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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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44e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • No 034

TABLE DES MATIÈRES

Samedi 19 février 2022




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

Volume 151
No 034
1re SESSION
44e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Samedi 19 février 2022

Présidence de l'honorable Anthony Rota

    La séance est ouverte à 7 heures.

Prière


  (0700)  

[Traduction]

L'annulation de la séance de vendredi

     Avant d’aller plus loin, je tiens à faire part de ce qui s’est produit hier.
     Avec l’accord des chefs de parti et afin d’assurer la sécurité des députés et du personnel, il a été décidé d’annuler la séance de vendredi. Tôt hier, une opération policière a été lancée pour disperser la manifestation qui occupe la rue Wellington et le centre-ville depuis les trois dernières semaines.

[Français]

    Les progrès réalisés jusqu'à présent par les autorités policières en collaboration avec le Service de protection parlementaire nous permettent de reprendre nos travaux.
    Au nom de la Chambre, je tiens à exprimer notre sincère gratitude pour le dévouement et le professionnalisme des autorités policières du Service de protection parlementaire ainsi que du personnel de la Sécurité institutionnelle et de l'Administration de la Chambre. C'est grâce à leur appui que ces séances extraordinaires sont possibles.

Ordre du jour

[Ordre légal]

[Traduction]

La Loi sur les mesures d'urgence

     La Chambre reprend l'étude, interrompue le 17 février, de la motion.
     Je désire informer la Chambre que, conformément à l'ordre adopté le jeudi 17 février, la Chambre se réunit aujourd'hui uniquement en vue d’étudier la motion de ratification de la déclaration de situation de crise inscrite au Feuilleton au nom du ministre de la Sécurité publique.

[Français]

    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député d'Abitibi—Témiscamingue.
    Le débat crucial qui nous occupe n'est pas à prendre à la légère, car il découle d'un événement qui restera longtemps gravé dans les annales de la fédération canadienne, bien qu'il ne risque pas de figurer au chapitre de ses brillants exploits.
    De prime abord, je tiens à préciser que je me prononce contre l'application de la Loi sur les mesures d'urgence comme prescrite dans les décrets et particulièrement au Québec. Afin de soutenir ma position, voici ce qui est prescrit.
    Comme son nom l'indique, la Loi sur les mesures d'urgence est un outil de dernier recours qui ne peut être utilisé que lorsqu'une situation constitue une menace tellement imminente, tellement irrésistible et tellement insurmontable qu'il est strictement impossible pour le gouvernement de la contrôler sous le régime des lois en vigueur.
     L'application de la Loi a comme conséquence de permettre à l'exécutif d'imposer par décret les mesures grâce auxquelles il pourra assurer la sécurité des citoyens, l'intégrité territoriale du pays et la sauvegarde de l'ordre constitutionnellement établi. Cela peut notamment inclure l'interdiction de déplacement ou de rassemblement, la restriction de l'utilisation de certains biens désignés, la prise de contrôle de services publics, l'imposition d'amendes ou même l'emprisonnement par procédure sommaire.
    Étant donné la nature potentiellement liberticide et antidémocratique des mesures pouvant être imposées, le législateur a pris soin de préciser une liste exhaustive des situations qui peuvent justifier l'invocation de la Loi. Ainsi, les seuls et uniques motifs qui peuvent permettre au gouvernement d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence sont les suivants.
     Le premier est la survenance d'un sinistre. Il est à noter que, depuis l'existence de la Loi, aucun des épisodes d'inondations dévastatrices, de verglas hivernal ou de feux de forêt ravageurs auxquels ont fait face les Canadiens et les Québécois n'a amené un gouvernement à recourir à ces pouvoirs extraordinaires.
    Outre les catastrophes naturelles, la définition de sinistre englobe aussi les maladies. Il est particulièrement pertinent de soulever que la crise sanitaire mondiale découlant de la pandémie de la COVID‑19 n'a pas nécessité l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, bien qu'elle ait causé à ce jour plus de 35 000 morts au Canada et près de 6 millions de décès dans le monde et qu'on soit sur le point d'en souligner le funeste deuxième anniversaire. Malgré leur caractère exceptionnel, les actions qui ont été mises de l'avant afin de répondre aux besoins créés par cette crise inédite ont pu l'être sans avoir recours aux pouvoirs de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Troisièmement, l'éclatement d'une crise internationale, qu'on entend par une situation ou des actes de coercition où survient l'usage de la force entre pays peuvent constituer un motif permettant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. De même, l'entrée en guerre du Canada peut justifier que soient utilisées les mesures exceptionnelles de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Finalement, le quatrième et dernier motif prévu pour justifier qu'un gouvernement puisse s'arroger des pouvoirs exceptionnels est celui de l'état d'urgence. Le terme étant assez flou, le législateur a eu l'amabilité de définir « état d'urgence » à l'article 16 de la Loi:
    
    Situation de crise causée par des menaces envers la sécurité du Canada d’une gravité telle qu’elle constitue une situation de crise nationale.
    Pour les députés qui se demandent ce qu'est une crise nationale, l'article 3 de la Loi précise qu'une telle crise:
[...] résulte d’un concours de circonstances critiques à caractère d’urgence et de nature temporaire, auquel il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada et qui, selon le cas:
a) met gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces;
b) menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays.
    Ce n'est pas rien. Mes collègues conviendront que le libellé est très explicite quant à l'envergure des drames qui peuvent justifier l'invocation de la Loi. Que ce soit pour l'un ou l'autre des motifs mentionnés, il s'agit d'un geste extrêmement sérieux qui ne doit pas être pris à la légère par le gouvernement. Ce doit être un outil de dernier recours, un outil qu'on utilise lorsqu'on a tenté de fermer la poignée du robinet, qu'on a vidé notre coffre à outils, qu'on a fait venir le plombier et que, malgré tout cela, le robinet fuit encore.

  (0705)  

    Depuis l'adoption de la Loi sur les mesures d'urgence en 1988, il s'agit de la première fois qu'un premier ministre du Canada juge qu'il doit recourir aux pouvoirs exceptionnels qu'elle confère. Sa mouture précédente, la Loi sur les mesures de guerre, n'a été invoquée qu'à trois reprises: lors de la Première Guerre mondiale, lors de la Seconde Guerre mondiale, ainsi que lors de l'épisode d'octobre 1970, dont les séquelles ont profondément marqué le peuple québécois.
    À des fins de rigueur intellectuelle, je tiens cependant à préciser que les deux lois ne sont pas comparables et qu'il faut être prudent lorsque l'on veut comparer le tout de ce point de vue.
    La Loi sur les mesures d'urgence exige que le gouvernement démontre qu'il fait face à une situation dangereuse et urgente et qu'il lui est impossible d'y faire face en suivant les lois ordinaires. Le gouvernement n'a absolument pas fait cette démonstration dans l'énoncé des motifs qui a été remis aux parlementaires. Pire encore, il n'a même pas essayé de la faire puisqu'il est demeuré complètement silencieux sur le sujet.
    Je vais expliquer aux députés pourquoi. C'est simplement qu'il n'excite aucun motif suffisant pour justifier le recours à cette loi d'exception. Il n'existe pas de vide juridique empêchant le gouvernement de résoudre la crise d'Ottawa.
    En effet, la très grande majorité des manifestations et barrages que l'on a vus au cours des dernières semaines ont été contrôlés ou démantelés sans avoir recours aux mesures d'urgence fédérales. Les barrages de Sarnia, de Fort Érié, de Coutts et du pont Ambassador ont été levés avec succès. Tous ces postes frontaliers sont à nouveau opérationnels et les échanges avec les États‑Unis sont rétablis. Il semble donc qu'on ait réussi à mettre fin à des manifestations sans avoir recours aux pouvoirs d'exception.
    En quoi la manifestation d'Ottawa est-elle si irrépressible qu'elle ne peut être contenue par le cadre législatif actuel? Quelles sont les lois actuelles qui ne suffisent pas à résoudre la crise? En quoi ces lois ne permettent-elles pas de faire face adéquatement à la situation? Nous l'ignorons, le gouvernement ne l'a jamais dit.
    Par ailleurs, le premier ministre, avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence s'est traîné les pieds pendant deux longues semaines plutôt que de tenter de résoudre la crise. Comment peut-il clamer, après n'avoir...

  (0710)  

    L'honorable député de Windsor‑Ouest invoque le Règlement.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis désolé d'interrompre mon collègue. Je crois qu'il s'agit peut-être même d'une question de privilège.
    On a dit à tort que les échanges commerciaux qui s'effectuent par le pont Ambassador, situé dans ma circonscription, sont rétablis. Ce n'est pas normal...
    Cela relève du débat. Le député peut poser des questions.
    Des enfants n'arrivent pas à se rendre à leur rendez-vous médical...
    Cela relève du débat. Si le député souhaite poser une question, je veillerai à ce qu'il puisse le faire.
    Le député de Rimouski‑Neigette—Témiscouata—Les Basques a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, je vous remercie de me permettre de continuer après cette interruption. Comme on le sait tous, les questions et commentaires font suite aux discours des députés. Je vais donc reprendre là où j'en étais.
    Comment le premier ministre peut-il clamer, après n'avoir rien essayé du tout, qu'il est désormais nécessaire d'utiliser une bombe nucléaire législative? Que s'est-il passé entre le 11 février, où il avançait que la Police provinciale de l'Ontario disposait de toutes les ressources nécessaires pour mettre fin à la crise, et le 14 février, trois jours plus tard, alors qu'il a fait appel à une loi n'ayant jamais été invoquée en plus de 35 ans.
    Pourquoi le premier ministre a-t-il élargi l'application de la Loi à l'ensemble du territoire canadien, alors que sept des premiers ministres des provinces et du Québec se sont ouvertement prononcés contre son application sur leur territoire?
    Le 15 février, l'Assemblée nationale du Québec s'est exprimée à l'unanimité par une motion qui précise « [...] qu'aucune situation d'urgence ne justifie actuellement l'utilisation au Québec de mesures législatives spéciales » et qui « demande au gouvernement canadien de ne pas appliquer la Loi sur les mesures d'urgence sur le territoire québécois ». Cela peut être difficilement plus clair. Comment le premier ministre a-t-il pu choisir d'aller à l'encontre d'un tel consensus du Québec et des provinces?
    J'aimerais terminer en ajoutant que je suis de tout cœur avec les citoyens d'Ottawa et de Gatineau, qui sont privés de la jouissance de leur quartier, de leur ville et de leur quiétude depuis maintenant plus de trois semaines. Ayant moi-même passé ces dernières semaines dans la région, j'ai pu directement être témoin de l'ampleur des désagréments causés par les manifestations illégales à l'ensemble de la population.
    Il est temps de mettre fin au siège de la ville d'Ottawa. Les citoyens doivent retrouver leur vie. Pour cela, le Bloc québécois comprend qu'il est nécessaire que des mesures soient prises, mais ne croit pas qu'il est justifié d'utiliser une telle bombe législative. La Loi sur les mesures d'urgence est conçue pour pallier l'insuffisance des lois existantes, pas l'insuffisance de leadership du gouvernement et de son premier ministre.

  (0715)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, le député a tout simplement tort. Comme les conséquences sur le commerce international s'élèvent à près d'un demi-milliard de dollars par jour, que le centre-ville est bloqué, etc., et que le chef intérimaire de la police d'Ottawa dit que la Loi sur les mesures d'urgence est très utile, j'oserais dire que le député a tort.
    Ne réalise-t-il pas que la grande majorité des Canadiens reconnaissent qu'il est important de rétablir l'ordre pour les habitants d'Ottawa, et que montrer au reste du pays que le gouvernement fédéral, en collaboration avec la municipalité et la province, peut faire respecter la primauté du droit est un aspect important de la démocratie?

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Winnipeg‑Nord de sa question.
    J'ai été très clair dans mon discours: il manque un motif pour mettre en place la Loi sur les mesures d'urgence. Le gouvernement n'a même pas fait la démonstration du motif.
    Comment a-t-on pu lever les barrages à la frontière à Fort Érié et au pont Ambassadeur sans la Loi sur les mesures d'urgence?
    Pourquoi Ottawa a-t-il présentement besoin de la Loi sur les mesures d'urgence? Quel est le vide juridique?
    Si quelqu'un du côté du gouvernement pouvait répondre à ces questions aujourd'hui, on réussirait peut-être à me convaincre.
    La police avait tous les moyens et les outils nécessaires. Même le premier ministre l'a mentionné.

[Traduction]

    Monsieur le Président, le député du Bloc a parfaitement décrit pourquoi il s'agit d'une ingérence coûteuse de la part du gouvernement. Une des choses qui me préoccupe beaucoup, et je crois que la vice-première ministre l'a confirmé l'autre jour, c'est que le gouvernement a l'intention d'imposer certaines des mesures contenues dans la Loi sur les mesures d'urgence — le suivi financier de particuliers, par exemple — de façon plus permanente. Cela pose problème, pas seulement ici, à Ottawa, mais partout au pays, y compris au Québec.
    Est-ce que le fait qu'elle parle d'un suivi plus permanent des comptes bancaires et des transactions de Canadiens est troublant? Ce devrait l'être.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.
    La vice-première ministre a mentionné que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence lui permettra de geler les comptes des manifestants ou le financement illégal.
    Pourtant, c'est faux. Il existe déjà une loi permettant de le faire. Il s'agit de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Cette loi prévoit déjà que les institutions financières puissent geler les fonds provenant des fruits d'activités criminelles ou qui servent à financer une activité criminelle.
    On essaie de nous faire croire des choses alors qu'il existe déjà des lois. C'est complètement faux, ce que le gouvernement dit en ce moment.
    Il n'est pas possible d'utiliser la Loi sur les mesures d'urgence sans évoquer les motifs obligatoires prévus par la Loi.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis désolé de mon intervention précédente. Je voulais être certain que le député avait l'information juste et qu'il ne propageait pas des renseignements erronés. Le pont Ambassador est libre d'accès, mais pas dans toute sa capacité. Les barrières sont maintenant dans ma collectivité, le long des rues secondaires, afin de sécuriser la circulation sur ces 14 kilomètres.
    Non seulement les entreprises, les véhicules d'urgence ainsi que les activités quotidiennes et les emplois sont perturbés, mais la circulation est plus lente, ce qui incommode beaucoup d'autres personnes. Aujourd'hui, et tous les jours depuis le début des manifestations, des enfants manquent leur rendez-vous chez le médecin en raison des barrages et des diverses répercussions qui découlent des autres obstacles.
    Le député a-t-il quelque chose à dire aux familles qui doivent repousser leurs rendez-vous médicaux à cause de ces nouveaux obstacles, alors que ces rendez-vous avaient déjà été repoussés en raison de la pandémie? Cela les empêche de se rendre à leurs rendez-vous médicaux. C'est un fait. J'aimerais que le député s'adresse maintenant à ces Canadiens qui ne peuvent pas se rendre à leurs rendez-vous médicaux ni à ceux de leurs enfants.

  (0720)  

[Français]

    Monsieur le Président, mon collègue a évoqué les faits. J'aime beaucoup les faits, mais j'aime particulièrement les lois.
    Il existe déjà des lois en vigueur qui permettent de lever les barricades. Ce n'est pas la Loi sur les mesures d'urgence qui vient permettre de lever des barricades tout d'un coup. Les forces policières ont déjà les outils et les compétences pour le faire.
    Au Bloc québécois, on comprend qu'une loi puisse être insuffisante. On peut ensuite la modifier par décret. Or ce n'est pas vrai que l'utilisation de la Loi sur les mesures d'urgence permet d'arriver avec une baguette magique et de régler toute la situation.

[Traduction]

    Nous avons quelques jours de débats devant nous. Je constate qu'un certain brouhaha règne déjà à la Chambre. On dirait bien que toutes les personnes présentes sont d'attaque après une première tasse de café. Cependant, je veillerai au respect des droits de tous les députés dans cette enceinte. Je veux que tous les députés qui le souhaitent puissent prendre la parole et que l'on puisse entendre non seulement les questions, mais aussi les réponses.
    Nous reprenons le débat. Le député d'Abitibi—Témiscamingue a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de me joindre à ce débat sur la légitimité d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Il s'agit d'un sujet fort important et urgent. Je sais que les députés ont bien hâte d'entendre mon point de vue. Je les remercie d'être ici d'ailleurs.
    Je tiens d'abord de saluer le travail des forces policières, leur professionnalisme et les interventions qu'elles ont faites hier. Je tiens aussi à remercier les citoyens de l'Abitibi‑Témiscaminque de la résilience dont ils ont fait preuve et à saluer le courage du personnel de la santé, qui travaille fort pour nous tous depuis de nombreux mois déjà. Je remercie également le personnel des services de garde et du réseau de l'éducation, qui ont bravé ce virus tous les jours et qui permettent aux enfants d'apprendre à devenir des grands.
    Je pourrais énumérer plein d'autres personnes, qui ont travaillé fort pour faire rouler notre économie locale, dont je suis fier. Je me fais porte-parole d'une région ressource pour qui la capacité de se relever de ces soubresauts de l'économie a toujours été valorisée et qui a fait preuve d'innovation. C'est dans cette voie que nous devons nous engager.
    Je suis sensible à la situation particulière qui est imposée chez nous, comme dans toutes les régions du Québec et du Canada. Cette pandémie a certes bien des malices que l'on a découvertes et qu'on a tenté de contrôler par des mesures qui ont restreint nos libertés, mais tout le monde sait que ces mesures sont temporaires. Les gens le savent tellement bien qu'ils sont venus nous le dire de bien des façons. Nous espérons que tout cela se terminera sans violence.
    Présentement, nous débattons ici de la Loi sur les mesures d'urgence pour dire au premier ministre, aux députés libéraux et aux députés néo-démocrates que nous ne voulons pas l'application de cette loi. Ce premier ministre l'a invoquée pour de mauvaises raisons. Premièrement, il n'a pas réussi à nous convaincre que cette situation est dangereuse et urgente, partout au Canada. Le danger est en Ontario, à Ottawa. Ce sont les provinces qui ont le pouvoir et elles ne veulent pas l'application de cette loi sur leur territoire. Deuxièmement, on dit qu'il est impossible de faire face à la situation en mettant en application les lois déjà existantes. C'est faux.
    J'espère que tous les députés comprennent bien à quel point le recours à la Loi sur les mesures d'urgence est lourd de conséquences, mais j'en doute. La Loi donne au gouvernement fédéral des pouvoirs spéciaux pour faire face à des situations urgentes et critiques. Autrement dit, il s'agit de situations qui ne peuvent être réglées que par l'octroi d'encore plus de droits du gouvernement fédéral, il a le droit de le faire seulement si les autres moyens ont été épuisés. Cela inclut le dialogue. Cette loi doit être utilisée avec parcimonie. Nous avons le privilège de décider si le moment est opportun. Nous avons l'obligation de soupeser chacune des exigences de la Loi.
    Le premier ministre du Canada a fui ses responsabilités et il a de toute évidence manqué de leadership par ses agissements et ses mauvaises décisions. Par sa faute, il a mis de l'huile sur le feu et s'est fait comme ennemis les gens de la population qui sont les plus à droite, et même ceux à gauche. C'est une grave erreur de mettre tous les manifestants dans le même panier à ce stade-ci.
    Toutes les analyses et les spécialistes en gestion de crise s'entendent qu'il est prématuré et inapproprié d'invoquer cette loi, mais le gouvernement n'entend pas reculer et joue les gros bras. Comme le dit l'expression, le « diable est dans les détails ». C'est relativement assez gênant pour le premier ministre libéral de faire, à ce stade-ci, l'aveu qu'il aurait fait fausse route et qu'il paie le prix de ses mauvais choix. J'espère qu'il réfléchit sérieusement à son avenir.
    Maintenant, à quoi s'attendre des provinces? Pour être clair, je pense que le gouvernement du Québec a fait son devoir. Au Québec, on ne veut pas donner de pouvoir à un premier ministre qui s'est défilé de ses responsabilités. Le Bloc québécois fera une lutte farouche à une loi qui apparaît comme une opération de camouflage d'un échec politique du premier ministre. Nous voterons manifestement contre la Loi sur les mesures d'urgence. Nous ne voulons pas de cette loi sur le territoire du Québec, point à la ligne.
    L'utilisation de cette loi doit être mieux et clairement justifiée devant les députés et les sénateurs. L'efficacité de cette mesure est discutable. Il est maintenant très clair aux yeux de tous que le premier ministre a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence non pas pour mettre un terme aux manifestations qui bloquent le centre-ville d'Ottawa et les postes frontaliers du pays, mais pour rétablir la confiance de la population à son égard. Il en fait une utilisation politique, encore une fois.
    Est-ce que le gouvernement peut faire ce qu'il veut? La réponse est non. La loi impose des limites. Le gouvernement est aussi limité par le Parlement, heureusement. La Chambre des communes ou le Sénat peut mettre fin à cette déclaration.
    De plus, le Parlement examine, tous les deux jours, les décisions prises par le gouvernement fédéral. Le Parlement peut alors les modifier ou les supprimer. Or, à quoi doit servir une telle loi? La Loi sur les mesures d'urgence impose des mesures exceptionnelles. Elle vise à donner au gouvernement la légitimité de dicter les façons d'agir à l'intérieur d'un territoire défini et d'établir l'ordre qui existait avant la crise. Il y a donc un début et une fin.

  (0725)  

    Il y a des personnes qui perturbent la situation ou qu'il est prouvé qu'elles sont à la source des perturbations; le gouvernement peut leur imposer des peines sévères pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement. L'assentiment des gouvernements provinciaux est nécessaire.
    La Loi sur les mesures d'urgence permet de limiter ou d'interdire les déplacements vers une destination en provenance d'un endroit en particulier; limiter ou interdire des rassemblements qui pourraient troubler la paix; désigner et aménager des lieux protégés; et prendre contrôle des services publics.
    Vers la fin des années 1980, le gouvernement a réfléchi à abroger la Loi sur les mesures de guerre pour permettre un débat sur les mesures d'urgence. Jamais il n'aurait cru qu'un premier ministre l'aurait invoqué à moins d'une situation exceptionnelle et que tous les autres moyens auraient été épuisés. Les députés à la Chambre avaient prévu tellement de conditions, incluant un débat à la Chambre et un débat au Sénat, pour s'assurer qu'en aucun moment le gouvernement serait tenté de s'approprier des pouvoirs de la sorte pour des raisons politiques.
    C'est épouvantable, le gouvernement libéral a impunément mis de côté l'esprit de la Loi pour servir ses intérêts et éviter d'assumer ses mauvaises décisions. C'est vraiment désolant. Cela me semble une évidence, le seuil nécessaire pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence n'a pas été, à mon avis, atteint. Le NPD et les libéraux font fausse route et font de l'aveuglement volontaire délibéré et s'abstiennent de vérifier les faits. C'est irresponsable.
    On ne doit pas tourner le dos aux gens qui nous ont donné le privilège de les gouverner. Ce sont ces personnes qui sont venues nous dire, dans les rues, essentiellement, qu'elles ne sont pas bien et qu'elles veulent un retour de leurs droits d'avant la crise sanitaire. Le risque d'avoir des débordements était prévisible, et l'inaction des services publics a contribué grandement à ce qui s'apparente maintenant à une situation de siège autour de la Colline du Parlement.
    Comment peut-on invoquer la Loi sur les mesures d'urgence alors qu'on évite de prendre position et que le gouvernement s'est caché de ses responsabilités.
    Nous avons demandé au gouvernement fédéral de nous présenter un plan. Les manifestants canadiens et québécois nous disent qu'ils sont tannés et qu'ils ont hâte de retrouver un semblant de vie normale. Cela s'en vient, le gouvernement du Québec a fait des annonces.
    Le premier ministre agit comme s'il n'écoutait pas les conférences de presse des provinces. Je crois sincèrement qu'il aurait avantage à le faire. Il réaliserait bien des choses en commençant par le fait que tout le monde est d'avis que c'est une bien mauvaise idée à ce stade-ci. S'il s'était mouillé depuis le début de cette crise, il réaliserait que les réactions sont mitigées au sein de la population. Je veux que mes concitoyens sachent que nous considérons les nombreux courriels que nous recevons à nos bureaux. Les gens ont exprimé plein de choses, allant de l'excitation, du soulagement, de l'indifférence, des doutes à la déception.
    Les pouvoirs que le gouvernement libéral s'est donnés ne sont même pas appropriés. Le fédéral ne devrait pas avoir le droit de geler des comptes bancaires avant même d'avoir déposé un plan comprenant un possible retour à un environnement beaucoup moins contraignant, comme l'ont fait les autres gouvernements à ce jour.
    Concrètement, la pandémie a fait des victimes, surtout chez les aînés. Des gens ont vu leur pouvoir économique réduit, les entreprises de tous les secteurs ont dû s'ajuster. Pour arriver, on essaie des choses concernant les mesures de santé et l'encadrement de ce qui est demandé. Cela se comprend. La pandémie a frappé tous les Canadiens et tous les Québécois.
    La clé reste toujours dans l'information, ce qu'on communique aux gens. Cela cause des retards et de l'incompréhension dans la population, qui est à la recherche d'informations de qualité. Le doute est légitime. Le dire et le manifester est légitime. L'insurrection et l'abdication ne sont pas légitimes. Le gouvernement avait la responsabilité de répondre à nos questions et de donner de l'information sur ce qui est exact. S'il l'avait fait au moment opportun, on n'en serait pas là. Lorsque des mesures sont nécessaires et pertinentes et que des changements dans la liberté des gens sont nécessaires, il faut s'exprimer à ces gens et à notre monde.
    Depuis trois semaines, le premier ministre ne viendra pas nous dire qu'il n'avait pas de ressources disponibles. Il sait fort bien qu'il y avait des ministres qui étaient capables de libérer des ressources pour venir en aide au gouvernement provincial de l'Ontario et des services policiers d'Ottawa. Les services de police d'Ottawa ont fait une demande afin d'obtenir des ressources additionnelles pour gérer les convois, mais la réponse du gouvernement fédéral, c'est que les agents de la GRC étaient autour de la Colline, simplement.
    Est-ce que c'était vraiment nécessaire? Est-ce qu'il aurait été plus approprié de les mettre ailleurs sachant que les convois de camions se dirigeaient vers Ottawa?
    Des camions qui arrêtent à un feu de circulation, c'est une chose. Des camions en plein milieu des rues, c'est une autre chose et c'est illégal. En aucun cas je n’appuie cette occupation.
    Le gouvernement fédéral s'est traîné les pieds alors que la Ville d'Ottawa demandait des renforts, sachant fort pertinemment que, le lundi suivant le début des manifestations, les camionneurs ne partiraient pas. Le premier ministre du Canada aurait pu exercer ce type de leadership, c'est évident.

  (0730)  

    Monsieur le Président, je suis d'accord avec mes collègues de l'autre côté de la Chambre. C'est très triste d'être rendus dans une situation où le gouvernement est obligé de mettre en place des mesures d'urgence.
    Cependant, quand on parle de 1970, je tiens à préciser que j'étais là aussi et que je m'en souviens très bien. Un élu avait été assassiné. On ne parle pas seulement d'un homme, mais d'un élu de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas pour rien que, aujourd'hui, aucun ministre de l'Assemblée nationale ne se promène sans que sa sécurité soit assurée.
    Revenons à la question que j'aimerais poser à mon collègue aujourd'hui. Le gouvernement Legault et la Ville de Québec ont bien agi; ils ont fait ce qu'il fallait faire. Cela n'a malheureusement pas été le cas en Ontario et ailleurs. Toutefois, comment mon collègue explique-t-il que 72 % des Québécois, selon un sondage, appuient l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence?
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son intervention.
    Je tiens à préciser que, non, je n'étais pas né, en 1970, que je n'étais pas là. Ce qui demeure toutefois, pour moi, c'est le traumatisme qui a été vécu par des centaines de Québécois, et on est en ce moment dans une situation où on est à même de le revivre.
    Il y a une responsabilité qui appartient à un gouvernement, et il ne l'a pas prise. Je sens actuellement un gouvernement en train de faire de la propagande, d'utiliser des symboles et de ne pas écouter ce qui se passe dans les rues, et je trouve cela encore plus grave que les propos qui sont tenus.
    Nous sommes dans un contexte inacceptable. J'ai vu hier une dame en triporteur en train de dire « peaceful, peaceful » à des policiers. Elle s'est fait passer dessus par un cheval.
    Le gouvernement a des responsabilités.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier mon collègue d'Abitibi—Témiscamingue de son discours. Je remercie également le député de Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques, qui a pris la parole plus tôt.
    Mes collègues ont bien mis en contexte la grande différence entre les événements de 1970 et la loi de 1988, évoquée par le gouvernement actuel. Cette loi, qui avait été écrite et adoptée par le gouvernement progressiste-conservateur de Brian Mulroney, sous l'égide du ministre Perrin Beatty, définissait des balises très précises. On ne pouvait notamment utiliser cette loi à des fins politiques partisanes, mais bien plutôt en répondant à des critères auxquels ne répond malheureusement pas le gouvernement actuel.
    J'aimerais poser une question à mon collègue.
    Pendant 17 jours, nous avons vu le siège d'Ottawa. Pendant 17 jours, nous avons vu un premier ministre tout à fait inactif qui n'a strictement rien fait et qui, pire, avait dit le 11 février que les policiers avaient tout en main pour agir. Or trois jours plus tard, il s'est réveillé et a dit qu'il fallait adopter cette loi.
    Comment le député explique-t-il le comportement tout à fait irresponsable de ce premier ministre libéral?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue.
    Je ne m'explique pas ce qui s'est passé. Nous sommes dans une démocratie. Nous sommes censés être dans une démocratie. J'en doute, présentement.
    J'ai de la difficulté à me dire que je suis à la Chambre, tout en me sentant tellement privilégié d'y être et d'avoir une voix au chapitre. Il y a des gens dehors qui ont voulu tendre la main, qui ont voulu dialoguer. On ne leur a jamais donné la parole pour qu'ils puissent s'exprimer.
    Je ne suis pas porteur de propos. Je suis doublement vacciné, je porte le masque et je fais tout ce qui est en mon possible. Je crois encore que la vaccination est la meilleure façon de se sortir de la pandémie.
    Il aurait cependant fallu être à l'écoute, et le gouvernement n'a pas été à l'écoute de la population, des gens les plus vulnérables et des gens les plus ordinaires. C'est ce qui fait qu'on se met en ce moment dans une situation de danger, et je suis très inquiet des répercussions.

  (0735)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, le pont Ambassador à Windsor dans ma circonscription ouvre tranquillement, mais les barrières érigées sur la rue Huron Church pour empêcher les camions de passer bloquent maintenant les rues secondaires. Ce sont des barrières de béton mises en place pour des raisons de sécurité. La Police provinciale de l'Ontario, la GRC et la Ville de Windsor sont tous présents sur place actuellement. La vie n'est pas revenue à la normale. Comme je l'ai mentionné, des enfants sont privés de leur rendez-vous chez le médecin.
    J'aimerais avoir une réponse claire du député. Qu'est-ce que ces familles sont censées faire d'après lui? Leurs vies sont bouleversées en ce moment. La situation ne fait pas que compliquer la vie des entreprises, des véhicules d'urgence ou de choses aussi simples que d'aller à l'épicerie ou tenter de reprendre une vie normale, mais elle empêche aussi des gens de se rendre à leurs rendez-vous médicaux et à leurs séances de thérapie.
    Les barrières de béton qui bloquaient le pont bloquent maintenant les voies d'accès des gens à leur quartier, alors que peut-il dire à ces familles en ce moment même qui doivent en payer la note?

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Windsor‑Ouest, qui est probablement l'une des personnes que je respecte le plus à la Chambre.
    Je répondrais simplement qu'il existe de nombreuses victimes dont on n'entend jamais parler, notamment celles qui souffrent de problèmes de santé mentale. La pandémie aura probablement fait plus de victimes chez les gens qui ont été ignorés, qui ont laissé aller leur liberté, qui ont été enfermés dans des chambres, qui ont abdiqué relativement à leur santé et à leur vie et qui n'ont pas pu obtenir de rendez-vous médicaux.
    Effectivement, je pense que le fait que nous en soyons là aujourd'hui soulève de sérieuses questions.
    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec l'honorable député de Hull—Aylmer.
    Je me lève aujourd’hui afin d'expliquer à mes collègues de la Chambre et à mes concitoyens de Chateauguay—Lacolle les raisons pour lesquelles j’appuie cette motion, dont l'objectif est de ratifier la déclaration d'état d'urgence d'ordre public faite par le gouvernement en vertu de l'article 17 de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Le Canada est un État de droit. En déclarant une urgence d'ordre public en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence, nous respectons le droit canadien et agissons selon les balises fixées par les lois. Mise en vigueur en 1988 par le gouvernement Mulroney, la Loi sur les mesures d'urgence énonce clairement les critères permettant de déclarer une urgence d'ordre public. Notre gouvernement estime que la situation répond à ces critères, ce qui le force à agir.
    La Loi sur les mesures d’urgence contient plusieurs garanties et plusieurs mécanismes de contrôle, dont la surveillance du Parlement. C’est la raison pour laquelle nous étions ici jusqu'à minuit l'autre soir et c'est pourquoi nous sommes ici ce matin à 7 heures.
    Toutes les mesures prises en vertu de la Loi doivent respecter la Charte canadienne des droits et libertés. Ces mesures seront limitées dans le temps, ciblées géographiquement, raisonnables et proportionnelles aux menaces auxquelles elles doivent répondre. La Loi sur les mesures d'urgence sert à renforcer et à soutenir tous les corps de police partout aux pays. Nous avons pu observer cela hier sur la rue Wellington lorsque les forces policières ont enfin réussi à former un cordon afin de déplacer les participants à cette manifestation illégale.
    Six mesures ont été mises en place pour contrôler la situation.
    Premièrement, on a réglementé et interdit les rassemblements publics qui entraînent une violation de la paix et qui vont au-delà des protestations légitimes. Les manifestations à Ottawa et au pont Ambassador ne sont pas légales.
    Deuxièmement, on a désigné et sécurisé les lieux où les barricades sont interdites, notamment les frontières, les abords des frontières et les autres infrastructures essentielles.
    Troisièmement, on a obligé des personnes à fournir des services essentiels pour atténuer l'impact des barricades sur l'économie canadienne. Par exemple, on a obligé les dépanneuses et leurs chauffeurs à faire leur travail avec compensation.
    Quatrièmement, on a autorisé et obligé les institutions financières à fournir des services essentiels pour atténuer l'impact des barricades, notamment en réglementant et en interdisant l'utilisation de ressources servant à financer ou à soutenir les barricades.
    Cinquièmement, on a permis à la GRC de faire respecter les règlements municipaux et les lois provinciales au besoin.
    Sixièmement, on a imposé des amendes ou des peines d'emprisonnement.
     Avec ces mesures, nous voulons assurer la sécurité des Canadiens, protéger leurs emplois et rétablir leur confiance à l'égard de nos institutions.
    La Loi sur les mesures d'urgence, adoptée en 1988 par le gouvernement Mulroney, contient également plusieurs limites, mécanismes de contrôle et garanties significatives. Comme l'exige la Loi, à plusieurs reprises au cours de la semaine dernière, le premier ministre et les membres du Cabinet ont consulté les premiers ministres provinciaux et les membres de leur gouvernement respectif.
    Ayant déclaré une urgence d'ordre public, nous avons déposé la déclaration au Parlement. Dans les prochains jours, un comité parlementaire sera formé pour assurer la surveillance pendant que l'état d’urgence est en vigueur.
    La déclaration ne dure que 30 jours, à moins qu'elle ne soit renouvelée. Toutefois, le gouvernement peut la révoquer beaucoup plus tôt. Personnellement, j’espère sincèrement que ce sera le cas. Le Parlement a également la capacité de révoquer la déclaration d'urgence, comme l'indique clairement la Loi. Il a aussi le pouvoir de modifier ou de révoquer tout décret adopté en vertu de la Loi. De plus, les décrets doivent être déposés au Parlement deux jours après avoir été pris par le gouvernement afin d'être examinés par les parlementaires.

  (0740)  

    On peut bien se demander comment on en est arrivé là. Pourquoi une telle déclaration d'urgence est-elle devenue tristement nécessaire ici, au Canada, un pays qui est toujours en tête de classement des pays du monde en matière de liberté, de démocratie et de paix sociale?
    Je ne peux pas parler des opérations policières ici à Ottawa ni du manque d'intérêt du gouvernement de l'Ontario alors qu'il était évident que les autorités de la Ville d'Ottawa n'étaient pas capables de faire face aux menaces des manifestants ici sur la rue Wellington. Malgré le fait incontestable que les municipalités relèvent de la compétence des provinces en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867, le gouvernement Ford a retardé ces interventions et n'a réagi que lorsqu'il y a eu des manifestations à Windsor et ailleurs en Ontario. Je crois qu'il y aura des élections bientôt en Ontario et que ce sera aux électeurs ontariens de décider comment juger leurs élus provinciaux.
    Comme élue fédérale, je me préoccupe de ce qui se passe à la Chambre. Comme simple député d'arrière-ban, depuis le début de cette soi-disant manifestation pour la liberté, je constate que certains députés ont exploité cette manifestation, qui est devenue rapidement une occupation et une tentative d'insurrection, à des fins partisanes, sans compter qu'ils ont mis à pied leur chef de parti.
    Quand ces députés ont pris des photos avec des manifestants qui agitaient des drapeaux arborant des signes haineux et racistes, ils ont prétendu qu'ils ne le savaient pas ou, pire, qu'il n'y avait rien là. Ce déni et le désir de minimiser la portée de leurs actes étaient délibérés et flagrants, alors qu'ils envoyaient des gazouillis d’encouragement pour donner de la crédibilité aux organisateurs et à leurs dangereuses intentions.
    Je pourrais continuer à donner plusieurs exemples de ces tromperies qui sèment la division. Nous sommes très conscients qu'il existe à la Chambre certains députés qui sont des professionnels en tactiques partisanes. Leur stratégie est de diviser les Canadiens dans l'espoir de profiter de cette division. Ces députés devraient avoir honte. Ils sont prêts à mettre notre sécurité, notre économie et notre démocratie en danger pour leurs propres fins partisanes et leurs petites carrières politiques, quand ce n'est pas simplement pour obtenir une entrevue de Fox News.
    Encore une fois, je suis d’accord avec notre gouvernement qu'il y a un état d'urgence causé par des blocages continus mis en place par des individus et des véhicules à différents endroits au Canada. Ces blocages ont un lien direct avec des activités qui visent à favoriser le recours à une violence grave ou à des menaces de violence contre des personnes ou des biens, notamment des infrastructures essentielles, dans le but d'atteindre un objectif politique ou idéologique au Canada.
    Je suis d’accord que ces blocages ont des effets néfastes sur l’économie canadienne. La sécurité économique du Canada est menacée parce que des infrastructures essentielles, comme les axes commerciaux et les postes frontaliers internationaux, sont bloquées. Ces blocages ont causé une rupture des chaînes de distribution et entraînent des effets néfastes sur les relations qu'entretient le Canada avec ses partenaires commerciaux, notamment les États‑Unis.
    Faisant face à un tel état d’urgence, notre gouvernement a invoqué avec la plus grande prudence la Loi sur les mesures d’urgence. Les Canadiennes et les Canadiens de partout au pays peuvent croire les principes fondamentaux de notre beau pays, le Canada: « Paix, ordre et bon gouvernement ».

  (0745)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, la députée a demandé ce qui a mené à cette situation. Elle a ensuite blâmé tout le monde, y compris le premier ministre de l'Ontario Doug Ford, mais elle a omis de blâmer son premier ministre pour avoir stigmatisé et divisé les gens en les traitant de racistes, de misogynes et d'extrémistes et en demandant si nous devions les tolérer. Ce que nous voyons aujourd'hui, dans les manifestations qui se déroulent partout pays, c'est l'aboutissement logique de la politique identitaire menée par le premier ministre.
    J'aimerais poser une question précise au sujet de la Loi sur les mesures d'urgence. Le décret diffusé par le gouvernement l'autorise, aux termes de l'article 19, à imposer d'autres mesures d'urgence temporaires qui ne sont pas encore connues, ce qui donne essentiellement au premier ministre et à l'organe exécutif du gouvernement un pouvoir absolu sur les citoyens. Comment peut-on, même de ce côté, appuyer logiquement une telle mesure?
    Monsieur le Président, je trouve très étonnant qu'un député du Parti conservateur pose une telle question au sujet de la Loi sur les mesures d'urgence. C'est son propre parti qui a rédigé la loi. J'ai beaucoup de respect pour le travail accompli par l'ancien premier ministre Mulroney et le ministre...
    La députée devrait savoir que je ne parle pas de la loi. Je parle en fait du décret.
    Cela devient un débat.
    Je vais permettre à la députée de Châteauguay—Lacolle de terminer sa réponse.
    Monsieur le Président, sur la question de savoir comment nous en sommes arrivés là, il y a ce qu'on appelle les champs de compétence et l'application régulière de la loi. Le maintien de l'ordre doit être assuré par les municipalités. Si une municipalité échoue, c'est la province qui doit intervenir. La municipalité est une créature de la province, et la province n'a pas fait son travail.

[Français]

    Monsieur le Président, on connaît l'adage « faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais. »
    C'est ce que font les libéraux en ce moment. Il est important pour eux de s'appuyer sur des sondages pour légitimer le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. La députée de Châteauguay—Lacolle a dit tout à l'heure que plus de 70 % des Québécois appuyaient le recours à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Par contre, elle a oublié de dire que le sondage n'avait été mené qu'auprès de 347 personnes. L'Assemblée nationale du Québec s'est prononcée à l'unanimité contre le cours à la Loi sur les mesures d'urgence. De plus, sept provinces canadiennes sur dix se sont prononcées contre le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Cela ne veut rien dire pour les libéraux?
    Ce qui m'impressionne le plus, c'est quand la députée parle de l'État de droit. Effectivement, l'État de droit, c'est l'opposé du droit arbitraire.
    Parmi les lois en vigueur actuellement, laquelle est assez insuffisante pour justifier l'application de la Loi sur les mesures d'urgence?

  (0750)  

    Monsieur le Président, la manipulation des statistiques est une tactique couramment employée.
    Quand cela sert les députés du Bloc, ils en sont capables, mais, quand cela ne les sert pas, ils en sont incapables. Or les Canadiens et les Canadiennes observent la situation actuelle et voient de leurs propres yeux ce qui se passe dehors.
    De plus, ils constatent que tous les paliers de gouvernement prennent leurs responsabilités comme il se doit. Je salue d'ailleurs le gouvernement Legault pour ce qu'il a fait jusqu'à présent.

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous sommes confrontés à une situation qui est complètement hors de contrôle. Dans ma province, en Alberta, 13 insurgés armés ont bloqué nos infrastructures. Nous n'avons qu'à regarder à l'extérieur de la Chambre des communes. Nous nous trouvons dans une situation vraiment très troublante qui n'aurait jamais dû se produire.
    Comment pouvons-nous veiller à ce que des mesures soient en place pour que cela ne se reproduise pas? Que fait le gouvernement pour éviter que cela se reproduise à l'avenir?
    Monsieur le Président, la loi prévoit divers processus, notamment la création d'un comité mixte composé de parlementaires et de sénateurs. Je suis impatiente de voir cette démarche se concrétiser et j'espère que la députée fera partie de ce comité.

[Français]

    Monsieur le Président, je salue tous mes collègues, en ce samedi matin. C’est une journée extraordinaire pour la Chambre de siéger un samedi. C’est une situation extraordinaire pour tout le pays compte tenu de ce qui se passe.
    Nous sommes ici pour participer à un débat très important sur l’utilisation de ces mesures d’urgence. Je ne suis pas avocat, je ne peux pas jauger et déterminer tous les petits détails. Pour moi, il suffit de voir deux choses. Premièrement, les services policiers d’Ottawa ont dit hier que sans avoir recours à ces mesures exceptionnelles contenues dans la Loi sur les mesures d’urgence, ils ne seraient pas capables de mettre fin à ce qui se passe dans la ville d’Ottawa et dans la région de la capitale nationale.
    La deuxième chose, c’est le fait que nous nous retrouvons ici un samedi matin. Hier, ce n’était pas assez sécuritaire pour les députés ni pour les sénateurs de rentrer au Parlement. On a pris une décision exceptionnelle. On a annulé une séance du Parlement, ce qui fait que nous sommes ici un samedi matin pour entamer ce débat.
    Tous les leaders des partis à la Chambre, le Parti conservateur, le Bloc québécois, le NPD et le Parti libéral, se sont entendus avec le Président de la Chambre des communes pour dire que quelque chose se passait ici, que ce n'était pas sécuritaire et que les parlementaires ne pouvaient pas y venir. C’est exceptionnel.
    Ce dont j’aimerais vraiment parler, c'est des autres mesures relatives au financement des groupes extrémistes

  (0755)  

[Traduction]

    Je suis né à Montréal, dans l'une des rares familles noires de mon quartier — un quartier à prédominance juive, dans une ville francophone située dans une province francophone, dans un pays anglophone, sur un continent surtout anglophone. J'aime dire que je fais partie d'une minorité au sein d'une minorité, au sein d'une autre minorité, au sein d'une autre minorité encore. Cela me donne une perception fort intéressante des choses.
    Je peux comprendre que la volonté de la majorité soit exécutée, car cela représente le point de vue dominant. C'est naturel, aussi naturel que l'air que nous respirons. Cependant, je peux aussi prendre du recul et voir les choses sous un autre angle. J'ai toujours pensé que cela représentait un atout. Je considère que c'est une capacité de voir la vie un peu plus pleinement, comme voir en trois dimensions au lieu de deux, ou voir le monde en couleurs au lieu d'en noir et blanc.
    Quand j'ai vu ce qui se passait dans la période précédant l'organisation du convoi, j'ai remarqué des choses que, à mon avis, d'autres personnes ne percevaient pas aussi clairement. Je me trompe peut-être, mais laissez-moi m'expliquer.

[Français]

    On a vu que les organisateurs de ce convoi sont les mêmes personnes qui ont tenté d'organiser d'autres manifestations sur n'importe quoi. En 2016, il y a eu la motion M‑103 contre l'islamophobie. Ils ont tenté de rallier les gens et de créer une manifestation populaire contre cette motion. Je parle de Tamara Lich, de Benjamin Dichter, de James Bauder, de Patrick King. Ces gens-là, exactement, ont tenté d'enflammer les passions des Canadiens pour promouvoir leurs pensées sur la suprématie blanche.
    Ils n'ont pas réussi à le faire en 2016, alors ils ont encore tenté de le faire l'an dernier. Je parle de United We Roll. Encore une fois, il n'y a pas eu beaucoup d'engouement.
    Ils ont cette fois-ci réussi grâce à une bonne raison: les Canadiens sont fatigués. Tout le monde est épuisé. On n'aime pas la pandémie, on n'aime pas les restrictions et on n'aime pas les confinements. Le virus s'en fout, de nos pensées. Les Canadiens sont épuisés, et ces gens ont profité de l'épuisement général.
    Les gens qui se sont présentés pour manifester leur désaccord sur la vaccination obligatoire, les mesures de confinement ou toutes autres mesures mises en place par les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux, ont le droit de le faire. Je ne parle pas de ces gens.
    Ceux dont je parle, ce sont les organisateurs qui utilisent cet épuisement pour recruter des gens sur les médias sociaux afin de faire passer leurs messages haineux. On le sait bien, avec les algorithmes, des groupes sur les médias sociaux vont réussir, grâce à des commentaires extrémistes, à attirer des gens qui, à leur tour, vont apparaître plus souvent en ligne. On ne peut pas l'éviter. Quand on est toujours exposé à la haine, on commence à un moment donné à adopter cette ligne de pensée.
     En 2016, quand la motion M‑103 a été présentée, le mouvement a réussi à aller chercher quelque 10 000 personnes sur Facebook, selon le Canadian Anti‑Hate Network. Ils ont véhiculé leur message et, à un certain moment, ils avaient presque 200 000 abonnés, du jamais vu.

  (0800)  

[Traduction]

    Ils ont touché le gros lot. On estime qu'ils ont maintenant plus de 1 million de personnes sur Facebook. Ces gens ne savent pas ce qui va les frapper. Ils ne cesseront de recevoir des messages haineux, des messages d'intolérance et de la désinformation, et devinez quoi? Ils vont également se faire demander de l'argent. Pensons à l'argent qui a été versé.
    Tous les députés doivent respecter des règles de financement très strictes. En vertu des règles sur la transparence et le financement, nous ne pouvons donner qu'un maximum de 1 650 $. C'est une bonne chose. Lorsque nous faisons un don à un organisme de bienfaisance, il y a tout un tas de mesures de transparence et de déclaration qui s'appliquent. Que se passe-t-il quand ces gens ont recours à l'externalisation ouverte pour faire des dons? Rien. Il n'y a absolument aucune transparence. Les manifestants ont recueilli 16 millions de dollars sur un site et 16 millions de dollars de plus sur un autre; on estime que de 40 à 50 % de ces fonds proviennent de l'étranger. Les noms des donateurs sont ridicules. Sur un site, on indique que Mickey Mouse a fait un don, tout comme l'actuel premier ministre. Ce n'est évidemment pas le cas. Ce n'est pas bon.
    Les mesures financières qui sont en place le sont pour de bonnes raisons. À tout le moins, il valait la peine de les inscrire au Feuilleton. J'espère qu'un projet de loi suivra afin que nous puissions éliminer de façon permanente ce type de « mauvais dons » du système politique canadien.
    Monsieur le Président, pas plus tard qu'avant-hier, le ministre de la Justice disait justement que les mesures financières dont vient de parler le député serviraient à sanctionner les personnes ayant certaines opinions politiques. Pas celles qui tiennent des propos haineux ou qui prônent l'intolérance, non, celles dont les propos sont inacceptables à son avis à lui. Ces personnes seront visées par les mesures financières prévues dans la loi.
    S'il y a une chose qui devrait préoccuper les députés...
    C'est l'ingérence étrangère, vous avez bien raison.
    Monsieur le Président, le député de Winnipeg-Nord sait qu'il n'est pas censé interrompre les autres, mais le voilà qui évoque l'ingérence étrangère. On parle ici de Canadiens dont les comptes bancaires canadiens sont gelés au motif que leurs opinions politiques n'ont pas l'heur de plaire au ministre de la Justice. Nous ne vivons pas en démocratie libérale. Cette façon de faire est au contraire antilibérale, et j'aimerais que le député nous explique comment il peut, en toute conscience, appuyer une violation aussi éhontée et grossière des droits garantis par la Charte.
    C'est très simple, monsieur le Président. L'argent en cause ne sert pas à financer les canaux politiques habituels. Les gens ont le droit de financer ce genre de chose, mais on parle ici de dons anonymes, provenant de sources non vérifiées et possiblement étrangères, qui visent à influencer la politique canadienne de manière insidieuse.
    Qui recueillait et distribuait l'argent avant que ces comptes ne soient fermés? Est-ce que nous voulons vraiment que Mme Lich, M. Barber et M. King puissent avoir accès à cet argent, que les gens ont donné de bonne foi en pensant qu'il servirait à ouvrir la discussion sur les exigences liées aux vaccins, mais qui sert dans les faits à tout autre chose? Il faut de la transparence.
    Si le député avait bien écouté ce que j'ai dit, il aurait compris qu'il s'agit d'une mesure temporaire et que nous aurions avantage à adopter une loi pour traiter ce genre de situation à l'avenir.

  (0805)  

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son exposé qui renfermait des nuances fort intéressantes.
    Ma question concerne les camionneurs qui étaient dans la rue. Encore une fois, il n'y en a plus beaucoup ce matin. Mon collègue croit-il vraiment que les mesures appliquées, soit saisir des comptes bancaires et des camions ou fermer des comptes hypothécaires, et ainsi de suite, auront un effet auprès des camionneurs, qui sont majoritairement de chez nous, c'est-à-dire des Canadiens?
    Monsieur le Président, je remercie mon honorable député de sa question.
    Je peux encore une fois répondre par l'affirmative. En effet, nous avons clairement vu dans les nouvelles un camionneur qui faisait partie du blocage ici, à Ottawa, dire qu'il devait partir parce qu'il avait eu un avis de sa banque l'informant que s'il ne quittait pas ce blocage illégal, ses biens pourraient être saisis. Il a ajouté qu'il était l'employeur de 55 personnes.
    Cela a fonctionné. Cela va éviter des blocages qui pourraient avoir lieu à Windsor. Nous avons aussi entendu le Service de police d'Ottawa et le Service de police de Windsor dire qu'avec ces mesures, ils avaient enfin la capacité d'éviter...
    À l'ordre. Nous passons aux questions et aux observations.
    L'honorable députée de North Island—Powell River a la parole.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ose espérer que chacun de nous a bien conscience du sérieux des décisions que nous prenons ici.
    Le député d'en face et moi avons déjà discuté du fait que nous avons tous les deux des enfants faisant partie de la communauté autochtone, noire ou de couleur, et des grands soucis que cela entraîne. Sur la planète et dans le monde où nous vivons, dès que nos enfants sortent de la maison, on ne sait pas s'il leur arrivera quelque chose. Dans le cadre du présent débat sur la mise en application de cette loi, je me demande si le député pourrait nous parler de la nécessité de protéger tous les habitants du Canada en faisant preuve de la responsabilité et la rigueur nécessaires.
    Monsieur le Président, ce qui me plaît beaucoup dans cette mesure législative — et je félicite d'ailleurs Brian Mulroney et son gouvernement de l'avoir adoptée —, c'est que la Charte des droits et libertés s'y applique en tout temps. Son application est limitée à une période déterminée, et les parlementaires doivent se réunir pour en discuter. J'ai pleine confiance en cette mesure parce qu'elle est ciblée, appropriée et, surtout, limitée dans le temps.
    Monsieur le Président, nous nous retrouvons ici, ce matin, à discuter d'une autre tentative de la part du gouvernement libéral de s'emparer du pouvoir de façon éhontée et excessive. Ce n'est pas la première fois que nous voyons cela.
    Voilà que l'alliance libérale-néo‑démocrate commence son chahut parce qu'elle veut me faire taire, tout comme elle veut faire taire les gens avec qui elle n'est pas d'accord.
    Nous savons qu'au tout début de cette pandémie, la première chose que le gouvernement libéral a tenté de faire, c'était de s'emparer du pouvoir de façon éhontée. Il voulait être en mesure de dépenser des sommes illimitées et d'augmenter les impôts, de taxer les Canadiens comme bon lui semblait, sans surveillance parlementaire, pendant près de deux ans.
    Nous, la loyale opposition de Sa Majesté, étions réveillés à ce moment‑là, jusque tard dans la nuit, et nous sommes intervenus. Nous avons mis fin à cet abus de pouvoir. Nous voici, en cette matinée de samedi, à tenir une séance extraordinaire à la Chambre, alors que le gouvernement cherche à utiliser des processus extraordinaires pour attaquer les personnes avec lesquelles il n'est pas d'accord. Nous avons entendu le ministre de la Justice. Il a dit à la télévision, devant tout le monde, que si les gens avaient des opinions politiques qu'il désapprouvait, le gouvernement s'en prendrait à leurs comptes bancaires.
    Les gens qui sont d'accord avec le ministre de la Justice et qui ont en aversion les mêmes politiciens ne s'inquiètent peut-être pas de la situation cette fois-ci. Cependant, qu'en est-il du précédent que la situation crée? Que penseront-ils lorsqu'un futur gouvernement ayant une vision politique différente de la leur gèlera les comptes bancaires de ses ennemis ou des personnes avec lesquelles il est en désaccord?
    Dans cette enceinte, nous avons la responsabilité de protéger les droits de l'ensemble de la population canadienne. Nous avons beaucoup entendu parler des répercussions au centre-ville d'Ottawa, alors je veux commencer par cela. Les résidants du centre-ville d'Ottawa sont témoins de manifestations et de célébrations dans leur quartier depuis des années. Il s'agit d'un aspect attrayant de la vie au cœur de la capitale du pays. Ces derniers temps, toutefois, c'est tout le contraire. Nombre de résidants se sont en effet joints à un recours collectif contre les manifestants.
    J'aimerais lire à la Chambre ce que leur avocat, une sommité dans le milieu juridique des droits de la personne, pense du recours à la loi par le gouvernement:
    [La mesure] porte gravement atteinte aux droits des Canadiens garantis par la Charte.
    Il s'agit de l'avocat qui représente les résidants du centre-ville d'Ottawa. Il a dit:
[...] je suis parfaitement conscient du traumatisme vécu par les résidants d'Ottawa, je suis tout à fait d'accord que la Loi sur les mesures d'urgence est un outil dangereux qui n'était pas nécessaire.
    Qui est le mieux placé pour se prononcer sur l'urgence de la situation au centre-ville d'Ottawa que l'avocat des droits de la personne qui représente les résidants du centre-ville d'Ottawa?
    Parlons un peu des autres méthodes utilisées pour composer avec les participants à ce mouvement. Au pont Ambassador, donc au poste frontalier de Windsor, nous avons pu voir des policiers de la région éliminer les barrages qui bloquaient la frontière internationale. Ils y sont parvenus en deux jours sans avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence. À Coutts, en Alberta, on a obtenu le même résultat en utilisant les ressources et les lois déjà disponibles. Les policiers locaux ont découvert, grâce au travail de renseignement de la police, que des armes et des munitions se trouvaient à proximité. Ils ont contenu cette menace efficacement sans tirer une seule balle, en se servant des lois et des ressources locales. Ce n'était pas une situation d'urgence.
    Le gouvernement libéral était déjà au pouvoir quand nous avons été confrontés à la pire crise de santé publique en plus de 100 ans et quand l'économie du pays a connu sa pire récession en 100 ans. Il n'a pas estimé qu'il s'agissait de situations d'urgence. Tous les jours, des gens meurent dans les rues du pays à cause de la crise des opioïdes, mais le gouvernement ne déclare pas que c'est une situation d'urgence. Il ne prend pas de mesures exceptionnelles pour régler ce problème-là.

  (0810)  

    Cela revient toutefois à ce coup de force et à une tendance que nous avons observée chez le premier ministre actuel. En effet, chaque fois qu'une personne n'est pas d'accord avec lui —  et cette fois‑ci ne fait pas exception — il la discrédite; il la dénigre et il la déshumanise. Cela inclut des millions de Canadiens, car ils ne sont pas d'accord avec lui. Il a dit qu'ils avaient des opinions inacceptables et qu'ils prenaient de la place. Il a dit que la plupart d'entre eux sont misogynes et racistes. La majorité des Canadiens, des millions de ces mêmes Canadiens, ont affirmé que toute manifestation ou expression de haine ou d'intolérance est inacceptable. Ils les condamnent et je les condamne.
    Quiconque commet un acte illégal en est personnellement tenu responsable, mais nous avons des lois pour cela. Les accusations qui sont portées à Ottawa sont des accusations de méfait et de « complot en vue de commettre ». Nous n'avons pas besoin d'une Loi sur les mesures d'urgence pour cela. Une opération de maintien de l'ordre public se déroule actuellement dans les rues d'Ottawa. Ce n'est pas une urgence nationale.
    Cependant, il s'agit certainement d'une occasion en or pour le premier ministre de faire ce qu'il fait le mieux, c'est‑à‑dire de diviser les Canadiens. Ce n'est pas le travail d'un premier ministre, et c'est une honte qu'il réussisse à trouver des députés avec qui faire cause commune sur les banquettes ministérielles et dans le troisième parti à la Chambre. L'histoire ne sera pas tendre envers ceux qui approuvent ce coup de force antilibéral. Ce n'est pas canadien d'agir ainsi.
    Bon nombre des manifestants un peu partout au pays, des personnes qui se font entendre, sont fatigués. Nous en avons tous assez de la COVID. Ces personnes voulaient qu'on leur fournisse un plan. Elles voulaient savoir combien de temps encore il faudrait attendre avant de s'en sortir, car beaucoup d'entre elles, y compris celles que j'ai rencontrées et à qui j'ai parlé devant cette enceinte, sont vaccinées. Certaines ne le sont pas. Elles veulent seulement savoir quand tout cela va finir.
    Nous avons donné l'occasion au gouvernement de soumettre un plan. Nous en avons demandé un l'an dernier. Nous l'avons encore fait la semaine dernière. Le gouvernement refuse de soumettre un plan. Entretemps, les personnes qui se fient aux données scientifiques, données fournies par des personnes comme le Dr Moore, en Ontario, ont donné un aperçu du moment où les mesures contre la COVID seraient levées sur le territoire qui relève de leurs compétences.
    Avant l'arrivée de ces personnes à Ottawa ou des autres manifestants ailleurs au pays, la Dre Tam, qui représente l'Agence de la santé publique du Canada, a déclaré que le gouvernement avait besoin d'un nouveau plan. Nous n'avons pas encore entendu le gouvernement là‑dessus, car c'est une excellente occasion pour lui de monter les voisins les uns contre les autres, les membres de familles les uns contre les autres, et le premier ministre n'en rate jamais une.
    Nous sommes bien éveillés ce matin. Nous voyons ce que le gouvernement essaie de faire et nous sommes là pour affirmer que c'est inacceptable. Notre Canada, ce n'est pas cela. Les gens qui veulent manifester en ont tout à fait le droit. Les gens qui veulent exercer leur liberté d'expression ont tout à fait le droit de le faire et il y a un endroit prévu à cette fin sur la Colline du Parlement.
    Les gens qui ont été déplacés du devant de l'immeuble en vertu de la proclamation d'une urgence d'ordre public, ou qui ont quitté l'endroit il y a des jours après avoir visité le siège de notre démocratie, ont besoin d'endroits appropriés pour manifester, ce que sont les terrains des hôtels de ville et des assemblées législatives provinciales ainsi que la pelouse de la Colline du Parlement, et exercer leurs droits en tenant compte du fait qu'il faut le faire légalement. C'est ce que font les Canadiens. Ils n'essaient pas de mettre en vigueur des mesures extraordinaires pour contourner l'application régulière de la loi et les droits garantis par la Charte, qui sont sacrés pour les Canadiens.
    L'actuel premier ministre le sait pertinemment. Les ministres et les députés libéraux d'arrière-ban le savent pertinemment. Voyons voir, à la tenue du vote, s'ils sont prêts à affirmer aux Canadiens qu'il s'agit bel et bien d'un pays qui respecte la primauté du droit, d'une démocratie libérale. Voyons voir ce que représente véritablement le Canada.

  (0815)  

    Monsieur le Président, c'est bon d'entendre le député d'en face, avec qui j'ai siégé au sein du comité de l'éthique, parler d'une démocratie libérale. Il existe diverses tactiques pour discréditer un adversaire. On peut discréditer quelqu'un en le couvrant d'insultes et en le dénigrant. On peut aussi procéder en faisant diversion, en changeant de sujet ou en attaquant l'autre au lieu de répondre. Toutes ces tactiques servent à diviser les gens.
    Quelle tactique utilise-t-il aujourd'hui?
    Monsieur le Président, je parle de démocratie libérale parce qu’il me semble que le gouvernement de ce pays est représenté par le parti antilibéral du Canada. La tactique que j’emploie aujourd’hui, c’est de rappeler au gouvernement que les droits des Canadiens sont le fondement de notre démocratie. Quand des citoyens ont peur de leur gouvernement, et c’est ce que vise le gouvernement, c’est le monde à l’envers. Le gouvernement devrait avoir peur des citoyens, car c’est eux qui détiennent le pouvoir. Voilà la clé de la liberté.

  (0820)  

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Leeds—Grenville—Thousand Islands et Rideau Lakes de son intervention.
    J'aimerais lui poser une question toute simple.
    Pourquoi le gouvernement du Québec a-t-il réussi, en deux jours et sans avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence, à contrôler et à régler une situation?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le premier ministre du Québec a été capable d’obtenir ce résultat de la même façon que Toronto a pu obtenir le même résultat que Montréal ou Québec, c’est-à-dire en invoquant les dispositions législatives locales et en recourant aux ressources existantes. C’est exactement comme cela que les choses auraient pu se dérouler à Ottawa. C’est ce qu’on a fait à Windsor; c’est ce qu’on a fait à Coutts et c’est ce qu’on fait ailleurs. Nous voyons que le gouvernement essaie de mélanger les Canadiens et d’amalgamer quelques problèmes comme prétexte pour s’arroger des pouvoirs.
    Monsieur le Président, j'espère vraiment qu'à la suite de tout cela il y aura une enquête approfondie sur l'échec total de l'application de la loi à Ottawa qui a permis à la situation de s'envenimer, et sur l'utilisation de fonds occultes en provenance des États-Unis et des îles Caïmans. Ces questions doivent faire l'objet d'une enquête approfondie.
    Je sais que la cheffe intérimaire de l'opposition pensait que laisser la situation s'éterniser offrait une chance à saisir. Elle a aussi dit, jour après jour, de sortir et de rencontrer les dirigeants. Chris Barber est un raciste malveillant qui aime les camionneurs pourvu qu'ils soient blancs. Tamara Lich est une femme qui veut briser notre pays. Je sais que certains conservateurs ne voient pas de mal à cela. Pat King est un homme qui parle ouvertement d'abattre le premier ministre du pays. Je n'ai pas entendu un seul conservateur se lever et dire que ces points de vue sont fondamentalement inacceptables. Notre pays a un problème lorsque nous décidons qu'il est acceptable de brûler l'enceinte de la démocratie pour regarder le premier ministre sauter par la fenêtre, ou de soutenir des gens qui parlent de tuer le premier ministre.
    Je veux entendre le député condamner ces propos.
    Monsieur le Président, je les condamne. Je condamne aussi le parti du député d'en face qui appuie cette usurpation de pouvoir et ses partenaires de la coalition au Parti libéral. Je ne sais pas quel motif on a donné à huis clos, car je ne l'ai pas entendu. Nous avons expliqué très clairement que les lois des autorités locales sont suffisamment efficaces. Le gouvernement cherche plutôt à régler des comptes avec ses adversaires politiques au moyen d'un coup de force sans précédent, et c'est inacceptable.
    Monsieur le Président, en réécoutant son intervention, je pense que le député de Leeds—Grenville—Thousand Islands et Rideau Lakes pourrait regretter d'avoir fait un rapprochement entre condamner des gens qui appellent à l'assassinat du premier ministre et la décision du NPD de voter pour la déclaration d'état d'urgence.
    Si j'ai bien compris, le député a dit que la déclaration d'état d'urgence permettrait de geler les comptes bancaires de personnes avec lesquelles le gouvernement n'est pas d'accord. Je ne sais pas comment je vais voter sur cette question. J'aimerais vraiment des précisions sur les conditions qui doivent être réunies avant que le gouvernement intervienne à l'égard des comptes bancaires de qui que ce soit. Je veux avoir des précisions à ce sujet. Cela dit, je ne pense pas qu'il soit acceptable d'induire les Canadiens en erreur en laissant entendre que le recours à cette loi permettrait de geler le compte bancaire d'une personne qui n'aime pas une autre personne ou qui n'est pas d'accord avec elle.
    Le député aimerait-il préciser son point de vue?
    Monsieur le Président, pour répondre à la députée d'en face, j'aimerais citer une question qu'Evan Solomon, animateur de l'émission de CTV Power Play, a posée au ministre de la Justice:
    Bien des gens disent: « Je n'aime tout simplement pas les exigences que vous imposez à l'égard des vaccins, et j'ai fait un don pour cette cause, mais maintenant que c'est illégal, devrais-je craindre que la banque puisse geler mon compte? »
    Le ministre de la Justice a répondu:
    Si vous êtes membre d'un mouvement pro-Trump qui donne des centaines de milliers de dollars ou des millions de dollars pour ce genre de chose, alors vous devriez être inquiets.
    Le gouvernement compte s'en prendre à ceux qui appuient Donald Trump. C'est inacceptable dans une démocratie libérale.
    Monsieur le Président, je suis mal à l'aise de me trouver ici aujourd'hui. C'est un sombre et triste épisode pour notre pays. Malheureusement, cela n'enlève rien aux événements en cours.
    J'ai observé avec inquiétude l'anarchie qui paralyse Ottawa et d'importants postes frontaliers en Ontario et dans d'autres provinces. La Loi sur les mesures d'urgence n'a jamais été invoquée auparavant. On ne s'en est pas servi même quand notre pays a traversé des périodes difficiles.
    Considérée comme un dernier recours, cette loi donne au gouvernement fédéral des pouvoirs accrus en période de crise. Pour la première fois, la Chambre doit se pencher sur la justification de son invocation et sur les subtilités de ses procédures. Il n'existe aucun précédent. C'est plutôt nous qui créons un précédent. Les arguments que nous avançons, les preuves que nous évaluons et le ton que nous employons seront soumis au jugement des générations futures.
    Tout le monde a le droit de manifester paisiblement contre toute politique du gouvernement. C'est une liberté fondamentale dans une démocratie. On protège ainsi les droits des citoyens d'exprimer leurs points de vue, même si la majorité ne les partage pas. Bien que ces manifestations constituent un élément fondamental de la démocratie, il en va de même pour la primauté du droit. Nous ne pouvons pas laisser se prolonger des barrages qui paralysent des corridors commerciaux, des pipelines, des chemins de fer, des voies d'approvisionnement, des ports ou des centres‑villes. Nous n'avons pas non plus le loisir de décider des lois qui s'appliquent ou non dans certaines situations.
    Dans un État de droit, la cohérence est importante, puisque c'est le fondement de la jurisprudence. Les personnes qui prennent part aux manifestations pour encourager la violence ou le renversement du gouvernement minent la démocratie. Mais soyons très clairs. Les gens qui ont participé à ces manifestations ne veulent pas tous renverser le gouvernement. Une bonne partie d'entre eux veulent seulement être entendus, pacifiquement. Je dis à ces personnes que nous les écoutons. Je les entends.
    À un certain point, les manifestations sont devenues anarchiques. Toutefois, des actes illégaux ne peuvent être réprimés par des mesures illégales. Le gouvernement nous demande de suspendre certaines lois pour punir ceux qui en violent d'autres. Il nous demande de faire une entorse aux principes démocratiques à l'endroit de ceux qui souhaitent nuire à la démocratie.
    Le seuil permettant d'invoquer la loi est censé être élevé, à juste titre. C'est une loi temporaire qui donnera au gouvernement des pouvoirs énormes et extraordinaires, notamment le pouvoir de geler des biens sans processus judiciaire et de contraindre des citoyens à agir, non plus selon leurs propres intérêts, mais en faveur des intérêts de l'État.
    À la Chambre, il y a quelques jours, le premier ministre a présenté un échéancier. Il a tenu une réunion du Cabinet dimanche, et une réunion du caucus, lundi. Ont eu lieu ensuite une réunion avec les premiers ministres des provinces, et enfin une conférence de presse, lundi après-midi. Pourquoi le premier ministre a-t-il attendu plusieurs jours avant de s'adresser à la Chambre, et quelles justifications a-t-il présentées?
    Il est difficile de déterminer si la décision du gouvernement est justifiée sans disposer de l'information appropriée. Il n'y a eu aucune séance d'information. Aucun renseignement des services secrets n'a été fourni. Que ce soit une question d'incompétence ou de malfaisance, c'est vraiment déplorable.
    Pourquoi le comité n'a-t-il pas été créé immédiatement? A-t-on des preuves montrant que la sécurité publique est sérieusement comprise ou qu'il y a un danger imminent? Une telle information n'aurait-elle pas dû être immédiatement transmise aux députés ou, à tout le moins, à un petit groupe de représentants de tous les partis? Si on avait voulu dépolitiser cette question, l'information aurait été transmise sans délai. Autrement, on peut en tirer la conclusion que les jeux politiques y étaient pour quelque chose.
    Pourquoi les ministres ont-ils choisi d'informer les médias avant la Chambre? Ils ont tenu des conférences de presse et participé à des entrevues en laissant entendre que des terroristes se trouvent devant le Parlement, et ce, sans présenter un seul élément de preuve à la Chambre. Comment peut-on alors s'étonner du fait que les Canadiens perdent confiance dans nos institutions publiques? C'est peut-être parce que le premier ministre et le gouvernement ont montré très peu de respect pour la Chambre et les institutions.
    Après tout, au début de la pandémie, le gouvernement a proposé de s'accorder un pouvoir illimité de dépenser pendant près de deux ans, sans que le Parlement n'exerce de supervision. Le même gouvernement a prorogé le Parlement pour contrecarrer une enquête menée par un comité. À ce jour, nous n'avons toujours pas vu les documents du laboratoire de Winnipeg même si des députés les ont demandés au gouvernement. On me pardonnera d'être sceptique quant au bien-fondé de cette mesure sans preuves à l'appui.
    Il ne faut pas sous-estimer l'effet que peut avoir la capacité de geler les comptes bancaires d'une personne. Cet effet ne durera pas seulement 30 jours: une personne pourrait voir son accès à des services financiers réduit pendant 30 ans ou plus. Des gens dont la relation avec l'État est déjà difficile, voire complètement rompue, seront davantage exclus de la société.
    Il faut donc utiliser ce pouvoir avec parcimonie, si on y a recours. À noter que le gouvernement n'a pas vraiment précisé comment il prévoit l'utiliser. À titre d'exemple, quel est le processus employé pour trouver les personnes concernées? Ces pouvoirs s'appliqueront-ils seulement aux organisateurs de la manifestation ou à toute personne qui a manifesté sur la Colline du Parlement ou a fait un don, même de quelques dollars, à la cause? De quels recours disposeront les gens à l'endroit des institutions financières si ces pouvoirs sont appliqués par erreur ou de manière inégale?

  (0825)  

    Ce ne sont pas des pouvoirs purement accessoires. Ils ne devraient pas être négligés, minimisés ou sous‑estimés. J'aborde toute décision avec un esprit ouvert. Cependant, en l'occurrence, les conséquences sur les particuliers sont trop lourdes et le précédent créé, trop monumental, pour que je puisse m'abstenir de poser des questions ou d'exprimer des inquiétudes légitimes. Nous créons un dangereux précédent.
    Nous devrions utiliser le pouvoir imposant de l'État avec beaucoup de prudence. L'utilisation par le gouvernement d'une loi n'ayant jamais été invoquée auparavant pour répondre à la situation actuelle me semble une réaction disproportionnée, quand d'autres solutions s'offraient à lui.
    Nous devrions faire attention de ne pas normaliser l'utilisation d'un outil démesuré en pareilles circonstances. Nous avons un problème très grave si nous devons envisager d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence chaque fois qu'une manifestation dure un certain temps. À bien des égards, le fait que le gouvernement ait dû recourir à cette loi met en cause sa gestion globale de la situation.
    Je me dois donc de faire comprendre à mes collègues que le seuil établi par les tribunaux n'a pas été atteint et que, d'un point de vue juridique, sauf erreur de ma part, le gouvernement n'est pas justifié d'invoquer cette loi.
    Même si la Loi sur les mesures d’urgence est la question dont la Chambre est saisie aujourd’hui, nous devrions profiter de ce moment pour réfléchir sur les raisons qui nous ont conduits où nous en sommes aujourd’hui, et les leçons que nous pourrions en tirer pour le futur. Les démocraties se caractérisent par leur capacité à tenir des débats raisonnables pour s’accorder sur la façon dont la société doit fonctionner. Malheureusement, en cours de route, nous avons perdu cette capacité à écouter les autres ou à tenir compte du point de vue de nos voisins. Nous tombons trop rapidement dans le manichéisme et nous sommes trop prompts à demander à chacun de choisir son camp. Pour ou contre, droite ou gauche, on laisse trop peu de place à la nuance, à la réflexion ou au compromis. Ne pas être d’accord ne devrait pas poser de problème.
    Je compatis avec ceux qui sont exaspérés par la pandémie et les mesures gouvernementales. Nous sommes nombreux à être exaspérés. Nous sommes fatigués des restrictions de voyage trop punitives, nous sommes contrariés par les exigences superflues et contradictoires en matière de test, et nous sommes inquiets de perdre notre gagne-pain à cause de nos choix médicaux.
    Certaines règles mises en place sont fondées sur des motifs politiques plutôt que scientifiques. Cela a généré de profonds clivages dans notre société, et il faudra un certain temps pour nous en remettre. Les deux dernières années ont été pénibles, et personne n’est entièrement irréprochable dans ces combats rhétoriques.
    C'est donc à nous tous de faire partie de la solution. Personnellement, je me demande si j'aurais pu dénoncer plus tôt des comportements aberrants ou si j'aurais pu faire preuve de plus d'empathie à l'égard de mes voisins. Qu'est-ce que je pourrais faire maintenant pour être une force positive à la Chambre et à l'extérieur de celle-ci?
    Le changement de ton doit venir d'en haut. Le premier ministre doit avoir un discours d'espoir, parce que les Canadiens ont besoin d'espoir. L'hyperpolitisation de la situation ne fera qu'empirer cette dernière. Un premier ministre qui ne tient pas compte de l'opinion de millions de Canadiens avec qui il n'est pas d'accord et la rejette n'est pas un dirigeant digne de ce nom. Cette attitude stigmatise, sème la division et envenime la situation.
    Nous devons opter pour l'empathie plutôt que le jugement, pour le dialogue plutôt que le silence, pour la persuasion plutôt que la coercition. Nous devons trouver des façons de désamorcer la situation. Il faut rapprocher les gens plutôt que les inciter à s'éloigner davantage.
    Les grands dirigeants arrivent à faire des introspections. Nous devons réaliser que des gens sont venus dans la capitale du pays et qu'ils se sont massés sur les viaducs partout au pays notamment parce qu'ils en avaient assez d'être humiliés et marginalisés à des fins politiques. Une introspection me semble requise.
    En 2013, le premier ministre, alors chef de l'opposition, avait affirmé que le rôle d'un premier ministre est de rendre le pays plus fort, pas de faciliter la division. L'heure est au leadership. C'est ce genre de comportement que j'attends du premier ministre. Les Canadiens comptent sur lui.

  (0830)  

    Monsieur le Président, je félicite mon collègue du ton de ses observations aujourd'hui.
    Nous paraîtrions tous beaucoup mieux si nous cherchions un terrain d'entente et tentions de régler les problèmes plutôt que d'aggraver la situation. Les Canadiens regardent ce débat en ce moment.
    Comme beaucoup d'entre nous, j'ai suivi le déroulement des événements hier. Malgré tout ce que dit mon collègue, j'ai entendu le chef intérimaire Steve Bell ainsi que d'anciens chefs de police et dirigeants de la GRC dirent sans équivoque que l'opération amorcée hier, qui n'est qu'une étape dans la résolution du conflit, n'aurait pas été possible sans l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Le député n'a-t-il pas entendu ces mêmes propos hier? Ne convient-il pas qu'il est important que nous appuyions tous le recours à cette loi pour commencer à résoudre la situation?

  (0835)  

    Monsieur le Président, j'ai écouté la conférence de presse d'hier dont parle la députée et j'ai entendu le chef de police dire que l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence a été utile.
    Je sais que nous aimons souvent discuter de sémantique à la Chambre, et je suis convaincu que c'est ce que nous ferons le reste de la journée ainsi que demain, mais il y a une différence entre une chose utile et une chose absolument nécessaire. À mon avis, c'est une distinction importante. Nous ferons la lumière sur cette affaire. Je suis convaincu que cette histoire fera l'objet d'une enquête et que nous aurons amplement le temps de critiquer les choses en rétrospective. Cela dit, voilà ce que j'ai entendu quand j'ai écouté la réponse du chef de police hier.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie sincèrement mon collègue de Simcoe-Nord de son intervention. Nous venons peut-être d'entendre le discours le plus constructif et le plus nuancé qu'il nous sera donné d'entendre dans le cadre de ce débat. Cela me calme énormément et me donne confiance en l'avenir. Je tiens donc à féliciter sincèrement mon collègue.
    J'aimerais entendre davantage mon collègue. Fondamentalement, il est question de notre démocratie et du message qu'on envoie aux Canadiens. J'aimerais l'entendre sur la façon dont on doit communiquer avec les Canadiens et sur le message qui doit être envoyé, particulièrement à travers le filtre des médias. Est-ce qu'une sélection se fait de ce côté? Dans le contexte actuel, est-ce que le gouvernement utilise les médias, la population et l'armée à des fins politiques?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie le député et j'ai hâte au jour où je pourrai prendre la parole dans cette Chambre et répondre en français, sa langue maternelle. J'espère être en mesure de le faire avant mon départ de cet endroit.
    Il est essentiel que tous les Canadiens reconnaissent que nous sommes devenus très polarisés dans les médias. Mon collègue a évoqué les médias. Chacun a droit à ses opinions, mais il est important de garder l'esprit ouvert. En fin de compte, la question est de savoir s'il est justifié que le gouvernement utilise et applique l'énorme pouvoir de l'État alors qu'il est peut-être possible de recourir à d'autres moyens. Nous avons vu à d'autres postes frontaliers qui avaient été bloqués des résolutions sans recours à la Loi sur les mesures d'urgence, et je crois que nous devons nous demander si les mesures ici sont proportionnelles. Est-ce que les sanctions sont proportionnelles?
    Monsieur le Président, comme de nombreux députés, je suis un ami proche de Bruce Stanton, un ancien député exceptionnel de Simcoe-Nord. J'aimerais mentionner, par votre entremise, au député actuel de Simcoe-Nord que son discours aujourd'hui témoigne du même haut degré d'esprit parlementaire que nous attendons maintenant de cette circonscription, et je suis heureux de constater que la tradition se poursuit.
    Je pense que le député reconnaîtra que les gens d'Ottawa ont beaucoup souffert au cours de cette occupation. Des milliers de personnes ont perdu leurs emplois, des petites entreprises ont fermé leurs portes et les habitants du centre-ville d'Ottawa ont subi des séquelles permanentes. La pollution, le bruit et l'intimidation ont été épouvantables. Il est donc important pour les parlementaires de réagir. Comme il l'a mentionné, nous devons prendre soin de nos concitoyens.
    La Loi sur les mesures d'urgence a donné lieu à quelques proclamations. Comme un de nos collègues l'a mentionné, selon la police, les mesures mises en place grâce aux règlements qui ont été adoptés ont fait une réelle différence pour empêcher l'arrivée d'autres manifestants sur la Colline. Jusqu'à maintenant, nous avons évité les blessures graves.
    Le député conviendra-t-il que le fait que des milliers de manifestants n'ont pu répondre à l'appel des organisateurs du convoi de se rendre sur la Colline du Parlement a sauvé des vies et assurément empêché des gens...
    Le député de Simcoe-Nord peut répondre brièvement.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question ainsi que de sa mention de l'excellent travail accompli par l'ancien député de Simcoe‑Nord, Bruce Stanton, pour qui j'ai beaucoup de respect.
    Encore une fois, je pense que tout est relatif. Le recours aux injonctions du tribunal s'est révélé très efficace. Une jeune femme s'est adressée au tribunal et a obtenu une injonction pour faire cesser les concerts de klaxons des camions, et ce jour‑là, les klaxons se sont tus pour un bon bout de temps. La question devrait donc être de savoir si cette loi est nécessaire, et si le gouvernement en était absolument réduit à cette solution de dernier recours. Je vais attendre les réponses.

  (0840)  

[Français]

    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Egmont.

[Traduction]

    Je prends la parole en cette Chambre, ce matin, et je ressens de la tristesse à cause de ce qui se passe à l'extérieur de notre Parlement, mais je me sens également privilégiée de pouvoir faire entendre la voix de notre communauté, celle d'Orléans, qui m'a confié, une fois de plus en 2021, la tâche de la représenter à la Chambre des communes, sachant bien l'importance des mesures de santé publique.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour débattre de la motion portant sur le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Adoptée en 1988, cette loi, la Loi sur les mesures d'urgence, instaurait une nouvelle forme de surveillance parlementaire en exigeant le respect de la Charte des droits et libertés. Nous avons invoqué cette loi le 14 février.
    En tant que société, nous devons envisager cette mesure dans la perspective des valeurs que nous partageons tous, notamment la démocratie et l'État de droit. Quant à la perspective des gens d'Orléans, les appels ont été nombreux au cours des 22 derniers jours.

[Français]

    Après deux ans de pandémie, la fatigue généralisée s'est fait sentir, mais grâce à un taux de vaccination extraordinairement élevé, le niveau de stress des familles et des commerçants a commencé à baisser. L'espoir de commencer à vivre dans une certaine normalité était à nos portes; il était palpable.

[Traduction]

    Puis un convoi de camions a décidé de prolonger son séjour dans la capitale nationale au-delà du raisonnable. Aujourd'hui, samedi, nous en sommes au 23e jour. Des gens, des voisins, des proches et des résidants, lorsque je fais mon épicerie dans les magasins locaux, m'ont font part de leurs réflexions. Ils veulent que nous fassions quelque chose.
    Nous avons travaillé fort avec notre partenaire municipal et, le 6 janvier, la Ville d'Ottawa a déclaré l'état d'urgence. Ensuite, le 11 février, c'était au tour du gouvernement provincial de l'Ontario à déclarer l'état d'urgence. Il faut comprendre ce que les commerces et les résidants du centre-ville ont enduré au cours des 23 derniers jours.
     J'étais propriétaire d'une entreprise à Orléans avant d'entrer en politique. Aussi emballant que cela puisse être, le travail d'un propriétaire d'entreprise et d'un entrepreneur n'est pas facile. Il faut faire des paiements, s'occuper des salaires, gérer les employés et payer le loyer. Les propriétaires d'entreprises à Orléans et à Ottawa sont nos voisins et nos amis. Ce sont des gens que nous avons appris à connaître, des gens avec qui nous avons noué des amitiés et des relations. Ils en arrachent depuis le début de la pandémie.
    Je suis de tout cœur avec les résidants du centre-ville d'Ottawa et avec les entreprises qui comptaient ouvrir le 31 janvier. Ils avaient hâte de connaître des jours plus heureux. Ils s'apprêtaient à faire ce qu'ils aiment. Ils espéraient ouvrir leurs commerces, être là pour leurs employés, et je dois dire que nous espérions pouvoir les soutenir.
    Je répète: les petites entreprises sont le cœur de notre économie. Je parle tous les mois avec des entrepreneurs de ma zone d’amélioration commerciale locale, c'est-à-dire la Zone d’amélioration commerciale du Cœur d’Orléans. Nous savons que les entreprises avaient besoin du soutien du gouvernement dès le début de la pandémie et nous le leur avons donné. Nous avons mis en place plusieurs mesures pour les appuyer.
    Comme je l'ai dit, le 31 janvier devait représenter un nouveau départ pour les entreprises. C'était censé être une bonne journée pour eux, car le gouvernement progressiste-conservateur de l'Ontario assouplissait les mesures de santé publique. Malheureusement, ce ne fut pas le cas pour les commerces du centre-ville d'Ottawa.
    Nous avons travaillé si fort ces deux dernières années. Nous avons uni nos efforts pour le bien des collectivités, des provinces et du Canada. Nous avons écouté les experts. Nous avons fait ce qu'il fallait pour voir nos proches et pour protéger les aînés.

  (0845)  

[Français]

    Nous espérions finalement un retour à la normale, mais ce ne fut pas le cas pour tout le monde. Ce fut une tout autre situation pour les résidants du centre-ville et ses commerçants, qui n'ont pas eu droit à cette opportunité.

[Traduction]

    Ils n'y ont pas eu droit parce qu'ils ont été victimes du blocage illégal, ce qui est inacceptable.

[Français]

    Il m'est difficile d'expliquer ce que je ressens relativement à ce blocage illégal. Cela fait 23 jours que nous ne pouvons profiter de la beauté de la capitale, circuler librement dans les rues, côtoyer nos amis ou nous rendre à notre milieu de travail.
    Que dire de l'incidence de ce blocage illégal sur la qualité de vie des résidants, sur la santé de nos étudiants et sur celle des gens avec un handicap? Que dire de son incidence sur notre paix sociale, sur notre santé mentale et sur notre environnement?
    Ce sont les raisons pour lesquelles nous en sommes là maintenant. Ce sont les raisons pour lesquelles le gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence. Nous devons mettre fin à ce cauchemar.

[Traduction]

    Nous en sommes maintenant à un point où le gouvernement a senti le besoin d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence pour améliorer la capacité des provinces et des municipalités à mettre fin au blocage illégal.
    Je tiens à souligner que la déclaration de l'état d'urgence serait d'une durée maximale de 30 jours. Ces mesures sont ciblées, temporaires et proportionnelles. Nous les invoquons seulement après avoir épuisé toutes les options. Elles permettront à la GRC d'appliquer les lois municipales, provinciales et fédérales; elles permettront au gouvernement fédéral de mobiliser les services essentiels, comme les dépanneuses; elles accorderont de nouveaux pouvoirs aux forces de l'ordre pour contrôler les foules, interdire les barrages et garder les infrastructures essentielles ouvertes; et elles accorderont des pouvoirs accrus pour mettre un frein au financement à l'appui des blocages. Il est important que les gens d'Orléans qui nous écoutent comprennent cela.
    Soyons clairs sur les répercussions de l'application de ces mesures: les mesures ne feront pas appel à l'armée, ne limiteront pas notre liberté, ne limiteront pas la liberté de réunion pacifique et ne suspendront pas les droits fondamentaux.
    Parfois, quand les gens parlent d'Ottawa entre amis et en famille, ils comparent la ville avec d'autres capitales ou d'autres villes et ils qualifient parfois Ottawa de ville tranquille ou peu animée. Eh bien, je peux leur assurer que, alors que je prends la parole à la Chambre aujourd'hui, j'ai hâte de retrouver ma ville et mon centre-ville tranquilles, où il est notamment possible de se promener en famille, de passer du bon temps avec ses enfants dans un musée, de visiter ses proches ou de faire une simple promenade dans son quartier en toute sécurité avec son animal de compagnie préféré.
    Monsieur le Président, l'un de mes concitoyens voulait que je pose une question au sujet de l'ingérence extérieure dans notre démocratie.
     Klaus Schwab est à la tête du Forum économique mondial et il s'est vanté que son organisation subversive a infiltré des gouvernements partout dans le monde. Il a déclaré que son organisation a infiltré plus de la moitié des cabinets canadiens.
    Par souci de transparence, la députée peut-elle nommer les ministres qui appuient le programme du Forum économique mondial? Je crains que le...
    À l'ordre. Le député était en train de poser une excellente question, mais le signal audio et vidéo est très mauvais. Je suis désolé. Essayons de nouveau.
    Le député...
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
    Le député propageait ouvertement de fausses informations. Cela ne relève pas du débat. Nous devons dénoncer la désinformation...
    Cela relève plutôt du débat.
    La période des questions et observations se poursuit. La députée de Lambton—Kent—Middlesex a la parole.
    Monsieur le Président, la députée dit que cette loi ne prive personne de la liberté d'expression ou de la liberté de réunion, mais nous en sommes rendus au point où, partout au Canada, des gens ont l'impression de ne pas avoir voix au chapitre. Nous en sommes rendus au point où le gouvernement a recours à la mesure la plus extrême à sa disposition pour faire taire des Canadiens qui sont ici pour se faire entendre.
    Quelles sont les trois premières mesures que le gouvernement a prises pour ne pas avoir à déclencher l'application de cette loi?

  (0850)  

    Monsieur le Président, c'est une très bonne question parce qu'elle me donne l'occasion de rappeler ce que le gouvernement fait depuis le début. Il est en rapport avec ses partenaires municipaux et provinciaux.
    Comme il est question aujourd'hui de démocratie, il y a un souvenir dont je voudrais faire part à la Chambre. Avant de me lancer en politique fédérale, j'étais députée provinciale. Tous les jeudis, un Canadien d'origine asiatique se rendait à Queen's Park pour exprimer ses idées sur le monde, du matin au soir, dans une langue qui m'est inconnue. Je l'écoutais parler et j'étais fière d'être Canadienne. Je sais qu'il y a des pays où les gens n'ont pas la chance de s'exprimer ainsi. Or, ce qui se passe ici n'est pas une manifestation pacifique.

[Français]

    Monsieur le Président, à l’intérieur du décret, il y a deux éléments et le principal porte sur l’économie. Hier, il a été démontré qu’on a gelé les comptes de certains camionneurs, ainsi que les prêts liés à leurs camions. Maintenant que c’est fait et que les camionneurs sont de retour à la maison, est-ce que ces restrictions vont tomber et quand?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Comme parlementaires et comme gouvernement, nous ne sommes pas là pour diriger les instructions, les opérations policières et ce que la justice est en train de faire. Je laisse cela aux gens qui sont mieux qualifiés que moi quant au processus juridique qui est enclenché depuis les derniers jours. J’aimerais juste noter que la page GoFundMe a arrêté d’appuyer les participants aux blocages illégaux ici à Ottawa, parce qu’on a vu que ces gens avaient peut-être des intentions un peu moins honnêtes que d’autres.

[Traduction]

    Qujannamiik, Uqaqtittiji. Les idéologies associées à ces extrémistes et les symboles qui ont été brandis pendant les manifestations sont dangereux. Ces efforts ont été efficacement organisés par les leaders des groupes extrémistes. Les arrestations qui ont commencé hier se poursuivent aujourd'hui. Il est toujours possible de voir des extrémistes installés sur la rue Wellington. Les leaders des groupes extrémistes doivent être tenus responsables de leurs actes avec toute la vigueur de la loi.
    La députée d'Orléans convient-elle que les extrémistes ont pris des mesures extraordinaires pour mettre en danger la démocratie, et que nous devons faire notre possible pour que les idéologies qu'ils véhiculent ne se répandent pas davantage?

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de cette question extrêmement délicate. Depuis le début, nous avons vu des gens faire la promotion de drapeaux haineux, susciter des conversations jusqu’à dire que le premier ministre du Canada devrait être mort, qu’il devrait être tué. Je suis effectivement d'avis qu’au Canada nous devons nous attaquer aux problèmes liés aux gens qui sont extrémistes.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c'est avec des sentiments partagés que je participe au débat. Je me sens ainsi, car bon nombre des électeurs de ma circonscription ont communiqué avec moi au sujet de la situation troublante ayant cours dans la capitale nationale. D'aussi loin que l'Île‑du‑Prince‑Édouard, ils s'inquiétaient pour les personnes vivant ici, à Ottawa. Ils étaient également préoccupés par le ton du dialogue. Ces électeurs m'ont demandé pourquoi les gouvernements, au pluriel, laissaient la situation aller, pourquoi ils ne prenaient pas de mesure.
    En prenant la parole aujourd'hui et en écoutant beaucoup d'interventions, j'observe que la discussion tourne autour des manifestations. Je participe à la vie publique depuis longtemps. J'ai été la cible de nombreuses protestations. Je suis convaincu, monsieur le Président, que vous en avez vu quelques-unes à titre de politicien provincial. Ne minimisons pas les événements survenus ici dans les rues d'Ottawa en disant qu'il s'agit d'une manifestation, un type d'événement auquel ont fait face tous les politiciens et les parlementaires au fil des ans. La population a le droit de manifester. Elle a le droit de tenir des manifestations pacifiques. Comme je l'ai indiqué, j'ai été la cible de nombreuses d'entre elles. Je respecte pleinement le droit des citoyens de protester et d'exprimer leur mécontentement à l'égard des actions du gouvernement en tout temps. Toutefois, il faut le faire de manière pacifique, dans le respect.
    Disons-le clairement. Ce dont nous avons été témoins ici à Ottawa n'est pas une manifestation. Appelons les choses par leur nom: il s'agit d'une occupation illégale qui visait à intimider la population et les parlementaires.
    Quiconque veut prendre le temps de s'informer et d'en apprendre plus sur les objectifs des dirigeants de ce groupe devrait aussi prendre le temps de s'inquiéter et de réfléchir. C'est ce qu'il a été si décourageant de constater dans cette affaire au cours des trois dernières semaines. Ce qu'on a fait passer pour une manifestation de camionneurs a été détourné par des individus qui ont d'autres motivations. Tout le monde peut voir cela. Aucun gouvernement ou parlementaire ne peut tolérer cela. Aucun individu ou groupe d'individus n'a le droit de bafouer de façon aussi flagrante les droits d'autres individus, comme nous l'avons vu ici à Ottawa au cours des dernières semaines.
    Le gouvernement doit absolument protéger les droits de tous, mais il est tout simplement inacceptable de participer à une occupation illégale en scandant « liberté », tout en affichant un mépris aussi flagrant pour la liberté, l'équilibre mental et le bien-être de nos concitoyens. Nous n'avons qu'à regarder les entrevues réalisées avec des résidents d'Ottawa. Des personnes handicapées ont été traumatisées et forcées de rester à la maison. Elles ont peur de sortir. Ce n'est pas le type de manifestation pacifique que notre pays encourage et soutient. C'est, comme nous l'avons appelée, une manifestation illégale. Nous ne pouvons pas minimiser l'importance de la différence entre les manifestations qui ont eu lieu dans notre pays et celles qui avaient pour but de renverser un gouvernement. Toute personne qui le souhaite peut prendre le temps d'examiner les objectifs des organisateurs de ce groupe, leurs activités et les personnes qui les appuient et leur procure un financement. Tous les parlementaires devraient s'inquiéter.

  (0855)  

    Le gouvernement a pris les mesures nécessaires pour reprendre le contrôle de cette occupation illégale. Je tiens à saluer et à féliciter les policiers et policières qui font respecter les lois de ce pays. Nous assistons au démantèlement d'une occupation illégale par une force policière professionnelle dans un pays démocratique. Voilà ce qui se passe dans les rues d'Ottawa aujourd'hui: des policiers professionnels assurant la primauté du droit dans un pays démocratique. Voilà pourquoi nous élisons un Parlement et un gouvernement. C'est pour conférer les pouvoirs et les outils juridiques nécessaires afin de veiller à ce que quelques individus clamant venir protéger leurs libertés ne briment pas les droits de qui que ce soit.
    Ce débat se poursuivra pendant quelques jours et il est intéressant d'entendre les divers points de vue. Je suis ici depuis trois semaines et j'ai observé le déroulement des événements. J'ai même été témoin de certains gestes de haine. Alors que je marchais avec mon adjoint parlementaire, un manifestant lui a dit de retourner d'où il venait parce qu'il a la peau brune. Le ton employé était très raciste et malveillant. Mon adjoint a les mêmes droits que moi parce qu'il est Canadien. Nous devons veiller à ce que le Parlement ne succombe pas à la haine dont font preuve certains individus. Nous ne pouvons pas en devenir les champions. On ne peut la légitimer, même par association.
    Voilà pourquoi je prends la parole aujourd'hui. Les personnes d'Egmont, que je représente, forment une communauté caractérisée par le respect et le soutien mutuel. C'est une population fière de son pays et qui appuie l'unité nationale.
    Toutefois le comportement d'un parti en particulier me perturbe depuis quelques semaines. Il était intéressant d'observer l'absence de leadership à la fois du Parti conservateur et de sa cheffe intérimaire, qui se sont ralliés à l'aspirant à la direction du parti, un député qui a tenté de légitimer cette manifestation illégale en s'y associant. Il était perturbant de voir l'absence de leadership du Parti conservateur, de même que de la cheffe actuelle et de l'aspirant à la direction du parti, qui ont tenté, par association, de légitimer cette occupation illégale.
    En tant que parlementaire, je vais toujours me ranger du côté de la primauté du droit. Je vais toujours appuyer les mesures législatives qui protègent les droits de la personne et empêchent quiconque de revendiquer son droit à participer à une occupation illégale au détriment des droits d'autrui.

  (0900)  

    Monsieur le Président, il est intéressant de suivre ce débat et d'entendre les raisons des députés libéraux pour soutenir cette ingérence gouvernementale sans précédent grâce à la Loi sur les mesures d'urgence. Ce qui est intéressant, ce sont les suppositions des députés libéraux, en particulier par rapport aux manifestants, suppositions qui correspondent à toutes les accusations portées par le premier ministre à l'encontre des manifestants, c'est-à-dire que ce sont tous des racistes et des misogynes. C'est vraiment malheureux.
    Nous avons aussi entendu des députés admettre que les Canadiens en ont assez de cette pandémie. Ils sont fatigués et veulent voir la lumière au bout du tunnel. Puisqu'il admet que les Canadiens en ont assez de la pandémie et des restrictions, pourquoi le député a‑t‑il voté contre notre motion de la semaine dernière qui demandait au gouvernement de soumettre un plan afin que les Canadiens puissent voir la fin des restrictions et reprendre espoir?

  (0905)  

    Monsieur le Président, j'ai été très clair. Je parlais des dirigeants de ces manifestations illégales et non de l'ensemble de ceux qui manifestent dans les rues.
    Si j'ai voté contre la motion du Parti conservateur — et je vais utiliser un terme qui n'est peut-être pas parlementaire —, c'est parce qu'elle est hypocrite. Elle l'est parce que la majorité des mesures sanitaires obligatoires ont été instaurées par les gouvernements provinciaux.
    Je tiens à préciser que je suis favorable aux mesures sanitaires obligatoires et aux diverses mesures qui ont été prises par le gouvernement de l'Île‑du‑Prince‑Édouard, sous la gouverne du premier ministre King. Je n'ai pas eu accès aux conseils que les autorités de la santé publique lui ont donnés, mais je tiens pour acquis qu'il a suivi ceux-ci dans le meilleur intérêt des habitants de l'Île-du-Prince-Édouard.
    Voilà pourquoi c'est en travaillant avec les gouvernements provinciaux que les mesures sanitaires obligatoires pourront être levées.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'Egmont de son intervention, que je qualifierais plutôt de constructive.
    Son intervention est beaucoup plus constructive que celles de plusieurs de ses collègues, qui semblent vouloir faire de la propagande. Je peux aussi dire d'un autre député qu'il a été constructif, et c'est celui de Hull—Aylmer. J'invite l'ensemble des libéraux du parti du gouvernement à adopter cette attitude.
    En fait, la question que je souhaite poser à mon collègue est la même question qu'a posée mon collègue de Rivière-des-Mille‑Îles.
    Les membres du gouvernement connaissent-ils les conséquences qu'il y aura pour ceux dont le compte en banque a été gelé?
    J'ai l'impression qu'on a improvisé cela et qu'on n'a pas de réponse à cela. On a l'impression que le gouvernement ne comprend pas les conséquences des mesures qu'il a mises en place.
    Le député d'Egmont peut-il m'éclairer à cet égard? Sinon, peut-il le faire avant lundi soir?

[Traduction]

    Monsieur le Président, en ma qualité de parlementaire, je vais appuyer toute mesure législative qui cherche à repérer et à saisir les fonds de provenance illicite et d'origine étrangère utilisés pour semer le chaos dans un pays démocratique.
    Monsieur le Président, les sujets abordés en ce moment soulèvent les passions et j'entends de plus en plus de propos qui sèment la discorde à la Chambre. C'est l'équivalent de provoquer la bête que sont les extrémistes. Les dirigeants de ce mouvement entretiennent des liens avec des groupes de nationalistes blancs, comme nous en avons eu la preuve à la suite de certaines arrestations survenues hier. De plus, ils n'hésitent pas à détourner des mouvements pour d'autres fins.
    Pourquoi le gouvernement a-t-il laissé aller les choses aussi longtemps? Pourquoi le gouvernement a-t-il attendu que la situation soit si hors de contrôle, au point où nous en sommes arrivés à ce qui se passe présentement? Après avoir vu des policiers faire des accolades à des extrémistes dans certains cas, le député croit-il qu'il est nécessaire de lancer une enquête publique sur les services policiers dans notre pays?
    Monsieur le Président, la réponse évidente à cette question, c'est qu'il y a une procédure établie. Le gouvernement doit suivre la procédure établie. Le premier corps policier concerné a été le service de police municipal de la Ville d'Ottawa. Les demandes d'intervention sont ensuite allées à la province de l'Ontario, puis au gouvernement du Canada. Le gouvernement du Canada a suivi la procédure établie et attendu que le gouvernement de l'Ontario s'occupe de la situation.
    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Hamilton-Centre.
    Je suis toujours fier d'intervenir à la Chambre. Je ne suis décidément pas fier de la situation dans laquelle notre nation se trouve actuellement, mais je suis fier d'être ici, parce que quand nous sommes confrontés à une crise comme celle-là, nous avons tous la responsabilité de faire le nécessaire pour la régler afin que les gens puissent vivre en sécurité et que la primauté du droit soit maintenue.
    Comment en sommes-nous arrivés là? Le Canada, où règne traditionnellement une forte solidarité sociale, est l'un des pays où la COVID a fait le moins de morts. L'arrivée de la vague Omicron nous a toutefois frappés comme un bâton de baseball, et je crois que cela nous a tous déstabilisés. Nous avons tous souffert psychologiquement. Malgré cela, dans notre région, j'ai vu des gens faire la file pour recevoir leur première, deuxième ou troisième dose de vaccin. J'ai vu des bénévoles et une fantastique solidarité sociale.
    Comment les choses se sont-elles désagrégées aussi vite? Nous sommes pourtant arrivés à un point où les restaurants sont en train de rouvrir, les enfants sont de retour à l'école, et ma chère mère et ma fille peuvent planifier un voyage dans le Sud, ce que je n'ai jamais fait moi-même n'étant pas amateur de chaleur, mais elles peuvent le faire puisque le pays ouvre de nouveau. Alors que notre solidarité sociale nous a permis de traverser l'un des pires moments de la pandémie, nous assistons à un éclatement.
    En tant que néo-démocrate, je suis disposé à accepter des mesures pour rendre la ville sécuritaire, mais les néo-démocrates veulent une enquête publique complète. Nous voulons une enquête sur l'incapacité de la police d'Ottawa, de la commission de police et du maire à assurer la sécurité des gens, car nous n'aurions jamais dû nous retrouver dans cette situation. Nous voulons une enquête pour comprendre comment le pont Ambassador, un lien vital pour notre pays, a pu être fermé parce que des gens croient à des théories du complot concernant les vaccins. Nous avons aussi besoin d'une enquête pour examiner les dommages causés à notre économie. Tous les intervenants du secteur de l'automobile s'entendraient pour dire que ce sont des dommages à long terme. Une enquête est nécessaire.
    Juste avant la situation actuelle, j'ai rencontré six membres de la Première Nation d'Attawapiskat qui sont venus transmettre un message de paix au gouvernement. Les services de sécurité n'ont pas perdu une seconde avant de les aborder, mais les personnes qui se trouvent devant le Parlement ont pu installer leurs châteaux gonflables et bloquer toutes les grandes intersections sans que rien ne soit fait pour les arrêter. C'est la raison pour laquelle nous avons besoin d'une enquête. Nous avons besoin de réponses; les Canadiens ont besoin de réponses.
    En janvier, le Centre intégré d’évaluation du terrorisme du Canada a affirmé qu’il était « probable » que des extrémistes fassent partie du convoi et qu’il y ait un « élément déclencheur et une possibilité que des loups solitaires mènent une attaque terroriste ». Cela ne veut pas dire que les gens qui ont bloqué les ponts étaient mélangés à tout cela. Par contre, le Centre intégré d’évaluation du terrorisme du Canada a reconnu qu’il y avait un risque d’attaque par un loup solitaire. Comment se fait-il, alors, que les gens qui sont arrivés ici avec leurs camions aient été invités sur la Colline du Parlement et qu’on leur ait permis de se stationner? Était-ce un échec sur le plan de la sécurité ou était-ce le résultat de collusion? Je peux affirmer aux députés qu’il y a des conducteurs de camions et d’autres véhicules à Ottawa qui sont juste venus ici manifester, mais qui ne pensaient pas qu’ils pourraient parvenir jusqu’ici, tout juste devant le bureau du premier ministre. Il faut qu’une évaluation soit faite.
    Nous savons que le Congrès américain demande à Facebook d’expliquer l’augmentation massive du nombre de faux comptes étrangers qui ont fait la promotion du convoi et fait de la désinformation russe. Les conservateurs ne parleront jamais de cela. Comment pouvons-nous échouer sur des questions de sécurité élémentaires dans ce pays? Il faut qu’il y ait une évaluation, et c’est pourquoi je demande une commission d’enquête. Les gens doivent savoir si la présente intervention va trop loin ou non. Il faut savoir comment autant d’argent, autant d’argent étranger, a été canalisé vers un compte de la droite utilisé pour l’attentat du 6 janvier.
    Je suis prêt à dire que, en tant que Canadien, je n’hésiterai jamais à me lever pour empêcher que des fonds occultes arrivent dans notre pays, et il faut mettre une loi en place pour que l’on s’assure qu’aucune activité politique dans notre pays ne soit financée par des comptes des îles Caïmans. Ce n’est pas une question partisane. C’est notre devoir de politiciens.

  (0910)  

    Je connais certains conservateurs que cela révolte aussi, mais ce ne sont pas les coupables qui manquent. Je blâme le premier ministre, qui a refusé de se tenir debout et qui n'a pas réussi à doter le pays d'une vision quand il en avait besoin. Je blâme aussi Doug Ford, qui multipliait les randonnées en motoneige et ratait réunion de sécurité par-dessus réunion de sécurité. Beaucoup de gens ont beaucoup de choses à se reprocher, à commencer par les conservateurs, qui semblent voir un avantage politique à défendre les extrémistes. Selon eux, le premier ministre devrait rencontrer les organisateurs du convoi, alors que ceux-ci sont arrivés ici avec une déclaration visant à faire tomber le gouvernement actuel, pourtant élu démocratiquement. Comment peut-on trouver acceptable le fait de rencontrer des gens qui veulent renverser le gouvernement?
    Qui sont ces gens, à qui la cheffe conservatrice par intérim voulait fournir les ressources nécessaires pour que leur mouvement ne s'essouffle pas et qu'elle voulait transformer en problème pour le premier ministre? Chris Barber est un raciste invétéré et il aime tous les camionneurs, tant qu'ils sont blancs. Il fait partie de ceux que, à entendre la cheffe par intérim de l'opposition, nous essayions de stigmatiser. Pat King s'en est pris à moi personnellement parce que j'ai osé prendre la parole ici même, ce qui est pourtant mon droit. C'est lui qui évoque l'idée d'abattre le premier ministre et d'ouvrir le feu sur les policiers. La cheffe intérimaire du Parti conservateur aurait aussi souhaité que le premier ministre rencontre Tamara Lich, qui s'est donné comme mission de faire voler le pays en éclats.
    Non, je ne négocierai jamais avec des gens comme cela. Leur place est derrière les barreaux. Le droit doit absolument primer. J'ai honte de ce que je vois depuis trois semaines. Nous n'aurions pas dû avoir besoin de ces outils. La Ville d'Ottawa aurait dû distribuer des contraventions. Les outils existants auraient dû être employés à meilleur escient, comme à Québec et à Toronto, mais nous avons hélas laissé la situation se dégrader au point d'en devenir incontrôlable.
    Si les occupants avaient envahi Thunder Bay ou Red Deer, la situation relèverait assurément de la province et de la municipalité, mais, en l'occurrence, il s'agit de la capitale nationale. Nous ne pouvons pas avoir l'air d'un État en déroute aux yeux du monde, mais nous ne parvenons même pas à contenir la situation. J'ai déjà exprimé ma frustration face aux échecs de la police d'Ottawa, mais, après avoir observé les policiers faire leur travail ces derniers jours, je peux affirmer que ce que nous avons vu hier est ce qu'il y a de mieux au pays en matière de maintien de l'ordre.
    Je connais certains agents de police qui sont venus du Nord. Je sais que des amis du Québec, de la Sûreté du Québec, sont ici. Il s'agit d'une situation terrible. C'est une honte nationale que nous en soyons rendus là, mais on doit s'assurer que les gens puissent circuler dans la ville. Le gars qui a un gros camion et qui décide de bloquer un carrefour important pendant trois bonnes semaines a plus de droits que les employés du Métropolitain, un restaurant qui a dû fermer ses portes, ou qu'une jeune femme que je connais qui s'est fait harceler et insulter. Ils affirment qu'il s'agit d'une manifestation pacifique. C'est pacifique pour l'homme blanc qui porte un drapeau canadien à l'envers sur son dos, mais ce ne l'est pas pour les résidants du centre-ville qui se font harceler à l'épicerie parce qu'ils portent un masque ou qui se font insulter et dire de retourner d'où ils viennent. J'ai été témoin de tels incidents.
    Encore une fois, je jette le blâme sur le service de police d'Ottawa parce qu'il n'a pas fait le travail qu'il était censé faire, et je jette aussi le blâme sur le maire. Comme législateurs, nous avons la responsabilité de dire qu'assez, c'est assez. J'exige cette enquête. Je veux savoir pourquoi le comité n'a pas été mi sur pied. Je veux des réponses. Je veux avoir l'assurance qu'on n'utilisera plus jamais de telles mesures contre des manifestations légitimes. Il nous faut des réponses.
    Je demande au gouvernement de rendre des comptes là‑dessus. Je fais la même demande au gouvernement provincial. En tant que législateur, je suis prêt à faire mon travail et à assumer ce qui doit être notre responsabilité la plus sacrée, soit défendre la primauté du droit et le droit des gens d'être en sécurité dans leur propre ville.

  (0915)  

[Français]

    Monsieur le Président, j'aimerais remercier mon collègue de l'Ontario de son excellent discours.
    J'aimerais lui poser une question assez simple. Est-il prêt comme moi à faire une enquête qui nous permettra d'aller au fond des choses afin de comprendre ce qui s'est passé, de déterminer pourquoi on a mal évalué la situation et de trouver des façons d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise?

[Traduction]

    Monsieur le Président, il nous faut une enquête, une enquête indépendante, car des députés ont été incapables de faire passer les intérêts du pays avant les intérêts locaux et partisans. Dans le cadre de cette enquête indépendante, il faut pouvoir obliger des gens à témoigner. Il n'y a jamais eu de règles ou de liens à l'échelle municipale, mais en ce qui concerne Ottawa, je tiens à ce qu'on nous parle de l'incapacité de la ville d'Ottawa à faire son travail et de ce qui s'est passé ici.
    Je veux en savoir plus sur ce que les Américains demandent, sur l'augmentation massive du nombre de comptes étrangers créés sur Facebook avant les événements. Nous devons savoir d'où cela provient. Nous devons savoir comment les fonds occultes été utilisés. Nous devons aussi être en mesure d'évaluer les demandes que le gouvernement a présentées pour nous assurer qu'on n'est pas allé trop loin, que les personnes qui ont été accusées l'ont été pour des raisons légitimes. Il faut exercer une surveillance. J'accueille favorablement la décision de l'Association canadienne des libertés civiles de s'adresser aux tribunaux. Il nous faut des mesures de surveillance.

