entamer, de façon proactive, un dialogue qui normalise les discussions au sujet du racisme et des obstacles systémiques.
  • 3) Rendre des comptes et faire preuve de transparence tout au long du processus de collecte, d’utilisation et de diffusion de données désagrégées et sur la race, ainsi que lors de la production de rapports sur les progrès réalisés et les résultats obtenus.
  • 4) Repérer la discrimination et les obstacles systémiques au sein de toutes les politiques, de tous les programmes et de toutes les initiatives.
  • 5) S’assurer que les employés noirs, autochtones et racialisés jouissent d’un accès juste et équitable à l’avancement et à des perspectives de carrière.
  • 6) Veiller à ce que les employés noirs, autochtones et racialisés soient représentés au sein des organes décisionnels et d’élaboration de politiques (y compris les groupes de la haute direction, les conseils consultatifs, les comités de santé au travail et d’autres comités horizontaux) afin de permettre la prise de décisions éclairées fondées sur des points de vue diversifiés.
  • 7) Appuyer et renforcer les réseaux d’employés divers en vue de développer un sentiment d’appartenance.
  • 8) Créer des espaces de travail sécuritaires pour l’ensemble des employés noirs, autochtones et racialisés, et d’autres groupes marginalisés, y compris ceux dont les identités se recoupent, où ils peuvent être authentiques et soulever des questions sans crainte de représailles.
  • 9) Établir des partenariats avec des organisations et des groupes externes en quête d’équité afin d’enrichir notre approche.
  • 10)  Célébrer les actions et les contributions positives qui favorisent l’équité raciale à IRCC, décourager les actions qui reflètent ou tolèrent un comportement raciste, et tenir les individus responsables des comportements nuisibles.
  • 11)  Faire preuve de responsabilité en incluant des engagements de lutte contre le racisme dans les ententes de gestion du rendement des dirigeants de tous niveaux.
  • 12)  Poursuivre nos efforts pour éliminer le racisme systémique afin d’assurer le changement durable[201].

Données désagrégées sur les employés

À la suite des engagements d’IRCC à combattre le racisme dans ses rangs, le Ministère amasse désormais des données désagrégées par genre et par race sur ses employés. Les données confirment l’impression des répondants au sondage et des participants aux groupes de discussion : les personnes racisées sont surreprésentées dans les postes de niveau d’entrée. Depuis le 23 juillet 2021, les employés racisés, autochtones et noirs dominent dans les postes de niveau d’entrée et moyen, comparativement aux postes de cadres intermédiaires et supérieurs; ils sont fortement minoritaires dans les postes de cadres supérieurs. Par exemple, les employés noirs occupent jusqu’à 10,9 % des postes de niveau d’entrée et moyen à IRCC, mais ce pourcentage chute à 4,9 % pour les postes de cadres intermédiaires et à 2,8 % pour les postes de cadres supérieurs (figure 4). Par contre, la proportion des employés qui ne se sont pas auto‑déclarés comme des personnes racisées, noires, autochtones ou handicapées atteint 59,6 % pour les postes de niveau d’entrée et moyen, et 78,2 % pour les postes de cadres supérieurs.

Figure 4 — Représentation (%) par niveau de poste, 23 juillet 2021

La figure 4 est un graphique à barres qui illustre le pourcentage d’employés à chaque niveau de poste à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (niveaux d’entrée et moyen, cadre intermédiaire et cadre supérieur). La vaste majorité des employés ne se sont pas auto-déclarés, particulièrement dans les postes de cadres supérieurs (72 %).

Source : IRCC, Plan relatif à la représentation et aux bases de référence de l’effectif sur l’équité en matière d’emploi, présentation au COMEX, 6 octobre 2021, p. 5.

Afin de se fixer des bases de référence pour comprendre et mesurer les progrès en matière de représentation, le GTAR compare maintenant la représentation à chaque niveau d’emploi avec les projections relatives à la disponibilité sur le marché du travail (DMT) des candidats dans chaque groupe visé par l’équité en matière d’emploi d’ici 2024[202].

Selon les données d’emploi du 25 mars 2022 et les projections de la DMT (figure 5) :

le taux de représentation des hommes racialisés d’IRCC était de 9,4 % (par rapport à une base de référence de 8,3 %). De plus, nous constatons que les représentations au niveau EX ou équivalent EX sont de 3,9 % (par rapport à une base de référence de 12,4 %), chez les cadres intermédiaires à 9,8 % (par rapport à une base de référence de 10,9 %), et pour les niveaux d’entrée à 9,5 % (contre une base de référence de 6,6 %)[203].

Figure 5 — Hommes racisés travaillant à IRCC par rapport à la disponibilité sur le marché du travail, 24 mars 2022 (%)

La figure 5 est un graphique à barres qui illustre la proportion d’hommes racisés qui travaillent à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) par rapport à la disponibilité sur le marché du travail. La plus forte proportion (9,5 %) d’hommes racisés à IRCC occupaient des postes de niveau d’entrée. Seulement 3,9 % occupaient des postes de cadres supérieurs ou l’équivalent.

Source : IRCC, CIMM 12.1 – Ventilation de la répartition raciale parmi le personnel d’IRCC, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 24 mars 2022, 6 mai 2022.

Le 25 mars 2022, le taux de représentation des femmes racisées d’IRCC (figure 6) :

était de 16,2 % (par rapport à une base de référence de 15,1 %). De plus, nous constatons que les représentations au niveau EX ou équivalent EX sont de 9 % (par rapport à une base de référence de 15 %), chez les cadres intermédiaires à 13,6 % (par rapport à une base de référence de 16,2 %), et pour les niveaux d’entrée à 17,9 % (contre une base de référence de 14,5 %)[204].

