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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 9 juin 1998

• 1535

[Traduction]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.)): Nous allons ouvrir la séance conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, une étude sur la préparation de la technologie de l'information en vue de l'an 2000.

Notre témoin d'aujourd'hui est M. Mike Fletcher, CGA, président-directeur général, HighSpin Corporation.

Monsieur Fletcher, y a-t-il quelqu'un avec vous pour répondre aux questions?

M. W. Michael Fletcher (président-directeur général, HighSpin Corporation, et membre de l'Association des comptables généraux agréés du Canada): Non, pas pour l'instant. Il y a un représentant de l'Association des comptables généraux agréés du Canada, M. Charles Bergeron.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Très bien. Je crois que vous avez une déclaration préliminaire à faire.

M. Michael Fletcher: Oui et elle sera brève.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Vous avez envoyé un document qui a été traduit et distribué. Merci beaucoup.

Nous allons donc commencer, monsieur Fletcher.

M. Michael Fletcher: Mesdames et messieurs les membres du comité, mesdames et messieurs.

[Français]

mesdames et messieurs, merci beaucoup de l'occasion que vous me donnez de vous parler du problème de l'an 2000.

[Traduction]

Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de vous parler brièvement du problème du passage à l'an 2000. Je suis ici au nom de l'Association des comptables généraux agréés du Canada afin d'ajouter quelques observations au débat qui entoure les questions juridiques soulevées par le problème informatique du passage à l'an 2000, plus particulièrement en ce qui concerne les petites et moyennes entreprises de notre pays. Je me trouve également ici en ma qualité de président-directeur général de HighSpin Corporation, le principal sinon le seul groupe d'experts-conseils dans le monde à conseiller ce groupe économique sur les conséquences éventuelles de ce problème sur la vie de leur entreprise.

Je félicite l'Association du Barreau canadien pour le document minutieux et complet qu'elle a produit sur les problèmes juridiques que pose le passage à l'an 2000. J'aimerais vous donner un peu le contexte dans lequel il faudrait envisager les questions soulevées. Comme vous le savez pour la plupart, on avance souvent le chiffre de 600 milliards de dollars pour le coût des solutions au problème informatique posé par le passage à l'an 2000. Mais si l'on y ajoute les frais de justice, certains parlent de 3 billions de dollars, un chiffre presque invraisemblable.

En 1997, lors d'une conférence, la Lloyds of London a déclaré s'attendre que les poursuites judiciaires lui coûtent 1 billion de dollars rien qu'aux États-Unis. Cela en dit long sur le fonctionnement de notre société quand on voit que les frais juridiques risquent d'être quatre fois supérieurs au coût de la solution au problème lui-même. C'est cependant un point important puisqu'il montre les répercussions possibles sur notre économie. Et il faudra que cet argent vienne de quelque part.

J'aimerais insister en particulier sur deux points qui méritent, à mon sens, que l'on s'y attarde. Tous deux portent sur le fait que l'inquiétude causée par les questions juridiques commence à faire obstacle aux solutions au problème informatique de l'an 2000.

Un examen rapide montre que chaque entreprise individuellement peut régler ce problème informatique de l'an 2000 de façon assez simple. Il faut premièrement prendre conscience du problème, deuxièmement comprendre en quoi il influera sur le fonctionnement de l'entreprise, troisièmement s'informer sur les solutions possibles et quatrièmement trouver des solutions et les mettre en oeuvre.

Comme les membres du comité le savent, la méthode est simple, mais l'application peut demander énormément de temps, surtout qu'il devient de plus en plus difficile de réunir toutes les données nécessaires à la réalisation des deux dernières étapes.

Le premier problème est celui de la divulgation de l'information. Lorsque je parle du problème de l'an 2000 à des groupes, j'insiste toujours sur le fait que les risques commerciaux auxquels une entreprise pourrait être exposée pourraient non pas venir d'une défaillance de ses systèmes informatiques, mais de celle des systèmes de ses fournisseurs et clients.

Un petit magasin de détail qui vend du mobilier de bureau peut survivre sans ordinateur. Il peut fonctionner avec une comptabilité manuelle et tenir son inventaire sur des fiches. Mais s'il n'a pas de stock à vendre ni de client pour acheter, il est sûr de fermer. La première chose qu'il doit donc faire, c'est de vérifier auprès de ses fournisseurs et clients où en est leur préparation en vue de l'an 2000.

S'ils ne sont pas prêts, il doit le savoir et agir en conséquence. Il voudra sans doute insister auprès des fournisseurs pour qu'ils s'occupent sans tarder de ce problème ou s'organiser autrement. Il voudra sans doute aussi proposer des séances d'information à ses clients actuels, voire à des clients éventuels, pour conserver sa clientèle. Mais pour prendre ces mesures, il devra savoir où en sont les entreprises qui constituent sa chaîne alimentaire commerciale dans leur préparation en vue de l'an 2000. De plus en plus, ces renseignements essentiels ne sont pas révélés parce que les avocats conseillent à leurs entreprises clientes de ne rien dire du tout sur le sujet.

Dans son document, l'Association du Barreau canadien (l'ABC) nomme de nombreux secteurs où les entreprises souhaiteront peut-être informer sur les défauts de leurs produits et procédés afin de limiter les poursuites éventuelles. Un cabinet d'avocats d'Ottawa a récemment indiqué, au cours d'un colloque, qu'il conseillait précisément à ses clients de donner tous les renseignements, mais c'est là une exception, et non la règle. En réalité, nombreux sont les propriétaires et dirigeants d'entreprise qui estiment que ce serait prendre un risque commercial énorme que de parler ouvertement des problèmes internes dus au fait de ne pas avoir résolu la question du passage à l'an 2000. Mieux vaut ne rien dire du tout que de révéler quelque chose qui pourrait se retourner contre vous. Et cela, c'est aussi ce que leur expliquent leurs avocats.

• 1540

La menace de poursuite a également un effet délétère sur les fournisseurs de solutions au problème informatique de l'an 2000. On parle là autant des grands cabinets d'experts-comptables et de grandes sociétés spécialisées dans l'intégration des systèmes que des entreprises constituées d'une seule personne qui fournissent des services informatiques très variés, y compris des solutions au problème de l'an 2000. Toutes ces entreprises, petites ou grandes, s'entendent dire froidement par leurs assureurs qu'elles prennent de gros risques juridiques en s'occupant de près ou de loin de ce problème particulier, à telle enseigne que certaines sociétés très compétentes et tout à fait capables d'aider à le résoudre renoncent totalement à offrir ce service professionnel.

Il ne fait aucun doute que, dans certains cas, les systèmes d'une entreprise tomberont en panne parce que le consultant ou la société à qui elle se sera adressée n'aura pas fait son travail. Ces cas devraient donner lieu à des poursuites, mais de nombreuses entreprises ne seront pas prêtes à l'an 2000 parce que leur propre direction aura tardé à agir ou se sera montrée incompétente. Pour éviter les conséquences de son inaction, elle va chercher un bouc-émissaire à l'extérieur et celui qui doit fournir la solution est une cible évidente.

Mon entreprise, HighSpin Corporation, a mis au point et va bientôt commercialiser une trousse d'outils pour l'an 2000 qui aidera les petites et moyennes entreprises à comprendre les répercussions du problème de l'an 2000 sur leur fonctionnement, à s'y préparer et à planifier en conséquence. Il ne s'agit pas d'une solution mais d'une méthode qui facilitera le processus d'identification des problèmes et de la conduite à tenir. Il est littéralement unique au monde. Cependant, il est possible que nous ne puissions obtenir l'assurance responsabilité voulue pour le produit parce que les compagnies d'assurance redoutent tellement les poursuites éventuelles qu'elles refusent d'assurer ne serait-ce qu'un outil conçu pour aider à comprendre et à planifier.

