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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 20 octobre 1998

• 1533

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre, daté du mardi 6 octobre 1998, le comité examine le projet de loi C-53, Loi visant à accroître la disponibilité du financement de l'établissement, de l'agrandissement, de la modernisation et de l'amélioration des petites entreprises.

Nous sommes très heureux d'accueillir aujourd'hui plusieurs témoins pour débattre du projet de loi C-53. Nous en avons deux groupes. De 15 h 30 à 16 h 30, nous recevons M. Roy Norton, consultant en politique publique, et deux représentants de l'Institut Fraser, Fazil Milhar, directeur d'études réglementaires, et Jason Clemens, analyste de politique. Puis à 16 h 30, nous accueillerons un autre groupe de témoins représentant les Assurances Boréal Inc.

J'aimerais rappeler aux députés que nous devons respecter strictement le temps qui nous est accordé. Il va y avoir une sonnerie d'appel à 17 h 15 et nous devons voter à 17 h 30.

Nous pouvons commencer, s'il n'y a pas de questions. Nous allons d'abord entendre les deux groupes de témoins avant de passer aux questions.

Je vais commencer par M. Norton.

M. Roy Norton (témoigne à titre personnel): Merci, madame la présidente.

Veuillez excuser ma voix; c'est presque depuis que l'on m'a demandé de comparaître devant vous que j'ai une laryngite. Je ne sais pas s'il s'agit d'un effet de causalité, mais je vais tout faire pour que l'on m'entende. Si vous ne pouvez m'entendre, faites-moi signe pour que je parle plus fort.

• 1535

En 1996, le ministère de l'Industrie a retenu mes services par contrat dans le but de consulter les personnes visées par la Loi sur les prêts aux petites entreprises—essentiellement des emprunteurs et d'autres représentants d'affaires; des prêteurs, actuels et futurs; des fonctionnaires gouvernementaux et des analystes universitaires de la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

Plus tôt cette année, alors qu'aucune décision n'avait encore été prise au sujet d'une loi visant à renouveler ou remplacer la Loi sur les prêts aux petites entreprises, le ministère m'a de nouveau engagé à contrat, cette fois-ci pour examiner le marché actuel du financement de la petite entreprise. Permettez-moi maintenant de vous faire part de quelques-unes des principales conclusions de ma recherche.

Les consultations de 1996 ont été instructives. Les personnes visées par la Loi sur les prêts aux petites entreprises étaient toujours en train de s'adapter à l'élargissement du programme, en 1993, ainsi qu'à l'introduction du recouvrement des coûts, en 1995. Tout en énumérant les lacunes du marché de crédit—lacunes au niveau du fonds de roulement et des contrats de location-financement, lacunes auxquelles se heurtaient les très petites entreprises et les entreprises très récentes, et lacunes auxquelles se heurtaient les sociétés d'exportation ou les sociétés axées sur le savoir—presque tout le monde se montrait peu disposé à approuver des changements susceptibles de menacer le programme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

En bref, sans répondre parfaitement à tous les besoins identifiés, la plupart des personnes visées ont été d'avis que la Loi sur les prêts aux petites entreprises servait un but essentiel de politique publique.

La portée de cette loi est tout à fait extraordinaire. D'après mes calculs, les prêts garantis par la Loi représentent 40 p. 100 des prêts bancaires à terme non remboursés de moins de 250 000 $, ce qui veut dire que le programme représente au moins un cinquième de tout le crédit à terme disponible pour les entreprises empruntant moins que ce montant.

Compte tenu de cette réalité, on peut comprendre que de l'avis des personnes visées, les principes fondamentaux de la Loi sur les prêts aux petites entreprises étaient soit valables ou ne méritaient d'être modifiés qu'après une expérience considérable en matière de recouvrement des coûts. Ces principes fondamentaux sont le montant du prêt garanti, les droits et les primes, le niveau de garantie, la taille maximale de la société, le montant maximum du prêt, et le taux d'intérêt maximum.

Je le répète, même si les participants au programme n'étaient pas tous également satisfaits de ces paramètres, ils étaient certainement d'avis qu'une fois tous les objectifs multiples pris en compte, le gouvernement avait probablement établi de bons principes fondamentaux. Je remarque que la nouvelle loi laisse tous les paramètres de 1995 tels quels.

Cette année, j'ai examiné dans le cadre de ma recherche certaines des lacunes du marché signalées en 1996 par les personnes visées. Ma recherche s'appuie fortement sur les études faites pour le compte de l'Association des banquiers canadiens, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et du ministère de l'Industrie ou par ces entités—dans le dernier cas, par d'autres consultants du secteur privé ou par des groupes de réflexion économique, comme le Conference Board.

Personne ne sera surpris d'apprendre que d'après le secteur bancaire, le marché de la petite entreprise est inondé de capitaux, tandis que la FCEI en arrive à la conclusion que ses membres en sont en quelque sorte considérablement privés. Alors que les statistiques disponibles ne sont pas facilement conciliables, je me suis proposé, premièrement, de repérer les lacunes du marché de financement, validant ainsi peut-être l'activité prévue aux termes de la Loi sur les prêts aux petites entreprises et justifiant même peut-être un élargissement de sa portée; et deuxièmement, dans le cas de chevauchement, d'évaluer si la Loi sur les prêts aux petites entreprises pouvait être globalement ou en partie superflue.

Il est frappant pour moi de voir jusqu'à quel point le marché du financement de la petite entreprise a évolué ces deux dernières années, depuis mes consultations de 1996. Beaucoup de produits, services et moyens de distribution novateurs se sont multipliés. La croissance du crédit a été rapide, dépassant celle de l'économie nationale. Tributaires—de manière disproportionnée—du capital d'emprunt, ce sont surtout les petites entreprises dont les demandes de crédit ont été approuvées qui ont tiré parti de la baisse des taux d'intérêt.

Même si la situation globale s'est certainement améliorée, diverses lacunes continuent de toute évidence à miner les petites et moyennes entreprises.

En règle générale, les petites entreprises sont confrontées à des lacunes persistantes du marché du financement. Certaines des raisons en sont systémiques. Les sommes relativement peu importantes qu'elles demandent n'offrent ni aux prêteurs ni aux investisseurs un taux de rendement susceptible de compenser adéquatement l'obligation de diligence.

Les petites entreprises subissent de plus grandes pertes liées au défaut de paiement des prêts et sont plus vulnérables à la faillite, en raison en partie de leur inexpérience relative. Il n'est pas surprenant qu'elles doivent donner de plus fortes garanties.

Le marché du financement reste toujours très peu accueillant pour deux genres de petites entreprises—les entreprises naissantes et les entreprises récentes. L'ABC et la FCEI sont d'accord sur ce point. Les antécédents limités ou inexistants de ces entreprises les classent dans les catégories d'entreprises à haut risque.

• 1540

Elles demandent moins de financement par emprunt que d'autres sociétés, en partie parce que leurs demandes sont approuvées moins souvent que la normale. Leur capacité d'accès à l'investissement est encore plus mince. Les garanties prévues par la Loi sur les prêts aux petites entreprises favorisent toutefois ce groupe en particulier, les sociétés qui existent depuis trois ans ou même moins recevant 63 p. 100 des prêts en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

Étant donné que le prêt en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises est en moyenne de 65 000 $ et que les sociétés bénéficiant du prêt comptent en moyenne 5,4 employés, il semble raisonnable de conclure que, en l'absence de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, les lacunes observées sur le marché de financement de la petite entreprise seraient aggravées.

Deux secteurs—les industries novatrices et les industries d'exportation—sont confrontées à des lacunes prononcées du marché de financement, quoique bien différentes. Le marché a réagi très assidûment ces trois dernières années—ou plus—aux besoins de ces deux secteurs.

Les problèmes—essentiellement le caractère incorporel des actifs dans le cas des industries novatrices et le besoin constant de fonds de roulement dans celui des industries d'exportation—n'ont pas encore été réglés. Toutefois, d'après les réactions d'autres programmes fédéraux ainsi que celles du marché du secteur privé, il semble qu'il soit moins urgent qu'auparavant d'assujettir ces secteurs à la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada.

Les entreprises dans des secteurs moins porteurs continuent, dans de nombreux cas, à avoir accès à un marché de financement qui est loin d'être parfait. Quatre secteurs au moins—les services commerciaux, la construction, le commerce de détail et le commerce en gros—semblent avoir connu des lacunes en matière de crédit au cours de la période 1995-1997. Dans le cas d'au moins un de ces secteurs, le commerce de détail, la Loi sur les prêts aux petites entreprises semble avoir considérablement comblé cette lacune.

Alors que de nombreux programmes provinciaux visent des secteurs économiques particuliers, ce n'est que dans de rares provinces qu'il existe des programmes visant à améliorer l'accès de toutes les sociétés au financement par emprunt. Aucun de ces programmes n'est aussi complet que la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Cette loi a toujours l'avantage comparatif d'être déterminée par la demande et guidée par les prêteurs et aussi par le fait qu'elle ne cherche pas à sélectionner des secteurs gagnants.

Le fait que la demande de fonds de roulement ne soit pas satisfaite semble être la lacune la plus importante et la plus persistante en matière de crédit à laquelle sont confrontées les PME. Cette réalité obsède exagérément les petites entreprises et c'est la principale raison pour laquelle les PME font appel aux institutions financières. Le secteur privé semble enfin réagir à cette lacune de manière importante, en offrant des marges de crédit et des autorisations de découvert, des cartes de crédit d'affaires, des contrats de location-acquisition et en assurant l'intégration des comptes débiteurs. En outre, le gouvernement fédéral a recours à d'autres mécanismes pour combler cette lacune, soit le CAE, la SEE et les organismes d'expansion régionale.

Les sociétés très récentes qui recherchent moins de 100 000 $ sont également confrontées à une lacune en matière de contrats de location-financement. Toutefois, cette lacune s'atténue. Sans aucune aide de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, le marché des sociétés spécialisées de financement prend de l'expansion. L'augmentation des contrats de location-financement créée des avantages accessoires importants. Tout comme les prêts à terme en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, les contrats de location-financement permettent d'utiliser les rares garanties à d'autres fins, facilitant ainsi l'accès au fonds de roulement. Le secteur de location-financement a montré de façon probante qu'en ne garantissant que l'achat forfaitaire de biens durables, la Loi sur les prêts aux petites entreprises déforme le marché de financement des PME. C'est probablement la raison pour laquelle le gouvernement propose un projet pilote de contrats de location-acquisition.

Il m'a semblé beaucoup plus facile d'en conclure qu'il existe des lacunes plutôt qu'un chevauchement. Ce dernier terme sous-entend une activité en double, voire même redondante. En règle générale, cela se limite au chevauchement entre la Loi sur les prêts aux petites entreprises et d'autres prêteurs et garants fédéraux. La plupart des autres programmes, qu'ils soient fédéraux ou provinciaux, diffèrent de la Loi sur les prêts aux petites entreprises en matière de ciblage sectoriel ou dans les moyens utilisés pour fournir du crédit aux PME.

De toute évidence, il y a chevauchement entre la Loi sur les prêts aux petites entreprises et de nombreuses initiatives du secteur privé visant à améliorer l'accès des PME au capital. Il ne pourrait en être autrement. La Loi sur les prêts aux petites entreprises est un programme généralisé. De tous les programmes gouvernementaux visant à aider les PME, c'est probablement celui qui répond le plus à la demande du marché. Les prêteurs et les emprunteurs en comprennent assez facilement les paramètres, lesquels s'appliquent à beaucoup plus de PME spécialisées dans des activités variées à l'échelle du pays que ceux de tout autre programme.

• 1545

Pour éliminer le chevauchement, il faudrait que tous les prêts en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises soient progressifs. Si le gouvernement devait maintenant éliminer le chevauchement, la nouvelle Loi sur le financement des petites entreprises du Canada garantirait tous les prêts risqués. Compte tenu de la conception du programme, il s'agirait alors d'un quasi-monopole sur les prêts risqués. Les défauts de paiement seraient beaucoup plus nombreux et le recouvrement des coûts serait impossible ou exigerait des droits tellement élevés que le programme serait effectivement anéanti.