Figure 6 — Femmes racisées travaillant à IRCC par rapport à la disponibilité sur le marché du travail, 24 mars 2022 (%)

La figure 6 est un graphique à barres qui illustre la proportion de femmes racisées qui travaillent à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) par rapport à la disponibilité sur le marché du travail. La plus forte proportion (17,9 %) de femmes racisées à IRCC occupaient des postes de niveau d’entrée. Seulement 9 % occupaient des postes de cadres supérieurs ou l’équivalent.

Source : IRCC, CIMM 12.1 – Ventilation de la répartition raciale parmi le personnel d’IRCC, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 24 mars 2022, 6 mai 2022.

Les données de 2022 illustrent également une tendance à la baisse en matière de représentation des employés racisés dans les postes de cadres intermédiaires et supérieurs. Cette tendance baissière, cependant, est plus prononcée pour les femmes racisées que pour les hommes racisés.

IRCC estime que ses données ne reflètent pas nécessairement la pleine diversité de ses effectifs, car des employés peuvent choisir de ne pas s’auto-identifier. Cependant, « IRCC continue de promouvoir l’auto‑identification afin d’offrir à ses employés des opportunités d’affectations, de formation et de perfectionnement, de participation à des jurys de sélection et/ou des groupes de discussion ciblés[205] ». Si l’on se fie à un document interne d’IRCC, le Ministère a calculé des bases de référence détaillées de la DMT pour quatre groupes d’équité en matière d’emploi (Noirs, personnes racisées, Autochtones, personnes handicapées) et ventilé ces bases de référence par genre. Le GTAR a également présenté des objectifs d’embauche éventuels sur trois ans et cinq ans pour chaque base de références de la DMT – un objectif qu’on décrit comme étant « en cours » dans un autre document d’IRCC[206].

Racisme et traitement des demandes de visa

Des témoins ont laissé entendre que le racisme et les préjugés relevés dans le sondage d’IRCC et les groupes de discussion avec des employés ont des répercussions sur le processus décisionnel d’IRCC et le jugement des agents des visas quant à la recevabilité des demandes[207]. Plusieurs témoins ont cité le commentaire concernant les « 30 pays corrompus » comme reflétant bien le racisme et les préjugés éventuels qui peuvent teinter l’évaluation des demandes provenant d’Africains, de Sud-Asiatiques et d’autres groupes racisés[208].

Les témoins ont réitéré le principe voulant que les agents des visas appliquent uniformément et équitablement la législation et les politiques en matière d’immigration à chaque programme d’immigration et que le pays d’origine des requérants et les opinions des agents des visas n’aient aucune influence sur le résultat final[209]. L’organisme Voices4Families s’est objecté à ce que les « pratiques culturelles/sociétales dans un pays donné » puissent servir à évaluer les demandes de parrainage d’époux[210]. Pour leur part, plusieurs témoins ont affirmé que les décideurs devraient tenir compte des circonstances particulières ou du contexte culturel des requérants pour comprendre comment des règles universelles s’appliquent à certains cas[211].

Le Comité a entendu plusieurs recommandations visant à éliminer les préjugés et le racisme conscients ou inconscients dans le rejet de demandes et à promouvoir l’uniformité des décisions. Commençons par les refus. Depuis 2021, IRCC a officialisé le processus par lequel il fournit à ses bureaux des visas à l’étranger des « renseignements, une orientation, des outils et des normes qui permettent d’évaluer de façon plus systématique les processus et les pratiques à l’échelle du réseau de bureaux à l’étranger[212] ». Parmi ces outils, il y a des exercices d’assurance de la qualité du processus décisionnel qui examinent :

si les décisions rendues sont valides en droit et en fait, si le processus décisionnel est uniforme au sein du bureau (et entre les bureaux, si la charge de travail est partagée) et si les décisions, comme celles relatives à la recevabilité et à l’admissibilité, sont prises correctement; cela comprend l’examen des taux d’approbation et de refus[213].

Chaque année :

les conclusions et les résultats des activités d’assurance de la qualité qui ont été menées font l’objet de discussions pour veiller à ce que les forces et les préoccupations soient cernées et abordées. Le processus est également le forum pour établir des plans concernant les exercices obligatoires et discrétionnaires pour l’année à venir[214].

Dans le cadre de sa stratégie antiracisme, IRCC a aussi donné en novembre 2020 « l’atelier sur l’autorité en matière de gestion de l’intégrité du secteur des Opérations qui explore les préjugés et l’ACS+ dans le traitement des demandes d’immigration[215] ». Les témoins ont suggéré d’aller encore plus loin en intégrant l’analyse antiracisme directement dans les exercices d’assurance de la qualité des bureaux des visas. Debbie Douglas a déclaré qu’un « examen exhaustif axé sur l’égalité raciale dans […] les pratiques est nécessaire pour cerner les préjugés systémiques et les aspects du processus décisionnel susceptibles d’être teintés par les préjugés individuels ou le racisme[216] ». Sabreena Ghaffar-Siddiqui a affirmé pour sa part qu’IRCC devrait effectuer des examens à l’aveugle des évaluations de ses agents des visas[217].

Compte tenu des témoignages qu’il a entendus, le Comité recommande :

Assurance de la qualité antiracisme pour les décisions des agents des visas

Recommandation 27

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada élargisse son éventail d’assurance de la qualité pour examiner l’effet éventuel du racisme systémique et des préjugés individuels sur les décisions des agents des visas et les taux de refus des bureaux des visas; exige l’utilisation immédiate de ces outils antiracisme dans chaque bureau des visas; évalue les résultats pour chaque bureau des visas à son prochain examen annuel; et publie d’ici un an et demi les conclusions agrégées de ces examens.