Comme le montre le mémoire de l'ABC, le problème de l'an 2000 soulève de nombreuses questions juridiques légitimes. Cependant, dans ce défi que nous avons à relever, les aspects liés à la responsabilité commencent à l'emporter sur ce que je crois être des questions sociales et éthiques bien plus importantes. Le problème de l'an 2000 n'est pas qu'un simple ennui technique, comme vous le savez tous. C'est un problème commercial, social et économique qui peut nous toucher tous. Toute collectivité, quelle que soit la définition que l'on en donne, qui souhaite survivre aux défis du passage à l'an 2000, doit divulguer l'information et les solutions; doit parler de meilleures pratiques; doit offrir des conseils et des suggestions pour aider les autres. En bref, nous devons collaborer. Si les entreprises s'attachent uniquement aux problèmes juridiques épineux, il sera plus difficile de trouver des solutions collectives, ce qui est beaucoup plus important.

Comme bon nombre d'entre vous, j'ai survécu au verglas de 1998. Lorsque j'organise des colloques pour mettre les gens en garde contre les effets éventuels du problème de l'an 2000, je fais souvent une analogie avec une tempête de pluie verglaçante prévisible, c'est-à-dire une catastrophe que nous voyons venir et à laquelle nous pouvons nous préparer. Mais comment pourrais-je me préparer si je n'arrive pas à me renseigner sur ce que Ontario Hydro ou la municipalité locale fait pour se préparer, sur ce qui est prévu pour l'approvisionnement en bois et en eau, ou sur les endroits où je trouverais un lit et un repas? Malheureusement, l'analogie ressemble de plus en plus à la réalité que vivent actuellement les entreprises qui essaient de planifier une solution pour faire face au problème de l'an 2000.

Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer devant vous. Je répondrai volontiers à toute question éventuelle.

[Français]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci beaucoup, monsieur Fletcher. M. Fletcher me dit qu'il parle français et anglais pour ceux qui sont intéressés à lui parler dans une langue ou dans l'autre.

Nous allons maintenant passer aux questions des députés. Monsieur Schmidt.

[Traduction]

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Fletcher, d'être venu aujourd'hui.

Le manque de précision de votre document m'intrigue un peu. Il est évident que le problème existe, et nous le savons. J'aimerais vous demander comment on doit agir pour arriver à cette collaboration que vous conseillez tant dans votre document? Comment une entreprise peut-elle transmettre la solution à ses problèmes à une autre entreprise?

Cela pourrait obliger à divulguer des renseignements commerciaux confidentiels. Et il y a toutes sortes d'autres choses. Pensez-vous qu'il soit réaliste de s'attendre à ce que des entreprises collaborent effectivement et à ce que l'on s'aide mutuellement pour résoudre le problème de l'an 2000, même si nous allons tous être touchés par lui, que ce soit directement ou indirectement?

M. Michael Fletcher: La meilleure réponse que je puisse sans doute donner, et je me répète, est qu'il y a effectivement des problèmes juridiques très précis et, comme vous l'avez dit, des questions de confidentialité et autres aspects du même genre. Le problème que je vois cependant est celui des entreprises qui sont très souvent nerveuses, si vous voulez, non pas à l'égard de la réalité de la situation, mais à l'égard des procès frivoles que pourraient leur intenter ceux qui recherchent des boucs-émissaires et celui des personnes qui ont fait tous les efforts possibles, ce qu'on refuse de reconnaître; elles finissent par ne rien révéler du tout.

• 1545

Il y a des regroupements, par exemple... La solution pourrait notamment consister à organiser des regroupements dans certaines industries ou dans certaines collectivités. Je ne sais si c'est possible d'avoir une stipulation d'exonération légale qui ferait que, par exemple, toute personne qui entrerait dans ces regroupements pour discuter de solutions ou d'idées éventuelles ne serait pas responsable si quelqu'un met en oeuvre ces suggestions pour revenir par la suite prétendre que la responsabilité de l'inaction ou de l'action erronée est due à ces gens.

Je ne sais pas si l'on peut fixer des limites, par exemple, aux dommages-intérêts punitifs et autres mesures du même genre afin qu'une entreprise puisse au moins envisager des coûts et des avantages réalistes sans avoir à s'inquiéter de frais de justice arbitraires dépassant de beaucoup les coûts et les actions effectifs.

J'aimerais bien avoir une réponse à votre question, mais je dois encore une fois me contenter de faire des généralités. Le défi consiste cependant à augmenter la circulation de l'information et non à la réduire.

M. Werner Schmidt: Personne ne doute que ce soit le cas. Le problème, c'est que nous avons dépassé l'étape des généralités. Il nous faut prendre des choses au sérieux. Il nous faut résoudre certains problèmes. Il n'est pas très utile de se contenter de dire à quelqu'un qu'il a un problème.

Je crois que vous travaillez aussi au nom de l'association des CGA. Les CGA sont sans doute les mieux placés pour connaître la situation financière d'une entreprise ou d'une exploitation donnée. Il me semble que c'est à vous qu'il revient, en tant que conseillers et fournisseurs de renseignements des dirigeants des entreprises, de leur dire que leur situation est bonne maintenant mais que si telle fourniture n'arrive plus, et ainsi de suite tout au long de la chaîne, ils auront des problèmes.

Donnez-vous des conseils précis sur les mesures à prendre par les quatre entreprises qui constituent le problème? Comment pouvez-vous les aider? Comment pouvez-vous les motiver pour qu'elles fassent ce qu'il y a à faire?

Dans de nombreux cas, ce sera une question de survie. Il ne s'agira pas de faire des choses, mais de survivre.

J'aimerais vous poser ensuite une autre question sur le système de paiements canadien. Mais si vous voulez bien répondre à la première d'abord, nous pourrions remettre à plus tard la deuxième.

M. Michael Fletcher: L'un des points importants, c'est en fait que cela revient à une question de prise de conscience. Je constate de façon très générale que le problème de l'an 2000 continue à être cité comme un problème informatique et que les entreprises s'attachent aux problèmes informatiques internes. Rares sont celles qui comprennent la nature essentielle de ce que j'appelle la chaîne alimentaire commerciale.

Il y a donc une chose importante, c'est que plus on aura conscience du fait qu'on n'est pas isolé, plus une entreprise sera prête à s'ouvrir parce qu'elle admettra aussi que c'est sa propre survie qui est en question. Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que leurs conseillers, qu'il s'agisse de CGA, de CA, d'avocats, etc., devraient les engager à révéler tout ce qu'il est prudent de révéler.

Il y a un équilibre à atteindre, je le comprends bien, mais je crois qu'il est important que les associations, l'Association des comptables généraux agréés du Canada comprise, fassent comprendre à leurs membres que cet équilibre est très important. Comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, si nous nous en tenons aux aspects juridiques, nous risquons que n'obtenir aucun renseignement du tout en définitive.

M. Werner Schmidt: Je suis d'accord.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Schmidt.

Monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Merci, monsieur le président.

Pour revenir sur les questions de M. Schmidt, vous avez dit que les CGA devraient le faire. N'ont-ils rien fait?

M. Michael Fletcher: Je crains que non, je dois l'avouer. Je ne fais pas partie du bureau de direction de l'association. Charles pourra peut-être vous en dire un peu plus, mais pour l'instant, les initiatives concernant l'an 2000, pour ce qui est des activités au sein de l'association, se sont limitées, pour l'essentiel, aux articles parus dans sa revue.

• 1550

On est en train de mettre au point une brochure pour sensibiliser davantage les clients. Pour l'instant cependant, on ne fait pas pression pour conseiller aux CGA d'agir pour confronter le problème. J'ai été invité à prendre la parole à quelques-unes de leurs conférences, je contribue donc à cette sensibilisation, mais rien n'est fait de façon officielle.

Je ne pense pas l'avoir vu non plus de la part de l'ICCA.

M. Alex Shepherd: Dans ce dernier cas, vous avez en fait tort.

M. Michael Fletcher: Bon, d'accord, je vous prie de m'excuser.

M. Alex Shepherd: Ils ont fait des envois massifs à leur clientèle et à d'autres personnes pour les sensibiliser.

Je m'inquiète simplement car je crois que vous représentez les CGA et vous nous dites pourtant qu'ils ne font pas grand-chose. Cela n'est guère rassurant pour beaucoup d'entre nous.

