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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 19 mars 1998

• 1532

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je vais ouvrir la séance. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement nous étudions la préparation de la technologie de l'information en vue de l'an 2000.

Nous poursuivons aujourd'hui nos délibérations sur l'an 2000 et l'état de préparation des petites et moyennes entreprises du Canada et les effets sur les consommateurs.

Nous entendons aujourd'hui deux témoins: Diane Brisebois, présidente et directrice générale du Conseil canadien du commerce de détail et M. Brian Collinson, directeur de la politique commerciale de l'Alliance of Manufacturers and Exporters of Canada.

Je propose que les deux témoins fassent leur déclaration liminaire avant que nous leur posions des questions.

Madame Brisebois, je vous prie.

Mme Diane J. Brisebois (présidente et directrice générale, Conseil canadien du commerce de détail): Je vous remercie.

[Français]

Je dois m'excuser parce que nous ne sommes malheureusement pas en mesure de vous présenter la version française de notre rapport aujourd'hui. Notre préparation en vue de cette séance s'est avérée un plus grand défi que la préparation pour l'an 2000, si je puis dire. Nous nous assurerons de vous faire parvenir tous les renseignements en français à la suite de cette rencontre.

[Traduction]

Le Conseil canadien du commerce de détail est heureux de cette invitation à vous faire part du point de vue des détaillants concernant leur préparation à l'an 2000.

Je vais arrêter là ma lecture, puisque je sais que vous avez reçu le texte de notre rapport. Il serait peut-être plus utile que je vous en résume le contenu plutôt que d'en faire lecture. J'ajouterai ensuite quelques mots et attendrai le deuxième exposé. Nous pourrons peut-être ainsi passer plus de temps à répondre aux questions qui intéressent plus particulièrement le comité.

Permettez-moi simplement de commencer par dire que le Conseil canadien du commerce de détail représente 6 500 détaillants dans tout le pays, ainsi qu'une centaine d'associations sectorielles. Le commerce de détail emploie plus de 1 200 000 Canadiens et a réalisé en 1997 un chiffre d'affaires supérieur à 225 milliards de dollars.

Au milieu de 1997, le Conseil canadien du commerce de détail a effectué une enquête dans le secteur—auprès de petits, moyens et gros détaillants—pour déterminer leur degré de préparation à l'an 2000.

Nous avons trouvé intéressantes les réponses à une question en particulier. En gros, nous avons demandé aux détaillants, vers le milieu de 1997, de classer le degré de préparation à l'an 2000 de leur société sur une échelle de un à dix, dix signifiant «prêt». La plupart, initialement, choisissaient quatre mais, après avoir discuté de la question plus en détail au téléphone et dans des réunions de groupes cibles, la note se rapprochait de deux.

• 1535

Ce qui est encore plus effrayant, c'est que les résultats étaient identiques chez les vendeurs, c'est-à-dire les fabricants de produits de consommation, de même que chez les vendeurs de logiciels et matériel informatique censés fournir une aide pour la préparation à l'an 2000.

Nous avons répété l'enquête le mois dernier et nous sommes heureux de dire que la note est passée de deux à environ cinq et demi, les membres plus importants étant proches de sept et les petits plus proches de quatre.

[Français]

Il n'y a aucun doute que le problème existe plus particulièrement au niveau des petites et moyennes entreprises dans le secteur du détail. Les grandes entreprises sont beaucoup mieux préparées que la plupart de celles qu'exploitent nos membres. Les grandes entreprises représentent quand même un important volume dans le marché, bien que leur nombre ne s'élève qu'à environ 100. Nous représentons plus de 6 500 petites et moyennes entreprises. Il y a donc un très gros problème.

[Traduction]

À la page trois du rapport, nous vous donnons une description plus détaillée des problèmes très concrets que les détaillants doivent régler sur le plan de la préparation à l'an 2000, ou de la conformité à l'an 2000—toutes sortes d'expressions circulent à cet égard. Comme vous pouvez le voir, le programme de conformité du secteur est très complexe, simplement à cause du genre d'opérations effectuées par les commerces pour fournir le produit au point de vente.

L'un des plus gros défis pour le détaillant canadien, et qui est mis en évidence par le rapport, est que près de 70 p. 100 de nos détaillants dépendent de l'importation. Ils se fournissent en Asie et dans des pays du tiers monde. Dans les quelques recherches que nous avons effectuées par le biais des missions commerciales, la réponse que nous recevions en provenance de la plupart de ces pays est qu'il n'y a pas de problème. Je pense que le comité sait parfaitement bien que cette réponse est déjà en soi un très gros problème.

Bien que nous soyons très préoccupés par le manque de préparation au Canada, nous pouvons néanmoins dire que nous sommes en avance sur nos partenaires d'Asie, à de rares exceptions près, et certainement du tiers monde.

Pour vous donner une meilleure idée de la manière dont nous avons réagi au problème de l'an 2000 en tant qu'association, nous avons inclus à la page quatre du rapport certaines des mesures que nous avons prises pour aider les détaillants à se préparer à l'an 2000 et à mettre en route leurs programmes de conversion.

Comme la plupart des grandes associations professionnelles, nous sommes très actifs dans ce domaine. Cependant, notre plus grosse difficulté est d'amener nos membres de moindre envergure—les petits et moyens commerces—à admettre que le problème ne va pas se régler tout seul.

Au haut de la page trois du rapport, j'ai ajouté quelque chose qui devrait vous intéresser. Lorsque nous avons reçu les résultats de l'enquête, nous avons constaté que la majorité des petits et moyens commerces membres étaient convaincus de trois choses: le problème ne va pas me toucher moi ou mon entreprise, et même si c'est le cas, ce ne sera un problème qu'à partir du 1er janvier 2000; la solution magique existe quelque part et on va la découvrir; et on exagère le problème de l'an 2000.

Cette enquête a été menée dans le courant de l'été et de l'automne 1997, et nous avons malheureusement constaté que ces réponses étaient encore fréquentes en 1998, à un moment où ils devraient déjà avoir commencé les essais avec leurs partenaires. Ils accusent donc un gros retard.

Sans vouloir m'étendre trop longtemps, car je veux laisser plus de temps pour les questions, j'attire votre attention sur la page six où figurent nos recommandations. Elles sont très brèves. Elles peuvent sembler de caractère général, mais donnez-moi quelques instants pour vous expliquer.

La première, qui est évidente, affirme notre adhésion aux recommandations du Groupe de travail sur l'an 2000.

Deuxièmement, le conseil exhorte le comité à envisager des solutions adaptées aux petites entreprises, sous forme d'éducation, de la recherche de solutions de prix abordable et de programmes d'aide financière.

Troisièmement, le conseil estime que le comité et le gouvernement du Canada peuvent aider tous les détaillants, et en particulier les petits commerces, en instaurant un programme visant à assurer que tous les logiciels et matériels informatiques vendus au Canada soient exempts du bogue de l'an 2000.

• 1540

Permettez-moi de conclure en disant que ce problème est notre plus grosse source de préoccupation et notre plus gros défi. Nombre de nos commerces petits et moyens sont pris en otage à cause du coût des logiciels et parce qu'ils doivent faire appel à des experts de l'extérieur pour trouver l'assistance requise. Je peux vous assurer que cela est devenu un problème majeur dans notre secteur.

Pour environ 70 p. 100 de nos membres, la première préoccupation est qu'on leur demande maintenant 20 000 $ pour exactement le même logiciel qui coûtait 1 000 $ auparavant. C'est donc une grande source d'inquiétude, car ils ne doivent pas seulement se conformer, ils doivent aussi pouvoir survivre au-delà de l'an 2000 pour fournir les produits et services que leurs clients attendent.

Voilà mes remarques liminaires, madame la présidente. Je serai ravie de répondre à vos questions en anglais et en français.

La présidente: Je vous remercie, madame Brisebois.

Je vais maintenant donner la parole à M. Brian Collinson, de l'Alliance of Manufacturers and Exporters Canada.

M. Brian W. Collinson (directeur, politique commerciale, Alliance of Manufacturers and Exporters Canada): Merci beaucoup.

Madame la présidente et membres du comité, l'Alliance of Manufacturers and Exporters Canada vous remercie de votre invitation à comparaître devant vous sur cette question, qui est l'un des grands sujets de préoccupation de nos membres à l'heure actuelle.

Quelques mots pour vous présenter l'association. L'Alliance of Manufacturers and Exporters Canada est la voix des secteurs de la fabrication et de l'exportation canadiens dans leur ensemble. Collectivement, nos membres représentent plus de 75 p. 100 de la production manufacturière totale du Canada, les exportations canadiennes étant elles-mêmes constituées à environ 80 p. 100 de produits de fabrication.

Nous comptons parmi nos membres des entreprises de fabrication et de transformation de toutes tailles et de tous types, dans toutes les régions du pays, de même qu'un très large éventail de sociétés exportatrices. Étant donné la diversité de nos adhérents, nous possédons ce que nous estimons être un aperçu privilégié du problème de l'an 2000 et nous sommes devenus sensibilisés à certaines dimensions particulières de celui-ci, qui sont propres à nos secteurs.

Pour le secteur manufacturier en particulier, le problème de l'an 2000 comporte au moins cinq dimensions commerciales. Il y a non seulement le problème des ordinateurs personnels et des macro-ordinateurs, qui a été décrit en détail dans les médias par le Groupe de travail 2000 et qui est celui généralement qualifié de problème de l'an 2000.

En sus, nos membres sont confrontés à des difficultés particulières propres aux usines, des problèmes spécifiques liés à la chaîne d'approvisionnement, que certaines associations et d'autres secteurs partagent—certainement le secteur de la vente au détail partage ces préoccupations, mais ce n'est pas le cas de tous; des difficultés sur le plan de la connectivité, des réseaux et des télécommunications, elles aussi partagées avec le commerce de détail; l'inquiétude concernant la situation à l'étranger et dans d'autres parties du monde, du point de vue à la fois des importations et des exportations, dans notre cas.

Les problèmes généraux des ordinateurs personnels et des macro-ordinateurs ont été bien décrits et sont essentiellement de même nature dans les secteurs de la fabrication et de l'exportation que dans les entreprises en général. Je ne vais donc pas m'y attarder, afin de consacrer peut-être un peu plus de temps à la situation telle qu'elle se manifeste dans les usines.

Le secteur manufacturier n'a réalisé qu'assez récemment toute l'ampleur du problème dans les usines. Les entreprises de fabrication utilisent une vaste gamme de matériels spécialisés dans les ateliers, tels que des systèmes de commande électroniques programmables, des microprocesseurs spécifiques et des systèmes intégrés. Lorsque ces matériels fonctionnent bien, ils ne sont pas souvent remplacés. Contrairement à ce que l'on voit dans d'autres domaines où la technologie se renouvelle rapidement, dans les ateliers, une fois qu'une technologie fonctionne bien, on la conserve et on n'y touche pas.

De ce fait, les ateliers sont remplis d'équipements qui ne sont pas prêts pour l'an 2000. Les estimations faites par certains de nos membres clés indiquent que nettement plus de la moitié des équipements d'usine sont loin d'être prêts pour l'an 2000 et l'on estime que le coût de la solution de ce problème de machines sera à peu près le double de celui de la solution des problèmes de micro et macro-ordinateurs de ces organisations.

