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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 083 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 18 avril 2023

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

     Bienvenue à la 83e réunion du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
     Conformément l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 21 novembre 2022, le Comité se réunit pour discuter des perspectives économiques et financières et du rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire.
     La réunion d'aujourd'hui a lieu en format hybride conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Certains membres participent ici en présentiel, et d'autres le font à distance avec l'application Zoom.
     Je vais présenter quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité.
     Avant de parler, veuillez attendre que je vous donne la parole en mentionnant votre nom. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez ensuite le mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
     Pour l'interprétation, ceux qui participent avec Zoom peuvent choisir, au bas de l'écran, entre le plancher, le français et l'anglais. Ceux qui sont en présentiel peuvent utiliser les écouteurs et sélectionner le canal désiré.
     Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
     Si vous êtes dans la salle et que vous voulez prendre la parole, veuillez lever la main. Les membres qui participent sur Zoom sont priés d'utiliser la fonction « Lever la main ». Le greffier et moi-même allons gérer l'ordre des interventions le mieux possible. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
     J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre premier témoin, qui comparaîtra de 11 heures à 11 h 30 environ. Nous accueillons aujourd'hui M. Yves Giroux, le directeur parlementaire du budget.
     Monsieur Giroux, vous avez la parole pour votre déclaration préliminaire.

[Français]

    Mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour et merci de m'avoir invité à venir témoigner devant le Comité.
    C'est avec plaisir que je suis venu vous parler du tout dernier rapport intitulé « Perspectives économiques et financières » que mon bureau a publié le 2 mars dernier, avant le dépôt du budget de 2023 et les récentes turbulences financières mondiales, et qui portent sur la période allant jusqu'au 21 février inclusivement. Ces perspectives présentent une projection de référence pour aider les parlementaires à évaluer les résultats économiques et financiers possibles dans le cadre des politiques actuelles.
    Le 13 avril 2023, mon bureau a publié son rapport sur les enjeux pour les parlementaires liés au budget de 2023, qui est conçu pour aider les parlementaires dans leurs délibérations budgétaires. Il fait ressortir les faits saillants du budget, comme de nouvelles dépenses de l'ordre de 69,7 milliards de dollars mesurées sur une base brute.

[Traduction]

    Je vais maintenant poursuivre mon intervention en anglais.
    Dans l'ensemble, les perspectives de croissance du produit intérieur brut réel de 2023 à 2027 présentées dans le budget de 2023 sont légèrement plus faibles que celles présentées dans nos perspectives de mars: on y établit la croissance annuelle moyenne à 1,6 % plutôt qu'à 1,7 %. Cette légère différence est attribuable à des perspectives plus faibles à court terme, qui comprennent une récession modérée en 2023, tandis que nos perspectives de mars projetaient une stagnation de l'économie au cours de l'année.
     Pour ce qui est des perspectives financières, selon notre projection de mars ajustée, sur une base comparable, les déficits budgétaires projetés pour les exercices 2022‑2023 à 2027‑2028 sont généralement conformes aux perspectives présentées dans le budget de 2023.
     Je serai heureux de répondre à vos questions sur l'analyse économique et financière ou les autres travaux réalisés par mon bureau. Merci.

[Français]

    Merci, monsieur Giroux.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer aux questions des députés. J'allais dire « pour le premier tour », mais ce sera le seul tour. Chaque parti aura au plus six minutes pour poser des questions. La parole sera d'abord aux conservateurs pour six minutes.
     Monsieur Morantz, je vous cède la parole.

  (1105)  

     Je suis très heureux de vous revoir, monsieur Giroux. C'est un plaisir de vous accueillir pour discuter du budget de 2023.
     J'ai lu votre rapport avec intérêt. La première question que je veux vous poser concerne le phénomène des mesures non annoncées. C'est une préoccupation qui a déjà été soulevée. Elle a été soulevée dans l'énoncé économique de l'automne, et même avant. Vous avez mentionné dans votre rapport que vous aviez relevé 798 millions de dollars en nouvelles mesures non annoncées, ce qui porte le total, je crois que vous avez dit, à plus de 12 milliards de dollars.
     Pour ceux qui nous regardent et qui ne savent pas ce que sont des mesures non annoncées, le gouvernement nous demande en fait de voter pour autoriser des dépenses sans que nous sachions à quoi elles servent. Essentiellement, elles donnent au gouvernement un chèque en blanc de 12 milliards de dollars.
     Lors de votre témoignage précédent, je crois que vous avez dit que ce qui vous pose un problème, c'est qu'une fois l'argent dépensé, il est très difficile de comprendre, sur le plan de la comptabilité, à quoi il a servi. Cette situation comporte deux problèmes. Premièrement, il y a un important problème de transparence lorsqu'on demande aux parlementaires d'approuver des fonds alors qu'ils ne savent pas à quoi ils serviront. Deuxièmement, il y a un gros problème de reddition de comptes, parce qu'après coup, il est impossible de savoir à quoi l'argent a servi.
     Pourriez-vous formuler des commentaires à cet égard?
    Bien sûr. Il n'est pas inhabituel pour les gouvernements d'avoir des dispositions pour répondre à des pressions qui pourraient se faire sentir ou à des événements imprévus. Ce qui rend cette situation particulièrement difficile, c'est qu'il y a des positifs et des négatifs, ce qui semble indiquer que le niveau de détail est très élevé. Il y a des dépenses bien planifiées pour lesquelles le gouvernement a une idée claire et des décisions qui sont soit prises, soit sur le point de l'être, et pour lesquelles les quantums sont assez clairs.
     Les dépenses étant présentées dans leur ensemble, nous n'avons aucune idée précise de ce qui est inclus. Ce qui nous préoccupe, c'est que lorsque ces dépenses sont annoncées publiquement, il est très difficile d'en retracer la source du financement. S'agissait‑il du budget 2023? S'agissait‑il du budget 2022? Lorsqu'elles sont finalement annoncées, il est très difficile de savoir d'où provenaient les fonds et s'il s'agit de nouveaux financements.
     Nous avons beaucoup de difficulté à faire le suivi de ce genre de dépenses. Ce sont nos principales préoccupations.
    Avez-vous fait part de vos préoccupations aux fonctionnaires du ministère?
    Nous avons exprimé nos préoccupations dans des rapports et à l'occasion de discussions avec les fonctionnaires du ministère. Puisque cela figure dans des rapports — nous savons qu'ils ont lu nos rapports, et que certains rapports ont été lus très attentivement —, alors ils sont bien conscients de nos préoccupations.
    D'accord. En tant que parlementaires, que pensez-vous que nous devrions faire? Croyez-vous qu'il devrait y avoir un mandat législatif pour empêcher que ce genre de situation se produise de nouveau?
    En tant que parlementaires, vous pouvez demander des précisions au gouvernement. Lorsque les ministres et les fonctionnaires témoignent, vous pouvez certainement leur demander de vous fournir plus de détails, soit par écrit, soit lorsqu'ils comparaissent devant les comités.
     C'est amusant que vous disiez cela, parce que c'est exactement ce que j'ai fait lorsque la ministre des Finances était ici en novembre. Je lui ai demandé si elle voudrait bien fournir au Comité les détails concernant toutes les dépenses non annoncées, et elle a refusé. On dirait que nous nous heurtons à un mur lorsque nous tentons de savoir à quoi servent toutes ces dépenses non annoncées. Il est donc très difficile pour nous, en tant que parlementaires, de voter sur quelque chose sans savoir à quoi servira l'argent.
     Je sais qu'une partie de votre mandat porte sur l'analyse économique. J'aimerais savoir ce que vous pensez du budget en général. Ce budget prévoit 69,7 milliards de dollars en nouvelles dépenses de croissance. En fin de semaine, j'ai entendu Derek Holt s'exprimer lors d'une entrevue avec la Banque Scotia, et il est d'avis que toutes ces dépenses gouvernementales effrénées sont responsables d'une augmentation d'au moins 1 % du taux d'escompte, ce que je n'avais jamais entendu un économiste dire auparavant.
     J'aimerais savoir si vous êtes d'accord pour dire que les dépenses déficitaires du gouvernement sont de nature à stimuler l'économie, qu'elles sont de nature inflationniste et qu'elles ont entraîné une augmentation du taux d'escompte supérieure à ce qu'elle aurait été si le gouvernement ne s'était pas lancé dans une telle frénésie de dépenses.

  (1110)  

    Nous avons effectué des analyses — non pas pour établir une correspondance entre les dépenses et l'augmentation du taux, mais pour examiner les dépenses qui n'étaient pas liées à la COVID‑19 — et nous avons constaté que si l'on ne tient pas compte des dépenses non liées à la COVID‑19 au cours des deux dernières années, le déficit aurait été inférieur d'environ de 26 milliards de dollars en moyenne par an, et que le ratio de la dette au PIB en 2027‑2028 aurait été de 4,7 points de pourcentage de moins que ce qui était prévu dans le dernier budget.
     Pour ce qui est de la partie de votre question qui porte sur la nature inflationniste des dépenses du gouvernement, le rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada indiquait la semaine dernière que les dépenses publiques — et par là on entend non seulement les dépenses fédérales, mais aussi les dépenses provinciales — stimulent dans l'ensemble la demande globale, ce qui est une autre façon de dire qu'elles génèrent ou stimulent l'inflation.
    Merci.
     Merci, monsieur Morantz.
     Nous allons maintenant passer aux libéraux. Monsieur MacDonald, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur Giroux, d'être de nouveau avec nous aujourd'hui. C'est un plaisir de vous voir.
     Le communiqué de presse qui accompagnait votre rapport soulignait l'annulation de l'examen des politiques stratégiques de 9 milliards de dollars annoncé dans le budget de 2022, mais lorsque je regarde le budget de 2023, je vois une section intitulée « Recentrer les dépenses gouvernementales » qui entraîne des économies considérables d'environ 15 milliards de dollars, ce qui est beaucoup plus que les 9 milliards de dollars proposés. Pouvez-vous nous expliquer les différences entre les deux?
    Je pourrais difficilement vous expliquer quelles sont les différences parce qu'il y avait très peu de détails concernant l'examen des politiques stratégiques du budget de 2022. Nous avons demandé aux fonctionnaires du ministère des Finances ce qu'il était advenu de l'examen des politiques stratégiques prévu dans le budget de 2022 et qui visait à réaliser des économies de 9 milliards de dollars. Nous avons demandé si notre conclusion qu'il avait été annulé était correcte. Ils ont répondu par l'affirmative.
     Vous avez raison de dire que le budget prévoit de nouvelles mesures de restriction des dépenses. Il y a un recentrage des dépenses gouvernementales, notamment la réduction des dépenses pour les services de conseil en gestion, les services professionnels et les voyages, ainsi qu'une réduction des dépenses admissibles des ministères et organismes gouvernementaux et des sociétés d'État. Au total, cela représente environ 15 milliards de dollars sur plusieurs années.
     Il y a l'annulation de l'examen des politiques stratégiques, mais il y a aussi dans le budget de nouveaux examens des dépenses totalisant 15 milliards de dollars.
    Votre rapport souligne également que vos prévisions relativement au PIB réel du Canada et au chômage sont plus optimistes que celles énoncées dans le budget de 2023. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de cette différence et ce que vous en pensez?
    Bien sûr.
     Dans nos prévisions, nous considérons une inflation plus rapide du PIB. En regardant les chiffres, je vois que nous envisageons que la croissance annuelle sera un peu plus rapide. Le gouvernement intègre une faible récession en 2023, alors que nous ne pensons pas que ce scénario soit le plus probable. Il est possible qu'il y ait une faible récession, mais nous sommes d'avis que la prévision ou le résultat le plus probable pour 2023 sera une stagnation de la croissance. Le gouvernement a adopté une perspective un peu plus pessimiste pour 2023. C'est ce qui explique l'essentiel de la différence.
    Comparativement à d'autres pays, en particulier les pays du G7, pour ce qui est des mesures fiscales clés telles que le ratio du PIB net, les niveaux d'endettement et notre déficit, quelle est la position actuelle du Canada après les deux dernières années et, en fait, alors que se termine la COVID‑19?
    Le Canada se compare très favorablement aux autres pays du G7 pour ce qui est du ratio de la dette nette au PIB.
     À ce sujet, j'ai discuté avec un représentant de Moody's au cours des derniers jours. En parlant des perspectives pour le Canada, j'ai mentionné que les déficits en proportion de l'économie étaient d'environ 1 à 1,5 %, et il m'a dit que je devrais être très content parce que c'est très bas comparé aux normes européennes.
     Comparativement aux pays du G7, nous nous en tirons relativement bien, en grande partie parce que les provinces ont des budgets presque équilibrés ou de petits déficits, si l'on considère l'ensemble. Nous avons préfinancé certaines de nos obligations au titre des pensions publiques.
     Comparativement à d'autres pays, nous nous en tirons très bien.