M. Michael Fletcher: Je ne peux pas dire le contraire.

M. Alex Shepherd: D'accord.

J'aimerais que vous me disiez une chose. Vous avez parlé de votre trousse d'outils. En quoi est-ce un outil unique? Nous savons qu'il y a des entreprises aux États-Unis qui possèdent une technologie que l'on peut insérer dans les systèmes informatiques, qui peut identifier les codes des dates, etc. Ces entreprises vendent ce genre de logiciel comme solution, élément utile, outil. En quoi votre trousse d'outils est-elle différente?

M. Michael Fletcher: Il y a deux choses. Pratiquement tous ceux qui offrent des solutions s'intéressent avant tout aux gros systèmes informatiques. Il y en a quelques-uns qui s'occupent des PC. Mais la question importante pour de nombreuses entreprises, c'est que la totalité du risque commercial dépasse les systèmes informatiques; il s'agit de sensibiliser les fournisseurs, les clients et autres.

Nous avons mis dans cette trousse d'outils un exemplaire de mon livre; une vidéocassette que nous avons produite pour contribuer à cette sensibilisation; un logiciel pour aider à la planification; l'un des outils que vous avez mentionné en fait, Greenwich Mean Time, pour ce qui est d'analyser le système; des copies des lettres à envoyer et un manuel pour les micro-entreprises.

Il s'agit en fait d'un ensemble, d'une trousse d'outils qui est destinée aux petites et moyennes entreprises, car je n'ai absolument rien vu qui existe à l'intention de ce groupe. L'une des plus grosses inquiétudes que j'ai concernant le problème de l'an 2000 de façon générale est que les médias et la plupart des solutions recherchées visent les grandes entreprises alors que la grande majorité de notre économie est constituée de petites entreprises.

M. Alex Shepherd: Certains économistes prévoient que 30 p. 100 de toutes les petites entreprises pourraient se retrouver en situation de faillite à cause de cela. Pensez-vous que ce chiffre soit crédible?

M. Michael Fletcher: Non. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un chiffre aussi élevé, en tout cas j'espère que ce ne sera pas le cas. La prévision du Gartner Group est de l'ordre de 1 à 10 p. 100 et le chiffre que ce groupe mentionne le plus généralement pour l'Amérique du Nord se situe entre 3 et 5 p. 100.

Mais je dois admettre cependant que la sensibilisation fait encore incroyablement défaut. Un de mes amis devait prendre la parole à l'Université de Phoenix. L'université a envoyé 22 000 invitations et a reçu 13 réponses. Et je dois ajouter que je crains que la situation ne soit guère meilleure au Canada pour ce qui est de la sensibilisation. Si cela continue, je m'inquiète de ce que le pourcentage d'entreprises qui vont en définitive faire faillite ne cesse d'augmenter.

M. Alex Shepherd: Les gens à qui vous avez parlé, notamment les exploitants de petites entreprises, sont-ils encore en grande partie en position de refus, à votre avis?

M. Michael Fletcher: Ce n'est peut-être pas du refus proprement dit. Il y a sans doute trois excuses que l'on avance souvent: la première c'est que c'est un problème qui ne vaut que pour les grosses entreprises et non pour les petites entreprises, non pour les PC; la deuxième est qu'il y a un génie de l'informatique qui va arriver demain avec une solution instantanée, il n'est donc pas nécessaire de faire quoi que ce soit; et la troisième, qui est assez ironique, est qu'on a tout le temps. C'est une excuse que nous avançons depuis cinq ans et que nous continuons à donner alors que nous sommes à 18 mois de l'échéance.

M. Alex Shepherd: Ce que le comité a notamment essayé de faire, c'est de s'en prendre à ce manque de sensibilisation. Voulez-vous dire que vous ne voyez pas de signes visibles indiquant que cette sensibilisation s'améliore?

M. Michael Fletcher: Elle ne s'améliore que très légèrement. Nous avons en fait à Ottawa une opinion légèrement partiale parce que The Citizen a fait un bien meilleur travail que les autres journaux pour ce qui est de traiter de la question. Elle fait souvent les manchettes. Lorsque je vais à Toronto, on me dit que l'on n'en parle peu. Lorsque je vais à Hamilton on me dit, oui, il y a eu un article dans The Spectator il y a environ un mois.

C'est ce que l'on en sait, et pourtant l'annonce publicitaire SOS 2000 paraît depuis un certain temps. Mais je dois dire que de façon très générale, je dois vraiment expliquer le b. a.-ba aux gens à qui je parle.

• 1555

M. Alex Shepherd: Certaines personnes essaient d'organiser des cours de formation pour ceux qui comprennent le COBOL et les autres langages semblables, et vont donner des conseils non pas aux plus petites entreprises mais aux entreprises de taille moyenne afin d'identifier les problèmes de leur système de codage. D'après ce que j'ai entendu dire, DRHC ne veut pas financer ces cours parce que la période de formation est brève, que l'an 2000 va arriver et qu'ensuite tout sera terminé.

Que dites-vous de cela?

M. Michael Fletcher: Je pourrais répondre deux choses. Tout d'abord, bien que ce genre de formation soit nécessaire, elle est encore une fois destinée aux grandes entreprises. Car les entreprises de taille moyenne ont des ordinateurs standard, des logiciels de série. Elles ne connaissent rien à la programmation en COBOL et ne s'en soucient pas. Ainsi, lorsqu'on leur parle de ça, on confirme que ce n'est pas un problème qui les concerne puisqu'elles n'ont pas ce genre de choses, cela ne sert donc à rien.

J'estime vraiment que ce qui est nécessaire... En fait, ces compétences peuvent être très précieuses. Je lisais dans une revue aujourd'hui qu'on avait besoin de directeurs de projets de technologie de l'information. Les compétences nécessaires pour résoudre le problème de l'an 2000 sont celles de la direction de projet. Il s'agit de pouvoir non seulement tenir compte du matériel et des logiciels, mais également des clients, des fournisseurs, des marchés, des systèmes, du personnel, de la comptabilité et de tous ces éléments.

C'est ce genre de formation que nous devrions offrir car très franchement, si nous donnons à quelqu'un l'ensemble de ces compétences, nous allons les équiper pour un large éventail d'emplois qui seront nécessaires bien après l'an 2000. Dans la mesure où l'importance donnée à la programmation en COBOL, ce qui peut être nécessaire jusque vers l'an 2002 ou 2004, pourrait être un peu utile et étant donné que nous manquons de directeurs de projets de technologie de l'information actuellement pour les technologies de l'information en général, et évidemment plus précisément pour le passage à l'an 2000, pourquoi ne pas combiner les deux pour la formation?

[Français]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Monsieur Dubé.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): J'ai plusieurs questions pour le témoin et je vais faire en sorte qu'elles soient brèves. Plusieurs vont exiger comme réponse un oui ou un non.

D'abord, j'aimerais vous féliciter pour votre document qui s'adresse aux petites entreprises. Il est bien fait. Cependant, vous semblez dire qu'il n'y a pas de partage de l'information. Accepteriez-vous que votre document soit distribué tel quel à certaines entreprises?

[Traduction]

M. Michael Fletcher: Certainement.

[Français]

J'ai beaucoup écrit sur ce problème dans des magazines, des journaux, etc.

M. Antoine Dubé: Vous dites représenter l'Association des comptables généraux agréés du Canada, mais ne pas faire partie du bureau de direction. Je vous vois avec le petit livre. Est-il disponible en français?

M. Michael Fletcher: Oui, mais il y a toujours des problèmes quant aux termes techniques. Je peux quand même vous répondre adéquatement.

M. Antoine Dubé: Si je comprends bien, c'est qui vous qui vendez ce livre au nom de votre compagnie.

M. Michael Fletcher: Non, c'est moi qui le vends. Je crois qu'on m'a demandé d'être le représentant de l'Association devant ce comité parce que je suis le seul expert sur ce sujet à part les CGA. J'ai beaucoup de points de vue sur des sujets juridiques, etc. Je ne suis pas un comptable dans la pratique publique.

M. Antoine Dubé: Quant au partage, aurait-il été possible, selon vous, que l'Association des comptables généraux agréés du Canada diffuse votre petit livre au moins à ses membres?

