Passer au contenu
Début du contenu

INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 21 octobre 1998

• 1530

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Conformément à son ordre de renvoi de la Chambre en date du mardi 6 octobre 1998, nous reprenons l'examen du projet de loi C-53, Loi visant à accroître la disponibilité du financement de l'établissement, de l'agrandissement, de la modernisation et de l'amélioration des petites entreprises. Nous sommes ravis d'accueillir aujourd'hui des représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, soit M. Garth Whyte, vice-président des Affaires nationales, et M. Brien Gray, vice-président principal responsable de la Politique et des affaires provinciales.

Nous écouterons avec plaisir votre exposé, puis je suis convaincu que nous trouverons des questions à vous poser.

M. Brien Gray (vice-président principal, Politique et affaires provinciales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité. Nous avons préparé 30 copies en anglais et 15 copies en français de notre exposé, que vous avez dû recevoir. Pour les besoins de cet exposé, nous allons simplement lire pour qu'il soit consigné au compte rendu l'essentiel de ce que nous avons à vous dire, puis nous répondrons aux questions.

La FCEI a le plaisir de témoigner devant le Comité permanent de l'industrie de la Chambre des communes pour présenter ses observations sur l'avant-projet de loi C-53 ayant trait à la Loi sur le financement des petites entreprises au Canada, anciennement la Loi sur les prêts aux petites entreprises, ou LPPE.

Comme vous le savez, nous avons témoigné devant le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce le 30 juillet et un grand nombre de points exposés devant ce comité seront répétés ici.

Nous faisons cette démarche dans une perspective exceptionnelle. En effet, la FCEI est un organisme qui représente 90 000 petites et moyennes entreprises indépendantes de toutes les régions du Canada.

Pendant plus de 25 ans, nous avons collaboré au perfectionnement du programme institué dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. À ce titre, nous avons acquis des connaissances sur le programme du point de vue des utilisateurs, soit les milliers de chefs d'entreprise qui ont eu recours au programme au cours des années.

Historiquement, nos sondages et nos travaux de recherche indépendants ont indiqué que la Loi sur les prêts aux petites entreprises représente l'un des programmes les plus efficaces en son genre. Selon nos membres, c'est le mieux connu, le mieux compris et le mieux utilisé des programmes de ce genre, tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial.

Il y a plusieurs raison pour lesquelles le programme a été aussi efficace. Il est demeuré relativement constant dans son objectif en tant que programme visant à aider les jeunes et petites entreprises à obtenir des capitaux d'emprunt en raison de l'insuffisance de capitaux propres et de capitaux d'emprunt pour ce segment du marché.

Le programme exige une reddition des comptes. Il a été examiné régulièrement pour garantir qu'il fonctionne efficacement, que les problèmes sont résolus et que les nouveaux besoins justifiés sont satisfaits.

Enfin, le programme a fonctionné à merveille parce que la politique a été écartée d'un programme qui est foncièrement bon. Ce dernier point est extrêmement important à nos yeux.

En dépit de notre appui accordé à la Loi sur les prêts aux petites entreprises et à son rôle dans la communauté des petites entreprises, nous avons des préoccupations parce que nous souhaitons que le programme s'en tienne à ses principes fondamentaux pour se perpétuer. Les efforts en vue de l'écarter de ses principes fondamentaux ont mis et mettront l'intégralité du programme en péril. Nous ne croyons pas que ce soit un risque qu'il vaut la peine de prendre.

Au cours de l'été, lorsque nous avons examiné le document de consultation, nous avons été frappés par la gamme de nouvelles applications qui sont suggérées pour le programme. En juillet, la FCEI a rappelé au gouvernement qu'il devait s'en tenir aux paramètres du programme et à leur perfectionnement.

Nous avons officiellement déclaré que les besoins de fonds de roulement ne doivent entrer dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, car cela pourrait ruiner l'intégralité du programme. Les prêts aux fins du fonds de roulement n'ont rien à voir avec ce programme. Si le gouvernement est résolu à aller dans cette voie, il doit mettre à l'épreuve un programme suivant ses propres mérites et voir s'il fonctionne. En fin de compte, nous avons des craintes à propos de la durabilité à long terme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Nous croyons qu'il est dangereux de faire entrer tous les besoins concevables dans le cadre de ce programme.

Enfin, le gouvernement doit rejeter la suggestion selon laquelle la seule façon pour les banques de consentir des prêts aux maisons d'exportation, aux entreprises axées sur le savoir, aux toutes petites entreprises ou même au secteur bénévole, c'est en vertu d'un programme de garanties de prêts. Aussi utile que soit le programme, il ne doit en aucune façon être utilisé par les banques pour répondre aux vastes besoins de financement que connaissent la majorité des petites entreprises au Canada.

En ce qui a trait aux questions précises, voici certains des points sur lesquels la FCEI fera des observations particulières. Notre objectif est de maintenir l'efficacité et la pertinence du programme pour le secteur des petites entreprises et d'assurer la durabilité du programme.

En ce qui a trait aux chiffres du programme, la FCEI est préoccupée depuis plusieurs années par le nombre des prêts qui sont consentis dans le cadre du programme. Pendant la plupart des années 80, le nombre de prêts consentis dans le cadre du programme chaque année s'est élevé à entre 16 000 et 17 000. À la suite des changements apportés au programme en 1993, ces chiffres ont augmenté rapidement pour plafonner à environ 68 000 en 1994-1995. Depuis ce temps-là, les chiffres ont baissé, en partie en raison des changements apportés en 1995, et sont retombés au niveau de 30 000.

En 1994, nous avons écrit au ministre Manley pour lui faire part de nos préoccupations à l'égard des aspects de la Loi sur les prêts aux petites entreprises qui, à notre avis, méritaient attention. Nous étions particulièrement préoccupés parce que «jusqu'à concurrence de 16 p. 100 du total des prêts à terme aux petites entreprises ont été financés dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises depuis les réformes d'avril 1993», pour citer cette lettre.

Or, la FCEI croit que ces chiffres sont toujours trop élevés et le risque ne fera que s'accroître, surtout si certaines des propositions actuelles visant à élargir le programme sont acceptées.

• 1535

Au sujet des paramètres du programme, la FCEI considère que les paramètres trop généreux du programme ont abouti à un élargissement inattendu, à un transfert de responsabilité et à la nécessité pour le ministère de revenir à la charge pour obtenir des crédits budgétaires supplémentaires au cours de la période de cinq ans.

Nous avons, par le passé, demandé de resserrer les paramètres. En 1994, les membres de la FCEI avaient des emprunts dont la taille médiane était d'environ 50 000 $. En 1997, ce chiffre était passé à 90 000 $. L'importance moyenne des emprunts dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises aujourd'hui est d'environ 65 000 $. En outre, le rehaussement du plafond pourrait créer des problèmes liés au fait que des entreprises plus importantes pourraient essayer de déjouer le système. Depuis plusieurs années, la FCEI réclame un abaissement du seuil de la taille des emprunts dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, de 250 000 $ à 150 000 $.

Étant donné les délibérations actuelles, nous avons cru qu'il était important de porter la question à l'attention de nos membres pour connaître leurs dernières opinions à propos de ce seuil. Il faut noter que les membres ont voté à 49 p. 100 en faveur du maintien du plafond de 250 000 $. La marge étroite du vote indique cependant qu'il ne faudrait pas relever ce seuil. Si l'on portait ce seuil à 500 000 $, par exemple, il pourrait en résulter des contraintes énormes sur le programme et sur les coffres de l'État, ce qui pourrait bien mettre en péril le programme. Il faut se rappeler que la taille moyenne des prêts aujourd'hui est bien inférieure à 100 000 $.

En ce qui concerne le seuil du chiffre d'affaires, nous croyons qu'il est fixé à un niveau trop élevé. Parmi nos membres, 7 p. 100 seulement des entreprises ont un chiffre d'affaires supérieur à 5 millions de dollars et 18 p. 100 ont un chiffre d'affaires supérieur à 2 millions de dollars. Les chiffres de Statistique Canada corroborent dans l'ensemble nos propres statistiques. On a tort de prétendre que pour subventionner le programme, il faut que celui-ci vise également des entreprises plus importantes et des prêts plus élevés. La question est de savoir si ces entreprises ont besoin de garanties de crédit comme celles que prévoit la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

Entreprises admissibles: Les genres d'entreprises qui sont admissibles aux prêts dans le cadre du programme constituent une autre question qui se rapporte au programme, à ses chiffres et à sa durabilité. Il est difficile de justifier les besoins de certaines entreprises qui sont actuellement admissibles dans le cadre du programme. Il a été question dans un document de travail d'une myriade de nouveaux types d'exploitations qui pourraient être visés par le programme. C'est dans ces secteurs que l'on risque de politiser un programme qui est nettement ciblé et qui est efficace dans l'aide apportée aux petites entreprises.

Si des besoins se font sentir au-delà de l'aide à apporter aux nouvelles entreprises, ces besoins devraient être satisfaits en dehors du programme. Il semblerait que les besoins ou les objectifs d'autres ministères viennent se greffer à la Loi sur les prêts aux petites entreprises parce que les gens ne savent trop que faire de ces objectifs politiques.

Garth.

M. Garth Whyte (vice-président, Affaires nationales, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante): En ce qui concerne l'organisme d'examen de la garantie de crédit, certains prétendent que la raison pour laquelle le gouvernement souhaite greffer à la loi des activités qui n'ont rien à voir avec l'expansion des petites entreprises, c'est parce que cette loi comporte un mécanisme déjà établi pour l'examen de la garantie de crédit. Nous voulons faire valoir que si le gouvernement souhaite mettre à l'épreuve ou mettre sur pied de nouvelles méthodes de garantie de crédit sans rapport avec le financement des petites entreprises—des méthodes qui pourraient fausser les statistiques de performance de l'activité des prêts aux petites entreprises en vertu de cette loi—, il devrait le faire séparément.