Pour favoriser la prise de décisions justes et éclairées par tous les agents des visas, les témoins ont recommandé d’améliorer la formation et la sélection des agents des visas. Habituellement, les agents des visas reçoivent une initiation aux différences culturelles dans le cadre de leur formation initiale d’agents du service extérieur. Plus récemment, des documents internes d’IRCC indiquent que plus de 80 % des effectifs du Ministère ont reçu leur formation sur les préjugés inconscients avant le 31 janvier 2021[218]. Le Ministère a confirmé au Comité que tous les décideurs qui traitent les demandes provenant d’Afrique avaient reçu cette formation[219]. Des documents d’IRCC révèlent que 250 cadres intermédiaires devaient avoir terminé un programme pilote en quatre volets sur la lutte contre le racisme au plus tard en mai 2021[220]. Parmi ces cadres intermédiaires, on compte les agents des visas principaux, mais aucun membre du personnel embauché sur place qui, dans certains bureaux, évalue les demandes[221]. IRCC comptait élargir ce programme pilote de lutte contre le racisme d’ici l’exercice 2022–2023[222].

Dans l’ensemble, de nombreux témoins ont appuyé une formation accrue pour aider à atténuer les préjugés et le racisme et pour évaluer les demandes dans le contexte culturel propre à chacune[223]. Marie Carmel Bien‑Aimé, co-administratrice, Spousal Sponsorship Advocates, a estimé que la formation doit être régulière et obligatoire pour fournir le contexte culturel si important – particulièrement pour évaluer les demandes de parrainage d’époux et déterminer si un mariage est authentique[224]. De plus, plusieurs témoins ont affirmé qu’IRCC devrait revoir ses formations et ses protocoles pour les agents des visas pour combattre leur propension à rejeter les demandes, à avoir des soupçons et à rechercher la fraude[225]. Mario Bellissimo a donné en exemple l’Australie : « [I]l y a 15 ans environ, l’Australie a créé un collège spécialisé en immigration où tous les agents suivent des cours de recyclage et se font rappeler que leur travail est d’offrir du soutien, pas de faire de la coercition[226]. »

Sabreena Ghaffar-Siddiqui a aussi fait valoir que la formation – particulièrement celle pour lutter contre le racisme et sensibiliser aux différences culturelles – ne peut pas être suivie en ligne au moyen de modules, car des recherches démontrent que les gens se souviennent de peu de choses après avoir passé de type de test. Comme elle l’a dit :

les modules de formation [en ligne] sur la diversité, l’équité et l’inclusion –, les gens cliquent pour passer au volet suivant, puis au suivant, etc. Ils ne retiennent aucune information, en fait. Il est très facile de suivre une formation et d’obtenir un certificat et de ne rien savoir sur ce qu’on vient de lire[227].

Elle a recommandé plutôt « un atelier » dynamique dans lequel « [d]es personnes converseraient avec d’autres personnes qui ont des expériences différentes[228] ». Elle a estimé qu’une telle formation ne ferait pas disparaître le racisme, mais pourrait « créer un système de reddition de comptes pour tenir les gens [IRCC] responsables de leurs actes[229] ».

Afin d’améliorer la formation et la responsabilisation en matière de lutte contre les préjugés et le racisme et de sensibilisation aux différences culturelles, et de réitérer avec force le rôle des agents des visas comme juges et facilitateurs des demandes, le Comité recommande :

Formation obligatoire et régulière sur la lutte contre le racisme pour les agents des visas

Recommandation 28

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada mette en place, sous forme de colloques, une formation obligatoire et régulière sur la lutte contre les préjugés et le racisme et la sensibilisation aux différences culturelles à l’intention de tous ses agents des visas; qu’il mette fin à la formation en ligne et à rythme libre sur ces sujets; qu’il étudie le programme de formation des agents des visas australiens pour déterminer s’il peut servir de modèle.

Plusieurs témoins ont également suggéré d’accroître l’embauche et la promotion de candidats racisés à des postes de traitement des demandes de visa – surtout lorsque les candidats proviennent de milieux culturels, religieux et raciaux qui leur permettraient de comprendre et d’évaluer correctement les demandes provenant de différentes régions du monde[230]. Quoiqu’elle appuie l’idée d’une formation sur la lutte au racisme et la sensibilisation aux différences culturelles qui prendrait la forme de colloques, Sabreena Ghaffar-Siddiqui a signalé ses limites comparativement à l’adoption de nouvelles pratiques d’embauche. Résumant un ensemble d’études portant sur la formation sur la sensibilisation en matière culturelle, elle a déclaré que « nous avons compris que personne ne peut être compétent dans une autre culture. On peut être informé, mais on ne peut pas acquérir de compétences[231]. » Les connaissances d’une personne issue d’une culture sont toujours plus subtiles et exactes. Elle a affirmé qu’il est plus important encore de diversifier le bassin d’agents des visas « afin que ceux qui comprennent et connaissent déjà une autre culture puissent apporter leur expérience et leur expertise[232] ».

Les participants aux groupes de discussion sur le racisme au sein d’IRCC, dont les propos ont été résumés dans le rapport de Pollara Strategic Insights, ont souligné à la fois la diversité du personnel d’IRCC et la concentration extrême de cette diversité dans les postes de niveau d’entrée (plutôt que dans les postes de niveau intermédiaire ou supérieur). Lorsqu’elle s’est adressée au Comité, Sabreena Ghaffar-Siddiqui a rappelé que ce déséquilibre mine la possibilité que des employés racisés occupent des postes de décideurs et d’évaluateurs de demandes de visa[233].

Tenant compte des témoignages qu’il a entendus quant aux décisions négatives des agents des visas et aux taux de refus, le Comité recommande :

Promouvoir des candidats racisés à des postes de tous les niveaux du service extérieur

Recommandation 29

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada accorde une place importante aux agents des visas dans ses stratégies pour accroître la représentation aux postes de niveau intermédiaire, et qu’il élimine la discrimination et les autres obstacles à la promotion de Canadiens racisés comme agents des visas à tous les niveaux d’emploi du service extérieur.