M. Michael Fletcher: J'espère que je pourrai les convaincre qu'il est très nécessaire de le distribuer.

M. Antoine Dubé: Croyez-vous que les membres de l'Association des comptables généraux agréés du Canada sont prêts à affronter le défi? On sait qu'il s'agit de chiffres et d'ordinateurs.

M. Michael Fletcher: Je dois admettre que la plupart des comptables ne sont pas prêts.

• 1600

M. Antoine Dubé: J'ai une dernière question. Je reviendrai peut-être lors d'un autre tour. Un point m'intéresse beaucoup. Vous semblez avoir des inquiétudes quant au fait que les entreprises n'osent pas trop communiquer les problèmes qu'ils envisagent par rapport au bogue de l'an 2000. Entre autres, elles craignent des poursuites.

À cet égard, que pensez-vous de la possibilité d'apporter des modifications législatives pour dégager de toute responsabilité ceux qui mettent volontiers à la disposition des autres leurs solutions au problème de l'an 2000?

M. Michael Fletcher: Je n'ai pas compris.

M. Antoine Dubé: Vous dites que vous constatez que les entreprises ne veulent pas trop divulguer leurs problèmes pour des raisons de concurrence et vous laissez entendre qu'il pourrait y avoir des poursuites.

Vous n'êtes pas le premier témoin à nous parler de cela. Plusieurs autres nous l'ont dit. Seriez-vous favorable à ce que le gouvernement fédéral adopte une loi pour dégager de toute responsabilité ceux qui mettent volontiers à la disposition des autres leurs solutions aux problèmes de l'an 2000, ou du moins pour diminuer leur responsabilité?

[Traduction]

M. Michael Fletcher: Oui.

[Français]

M. Antoine Dubé: Merci.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Dubé.

[Traduction]

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, monsieur le président. Certains points ne sont pas très clairs pour moi aussi vais-je tout de suite vous demander des précisions.

Combien de membres compte l'association des CGA?

M. Michael Fletcher: En comptant les étudiants, je crois qu'il s'agit d'environ 56 000.

M. Walt Lastewka: Mais vous ne faites pas partie de cette association?

M. Michael Fletcher: Si, monsieur. Je suis membre de l'association.

M. Walt Lastewka: Vous êtes membre de l'association. J'aimerais savoir si les bureaux des CGA sont prêts?

M. Michael Fletcher: Si vous voulez parler des bureaux nationaux précisément, je crois que oui, mais je ne puis vous le garantir totalement.

M. Walt Lastewka: Qu'a fait l'association pour alerter ses membres et ses clients? Je n'ai pas très bien compris ce que vous avez dit plus tôt à ce sujet.

M. Michael Fletcher: C'est là que je donne libre cours à ma schizophrénie. Je dois dire qu'elle n'a pas fait assez. Elle a publié des articles dans les journaux et elle a mis au point une brochure pour ses clients, mais je dois admettre que pratiquement toutes les associations professionnelles du Canada n'ont pas fait suffisamment pour alerter leurs membres.

M. Walt Lastewka: Je préfère m'en tenir à l'association des CGA. Je ne veux pas parler de HighSpin Corporation car je respecte votre travail. Il me semble que l'association des CGA a une responsabilité envers ses membres et ses clients.

J'avais constaté il y a quatre ou cinq mois, juste avant que nous ne commencions nos audiences ou au moment où nous l'avons fait, que certaines associations n'étaient pas prêtes. Je suis très surpris que l'association des CGA ne vienne pas nous rendre compter aujourd'hui des progrès qu'elle a réalisés jusqu'ici à ce chapitre, car sa responsabilité est tout aussi importante que celle de la communauté juridique; et nous en avons parlé précisément la semaine dernière en disant qu'il y avait une responsabilité des juristes et des comptables.

Je dois donc vous dire, à vous et à votre association, que l'ACGAC n'a pas fait son travail et est parmi ceux qui attendent le dernier moment pour agir, comme vous l'avez dit, ceux qui attendent la solution magique. L'ACGAC attend-elle la solution magique?

M. Michael Fletcher: Non, je ne crois pas que ce soit le cas. Elle est en train d'agir, mais je ne pense pas pouvoir dire qu'elle soit beaucoup plus avancée que la plupart des autres associations.

M. Walt Lastewka: Pour être franc avec vous, et je ne vais pas mâcher mes mots, monsieur le président, je suis très surpris et déçu de constater que des associations de cet ordre, à ce stade de nos travaux, nous fassent ce genre de rapport. J'aimerais que l'association des CGA nous fasse parvenir un document nous indiquant quels sont ses plans à l'égard de sa responsabilité envers ses 50 000 membres.

Je m'inquiète davantage de ses clients. Si j'étais un client de votre association, je serais très inquiet après ce que j'ai entendu aujourd'hui. Que répondez-vous à cela?

M. Michael Fletcher: Je vous répondrai franchement, monsieur, que j'estime un peu injuste que vous fassiez une distinction pour l'association des CGA. Je ne suis sincèrement pas convaincu que les entreprises clientes obtiennent les conseils voulus sur l'an 2000 tant de la part de leurs comptables, que de leurs avocats ou de tous autres professionnels. Ces conseils ne sont pas transmis. Il ne s'agit pas de savoir si, lorsque je vais m'adresser à un groupe, on me dit que les avocats et les CA leur en ont parlé, mais pas les CGA; personne ne leur en a parlé.

• 1605

M. Walt Lastewka: Que pensez-vous du rapport de Statistique Canada—et on devrait en avoir un autre le mois prochain—disant que 93 ou 94 p. 100 des gens sont au courant du problème, mais que dans le secteur de la petite entreprise, ceux qui ont pris des mesures ne représentent que 20 ou 25 p. 100?

M. Michael Fletcher: Cela dépend comment on formule la question. Lorsque j'ai étudié les réponses au sondage, j'ai déduit que les répondants savaient qu'il y avait un problème «général». Ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'il y a un problème dans leur entreprise—et personne ne le leur explique cela.

M. Walt Lastewka: Ce n'est pas ce qu'a dit Statistique Canada.

Monsieur le président, je crois qu'il nous faudra tous poser la question lorsque nous verrons le rapport. À ce qu'il me semble, on a compris qu'il y a un problème mais on ne s'en est tout simplement pas encore occupé.

M. Michael Fletcher: Au cours de mes colloques, le message que je reçois très souvent de la part de la majorité des participants, c'est: «Eh bien, j'étais un peu au courant du problème, mais je n'ai jamais essayé de comprendre quelles étaient ses répercussions et je n'ai certainement pas pensé à 80 p. 100 des choses que vous nous avez dites concernant l'incidence sur mon entreprise.»

M. Walt Lastewka: J'aimerais que vous me précisiez quelque chose. À la page 2 de votre rapport, vous dites que «de plus en plus, ces renseignements essentiels ne sont pas révélés» parce que les juristes professionnels conseillent à leurs entreprises clientes de ne rien dire de leur préparation en vue de faire face au problème. Je déduis de votre remarque que les avocats estiment d'ores et déjà que nous ne serons pas prêts et que nous devrions donc être prêts à nous défendre. Est-ce bien là le message?

M. Michael Fletcher: En fait, ce n'est peut-être même pas le cas. Il se pourrait qu'une entreprise pense qu'elle sera prête, mais qu'on lui conseille de ne rien dire par crainte qu'elle soit tenue responsable du un pour cent de non-préparation, si c'est juste ce qui lui manque.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Lastewka.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Fletcher. J'aimerais faire quelques remarques sur ce livre. Je n'ai pas eu l'occasion de le regarder avant, mais je viens de le feuilleter rapidement et je dois dire que je suis très impressionné.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Pourriez-vous nous donner le titre?

M. Werner Schmidt: Oui. C'est le livre que M. Fletcher a aimablement... J'espère qu'il m'appartient maintenant.

M. Michael Fletcher: Oui.

M. Werner Schmidt: Merci. Il s'agit de The Computer Crisis 2000, de W. Michael Fletcher, le témoin qui est en train de comparaître devant nous, monsieur le président.

J'estime que ce livre est un bon début, si modeste soit-il, qui va commencer à susciter un certain intérêt de la part des entrepreneurs. Je le trouve quant à moi très utile et je pense que nous devrions vous féliciter de l'avoir fait.

