La procédure et les usages de la Chambre des communes
Sous la direction de Robert Marleau et Camille Montpetit
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Déroulement des débats en comité plénier

Les travaux des comités pléniers sont régis par le Règlement, dans la mesure où il est applicable, et par les usages établis de longue date [67] . Bien que les députés doivent attendre que le président leur donne la parole avant d’intervenir ou de proposer une motion, les discussions sont moins solennelles. Ainsi, les députés peuvent s’asseoir ailleurs qu’à la place qui leur est attribuée [68]  pour prendre la parole et voter, et ils peuvent intervenir plus d’une fois sur une même question [69] , mais ils ne sont pas autorisés à partager leur temps de parole [70] . La durée des interventions du premier ministre et du chef de l’Opposition n’est pas limitée [71] . Les députés disposent chaque fois de 20 minutes pour faire un discours, poser des questions ou obtenir des réponses [72] . Le président doit faire respecter la limite de 20 minutes de manière à laisser au ministre ou au parrain la possibilité de répondre à une dernière question à l’intérieur de ce délai. Comme à la Chambre, où les députés doivent s’adresser au Président, les intervenants doivent aussi s’adresser au président du comité [73] . Dans la pratique, toutefois, les députés s’adressent souvent les uns aux autres, posent des questions et reçoivent des réponses directement [74] . Au cours de ces échanges, les députés devraient toujours néanmoins se désigner par le nom de leur circonscription comme il est d’usage à la Chambre [75] .

De manière générale, les règles et pratiques qui régissent les motions présentées à la Chambre s’appliquent aussi en comité plénier, sauf qu’il n’est pas nécessaire que les motions soient appuyées [76] . Les motions proposant « que la président se lève et fasse rapport de l’état de la question [77]  » et « que le président quitte le fauteuil [78]  », qui sont propres à un comité plénier, sont adoptées ou rejetées sans débat ou amendement. Une fois proposées, les motions ne peuvent être retirées que par le motionnaire et qu’avec le consentement unanime du comité [79] . Lorsqu’un amendement est proposé, le débat doit porter sur l’amendement tant que le comité ne s’est pas prononcé sur celui-ci.

Quorum

La Loi constitutionnelle de 1867 et le Règlement de la Chambre fixent un quorum de 20 députés, le Président compris, pour « constituer une assemblée de la Chambre dans l’exercice de ses pouvoirs  [80]  ». Le quorum d’un comité plénier est également de 20 députés [81] . Si un député porte à l’attention du président qu’il n’y a pas quorum en comité plénier, le président compte les députés présents [82] . S’il n’y a pas 20 députés présents, le président se lève sans demander l’autorisation de faire rapport et de siéger à nouveau. Le Président de la Chambre reprend le fauteuil [83] , la Chambre reprend ses travaux, le président du comité signale qu’il n’y a pas quorum et le Président compte le nombre de députés à la Chambre. Si le Président constate qu’il y a quorum, le comité reprend ses travaux [84] . S’il n’y a pas quorum, on actionne la sonnerie jusqu’à ce qu’il y ait quorum et le comité reprend alors ses travaux. Si la sonnerie marche toujours au bout de 15 minutes, le Président suspend les travaux jusqu’au prochain jour de séance [85] . Toute question dont l’examen est interrompu par l’absence de quorum reste au Feuilleton et y garde son rang pour la séance suivante, lorsque la Chambre sera appelée à se constituer en comité plénier [86] . Le comité reprend alors ses travaux où il les avait interrompus.

La règle de la pertinence et le désordre en Comité plénier

Les discours en comité plénier doivent porter précisément sur la question ou l’article à l’étude [87] . Si le discours d’un député est sans rapport avec le débat, le président peut rappeler le député à l’ordre et, au besoin, le prévenir qu’il risque d’être dénoncé à la Chambre [88] . Le débat général sur l’article 1 (ou l’article 2 si cet article se résume au titre abrégé de la loi) constitue une exception à la règle de la pertinence qui s’est établie avec le temps [89] . Certaines restrictions ont néanmoins été imposées pour l’étude de l’article 1, dont l’interdiction de reprendre le débat en deuxième lecture et d’anticiper sur le débat article par article [90] . Le débat doit en outre se limiter au contenu du projet de loi [91] . Une autre restriction s’applique lorsqu’un amendement est proposé à l’article 1 : les interventions doivent se limiter à l’amendement tant que la Chambre ne s’est pas prononcée [92] .