  (1115)  

    Pour ce qui est de Moody's et de la cote de crédit, pouvez-vous expliquer aux gens à la maison à quel point il est important de maintenir notre cote de crédit?
    Avec plaisir.
     Les acteurs du marché, les portefeuilles d'investissement et les investisseurs institutionnels examinent les cotes des obligations attribuées par les agences de notation externes pour établir les taux d'intérêt qu'ils sont prêts à payer pour les obligations du gouvernement du Canada. Le fait de se voir attribuer une cote favorable ou élevée par la majorité de ces agences de notation permet au Canada de financer sa dette à des conditions plus favorables que les pays dont la cote de crédit n'est pas aussi bonne. Cela réduit ce que les gouvernements — le gouvernement canadien et les gouvernements provinciaux — paient en intérêts.
    Nous venons de traverser une période très mouvementée et nous semblons être sur une trajectoire qui est actuellement très bonne pour le Canada. Dans une certaine mesure, nous ne savons pas ce qui nous attend, ni à quel point les choses seront compliquées. Les propos des économistes sont souvent rapportés dans les médias. Ils ont tous des opinions divergentes sur l'économie canadienne.
     Si vous parliez aux membres d'une chambre de commerce dans n'importe quelle ville du pays, que diriez-vous à votre auditoire au sujet de l'économie canadienne?
    Je dirais que nos perspectives sont relativement bonnes pour ce qui est de la croissance économique. Notre économie est diversifiée et riche en ressources naturelles. Si je m'adressais à une chambre de commerce, j'exprimerais des préoccupations au sujet du niveau de productivité observé au Canada.
     La croissance de la productivité n'est pas aussi bonne qu'elle pourrait l'être. Bien sûr, si je m'adressais aux membres d'une chambre de commerce, je les encouragerais à investir vigoureusement dans des secteurs qui favorisent et améliorent la productivité, car c'est la clé de la croissance économique à long terme, et nous sommes malheureusement à la traîne par rapport aux États‑Unis.
    Merci.
    Merci, monsieur MacDonald.
     Nous passons maintenant la parole au Bloc et à M. Ste‑Marie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, tout le monde.
    Avant de commencer, je rappelle à mes collègues que, hier, je leur ai envoyé un courriel concernant une invitation. M. MacDonald m'a envoyé sa réponse, mais les autres ne l'ont pas fait. S'ils pouvaient faire le suivi, je leur en serais reconnaissant.
    Bonjour, monsieur Giroux. Je vous remercie encore une fois d'être avec nous, de votre participation et de tous les travaux que vous et votre équipe menez. J'ai bien aimé votre analyse figurant dans le rapport intitulé « Budget de 2023 : enjeux pour les parlementaires ».
    Je vais continuer dans le même sens que M. Morantz.
    Dans le rapport, on peut lire ce qui suit:
[...] il est recommandé que le Parlement envisage d’adopter un nouveau cadre législatif ou administratif en vue d’accroître la transparence et la compréhension pour les parlementaires et le public. Dans ce cas, le fait de déposer le budget à une date fixe plus tôt dans l’année pourrait garantir une meilleure harmonisation entre les divers rapports financiers du gouvernement.
    Pouvez-vous nous expliquer davantage votre recommandation?
    Je vais le faire avec plaisir, monsieur Ste‑Marie.
    La recommandation que j'ai faite concerne le moment où le gouvernement dépose les budgets des dépenses. Depuis mon arrivée en poste, j'ai parlé à plusieurs reprises de la façon dont le gouvernement se finance. Le projet de loi qui fait en sorte que les dépenses courantes sont autorisées par le Parlement doit être déposé avant le 1er mars. Il est effectivement déposé avant le 1er mars, mais il précède presque toujours l'annonce du budget. Les parlementaires sont donc appelés à voter sur le financement et les opérations du gouvernement, mais le gouvernement dépose son budget après que ceux-ci ont en main cette pièce législative. Cela fait que, dans le budget supplémentaire des dépenses, c'est-à-dire le budget principal, vous ne voyez pas l'ensemble des dépenses du gouvernement, ce qui doit être corrigé au moyen du budget supplémentaire des dépenses. On vous demande de voter sur les dépenses gouvernementales pour l'année à venir avant que vous sachiez quelles sont les priorités du gouvernement.
    Une façon de simplifier les choses serait de faire en sorte que le budget soit déposé en février, par exemple, à une date prédéterminée ou à l'intérieur d'une fenêtre prédéterminée. Cela vous permettrait d'avoir en main le budget et, ensuite, le projet de loi incluant les dépenses gouvernementales, c'est-à-dire les frais de fonctionnement du gouvernement, et les initiatives du budget. Vous auriez un portrait plus juste des opérations et des dépenses gouvernementales, c'est-à-dire des fonds dont le gouvernement a besoin pour fonctionner et pour tenir ses promesses. Ce serait plus logique d'avoir d'abord le budget et, ensuite, le projet de loi qui demande les fonds permettant de respecter les engagements pris dans le budget.

  (1120)  

    Merci.
    Souhaitons que le gouvernement aille de l'avant. Nous essaierons de le lui rappeler le plus souvent possible. Le secrétaire parlementaire est avec nous, alors j'espère qu'il prend bonne note de tout cela.
    Dans l'analyse du budget, l'un des problèmes que je vois est en lien avec la question de la transparence. D'ailleurs, cela transparaît aussi dans votre analyse. Pour présenter l'angle qui m'intéresse, je vais faire une comparaison. À l'époque où M. Paul Martin était le ministre des Finances, mon prédécesseur et porte-parole du Bloc québécois en cette matière avait trouvé l'astuce du gouvernement quant aux budgets: il surestimait systématiquement ses dépenses, et il atteignait donc un équilibre ou un léger déficit. À la fin de l'année financière, il pouvait toujours dire que, finalement, la situation était meilleure que ce à quoi l’on s'attendait.
    J'aimerais connaître votre opinion concernant les prévisions du gouvernement en ce qui a trait à la croissance des dépenses.
    Par ailleurs, les dernières données des comptes publics montrent que le gouvernement a laissé sur la table 41 milliards de dollars en fait de crédits périmés, lesquels avaient essentiellement été votés, mais dont une partie ne l'avait pas été. Or, le dernier exercice pour lequel les chiffres sont disponibles est 2021‑2022. Quand j'ai demandé aux fonctionnaires du ministère des Finances de nous dire où cela se retrouvait dans le budget et comment on en tenait compte, ils m'ont dit qu'ils n'étaient pas capables de répondre à ces questions et que cela ne s'y retrouvait pas systématiquement.
    J'aimerais avoir vos observations sur tout cela.
     Merci.
    Votre question comporte plusieurs aspects. J'aborde d'abord la question des crédits périmés. Le gouvernement, d'après sa structure et les contraintes imposées aux ministères — contraintes qui les empêchent de dépenser plus que ce que le Parlement les y autorise —, fait en sorte que les gestionnaires de l'ensemble du gouvernement vont faire preuve de prudence. Ils vont soit demander plus de fonds que nécessaire pour éviter les mauvaises surprises, soit éviter d'aller à la limite de ce qu'ils peuvent dépenser pour parer aux éventualités. Ils veulent donc éviter de dépasser leur budget et ainsi contrevenir à la loi. Cela fait en sorte qu'il y a des crédits périmés chaque année, et cela est prévu dans le cadre budgétaire du gouvernement.
    Quand le gouvernement et les fonctionnaires du ministère des Finances établissent leurs prévisions des dépenses, ils incluent toujours un facteur lié aux crédits périmés pour refléter le fait que cela se produit d'année en année. Évidemment, quand il y a des injections de fonds de manière ponctuelle, comme on l'a vu en raison de la pandémie, par exemple, les crédits périmés grossissent, parce que c'est plus difficile pour le gouvernement de prévoir avec précision combien il va dépenser.
    L'autre question concerne les prévisions des dépenses et le fait qu'il y avait auparavant des réserves, des facteurs liés à la prudence où l'on surestimait les dépenses pour s'assurer d'arriver à des résultats meilleurs que ceux ayant été prévus. C'est, entre autres choses, ce qui a donné lieu à la création du Bureau du directeur parlementaire du budget. Plusieurs parlementaires, à l'époque où le gouvernement sous-estimait ces surplus, en ressentaient de la frustration, car cela les empêchait d'avoir de réels débats éclairés et d'avoir un portrait juste des finances publiques. C'était alors une préoccupation, mais ça l'est moins maintenant, grâce à la création d'un bureau comme le mien.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Nous passons maintenant au NPD.
     Monsieur Blaikie, vous serez notre dernier intervenant.
     Je pense que les Canadiens qui tirent l'essentiel de leurs connaissances sur les politiques du gouvernement fédéral en écoutant la période des questions peuvent croire que la taxe sur le carbone est une source importante de recettes nettes pour le gouvernement.
     Quel est le revenu net de la taxe sur le carbone pour le gouvernement fédéral?

  (1125)  

    Eh bien, la taxe sur le carbone a été conçue de façon à ce que l'essentiel des recettes soit retourné aux particuliers et aux ménages. Les recettes nettes du gouvernement doivent être négligeables, surtout si l'on tient compte des coûts administratifs. Pour le gouvernement, les recettes nettes de la taxe sur le carbone ne sont pas totalement nulles, mais elles sont pratiquement de zéro.
    D'accord, ce n'est pas une véritable source de revenus. Cela ne figurerait pas dans un tableau budgétaire ou quelque chose du genre.
    Eh bien, dans le cadre d'opérations gouvernementales de plus de 400 milliards de dollars, c'est négligeable si l'on tient compte des sommes remises aux particuliers, comme nous l'avons mentionné dans plusieurs rapports.
    L'argent recueilli est donc retourné aux Canadiens. Est‑ce qu'une partie est parfois remise à des entreprises canadiennes?
    À ma connaissance, non. Il y a peut-être des dispositions très précises, mais l'essentiel des recettes est retourné aux particuliers, aux ménages.
    Nous avons beaucoup entendu parler de la controverse entourant la question de savoir si les ménages canadiens reçoivent plus que ce qu'ils versent pour cette taxe. Ce que j'entends, c'est que toutes les sommes versées par les particuliers au titre de la taxe sur le carbone et que toutes les sommes versées par les entreprises au titre de la taxe sur le carbone sont retournées aux Canadiens.
     Y a‑t‑il un niveau de revenu du ménage qui nous permettrait de dire avec certitude que les gens reçoivent plus que ce qu'ils ont versé ou qu'ils atteignent un seuil de rentabilité?
    La réponse à cette question varie d'une province à l'autre, car elle dépend des habitudes de consommation et de la manière dont l'électricité consommée par les ménages est produite. Est-elle produite par des combustibles fossiles ou non? De façon générale, cependant, si nous considérons uniquement la taxe sur le carbone payée par les ménages et le remboursement qu'ils obtiennent, dans la majorité des cas — je dirais environ 80 % — les remboursements sont supérieurs aux montants versés.
     Les ménages qui se trouvent dans le quintile supérieur, c'est‑à‑dire la tranche de 20 % dont les revenus sont les plus élevés, paient généralement plus que le remboursement qu'ils obtiennent, si l'on considère uniquement la taxe sur le carbone qu'ils paient par rapport à ce qu'ils reçoivent. Évidemment, cela varie en fonction des habitudes de consommation de chacun. Si vous conduisez un gros véhicule récréatif et que vous chauffez votre maison au pétrole ou au gaz naturel, vous paierez évidemment plus que ce que vous recevez au titre des taxes sur le carbone.
     La controverse est liée à l'inclusion des conséquences économiques de la taxe sur le carbone. Il est vrai que toute taxe a des répercussions et entraîne des frictions dans l'économie. La situation n'est pas différente avec la taxe sur le carbone. L'adoption d'une taxe sur le carbone a des incidences dans des secteurs précis. Plus un secteur est un grand consommateur de combustibles fossiles, plus les impacts risquent d'être importants. Avec l'inclusion des répercussions économiques, nous constatons que la plupart des ménages subiront une légère perte, dont l'ampleur est variable, si l'on tient compte de la perte de production économique, de revenus d'investissement et de revenus d'emploi et de la différence entre ce que les ménages paient et le remboursement obtenu.
     Il s'agit de considérer toutes les répercussions de la taxe sur le carbone sur l'économie.
    S'agit‑il également d'une prévision?
    Oui.
    D'accord. Cette prévision tient-elle compte des réductions des émissions qui découlent probablement des investissements que le gouvernement et les gens du secteur privé font déjà en ce sens, ou s'agit‑il d'un facteur qui ne fait pas partie des hypothèses qui sous-tendent cette prévision?
    Elle tient compte des changements de comportement qui seront provoqués par la taxe sur le carbone et son augmentation, sans toutefois inclure les soi-disant avantages de la réduction des émissions de carbone. Il est très difficile de quantifier, en dollars, les avantages d'une réduction des émissions de gaz à effet de serre. S'il y avait une façon de quantifier les avantages de la réduction des émissions de carbone d'ici 2030, nous serions heureux d'en tenir compte et de les inclure, mais les retombées dollars de la transition vers une économie plus verte d'ici 2030 sont très, très difficiles à évaluer.