Pour une bonne partie de cette technologie, il n'y a pas de possibilité de faire les réparations automatiquement ou en usine, pas plus qu'il n'est possible de modifier les codes intégrés dans les puces qui contrôlent les machines d'atelier. Il faut passer en revue tous les matériels des usines et, lorsqu'une unité est douteuse, il faut carrément la remplacer. De nombreuses usines tournent en continu et cette réparation doit donc être effectuée en sus d'un calendrier d'entretien déjà encombré. Nos membres commencent à réaliser toute la dimension de ce problème et ce qui paraissait être un écueil sinon négligeable du moins relativement mineur apparaît maintenant plus difficilement surmontable.

• 1545

Parallèlement à cela, il y a aussi les difficultés au niveau de la chaîne d'approvisionnement. L'alliance s'inquiète particulièrement de l'intégrité des réseaux de fournisseurs qui forment la trame de l'industrie canadienne. Si certaines industries déploient beaucoup d'efforts pour garantir la préparation à l'an 2000 du réseau de fournisseurs, il n'est pas du tout évident à ce stade qu'il soit réellement possible pour toutes les entreprises d'assurer que leurs fournisseurs de troisième et quatrième rang—c'est-à-dire les fournisseurs des fournisseurs des fournisseurs etc.—seront réellement prêts pour l'an 2000 et que des mécanismes seront en place pour le garantir à ce stade.

Sachant qu'une défaillance stratégique d'un fournisseur peut mettre en panne toute une industrie, l'alliance estime impératif d'établir des mécanismes efficaces pour assurer que tous les fournisseurs des fabricants soient préparés pour l'an 2000.

Pour ce qui est de la connectivité, des réseaux et des communications, ces problèmes sont complexes et divers. Je répondrai avec empressement aux questions que les membres du comité pourraient avoir à cet égard, et je signale simplement ici que ces dimensions du problème ajoutent grandement à la complexité de la solution de l'an 2000 que les fabricants devront mettre en oeuvre.

Pour ce qui est des exportations, l'une des dimensions les plus sérieuses du problème de l'an 2000 intéresse le niveau de préparation dans d'autres parties du monde. Nombre de nos partenaires commerciaux sont à un degré de préparation à l'an 2000 nettement moindre que l'Amérique du Nord et il semble probable que le problème de l'an 2000 entraînera une perturbation grave des relations commerciales. C'est particulièrement vrai en Asie, où il se pose des problèmes spécifiques, même dans des pays avancés comme le Japon. Ces problèmes sont liés à l'écriture kanji utilisée dans les ordinateurs et le fait que la technologie mise au point en Amérique du Nord n'est pas facilement transposable au système de caractères japonais. Les difficultés sont également très sérieuses dans les pays moins développés qui utilisent une technologie plus ancienne.

Malheureusement, d'après les renseignements que nous obtenons du secteur informatique, il ne semple pas que le Canada soit en mesure d'offrir une aide directe conséquente pour résoudre ce problème, hormis des encouragements insistants.

Il n'y a guère de doute que le problème de l'an 2000 aura un effet économique négatif sur les économies canadiennes, nord-américaine et mondiale. Les chiffres avancés par les économistes varient, mais une estimation courante prévoit la perte de peut-être « p. 100 du PIB, mais avec une probabilité de 40 p. 100 que le problème de l'an 2000 entraîne un ralentissement économique substantiel.

S'il est risqué de vouloir chiffrer l'impact en dollars, on cite fréquemment le chiffre de 600 milliards de dollars US comme coût de la solution à l'échelle mondiale. Cependant, certains experts commencent à dire que cette estimation n'englobe pas tous les coûts réels, à cause des difficultés liées aux langues qui ne peuvent être converties automatiquement et parce que le coût des machines-outils et des systèmes intégrés a été sous-estimé dans les prévisions antérieures.

Il existe d'importants problèmes juridiques et de contentieux qui préoccupent les petites et moyennes entreprises et les secteurs de fabrication et d'exportation en général. Le problème de l'an 2000 pourrait bien être la plus grande source de procès de l'histoire. Il faut s'attendre à des poursuites en justice mettant en jeu la responsabilité des administrateurs et dirigeants, la négligence professionnelle, la responsabilité du fait des produits et l'inexécution d'engagements. Ces frais juridiques pourraient bien nuire plus avant à l'économie et entraîner un énorme détournement de ressources au détriment de la productivité économique. L'alliance exhorte le gouvernement du Canada à faire tout ce qui est en son pouvoir pour élaborer d'autres mécanismes de règlement des différends entre entreprises à propos du problème de l'an 2000.

Nos membres sont tout aussi préoccupés par l'état de préparation de l'infrastructure canadienne et du gouvernement canadien. Au vu du rapport du vérificateur général et de celui du Groupe de travail 2000, l'alliance est gravement préoccupée par le degré de préparation des pouvoirs publics canadiens, à tous les paliers, et exhorte le gouvernement fédéral et les autres paliers à assurer rapidement leur propre préparation à l'an 2000, car cela a un impact immense sur toute une gamme d'activités des entreprises.

• 1550

Je vais maintenant passer rapidement à nos recommandations. Comme je l'ai déjà dit, pour préserver la santé des entreprises et de l'industrie au Canada, nous considérons que le gouvernement doit faire tout en son pouvoir pour souligner la gravité des problèmes de l'an 2000 à l'intention des entreprises canadiennes, et en particulier des petites. Il devrait rechercher les moyens à la fois de sensibiliser la collectivité d'affaires à tous les aspects du problème et d'aider les petites et moyennes entreprises à élaborer des stratégies internes en vue de régler le problème.

Deuxièmement, nous pensons que le gouvernement du Canada devrait utiliser tous les moyens à sa disposition pour assurer que l'infrastructure gouvernementale et quasi gouvernementale essentielle aux entreprises et à l'industrie atteigne le niveau nécessaire de préparation à l'an 2000 et assurer qu'une stratégie transparente à l'échelle de l'administration soit mise en place.

Troisièmement, l'alliance recommande que le gouvernement prenne toutes les mesures possibles en matière de ressources humaines et d'immigration pour accroître le bassin de main-d'oeuvre possédant la compétence technique nécessaire pour contribuer à la solution du problème.

Il conviendrait d'envisager peut-être des mesures pour encourager les retraités ayant des connaissances de programmation et techniques pertinentes à réintégrer la main-d'oeuvre.

Quatrièmement, de concert avec les gouvernements provinciaux, les barreaux provinciaux et les associations professionnelles concernées, le gouvernement devrait entreprendre un examen poussé de mécanismes non judiciaires de règlement des différends afin de prévenir un raz-de-marée d'actions en justice liées à l'an 2000, dont l'ampleur pourrait tout autant perturber l'économie que le problème lui-même.

En outre, à l'instar de nos amis du Conseil du commerce de détail, nous voulons réaffirmer notre adhésion aux recommandations du Groupe de travail 2000.

Merci beaucoup de cette occasion de prendre la parole, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup de vos remarques liminaires, monsieur Collinson.

Nous allons maintenant passer à la période de questions et je commencerai avec M. Schmidt.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Merci beaucoup de votre comparution. Vous représentez probablement l'une des associations ayant la plus grande envergure, du point de vue de la variété des gens que vous représentez et avec lesquels vous êtes en contact dans les divers secteurs, et il convient donc d'accorder beaucoup de poids à ce que vous dites. En effet, vous représentez des milliers d'entreprises de ce pays.

J'ai été particulièrement frappé, madame Brisebois, lorsque vous avez dit que le fait que les gens ne voient pas de problème est la première indication de ce que, oui, il y a effectivement un problème—le fait qu'ils ne sachent pas reconnaître un problème lorsqu'il y en a un. C'est l'absence de cette prise de conscience qui est le cauchemar de ce comité et de beaucoup d'autres. J'ai remarqué que Global Television était ici au début de la séance...

Outre les enquêtes que vous avez effectuées, auriez-vous des suggestions concrètes à faire en sus des recommandations que vous formulez ici pour faire surgir l'étincelle dans l'esprit de ces cadres d'entreprise, et en particulier des chefs de petites entreprises, afin qu'ils comprennent qu'il y a un problème réel et qu'ils en sont un élément du fait qu'ils ne le voient pas?

Que pouvons-nous faire? M. Collinson recommande certes que nous fassions tout ce qui est en notre pouvoir. C'est précisément pourquoi nous sommes là. C'est précisément ce que nous essayons de faire, mais nous nous heurtons à une inertie, à une passivité, remarquables.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Pourrais-je ajouter un complément à cette question? Est-ce contraire aux règles ou pourrais-je juste ajouter quelque chose?

La présidente: Vous pouvez user de son temps.

M. Eric Lowther: Je regarde vos quatre recommandations, et elles appellent toutes le gouvernement du Canada à faire quelque chose, mais il n'y a pas de recommandation appelant les entreprises à faire le genre de choses dont parle M. Schmidt.

M. Werner Schmidt: Oui, pour agir sur les deux tableaux?

Mme Diane Brisebois: Le Conseil du commerce de détail souscrit également à vos recommandations, et je vais donc me lancer la première pour répondre à cela.

En disant que nous appuyons le document appelant à agir montre que nous ne demandons pas seulement au gouvernement de faire quelque chose. En effet, il attribue quantité de responsabilités à l'industrie, aux associations et au secteur des services. Cependant, si vous rassemblez toutes ces associations professionnelles dans une même pièce, le consensus sera que le gouvernement a gardé un profil très bas sur la préparation à l'an 2000.

• 1555

On ne voit pas grand-chose dans les médias. Moi qui représente beaucoup d'entreprises indépendantes, je peux vous dire que ce gros manuel est bien joli, mais pour nos membres, la planification à long terme est quelque chose que l'on remet au lendemain. Donc, si vous avez un message très urgent à leur faire comprendre, il doit être simple. Il faut qu'il tienne en une ou deux pages.

Il faut aussi un appui derrière le message, sinon rien ne se fera. La réalité est que la concurrence est vive et ce sont les petites entreprises qui connaissent, je pense, le plus de difficultés. C'est vrai d'un bout à l'autre du pays.

Donc, d'une certaine façon, ce sont là les éléments que nous traitons ici, dans notre recommandation.

M. Brian Collinson: Si je puis juste ajouter quelques mots, nous sommes pleinement en accord avec ce que Mme Brisebois a dit.

Nous souscrivons pleinement aux recommandations du Groupe de travail 2000, en particulier à celle invitant les assureurs et banques à prendre les mesures nécessaires pour assurer que les entreprises soient prêtes.

Nous reconnaissons que le monde des affaires et les associations ont l'obligation de sensibiliser leurs membres à l'importance et à la gravité de ce problème. Nous ne ménageons pas les efforts en ce sens.

Mais pour reprendre l'un des propos de M. Schmidt, il y a quelque chose de presque surréel dans le manque de réceptivité et l'aveuglement auxquels ce message semble se heurter. Si je ne le voyais pas de mes yeux, j'aurais du mal à le croire. On voit des gens d'affaires rationnels et avisés se boucher les yeux. Je pense certainement qu'il nous incombe, en tant qu'association, de même qu'à toutes les associations et au gouvernement du Canada de tout faire pour secouer cette apathie.

M. Werner Schmidt: Ce qui m'intrigue réellement ici, c'est une discussion que j'ai eue avec certaines de nos plus grandes banques, de même que la remarque qui se trouve au bas de la page... je ne suis pas sûr du numéro de la page, mais il s'agit des retombées économiques du problème de l'an 2000, monsieur Collinson.