Je suis arrivé à des conclusions fort simples. Il y a des lacunes dans le marché du financement de la petite entreprise. La Loi sur le financement des petites entreprises en a amélioré certaines, tandis que d'autres échappent à sa portée. La plupart des innovations sur le marché de crédit ces dernières années complètent la Loi sur les prêts aux petites entreprises plutôt qu'elles ne la reproduisent. Si l'on parvient à un recouvrement complet des coûts, la nouvelle loi, comme celle qui la précède, devrait permettre de combler la lacune qui existe entre le taux que les prêteurs imposeraient aux entreprises naissantes ou plus récentes et ce que ces entreprises seraient normalement prêtes ou en mesure de payer.

Mes deux recherches dans le domaine de la Loi sur les prêts aux petites entreprises m'ont permis de confirmer que la qualité du programme, c'est sans aucun doute sa conception simple, de mieux en mieux comprise et relativement non bureaucratique. Essayer de faire en sorte que la loi qui la remplacerait, soit la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada, comble toutes les lacunes, ne permettrait probablement pas de répondre à tous ses objectifs.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Norton.

Je vais maintenant céder la parole à M. Clemens.

M. Jason Clemens (analyste de politiques, Institut Fraser): Merci. Tout comme M. Norton, M. Milhar et moi-même luttons contre la grippe et subissons les effets du décalage horaire; par conséquent, je vous demanderais de bien vouloir excuser toute défaillance de mon processus mental au cours de la prochaine heure.

Lorsqu'on nous a demandé de présenter un mémoire, il s'agissait davantage d'examiner les principes généraux de l'intervention du gouvernement dans le marché financier, notamment dans les marchés financiers de la petite entreprise. Mes observations d'aujourd'hui, ainsi que le mémoire que nous avons présenté, correspondent donc beaucoup plus au concept général des dettes garanties par le gouvernement.

En général, l'intervention du gouvernement entraîne deux macro-effets. Tout d'abord, elle entraîne une diminution du risque pour le prêteur, sans nécessairement changer la nature du produit. En d'autres termes, le rapport risque-avantage de n'importe quel projet est modifié lorsque la dette est garantie par le gouvernement. Deuxièmement, comme le crédit est limité, il y a nécessairement processus de réaffectation, vu que la priorité ou l'affectation de crédit diffère en fonction de l'existence ou de la non-existence d'une dette garantie.

Dans notre mémoire, nous passons pas mal de temps à débattre de la notion des rapports risque-avantage. Fazil et moi-même serons heureux de débattre davantage de cette question, s'il s'agit d'un point litigieux en ce qui concerne la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

Au cours de la recherche que nous avons faite pour notre mémoire, nous avons examiné un document de E. Brewer, «Performance and Access to Government Guarantees: The Case of Small Investment Companies», publié par la Federal Reserve Bank des États-Unis. L'auteur souligne de nouveau le fait que l'intervention du gouvernement en matière de dettes garanties modifie effectivement ce rapport risque-avantage.

À l'annexe A de notre mémoire se trouve un schéma très simpliste de l'effet des dettes garanties en fonction de l'ordre de priorité des projets. Nous soulignons qu'en pareil cas, il faudrait faire une analyse complète de rentabilité.

Dans notre mémoire, nous signalons que selon le rapport 1997-1998, de 147 000 à 1,2 million de nouveaux emplois sont attribués à la fourniture de prêts par l'entremise de cette loi. Malheureusement, il n'est pas indiqué que ce crédit est réaffecté d'autres entreprises. L'effet peut donc être négligeable et il peut s'agir en fait d'un désavantage net en matière de création d'emplois, si le crédit est réaffecté de sources productives à des sources moins productives—non pas des sources non productives, mais des sources moins productives—, en ce qui concerne ce rapport risque-avantage.

Nous avons essayé de résumer la disponibilité du crédit bancaire afin de fournir quelques données de macro-prêts. Au tableau 1 de notre mémoire, nous soulignons à la fois le micro-prêt et le montant du prêt prévu par la loi—de 0 à 250 000 $. À l'heure actuelle, les sept grandes banques du Canada ont 2,5 milliards de dollars de prêts non payés, dont tous sont inférieurs à 25 000 $.

Il est intéressant de noter que le micro-prêt correspond de façon générale à 7 900 $. Il s'agit donc de très peu de prêts dont le montant est négligeable. Par conséquent, il n'est pas confirmé, du moins par les statistiques de l'ABC, que les prêts octroyés à la petite entreprise ne sont pas inférieurs à ce montant.

• 1550

Par ailleurs, en ce qui concerne la fourniture de crédit bancaire, il est important de souligner l'effet de la technologie. Il suffit de citer l'exemple de Wells Fargo, qui a émis 50 millions de dollars, essentiellement dans le sud de l'Ontario, sans aucune garantie, par téléphone à partir de son central téléphonique situé au Colorado. Dans notre document sur les fusions bancaires, nous indiquons qu'au fur et à mesure des progrès technologiques et de l'élimination des autres obstacles à l'accès, le prêt à la petite entreprise deviendra l'un des marchés les plus disputés.

Pour résumer très rapidement—si vous avez des questions, nous pourrons en débattre plus à fond—le sondage Thompson Lightstone & Company Limited fait pour le compte de l'ABC a permis de conclure que seulement 50 p. 100 des PME visées avaient recours au financement par emprunt, 48 p. 100 au crédit-fournisseur et 46 p. 100 aux cartes de crédit et contrats de location-financement. Il y a donc de toute évidence des solutions de rechange. Ce qui nous a paru encourageant, c'est le pourcentage des PME qui se servent des bénéfices non répartis—c'est-à-dire de leur propre rentabilité—pour financer la poursuite de leurs opérations et leur agrandissement; ce pourcentage est passé de 45 à 51 p. 100.

Nous affirmons dans notre document que c'est grâce à une nouvelle structure du système d'imposition que l'on parviendra le plus efficacement possible à assurer un meilleur financement et une plus grande flexibilité pour les PME. Nous en débattons en termes absolus comme en termes relatifs. Je serais porté à croire qu'il s'agit d'une question relative au taux absolu d'imposition. Je peux aller dans les détails un peu plus tard.

Il est également important de remarquer d'après les données du sondage que 93 p. 100 de tous les prêts PME ont été approuvés par les sept grandes banques, ce qui témoigne d'une réponse importante aux demandes de financement des PME. Par ailleurs, le fait que 92 p. 100 des demandes de prêt sont approuvées à la première demande, et non à la deuxième ou à la troisième, lorsque les garanties ou les conditions du prêt sont restructurées, témoigne également de la bonne réaction des grandes banques.

Je suis complètement d'accord avec M. Norton lorsqu'il déclare que le processus du fonds de roulement est l'un des défis que doivent relever les PME en matière de financement—c'est-à-dire le financement des comptes débiteurs, de l'inventaire par les comptes créditeurs. Quiconque connaît le marché de la petite entreprise sait bien que la réussite, à court terme et à long terme, d'une PME peut dépendre de la gestion des comptes débiteurs, de l'inventaire et des comptes créditeurs. Dans notre mémoire, nous faisons une analyse détaillée du fonctionnement de ce processus. Plus on peut donner d'information aux PME au chapitre de la gestion du fonds de roulement, plus elles disposent de flexibilité financière.

En outre, il est intéressant de noter que dans une étude de Statistique Canada faite en 1996, il apparaît que la mauvaise gestion est la cause essentielle des faillites au Canada. On souligne en particulier la mauvaise gestion financière ou l'incapacité, pour les petites entreprises, de gérer leur structure de capital—c'est-à-dire, le ratio d'endettement—leur structure de fonds de roulement et leur structure de capital. Les conclusions du rapport de Statistique Canada, ainsi que celles des États-Unis que nous signalons dans notre document, indiquent qu'il est nécessaire d'utiliser les bénéfices non répartis comme source de financement.

Ce que nous affirmons essentiellement dans notre document, c'est qu'il s'agit véritablement d'une question d'imposition. Une étude effectuée par la FCEI en 1998 conclut que pour 88,5 p. 100 des membres de cette fédération, l'imposition, le lourd fardeau de l'imposition en particulier, est la priorité numéro un. Par contraste, seulement 28 p. 100 des membres indiquent que la disponibilité du financement—c'est-à-dire l'affectation de crédit de la banque—devrait être la priorité numéro un. Il apparaît donc clairement que les membres de la FCEI ont le sens des priorités.

Dans notre document, nous nous sommes attardés sur trois domaines financiers. Le premier, le capital de risque, est extrêmement important. D'après ce que nous savons des États-Unis, c'est qu'il existe un rapport extrêmement fort entre le taux d'imposition applicable aux gains en capital et le montant de capital de risque.

Il est intéressant de noter qu'en 1997, presque 1,8 milliards de dollars ont été fournis aux PME par l'entremise de sociétés de capital de risque, ce qui équivaut presque au montant total de capitaux émis en vertu de cette loi. Le secteur du capital de risque est axé sur des projets à haut risque et est structuré pour de tels projets. Il lui est naturel de fournir ce genre de financement. D'après moi, une réduction du taux absolu des gains en capital faciliterait l'investissement de capital de risque, ce qui permettrait—autant, si pas plus, que la loi actuelle—de fournir un financement pour l'agrandissement des entreprises et leur entrée sur de nouveaux marchés.

• 1555

Le Canada se classe au troisième rang des sept pays du G-7 en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés. Le taux absolu est tel qu'il empêche les petites entreprises de conserver les profits et de les utiliser.

L'aspect le plus pénible du financement des entreprises, c'est celui du bénéfice non réparti qui découle de l'imposition individuelle. Au Canada, si l'on n'est pas constitué en société ou si l'on est structuré comme entreprise individuelle ou société en nom collectif, le revenu est imposé en fonction de l'impôt sur le revenu personnel. Par conséquent, les taux marginaux et absolus élevés de l'imposition sont un obstacle, les profits ne pouvant être remis ni conservés pour l'exploitation de l'entreprise.

Fazil et moi-même avons hâte de répondre aux questions. Veuillez m'excuser de la brièveté de l'exposé.

J'aimerais simplement terminer en soulignant le fait que le rapport risque-avantage est véritablement la pierre angulaire de l'activité bancaire prudentielle au Canada. Toute distorsion du rapport risque-avantage modifie les priorités et/ou réaffecte le crédit. C'est ce crédit qui véritablement produit et définit la productivité et la capacité futures. Selon nous, une restructuration du régime fiscal permettant de se concentrer sur les PME—c'est-à-dire une réduction de l'imposition individuelle et une restructuration de l'impôt sur les gains en capital ainsi que de l'impôt sur les sociétés—permettrait beaucoup plus de faciliter et de promouvoir l'expansion des PME.

Fazil aimerait conclure.

M. Fazil Milhar (directeur d'études réglementaires, Institut Fraser): J'aimerais simplement faire quelques remarques supplémentaires à propos de l'imposition en particulier.

Permettez-moi de commencer par dire que nous entendons constamment parler de la baisse de notre niveau de vie. Le document d'Industrie Canada intitulé «Rivaliser avec nos voisins» le souligne également. D'après les données de l'OCDE, on s'aperçoit que pour ce qui est de la productivité totale des facteurs au Canada—c'est-à-dire notre efficacité—nous avons connu une croissance négative de 0,1 p. 100 de 1979 à 1996. En d'autres termes, c'est une baisse de notre niveau de vie.

La productivité a essentiellement trait à l'efficacité de production. Les taux de productivité ou les changements de la productivité peuvent être plutôt infimes, mais une petite différence peut avoir, à long terme, un impact énorme sur la croissance économique. De nouveaux investissements permettent d'améliorer considérablement la productivité, puisqu'ils augmentent le capital dont dispose chaque travailleur. Des taux élevés d'investissement entraînent un rythme élevé de changements techniques, ce qui se traduit par de l'innovation et une croissance économique plus rapide. Par conséquent, les économies qui affichent un haut coefficient d'épargne connaissent une croissance économique plus rapide.

À la lumière de tout ceci, permettez-moi d'aborder la question de ce taux élevé d'imposition sur les gains en capital. Pour répéter les propos de Jason, je dirais que l'imposition élevée des gains en capital et des dividendes réduit l'épargne disponible ainsi que l'investissement global. Si l'on a moins d'investissement, c'est-à-dire moins de capital, on est moins productif. Dans cette mesure, ce qui intéresse les investisseurs, c'est le taux de rendement après impôt. Des impôts élevés sur les gains en capital abaissent le niveau de l'investissement, le taux net de rendement et les niveaux globaux d'investissement.