  (1130)  

    L'analyse économique selon laquelle les Canadiens rentrent dans leurs frais ou accusent une légère perte a exigé que plusieurs hypothèses soient faites quant aux changements de comportement. Aucune tentative n'a été faite parce qu'il y a trop d'incertitude et qu'aucun modèle n'est adéquat pour mesurer les avantages financiers de la réduction des émissions. Cependant, pour ce que nous pouvons mesurer très clairement, c'est‑à‑dire les sommes versées au titre de la taxe sur le carbone et les sommes remboursées aux particuliers, environ 80 % des Canadiens atteignent le seuil de rentabilité ou reçoivent un remboursement supérieur à ce qu'ils ont payé. Quant aux 20 % qui sont susceptibles de payer un montant supérieur à celui de leur remboursement, ils se classent probablement dans le quintile supérieur des Canadiens. Cette affirmation est-elle juste?
    C'est une affirmation juste. C'est une représentation fidèle des résultats des nombreux rapports que nous avons produits sur cette question au cours des dernières années.
    Je vous remercie de cette précision. Je vous en suis reconnaissant, car je crois que le débat parlementaire est devenu plutôt confus dernièrement.
    Merci, monsieur Blaikie.
     Je tiens à remercier le Bureau du directeur parlementaire du budget et, bien sûr, son directeur de sa participation.
     Monsieur Giroux, merci de votre témoignage dans le cadre de notre étude. Je vous remercie beaucoup. Nous vous sommes vraiment reconnaissants du temps que vous nous avez accordé.
     Chers collègues, nous allons maintenant suspendre la séance pour nous préparer à accueillir notre deuxième groupe de témoins.

  (1130)  


  (1130)  

    Chers collègues, nous sommes de retour avec notre deuxième groupe de témoins.
     Nous accueillons aujourd'hui M. Tiff Macklem, le gouverneur de la Banque du Canada, ainsi que la première sous-gouverneure, Mme Carolyn Rogers.
     Je vous cède la parole afin que vous puissiez faire votre déclaration préliminaire. Nous passerons ensuite aux questions des députés.

  (1135)  

    Merci monsieur le président et bonjour à tous. Je suis ravi d'être ici en compagnie de la première sous-gouverneure pour parler de notre récente annonce concernant le taux directeur et de notre Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada.
     La semaine dernière, nous avons maintenu le taux directeur à 4,5 %, et nous continuons d'évaluer si la politique monétaire est assez restrictive pour permettre le retour de l'inflation à la cible de 2 %. Depuis notre dernier témoignage devant vous, nous avons observé un recul constant de l'inflation et une croissance modeste de l'économie. L'inflation baisse rapidement: les données de ce matin indiquent qu'elle est passée à 4,3 % en mars. Nous prévoyons qu'elle se situera autour de 3 % cet été. C'est encourageant, mais ça fait ressortir pour nous l'importance de garder le cap et de restaurer la stabilité des prix pour les Canadiennes et les Canadiens.
     Plusieurs choses doivent encore se produire pour que nous atteignions la cible d'inflation de 2 %. Il faut que les attentes d'inflation continuent de diminuer, que l'inflation des services et la croissance des salaires se modèrent, et que les pratiques de fixation des prix des entreprises se normalisent.
     Nous portons une attention particulière à ces indicateurs, et à l'évolution de l'inflation fondamentale, pour veiller à ce que l'inflation mesurée par l'indice des prix à la consommation (IPC) continue de progresser vers la cible. Si la politique monétaire n'est pas assez restrictive pour permettre un retour complet à la cible de 2 %, nous sommes prêts à relever de nouveau le taux directeur pour y parvenir.
     Avant de répondre à vos questions, je vais faire un survol du contexte économique et financier qui explique notre décision.

[Français]

    Au Canada, la demande reste excédentaire. La croissance du produit intérieur brut, ou PIB, au premier trimestre de l'année paraît supérieure à notre projection de janvier. Le marché du travail reste tendu. À 5 %, le taux de chômage demeure près de son creux historique, et les salaires continuent de croître dans une fourchette de 4 à 5 %. La croissance de l'emploi a été plus forte que prévu. Cela reflète le maintien de la demande et les augmentations de l'offre de main-d'œuvre.

[Traduction]

    L'incidence des hausses passées du taux directeur se propage dans l'économie et freine la demande. Les dépenses des ménages ralentissent, surtout les gros achats. Les renouvellements de prêts hypothécaires à des taux supérieurs se poursuivent, et les ménages seront donc plus nombreux à ressentir les effets modérateurs de la politique monétaire. Compte tenu de ces forces, nous nous attendons à ce que la croissance du PIB canadien soit faible pour le reste de l'année avant de commencer à remonter graduellement en 2024 et tout au long de 2025.
     Qu'est‑ce que tout cela signifie pour l'inflation? Nous avons parcouru beaucoup de chemin depuis l'été passé, alors que le taux d'inflation atteignait 8 %. Comme je l'ai mentionné, l'inflation annuelle mesurée par l'IPC est descendue à 4,3 % en mars, à cause surtout de la diminution de l'inflation des biens, et nous nous attendons à d'autres baisses. C'est une bonne nouvelle.
     Toutefois, beaucoup de gens ont encore du mal à joindre les deux bouts en raison de la hausse du coût de la vie, et les prix de nombreux essentiels grimpent encore trop vite. L'inflation des aliments est juste au‑dessous de 10 %. Nous nous attendons à ce qu'elle baisse dans les mois à venir, mais ce sera plus long pour l'inflation des services. La demande de services reste forte et le marché du travail, tendu, ce qui exerce des pressions à la hausse sur les prix de nombreux services, lesquels ne devraient diminuer que graduellement. Nous nous attendons à ce que l'inflation ne revienne à la cible de 2 % qu'à la fin de 2024.
     Lors de la réunion du Conseil de direction la semaine passée, nous nous sommes demandé si les hausses de taux effectuées étaient suffisantes. Nous avons aussi évoqué la possibilité que la politique monétaire doive rester restrictive pendant plus longtemps pour que l'inflation revienne à la cible de 2 %.

[Français]

    Le Conseil de direction a aussi discuté des risques entourant la projection de la Banque du Canada. Le plus important risque à la hausse est que l'inflation des services soit plus tenace que prévu. Le principal risque à la baisse est une récession à l'échelle mondiale. Si des tensions refont surface dans le secteur bancaire mondial, on pourrait observer un ralentissement mondial plus marqué et une baisse importante des prix des produits de base.
    Dans l'ensemble, les risques entourant notre prévision d'inflation sont assez équilibrés, mais comme l'inflation est encore bien au-dessus de notre cible, nous restons davantage préoccupés par les risques à la hausse.

  (1140)  

[Traduction]

    Permettez-moi de conclure. Notre travail, à la Banque du Canada, consiste à ramener l'inflation à la cible de 2 %. Jusqu'à présent, les progrès sont encourageants. Une inflation de 3 % cet été sera accueillie avec soulagement par les Canadiens.
     Mais laissez-moi assurer ceci aux Canadiennes et aux Canadiens: nous savons que notre travail ne sera pas accompli tant que nous n'aurons pas restauré la stabilité des prix. La stabilité des prix est importante, car elle rétablit les forces de la concurrence dans l'économie et permet de planifier et d'investir en sachant que l'argent va conserver sa valeur. C'est notre destination: nous sommes sur la bonne voie et nous allons garder le cap.
    Sur ce, la première sous-gouverneure et moi serons heureux de répondre à vos questions. Merci.
    Merci, monsieur le gouverneur Macklem et madame la première sous-gouverneure Rogers.
     Nous commençons notre première période de questions. Je cède d'abord la parole au député conservateur Hallan pour six minutes. Nous vous écoutons, monsieur Hallan.
    Merci, monsieur le président.
     Je vous remercie, monsieur Macklem et madame Rogers, d'être avec nous encore aujourd'hui.
     Le directeur parlementaire du budget prévoit que les nouvelles dépenses de croissance inscrites dans le budget de 2023 seront de 6,7 milliards de dollars de plus que les prévisions de 2023, atteignant 69,7 milliards de dollars, et il ne fait aucun doute qu'il y aura plus de dépenses gouvernementales, compte tenu du bilan du gouvernement libéral. Cette augmentation des dépenses va‑t‑elle jouer contre vos efforts de lutte contre l'inflation?
    C'est une question importante. La première chose que je veux mentionner, et je ne saurais trop insister sur ce point, c'est que les plans financiers relèvent de la responsabilité des gouvernements élus et, en fin de compte, des parlementaires. Les gouvernements ont de nombreuses priorités. Ils doivent prendre des décisions difficiles.
    C'est décidément ce qu'on nous répète tant et plus.
    Il est important de le répéter, cependant, et il est important que nous ayons un mandat. J'y viens. Nous avons pour tâche de maîtriser l'inflation, et c'est volontiers que nous parlons de l'incidence globale des dépenses publiques sur la croissance économique et sur l'inflation.
    Dans les prévisions que nous avons présentées la semaine dernière, notre rapport sur la politique monétaire comprend les nouvelles projections budgétaires du gouvernement fédéral et les projections faites par les gouvernements provinciaux dans leurs récents budgets. Pour ce qui est des comptes nationaux, ces budgets, pris ensemble, ajoutent environ 25 milliards de dollars en mesures budgétaires supplémentaires sur les trois prochaines années. Les trois quarts environ de ces mesures supplémentaires sont des mesures provinciales. Le dernier quart, plus ou moins, est fédéral. Vous pouvez voir l'incidence de ces mesures budgétaires supplémentaires. Elles apparaissent dans nos prévisions. Vous le verrez au tableau 2. Vous verrez que la contribution des dépenses publiques à la croissance augmente.
    Sur cette année, les dépenses publiques augmentent de 2 à 2,5 %. Quel effet cela a‑t‑il sur l'inflation? On peut s'en faire une idée en comparant le taux de croissance des dépenses publiques et le taux de croissance de la production potentielle, qui est la croissance économique tendancielle. Nous estimons la croissance tendancielle à environ 2 % et, si les dépenses publiques augmentent de beaucoup plus que 2 %, cela stimulera davantage la demande et accroîtra les pressions inflationnistes.
    Dans notre projection, qui repose sur ces budgets, les dépenses publiques augmentent de 2 à 2,5 % environ, ce qui correspond sensiblement à la production potentielle. Je dirai que les plans de dépenses publiques n'ont pas contribué au ralentissement économique. Ils n'ont pas contribué à réduire les pressions inflationnistes, mais ils n'empêchent pas de revenir à notre cible d'inflation. Comme je l'ai mentionné, dans notre inflation qui tient compte de ces projections budgétaires, nous revenons à la cible d'inflation d'ici la fin de 2024.
    Dans le budget de 2023, les dépenses augmentent de 4,1 %. Précédemment, dans votre analyse lors de votre dernière comparution, vous déclariez que la banque tablait sur 1,4 %. Nous en sommes à quatre fois plus que vous prévoyiez à votre dernière comparution devant le Comité. Est‑ce que cela veut dire que vos projections sont sous-estimées? Avez-vous sous-estimé les conséquences des dépenses publiques la dernière fois que vous êtes venu ici?
    Dans la deuxième moitié de l'année dernière, les dépenses publiques ont augmenté d'environ 3,5 %, et nous avons précisé que si ce taux se maintenait, il stimulerait la demande et pourrait faire qu'il serait plus difficile de faire reculer l'inflation. Nous prévoyons pour les deux prochaines années une croissance des dépenses d'environ 2 à 2,5 %. Comme je l'ai dit, cela correspond globalement à la production potentielle. Il s'agit d'une révision à la hausse par rapport à ce que nous avions dans nos prévisions de janvier parce que nous tenons compte des nouvelles dépenses, des nouvelles mesures budgétaires annoncées dans le dernier budget.