J'aimerais l'approfondir un peu et je pense que c'est pour cela que ce livre a été fait. Ma question concerne le système de compensation des chèques et paiements entre institutions financières. Je redoute que cela se produise au Canada, mais je m'inquiète beaucoup plus des transferts internationaux de fonds entre institutions financières, d'un pays à l'autre. Tout ce système relève maintenant du domaine du traitement de l'information. Ce ne sont pas vraiment des dollars qui sont matériellement transférés; ce sont des chiffres qui vont d'un endroit à l'autre. Il suffirait que l'un de ces systèmes tombe en panne, que l'un des éléments de ce système tombe en panne.

Ma question concerne donc le marché asiatique que vous signalez pour dire qu'il est inégal. En ce qui concerne la Chine, on n'a guère d'information. Pour le Japon il semble que ce soit bien ou mal selon ce que l'on considère. Nous avons eu un témoin qui nous a dit très clairement que l'Asie n'allait pas être prête et qu'il s'attendait à des faillites bancaires massives sur ce continent.

Étant donné vos antécédents de CGA—et je crois que c'est certainement un complément très intéressant que vous soyez un expert en informatique aussi bien qu'un comptable général agréé—j'aimerais vous demander... Vous devez savoir un peu comment se fait ce transfert de fonds et comment fonctionne ce système de compensation pour ce qui est des chèques, des engagements, des responsabilités, etc. Comment pensez-vous que ce système va réagir s'il y a une panne quelque part? Et je pense qu'il y en aura.

M. Michael Fletcher: Ma grosse inquiétude concernant ces opérations, c'est que la seule façon de nous protéger consiste à nous isoler, autrement dit à mettre des barrières matérielles autour de nos propres institutions financières.

M. Werner Schmidt: Mais c'est impossible.

M. Michael Fletcher: En fait, il s'agit d'une barrière électronique pour ce qui est de filtrer l'information et c'est possible, à ce que je crois, dans la mesure où Revenu Canada, notamment, est confronté au même défi puisqu'il reçoit l'information de milliers d'autres clients. Il doit aussi vérifier si tout va bien avant d'entrer les données dans ses systèmes. Je crois que les banques canadiennes essaient de mettre en place des systèmes semblables pour filtrer l'information afin d'arriver à ce résultat.

• 1610

Mais à un certain moment dans leurs transactions avec certains éléments de la communauté financière internationale, je crois qu'il y aura des risques graves dans des régions données du monde, et je ne sais trop comment on va y faire face. C'est la grande inconnue pour moi.

M. Werner Schmidt: J'arrive à comprendre cette partie du problème, mais je voulais penser à l'effet cumulatif pour ce qui est du temps. Il y a une réaction en chaîne et lorsqu'un paiement donné doit être transféré pour permettre un autre paiement afin de respecter une autre obligation, et ainsi de suite tout le long de la chaîne, s'il y a une panne à l'un de ces endroits et que le système fait défaut, les délais ne seront pas respectés plus loin dans la chaîne...

M. Michael Fletcher: Oui.

M. Werner Schmidt: ... et cela pourrait entraîner la faillite effective d'une institution financière.

M. Michael Fletcher: Oui. Là encore, lorsque je parle de la situation financière, je fais une distinction entre la situation canadienne et la situation américaine, mais ce que je dis notamment aux entreprises canadiennes qui ont des clients ou des fournisseurs aux États-Unis, c'est exactement ce que vous venez de dire. Ces entreprises peuvent être parfaitement au point pour l'an 2000, mais si leurs banques ne le sont pas et si leurs banques ferment, alors l'entreprise canadienne connaît un problème tout aussi grave que si l'un de ses fournisseurs ou de ses clients avait un problème.

Je leur indique que c'est une chose importante, mais je ne peux pas proposer de solution. Tout ce que je peux faire, c'est de leur signaler le problème et de leur dire de le signaler à leurs clients et fournisseurs.

M. Werner Schmidt: C'est là quelque chose qui se passe entre un client et une banque, mais qu'en est-il entre deux banques? Je pense que c'est vraiment là que le problème de compensation va se poser, surtout si c'est un marché énorme comme le marché asiatique. Si certains éléments s'écroulent, les répercussions seront ressenties dans le monde entier.

M. Michael Fletcher: Je suis d'accord.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci beaucoup, monsieur Schmidt.

Monsieur Murray.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Fletcher, soyez le bienvenu. Je suis heureux de votre présence parmi nous.

Peut-être que notre comité s'occupe de la question de trop près depuis trop longtemps, mais j'avais l'impression que, dans notre pays, nous nous dirigions inévitablement vers une solution au problème. Après vous avoir écouté aujourd'hui, je constate que certains d'entre nous sont peut-être encore en train de tourner en rond.

Ce qui m'a frappé dans ce que vous avez dit, c'est que vous avez parlé du risque de poursuites judiciaires qui pourraient avoir des effets négatifs sur ceux qui pourraient en fait fournir des solutions. Vous avez dit que leurs assureurs leur ont carrément dit qu'ils risquaient des poursuites juridiques s'ils faisaient quoi que ce soit pour cette solution. Si c'est le cas, qu'est-ce que cela veut dire? Si les assureurs disent à ceux qui pourraient fournir des solutions qu'ils ne doivent pas aller aider les autres... à moins que j'aie mal compris ce que vous avez dit.

M. Michael Fletcher: Non, vous m'avez parfaitement compris. J'ai pris l'exemple d'un technicien—il s'agit d'un consultant qui travaille seul, ou qui travaillait seul à l'époque—à qui son assureur a dit carrément que s'il faisait quoi que ce soit pour le problème de l'an 2000 et s'il voulait obtenir une assurance, le tarif serait quatre ou cinq fois celui qu'il avait payé l'année précédente.

M. Ian Murray: Toutes ces bonnes paroles qu'on a entendues sur le bon Samaritain et sur le fait qu'il faut transmettre l'information ne sont pas suffisantes. Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est un peu tard pour essayer de proposer des mesures législatives, mais vous nous dites que cela reste un gros problème.

M. Michael Fletcher: Cela reste un gros problème.

M. Ian Murray: Que conseilleriez-vous à un petit entrepreneur de faire? Je crois qu'il se produit toujours la même chose lorsqu'il y a un problème qui arrive de nulle part. Il y a des gens qui courent partout en disant qu'ils connaissent la réponse au problème, qu'ils ont la solution. Pour ceux qui cherchent des solutions dans ce cas, à qui leur conseillez-vous de s'adresser? À qui peuvent-ils faire confiance? Je crois que là est la véritable question.

M. Michael Fletcher: Il y a deux réponses à votre question. Tout d'abord, sur le plan technique, il y a des logiciels disponibles qui vont les aider à faire en partie leur propre diagnostic. On peut les télécharger à partir d'Internet ou on peut acheter ces logiciels dans les magasins de détail. Il leur faudra peut-être aller trouver leur fournisseur habituel de technologie de l'information, du moins pour passer certains de ces programmes.

Mais dans de nombreux cas, je leur donnerais des conseils pratiques pour l'entreprise, autrement dit des conseils concernant leur matériel et leur logiciel, dans la mesure où pour l'entreprise moyenne, si le matériel ne fonctionne pas, on peut le remplacer relativement facilement. Si le logiciel ne fonctionne pas, on peut obtenir une version améliorée adaptée à l'an 2000. Si je dis cela, c'est parce que 75 p. 100 des logiciels vendus en Amérique du Nord aux entreprises sont des logiciels de série.

• 1615

Mais là où les conseils font défaut, c'est pour inciter à planifier et à se renseigner davantage pour les questions commerciales, et non pour les questions informatiques. Ces questions ont peut-être moins de répercussions juridiques immédiates, mais mon cri de guerre lors de mes colloques est constamment: «Les fournisseurs et les clients, les fournisseurs et les clients». C'est chez eux que se situent les risques pour votre entreprise.

M. Ian Murray: Vous avez parlé d'un cabinet d'avocats d'Ottawa qui recommandait de tout dire, mais c'est l'exception plus que la règle, apparemment.