Je me demande, madame la présidente, si l'une des raisons pour lesquelles il y a cette dénégation n'est pas la crainte de voir surgir très rapidement une panique. Si les établissements bancaires ou les compagnies d'assurances reconnaissent le problème, c'est que c'est très grave. Peut-être l'argent sur mon compte va-t-il disparaître en fumée la nuit du 31 décembre.

Supposons que nous fassions un grand battage en disant: faites attention, voilà les risques, les ascenseurs pourraient ne pas fonctionner et toutes sortes d'autres choses pourraient arriver. Si nous annonçons qu'il y a 40 p. 100 de probabilité que l'an 2000 entraîne une récession économique, il y a fort à parier que cela sera reçu comme une raison de paniquer un peu, n'est-ce pas?

Serait-ce l'une des raisons pour lesquelles ces hommes d'affaires censément retors disent simplement qu'on ne les prendra pas à semer la panique? Nous voulons susciter cette prise de conscience et cette volonté de faire quelque chose, et en même temps éviter une panique.

Comment concilier les deux? Vous êtes tous deux des dirigeants hautement compétents. Pouvez-vous les aider et nous aider à trouver la solution?

M. Brian Collinson: Nous nous trouvons un peu dans la situation du médecin qui doit annoncer à son patient qu'il souffre d'une grave maladie cardiaque et que le moindre choc pourrait le tuer. Je suis loin de plaisanter.

Mais il faut se demander si risquer la panique et l'incertitude aujourd'hui n'est pas préférable à ce qui se passera si le problème n'est pas réglé et que les gens se retrouvent le 1er janvier 2000 dans une situation désastreuse.

Pour votre gouverne, je crois savoir qu'il n'y a aujourd'hui que deux hôpitaux—d'autres y travaillent peut-être—en Ontario qui ont un plan bien conçu pour l'an 2000. Il y a dans les hôpitaux une énorme quantité d'appareils à système intégré.

M. Werner Schmidt: C'est juste.

M. Brian Collinson: Je comprends votre souci d'éviter la panique, mais si nous ne secouons pas les gens maintenant, je pense que nous devrons nous préparer à une situation à la veille de l'an 2000 qui sera beaucoup plus chaotique et socialement désastreuse.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci beaucoup.

La présidente: Je signale simplement que ce qui est en train d'être distribué, c'est la page deux. Lorsque nous avons photocopié le rapport du Conseil du commerce de détail, la page deux manquait. La voici. Toutes mes excuses.

• 1600

La parole est à M. Bellemare.

[Français]

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Madame Brisebois, les grandes lignes du message que vous nous livrez semblent indiquer que l'industrie des marchands ne semble pas être prête pour faire face à l'année 2000 et qu'on peut prévoir des problèmes énormes, au point de vue économique d'abord. Tout le monde admet que ceux qui ne seront pas prêts s'exposeront à des litiges extraordinaires.

Les banquiers membres de l'Association des banquiers, les vice-présidents des banques et les représentants du domaine de la haute technologie qui ont comparu devant nous semblaient frissonner devant le mot «litige». Il me semble entrevoir une immense crainte de la part des super-gros de l'industrie canadienne. Je trouve effrayant que les marchands, comme les manufacturiers, ne se soient pas mis au pas pour régler le problème et attendent que les autres le règlent. Vous avez dit, tout comme le représentant des manufacturiers, que la responsabilité d'informer les gens incombait au gouvernement.

Puisque vous êtes des leaders, je voudrais tout d'abord vous demander si vous avez lu les procès-verbaux de nos réunions précédentes, madame Brisebois.

Mme Diane Brisebois: J'ai eu quelques renseignements au sujet de vos réunions, mais je dois avouer que la plupart des documents que nous avons eus ne nous indiquent rien de nouveau. Nous avons déjà entamé des discussions et des pourparlers avec le secteur bancaire et certaines compagnies comme IBM et Stentor.

J'aimerais corriger un de vos commentaires. On ne s'attend pas à ce que le gouvernement nous offre la pilule miracle. En fait, je pense que ce serait la mauvaise solution. Depuis plus d'un an et demi, le Conseil canadien du commerce de détail se penche sur cette question de la préparation à l'an 2000. Ce n'est pas tout le secteur du commerce, d'un bout à l'autre du Canada, qui connaît de gros problèmes. Ce sont surtout les petites et moyennes entreprises, qu'elles soient au niveau du détail, dans le secteur des services ou dans le secteur manufacturier, qui font face à ce problème universel.

C'est bien beau de discuter du problème de l'an 2000 avec Stentor, Ford ou Chrysler, qui sont de très grandes entreprises, mais en réalité, le problème n'existe pas à ce niveau mais plutôt au niveau des petites et moyennes entreprises, qui commencent tout simplement à s'apercevoir qu'il s'agit d'un problème sérieux et qu'on ne peut pas attendre jusqu'au 31 décembre 1999 pour le résoudre.

J'ajoute que nous pensons que nous devons assumer une très grande responsabilité. C'est pourquoi le Conseil canadien du commerce de détail a invité quelque 45 associations commerciales représentant les fournisseurs qui vendent à nos détaillants à participer à une conférence éducative que nous organiserons au mois de mai. Nous tiendrons des tables rondes où nous discuterons non pas des problèmes de Sears, de Canadian Tire, de Ford ou de Chrysler, mais des solutions à trouver pour les petites et moyennes entreprises. À mon avis, ces gestes et cette action sont très proactifs. Nous encourageons tous les autres secteurs et associations à faire de même.

Le point de vue que nous faisons prévaloir à la dernière page de notre rapport est en quelque sorte un message indiquant au gouvernement qu'il faut pousser le bouton et qu'il faut paniquer un petit peu.

• 1605

On sait qu'au niveau des petites et moyennes entreprises, la panique est beaucoup plus productive que le calme. La panique fait avancer les choses plus vite. Comme les petites entreprises sont en général des entreprises familiales, elles sont plus préoccupées par le lendemain que par l'an 2000. Elles n'ont pas toujours le temps de gérer leur entreprise en extrapolant vers l'an 2000 ou 2001. Il faut donc leur faire un peu peur pour qu'elles se rendent compte qu'elles doivent se préoccuper de ce sujet. J'espère avoir répondu à votre question.

[Traduction]

M. Eugène Bellemare: Monsieur Collinson, pensez-vous que le gouvernement devrait promulguer des lois pénalisant les entreprises ou les détaillants ou les fabricants qui ne seront pas prêts, mettons le 1er janvier 1999?

M. Brian Collinson: À mon avis, ce seul fait sera une pénalité suffisante.

Je pense que le secteur bancaire, le secteur financier, s'est déjà engagé à exiger un plan solide de préparation à l'an 2000—même chose pour les compagnies d'assurances, les commissions de valeurs boursières du pays à l'égard des sociétés cotées en bourse mais aussi à l'égard des compagnies faisant partie de réseaux de fournisseurs. De plus en plus, ces dernières devront démontrer à leurs clients qu'elles sont prêtes pour l'an 2000.

Je ne pense pas que des lois pénalisant les sociétés seraient une bonne méthode, car les sanctions du marché seront suffisantes. Mais je tends à convenir avec Mme Brisebois qu'il faut quelque chose pour secouer les petits entrepreneurs.

Il y a un peu une mentalité d'assiégé chez les petits entrepreneurs. Ce sont des gens auxquels notre association porte la plus grande estime, mais ils sont toujours aux prises avec des crises immédiates. Je pense qu'il faut leur faire comprendre que cette crise est plus grosse que cela, et l'une des façons les plus efficaces que nous ayons trouvées pour cela est de leur expliquer à quel point la profession juridique est en train de se préparer pour la vague des procès de l'an 2000.

Nos membres n'aiment pas beaucoup entendre parler de poursuites en justice...

Une voix: Comme nous tous.

La présidente: Allons, allons.

M. Brian Collinson: Comme nous tous. Néanmoins, nous avons trouvé quelques très bons communicateurs concernant le problème de l'an 2000, des avocats, qui commencent à communiquer et à diffuser le message auprès de nos membres sur la gravité du problème: les avocats le prennent au sérieux et les gens commencent à se mettre à la page, et vous devriez en faire autant.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Bellemare.

[Français]

Monsieur Dubé, s'il vous plaît.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): J'aurais deux questions préliminaires à poser. J'aimerais d'abord demander au représentant de l'Alliance, M. Collinson, s'il y a des membres du Québec dans son organisme.

[Traduction]

M. Brian Collinson: Absolument. De 25 à 30 p. 100 de nos membres sont au Québec, des sociétés de toutes tailles, depuis les plus grandes jusqu'aux plus petites.

[Français]

M. Antoine Dubé: Je pose la même question à madame Brisebois: avez-vous des membres qui viennent du Québec?

Mme Diane Brisebois: Oui, en fait, il y a une association associée au Conseil canadien qui s'appelle le Conseil québécois du commerce de détail. Je pense qu'on compte maintenant plus de 500 membres.

M. Antoine Dubé: Je vous pose la question parce que je suis un peu étonné de cet état de chose. Je le suis même encore plus par Mme Brisebois, qui est francophone et présidente-directrice générale. Vous nous présentez ici des textes en anglais seulement. On parle de l'an 2000, mais c'est un problème qui existe depuis au moins 200 ans. Le fait de présenter un texte en anglais seulement m'a d'abord frappé puis déçu, parce que vous n'êtes pas de petits organismes. Vous êtes de gros organismes avec de grandes capacités et, en plus, Mme Brisebois sait s'exprimer en français. En ce qui concerne le problème de l'an 2000, est-ce que vous avez communiqué en français avec vos membres pour les prévenir de cela?

Mme Diane Brisebois: Oui, absolument. Je m'excuse d'avoir apporté les textes en anglais seulement, mais comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, le rapport que vous avez devant vous a été préparé dans les dernières 24 heures et nous avons manqué de temps pour le traduire. Mais je peux vous assurer que la plupart des communiqués que nous envoyons à nos membres sont envoyés au Conseil québécois et sont traduits en français.

M. Antoine Dubé: Par vous ou par le Conseil québécois?

• 1610

Mme Diane Brisebois: Par le Conseil québécois en général, et certaines fois la traduction est faite à Toronto. Nos bureaux sont à Toronto et le Conseil québécois est à Montréal.

M. Antoine Dubé: J'ai une autre question. Il y a des francophones en Acadie et un peu partout ailleurs. Est-ce que c'est traduit par d'autres organismes?

Mme Diane Brisebois: Oui. Pour s'assurer qu'on reste bien sur le sujet de l'an 2000 et non sur le sujet de la francophonie et des langues au Canada, je vais répondre en disant que sur notre site Internet, on dit à nos membres que les documents sont disponibles dans les deux langues. Même si un document au sujet de l'an 2000 est seulement en anglais, nous le traduisons s'il est demandé en français. Je dis cela parce que ces documents sont dans notre bibliothèque mais ne nous appartiennent pas. Ils ont été publiés aux États-Unis, par exemple.

M. Antoine Dubé: Je vais vous dire pourquoi c'est d'actualité. J'ai vérifié dans ma circonscription, auprès des gens de la Chambre de commerce, qui réunit les petites entreprises, et j'ai constaté que les statistiques étaient encore plus basses chez nous. En effet, ils m'ont dit qu'ils ignoraient totalement vos travaux et qu'ils avaient été surpris de ce que je leur avais dit. J'ai aussi vérifié auprès de quelques députés du Québec, qui m'ont dit qu'ils avaient vaguement entendu parler de cela. Je pense que c'est un problème.