Étant donné que la croissance de la productivité dépend du nouvel investissement en capital, l'impact de tels impôts va ralentir la croissance économique, à long terme. Dans une allocution qu'il a récemment prononcée devant la Chambre de commerce, le premier ministre a déclaré que l'objectif du gouvernement était d'augmenter le taux de productivité du pays, étant donné la baisse de notre niveau de vie. Lorsque la productivité baisse, cela veut dire que le niveau de vie baisse également. Si vous voulez que les sociétés disposent de suffisamment d'argent pour investir dans des entreprises, investissez dans le capital.

Je le répète, les petites et moyennes entreprises sont en général des entreprises individuelles et des sociétés en nom collectif. Si les taux d'imposition sont élevés, cela signifie que ces entreprises disposent de moins d'argent, de moins de bénéfices non répartis et qu'elles ne peuvent pas investir. Il va donc falloir essayer d'abaisser les impôts sur les sociétés, les impôts sur les gains en capital et les impôts sur le revenu, faute de quoi il ne sera pas possible d'offrir le genre d'autofinancement nécessaire pour la croissance économique à long terme.

La croissance économique à long terme dépend du capital; en d'autres termes, le capital facilite la croissance de la productivité. Ce qui m'inquiète surtout, c'est que si l'on compare le Canada aux États-Unis, on s'aperçoit que le Canada n'investit pas autant dans le capital. Aux États-Unis, le taux de l'imposition sur les gains en capital est bien plus bas par rapport à celui pratiqué au Canada et il y a beaucoup d'investissements en capital dans les petites entreprises, à cause de l'existence du capital de risque.

• 1600

Au Canada, si nous voulons que certaines entreprises de haut risque puissent réussir dans cette économie, nous devons examiner la structure de l'impôt sur les gains en capital, ainsi que les impôts sur le revenu personnel et les impôts sur les sociétés.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

J'aimerais remercier les témoins pour leur exposé. Nous allons passer aux questions et je rappelle à mes collègues que je vais m'en tenir de très près au temps très court dont nous disposons.

Monsieur Pankiw, s'il vous plaît.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Merci.

Monsieur Clemens, malgré vos inquiétudes au sujet de votre processus mental, malgré votre rhume, je vous ai trouvé très clair. Il est malheureux que d'autres personnes ne puissent pas voir les choses aussi clairement que vous. Je n'ai pas de questions à vous poser, car vous avez été très clair et très précis et j'encourage les autres membres du comité à écouter soigneusement ce que vous avez à dire.

Monsieur Norton, vous avez dit que les personnes visées sont les emprunteurs, les prêteurs, les fonctionnaires du gouvernement, et...?

M. Roy Norton: Nous avons consulté également quelques universitaires qui ont fait de la recherche sur le programme. Les personnes visées sont en fait les trois premières catégories.

M. Jim Pankiw: D'accord, les trois premières seulement.

En ce qui concerne les prêteurs, le vérificateur général a fait remarquer que beaucoup de prêteurs se servent tout simplement de la LPPE comme forme supplémentaire de sécurité et exigent que les emprunteurs s'appuient sur cette loi. Si elle n'existait pas, ils leur prêteraient l'argent de toute façon; cela revient donc tout simplement à ce que les contribuables paient la note de cette garantie supplémentaire. Il semblerait donc que les prêteurs préféreraient certainement que la LPPE continue de s'appliquer et ils vous signalent, comme vous l'avez d'ailleurs dit, que cette loi est essentielle. Je ne sais pas si ce qu'ils disent est vraiment crédible.

Vous avez parlé des emprunteurs qui font partie des personnes visées. J'ai déjà été emprunteur; une banque m'a demandé de me soumettre à la LPPE et m'a fait croire que sans cela, je n'obtiendrais pas le prêt demandé. J'imagine donc que les emprunteurs, en général, vont également donner des renseignements erronés, car l'institution leur fait croire que les dispositions de cette loi sont requises, essentielles et valables, alors qu'en fait ce n'est pas le cas.

Les fonctionnaires du gouvernement sont la troisième catégorie de personnes visées dont vous parlez. Si le gouvernement ne voit pas la sagesse des propos de M. Clemens—à savoir que pour régler ce problème, il suffit simplement de réduire les taxes sur les gains en capital et empêcher l'intervention du gouvernement du fonctionnement des entreprises et qu'ainsi, tout irait beaucoup mieux...

Il semble que toutes les personnes visées que vous avez consultées vont vous donner une opinion partiale de l'utilité de ce genre de programme. Qu'en pensez-vous?

M. Roy Norton: Eh bien, les personnes visées vont probablement toutes être en faveur du programme. Nous les avons consultées au sujet de ses paramètres particuliers et elles ne seront pas nécessairement d'accord les unes avec les autres au sujet de la diminution ou de l'augmentation des taux d'intérêt, du plafond des prêts fixé à 250 000 $, à plus ou à moins. Vous comprenez où je veux en venir.

Vous soulevez la question de l'incrémentalité d'une autre façon: Vous demandez si ces prêts auraient été consentis sans l'existence de la LPPE. C'est bien sûr évident dans un genre de pool d'assureurs comme celui-ci—ce qui est effectivement le cas—que certains des prêts n'auraient pu être consentis sans la LPPE. Certains naturellement doivent être inclus de manière à équilibrer le risque. Allan Riding et d'autres ont examiné la question et ont évalué le niveau d'incrémentalité à 50 p. 100 environ.

Dans le domaine de recouvrement des coûts, proposé par le gouvernement dans le cadre de la LPPE, il est impératif que les participants puissent se permettre financièrement le programme. Le taux préférentiel plus 3 p. 100 correspond au taux d'intérêt actuel maximum, qui comprend les frais annuels d'administration.

• 1605

Si on enlevait tous les prêts moins risqués de ce portefeuille—ceux qui auraient été consentis de toute façon—les prêts restants seraient, par définition, plus risqués et le taux d'intérêt imposé devrait probablement augmenter, de beaucoup, d'ailleurs. On assisterait alors à une chute de la demande jusqu'au point où le programme serait probablement superflu.

M. Jim Pankiw: Je comprends ce que vous dites, mais en fait, n'est-ce pas ce qui se produit? Les entreprises qui auraient obtenu de toute façon le prêt seront tenues de payer une prime, de subventionner en fait des entreprises qui n'auraient jamais obtenu de prêt en premier lieu?

M. Roy Norton: Eh bien, elles n'ont pas à participer et lorsque le taux d'intérêt a atteint le taux préférentiel plus 3 p. 100, il y a eu une baisse. Certaines entreprises se sont aperçues qu'elles pouvaient avoir accès au capital de façon moins coûteuse sans participer au programme LPPE. Celles qui continuent de participer et acceptent le taux préférentiel plus 3 p. 100 au maximum considèrent probablement qu'elles ne pourraient pas obtenir un meilleur taux ailleurs.

La présidente: Merci, monsieur Pankiw.

Monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Merci.

Je suis intéressé par certaines des conclusions que vous tirez et que vous fondez sur certains renseignements que vous qualifiez de documents de référence. Par exemple, est-ce qu'un sondage effectué par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante est une source adéquate ou un point de référence qui vous permette de faire les hypothèses que vous faites au sujet du régime fiscal?

M. Jason Clemens: Si nous avons fait référence à la FCEI, c'est simplement pour appuyer le fait que les entreprises ne peuvent utiliser leurs profits que d'une ou deux façons. Elles peuvent soit les remettre aux propriétaires—c'est-à-dire à elles-mêmes ou aux actionnaires—soit les réinvestir. C'est le taux d'imposition qui détermine ce qui reste. Il y a donc un profit avant impôt, et plus le taux d'imposition est élevé, moins le montant qui reste est élevé. Il est clair, mathématiquement parlant, que plus le taux d'impôt est bas, plus le montant qui reste à réinvestir est élevé.

M. Alex Shepherd: Un instant, je vous prie. Vous posez plusieurs hypothèses dans cette étude que je veux contester.

Tout d'abord, vous parlez d'entreprises non constituées en société et vous parlez ensuite d'un taux marginal d'imposition élevé. Mais n'est-il pas vrai que les petites entreprises non constituées en société vont probablement afficher une profitabilité plus basse—en d'autres termes, vont probablement être imposées à des taux marginaux plus bas?

M. Jason Clemens: L'entreprise elle-même ne subit pas le taux marginal d'imposition; c'est le particulier qui en fait les frais.

M. Alex Shepherd: C'est ce que je veux dire. Nous parlons d'entreprises non constituées en société.

M. Jason Clemens: C'est exact.

M. Alex Shepherd: Il suffit d'être astucieux et de croire aux principes purs et durs de l'économie pour savoir que les sociétés dont le revenu est plus élevé vont de toute évidence se constituer en sociétés, n'est-ce pas?

M. Jason Clemens: Cela dépend de la responsabilité légale. Avant de se constituer en société, la plupart des gens tendent à examiner la responsabilité légale. En tant qu'entreprise constituée, vous avez une responsabilité limitée, mais pas d'abri.

M. Alex Shepherd: Dans la profession de comptable agréé que j'exerce, je m'occupe essentiellement de l'impôt sur le revenu.

M. Jason Clemens: D'accord.

M. Alex Shepherd: Il me semble que certaines de vos théories ne sont pas valables, car les entreprises non constituées en sociétés—et celles auxquelles vous aimeriez appliquer un taux marginal élevé d'impôt—n'existent probablement pas en fait, car, à moins d'être des professionnels, la plupart des gens se constitueraient en société.

Deuxièmement, comme une déduction est accordée aux petites entreprises constituées en sociétés au Canada, à mon avis, ces entreprises sont parmi les moins imposées de l'OCDE.

M. Jason Clemens: Je ne sais pas si Fazil veut répondre, mais les données que nous avons de la FCEI et de l'OCDE—et je vous l'accorde, les données de l'OCDE sont cumulatives—montrent que le Canada n'est pas concurrentiel au plan des prix en ce qui concerne le niveau de l'imposition.

M. Alex Shepherd: Vous parlez de l'impôt personnel, mais vous ne parlez pas de la façon dont les petites et moyennes entreprises sont imposées. Par exemple donc, si une petite entreprise gagne moins de 200 000 $ par an, elle va être imposée à 23 p. 100 environ au Canada. C'est l'un des taux les plus bas des pays occidentaux.

M. Jason Clemens: Parlez-vous du taux marginal ou du taux moyen?

M. Alex Shepherd: Ce n'est pas croyable. Les sociétés ne payent pas de taux progressifs d'impôt, mais des taux uniformes.

M. Jason Clemens: D'accord, mais vous parlez de particuliers, n'est-ce pas?

M. Alex Shepherd: Non, nous parlons de petites entreprises constituées en sociétés.

M. Jason Clemens: Je suis désolé, je croyais que vous parliez des entreprises individuelles ou des sociétés en nom collectif non constituées en sociétés.

M. Alex Shepherd: Ce que je vous dis, c'est que la plupart des petites entreprises qui sont rentables seraient constituées en sociétés et que si elles se définissent comme étant admissibles à la déduction accordée aux petites entreprises, elles ne payent qu'un taux de 23 p. 100, qui est l'un des taux les plus bas de l'OCDE.

M. Jason Clemens: A titre de sociétés?

M. Alex Shepherd: Oui. Toute votre analyse est fondée sur une imposition élevée applicable aux petites et moyennes entreprises.

M. Jason Clemens: Effectivement.

M. Alex Shepherd: Eh bien, ces deux notions sont incompatibles.

• 1610

M. Jason Clemens: J'affirme de nouveau que les taux de l'impôt personnel au Canada, par rapport à ceux en vigueur dans les autres pays du G-7, sont les plus élevés.

M. Alex Shepherd: L'impôt personnel.

M. Jason Clemens: Oui, et si vous examinez l'éventail des prêts inférieurs à 250 000 $, nous indiquons très clairement dans notre document qu'à notre avis, la plupart de ces entreprises sont des petites entreprises non constituées en sociétés, à ce niveau de crédit, surtout lorsqu'il s'agit des micro—prêts selon les données de l'ABC.