Par contre, Voices4Families a mis en garde contre l’embauche d’employés locaux provenant tous des mêmes populations ethniques et culturelles. Dans son mémoire, l’organisme aborde l’expérience de ses membres avec le traitement des demandes de parrainage d’époux : « Les bureaux des visas ne semblent pas employer un personnel diversifié, ce qui expose les Canadiens [requérants ayant soumis une demande de parrainage d’époux] à des préjugés potentiels vis-à-vis des groupes minoritaires déjà marginalisés d’un pays donné[234]. » Étant donné que certains bureaux des visas font vérifier la recevabilité des demandes par le personnel embauché sur place et que le racisme régional peut également influer sur les taux de succès des demandes, les bureaux des visas doivent promouvoir la diversité sur tous les plans.

Par conséquent, le Comité recommande :

Diversité au sein des effectifs embauchés sur place

Recommandation 30

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada évalue la diversité au sein des effectifs embauchés sur place et qu’il favorise des mesures pour accroître la représentation de différents groupes ethniques et culturels chez les employés embauchés sur place.

De nombreux témoins ont réclamé qu’IRCC collecte et rende publiques des données désagrégées sur les décisions touchant le financement, les requérants et la technologie de traitement des demandes[235]. IRCC recueille déjà ces données grâce à son GTAR, mais ces témoins ont affirmé qu’elles devraient être rendues publiques.

De façon plus générale, de nombreux témoins ont réclamé la création d’un poste d’ombudsman indépendant pour contrer le racisme dans les décisions touchant les demandes de visa et au sein d’IRCC[236]. Il s’agit d’ailleurs de la même recommandation formulée par les employés d’IRCC qui ont participé aux groupes de discussion de Pollara Strategic Insights[237]. IRCC fait des progrès pour lutter contre la discrimination et le racisme, mais ce changement transformateur doit aussi être appuyé de l’extérieur. Le Comité recommande :

Création d’un bureau de l’ombudsman

Recommandation 31

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada fournisse les ressources appropriées pour la création d’un bureau de l’ombudsman chargé d’examiner les politiques du Ministère, de recevoir et d’étudier les plaintes, d’examiner les rapports réguliers sur le racisme et les procédures de formation; et que le bureau soit habilité à prendre les mesures d’exécution appropriées relativement à ces activités.

Donner une assise législative au Secrétariat fédéral de lutte contre le racisme

Recommandation 32

Que le gouvernement du Canada donne une assise législative au Secrétariat fédéral de lutte contre le racisme et renforce ainsi les activités de cet organisme, et qu’il soumette toutes les lois et tous les règlements fédéraux à un examen de l’équité raciale.

Travailler avec des experts et des intervenants pour concevoir une formation contre le racisme

Recommandation 33

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada travaille avec des experts externes et des parties prenantes internes pour concevoir une formation contre le racisme avec une optique de genre, et que cette formation soit obligatoire pour tous les employés et sous‑traitants.

Faciliter la création de groupes de soutien dirigés par les employés au sein du Ministère

Recommandation 34

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada facilite la création de groupes d’employés dotés de ressources suffisantes pour offrir du soutien et permettre aux employés de parler de leurs expériences de discrimination, et que ces groupes fassent partie intégrante de l’organisation.

Donner aux décideurs une formation sur l’équité procédurale et l’impartialité

Recommandation 35

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada crée un groupe de travail sur la lutte contre le racisme dans le cadre de la prestation de services et donne des formations obligatoires qui aideront les décideurs à comprendre l’équité procédurale et l’impartialité.

Améliorer la diffusion de l’information

Recommandation 36

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada améliore les formulaires de demande et mette à jour son site Web en y ajoutant le plus de détails possible. Le site Web devrait être transparent et décrire en détail le processus, y compris les critères qui seront utilisés pour évaluer l’authenticité d’un mariage.

Améliorer la coordination des services d’établissement

Recommandation 37

Que le gouvernement du Canada continue de travailler avec ses partenaires provinciaux et territoriaux, ainsi qu’avec les organismes de services d’établissement, afin d’améliorer la coordination et la disponibilité de l’aide aux nouveaux arrivants, en respectant l’Accord Canada‑Québec.

Conclusion

Comme l’a révélé le présent rapport, les décisions à tous les niveaux peuvent avoir des résultats différentiels et même des effets discriminatoires pour les requérants, les employés, les régions et les économies locales. Parfois, ces effets reflètent des préjugés qui minent directement l’impartialité des décisions. D’autres effets sont plus implicites et systémiques et sont le résultat de difficultés moins évidentes en matière d’équité, comme la répartition de l’infrastructure d’immigration, le contrôle de la qualité des technologies de traitement des demandes et les résultats des décisions de financement. Pour lutter contre les préjugés, la discrimination et le racisme conscients ou inconscients, il faut examiner l’ensemble des éléments du système d’immigration. Comme les témoins l’ont si bien expliqué, un résultat différentiel peut avoir un effet domino. Les solutions aux problèmes relevés doivent être à la fois ciblées et globales.

Le Comité remercie les témoins qui lui ont parlé des résultats différentiels du système d’immigration canadien ou qui ont soumis des mémoires et des documents d’information. Votre contribution nous aura été très précieuse. Le Comité continuera d’examiner les questions liées aux préjugés, au racisme et aux résultats différentiels dans ses futures études.


[1]              Chambre des communes, Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration (CIMM), Procès-verbal, 1er février 2022.