  (1145)  

    Prévoyez-vous de fortes pressions, alors? Prévoyez-vous des déficits plus importants que généralement qui dépasseront le PIB potentiel?
    Nous ne faisons pas vraiment de prévisions en ce qui concerne les déficits. Nous prenons les plans budgétaires du gouvernement tels qu'ils sont présentés. Comme je l'indiquais, je dirai que, de manière générale, l'augmentation des dépenses publiques correspond à la croissance tendancielle de l'économie. Elles ne stimulent pas l'économie ni ne la mettent en situation de surchauffe, mais elles augmentent continuellement, ce qui fait qu'elles n'exercent pas non plus de pression à la baisse sur l'inflation.
    Est‑ce que, par conséquent, vous prévoyez une inflation persistante? Est‑ce que c'est ce que vous prévoyez?
    Non, nous ne prévoyons pas d'inflation persistante. Comme vous le voyez, l'inflation retombe assez rapidement.
    Mais à l'heure actuelle, il y a un écart de production positif.
    L'été dernier, il était de 8 %. Il était de 4,3 % aujourd'hui. Nous nous attendons à ce qu'il soit d'environ 3 % cet été, 2,5 % d'ici la fin de l'année et 2 % d'ici la fin de 2024.
    Je ferai deux ou trois remarques sur les plans de dépenses publiques. Les différents ordres de gouvernement dépensent pour protéger...
    Je dois passer à autre chose.
    D'accord.
    J'aimerais savoir si des dépenses supérieures à vos prévisions de 1,4 % ne vous posent pas de problème.
    Les dépenses n'ont pas à me poser des problèmes ou pas. Je suis satisfait de nos prévisions relatives à l'inflation. Il appartient au Parlement de décider si les dépenses posent des problèmes. Nous tenons compte des dépenses dans nos prévisions, et nous estimons que l'inflation retombera à 2 %.
    Je dois passer à autre chose. Il me reste peu de temps.
    Le gouvernement a augmenté de 30 % la taille de la fonction publique. En plus d'avoir dépensé 21,4 milliards de dollars en consultants. Le marché du travail reste tendu, comme vous le disiez, et les pénuries de main-d'oeuvre font grimper le coût des embauches.
    Êtes-vous d'accord que la croissance de la fonction publique aggrave la tension sur le marché du travail?
    Nous considérons le marché du travail dans son ensemble. Le marché du travail est tendu. Nous voyons quelques signes d'amélioration.
    Nous payons aussi pour plus de services publics et de consultants.
    Messieurs, le temps de parole est écoulé. Je vous remercie, monsieur Hallan. Il y aura d'autres séries de questions.
    Nous passons aux libéraux avec Mme Dzerowicz pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à vivement vous remercier, monsieur Macklem et madame Rogers, de votre présence une fois de plus aujourd'hui et du travail extraordinaire que vous accomplissez pour notre pays.
    Ma première question concerne l'emploi, l'augmentation des salaires et l'incidence sur l'inflation.
    Dans une des questions que je vous ai posées précédemment, monsieur le gouverneur, je vous demandais si l'augmentation des salaires a toujours un effet négatif sur l'inflation. Je me rappelle que vous m'avez répondu qu'il n'y a pas de problème si les salaires augmentent du moment que la productivité augmente d'autant. Lorsque je pense aux salaires, c'est difficile parce que je les vois comme un tout. Beaucoup de personnes sont très bien payées. Il y a des personnes qui sont payées à leur juste valeur. Je crois, toutefois, qu'énormément de personnes dans notre société doivent être payées plus, qu'il s'agisse des infirmières, des préposés aux services de soutien à la personne ou des employés de certains des segments clés du secteur hôtelier. Je ne veux pas décourager d'augmenter les salaires des personnes qui ont besoin d'augmentations.
    Pouvez-vous expliquer à quoi pourraient ressembler les augmentations de productivité dans des secteurs où les salaires doivent augmenter? Encore une fois, je parle des infirmières, des préposés aux services de soutien à la personne et des employés de certains des segments clés du secteur hôtelier. Que pouvez-vous nous dire?
    Comme vous le mentionniez, une hausse de la productivité permet d'augmenter les salaires. Une croissance économique qui s'accompagne d'une meilleure productivité favorise la croissance salariale, ce qui ne contribue pas à l'inflation.
    À l'heure actuelle, la croissance salariale se situe aux alentours de 4 à 5 %, et la croissance de la productivité est elle en baisse. Pour revenir à la cible d'inflation, la croissance salariale devra se tasser dans l'ensemble de l'économie. Cela ne veut pas dire que les salaires ne peuvent pas augmenter plus dans certains secteurs et moins dans d'autres. Les augmentations correspondront à la demande dans les secteurs en question. Elles tiendront aussi compte des gains de productivité dans ces secteurs.
    Si nous voulons maintenir une croissance plus élevée des salaires dans le temps, nous devons améliorer la croissance de la productivité au Canada.

  (1150)  

    Je vous remercie. C'est bon à savoir.
    Je passe à ma question suivante.
     Dans vos observations préliminaires à la conférence de presse relative au Rapport sur la politique monétaire, vous avez déclaré ceci: « Selon les répondants à l'Enquête sur les perspectives des entreprises menée par la Banque, il est de plus en plus facile de trouver du personnel. Cela indique que les tensions sur le marché de travail commencent à s'atténuer. »
    Avez-vous plus de données à ce sujet? Des personnes disent qu'il y a beaucoup d'emplois qui cherchent preneurs et d'autres qu'elles n'arrivent toujours pas à pourvoir des postes. C'est la première fois que je vois la nouvelle positive que des employeurs réussissent à pourvoir les postes. Est‑ce que la tendance est telle qu'on est passé de 50 % des employeurs qui disaient qu'ils avaient besoin de travailleurs à 25 % maintenant? Avez-vous des chiffres à ce propos?
    Je n'ai pas tous les chiffres de l'Enquête sur les perspectives des entreprises sous les yeux. N'oubliez pas qu'il s'agit d'une enquête menée auprès d'une centaine d'entreprises. Il faut donc regarder davantage l'orientation, je dirai, que des chiffres très précis.
    Je peux dire deux ou trois choses.
    Si vous prenez les statistiques macroéconomiques, comme le taux de chômage ou le taux de croissance de l'emploi, le taux de chômage est resté à 5 %. Il n'a pas bougé. De toute évidence, si nous regardons seulement le taux de chômage, et la croissance de l'emploi, le marché du travail reste très tendu.
    Quand on parle avec les entreprises, elles disent qu'elles commencent à trouver plus facilement à recruter. Elles parviennent plus à embaucher. Elles disent qu'il y a plus de main-d'œuvre disponible. Les entreprises se disputent moins les mêmes travailleurs. Il commence à être plus facile de pourvoir des postes.
    Par ailleurs, je mentionnerai dans ce contexte que nous assistons à une forte augmentation de l'immigration. De plus, les entreprises recourent davantage au Programme des travailleurs étrangers temporaires, ce qui se traduit par la venue au Canada de beaucoup de travailleurs supplémentaires, et c'est peut-être une des raisons pour lesquelles le marché du travail n'est plus tout à fait aussi tendu.
    Étant donné les bons chiffres du PIB en janvier, la résilience continue du marché du travail et la baisse continue de l'inflation, comme le montre le communiqué de ce matin, voyez-vous une possibilité d'atterrissage en douceur au Canada?
    Ces termes sont un peu vagues, mais je pense que la plupart des gens diraient que nos prévisions annoncent un atterrissage en douceur.
    La croissance au premier trimestre semble un peu plus forte que nous ne le pensions. Et pour ce qui est des trois autres trimestres de cette année, nous nous attendons à une croissance légèrement positive, c'est‑à‑dire inférieure à 1 %, mais supérieure à zéro. La croissance sera faible. Il n'y aura pas de quoi se réjouir, mais ce sera une croissance légèrement positive, et la plupart des gens y verront, à mon avis, un atterrissage en douceur.
    Il y a évidemment des risques dans tout cela. Comme nous le soulignons dans le rapport, le plus grand risque est celui d'une récession mondiale. Notre économie est très ouverte et très intégrée au reste du monde. Par conséquent, en cas de récession mondiale, la croissance canadienne sera plus faible.
    Je vous remercie.
    Merci, madame Dzerowicz.
    Nous passons au Bloc québécois avec M. Ste‑Marie, qui dispose de six minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, madame la première sous-gouverneure, je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui.
    Dans votre rapport sur la politique monétaire, j'ai été surpris de voir que vous prévoyez une croissance du produit intérieur brut de 1,4 % cette année et de 1,3 % pour 2024. Sauf erreur, il s'agit de la croissance réelle corrigée selon l'inflation.
    Pourquoi la croissance prévue est-elle moins importante pour 2024 que pour 2023?
    C'est un peu dû au calcul des taux de croissance annuels par rapport à la croissance trimestrielle annualisée. Si on regarde cette dernière, c'est très faible pour le reste de cette année. Cela commence à augmenter l'année prochaine et ce sera encore plus fort en 2025. Quand on calcule la moyenne annuelle, c'est à peu près la même chose pour les deux années. Par contre, si vous regardez la dynamique trimestrielle, c'est plus fort en 2024.

  (1155)  

    D'accord. Merci, cela m'éclaire.
    En quoi vos prévisions pour la conjoncture économique, la croissance, l'inflation, le marché de l'emploi, et ainsi de suite, diffèrent-elles de celles présentées dans le budget de 2023?
    Vous parlez du budget fédéral. Il n'y a pas une grande différence. Le sondage utilisé par le ministère des Finances du gouvernement fédéral a été fait avant que nous ayons fait nos prévisions. Nous avons des données plus récentes, qui sont plus élevées, surtout pour le premier trimestre. Les deux prévisions évoquent une croissance faible et une diminution de la croissance. Les prévisions de croissance dans le budget sont encore un peu plus faibles que les nôtres, mais les deux sont faibles.
    D'accord, merci.
    Comme vous l'avez rappelé, le taux directeur a été relevé. Du côté des banques, constatez-vous que cette hausse des taux d'intérêt se reflète dans la rémunération des épargnants? Selon votre analyse, les taux offerts aux épargnants auprès des institutions financières reflètent-ils bien la hausse du taux directeur?
    En lien avec cela, selon vous, le mécanisme de concurrence entre les banques fonctionne-t-il bien, ou s'agit-il plutôt d'une situation qui se rapproche d'un oligopole?
    Pour répondre à votre première question, nous avons effectivement vu que, lorsque nous avons augmenté le taux directeur, cela s'est reflété dans les décisions des banques. Les taux pour les prêts hypothécaires sont plus élevés, et il y a plus de compétition en ce qui a trait aux dépôts. Les taux pour les dépôts sont aussi à la hausse. Certaines choses peuvent donc changer plus rapidement ou plus lentement, mais, grosso modo, cela a eu un effet.
    Nous avons établi un système avec quelques grandes banques nationales, que l'on connaît bien. Nous avons aussi établi un système avec des banques de petite ou moyenne taille, des banques plus régionales qui font une certaine concurrence aux grandes banques. En gros, je pense que le Canada a trouvé un bon équilibre dans notre système bancaire. Celui-ci est réputé pour sa stabilité, et c'est bon pour tous les Canadiens. Cela est dû en partie au fait que notre système de banques nationales est bien diversifié, ce qui permet de gérer le risque associé aux prêts.
    Merci.
    Combien de temps de parole me reste-t-il, monsieur le président?

[Traduction]

    Il vous reste 15 secondes, monsieur Ste‑Marie.

[Français]

    Je vais attendre mon prochain de tour de parole, puisque mes prochaines questions vont nécessiter de trop longues réponses.
    Merci.

[Traduction]

    Nous passons au NPD avec M. Blaikie, qui dispose de six minutes.

  (1200)  

    Je vous remercie.
    À l'automne 2021, on a annoncé en fanfare un nouveau mandat pour la Banque du Canada. Il me semble que la banque continue de se concentrer strictement sur la stabilité des prix ou la maîtrise de l'inflation.
    Vous avez déclaré à de nombreuses occasions que le taux de chômage est faible et que les attentes relatives à la hausse des salaires sont prises en compte quand vous décidez du taux général. Le nouveau mandat de l'automne 2021 a‑t‑il modifié les hypothèses sur lesquelles la banque se fonde? A‑t‑il modifié son approche? Est‑ce que son analyse est sensiblement différente, étant donné la nouvelle entente signée à l'automne 2021? Dans l'affirmative, en quoi le nouveau mandat a‑t‑il, selon vous, changé la façon dont vous avez abordé la situation dans laquelle nous nous trouvons depuis deux ans, en comparaison du mandat signé vers 2016?
    Il y a deux éléments en l'espèce.
    Premièrement, pour ce qui est de ce qui a changé ou pas, je pense que ce qui est inchangé depuis 1995, c'est que la cible d'inflation est de 2 %. Il me semble que l'entente de décembre 2021 était plus claire sur le rôle du marché du travail dans la formation de la politique monétaire. Il était clair que notre principal objectif est une inflation faible et stable et qu'en tendant vers cet objectif, nous examinons soigneusement le marché du travail. Nous voulons soutenir des taux d'emploi élevés. Je dirai que l'entente de décembre 2021 n'a pas apporté de grand changement. Il s'agissait plus d'une continuité et je pense qu'elle a ajouté plus de clarté.
    Pour ce qui est de ce qui a changé — et cela s'est révélé être très important pendant toute la pandémie —, nous mettons plus l'accent sur le marché du travail. Vous avez demandé ce qui a changé selon nous. Je pense que vous voyez que nous analysons beaucoup plus le marché du travail. Nous l'examinons beaucoup plus en détail. Nous ne nous contentons pas de regarder les grandes statistiques agrégées, comme le taux de chômage et le nombre d'emplois. Nous examinons différents groupes démographiques — âge, sexe, travailleurs à revenu élevé, travailleurs à faible revenu — et cela nous aide à nous faire une meilleure idée de la situation.
    Vous avez parlé de l'incidence que cela a sur nous en ce moment. À l'heure actuelle, nous examinons comment les taux d'intérêt plus élevés se généralisent dans l'économie pour faire baisser l'inflation. L'examen plus en détail du marché du travail est un des moyens que nous avons pour dresser un tableau plus précis, ce qui devrait mener à de meilleures décisions.
     À l'automne 2021, Pierre Poilievre était le porte-parole en matière de finances et il tenait beaucoup à ce que la politique principale de la Banque du Canada reste axée sur la stabilité des prix et la maîtrise de l'inflation. À cet égard, le gouvernement a plus ou moins fait ce que M. Poilievre recommandait alors. Est‑ce que je me trompe?
    La stabilité des prix demeure absolument essentielle. C'est notre principal objectif.
    Entre autres questions, lorsque vous examinez le taux de chômage, est‑ce que... Là encore, vous avez dit que vous tenez à ce qu'il reste faible. Y a‑t‑il un taux de chômage cible? Y a‑t‑il un scénario dans lequel le chômage reste faible et où vous prévoyez quand même que la banque réduise les taux d'intérêt, ou est‑il important pour la banque que le chômage atteigne un certain niveau auquel il n'est pas actuellement pour déclencher une réduction du taux général?
    En fait, nous sommes guidés par l'inflation et par notre mandat en matière d'inflation. Il est important quand on cible l'inflation — parce qu'il y a un décalage des effets de la politique monétaire dans le temps — d'anticiper, non seulement ce qu'est l'inflation, mais aussi ce qu'elle sera. C'est là que le marché du travail devient particulièrement important. L'inflation est passée de 8 % l'été dernier à 4,3 % aujourd'hui et le marché du travail est resté très dynamique.
    Nous prévoyons que la croissance sera faible pendant le reste de l'année et, à vrai dire, nous avons besoin d'une faible croissance. La demande est encore supérieure à l'offre dans l'économie. Il y a encore beaucoup de pression à la hausse sur le prix des services. Si nous voulons ramener l'inflation à 2 %, nous devons soulager ces pressions. Nous avons donc besoin de cette période de plus faible croissance pour que l'offre rattrape la demande.