M. Alex Shepherd: Ce que je veux vous dire, c'est que si ces entreprises sont si petites et ne sont pas constituées en sociétés, vous ne pouvez pas leur appliquer le taux marginal élevé d'impôt. En fait, elles sont imposées au taux marginal le plus bas possible, puisqu'elles ne sont pas rentables.

M. Jason Clemens: Eh bien non, je ne suis pas d'accord. Vous affirmez que parce qu'il s'agit d'entreprises individuelles ou de sociétés en nom collectif, leur niveau de rentabilité n'est pas compatible avec celui de sociétés de taille similaire qui sont constituées en sociétés.

M. Alex Shepherd: C'est exact.

M. Jason Clemens: Nous disons en fait que ces entreprises sont plus petites, qu'il s'agit d'entreprises individuelles ou de sociétés en nom collectif, et que l'impôt sur le revenu qui entre de ligne de compte est en fait l'impôt sur le revenu personnel. Dans notre étude, nous indiquons ensuite les taux qui montrent jusqu'à quel point ils sont élevés. D'après nous, une réduction marginale, ou réduction des taux absolus, fournit plus d'argent aux entreprises qui peuvent ainsi le réinvestir et financer la poursuite de leurs opérations.

M. Alex Shepherd: Le taux marginal élevé de l'impôt peut s'appliquer aux personnes qui reçoivent un revenu d'une entité constituée de quelque genre que ce soit, mais non aux entités constituées elles-mêmes.

M. Jason Clemens: Oui, mais...

M. Alex Shepherd: Je dis en fait que vos données sont erronées.

M. Jason Clemens: Je parlais simplement des entreprises individuelles et des sociétés en nom collectif, et maintenant, vous parlez de sociétés. Les sociétés sont assujetties à l'impôt sur les sociétés, tandis que les entreprises individuelles et les sociétés en nom collectif sont assujetties à l'impôt personnel.

M. Alex Shepherd: Je parle de la petite entreprise non constituée en société...

La présidente: Monsieur Shepherd, monsieur Shepherd...

M. Alex Shepherd: ...et j'examine ensuite l'ensemble du régime fiscal personnel au Canada. Le groupe dont vous parlez tombe dans la catégorie la plus basse du taux marginal d'impôt, non dans la plus haute.

La présidente: Monsieur Shepherd, merci. Nous devons poursuivre. Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Dubé, s'il vous plaît.

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Je n'ai pas de questions pour M. Norton parce que je trouve qu'il a été clair. C'est peut-être parce que ce qu'il défend me touche davantage.

Quant à votre exposé, monsieur Clemens, je déplore un peu qu'il nous ait été présenté seulement en anglais, ce qui a peut-être nui à ma compréhension. Cependant, ce que je comprends de vos suggestions et de vos remarques quant au financement des petites entreprises me rappelle le début des années 1980, alors que Mme Thatcher proposait des choses semblables. Depuis ce temps-là, en Angleterre, il n'y a plus de fabricants d'automobiles, d'entreprises d'informatique et d'entreprises de textile. On a assisté à une diminution des salaires. Finalement, cela n'a pas fait baisser le taux de chômage. Au contraire, il a peut-être augmenté, et les salaires sont beaucoup plus bas.

Je peux me tromper, mais dans votre exposé, vous semblez vouloir protéger les actifs de ceux qui en possèdent déjà. Pour ma part, je suis davantage préoccupé par le nombre d'emplois.

En ce qui a trait à l'imposition des entreprises, vous trouvez que c'est grave, mais c'est comme si c'était uniquement les actionnaires qui payaient. Ma compréhension des choses est que, si on impose davantage les entreprises, il faut aussi voir le prix à payer en termes de salaires payés aux employés et de nombre d'emplois en cause.

Il y a des gens qui réussissent à se créer un emploi en développant une société et qui, autrement, ne se trouveraient pas d'emploi. On sait que plus de 80 p. 100 des emplois créés au Canada, au cours des dernières années, l'ont été par les petites entreprises. Que fait le gouvernement en garantissant des choses plus risquées? Il crée des emplois.

Quand le gouvernement libéral fait cela, nous ne l'applaudissons pas nécessairement, mais nous sommes d'accord avec lui.

• 1615

Je ne comprends pas votre raisonnement. C'est comme s'il fallait absolument décourager le prêt aux petites entreprises et laisser plus libres les institutions financières qui, automatiquement, parce que les risques ne seront pas assurés dans un tel programme... Il y aura donc moins de création d'entreprises et moins de création d'emplois. J'aimerais que vous me convainquiez du contraire. Je n'ai rien vu dans votre document qui parlait de création d'emplois. Quand il y a création d'emplois, il y a plus d'impôts payés au gouvernement et moins de dépenses en aide sociale et en chômage.

[Traduction]

M. Jason Clemens: De nouveau, ce que je peux dire au sujet de notre document, c'est que nous avons tenté d'examiner globalement l'intervention du gouvernement sur les marchés financiers.

Je conviens avec vous que les PME sont importantes dans toute économie en matière d'entrepreneuriat, de développement de nouveaux produits et d'innovation. Je suis complètement d'accord avec vous. La question que nous avons posée est la suivante.

Dans les rapports, l'évaluation est partiale puisqu'il est dit qu'effectivement le financement est fourni aux PME, mais que parce que le crédit est limité, il doit être réaffecté d'autres projets. L'introduction des dettes garanties dans le rapport risque-avantage au sein du système de fourniture de crédit signifie simplement que l'on passe de tel ou tel projet à tel ou tel autre. Effectivement, il est possible d'attribuer plus directement les emplois aux deux projets qui sont maintenant financés, mais pour avoir une analyse complète de rentabilité, il faut comprendre l'effet du transfert de ce crédit. Comment les deux projets qui n'obtiennent pas maintenant de financement prennent-ils de l'expansion, si tant est qu'ils en prennent?

Il n'est pas juste d'examiner simplement les bénéfices du grand livre, en ce qui concerne la loi et son effet sur le financement de la petite entreprise, sans examiner ces projets qui n'auraient pas été financés ou qui l'auraient été ailleurs, à un taux plus élevé.

Je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.

M. Fazil Milhar: J'ai quelques remarques à faire.

Vous avez cité l'exemple de la Grande-Bretagne. Depuis les années 80 et au cours des années 90, autant que je sache, des sociétés automobiles allemandes s'implantent en Grande-Bretagne, car par comparaison avec l'Allemagne, la productivité de la Grande-Bretagne est bien meilleure et le coût unitaire de la main-d'oeuvre bien inférieur. Le fait est que les sociétés automobiles sont transférées au Royaume-Uni plutôt que de rester en Allemagne.

J'ai d'autres remarques à faire. Si nous voulons que le secteur de la technologie de pointe survive et réussisse au Canada, nous devons faire en sorte qu'il existe un genre de financement autre que le financement traditionnel des banques—je veux parler du capital de risque. Si nous voulons faire en sorte qu'il y ait du capital de risque, nous devons diminuer nos taux d'impôt sur les gains en capital. Si nous ne le faisons pas, nous n'amènerons pas suffisamment de ressources permettant de dépenser pour ces genres d'industrie qui sont productrices de richesses et qui donc améliorent également la productivité. Si nous ne travaillons pas avec plus de capital, nous allons devenir moins productifs.

Comme nous le savons, ces 15 dernières années, le Canada est tombé du deuxième au onzième rang en matière de revenu par habitant. Pourquoi? Parce que notre productivité est insuffisante. Pourquoi? Tout simplement parce que nous n'investissons pas autant dans le capital que les États-Unis. Il suffit de comparer le nombre d'ordinateurs ou de toute autre machine par groupe de 100 000 personnes pour s'apercevoir que les États-Unis fonctionnent avec beaucoup plus de capital que nous.

Si nous voulons que les sociétés disposent de plus de capital, essayons de diminuer l'impôt sur les gains en capital de manière que les gens puissent réinvestir et prendre le genre de risque qu'ils souhaitent prendre. Sans production de richesses, sans croissance de la productivité, nous n'allons pas créer d'emplois. Il n'y a rien de plus simple, mathématiquement parlant.

[Français]

La présidente: Merci. Vous avez une petite question, monsieur Dubé?

M. Antoine Dubé: Non, mais j'ai un commentaire. J'ai l'impression que vous avez un parti pris. Vous avez droit à cette opinion, mais je ne la partage pas. Je regardais hier une émission à Radio-Canada, en français, où vous accordiez de mauvaises notes au gouvernement du Québec parce qu'il améliorait les conditions de travail des employés. Je vous inviterais à ne pas tenir compte uniquement du capital financier, mais aussi du capital humain. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Dubé.

Monsieur Lastewka, la parole est à vous.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame la présidente.

M. Norton, j'ai remarqué dans votre rapport et dans vos interventions que vous vouliez souligner que les changements apportés en 1995 commencent à porter fruit, mais qu'il faudra encore quelque temps.

• 1620

Vous avez confirmé au comité que les changements qui ont été faits en 1995, en vue d'un meilleur recouvrement des coûts et de la perception de droits, se reflètent dans le nouveau projet de loi. C'est donc que la transition entre l'ancien et le nouveau système qui s'effectue depuis deux ou trois ans ne serait pas terminée avec l'adoption du projet de loi. C'est bien ce que vous avez dit.

M. Roy Norton: C'est exact.

M. Walt Lastewka: Il a beaucoup été question du montant du prêt de la LPPE. Je sais qu'il se situe entre 65 000 et 68 000 $. Avez-vous des renseignements ou des conseils à formuler sur la pertinence de modifier le plafond des prêts, qui est actuellement fixé à 250 000 $? Pourriez-vous nous donner votre avis à ce sujet?

M. Roy Norton: C'est effectivement un des paramètres dont j'ai parlé avec les intéressés que j'ai consultés en 1996, monsieur Lastewka. Le plafond venait d'être relevé. En 1993, il était passé, je crois, de 100 000 $—mais peut-être bien de 150 000 $—à 250 000 $, ce qui est une augmentation considérable. Certains estimaient qu'il fallait le rabaisser, particulièrement la FCEI, qui le trouvait peut-être un peu trop élevé. D'autres jugeaient qu'il pourrait peut-être être relevé encore de 50 000 $, pour atteindre 300 000 $. Mais dans l'ensemble, on s'entendait pour dire que le plafond fixé était probablement juste ce qu'il fallait, ou plus précisément qu'il valait mieux le laisser tel quel plutôt que de le changer encore.

C'est un peu comme un casse-tête. Chaque petit changement apporté peut se répercuter sur l'ensemble du programme, sur la fiabilité des emprunteurs pour ainsi dire et, par voie de conséquence, sur le potentiel de recouvrement des coûts. Donc, dans l'ensemble, la plupart des gens estimaient qu'il valait mieux ne rien changer.

M. Walt Lastewka: Les banquiers, les prêteurs et aussi les dirigeants de petites entreprises avec qui je me suis entretenu récemment ont affirmé qu'il nous faudrait avoir un bon rendement ces deux ou trois prochaines années. Ce n'est qu'alors que nous pourrons vraiment faire des comparaisons.

M. Roy Norton: C'est juste.

M. Walt Lastewka: Monsieur Clemens, votre exposé m'a un peu dérouté, donc j'aimerais que vous m'aidiez.

La première fois que je vous ai entendu affirmer que votre étude portait sur l'intervention du gouvernement sur le marché financier, je me suis demandé si vous veniez ici commenter le projet de loi qui est présenté ou nous faire la morale sur certains articles, et je ne sais toujours pas si vous êtes en faveur de la loi ou non. Je ne veux pas avoir de réponse ambiguë. Est-ce que vous recommandez que nous n'ayons pas de programme sur le marché?

M. Jason Clemens: Oui. J'espère que je ne faisais pas la morale, mais non, je ne suis pas en faveur du programme.

En fait, il y a une chose que nous avons mentionnée, sans insister simplement parce que nous n'avons pas eu le temps, c'est que le fait d'envisager le recouvrement intégral des coûts semble indiquer qu'il existe un marché pour ce genre de prêts. Si vous l'examinez bien, la structure du prêt sur le plan de l'établissement du prix est assez semblable à celle des sociétés de financement à risque quand elles consentent des emprunts puisqu'il y a des frais initiaux de 2 p. 100, puis des frais à posteriori.