Une fois qu'il a été établi que le besoin existe et que le test a bien fonctionné, il devrait y avoir une loi distincte pour pourvoir à cet objectif du gouvernement. Pour créer le mécanisme d'examen de la garantie de crédit nécessaire, nous proposons que le gouvernement établisse un groupe d'examen central de garantie de crédit qui pourrait être chargé de surveiller l'activité dans le cadre des lois distinctes.

Ainsi, par exemple, si le test relatif au secteur bénévole démontre le besoin dans ce secteur, que l'on établisse donc une loi sur le financement du secteur bénévole, indépendante de la Loi sur le financement des petites entreprises, et que l'on utilise le groupe d'examen de la garantie de crédit pour surveiller l'activité en vertu de cette loi. De cette façon, le gouvernement peut surveiller et contrôler les risques inhérents à des catégories analogues de secteurs ou d'activités tout en mesurant l'efficacité du programme.

Passons maintenant aux programmes pilotes. Le projet de loi C-53 prévoit de lancer des programmes pilotes en vertu de la loi dans deux secteurs précis: le secteur bénévole et la location-acquisition. Pour les raisons que nous venons de décrire, la FCEI s'oppose à ce que l'une ou l'autre de ces activités relève de la Loi sur le financement des petites entreprises. En outre, nous croyons qu'il est important de fixer le niveau de besoin pour ces deux activités.

En ce qui concerne la location-acquisition, nos membres ne réclament pas à cor et à cris que cette forme de financement soit prévue dans la Loi sur le financement des petites entreprises. Le besoin n'a pas été clairement établi. Où sont les lacunes? Il faut croire que le test pilote permettra de déterminer, entre autres, si ces lacunes existent et, le cas échéant, quels sont la taille et l'âge des entreprises en cause.

En ce qui concerne le secteur bénévole, les membres de la FCEI se plaignent régulièrement de la concurrence déloyale d'établissements qui ne paient pas d'impôt. Nous redoutons sérieusement que les établissements du secteur bénévole qui reçoivent du financement dans le cadre de la loi se voient conférer un autre avantage concurrentiel par rapport aux entreprises traditionnelles assujetties à l'impôt qui, elles, ne sont peut-être pas admissibles dans le cadre de la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada.

• 1540

La FCEI demande au comité et à Industrie Canada de surveiller ces programmes pilotes au moyen d'une gamme de critères avant que ces secteurs deviennent admissibles de manière permanente aux garanties de crédit.

Les micro-prêts. La FCEI craint que certains prêteurs traitent la majorité de leurs micro-prêts dans le cadre du programme. Si vous souhaitez un micro-prêt, nous pouvons le consentir, disent des banques, mais dans le cadre d'un programme de crédit garantis. Il faut réunir, analyser et publier régulièrement les statistiques pour déterminer si ces chiffres—par établissement—sont appropriés. Par exemple, aucun établissement ne devrait avoir la majorité de ces prêts de démarrage dans le cadre de la nouvelle loi.

Cela nous amène à l'autre problème: le transfert des responsabilités. La FCEI continue de s'inquiéter du fait que les banques font entrer les prêts qu'elles devraient consentir en dehors du programme dans le cadre du programme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, ce qui revient à esquiver le risque. Cette pratique devrait être interdite. À plusieurs reprises, la FCEI a soulevé ces préoccupations auprès des ministres responsables du programme. Les chiffres qui ressortent des années 80 par rapport à ceux des années 90 sont révélateurs. Les conclusions du rapport Riding ont été un deuxième indicateur.

Le fait que 80 p. 100 des prêts actuels en vertu du programme sont consentis par les banques est suspect. Il faut établir des critères d'évaluation de programme pour suivre, d'une manière permanente, les niveaux d'augmentation des prêts dans le cadre du programme, y compris une analyse par institution financière.

Passons à la transparence. La FCEI croit que ceux qui touchent des fonds en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises, doivent être au courant du fait. Plusieurs ont indiqué qu'un grand nombre de candidats aux prêts ne savent pas qu'ils touchent de l'argent dans le cadre d'un programme garanti par l'État pour lequel ils versent une prime. En conséquence, ils ne prennent peut-être pas une décision commerciale éclairée lorsqu'ils participent au programme ou lorsqu'ils continuent d'y participer.

Le formulaire de demande dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises doit être entièrement transparent et les agents de prêts devraient être tenus d'expliquer totalement les occasions et les coûts de cette forme de financement. Un certain mérite devrait être reconnu au gouvernement pour ce programme. Le formulaire de demande ci-annexé démontre qu'un grand nombre de chefs d'entreprise qui reçoivent du financement dans le cadre de la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada et qui remplissent le formulaire ne seraient pas au courant que ce programme coûte plus cher et qu'il est subventionné par le gouvernement.

Le point suivant porte sur la collecte et le suivi des données. Les méthodes permettant d'évaluer le programme sont essentielles. Par le passé, l'absence de méthodes a constitué une lacune dans ce programme. Un suivi plus sérieux et une évaluation du programme sont nécessaires. Par exemple, dans quelle mesure savons-nous aujourd'hui quels éléments des changements apportés en 1993 et 1995 ont porté fruit? Qu'en sera-t-il des changements proposés pour 1999? Dans quelle mesure pouvons-nous mesurer ces effets?

Par ailleurs, juger la Loi sur les prêts aux petites entreprises d'après les emplois qu'elle a permis de créer est, à notre avis, davantage une mesure d'ordre politique qu'une véritable mesure du succès de ce programme. Il importe de mesurer, au contraire, les entreprises voient le jour à cause du type de financement que prévoit la Loi sur le financement des petites entreprises au Canada, leur taux de croissance, leurs besoins de financement, etc.

Enfin, nous suggérons qu'Industrie Canada surveille, institution par institution, le nombre d'entreprises qui sont régulièrement financées dans le cadre du programme.

Quant à la souplesse en matière de réglementation, la FCEI comprend la nécessité pour le gouvernement de pouvoir agir rapidement lorsqu'il importe de remédier aux problèmes dans le cadre du programme. À titre d'exemple, citons les abus des sociétés apparentées. Dans ce cas, une méthode de réglementation serait logique. Cependant, pour les questions qui sont fondamentales, les changements structurels au programme, comme l'admissibilité des prêteurs, les seuils de prêt, la sélection des bénéficiaires des prêts, etc., il faudrait qu'elles soient traitées dans le cadre de la législation et non de la réglementation pour garantir la reddition des comptes et la transparence du programme.

Nous savons que la loi n'en parle pas, mais il y a un autre problème concernant ce qu'on appelle les autres frais. Nous croyons savoir que certains prêteurs ont demandé de pouvoir réclamer en plus des frais d'inscription de 2 p. 100 et des frais d'administration annuels de 1,25 p. 100, réclamés aux prêteurs, et que ceux-ci peuvent réclamer à l'emprunteur, des frais de demande de prêt, de renouvellement ou autres. On prétend que cette politique serait conforme aux pratiques bancaires normales et qu'elle permettrait donc de simplifier le processus.

La FCEI rejette cette notion d'ajout de frais supplémentaires dans le cas du programme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Les membres de la FCEI se sont toujours plaints des frais de service, du côté arbitraire de leur application et de leur niveau ainsi que du manque de corrélation entre les frais de service et la valeur de ce service. Nous avons toujours trouvé contradictoire que si les institutions financières offrent ce service, il faut encore que les gens qui demandent ce service paient pour en faire la demande. Nous ne croyons pas qu'il soit approprié qu'un programme du gouvernement fédéral nécessite ces frais supplémentaires.

• 1545

Enfin, comme nous l'avons fait remarquer dans la section sous le titre transparence, nous estimons qu'il est important de faire une différence entre les prêts au titre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises et ce que l'on appelle les prêts bancaires normaux.

Brien.

M. Brien Gray: On ne peut pas discuter des questions de capitaux d'emprunt, notamment ceux qui sont fournis dans le cadre de ce programme, sans aussi discuter de la question de l'accès adéquat aux capitaux propres.

Au cours des vingt dernières années, trop peu d'attention a été portée au Canada à la question des capitaux propres dans la mesure où elle touche les petites entreprises. Les effets dévastateurs de la récession sur les niveaux de capitaux propres des petites entreprises se font toujours sentir. Face à l'affaiblissement des conditions du marché et souvent à des réductions massives de prêts aux petites entreprises, un grand nombre d'entreprises ont été forcées de puiser dans leurs capitaux propres pour survivre.

Lorsque l'économie s'est raffermie, les conditions fiscales différentes de celles du début des années 80 ont rendu difficile pour les petites entreprises le rétablissement de leurs capitaux propres. La réduction des capitaux propres d'un grand nombre d'entreprises diminue leur possibilité d'obtenir des capitaux d'emprunt. Résultat: la création d'emplois est inférieure à ce qu'elle pourrait être.

La gamme actuelle des outils permettant de résoudre ce problème est nettement insuffisante. Un sondage des membres de la FCEI en 1997 a révélé que les économies personnelles—56 p. 100—, la réduction des impôts et la hausse du taux de non-distribution des bénéfices—45 p. 100—étaient les sources les plus appropriées de financement par capitaux propres pour les petites entreprises. Par contre, les bailleurs de fonds—5,2 p. 100, le capital risque—4,1 p. 100—et les fonds de capital-risque parrainés par les syndicats—1,1 p. 100—n'avaient pas la cote des PME comme sources appropriées de capitaux propres. Il est clair que des solutions dans le cadre de programmes et des fonds de capital-risque parrainés par les syndicats ne répondent pas aux besoins de capitaux propres du secteur des petites entreprises.