  (0920)  

    Monsieur le Président, bien que je sois en désaccord avec la majorité de ce que le député affirme, il a tout à fait raison. C'est une honte nationale, puisque des journalistes du monde entier ont rapporté la situation, qui s'avère un échec cuisant. C'est une situation relevant de la police locale qui est devenue incontrôlable.
    L'objet de notre débat d'aujourd'hui est très simple. La Chambre confirme-t-elle la déclaration du gouvernement à l'égard de la Loi sur les mesures d'urgence? Je crains que le gouvernement ne l'ait pas justifiée. D'ailleurs, cette loi est censée servir de dernier recours lorsqu'une province n'arrive plus à s'acquitter de ses fonctions. La police relève de la compétence provinciale.
     Le député votera-t-il pour ou contre le gouvernement?
    Monsieur le Président, je remercie le député, mais je crois qu'il s'est emmêlé dans le préambule de sa question.
    La question de la surveillance est fondamentale. Le gouvernement a-t-il fourni la justification nécessaire? Un comité est censé être formé, et c'est ce que je souhaite. Cependant, nous voici au beau milieu d'une opération policière de grande envergure, que même les conservateurs reconnaissent selon moi. En fait, je retire ce commentaire, parce que je sais que les conservateurs considèrent que cette opération est du même acabit que celle de la place Tiananmen.
    Nous avons vu les policiers appliquer la primauté du droit avec des représentants de toute la région...
    Le député de Leeds—Grenville—Thousand Islands et Rideau Lakes invoque le Règlement.
    Monsieur le Président, comme il est important de maintenir l'ordre, vous pourriez peut-être demander au député de ne pas employer de vocabulaire et de propos incendiaires, qui font déraper le débat. C'est d'ailleurs ce qu'il tente de faire en comparant les événements qui se déroulent à Ottawa aux événements de la place Tiananmen.
    Je remercie le député de son intervention. Je pense que nous devrions tous essayer de travailler ensemble dans les circonstances et éviter d'aggraver la situation.
    Le député de Timmins—James Bay a la parole.
    Monsieur le Président, je commets, j'en suis conscient, une grave offense à l'endroit du député d'en face, membre de la génération geignarde, en parlant de son compte Twitter, qui évoque la place Tiananmen. Ce qui se déroule sous nos yeux est une opération policière menée sous la loupe des médias. Nous avons des effectifs des forces policières des régions de...
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Passons à la question suivante.
    Nous passons aux questions et observations. Le député de Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, de ce que j'ai compris du discours de mon collègue de Timmins—Baie James, c'est qu'il appuie la Loi sur les mesures d'urgence parce qu'il y a une crise nationale.
    C'est curieux, d'anciens députés du NPD pensent le contraire. Je me permets d'en citer deux anciens, Svend Robinson et Erin Weir, dont on peut lire les déclarations dans un article publié le 18 février dans le National Post.
    D'abord, Svend Robinson dit que, en 1970, le caucus du NPD mené par Tommy Douglas avait pris une position courageuse et fondée sur des principes contre la Loi sur les mesures de guerre, et que le NPD d'aujourd'hui, sous le député de Burnaby‑Sud, trahit cet héritage en soutenant les libéraux et la Loi sur les mesures d'urgence. Il dit que c'est une honte et qu'un précédent très dangereux est en train d'être créé.
    Quant à M. Weir, il mentionne qu'il est décevant de voir le NPD fédéral appuyer aujourd'hui la Loi sur les mesures d'urgence alors qu'il n'y a pas vraiment d'urgence nationale, comme le prévoit cette loi.
    J'invite mon collègue à la réflexion. Voici ma question: le NPD a dit qu'il allait possiblement retirer son appui à la Loi sur les mesures d'urgence, mais sous différents critères émotifs qu'on ne connait pas encore aujourd'hui.
    J'aimerais que mon collègue nous dise quels sont ces critères.
    Monsieur le Président, j'ai deux choses à dire.
    D'abord, je voudrais remercier l'Assemblée nationale du Québec, qui a offert son soutien à la population d'Ottawa en lui envoyant la Sûreté du Québec et son expertise. Je remercie donc M. Legault.

[Traduction]

    Deuxièmement, j'aimerais signaler à mon ami, qui ne siège pas ici depuis très longtemps, qu'il a omis une partie de l'histoire. Lorsque le gouvernement de Brian Mulroney a présenté la Loi sur les mesures d'urgence, les néo-démocrates ont dit:
« [...] nous sommes heureux que le ministre présente un projet de loi tendant à remplacer [la Loi sur les mesures de guerre]. »
« [Nous ne tenons] pas à rouvrir de vieilles blessures. J'espère plutôt que ce projet de loi, tel que modifié, saura achever le processus de guérison ».
    Les deux lois sont, en effet, différentes.

  (0925)  

    Nous nous sommes un peu égarés pendant les questions et réponses. Nous devons respecter le temps imparti pour que tous les députés aient la possibilité de participer au débat.
    Nous reprenons le débat. Le député d’Hamilton-Centre a la parole.
    Monsieur le Président, je partage les inquiétudes sérieuses de mes collègues de la Chambre qui comprennent les graves implications de ce moment critique de l’histoire du Canada. C’est un moment de crise pour la démocratie canadienne. Je crois en la démocratie. Je défendrai nos droits, comme je l’ai toujours fait. Je veux toutefois m’assurer que la défense de nos droits repose sur la primauté du droit, et non pas sur des discours creux et des jeux politiques, et certainement pas sur le décret d’une voyoucratie insurrectionnelle.
    J’étais présent à l’ouverture de ce débat et j’ai écouté attentivement tous les partis. Lorsque j'ai pris la parole pour faire ma déclaration, j’ai indiqué que nous devions entreprendre l'important travail de rétablir la confiance envers nos institutions et, sachant dans quel contexte se tient ce débat sur la déclaration de l'état d'urgence, mais surtout quelles pourraient être les implications futures d’une telle situation, nous devons aussi assurer une transparence et une responsabilisation accrues. Il apparaît maintenant très clairement à l’ensemble de la population canadienne à quel point notre démocratie est fragile et qu’il faudra travailler très fort pour la rétablir complètement, peu importe l’issue de l’occupation cette semaine.
    Je dois dire que j'espère toujours que la situation continuera de se résorber sans violence. J'espère qu'il n'y aura pas de nouvelle escalade de la violence. Il est peut-être trop tard pour le demander, mais les gens dans les rues devraient plier bagage afin que nous puissions nous concentrer de nouveau sur la crise de santé publique actuelle et continuer de travailler pour répondre aux besoins sanitaires des Canadiens aux prises avec la COVID‑19.
    En plus de ces difficultés, je tiens à souligner les répercussions disproportionnées de cette occupation sur les habitants et les travailleurs de la région, y compris le personnel de la Colline du Parlement et les fonctionnaires fédéraux, qui ont été plongés dans un désordre public total bouleversant leur vie nuit et jour. Depuis trois semaines, notre pays et sa capitale sont sous la menace d'une occupation soutenue et imprévisible alors que le monde nous observe. Des gens d'Hamilton‑Centre m'ont parlé de leur frustration et de leur déception par rapport à tous les ordres de gouvernement. Ils ont aussi l'impression que les services de police locaux ont complètement échoué à maintenir adéquatement la sécurité publique et à gérer ces actes illégaux d'insurrection qui menacent notre démocratie et les droits de tous les Canadiens partout au pays.
    Depuis trois semaines, nous avons vu des agressions, une tentative d'incendie criminel, de nombreux cas de harcèlement, que les personnes se trouvent chez elles, au travail ou à l'école, la promotion de la haine et d'autres comportements préoccupants, comme des membres du convoi qui se sont accordé faussement le pouvoir de détenir des gens. Il est inquiétant que, au lieu de dénoncer ces actes et de trouver des façons d'aider les Canadiens qui ne se sentent pas en sécurité chez eux, certains députés aient jugé qu'il était utile sur le plan politique d'encourager ces actes, ce qui va à l'encontre de notre système démocratique. Le 14 février 2022, la GRC a arrêté 11 personnes qui ont été accusées de complot en vue de commettre un meurtre après avoir trouvé ce qui suit dans trois remorques: 14 armes à feu, des gilets pare-balles, une machette et une grande quantité de munitions, y compris des chargeurs à grande capacité.
    Je dirais que je suis préoccupé par le fait que, lorsqu'il a précisé la liste de situations pouvant justifier la déclaration de l'état d'urgence, le gouvernement a trop insisté sur les perturbations économiques causées par les barrages, y compris leurs effets néfastes sur les entreprises et les chaînes d'approvisionnement, sans mentionner suffisamment la menace posée par les suprémacistes blancs et les risques de violence. Pourtant, des évaluations du renseignement préparées par le Centre intégré d'évaluation du terrorisme du Canada avaient indiqué à la fin de janvier qu'il était probable que des extrémistes soient impliqués dans la manifestation et que l'ampleur de celle-ci incite des loups solitaires à mener une attaque terroriste. C'est en lisant The Guardian que j'ai pris conscience de la gravité de la menace à la sécurité nationale, et c'est le Centre intégré d'évaluation du terrorisme du Canada qui m'a appris que les partisans du convoi étaient en faveur d'une guerre civile. Ils ont appelé à la violence contre le premier ministre, et ils ont dit qu'il faudrait faire de ces manifestations un 6 janvier canadien, en référence à la prise d'assaut du Capitole. Si les faits rapportés sont exacts et que les organismes de renseignement ont informé le gouvernement canadien dès la fin décembre de la menace potentielle posée par le convoi, pourquoi n'a-t‑il pas mieux défini cette menace claire et immédiate dans la proclamation?
    À mon avis, la trop grande importance accordée aux barrages, à l'économie et au risque pour les capitaux est une lacune de la proclamation de l'état d'urgence et continue d'empêcher la population de comprendre pleinement ce qui est en jeu. Cela montre aussi comment les différentes communautés ont ressenti différemment les effets de ces menaces. Pour les personnes dont l'existence n'est pas menacée par la suprématie blanche, les principales priorités demeurent l'économie et la circulation des capitaux. Par contre, pour ceux d'entre nous qui reconnaissent la réelle menace de violence posée par les suprémacistes blancs et ceux qui l'ont vécue, la principale source de préoccupation est l'objectif des occupants, qui ont déclaré leur intention de renverser le gouvernement canadien élu pour le remplacer par une junte ethnonationaliste.

  (0930)  

    Je viens d’une ville où si quelqu’un menace de me tirer une balle dans la tête, je suis forcé de le prendre au sérieux. J’apprécie les réflexions solennelles du député de Hull—Aylmer. Cela dit, je veux répéter qu’il est impératif pour le gouvernement de nous donner plus de précisions au cours du débat d’aujourd’hui sur ce que j’ai exposé plus tôt et sur les éléments qui pourraient ne pas avoir été rendus publics. Par exemple, je demande au gouvernement d’être honnête avec les Canadiens et de leur dire clairement quelles sont les menaces à la sécurité que beaucoup d’entre nous constatent aux termes de l’article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité — qui ne vise pas les activités de protestation ou de manifestation d’un désaccord — notamment celles qui relèvent de l’alinéa d) que je cite ici:
les activités qui, par des actions cachées et illicites, visent à saper le régime de gouvernement constitutionnellement établi au Canada ou dont le but immédiat ou ultime est sa destruction ou son renversement, par la violence
    Il est nécessaire d’expliquer ces importantes distinctions pour que le public puisse établir la nécessité du recours à la partie II de la loi, et la nécessité de se protéger contre une intervention excessive du gouvernement, qui a dépassé les bornes à maintes reprises contre les défenseurs des terres des nations autochtones souveraines, contre les militants ou associations luttant pour la justice raciale ou climatique. Il est très légitime de se demander quel précédent cela crée, et si cela pourrait permettre au gouvernement d’intervenir de la sorte lors de futures manifestions contestataires légitimes.
    Je répète que ce n'est pas le moment de servir des réponses toutes faites, de manipuler les faits à son avantage ou de se livrer à des attaques partisanes. Les Canadiens méritent des réponses honnêtes, des renseignements exacts et des arguments clairs. Comment en sommes-nous venus jusqu'ici? Cette déclaration d'état d'urgence, et tout ce débat, d'ailleurs, doivent être axés, comme il se doit, sur la sécurité publique et non simplement sur la défense de capitaux essentiels. Nous avons vu la juxtaposition d'interventions brutales et excessives et de manifestations légitimes, comme le vivent depuis des générations les Autochtones du Canada et comme cela se poursuit à l'heure actuelle en territoire non cédé des Wet'suwet'en; le recours aux Forces armées canadiennes pour surveiller les manifestations du mouvement Black Lives Matter, aussi récemment qu'en 2022; l'intervention brutale à l'endroit des militants pour la justice climatique à Fairy Creek; et les mesures violentes prises par les services de police contre les itinérants et les militants qui appuyaient les campements de sans-abri à Trinity-Bellwoods, à Toronto, ainsi qu'au parc J.C. Beemer, dans ma circonscription, Hamilton‑Centre. Beaucoup de ces gens craignent à l'heure actuelle que les pouvoirs élargis de l'État et son monopole sur la violence ne servent qu'à cibler davantage leurs causes.
    Cette profonde préoccupation m'amène à poser une question au gouvernement. Déclarera-t-il sans équivoque que les droits conférés par la Charte, loi suprême de ce pays, demeureront intouchés, ou s'il tente, par cette déclaration, de justifier sournoisement tout abus potentiel de pouvoir en invoquant l'article 1 de la Charte? J'estime que c'est un point de droit extrêmement important et nécessaire pour comprendre l'ampleur et la portée des pouvoirs conférés par la proclamation, de même que son éventuelle utilisation dans l'avenir.
     Au début de mon discours, j'ai parlé de la nécessité de rétablir la confiance envers les institutions publiques, notamment la confiance envers les services de police, qui est celle qui a été la plus mise à mal, parce qu'on a vu des policiers avoir des échanges compromettants avec les occupants et même, dans certains cas, collaborer avec eux. D'un point de vue logistique, depuis le début, les forces de l'ordre soutiennent l'occupation.
    Les Canadiens ne peuvent plus faire confiance aux institutions du pays chargées de la sécurité après avoir vu les policiers locaux manquer de facto à leur devoir dès le début et tout le long de l'occupation. L'incompétence de certains policiers et leur refus d'assurer le maintien de l'ordre dans la capitale du pays ont été utilisés par les manifestants pour nous amener au point où nous en sommes. Les rapports qui font état de la présence de membres actifs ou retraités des services du renseignement, des forces armées, notamment de la Force opérationnelle interarmées 2, de membres de la GRC et d'anciens membres du service responsable de la sécurité du premier ministre montrent bien qu'il faut une commission nationale sur les forces de l'ordre. La dernière commission royale sur les forces de l'ordre remonte à 1962. C'est pour cette raison que, jeudi, j'ai demandé au ministre de la Protection civile s'il était prêt à s'engager à mettre en place une commission nationale sur les forces de l'ordre dans le but d'étudier le rôle des services de police dans la crise nationale en cours, ainsi que les fonctions que les services de police ont habituellement à remplir et les budgets correspondants, et s'il serait prêt à créer un secrétariat ou une autre entité dont l'objectif serait de faire rapport sur la radicalisation et l'utilisation de ressources et de forces de sécurité publiques à des fins antidémocratiques.
    Aujourd'hui est un moment extraordinaire dans l'histoire du Canada, mais la démocratie finit toujours par être mise à l'épreuve. La question qui demeure et à laquelle il faudra inévitablement répondre est la suivante: comment, en tant que pays, pouvons-nous sortir de cette crise, obliger les personnes responsables à rendre des comptes et améliorer ou abolir les systèmes et les principes défaillants qui nous ont précipités dans cette crise au départ?

  (0935)  

    Monsieur le Président, quelqu'un qui veut miner la sécurité d'un pays, d'une nation, s'attaque à son infrastructure critique. Pour une nation commerçante, l'infrastructure la plus critique est celle de ses points frontaliers. Nous avons vu ce qui s'est passé au pont Ambassador, ce qui s'est passé au Manitoba et ce qui s'est passé à Coutts, en Alberta. Cependant, beaucoup de gens ignorent que 12 autres manifestations ont eu un impact direct sur les opérations aux points d'entrée. Dans deux cas, les manifestants ont envahi l'esplanade de l'ASFC, forçant les agents de l'ASFC à verrouiller les portes des locaux pour empêcher d'autres manifestants d'entrer.
    Ces agissements aux 12 points d'entrée, comme au pont Ambassador, ne constituent-ils pas une menace pour la souveraineté et la sécurité économique du Canada?
    Monsieur le Président, c'est certainement le cas, mais je précise que la plus grande préoccupation d'une nation souveraine doit être la sécurité de ses citoyens. La menace de renversement du gouvernement par une junte ethno-nationaliste l'a mise à mal. On sous-estime cette menace depuis des décennies dans ce pays.
    Les experts du renseignement continuent d'affirmer que les suprémacistes blancs et les ethno-nationalistes constituent les plus grandes menaces au pays en matière de terrorisme intérieur. Il est maintenant temps de prendre ces menaces au sérieux. Il est maintenant temps de déterminer comment des experts en sécurité nationale ont pu infiltrer ce mouvement et se hisser aux plus hauts rangs des organisations.
    Le grand public mérite des réponses. Nous devons cerner les véritables risques que pose ce mouvement, et en parler ouvertement et honnêtement.
    Monsieur le Président, tous les députés s'entendent pour dire que les paroles comptent, tout comme les actions.
    J'aimerais savoir ce que le député pense des propos tenus récemment par le ministre de la Justice sur le réseau de télévision nationale au sujet des mesures économiques qui seront mises en place. Il a mentionné que les gens membres d'une organisation pro-Trump devraient s'inquiéter de voir leurs actifs gelés.
    À la suite de ces propos, j'ai reçu des appels de concitoyens, en particulier des aînés, qui sont vaccinés, mais qui ont fait un don de 70 $ à cette cause.
    Leurs comptes bancaires seront-ils gelés? J'aimerais savoir ce qu'a à dire le député et ce que compte faire le gouvernement à ce sujet.
    Monsieur le Président, comme je l'ai précisé dans mes observations, j'ai posé officiellement une question au gouvernement, lui enjoignant de dire clairement si les droits accordés par la Charte, en tant que loi suprême de ce pays, demeurent entiers, comme indiqué dans le préambule de sa déclaration, ou si le gouvernement tente de s'autoriser des abus de pouvoir potentiels à la faveur de l'article 1 de la Charte. L'enquête et la commission sur notre réponse à la situation en cours doivent pouvoir nous le démontrer.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon honorable collègue de son discours. Il l'a très bien dit: c'est maintenant le moment de lutter contre une menace, et l'extrême droite est, dans les faits, une menace pour notre démocratie.
    Je me demande cependant si son parti et lui-même pensent sincèrement que, s'il s'était agi d'une manifestation d'étudiants ou d'une manifestation de syndicalistes, le gouvernement aurait laissé la situation dégénérer à ce point pendant trois semaines.
    Mon collègue ne croit-il pas qu'il y avait des motivations sous-jacentes à laisser la situation dégénérer ainsi pendant trois semaines et à en venir ensuite à des mesures aussi extrêmes?

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'aimerais aussi rappeler que les députés de la Chambre, il y a à peine quelques semaines, ont souligné et déploré les tragédies survenues à Québec.
    Or, le pays sous-estime et minimise depuis trop longtemps les menaces des suprémacistes blancs sur son territoire. Il est temps pour ces mêmes députés qui se sont joints aux communautés éplorées de se lever pour dénoncer les actions des suprémacistes blancs, beaucoup plus violentes et imprévisibles que toute action des étudiants et des défenseurs de la justice climatique ou des territoires autochtones que nous avons vue jusqu'à maintenant.

  (0940)  

Les travaux de la Chambre

    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a eu consultations entre les partis et je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante.
    Que, nonobstant tout article du Règlement, ordre spécial ou usage habituel de la Chambre, aux fins de l'article 28 du Règlement, la Chambre soit réputée avoir siégé le vendredi 18 février 2022.

[Français]

    J'ai été avisé par les partis reconnus qu'ils sont d'accord sur cette demande.

[Traduction]

    Par conséquent, que tous ceux qui s'opposent...
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis certaine qu'il s'agit d'un oubli, mais comme il est question de consentement unanime, chaque membre de la Chambre aurait dû être consulté. Je ne l'ai pas été, mais je souhaite donner mon consentement.
    Je remercie la députée de Saanich—Gulf Islands de son intervention.
    Que tous ceux qui s'opposent à ce que le député propose la motion veuillent bien dire non.
    C'est accepté.
    La Chambre a entendu la motion. Que tous ceux qui s'opposent à la motion veuillent bien dire non.

     (La motion est adoptée.)

La Loi sur les mesures d'urgence

    La Chambre reprend l'étude de la motion.
    Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole au nom des gens qui m'ont élue pour les représenter à la Chambre.
     Il est important de signaler que la Loi sur les mesures d'urgence établit un seuil qui précise les circonstances dans lesquelles son application est justifiée. En effet, la Loi ne peut être invoquée que lorsqu'une situation « menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays » et lorsque la situation ne peut être réglée efficacement à l'aide d'aucune autre loi. Selon moi, le gouvernement n'a pas démontré que c'était le cas.
    Comme bon nombre de mes collègues des deux côtés de la Chambre l'ont fait remarquer, cette loi n'a jamais été utilisée dans sa forme actuelle. Son incarnation antérieure, la Loi sur les mesures de guerre, n'a été invoquée qu'à trois reprises. La première fois, c'était pendant la Première Guerre mondiale, la deuxième, pendant la Deuxième Guerre mondiale et la troisième, pendant la crise du FLQ.
    Il est important de souligner que...
    Le député de Timmins—Baie James invoque le Règlement.
    Monsieur le Président, nous ne discutons pas de la Loi sur les mesures de guerre. Elle n'existe plus. C'était une loi présentée en 1987 par Brian Mulroney. Ce n'est pas pertinent.
    Nous débattons de la motion dont la Chambre est saisie. Nous avons laissé une grande marge de manœuvre à beaucoup de députés quant à la teneur de leurs déclarations.
    La députée de Fort McMurray—Cold Lake a la parole.
    Monsieur le Président, c’est assez évident: le député d’en face et les députés du NPD sont un peu mal à l’aise lorsque nous disons que la loi qui a précédé celle-ci est la Loi sur les mesures de guerre, parce que c’est le chef du NPD d’alors, Tommy Douglas, qui a pris courageusement position contre le recours à cette loi pendant la crise du FLQ. Voilà. Je rappelle ce fait parce que la gravité relative de ces événements devrait amener tous les parlementaires à faire montre de prudence et à ne pas invoquer une telle loi à la légère.
    De nombreux politiciens provinciaux se sont déclarés contre le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. C’est le cas de politiciens de la Nouvelle‑Écosse, du Nouveau‑Brunswick, de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, du Québec, du Manitoba, de la Saskatchewan et de ma province d’origine, l’Alberta. Au cours des derniers jours, le premier ministre a déclaré plusieurs fois que le recours à la Loi sur les mesures d’urgence n’était ni la première, ni la deuxième, ni la troisième option. Toutefois, les députés de ce côté-ci de la Chambre ont demandé plusieurs fois quelles étaient les trois premières options, et ils n’ont encore obtenu aucune réponse concrète. En l’absence d’une réponse, j’en viens à conclure que la première option était d’attendre, la deuxième, de ne rien faire, et la troisième, de faire porter le blâme à d'autres.
    Ce n’est pas le leadership auquel les Canadiens s’attendent et qu’ils méritent. Nous avons vu le premier ministre refuser de fournir à la police d’Ottawa l’aide supplémentaire demandée. En effet, le 11 février, le premier ministre a déclaré que la police avait assez de ressources. Trois jours plus tard seulement, le 14 février, la Loi sur les mesures spéciales a été invoquée. Que s’est-il donc passé pendant ces trois jours pour que les choses changent aussi radicalement? On ne nous a rien dit à ce sujet, nous, les parlementaires.
    Au cours des derniers jours, mon bureau a reçu des centaines d’appels téléphoniques et des milliers de courriels au sujet du recours à la Loi sur les mesures d’urgence. Beaucoup de mes concitoyens m’ont fait part de leurs craintes et de leur anxiété et m’ont dit éprouver un sentiment de traumatisme collectif et de stress post-traumatique. Pour eux, le gouvernement va trop loin et crée un précédent inquiétant.
    Une de mes concitoyennes, Lindsay, m’a écrit qu’elle essaie toujours aussi fort de comprendre comment nous avons pu en arriver là et pourquoi. Elle se demande comment la situation a pu dégénérer à ce point. Elle est très inquiète de la façon dont le premier ministre traite les gens de notre pays. Elle considère que ses agissements et ses propos ne sont pas conformes aux véritables valeurs canadiennes: la paix, la liberté ou la protection. Selon elle, il jette constamment de l’huile sur le feu, et elle ne peut pas croire qu'elle vit actuellement dans la peur au Canada.
    Bon nombre des courriels et des appels que j'ai reçus proviennent de parents éplorés parce qu'ils ont peur pour leurs enfants. Ils ont l'impression d'avoir été ignorés et laissés pour compte par le gouvernement libéral. Un autre de mes concitoyens, Tyler, a écrit ceci: « Je suis totalement en désaccord avec le premier ministre quant à sa décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Je crois fermement que sa décision est injustifiée et qu'elle constitue un abus de pouvoir. Elle a pour seul effet d'attiser davantage la peur et la division entre les citoyens de ce merveilleux pays. »
    Après avoir réfléchi à toute la correspondance et à tous les appels que j'ai reçus, je me suis dit que le premier ministre avait peut-être oublié ou n'avait pas compris pourquoi autant de Canadiens manifestaient actuellement. Je vais l'aider à comprendre en lui exposant simplement la situation. Beaucoup sont frustrés par ce qu'ils considèrent être une intervention excessive du gouvernement. Le premier ministre manque terriblement de vision s'il croit que la solution à cette intervention excessive est d'intervenir de façon encore plus excessive.
    Il convient de noter que les manifestations aux postes frontaliers de Windsor, d'Emerson, de Coutts et de Surrey se sont toutes terminées de façon pacifique, grâce à des négociations avec les services de police locaux et à des interventions ciblées des forces policières locales. Elles se sont toutes terminées avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence.
    À mon avis, il s'agit d'un point important à souligner. C'est extrêmement important. Je crois que les députés libéraux devraient prendre le temps d'y réfléchir. Ultimement, les lois canadiennes et le respect généralisé de la primauté du droit ont suffi pour convaincre les manifestants qui bloquaient les postes frontaliers de se disperser. La police a fait son travail en appliquant les lois existantes, puis les manifestants sont rentrés chez eux.

  (0945)  

    Je suis une ardente défenseure de la primauté du droit. Le respect des Canadiens ordinaires pour les lois qui servent la cause de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement me remplit d'une immense fierté pour mon pays. Oui, il y a probablement des gens parmi les manifestants qui ne partagent pas ce sentiment, mais je pense qu'il vaudrait la peine que le premier ministre réfléchisse à la façon dont son leadership douteux a contribué à certains de ces événements.
    Les gens perdent confiance dans la primauté du droit lorsqu'ils cessent de croire que la loi est égale et s'applique également à tous, par exemple lorsque les politiciens ignorent leurs propres lignes directrices concernant les restrictions liées à la COVID, lorsqu'un premier ministre traite les manquements à l'éthique comme un inconvénient mineur, lorsqu'il y a des violations des règles sur les conflits d'intérêts et des infractions à la loi électorale, et lorsqu'une femme est démise de ses fonctions au Cabinet parce qu'elle a refusé d'enfreindre la loi. Nous envisageons d'invoquer une loi qui était auparavant réservée aux guerres mondiales et aux attentats terroristes meurtriers parce que les manifestants refusent de respecter la loi...
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Laila Goodridge: ... et voilà que les députés d'en face me chahutent...
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Laila Goodridge: Monsieur le Président, c'est tout à fait inacceptable.
    Je demande à tous les députés de se calmer. Nous avons si bien fait jusqu'à présent. Nous passerons bientôt à la période des questions et des réponses, alors je vous en serais très reconnaissant.
    Monsieur le Président, j’invoque le Règlement. Je vous prie certainement de m’excuser, mais la députée continue de parler d’une loi qui n’existe pas. Je ne veux pas que cela la fasse mal paraître.
    Nous nous lançons dans un débat. J’écoute également la députée, et je vois qu’elle essaie de structurer ce qu’elle veut dire, et parfois, je dois laisser aux députés du temps pour cela.
    La parole est à la députée de Fort McMurray—Cold Lake.
    Monsieur le Président, je vous prie de m'excuser. Parfois, lorsque nous parlons de quelque chose avec passion, on commet un lapsus, et ce, même en lisant. Je suis désolée d'avoir dit « mal informé » au lieu d’« informé ».
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Laila Goodridge: Monsieur le Président, je suis désolée. Les députés manquent de respect envers leurs collègues qui prennent la parole à la Chambre, et c’est un problème. À mon avis, nous avons besoin maintenant d’échanges honnêtes, de communications ouvertes et d'un leadership engagé. Nous devons désamorcer la situation et trouver un compromis. Nous devons veiller à résoudre la situation de façon pacifique.
    Ma mère était une femme très sage et elle disait tout le temps que lorsqu’on traite les gens comme des humains, ils agissent comme des humains. Je crois que ce conseil peut tous nous aider à l’heure actuelle. En effet, ce qu’il faut maintenant, c’est unir les Canadiens. Après deux années où nous avons vécu chacun de notre côté, il faut maintenant nous employer à trouver ce que nous avons en commun et non plus ce qui nous différencie. Nous devons nous rappeler qu’en définitive, nous sommes tous des humains.
    J’exhorte tous les députés et tous les Canadiens qui nous écoutent à se rappeler que nous sommes des humains. Nous devons nous traiter les uns les autres avec dignité et respect. Nous devons consacrer plus de temps à écouter les autres et à trouver une solution pacifique. J’exhorte donc tous les députés à voter contre la Loi sur les mesures d’urgence.

  (0950)  

     Monsieur le Président, j’ai écouté attentivement l’allocution de la députée d’en face, et il y a quelque chose que je trouve préoccupant dans ce qu’elle a dit et dans ce que les députés conservateurs disent également depuis deux ou trois semaines: pour eux, parce que certaines personnes mêlées à l’occupation ont un comportement pacifique, la manifestation est légale. Or, il y a peut-être des gens qui agissent de façon pacifique, mais, à la Chambre, on a réellement mis en lumière le cas d’individus qui ont des objectifs beaucoup plus sombres. Il s'agit donc d'un argument fallacieux. Ce qui s’est passé demeure illégal. Le chef intérimaire de la police d’Ottawa a déclaré hier que les mesures prises par le gouvernement ont été extrêmement utiles pour mettre fin à l’occupation qui a cours actuellement ici. Naturellement, certains individus propagent l’idée qu’ils vont organiser d’autres blocages ailleurs au Canada.
    Le témoignage du chef de police d’Ottawa n’aide-t-il pas la députée à comprendre que ces mesures ont été utiles pour mettre fin à un blocage dans la capitale d’un pays du G7?
    Monsieur le Président, je ne crois pas que le député ait rapporté correctement ce que j’ai entendu à la conférence de presse. Il est très important de mettre en lumière le fait que les blocages à nos frontières ont été résolus avant que le gouvernement invoque la Loi sur les mesures d’urgence, ce qui montre donc que les lois actuellement en vigueur dans nos provinces et dans nos municipalités permettent de résoudre ces problèmes.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de Fort McMurray—Cold Lake de son allocution.
    J'aimerais l'entendre parler de la Loi sur les mesures de guerre et de la Loi sur les mesures d'urgence. On a entendu à plusieurs reprises que ce n'étaient pas les mêmes lois, et je suis tout à fait d'accord. À mon sens, les deux ont existé et existent, il y a tout de même des liens. Il ne faut pas faire semblant que certaines choses n'existent pas à la Chambre des communes.
    Je donnerai un exemple qui me plaît bien, celui de la Constitution de 1982. Le Québec a vécu des conséquences de ne pas avoir signé la Loi constitutionnelle de 1982. On n'est pas là, mais cela existe quand même.
    Je ne sais pas si ma collègue voudrait bien parler de la pertinence de parler de la Loi sur les mesures d'urgence et de faire certains liens avec la Loi sur les mesures de guerre qui a été appliquée lors de la Première Guerre mondiale, la Deuxième Guerre mondiale et la crise d'Octobre en 1970.
    Monsieur le Président, ma collègue a souligné des points importants. C'est important de parler de l'histoire pour ne pas répéter les erreurs. Il est important de connaître les raisons pour lesquelles la Loi sur les mesures d'urgence a été créée. Je crois que c'est important de connaître les raisons pour lesquelles elle a été utilisée auparavant. Je l'ai souligné dans mon discours et je vais continuer de répéter les faits.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie la députée de son intervention, mais je dois admettre que je ressens actuellement un immense découragement.
    Je pense aux premières tombes d’enfants qu’on a découvertes à Kamloops, à l’extérieur du pensionnat. J’ai été adoptée par une famille autochtone lorsque j’avais quatre ans. Je me rappelle que, lorsque nous avons trouvé ces enfants, ma sœur m’a appelée et m’a dit qu’elle devait parler à Daizy, ma nièce, des pensionnats et de Grand-Maman, et qu’elle avait voulu attendre un peu plus pour cela.
    Il suffit de constater que le privilège blanc, l’extrémisme blanc et le suprémacisme blanc demeurent très forts au Canada et que beaucoup d’organisateurs de cette manifestation adhèrent à ces valeurs pour savoir que nous devons agir avec précaution. Ma grand-mère, qui est allée dans un pensionnat jusqu’à l’âge de 16 ans, avait l’habitude de dire qu’il valait mieux se tenir droit et connaître la personne qui était à côté de soi.
    La députée pourrait-elle nous parler de l’attitude de son parti, qui s’est placé du côté de ceux qui ont cherché à diminuer la gravité de ce que ces personnes ont vécu au Canada?

  (0955)  

    Monsieur le Président, je suis née et j’ai grandi dans le Nord‑Est de l’Alberta, où j’ai vécu à peu près toute ma vie. Malheureusement, il y a dans ma collectivité et dans la région que je représente un certain nombre de pensionnats. Le traumatisme est très réel.
    Je veux remercier la députée de nous avoir raconté un peu de sa vie. C’est une partie de notre histoire que nous devons reconnaître. La vérité nous mènera à la réconciliation.
    Monsieur le Président, je ne prends pas la parole aujourd’hui pour parler de détails techniques de la Loi sur les mesures d’urgence, mais des raisons pour lesquelles nous sommes ici. Comment se fait-il qu’après 34 ans où aucun des gouvernements qui se sont succédé n'a invoqué la Loi sur les mesures d’urgence, le gouvernement libéral actuel estime nécessaire de recourir à cette loi? Malheureusement, notre pays a connu plusieurs situations éprouvantes par le passé, mais elles ont toutes été résolues sans qu’il ait été nécessaire de prendre une mesure inédite et dangereuse comme la Loi sur les mesures d’urgence.
    La crise d’Oka en 1990 est un bon exemple. Les protestataires et la police du Québec se sont alors affrontés pendant 78 jours. Des coups de feu ont été tirés. Un aîné mohawk, Joe Armstrong, a été tué et le caporal Marcel Lemay, de la police provinciale du Québec a tragiquement perdu la vie. Les morts violentes et les coups de feu auraient certainement justifié le recours à la Loi sur les mesures d’urgence, mais le premier ministre Mulroney n’en a pas décidé ainsi. Les autorités ont alors gardé la tête froide et l'affrontement a été résolu par la négociation.
    Le 11 septembre 2001, notre plus proche allié, les États‑Unis, a été victime d’une série de détournements d’avions et d’attentats suicides qui ont fait de nombreuses victimes. Plus de 2 900 personnes ont été tuées, dont au moins deux douzaines de citoyens canadiens. La Loi sur les mesures d’urgence aurait sûrement pu être invoquée en vertu de ses articles sur la guerre ou sur la situation internationale, mais le premier ministre Chrétien ne l’a pas fait. Au lieu de cela, nous avons soutenu nos voisins américains de toutes les manières possibles et nous nous sommes tenus aux côtés de nos amis lorsqu’ils avaient le plus besoin de nous.
    À l’été 2013, l’Alberta a connu des inondations catastrophiques qui ont tragiquement coûté la vie à cinq Canadiens et causé des milliards de dollars de dommages. Cet été-là, des états d’urgence locaux ont été déclarés. Le premier ministre Harper a-t-il alors invoqué une urgence de bien-être public? Non, au contraire, les Canadiens se sont regroupés pour aider les Albertains du sud.
    Le 22 octobre 2014, un tireur, que je ne nommerai pas, a abattu et tué tragiquement le caporal Nathan Cirillo au Monument commémoratif de guerre du Canada. Le tireur a également blessé trois autres personnes et a ensuite pris d’assaut le Parlement, le cœur même de notre démocratie, et pourtant, une fois de plus, le premier ministre Harper n’a pas invoqué la Loi sur les mesures d’urgence.
    Le 1er mai 2016, notre pays a été témoin de la catastrophe la plus coûteuse de l’histoire du Canada lorsque Fort McMurray, en Alberta, a été dévasté par un incendie de forêt. Plus de 80 000 personnes ont été forcées de quitter leur maison, et les dommages économiques de l’incendie de forêt ont été estimés à plus de 9 milliards de dollars. La première ministre Notley a déclaré un état d’urgence provincial, mais le premier ministre n’a toujours pas invoqué la Loi sur les mesures d’urgence.
    De janvier à mars 2020, des infrastructures essentielles telles que des pipelines et des chemins de fer ont été bloquées à travers le Canada par des manifestants et des activistes environnementaux en réaction à la construction du pipeline Coastal GasLink. Cela a entraîné l’arrêt de la construction du gazoduc, la suspension du transport ferroviaire de passagers et l’arrêt du transport ferroviaire commercial. Qu’a fait le premier ministre? A-t-il invoqué la Loi sur les mesures d’urgence? Non, il ne l’a pas fait. Au lieu de cela, le gouvernement a négocié avec les chefs autochtones et les blocages ont pris fin.
    Plus récemment, en novembre 2021, la Colombie‑Britannique a connu des inondations massives. Cette catastrophe naturelle a tragiquement coûté la vie à cinq personnes et a entraîné une perturbation à court et à long terme du plus grand port du Canada, Fraser Valley. L’inondation a coupé des infrastructures essentielles qui relient la Colombie‑Britannique au reste du Canada. Encore une fois, cette catastrophe aurait sûrement pu justifier l’application de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Enfin, n’oublions pas que tout au long de la pandémie de COVID‑19, le premier ministre aurait pu invoquer une urgence de bien-être public, mais il ne l’a pas fait parce que les provinces n’en voyaient pas la nécessité.
    Pourquoi le premier ministre choisit-il de prendre la mesure sans précédent d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence maintenant? Qu’est-ce qui rend la situation si grave, si désastreuse, que le premier ministre est obligé d’invoquer cette loi? Je serai clair. La situation à laquelle nous sommes actuellement confrontés ne justifie pas que le gouvernement libéral invoque la Loi sur les mesures d’urgence. Nous sommes témoins d’un cas flagrant d’excès de la part du gouvernement. Cette loi est censée être utilisée pour les situations d’urgence qui ne peuvent être résolues par les lois existantes.
    Notre pays a passé 34 ans sans invoquer cette loi. Nous avons fait face à de véritables urgences, à des catastrophes naturelles, à des attaques terroristes, au terrorisme intérieur et même à des blocages illégaux, mais aucun autre premier ministre en poste, y compris M. Trudeau lui-même, n’a utilisé les pouvoirs de la Loi sur les mesures d’urgence pour faire face à l’une ou l’autre de ces situations.

  (1000)  

    Madame la Présidente, j’invoque le Règlement.
    C’est sans doute une erreur de la personne qui a rédigé l’allocution du député, mais il est d’usage courant à la Chambre de nommer les députés par leur circonscription ou par leur titre, et non par leur propre nom.
    Je remercie le député. Je ne m’étais pas rendu compte de cela lorsque le député a parlé, mais je veux rappeler à tous les députés qu’ils doivent nommer les députés ou les ministres à la Chambre soit par leur titre, soit par le nom de leur circonscription.
    Le député peut continuer.
    Madame la Présidente, c’est un cas classique d’abus flagrant de la part du gouvernement. Tous les jours, mon bureau de circonscription reçoit des centaines d’appels téléphoniques et de courriels de citoyens préoccupés. Ces gens s’inquiètent de l’avenir de notre pays et du fait que le gouvernement outrepasse ses pouvoirs pour geler les comptes bancaires et les avoirs de Canadiens sans l’intervention d’un juge ou le recours au processus approprié.
    J'aimerais rappeler à mes collègues que c'est le premier ministre qui disait en 2015 qu’il allait réformer le Parlement pour donner plus de pouvoirs aux députés d'arrière-ban, réduire la partisanerie, restaurer la courtoisie et rendre le gouvernement responsable. Rappelons-nous qu'il parlait de « voies ensoleillées ».
    Qu’est-ce que les Canadiens ont eu à la place? Un gouvernement dirigé par le Cabinet du premier ministre, un gouvernement qui foule aux pieds le processus parlementaire et qui ne rend de comptes à personne. Ce ne sont pas des voies ensoleillées, mais des voies très ennuagées.
    Avec le gouvernement du premier ministre, les échanges sont devenus plus partisans et moins courtois. Il a attaqué les Canadiens mêmes qu'il est censé servir, leur reprochant d’être « extrémistes » et aussi d'être très souvent misogynes et racistes. Maintenant, le premier ministre insiste pour recourir à cette loi qui augmente énormément la capacité de l’État d’intervenir dans la vie privée des Canadiens.
    Le recours à la Loi sur les mesures d’urgence crée un dangereux précédent, et il est impossible de faire marche arrière. En outre, les premiers ministres des provinces n’appuient pas unanimement cette mesure radicale. En effet, les premiers ministres de l’Alberta, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l’Île‑du‑Prince‑Édouard et du Québec ont tous déclaré qu’ils ne sont pas en faveur du recours à la loi.
    Les principes fondamentaux du Canada sont la paix, l’ordre et le bon gouvernement. Bien que les libéraux ne semblent pas comprendre la notion de bon gouvernement, ils ont finalement compris qu’ils doivent assurer l’ordre. Malheureusement, ils vont trop loin.
    Au lieu de procéder de façon raisonnée et mesurée, le gouvernement a exagéré et mis en œuvre des mesures punitives. Il a gelé les comptes bancaires de personnes sans l’intervention d’un juge ou l’application du processus approprié. Il impose la vaccination aux camionneurs sans que des données scientifiques probantes le justifient.
    Comme Canadien et comme conservateur, j’appuierai toujours le droit de manifester de façon pacifique et dans le respect de la loi. J’estime que c’est une pierre angulaire de notre démocratie. J’estime également que la primauté du droit et la liberté fondamentale d’association pacifique ne comprennent pas le droit de bloquer des rues, des routes, des postes frontaliers et des voies ferrées ni de perturber les chaînes d’approvisionnement. Ma position concernant les blocages illégaux a toujours été claire: tous les blocages et tous les barrages doivent prendre fin. Ils ne servent qu’à faire du tort aux familles, aux entreprises et aux emplois des Canadiens.
    Cependant, nous pouvons résoudre cette situation sans invoquer la mesure qui a succédé à la Loi sur les mesures de guerre. Je comprends la frustration qu’éprouvent les personnes qui manifestent. Cette pandémie a été difficile pour tous les Canadiens. De nombreuses personnes ont perdu leur gagne-pain, des êtres chers et bien d’autres choses encore au cours de cette pandémie.
    Cependant, les camionneurs et leurs familles ne sont pas des terroristes. Au début de la pandémie, alors que de nombreux Canadiens s’isolaient chez eux, je me souviens que les camionneurs étaient là pour veiller à ce que nous ayons les produits de première nécessité dont nous avions besoin pour survivre.
    Comme l’a dit le premier ministre en avril 2020: « Alors que plusieurs d’entre nous travaillent de la maison, d’autres n'en sont pas capables, comme les camionneurs qui travaillent jour et nuit pour s’assurer que nos étagères sont bien remplies. Si vous en avez la chance, dites-leur merci et aidez-les comme vous le pouvez. »
    Les camionneurs sont des citoyens canadiens qui s’inquiètent de leur avenir et de celui dont hériteront leurs enfants et petits-enfants. Les conservateurs ont entendu les préoccupations de ces manifestants.
    Nous avons demandé au premier ministre et à son gouvernement de s’engager publiquement à mettre en place un plan et un échéancier précis pour mettre fin aux mesures obligatoires et aux restrictions du gouvernement fédéral. C'est le moins qu'on puisse faire pour les Canadiens. Or, les libéraux et les néo-démocrates ont refusé d’appuyer notre motion. Demander un plan est raisonnable, et leur refus d’en fournir un est honteux.
    Je demande à tous les parlementaires, en tant que représentants de la population canadienne, d’écouter leurs concitoyens. Nous devons être prêts à discuter, quelle que soit la difficulté de la situation. Nous ne devons pas dénigrer, rejeter ou insulter. Nous devons travailler à rétablir la confiance dans nos institutions publiques. Nous devons aider ceux qui ont été laissés pour compte par la pandémie, et nous devons mettre fin aux mesures obligatoires.
    Je conclurai en demandant à tous les députés de la Chambre d’essayer de rétablir la confiance qui a été perdue entre la population et nous. Je demande également à tous les députés de se demander sérieusement si nous sommes réellement confrontés à des menaces terroristes ou si le gouvernement libéral va trop loin et crée un dangereux précédent pour notre pays.

  (1005)  

    Madame la Présidente, je dois dire à mon collègue qu’une grande partie de son discours aurait pu être écrite par n’importe lequel d’entre nous de ce côté-ci de la Chambre. Nous savons tous que la loi et l’ordre constituent l’épine dorsale de notre pays. C’est ce que nous voulons tous.
    Toutefois, le député ne peut pas me dire, ni à moi ni au reste de nos collègues, que ce qui se passe à l’extérieur pouvait simplement être réglé par quelques policiers qui auraient repoussé les manifestants. Il s’agit d’un barrage illégal qui est en place depuis maintenant quatre semaines. Les gens d’Ottawa ont été terrorisés. Ils ont été privés de leur liberté.
    Pour quelqu’un qui respecte également la loi et l’ordre, comment peut-il laisser passer une autre fin de semaine sans reconnaître que c’était une mesure que nous devions absolument prendre?
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de sa question. J’ai toujours été pour la loi et l’ordre. J’ai grandi dans un foyer où le père était policier. Je ne sais pas comment nous avons en sommes arrivés à la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Ce matin, certaines personnes ont demandé une enquête. Je crois que c’est nécessaire pour comprendre comment nous en sommes arrivés là.
    Je crois que les camions ont été stationnés sur la route et qu’une fois là, il a été très difficile de les déplacer. Je pense qu’on aurait dû le faire il y a des semaines. Ils n’auraient pas dû nuire autant aux gens d’Ottawa. Je suis d’accord, mais il y a des raisons pour lesquelles nous sommes arrivés à cette situation. Ce qu'il faut vraiment faire, c’est d’en trouver la cause profonde. D’où viennent cette colère et cette division dans notre pays?
    J’ai été très heureux d’entendre la députée dire, au début de sa question, qu’une partie de mon discours aurait pu être écrite par un député d'en face, parce que, très franchement, lorsque j'ai écrit mon discours avec l’aide de mon personnel, nous en avons supprimé certains éléments parce que je ne voulais pas employer un ton extrêmement partisan ou colérique. Nous avons assez de ce genre d’émotions en ce moment. Je sais gré à la députée de le reconnaître. J’ai tenté d’éviter ce piège. Nous devons tendre un rameau d’olivier à chaque partie, y compris aux gens qui sont dehors.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son intervention et des réflexions qu'il propose au Parlement.
    À ce stade du débat, je m'interroge sur les stratégies de sortie de crise que l'on pourrait employer et qui pourraient être satisfaisantes. Ce n'est pas parce qu'on envoie l'armée et la police rentrer dans des manifestants, notamment à cheval, que les gens vont se calmer. À un moment donné, il faudra penser à la sortie de crise, il faudra que le Parlement fasse des compromis et qu'il tende la main.
    Quelles stratégies de sortie de crise plairaient à mon collègue? Le premier ministre devrait-il penser lui aussi à des stratégies de sortie de crise, quitte à démissionner?

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’aimerais pouvoir répondre au député dans sa langue, mais j’en suis incapable. Un jour peut-être.
    J’ai le sentiment que nous sommes devenus incroyablement divisés dans ce pays. Je lui suis reconnaissant de son allusion au rameau d’olivier dont j’ai parlé. Nous devons nous unir. Les deux dernières années ont été très pénibles pour tout le monde. La capacité de chacun à s’entendre et à faire preuve de patience s’est émoussée. Nous avons tous peur. Comme parlementaires, nous sommes tous inondés d’appels téléphoniques et de courriels. Je sais que c’est le cas également pour les députés d’en face. Nous devons franchir cette étape difficile d’une manière ou d’une autre. Nous devons redevenir capables de discuter de manière raisonnable les uns avec les autres. Nous n’avons pas à être toujours d’accord, mais nous devons pouvoir nous écouter et avoir des points de vue différents sans pour autant cesser de nous entendre.
    Madame la Présidente, je remercie le député de son discours dont j’apprécie le ton. Ce sont des jours importants et ce sont des discussions importantes. Le ton qu’il a adopté est approprié.
    Il a mentionné le service rendu par son père en tant que policier, et nous en remercions sa famille. Ce que les autorités policières ont déclaré, c’est que les règlements qui ont été pris ont permis d’éviter que des gens soient gravement blessés jusqu’à présent, notamment en ce qui concerne la désignation des lieux, ce qui signifie que les dirigeants du convoi n’ont pas pu obtenir ce qu'ils avaient demandé, à savoir l’arrivée de milliers de personnes en renforts à Ottawa en fin de semaine, et ce, grâce au Règlement sur les mesures d’urgence qui a permis aux policiers de l'empêcher.
    N’est-il pas justifié de veiller à ce que personne ne soit gravement blessé?

  (1010)  

    Madame la Présidente, je remercie le député de ses propos aimables et de l'hommage qu'il a rendu au service de mon père.
    Bien entendu, la sécurité de tous est primordiale. Nous avons parlé d’une enquête à quelques reprises, et je crois vraiment qu’il serait important d’aller à la source du problème. Au cours de la dernière ou des deux dernières semaines, j’ai eu l’occasion de parler à deux commissaires retraités qui avaient des grades très élevés dans la Police provinciale de l’Ontario. Tous deux m’ont dit que la Loi sur les mesures d’urgence n’était pas nécessaire et qu'on aurait pu agir sans y avoir recours. Il y a eu des problèmes dès le début. J’ai obtenu d’autres informations dont je ne veux pas me servir aujourd’hui parce que cela pourrait exacerber les choses, mais disons simplement que j’ai fait mes propres recherches. J’ai parlé à des gens, et on m’a dit que cette loi n’était vraiment pas nécessaire pour faire partir les manifestants.

[Français]

    Madame la Présidente, j'indique d'emblée que je partagerai mon temps de parole avec le député de Lac‑Saint‑Jean.
    Alors que nous prenons la parole sur la ratification de la proclamation des mesures d’urgence du 14 février, de l’autre côté des murs, les forces policières procèdent à la levée du siège d’Ottawa. Nous souhaitons tous que cela se fasse de la façon la plus pacifique possible, le plus paisiblement possible. Comme des collègues l’ont fait avant moi, et comme d’autres le feront sans doute, j’invite les participants de ce siège à quitter les lieux sans plus tarder.
    Je veux souligner l’excellent travail des hommes et des femmes qui travaillent depuis hier à remettre de l’ordre dans les rues de la capitale. Ce travail efficace démontre ce que nous répétons depuis le début de ce siège: nous n’avons pas besoin de la Loi sur les mesures d’urgence. Nous avons besoin d’une action concertée de toutes les forces policières. Nous avons besoin d’une cellule de crise et d’un centre de coordination. Comme nous le répétons depuis trois semaines, nous avons besoin d'un plan.
    Ce qui a manqué depuis le début de ce siège, ce n’est pas l’utilisation de la Loi sur les mesures d’urgence. Ce qui a manqué, c’est du leadership de la part des dirigeants, à commencer par le gouvernement fédéral.
    Nous demandons au gouvernement de ne pas utiliser cette loi, comme se sont abstenus de le faire tous les gouvernements depuis 1988, ou même depuis 52 ans, si l'on inclut ici la Loi sur les mesures de guerre, qui est l’ancêtre de cette loi. Il s'est donc écoulé plus d’un demi-siècle sans qu'on utilise cette loi. Il doit bien y avoir une bonne raison à cela.
    Voyons plutôt:
    Attendu: que l’État a pour obligations primordiales d’assurer la sécurité des individus, de protéger les valeurs du corps politique et de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays;
que l’exécution de ces obligations au Canada risque d’être gravement compromise en situation de crise nationale et que, pour assurer la sécurité en une telle situation, le gouverneur en conseil devrait être habilité, sous le contrôle du Parlement, à prendre à titre temporaire des mesures extraordinaires peut-être injustifiables en temps normal [...]
    C'est par ce préambule que s'ouvre la Loi sur les mesures d'urgence, comme un avertissement disant « Manipuler avec précaution » ou « Attention: matières dangereuses ».
    La Loi dit: « [...] prendre à titre temporaire des mesures extraordinaires peut-être injustifiables en temps normal [...] » Je répète cette phrase, parce qu'elle porte, en démocratie, un fardeau immense: « [...] des mesures extraordinaires peut-être injustifiables en temps normal [...] »
    Les auteurs de cette loi et les parlementaires qui l’ont adoptée nous préviennent: nous entrons à nos risques et périls.
    De tels avertissements devraient être perçus comme une mise en garde. En même temps, la Loi sur les mesures d’urgence existe et, si elle existe, elle doit bien avoir son utilité. On n'adopte pas de lois pour ne pas les utiliser.
    Sans aucun doute, cette loi a son utilité, mais en situation extraordinaire: en cas de sinistre, en état d'urgence, en état de crise internationale et en état de guerre. C'est une loi en cas de catastrophes.
    Au cours des dernières semaines, nous avons eu, devant nous, un siège. C'est vrai. Il s'agit de citoyens canadiens insatisfaits des mesures sanitaires, en colère, participant irréfutablement et sans l'ombre d'un doute à une activité illégale, qui mérite des amendes, des saisies de véhicules, peut-être même des incarcérations, pour certains. Or, est-ce une catastrophe? Est-ce une crise nationale? Est-ce une situation extraordinaire?
    Devant nous, au cours des dernières semaines, nous avons eu un siège, auquel ont participé des gens mal avisés, mal informés, hargneux et tout à fait conscients de participer à une activité interdite par la loi. Dans beaucoup de cas, les gens avaient leurs enfants avec eux.
    Je tiens à rappeler, alors que les forces policières règlent la situation, combien je trouve irresponsable d'entraîner des enfants dans de pareilles situations. À ceux qui ont des enfants sur place, je leur demande de partir, car ils mettent leurs enfants en danger.
    Depuis le premier jour, nous demandons à ces gens de partir. Dès le lundi, nous avons demandé au gouvernement de nous faire connaître son plan. Au sixième jour, nous avons demandé la création d'une cellule de crise comprenant tous les corps policiers. Le gouvernement n'a rien fait.
    Les gens dehors n'ont pas le droit d'y être. Dès la fin du jour 1, ce n'était plus une manifestation, mais une occupation. Dès la fin de la première semaine, ce n'était plus une occupation, mais un siège.
    Ce qui devait être une anecdote dans nos vies est devenu un épisode de l'histoire canadienne. Ce gouvernement est en train d'inscrire ces gens dans notre histoire.
    Nous avons eu devant nous un siège qui méritait une intervention policière, et non pas le recours à une loi qui sert en temps de guerre, en temps de crise internationale ou à l'occasion d'un tremblement de terre.
    Lors de la crise du verglas, on n'a pas eu besoin de cette loi. Lors de la crise d'Oka, on n'en a pas eu besoin, non plus lors des incendies en Colombie‑Britannique. Finalement, jamais on n'en a eu besoin au cours du dernier demi-siècle.
    Quand la planète a fait face à une pandémie en 2020, le gouvernement n'a pas eu à utiliser la Loi sur les mesures d'urgence.

  (1015)  

    Il faudrait croire que cette manifestation incontrôlée justifie son application aujourd’hui. Or, cela crée un dangereux précédent et c'est comme la première cigarette que l'on fume après avoir arrêté pendant des années. Pourtant, le truc, c'est de ne pas toucher à cette cigarette.
    Certains d’entre nous ont des valeurs plus conservatrices, d’autres ont des valeurs plus libérales. Certains priorisent l’énergie propre, d’autres, la lutte aux changements climatiques. Nous pouvons en débattre, nous insulter mutuellement à la Chambre et nous emporter. Certains d'entre nous souhaitent que le Québec soit un pays et d'autres souhaitent que le gouvernement fédéral soit plus centralisateur. Nous savons que nous ne serons jamais d'accord sur plusieurs questions.
    Toutefois, je crois sincèrement que tous les députés de la Chambre sont démocrates et profondément attachés à la démocratie. La Loi sur les mesures d’urgence implique « des mesures extraordinaires peut‑être injustifiables en temps normal ». Nous n’en avons pas besoin, pas pour ces gens-là. Même si le gouvernement a choisi cette voie, nous n'avons pas à le suivre. La Chambre n’a pas à entériner cette proclamation. Soyons plus grands que ça.
    Le Règlement sur les mesures d'urgence du décret de mardi prévoit notamment qu’« [i]l est interdit de se déplacer à destination ou à l’intérieur d’une zone où se tient une assemblée visée au paragraphe 2(1). » Il est interdit de participer à une assemblée publique qui pourrait gravement troubler la paix. Je comprends cela.
    Cependant, il est même interdit à ceux qui ne se trouvent pas sur les lieux de se déplacer afin de s’y rendre. J’essaie de comprendre cela. Il est interdit d’avoir l’intention de faire quelque chose qui est interdit. Une personne qui s'apprête à faire quelque chose sans toutefois l'avoir fait est coupable d'une infraction passible d'amende. Quand le gouvernement décide de relativiser la liberté d’association et de remettre en cause la liberté de circulation, il doit avoir des bonnes raisons de le faire. Or je n’en vois pas.
    Je vois des gens qui commettent des méfaits, des actes illégaux, et je vois des camions qui obstruent les voies publiques de façon dangereuse. Je vois des gens qui auraient dû depuis longtemps être dispersés, des véhicules qui auraient dû être depuis longtemps remorqués. Depuis le début, nous demandons une intervention policière pacifique, mais ferme. Cependant, l'utilisation de la Loi sur les mesures d’urgence n'est franchement pas nécessaire pour cela. Si on fait ça pour eux, si on ouvre la boîte de pandore, si on fume la première cigarette, vers où irons-nous?
    Je répète que je conçois l'utilité de la Loi sur les mesures d'urgence. Toutefois, sa ratification en dira bien plus sur nous que sur les gens dans la rue. On a vu des motards criminels, des suprémacistes blancs, des racistes et des homophobes dans cette foule étrange, soit. Parmi eux, il y a des gens qui croient à un grand reset, qui pensent que le vaccin contient des agents stérilisateurs et qui adhèrent à d'autres théories du complot, soit. Il y a aussi des gens qui ont rompu avec nos institutions, qui ne croient plus ni au gouvernement ni aux médias.
    Je tiens d’ailleurs à saluer le courage des femmes et des hommes qui se retrouvent au milieu de tout cela pour nous informer. Je pense notamment à Raymond Filion, qui a subi des gestes violents alors qu'il rapportait l’information. Être informé, c’est être libre.
    Franchement, il y a plus de liberté du côté des médias que du côté des opposants. Ce siège n’est pas sympathique; ses occupants non plus. Il faut y mettre fin par une intervention policière, et c’est ce qui se passe. Cependant, le gouvernement ne nous a pas convaincus de la nécessité d’utiliser la Loi sur les mesures d’urgence. Qu’il s’en abstienne.

  (1020)  

    Madame la Présidente, je vais présenter trois faits et je poserai ensuite une question.
    Premièrement, les droits prévus par la Charte ne sont pas touchés par nos mesures. Deuxièmement, cette loi est très différente de la Loi sur les mesures de guerre. Nous ne faisons pas appel à l’armée et c’est très différent de la crise d’Octobre. Troisièmement, selon un sondage récent, 72 % des Québécois appuient nos mesures.
    Lundi, ma collègue de l’opposition a demandé au gouvernement fédéral de faire preuve de leadership. Depuis le premier jour, nous travaillons avec les forces policières municipales et provinciales et nous introduisons des mesures concrètes et ciblées en vertu de la loi fédérale.
    Ma question est simple. Pourquoi la députée a-t-elle changé sa position relativement aux mesures nécessaires pour combattre les activités illégales, particulièrement dans un contexte où la majorité de la population du Québec appuie ces mesures?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Le Bloc québécois n’a pas changé de position. Depuis le premier jour de ce siège, nous demandons au gouvernement de faire quelque chose, de prendre ses responsabilités, de créer une cellule de crise, de faire un travail concerté et coordonné avec les autorités policières, le maire de la Ville d’Ottawa et le premier ministre de l’Ontario. Nous avons demandé à ce que tout le monde collabore et à ce que le gouvernement fasse preuve d'un certain leadership, parce que nous avons vu le siège servir d’inspiration à d’autres manifestations ailleurs dans le pays.
    Ces autres manifestations ont été bien gérées par les autorités policières sans qu’on ait besoin d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Présentement, on se retrouve avec un siège au centre‑ville d’Ottawa. Or, cette crise est circonscrite, ce n’est pas une crise nationale à la grandeur du pays et cela ne justifie pas le recours à la Loi sur les mesures d’urgence. Si le gouvernement avait fait preuve de leadership, nous serions sortis de cette crise depuis bien longtemps.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je tiens à remercier ma collègue de son intervention réfléchie et des préoccupations qu'elle a exprimées à propos de la mise en place, par le gouvernement, de pouvoirs qui, certes, troublent les Canadiens. Je parle des pouvoirs financiers qui, d’après la vice-première ministre, deviendront probablement permanents.
    La députée pourrait-elle commenter le gel de comptes bancaires sur la base de soupçons? J’ai entendu des électeurs âgés dire qu’ils s’inquiètent énormément du paiement de leurs factures. La députée pourrait-elle nous dire ce qu’elle en pense?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Comme je l'ai dit dans mon discours, le fait d'utiliser la Loi sur les mesures d'urgence, alors qu'on ne l'a pas fait depuis son adoption, en 1988, et que tant de gouvernements se sont abstenus de le faire, cela crée un dangereux précédent.
    Cela permet au gouvernement et aux autorités policières d'utiliser des mesures extraordinaires. On entend le premier ministre dire que, même s'ils n'en ont pas besoin, elles peuvent le faire. Or c'est justement là, le problème: elles peuvent utiliser ces mesures.
    Par ailleurs, on voit les opposants continuer d'être financés par des plateformes de sociofinancement. Cela a-t-il l'effet escompté? Je n'en suis pas certaine, et cela crée un dangereux précédent.

[Traduction]

    Uqaqtittiji, est-ce une question nationale? Oui. Nous avons pu entendre le Parti conservateur et le Bloc essayer de minimiser les événements qui ont débouché sur la situation d’aujourd’hui.
    Les gens qui sont dehors ne sont pas seulement des camionneurs, et ils ne font pas juste se garer. C’est de l’extrémisme. C’est une urgence nationale. Nous avons vu des idéologies extrémistes violentes provenant des États-Unis s’infiltrer au Canada. Ce matin, nous avons entendu des conservateurs évoquer le fait que Donald Trump envisage de recueillir des fonds au Canada.
    J’ai trois questions à poser. La députée convient-elle que le fait de se trouver face à ces idéologies extrémistes provenant d’autres pays vient confirmer qu’il s’agit d’une question nationale? Est-elle d’accord pour dire qu’il s’agit bien d’une urgence nationale, et est-elle d’accord sur le fait que nous devons empêcher l’infiltration d’autres pays et la pénétration d’idéologies extrémistes au sein d'un plus grand nombre de groupes canadiens?

[Français]

    Madame la Présidente, des fois je ne sais pas si la question vient du NPD ou du Parti libéral, parce que c'est pareil.
    En effet, c'est une crise, mais elle n'aurait pas pris cette ampleur si le gouvernement fédéral avait pris ses responsabilités dès le premier jour. Ce n'est pas une crise nationale. Le Canada au complet n'est pas ciblé et assiégé; il s'agit d'un périmètre de sécurité devant le Parlement. On aurait très bien pu agir avec l'intervention des forces policières sans la Loi sur les mesures d'urgence.

  (1025)  

    Madame la Présidente, premièrement, je n'ai aucune sympathie pour ce qui s'est passé dans les rues d'Ottawa depuis trois semaines. Heureusement, après 22 jours de siège, la crise pourrait s'achever. Au moment où nous nous parlons, les forces de l'ordre dispersent et arrêtent les occupants.
    Au nom du Bloc québécois, je tiens à remercier tous les corps policiers de leur courage, leur patience et leur professionnalisme. Nous nous croisons les doigts, mais nous pourrions avoir évité le pire. Soyons honnêtes: nous avons craint le pire et celui-ci demeure possible.
    Depuis le début du siège, le Bloc québécois reconnaît le droit de manifester, mais pas celui d'occuper, d'intimider, de tenir des propos haineux, et j'en passe. Comme je vous l'ai dit, je n'ai aucune sympathie pour ce qui s'est passé durant trois semaines dans les rues d'Ottawa. Néanmoins, mon absence de sympathie ne doit pas teinter mon jugement lorsqu'il est question du recours à la Loi sur les mesures d'urgence. C'est cela, la crise nationale. Ce qui se passe dehors est extrêmement grave, mais les corps policiers s'en occupent grâce à leur travail bien coordonné, pas grâce au fédéral.
    La crise nationale, c'est que le premier ministre invoque, pour la première fois de l'histoire, la Loi sur les mesures d'urgence, une loi qui n'a jamais servi depuis sa création en 1988, il y a 34 ans. Elle limite les libertés fondamentales, comme la liberté d'association et la liberté de circulation. Elle permet au fédéral d'intervenir en sol québécois, mais aussi dans les infrastructures québécoises, comme les hôpitaux, les barrages et les centres de vaccination. Elle contrevient à la volonté de l'Assemblée nationale du Québec, qui s'oppose unanimement à son application au Québec. Elle permet « de prendre [...] des mesures extraordinaires peut-être injustifiables en temps normal ». Le premier ministre a revendiqué le droit de poser des gestes injustifiables. En tant que parlementaires, nous devons déterminer s'il a réellement été capable de justifier l'injustifiable.
    Le premier ministre commet une erreur historique en invoquant pour la première fois la Loi sur les mesures d'urgence. Je le répète: c'est la première fois de l'histoire. C'est pourquoi la décision du premier ministre a deux effets qui marqueront l'avenir: banaliser et baliser. Je dis banaliser, parce qu'il utilise cette loi, alors qu'il n'a absolument pas fait la démonstration qu'il remplit les critères d'urgence nécessaires. La Loi sur les mesures d'urgence doit seulement être invoquée, c'est écrit noir sur blanc, si l'État est confronté à une crise nationale, qui menace sa souveraineté, sa sécurité et son intégrité territoriale. C'est grave. Cela décrit pratiquement un état de guerre. On le sait, cette loi est une mise à jour de l'ancienne Loi sur les mesures de guerre.
    Or, la crise à Ottawa n'est pas nationale; elle est circonscrite au centre-ville d'Ottawa et aux villes limitrophes, comme Gatineau. Oui, il y a eux d'autres manifestations en Alberta, au Manitoba, en Ontario, et il y a même eu un feu de paille à Québec, mais tout a été réglé par les forces de l'ordre avec les moyens dont elles disposaient déjà. C'est simple, chaque fois que les gouvernements et les corps policiers ont travaillé adéquatement, en concertation, ils ont eu gain de cause. Nous nous croisons donc les doigts, mais le même scénario semble se répéter à Ottawa. En effet, tous les moyens d'intervenir existent déjà dans chacun des champs de compétence respectifs.
    La concertation est impossible quand le fédéral voit un convoi d'opposants arriver dans la capitale fédérale pour s'opposer à une politique fédérale, s'installer devant le Parlement fédéral pour interpeller le premier ministre fédéral, et que le fédéral passe trois semaines à dire que c'est le problème de la ville d'Ottawa.
    Par ailleurs, l'intégrité du territoire canadien n'est pas menacée. Ce qui se passe est hautement condamnable, mais ce n'est pas une invasion.
    Qui plus est, il n'y a pas de menace à la souveraineté du Canada. Encore une fois, nous nous croisons les doigts, mais les corps policiers semblent en contrôle.
    Ce qui a manqué durant trois semaines, c'est le gouvernement fédéral aux commandes de la gestion de crise rigoureuse. C'est gênant aujourd'hui de voir le gouvernement prétendre qu'il n'avait pas le choix de recourir aux mesures d'urgence. Cela fait trois semaines que nous voyons les occupants de la capitale d'un pays du G7 installer un spa, des saunas, des jeux gonflables et des terrains de hockey-balle. Tous ceux qui sont présents ici on vu cela en personne.
    Qui à la Chambre peut sérieusement prétendre qu'à ce moment tout était mis en œuvre pour régler la crise? Y a-t-il vraiment quelqu'un qui croit cela?
    C'est pourquoi le premier ministre banalise le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Il inscrit dans l'histoire que les critères qui doivent être remplis pour recourir à cette loi, sont discrétionnaires.

  (1030)  

    Il inscrit dans l’histoire qu’il est acceptable de l’utiliser sans consensus à la Chambre, et peut-être même sans majorité. Il inscrit dans l’histoire que c’est acceptable contre la volonté du Québec et de la plupart des provinces. Il inscrit dans l’histoire que le gouvernement fédéral peut s’en servir essentiellement pour dire qu’il a fait quelque chose après trois semaines d’inaction.
    C’est donc de manière arbitraire et clivante et au nom de la joute politique que le premier ministre a recours à la Loi sur les mesures d’urgence. C’est cette banalisation qui va servir de balise à tous les premiers ministres qui vont lui succéder. Le premier ministre balise la voie à suivre pour tous les prochains gouvernements. Tous les acteurs politiques de l’avenir, devant une crise, vont regarder comment le premier ministre du Canada a invoqué, en 2022, la Loi sur les mesures d’urgence. Ils vont tous consulter sa décision et constater que, pour invoquer les mesures d’urgence, la barre est moins haute que le texte de la Loi le suggère.
    Ainsi, la joute politique et la pression en temps de crise risquent de mettre la barre encore un peu moins haut, toujours juste un peu moins haut. Cela va servir de jurisprudence à tous les prochains gouvernements pour évaluer, par exemple, le financement des mouvements écologistes; la lutte citoyenne aux changements climatiques; les manifestations étudiantes; les conflits de travail tendus; les manifestations pour les droits civiques, pour l’autodétermination des peuples, ou contre le racisme; et les débats à forte charge émotionnelle, comme une nation qui aspirerait à son indépendance. Cela va servir de balise.
    C'est pourquoi on doit être prudent. C’est pourquoi on doit se comporter en homme d’État et en femme d’État, s’élever au-dessus de la mêlée. Il faut considérer les répercussions de nos choix au-delà de la situation qui est directement sous notre nez. Il faut penser à long terme et prévoir deux coups à l’avance. Il faut ériger un mur entre ses opinions et la décision législative, entre la situation politique immédiate et la décision législative. C’est seulement ainsi que, comme politicien ou politicienne, on respecte le contrat entre les citoyens et l’État.
    On ne contrôle pas l’avenir. Je ne sais pas qui va former le gouvernement du Canada dans 10 ans. Je suis optimiste, j’ai espoir que tous les futurs premiers ministres seront prudents, humanistes, nuancés et conscients de l’impact de chacune de leurs décisions. Cependant, je n’en ai pas la garantie. Je suis profondément mal à l’aise de voir qu’on amenuise, aujourd’hui et pour toujours, la définition politique de ce qui constitue le dernier recours, la bombe atomique, durant une crise.
    Je l’ai dit, je n’ai aucune sympathie pour ce qui s’est passé durant trois semaines dans les rues d’Ottawa, mais c'est sans importance. Je m’oppose au recours à la Loi sur les mesures d’urgence, malgré tout ce que j’ai vu de mes yeux chaque jour en venant travailler. À la Chambre, je suis le député de Lac-Saint‑Jean.
    Chaque matin, je me rappelle pour qui je travaille. Je travaille pour les gens du Lac-Saint‑Jean. Je n’appuierai pas une décision irréfléchie qui pourrait, un jour, avoir un impact sur les droits des gens du Lac-Saint‑Jean et du Québec. Je ne peux pas banaliser le recours à la Loi sur les mesures d’urgence. Je ne peux pas baliser imprudemment le chemin qui sera emprunté par tous les prochains gouvernements.
    Sincèrement, je n’ai pas l’entière certitude que la décision du premier ministre n’est pas en partie teintée par son dédain pour les occupants. Je n’ai pas non plus la certitude que ce n’est pas la situation politique immédiate qui le guide vers une décision soulageante aujourd’hui, mais qui sera consternante demain. Je n’ai pas la certitude qu’il a pleinement mesuré l’impact de l’héritage qu’il va laisser. Je n’ai pas non plus l’entière certitude que l’appui précipité du NPD n’a pas été en partie teinté par le peu de sympathie qu’il a, lui aussi, pour ce qui s’est passé dans les rues d’Ottawa. Je n’ai pas la certitude que la situation politique immédiate n'a pas distrait le NPD de l’importance de protéger, à long terme, les droits et libertés. Le NPD semble réfléchir aujourd’hui à l’héritage qu’il va laisser. C'est une bonne nouvelle.
    Il faut qu’on se souvienne de l’occupation d’Ottawa comme de la crise qui a mené à davantage de collaboration proactive entre gouvernements et corps policiers. Il ne faut pas s'en souvenir comme de la crise qui a banalisé et balisé le recours à la Loi sur les mesures d’urgence.
    Prenons la bonne décision pour l’avenir de la saine démocratie, pour l’avenir du contrat social et pour l’avenir des citoyens et des citoyennes que nous avons l’honneur de représenter.

  (1035)  

    Madame la Présidente, j'aimerais remercier mon honorable collègue de son discours. J'apprécie sa franchise quant aux doutes qu'il exprime. J'apprécie également le fait qu'il laisse de la place à l'opinion des autres.
    Moi non plus, je n'ai pas la certitude qu'il s'agit à 100 % de la meilleure chose à faire, mais il y a une chose que je reconnais sincèrement. J'espère d'ailleurs que mon honorable collègue pourra m'en parler. Sans vouloir banaliser les décisions que nous sommes en train de prendre, mon honorable collègue serait-il d'accord pour dire que nous banalisons un peu là où nous en sommes rendus quant à l'expression extrémiste que nous observons dans notre politique, au Canada et dans le monde?
    N'est-il pas temps de maintenant fixer des balises afin que nous ne nous dirigions pas vers des débordements?
    Madame la Présidente, jamais je ne banaliserai les discours haineux. Je tiens à m'assurer que mon honorable collègue est au courant.
    Mon collègue a dit que lui non plus n'était pas sûr à 100 % qu'on prenait la bonne décision. C'est ce qu'il vient de me dire.
    Toutefois, quand il est temps de prendre une décision aussi importante que celle de mettre en application la Loi sur les mesures d'urgence, il faut être certain à 100 % que c'est la bonne décision.

[Traduction]

    Madame la Présidente, d’un bout à l’autre du pays, durant la période qui a mené à l’arrivée du convoi à Ottawa, il y a eu de multiples arrêts en cours de route. Le gouvernement aurait pu se mettre à l’écoute des gens et être prêt à regarder au-delà des apparences, écouter ce que le reste du pays disait et la manière dont les gens voyaient les choses. Il y a eu suffisamment de signes avant-coureurs de ce qui allait se produire, mais le gouvernement a choisi de ne pas agir et de ne pas écouter.
    Le député convient-il que le gouvernement aurait dû être disposé à regarder ce qui se passait ailleurs au pays? Ce n’est pas parce qu’il n’est pas représenté dans d'autres régions du pays qu’il ne doit pas être à l’écoute de leurs préoccupations.

[Français]

    Madame la Présidente, lorsqu'on est premier ministre, on doit effectivement écouter tous ceux qui émettent une opinion partout au pays. J'imagine que cela vient avec la job. Or il fallait surtout agir dès le jour un de ces manifestations.
    Je comprends la question de mon honorable collègue et je l'en remercie, mais, si certains membres du caucus conservateur n'avaient pas exacerbé la crise, nous n'en serions peut-être pas là maintenant. Il y a tout de même des conservateurs qui se sont pris en photo avec les manifestants en disant qu'il fallait les écouter et en les encourageant presque à rester sur place.
    Voilà ce qui s'est passé: il y a eu un manque de leadership du côté libéral et un encouragement du côté conservateur, et on se retrouve aujourd'hui à la Chambre à débattre d'une loi qui ne devrait pas être mise en application pour ce genre de manifestation.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’aimerais remercier mon collègue de son intervention. Il est certain que je suis préoccupée par la situation à laquelle nous sommes arrivés et par le fait que le gouvernement ait laissé les choses durer aussi longtemps.
    Cependant, je veux être claire. Il fait allusion aux défenseurs des terres et aux environnementalistes. Ayant été très engagée dans certains mouvements, dont Idle No More, je peux affirmer que nous étions pacifiques. Nous n’avons jamais eu d’armes à feu. Nous n’avons jamais choisi de nous insurger contre le gouvernement. Nous n’avons jamais menacé de tuer la police. Cette posture constante de minimisation à la Chambre est profondément troublante et inquiétante. Elle entretient et alimente les notions de suprématie blanche, ce qui alimente également les idées propagées au cours de cette occupation illégale.
    Le député n’est-il pas d’accord sur le fait que minimiser ce qui se passe à l’extérieur est une autre façon d’encourager ce genre de mouvement extrémiste d’occupation, dirigé par des nationalistes blancs que nous voyons à l’extérieur?

[Français]

    Madame la Présidente, au risque de me répéter, jamais je ne banaliserai les discours haineux. Ce n'est pas ainsi que je suis fait.
    Je suis inquiet pour l'avenir. Je ne sais pas si, dans 10 ans par exemple, le Reform Party renaîtra de ses cendres, tel le phénix, et prendra le commandement du gouvernement du Canada. Je ne sais pas si ce sera le cas dans 10 ans.
    Je ne sais pas non plus si, dans 10 ans, en regardant ce qui se passe aujourd'hui et ce que le gouvernement aura fait en 2022 avec la Loi sur les mesures d'urgence, ils l'utiliseront à leur tour pour un mouvement écologiste qui bloque une rue. Je ne veux pas cela.
    C'est pourquoi il ne faut absolument pas que les députés permettent aujourd'hui à cette loi d'être adoptée.

  (1040)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, je tiens à signaler que je partagerai mon temps de parole avec le député de Lac-Saint-Louis.
    J’aimerais commencer mes observations aujourd’hui en vous remerciant, vous et le personnel de l’administration de la Chambre, de veiller à ce que le Parlement puisse fonctionner. J’aimerais également prendre un instant pour remercier de leur travail toutes les femmes et tous les hommes en uniforme, tous ces gens qui travaillent sans relâche à assurer notre sécurité et à rétablir la loi et l’ordre.
    Ces deux dernières années ont été difficiles pour tout le monde. Les Canadiens se sont mobilisés pour protéger leurs proches en suivant les directives de la santé publique. J’aimerais également prendre un moment pour remercier tous ceux qui ont veillé à la sécurité de nos collectivités. Je les remercie de faire leur part dans la lutte contre cette pandémie. Je veux remercier les travailleurs essentiels de tout le pays, qui ont travaillé dur pour assurer la sécurité de nos collectivités.
    Je veux également parler des camionneurs qui, eux aussi, travaillent dur. L’industrie du transport a joué un rôle fondamental ces deux dernières années. Lorsque les provinces ont imposé des mesures sanitaires et recommandé aux Canadiens de rester chez eux, les camionneurs ont continué à travailler. Ils ont continué à travailler dur afin d’acheminer les médicaments, la nourriture et les fournitures pour que nos étagères restent garnies et que notre économie continue à fonctionner.
    Brampton abrite des centaines d’entreprises de camionnage. Le secteur des transports fait partie des employeurs les plus importants à Brampton et il contribue de manière importante à la chaîne d’approvisionnement canadienne. Je remercie tous les camionneurs qui ont continué à travailler héroïquement tout au long de la pandémie des services qu’ils rendent à notre pays.
    Les travailleurs représentés par Unifor, Teamsters et l’Alliance canadienne du camionnage font leur part en se faisant vacciner et en maintenant la chaîne d’approvisionnement en mouvement. Ils ont dit clairement qu’il était nécessaire que les camionneurs se fassent vacciner et continuent d'assurer la circulation des marchandises.
    Ces deux dernières semaines, j’ai également reçu de nombreux appels téléphoniques de camionneurs de ma circonscription à propos des blocages. Ils ont été très clairs. Les individus qui ont occupé Ottawa ne les représentent pas, ne représentent pas leurs opinions ni celles de l’industrie de manière générale. Les individus qui, dans les convois, bloquent illégalement les passages frontaliers de notre pays ne sont pas représentatifs de ces camionneurs, ces travailleurs acharnés que nous connaissons.
    Je tiens à souligner que des personnes à l’extérieur de la Chambre sont venues avec des camions qui ne leur appartiennent pas. Un électeur a pris contact avec moi l’autre jour; il est propriétaire d’une entreprise de camionnage. Il m’a appelé pour me dire qu’ils ont quelques camions à Ottawa que les chauffeurs ont pris de leur propre gré pour cette occupation. Ils n’appuient pas ce qui se passe à l’extérieur et veulent savoir comment récupérer leurs camions. Cela ne devrait pas se produire et est considéré comme un vol. Non seulement j’exhorte ces camionneurs à rendre les camions à leurs propriétaires respectifs, mais j’encourage aussi ceux qui sont restés dehors à rentrer chez eux.
    Je soutiens les manifestations pacifiques. Cela fait partie de notre droit en démocratie, et chacun a le droit d’exercer sa liberté d’expression. Après tout, nous sommes le parti de la Charte canadienne des droits et libertés. La liberté d’expression et la démocratie sont ce qui fait notre réputation en tant que Canadiens, mais quand le commerce international dans notre pays est touché à nos frontières, que les résidants ne se sentent pas en sécurité dans leurs propres communautés et que nos entreprises doivent fermer leurs portes contre leur gré, cela n’est plus considéré comme une protestation pacifique.
    L’occupation des rues d’Ottawa est illégale. Les occupations et les blocages qu'on a vu apparaître constituent une menace pour notre économie, nos chaînes d’approvisionnement et la sécurité publique. Les résidents du centre-ville ne se sentent pas en sécurité en sortant de chez eux parce qu’ils craignent d’être harcelés. Des entreprises sont fermées parce qu’elles craignent pour la sécurité de leurs employés. Les individus qui bloquent illégalement les rues d’Ottawa parlent de liberté pour tous, mais à cause d’eux, les résidents locaux sont enfermés chez eux. De petites entreprises qui ont déjà suffisamment souffert au cours de la pandémie sont fermées. Nous devons protéger nos infrastructures essentielles, comme nos postes frontaliers d’un bout à l’autre du pays.
    Cela n'est pas sans conséquence pour les camionneurs qui essaient de faire leur travail en traversant les frontières et qui ne peuvent pas rentrer chez eux. Ce n’est pas cela la liberté. J’ai entendu des histoires de familles inquiètes de camionneurs qui ont dû attendre jusqu’à six heures dans un sens pour traverser la frontière alors qu’ils transportaient des marchandises depuis les États-Unis. À cause des blocages, ils ont dû sacrifier le temps passé avec leur famille. Cela a eu des répercussions sur leur santé mentale et mis plus de 8 000 travailleurs de l’automobile au chômage, ce qui a eu une incidence sur des milliers de familles partout au pays pendant les blocages frontaliers.
    Certains habitants du centre-ville me disent qu'ils craignent de sortir de chez eux et qu'ils se font harceler parce qu'ils portent le masque. Leur santé mentale se détériore à cause du niveau absurde de bruit causé par les manifestants et les klaxons. Moi qui suis père, je n'arrive même pas à imaginer ce que les nouveaux parents et les jeunes familles doivent endurer. Bien des commerces, comme ceux du centre commercial, et bien des restaurants ont dû temporairement fermer leurs portes en raison des occupations illégales.
    Les barrages illégaux perturbent la vie des Canadiens et menacent aussi notre économie et les rapports que nous avons avec nos partenaires commerciaux. Le blocage du pont Ambassador coûtait 390 millions de dollars par jour; celui du poste-frontière de Coutts coûtait 48 millions de dollars par jour et celui d'Emerson, au Manitoba, 73 millions de dollars. Oui, c'est bien ce que je dis: par jour.
    Les Canadiens demandent au gouvernement de s'élever contre les occupations et les barrages illégaux et de mettre un terme à ce qui se passe près de nos institutions. Nous avons invoqué la Loi sur les mesures d'urgence pour protéger les collectivités et les emplois et pour rétablir la confiance envers nos institutions. Les dons importants en provenance de l'étranger sont aussi alarmants, et il faut en tenir compte. Si nous voulons protéger la collectivité, c'est notre devoir d'adopter cette position. Comme le premier ministre l'a rappelé lundi dernier, la Charte canadienne des droits et libertés continue de protéger les droits individuels lorsque la Loi sur les mesures d'urgence est appliquée.
    Comme notre gouvernement l’a dit à plusieurs reprises, le recours à la Loi sur les mesures d’urgence n’est pas utilisé pour faire appel à l’armée et ne restreindra pas la liberté d’expression ni la liberté de réunion pacifique. La Loi est invoquée parce que les barrages et les occupations constituent une menace pour nos chaînes d’approvisionnement, notre économie et la sécurité publique. La Loi donne aux forces de l’ordre des moyens supplémentaires, elle interdit les barrages et maintient les corridors essentiels ouverts.
    La GRC et les services de police locaux ont reçu les ressources supplémentaires dont ils ont besoin pour continuer à assurer la sécurité de nos collectivités, et nous avons pleinement confiance dans le travail important qu’ils accomplissent. Depuis que nous avons invoqué la Loi sur les mesures d’urgence, la plupart de nos frontières ont été rouvertes aux échanges commerciaux essentiels. Nous devons à présent poursuivre notre travail pour mettre fin aux blocages et aux occupations illégales qui se déroulent à l’extérieur du Parlement.
    Nous demandons aux participants du convoi de rentrer chez eux depuis près de trois semaines maintenant. La police a lancé des avertissements clairs aux manifestants. Ces derniers ont eu la possibilité de rentrer chez eux en toute sécurité, mais ils ont choisi de ne pas le faire. Nous faisons confiance à la GRC, à la Police provinciale de l’Ontario, à la police d’Ottawa et aux autres services de police pour rétablir la loi et l’ordre. Ces mesures ne sont pas prises à la légère, et il n’y aura aucune atteinte aux droits démocratiques de quiconque.

  (1045)  

    Nous faisons ce qui s’impose pour assurer la sécurité des Canadiens, et les mesures mises en place par notre gouvernement sont efficaces. Ces convois mobiles sont une menace pour nos collectivités. Ils peuvent apparaître n’importe où et prendre le contrôle d’une ville. Nous en avons été témoins dans la capitale nationale et aux points d’entrée partout au pays, et c’est simplement inacceptable. Personne ne veut qu’on lui retire son gagne-pain et, en tant que parlementaires, nous devons défendre les Canadiens pour mettre fin à ces occupations illégales.
    Alors que certains députés conservateurs serrent des mains, lèvent le pouce en signe d’encouragement, font des high five et posent pour la photo avec les chefs des occupants d’Ottawa, je me permets de rappeler aux députés d’en face que les dirigeants du convoi qu’ils accueillent avec un sourire, sont liés à l’extrémisme de droite que l'on a vu tenir des propos haineux et brandir des symboles racistes et des drapeaux des confédérés.
    Nous ne tolérerons pas cela, en tant que parti ou en tant que pays. Nous nous élevons contre toutes les formes de racisme et de haine, et nous prendrons toujours position. Ce ne sont pas des valeurs canadiennes et cela ne représente pas notre pays. Contrairement à certains membres du Parti conservateur, nous ne faisons pas la promotion des figures de proue du convoi et des activités qui se déroulent à l’extérieur de la Chambre.
    Nous avons pris des mesures pour mettre fin à ces blocages illégaux. J'espère que les députés d'en face arrêteront une bonne fois pour toutes d'appuyer les leaders du convoi et qu'ils feront passer l'intérêt du pays en premier en travaillant avec le gouvernement pour protéger et soutenir l'économie et la sécurité publique. Nous reconnaissons que les barrages illégaux constituent une menace pour la sécurité nationale. Nous continuerons à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour assurer la sécurité de la population canadienne.
    Nous comprenons que la pandémie n'a été facile pour personne et qu'elle a eu des répercussions sur la vie de la population, mais les barrages illégaux à la frontière, dans l'ensemble du pays et à Ottawa ne sont pas la solution. Les entreprises souffrent. Les employés souffrent. La population canadienne souffre. Il est important que nous continuions à nous appuyer sur les données scientifiques et à travailler dans l'intérêt de l'ensemble de la population canadienne.
    Les membres du convoi ont fait valoir leur point de vue. Il est maintenant temps pour eux de rentrer chez eux. J'encourage les députés d'en face à faire la bonne chose en se joignant à nous pour mettre fin à cette occupation illégale. Je tiens à rassurer les citoyens qui nous écoutent que les droits garantis par la Charte sont protégés par cette loi et qu'il s'agit d'une plainte fondée sur la Charte.
    Comme mes collègues à la Chambre, je soutiens pleinement le droit de manifester pacifiquement, mais nous savons tous que cette manifestation n'est plus pacifique. Dans une démocratie, nous devons nous opposer à ceux qui empêchent les autres, par des menaces et des agressions, de vivre librement dans notre pays. Il y a des forces sinistres à l'œuvre dans ce cas‑ci, et elles ciblent nos infrastructures essentielles à nos frontières, ce qui nuit à notre économie et aux Canadiens.
    Ces forces sinistres sont financées par des fonds étrangers, et les individus qui ont un comportement criminel doivent faire face aux conséquences. Les mesures supplémentaires prévues dans cette loi permettent d'exercer une plus grande surveillance financière, afin de donner à nos organismes d'application de la loi la possibilité de faire leur travail efficacement et de demander des comptes aux responsables. Oui, nous avons réalisé des gains et des progrès, et nous avons obtenu la réouverture de nos passages frontaliers, mais nous, les parlementaires, devons continuer à travailler pour préserver ces progrès et fournir aux organismes d'application de la loi les outils nécessaires pour mettre fin à ces occupations et barrages illégaux.
    L'une des plus hautes fonctions électives au Canada est celle de député, et ce privilège s'accompagne de grandes responsabilités. Avant de conclure, j'aimerais lire une déclaration tirée du site Web de l'Administration de la Chambre:
    Avant de pouvoir prendre son siège à la Chambre des communes et de voter, le député dûment élu doit prêter serment ou faire une affirmation solennelle d'allégeance ou de loyauté au souverain et signer le registre d'assermentation [...]
    On peut aussi lire ceci:
    Quand un député prête allégeance à Sa Majesté la Reine en sa qualité de souveraine du Canada, il prête aussi allégeance aux institutions qu'elle représente et notamment au principe de la démocratie. Le député s'engage ainsi à servir les meilleurs intérêts du pays. Le serment qu'il prête, ou l'affirmation solennelle qu'il fait, sers à lui rappeler tout le poids des obligations et des responsabilités qu'il assume.
    Maintenant, avant qu'un autre député ait la brillante idée d'aller serrer la main de gens qui prônent des idéologies extrémistes et racistes d'extrême droite, tiennent des discours violents ou répandent des théories conspirationnistes, de leur faire des accolades et de se prendre en photo avec eux, j'aimerais que mes collègues se rappellent qu'ils ont juré de protéger nos institutions démocratiques et de servir les intérêts du pays.

  (1050)  

    Madame la Présidente, je trouve quelque peu difficile d'écouter le député et le Parti libéral parler de la sécurité de la population. Je viens de jeter un coup d'œil au compte Twitter du premier ministre, et je n'y vois rien au sujet de Houston, en Colombie‑Britannique, et rien au sujet des attaques à la hache d'écoterroristes qui provoquent des millions de dollars de dommages. Je n'entends pas parler de tout cela. Je n'entends parler que de ceci.
    Lorsque j'ai quitté la Chambre après mon discours, jeudi soir, un policier m'a ouvert la porte qui donnait sur le convoi et m'a dit d'être prudent. Je me suis dit que les alentours étaient peut-être dangereux, mais non. Il m'a ensuite prévenu que le sol était glissant.
    Je ne dis pas que les manifestants devraient être ici, mais j’aimerais savoir pourquoi le député ne parle pas de ce qui se passe dans le monde réel.
    Madame la Présidente, comme le député parle de la police, qui nous recommande de faire preuve de prudence, j’aimerais citer le chef Bell, de la police d'Ottawa, qui a déclaré hier: « Sans les pouvoirs qui nous ont été octroyés grâce à cette loi, nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons aujourd'hui. »
    Ces mesures d'urgence ont permis à la police de confisquer les permis commerciaux de camionneurs, de geler des comptes bancaires et d'annuler des assurances tout en forçant des entreprises de remorquage à aider la police à enlever des véhicules.
    Comme il est question du merveilleux travail qu'accomplissent les policiers, il est important de souligner qu'ils sont ici pour rétablir la loi et l'ordre dans les rues partout au pays. Peu importe qu'il y ait un problème ici, à Ottawa, ou quelque part en Colombie‑Britannique. Je sais que nous pouvons toujours compter sur les forces de l'ordre, mais nous devons continuer de leur fournir les outils dont elles ont besoin pour faire leur travail.

[Français]

    Madame la Présidente, je vais poser à mon collègue une question que j'ai posée plus tôt et à laquelle je n'ai pas obtenu de réponse.
    Une des principales mesures de ce décret consiste à geler les comptes bancaires des camionneurs québécois et canadiens, et l’on entend dire que ce serait gelé pendant une semaine. Le député peut-il me donner plus d'informations là-dessus?
     J'imagine qu'on a réfléchi à ce décret. La durée est-elle d'une semaine, oui ou non?

[Traduction]

    Madame la Présidente, pour ce qui est des outils financiers fournis aux policiers pour retracer le financement étranger, il est important de souligner que ces outils étaient nécessaires pour assurer la protection de nos institutions démocratiques. Ils vont contribuer à la protection de nos citoyens et du pays.
    Nous tous, dans cette enceinte, représentons une démocratie et, quand nous voyons des forces occultes à l'œuvre, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour assurer la protection de nos institutions démocratiques.
    Madame la Présidente, la situation actuelle est le fruit de l'absence patente et totale de leadership de tous les ordres de gouvernement, c'est évident. En fait, un événement qui aurait pu être contenu par l'imposition d'amendes et dans le cadre d'activités policières courantes a pu se muer en une véritable honte aux yeux du monde au pont Ambassador.
    Voici ma question pour mon collègue: est-ce que les libéraux acceptent de lancer une enquête indépendante complète sur tout ce qu'on a laissé se produire pendant cette crise, puis d'agir en conséquence des résultats pour veiller à ce que les outils dont nous avons actuellement besoin ne soient pas mal employés à l'avenir? Pourquoi n'y a‑t‑il pas de comité de supervision, ce qui nous permettrait de veiller à l'utilisation limitée de ces outils pour rétablir la sécurité des gens dans les rues d'Ottawa sans qu'il y ait davantage d'abus de pouvoir de la part du gouvernement?
    Madame la Présidente, je crois en l'importance de la transparence et des mécanismes de surveillance. Comme l'a dit le ministre de la Justice, il s'agit de mesures temporaires, qui visent à rétablir la confiance envers nos institutions et à rétablir la loi et l'ordre. Nous savons que la Loi sur les mesures d'urgence contribuera à rétablir la loi et l'ordre. Elle donne des résultats, comme le montre ce qui se déroule à l'extérieur de la Chambre. Les forces de l'ordre utilisent efficacement leurs pouvoirs.
    Je signale que les forces de l'ordre ne suivent pas les ordres des parlementaires. Nous ne les dirigeons pas, mais nous devons continuer de leur fournir les outils dont elles ont besoin pour accomplir efficacement leur travail. Hier, quand j'ai regardé dehors, j'ai vu que des policiers de Peel étaient à Ottawa et contribuaient à rétablir la confiance. C'est grâce aux outils que fournit la Loi sur les mesures d'urgence, comme l'a dit le chef de police Bell. Il est très important de comprendre pourquoi on a eu recours à la Loi sur les mesures d'urgence et de savoir qu'il s'agit d'une mesure extrêmement temporaire, comme l'a dit le ministre de la Justice.

  (1055)  

    Madame la Présidente, je tiens, comme le député précédent, à remercier les membres du Service de protection parlementaire et les agents de la paix qui sont venus à Ottawa pour dénouer cette situation sans précédent.
    Il y a eu beaucoup de désinformation, de malentendus et d'incompréhension autour de la pandémie, des mesures de santé publique nécessaires, et de l'opposition possible entre ces mesures et les droits garantis par la Charte des droits et libertés. Avant même que ne commencent les événements qui se déroulent actuellement à Ottawa, beaucoup de gens m'ont écrit pour me parler des exigences liées à la santé publique et me dire qu'elles contrevenaient aux droits garantis par la Charte.
    Nous avons tous la responsabilité de dire aux gens de nos circonscriptions respectives, comme je le fais, que les exigences et les restrictions liées à la santé publique, qui sont en voie d'être assouplies et éliminées, ne contreviennent pas aux droits garantis par la Charte. Si elles avaient contrevenu à ces droits, des gens auraient intenté des poursuites, des juges auraient rendu des décisions et les exigences auraient été annulées. C'est ainsi que fonctionne notre démocratie.
    En fait, à Terre-Neuve, au tout début de la pandémie, on a imposé une très sérieuse restriction de santé publique qui interdisait à quiconque d'entrer dans la province à moins de fournir une attestation médicale. L'affaire a été portée devant les tribunaux, qui ont conclu que cette mesure de santé publique ne constituait pas une violation des droits garantis par la Charte. Il est très important, et il est de notre devoir en tant qu'élus, de réitérer aux Canadiens que leurs droits garantis par la Charte n'ont pas été violés. Oui, ces mesures ont été contraignantes, mais ces contraintes ne constituent pas nécessairement une violation des droits prévus par la Charte.
    Certains répondront à cela qu'ils ne veulent pas parler des tribunaux parce qu'ils font partie du gouvernement, ou parce qu'ils sont truffés de juges à l'esprit libéral. À partir du moment où on ne s'entend plus sur la structure de notre démocratie et son fonctionnement, il est impossible d'avoir des conversations constructives. Tout projet de loi déposé à la Chambre est accompagné d'un énoncé concernant la Charte. Bien que les décrets ne nécessitent pas d'énoncé officiel, ils sont vérifiés pour valider leur conformité à la Charte.
    Il est également important de rappeler aux Canadiens que ce que nous avons vu devant le Parlement et à de nombreux postes frontaliers du pays, ce ne sont pas des manifestations pacifiques et légales. Nous devons rappeler aux Canadiens qu'il s'agit de rassemblements illégaux qui ont débordé du cadre raisonnable d'une manifestation légitime fondée sur les droits et libertés protégés par la Constitution.
    Le soi‑disant « convoi de la liberté » est venu aussi avec son lot d'effets négatifs, surtout pour les habitants d'Ottawa. Des entreprises du centre-ville ont dû fermer leurs portes et des travailleurs qui doivent subvenir aux besoins de leur famille sont privés de travail, et de salaires, depuis trois semaines. Parallèlement, d'autres Canadiens ont subi des pertes de revenus en raison des bris dans la chaîne d'approvisionnement à la frontière. Toutes ces personnes ont subi les conséquences très réelles de ces barrages illégaux.
    Pour en revenir aux habitants d'Ottawa, j'aimerais vous lire un extrait d'un article qui a récemment été publié dans le Globe and Mail. On y parle de l'impact des barrages au centre-ville d'Ottawa sur la santé mentale de ses habitants. Je cite: « Les experts s'inquiètent des effets à long terme du stress sur la santé des habitants, qui doivent aussi composer avec une pandémie. » Puis, l'article cite Mme Ivy Bourgeault, professeure titulaire en Études sociologiques et anthropologiques, à l'Université d'Ottawa, qui a dit: « Je ne crois pas que les habitants auront le même regard qu'avant sur leur environnement. Quand d'autres manifestations surviendront, ce sera un élément déclencheur pour eux. » Puis elle ajoute: « L'incertitude et le fait de n'avoir aucun contrôle causent un stress énorme, qui vient s'ajouter aux facteurs de stress chroniques qui affligent la population depuis le début de la pandémie. » Je pourrais continuer à fournir des exemples.

  (1100)  

    Je voudrais également parler des répercussions économiques. J’en ai déjà parlé, dans une question posée à l’un des députés qui a pris la parole. Ce que j’essayais de dire, c’est que si quelqu’un voulait miner la sécurité d’une nation, en particulier d’une nation marchande qui importe la plupart de ses produits d’une nation voisine comme les États-Unis, il en bloquerait les points d’entrée. Cela nuirait à cette nation. Ils bloqueraient le pont Ambassador. Ils bloqueraient les passages au Manitoba et en Alberta. Ils bloqueraient 12 autres points d’entrée. Bien sûr, ils violeraient aussi les limites de l’esplanade de l’Agence des services frontaliers du Canada à Fort Erie, ce qui entraînerait la fermeture du bureau pour empêcher d’autres manifestants d’entrer. C’est ce que quelqu’un ferait s’il voulait miner la sécurité de ce pays.
    J’ai observé la réaction de l’opposition officielle. Je ne veux pas être partisan, car il ne s’agit pas d’une question partisane. J’ai observé le raisonnement et le message de l’opposition officielle depuis quelques semaines. La première idée que l’opposition officielle a essayé de faire passer était que si le premier ministre s’asseyait et prenait une tasse de café avec des organisateurs antidémocratiques, tout le monde rentrerait chez soi heureux. Je ne crois pas qu’un soi-disant parti de la loi et de l’ordre puisse vraiment croire en cette idée.
    Ensuite, l’opposition officielle a donné foi à l'idée voulant que la police soit dirigée par le gouvernement fédéral. Si la manifestation est toujours là, c’est la faute du gouvernement fédéral, car il contrôle les forces de l’ordre. Beaucoup de gens le croient. De nombreuses personnes m’ont écrit pour me demander pourquoi nous ne pouvons rien faire à ce sujet. Je leur rappelle que dans une démocratie constitutionnelle, les gouvernements, qu’ils soient municipaux, provinciaux ou fédéraux, ne dirigent pas la police.
    Quand le gouvernement a finalement fait quelque chose en invoquant la Loi sur les mesures d’urgence, l’opposition officielle a reculé, choquée. Elle a demandé comment nous pouvions penser à faire cela, après avoir dit au gouvernement qu’il ne faisait rien. Il y a beaucoup de contradictions dans les messages de l’autre côté, mais laissons cela de côté pour un moment.
    Un autre point qui a été soulevé est que la situation aurait pu être gérée normalement en utilisant des lois ordinaires, mais nous avons vu pendant trois semaines que la police d’Ottawa était débordée. Elle ne pouvait rien faire, et nous l’avons vu. C’est un fait historique. Pendant trois semaines, la police d’Ottawa n’a pas pu maîtriser la situation. Ce n’était pas la police fédérale. Ce n’était pas la police provinciale. C’était la police d’Ottawa.
    Qu’est-ce que la Loi sur les mesures d’urgence a permis de faire? Elle a permis à la police d’Ottawa d’être soutenue par les forces de police de sept autres municipalités, je crois. Qu’est-ce que la Loi sur les mesures d’urgence a permis de faire? Elle a permis à ces policiers de se joindre à la police d’Ottawa et de l’aider à lever les barrages devant les édifices du Parlement, sans qu’il soit nécessaire d’affecter chaque agent dans le cadre d’un processus bureaucratique…
    Des voix: Oh, oh!
    À l’ordre. Les députés savent très bien qu’ils auront l’occasion de poser des questions et de formuler des observations, et je leur demanderais de garder leurs réflexions pour eux d’ici là. Il serait préférable qu’ils les notent, plutôt que de les crier.
    Il reste une minute et 30 secondes au député de Lac-Saint-Louis.
    Madame la Présidente, je crois qu’il nous incombe aussi de dire à nos citoyens ce que fait la Loi sur les mesures d’urgence et ce qu’elle ne fait pas. Premièrement, ce n’est pas la Loi sur les mesures de guerre. Je sais que certains députés ont tenté d’établir un lien subtil avec celle-ci. D’autres ont été moins subtils, mais il ne s’agit pas de la Loi sur les mesures de guerre. Deuxièmement, la Loi sur les mesures d’urgence ne suspend pas les droits garantis par la Charte. Nous revenons à la Charte des droits. Il est important de dire aux citoyens que la loi ne suspend pas les droits garantis par la Charte.
    Troisièmement, la loi ne met pas les services de police locaux sous l’autorité du gouvernement fédéral. Quatrièmement, elle ne supprime pas le droit de manifester légalement. Que fait-elle? Elle donne au CANAFE la capacité d’arrêter le flux du soutien financier, dont une grande partie provient de l’étranger, du Sud de la frontière plus particulièrement. Ce pouvoir est important. Le CANAFE est toujours tenu de respecter la Charte canadienne des droits et libertés, parce que la Loi sur les mesures d’urgence ne suspend pas l’application de la Charte.
    J’arrêterai ici, et j’ajouterai certains points dans les réponses que je donnerai.

  (1105)  

    Madame la Présidente, je remercie le député de son travail en tant que président du comité de l’environnement. Dans cette affaire, il a maintes fois dit que la Loi sur les mesures d’urgence est nécessaire afin qu’il n’y ait pas de formalités administratives pour que d’autres services de police puissent venir en aide au Service de police d’Ottawa.
    Je viens de la Colombie-Britannique et les services de police relèvent en fait de la compétence provinciale. Des agents de la paix sont souvent appelés en renfort dans d’autres régions en cas de besoin. Par exemple, en novembre, 800 personnes ont manifesté sur le site du projet de GNL en Colombie-Britannique. Tout a été réglé avec les mesures provinciales en place.
    Le député a aussi parlé de la Charte des droits, et de son importance en ce qui concerne la COVID‑19. Mais ce dont il n’a pas parlé du tout, ce sont des libertés civiles de tous les Canadiens. Des restrictions ont été imposées aux gens qui souhaitent se rassembler et pouvoir faire des dons à qui ils veulent, dans tout le pays.
    Peut-être n’aime-t-il pas ce qu'ils disent, mais le député pourrait-il au moins demander au gouvernement de montrer que ce décret d’urgence a fait l'objet d'un examen approprié afin que les droits garantis par la Charte ne soient pas lésés injustement?
    Madame la Présidente, j’aimerais aussi dire que je suis ravi de siéger au comité de l’environnement avec mon collègue, qui est toujours bien préparé pour les réunions et qui demande des comptes au gouvernement.
    La loi permet aussi à la police à Ottawa de créer une zone interdite afin d'empêcher que des gens de tout le pays convergent vers Ottawa la fin de semaine et causent plus de perturbations. On a dit qu’il s’agissait de l’une des raisons du succès de cette opération.
    Je dois dire que la Charte s’applique toujours, et que l’article 58 de la Loi sur les mesures d’urgence exige du gouvernement qu’il explique pourquoi il a invoqué la loi. Je suggère au député de lire l’explication.

[Français]

    Madame la Présidente, mon collègue a dit qu'on avait besoin de la Loi sur les mesures d'urgence pour obtenir une participation conjointe des corps policiers. C'est complètement faux, cela se voit systématiquement en vertu des lois ordinaires. C'est la même chose pour ce qui est des activités criminelles sur le plan financier: la loi existante permet de régler cela. En fait, quand on regarde tout ce qui est invoqué dans les décrets, il n'y a pas une mesure invoquée qui n'est pas déjà inscrite dans les lois et les règlements existants.
    Pourquoi sortir la bombe atomique, la Loi sur les mesures d'urgence, alors que tout ce qui est invoqué dans les décrets se retrouve déjà dans les lois ordinaires? Cela n'a pas de bon sens.
    Madame la Présidente, je crois qu'il est fort probable que, lorsqu'on passera en revue les événements et les lois existantes, il y aura du fignolage à faire quant à la capacité du gouvernement de suivre les traces créées par les nouvelles technologies qui permettent d'envoyer de l'argent anonymement afin de soutenir des activités illégales. On verra cela lorsqu'on passera en revue la situation après que la Loi aura été retirée.
    Cela dit, il est très évident que la police d'Ottawa ne pouvait, jusqu'ici, régler la situation.

  (1110)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, les députés du Bloc et du Parti conservateur n'arrêtent pas de dire que tout va bien au pont Ambassador, mais je n'ai qu'à faire deux kilomètres dans cette direction pour pouvoir dire à la Chambre que les murets de béton qui avaient été installés sur le chemin Huron Church divisent maintenant le secteur en deux et séparent ses résidants les uns des autres. Et c'est sans compter qu'un nouveau convoi a été intercepté l'autre jour et qu'on croit que d'autres convois pourraient revenir. N'importe qui peut venir stationner ici trois ou quatre véhicules, s'installer sur les lieux et essentiellement retarder chaque jour le passage de 400 millions de dollars en biens et services.
     J'aimerais donc demander au député si les habitants de Windsor et les gens d'ici méritent que le gouvernement fédéral leur fournisse les mesures de soutien nécessaires. Nous protégeons les 14 kilomètres de route qui mènent à l'autoroute, et ce tronçon est vulnérable en tout temps. À l'heure actuelle, des barrières coupent en deux les différents quartiers de ma circonscription, dont l'un des plus pauvres du Canada.
    Croit-il que nous pourrions obtenir de l'aide de la municipalité? En ce moment, ce sont les résidants locaux qui font les frais de ce qui se passe. Ce n'est pas juste, et la menace et le danger sont toujours présents.
    Madame la Présidente, la situation au pont Ambassador est l'une des raisons qui sous-tendent la décision du gouvernement. La loi permet aux forces de l'ordre de boucler de plus vastes secteurs. En cas de menace visant un passage frontalier, comme le pont Ambassador, elle devrait contibuer à éviter que le pont soit de nouveau bloqué.

[Français]

    Madame la Présidente, je tiens d’abord à saluer le travail des différents corps policiers. Dans les circonstances, et jusqu’à maintenant, le démantèlement se fait de façon calme et ordonnée. Je souhaite que cela se poursuive de la sorte.
    Je tiens aussi à remercier les employés de la Chambre et de son service de sécurité, qui, grâce à leur travail exceptionnel, nous permettent de siéger aujourd’hui, dans les circonstances exceptionnelles qu’on connait.
    Le présent débat est de la plus extrême gravité. La Loi sur les mesures d’urgence est l’arme nucléaire des outils législatifs. C’est le dernier recours. Gouverner par décret n’est pas normal. La décision d’autoriser ou non cette loi repose sur nos épaules à toutes et à tous, députés du Parlement.
    Ce qu’on décidera va s’inscrire dans les livres d’histoire. Nous avons le pouvoir d’y mettre fin ou de donner un chèque en blanc au gouvernement. Cela repose sur nos épaules. J’invite tous les parlementaires, tous partis confondus, à se montrer à la hauteur de la gravité de la situation.
    La Loi sur les mesures d’urgence est une loi d’exception. On invoque cette loi exceptionnelle quand c’est absolument inévitable. On l'invoque quand on est arrivé à la conclusion que les lois ordinaires ne permettent pas de faire face à une situation urgente et dangereuse. J’insiste là-dessus, invoquer l’arme nucléaire législative, on ne doit pas prendre cela à la légère.
    Plusieurs ont fait valoir que la Loi était nécessaire pour envoyer un message aux occupants d’Ottawa. On ne lance pas une bombe nucléaire pour envoyer un message.
    La motion qui est devant nous ne se contente pas d’accepter la proclamation des mesures d’urgence. Elle nous demande d’accepter trois décrets qui contiennent une série de mesures. Notre devoir, en tant que parlementaires, est d'étudier ces mesures et de se demander si chacune d'elles est vraiment nécessaire et si on ne pourrait pas régler le problème autrement. Si nous concluons que l’une ou l’autre d’entre elles n’est pas vraiment indispensable, il nous faut rejeter la motion.
    Le gouvernement pourra nous présenter un autre décret plus convenable s’il l’estime indispensable. Dans ce cas, on verra. Je suis québécois et je suis indépendantiste. Mes collègues comprendront aisément que, déclarer les mesures d’urgence, c’est quelque chose qui vient me chercher jusqu'au fond des tripes.
    Plusieurs ont fait valoir que l’actuelle Loi sur les mesures d’urgence était complètement différente de la sulfureuse loi sur les mesures de guerre qui avait servi à intimider les Québécois et à tyranniser les indépendantistes, en 1970. C’est vrai, et pour cause.
    Pour comprendre l’objectif de la Loi, remontons à presque 34 ans en arrière, au moment de son adoption. La Loi a été adoptée en 1988. Elle avait été déposée en 1987. Que se passait-il, en 1987? C’était une autre époque, mais cela nous aide à comprendre l’intention du législateur d’alors.
    Brian Mulroney était au pouvoir. Il dirigeait le Parti progressiste-conservateur qui n’existe plus aujourd’hui. Il avait été élu sur une plateforme de réconciliation avec le Québec, un sujet dont le Canada ne parle plus.
    En 1987, dans le cadre de son programme de réconciliation, il concluait l’accord du lac Meech. Il voulait réparer l’affront de 1982, alors que le Canada anglais avait changé la Constitution et réduit les pouvoirs de l’Assemblée nationale du Québec sans nous et malgré nous. On connait la suite: sur le front constitutionnel, l’accord du lac Meech a échoué, tout comme celui de Charlottetown, et la réconciliation n’a toujours pas eu lieu.
    La même année, le gouvernement Mulroney déposait la Loi qui est discutée aujourd’hui. Il abrogeait la loi sur les mesures de guerre qui avait traumatisé le Québec 17 ans plus tôt. La même année où il essayait de réparer l’affront de 1982, il essayait de réparer aussi l’affront de 1970. Voilà pourquoi la Loi sur les mesures d’urgence est différente de la loi sur les mesures de guerre.
    Cette fois-ci, il n’y aura pas de policiers ou de militaires qui arriveront en pleine nuit pour arrêter, sans mandat, des gens qui n’ont rien fait de mal, mais dont le seul crime aurait été d'avoir un délit d’opinion. Cela n’arrivera pas cette fois-ci. Les droits fondamentaux ne sont pas abolis. Il y a des contrôles qu’il n’y avait pas sous le régime de la maudite loi sur les mesures de guerre.
    Avant, le gouvernement pouvait l’invoquer à volonté. Il pouvait la maintenir à volonté. Aujourd’hui, il y a des freins. Nous sommes un de ces freins. Or les freins ne sont utiles que si on accepte de s’en servir. Je nous invite justement aujourd’hui à mettre le pied sur le frein.
     Le premier frein, c’est la consultation des provinces. La Loi exige que le gouvernement consulte les provinces et fasse rapport au Parlement du résultat de ces consultations. Dans le contexte de réconciliation avec le Québec lors de l’adoption de la Loi, on avait pensé que jamais la Loi ne nous serait imposée. Il fallait qu'on y consente.