Il faudrait s'adresser aux entreprises dans leur langue. Il faudrait également faire un effort pour les entreprises autochtones. Cela semble être le problème de l'an 2000 et cela me préoccupe. Je voudrais que le message soit reçu et compris. Le gouvernement fédéral fait un effort de communication et je l'apprécie. Il y est obligé d'ailleurs, à cause de la Loi sur les langues officielles, mais il faudrait que les autres organismes, à l'échelle du pays, fassent la même chose.

Mme Diane Brisebois: Nous sommes tout à fait d'accord avec vous. Il n'y a pas d'excuse pour que le rapport ne soit pas en français et en anglais. Mais je voudrais dire qu'il a été préparé hier seulement et que nous n'avons pas eu le temps de le traduire. Je dois dire aussi qu'il est très important d'éduquer les gens dans les deux langues.

[Traduction]

La présidente: Avez-vous un rappel au Règlement, monsieur Schmidt?

M. Werner Schmidt: Oui, un rappel au Règlement. Cela fait maintenant près de cinq minutes que nous parlons de langue. La question ici est l'an 2000, pas la langue.

La présidente: Monsieur Schmidt, je prends note.

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Madame la présidente, par respect pour le témoin, peut-être M. Dubé n'a-t-il pas entendu le début, mais le témoin nous a expliqué au début de son exposé l'absence de traduction, et je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'y revenir.

La présidente: Je vous remercie.

M. Walt Lastewka: Vous étiez occupé, monsieur Dubé, et le témoin a expliqué cela.

La présidente: Elle l'a même expliqué en français, monsieur Dubé.

M. Werner Schmidt: Poursuivons.

M. Antoine Dubé:

[Note de la rédaction: Inaudible]

La présidente: Non, vos cinq minutes sont écoulées. Vous avez choisi de parler de langue.

Madame Jennings.

[Français]

M. Antoine Dubé: J'invoque le Règlement.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Dubé.

[Français]

M. Antoine Dubé: Quand on fait un rappel au Règlement, il est d'usage qu'on entende la réplique. Je ne le ferai pas ici, mais je voudrais être respecté en tant que francophone. C'est un règlement du comité. Ça va prendre juste une minute. Je voudrais dire que je souhaite que l'on en discute lors d'une prochaine réunion. Je ne veux pas blâmer indûment ces gens-là, parce qu'on aurait dû leur donner le délai nécessaire pour traduire ces documents afin qu'ils nous arrivent en français. Le monsieur à côté serait le premier à faire remarquer la chose s'il n'avait le document qu'en français.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Dubé, nous avons expliqué cela plusieurs fois lorsque vous ou Mme Lalonde avez soulevé la question. Les témoins ont le droit de comparaître devant le comité dans l'une ou l'autre langue officielle.

Une voix: Exactement.

La présidente: Ils ne sont absolument pas obligés de présenter leur mémoire dans les deux langues officielles. Si nous les recevons à temps, nous pouvons essayer de les faire traduire. Cependant, il n'y a pas de garantie, même si nous les recevons une semaine à l'avance, qu'ils soient traduits. Vu la manière dont ces audiences sont programmées et la manière dont ces textes sont envoyés au comité, nous n'avons pas toujours le temps.

Nos témoins ont pris le temps de rédiger ces rapports à notre intention, sur leur propre temps et à leurs frais, et nous leur en sommes reconnaissants. Lorsqu'ils peuvent être traduits, nous essayons de le faire, et nous continuerons d'essayer. Mais ils n'ont absolument aucune obligation de les fournir dans les deux langues officielles.

Cela dit, nous allons revenir à notre sujet, soit l'an 2000. Madame Jennings.

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Je vous remercie.

[Français]

Madame Brisebois, si j'ai bien compris, vous avez dit que 70 p. 100 de vos détaillants et vendeurs dépendaient des importations. Et si j'ai bien compris votre exposé ainsi que celui de M. Collinson ou d'autres dans le passé, les pays en voie de développement ne sont pas du tout préparés et n'ont pas conscience du problème.

• 1615

Donc, même si le Canada était déjà prêt pour l'an 2000, compte tenu qu'une bonne partie de notre économie dépend des importations, il y aurait quand même un impact économique.

Je reviens aux suggestions que vous avez faites. L'Alliance recommandait entre autres que le gouvernement entreprenne toutes les actions à sa disposition au niveau de l'immigration afin d'augmenter le bassin de travailleurs qualifiés dans ce domaine, ce qui pourrait aider à solutionner le problème au Canada. Mais en le faisant, on rendrait ces pays encore moins aptes à faire face à ce problème, parce qu'une bonne partie de ces gens viendraient justement des pays en voie de développement. Ce sont des gens qui ont été scolarisés et n'ont pas beaucoup de possibilités de travail parce que leurs pays ne sont pas tout à fait sensibilisés au sujet. Une fois qu'ils y seront sensibilisés, leurs travailleurs seront ici, au Canada. C'est dans l'hypothèse où ces gens seraient effectivement disponibles.

[Traduction]

M. Brian Collinson: Je comprends votre argument et j'admets qu'il y a là quelques considérations morales délicates.

S'agissant de l'immigration, nous ne songions pas nécessairement aux pays les moins développés du monde, mais plutôt à des pays plus développés, afin de faciliter les choses de ce point de vue.

La tragédie est qu'il n'y a nulle part de ressources suffisantes pour combattre le problème. Il y a une tension entre ce qui est bon pour le Canada lui-même et ce qui est bon pour d'autres pays.

Je comprends votre argument et je conviens qu'il y a là des éléments délicats auxquels il faudra prêter attention. Néanmoins, je souligne à ce sujet qu'il existe de nombreux Canadiens de plus de 65 ans figurant au rang des meilleurs experts du monde de la programmation en COBOL. À titre d'anecdote, je cite le cas d'une telle personne, qui en fait n'est pas un Canadien mais qui est l'un des auteurs de la langue ANSI COBOL et qui a reçu des offres financièrement très intéressantes pour redevenir actif et travailler sur le problème.

Ainsi, nous pourrions demander aux Canadiens retraités une aide qu'ils sont particulièrement qualifiés à apporter, et éviter ainsi en bonne partie ce conflit moral.

Mme Marlene Jennings: Vous avez répondu à ma question suivante et je n'ai donc pas à la poser. Il s'agissait précisément de savoir si nous n'avons pas déjà un bassin de techniciens qualifiés de plus de 65 ans que l'on pourrait inciter à réintégrer le marché du travail.

Je trouve excellente la recommandation où vous dites que le gouvernement fédéral devrait tenter de rassembler les gouvernements provinciaux, les barreaux provinciaux et les associations professionnelles concernées pour trouver des mécanismes extrajudiciaires de règlement des différends, afin de prévenir les procès.

À ma connaissance, c'est la première fois que cette recommandation est adressée à notre comité. D'autres organisations et associations professionnelles et industrielles ont estimé que les contentieux juridiques sont certainement un problème qu'il faudra confronter, mais sans nécessairement envisager de mécanisme autre.

Est-ce que l'alliance y a réfléchi plus avant? Avez-vous des recommandations ou sous-recommandations spécifiques? Ou bien considérez-vous simplement que le gouvernement fédéral devrait prendre l'initiative à cet égard?

• 1620

M. Brian Collinson: Je ne suis pas certain de pouvoir vous présenter un ensemble de recommandations concrètes à ce stade. Mais nous avons commencé à dialoguer avec le Barreau, particulièrement en Ontario, et nous sommes très désireux de voir ce qui pourrait être réalisable à cet égard.

Nous pensons, en particulier concernant les problèmes à l'intérieur d'une chaîne d'approvisionnement, qu'un mécanisme extrajudiciaire devrait être une option facilement accessible. Il se peut fort bien que des mécanismes de médiation particuliers puissent être mis sur pied à l'intérieur d'une association professionnelle ou entre associations professionnelles et que nous puissions jouer un rôle actif au sein du processus. Nous en sommes encore à étoffer cette idée, mais nous pensons que c'est une option qui pourrait nous épargner une bonne partie du gaspillage et de l'infortune qui risquent de résulter indirectement de cette situation.

Mme Marlene Jennings: Voyez-vous là un rôle pour le gouvernement fédéral? Vous parlez du Barreau ontarien, mais il y a dix provinces et deux territoires.

M. Brian Collinson: Certes, et du point de vue d'un certain nombre de lois qui relèvent de vous—par exemple la responsabilité des administrateurs et dirigeants—il y a des éléments qui mettent en jeu et la législation provinciale, telle que la Loi sur les sociétés par actions ontarienne, et la législation fédérale, la Loi sur les sociétés par actions de régime fédéral. Il y a donc des possibilités de concertation dans ce domaine en vue de rechercher des mécanismes appropriés.

La présidente: Je vous remercie, madame Jennings.

Je devrais vous signaler, monsieur Collinson et madame Brisebois, que l'Association du Barreau canadien va comparaître devant le comité. Elle travaille actuellement sur un rapport et procède à des consultations sur la responsabilité juridique et la manière dont elle est répartie, à son avis. Si elle peut tirer des conclusions plus ou moins solides avant... Nous pensons que le rapport devrait être prêt vers la fin avril, et donc nous aurons une réunion avec l'Association du Barreau et aussi les assureurs. Les assureurs veulent attendre ses conclusions avant de comparaître.

Cela dit... monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): Merci. Il est un peu décevant de voir que les petites et moyennes entreprises ne voient pas le problème.

Comme M. Bellemare l'a dit, faudrait-il une loi pour obliger à agir ceux qui ne sont pas prêts? Qu'en est-il de certains de vos fabricants, construisent-ils encore aujourd'hui des produits qui ne sont pas adaptés à l'an 2000? S'il faut légiférer, peut-être faudrait-il une loi disant qu'à partir d'une certaine date aucun produit non adapté à l'an 2000 ne devrait sortir des usines.

M. Brian Collinson: Nous comprenons certainement l'intention de cette sorte de loi et je pense que nous partagerions la position de l'association ontarienne des camionneurs au sujet des roues de camion qui se détachent. Il serait très difficile d'arguer contre une telle approche.

Mais son application pratique est un autre problème. Il faudrait réfléchir soigneusement aux conséquences économiques. Vous risquez de simplement accélérer les conséquences en matière d'emploi du problème de l'an 2000 si vous les anticipez par une loi, et si vous ne faites pas très attention. Je ne puis dire que nous serions opposés au principe d'une telle approche, mais il faudrait l'emprunter avec beaucoup de prudence.

M. Jim Jones: Votre association a-t-elle proposé quelque chose à cet égard à ses membres—une sorte de recommandation disant qu'à partir d'une certaine date tous les produits doivent être conformes?

M. Brian Collinson: Notre position—et nous l'avons communiquée à nos membres—est que dans toute la mesure du possible tous les produits doivent être adaptés à l'an 2000 à partir de maintenant.

Mme Diane Brisebois: Si je puis ajouter un mot, vous verrez à la page cinq de notre rapport, en italiques, un énoncé de principes que nos détaillants envoient à leurs fournisseurs. On leur y demande de veiller à ce que les produits, en particulier les logiciels et matériels informatiques, soient adaptés à l'an 2000. Nous essayons d'amener les sous-associations, les conseils sectoriels représentant d'autres détaillants, de faire de même.