  (1205)  

    Diriez-vous qu'une faible croissance signifie une hausse du chômage?
    Oui, et c'est exactement à cela que j'en venais.
    Nous ne publions pas de prévisions du chômage, mais cela signifie probablement que le taux de chômage augmentera nécessairement. Nous ne parlons toutefois pas de fortes augmentations.
    Pour revenir à l'une des questions posées plus tôt, nous avons une croissance positive...
    Je suis désolé de vous interrompre, mais je tiens à examiner une des conséquences de ce scénario avant la fin de mon temps de parole.
    Sans stabilisateurs systématiques efficaces, comme un régime d'assurance-emploi qui fonctionne bien... S'il est probable que le taux de chômage augmente et si c'est un objectif stratégique direct ou indirect de la banque, est‑il important d'avoir des stabilisateurs systématiques efficaces, tant d'un point de vue macroéconomique que pour les ménages canadiens, afin qu'ils aient un revenu de remplacement en cas de chômage?
    J'aimerais une réponse très courte.
    Je tiens à préciser que nous ne prenons aucun plaisir à faire augmenter le taux de chômage. Nous avons des décisions difficiles à prendre. Il est très important de rétablir la stabilité des prix. Je laisserai les questions de politique budgétaire au gouvernement et aux parlementaires.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Blaikie.
    Nous passons à la deuxième série de questions. Nous commencerons par M. Chambers, qui disposera de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le gouverneur et madame la première sous-gouverneure. C'est toujours un plaisir de vous recevoir. Merci d'avoir accepté notre invitation, même si je sais que vous venez souvent de votre propre chef. Vous êtes venus au moins six fois, probablement, en deux ou trois ans. Malheureusement, l'exécutif et la ministre des Finances n'ont pas accepté notre invitation. Nous vous sommes très reconnaissants de votre volonté de transparence avec les parlementaires.
    Je parlerai un peu de l'immobilier, si vous le permettez. Je ne sais pas si cela fait partie du portefeuille de Mme Rogers. La banque a‑t‑elle été consultée au sujet de la décision du gouvernement et du Bureau du surintendant des institutions financières, le BSIF, d'autoriser les prêteurs à allonger les périodes d'amortissement au moment du refinancement?
    Ce sont des décisions que prennent les prêteurs. Je pense que l'allongement des périodes d'amortissement, du moment qu'il se fait dans le respect des politiques de risque... Je sais que le BSIF est très attentif à ces choses, mais je ne crois pas qu'il s'agisse de politiques qui sortent de leurs gammes de produits normales.
    D'accord.
    Je ne pense pas qu'il y ait eu un changement au sujet duquel il fallait nous consulter, pour répondre très directement à votre question.
    Le fait que de 20 à 25 % du portefeuille hypothécaire de certains prêteurs ait maintenant des amortissements nettement supérieurs à 40 ans vous inquiète‑t‑il?
    Nous avons, en fait, rencontré certaines banques la semaine dernière. Nous avons posé cette question précisément. C'est évidemment quelque chose que nous surveillons. Elles nous ont expliqué qu'il s'agit d'emprunteurs avec qui elles travaillent. Cela dépend beaucoup de la situation de l'emprunteur et des options existantes. Certains refinancent, d'autres remboursent leur hypothèque et d'autres encore cherchent à modifier les paiements. Il me semble que les banques savent pertinemment que des prêts hypothécaires qui ne sont pas remboursés ou amortis ne constituent pas une situation viable à long terme, mais pour autant que nous sachions, elles travaillent en étroite concertation avec ces emprunteurs.
    Nous fournissons une analyse à ce sujet. Il y a un peu d'analyse dans l'encadré 3 du Rapport sur la politique monétaire. Nous avons notre Revue du système financier, que nous publierons en mai. Nous y présenterons une analyse un peu plus poussée du marché des prêts hypothécaires.
    Je vous remercie. Nous avons hâte d'en prendre connaissance.
    Vous avez un travail à faire. Le BSIF aussi, de même que d'autres organismes de réglementation. Cependant, les décisions prises ont des répercussions sur d'autres parties du système. Par exemple, nous connaissons les contreparties positives de ce genre de décision, mais il y a aussi des contreparties négatives, y compris le fait de ne pas laisser la demande baisser dans certaines circonstances ou de mettre un niveau de prix aux logements.
    Beaucoup de gens ne sont pas sur le marché du logement en ce moment, surtout les jeunes qui disent que le système les désavantage complètement. Les taux d'intérêt ont été faibles pendant plus d'une décennie. Les gens se sont surendettés et ont alimenté la dynamisation du secteur de l'immobilier et les investissements dans ce secteur. Le Canada a, en pourcentage du PIB, un des montants les plus élevés du PIB en investissement dans l'immobilier résidentiel et aujourd'hui, alors que le système devrait opérer une correction et que les prix pourraient baisser, le système fait en sorte que les prix restent un peu plus élevés. Tout récemment, au cours des derniers mois, les prix de l'immobilier ont remonté sur certains marchés parce que personne ne met sa maison en vente. Les pressions sont nombreuses sur ce système, et il y a des contreparties positives et négatives. Nous comprenons le point de vue de la banque à ce sujet et nous nous réjouissons à la perspective d'une partie de votre travail futur.
    Dans ma dernière minute, j'aimerais passer à la productivité parce que le sujet a été évoqué. Nous mesurons le niveau de vie en PIB par habitant, mais cette mesure est très insuffisante au Canada. En fait, nous faisons de la croissance en volume. Le gâteau augmente, mais la part de chacun demeure la même. Une des pressions sur les prix et la demande de maisons, comme vous le soulignez, me semble‑t‑il, dans le rapport, concerne l'augmentation à long terme de l'offre potentielle parallèlement à la croissance démographique. À court terme, est‑ce que cela constitue un obstacle à la demande de biens et services généraux et de biens immobiliers?

  (1210)  

    Oui. L'immigration, comme de nombreuses politiques, a des effets sur l'offre et la demande. Nous le soulignons dans le Rapport sur la politique monétaire.
    L'immigration fera augmenter l'offre de main-d'œuvre, ce qui est une bonne chose. Cela aidera à détendre le marché du travail et aussi à augmenter le potentiel à long terme, mais les immigrants aussi achètent des maisons, comme vous le faites remarquer. Ils ajoutent à la demande. Donc, dans une économie où la demande est déjà trop forte, l'augmentation de l'immigration ajoutera des deux côtés. Elle ne soulagera pas nécessairement la demande excédentaire. Elle ajoutera aux pressions de l'offre et de la demande.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Chambers.
    Nous passons à M. MacDonald pour cinq minutes. Vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, il me semble vous poser chaque fois que vous venez des questions sur les provinces par rapport à la croissance économique et à leur contribution à l'inflation. Je ne vais donc pas changer d'habitude. Que pouvez-vous nous dire de la situation financière des provinces et des territoires par rapport au gouvernement fédéral à l'heure actuelle?
    Je redirai la première chose que j'ai dite. Les décisions financières sont les décisions des gouvernements, du Parlement, et nous les leur laissons.
    Ce que je peux dire, comme je l'ai fait dans ma réponse à votre première question, c'est que nous prenons les plans de dépenses des gouvernements fédéral et provinciaux tels qu'ils sont donnés. Nous en tenons compte dans nos projections et nous en déduisons les conséquences pour la croissance réelle et l'inflation et, pour finir, ce que nous devons faire par rapport aux taux d'intérêt pour revenir à la cible d'inflation.
    Il y avait quantité de budgets provinciaux et un budget fédéral. Nous les avons pris et nous en avons tenu compte dans nos projections, et ils ont ajouté 25 milliards de dollars en dépenses supplémentaires sur les trois prochaines années. Les trois quarts environ de cette somme correspondent aux budgets provinciaux et un quart environ, au budget fédéral.
    Sur les 25 milliards de dollars, est‑ce que le quart qui correspond aux budgets provinciaux est la norme d'année en année?
    Non, cela varie d'une année à l'autre.
    Pendant la pandémie, par exemple, les gouvernements provinciaux et fédéral ont augmenté considérablement leurs dépenses pour soutenir l'économie quand elle était dans une situation désastreuse, et les dépenses fédérales ont été plus importantes que les provinciales pendant toute cette période. Cela varie.
    C'est, en gros, 98 ¢ par dollar dans ma province.
    Prévoyez-vous actuellement des difficultés ou des perturbations à l'horizon qui pourraient créer des perturbations ou tirer à la baisse l'inflation que nous voyons depuis quelques mois?
    Il y a des risques et il me semble qu'ils sont soulignés dans notre rapport.
    Comme je le mentionnais dans mes observations préliminaires, l'inflation recule assez vite et la majeure partie de cette baisse tient au prix des produits. Les prix de l'énergie ont beaucoup baissé et la situation des chaînes d'approvisionnement mondiales s'est améliorée. Nous voyons également les effets de la politique monétaire sur les articles sensibles aux variations des taux d'intérêt, c'est-à-dire les choses que les gens achètent généralement à crédit, comme l'ameublement ou l'électroménager, et les maisons, évidemment, dont nous venons de parler, mais ce qui demande plus de temps, c'est l'inflation des prix des services.
    C'est en partie normal. Le secteur des services a été le dernier à se redresser. Les Canadiens essaient encore de se rattraper dans certains des services qui leur ont manqué pendant la pandémie, et les effets de la politique monétaire sont plus longs à se faire sentir dans les services. Cependant, nous ne ramènerons pas l'inflation à 2 % si nous ne faisons pas retomber l'inflation des prix des services. Pour revenir à votre question, les coûts des facteurs de production liés à la main-d’œuvre représentent une part importante de la prestation de services. Il faut que la croissance salariale ralentisse. Il faut que l'inflation des prix des services recule.
    Par ailleurs, nous surveillons de près le comportement des entreprises. Nous avons remarqué, quand l'inflation était très élevée, qu'elles augmentaient leurs prix beaucoup plus et beaucoup plus souvent. Nous commençons à observer un début de normalisation à cet égard. Les augmentations de prix sont moins fréquentes et pas aussi importantes, mais elles ne sont pas encore normales.
    Quand on parle avec les entreprises, elles disent qu'elles ressentent encore des pressions sur les coûts, mais qu'elles les répercutent. Cela tient à la situation de demande excédentaire dans l'économie. Quand les entreprises ne craignent pas de perdre des clients, elles se contentent de répercuter ces prix. La situation commence à se normaliser, mais c'est quelque chose que nous devons surveiller de près.
    Nous sommes sur la bonne voie, mais il reste du chemin à parcourir et il doit se passer certaines choses avant que nous touchions au but.