[2]              Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), Résultats du sondage antiracisme auprès des employé(e)s d’IRCC, présentation au comité de direction, 20 janvier 2021, p. 6 à 12; Pollara Strategic Insights, Groupes de discussion des employés d’IRCC, rapport final, préparé pour : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, 23 juin 2021, p. 13.

[3]              Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR), L.C. 2001, ch. 27, par. 3(2).

[4]              LIPR, art. 96. Voir Nations Unies, Convention et Protocole relatifs au statut des réfugiés.

[8]              Jynnah Radford et Phillip Connor, Canada Now Leads the World in Refugee Resettlement, Surpassing the U.S., Pew Research Center, 19 juin 2019 [disponible en anglais seulement].

[9]              HCR Canada, La réinstallation des réfugiés au Canada.

[10]            Ibid.

[12]            IRCC, La réponse du Canada à la situation en Afghanistan. Au moment de la rédaction du présent rapport, 14 645 Afghans étaient arrivés au Canada.

[13]            HCR, Portail opérationnel, Ukraine Refugee Situation, mise à jour le 1er juin 2022 [disponible en anglais seulement].

[14]            IRCC, Mesures d’immigration pour les personnes touchées par l’invasion russe de l’Ukraine. Entre le 17 mars et le 1er juin 2022, IRCC a reçu plus de 278 000 demandes AVUCU et en a approuvé 127 000. Les statistiques clés sont mises à jour chaque semaine.

[15]            IRCC, Le ministre Fraser conclut une visite fructueuse en Europe, communiqué de presse, 6 mai 2022.

[16]            IRCC, Le Canada élargit les services à l’étranger à l’intention des Ukrainiens, communiqué de presse, 4 mai 2022.

[17]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1215 (Anila Lee Yuen, présidente et directrice générale, Centre for Newcomers).

[18]            Ibid.

[19]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1115 (Siham Rayale, directrice, Affaires étrangères, Conseil national des musulmans canadiens).

[20]            Ibid.

[21]            CIMM, Témoignages, 24 mars 2022, 1245 (Caroline Xavier, sous-ministre déléguée, Citoyenneté et Immigration Canada).

[22]            CIMM, Témoignages, 24 mars 2022, 1130 (l’hon. Sean Fraser, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté).

[23]            Ibid.

[24]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1110 (Jennifer Miedema, directrice générale, Remember Ministries).

[25]            Ibid.

[26]            Ibid., 1110.

[27]            Ibid.

[28]            Ibid., 1125.

[29]            IRCC, Programme des aides familiaux résidants.

[30]            IRCC, Aides familiaux.

[31]            CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1110 (MD Shorifuzzaman, consultant réglementé en immigration canadienne, Guide Me Immigration Inc.).

[32]            CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1255 (Debbie Douglas, directrice générale, Ontario Council of Agencies Serving Immigrants).

[33]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1210, 1225 (Arlene Ruiz, consultante et agente de recrutement en immigration autorisée et réglementée, Alexene Immigration & Employment Services Inc.).

[34]            CIMM, Témoignages, 24 mars 2022, 1225 (Caroline Xavier).

[35]            Ibid., 1255.

[36]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1135 (Steven Meurrens, avocat spécialisé en immigration, à titre personnel).

[37]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1215 (Arlene Ruiz).

[38]            IRCC, Permis d’études : Au sujet du processus.

[39]            Au Québec, un étudiant âgé de plus de 18 ans doit prouver qu’il a 13 134 $ par année pour vivre. Dans le reste du Canada, un étudiant doit prouver qu’il a 10 000 $ par année. IRCC, « Preuve de ressources financières ». Permis d’études : Obtenez les documents requis, 2021.

[40]            Un établissement d’enseignement désigné est une école approuvée par un gouvernement provincial ou territorial pour recevoir des étudiants étrangers. Pour de plus amples renseignements, voir IRCC, Liste des établissements d’enseignement désignés.

[42]            L’anglais est la langue d’enseignement à Antigua-et-Barbuda, à Saint-Vincent-et-les Grenadines, et à Trinidad-et-Tobago. Le français est la langue d’enseignement au Sénégal.

[43]            CIMM, Témoignages, 3 mai 2022, 1320 (Caroline Xavier).

[44]            IRCC, CIMM 19.21 – Chronologie de l’ajout du Bangladesh dans la VDE, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 26 mai 2022.

[45]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1210 (Beba Svigir, directrice générale, Calgary Immigrant Women’s Association).

[46]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1115 (Gideon Christian, président, African Scholars Initiative).

[47]            Ibid.

[48]            IRCC, Services offerts aux nouveaux arrivants. Au Québec, voir Immigration, Francisation et Intégration, Préparer votre vie au Québec, Programmes et services offerts aux nouveaux arrivants.

[49]            IRCC, Le Canada élargit son soutien à l’établissement pour les Ukrainiens venant au Canada, communiqué de presse, 30 mars 2022.

[50]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1215 (Anila Lee Yuen).

[51]            Ibid.

[52]            Ibid.

[53]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1250 (Christian Blanchette, recteur, Université du Québec à Trois-Rivières).

[54]            Gouvernement du Canada, « Opérations d’IRCC à l’étranger », Cahier de transition du ministre d’IRCC 2021 : IRCC – Aperçu ministériel.

[57]            Ibid., tableau 2, p. 44.

[58]            Pour soumettre une demande de permis d’études, les requérants doivent démontrer qu’ils possèdent suffisamment de fonds pour payer leurs droits d’inscription, les frais de subsistance pour eux-mêmes et tout membre de leur famille qui les accompagne au Canada, et leur billet de retour dans leur pays d’origine. Gouvernement du Canada, Permis d’études : Qui peut présenter une demande.

[59]            CIMM, Traitement différentiel dans le recrutement et les taux d’acceptation des étudiants étrangers au Québec et dans le reste du Canada, mai 2022, annexe A. Au sujet des motifs d’ordre juridique pour rejeter les demandes de permis d’études, voir les pages 51 à 59.