  (1115)  

    L'obligation de consultation, c'était cela. Le gouvernement nous a remis un compte rendu de ses consultations. La loi l'oblige à le faire. Il nous a informés que, sur dix provinces, sept s'opposaient à la proclamation des mesures d'urgence. Sur les trois qui ont dit que le gouvernement devrait le faire parce qu'il y a des problèmes dans la ville d'Ottawa, deux ont dit qu'elles n'en avaient pas besoin chez elles.
    Or, le gouvernement a choisi d'imposer cette loi sur tout le territoire, « from coast to coast to coast ». Il l'impose au Québec, qui avait dit non. Le gouvernement du Québec a dit non. L'Assemblée nationale qui parle au nom de mon peuple a été unanime pour dire non, à gauche comme à droite. Cette volonté unanime de l'Assemblée nationale ne se retrouve pas dans les trois décrets que ce gouvernement nous demande d'approuver. Pour le gouvernement, une consultation veut dire: cause toujours.
    Nous avions compris que jamais on ne nous imposerait cette loi sans notre consentement. Pourtant, c'est ce qui se produit. La réconciliation avec le Québec, qui a été l'un des piliers de l'adoption de la Loi sur les mesures d'urgence, je le rappelle, est en train de prendre le bord aujourd'hui. Le premier frein à la gouverne par décret n'a pas fonctionné. Le gouvernement a passé outre. Il reste le deuxième et dernier frein: nous, les parlementaires.
    Le gouvernement est tenu par la Loi de nous informer que les provinces n'en veulent pas et que le Québec n'en veut pas. S'il fait cela, c'est pour qu'on en tienne compte. Les décrets qu'on nous impose n'en tiennent pas compte. La Loi s'applique partout sur le territoire, peu importe qu'il y ait des problèmes ou non, peu importe que le Québec le veuille, ou non. C'est contraire à l'esprit de réconciliation avec le Québec qui avait entrainé l'adoption de la Loi. La réconciliation avec le Québec, le respect du Québec, tout cela semble bien loin aujourd'hui.
    Revenons à la Loi. En gros, pour que le gouvernement ait le droit de l'invoquer, pour que le Parlement soit justifié de l'approuver, cela prend deux conditions. Premièrement, il faut qu'il y ait une situation dangereuse et urgente. Deuxièmement, il faut qu'il soit impossible d'y faire face avec les lois existantes, ce qui rendrait indispensable de passer à un régime de gouvernement par décret.
    La Loi sur les mesures d'urgence exige que le gouvernement justifie sa décision d'invoquer la Loi et dépose au Parlement « un exposé des motifs de la déclaration ». Mercredi soir, le gouvernement nous a envoyé un document intitulé « Explications conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur les mesures d'urgence ». Dans ce document explicatif, le gouvernement invoque cinq motifs pour justifier sa décision d'invoquer la Loi.
    i. Les occupants menacent d'utiliser la violence à des fins politiques et idéologiques.
     ii. Les blocages, en particulier ceux qui touchent les infrastructures essentielles, menacent la sécurité économique du Canada
    iii. Les blocages, en particulier ceux qu'on retrouve aux frontières, sont préjudiciables aux relations Canada—États-Unis
    iv. Les blocages menacent l'approvisionnement en biens essentiels pour la population.
    v. Il y a un risque que le niveau de violence augmente.
    On peut concevoir que les cinq motifs invoqués par le gouvernement soient vrais ou pas. C'est une question de débat. Or, comme la Loi sur les mesures d'urgence est l'arme nucléaire législative, elle fixe la barre plus haut que cela. Même si ces cinq motifs étaient fondés, il demeure que ce n'est pas suffisant. Il en manque un pour que le gouvernement puisse procéder. L'article 3 de la Loi précise qu'il n'est pas suffisant qu'il y ait une crise. Il faut, de plus, que la crise « échappe à la capacité ou aux pouvoirs d'intervention des provinces » et qu'il ne soit « pas possible d'y faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada ».
    En d'autres termes, pour avoir le droit d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement doit démontrer en quoi il est impossible de faire face à la crise sous le régime des lois ordinaires, et qu'il est est absolument nécessaire de recourir à une loi d'exception et au gouvernement par décret. Or, le gouvernement n'a pas fait cette démonstration dans l'énoncé des motifs qu'il a remis aux parlementaires. Pire, il n'a même pas essayé de le faire, alors que la Loi l'exige. Il demeure totalement silencieux sur le sujet.
    Au fait, je pose encore la question, quelles lois sont insuffisantes actuellement?
    Le décret précise qu'il est interdit d'amener un enfant à une manifestation interdite. Or, les lois provinciales sur la protection de la jeunesse interdisent déjà d'exposer un enfant à une situation dangereuse. Tant au Québec qu'en Ontario, c'est déjà le cas. La Société d'aide à l'enfance, l'équivalent ontarien de la Direction de la protection de la jeunesse, était déjà impliquée dans le dossier parce que la police d'Ottawa lui avait déjà transmis des cas.
    En quoi les lois normales ne permettent-elles pas de faire face adéquatement à la situation?

  (1120)  

    À l'ordre. Je dois interrompre le député.
    Il semblait y avoir un problème d'interprétation, mais tout est réglé.
    L'honorable député de Joliette peut poursuivre son intervention.
    Comme je le disais, pour la protection de l'enfance, le dossier est déjà ouvert.
    En quoi les lois normales ne permettent-elles pas de faire face adéquatement à la situation? Pourquoi le gouvernement estime-t-il que la Loi sur les mesures d'urgence est nécessaire? On ne le sait pas, on l'ignore, parce qu'il ne le dit pas.
    Le décret prévoit la possibilité pour les institutions financières de geler les comptes des participants aux manifestations illégales. Or, le Code criminel interdit déjà le financement des activités illégales. C'est déjà le cas. La Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes prévoit déjà que les institutions financières peuvent geler les fonds qui sont le fruit d'une activité criminelle ou qui servent à financer une activité criminelle. C'est déjà le cas sous le régime des lois ordinaires. Il n'y a pas de vide juridique.
    En quoi ces lois ne permettent-elles pas de faire face à la situation? Pourquoi est-ce que le gouvernement estime que la Loi sur les mesures d'urgence est nécessaire? On ne le sait pas, on l'ignore, parce qu'il ne le dit pas.
    En fait, non seulement le gouvernement ne nous a jamais dit pourquoi ce pouvoir était indispensable, mais il ne nous a même pas dit en quoi il pourrait être utile.
    La semaine passée, le gouvernement nous a offert un breffage sur l'application de la Loi. Ce qu'il nous a dit concernant le gel des comptes était troublant. C'est une sous-ministre adjointe du ministère des Finances qui nous a expliqué comment cela marcherait. Ce que le gouvernement nous a dit, c'est qu'il reviendrait aux institutions financières de geler les comptes de celles et ceux qui participent à l'occupation d'Ottawa. Autrement dit, ce serait aux institutions financières de deviner lesquels de leurs membres ou de leurs clients participent à ces manifestations illégales et de deviner quand ceux-ci ont quitté les lieux, pour qu'elles puissent réactiver les comptes. Le gouvernement ne s'y voit aucune responsabilité particulière et affirme que cela relève des banques. Ce n'est pas sérieux.
    Les banques, ce ne sont pas des services policiers. Elles ne peuvent pas savoir qui est en train de bloquer la ville d'Ottawa. Le gouvernement s'en lave les mains. C’est n'importe quoi.
    La Loi exige que le gouvernement nous explique en quoi les lois ordinaires ne permettent pas de mettre fin au siège d'Ottawa. Non seulement il ne l'a pas fait, mais il ne nous a même pas dit en quoi sa loi serait utile ici.
    Je vais donner un autre exemple. Conformément au décret, les mesures contre le financement de la criminalité s'étendent jusqu'aux plateformes de sociofinancement. Cela, c'est une bonne idée. En fait, c'est tellement une bonne idée que les lois actuelles le prévoient déjà.
    En effet, les plateformes de sociofinancement sont déjà encadrées par les provinces. Les lois existent déjà et elles fonctionnent. À preuve, le 10 février dernier, la Cour supérieure de l'Ontario a accordé une injonction, demandée par la province, pour geler les fonds recueillis par les campagnes « Freedom Convoy 2022 » et « Adopt a Trucker » sur la plateforme de sociofinancement GiveSendGo. Tout cela s'est déroulé en vertu des lois ordinaires, sans la Loi sur les mesures d'urgence, sans le gouvernement par décret.
    En quoi les lois existantes ne permettent-elles pas de faire face adéquatement à la situation? Pourquoi le gouvernement estime-t-il que la Loi sur les mesures d'urgence est nécessaire? On ne le sait pas, on ne le voit pas, on ne le comprend pas.
    Je vais donner un autre exemple. Le décret autorise les assureurs à suspendre les assurances des occupants. Comment est-ce que les camionneurs vont pouvoir s'en aller, s'ils ne sont plus assurés? Si l'on suspend l'assurance responsabilité des camionneurs et qu'un accident survient, ce sont leurs victimes qui seront privées d'indemnisations en cas de dommages. En quoi est-ce nécessaire et utile de priver ainsi les victimes?
    Le gouvernement avait l'obligation légale de démontrer que chacun des pouvoirs d'exception qu'il se donnait était absolument nécessaire pour dénouer la crise. Dans le cas de la suspension des assurances, non seulement il n'a pas cherché à démontrer l'absolue nécessité de cette mesure, mais il n'a pas cherché à démontrer en quoi c'était utile.
    Le décret prévoit une série de motifs permettant de déclarer qu'une manifestation est illégale: paralysie d'infrastructures essentielles, entrave importante à la circulation, et ainsi de suite. Tous ces motifs sont énoncés par l'une ou l'autre des lois ordinaires actuellement en vigueur, qu'il s'agisse du Code criminel, du code de la route ou des règlements municipaux.
    Les forces de l'ordre avaient tous les outils légaux pour faire face aux différents blocages frontaliers. On l'a vu à Windsor et à Coutts. Il n'y a pas de vide juridique qui a besoin d'être comblé par la proclamation des mesures d'urgence. Le gouvernement l'admet lui-même. Ce n'est pas l'absence de lois qui a entraîné la paralysie d'Ottawa. Dans son énoncé des motifs, il n'essaie même pas de faire valoir l'idée qu'il y avait un vide juridique à combler par la loi d'exception. Franchement!
    La Loi sur les mesures d'urgence est conçue pour pallier l'insuffisance des lois existantes. Elle n'est pas conçue pour pallier l'insuffisance de leadership du gouvernement.
    J'aurais pu concevoir que le gouvernement ait besoin d'un pouvoir d'exception pour réquisitionner des remorqueuses et déplacer les camions aujourd'hui utilisés comme barricades à Ottawa. Même si le gouvernement ne l'a pas fait valoir, j'aurais pu le concevoir. Un décret d'un seul article pour pallier ce manque dans un lieu très circonscrit aurait peut-être pu être acceptable.

  (1125)  

    Or les décrets qui nous sont soumis ne se limitent pas à la réquisition de remorqueuses à Ottawa.
    Ces décrets équivalent à un chèque en blanc. Ils couvrent sans justification apparente une série d’activités, et ils s’appliquent dans tout le Canada, incluant le Québec, où il n’y a pas d’état d’urgence.
    Ce sont ces décrets extrêmement larges que la Chambre est appelée à approuver.
    En conscience, je m’y refuse. Le Bloc québécois s’y refuse.
    L’Assemblée nationale du Québec, unanimement, presse la Chambre des communes de s'y refuser. Les conditions pour invoquer la Loi ne sont pas respectées. Le gouvernement sait très bien que les lois actuelles sont suffisantes, sinon il nous l’aurait dit.
    La Loi sur les mesures d’urgence ne répond pas à une nécessité. Elle ne sert qu’à sauver la face du premier ministre, qui a laissé la situation dégénérer dès le départ et qui veut montrer qu’il fait quelque chose. Or, je le répète, on n’envoie pas une bombe nucléaire pour lancer un message. Le Québec ne veut pas que les mesures d’urgence s’appliquent chez lui.
    Le gouvernement a mené des consultations, et on lui a dit non. Il devait en tenir compte, et il ne l’a pas fait. Les parlementaires vont‑ils jouer leur rôle en actionnant le frein? Vont‑ils s’insurger contre le gouvernement par décret, ou vont‑ils écouter la consigne du Parti libéral?
    On le sait, les libéraux vont écouter les consignes du gouvernement. Un valet, cela reste un valet.
    Je me tourne maintenant vers le NPD.
    En 1970, Tommy Douglas avait dit que proclamer la Loi sur les mesures de guerre équivalait à utiliser un marteau piqueur pour écosser une arachide. La loi a changé en 1988, mais la situation demeure la même.
    Proclamer la Loi sur les mesures d’urgence et l’imposer au Québec, où il n’y a pas d’état d’urgence, cela équivaut, encore aujourd’hui, à utiliser le marteau-piqueur pour écosser l'arachide.
    Bien sûr, la Loi sur les mesures d’urgence est différente de l’infâme loi sur les mesures de guerre. Bien sûr, elle contient des balises, des freins à l’autoritarisme du gouvernement par décret, mais le principal frein, ce sont les parlementaires. Nous en avons lourd sur les épaules.
    Un valet reste un valet. Au moment du vote, on va voir si le NPD devrait plutôt s’appeler le Nouveau Parti libéral ou rester le Nouveau Parti démocratique. Au fond, c’est sur ses épaules que repose le choix entre le gouvernement démocratique et le gouvernement par décret.
    Pour ma part, je vais me tenir debout et dire non à ces trois décrets exorbitants, par respect pour mon peuple et par amour de mon peuple.

[Traduction]

    Madame la Présidente, la Loi sur les mesures d'urgence a déjà démontré son efficacité. De fait, les forces de l'ordre l'appliquent et obtiennent de bons résultats. Nous sommes très préoccupés par les barrages qui paralysent le centre-ville d'Ottawa et ceux qui ont bloqué nos couloirs commerciaux et causé des pertes de centaines de millions de dollars en échanges commerciaux. Nous nous inquiétons des répercussions actuelles et futures de ces barrages. On parle ici de graves conséquences qui menacent l'emploi et la santé des gens. Les raisons de passer à l'action ne manquent pas.
    Le député croit-il que les forces de l'ordre ont tort aujourd'hui d'utiliser l'outil que nous avons mis à leur disposition? Est-il d'avis que les forces de l'ordre désapprouvent ce que fait le Parlement?

  (1130)  

[Français]

    Madame la Présidente, depuis le début des événements, le Bloc québécois demande au gouvernement d'agir, de mettre ses culottes et de ne pas laisser la situation dégénérer.
    Le gouvernement a laissé la situation dégénérer, et maintenant, au lieu d'y aller progressivement et d'utiliser les lois déjà existantes, il sort l'arme nucléaire, à savoir la Loi sur les mesures d'urgence, qui n'est pas nécessaire.
    Le secrétaire parlementaire a‑t‑il écouté mon discours? Il n'y a pas une seule mesure invoquée qui est nécessaire. Les corps policiers pouvaient déjà collaborer entre eux. Ils n'avaient pas besoin d'une loi d'urgence pour cela. C'est n'importe quoi.
    Le gouvernement et le premier ministre essaient de sauver la face parce qu'ils ont dormi au gaz pendant trois semaines. Le gouvernement devrait avoir honte!

[Traduction]

    Madame la Présidente, on dirait presque que les libéraux jubilent quand ils parlent de l'efficacité des opérations qui se déroulent en ce moment. Personne n'a jamais dit que la loi ne serait pas efficace. La question qui se pose, c'est de savoir si elle est justifiée. C'est cela qu'il faut se demander.
    J'ai écouté le député et j'ai bien aimé le ton et la teneur de son discours. Si on a recours à la Loi sur les mesures d'urgence aujourd'hui, si on considère que les circonstances actuelles justifient son application, quelle autre situation pourrait justifier qu'on l'invoque à nouveau?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son intervention. Je suis tout à fait d'accord avec lui.
    Tout le monde dit qu'il faut agir. Actuellement, la situation est problématique, mais rien ne justifie le recours à l'arme nucléaire. Pour y avoir recours, le gouvernement avait le devoir de nous démontrer qu'il n'avait pas d'autre choix.
    Dans les documents officiels qu'il nous envoie, il n'essaie même pas de le démontrer et il ne fait même pas de revue des lois existantes. Nous l'avons fait, et nous n'avons trouvé aucun élément qui n'existait pas dans d'autres lois et qui justifiait le recours à cette loi, hormis la possibilité de réquisitionner des remorqueuses.
    Le Parti libéral fait un amalgame douteux entre la situation qui demande à être corrigée et la bombe atomique législative qu'il lâche.

[Traduction]

    Qujannamiik, Uqaqtittiji. Nous savons à quelle vitesse les comportements et les idéologies extrémistes peuvent se répandre. Étant donné l'ampleur de la manifestation, je crains sincèrement que le racisme s’amplifie, s’installe et entraîne de la violence à grande échelle. Cet extrémisme est dangereux et il est urgent que l’on s’en occupe.
    Je ne suis pas certaine si le député a regardé les nouvelles hier soir, mais le chef intérimaire de la police d’Ottawa, Steve Bell, a dit: « Sans les pouvoirs qui nous ont été octroyés grâce à cette loi, nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons aujourd'hui. »
    Le député est-il d’accord pour dire que les idéologies extrémistes provenant de l’étranger doivent être enrayées et que les Canadiens doivent revenir à leurs racines de bienveillance?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon estimée collègue de sa question et de son commentaire.
    Je veux être bien clair. Ce que nous dénonçons, ce sont les amalgames qui peuvent être faits entre les positions politiques qui peuvent être dénoncées, les occupations qui n'ont pas lieu d'être et le recours à la Loi sur les mesures d'urgence, qui n'est pas justifié selon nous.
    Je suis tout à fait d'accord avec la députée pour dire qu'il faut dénoncer les propos haineux et les propos inacceptables et qu'il faut certainement continuer ce combat. Cela dit, évitons de faire un amalgame en disant qu'il faut avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence parce que le siège doit cesser.
    Je rappelle que, dans les années 1970, le parti de Tommy Douglas avait été le seul à s'opposer à la Loi sur les mesures de guerre. J'invite le NPD à s'inspirer de la décision prise par Tommy Douglas à l'époque.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Joliette de son discours. J'aimerais lui poser une question et j'espère que mon français sera suffisamment bon.
    Selon moi, la définition de ce qui constitue une menace en matière de sécurité au Canada ne se trouve pas dans la Loi sur les mesures d'urgence, mais plutôt dans la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Dans la définition qui est donnée dans cette loi, il est question notamment des activités influencées par l'étranger.
    Je suis réellement troublée, car je pense que la désinformation sur la COVID‑19 et les vaccins et les idées très bizarres des quelques participants à cette manifestation proviennent de deux sources. Cela provient en partie des républicains des États‑Unis, et, dans une plus grande proportion, cela provient de la Russie et de M. Poutine, qui propage de la désinformation sur des sites comme russiatoday.com. Ce site est accessible partout au Canada, ce qui m'étonne beaucoup, car on y propage de la désinformation dans le but de détruire les sociétés démocratiques partout dans le monde.
    Au-delà de la nécessité de prendre une décision relativement à la Loi sur les mesures d'urgence, nous devons agir contre les sources de désinformation. Je voudrais que le député me fasse part de ses idées à cet égard.

  (1135)  

    Madame la Présidente, je remercie mon estimée collègue de son intervention.
    Effectivement, c'est très préoccupant. Il ne faut pas laisser des puissances étrangères influencer la politique intérieure, c'est certain. C'est pour cette raison que, dans mon exposé, j'ai rappelé les cinq motifs invoqués par le gouvernement pour justifier sa décision d'avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence. J'ai aussi rappelé que ces motifs étaient justifiables et qu'ils pouvaient être débattus.
    Cependant, pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement doit faire la démonstration que les lois ordinaires et les règlements qui existent déjà ne permettent pas de régler le problème. Il ne l'a pas fait.
    Or, des règlements et des lois existent déjà, notamment en ce qui concerne les plateformes financières. Le gouvernement n'a même pas essayé de démontrer qu'il existait un vide dans la loi à ce sujet. C'est notre position.
    Madame la Présidente, quelque chose d’assez ironique se produit en ce moment à la Chambre: un député du NPD est assis sur une banquette arrière du Parti libéral. J’espère au moins qu’il négocie une place plus en avant.
    Cela étant dit, j’entends ceux du côté du gouvernement parler d'un sondage de la firme Maru qui dit un peu n’importe quoi. Selon ce sondage, 72 % des Québécois ont une opinion favorable de la Loi sur les mesures d’urgence. Cela dit, ces mêmes députés omettent le fait que, selon le même sondage, seulement 17 % des gens de partout au Canada pensent que le premier ministre agit comme l’exige sa fonction. Les Canadiens ont conséquemment une très mauvaise opinion de son leadership.
    Si on fait parler les chiffres, les seuls qui comptent, c’est que l’Assemblée nationale du Québec a voté à 100 % contre la Loi sur les mesures d’urgence et que 7 provinces sur 10 pensent que cette loi est inopportune.
    Je pose donc à mon collègue une question très simple: que pense-t-il de l’opinion du premier ministre et comment doit-il agir de façon responsable maintenant?
    Madame la Présidente, il est certain que les gens, en voyant la situation se détériorer au Parlement, veulent que cela cesse et que cela se règle.
    Si une firme de sondage leur pose des questions sur la Loi sur les mesures d’urgence, ce n’est pas M. et Mme Tout-le-Monde qui prennent le temps d’aller décortiquer la Loi et de comprendre pourquoi elle a été mise en place et quels sont les éléments qui doivent être démontrés. Ici, nous l’étudions et nous l’analysons, et nous disons qu’il faut que le gouvernement nous fasse la preuve qu’il existe un vide législatif qui doit être comblé. Or, jusqu’à maintenant, le gouvernement n’a même pas essayé de le faire. Cela n’a aucun sens.
    Il fallait régler la situation — nous sommes d’accord avec la population, — mais l’utilisation de la bombe atomique législative n’était pas appropriée. On s'entend là-dessus, on en est certain.
    Unanimement, les partis à l’Assemblée nationale, que ce soit la Coalition avenir Québec, le Parti libéral du Québec, le Parti québécois, ou Québec solidaire — je ne sais pas si la représentante du Parti conservateur du Québec était à l’Assemblée à ce moment-là, mais on me dit que oui — disent d’une seule voix que cela n’a pas de bon sens. Pourquoi les élus du Québec — je parle aussi aux députés du Parti libéral — ne sont-ils pas solidaires de leur peuple?

  (1140)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, au cours des dernières semaines, j'ai reçu des appels de concitoyens qui m'ont demandé pourquoi nous en sommes arrivés là. Comment le Canada, un pays fort et libre, en est‑il venu à déclarer un état d'urgence pour gérer des camions stationnés au centre-ville d'Ottawa?
    Soyons clairs: il est temps de rétablir la primauté du droit à Ottawa, mais ce qui s'est produit est une conséquence directe de la peur et de la division créées par le premier ministre. Je veux aussi dire aux gens qui font partie du convoi que mes collègues et moi de ce côté‑ci de la Chambre avons entendu leurs préoccupations valables. Nous allons continuer de réclamer la fin des mesures liées à la pandémie, conformément à ce que nous dit la science.
     Les gens qui ont communiqué avec mon bureau au cours des dernières semaines sont épuisés et frustrés, et ils en ont assez du gouvernement libéral qui n'écoute pas et n'essaie même pas de comprendre leur point de vue. Après trois semaines, les forces de l'ordre ont agi pour régler la situation. Le gouvernement n'a toutefois pas tenté de parler aux organisateurs. Le premier ministre a plutôt poursuivi son discours de division et n'a toujours pas présenté un plan pour mettre fin aux mesures liées à la COVID‑19.
    Lundi dernier, les libéraux ont eu l'occasion de faire enfin montre de leadership en appuyant la motion réfléchie et mesurée qu'ont présentée les conservateurs. Toutefois, ils se sont associés avec le NPD, comme d'habitude, et ont anéanti les espoirs d'innombrables Canadiens qui veulent désespérément sortir de la pandémie. Ils ont anéanti les espoirs de bon nombre d'habitants de ma circonscription qui travaillent dans les secteurs du tourisme et du transport, des habitants qui souhaitent simplement sortir de la pandémie. Au lieu de collaborer avec les députés et les gouvernements provinciaux, le premier ministre s'est campé sur sa position et a continué avec ses insultes. Les gens qui demandaient à être entendus à l'extérieur de l'édifice de l'Ouest sont tout aussi Canadiens que n'importe quel député. Ils ne devraient pas être dénigrés par quelqu'un qui est censé diriger le pays.
    Nous en sommes rendus à un point où il faut sérieusement se demander si le recours à la Loi sur les mesures d'urgence était vraiment nécessaire. La Ville d'Ottawa et le gouvernement de l'Ontario avaient déclaré l'état d'urgence. En vertu des pouvoirs existant dans ces déclarations et les lois provinciales et fédérales en vigueur, la police disposait des outils nécessaires pour régler la situation à Ottawa.
    La Loi sur les mesures d'urgence dit clairement que la déclaration ne peut être faite que lorsque trois conditions sont réunies, notamment le fait qu'aucune loi fédérale ou aucun pouvoir provincial ne permette de régler l'urgence. Or, l'Ontario dispose déjà d'un plan lui permettant de partager des ressources policières avec les municipalités sans avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Si la police dispose déjà des pouvoirs dont elle a besoin et que la Loi sur les mesures d'urgence n'était pas nécessaire pour disposer d'un plus grand nombre de policiers, pour quelle raison cette loi a-t-elle été invoquée pour la première fois de l'histoire du Canada?
    Le gouvernement fédéral n'a eu recours à cette loi ni lors de la crise d'Oka, ni lors des émeutes de 1994 et de 2011 à Vancouver. Cette loi n'a pas été invoquée lorsque les manifestants ont déclenché une émeute pendant le Sommet du G20, à Toronto. Elle n'a pas été invoquée, non plus, pour contrer récemment les menaces terroristes ou les barrages érigés en 2020 pour s'opposer aux pipelines. Le gouvernement libéral crée un très dangereux précédent en invoquant cette loi.
    Les pouvoirs permettant de régler la situation que nous connaissons à Ottawa existaient déjà. Contrairement à ce que plusieurs ministres ont affirmé, le gouverneur en conseil peut donner des instructions à la GRC. C'est écrit noir sur blanc à l'article 5 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Le gouvernement devrait le savoir puisqu'il a invoqué cet article en 2017.
    Les libéraux prétendent également avoir besoin de la Loi sur les mesures d'urgence pour ordonner aux remorqueuses de libérer le centre-ville. Eh bien, on sait aussi que c'est faux, puisque l'alinéa 129b) du Code criminel permet aux policiers d'obliger quiconque « [n'ayant aucune excuse raisonnable de se soustraire à l'ordre à] prêter main-forte à un fonctionnaire public ou à un agent de la paix qui exécute ses fonctions en arrêtant quelqu'un ou en préservant la paix ».
    Il est alors indéniable que le déclenchement de cette loi n'est rien d'autre qu'un coup de force et que le gouvernement libéral outrepasse encore une fois ses droits. C'est très inquiétant. Qu'arrivera-t-il à l'avenir lorsque le gouvernement sera en désaccord avec les positions politiques de Canadiens qui manifestent?
    Des résidants de ma circonscription ont examiné la déclaration d'état d'urgence et ils ont demandé: « pourquoi? » Comment le premier ministre peut-il assimiler des camionneurs stationnés au beau milieu de la rue au centre-ville d'Ottawa avec la Première Guerre mondiale, la Deuxième Guerre mondiale et la crise d'Octobre, simplement parce qu'il est en désaccord avec les croyances de ces camionneurs? Il aurait pu prêter l'oreille. Il aurait pu présenter un plan pour mettre fin aux mesures liées à la COVID. Il aurait pu gérer la situation à Ottawa sans compromettre la démocratie. La GRC et les forces de l'ordre locales l'ont fait en Colombie‑Britannique, à Coutts, à Emerson et au pont Ambassador.
    La Loi sur les mesures d'urgence ne peut être prise à la légère. Elle est l'ultime recours dont nous disposions après avoir tout tenté.

  (1145)  

    L'avenir de notre pays est en jeu. Le gouvernement libéral et le premier ministre ne peuvent toujours pas expliquer les mesures qui ont été prises avant d'invoquer cette loi. En cas d'urgence et de danger, le gouvernement doit exercer des pouvoirs extraordinaires, mais quelle est l'urgence? Peu importe l'allégeance politique, le soutien à des pouvoirs aussi vastes constitue l'une des décisions les plus graves qu'un député puisse prendre. La décision est grave, parce que l'application de la Loi sur les mesures d'urgence a des conséquences sur les droits et les libertés des Canadiens, quoi qu'en dise le gouvernement.
    Le premier ministre adore lancer des répliques du genre « leadership responsable ». Le leadership implique la défense des droits et des libertés des citoyens de notre pays. Le véritable leadership implique la protection des principes fondamentaux du Canada et l'unité des Canadiens. Même si les points de vue diffèrent de ceux du premier ministre, le gouvernement ne devrait pas pouvoir limiter les droits des citoyens. D'ailleurs, il ne faudrait jamais limiter les droits des citoyens sans égard pour l'application régulière de la loi ni en l'absence d'une urgence nationale.
    S’il n’y a pas de grave urgence nationale, la seule façon de limiter les droits des Canadiens devrait passer par l’application régulière de la loi. Pourtant, le gouvernement utilise maintenant la Loi sur les mesures d’urgence pour fermer des comptes bancaires. Barry MacKillop, le sous-directeur du CANAFE responsable du renseignement, a affirmé que rien ne prouvait que les fonds donnés aux manifestants à Ottawa étaient liés à de l’extrémisme idéologique. Dans ce cas, pourquoi des gens perdent-ils leurs droits? Qu’a-t-on fait du droit d’être présumé innocent avant d’être trouvé coupable? Les gens dépendent de leurs comptes bancaires pour vivre et subsister. Les Canadiens ne devraient jamais perdre leurs droits parce qu’ils appuient une cause politique.
    Howard Anglin, un ancien chef de cabinet adjoint du premier ministre Stephen Harper, a écrit:
Essentiellement, les libertés civiles sont plus vulnérables qu’elles ne l’étaient hier au Canada, et elles le resteront tant que la déclaration d'état d’urgence restera en vigueur.
    L’Association canadienne des libertés civiles a intenté une poursuite contre le gouvernement, affirmant que l’invocation de la Loi par le premier ministre est « hors du commun » et « inconstitutionnelle ». L’Association a indiqué que les seuils établis pour protéger les processus démocratiques n’ont pas été atteints.
    De plus, la Canadian Constitution Foundation a indiqué ce qui suit: « L’utilisation de lois d’urgence ne devrait pas être normalisée. Le seuil à atteindre pour avoir recours à la Loi sur les mesures d’urgence est extrêmement élevé, et il n’a pas été atteint ».
    L'Organisation mondiale des sikhs du Canada est également contre l'application de cette loi, tout comme l'association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique. Les gouvernements provinciaux de la Nouvelle‑Écosse, du Nouveau‑Brunswick, de l'Île‑du‑Prince‑Édouard, du Québec, du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta se sont aussi opposés à l'intervention excessive du premier ministre.
    À Ottawa, la situation n'a jamais atteint le niveau critique requis pour appliquer la Loi sur les mesures d'urgence. Recourir à cette loi établirait un dangereux précédent. On se trouve à dire à l'ensemble des Canadiens que, à partir de maintenant, ils ne peuvent pas exprimer de points de vue dissidents. En cette période de peur et de division, les gens nous implorent de ne pas bafouer les traditions et les convictions qui font la grandeur du Canada.
    Le premier ministre a eu de nombreuses occasions de désamorcer la situation et d'adopter une approche mesurée. Les conservateurs ont exhorté le gouvernement à établir un plan clair et fondé sur les données scientifiques. Encore une fois, le gouvernement libéral n'a pas du tout tenu compte des Canadiens, même si les deux tiers d'entre eux veulent voir la levée de ces exigences. Tout cela est lié aux exigences. Il est temps qu'on fasse preuve de leadership pour unir les Canadiens, quels que soient leurs points de vue.
    En tant que députés, notre première responsabilité est d'écouter les gens de nos circonscriptions et de protéger leurs droits et libertés. Lorsque les gens aux pouvoirs réagissent et interviennent de façon démesurée, ils mettent en danger les droits, les libertés et la démocratie que nous sommes censés défendre dans cette enceinte. C'est pourquoi je ne peux pas, en toute conscience, appuyer le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Il est temps que les députés s'emploient à trouver comment revenir à une façon de gouverner sans diviser et à trouver une façon de faire du Canada un pays uni, fort et libre.

  (1150)  

    Madame la Présidente, j'aimerais féliciter le député pour son excellent discours en ces temps difficiles.
    J'aimerais lui poser une question sur le décret pris par le gouvernement, qui a mené à l'invocation de la loi dont nous débattons aujourd'hui. Une des dispositions du décret confère au gouvernement le pouvoir de prendre « toute autre mesure d'intervention autorisée par l'article 19 de la Loi sur les mesures d'urgence qui est encore inconnue ». On dirait que le gouvernement demande des pouvoirs illimités.
    Nous connaissons le peu de respect du premier ministre pour la Chambre. Rappelons-nous qu'il a écarté la demande de production de documents concernant le laboratoire de Winnipeg. Il a essayé de s'ingérer dans le processus juridique lié au scandale de SNC-Lavalin.
    Comment pouvons-nous lui faire confiance? Il n'a pas convoqué les conseillers privés assermentés à la Chambre à une réunion pour leur fournir des renseignements sur des enjeux de sécurité. Comme confier un tel pouvoir au gouvernement, qui...
    Le député de Calgary Forest Lawn a la parole.
    Madame la Présidente, la confiance a été complètement brisée par le premier ministre, qui a non seulement violé à répétition les règles d'éthique, mais qui est revenu sur sa parole à de multiples reprises. La confiance est au cœur du problème. Comment les Canadiens peuvent-ils continuer à faire confiance au premier ministre?
    Dans sa dernière question, mon collègue du Bloc a mentionné un sondage récent qui révèle que seul un petit pourcentage de Canadiens font encore confiance au premier ministre. C'est le même premier ministre qui a dit qu'il ne déclencherait pas d'élections pendant la pandémie. Voilà un autre exemple où il est revenu sur sa parole. Il a dit qu'il respecterait les droits et les libertés au pays. Nous voyons très bien que c'est le dernier de ses soucis en ce moment.
    La confiance a été brisée. Le premier ministre doit présenter des excuses aux Canadiens et leur prouver qu'il est sérieux...
    Je dois demander s’il y a d’autres questions.
    La leader adjointe du gouvernement à la Chambre a la parole.
    Madame la Présidente, j’aimerais remercier mon collègue d’en face pour son intervention.
    Nous entendons aujourd’hui que certains députés pensent qu’il n’est pas nécessaire d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Je voudrais citer les propos de Steve Bell, chef par intérim du Service de police d’Ottawa. Voici ce qu’il a déclaré:
    Toutes les mesures législatives et tous les soutiens dont nous disposons de la part de différents ordres de gouvernement contribuent directement et activement à notre capacité de dire que nous sommes finalement en position d’agir et de maîtriser cette manifestation.
    Il travaille depuis 31 ans dans la police, et il a clairement dit que cette loi a permis de mettre fin à l’occupation des rues.
    Le député peut-il nous dire ce qu’il en pense?
    Madame la Présidente, la députée a utilisé l’expression « directement et activement », ce qui me fait penser au premier ministre, qui est directement et activement à l’origine de la situation à Ottawa, parce qu’il a refusé d’écouter les Canadians et qu’il a fait la sourde oreille face aux opinions différentes de la sienne.
    Il était inutile d’en arriver là. Tout cela est arrivé parce que les Canadiens demandaient un plan précis pour sortir de la pandémie et que le premier ministre est resté les bras croisés, comme à son habitude, et ce, pendant trois semaines, sans intention aucune de faire un plan ou d’écouter la population.
    Voilà pourquoi nous en sommes arrivés ici. C’est la faute du premier ministre. Il était inutile d’en arriver là, et le premier ministre doit présenter ses excuses. J’aimerais que la députée lui dise la même chose.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Calgary Forest Lawn de ses interventions aujourd'hui. Lui et moi avons collaboré étroitement pour obtenir du soutien pour les gens de l'Afghanistan.
    Il a parlé de la situation comme s'il ne s'agissait que d'une manifestation de camionneurs à Ottawa. Premièrement, ce qui se passe à Ottawa est une occupation. Deuxièmement, étant Albertain, le député reconnaît certainement qu'on a découvert en Alberta une milice armée qui menaçait la GRC et qui affichait des images de suprématie blanche et de racisme. Le problème ne touche donc pas seulement Ottawa; c'est un problème national.
    Si cela ne justifie pas le recours à la Loi sur les mesures d'urgence, qu'est-ce qui le justifierait?
     Madame la Présidente, je précise que l'on avait déjà débloqué les postes frontaliers. Contrairement au gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les services de police municipaux sont intervenus et avaient déjà dégagé les postes frontaliers bloqués.
    Ce que le gouvernement fédéral a fait est complètement excessif. J'espère que ma collègue aura le courage de faire ce qu'a fait Tommy Douglas à l'époque et s'opposera à cet abus de pouvoir du gouvernement libéral.

  (1155)  

    Madame la Présidente, je voudrais d'abord dire que j'apprécie toutes les prières qui sont faites par les Canadiens présentement. Je reçois des messages de gens qui disent prier pour que les députés prennent les bonnes décisions. Je leur en suis reconnaissant, car nous avons bien besoin de ces prières, surtout en ces temps très difficiles pour le pays.
    Aujourd'hui, nous débattons de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence par le premier ministre. Des députés ont déjà parlé des seuils à atteindre pour avoir recours à la Loi. Selon les libéraux, ces seuils ont été atteints. Or, des voix de partout au pays nous disent que ce n'est pas le cas. On se rend bien compte, en lisant certaines déclarations, que bien des gens estiment que les seuils n'ont pas été atteints.
    En voici une de l'Association canadienne des libertés civiles:
     Les ordonnances d'urgence actuellement en vigueur imposent des limites sévères aux manifestations pacifiques partout au pays. Les ordonnances obligent également les institutions financières à transmettre des informations financières personnelles au SCRS et à la GRC, à geler les comptes bancaires et à interrompre les services financiers fournis à toute personne ayant assisté à un rassemblement interdit ou ayant fourni de l'aide à ceux qui y participent. Le tout sans contrôle judiciaire.
    C'est à la lumière de toutes ces violations des libertés civiles que nous poursuivrons le gouvernement devant les tribunaux...
    La situation devient très préoccupante pour une mère ou une grand-mère qui a donné 20 $ au convoi des camionneurs pour défendre la cause de la liberté. Ce qui devait être une simple manifestation contre les exigences liées à la vaccination pour les camionneurs est devenu un mouvement beaucoup plus vaste pour défendre la liberté au Canada. La grand-mère qui a donné 20 $ se trouve-t-elle maintenant sur une liste établie par les libéraux? Ses déplacements seront-ils limités? Nous l'ignorons. Nous ne savons pas jusqu'où ira l'application de cette loi ni ce que le premier ministre tente de faire.
    Étant donné que nous parlons beaucoup de nos libertés, je trouve important de les lire à la Chambre. L'article 2, qui porte sur nos libertés fondamentales, se lit comme suit:
     Chacun a les libertés fondamentales suivantes:
a) liberté de conscience et de religion;
b) liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication;
c) liberté de réunion pacifique;
d) liberté d’association.
    Voici ce que prévoit l'article 6: « Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d’y entrer ou d’en sortir. »
    L'article 7 se lit comme suit: « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale. »
    L'article 8 dit: « Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives. »
    Enfin, l'article 9 dit: « Chacun a droit à la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires. »
    Or, la Loi sur les mesures d'urgence permet au premier ministre de faire fi de ces libertés et d'imposer sa volonté. Certains me demandent comment nous en sommes arrivés là. C'est la question que je poserais à tous les Canadiens. Comment en sommes‑nous arrivés là? C'est le premier ministre qui nous a menés là. Ce sera le point culminant de sa carrière politique.
    Est‑ce que tout le monde se souvient que, en 2017, le premier ministre a imposé un critère lié aux valeurs aux participants du programme Emplois d’été Canada? En décembre de la même année, le gouvernement a mis en place une attestation selon laquelle une personne devait adhérer aux croyances ou aux valeurs du premier ministre pour recevoir des fonds du gouvernement.
    Je me rappelle que, en ma qualité de député, je me suis souvent battu contre cette mesure afin que tous les habitants de ma collectivité aient accès au programme Emplois d’été. Plus de 1 500 demandes ont été rejetées pour non‑respect du critère lié aux valeurs. Le 19 mars 2018, nous avons déposé une motion. L'ancien député libéral Scott Simms a voté contre le gouvernement, et il a été relégué à un rôle de député d'arrière‑ban par le premier ministre. C'était il y a quatre ans. Cela fait donc des années que nous voyons cette situation se développer.
    Je crois que les Canadiens commencent à se rendre compte, malheureusement, que c’est la véritable personnalité du premier ministre. J’ai écrit un article il y a environ deux semaines, et voici une citation de la bouche même du premier ministre, un homme censé unifier le pays et non pas le diviser. Il a dit que ce sont des extrémistes qui ne croient pas à la science, qui sont souvent misogynes et aussi racistes. Il dit qu’il s’agit d’un petit groupe qui s’impose et que les dirigeants et les Canadiens doivent faire le choix de tolérer ou non ces gens.
    Ces paroles ne sont pas celles d’un individu de l’extrême gauche ou de l’extrême droite. Ce sont celles du premier ministre. Il s’agit de la personne qui invoque la loi dont nous débattons aujourd’hui,et c'est honteux.
    Certains se demanderont pourquoi. Il semblerait plus judicieux d’unifier le pays que de le diviser. Voici une citation d’un article de Lorrie Goldstein, qui écrit: « Trudeau ne peut nous unir, car sa stratégie est de nous diviser. » C’est de cela qu’il s’agit...

  (1200)  

    Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes invoque le Règlement. Je suppose qu’il s’agit de la désignation d’un député par son nom.
    Madame la Présidente, ce n’est pas la première fois, mais bien la deuxième fois que le député le mentionne, et je suis convaincu qu’il sait très bien qu’on ne doit pas désigner les députés par leur nom à la Chambre.
    Je tiens à rappeler au député qu'il ne faut pas mentionner le nom des députés. Il faut plutôt les désigner par leur titre ou par le nom de leur circonscription.
    Je vais m'efforcer de ne plus le faire, madame la Présidente.
    Je veux revenir à l'article de Mme Goldstein, qui titre que le premier ministre ne peut pas nous unir parce que sa stratégie consiste à nous diviser, et dans lequel elle dit essentiellement que cela est dû au fait que les libéraux répartissent les Canadiens en petits groupes de partisans et d'opposants politiques au pays dans le but de récolter le maximum de sièges à partir du minimum de votes. C'est voulu. Le premier ministre a promis des voies ensoleillées. Les conservateurs ont perdu ces élections et espéraient qu'il soit, à tout le moins, un bon premier ministre, mais les quatre dernières années nous ont montré que nous avons un premier ministre bien déterminé, malheureusement, à diviser le pays.
    Je poursuis ce que dit l'article:
    Tout en promettant des « voies ensoleillées », le premier ministre Justin Trudeau a adopté une politique identitaire qui a mené à un échec incroyable de gouvernance, faisant de lui le quatrième premier ministre à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, ou sa version antérieure, et surtout le premier à le faire alors qu'il n'y a ni guerre ni insurrection. C'est une disgrâce scandaleuse, et ce sont sa politique de division, son incompétence et sa politique identitaire tout à la fois qui sont à blâmer.
    Et il y a plus encore:
    Puis, ce qui était imperceptible au départ, la grande plaie de notre époque en politique a commencé à se manifester au sein des libéraux de Trudeau: la politique identitaire. Avec...
    Je rappelle au député de ne pas mentionner le nom des députés, s'il vous plaît.
    Madame la Présidente, j'étais en train de lire la citation. Je m'excuse encore une fois.
    Avec une rapidité étonnante, on pouvait taxer les opposants aux mesures gouvernementales de racisme, de misogynie, d'homophobie ou autre, dans une litanie d'insultes destinées à stigmatiser personnellement les opposants et à les discréditer comme étant ce que la société a de pire à offrir, sans aborder le fond de leur argument.
    Nous débattons aujourd'hui de la Loi sur les mesures d'urgence, et nous en sommes arrivés à ce point culminant par la volonté du premier ministre. C'est le résultat qu'il souhaite. C'est à cause du premier ministre aux voies ensoleillées, pour lequel les gens ont voté en espérant qu'il deviendrait le grand rassembleur de notre pays. Le problème que nous connaissons est‑il dû à une bande de camionneurs ou de Canadiens pacifiques et épris de liberté? Non. Il est dû au premier ministre et à sa Loi sur les mesures d'urgence, et il faut que cette loi cesse d'être appliquée.
    Je lance un appel particulier au NPD. Nous savons que le Bloc a manifesté son opposition à cette loi et que les conservateurs s'y opposent. J'espère que les députés libéraux d'en face s'y opposeront également. Il faut que 20 députés néo-démocrates de plus se prononcent contre cette mesure pour qu'elle échoue. Pour le bien de la démocratie dans ce pays, il le faut, et j'invite les néo-démocrates à le faire aujourd'hui.
    Nous entendons les Canadiens de tout le pays et nous leur sommes reconnaissants de leurs prières, de leurs courriels et de leurs témoignages d'inquiétude. Nous prenons très au sérieux nos responsabilités dans cette enceinte, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici, en fin de semaine, à débattre de cette loi qui menace notre institution même.
    Madame la Présidente, j'aimerais remercier le député d'avoir cité le premier ministre lorsqu'il a fait des commentaires sur le type de personnes dont il parlait. Il parlait d'un petit groupe. Je voudrais demander au député comment il se fait que, depuis le début de ce débat, vous n'ayez pas cessé, de l'autre côté de la Chambre, de...
    Je rappelle à la députée qu'elle doit adresser sa question à la présidence.
    Toutes mes excuses, madame la Présidente.
    Je voudrais demander au député d'en face d'expliquer une chose. D'après la citation qu'il a lue, le premier ministre a dit qu'il s'agissait d'un petit groupe au sein de l'organisation. Dans ce cas, pourquoi le parti d'en face ne cesse-t-il de répéter que le premier ministre parlait de tous les manifestants et camionneurs, que nous appuyons tous?

  (1205)  

    Madame la Présidente, je suis choqué par la question que la députée vient de me poser. Elle est en train de justifier les commentaires du premier ministre. Il parlait des gens qui hésitaient à se faire vacciner. La députée laisse entendre qu'il est normal que le premier ministre ait traité ces gens d'extrémistes qui ne croient pas à la science, qui sont souvent misogynes et aussi souvent racistes, en ajoutant qu'il s'agit d'un petit groupe qui s'impose. Le premier ministre poursuit en disant qu'il faut faire un choix, en tant que leader, en tant que pays: devons-nous tolérer ces gens‑là?
     Je suis, ma foi, surpris que la députée défende une telle déclaration à la Chambre. Elle pourrait peut-être se procurer un exemplaire de la Constitution et étudier nos libertés fondamentales pour comprendre en quoi elles consistent. Elles sont censées s'appliquer à tous les Canadiens, et pas seulement à ceux qui font ce que le premier ministre choisit de faire.
    Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le député d'en face s'adresse directement à moi. Il remet aussi en question ma connaissance de la Charte des droits et libertés.
    Je rappelle que les députés doivent adresser leurs questions à la présidence.
    Nous poursuivons les questions et observations. La députée de Saanich—Gulf Islands a la parole.
    Madame la Présidente, j'aimerais d'abord dire que je suis d'accord avec le député de Prince George. C'est toujours agréable lorsqu'on peut s'entendre. J'étais parmi les trois seuls députés des partis de l'opposition à voter comme son parti pour dénoncer le libellé du programme Emplois d’été Canada, comme l'a mentionné le député. Je me souviens parfaitement de ce vote. J'estimais que le nouveau libellé du programme constituait une utilisation abusive d'un programme de subvention. En effet, il constituait une violation des droits garantis par la Charte.
    J'ignore encore ce que sera mon vote sur cette motion. Je me tourne vers mon ami, car le député est mon ami. J'aimerais tant savoir comment faire baisser les tensions dans cette enceinte afin d'éviter les insultes d'une part et d'autres de la Chambre. Ce n'est pas ce que souhaite la population canadienne.
    Madame la Présidente, je remercie la députée de ses commentaires. Il y a un vieux proverbe dans la Bible qui dit qu'une réponse douce fait rentrer la colère. Je pense que, dans cette enceinte, nous devons faire preuve de calme afin de ne pas jeter de l'huile sur le feu. Je crois vraiment que c'est la bonne chose à faire. Nous avons tous la responsabilité de garder notre calme. On voit bien que cette loi ne fait qu'attiser les flammes.
    Nous devons faire de notre mieux pour ramener la paix au pays et redevenir unis comme nous le souhaitons tous. Protéger nos foyers et nos droits; c'est ce que nous nous efforçons tous de faire.
    Madame la Présidente, je suis pour la vaccination, mais j’ai des amis et des gens de ma circonscription qui ne le sont pas. Ils ont pris une décision différente. Nous en avons discuté entre nous, mais je n’ai pas pu les convaincre. Beaucoup m’ont appelé, dont certains pour me dire qu’ils travaillaient dans la fonction publique et qu’ils avaient perdu leur emploi. Il y en a plus d’un qui m’a dit qu’il avait dû quitter son logement à cause de cela. Tous ces gens nous appellent parce qu’ils ne savent pas quoi faire. Comble de malheur, ils ont un premier ministre qui les traite de misogynes et de racistes, comme quelqu’un l’a rappelé tout à l’heure.
    Je suis sûr que le député a entendu parler de situations aussi dramatiques. Peut-être que si le premier ministre était prêt à reconnaître qu’il a employé des termes trop forts, qu’il s’est trompé et que maintenant il comprend mieux ce que vivent les gens, cela permettrait de désamorcer un peu la situation que nous vivons depuis…
    Le député a 10 secondes pour répondre.
    Le député de Prince George—Peace River—Northern Rockies a la parole.
    Madame la Présidente, c’est une question fort intéressante. La Chambre est souvent un lieu de divergence d'opinions, mais elle doit aussi laisser une place à la bienveillance. C’est précisément ce que nous avons proposé au premier ministre de faire. Je lui ai même suggéré de présenter simplement des excuses.
    Je crois qu’un grand nombre de manifestants seraient prêts à accepter de simples excuses, mais elles ne sont toujours pas venues. Nous lui suggérons…
    Nous reprenons le débat. Le député de Trois-Rivières a la parole.

[Français]

    Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Rivière‑des‑Mille‑Îles.
    Je suis contre l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Je salue le travail des forces policières, qui ont démontré un calme et un professionnalisme remarquables. J'espère que cette occupation illégale se terminera sans violence.
    Plusieurs manifestants ont fait le choix raisonnable de partir. Un groupe d'irréductibles est toutefois encore sur place. Ce sont possiblement des extrémistes. Ils sont ceux qui sont venus pour occuper les lieux et non pas pour manifester. Il est prévisible qu'ils seront difficiles à déplacer, mais rien de cela ne justifie l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Pour invoquer et appliquer la Loi, une démonstration en deux temps doit au moins être faite. Premièrement, il faut qu'il y ait une situation dangereuse et urgente et, deuxièmement, qu'il soit impossible d'y faire face en vertu des lois actuelles. Je ne crois pas que ce soit le cas.
    Devant une telle situation, je pense qu'il est important de faire la différence entre une exception, c'est-à-dire une chose qui n'arrive qu'une fois et qui ne se reproduira pas, et un précédent, un élément censé se reproduire. Je ne pense donc pas qu'il faille faire un précédent d'une situation d'exception.
    Pour ma part, je crois que l'invocation sur la Loi sur les mesures d'urgence est une conséquence directe d'un terrible manque de vision et de leadership. Devant ce constat, il faut poser la question suivante: pourquoi en sommes-nous rendus là?
    Tous, nous savions que les camionneurs arrivaient. Tous, nous savions qu'une fois installés, il serait difficile de les déloger. Le savions-nous vraiment tous? Non. Le premier ministre disait que le droit de manifester était important, ce dont je conviens; que tous devaient pouvoir s'exprimer librement, ce dont je conviens également; mais c'était avant que la manifestation ne se transforme en occupation.
    Tout au long de la première semaine d'occupation, le premier ministre nous faisait la leçon, en disant qu'il n'était pas le patron de la police; que celle-ci devait faire ses demandes; et qu'il était du ressort de la police de contrôler la situation. C'est ainsi que le chef de la police a demandé 1 800 policiers additionnels et n'en a obtenu que quelques dizaines. C'est à ce moment que l'occupation s'est transformée en occupation permanente. Était-ce là un manque de vision du premier ministre, de l'insouciance, de la désinvolture ou un manque de leadership? Qui sait?
    Afin de comprendre la situation, et je propose qu'on en discute pour l'expliquer, il faut constater que cette décision malavisée est une suite logique aux décisions antérieures, toutes aussi maladroites.
    Le gouvernement libéral actuel a été élu en 2015, sur des promesses d'un avenir meilleur, un avenir où la transparence serait de mise et où le Canada reprendrait sa place sur l'échiquier international. Il faut se rappeler que c'était en 2015, et on disait que le Canada était « de retour ».
    Décidément, un vent de fraîcheur soufflait et laissait espérer des jours meilleurs. Le premier ministre rencontrait les leaders du monde et faisait la une des magazines célébrités, et le monde entier admirait son allure de jeune premier et ses chaussettes colorées.
    L'espoir séduisait la population canadienne, mais tout n'était pas rose. En janvier 2017, la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique a entrepris une enquête sur les vacances passées par la famille Trudeau, sur l'île privée de l'Aga Khan, enquête qui a abouti à un blâme de la commissaire.
    C'était la première fois qu'un premier ministre était blâmé par un commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique. Le premier rapport Trudeau, parce qu'il y en aura d'autres, était une première honteuse pour un premier ministre...

  (1210)  

    Je rappelle à l'honorable député de ne pas utiliser les noms des collègues.
    Madame la Présidente, vous avez tout à fait raison. C'était le nom du rapport.
    À la suite de ce blâme, le premier ministre a tenté de justifier l'injustifiable en répondant qu'il était désolé, qu'il était responsable, qu'il ferait mieux à l'avenir, et qu'il s'assurerait de faire approuver ses vacances par la commissaire. Bref, c'était une dérobade que nous entendrions souvent à l'avenir.
    Je vais me permettre d'interrompre l'honorable député, car il y a un recours au Règlement.
    L'honorable députée de Humber River—Black Creek a la parole.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je pense que ces commentaires sont hors sujet. Nous parlons de la Loi sur les mesures d’urgence, et pas d'un rapport présenté par le commissaire à l’éthique il y longtemps.
    Les députés disposent d’une certaine latitude pour exposer leurs arguments.

[Français]

    Des voix: Oh, oh!
    La vice-présidente adjointe (Mme Alexandra Mendès): J'aimerais finir de répondre, s'il vous plaît.
    Je voulais dire que l'honorable député a la chance de trouver un contexte, mais qu'il est effectivement question de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Absolument, madame la Présidente, je suis tout à fait d'accord.
    Les éléments de contexte que j'amène ici visent à tracer une ligne, qui pour l'instant est tracée à la ligne pleine et dont on peut voir les pointillés. Je vais abréger mes propos sur la ligne en question.
    Un peu plus tard, le premier ministre a toujours été dans l'actualité éthique avec l'affaire SNC Lavallin. À la lecture du rapport, on a su que le commissaire avait tenté de le rencontrer une centaine de fois, et que cela n'a pas été le cas. Selon moi, c'est de l'évitement. Encore là, il n'était responsable de rien.
     Cela s'est poursuivi; cette ligne-là est continue et c'est ce qu'il faut bien voir. En 2020, comme on le sait, le cabinet fédéral choisit l'organisme UNIS pour administrer la Bourse canadienne pour le bénévolat. Or il y avait des liens entre cette organisation et la famille du premier ministre, ses enfants, son épouse, son frère, ainsi de suite. Le premier ministre n'a pas fait l'objet de blâme dans cette situation, mais on connaît la suite de ce qui s'est passé. Si je mentionne tout cela, c'est pour dire ceci: le premier ministre a une relation trouble avec l'éthique, avec les concepts de ce qui est juste et de justesse, ce qui nous amène à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Selon moi, dans ces exemples cités que j'ai abrégés, le premier ministre a démontré un manque de jugement flagrant, et ces manques de jugement ne sont pas ce qu'on attend de la part d'un leader. Même jusqu'à récemment, lors de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, le premier ministre a choisi d'aller faire du surf plutôt que d'aller rendre hommage à une population qu'il avait lui-même choisi d'honorer. Est-ce que c'est un manquement à l'éthique? Bien sûr que non, mais c'est un manque de jugement. Encore là, ce n'est pas tout à fait ce qu'on attend d'un leader. Le plus récent manque de jugement à ce jour, c'est l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    J'énumère ces manquements afin de démontrer un fil rouge. Je le répète. Selon moi, ce fil rouge qui représente les erreurs de jugement à répétition, c'est le fil rouge du mépris. Le mépris, c'est un sentiment qui fait juger un objet, une personne, ou une chose indigne d'égard ou d'estime. Je vais donner trois exemples qui portent sur le mépris de la fonction du premier ministre, de l'institution du Parlement et de la population.
    Pour ce qui est du mépris de la fonction du premier ministre, on peut penser aux nombreux déguisements au début de son mandat. Le premier ministre doit comprendre qu'il ne joue pas dans une pièce de théâtre.
    Pour ce qui est du mépris envers l'institution du Parlement, on peut penser aux manquements à l'éthique que j'ai cités ainsi qu'à l'audace d'avoir déclenché des élections non nécessaires par vanité.
    Pour ce qui est du mépris de la population, après avoir activement attendu, le premier ministre a choisi d'appliquer l'inutile Loi sur les mesures d'urgence, laquelle n'est pas désirée par les provinces ni utile dans les circonstances, ce que mes collègues ont bien démontré, car la plupart des pouvoirs utilisés à ce jour par les policiers étaient des pouvoirs qui existaient déjà à l'échelle municipale et provinciale.
    C'est un geste fort, mais qui constitue pourtant un aveu de faiblesse. On est devant un cas classique de ce qu'on appelle l'hubris — mes amis connaissent mon parcours philosophique. L’hubris, c’est lorsqu’une personne, par orgueil, par confiance excessive ou grisée par le pouvoir, finit par perdre le fil et risque de prendre de mauvaises décisions qui pourraient être fatales.
    Le premier ministre a élevé en art la technique d’ajouter le tort à l’affront: un manque de substance, de nombreux manquements à l’éthique, les erreurs de jugement, le mépris, l'orgueil, l’hubris.
    Le premier ministre a tenu des élections non nécessaires par caprice et a appliqué sans raison valable la Loi sur les mesures d’urgence, qui n'a pas aidé à résoudre Coutts, Windsor ou même Ottawa. Selon moi, c'est inacceptable. Pourquoi en sommes-nous rendus là? Si on porte le moindrement attention et qu'on fait la somme des manques de jugement et de leadership, on ne peut être étonné d’être ici aujourd’hui à discuter de cette loi.
    Lorsque je regarde l’ensemble de l’œuvre, j’ai l’impression qu’au fil du temps, le premier ministre en est venu à confondre l’intérêt public et la joute politique, l’intérêt public et l'intérêt personnel.
    La Loi sur les mesures d'urgence est une mauvaise réponse, une réponse dénuée de leadership à une situation qui, pourtant, en exigeait un maximum. L'application de la Loi sur les mesures d'urgence, je le répète, c'est un geste fort, mais c'est un aveu de faiblesse. Plutôt que de sortir l'arsenal atomique, je crois qu'il devait agir plus tôt. Je me demande si le premier ministre ne pourrait pas tenir un vote libre sur la loi en question afin de voir l'opinion réelle de tous les députés de la Chambre.
    Avant qu'il accumule un manque de jugement de trop, j'invite le premier ministre à se demander s'il a encore envie de gouverner.

  (1215)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, aucun droit garanti par la Charte n’est mis à mal par le recours à cette loi. C’est clairement indiqué dans l’ordonnance. Ce n’est pas la même chose que la Loi sur les mesures de guerre. Il s’agit d’une application beaucoup plus circonscrite des lois fédérales, afin de permettre aux autorités provinciales et municipales de régler le problème. En fait, 72 % des Québécois appuient les mesures décidées par le gouvernement.
    Lundi, le porte-parole du Bloc québécois a demandé au gouvernement fédéral de faire preuve de leadership. Peu de temps après, le gouvernement du Canada a décidé de donner aux provinces et aux municipalités les outils dont elles ont besoin pour faire face à la situation, et maintenant, le Bloc s’y oppose. Il y a une chose que le Bloc ne comprend pas, c’est que cette crise ne se limite pas à Ottawa, et qu’il faut essayer d’anticiper ce qui va se passer, car certains organisateurs de cette manifestation n’ont pas caché leur intention d’aller s’installer ailleurs.
    Le Bloc ne pense-t-il pas que c’est une bonne chose que ses forces policières, la SQ, aient les pouvoirs nécessaires pour faire respecter la loi dans les postes frontaliers du Québec, notamment à Lacolle? D’habitude, le Bloc réclame toujours davantage de pouvoirs pour les provinces, mais aujourd’hui, il fait le contraire.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon honorable collègue de sa question.
    Le pouvoir discrétionnaire des policiers est une chose importante. Ils doivent pouvoir agir avec un périmètre qu'ils vont juger acceptable.
    Les pouvoirs actuels dévolus aux autorités municipales et provinciales prévoyaient la plupart des situations qui se sont produites. Le problème est qu'on n'a pas agi assez tôt.
    Je ne pense pas qu'il s'agit d'un manque de pouvoir. Je ne crois pas du tout qu'on ait enfreint la Charte canadienne des droits et libertés.

  (1220)  

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son discours. J'ai siégé avec lui au Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, et j'aimerais dire qu'il est un homme très honorable.
    Je suis très inquiet. Le décret publié par le gouvernement autorise ce dernier à imposer d'autres mesures temporaires autorisées en vertu de l'article 19 de la Loi sur les mesures d'urgence qui ne sont pas encore connues.
    Le premier ministre demande essentiellement à la Chambre de lui accorder un pouvoir limité. Cela est très large, en fait.
    Mon collègue est‑il également inquiet?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue.
    Le fait que nous ignorions certaines parties ou certains articles de la Loi est effectivement inquiétant.
    Si nous devons l'approuver lundi, comme cela est prévu, j'exige que nous soyons en mesure de connaître l'ensemble du texte.

[Traduction]

    Madame la Présidente, le Bloc et les conservateurs ne cessent de répéter que tout va bien maintenant au pont Ambassador à Windsor, mais ce n’est pas le cas. Si je pouvais emporter mon ordinateur dans la rue, je pourrais vous montrer toute les barrières qui ont été érigées dans la ville.
    Pourquoi mon collègue du Bloc abandonne-t-il la population francophone de ma région? C’est pourtant, à l’ouest de Montréal, le plus ancien peuplement francophone. Des personnes sont maintenant touchées par cette crise, pas seulement les entreprises, mais aussi les personnes qui ont des rendez-vous médicaux ou qui doivent tout simplement se rendre à leur travail. La situation est loin d’être revenue à la normale.
    Pourquoi les députés du Bloc prétendent-ils qu’il n’y a pas de problèmes? Pourquoi ont-ils abandonné la population francophone établie dans le comté de Windsor-Essex depuis les années 1700?

[Français]

    Madame la Présidente, je ne peux pas croire ce que j'entends.
    Nous n'abandonnons personne. Contrairement à ce que mon collègue insinue, nous n'en sommes pas à dire « les anglophones », « les francophones », « les racisés », « les non-racisés ». Nous parlons de tout le monde, ici. La situation, nous devons l'arranger pour tout le monde, dans une parfaite égalité.
    Le commentaire de mon collègue est malveillant. Je ne suis pas d'accord.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je salue le discours de mon collègue de Trois-Rivières et ceux de ses collègues car ils ont clairement démontré que le gouvernement était incapable de justifier l’imposition de cette loi aux Canadiens.
    Je suis sûr que les électeurs leur ont dit, comme c’est mon cas, qu’ils ne faisaient plus confiance au premier ministre, et qu’en invoquant cette loi, il outrepassait des limites. Il a une vision sélective. Certains ont fait remarquer que le recours à cette loi ouvrait la porte à des conséquences financières. Mais c’est le premier ministre qui en a décidé ainsi.
    Est-ce qu’on s’inquiète au Québec de la possibilité que ce soit appliqué à d’autres groupes à d’autres organisations de cette province, comme cela a été le cas avec Coastal GasLink…
    Je vais donner quelques secondes au député de Trois-Rivières pour répondre à la question.

[Français]

    Madame la Présidente, je suis tout à fait d'accord. Il faut faire très attention.
    Des lois de ce type‑là peuvent servir le bien public, mais doivent être plus précises. Celle-ci ne répond pas aux critères fondamentaux.
    Madame la Présidente, le Bloc québécois condamne fermement cette occupation, ce siège et ces blocages. C'est clair, j'espère qu'on ne remettra pas cela en question.
    Pour ma part, je refuse de jouer le jeu des libéraux et des députés du NPD. Je trouve cela immonde. Bref, qu'on ne me demande pas d'accepter candidement l'application de ce décret démesuré et potentiellement liberticide que les libéraux ont déployé comme un écran de fumée devant leur incompétence et leur gestion boiteuse et piteuse de la crise.
    Ce gouvernement, et plus particulièrement son premier ministre, a dormi au gaz pendant trois semaines. Pour reprendre les mots de mon chef, ils ont, tout à coup, lâché la bombe atomique, c'est-à-dire la Loi sur les mesures d'urgence. Notre rôle, en tant que parlementaires bloquistes, est de défendre notre monde contre ces mauvaises décisions du fédéral. Agir de façon coercitive sans prendre en compte l'avis du Québec, c'est une très mauvaise décision.
    Le gouvernement avait à sa disposition des forces de police qui étaient capables d'agir, et elles étaient outillées pour le faire. Malheureusement, cela s'est fait trop tardivement. Comme l'a dit mon chef, c'est bien évident qu'un camion stationné sur les lignes blanches d'une voie publique, cela peut durer une minute et demie, mais cela enfreint déjà quelques lois.
    Parlons-en, des lois existantes. Le paragraphe 430(1) du Code criminel stipule ceci:
    430 (1) Commet un méfait quiconque volontairement, selon le cas: [...]
c) empêche, interrompt ou gêne l’emploi, la jouissance ou l’exploitation légitime d’un bien;
d) empêche, interrompt ou gêne une personne dans l’emploi, la jouissance ou l’exploitation légitime d’un bien.
    Notons qu'un bien, ici, peut renvoyer à une route, à un pont, à un tunnel ou à un port.
    Le droit de manifester est reconnu. Cependant, une manifestation peut-être déclarée illégale dans plusieurs cas. Par exemple, le paragraphe 63(1) du Code criminel stipule ceci:
    63 (1) Un attroupement illégal est la réunion de trois individus ou plus qui, dans l’intention d’atteindre un but commun, s’assemblent, ou une fois réunis se conduisent, de manière à faire craindre, pour des motifs raisonnables, à des personnes se trouvant dans le voisinage de l’attroupement:
a) soit qu’ils ne troublent la paix tumultueusement;
b) soit que, par cet attroupement, ils ne provoquent inutilement et sans cause raisonnable d’autres personnes à troubler tumultueusement la paix.
    Ces deux types de méfaits constituent des offenses et ont été perpétrés de manière continue depuis 23 jours. À un moment donné, la liberté individuelle s'arrête. C'est là qu'on en était il y a déjà quelques semaines. Ce n'est donc pas d'hier. C'est la base de notre contrat social: une société libre et démocratique.
    Le premier ministre aurait évidemment dû se réveiller avant. Il savait que le Service de police d'Ottawa n'avait pas les effectifs requis pour gérer cette crise, et il n'a rien fait pour l'aider. Le 10 février, Ottawa demandait 1 800 policiers supplémentaires. Le fédéral en a envoyé 275. Bon, ce n'est pas si mal. Par contre, ils ont principalement été affectés autour du premier ministre et du Parlement. Dans les faits, 20 policiers ont été ajoutés dans la rue, auprès des manifestants. C'est gênant et c'est honteux.
    Tout à coup, le 16e jour de l'occupation, le premier ministre s'est réveillé et a parlé de cette fameuse bombe atomique, la Loi sur les mesures d'urgence. En invoquant cette loi, le gouvernement se dit justifié de l'utiliser. Alors, parlons de ces justifications, ou plutôt de leur absence.
    Depuis lundi, le gouvernement utilise son décret pour punir financièrement et ruiner littéralement les manifestants et des entités qui leur sont associées. À la suite de cela, a-t-on vu les manifestants partir,la queue entre les jambes? Non. On parle tous d'un cas qu'on a vu à la télévision avant-hier, je crois, le seul cas que l'on connaît, le seul cas vraiment répertorié.

  (1225)  

    Les manifestants sont restés, plus déterminés que jamais, désormais persuadés de vivre dans la dictature. Ce gouvernement les a provoqués et continue de les provoquer.
    The Economist écrivait que cette loi risquait d’empirer la situation. Il me semble que c’est en plein cela, c'est tout à fait cela, c'est dans le mille.
    La deuxième chose couverte par ce décret, c'est le fameux soutien logistique au remorquage. Les remorqueurs de la région ne voulaient pas, semble-t-il, utiliser leurs ressources pour remorquer les camions. Si le gouvernement avait regardé en dehors de la capitale nationale pour faire venir des remorqueuses, il en aurait trouvé et il n’aurait pas eu besoin d'un décret.
    S’il y a une grosse tempête qui cause de gros dommages quelque part à Sherbrooke, que va-t-il se passer? Des gens du Saguenay vont descendre rapidement pour venir nous aider. C'est comme cela au Québec, en tout cas. Un appel à l’aide résonne loin. Il faut juste le demander.
    D’ailleurs, le Bloc québécois a offert de former une cellule de crise multipartite dès les premiers jours de l’occupation. Nous voulions nous y attaquer de manière concertée et efficace. Le premier ministre a pris son temps pour finalement dire oui; il s’est ramassé dans un cul-de-sac et il a dit oui.
    Le Bloc québécois voulait et veut toujours aider le pays à sortir de ce bourbier, de cette crise merdique. Or, la réalité du terrain, c'est que la police fait désormais son travail et qu’elle n’avait pas besoin de ce décret pour le faire. Elle avait besoin de plus d’effectifs.
    Le Bloc québécois s’oppose à cette loi, car il suffisait et il suffit toujours d’allouer autant de policiers et de ressources que nécessaire, comme au pont Ambassador et à Coutts, toutes proportions gardées.
    Il y a un instant, je parlais de solidarité. Je me permets d’exprimer ma reconnaissance à l’endroit du contingent de la Sûreté du Québec qui est venu prêter main-forte à nos voisins ontariens. J’aimerais aussi témoigner ma profonde admiration aux sept corps policiers présents dans la ville d’Ottawa depuis vendredi et qui font un travail extraordinaire pour déloger les assiégeants. Ils sont professionnels, méthodiques et efficaces: je n’ai que des fleurs à leur lancer.
    Soit dit en passant, les députés du NPD ne sont pas nombreux aujourd'hui, alors ce parti est peut-être en train de réviser sa position. C'est du moins ce que nous souhaitons. Après tout, il y a juste les fous qui ne changent pas d’idée.

  (1230)  

    La députée de Longueuil—Charles‑LeMoyne invoque le Règlement.
    Madame la Présidente, le député de l'autre côté sait très bien qu'il n'a pas le droit de mentionner l'absence ou la présence des députés.
    En effet, je remercie la députée de le rappeler.
    Je vais demander à l'honorable député d'attendre que son microphone s'allume pour s'excuser.
    L'honorable député de Rivière‑des‑Mille‑Îles a la parole.
    Madame la Présidente, j'ai compris, donc je ne parlerai pas de l'absence des députés du NPD.
    Je rappelle à l'honorable député qu'il est en train de renforcer la mention pour laquelle le Règlement vient d'être invoqué. Je lui demande donc de retirer ses propos sans faire d'autres commentaires.
    Madame la Présidente, j'ai été un peu délinquant et je m'en excuse.
    Le député de Windsor‑Ouest invoque le Règlement.

[Traduction]

    Madame la Présidente, tout le monde sait qu’on ne peut pas faire par inadvertance ce qu’on ne doit pas faire ouvertement. Les députés néo-démocrate sont en ligne, tout comme d’autres députés, et j’estime que cette remarque est tout à fait irresponsable et mesquine.

[Français]

    En effet, c'est ce que j'ai dit à l'honorable député.
    L'honorable député de Rivière‑des‑Mille‑Îles a la parole.
    Madame la Présidente, je retire mes propos.
    L'Association canadienne des libertés civiles a annoncé qu'elle contesterait en cour la Loi sur les mesures d'urgence.
    Le groupe a affirmé que le gouvernement disposait déjà des outils nécessaires pour faire face à la situation et que ce décret était inutile, injustifiable et inconstitutionnel. Nous sommes tout à fait en accord avec elle.
    Amnistie internationale a affirmé être préoccupée par certains aspects du décret qui demeurent vagues et flous, qui pourraient entraîner des abus de droit, notamment en ce qui concerne la limitation géographique. C'est ce que nous martelons depuis jeudi.
    Cette loi est démesurée, et elle est mal circonscrite. Elle ne devrait surtout pas inclure le Québec, pas plus que les six autres provinces qui sont en désaccord sur ce décret.
    Par contre, je suis entièrement d'accord avec mes collègues libéraux que le siège doit être démembré le plus rapidement possible. Malheureusement, on l'a dit et on l'a répété, et je vais le répéter encore une fois, il faut que cela se fasse par étapes. En somme, cette loi de dernier recours fait peu pour régler la situation actuelle, mais elle fait beaucoup décrédibiliser le Québec et le Canada sur la scène internationale. Elle fait beaucoup pour menacer une liberté qui devrait nous être encore pleinement acquise. L'utilisation de cette loi n'a absolument pas l'appui du Bloc québécois. C'est regrettable que nous ayons à passer trois jours à traiter de cette loi.
    C'est d'autant plus triste que nous assistons présentement, à l'extérieur, au démembrement de l'occupation.

  (1235)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, je remercie la province de Québec de nous avoir apporté son aide pour faire face au blocage illégal dont nous sommes victimes. C’est un problème d’envergure nationale, qui ne se limite pas à ce qui se passe à Ottawa. Il y a des manifestations un peu partout au Canada, et c’est la raison pour laquelle nous avons besoin d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence.
    J’aimerais savoir si mon collègue est d’accord pour que la SQ continue de nous aider, car cette aide nous est très précieuse à l'extérieur en ce moment.

[Français]

    Madame la Présidente, le fait que la Sûreté du Québec aide l'Ontario et la Colombie‑Britannique est quelque chose d'extraordinaire.
    Nous sommes solidaires. Les provinces seront d'excellentes voisines pour nous, et nous continuerons d'être solidaires. C'est clair.
    Si on lit les mêmes journaux, il ne se passe pas grand-chose à l'extérieur d'Ottawa. En principe, toutes les manifestations et tous les barrages ont été dissous.
    Madame la Présidente, hier, le ministre de la Justice a révélé que les dispositions financières de la Loi sur les mesures d'urgence visaient plus à punir les adversaires politiques qu'à lutter réellement contre le crime.

[Traduction]

    Les députés peuvent-ils imaginer que, dans un pays comme le Canada, on puisse appliquer une loi visant à réprimer toute dissidence politique de la part de partis d’opposition. Le Bloc Québécois pourrait en faire l'objet, par exemple. J’aimerais savoir ce qu’en pense le député.

[Français]

    Madame la Présidente, on m'ouvre une porte, encore une fois.
    Ce matin, j'ai posé la question, mais je n'ai pas eu de réponse. On parle de finances. Le décret souhaite agir sur les finances personnelles des camionneurs, sauf que cela ne donne pas les résultats escomptés. Pour moi, cela ne se fait pas.
    On gèle des comptes bancaires. Ce matin, j'ai demandé si on les gelait pendant une semaine ou un mois. Combien de temps ces comptes seront-ils? Cela affectera-t-il le crédit de ces gens?
    Cela va mener des gens à la ruine.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’ai le plaisir de siéger avec le député au comité des anciens combattants, et je respecte ses opinions. J’ai aussi eu le plaisir de constater que, pendant toute la durée de son intervention, j’ai été presque tout le temps dans le viseur de la caméra.
    Je voudrais lui demander de répondre à une question très importante.
    Je suis en accord avec certaines de ses remarques, comme lorsqu’il a dit que le gouvernement avait trop tardé à réagir. En fait, le gouvernement n’a rien fait alors qu’il aurait dû agir. Tous les paliers de gouvernement ont été défaillants. Et aujourd’hui, nous discutons de quelque chose dont nous ne devrions pas discuter parce que des gouvernements n'ont pas fait ce qu’ils devaient faire. Nous savons par ailleurs que l’Association canadienne des libertés civiles intente des poursuites contre le gouvernement, ce que j’approuve. Je pense qu’il est impératif que nous ayons des mécanismes en place pour garantir que les mesures qui sont prises sont exécutées de façon efficace et responsable.
    J’aimerais savoir si le député est d’accord avec moi pour recommander la création immédiate d’un comité pour superviser tout cela.

[Français]

    Madame la Présidente, il m'est difficile de saisir précisément la question. J'en profiterais donc simplement pour demander aux députés du NPD de vraiment réfléchir.
    Les gens du Nouveau Parti démocratique ont des valeurs humanistes comme peu de gens en ont à la Chambre. Les députés néo-démocrates sont des sociaux-démocrates. Qu'on le veuille ou non, la Loi que nous nous apprêtons à adopter — ou non — nuira aux travailleurs.
    Les travailleurs sont la clientèle cible des néo-démocrates. C'est tout que je voulais ajouter à l'intervention de ma collègue.

[Traduction]

    Madame la Présidente, c’est un grand honneur pour moi de représenter les électeurs de Kelowna—Lake Country.
    Le vendredi 13 mars 2020 restera à jamais gravé dans ma mémoire comme le jour où nous avons dû fermer le Parlement à cause de la pandémie de coronavirus et où nous avons tous dû rentrer chez nous. En réponse à la pandémie, les libéraux ont présenté, à la onzième heure, un projet de loi dont certaines clauses auraient donné au ministre des Finances un pouvoir illimité de taxer, de dépenser et de s’endetter pendant 21 mois, et ce, en l’absence de tout budget, débat ou contrôle parlementaire.
    Après des semaines d’ajournement parlementaire, les libéraux ont fini par rétablir un Parlement tronqué où, pendant plusieurs mois, les députés ont pu, certes, poser des questions, mais n’ont pas pu présenter des motions d’opposition, réclamer des débats d’urgence et exécuter bien d’autres fonctions. Cette période a représenté une rupture dans l’histoire de nos institutions démocratiques et dans la façon dont nous allions faire face a cette crise planétaire.
    Les conservateurs se sont fermement opposés à ce que le gouvernement dispose de tous les pouvoirs financiers, et en mai 2020, je suis revenue à Ottawa pour défendre mon point de vue à la Chambre des communes. Mon discours a suscité un vif intérêt de la part des médias nationaux, car ils voyaient une jeune députée oser défendre la démocratie avec passion. J’ai l’impression que nous nous retrouvons aujourd’hui dans une situation un peu similaire, puisque les libéraux préconisent le recours aux pouvoirs ultimes. On ne dit jamais assez que le Canada est un grand et beau pays. Nous avons un gouvernement démocratique, nous respectons l’égalité et la primauté du droit, nous avons adopté des lois particulièrement musclées en matière de droits de la personne et d’environnement, nous vivons dans une société bienveillante et respectueuse de la loi, nous avons une économie robuste, nous avons des réseaux sociaux, et nous avons des libertés civiles.
    Mais il faut que nous sachions protéger tout cela, car c’est ce qui attire chez nous tant de visiteurs et d’immigrants. Les gens se sont battus pour que soient respectées les libertés que nous chérissons dans notre pays. Nous devons nous assurer que la loi protège ces libertés ainsi que les structures qui assurent le respect de nos lois.
    Le premier ministre Mulroney a été témoin de l’affrontement d’Oka, où des coups de feu ont été échangés et où des gens ont trouvé la mort. Le premier ministre Chrétien a été témoin de la tragédie du 11 septembre, où le ciel a failli nous tomber sur la tête, et il a dû faire face à la menace terroriste qui avait atteint des niveaux sans précédent. Le premier ministre Harper a été témoin de l’effondrement des marchés financiers et d’une attaque terroriste sur la Colline parlementaire, qui a coûté la vie à un homme.
    En janvier 2020, des manifestants ont bloqué pendant un mois des voies ferrées et des axes routiers utilisés pour le transport de passagers et de marchandises sur tout le territoire du Canada. Ils ont aussi interrompu la circulation des traversiers au large de la Colombie‑Britannique. En 2020 et 2021, la pandémie de coronavirus a sérieusement mis à mal notre système de santé et notre économie. Toujours en 2021, ma province, la Colombie‑Britannique, a été dévastée par des inondations, des glissements de terrain et des incendies qui ont eu des répercussions négatives sur des dizaines de milliers de personnes.
    Aucune de ces crises n’a amené le gouvernement fédéral à invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Entendons-nous bien: les conservateurs n’ont aucune hésitation à dialoguer avec les Canadiens qui veulent manifester pacifiquement, mais le droit de manifester n’inclut pas le droit de bloquer des infrastructures comme les voies ferrées et les postes frontaliers. Les infrastructures essentielles qui permettent la libre circulation des passagers et des marchandises sont protégées par la loi de notre pays, et nous devons nous assurer que cette loi est respectée.
    Le gouvernement a laissé entendre que la position des conservateurs à cet égard manquait de cohérence. C’est faux. En fait, c'est le Parti libéral qui a vraiment manqué de cohérence. Pendant les blocus ferroviaires prolongés en 2020, le gouvernement a dépêché des délégations pour discuter avec les manifestants. Les forces de police qui sont intervenues et qui provenaient de nombreuses régions ont utilisé les outils et les lois qu’elles avaient à leur disposition pour mettre un terme à ces blocus.
    Il y a quelques jours, le 17 février, on a appris que le gazoduc Coastal GasLink, en Colombie‑Britannique, avait été gravement endommagé, et que des manifestants étaient passés par là. Ils ont essayé d’incendier un véhicule dans lequel se trouvaient des travailleurs, brandi des pioches, utilisé des pistolets lance-fusées contre des travailleurs, coupé des câbles hydrauliques et des conduites de carburant, provoquant ainsi des fuites dangereuses, endommagé gravement des équipements et des biens, et lancé des bombes fumigènes en direction des policiers.
    Qu’ont fait les libéraux face à cette situation? Le premier ministre a nommé au poste de ministre de l’Environnement un militant professionnel qui n’a pas hésité à enfreindre la loi. Ils sont d’une hypocrisie manifeste. Quand le premier ministre partage l’idéologie des manifestants, il est prêt à dialoguer, même en personne. Mais dans le cas contraire, il profère des insultes et exige que son gouvernement ait les mêmes pouvoirs que si nous étions en guerre.
    Les propos du député libéral de Louis-Hébert sont tout à fait d’actualité. Le gouvernement libéral du premier ministre est toujours prêt à cliver, diviser et stigmatiser. Tout récemment, le premier ministre a accusé à tort des députés d’avoir apporté leur appui à un manifestant qui brandissait une croix gammée, ce qui est tout à fait insensible. En continuant de refuser de présenter des excuses, il s’entête dans la voie de la division. C’est vraiment désolant de voir cela chez un premier ministre.

  (1240)  

    Parmi les gens qui se sont rendus à Ottawa d'un peu partout au pays, y compris de Kelowna—Lake Country, beaucoup sont respectueux des lois et sont venus manifester pacifiquement afin d'être entendus. Les Canadiens savent qu'il faut tenir responsables les gens qui utilisent des symboles et un langage haineux, exercent l'intimidation et causent des préjudices et des dommages. Tous les députés dénoncent ces situations et il existe des lois pour y répondre.
    La bonne nouvelle pour les Canadiens, c'est que les lois semblent fonctionner et les manifestations ont été pacifiques. Entre autres, le poste frontalier de Coutts a été dégagé et le pont Ambassador a été rouvert. Les gouvernements provinciaux et les forces policières locales ont été en mesure d'appliquer les lois du Parlement et celles des autorités provinciales et municipales du pays. Sept provinces sur dix se sont prononcées contre le recours à la Loi sur les mesures d'urgence.
    La proclamation publiée par le gouvernement autorise celui-ci à imposer « toute autre mesure d’intervention autorisée par l’article 19 de la Loi sur les mesures d’urgence qui est encore inconnue ». Est-ce que cela signifie qu'il faut simplement faire confiance au premier ministre et lui accorder des pouvoirs ultimes, sans aucune surveillance? La proclamation déclare également « qu'il se produit dans tout le pays un état d'urgence », ce qui est faux.
     Le décret exige aussi que les entités visées cessent de traiter avec une personne désignée, laquelle est définie comme toute personne associée à la manifestation. Qu'est-ce que cela signifie? C'est extrêmement vague. Qu'en est-il d'une personne qui a envoyé un gazouillis? Il a été déclaré que les institutions financières ne savent pas au juste ce que cela implique. Il semble que l'on prévoit de vastes pouvoirs discrétionnaires pour le gouvernement.
    On invoque la Loi sur les mesures d'urgence, mais l'urgence nationale en question ne répond pas aux critères pour justifier un tel recours. Le gouvernement a choisi d'invoquer les pouvoirs conférés par la Loi sur les mesures d'urgence non pas parce qu'il manquait d'options, mais parce que le premier ministre manque de leadership. Le gouvernement se trouve dans l'embarras et cherche maintenant à appliquer la loi la plus sévère.
    Les Canadiens sont frustrés et ils cherchent de l'espoir. Il y a tout juste une semaine, les conservateurs ont essayé de tendre au gouvernement la branche d'olivier nécessaire pour y parvenir. Nous avons présenté une motion demandant au gouvernement d'ouvrir la voie à l'élimination des restrictions et des mesures obligatoires liées à la COVID‑19. Nous voulions que le gouvernement dise aux Canadiens, dont 90 % sont déjà vaccinés et des millions d'autres ont reçu leur dose de rappel, quand cela prendra fin. Les provinces le font, de même que d'autres pays. Nous avons demandé un plan dans notre motion et les libéraux et les néo-démocrates ont refusé d'en donner un. Ils ont rejeté la motion.
    Mon bureau de circonscription n'a jamais reçu autant de courriels et d'appels téléphoniques que dans les deux dernières semaines. Il ne s'agit pas de lettres types. Des milliers d'habitants de Kelowna—Lake Country, dont beaucoup n'avaient jamais contacté leur député auparavant, appuient la motion des conservateurs visant à établir un plan pour mettre fin aux mesures obligatoires et ils s'opposent au recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Voici seulement quelques exemples de leurs commentaires.
     « J'étais tellement fier d'être Canadien... maintenant je ne le suis plus. »
    « Je suis agent de la GRC depuis 13 ans et cela m'attriste de voir ce qui se passe au Canada. »
    « Je remarque que les libéraux veulent suivre l'argent dans le cas du barrage organisé par les camionneurs. Je me demande s'ils sont maintenant prêts à ouvrir les comptes touchés par l'affaire UNIS et à suivre l'argent qui s'y trouve. »
    « Trois semaines à manifester pacifiquement et aucune volonté de la part du gouvernement libéral pour écouter les personnes mécontentes et fatiguées des exigences relatives à la vaccination. »
    « En vertu de la Loi sur les mesures d'urgence, les institutions financières du Canada seraient habilitées à geler les comptes d'un particulier sans ordonnance du tribunal. C'EST assurément une atteinte éhontée à notre liberté d'expression qu'on ne saurait tolérer. Assez, c'est assez. »
    « S'il s'agit SEULEMENT d'une minorité de gens marginaux, pourquoi alors invoquer la Loi sur les mesures d'urgence? »
    « Je suis un ancien combattant qui compte 20 années de service, et je suis maintenant dégoûté de la situation actuelle. »
    « Ce n'est pas le Canada que je connais. »
    Les libéraux piaillent dans ma direction, et ils rient des commentaires de mes concitoyens de Kelowna—Lake Country. Aux prochaines élections, j'invite les gens à réfléchir à la citation suivante du premier ministre Harper que le premier ministre actuel a retransmise ainsi il y a presque 10 ans: « Quand un gouvernement commence à essayer d'éliminer ou d'éviter les dissensions, il perd alors rapidement son autorité morale de gouverner. »
    J'ai examiné la motion, fait mes recherches et écouté les gens, notamment ceux de ma circonscription, Kelowna—Lake Country. Je ne peux absolument pas donner mon appui pour confirmer le recours à la Loi sur les mesures d'urgence.

  (1245)  

    Madame la Présidente, je m'insurge contre les propos de la députée lorsqu'elle emploie des tournures comme « ces libéraux ». Je peux lui assurer que « ces conservateurs » n'ont rien à voir avec « ces conservateurs » du passé, comme ma prédécesseure Flora MacDonald, qui a déposé ce projet de loi à la Chambre.
    La députée a cité de nombreuses personnes, et je vais maintenant citer pour elle le chef de police Steve Bell. Il a dit: « Sans les pouvoirs qui nous ont été octroyés [...] grâce à cette loi, nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons [ensemble] aujourd'hui. »
    J'invite la députée, elle qui vient du parti de la loi et de l'ordre, à nous expliquer pourquoi elle semble encourager les actes commis à l'extérieur et pourquoi elle ne se fie pas à la parole du chef de police qui mène les opérations.

  (1250)  

     Madame la Présidente, si nous sommes ici aujourd'hui, c'est à cause du manque de leadership du premier ministre et du gouvernement. Nous avons demandé à maintes reprises aux libéraux quelles mesures ils avaient prises pour que nous en arrivions à ce point. Ils ne nous ont jamais donné de réponse.
    Quelles sont la première, la deuxième, la troisième et la quatrième mesures qu'ils ont prises?
    Il s'agit d'une situation extraordinaire. Nous n'avons reçu aucune information au sujet des mesures que le gouvernement fédéral a prises pour que nous en arrivions à ce point. La première mesure aurait pu être de parler aux gens et de les écouter.
    Si nous en sommes là aujourd'hui, c'est parce que rien n'a été fait.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de son allocution.
    D'abord, on ne m'en voudra pas de saluer l'exercice, le courage, l'audace et le grand jugement des membres des diverses interventions de sécurité qui sont sur le terrain, en ce moment, en face du Parlement. Mon conjoint étant un policier retraité, je peux affirmer qu'il faut beaucoup de jugement et de...
    Je suis désolée de devoir interrompre l'honorable députée.

[Traduction]

    J'invite la Chambre à se calmer. Il faut pouvoir entendre les questions. À l'ordre.
    Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le député de Kingston et les Îles a utilisé un terme non parlementaire: il a qualifié un autre député d'« idiot ».
    Je lui demande de s'excuser.
    Je n'ai rien entendu de tel.
    Le député de Kingston et les Îles peut répondre.
    Madame la Présidente, je suis disposé à présenter mes excuses pour cette remarque. J'ai effectivement dit cela et je m'en excuse.
    Toutefois, je tiens à souligner que le député de Barrie—Innisfil a dit la même chose...
    Nous n'entamerons pas un débat sur cette question.

[Français]

    L'honorable députée de Beauport—Côte‑de‑Beaupré—Île d'Orléans—Charlevoix peut poursuivre sa question.
    Madame la Présidente, je salue l'exercice des sept équipes qui sont sur le terrain en ce moment.
    J'ajouterai que personne au Parlement ne mérite d'être traité d'idiot.
    Je poserai la question suivante à ma collègue. À plusieurs reprises, le premier ministre a lui-même dit que la Loi ne s'appliquerait pas là où elle ne serait pas nécessaire. Comme il y a sept provinces, incluant le Québec, qui n'ont pas besoin de cette loi et qui ne souhaitent pas qu'elle s'applique, pourquoi le premier ministre veut-il l'appliquer partout? Qu'est-ce qui le motive, selon la députée?

[Traduction]

    Madame la Présidente, à propos de ce qui vient de se passer, il est évident que le premier ministre n'est pas le seul à aimer insulter les gens. C'est une tactique des libéraux.
    Ma réponse à la question de la députée est « certainement ». La Loi sur les mesures d'urgence stipule qu'il faut consulter les provinces, et c'est ce qui a été fait. Manifestement, la grande majorité d'entre elles n'appuient pas le recours à la Loi, car sept provinces sur dix s'y opposent. Cela en dit long. Ces gouvernements ont affirmé qu'à leur avis, il n'est pas nécessaire d'avoir recours à cette loi pour le moment.
    Toutefois, le premier ministre n'en a absolument pas tenu compte. Il n'en a fait qu'à sa tête et est allé de l'avant malgré tout.
    Qujannamiik, Uqaqtittiji. Le discours des conservateurs a alimenté la désinformation et a minimisé des actes visiblement très violents. Le fait qu'ils aient utilisé de terribles exemples de l'histoire, par exemple les victimes de l'Holocauste, comme argument est déplorable.
    Une désinformation de cette ampleur entraîne une montée de la violence et de la haine à l'égard de nos communautés et fait des ravages, tout cela sans conséquence. La députée peut-elle expliquer pourquoi les membres de son parti continuent de minimiser la violence utilisée par ces extrémistes, avec lesquels ils ont accepté de se faire prendre en photo?
    Madame la Présidente, je remercie la députée pour sa question et son intervention.
    De ce côté-ci de la Chambre, je ne connais personne qui a pris des photos avec des personnes brandissant des croix gammées et ce genre de choses. Cela ne s'est tout simplement pas produit.
    Nous devons comprendre que, comme je l'ai dit dans mon discours, il y a des gens dont les points de vue, les propos et les actions sont absolument déplorables. Nous dénonçons ces personnes. Ce n'est pas tout le monde qui est visé.
    J'ai déambulé dans les rues, parlé à des gens qui sont des enseignants et qui en ont assez de voir les enfants affligés de graves troubles de santé mentale, au point où ils ne peuvent plus les gérer. Il y a des personnes qui ont perdu leur emploi. Il y a des personnes ordinaires...

  (1255)  

    Nous devons reprendre le débat.
    Le député de Miramichi—Grand Lake a la parole.
    Madame la Présidente, c'est certes un privilège de prendre la parole aujourd'hui au nom des résidants de Miramichi—Grand Lake.
    Après 14 ans de vie politique, je n'ai pas fermé l'œil de la nuit en raison de ce discours. J'ai dû aborder ce qui se passe vraiment sous tellement d'angles. Cela m'a rappelé certaines de mes pérégrinations de jeune adulte. J'ai exploré à fond l'Italie et la France, j'ai vécu un certain temps en Corée du Sud, puis je me suis installé un mois à Rome.
    Pendant mon séjour à Rome, j'ai étudié l'histoire ancienne. Il était question de l'empereur Néron. On nous a appris de quelle façon, alors que Rome était en flammes en 64, il a laissé la ville se consumer. Les historiens se demandent souvent s'il a joué du violon pendant que la ville brûlait, car il souhaitait qu'une nouvelle ville naisse des cendres. Il a jeté le blâme sur une minorité marginale appelée chrétiens. J'ai appris cela en histoire ancienne.
    L'après-midi, pendant ce voyage d'études, nous étudiions l'Italie moderne. J'ai appris pourquoi les Italiens étaient si reconnaissants envers les Canadiens pour les avoir libérés lors de la Seconde Guerre mondiale. J'ai participé à une cérémonie à Thierville, en Normandie, en 2011, et j'ai pris la parole au nom de la province du Nouveau-Brunswick. J'ai vu devant moi les larmes de personnes qui vivaient à Juno, dans les premières maisons libérées, et le respect que ces personnes vouaient aux Canadiens encore à ce jour.
    Un soir, tard, alors que je vivais en Corée du Sud, je me promenais le long de la rue. Je crois qu'il y avait un décalage de douze heures, et j'appelais chez moi. Dans la rue, un vieil homme ivre m'a lancé des injures parce qu'il n'aimait pas le son de ma voix. Je parlais anglais. Je me suis rendu compte plus tard qu'il croyait que j'étais Américain.
    Certains de mes amis qui étaient Coréens se sont approchés de l'homme et lui ont demandé d'être aimable avec moi, en ajoutant que j'étais Canadien. Je ne comprenais pas la langue qu'ils parlaient. Le vieil homme, qui pouvait à peine marcher tellement il était intoxiqué, s'est avancé vers moi et m'a embrassé sur la joue. Il m'a appelé un oegug-in, ce qui désigne un Canadien pour un Sud-Coréen, puis m'a remercié dans sa langue pour ce que nos ancêtres et anciens combattants ont fait pendant la guerre de Corée. Je suis conscient du respect que le Canada suscite dans le monde et je sais ce qui a permis à notre pays de gagner ce respect.
    La question dont nous débattons aujourd'hui est très importante. Nous croyons tous à la liberté. Nous savons tous comment nous l'avons obtenue. Ce que nous devons déterminer, c'est ce qu'elle représente pour chacun d'entre nous. S'il y a des gens de Miramichi—Grand Lake qui nous écoutent et nous regardent aujourd'hui, je tiens à leur dire qu'il y a une différence entre une urgence et le fait d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Cette loi s'appelait autrefois Loi sur les mesures de guerre. On y a eu recours pendant la Première Guerre mondiale, puis de nouveau pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle a aussi été invoquée en 1970 par le premier ministre Trudeau de l'époque, dans ce que le chef du NPD d'alors, Tommy Douglas, a essentiellement qualifié de contrôle démesuré exercé par un gouvernement inepte.
    On y a recours pour la quatrième fois dans notre histoire, mais cette fois-ci sous le nom de Loi sur les mesures d'urgence. Les députés doivent comprendre que le premier ministre Chrétien n'y a pas eu recours lors des attentats du 11 septembre. On n'y a pas eu recours lorsqu'Allan Legere, un tueur en série, a terrorisé et horrifié les habitants de Miramichi en se lançant dans une folie meurtrière que personne dans ma collectivité n'oubliera jamais. On n'y a pas eu recours lors des manifestations contre le gaz de schiste, sur la route 11. On y avait alors détruit de l'équipement sismique valant des millions de dollars et huit véhicules de police à coups de cocktails Molotov, et les organisateurs de la manifestation avaient des mitraillettes. Lorsqu'on a appelé la GRC pour mettre fin à tout cela, tout s'est subitement arrêté. La situation n'a pas pris fin grâce à ce qu'on appelait alors la Loi sur les mesures de guerre. Elle n'a pas non plus pris fin grâce à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Je suis vacciné, tout comme ma femme et mes enfants. Nombre de mes connaissances sont vaccinées, mais beaucoup d'autres ne le sont pas. Je crois que la vaccination est un choix personnel, et je ne crois pas que le chef de notre pays devrait vilipender ceux qui ont fait le choix personnel de ne pas se faire vacciner. Je ne crois pas qu'il devrait agir ainsi. Jamais.
    Au bénéfice des téléspectateurs, je dirai que le discours d'aujourd'hui ne porte pas sur la vaccination, ni même sur les obligations vaccinales. Il s'agit plutôt de décider d'appliquer ou non la Loi sur les mesures d'urgence pour disperser des manifestants, des dissidents de la population canadienne. Je m'inquiète de ma propre sécurité. J'ai dû traverser ces manifestations chaque soir pendant 14 jours, dans le noir, à 20 ou 30 degrés au-dessous de zéro, sans que personne m'escorte. S'il s'agissait d'une crise nationale, qui me protégeait?
    Pour trouver un taxi, il fallait se frayer un chemin à travers ces personnes qui contreviennent à la loi, comme les grands médias cherchent à nous le faire croire. On m'a demandé si je voulais un cheeseburger ou si je voulais danser. Cela ne s'invente pas. Personne n'est obligé d'être en accord avec la manifestation ou avec les motifs de celle‑ci. Il faut cependant constater que lorsque des ponts, des chemins de fer ou des voies commerciales ont été bloqués, on les a débloqués presque aussitôt.

  (1300)  

    Comment cela s'est-il produit? Comment toutes ces autres situations relevant de notre responsabilité ont-elles été résolues? Elles ont été résolues avec de la décence. Elles ont été résolues par des premiers ministres qui ne se sont pas cachés dans leurs maisons pendant que le pays était dans la tourmente en raison d'une crise que le premier ministre a lui-même créée.
    Au cas où les résidants de ma circonscription se le demanderaient, je ne me suis pas caché dans ma maison. J'ai été parmi les premiers députés à être allé discuter avec des camionneurs. Ils venaient de l'Alberta. C'était le samedi 29 janvier, avant même que le convoi atteigne la Colline du Parlement. La plupart de ces camionneurs étaient vaccinés. Ils manifestaient pour la liberté, parce qu'ils considéraient qu'on leur avait arraché leur liberté.
    Comment le fait de m'être assis sur la plateforme d'un camion avec quelques camionneurs me rend-il raciste ou misogyne? Pourquoi la députée de Thornhill, dont la famille a vécu l’Holocauste, s'est-elle fait traitée de raciste et de sympathisante?
    Le gouvernement du Canada étiquette les Canadiens depuis de nombreux mois. Le premier ministre a traumatisé les Canadiens en utilisant un vocabulaire qui sème la discorde et en soulevant constamment des questions litigieuses, ce qui a carrément mené à la stigmatisation de l'identité canadienne. Or, le premier ministre refuse de présenter des excuses pour avoir utilisé de telles étiquettes. Il a lancé des insultes à tout le monde qui était en désaccord avec lui.
    Voici les expressions et le vocabulaire que le premier ministre a utilisés pour traumatiser encore plus les citoyens canadiens: ces gens; des personnes inacceptables; des personnes qui ont des points de vue inacceptables; des racistes; des fanatiques; des terroristes; des misogynes; des gens qui accaparent l'espace. Des gens qui accaparent l'espace? J'aime croire que nous avons tous le droit d'occuper un peu d'espace dans ce pays que nous appelons le Canada. Le premier ministre doit porter le blâme.
    Je vais ajouter quelque chose avant de conclure. Nous devons chérir et soutenir la liberté d'expression et la diversité d'opinions. Nous avons tous dans notre famille une personne qui a lutté pour la liberté que nous avons aujourd'hui. Ces personnes ont fait des sacrifices pour garantir le droit d'avoir des opinions différentes de celles du gouvernement et de vivre en toute liberté à cet égard. Les voix dissidentes font partie de notre démocratie.
    J'ai un dernier point à faire valoir à mes collègues. Je m'oppose à l'invocation de la Loi sur les mesures d’urgence parce qu'elle permet au gouvernement d'aller trop loin. Geler les comptes bancaires est une mesure digne des États communistes. Voici une citation de la Bible, qui est tirée du chapitre 2, versets 3 et 4 des Philippiens.
     Ne faites rien par esprit de rivalité ou par désir d’une gloire sans valeur, mais avec humilité considérez les autres comme supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous, au lieu de regarder à ses propres intérêts, regarde aussi à ceux des autres.
    C'est la façon canadienne de faire les choses. Pour le monde, le Canada a toujours été un pays de paix et de justice. Il est temps que nous retrouvions cet esprit ici, à la maison.

  (1305)  

    Madame la Présidente, je constate que le député marche dans les traces de sa cheffe intérimaire et que, lui aussi, il encourage les manifestants et approuve les barrages illégaux. Lui aussi, il rejette l'entière responsabilité sur le premier ministre. Calomnie par-dessus calomnie, c'est tout ce que nous entendons des banquettes de l'opposition aujourd'hui. Pendant que les Canadiens s'en font avec les conséquences sur l'économie et sur la société en général, qu'ils dénoncent l'occupation d'Ottawa et les gestes posés par ceux qui bloquent les rues, les conservateurs continuent de médire de leur prochain et de rejeter le blâme sur une seule et même personne.
    Voici ma question: le député est-il conscient qu'il y a urgence? Même le chef de police d'Ottawa par intérim se sert de la loi dont nous débattons aujourd'hui. La Ville d'Ottawa et la province de l'Ontario ont déclaré l'état d'urgence. L'opposition doit revenir les deux pieds sur terre.
    Madame la Présidente, je rappelle au député d'en face que, lorsque ce mouvement a pris naissance, le premier ministre n'a pas agi de manière raisonnable, pondérée et responsable. Il ne s'est pas comporté comme le premier ministre du Canada. Rappelons-nous MM. Chrétien, Harper et Mulroney. Ceux qui nous ont précédés auraient tendu la main à ceux qui prônent des opinions dissidentes. Ils auraient peut-être même rompu le pain et pris un café avec eux. Malgré leurs différends, ils auraient tenté de trouver un terrain d'entente. Je crois que les manifestations seraient terminées depuis au moins deux semaines et demie si nous avions choisi cette voie.
    Madame la Présidente, le député a parlé de sa vie en Corée du Sud. Il a raconté comment il avait rencontré un homme qui était heureux qu'il soit Canadien, et non Américain.
    Je ne peux m'empêcher de penser au fait qu'il y a de la désinformation partout dans le monde, et qu'une grande partie de cette fausse information est générée par des robots russes. Les gens ne peuvent pas être en ligne deux minutes sans être attaqués par ces robots. Nous avons aussi vu des faussetés être véhiculées à des endroits comme Fox News et amplifiées par des républicains comme Ted Cruz.
    Le député ne convient‑il pas que quand les conservateurs véhiculent ces faussetés et quand ils prennent des photos avec les extrémistes, ils augmentent le niveau de désinformation au Canada et instaurent un climat politique plus clivant comme aux États‑Unis?
    Madame la Présidente, je remercie la députée d'en face de sa question. Pour tout dire, les Américains sont également mes amis. Cela faisait partie de mon histoire.
    Je préciserai que je n'ai jamais rencontré d'extrémistes. Le gouvernement agit comme s'il est question d'opposer les libéraux à l'extrême droite, mais le débat ne porte pas là‑dessus. Il vise à déterminer si le Canada veut être semblable aux États communistes. Il n'est plus question de libéralisme. J'ai fréquenté une université d’arts libéraux. Or, ce que le gouvernement propose est digne des pays communistes et socialistes.
    J'ai rencontré un camionneur qui subvient aux besoins de sa famille. La députée n'aime peut-être pas Fox News, mais elle vote en faveur du projet de loi qui cherche à censurer ce que les Canadiens peuvent voir et écrire en ligne.
    Madame la Présidente, dans son discours dans le cadre de cet excellent débat sur cette loi, le député a parlé de l'importance de communiquer avec les gens et d'entendre ce qu'ils ont à dire.
    L'un des documents que le gouvernement a déposés en accompagnement de la proclamation s'intitule « Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement: Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence ». Il s'agit en fait d'une liste de toutes les rencontres que le gouvernement a effectuées avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, conformément aux exigences de la loi, pour tenter de déterminer si oui ou non le gouvernement a mis à exécution les étapes un et deux avant d'utiliser cette « mesure de dernier recours », puisque c'est ainsi que le premier ministre a qualifié la Loi sur les mesures d'urgence. Or, j'ai beau examiner ce document, je ne vois rien qui corresponde aux étapes un et deux, sinon des réunions du Cabinet, où les ministres ce sont consultés entre eux. Le gouvernement n'a jamais consulté le moindre Canadien en dehors du gouvernement.
    Le député pourrait-il nous dire ce qu'il pense de la consultation effectuée et de l'importance d'écouter les gens avant de recourir à une loi draconienne?
    Madame la Présidente, cela rejoint ce que j'essayais de dire tout à l'heure. Un premier ministre raisonnable rencontrerait les organisateurs et tenterait de dialoguer pour trouver un terrain d'entente. D'autres pays ont déjà levé les exigences relatives à la vaccination. Nous n'aurions pas été différents de ces autres pays du monde libre. La différence ici, c'est que le premier ministre s'est caché dans sa résidence, tout comme il l'a fait lors du scandale UNIS, lors du scandale SNC‑Lavalin et lors du scandale du « blackface »...

  (1310)  

    Nous reprenons le débat. Le député de Coquitlam—Port Coquitlam a la parole.
    Madame la Présidente, je vous indique que je vais partager mon temps de parole avec le député de Willowdale.
    Je prends la parole à la Chambre aujourd’hui pour soutenir l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence de 1988 par le gouvernement cette semaine. Normalement, je dirais que je suis heureux de prendre la parole, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui.
    Aujourd’hui, je ne suis pas heureux du siège contre les habitants d’Ottawa, qui ont été les plus durement touchés par cette occupation illégale de leurs quartiers. Ils vivent dans la peur que leur immeuble à appartements soit la cible d’un incendie criminel, la peur d’être harcelés, nargués ou ridiculisés alors qu’ils se rendent à leur travail ou à l’épicerie.
    Je ne suis pas heureux pour les gens qui travaillent au centre-ville d’Ottawa, dont au Centre Rideau, et qui ne peuvent plus gagner leur vie depuis maintenant trois semaines. Je ne suis pas heureux pour les propriétaires d’entreprises qui espéraient rouvrir après la levée des restrictions en Ontario, au début de l’occupation, pour finalement devoir fermer à nouveau en raison de menaces, d’intimidation et de violence de la part des manifestants.
    Je ne suis pas heureux pour mon personnel, qui ne peut pas aller travailler parce qu’on sème la peur et l’intimidation. La Cité parlementaire devrait être un lieu sûr. Ces temps-ci, elle ne l’est pas.
    Ce sont des Canadiens ordinaires qui souffrent de cette occupation illégale. Je suis triste pour eux. Je suis contrarié par ces occupants qui enfreignent la loi et nous empêchent d'interagir au quotidien. Je suis contrarié de voir des passants innocents subir ces activités illégales. Je suis triste pour les victimes de mauvais traitements, de harcèlement et de moquerie parce qu'elles suivent les mesures de santé publique, des mesures mises en place pour aider à protéger nos citoyens et notre système de santé. Nos médecins, nos infirmières et nos autres travailleurs de la santé sont épuisés; je les remercie.
    Je regrette de voir les torts causés à notre économie, qui a déjà été durement touchée par la pandémie proprement dite et ensuite par les barrages illégaux qui sont apparus de part et d'autre à cause du siège à Ottawa. Ce n'est toutefois pas qu'Ottawa qui est touché. L'Ontario l'est aussi, par exemple, à cause du blocage du pont Ambassador, qui a notamment forcé la fermeture d'usines d'automobiles. Ces barrages illégaux portent un coup dur à l'économie de l'Alberta, où je suis né et où j'ai grandi, ainsi qu'à l'économie du Manitoba et à celle de la Colombie‑Britannique, où j'habite actuellement.
    Je sais que les gens sont fatigués des restrictions sanitaires. Je le suis également, tout comme pratiquement toutes mes connaissances. Je sais que la pandémie est épuisante. C'est difficile pour tous les Canadiens. Cela a été difficile et cela continuera de l'être pour tout le monde. Cette frustration est également ressentie par les 90 % de Britanno‑Colombiens qui ont retroussé leur manche pour recevoir le vaccin. Ce genre de mesures demeure toutefois essentiel à la réduction du risque pour nos aînés et les personnes immunodéprimées, ainsi que pour finalement mater la pandémie.
    Je soutiens l’approche mesurée de la Colombie‑Britannique concernant la levée des restrictions, là et quand cela est envisageable, en fonction de l’évolution de la pandémie dans la région. Ces mesures s’appuient sur les excellents conseils fournis par des médecins et des professionnels hautement qualifiés de la santé publique. Nous devons continuer d’écouter les responsables de la santé publique afin de protéger les Canadiens contre cette maladie sournoise. Pour ce faire, il faut aussi protéger nos systèmes de santé et respecter les directives sanitaires.
    Personne n’aime le passeport vaccinal, moi le premier, mais au lieu de le considérer comme un sujet de discorde — comme beaucoup l’ont fait — nous devrions le voir comme un outil qui permet aux entreprises, à l’économie et aux voyages de reprendre dans une certaine mesure; un outil qui permet de ne pas tout fermer comme nous avons dû le faire par moment avant de pouvoir disposer d’autant de vaccins qui, je le rappelle, sont efficaces, sûrs et testés. Le passeport vaccinal n’est toutefois qu’un outil propre à la pandémie, et comme toutes les mesures sanitaires, il disparaîtra en temps voulu lorsque la pandémie touchera à sa fin. Nous ne pouvons pas simplement souhaiter sa disparition et exiger que la pandémie soit ignorée.
    Nous vivons des moments éprouvants sur le plan émotionnel, et c’est dans ce contexte que des gens qui voulaient exprimer des préoccupations sincères dans le cadre de manifestations légales et légitimes se sont laissés submerger et dépasser. C’est dans ce contexte très éprouvant sur le plan émotionnel, qui favorise un profond mécontentement et l’échauffement des esprits, que nous avons assisté au malheureux siège d’Ottawa, et à une prolifération de manifestations et de barrages similaires sur tout notre territoire.

  (1315)  

    En cette période éprouvante et dangereuse, le service de police d'Ottawa, la Police provinciale de l'Ontario et d'autres intervenants au pays n'étaient pas en mesure de prendre les moyens qui sont mis à exécution en ce moment. Maintenant, nous pouvons mettre fin à ce siège de façon pacifique en appliquant la Loi sur les mesures d'urgence, en fournissant des ressources et en définissant clairement les pouvoirs des intervenants.
    Le gouvernement a pris cette mesure audacieuse cette semaine afin que les forces de l'ordre aient suffisamment de ressources pour mettre fin à l'occupation illégale de façon pacifique et sécuritaire. Hier, nous avons enfin commencé à voir ce que la plupart des Canadiens attendent depuis des semaines, soit le retrait des personnes impliquées dans ces sièges illégaux, le rétablissement de la paix et un retour à des conditions qui permettent de vivre et de travailler en sécurité dans la ville.
    Les Canadiens doivent absolument comprendre ce que cette loi permet et ne permet pas de faire. Il est essentiel de comprendre que la Loi sur les mesures d'urgence prévoit des mesures précises, ciblées et mesurées. Fait tout aussi crucial, ces mesures sont d'une durée limitée et sont soumises à un processus de vérification adéquat, démocratique et équilibré. Des modalités essentielles sont déjà prévues pour limiter la durée des mesures à 30 jours, pour exercer une surveillance permanente par l'entremise d'un comité parlementaire et pour que le Parlement puisse garder son droit de révoquer la déclaration d'état d'urgence quand il le jugera nécessaire. Par ailleurs, il faudra ensuite mener une enquête publique pour déterminer les circonstances ayant mené aux mesures prises pendant cette situation d'urgence sans précédent.
    Plus important encore, la Loi sur les mesures d'urgence ne prévoit pas le recours aux militaires et ne suspend pas la Charte des droits et libertés. Elle établit explicitement ces balises. Les droits prévus à la Charte comprennent la liberté de réunion pacifique, la liberté d'expression, ainsi que le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne. Le préambule de la Loi sur les mesures d'urgence est limpide à ce sujet. Je cite:
[...] qu'en appliquant de pareilles mesures, le gouverneur en conseil serait assujetti à la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi qu'à la Déclaration canadienne des droits et aurait à tenir compte du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, notamment en ce qui concerne ceux des droits auxquels il ne saurait être porté atteinte même dans les situations de crise nationale [...]
    En tant que membre de longue date de la section des « trois villes » d'Amnistie internationale, je reconnais et je respecte totalement le droit de tous les Canadiens de manifester, d'exprimer leur opinion et de demander des comptes aux élus. Par contre, nous devons établir clairement que personne n'a le droit de bloquer des infrastructures essentielles comme des autoroutes et des hôpitaux. Personne n'a non plus le droit d'intimider et de menacer ses concitoyens, de les empêcher de jouir en toute sécurité de leur demeure et de mettre en péril leur emploi ou leur entreprise.
    Je veux simplement ajouter que tenter de nous intimider au moyen d'un manifeste qui exige le renversement du gouvernement dûment élu du Canada est tout à fait absurde, ne repose sur aucune loi et est antidémocratique. Cela relève de l'anarchie stupide, voire carrément de la sédition, et il n'y a rien de plus éloigné de la liberté dont les participants de l'occupation se réclament.
    Je sais que la plupart des gens qui appuient les manifestations, avec ou sans barrages, ne sont pas des anarchistes ni des extrémistes. La plupart sont des Canadiens honnêtes qui en ont assez des restrictions. Je les comprends et je compatis avec eux. Malheureusement, le harcèlement et les menaces ne cessent pas, et il est évident que toutes ces manifestations liées entre elles à l'échelle du pays ont été infiltrées par des groupes de suprémacistes blancs, de sympathisants nazis, d'islamophobes, d'antisémites et de racistes, fanatiques et extrémistes de tous acabits. Partout où ces gens passent, ils laissent leur marque sordide et indélébile.
    On en voit un excellent exemple dans la saisie menée à Coutts, ces derniers jours, dans une importante cache d'armes qui appartenait à des individus liés à des organisations extrémistes. Nous avons vu également des comportements dangereux, comme celui de l'homme qui a foncé avec sa camionnette sur une barricade policière au poste frontalier de Peace Arch, et il y a d'autres exemples. Ces menaces, entre autres, mettent en évidence la présence de petits groupes organisés et dangereux au sein des manifestations, de petits groupes prêts à faire de l'intimidation et à commettre des actes de violence pour atteindre leurs propres objectifs, qui ne correspondent habituellement pas au respect de la population, des droits et des institutions, mais qui exigent une surveillance accrue de notre part.
    Cependant, je dois souligner que, même si la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée, les gens peuvent encore manifester et être en désaccord avec le gouvernement, mais ils ne peuvent pas...