En fait, lorsque que nous avons été appelés à témoigner devant vous, une demi-heure m'a suffi pour répertorier une soixantaine sociétés de financement à risque au Canada, et j'y ai même ajouté le profil des divers programmes de financement à risque de la Banque de Montréal. Donc, à mon avis, ce genre d'intervenants spécialisés et les nouveaux venus sur le marché—comme Comerica, Finova et Wells Fargo—vont faire concurrence sur le marché.

M. Walt Lastewka: Donc, là où vous voulez en venir est que vous n'êtes pas d'accord avec la recommandation de la FCEI, qui est en faveur du maintien d'un programme sur le marché?

M. Jason Clemens: Pardon?

M. Walt Lastewka: Vous n'êtes pas d'accord avec la FCEI, qui soutient qu'il est très important d'offrir ce programme sur le marché?

M. Jason Clemens: Non, je ne suis pas d'accord.

M. Walt Lastewka: C'est bien, je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions.

La présidente: Merci.

Monsieur Jones.

M. Jim Jones (Markham, PC): Sur le même sujet, j'allais demander pourquoi, avec toutes les nouvelles possibilités qui surgissent au Canada dans le domaine bancaire nous avons besoin d'une Loi sur les prêts aux petites et moyennes entreprises. J'entends dire que certaines sociétés augmentent leur chiffre d'affaires de 100 millions de dollars en six mois, par l'entremise d'Internet, alors il semble bien que tout le monde a accès au capital.

• 1625

M. Jason Clemens: Je n'aime pas tellement donner des informations anecdotiques, mais lorsque j'étais dans le domaine des services bancaires commerciaux, dans le sud-ouest de l'Ontario, nous étions très inquiets de l'arrivée de la Wells Fargo, à cause du créneau qu'elle visait. Elle consentait des prêts non garantis allant jusqu'à 75 000 $ et son délai d'exécution n'était que de 48 heures. Dans le meilleurs des cas, lorsque je travaillais encore dans le domaine, notre délai d'exécution était toujours supérieur à 48 heures.

Je suis donc tout à fait d'accord qu'à la faveur de l'évolution de la technologie... Par exemple, Wells Fargo n'a pas de bureaux dans le sud de l'Ontario. Elle fait toutes ses démarches à partir de son centre de service situé dans le Colorado. Donc, avec l'évolution de la technologie, et si la déréglementation du secteur bancaire ou des grands services financiers se poursuit et permet l'arrivée de nouveaux intervenants dans ces créneaux, je serais tout à fait d'accord pour dire que ces marchés seront comblés.

M. Jim Jones: Donc, une fois que nous aurons déréglementé le système bancaire, il n'y aura pas d'obstacle à la concurrence sous toutes ses formes.

M. Fazil Milhar: La concurrence n'est pas très forte aujourd'hui. Si vous décidiez de suivre la recommandation du groupe de travail MacKay et de permettre une déréglementation complète, c'est sûr qu'il y aura plus de concurrence. De nos jours—et ça n'existait pas il y a dix ans—1,6 millions de Canadiens sont abonnés au réseau Internet, et 5,9 millions de Canadiens effectuent leurs transactions bancaires par téléphone. Ça n'existait pas auparavant. Ce sont là les changements qui surviennent. Wells Fargo, entre autres, pourrait rivaliser avec les autres sur le marché.

Il y a autre chose. Le fait d'offrir, de subventionner et de garantir ces prêts aux petites entreprises altère le marché des capitaux. C'est un fait, et ça ne devrait pas échapper au comité—que la façon de prêter de l'argent au projet A ou au projet B altère le marché. Après tout, c'est l'argent des contribuables. Un taux élevé de défaut de paiement est associé à un facteur de risque moral. Avec une garantie, les banques vont aussi, d'une certaine manière, consentir des prêts très risqués, parce qu'elles pensent que leur investissement est protégé jusqu'à 85 p. 100. Donc, manifestement, il y a aussi des distorsions sur le marché.

M. Jim Jones: Vous avez parlé d'un écart de productivité. À quoi peut-on attribuer l'écart de productivité entre le Canada et les États-Unis?

M. Fazil Milhar: De nombreux économistes ont donné plusieurs explications. Pour commencer, certaines études démontrent que 12 p. 100 à 31 p. 100 de la baisse de productivité peut être attribuée à l'alourdissement des règlements au Canada.

Et puis il y a le fardeau fiscal. Proportionnellement au PIB, les impôts prélevés au Canada sont de 10 p. 100 supérieurs à ceux perçus aux États-Unis. Il est évident que les impôts sur le revenu des sociétés et des particuliers ont un effet dissuasif, comme nous l'avons dit, sur les gains en capital. Nous ne poussons pas les entreprises à être entreprenantes, à prendre des risques et à investir des capitaux. Si on ne peut pas augmenter le capital—capital humain et matériel—on ne peut pas être aussi productifs. C'est le simple bon sens.

Il y a donc deux raisons. La première est l'alourdissement des règlements au Canada, à l'échelle fédérale et provinciale, et la deuxième est le lourd fardeau fiscal. C'est ce qui pourrait expliquer l'écart entre notre productivité et celle des États-Unis.

M. Jim Jones: Est-ce que c'est la raison pour laquelle, cet été, lorsque nos marchés subissaient le contrecoup de la crise asiatique et que les investisseurs cherchaient à investir dans la qualité, la plupart se sont tournés vers la devise américaine plutôt que vers le dollar canadien?

M. Fazil Milhar: Je crois qu'on se jetait sur le dollar américain parce que personne ne se fiait aux autres devises.

Notre productivité est en baisse depuis le milieu des années 70. On a pu constater l'érosion constante de la croissance de notre productivité. Il y a donc de quoi s'inquiéter. Il semble bien que le premier ministre s'en inquiète. Si nous n'y prenons pas garde, nous assisterons à une baisse du niveau de vie au Canada. C'est d'ailleurs déjà commencé. Pour l'instant nous sommes en onzième place sur le plan du niveau de vie, d'après un calcul par habitant. Ça veut dire que nous avons beaucoup régressé depuis 15 ans, et il y a de quoi s'inquiéter. Nous devrions examiner notre structure fiscale et les règlements que nous adoptons, parce qu'ils sont en partie la cause du ralentissement de la croissance de notre productivité.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Jones.

Je tiens à remercier les témoins d'être venus témoigner devant nous. Comme je l'ai dit au début de la réunion, nous avons d'autres témoins à entendre, et nous devrions être convoqués à la Chambre à 17 h 15.

Nous remercions MM. Norton, Clemens et Milhar d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Nous sommes impatients d'entendre les autres témoins sur le même sujet. La discussion a été très intéressante. Je vous remercie de nous avoir consacré de votre temps. Pendant que vous cédez vos places aux prochains témoins, nous allons nous interrompre deux minutes.

Mesdames et messieurs, ne partez pas; restez avec nous.

• 1630




• 1633

La présidente: Nous poursuivons. Nous avons un des témoins avec nous, et je propose que nous commencions, parce que nous devons lever la séance à 17 h 15. Nous avons ici M. Greg Smith, un associé de l'immeuble de la filature de laine Victoria.

À titre indicatif, M. Laforge n'est pas encore arrivé. Nous lui demanderons de se joindre à nous à son arrivée. Comme le temps nous est compté, je demanderais à M. Smith de commencer s'il le veut bien.

M. Greg Smith (associé, immeuble de la filature de laine Victoria): Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs.

En fait, je suis ici pour faire ce que je considère être mon devoir civique. Je n'ai pas vraiment de comptes à régler. Je ne fais partie d'aucune organisation. Je ne suis qu'un modeste entrepreneur. J'ai bénéficié du Programme de prêts aux petites et moyennes entreprises dans le cadre de deux entreprises dont je m'occupe. Je suis un des associés d'une société d'experts-conseils d'Ottawa, qui a eu recours au programme. Mais je suis surtout venu parler aujourd'hui d'un projet auquel je suis associé à 50 p. 100 à Almonte, à l'ouest d'Ottawa.

Il s'agit de l'immeuble de la filature de laine Victoria. C'est un édifice historique qui est resté inoccupé pendant plusieurs années et que j'ai acheté avec mon associé, Stephen Brathwaite, qui m'accompagne aujourd'hui. Je voulais seulement parler de notre expérience relativement au programme.

Je crois que si je suis ici aujourd'hui c'est parce que j'ai écrit, il y a près d'un an, une lettre au journal Citizen d'Ottawa pour relater certaines de nos expériences étant donné qu'on parlait à l'époque du Programme de prêts aux petites entreprises dans les médias. Je trouvais que le Programme nous avait bien servis et nous en avions été très satisfaits. En fait, c'est à lui que nous devons en bonne partie le succès de notre projet.

Nous avons acheté l'immeuble. Je ne sais pas si vous avez déjà été à Almonte. C'est une très jolie petite localité, située à une quarantaine de minutes en voiture à l'ouest d'Ottawa. Il y a des chutes au centre-ville, et la rivière Mississippi traverse la ville.

• 1635

Il y a environ six ou sept ans, le centre-ville a commencé à se vider, comme ça se passe dans bien d'autres petites municipalités. Un grand nombre de très beaux édifices historiques sont restés vacants et la rue principale a commencé à prendre les allures d'une ville fantôme.

Stephen et moi nous intéressions tous les deux au patrimoine. Stephen est artiste et, comme je l'ai dit, je suis expert-conseil, et j'ai participé à divers projets. Cet immeuble vacant de six étages donnant sur les chutes a suscité notre intérêt et, presque sur un coup de tête, nous avons fait une offre d'achat, et nous nous sommes retrouvés associés et propriétaires de l'immeuble.

Sans tout vous raconter, il s'agit d'un immeuble d'environ 18 000 pieds carrés, merveilleusement bien situé, qui avait été vacant pendant les trois années qu'il était à vendre. Avant que nous l'achetions, il avait été vendu en vertu d'un pouvoir de vente.

Nous avons acheté cet immeuble dans l'intention de le faire revivre, d'en faire un centre des arts, du patrimoine, de développement économique pour la communauté. Je ne crois pas qu'un de nous ait espéré faire fortune avec ce projet. Nous nous y intéressions pour d'autres raisons, notamment pour aider la ville à survivre et à revivre, outre notre intérêt pour le patrimoine.

Pour commencer, nous avons acheté l'immeuble puis, à la suite de divers incidents, parce que la société de fiducie de laquelle nous l'avions acheté a fait faillite, nous nous sommes retrouvés propriétaires d'un immeuble franc d'hypothèque. Pourtant, nous ne réussissions pas à obtenir le financement nécessaire pour aménager la propriété. Nous comptions la rénover en plusieurs étapes. Nous nous sommes adressés à diverses banques, à plusieurs sociétés de fiducie et à la Banque fédérale de développement, sans que personne ne s'intéresse à notre projet. Nous nous trouvions, en fait, dans un cul-de-sac. C'était en 1993-1994. Nous avions en main ce qui aurait pu devenir un éléphant blanc.

Finalement, nous avons parlé au directeur de la succursale de la Banque Royale à Carleton Place, et j'ai failli lui demander de répéter lorsqu'il m'a dit «Oui, nous serions peut-être intéressés à votre projet».

En fin de compte, nous l'avons rencontré et, en fait, le seul moyen pour que le directeur de cette succursale bancaire ou n'importe quel autre directeur s'intéresse sérieusement à financer notre projet était que nous soyons admis dans le Programme de prêts aux petites et moyennes entreprises. Nous avions pas mal d'argent qui était déjà investi dans la propriété ou prêt à y être investi, donc nous n'étions pas très endettés. Nous ne cherchions à obtenir que 40 ou 50 p. 100 de la somme dont nous avions besoin.

Pour réaliser ce projet—et le directeur de la banque nous y a aidés—nous avons dû lancer une entreprise. D'après ce que j'ai compris à ce moment-là à ce qu'il nous a dit, nous n'étions pas admissibles à des projets d'aménagement immobilier si nous n'exploitions pas une entreprise dans la propriété même. Nous avons donc créé une entreprise dans l'immeuble. Nous avons mis sur pied un commerce de détail et un café, même si aucun de nous d'eux ne travaillait dans ces domaines ni ne s'y intéressait. En fait, ça nous a détournés de nos autres activités, mais l'entreprise était lancée et c'est ce qui nous a permis de faire revivre l'immeuble.