  (1215)  

    Je vous remercie.
    Nous avons nos données sur l'activité, la tendance est à la baisse depuis neuf mois, nous avons créé 200 000 emplois en trois mois et les salaires augmentent. Nous affichons maintenant le deuxième taux d'inflation le plus faible du G7, derrière le Japon.
    Rapidement, car nous n'avons pas beaucoup de temps, pouvez-vous dire quelques mots sur la résilience de notre économie?
    Vous avez mentionné des comparaisons internationales. Les Canadiens ont vécu une situation très difficile depuis deux ou trois ans et ils continuent de ressentir les effets de l'inflation, mais si l'on compare le Canada à d'autres pays similaires — des pays semblables au nôtre —, nous nous en sortons plutôt bien. La croissance canadienne est parmi les plus fortes. L'inflation, même si elle est assurément trop élevée, est, après celle du Japon, la plus faible du G7. Cela n'aide pas vraiment les Canadiens à se sentir mieux, mais je pense que si nous nous comparons à d'autres pays, en effet, le Canada s'en sort plutôt bien.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur MacDonald.
    Nous passons à M. Ste-Marie pour deux minutes et demie. Vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    L'économiste Willem H. Buiter, qui a travaillé chez Citigroup et au sein du comité de la politique monétaire de la Banque d'Angleterre, suggère aux banques centrales d'abandonner le papier-monnaie pour migrer vers une monnaie totalement numérique ou virtuelle.
    L'argument qu'il avance, en se basant sur les perspectives de l'économie mondiale du Fonds monétaire international, ou FMI, est qu'il est plausible qu'on revienne à une politique monétaire à faible taux d'intérêt dans quelques années. Il est d'avis que, pour que les banques centrales aient de meilleurs outils, il pourrait y avoir un taux d'intérêt négatif, ce qui est difficile à mettre en oeuvre avec le papier-monnaie, mais qui ne serait pas le cas avec une monnaie numérique ou virtuelle.
    Je ne suis pas nécessairement d'accord sur son analyse, mais j'aimerais connaître votre opinion sur cette possibilité et savoir où vous en êtes dans son évaluation.
    La réponse courte est que nous sommes très loin du monde de M. Buiter.
    Nous aurons des billets de banque pendant encore longtemps. Les Canadiens aiment leurs billets de banque, et cela est très important pour la vie quotidienne.
    Or, la question importante qui se pose est de savoir si ce serait une bonne idée de donner aux Canadiens l'accès à une monnaie numérique de la banque centrale. Nous examinons de près cette question.
    Différents aspects doivent être pris en compte dans notre recherche. Il faut notamment se poser des questions sur les avantages que cela comporterait et sur l'incidence qu'une monnaie numérique de la banque centrale aurait sur le système financier. Des questions techniques se posent également. Si nous adoptions une telle approche, il serait très important qu'elle fonctionne très bien, que la sécurité soit très élevée et que l'accès pour les Canadiens soit large.
    Voilà les deux types de questions que nous examinons. Cependant, les choses en sont encore au stade de la recherche-développement. Aucune décision n'a été prise jusqu'à maintenant, et je veux souligner que la décision d'adopter une monnaie numérique de la banque centrale du Canada reviendrait au Parlement.

  (1220)  

    Merci.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Blaikie pour deux minutes et demie. Allez‑y.
    Je vous remercie.
    J'aimerais parler un peu plus du marché du logement. Nous avons vu pendant des décennies au Canada que, lorsque que les taux d'intérêt baissaient — comme ils l'ont fait pendant longtemps, du milieu des années 1990 jusque récemment —, les personnes dont le salaire réel n'augmentait pas pouvaient cependant faire une offre supérieure pour acheter un logement. Elles parvenaient à mettre leurs gains plus à profit.
    Le prix des maisons n'a cessé d'augmenter. Il a même explosé pendant la pandémie, en partie parce que les gens ne dépensaient pas d'argent sur d'autres choses, ce qui faisait qu'ils avaient plus à dépenser sur un logement. La demande était élevée parce que les gens allaient passer beaucoup plus de temps chez eux. Ils voulaient plus d'espace et différentes sortes d'espace. Le télétravail permettait de vivre ailleurs tout en conservant son emploi. À vrai dire, beaucoup de couples ont rompu aussi pendant la pandémie et cela a créé un certain type de demande de logement, ainsi que des familles qui avaient dorénavant besoin de deux logements au lieu d'un.
    Il y avait cependant une trajectoire, assez stable et rapide, d'augmentations de prix sur le marché du logement. Il y avait aussi des investisseurs institutionnels qui se plaçaient dans différents segments du marché immobilier résidentiel, dans les logements unifamiliaux et dans les grands immeubles d'habitation, notamment.
    Nous n'avons rien fait par rapport à l'investissement dans le secteur résidentiel. Quel est l'avis de la banque sur le sujet si les taux se mettent à baisser dans les 12 prochains mois? Avec une inflation qui va revenir à son taux cible — il me semble que vous avez dit d'ici la fin de 2024, mais il se peut qu'elle retombe à 3 % dans un avenir relativement proche —, est‑ce qu'il faut s'attendre à un retour à la tendance habituelle? Des taux d'intérêt plus faibles permettent aux Canadiens de faire des offres plus élevées sur le prix de logements, et ils y seront certainement encouragés par les agents immobiliers et par d'autres acteurs de ce secteur. Quelles seront les conséquences pour la crise du logement d'une nouvelle baisse des taux?
    Comme vous l'avez dit, plusieurs éléments influent sur la dynamique du marché du logement, dont les faibles taux d'intérêt. La plupart des personnes qui achètent un logement l'achètent à crédit. Donc, lorsque les taux d'intérêt sont faibles, elles peuvent acheter une plus grande maison.
    Il y a eu une augmentation importante pendant la pandémie. Comme vous l'avez fait remarquer, la demande a évolué, tout comme le type de logement que les Canadiens recherchaient et, pour revenir à la question précédente que m'a posée M. Chambers, il y a certainement eu l'effet de l'immigration sur le logement.
    La constante dans tout cela est que l'offre de logements est insuffisante. C'est une loi fondamentale de l'économie: si la demande est supérieure à l'offre, il y aura des pressions sur les prix.
    Nous devons, à long terme, régler la question de l'offre de logements. Ce sera un des éléments les plus importants pour soulager les pressions. Il est encourageant de voir différents ordres de gouvernement mener différents programmes pour améliorer l'offre, mais la banque attire l'attention sur la question depuis très longtemps maintenant.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Blaikie.
    Nous passons à présent aux conservateurs.
    La parole est à M. Morantz pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur le gouverneur, j'ai regardé avec plaisir une entrevue avec Derek Holt sur CTV ce week-end, et il a dit quelque chose d'intéressant que je n'avais pas entendu dans la bouche d'un économiste auparavant. Je vais vous lire ses propos. Il a déclaré que les dépenses publiques « alimentent fortement l'inflation » et que « nous avons augmenté les dépenses publiques fédérales annuelles d'environ 105 milliards de dollars par an en comparaison de l'année financière juste avant la pandémie, et que ce chiffre passera à environ 170 milliards de dollars de plus par an, dans cinq ans, que ce que les gouvernements dépensaient avant la pandémie. Et nous savons que cela contribue à l'inflation. » Il a ensuite dit ceci: « Cela représente probablement au moins un point de pourcentage des relèvements de taux de la Banque du Canada et probablement plus. »
    Êtes-vous d'accord avec ce qu'il dit?
    Eh bien, notre propre analyse... Non, je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'il dit.
    Les dépenses publiques contribuent à la croissance, cela ne fait aucun doute. Leur augmentation correspond plus ou moins à la croissance potentielle de l'économie, soit de 2 % à 2,5 %. Le potentiel est de 2 %. La hausse des dépenses est donc légèrement supérieure à la croissance potentielle. Cependant, pour autant que nous puissions bien mesurer ces choses, elle correspond, grosso modo, au potentiel. Elle ne contribue donc pas au ralentissement actuel de la croissance. Elle ne soulage pas les pressions...

  (1225)  

    Oui, vous avez déjà avancé cet argument.
    ... inflationnistes, mais elle n'empêche pas le recul de l'inflation.
    Monsieur le gouverneur, j'allais justement vous interroger sur cet argument, mais comme vous l'avez présenté plus tôt, je vous ai interrompu. Veuillez m'en excuser. Mon temps de parole est limité.
    Ce que vous dites, essentiellement, c'est que les dépenses publiques n'aggravent pas le problème en ce moment, mais n'arrangent pas les choses non plus. Il me semble que les politiques budgétaires et monétaires devraient agir de concert. Dans notre dernière discussion, vous avez dit avoir l'assurance que le gouvernement ne comptait pas travailler en désaccord avec vous. Nous avons maintenant des économistes crédibles comme M. Holt qui disent que les dépenses publiques contribuent directement aux taux d'intérêt élevés.
    Vous avez dit que l'inflation baisse, mais pas encore assez. Il me semble que vous avez déclaré qu'il reste du chemin à parcourir et que les taux d'intérêt pourraient grimper encore plus.
    Je vous repose la question. Vous répétez que la politique budgétaire ne relève pas de votre responsabilité, mais elle influe sur votre travail. Vous devez avoir un avis sur le sujet.
    Elle influe sur notre travail. Nous en tenons...
    Les dépenses publiques ont-elles une incidence sur les taux d'intérêt?
    Elles influent sur notre travail...
    Ont-elles une incidence sur les taux d'intérêt?
    ... et nous en tenons compte pour faire notre travail.
    Il y a deux ou trois choses que je peux dire par rapport à ce que nous avons à l'esprit en ce qui concerne les prévisions.
    Plusieurs gouvernements dans le pays ont pris différentes mesures pour protéger les Canadiens des effets d'une forte inflation. Sur ce front, je pense que les conseils du FMI sont très sensés lorsqu'il dit que ces programmes devraient être ciblés et temporaires.
    Qu'est‑ce que j'entends par « ciblés »? J'entends ciblés sur les personnes les plus vulnérables. Ce sont les personnes qui sont le plus touchées par l'inflation. Quant à « temporaires », comme nous l'avons dit, l'inflation recule. Or, avec le recul de l'inflation, nous n'aurons plus besoin de ces programmes. Je souscris à ce genre de conseils...
    Je suis désolé, monsieur le gouverneur. J'essaie d'en venir à une chose. Ce qui m'intéresse vraiment, c'est de savoir si les dépenses publiques, dont il est établi qu'elles sont inflationnistes, ont eu une incidence sur le taux d'intérêt de la banque. Autrement dit, est‑il plus élevé qu'il ne l'aurait été sans les dépenses d'un gouvernement prodigue?
    Ce devrait être une question assez simple pour un économiste.
    Écoutez, selon le cours Économie 100, si la croissance de la consommation était plus forte, les dépenses publiques plus élevées, les investissements plus solides et les exportations nettes plus dynamiques, l'économie connaîtrait une plus forte croissance, il y aurait plus de pressions inflationnistes, plus d'inflation et il faudrait que les taux d'intérêt soient plus élevés pour la faire baisser, et tous ces facteurs valent dans l'ordre inverse. Oui, les dépenses publiques alimentent nos projections. J'ai expliqué comment elles sont prises en compte et ai décrit ce qui en est l'effet net à notre avis.
     Pour conclure, je dirai que si les dépenses publiques sont proportionnelles au potentiel de production, cela revêtira une certaine importance... Si les dépenses publiques commencent à augmenter ou augmentent encore plus et dépassent largement le potentiel de production, elles stimuleront l'économie au‑delà de sa croissance tendancielle, ce qui ne facilitera pas la réduction de l'inflation. Cela posera problème.
    Vous pouvez poser une dernière question.
    Il me reste quelques secondes.
     Je vais passer à un autre sujet qui a trait à l'écart entre le taux de financement américain à un jour et le taux de financement canadien à un jour. Je sais que vous avez dit que l'inflation diminue et que vous vous réservez le droit d'augmenter les taux d'intérêt, cela est indéniable, mais s'il y a un trop grand écart entre le taux canadien et le taux américain, cela peut devenir inflationniste en soi. Cela affecterait le taux de change entre le Canada et les États-Unis.
     Comment gérer une telle situation? Craignez-vous d'être contraints d'augmenter encore les taux d'intérêt tout bonnement parce que c'est ce que font les Américains?
    Répondez brièvement, s'il vous plaît.
    Je vais faire de mon mieux.
    Tout d'abord, l'avantage pour le Canada d'avoir sa propre politique monétaire est que cela lui permet d'adapter cette politique à la conjoncture qui prévaut. Un taux de change flexible nous permet d'adapter notre politique monétaire à la situation qui prévaut au Canada. L'inflation au Canada est un peu plus faible qu'aux États-Unis. Nous n'avons pas eu à augmenter les taux aussi fortement qu'eux.
     Oui, cela entraîne des conséquences sur le taux de change. Je pense que le marché a assez bien digéré cet écart de taux. Je pense que le marché s'attend à un différentiel de taux à l'avenir. Dans une large mesure, cela est déjà intégré dans le taux de change, encore que marginalement, et si le taux de change faiblit, cela entraînera un taux d'inflation importée plus élevé. C'est un paramètre dont nous devons tenir compte quand nous fixons nos propres taux d'intérêt.