La question a été clairement identifiée par le groupe de travail des petites entreprises, que j'ai eu l'honneur de coprésider, dans le rapport «Franchir les obstacles», publié en 1994. Le groupe nommé par les ministres des Finances et de l'Industrie a prié instamment le gouvernement de recourir aux instruments de la politique budgétaire pour combler les lacunes en matière de capitaux propres des petites entreprises.

Il faut poursuivre avec plus de vigueur des solutions pratiques pour les petites entreprises. De meilleures solutions au problème des capitaux propres pour les petites entreprises contribueront énormément à renforcer non seulement la santé financière de l'entreprise, mais également sa capacité de croître et l'aide qu'elle apporte à l'économie pour ce qui est des emplois et de la création de richesse. Cette solution diminuerait également la dépendance vis-à-vis des programmes de garantie de crédit subventionnés par l'État, comme ceux qui sont institués dans le cadre de la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

Il serait difficile d'examiner un programme de financement dont la prestation est effectuée en grande partie par les grandes banques à charte du Canada en faveur des petites entreprises, sans envisager les répercussions des fusions bancaires proposées.

La FCEI a examiné certains chiffres du programme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises et tient à faire remarquer qu'en Ontario par exemple, si les quatre banques étaient réduites à deux, ces deux banques représenteraient plus de 75 p. 100 du total des prêts dans le cadre de ce programme dans la province et plus de 75 p. 100 de la valeur chiffrée. Ces chiffres pourraient certainement être plus élevés dans certaines localités.

Dans la mesure où ce programme et les prêts qui sont consentis dans le cadre de ce programme visent les jeunes et petites entreprises et étant donné que celles-ci créent la majorité des nouveaux emplois dans l'économie, nous sommes bouleversés devant la perspective que la grande majorité de ces prêts serait monopolisée par deux méga-institutions. Dans le cadre de votre examen, nous croyons qu'il est essentiel de recueillir des données de la part des banques pour évaluer les effets possibles des fusions bancaires sur le programme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises.

En conclusion, la FCEI a exposé certaines de ses préoccupations et opinions sur le programme de la Loi sur les prêts aux petites entreprises—devenue la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada—et sur les propositions dans le cadre du projet de loi C-53. Nous en avons également réitéré plusieurs et nous vous encourageons à lire nos lettres antérieures adressées aux ministres, qui se trouvent annexées à notre mémoire. Nous croyons qu'un grand nombre des préoccupations exprimées dans ces lettres, par le passé, sont toujours valides aujourd'hui.

Enfin, nous croyons qu'un programme dans le cadre de la Loi sur le financement des petites entreprises du Canada, défini et administré d'une manière rigoureuse, continuera de jouer un rôle important dans le développement et la croissance du secteur des petites entreprises au Canada. Nous recommandons cependant de prendre des précautions extrêmes pour ce qui est des changements structurels majeurs dans la manière dont ce programme fonctionne. En fait, s'il fonctionne bien, inutile de le réparer.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Gray et monsieur Whyte, d'avoir lu votre mémoire pour qu'il soit consigné au compte rendu.

Nous passons maintenant aux questions et nous commencerons par M. Pankiw.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): En ce qui a trait à l'avant dernier point que vous avez soulevé avant votre conclusion, nous avons entendu hier deux représentants du Fraser Institute. Selon eux, les programmes comme la LPPE déforment les marchés et, bien qu'ils puissent profiter considérablement à un très petit nombre d'entreprises, ils nuisent un peu à un grand nombre d'entreprises. Ils nous ont dit que l'effet net de ces programmes—calculé à partir d'une analyse coûts-avantages complète—est négatif sur le plan de la création d'emplois.

• 1550

Vous semblez d'ailleurs le confirmer à votre avant-dernier point, «offre de capitaux propres». Je soutiens finalement que les véritables obstacles à l'accès au financement pour les petites entreprises sont les taux d'imposition excessifs, les impôts sur les gains en capital et les taux d'imposition marginaux, de même que d'autres règlements gouvernementaux qui constituent un fardeau pour les entreprises. Ainsi, ce que vous dites concorde avec ce que nous a dit le Fraser Institute hier, mais ne concorde pas avec le reste de votre rapport.

M. Brien Gray: Comme je n'ai pas lu le rapport du Fraser Institute et que je n'étais pas là non plus pour le témoignage de l'Institut, je ne peux que supposer quels sont les éléments sur lesquels il se fonde pour faire cette déclaration. Je peux vous dire ceci: notre position à cet égard se fonde sur les sondages que nous faisons régulièrement auprès des 90 000 petites et moyennes entreprises qui sont membres de notre fédération. Je ne sais pas sur quoi se fonde la position du Fraser Institute, mais nous sommes plutôt confiants quand nous disons que nos membres savent...

Permettez-moi de m'expliquer. Les petites entreprises ne réclament pas à cor et à cri qu'on augmente le nombre de programmes. Quand il y a toutefois un programme qui existe et qui fonctionne... Le programme en question a été mis sur pied parce qu'il y avait des lacunes sur le marché. Les petites entreprises sont effectivement défavorisées de par leur nature même dans notre économie. Qu'on le veuille ou non, leur petite taille comporte des désavantages. Les petites entreprises sont notamment moins en mesure d'obtenir des capitaux, qu'il s'agisse de capitaux empruntés ou de capitaux propres. Il existe des problèmes des deux côtés, de sorte qu'il n'est pas contradictoire de dire qu'il y aucun besoin des deux côtés.

Le programme en question vise un créneau bien particulier du marché: les petites entreprises qui en sont à leurs débuts et qui ont du mal à réunir des capitaux pour démarrer parce qu'elles sont insuffisamment capitalisées. On aurait beau modifier toutes les lois fiscales dès demain, on ne pourrait rien changer à la situation au tout début en tout cas. On pourrait peut-être l'améliorer avec de meilleures lois fiscales sur les gains en capital et de meilleurs crédits à l'investissement, par exemple, mais nous soutenons que, parmi les programmes qui existent déjà, celui dont nous parlons sert assez bien les petites entreprises, et ce, depuis 25 ans. La plupart des programmes ne sont guère appréciés des petites entreprises—je serais d'accord avec vous là-dessus—, mais celui-là donne de bons résultats pour ce secteur du marché.

En ce qui a trait aux dégrèvements fiscaux, aux lois fiscales et aux autres mesures de ce genre, nous avons toujours dit la même chose. Il faut moins d'impôt, moins de règlements: tout cela permettrait de stimuler énormément l'économie, mais ce dont nous discutons aujourd'hui, c'est du programme de la LPPE, et de notre point de vue, nos membres s'opposeraient à ce que le programme soit éliminé.

La présidente: M. Whyte a quelque chose à ajouter.

M. Garth Whyte: Merci, madame la présidente. Je veux simplement répondre à l'observation qui a été faite. J'estime que nous sommes conséquents avec nous-mêmes tout au long du rapport, et nous sommes conséquents avec nous-mêmes depuis au moins les 15 années où Brien a été là et depuis les deux années où j'ai moi-même été là. Nous soutenons depuis toujours que le programme donne de bons résultats pour les cas marginaux. Il ne devrait pas être considéré comme une panacée pour régler tous les problèmes de financement des petites entreprises; il existe pour aider les nouvelles entreprises qui ont besoin du coup de pouce supplémentaire que leur assure ce programme de prêt garanti afin de pouvoir obtenir un prêt.

Les déformations commencent à se faire sentir quand on gonfle le programme et qu'on relève le seuil pour qu'il s'applique à des entreprises ayant un chiffre d'affaires de cinq millions de dollars et des prêts s'élevant à 250 000 $; c'est dans ces conditions-là que nous le désapprouvons. Quand on commence à l'appliquer aussi au secteur bénévole et à plein d'autres choses, on dépasse la portée des prêts qui était prévue.

Nous avons étudié les programmes de ce genre qui existent dans le monde, et celui-là est le seul qui soit une réussite—parce qu'il s'agit d'un programme de prêt garanti. Nous disons aussi depuis toujours, et les documents sont là pour le prouver—vous n'avez qu'à lire les lettres—qu'il ne s'agit pas d'une subvention. Les entreprises qui obtiennent ces prêts doivent payer une prime plus élevée et des frais d'administration. Nous n'avons pas non plus demandé que ces frais soient réduits, nous avons plutôt soutenu qu'ils devraient être plus élevés. Les entreprises sont prêtes à payer un prix plus élevé pour obtenir ces prêts parce qu'elles ne peuvent pas les obtenir ailleurs.

M. Jim Pankiw: Eh bien, à mon avis, il suffirait de réduire les impôts sur les gains en capital pour faciliter l'accès au capital, mais dans l'ensemble, vous dites que cette mesure a bien servi le secteur de l'entreprise depuis 25 ans. J'ai moi-même eu l'occasion de faire un emprunt aux termes de la LPPE et, comme vous l'expliquez à la page 5, à l'époque j'étais un entrepreneur, très préoccupé par mon entreprise, et quand la banque m'a dit: «Faites ceci» je n'ai pas hésité, je l'ai fait.

C'est seulement après être entré en politique que j'ai commencé à comprendre ce programme. Mais quand je regarde en arrière, quand je pense à ce banquier, je sais aujourd'hui que je n'avais pas besoin de ce programme-là. J'avais un avoir amplement suffisamment, toutes sortes de garanties. Il ne courait absolument aucun risque avec moi, mais il a tout de même utilisé ce programme pour garantir le prêt.