  (1320)  

    Le député aura l'occasion d'exprimer le reste de sa pensée pendant les questions et observations.
    Nous passons aux questions et observations. Le député d'Oshawa a la parole.
    Madame la Présidente, je suis extrêmement déçu. J’ai vu un gazouillis d’un ancien député néo-démocrate, Svend Robinson, qui disait: « En 1970, sous Tommy Douglas, le caucus néo-démocrate a adopté une position courageuse et raisonnée contre la Loi sur les mesures de guerre. Aujourd’hui, sous la direction de [son chef], le NPD trahit cet héritage et appuie les libéraux relativement à la Loi sur les mesures d’urgence. Honte. Un précédent très dangereux est en voie d’être établi. »
    Le député pourrait-il nous dire clairement s’il croit que les nouveaux pouvoirs conférés au gouvernement pour saisir et geler des comptes bancaires devraient être mis en place de façon permanente pour les personnes qui ont des opinions politiques différentes de celles du gouvernement?
    Madame la Présidente, les problèmes auxquels nous faisons face aujourd’hui sont une menace à notre démocratie, à notre économie et au principe de la paix, de l’ordre et du bon gouvernement au Canada, et c'est inacceptable. Les mesures mises en place ces derniers jours sont limitées dans le temps et doivent être ratifiées par le Parlement. Elles seront également portées devant les tribunaux en temps voulu.
    Nous ne pouvons pas faire une déclaration générale du genre que propose le député.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son discours.
    Afin de justifier le recours à la Loi sur les mesures d'urgence, il a mentionné le fait que plusieurs Ottaviens, dont certains de ses employés, se faisaient intimider.
    Pas plus tard qu'en décembre dernier, nous avons adopté le projet de loi C‑3, qui visait à criminaliser l'intimidation envers le personnel soignant et les gens voulant obtenir des soins de santé.
    J'aimerais savoir ce qui justifie le recours à la Loi sur les mesures d'urgence maintenant, alors que ce n'était pas justifié au moment d'adopter le projet de loi C‑3.

[Traduction]

    Madame la Présidente, la Loi sur les mesures d’urgence est entrée en vigueur pour faire face à un problème bien précis, qui s’est manifesté il y a plusieurs semaines et que les responsables des forces de l’ordre ont été incapables de gérer correctement en raison d’un conflit de compétences et d’un manque de ressources. Hier, et encore aujourd’hui, nous avons vu la capacité des responsables des forces de l’ordre, qui disposent maintenant des ressources requises et de la collaboration des services de polices de partout au pays, à mobiliser les ressources voulues pour régler la situation et nous...
    Le député de Windsor-Ouest a la parole.
    Madame la Présidente, le pont Ambassador se trouve à deux kilomètres d'ici. Les conservateurs et le Bloc aiment dire que ça va bien. Ce n'est pas le cas. Le pont est ouvert, mais les barrières en béton et les barrages sont maintenant dans les rues de la ville et d'autres endroits. Des centaines de millions de dollars en marchandises et près de 40 000 véhicules par jour y circulent.
    Les camions sont alignés depuis le pont et sont ralentis jusqu'au corridor, y compris dans la circonscription du député d'Essex. Les députés d'en face ne semblent pas s'en soucier ni comprendre la fragilité du système de livraison juste à temps ou le nombre d'emplois perdus.
    Est-ce que le gouvernement du député appuiera au moins les mesures de soutien municipales, qui seront remboursées par les gouvernements fédéral et provinciaux, des mesures qui serviront à payer les coûts des services de police et à soutenir la logistique des organisations, des entreprises et des groupes qui subiront une série de retards et de problèmes, pas seulement maintenant, mais au cours des prochaines semaines, afin de compenser le temps perdu?

  (1325)  

    Madame la Présidente, je ne tiens malheureusement pas les cordons de la bourse. Je dirai toutefois que j'appuie sans réserve l'idée de continuer à soutenir tous les ordres de gouvernement qui ont besoin d'aide en ce moment, comme nous avons pu le faire tout au long de la pandémie, pour composer avec les situations et les urgences qui se présentent, afin que nous puissions tous sortir de cette crise en bonne santé et en sécurité.
    Madame la Présidente, je suis reconnaissant de pouvoir prendre part à ce débat important aujourd'hui.
    Après ce dont nous avons tous été témoins dans les rues de notre capitale hier, je me dois de dire que chacun de nous a l'obligation et la responsabilité solennelles de se tenir loin des excès de rhétorique et de partisanerie. Ce dont nous avons été témoins dans notre capitale nationale doit nous rappeler que nous avons l'obligation solennelle de nous montrer résolus dans l'exercice de nos responsabilités et vigilants dans la protection des intérêts de tous les Canadiens. Je crois fermement que nous devons tous nous efforcer d'éviter la division et de faire appel aux principes qui nous guident dans notre décision au sujet de la motion dont nous sommes saisis. Après tout, dans de telles circonstances, les Canadiens ne méritent rien de mois de leurs élus.
    Les faits sont incontestables. Nous en sommes aujourd'hui au 23e jour de siège à Ottawa. Outre les campements établis et les barrages érigés dans la ville, nous avons assisté aussi à des semaines de manifestations au pont Ambassador à Windsor et au passage frontalier à Coutts, en Alberta. Toutes ces manifestations ont été des gestes délibérés et concertés pour entraver nos voies commerciales essentielles ou perturber la vie des citoyens.
    Notre droit démocratique de manifester et d’exprimer librement nos opinions est une chose. Le blocage, le siège et l’encombrement de notre réseau routier en sont une autre. Je tiens à dire, de façon catégorique, que la raison d'être de l'occupation importe peu. Ce n’est pas là l’objet de la motion dont nous sommes saisis. Normalement, une manifestation est limitée dans le temps, et on ne devrait jamais la laisser se transformer en un siège illimité qui fait fi des droits d’autrui. Notre gouvernement reste à l’écoute, comme il le fait toujours en ce qui concerne les préoccupations de tous les Canadiens.
    Je vais maintenant parler de l’importance de la primauté du droit. Notre respect scrupuleux de la primauté du droit fait de notre pays un modèle pour beaucoup de pays du monde. C’est précisément la raison pour laquelle j’ai émigré au Canada avec ma famille, lorsque j’étais encore adolescent. Nous avons fui l’idéologie haineuse et l’extrémisme d’un gouvernement révolutionnaire parfaitement indifférent aux droits individuels et à la primauté du droit. La primauté du droit, c’est la pierre angulaire de notre nation, c’est le principe selon lequel tous les citoyens sont assujettis à la loi et tous les citoyens doivent être tenus responsables de leurs actes. C’est la raison pour laquelle nous ne devons pas fermer les yeux sur ce qui se passe depuis plusieurs semaines dans notre pays et dans notre capitale.
    Les députés ne sont pas sans savoir que les résidants d’Ottawa sont soumis à des agressions sonores insupportables depuis des semaines, et que bon nombre d’entre eux se sont sentis obligés de constituer des brigades citoyennes pour se défendre. Nous ne pouvons pas rester indifférents à ce qu’ils nous disent. Les députés ne sont pas non plus sans savoir que des centaines de petits commerces, dont beaucoup étaient fréquentés par des députés, ont dû fermer leurs portes il y a trois semaines. Nous devons réagir. Nous avons même appris que certains manifestants bloquaient les lignes du 911 depuis quelques jours.
    Les Canadiens attendent à juste titre de leur gouvernement que celui-ci affirme sa volonté de mettre un terme à cette situation. La seule façon de le faire de façon responsable, c’est d’utiliser la Loi sur les mesures d’urgence. Nous avons communiqué avec tous les ordres de gouvernement, et tous nous ont dit — que ce soit le chef de la police d’Ottawa, le maire d’Ottawa ou le premier ministre de l’Ontario — qu’Ottawa était assiégée, qu’elle était complètement dépassée et qu’elle n'avait pas les outils et les ressources nécessaires pour faire face à la situation. Je rappelle aux députés que la Ville d’Ottawa a décrété l’état d’urgence le 6 février, et qu’elle a été suivie par la province de l’Ontario le 11 février et par le gouvernement fédéral le 14 février.

  (1330)  

    La Loi sur les mesures d’urgence décrit une procédure claire. Contrairement à ce que nous avons entendu aujourd’hui, cette loi a une durée limitée; elle est ciblée et elle doit toujours être appliquée de façon raisonnable et proportionnée. Elle ne limite pas la liberté d’expression, pas plus qu’elle ne limite la liberté de se réunir de façon pacifique. La loi contient de nombreux mécanismes de contrôle. Telle qu’elle a été adoptée en 1988, elle est assortie de nombreuses sauvegardes pour garantir en permanence le respect des droits consacrés par la Charte.
    Le gouvernement progressiste conservateur qui a présenté la Loi sur les mesures d’urgence en 1988 s’est assuré que le recours à cette loi se fasse conformément à la Charte. Les députés de l’opposition ne cessent de dire que les faits ne justifient pas l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. Si les événements qui se sont déroulés à Windsor, Coutts et Ottawa ne suffisent pas à convaincre les députés, sans parler des appels au secours des résidants, du chef de police, du maire d’Ottawa et du premier ministre de l’Ontario, je leur dis ceci: il ne s’agit pas simplement de réagir à ce qui se passe, il faut aussi anticiper d’autres menaces ultérieures possibles.
    Quand on lui a demandé, en 1988, quelles conditions il fallait réunir pour justifier le recours à la Loi sur les mesures d’urgence, Perrin Beatty, ministre du gouvernement conservateur, a répondu ceci: « [Cela] dépend non seulement de l'évaluation de la situation, mais encore et surtout du jugement que l'on porte sur l'évolution possible de la situation et sur la vitesse avec laquelle elle pourrait se détériorer. » M. Beatty a même ajouté: « Il faut porter un jugement non seulement sur ce qui s'est passé, mais aussi sur ce qui est susceptible de se produire ».
    Quand la Loi sur les mesures d’urgence a été invoquée par notre gouvernement, il a dit très clairement que la situation au Canada était d’autant plus inquiétante qu’elle était instable et imprévisible. J'ose croire que personne ici ne nierait cette affirmation. Je demande donc aux députés non seulement de ne pas fermer les yeux sur ce qui s’est passé, mais surtout de ne pas faire la sourde oreille aux déclarations du chef de police d’Ottawa, du maire d’Ottawa et du premier ministre de l’Ontario. Nos convictions personnelles ne doivent pas l’emporter sur ce que nous disent les représentants de la sécurité publique et les experts de la sécurité nationale depuis quelques jours. Il faut absolument tenir compte de cela pour juger du bien-fondé du recours à cette loi.
    Madame la Présidente, ce sont des remarques intéressantes, mais j’aimerais faire brièvement une comparaison avec ce qui se passe dans un autre pays. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande vient d’annoncer, selon l’Ottawa Citizen, qu’il « écartait la possibilité de dégager par la force les voies d’accès au Parlement qui sont bloquées par des manifestants opposés aux restrictions vaccinales », parce que cela risquait de causer « plus de tort ». Les représentants ont déclaré que « la négociation et la désescalade étaient la seule façon de régler le problème, et qu’ils étaient prêts à continuer de parler aux manifestants ». Si on compare cela avec ce que fait le gouvernement libéral. Il y a eu 58 consultations, et le député en a cité quelques-unes. Mais aucune n’a eu lieu avec les manifestants.
    Est-ce que les libéraux ont laissé délibérément la situation dégénérer, afin de pouvoir ensuite se retourner contre les Canadiens qui ne sont pas d’accord avec eux?

  (1335)  

    Madame la Présidente, plutôt que de regarder ce qui se passe en Nouvelle-Zélande, il vaut mieux regarder ce qui se passe dans notre propre pays, et écouter ce que disent les experts et les représentants des trois paliers de gouvernement, à Ottawa et en Ontario. Il faut absolument maintenir les liens de communication, évaluer la situation et faire tout ce qui est nécessaire.

[Français]

    Madame la Présidente, les débats sont très passionnés aujourd'hui, et je le comprends. Personnellement, je préfère regarder cela de façon rationnelle.
    Allons-y de façon rationnelle. Ce qui se passe aujourd'hui, c'est qu'on utilise la Loi sur les mesures d'urgence, laquelle a une portée à la grandeur du Canada et donc au Québec aussi.
    Mon honorable collègue, que je remercie d'ailleurs de son discours, nous a dit qu'il fallait écouter certains politiciens de l'Ontario.
    Je lui dirais d'écouter certains politiciens du Québec. En fait, je devrais dire tous les politiciens du Québec, parce que l'Assemblée nationale demande que le Québec soit exclu de l'application de cette loi. Malheureusement, ce n'est pas le cas aujourd'hui.
    De façon rationnelle, j'aimerais demander à mon collègue la chose suivante. Dans 10 ans, si un parti de droite était à la tête du gouvernement du Canada et qu'un mouvement de gauche voulait, par exemple, faire des manifestations et bloquer des chantiers de pipelines qui auraient été construits, ce parti pourrait s'appuyer sur la décision prise aujourd'hui, en 2022, par le présent gouvernement. Ce parti évoquerait que cela a déjà été fait par le gouvernement libéral en 2022, et il pourrait alors...
    À l'ordre. Je dois permettre au député de Willowdale de répondre.
    Le député de Willowdale a la parole.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’ai bien entendu la question de mon collègue.
    Cela dit, je pense qu’il faut remercier les différents détachements de policiers qui sont arrivés à Ottawa hier. Ils ont fait un travail formidable, et nous sommes très reconnaissants à la province du Québec de son aide.
    S’agissant de votre question…
    Je rappelle au député que je ne suis pas censée poser des questions.
    Je vous prie de m’excuser, Madame la Présidente.
    Je voudrais simplement assurer au député que je suis convaincu que nous ne sommes pas censés nous prononcer sur la nature de ce qui se passe quand il y a une occupation ou une manifestation qui s'étire, mais que nous devons par contre défendre les droits de tous les Canadiens.
    Madame la Présidente, mon collègue a parlé de fermer les yeux, et je suis d’accord avec lui. Le gouvernement a fermé les yeux, tout comme le maire d’Ottawa et le service de police, si bien que nous nous retrouvons maintenant en pleine crise. Pourtant, il y a eu toutes sortes de signes annonciateurs. J’hésite vraiment à appuyer cette motion, et je suis d’accord avec l’Association canadienne des libertés civiles qui veut des contrôles. Si l’on invoque ces mesures d’urgence, il faut absolument avoir des contrôles.
    Cela dit, il faut se demander pourquoi nous en sommes arrivés là, et je me demande si le député croit comme moi que nous avons besoin d’une enquête publique sur la façon dont toute la crise a été gérée. Le député est-il d’accord avec moi pour dire que nous avons besoin d’une enquête publique sur la gestion de cette crise?
    Absolument, Madame la Présidente, je suis tout à fait d’accord. Je tiens à rassurer la députée: la loi, telle qu’elle a été formulée et pensée en 1988, exige la tenue de cet examen. De plus, la Ville d’Ottawa a décidé d’en tenir un elle aussi.

  (1340)  

    Madame la Présidente, c’est toujours avec un grand plaisir que je prends la parole à la Chambre. J’aimerais aujourd’hui expliquer pourquoi je vais voter contre le maintien de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Depuis 34 ans, soit depuis l’adoption de la Loi sur les mesures d’urgence, il y a eu quatre crises nationales, et dans chaque cas, le premier ministre au pouvoir a refusé de recourir à cette loi. Brian Mulroney ne l'a pas invoquée lors de l’affrontement d’Oka, à l’extérieur de Montréal, en 1990. Jean Chrétien ne l’a pas invoquée après l’attaque terroriste du 11 septembre. Stephen Harper ne l’a pas fait à l’occasion de la crise bancaire de 2008. Le premier ministre actuel ne l’a pas invoquée pendant les deux premières années de la pandémie de COVID‑19, qui a pourtant causé la mort de 35 000 personnes et la pire contraction de l'activité économique depuis la Grande Dépression.
    Pour la première fois dans l’histoire du Canada, un premier ministre invoque la Loi sur les mesures d’urgence alors que les autorités ont déjà tous les outils juridiques à leur disposition pour faire face à la situation. Personnellement, il y a beaucoup d’éléments de la loi qui me préoccupent, notamment la saisie des actifs et le gel des comptes bancaires sans égard à l'application régulière de la loi. Le ministre de la Sécurité publique a déclaré que, à l'heure actuelle, 76 comptes bancaires, d’une valeur totale de 3,2 millions de dollars, ont été gelés.
    Le recours à cette loi est lourd de conséquences que les parlementaires doivent bien peser avant de voter lundi. Après avoir refusé pendant 21 jours de faire face aux manifestants d'une manière courtoise et pacifique, le gouvernement a choisi de recourir à la matraque avec la Loi sur les mesures d’urgence.
    Entendons-nous bien, madame la Présidente. Je suis contre la haine, et je ne trouve aucune légitimité à des groupes qui propagent la discrimination, la violence ou la haine. Encore une fois, je demande qu’on mette rapidement un terme à ces barrages de façon pacifique.
    Le personnel de mon bureau de circonscription, qui s’est comporté avec un professionnalisme et un dévouement incomparables pendant toute cette période difficile, a reçu des centaines d’appels et de courriels de citoyens inquiets et parfois furieux.
    Par exemple, Kenneth et Lois, de Bobcaygeon, ont écrit: « Rien ne justifie le recours à cette loi, si ce n’est la peur du premier ministre. Tout cela aurait pu être évité si le premier ministre avait accepté de les écouter. »
    Vanessa, une habitante de Kawartha Lakes, a écrit: « Je vous implore de ne pas appuyer la décision du premier ministre d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Non seulement c’est une réaction excessive à la situation, mais c’est le premier ministre lui-même qui l’a provoquée en refusant d’écouter les manifestants du convoi. De plus, cela ne sert les intérêts de personne. »
    Peter et Lois ont écrit: « Nous estimons que le gouvernement a abusé de son pouvoir et qu’il bafoue nos droits et nos libertés. »
    Ce n'est qu'un petit échantillon des centaines de messages semblables que nous recevons tous, j'en suis sûr. Ce sont les mots de Canadiens ordinaires qui craignent que la réaction du gouvernement soit excessive en raison de l'échec du leadership du premier ministre. La loi est claire sur les circonstances dans lesquelles elle doit être appliquée. Elle ne doit être invoquée que lorsqu'une situation « menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays » et lorsque la situation résulte d'un concours de circonstances « auquel il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada ».
    La première question à nous poser consiste à savoir si les barrages menacent sérieusement la souveraineté ou l'intégrité territoriale du Canada, et s'il n'y a pas déjà des dispositions législatives qui permettent de composer avec les manifestants. Il incombe au gouvernement fédéral de démontrer que cette loi était la seule option possible.
    Les experts en sécurité nationale ont exprimé leurs préoccupations. Par exemple, Leah West, professeure et spécialiste en matière de sécurité nationale à l'Université Carleton, a déclaré à CBC/Radio-Canada que la situation actuelle au Canada ne correspond pas au type d'urgence publique pour laquelle la loi a été conçue. Elle a déclaré être « honnêtement plutôt choquée de constater que le gouvernement du Canada continue de croire que cette situation répond à la définition permettant d'invoquer la loi », ajoutant être « vraiment inquiète à l'idée que l'on manipule les critères juridiques pour invoquer la loi fédérale la plus puissante dont nous disposons ».
    Si notre pays était gravement menacé, les provinces demanderaient certainement l'aide du gouvernement, mais les provinces ont dit au premier ministre qu'elles n'avaient pas besoin de cette loi et qu'elles avaient déjà réglé la situation liée aux manifestants en les écoutant et en discutant avec eux. Voici la question sur laquelle repose, selon moi, tout le débat: maintenant que les provinces ont réglé la situation par leurs propres moyens, la menace perçue que le gouvernement a jugé nécessaire de traiter existe‑t‑elle toujours et justifie‑t‑elle le recours à cette loi?

  (1345)  

    De plus, la deuxième condition, à savoir qu'il doit s'agir d'un concours de circonstances « auquel il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada », a été réfutée par le leadership dont ont fait preuve un grand nombre de premiers ministres provinciaux d'un bout à l'autre du Canada. Les provinces et leurs services de police n'ont pas eu besoin des pouvoirs extraordinaires accordés par la Loi sur les mesures d'urgence, car ils avaient déjà les pouvoirs nécessaires pour faire face à la situation. Il est malheureux que le premier ministre ait refusé de suivre la bonne gouvernance mise en œuvre par ces premiers ministres provinciaux.
    Il n'est donc pas étonnant que les Canadiens qui m'ont écrit et m'ont téléphoné, et qui ont écrit et téléphoné à tous les autres députés de la Chambre, considèrent que la mise en œuvre de cette loi ne vise pas à protéger le Canada, mais plutôt à protéger le premier ministre d'un échec politique.
    On a dit qu'une partie de la justification pour invoquer la loi était l'ingérence délibérée d'extrémistes étrangers dans notre démocratie, mais le gouvernement n'a pourtant fourni aucune preuve qui indique que des puissances ou des organisations étrangères soutiennent les manifestations qui ont lieu ici au Canada. En fait, lors d'une réunion de comité qui a eu lieu la semaine dernière, le sous-directeur du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, l'organisme national du renseignement financier, a déclaré qu'il n'y avait eu « aucune augmentation soudaine des opérations douteuses » et aucun signe que des groupes extrémistes effectuaient des transactions pour les manifestants.
    De plus, en invoquant cette loi, le gouvernement a notamment l'intention de recueillir et de divulguer des informations concernant les transactions financières de particuliers. Ces informations seront transmises à la GRC, au Service canadien du renseignement de sécurité ainsi qu'au Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, et elles serviront à geler des comptes sans passer par un processus judiciaire. J'ai commencé mon discours en parlant de cette situation.
    Il est très inquiétant que le gouvernement ne dise pas au Parlement s'il a consulté le commissaire à la protection de la vie privée au sujet de l'utilisation de ces informations. Lors d'une entrevue donnée à CTV, Kim Manchester, directeur général de l'entreprise de formation en renseignements financiers ManchesterCF, a émis un avertissement selon lequel marquer des comptes pourrait ruiner les finances des personnes ciblées et leur rendre plus difficile l'obtention de services financiers à l'avenir. Il a déclaré ceci: « C'est très difficile pour les gens quand les activités du gouvernement du Canada peuvent entraîner la débâcle financière de personnes liées aux manifestations et reconnues coupables par association, par directive, et non par voie judiciaire. »
    Au cours de la même entrevue, Vanessa Iafolla, consultante en criminalité, a indiqué que le recours à cette mesure était un « [écart] important par rapport aux processus démocratiques normaux auxquels on s'attend habituellement dans la société canadienne ».
    Cette mesure législative a été élaborée pour lutter contre les organisations terroristes et les syndicats transnationaux du crime organisé, et non les camionneurs canadiens.
     Mme Noa Mendelsohn Aviv, de l'Association canadienne des libertés civiles, s'inquiète du fait que la Loi sur les mesures d'urgence permet au gouvernement de créer de nouvelles dispositions législatives et de contourner la démocratie sous prétexte d'une urgence nationale, alors qu'il n'a fourni aucune preuve pour confirmer l'existence d'une urgence nationale, un critère pourtant impératif. L'Association canadienne des libertés civiles poursuit le gouvernement, car elle allègue qu'il a sérieusement empiété sur la Charte canadienne des droits et libertés.
    Dans le Maclean's du 14 février, Paul Wells a avancé quelques hypothèses:
    Je pense que la vraie raison derrière l'annonce d'aujourd'hui est venue [de la vice-première ministre], qui a affirmé que c'est essentiellement en raison du barrage du pont Ambassador, à Windsor. Malencontreusement, le pont n'est plus bloqué [...] En effet, selon la vice-première ministre, le Canada s'est battu bec et ongles pour protéger sa relation privilégiée avec les États‑Unis lors des négociations entourant l'ALENA, contestant les droits de douane imposés au titre de l'article 232, des droits qu'elle juge illégaux et injustifiés. Elle ne veut pas perdre des gains obtenus au moyen de si gros efforts. Elle sait que le monde entier à les yeux rivés sur le Canada et que nos emplois, notre prospérité et nos moyens de subsistance sont en jeu. Voilà la vraie raison qui motive le gouvernement à adopter la Loi sur les mesures d'urgence.
    Cette loi est prévue pour répondre à des menaces extrêmes envers le Canada, pas pour protéger notre économie.
    En 1978, on comptait approximativement 30 pays en état d'urgence. En 1986, ce nombre avait grimpé jusqu'à 70 pays. Puis, en 1996, 147 pays avaient instauré des mécanismes pour décréter l'état d'urgence. Cela dénote une tendance mondiale troublante à laquelle le Canada semble vouloir adhérer de manière douteuse.
    Ce n'est probablement pas un hasard si cette annonce historique est survenue à peine une heure après que le gouvernement eut défait de justesse la motion des conservateurs qui lui demandait de présenter, avant la fin du mois, un plan pour la levée des exigences fédérales liées à la vaccination. Le premier ministre a dû se rendre à l'évidence, puisque son propre caucus commençait à se révolter contre lui.
    Au lieu de prendre la voie diplomatique et de parler aux manifestants en employant les méthodes de communication qu'il avait utilisées pour leur lancer des injures, au lieu de calmer le jeu, de faire savoir aux personnes préoccupées qu'elles avaient été entendues et de présenter un plan pour la levée des exigences et des restrictions, comme le font plusieurs provinces canadiennes et plusieurs pays, il est resté sur sa position et il a sorti l'artillerie lourde. Il a recours aux pouvoirs prévus par la Loi sur les mesures d'urgence et crée ainsi un dangereux précédent.
    Le plus inquiétant dans tout cela, c'est qu'il y a, parmi les jeunes Canadiens qui n'ont pas de lien personnel avec la lutte contre le fascisme, le socialisme et le communisme, une perte de confiance et d'intérêt envers la liberté et la démocratie. Ces nobles idéaux ont été ternis, et cela contribue à ce qui se passe actuellement
    Pour terminer, j'offre aux députés la citation que voici: « Nous aurons le temps, plus tard, de réfléchir à toutes les leçons qu'on peut tirer de cette situation. » C'est ce que le premier ministre a dit à des journalistes lundi après-midi.
    Je dirais que les leçons en question existent déjà. Il n'est pas nécessaire de retourner bien loin dans l'histoire pour les trouver.

  (1350)  

    Madame la Présidente, le député affirme que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence n'est pas nécessaire et qu'on aurait pu choisir d'autres options législatives.
    J'aimerais savoir à quelles options vous pensez. Sans la Loi sur les mesures d'urgence, comment pourrait-on obtenir que des dépanneuses aident les policiers à remorquer les camions? Sans la Loi sur les mesures d'urgence, comment pourrait-on légalement empêcher des gens d'aller au centre-ville et de se joindre à l'attroupement?
    Un rappel au député — je ne vais pas m'empêcher de le faire, même s'il est question de la Loi sur les mesures d'urgence —: veuillez adresser vos questions à la présidence.
    Madame la Présidente, par votre entremise, je demande ceci au député d'en face: comment le gouvernement peut-il régler la situation sans recourir à la Loi sur les mesures d'urgence? Les arguments de l'opposition, aussi puissants soient-ils, ne sont pas assez forts pour remorquer un camion.
    Madame la Présidente, je suis attristé par le ton de cette question. Je m'entends bien avec le député. Nous siégeons au sein du même comité, et ce, depuis deux législatures consécutives.
    Je crois avoir présenté des arguments assez logiques pour expliquer pourquoi je vais voter contre. Je suis désolé de voir le député réagir ainsi. Je lui répondrai en lui demandant quels pouvoirs les policiers ont à ce moment précis qu'ils n'auraient pas pu utiliser avant. La situation aurait pu être réglée il y a des semaines. Il n'était pas nécessaire d'en arriver là.
    Comme je l'ai indiqué dans mon allocution, de nombreuses avenues auraient pu être envisagées, y compris un peu plus de sympathie de la part du premier ministre, qui aurait pu dire: « Nous vous avons entendus. Nous sommes à l'écoute. Nous avons un plan. » Au lieu de quoi, il n'a fait que...
    Nous poursuivons les questions et observations. La députée d'Edmonton Strathcona a la parole.
    Madame la Présidente, j'aimerais lire une citation.
     La liberté d'expression et le droit de manifester pacifiquement n'autorisent aucun Canadien à enfreindre la loi. Je demande [au premier ministre] d'appliquer la loi et d'ordonner à la GRC de mettre fin à ces blocages illégaux.
    Les députés pensent peut-être que cette citation est en lien avec le blocage illégal du centre‑ville d'Ottawa, mais en fait, il s'agit de propos tenus par un membre du Parti conservateur, le député de St. Albert—Edmonton, lorsqu'il a demandé que l'on mette fin aux blocages de février 2020.
    Je me demande pourquoi, selon le député, son parti s'oppose vivement à certains blocages, mais en appuie d'autres et va même jusqu'à s'en attribuer le mérite et à prendre des autoportraits devant.
    Madame la Présidente, encore une fois, je suis très déçu du ton de ces questions. Je pensais pourtant avoir présenté des arguments solides.
    Comme je l'ai dit dans mon discours et comme je l'ai répété dans ma réponse à la question précédente, la police avait déjà à sa disposition des outils qu'elle aurait pu utiliser pour mettre fin beaucoup plus tôt à cette situation. Encore là, la situation ne se serait pas ainsi envenimée si le premier ministre n'avait pas décidé de diviser davantage la population.
    Beaucoup de gens, de simples personnes ordinaires, se sentent exclus de la société en raison de ce qui se passe, que ce soit vrai ou non. Un brin de reconnaissance, de sympathie ou de compassion aurait probablement pu désamorcer suffisamment la situation pour que nous n'ayons pas besoin d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Madame la Présidente, au cours du débat, j'ai entendu quelques personnes mentionner que la mesure dont nous discutons serait celle qui s'appliquerait en temps de guerre.
    Je voudrais simplement préciser à l'intention des Canadiens qui sont peut-être à l'écoute que la Loi sur les mesures d’urgence est une mesure législative très bien rédigée. Je ne suis pas certaine que je vais voter en faveur de la déclaration, mais je trouve impressionnant qu'un groupe de députés des années 1980 aient réfléchi à différents types de situations d'urgence: il y a les sinistres, ce qui inclut l'urgence de santé publique et les pandémies, l'état d'urgence, ce qui est invoqué en ce moment, l'état de crise internationale et, enfin, l'état de guerre.
    Ce n'est pas ce que nous utiliserions en cas de guerre.
    Madame la Présidente, comme je l'ai mentionné dans la justification, les corps policiers locaux et provinciaux avaient déjà un certain nombre d'outils à leur disposition. Ces outils auraient d'abord dû être utilisés. Le fait que nous en soyons rendus là est décevant et s'explique par un manque de leadership.
    Tout ceci aurait pu être évité en grande partie, mais le premier ministre a choisi de diviser les Canadiens au lieu de les unir.

  (1355)  

    Madame la Présidente, j'interviens aujourd'hui pour parler à mes concitoyens canadiens de l'état actuel des choses au pays. Je tiens à exprimer mon inquiétude au sujet du manque de leadership de la part du gouvernement.
    Le premier ministre et le gouvernement qu'il dirige ont pris la décision sans précédent d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, qui succède à la Loi sur les mesures de guerre. C'est un aveu stupéfiant de défaite. En effet, la Loi sur les mesures d'urgence n'a jamais été invoquée depuis son entrée en vigueur en 1988. Je le répète, en 34 ans, le gouvernement fédéral n'a jamais jugé qu'il était essentiel d'utiliser cette loi pour régler une crise. Rien n'a été considéré comme une menace suffisante à la sécurité nationale pour justifier le recours aux pouvoirs dont nous sommes en train de débattre, ni le 11 septembre, ni la crise d'Oka en 1990, ni même le début de la pandémie de COVID‑19. La dernière fois qu'un gouvernement fédéral s'est donné des pouvoirs aussi vastes et illimités, c'était durant la crise d'Octobre en 1970 après que 200 bombes eurent explosé dans des zones occupées par des civils. Par ailleurs, plusieurs manifestations nationales ont entraîné le blocage d'infrastructures essentielles depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les mesures d'urgence. Cependant, aucune d'entre elles n'atteignait le seuil requis pour invoquer ces vastes pouvoirs, même si elles posaient des menaces concrètes semblables à notre sécurité nationale.
    Je pense que nous conviendrons tous que la violence, les menaces et les barrages ne sont jamais justifiés et ne devraient pas être autorisés, en particulier s’ils empiètent sur nos libertés civiles. Tous les ordres de gouvernement disposent d’outils pour gérer la crise actuelle, et il n’est pas nécessaire de recourir à une des lois les plus autoritaires dont nous disposons et qui donne un pouvoir considérable au gouvernement.
    Les barrages du pont Ambassador représentaient une menace immédiate pour des milliers d’emplois et une perte de milliards de dollars en commerce international. Pourtant, il était évident qu’en une seule journée, grâce à une ordonnance du tribunal et à une forte présence policière, le problème pouvait être réglé sans avoir recours à des mesures exceptionnelles, à un débat législatif ou à des pouvoirs gouvernementaux qui n’avaient jamais été utilisés auparavant. Ce fut la même chose pour d’autres barrages en Alberta et au Manitoba.
    Comme mes collègues l’ont récemment rappelé à la Chambre, le premier ministre a assuré aux Canadiens qu’il avait invoqué cette loi en dernier recours, en précisant qu’il avait envisagé non pas une, non pas deux, mais au moins trois solutions avant d’envisager celle-là. Lorsque nous avons demandé quelles avaient été les deux premières solutions envisagées par le gouvernement, le ministre de la Protection civile nous a dit que le gouvernement avait « travaillé avec des partenaires municipaux et provinciaux [...] afin qu’ils disposent des ressources et du soutien nécessaires », comme si ce n’était pas là une des responsabilités quotidiennes du gouvernement fédéral.
    Il est évident que les libéraux ne peuvent expliquer pourquoi ils croient nécessaire d'aller au-delà des recours juridiques traditionnels. Plutôt que d'envisager les mêmes lois qui ont déjà permis de lever des barrages partout au pays, le gouvernement croit que nous devrions appliquer des mesures de type militaire. Il s'est peut-être finalement rendu compte que son incompétence, son inaction et sa volonté de diviser avaient suscité la frustration des Canadiens. Les libéraux pensent peut-être que des mesures à grand déploiement les feront bien paraître.
    Les députés doivent savoir que ce moment sera inscrit dans les annales comme étant un chapitre sombre de notre histoire. Des mesures que le gouvernement ne peut justifier menacent les libertés protégées par la Charte que nous chérissons tous. Quel type de précédent cela crée-t-il lorsqu'un gouvernement utilise avec une telle nonchalance cette loi autoritaire contre ses citoyens? Qu'adviendra-t-il des manifestations à l'avenir? Les Canadiens doivent-ils craindre de verser des dons à des mouvements et à des organisations, étant donné que le gouvernement actuel croit qu'il peut rendre ces dons illégaux rétroactivement?

  (1400)  

    S'il advenait, Dieu nous en garde, de nous retrouver dans un autre conflit mondial, le gouvernement envisagerait-il d'appliquer les mêmes mesures que celles qu'il a prises pour juguler quelques semaines de manifestations perturbatrices? La presse internationale est outrée de cette décision du premier ministre canadien. Rien d'étonnant, puisqu'il ne démontre pas l'ombre d'un regret après avoir accusé des députés juifs de s'afficher à côté de croix gammées. Chacun sait que le premier ministre préfère injurier et diviser, plutôt que d'unir et d'inspirer. Cette loi n'aurait peut-être jamais été appliquée sans l'inaction du premier ministre et du gouvernement.
    Heureusement, les libéraux peuvent toujours compter sur les néo-démocrates pour alléger leurs responsabilités. Le NPD était auparavant un parti qui défendait les libertés civiles. La dernière fois que de telles mesures dramatiques ont été appliquées, c'est-à-dire lors de la crise d'Octobre, Tommy Douglas, le chef néo-démocrate de l'époque, s'est opposé à l'application de la Loi sur les mesures de guerre en la qualifiant d'excessive. De nos jours, le NPD fait tout ce qu'il peut pour imiter le mépris des libéraux pour la dissidence et pour l'opposition en préférant pointer du doigt au lieu d'assumer la responsabilité de l'instigation. La coalition entre les libéraux et les néo-démocrates est solide. Malheureusement pour les Canadiens, elle est assez solide pour donner au premier ministre et au Cabinet tous les pouvoirs qu'ils souhaitent.
    Il est tragique que nous en soyons rendus au point où nous en sommes. Les Canadiens veulent que les barrages soient levés. Les conservateurs veulent que, à tout le moins, les choses reviennent à la normale. Les Canadiens méritent un gouvernement fédéral capable de donner une réponse réfléchie à plusieurs enjeux critiques. L'inflation atteint des niveaux records. Le prix des maisons a doublé depuis 2015, et la situation de la santé mentale dans la population partout au pays exige notre attention. Malgré ces inquiétudes tout à fait fondées, le premier ministre et son gouvernement sont trop occupés à couvrir leurs échecs, à se défiler de leurs responsabilités et à rejeter le blâme sur tout le monde sauf eux. Les conservateurs veulent la fin des confinements et le retour à la vie normale. Nous voulons un leader national qui agira dans l'intérêt des Canadiens.
    Monsieur le Président, je n'aurais jamais cru voir le jour où le NPD défend la loi et l'ordre pendant que les conservateurs courbent le dos devant les manifestants qui enfreignent la loi à l'extérieur...
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis prêt à encaisser toutes les attaques possibles et imaginables, mais je ne veux plus jamais entendre le député de Kingston et les Îles dire du bien des néo-démocrates. Pourrait-il...
    Cela semble plutôt relever du débat.
    Le député de Kingston et les Îles a la parole.
    Monsieur le Président, comme je le disais, je trouve qu’il est tout à fait insolite d’être à la Chambre des communes et de voir les néo-démocrates défendre la loi et l’ordre pendant que les conservateurs courbent le dos devant ce qui se passe à l’extérieur. Même Jason Kenney, premier ministre de l’Alberta, dit que nous ne devrions jamais négocier avec ce genre d’individus.
    La députée peut-elle expliquer pourquoi, soudainement, elle ne croit pas que la loi et l’ordre devraient être maintenus?
    Monsieur le Président, je crois dans la loi et l’ordre, mais je crois aussi dans le Canada. J’ai été élevée selon l’idée qu’au Canada les gens s’assoient, négocient, se parlent, écoutent leurs concitoyens et tentent de régler les problèmes pacifiquement, pas en utilisant la Loi sur les mesures d’urgence.
    Uqaqtittiji, les conservateurs répandent leur idée selon laquelle il s’agit d’une manifestation en faveur de l’unité, de la paix et de la liberté contre la peur, incités en cela par des extrémistes étrangers. Ils l’ont fait en se tenant à côté de personnes portant des drapeaux confédérés et des croix gammées et terrorisant des femmes et des Autochtones.
    Il ne s’agit pas d’unité; il ne s’agit pas de paix; il ne s’agit pas de liberté. Il s’agit de violence, une violence menaçant la sécurité et la démocratie du Canada. Ce mépris qu’ils ont manifesté à l’égard des menaces à la sécurité — qu'ils continuent de défendre sur la Colline en ce moment même — est inacceptable.
    Que gagnent les conservateurs à répandre cette haine?

  (1405)  

    Monsieur le Président, je ne sais pas d'où la députée tire ses informations, mais c'est absolument faux. Les conservateurs adhèrent aux principes de la loi et de l'ordre. Nous avons du respect pour les habitants de nos circonscriptions, car nous les écoutons pour essayer de les comprendre. Peu importe que nous soyons en accord ou en désaccord avec leurs opinions, nous les écoutons pour essayer de trouver des compromis afin de résoudre les problèmes.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon honorable collègue de ce discours très passionné.
    Plus tôt aujourd'hui, je me suis fait poser une question par mon collègue de Hull—Aylmer, du côté des libéraux. Il me disait qu'il n'était pas absolument certain qu'on devrait utiliser cette loi, mais il y a plus de pour que de contre pour mettre ce décret en application.
    Ma question est simple: pour mettre en application une loi de cette envergure, ne devrions-nous pas être absolument certains que ce soit la bonne solution?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je pense que la seule façon de régler les problèmes est de s'asseoir, d'écouter et de discuter pour convenir d'une solution axée sur la paix et le respect. La Loi sur les mesures d'urgence n'est pas une nécessité. Elle divise les Canadiens. Nos ancêtres ont bâti le Canada sur des fondations de paix, pas de dissension.
    Monsieur le Président, je sais que la députée travaillait dans le secteur bancaire avant d'être élue dans cette enceinte en 2021. J'aimerais lui poser une question sur le règlement pris en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence qui oblige les institutions financières à cesser de faire affaire avec des personnes désignées.
    Vendredi, dans ma circonscription, deux succursales bancaires ont manqué de liquidités parce des Canadiens ont eu peur que le gouvernement saisisse leurs actifs en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence. Des citoyens se sont présentés à leur institution financière et ils ont retiré leur argent. En tant qu'ancienne administratrice d'une succursale bancaire, comment vous y prendriez-vous pour gérer une telle situation?
    Comme je n'ai jamais travaillé dans le domaine bancaire, je rappelle au député de poser ses questions par l'entremise de la présidence. Je suis persuadé que tous les députés comprennent cela.
    La députée de King—Vaughan a la parole.
    Monsieur le Président, avec plus de 30 ans d'expérience dans le domaine bancaire, je répondrai à mon collègue qu'une telle décision va semer la pagaille. Des succursales vont manquer d'argent. Les criminels vont attendre les gens à leur sortie des banques. Cela va provoquer des bouleversements. Une telle chose ne peut se produire, car elle va effrayer tous les Canadiens.
    Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député d'Etobicoke-Centre.
    C'est avec une grande tristesse que je prends la parole au sujet de la Loi sur les mesures d'urgence, car personne à la Chambre, en particulier le premier ministre, ne voulait y recourir. On n'y aurait pas eu recours si cela n'avait pas été absolument nécessaire. Songeons à toutes les barricades érigées la fin de semaine dernière au pont Ambassador, à Coutts, en Alberta, et à Emerson, et aux répercussions qu'elles ont eues sur le commerce. En tant que présidente du comité du commerce international, je sais que ces choses sont très importantes pour nous tous. Les barricades empêchaient les biens, les services et les gens de traverser la frontière.
    Nous savons que cela coûte 400 millions de dollars par jour au pont Ambassador, sans compter tous les problèmes personnels énumérés plus tôt par mon collègue de Windsor-Ouest: des gens qui ne peuvent se rendre à des rendez-vous médicaux, ou encore des infirmières qui ne peuvent traverser la frontière pour venir nous aider avec la pandémie. Cette situation a d'énormes répercussions économiques, peu importe sous quel angle on l'aborde, et c'est sans parler de ce qui se passe ici, à Ottawa.
    J'aimerais que mes collègues conservateurs me disent si, après presque quatre semaines de siège chez eux, ils se seraient réjouis à l'idée que l'on ait à faire l'assermentation d'un grand nombre de policiers appelés à intervenir en situation d'urgence, ce qui aurait nécessité cinq à six jours de plus? Ils ne l'auraient pas fait de bonne grâce, et nous n'avions plus le choix d'agir. Les répercussions économiques sont énormes, il était donc primordial d'agir pour veiller à rétablir l'ordre public.
    Ce qui se passe n'est pas seulement préoccupant à l'échelle locale, mais bien à l'échelle mondiale. De ce que je peux voir, le nouveau moyen de perturber les gouvernements qu'ont trouvé les gens, dont certains sont issus de l'extrême droite, est de réunir des camions, des remorques et des tracteurs, pour ensuite de convaincre beaucoup de monde que c'est strictement à propos des exigences en matière de vaccination. Cette manifestation n'a rien à voir avec ces exigences ou avec les vaccins. Elle vise uniquement à renverser le gouvernement et à perturber la démocratie. Quand il n'y a ni démocratie ni ordre public, que nous reste-t-il? Ce qui se passe aujourd'hui à l'extérieur du Parlement, en particulier, c'est le rétablissement de l'ordre public. On a prié les gens de rentrer chez eux. Le blocage illégal n'était pas une manifestation ordinaire; c'était bien plus grave.
    Le chef de police par intérim, Steve Bell, trois autres anciens chefs de police d'Ottawa et l'ancien chef de police de London ont tous dit que la Loi sur les mesures d'urgence, hélas, devait absolument être appliquée avant que la violence ne s'aggrave. Sans cette loi, la tâche serait beaucoup plus difficile. Je sais à quoi ressemblait la situation ces dernières fins de semaine. Je ne peux qu'imaginer la tournure qu'auraient prise les choses cette fin de semaine, sachant que des centaines de personnes supplémentaires venaient ici chaque fin de semaine pour créer plus de chaos et de perturbations.
    Parlons des enfants. Au pied des marches de la porte d'entrée de l'édifice de l'Ouest, il y a un château gonflable et des enfants qui sautent à la corde. On veut ainsi donner l'impression qu'il s'agit d'une petite manifestation ludique et inoffensive. En réalité, c'était un blocage illégal qui utilisait les enfants comme boucliers. Je dirais à tous les participants que ce n'est pas de la démocratie lorsque des enfants sont en cause.
    Des voix: Oh, oh!

  (1410)  

    Je suis désolé d'interrompre la députée. Elle est près de moi, et j'aimerais pouvoir entendre tout ce qu'elle dit. Je tiens à ce que les députés respectent le droit de parole de chacun à la Chambre des communes.
    Nous avons beaucoup de temps pour poser des questions et faire des observations pendant cette partie du débat. Je veux m'assurer de pouvoir entendre les intervenants. Tâchons de faire moins de bruit.
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous avez su, avec brio, maintenir le calme et prévenir les débordements. Vous méritez nos plus vives félicitations pour votre travail aujourd'hui.
    Même s'il n'y a pas matière à invoquer le Règlement, je vous remercie de votre commentaire. Je veux m'assurer que tout se passe rondement.
    La députée de Humber River—Black Creek a la parole.
    Monsieur le Président, nous avons parlé de la nécessité de passer à travers cette pandémie et des difficultés que doivent surmonter de nombreuses entreprises. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et laisser la situation dégénérer.
    Michael Kempa, professeur de droit et criminologue à Ottawa, a répondu il y a quelques minutes, à une question sur la nécessité de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence. M. Kempa était catégorique. Sans la Loi sur les mesures d'urgence, il aurait fallu au moins cinq ou six jours de plus pour obtenir d'autres services de police en renfort et les assermenter. Nous aurions vu ces activités illégales se perpétuer au pied de la Colline du Parlement et continuer à perturber les rues avoisinantes pendant encore cinq ou six jours.
    Je demande aux députés de penser aux répercussions de ces événements sur notre économie. Nate's Deli est un restaurant situé à l'angle Sparks et O'Connor, où nous allons souvent sur l'heure du midi. Les employés m'ont dit qu'ils étaient arrivés tout juste à tenir le coup jusqu'à la levée des mesures de confinement. Ce restaurant est fermé depuis quatre semaines. Pourra-t-il rouvrir ses portes et survivre?
    Je pense à Good Food Inc., une entreprise située près de ma circonscription, qui appartient à une jeune famille. Le président, Dan Simile, m'a téléphoné la semaine dernière pour me dire qu'il n'arrivait pas à trouver un camion pour livrer des boîtes de l'autre côté de la frontière. Il était obligé de mettre à pied tout son personnel.
    Ce genre de choses perturbe considérablement l'économie. Elles perturbent également la vie des habitants de la région d'Ottawa en particulier. De nombreux employés n'ont pas pu se rendre au travail, y compris sur la Colline du Parlement, sans se faire insulter et subir des abus. Mon propre personnel a été victime d'abus de la part de certains manifestants.
    Nous avons la responsabilité d'agir. Les commerces, comme les épiceries du centre-ville, souffrent. L'une d'entre elles a dû fermer parce que des manifestants non masqués entraient dans le commerce sans le moindre respect pour les autres. Ce comportement dérangeait tout le monde, alors la décision a été prise de fermer.
    La situation dure depuis beaucoup trop longtemps. Oui, je sais que ce n'est pas facile. J'ai reçu de nombreux appels de personnes de ma circonscription qui ne comprennent pas tout à fait ce qui se passe, mais elles ne vivent pas ici. Elles ne voient pas ce qui se passe tous les jours et elles ne réalisent pas l'ampleur des répercussions des barrages. Il est impératif que nous prenions les mesures nécessaires. Nous devons protéger le pays et les citoyens, sans compter l'économie.
    Qu'un banquier américain qualifie le Canada de république de bananes est inacceptable. C'est carrément insultant. Je suis fière de mon pays et je suis fière de ce que nous faisons. Nous faisons le nécessaire pour avancer.
    Nous tâchons d'éviter les arguments partisans. Si les députés d'en face choisissaient de se joindre à nous, de faire front commun et d'appuyer ce décret, celui-ci ne serait en vigueur que pendant un très bref laps de temps. Il fera l'objet d'un examen par un comité parlementaire et il sera suivi d'une enquête en bonne et due forme. Les choses ont dérapé dès le départ, mais une fois les manifestants bien installés, c'était très difficile de les faire bouger.
    J'aimerais que nous demeurions aussi unis que possible et que nous évitions de mélanger les gens que nous représentons et de les effrayer en parlant de la Loi sur les mesures de guerre. Quel que soit notre parti, tâchons d'unir nos efforts et de fournir de l'information exacte aux Canadiens.

  (1415)  

    Monsieur le Président, ma collègue a dit que les choses ont dérapé dès le départ. De l'avis des nombreux Canadiens qui en ont contre les obligations liées aux vaccins, les choses ont commencé à déraper quand le premier ministre a déclaré qu'une bonne partie d'entre eux sont des misogynes et des racistes.
    Le premier ministre n'a jamais retiré ses propos et il ne s'est jamais excusé. J'offre aujourd'hui l'occasion à ma collègue de tendre un rameau d'olivier à ces gens. Estime-t-elle elle aussi que bon nombre d'entre eux sont misogynes et racistes?
    Monsieur le Président, je pense qu'il y a énormément de gens gentils dehors qui manifestent parce que la manifestation illégale leur permet d'exprimer deux ans de frustrations. J'aurais pu participer à cette manifestation tout aussi bien qu'eux. Nous en avons tous assez de la pandémie. Nous avons tous traversé une période difficile, mais nous devons faire ce qui s'impose, c'est-à-dire nous respecter les uns les autres.
    Il y a des extrémistes qui ne cherchent qu'à semer le trouble et c'est très injuste de voir des pancartes qui disent « À bas le premier ministre » et d'entendre le genre de menaces que de nombreux Canadiens ont proférées contre lui. Je ne voudrais pas qu'un premier ministre, quel que soit son parti, ait à subir ce que lui et sa famille vivent.

  (1420)  

[Français]

    Monsieur le Président, dans son discours, ma collègue a beaucoup fait état de la gravité de la situation pour soutenir l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Elle a décrit beaucoup d'éléments qui sont effectivement très graves. Cela dit, je n'aborderai peut‑être pas certains sujets, comme le fait qu'une entreprise ne peut pas se faire livrer de biscuits.
    Ma question est la suivante: pour ma collègue, le critère qui permet l'application de la Loi est-il que la situation soit grave, ou est‑ce plutôt qu'il n'y ait absolument aucune autre solution qui ait fonctionné?

[Traduction]

    Monsieur le Président, si nous devions attendre encore cinq ou six jours avant de pouvoir commencer à mettre fin à la manifestation illégale et à démanteler le blocage illégal, quel genre de dommage cela continuerait-il de causer à la réputation du Canada?
    Beaucoup de petites entreprises livrent des biscuits ou d'autres choses. Ce sont des entreprises précieuses qui emploient souvent cinq, six, voire une dizaine de personnes. Elles subissaient les contrecoups. Je ne veux pas que ces entreprises fassent faillite.
    Monsieur le Président, comme bien des députés, je suis très préoccupée par l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. C'est pourquoi nous sommes ici. Il s'agit du débat auquel nous participons.
    Comme bien d'autres personnes dans cette enceinte, je me demande comment nous en sommes arrivés là et quels échecs tous les ordres de gouvernement ont dû essuyer pour qu'on en arrive ici. J'aimerais que le gouvernement et la députée nous promettent qu'une enquête entièrement transparente, publique et indépendante sera menée pour voir ce qui s'est mal passé au cours des trois dernières semaines.
    La députée peut-elle garantir que le gouvernement mènera une telle enquête dès que possible?
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son soutien et de son importante question. Cette situation nous concerne tous, peu importe notre parti. Il s'agit d'une mesure législative que nous défendons et appuyons. Nous voulons tous nous assurer de l'application régulière de la loi, ce qui signifie qu’il y aura une enquête complète sur ce qui s’est produit et ce qui n'a pas fonctionné.
    Il est clair que, dès le début, on a permis à ces gens de bien s’installer comme ils l’ont fait. Ils ont fini par s'incruster et auraient pu rester là encore six mois. Nous ne pouvions pas le leur permettre. Je peux assurer à la députée que le gouvernement et moi appuyons cette idée et que nous suivrons la procédure établie dans cette loi.
    Monsieur le Président, je remercie mon amie de Humber River—Black Creek de son discours. Je sais qu’elle a ardemment défendu de nombreuses causes au Parlement pendant sa carrière, en particulier l’organisation Canada-Taïwan, et je l’en félicite. Elle défend maintenant le recours à la Loi sur les mesures d’urgence. La réalité, comme elle l’a indiqué, c’est que cette loi s’applique à tout le Canada et dans tous les domaines.
    La députée défendrait-elle la saisie des véhicules et le gel des comptes bancaires des écoterroristes financés par des intérêts étrangers qui sont responsables de la violence, de la destruction et des millions de dollars de dommages à l'emplacement du projet Coastal GasLink? J’espère qu’elle et le gouvernement défendraient aussi cette cause en utilisant les pouvoirs de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Monsieur le Président, l'une des choses qui continuent de me préoccuper, c'est le niveau de violence qu'on observe partout au pays à divers égards et pour différentes raisons. C'est peut-être en partie attribuable à la pandémie et au stress qu'elle fait subir à la population. C'est ce que j'ose espérer. Au fur et à mesure que nous sortirons de cette pandémie, les gens se sentiront mieux. Ils seront plus calmes et ils trouveront une façon plus raisonnable de résoudre les problèmes.
    Monsieur le Président, j'aimerais d'abord raconter une histoire. L'une des plus vieilles photos dont je me souviens de moi et de mes grands-parents date du milieu ou de la fin des années 1980. Pour mettre les choses en perspective, je précise que mes grands-parents ont quitté l'Ukraine pour immigrer au Canada après la Seconde Guerre mondiale, et ma grand-mère a survécu à l'Holodomor, le génocide par la famine commis en 1932 et 1933, lorsque Joseph Staline a fermé les frontières de l'Ukraine et confisqué toute la nourriture afin d'éliminer des millions d'Ukrainiens parce qu'ils se sont opposés à son régime. Mon grand-père a risqué sa vie à maintes reprises parce qu'il militait pacifiquement pour une Ukraine libre et démocratique.
    Sur cette photo que j'ai mentionnée, j'ai environ 9 ou 10 ans, et je me tiens devant l'édifice de l'Assemblée législative de l'Ontario, qu'on appelle Queen's Park, avec mes grands-parents. À l'époque, nous demandions au Canada et à la communauté internationale de défendre les habitants de l'Ukraine et d'autres pays qui avaient été conquis par l'Union soviétique, car on violait leurs droits. Des gens pouvaient être arrêtés parce qu'ils ne parlaient pas russe, parce qu'ils avaient des opinions politiques différentes ou parce qu'ils soutenaient que l'Ukraine devait être démocratique ou libre.
    Ce jour‑là, avec mes grands-parents devant Queen's Park, nous avons manifesté pour la liberté de millions de personnes. Nous l'avons fait à maintes reprises par la suite, et je l'ai fait moi-même à bien des occasions au cours de ma vie. Malgré les horreurs que ma grand-mère a vécues, malgré les horreurs que la famille de mon grand-père vivait encore là‑bas, et malgré la douleur, le traumatisme et la colère, ce jour‑là, et bien d'autres jours par la suite, mes grands-parents ont manifesté pour la liberté, mais ils l'ont toujours fait dans le respect des libertés des autres Canadiens.
    J'en ai assez des restrictions imposées à cause de la COVID, tout comme bon nombre de mes concitoyens, qui l'expriment d'ailleurs de nombreuses façons. Certains m'ont envoyé des lettres ou des courriels; d'autres m'ont appelé, et j'ai parlé avec eux. Certains d'entre eux sont allés manifester. J'ai toujours pris le temps de les écouter et d'essayer de comprendre leur point de vue. Souvent, les électeurs m'aident à mieux comprendre les problèmes. Ils proposent des solutions et suggèrent de meilleures façons de faire pour le gouvernement, et je m'en réjouis. C'est ce qui fait de moi un meilleur représentant, et c'est ainsi que nous améliorons notre pays, mais ces électeurs dont je parle, tout comme mes grands-parents, ont exprimé leurs préoccupations tout en respectant la liberté des autres.
    Tous les Canadiens ont le droit de manifester pacifiquement. Nous avons le droit d'être entendus, d'exprimer notre point de vue et de dire ce que bon nous semble, pourvu que ce soit dans le respect de la loi, car la loi protège aussi les libertés d'autrui. Ces barrages ne respectent pas les droits et libertés d'autrui. Ils sont illégaux et causent du tort à bien des Canadiens et de bien des façons.
    Ils ont menacé la sécurité des Canadiens et le bien-être de nos collectivités. Tout au long de ce débat, nous avons entendu des exemples des effets qu'ils ont eus sur les gens d'Ottawa. Ils ont grandement nui à notre économie et aux sources de revenu de tant de Canadiens, surtout les barrages aux passages frontaliers. Ils risquent de peser sur notre économie dans les années à venir, car ils auront ébranlé la confiance de nos partenaires commerciaux, que nous essayons de convaincre que le Canada est un bon endroit pour investir. Le Canada est un endroit idéal pour le commerce, mais nos frontières sont bloquées et les échanges commerciaux sont impossibles. Ils ont sapé la primauté du droit et risquent de miner la confiance envers nos lois et nos institutions, qui sont conçues pour protéger nos droits et nos libertés.
    Ces barrages et occupations ont des conséquences énormes pour notre économie et notre démocratie, et c'est pourquoi il faut y mettre fin.
    Je crois que les pouvoirs accordés par la Loi sur les mesures d'urgence sont nécessaires pour mettre fin aux barrages et je souhaite vous dire pourquoi. Il est on ne peut plus clair que nous n'avons pas besoin d'être des spécialistes de l'application de la loi pour savoir que les services de police locaux n'ont pas été en mesure d'appliquer la loi ni d'éliminer les barrages, en particulier ici, à Ottawa. C'est très clair.
    Parlons de ce que fait la Loi sur les mesures d'urgence, puis des raisons pour lesquelles elle est selon moi nécessaire. Que fait réellement la Loi sur les mesures d'urgence? Il ne s'agit pas de la Loi sur les mesures de guerre. On ne fait pas appel à l'armée. Ce serait induire les Canadiens en erreur que de prétendre le contraire. La Loi sur les mesures d'urgence permet en fait à la GRC d'appliquer les règlements municipaux et locaux, ce qu'elle ne pouvait faire auparavant. Elle permet au gouvernement fédéral de mobiliser les services essentiels, y compris de réquisitionner des remorqueuses. C'est ce dont mes collègues ont parlé. La loi donne de nouveaux pouvoirs aux services de police afin d'interdire les barrages et de veiller à ce que les infrastructures essentielles demeurent ouvertes, par exemple les postes frontaliers. Elle donne le pouvoir de mettre un terme au financement des activités illégales, telles que les barrages.
    En vertu de ces pouvoirs, le gouvernement prend un certain nombre de mesures. Il émet des directives permettant de geler les comptes servant au financement des barrages et de résilier les polices d'assurance automobile.

  (1425)  

    La Loi élargit la portée des règles de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes afin qu'elles englobent les plateformes de financement participatif. À l'origine, les blocus étaient financés à l'aide de moyens conventionnels, et on s'est ensuite tourné vers les cryptomonnaies. Pourquoi? Parce qu'il est plus difficile de faire un suivi. Le gouvernement tient à pouvoir faire un suivi du financement et y mettre fin. La Loi permet d'autoriser les banques à cesser d'offrir des services financiers à une personne qui s'en sert pour financer des activités illégales.
    C'est le genre de choses prévues dans la Loi sur les mesures d'urgence.
    Des experts ont dit qu'il est essentiel de mettre fin aux blocages. Il faut absolument que la GRC puisse appliquer la législation locale, et la Loi permet à de nombreux organismes d'application de la loi de se rassembler très rapidement, comme nous le voyons actuellement dans les rues d'Ottawa.
    La Loi permet de forcer des conducteurs de dépanneuse à remorquer des véhicules. C'est ce que nous devons être en mesure de faire pour enlever ces barrages, et c'était impossible avant.
    Elle donne le pouvoir de maintenir certaines infrastructures ouvertes, comme des postes frontaliers, et de faire en sorte que les personnes à l'origine des blocages savent qu'elles s'exposent à des sanctions. Il est important qu'elles sachent que leurs comptes seront bloqués, qu'elles feront face à des sanctions et que leur comportement illégal aura des conséquences.
    Il s'agit d'une mesure importante pour appliquer la loi, mettre fin aux blocages et stopper l'afflux de fonds destinés à soutenir ceux-ci.
    Toutes ces choses sont prévues dans la Loi sur les mesures d'urgence. C'est à cela qu'elle sert. Voilà les étapes précises.
    Il ne fait aucun doute que les mesures que je viens de mentionner aident à débloquer les postes frontaliers et le centre-ville d'Ottawa. Nul besoin de me croire sur parole. Le chef du Service de police d'Ottawa, M. Bell, ainsi que de multiples chefs de police et experts en sécurité ont répété maintes fois aujourd'hui et au cours des derniers jours que nous serions incapables de mettre fin à ces blocages sans les mesures prévues dans la Loi sur les mesures d'urgence. Il est évident que les pouvoirs conférés par cette dernière sont nécessaires pour appliquer la loi, mettre fin aux blocages et protéger les libertés des Canadiens.
    Certains estiment que c'est excessif, qu'il s'agit de la Loi sur les mesures de guerre. Mettons les choses au clair. Cela n'a rien à voir avec les forces armées. En fait, on ne peut invoquer cette loi pour faire intervenir les forces armées. Pour ce faire, il faudrait invoquer une loi entièrement distincte appelée Loi sur la défense nationale. C'est le premier point que je tenais à souligner.
    Ensuite, la déclaration a une durée limitée. Elle vise une période de 30 jours, et je sais que le gouvernement aimerait vraiment pouvoir cesser d'y avoir recours encore plus tôt. La portée de ces mesures est circonscrite sur le plan géographique. Des infrastructures précises sont ciblées. Il s'agit d'endroits précis que nous voulons protéger, et l'application de la Loi doit toujours se faire dans le respect de la Charte canadienne des droits et libertés. On ne peut pas faire valoir qu'il y a violation des droits et libertés des gens si la Charte l'emporte sur la Loi. Toutes les mesures qui sont prises au titre de la Loi doivent respecter la Charte, laquelle garantit et protège nos libertés et nos droits. La Loi y est conforme. Nos droits sont protégés.
    Nous avons le présent débat au Parlement parce qu'il est exigé par la Loi. Il y a donc ce mécanisme de reddition de comptes. Un comité parlementaire sera créé pour assurer une surveillance. Lorsque les mesures expireront, la Loi exige une enquête publique sur son invocation. Il y a beaucoup de mesures de transparence et de reddition de comptes afin que les Canadiens et les députés puissent évaluer la mise en œuvre de la Loi et veiller à ce qu'elle soit appliquée pour les bonnes raisons et de la bonne façon.
    J'ai commencé mon discours en parlant de mes grands-parents et du fait qu'ils m'ont appris à défendre la liberté tout en respectant toujours celle d'autrui, en respectant les libertés des Canadiens. Ce n'est pas ce qui s'est passé avec les barrages. Ils ont menacé la sécurité des Canadiens et le bien-être des collectivités. Ils ont nui énormément à l'économie, qui a perdu des centaines de millions de dollars chaque jour, et au gagne-pain des Canadiens. Des gens ont perdu leur emploi. Ils ont perdu leur entreprise. Ces barrages risquent d'affecter l'économie au cours des prochaines années en minant la confiance de nos partenaires commerciaux, surtout les États‑Unis. Ils ont miné le principe de la primauté du droit. Ils risquent de saper la confiance dans nos lois et nos institutions, qui ont pour but de protéger nos libertés et nos droits. Ces barrages et ces occupations ne respectent pas les libertés des Canadiens.
    Dans ce cas-ci, j'appuie le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Nous ne pouvons pas permettre à ces barrages illégaux et dangereux de se poursuivre. À mon avis, il est nécessaire d'avoir recours à cette loi pour assurer la sécurité des Canadiens, protéger l'économie à court et à long terme et rétablir l'ordre public.
    La mesure est limitée dans le temps, et sa portée est proportionnelle à la situation. De plus, elle est soumise à la surveillance des députés de tous les partis, qui peuvent demander des comptes au gouvernement.
    Comme l'auraient dit mon grand-père et ma grand-mère s'ils étaient ici, c'est ce qu'il faut faire pour protéger l'économie, notre démocratie et la liberté.

  (1430)  

    Monsieur le Président, cela nous ramène à une question fondamentale, soit que le critère pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence est qu'aucune autre loi au Canada ne pourrait permettre d'intervenir efficacement dans une situation comme celle-ci.
    Le député en a parlé brièvement. Il a dit que la police d'Ottawa n'était pas en mesure de gérer la situation. Mais, tout compte fait, c'est le manque de ressources qui était en cause, et non la loi elle-même.
    Des experts ont dit que le Code criminel du Canada confère précisément les pouvoirs dont la police a besoin pour gérer la situation.
    À la lumière de ce qui précède, pourquoi le député pense-t-il qu'on satisfait au critère pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?

  (1435)  

    Monsieur le Président, la Loi sur les mesures d'urgence a joué un rôle essentiel dans la mise en œuvre de l'opération en cours à Ottawa aujourd'hui et, franchement, dans le démantèlement des barrages aux postes frontaliers dans les derniers jours. C'est que la Loi sur les mesures d'urgence prévoit des mécanismes qui confèrent à la police des pouvoirs qu'elle n'avait pas, comme celui de suspendre le financement des barrages; on peut ainsi envoyer le message clair aux personnes qui entravent les postes frontaliers ou la ville d'Ottawa que leurs comptes peuvent être gelés, en plus de s'assurer que la GRC a le pouvoir d'appliquer les lois locales. Autrement, nous n'aurions pas pu fournir à temps et en nombres nécessaires les ressources dont parle le député pour lever ces barrages. La Loi sur les mesures d'urgence est utile à Ottawa et aux postes frontaliers.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours, qui était très beau et très senti. Il nous a fait part de trucs assez personnels et je l'en remercie.
    Par contre, les images de l'opération policière qui se déroule sous nos yeux depuis hier matin sur Wellington, que nous pouvons voir à la télévision, me rappellent beaucoup les images que je voyais, la fin de semaine dernière, des événements au pont Ambassador. Là-bas, les policiers ont été en mesure de contrôler la situation sans la Loi sur les mesures d'urgence.
    Nous sommes très réticents devant le recours à cette loi, parce que nous avons peur que cela crée un dangereux précédent. Le gouvernement aurait pu sortir plusieurs outils de son coffre avant d'en arriver à cette mesure de dernier recours.
    J'aimerais savoir si mon collègue craint que cela crée un dangereux précédent.
    Monsieur le Président, je remercie la collègue de sa question.
    Premièrement, je dirais que je ne suis pas inquiet de la création d'un précédent, parce que la Loi, comme elle est rédigée, s'assure que les députés et les Canadiens ont un moyen d'évaluer comment la Loi a été utilisée. Il y a des protections dans la Loi pour s'assurer qu'elle n'est pas utilisée dans des cas où ce n'est pas nécessaire.
    Deuxièmement, mis à part la situation à Windsor, dans d'autres cas d'occupation survenus à la frontière, on a vu que la Loi avait aidé la police à y mettre fin, notamment en coupant les sources de revenus.

[Traduction]

    Monsieur le Président, avant de commencer, je tiens à remercier tous ceux qui travaillent à la Chambre de nous permettre de faire notre travail comme député.
    Je remercie mon collègue de son intervention. Je sais qu'il est très difficile de parler, en particulier, de drames familiaux, alors je tiens à saluer son geste.
    Je veux parler de l'extrémisme. Nous savons que des gens en arrachaient avant la pandémie. Nous savons aussi que depuis la pandémie, ils en arrachent encore plus et se sentent désespérés et marginalisés. Lorsqu'on ne prend pas soin des gens, on alimente la montée des mouvements extrémistes et antidémocratiques.
    J'aimerais savoir si le député est d'accord avec moi pour dire que les Canadiens ont besoin de plus d'aide pour éviter la montée de ces mouvements extrémistes.
    Monsieur le Président, je remercie la députée de ses bons mots.
    Nous avons accompli un travail colossal, mais il reste beaucoup à faire. Nous avons des députés ici aujourd'hui qui ont souvent mené la charge. De nombreux députés ont travaillé très fort pour contrer l'extrémisme au pays, et je me réjouis à l'idée de travailler avec eux et les députés de tous les partis pour poursuivre nos efforts.
    Monsieur le Président, je ne pense pas avoir déjà désiré aussi ardemment participer à un débat de la Chambre qu'à ce débat sur l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Je vais commencer par apporter certaines précisions pour les gens qui nous écoutent, notamment mes concitoyens. Ils voudront peut-être connaître ma position sur un certain nombre d'enjeux qui ne peuvent être dissociés du débat actuel.
    Je suis fier d'appartenir à un parti qui a toujours défendu la loi et l'ordre. À aucun moment n'ai‑je toléré, encouragé ou excusé des comportements illégaux. J'ai été révolté par les barrages frontaliers qui ont immédiatement nui à l'économie et remis en question la compétence fondamentale du Canada à titre de pays souverain capable de contrôler et de protéger ses frontières. J'ai été horrifié par l'attaque violente menée contre des travailleurs du gazoduc de Coastal GasLink, il y a deux jours, et qui a fait des blessés parmi les policiers, qui a terrorisé des travailleurs et qui a causé des millions de dollars en dégâts matériels, sans que le gouvernement fédéral, ni la presse d'ailleurs, ne dise quoi que ce soit.
    J'ai été élu en proposant un programme qui allait rendre illégal le fait de bloquer des infrastructures essentielles comme les autoroutes, les chemins de fer, les ports, les pipelines et les postes frontaliers. Je le maintiens. Je crois en des mesures de santé publique prudentes et raisonnables, surtout en cas de pandémie, mais je suis contre les obligations inflexibles. Aujourd'hui, à la Chambre des communes, je m'oppose au recours à la Loi sur les mesures d'urgence et au décret que le gouvernement a pris en vertu de cette loi. Je m'oppose au recours à cette loi parce que la situation ne répond pas aux critères établis par la loi, parce que cela crée un terrible précédent pour les gouvernements futurs et parce qu'on ne peut pas avoir la certitude que le gouvernement actuel en particulier n'abusera pas des pouvoirs qu'il s'octroierait.
    La première raison est simple. La situation actuelle ne répond manifestement pas aux critères énoncés dans la loi. Le gouvernement a déclaré l'état d'urgence. La loi elle-même définit l'état d'urgence comme suit:
    Situation de crise causée par des menaces envers la sécurité du Canada d’une gravité telle qu’elle constitue une situation de crise nationale.
    Il a toujours été entendu que cette définition correspondait à la guerre, à la violence meurtrière généralisée, à l'insurrection ou aux menaces contre la souveraineté du Canada.
    Quelle était la situation lorsque le décret est intervenu lundi? Bien sûr, il y avait eu des barrages à la frontière et des rues avaient été partiellement bloquées dans les environs de la Cité parlementaire ici, à Ottawa. Cependant, au moment où le décret a été prononcé, les forces policières avaient déjà réussi à rétablir l'ordre à la frontière. Des arrestations avaient eu lieu et des accusations graves avaient déjà été portées à Coutts, alors qu'une partie des manifestants avaient déjà quitté les lieux de leur propre chef. Le pont Ambassador avait également déjà été libéré de façon pacifique. Je veux d'ailleurs prendre un moment pour féliciter les services de police qui ont réussi à mettre fin à ces barrages sans que personne ne soit blessé, sans violence et sans qu'il n'y ait de bris aux propriétés en se servant des pouvoirs qui leur sont déjà accordés et de techniques policières solides.
    Comme les barrages à la frontière ont pu être levés sans les pouvoirs supplémentaires qu'accorde la Loi sur les mesures d'urgence et qu'il ne restait que la situation au centre-ville d'Ottawa à régler, est-ce que la situation actuelle correspond aux critères requis pour invoquer l'état d'urgence national? Il faut bien me comprendre. Des lois ont été enfreintes et les gens qui vivent et qui travaillent à Ottawa ont vécu toutes sortes de problèmes liés à la circulation automobile, au bruit et aux incidents de harcèlement qui ont été rapportés. Cependant, s'agit-il d'une situation d'urgence nationale, d'une menace pour la sécurité du Canada qui ne pouvait pas être endiguée au moyen des lois en place et des techniques policières conventionnelles?
    Je suis arrivé à Ottawa le même jour que le convoi. J'ai été en ville tous les jours depuis, sauf un. Je me suis promené près des camions et des manifestants tous les jours lorsque je me déplaçais pour aller de mon appartement au Parlement ou à mon bureau qui se trouve de l'autre côté de la rue. Il est évident que des lois étaient enfreintes, mais je n'ai pas vu d'urgence nationale. Peut-être y avait-il une situation d'urgence dans le centre-ville d'Ottawa, mais une situation d'urgence nationale est une situation où 38 millions de Canadiens sont menacés. Erin Weir, un ancien député, a résumé la situation assez justement lorsqu'il a affirmé que le seul élément de ces manifestations qui pouvait être considéré comme une urgence nationale était le barrage à Windsor. Or, la police a dégagé le pont dimanche soir sans avoir besoin de la Loi sur les mesures d'urgence.

  (1440)  

    La deuxième raison pour laquelle je m'oppose à l'invocation de la Loi sur les mesures urgences est le terrible précédent que cela créerait, ou que cela a créé, devrais-je dire. La Loi existe depuis 1988 et elle n'avait jamais été invoquée jusqu'à maintenant. Il y a eu de nombreuses menaces à la sécurité publique depuis, mais aucun gouvernement n'a jamais eu recours aux pouvoirs prévus par la Loi; pas pendant la crise d'Oka, pas après le 11 septembre 2001, pas pendant les barrages dangereux qui ont paralysé des autoroutes et des chemins de fer il y a deux ans et pas pendant la crise de COVID. Cependant, le recours actuel servira de référence aux gouvernements futurs.
    Nous savons maintenant ce que le premier ministre pense de ceux qui ne sont pas d'accord avec sa politique fédérale de vaccination obligatoire. Nous savons qu'il a mis dans le même panier tous ceux qui n'étaient pas d'accord lui et qu'il les a traités de racistes, de misogynes, de réfractaires à la science et de marginaux, qu'il a dit qu'ils ne devaient pas être tolérés et qu'il s'est plaint qu'ils prenaient de la place. Il a agi ainsi pendant une campagne électorale où il a cyniquement fait tout ce qu'il pouvait pour diviser les Canadiens et faire de la pandémie et des vaccins une arme. Il en est maintenant au point d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence en réponse à une manifestation qui est loin d'être la première à survenir depuis l'entrée en vigueur de la Loi en 1988, ou même depuis 2015, lorsque le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir, ou même depuis 2020. Seulement, cette protestation est menée par des personnes dont les opinions sont révoltantes pour le premier ministre. Ce dernier a systématiquement diabolisé, vilipendé, stigmatisé et désigné comme boucs émissaires les manifestants, dans le droit fil de qu'il avait cyniquement commencé à faire au cours de la dernière campagne électorale pour servir ses propres intérêts. Ce qui arrive en ce moment servira de référence pour toute utilisation future de la Loi. Chaque futur premier ministre profitera de ce précédent pour utiliser la Loi comme un outil contre les citoyens qui ont des opinions différentes.
    Cela m'amène à la troisième raison pour laquelle je vais voter contre cette motion. Les outils prévus par le décret sont tellement flous et draconiens et tellement démesurés par rapport à la situation qu'on ne peut tout simplement pas les appuyer. Entre autres, le décret oblige immédiatement les banques à geler les comptes bancaires de toute personne associée aux barrages et cela, sans ordonnance du tribunal. Des milliers de Canadiens qui désapprouvent le gouvernement ont donné des fonds pour soutenir la manifestation, et bon nombre d'entre eux l'ont fait vraisemblablement avant qu'un seul geste illégal ait été posé. Ces Canadiens se demandent maintenant ce qu'on entend au juste par « utilisé pour soutenir les barrages illégaux ».
    Est-ce vraiment ainsi que les gouvernements au Canada traiteront avec les manifestants dorénavant? Allons-nous devenir un pays où les gouvernements prétendent que le système judiciaire représente un obstacle et une perte de temps plus qu'autre chose et se tournent vers des solutions plus simples? Non, le Canada n'est pas comme cela. Aucun gouvernement actuel ou futur ne devrait réagir à une difficulté à faire respecter la loi au niveau local en suspendant le processus judiciaire, et certainement pas pour une situation aussi politisée que la réponse à un groupe de personnes qui se sont volontairement dissociées du gouvernement et que le gouvernement lui-même s'est aliénées.
    Avant de trouver une certaine assurance dans le fait que le gouvernement s'engage à ne pas abuser des pouvoirs qu'il cherche à s'octroyer à lui-même, j'aimerais rappeler à la Chambre le type de gouvernement auquel nous avons affaire. Nous traitons avec un gouvernement dont les députés ont été visés à répétition par des sanctions du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, avec un premier ministre qui a essayé de s'ingérer dans une poursuite criminelle en créant une nouvelle loi afin d'aider une entreprise corrompue à s'en tirer à bon compte et qui a ensuite congédié sa procureure générale parce qu'elle a refusé d'être sa complice. C'est aussi un gouvernement qui a essayé de s'octroyer des pouvoirs illimités pour augmenter les impôts et les dépenses au début de la pandémie, un gouvernement qui a essayé de contrôler — avec des mesures législatives — ce que les Canadiens publient en ligne, un gouvernement qui a fait fi des ordonnances des tribunaux dans cette enceinte. On parle d'un gouvernement qui voulait obtenir des renseignements bancaires personnels et qui cherche maintenant un partenaire pour traquer les données sur la mobilité. Je ne veux pas accorder au gouvernement les pouvoirs extraordinaires qu'il sollicite. En effet, son appétit insatiable pour le pouvoir et le contrôle ainsi que sa propension à ne pas se conformer à la loi sont trop bien enracinés.
    Je terminerai mon discours en ajoutant qu'il n'y a aucune justification pour recourir à la Loi sur les mesures d'urgence. L'urgence en question se situe dans une zone limitée et le gouvernement n'a besoin d'aucun pouvoir additionnel pour régler la situation.

  (1445)  

    Monsieur le Président, j'ai entendu le député citer quelques parlementaires, alors je vais en citer deux moi aussi. Le député se souvient peut-être de Peter MacKay, un ministre conservateur, et de Vernon White, un sénateur. Ils ont dit ceci: « Les images de l'occupation d'Ottawa et des barrages aux postes frontaliers ne sont pas une illustration du droit de manifester qui est inscrit dans la Constitution; il s'agit d'activités illégales qui représentent une menace pour la sécurité nationale et l'économie du Canada. » Vernon White a ensuite déclaré à CBC: « Je suis en faveur [de la Loi sur les mesures d'urgence]. J'estime que nous étions à un point de non-retour. »
    Pourquoi le député est-il en désaccord avec ces conservateurs? Est-ce parce que le parti d'en face est réellement le Parti réformiste?

  (1450)  

    Monsieur le Président, je suivais le débat plus tôt dans la journée et je dois dire que le calibre et la qualité du débat tenu à la Chambre étaient bien meilleurs avant l'arrivée du député de Kingston et les Îles...
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. En dépit du fait que je m'insurge contre son commentaire et que je pense qu'il est déplacé à la Chambre, le député devrait savoir qu'il ne doit jamais faire allusion à ma présence à la Chambre, que je sois ici ou non.
     Selon les règles, le député ne doit pas souligner la présence ou l'absence d'un autre député à la Chambre.
    Le député de Calgary Rocky Ridge a la parole.
    Monsieur le Président, je ne parlerais certainement pas de la présence ou de l'absence d'un autre député à la Chambre, mais depuis que le député a commencé à intervenir dans le débat, la civilité et la qualité des échanges se sont assurément détériorées. Poursuivons...
    Merci. Voilà qui devrait mettre fin à ce rappel au Règlement.
    Nous en sommes toujours à la réponse à la question initiale posée au député de Calgary Rocky Ridge.
    Monsieur le Président, je répondrai à la question du député en disant que je souscris à la prémisse, mais pas à la conclusion de certains des propos qu'il a cités.
    Nous avons affaire, j'en conviens, à une très grave situation mettant en cause des actes illégaux pour lesquels une intervention est nécessaire. Toutefois, je ne suis pas d'accord pour dire que c'est cette intervention qui s'impose.

[Français]

    Monsieur le Président, je suis tout à fait d’accord sur les commentaires de mon collègue de Calgary Rocky Ridge. Je comprends les motifs qui le portent à refuser la loi en question.
    Alors, si ce n’était pas cette loi qui était nécessaire, qu'est-ce qu'il aurait fallu? Est-ce du leadership, de la vision, ou est-ce une loi?

[Traduction]

    Monsieur le Président, il y a eu une absence de leadership au Canada sous la direction du premier ministre, et ce, dans tous les domaines.
    Je rappelle les propos du député de Louis‑Hébert, qui a souligné à quel point le gouvernement a délibérément choisi de monter les Canadiens les uns contre les autres bien avant la crise actuelle. Il faut vraiment faire le lien entre ces deux événements. Le premier ministre y est pour beaucoup dans la discorde qui règne partout au pays.
    Monsieur le Président, je représente le secteur du pont Ambassador, par où passent chaque jour 40 % des échanges commerciaux avec les États‑Unis.
    Je peux assurer au député que les notes d'allocution du Parti conservateur sont erronées. Le pont Ambassador est ouvert dans une certaine mesure, mais, tout comme à Ottawa, les barricades érigées un peu partout dans notre collectivité nous empêchent d'avoir accès aux commerces, empêchent les enfants de se rendre à des rendez-vous, y compris des rendez-vous médicaux, et provoquent une foule d'autres problèmes.
    Jusqu'à présent, les habitants de Windsor doivent régler une facture de plus de 10 millions de dollars, et les frais ne cessent de s'accumuler, car la PPO, la GRC et la Ville de Windsor protègent toujours 14 kilomètres de l'autoroute 401. Quelle est la position du Parti conservateur? Est-il d'accord pour que la province et le fédéral règlent la note?
    Et que compte-t-il faire au sujet des convois? D'autres convois arrivant dans notre région ont déjà été interceptés, et la menace demeure...
    Le député de Calgary Rocky Ridge a la parole.
    Monsieur le Président, je suis d'accord. Comme je l'ai dit dès le début de mon discours, j'ai été consterné par ce qui s'est passé dans sa circonscription. J'ai remarqué que la situation revient à la normale et que le passage frontalier, comme l'a indiqué le député, a été rouvert au moyen de méthodes policières classiques et sans qu'il soit nécessaire de recourir à des pouvoirs extraordinaires.
    Tout comme le député, je conviens que c'est un terrible problème et un terrible fardeau pour sa collectivité, mais je ne crois pas que quoi que ce soit dans cette motion y changera quelque chose. Cela ne justifie pas les pouvoirs extraordinaires que s'octroie le gouvernement.
    Monsieur le Président, pour le bénéfice des électeurs de Mission—Matsqui—Fraser Canyon, que je représente, nous débattons aujourd'hui de la Loi sur les mesures d'urgence et de la motion de ratification de la déclaration de situation de crise, conformément à l'article 58 de la Loi. Il y a beaucoup à dire sur le sujet et je ne pourrai pas le faire en 10 minutes.
    Au titre de l'article 58, le gouvernement doit proposer une motion de ratification de la déclaration de situation de crise accompagnée d'un exposé des motifs de la déclaration ainsi que d'un compte rendu des consultations avec les provinces et territoires au sujet de celle-ci. En effet, des milliers de personnes ont communiqué avec moi la semaine dernière à propos des mesures temporaires dans le cadre de l'état d'urgence, dont celles relatives aux rassemblements publics, aux amendes et à l'incarcération, et à l'obligation de travailler pour le gouvernement du Canada, puis d'autres, comme le gel d'avoirs financiers.
    Les pouvoirs du Parlement dans ces circonstances uniques sont de protéger la population contre les excès et les mauvaises décisions du gouvernement, puis de veiller à ce que les mesures de contrôle efficaces et nécessaires soient en place quand une déclaration d'état d'urgence est faite conformément à l'article 17 de la Loi. Après examen de l'explication fournie dans la Loi sur les mesures d'urgence, je ne peux pas appuyer les motifs exposés par le gouverneur en conseil pour le recours soutenu à la Loi. Mes raisons s'appuient sur ce qui suit.
    Concernant le deuxième point des motifs de déclarer l'état d'urgence, « les effets néfastes sur l’économie canadienne », on a beaucoup parlé des manifestations tenues à des points d'entrée à différents endroits au Canada. Si j'ai bien compris, le 14 février, il n'y avait aucun blocage majeur empêchant le transport de marchandises entre le Canada et les États‑Unis pour justifier cette mesure sans précédent. En délogeant les manifestants aux points d'entrée la fin de semaine dernière, avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, les forces de l'ordre ont prouvé qu'elles étaient capables de gérer les manifestations.
    Le rapport avance ensuite qu'il y a eu des menaces de blocage des voies ferrées, ce qui pourrait entraîner d'importantes perturbations économiques. Il précise que le réseau ferroviaire canadien génère des revenus d'exploitation de plus de 16 milliards de dollars par an. Les lois en place permettent de réagir à une telle menace, et le Parlement ne peut se contenter des maigres explications fournies sur l'importance économique des chemins de fer au Canada. La Loi sur la sécurité ferroviaire est un texte de loi solide. Je suis sûr qu'elle pourrait être appliquée en cas de vraie menace.
    Je dirais de même pour le quatrième point, « la rupture des chaînes de distribution et de la mise à disposition de ressources, de services et de denrées essentiels ». Encore une fois, les motifs avancés par le gouvernement sont dépourvus de toute preuve. Les parlementaires exigent plus que des statistiques commerciales générales pour confirmer l'application de la mesure la plus sévère que peut prendre le gouvernement. Je ne peux tout simplement pas cautionner cela.
    Encore une fois, on peut en dire autant du point cinq: « le potentiel d’augmentation du niveau d’agitation ». Le gouvernement n'a pas fourni à la Chambre une justification satisfaisante montrant que la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui ne pourrait pas être réglée efficacement en invoquant une autre loi. Aucune émotion ou belle parole ne justifie une telle action.
    Le compte rendu présenté aux deux Chambres du Parlement sur les consultations relatives à la Loi sur les mesures d'urgence ne contient pas de justification suffisante non plus. Les mots « a parlé », « tenu des réunions », « régulièrement consulté » et « discuté » reviennent partout dans le document. Toutefois, il n'y est question nulle part des mesures concrètes prises par le gouvernement dans le cadre des consultations. Dans des moments comme maintenant, il ne suffit pas que le gouvernement dise qu'il a parlé avec les provinces et les territoires. Le Parlement doit savoir sur quoi ont porté les discussions, ce que le gouvernement a dit aux provinces et aux territoires et quelles mesures il a prises pour prévenir les perturbations nationales, et je dirais l'inverse pour ce qui est des provinces et des territoires.
    Permettez-moi de citer les paroles du premier ministre « La décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence n'est pas une chose que nous prenons à la légère. Ce n'est pas la première option, ni la deuxième ni même la troisième. C'est une solution de dernier recours. » Or, le premier ministre n'a rien présenté à la Chambre qui montre quelles ont été les première, deuxième et troisième options.
    Lors des débats jeudi dernier, le député d'Ottawa-Centre a demandé, en pointant les députés de l'opposition officielle comment ils réagiraient si une occupation de ce genre se déroulait dans leur quartier, dans leur circonscription, pendant quatre semaines d'affilée.
    On peut dire que de nombreuses justifications fournies se rapportent davantage aux catastrophes, aux inondations, aux feux de forêt et aux glissements de terrain que la Colombie‑Britannique a connus l'an dernier. La municipalité de Lytton a été rasée l'été dernier et, cet automne, toutes les routes principales en Colombie‑Britannique ont été inondées ou emportées par les flots. Les lignes ferroviaires du CP et du CN ont cessé de fonctionner. Le port du grand Vancouver a été coupé du reste du Canada.

  (1455)  

    Dans ma circonscription, des vies étaient en danger; des gens sont morts; des milliers de personnes ont vu leur propriété endommagée; la vie de la région a été complètement chamboulée à cause de la destruction d'infrastructures essentielles et de la perte de biens et services essentiels. Des personnes de la région n'ont toujours pas de logis permanent. Des routes cruciales, dont l'autoroute transcanadienne et l'autoroute 8, ne sont toujours pas complètement rétablies.
    Dans les documents que le gouvernement doit soumettre en vertu de l'article 58, rien ne montre qu'il satisfait aux critères établis pour le recours à cette loi. Je pourrais faire valoir plus concrètement que les désastres auxquels la Colombie‑Britannique a été confrontée l'an dernier constituent un meilleur exemple de cas où on aurait pu recourir à cette loi, notamment aux dispositions sur les sinistres, à la partie I.
    Vendredi matin, j'ai été bouleversé de lire que de terribles actes de violence avaient été commis dans la communauté nordique de Houston, en Colombie-Britannique, une situation qui a déjà été mentionnée à la Chambre. Cette situation passera-t-elle sous le radar du premier ministre et de sa Loi sur les mesures d'urgence? Il y a réellement eu de la violence dans ce cas-là.
    Je repense aussi à d'autres événements historiques survenus au Canada, par exemple un sommet du G20, alors que celui qui était alors chef de la police de Toronto et qui est maintenant ministre de la Protection civile a fait arrêter des centaines de manifestants et que des voitures de police ont été incendiées dans les rues, mais qu'on n'a pas eu recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Le monde entier avait aussi les yeux tournés vers le Canada, à l'époque. Notre réputation était aussi en jeu, à l'époque.
    Le premier ministre a joint à la motion déposée à la Chambre la lettre qu'il a adressée aux premiers ministres. Il dit être préoccupé par la perte de confiance envers nos institutions. Je crois que les Canadiens trouvent préoccupant que le premier ministre ait laissé la situation s'aggraver jusqu'au point actuel. C'est son erreur. C'est l'erreur du Cabinet. Je crois que ce sont ses actions qui minent la confiance de la population envers nos institutions.
    En prévision du débat d'aujourd'hui, j'ai examiné le compte rendu des débats de 1988 où le Parlement était saisi du projet de loi qui allait devenir la Loi sur les mesures d'urgence. J'ai appris que les parlementaires de toutes les allégeances politiques étaient préoccupés par l'application future du projet de loi et par le rapport de celui-ci avec la Charte canadienne des droits et libertés.
    Le 25 avril 1988, le député néo-démocrate Derek Blackburn a parlé des expériences horribles vécues par des Canadiens d'origine japonaise qui ont été internés au titre de la Loi sur les mesures de guerre, la loi précédente. Le député appuyait le projet de loi, mais il craignait que la Loi sur les mesures d'urgence puisse encore empiéter sur les droits et libertés des Canadiens au-delà de ce qui est raisonnable et proportionnel en fonction des circonstances. Je partage son inquiétude. M. Blackburn a suggéré que la Cour suprême examine le projet de loi pour avoir l'assurance que l'on trouve le juste équilibre et que les Canadiens soient protégés. Aucun examen n'a eu lieu, et voilà où nous en sommes aujourd'hui.
    En terminant, je rappelle aux députés les réflexions judicieuses que Bob Kaplan, ancien député libéral d'York-Centre, a livrées le 11 juillet 1988, alors qu'il était dans l'opposition officielle. Il a déclaré ceci:
    La législation que nous légiférons aujourd'hui [la Loi sur les mesures d'urgence] donne encore des pouvoirs très larges au gouvernement, il y aura toujours un rôle pour le législateur ici, celui d'avoir une surveillance efficace pour assurer que les urgences qui sont créées dans les quatre catégories [...] d'urgence relativement à cette législation ne constituent pas l'excuse au gouvernement pour implanter le pouvoir de légiférer par règlement.
    Il faut toujours faire preuve de vigilance, en cet endroit, dans les médias et dans toutes les régions du pays de sorte que le gouvernement ne fasse pas un usage abusif de quelque mesure législative d'urgence. Si nous avons appris quelque chose au cours de ce débat et [...] des audiences du comité, c'est qu'un gouvernement qui se voit investi d'un pouvoir quelconque a besoin d'être surveillé.
     Le premier ministre doit être surveillé. Le gouvernement doit être surveillé. Il doit rendre des comptes. Je parle au nom des habitants de ma circonscription, qui s'attendent à ce que j'oblige le gouvernement à rendre des comptes. Je prie tous les députés de réfléchir attentivement à la façon dont ils vont voter sur cette mesure sans précédent et non nécessaire. Il en va de la confiance en nos institutions. Il en va de la confiance qu'accordent les Canadiens à l'ensemble des députés. Il en va de notre pays.
    J'invite tous les députés à voter contre la motion pour éviter que le gouvernement n'aille trop loin.

  (1500)  

    Avant d'aller plus loin, monsieur le Président, je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée de prendre ainsi des événements du passé et de les comparer directement, car en plus d'être différents en soi, ils s'inscrivent aussi dans des contextes différents. Jamais je n'oserais comparer une catastrophe naturelle à un mouvement conscient et organisé comme celui dont nous avons été témoins. Il y a eu de la coordination entre les manifestants de Coutts et ceux d'Ottawa.
    J'ai beaucoup aimé le discours du député. Il était rigoureux et analytique. Voici ma question: abstraction faite des supposés motifs du « convoi pour la liberté », à savoir les exigences de vaccination imposées aux camionneurs, ne craint-il pas l'émergence d'un mouvement à long terme dans certaines parties du pays? Je lui rappelle par exemple que les organisateurs de ce convoi-ci ont aussi pris part au convoi United We Roll. J'ai aussi lu quelque part que la page Facebook de Canada Unity a été enregistrée en 2019.

  (1505)  

    Monsieur le Président, ce qu'a dit le député d'en face au sujet de l'extrémisme, de la confiance dans les institutions nationales, de ce que les Canadiens voient et lisent en ligne et de l'incidence de ces propos sur le travail des parlementaires est tout à fait valable, mais je crois qu'il a omis les arguments invoqués par le gouvernement du Canada, qui reposaient largement sur la protection des infrastructures, de l'économie et des chaînes d'approvisionnement. Rien, dans les arguments du gouvernement ou dans les documents officiels déposés au Parlement, ne justifie le recours à la Loi sur les mesures d'urgence à ce moment-ci. Les conditions nécessaires ne sont tout simplement pas réunies.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son allocution.
     Nous ne sommes pas souvent d'accord avec les conservateurs, mais j'avoue que, cette fois-ci, nous avons sensiblement la même opinion sur le recours à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Mon collègue est-il d'accord avec moi pour dire que l'utilisation de la Loi à ce moment-ci est une façon de remédier au laxisme et à la nonchalance dont a fait preuve le gouvernement dans les 20 derniers jours? Est-il d'accord pour dire que le gouvernement veut se présenter en sauveur et rétablir sa réputation, alors que les vrais sauveurs sont ceux qui sont sur place en ce moment et qui assurent la sécurité publique avec doigté?
    Monsieur le Président, j'aimerais remercier ma collègue de Beauport—Côte-de-Beaupré—Île d'Orléans—Charlevoix de sa question.
    Le gouvernement a décidé de recourir à la Loi pour plusieurs raisons. Je suis d'accord avec la députée pour dire que, l'une d'entre elles, c'est qu'il voulait changer l'opinion publique sur ses actions et sur les mauvaises décisions qu'il a prises pendant les quatre dernières semaines.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je sais que le député travaille très fort pour les résidants de sa circonscription. Je veux lui dire que j'ai beaucoup pensé à la profonde douleur que les résidants de sa circonscription ont ressentie à la suite des inondations.
    Il a cité d'anciens députés. Si je peux me permettre, j'aimerais citer l'ancien député conservateur Peter MacKay et le sénateur Vern White:
     L'occupation d'Ottawa et les barrages aux postes frontaliers ne sont pas représentatifs du droit de manifester inscrit dans la Constitution. Ce sont des activités illégales qui représentent une menace à la sécurité nationale et à l'économie du Canada.
    Si une menace à la sécurité nationale et à l'économie du Canada ne constitue pas une bonne occasion d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, je demanderais au député: qu'est-ce qui pourrait l'être?
    Monsieur le Président, je pense que la députée n'a pas eu connaissance de la citation de Peter MacKay qui dit que la Loi sur les mesures d'urgence pourrait constituer un pas de trop.
    Les citations d'anciens députés que j'ai utilisées concernent directement le débat que nous tenons en ce moment. Au moment d'adopter la Loi sur les mesures d'urgence, il y avait un consensus de tous les partis, c'est-à-dire que des députés de tous les partis politiques se préoccupaient d'une ingérence excessive de la part du gouvernement. Ils étaient inquiets. La loi indique clairement qu'aucune autre loi ne peut s'appliquer. Les députés ont cru que seules des situations spécifiques pourraient justifier l'invocation de cette loi. Or, l'histoire de notre grand pays contient de multiples précédents qui indiquent que cette loi s'avère inutile à l'heure actuelle.
    Monsieur le Président, avant de commencer, je signale que je vais partager mon temps de parole avec le député de Scarborough—Guildwood.
    La beauté de notre démocratie est indéniable, mais soyons clairs: la beauté ne suppose pas la perfection ni l’absence de défauts, et notre démocratie est en train d’être attaquée par des personnes qui souhaitent la déstabiliser et l’endommager.
    Tout ce qui se passe ces jours-ci, que ce soit les barrages illégaux aux frontières ou l’occupation d’Ottawa, est fondé sur la désinformation et la haine qui s’accumulent depuis un bon moment. En mai dernier, au Comité permanent de la sécurité publique et nationale, nous avons entendu Timothy Hahlweg du SCRS dire que différents groupes extrémistes idéologiques, unis par la pandémie, travaillaient ensemble afin de promouvoir leurs intentions dangereuses et leur haine. Il a affirmé: « dans le cas de la COVID‑19, nous avons vu divers groupes qui n’avaient jamais fait corps, ou des personnes qui ne partageaient peut-être pas la même idéologie ou la même motivation, se réunir pour une cause commune, qu’il s’agisse d’activités antigouvernementales ou d’activités anti-vaccination ». La montée de la désinformation provenant de ces groupes haineux continue d’attiser la haine et la peur, et elle semble être au moins en partie responsable des barrages à la frontière et de l’occupation d’Ottawa.
    Nous savons que certains dirigeants de ce mouvement d'occupation ont des positions fermement ancrées dans le nationalisme blanc. Partout dans la zone occupée d'Ottawa, on a vu des croix gammées, des drapeaux des États confédérés et des drapeaux associés à l'extrême-droite ainsi que des pancartes avec de la désinformation sur toutes sortes de choses comme la protection offerte par le port du masque et la vaccination. Je sais que ce ne sont pas tous les participants à ce mouvement d'occupation qui ont ce genre de convictions, mais c'est le genre de personnes qu'ils côtoient, et pour bien des Canadiens, voir des députés d'en face appuyer et alimenter ce mouvement d'occupation a été plutôt révélateur.
    Je tiens à préciser que les dirigeants de ce mouvement d'occupation illégale ont publié en ligne un protocole d'entente dans lequel ils appellent à la destruction de notre démocratie. Cela n'a jamais été caché.
    Au Canada, la Charte confère des droits importants comme la liberté de réunion pacifique. Lorsque j'ai été élu pour la première fois comme député, l'une des premières choses que j'ai remarquées, c'était le nombre de personnes qui venaient de partout au Canada pour manifester devant le Parlement afin de défendre des causes qui leur tenaient profondément à cœur. Qu'il s'agisse d'un petit groupe qui s'installe sur la pelouse devant l'édifice du Centre ou d'une foule de plusieurs milliers de personnes, tous ces gens défendaient leur cause de façon pacifique tout en respectant les droits et les libertés des résidants d'Ottawa qui veulent vivre librement dans leur propre ville. On ne voit pas ce degré d'accessibilité dans bien d'autres pays, et c'est une particularité unique qui mérite d'être protégée.
    Les manifestations pacifiques sont parfois dérangeantes, et c'est tout à fait acceptable au Canada. Je ne mentionnerai pas pour quelle cause, mais chaque année, il y a un rassemblement qui attire des milliers de personnes sur la Colline du Parlement à Ottawa. Croyez-moi, je trouve cet événement passablement désagréable. Je ne soutiens pas cette cause, mais je respecte le droit à la liberté et à la réunion pacifique. Ils viennent faire leur manifestation, qui provoque habituellement une vigoureuse contre-manifestation, et ils s'en vont.
    Je veux être clair. Ce qui se passe à Ottawa n'est pas une manifestation pacifique. Ce que nous avons vu à Ottawa et aux frontières est une menace à la souveraineté du Canada et à la démocratie sous les oripeaux d'une défense de la liberté. Les occupants ont privé les résidants d'Ottawa de leur liberté. Ils ont tenu les citoyens en otage dans leur propre demeure et les ont terrorisés en faisant un vacarme assourdissant, des gestes haineux et du harcèlement. Les résidants ne pouvaient pas sortir de leur logement ou porter un masque sans être ridiculisés et harcelés. Ils ne se sentaient plus en sécurité dans leur propre ville. Cette occupation a privé de nombreuses personnes de leur gagne-pain. En raison du harcèlement et d'autres gestes terribles, le centre commercial et les entreprises du secteur n'ont pas pu rester ouverts en toute sécurité.
    Beaucoup de personnes, surtout celles touchant le salaire minimum, sont privées de leur gagne‑pain, à cause des gens qui occupent la ville depuis trois semaines. Même si la Ville d'Ottawa puis l'Ontario ont déclaré l'état d'urgence, l'occupation d'Ottawa s'est poursuivie et les barrages n'ont pas été démantelés. Quand d'autres ordres de gouvernement font appel à nous, le gouvernement du Canada, nous répondons à leur appel. Dès le début, nous avons apporté notre aide à Ottawa, et nous avons offert notre soutien pour régler la situation à nos postes frontaliers. Nous avons continué de travailler dans les limites des mesures et des lois existantes pour fournir des ressources.

  (1510)  

    Nous savons que le blocage illégal des frontières a eu des effets dévastateurs sur l'économie canadienne. Je pense au pont Ambassador par lequel s'effectuent 30 % de tous les échanges commerciaux assurés par le transport routier entre le Canada et les États‑Unis, notre plus important partenaire commercial. Cela équivaut à approximativement 390 millions de dollars de marchandises par jour. Je suis de tout cœur avec les vaillants camionneurs qui ont souffert des barrages illégaux. Ils ont été bloqués aux postes frontaliers et sur les routes pendant des heures et des heures, alors qu'ils faisaient simplement leur travail pour empêcher l'interruption des chaînes d'approvisionnement canadiennes. Une situation semblable s'est produite à Coutts, où, comme nous le savons, les barrages illégaux ont coûté environ 48 millions de dollars par jour.
    Une manifestation pacifique ne devrait jamais causer de tort à quiconque. Elle ne devrait jamais non plus brimer les droits de quiconque. Les effets du blocage illégal des postes frontaliers se feront sentir pendant longtemps. Nous savons que cela a menacé l'existence des entreprises ici, au Canada, et le gagne‑pain des travailleurs. C'est vraiment honteux.
    Un grand nombre de mes concitoyens de Dartmouth—Cole Harbour m’ont fait part des difficultés que leur ont confiées leurs proches à Ottawa. Depuis le début, ils demandent une intervention plus ferme. Que ce soit des vétérans ou des enseignants, des aînés ou des jeunes, des concitoyens de tout bord politique sont venus me dire qu’ils soutenaient le gouvernement. Certains m’ont même avoué qu’ils n’avaient jamais été aussi bouleversés, au point de faire appel à leur député, jusqu’à maintenant. Ils sont terrifiés par la haine et le mépris des lois dont ils ont été témoins aux frontières et à Ottawa. Ils voulaient que tous les ordres de gouvernement collaborent et fassent tout ce qui était en leur pouvoir pour maîtriser la situation, préserver la démocratie et rétablir l’ordre.
    Il était on ne peut plus clair que la police locale n’était pas en mesure de faire respecter la loi à Ottawa. Nous avons invoqué la Loi sur les mesures d’urgence afin de renforcer les capacités des autorités locales et provinciales pour mettre fin aux barrages et à l’occupation, pour protéger les Canadiens, pour rétablir la confiance dans nos institutions et pour protéger les emplois. Il n’existe tout simplement aucune autre loi au Canada qui nous permette de coordonner nos efforts à ce point.
    Mes collègues, dont bon nombre sont avocats, ont déjà exposé de façon claire et concise les arguments juridiques pour invoquer cette loi. Les critères sont respectés, et il est indéniable que la Loi sur les mesures d’urgence n’a rien à voir avec la Loi sur les mesures de guerre, qui est archaïque. La Loi sur les mesures d’urgence n’implique pas l’armée. Elle respecte la Charte canadienne des droits et libertés, et permet ainsi d’assurer que les droits individuels des Canadiens sont respectés comme il se doit.
    Tous les parlementaires doivent collaborer pour le bien des Canadiens. Cela signifie que nous devons nous unir pour rétablir l’ordre au Canada, mais aussi pour protéger notre démocratie en luttant contre la haine, même si c’est difficile. J’invite tous les députés de la Chambre à s’unir pour défendre nos familles, nos travailleurs et notre démocratie.

  (1515)  

    Monsieur le Président, c’est toujours un plaisir de prendre la parole au nom des gens de Kamloops—Thompson—Cariboo. Mon collègue le secrétaire parlementaire a mentionné que de nombreux avocats présents à la Chambre ont examiné en détail le projet de loi et ont conclu que le seuil était atteint. Or, je peux lui dire que, après avoir examiné le projet de loi en détail, l’avocat que je suis ne croit pas que le seuil soit atteint.
    Le député a parlé de la Charte canadienne des droits et libertés. C'est intéressant, parce que le principe de la primauté du droit veut notamment que la loi soit prévisible et transparente. Dans le cas présent, s’agissant de geler des actifs, il n’y a aucune prévisibilité ni transparence relativement au fonctionnement, particulièrement si ce pouvoir est délégué à des tiers, comme les banques. Comment le député peut-il dire que la Charte est respectée alors que la primauté du droit ne peut être garantie par l’intermédiaire d’un tiers?
    Monsieur le Président, je veux prendre un moment pour remercier le député de l’opposition de faire tout en son pouvoir pour s’occuper des gens de sa circonscription. Je sais que nous sommes tous ici pour les bonnes raisons, même si, la plupart du temps, à la Chambre, nos points de vue idéologiques diffèrent sur certains points fondamentaux. Je tiens à le remercier pour son travail.
    Cette loi protège la Charte canadienne des droits et libertés. Comme je l’ai dit dans mes observations, aucune manifestation pacifique ne peut porter atteinte aux droits et libertés d’autres Canadiens. Il s’agissait d’une occupation et d’une manifestation illégale.

[Français]

    Monsieur le Président, je ne peux qu'être d'accord en grande partie avec le député de Dartmouth—Cole Harbour.
    Manifester est un droit, par contre, occuper n'en est pas un. Le harcèlement, les pertes économiques et la tragédie sont inacceptables. Étant d'accord sur la finalité, je lui pose une question.
    Est-ce le meilleur moyen qu'on a pu trouver...

  (1520)  

    À l'ordre.
    Il y a eu un problème d'interprétation, mais c'est réglé.
    Je demanderais au député de Trois‑Rivières de reprendre sa question.
    Monsieur le Président, je parlais de mon accord avec mon collègue, le député de Dartmouth—Cole Harbour. La finalité poursuivie est de restaurer l'ordre. Nous partageons cette finalité et nous sommes tout à fait d'accord sur cela. Nous sommes tout à fait d'accord sur le fait que le harcèlement, les tragédies, le bouleversement de la vie des gens et les pertes économiques sont inacceptables.
    Maintenant, si nous voulons restaurer l'ordre, ce moyen est-il le meilleur qui soit, ou, au contraire, est-il celui qui restait après l'inaction?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis ravi que le député soit d'accord avec ce côté-ci de la Chambre pour dire que la situation est inacceptable. J'ai pratiquement entendu le soupir de soulagement du chef intérimaire de la police d'Ottawa lorsqu'il a dit que les forces de l'ordre avaient finalement les ressources dont elles avaient besoin pour mettre fin à la situation. Le chef intérimaire a expliqué que les ressources découlant de la Loi sur les mesures d’urgence leur ont permis de passer à l'action. C'était merveilleux à entendre.
    Qujannamiik, Uqaqtittiji. En tant qu'Inuk et Autochtone, je me méfie fondamentalement des forces de l'ordre. Trop souvent, j'ai vu le traitement que les forces de l'ordre réservent à ma communauté, aux Autochtones et aux personnes de couleur. Nous avons été trop souvent du mauvais côté de la loi. Les forces de l'ordre ciblent arbitrairement mes collectivités.
    Mes collègues du NPD et moi avons longuement réfléchi aux mesures permises dans la Loi sur les mesures d’urgence. Nous sommes bien conscients du risque pour la démocratie du Canada et, sans la prise de mesures drastiques, des menaces à la sécurité nationale que posent des extrémistes étrangers. J'ai reçu des menaces qui venaient d'aussi loin que le Nouveau‑Brunswick en raison du débat sur la Loi sur les mesures d’urgence.
    Le député peut-il expliquer aux Canadiens en quoi il s'agit d'un enjeu national qui appelle une intervention immédiate?
    Monsieur le Président, j'ai écouté le débat toute la journée, et je veux remercier la députée d'être toujours intervenue aussi judicieusement. Elle a pris la parole à maintes reprises, je l'en remercie.
    Notre sécurité nationale et la menace pour notre économie ont malheureusement rendu nécessaire le recours à cette loi.
    Monsieur le Président, j'abonde dans le même sens que mon collègue de Dartmouth—Cole Harbour à propos des interventions de la députée de Nunavut.
    Je ne sais pas encore comment je vais voter, mais je veux demander au député dans quelle mesure, au‑delà des menaces pour l'économie, le recours à la Loi sur les mesures d'urgence repose sur la reconnaissance que ce n'est pas une seule menace, mais un vaste réseau qui cherche à nuire aux démocraties. Le dernier mot du député dans son discours était « démocratie », et comme nous l'ont appris Vladimir Poutine et certaines forces de la droite américaine, notre démocratie est ciblée par des influences étrangères qui cherchent à la miner.
    Monsieur le député, la députée a parfaitement raison. J'ai siégé au comité de la défense nationale et au comité de la sécurité publique, et nous avons entendu des experts de partout dans le monde dire que nos adversaires et nos ennemis mènent une campagne planifiée de désinformation dans différents pays. La députée a parfaitement raison de dire qu'il y a des répercussions sur la démocratie au Canada.
    Monsieur le Président, habituellement, lorsque je prends la parole, je commence en disant à quel point je suis reconnaissant d'avoir l'occasion de m'exprimer à la Chambre. Aujourd'hui, toutefois, je dirai que c'est la première fois en 24 ans que j'ai eu besoin d'une escorte policière pour entrer dans la Chambre, et il est fort probable que nous aurons tous besoin d'une escorte policière pour en sortir. Voilà l'état de la situation d'urgence à l'heure où l'on se parle à Ottawa.
    La sédition se définit comme étant un « comportement ou discours incitant à la révolte concertée contre l'autorité publique ». Une urgence s'entend d'« une situation grave, inattendue et souvent dangereuse requérant une intervention rapide ». La Loi sur les mesures d'urgence contient une autre définition qui appuie largement cette notion:
[...] menace [...] la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté [et] la sécurité [...]
    Au cours des trois dernières semaines, nous avons vu arriver à Ottawa un convoi hétéroclite de camionneurs ayant pour but, apparemment, de manifester contre les exigences liées à la vaccination. Or, cela s'est transformé en une contestation anarchique de l'autorité légitime qui a gravement nui à la vie, au bien-être économique et à la sécurité des Canadiens d'un océan à l'autre: depuis Ottawa jusqu'au pont Ambassador, non pas une fois, non pas deux fois, mais trois fois, en passant par des manifestations à Toronto et à Québec, par le pont Blue Water, par le blocage des postes frontaliers d'Emerson, au Manitoba, et de Coutts, en Alberta, sans compter les nombreux blocages en Colombie‑Britannique. La perturbation des échanges commerciaux a entraîné des pertes économiques de milliards de dollars et causé des ruptures dans les chaînes d'approvisionnement, sans compter que la situation a réduit des citoyens à un sentiment de désespoir et de peur. Des citoyens se menacent entre eux et, devant l'impuissance de la police ou son refus d'intervenir, certains menacent de se faire justice eux-mêmes.
    J'ignore ce que l'on voudrait voir de plus avant de déclarer l'état d'urgence nationale, sinon peut-être de la violence dans les rues. Certains semblent estimer que cela devrait faire partie du débat et constitue un critère incontournable. Il est également tout aussi évident que certains insurgés seraient ravis que cela se produise, que l'anarchie et le non-respect des lois l'emportent et que l'autorité légitime soit sapée. Pendant ce temps, ces « courageux anarchistes » se cachent derrière des enfants dans des jeux gonflables et brandissent des drapeaux du Canada, parfois à l'endroit, parfois à l'envers.
    De plaintes malavisées au sujet des restrictions relatives à la vaccination, les motifs de la manifestation sont passés à la sédition. La plupart des restrictions relatives à la vaccination relèvent des autorités provinciales, qui sont en train de les assouplir avec prudence en se fondant sur les directives de la santé publique. Les barrages, s'ils étaient véritablement motivés par ces restrictions, auraient dû être érigés dans les capitales provinciales. Les seules restrictions qui relèvent de la compétence fédérale concernent les frontières, et leur levée doit être faite de concert avec le gouvernement américain. Les manifestants devraient se rendre à Washington, s'ils pouvaient traverser la frontière.
    Quel est le véritable motif de ce barrage séditieux? Je suis certain que les députés ont entendu parler des campagnes de désinformation. Comme le député l'a mentionné dans son allocution, le comité de la sécurité publique et le comité de la défense ont beaucoup entendu parler des campagnes de désinformation menées par des acteurs étatiques et non étatiques. Je n'ai pas, personnellement ou directement, vu de preuves de la tentative de déstabilisation d'un pays du G7 et de l'OTAN qui s'oppose à l'imminente invasion de l'Ukraine par la Russie, mais, à mon avis, il y a lieu de croire que cette tentative avantagerait le président Poutine. Tout effort de déstabilisation qui mine le consensus national est à l'avantage de nos deux principaux adversaires, c'est-à-dire la Chine et la Russie.
    La télévision russe fait la promotion de diverses théories sur l'utilité des vaccins et de théories paranoïaques sur l'implantation de puces. En outre, elle remet en question l'efficacité des restrictions relatives à la vaccination et sème le doute dans l'esprit de ceux qui cherchent à exprimer leur frustration et leur colère qui, à ce stade-ci, sont dirigées vers le gouvernement et le premier ministre.
    Les preuves concernant les acteurs non étatiques sont un peu plus claires. Il est flagrant que du financement est parvenu des États‑Unis, de sources associées aux éléments les plus ignobles de la société américaine. Comme les conservateurs affirment depuis des semaines qu'il suffirait de parler à ces gens, je me suis mis à répondre à des appels téléphoniques et à des courriels. Je ne peux m'empêcher de constater que je suis devenu assez populaire en Alberta, en Colombie‑Britannique et au Québec. Tous ces habitants d'autres circonscriptions veulent m'aider à voter en vue d'aider les habitants de ma circonscription. Aujourd'hui seulement, nous avons reçu 1 300 courriels, après en avoir reçu 600 hier.