Après un an environ, nous avons loué l'entreprise. Quelqu'un, on ne sait qui, a conseillé le directeur de la banque de nous permettre de louer l'entreprise, donc nous avons pu nous en retirer après un an. À l'époque, je crois qu'il fallait être propriétaire d'une entreprise pendant trois ans avant d'être autorisé à la louer, donc ça pris un peu de flexibilité et il a fallu contourner les règles, mais nous avons pu retourner à nos affaires et des professionnels ont pu prendre l'entreprise en main. Ils sont d'ailleurs devenus des locataires clés de notre immeuble.

Pour le café, que nous avons constitué en société, nous avons emprunté 46 000 $ et nous avons obtenu une hypothèque de premier rang de 204 000 $ en vertu du Programme de prêts aux petites et moyennes entreprises, que nous avons investie dans l'aménagement de la propriété. C'est ça qui nous a permis de démarrer, c'était en 1994-1995.

• 1640

Nous avons maintenant rénové les deux tiers de la propriété. Nous avons toujours été poussés par la demande. Il y a eu des gens qui ont demandé à louer des locaux parce qu'ils voulaient emménager dans notre immeuble, qui est très bien situé, mais il faut pouvoir financer ce genre d'aménagement.

Nous avons environ 12 000 ou 13 000 pieds carrés qui sont aménagés et loués, et nous projetons actuellement l'aménagement des 4 000 pieds carrés restants; après, l'immeuble sera rénové à environ 90 p. 100. Encore là, c'est parce qu'il y a des gens qui viennent nous voir pour nous dire qu'ils veulent louer nos locaux. C'est loué avant même que nous commencions.

Et voilà pour notre expérience. Je voulais vous parler un petit peu de l'expérience que nous avons du programme de prêts aux petites et moyennes entreprises, mais je pourrais peut-être vous entretenir des répercussions de ce projet sur notre collectivité.

Almonte est une petite agglomération. C'est en quelque sorte une ville-dortoir pour Ottawa, Kanata et le secteur de la haute technologie. Jusqu'à il y a cinq ou six ans, très peu de gens y investissaient dans le secteur commercial. Le centre-ville, comme je l'ai dit, se vidait. Le supermarché s'était installé au centre commercial à l'instar de beaucoup d'autres entreprises. Beaucoup de magasins étaient inoccupés au centre-ville. On y trouvait au moins trois ou quatre vieilles usines comme la nôtre—de merveilleux bâtiments anciens que personne ne voulait acheter ou reprendre. Nous l'avons fait et d'autres personnes ont voulu nous imiter.

Si vous vous rendez à Almonte aujourd'hui ou demain—et je vous y encourage—vous constaterez que presque toutes ces anciennes propriétés du patrimoine sont exploitées ou rénovées ou ont été transformées en bistros ou en restaurants. Notre immeuble loge diverses entreprises de haute technologie. C'est une pépinière d'entreprises. Nous y trouvons un certain nombre de petites entreprises de haute technologie en démarrage qui sont en pleine expansion. C'est en partie la raison pour laquelle nous devons nous maintenir à l'avant-garde. Elles embauchent des gens, au centre-ville même d'Almonte. Nous avons un café, un restaurant, des studios que se partagent quatre artistes, une entreprise de graphisme, un architecte, une petite imprimerie—toute une brochette de locataires.

Nous avons par notre initiative, comme je l'ai dit, suscité la naissance d'autres projets de développement. Nous avons encouragé d'autres personnes à aménager un grand nombre de ces éléphants blancs, ces beaux édifices à valeur patrimoniale. Je pense qu'une trentaine de personnes travaillent maintenant à plein temps dans notre édifice. Notre initiative a donc contribué à créer des emplois, directement ou indirectement, dans notre collectivité. Elle a aussi contribué grandement à y améliorer la qualité de vie.

Nous sommes très fiers de nos accomplissements. La collectivité nous a décerné un prix en reconnaissance de nos efforts. L'effet que nous avons eu sur la collectivité n'est pas négligeable.

Je voulais vraiment vous parler du programme de prêts aux petites et moyennes entreprises. Je le répète, je n'appartiens à aucun organisme. Je n'ai pas de point de vue à défendre ici. Je veux tout simplement vous dire qu'il est très important pour les petites entreprises, surtout dans des régions périphériques comme Almonte—et ça l'est encore probablement davantage dans des collectivités encore plus isolées—d'avoir accès aux capitaux leur permettant de créer des emplois chez eux, d'offrir des possibilités de création d'emploi et de développer leurs collectivités et les endroits où elles vivent.

Les 250 000 $ que nous avons obtenus, en l'occurrence le montant maximum accessible par l'entremise de ce programme, nous ont encouragés à investir probablement le double de notre propre poche. Le reste nous est parvenu d'autres sources. Nous avons ainsi investi un million dans notre collectivité, ce qui a permis d'embaucher par exemple des charpentiers et des plombiers. Attirés par notre projet, des gens ont lancé des entreprises dans la collectivité. Les retombées ont été nombreuses et chacune de ces entreprises investit dans la collectivité. Les 250 000 $ que nous avons obtenus à l'origine dans le cadre du programme ont donc eu un incroyable effet de levier.

Je le répète, je ne crois pas que nous aurions obtenu ce financement et cet édifice serait toujours là aujourd'hui, comme une coquille vide, n'eût été de ce programme. En effet, aucune banque ni compagnie de fiducie, personne avec qui nous avons parlé ne voulait y toucher. En fait certains des directeurs de ces entreprises et certains gros bonnets, même si le directeur local nous appuyait et était intéressé...

Un grand nombre de nos approbations de prêts ont dû se rendre à Ottawa ou là où sont prises les décisions. Dans certains cas nous avons essuyé un refus ou le directeur local après nous avoir dit que l'idée était bonne a essuyé un refus de la part de ses supérieurs. Dans certains cas certains nous ont même répondu qu'ils ne voulaient même pas prendre la peine de venir à Almonte, que c'était trop loin et qu'ils n'allaient pas s'occuper d'un petit projet comme le nôtre. J'estime donc que le succès de ce projet est en partie attribuable à l'existence de ce programme.

• 1645

Plus tôt cette année, nous avons refinancé le projet par l'entremise de la Banque de développement du Canada. Il nous reste encore 37 000 $ à payer, de sorte que nous avons remboursé la presque totalité de notre prêt. Nous avons gardé un petit montant d'argent pour le café, l'équipement qui se trouve à l'intérieur étant donné en garantie, et nous le remboursons comme prévu, selon les modalités de l'entente originale. Nous n'avons donc pas abusé du programme. Nous avons remboursé notre prêt et refinancé le projet pour réaliser d'autres travaux.

J'aimerais rapidement ajouter deux ou trois autres points. À mon avis, l'idée de verser une petite prime pour garantir le prêt est valable. Si c'est ce qu'il faut faire pour obtenir du financement, alors je suis d'accord. Comme je l'ai dit, nous avons été impressionnés par la flexibilité du programme. Même s'il n'était pas évident, au début, que nous pourrions modifier légèrement les règles, quand nous avons été obligés de le faire pour assurer la survie de notre entreprise et de notre projet, le programme a su répondre à nos besoins grâce à sa flexibilité. Il nous a permis, comme je l'ai dit, de louer notre café.

Ce programme, de même que le soutien d'un directeur de banque—et je dois le remercier, car il a su faire confiance à la collectivité, au potentiel qu'offrait ce projet—ont constitué une combinaison gagnante pour notre collectivité. Je voudrais que le programme soit maintenu, amélioré et offert au plus grand nombre possible de personnes.

Voilà qui termine mon exposé.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Smith. Certains membres du comité ont peut-être quelques questions à vous poser.

Monsieur Pankiw, avez-vous des questions?

M. Jim Pankiw: Monsieur Smith, vous avez dit que vous et votre partenaire aviez tous deux un montant d'argent considérable à investir dans ce projet, mais que, malgré cela, vous ne pouviez obtenir un prêt. Vous avez donc été obligés d'avoir recours au programme offert dans le cadre de la LPPE et de verser, en plus, des frais—frais qui vous ont sans doute coûté des milliers de dollars.

Je ne vois pas pourquoi vous dites que vous êtes d'accord avec l'idée de payer de tels frais, de verser cette somme supplémentaire. Vous devriez plutôt dénoncer le fait que le système bancaire est trop réglementé. Vous auriez sûrement pu obtenir ce prêt s'il y avait eu plus de concurrence. Votre demande, si les banques avaient été moins réglementées, s'il y avait eu moins d'impôts à payer, s'il y avait eu moins d'intervention de la part du gouvernement...

Pourquoi ne dénoncez-vous pas ces choses là au lieu de dire que vous êtes d'accord avec l'idée de verser des frais pour un programme qui comporte des lacunes en raison des mauvaises pratiques de gestion du gouvernement?

M. Greg Smith: Eh bien, ce sont vos paroles, pas les miennes. Qui veut payer des frais de 2 p. 100 si l'on peut carrément éviter d'en payer? Personne.

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): C'est exact.

M. Greg Smith: Mais les autres institutions avaient la possibilité de nous consentir un prêt. Or, aucune d'entre elles ne voulait nous parler. Personne à Ottawa ne voulait se déplacer jusqu'à Almonte, même pour jeter un coup d'oeil à la propriété, même si nous avions un bon dossier, même si nous avions 50 ou 60 p. 100 des fonds requis pour le projet. Et ce n'est pas de l'argent qui nous est tombé du ciel. Nous avons tous les deux gratté les fonds de tiroir. Nous nous sommes serré la ceinture et nous avons fait des sacrifices pendant un bon moment.

N'eut été de l'existence de ce programme, nous serions toujours là, avec un bâtiment vide. C'était la seule option que nous avions à l'époque. Personne ne voulait y toucher.

M. Jim Pankiw: Je suppose que ce que j'essaie de dire, c'est qu'il y a un problème. Le problème, dans votre cas, c'est que vous aviez de la difficulté à obtenir un prêt.

M. Greg Smith: Oui.

M. Jim Pankiw: Mais au lieu de dénoncer l'existence d'un régime réglementaire qui empêche l'entrée d'institutions concurrentes qui vous auraient accordé un prêt... vous avez été obligé d'avoir recours à un programme qui camoufle le problème au lieu de le régler, et de débourser de l'argent de vos propres poches.

M. Greg Smith: Je ne vois pas les choses de la même façon. À mon avis, les autres institutions avaient la possibilité de nous offrir un prêt. Nous ne pouvions même pas franchir la porte d'entrée, et en tant que personne qui cherche à obtenir du financement, cela n'a rien à voir avec la réglementation. Elles sont là. Elles ont l'argent. Pourquoi hésitent-elles à consentir des prêts? Je présume que c'est parce qu'elles ont perdu beaucoup d'argent lors de la crise à la fin des années 80. Personne ne voulait toucher à l'immobilier.

• 1650

Quand les choses vont bien, je reçois tous les jours des tonnes de lettres des banques me demandant, «aimeriez-vous accroître votre marge de crédit?» Dépassez la limite sur votre carte Visa et que font-elles? Les banques vous envoient une lettre vous disant, «souhaitez-vous qu'on majore la limite de votre marge de crédit?» Quand l'économie roule, il n'y a pas de problème. Mais nous avions essayé d'obtenir du financement au début des années 90, à la fin de la crise du marché immobilier, dans une petite localité que personne ne semblait connaître et qui n'intéressait personne.

Donc, pour moi, ce n'était pas l'absence de concurrence qui posait problème, mais le manque de volonté ou d'intérêt. Soit notre entreprise était notre petite, soit nous étions installés trop loin, je ne sais pas. Aucune banque ou société de fiducie ne voulait nous aider. Donc, pour réaliser notre projet, 2 p. 100... J'aurais préféré ne rien payer, mais 2 p. 100, ce n'est pas beaucoup, parce que sans cela, le projet n'aurait pas vu le jour.

M. Jim Pankiw: Mais c'était...

La présidente: Ce sera votre dernière question.