[60]            Lou Janssen Dangzalan, mémoire, 3 février 2022, p. 1.

[61]            CIMM, Témoignages, 17 février 2022, 1115 (l’hon. Sean Fraser).

[62]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1210 (Beba Svigir).

[63]            Ibid.

[64]            Université Laval, mémoire, 10 février 2022; Lou Janssen Dangzalan, mémoire, 3 février 2022, annexe D; CIMM, Témoignages, 1er février 2022, 1145 (Larissa Bezo, présidente et chef de la direction, Bureau canadien de l’éducation internationale).

[65]            Université Laval, mémoire, 10 février 2022, p. 5; CIMM, Témoignages, 1er février 2022, 1145 (Larissa Bezo).

[66]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1220 (Christian Blanchette).

[67]            Ibid., 1235.

[68]            Ibid.

[69]            Ibid.

[70]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1105 (Gurpartap Kals, consultant en immigration, Kals Immigration).

[71]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1105 (Steven Meurrens).

[72]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1125 (Gurpartap Kals).

[73]            Gouvernement de la Saskatchewan, Programme Candidats immigrants pour la Saskatchewan (PCIS) [disponible en anglais seulement].

[74]            CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1110 (MD Shorifuzzaman).

[75]            Ibid.; CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1105 (Gurpartap Kals).

[76]            CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1110 (MD Shorifuzzaman).

[77]            IRCC, CIMM 19.2 – Taux d’acceptation et de refus de la procédure de visa, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022, annexe A. Une différence similaire entre les taux de refus existait en 2019 (30 % pour l’Inde, 55 % pour le Bangladesh, 14 % pour la moyenne mondiale, 15 % pour l’Australie) et en 2020 (42 % pour l’Inde, 51 % pour le Bangladesh, 13 % pour la moyenne mondiale et 10 % pour l’Australie).

[78]            CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1110 (MD Shorifuzzaman).

[79]            CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1125 (Gurpartap Kals).

[80]            LIPR, par. 3(1).

[81]            L’article 12 de la LIPR est bonifié par une politique pour inclure parmi les parrains une personne inscrite au Canada comme Indien aux termes de la Loi sur les Indiens (L.R.C. [1985], ch. I-5). Voir, IRCC, Parrainer un membre de la famille.

[83]            Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (RIPR), DORS/2002-227, art. 2.

[84]            RIPR, art. 2, par. 4(1), art. 4.1 et 5, par. 117(9).

[85]            CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1105 (Sabreena Ghaffar-Siddiqui, professeure et membre, Comité directeur de l’Ontario, Centre canadien de politiques alternatives).

[86]            CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1215 (Yusuf Badat, à titre personnel).

[87]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1220 (Fatima Filippi, directrice générale, Rexdale Women’s Centre).

[88]            Voices4Families, mémoire, p. 2.

[89]            CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1245 (Fatima Filippi).

[90]            RIPR, par. 179 b).

[91]            Gouvernement du Canada, Résidents temporaires : double intention.

[93]            Voices4Families, mémoire, p. 3.

[94]            RIPR, art. 190.

[95]            Gouvernement du Canada, Savoir ce qu’est une autorisation de voyage électronique (AVE). Voir RIPR, art. 190, pour connaître les pays dont les ressortissants sont exemptés de demander un visa.

[96]            CIMM, Témoignages, 24 mars 2022, 1210 (Pemi Gill, directrice générale, Réseau international, IRCC).

[97]            Document parlementaire 8555-441-97, Q-97, question écrite posée par M. Brunelle-Duceppe (Lac-Saint-Jean), 25 novembre 2021, p. 476 à 477 du document PDF.

[98]            CIMM, Adapter les politiques d’immigration du Canada aux réalités d’aujourd’hui, vingt-cinquième rapport, juin 2019, p. 58 à 59.

[99]            IRCC, CIMM 7.1 – Délais de traitement actuels, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 17 février 2022, 12 mai 2022.

[101]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1105 (Gurpartap Kals).

[102]          Voices4Families, mémoire, p. 3.

[103]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1110 (Gideon Christian); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1225 (Arlene Ruiz).

[104]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1125 (Steven Meurrens); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1125 (Jennifer Miedema).

[105]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1220 (Fatima Filippi); CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1220 (Debbie Douglas).

[106]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1220 (Fatima Filippi).

[107]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1210 (Vishal Ghai, Voices4Families).

[108]          Ibid., 1240.

[109]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1220 (Fatima Filippi); CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1220 (Debbie Douglas).

[110]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1240 (Vishal Ghai).

[111]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1220 (Fatima Filippi).

[112]          Voices4Families, mémoire, p. 3.

[113]          IRCC, CIMM 19.11 – Demandes retardées en raison des contrôles de sécurité, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 15 juin 2022.

[114]          Gouvernement du Canada, Agence des services frontaliers du Canada.

[115]          LIPR, al. 4(2)a).

[116]          LIPR, al. 4(2)b).

[117]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1230 (Fatima Filippi).

[118]          Ibid.

[119]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1230 (Beba Svigir).

[120]          CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1115 (Aleks Selim Dughman-Manzur, co-directeur exécutif, Programmation et plaidoyer, Rainbow Refugee Society).

[121]          Ibid.

[122]          Ibid.

[125]          LIPR, 4.1.

[126]          Gazette du Canada, 26 janvier 2019, Règlement modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, partie 1, volume 153, no 4. Cité dans Mario Bellissimo, mémoire, 10 mai 2022, p. 8.

[127]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1115, 1150 (Siham Rayale); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1155 (Gurpartap Kals); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1210, 1225 (Arlene Ruiz); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1115, 1150 (Gideon Christian).