  (1525)  

    Je présente des excuses peu sincères à ces habitants d'autres circonscriptions pour les avoir ignorés. Je n'ignore toutefois pas les habitants de ma circonscription, et ce, depuis neuf élections générales ou 24 ans. Les gens qui veulent que je vote contre le projet de loi sont plus diversifiés et ils sont plus véhéments cette semaine. Cependant, la semaine dernière, d'autres personnes voulaient que je mette fin au blocage. Les gens à qui je parle qui veulent que je vote contre le projet de loi adoptent une attitude belliqueuse et débitent tellement de désinformation que c'en est décourageant.
    Nous savons que nous sommes mal partis lorsque la conversation commence par « je n'ai jamais voté pour vous et je ne le ferai jamais ». Cette personne a dû éprouver énormément de frustration au cours des neuf législatures des 24 dernières années. Lorsque la conversation est truffée du nom de famille du premier ministre et de propos que le Président jugerait non parlementaires et qui commencent apparemment tous par la même lettre, nous savons qu'elle ne va pas bien se dérouler. De plus, il est difficile d'avoir une discussion civilisée lorsqu'on entend le klaxon d'un 18 roues en arrière-plan.
    La discordance des faits est l'élément le plus décourageant de toute cette situation. La tenue de débats civilisés doit reposer sur une compréhension minimale du civisme et de la science, mais le discours des faits alternatifs émanant de cet acolyte notoire de Trump s'est implanté. En fin de compte, voilà ce qui est si décourageant. D'une façon ou d'une autre, cette insurrection prendra fin, mais les dommages causés au discours politique vont demeurer. Il est difficile de tenir une conversation avec des klaxons qui retentissent, des moteurs qui vrombissent, des vapeurs de diesel qui empestent l'air, une idée fixe sur les faits alternatifs et certains politiciens qui cautionnent la sédition.
    J'appuie donc sans réserve cette initiative, que je considère comme une réponse mesurée, proportionnée et conforme à la Charte à l'égard d'un mépris flagrant de la primauté du droit. Si la révocation des permis, la révocation des assurances et le gel des comptes de banque ne suffisent pas, j'accepte que la police encercle le secteur et arrête ceux qui refusent de partir, ce qu'elle fait en ce moment même. J'ai été très impressionné par l'intervention mesurée et prudente de la police au cours des deux derniers jours.
    Je condamne les voyous anarchiques qui se cachent derrière des enfants, tout comme je condamne la violence. Cette mesure législative devrait servir d'avertissement aux brigands anarchiques et surtout aux organisateurs, qu'ils soient étrangers ou canadiens. Au Canada, la primauté du droit triomphe en tout temps. Cette campagne de désinformation, qu'elle émane de sources étrangères ou canadiennes, est implantée profondément dans l'esprit de ces insurgés qui voient des complots partout et qui semblent incapables d'ajuster leurs préjugés bien ancrés de certains faits essentiels. Tout cela pousse notre nation vers les ténèbres.

  (1530)  

    Monsieur le Président, nous parlons de manifestations pacifiques, et je tiens à féliciter les forces de l'ordre pour le travail qu'elles ont accompli ces dernières semaines ici, à Ottawa. En effet, elles ont maintenu la paix et ont fait un excellent travail pour mettre fin au blocage cette semaine. Les conservateurs demandaient la fin de ce blocage depuis un certain temps.
    Ottawa savait depuis des jours que cette manifestation, c'est‑à‑dire le « convoi pour la liberté », allait arriver en ville. Le maire le savait, le chef de police le savait et les intervenants en matière de sécurité, ici à Ottawa, le savaient. Ils le savaient des jours avant l'arrivée du convoi. Nous avons vu des centaines de milliers de personnes se rassembler ici pendant des semaines, sans qu'une seule fenêtre soit cassée.
    Quelles sont les première, deuxième et troisième choses que le gouvernement aurait pu faire avant de prendre une mesure aussi musclée que l'invocation de cette loi? Nous attendons toujours la réponse, et j'aimerais donc entendre la réponse du député à ce sujet.
    Monsieur le Président, la première chose à faire est d'obtenir des renseignements. Nous disposions de renseignements de source ouverte qui indiquaient l'arrivée de ce convoi, ainsi que les intentions de ses participants. Deuxièmement, il faut déployer des ressources. Des ressources ont été mises librement à la disposition des services de police d'Ottawa. Troisièmement, il y a les immenses ressources du gouvernement du Canada, qui ont toutes été mises à la disposition de la municipalité. Pour une raison quelconque, cela n'a pas semblé suffisant pour faire face aux activités séditieuses de ces brigands sans foi ni loi.

[Français]

    Monsieur le Président, j'apprécie énormément le discours de mon collègue. J'apprécie aussi mon collègue en général dans la vie parce que je le sais sincère, honnête et passionné.
    Cependant, nous avons une position différente sur la question qui nous préoccupe aujourd'hui.
    Pense‑t‑il que tous les outils législatifs à la disposition des différents gouvernements ont été utilisés avant qu'on ait recours aujourd'hui à la Loi sur les mesures d'urgence? Si oui, peut‑il me nommer ceux qui ont été utilisés?

  (1535)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'aime beaucoup mon ami, moi aussi, même quand il a tort.
    Le Code criminel aurait dû suffire dans les circonstances. Toutefois, il est évident que, pour quelque raison, après deux ou trois semaines d'insurrection à l'échelle du pays, ce n'est pas le cas. Comme je l'ai dit plus tôt, s'il faut révoquer les assurances et les immatriculations, geler les comptes bancaires, sécuriser des périmètres ou réquisitionner des remorqueuses, eh bien, c'est ce qui doit arriver.
    Je souhaite également saluer le travail de la Sûreté du Québec, qui a heureusement fait fi du gouvernement du Québec et contribué aux efforts policiers à Ottawa.
    Monsieur le Président, j'aimerais remercier mon collègue pour son intervention aujourd'hui. Je trouve toujours ses interventions pleines d'esprit et informatives.
    Quand on pense à ce qui se passe ici, que l'on regarde ce qui se passe dans les rues d'Ottawa, partout au pays et en Alberta, je me demande de quelle façon nous pouvons y mettre un terme. Comment pouvons-nous avancer?
    J'ai demandé une enquête publique indépendante et transparente. Est-ce que le gouvernement est prêt à également revoir les activités policières à l'échelle du pays et à soumettre un texte législatif sur la haine en ligne? Une loi plus robuste contre la haine en ligne s'impose. Est-ce que le gouvernement va chercher des façons de mieux protéger les représentants des médias dans ce pays?
    Monsieur le Président, habituellement, ce n'est pas ma vivacité d'esprit que mes enfants soulignent, mais nous allons ignorer mes enfants pour l'instant.
    Par définition, la loi exige une enquête, et il y en aura donc une. Quant à la suggestion de la députée concernant une enquête générale sur le maintien de l'ordre, le comité de la sécurité publique en a mené une l'an dernier. Elle se concentrait sur le racisme dans les services de police. Cependant, c'est une suggestion louable que le comité de la sécurité publique devrait peut-être retenir, si le gouvernement ne le fait pas.
    Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de ne pas avoir insulté un autre parti ou un autre membre de la Chambre. Aujourd'hui, nous avons beaucoup parlé de la division au Canada, mais les personnes qui se plaignent de la division prononcent des discours qui suscitent tout autant la division.
    Je trouve très inquiétant qu'au Canada, nous commencions à vivre dans deux réalités différentes. J'aimerais que le député nous indique, s'il le peut, si cette situation lui inspire de l'inquiétude.
    Monsieur le Président, ce doit être une bonne journée pour moi, car il est également l'un de mes députés préférés à la Chambre. Vous l'êtes aussi, monsieur le Président. Vous êtes tous mes préférés.
    Mon collègue a repéré le paradoxe de notre débat, à savoir que ceux qui appellent au calme et à un discours civilisé sont, dans bien des cas, ceux qui sèment la discorde et qui aident et encouragent la sédition et l'anarchie.
    Je tiens à dire que les compliments vous mèneront partout.
    Nous reprenons le débat. La députée de Davenport a la parole.
    Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Don Valley‑Ouest.
    C'est un grand honneur pour moi d'intervenir à la Chambre des communes aujourd'hui au nom des résidants de ma circonscription, Davenport, pour parler du recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Avant de poursuivre, je tiens à souligner que je prends la parole sur le territoire traditionnel de la nation algonquine.
    Plus tôt cette semaine, le 14 février, le gouvernement fédéral a déclaré l'état d'urgence et a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence. C'était la première fois que cette loi était invoquée depuis sa création en 1988. La Loi sur les mesures d'urgence énonce des conditions précises à remplir avant de pouvoir déclarer l'état d'urgence. Nous ne l'avons invoquée qu'après avoir épuisé toutes les autres options.
     La loi est limitée dans le temps, soit d'une durée de 30 jours. Elle est géographiquement ciblée. Elle propose des mesures qui sont raisonnables et proportionnelles aux menaces qu'elle vise à contrer, et elle ne déplace ni ne remplace les autorités provinciales ou territoriales. La loi a été invoquée après discussions avec le Cabinet et le caucus, après consultations des premiers ministres de l'ensemble des provinces et territoires, et à la suite d'entretiens avec les chefs de l'opposition. J'appuie cette décision.
    Depuis près de trois semaines, des barrages illégaux perturbent la vie des Canadiens. Ils nuisent à l'économie et menacent la sécurité publique. Le « convoi pour la liberté 2022 » a engendré une situation critique, urgente et temporaire qui a une portée nationale et qui ne peut être réglée efficacement à l'aide d'aucune autre loi du Canada.
    Les barrages aux ports d'entrée ont perturbé le transport de médicaments, de biens, de carburant et de nourriture essentiels pour les Canadiens. Ils ont de lourdes conséquences négatives sur l'économie du Canada, ses relations avec ses partenaires commerciaux et les chaînes d'approvisionnement. Les perturbations commerciales, l'augmentation de la criminalité, l'occupation du centre-ville d'Ottawa, l'anarchie, les menaces de violence ainsi que la présence d'armes à feu constituent un état d'urgence. Les menaces à la sécurité du Canada sont tellement graves qu'elles constituent une urgence nationale.
    Ce qui a peut-être commencé comme une manifestation de camionneurs s'opposant aux exigences relatives à la vaccination à la frontière s'est rapidement transformé en un point de rassemblement pour des groupes anti-vaccination, anti-gouvernement, anti-autorité et suprémacistes blancs, dont les revendications vont de l'élimination de toutes les mesures sanitaires au renversement du gouvernement élu.
    Dans les zones d'occupation et aux barrages, partout au pays, on a été témoin de comportements racistes et violents préjudiciables. On a tenté de minimiser ou de rejeter du revers de la main les torts causés aux Canadiens. Il est apparu aussi clairement que le service de police de la ville avait beaucoup de difficultés à appliquer efficacement la loi et qu'il y avait des lacunes à cet égard.
    Il est manifeste que des mesures extraordinaires devaient être prises pour assurer la sécurité des Canadiens, protéger les emplois des gens et rétablir la confiance dans nos institutions. Le Canada est un pays qui croit fondamentalement à la primauté du droit et qui est régi par celle-ci. Dans notre sang et dans notre âme, nous croyons aux principes de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement.
    Au cours des trois dernières semaines, il n'y a eu ni paix ni ordre dans certaines parties du pays, notamment ici, à Ottawa. Des secteurs névralgiques du centre-ville ont été complètement fermés en raison de l'occupation. Les travailleurs n'ont pas pu se rendre au travail, les entreprises n'ont pas pu rouvrir leurs portes et les gens n'ont pas pu mener une vie normale.
    La première semaine d'occupation a été marquée par un niveau de bruit sans précédent qui a causé une grande détresse pour tous ceux qui vivent dans la zone occupée ou à proximité de celle-ci. Le bruit a eu de graves répercussions sur la santé mentale des résidants d'Ottawa. La santé mentale de beaucoup d'entre eux était déjà fragile en raison des deux années de pandémie déjà très éprouvantes.
    Au pont Ambassador, à Windsor, en Ontario, les convois de camionneurs ont bloqué le passage et empêché les échanges commerciaux entre les États-Unis et le Canada. Plus de 400 millions de dollars en échanges commerciaux ont lieu chaque jour à ce poste frontalier. De nombreux Canadiens ont été temporairement mis à pied et les économies des deux pays ont été touchées. Le pire, c'est que notre réputation à titre d'endroit où il est facile de faire des affaires de part et d’autre des deux frontières a grandement souffert.
    La vice-première ministre et ministre des Finances a déclaré que ces perturbations avaient ébranlé la réputation du Canada à titre de lieu où investir et faire des affaires. Elle a ajouté que le monde nous observait et que nos emplois, notre prospérité et nos gagne-pain étaient menacés, mais aussi que nous ne permettrions pas que la relation commerciale privilégiée entre le Canada et les États-Unis soit compromise.
    Windsor n'est pas le seul poste frontalier à avoir été touché. En effet, il y a eu un barrage par des camionneurs à Coutts, en Alberta, et un autre à Emerson, au Manitoba, ce qui a entraîné, respectivement, des répercussions économiques quotidiennes de 48 millions de dollars et de 73 millions de dollars en échanges commerciaux. D'autres postes frontaliers du pays pourraient également être visés par cette menace.

  (1540)  

    Des armes ont été trouvées à Coutts, en Alberta. Des manifestants ont été accusés de complot en vue de commettre un meurtre à l'endroit de policiers, et une importante cache d'armes et de munitions a été saisie par la GRC. Tous ces gestes et ces menaces ont forcé le gouvernement fédéral à prendre des mesures extraordinaires.
    Il est important de noter que cette loi ne suspend pas la Charte des droits et des libertés. Elle a en fait été créée pour en découler et la faire respecter. Le préambule de la loi stipule que toutes les mesures prises aux termes de la loi sont assujetties à la Charte. Le recours à la loi ne limite pas la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique ou la capacité des gens d'exercer leur droit de protester de façon légale. Nous renforçons les principes, les valeurs et les institutions qui assurent la liberté de l'ensemble des Canadiens.
    La Loi sur les mesures d'urgence donne le pouvoir de mettre fin à la circulation d'argent qui sert à financer les barrages et les occupations des camionneurs. Selon des fuites de données, la majorité, soit plus de 50 %, des dons proviennent de l'étranger, principalement des États-Unis. Lorsque la police a informé GoFundMe que les fonds recueillis par cet organisme étaient utilisés à des fins illicites, la campagne a été stoppée. Les manifestants se sont alors tournés vers le site de financement participatif chrétien GiveSendGo, qui leur a permis de recueillir près de 11 millions de dollars.
    Afin de juguler l'afflux de fonds vers ces occupations et barrages illégaux, la Loi sur les mesures d'urgence comprend quatre mesures financières clés. Nous avons obtenu beaucoup de détails à cet effet plus tôt cette semaine dans le communiqué de presse et l'annonce de la vice-première ministre.
    La première mesure élargit la portée des règles canadiennes en matière de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes pour englober les plateformes de sociofinancement et les services de traitement des paiements qu’elles utilisent. Ce changement couvre toutes les formes d’opérations, y compris les transactions d’actifs numériques comme les cryptomonnaies.
    Deuxièmement, le décret ordonne aux banques, aux sociétés d’assurances et aux autres fournisseurs de services financiers canadiens de cesser temporairement de fournir des services financiers lorsqu’ils soupçonnent qu’un compte — personnel ou d’entreprise — est utilisé pour soutenir les barrages.
    Troisièmement, la Loi permet également d'ordonner aux institutions financières canadiennes d’examiner leurs relations avec toute personne impliquée dans les barrages illégaux et de déclarer les actifs et les opérations connexes de cette personne à la GRC ou au SCRS.
    La quatrième mesure, elle, confère aux institutions fédérales, provinciales et territoriales un nouveau pouvoir d’échanger des renseignements pertinents avec les banques et les autres fournisseurs de services financiers si ces renseignements contribuent à mettre un terme au financement des barrages illégaux et des activités illicites. Les fournisseurs canadiens de services financiers peuvent geler ou suspendre immédiatement le compte d’une personne ou d’une entreprise affiliée aux barrages sans avoir à obtenir une ordonnance judiciaire.
    Ces nouvelles exigences et ces nouveaux pouvoirs contribueront à réduire le risque que des institutions financières et des plateformes de sociofinancement canadiennes effectuent des transactions de fonds illicites, car elles augmenteront la qualité et la quantité des renseignements que reçoit le CANAFE, ce qui nous permettra de mettre un terme au financement des barrages illégaux.
    Il est important de souligner les garanties, la surveillance parlementaire et les mesures de reddition de comptes que prévoit la loi. Conformément à celle-ci, le gouvernement a déposé la déclaration d'état d'urgence pour que la Chambre puisse en débattre et se prononcer à son sujet. Le gouvernement a également déposé les décrets devant la Chambre, comme il y était tenu. De plus, cette mesure législative permet aux parlementaires d'exercer une surveillance, ce qui est important pour s'assurer qu'elle est mise en application dans le respect de la loi, et c'est une responsabilité que je prends très au sérieux.
    Plusieurs provinces appuient cette décision, dont la Colombie‑Britannique, Terre‑Neuve‑et‑Labrador et l'Ontario. Le gouvernement fédéral est conscient de l'importance de la transparence et de la surveillance exercée par le Parlement dans ce dossier. Au cours des prochains jours, un comité parlementaire sera formé pour assurer la surveillance pendant que les mesures d'urgence sont en vigueur. De plus, une enquête sur les mesures prises durant la situation de crise doit être lancée une fois que l'état d'urgence sera levé.
    En conclusion, je remercie les habitants de Davenport qui m'ont appelée ou écrit au cours de la dernière semaine. Je leur suis reconnaissante de m'avoir fait part de leur point de vue. Nous vivons un moment exceptionnel de l'histoire de notre pays, et nous débattons d'une mesure législative extraordinaire. Il nous incombe, au gouvernement et à moi-même, en tant que députée, d'expliquer pourquoi il est nécessaire de déclarer l'état d'urgence et pourquoi il fallait invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.

  (1545)  

    Monsieur le Président, la députée a parlé abondamment de la façon dont agirait le CANAFE pour catégoriser les fonds provenant de l'étranger. Pourtant, il s'agit du même gouvernement qui n'arrive pas à savoir comment 12 millions de dollars ont été versés à des Canadiens se trouvant à l'extérieur du pays par l'entremise de la PCU. Je m'éloigne du sujet.
    La députée a fait référence aux « autres options ». Quelles autres options ont été essayées avant d'en arriver à la Loi sur les mesures d'urgence? A-t-on essayé d'avoir recours à des modes substitutifs de règlement des différends? À de la médiation? À des consultations? Pouvez-vous nommer au moins une ou deux des tentatives de solutions qu'on a essayé d'appliquer?
    J'aimerais rappeler aux députés qu'ils doivent adresser leurs questions à la présidence et non directement aux autres députés.
    La députée de Davenport a la parole.
    Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Je tiens à répondre à cette question importante.
    À de nombreuses occasions, le gouvernement a offert des ressources additionnelles. Pas seulement une fois, pas seulement deux fois, pas seulement trois fois; il l'a fait à toutes les étapes. Il a aussi contribué à établir un dialogue entre les trois niveaux de services policiers, ce qui l'a amené à découvrir des lacunes dans leurs capacités à agir pour la suite des choses. C'est pour cela que le gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence.

  (1550)  

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai écouté le discours de ma collègue de Davenport, que j'apprécie beaucoup, par ailleurs.
    D'après de que j'ai compris, si elle est d'accord pire recourir à la Loi sur les mesures d'urgence à la base, c'est parce qu'elle est d'accord sur la façon dont on l'applique, sur les règlements d'application qui en découlent. Toutefois, à la base, cette loi-là, qui est exceptionnelle et qui est censée nous protéger de l'arbitraire, doit être utilisée seulement dans des situations d'urgence, lorsque rien d'autre ne peut être fait.
    N'a-t-elle pas l'impression de créer un précédent si elle ne se concentre que sur l'utilisation qu'on fait de la Loi plutôt que sur les critères pour y recourir?

[Traduction]

    Monsieur le Président, cette question comporte deux volets. Premièrement, je suis satisfaite de l'utilisation qui est faite de la Loi. Pour être bien honnête, je ne suis probablement pas au courant de tout ce qui a été fait, mais je suis convaincue qu'il y aura une enquête sur les mesures prises pendant la situation d'urgence. Cette enquête pourra débuter une fois que l'état d'urgence sera levé.
    Pour ce qui est d'établir un précédent, j'estime que ce qui compte d'abord et avant tout, c'est qu'il y a eu une véritable réflexion avant que la Loi soit mise en vigueur. Je suis aussi contente qu'elle s'applique uniquement à certaines zones bien précises, qu'elle soit limitée dans le temps et qu'il s'agisse d'un moyen proportionnel et raisonnable de...
    Nous poursuivons les questions et les observations, le député de Lac-Saint-Louis a la parole.
    Monsieur le Président, j'ai entendu de nombreux députés dire que nous avions déjà tous les outils législatifs dont nous avions besoin, mais si je me rappelle bien, l'Ontario aussi a adopté des mesures d'urgence. La députée estime-t-elle elle aussi que c'est parce que le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada ne pouvait pas intervenir et qu'il était impossible de faire venir des policiers de l'extérieur de l'Ontario qu'il fallait avoir recours à cette mesure législative d'exception?
    Monsieur le Président, je suis d’accord avec le député. Nous avons réalisé, et les services de police d’ailleurs au pays nous on fait réaliser, qu’il y avait des obstacles à leur capacité d’agir. Faire le suivi des fonds et les bloquer était l’un des éléments clés qui manquaient, tout comme la capacité de désigner des zones particulière pour exécuter les activités d’application et permettre aux remorqueurs d’entrer en jeu. Les lois en vigueur ne nous permettaient pas non plus d’intervenir face à l’utilisation de camions comme des barricades.
    Monsieur le Président, j’ai passé la journée à réfléchir à l’occasion mémorable que nous vivons, à ce type de débat prolongé, engagé et important. J’ai écouté toute la journée et j’ai véritablement trouvé les interventions de tous les députés très utiles et intéressantes, que j’aie été en accord ou non avec eux. Nous ne faisons pas ceci souvent à la Chambre. Nous ne tenons pas des débats sur des dizaines d’heures au sujet d’une seule question. Cependant, nous le faisons maintenant en raison de l’importance singulière qu’est l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Alors même que nous débattons aujourd’hui, les policiers d’Ottawa, appuyés par des policiers locaux, la Sûreté du Québec, la Police provinciale de l’Ontario et la GRC, continuent leur travail calme, pacifique et efficace pour libérer notre capitale, qui est encore en état de siège et d’occupation illégale. Je les remercie.
    Grâce au recours à la Loi sur les mesures d'urgence, les forces policières et les autres autorités sont en mesure de travailler en coopération pour rétablir la paix, l'ordre et le bon gouvernement dans la ville. En fait, la loi trouve elle-même sa source à la partie correspondante de la Loi constitutionnelle de 1867. Il est important que nous posions ce geste pour que les forces policières puissent coopérer et disposer des outils dont elles ont besoin pour agir dans une situation d'urgence. Ce qui est tout aussi important et peut-être moins visible, bien qu'on l'ait mentionné aujourd'hui, c'est que cette loi nous permet de resserrer l'étau autour du financement étranger et du financement canadien camouflé des groupes extrémistes qui œuvrent dans les coulisses de l'occupation, et d'y mettre un terme. En ce moment même, j'ai bon espoir que la fin de l'intervention approche et qu'elle arrivera sans incidents, sans blessures et, bien sûr, sans aucun décès.
    Je tiens à être parfaitement clair. Tous les Canadiens attachent de l'importance à la liberté d'expression et au droit de manifester. Ce sont des éléments fondamentaux de l'identité canadienne. En tant que pasteur de l'Église unie, j'ai moi-même participé à beaucoup de manifestations pour attirer l'attention de la population sur des enjeux de justice sociale, et je suis certain que je le ferai encore. Ce qui s'est passé à Ottawa, à des postes frontaliers et près d'un pont au cours des dernières semaines était d'un autre ordre.
    Dans les trois dernières semaines, j'ai marché au milieu de la foule réunie près du Parlement. J'ai vu leurs pancartes. J'ai entendu leurs commentaires. Ils m'ont aussi appris des choses. J'ai appris que bien des gens dans la rue sont en colère. Ils se sentent abandonnés. Ils ont l'impression qu'on ne les écoute pas pour une foule de raisons. Pour certains, cette pandémie a exacerbé d'autres problèmes, comme des problèmes économiques, des problèmes sociaux et des problèmes de santé. Notre travail consiste essentiellement à les écouter, à trouver des façons de les aider et à les traiter avec respect. Je m'y engage, mais leur colère et leur exaspération ont été manipulées et exploitées par des extrémistes dont les intentions sont purement malveillantes et qui n'ont aucun respect pour les principes et les institutions que les Canadiens ont adoptés et sur lesquels ils doivent pouvoir compter.
    Ce qui...

  (1555)  

    Puis-je interrompre le député un instant? Je suis vraiment désolé.
    Le député peut-il éloigner le téléphone de son micro? Il nuit au bon fonctionnement du micro.
    Le secrétaire parlementaire de la ministre des Affaires étrangères a la parole.
    Monsieur le Président, la colère et la frustration des personnes dans la rue ont été, je pense, entretenues et exploitées par des extrémistes aux desseins malveillants qui n'ont aucun respect pour les valeurs et les institutions que les Canadiens ont bâties et qu'ils soutiennent.
    Ce qui est ressorti des trois dernières semaines à Ottawa est une perturbation majeure destinée à faire plus que troubler la circulation et véhiculer des positions sur les vaccins et les mesures obligatoires liées à la pandémie. La manifestation est organisée par un petit groupe d'individus motivés par la colère, voire la haine, qui entendent renverser la démocratie et l'État de droit. La démocratie et la primauté du droit vont de pair avec la liberté. En fait, ils la protègent. Cette occupation illégale doit cesser. La vaste majorité des Canadiens, je pense, comprend cela et est d'accord avec l'approche du gouvernement. Je respecte toutes les opinions, mais je crois qu'il est temps de défendre la démocratie, nos institutions démocratiques et l'État de droit afin de préserver notre liberté.
    Monsieur le Président, je veux m'adresser directement aux résidants de Don Valley-Ouest. Je veux les remercier d'avoir pris le temps de m'écrire et de m'appeler, notamment pour s'enquérir de ma sécurité, au cours des dernières semaines. Une minorité de personnes ne sont pas d'accord avec moi, mais je suis persuadé que le gouvernement fédéral agit de façon réfléchie et prudente en invoquant la loi. Après avoir épuisé toutes les autres options, le gouvernement devait faire quelque chose. Voilà pourquoi il applique cette loi intelligemment et judicieusement.
    Nous en avons tous assez de la COVID‑19. Nous voulons que cette pandémie se termine, et nous aimerions tous savoir avec certitude quand nous en aurons enfin fini avec elle. Cependant, il s'agit d'un virus. Il est persistant, et il évolue. Personne ne peut dire avec exactitude quand nous pourrons reprendre une vie normale. J'entends les conservateurs réclamer que le gouvernement fixe un délai précisant quand notre vie reprendra son cours normal, que nous établissions un plan. Franchement, nous avons besoin de nombreux plans qui tiennent compte de toutes les éventualités pouvant se produire avec ce virus imprévisible, et c'est ce que nous avons. Tant au niveau fédéral qu'au niveau des provinces et des territoires, nous avons dressé de nombreux plans: pour rouvrir les espaces publics, pour faciliter les déplacements, pour lutter contre les nouveaux variants et ceux qui n'ont pas encore été découverts, ainsi que pour garantir que toutes les personnes au monde, et pas seulement les Canadiens, sont pleinement vaccinées. Ces plans sont constamment élaborés par des fonctionnaires qui suivent la science et conseillent les divers ordres de gouvernement du pays.
    À l'heure actuelle, nous avons vraiment besoin de faire preuve de patience et de persistance, de coopérer, de prendre soin de nos voisins, d'appuyer les travailleurs de première ligne, surtout ceux du secteur de la santé, et de respecter la primauté du droit au Canada. Nous vaincrons ce virus. La pandémie prendra fin, mais elle prendra fin grâce à la vaccination, ainsi qu'aux protocoles et aux améliorations de la santé publique. Cela ne se produira pas en occupant la capitale nationale, en bloquant des ponts, en paralysant le transport de marchandises et en empêchant ses concitoyens de vaquer librement à leurs occupations quotidiennes.
    À l'échelle mondiale, plus de 5,8 millions de personnes ont succombé à la COVID‑19. C'est une pandémie. C'est notre ennemie. Les ennemis ne sont ni les scientifiques, ni les politiciens, ni les professionnels de la santé, ni les responsables de la santé publique. L'ennemi est un virus persistant et imprévisible, qui mute et doit être vaincu. Toutefois, il n'est pas le seul ennemi qu'il faut combattre. La désinformation et la mésinformation au sujet de cette pandémie sont devenues endémiques.
    Je suis attristé de voir des gens intelligents devenir des victimes de la désinformation et ne pas réaliser que l'extrême droite se sert de la situation pour faire avancer son programme. Ces gens sont devenus des cibles de choix pour cette contagion alimentée par la paranoïa, les théories complotistes et l'ignorance, qui a culminé avec la manifestation qui se déroule dans les rues de la ville et que nous avons entendue et vue lorsque nous marchons dans le secteur.
    Nous comprenons que les gens souffrent, qu'ils sont mécontents et fâchés. Cependant, nous voulons qu'ils sachent que nous les écoutons et qu'ils ne doivent pas se laisser manipuler par des extrémistes qui ont pour seul objectif de perturber nos libertés, notre démocratie et la primauté du droit au Canada. Il fallait donc invoquer la Loi sur les mesures d'urgence pour mettre fin aux barrages maintenant.

  (1600)  

    Le premier ministre a été aussi patient qu'il le pouvait et il a tenté de désamorcer la situation. Au cours des dernières semaines, le barrage illégal des routes, des postes frontaliers et du pont, et ses impacts négatifs sur l'économie du pays, ont convaincu le premier ministre d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Des discussions auront lieu à ce sujet. Un comité parlementaire sera formé pour surveiller la situation. Il y aura des audiences une fois que tout sera terminé et il y aura une divulgation publique. Cependant, dans l'immédiat à la Chambre, nous devons être unis pour assurer le maintien de la démocratie, de la primauté du droit et des libertés fondamentales au Canada.
    Nous avons la Charte des droits et libertés. Ce sont les libéraux qui l'avaient adoptée. Il y a aussi la Déclaration canadienne des droits, qui, elle, avait été adoptée par les conservateurs. Elles sont toutes deux protégées dans la Loi sur les mesures d'urgence. Comme l'a souligné le chef de police intérimaire d'Ottawa, Steve Bell, présentement, le recours à cette loi est utile, nécessaire et efficace. Nous voyons que la loi fonctionne, car les rues sont lentement dégagées. Ce matin, je me suis rendu au Parlement un peu craintif face à ce qui allait se passer. Ce soir, je rentrerai chez moi un peu plus confiant quant à la possibilité pour le Canada de demeurer un endroit où tous sont en sécurité, où nos droits et libertés sont protégés et où tous peuvent contribuer à la société.
    Nous poursuivrons notre mission. Nous travaillerons ensemble. J’invite tous les députés, de tout bord politique, à s’engager dans cette mission, car c’est important pour leurs concitoyens, c’est important pour en finir avec la pandémie et c’est important pour ne pas dénaturer notre pays.
    Madame la Présidente, mon collègue a mentionné l’extrême droite et l’extrême gauche dans son discours. Ces termes peuvent semer la discorde. À la Chambre, nous n’avons que des concitoyens et nous devons veiller à écouter tous les Canadiens, quelles que soient leurs opinions, afin que chacun soit entendu dans notre pays. Il n’est pas judicieux de stigmatiser certaines personnes. Je sais que le député n’a pas pour habitude de le faire.
    J’aimerais lui poser une question concernant le système financier canadien. J’aimerais signaler au député que, grâce au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada, notre pays dispose déjà de moyens législatifs suffisants pour analyser et régler le problème du financement étranger. Le député est-il prêt à revenir sur la stigmatisation des comptes bancaires de personnes ayant donné un faible montant pour soutenir des manifestants se rendant à Ottawa — pour simplement manifester — et dont les comptes sont susceptibles de se retrouver bloqués? Le député est-il prêt à revenir sur cette décision?
    Madame la Présidente, soyons très clairs. Le gouvernement n'a absolument aucune intention de stigmatiser qui que ce soit dans le cadre du processus. Nous allons toutefois suivre l'argent. Nous disposons maintenant des outils nécessaires pour suivre l'argent et déterminer les sources exactes de l'influence exercée.
    Pendant deux ans, j'ai été président du comité de la sécurité publique et j'ai souvent entendu les conservateurs dire que les libéraux étaient naïfs et qu'ils ignoraient les menaces et les informations fournies par les services de renseignement. Nous avons écouté. Les députés de ce côté-ci de la Chambre ne sont pas naïfs. Nous ne faisons pas de la politique. Nous participons aux systèmes les plus importants auxquels il faut participer pour assurer la protection du Canada. Je crois que les conservateurs le savent et ils devraient se rallier à nous.

  (1605)  

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon honorable collègue de son discours.
    Quand on veut utiliser une loi extraordinaire comme la Loi sur les mesures d’urgence, je pense qu'il faut être sûr à 100 % que c’est la bonne décision, contrairement à ce que croit d'ailleurs mon collègue de Hull—Aylmer. Plus tôt aujourd'hui, il nous a dit qu’il n’était pas sûr à 100 % que c’était la bonne décision, mais qu’il voulait la prendre quand même.
    Que dit le texte de la Loi? Il dit que tous les autres outils législatifs ordinaires doivent avoir été utilisés avant que ne soit décrétée la Loi sur les mesures d’urgence.
    Mon honorable collègue croit-il que c’est le cas? Croit-il que nous avons déjà utilisé tous les outils législatifs qui sont déjà à notre disposition? Si c'est le cas, peut-il nommer ces outils?

[Traduction]

    Madame la Présidente, il n'y a pas de certitude absolue dans la vie. Je ne pourrais pas vivre si j'attendais que tout soit absolument certain. Cependant, je crois que nous nous sommes acquittés du fardeau de la preuve. Nous avons écouté les forces policières. Nous leur donnons les outils nécessaires. Nous travaillons avec elles afin que nos droits et libertés soient protégés et que les autorités disposent des outils dont elles ont besoin pour agir.
     Nous agirons. Nous mènerons une enquête publique après cet événement. Nous avons un comité parlementaire qui la supervisera. Tout sera transparent. Nous donnerons suite à tous les points soulevés. C'est un acte courageux. La loi existe. Le premier ministre et le Cabinet l'appliquent et, bien franchement, je suis fier d'eux.
    Qujannamiik, Uqaqtittiji. Je tiens à remercier le député de Don Valley-Ouest. Je tiens également à remercier le personnel parlementaire, qui fait un travail extraordinaire.
    J'ai décrit les leaders du soi-disant « convoi pour la liberté » comme des extrémistes. Les résidants de ma circonscription de Nunavut me demandent de quels extrémistes je parle. Est-ce que le député peut décrire les personnes qui ont dirigé les barrages illégaux et nous dire exactement le danger qu'elles représentent pour le Canada?
    Madame la Présidente, je tiens à remercier la députée de Nunavut pour son leadership concernant cet enjeu. J'ai été profondément ému par ses questions, tant au sujet de l'inclusion que des droits, et maintenant par celle-ci.
    Il y a eu des arrestations. Il y a eu un nombre important d'arrestations hier et aujourd'hui. Comme ces personnes comparaissent maintenant devant les tribunaux, je ne vais pas faire de commentaire qui les concerne directement. Les processus judiciaires suivront leur cours. Nous comprendrons les événements plus tard.
    Mon instinct me dit toutefois, après avoir suivi les nouvelles à ce sujet de même que les renseignements reçus ces dernières années à propos des personnes qui se déplacent et de celles qui constituent les menaces les plus importantes pour le Canada, que ces menaces proviennent des groupes d'extrême-droite. Je pense que la situation a atteint un point critique. Notre compréhension sera meilleure et plus claire une fois que les tribunaux auront rendu leurs décisions.

[Français]

Le Budget supplémentaire des dépenses (C) de 2021-2022

    La présidente du Conseil du Trésor présente un message dont la présidence donne lecture à la Chambre et par lequel Son Excellence la gouverneure générale transmet le budget supplémentaire des dépenses (C) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2022.
    Madame la Présidente, j'ai l'honneur de déposer dans les deux langues officielles le Budget supplémentaire des dépenses (C) de 2021-2022.

  (1610)  

[Traduction]

La Loi sur les mesures d'urgence

    La Chambre reprend l'étude de la motion.
    Madame la Présidente, en ce qui concerne l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, je dois demander comment on peut confier une si grande responsabilité à une personne aussi irresponsable.
    Notre pays est plus divisé que jamais. Au cours des deux dernières années, nous avons vu le gouvernement diviser sans cesse les Canadiens en vue de réaliser des gains politiques en dressant une région contre l'autre, en dressant l'Est contre l'Ouest, en dressant les Canadiens les uns contre les autres, en minant la confiance qu'inspirent nos institutions et en bafouant la primauté du droit.
    La plus grande responsabilité du premier ministre est de maintenir la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Quelle note devrait‑on attribuer au premier ministre? Selon moi, il a échoué. La paix et l'ordre n'ont pas été maintenus et je pense que tous les Canadiens connaissent la réponse à la troisième question. C'est exact. Il a échoué.
    Le premier ministre a décidé d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence pour la première fois depuis son adoption, il y a 34 ans. Cette loi donne au gouvernement un pouvoir et un contrôle sans précédent sur la vie des Canadiens, et on ne devrait y avoir recours que dans les circonstances les plus exceptionnelles. On ne devrait pas y avoir recours lorsque les lois existantes suffisent à la tâche.
    Le seuil permettant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence n'a tout simplement pas été atteint, loin de là. C'est un cas manifeste d'intervention excessive du gouvernement. Jusqu'à présent, le premier ministre et ses ministres n'ont même pas pu articuler un motif cohérent.
    On ne peut invoquer la Loi sur les mesures d'urgence que lorsque:
[...] il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada [à une situation] qui, selon le cas:
a) met gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces;
b) menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays.
    La Loi sur les mesures d'urgence vise à contrer certains types de menaces extrêmes pour le Canada uniquement lorsque toutes les autres options existantes sont inefficaces. La Loi n'est pas destinée à permettre au premier ministre de restreindre arbitrairement et sans raison les droits de tous les citoyens.
    Le premier ministre prétend qu'il est impossible de régler les problèmes qui sont survenus ces trois dernières semaines au moyen des lois existantes. Les experts ne sont pas de cet avis. Ils disent que les dispositions existantes du Code criminel sont suffisantes et que ces pouvoirs extraordinaires sont exagérés.
    Voici un exemple. Le ministre de la Justice justifie le recours à la Loi sur les mesures d'urgence en disant qu'elle est nécessaire pour obliger les chauffeurs de dépanneuses à enlever les véhicules stationnés illégalement, mais il y a un problème avec cette affirmation: l'alinéa 129b) du Code criminel accorde déjà de tels pouvoirs à la police. Il vise quiconque:
omet, sans excuse raisonnable, de prêter main-forte à un fonctionnaire public ou à un agent de la paix qui exécute ses fonctions en arrêtant quelqu’un ou en préservant la paix,
    Le Code criminel comporte déjà d’autres articles concernant les attroupements illégaux, le harcèlement, l’intimidation et les méfaits.
    Au cours des 30 dernières années, notre pays a vécu de nombreuses crises qui ont été résolues sans le recours aux dispositions péremptoires de la Loi sur les mesures d’urgence. La Loi n’a pas été invoquée lors de la crise financière de 2008. Elle n’a pas été invoquée lors de la crise d’Oka en 1990. Elle n’a pas été invoquée dans la foulée des fusillades d’Ottawa où le caporal Nathan Cirillo a tragiquement perdu la vie en 2014. Elle n’a pas été invoquée lors des événements du 11 septembre. Elle n’a pas été invoquée en 2020, alors que des passages à niveau ont été bloqués pendant des semaines dans tout le pays, perturbant les chaînes d’approvisionnement, la livraison des marchandises et les moyens de subsistance.
    Elle n’a pas été invoquée pour s’attaquer à la crise des opioïdes. Plus récemment, on ne l’a pas utilisée pendant la pire crise que ce pays ait connue depuis la Deuxième Guerre mondiale, à savoir la pandémie de COVID-19. En fait, on ne l’a même pas utilisée la semaine dernière pour dégager le pont Ambassador, le poste frontalier d’Emerson ni, d’ailleurs, pour aucun autre poste frontalier. Les postes frontaliers ont manifestement été dégagés pacifiquement, sans violence et en vertu des lois en place.
    Pourquoi invoquer la Loi sur les mesures d’urgence? Pourquoi suspendre les droits de tous les Canadiens? Malheureusement, on ne sait pas pourquoi. Le premier ministre ne nous explique pas les raisons de cette appropriation de pouvoir historique et arbitraire.
    Il est évident que le premier ministre a perdu la maîtrise de la situation et qu’il tente désespérément d'assurer sa survie politique. Oui, les voies ensoleillées de 2015 ont fait place au sombre voile de brume de 2022. Il a perdu le contrôle et nous ne devrions pas du tout nous en surprendre.

  (1615)  

    Voici pourquoi. Lorsqu'un gouvernement réduit les peines pour les crimes graves, comme l'a fait celui‑ci, lorsqu'un premier ministre essaie d'obtenir un traitement de faveur pour ses amis à SNC-Lavalin afin de leur éviter des poursuites criminelles, lorsqu'un gouvernement renonce au respect fondamental de la primauté du droit, lorsque certains politiciens demandent de cesser le financement de la police et que le premier ministre ne répond même pas immédiatement et fermement pour rejeter cette très mauvaise idée, que se passe‑t‑il? La réponse, c'est l'anarchie, et c'est ce que nous voyons actuellement. Vous avez bien entendu: l'anarchie.
    Le Parlement est entouré de camions qui bloquent les rues d'Ottawa, empêchent les gens de circuler librement, rendent la vie des résidants du centre-ville misérable, leur font subir le bruit des klaxons 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, obligent des entreprises à fermer leurs portes et font perdre aux gens leur gagne-pain, tout cela à cause des politiques faibles du premier ministre.
    Comme nous l'avons vu à Coutts, à Windsor, à Surrey et même dans ma province, le Manitoba, les forces de l'ordre ont réussi à disperser pacifiquement les manifestants à la frontière au moyen de négociations sans avoir recours à la moindre disposition de la Loi sur les mesures d'urgence. En fait, le Manitoba et beaucoup d'autres provinces disent au premier ministre que cette mesure n'est tout simplement pas nécessaire et qu'elle pourrait même mettre le feu aux poudres.
    Le gouvernement insiste toutefois pour appliquer cette loi draconienne qui renforce considérablement la capacité de l'État à s'ingérer dans la vie privée des Canadiens, une loi qui force notamment les banques à bloquer les comptes de particuliers sans aucune forme de procès.
    Le fait est que les gouvernements provinciaux ont déjà les pouvoirs nécessaires pour gérer les blocages et les manifestations. C'est ce qui a été confirmé la semaine dernière lorsque le ministre de la Protection civile a affirmé que la police avait déjà les outils et les ressources nécessaires. Pourquoi alors invoquer la Loi sur les mesures d'urgence quelques jours plus tard?
    On a affaire à un premier ministre qui trouvait que c'était une bonne idée de faire un voyage toutes dépenses payées sur l'île de l'Aga Khan; un premier ministre qui a fait honte au Canada en dansant avec un terroriste reconnu en Inde; qui a versé 10 millions de dollars à Omar Khadr et qui a donné un contrat de 500 millions de dollars à ses copains de l'organisme UNIS en échange de 500 000 $ en honoraires de conférencier pour des membres de sa famille.
    On parle ici d'un premier ministre que le commissaire à l'éthique a reconnu coupable de manquements à l'éthique non pas une, mais bien deux fois; qui a fait pression sur la première procureure générale autochtone de notre histoire pour essayer de la convaincre d'accorder un traitement de faveur à ses amis de SNC-Lavalin, de les ménager en raison des accusations criminelles qui pesaient sur eux; qui affirme être un féministe alors qu'il expulse de son caucus des femmes de couleur courageuses pour la simple raison qu'elles ne partagent pas son avis; qui est allé se reposer à Tofino lors de la toute première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, après avoir passé des années à clamer que la réconciliation lui tenait à cœur; qui s'est personnellement moqué de manifestants autochtones qui demandaient simplement l'accès à de l'eau potable; et qui a passé des années à se maquiller le visage en noir, à tellement de reprises qu'il ne peut même pas se rappeler combien de fois il l'a fait.
    Pas plus tard que la semaine dernière, en réponse à une question raisonnable que lui avait posée la députée de Thornhill, qui est Juive, il a dit à cette dernière que les députés du Parti conservateur pouvaient bien être solidaires de gens qui brandissent des croix gammées et des drapeaux confédérés. C’est scandaleux. Quelle insulte envers la députée, la communauté juive, la mémoire des victimes l’Holocauste et les valeureux Canadiens qui ont servi pendant la Seconde Guerre mondiale et contribué à vaincre les nazis.
    Pire encore, il a refusé de présenter des excuses. Ses commentaires et son comportement sont loin — très loin même — de satisfaire aux attentes relatives à son rôle de premier ministre.
    Les conservateurs sont le parti de la loi et de l'ordre. Nous croyons qu'il faut rapidement déloger les barrages illégaux, et agir de manière pacifique. Cependant, les décisions du premier ministre, notamment celle d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, risquent d'avoir l'effet contraire.
    La grande poète américaine Maya Angelou a écrit: « Quand quelqu'un te montre qui il est, crois-le la première fois. » Les Canadiens devraient suivre ce conseil.
    Je pose encore une fois la question: comment une personne aussi irresponsable peut-elle se voir confier une responsabilité aussi lourde que celle d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence? La réponse est simple: c'est impossible.

  (1620)  

    Madame la Présidente, je souligne que le député de Winnipeg a décrit son parti comme celui de loi et de l'ordre. Plus tôt, il a aussi indiqué que l'anarchie régnait au centre-ville d'Ottawa.
    Il a raison. C'est l'anarchie qui règne depuis trois semaines. À titre d'exemple, le centre commercial Rideau a fermé ses portes depuis approximativement trois semaines. C'est une véritable honte, car si nous avions travaillé en étroite collaboration, cette fermeture aurait pu être évitée.
    Dans le cadre de discussions à l'interne, la cheffe intérimaire du député a fait la promotion de cette anarchie en refusant de dire aux manifestants de retourner chez eux. Je cite un passage d'un courriel qu'elle a envoyé: « Je ne pense pas que nous devrions leur demander de retourner chez eux. Je pense que l'atmosphère pourrait changer bientôt. Nous devons faire en sorte que cela devienne le problème du premier ministre. »
    Le député a-t-il quelque chose à dire à ce sujet?
    Madame la Présidente, l'un des éléments importants pendant un débat, c'est de rester concentrés sur l'essentiel. La question essentielle ici, c'est de déterminer si la situation satisfait aux critères établis pour le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Selon ces critères, il doit s'agir d'une situation à laquelle « il n'est pas possible de faire face [...] sous le régime des lois du Canada ». Ce critère n'a tout simplement pas été satisfait. En fait, Mme Leah West, experte en affaires internationales et professeure à l'Université Carleton, ne croit pas que cette loi s'applique à la situation. Elle a dit: « Je doute fort que la situation réponde à cette définition. » Quand le chef du NPD parle, il donne l'impression qu'il aimerait mieux aller chez le dentiste que voter en faveur de cette loi.
    Je crois qu'il faut vraiment rester concentrés sur la question à régler. Je ne crois pas que le seuil nécessaire ait été atteint.

[Français]

    Madame la Présidente, mon collègue précédent du Parti libéral se trouve à critique l'opposition en disant que si tout le monde avait travaillé ensemble, on n'en serait peut-être pas là aujourd'hui. Cela me fait sursauter.
    J'aimerais que mon collègue nous dise combien de propositions et de suggestions, depuis trois semaines, ont été faites par les partis de l'opposition, incluant le Bloc québécois, pour qu'aujourd'hui on n'en vienne pas là.
    Trouve-t-il normal que le gouvernement critique l'opposition pour un travail de gouvernance qui n'a pas été fait?

[Traduction]

    Madame la Présidente, pour justifier l'emploi de cette mesure drastique, le premier ministre a dit que ce ne serait pas la première, ni la deuxième, ni la troisième chose qu'il ferait. Mais lorsqu'on lui a demandé quelles étaient les première, deuxième et troisième choses qu'il avait faites, il a été incapable de répondre, tout comme ses ministres. La question est tout à fait légitime. Je ne sais pas comment nous avons sauté directement de A à Z sans passer par les autres lettres de l'alphabet.
    Madame la Présidente, le pont Ambassador est situé à deux kilomètres de l'endroit où je me situe, dans ma circonscription. Les choses n'ont pas repris leur cours normal. Les camions font la file et avancent plus lentement qu'auparavant. Dans une section de la ville, des barrières sur le chemin Huron Church empêchent les citoyens d'accéder aux entreprises, dont certaines sont toujours fermées, des enfants sont incapables d'aller à leur rendez-vous chez le médecin, sans compter toute une série d'autres problèmes.
    Nous avons demandé au gouvernement provincial de l'Ontario et au gouvernement fédéral d'indemniser financièrement la ville. Pas plus tard que l'autre jour, un autre convoi a été contraint de rebrousser chemin. Quels renseignements le député peut-il fournir qui permettront de sécuriser le couloir de 14 kilomètres qui s'étend entre le pont et l'autoroute 401? Comment le Parti conservateur peut-il affirmer qu'il n'existe aucune menace imminente alors qu'il y en avait une il y a à peine quelques jours?
    Madame la Présidente, je peux seulement répéter que le débat d'aujourd'hui porte sur une question fondamentalement binaire: les critères justifiant le recours à la Loi sur les mesures d'urgence ont-ils été satisfaits, oui ou non? On ne peut simplement utiliser une loi aussi draconienne que la Loi sur les mesures d'urgence sans satisfaire ces critères. Il est évident que le gouvernement est incapable de prouver que ces critères ont été satisfaits. La réalité, c'est que le pont Ambassador et les autres postes frontaliers bloqués au pays ont été dégagés en appliquant les lois déjà en vigueur.
    Madame la Présidente, c'est avec une humeur sombre que je prends la parole à la Chambre des communes aujourd'hui afin de m'élever contre le recours à la Loi sur les mesures d'urgence par le gouvernement. D'abord, il faut parler de la primauté du droit qui prévaut dans notre démocratie. À l'extérieur, la police rassemble le reste des manifestants à l'origine des barrages dans les rues d'Ottawa.
    La semaine dernière, la police a démantelé des barrages à des postes frontaliers canadiens dans cinq provinces. Toutes ces manifestations ont eu des conséquences graves sur l'économie nationale et les emplois dont les Canadiens dépendent, sur notre fiabilité à titre de partenaire commercial, sur notre chaîne d'approvisionnement — qui est déjà mise à rude épreuve comme on nous l'a abondamment expliqué —, sur nos épiceries — puisque plus de 70 % des fruits et légumes consommés au Canada en hiver viennent du Sud —, et sur l'inflation, évidemment, puisque les cargaisons ont été retardées, détournées ou annulées.
    Les Canadiens payeront le prix de ces barrages illégaux de bien des façons. Ces interruptions à court terme ont des conséquences à long terme. Je tiens à illustrer clairement que chaque barrage à nos postes frontaliers internationaux a été résolu au moyen des lois canadiennes existantes. Aucun pouvoir exceptionnel n'a été nécessaire. Nos services policiers, dans toutes les provinces, ont relevé le défi et géré ces barrages illégaux.
    L'idée que des pouvoirs exceptionnels étaient nécessaires pour gérer la situation est un stratagème, et la justification du procureur général du Canada quant à la nécessité de recourir à ces pouvoirs pour obliger les remorqueurs à leur prêter main-forte a été clairement discréditée par les références au Code criminel, qui prévoit déjà de tels pouvoirs.
    Il ne fait aucun doute que nous vivons une période exceptionnelle qui met à l'épreuve toutes nos institutions démocratiques. Rapidement, aux yeux du monde, le Canada a perdu son statut d'État de droit. Notre position selon l'indice de perception de la corruption de Transparency International a chuté considérablement. Nous sommes passés de la septième à la dixième économie mondiale en importance. Nos partenaires en sécurité internationale ne tiennent guère compte de nous et prennent des décisions sans nous consulter. Nous sommes sur la mauvaise voie.
    Comment en sommes-nous arrivés là? Le premier ministre a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence. Ce n'est que la quatrième fois dans toute l'histoire du Canada. Par le passé, elle a été invoquée pour les deux guerres mondiales et la crise du FLQ. C'est tout. En examinant de près les circonstances actuelles, cette option est gravement exagérée et inutile.
    J'ai parlé des barrages. Certains individus seront poursuivis pour les gestes qu'ils ont commis lors de ces manifestations illégales. Au départ, le convoi propageait un message d'espoir aux Canadiens et les camionneurs ont récolté beaucoup de soutien tout au long de leur périple vers Ottawa, où ils sont venus exprimer leur désaccord à l'égard de la vaccination obligatoire imposée soudainement par le gouvernement aux camionneurs transfrontaliers. C'était une mesure inutile et injustifiée, qui ne reposait sur aucune preuve scientifique. La décision du gouvernement dépassait largement les bornes des mesures raisonnables à appliquer à ces Canadiens qui ont travaillé sans relâche pour approvisionner notre pays depuis le début de la pandémie, il y a deux ans. La manière dont le premier ministre a fait passer ces valeureux Canadiens de héros à zéros du jour au lendemain est une volte-face propre à susciter des divisions.
    Aucune donnée ne permet d'établir un lien entre l'industrie du camionnage et la propagation du coronavirus. Il y a seulement un gouvernement qui cherche à diviser les Canadiens en tirant profit de leurs divergences d'opinions. Ces camionneurs ont défendu leurs droits. Je souligne que ces droits sont bel et bien inscrits dans la Charte canadienne des droits et libertés et qu'ils ne devraient pas être bafoués simplement parce que le gouvernement déclare que la situation le justifie. Ces travailleurs canadiens se sont installés derrière le volant de leur camion pour venir à Ottawa et manifester pour faire respecter leurs droits. C'est aussi cela, leur droit.
    En cours de route, les camionneurs ont recueilli le soutien d'un grand nombre de Canadiens qui en ont assez des abus de pouvoir commis par le gouvernement au cours de la pandémie. Les Canadiens en ont assez des programmes gouvernementaux coûteux et insensés qui sont uniquement conçus pour les frustrer, ce qui aura de lourdes conséquences. Je parle de l'exigence imposée aux Canadiens qui reviennent de l'étranger, qui doivent passer de nombreux tests et peut-être se placer en quarantaine. Le gouvernement rend la vie plus complexe et plus coûteuse pour les Canadiens et il n'a aucun résultat concret à montrer pour ses protocoles.
    Par ailleurs, les Canadiens voient l'envers de la médaille, soit les résultats que le gouvernement ne mesure pas, et on ne peut pas gérer ce que l'on ne mesure pas. Je parle des suicides, des surdoses, des problèmes de santé mentale, des faillites d'entreprises, des enfants qui prennent du retard dans leur développement scolaire et social et des aînés qui passent leurs dernières années seuls, isolés et inactifs. Il n'est guère étonnant que les manifestants aient rassemblé autant de partisans des quatre coins du Canada pour contester l'abus de pouvoir évident du gouvernement.
    Au lieu de demander à un ministériel de rencontrer les manifestants, le premier ministre, le diviseur en chef, les a ignorés et, pour attiser la division, il les a qualifiés d'indésirables. Ces travailleurs canadiens, qui étaient qualifiés de héros peu de temps auparavant, étaient désormais des indésirables. On est loin d'une mesure visant à résoudre un différend né d'un abus de pouvoir flagrant du gouvernement.

  (1625)  

    Malheureusement, des manifestations légales ont mené à des barrages illégaux, et nous ne pouvons pas tolérer des barrages, quels qu’ils soient. Le premier ministre pense qu’il peut décider à qui la loi s’applique, mais la primauté du droit doit être claire. Les barrages devaient être levés, et le fait qu’ils soient demeurés aussi longtemps est une autre tache à la réputation du Canada dans le monde.
    Tout cela aurait pu être évité si facilement, mais le premier ministre n’a jamais fait un seul pas vers une résolution constructive. C’est sa façon de faire. Ce qui se passe depuis un mois aura des répercussions durables sur le Canada.
    L’une des choses dont il faut parler est l’imposition de limites sur les manifestations pacifiques dans ce pays. Si le dernier barrage est un exemple de l’escalade de ce qui est considéré comme une manifestation acceptable au Canada, j’ai bien peur que notre pays soit en train de devenir essentiellement ingouvernable. Comme nous sommes tombés rapidement. Je me demande souvent si le but du premier ministre et de sa coterie est de rendre notre pays moins démocratique, moins uni et moins respectueux des lois, ou s’il s’agit simplement d’une incompétence de premier ordre.
    Rappelons comment on s'est éloigné du respect de la primauté du droit en ce qui a trait aux manifestations. Dans les six dernières années, le gouvernement n'a rien fait lorsque des manifestations ont essentiellement paralysé une grande partie de l'économie canadienne. D'ailleurs, le gouvernement a accordé du financement à des organismes qui avaient comme seul objectif de manifester et de ralentir le développement économique du Canada. Le financement de blocus par des intérêts étrangers contribue aux activités militantes depuis l'arrivée du gouvernement actuel au pouvoir. Laisser le financement secret provenant d'intérêts étrangers renforcer ses politiques fait partie des habitudes et du programme du gouvernement.
    Le résultat, c'est que des gens ont été blessés, des propriétés ont été détruites, des projets ont été retardés et annulés, des efforts de réconciliation économique avec les Autochtones ont été freinés, et des investisseurs de capitaux étrangers ont fui le Canada, tandis que des investisseurs de capitaux canadiens sont allés chercher des possibilités d'investissement ailleurs.
    J'aimerais profiter de l'occasion pour exprimer ma gratitude aux forces de l'ordre qui sont intervenues lors de la plus récente activité illégale qui a eu lieu jeudi soir, au site de construction du gazoduc Coastal GasLink. Je crois comprendre qu'un agent a été blessé et que des travailleurs ont été menacés de graves préjudices. Cette situation ne peut plus durer, et j'espère que les agresseurs seront poursuivis avec toute la rigueur de la loi.
    Peut-on comprendre maintenant pourquoi les Canadiens ne savent pas exactement comment les mesures législatives s'appliquent aux manifestations? Le gouvernement a intentionnellement veillé à ce que les modalités ne soient pas claires afin de promouvoir son objectif de bâtir un état postnational avec des fonds publics et du financement provenant d'intérêts étrangers.
    Cela m'amène à la partie la plus répréhensible des décrets liés à la Loi sur les mesures d'urgence, c'est‑à‑dire celle qui consiste à exiger de tout fournisseur de services financiers qu'il détermine s'il a en sa possession ou sous son contrôle des biens appartenant à une personne qui a participé au blocage. Je ne pense pas que la ministre des Finances a la moindre idée des répercussions financières qu'entraînera cette proposition. Elle demande aux banques canadiennes de geler, sans ordonnance judiciaire, les comptes de Canadiens qui n'ont commis aucun crime.
    Par exemple, une retraitée qui a peut-être fait un don de 50 $ lorsque son fils lui a demandé de soutenir son droit de manifester aura son compte gelé. Elle n'aura donc aucun moyen de payer sa nourriture ou le loyer de sa résidence pour personnes âgées. Il y aura donc des répercussions sur le plan humain, mais il y aura également d'énormes répercussions sur le système financier du Canada. Lorsque les Canadiens ne feront plus confiance aux banques canadiennes, lorsque nos comptes d'épargne-retraite ne seront plus considérés comme sûrs et que le gouvernement pourra unilatéralement geler nos comptes bancaires, le système financier du Canada connaîtra une crise. Je demande donc au gouvernement de se projeter dans l'avenir et de tenir compte de ces répercussions.
    J'ai également présenté au Comité permanent des finances de la Chambre des communes une motion qui porte sur cette question, et le Comité commencera à se réunir d'urgence pour étudier cette motion à partir de mardi. Je remercie mes collègues des autres partis qui ont contribué à l'adoption de cette motion jeudi dernier.
    Les conséquences dont je parlais à l'instant ne peuvent pas être prises en compte après coup, comme le fait généralement le gouvernement. Je me réconforte en sachant qu'il y a au moins un député libéral, celui de Louis‑Hébert, qui a appuyé notre motion et qui aurait souhaité que le gouvernement commence à alléger les restrictions en tout genre. Il y a de l'espoir.

  (1630)  

[Français]

    La motion que nous avons présentée la semaine dernière a été défaite au Parlement, mais j'ai été très heureux que le Bloc québécois appuie la motion.

[Traduction]

    Le député de Louis‑Hébert a clairement dit que le premier ministre et son équipe ont fait le choix de diviser et de stigmatiser les Canadiens sur la question de la pandémie. Ce n'est pas ce que j'appelle du leadership et ce n'est pas non plus une façon de gouverner.
    Je rappelle au premier ministre qu'on finit toujours par récolter ce qu'on a semé. Le pays est profondément divisé et c'est en bonne partie parce que vous avez choisi de diviser la population.
    Le monde regarde le Canada comme il ne l'a jamais regardé auparavant, et pas nécessairement pour les bonnes raisons. J'implore mes collègues et amis du Parti libéral et du Nouveau Parti démocratique de tenir tête à leurs chefs. L'enjeu va bien au-delà de la simple politique. C'est la démocratie canadienne qui est en péril. Votez contre ce projet de loi, je vous en supplie.

  (1635)  

    Je souligne au député qu'il s'est adressé directement au gouvernement à la fin de son discours alors qu'il doit s'adresser à la présidence.
    Madame la Présidente, je remercie le député de Calgary-Centre de ses observations. Comme brève réplique, je dirai simplement que les pouvoirs découlant de l'invocation de la Loi sur les mesures d’urgence ont été utilisés pas plus tard que le 16 février, à Windsor, pour empêcher le rétablissement d'un barrage. Si le député s'inquiète des investissements au Canada, je ferais valoir que les barrages nuisent au climat d'investissement.
    Je veux aborder une partie de sa réponse au secrétaire parlementaire de la ministre des Affaires étrangères. Il a dit que nous ne devrions pas stigmatiser des gens, et je suis d'accord avec lui. Toutefois, lorsque des éléments de l'extrême droite, y compris un groupe dénommé Diagolon, cherchent activement à se procurer des armes, des munitions et des gilets pare-balles pour bloquer la frontière à Coutts, lorsque ces efforts mènent à quatre arrestations pour complot en vue de commettre un meurtre et à des enquêtes sur les liens possibles entre ce groupe et les groupes qui ont brandi la croix gammée et le drapeau confédéré ici, à Ottawa, et lorsque les barrages se poursuivent à Ottawa, je pense que nous sommes bel et bien devant une menace constante qui doit être résolue.
    Le député peut-il nous dire ce qu'il en pense?
    Madame la Présidente, je suis en effet très heureux que les agents frontaliers de Coutts en Alberta aient pu intercepter ces éléments très dangereux qui s’étaient infiltrés parmi les organisateurs de la manifestation. Lorsqu'ils l'ont su, les manifestants se sont dispersés, car ils ne voulaient pas se retrouver associés à ces éléments.
    Que l'on soit de droite ou de gauche, là n’est pas la question, car c’est un problème présent partout. Quoi qu’il arrive, il y aura toujours des individus pour enfreindre la loi. Nous disons depuis le début que ces barrages sont en soi illégaux, mais si on y décèle de la violence — ce qui met potentiellement des agents en danger — et que les choses deviennent plus sérieuses, il faut en effet agir sur‑le‑champ. Peu importe les affiliations des personnes concernées. Toute activité illégale susceptible de générer de la violence est néfaste pour tous.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son discours.
    Plus tôt aujourd'hui, des propos m'ont fait sursauter. J'ai failli tomber en bas de ma chaise, qui est d'ailleurs solide. Deux députés du caucus libéral, les députés de Hull—Aylmer et de Don Valley‑Ouest, nous ont dit, mot pour mot — on peut regarder les Bleus —, qu'ils n'étaient pas certains à 100 % que la mise en application de la Loi sur les mesures d'urgence était la bonne décision à prendre.
    Ma question pour mon honorable collègue est très simple: ne croit-il pas comme moi que lorsqu'on veut décréter la Loi sur les mesures d'urgence, il faut être sûr à 100 % pour prendre cette décision?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue du Bloc québécois de sa question.
    Je suis totalement d'accord avec lui. Le gouvernement n'a pas fait la preuve à la Chambre des communes qu'il était nécessaire de mettre en application une telle loi.

[Traduction]

    Madame la Présidente, nous avons beaucoup entendu parler des barrages de Coutts à la Chambre. Le député qui a pris la parole plus tôt s'est interrogé sur les répercussions juridiques, les individus accusés de tentative de meurtre, la violence et le racisme blanc. N’oublions pas de mentionner les répercussions économiques. Ce barrage qui a duré 18 jours a coûté 864 millions de dollars au gouvernement de l’Alberta.
    Que doit-on faire lorsqu’un gouvernement en place, le gouvernement de l’Alberta, qui dispose de la loi 1— une loi pouvant effectivement mettre fin à ces barrages — n’a pas recours à cette loi? Lorsque le gouvernement provincial ne fait rien pour protéger sa population et son économie, le gouvernement fédéral n’est-il pas dans l’obligation d’intervenir?

  (1640)  

    Madame la Présidente, je souligne que le barrage de Coutts a été en quelque sorte démantelé et qu'une voie a été rouverte peu après. Néanmoins, il y a eu à cet endroit un élément problématique. Nous le savons. Nous savons qu'il y a eu un ralentissement. Je n'avais pas entendu le chiffre que la députée a mentionné, soit les 864 millions de dollars qu'a coûté l'interruption des échanges commerciaux, mais j'ai souligné dans mon discours l'importance de s'assurer que les postes frontaliers demeurent ouverts partout au Canada.
    Je lui ferai aussi remarquer que le gouvernement de l'Alberta n'a pas demandé l'intervention du gouvernement canadien. Je ne sais pas comment le gouvernement canadien intervient. L'Alberta a déjà un corps policier. La province va-t-elle demander des forces policières de partout au pays? Le gouvernement de l'Alberta, qui a plusieurs types de corps policiers, a agi pour le bien de la population de l'Alberta afin de veiller à ce que les marchandises traversent la frontière.
    Demande-t-il...
    Je crois que votre temps est écoulé. Je suis désolée. J'essaie de respecter les temps de parole de sorte que tous puissent terminer leur discours.

[Français]

    Nous reprenons le débat. La députée de Saint-Jean a la parole.
    Madame la Présidente, je vous informe que je vais partager mon temps de parole avec mon estimé collègue de Mirabel.
    Avant toute chose, j'aimerais mentionner que je vais m'adonner aujourd'hui à quelque chose qui n'est pas dans mon habitude. Plutôt que de livrer mon discours ad libitum, ce qui est la formule que j'ai tendance à fortement privilégier pour les débats parlementaires, car cela les rend beaucoup plus vivants, je vais le lire d'un bout à l'autre.
    C'est ma façon d'essayer de donner un peu de souffle au personnel de soutien de la Chambre qui met les bouchées doubles présentement pour nous permettre de faire notre travail. Je me permets d'en profiter pour les remercier chaudement.
    Nous débattons aujourd'hui de quelque chose d'exceptionnel. Je ne parle pas de la situation, mais de la Loi sur les mesures d'urgence elle-même. La Loi est exceptionnelle. Cette loi est une loi d'application ex post facto. Cela veut dire que c'est une loi qui s'applique après coup. Cela déroge complètement au principe de base de justice naturelle voulant qu'une personne ne devrait pas être soumise à des lois arbitraires imposées par un gouvernement qui peut décider qu'une action est illégale après les faits, et surtout de façon rétroactive.
    C'est expressément pour justifier de déroger à ce principe de base, et pour éviter de saper les fondements de la démocratie voulant que les citoyens devraient être à l'abri des perquisitions et saisies abusives par le gouvernement que le Parlement, lorsqu'il l'a promulguée en 1988, en a très clairement circonscrit les critères de mise en œuvre. C'est précisément ce sur quoi les élus devraient se pencher aujourd'hui.
    La seule question qui compte est: est‑ce qu'on satisfait les critères de mise en œuvre de la Loi, parce que ces critères‑là ont été pensés rigoureusement pour protéger les remparts de la justice et de la démocratie?
    La note d'information fournie par le gouvernement est assez éclairante sur ces critères de mise en œuvre:
    La loi contient une définition précise de « crise nationale » qui indique clairement à quel point une situation doit être grave avant que l'on puisse l'invoquer. Une crise nationale est une situation urgente, temporaire et critique qui met sérieusement en danger la santé et la sécurité des Canadiens ou menace la capacité du gouvernement du Canada de préserver la souveraineté, la sécurité et l'intégrité territoriale du Canada. Ce doit être une situation d'urgence qui ne peut être réglée efficacement par les provinces et les territoires, ou par toute autre loi du Canada.
    En gros, il ne faut pas juste faire la preuve que la Loi est utile, il faut faire la preuve que d'y recourir est nécessaire. Il ne faut pas juste regarder la gravité de la situation, il faut en arriver à la seule conclusion qu'on n’est pas capable de répondre à une situation d'urgence autrement que par la mise en œuvre de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Le problème est que j'ai écouté les discours des parlementaires qui soutiennent le recours à la Loi jusqu'à maintenant. Je les ai écoutés de bonne foi, au cas où j'entendrais un argument qui me ferait douter de ma propre position. À date, il n'y a rien qui m'a convaincue. J'ai envie de présenter un florilège de certains arguments entendus depuis le début des débats, et de proposer mes pistes de réflexion en réponse.
    On a malheureusement entendu des discours complets par lesquels on a tenté de justifier l'application de la Loi parce que, par exemple, la situation qui a prévalu a empêché la population de profiter la beauté d'Ottawa, ou parce que les gens n'ont pas pu aller dans les musées, ou encore parce que des entreprises n'ont pas pu ouvrir.
    On pourrait penser que c'est même un peu ridicule de souligner ces arguments qui ont été utilisés dans le cadre du débat qui nous occupe. Si je le fais, c'est parce que cela n'a pas été anecdotique de recourir à ces arguments.
    On a entendu plusieurs députés tenter de se justifier par des arguments qui étaient à des lieues de ce qui constituerait ne serait‑ce qu'un début de l'onde d'un iota de situation d'urgence nationale. Je soutiens que c'est révélateur de la pauvreté de l'argumentaire au soutien de l'application de la Loi.
    On a aussi entendu comme arguments qu'il y a 72 % de la population qui est d'accord sur le recours à la Loi. Je trouve pour le moins épeurant que, pour justifier le recours à une loi d'exception, on s'en remette à un sondage. Évidemment, dans les critères que j'ai énoncés plus tôt, il n'y a rien qui dit qu'à partir de tel pourcentage d'appui populaire, c'est justifié de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence. C'est une sacrée chance.
    Cela dit, je me permets quand même le commentaire suivant: je reste absolument convaincue que cette adhésion à 72 % n'est pas spécifiquement envers le recours à la Loi. Elle traduit plutôt tout simplement une volonté de la population de voir la situation se régler, peu importe le moyen utilisé. Elle reflète la réaction de la population au manque flagrant de leadership du gouvernement dans sa gestion de crise. En fin de compte, l'utilisation par le gouvernement de la Loi sur les mesures d'urgence ne reste qu'une triste tentative de camoufler son incompétence.
    Tant mieux, il y a quand même eu des arguments qui semblent convaincre et qui méritent qu'on s'y attarde davantage.

  (1645)  

    Le député de Windsor-Ouest, lors de ses questions et de ses observations, a souligné plusieurs fois aujourd'hui que la situation au pont Ambassador n'était pas complètement réglée. Il a soulevé que bien qu'une partie de la circulation ait repris, il reste encore des embûches et des entraves. Il a mentionné que des familles avaient été empêchées, par exemple, d'avoir accès à des soins de santé.
    Il a demandé à mes collègues du Bloc ce qu'on avait à dire à ces familles. Il a demandé si nous ne devions pas, pour elles, soutenir la Loi sur les mesures d'urgence. Évidemment, j'ai toute la compassion du monde pour ces familles, mais je crois malgré tout que le recours à la Loi n'est pas la solution.
    À preuve, les autorités peuvent s'en prévaloir depuis lundi, et, de l'aveu même du député, la situation n'est pourtant pas réglée. Par ailleurs, le plus gros du démantèlement des barricades s'est fait avant la promulgation de la déclaration par le truchement des moyens légaux déjà existants.
    Ce n'est pas le recours à la Loi qui est l'enjeu ici, c'est davantage l'utilisation mauvaise ou incomplète des ressources qu'on a déjà, et l'on ne devrait pas faire miroiter à ces familles que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence va régler leur situation.
    Le chef du NPD et plusieurs de ses collègues ont également invoqué comme argument le fait que la situation était urgente, notamment parce que plusieurs des occupants ont commencé à en appeler au renversement du gouvernement en place, qu'il y avait carrément sédition.
    J'ai fait une bonne partie de mes études à l'UQAM. Il y avait pratiquement chaque semaine une manifestation appelant à renverser le gouvernement. Par chance, personne n'a demandé l'application de la Loi sur les mesures de guerre. Si cela avait été le cas, Montréal aurait été constamment en situation d'urgence.
    Plus sérieusement, je doute que le critère de crainte sérieuse et réelle pour la souveraineté de l'État trouve application ici. Si l’on se fie à la définition de Max Weber, le gouvernement n'est pas sur le point d'avoir perdu le monopole de la violence légitime et on n'est pas en situation d'insurrection.
    Quant à l'intégrité du territoire, je veux bien que les Ottaviens soient chauvins, mais la prise d'assaut d'un périmètre de trois kilomètres carrés, malgré le statut de capitale nationale dont Ottawa jouit, je doute vraiment que ce soit assimilable à l'effritement de l'intégrité d'un territoire d'un pays qui fait, autrement, 10 millions de kilomètres carrés.
    On a aussi entendu comme argument que les policiers ont dit qu'ils n'auraient pas pu faire tout ce qu'ils ont fait sans la Loi sur les mesures d'urgence. De mon côté, ce que j'ai surtout entendu des policiers, c'est que la Loi était utile. Je ne les ai toutefois pas entendus sur la raison pour laquelle elle était nécessaire.
    Mes collègues du Bloc ont brillamment exposé de quelles façons les lois déjà existantes permettaient la prise concrète d'actions sans recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Rien aussi, avant lundi, n'empêchait les différents corps policiers de se concerter pour en arriver aux résultats qu'on a vus au cours des dernières 24 heures.
    Par ailleurs, ce n'est pas le rôle des policiers de justifier le recours à la Loi. C'est le rôle des parlementaires. Je me permets de trouver que le fait de simplement citer les policiers sans, par ailleurs, établir concrètement et clairement quel vide juridique de la Loi sur les mesures d'urgence cela vient combler, c'est pas mal faible comme argument. Je le vois même comme une forme d'abdication du rôle de parlementaire.
    Le député qui s'est principalement basé sur l'opinion des policiers pour justifier son soutien à la Loi, a mentionné, en réponse à un de mes collègues, qu'il n'était pas certain à 100 % que de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence était la meilleure des choses à faire. La Loi sur les mesures d'urgence, c'est le genre de loi qui mérite qu'on soit plus certain que cela quand vient le temps de l'appliquer et qu'on ait au moins essayé au préalable de régler la situation autrement.
     Une collègue a invoqué ce matin, comme autre argument, que la Loi sur les mesures d'urgence a probablement découragé des manifestants de venir gonfler les rangs des occupants déjà sur place. Je trouve particulièrement dangereuse la pente glissante voulant qu'on puisse même considérer l'application de la Loi sur les mesures d'urgence dans le but d'obtenir un effet dissuasif et, qui plus est, de façon préventive.
    Par ailleurs, de lundi à vendredi matin, pendant que la Loi était en application, rien n'a découragé les manifestants de faire la fête, d'organiser des barbecues ou de se glisser dans un spa en plein milieu de la rue. Ce n'est pas la Loi qui a eu un effet dissuasif, c'est le déclenchement, finalement, d'une action concertée des policiers.
    Je me permets de reprendre les paroles de Jim Watson, qui disait d'ailleurs ce matin que ces opérations policières auraient dû avoir lieu dès le deuxième jour. L'important, ce n'est pas juste qu'elles auraient dû avoir lieu, c'est que, même sans la Loi sur les mesures d'urgence, elles auraient pu avoir lieu.
    Finalement, on nous a servi comme argument que nous devrions soutenir la Loi sur les mesures d'urgence parce qu'elle est souhaitée par la Ville d'Ottawa et par le gouvernement de l'Ontario, qui ont, eux aussi, promulgué leurs propres lois d'urgence.
    L'approbation des provinces est un garde-fou qui sert à baliser l'application de la Loi, et non pas une justification unique permettant de l'invoquer. Encore une fois, les critères ouvrant à la mise en œuvre de la Loi sont bien définis, et le seul fait pour une province d'en faire la demande n'est pas un de ces critères. Si ce l'était, il y aurait malheureusement à craindre un usage injustifié de la Loi dès lors qu'une province perdrait le contrôle d'une situation, et ce, sans avoir à faire la preuve au préalable que toutes les solutions possibles ont été tentées et que la province est, dans les faits, à court de ressources.
    Bref, je demeure sur ma faim. J'attends encore d'entendre un argument qui me ferait changer d'idée d'ici lundi, mais je dois avouer que j'y crois de moins en moins. Le gouvernement n'a pas rempli son fardeau de nous convaincre que nous n'avons pas d'autre choix que de recourir à la Loi, comme la Loi le prévoit par ailleurs, et, dans le contexte, je vois difficilement comment je pourrais me prononcer en faveur.

  (1650)  

[Traduction]

    La députée soulève un point très intéressant, madame la Présidente. Elle a dit qu'avant lundi, rien n'empêchait les divers corps policiers de travailler de concert. En fait, ce n'est pas totalement vrai. À moins d'être un agent de police assermenté en Ontario, on ne peut pas faire respecter la loi en Ontario. Je suis certain qu'Ottawa est extrêmement reconnaissante envers les agents de la Sûreté du Québec, mais sans la Loi sur les mesures d'urgence pour leur permettre d'appliquer la loi en Ontario, ces policiers n'auraient pas pu intervenir. J'aimerais entendre les observations de la députée là-dessus.

[Français]

    Madame la Présidente, je rappelle que la Loi sur les mesures d’urgence prévoit qu’on doit avoir tenté tout ce qui est possible. Or, avant de l’invoquer, on n'a fait aucune tentative de concertation entre les différents corps policiers. C'est la preuve qu’on a employé ce que certains députés ont appelé la solution atomique sans que ce soit justifié. Un travail n'a pas été fait.
    Le seul règlement d'application qui diffère de ce qui est déjà permis dans le cadre des lois actuelles, c’est celui qui permet la réquisition des remorques. Mes collègues en ont fait la preuve. Le recours à la Loi les mesures d’urgence ressemble surtout à un show de boucane visant à remédier à la mauvaise gestion de crise du gouvernement.

[Traduction]

    Madame la Présidente, à divers moments de la journée aujourd'hui, nous avons été témoins de l'attitude triomphaliste des libéraux, qui se vantent de l'efficacité des mesures. C'est peut-être en partie parce que l'efficacité est un concept nouveau pour eux et que leur caucus n'y est pas habitué. À mon avis, l'efficacité n'est pas le critère à utiliser pour juger des mesures. Il faut plutôt se demander si elles sont justifiées.
    Étant donné le précédent que nous créons aujourd'hui, dans quelles autres situations la députée craint-elle que l'on recoure à la loi?

[Français]

    Madame la Présidente, quand on a créé la Loi sur les mesures de guerre, on a prévu plusieurs scénarios, mais rien de précis. Un des fondements d'une loi, c'est qu'elle ne doit pas s'appliquer à une situation déterminée. Elle doit être pensée de façon générale afin d'éviter qu'elle ne soit abusive.
    C’est pour cette raison qu’il existe des critères permettant de déterminer si on doit avoir recours à la Loi sur les mesures de guerre. Je ne vois pas l’utilité de penser à une situation très précise où la Loi pourrait s’appliquer, parce qu'elle a été pensée de façon large, et des balises permettent justement de respecter les principes de justice naturelle et de démocratie. Il n’est même pas nécessaire de penser à des applications potentielles, car la Loi est déjà pensée pour qu’on puisse faire face à cela.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'aimerais revenir sur l'incapacité de la police locale et provinciale à faire face à la situation. J'ai entendu dire à plusieurs reprises que la police avait les outils et les ressources nécessaires. Toutefois, ce qu'ont dit les forces de l'ordre, c'est qu'en raison d'erreurs commises dès le début de la crise, elles estimaient ne pas avoir les outils et les ressources nécessaires pour rétablir l'ordre social. Ce n'est que lorsque le gouvernement fédéral est intervenu que l'ordre social a commencé à être rétabli.
    Je suis conscient que c'est à la police locale d'appliquer la loi et qu'elle peut compter sur la police provinciale au besoin. Lorsque ces deux niveaux échouent et appellent à l'aide, quelqu'un ne devrait‑il pas assumer cette responsabilité? Quelqu'un ne devrait‑il pas intervenir et répondre aux gens d'Ottawa et de partout au pays qui demandent qu'on leur accorde une protection?

  (1655)  

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie le député de son intéressante question. J’y ai répondu directement dans mon discours.
    J’ai mentionné que je craignais beaucoup qu'une demande d’une province ou d’une ville qui a échoué à répondre à une crise nationale devienne un critère permettant de recourir à la Loi. L’échec n’est pas un critère selon la Loi; il faut plutôt avoir épuisé adéquatement les ressources disponibles.
     Malheureusement, il y a eu du laxisme et des problèmes relatifs au travail policier. Un chef de police a d'ailleurs démissionné. Cependant, cela ne devrait pas être un critère pour recourir à une mesure législative qui est aussi forte et qui a un tel potentiel de brimer arbitrairement des droits fondamentaux.
    Madame la Présidente, jamais le Bloc québécois n'a sanctionné les actions qui ont cours dans les rues d'Ottawa; ce sont des actes répréhensibles. Par ailleurs, j'aimerais au nom du Bloc québécois saluer l'excellent travail des policiers, qui ont finalement eu aujourd'hui les ressources nécessaires pour agir à la hauteur de ce qui était requis.
    Le problème, c'est que cela aurait dû être fait il y a longtemps. Le problème, c'est aussi qu'on a un gouvernement et un premier ministre nonchalants. C'est un gouvernement qui ne prend pas de décision.
    Chantal Hébert, qui a couvert plusieurs gouvernements depuis très longtemps, disait hier à la radio que chaque gouvernement successif au Canada était de plus en plus centralisateur. Elle a dit que, avec le gouvernement qu'on a actuellement, « on est arrivé au bout de l'exercice ». C'est un gouvernement qui est incapable d'agir, qui est incapable de prendre la décision.
    On comprend que le premier ministre a dû se confiner, mais quand c'est le temps de décider, on dirait qu'il a la COVID-19 de longue durée.
    Ce qui est arrivé avec la Loi sur les mesures d'urgence, c'est un coup de publicité, comme seul ce premier ministre sait le faire. Le problème, c'est qu'on crée un dangereux précédent. Le sceau a été brisé. J'ai peur et nous craignons que, dans l'avenir, un autre gouvernement puisse se justifier de ce qui est arrivé dans les rues d'Ottawa pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence lorsque l'enjeu sera local, qu'il sera partisan et qu'il fera l'affaire du gouvernement. En l'utilisant dans les circonstances actuelles, on salit la réputation du Canada encore plus.
     Les précédents parlent d'eux-mêmes, mais le Bloc québécois leur a prêté sa voix. J'aimerais donner un exemple et parler du Sommet des Amériques, à Québec, en avril 2001 où on a érigé une clôture de trois mètres de haut sur quatre kilomètres de long dans un secteur résidentiel densément peuplé, où les forces de sécurité ont été fournies par la Sûreté du Québec, la police de Québec, la GRC, le SCRS, les Forces armées canadiennes, où les manifestants étaient organisés, financés, motivés et remettaient en question l'autorité de l'État. Ces derniers ont fait avorter un projet d'accord de libre-échange. Jamais, on a invoqué à ce moment-là l'état d'urgence, parce que les gouvernements, incluant le gouvernement fédéral, étaient prêts. C'est cela qui arrive.
    On est devant un gouvernement qui ne gouverne pas, qui est incapable de prendre des décisions, incapable de nommer un ambassadeur à Paris, incapable de faire ses appels d'offres à temps dans les projets de transport ferroviaire que les Québécois attendent. C'est un gouvernement qui ne décide pas sur Huawei alors que tous ses partenaires commerciaux l'ont déjà fait. On se demande parfois si c'est un gouvernement qui est capable de quoi que ce soit.
    Ce qui est arrivé dans les rues nous montre que nos présomptions sont peut-être justifiées. Oui, le Bloc québécois a posé des questions. Le Bloc québécois a demandé une cellule de crise. Le Bloc québécois est intervenu. On nous a accusés de demander aux politiciens de contrôler la police. Le 7 février dernier, le chef de la police d'Ottawa a demandé 1 800 policiers supplémentaires. La réponse du gouvernement fut d'envoyer 275 policiers, dont 20 seulement ont été affectés aux manifestations. En pourcentage, cela veut dire que 1 % des demandes d'effectifs de la police d'Ottawa a été satisfait. C'est 99 % d'échec. C'est mesurable en proportion de ce que la police d'Ottawa elle-même a demandé alors qu'il était encore temps d'agir.
    Oui, il est possible de collaborer. Oui, il est possible d'utiliser les lois en vigueur. Oui, il est possible de punir ces actes répréhensibles. C'est pour cela que la motion votée par l'Assemblée nationale du Québec, qui demandait à ce que la Loi sur les mesures d'urgence ne s'applique pas au Québec, insistait aussi sur la nécessité que le gouvernement fédéral collabore avec les provinces.
    S'il est une preuve que cette collaboration a été déficiente, nous en avons une. La CAQ, le Parti libéral du Québec, Québec solidaire, le Parti québécois et même la députée du Parti conservateur du Québec ont appuyé la motion. Cette unanimité du Québec sera ignorée grâce à la coalition du « nouveau parti libéral démocratique du Canada ».
    On nous dit qu'on avait besoin de cette loi, notamment pour pouvoir geler les comptes de banque et agir sur des impératifs financiers.

  (1700)  

    On me permettra d'être inquiet d'avoir un gouvernement qui se sent obligé d'invoquer les mesures d'urgence pour être capable de bloquer le financement de camionneurs. Il peut arriver beaucoup plus grave, on espère que cela n'arrive pas, mais je suis extrêmement inquiet.
    L'institut sur la gouvernance de Bâle a déjà souligné que le CANAFE, le système canadien d'information et de suivi sur les crimes financiers, n'avait pas assez d'employés, pas assez d'argent, pas assez de ressources et qu'il était incapable de faire le suivi de façon à prévenir les crimes financiers. Par ailleurs, le Canada a une réputation internationale d'être incapable, ou peut-être que cela ne lui tente juste pas, de poursuivre les gens qui commettent ces crimes. Nous sommes au XXIe siècle et le gouvernement nous confirme qu'il ne s'est pas doté des outils du XXIe siècle pour faire face aux menaces du XXIe siècle et pour ce qui est des camionneurs, on prend les mesures d'urgence.
    Que reste-t-il? Il fallait la Loi sur les mesures d'urgence pour réquisitionner des remorqueuses. Quel genre de leadership exerce-t-on quand même les remorqueurs ne veulent pas nous suivre? C'est très grave.
    Il est clair que la Loi existe pour un certain nombre de raisons. Il y a des circonstances dans lesquelles cette loi doit être utilisée. La crise doit être d'envergure nationale. On doit en être aux derniers recours et présentement on n’en est pas aux derniers recours. Il y avait des recours précédents qui auraient dû être utilisés et ils ne l'ont pas été. J'ai l'intime conviction qu'on aurait pu faire plus. Les faits parlent d'eux-mêmes.
    On nous dira que le chef de police d'Ottawa, qui a un travail à faire, on le comprend, a dit que les mesures extraordinaires actuellement en place lui ont été utiles. Ce que le chef de police d'Ottawa a dit, c'est que les états d'urgence municipal, provincial et fédéral lui ont été utiles. D'autres ordres de gouvernement ont commencé à faire leur travail avant que le gouvernement fasse le sien.
    Du côté du gouvernement, et j'attends les questions, on nous dira que cela a été utile et qu'on a donné des outils supplémentaires aux policiers. Premièrement, on aurait pu avoir les opérations qui ont cours avec des effectifs renforcés. Deuxièmement, s'il existe un Parlement, s'il existe un législateur, s'il existe des lois qui encadrent les mesures d'urgence, c'est exactement parce qu'on ne veut pas toujours donner aux policiers tous les outils qu'ils voudraient. Voilà ce qu'est la démocratie, c'est l'exercice du pouvoir législatif sur l'exécutif et sur la police.
    Je pourrais nommer une panoplie de pouvoirs que les policiers ont déjà eus et qu'ils n'ont plus et qui auraient été utiles aujourd'hui, pour eux, et qu'on refuse de leur donner parce qu'en démocratie on ne leur donne pas à moins que la situation soit désespérée.
    Tout le long de cette crise, j'ai essayé de trouver le leadership dans ce gouvernement. J'ai essayé de voir où se prenaient les décisions. J'ai essayé de comprendre où était la tête de ce gouvernement. Après moult recherches, j'ai été obligé de m'arrêter aux épaules.

  (1705)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'aimerais soulever un problème de logique dans l'intervention du député. En effet, il dit que nous sommes incapables de prendre des décisions sur les banquettes ministérielles…
    Excusez-moi, mais nous avons le même problème que tout à l'heure, c'est‑à‑dire qu'il n'y a pas d'interprétation.
    Je vais passer au prochain parti et je reviendrai ensuite au secrétaire parlementaire.
    Nous passons aux questions et observations. Le député de Kamloops—Thompson—Cariboo a la parole.
    Madame la Présidente, c'est toujours un plaisir prendre la parole au nom des gens de Kamloops-Thompson-Cariboo.
    Je voudrais poser à mon collègue une question qui fait suite à une question qui a été posée par le député de Kingston et les Îles. Ce dernier a posé à une collègue de mon collègue une question au sujet de la Loi sur les mesures d'urgence. J'espère vraiment que je vais bien m'expliquer. En effet, le député de Kingston et les Îles a dit que la Loi sur les mesures d'urgence était nécessaire pour faire appel à d'autres policiers.
    Si on consulte la Refonte complète des services de police de l'Ontario, que j'ai pu trouver en environ 45 secondes, l'article 21(1) prévoit ce qui suit:
    Dans une situation d'urgence, le ministre peut conclure avec la Couronne du chef du Canada, ou d'une autre province, ou avec l'un quelconque de ses organismes un accord en vue de la prestation de services policiers.
    Cela semble aller directement à l'encontre de la déclaration du député de Kingston et les Îles. Le député peut-il nous dire ce qu'il en pense?

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai l'honneur d'avoir eu le député de Kingston et les Îles comme conseiller municipal et comme maire quand j'étais moi-même en train de faire mon doctorat à l'Université Queen's.
    Chaque année, dans la ville de Kingston, il y a ce qu'on appelle le « Homecoming », un événement où des milliers de personnes renversent des voitures de police, commettent des actes criminels et virent la ville sens dessus dessous, et où on appelle la police de Toronto, celle de Brockville, celle de Kingston, celle de Cornwall, ainsi que la cavalerie.
    Selon que je peux me rappeler, en lien avec mes cinq belles années dans la ville même du député de Kingston et les Îles, c'est qu'il n'a jamais demandé l'état d'urgence.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je veux souligner l'incohérence des propos du député, qui affirme que le gouvernement libéral est incapable de prendre des décisions, alors qu'il a pris une décision qu'aucun autre gouvernement n'avait prise dans l'histoire canadienne.
    Trouvons un terrain d'entente. Le Bloc est contre les barrages, qu'il a qualifiés d'illégaux. Nous en convenons tous. Nous convenons aussi qu'il faut écouter la police et tarir les sources de financement qui permettent que ces barrages existent. Pour ce faire, il faut effectuer le suivi des fonds dans les coopératives de crédit, les banques, les sites de cryptomonnaie et les sites Web.
    Étant donné qu'aucun de ces sites ou de ses fonds qui nécessiteraient l'application de ces mesures d'urgence au Québec ne provient de cette province, le député d'en face accepte-t-il que cet aspect de la loi s'applique dans sa province?

  (1710)  

[Français]

    Madame la Présidente, vous me permettrez de me passer du petit cours de logique de mon collègue.
    Les experts en sécurité nous disent que la communication est l'outil le plus important dans le cadre d'opérations comme celle-là.
    Or, pendant deux ou trois semaines, nous avons demandé à avoir une cellule de crise et un point de presse du ministre. Les libéraux n'ont pas décidé de le faire. Ils ne prennent pas de décisions.
    Le chef de police d'Ottawa nous disait hier que, plus on a d'effectifs et plus on les a tôt, moins on doit faire usage de violence. Les libéraux n'ont pas pris leurs décisions, et voilà où nous en sommes.
    Je vois que mon collègue travaille de la maison. Sa logique, il l'a peut-être oubliée dans l'antichambre.

[Traduction]

    Madame la Présidente, la question que je veux poser au député de Mirabel concerne ce dont il a parlé au début de son discours, c'est-à-dire le précédent. Croit-il vraiment que le fait de laisser manifester des groupes prêts à utiliser la violence, l'intimidation et la haine pour annuler les décisions prises par un gouvernement dûment élu constitue un précédent que nous aurions pu tolérer encore longtemps sans que cela devienne un précédent dangereux en soi?

[Français]

    Madame la Présidente, nous parlions justement de logique. La logique toute tordue de la question de mon collègue, c'est de dire que, lorsqu'il y a une manifestation ou que quelqu'un n'aime pas le gouvernement, peu importe le niveau de la menace, peu importe le niveau de l'organisation et peu importe l'inaction du gouvernement, la solution est: celle qui est la pire, la plus radicale et de dernier recours.
    Nous n'avons jamais cautionné les actions qui avaient lieu dans la rue. Nous n'avons jamais minimisé la menace. Nous n'avons jamais minimisé l'importance de cela. C'est pour ces raisons que, depuis trois semaines, nous faisons des propositions.
    Je suis content de savoir que mon collègue vient de se réveiller.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'aimerais partager mon temps de parole avec mon collègue le député d'Esquimalt—Saanich—Sooke.

[Français]

    Ce qui s'est passé dans les derniers jours au Canada est sans précédent. C'est une attaque organisée contre notre démocratie, venant de la droite radicale financée au-delà de nos frontières. Nos concitoyens et concitoyennes ont été intimidés. Le Parlement a été obligé de fermer, sa sécurité étant menacée.

[Traduction]

    Une telle situation est sans précédent au Canada, mais il en est autrement en Amérique du Nord et ailleurs dans le monde. C'est pour cette raison que le présent débat est extrêmement important. Le fait est que nous pouvons faire le choix, en tant que pays, d'éviter la voie d'un programme dicté par la droite radicale, qui utilise des techniques de déstabilisation, de provocation et d'intimidation, qui cherche à annuler une grande partie des progrès socio-économiques que nous avons faits au Canada et qui vise à miner notre système démocratique lui-même.
    Parlons d'abord de ce qui ne fait pas partie du présent débat. Il ne porte pas sur les camionneurs ou l'industrie du camionnage. Certes, des camionneurs participent au mouvement, mais la grande majorité d'entre eux vaquent à leurs occupations et font leur travail: ils fournissent des services essentiels aux Canadiens pendant la pandémie. Le cadre du débat va aussi bien au-delà de la pandémie. Partout au pays, beaucoup de gens qui ne sont pas vaccinés et qui s'opposent aux exigences liées à la vaccination et au port du masque n'ont pas recours aux menaces ni à l'intimidation. Ce ne sont pas tous les participants qui sont des extrémistes de droite, mais il y en a beaucoup trop qui le sont.
    Soyons clairs: les événements que nous observons ici sont motivés par le même programme d'extrême droite qui a mené à l'attaque du Capitole aux États‑Unis, laquelle a été fomentée par Donald Trump. Ce programme d'extrême droite se manifeste dans toute sa laideur en Europe, au Brésil et dans de nombreux autres pays. Nous constatons la même chose ici, au Canada.
    Je suis une descendante de personnes qui ont combattu le fascisme en Europe, de personnes qui savent ce que sont vraiment les dictatures et qui se sont battues pour rétablir la démocratie dans leur pays d'origine. Je sais que nous ne pouvons pas, en tant que Canadiens, baisser la garde face à cette menace de l'extrême droite au pays. Précisons aussi que lorsque les gens ignorent ou même tolèrent ce que nous voyons, ils font partie du problème.
    Comment en sommes-nous arrivés là? Il y a d'abord le fait que les gouvernements et la police ont, depuis beaucoup trop longtemps, une opinion sur ce qui distingue une manifestation légitime d'une manifestation illégitime. Moi qui suis influencée par les principes de non-violence prônés par Gandhi, les principes appliqués par Martin Luther King et l'esprit de réconciliation de Nelson Mandela, et qui suis inspirée par les actions non violentes des peuples autochtones qui défendent leurs droits et leurs terres, je crois au droit des citoyens de participer à des manifestations non violentes. Les gestes posés ici et cette occupation sont toutefois fondamentalement différents. On cible non seulement nos institutions, mais aussi nos citoyens en adoptant des comportements racistes, misogynes, homophobes et transphobes, ainsi qu'en agressant des gens qui respectent les ordonnances de santé publique et portent un masque.
    Quelle a été la réponse? Y a-t-il quelqu'un qui croit que nous ferions face à la situation actuelle si les manifestants étaient des Autochtones, des Noirs, des personnes racisées, des militants pour la justice climatique ou des étudiants, comme lors des manifestations au G20 ou au Québec, ou des travailleurs en grève? Nous assistons à un échec des gouvernements et de la police, attribuable à l'idée que l'on se fait d'une protestation légitime. La situation n'est pas accidentelle et fait partie d'une stratégie, comme celle de Donald Trump, un milliardaire qui se prétend un ami des travailleurs.
    Comment faire face à ce qui se passe et à la menace, plus grave, envers nos valeurs et la démocratie? L'intervention de la police ici à Ottawa et ailleurs au pays a beaucoup laissé à désirer. Il s'agit d'une occupation dirigée par des tenants de la suprématie blanche. Nous avons vu des croix gammées, des drapeaux confédérés et d'autres symboles haineux et d'extrême droite. L'occupation visait à malmener et à harceler des citoyens pendant des jours; à agresser les résidants de manière raciste, homophobe, transphobe et misogyne; à faire craindre les gens de sortir de chez eux; à fermer les entreprises et les lieux de travail; à faire perdre des emplois; à engorger les lignes téléphoniques d'urgence, de manière à empêcher l'acheminement d'appels légitimes; et à mettre en danger des résidants et des quartiers résidentiels.
    L'occupation vise aussi la démocratie. Les dirigeants de l'occupation ont réclamé le renversement des institutions démocratiques. Ils ont agressé des journalistes. Ils ont menacé de violence les dirigeants et les élus, et ont encouragé la haine à leur endroit. Hier, les actions des occupants ont mené à la fermeture du Parlement, un fait choquant et sans précédent. Néanmoins, les gouvernements et la police ont refusé jusqu'à la dernière minute de prendre la situation au sérieux. Les choses n'auraient jamais dû en arriver là.

  (1715)  

    Les dirigeants municipaux ont refusé d'intervenir. Je tiens à saluer le travail héroïque de la conseillère Catherine McKenney et du conseiller Shawn Menard qui, de concert avec d'autres chefs de file, des résidants et des syndicalistes, ont lutté contre le fascisme dans leur collectivité en organisant la bataille du pont Billings. Des gouvernements provinciaux de droite, en Ontario et ailleurs, ont légitimé ces occupations et refusé d'intervenir. Le gouvernement fédéral nous a menés à une situation qui n'aurait jamais dû se produire.
    Lorsque tout cela a commencé, le gouvernement libéral a refusé de reconnaître cette occupation pour ce qu'elle est. Le premier ministre a mis l'accent sur les belles paroles plutôt que sur la réalité. Il a dénoncé les symboles d'extrême droite, et avec raison, mais il a attendu beaucoup trop longtemps pour dénoncer l'objectif en soi. Cela dit, ce qui est très inquiétant, notamment dans le présent débat, ce sont les actes et les paroles incendiaires des conservateurs. L'un après l'autre, les députés conservateurs qui prennent la parole exposent le véritable visage du Parti conservateur. Ce n'est pas un parti qui prône la paix, l'ordre et la bonne gouvernance, ni le respect de la loi et l'ordre, et ce n'est assurément pas un parti progressiste-conservateur.
    Des députés tiennent un discours d'extrême droite à la Trump qui approuve, voire appuie ce qui se passe. Certains tiennent des propos troublants qui ne sont pas sans rappeler les remarques trumpistes du genre « il y a de bonnes personnes dans les deux camps ». D'autres tiennent un discours incendiaire ciblant les libéraux et les conservateurs. On a même vu voler de bonnes vieilles accusations de communisme pour faire bonne mesure. On pouvait s'y attendre, étant donné que la cheffe intérimaire de l’opposition ne voit rien de mal à porter une casquette « Make America Great Again », ce qui est pourtant considéré comme...
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Même les personnes qui participent en mode virtuel entendent tout ce qui se passe à la Chambre. Encore une fois, je demande aux députés de prendre en note leurs questions ou leurs idées, ou lieu de bavarder ou de penser tout haut, et de les garder pour la période de questions.
    La députée de Churchill—Keewatinook Aski dispose encore de 3 minutes et 10 secondes.
    Madame la Présidente, on pouvait s'y attendre, étant donné que la cheffe intérimaire de l'opposition ne voit rien de mal à porter une casquette « Make America great again », qui est pourtant considérée comme un symbole du suprémacisme blanc et de la rhétorique trumpiste d'extrême droite, et que le favori à la course à la direction de ce parti soutient ouvertement les occupations et les barrages. Il est consternant que les conservateurs fassent fi ce qui se passe à l'extérieur du Parlement, notamment les gestes racistes, homophobes, transphobes et misogynes, dont nous avons tous entendu parler. Lorsque je suis à Ottawa, je réside au centre-ville. Je connais de nombreuses personnes qui sont profondément affectées par ce qui se passe.
    Les députés conservateurs ont encouragé sans ménagement cette occupation. Un député a fait une entrevue devant un drapeau montrant des croix gammées. D'autres ont pris des photos, serré des mains et montré des pouces levés. À la Chambre, ils ont induit en erreur le pays en qualifiant les rassemblements de pacifiques. Les députés conservateurs qui ont appuyé cette occupation entachée de suprémacisme blanc, dirigée contre les citoyens et les médias, dont l'objectif est de renverser nos institutions, doivent rendre des comptes. Une enquête doit être menée pour comprendre ce qui a mené à cette occupation: comment le convoi a pu gagner le centre-ville, qui l'a financée et l'a fomentée, qui aurait dû agir, qui s'est défilé de ses responsabilités, et quel était le rôle de la police. Nous ne pouvons pas banaliser cette attaque de l'extrême droite, politiquement organisée et financée par l'étranger, contre notre démocratie. Nous devons à tout prix empêcher toute attaque de ce genre de se reproduire.
    C'est une question de privilège. Cette manifestation est motivée par un programme, par une idéologie et par des partisans qui croient avoir le droit de cibler notre population et notre régime démocratique. Tous ces abus n'arrivent pas par accident. Ils découlent d'un programme raciste, homophobe et misogyne.
    La liberté est ancrée dans notre démocratie. Elle commence par le respect. Elle n'accorde pas le droit d'être raciste, homophobe ou misogyne. Le concept même de la liberté a été détourné et déformé. Beaucoup s'en sont servis pour soutenir les privilèges, notamment le privilège accordé aux Blancs. Il s'agit du privilège de menacer et d'harceler les autres, en plus de lancer une attaque d'extrême droite financée par l'étranger sur notre démocratie.
    Nous ne pouvons pas rester les bras croisés, alors que l'extrême droite s'enhardit. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et permettre au fascisme de se légitimer. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et permettre à la police et à d'autres institutions d'intervenir tardivement, puis de persister pour neutraliser les gens qui se portent pacifiquement à la défense de leurs droits, comme les travailleurs en grève, les Autochtones qui défendent leurs terres, les Noirs et les communautés racialisées qui se soulèvent et les militants écologistes qui luttent pour notre survie. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et permettre au statu quo de persister. Le Canada peut faire bien mieux. Il peut et il doit être un pays qui témoigne de respect, qui dénonce le sectarisme, qui renforce sa démocratie et qui fait régner la justice raciale, sociale, économique et environnementale que nous méritons tous.

  (1720)  

    Madame la Présidente, le Parti conservateur de manière générale et plus précisément la cheffe intérimaire du Parti conservateur ont comparé l'occupation des faux camionneurs des trois dernières semaines à des manifestations autochtones ayant eu lieu d'un bout à l'autre du Canada, en particulier au Manitoba et en Colombie‑Britannique. Je me demande si la députée peut dire ce qu'elle pense de cette analyse.
    Madame la Présidente, oui, tout à fait. Les députés manitobains connaissent bien le genre de jeux politiques auxquels s'adonnent malheureusement de nombreux conservateurs, y compris la cheffe intérimaire, qui vient du Manitoba, et il n'y a aucune comparaison possible. Encore une fois, nous voyons les conservateurs manipuler les Canadiens en disant que cette occupation de l'extrême droite à Ottawa qui est financée par des étrangers équivaut aux manifestations non violentes des peuples autochtones pour défendre leurs droits, leur terre et leurs convictions. Comparer les deux est non seulement profondément insultant, mais aussi carrément erroné.
    Soyons très clairs: la cheffe intérimaire ne s'est pas cachée, que ce soit en portant une casquette MAGA ou dans ses déclarations, pour montrer que ses collègues et elle ne voient rien de mal à courtiser des suprémacistes blancs ni à poser des gestes qui leur sont carrément favorables.
    Madame la Présidente, j'ai écouté la députée et il arrive très souvent que nous ne soyons pas d'accord, elle et moi. Elle a notamment parlé de respect. À l'entendre, le parti auquel j'appartiens est misogyne et il prône la suprématie blanche ainsi que les grandes idéologies du genre. Avec tout ce qui se passe à l'extérieur, il me semble que ce n'est pas le moment de dire des énormités. J'ai écouté la députée dénigrer le parti auquel j'appartiens et chacun de ses membres. Nous avons le droit de penser différemment. Je n'approuve pas l'occupation actuelle, mais comme elle, j'estime que les gens ont le droit de manifester.
    La députée va-t-elle demander des comptes au premier ministre ou va-t-elle continuer à blâmer les conservateurs, même si ce sont les libéraux qui sont au pouvoir?

  (1725)  

    Madame la Présidente, le débat d'aujourd'hui sert notamment à déterminer à qui revient la responsabilité. Comme je l'ai clairement dit, les libéraux ont beaucoup de choses à se reprocher. Nous n'aurions jamais dû nous retrouver dans une situation pareille. Il demeure toutefois un fait incontestable: ce sont les députés conservateurs — ou du moins une bonne partie d'entre eux —, leur cheffe par intérim et leur dauphin qui ont légitimé, encouragé et soutenu l'occupation. Leur implication est largement documentée et il suffit de voir les photos qu'ils ont eux-mêmes affichées sur les réseaux sociaux ou qui ont été diffusées dans les médias pour s'en convaincre.
    Les Canadiens ne sont pas dupes. Ce qu'il nous faut, ce sont des dirigeants qui ont des principes, pas des politiciens qui soutiennent les mouvements de la droite alternative financés par des sources étrangères, cherchant à renverser la démocratie canadienne et s'en prenant aux citoyens ordinaires. J'espère que la députée et ses collègues vont changer de tactique, qu'ils vont condamner ce type d'activité et qu'ils agiront en conséquence.

[Français]

    Madame la Présidente, on ne peut pas invoquer la Loi qui est devant nous de façon préventive. C’est déjà dedans. On le sait déjà.
    Cette semaine, dans les médias au Québec, l’honorable député de Rosemont—La Petite-Patrie a dit qu’advenant le départ des manifestants et le démantèlement des blocages, lundi, le NPD pourrait reconsidérer sa décision d’appuyer le gouvernement. Or, c’est fini. Les manifestants sont partis. Il n’y en a plus devant le parlement.
    Est-ce que ma collègue peut penser que le NPD ne va pas appuyer le gouvernement là-dessus?
    Madame la Présidente, je dirais d'abord que les personnes qui ont dirigé et appuyé cette occupation sont malheureusement toujours en activité.
    Comme je l'ai dit clairement dans mon discours, il faut prendre au sérieux cet effort financé et organisé par l'extrême droite, qui a pour but de s'attaquer à notre démocratie, d'intimider les citoyens du Canada et de les harceler. C'est un problème auquel nous faisons face et qu'il nous faut maintenant prendre au sérieux.

[Traduction]

    Madame la Présidente, il n'est pas surprenant que je sois à la fois heureux et triste de participer au débat visant à confirmer le recours à la Loi sur les mesures d’urgence pour mettre fin au blocage des postes frontaliers et lever le siège de la capitale.
    Je suis heureux de parler parce que je crois que la situation a atteint un point critique et que l'invocation de la Loi sur les mesures d’urgence s'imposait pour contrer une véritable menace pesant sur la démocratie et la primauté du droit au Canada. Toutefois, je suis triste que nous en soyons arrivés là. Je suis triste parce que les libéraux ont laissé la situation se poursuivre pendant tellement longtemps qu'elle s'est transformée en crise.
    Il est important d'examiner comment nous en sommes arrivés là. Il y a beaucoup de gens à qui on pourrait reprocher de ne pas avoir réalisé que l'érection de barrages et le siège du centre‑ville d'Ottawa et de la Cité parlementaire ne constituent pas des manifestations ou des exercices de liberté d'expression. En fait, les gens qui se décrivent comme des combattants de la liberté et qui ont organisé ces manifestations étaient prêts à recourir à l'intimidation, au harcèlement et à la coercition pour obtenir les changements politiques qu'ils désirent. Ce n'est pas comme cela que la démocratie fonctionne. Ce n'est pas comme cela que doivent se dérouler des manifestations pacifiques, et l'utilisation de telles tactiques n'a rien à voir avec la liberté d'expression.
    Le Canada a été le théâtre de nombreuses manifestations et il est arrivé à plusieurs d'entre nous de participer à une manifestation. Cependant, l'objectif de ces manifestations était toujours de changer l'opinion des gens et d'obtenir des changements par des moyens politiques. L'objectif était toujours de convaincre le gouvernement de changer de cap en lui faisant comprendre que le prix politique à payer s'il ne le faisait pas serait très élevé.
    Les barrages et les occupations sont dans une autre catégorie. Rien de ce qui se passe à l'extérieur du Parlement depuis trois semaines ne s'inscrit dans la riche tradition de la désobéissance civile. Les personnes qui ont recours à la désobéissance civile le font sachant qu'ils subiront les effets de leurs actes. Ils savent qu'ils devront subir les effets d'une arrestation et d'une peine liées au fait qu'ils enfreignent la loi. Ils acceptent de subir ces impacts afin de présenter avec force leur argument fondé sur la moralité. Ceux qui participent aux barrages et à l'occupation, eux, veulent faire subir des impacts aux autres jusqu'à ce que nous acquiescions à leurs demandes.
    Les manifestations légitimes ne cherchent jamais à extorquer des changements en intimidant les gens ou en leur causant délibérément du tort. Le juge qui a accordé l'injonction pour faire cesser l'utilisation constante des klaxons à Ottawa l'a dit, jamais un coup de klaxon n'a servi à exprimer une idée géniale.
    Je reproche aux libéraux de ne pas avoir reconnu la nature de la menace que représentaient les barrages à Windsor et à Coutts ainsi que le siège au centre-ville d'Ottawa. Il est difficile de comprendre comment on a pu passer à côté d'une telle chose quand les organisateurs ont clairement annoncé leur intention d'imposer des changements, voire de remplacer le gouvernement élu, quand ils ont établi des camps de base à l'extérieur du centre-ville d'Ottawa pour acheminer des fournitures aux occupants ou quand ils ont organisé une attaque contre les services 911 à Ottawa pour priver les habitants de la ville de services d'urgence. C'est de l'intimidation. C'est de l'extorsion.
    Il est difficile de comprendre comment une telle situation a pu durer aussi longtemps quand on voyait des résidants et des entreprises victimes de harcèlement et d'intimidation directement en face du Parlement. Nous nous sommes retrouvés dans une situation où, selon la plupart des rapports, plus de 50 % des entreprises du centre-ville ont été contraintes de fermer leurs portes et plus de 85 % ont dû réduire leurs activités afin d'assurer la sécurité de leurs employés. Il s'agit d'une amère ironie pour ces entreprises parce que les tactiques adoptées par ceux qui soutenaient qu'il fallait rouvrir l'économie ont entraîné de nouvelles fermetures et de lourdes pertes pour les entreprises et les travailleurs locaux.
    Je conçois mal comment le fait que les barrages aux postes frontaliers de Coutts et de Windsor visaient à nuire suffisamment à l'économie pour forcer la main des autorités a pu échapper à certains. Alors que le Canada lutte bec et ongles pour assurer la survie du secteur de l'automobile du pays, de nombreux travailleurs d'usine, y compris dans les installations de la General Motors, ont perdu des quarts de travail parce que les barrages ont perturbé la chaîne d'approvisionnement.
    Ce qu'il y a de plus ironique là-dedans, c'est que les barrages de Coutts et du pont Ambassador ont obligé des milliers de camionneurs, ceux-là mêmes au nom de qui les organisateurs du convoi prétendaient s'exprimer, ont été bloqués durant des heures, voire des jours à cause des bouchons qui en ont résulté. Les organisateurs du convoi ont même tenté de bloquer de nouveau le pont de Windsor lorsque celui-ci a été dégagé.
    Même si j'estime que c'est la faute du gouvernement si la situation a dégénéré de la sorte, je rejette aussi l'idée voulant que ce soit le gouvernement ou les obligations liées aux vaccins qui ont semé la division et donné naissance aux barrages et au siège que l'on sait. Oui, certains routiers ont pris part aux perturbations, mais il ne faut pas oublier que plus de 90 % d'entre eux sont vaccinés. N'oublions pas non plus qu'au plus fort de la pandémie, avant l'arrivée des vaccins, ils ont continué à travailler pour éviter la paralysie économique, et ce, même s'ils mettaient ainsi leur santé et celle de leur famille en danger.
    Comme la très vaste majorité des Canadiens, les camionneurs savent que c'est grâce aux masques, aux vaccins et à la distanciation sociale que nous n'avons jamais été aussi près d'échapper à la pandémie. Ils savent que la solidarité sociale, notamment à l'endroit des travailleurs de la santé, a permis de sauver des milliers de vies et a fait en sorte que, proportionnellement, la COVID cause deux fois moins de morts au Canada qu'aux États‑Unis. Ils savent que c'est seulement en continuant de se serrer les coudes que les Canadiens pourront enfin sortir du proverbial tunnel.