M. Jim Pankiw: D'accord.

La présidente: Merci, monsieur Pankiw.

Monsieur Murray.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci.

Je devrais peut-être dire que je me trouve en conflit d'intérêt, étant donné que je suis le député de M. Smith. M. Smith est un électeur bien respecté de ma circonscription. Je connais également très bien l'usine de tissage de laine Victoria, et je peux confirmer toutes les choses positives que M. Smith a dites à son sujet.

Je voudrais non pas poser une question, mais faire un commentaire. J'aimerais revenir sur un point que je n'ai pas eu le temps d'aborder avec les autres témoins, faute de temps.

Monsieur Smith, êtes-vous membre de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante?

M. Greg Smith: Non.

M. Ian Murray: Si je vous pose cette question, c'est parce qu'on a parlé d'un sondage qu'a effectué la Fédération, et où la majorité des répondants ont dit que le régime fiscal constituait davantage un problème que l'accès au capital. Je me suis dis que, si on avait obtenu cette réponse, c'est parce que la plupart des entreprises émergentes, celles qui ont le plus de difficulté à obtenir des fonds, ne font peut-être pas encore partie de la Fédération. Il semble que, quand les choses commencent à bien fonctionner, c'est là que vous songez à devenir membre d'une association. Je pensais que les données de la Fédération étaient peut-être faussées.

À mon avis, nous avons plutôt tendance, en tant que députés, à entendre les gens qui veulent mettre sur pied une entreprise et non ceux qui en ont déjà une. C'est à ce moment-là que l'accès au capital, pour bon nombre de ces personnes, semble être un obstacle presque impossible à surmonter.

Je ne veux pas revenir sur ce qui a déjà été dit. Vous nous avez décrit très clairement votre expérience, et vous avez dit appuyer cette loi. Comme vous avez beaucoup de contacts dans le milieu d'affaires, connaissez-vous d'autres personnes qui sont du même avis que vous et qui seraient prêtes à venir nous faire part de leur expérience? Ou vous considère-t-on comme une anomalie, quelqu'un qui eu la chance d'obtenir ce qu'il voulait de la banque dans ce cas-ci?

M. Greg Smith: Je ne sais pas vraiment ce que pensent les autres. Je m'occupe d'autres types d'entreprises, dans différents domaines. Comme je l'ai mentionné, je fais partie d'un cabinet de consultants et nous avons eu recours au programme pour acheter de l'équipement, pour faire essentiellement l'acquisition d'immobilisations.

J'ai parlé à quelques personnes qui se sont prévalues du programme. Je ne sais pas ce que pensent les gens de manière générale, mais j'ai l'impression, si je me fie à ce qu'ont m'a dit, que le programme a été très utile. Je ne veux pas vraiment en dire plus, parce que je n'ai pas eu l'occasion d'en discuter beaucoup avec les gens.

M. Ian Murray: C'était peut-être injuste de ma part de vous poser cette question, mais comme je l'ai dit, madame la présidente, je voulais tout simplement soulever un point. Je vais m'arrêter ici.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Murray.

[Français]

Monsieur Dubé, vous avez une question?

M. Antoine Dubé: Je vous félicite d'avoir mis au point votre projet. Je pense que vous avez assez bien démontré que vous n'auriez pas pu avoir de financement autrement que par l'entremise de ce programme.

• 1655

Ma question est la suivante. Vous avez parlé de trois domaines où, me semble-t-il, il est plus difficile d'obtenir du financement. Par exemple, vous avez soulevé le fait que le secteur où vous investissiez comportait un ancien édifice, etc. Ensuite, si j'ai bien compris, il y a des gens du milieu artistique qui se sont associés à vous. Donc, il y a là un deuxième élément de difficulté. Quant au troisième, je l'ai oublié.

Il y a des secteurs d'activité qui sont plus difficiles et, d'autre part, les jeunes qui se lancent en entreprise n'ont pas nécessairement du financement. Vous avez démontré que, finalement, c'est une innovation. Donc, ces secteurs-là présentaient des risques plus élevés. Le développement régional ou le développement de certains secteurs est plus risqué.

On pourrait laisser le marché faire ce qu'il fait de façon naturelle, mais il est certain qu'à ce moment-là, le secteur financier se lancerait dans les choses non risquées et il n'y aurait pas de développement.

Il y a quelque chose de semblable dans ma circonscription. Dans la ville de Lévis, une ville de 40 000 habitants, tout le centre-ville, comme dans bien d'autres cas, se dépeuplait parce que les gens allaient vers les centres d'achats. Il a fallu un programme municipal, gouvernemental, pour encourager les gens à retourner au centre-ville, ce qui a sauvé la ville et ajouté à la prospérité de tout le monde. En tout cas, je vous appuie dans ces choses-là. Donc, est-ce plus difficile dans le domaine artistique ou dans le domaine du patrimoine que dans d'autres domaines?

[Traduction]

M. Greg Smith: Comme je l'ai indiqué, nous avons divers locataires, dont plusieurs artistes. Ce sont les locataires les plus anciens et les plus stables, et je suppose que c'est en partie grâce à Stephen, mon associé, qu'ils sont là. Ce sont de très bons locataires.

Je ne crois pas que le genre de locataires que nous voulions attirer à l'époque où nous avons entrepris la rénovation de l'édifice a eu une influence quelconque sur notre demande de financement. Je ne le crois pas, mais je n'en suis pas certain. Nous avions établi un plan d'entreprise, et nous l'avons essentiellement suivi. Ce qui a surtout fait la différence, c'est la croissance du secteur de haute technologie dans notre région, les petites entreprises naissantes qui travaillent pour les Nortel, Bell, Mitel et Newbridge de ce monde. Bon nombre de ces entreprises sont très petites; elles ne comptent que deux ou trois personnes, ou même une seule personne, mais elles peuvent connaître un essor très rapide. C'est quelque chose que nous n'avions pas prévu dans notre région.

Le véritable obstacle à l'accès au financement n'était pas... Nous avions de notre côté beaucoup d'argent à investir dans le projet. Comme je l'ai mentionné, une fois la faillite de l'acheteur original réglé, nous sommes devenus propriétaires à part entière de l'édifice. Nous avions de l'argent, pas assez, mais nous en avions.

Je pense que le problème tenait au fait qu'il s'agissait d'une propriété située dans une petite localité. De nombreux directeurs de banques et de sociétés de fiducie nous ont dit qu'ils ne voulaient pas toucher au marché immobilier dans les petites villes. C'était un secteur à éviter à l'époque.

Pour ce qui est du facteur risque, je comprends cela, étant moi-même entrepreneur. On ne peut pas faire fi des risques, et parfois, vous devez payer une prime. Nous savions que nous prenions des risques, dans un sens, parce qu'il s'agissait d'un projet nouveau dans une région qui avait connu des difficultés. Le marché immobilier et les autres types d'entreprises—les restaurants, les commerces de détail—tous souffraient à l'époque. Donc, nous savions qu'il fallait payer une prime de risque, mais je tiens encore une fois à répéter que personne n'était prêt à prendre des risques de toute façon, aussi minimes fussent-ils. Nous n'avions pas besoin de grand chose pour démarrer notre entreprise.

[Français]

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Dubé.

[Traduction]

Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes: Merci, madame la présidente.

Je tiens à vous remercier, monsieur Smith, pour votre exposé, car il décrit certains des problèmes auxquels font face les électeurs de ma circonscription de Hamilton-Ouest quand ils essaient d'obtenir un prêt d'une banque.

• 1700

Je vais aborder la question sous un angle différent de celui de mon collègue du Parti réformiste, qui semble dire qu'il n'y a pas suffisamment de concurrence et que vous devez vous en remettre à la LPPE pour obtenir un prêt. Je trouve cet argument plutôt déroutant, compte tenu du fait que dans la seule province de l'Ontario, on trouve la Banque Royale, la Banque de la Nouvelle-Écosse, la Banque de Montréal, des sociétés de fiducie, des caisses populaires, des coopératives de crédit, la CIBC, la Banque Nationale, la Banque TD et 258 autres institutions. Je ne vois donc pas pourquoi ces institutions ne se livreraient pas concurrence, monsieur Smith, pour vous accorder l'argent dont vous avez besoin pour financer votre projet. La concurrence existe, manifestement. Malheureusement, elle est peut-être trop vorace.

Je suis très content que M. Smith soit ici, car l'Institut Fraser, dans son exposé, affirme des choses du genre:

    Toutefois, à notre avis, en principe, le programme de prêts prévu par la loi ne constitue pas le moyen le plus efficace et efficient d'aider les PME à obtenir du financement.

Eh bien, d'après M. Smith, ce n'est pas vrai.

Il dit plus loin:

    Manifestement, les grandes banques remplissent, comme elles l'ont toujours fait, le rôle qui leur revient sur le plan économique—le gouvernement ne doit absolument pas adopter de lois et de règlements qui modifieraient le rapport risque/rendement afin de préserver le maximum...

et cetera, et cetera.

Je voudrais vous parler de ce rapport et des difficultés que vous avez eues avec les banques. Je crois que vous avez dit que les directeurs de banques locales ont manifesté de l'intérêt pour le projet, l'ont examiné, et ont même dit qu'ils étaient prêts à l'approuver. Sauf que, comme ce fut les cas avec certains de mes électeurs à Hamilton, les directeurs doivent remettre le dossier aux compteurs de sous qui sont installés dans les tours d'ivoire, dans mon cas, de Toronto. Ils descendent, examinent le projet froidement, comptent leurs sous, ne tiennent pas compte de mon électeur—ou, dans votre cas, ne tiennent pas compte de Greg Smith, de ce qu'il investit dans la collectivité, des contacts qu'il a établis avec les gens qui vont louer l'édifice ou une partie de celui-ci, ainsi de suite—et rejettent la demande, de sorte que le directeur de la banque locale est obligé de dire, «Je m'excuse, Greg. Je ne peux rien faire pour toi aujourd'hui.» C'est le genre de situation à laquelle ils doivent faire face jour après jour.

Monsieur Smith, je vous souhaite beaucoup de succès et j'espère que vous avez une propriété que vous pouvez agrandir, mais que Dieu vous vienne en aide si cela se produit, parce que si vous ne pouvez pas obtenir du financement par le biais de la LPPE, vous allez être obligé de retourner voir les banques afin d'obtenir les 2,5 millions dont vous avez besoin pour refinancer votre projet. Les banques vont vous dire, «Eh bien, je ne sais pas si nous pouvons vous donner ce que vous demandez.»

M. Greg Smith: Nous sommes retournés voir la banque l'année dernière. À ce moment-là, nous avions effectué des paiements réguliers pendant trois ans, sans jamais en manquer un seul. Nous avions remboursé, je ne sais plus, environ 40 000 $ et nous avions, entre temps, investi beaucoup d'argent de notre propre poche dans le projet. Nous sommes retournés voir la banque et nous lui avons dit, «Il nous faut 30 000 $ de plus parce que nous avons un locataire sérieux qui a besoin de plus d'espace. Nous pouvons combler la différence, mais nous avons besoin d'environ 30 000 $ pour effectuer quelques travaux.» Il aurait fallu que la banque convertisse le prêt pour petite entreprise en prêt hypothécaire de premier rang. Elle n'était pas disposée à le faire. Le directeur de la banque locale, lui, était de notre côté. La demande a été envoyée à Ottawa, et quelques semaines plus tard, nous avons reçu une réponse qui était toutefois négative. Elle a accepté de nous consentir un prêt, mais uniquement parce qu'il était garanti par le programme des prêts aux petites entreprises.

M. Stan Keyes: J'ai une histoire encore plus intéressante à vous raconter. Je ne mentionnerai pas de noms, et je ne vous dirai pas non plus de quelle banque il s'agit. La personne en question voulait obtenir une hypothèque pour sa propriété. Elle est allée voir son directeur de banque, qui lui a dit, «Pas de problème.» Ils s'adressent aux compteurs de sous, qui disent, «Eh bien, nous ne sommes pas certains. Nous ne croyons pas que vous allez être en mesure de réaliser ce projet.» Le directeur de la banque locale est prêt à lui verser l'argent, mais les responsables des hypothèques, à Toronto, qui soutiennent être totalement indépendants... Son directeur de banque est prêt à garantir le prêt, mais la banque mère indépendante, elle, dit «Non, nous ne pensons pas que ce projet va fonctionner.»