Je dois dire que je suis d'accord avec l'alliance des fabricants: je ne pense pas qu'une loi pénalisant ceux qui fabriquent des produits non conformes serait efficace. Je pense que le marché fait très bien le tri entre ceux qui sont conformes et ceux qui ne le sont pas. Les détaillants fixent déjà des lignes directrices très strictes à leurs fournisseurs. Ils leur disent très clairement qu'ils ne se fourniront plus chez eux s'ils ne peuvent prouver que leurs produits, qu'il s'agisse de produits de consommation ou de produits d'exploitation, sont conformes. Le marché lui-même s'occupe donc de cela. Je pense que notre préoccupation, de même que celle de l'alliance, est de savoir comment convaincre les petites entreprises.

• 1625

M. Jim Jones: J'allais poser cette question. Oui, c'est bien beau pour les grosses sociétés qui peuvent inscrire cette condition dans leurs contrats, mais la petite entreprise, probablement, n'a même pas idée qu'elle devrait demander cela. Il faudrait donc imposer une certaine discipline. Si nous ne le faisons pas au moyen d'une loi, alors votre organisation devrait le faire.

Je sais que les banques et les compagnies d'assurances, probablement à partir d'avril, vont refuser d'assurer et les banques refuseront les crédits si elles ne voient pas de plan pour l'an 2000. Je pense que si suffisamment d'interventions de ce genre sont effectuées, les gens vont se réveiller et réaliser qu'ils ont un problème.

Mme Diane Brisebois: Un aspect important à souligner est que les gros fabricants font maintenant pression sur les petits détaillants et leur disent qu'ils vont cesser de les approvisionner s'ils ne sont pas prêts pour l'an 2000. Les gros détaillants font pression sur les petits fournisseurs en disant qu'ils ne se fourniront plus chez eux s'ils ne sont pas conformes. Les institutions financières et les compagnies d'assurances font de même.

Cela a donc commencé, je pense. Je pense que, là où nous sommes placés, nous tendons à paniquer un peu. Nous allons dans l'entrepôt d'un centre de distribution et réalisons que l'an 2000 posera problème bien avant l'an 2000, parce qu'en fait, dans certains cas, certaines industries vont être touchées dès le milieu de 1998 à cause des dates sur les produits etc. Je pense que nous tendons à être un peu plus alarmistes, mais que les choses vont se mettre en place sur le marché.

La question que nous voulions porter à l'attention du comité et aborder avec l'alliance avant cette séance est tout le problème du manque d'information et d'appui des petites entreprises obligées d'acheter des produits et services non adaptés à l'an 2000. C'est surtout sur le plan des logiciels, ou le fait d'être pris en otage parce que le coût de ces logiciels est devenu totalement scandaleux.

Je ne sais pas trop comment régler cela mais nous pensons que d'en parler à ce comité et avec les autres associations pourrait nous aider à trouver une solution. C'est un vaste problème.

La présidente: Je vous remercie. Dernière question, monsieur Jones, je vous prie.

M. Jim Jones: Vous dites que les ateliers sont encore très mal préparés. Il faut vraiment faire prendre conscience à ces gens ou faire quelque chose. Je ne sais pas ce qu'il faut faire.

La plus grande partie de ce matériel, s'il n'est pas déjà adapté à l'an 2000, sera normalement du matériel neuf, n'est-ce pas? Ce ne sont pas des boîtiers de commande programmables ou des modifications de micro-codage ou des choses de ce genre. Il faudra acheter du neuf. Tout d'un coup, il va y avoir des retards de livraison énormes chez les fournisseurs de ce matériel. Cela va causer de grosses difficultés.

M. Brian Collinson: C'est très vrai. C'est certainement vrai si vous ne pouvez acheter... C'est comme pour tout le reste dans toute cette affaire: plus vous attendez, et plus cela coûte cher. S'il s'agit d'une machine, plus vous vous rapprochez de l'an 2000 et plus la machine coûtera cher et plus cela va faire mal à votre entreprise.

Nous faisons donc tout ce que nous pouvons pour faire passer le message dans les ateliers. Tout le problème est très grave, mais pour nos membres, c'est au niveau de l'atelier que les coûts sont les plus importants. Nous travaillons activement pour amener nos membres à planifier l'adaptation de leurs équipements, mais nous ne pouvons relâcher l'effort.

M. Jim Jones: Y a-t-il une incitation que l'on puisse leur donner? Je ne sais pas si le gouvernement envisage... Le rapport Monty recommandait que 150 p. 100 des coûts puissent être déduits aux fins de l'impôt en 1998 et 1999. Si vous devez acheter du matériel, vous pourriez presque l'amortir sur un ou deux ans, au lieu des huit à dix ans de la période d'amortissement normale. Est-ce là le genre de mesure qu'il faudrait introduire pour les amener à faire cela?

• 1630

M. Brian Collinson: Ce genre de mesure pourrait être utile, mais là aussi il y a des inconvénients. En effet, si la capacité de production de ces matériels est relativement fixe, en libérant les ressources financières pour les acquérir, tout ce que vous faites c'est mettre en circulation davantage d'argent en quête de la même quantité de matériels ou services etc. Il y a le risque de faire grimper les prix, et c'est un facteur à ne pas négliger. À notre sens, la meilleure incitation dans toute cette affaire c'est que, si vous faites ce qu'il faut, vous réussirez à survivre.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Jones. Monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Je veux revenir sur cette question de la diminution de l'offre, si vous voulez, des logiciels eux-mêmes. À vous entendre, c'est comme s'il y avait une certaine domination du marché, presque un monopole, que les fournisseurs majorent les prix parce qu'il y a tout d'un coup une grosse demande et une offre limitée. Mais nous savons qu'il est très simple de reproduire des logiciels. Dites-vous qu'il n'y a pas assez de concurrence sur ce marché, ou bien...?

M. Brian Collinson: S'agissant des équipements d'usine, malheureusement il ne s'agit pas simplement de copier des logiciels sur une disquette souple. En effet, les programmes sont encryptés dans une puce de silicium. Les codes sont inscrits directement dans la puce, et vous ne pouvez la modifier pour l'adapter à l'an 2000; vous devez démonter l'ancienne puce et la remplacer par une nouvelle qui comporte le bon code. Il y a donc là une opération de fabrication à effectuer. Quelqu'un, probablement aux États-Unis, doit fabriquer cette pièce en particulier.

M. Alex Shepherd: Oui, mais nous savons que lorsque la demande augmente, habituellement dans le secteur de la technologie, les prix tendent à baisser. Vous semblez décrire l'effet inverse, ce qui m'amène à conclure que ce marché ne joue pas parfaitement, ou quelque chose. Vous avez tous deux évoqué cette question.

M. Brian Collinson: Je connais très bien la loi de Moore qui dit que la capacité technologique augmente avec le temps et que les coûts baissent de façon exponentielle. Mais nous sommes là dans une situation où la loi de Moore connaît des ratés très sérieux.

Mme Diane Brisebois: Permettez-moi d'ajouter aussi qu'il ne s'agit pas simplement, comme nous l'avons dit déjà, d'acheter une nouvelle disquette. Le plus gros problème à l'heure actuelle est que, dans la plupart des cas, la plus grande partie des logiciels à améliorer ou adapter doivent être remplacés. La demande pour les produits est donc forte.

Dans la plupart des cas, le produit est disponible. Le problème ne réside pas tant au niveau du logiciel qu'au niveau du fournisseur du service technique, qui doit assurer que tous les systèmes à l'intérieur d'une société sont conformes. C'est ce que nous voyons chez beaucoup de détaillants—et aussi de fabricants, je n'en doute pas—parce qu'ils ont des logiciels et des fonctions exclusifs, c'est-à-dire qu'ils ont acheté des produits semi-finis qui ont ensuite été spécialement adaptés pour eux.

Ils sont donc très dépendants des services techniques externes, car la plupart des petites et moyennes entreprises n'ont pas d'expert maison, si bien qu'elles sous-traitent. C'est là où nous avons vu grimper les prix en flèche, parce qu'il y a une fuite des cerveaux et d'ailleurs nos membres les plus importants perdent tous leurs informaticiens, parce que ces derniers se mettent tous à leur compte. Cela amène donc une escalade des coûts, surtout pour les petites et moyennes entreprises qui n'ont pas un important service informatique pour effectuer la conversion.

M. Alex Shepherd: D'accord. Le sujet qui m'intéresse—et M. Jones l'a évoqué—serait un amortissement rapide, une déduction pour amortissement accéléré, intéressant le volet matériel plutôt que le volet logiciel. Vous savez sans doute que lorsque nous sommes passés au système métrique, nous avons accordé une déduction de 100 p. 100 pour l'installation de nouvelles caisses enregistreuses etc., c'est-à-dire un programme similaire.

• 1635

Pour en revenir aux facteurs économiques, vous dites que la pénurie est au niveau des services de programmation de logiciels. Si je laisse cela de côté pour considérer uniquement le matériel pur, les puces, etc., l'octroi par le gouvernement d'un amortissement rapide n'entraînerait pas nécessairement des majorations de prix. Peut-on conclure cela de vos propos?

M. Brian Collinson: Je suis d'accord; le danger réside davantage au niveau des logiciels et services. De manière générale, notre association serait certainement en faveur d'un amortissement accéléré du nouveau matériel et je dois dire que ce n'est pas vrai seulement à l'égard de ce problème, mais aussi de manière générale.

La présidente: Cette question sera votre dernière, monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd: Est-ce que ce serait une façon de pousser ces petites entreprises à agir, si nous leur donnons une fenêtre d'opportunité: pour obtenir la déduction à 100 p. 100, il faudrait faire l'acquisition avant le 30 juin 1999?

M. Brian Collinson: S'ils étaient sensibilisés et prêts à agir, ce pourrait être utile. Ce pourrait être une incitation. Actuellement nous avons une situation où l'incitation est la viabilité: vous allez survivre, et non seulement cela, vous prendrez peut-être l'avantage sur vos concurrents. Mais même cela ne fait par réagir les gens.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Shepherd.

Monsieur Collinson, cette question a été évoquée à plusieurs reprises devant le comité. Il serait peut-être bon que vous sachiez que certains témoins ont estimé que ce serait récompenser les retardataires et sanctionner ceux qui ont pris leurs précautions. Il y a donc un envers à cette médaille. Avant de nous donner une réponse catégorique, vous voudrez peut-être consulter vos membres.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Je vous remercie, madame la présidente.

Je remercie les témoins de la franchise de certaines de leurs réponses. J'ai été plutôt impressionné par le réalisme avec lequel vous avez abordé les questions.

J'ai une question sur les puces intégrées, et en particulier celles intégrées dans les appareils médicaux. Nous avons reçu ici les représentants de l'Ontario Hospital Association et ils ont dit avoir demandé aux fournisseurs d'appareils médicaux de leur indiquer lesquels de ces appareils sont dotés d'une puce intégrée tributaire du temps ou pouvant être touchée par l'an 2000. Dans certains cas, ils ont énormément de mal à obtenir une réponse de ces fournisseurs et fabricants.

J'aimerais savoir si ce problème vous a été signalé. Si oui, que faites-vous pour y remédier et, sinon, qu'êtes-vous prêt à faire maintenant que vous savez?

M. Brian Collinson: Je suis au courant de ce problème particulier, qui nous a été soumis aussi sous forme de la question plus générale de savoir quelles puces sont conformes à l'an 2000 et lesquelles ne le sont pas.