  (1730)  

    Oui, les gens sont libres de rejeter la science et les conseils sans équivoque des experts médicaux. Ils peuvent faire ce choix, mais la liberté signifie accepter les conséquences des choix que nous faisons. Cela ne signifie pas que nous avons le droit d'infliger à autrui les conséquences de nos choix. Ceux qui rejettent les exigences relatives à la COVID ne devraient pas être surpris qu'on leur impose des restrictions en raison des risques qu'ils représentent pour autrui et pour le pays dans la lutte contre la pandémie.
    Nul doute qu'avec la pandémie qui s'éternise, nous souhaitons tous qu'on lève les restrictions, mais pour la grande majorité des Canadiens, cela ne devrait se produire que lorsqu'il est sécuritaire de le faire. Cinq nouveaux décès dus à la COVID ont été enregistrés hier en Colombie‑Britannique, dont un de plus sur l'île de Vancouver, où plus d'une personne en moyenne meurt chaque jour des suites de la COVID. Chaque jour, des familles perdent un être cher. Hier, le nombre de patients aux soins intensifs est descendu sous la barre de 1 000 personnes, un chiffre qui demeure beaucoup trop élevé même s'il a heureusement considérablement baissé. Toutefois, même avec la baisse des hospitalisations, nos hôpitaux et nos travailleurs de la santé sont près du point de rupture.
    C'est cette tension découlant de la pandémie que les organisateurs des barrages et de ce siège exploitent à leurs propres fins. Les députés ne doivent pas se méprendre: ces organisateurs sont des extrémistes et leurs objectifs sont antidémocratiques. Ils ont clairement l'intention de recourir à la force, à l'intimidation et, pour certains d'entre eux comme on a pu le constater au poste frontalier de Coutts, à la violence pour parvenir à leurs fins.
    Au centre-ville d'Ottawa, les symboles haineux, le racisme et l'homophobie se sont affichés ouvertement. Des résidants ont été intimidés par des gens qui voulaient leur faire enlever leur masque. Cela m'est arrivé personnellement plus d'une fois, mais ces gestes ont surtout ciblé des gens que les occupants jugeaient faibles, vulnérables et aptes à plier sous la pression, c'est-à-dire les femmes, les Canadiens racisés et les membres de la communauté 2SLGBTQI.
    Avant que certains disent qu'il y a des pommes pourries dans chaque manifestation ou que c'était seulement le fait d'une minorité de manifestants, je tiens à souligner que les organisateurs n'ont jamais dénoncé la présence de drapeaux nazis ni l'intimidation des résidants locaux dans le but de leur faire enlever leur masque. Et bien que des partisans aient soutenu qu'il n'y avait que quelques croix gammées à l'occupation d'Ottawa, j'ai moi-même vu, la même journée, six drapeaux à croix gammée sur une distance de trois pâtés de maisons. Je répète donc une question évidente: quel nombre de croix gammées est acceptable? La réponse est évidente: zéro.
    Des gens disent que les drapeaux confédérés ne sont qu'un symbole de rébellion. Ceux qui pensent ainsi devraient prendre un instant pour réfléchir avant d'avancer un tel argument dans le contexte actuel. Le drapeau conféré est clairement un symbole de racisme et de la violence associée au racisme anti-Noirs. C'est pourquoi je soutiens le projet de loi d'initiative parlementaire du député de New Westminster—Burnaby, qui vise à bannir l'affichage public de ces horribles symboles de haine qui découragent certains de nos concitoyens de participer pleinement à la société canadienne.
    Des entreprises qui appliquent les exigences sanitaires afin d'assurer la sécurité de leurs employés et de la population ont été envahies, et maintenant, puisque plus de la moitié des entreprises au centre-ville d'Ottawa ont été forcées de fermer leurs portes, ce sont littéralement des milliers de personnes qui ne peuvent pas travailler. Uniquement au Centre Rideau, plus de 1 500 employés ne peuvent pas se rendre au travail depuis trois semaines maintenant.
    Nous avons été témoins de l'intimidation physique de journalistes et de l'utilisation d'enfants comme boucliers. Il y a eu des menaces directes de violence à l'endroit du premier ministre, de ministres et de députés, tant dans la rue qu'en ligne. Les déclarations répétées d'organisateurs qui disaient ne pas avoir l'intention de partir avant la levée de toutes les exigences s'avèrent peut-être ce qui est le plus pertinent à notre débat sur l'invocation des pouvoirs d'urgence.
    C'est pourquoi les néo-démocrates sont favorables au recours à des pouvoirs d'urgence pour mettre fin à ce qui constitue des attaques contre la démocratie. Comme nous l'avons fait depuis trois semaines, les néo-démocrates rejettent le discours selon lequel les Canadiens seraient plus divisés que jamais. À vrai dire, les faits indiquent plutôt le contraire.
    Au moment de voter sur cette motion visant à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, je vais soutenir les travailleurs de la santé, les premiers intervenants, le personnel des épiceries, l'ensemble des travailleurs de première ligne et, bien sûr, la vaste majorité des camionneurs, mais je vais aussi appeler à la vigilance pour que ces pouvoirs nécessaires, mais exceptionnels soient employés seulement pour contrer ces graves menaces à la démocratie et ne servent jamais à violer le droit de manifester et d'exprimer son désaccord.
    Encore une fois, je tiens à dire que je suis navré que nous en soyons arrivés là, mais je suis fier de m'opposer fermement à ceux qui veulent se servir de l'intimidation, de la haine et de la violence pour renverser la démocratie.

  (1735)  

    Madame la Présidente, je remercie le député d'Esquimalt—Saanich—Sooke de tout le travail qu'il a fait pendant de nombreuses années pour défendre les droits de la personne. Son discours d'aujourd'hui a bien souligné certains aspects des droits de la personne.
    Le député a parlé des gens utilisent leurs enfants comme boucliers humains. À vrai dire, c'est l'un des aspects de cette manifestation qui m'ont choqué le plus dans tout ce qui s'est passé. Ils mettent en danger des enfants, et dans certains cas, ce sont des enfants qui ne peuvent pas être vaccinés. On se fait vacciner notamment pour protéger les enfants, et maintenant, on voit des enfants qui sont placés dans des situations dangereuses.
    Le député peut-il expliquer en quoi cela constitue une violation des droits de la personne pour l'un des groupes les plus vulnérables de la société canadienne?
    Madame la Présidente, je ne veux pas m'attarder trop longtemps sur l'utilisation des enfants comme boucliers. Cela dit, j'ai été témoin de ce genre de scène en marchant dans les rues d'Ottawa et j'ai été horrifié de voir des parents mettre leurs enfants en danger au nom d'une conception tordue de la liberté. Ce comportement démontre le peu de respect des organisateurs pour les droits et libertés, et pour les valeurs qu'incarnent les Canadiens.

[Français]

    Madame la Présidente, mon collègue fait l'étalage des conséquences des blocages.
    Dans le monde dans lequel je vis, le monde normal, il y a le Code criminel, des règlements municipaux, le Code de la sécurité routière, la possibilité d'appeler d'autres corps policiers; il y a des dispositions dans le Code criminel contre les crimes haineux.
    J'aimerais d'abord savoir si mon collègue est au courant que toutes ces lois s'appliquaient encore la veille de la déclaration des mesures d'urgence. J'aimerais ensuite savoir s'il juge, tel qu'il le dit, qu'un député de la Chambre qui voterait contre les mesures d'urgence et contre la démocratie est pour la violence.

  (1740)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, je ne sais pas si je dois remercier le député de cette question, mais je pense qu'il est évident que certaines personnes — et je n'accuse aucun député dans cette enceinte — qui ont contribué à l'organisation de ces manifestations avaient l'intention d'employer la force et l'intimidation pour changer les politiques publiques. Ce n'est pas cela, la démocratie. Ce n'est pas cela, le Canada. Ce n'est pas pour ces valeurs que je siège comme député.
    Madame la Présidente, le député a évoqué l'appui aux manifestations pacifiques, mais le décret pris en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence exige que les institutions financières cessent de faire affaire avec les personnes désignées. Or, le terme « personne désignée », au sens du décret, renvoie à toute personne associée à une manifestation.
    En partant du fait que nous appuyons tous les deux les manifestations pacifiques, le député pourrait-il expliquer ce qu'est une personne désignée au sens de la Loi? Ce terme désigne-t-il l'organisateur d'une manifestation? Désigne-t-il une personne qui assiste à une manifestation? Un donateur? Une personne qui publie un gazouillis en appui à la manifestation? Quelle est la portée de la Loi, au juste?
    Madame la Présidente, je veux revenir à la Loi sur les mesures d'urgence, qui inclut une supervision parlementaire dans son processus et qui permet notamment à 20 députés de demander un vote pour révoquer son utilisation. Le député précédent a demandé pourquoi les lois existantes n’avaient pas été utilisées; je pense que la vérité dans le cas présent, c’est que la Loi sur les mesures d’urgence nous donne le pouvoir, en tant que gouvernement, en tant que société, de faire appliquer les lois et les règlements existants afin d’empêcher que certains utilisent la force, la violence et l’intimidation pour contourner ces lois. Si des gens se servent de leurs ressources pour prolonger ces manifestations, ces barrages et ces occupations, ils tomberont dans le champ d’application de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Je prends la parole aujourd’hui le cœur très lourd pour appuyer l’invocation de la Loi sur les mesures de guerre par notre gouvernement et la motion de la Chambre visant à confirmer la décision du gouvernement. Je reconnais que je prends la parole sur les terres traditionnelles non cédées du peuple algonquin. Je tiens à remercier les nombreux camionneurs dans ma circonscription, Scarborough—Rouge Park, et les centaines de milliers de camionneurs partout dans le monde qui nous aident depuis le début de la pandémie.
    Je participe à des manifestations depuis aussi longtemps que je puisse me rappeler. Nous manifestons pour les droits des Tamouls sur l’île du Sri Lanka depuis que j’ai l’âge de quatre ou cinq ans. Après le pogrom anti-tamoul de 1983, j’ai manifesté pendant des semaines au consulat de l’Inde à Dublin, en Irlande. Plus tard, au Canada, dans les années 1980, j’ai manifesté contre l’apartheid en Afrique du Sud. Dans les années 1990, j’ai manifesté contre les compressions dans l’éducation en Ontario, sous le premier ministre de l’époque, Bob Rae. En 1995, j’ai organisé une vigile et une manifestation ici sur la Colline du Parlement alors que les Tamouls se faisaient déplacer dans le Nord et l’Est de l’île.
    Dans les années 2000, j'ai offert du soutien juridique aux manifestants à Queen's Park. J'ai répété l'expérience à un certain nombre de manifestations au cours de la décennie suivante. En 2009, j'étais ici, à Ottawa, et j'offrais un appui juridique aux personnes qui manifestaient contre le génocide des Tamouls, au Sri Lanka. On l'avait appelé la manifestation pro-tamoule. Elle avait commencé au début de février 2009 pour se terminer quelques mois plus tard, en mai. D'autres manifestations se déroulaient parallèlement sur l'avenue University, devant le consulat américain. Je collaborais avec le chef de la police de Toronto, qui est le ministre de la Protection civile aujourd'hui, afin de veiller à ce que les manifestations se déroulent de manière pacifique.
    Je me souviens de mon neveu. Il avait 10 ans à l'époque. Il avait participé à de nombreuses manifestations avec mon beau-père, qui est décédé depuis. Mon épouse et moi avions joint la foule à Dundas Square, avec notre bébé de quatre mois, dans les températures glaciales de l'hiver 2009. À cette époque, j'avais aussi participé à d'autres manifestations qui se déroulaient à Washington, à New York et à Genève. Par conséquent, je suis un ardent défenseur du droit de manifester pour exprimer sa dissidence et ses opinions politiques. Je crois au droit de manifester, même en compagnie de ses enfants, à condition que ces derniers ne servent jamais de bouclier dans le cadre d'une occupation illégale.
    Depuis le 29 janvier 2022, le Canada est secoué par ce qui a débuté par des manifestations, mais s'est vite transformé en barrages illégaux et en occupations. De nombreux députés d'en face ont parlé des échanges qu'ils ont eus avec les participants aux barrages illégaux. J'ai beaucoup de respect pour la plupart de mes collègues d'en face. Ils se sont toutefois vantés qu'après avoir échangé avec certains routiers et manifestants et circulé parmi les barrages, ils comprennent ces gens et ont de l'empathie pour eux.
    Je n'ai hélas pas ce privilège. Peu de députés ont ce privilège. Même si tous les députés sont censés jouir des mêmes privilèges, je n'ai pas celui-là.
    Les manifestants réclament le renversement du gouvernement et, partant, de l'ensemble des députés. Ils ont apporté des symboles de haine, comme les drapeaux confédéré et nazi, pour manifester. Ils ont détruit le drapeau de la fierté. Ils ont menacé les représentants des médias. Ils ont volé de la nourriture dans un refuge pour sans-abri. J'espère que mes collègues d'en face vont me pardonner si je ne me sens pas aussi confiant qu'eux en présence de ces prétendus manifestants.
    Je ne me permettrais jamais de critiquer l'ensemble d'un groupe pour les agissements de quelques-uns, mais après 23 jours, ceux qui dénoncent habituellement les actes de haine et de violence comme on en voit présentement devraient prendre leurs distances des manifestants et condamner les débordements — et j'inclus les députés du Parti conservateur du Canada dans le lot.
    Les barrages illégaux d'Ottawa, de Coutts, d'Emerson, de Surrey et de Windsor ont eu et auront de graves conséquences. Par leur nature et leur substance, ces barrages illégaux n'ont rien à voir avec les centaines de manifestations qui ont lieu chaque année à Ottawa. Voilà pourquoi, après de vastes consultations et une profonde réflexion, le gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence le 14 février 2022. Il a pris cette décision après que la Ville d'Ottawa, celle de Windsor, la province de l'Ontario et diverses municipalités ont déclaré l'état d'urgence.

  (1745)  

    Au bout du compte, le Canada est un pays où règne la primauté du droit. En déclarant l'état d'urgence en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence, nous avons suivi la loi et nous avons agi dans le cadre de celle‑ci. La Loi sur les mesures d'urgence énonce des conditions précises à remplir avant de pouvoir déclarer l'état d'urgence. Notre gouvernement estime que ces conditions ont été remplies.
    Je tiens à mettre en évidence le préambule de la Loi sur les mesures d'urgence, qui se lit comme suit:
    Attendu (...) qu'en appliquant de pareilles mesures, le gouverneur en conseil serait assujetti à la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'à la Déclaration canadienne des droits et aurait à tenir compte du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, notamment en ce qui concerne ceux des droits fondamentaux auxquels il ne saurait être porté atteinte même dans les situations de crise nationale,
    Toutes les mesures prises par notre gouvernement seront assujetties à la Charte, et le procureur général a la responsabilité solennelle de s'en assurer. La Loi sur les mesures d'urgence ne peut être invoquée que dans les circonstances précises et graves qui constituent une crise nationale.
    Pour satisfaire au critère en matière de crise nationale, trois conditions doivent être remplies. Tout d'abord, nous devons nous trouver dans une situation qui soit met gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d'intervention des provinces, soit menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l'intégrité territoriale du pays.
    Deuxièmement, la capacité des provinces et des territoires à s'occuper de la situation doit être insuffisante ou comporter des lacunes. Troisièmement, il faut être arrivé à la conclusion que la situation ne peut être réglée adéquatement au moyen des lois en vigueur au pays, y compris les lois des provinces et des territoires.
    Le gouvernement considère que ces conditions ont été remplies et il a présenté des explications concernant le raisonnement qui a mené à la déclaration de l'état d'urgence, comme l'exige la Loi. Nous avons également présenté, conformément à la Loi, un rapport sur les consultations menées avec les provinces au sujet de la déclaration. Je voudrais particulièrement souligner l'appui de la Colombie‑Britannique, de l'Ontario et de Terre‑Neuve‑et‑Labrador et remercier ces dernières de leur contribution, qu'on peut constater dans les documents présentés pour invoquer la Loi en réponse à la situation d'urgence nationale.
    Comme ont pu le constater les députés, le gouvernement a présenté des décrets ciblés sous le régime de la Loi. Même si l'application de la Loi couvre techniquement tout le Canada, nous avons préparé des décrets aussi circonscrits que possible s'appliquant uniquement aux endroits où il y a des barrages et des occupations illégales.
     Pour maîtriser la situation, nous avons mis en œuvre les six mesures temporaires suivantes: premièrement, la réglementation et l'interdiction des assemblées publiques qui auraient pour effet de troubler la paix et qui vont au-delà d'une manifestation légale; deuxièmement, la désignation et l'aménagement de lieux protégés où les barrages sont interdits; troisièmement, le fait d'ordonner à des personnes de fournir des services essentiels afin de réduire l'incidence des barrages sur l'économie canadienne; quatrièmement, le fait d'autoriser directement les institutions financières à fournir des services essentiels pour réduire l'incidence des barrages; cinquièmement, le fait d'autoriser la GRC à appliquer les lois municipales et provinciales; et sixièmement, l'imposition d'amendes ou de peines d’emprisonnement en cas de contravention aux décrets ou aux règlements pris au titre de l’article 19 de la Loi sur les mesures d’urgence.
    La Loi prévoit un certain nombre de mesures de sauvegarde. Comme l'exige la Loi, le premier ministre a rencontré le cabinet ainsi que les premiers ministres provinciaux avant de l'invoquer. Après l'avoir invoquée, nous avons déposé la déclaration dans les deux jours, et le Parlement a pu en débattre dans les sept jours. Dans les prochains jours, le comité parlementaire sera constitué, et une enquête sera ouverte. La déclaration dure 30 jours et peut être révoquée à tout moment si le Parlement le désire.
    La situation est urgente. Comme Steve Bell, chef intérimaire de la police d'Ottawa, l'a déclaré hier, la police n'aurait pas pu entreprendre l'énorme opération qui se déroule actuellement à Ottawa sans les pouvoirs temporaires que lui accorde la Loi sur les mesures d'urgence.
    Nous invoquons la Loi sur les mesures d'urgence pour mettre fin aux occupations et aux barrages illégaux. Nous l'invoquons pour rétablir les droits de ceux qui ne peuvent pas marcher en toute sécurité dans les rues du centre-ville d'Ottawa et ailleurs.

  (1750)  

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de nous avoir parlé des expériences qu'il a vécues. D'abord et avant tout, nous sommes tous humains, et nous avons tous vécu certaines expériences. Je lui suis reconnaissant d'avoir soulevé ces points.
    Ma question est très simple. Pendant 17 jours, le gouvernement n'a rien fait. Même le 11 février, le premier ministre a déclaré que des lois pourraient être appliquées pour résoudre le problème. Trois jours plus tard, il a déposé le projet de loi. Que s'est-il passé pendant ces trois jours pour qu'il dépose le projet de loi?
    Madame la Présidente, cette intervention me donne l'occasion de répondre à la question du député, qui a été posée à plusieurs reprises. J'invite expressément le député à lire le rapport, intitulé « Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement: Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence ». Il décrit toutes les mesures prises par le gouvernement pour remédier à la situation que nous avons observée.
    D'abord et avant tout, je pense que les premières conversations directes avec le maire d'Ottawa ont eu lieu le 31 janvier. Il y a eu de nombreuses conversations avec les premiers ministres des provinces, y compris le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford. Des consultations ont été menées auprès de l'Association canadienne des chefs de police et de la Fédération canadienne des municipalités.
    Je pourrais continuer. Il s'agit d'un document de huit pages et j'espère que le député pourra le lire afin de prendre connaissance du travail que nous avons fait avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.

[Français]

    Madame la Présidente, j'écoute depuis vendredi, sauf un petit sursaut hier, ce qui se dit à propos de la manifestation.
    J'ai une question en lien avec ce que mes collègues ont dit depuis ce matin. Doit-on comprendre que, dorénavant, chaque fois que des forces de l'ordre auront besoin d'unir leurs forces, de se coordonner et de collaborer, le gouvernement fédéral pourra invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    C'est ce qui se passe, c'est-à-dire que les mesures et les forces de l'ordre se coordonnent enfin après trois semaines.

[Traduction]

    Madame la Présidente, non, ce n'est pas ce que cela signifie. À l'heure actuelle, il y a des situations bien particulières à différents endroits — à Ottawa, à Windsor, à Coutts, à Emerson et à Surrey —, qui représentent une urgence nationale. Le recours à cette loi est une réponse directe aux circonstances actuelles.
    J'espère que le gouvernement n'aura plus jamais à invoquer cette loi. Toutefois, nous sommes dans une situation où il est nécessaire de le faire. C'est ce que nous nous employons à faire.

  (1755)  

    Madame la Présidente, je sais que le député est un avocat de formation, tout comme moi. Nous savons tous que le grand public à des préoccupations par rapport à la Loi sur les mesures d'urgence, surtout sur le fait d'établir un précédent. J'aimerais entendre les commentaires du député à cet effet.
    J'aimerais particulièrement savoir ce que pense le député de l'envers de la médaille, c'est-à-dire quel précédent nous établirions si le gouvernement décidait de ne rien faire et laissait des individus utiliser le chantage économique dans le but de forcer un gouvernement élu démocratiquement à changer ses politiques. Est-ce qu'il se dit que cela aussi créerait un précédent très dommageable pour notre pays?
    Madame la Présidente, j’apprécie la question posée par le député d’en face. Cette manifestation en soi est un précédent. Nous ne pouvons pas tolérer des barrages de ce type, qui paralysent notre économie.
    Nous avons traversé une pandémie. Nous rencontrons de sérieuses difficultés dans le secteur des transports au Canada en ce moment, et nous devons veiller à ce que tout fonctionne correctement. Il serait irresponsable pour le gouvernement de ne pas intervenir dans de telles circonstances, avec de telles pertes sur le plan de l’économie et de l’emploi. Je pense que nous prenons la bonne décision au bon moment.
    Madame la Présidente, c’est un honneur de prendre la parole aujourd’hui pour représenter les citoyens de la circonscription d’Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill, et de participer à ce débat historique concernant la motion visant à confirmer la déclaration d’urgence.
    Je remercie toutes les personnes qui suivent ce débat crucial ou y participent. Pour notre pays, il est vital que nous, les parlementaires, collaborions pour que ce débat soit dynamique et que nous puissions nous prononcer sur la motion présentée.
    Dans un esprit d’unité, j’aimerais commencer par parler de sujets qui nous rassemblent.
    Pour commencer, je pense que nous sommes tous d’accord pour exprimer notre reconnaissance envers les Canadiens pour tous leurs efforts ces deux dernières années, pour avoir pris leurs responsabilités et respecté les consignes sanitaires afin de protéger la santé et le bien-être de tous. Nous sommes reconnaissants envers les travailleurs de première ligne et des services essentiels qui ont tenu bon afin de continuer à faire tourner notre économie et de prendre soin des Canadiens. Nous sommes aussi reconnaissants envers les camionneurs qui nous ont tenus approvisionnés, et — aujourd’hui en particulier — envers nos hommes et nos femmes en uniforme qui sont venus de partout pour mettre fin à cette occupation illégale de manière pacifique et professionnelle.
    Je crois également que nous nous entendons tous sur nos principaux droits et responsabilités: le droit qu'ont tous les Canadiens de s'exprimer librement et de manifester de manière pacifique, dans les limites de la loi, ainsi que la responsabilité qu'a le gouvernement de maintenir la paix, l'ordre et la saine gestion publique. J'ajouterais, sur une note plus personnelle, la responsabilité qu'ont les députés d'écouter les Canadiens qu'ils représentent et d'analyser soigneusement les mesures qu'ils entérinent.
    Les Canadiens ont aussi la responsabilité de ne pas tenir de propos haineux et de ne pas harceler ni violenter leurs concitoyens, à commencer, dans les situations comme celle-ci, par les policiers, les fonctionnaires de première ligne, les professionnels de la santé et j'irais même jusqu'à dire le personnel parlementaire.
    Je crois que nous pouvons en outre nous entendre sur certains faits liés aux perturbations de l'ordre public qui ont lieu depuis plusieurs semaines. Le centre-ville d'Ottawa est occupé de manière illégale depuis maintenant plus de trois semaines. En plus de nuire aux commerces et de chambouler la vie de milliers de Canadiens, notamment en les empêchant de travailler, cette occupation a surtout mis en péril le fonctionnement des trois ordres de gouvernement, y compris celui du Parlement. Je crois d'ailleurs que ce facteur a pesé particulièrement lourd dans l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Que les autorités municipales, régionales et provinciales aient été incapables de disperser les manifestants qui occupent également la capitale du pays n'a évidemment pas aidé non plus.
    Examinons d'autres faits, comme la publication, par les organisateurs des barrages, d'un protocole d'entente dans lequel ils appellent au renversement du gouvernement si leurs demandes ne sont pas satisfaites. Nous devrions être scandalisés par la participation de ces extrémistes et de ces organisations de nationalistes blancs à ce mouvement autoproclamé de « convoi de la liberté », dont certains manifestants brandissaient même des drapeaux confédérés ou affichant la croix gammée. Il y a quelques heures à peine encore, pendant un reportage de la CBC sur la manifestation, on a clairement pu voir quelqu'un brandir le drapeau d'une de ces organisations d'extrême droite.
    Nous devrions être révoltés par la découverte d'armes mortelles et illégales et par l'arrestation d'individus associés à des groupes organisés au barrage du poste frontalier de Coutts, en Alberta. Nous devrions être révoltés par les menaces de mort à l'endroit du premier ministre ainsi que des policiers et des policières qui sont en première ligne, tentant de contenir et réprimer pacifiquement ces barrages illégaux.
    Nous devrions être révoltés par les importants dommages économiques qu'ont provoqués ces barrages à des postes frontaliers essentiels aux échanges commerciaux cruciaux entre le Canada et les États-Unis. Quel Canadien n'est pas outré par cet afflux d'argent provenant de l'étranger et destiné à financer ce mouvement politique? Cet argent provient des États-Unis et des îles Caïmans, notamment de plus d'un millier de donateurs qui ont aussi versé des dons à la tentative de coup d'État aux États-Unis, le 6 janvier 2021. Comment les conservateurs peuvent-ils ne pas être eux aussi révoltés par ces gestes?
    La question qui nous occupe actuellement est d'établir si la situation actuelle justifie l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Cette loi a été invoquée en vertu de la Partie II: État d'urgence. On entend par un état d'urgence une situation causée par de graves menaces envers le gouvernement du Canada. La définition des menaces à la sécurité du Canada dans la Loi renvoie à celle fournie dans la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité. Cette définition comprend l'espionnage, le sabotage, les activités préjudiciables influencées par l'étranger, les activités qui favorisent l'usage de la violence ou de menaces de violence dans un but politique, religieux ou idéologique, ou les activités qui visent à saper, à détruire ou à renverser le gouvernement du Canada.

  (1800)  

    Après avoir entendu les faits que je viens d'énumérer, et la définition de ce qui constitue un état d'urgence au titre de la Loi, j'espère que les députés conviendront qu'il faut appuyer la motion dont nous sommes saisis.
    N'oublions pas que nous débattons de la déclaration d'un état d'urgence au titre d'une loi qui a été déposée, débattue et modifiée en 1987 et en 1988 par le gouvernement conservateur de Brian Mulroney. Il s'agissait d'un gouvernement progressiste-conservateur, bien différent du leadership du Parti conservateur de l'autre côté de la Chambre.
    Il s'agit d'un texte législatif bien rédigé et sérieux qui a été déposé pour répondre aux préoccupations de nombreux Canadiens par rapport à la seule loi à la disposition du gouvernement à l'époque, soit la Loi sur les mesures de guerre. Comme l'a souligné l'ancien premier ministre Mulroney, l'une des principales mesures de la Loi sur les mesures d'urgence exige l'obtention de l'agrément du Parlement pour déclarer l'état d'urgence. C'est une caractéristique importante de la Loi et la raison pour laquelle nous sommes réunis aujourd'hui.
    Perrin Beatty, PDG de la Chambre de commerce du Canada, qui était ministre de la Défense au dépôt de la Loi, a déclaré que l'utilisation de celle-ci par le gouvernement montre toute la gravité de la menace des blocages pour la sécurité publique et l'économie.
     Pour citer une source de première main, voici ce qu'a publié M. Beatty sur Twitter: « Quand j'ai mis de l'avant la Loi sur les mesures d'urgence, il y a 35 ans, j'espérais qu'elle ne serait jamais nécessaire, mais je savais qu'il y aurait inévitablement des crises un jour, et qu'il était essentiel de protéger les droits fondamentaux des Canadiens même dans une situation d'urgence. »
    C'est ce que fait la loi. J'aimerais passer en revue, une fois de plus, comment cette loi assure la protection des droits fondamentaux. Selon la loi, les gestes du gouvernement demeurent assujettis à la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'à la Déclaration canadienne des droits. L'application de la loi est ciblée, sa durée est limitée, et les mesures prises doivent être raisonnables et proportionnelles à la situation. Le recours à la loi prend fin après 30 jours et on peut y mettre fin plus tôt.
    Ajoutons qu'il y a beaucoup de mécanismes de contrôle. Nous sommes à la Chambre aujourd'hui, j'y suis moi-même depuis 7 heures ce matin, pour débattre en profondeur du recours à cette loi, comme l'exige la loi elle-même. De plus, il faut former un comité qui examinera les mesures mises en œuvre, et la mise en oœuvre de la loi sera examinée par les tribunaux.
    J'ai confiance qu'étant donné les menaces qui planent actuellement sur la sécurité du pays et que j'ai décrites plus tôt, et les mécanismes de surveillance qui ont été très judicieusement inclus dans la loi, les députés conviendront que la situation d'urgence déclarée par le premier ministre est pertinente et justifiée et qu'ils appuieront la motion à l'étude.
    Il faut agir. Les Canadiens comptent sur nous. Le monde entier a les yeux tournés vers nous. N'ayons pas peur d'adopter des mesures rigoureuses et audacieuses pour protéger notre pays, notre frontière, notre économie et notre société civile.

  (1805)  

    Madame la Présidente, avant de commencer, je veux simplement mentionner qu'hier soir, en raison de la présence policière ici, j'ai raté un souper très important avec deux très bons amis kurdes, Jowana et son époux Shaheen. Je tenais à le mentionner d'entrée de jeu.
    Après avoir écouté l'allocution de la députée, j'aimerais mentionner quelques faits véritables. À l'approche de la proclamation de l'état d'urgence, et dans les informations fournies par le gouvernement à l'opposition, on n'a pas indiqué comment la loi devait être appliquée. Notre caucus n'a reçu aucun document d'information avant sa réunion. En fait, le leader à la Chambre de l'opposition officielle, dont je suis l'adjoint, a dit aux médias que nous n'avions reçu aucune information.
    S'il s'agissait d'une urgence d'ordre public et que le gouvernement voulait véritablement notre appui et avait l'intention de l'obtenir, il aurait fourni ces informations dès le départ, c'est-à-dire la preuve de l'implication de groupes extrémistes, l'identité des donateurs et les véritables préoccupations liées à la sécurité publique. Le gouvernement n'a fourni aucun document à cet égard.
    Je n'ai pas de question. Je voulais simplement que cela soit consigné au compte rendu.

[Français]

    L'honorable député de Mirabel a la parole.
    Madame la Présidente, c'est la première fois qu'on utilise cette loi depuis 1988, depuis qu'elle a force de loi.
    Malgré cela, en réponse à son ami du NPD...
    Je dois interrompre l'honorable député de Mirabel.
    L'honorable député de Calgary Shepard souhaite invoquer le Règlement.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’invoque le Règlement.
    Avec tout le respect que je dois au député du Bloc, je crois que c'est maintenant le moment des questions et des observations; ainsi la députée d’en face a l’occasion de me répondre si elle le souhaite.
    La députée d’Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill a la parole.
    Madame la Présidente, comme il n’y avait pas de question, je n’ai pas cru bon répondre, mais je suis reconnaissante qu'on m'en ait donné l’occasion.

[Français]

    Madame la Présidente, je vais lui donner une occasion de répondre. C’est la première fois qu’on utilise cette loi depuis 1988, depuis qu’elle est entrée en vigueur. En réponse à ses petits amis du NPD, tout à l’heure, le secrétaire parlementaire du ministre a dit qu’il ne s’agissait pas d’un précédent.
    Ma question à la députée est à la suivante: comment est-il possible qu’on ne crée pas un précédent quand on est le premier à utiliser une loi aussi draconienne?
    Si une réponse sort de la part du gouvernement, les Québécois et les Canadiens devraient être inquiets, parce que c’est impossible que ce ne soit pas un précédent.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je ne suis pas avocate, mais je crois que l’invocation de cette loi établira effectivement un précédent, et je crois que c’est un précédent approprié. Le simple fait que cette loi n’ait jamais été appliquée depuis sa création en 1988 ne signifie pas qu’elle ne devrait pas l’être maintenant. Nous avons clairement démontré pourquoi cette loi était nécessaire, et je suis convaincue que le précédent établi permettra à la loi d’être toujours utilisée de façon judicieuse à l’avenir.
    Madame la Présidente, plusieurs personnes de ma circonscription m’ont contacté pour me faire remarquer le contraste entre la façon dont la police locale a réagi à l’occupation d’Ottawa, qu’ils considèrent comme la méthode douce, et la façon dont tant de personnes autochtones se font traiter par la police dans notre pays.
    Ma collègue est-elle aussi préoccupée par ce contraste? Soutiendrait-elle une commission d’enquête publique indépendante sur la façon dont la police a géré la situation et sur la prestation des services de police dans notre pays?
    Oui, madame la Présidente, je suis préoccupée. Le fait que les policiers aient été incapables de maîtriser la situation plus tôt fait partie des raisons pour lesquelles il était nécessaire de recourir à cette loi. Comme il y a des différences importantes dans les façons de traiter différentes manifestations, je suis tout à fait favorable à ce que l'on mène une enquête.
    Madame la Présidente, j'ai été impressionnée que ma collègue la députée d'Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill soit passée de la Loi sur les mesures d'urgence à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité pour établir la définition de ce qui constitue une « menace envers la sécurité du Canada ».
    Dans ces débats, nous n'avons toujours pas établi pourquoi il faut déclarer l'état d'urgence, ni si c'est nécessaire. Ce qui m'intéresse particulièrement, c'est le fait que des intérêts étrangers exercent une influence négative sur la démocratie canadienne. À l'alinéa b) de la définition de ce qui constitue des « menaces envers la sécurité du Canada », la loi indique que cela comprend:
les activités influencées par l'étranger qui touchent le Canada ou s'y déroulent et sont préjudiciables à ses intérêts, et qui sont d’une nature clandestine ou trompeuse ou comportent des menaces envers quiconque [...]
    On ne mentionne pas expressément les manifestations normales et légales. J'aimerais que la députée en dise davantage à ce sujet.
    Est-ce qu'on propose de déclarer l'état d'urgence à cause des manifestations qui touchent plus précisément la ville d'Ottawa, ou est-ce qu'on veut s'attaquer à un réseau pancanadien, voire mondial, qui choisit de faire de la désinformation et de tenir des propos alarmistes pour semer la division et nuire à la démocratie?

  (1810)  

    Madame la Présidente, je dirais les deux. Nous devons comprendre ce qui s'est passé à Ottawa, pourquoi cela est arrivé et quelles sont les menaces en jeu. La question de l'ingérence étrangère dans son ensemble et de ses effets sur les mouvements politiques ici, au Canada, devrait être examinée de façon plus large.
    Madame la Présidente, je prends la parole pour poser une question que bien des Canadiens se posent: comment en sommes-nous arrivés là? Partout sur la planète, nos alliés sont sous le choc. J'ai des amis dans le monde entier qui m'appellent pour me demander ce qui se passe dans mon pays. Ils savent que les Canadiens sont des gens calmes et polis. Il faut qu'il y ait un grave problème pour que des gens pacifiques décident de sortir manifester dans la rue et de se battre pour défendre leur liberté face aux mesures obligatoires et aux restrictions gouvernementales.
    Nous en sommes arrivés là parce que le gouvernement libéral a lentement grugé les libertés des Canadiens et que le premier ministre a choisi d'employer la haine, la peur et la division dans sa stratégie de réponse à la COVID. Les libéraux cherchent à présenter une version déformée de la réalité. Ils veulent nous convaincre que les manifestants sont des terroristes. Ils veulent nous le faire croire pour justifier l'approche musclée pour laquelle ils ont opté en invoquant la Loi sur les mesures d'urgence.
    Les travailleurs canadiens demandent de l'empathie, de la compréhension et de l'écoute de la part des élus dont ils paient le salaire. Pourtant, le premier ministre refuse catégoriquement d'écouter tout point de vue qui diffère du sien. Il a affirmé que ceux qui ne sont pas d'accord avec lui ont de mauvaises opinions. Voilà un mauvais exemple de leadership. C'est ce mauvais leadership qui est responsable de la situation dans laquelle nous nous trouvons en ce moment. Cette manifestation aurait pu prendre fin il y a une semaine au moins sans que la police intervienne comme elle le fait actuellement si les libéraux avaient appuyé notre motion leur demandant de présenter un calendrier de retour à la vie normale pour les Canadiens. Même certains dirigeants internationaux condamnent l'attitude autoritaire du premier ministre, qu'il s'agisse de députés britanniques, de sénateurs américains, de législateurs brésiliens ou d'auteurs et de journalistes internationaux. Le monde libre jette un regard stupéfait sur le Canada et il utilise même des termes comme « autoritaire » et « dictature totalitaire » pour décrire le gouvernement canadien.
    Je rappelle à la Chambre qu'il y a moins de deux ans, le premier ministre a célébré les héros du camionnage dans le cadre de la campagne « Thank a Trucker » sur les médias sociaux. Je répète qu'il ne s'agit pas d'avoir raison ou d'avoir tort. Il s'agit de savoir qui peut participer au dialogue, et la seule réponse acceptable à cette question, c'est: tout le monde, tous les Canadiens.
    La Loi sur les mesures d'urgence permet de déclarer l'état d'urgence nationale. Ce coup de force ne devrait être utilisé qu'en situation de crise nationale, après que tous les pouvoirs législatifs et juridiques ont été épuisés. Les Canadiens savent pertinemment que le premier ministre n'a pas utilisé toutes les options avant d'invoquer cette loi. Nos lois pénales contiennent des dispositions qui permettent de saisir des produits de la criminalité, de remorquer des véhicules, de geler des comptes bancaires, toutes des mesures qui auraient dû être prises en premier lieu.
    Les conservateurs croient à la primauté du droit. Nous appuyons les manifestations pacifiques, mais nous ne soutenons pas les manifestants qui s'en prennent aux infrastructures essentielles. Voilà pourquoi les manifestants qui ont bloqué le pont Ambassador à Windsor et les postes frontaliers de Coutts, en Alberta, et d'Emerson, au Manitoba, ont reçu l'ordre de quitter les lieux. Les autorités sont intervenues et leur ont demandé de partir. Les personnes concernées ont obtempéré. La GRC a géré la situation avec efficacité, sans déclaration de l'état d'urgence nationale. Toutes les infrastructures essentielles ont été dégagées. Il ne restait donc que la manifestation devant le Parlement, au centre-ville d'Ottawa. Pour empêcher la tenue d'autres manifestations, le premier ministre a menacé de confisquer des permis de conduire, de saisir des camions, de geler des comptes bancaires et d'intimider carrément les gens qui manifestent en toute légalité. Ces gestes sont la signature d'un dictateur et reproduisent exactement le mode opératoire des régimes totalitaires.

  (1815)  

    J'ai reçu des milliers de courriels de Canadiens terrifiés. Une femme qui a simplement acheté un t‑shirt a peur que son compte bancaire soit gelé.
    Invoquer la Loi sur les mesures d'urgence quand les conditions n'ont pas été réunies mine la confiance dans notre démocratie. Ce n'est pas la première grande manifestation au pays. Nous avons mis fin à de nombreuses autres manifestations sans invoquer cette loi, par exemple la crise d'Oka, les manifestations contre les pipelines et, dans ma circonscription, Haldimand—Norfolk, les manifestations à Caledonia. Le système juridique canadien comporte d'autres lois qui permettraient de contrer ces manifestations. Par ailleurs, le système du Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada autorise le dépistage des fonds et le gel des comptes.
    Le maintien de la Loi sur les mesures d'urgence sans preuve claire de l'existence d'une situation de crise nationale représente une menace à notre démocratie. Je rappelle à la Chambre que quand la Loi sur les mesures de guerre, la version antérieure de cette loi, a été mise en application, elle a perturbé la vie de nombreuses personnes innocentes, et des vies ont été détruites. Lorsqu'il a présenté cette loi, même l'ancien ministre de la Défense Perrin Beatty a dit ce que la plupart des gens pensaient, à savoir que la Loi sur les mesures de guerre était extrêmement efficace comme outil politique, mais extrêmement inefficace pour lutter contre la criminalité.
    Je suis avocate de formation, et j’ai exercé le droit pendant plus de 20 ans. J’ai aussi enseigné le droit à la faculté, et à ce titre, je crois à la primauté du droit. L’application de cette règle me tient à cœur. Je suis maintenant législatrice; il est donc impératif que je sois convaincue que les lois sont correctement appliquées. Si nous analysons les articles pertinents dans la Loi sur les mesures d’urgence, nous verrons que les raisons pour invoquer cette loi ne sont pas suffisantes.
    Les libéraux ont cité trois raisons de l’invoquer. Premièrement, ils nous ont dit que cette loi était nécessaire pour démanteler les barrages en place. C’est inexact, car tous les barrages aux frontières ont été démantelés pacifiquement avec les moyens législatifs en vigueur. Rien dans la Loi sur les mesures d’urgence n’aurait donné plus de pouvoir aux forces de l’ordre lorsqu’ils ont démantelé les barrages au pont Ambassador, à Coutts et à la frontière du Manitoba. Si l’on tient compte du fait que tous les ponts avaient été libérés et que la manifestation se confinait au centre-ville d’Ottawa, principalement sur la rue Wellington, en face du Parlement, la situation ne constituait certainement pas une urgence nationale.
    Deuxièmement, les libéraux voulaient utiliser cette loi pour éviter que la manifestation ait des répercussions négatives sur l’économie canadienne. Une fois de plus, la raison est inexacte. Le Canada était plongé dans l’insécurité économique à cause des effets nocifs des confinements et des exigences vaccinales. Cette situation avait commencé bien avant que ne débutent les manifestations et les barrages.
    Comme troisième raison, ils ont évoqué les effets néfastes des barrages sur les relations du Canada avec ses partenaires commerciaux. Il est incroyable que le premier ministre ait eu besoin d'invoquer la Loi sur les mesures d’urgence pour protéger les relations avec nos partenaires commerciaux. Bien franchement, les États‑Unis sont notre principal partenaire commercial, et de nombreux gouverneurs américains ainsi que des pays partout dans le monde ont condamné l'approche musclée du premier ministre.
    Il est fort probable que ses actions à elles seules nuiront aux relations avec nos partenaires commerciaux. Il est clair que le premier ministre utilise la Loi sur les mesures d’urgence comme un outil politique pour terroriser et punir les dissidents en ruinant la vie des gens qui ne sont pas d'accord avec lui. La prépondérance des preuves fournies ne soutient manifestement pas l'invocation de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Les Canadiens ont désespérément besoin d'espoir et appellent à l'unité. Peu importe leur point de vue, les gens ont tous besoin de compassion et de compréhension. Qu'il le veuille ou non, le premier ministre doit assumer la responsabilité de son leadership défaillant. Pour défendre nos libertés et notre démocratie, nous devons faire preuve de compassion et d'écoute.
    Les actions du premier ministre vont probablement discréditer le gouvernement et notre démocratie. Heureusement, la solution à ce problème est simple. Penchons-nous sur une solution non partisane pour mettre fin aux mesures obligatoires, tout comme l'ont fait de nombreux pays, y compris l'Irlande, la Suède, la Norvège, la Tanzanie, le Nicaragua et la République dominicaine. Ensemble, nous pourrions commencer à restaurer...

  (1820)  

    Le temps de parole est écoulé.
    Nous passons aux questions et observations. Le député de Scarborough—Guildwood a la parole.
    Madame la Présidente, j'ai été étonné d'entendre la députée dire que si la Chambre avait adopté la résolution proposée par les conservateurs la semaine dernière, toute cette histoire serait réglée. On peut toujours croire aux contes de fées, sans doute, mais je dois dire que c'est là l'une des déclarations les plus ridicules que j'ai entendues à la Chambre.
    La députée serait-elle disposée à remplacer son point de vue et sa prise de décision par le point de vue du chef Bell, selon lequel les ressources fournies par cette loi pour réglementer et interdire les assemblées publiques sont les bienvenues, selon lequel le pouvoir de désigner, dans le but de les sécuriser, les lieux où les blocages sont interdits est le bienvenu, selon lequel le pouvoir d'ordonner à des gens d'assurer la prestation de services essentiels afin d'atténuer l'incidence sur l'économie du Canada est le bienvenu, selon lequel le pouvoir d'ordonner aux institutions financières d'assurer la prestation de services essentiels est le bienvenu, selon lequel les mesures habilitant la GRC à appliquer les règlements municipaux sont les bienvenues? Est-elle disposée à substituer le jugement du chef Bell au sien?
    Madame la Présidente, nous disposons déjà des dispositions législatives, des mécanismes et des lois voulus pour que les forces de l'ordre puissent gérer tous les aspects de la criminalité et de l'application de la loi au pays. Il n'est aucunement nécessaire d'imposer une loi aussi musclée, qui devrait uniquement être réservée aux situations d'urgence nationales. La situation actuelle n'est pas une situation d'urgence nationale.
    Madame la Présidente, la députée ne trouve-t-elle pas problématique que des millions de dollars de fonds affluent de l'étranger pour appuyer des organisateurs qui demandent ouvertement le renversement du gouvernement élu démocratiquement au Canada? Ne considère-t-elle pas cet afflux de fonds étrangers destinés à ceux qui ne respectent pas nos processus démocratiques comme étant un problème qui représente, en fait, une crise nationale?
    Madame la Présidente, je le répète: j'ai pleinement confiance dans le système d'application de la loi en place. S'il y a un problème, comme l'a souligné le député, nos mécanismes d'application de la loi permettent d'y remédier. Ce qu'il aurait fallu faire, c'est d'épuiser tous les recours législatifs. Le Code criminel comprend des articles qui permettent de remédier à ces problèmes, mais on ne s'en est pas prévalu dans ce cas.

[Français]

    Madame la Présidente, on vient de parler de financement étranger et on a beaucoup parlé du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, le CANAFE.
    Il y a deux cas de figure. Le premier est que le CANAFE est capable de faire le travail et qu'on n'avait pas besoin de l'état d'urgence. Le deuxième est que le CANAFE est sous-financé, qu'il n'a pas suffisamment d'employés et que ce gouvernement n'a pas pris au sérieux les cas de crimes financiers tels que ceux auxquels on assiste aujourd'hui.
    Est-ce que la députée peut nous dire si le gouvernement a été négligent dans sa préparation à de tels crimes?

  (1825)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, le directeur des poursuites pénales dispose essentiellement des articles nécessaires pour remédier à ces problèmes. L'article 10 de la Loi sur le directeur des poursuites pénales l'autorise à donner des directives et à conduire ce type d'enquêtes. Nous avons le CANAF, et d'autres mécanismes qui n'ont pas été utilisés avant l'invocation cavalière de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Madame la Présidente, bien des lois auraient pu être utilisées, mais ne l'ont pas été. Nous nous sommes retrouvés avec un siège qui a duré trois semaines. Quelles lois aurait-on pu invoquer pour obliger les remorqueurs à retirer les camions alors qu'ils ne voulaient pas le faire?
    Madame la Présidente, je crois que l'article 129 du Code criminel peut servir à forcer les remorqueurs à retirer les véhicules des rues, donc nous avons assez de mécanismes prévus dans notre droit pénal pour remédier à ce problème. La Loi sur les mesures d'urgence a donc été invoquée inutilement.
    Madame la Présidente, c'est toujours avec reconnaissance que je m'adresse à la Chambre des communes, et c'est encore plus vrai aujourd'hui, en ce moment charnière de l'histoire canadienne. J'aurais voulu qu'il en soit autrement, mais je suis revenu dans ma circonscription, car je tenais à bien comprendre la nature de l'urgence nationale évoquée. J'y reviendrai dans la suite de mon intervention.
    L'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence entraîne tout un lot de difficultés, et il y a quelque chose de contreproductif à débattre d'un événement qui s'est déjà produit. Il s'agira à n'en pas douter d'un élément important de l'examen obligatoire qui suivra. Selon moi, deux grandes questions se posent: comment en sommes-nous arrivés là, et comment peut-on justifier le recours à la Loi sur les mesures d'urgence?
    Certains députés tentent de semer la confusion dans l'esprit des gens quant aux arguments juridiques justifiant la mise en vigueur de la Loi, mais il faut dire que certains de mes collègues sont passés maîtres dans cet art-là. Cet élément-là devra aussi faire partie du futur examen. Commençons par répondre à la première question. Comment en sommes-nous arrivés là? Si les députés veulent mon avis, nous avons assisté à la plus déplorable manifestation de leadership qu'il m'ait été donné de voir.
    Comme bon nombre de mes collègues, j'ai fait partie de diverses équipes sportives et j'ai été membre de comités. J'ai aussi occupé des postes de direction dans le milieu médical et j'ai servi dans l'Aviation royale canadienne. S'il y a une chose qui devrait aller de soi, c'est que, lorsqu'on rencontre une personne qui n'est pas entièrement d'accord avec soi ou qui ne soutient pas les mêmes causes que soi, il faut voir la situation comme une occasion de dialoguer. Quand j'exerçais la médecine, j'avais tous les jours l'occasion de discuter avec les patients des options qui s'offraient à eux et de négocier avec eux. Au risque de paraître présomptueux, j'estime que c'est le b. a.‑ba de la communication.
    Depuis le début de la pandémie, je suis choqué et consterné par les propos tenus par le premier ministre lorsqu'il parle des personnes qui hésitent à se faire vacciner. La réticence à l'égard de la vaccination me préoccupe depuis le début de la pandémie, et j'ai évidemment profité de l'occasion pour examiner la littérature scientifique sur le sujet. Il existe d'innombrables articles à ce sujet, et j'ai eu l'occasion de les examiner, mais ils ne suggèrent absolument pas d'utiliser la division, la stigmatisation ou les insultes. Ce qu'ils conseillent est plutôt d'essayer d'établir des relations, d'instaurer la confiance et de comprendre le point de vue d'autrui.
    Lors d'une affaire particulièrement difficile, Chris Voss, un célèbre négociateur du FBI, a parlé devant la porte close d'un appartement pendant six heures sans obtenir de réponse. Finalement, les fugitifs et les otages sont soudainement sortis de l'appartement. Les fugitifs ont déclaré ceci: « Vous nous avez calmés [...] Nous avons fini par croire que vous ne partiriez pas, alors nous sommes sortis. »
    Je crois qu'il est important que les gens sachent que je suis à Ottawa depuis les trois dernières semaines, soit depuis le début des manifestations, et que je me rends au travail à pied chaque jour. Comme d'autres l'ont souligné, je suis conscient que je suis un homme blanc. J'en suis bien conscient. On ne m'a jamais pris à partie, accusé ou menacé. Je porte un masque, mais, malheureusement, les Canadiens qui ne sont pas d'accord avec le premier ministre ont été vilipendés, stigmatisés et insultés. Gardons cela à l'esprit.
    Mercredi soir dernier, j'ai quitté mon bureau au coin des rues Bank et Wellington et j'ai marché jusqu'au marché By pendant la manifestation. En effet, je ne me suis pas senti en danger. Personne ne m'a même adressé la parole. S'agissait-il d'un état d'urgence? Chose certaine, je crois qu'il existe d'autres moyens de gérer cette situation et, bien sûr, comme je l'ai dit précédemment, je suis retourné en Nouvelle‑Écosse et il n'y a absolument aucun état d'urgence ici. La vie suit son cours normal et je pense que les parlementaires qui décrivent la situation à Ottawa comme un état d'urgence font un peu fausse route.
    Le problème isolé à Ottawa ne constitue pas une urgence nationale. J'ai entendu beaucoup de collègues libéraux dire qu'il est très dangereux ou effrayant...

  (1830)  

     Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je ne m'étais pas rendu compte que nous étions dans une salle de réunion. Ils tiennent une réunion et parlent si fort que l'on ne peut entendre...
    Le député invoque le Règlement en raison du bruit. Je parlais avec le greffier et je n'ai entendu aucun bruit.
    Si les députés souhaitent avoir des conversations, je les invite à se rendre dans les antichambres ou dans les coulisses.
    Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre a la parole.
    Madame la Présidente, tout ce que j’ai fait, c’est de dire à mon collègue que les députés de l’opposition officielle croient que tout ce qu’ils ont à faire, c’est de donner un coup de baguette magique et pouf, les manifestants auront disparu. Je l’ai dit à voix très basse. Je ne pensais même pas que quelqu’un pouvait l’entendre. C’était plutôt un chuchotement. Cependant, si j’ai offensé des gens en ce qui concerne leur...
    Il semble que c’était suffisamment fort pour déranger les députés qui écoutaient le discours; je demande donc aux députés de demeurer le plus silencieux possible et de respecter les personnes qui parlent.
    Le député de Cumberland—Colchester a la parole.
    Madame la Présidente, beaucoup de mots viennent à l’esprit relativement à cette malheureuse interruption. Il est déconcertant de voir le député faire consigner au compte rendu les propos qu'il a utilisés pour m'interrompre.
    Il est intéressant que les collègues libéraux disent souvent combien la manifestation est dangereuse et effrayante, bien que, selon moi, aucun d’entre eux ne soit jamais allé à l’intérieur de la manifestation. Un jour, au comité de la santé, la séance s’est terminée plus tôt que prévu, parce que mes collègues craignaient de sortir dans le noir.
    D’autres manques de leadership sont évidents. Nous avons obtenu des documents dans lesquels le premier ministre a convoqué une réunion des premiers ministres pour déterminer s’il faillait déclarer l’état d’urgence en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence. Les documents révèlent que les premiers ministres ont donné leur opinion de façon confidentielle. Depuis lors, cependant, leurs positions ont été exprimées publiquement. Le premier ministre du Québec ne pensait pas que ce serait bénéfique. L’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau‑Brunswick, la Nouvelle‑Écosse et l’Île‑du‑Prince‑Édouard y étaient opposés. Je n’ai trouvé aucun commentaire pour le Yukon, les Territoires du Nord‑Ouest et le Nunavut. Si les opinions exprimées par sept des dix premiers ministres lors de cette consultation ont été ignorées, pourquoi s’être donné la peine de tenir la réunion?
    Comme on l'a dit à maintes reprises, il n'y a jamais eu et il n'y aura jamais de consultations entre le premier ministre ou un quelconque représentant du gouvernement et les manifestants. Je le répète à l'intention de la Chambre et de l'ensemble des Canadiens. Le premier ministre n'a jamais parlé avec le moindre manifestant et il a décidé de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Quelle est l'urgence, outre le pitoyable taux d'approbation à l'égard du premier ministre? Avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, quelles mesures le gouvernement aurait-il pu prendre pour corriger la situation et que les Canadiens considèrent approprié qu'on suspende certains de leurs droits et libertés?
    On décrit une urgence d'ordre public comme étant une « menace » envers la sécurité du Canada, y compris l'espionnage ou le sabotage; des « activités influencées par l’étranger » qui sont préjudiciables à ses intérêts; des activités terroristes et des efforts visant à renverser la structure constitutionnelle du pays par des actes cachés ou la violence. Cela ne vise toutefois pas les activités licites de défense d’une cause, de protestation ou de manifestation.
    Je crois avoir clairement établi que je ne me suis pas senti menacé en marchant parmi les manifestants.
    Cet état d'urgence a permis au gouvernement fédéral d'outrepasser grandement ses pouvoirs relativement à l'accès potentiel aux comptes bancaires non seulement des gens qui ont pris part à des actes de désobéissance civile, mais aussi de ceux qui ont fait des dons à la cause. Comme des députés l'ont déjà demandé, cela signifie-t-il que les actifs d'une personne qui a fait un don de 5 ou 10 $ seront gelés? Si des proches d'un chef de parti à la Chambre avaient fait des dons à la cause, leurs avoirs seraient-ils gelés? Je me le demande.
     Bloomberg News a décrit la situation comme suit: « Les banques seraient tenues de signaler leurs relations avec les personnes impliquées dans les blocages et recevraient le pouvoir de geler des comptes sans ordonnance du tribunal, entre autres mesures. » L'autre jour, j'ai parlé à Daniel, qui a peur désormais de faire des dons à un organisme de bienfaisance et qui craint que son compte bancaire ne soit gelé et qu'il ne puisse pas payer son hypothèque. Il se demande si ces nouveaux pouvoirs continueront à être utilisés pour d'autres causes qui recueillent des fonds si le gouvernement n'approuve pas de leurs valeurs. Il est un fier Canadien avec trois drapeaux canadiens dans sa cour.
    Sous le gouvernement actuel, nous avons vu la restriction des déplacements, la collecte de données de téléphones cellulaires, de la propagande militaire utilisée à l'échelle nationale, le gel de comptes bancaires et maintenant, le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Si ce ne sont pas de multiples violations des libertés civiles et de la Charte canadienne des droits et libertés, je me demande ce que c'est. Le Canada se trouve à la croisée des chemins par rapport à sa démocratie. Nous sommes en présence d'un premier ministre qui choisit de vilipender, de stigmatiser et de traumatiser des Canadiens qui ne partagent pas ses opinions.
    Le gouvernement a décidé de déclarer l'état d'urgence alors que sept des dix premiers ministres provinciaux s'y opposent. D'ailleurs, en dehors d'Ottawa, la grande majorité des Canadiens ne voient rien qui justifie la déclaration de l'état d'urgence. Nous avons vu des forces de l'ordre réussir à composer avec la situation exaspérante qui s'est produite au pont Ambassador et à une foule d'autres postes frontaliers sans les mesures prévues par la Loi sur les mesures d'urgence. Nous avons aussi entendu parler des perturbations importantes que ces barrages ont causées à certains postes frontaliers, et de leurs effets nuisibles sur notre économie.
     Cependant, je ne peux pas concevoir que la ministre des Finances puisse nous dire que l'économie se porte à merveille alors que nous devons faire face à un taux d'inflation de 5,1 % et que le coût de la vie est inabordable pour nombre de Canadiens, et ces problèmes existaient déjà avant les trois dernières semaines.
    Il n'y a absolument rien qui nous empêche de renoncer immédiatement à l'application de la Loi sur les mesures d'urgence et de mettre fin à cette folie. Il est dommage qu'une coalition idéologique puisse maintenir l'application de la loi pendant 30 jours supplémentaires. La gauche pense que cette position est parfaitement acceptable et que cela ne pose aucun problème.

  (1835)  

    Ces gens, qui voulaient manifester, n'ont pas été pris en considération. Voilà les tristes circonstances qui expliquent la situation actuelle.
    Madame la Présidente, voilà qui est intéressant. Toute la journée, les conservateurs ont dit que le premier ministre devait établir un dialogue avec les occupants à l'extérieur. Pourtant, Jason Kenney, le premier ministre de l'Alberta, n'a établi aucun dialogue avec les manifestants à Coutts, le premier ministre Doug Ford n'a établi aucun dialogue avec les manifestants et ceux qui bloquaient le pont à Windsor, et la première ministre Stefanson du Manitoba n'a établi aucun dialogue avec ceux qui ont érigé des barrages dans cette province.
    Le député croit-il que tous les dirigeants devraient établir un dialogue avec les manifestants ou seulement les libéraux?
    Madame la Présidente, il est fascinant que même les libéraux reconnaissent que le premier ministre n'a établi aucun dialogue avec les manifestants. Je trouve que c'est honteux et très franchement, ridicule. Comment le député d'en face peut-il prétendre que parce qu'une autre personne agit mal, son parti peut continuer de faire de mauvaises choses et qu'il a raison de le faire?
    Voilà une leçon que ma mère m'a apprise quand j'étais enfant.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai écouté le discours de mon collègue. Il fait quand même la démonstration que le gouvernement n'avait absolument rien fait, ou très peu, avant de déclarer les mesures d'urgence.
    Cela donne l'impression que, dans le fond, cette déclaration des mesures d'urgence est une façon d'essayer de sauver la face du gouvernement et du premier ministre qui ne faisaient absolument rien depuis une vingtaine de jours.
    J'aimerais avoir l'impression de mon collègue à ce sujet.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je remercie le Bloc de comprendre la situation intenable dans laquelle nous sommes plongés et les raisons ridicules pour lesquelles cette loi est invoquée. Il ne fait aucun doute que le premier ministre tente de préserver sa cote de confiance, qui est pitoyable à l'heure actuelle et qui poursuivra sa chute à présent que les Canadiens sont à même de constater qu'il n'incarne pas les valeurs du Canadien moyen.

  (1840)  

    Madame la Présidente, je l'ai déjà dit, et je le répète: nous n'aurions jamais dû en arriver là. Les occupants qui prennent en otage le centre-ville d'Ottawa depuis des semaines avaient énoncé clairement leurs intentions dès le départ, mais le gouvernement n'a rien fait. Le député d'en face conviendra que le premier ministre, au lieu d'exercer un leadership fort et de prendre clairement position, a brillé par son absence. Nous avons déroulé le tapis rouge à ceux pour qui il est raisonnable de renverser le système démocratique. C'est une occupation nourrie par la haine, déguisée en manifestation pacifique.
    Le député convient-il à présent qu'il est temps d'agir?
    Madame la Présidente, je suis d'accord avec la députée sur tout, sauf lorsqu'elle parle du fait que le premier ministre n'a absolument rien fait. Évidemment, c'est tout à fait vrai. C'est un point important. Le problème, comme je l'ai mentionné dans mon discours, c'est de savoir comment nous en sommes arrivés là. Nous en sommes arrivés là à cause d'un manque criant de leadership, parce que, avec un peu de leadership, la situation ne se serait pas rendue aussi loin.
    Ce qui m'inquiète, c'est de penser que, si la manifestation avait été minutieusement planifiée, l'escalade, elle, avait peut-être été planifiée par le premier ministre.
    Madame la Présidente, comme la vice-première ministre, candidate au poste de première ministre, a révélé qu'elle voudrait rendre permanents certains éléments de la Loi sur les mesures d'urgence, notamment l'élargissement du CANAFE pour avoir plus de contrôle sur les comptes et les transactions bancaires de la population, et comme on constate que les critères pour recourir à la loi n'ont pas été respectés, est-ce que le député pense que, peut-être, la raison pour laquelle la loi a été invoquée était de s'arroger des pouvoirs élargis de façon permanente et que c'était la motivation réelle pour faire plonger le pays dans cette crise?
    Madame la Présidente, certes, comme je l'ai mentionné plus tôt, c'est une inquiétude que j'ai en tant que citoyen canadien qui s'intéresse à cette question. Si un dirigeant reste les bras croisés jusqu'à ce qu'il soit contraint d'agir de façon brutale, peut-être que c'était sa stratégie dès le départ?
    Je crains que ce soit bien possible. Je crois que les Canadiens veulent que les libéraux les laissent tranquilles, mais je crois qu'ils veulent aussi qu'ils laissent leur portefeuille tranquille.
    Le secrétaire parlementaire invoque le Règlement.
    Madame la Présidente, j'ai été très patient et je n'invoque que très rarement le Règlement, mais le député de Cumberland—Colchester a dit une chose qui m'offense profondément en tant que député et je veux lui donner l'occasion de se rétracter.
    Il a dénigré des députés et collègues qui siègent au comité de la santé pour leur réticence à sortir d'une réunion du comité dans la pénombre en pleine manifestation. Il a longuement parlé du fait que les manifestations ne le dérangent pas et qu'il est tout à fait à l'aise, ce qui, de toute évidence, n'est pas le cas des résidants d'Ottawa et d'autres députés.
    Je lui donne l'occasion de se rétracter et de préciser, aux fins du compte rendu, qu'il ne voulait pas minimiser les sentiments de collègues députés, leurs impressions de la manifestation et ce que celle-ci représente pour eux.
    Madame la Présidente, au sujet du même rappel au Règlement, je suis le président du comité de la santé. Non seulement le député dénigre les membres du comité, mais aussi ce qu'il dit est faux. Il sait pertinemment que pour ajourner une réunion, il faut obtenir le consentement du comité ou tenir un vote. La réunion a été ajournée plus tôt que prévu. Personne n'a mentionné que quiconque était effrayé par la pénombre. Ce qu'a dit le député est tout à fait déplacé.
    Madame la Présidente, peut-être que le président du comité n'a pas vécu la situation de la même façon que moi. Pourtant, c'est ce qui est arrivé, alors prétendre que mes paroles sont trompeuses est inapproprié, parce que c'est bien ce qui est arrivé. Ce sont les faits et je crois qu'il est très important ici de présenter les faits. Je ne crois pas avoir rabaissé qui que ce soit. Je n'ai fait que présenter les faits. Les gens qui ne sont pas allés voir de quoi a l'air la manifestation continuent de rapporter les expériences vécues par d'autres personnes, alors que, moi, je me suis rendu sur place pour me faire ma propre idée, comme certains de mes collègues l'ont fait.

  (1845)  

[Français]

    Madame la Présidente, je vous informe que je vais partager mon temps de parole avec la députée de Shefford.
    Je dois avouer quelque chose: je suis épuisé. Je suis profondément épuisé. Je suis intellectuellement, physiquement et mentalement épuisé.
    C'est samedi soir, il est 18 h 45. Je devrais être en train de souper avec mes enfants et ma femme chez nous, mais je suis ici, au Parlement, en train de discuter d'une loi sur l'urgence nationale, alors qu'il n'y a pas d'urgence nationale. C'est terminé. Il n'y a plus personne dans les rues devant le parlement. Les camions sont partis, les gens sont partis. La crise est terminée.
    Je n'ai pas de problème à passer des heures et des nuits pour discuter du logement, pour discuter des aînés, pour discuter de la santé, pour discuter des changements climatiques ou de toutes les choses importantes. Je passerais mes fins de semaine ici. Je camperais ici, avec mon sac de couchage. Je coucherais au parlement pour toutes ces questions qui sont importantes pour les gens.
    Je cherche: où est la crise nationale?
    On cherche encore. On cherche la crise nationale. On la cherche et on ne la trouve pas. C'est un scandale. Il n'y a pas de crise.
    J'aimerais féliciter les policiers dehors. Depuis 24 heures, ils ont fait un travail vraiment formidable. Je ne sais pas si on les a vus, mais, pas à pas, ils ont avancé tranquillement. Ils avaient une stratégie. C'est là, le centre de notre argumentation au Bloc québécois. Qu'avaient-ils comme outils maintenant que la Loi est appliquée depuis quelques jours? Qu'ont-ils de plus maintenant?
    S'ils ont réussi à faire cela maintenant, il va falloir que le gouvernement nous explique comment les policiers ont réussi cette stratégie qu'ils n'auraient pas pu faire avant.
    J'étais là en 2001 au Sommet des Amériques. Les policiers ont fait à peu près ce qu'ils ont fait aujourd'hui. Ils ont utilisé du poivre de cayenne un peu, pas tant que cela. Ils ont avancé à petits pas. Ils ont réussi à maîtriser les manifestants. Cela s'est très bien déroulé. Il n'y avait pas de loi spéciale.
    Féliciter les policiers est une chose. J'aimerais toutefois aussi féliciter les interprètes qui devront travailler pendant trois ou quatre jours à cause d'un débat totalement inutile. Ils font un travail extraordinaire. Ils vont passer la fin de semaine ici, et il est très important de les féliciter.
    J'aimerais aussi féliciter les journalistes qui sont dehors, au milieu de la foule avec leur micro. Ils se font insulter et poussailler. Ce n'est pas facile pour eux. Ils ont fait un travail remarquable.
    Pour commencer mon allocution, même si cela fait cinq minutes que je parle, j'aimerais citer l'écrivain britannique Ernest Benn, qui a dit quelque chose d'assez intéressant quant à la crise que nous vivons en ce moment. Il a dit: « La politique est l'art de chercher des ennuis, de les trouver, d'en donner un diagnostic erroné, puis d'appliquer les mauvais remèdes. » Je crois que M. Ernest Benn n'aime pas beaucoup les politiciens.
    Si on l'applique à la crise actuelle, si on dit que la politique est l'art de chercher des ennuis, on peut dire que le gouvernement a commencé par laisser les camionneurs arriver.
    Par exemple, à Québec, on savait que les camionneurs arrivaient et on a pris les moyens nécessaires en érigeant des barricades autour du Parlement et en indiquant aux camionneurs où ils pouvaient s'installer. Le maire de Québec leur a même dit qu'il voulait les entendre et qu'ils avaient le droit d'être là parce que c'était légitime dans une démocratie. On leur a dit qu'ils avaient le droit de parler, mais on leur a demandé de le faire sans paralyser le Parlement et sans empêcher les gens de dormir.
    Y avait-il une loi sur les mesures d'urgence au Québec, à ce moment-là? La réponse est non. Le Québec a très bien réussi cela.
    Je disais donc que c'est l'art de chercher des ennuis et de les trouver. Comment le premier ministre a-t-il réussi à trouver des ennuis? C'est en les laissant s'installer. Si, au début, on avait réagi comme à Québec, on n'en serait pas là.
    Je disais aussi que c'est l'art d'en donner un diagnostic erroné. Voilà la stratégie du premier ministre depuis trois semaines: on s'assoit dans son chalet et on se dit que cela va se régler tout seul, qu'à un moment donné, ils vont s'en aller. Or, non, ils ne sont pas partis.
    Finalement, c'est l'art d'appliquer le mauvais remède, c'est-à-dire qu'on sort l'arme nucléaire législative, la Loi sur les mesures d'urgence. Je pense que M. Benn avait tout à fait raison sur ce point, parce que, au pont Ambassador, on n'a pas eu besoin de mesures d'urgence nationales. À Coutts, on n'en a pas eu besoin. À Sarnia, on n'en a pas eu besoin. À Fort Érié, à Vancouver, à Emerson — on peut toutes les nommer —, on n'en a pas eu besoin.
     Si je stationne mon auto en plein milieu de la rue, à Longueuil, et que je fais fonctionner mon moteur pendant une heure ou deux, un agent de police viendra à un moment donné m'informer qu'un règlement m'empêche de le faire. Si je dis au policier que cela me tente de rester là quand même, un autre policier viendra sûrement me donner une amende trois ou quatre heures plus tard. Si je dis que je reste là quand même, on viendra me remorquer deux jours plus tard. Il y a des lois pour cela. On n'a pas besoin de mesures d'urgence nationales pour faire déplacer des camions. C'est ce qu'on a vu ici.
     J'ai écouté attentivement le premier ministre Trudeau quand il a fait son allocution pour présenter cette loi...

  (1850)  

    Je rappelle au député qu'on n’utilise pas le nom des députés à la Chambre.
    Madame la Présidente, je suis désolé.
    Le premier ministre a dit: « [...] la Loi sur les mesures d’urgence n’est pas quelque chose qu’on fait à la légère. [Évidemment]. Ce n’est pas la première option, ni la deuxième, ni même la troisième. » Quelles seraient ces trois options qu’il aurait supposément envisagées? On ne le sait pas.
    Dans une crise nationale, l’important, c’est de faire preuve de leadership. Quand arrive une crise, on doit se dire que c’est quelque chose de difficile, que ce n’est pas facile dans la société, mais qu’on pense qu’on devrait faire ceci et qu’on devrait s’en aller par là. C’est ça, un leader. Il prend des décisions et il indique par où on s'en va.
    Pour ce qui est de la décision qui est devant nous, sept provinces au Canada sont contre cette loi. Est-ce que c’est cela, faire preuve de leadership?
    En réfléchissant à cela, cette semaine, je me suis rappelé le film Douze hommes en colère. Mes collègues ont-ils vu ce film? C’est un succès mondial adapté d’une pièce de théâtre de Reginald Rose. Dans Douze hommes en colère, il y a le procès d’un homme accusé de meurtre. Il y a 12 jurés. Le film commence alors que les jurés se réunissent. Tout le monde pense que l’accusé est coupable. Les preuves sont accablantes. Tout le monde a hâte de s’en aller chez soi, le procès a été long. Onze personnes disent qu’il faut le condamner, mais il y en a un qui soulève un doute. Il dit que non, la vérité n’est pas là. Il dit que la vérité est dans une autre direction. Tranquillement, pendant deux heures, il va convaincre tout le monde de son point de vue, de la vérité. Il pense que l’accusé est innocent. C’est ça, un leader.
    Sept provinces s’opposent à la Loi. Le premier ministre aurait pu se lever et dire qu’il pense que c’est important et qu’il faut le faire, pour telle et telle raison. Ce n’est jamais arrivé. On n’a jamais vu, à aucun moment, le premier ministre faire preuve de leadership. C’est cela qui nous manque.
    Je n’ai pas le temps de parler de la crise d’Octobre, mais je pense qu’on a compris le sens de mes propos. On est devant une loi inutile, totalement disproportionnée qui n’est pas acceptée par une grande partie de la population. Je reçois des milliers de courriels de la part des gens qui s’y opposent. Ce sont des milliers de courriels de la part des gens qui veulent qu’on vote contre cette loi...

  (1855)  

    Hélas, on doit passer aux questions et commentaires.
    La parole est à l'honorable député de Lac-Saint-Louis.
    Madame la Présidente, je crois avoir participé à une excellente pièce de théâtre. C’était très passionné.
    Mon collègue a donné l’exemple de sa voiture à Longueuil à un endroit où le stationnement est interdit. La police vient, il ne veut pas s’en aller, la police lui donne une contravention. Il prétend que la police va appeler la compagnie de remorquage pour faire remorquer son véhicule. Est-ce qu’il est au courant que les remorqueurs à Ottawa ne voulaient pas toucher aux camions du convoi de crainte d’être intimidés et qu’il fallait, en vertu de cette loi, les encourager à venir remorquer les camions, une fois que la police aurait maîtrisé la situation? Il me semble que c’est assez évident...
    La parole est à l'honorable député de Longueuil—Saint-Hubert.
    Madame la Présidente, mon honorable collègue que j’aime beaucoup d’ailleurs a tout à fait faux. Ça prenait simplement une ordonnance du tribunal. On ordonne aux entreprises d’aller remorquer les camions et ça fonctionne. On n’a pas besoin d’une loi d’urgence, on n’a pas d’une loi massue, on n’a pas besoin d’une loi matraque comme celle que nous avons devant nous aujourd’hui.

[Traduction]

    Madame la Présidente, moi aussi, j'étais au Sommet des Amériques, mais la situation était fort différente. Des milliers de personnes avaient pris d'assaut la barrière érigée pour encadrer le périmètre, la foule lançait des projectiles sur la barrière et des manifestants professionnels étrangers vêtus de noir avec des passe-montagnes étaient présents. Cela n'a rien à voir avec ce qui se passe ici. Tout s'est déroulé de façon pacifique. Tout le monde était le bienvenu. Lorsque j'ai circulé dans le centre-ville, je n'ai jamais eu l'impression que des actes de violence risquaient d'être commis.
    Comme moi, le député considère que les critères pour invoquer la loi n'ont pas été atteints. D'après lui, si rien ne le justifiait, pourquoi la Loi sur les mesures d'urgence a-t-elle été invoquée?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de sa question. J'irai un peu ailleurs. Je trouve cela important. Il y a une chose dont on a très peu parlé relativement à cette crise.
    On a beaucoup parlé des groupes d'extrémistes, qui se sont infiltrés parmi les manifestants. C'est vrai, c'est documenté. Il y en a et il faut les combattre. Cependant, il y a d'autres armes pour le faire. On n'avait pas besoin de la Loi sur les mesures d'urgence.
    On a beaucoup parlé des enfants, des boucliers humains. Les médias ont fait beaucoup de sensationnalisme avec cela.
    Dehors, il y a toutefois des gens qui voulaient tout simplement exprimer un ras-le-bol sur ce qu'on est en train de vivre depuis deux ans, ras-le-bol que je partage. Tout le monde est tanné, fatigué. Les contraintes sanitaires ne sont pas faciles à vivre.
    Nous, les députés, sommes peut-être des privilégiés. Nous avons peut-être des maisons, des maisons assez grandes pour vivre. Or beaucoup de gens qui sont actuellement dehors vivent dans des trois et demi, à huit personnes, et ce n'est pas facile de traverser la pandémie avec toutes les contraintes que l'on vit.
    Si, au lieu de traiter toute la gang de ci ou de ça, car c'est quand même le peuple canadien, le premier ministre avait fait preuve d'écoute dès le début, on aurait peut-être pu dénouer cette crise d'une autre façon qu'on l'a fait.
    Madame la Présidente, la question que j'aimerais poser à mon collègue est la suivante. Faut-il prendre au sérieux l'attaque organisée contre notre démocratie, venant de la droite radicale et financée au-delà de nos frontières?
    Cette attaque sert à intimider nos concitoyens et nos concitoyennes et à obliger le Parlement à fermer en raison de menaces à la sécurité. Faut-il prendre cela au sérieux? Faut-il agir de façon sérieuse à tous niveaux?

  (1900)  

    Madame la Présidente, j'en suis certain. Des articles du Code criminel peuvent toutefois nous aider à le faire. On n'a pas besoin d'une loi comme celle dont il est question en ce moment.
    On le sait. Donald Trump, aux États‑Unis, fournit du financement partout et a une aura qui se promène dans différents pays. Il a une grande influence. On doit absolument combattre cela.
     Or, on a déjà les outils pour le faire. On n'a pas besoin de la Loi sur les mesures d'urgence pour combattre cela. On le faisait avant, on le fait peut-être un peu plus maintenant, et on le fera aussi après.
    Madame la Présidente, je tiens d'abord à féliciter mon collègue de Longueuil—Saint‑Hubert pour son discours passionné, mais surtout pour finalement avoir accepté de partager son temps de parole avec moi.
    C'est avec beaucoup d'inquiétude que je prends la parole aujourd'hui dans le cadre de ce débat historique. J'aimerais commencer par une petite question. Comment mes collègues se sentent-ils devant ces images de chevaux qui chargent et de confrontations qui tournent en boucle à la télévision depuis maintenant plusieurs heures?
    Personnellement, je me demande comment on a pu en arriver là. Je sais que je ne suis pas la première à le dire, et que plusieurs de mes collègues se sont déjà exprimés sur ce sujet, mais je le répète: nous sommes toujours contre l'application de la Loi sur les mesures d'urgence à la grandeur du Canada.
    D'entrée de jeu, je tiens à rappeler que j'ai étudié en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, et cela me donne un point de vue profondément démocrate. Je ne peux que me questionner et m'inquiéter quant au signal que cette mesure envoie, favorisant l'effritement de notre système démocratique.
    Deuxièmement, j'aborderai la question du risque de radicalisation. Troisièmement, je parlerai de la question du respect des compétences et des demandes du Québec, des provinces et des territoires. Une chose est certaine, je n'entrerai pas dans un discours démagogique comme certains ont tenté de le faire.
     Sur le plan démocratique, il est donc d'abord légitime de se demander si cette loi avait vraiment lieu d'être, car, pour avoir le droit d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement doit démontrer deux choses. Il doit premièrement démontrer qu'il y a une situation dangereuse et urgente. Deuxièmement, il doit démontrer qu'il est impossible d'y faire face avec des lois ordinaires.
    À la première question, on peut effectivement répondre qu'il existe bel et bien une situation dangereuse et urgente. Cette situation est cependant circonscrite à l'Ontario, et je dirais même plus précisément à Ottawa. Si le Bloc québécois n'est pas contre le fait que la Loi s'applique, cela ne devrait être le cas qu'à l'endroit où il y a l'occupation, ce qui n'est pas arrivé au Québec. Je sais que cela a déjà été dit dans le cadre de ce débat, mais je tiens à le répéter: l'utilisation d'une telle loi n'est pas à prendre à la légère. Conséquemment, son application doit être mesurée et équilibrée.
    Une autre de mes craintes, c'est que l'utilisation de cette loi, déployée de façon plus large qu'elle ne le devrait, pourrait créer un dangereux précédent. Je tiens à soulever ici d'autres interrogations. Par exemple, pourquoi le premier ministre tient‑il à appliquer cette loi partout, surtout qu'il a lui‑même affirmé à de nombreuses reprises qu'elle ne serait pas utilisée où ce ne sera pas nécessaire?
    Le premier ministre a également ajouté, à la Chambre et dans les documents complémentaires à la motion, qu'il appréhendait que d'autres barrages s'érigent ailleurs au Canada, étant donné notamment les effets de mobilisation sur les réseaux sociaux. Comme je l'illustrerai plus tard, est-ce que ce n'est pas plutôt cette loi qui alimente la hausse des appuis aux contestataires sur ces mêmes réseaux sociaux?
    J'ai beau retourner la question de tous bords et de tous côtés, je ne vois pas l'aspect réel et imminent selon lequel la situation qui se vit en ce moment à Ottawa risque de s'appliquer ailleurs. On n'applique pas une telle loi historique seulement au cas où.
    D'ailleurs, il faut croire que le débat serait tout autre si la motion s'était limitée à la province de l'Ontario. Le gouvernement aurait possiblement obtenu facilement une majorité de voix au Parlement. La seule et unique raison pour laquelle nous sommes ici à débattre de cette loi, c'est parce que le gouvernement s'est traîné les pieds, comme c'est trop souvent le cas depuis le début de son mandat.
    Il est possible d'y faire face avec les lois ordinaires, avec une bonne coordination et une collaboration efficace des forces policières, comme nous avons pu le constater au Québec et au Canada. Pourquoi ne pas s'être inspiré de ce qui s'est fait ailleurs au Canada et au Québec avant d'en arriver à appliquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    De plus, si on regarde un peu dans le passé pour tenter de voir où on aurait pu aller, on constate qu'il n'a pas été nécessaire de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence pour régler les barrages ferroviaires de 2020, la crise d'Oka, la crise de Caledonia, les événements du 11 septembre, la pandémie de la COVID‑19, ou n'importe quel autre conflit qui a marqué l'histoire du Canada.
    Avec une utilisation trop libérale ou déployée inutilement, il y a un risque réel de lancer un mauvais message à la classe politique, mais surtout à la population, en l'utilisant trop largement ou en la déployant de façon inutile.
    Il y a longtemps que le gouvernement est au courant de l'évidence, car certains manifestants s'étaient transformés en occupants qui étaient là pour de bon. Il a simplement continué à évoquer le fait que la gestion de cette crise relevait de la police d'Ottawa. Dès le 6 février, la Ville d'Ottawa a déclaré l'état d'urgence, et, dès le lendemain, la police d'Ottawa avait déjà demandé du renfort à la province et au gouvernement fédéral. Cela fait maintenant plus de 12 jours.

  (1905)  

    Dès le départ, le Bloc québécois a voulu agir de façon constructive. Si le gouvernement avait été le moindrement à l'écoute, s'il avait vraiment voulu faire preuve de leadership politique et s'il s'était assis à la table avec des représentants, s'il avait établi un plan d'intervention ou s'il avait simplement aidé à le concevoir, nous n'en serions probablement pas là.
    J'écoutais un constitutionnaliste ce matin. Il a très bien expliqué qu'il existait déjà des moyens d'intervenir. Le Code de la sécurité routière, les règlements de la Ville d'Ottawa, le Code criminel et une collaboration tripartite auraient pu permettre de coordonner les différents services de police afin de renforcer les lois en vigueur.
    La déclaration d'état d'urgence en Ontario par le gouvernement Ford le 11 février avait déjà donné beaucoup de pouvoirs à la police d'Ottawa et à la police provinciale. Encore une fois, le gouvernement fédéral aurait dû comprendre, mais il a plutôt décidé de faire l'autruche, de se cacher la tête dans le sable, alors que la situation était grave.
    On peut même constater, en ce moment, que les blocages pourraient prendre fin avant que l'application de la Loi sur les mesures d'urgence soit proclamée. On ne peut donc vraiment pas faire de liens entre la Loi et la fin des blocages.
    Par ailleurs, chaque crise comporte un risque de radicalisation. Évidemment, nous espérons que tout se terminera sans violence, mais nous sommes également conscients que, plus le nombre de manifestants diminue, plus on s'approche du noyau dur, voire extrémiste. Ce sont fort probablement des gens qui n'ont rien à voir avec l'esprit de la manifestation du 29 janvier dernier. Les derniers participants dans la foule sont de plus en plus instables et imprévisibles. On est donc en droit de se demander avec quelles idées les occupants repartiront, car ils se sentent actuellement appuyés par les partisans, et ils sont appuyés financièrement. On a pu constater à quel point ils sont organisés.
    Cet été, je lisais un livre intitulé Le nouvel âge des extrêmes? Les démocraties occidentales, la radicalisation et l'extrémisme violent, un ouvrage dirigé par David Morin et Sami Aoun en collaboration avec Sylvana Al Baba Douaihy. Je m'intéresse à cette question, d'autant plus que ce sujet a été abordé le printemps dernier au Comité permanent de la condition féminine, dont je suis la vice-présidente, et au Comité permanent de la sécurité publique et nationale, où j'ai fait quelques remplacements. Dès le premier paragraphe de l'introduction, le ton est donné, et il alimente ma réflexion sur les effets de la Loi sur les mesures d'urgence, qui risque de jeter de l'huile sur le feu. Dans son livre intitulé L'Âge des extrêmes: histoire du court XXe siècle, paru en 1994, Eric John Hobsbawn écrivait que le siècle finissait mal. Nul besoin d'être prophète de malheur pour reconnaître que le XXI siècle ne commence pas beaucoup mieux.
    Les deux dernières décennies ont vu se succéder une vague de terroristes islamistes, plusieurs conflits civils et internationaux, des millions de victimes et de déplacés, une crise migratoire majeure, une crise financière mondiale, la montée du populisme de l'ultra-droite violente et l'accélération du dérèglement climatique. Il faut désormais ajouter à ce sombre portrait la pandémie de la COVID‑19, qui est à l'origine d'une crise sanitaire mondiale.
    De plus, le Québec a dit qu'il ne voulait pas de cette loi. L'exemple de la manifestation qui a eu lieu dans notre capitale nationale a bien démontré que, lorsqu'on a une volonté politique ferme, les dérapages sont évités. Je tiens d'ailleurs à saluer l'excellent travail des forces policières, dont le professionnalisme et les interventions sont irréprochables. En somme, la question ne porte pas tant sur la Loi sur les mesures d'urgence que sur les raisons pour lesquelles nous en sommes rendus là. Poser la question, c'est y répondre.
    J'aimerais dire une dernière chose. J'ai en tête une image qui me revient de plus en plus souvent quand je pense au gouvernement libéral: celle du pompier pyromane. Le premier ministre a fait preuve d'attentisme. Il a laissé aller la situation et l'a laissée se détériorer sans rien faire, en regardant passer la parade, fidèle à son habitude. Il a également insulté et méprisé les manifestants en les mettant tous dans le même panier. Maintenant, il arrive avec sa Loi sur les mesures d'urgence afin de donner l'impression d'éteindre le feu qu'il a lui-même allumé, mais il jette plutôt de l'huile sur le feu, attisant ainsi les feux de la haine et de la division.

  (1910)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, je respecte la députée d'en face, mais je suis fortement opposé à un argument qu'elle et son parti ont martelé durant le débat d'aujourd'hui, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de crise.
    Je pense que nous convenons qu'il y a toujours des barrages à l'extérieur de la Chambre. À l'évidence, il y a un problème à Ottawa. Comme nous le savons, la déclaration d'état d'urgence a été proclamée le 14 février. Le 16 février, nous savons qu’il y a eu une tentative d'ériger à nouveau un barrage à Windsor, qui a été contrecarrée avec succès. C'est bien, mais on apprend encore aujourd'hui que des barrages ont forcé la fermeture de la frontière à Surrey. De toute évidence, la manifestation se poursuit et le problème n'est pas résolu.
    La députée d'en face convient-elle que ces outils sont requis pour régler un problème national évident, de sorte que la sécurité économique, l'intégrité territoriale et la souveraineté de nos frontières ne soient pas compromises par des barrages illégaux?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Je pense avoir démontré dans mon discours à quel point cette crise n'est pas nationale, elle est circonscrite à Ottawa, précisément.
    Ailleurs, à Québec par exemple, les crises qui se sont passées se sont réglées, parce qu'il y a eu une concertation. En ce moment, tant la police que les autorités ont tous les outils pour pouvoir intervenir. Il y a eu une concertation d'ailleurs à Québec, entre le ministère de la Sécurité publique et le maire de Québec, qui a eu une volonté politique, qui a fait preuve de leadership et qui a prévenu que les débordements ne seraient pas permis. Il n'y en a pas eu, parce qu'il y a eu une concertation avec la police de Québec. Cela s'est fait ailleurs, à différents endroits, et aussi dans différents postes.
    On avait les outils nécessaires, et la Loi sur les mesures d'urgence ne l'était pas. Elle ne fait que jeter de l'huile sur le feu et alimenter la haine et la division.

[Traduction]

    Madame la Présidente, la députée de Shefford s'est exprimée de manière réfléchie sur les événements qui nous ont menés à la situation actuelle. Elle a fait allusion à des commentaires du premier ministre, qui a dressé un portrait généralisé des personnes qui se sont rendues à Ottawa et des millions de Canadiens qui les ont appuyées.
    Convient-elle que si le premier ministre avait tendu un rameau d'olivier, qu'il avait écouté et qu'il avait entrepris un dialogue, il aurait pu à tout le moins calmer le jeu, mais qu'à la place, le premier ministre a aggravé la situation?

[Français]

    Madame la Présidente, effectivement, j'ai abordé cette question.
    Le premier ministre n'avait pas à se comporter en commentateur politique, à faire de commentaires déplacés. Il avait à se comporter en dirigeant politique, en leader; à mener un comité tripartite pour réussir à réunir tout le monde autour d'une même table et à trouver une solution pacifique.
    En faisant cela, comme je l'ai dit, il a tout simplement contribué à ce que la situation s'envenime. C'est fidèle à son habitude. On l'a vu avec la crise des Wet'suwet'en. Le premier ministre a cette tendance à laisser aller les choses et à laisser dégénérer les crises, en espérant que tout se règle tout seul, comme par magie.
    Ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent. On a besoin d'un leader capable de réunir des gens pour trouver des solutions quand il y a une crise.
    Madame la Présidente, ma collègue vient de le mentionner, mais je veux lui laisser l'occasion d'en dire davantage.
    Lorsqu'il y a une crise, tout le monde doit faire un examen de conscience pour s'assurer qu'il n'est pas trop tard pour faire ce qui doit être fait.
    Je me suis questionnée, à savoir s'il est possible que l'incrustation ait été encouragée par les mots d'encouragement de certains politiciens. Est-il possible que l'incrustation ait été également encouragée par les mots du premier ministre, qui ont fait en sorte que les gens se sont sentis délaissés, déconsidérés et mis en ban de la société?
    J'aimerais que ma collègue nous parle de cela, mais également de l'examen de conscience qui est à faire de tous les côtés de la Chambre.
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de Beauport—Limoilou de son importante question.
    En tant que politiciens, il est certain que nous devions être à l'écoute des diverses voix qui se sont élevées de la manifestation; il ne s'agissait pas de faire des commentaires, de prendre parti ou de prendre position. Notre but était de réconcilier les différentes parties.
    Ma collègue parle de tirer des leçons de tout cela. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'il faut être à l'écoute, mais surtout nous réunir tout le monde ensemble, par exemple dans un comité tripartite dont nous avons beaucoup parlé.
    On aurait pu réunir beaucoup de gens, tenir...

  (1915)  

[Traduction]

    Nous reprenons le débat. Le député de Banff—Airdrie a la parole.
    Madame la Présidente, je croyais que le Canada était une démocratie. Dans une démocratie toutefois, le gouvernement ne peut suspendre les droits des gens, geler leurs avoirs ou saisir leurs comptes bancaires simplement parce qu'ils ne partagent pas son avis. C'est ce qui se passe en ce moment. C'est ce qui se passe avec l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Voilà pourquoi, lorsque nous voterons à ce sujet lundi soir, je vais m'opposer à cette violation totalement injustifiée des droits et libertés des Canadiens, et je vais le faire pour trois raisons.
    Premièrement, le gouvernement a été incapable de comprendre pourquoi ces événements se sont produits. Deuxièmement, le gouvernement a été incapable de savoir quoi faire. Troisièmement, et c'est la raison la plus importante, le gouvernement a été totalement incapable de justifier de façon légitime cette ingérence sans précédent.
    Je vais commencer par la troisième raison, car il faut parler des critères qui justifient le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Le recours à cette loi exige la présence d'une réelle menace pour la sécurité nationale, comme la menace de violence dans le but d'atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique, ou le renversement du gouvernement constitutionnellement établi au Canada.
    Nous sommes en présence d'un gouvernement qui veut invoquer une mesure législative conçue pour répondre à une invasion étrangère, à une guerre civile ou à une attaque terroriste. Le Canada est-il aux prises avec une guerre civile? Une attaque terroriste? Une invasion étrangère? Je mets au défi quiconque de prouver que la situation actuelle correspond à l'une ou l'autre de ces situations.
     Par ailleurs, la loi prescrit que les circonstances doivent menacer gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l'intégrité territoriale du pays. J'attire votre attention sur le mot « et ». Le critère à satisfaire est que tous ces aspects — la souveraineté de notre pays, sa sécurité et son intégrité territoriale — soient menacés et que le gouvernement du Canada estime ne pas avoir la capacité de les protéger sans recourir à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Peut-on vraiment affirmer que notre intégrité territoriale et notre souveraineté nationale sont à risque? Je rappelle que les circonstances actuelles ne constituent pas une invasion étrangère ni une attaque terroriste. Il s'agit d'actes illégaux. Les gens bloquent des rues et des routes; il est clair que c'est illégal et que cela doit cesser, mais la situation ne justifie pas d'appliquer la Loi sur les mesures d'urgence.
     Pour déterminer pourquoi cette mesure n'est pas justifiée, nous pouvons notamment nous pencher sur d'autres exemples de situations où l'invocation de la loi ne s'est pas imposée et où cette loi n'a pas été appliquée. Il a beaucoup été question des perturbations de la vie quotidienne à Ottawa. On a aussi beaucoup parlé des possibles menaces de violence. Ces sujets ont parsemé un grand nombre des discours que les députés libéraux et néo-démocrates ont prononcés pour tenter de justifier leur vote en faveur de l'utilisation de cette loi.
    Si nous utilisons ces critères comme baromètre, pensons au Sommet du G20 en 2010 à Toronto. On a alors compté 10 000 manifestants. Des voitures de police ont été renversées et incendiées. Des entreprises locales ont subi des dommages s'élevant à des millions de dollars, et 97 policiers ont été blessés. Malgré tout, le recours à la Loi sur les mesures d’urgence n'a pas été jugé nécessaire. Je ne suis pas en train de dire qu'il aurait dû l'être. Il y a d'autres façons de gérer les situations de ce genre. Comme la Loi sur les mesures d’urgence n'a pas été utilisée dans ce cas, les arguments à propos des perturbations de la vie quotidienne et des choses de ce genre sont peu convaincants.
    Pensons au 11 septembre 2001. C'est la définition même d'un acte terroriste. On a limité l'espace aérien. Tous les vols ont été annulés. Un sentiment de peur planait. Je me souviens de personnes qui se demandaient si c'était le début de la troisième guerre mondiale ou si nous assistions à la fin du monde tel que nous le connaissions. C'était le genre de sentiments que ressentaient les gens à l'époque. La présente situation cause des craintes à beaucoup de personnes, mais ces craintes ne se comparent en rien avec la peur ressentie en 2001. Je ne suis pas non plus en train de dire que la Loi sur les mesures d’urgence aurait alors dû s'appliquer. Toutefois, on peut en conclure que le recours à cette loi n'est probablement pas nécessaire dans la situation actuelle.

  (1920)  

    J'ai entendu beaucoup d'arguments à propos des conséquences économiques ou autres qu'il y a à bloquer des infrastructures essentielles, par exemple des voies ferrées, des autoroutes et des postes frontaliers. La meilleure comparaison qui me vient à l'esprit, c'est celle des barricades très semblables qui ciblaient, il y a deux ans, des pipelines et des voies ferrées d'un bout à l'autre du pays. Ces barricades ont aussi duré pendant quelques semaines. On aurait pu, à ce moment-là, invoquer les arguments qui sont invoqués aujourd'hui pour justifier le recours à la Loi sur les mesures d'urgence, si le gouvernement avait choisi de le faire. Je ne veux pas dire, je le souligne, qu'on aurait dû le faire.
    À l'époque, le premier ministre a affirmé que le Canada était un pays qui reconnaissait le droit de manifester et que nous ferions tout notre possible pour résoudre cette situation par la voie du dialogue afin d'obtenir des résultats constructifs. La ministre des Affaires autochtones d'alors a dit qu'il fallait faire en sorte d'en arriver à une solution pacifique, en misant notamment sur le dialogue. À l'heure actuelle, personne ne parle de trouver une façon de dialoguer et d'en arriver à une solution pacifique. Je crois, en fait, que s'il y avait eu une certaine forme de dialogue avec les gens qui sont venus à Ottawa, s'il y avait eu une façon de répondre à leurs préoccupations, la situation se serait probablement réglée très vite. Je reviendrai sur ce point dans un instant si le temps le permet.
    Je veux aussi soulever une question. Dans beaucoup de discours que j’ai entendus aujourd’hui et à d’autres moments, on prétend qu’il y a une menace pour le Parlement et, de ce fait, pour notre démocratie. Oui, il y a l’aspect de la proximité au Parlement. Par contre, je n’ai vu personne essayer de prendre d’assaut les édifices du Parlement. Je n’ai rien vu de tel. Ces gens sont ici pour se faire entendre et, en effet, les événements qui se déroulent ont une nature illégale. Je veux absolument être clair: je n’excuse aucun geste illégal, peu importe l’argument que les coupables essaient de faire valoir.
    Le caporal Nathan Cirillo a été abattu au Monument commémoratif de guerre du Canada en 2014 par un attaquant armé qui a ensuite pris d’assaut notre Parlement. Personne n’a suggéré que nous invoquions la Loi sur les mesures d’urgence cette fois-là non plus. Je ne dis pas qu’il aurait fallu agir ainsi, mais c’était là une bien plus grande menace pour notre Parlement et pour notre démocratie que la situation d’aujourd’hui.
    Nous sommes en présence d'un gouvernement qui est incapable de comprendre pourquoi nous sommes dans cette situation. Il y a des raisons à cela. C'est parce que les gens en ont ras le bol. Ils sont exaspérés. Ils ne voient aucune raison pour certaines mesures prises par le gouvernement. Nous pouvons débattre tant que nous le voulons sur la question de savoir s'il est acceptable de poser des gestes illégaux pour faire valoir son point de vue; évidemment, la réponse est non.
    Il y a beaucoup de gens dans ce pays. Bien des gens ont soutenu les convois et les barrages en faisant, par exemple, un don de 50 $. Ils en ont assez des mesures de confinement, des exigences et des restrictions. Dans le cas d'une personne qui n'était pas au courant des activités illégales qui pouvaient avoir lieu, est-il vraiment juste de dire qu'on devrait pouvoir saisir son compte bancaire ou geler ses actifs parce qu'elle a donné 50 dollars, principalement parce qu'elle en a tout simplement assez des restrictions?
    Le gouvernement n'a pas le droit de prendre ce genre de décision simplement parce qu'il ne partage pas le point de vue de quelqu'un. Le gouvernement n'a pas su agir au moment opportun. Nous lui avons donné l'occasion de mettre fin aux exigences, ou à tout le moins de proposer un plan pour mettre fin aux exigences et aux restrictions qui relèvent du gouvernement fédéral. S'il avait saisi cette occasion, il aurait suivi l'exemple de bien des provinces et d'autres pays. Il aurait agi en fonction de ce que les données scientifiques indiquent.
    Le gouvernement a choisi de ne pas le faire. Il a plutôt décidé d'alimenter la peur et la division dans ce pays. Les gens ont peur. J'ai entendu bien des gens dire qu'ils ont peur parce qu'ils ont donné 50 $ ou 100 $ pour soutenir ce genre de manifestation. Le gouvernement refuse de dire à ces gens si leurs comptes bancaires seront saisis. Cela suscite des craintes. Cela crée des divisions et des dissensions. Le gouvernement devrait avoir honte d'avoir pris ce genre de décision. Je vais m'y opposer jusqu'au bout.

  (1925)  

    Madame la Présidente, selon le député, le premier ministre n'avait qu'à engager le dialogue avec les occupants pour en arriver à une résolution pacifique. Pourtant, le premier ministre de la province du député, Jason Kenney, n'a pas engagé de dialogue au poste frontalier de Coutts, pas plus que le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford. Même absence de dialogue pour le premier ministre du Manitoba concernant les barrages dans sa province.
    Je suis curieux. Le député peut-il expliquer pourquoi seuls les chefs libéraux doivent amorcer un dialogue? Sinon, il ne voit peut-être pas l'hypocrisie que recèlent ses propres déclarations.
    Madame la Présidente, parlons-en d'hypocrisie. Comparons les déclarations du premier ministre en 2020 et ses déclarations actuelles. Elles ont été faites dans un contexte très similaire. Des blocages d'infrastructures essentielles ont duré pendant des semaines un peu partout au pays. Voilà les arguments énoncés aujourd'hui pour justifier le recours à cette loi. À l'époque, le premier ministre avait dit qu'il fallait résoudre cette situation par la voie du dialogue afin d'obtenir des résultats constructifs.
    Nous avons fourni une occasion au gouvernement. Nous aurions pu obtenir des résultats constructifs en levant les restrictions et les exigences fédérales relatives à la vaccination pour que les nombreux autres Canadiens qui partagent ces préoccupations, mais qui ne participent pas aux manifestations illégales, voient la levée des restrictions. Nous avions une occasion d'obtenir des résultats constructifs. Voilà l'hypocrisie. Le premier ministre en est rempli.

[Français]

    Madame la Présidente, j'aimerais revenir sur l'idée de faire un examen de conscience collectif. Loin de moi l'idée de faire la morale ici, car je peux à l'occasion avoir un certain caractère, moi aussi.
    Sachant que certaines personnes ont minimisé la dangerosité des paroles de certains manifestants, alors que d'autres l'ont exagérée, n'y aurait-il pas lieu, en faisant cet examen de conscience, de se demander de faire attention aux extrêmes et de trouver le moyen de les éviter?

[Traduction]

    Madame la Présidente, c'est tout à fait juste. Nous voulons tous éviter les extrêmes. Je tiens certes à préciser très clairement que personne ne cautionne les actes illégaux commis. Il faut prendre des mesures pour empêcher les gens de perpétrer de tels actes.
    Toutefois, l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence n'est pas justifiée. Parlant d'extrêmes, c'en est tout un. C'est une mesure très extrême, et je n'y vois aucune justification. Le fait que le gouvernement se donne le pouvoir de saisir des comptes bancaires...
    Le député de Vancouver Kingsway a la parole.
    Madame la Présidente, mon collègue dit qu'il a du mal à voir les justifications du recours à la Loi sur les mesures d'urgence. En voici quelques‑unes: la fermeture d'un poste frontalier important au pont Ambassador, entraînant des pertes de 330 millions de dollars par jour en échanges commerciaux et menaçant le commerce entre le Canada et les États‑Unis; des interruptions des activités de l'industrie automobile canadienne et du secteur manufacturier dans le Golden Horseshoe; une cache d'armes et le dépôt d'accusations de complot en vue de commettre un meurtre à Coutts, en Alberta; le blocage de rues à Ottawa pendant trois semaines, forçant de nombreux commerces dans la capitale nationale à fermer leurs portes; des actes de harcèlement et des menaces à l'égard de citoyens; de l'information secrète révélant des plans d'installation de barrages dans les ports et les aéroports; la publication d'un manifeste réclamant ouvertement un changement de gouvernement; les fonds provenant de l'étranger et l'ingérence dans nos affaires nationales; l'implication de l'extrême droite; des menaces envers des conducteurs et des entreprises de remorquage et l'utilisation de camions et de tracteurs comme armes de barrage.
    Mon collègue croit‑il réellement qu'aucun de ces faits ne devrait nous inciter à évaluer honnêtement la nécessité d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence? Pense-t‑il que rien de ce qui se passe actuellement au Canada ne justifie une telle évaluation?
    Madame la Présidente, les sujets mentionnés par le député sont en effet préoccupants. Ils sont très préoccupants et il faut s'en occuper. Néanmoins, les critères pour invoquer la Loi sur les mesures d’urgence sont extrêmement rigoureux et les conditions ne sont pas réunies dans le contexte dont nous parlons. La souveraineté du pays n’a pas été menacée et il n’y a pas eu non plus d’invasion étrangère, deux éléments qui pourraient normalement justifier le recours à cette loi.
    Le député a mentionné une chose dont je voudrais parler rapidement et ce sont les fonds provenant de l’étranger. On a beaucoup parlé du financement étranger, et c’est un problème que j’ai soulevé à maintes reprises au Parlement et pendant les travaux des comités. En fait, le financement étranger sert souvent à bloquer des infrastructures essentielles dans notre pays, comme les oléoducs. Où était...

  (1930)  

    Nous reprenons le débat. Le député de Beauce a la parole.

[Français]

    Madame la Présidente, aujourd'hui, je me lève à la Chambre avec tristesse et déception. Cette semaine, pour la première fois depuis son adoption, la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée par le premier ministre. C'est un événement historique.
    Au cours des trois dernières semaines, le premier ministre n'a pas pris de mesures significatives pour désamorcer les manifestations dans tout le pays ou utiliser tout autre outil dont il aurait pu disposer. Au lieu de cela, il a sauté directement aux mesures extrêmes.
    Pendant plus de trois semaines, le gouvernement est resté les bras croisés alors que des blocages ont fermé nos frontières et d'autres infrastructures importantes. Alors que le gouvernement est resté silencieux et a diabolisé les manifestants pacifiques en les peignant tous de la même couleur, les Canadiens sont sortis en grand nombre, simplement pour se faire entendre. Le premier ministre n'a même pas la compassion d'écouter les personnes avec lesquelles il n'est pas d'accord. C'est tout à fait indigne d'un dirigeant d'un pays.
    Beaucoup de ces personnes sont nos voisins, nos concitoyens, des Canadiens qui veulent être entendus et recevoir un minimum de respect de la part de leur premier ministre. Le premier ministre a décidé que, parce qu'il n'était pas d'accord avec eux et qu'il n'aime pas leurs opinions, il ne les écoutera pas. Chaque fois, le premier ministre a stigmatisé, marginalisé et divisé les Canadiens.
    Pourquoi le gouvernement a-t-il sauté directement à cette mesure extrême, sans agir pour faire baisser la pression? Aucun gouvernement ne devrait avoir recours aux genres de mesures extrêmes décrites dans la Loi sur les mesures d'urgence, et ce, sans avoir épuisé toutes les autres options.
    Nous avons demandé au gouvernement de s'engager publiquement à présenter un plan et un calendrier précis pour supprimer les obligations et les restrictions émanant du gouvernement fédéral. Les libéraux et le NPD ont refusé d'appuyer notre motion et, au lieu de faire cela, le premier ministre a cherché à obtenir encore plus de pouvoir.
    Cela se produit alors que les gouvernements provinciaux de presque toutes les provinces ont annoncé des plans pour mettre fin aux restrictions en lien avec la COVID‑19. De nombreuses provinces ont fait part de leur mécontentement à l'égard du premier ministre concernant ses actions. Elles ne veulent pas que le gouvernement fédéral impose la Loi sur les mesures d'urgence dans leurs zones de responsabilité.
    Tout comme l'industrie du camionnage qui a clairement déclaré qu'elle n'avait jamais été consultée au sujet des obligations imposées par le gouvernement, les provinces et les territoires ne semblent pas avoir été consultés non plus dans ce cas-ci.
    Notre pays semble se transformer de plus en plus en une dictature. Malheureusement, à la grande surprise de personne, le NPD soutient une fois de plus le gouvernement en place en formant une coalition qui divise notre pays.
    Mon bureau a été submergé de communications de citoyens qui sont extrêmement inquiets des politiques excessives continues du gouvernement. Mon personnel a beaucoup de mal à répondre au volume impressionnant d'appels et de courriels à ce sujet.
    Le fait est que les Canadiens veulent simplement voir une lumière au bout du tunnel. Nous sommes tous fatigués; plusieurs de mes collègues l'ont exprimé tout à l'heure. Or ce gouvernement et son allié le NPD ne semblent pas vouloir fixer des objectifs de réouverture, ce que je trouve honteux.
    Comme on le sait, le Parti conservateur est le parti de la loi et de l'ordre. Nous croyons que les blocus illégaux doivent prendre fin rapidement et pacifiquement.

  (1935)  

    Cependant, les actions du premier ministre pourraient avoir l'effet contraire. Presque tous les manifestants ont maintenant été dispersés, mais le premier ministre estime que c'est le moment d'attiser les braises pour alimenter davantage la division dans ce pays.
    Nous devons nous rassembler, malgré nos différentes opinions, pour le bien‑être de notre pays. J'aimerais que le premier ministre en prenne conscience.
    La mesure dont nous débattons aujourd'hui est un excellent exemple du manque de leadership de ce premier ministre. C'est sa façon de cacher ses erreurs et celles de ses ministres. Soyons assurés que les Canadiens et le reste du monde nous surveillent.
    J'ai passé de nombreuses années de ma vie à travailler comme représentant dans ma communauté. Pendant plus de 20 ans, j'ai servi la population beauceronne. La plus grande qualité que j'ai acquise au fil des années, et la qualité la plus importante pour un politicien, c'est l'écoute. J'ai toujours pris le temps d'écouter les préoccupations des gens et d'avoir des débats fructueux, en prenant un café au restaurant ou à l'épicerie du coin.
    Or ce premier ministre est tellement déconnecté de la réalité qu'il ne prend pas le temps de parler aux Canadiens ordinaires. S'il n'y a pas de caméras autour, cela ne l'intéresse pas.
    Notre pays doit réévaluer ses vraies valeurs et se demander si ce premier ministre est la bonne personne pour le diriger. Après avoir déclenché une élection inutile pour obtenir plus de pouvoir, ce gouvernement a formé un autre gouvernement minoritaire. Le premier ministre ne cesse de répéter que les Canadiens ont fait un choix clair en le réélisant. Cependant, il semble oublier que, pour la deuxième élection consécutive, ce sont les conservateurs qui ont emporté le vote populaire.
    Bien sûr, le premier ministre n'attestera jamais du fait qu'il a obtenu moins de votes que l'opposition officielle. Le fait est que les libéraux ont le NPD dans la paume de leur main. Je trouve cela honteux que le NPD continue à jeter de l'huile sur le feu avec le premier ministre.
    En prenant la parole aujourd'hui, je me demande pourquoi on ne peut pas laisser la police et les pouvoirs déjà en place effectuer leur travail, pendant que nous faisons le nôtre à la Chambre en adoptant et en débattant des projets de loi afin d'améliorer la vie des Canadiens. Les gens de ma circonscription ne peuvent même pas obtenir une couverture cellulaire adéquate. Ils ne peuvent pas joindre Service Canada par téléphone lorsque leurs prestations d'assurance‑emploi ou de Supplément de revenu garanti sont réduites, ou lorsqu'ils sont victimes de fraude. Ils ne peuvent pas faire venir au Canada les travailleurs étrangers temporaires dont ils ont si désespérément besoin pour pourvoir des postes importants afin de faire prospérer leurs entreprises.
    Pendant que nous sommes à la Chambre afin de débattre des manquements de ce premier ministre et de son Cabinet, mes électeurs continuent de payer les frais de cette incompétence.
    Pour conclure, je voterai contre cette motion, comme tous mes collègues du Parti conservateur, car je ne crois pas que ce que notre pays vit en ce moment exige que nous adoptions des mesures aussi puissantes. Nous avons traversé plus de deux ans de pandémie mondiale et de nombreuses protestations se sont dissipées. Ce n'est pas le moment de perdre la confiance de notre nation en prenant des mesures aussi radicales contre notre propre peuple.
    Je supplie tous mes collègues ici présents de réfléchir longuement et sérieusement à la façon dont ils vont se prononcer sur cette motion. Je leur mentionne que leurs électeurs les regardent.
    Je serai heureux de répondre aux questions de mes collègues.

  (1940)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, je suis très heureux que mes concitoyens puissent voir dans quel sens je voterai. J’ai hâte d’y arriver.
    Le député a dit que nous devrions laisser la police faire son travail. Le fait est que depuis que cette loi a été invoquée lundi, la police a effectivement été en mesure de faire son travail. Lorsque je suis arrivé cet après-midi, j’ai dû être escorté par la police pour traverser la rue Wellington. Depuis, la police a vidé la rue Wellington et est en train de dégager les autres rues. Cette loi a donc permis à la police de faire son travail.
    J’aimerais savoir pourquoi le député s’oppose à cette loi qui donne réellement à la police les moyens de faire son travail.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    J'ai dit que la police devait faire son travail, comme elle l'a fait ailleurs au Canada — nous en avons parlé à de multiples reprises aujourd'hui.
    Au Québec, les policiers sont intervenus il y a deux semaines. Il n’y avait pas de Loi sur les mesures d’urgence, mais ils ont quand même contrôlé la situation. C’était la même chose aujourd’hui.
    La question que l'on doit se poser est la suivante.
    A-t-on utilisé tous les moyens disponibles, qu'il s'agisse de la police ou des pouvoirs qui lui sont conférés, pour répondre aux besoins, comme cela a été fait dans plusieurs autres provinces?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son discours très éclairant.
    Plus tôt, mon collègue libéral a fait référence à une pièce de théâtre, quand mon collègue cherchait une crise et n’en trouvait pas. Personnellement, j’ai l’impression que c’est le premier ministre qu’on ne trouve pas.
    La pièce de théâtre, n'est-ce pas le fait d'avoir invoqué la Loi sur les mesures d'urgence afin de cacher l'incompétence du gouvernement?
    J’aimerais connaître l'opinion de mon collègue à ce sujet.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son excellente question.
     En effet, on croirait être dans une pièce de théâtre, tout simplement parce que le premier ministre et le gouvernement n’ont jamais utilisé l’ensemble des ressources à la disposition de l’ensemble des corps policiers du Canada. C’est peut-être une occasion de cacher son incompétence.
    J'ai énuméré plusieurs problèmes que les citoyens aimeraient que l'on règle au lieu de discuter d'un projet de loi qui n'est pas utile présentement.

[Traduction]

    Madame la Présidente, le Service de police d'Ottawa s'est dit préoccupé par le montant considérable d'argent provenant de l'étranger pour financer cette occupation. Ce financement étranger est acheminé, souvent de façon anonyme, au Canada pour soutenir un mouvement qui déclare ouvertement que son objectif est de renverser le gouvernement. Ces fonds financent la poursuite d'un objectif haineux déguisé en manifestation pacifique et, d'ailleurs, beaucoup se rallient à la cause sans connaître les véritables intentions des organisateurs ou sans en tenir compte. Le député est-il d'accord pour dire que c'est le manque de leadership du gouvernement qui nous a menés dans cette situation et que la Loi sur les mesures d'urgence nous fournira ce qui est nécessaire pour enfin aider les gens?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de sa question.
    Au Canada, il y a des règles, et l’on fait déjà de la surveillance à cet égard. Personne n'a réussi à me convaincre que le fait d'adopter une loi spéciale permettrait de donner encore plus de mordant aux règles en vigueur actuellement.
    Madame la Présidente, on nous dit que certains manifestants voulaient renverser le gouvernement. Je viens d'aller faire un tour à l’extérieur et j’ai pu constater l’état des lieux.
     J’aimerais que mon collègue me dise une chose. Parmi les zéro camions qui sont à l’extérieur, combien veulent renverser le gouvernement?