M. Brien Gray: Nous traitons de ces questions-là au chapitre de la transparence.

• 1555

M. Jim Pankiw: D'accord, mais vous reconnaissez que même chez vous il y a des gens qui remplissent vos formulaires sans savoir qu'il s'agit de ce programme. Êtes-vous certains que les entreprises qui répondent à ces questionnaires que vous leur envoyez comprennent véritablement de quoi il s'agit? En effet, j'ai moi-même été forcé d'utiliser la LPPE, et je n'y ai rien compris.

M. Brien Gray: Le fait que vous posiez cette question est intéressant car l'un des problèmes, en matière de contrôle des données... À l'époque du dernier examen, Industrie Canada a demandé à notre organisation de fournir des données sur notre expérience dans le cadre de la LPPE parce que le gouvernement n'avait pas les moyens nécessaires pour recueillir lui-même ces données. Nous avons donc créé des outils de sondage sur la Loi sur les prêts aux petites entreprises pour essayer d'aider le gouvernement à mesurer l'efficacité du programme. Les documents étaient très précis, on expliquait clairement qu'il s'agissait du programme, de ses effets, de l'utilité qu'il avait eue pour certaines personnes.

Je comprends votre observation. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles nous en avons parlé ici. D'autre part, comme Allan Riding l'a dit, il arrive souvent que des compagnies ne sachent pas qu'elles ont adhéré au programme. Par conséquent, nous avons recommandé qu'on explique clairement ce programme à tous ces adhérents pour qu'ils puissent prendre des décisions informées—une chose qu'apparemment vous n'aviez pas pu faire vous-même—pour qu'ils sachent qu'ils ont adhéré à un programme de garanties et qu'ils auront quelque chose à payer en plus. Certains décideront peut-être de commencer de cette façon-là, mais ils pourront se demander ensuite s'ils ont intérêt à continuer indéfiniment à assumer ces frais supplémentaires. L'important, c'est qu'ils prennent une décision bien informée. S'ils adhèrent à un programme de l'État, il faut qu'ils le sachent.

M. Garth Whyte: Je dois dire que c'est le genre de discussion que nous espérions éviter car plus on s'étend au-delà des paramètres de ce programme, plus on pénètre dans le domaine de la politique.

Et vous avez raison, vous auriez probablement pu obtenir votre prêt autrement. Pour nous, ce n'est pas un moyen de garantir les prêts des banques d'une façon générale. Ce banquier aurait dû vous consentir le prêt sur la base de vos propres garanties.

C'est donc ce qui nous inquiète. Plus ce programme prend d'expansion, plus on aura tendance à l'utiliser aux dépens des pratiques de prêt ordinaires.

Ce que ne disons ne se contredit pas. Si vous lisez notre mémoire, vous verrez que, dans l'ensemble, nous partageons votre opinion, mais il n'en reste pas moins que par le passé ce programme a satisfait un besoin particulier, répondu à des besoins particuliers en matière de financement. Aujourd'hui, nous craignons qu'il perde de son utilité s'il prend trop d'expansion.

M. Jim Pankiw: C'est à partir de là que nous divergeons d'opinion. Jusque-là, nous étions d'accord. Vous continuez à dire que d'après vos membres ce programme répond à des besoins particuliers, mais en même temps, vous reconnaissez que très souvent ils ne savent même pas qu'ils ont adhéré au programme. Et pourtant, vous justifiez ce programme et son utilité pour ces besoins particuliers grâce à des sondages parmi ces gens-là qui ne savent pas qu'ils ont adhéré au programme.

M. Garth Whyte: Puis-je citer l'exemple inverse? Nous pensons que beaucoup de nos membres n'auraient pas obtenu un prêt, que vous-même n'auriez pas obtenu un prêt en l'absence de ce programme. Voilà l'argument. C'est justement ce que nous reprochons aux banques: on ne devrait pas avoir besoin de ce programme pour obtenir que des micro-prêts soient consentis. Chaque cas devrait être jugé selon son mérite. Autrement dit, en l'absence de ce programme, vous n'auriez peut-être pas obtenu le prêt. Comme on ne vous a rien dit à ce sujet, vous n'avez pas pu faire de reproche à votre banquier.

C'est un exemple qu'on retrouve dans des pays du monde entier. Lorsqu'on étudie les types de programmes les plus efficaces, on s'aperçoit que ce sont les législations sur les prêts aux petites entreprises, qui atteignent de 10 à 15 p. 100 des entreprises. Nous pouvons vous fournir ces études.

M. Jim Pankiw: Oui, mais...

La présidente: Monsieur Pankiw, M. Gray souhaite répondre.

M. Brien Gray: Une dernière observation, madame la présidente: avec ce programme, il nous est arrivé de temps en temps de tenir les cordons de la bourse, si l'on peut dire, d'être forcés de nous assurer que le programme restait dans les limites prévues, et qu'on ne s'en servait pas pour toutes sortes de choses qui n'étaient pas prévues au départ. En effet, cela coûterait très cher aux contribuables.

Mais voulez-vous savoir une chose intéressante? Il n'est pas très fréquent, cela ne se produit pratiquement jamais, qu'on attaque la méthodologie de nos recherches. Nous sommes absolument certains que nos membres comprennent à quel point le marché a besoin de petites firmes, d'entreprises jeunes. Sans cette garantie de crédit, je peux vous garantir que beaucoup d'emplois qui sont créés actuellement ne le seront plus.

C'est la raison pour laquelle nous sommes en faveur du programme. Comme nous l'avons observé dans notre mémoire, nous insistons très fort sur les allégements fiscaux. Normalement, il n'y aurait pas tout un chapitre du mémoire consacré aux avoirs propres des petites entreprises, mais c'est un problème grave au Canada, et les deux questions doivent être abordées.

M. Jim Pankiw: Il me reste une observation...

La présidente: Non, monsieur Pankiw, nous vous redonnerons la parole plus tard. Merci.

Monsieur Lastewka, je vous en prie.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Merci, madame la présidente.

Avez-vous de bonnes preuves pour confirmer que les banques utilisent la LPPE pour se débarrasser des prêts à risque?

M. Brien Gray: Nous n'avons pas de preuves absolues, mais nous demandons aux spécialistes du gouvernement d'analyser cette situation pour s'assurer que cela ne se produit pas.

M. Walt Lastewka: Mais votre organisation ne possède pas de preuves absolues?

M. Brien Gray: Non.

M. Garth Whyte: Vous n'avez qu'à considérer les chiffres relatifs à ce programme. Nous avions des soupçons, et le ministre en avait également à l'époque. Au début des années 80, il y avait en permanence de 16 à 17 000 adhérents au programme. Une fois certains critères d'admissibilité élargis, ce chiffre est monté en flèche à 68 000. À l'heure actuelle, il s'est stabilisé aux alentours de 30 000.

• 1600

Sur cette base, faut-il chercher à évaluer les causes de cette évolution des prêts de cette importance? Nous pensons que ces chiffres veulent dire quelque chose.

Cela nous préoccupe. Et soit dit en passant, c'est à cette époque-là que nous avons commencé à comparaître devant ce comité et à demander aux banques de nous donner des chiffres sur l'ensemble de leurs prêts. À l'époque, nous n'avions même pas une analyse de leurs pratiques de prêt.

M. Walt Lastewka: Vous dites que les entreprises devraient être parfaitement au courant lorsqu'elles relèvent de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. J'imagine que le seul moyen de les avertir, c'est de l'écrire en gros caractères et de demander aux gens de parafer quelque chose.

M. Brien Gray: Non. Je vais vous donner un exemple. Soit dit en passant, le comité de travail de la petite entreprise a beaucoup insisté sur ce point également. Si le gouvernement aide à subventionner et à faire connaître un programme, le consommateur averti doit être au courant pour pouvoir décider d'y adhérer ou de ne pas y adhérer sur la base d'informations solides.

Allan Riding, un chercheur indépendant engagé par Industrie Canada pour examiner le programme, a constaté que la majorité des gens qui émargeaient au programme, ignoraient qu'ils payaient une prime lorsqu'ils adhéraient à un programme de garantie offert par le gouvernement.

Si vous passez maintenant à la fin de notre mémoire, vous trouverez un formulaire de demande intitulé «Loi sur les prêts aux petites entreprises». Certes, on y trouve le logo du gouvernement du Canada, mais je ne vois rien d'autre qui dise expressément: «Ceci est un régime de garantie du gouvernement fédéral destiné à aider les petites entreprises naissantes à obtenir leur financement de départ, et vous voudrez bien par ailleurs noter que le programme en question et les frais qu'il sous-tend sont peut-être plus coûteux pour vous que ne serait le cas si vous obteniez un financement ailleurs.» Ce que nous disons, c'est qu'à tout le moins, il faudrait que cela soit mentionné, tout en haut de la feuille, et de façon très claire.

M. Walt Lastewka: J'ai remarqué, tout au bas de la page, les rubriques par lesquelles l'emprunteur reconnaît certaines choses et le prêteur aussi. Même si la mention «Loi sur les prêts à la petite entreprise» est bien là, vous nous dites pour votre part qu'il faudrait également une mention, tout en haut de la feuille, qui précise clairement ce qu'il en est.