Le président est habilité à maintenir l’ordre en comité plénier et à trancher toutes les questions d’ordre [93] . Cependant, si un député persiste à s’éloigner du sujet de la discussion ou à répéter des choses déjà dites, s’il refuse de retirer des propos non parlementaires ou de se rasseoir lorsqu’il est prié de le faire, ou si les délibérations deviennent désordonnées et que le président est incapable de rétablir le décorum en comité, le président peut se lever et faire rapport de l’incident au Président de la Chambre sans demander la permission du comité [94] . Le Président reprend alors le fauteuil, reçoit le rapport du président du comité, traite la question comme si l’incident s’était produit à la Chambre et peut subséquemment désigner le député par son nom [95] . Dans le cas de propos non parlementaires, le Président peut demander au député de retirer ses paroles. Une fois la question réglée, le comité reprend ses travaux sans qu’une motion ne soit proposée. Dans les cas d’un grave désordre en comité plénier, il est arrivé que le Président de la Chambre reprenne le fauteuil sans attendre que le président en fasse rapport [96] .

Questions de privilège

La Chambre siège rarement en comité plénier, mais lorsqu’elle le fait, les délibérations ne prennent habituellement que quelques minutes; il est donc rare de nos jours que des questions de privilège soient soulevées en comité plénier. La procédure suivie est néanmoins la même que dans tout comité permanent, législatif ou spécial. Le président du comité n’est pas habilité à décider s’il y a eu atteinte au privilège [97] . Il entend la question de privilège et peut accepter qu’on présente une motion lui demandant de faire rapport à la Chambre de certains événements qui se sont produits en comité [98] . Si le comité décide qu’il faut faire rapport à ce sujet, le président se lève, le Président de la Chambre prend le fauteuil et le président du comité fait rapport sur la question de privilège [99] . Le Président examine alors la question. S’il juge que la question de privilège paraît fondée de prime abord, un député peut présenter une motion à ce sujet [100].

Le Président acceptera d’entendre une question de privilège à l’égard d’une affaire qui s’est produite en comité plénier seulement si ce dernier l’a d’abord examinée et en a fait rapport à la Chambre [101] .

Lorsque la Chambre est constituée en comité plénier, aucun député ne peut soulever une question de privilège qui a trait aux privilèges de la Chambre dans son ensemble; un député peut toutefois proposer une motion demandant au comité de suspendre ses travaux et de faire rapport afin que le Président de la Chambre puisse être saisi de la question de privilège [102] .

Interruptions

Lorsque les travaux d’un comité plénier sont interrompus pour que la Chambre puisse passer aux affaires inscrites à l’ordre du jour quotidien (par exemple, à 14 heures les lundi, mardi et jeudi, et à 11 heures le vendredi, pour les déclarations des députés et la période des questions, ou encore pour donner suite à un vote par appel nominal prévu), ou s’il est impossible au comité de terminer ses travaux avant la fin de la période prévue pour les initiatives ministérielles [103] , le président du comité interrompt les travaux et lève la séance. Le Président réintègre le fauteuil et le comité fait rapport à la Chambre sur ses travaux en demandant l’autorisation de les reprendre plus tard dans la journée ou à la prochaine séance. La Chambre reçoit alors le rapport et autorise le comité à siéger à nouveau plus tard dans la journée ou à sa prochaine séance [104] . Le comité peut reprendre ses travaux après l’interruption si l’ordre est remis en délibération [105] .

Si une affaire qui exige l’attention de la Chambre surgit (par exemple, une cérémonie de sanction royale), le Président reprend le fauteuil immédiatement sans attendre que le comité interrompe ses travaux et fasse rapport [106] . Lorsque cette affaire est réglée, le comité reprend ses travaux. Ces derniers ne sont pas interrompus par les messages reçus du Sénat, puisque le Président ne fera rapport à la Chambre à ce sujet qu’une fois que le comité aura levé la séance et fait rapport, mais avant de passer à tout autre point de l’ordre du jour [107] .

Prolongation du débat

Un député peut proposer, sans préavis, une motion visant à prolonger la séance au-delà de l’heure habituelle d’ajournement quotidien pour poursuivre l’étude d’une affaire précise, seulement si le Président occupe le fauteuil [108] . Lorsque la Chambre siège en comité plénier, un député doit signaler son intention de proposer une telle motion; le président interrompt alors les travaux et, sans faire rapport de l’état de la question, se lève afin que la motion puisse être présentée selon les règles et que la Chambre puisse se prononcer pendant que le Président occupe le fauteuil [109] . La motion ne peut faire l’objet d’un débat ou d’un amendement [110] . Elle est adoptée automatiquement à moins que 15 députés qui s’y opposent se lèvent à leur place lorsque le Président met la question aux voix, auquel cas la motion est réputée retirée [111] . Il est arrivé que la Chambre adopte des ordres spéciaux visant à prolonger une séance afin de terminer l’étude d’un projet de loi en comité plénier [112] .