  (1230)  

    Merci.
    Merci, monsieur le député Morantz.
     C'est maintenant au tour de la députée Chatel de terminer ce tour.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le gouverneur, d'être avec nous aujourd'hui. Je vous félicite pour votre excellent travail. La Banque du Canada est une institution vraiment très importante. Son indépendance est très appréciée. Comme nous pouvons le constater, vos politiques commencent à porter des fruits.
    Je vais revenir à ce que disait mon collègue tout à l'heure, parce que j'aimerais, moi aussi, comprendre la résilience économique du Canada. J'ai consulté récemment le rapport du Fonds monétaire international, qui fait des prédictions économiques pour plusieurs pays. On y note que le Canada, encore une fois, s'en sortira mieux que prévu par rapport aux pays qui lui sont comparables.
    Vous avez signifié votre acquiescement à mon collègue, mais sans expliquer ce qui nous rend un peu uniques dans cette situation. Quels sont les facteurs qui y contribuent? Est-ce le fait que nous attirons des talents, ou encore est-ce en raison de nos ressources naturelles, de la stabilité de notre économie ou de notre cote de crédit AAA?
    Qu'est-ce qui explique que nous nous en sortons mieux que d'autres pays?
    Je suis revenu la semaine dernière, après avoir assisté à des réunions du FMI. Vous avez raison, ses prévisions pour le Canada sont proches des nôtres, voire un peu plus élevées. Il prévoit un taux de croissance de 1,5 % pour cette année et l'année prochaine, ce qui est un peu plus élevé que dans nos prévisions.
    Pour ce qui est des facteurs, je pense que vous en avez souligné plusieurs qui sont importants. Nous avons une économie diversifiée, qui comprend un secteur manufacturier, un secteur de services, ainsi que les produits de base. Notre population est très bien instruite et elle compte beaucoup de talents. Le taux de croissance de notre main-d'œuvre est plus élevé que celui de plusieurs autres pays du G7, ce qui s'explique par le fait que nous avons ici plus d'immigration que dans plusieurs autres pays.
    Nous avons effectivement plus d'avantages. Cela dit, il est toujours bon d'utiliser ses avantages tout en s'attaquant à ses faiblesses.
    Merci beaucoup.
    Vous avez dit à d'autres occasions que les systèmes financiers, les systèmes bancaires mondiaux, étaient soumis à des tensions. Or, il y a dans ma circonscription des citoyens qui sont préoccupés par la situation. Nous voyons ce qui se passe dans le système bancaire international, notamment aux États‑Unis, et nous nous demandons quelles répercussions cela pourrait avoir sur le système bancaire canadien. Nous savons que nous avons de bonnes institutions et qu'elles sont solides. Par contre, comme nous devons face à plusieurs crises, j'aimerais savoir un peu quelle est votre réflexion à ce sujet.
    Les effets des problèmes qui ont cours aux États‑Unis et en Suisse sont minimes ici, au Canada. Comme je l'ai dit plus tôt — c'était en réponse à une question de M. Ste‑Marie, je crois —, notre système bancaire national est solide. Pendant la crise financière mondiale de 2008‑2009, il n'y a eu aucune faillite parmi les banques canadiennes. Or, le système est même encore plus fort qu'il ne l'était, parce que les fonds propres et les liquidités ont encore augmenté depuis cette époque.
    On peut donc dire, en effet, que le système est stable et fort au Canada. Il est toujours important que les banques gèrent les risques. Il est également important d'avoir un bon système de supervision, ici, au Canada. Cela devrait être maintenu. Aux États‑Unis et en Suisse, la réponse des autorités a été très rapide et assez forte, ce qui a eu pour effet de stabiliser le système mondial. D'autres événements sont toujours possibles, c'est pourquoi il est important que nous soyons préparés.

  (1235)  

[Traduction]

    Merci, madame Chatel. Vous avez quelques secondes pour formuler un commentaire, puis nous passerons au dernier tour.
    Vous avez la parole.
    Je dirai rapidement que l'on entend souvent dire que les dépenses peuvent créer davantage d'inflation si l'on donne de l'argent à ceux qui en ont besoin. Pour moi, réduire les impôts revient au même. C'est juste une façon indirecte de donner plus d'argent aux gens, surtout s'ils appartiennent aux classes supérieures. C'est ainsi qu'il y a plus d'argent pour la consommation, ce qui stimule aussi l'inflation.
    Merci encore, madame la députée Chatel.
     Chers collègues, je ne fais que vérifier l'heure, comme nous le faisons au sein de ce comité. Comme nous n'avons pas le temps de faire un tour complet, nous allons répartir le temps entre tous les partis. Nous commencerons par les conservateurs, qui auront jusqu'à cinq ou six minutes. Vous pouvez également répartir ce temps entre vous.
    Merci, monsieur le président.
     Monsieur le gouverneur, dans le rapport sur la politique monétaire, il y a un titre qui dit: « Les mesures fiscales contribuent à la croissance de la demande intérieure. » C'est juste une petite question: est‑ce une façon polie de dire que cela relance l'inflation?
    C'est une façon polie de dire que les mesures fiscales stimulent la demande intérieure. Cela contribue à la croissance de l'économie. Les dépenses publiques correspondent à peu près au potentiel de production. Elles contribuent à la croissance de l'économie, et non pas à son ralentissement. Comme je l'ai dit, nous avons besoin d'un certain ralentissement de l'économie pour faire baisser l'inflation.
    Merci.
     Je pense que c'est l'une des premières fois que je vous entends établir le lien entre la politique budgétaire et la politique monétaire. Je vous en remercie.
     Je voudrais poursuivre la question que j'ai posée sur l'augmentation de 30 % de la fonction publique. Je n'ai pas obtenu de réponse complète à ce sujet.
     Les consultants se voient accorder jusqu'à 21,4 milliards de dollars dans le budget. Ce chiffre est en augmentation. Nous savons que le marché du travail se resserre, comme vous l'avez si bien dit. Les pénuries de main-d’œuvre sèment le chaos un peu partout, et l'embauche coûte plus cher. Nous savons qu'il y aura beaucoup plus d'immigrants, mais il est fictif de penser que cela comblera les pénuries de main-d’œuvre que connaît le Canada, et nous ne savons pas vraiment si cela va résoudre quoi que ce soit. Nous savons que cela pourrait entraîner une pénurie de logements et des problèmes sur le marché de l'immobilier. Cela est certain.
     Seriez-vous d'accord pour dire que l'expansion de la fonction publique aggrave le resserrement du marché du travail?
    Nous ne ciblons pas chaque secteur. Nous examinons le marché du travail dans son ensemble. Je suis en train de regarder un tableau dans notre rapport sur la politique monétaire. Il y a différents secteurs publics dans ce tableau, et ce que nous voyons, c'est que les secteurs public et privé sont les plus durement touchés par la crise.
    Je pose la question parce que Mme Rogers, dans une réponse préalable, a dit que l'immigration aiderait à résoudre ce problème, mais il ne semble pas que vous partagiez son avis.
    L'immigration aidera incontestablement.
    Je pense que vous avez raison de dire que les différents secteurs ont des résultats différents.
    L'immigration contribuera à atténuer les pressions sur le marché du travail, mais comme l'a souligné Mme Rogers, si vous avez une économie qui part d'une demande excédentaire et que vous ajoutiez de nouveaux travailleurs, ces derniers contribuent à accroître l'offre, mais aussi la demande parce qu'ils ont besoin de logements et qu'ils font des achats. Si l'on part d'une demande excédentaire et que l'on augmente à la fois l'offre et la demande, on demeure en situation de demande excédentaire. La politique monétaire a encore du chemin à faire pour réduire cette demande. L'augmentation de l'immigration signifie que notre économie globale peut croître plus rapidement sans créer de pression inflationniste, mais elle ne soulage pas à elle seule l'excès de demande dans l'économie.
    Je vous remercie.
     Je vais poursuivre dans cette même veine. Je voudrais parler du logement.
     Nous savons que le gouvernement prévoit d'accueillir plus d'un million d'immigrants — 500 000 travailleurs réguliers et le reste, des travailleurs étrangers temporaires et des étudiants. Le budget de 2023 prévoit 1,5 milliard de dollars pour créer 4 500 places et 4 milliards de dollars supplémentaires pour 100 000 places. Nous n'avons déjà pas suffisamment d'endroits où vivre. Dans quelle mesure pensez-vous que l'écart entre ces deux plans sera inflationniste?

  (1240)  

    Très rapidement, si vous examinez nos propres projections, le marché du logement s'est considérablement fragilisé, ce qui reflète en grande partie les taux d'intérêt plus élevés et, dans une certaine mesure, le fait qu'à mesure que les gens émergeaient de la pandémie de COVID, ils ne voulaient pas tous rester enfermés chez eux et se sont mis à sortir un peu plus. Il est certain que la hausse des taux d'intérêt a eu un effet modérateur assez appréciable sur le secteur du logement.
     Les prix des logements sont à la baisse au niveau national. Ils ont reculé d'environ 15 %. Nous nous attendons à ce que le marché du logement reste modéré, mais la seconde moitié de l'année, il devrait probablement recommencer à augmenter. L'une des raisons est précisément celle que vous avez citée. Nous avons des taux d'immigration plus élevés, qui assurent en quelque sorte le soutien de la demande...
    Mme Marilyn Gladu: C'est une autre pression.
     M. Tiff Macklem: ... et on en revient à la question de l'offre.
    J'ai une autre question à vous poser. Vous avez dit que la croissance des salaires devrait être de 4,5 % tandis que faiblit la croissance économique. J'aimerais connaître votre point de vue sur les négociations collectives en cours dans tout le pays et sur la façon dont elles risquent d'affecter l'inflation et les taux d'intérêt.
    Vous ne serez pas surpris d'apprendre que nous ne parlerons pas des négociations collectives individuelles. Celles‑ci se déroulent entre les employeurs et leurs employés. Ce que je dirai — et je le répète en fait depuis six mois aux entreprises, aux travailleurs, aux gouvernements, aux Canadiens, à tous ceux qui veulent bien m'entendre — c'est qu'il faut s'attendre à une baisse de l'inflation. L'inflation est en train de baisser. Elle était de 4,3 % ce matin. Nous pensons qu'elle sera de 3 % d'ici l'été et de 2,5 % d'ici la fin de l'année; ainsi, quel que soit le type de contrat que vous signez, vous devez vous attendre à une baisse de l'inflation.
    C'est une excellente nouvelle.
     En ce qui concerne le comportement des entreprises en matière de fixation des prix, pensez-vous que le gouvernement du Canada pourrait faire quelque chose pour encourager les bons comportements afin de minimiser les pressions inflationnistes?
    Il y a certainement des questions de concurrence, et nous allons laisser au Bureau de la concurrence le soin d'examiner les questions de concurrence.
     À notre avis, nous devons mieux équilibrer l'offre et la demande, car tant que la demande sera supérieure à l'offre, il sera trop facile pour les entreprises de répercuter les hausses des prix sur les consommateurs. Elles n'ont pas à craindre de perdre des clients.
     Nous surveillons de près le comportement des entreprises en matière de fixation des prix. Celui‑ci commence certainement à se normaliser, mais nous n'en sommes pas encore là. Nous nous sommes engagés à rétablir la stabilité des prix, car lorsque les prix sont stables, les forces concurrentielles sont plus grandes. Si tout le monde s'attend à ce que l'inflation soit faible et se stabilise, lorsqu'une entreprise augmente ses prix, les clients le remarquent et disent: « J'irai faire mes achats ailleurs. » Les entreprises le savent et hésitent à répercuter les fortes hausses des prix. La stabilité des forces concurrentielles s'en trouve renforcée. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous devons revenir à notre objectif en matière d'inflation.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie.
     Merci, madame la députée Gladu, et bienvenue dans notre comité.
     La parole est au député Baker.
    Merci infiniment, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec M. Beech.
     Monsieur Macklem et madame Rogers, je vous remercie beaucoup d'être ici une fois de plus et de tout le travail que vous avez fait pour essayer de vous attaquer à ce qui, pour la plupart de mes électeurs, a été leur plus grand défi et leur priorité numéro 1: l'augmentation du coût de la vie et le défi de l'accessibilité qui en résulte. Je vous remercie de votre leadership et de votre travail à cet égard.
     Monsieur le gouverneur, si vous le permettez, j'aimerais commencer par résumer, pour les téléspectateurs qui n'ont pas pu suivre l'intégralité de cette audience, quelques éléments clés de ce que vous avez dit. N'hésitez pas à me faire savoir si je me trompe ou si j'interprète mal ce que vous avez dit.
     L'inflation au Canada a atteint un sommet d'environ 8,1 % l'été dernier. D'après les chiffres d'aujourd'hui, nous avons maintenant un taux d'inflation annuel d'environ 4,3 %. Vous prévoyez que l'inflation sera de 3 % cet été, de 2,5 % à la fin de l'année et qu'elle atteindra votre objectif de 2 % à la fin de 2024.
     En ce qui concerne le taux de chômage, nous sommes actuellement à un niveau historiquement bas d'environ 5 %, lequel devrait persister. Bien qu'il puisse varier légèrement, vous ne vous attendez pas à de fortes augmentations du chômage.
     En ce qui concerne la croissance des salaires, nous prévoyons qu'elle restera forte, du moins à court terme, et vous prévoyez que l'économie poursuivra sa croissance.
     Est‑ce un résumé assez juste de ce que vous avez dit aujourd'hui?