M. Brien Gray: C'est exact. Le gouvernement canadien...

M. Walt Lastewka: Et l'emprunteur tout comme le prêteur devraient parafer pour attester qu'ils ont bien compris.

M. Brien Gray: C'est bien cela.

Il y a certaines choses qui nous tracassent—il est extrêmement difficile de le prouver, et nous en avons d'ailleurs parlé plus particulièrement en ce qui concerne les prêts consentis à des entreprises en phase de lancement—en ce sens qu'un très grand nombre de prêts qui n'auraient pas nécessairement dù être consentis en vertu du programme, l'ont toutefois effectivement été. Nous pensons donc que c'est le genre de chose qu'il faut suivre de près parce que cela doit normalement faire partie intégrante des mesures de vérification accompagnant un programme comme celui-là.

M. Walt Lastewka: Je voudrais pousser les choses un peu plus loin que mon collègue de l'opposition, qui a bien précisé que son parti n'était pas du tout favorable à ce programme et ne voulait pas non plus qu'il soit reconduit au printemps. Je dirais qu'il faudrait d'abord qu'on me prouve beaucoup mieux que le programme est vraiment nécessaire. Vous nous avez dit que pour les jeunes entreprises, celles qui débutent, il y a quelque chose qui manque. Vous nous avez dit que d'une façon ou d'une autre, nous devrions faire en sorte que les banques qui leur auraient consenti un prêt de toute façon ne se servent pas précisément de ce programme pour le faire. Il faudrait qu'on me prouve également beaucoup mieux que c'est un bon programme pour le milieu de la petite entreprise.

M. Garth Whyte: Certes. Je pense qu'il devrait y avoir certains éléments d'étalonnage implicites. Nous n'avons pas le reste du dossier ici, mais il faudrait par exemple d'abord quelque chose sur le taux de participation et également quelque chose sur le degré de reconnaissance, ce qui nous dirait si les gens connaissent le programme qui existe après tout depuis un certain temps et qui ferait que lorsque nous demandons à nos membres quelles sont les possibilités de prêts qu'ils connaissent, ils soient au courant de celle-là.

Il y en a d'autres. Il y a des études que je recommande d'ailleurs à l'attention du comité. Ne vous limitez pas à regarder ce qui se passe au Canada, voyez également la situation à l'étranger. Regardez ce que ce genre de programme coûte par rapport à, mettons, au programme de diversification de l'économie de l'Ouest ou des choses du même genre que nous ne préconisons d'ailleurs pas. Avec des programmes comme ceux-là, il en coûte beaucoup plus cher de financer une activité économique parce qu'il s'agit d'un programme de prêt garanti, et les prêts sont remboursés et le pourcentage de prêts non honorés est faible. Le coût est beaucoup plus élevé que dans le cas d'autres types de programmes de subvention.

M. Brien Gray: Je vais vous faire tenir une documentation à ce sujet. Tous les trois ans, nous conduisons une enquête très détaillée sur les banques parce qu'à notre avis, il faut environ trois ans pour que les grosses institutions financières apportent des changements vraiment notables au niveau du marché.

• 1605

Nous avons interrogé nos membres à propos de l'accès aux possibilités de financement et à toutes ces sortes de questions, et lorsqu'on interroge les toutes petites entreprises ou les entreprises naissantes, vous constatez que les pourcentages diminuent dans la mesure où rares sont celles qui parviennent à obtenir du financement et nombreuses celles qui voient leur demande refusée. Je serais heureux de vous faire part de ces renseignements. Je pense qu'il existe une corrélation directe qui prouve bien qu'à ce niveau-là, le marché présente une lacune. Dès lors qu'on passe à des niveaux un peu plus élevés, la situation s'améliore beaucoup, mais au tout premier stade de développement d'une entreprise, la question du financement pose problème.

M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.

[Français]

Madame Lalonde, s'il vous plaît.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Votre présentation est très intéressante. J'ai apporté le texte de la conférence de presse qu'avait donnée votre présidente en janvier. Elle disait qu'en 1997, 29 p. 100 des propriétaires d'entreprise disaient que la disponibilité du crédit était l'une de leurs préoccupations les plus importantes.

Je vois par ailleurs que vous éliminez d'emblée les fonds de roulement. Je sais que les fonds de roulement posent des problèmes. Je me serais cependant attendue à ce que vous suggériez qu'on garantisse les fonds de roulement avec des conseils de gestion aux entreprises.

Je vous dis cela parce que je sais que les propriétaires d'entreprise qui démarrent utilisent souvent tout leur argent personnel avant d'aller voir les bailleurs de fonds. Ils se trouvent un prêt garanti pour les locaux, mais lorsque vient le moment d'assumer le coût de fonctionnement des trois premiers mois, avant que n'entre l'argent, ils épuisent tout leur argent et font faillite petit à petit, juste parce qu'ils n'ont pas eu suffisamment de crédit. Les entreprises n'ont pas eu suffisamment de crédit pour attendre la rentabilité.

C'est une de mes préoccupations. Je suis certaine qu'avec de bons conseils de gestion et un crédit suffisant, il y aurait un taux de décès moindre. Êtes-vous d'accord sur cela? Pourquoi ne proposez-vous pas un projet-pilote à cet égard?

M. Brien Gray: Notre expérience est en bonne partie basée sur l'expérience vécue dans les autres pays du monde.

Mme Francine Lalonde: D'accord.

M. Brien Gray: Lorsqu'ils ont lancé de tels programmes, ils ont explosé. C'est une forme de financement qui est extrêmement risquée, et n'importe quel banquier dirait la même chose. C'est une forme de financement très différente des dettes à terme. En Angleterre, par exemple, les choses ont vraiment explosé. Ils ne pouvaient assumer les coûts de ce programme.

En fin de compte, la raison pour laquelle on ne soutient pas nécessairement les fonds de roulement ici, c'est que le programme fonctionne extrêmement bien maintenant et qu'on ne veut pas déranger les choses. Nous pensons que la meilleure façon d'aider les PME, débutantes ou autres, dans leurs problèmes de fonds de roulement serait de leur donner un meilleur accès aux fonds d'equity afin qu'elles aient suffisamment de capital pour continuer en affaires.

Mme Francine Lalonde: Leur donner davantage d'accès aux fonds.

M. Brien Gray: Aux fonds d'equity. Jusqu'à maintenant, la plupart des démarches des gouvernements... Par exemple, récemment, le ministre responsable des institutions financières ici, à Ottawa, a annoncé l'injection d'une autre somme d'argent pour les fonds de travail. Cela ne touche pas du tout les PME. C'est 1 p. 100 de toutes les demandes des PME. D'après nous, un peu comme M. Pankiw le disait plus tôt, si on avait pour les PME un tarif un peu moindre que l'actuel tarif, si elles pouvaient investir leurs profits dans leur entreprise sans payer d'impôts élevés, elles auraient moins de problèmes de fonds de roulement. Elles pourraient assumer ces coûts.

• 1610

Mme Francine Lalonde: Ce serait peut-être bon pour les entreprises établies, mais pour celles qui démarrent, le problème...

M. Brien Gray: Cela a toujours été un problème partout dans le monde entier. Je ne suis pas au courant de beaucoup de programmes ayant eu du succès sur ce plan dans le monde industriel.

Mme Francine Lalonde: Je reviens à ma question sur le projet-pilote. Le projet-pilote éviterait l'explosion. Je vais étudier ce que vous dites, mais je crois qu'il faut aussi des conseils de gestion et qu'il ne faut pas aller n'importe où.

Êtes-vous d'accord sur la nouvelle formule du projet de loi? Au lieu de déterminer un montant total, on parle du passif éventuel comme d'un instrument de détermination des montants disponibles. Le passif éventuel ne permet pas vraiment de savoir si tout le crédit qu'on pourrait avoir est effectivement disponible.

M. Brien Gray: Je n'ai pas de bonne réponse à vous donner, mais je vais y penser et vous écrire à ce sujet.

Mme Francine Lalonde: D'accord. L'autre question qui m'importe beaucoup, c'est celle de la trop grande facilité pour les banques à financer des prêts malheureux qu'elles ont faits. Que faire pour que les choses ne se passent pas comme cela? Je sais qu'on a déploré à maintes reprises que l'accès des PME aux prêts ne soit pas aussi grand qu'il devrait l'être, alors que d'autres entreprises profitent de ces prêts alors qu'elle ne le devraient pas.

M. Brien Gray: Je pense qu'il y a plusieurs façons de faire cela. Nous en avons essayé une ou deux.

Par exemple, si les frais du programme sont un peu plus élevés et que l'homme d'affaires est au courant du fait qu'il est dans le cadre du programme de subventions du gouvernement, il ne va pas payer la prime nécessaire pour obtenir ces fonds-là. Cela se passe surtout dans le cas d'entreprises qui ne devraient pas nécessairement bénéficier de ce programme-là.

Mme Francine Lalonde: Il faudrait obligatoirement que l'homme ou la femme d'affaires le sache de façon claire. Il ne faut pas que ce soit juste écrit en petit caractère sur un formulaire.

M. Brien Gray: Finalement, la banque va décider que c'est plus rentable pour elle de le faire en dehors du programme LPPE que dans le cadre de ce programme, parce qu'elle va elle-même récupérer l'argent.

Pour ce qui est de la façon de faire le monitoring de tous les chiffres associés à ce programme, le professeur Riding a fait une étude pour voir jusqu'à quel point les prêts consentis dans le cadre de ce programme étaient ce qu'on appelle en anglais de l'incremental lending. Si on fait régulièrement ces analyses, les banques se verront jusqu'à un certain point contraintes de faire cela à l'avenir.

La présidente: Une dernière question, s'il vous plaît, madame.