  (1945)  

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son excellente question.
    J'ai pris le temps de regarder par la fenêtre. Comme mon collègue, je constate qu'il ne reste pas grand-chose à renverser. Nous sommes ici pour débattre de la situation, et nous en débattrons jusqu’à lundi, en début de soirée. Je me demande pourquoi nous le faisons, car la plupart des exercices de démantèlement des manifestations, qui ont eu lieu un peu partout au Canada, ont été faits avant que la Loi...

[Traduction]

    Nous reprenons le débat. La secrétaire parlementaire du ministre des Affaires intergouvernementales a la parole.
    Madame la Présidente, j'aimerais pouvoir dire que je suis reconnaissante de débattre cette importante loi, mais, comme l'ont souligné beaucoup de mes collègues, ceci n'est pas nécessairement un jour de travaux législatifs qui nous rend particulièrement heureux. D'ailleurs, je suis déçue que la situation soit telle au pays que nous... [difficultés techniques]
    Cela dit, il est incroyablement important de débattre ce qui se passe à l'extérieur, devant les portes mêmes de la Chambre des communes. Des députés qui sont intervenus dans une période de questions et observations ont mentionné que les camions ont été remorqués et soutenu qu'il est inutile d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. On dirait presque que ces députés ne réalisent pas que c'est grâce au recours à la Loi sur les mesures d'urgence que ces camions ont pu être remorqués.
     Le député a dit avoir regardé par la fenêtre et n'avoir vu aucun camion. Dans les faits, les effectifs policiers et les mesures nécessaires pour dégager cette rue ont été obtenus grâce au recours à la loi dont nous débattons en ce moment.
    Normalement, quand nous débattons d'un projet de loi, nous émettons tous des hypothèses et nous discutons des intentions des uns et des autres. L'opposition, de son côté, s'interroge sur les conséquences et les répercussions des textes à l'étude. La situation d'aujourd'hui est toutefois unique, car nous pouvons assister en temps et réel et juste là, à quelques pas de la Chambre des communes, à la mise en œuvre de la Loi sur les mesures d'urgence. Une bonne partie des discussions portera sur ce qui a pu se passer pour que nous en arrivions là, y compris ce qui a pu aller de travers. Cela dit, ceux qui osent affirmer que le gouvernement et le premier ministre ont décidé un bon matin d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence et qui prétendent que ce geste était inutile n'étaient de toute évidence pas ici ces trois dernières semaines. Ils n'ont pas dû regarder les nouvelles non plus depuis deux jours, car on y montre l'effet que la loi a eu dans les rues de la ville.
    Je suis reconnaissante aux policiers qui sont venus jusqu'ici pour repousser les manifestants hors du quartier et de la ville, car bon nombre de nos employés et d'entreprises situées à proximité du Parlement, au centre-ville et dans les quartiers avoisinants ne se sentaient plus en sécurité. Les Ottaviens vivent dans la terreur depuis trois semaines. Ils ne se sentent plus en sécurité dans leur propre maison et dans leur propre quartier. J'ai entendu, dans les reportages et les entrevues que j'ai regardés, que certaines personnes handicapées sont incapables d'aller à l'épicerie ou de se faire livrer de la nourriture parce qu'elles habitent dans une zone occupée par les prétendus manifestants. Elles ne peuvent pas non plus prendre les transports en commun.
    Étrangement, les conservateurs répètent qu'il n'y a rien à voir. Ils sont sans doute trop occupés à courtiser ceux-là mêmes qui occupent les rues et qui sèment le chaos non seulement sur la Colline du Parlement, mais aussi dans la vie des Canadiens qui habitent dans cette ville.
    Il est incroyablement naïf de la part des conservateurs de soutenir qu'il ne s'agit que de manifestants pacifiques. Il ne fait aucun doute que certains d'entre eux se sont présentés en pensant que la manifestation portait uniquement sur les exigences relatives à la vaccination ou sont contrariés par rapport aux événements liés à la COVID. Toutefois, les organisateurs ont eux-mêmes déclaré leurs intentions des semaines avant de se rendre à Ottawa. Quiconque suggère qu'ils ne le savaient pas ne prêtait tout simplement pas attention ou tente de réécrire l'histoire.

  (1950)  

    Les organisateurs qui se sont rendus à Ottawa, qui voulaient voir le convoi envahir les rues d'Ottawa, ont très clairement indiqué qu'ils venaient à Ottawa pour renverser le gouvernement démocratiquement élu et le remplacer par un comité de leur choix. Je ne sais pas dans quel univers je me serais attendu à voir le Parti conservateur se croiser les bras et défendre un groupe qui planifie de renverser le Parlement au complet. Soit dit en passant, cela inclut les conservateurs qui prennent la parole en ce moment pour défendre ces individus et qui ignoreraient les votes de citoyens canadiens qui ont élu tous les députés.
    Il y a à peine six mois, des élections démocratiques ont eu lieu, que les conservateurs ont qualifiées de non nécessaires. Ils auraient volontiers continué avec le premier ministre en place. Toutefois, le gouvernement a estimé qu'il fallait tenir des élections justement parce qu'il fallait parler aux Canadiens et leur présenter une plateforme sur la manière de procéder relativement à la COVID et l'après-COVID. La grande majorité des Canadiens ont appuyé des partis politiques qui ont prôné la fermeté en ce qui concerne la vaccination, parce que nous savions tous que la seule manière de sortir de la pandémie passait par la vaccination.
    Depuis le début de la pandémie, les conservateurs ont fait volte-face en ce qui a trait à la COVID. Voici des exemples.
    Au début de la pandémie, les conservateurs ont protesté en affirmant que le Canada n'obtiendrait jamais de vaccin avant 2030. Bien entendu, c'était faux. Ensuite, les conservateurs ont réclamé qu'on ferme les frontières. Une fois les frontières fermées et des restrictions sur les voyages mises en place, les conservateurs ont demandé qu'on ouvre les frontières.
    Avec l'assouplissement des mesures de restriction et l'évolution de la pandémie, des premiers ministres conservateurs, comme Doug Ford, ont montré des graphiques. Les députés se rappellent-ils les cartes colorées de propagation de la maladie? Puis, les conservateurs fédéraux ne savaient plus quoi faire, parce qu'un premier ministre conservateur demandait de fermer les frontières, tandis qu'ils réclamaient leur ouverture. Leur confusion était totale à l'égard des frontières à ce moment-là.
    Alors que les Canadiens avaient de plus en plus accès aux vaccins et que nous encouragions toute la population à se faire vacciner, les conservateurs se sont rendu compte que leur base ne souhaitait peut-être pas se faire vacciner. Tout à coup, le parti qui cherche à limiter le droit des femmes au libre choix s'est mis à scander « mon corps, mon choix ». Quelle ironie quand on songe qu'un député a pris la parole durant la session précédente pour défendre les droits des femmes auprès des conservateurs qui jugent que ce sont les législateurs qui doivent décider de la santé des femmes.
    Puis, les conservateurs ont cessé de recommander la vaccination, affirmant que ce n'était pas nécessaire, que les tests rapides suffisaient amplement. Eh bien, la semaine dernière, nous avons tous entendu les conservateurs à la Chambre déclarer que les tests étaient inutiles, que tout allait bien et que, à leurs yeux, la COVID est derrière nous. Donc, ils ont voté contre les tests rapides. J'aimerais également souligner que même l'ancien chef et député de Durham, pendant sa campagne électorale, imposait des exigences relatives à la vaccination à toute personne qui voyageait avec lui ou le côtoyait, mais estimait que le reste des Canadiens n'avaient pas besoin du même degré de protection.
    Quand il est question des conservateurs et de la pandémie, s'appuyer sur des données probantes et scientifiques est le dernier de leurs soucis. À chaque étape, ils s'en remettent à l'approche politique qu'ils estiment la plus avantageuse pour eux.

  (1955)  

    Je suis exaspérée par la COVID, et je ne peux m'imaginer que quiconque au Canada, ou ailleurs dans le monde en fait, ne le soit pas également. Toutefois, la réponse à la pandémie ne consiste pas à adopter l'approche des conservateurs, qui est de voler au gré du vent et de faire ce qui semble convenir sur le moment. Si c'était le cas, beaucoup plus de gens seraient malades, beaucoup plus pleureraient la mort d'un proche, et nos hôpitaux seraient complètement débordés. De plus, nos travailleurs de la santé, qui ont été de véritables héros pendant la pandémie, auraient dû déployer des efforts encore plus surhumains.
    J'aimerais revenir à la Loi sur les mesures d'urgence et sur ce qui motive notre présence ici. Il y a quelque chose que je trouve vraiment consternant dans le débat actuel. Nous aurions déjà dû tenir de véritables débats sur les politiques visant la COVID et sur les mesures à prendre par la suite. C'est une approche saine dans toute démocratie et j'y suis favorable.
    Toutefois, avec ce qu'on constate dans les rues d'Ottawa et dans des collectivités frontalières partout au pays, c'est celui qui criera le plus fort, qui pourra utiliser les plus gros camions pour bloquer les routes et qui pourra intimider ou harceler le plus qui remportera le débat sur la COVID et dictera à ce gouvernement ou à n'importe quel autre quelles politiques adopter. Dans quel monde cela représente-t-il la démocratie?
    En démocratie, nous pouvons débattre. En démocratie, des députés dûment élus représentent le gouvernement. Il y a des votes. Pendant le débat aujourd'hui et la semaine dernière, lorsqu'il était question des différentes choses qui se passent au pays, j'ai entendu à plusieurs reprises le premier ministre être qualifié de dictateur. Certains prétendent que nous vivons sous un gouvernement tyrannique et autoritaire. Cela me rend malade d'entendre de telles choses.
    L'ironie là-dedans, c'est que des députés à la Chambre crient que le premier ministre est un dictateur, mais qu'ils le font depuis leur siège à la Chambre des communes et que, s'ils sont ici, c'est parce qu'ils ont été dûment élus. Quelle dictature dans le monde tient des élections démocratiques libres? D'autres prétendent qu'ils ne sont pas libres, qu'ils ne vivent plus en démocratie, qu'il n'y a plus qu'un point de vue qui soit valable et qu'il n'y a plus de débats.
    J'avais aussi noté que, le jour même où des députés criaient que le Canada était devenu une dictature, des mesures législatives ont été mises aux voix en soirée. Nous avons notamment voté au sujet des mesures concernant les aînés que mon amie la ministre des Aînés avait présentées. Ces mesures ont été adoptées à l'unanimité. Quelles sont les dictatures qui permettent la tenue de débats et de votes libres?
    Les propos du Parti conservateur sont subversifs. Bien franchement, je crois que certains députés tiennent de tels propos pour faire réagir les manifestants et pour faire les manchettes parce qu'ils pensent que cela leur permettra de recueillir davantage de fonds ou de faire plaisir à leur base électorale. D'autres députés, peut-être même chez les conservateurs, sont mal à l'aise avec une telle pratique. Je suis sûre qu'ils ont vu les conséquences des véritables dictatures et gouvernements autoritaires et qu'ils ne sont pas enchantés par certains des propos tenus par leurs propres collègues.
    La semaine dernière, pendant la période des questions, j'ai vu des députés du Parti conservateur en colère arracher leur masque et crier au premier ministre qu'il était un dictateur. Je le répète, je souligne qu'ils ont fait cela à la Chambre des communes, à laquelle ils ont été élus lors d'élections démocratiques. Je me demande vraiment s'ils sont seulement conscients qu'ils tiennent des propos paradoxaux, s'ils comprennent vraiment le sens de ces derniers ou s'ils sont tellement privilégiés qu'ils ont perdu tout sens de la réalité.

  (2000)  

    De nombreux députés, notamment chez les conservateurs, ont affirmé qu'il s'agissait d'une manifestation pacifique et que ce n'étaient que des Canadiens ordinaires qui se réunissaient et manifestaient parce qu'ils n'étaient pas d'accord avec le gouvernement. J'appuie pleinement le droit de manifester et le droit à la dissidence au Canada. Cela représente un aspect fondamental de notre démocratie. Si tout le monde était du même avis, ce ne serait pas une démocratie saine.
    Cependant, ce que je trouve si intéressant, ce sont certaines des actions de ces soi-disant combattants de la liberté pacifiques que les conservateurs aiment défendre. Ils ont agressé des gens d'Ottawa parce qu'ils portaient des masques. Ils ont harcelé des employés d'entreprises locales, à tel point que des commerces ont dû fermer leurs portes pendant trois semaines. Il y a eu une tentative d'incendie criminel où les portes de l'immeuble visé ont été fermées avec des menottes afin que des gens à l'intérieur soient brûlés vifs si un incendie se déclarait. J'ai vu des journalistes se faire agresser et harceler en direct à la télévision. Des centres d'appels 911 ont été inondés d'appels pour perturber les services d'urgence. Un vélo a été jeté sur un cheval policier hier dans le but de le blesser. Hier, des manifestants ont essayé de s'approprier les armes des policiers. Aujourd'hui, des manifestants ont allumé et lancé des bonbonnes de gaz sur les policiers. Il y a eu des menaces d'attentat à la bombe à l'Hôpital d'Ottawa.
    Je suis certaine que ce n'est pas une liste exhaustive des gestes posés. Cela dit, le gouvernement fédéral doit faire régner la loi et l'ordre partout au pays après que de tels actes ont été commis, après trois semaines pendant lesquelles les forces de l'ordre ont dit aux gens qu'ils avaient été entendus, qu'ils avaient fait valoir leurs arguments et qu'ils devaient retourner à la maison parce que ce qu'ils faisaient était illégal. Les manifestants ont refusé d'écouter et ont continué de commettre des actes de violence. C'est inacceptable. Il est temps d'agir. Je crois que le recours à la Loi sur les mesures d’urgence ne devrait jamais être pris à la légère. Le débat que nous avons aujourd'hui est crucial. Le comité d'examen qui est prévu dans la loi est aussi crucial. J'espère que notre pays ne se retrouvera plus jamais dans cette position.
    Cela dit, c'est là où nous en sommes, et je reviens sur le fait que notre démocratie est menacée. Il a été montré très clairement que des fonds étrangers influencent les actions de ce convoi.
    Une chose m'a particulièrement interpellée pendant les discussions antérieures: le député de Cumberland—Colchester a dit qu'il était allé à la rencontre des manifestants, qu'il s'était senti en toute sécurité et qu'il ne comprenait pas vraiment quel était le problème. Je suis la représentante dûment élue des habitants de Pickering—Uxbridge. Je vais lire un extrait d'un message qui a été laissé dans ma boîte vocale, à mon bureau sur la Colline, l'autre jour: « Écoute-moi bien mon ostie de plotte, ma crisse de chienne, nous... »

  (2005)  

    À l'ordre. Je suis conscient que la députée cite des propos, mais ils sont non parlementaires. Je ne sais pas comment la députée veut procéder. Elle pourrait peut-être retirer ces propos et essayer de présenter son point autrement.
    Monsieur le Président, je reconnais qu'il s'agit de propos non parlementaires et je m'excuse aux personnes qui les ont entendus. J'ai pensé censurer ces propos, mais ce sont des mots qui ont été laissés dans un message sur la boîte vocale de mon bureau parlementaire afin de m'intimider, de me réduire au silence et de me harceler en prévision du vote sur la question à l'étude. Aussi dérangeants que soient ces mots pour les députés qui les ont entendus, c'est pourtant cette forme d'intimidation que les soi-disant manifestants du convoi de la liberté utilisent. Aucun député ne devrait insinuer et affirmer que moi, en tant que députée dûment élue, je devrais subir cette intimidation parce que certains députés ont été à l'aise de se promener parmi les manifestants. Il est scandaleux que, dans l'exercice de mes fonctions de députée de Pickering—Uxbridge, j'aie à subir ces actes de harcèlement et d'intimidation. Il faut que cela cesse.
    Monsieur le Président, un point m'intrigue. La secrétaire parlementaire a affirmé que ces individus qui manifestent dans les rues sont violents, mais elle n'a pas marché parmi les manifestants. Elle a utilisé un langage très vulgaire pour citer des propos très vulgaires enregistrés sur un message vocal, alléguant qu'ils proviennent d'un de ces manifestants.
    Si elle n'a pas marché au travers de la foule pour constater elle-même la conduite de ces manifestants, comment sait-elle si c'est l'un d'eux qui lui a laissé ce message sur sa boîte vocale?
    Monsieur le Président, j'ai marché au travers de la foule. Je siège à la Chambre depuis deux semaines. J'ai entendu le langage vulgaire utilisé. J'ai vu comment les manifestants se comportent.
    En passant, je veux corriger la députée. Ce langage vulgaire ne venait pas de moi. Je n'ai fait que citer les propos vulgaires utilisés par ce groupe criard pour harceler et intimider les députés dûment élus de même que leur faire peur afin qu'ils décident de changer la façon dont les politiques sont élaborées. Or, dans une société démocratique, les politiques ne sont pas dictées par l'intimidation et le harcèlement.

[Français]

    Monsieur le Président, la secrétaire parlementaire a demandé si on s'était rendu compte que les camions avaient été retirés depuis l'invocation des mesures d'urgence.
    S'est-elle rendu compte que le pont Ambassador a été libéré sans les mesures d'urgence? A-t-elle remarqué que la frontière en Alberta a été libérée sans les mesures d'urgence et que, à cet endroit, on a même saisi des armes? N'a-t-elle pas réalisé que les mesures d'urgence ne sont donc pas utiles pour dégager cela?
    Enfin, comme secrétaire parlementaire aux affaires intergouvernementales, s'est-elle rendu compte que le Québec et sept provinces sur dix ne voulaient pas de cette loi?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis très heureuse que la Loi sur les mesures d'urgence n'ait pas été nécessaire dans d'autres régions du pays, mais, de toute évidence, elle l'est à Ottawa. Le chef de police et le maire d'Ottawa ont tous les deux dit que les mesures prises au cours des derniers jours découlent directement des pouvoirs conférés par la Loi sur les mesures d'urgence.
    Cette loi ne sera pas utilisée dans les régions qui n'en ont pas besoin. J'espère qu'aucune autre collectivité ou province au pays ne se trouvera dans une situation où ses habitants ont peur de se rendre à l'épicerie pendant trois semaines. J'espère également qu'aucun autre député ne sera intimidé et harcelé ou qu'aucun autre citoyen ne se fera agresser ni ne se fera arracher son masque. J'espère que cette mesure n'aura pas besoin d'être appliquée ailleurs, mais elle est nécessaire ici, et j'espère que le député reconsidérera son vote.

  (2010)  

    Monsieur le Président, je remercie la députée de dire la vérité sur son expérience en tant que députée, en tant que femme dans cette enceinte où 30 % des élus sont des femmes, et aussi de raconter les expériences des gens de sa circonscription et le harcèlement que les gens subissent ici à Ottawa.
    Comme beaucoup d’autres, je suis frustrée d’être ici aujourd’hui. Par contre, je peux dire à la députée que je ne suis pas frustrée que nous débattions l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. Je suis frustrée que des manifestants aient envahi le centre-ville, ce qui nous force à être ici ce soir pour décider de la meilleure façon de procéder pour répondre à ces comportements et à ce harcèlement au centre-ville. Beaucoup de gens dans ma circonscription, Nanaimo—Ladysmith, ont du mal à joindre les deux bouts, et je peux dire aux députés que je préférerais de loin travailler à les aider en ce moment.
    La députée pourrait-elle dire si elle est d’accord avec moi qu’il faut agir maintenant, puis passer à autre chose pour aider véritablement ceux qui ont été laissés pour compte dans la pandémie?
    Madame la Présidente, je suis d’accord avec ma collègue. Je suis connue pour avoir un esprit de combattante et pour débattre avec passion des questions qui nous occupent. Cependant, je préférerais nettement être en train de débattre des solutions pour nous sortir de la pandémie. Je préférerais débattre de l’économie et des besoins de nos collectivités. Certes, nous ne sommes pas toujours d’accord, mais notre mission à tous est de siéger à la Chambre et d’avancer sur ces questions.
    Je suis moi aussi déçue que nous soyons ici ce soir pour discuter de la question qui nous occupe, mais comme ma collègue l’a dit, cela illustre en fait la force de notre démocratie. Je m’en rends bien compte depuis que je siège à Ottawa, mais aussi dans le cadre de mon travail dans ma circonscription. Alors que ceux qui sont dans la rue veulent nous destituer avec violence et nous mettre en prison pour avoir fait notre travail de représentants élus, le débat se poursuit. Nous n’avons pas peur. Nous avons voté au sujet d'une loi importante, et notre démocratie est plus forte que ces menaces.
    Monsieur le Président, j'ai aimé pratiquement tout le discours de la députée. Comme elle siège au comité de la défense avec moi, je voudrais entendre ce qu'elle a à dire sur le langage violent. Récemment, elle et moi avons entendu des témoignages sur les campagnes de désinformation et sur les fausses informations véhiculées par des acteurs étatiques et non étatiques. À mon sens, il existe une corrélation directe entre le langage violent et l'intimidation. Je voudrais savoir ce qu'elle pense des liens à faire entre ces deux phénomènes.
    Monsieur le Président, j'ai beaucoup réfléchi sur cette question, car à titre de membre du comité de la défense, j'ai entendu parler de gouvernements autoritaires un peu partout dans le monde et de leurs tactiques. À la dernière session, je siégeais au sous-comité des droits de la personne. J'ai eu l'occasion d'entendre le témoignage d'élus de vrais gouvernements autoritaires qui appliquent exactement ces tactiques. Le langage, l'intimidation et les menaces de préjudices personnels ou d'emprisonnement sont utilisés précisément pour inspirer la peur et abolir les institutions démocratiques.
    Voilà quelque chose dont nous devons être très conscients. Les Canadiens devraient prendre très au sérieux les investissements et les fonds étrangers qui servent à promouvoir ces tactiques...
    Nous avons le temps pour quelques autres questions et observations.
    Le député de Brantford—Brant a la parole.
    Monsieur le Président, loin de moi l'idée de prodiguer gratuitement des conseils juridiques à qui que ce soit à la Chambre, en particulier à une collègue. Toutefois, étant donné le message au vitriol qu'elle a reçu dans sa boîte vocale, je souhaite lui rappeler que c'est à cela que sert le Code criminel. Ce qu'elle décrit s'appelle de l'intimidation. C'est proférer des menaces. Aucun délai de prescription ne vise ces crimes. Elle est libre de communiquer avec la police et de demander une enquête.
    Cela dit, ma question porte avant tout sur ce qu'elle a déclaré, sur ce que le gouvernement libéral, et plus précisément le premier ministre, a déclaré. Puisqu'il était de notoriété publique que le manifeste appelait au renversement du gouvernement canadien, pourquoi le premier ministre a‑t‑il attendu trois semaines pour agir plutôt que de consulter la GRC et de demander que les organisateurs soient accusés de trahison?

  (2015)  

    Monsieur le Président, les affirmations ambiguës du député sont incroyables. Il est présent aujourd'hui pour refuser d'appuyer le recours à la Loi sur les mesures d'urgence par le premier ministre pour faire respecter la loi et disposer de pouvoirs élargis de sorte que les personnes qui commettent une infraction criminelle rendent des comptes. Et le voilà qui veut en quelque sorte réécrire l'histoire.
    Le gouvernement agit avec mesure, dans les limites de la Charte, et le député devrait défendre la loi et l'ordre. Les Canadiens qui ne sont pas d'accord avec le gouvernement n'ont pas le droit d'user du harcèlement et de l'intimidation pour tenter de le renverser dans la violence. S'ils veulent un autre gouvernement, ils ont le droit de vote. Voilà comment fonctionne la démocratie, et non à coups de harcèlement et de violence.
    Je demanderais aux députés de bien vouloir abréger leurs questions et réponses pour qu'un plus grand nombre de députés puissent intervenir. Le secrétaire parlementaire de la ministre du Commerce international souhaitait poser une question, mais nous avons manqué de temps.
    J'aimerais également faire un bref rappel au sujet du langage non parlementaire. Nous devons essayer autant que possible de nous abstenir d'utiliser un tel langage.
    Le secrétaire parlementaire invoque le Règlement.
    Monsieur le Président, malgré tout le respect que je vous dois, il existe des règles au sujet du langage employé à la Chambre, et ces règles sont valables lorsque nous échangeons entre nous, par votre entremise. Cependant, lorsque nous citons des propos qui décrivent le genre d'injures et de propos virulents proférés à l'endroit des gens dans le contexte de ce convoi...
    Non, je vérifie avec les greffiers au Bureau. Ce genre de vulgarité n'est pas un langage parlementaire dans ce contexte. Nous pourrons revisiter la question une autre fois et en rediscuter, mais dans ce cas-ci, je crois que c'est allé trop loin.
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
    Nous nous lançons dans un débat. Si le député le souhaite, lui et moi pourrions en discuter plus tard.
    Reprenons le débat. Le député de Louis-Saint-Laurent a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, comme on le sait, le Canada est aux prises avec une crise majeure qui frappe toutes les familles canadiennes.
    Depuis plus de 30 ans, c'est la première fois que l'inflation est à 5,1 %. Cela touche toutes les familles canadiennes, mais, malheureusement, nous ne sommes pas réunis ce soir pour parler de ce sujet qui attaque directement toutes les familles canadiennes, mais plutôt pour parler d'une loi dont l'application est proposée par ce gouvernement. C'est une loi qui n'est pas nécessaire, qui ne répond même pas à ses propres critères, qui crée des précédents qui risquent d'être très lourds à vivre par la suite, une loi qui est déjà rejetée par sept gouvernements et sept premiers ministres sur dix provinces et qui n'a donc pas sa place. Cette loi, c'est la Loi sur les mesures d'urgence.
    C'est une loi qui a été créée il y a bientôt plus de 35 ans et qui n'a jamais été invoquée. On verra pourquoi elle n'a jamais été invoquée, pourquoi, actuellement, elle n'a pas sa place, et surtout, ce qui est derrière cela, pourquoi le gouvernement y fait appel. On verra que, malheureusement, cela porte la signature mesquine du premier ministre partisan.
    Avant d'aborder le fond du dossier, je tiens à dire deux choses. D'abord, je remercie les forces policières qui assurent avec honneur et dignité la sécurité que nous avons ici au Parlement, à Ottawa et partout au pays. Je tiens à les remercier. Du même souffle, et je confesse tout de suite mon conflit d'intérêts, puisque je suis un ancien journaliste, je ne peux que condamner sévèrement toutes celles et tous ceux qui font de l'agression ou de l'intimidation envers les journalistes qui travaillent actuellement dans des situations qui ne sont pas évidentes. Je pense particulièrement au gredin qui s'est attaqué au journaliste de TVA hier soir, comme un poltron, qui l'a attaqué de dos. Cette situation-là est tout à fait inacceptable et intolérable dans notre vie démocratique. Souhaitons que les forces policières puissent débusquer cet individu qui a agi de façon tout à fait inacceptable.
    Parlons maintenant de la Loi sur les mesures d'urgence. La cheffe de l'opposition officielle, notre cheffe conservatrice, a été très claire lorsqu'elle a dit que nous sommes le parti de la loi et de l'ordre, et que nous croyons que les camions doivent partir. Voilà la position du Parti conservateur concernant ce qui se passe actuellement à Ottawa. Des blocus illégaux, c'est non.
    Rappelons-nous qu'il y a trois semaines, quand tout cela a commencé, le premier rassemblement qui avait cours a été beaucoup moins grave que ce que les gens disaient. Ce n'est pas moi qui le dis. Je citerai un gazouillis de Radio-Canada, pas un gazouillis conservateur ou de militant conservateur, du 30 janvier dernier:
    Des slogans, de la danse et des feux d'artifice: loin de l'insurrection, les milliers de personnes réunies à Ottawa ont manifesté dans la bonne humeur.
    C'est ainsi que Radio-Canada décrivait le début de la manifestation qui est survenue à Ottawa. Malheureusement, trois semaines plus tard, cette manifestation est devenue une occupation et elle n'a plus sa place. Une situation illégale n'a pas sa place dans notre système de droit, et on ne peut être à moitié ou à peu près illégal; on est illégal ou on ne l'est pas. Il y a mille façons de manifester son opposition. Ne faisons pas exprès pour prendre la mauvaise.
    La Loi sur les mesures d'urgence existe depuis 1988. Elle n'a jamais été invoquée par un gouvernement, jamais mise en place. Comme le dit le premier ministre du Canada, ce n'est pas une loi que l'on doit prendre à la légère. Ce n'est pas sur le premier élément qu'on l'amène, ni sur le deuxième ou le troisième, mais bien plutôt quand c'est vraiment grave et important. Ce sont les paroles du premier ministre. Il aurait peut-être dû penser à appliquer ces observations, avant de mettre en marche la Loi sur les mesures d'urgence. On a posé la question tous les jours au premier ministre: quelles ont été les premières, deuxièmes et troisièmes démarches qui ont été faites avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Il est incapable de donner le début du commencement de ce qui pourrait ressembler à l'ombre d'une réponse. Cela, c'est l'attitude du premier ministre.
    La Loi sur les mesures d'urgence ne répond même pas à ses propres critères. Cette loi doit être invoquée quand il y a une menace sérieuse qui empêche le gouvernement de fonctionner. Sauf hier, la Chambre a toujours siégé. Le premier ministre, même si je ne peux pas le dire, s'est présenté ici même à la Chambre sur ce plancher pour répondre aux questions. Le gouvernement a continué à procéder. Cette loi doit être invoquée si l'on sent que la souveraineté et l'intégrité du territoire sont mises à mal. Ce n'est pas le cas. Oui, il y a eu des situations qui posaient problème, mais ces situations à problèmes dont je parlerai plus tard ont été réglées avec les lois ordinaires et les lois que nous avons actuellement sans avoir à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Le premier ministre a dit à la Chambre qu'il avait consulté les premiers ministres.

  (2020)  

    Or, il n'a pas consulté les premiers ministres. Il les a informés de sa décision. C'est en raison de cela que sept premiers ministres, sept gouvernements provinciaux s'opposent à cette loi.
    Ce que l'on constate, c'est que la situation actuelle et celles que nous avons connues au Canada au cours des dernières semaines peuvent être réglées par les lois actuelles sans qu'on fasse appel à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Parmi les éléments que comprend la loi proposée par le gouvernement, il y a celui de geler les comptes et les avoirs, ainsi que d'intervenir directement dans les comptes de banque de citoyens, lesquels pourraient être utilisés pour des situations qui ne sont pas légales.
    La Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes permet d'agir immédiatement. Nous n'avons pas besoin de la Loi sur les mesures d'urgence. En ce qui a trait aux menaces à la souveraineté canadienne, le Code criminel, à l'article 83.01, permet d'agir directement sans avoir à faire appel à la Loi sur les mesures d'urgence.
    En ce qui concerne la fameuse histoire des remorqueurs, le Code criminel, au paragraphe 129b), le prévoit. Cela donne à la police le droit de demander à quelqu'un, sans excuse raisonnable « [...] de prêter main‑forte à un fonctionnaire public ou à un agent de la paix [dans l'exercice de] ses fonctions en arrêtant quelqu’un [et] en préservant la paix [...] »
    La Loi sur les mesures d'urgence, qui prévoit de telles mesures extrêmes, n'a pas besoin d'être invoquée, puisque le paragraphe 129b) du Code criminel le prévoit. Il ne sert à rien de faire appel à cette loi, alors que, actuellement, les lois sont déjà appliquées.
    À preuve, ce qui se passe à Ottawa n'est malheureusement pas unique à ce qui s'est passé partout ailleurs au pays. La frontière à Coutts, en Alberta, a connu des blocages. La frontière à Emerson, au Manitoba, la frontière à Surrey, en Colombie‑Britannique, et le pont Ambassador à Windsor, en Ontario, ont connu les mêmes problèmes. Voilà quatre crises qui ont pu être réglées au moyen des lois actuelles.
    Pourquoi ont-elles pu être réglées? C'est parce que, à ces endroits, on a vu du vrai leadership, on a vu des forces policières se donner la main pour agir directement, et on a vu un effort coordonné, soutenu par les forces politiques, pour que l'on puisse agir.
    Oui, à Coutts, on a découvert la présence d'armes pouvant inquiéter tout le monde. Moi le premier, en voyant cette panoplie d'armes, je me suis demandé ce qui se passait et me suis dit que c'était dangereux. Cela a été découvert et débusqué, et les gens seront sanctionnés par les lois actuelles sans jamais qu'on ait eu besoin de faire appel à la Loi sur les mesures d'urgence. Il faut être vigilant à cet égard.
    Historiquement, on se souviendra que c'est en 1970 que la Loi sur les mesures de guerre a été mise en application pour la dernière fois. La défunte Loi sur les mesures de guerre n'a cependant rien à voir avec la loi d'aujourd'hui. La nouvelle Loi sur les mesures d'urgence est celle de 1988 et a été initiée sous le gouvernement conservateur du très honorable Brian Mulroney, sous l'égide de l'honorable Perrin Beatty.
    La Loi sur les mesures d'urgence n'a, à ce jour, jamais été invoquée, même lors de situations où il y a eu des débordements majeurs, comme lors du G7, du G20, du Sommet des Amériques auquel j'ai assisté à titre de journaliste, de la crise d'Oka, de la crise de la COVID‑19 et du 11 septembre. Ces événements hors du commun auraient pu être interprétés comme nécessitant l'application de cette loi, mais on ne l'a pas fait.
    Pourtant, en ce qui concerne l'événement à Ottawa, le gouvernement libéral invoque cette loi. Il le fait parce que ce gouvernement est malheureusement dirigé par un premier ministre qui est, d'abord et avant tout, guidé par la partisanerie. Ce n'est pas nouveau.
    Rappelons‑nous que, dans le scandale de SNC‑Lavalin, le premier ministre s'est mis les deux pieds, de même que les deux mains partisanes, dans un dossier judiciaire. C'est épouvantable.
    La même chose s'est passée avec le Laboratoire national de microbiologie à Winnipeg, alors qu'il a tout fait pour empêcher que la vérité soit faite et qu'elle soit accessible à tout le monde.
    Rappelons‑nous qu'on a déclenché des élections pour imposer la vaccination obligatoire aux fonctionnaires, alors qu'il n'y avait pas d'avis scientifique à ce sujet. La même chose s'est produite concernant les camionneurs. Aucun avis de la santé publique ni analyse scientifique ne justifient l'imposition de la vaccination obligatoire.
    Pendant 17 jours, rien n'a été fait avant que le gouvernement décide d'agir. Le 11 février, curieusement, il a dit que tout était en place pour agir sans avoir recours à une loi spéciale, et, le 14 février, il a décidé d'invoquer la loi spéciale.
    Ce premier ministre en est un qui stigmatise, qui divise et qui insulte les Canadiens. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le député libéral de Louis-Hébert. Ce dont les Canadiens ont besoin, c'est d'un vrai leadership et d'un premier ministre qui rassemble et qui unit, plutôt que de quelqu'un qui stigmatise les gens qui ne pensent pas comme lui.

  (2025)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations et de sa contribution en tout temps aux débats. Pour ce qui est de la crise actuelle, je souhaite lui signaler poliment qu'aujourd'hui même, la frontière a de nouveau été bloquée à Surrey, en Colombie-Britannique. Les forces policières ont donc toujours besoin d'outils pour régler la situation partout au pays. C'est le premier point que je souhaite préciser.
     Je tiens aussi à soumettre au député une idée qui m'apparaît cruciale, peut-être parce que d'autres conservateurs, dont la députée d'Haldimand—Norfolk, ont dit que « tout le monde » avait le droit d'être entendu.
    Je dirais que j'ai un point de vue très précis sur la question et que, selon moi, tout le monde n'a pas le droit d'être entendu dans ce contexte précis. Les gens qui brandissent des croix gammées ou des drapeaux confédérés, ceux qui laissent des messages vitrioliques dans la boîte vocale de députés, ceux qui intimident ouvertement des personnes ou les menacent de violence, et ceux qui portent des armes à la frontière n'ont pas le droit d'être entendus.
    Le député d'en face convient-il qu'on ne peut pas vraiment envisager d'entamer un dialogue avec des individus qui participent aux blocages que l'on voit dans ce pays?
    Monsieur le Président, je ne peux pas croire qu'un député du parti du pouvoir, le Parti libéral, parle encore de la fameuse histoire de la croix gammée. Je n'accepterai jamais les commentaires de ce genre, peu importe qui les fait à la Chambre des communes, car tout le monde sait que tous les parlementaires ici, peu importe ce que défend leur parti, ne défendront jamais une telle chose.
    Le problème, c'est que le premier ministre — mon premier ministre, notre premier ministre — a décidé de politiser tout cela. Il devrait en avoir honte, et le député aussi.

  (2030)  

[Français]

    Monsieur le Président, le premier ministre avait promis que la loi serait appliquée de manière circonscrite, puis il s'est ravisé en disant que ce n'était pas possible. Or l'alinéa 17(2)c) de la partie II de la Loi sur les mesures d'urgence indique exactement le contraire.
    Si le premier ministre avait tenu parole et s'il avait respecté la Loi, quelle aurait été l'opinion de mon collègue de Louis-Saint-Laurent et de son parti quant à l'application de la Loi?
    Monsieur le Président, je me demande si mon honorable collègue, voisine de la région de Québec, est avocate. Je crois que plusieurs personnes ont lu le Code criminel, le Code civil et toutes les lois qui s'appliquent au Canada afin de faire ressortir les faits et la réalité suivante: aujourd'hui, on n'a pas besoin d'utiliser cette loi, qui a été adoptée en 1988 et qui n'a jamais été appliquée.
    Comme ma collègue du Bloc québécois vient de le dire de façon très éloquente, les lois actuelles prévoient des mesures pour régler les problèmes qui surgissent, que ce soit ici à Ottawa, aux frontières, au pont Ambassador ou ailleurs. C'est à cela que cela sert. Or la loi que le gouvernement veut nous imposer aujourd'hui n'a pas sa place dans l'actuel débat qui a lieu au Canada.

[Traduction]

    Monsieur le Président, il y a des députés aimables dans tous les partis à la Chambre. La Chambre est remplie de gens aimables, et personne n'est plus aimable que le député qui vient de parler. J'estime donc qu'il est absolument regrettable que la stratégie des libéraux et des néo-démocrates aujourd'hui consiste à étiqueter tous les députés conservateurs en fonction des gestes posés par seulement quelques personnes, qui sont inacceptables, comme tout le monde le convient sans équivoque.
    Je vais faire un parallèle. Serait-il juste d'étiqueter tous les députés libéraux, verts ou néo-démocrates qui se soucient de l'environnement en fonction des gestes qui ont été posés à Houston il y a quelques jours, où 20 personnes portant des masques et maniant des haches ont incendié un véhicule alors que des gens se trouvaient encore à l'intérieur? Serait-il juste d'étiqueter tous les députés qui se soucient de l'environnement en fonction des actions de ces 20 personnes?
    Monsieur le Président, je sais que mon collègue est très passionné quand nous parlons d'équité en politique. Voici ce que nous devrions faire maintenant. Je sais que ce n'est pas très facile, surtout pour moi, mais lorsqu'il y a une crise, nous devrions mettre de côté toute partisanerie. Cependant, chers collègues, ce soir, nous débattons d'une crise sanitaire. Si nous voulons collaborer, nous devons mettre de côté la partisanerie et surtout éviter les amalgames.
    J'invite les députés à collaborer pour tous les Canadiens.

[Français]

    Monsieur le Président, lorsque des Autochtones ont bloqué des chemins de fer en 2020, mes collègues de l’autre côté de la Chambre ont réclamé à grands cris une action ferme du gouvernement pour mettre un terme aux blocages, qu’ils ont rapidement considérés comme illégaux.
    Cependant, ils trouvent opportun de prendre des égoportraits avec les manifestants qui assiègent la Colline parlementaire et handicapent la capitale nationale depuis trois semaines.
    La position du député n'est pas la même lorsque les manifestants sont autochtones que lorsqu'ils sont soutenus par des groupes suprémacistes. Comment le député peut-il expliquer cette incohérence?
    Monsieur le Président, contrairement au gouvernement libéral, nous n'avons jamais pensé à invoquer la loi sur les mesures extrêmes. Cela ne nous est jamais venu à l'esprit.
     Je tiens à rappeler au député encore une fois que ce type d’amalgame n’a pas sa place, particulièrement dans une situation aussi délicate où la sécurité est en jeu. Tentons le mieux possible de mettre de côté la partisanerie, même si, parfois, on peut être tenté d'y avoir recours.
    Je rappelle que, durant la crise à laquelle le député faisait référence, personne de ce côté-ci de la Chambre n’a tenu à avoir recours à la loi sur les mesures extrêmes comme le fait actuellement le gouvernement.

  (2035)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, c’est un honneur d’être ici, au Parlement. C’est un honneur de représenter mes concitoyens de Prince Albert. Je ferai de mon mieux ce soir pour parler de ce débat d’urgence et des mesures d’urgence auxquelles le gouvernement recourt actuellement.
    Ce qui fait défaut au Parlement et dans le présent débat, c’est le respect absolu de tous les gens, qu’ils soient vaccinés ou non. En effet, si nous regardons en arrière et songeons aux événements survenus et si nous nous demandons comment nous avons pu en arriver là, nous constaterons que la véritable raison est que les gens n’ont pas été respectés.
    J’ai parlé à des concitoyens. Certains étaient vaccinés, d’autres non. Des médecins non vaccinés m’ont dit qu’ils avaient travaillé de 80 à 90 heures par semaine pendant toute la pandémie, faisant tout leur possible, puis un beau jour, le gouvernement leur a soudainement dit qu’ils mettaient dorénavant la vie des autres en danger et qu’ils ne pouvaient plus exercer leur profession. De plus, la ministre de l’Emploi leur a dit qu’ils n’étaient pas admissibles à l’assurance-emploi à moins d’être vaccinés. Cela pose problème. La même situation pourrait s’appliquer aux infirmières, aux gens qui travaillent auprès des personnes âgées et aux policiers. Ces personnes ont l’impression d’avoir été acculées dans un coin où personne ne les écoute ni ne les respecte. Or, ils ont été là pendant que nous avions besoin d’eux, et comme politiciens, nous devons aujourd’hui les écouter et voir comment nous pouvons les aider.
    Nous avons bel et bien communiqué avec le Parti libéral, avec le ministre des Transports, avant l’entrée en vigueur de la vaccination obligatoire pour les camionneurs traversant la frontière. Nous leur avons dit de ne pas imposer cette mesure, qu’il n’y avait pas de preuves scientifiques démontrant que l’absence de vaccination dans leur cas était un problème. Nous savons que ce n’est pas un problème. Ces gens sont assis dans leur camion; ils ont traversé la frontière au cours des deux dernières années sans propager le virus dans un sens ou dans l’autre. La mesure pouvait en fait perturber les chaînes d’approvisionnement. Alors, pourquoi y avoir recours? La science ne dit pas que la mesure est nécessaire, sauf si on veut imposer notre volonté à quelqu’un, ce que le gouvernement actuel a fait en déclarant qu’elle était nécessaire. Il n’a pas respecté ces gens.
    Lorsque les gens sont acculés au mur, lorsque la vie de leur famille est en danger et qu’ils ne savent pas quoi faire, que va-t-il se passer, selon vous? Comment se fait-il que nous en soyons venus là aujourd’hui? Les députés croient-ils que ces gens voulaient traverser le pays pour venir à Ottawa? Voulaient-ils dépenser des milliers de dollars en diésel? Voulaient-ils rester ici et faire face à la police, envers laquelle ils ont montré le plus grand respect? Voulaient-ils risquer leur réputation, sachant que des indésirables pouvaient se joindre à eux et qu’ils devraient s’autoréglementer et se débarrasser de ces gens? Voulaient-ils être ici? Non.
    Il y a eu tant d’occasions où tout cela aurait pu être évité ou arrêté si le premier ministre avait fait montre de leadership et de respect. C’est vraiment frustrant et enrageant de voir ici ces manifestants, dont bon nombre pourraient être aperçus à une partie des Riders ou une partie de baseball ou de hockey. Ce sont des Canadiens ordinaires qui sont au bout du rouleau et qui crient à l’aide. Ils ne savent pas vers qui se tourner. C’est le cas de 90 % d'entre eux.
     Ils se tenaient ici, attendant de parler au premier ministre, qui a refusé de s’entretenir avec eux parce qu’il avait vu une croix gammée sur la scène; or, ce symbole ne leur appartenait pas et ils avaient demandé à la personne qui le brandissait de partir. Toutefois, le premier ministre a continué de refuser de leur parler, les qualifiant de suprémacistes blancs chauvins, ce qui a empiré la situation. Au lieu de s’asseoir avec eux pour parler de leurs préoccupations et comprendre qu’ils représentent une bonne partie de la population, il leur a tourné le dos et leur a manqué de respect.
    Voilà ce qui a créé le problème. Voilà pourquoi ils sont restés pendant trois semaines. Voilà pourquoi ils ne sont pas partis après une semaine. Si le premier ministre avait fait montre d’un peu de respect et de bonne volonté, s’il avait tendu le rameau d’olivier que nous lui avions donné et présenté un plan, fondé sur la science, montrant que les mesures obligatoires prendraient fin et que leur famille aurait un avenir, nous ne serions pas dans la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement. Nous n’aurions pas à invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Il n’y aurait absolument aucune raison de le faire, même s’il n’y en a pas actuellement.
    Ce matin, alors que je retournais chez moi en avion, j'ai vu à l'aéroport de Toronto tout le monde qui quittait le Canada. Les gens ne s’en allaient pas parce qu'ils avaient peur, ils partaient en vacances, poursuivant leur vie, tout simplement. Il y avait des familles avec des enfants à l'aéroport attendant leur avion pour partir vers des destinations de vacances ou pour aller rendre visite à de la parenté ou à des amis n’importe où au Canada, ce qu’ils n’avaient pas pu faire pendant deux ans. Je suis de retour à Saskatoon. Il doit y avoir une crise grave, parce que ces mesures d'urgence s’appliquent d’un océan à l’autre, mais il y a des enfants qui font de la motoneige dehors. C’est la vie normale. Home Depot est plus achalandé que jamais.
    Nous voyons cela et nous nous demandons où est la crise. J’ai regardé CBC News pour voir ce qui s’était passé à Ottawa aujourd’hui, et j’ai vu que les policiers ont repoussé les manifestants. Oui, ils font reculer les protestataires et reprennent possession des lieux, mais ils auraient pu faire tout cela en appliquant les lois actuelles. Ils n’avaient pas besoin d’une nouvelle loi pour faire ce qu’ils font aujourd’hui.

  (2040)  

    Ce qui est intéressant et mérite notre attention, c’est que la ministre des Finances et vice-première ministre a parlé des moyens à mettre en œuvre pour mettre la main sur l’argent. Beaucoup de personnes, je crois, ont été vraiment stupéfaites de voir que ce groupe a pu recueillir autant d’argent aussi rapidement. On pourrait dire que les Américains ont exercé leur influence et cela ne fait aucun doute. Nous pourrions dire également la même chose pour toute question environnementale.
    Le fait est qu’ils ont recueilli beaucoup d’argent en peu de temps. Nous savons tous que l’argent pèse lourd dans la balance; si autant d’argent a été amassé, c’est donc que beaucoup de gens sont derrière eux. Nous pourrions dire que la moitié de l’argent provenait des États‑Unis, mais, même à cela, c’est 10 millions de dollars qui ont été recueillis au Canada en deux semaines. Quel parti politique pourrait en faire autant? Tous en rêvent. Comment un groupe de camionneurs, d’infirmières, de médecins et d’agriculteurs ont-ils pu mettre en place un mécanisme de collecte de fonds capable d’amasser autant d’argent? Si ce n’est pas parce que cela cadrait avec la volonté des gens ordinaires, je me demande bien ce que c’est.
    Y a-t-il des personnes mal intentionnées dans ceux qui ont contribué à la collecte? Il y en a probablement, cela ne fait pas de doute. Faut-il s’inquiéter de l’influence de ces personnes? Cela ne fait aucun doute. Il est fondamental de dénoncer ces gens et de les tenir responsables de leurs agissements. Cela non plus ne fait aucun doute.
    Toutefois, faut-il pour autant recourir à la Loi sur les mesures d’urgence? La réponse est non, à moins de chercher vraiment à faire peur à ceux qui voudront dorénavant donner de l’argent pour une cause, quelle qu’elle soit, à moins de vouloir montrer aux Canadiens que nous n’avons pas été présents pendant trois semaines, mais que nous le sommes bel et bien maintenant et que nous allons faire du zèle pour pallier l’absence de résultats et d’efforts.
    Voilà un autre exemple de situation où le gouvernement libéral n’a rien fait avant qu’une crise éclate. Nous avons vu cela à d’autres occasions. Ainsi, les libéraux ne se sont pas occupés de l’accord commercial canado-américain tant qu’il n’y a pas eu une crise, et c’est la même chose pour l’accord commercial avec le Royaume‑Uni. Je sais de quoi je parle parce que je siège au comité du commerce. L’entente vient à expiration et les libéraux se contentent de dire que nous devrions peut-être commencer à l’examiner.
    Le gouvernement n’est pas proactif. Si nous avions agi en amont, nous aurions pu éviter beaucoup de problèmes, mais non, les libéraux attendent qu’une crise éclate; ils sautent alors dans la mêlée et disent agir avec héroïsme. C’est dangereux. Comme nous le voyons maintenant, c’est très dangereux. Cela ne donne aucun résultat et personne n’en sort gagnant.
    Comment pouvons-nous nous en sortir? La police fait son travail, et je la félicite. Elle le ferait sans la Loi sur les mesures d’urgence. Si nous lui avions dit de faire partir les manifestants il y a deux semaines, elle l’aurait fait sans cette loi.
    La levée des blocages aux postes frontaliers de Coutts et de Windsor le prouve. On n’a pas eu besoin de la Loi sur les mesures d’urgence pour dégager les lieux. Les autorités ont simplement parlé avec les manifestants et négocié avec eux une solution pour obtenir leur départ. Il y a des façons de faire bouger les choses qui pourraient réellement donner les résultats que nous recherchons.
    Je tiens également à dire que le gouvernement n’a pas l’appui des provinces; en effet, les premiers ministres de sept des dix provinces ne sont pas d’accord avec lui. Les libéraux pourraient dire qu’ils ont consulté les provinces et que cela est suffisant, mais, non, ce n’est pas suffisant. Pourquoi ne porterions-nous pas attention aux premiers ministres du Québec, de la Saskatchewan ou de l’Alberta qui disent ne pas vouloir l’application de cette loi dans leur province? Si les premiers ministres de ces provinces affirment au premier ministre que la situation ne satisfait pas aux critères fixés pour recourir à une telle loi, pourquoi ne prendrions-nous pas en considération leur avis? Ce sont des gens intelligents qui ont été également élus par leur population. Qui plus est, ils ont un mandat plus fort, je dirais, parce qu’ils ont des gouvernements majoritaires et non minoritaires dans leur province.
    À la lumière de ce scénario, pourquoi le premier ministre ne prend-il pas un pas de recul et n’affirme-t-il pas qu’il vaudrait peut-être mieux ne pas invoquer la loi? C’est à cause de son ego. Il a été surpris à ne rien faire et maintenant il croit qu’il doit faire quelque chose. Il va trop loin et les Canadiens paieront pour cela.
    Il est en train d’établir un précédent très dangereux. En agissant de la sorte, il légitime le recours à la Loi sur les mesures d’urgence pour les gouvernements futurs qui s’appuieront sur les événements survenus à Ottawa, où 170 personnes ont été arrêtées, pour sévir contre tous ceux qui pourraient participer à une manifestation. Or, le recours à cette loi ne spas atisfait aux critères prévus à cette fin.
    Je vois mes collègues du NPD, et je pense à Tommy Douglas qui n’aurait jamais appuyé cette mesure. Les députés peuvent consulter certaines de ses observations lorsque la Loi sur les mesures de guerre a été mise en œuvre au Québec. S’ils étaient réellement des néo-démocrates dignes de Tommy Douglas, ils ne se rangeraient pas derrière leur chef actuellement pour voter en faveur de l’application de la Loi sur les mesures d'urgence. Ils affirmeraient plutôt qu’ils ne peuvent pas le faire parce que ce n’est pas une bonne chose.
     Si on regarde les manifestions syndicales et les grèves qui ont cours actuellement, qu’est-ce qui va les empêcher de faire la même chose pour y mettre fin? Quelle est donc leur véritable intention?

  (2045)  

    Monsieur le Président, j’espère que le député d’en face trouvera ma question distrayante.
    En effet, il y a des endroits au Canada où on n'a pas eu besoin d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Par exemple, à Coutts, en Alberta, après que la police ait démasqué de sinistres individus qui avaient en leur possession une énorme quantité d’armes, et que la police en ait accusé certains de complot pour meurtre, qu’ont fait les manifestants? Les bonnes gens parmi les manifestants ont dit qu’ils ne voulaient pas être associés à cela et sont rentrés chez eux. C’est ce qu’ils ont fait.
    Le député pourrait-il en dire de même des manifestants qui ont dépassé les bornes en restant plus de deux semaines sur la rue Wellington, en plein centre-ville d’Ottawa?
    Monsieur le Président, il faut se demander pourquoi ils ont dépassé les bornes. Pourquoi sont-ils restés si longtemps? Notre premier ministre les a ignorés, méprisés et s’est en fait moqué d’eux; il n’a cessé de les prendre de haut. Pourquoi sont-ils furieux? Pourquoi pensons-nous qu'ils sont en colère?
    Je suis d’accord avec l’analogie du député. Il a raison en ce qui concerne ce qui s’est passé à Coutts. Lorsque les manifestants ont réalisé que des individus indésirables avaient infiltré leur mouvement, ils ont dit qu’ils n’avaient rien à voir avec eux et se sont dispersés. J’en conviens. Je dirais en fait que c'est la même chose pour 90 % des gens qui sont dans la rue à Ottawa. Si on les avait respectés, ils seraient partis, mais le premier ministre leur a tourné le dos et voilà où nous en sommes.

[Français]

    Monsieur le Président, nous avons beaucoup de différends avec le Parti conservateur, mais, au Bloc québécois, nous croyons au rôle fondamental de l'opposition qui est de contrôler l'action du gouvernement. Or, les lapsus sont parfois très évocateurs; plus tôt aujourd'hui le député du NPD d'Esquimalt—Saanich—Sooke a dit — je traduis librement ses propos — que cette loi « nous donne, en tant que gouvernement », des outils pour agir.
    J'aimerais savoir si, pendant ma pause-dîner, le NPD a fusionné avec le Parti libéral. Si ce n'est pas le cas, j'aimerais savoir si mon honorable collègue juge qu'en votant en faveur de cette loi, une fois que le convoi aura été délogé, lundi prochain, le NPD capitule sur son rôle fondamental qui est celui de contrôler l'action du gouvernement.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c'est une question très intéressante en ce qui concerne le NPD. Je ne suis pas dans le camp des néo-démocrates, alors je ne peux pas savoir quelles sont les idées qui leur passent par la tête. Peut-être il faudrait demander à un député du NPD. Je peux par contre affirmer que l'ancien député de Regina—Lewvan avait déclaré qu'il ne pourrait jamais appuyer ce type de loi. Il est bon de noter qu'il avait accumulé une vaste expérience du monde syndical avant d'être élu à la Chambre. Au bout du compte, j'estime que les néo-démocrates ont un examen de conscience à faire. Ils doivent se demander quelles seront les répercussions pour eux à long terme et réfléchir au précédent qu'ils établiront en agissant de la sorte.
    Monsieur le Président, le député brosse un portrait des manifestations à Ottawa comme si 90 % des individus y prenant part sont les mêmes personnes que l'on pourrait rencontrer à l'aréna ou au Costco. En 24 heures, les policiers ont procédé à plus de 100 arrestations. Il y a eu des affrontements intenses avec les policiers et certains manifestants ont refusé de quitter les lieux. Les policiers d'Ottawa ont accusé certains individus de voies de fait à leur égard et d'avoir tenté de leur subtiliser leur arme de service. L'organisateur du barrage Pat King a demandé aux manifestants de marcher jusqu'à la Colline du Parlement même si les policiers les avaient sommés de quitter les lieux. Il a aussi demandé aux camionneurs de placer leur véhicule en mise en portefeuille devant les remorqueurs, menaçant ces derniers de retrouver leur employeur et leur disant qu'ils commettaient un suicide professionnel. Finalement, le chef intérimaire de la police d'Ottawa, le chef Bell, a dit que tous les ordres des forces policières — que ce soient les échelons municipaux, provinciaux et fédéral — procèdent à des arrestations, et que « sans les pouvoirs qui nous ont été octroyés par ces différentes lois, nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons aujourd'hui. »
    Le député a remis en question l'histoire du NPD. Les conservateurs se plaisent à dire qu'ils sont le parti de la loi et de l'ordre. Ils se joignent maintenant aux séparatistes et ils ne semblent pas se soucier de voir des policiers se faire attaquer par des manifestants. Comment le député justifie-t-il tout cela?
    Monsieur le Président, le député du NPD y va un peu fort en posant une telle question. Je ne m'associe aucunement aux séparatistes. Je suis d'accord avec eux sur un seul point, soit que le recours à cette loi est excessif. Cela dit, nous sommes effectivement le parti du respect de la loi et de l'ordre, et avons dit clairement que, selon nous, ces manifestants auraient dû quitter les lieux plus tôt. En fait, si le député était présent à la période des questions, il a dû entendre notre cheffe le dire à plus d'une occasion. La réalité, c'est que le NPD est en train de devenir un parti libéral de facto et les députés néo-démocrates font simplement tout ce que leur chef libéral demande. C'est ce que nous verrons encore une fois quand viendra le temps de voter sur cette motion.

  (2050)  

    Monsieur le Président, c'est avec tristesse que j'interviens ce soir à propos de la Loi sur les mesures d'urgence, car je préférerais qu'elle ne soit pas nécessaire dans notre pays.
    Je voudrais que la pandémie de COVID soit terminée et oui, elle l'est presque. Comme tout le monde, je ne raffole pas des masques et des exigences liées à la vaccination. Nous savons toutefois que la pandémie continue et qu'il faut la traverser. Je crois que tous les Canadiens savent que la fin de la pandémie approche.
    Je suis très attristée que, dans un pays comme le Canada, fier de sa capacité de faire respecter la primauté du droit, le Parlement soit forcé de proposer le recours à une loi comme celle-là. Cela dit, nous avons tous vu, au cours des dernières semaines, l'occupation continue de postes frontaliers, de villes et de municipalités; nous avons vu des commerces forcés de fermer et des personnes effrayées à l'idée de sortir de chez elles; nous avons vu les interruptions qui ont frappé l'économie et la vie des gens. Des Canadiens de partout au pays ont ressenti les effets de l'occupation du centre-ville d'Ottawa, la capitale de notre pays, au cours des trois dernières semaines. Beaucoup de gens m'ont dit être inquiets pour leur famille, pour les résidants d'Ottawa et pour tous les Canadiens.
    J'ai entendu de nombreuses histoires de gens qui habitent au centre-ville d'Ottawa et qui ont dû quitter leur domicile pour retrouver un sentiment de quiétude et de sécurité. De nombreux autres ont dû endurer tout ce boucan et ce désordre parce qu'ils n'avaient nulle part où se réfugier. J'ai aussi entendu des histoires de personnes et de familles qui ne se sentaient pas en sécurité dans leur propre maison. Elles avaient peur d'aller travailler ou de sortir dans les rues. On ne parle plus d'une simple manifestation, comme le laissent entendre certains de mes collègues d'en face, mais d'un abus cruel, déraisonnable et arbitraire de pouvoir et de contrôle pour une société démocratique. C'est de la tyrannie, et c'est voulu ainsi. Nous avons affaire à une tentative de subversion anarchique. Eh bien, je regrette, mais il n'y aucun niveau de mécontentement qui justifie de tels agissements.
    Il suffit de regarder ce qui se passe pour comprendre que ceux qui qualifient encore ces manifestations de pacifiques ferment les yeux sur la réalité et font comme si ces prétendus manifestants — soupçonnés d'entretenir des liens avec des groupes extrémistes — n'avaient pas été inculpés de complot dans le but de commettre un homicide, celui de policiers. C'est profondément révoltant. Mon frère et ma belle-sœur sont dans la police. Des milliers de gens comme eux se lèvent chaque matin pour aller faire respecter les lois du pays, maintenir la paix et protéger leurs concitoyens, mais ils sont aujourd'hui pris pour cibles par l'un des groupes derrière ces manifestations.
    Une importante cache d'armes à feu et de munitions a été saisie par la GRC dans le cadre des opérations visant les barrages dans le pays, ce qui est extrêmement inquiétant. Nous voyons encore des comportements violents et nuisibles ainsi que des tentatives de minimiser l'importance des préjudices causés à autrui. À mon avis, ceux qui croient que ces gens sont pacifiques font preuve d'une grave négligence. Nous ne pouvons pas faire abstraction de ces gestes, et aucune personne qui se comporte de façon civilisée ne peut accepter de tels agissements.
    Le Canada est fier d'être une société ouverte et démocratique où on peut manifester de façon pacifique, se faire entendre, s'exprimer librement et ouvertement sans porter préjudice aux autres. Non, ce n'est pas une manifestation pacifique. Elle n'y a rien de civilisé quand les autres craignent pour leur sécurité...
    Je suis navré d'interrompre la députée, mais j'aimerais savoir si elle partagera son temps de parole avec un autre député.
    Monsieur le Président, je croyais l'avoir mentionné en début d'intervention. Veuillez me pardonner si ce n'est pas le cas. Je partage mon temps de parole avec la députée de Vancouver-Centre.
    Je veux souligner ce que vivent beaucoup de petites entreprises. Il y a eu des entraves illégales à la circulation dans leur propre quartier. Certains de leurs clients se sont fait harceler. Bon nombre d'entre elles ont dû fermer leurs portes. Beaucoup de Canadiens ont enduré des commentaires de nature extrémiste et un discours très toxique, haineux et dangereux. Il n'y a vraiment pas de place pour cela dans notre société ou dans n'importe quelle ville ou n'importe quelle localité du pays. Cela n'a pas sa place au Canada. Je ne saurais trop insister là-dessus.
    Les premiers jours de la manifestation, j'ai été bouleversée de voir que l'on brandissait dans ce pays des croix gammées et d'autres symboles déplorables de la suprématie blanche et de l'antisémitisme, devant le Parlement du Canada, le pays le plus libre du monde. On manifestait ainsi un mépris flagrant envers les libertés civiles de nos voisins au pays.
    Lundi, lorsque le gouvernement a décrété l'état d'urgence, c'était simplement parce que la situation à Ottawa et ailleurs au pays avait dépassé le point de rupture. Ma propre circonscription, Labrador, et les collectivités qui lui ressemblent ailleurs au Canada sont à des lieues d'Ottawa, mais les députés reçoivent quand même de nombreux messages. J'ai reçu un grand nombre de messages de gens de ma circonscription qui disent être inquiets et avoir peur. Ils ont peur de ce qui arrive à notre pays et ils m'ont écrit.
    Une personne m'a dit ceci: « En tant que citoyen canadien, je déteste ce qui arrive à mon pays présentement; je déteste que nous ne nous sentions pas en sécurité à cause de manifestants radicaux. S'il vous plaît, est-ce que le gouvernement peut faire quelque chose pour mettre fin à la manifestation? »
    Ce n'est qu'un des nombreux messages que j'ai reçus des gens du Labrador. Bien sûr, il n'y a pas que dans ma circonscription que des gens sont inquiets, c'est la même chose un peu partout. Les gens se disent inquiets de ce qui se passe aux postes frontaliers. Ils se disent inquiets de ce qui arrive aux habitants du centre-ville d'Ottawa. Il était évident que de graves inquiétudes étaient exprimées, mais il était également très évident pour le gouvernement que les forces de l'ordre éprouvaient de sérieuses difficultés à assurer de façon efficace le respect des lois.
    Les forces de l'ordre n'agissaient pas aussi rapidement que ce à quoi les Canadiens pouvaient raisonnablement s'attendre. Il y avait une menace sérieuse pour la sécurité du Canada et de tous ses citoyens — et cette menace demeure. C'est pour ces raisons que le gouvernement fédéral est intervenu et a utilisé les outils à sa disposition pour gérer cette situation tout à fait unique, sans précédent au pays. Gérer des situations sans précédent qui mettent en péril la sécurité du pays nécessite des mesures et des actions sans précédent. Les ressources pour mettre fin de façon sécuritaire à cette occupation illégale sont maintenant accessibles.
    Comme l'a dit le ministre de la Justice il y a quelques jours, le Canada est un pays où l'on respecte la primauté du droit. Ainsi, en déclarant l'état d'urgence aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence, le gouvernement respecte la loi et agit dans les limites prévues. Beaucoup de mes collègues ont déjà parlé de cette partie de la loi, mais conformément à ses dispositions, le gouvernement fédéral est maintenant habilité à prendre des mesures temporaires visant la réglementation ou l'interdiction d'assemblées publiques — autres que les manifestations légales — qui auraient pour effet de troubler la paix. En effet, ces manifestations ne sont pas légales.
    La loi permet au gouvernement de désigner et de sécuriser de façon temporaire des lieux où les barrages sont interdits, ce qui inclut les frontières et d'autres infrastructures essentielles du pays. Elle l'autorise temporairement à ordonner à des personnes de fournir des services essentiels afin de pallier les effets des barrages sur l'économie du Canada, ce dont nous avons déjà été témoins. Elle permet au gouvernement de réquisitionner des remorqueuses et des conducteurs pour que le travail soit fait de façon sécuritaire et stratégique. Elle l'habilite également à prendre des mesures temporaires pour autoriser des institutions financières à fournir des services essentiels, ou pour leur ordonner de le faire, afin de pallier les effets des barrages, y compris en réglementant ou en interdisant l'usage de biens en vue de financer ou d'appuyer les barrages.

  (2055)  

    La loi autorise temporairement la GRC à faire respecter les règlements municipaux et les lois provinciales, au besoin, et à imposer temporairement des amendes ou des peines d'emprisonnement aux personnes ne respectant pas la loi.
    Ces mesures spéciales sont nécessaires, peu importe ce que d'autres soutiennent, et elles sont temporaires. En outre, à l'instar des autres mesures gouvernementales, ces mesures sont assujetties à la Charte canadienne des droits et libertés et à la Déclaration canadienne des droits, comme bon nombre de mes collègues l'ont déjà mentionné. Ils ont donné des définitions très claires et définitives de ces lois et de leur signification. Nous respectons les limites imposées par la Charte canadienne des droits et libertés et la Déclaration canadienne des droits.
    Cela m'amène à la véritable nature du « convoi pour la liberté », comme on l'appelle. Pour moi, la liberté au Canada signifie pouvoir m'exprimer librement de façon pacifique, pouvoir sortir de chez moi en toute liberté et sécurité, et être libre d'aller me coucher le soir sans me faire déranger par des bruits de klaxon, des fêtes de rue et des feux d'artifice qui me réveillent à toute heure de la nuit. Pour moi, la liberté au Canada, c'est aussi pouvoir aller travailler...

  (2100)  

    Le temps est écoulé.
    Nous poursuivons les questions et observations. La députée de Renfrew—Nipissing—Pembroke a la parole.
    Monsieur le Président, initialement, les manifestations portaient sur les exigences relatives à la vaccination qui s'appliquent aux camionneurs circulant de part et d'autre de la frontière.
    Pourquoi les camionneurs ayant été vaccinés contre la COVID, mais qui assurent le transport transfrontalier des instruments médicaux et d'autres fournitures de lutte contre la pandémie, n'ont‑ils pas à se mettre en quarantaine ni à subir un test de dépistage, alors que les camionneurs ne s'étant pas fait vacciner contre la COVID sont, eux, placés en quarantaine? Un groupe est‑il plus dangereux que l'autre, ou les deux ne sont‑ils pas dangereux du tout?
    Monsieur le Président, en réalité, quand on examine les faits entourant la situation actuelle, on constate qu'il ne s'agit pas d'une manifestation pacifique. Il est question du respect de la primauté du droit.
    J'ai participé à de nombreuses manifestations dans ma vie et j'ai vu beaucoup de travailleurs et de travailleuses campés sur leurs positions prendre part à des manifestations pendant des jours et des nuits pour faire valoir leurs points de vue au gouvernement et aux gens qui les écoutaient. Toutefois, ils n'ont jamais fait de mal aux personnes autour d'eux et ils ne les ont certainement jamais invectivées avec violence et de façon agressive. Actuellement, le Canada est aux prises avec un mépris total de la loi, des Canadiens...

[Français]

    Monsieur le Président, si on met de côté les symboles racistes, dont on a parlé beaucoup, je pense qu'il y a beaucoup de détresse chez les manifestants qu’on a vus ces dernières semaines. Le Canada est l'un des pays au monde où la vaccination a le mieux fonctionné. On a un taux de 90 %. Les gens ont suivi les règles sanitaires. Malgré cela, il est l'un des pays qui se déconfinent le moins rapidement. Je pense que le sous-financement du système de santé depuis 30 ans en est la raison fondamentale.
    Est-ce que mon collègue est d’accord pour dire que si le gouvernement fédéral,quu'il soit libéral ou conservateur, avait financé correctement le système de santé depuis 30 ans, le pays serait peut‑être déconfiné depuis quelques mois et on aurait peut-être évité le bordel qu’on voit dehors en ce moment?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je pense que nous sommes tous conscients qu'il n'y avait pas de plan pour affronter la pandémie que nous traversons depuis deux ans. Il n'y avait pas de directives. Il n'y avait pas de plan pour permettre aux établissements de santé et aux équipes médicales au Canada et partout dans le monde de répondre à une pandémie comme celle que nous traversons. À mon avis, les travailleurs de la santé ont fait un travail exceptionnel. Je pense qu'ils ont relevé le défi en faisant preuve d'une grande résilience. Ils ont négligé à bien des égards leur propre santé pour fournir des soins à beaucoup d'autres Canadiens.
    Il était nécessaire que le gouvernement impose les exigences relatives à la vaccination. Elles étaient nécessaires pour protéger tous les Canadiens contre...
    J'aimerais prendre quelques autres questions avant la fin de la soirée. Je m'excuse.
    Le député d'Esquimalt—Saanich—Sooke a la parole.

  (2105)  

    Monsieur le Président, je remercie la députée de Labrador d'avoir attiré l'attention sur la distorsion causée par l'utilisation de l'adjectif « pacifique » pour décrire la manifestation à Ottawa. J'ai fait l'erreur de traverser le groupe alors que je portais un masque magenta et on m'a injurié en anglais en utilisant un mot de sept lettres, dont la première est « F ». J'ai vu des journalistes se faire intimider physiquement.
    La députée a-t-elle déjà entendu les dirigeants de la soi-disant manifestation condamner le genre d'intimidation qui avait lieu au cours de l'occupation du centre-ville d'Ottawa?
    Monsieur le Président, c'est malheureux, mais j'ai entendu tant de députés dire qu'ils appuient la manifestation et je trouve cela très inquiétant. C'est du radicalisme. Ce sont des gens qui n'ont fait preuve d'aucun respect envers les autres Canadiens ou envers les villes qu'ils ont occupées. Ils n'ont pas du tout respecté la règle de droit en ce qui concerne le respect des autres êtres humains.
    Je suis toujours perturbée lorsque je vois...
    Je veux essayer de donner la chance à un dernier député de poser une question. Je sais que la députée de Scarborough—Agincourt a déployé de gros efforts pour pouvoir poser une question.
    Monsieur le Président, de nombreux résidants de ma circonscription ont entendu parler des propos racistes tenus à l'endroit de résidants d'Ottawa. Cette situation est préoccupante pour beaucoup de gens, surtout les gens de couleur.
     La députée pourrait-elle expliquer comment la Loi sur les mesures d'urgence pourrait contenir ces éléments extrémistes?
    Monsieur le Président, il n'y a pas de place au Canada pour de tels comportements et opinions extrémistes. Je crois sincèrement que les manifestants étalent les sujets de préoccupation qui les rongent depuis des années, voire des décennies. Ce n'est pas l'endroit pour le faire, et leurs actions ont démontré que c'est inacceptable au Canada.
    J'appuie les actions du gouvernement et j'appuie la Loi sur les mesures d'urgence.
    Je souligne que les questions et les réponses commencent à être un peu trop longues, alors tâchons d'accélérer la cadence. Il commence à se faire tard et nous voulons permettre au plus grand nombre de députés possible de s'exprimer.
    Nous reprenons le débat. La députée de Vancouver‑Centre a la parole.
    Monsieur le Président, je dois dire que je suis embarrassée depuis longtemps par ce qui se passe au Canada, surtout à Ottawa. Beaucoup de collègues dans l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe m'ont téléphoné pour me demander: « Que se passe‑t‑il au Canada? Vous êtes une si belle démocratie. Que se passe‑t‑il? » J'ai donc été embarrassée. Ils ont été renversés d'apprendre ce qui se passait ici.
    Dans de nombreux pays, des gens ont imité ce que les manifestants faisaient ici et je dois dire aux députés que ces imitateurs ont été réprimés immédiatement à l'aide de canons à eau, d'armes à feu et de gaz lacrymogènes pour les faire rentrer dans les rangs. Cependant, je suis fière que mon pays n'ait pas agi ainsi au cours des deux derniers jours. Les policiers canadiens ont fait preuve de retenue, de professionnalisme et de patience. Ils ont été la cible de violence verbale et physique et des manifestants ont également tenté de s'approprier leurs armes. Ils ont fait attention aux enfants qui se trouvaient dans le groupe et qui ont été utilisés comme boucliers en première ligne. Je ne sais pas quel type de parent fait cela, mais c'était une façon de faire voir à tout le monde qu'ils étaient gentils et qu'ils avaient de jeunes enfants. Les enfants étaient toutefois en première ligne. Voilà ce que nous avons vu se passer ici. La police a fait très attention aux enfants, mais elle était très inquiète à leur sujet.
    La question que nous nous posons est la suivante: pourquoi recourir à la Loi sur les mesures d'urgence? Je dois avouer qu'il est assez facile de comprendre pourquoi: la ville d'Ottawa a été occupée pendant 22 jours, et pas seulement par des gens pacifiques assis par terre qui chantaient Kumbaya, mais aussi par des gens qui ont menacé, harcelé verbalement et intimidé physiquement des gens qui portaient un masque et des membres des minorités visibles, qui ont eu peur. Certains manifestants se promenaient dans la ville en transportant des matières volatiles comme de l'essence et du diésel. Ils ont tiré des feux d'artifice dans une ville qui compte d'immenses gratte-ciel en faisant preuve de négligence et sans se soucier de savoir s'ils déclencheraient un incendie. Les manifestants étaient anarchiques, c'est le seul terme que je peux utiliser. Si cela n'est pas suffisant pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence au Canada, alors je ne sais pas ce qui l'est.
    Nous avons beaucoup parlé de la primauté du droit, et j'ai entendu tout le monde invoquer ce principe. C'est exactement ce que fait le Canada. Le Canada est un pays séparé en diverses administrations au titre de la Constitution. Le gouvernement fédéral ne peut pas intervenir comme une grande et merveilleuse matriarche en imposant sa volonté aux municipalités ou aux provinces. Il ne peut pas agir ainsi. Par conséquent, il devait essayer de donner aux municipalités et aux provinces les outils dont elles avaient besoin pour être en mesure de mettre fin à l'anarchie, et c'est exactement ce que fait la Loi sur les mesures d'urgence. La Loi fournit aux municipalités et aux provinces les outils dont elles ont besoin.
    Aujourd'hui, j'ai entendu le maire d'Ottawa dire qu'il n'arrivait pas à faire venir de dépanneuses. Les conducteurs de dépanneuse ne voulaient pas venir parce qu'ils avaient peur. Ils ne voulaient pas venir remorquer les semi-remorques qui bloquaient les rues. Cependant, grâce à la Loi sur les mesures d'urgence, les conducteurs de dépanneuse ont été informés qu'ils devaient venir les remorquer. Voilà un exemple simple montrant qu'il fallait passer par la Loi sur les mesures d'urgence pour fournir à la police les ressources et les outils dont elle avait besoin.
    La Loi sur les mesures d'urgence aide aussi les provinces et les municipalités à assumer certains rôles qui ne relèvent habituellement pas d'elles. Par exemple, permettre que des services de police viennent de partout au pays, y compris celui de ma propre circonscription, le service de police de Vancouver, duquel je suis excessivement fière, pour aider Ottawa. Soulignons également la capacité de retracer l'argent, de déterminer quelles entités étrangères finançaient ce mouvement d'anarchie qui sévissait dans notre ville depuis 22 jours, de déterminer qui envoyait de l'argent à qui et de suivre la cryptomonnaie, une activité qui s'est révélée fondamentale pour découvrir que des entités étrangères se cachaient derrière les événements.
    J'ai entendu des gens dans la rue, lorsque la police les repoussait, parler des droits garantis par le premier amendement et dire: « Vous ne pouvez pas arrêter cette personne; vous ne lui avez pas lu ses droits Miranda. » Allons donc! Les gens ne regardent-ils pas assez la télévision pour savoir que nous ne faisons pas cela au Canada? Ces pratiques ne sont pas canadiennes, donc nous savons qu'il y avait des entités étrangères au pays, qui manipulaient les événements.

  (2110)  

    Qui les finance? Qui les paie pour être ici? D'où vient l'argent qui permet à ces individus de manger, de boire et de subvenir à tous leurs besoins durant 22 jours? Quelqu'un finance tout cela. Nous devons trouver de qui il s'agit.
    On parle de souveraineté. La souveraineté au Canada repose sur plusieurs principes, notamment qu'il est interdit pour des entités étrangères de nous imposer comment agir sous notre régime démocratique. Le Canada est un pays démocratique, et cela signifie que nos gouvernements sont élus. Peu importe l'ordre de gouvernement, les personnes qui le forment sont élues au moyen d'une élection libre et juste. C'est un des principes fondamentaux de notre démocratie. Nos élus ont été nommés par les voies légitimes, et essayer de renverser le gouvernement par la loi de la rue, des menaces et l'intimidation relève de l'anarchie. C'est inacceptable. Si ces manifestants ne veulent plus du gouvernement au pouvoir, qu'ils utilisent leur droit de vote aux prochaines élections. Voilà ce qu'est la démocratie.
    Dans un régime démocratique, les représentants des médias sont libres et on respecte le principe de la liberté de la presse. Or, les journalistes ont été intimidés, harcelés, poussés, bousculés, menacés et apeurés ces dernières semaines. D'ailleurs, je lève mon chapeau à tous les représentants des médias qui ont fait un travail extraordinaire, avec beaucoup de courage. Ils ont fait ce qu'il fallait. Si on impose le silence aux médias, personne ne sait ce qui se passe réellement et la porte est grande ouverte pour la désinformation et les fausses nouvelles.
    Voilà certains des enjeux dont il est question ici. Je dois dire que, lorsque les policiers répétaient aux gens qu'ils devaient partir et amener les enfants ailleurs, j'ai pensé à ce qu'on avait vu à Coutts et dans certaines manifestations aux postes frontaliers. Au pont Ambassador, une chaîne d'enfants qui se tenaient par les bras était placée devant les manifestants. Dans quel genre de pays sommes-nous pour que des soi-disant « manifestants » utilisent ainsi des enfants comme des boucliers humains? Ils agissent ainsi pour deux raisons: les enfants servent de boucliers, puisque les adultes savent que personne ne leur fera de mal, et ils créent aussi l'impression qu'il s'agit d'une activité agréable, tranquille, axée sur la famille et ainsi de suite. Ce n'est pas la réalité. Nous assistons à une forme de manipulation et d'intimidation des médias.
    Je dois dire que nous sommes conscients de tout l'argent qui est lié à cette affaire. Je pense aux postes frontaliers qui ont été bloqués par des camions. Rappelons que 95 % des camionneurs du pays sont vaccinés et font des trajets aller-retour pour transporter des aliments, des médicaments et tout le reste. D'autres ne souhaitaient pas être vaccinés, mais il y a deux facettes à la liberté: la liberté de choix signifie qu'une personne qui choisit de ne pas être vaccinée ou de ne pas porter de masque doit accepter les conséquences de son choix. C'est quelque chose que j'ai enseigné à mes enfants, comme mes parents me l'ont enseigné. Nous avons des choix, mais ces choix ont des conséquences. Si on considère qu'en raison d'un choix particulier, une personne porte préjudice aux autres parce qu'elle les expose à une infection, le gouvernement doit en être informé.
    On entend dire qu'ils bloquent le passage de camions qui tentent de passer la frontière pour apporter des aliments et des médicaments, et de maintenir les échanges commerciaux, lesquels se chiffrent à 511 millions de dollars par jour si l'on tient compte de tous les passages. C'est de l'intimidation. Ce ne sont pas les camionneurs qui sont en cause ni les exigences relatives à la vaccination. C'est l'anarchie et il ne faut pas l'oublier. Ces gens disent vouloir renverser le gouvernement, qui est dûment élu, et utilisent un langage menaçant à l'endroit du premier ministre, qui a été dûment élu, et lorsqu'on leur fait l'accolade et que l'on prend des photos avec ces gens, on exprime son accord avec la loi de la rue et la possibilité qu'elle fasse tomber un gouvernement dûment élu.
    Cela ne se fait pas dans une démocratie. Pensons aux juges. Nous avons une magistrature indépendante, qui est actuellement à émettre toutes sortes d'ordonnances contre des personnes qui ont enfreint la loi. Encore une fois, nous revenons à la primauté du droit. On ne peut pas jouer sur les deux tableaux. On ne peut pas parler de la primauté du droit d'une part et, d'autre part, affirmer que l'on enfreint la loi et impose une dictature lorsque la loi est appliquée conformément aux champs de compétence. Ce n'est pas vrai. Un dictateur prive les gens de leurs libertés. Or, c'est ce qu'ont fait les manifestants. Ils ont cherché à priver tout le monde de leurs libertés: celle de porter le masque, celle d'obtenir des soins à l'hôpital, celle de reconduire ses enfants à l'école et celle de sortir faire des courses. Les occupants ont forcé la fermeture d'entreprises. Des commerces ont dû fermer leurs portes. Les manifestants sont entrés dans des restaurants, et ils ont intimidé et malmené verbalement et physiquement des serveurs, des serveuses et des clients.
    Ce n'est pas là une manifestation légale et pacifique. Aujourd'hui, lorsque tout le monde chantait l'hymne national et disait à la police: « Nous vous aimons », c'était de la propagande. Les manifestants voulaient faire croire qu'ils sont des gens sympathiques. « Voyez, nous nous sommes dotés d'un jeu gonflable pour amuser nos enfants. »

  (2115)  

    Nous tous, en séance à la Chambre des communes, devons savoir que ce n’est pas vrai. Nous savons ce qui se passe...
    Nous passons aux questions et observations. Le député de Calgary Shepard a la parole.
    Monsieur le Président, j’aimerais aborder trois points. La députée a mentionné que la magistrature indépendante était très active en ce moment. La députée doit savoir que l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence retire le rôle des juges dans les activités du CANAFE, notamment le gel des comptes bancaires. C’est le raccourci utilisé. Des fonctionnaires du gouvernement ont informé un de nos députés qu’il est trop long de passer par les juges, et la députée devrait savoir cela. C’était mon premier point.
    La députée a parlé du traitement des médias par certains des manifestants, et je suis d’accord, c’est affreux. Je lui rappellerai qu’en 2017, le journaliste Ben Makuch de VICE et le journaliste Justin Brake de l’Independent ont été poursuivis en justice par le gouvernement parce qu’ils refusaient de révéler leurs sources.
    Enfin, l’une des choses que la députée n’a pas abordées est la consultation. Sept des dix provinces ont déclaré publiquement être contre l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. Comment peut-elle appuyer une telle mesure?
    Monsieur le Président, les juges s'affairent à examiner le dossier des personnes arrêtées, mais ils ont aussi pris la parole pour donner une idée de la direction à suivre. Ils disent haut et fort qu'il y a certaines mesures qui doivent être prises. Tout cela au moment où on se parle.
    L'Alberta a envoyé une lettre au premier ministre pour lui signifier qu'elle n'avait pas les ressources — que ce soit à l'échelle municipale ou provinciale — pour répondre à tous les besoins à la frontière. Elle avait besoin d'aide. Le gouvernement fédéral aurait dû avoir les outils pour l'aider. Il aurait dû pouvoir analyser les questions relatives aux champs de compétence et répondre...
    Nous poursuivons les questions et les observations. La députée de Beauport—Limoilou a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, dans son allocution, ma collègue a dit notamment que les remorqueurs craignaient de faire leur travail et elle a affirmé que le gouvernement avait absolument besoin de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence pour les forcer à le faire.
    Cela dit, il existe dans le Code criminel des mesures, des ordonnances judiciaires, et même des ordonnances du Procureur général. Pourquoi n'a-t-on pas proposé ces postes de solutions avant de larguer la bombe atomique qu'est la Loi sur les mesures d'urgence?

  (2120)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, la réquisition de remorqueuses dans une province ou une municipalité donnée relève encore une fois des autorités provinciales, mais celles-ci n'avaient pas les pouvoirs nécessaires pour passer à l'action. La loi sur les mesures d'urgence leur a fourni ces pouvoirs.
    Pourquoi les remorqueurs avaient-ils si peur, au fait? Parce qu'ils se sont fait intimider par les participants du soi-disant convoi de camionneurs. Ils craignaient de perdre leurs permis, ou même leur entreprise. Ils ont enfilé des masques afin que personne ne les reconnaisse. C'est le genre de...
    Nous poursuivons les questions et les observations. La députée de Nanaimo—Ladysmith a la parole.
    Monsieur le Président, recourir à la Loi sur les mesures d'urgence, même songer à le faire, c'est reconnaître un manque de leadership qui a permis cette escalade incontrôlée dès le départ. On me fait part d'inquiétudes. Moi aussi, je m'inquiète que cette loi pourrait être utilisée plus tard contre ceux qui participent réellement à des manifestations pacifiques. Tel n'est pas le cas en ce moment.
    Il s'agit d'une occupation illégale où des gens subissent du harcèlement depuis des semaines. La députée convient-elle que des mesures auraient dû être prises plus tôt afin qu'on évite d'en arriver à la situation actuelle?
    C'est intéressant, monsieur le Président. Si le premier ministre s'était empressé d'imposer la Loi sur les mesures d'urgence dès le début de tout ceci, tout le monde lui aurait demandé ce qu'il faisait et l'aurait traité de tyran. On lui aurait demandé pourquoi il n'essayait pas d'abord d'autres méthodes.
    C'est ce qu'il a fait. Il a discuté avec les provinces et les municipalités, et il a tenté de régler tout ça avec elles. Il a tenu des tables rondes pendant plusieurs jours. Nous en revenons encore aux champs de compétence.
    Il faut bien se rappeler que cette loi est temporaire, que les interventions sont géographiquement ciblées là où c'est nécessaire et qu'elles sont proportionnelles à la situation. Si nous gardons tout cela en tête, alors nous savons qu'elle va prendre fin, et qu'elle va prendre fin avec une enquête au cours de laquelle le gouvernement du Canada devra rendre des comptes.
    Monsieur le Président, je prends la parole au nom des résidants de Renfrew—Nipissing—Pembroke qui aiment la liberté et qui sont très préoccupés.
    En décrétant l'état d'urgence, le premier ministre a plongé des millions de Canadiens dans la terreur. Ils ne comprennent pas pourquoi on a pris cette mesure anticanadienne sans précédent. Ils se demandent si leur compte bancaire sera gelé parce qu'ils ont soutenu le mauvais parti politique. Ils veulent savoir s'ils vont perdre leurs enfants simplement parce qu'ils ont agité un drapeau du Canada.
    J'aimerais pouvoir leur dire que cela n'arriverait jamais au Canada, mais c'est ce qui est en train de se produire. J'aimerais pouvoir leur dire que ce n'est pas ce que le premier ministre voulait depuis le début.
    Depuis que le gouvernement a annoncé la suspension des exigences relatives à la vaccination pour les camionneurs, pour ensuite revenir sur sa décision 24 heures plus tard, le premier ministre et le gouvernement ont tout fait pour aggraver la situation et jeter de l'huile sur le feu. Soit ils ont tout calculé, soit ils ont fait preuve d'incompétence. Quoi qu'il en soit, les Canadiens ne font plus du tout confiance au premier ministre.
    La question est de savoir combien de temps il faudra attendre pour que des députés libéraux trouvent la confiance nécessaire pour dire la vérité à ceux qui sont au pouvoir. Voici la vérité: la seule situation d'urgence pour le premier ministre, c'est sa cote de popularité en chute libre dans les sondages. Les théories du complot avancées par le gouvernement sont encore plus gonflées que les châteaux gonflables sur la rue Wellington. Pour justifier les mesures qu'il veut prendre à l'égard de cette fausse situation d'urgence, il doit tenir un discours plus alarmiste.
    Faut-il que les Canadiens croient que notre démocratie est menacée par des soirées de danse et des bains tourbillon? La seule chose qui soit menacée, c'est la crédibilité du gouvernement. Le premier ministre a crié au loup en invoquant des insurgés racistes. Les Canadiens le voient très bien et ils jugent sévèrement le premier ministre. Même certains libéraux se demandent ce qu'il est advenu du premier ministre.
    Il y a exactement deux ans, le premier ministre a déclaré ceci au sujet d'un groupe de Canadiens qui bloquaient des infrastructures essentielles et demandaient à la gouverneure générale de contourner le gouvernement élu: « Notre responsabilité est de continuer à œuvrer pour une résolution pacifique et durable de cette situation troublante. » Il y a deux ans, le premier ministre demandait aux Canadiens d'être patients. Il a dépêché un ministre pour aller négocier avec les manifestants. Une fois l'enjeu politique réglé, la Police provinciale de l'Ontario est intervenue pour démanteler les barrages de façon pacifique.
    Les Canadiens ont le droit de demander pourquoi la situation actuelle est différente. Pourquoi le gouvernement traite-t-il un groupe de manifestants différemment d'un autre? Je ne vois qu'une seule réponse: la politique. Le gouvernement et ses partisans urbains élitistes méprisent les Canadiens des régions rurales, à moins qu'ils soient Autochtones, auquel cas ils les traitent avec condescendance.
    Qui a dénoncé le groupe de justiciers agitant un drapeau soviétique qui s'en sont pris à des automobilistes? Personne, parce que ce groupe comprenait des chefs syndicaux du secteur public avec un salaire dans les six chiffres et des professeurs d'université, connus pour faire partie du bassin de donateurs du Parti libéral. Les Canadiens bien nantis de la classe privilégiée qui brandissent des drapeaux d'États génocidaire ont été dépeints comme des héros de la « bataille du pont Billings » par les médias.
    Par contre, les cols bleus de régions rurales tenant des pancartes qui associent le gouvernement au nazisme sont décrits par les médias comme des barbares rassemblés pour une marche au flambeau Tiki. Les médias en sont rendus à applaudir la divulgation de données personnelles de Canadiens. Pendant ce temps, le ministre de la Justice menace de geler le compte bancaire de personnes qui ont voté pour le mauvais candidat à la présidence.
    Les commentaires formulés par le ministre à la chaîne CTV mercredi démontrent sans l'ombre d'un doute qu'il serait imprudent de conférer au gouvernement le pouvoir de prendre des mesures d'urgence. À la question de savoir si les comptes bancaires des personnes qui ont fait des dons au convoi seraient gelés, le ministre de la Justice a répondu: « Si j'étais membre d'un mouvement pro-Trump qui a fait des dons, ou d'un autre mouvement du genre, je m'inquiéterais ».
    J'espère que le ministre pourra expliquer à la Chambre au nom de quelles autres idées prétendument inacceptables on décidera de geler des comptes bancaires. Hélas, le ministre n'aura même pas à fournir d'explications. Les médias et les autres activistes radicaux financés par le gouvernement s'affairent déjà à dresser une liste d'ennemis des progressistes.
    Mercredi, dans un effort qui a semblé concerté, CBC/Radio-Canada et le Canadian Anti-Hate Network, deux organisations financées par les libéraux, ont publié simultanément des articles sur des chrétiens qui appuient le convoi. La semaine dernière, des articles d'opinion dans les médias libéraux ont fait valoir que le drapeau canadien avait été entaché parce qu'il avait été brandi par le mauvais type de Canadiens.

  (2125)  

    Les médias de gauche et les militants financés par le gouvernement ont certainement brossé un portrait clair du type de personnes qui, selon eux, défendent des points de vue inacceptables. Les chrétiens, les Canadiens patriotiques et même les gens aux idées libérales traditionnelles se sont tous taillé une place sur la liste des ennemis des socialistes urbains. Les médias aiment parler d'une guerre culturelle. Il y a une culture urbaine qui est très conservatrice lorsqu'il est question de lever les mesures sanitaires. Il y a une culture rurale qui réunit des gens ayant choisi de renoncer aux avantages de la vie urbaine pour profiter de la liberté offerte dans les régions rurales. L'erreur, c'est de penser que c'est une guerre.
    Il y a toujours eu un combat entre un David rural et un Goliath urbain, mais sans les lance-pierres qui ont été interdits par décret. Le Canada a longtemps été un pays libre. Les gens de ma circonscription ont élu un député libéral pendant la majeure partie du siècle dernier. C'était avant que le Parti libéral abandonne les Canadiens des régions rurales en mettant en place un registre des armes d'épaule. Depuis, les libéraux ont toujours choisi de soutenir les intérêts des citadins au détriment des intérêts du monde rural, mais ce n'est qu'à l'arrivée de l'actuel premier ministre et des émules conscientisés de McGuinty que les règles du jeu ont vraiment changé. Au lieu de tout simplement choisir un camp, ils cherchent maintenant à asseoir une domination culturelle totale.
    Autrefois, la tolérance signifiait accepter les gens, surtout lorsque nous n'étions pas d'accord avec eux. Toutefois, les socialistes ont redéfini cette notion pour qu'elle signifie une soumission complète à une idéologie radicale. C'est pourquoi les médias agissent maintenant comme si le terme « liberté » était tendancieux. C'est pourquoi ils s'en prennent à notre drapeau. C'est un premier ministre libéral qui a dit que « la liberté est notre nationalité ». Canada et liberté étaient autrefois synonymes. Cependant, la liberté signifie accepter les différences d'opinions. Dans une démocratie, il y a des divergences d'opinions, et même quand 90 % de la population est d'accord, il faut protéger le droit des 10 % d'être en désaccord. Quand le prédécesseur du NPD a voté contre la Loi sur les mesures de guerre alors que le Canada était vraiment en guerre contre de véritables nazis, personne n'a accusé ses députés d'appuyer Hitler. Le droit à la dissidence est un bon indicateur de la démocratie d'un pays. Or, le décret d'urgence constitue une attaque directe contre ce droit.
    D'un trait de plume, le premier ministre a proscrit les manifestations sur la Colline du Parlement pendant 30 jours, pour commencer. Nous ne parlons pas ici des rues d'Ottawa, mais de la pelouse de la Colline. Si des Canadiens d'origine ukrainienne veulent manifester ou se rassembler sur la Colline pour exprimer leur opposition à l'agression russe, ils ne pourront pas le faire parce que de tels actes sont maintenant devenus illégaux. Le premier ministre affirme que le décret respecterait la Charte, mais la Charte ne vaut pas le papier sur lequel elle est écrite si les gens ne peuvent pas manifester sur la Colline du Parlement contre une déclaration d'état d'urgence.
    Le gouvernement prétend avoir besoin d’un pouvoir extraordinaire pour endiguer une insurrection imminente qui menace la démocratie. Je sais que le premier ministre n’aime pas passer son temps à la Chambre et qu’il était probablement caché dans son bunker dès le départ, mais le Parlement s’est réuni, a débattu et a voté pendant toute la période où les camionneurs étaient là. Dans d’autres pays, les gens qui entendent le mot « insurrection » s’imaginent des coups d’État militaires ou des prises de pouvoir des communistes. Ils ne s'imaginent pas qu'un petit groupe de manifestants qui demandent à la gouverneure générale nommée par les libéraux de former un gouvernement avec le Sénat nommé par les libéraux représente une dangereuse insurrection. Le plus récent plan des manifestants pour renverser le gouvernement consiste à demander poliment à la gouverneure générale de remplacer le premier ministre libéral par un autre député libéral. La gouverneure générale a rejeté cette demande. Si l’on qualifie cela d’insurrection, il s’agit de l’insurrection la plus polie, la moins violente et la plus typiquement canadienne de l'histoire.
    À Ottawa, les manifestants ont poliment demandé au gouvernement de se renverser lui-même. Le gouvernement a répondu par la négative, alors ils ont organisé une fête de quartier pendant plusieurs semaines. Cette insurrection des jeux gonflables a suffi au gouvernement pour déclarer une urgence nationale? Ce serait triste et pathétique si le précédent créé n’était pas si dangereux. Le gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures d’urgence sans motifs valables. Il se retrouve maintenant enfermé dans son propre piège, et pour justifier cet abus de pouvoir, il ne peut que multiplier les belles paroles. Pour justifier les grands discours du gouvernement, les alliés de ce dernier dans les médias ont encouragé le boycottage et la création de groupes de justiciers.
    Il y a deux ans, le premier ministre exhortait la population à la patience et, aujourd’hui, il traite tout le monde de nazi alors qu’il envoie ses unités de choc démanteler les jeux gonflables. Il faut que cela cesse.

  (2130)  

    Monsieur le Président, je trouve toujours intéressant d'écouter ma collègue et amie d'en face.
    Elle a parlé de jeux gonflables et de piscines qui ont été installés et de tout le plaisir que ces personnes ont eu. La députée d'en face considère cela comme étant une merveilleuse manifestation. Elle n'y voit pas vraiment rien de mal. Elle ne tient aucunement compte des blocages et des nombreuses difficultés que cela a entraînés, que ce soit ici, au centre-ville d'Ottawa, ou à la frontière internationale.
    Par contre, je connais quelqu'un qui reconnaît tout cela. Le sénateur Vernon White a été nommé au Sénat par l'ancien premier ministre conservateur Stephen Harper et a occupé auparavant les fonctions de chef de police d'Ottawa.
    La députée ne croit-elle pas que cet homme sait de quoi il parle lorsqu'il dit que l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence a été utile pour gérer cette manifestation et était, en fait, une bonne décision? N'est-elle pas d'accord avec un sénateur conservateur aussi chevronné dans ce domaine?
    Monsieur le Président, ce qui est tragique et douloureux, ce sont les millions d'emplois qui ont été perdus en raison de la pandémie, la déclaration de cette dernière, les restrictions, les confinements, la nécessité de rester au pays et toutes ces exigences qui n'étaient fondées sur aucune preuve scientifique. Selon une étude de l'Université John Hopkins, toutes les mesures non médicales qui ont été prises n'ont aucunement contribué à réduire les taux de mortalité et d'infection.
    Au même titre qu'il était excessif de confiner les gens et de leur faire perdre leur emploi, il est excessif d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.

[Français]

    Monsieur le Président, je constate que ma collègue est contre le recours à la Loi sur les meures d'urgence.
     Au Bloc québécois, nous sommes évidemment contre cela, car nous avons une réaction allergique chaque fois que le fédéral vient jouer dans nos pattes. Malheureusement, on a vu des députés du Parti conservateur, et même un aspirant chef, se filmer avec des camionneurs et encourager ce mouvement.
    Ma question est assez simple: combien de partis conservateurs y a-t-il à la Chambre?

  (2135)  

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis très déçue de mon collègue, parce qu'il est pourtant d'accord avec nous pour dire qu'il n'était pas nécessaire d'avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Le Parti conservateur est plus uni et plus fort que jamais. L'unité du parti augmente, le nombre de personnes qui appuient le parti augmente et, très bientôt, le parti formera le gouvernement.
    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement ma collègue. Elle a fait une description très intéressante de la division entre les régions urbaines et les régions rurales au pays. Je ne suis pas certain que cela soit représentatif de toute la diversité d'opinions qui existent au pays. Je suis d'accord avec elle, de nombreux emplois ont été perdus pendant la pandémie à cause du virus, mais aussi à cause des mesures mises en place. Un des éléments ironiques est que l'impact des barrages à Ottawa a entraîné des pertes d'emploi et la fermeture de petites entreprises et que des personnes qui ont des enfants n'ont pas pu travailler. Des gens qui travaillent dans les sandwicheries et les restaurants ont perdu des revenus.
    Comment la députée se sentirait-elle si une des villes de sa circonscription était bloquée par, disons, 500 camions et que toutes les entreprises de cette ville qu'elle représente ne pouvaient plus avoir de revenus pendant trois semaines ou même plus longtemps? Est-ce que les gens de sa circonscription trouveraient cela normal?
    Monsieur le Président, je peux vous en parler des gens de ma circonscription. Lorsque le convoi est passé par l'autoroute Transcanadienne, des gens ont attendu pendant 4, 6 ou même 8 heures pour encourager les camionneurs de Deux‑Rivières jusqu'à la fin d'Arnprior. Ils étaient vraiment heureux que quelqu'un vienne à Ottawa pour défendre leurs droits et libertés.
    Il y a les conservateurs au Parlement, des gens de partout au pays et maintenant de partout sur la planète, qui comprennent que la démocratie et la liberté sont menacées au Canada.
    Monsieur le Président, je prends la parole à la Chambre aujourd'hui parce que je m'oppose à la décision du premier ministre, qui a imposé de façon injustifiée, inconstitutionnelle et illégale la Loi sur les mesures d'urgence. Ce soir, je ne me sens pas en état de transmettre mon message, qui représente un fardeau à mon avis. Les mots me manquent pour décrire le mélange de désespoir, de chagrin, de colère et de dégoût que m'inspirent les mots prononcés par le premier ministre et les mesures qu'il a prises au cours des deux dernières années. J'éprouve des sentiments de plus en plus contradictoires, ce qui rend la situation encore plus difficile.
     Au cours des derniers jours, j'avais l'impression de voir une lueur d'espoir. Je voyais poindre à l'horizon une lumière lointaine, qui commençait à prendre de l'ampleur, et je me réjouissais de penser que le premier ministre avait autant de contrôle sur ce phénomène que sur le lever du soleil. Je suis dégoûté et frustré par ce qui a lieu au cours des derniers mois, et aujourd'hui, les sentiments de tristesse et de dégoût m'ont presque anéanti alors que j'observais ce qui se passait dans la rue, juste devant l'édifice où nous nous trouvons. Certes, le premier ministre a eu ce qu'il voulait. Il a libéré les rues. Il a poussé les personnes qui critiquaient ses méthodes suffisamment loin pour ne plus les entendre, et il s'est servi de la force et de poivre de cayenne pour arriver à ses fins.
    Chers collègues, que faisons-nous ici? Quand le premier ministre a promulgué la Loi sur les mesures d’urgence, il a prétendu qu’il le fallait pour sauver l’économie, mais les barrages frontaliers étaient déjà levés et les manifestants avaient commencé à se retirer. Il a ensuite changé son fusil d’épaule en affirmant qu’il le fallait pour sauver notre démocratie. Or, pendant ce temps, le Parlement poursuivait ses activités, et les débats législatifs et les votes ont eu lieu. Puis, le premier ministre a encore une fois changé sa version des faits et a déclaré que l’invocation de cette loi était nécessaire pour déloger les camions. Cependant, des juristes ont contesté cette affirmation et dit que les pouvoirs nécessaires étaient déjà en place. Aujourd’hui, les camions sont partis et les rues sont dégagées, et le premier ministre veut encore s’arroger ces pouvoirs sans précédent.
    Pourquoi en a-t-il besoin? Les frontières sont ouvertes, les camions sont partis et les rues sont dégagées. Que reste-t-il à accomplir? Apparemment, le premier ministre va continuer à suspendre les libertés civiles et les protections juridiques jusqu’à ce qu’il soit certain d’avoir muselé ses opposants pour de bon et d’avoir fait comprendre à tous ses critiques que le même sort les attend. Il saisira les comptes bancaires, les relevés téléphoniques et tout ce dont il a besoin sans avoir à respecter les protections juridiques normales et sans recourir à des ordonnances judiciaires.
    Cette façon d'agir ne date pas seulement de quelques semaines. En fait, le premier ministre s'emploie depuis quelque temps déjà à brouiller, ostraciser et diviser les Canadiens à des fins politiques. Même les députés de son propre parti commencent à le rappeler à l'ordre. Il parle de « ces gens-là ». Il les traite d'extrémistes qui ne croient pas à la science. Pour lui, ce sont des misogynes et, souvent aussi, des racistes. Ce sont des gens qui nient la science, des marginaux qui défendent des opinions inacceptables. Ce sont des antisémites, des islamophobes, des anti-Noirs, des homophobes et des transphobes. Il s'agit, selon lui, d'un petit groupe de personnes qui accapare l'espace. Il a même demandé si le Canada devait « tolérer ces gens ». Le premier ministre a donc mis en œuvre des règles injustifiées et intentionnellement discriminatoires pour que ces gens qui « accaparent l'espace » n'aient pas à être tolérés.
    Il y a quelques semaines, une dame dont je ne révélerai pas le nom a demandé à me rencontrer à mon bureau de circonscription. Elle s'est assise de l'autre côté de la table de réunion et elle m'a dit avoir perdu son fils il y a quelques dizaines d'années en raison d'un vaccin ayant entraîné des complications. Elle a fondu en larmes quand elle m'a parlé de ses craintes de se faire vacciner. Elle avait peur pour elle-même, pour ses enfants et pour ses petits-enfants. Elle m'a demandé pourquoi le premier ministre lui faisait cela. Pourquoi n'arrivait-il pas à comprendre que c'était impossible pour elle? Elle avait déjà contracté la COVID‑19 et elle voulait savoir si elle pouvait être exemptée des exigences fédérales afin de pouvoir aller visiter sa mère âgée qui habite assez loin. Elle devait prendre l'avion pour se rendre chez elle.

  (2140)  

    Je ne pouvais pas lui fournir de réponse. Cette dame n'est pas raciste. Elle n'est pas une extrémiste. Elle ne fait pas partie d'une minorité de gens marginaux.
    Norm et sa famille avaient une ferme à quelques kilomètres de la ferme où j'ai grandi. Toute ma vie, j'ai su qu'il était un fervent partisan du NPD. Je savais qu'il s'était présenté pour le parti en 1988 sous la direction d'Ed Broadbent. Norm et sa famille étaient des voisins généreux. Même si nos familles n'avaient pas les mêmes opinions politiques, nous savions que si l'une ou l'autre avait besoin d'aide, elle pouvait toujours compter sur l'autre pour l'aider.
    Lorsque je suis devenu député il y a plus de 16 ans, Norm est resté en contact avec moi. Il a toujours été cultivé et bien informé, et cela transparaissait lorsqu'il exprimait ses préoccupations au sujet des multinationales ou du gouvernement Harper. Plus récemment, il a exprimé une préoccupation plus urgente au sujet du premier ministre actuel et des exigences que ce dernier a imposées à l'ensemble de la population canadienne. Selon Norm, on piétine le droit des citoyens de manifester pacifiquement.
    Je veux m'adresser à mes collègues du NPD. Norm a écrit à beaucoup d'entre eux et, bien qu'ils ne puissent pas le savoir en lisant ses courriels, ses propos sont sincères. Il est inquiet pour ses petits-enfants, ses enfants et ses voisins. Il nous a suppliés de ne pas appuyer le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Norm est un homme bon, avec une bonne famille. Il n'est pas un extrémiste. Il croit en la science. Il n'est ni misogyne ni raciste.
    Chris est un conseiller municipal de Grand Prairie. Il se soucie profondément de notre collectivité, en particulier des gens vulnérables de notre région. Il a été l'un des principaux défenseurs de la réconciliation et de la mise en place de changement significatif pour les peuples autochtones qui vivent dans nos collectivités. C'est un bon ami à moi.
    La semaine dernière, Chris était à Ottawa pour protester contre les politiques et les mandats discriminatoires du gouvernement fédéral. Ce n'est pas un extrémiste. Il n'est pas antisémite, islamophobe, raciste envers les Noirs, homophobe ou transphobe. Il y a une personne à la Chambre qui le sait aussi bien que moi, et c'est le premier ministre. Il connaît bien Chris parce qu'ils ont de bons amis en commun. En fait, le premier ministre a appelé Chris personnellement pour lui demander de se présenter comme candidat du Parti libéral du Canada. Malheureusement, en raison de son opposition à l'injustice et à la division, des gens dans tout le pays ont repris les mots du premier ministre et ont accusé mon ami, notre ami, qui a deux sœurs noires, d'être raciste et misogyne. Il faut que cela cesse.
    Mes collègues et moi avons le choix. L'histoire nous jugera pour notre décision. Allons-nous faire ce qu'il faut et rejeter la politique de division et de haine et mettre fin à cette atteinte à la liberté, ou allons-nous accorder au premier ministre ce pouvoir illimité dont il veut disposer pour attaquer ses adversaires politiques?
    J'ai dit au début de mon discours que j'avais des raisons d'espérer, et c'est toujours le cas. En effet, que les 338 députés de la Chambre fassent ce qui s'impose ou non, je sais que les Canadiens en ont assez des désaccords, qu'ils en ont assez de la haine et ils en ont assez des divisions politiques.
    Je ne fais pas confiance au premier ministre et je ne crois pas du tout qu'il changera, mais je suis convaincu que les Canadiens ont vu tout ce qu'ils avaient besoin de voir. Ils connaissent le premier ministre. Ils ont vu la douleur qu'il est prêt à infliger à ceux qui ne sont pas d'accord avec lui. Je fais confiance aux Canadiens. J'espère que mes collègues ici présents feront de même et rendront aux Canadiens leurs libertés.

  (2145)  

    Monsieur le Président, j'aimerais préciser trois choses. Tout d'abord, il y a aujourd'hui un barrage à Surrey, en Colombie-Britannique. Deuxièmement, le décret, quoiqu'en dise la députée de Renfrew—Nipissing—Pembroke, ne vise pas à confier au premier ministre le pouvoir de prendre des mesures d'urgence. Il s'agit plutôt de donner à la police, qui agit de manière indépendante, les moyens de faire respecter la loi. Troisièmement, les manifestations légales sont autorisées en vertu de ce décret et sont toujours autorisées en vertu de la Charte. Seules les manifestations qui troublent la paix seraient réprimées.
    Je vais poser une question très directe au député. Les membres de son parti ont parlé de la loi et l'ordre et ont affirmé que leur parti était fondé sur la loi et l'ordre. Pouvons-nous au moins nous entendre sur une chose? Lorsque, après 22 jours, les citoyens d'Ottawa en arrivent à prendre les choses en main parce qu'ils n'en peuvent plus d'attendre qu'on applique la loi, nous avons un problème qui doit être réglé par l'octroi de pouvoirs, y compris des pouvoirs accrus comme ceux que le chef intérimaire, Steve Bell, a reçus pour renforcer l'application de la loi.
    Monsieur le Président, c'est bien le problème avec le Parti libéral: chaque jour, il change de discours et trouve une nouvelle raison de s'être donné ses nouveaux pouvoirs. Des juristes nous ont confirmé que le gouvernement n'en avait pas besoin pour faire lever les barrages. Il dispose déjà de ces pouvoirs. Aucun gouvernement, depuis Pierre Elliott Trudeau, n'a eu à les invoquer. Nous avons connu le 11 septembre, la crise d'Oka et le G20 à Toronto. Jamais un premier ministre n'est allé aussi loin pour réprimer des opposants politiques.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai aimé que mon collègue prenne le temps d'expliquer qu'il y a des gens qui soutenaient la manifestation, mais qui ne correspondaient aucunement aux descriptions qui en ont été faites.
    Je comprends aussi que lorsqu'on apprend que des factions peut-être plus extrémistes financent ces groupes, il faut faire un examen de conscience.
    Selon mon collègue, est-ce possible que le fait que les personnes qui sont fatiguées de suivre les mesures sanitaires se font décrire d'une façon qui ne leur correspond pas ait fait qu'elles ont finalement décidé d'appuyer la manifestation alors qu'elles n'avaient peut-être pas l'intention de le faire au départ?

[Traduction]

    Monsieur le Président, ce que je constate, c'est que ce n'est pas un enjeu qui divise les gens selon leur allégeance politique. Un peu partout au pays, les gens en ont assez de la situation, du premier ministre, des divisions et de l'animosité. Ils ne comprennent pas pourquoi le premier ministre ne fait pas comme tous les autres gouvernements provinciaux et d'autres dans le monde. Dans le monde, nos alliés ont levé les restrictions ou envisagent de le faire, et ils ont informé leurs citoyens de l'échéancier qu'ils comptent suivre. C'est ce qu'ont fait les gouvernements provinciaux. Pourquoi le premier ministre n'en fait-il pas de même? Les Canadiens méritent une réponse.

  (2150)  

    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les remarques du député de Grande Prairie. J'aurais aimé retenir le nom complet de sa circonscription. Je suis persuadé que je l'apprendrai avec le temps.
    Je suis quelque peu fasciné par le temps que le Parti conservateur consacre à parler du NPD. J'ai entendu des députés évoquer en termes élogieux l'héritage laissé par Jack Layton et Tommy Douglas, se remémorant le vote sur la Loi sur les mesures de guerre en 1970, dans le cadre duquel le Parti conservateur a appuyé l'utilisation de cette loi, qui est beaucoup plus draconienne que celle dont nous sommes saisis aujourd'hui.
    Je me demande si mon collègue peut nous présenter ses réflexions sur ce vote. Voterait-il de la même manière maintenant? Que faut-il penser de son vote prochain sur la motion dont nous sommes saisis?
    Monsieur le Président, je peux assurer au député que je n'avais pas l'âge de siéger à la Chambre à cette époque. Toutefois, plus sérieusement, la raison pour laquelle les députés exhortent le NPD à voter d'une certaine manière, c'est qu'il décidera si le premier ministre continuera de détenir ces pouvoirs ou si, lundi, il devra répondre de ses actes devant les tribunaux et en vertu des dispositions et des mesures de protection auxquelles nous tenons tous et dans lesquelles le NPD, du moins sous Tommy Douglas, croyait. J'encourage le NPD à réfléchir à l'héritage que son parti veut laisser lorsque les gens repenseront aux événements que nous sommes en train de vivre dans 30 ans.
    Monsieur le Président, la pandémie suscite de la frustration au sein de la population. Les résidants d'Edmonton Griesbach ainsi que tous les autres Canadiens, y compris chacun d'entre nous dans cette enceinte, subissent les répercussions de cette maladie mortelle et unique en son genre, que ce soit en raison de la perte d'être chers, ce qui est mon cas, ou des mesures sanitaires restrictives mises en œuvre sur la recommandation de professionnels de la santé. Je sais à quel point cette période de profondes divisions peut être difficile et franchement éprouvante.
    Au début de tous ces bouleversements, les Canadiens ont montré au reste du monde le sens de la solidarité. Nous nous sommes mobilisés pour prendre soin les uns des autres et assurer notre sécurité. Les voisins s'entraidaient, les amis livraient des colis de réconfort, et les enseignants et organisateurs communautaires se surpassaient pour assurer l'apprentissage et la sécurité des enfants.
    Durant cette pandémie, nous avons beaucoup souffert. Nous sommes nombreux à avoir perdu des êtres chers. Beaucoup de gens ont perdu du temps précieux en compagnie de proches, mais nous allons passer au travers. Je tiens à remercier chaque Canadien pour sa résilience soutenue. C'est l'essence même du Canada. Voilà l'histoire que nous devons transmettre, car c'est la vérité. Ne renonçons pas aux sacrifices de la multitude au profit d'une infime minorité.
    Le Canada n'est pas parfait. En tant qu'Autochtone, je le sais très bien. Cependant, le Canada est un endroit où les forces du bien peuvent prospérer, tant que nous continuons à considérer la liberté des autres comme la liberté de soi-même, que nous n'utilisons pas notre liberté pour mettre la vie de nos voisins en danger et que nous ne l'utilisons certainement pas pour détruire nos institutions démocratiques par la force. La liberté des autres s'arrête au bout de mon nez.
    Aujourd'hui et au cours des prochains jours, les conservateurs nous parleront du besoin d'écouter, de sacrifices et de difficultés, mais je tiens à les informer directement de certains habitants de ma circonscription, Edmonton Griesbach, qui ont fait de vrais sacrifices. Ce ne sont pas les gens qui ont eu l'occasion de jouer dans des châteaux gonflables. Ce ne sont pas les gens qui ont eu l'occasion de s'asseoir dans un bain à remous pendant deux semaines. Ce ne sont pas les gens qui ont passé les trois dernières semaines dehors sur la rue Wellington. Ce ne sont pas ceux qui souhaitent utiliser la force pour apporter des changements de politique. Ce ne sont pas ceux qui cherchent à intimider et à blesser les autres.
    En fait, il s'agit des gens qui portent un masque tous les jours pour éviter que leur voisin immunosupprimé ne meure. Il s'agit du personnel infirmier, des médecins et du personnel médical de ma circonscription, qui ont enduré et qui endurent toujours le pire de cette urgence médicale. Il s'agit des travailleurs essentiels, y compris la police en ce moment, qui se présentent au travail jour après jour pour maintenir les services et garder les Canadiens en vie. Il s'agit des parents obligés de rester chez eux qui ont eu du mal non seulement à accomplir leur travail, mais aussi à enseigner à leurs enfants lorsque ceux-ci ne pouvaient pas aller à l'école. Il s'agit des gens qui ont dû choisir entre payer leur loyer ou s'acheter de la nourriture parce que le gouvernement libéral ne s'est pas attaqué aux dépenses liées à l'épicerie, au logement et aux factures ni au taux de chômage.
    Chers collègues, voilà pourquoi nous sommes dans cette situation. C'est parce que le gouvernement libéral n'a pas aidé les gens en cette période sans précédent et incertaine. Pendant que les conservateurs et les libéraux se querellent et que le Bloc reste les bras croisés et qu'il protège ses objectifs provinciaux étroits au détriment des Canadiens et des Québécois, les néo-démocrates, eux, sont obligés d'agir de façon responsable en se chargeant de régler la crise à l'extérieur à cause de la lenteur du gouvernement et de tenir ce terne et...