M. Michael Fletcher: Oui.

M. Ian Murray: Pourquoi une telle recommandation? Cela veut-il dire qu'en cas de procès après l'an 2000 ou en l'an 2000, les tribunaux seraient mieux disposés à l'égard d'une entreprise qui a tout révélé, qui a fait de son mieux et à qui on ne pourra donc pas reprocher d'avoir essayé d'être utile?

M. Michael Fletcher: En gros, oui. En fait c'est ce que dit le mémoire de l'ABC, à savoir que dans de nombreux cas, il semble judicieux qu'une entreprise donne ce genre d'information à l'avance pour limiter les pertes éventuelles, parce qu'elle reconnaît ainsi ses lacunes et permet à ses clients d'agir. Si vous ne reconnaissez pas que vous avez des lacunes et que les clients ne réagissent pas, d'après ce que j'ai lu dans le mémoire de l'ABC, on pourrait vous en rendre responsable, et j'ai tendance à être d'accord avec ça.

M. Ian Murray: Très bien. Merci beaucoup, monsieur Fletcher.

Merci, monsieur le président.

[Français]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Murray.

Monsieur Dubé.

M. Antoine Dubé: Vous avez parlé de l'état de la situation à l'Association des comptables généraux agréés du Canada. Je sais qu'au Québec, l'Ordre des comptables agréés offre tout un programme sur son site Internet. Elle a des pochettes d'information et elle communique avec différentes entreprises. Êtes-vous au courant de l'approche de l'Ordre des comptables agréés du Québec?

[Traduction]

M. Michael Fletcher: Non.

[Français]

J'ai vu très peu de chose sur cette planification.

M. Antoine Dubé: Dans le domaine de la comptabilité, seriez-vous d'accord qu'on offre une déduction fiscale distincte pour l'amortissement des frais reliés à l'an 2000, par exemple pour l'acquisition de nouveaux ordinateurs, etc.?

M. Michael Fletcher: Oui, je pense qu'il est très important d'investir de l'argent dans les petites et moyennes entreprises parce qu'il y aura des dépenses énormes reliées à cela.

M. Antoine Dubé: Avez-vous évalué les sommes qui seraient nécessaires?

M. Michael Fletcher: Non. Par exemple, si une compagnie qui a des ordinateurs ne fait que du traitement de texte, ce n'est pas grave si ses ordinateurs ne fonctionnent pas exactement avec les dates correctes. Il serait possible qu'une entreprise comme celle-là n'ait pas à dépenser quoi que ce soit. Cela varie énormément.

M. Antoine Dubé: Vous êtes un expert dans le domaine de la comptabilité ou le domaine fiscal. Moi, je ne le suis pas, mais dans différents organismes où j'ai oeuvré, on entend souvent parler des fameuses règles comptables. Donc, c'est fixé. Les règles comptables actuelles sont-elles suffisantes ou si, en raison du problème de l'an 2000, des nouvelles technologies ou des transferts de fonds dont tout le monde parlait plus tôt, on devrait envisager d'établir d'autres règles comptables?

M. Michael Fletcher: Je dois dire que non. Si vous me le permettez, je vais répondre en anglais.

• 1620

[Traduction]

Pour l'instant, les comptables agréés, tant au Canada qu'aux États-Unis, estiment que la meilleure remarque ou la remarque la plus judicieuse qu'ils puissent faire sur la préparation d'une entreprise à l'an 2000 consiste simplement à ajouter une note aux états financiers.

J'y vois franchement un inconvénient car, comme vous l'avez dit, il y a un principe de comptabilité généralement accepté qui est la convention de la permanence de l'entreprise, c'est-à-dire l'hypothèse que l'entreprise restera en exploitation pendant un certain temps à l'avenir. Si elle n'a rien fait pour le problème de l'an 2000, je doute fort que cela reste valable et le simple fait qu'il y ait une note dans les états financiers ne me semble pas suffisant pour mettre en garde les lecteurs, ou pourrait ne pas être une information suffisante pour permettre à ceux qui reçoivent les états financiers de prendre une décision valable et éclairée.

[Français]

M. Antoine Dubé: Justement, que faudrait-il faire?

[Traduction]

M. Michael Fletcher: Il sera peut-être de plus en plus nécessaire de fournir ce que l'on appelle une vérification sous réserve, à savoir que si une entreprise ne fait pas suffisamment pour résoudre les problèmes qu'elle pourrait avoir en l'an 2000, les vérificateurs devraient estimer qu'il en va de leur devoir de le dire dans les états financiers. S'ils ne sont pas convaincus que l'entreprise existera l'année prochaine, comment peuvent-ils publier une vérification, même avec une note dans les états financiers?

Je comprends que c'est plus facile à dire qu'à faire, car il faut évaluer la technologie et les systèmes, ce qui est difficile. Pour moi, il n'est pas non plus acceptable de ne pas faire cette évaluation.

[Français]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Dubé.

Madame Jennings.

[Traduction]

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci, monsieur Fletcher.

Pour continuer dans la même veine, l'Association des comptables généraux agréés du Canada ne devrait-elle pas en fait envisager et même offrir éventuellement une formation rapide à ses membres pour que les CGA qui font des vérifications pour leurs clients aient la formation voulue pour pouvoir procéder à cette évaluation raisonnée pour conclure si oui ou non il y aura permanence de l'entreprise, surtout en ce qui concerne le problème de l'an 2000? Pensez-vous que l'association devrait faire quelque chose de ce genre?

M. Michael Fletcher: Oui, j'en conviens, elle devrait le faire et elle a indubitablement commencé à agir pour informer ses membres. Parallèlement, les règles comptables que nous suivons sont les règles comptables internationales et les règles comptables canadiennes reconnues par l'ICCA et l'AICPA américain, notamment.

Je ne crois pas me tromper, et M. Shepherd pourra me corriger si je me trompe, en disant que ces règles sont révisées assez régulièrement, qu'elles ne sont pas coulées dans le béton. Mais je veux bien admettre que c'est une question qui devrait être soumise aux deux associations comptables.

Mme Marlene Jennings: Et très rapidement.

M. Michael Fletcher: Et très rapidement.

Mme Marlene Jennings: J'ai une autre question. Dans votre document et dans l'exposé que vous venez de faire, vous parlez de l'un des principaux problèmes. Qu'il s'agisse de l'Association du Barreau canadien ou des associations provinciales de juristes qui donnent les conseils... l'Association du Barreau canadien conseille à ses avocats de dire à leurs clients de révéler le plus de choses possibles sur leur préparation en vue de l'an 2000.

M. Michael Fletcher: Je ne voudrais pas que vous interprétiez mal mes propos. Je ne sais pas du tout si l'association du barreau suggère cela. Tout ce que je dis, c'est que je connais quelques avocats qui ont conseillé en gros à leurs clients de ne rien divulguer du tout.

Mme Marlene Jennings: Je me suis peut-être mal exprimée. Je voulais dire que l'Association du Barreau canadien avait identifié de nombreux domaines où les entreprises devraient divulguer le plus de choses possibles, mais malgré cela, autant que vous sachiez et autant que je sache, les conseillers juridiques de certaines entreprises leur ont recommandé de ne rien divulguer, ou de divulguer le moins possible, même lorsqu'ils sont sûrs que leur entreprise et que la plupart des éléments de la chaîne alimentaire de l'entreprise auront vraisemblablement maîtrisé le problème d'ici l'an 2000, précisément en raison des implications juridiques.

M. Michael Fletcher: C'est tout à fait vrai.

Mme Marlene Jennings: Poussons cela un peu plus loin. Ceci étant, pensez-vous que le gouvernement puisse faire quoi que ce soit pour calmer certaines craintes de litiges relatifs à la responsabilité, qu'il s'agisse des compagnies d'assurance qui offriront une garantie pour la responsabilité, d'une entreprise, etc.? Pensez-vous qu'il y ait quelque chose que le gouvernement puisse faire en particulier pour toute cette question de la responsabilité juridique? Cela encouragerait les gens à être plus ouverts.

• 1625

M. Michael Fletcher: J'imagine que je suis à la fois idéaliste et pragmatique. Je vous répondrai que oui, je pense qu'il y a quelque chose que le gouvernement devrait faire, mais sur un plan très pragmatique, je ne suis pas sûr que cela puisse se faire dans la pratique.