• 1705

Et si vous retournez voir la banque, elle vous dit toujours que les institutions sont totalement indépendantes. Toutefois, quand vous allez rencontrer le responsable des hypothèques à Toronto, il vous dit, «Eh bien, cela revient à donner d'une main et à reprendre de l'autre.»

Alors où est le problème? Est-ce que la banque et le prêteur hypothécaire agissent de façon totalement indépendante, ou la banque est-elle de mèche avec le prêteur hypothécaire? Parce que c'est l'argument qu'ils vont utiliser d'une façon ou d'une autre. C'est tout à fait frustrant.

Je vous souhaite donc beaucoup de succès, mais j'espère aussi que vous ne serez pas obligé de retourner voir les banques pour obtenir du financement.

M. Greg Smith: Pour l'instant, nous comptons sur la Banque de développement du Canada et sur nos propres fonds. Je ne sais pas ce que nous allons faire après.

C'est un véritable problème et c'est très frustrant, surtout quand vous avez une bonne feuille de route, que vous faites honneur à vos obligations, que vous jouissez d'une excellente cote de crédit, que votre projet est solide, que vous avez des gens qui frappent à votre porte parce qu'ils veulent vous aider à prendre de l'expansion, et que vous ne pouvez pas obtenir le financement dont vous avez besoin. C'est très frustrant.

M. Stan Keyes: Ce qui m'inquiète le plus, c'est la perte de contrôle au niveau de local. Vous connaissez le directeur de la banque, il vous connaît, il sait ce que vous êtes capable de faire, il sait que vous n'allez pas vous sauver à Cuba avec l'argent, il sait tout cela, mais les gens à Toronto ou au siège social ne vous connaissent pas, et franchement, ils ne veulent pas vous connaître. Ils veulent tout simplement jeter un regard froid et sévère sur votre projet et parfois, ce n'est pas ainsi que les choses doivent se faire.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Keyes.

Monsieur Jones.

M. Jim Jones: Merci.

J'ai fait partie d'un conseil pendant neuf ans, et j'ai eu l'occasion de rencontrer beaucoup de promoteurs et de constructeurs au cours de cette période. Dans bien des cas, l'entrepreneur qui fait faillite a emprunté de l'argent pour financer un projet particulier. Il n'a pas investi son propre argent dans celui-ci. Donc, si le projet fait faillite, tout ce qu'il perd, c'est l'argent qu'il a emprunté. Où est le problème dans ce cas-ci? Vous sembliez avoir beaucoup d'éléments d'actifs. Je ne vois pas, une fois ceux-ci regroupés, pourquoi une banque aurait rejeté votre demande.

M. Greg Smith: Eh bien, je suis arrivé ici dans une Toyota 1986, et je n'ai pas les moyens de m'acheter autre chose.

Des voix: Oh, oh!

M. Jim Jones: Non, mais...

M. Greg Smith: Stephen et moi avons pris des risques. J'ai des enfants, et nous avons beaucoup investi dans ce projet. Si nous n'avions pas été convaincus de son succès, mais tout simplement entêtés, parce que si vous l'analysez sur le plan strictement financier—et je pense que c'est là où vous voulez en venir...

Il y a parfois d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte. Je sais qu'il n'est pas question de cela aujourd'hui, mais dans une petite collectivité, il y a d'autres facteurs en dehors des considérations strictement financières qui entrent en ligne de compte. Nous avons tous les deux pris des risques. Nous ne sommes pas riches. Nous n'avons pas des ressources illimitées. Nous avons investi presque tout ce que nous possédons dans ce projet.

Nous ne voulions pas—et c'est ce que nous nous sommes dit— laisser tomber la collectivité. Nous possédons tous les deux des propriétés à valeur patrimoniale. Ce n'est pas la première fois que nous rénovons des bâtiments de ce genre. Quand nous avons acheté cet édifice, tout le monde l'a examiné et a dit, «quelque chose va se produire». Trois mois après, l'édifice prenait feu. Des vandales avaient réussi à entrer par-dessous. Heureusement, l'édifice n'a pas été endommagé, même s'il y a eu beaucoup de dégâts causés par la fumée. Le projet a presque avorté à cause de cela, mais nous avons foncé, parce que, autrement, nous aurions eu l'impression de laisser tomber la collectivité. Nous aurions pu tout abandonner à bien des reprises.

M. Jim Jones: Donc, vous êtes allés voir les banques dans le seul but d'obtenir du financement pour ce projet précis?

M. Greg Smith: Nous avions tout investi dans ce projet.

M. Jim Jones: Avez-vous également hypothéqué votre maison, ainsi de suite?

M. Greg Smith: Nous avons tous les deux hypothéqué nos propriétés pour réunir des fonds pour le projet. Nous avons tout investi dans le projet pendant les trois ou quatre premières années. Comme le plafond est fixé à 250 000 $, on ne pouvait pas obtenir plus. Quiconque souhaite investir dans des édifices à valeur patrimoniale doit savoir que ces édifices peuvent parfois devenir un véritable gouffre.

M. Jim Jones: Je sais.

M. Greg Smith: Donc, chaque dollar supplémentaire devait essentiellement venir de nos poches. Nous ne pouvions pas refinancer le projet chaque fois que nous avions besoin d'effectuer des travaux de peinture, réparer le toit, ainsi de suite. Nous avons personnellement investi beaucoup dans ce projet. Nous constituons une société de personnes enregistrée. Nous ne sommes pas une compagnie qui peut déclarer faillite et abandonner la partie. Nous avons investi ce que nous possédons dans ce projet.

• 1710

M. Jim Jones: Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Jones.

Monsieur Lastewka sera le dernier intervenant.

M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.

Il est bon d'entendre le point de vue de quelqu'un qui n'est pas influencé par d'autres, qui a sa propre vision des choses. C'est très important pour le comité.

Plus nous parlons de finances, plus il est question de risques et de coût de l'argent. Comme l'a mentionné M. Keyes—et nous en avons discuté—il existe d'autres possibilités. Toutefois, quand il est question de financer un projet ou de prêter de l'argent à quelqu'un, tout est fonction des risques que présente le projet. C'est ce qui va permettre de déterminer si un prêt sera consenti ou non, et à quel coût.

Vous avez dit que la LPPE a été en mesure de prendre ce risque supplémentaire. Les banques aimaient ce qu'elles voyaient, mais elles n'avaient pas suffisamment confiance dans ce projet. C'est le fait d'obtenir un prêt par l'entremise de la LPPE, un prêt garanti par le gouvernement, qui a permis au projet de voir le jour.

M. Greg Smith: En un mot, oui. C'est l'impression que j'ai de toutes façons. Personne ne voulait nous parler, en tous cas pas avant qu'on ait rencontré un directeur de banque qui nous a dit, «Eh bien, si vous pouviez ouvrir un commerce, et que vous faisiez ceci et cela, nous pourrions sans doute trouver un moyen de réaliser ce projet par l'entremise de ce programme.»

M. Walt Lastewka: Le montant d'argent que prévoyait la LPPE dans le passé et que prévoit la nouvelle loi n'est pas tellement considérable, mais il permet de venir en aide aux 30 000 ou 40 000 projets ou entreprises qui présentent des risques élevés.

On se dit toujours qu'il y en a qui finissent par être financés, d'autres pas. Certains des projets qui présentent des risques plus élevés, comme le vôtre, n'auraient pas pu voir le jour. Combien d'argent supplémentaire avez-vous investi dans la collectivité, et combien d'emplois ont été créés grâce à ce projet?

M. Greg Smith: Nous avons probablement investi 1 million de dollars dans l'édifice, et c'est de l'argent qui a été emprunté ou qui vient de nos poches. C'est donc 1 million qui a été investi dans la collectivité et qui a permis d'embaucher des gens pour faire le travail, d'acheter du matériel, ainsi de suite. Comme nous avons ouvert un café-bar dans l'édifice, nous avons réussi à attirer une personne bien connue du milieu des affaires d'Ottawa. Elle a créé une entreprise satellite là-bas quand elle a renouvelé le bail. Elle n'aurait jamais fait cela si l'occasion ne s'était pas présentée. Elle emploie entre 10 et 15 personnes.

En raison de l'emplacement, de la beauté du site et de l'édifice, de la qualité des rénovations, nous avons fait affaire avec plusieurs entrepreneurs locaux—des entreprises de haute technologie, ainsi de suite. Ils auraient pu lancer leur propre entreprise à Kanata, parce que c'est là que se déroule l'action, mais ils ont préféré rester ici en raison de cet environnement fantastique qui permettait de créer une synergie entre le monde artistique, le café-bar, la vue magnifique offerte par les chutes et l'édifice à valeur patrimoniale. Tous ces facteurs les ont encouragés à rester à Almonte.

Environ 15 autres emplois ont été créés grâce aux locataires de l'édifice. Les artistes contribuent pour beaucoup à la vie culturelle en organisant des festivals et des foires et en participant à toutes sortes de projets qui visent à rendre la collectivité encore plus intéressante: il y a donc une synergie qui entraîne des retombées considérables.

M. Walt Lastewka: C'est pour ça que je suis content que vous soyez ici. Vous nous avez permis de comprendre les avantages tangibles et intangibles qui découlent de ces projets. C'est un sujet sur lequel nous devrons nous pencher.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Monsieur Smith, nous vous remercions d'être venu nous rencontrer. J'ai deux brèves questions à vous poser. La première a trait à un commentaire qu'a fait plus tôt M. Jones. Vous souvenez-vous si vous avez dû vous-même garantir le prêt obtenu par l'entremise de la LPPE, ou si ce sont vos conjoints qui l'ont fait? Je ne sais pas si vous êtes marié.

• 1715

M. Greg Smith: Je suis marié; mon associé ne l'est pas.

Je ne m'en souviens pas. Je crois avoir vu l'expression garantie «conjointe et solidaire» dans le document que nous avons signé.

La présidente: Si je vous pose cette question, c'est parce que, quand je pratiquais le droit de la petite entreprise et que j'étais appelée à examiner des contrats pour les prêts consentis dans le cadre de la LPPE, je demandais aux conjoints d'obtenir l'avis impartial d'un autre avocat parce que se sont eux qui garantissaient le prêt. Je sais que, dans un cas particulier, le couple a décidé de tout abandonner au bout de quatre ou cinq ans, qu'il a été obligé de se départir de tout ce qu'il possédait et de rembourser une bonne partie de ses dettes avant de présenter une nouvelle demande au gouvernement. On semble croire que les prêts consentis dans le cadre de la LPPE ne sont pas garantis à même les biens personnels. Ils le sont, si je me fie à mon expérience.

M. Greg Smith: C'est l'impression que j'ai. Je n'ai pas relu le contrat. J'aurais peut-être dû le faire.

La présidente: Bien. Je me demandais tout simplement si vous...

M. Greg Smith: Ils ont essayé d'obtenir toutes les garanties possibles.

La présidente: D'accord.

J'ai une autre brève question. Vous avez dit à plusieurs reprises qu'il s'agit d'un édifice à valeur patrimoniale. Le nouveau projet de loi contient une disposition qui traite des projets pilotes entrepris par des groupes sans but lucratif. On ne les définit pas de façon précise, mais il y a beaucoup de groupes de protection du patrimoine ou de groupes sans but lucratif. Je me demande tout simplement ce que vous pensez de l'idée d'accorder un prêt à ces groupes qui ont de la difficulté à obtenir du financement, parce qu'ils n'ont pas de revenus.

M. Greg Smith: C'est une excellente idée. Bien sûr, il s'agit de fonds publics dans un sens, et si ces fonds sont perdus, vous voulez les garantir. Mais l'idée est excellente. J'ai eu l'occasion de travailler avec des organisations sans but lucratif, et leurs projets ont beaucoup de potentiel et apporteraient beaucoup à la collectivité. Je trouve l'idée excellente.

La présidente: Je vous remercie beaucoup, monsieur Smith. La sonnerie d'appel se fait entendre. Nous devons aller voter. Je voulais tout simplement ajouter un bref commentaire. Si vous voulez, il y a un édifice à valeur patrimoniale dans ma circonscription.

La séance est levée. Merci beaucoup.