Mme Francine Lalonde: Vous dites que si des besoins se faisaient sentir au-delà de l'aide apportée aux nouvelles petites entreprises, ces besoins devraient être satisfaits en dehors du programme. Encore là, comment faire pour se concentrer sur l'aide apportée aux nouvelles petites entreprises? Dans le fond, elle est là, la difficulté. Vous dites cela lorsque vous parlez des entreprises admissibles.

M. Brien Gray: Ce n'est pas en disant...

Mme Francine Lalonde: Je ne parle pas des autres, mais je vous pose la question: comment faire pour s'assurer que l'aide soit apportée aux nouvelles petites entreprises?

M. Brien Gray: Lorsque quelqu'un fait une demande de prêt en vertu de la LPPE, on peut lui demander depuis combien d'années il est en affaires. Cela pourrait faire partie de la base de données sur l'entreprise. On peut comparer cela et les chiffres fournis par la banque même à l'extérieur de ce programme. De cette manière, on peut voir jusqu'à quel point la banque fait le financement des PME débutantes. On peut voir si elle le fait complètement dans le cadre du programme, partiellement dans le cadre du programme ou pas du tout dans le cadre du programme.

• 1615

Mme Francine Lalonde: On leur demande déjà depuis combien d'années elles existent.

M. Brien Gray: En effet, mais je ne suis pas convaincu qu'on utilise ces chiffres au point de vue analytique. Souvent, on n'a pas les chiffres nécessaires pour faire l'évaluation du programme de cette manière-là. C'est pour cette raison qu'on a demandé que cela se fasse régulièrement. Il y a aussi les compagnies qui pourraient faire des demandes répétées dans ce programme. Est-ce que, du début jusqu'à la fin, elles font leur financement dans le cadre de ce programme? Si c'est le cas, est-ce que le gouvernement est au courant et est-ce qu'il y a une façon de mesurer cela? Si elles n'ont pas besoin de ce programme, elles ne devraient pas y avoir recours.

La présidente: Merci beaucoup, madame Lalonde.

[Traduction]

Monsieur Shepherd, s'il vous plaît.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): À la rubrique des autres frais, vous signalez que les banques prélèvent d'autres frais en plus des frais d'inscription: frais d'ouverture de dossier, frais de renouvellement et ainsi de suite. Quelle est la situation actuelle?

M. Brien Gray: Ces frais n'existent pas. Il y avait dans le document de consultation une suggestion sur laquelle nous pensions devoir insister ici parce qu'à notre connaissance, elle n'a pas été reprise dans le projet de loi. Le document de consultation suggérait en effet qu'outre les frais actuels permis par la loi, les banques devraient pouvoir percevoir les frais qu'elles ont coutume d'imposer dans le cas d'une demande de prêt et d'une demande de révision de la cote de solvabilité. Pour nous, ce n'était pas une bonne idée, étant donné qu'il s'agit d'un régime de prêt garanti subventionné par le gouvernement fédéral.

M. Alex Shepherd: Vous diriez donc qu'à l'heure actuelle, le texte de loi n'est pas clair, n'est-ce pas?

M. Brien Gray: Non, ce n'est pas cela que je veux dire. C'est simplement une façon d'insister sur cela: n'y pensez même pas, n'y pensez plus. C'est la raison...

M. Garth Whyte: N'essayez pas d'imposer cela en catimini.

M. Brien Gray: En catimini, par l'entremise de la réglementation. Ne faites rien qui ait pour effet en fin de compte d'introduire cet élément dans le programme.

M. Alex Shepherd: Mais vous suggérez par contre un amendement qui dirait par exemple qu'il est bien entendu que les seuls frais qui peuvent être réclamés au titre par exemple de cette disposition sont...

M. Brien Gray: Selon mon interprétation de la loi, ce genre de chose est interdit à moins d'être expressément autorisé.

M. Alex Shepherd: Je vois. C'est donc ce que vous pensez.

M. Brien Gray: Selon mon interprétation de la loi, il existe actuellement des frais d'inscription et des frais d'ouverture de dossier, et rien de plus.

Si vous en voulez d'autres, il faut que cela soit dit clairement, soit dans la loi, soit dans les règlements. Je n'ai pas vu les règlements, de sorte que j'ignore s'il en est fait mention.

M. Alex Shepherd: Ne devrait-ce pas être l'inverse? Ne faudrait-il pas dire que le fait d'exiger des frais ou des droits serait une infraction à la loi?

M. Brien Gray: On pourrait effectivement procéder ainsi.

M. Alex Shepherd: Bien.

Une autre question est la possibilité de limiter les cautions personnelles. C'est une question qui revient régulièrement. Bien entendu, j'imagine que la plupart des cautions personnelles qui accompagnent ce genre de prêts consentis à vos membres seraient inconditionnelles au lieu de comporter un plafond monétaire.

Et pour en revenir à l'idée qu'il faudrait que les banques assument davantage la responsabilité de ces prêts et cessent de vouloir profiter de cette garantie de l'État, vous voyez là un genre de créneau qui permettrait de commencer par dire: «D'accord, selon certains paramètres, la garantie serait donc limitée»?

M. Garth Whyte: J'aimerais dire quelques mots à ce sujet à la cantonade. C'est effectivement notre préoccupation d'une certaine manière. À l'origine, les banques n'étaient pas si mauvaises que cela lorsque le programme a été lancé. D'ailleurs, c'est nous qui avions travaillé avec les banques pour que le programme soit mis en place.

Mais depuis le début, nous avons constaté une lacune. Nous avions dit: «Comment la faire disparaître? Il suffirait d'instaurer un programme qui garantirait les prêts». Cela remonte à l'époque de John Bulloch. C'est nous qui avions dit que nous devrions payer des frais plus élevés parce que de cette façon, seuls les gens qui ont vraiment besoin d'un prêt auraient gain de cause. Et c'est nous qui nous étions inquiétés de voir que le programme était plafonné à quatre milliards de dollars seulement. Personne d'autre ne s'en était soucié, aucun parti d'opposition, pas le NPD—et à l'époque, le Parti réformiste n'existait pas encore. Aucun parti n'avait quelque inquiétude que ce soit à propos du programme. C'était un programme parfaitement apolitique.

• 1620

Mais nous par contre, nous avions nos inquiétudes. Lorsque le plafond a crevé les 12 milliards de dollars, nous avons dit de grâce, surveillez un peu le programme et faites bien en sorte de savoir où vont ces prêts. Ne relevez pas le plafond des prêts à 250 000 $. N'appelez pas non plus une petite entreprise une firme qui a un chiffre d'affaires de cinq millions de dollars, parce que vous allez tout simplement détruire le programme. C'est un programme qui est censé être destiné aux toutes petites entreprises, aux entreprises naissantes, qui ne parviennent pas à trouver du capital peu importe les circonstances et qui seraient prêtes à payer plus cher pour obtenir un prêt.

Nous sommes maintenant en présence d'une loi qui ne cesse de se complexifier, et si elle devient trop prescriptive, trop complexe, le milieu bancaire ne l'utilisera pas. Les banquiers ne se démèneront pas pour l'appliquer. Et c'est un autre aspect négatif de ce programme. Idéalement, c'est censé fonctionner. Les banquiers sont censés dire «écoutez, nous ne sommes pas disposés à vous accorder ce prêt»—nous pensons d'ailleurs que c'est un autre problème—«mais il existe un programme de garantie de prêt, et si vous payez un taux plus élevé, vous pouvez y participer».

Ensuite, nous essayons de réduire au minimum les garanties personnelles, parce que nous craignons que s'il faut utiliser intégralement toutes ses garanties personnelles, on ne pourra plus trouver à emprunter ailleurs, ce qui pose la question du fonds de roulement. Nous ne voulons pas que le programme serve à gonfler le fonds de roulement; nous aimerions que les gens utilisent leur garantie personnelle pour se procurer un fonds de roulement et qu'ils utilisent des actifs pour obtenir un prêt au titre du programme. C'est ainsi que nous avons travaillé avec le milieu bancaire pour essayer de mettre au point un programme qui fonctionnait très bien.

M. Brien Gray: L'élément crucial était donc la garantie personnelle de 25 p. 100...

M. Garth Whyte: C'est cela.

M. Brien Gray: ...parce que les administrateurs du programme, le gouvernement ainsi que les banquiers voulaient que l'entrepreneur ait un intérêt personnel à l'égard de ce prêt et ne puisse pas cesser simplement ses paiements.

Il y a une chose qui s'est passée dès le début, et on y a d'ailleurs remédié: dans le cas d'une entreprise comprenant quatre associés, on pouvait avoir 25 p. 100 de chacun d'eux pour un total de 100 p. 100. C'était un peu une distorsion et nous nous en sommes débarrassés. En fait, nous avons réduit ce 100 p. 100; à un moment donné, la banque pouvait exiger une garantie personnelle de 100 p. 100. C'est maintenant limité à 25 p. 100, ce qui me semble une grande amélioration.

M. Alex Shepherd: C'est donc maintenant définitif; c'est à 25 p. 100 et vous en êtes content.

M. Garth Whyte: Eh bien, nous avons essayé de faire réduire encore ce chiffre, mais ce qui nous préoccupe maintenant, c'est que ce programme de 4 milliards de dollars en est maintenant à 16 milliards et à la hausse. De plus, nous nous tournons vers le secteur du bénévolat et d'autres projets pilotes. Nous craignons que tout cela ne prenne une ampleur imprévue, que le déficit potentiel soit plus grand et que toute l'affaire ne serve plus seulement à financer un petit créneau, un groupe restreint de gens.

M. Brien Gray: Et puis, bien que les droits à payer aient aidé à compenser les coûts du programme, il y a un décalage entre l'inscription du prêt aux livres et le début du défaut de paiement. Beaucoup de prêts qui ont été accordés au pire moment de la récession atteignent maintenant la maturité et peuvent commencer à être en défaut de paiement, et pour toutes ces raisons, il faut demeurer prudent dans l'administration de ce programme.