[128]          Mario Bellissimo, mémoire, 21 avril 2022, p. 3; Mario Bellissimo, mémoire, 10 mai 2022, p. 1.

[130]          Ibid.

[131]          IRCC, CIMM 19.12 – Comment identifier les dossiers simples et complexes, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022.

[132]          IRCC, CIMM 19.12 – Comment identifier les dossiers simples et complexes, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022, p. 2.

[133]          IRCC, CIMM 19.3 – Analyses avancées utilisées et bureaux les utilisent, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, p. 1.

[134]          IRCC, « Prise de décision améliorée @ IRCC », Présentation au Symposium sur l’algorithmique gouvernementale, 24 avril 2019. Cité dans Mario Bellissimo, mémoire, 10 mai 2022, p. 8.

[135]          Mario Bellissimo, mémoire, 10 mai 2022, p. 7.

[138]          IRCC, CIMM 19.12 – Comment identifier les dossiers simples et complexes, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022, p. 3.

[139]          Ibid.

[140]          Ibid.

[144]          Overview of the Analytics-Based Triage of Temporary Resident Visa Applications, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, p. 3, ATIP 2A-2020-37581-000045.

[145]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1150 (Siham Rayale); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1155 (Gurpartap Kals).

[146]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1150 (Gideon Christian).

[147]          Mario Bellissimo, mémoire, 21 avril 2022, p. 5.

[148]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1150 (Siham Rayale); Mario Bellissimo, mémoire, 7 avril 2022, p. 4.

[149]          Mario Bellissimo, mémoire, 21 avril 2022, p. 4.

[150]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1210 et 1245 (Beba Svigir).

[151]          Mario Bellissimo, mémoire, 21 avril 2022.

[152]          Document parlementaire, Q-315, question écrite posée par Brad Redekopp (Saskatoon-Ouest), 7 février 2022, p. 1.

[153]          IRCC, CIMM 19.16 – Analyse de la confidentialité entre IRCC, ApplyBoard et ApplyProof depuis 2015, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022.

[154]          Affidavit, Abigail Ocran c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, Cour fédérale, IMM-6571-20, 17 décembre 2020, p. 6 à 7. [Les caractères gras sont de nous.] Le contrôle judiciaire a été rejeté le 10 février 2022.

[155]          Document parlementaire, Q-315, question écrite posée par Brad Redekopp (Saskatoon Ouest), 7 février 2022, p. 1.

[156]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1140 (Steven Meurrens).

[157]          Mario Bellissimo, mémoire, 10 mai 2022, p. 15.

[158]          CIMM, Témoignages, 3 février 2022, 1105 (Lou Janssen Dangzalan); CIMM, Témoignages, 3 février 2022, 1110 (Wei William Tao, avocat canadien en droit de l'immigration et cofondateur, Fondation Arenous).

[159]          IRCC, TDSS, ITOPS Weekly Release DASHBOARD – Must Do High, GCMS Release 22 Tracking – As of January 24, 2020, ATIP 2A-2020-29772-000167; Cf. ATIP 2A-2020-29772-000169 et ATIP 2A-2020-29772-000184.

[160]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1145 (Steven Meurrens).

[162]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1210 (Arlene Ruiz); Contre-interrogatoire d’Andie Melo Daponte, 4 août 2021, Abigail Ocran c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, Cour fédérale, IMM-6571-20, 17 décembre 2020, p. 69 à 73.

[163]          IRCC, CIMM 7.8 – Demandes traitées de 2015 à la mise en œuvre de Chinook, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 17 février 2022, 27 avril 2022, annexe A.

[164]          IRCC, Bureaux des visas à l’étranger.

[165]          IRCC, CIMM 7.12 Préjugés dans la prise de décision : Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 17 février 2022.

[167]          Ibid., p. 76.

[168]          CIMM, Témoignages, 3 février 2022, 1200 (Alain Dupuis, directeur général, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada).

[169]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1155 (Steven Meurrens); CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1225 (Marie Carmel Bien-Aimé, co-administratrice, Spousal Sponsorship Advocates).

[170]          IRCC, CIMM 19.6 – Évaluation du bureau de Dakar, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 3 mai 2022, 3 juin 2022.

[171]          CIMM, Témoignages, 3 mai 2022, 1240 et 1245 (Caroline Xavier).

[173]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1250 (Christian Blanchette).

[174]          Ibid.

[175]          IRCC, Médecins désignés. CIMM, Témoignages, 3 mai 2022, 1250 (Caroline Xavier).

[176]          CIMM, Témoignages, 3 mai 2022, 1250 (Caroline Xavier).

[177]          Voices4Families, mémoire, p. 2–3.

[178]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1125 (Jennifer Miedema).

[179]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1235 (Beba Svigir).

[180]          Ibid.,1255.

[181]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1235 (Beba Svigir); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1245 (Fatima Filippi).

[182]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1245 (Fatima Filippi).

[183]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1235 (Beba Svigir).

[184]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1215 (Anila Lee Yuen).

[185]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1245 (Fatima Filippi).

[186]          Ibid., 1235.

[187]          Ibid., 1220.

[188]          Ibid.

[189]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1230 (Fatima Filippi).

[190]          IRCC, Résultat du sondage anti-racisme auprès des employé(e)s d’IRCC, présentation PowerPoint au comité exécutif, 20 janvier 2021.

[191]          Pollara Strategic Insights, Groupes de discussion des employés d’IRCC, rapport final, préparé pour : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, 23 juin 2021, p. 5.

[192]          IRCC, Résultat du sondage anti-racisme auprès des employé(e)s d’IRCC, présentation PowerPoint au comité exécutif, 20 janvier 2021, p. 8.