J'aimerais même que l'on essaie de faire quelque chose car, je le répète, le message qui en découlerait serait que la question est plus importante que les problèmes juridiques.

Mme Marlene Jennings: L'un des problèmes ne vient-il pas de la nature même de notre économie? Il y a le fait que nous sommes une économie axée sur le marché et que cela signifie nécessairement qu'il y a concurrence et que chaque entreprise veut avoir un petit avantage sur ses concurrents.

M. Michael Fletcher: Oui, cela fait certainement partie du tableau d'ensemble.

Mme Marlene Jennings: Ce que je crains, c'est qu'étant donné la nature même de notre économie sociale, de notre économie commerciale et étant donné le fait qu'elle est axée sur le marché, il n'y a pratiquement rien que nous puissions faire pour nous assurer que la totalité du problème de l'an 2000 soit résolue. Le problème aura des conséquences parce qu'il y a des entreprises qui sont axées sur les profits parce que c'est pour cela qu'elles sont là.

Elles ont peut-être fait en sorte qu'au sein de leur entreprise et de leur exploitation, et dans la chaîne alimentaire qui les concerne, les fournisseurs sont prêts pour l'an 2000 et que leur banque est prête, etc. Elles pensent vraiment qu'elles n'ont pas à divulguer cette information, aussi pourquoi devraient-elles le faire? Pourquoi devraient-elles aider leurs éventuels concurrents lorsqu'il y a de bonnes chances que certains d'entre eux ne soient pas aussi avancés qu'elles et qu'elles vont pouvoir choisir parmi leurs clients?

M. Michael Fletcher: Je suis d'accord avec vous de façon générale. Ironiquement, elles ne donnent parfois même pas l'information aux membres de leur chaîne alimentaire, ce qui est en fait contraire à ce que vous avez dit.

Je suis d'accord pour dire que c'est en grande partie la nature de notre économie qui veut ça. Mais en même temps, l'une des leçons que nous avons tirées de la tempête de verglas, c'est que la collectivité a la capacité remarquable de se mobiliser dans un commun effort. C'est ce que j'ai même constaté en parlant à certains groupes. Dans chaque collectivité où je vais, je suggère toujours que l'on fasse de cette collectivité la première à être prête pour l'an 2000 au Canada. Bon nombre d'entre elles ont tendance à être un peu sensible à cet appel.

C'est donc effectivement la nature de notre économie, mais il y a des éléments qui nous encouragent à travailler ensemble.

Mme Marlene Jennings: Merci.

[Français]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, madame Jennings.

Monsieur Schmidt.

[Traduction]

M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président.

J'ai trois questions brèves. Quel plan d'urgence le gouvernement devrait-il conseiller aux entreprises pour l'an 2000?

M. Michael Fletcher: Bien franchement, je répondrais qu'elles devraient avoir un plan d'urgence. Personne ne leur dit qu'elles devraient procéder à une opération de planification et qu'elles devraient auparavant identifier leurs risques. Ensuite, si elles constatent qu'elles ne peuvent pas minimiser ces risques, elles devraient mettre en place un plan d'urgence. Personne ne parle de plan d'urgence, et pourtant il le faudrait.

M. Werner Schmidt: Voici ma deuxième question: les déposants devraient-ils retirer leur argent de la banque ou de toute institution de dépôt pour être sûrs d'avoir de l'argent liquide au matin du 1er janvier de l'an 2000?

M. Michael Fletcher: Je crois de plus en plus que la plupart des systèmes qui pourraient faire que les cartes de crédit, les cartes de débit, les guichets automatiques ne fonctionnent pas auront en fait été mis à jour. J'espère qu'ils le seront.

Néanmoins, je crois que la tendance va être de faire de tels retraits. Personnellement, pour l'instant, je ne dirais pas que ce soit nécessaire, mais je pense que beaucoup de gens le feront.

M. Werner Schmidt: Y a-t-il un risque que tout le monde se précipite sur les banques?

M. Michael Fletcher: Je crois qu'étant donné tout ce que l'on dit sur la façon de faire face au passage à l'an 2000, oui, cela pourrait arriver. Cela va beaucoup dépendre de ce que nous allons faire au cours des 12 prochains mois.

M. Werner Schmidt: Si tel était le cas, quelle mesure le gouvernement devrait-il prendre pour garantir à la population que ses dépôts sont en sécurité? Car si tout le monde se précipite sur les banques, cela pourrait avoir des répercussions très graves sur l'ensemble de notre système financier canadien.

• 1630

M. Michael Fletcher: Il y a certainement des règles internes qu'il faudrait étudier et éventuellement changer. Je sais notamment que les banques ne doivent garder qu'un certain pourcentage des fonds en liquide.

Vous avez raison—et je crois qu'il s'agit de trois pour cent, bien que je puisse me tromper—on devrait peut-être prévoir des changements pour leur permettre d'avoir un plus grand pourcentage en liquide, mais l'absence d'assurance ou l'absence de confiance en notre système bancaire reviendra à un manque de confiance en notre système économique global. Ce manque de confiance se vérifiera si l'on a le sentiment que l'on ne fait rien pour régler le problème—et il ne s'agit pas de fournir des remèdes instantanés ou des solutions instantanées, mais tant qu'on aura le sentiment que l'on ne maîtrise pas la situation et que c'est quelqu'un d'autre qui est responsable, alors les gens vont réagir à une situation à la fin de 1999 et laisseront entendre que la seule forme de contrôle que l'on puisse avoir, c'est de retirer des espèces, ce qui aurait précisément le genre de conséquences que vous avez envisagées.

M. Werner Schmidt: Ma dernière question concerne le test. Vous êtes CGA.

M. Michael Fletcher: Oui.

M. Werner Schmidt: Les CGA sont nombreux. Quel test connaissez-vous ou appliquez-vous pour vérifier qu'une entreprise est en conformité pour l'an 2000?

M. Michael Fletcher: Lorsque je prends la parole devant divers auditoires, je dis toujours de ne pas utiliser l'expression «conforme à l'an 2000», car cela a des répercussions juridiques. L'expression «prêt pour l'an 2000» me semble plus indiquée. Pour être prêt, à mon avis, il faut comprendre le problème, il faut avoir un plan, il faut prévoir des ressources pour le mettre en oeuvre, il faut avoir un budget et il faut avoir un délai. Je crois que si une compagnie venait maintenant dire qu'elle était conforme, cela voudrait dire qu'elle ne comprend ni la nature ni la portée du problème. Mais si je puis m'assurer que quelqu'un comprend, a un plan, des ressources, de l'argent et un délai, alors j'ai de bonnes raisons de croire que l'entreprise est sur la bonne voie.

M. Werner Schmidt: Mais j'ai une entreprise et je veux être sûr d'être conforme. J'ai toutes ces choses. J'ai un plan d'urgence. Si je veux savoir si mon système fonctionne, quel test dois-je lui faire subir?

M. Michael Fletcher: Si j'ai bien compris votre question, le meilleur test consiste à sortir votre système pour le mettre dans un autre ordinateur, à changer les dates et ensuite à procéder à toute une série de tests.

Je ne suis pas sûr de répondre à votre question.

M. Werner Schmidt: Si, si, vous répondez à ma question, mais est-ce que cela va fonctionner?

M. Michael Fletcher: En définitive, les tests sont un élément tout à fait essentiel.

M. Werner Schmidt: Oh, bien sûr!

M. Michael Fletcher: Le seul test absolu est celui de la réalité, mais je pense que l'on peut faire beaucoup d'autres tests pour du moins réduire les possibilités de pannes que vous risquez d'avoir.

M. Werner Schmidt: Vous devriez écrire un autre livre sur le test.

Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci beaucoup.

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Merci, monsieur le président.

Monsieur Fletcher, j'aimerais passer aux expériences de votre entreprise dans ses tractations avec d'autres entreprises. Nous avons fait venir de nombreuses grosses sociétés, qu'il s'agisse des banques, de l'industrie automobile, etc., et elles semblent avoir un plan en place. Bien sûr, elles ont davantage de moyens; elles ont davantage de ressources à accorder au problème.