Mr. Garth Whyte: Je le répète, nous craignons encore que ce programme ne soit pas étroitement contrôlé. C'est difficile de comparer les expériences de 1993 et de 1995, parce que les règles ont changé. C'était censé être un programme ayant un bon rapport coût- efficacité qui ferait ses frais, mais aujourd'hui nous craignons aussi que des gens qui n'ont pas vraiment besoin de la garantie de prêt y aient accès.

M. Alex Shepherd: L'argument serait donc de rabaisser le plafond, parce que les gens que vous voulez cibler sont les emprunteurs moyens...

M. Garth Whyte: Oui, nous sommes coincés, de la même manière que tous les politiciens. Une fois que le plafond a été relevé, et nous nous y opposions, nous avons fait un sondage parmi nos membres et aujourd'hui, une faible majorité d'entre eux disent qu'il ne faut pas le rabaisser. C'est comme de mettre une grande affiche annonçant des bonbons gratuits.

M. Alex Shepherd: Mais l'argument est qu'il n'y a pas d'analyse démontrant que les gens qui obtiennent des prêts, disons, de 100 000 $ à 250 000 $, ne pourraient pas les obtenir en l'absence de la garantie.

M. Garth Whyte: Nous croyons que c'est exact.

M. Alex Shepherd: Vous croyez qu'ils peuvent les obtenir?

M. Garth Whyte: Non. Nous croyons ce que vous avez dit. L'énoncé est correct. Il n'y a pas...

M. Alex Shepherd: ...d'analyse.

M. Brien Gray: Allan Riding a fait des travaux sur l'apport différentiel du programme. Il y a trop longtemps que j'ai examiné tout cela en détail, quant au montant des prêts, aux catégories et aux chiffres sur l'apport différentiel, mais on peut se procurer tout cela à Industrie Canada. Si vous voulez le consulter, vous devriez en faire la demande.

M. Alex Shepherd: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Shepherd.

Avant de passer au deuxième tour de questions, je voudrais obtenir des précisions.

Monsieur Whyte et monsieur Gray, vous n'avez cessé de dire que vous étiez contre le fait de porter le plafond à 5 millions de dollars. Quel chiffre vous semblait raisonnable?

M. Brien Gray: À l'époque, c'était 2 millions de dollars, si je me rappelle bien...

M. Garth Whyte: Oui.

M. Brien Gray: ...et nous n'avions pas d'objection à ce qu'on maintienne ce montant à ce niveau-là, pour les raisons énoncées dans le mémoire. La grande majorité des petites entreprises du Canada ont un chiffre d'affaires très inférieur à 2 millions de dollars. Et puisqu'il s'agit d'un programme qui vise essentiellement les nouvelles entreprises qui viennent de démarrer, elles ne sautent pas d'un seul coup de l'état embryonnaire à des ventes de 2 millions et ensuite à 5 millions de dollars.

• 1625

La présidente: En me fondant sur ma propre expérience, je ne suis pas d'accord avec vous pour ce qui est de certains secteurs industriels qui ont besoin de nouvelles entreprises.

Je vais vous donner un exemple tiré de l'époque où je pratiquais le droit. Dans l'industrie des beignets, pour pouvoir rivaliser avec les grandes chaînes de beignets, il faut avoir une certaine ampleur ou une certaine visibilité, faute de quoi il est impossible de se tailler une place sur le marché, ou tout au moins de dépasser le stade de la très petite entreprise. Et pour que tout fonctionne, si je me rappelle bien les résultats de certains sondages et enquêtes, il fallait avoir trois magasins, de préférence cinq magasins, pour être visibles et survivre comme petite entreprise.

Maintenant, je considère que c'est très petit en comparaison des grandes chaînes que nous connaissons aujourd'hui. Pourtant, si l'on examine le chiffre moyen des ventes quotidiennes, on arrive très vite à plus de 2 millions de dollars de revenus, dans ce type de commerce.

Je ne comprends donc pas très bien comment vous définissez le secteur des PME.

M. Brien Gray: Vous soulevez un point très valable. Toute la question de la définition d'une petite entreprise est très problématique. C'est un dilemme qui se pose dans tous les pays. Par exemple, aux États-Unis, à un moment donné, la compagnie American Motors était considérée comme une petite entreprise parce que, dans ce secteur, elle était petite, même si elle avait accès aux marchés publics et aux sources de capitaux qui demeuraient fermés pour la plupart des petites entreprises, du moins selon la définition qu'on en donne traditionnellement. Les problèmes qu'éprouve une compagnie comme American Motors ne ressemblent en rien à ceux auxquels on songe quand on discute de petites entreprises.

En effet, on peut toujours trouver une exception à la règle. Mais en général—et le programme en question est d'application générale, il s'applique absolument à tout le monde—, si l'on examine la composition du secteur des petites entreprises au Canada, on englobe la plupart d'entre elles en fixant un plafond de 2 millions de dollars.

La présidente: Monsieur Gray, sauf le respect que je vous dois, je sais quelles entreprises de ma circonscription font partie de la FCEI, et je ne comprends pas très bien, parce que je sais quel est leur secteur d'activité et leur chiffre d'affaires, et je dois dire qu'il semble y avoir une certaine différence, du moins pour celles qui participent continuellement à vos sondages dans ma circonscription, entre leurs chiffres des ventes et ce que vous dites. Je crains donc que...

M. Garth Whyte: Je dois répondre à cela.

La présidente: ...dans ma circonscription, il y a une certaine distorsion quant à la composition prétendue de ce groupe d'entreprises. Cela me préoccupe un peu.

Monsieur Whyte.

M. Garth Whyte: Nous comptons parmi nos membres des entreprises de toutes tailles mais, je le répète—et je pense que les chefs de grandes sociétés qui sont membres en conviendraient—, le critère d'adhésion, c'est qu'il faut être un entrepreneur indépendant. On pourrait faire valoir que la firme Eaton pourrait devenir membre puisqu'elle n'est pas cotée à la bourse de Toronto. Nous accueillons donc des sociétés de tailles différentes.

Lorsque nous faisons un sondage auprès de nos très petites entreprises—et nous en comptons quelques milliers, et leur nombre va croissant... Voilà le groupe qui était censé être ciblé par ce programme.

La présidente: D'accord.

M. Garth Whyte: Le programme n'était pas censé couvrir toutes les entreprises et il n'était pas censé non plus aider une société ayant un chiffre d'affaires de 5 millions à accéder à des prêts. Voilà pourquoi, lorsque nous présentons un exposé—et nous en avons présenté au comité à plusieurs reprises—, il y a toujours un aspect qui porte sur la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Cette mesure législative n'était pas censée être une panacée pour résoudre les difficultés financières de toutes les sociétés canadiennes. Elle devait cibler un segment particulier des entreprises, à titre d'option. Il y a de nombreuses autres options que nous avons envisagées, y compris les capitaux propres pour répondre aux besoins de financement.

De là à dire que la Loi sur les prêts aux petites entreprises devrait régler tout cela... C'est ce qui nous inquiète un peu. Nous avons discuté de la possibilité de l'appliquer au secteur du bénévolat et aux grandes entreprises, ce qui revient pratiquement à transférer le programme dans l'arène politique. À ce moment-là, l'idée commence à faire son chemin que c'est un cadeau. Voilà ce qui nous inquiète. Nous craignons que le programme ne soit sacrifié parce qu'il devient trop ambitieux.

La présidente: D'accord. Je voulais également obtenir une autre précision. Si je ne m'abuse, des frais sont prévus au titre de la loi dans la formule de demande. Il semblerait que vos membres ou les personnes qui obtiennent ces prêts ne savent pas que c'est ce type de prêt qu'ils obtiennent. Et pourtant, il y a une mention très claire des droits au titre de la LPPE, le cas échéant.

En outre, si je me souviens bien de la procédure de financement de la LPPE que j'ai suivie, la banque envoie le client consulter une partie indépendante qui lui prodiguera des conseils afin qu'il sache exactement dans quoi il s'embarque. Cela fait partie de la procédure courante de financement dans une banque.

N'est-ce pas la responsabilité des personnes qui signent ou qui sont témoins de veiller à ce que le client reçoive toutes les explications voulues au sujet du prêt?

M. Brien Gray: Bien sûr, et...

La présidente: Voulez-vous dire que vos membres ne respectent pas cette procédure?

M. Brien Gray: Je ne voudrais pas me lancer dans un affrontement, mais...

La présidente: Non. Je veux simplement savoir précisément quelle est la procédure de financement.

M. Brien Gray: Très bien. Tout d'abord, vous n'avez pas besoin de nous croire sur parole. C'est la conclusion à laquelle Allan Riding est arrivé dans son ouvrage très détaillé...

La présidente: Il va comparaître.

M. Brien Gray: Vraiment? Dans ce cas, vous pouvez l'interroger lorsqu'il sera devant vous. Il a constaté qu'un grand nombre de personnes participant au programme ne savaient pas qu'elles tombaient sous le coup du programme...

La présidente: D'accord.

M. Brien Gray: ...et, dans notre perspective, s'il a constaté cela à titre de chercheur indépendant mandaté par Industrie Canada, on devrait l'écouter.

• 1630

La présidente: Très bien. Monsieur Gray, je ne conteste pas cela. Ce qui m'inquiète, c'est que vous représentez 70 000 entreprises, si je...

M. Garth Whyte: Quatre-vingt-dix mille.

La présidente: Quatre-vingt-dix mille entreprises.