Nous travaillons très activement avec un certain nombre de firmes de notre connaissance qui ont des bases de données sur ces puces, afin de les encourager à partager largement cette information. Nous travaillons là-dessus en ce moment. Je n'ai pas encore de résultats à vous communiquer, mais avec votre permission, j'aimerais diffuser ce message auprès de nos membres et souligner l'importance cruciale de communiquer ces renseignements, particulièrement s'agissant de matériel médical.

M. Werner Schmidt: Oui, c'est vital, et je vous encourage vivement à faire cela.

Si vous le permettez, j'aimerais aborder les mécanismes de règlement des différends que vous avez évoqués, et aussi les programmes gouvernementaux dont Mme Brisebois, je crois, a parlé. Ce sont deux sujets différents, mais ils pourraient être apparentés.

J'aimerais savoir en particulier comment vous concevez ce mécanisme de règlement des différends dont vous parlez. J'aime l'idée. Elle a l'air réellement bonne. Mais il faut que ce mécanisme soit efficace et débouche sur un règlement satisfaisant, sinon il sera inutile. Il ne sert pas à grand-chose de se retrouver et de discuter un peu.

Quel serait ce mécanisme? Vous devez y avoir réfléchi, sinon vous n'en auriez pas fait état ici.

M. Brian Collinson: Oui, nous y avons réfléchi et nous avons examiné certains des modèles de règlement des différends élaborés récemment dans la plupart des provinces, mais plus particulièrement, ils se trouvent, en Ontario.

• 1640

Très souvent, en Ontario, vu le temps que prennent les poursuites en justice, il y a un grand désir de trouver un règlement extrajudiciaire. Une possibilité serait donc que les parties s'engagent par contrat à accepter les résultats d'un processus de règlement d'un contentieux ou d'un arbitrage. Cela exige un degré de confiance relativement élevé dans le processus, mais on a maintenant de nombreux exemples de cela, dans le contexte de tribunaux privés, par exemple, ou dans le contexte d'une médiation, en Ontario. Et il ne semble exister aucune raison inhérente que ce modèle, avec les adaptations requises, ne puisse être appliqué aux contentieux relatifs au problème de l'an 2000.

M. Werner Schmidt: Cela pourrait-il aller jusqu'à un arbitrage où une personne donnée, acceptée par les deux parties en litige, donnerait raison à l'une ou l'autre partie? Iriez-vous jusque-là?

M. Brian Collinson: Ce pourrait certainement être un modèle. Un autre serait une médiation ou...

M. Werner Schmidt: Vous parlez là d'un troisième palier, je pense. Si la médiation échoue, on pourrait en venir là.

Pourrais-je demander à Mme Brisebois d'expliquer un peu plus en détail sa recommandation trois, je pense, préconisant certains programmes gouvernementaux? Quelle forme pourraient prendre ces programmes? S'agit-il de programmes financiers? S'agit-il de programmes établissant des incitations non financières? À quelles sortes de programmes songez-vous ici?

Mme Diane Brisebois: Avant de répondre à votre question, j'aimerais rectifier une chose que j'ai dite précédemment, si vous le permettez. M. Bellemare m'a demandé si je suis informée de certaines discussions intervenues à ce niveau, et en fait je ne le suis pas.

Cela m'amène à votre question, à savoir qu'il y a eu très peu d'information sur ce que le gouvernement fait à l'égard de l'an 2000, excepté la couverture donnée à la presse au groupe de travail, lequel avait une très grande visibilité. Mais il est difficile de dire si cette couverture a réellement touché ceux qui ont besoin d'entendre le message de la préparation à l'an 2000.

L'une des raisons pour lesquelles nous avons ajouté cela à notre recommandation est que nous croyons... Nous ne disons pas que le gouvernement devrait lancer des programmes de sensibilisation en tant que tels. Nous disons que le gouvernement devrait collaborer avec un grand nombre d'associations, représentant des membres nombreux, et élaborer, sur la base des recommandations du groupe de travail, des programmes ciblant les petites et moyennes entreprises pour assurer que le message parvienne aux gens voulus.

En outre, nous recevons à ce stade des messages ambigus des différents paliers de gouvernement, de même que des différents ministères, et il ne semble pas y avoir de cohésion. Je pense que l'alliance partage mon avis là-dessus. Cela nous préoccupe énormément et fait que les messages deviennent flous. Je pense donc que les associations et le gouvernement doivent oeuvrer de concert pour lancer un message identique, et l'industrie doit avoir l'assurance que le gouvernement pratique bien lui-même ce qu'il prêche.

M. Werner Schmidt: C'est une accusation très grave, madame la présidente. Cela me terrifie.

Voulez-vous réellement dire que les divers ministères du gouvernement fédéral vous communiquent des messages différents concernant la préparation à l'an 2000?

Mme Diane Brisebois: Je répondrai que cela ne fait que reproduire ce qui se passe dans nos grandes sociétés. Dans divers ministères, on pense à une chose au niveau opérationnel et une autre au niveau de l'administration centrale. Dans une grande société de distribution, le service de marchandisage et le service de mercatique croient chanter la même chanson, alors que ce n'est pas vrai. Et nous disons qu'il pourrait bien en être de même au sein du gouvernement. En fait, j'affirme qu'il en est de même au sein du gouvernement et souligne que c'est courant dans les grosses administrations, y compris l'administration publique.

M. Werner Schmidt: Voilà donc un des programmes: diffuser un message cohérent.

Mme Diane Brisebois: Travailler ensemble. Veiller à bien communiquer.

La présidente: Monsieur Murray, je vous prie.

• 1645

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Je vous remercie.

Monsieur Collinson, vous avez parlé de cette impression surnaturelle de panique, et elle a fait surgir en moi cette image où nous sommes tous à bord du Titanic, en quelque sorte, au deuxième jour d'une traversée de quatre jours, en sachant que certains d'entre nous vont se retrouver dans un bateau de sauvetage—certains pays, certaines entreprises, certaines personnes—alors que d'autres vont couler avec le navire.

Plus concrètement, il semble que le problème de l'an 2000 va durer quelques années au-delà de cette date. Cela pourrait durer cinq, dix, 15 ans. Vous parlez de tous ces circuits intégrés dans les ateliers, par exemple. Nous serons à la merci de tous nos partenaires commerciaux et de leur état de préparation, pendant des années encore, me semble-t-il.

Je n'ai réellement qu'une seule question, et elle intéresse les ressources humaines. C'est en partie parce que j'ai parlé à quelqu'un qui exploite une école de commerce, laquelle forme des gens à cela, enseigne le COBOL à des jeunes. Il me dit qu'il pourrait, à un certain prix, former un grand nombre de diplômés. J'aimerais demander à l'un ou l'autre d'entre vous, ou aux deux, si vous jugez qu'il serait opportun que le gouvernement fédéral essaie de former un bassin de jeunes, sachant que ces emplois pourraient durer quelques années, et sachant également que ce sera un travail fastidieux, où l'on passe en revue ligne après ligne de code dans certaines industries, si bien qu'une personne risque d'être brûlée au bout de quelque temps.

Nous avons un programme où nous envoyons des jeunes dans les petites entreprises pour les préparer et les former à l'Internet. Je sais bien que c'est un travail beaucoup plus simple que de résoudre ce problème de l'an 2000.

Voyez-vous un besoin, ou serait-il praticable de former un grand nombre de techniciens pour travailler sur ce problème? Cela serait-il un emplâtre sur une jambe de bois ou cela serait-il utile?

M. Brian Collinson: Il y a indubitablement une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée pour travailler sur ce problème, si vous regardez l'effet des forces du marché sur le salaire d'un diplômé sortant d'un collège technique avec une qualification en COBOL et la courbe des salaires de ces techniciens. Certains d'entre eux gagnent très bien leur vie. De fait, toute la profession s'en tire très bien.

Ce peut être vrai non seulement dans le cas du COBOL, mais aussi d'autres langues utilisées, les 30 à 40 p. 100 d'autres codes qui ne peuvent être modifiés au moyen de systèmes automatiques—dans une certaine mesure on peut utiliser des systèmes automatiques avec le COBOL. Il y a aussi une pénurie dans le cas des autres langues.

Ce pourrait être une bonne façon d'amener les jeunes dans la main-d'oeuvre, s'ils peuvent être formés suffisamment rapidement pour travailler sur le problème. C'est la seule autre contrainte. Je sais que le problème va subsister pendant plusieurs années, et vous avez raison, certainement jusqu'en 2005, mais je ne sais pas si ces diplômés pourront être prêts et actifs et déployés dans le milieu de travail avant l'an 2000—ce serait l'idéal. Ce pourrait être une option que le gouvernement pourrait envisager très sérieusement.

M. Ian Murray: On me dit que la formation ne prend que quelques mois. C'est un cours intensif.

M. Brian Collinson: Eh bien, nous serions certainement très désireux de dialoguer avec tout organisme gouvernemental qui envisagerait cela et très disposés à tout faire pour aider les diplômés de ces programmes à trouver un emploi, et je ne pense pas que ce serait difficile.

Mme Diane Brisebois: Nous souscrivons à cela également.

M. Ian Murray: Nous parlons de ce problème au sein du comité depuis quelques mois maintenant et je sens la température monter. Le sentiment de panique devient de plus en plus apparent chaque fois que de nouveaux témoins comparaissent. On en parle également plus dans la presse. Il y a davantage d'articles, du moins dans la presse locale d'Ottawa ces derniers temps, qui soulignent qu'il s'agit là d'un problème grave. Je pense donc que le message commence lentement à passer.

La question devient de savoir si l'on va paniquer et courir dans tous les sens pour tenter de régler le problème, ou bien si l'on a un plan réfléchi. J'en suis venu à la conclusion que si quelqu'un va jouer un rôle d'impulsion dans tout cela, il faudra peut-être que ce soit le gouvernement fédéral, du moins en ce qui concerne les ressources humaines. Nous ne pouvons évidemment résoudre le problème de tout le monde, mais c'est un fait que...

Il y avait un article dans le journal ce matin disant que tous les nouveaux programmes gouvernementaux allaient être mis en attente, à toutes fins pratiques, jusqu'à ce que ce problème soit réglé et cela montre bien que l'on a conscience de sa réalité. Cela ne peut que sensibiliser tous ceux, dans les entreprises, les hôpitaux et ailleurs, qui sont confrontés à lui.

• 1650

M. Brian Collinson: Il est certainement vrai que ce problème souligne une question dont je sais que beaucoup de groupes l'ont portée à l'attention du gouvernement depuis quelque temps. Il souligne dramatiquement la pénurie aiguë de main-d'oeuvre qualifiée au Canada.

M. Ian Murray: Je vous remercie. Je n'ai rien d'autre, madame la présidente.

La présidente: Je vous remercie. Monsieur Jones, avez-vous d'autres questions?

M. Jim Jones: Oui. Premièrement, j'aimerais revenir à l'analogie avec le Titanic de M. Murray. La différence entre le problème de l'an 2000 et le Titanic est que les passagers du Titanic ne savaient pas ce qui allait arriver; or, face à l'an 2000, les gens savent ce qui va arriver. Il y a là une petite différence. Ce n'est pas la même chose.

L'autre aspect est celui-ci. Lorsque j'ai parlé de l'amortissement accéléré ou de ce que nous avons offert lors de la conversion au système métrique, vous avez dit que ceux qui sont déjà prêts ne vont rien en retirer.