  (2155)  

    Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois que le député voulait dire qu'il va partager son temps de parole avec son collègue de Skeena—Bulkley Valley.
    Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec le député de Skeena—Bulkley Valley.
    Le député d'Edmonton Griesbach a la parole.
    Madame la Présidente, le gouvernement aurait pu éviter tous ces événements s'il avait aidé les Canadiens à traverser cette période difficile. Le gouvernement a plutôt choisi l'inaction et la partisanerie. En ne passant pas à l'action plus rapidement, le gouvernement a laissé le champ libre à des individus qui souhaitaient nuire à l'économie canadienne et à notre réputation à l'échelle internationale. Tout cela est le résultat des décisions du gouvernement. De leur côté, les conservateurs ont enhardi les occupants, se rendant auprès de certains d'entre eux qui brandissaient des symboles nazis et des drapeaux confédérés. La situation dans laquelle nous nous trouvons n'a donc rien d'étonnant.
    Pat King, l'un des leaders, s'est d'abord présenté comme l'organisateur du convoi albertain nommé Canada Unity. Toutefois, cet individu s'est fait connaître au fil des ans en raison de ses commentaires sur la suprématie blanche. Sur des vidéos qui circulent, on l'entend dire que les Blancs ont les lignées les plus puissantes. De plus, en décembre dernier, un mois à peine avant les manifestations, il a dit ceci à propos des mesures sanitaires contre la COVID‑19: « Le seul moyen d'y mettre fin est de sortir les armes. » Même si je condamne toute incitation à la haine, comme les propos de M. King — avec qui je suis totalement en désaccord —, je respecte le droit de tous les citoyens de se regrouper pour manifester pacifiquement. Cependant, les événements dont nous avons été témoins dans cette ville et ailleurs au pays ne sont certainement pas pacifiques.
    J'ai moi-même participé à beaucoup de manifestations au cours des dix dernières années, et je suis un ardent défenseur des territoires autochtones. Je suis un grand partisan des rassemblements publics et de la solidarité communautaire, qui ont un rôle absolument essentiel à jouer pour renforcer la démocratie, la reddition de comptes et la diversité d'opinions au Canada.
    Cela dit, il est clair que la situation n'aurait jamais dû en arriver là, particulièrement dans ma province, l'Alberta, au pont Ambassador à Windsor, et à Ottawa. Diverses forces hostiles se sont combinées pour créer la crise actuelle. Parmi ces forces figure le manque d'un réel leadership dans la lutte contre la désinformation au Canada. La haine, le racisme et le financement du terrorisme sont des réalités indéniables contre lesquelles des groupes de lutte contre le racisme nous mettent en garde depuis plusieurs années.
     Lors de l'attaque du Capitole, nous avons vu à quel point la démocratie était fragile aux États-Unis et nous avons tous pensé qu'une chose pareille ne pourrait jamais arriver au Canada. Nous y voici pourtant: trois semaines après le début de la crise actuelle, nous espérons pouvoir enfin rétablir l'ordre public, comme cela aurait dû être fait il y a longtemps. Nous savions ce qui s'en venait.
    Je suis certain que les gens qui, comme moi, ont déjà participé à des rassemblements pacifiques ont remarqué une immense différence dans la façon dont les policiers traitent les défenseurs des territoires autochtones et les organisations comme celles que nous voyons actuellement. La police n'a jamais eu besoin de la Loi sur les mesures d'urgence pour déloger, souvent violemment, des défenseurs des territoires autochtones. Ce genre de précédent existe malheureusement dans notre pays. Je veux dire que, au-delà de Loi sur les mesures d'urgence, les peuples autochtones subissent la violence de l'État depuis la création du Canada et de ses lois. C'est un enjeu qu'il faudra régler. Je suis heureux de constater que, d'après ce que nous avons vu hier et aujourd'hui, les policiers sont bel et bien capables de faire respecter l'ordre public sans utiliser de balles, de gaz lacrymogène, de scies mécaniques ni de haches. Je sais que beaucoup d'autres personnes le remarquent aussi, je le signale aux policiers.
    Depuis trois semaines, les corps de police municipaux et locaux sont incapables de faire appliquer les règlements et les ordonnances les plus simples dans le but de protéger l'économie, la population et les corridors de transport. Encore la semaine dernière, certains participants au barrage de Coutts, dans le Sud de l'Alberta, ont été inculpés de complot dans le but de tuer des agents de la GRC après la découverte d'une cache d'armes. Les choses n'auraient jamais dû en arriver là. La violence armée et l'intimidation sont incompatibles avec la liberté démocratique, et rien ne garantit que ce genre de scénario ne se reproduira pas ailleurs au pays. De nombreuses personnes noires, autochtones ou de couleur craignent pour leur sécurité. Elles se sentent intimidées.
    J'ai discuté avec divers professionnels de la santé de ma circonscription. Infirmiers, médecins, préposés: eux aussi craignent pour leur sécurité. En raison des manifestations de haine visant les travailleurs de la santé dont nous sommes témoins depuis quelques semaines, et notamment de la hausse du nombre d'agressions, les hôpitaux ont demandé à leurs employés d'éviter les vêtements permettant de les identifier. Nous sommes au Canada les amis. En 2022. Les vraies démocraties libres ne laissent pas l'intimidation ni la violence prendre le dessus. Ce n'est pas le Canada que je connais. Il n'est pas question de liberté, mais bien de haine.
    Sans entrer dans les nuances entre les droits civils garantis par la Charte canadienne et les droits des nations autochtones souveraines, je terminerai en rappelant que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence n'annule en rien le droit qu'ont les peuples autochtones de faire appliquer leurs lois, d'occuper leurs terres et d'y avoir accès.

  (2200)  

    Les motifs que je viens d'exposer poussent mes collègues néo-démocrates et moi-même à soutenir les mesures à portée très limitée prévues par la Loi sur les mesures d'urgence. Ces mesures comprennent principalement la coordination des forces de l'ordre locales, comme l'a souligné le chef de police par intérim d'Ottawa, et le pouvoir d'enquêter sur les sources de financement canadiennes et étrangères qui soutiennent cette occupation motivée par la haine. Tous les membres de mon caucus et moi-même croient aux limites raisonnables, ce qui exclut tout recours aux Forces armées canadiennes et implique le respect et le maintien de la Charte canadienne des droits et libertés.
    C'est avec une réticence extrême que nous le faisons, pour l'amélioration de notre sécurité, pour notre pays et pour la survie de notre démocratie. Nous nous montrerons indéfectibles dans la surveillance de ces pouvoirs et, en tout temps, nous n'hésiterons pas à révoquer ou à cesser de soutenir des pouvoirs qui empiéteraient sur nos droits civils et sur notre démocratie. Les moyens utilisés ne doivent jamais devenir le problème. Kinana'skomitina'wa'w.
    Madame la Présidente, je souhaite la bienvenue à la Chambre au député d'Edmonton Griesbach. J'admets éprouver de graves préoccupations quand des députés de l'opposition officielle minimisent les préoccupations d'autres parlementaires qui ne sont pas du même groupe démographique ni les craintes que ces personnes pourraient avoir.
    J'aimerais poser une question au député, en sa qualité de défenseur des Autochtones et en tant qu'Autochtone lui-même. Quand il voit des gens qui se font arrêter après avoir agressé des policiers, après avoir lancé un vélo contre un cheval policier ou après avoir tenté de soutirer son arme à un policier, peut-il imaginer comment ces manifestants auraient été traités s'ils avaient été des Noirs, des Autochtones ou des gens de couleur? Pourrait-il préciser en quoi l'intervention aurait été différente?
    Je suis convaincu qu'elle aurait été différente. Nous devons aller de l'avant pour repenser véritablement notre façon de maintenir l'ordre, en dépit du travail remarquable que les responsables de l'application de la loi cherchent à faire au pays à l'heure actuelle.
    Madame la Présidente, je tiens à exprimer les meilleurs vœux et l'appui de la part des habitants d'Edmonton Griesbach aux personnes de la communauté du député, pour ce qu'elles ont enduré. D'après ce que les gens de ma circonscription me disent, je sais à quel point ont été pénibles les interruptions de services, les problèmes dans les hôpitaux, le harcèlement et les inquiétudes au sujet de la sécurité et du bien-être des gens de la collectivité.
    Nous faisons face à une situation très grave. J'espère que les députés se rendent compte du sérieux de la situation, en particulier pour les Noirs, les Autochtones et les personnes de couleur. Ce dont nous sommes témoins en ce moment est très différent de la manière dont nous interagissons avec la police et nous comprenons que c'est différent. Pour avoir été sur le terrain, je peux affirmer que c'est réellement différent. Je crois qu'il y a encore fort à faire et, selon moi, on devrait obliger la police à rendre davantage de comptes à cet égard.

  (2205)  

    Madame la Présidente, selon la loi dont nous débattons, la Loi sur les mesures d'urgence, les institutions financières doivent cesser de traiter avec une personne désignée. Une personne désignée est définie comme toute personne associée à une manifestation.
    Par le passé, avez-vous déjà été une personne désignée dans une manifestation? Avez-vous déjà organisé une manifestation? Avez-vous déjà assisté à une manifestation? Avez-vous déjà fait un don ou envoyé un gazouillis pour exprimer votre appui? En vertu de cette loi, est-ce que votre institution financière cesserait de traiter avec vous?
    Comme je ne crois pas que la question du député m'était destinée, je lui demanderais de ne pas utiliser le pronom « vous ». Cela réglerait le problème lorsqu'il pose des questions.
    Le député d'Edmonton Griesbach a la parole.
    Madame la Présidente, de toute ma vie, je n'ai jamais été membre d'un groupe fomentant un coup d'État, participé aux activités d'un tel groupe, ni prôné le renversement du gouvernement. Je n'ai jamais rien dit de tel. Je n'ai jamais voulu qu'on renverse les institutions démocratiques du Canada par la violence jusqu'à ce qu'elles s'effondrent. C'est totalement différent de ce qu'on peut voir ici.
    Ce qu'on peut voir ici, c'est une volonté très claire et déclarée de renverser un gouvernement démocratiquement élu, ainsi que d'employer la force et les moyens nécessaires pour y parvenir. Ils en ont les moyens grâce à un financement étranger à hauteur de millions de dollars, et ils en ont les moyens grâce à des armes. Nous l'avons vu. Voilà deux aspects particuliers auxquels je ne me serais jamais associé.

[Français]

    Madame la Présidente, dans son discours, mon collègue a laissé entendre que notre formation politique avait des intérêts limités. Je l'invite à modérer ses propos et à regarder le travail que le Bloc québécois fait à la Chambre.
    S'il se demande quelle est l'utilité de notre présence à la Chambre et s'il veut savoir ce que nous faisons, je vais lui apprendre que nous défendons notre nation parce que, si nous ne sommes pas là pour le faire, peu de gens le feront. Depuis que nous sommes ici, nous avons démontré que nous travaillions de façon constructive dans l'intérêt collectif, malgré tout.
    Mon collègue a parlé, pendant tout son discours, d'un rassemblement qui est allé trop loin. Pourtant, sa formation politique, qui commence de plus en plus à ressembler à l'aile gauche du Parti libéral, a voté contre la motion de la semaine dernière qui visait à établir un calendrier progressif de retrait des mesures sanitaires.
    Peut‑il m'expliquer cela?

[Traduction]

    Madame la Présidente, je vais tenter d'être bref. Il y avait beaucoup de contenu dans cette question.
    Je participe depuis longtemps à la protection de la nation métisse. À ce titre, je n'ai jamais, au grand jamais, sous le couvert d'une défense nationaliste, fait valoir le droit de renverser un gouvernement démocratiquement élu. C'est la première et la plus importante des choses.
    La deuxième partie de la question du député portait sur ce que les députés devraient faire maintenant. Nous devons prendre cette question très au sérieux, et nous devrions songer à l'état de notre pays dans son ensemble.
    Madame la Présidente, avant de faire mon discours, je tiens d'abord à dire que mes pensées accompagnent les résidants de Bulkley Valley qui ont été ébranlés par les récents actes de violence et de vandalisme commis à un chantier sur le chemin de service forestier Marten. Mes pensées accompagnent plus particulièrement les travailleurs de ce chantier qui ont été traumatisés et l'agent qui a été blessé. Je dénonce ces gestes, et je me joins aux gens de ma circonscription pour exiger la tenue d'une enquête approfondie pour que les coupables soient tenus responsables de leurs actes.
    Alors que le Canada est aux prises avec des difficultés sans précédent, je souhaite intervenir dans le débat sur la motion dont nous sommes saisis, qui vise à confirmer le recours à la Loi sur les mesures d'urgence pour rétablir l'ordre social. Je suis resté à Ottawa dans les trois dernières semaines. Je suis arrivé un jour après le convoi. Pendant la plus grande partie des 22 derniers jours, j'ai traversé le centre-ville d'Ottawa à pied deux fois par jour, et j'ai observé attentivement le convoi, les messages sur les pancartes, les gens, les résidants de la ville, ainsi que les personnes qui vivent et travaillent au centre-ville, et qui ont été profondément affectées par cette occupation illégale.
    Je crois que le droit de manifester est un aspect important de notre démocratie. Il donne une voix à ceux qui n’en ont pas et permet aux citoyens de communiquer à leur gouvernement la force de leurs sentiments, de leurs opinions et de leurs croyances. J’ai participé à des dizaines de manifestations au cours de ma vie, et j’ai un respect tout spécial pour les rassemblements pacifiques et non violents de désobéissance civile. Ces derniers ont joué un rôle important pour le progrès social de notre société à tant de reprises dans l’histoire, mais cette fois‑ci, c'est autre chose. Ce que nous observons depuis trois semaines n’est rien de moins que l’occupation d’une capitale d’un pays du G7. C’est un événement qui me trouble profondément pour plusieurs raisons.
    Premièrement, il y a l’objectif déclaré des dirigeants de cette occupation qui était, comme l’a mentionné mon ami d’Edmonton Griesbach, de nuire à notre démocratie et de renverser un gouvernement élu démocratiquement.
    Deuxièmement, il y a l’effet de cette occupation sur la population d’Ottawa. Des milliers de personnes innocentes, qui avaient déjà des difficultés en raison de la pandémie, sont incapables d’aller travailler ou de vaquer paisiblement et sécuritairement à leurs activités quotidiennes comme c'est pourtant leur droit. Je pense aussi que des milliers de personnes partout au Canada ont été perturbées de la même façon par le barrage de ponts et de corridors commerciaux.
    Le troisième élément qui me trouble est le financement provenant du sud de la frontière, de personnes qui jugent bon de déstabiliser notre pays dans la même veine que la tentative d'insurrection au Capitole, aux États-Unis, le 6 janvier 2021. Enfin, le quatrième élément est la présence de l'extrémisme, comme en témoignent les leaders de l'occupation, leurs antécédents, leurs discours et leurs associations.
    Je sais que pour plusieurs citoyens du Nord-Est de la Colombie-Britannique, l'occupation et le convoi ont servi d'exutoire à leurs frustrations et à leur colère. Je leur demande simplement de regarder les personnes qui sont derrière cet événement. J'ai envisagé de nommer les leaders de l'occupation et d'exposer certains de leurs points de vue troublants ici ce soir, comme l'ont fait mon collègue et d'autres précédemment dans ce débat, mais je ne le ferai pas, car je refuse de leur donner la notoriété qu'ils semblent désirer.
    La défaillance de la police est au cœur de cette crise. Si les forces de l'ordre avaient d'emblée fait leur travail et pris les menaces au sérieux, nous n'en serions pas là ce soir. Alors qu'il se formait un véritable siège, bien des habitants de ma circonscription autochtones et non autochtones m'ont fait part de leur stupéfaction devant la méthode douce du Service de police d'Ottawa en comparaison au traitement réservé aux manifestants autochtones dans le Nord-Ouest de la Colombie-Britannique et ailleurs au pays. Beaucoup de députés dans cette enceinte ont souligné cette dichotomie, et c'est une question sur laquelle nous devons nous pencher. C'est parce que l'on n’a pas appliqué les lois provinciales et les règlements municipaux pour préserver l'ordre social que nous devons maintenant envisager la mesure exceptionnelle qui nous occupe.
    Je demanderais simplement aux personnes qui s'opposent à cette motion de nous dire quelle est l'alternative. Elles proposent que le premier ministre négocie avec ceux qui ont occupé la ville, mais avec qui devrait-il négocier exactement? Sûrement pas avec les leaders de ce siège.
    D'autres avancent que les forces de l'ordre disposent déjà de pouvoirs et de dispositions législatives, mais à quoi servent les dispositions du Code criminel si les policiers sont incapables de les faire respecter ou refusent de le faire? En fait, les services policiers ont demandé de l'aide. Ils ont clairement affirmé ne pas être en mesure de gérer la situation avec les pouvoirs, les outils et les ressources à leur disposition.

  (2210)  

    Cette occupation dure depuis trois semaines. Une telle situation n’oblige-t-elle pas le gouvernement à envisager de renforcer les capacités de la police? Pour être honnête, je trouve les objections de certains députés un peu naïves, en particulier lorsqu’elles proviennent des partis qui défendent traditionnellement la loi et l’ordre. Aujourd’hui, il est temps de protéger la population, et nous devons intervenir.
    Cela ne veut pas dire que je suis entièrement à l’aise avec l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. J’entends ceux qui nous préviennent du dangereux précédent que cela crée, et qui nous disent que la loi pourrait être utilisée à moins bon escient à l’avenir, notamment contre des manifestations légitimes. Il nous incombe de veiller à ce que cela ne se produise pas. Nous, les néo-démocrates, avons dit clairement que nous ne tolérerions pas que ces pouvoirs additionnels soient utilisés à mauvais escient par le gouvernement, et que nous sommes prêts à amorcer un processus de révocation si tel est le cas.
    Si nous prenons le contexte plus global de la pandémie qui dure depuis deux ans, je constate un ras-le-bol au sein d'une grande partie de la population. Les sentiments vont de la colère au désespoir. Comment pourrait-il en être autrement? Nous ne devons pas nous mettre à penser que ces circonstances ressemblent de près ou de loin à la normalité. Une situation qui exige que soient imposées des restrictions aussi vastes et draconiennes n'est pas normale.
    Au cours des trois dernières semaines, j'ai parlé à de nombreux habitants de ma circonscription, qui ont une opinion tranchée sur la gestion de la pandémie par le gouvernement et sur ce qui se passe ici. Je veux m'adresser directement à eux. Je comprends leur point de vue. Je comprends leur frustration et leur colère à l'endroit d'un gouvernement et d'un premier ministre qui, selon eux, est déconnecté des difficultés qu'ils ont à surmonter. Ils estiment que le gouvernement n'a pas toujours été transparent et qu'il n'a pas toujours réussi à expliquer les données probantes à l'origine de ses mesures de lutte contre la pandémie. Ils déplorent que certaines mesures aient causé à certaines petites entreprises, particulièrement celles du secteur touristique, des pertes qui n'ont pas pu être compensées en totalité par les programmes d'aide. Ils sont aussi préoccupés par les effets sur la santé mentale de la pandémie.
    Voici ce que je veux dire au petit nombre de gens de ma circonscription qui ont décidé de ne pas se faire vacciner et qui risquent de perdre leur gagne-pain dans quelques mois: je n'approuve pas leur choix, mais je reconnais la situation difficile dans laquelle ils se trouvent. Le gagne-pain d'une personne est sacré, et les gouvernements ne devraient le compromettre que dans les circonstances les plus graves. Je continue d'exercer des pressions auprès du gouvernement pour qu'il donne des éclaircissements sur la nécessité de maintenir de telles mesures à cette étape de la pandémie.
    Je suis à leur écoute.
    Je vais conclure en exprimant ma gratitude. Je remercie les milliers de personnes dans le Nord‑Ouest de la Colombie‑Britannique qui ont fait de petits et grands sacrifices pour protéger la santé et le bien-être de leurs voisins, de leurs proches, des anciens et des aînés de la région. Je remercie aussi les travailleurs de la santé qui, depuis deux ans, vont travailler tous les jours malgré un système de santé en difficulté et qui se sont révélés de véritables héros. Je suis reconnaissant de vivre dans un pays où un tel débat est possible, où des mécanismes de contrôle existent et où la démocratie est suffisamment forte pour résister aux menaces qui pèsent sur le tissu social de la nation.
    Je rejette l'idée selon laquelle nous sommes plus divisés que jamais. C'est la solidarité sociale et l'entraide dont ont fait preuve les Canadiens qui nous ont permis de déplorer beaucoup moins de morts que la plupart des autres pays, toute proportion gardée. Cette volonté de prendre soin les uns des autres est selon moi le fondement de notre liberté en tant que peuple.
    Lorsque j'ai besoin de force pour prendre une décision difficile à la Chambre, je me tourne vers mon coin de pays. Je me tourne vers Skeena et les endroits qui inspirent, énergisent et motivent tant de gens. Je pense au fleuve Skeena, qui coule librement vers l'océan Pacifique. Je pense aux gens. Ce sont de bonnes personnes, fortes et bienveillantes. C'est un grand honneur de prendre la parole en leur nom.

  (2215)  

[Français]

    Madame la Présidente, premièrement, je tiens à remercier mon collègue de son discours qui explique très bien l'équilibre entre les libertés et l'ordre social. Cependant, il reproche au gouvernement de ne pas avoir agi suffisamment rapidement.
    Mon collègue peut‑il me dire ce qu'il dirait alors à ceux qui croient que les actions des derniers jours sont une répression et un déni du droit à manifester?

[Traduction]

     Madame la Présidente, je reproche à la police de ne pas avoir réagi suffisamment rapidement à l'occupation, pas au gouvernement. Je crois que les services de police des autres villes ont appris des erreurs de la police d'Ottawa, et ils ont compris qu'agir plus rapidement et prendre plus au sérieux l'information provenant des services de renseignement de sécurité auraient permis d'éviter bon nombre des perturbations et des troubles des trois dernières semaines.
    Madame la Présidente, je me demande si le député pourrait expliquer pourquoi, selon lui, le gouvernement a tant tardé à agir. Il savait que des gens potentiellement dangereux restaient à un hôtel ici, à Ottawa. Pourquoi les députés ministériels ne les ont‑ils pas invités à les rencontrer pour discuter avec eux et les questionner?
    Pourquoi le député croit‑il que le gouvernement s'est contenté d'ignorer la situation pendant trois semaines?

  (2220)  

    Madame la Présidente, c'est évidemment les autorités policières locales qui sont responsables de l'application des lois municipales et provinciales relatives aux manifestations illégales, aux manifestations nuisant à la circulation et bloquant les routes principales et à d'autres enjeux similaires.
    Même si je crois que le premier ministre et tous les députés, d'ailleurs, se doivent d'écouter des gens aux points de vue très divers et de tenir compte de ce qu'ils ont à dire, je crois qu'il incombait à la police d'intervenir très rapidement pour faire respecter l'ordre social dans la ville et partout au pays.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai beaucoup aimé le discours de mon collègue.
    Je comprends qu'il y a de l'ambigüité et que c'est une situation qui n'est pas facile. Nous avons un choix à faire en ce moment. C'est une loi d'urgence qui a été appliquée trois fois dans toute l'histoire du pays. Nous ne sommes pas en train de voter sur n'importe quel projet de loi. La motion dont nous débattons est importante. Il faut peser le pour et le contre.
    Cependant, depuis que la Loi a été invoquée, il y a une semaine, la situation sur le terrain a vraiment beaucoup changé. J'ai entendu un de ses collègues, le député de Rosemont—La Petite-Patrie, dire jeudi sur les ondes d'une chaîne de télévision au Québec que si la situation évoluait dans un sens où il n'y aurait peut‑être plus de manifestants à Ottawa, le NPD pourrait peut‑être reconsidérer sa décision d'appuyer le gouvernement sur cette loi.
    Mon collègue pense‑t‑il que la situation a suffisamment évolué pour que le NPD puisse changer de position?

[Traduction]

    Madame la Présidente, je ne sais pas si c'est une erreur de traduction, mais je crois avoir compris que le député a dit que la Loi sur les mesures d'urgence n'a été invoquée que quelques fois au cours de l'histoire. Pour être exact, c'est la première fois qu'elle est invoquée. La Loi sur les mesures de guerre est une loi entièrement distincte. Je me trompe peut-être, mais c'est ce que j'ai compris.
    Pour répondre à sa question sur la façon dont ces pouvoirs sont exercés, je tiens à lui assurer que, si nous appuyons la motion, nous le ferons à contrecœur. Je ne désire aucunement voir ces pouvoirs supplémentaires utilisés un jour de plus qu'il ne le faut. Nous surveillerons la situation étroitement et exigerons des comptes du gouvernement. Nous révoquerons ces pouvoirs dès qu'ils ne seront plus nécessaires. Je compte sur la collaboration du député dans une telle éventualité.

[Français]

    Madame la Présidente, d'emblée, je vous annonce que je vais partager mon temps de parole avec ma très distinguée et appréciée collègue de Beauport—Limoilou.
    La situation est grave. Les gens sont inquiets. Ils nous contactent. J'ai toutes sortes de messages. Les messages sont très majoritairement pour nous demander de ne pas appuyer cette loi extraordinaire. On nous dit, entre autres, de ne pas appuyer pas cette loi inacceptable.
    D'autres messages, moins nombreux, mais qui existent quand même, demandent comment on peut appuyer ces manifestants‑là. J'ai d'autres messages qui me demandent comment je peux abandonner des gens qui se battent pour leur liberté. Les messages viennent de toutes les directions, mais ces gens ont tous un point en commun: ils sont tous inquiets et mécontents de la situation.
    Demandons‑nous pourquoi. Pourquoi en sommes‑nous arrivés là, à savoir dans un État où la société est extrêmement divisée? Je suis convaincu que tous mes collègues de la Chambre reçoivent toutes sortes de messages. Nous essayons de leur répondre le mieux possible. Nous expliquons nos positions. Généralement, cela va.
    Pourquoi sommes-nous là? C'est parce que nous n'avons pas de leader. Le gouvernement sème la division. Je vais le dire comme cela: le gouvernement a osé utiliser la détresse collective d'un certain groupe de façon politique, et qui a laissé ces gens s'installer.
    On aurait pu gérer la situation différemment. C'est toujours plus facile à dire après, bien sûr, mais on sait que cela se peut. On l'a vu ailleurs.
    Qu'est‑ce que cela a pris? Cela a pris un leader. Quelle est la différence entre Québec et Ottawa? Plus tôt, quelqu'un disait que d'autres villes ont pu apprendre de l'expérience d'Ottawa. Au‑delà de cela, Québec a bénéficié d'un maire et d'un premier ministre qui se sont parlé, qui ont créé une cellule de crise, qui ont concerté les forces policières et qui ont reconnu le droit de manifester des gens qui arrivaient. Ce sont tous des éléments qui ont été totalement absents à Ottawa. Assez ironiquement, les gens les plus méprisés sont les gens qui ont manifesté le plus longtemps. Je ne suis pas en train de dire qu'ils ont raison ou tort. Je m'exprime sur le fond des choses.
    Comment peut‑on, lorsqu'on est premier ministre, chef d'État, jeter de l'huile sur le feu dès les premiers jours et insulter sa population? Peut‑être que le message de cette population ne faisait pas l'affaire du premier ministre, mais ces gens font partie de sa population.
    Un chef d'État doit avoir la hauteur nécessaire pour calmer le jeu. Je ne dis pas de tout céder non plus, mais il fallait, premièrement, ne pas insulter les gens; deuxièmement, pourquoi ne pas rencontrer au moins les représentants officiels des camionneurs? Cela a été mentionné plusieurs fois dans les débats. Ils sont, eux aussi, vaccinés à 90 %. Pour la plupart, ils n'étaient pas d'accord avec la manifestation qui avait lieu. Le premier ministre n'a rencontré personne.
    Nous avons un premier ministre qui se cache et qui attend que cela passe, chaque fois qu'il y a une crise. En temps de crise, les 338 élus de la Chambre des communes ont un devoir collectif de s'unir et de travailler pour le bien commun. Pour faire cela, il faut qu'il y ait quelque chose qui se passe. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui ait le goût de nous parler. Il ne faut pas que nous soyons constamment en présence de gens qui ne cherchent qu'à marquer des points politiques.
    Cela n'a pas de bon sens. Nous avons tous vu les images d'hier et d'aujourd'hui. Ce n'est pas un travail facile, alors je salue encore les forces policières. C'est dommage qu'on en soit rendu là. Tout le monde trouve cela triste.
    Comment a‑t‑on pu laisser occuper une ville au complet pendant 23 jours? Pensons aux citoyens et aux petits commerçants d'Ottawa. Nous les avons abandonnés.
    Être premier ministre, ce n'est pas une médaille à accrocher au mur. Ce n'est pas un titre glorieux et un trophée de plus sur la tablette.

  (2225)  

    Être premier ministre, c'est très lourd de conséquences; cela vient avec une charge importante. Encore faut-il s'en montrer digne. J'ai le regret de dire que nous ne l'avons pas vu pendant trois semaines. Que s'est-il passé? Il s'est caché en attendant que cela passe. Ce n'est pas la première fois que cela arrive.
    D'ailleurs, cela a été évoqué plus tôt aujourd'hui. Je rappelle les blocages en appui à la nation Wet'suwet'en, qui ont eu lieu il n'y a pas si longtemps. Personne n'en parle, puisque cela s'est passé avant la COVID‑19; c'est comme s'il n'y avait rien avant la COVID‑19.
    Évidemment, les deux types de manifestations n'ont rien en commun. Je ne suis pas en train de faire un amalgame ou une comparaison. Or je me souviens que les barrages ont commencé à un endroit, mais qu'il y a eu une inaction totale de la part du gouvernement. Il ne se passait rien. Notre premier ministre était en Afrique pour essayer de gagner des votes en vue que le Canada obtienne un siège à l'ONU; il ne l'a jamais obtenu. Il ne s'occupait pas de ce qui se passait chez lui. Il est revenu 10 jours plus tard. La crise s'était amplifiée, et elle a été beaucoup plus difficile à gérer.
    Nous proposions des solutions. Nous avons entre autres proposé le retrait des forces policières, de la GRC. Nous avons aussi proposé d'entamer des négociations. Au début, on ne voulait rien savoir. Qu'a-t-on fini par faire pour résoudre la crise? On a écouté les recommandations du Bloc québécois.
    C'est avec une grande déception que je dis ce qui suit: cette fois-ci, nous n'avons pas été écoutés du tout. Dans les premiers jours de la crise, nous avons demandé que les chefs de partis se rencontrent. Nous avons aussi demandé la création d'une cellule de crise et d'un comité. Il faut qu'il y ait une discussion. Il faut qu'il se passe quelque chose. Il faut qu'on parle à nos citoyens, qui sont désespérés et qui n'en peuvent plus des restrictions mises en place depuis deux ans. Voilà la vraie situation. Voilà ce qui s'est passé.
    J'ai une impression, et ce n'est qu'une impression; je n'affirme rien. En regardant cela d'un œil extérieur, je me demande pourquoi ne pas laisser aller une manifestation dans ma capitale devant le Parlement. Ainsi, cela suscitera la grogne et cela provoquera peut-être la division dans certains partis de l'opposition où il y a un peu de tension. Cela a fonctionné, en partie. Après cela, les manifestants vont se tanner et ils vont partir. Si ce n'est pas le cas, on va intervenir et on va avoir l'air d'être forts. Il s'agit d'une erreur de jugement.
    Quelles ont été les répercussions de cette attente? Cela a fait que plus de gens sont venus et se sont installés. De plus, cela a fait que l'on a tout barré. En effet, c'est à ce moment que les barrages au pont Ambassador et aux frontières ont commencé.
    Tout à coup, il y a eu un coup de théâtre. Le premier ministre a reçu un appel du président américain. Je ne sais pas si mes collègues le savent, mais près de 400 millions de dollars de marchandises circulent chaque jour sur le pont Ambassador. Que les citoyens d'Ottawa endurent le bruit des klaxons pendant un mois, ce n'est pas grave. Je ne dis pas qu'on devait laisser bloqué le pont utilisé pour faire du commerce, mais je fais le parallèle entre les deux.
    Le premier ministre a reçu un appel du président américain. Soudainement pris de panique, notre pauvre premier ministre a commencé à dire qu'il fallait que cela cesse. C'est à ce moment-là que les forces policières sont intervenues à ces endroits, sans que l'on utilise la loi exceptionnelle sur les mesures d'urgence. Elle est là, la grande différence. Nous n'avons pas eu besoin de cette loi.
    On aurait pu faire les mêmes interventions dans la ville d'Ottawa. Après avoir enduré cela plus de 20 jours, c'est beaucoup plus difficile à déplacer. On l'a vu dans les derniers jours, c'était prévisible. D'ailleurs, c'est triste. On n'aurait pas dû se rendre là. Les gens ont le droit de manifester, mais encore faut-il que cela soit fait selon les règles. On a le droit de manifester, mais on ne peut pas occuper une ville pendant un mois. Les gens ont le droit de vivre. Cela n'a pas de bon sens.
    Comme on était mal pris, on a trouvé une façon de sauver la face du gouvernement et du premier ministre en faisant un coup d'éclat, en invoquant cette loi. Depuis 1988, c'est la première fois que cela arrive. En effet, cette loi n'a jamais été invoquée. Personnellement, cela me dérange beaucoup qu'on l'ait invoqué cette fois-ci.
    Bien sûr, aujourd'hui, la loi n'est pas la même qu'en 1970. Je ne ferai pas d'amalgames. Cela me dérange beaucoup parce que le précédent est créé. Lorsqu'on sera un peu mal pris sur le plan politique, on va utiliser cette loi. Que se passera-t-il dans cinq ou dix ans, quand un autre gouvernement, peu importe lequel, voudra l'utiliser? Elle est là, la question, et c'est pour cela que nous allons nous prononcer contre cela.

  (2230)  

    Madame la Présidente, mon collègue ne semble pas comprendre que les gouvernements ne dirigent pas les forces policières.
    Mon collègue reconnaît-il que ce que nous avons vécu et ce dont nous avons témoigné font partie d'un phénomène qui dépasse la vaccination obligatoire pour les camionneurs?
    Nous avons déjà rencontré les organisateurs de ce convoi il y a deux ans. Ils sont venus ici avec leurs camions pour manifester contre la taxe sur le carbone.
    Par ailleurs, mon collègue savait-il que la page Facebook de Canada Unity a été créée il y a deux ans?
    Ne croit-il que nous faisons peut-être face à un mouvement qui dépasse l'objectif principal très étroit mentionné pendant la manifestation, à savoir qu'on voulait lever la vaccination obligatoire pour les camionneurs?
    Madame la Présidente, je comprends très bien que ce n'est pas le premier ministre qui gère les forces policières.
    J'aimerais à mon tour poser une question à mon collègue. Comprend-il que ce serait parfois le fun d'avoir un leader, un rassembleur?
    Quand on est à la tête d'un pays, il faut parler aux gens. On dit qu'on leur a parlé il y a deux ans, mais je pense qu'on aurait pu leur parler encore cette fois.
    Mon collègue demande si je suis conscient de l'implication de cette organisation. On sait tout cela, et j'espère que mon discours n'a pas été mal interprété tantôt. La question n'était pas là. Si cela s'est passé, c'est d'abord parce qu'il y a eu du laisser-faire pendant 23 jours.

  (2235)  

    Madame la Présidente, j'aimerais poser une question à mon collègue, mais également faire un commentaire.
    On entend souvent les libéraux dire que les forces policières ne sont pas dirigées par le gouvernement. En fait, l'article 5 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada dit clairement que c'est sous la responsabilité du ministre que le commissaire de la GRC a pleine autorité sur la Gendarmerie et tout ce qui s'y rapporte. Ce sont les mots exacts utilisés dans la Loi.
    Le gouvernement ne peut donc pas dire que les policiers font tout et que lui ne fait rien. En fin de compte, c'est au gouvernement de les diriger et de leur dire quel est le but de l'administration publique de la défense policière.
    J'aimerais que mon collègue du Bloc nous explique comment il se fait que le gouvernement cherche à dire qu'il ne fait rien et que l'application de la loi ne se fait que par magie.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question. Je suis d'accord avec lui.
    Je ferai de nouveau un parallèle avec Québec. Ce n'est pas le premier ministre du Québec qui contrôlait la police de Québec. Il a eu une rencontre avec le maire pour discuter de ce qu'ils feraient et de la manière dont ils organiseraient cela. C'est simplement être à l'avant-garde, essayer de prévoir et, bien sûr, rassembler les gens.
    Ce que mon collègue conservateur a mentionné est également très pertinent. Il y a une impulsion à donner.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je sais que je n'ai pas pu être présent pour l'intégralité du débat, mais il y a une chose que je n'ai toujours pas entendue de la part des députés du Bloc québécois: du souci pour les gens de Gatineau et du reste de l'Outaouais, dont beaucoup travaillent à Ottawa et ont perdu leur emploi parce que des entreprises ont fermé, parce que les services de transport en commun ont été interrompus et parce que les ponts étaient congestionnés. Je trouve quelque peu curieux que les députés du Bloc québécois ne parlent jamais des gens de l'Outaouais ni des inconvénients et des difficultés qu'ils ont subis durant le confinement à Ottawa.

[Français]

    Madame la Présidente, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris. La question n'est pas très claire.
    Les gens du Bloc québécois ne parleraient-ils donc jamais des gens de l'Outaouais?
    Les gens de l'Outaouais ont bien sûr été embêtés par les ponts qui étaient bloqués. Il y a bien sûr des gens qui ont de la famille et des amis du côté d'Ottawa.
    Cependant, c'est le centre-ville d'Ottawa qui était occupé. C'est dans le centre-ville d'Ottawa qu'on entendait les klaxons. C'est pour cette raison que nous en parlons un peu plus. Nous sommes au Parlement d'Ottawa, et c'est ici, devant ce Parlement, que les camions se trouvaient.
    J'espère ne pas être en train de me faire dire qu'on ne se soucie pas du Québec, parce que ce ne serait pas une bonne journée.
    Madame la Présidente, vendredi, j'ai écouté mes collègues pendant neuf heures. Aujourd'hui, je les ai écoutés toute la journée dès 7 heures du matin, et ce, même si je me suis couchée à 3 heures pour écrire ce discours, et même si je serai ici jusqu'à minuit.
    J'ai pu constater à quel point la polarisation que j'observe sur les réseaux sociaux a envahi la Chambre. J'ai eu de la difficulté à écrire ce discours, ce qui n'est pas peu dire, car quiconque m'observe un tant soit peu à la Chambre sait que je suis constamment en train d'écrire.
    Il n'est pas facile d'écrire pour éviter la polarisation lorsque toutes ces émotions sont présentes. Tout le monde est à fleur de peau et j'entends beaucoup de commentaires enflammés à la Chambre actuellement.
    Il n'a pas été facile d'écrire ce discours, car l'application de la Loi sur les mesures d'urgence est un événement historique qui servira de balise à son application à l'avenir. Il est donc primordial de s'assurer que son utilisation ne sera pas banalisée à l'avenir parce qu'on l'aurait banalisée aujourd'hui.
    Le Canada a connu des situations hautement dangereuses, critiques et urgentes. Mes collègues ont presque tous parlé de la crise d'Oka, des barrages ferroviaires de 2020, de la crise de Caledonia, des événements du 11 septembre et de la COVID‑19.
    J'aimerais mettre les choses au clair tout de suite: je n'ai jamais eu de sympathie et je n'en aurai jamais pour les extrémistes, qu'ils soient de gauche ou de droite. Je n'ai jamais eu de sympathie pour les discours haineux et pour les menaces. J'ai été outrée et choquée de voir des drapeaux nazis et des drapeaux confédérés; j'en ai eu mal au cœur de colère. Je ne minimiserai jamais les menaces qu'une personne peut recevoir. J'en ai moi-même reçu après qu'un député de la Chambre a fait une sortie dans les médias afin de désinformer les journalistes à propos des circonstances entourant un vote en comité.
    Tout au long de la journée d'hier, j'ai répondu à des centaines de courriels qui, tous, sans exception, demandaient à ce qu'on n'applique pas la Loi sur les mesures d'urgence. Ces courriels ne provenaient pas seulement de gens de ma circonscription, mais aussi de gens de Calgary, de Vancouver, de Burnaby, de Prince George, de Toronto, de Winnipeg, de Montréal, de Québec, du Nouveau‑Brunswick, de Terre‑Neuve, de la Nouvelle‑Écosse, et même d'Ottawa. Or les habitants d'Ottawa sont les premiers à être touchés par cette situation. Tout ce qu'il me manquait, c'était des courriels de gens de l'Île‑du‑Prince‑Édouard.
    Cette loi leur fait très peur, et ils ont le droit d'être écoutés, d'être entendus et de recevoir des réponses. L'article 3 de la Loi sur les mesures d'urgence précise que le gouvernement doit démontrer qu'il y a une situation dangereuse et urgente et qu'il est impossible d'y faire face avec les lois ordinaires. Or le décret ne démontre pas que les pouvoirs d'intervention actuels ne sont pas suffisants.
    Ailleurs, les forces de l'ordre ont appliqué les outils qu'elles devaient appliquer, les règlements municipaux, le Code de la route et le Code criminel. Voilà ce qui aurait dû être fait ici dès le début. Certains pourraient être tentés de me dire qu'on ne pouvait pas prévoir l'avenir et savoir ce qui allait se passer.
    Certes, Ottawa a servi d'exemple aux autres, sauf qu'Ottawa était au courant de la situation. Plusieurs de mes collègues de la Chambre ont mentionné que des groupes extrémistes sont sur les réseaux sociaux depuis deux ans. Ils ont aussi mentionné que, sur les réseaux sociaux et dans les médias, on parlait d'un convoi de 70 kilomètres de long. On a été averti une semaine avant que ce convoi arrive, et il était donc possible de planifier et d'organiser sa contention pour ne pas que cela dérape comme c'est arrivé. Ce genre d'action est possible grâce à la coordination, au travail d'équipe, à la mise sur pied d'une équipe d'urgence, à la collaboration et à un leadership visionnaire.
    Le premier ministre a aussi expliqué à la Chambre et dans les documents annexés à la motion qu'il craignait que d'autres barrages s'érigent ailleurs au Canada étant donné les amalgames et les effets de mobilisation des réseaux sociaux. Cependant, la Loi indique clairement qu'elle doit être appliquée non pas en fonction d'événements hypothétiques, mais en fonction de la présence de réels dangers.

  (2240)  

    La Loi doit être appliquée lorsque les forces de l'ordre ne sont pas en mesure d'appliquer les règlements et les codes de loi à leur disposition. Actuellement, j'ai l'impression que la Loi est plus un geste positif qu'un geste raisonnable. Un geste raisonnable aurait reconnu que le problème se trouve principalement à Ottawa et pas ailleurs au pays.
    Plusieurs événements ont été mentionnés à la Chambre pour nous convaincre que la Loi sur les mesures d'urgence était nécessaire. Le 17 février, le vol d'une remorque remplie d'armes à Peterborough a été mentionné. Même que, à 13 h 55, le député de Parkdale—High Park a fait un lien entre ce vol et la manifestation à Québec qui a lieu en ce moment. C'était le 17 février. Or, la remorque a été retrouvée le 16 février. C'est un amalgame, cela ne se fait pas, c'est de la désinformation. Cet événement ne peut donc pas appuyer l'application de la Loi.
    Le même jour, le camion-grue qui était stationné devant les bureaux du premier ministre — il ne l'est plus maintenant — était considéré comme une menace. Si c'était une menace, pourquoi n'a-t-il pas été déplacé dès le départ? Le Code criminel est clair. Les alinéas 423(1)a) à 423(1)g) du Code criminel concernent de tels événements, de menace et d'intimidation. Déjà, en vertu du Code criminel et du code la route, il aurait fallu déplacer le véhicule.
    On a parlé des menaces dans des vidéos. J'ai vu ces vidéos et je n'ai pas trouvé cela agréable. Mon collègue en a parlé tout à l'heure: cela fait deux ans qu'on sait que certains groupes Facebook existent. Il est incompréhensible que ces groupes Facebook n'aient pas été fermés, justement par l'application du Code criminel.
    Pour ce qui est de ces vidéos, je compte sept articles du Code criminel qui auraient pu être appliqués pour faire taire ces personnes et les traduire en justice parce que ce qu'elles faisaient était illégal: l'alinéa 261(1)a), le paragraphe 423(1) dont j'ai déjà parlé, le paragraphe 46(2), les paragraphes 59(1) à 59(3), les alinéas 63(1)a) et 63(1)b) et le paragraphe 72(1). Il y en a plein.
    Pour les fonds qui viennent des États-Unis et possiblement, selon les vérifications, de groupes extrémistes suprémacistes, les articles 83.02, 83.03 et 83.04 du Code criminel traitent de ce sujet. L'article 83.11 prévoit que les banques peuvent geler les avoirs. Nous avions tous les outils législatifs nécessaires pour gérer la crise avant qu'elle ne dégénère en 23 jours d'occupation.
    En somme, tout ce qu'il manquait aux forces de l'ordre était de la coordination et la possibilité de mobiliser les remorqueurs. Encore là, le Code criminel encadre cette question. Avec une ordonnance du tribunal ou même du procureur général, les remorqueurs n'auraient pas eu le choix d'être soutenus et d'agir.
    Dans une situation de crise, nous devons tous peser nos mots et nos gestes, que nous soyons député, premier ministre, membre des forces de l'ordre, maire, conseiller municipal ou manifestant. Durant une crise, il faut prendre le temps de trouver l'équilibre entre nos émotions et notre rationnel. Trop de l'un ou trop de l'autre, ce n'est pas bon. L'inaction peut être aussi dommageable que l'action trop brusque ou extrême. D'un côté comme de l'autre, la concertation, la collaboration et la coordination entre les différents corps de police étaient possibles sans l'application de la Loi sur les mesures d'urgence. Il fallait de la planification et du leadership.
    L'arrestation des gens menaçant d'autres personnes était possible sans l'application de la Loi sur les mesures d'urgence. L'arrestation des incendiaires était possible sans l'application de la Loi. Je pourrais continuer comme cela encore longtemps. J'ai encore deux pages remplies d'exemples.
    Les policiers avaient demandé de l'aide les 7 et 11 février. Leadership et concertation, voilà ce dont cette manifestation avait besoin et c'est ce que les corps policiers font maintenant.

  (2245)  

     On n'a pas besoin de créer un précédent.

[Traduction]

    La députée a mentionné un certain nombre de dispositions du Code criminel, et une qui a souvent été soulevée dans le débat d'aujourd'hui, surtout par l'opposition officielle, avec l'appui du Bloc, c'est l'article 129 du Code criminel. J'ai examiné cette disposition et j'y ai réfléchi. Cette disposition porte sur une omission. Elle concerne une personne qui omet de prêter main-forte à un agent de la paix, et elle permet que cette personne soit inculpée pour une infraction. La disposition prévoit une exclusion lorsque la personne qui ne coopère pas avec l'agent de la paix a une excuse raisonnable.
    À mon sens — et la majorité des analystes juridiques sont sans doute du même avis —, si une personne reçoit une menace de mort, comme on en a vu la preuve avec une entreprise de remorquage d'Ottawa qui a été accusée d'aider au remorquage du camion d'un manifestant, ce serait considéré comme étant une excuse raisonnable.
    Je signale à la députée d'en face que nous n'obligeons pas les gens à coopérer avec les agents de la paix dans d'autres enquêtes, notamment lorsqu'une personne est témoin d'une fusillade entre gangs ou d'un incident lié à la mafia. Nous ne procédons pas à l'arrestation de ces personnes; nous trouvons d'autres moyens d'assurer leur participation.
    C'est ce que...
    J'essayais de faire signe au député. D'autres personnes veulent poser des questions.
    La députée de Beauport—Limoilou a la parole.

[Français]

    Madame la Présidente, ma question est la suivante: est‑ce que seulement les remorqueurs ont essayé? Je comprends que certains ont eu peur. Je comprends cela. De là, l'importance des mots « concertation » et « collaboration » avec les forces de l'ordre. Les deux devaient travailler ensemble, comme ils l'ont fait dans les deux derniers jours, quitte à avoir de l'aide de la GRC, comme cela a été le cas, de Toronto et des villes avoisinantes. En travaillant en concertation dès le départ, on aurait évité pas mal de dérapages.
    Je peux comprendre que des gens aient eu peur des menaces de mort. J'en ai eu, moi aussi, et ce n'est pas agréable.

  (2250)  

[Traduction]

    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de ses commentaires. Elle a fait plusieurs remarques très importantes.
    La première est qu'il existe d'autres outils légaux. Le gouvernement n'a pas à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence chaque fois que les forces de l'ordre doivent intervenir. Cette loi n'a pas été utilisée depuis 1988. Le pays a pourtant bien eu à régler des situations où il y avait des barrages, des affrontements et des occupations, et même des événements violents et des attaques terroristes pendant toutes ces années, mais c'est la première fois que la Loi sur les mesures d'urgence est invoquée.
    La députée a également bien expliqué que le premier ministre aurait pu chercher à désamorcer la situation. Je constate un contraste marqué entre le discours employé aujourd'hui pour diaboliser ceux qui ont un point de vue différent et la façon dont le premier ministre parlait, il y a deux ans, d'une autre série de barrages. Il disait qu'il était important de parler avec les gens, de les écouter et de chercher à trouver un terrain d'entente.
     On dirait que le premier ministre veut taper sur ceux qui ont des opinions politiques différentes des siennes, mais seulement sur ces personnes. Je me demande ce que la députée en pense.

[Français]

    Madame la Présidente, j'essaie toujours de ne pas faire d'amalgame, autant que possible.
    Je pense que dans la situation que nous avons vécue, il y avait d'autres solutions que d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. L'inaction n'était sûrement pas un moyen pour arriver à déloger les gens.
    Madame la Présidente, j'ai entendu d'autres personnes du Bloc québécois déclarer qu'il ne s'agissait pas d'une urgence. Je ne suis pas d'accord.
    Lorsque les occupants retiennent en otage des résidants d'Ottawa effrayés de quitter leur maison pendant des semaines, nous sommes dans une situation d'urgence.
    Ma collègue conviendra-t-elle que nous sommes dans une situation d'urgence et qu'il faut agir maintenant pour nous assurer qu'elle est traitée comme telle?
    Madame la Présidente, comme je le disais dans mon allocution, hier et aujourd'hui, j'ai écouté les discours.
    On a convenu à maintes reprises qu'il y avait urgence. Par contre, là où on ne s'entend pas sur la Loi, c'est qu'il n'y a pas de crise nationale. La crise est circonscrite. Voilà la différence.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je suis heureux de prendre part à ce débat historique sur la déclaration de l'état d'urgence.
    Tout d'abord, j'aimerais souligner que les deux dernières années ont été longues et difficiles en raison de la pandémie de COVID et de l'arrivée somme toute assez récente d'Omicron. Le virus et ses variants ont façonné nos vies depuis deux ans. La pandémie a frappé durement notre travail, notre façon de parler à nos concitoyens et la manière dont nous rencontrons la population. Nous vivons des temps très difficiles. Je tenais à le mentionner d'entrée de jeu, et je veux remercier les Canadiens et les Néo-Écossais pour leur résilience et leurs efforts.
    Je me souviens du 13 mars 2020, ce jour où nous avons quitté le Parlement pour revenir dans nos foyers alors que le monde avait changé du jour au lendemain. Regardons la vérité en face: plus de trois millions de Canadiens ont perdu leur emploi en très peu de temps et le gouvernement savait qu'il devait intervenir rapidement. Comme il s'agissait d'abord et avant tout d'une pandémie, et donc d'une question de santé, nous tenions à travailler en étroite collaboration avec les experts de la santé publique, et c'est ce que nous avons fait. En tant que gouvernement, notre objectif dès le jour un était très clair: nous voulions réduire le fardeau administratif, créer des programmes en un temps record, et mettre de côté la partisanerie afin de travailler tous ensemble pour aider les Canadiens.
    Le gouvernement a promis qu’il serait là pour soutenir les Canadiens. C’est ce que nous avons fait, et nous continuerons de le faire jusqu’à la fin. Les programmes d’aide aux Canadiens, comme la PCU, la subvention salariale et la subvention pour le loyer, ont porté fruit. Quand il a fallu nous procurer des tests, de l’équipement de protection individuelle, des blouses et des gants, nous les avons obtenus rapidement. Nous avons même sollicité l’aide de nos entrepreneurs et fabricants d’ici, qui ont répondu à l’appel, et je les en remercie. En ce qui concerne les vaccins, nous n’avons pas tardé à les obtenir, et ceux-ci ont été administrés aux Canadiens beaucoup plus rapidement que prévu. Quand les provinces ont eu besoin d’aide en matière de soins de santé et d’éducation, nous avons encore une fois réagi sans tarder en investissant 19 milliards de dollars dans le cadre de l’Accord sur la relance sécuritaire et en créant le Fonds pour une rentrée scolaire sécuritaire. Dans chaque tranche de dix dollars investis dans la lutte contre la pandémie, huit dollars provenaient du gouvernement fédéral.
    Les Canadiens nous ont également beaucoup aidés. Ils ont suivi les consignes sanitaires. Ils se sont serré les coudes. Ils se sont fait vacciner dès qu’ils le pouvaient. Nous avons le plus haut taux de vaccination au monde. Je remercie les Canadiens.
    Je sais que tout cela dure depuis deux ans et que tout le monde est écœuré de la COVID et des sacrifices à faire. La vie des gens a été mise en veilleuse. Nous voulons tous que la COVID soit enfin chose du passé. Nous savons que cette pandémie a eu des effets sur notre santé, tant sur le plan socioéconomique que sur celui de la santé mentale. Cette période a été très difficile.
    C'est la raison pour laquelle il faut commencer à examiner les restrictions. N'oublions pas, toutefois, que la plupart de ces restrictions ont été instaurées par les gouvernements provinciaux. Pourquoi? Pour une excellente raison. Les restrictions ont été dictées par les capacités concrètes, sur le terrain, notamment le nombre limité de lits d'hôpitaux, de travailleurs de la santé, d'employés de première ligne, et j'en passe. Nous avons constaté qu'il faut continuer de soutenir les provinces dans le domaine de la santé et dans d'autres domaines, mais j'ai bon espoir que nous verrons bientôt des changements et que la capacité des hôpitaux augmentera au fil des ans.
    On a déjà pu voir un assouplissement de certaines restrictions. Le mois prochain, les voyages non essentiels seront autorisés. Les gens n'auront plus besoin d'être en quarantaine pendant qu'ils attendent les résultats de leur test de dépistage. Nous nous laisserons encore guider par les données concrètes et la réalité sur le terrain. Je refuse que tout ce bon travail ait été fait en pure perte. On ne peut pas tout laisser tomber à quelques mètres de la fin.

  (2255)  

    Les manifestations des trois dernières semaines ont été très difficiles. Nous avons été témoins de barrages associés au convoi. Je suis un grand partisan du droit de manifester et du respect des droits en vertu de la Charte, mais il ne s'agit pas d'une manifestation pacifique. C'est une occupation. Elle est contrôlée par des individus qui veulent renverser un gouvernement élu.
    Une manifestation pacifique n'aurait rien à voir avec les symboles de haine et de violence ni avec l'intimidation et le harcèlement des travailleurs de première ligne. Elle ne consisterait pas à prendre la ville et les infrastructures en otage ni à témoigner d'un manque de respect pour les monuments ou les monuments commémoratifs. J'ai vu la vidéo d'un individu dansant sur la Tombe du soldat inconnu. C'était difficile de regarder cet acte de mépris. Nous avons rapidement installé des clôtures pour protéger le monument des occupants, mais j'ai ensuite dû regarder, comme de nombreux Canadiens, une foule de personnes enlever les clôtures.
    Voici un gazouillis de la Légion royale canadienne: « Le Monument commémoratif de guerre du Canada est un site de commémoration collective qui doit être traité avec respect. Le retrait des clôtures de protection et l'inaction des personnes chargées de protéger le moment commémoratif sont très préoccupants. Ceux qui se sont sacrifiés pour nos libertés méritent mieux. »
    Ces gestes ne reflètent pas les valeurs canadiennes. Je refuse de croire qu'ils représentent la volonté de la population canadienne. Plus nous en apprenons sur cette occupation, plus nous découvrons des éléments troublants.
    Des acteurs étrangers influencent et appuient les événements sur le terrain, 55 % des donateurs étant Américains et 6 % venant d'autres pays. Les Canadiens représentent 39 % des donateurs. Un autre point très important est le fait que 1 100 Américains ayant fait un don pour l'insurrection aux États-Unis le 6 janvier ont également fait un don pour l'occupation et le convoi au Canada. Il n'est plus question des camionneurs.
    Je souhaite également citer à la Chambre une déclaration commune des syndicats du Canada:
    Les syndicats du Canada luttent depuis des générations pour le droit de manifester. C’est une pierre angulaire de notre démocratie. Cependant, ce à quoi nous assistons dans les rues de la capitale du Canada depuis treize jours est tout autre chose qu’une manifestation: c’est une occupation par une foule en colère qui tente de se déguiser en manifestation pacifique.
    La déclaration continue comme suit:
    Il est temps que les gouvernements de tous les ordres collaborent pour aider les personnes affectées et mettre fin au siège de la capitale du Canada.
    L'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence était nécessaire. Pendant quatre semaines, des perturbations illégales ont nui à notre économie et ont mis en danger la sécurité du public. La population d'Ottawa a souffert pendant 23 jours, et ce n'est pas fini. Nous devions accorder aux provinces et aux territoires les pouvoirs leur permettant de corriger la situation.
    Cependant, avant de parler de ce que signifie le recours à la Loi sur les mesures d'urgence, je veux parler de ce qui n'en résultera pas. Les gens ne seront pas privés de leur droit de manifester. La liberté d'expression et les droits prévus par la Charte ne seront pas limités. Il n'y aura pas d'intervention militaire. Les valeurs et les principes de nos institutions seront renforcés. Il s'agit de préserver la liberté du Canada. Ce n'est pas la Loi sur les mesures de guerre. C'est une loi bien différente.
    Les menaces à la sécurité du Canada sont réelles. Ce groupe voulait renverser nos dirigeants, notre gouvernement démocratique. En fournissant des fonds, des acteurs étrangers ont une influence sur ce qui se passe sur le terrain. Ces fonds, qui ont été repérés, puis bloqués, entraînent des répercussions négatives sur notre économie et notre démocratie.
    La Loi sur les mesures d'urgence donne des pouvoirs aux provinces et aux territoires. Elle crée de nouveaux pouvoirs pour réglementer les foules, interdire les blocages et maintenir les corridors essentiels ouverts. Enfin, elle permet de mobiliser les services essentiels comme le remorquage, auxquels nous n'avons pas eu accès pendant longtemps.

  (2300)  

    Cette loi comporte toutes sortes de déclarations et un mécanisme de surveillance clair. Elle est déposée au Parlement dans les sept jours. Nous tenons le présent débat ce soir, qui est si important. Un comité parlementaire assurera une surveillance pendant que les mesures d'urgence seront en vigueur. Cela durera 30 jours ou moins. La loi peut être révoquée. Ce que je trouve très intéressant, c'est qu'une enquête est déclenchée automatiquement. Nous pourrons ainsi revenir sur toutes les décisions.
    Je veux parler de certaines des choses importantes que le chef de police par intérim, Steve Bell, et le maire ont dites. Ils ont dit qu'il était très important de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence pour qu'ils puissent faire leur travail. La participation de l'administration municipale et des deux ordres de gouvernement était nécessaire pour réaliser ce que nous faisons aujourd'hui. Nous savons que nous devons maintenant résoudre la situation le plus rapidement possible, et la loi nous permettra de le faire.
    Madame la Présidente, le député va-t-il parler au nom du premier ministre et condamner ce qui se passe dans la région intérieure de la Colombie‑Britannique? En effet, 20 hommes masqués, armés de machettes et de haches, ont attaqué un groupe d'ouvriers de pipeline, causant des millions de dollars de dommages. Est-il prêt, au nom du gouvernement libéral, à condamner ce type d'activité?

  (2305)  

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question, mais nous nous concentrons actuellement sur le sujet d'aujourd'hui, à savoir la Loi sur les mesures d'urgence. J'aimerais rappeler à mon collègue que c'est le parti conservateur — et j'écoutais tout à l'heure le député de Louis-Saint-Laurent — qui a affirmé que la cheffe intérimaire dit maintenant que les camionneurs devraient partir. Ce n'est pas ce qu'elle a dit pendant les deux premières semaines et demie. Elle a même écrit au chef de l'opposition de l'époque pour lui dire que c'est le problème du premier ministre et qu'il devait aller leur parler. Un certain nombre de conservateurs ont pris des photos avec des membres de ce groupe et les ont soutenus. C'est inacceptable. Le député devrait se concentrer sur la question à l'étude aujourd'hui.

[Français]

    Madame la Présidente, tout à l'heure, le député de Lac‑Saint‑Louis nous a dit que l'opposition ne comprenait rien, et que le gouvernement ne contrôlait pas les services policiers, comme s'il n'y avait pas de juste milieu entre contrôler les services policiers et agir, comme si la seule option qu'il restait, c'était le recours aux mesures d'urgence.
    Comment se fait‑il que le chef de police d'Ottawa, lui, ait demandé 1 800 agents de la GRC? Comment se fait‑il que le gouvernement du Québec, qui s'occupe de sécurité publique, ait décidé d'aller ailleurs? Comment se fait‑il que tout le monde ne comprenne jamais rien, à part les libéraux?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question. Je trouve toujours intéressante la discussion avec lui.
    Je veux quand même lui rappeler que le Bloc québécois doit se regarder dans le miroir. Il dit souvent qu'il détient la vérité, mais n'oublions pas que 72 % des Québécois et des Québécoises sont favorables à notre application de la Loi sur les mesures d'urgence. C'est une indication que ce parti doit garder en tête.
    C'est le moment d'agir, et le gouvernement est en train d'agir. Nous aimerions avoir l'appui du Bloc québécois.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'ai posé cette question à d'autres députés, mais je tenais à transmettre au député les commentaires que j'ai reçus de la part de nombreux concitoyens qui ont remarqué le contraste frappant entre la façon dont la police d'Ottawa a réagi au convoi et à l'occupation et celle dont la police traite les Autochtones du Nord-Ouest de la Colombie‑Britannique et d'ailleurs au Canada lorsqu'ils manifestent.
    Le député pourrait-il dire si ce contraste le préoccupe autant que nous, et s'il appuierait une enquête publique indépendante qui se pencherait sur la façon dont le maintien de l'ordre a été assuré ces dernières semaines dans le cas qui nous occupe?
    D'abord, madame la Présidente, j'aimerais dire qu'à mon avis, beaucoup de Canadiens d'un bout à l'autre du pays sont très déçus par la façon dont la police d'Ottawa a réagi à la situation. Elle a été beaucoup trop lente à réagir. Je crois que nous aurions pu fournir davantage d'outils plus tôt.
    La bonne chose, avec la Loi sur les mesures d'urgence, c'est qu'elle prévoit la tenue automatique d'une enquête. Cela permettra de revenir sur ce qui s'est passé et de réfléchir à la façon dont nous pouvons poursuivre le travail nécessaire en tant que parlementaires.
    Madame la Présidente, je remarque que le député de Sackville—Preston—Chezzetcook a parlé d'ingérence étrangère comme s'il s'agissait simplement des flux de dons pour le soi-disant « convoi de la liberté ». Je me demande s'il a porté attention à l'ingérence étrangère sous forme de désinformation, qui provient principalement de sites Web russes, des réseaux sociaux et du Parti républicain des États-Unis.
    Madame la Présidente, contrairement aux conservateurs et à Trump, je ne crois certainement pas qu'il y a de bonnes personnes dans les deux camps. La ligne 911 a été inondée d'appels, dont la majorité provenaient des États‑Unis. Comme je l'ai mentionné dans mon discours, 1 100 individus qui avaient contribué à l'insurrection aux États‑Unis ont contribué à ce convoi. Cela démontre que les gens de la droite au Canada et aux États‑Unis ont été nombreux à jouer un rôle.

  (2310)  

    Madame la Présidente, deux façons contradictoires de voir les choses coexistent. D'une part, le convoi vise à dénoncer la vaccination obligatoire et l'atteinte aux libertés individuelles. D'autre part, les leaders parlent d'insurrection, de leur volonté de renverser le gouvernement élu démocratiquement. Les gens qui appuient la manifestation, y compris les conservateurs, soit sont naïfs au point de s'être fait rouler dans la farine par les véritables leaders de ce siège, soit ils ont volontairement choisi de ne pas tenir compte des intentions de ces leaders. Qu'en pensez-vous?
    Je ne vais pas vous dire ce que j'en pense, mais je vais laisser le secrétaire parlementaire vous répondre.
    Madame la Présidente, je suis vraiment fier des Canadiens. Plus de 80 % d'entre eux sont doublement vaccinés, ce qui est crucial. Certaines des personnes vaccinées sont à bout. Je comprends que les gens souhaitent retrouver leurs activités normales, mais il est inacceptable qu'une organisation ait pour principal objectif de renverser le gouvernement.
     Regardons les conservateurs et les commentaires faits par la cheffe intérimaire lorsqu'elle était simple députée. Elle a dit au chef conservateur de se faire prendre en photo avec ces gens-là et de faire de la manifestation le problème de Trudeau. C'est inacceptable. C'est un jeu politique. C'est tout...
    Je rappelle au secrétaire parlementaire qu'il ne peut utiliser ni le prénom, ni le nom de famille du premier ministre.
    Nous avons une autre question. Le député de St. Albert—Edmonton a la parole.
    Madame la Présidente, la mesure législative dont nous discutons, la Loi sur les mesures d'urgence, est en vigueur depuis 34 ans et n'a jamais été invoquée. Le député a prononcé un discours de 20 minutes, mais il n'a pas du tout parlé des critères juridiques à satisfaire, c'est-à-dire que la situation de crise doit menacer gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l'intégrité territoriale du pays.
    Croit-il sincèrement que la situation à Ottawa satisfaisait à ce critère?
    Madame la Présidente, la réponse à cette question est évidente. Si l’objectif principal est de renverser un gouvernement démocratique, cela implique à la base que la souveraineté est menacée. Si les gens d’Ottawa avaient peur de sortir de chez eux, c’est un autre indicateur fort. Si l’économie canadienne a des problèmes, c’est un bon indicateur également.

[Français]

    Madame la Présidente, tantôt, le secrétaire parlementaire a fait référence à un sondage.
    N'a-t-il pas plutôt l'impression que ces 72 % de personnes étaient en faveur de la fin des manifestations parce qu'elles duraient depuis trop longtemps? D'ailleurs, peut-être que c'est l'inaction du gouvernement pendant trois semaines qui a donné cette impression. Je pense que c'est cela qui se passe.
    J'aimerais entendre son avis à ce sujet.
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Je comprends l'hésitation des Québécois et des Québécoises, étant donné ce qu'ils ont vécu en 1970. Cependant, il n'y a pas de doute dans mon esprit. Comme mon collègue l'a mentionné tantôt, les gens de Gatineau et d'ailleurs en Outaouais ont souffert aussi de la situation, tout comme les gens d'Ottawa. Cela ne fait pas de doute: cette loi est là pour les gouvernements qui veulent l'utiliser et qui ont besoin de l'utiliser pour une courte durée. Si le Québec ne le voit pas de cette façon à ce moment-ci, c'est correct.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je remercie quiconque nous regarde actuellement, à 23 h 15. Nous avons commencé ce débat à 7 heures et je peux dire que, pour y avoir participé dès le début, j’ai entendu toutes sortes d’histoires. Certaines étaient factuelles, d’autres non. Nous avons entendu beaucoup de choses.
    La vérité c’est qu’aujourd’hui, c’est l’anniversaire de ma mère. Je lui souhaite donc un joyeux 81e anniversaire. Je suis sûre qu’elle adore le fait que je viens de dire son âge à tout le monde, mais c’est la raison pour laquelle je suis ici. Je suis ici à cause de ma famille. Je suis ici pour les familles et les gens de partout au Canada. Je vais parler des personnes raisonnables que je représente également.
    J’ai regardé Twitter plus tôt. Mon mari m’a dit il y a des semaines d’arrêter d’aller sur Twitter, parce que cela m’empêche de dormir. À tous les députés et à quiconque m’écoute, je suggère d’éviter Twitter. Si les gens veulent faire des cauchemars, qu’ils aillent lire Twitter.
    J’ai trouvé un gazouillis aujourd’hui. Il vient d’Aaron Wudrick. Si quiconque ici s’intéresse à la Fédération canadienne des contribuables, il est l’une des personnes que je lis pour rester au courant de l’état de notre économie. Aujourd’hui, il a mentionné ce qui se déroule à la Chambre des communes. Il a écrit:
     Quand je dis que je soutiens l'objectif de mettre fin aux restrictions, on dit que je fais l'apologie des nazis et des insurgés. Quand je dis que, malgré tout, je soutiens la primauté du droit, on dit que je suis un attardé libéral totalitaire et mondialiste.
    Toutes mes excuses pour le langage inapproprié. Il n'en demeure pas moins que, dans le cadre de ce débat, personne ne souhaite avoir honte de regarder son voisin en face pour lui dire que son argument est valable. Aujourd'hui, beaucoup de députés ont présenté des arguments valables. Parfois, je suis tout à fait en désaccord, mais je considère qu'ils ont le droit d'exprimer leur opinion, qu'elle soit bonne ou mauvaise. C'est un fait.
    J'ai été ici tout au long de cette période et je me suis rendu compte, même durant la préparation de mon discours, que quoi que nous disions, il se trouvera toujours quelqu'un pour nous le reprocher. Chaque fois qu'un parlementaire, qu'un politicien ou qu'un dirigeant affirme quelque chose, il se trouve quelqu'un pour le lui reprocher.
    Il est intéressant de noter que cinq jours avant l'arrivée des manifestants le 31 janvier, j'ai accordé une entrevue à une station de radio locale. C'était probablement le 23 janvier. Il y a un mois, donc, nous commencions à parler de ce à quoi pourrait ressembler le mouvement. J'ai dit que j'appuyais le convoi des camionneurs et le droit de manifester. Cependant, nous ne pouvons pas nier que des individus adopteront des comportements répréhensibles. Nous en sommes tous conscients. Je ne crois pas que quelqu'un a déjà vu une manifestation réunissant un nombre important de personnes où il n'y a eu aucune infraction mineure.
    Nous avons parlé des types d'infractions commises. Comme je viens d'Elgin—Middlesex—London, je peux assurer à la Chambre que les deux dernières années ont été très difficiles. Elles l'ont été pour tout le monde, peu importe l'endroit où l'on vit. Nous avons observé ce genre de choses dans ma circonscription depuis 2020. Je pense aussi à des gestes qui ont été posés en 2021, lorsqu'un manifestant a lancé du gravier au premier ministre. Nous avons tous convenu que c'était inadmissible. Cet individu a été arrêté.
    Ce même manifestant était dans nos rues il y a quelques jours à peine. Je le connais personnellement. Qu'ai-je à dire sur lui? S'il était à l'écoute aujourd'hui, ce dont je doute puisqu'il me semble qu'il est en détention, je lui dirais qu'il doit prendre un peu de recul et être à l'écoute. Il doit participer à la conversation.
    Voilà ce que je dirais aux manifestants qui franchissent ce pas. S'ils veulent provoquer le changement, ils devront y contribuer. Le but n'est pas toujours d'obtenir exactement ce que l'on veut.
    Je dirais exactement la même chose au gouvernement. L'idée est de trouver un juste équilibre. Nous avons entendu les gens. On m'a traitée de raciste, de misogyne et de tous ces autres noms étonnants. Quand j'ai interpellé une députée néo-démocrate à cet égard, elle en a rajouté une couche. Ce n'est pas cela, la démocratie. Ce n'est pas la façon dont nous devrions parler aux gens. Nous sommes réunis ici à dénoncer ce que ces « odieuses personnes » disent à l'extérieur, et pourtant, les mêmes députés qui s'en plaignent profèrent aujourd'hui les mêmes propos à la Chambre. Ils nous traitent de racistes. Ils nous traitent de nazis.
    Nous n'irons nulle part tant que nous n'arrêterons pas de faire les gros bras et de nous insulter les uns les autres. C'est la stricte vérité.
    Personne n'a songé à se doter d'un plan. J'ai vu un des libéraux, pour qui j'ai le plus grand respect au demeurant, ouvrir les bras en signe d'incrédulité et affirmer que, dans notre esprit, il suffisait de présenter une motion disant qu'ils avaient un plan pour tout régler.

  (2315)  

    Ce n'était évidemment pas le but. Le but, c'était de doter le pays d'un plan, de redonner espoir aux Canadiens. J'ai vu de mes yeux tout un groupe de ministériels se faire ordonner de répéter les arguments officiels au lieu de représenter librement les habitants de leur circonscription. J'aimerais les entendre dire des choses comme: « Mon voisin Patrice m'a appelé et il en a assez. Son fils aussi, car il a manqué deux années de scolarisation. Ma sœur élève ses enfants seule. Elle enseigne à la maternelle en plus de s'occuper de ses enfants. » Nous oublions ces gens quand nous nous lançons dans nos discussions. Nous oublions que les gens sont fatigués et qu'ils ont besoin d'espoir.
    Je suis consciente qu'il y a une masse critique. Je suis aussi consciente, cela dit, que nous devons nous assurer que les mesures sanitaires sont justifiées. Je demande donc au gouvernement de nous montrer les chiffres, les indicateurs, et de nous donner une idée du moment où tout cela prendra fin, parce que les gens en ont ras le bol.
    Lundi dernier, nous avons posé cette question sans avoir de réponse, alors que les gens voulaient tout simplement des réponses et des solutions. Voilà où j'en suis aujourd'hui, et je sais que la moitié des députés ici réunis aujourd'hui veulent exactement la même chose. Malheureusement, je parle de la moitié seulement, parce que j'ai écouté une partie des inepties qui nous ont été servies aujourd'hui. En toute honnêteté, j'ai honte lorsque j'entends certains de ces discours. Comment s'attendre à mieux de la part des gens?
    J'ai entendu la députée de Pickering—Uxbridge, qui voulait lire un courriel horrible qu'elle a reçu et qui l'a profondément troublée. Je lui souhaite la bienvenue en politique, car nous recevons constamment ce genre de choses. Des gens m'ont dit que je devais apprendre à être moins susceptible. Je ne crois pas que l'on doive s'endurcir pour se lancer en politique. Il faut plutôt être une bonne personne, pour l'amour du ciel. Ainsi, lorsqu'une personne commence à lire quelque chose pour dire à quel point on l'a maltraitée, elle essaie non pas d'attirer l'attention sur elle, mais de jeter de l'huile sur le feu en répétant toutes les insultes qu'elle a reçues.
    Je suis préoccupée par ce que nous nous apprêtons à faire. Je me fais du souci parce que je suis là pour défendre les droits de la population. Je suis triplement vaccinée. J'en suis fière, mais je dois défendre les droits des gens, y compris une jeune cinquantenaire de ma circonscription. À cause de l'expérience qu'elle a vécue par rapport à la vaccination lorsqu'elle était jeune, elle a peur à l'idée de recevoir un autre vaccin. Je la connais très bien. Elle a peur d'être malade, et elle a manqué les célébrations de Noël en famille parce que quelqu'un était malade, et elle ne voulait pas rendre d'autres personnes malades. C'est ce qu'on appelle la responsabilité personnelle, et je pense que si nous laissions les Canadiens exercer cette responsabilité à nouveau, ils sauraient le faire.
    Je pense à ma mère, qui a 81 ans aujourd’hui, et je me dis que lorsque je reviens d'Ottawa, j'ai attendu avec des centaines de personnes dans un aéroport et que j'ai été entourée de centaines de personnes dans l’avion. Je prends donc mes responsabilités et je fais le choix de ne pas aller voir ma mère parce qu’elle est fragile. C’est ce que font les Canadiens lorsqu’on les laisse prendre leurs responsabilités. Nous sommes en train de perdre cette capacité en ce moment. Il faut maintenant que le gouvernement nous dise de ne pas aller voir notre mère. Je suis persuadée que la femme de 50 ans que je suis est en mesure de savoir si elle peut ou non aller voir sa mère, mais nous sommes tributaires de ce que nous dit le gouvernement.
    Je terminerai mon intervention en vous racontant une courte histoire. J’aime me promener dans les rues d’Ottawa. Cela m’est égal de marcher seule. Je ne le ferais pas dans certains quartiers de ma circonscription, mais à Ottawa, je me sens en sécurité. Ma première semaine ici, je me déguisais chaque jour pour me noyer dans la foule. Les députés ne me voient jamais vraiment sur mon 31, mais je voulais ressembler à tout le monde parce que j’avais peur. J’avais un peu peur d’aller marcher. La semaine dernière, j’ai commencé à m’habiller et à agir normalement. Hier, je me suis arrêtée pour parler à un homme qui était devant mon immeuble et nous avons échangé pendant quelques minutes. J’ai fini par lui demander d’où il venait. Il m’a dit qu’il venait d’un coin près de London. Je lui ai dit que j’étais de London, alors je lui ai demandé d’où exactement. Il m’a dit qu’il venait de Fingal. Fingal, c’est l’endroit où mon frère déneige les rues. Fingal, c’est là où va mon fils pour voir ses amis.
    Il ne faut pas oublier que dehors se trouvent de simples citoyens. Il faut arrêter de les repousser. Nous devons trouver des solutions, et nous devons le faire maintenant.

  (2320)  

    Madame la Présidente, les conservateurs semblent être d'avis que la police devrait cesser de repousser les manifestants sous prétexte que des gens ordinaires se trouvent parmi eux. Le collègue de la députée, le député de Grande Prairie—Mackenzie, a mentionné, dans un discours très senti, le grand malaise des personnes ordinaires, les injures qui ont été proférées, la marginalisation, et j'en passe. Il se pourrait très bien, en effet, que certains députés soient responsables de cette vague d'insultes. Idéalement, le discours politique devrait être moins puéril, mais que voulez-vous.
    Toutefois, je trouve étrange cette logique qui permet de dresser un parallèle entre le fait de proférer des insultes et celui d'appuyer des activités séditieuses et des barrages, qui ont nécessité toutes ces opérations policières pour dégager nos rues.

  (2325)  

    Madame la Présidente, nous venons de prouver qu'il est possible de discuter, car je viens d'entendre le député poser une question qui n'était pas assortie d'insultes. Je l'en remercie.
    Si nous revenons à l'essentiel de ce qu'il a dit, nous devons convenir que personne dans cette enceinte ne dit que nous approuvons les barrages. Ce ne sont que des intentions qu'on nous prête. Lorsque j'ai souligné que des gens ordinaires se trouvent parmi ceux qui manifestent dans la rue, je n'ai jamais dit que tous ces gens le sont. Je dis que la majorité des personnes qui participent à la manifestation, ou qui y participaient avant la prise des mesures, sont des gens absolument normaux.
    Il y aura toujours des gens comme cela. Peu importe le type de manifestation, il y aura toujours ce genre d'individu. C'est quelque chose qui me préoccupe grandement.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai beaucoup aimé le discours de ma collègue, parce qu'il était posé et qu'il faisait la part des choses entre les gens qui commettent des actes répréhensibles et ceux qui n'en commettent pas.
    Cela dit, concernant les actes répréhensibles, dont on est au courant depuis un certain temps déjà et dont on connaît les auteurs, à son avis, quelles mesures devrait-on appliquer à la place de la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Madame la Présidente, exactement, la députée pose la bonne question. L'un des problèmes les plus importants que j'ai eus aujourd'hui visait à savoir comment j'allais rédiger mon discours sans pointer quiconque du doigt. C'est très facile de blâmer les gens dans cette situation.
    Nous savons que des mesures auraient dû être prises il y a 23 jours. Nous savons que des renseignements existaient il y a plus de 30 jours. J'ai discuté aujourd'hui avec une personne à laquelle je voue un grand respect. Les services de police accomplissent un travail, pas parce qu'il y a de la violence et des activités criminelles. Ils le font parce que nous sommes dans une crise politique à l'heure actuelle. C'est leur travail. Il y a des Canadiens qui sont mécontents, et il y a une crise politique à cause du leadership.
    Qu'est-ce que je ferais? Je commencerais par être un leader. C'est ce que j'exige du gouvernement.
    Madame la Présidente, j'aimerais d'abord souhaiter un très joyeux anniversaire à la mère de ma collègue. Je veux remercier la députée de son discours modéré. Je dois dire que j'ai toujours respecté le ton qu'elle adopte à la Chambre, son esprit raisonnable et son respect du décorum. Je l'en remercie.
    J'aimerais dévier un peu du sujet. Environ une semaine avant la présentation de la motion de l'opposition réclamant un plan pour mettre fin aux exigences relatives à la vaccination, j'ai parlé à la Chambre de la regrettable polarité qui existe au Canada entre les gens en faveur de la vaccination et ceux qui s'y opposent. J'ai précisé que, après deux ans de pandémie, cette dichotomie n'était plus vraiment valable. Il y a beaucoup de Canadiens qui ont des questions légitimes à ce sujet. Au lieu de mettre fin aux exigences vaccinales, nous devrions remettre en question toutes les politiques publiques en vigueur à la lumière de la science et des données existantes, déterminer si elles sont valables, et y apporter des modifications dans la mesure du possible.
    La députée est‑elle d'accord avec cela? Pense‑t‑elle que c'est quelque chose que le Canada devrait faire?
    Madame la Présidente, je peux aisément dire que je suis tout à fait d'accord avec lui. C'est ce que nous devrions faire. Nous devrions unir nos efforts pour trouver des solutions. Je serais prête à m'asseoir avec le député en tout temps, en tant que représentante du caucus conservateur, ainsi qu'avec n'importe quel autre député, pour faire avancer ce dossier.
    Je sais qu'il y a des députés de tous les partis qui désirent uniquement que la paix règne de nouveau au pays. Nous ne devrions pas nous préoccuper des croyances des gens ou de leur statut vaccinal. Nous devrions nous préoccuper de la sécurité de tous les Canadiens et du Canada, et non de ce que le gouvernement libéral a créé.

  (2330)  

     Madame la Présidente, nous sommes ici ce soir pour débattre du recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Je n'aurais jamais cru, il y a tout juste trois semaines, que nous tiendrons ce débat aujourd'hui. Comme tous les Canadiens, je m'attendais à ce que les autorités compétentes prennent leurs responsabilités et désamorcent la situation bien avant d'en arriver là, mais ce n'est évidemment pas la voie que le gouvernement et le premier ministre ont privilégiée. Nous devons aujourd'hui débattre de cette question en raison d'un manque flagrant de leadership. Au lieu de prendre des décisions qui nous auraient rapprochés d'une solution, le premier ministre a jeté de l'huile sur le feu en choisissant les insultes, la provocation, la division, la diffamation et le mépris.
    Avant de donner mon avis sur la loi, je tiens à préciser que j'ai à cœur le droit de tous les Canadiens à manifester pacifiquement et légalement. Je n'ai jamais appuyé les infractions commises au nom du droit de manifester, et je ne le ferai jamais. Notre société repose sur la primauté du droit, et il doit toujours en être ainsi. Il y a plusieurs façons de manifester en toute légalité et avec efficacité. Je crois aussi qu'une manifestation vise à faire entendre sa voix, et non à détruire l'économie et les vies de ses concitoyens. Il suffit de jeter un œil aux travaux de la Chambre, aux reportages dans les médias et aux publications sur les médias sociaux pour voir que le message a été compris depuis longtemps, et qu'il est maintenant temps pour les manifestants de rentrer à la maison. Je n'ai pas regardé dehors dernièrement, mais je suppose que nous verrons comment les choses évoluent dans les prochains jours.
    Il ne faut cependant pas oublier que, si les gens ont l’impression de ne pas être entendus, ils n’écouteront pas. C’est aussi simple que cela. Les manifestations sont un moyen de se faire entendre, pas nécessairement d’obtenir ce que l’on veut. Les gouvernements ont la responsabilité d’écouter les manifestants, mais pas l’obligation de céder à leurs exigences. Dans tout débat, comme à la Chambre, on a le droit de se faire entendre, mais pas celui d’obtenir le résultat souhaité.
    Les Canadiens s’inquiètent à juste titre de la mise en œuvre de la Loi sur les mesures d’urgence et de ses conséquences sur eux. Le manque d’information sur cette loi, sa mise en œuvre et son application suscite de fortes craintes, vives et légitimes, chez de nombreuses personnes.
    Comme pour presque tous les aspects de la pandémie, le gouvernement libéral n’a pas établi de plan cohérent et à long terme, ce qui fait que les Canadiens vivent dans un climat d’incertitude inacceptable. Cela nuit à notre économie et, surtout, à notre santé mentale. Ce n’est pas la première fois qu’une manifestation a lieu au Canada, et ce ne sera pas la dernière. Les Canadiens ont toujours eu à cœur leur droit de manifester pacifiquement. Malheureusement, ce ne sont pas toutes les manifestations qui commencent ou se terminent de manière pacifique, et nous disposons de nombreuses lois pour gérer ces situations.
    Toujours est-il que la police a trouvé le moyen de mettre fin aux manifestations avec les moyens dont elle disposait déjà. Même à l'heure actuelle, tandis que nous débattons de la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement libéral n'a toujours pas réussi à expliquer pourquoi les lois existantes ne suffisaient pas pour résoudre la situation. La Loi sur les mesures d'urgence est un outil législatif qu'il est important et nécessaire d'avoir à notre disposition. Toutefois, elle n'est censée servir que lorsque les lois existantes ne permettent pas de prendre les mesures qui s'imposent.
    Le sujet a généré une quantité considérable de courrier à mes bureaux et je suis certain qu'il en est de même aux bureaux de mes collègues. J'aimerais vous faire part de certains messages, car j'estime important que les habitants de ma circonscription soient entendus dans leurs propres mots.
    Dans une lettre adressée au premier ministre, dont j'ai obtenu copie, Leanne dit: « Certes, je comprends votre frustration envers certaines actions des manifestants du “ convoi pour la liberté ”, mais vos actions vont beaucoup trop loin ».
    Dans une lettre adressée au premier ministre, dont j'ai obtenu copie, Joe dit: « Même si, en ce moment, vous êtes convaincu que ces mesures sont justifiées, avez-vous songé au genre de précédent que vous êtes en train de créer? Lorsque des manifestants incendiaient des églises et commettaient d'autres crimes haineux l'été dernier, avez-vous appuyé le gel des comptes bancaires de militants autochtones? Que direz-vous si un gouvernement fédéral futur interdit le financement participatif du mouvement Black Lives Matter?
    « Souhaitez-vous vraiment que l'on se souvienne de vous comme le premier ministre qui a rendu “ normal ” le fait que les gouvernements canadiens prennent ces mesures contre toute manifestation avec laquelle ils ne sont pas d'accord? »
    « Le Canada doit demeurer un pays où toute personne peut manifester librement, peu importe son point de vue et peu importe que les gens au pouvoir soient d'accord ou non avec elle.
    « Faites marche arrière, monsieur le premier ministre. Vous allez trop loin. »

  (2335)  

    Lorne a déclaré ceci: « Je ne crois pas le premier ministre quand il affirme que la réponse sera mesurée et limitée dans le temps. Le premier ministre met ainsi un pied dans la porte qui lui permettra, à lui ou à tout autre gouvernement, d'abuser de son pouvoir pour contrôler les citoyens canadiens. »
    Nick a dit ceci: « Il n'est pas nécessaire d'exacerber les tensions entourant une manifestation qui est actuellement civile, pacifique et légale, même si des véhicules stationnés illégalement qui ont fait l'objet de contraventions perturbent la circulation, la vie quotidienne des gens et le commerce dans une petite zone de la ville. Il existe une solution politique pratique. Voici ce que je dis: ne ratifiez PAS l'imposition de la Loi sur les mesures d'urgence. »
    Comme l'a souligné Beau, « l'article 3 de la Loi sur les mesures d'urgence énonce les circonstances qui permettent son invocation, soit: a) une urgence nationale qui met gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces; ou b) une urgence nationale qui menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays.
    « Aucune de ces conditions n'est remplie [...] En invoquant la Loi fédérale sur les mesures d'urgence sans aucune justification raisonnable, [le premier ministre] établit un dangereux précédent qui menace la liberté de réunion et d'association pacifiques ainsi que le droit de manifester de tous les Canadiens. »
    Grâce aux centaines de lettres que j'ai reçues et lues, je pourrais littéralement continuer pendant des heures. Je n'ai reçu qu'une seule lettre — une seule — qui appuie les intentions du gouvernement libéral. Fait remarquable, le premier ministre et le gouvernement libéral ont uni les Canadiens sur un point, celui de ne pas invoquer la Loi sur les mesures d'urgence de cette façon. Ils ne devraient pas l'invoquer maintenant.
    Je suis très préoccupé par le fait que le recours à cette loi normalisera son recours chaque fois qu'il y aura quelques centaines de manifestants. Lorsqu'un gouvernement utilise un marteau pour tuer d'une mouche, cela représente une menace directe éventuelle pour tous les Canadiens. Une fois que nous aurons franchi cette ligne et invoqué la Loi sur les mesures d'urgence, il sera plus facile sur le plan politique pour tout gouvernement futur de faire de même. Je m'attends vraiment à ce que le gouvernement actuel l'invoque à nouveau. L'invoquera-t-il de manière abusive contre les manifestations des Autochtones à l'avenir? L'invoquera-t-il de manière abusive contre les manifestants pro-environnement à l'avenir? L'invoquera-t-il de manière abusive contre les Canadiens qui manifestent sur des questions religieuses, des questions d'immigration, des questions raciales, des questions mondiales ou des questions fiscales? Je parie que oui.
    Peu importe notre allégeance politique ou notre position dans un dossier, nous devrions être unis dans notre souci de protéger le droit de manifester légalement et d'être entendu.
    Les Canadiens ne peuvent pas se permettre d'établir et de renforcer des mesures qui les réduisent au silence lorsque les gouvernements démocratiques du monde entier devraient s'efforcer d'être plus à l'écoute de leurs citoyens. Les gouvernements limitent souvent les activités au fil du temps, mais ils font rarement le contraire. Si nous perdons quelque chose au profit de l'État aujourd'hui, nous ne le récupérerons probablement pas de sitôt.
    J'ai écouté. J'ai entendu mes concitoyens et je ne voterai certainement pas en faveur du recours à la Loi sur les mesures d'urgence en ce moment. Je tiens à dire à mes collègues du caucus néo-démocrate que de nombreux partisans du NPD de ma circonscription m'ont écrit pour me faire part de leur consternation à l'idée que leur parti appuie l'invocation de cette loi. Ils sont conscients du dangereux précédent que cela créerait et cela les inquiète profondément. Ils sont préoccupés...
    Le temps de parole du député est écoulé. Je suis convaincue qu'il pourra en dire davantage pendant la période des questions et observations.
    Le député de Lac‑Saint‑Louis a la parole.

  (2340)  

    Madame la Présidente, l'une des lettres que le député a lues, de la part d'un électeur, laissait entendre très clairement que ce que nous avons vu au cours des trois dernières semaines dans les rues d'Ottawa était une manifestation légitime. Les leaders de la manifestation ont soutenu qu'ils ne faisaient qu'exercer les droits qui leur sont conférés par la Charte.
    Le député reconnaît-il qu'il s'agit d'une manifestation illégale, ce qui explique l'intervention de la police? Pourquoi l'opposition officielle ne critique-t-elle pas davantage les leaders de cette manifestation illégale?
    Madame la Présidente, je vais terminer mes observations avant de répondre rapidement à la question du député.
    Tout d'abord, je souhaite dire à mes collègues du NPD que les citoyens de ma circonscription craignent que cette mesure crée un dangereux précédent et qu'ils ne sont pas du tout impressionnés. Bien que de nombreux partisans du NPD dans ma circonscription m'aient fait savoir très clairement qu'ils n'appuyaient pas les politiques de mon parti à ce sujet, ils se réjouissent de notre décision responsable et réfléchie. Les députés néo-démocrates de la Chambre suivront-ils le pas?
    En ce qui concerne la question du député, je peux comprendre votre frustration à l'égard de certains actes commis par des manifestants du convoi pour la liberté, mais le fait d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence va beaucoup trop loin. Le gel des comptes bancaires de toute personne qui participe à la manifestation ou l'annulation de l'assurance d'une personne, même si cette dernière ne commet aucun acte violent, et ce, sans ordonnance du tribunal, est fondamentalement incompatible avec les valeurs démocratiques libérales que le Canada est censé défendre.
    Je suis désolée d'interrompre le débat, mais il y a un recours au Règlement.
    Madame la Présidente, le député n'a absolument pas tenu compte de ma question et...
    Il ne s'agit pas d'un recours au Règlement, mais d'une question relevant du débat.
    Je rappelle au député de Calgary Confederation qu'il doit s'adresser à la présidence, et non pas directement aux députés, pour poser ses questions ou faire ses observations.

[Français]

    L'honorable député de Berthier—Maskinongé a la parole.
    Madame la Présidente, dans le discours libéral, on entend beaucoup qu'on veut aider, qu'on est proactif, et ainsi de suite.
    J'aimerais que mon collègue commente le fait que les forces policières d'Ottawa avaient demandé 1 800 agents supplémentaires, mais ont reçu, de la part du fédéral, seulement 275 agents de la GRC, dont seulement 20 ont été affectés aux manifestations.
    Est-ce que répondre à cette demande n'aurait pas été une façon beaucoup plus concrète de soutenir la ville?

[Traduction]

    Madame la Présidente, ces questions soulèvent de très bons points, et j'en remercie le député, mais ce qui compte surtout, c'est que les conditions qui sont définies dans la Loi sur les mesures d'urgence ne s'appliquent pas à la situation actuelle, et j'ose croire que le député le sait. Voilà le message que je laisse à tous les députés. Je m'oppose vivement à la motion et à la déclaration d'état d'urgence. Il faut user de prudence et de tolérance plutôt que de force et de fermeté.
    Madame la Présidente, j'ai beaucoup aimé que le député dise clairement qu'il n'approuve pas les activités illégales, mais je me demande comment il peut passer sous silence l'intimidation dont les entreprises d'Ottawa ont très souvent été victimes en tentant de faire appliquer le port du masque, et comment il peut cautionner les incidents comme celui qu'a vécu mon employé, qu'on a forcé à enlever son masque pour pouvoir monter à bord du train.
    Globalement, ce qui s'est passé au centre-ville d'Ottawa n'était pas une manifestation pacifique. Comment le député peut-il faire abstraction de l'intimidation qui a entraîné la fermeture de plus de la moitié des entreprises du centre-ville d'Ottawa?
    Madame la Présidente, je n'approuve absolument pas ces gestes. Je tiens toutefois à résumer comment une de mes concitoyennes a vu tout ce processus.
    Elle s'appelle Kirsten, et elle a dit ceci: « Un groupe de citoyens canadiens ont des préoccupations qu'ils souhaitent soumettre au premier ministre, mais celui-ci refuse de les écouter parce qu'ils ne sont pas d'accord avec lui. Ils décident donc d'aller lui transmettre leur message personnellement, et d'autres citoyens les encouragent le long du trajet. Ils arrivent à Ottawa, mais il refuse d'entendre leurs préoccupations. Il les laisse attendre pendant quelques semaines, puis les gens du quartier dans lequel ils sont installés sont exaspérés et veulent qu'ils partent. »
    Peut-être qu'à cause de certaines expériences...

  (2345)  

    Je suis désolée, mais nous avons un recours au Règlement.

[Français]

    L'honorable députée de Beauport—Limoilou invoque le Règlement.
    Madame la Présidente, quelqu'un quelque part a un microphone ouvert, ou quelque chose se frotte à un microphone, et cela empêche les interprètes de bien faire leur travail. Cela doit être vraiment pénible, à cette heure-ci, d'entendre cela.
    Il semble y avoir des gens qui parlent juste en arrière de moi. J'espère qu'on peut leur dire d'aller parler ailleurs.

[Traduction]

    Le temps est écoulé.
     Nous reprenons le débat. Le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan a la parole.
    Madame la Présidente, je crois que la gauche ne veut plus cesser de financer la police.
    Cet été, lors d'une fête organisée par un ami, j'ai rencontré un jeune couple qui s'apprêtait à apporter des changements importants de dernière minute à ses plans de mariage. Il devait se marier dans la magnifique église catholique centenaire qui était le cœur et l'âme de la communauté de Morinville, en Alberta. C'était l'église dans laquelle la jeune femme avait grandi. Toutefois, l'église avait complètement brûlé quelques semaines auparavant, à la suite d'un incendie probablement criminel, un acte de protestation et de terreur.
    J'habite à environ 45 minutes de route de Morinville. Le matin suivant l'incendie, je me suis rendu sur place en voiture pour observer la situation. À mon arrivée, le feu brûlait encore. Tandis que je regardais, des pompiers locaux avaient la pénible tâche de démolir des parties de la structure pour assurer la sécurité du public et éviter la propagation de l'incendie. Outre le danger que représentait un édifice en flammes, une conduite de gaz passait sous l'église et des appartements se trouvaient à proximité. Bien que personne n'ait été blessé pendant cette attaque, le risque supplémentaire lié à une possible explosion et le risque pour la vie humaine étaient très importants.
    Cet acte violent et dangereux qui a été commis à Morinville n'était pas un geste isolé. Au cours de l'été dernier, des incendies criminels ont détruit plus d'une dizaine d'églises de diverses confessions, et d'innombrables autres actes de vandalisme ou tentatives de violence ont également eu lieu. Le premier ministre a répondu à une question des médias sur ce qui s'est passé à Morinville, mais il n'a pas fait de déclaration sur ce déchaînement d'actes de destruction dans l'Ouest canadien. Le bon ami et ancien conseiller du premier ministre, Gerry Butts, a qualifié ces actes de « compréhensibles ».
    Il y a deux jours, une attaque extrêmement violente a eu lieu sur un chantier du gazoduc Coastal GasLink en Colombie‑Britannique. Les agents de la GRC qui sont intervenus ne pouvaient pas accéder à la route, car elle était jonchée de planches transpercées de pointes, de souches et d'arbres abattus recouverts de goudron en feu. De plus, des personnes leur ont lancé des bombes fumigènes et des bâtons en feu. Pendant ce temps, d'autres manifestants violents ont fait irruption sur le chantier, armés de haches et de pistolets signaleurs. Ces manifestants ont renversé des machines lourdes, coupé des conduites de carburant, brisé des véhicules de chantier et y ont mis le feu pendant que des travailleurs étaient encore à l'intérieur.
    À propos de cet incident, le ministre de la Sécurité publique a dit qu'il était profondément préoccupé par les confrontations violentes qui étaient survenues sur le chantier. Je dirais respectueusement au ministre qu'il ne s'agissait pas de confrontations violentes, mais d'une attaque violente préméditée contre des travailleurs qui essayaient simplement de faire leur travail.
    Quel est le climat dans lequel de tels actes de violence contre des lieux de culte et des travailleurs du secteur de l'énergie en sont venus à se produire ici, au Canada? Le très vénéré David Suzuki a déclaré que les pipelines vont « exploser ». L'actuel ministre de l’Environnement du gouvernement libéral a déjà attaqué le domicile de Ralph Klein, premier ministre de l'Alberta à l'époque. En effet, il a grimpé sur le toit de sa résidence privée dans le cadre d'un coup d'éclat militant, ce qui a apparemment terrifié l'épouse du premier ministre provincial, qui était seule à la maison à ce moment-là. D'autres députés, dont l'ancienne cheffe du Parti vert et un ancien député néo-démocrate, aujourd'hui maire de Vancouver, ont été arrêtés pour des infractions mineures.
    Je crois en la primauté du droit. La primauté du droit signifie que tout le monde est également assujetti à la loi et protégé par elle. Qu'ils soient dans un camp de manifestation sur la rue Wellington ou au Cabinet fédéral, qu'ils conduisent un camion pour aller travailler ou qu'ils travaillent dans la fonction publique fédérale, qu'ils appartiennent à un mouvement populiste pro-Trump ou à un mouvement socialiste démocratique alarmiste sur le climat, ces gens ont l'obligation de respecter la loi et le droit d'être protégés par la loi. Lorsque la loi est appliquée de manière sélective pour pénaliser des personnes en fonction de leurs opinions politiques, il s'agit par définition d'une violation de la primauté du droit. Pendant que nous dénonçons les blocages illégaux d'infrastructures essentielles et d'autres infractions à la loi commises par les manifestants, nous devons également reconnaître que la primauté du droit est menacée par un gouvernement qui manque cruellement de cohérence dans la façon dont il traite les manifestants, et que cette incohérence est fondée sur les préférences politiques et les préjugés des personnes pouvoir. Cela discrédite la loi.
    Au cœur de la notion de primauté du droit se trouve un contrat: je m'engage à observer la loi et je m'attends en retour à jouir de la protection de la loi. Lorsqu'on dit aux gens de respecter la loi, mais qu'on les prive de la protection juste et équitable de la loi, on ne parle plus de primauté du droit, mais plutôt de droit au service du pouvoir. La primauté du droit signifie que la loi l'emporte toujours. Le droit au service du pouvoir signifie que les détenteurs du pouvoir utilisent les lois pour dominer les autres. Il faut comprendre cette distinction.
    La crise d'Oka, les événements du 11 septembre, les violentes manifestations lors des sommets du G7 et du G20, les blocages d'il y a deux ans, la série d'attaques sur des lieux de culte et la violence ciblant les travailleurs de l'énergie n'ont pas justifié le recours à des pouvoirs d'urgence. Lorsqu'on prend ainsi les grands moyens pour cibler des travailleurs qui participent à un mouvement de désobéissance civile en réaction à l'imposition d'exigences liées à la vaccination qui sont injustifiées et qui ne sont fondées sur aucune preuve scientifique, on constate que le contrat qui se trouve au cœur même de ce que cela signifie que d'être une société où règne la primauté du droit s'effrite. Si j'avais vu l'église où je m'apprêtais à me marier rasée par le feu, si j'avais perdu mon emploi ou l'accès à des services essentiels en raison des exigences liées à la vaccination ou si j'avais vu les autorités fermer les yeux sur des activités illégales que de hauts dirigeants du pays défendent, voire commettent eux-mêmes, je trouverais un peu fort que le gouvernement considère que la situation actuelle constitue une urgence nationale unique.

  (2350)  

    Le contrat nécessaire au maintien d'une société fondée sur la primauté du droit s'effrite et nous avons un premier ministre dont le bilan personnel en matière de corruption est misérable; c'est le seul premier ministre de l'histoire à avoir enfreint à plusieurs reprises la loi sur l'éthique. Il voudrait maintenant que des gens subissent des conséquences disproportionnées simplement pour avoir fait un don au convoi, même si c'était dans les semaines avant les barrages.
     À mon avis, la question la plus importante pour le Canada à l'heure actuelle n'est pas que de connaître les détails de la situation en cours, mais de comprendre comment nous en sommes arrivés là. Si nous en sommes là, c'est à cause de l'application arbitraire et inconstante des décisions du gouvernement et de la démonisation des personnes qui n'acceptent pas le déclin des institutions démocratiques du pays qui ont fait en sorte que les gens considèrent qu'il n'y avait pas d'autre moyen de se faire entendre. Pour que le pays soit de nouveau uni et qu'on en finisse avec la souffrance et la division qui ont été créées, il faut nous demander pourquoi les pleurs d'une mère qui a vu son fils perdre son entreprise et se suicider à cause des restrictions liées à la COVID n'ont pas la même résonnance que le bruit des klaxons sur la rue Wellington. Pourquoi des réfugiés égyptiens qui ont vu leur lieu de culte être rasé par un incendie à Surrey l'année dernière n'ont même pas eu droit à une déclaration du premier ministre, alors que, le risque d'un débordement violent du convoi a conduit à la déclaration de l'état d'urgence nationale?
    Il faut nous attaquer au manque d'empathie qui semble omniprésent dans les coulisses du pouvoir et à l'indifférence devant les travailleurs canadiens qui ont perdu leur emploi et raté des occasions en raison des mesures de réponse à la pandémie et qui ont vu les mesures gouvernementales en général leur retirer leur gagne-pain. Pour certains ici, il peut être difficile de comprendre ce que vivent de nombreux Canadiens, mais je voudrais que les députés aient une pensée pour des gens comme le beau-frère du chef du NPD. Le chef du NPD n'est peut-être pas prêt à défendre son beau-frère, mais je serai là...
    La députée de Beauport—Limoilou invoque le Règlement. Cependant, avant de lui donner la parole, je demanderais au député de remonter un peu son micro, car on entend des bruits parasites, ce qui pourrait être la cause du problème.
    La députée de Beauport—Limoilou a la parole.

[Français]

    Madame la Présidente, mon collègue est passionné. Cela fait en sorte que son débit est très rapide et les interprètes ont de la misère à suivre. Je sais que la passion peut aussi se manifester autrement que par un débit de voix rapide.
    J'invite le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan à ralentir son débit un peu afin que les interprètes puissent interpréter son discours.

[Traduction]

    Il reste trois minutes au député.
    Madame la Présidente, je remercie les interprètes de l'important travail qu'ils accomplissent.
    M. Dhaliwal a fait un don de 13 000 $ au « convoi pour la liberté ». Après coup, selon une source du NPD, M. Dhaliwal a exigé un remboursement. Comme par hasard, cette source du NPD prétend qu'il y a eu malentendu sur la véritable nature de l'organisation, bref, le genre d'argument auquel on pourrait s'attendre de la part d'une source du NPD. Quoi qu'il en soit, si l'on en croit cette source, M. Dhaliwal, le beau-frère du chef du NPD, a fait un don sur un malentendu. Peut-être s'est-il trompé de page sur le site de GoFundMe. Peut-être a-t-il fait un don de 13 000 $ avant de prendre le temps de lire à quelle cause cela était destiné. Supposons que ce soit effectivement le cas et que M. Dhaliwal ne soit pas le seul à s'être mépris. Je suis certain que de nombreux Canadiens ordinaires, comme M. Dhaliwal, ont fait un don au convoi pour diverses raisons: parce qu'ils s'opposent aux obligations liées aux vaccins, parce qu'ils s'inquiètent de leurs répercussions sur la chaîne d'approvisionnement, parce qu'ils souhaitent témoigner leur soutien aux camionneurs ou tout autre malentendu. Je ne voudrais pas que M. Dhaliwal ait à s'inquiéter de voir son compte bancaire gelé sans qu'un tribunal ne l'ait ordonné, en raison des mesures d'urgence.
    Le NPD n'est peut-être plus disposé à défendre les travailleurs, les libertés civiles et les membres de la famille du chef du NPD, mais les conservateurs, eux, sont prêts à intervenir quand le NPD laisse tomber les siens. Mes collègues ont fait remarquer que le NPD et les libéraux se ressemblent de plus en plus, mais j'observe une différence marquée: contrairement au chef du NPD, nous savons que le premier ministre a l'habitude d'en faire beaucoup pour défendre les intérêts financiers de sa famille.
    En dépit des défis que nous devons relever, je suis beaucoup plus optimiste quant à l'avenir du pays qu'il y a trois ou quatre mois. Le convoi, qui était composé de personnages complexes, de quelques personnes peu recommandables et de dizaines de milliers de personnes qui réclamaient la fin des exigences relatives à la vaccination et le retour à une vie normale, a suscité un regain d'intérêt pour l'engagement et la participation politiques dans ma circonscription et dans tout le pays. Il a inspiré davantage de Canadiens à se mobiliser pour défendre la paix, l'ordre et la bonne gouvernance.
    Hier soir, j'ai organisé une assemblée publique en ligne à court préavis pour discuter de la Loi sur les mesures d'urgence. Il y avait plus de 300 participants, en plus des membres de leur famille et de leur conjoint. Le message que j'ai reçu a été extraordinaire et a confirmé ma décision de voter non. Les participants ont également posé beaucoup de bonnes questions sur le fonctionnement du processus démocratique, les moyens d'influencer le changement et les moyens de participer. Les Canadiens ne veulent pas de division et ils ne veulent pas d'anarchie. Ils veulent rétablir la primauté du droit par des moyens ordinaires et légaux, où les citoyens et les dirigeants respectent les droits de la personne et suivent la loi et où la loi est appliquée également à tous, peu importe leurs opinions ou leur statut politiques. Ils veulent la levée des mesures obligatoires et l'application de politiques de santé publique fondées sur des données scientifiques. Ils veulent avoir la possibilité de travailler et d'élever une famille.
    Le prochain convoi ne sera pas un convoi de manifestants; ce sera un convoi d'électeurs. Après cette fin de semaine, les gens chercheront à en apprendre davantage sur le processus démocratique et à y participer afin de défaire le gouvernement, qui sème la discorde, et ses alliés néo-démocrates et de les remplacer par un gouvernement qui défendra la liberté, les possibilités et, oui, la primauté du droit. Que Dieu protège la terre de nos aïeux.

  (2355)  

    Madame la Présidente, aujourd'hui, j'ai écouté en long et en large les conservateurs et leurs réactions face aux barricades et aux manifestants, et je remarque qu'ils continuent de soutenir ce groupe. Leur message est ambigu. D'une part, ils disent être contre les barricades et vouloir que les gens rentrent chez eux, mais d'autre part, ils vénèrent leurs actions.
    Notre message, lui, a toujours été le même. Les barricades ont coûté très cher à nos collectivités. Elles ont entraîné la fermeture du centre-ville d'Ottawa. Certaines barricades érigées pour des motifs économiques ont causé des pertes d'emplois dans les régions frontalières du Manitoba, de l'Alberta et de l'Ontario. Cette loi est nécessaire, à preuve la question des enfants. Des enfants ont vraiment été utilisés dans le cadre de ces barricades.
    Je me demande si le député peut nous dire ce qu'il pense de la présence d'enfants derrière ces barricades illégales. Appuie-t-il aussi cela?
    Honnêtement, madame la Présidente, je m'attendais à mieux même de la part de ce député. Ma position a toujours été très claire: j'appuie les manifestations pacifiques et ceux qui demandent la fin des restrictions liées à la COVID, et je suis contre le fait de bloquer illégalement des infrastructures essentielles. Je dirais que je suis de cet avis peu importe qui est derrière les barricades. Je suis également contre l'abus arbitraire de pouvoir de la part du gouvernement dans le but de cibler des gens qui ont versé des dons au convoi longtemps avant l'érection des barricades. Il devrait s'agir d'un principe assez simple, que les députés libéraux et néo-démocrates comprenaient auparavant. On ne peut justifier quelque abus de pouvoir que ce soit simplement parce qu'on désapprouve les gestes de certains manifestants.

[Français]

    Madame la Présidente, on voit que la situation a quand même changé durant les 48 dernières heures. Les camionneurs sont partis, et la plupart des contestataires aussi.
    Le député de Rosemont—La Petite-Patrie, du NPD, a dit aux nouvelles que, si les camionneurs partaient, le NPD pourrait reconsidérer sa décision.
     Les camionneurs sont partis d'Ottawa et il n'y a plus d'urgence nationale. Si le premier ministre décidait de tenir un vote libre sur cette importante question, mon collègue pense-t-il qu'il y aurait de la dissension chez les libéraux et que certains députés pourraient voter contre le recours à la Loi?

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'ai très clairement exprimé dès le départ à quel point je suis contre ces mesures d'urgence. J'estime que les forces de l'ordre ont déjà tous les outils dont elles ont besoin. Il n'y a aucun doute là-dessus. De plus, personne ne peut douter — même les personnes qui n'étaient pas convaincues de prime abord — qu'au moment où la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée, les barrages à la frontière avaient déjà été démantelés ou que les forces de l'ordre étaient sur le point de les démanteler. Il est absurde de poursuivre les démarches pour appliquer les mesures d'urgence quand les manifestations et les barrages n'existent plus. Que ce soit bien clair: je crois que ces mesures d'urgence étaient injustifiées, initialement et à tout autre moment.

  (2400)  

    Madame la Présidente, je comprends que le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan est un homme qui apprécie la logique. Je vais donc lui fournir des arguments logiques qui préoccupent certains députés de ce côté-ci de la Chambre. Premièrement, les manifestants revendiquent l'importance de la liberté d'expression, mais ils ont agressé un journaliste. Deuxièmement, ils sont contre les mesures de confinement, mais ils ont forcé le confinement des résidants et des entreprises du centre-ville d'Ottawa. Troisièmement, il faut protéger les chaînes d'approvisionnement essentielles partout au pays, mais les chaînes d'approvisionnement de la propre province du député, l'Alberta, sont bloquées.
    Le député comprend-il à quel point les députés de ce côté-ci de la Chambre sont réticents à dialoguer avec ceux qui participent à de telles activités illégales?
    Madame la Présidente, dans n'importe quel autre contexte, le député saurait d'instinct que les généralisations auxquelles il se livre n'ont pas leur place. Comme si tous les manifestants avaient agressé des journalistes et qu'ils avaient tous pris sur eux de bloquer les frontières. C'est n'importe quoi. Le député devrait savoir que des dizaines de milliers de gens de partout au pays sont descendus dans la rue pour manifester contre les obligations injustifiables que le gouvernement leur impose et que bon nombre d'entre eux sont demeurés pacifiques. La plupart des manifestants n'ont aucun goût pour les barrages.
    Je ne crois pas avoir besoin de préciser que je suis contre la violence sous toutes ses formes. J'ai entendu dire qu'un journaliste avait été aspergé de gaz poivré, mais je ne sais pas si c'est par un policier ou quelqu'un d'autre. Peu importe qui les commet, les agressions contre les journalistes sont inacceptables, point à la ligne. Ce n'est toutefois pas représentatif de...
    Conformément à l'ordre adopté le jeudi 17 février, comme il est 0 h 2 et que le temps prévu aujourd'hui pour le débat sur cette question est écoulé, la Chambre reprendra l'étude de la motion de ratification à sa prochaine séance.

[Français]

    En conséquence, la Chambre s'ajourne à plus tard aujourd'hui, à 7 heures, conformément à l'ordre adopté le jeudi 17 février.
    (La séance est levée à 24 h 2.)
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