[193]          Pollara Strategic Insights, Groupes de discussion des employés d’IRCC, rapport final, préparé pour : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, 23 juin 2021, p. 10 à 11.

[194]          Ibid., p. 11–12.

[195]          Ibid., p. 16, 18 et 19.

[196]          CIMM, Témoignages, 24 mars 2022, 1235 (Farah Boisclair, directrice, Groupe de travail antiracisme, IRCC).

[197]          IRCC, Groupe de travail anti-racisme d’IRCC : Séance d’information ministérielle, 2 décembre 2021, p. 4.

[199]          Bureau du Conseil privé, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Lettre sur la mise en œuvre de l’Appel à l’action en faveur de la lutte contre le racisme, de l’équité et de l’inclusion dans la fonction publique fédérale, mise à jour de l’été 2021.

[200]          Le comité exécutif est composé des personnes et groupes suivants : Bureau du sous-ministre, Dirigeant principal de la vérification et Direction générale de la vérification interne et de la responsabilisation, Bureau de résolution des conflits, Avocat général principal, Planification des efforts d’intervention et de rétablissement à la COVID-19, Groupe de travail antiracisme, Politiques stratégiques et de programmes et Dirigeant principal des données; Opérations, Établissement et intégration; Services ministériels, Dirigeant principal des finances et contrôleur, Dirigeant principal de l’information, et Transformation et solutions numériques.

[201]          IRCC, CIMM 7.6 – Efforts de lutte contre le racisme à l’IRCC  Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 17 février 2022, 12 mai 2022.

[202]          IRCC, CIMM 12.1 – Ventilation de la répartition raciale parmi le personnel d’IRCC, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 24 mars 2022, 6 mai 2022; IRCC, Plan relatif à la représentation et aux bases de référence de l’effectif sur l’équité en matière d’emploi, présentation au COMEX, 6 octobre 2021, p. 6.

[203]          IRCC, CIMM 12.1 – Ventilation de la répartition raciale parmi le personnel d’IRCC, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 24 mars 2022, 6 mai 2022.

[204]          Ibid.

[205]          Ibid.

[206]          IRCC, Plan relatif à la représentation et aux bases de référence de l’effectif sur l’équité en matière d’emploi, Présentation au COMEX, 6 octobre 2021, p. 6; IRCC, Anti-Racism Task Force Annual Plan (FY 2021-22), p. 3.

[207]          Mario Bellissimo, mémoire, 21 avril 2022, p. 4; CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1225 (Marie Carmel Bien‑Aimé); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1115 (Gideon Christian); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022 (Siham Rayale); CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1220 (Debbie Douglas).

[208]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1225 (Marie Carmel Bien-Aimé); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1115 (Gideon Christian).

[209]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1155 (Gideon Christian); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1110 (Gurpartap Kals); Voices4Families, mémoire, p. 4.

[210]          Voices4Families, mémoire, p. 4.

[211]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1225 (Marie Carmel Bien-Aimé); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1155 (Gideon Christian).

[212]          IRCC, CIMM 12.3 – Programme d’assurance qualité, Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 24 mars 2022, 6 mai 2022, p. 1. [Les caractères en italiques sont dans l’original.]

[213]          Ibid., p. 2.

[214]          Ibid., pp. 1–2.

[215]          IRCC, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada – Réalisations relatives à la diversité, à l’inclusion et à la lutte contre le racisme, approuvé le 26 février 2021.

[216]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1220 (Debbie Douglas).

[217]          CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1145 (Sabreena Ghaffar-Siddiqui).

[218]          IRCC, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada  Réalisations relatives à la diversité, à l’inclusion et à la lutte contre le racisme, approuvé le 26 février 2021, p. 1.

[219]          IRCC, CIMM 7.4 – Disparité entre les taux d’acceptation francophones et anglophones – Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration le 17 février 2022, 12 mai 2022.

[220]          IRCC, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada  Réalisations relatives à la diversité, à l’inclusion et à la lutte contre le racisme, approuvé le 26 février 2021, p. 1.

[221]          IRCC, Plan relatif à la représentation et aux bases de référence de l’effectif sur l’équité en matière d’emploi, présentation au COMEX, 6 octobre 2021, annexe A.

[222]          IRCC, Anti-Racism Task Force Annual Plan (FY 2021-22), p. 2.

[223]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1225 (Marie Carmel Bien-Aimé); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1155 (Gideon Christian); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1225 (Fatima Filippi).

[224]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1225 (Marie Carmel Bien-Aimé).

[225]          CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1125 (Sabreena Ghaffar-Siddiqui); Mario Bellissimo, mémoire, 21 avril 2022, p. 3; CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1255 (Anila Lee Yuen); CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1205 (Mario Bellissimo, Bellissimo Law Group Professional Corporation).

[226]          CIMM, Témoignages, 7 avril 2022, 1205 (Mario Bellissimo).

[227]          CIMM, Témoignages, 26 avril 2022, 1125 (Sabreena Ghaffar-Siddiqui).

[228]          Ibid.

[229]          Ibid., 1105.

[230]          Ibid., 1125.

[231]          Ibid.

[232]          Ibid.

[233]          Ibid.

[234]          Voices4Families, mémoire, p. 5.

[235]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1140 (Gideon Christian); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1155 (Gurpartap Kals); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1135 (Steven Meurrens).

[236]          CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1135 (Gideon Christian); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1220 (Fatima Filippi); Voices4Families, mémoire, p. 3; CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1125 (Jennifer Miedema); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1250 (Anila Lee Yuen); CIMM, Témoignages, 22 mars 2022, 1250 (Beba Svigir); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1115 (Siham Rayale); CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1135 (Gurpartap Kals).

[237]          CIMM, Témoignages, 29 mars 2022, 1245 (Craig Worden, président, Pollara Strategic Insights).