Clôture

Le Règlement prévoit une procédure qui permet au gouvernement d’obliger la Chambre à se prononcer sur n’importe quel projet de loi ou motion à l’étude. Ce mécanisme s’appelle la clôture [113] . Si la clôture est moins fréquente aujourd’hui parce que la procédure du comité plénier est peu utilisée, il est encore possible de l’invoquer. Une fois qu’un débat est amorcé en comité plénier, la clôture peut être imposée à l’égard d’une motion, de l’ensemble de l’étude d’un projet de loi à l’étape du comité, de son titre, de son préambule ou de ses articles, pris séparément ou regroupés, ou encore des amendements ou sous-amendements. La clôture peut en outre être proposée pour les articles d’un projet de loi dont on n’a pas encore entrepris l’étude [114] .

Avant qu’on puisse proposer la clôture des débats sur une question à l’étude en comité plénier, un ministre doit en avoir donné un avis oralement lors d’une séance antérieure, normalement mais pas nécessairement pendant l’étude de la question en comité plénier [115] . Si l’avis est donné à un autre moment, on attend habituellement le début du débat sur cette question, que ce soit lors d’une séance antérieure ou plus tôt au cours de la même séance. Quand l’avis a été donné oralement, un ministre peut alors proposer « que le comité procède en premier lieu au nouvel examen de toute résolution ou tout article, paragraphe, préambule ou titre, et que cet examen ne soit pas différé davantage [116]  ». Une telle motion de clôture est proposée avant que le comité ne reprenne l’étude de la question visée par cette motion.

Une fois proposée, une motion de clôture est décidée sans débat ni amendement [117] . La motion est mise aux voix, et le vote peut être tenu. Si la motion est adoptée, la durée des interventions des députés est limitée : chacun ne peut prendre la parole qu’une fois sur la question, et ce, pendant au plus 20 minutes [118] . La séance peut être prolongée, mais le débat prend fin au plus tard à 23 heures le même jour, et le président met alors aux voix toutes les questions nécessaires pour terminer l’étude de la question [119] .

Une fois achevée l’étude du projet de loi frappé de clôture, le président en fait rapport à la Chambre avec ou sans amendement. Puis, une motion d’adoption du projet de loi à l’étape du rapport est proposée et mise aux voix sans débat [120] . Si le projet de loi est adopté à l’étape du rapport et que la période normalement réservée aux initiatives ministérielles n’est pas terminée, la Chambre peut alors procéder immédiatement à la troisième lecture [121] . Si le projet de loi est adopté à l’étape du rapport et que la séance s’est prolongée au-delà de l’heure normale d’ajournement quotidien, la troisième lecture est alors fixée à la prochaine séance et la Chambre suspend ses travaux [122] .

Attribution de temps

Le Règlement prévoit un mécanisme, appelé attribution de temps, pour limiter la durée des débats sur les projets de loi [123] . L’attribution de temps ressemble sous certains rapports à la clôture; elle permet au parti ministériel de négocier avec les partis de l’opposition en vue d’établir à l’avance un échéancier pour l’étude d’un projet de loi d’intérêt public à une ou plusieurs étapes du processus législatif, dont celle du débat en comité plénier. Le recours à l’attribution de temps est rare en comité plénier, car les projets de loi qui lui sont renvoyés ne prêtent généralement pas à controverse et suscitent habituellement peu de débats, ou encore ils portent sur des questions politiques importantes qui ont donné lieu à des ententes sur l’aménagement du temps de la Chambre [124] .

Interdiction de proposer la question préalable

On appelle « question préalable » une motion proposant « que cette question soit maintenant mise aux voix ». Elle vise, lorsque proposée et débattue à la Chambre, à bloquer tout amendement à la motion principale et à provoquer un vote direct sur celle-ci, ou à retarder la mise aux voix de la motion principale en prolongeant le débat [125] .

Il est interdit de proposer la question préalable en comité plénier, comme dans tout autre comité [126] . Comme un projet de loi est renvoyé à un comité plénier pour étude article par article, la proposition de la question préalable empêcherait les députés de proposer des amendements et de consacrer à l’examen du texte tout le temps nécessaire.