D'après notre étude du moins, à moins que nous entendions un son de cloche différent en septembre et en octobre, il semble que la plupart des grosses sociétés soient en bonne voie et que les PME constituent la grande inconnue. Avez-vous entendu parler de grosses sociétés qui pourraient ne pas...?

M. Michael Fletcher: Non, absolument pas. Je pense notamment aux chiffres avancés par Statistique Canada indiquant que 100 p. 100 d'entre elles sont au courant du problème et que 92 p. 100 d'entre elles ont un plan. Je dois avouer qu'à plusieurs reprises, j'ai pris ces pourcentages pour essayer de les envisager sous un autre angle, car bien que cela semble encourageant, si je change de perspective, cela veut dire que huit pour cent d'entre elles n'ont rien fait. Ça veut dire que 40 sociétés sur les 500 sociétés canadiennes qui sont citées dans Fortune risquent d'avoir de graves problèmes avec l'an 2000. Cela me semble représenter un risque énorme au niveau des grosses sociétés.

M. Walt Lastewka: Savez-vous ce qu'il en est dans les services publics des collectivités? Vous avez parlé de municipalités et autres qui étaient prêtes.

• 1635

M. Michael Fletcher: Plusieurs le sont. Par exemple, les systèmes de comptabilité de ces services publics viennent souvent des États-Unis. Je parlais la semaine dernière avec une personne qui s'inquiétait beaucoup pour une fonction très spécialisée pour les comptes clients d'une petite entreprise de services publics de Colombie-Britannique, car elle devait attendre que des programmeurs de logiciels du Texas leur envoient une version pour l'an 2000.

Là encore, la situation peut être différente selon les services publics. De la même manière que les grosses sociétés sont plus avancées que les petites, il me semble en général, d'après mon expérience, qu'il en va de même pour les municipalités. Ottawa-Carleton est plus avancée, mais lorsqu'on va dans les comtés avoisinants, la sensibilisation est moins grande et les services publics qui fournissent l'eau et autres, sont moins conscients du problème.

M. Walt Lastewka: Dans ce secteur, les entreprises sont très étroitement constituées en réseau sur la côte est, par exemple, et je sais que le président se demande vraiment s'il y aura du courant ou non lorsqu'arrivera l'an 2000.

Je tenais à poser cette question en votre nom, monsieur le président.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci. Je vous en suis reconnaissant.

M. Walt Lastewka: Dans le domaine médical, surtout dans les hôpitaux et les grands centres médicaux, de très nombreux témoins nous ont dit qu'ils avaient du mal à obtenir l'information contenue dans des puces emprisonnées dans des boîtes noires. Je sais que la situation a un peu changé dernièrement, mais avez-vous entendu parler de gens qui ne pouvaient pas obtenir d'information auprès des fournisseurs de boîtes noires, ou d'autres types de systèmes?

M. Michael Fletcher: Non, car je n'ai pas travaillé directement avec les hôpitaux pour cette question, mais j'ai lu pas mal de choses, surtout sur l'expérience américaine, qui confirmeraient ce que vous dites.

M. Walt Lastewka: Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Lastewka.

[Français]

Monsieur Dubé.

M. Antoine Dubé: Avant de poser une question ou de faire un commentaire, j'aimerais vérifier quelque chose auprès de Mme la greffière. Cette association a-t-elle comparu devant nous auparavant en ce qui a trait au problème de l'an 2000?

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Elle ne le saurait pas. Elle remplace aujourd'hui.

M. Antoine Dubé: D'accord. Le savez-vous, madame Pothier?

M. Walt Lastewka: Non.

M. Antoine Dubé: Je suis un peu étonné. Je livre cela à l'ensemble des membres du comité. Je ne veux pas blâmer qui que ce soit, mais je me serais attendu à ce qu'un organisme aussi important parle de sa propre préparation au problème de l'an 2000. J'apprécie le témoignage de M. Fletcher, qui est très instructif, mais il me semble qu'il serait important qu'on connaisse leur degré d'avancement.

Je sais que M. Lastewka a posé une question là-dessus, mais on devrait écrire aux autres pour leur demander quel est leur état de préparation par rapport à cela. On devrait le demander non seulement à l'association comme telle, mais à l'ensemble des 50 000 comptables au Canada. Ce serait très important parce que ce sont des joueurs importants. Ils ne sont pas n'importe qui. Ils sont ceux qui, normalement, devraient conseiller les petites et moyennes entreprises.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Les membres du comité sont-ils d'accord avec M. Dubé?

Werner?

M. Werner Schmidt: Yes.

M. Antoine Dubé: Je constate que M. Schmidt a eu le privilège d'obtenir le livre de M. Fletcher. En a-t-on des copies?

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Monsieur Dubé, ces livres appartiennent à M. Fletcher et c'est à lui, s'il le désire, de les distribuer aujourd'hui. Cependant, il n'est pas de mise de demander à M. Fletcher de distribuer des livres qu'il veut vendre à tout le monde.

M. Antoine Dubé: Peut-être pas lui, mais l'association...

M. Michael Fletcher: Je viens de demander qu'on le traduise en français. Donc, je pourrai vous en remettre une copie en français dans 10 jours environ.

M. Antoine Dubé: Excellent. Merci.

[Traduction]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Au nom du comité, monsieur Fletcher, je tiens à vous remercier d'être venu aujourd'hui pour représenter l'association des CGA et pour avoir été si direct et si franc avec nous.

• 1640

Je dois cependant indiquer que nous sommes profondément déçus par les CGA. Nous sommes en fait non seulement déçus, mais également inquiets. Je m'inquiète du fait qu'aucun membre du bureau de direction ne soit venu aujourd'hui. Vous leur avez sauvé la mise grâce à votre savoir-faire et à votre franchise, mais je suis sûr que tous les membres du comité sont d'accord avec moi pour dire que nous sommes très inquiets au sujet du bureau de direction de l'association des CGA et des CGA en général. Est-ce là le message qui est transmis à leurs clients? Que font-ils? Au bureau de direction de l'association des CGA est-on prêt? Nous ne savons pas. Je dois dire que nous craignons qu'on ne le soit pas.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Monsieur le président, j'aimerais faire une remarque qui confirme ce que vous avez dit. M. Fletcher dit précisément cela dans son livre en ce qui concerne la haute direction. Le comité s'est saisi d'une étude qui a été faite par le groupe de travail qui est sans doute présidé par l'un des plus importants PDG du Canada. En fait, le groupe de travail était constitué de tout un groupe de présidents-directeurs généraux. Ce sont des gens très importants. Je ne veux pas sous-estimer par là le témoignage de M. Fletcher. Je pense qu'il a fait un excellent travail. Mais je suis d'accord pour dire qu'on ne peut guère mieux prouver la gravité de la chose qu'en nommant au sein du groupe de travail le plus haut responsable.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci.

Monsieur Lastewka, voulez-vous dire un dernier mot?

M. Walt Lastewka: J'ajouterais à vos remarques qu'il y a peut-être eu un malentendu de la part de l'association des CGA concernant l'objectif de notre réunion d'aujourd'hui. Je ne suis pas sûr qu'on leur ait donné la véritable raison de notre convocation. Il serait donc peut-être bon que l'association des CGA nous envoie une lettre sur sa préparation, sur ce qu'elle fait, sur toutes ces questions qui nous inquiètent... Peut-être que cela serait une bonne chose et j'aimerais qu'on demande une telle lettre.

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): D'accord. Il serait sans doute indiqué de laisser à M. Fletcher le dernier mot avant de lever la séance.

M. Michael Fletcher: Merci, monsieur le président. À bien y réfléchir, je me serais sans doute aussi senti mieux à l'aise si j'avais eu à mes côtés un membre du bureau de direction car je ne savais pas exactement ce que l'on attendait de moi en tant que représentant de l'association des CGA. Je vous remercie néanmoins infiniment de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous. Je suis tout à fait sûr que l'association des CGA accédera du mieux qu'elle le pourra à la demande du comité.

[Français]

Le vice-président (M. Eugène Bellemare): Merci, monsieur Fletcher.

Je déclare la séance ajournée.