Combien de gens dans votre organisation...? Quant vont-ils effectuer le gros de leurs dépenses? Sera-ce en 1998 et 1999, ou bien l'ont-ils déjà fait en 1995 et 1996? Je pense que la grande masse des dépenses interviendra en 1998, 1999 et peut-être 2000. Il ne sert à rien de vouloir percevoir des impôts en 2000 auprès de quelqu'un qui aura fait faillite.

L'un des rôles que nous devrions assumer est d'aider l'industrie et les entreprises à survivre à l'an 2000.

Pourquoi pas des incitations? On estime que 10 p. 100 de toutes les entreprises vont faire faillite ou disparaître. Eh bien, si nous pouvons ramener ce chiffre à 2 p. 100, ou même moins, je pense qu'il nous faut mettre en place ce genre d'incitations. Je pense que l'annonce dans le journal d'aujourd'hui est utile. Certaines lois seront utiles et tout le reste, car la situation est grave. Si les choses tournent mal en l'an 2000 pour le Canada, nous pourrions perdre jusqu'à 15 ou 16 p. 100 du PIB, selon les chiffres que j'ai entendus.

Je sais que nous ne sommes pas une île par rapport au reste du pays, mais quand la masse des dépenses visant à rectifier ce problème interviendra-t-elle? Sera-ce cette année et l'année prochaine, ou bien les dépenses ont-elles déjà été faites?

M. Brian Collinson: Mon impression, pour ce qui est de nos membres, est que des dépenses très substantielles seront effectuées entre maintenant et 2000, particulièrement, mais pas seulement, sur le problème des équipements d'usine. L'ampleur de ce problème est devenue apparente et l'avis général est qu'il ne faut pas attendre pour faire ces dépenses jusqu'après le 1er janvier 2000, à moins d'y être absolument contraint.

Il y aura forcément un tri à faire. Des décisions difficiles devront être prises concernant les systèmes qui vont survivre et lesquels vont s'effondrer, mais les entreprises veulent minimiser le nombre de systèmes qui vont faillir, car il sera beaucoup plus difficile et coûteux d'essayer de réparer une organisation battant de l'aile après le 1er janvier 2000, particulièrement si votre production est arrêtée et que vous n'avez plus de rentrées d'argent.

Mme Diane Brisebois: J'ajouterais simplement que nos membres sont dans une situation similaire. Je signale quand même que je ne pense pas que nos membres dépensent plus qu'ils auraient dépensé de toute façon. Ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont reporté l'adoption d'autres technologies et améliorations dans leurs entreprises. Ils n'ont donc pas investi dans ces équipements nouveaux de façon à pouvoir utiliser cet argent pour le problème de l'an 2000.

Par exemple, dans notre enquête, nous avons observé que nombre des sociétés de distribution grandes et moyennes ont décidé de ralentir le rythme d'ouverture de nouveaux magasins, par exemple, ou des réaménagements, simplement parce que l'argent qu'elles avaient réservé pour cela a été réaffecté au problème de l'an 2000.

Ceux qui ont des problèmes similaires à ceux des membres de l'alliance sont les détaillants ayant de gros centres de distribution, c'est-à-dire ceux que nous appelons les détaillants intégrés, comme Roots, par exemple, qui fabrique ses produits en sus de les distribuer et de les vendre.

Nous avons donc toute une diversité. Je dirais que la plupart de nos membres, c'est-à-dire les commerces de détail petits et moyens, et principalement les petits, vont effectuer la masse de leurs dépenses cette année et l'année prochaine.

La présidente: Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Je vous remercie, madame la présidente. J'aimerais remercier les témoins de leur exposé.

• 1655

J'aimerais d'abord poser quelques questions à Mme Brisebois. J'aimerais qu'elle nous en dise un peu plus sur les messages déroutants ou divergents des ministères. Auriez-vous quelques exemples, ou est-ce quelque chose que vous pourriez nous communiquer ultérieurement? J'aimerais en savoir un peu plus.

Mme Diane Brisebois: Je peux vous donner quelques exemples généraux et je me ferai un plaisir de vous faire parvenir des exemples plus précis, car bon nombre de ces renseignements nous reviennent maintenant en provenance de nos membres siégeant à notre groupe de travail, le Groupe de travail sur l'an 2000. Il ressort des discussions avec nos membres de grande taille, dont Sears, Canadian Tire, Hudson's Bay, que lorsqu'ils contactent les douanes, par exemple, ou Revenu Canada, ou tout autre ministère avec lequel ils traitent, ils sont surpris de voir que le niveau de préparation diffère d'un ministère à l'autre, de même que le niveau de connaissance. Je ne peux rien vous dire de plus précis, mais je peux vous assurer que cela a été mentionné très souvent par ces gens qui n'ont rien à gagner à répandre des bruits. Ils le disent parce qu'ils sont très inquiets.

M. Walt Lastewka: J'avais compris, lorsque vous parliez de cela, que les différents ministères disséminaient des renseignements différents sur l'an 2000. Ce dont il s'agit en fait, c'est que chaque ministère est à un niveau de préparation différent etc.

Mme Diane Brisebois: Je ne parlais pas de l'information communiquée au secteur sur l'an 2000, mais plutôt de l'état de préparation à l'intérieur de ces ministères. Et par dissémination de l'information, j'entendais qu'un ministère ne semble pas savoir où en est l'autre; il ne semble pas y avoir de communication à l'intérieur de l'administration.

Comme je l'ai dit, ce n'est pas une critique du gouvernement; nos membres ont le même problème chez eux, surtout les plus gros, chez qui une collaboration étroite entre services est nécessaire. C'est un aspect qui nous préoccupe. Nous nous ferons un plaisir de vous communiquer de plus amples détails.

M. Walt Lastewka: Nous avons recherché des exemples et je vais vous citer celui qui nous a été donné il y a une semaine environ. Nous avions ici les représentants de Santé Canada et les associations hospitalières. Nous savions que ces dernières avaient besoin de renseignements venant de Santé Canada avant de pouvoir passer à l'étape suivante d'exécution. Nous, le comité, cherchons donc à savoir s'il y a d'autres ministères dont vous attendez des renseignements avant de pouvoir faire votre travail. Si dans vos associations il vous manque ce genre de renseignements, il faut nous le signaler très rapidement. Nous serons heureux de recevoir votre rapport à ce sujet, car cela nous aide à sonner les cloches de ces ministères et à saisir le responsable de l'information pour faire bouger les choses. Nous avons demandé au responsable de l'information du gouvernement de comparaître de nouveau au début de l'automne pour cette raison.

Mme Diane Brisebois: Nous avons une réunion de notre groupe de travail, ainsi qu'une réunion de nos principaux membres la semaine prochaine et nous leur demanderons si des éléments de leur programme de conformité sont en panne parce qu'ils attendent des renseignements du gouvernement avant de passer à l'étape deux. Et s'il y a des situations de ce genre, nous veillerons à vous les signaler immédiatement.

M. Walt Lastewka: Je suis heureux, monsieur Collinson, que vous ayez évoqué la situation dans les ateliers, puisque je connais un peu moi-même le sujet. Ce qui m'inquiète—et j'en ai parlé un peu au ministère de l'Industrie—sont les attestations de qualité, les normes de sécurité, toutes ces choses qui exigent une documentation à jour aux fins des rappels etc. À mes yeux, les gens prennent cela un peu trop à la légère, le fait qu'ils ne pourront produire dans leurs centres de fabrication s'ils n'ont pas un programme de documentation. Vous avez effleuré le sujet. Pourriez-vous me dire ce qu'il faudrait de plus à votre organisation pour faire comprendre ce message aux fabricants?

M. Brian Collinson: Nous avons au moins deux ou trois initiatives en train à cet égard. Nous avons en cours un programme de sensibilisation portant sur les problèmes en atelier. Ensuite, nous établissons des alliances stratégiques avec des cabinets d'ingénierie particulièrement au fait des problèmes en atelier et nous faisons appel à eux pour diffuser auprès de nos membres la méthodologie requise pour régler le problème.

• 1700

Nous cherchons également à diffuser les normes applicables à la préparation pour l'an 2000, telles que la norme PD2000-1 du British Standards Institute et tentons, de manière générale, à faire passer ce message. Nous avons maintenant une rubrique régulière dans nos bulletins et nos magazines. Ils sont distribués chaque mois et traitent des problèmes d'ateliers et des sujets liés à l'an 2000. Nous allons intensifier cela sous forme d'un programme de gestion de projet de l'an 2000, sur lequel nous allons collaborer avec une importante école de commerce dans l'avenir proche.

M. Walt Lastewka: J'espère qu'il ne sera pas question de demander des permis d'exemption temporaires pour cause d'impréparation à l'an 2000. J'espère que ce n'est pas quelque chose que l'on envisage dans votre secteur.

M. Brian Collinson: À ma connaissance, ce n'est pas le cas. En tout cas, je n'en ai pas connaissance. Notre association et les principaux membres de notre association ne voudraient certainement pas qu'on s'engage dans cette voie.

M. Walt Lastewka: C'est là où interviennent les détaillants, car ils seraient les premiers concernés par cette exemption.

M. Brian Collinson: Oui.

M. Walt Lastewka: À mes yeux, cela ne ferait que retarder la solution du problème et donner aux gens l'excuse de ne rien faire. Personnellement, je suis inflexible sur le refus de tout permis d'exemption temporaire relatif à la documentation pour cause d'impréparation à l'an 2000.

M. Brian Collinson: Je comprends tout à fait. Il ne peut y avoir de compromis, surtout lorsque la santé et la sécurité ou des questions de cette importance sont en jeu, et notre association ne préconisera aucun compromis à cet égard.

M. Walt Lastewka: L'une des choses que nous avons apprises, collectivement, dans ce comité, au fur et à mesure que nous voyons défiler les associations, est l'importance de votre rôle, en tant qu'association, dans tous les domaines, dans la transmission du message au gouvernement et à quiconque peut faire cette publicité. Très souvent les entreprises se plaignent, disant: qu'est-ce que le gouvernement sait de mon travail; que le gouvernement arrête de se mêler de mes affaires. J'en ai vu pas mal d'exemples en faisant le tour des entreprises dans ma région et j'en ai fait part au comité. Mais tout à coup, la semaine suivante, ils viennent réclamer de l'information et de l'aide. Je ne soulignerai jamais assez que vous jouez un rôle de tout premier plan dans la communication du message, dans les deux sens.

Vous avez dit que vous en étiez réellement à la phase deux, et certains plus avancés. Le secteur de la fabrication et de l'exportation ne nous en a pas parlé. Où en êtes-vous, dans votre association, sur le plan de la conformité complète à l'an 2000?

M. Brian Collinson: Nous estimons, à ce stade, que les grands fabricants, les 20 p. 100 de nos membres les plus gros... nous estimons qu'ils ont achevé, en moyenne, de 55 à 60 p. 100 de leur programme.

Nos données sont un peu plus floues pour ce qui est des entreprises de moindre taille. Nous savons que le rythme y est plus lent. Nous mettons actuellement au point un questionnaire dont nous serons heureux de vous communiquer les résultats. Nous devrions avoir ces résultats dans un mois et demi.

M. Walt Lastewka: Nous en serions heureux car nous cherchons à rassembler de plus en plus de données sur la situation dans chaque secteur. Si vous pouviez transmettre ces données au greffier du comité, nous vous en serions tous reconnaissants.

M. Brian Collinson: Je m'y engage.

La présidente: Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Je vous remercie.