Ajournement du débat

Un comité plénier n’est pas habilité à ajourner sa propre séance ou à reporter l’étude d’une question à une autre séance [127] . S’il n’a pas terminé l’étude d’une question à l’heure habituelle d’ajournement quotidien, ou si l’ordre du jour prévoit que la Chambre passe aux affaires émanant des députés ou au débat sur la motion d’ajournement, le président interrompt les travaux et se lève. Le Président reprend le fauteuil et le comité fait rapport de l’état de la question à la Chambre et lui demande de poursuivre ses travaux à la prochaine séance [128] . Le Président déclare alors, pour la forme : « Quand le rapport sera-t-il reçu? Maintenant. Quand le comité pourra-t-il siéger de nouveau? À la prochaine séance de la Chambre. Il en est ainsi ordonné. »

Pendant l’étude d’un projet de loi ou d’une motion en comité plénier, un député peut se lever et proposer que le président se lève et fasse rapport de l’état de la question [129] . Une motion demandant que « le président fasse rapport de l’état de la question » équivaut à une motion d’ajournement du débat [130] . Autrement dit, si la motion est adoptée, elle met un terme au débat sur l’affaire à l’étude ce jour-là. Si elle est rejetée, le comité continue de siéger et une nouvelle motion dans ce sens ne peut être proposée que si le comité procède, dans l’intervalle, à une autre opération [131] .

Après qu’un comité plénier a interrompu ses travaux, fait rapport de l’état de la question et obtenu l’autorisation de siéger à nouveau à la prochaine séance, la Chambre se forme en comité plénier quand l’ordre est appelé à nouveau et le comité reprend ses travaux [132] .

Conclusion du débat

Un député peut mettre immédiatement fin aux délibérations en comité plénier s’il propose une motion demandant « que le président quitte maintenant le fauteuil » et que la motion est adoptée. Une telle motion est toujours recevable; elle ne peut faire l’objet d’un débat et, si elle est adoptée, elle remplace la question dont le comité est saisi [133] . Si la motion est mise aux voix et adoptée, le comité lève la séance sans faire rapport à la Chambre et l’affaire dont le comité était saisi disparaît du Feuilleton [134] . Si le comité la rejette, la question ne peut être mise aux voix de nouveau si le comité n’a pas, dans l’intervalle, procédé à une autre opération [135] .

Votes

Lorsque le président met aux voix un projet de loi, un article ou une motion, le ou les opposants peuvent demander un vote par assis et debout [136] ; autrement, le président déclare que le projet de loi, l’article ou la motion est adopté avec dissidence ou rejeté à la majorité (signalant ainsi qu’il y a opposition sans demander un vote par assis et debout) [137] . Il n’est pas nécessaire que cinq députés se lèvent pour exiger un vote par assis et debout comme c’est le cas à la Chambre [138] . En comité plénier, les noms des députés qui votent pour ou contre une mesure ne sont pas consignés, et la sonnerie n’est pas actionnée pour convoquer les députés [139] . Les députés présents se lèvent simplement par rangée et un greffier au Bureau les compte. Il n’est pas nécessaire que les députés soient à leur place. Comme c’est le cas à la Chambre, pendant le déroulement du vote en comité plénier, aucun député ne peut entrer dans la salle [140] , et le président n’accepte aucun rappel au Règlement [141] . Les députés en faveur de la motion qui sont assis à la droite du président se lèvent en premier et le président leur demande de se rasseoir une fois que leur rangée a été comptée. La même procédure est suivie pour les députés assis à la gauche du président et on procède ensuite d’une manière identique pour les opposants. Après le dénombrement, un greffier se place à l’extrémité du Bureau et annonce le nombre de « oui » et de « non » au président. Celui-ci déclare alors la motion adoptée ou rejetée [142] . Il n’y a pas de pairage des députés pour les votes en comité plénier étant donné qu’on ne note pas les noms de ceux qui ont voté dans un sens ou dans l’autre [143] .

Le président ne vote pas en comité plénier, mais il dispose d’une voix prépondérante lorsqu’il y a égalité; il doit alors suivre les règles prévues pour le Président de la Chambre en pareille situation [144] . Le président d’un comité plénier vote habituellement de manière à permettre aux députés de se prononcer une nouvelle fois sur la question (c’est-à-dire de façon à maintenir le statu quo) [145] .


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