  (1245)  

    Oui. La seule chose que j'ajouterais, cependant, c'est que nous avons besoin d'une certaine modération dans la croissance des salaires. Il faut que les prix des services baissent pour que ces prévisions d'inflation se matérialisent.
    J'ai remarqué que vous étiez membre du conseil d'administration de la Banque Scotia. Des années avant cela, j'étais banquier d'affaires à la Banque Scotia. Je ne vous blâmerai pas pour tous les prêts que j'ai proposés à l'interne de la banque et qui ont été refusés à mes clients, mais je pense qu'en tant que personne qui a travaillé dans la gestion des risques et qui connaît bien ce domaine, vous pouvez apprécier, tout comme je peux le faire en tant que banquier ayant essayé d'accorder des prêts à des clients, l'impact que les taux d'intérêt ont sur les coûts d'emprunt.
     C'est l'une des questions que me posent souvent mes électeurs d'Etobicoke-Centre: quelle direction prennent les taux d'intérêt? Il s'agit soit de propriétaires ou de futurs propriétaires qui cherchent à acheter une maison et qui réfléchissent à leur taux hypothécaire, soit de chefs d'entreprise qui cherchent à emprunter de l'argent pour investir dans leur entreprise et en assurer la croissance.
     Que diriez-vous aux Canadiens au sujet de l'évolution des taux d'intérêt?
    C'est toujours une question délicate, car nous prenons une décision à la fois sur les taux d'intérêt, mais nous avons relevé ces taux. L'an dernier, nous avons relevé les taux très rapidement. Pour nos deux dernières décisions, nous avons maintenu le taux directeur à 4,5 %. Nous profitons de cette pause pour évaluer si nous avons suffisamment rehaussé les taux d'intérêt pour ramener le taux d'inflation à la cible, et nous ne pouvons donc pas exclure la possibilité d'accroître davantage les taux d'intérêt pour ramener le taux d'inflation à la cible.
     L'autre élément à noter, dont nous avons discuté lors de nos récentes délibérations, est la mesure dans laquelle les taux d'intérêt pourraient devoir rester plus élevés plus longtemps, en fonction de la rapidité avec laquelle l'inflation baissera pour atteindre la cible. Au début de la journée, nous avons appris de bonnes nouvelles: l'inflation est en train de baisser. Toutefois, comme je l'ai souligné, pour qu'elle revienne à l'objectif de 2 %, d'autres éléments doivent se produire. Nous allons les suivre de près.
    Merci beaucoup de cette intervention.
     Je cède le reste de mon temps de parole à M. Beech.
    Merci, monsieur le député Baker.
     Allez‑y, monsieur Beech.
    Merci, monsieur le président.
     Chers collègues, par respect pour le gouverneur, je serai relativement bref. J'ai déjà prévenu les porte-parole de chaque parti. J'ai demandé au greffier de faire circuler l'avis de motion suivant, que j'ai fourni dans les deux langues officielles. Celui‑ci se lit ainsi:
Si une loi d'exécution du budget est déposée à la Chambre, le Comité entreprend une étude préalable de cette loi, et il invite des fonctionnaires à donner des séances d'information sur le contenu du projet de loi ainsi que le vice-premier ministre et le ministre des Finances.
    Il s'agit d'un simple avis. Je n'ai pas l'intention de présenter la motion à ce stade.
     Dans le même ordre d'idées, je rappelle à tous les membres du comité des finances que la séance d'information technique sur la LFI aura lieu ce soir. Cela devrait être amusant.
     S'il reste du temps, monsieur le président, je serai heureux de céder à nouveau la parole à M. Baker.
    C'est ainsi que vous définissez le mot amusant, M. Beech.
     Je pense que cela aura lieu à 18 heures ce soir, mesdames et messieurs les députés.
     Est‑ce exact, monsieur Beech, pour que tout le monde soit au courant?
    Oui. Tout le monde est prévenu. Cela aura lieu sans doute juste après le vote.
    D'accord. Nous vous remercions.
     Nous allons maintenant passer au Bloc, avec le député Ste-Marie, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais être certain que le temps de parole de M. Baker est bel et bien écoulé, puisqu'il a laissé le reste de son temps de parole à un autre député libéral.
    Est-ce bien cela?
    Son temps de parole est écoulé, en effet.

[Traduction]

    Le député Baker a terminé. C'est bien le cas, monsieur le député Ste-Marie.

[Français]

    D'accord.
    Je vous remercie de cette clarification, monsieur le président. Cette situation est une des joies d'être parmi vous de façon virtuelle.
    Monsieur Macklem, les récentes faillites bancaires peuvent-elles nuire au développement des technologies propres ou à celui de la finance verte?
    Je n'ai pas bien entendu la fin de la question.
    Vous voulez savoir sur quoi les faillites des banques peuvent avoir des répercussions. Est-ce bien cela?
    Oui, je parlais des répercussions que les faillites peuvent avoir sur le développement des technologies propres ou sur celui de la finance verte.
    D'accord.
    Les récents problèmes touchant les banques sont plutôt en lien avec les systèmes traditionnels. Il n'y a donc pas une grande incidence sur le plan des technologies.
    Vous avez raison de souligner que quelques-unes de ces banques, comme la Signature Bank et la Silicon Valley Bank, ou SVB, ont été utilisées par le secteur technologique. Ce qui était frappant, c'était la vitesse à laquelle les dépôts sortaient de ces banques. C'était probablement dû au fait que les clients, surtout ceux de la SVB, étaient très concentrés dans un secteur. Ils communiquaient sur les réseaux sociaux et utilisaient des systèmes bancaires numériques, ce qui a fait en sorte qu'ils ont pu retirer leurs dépôts très vite. Que les choses puissent se produire aussi vite est un aspect de cette faillite.
    Au niveau mondial, c'est un élément sur lequel se penche le Comité de Bâle, à savoir l'incidence de cette question quant aux liquidités et à leur calibrage. Cela soulève donc des questions, mais le Comité de Bâle et le Financial Stability Board, ou FSB, sont en train de les étudier.

  (1250)  

    D'accord, merci.
    J'aborde maintenant un tout autre sujet. L'économiste Anne O. Krueger, qui a travaillé à la Banque mondiale et au FMI, et qui travaille maintenant à l'Université de Stanford, s'inquiète de l'aide que le FMI et des institutions internationales apportent aux pays en développement qui sont accablés de lourdes dettes. L'émergence de la Chine comme prêteuse privée ou particulière auprès de ces pays en développement a une incidence quant au fonctionnement du financement et au soutien pour ces pays. J'aimerais avoir votre opinion sur ce phénomène.
    Selon vous, risquons-nous de voir des crises de la dette dans les pays en développement, et les institutions internationales, compte tenu de la nouvelle conjoncture, sont-elles bien préparées pour affronter ces crises?
    Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il y a des risques. Gérer les problèmes liés aux dettes souveraines, c'est toujours difficile, et il y a maintenant plus d'acteurs. La Chine est un acteur majeur. Ce que nous avons vu jusqu'à maintenant, c'est que le processus est plus lent. Cela prend plus de temps pour gérer ces situations et cela pose un risque.
    Selon notre perspective, au Canada, le FMI est une institution qui a un rôle très important à jouer, et nous travaillons fort avec lui. Il a beaucoup de facilité pour ce qui est d'aider les pays qui ont des problèmes. Je pense que ses programmes seront bénéfiques pour les pays qui en ont besoin. Je les encourage à s'adresser au FMI.
    Merci beaucoup.
    Ma dernière question porte sur un tout autre sujet.
    Dans vos analyses, modélisez-vous un effet multiplicateur des dépenses fiscales du gouvernement fédéral et des baisses d'impôt et de taxe? Si c'est le cas, cette information est-elle publique et pouvez-vous nous parler de son importance?
    Nous ne sommes pas des experts sur toutes les questions fiscales, mais nous examinons effectivement différents types de dépenses du gouvernement. Cela peut être des baisses d'impôt, des investissements dans les infrastructures, dans la santé et dans l'éducation, et ainsi de suite. Ces types de dépenses peuvent avoir divers effets multiplicateurs et, lorsqu'ils sont assez élevés, nous essayons d'en tenir compte. Nous menons quelques études sur les différents effets multiplicateurs.
    Par exemple, les investissements relatifs aux dépenses en infrastructure ont tendance à avoir un effet multiplicateur assez élevé, parce que tout l'argent circule dans l'économie et on embauche plus de gens. Lorsqu'on verse de l'argent à des personnes, l'effet multiplicateur a tendance à être moins élevé, parce qu'ils vont épargner une partie de cet argent. Nous essayons d'en tenir compte quand nous établissons nos prévisions. Il ne s'agit pas seulement de l'envergure de la détente budgétaire, mais aussi du type de paramètres utilisés.

  (1255)  

    Merci.
    Merci, monsieur Ste‑Marie.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer au député Blaikie.
     Vous serez le dernier à poser des questions au gouverneur et au premier sous-gouverneur.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Pour revenir brièvement à la question soulevée par M. Beech, je crois que nous avons évoqué à un moment donné la possibilité — et je sais que nous l'avons fait l'an dernier — d'envoyer des lettres à d'autres comités pour leur demander d'examiner certains articles de la loi d'exécution du budget. Nous ne sommes évidemment pas encore en mesure de le faire puisque le projet de loi n'a pas encore été déposé, mais je pense qu'il serait utile d'avoir un projet de lettre. Je ne crois pas que ce soit la première fois que j'évoque la question.
     Je n'ai vu aucun projet de lettre à ce jour. Je pense que si le Comité souhaite poursuivre cette stratégie cette année, nous devrions disposer d'un tel projet prochainement afin qu'il puisse faire partie de nos délibérations sur la motion de M. Beech lorsqu'il décidera de la présenter.
     Je tiens juste à ce que cela soit un point de repère pour vous, monsieur le président et monsieur le greffier. Veuillez nous faire parvenir un projet pour que nous puissions l'examiner.
    Merci, monsieur le député Blaikie.
    Je vous remercie.
     Dans ma question, nous avons parlé un peu de l'amortissement négatif qui se produit avec la prolongation des périodes d'amortissement que les banques ont instituée afin de prévenir les défauts de paiement sur les hypothèques. Je reconnais que c'est un moyen pour les banques de protéger leurs profits. Je reconnais également qu'il s'agit d'une chose très importante pour les Canadiens qui se trouvent actuellement dans une situation précaire. S'ils n'étaient pas en mesure de prolonger leur période d'amortissement, ils se retrouveraient probablement sans logement. Cela a eu un effet stabilisateur qui peut, dans une certaine mesure, aller à l'encontre de la politique monétaire de la banque, mais nous avons également constaté que la politique monétaire a permis de réduire l'inflation, en dépit du fait que cette activité est en cours. Cela représente indéniablement un avantage pour les ménages canadiens, que j'approuve sans réserve.
     L'assurance-emploi peut fonctionner de la même manière lorsque les familles canadiennes sont confrontées à des difficultés. L'étendue de l'assurance-emploi disponible peut avoir un impact sur la demande et l'offre.
     Je sais que vous ne voulez pas parler de l'assurance-emploi en tant que politique fiscale, mais je serais curieux de savoir comment la banque incorpore la suffisance de l'assurance-emploi dans ses prévisions de l'offre et de la demande du point de vue macroéconomique lorsque vous réfléchissez à l'impact des taux d'intérêt sur l'économie.
     Pourriez-vous nous donner un aperçu de la façon dont vous estimez que la politique d'assurance-emploi a une incidence sur les familles canadiennes ou sur le type d'analyse macroéconomique que vous avez?
    Je pense que vous allez être un peu déçu par ma réponse. Nous ne modélisons pas directement le régime d'assurance-emploi.
     Dans nos modèles macroéconomiques, nous modélisons la mesure dans laquelle il existe des stabilisateurs automatiques dans l'économie. Pour ce faire, nous nous basons en grande partie sur les moments où l'économie a ralenti historiquement. Dans quelle mesure les recettes publiques ont-elles diminué? De combien les dépenses publiques ont-elles augmenté? Quel en est l'effet stabilisateur automatique?
     Cela revient à prendre l'effet stabilisateur moyen que nous pouvons observer au cours de l'histoire et à l'utiliser dans nos modèles en progression. Nous n'allons pas plus loin et ne modélisons pas les différentes parties de ces stabilisateurs automatiques. Il est évident que l'assurance-emploi en fait partie, mais nous examinons en fait l'impact global.
     Pour en revenir à votre question précédente, je pense que les stabilisateurs automatiques jouent un rôle important dans l'économie. Il faut qu'ils soient efficaces. Ensuite, il y a un grand nombre de discussions épineuses sur la taille qu'il faut leur donner et sur ce même genre de question, et je vais vous laisser le soin d'aborder ces questions.
    Eh bien, je vous remercie beaucoup pour le temps que vous nous avez consacré aujourd'hui. Je crois qu'un de mes collègues vous a remercié tout à l'heure d'avoir accepté nos invitations à comparaître devant le Comité. Je me fais l'écho de cette gratitude. Je vous félicite également d'avoir prévu mon désarroi face à la réponse. Je sais que la prévision est votre métier, et nous avons été témoins de votre excellence en la matière aujourd'hui. Je vous remercie néanmoins d'avoir tenté de répondre à une question qui n'est pas vraiment de votre ressort.

  (1300)  

    Merci.
    Merci, monsieur le député Blaikie.
     Au nom de tous les membres du Comité, du greffier, des analystes et de tous les interprètes, je vous remercie d'être venus régulièrement, monsieur le gouverneur Macklem et monsieur le premier sous-gouverneur Rogers. Nous apprécions vraiment le temps que vous nous accordez et les nombreuses questions auxquelles vous avez répondu. Merci de votre témoignage et de votre aide dans le cadre de cette étude. Nous vous en sommes reconnaissants.
     En ce qui concerne la question du député Blaikie, le greffier est à la recherche du projet de lettre que nous avons envoyé la dernière fois. Nous le distribuerons à tous les membres.
     Voilà qui met un terme à la séance.
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