J'ai pour vous une question intéressant l'organisation. En tant qu'association de fabricants, avez-vous des membres fabriquant des produits électroniques?

M. Brian Collinson: Nous avons des fabricants de pratiquement tout ce que vous pouvez imaginer. Il y a certainement des fabricants de produits électroniques.

M. Werner Schmidt: Ces gens-là sont peut-être plus immédiatement sensibilisés, car ils fournissent certains des équipements aux membres du conseil du commerce de détail en vue de l'an 2000. De même, à l'intérieur de votre association, ils fournissent des équipements d'usine à d'autres fabricants.

M. Brian Collinson: Oui.

M. Werner Schmidt: Y aurait-il quelque mécanisme au sein de votre association pour mettre en rapport ces services parfois conflictuels et parfois complémentaires, afin que cela puisse se faire en dehors de l'administration publique? Je suis sûr qu'au sein de votre association vous avez des tensions résultant de toute cette affaire de l'an 2000.

M. Brian Collinson: Nos membres sont certainement dans des situations très différentes à cet égard. Il y en a qui sont des consommateurs nets de la technologie et d'autres qui sont des producteurs nets de la technologie.

M. Werner Schmidt: Au sein de votre association.

• 1705

M. Brian Collinson: Oui. Nous nous efforçons certainement de promouvoir un dialogue entre ces membres. Nous avons également un certain nombre de gens qui fournissent des solutions au secteur de la fabrication. Nous tentons d'établir un dialogue entre eux et les consommateurs de leurs produits. Il est sûr que le dialogue doit s'élargir. Nous sommes très désireux de rechercher des mécanismes pour cela, d'abord au sein de notre association, puis en collaboration avec d'autres associations, encore qu'à ce stade le travail se fait surtout au sein de notre association.

M. Werner Schmidt: Y a-t-il adhésion croisée entre l'Alliance des fabricants et le Conseil canadien du commerce de détail?

Mme Diane Brisebois: J'ai l'impression que la plupart de leurs membres sont membres d'autres associations professionnelles mais pas du Conseil du commerce de détail. Nous avons quelques membres affiliés qui représentent le secteur de la fabrication de produits de consommation, mais très peu. Nos membres sont surtout des détaillants.

M. Werner Schmidt: Je pose la question parce que mardi Nortel et Bell nous ont dit... lorsque nous leur avons demandé certaines assurances, ils ont dit qu'il leur était impossible de nous garantir les réponses à certaines questions que nous leur posions. Cela engendre un réel dilemme. Vous avez donné certains engagements, ce qui est merveilleux et je vous en félicite, mais...

Est-ce que Bell est membre de votre organisation?

M. Brian Collinson: Oui.

M. Werner Schmidt: Oui? Voilà donc un membre de votre association à qui l'on demande certains engagements et qui refuse de les donner. Il ne vous donnera évidemment pas non plus ces engagements—du moins pas s'il est cohérent. Or, les produits qu'il fabrique et vend aux détaillants...

Madame Brisebois, je pense que certains de vos détaillants, certains de vos membres, revendent en fait certains de ces matériels. Ils vendent forcément des produits fournis par ces fabricants.

Il n'y a peut-être pas adhésion croisée directe, mais il y a certainement une situation d'intercommunication entre les associations. Je suis donc très heureux que vous soyez là ensemble, car plus nous nous familiarisons avec le problème et plus nous constatons une interrelation que les gens niaient auparavant mais dont nous découvrons qu'elle existe bel et bien. Je suis réellement soucieux de déterminer quelles interfaces il convient d'établir entre les associations et entre la fabrication et la distribution; ce n'est qu'un exemple, mais entre le volet électronique et informatique et le volet fabrication, celui qui crée des choses nouvelles avec des matériaux et des fournitures.

Je me dis que ce genre de discussion devrait peut-être dépasser largement le stade actuel, afin que ce niveau supérieur de dialogue avec vos membres les avertisse de toute une série de problèmes que nous n'avons même pas encore évoqués. Cela semblait être le résultat chez Bell. Au début, ils semblaient dire oui, nous avons réglé le problème, nous avons réglé le problème. Ensuite, lorsque nous leur avons demandé s'ils pouvaient donner une garantie, ils ont dit qu'ils ne pouvaient pas, car cela devait se faire sur la base de solutions individuelles.

Si c'est le cas, il me paraît indispensable qu'une association comme la vôtre, celle des fabricants et celle des détaillants, établisse certains critères afin que l'on sache exactement le degré de préparation. Cela ne garantira peut-être pas la préparation, mais au moins on connaîtra le degré et on pourra dire ce qu'il reste à faire pour être pleinement prêt.

M. Brian Collinson: La situation que nous voyons aujourd'hui, et c'est une dimension qui nous préoccupe particulièrement pour ce qui est des chaînes d'approvisionnement à l'intérieur de notre organisation, c'est que vous avez littéralement des milliers de lettres faisant l'aller-retour entre clients et fournisseurs demandant des assurances au sujet de l'an 2000. Une tension se manifeste.

Évidemment, ceux qui envoient les lettres veulent le maximum de renseignements possibles. J'ai vu certains questionnaires comportant 130 ou 140 questions, dont certaines extrêmement détaillées.

• 1710

Mme Diane Brisebois: Certains venant de nos membres, malheureusement.

M. Brian Collinson: Certains venant des nôtres aussi.

M. Werner Schmidt: Il faut faire cela—absolument. Ce n'est pas une situation où il y a des camps opposés. Il s'agit de dire: voilà, nous avons un problème.

Mme Diane Brisebois: Permettez-moi juste d'ajouter ceci. Le problème de l'alliance... Nous avons eu une présentation d'AT&T sur son état de préparation. Son problème est similaire à celui des détaillants. Elle aussi dépend de produits étrangers, et ces fabricants étrangers ne sont pas prêts.

L'autre chose intéressante, et qui mérite d'être signalée, est que si vous demandez aux fabricants et détaillants de définir ce qu'est la conformité à l'an 2000, beaucoup vous diront que le cheval ressemble à un éléphant qui ressemble à une girafe qui ressemble... Tous les avis divergent. C'est une question très complexe. Si quelqu'un vient dire à ce comité qu'il est prêt pour l'an 2000 et qu'il a tout vérifié... Je lui répondrais qu'il est dans une discipline olympique nouvelle et qu'on va attendre un peu avant de lui donner la médaille. Une telle personne soit ment soit prend un médicament qui trouble sa raison.

M. Werner Schmidt: Beaucoup d'entre nous dans ce comité sommes déjà parvenus à cette conclusion.

Mme Diane Brisebois: Oui, mais c'est la réalité. Malheureusement, c'est un gros défi pour notre industrie, tout comme pour votre comité, car c'est presque comme un trou noir. Nous avançons vers l'échéance de l'an 2000 mais nous ne savons pas trop à quel point nous devons nous préparer, et la chaîne se poursuit. Nous sommes tributaires de tant d'autres gens que je crains que nous vivions avec ce problème pendant encore longtemps.

M. Brian Collinson: Personne n'a jamais fait l'an 2000 auparavant. Voilà le problème.

La remarque sur la signification de la conformité à l'an 2000 est très judicieuse. Il y a toutes sortes de définitions. Il faut parvenir à une acception commune et il faut davantage de dialogues à ce sujet, et des critères plus concrets.

Il y a aussi cet autre phénomène qui se manifeste, l'énorme crainte de procès. Les gens veulent bien renseigner, mais lorsqu'il s'agit de s'engager, on leur a dit de ne pas le faire. Je sais que chez nos membres, lorsqu'on envoie un document à quelqu'un, il y a un paragraphe pour ce qu'on dit aux fournisseurs, un paragraphe pour ce qu'on dit aux clients, un paragraphe pour ce qu'on dit au grand public. Tout cela a été rédigé à grands frais par des juristes.

C'est pourquoi, dans une certaine mesure, nous pensons désamorcer la tension, privilégier des formes de règlement des différends autres que l'action en justice. Nous sommes tous dans le même bateau, d'une certaine façon, et si nous ne parvenons pas à nouer un dialogue véritable, trouver des façons d'échanger réellement l'information, nous allons tous devoir payer cher.

M. Werner Schmidt: Toute cette conceptualisation abstraite m'apparaît bien jolie, mais je me demande si cela va marcher. N'est-ce pas là la question, en fin de compte? Est-ce que l'information va aller d'ici à là?

Mme Diane Brisebois: De notre point de vue et de celui de nos membres, nous n'avons pas la réponse à cette question. La seule chose que nous puissions faire est de nous préparer au mieux, d'espérer que tout tombera en place et que les choses vont tourner au mieux.

La présidente: Je pense, madame Brisebois, que c'est vous qui l'avez dit le mieux. Un autre de nos témoins l'a comparé avec la préparation à un ouragan qui ne viendra peut-être jamais. Si vous ne faites rien, c'est votre faute si vous n'êtes pas prêt. L'ouragan ne viendra peut-être pas, mais il pourrait venir.

Cela nous ramène à toute la question d'un amortissement accéléré spécifiquement pour l'an 2000. Ou bien faudrait-il un amortissement plus rapide pour la technologie en général, afin de ne pas rencontrer un autre problème de l'an 2000 à l'avenir?

Comme je l'ai déjà indiqué, ce mot n'est pas de moi, c'est de l'un de nos témoins. J'ai demandé à M. Collinson de tenir compte de l'opinion d'un de nos témoins qui estime que ce serait récompenser ceux qui ont temporisé et pénaliser ceux qui sont déjà prêts, si certains le sont déjà.

• 1715

Cela me rappelle les inondations l'année dernière au Manitoba: ceux qui ont entassé des sacs de sable autour de leur maison à grands frais n'ont pas été indemnisés, et ceux qui n'ont rien fait l'ont été. Cela introduit une dimension assez intéressante dans cette problématique.

Il faut peut-être se poser une question plus générale. Vu la rapidité des changements technologiques, notre comité devrait peut-être envisager une recommandation allant plus loin que l'an 2000, car certaines entreprises, pour se préparer à l'an 2000, négligent d'autres impératifs technologiques et vont subir de plus grands frais après le 1er janvier 2000. Peut-être, comme M. Jones l'a dit, faudrait-il instituer une déduction généralisée, un amortissement plus rapide de la technologie, lequel serait peut-être une meilleure solution et une solution à plus long terme.

Nous apprécions réellement les avis que vous avez exprimés aujourd'hui. Ils nous sont très utiles. Nous espérons que vous ferez votre possible pour faire comprendre à vos membres que l'an 2000 est un problème et que vous souhaitez tout autant que nous qu'ils agissent car nous voulons que tous les Canadiens soient aussi bien préparés que possible. Nous savons qu'il n'y a pas de garantie absolue concernant l'an 2000.

Nous vous remercions d'avoir pris le temps de venir nous voir en dépit de la neige et des difficultés que vous avez pu rencontrer en chemin. Nous apprécions.

Je vais lever la séance sous peu. Je veux simplement rappeler aux membres que le projet de loi C-20 a maintenant été envoyé au comité, la Loi sur la concurrence. Le greffier a distribué une liste des témoins potentiels. Nous aimerions avoir votre avis sur cette liste. Veuillez communiquer avec le greffier ou avec moi au sujet des témoins que vous aimeriez voir, afin que nous puissions commencer à programmer ces audiences.

Encore une fois, merci beaucoup.

La séance est levée.