Ce qui m'inquiète, c'est que les gens n'obtiennent pas l'information voulue. En tant qu'avocate, je m'intéresse aux formules, aux demandes et autres documents qui doivent être remplis pour obtenir du financement. Je souhaite que tout se fasse en bonne et due forme. D'ailleurs, je vais poser la même question à M. Riding, car je veux que tout cela figure clairement au compte rendu. Il semble que c'est un dossier dont il faut assurer le suivi...

M. Brien Gray: Absolument.

La présidente: ...pour que les gens sachent ce qu'ils font. Mais en même temps, ce que j'ai du mal à avaler c'est que lorsque je lis une formule et qu'il y a une ligne qui précise qu'il y a des frais, il y a quand même des gens qui viennent dire qu'ils ne savent pas qu'on leur a imposé des frais. Voilà ce qui m'inquiète.

M. Brien Gray: On impose des frais dans les banques constamment. Je vous pose la question suivante: chaque entrepreneur qui tombe sous le coup du programme comprend-il que les frais qui sont exigés sur cette formule diffèrent de ceux que la banque exige normalement? Je pense que c'est là où ça achoppe. Je ne sais pas si les consommateurs sont nombreux à comprendre vraiment que tels ou tels frais sont des frais bancaires, d'autres des frais imposés par l'État, etc., etc... Cela amène toute la question de l'information. En tant que consommateur, il faut être vigilant, s'informer, savoir précisément ce que l'on signe, et ainsi de suite. Quoi qu'il en soit, les signataires n'ont pas à leur côté des professionnels qui les aident à passer en revue la formule.

La présidente: Merci.

Monsieur Pankiw.

M. Jim Pankiw: Monsieur Gray, M. Lastewka vous a demandé quelle preuve vous aviez que le programme est vraiment nécessaire, et j'ai raté votre réponse. Pourriez-vous répéter ce que vous avez dit?

M. Brien Gray: Je pense qu'il voulait savoir où il y avait une lacune dans le marché. Je lui ai dit que nos sondages, que nous effectuons régulièrement—le dernier remonte à l'été—indiquent très clairement que les petites entreprises et les entreprises naissantes ont du mal à avoir accès à des capitaux d'investissement. En outre, on refuse les demandes de prêt bancaire de ces entreprises dans une proportion plus élevée que pour la plupart des autres types d'entreprises dans l'économie.

C'est la meilleure réponse que je peux vous donner.

M. Jim Pankiw: D'accord. M. Whyte a aussi dit que par le passé vous aviez constaté cette lacune, et je suppose que c'est ainsi que vous l'avez trouvée.

Ce qui me dérange, c'est que s'il y a un problème d'imposition—et vous reconnaissez qu'il y en a un—, ne serait-ce pas une bonne idée d'essayer de le régler d'abord et de voir ensuite s'il y a une lacune?

M. Garth Whyte: Pourquoi pas? D'ailleurs, ce n'est pas tout. Officiellement, nous avons dit que les primes d'assurance-emploi devraient être mises dans la balance. Nous avons également affirmé en public qu'il faudrait intervenir relativement à l'impôt personnel.

Bien sûr qu'il faut régler le problème, mais le hic c'est que certaines petites entreprises qui démarrent ne paient pas d'impôt et cherchent du financement. Or, elles ne peuvent obtenir de financement en raison d'un problème d'accès.

M. Jim Pankiw: Très juste.

M. Garth Whyte: C'est ça, le coeur du problème.

M. Jim Pankiw: Mais s'il n'y avait pas d'impôt sur les gains en capital, vous ne pouvez pas être sûrs qu'il n'y aurait pas un surplus de capital de risque disponible, n'est-ce pas?

M. Garth Whyte: Mais vous savez lorsque vous vous lancez dans une entreprise à risque... Vous avez raison, mais si vous cherchez des capitaux à risque, si vous voulez investir dans une entreprise à risque et que vous cherchez des capitaux à risque, comme nous, on exige au minimum que vous investissiez un million de dollars. Nous parlons de prêts de l'ordre de 30 000 $. Nous ne parlons pas d'une entreprise qui essaie de réunir un million de dollars en capitaux de risque.

M. Jim Pankiw: Oui, mais n'y aurait-il pas davantage d'argent qui resterait entre les mains des entrepreneurs ordinaires? N'y aurait-il pas davantage...

M. Garth Whyte: Bien sûr. Votre argument est valable.

M. Jim Pankiw: ...d'activités?

M. Garth Whyte: Mais ce sont des entreprises qui se lancent en affaires. Que ce soit les études de l'OCDE sur le marché de l'emploi, l'étude de la FCEI ou encore le rapport Franchir les obstacles: bâtir notre avenir, ou toute autre étude gouvernementale, toutes s'entendent pour dire qu'il est nécessaire d'offrir des capitaux de démarrage aux entreprises qui n'ont ni capitaux propres ni éléments d'actif. Et c'est un excellent programme en ce sens. D'ailleurs, cela a été reconnu dans le monde entier.

M. Jim Pankiw: D'accord. À mon avis, ces capitaux de démarrage pourraient se trouver auprès de diverses sources.

M. Garth Whyte: Oui: argent de l'affection, bailleurs de fonds, banques, le fisc, les économies... Au dos de notre mémoire, nous identifions les critères. Encore une fois, nous ne nous attendons pas à ce que la Loi sur les prêts aux petites entreprises résolve tous les problèmes de financement. Simplement, c'est un programme qui a une bonne feuille de route et qui sert bien son objectif.

M. Jim Pankiw: Qu'en est-il de cet effet de distorsion des marchés? Avez-vous fait enquête auprès de vos membres?

• 1635

Supposons que l'un de vos membres ouvre une boutique de trucs-machins qui affiche un chiffre d'affaires intéressant en l'espace de deux ans et que, soudainement, un concurrent se présente. Et qu'à cause de cette autre usine de trucs-machins dans le voisinage, la banque dit à votre membre qu'étant donné qu'il n'a pas tellement de capitaux propres ni d'argent pour lancer son affaire, elle refuse de le financer. Cependant, elle laissera les contribuables le subventionner, et l'un de ces contribuables, c'est le type qui a ouvert l'usine de trucs-machins il y a deux ans.

M. Garth Whyte: Vous nous renvoyez nos arguments. Vous parlez des subventions aux entreprises. Nos membres sont contre les subventions aux entreprises.

M. Jim Pankiw: Eh bien...

M. Garth Whyte: Nous craignons la concurrence déloyale des organismes sans but lucratif qui pourrait en résulter.

M. Jim Pankiw: Mais cela ne vous inquiète pas que des entreprises...

M. Garth Whyte: C'est un prêt...

M. Jim Pankiw: ...subventionnent des prêts à d'autres entreprises par l'entremise...

M. Garth Whyte: Non. Évidemment, cela n'est pas...

M. Brien Gray: Il s'agit d'un prêt remboursable pour lequel l'emprunteur paie une prime.

M. Garth Whyte: ...sans m'inquiéter. C'est un prêt remboursable à un taux plus élevé.

M. Jim Pankiw: Oui, mais il est quand même assorti d'une garantie du contribuable.

M. Garth Whyte: Bien sûr, mais dans certaines collectivités, y compris celles où l'entreprise a démarré, on obtient un prêt. On n'aurait peut-être pas pu obtenir de prêt ailleurs. Nous essayons de trouver des moyens qui permettront aux entreprises d'avoir accès au capital.

Nous ne préconisons pas de puiser dans le Trésor pour financer la concurrence, et ce n'est pas ce qui se produit. Selon notre vision des choses, quelqu'un est disposé à payer plus cher pour une garantie de prêt liée à un actif dont il fait l'acquisition. Soit dit en passant, c'est la raison pour laquelle nous ne préconisons pas que le programme s'applique au capital de roulement. À ce moment-là, on pourrait considérer qu'il s'agit de subvention ou de cadeau car il y aurait un pourcentage élevé de défaut de paiement. Mais le pourcentage de créances impayées est peu élevé dans le programme. La majorité des prêts sont remboursés.

M. Jim Pankiw: Mais qu'en est-il de cette prime? Vous avez suggéré qu'elle se justifiait pour que seules les personnes qui en ont besoin puissent avoir accès à ces capitaux. Nous sommes donc en présence d'une entreprise qui, à première vue, ne trouve aucun bâilleurs de fonds car ces derniers estiment qu'elle présente un risque trop élevé. Et ils ont fondé partiellement leur décision concernant la viabilité de l'entreprise sur le taux d'intérêt courant. Vous allez donc prendre cette entreprise, dont la viabilité est douteuse au départ, y imposer une surtaxe, puis une prime et un taux d'intérêt plus élevé. Et c'est le gouvernement qui met cela en oeuvre et qui impose cela à cette entreprise...

M. Brien Gray: L'un des problèmes dans l'économie canadienne—les choses changent quelque peu maintenant, mais cela a été le cas depuis des années—c'est que fondamentalement, les banques n'établissent pas un prix en fonction du risque. Dans un marché idéal, la banque pourrait dire aux entreprises émergentes: «D'accord, vous êtes une entreprise qui démarre. Au lieu d'exiger le taux préférentiel plus 2 ou 3 p. 100, je vais exiger le taux préférentiel plus 4 p. 100, mais vous pouvez avoir l'argent.»

Étant donné que les banques n'établissent pas le prix de leurs prêts en fonction du risque—cela s'est fait très peu jusqu'à récemment—et qu'elles n'établissent pas leur propre profil de risque, il fallait trouver un mécanisme qui encouragerait l'injection de fonds dans les petites entreprises. D'une certaine façon, ce programme met l'argent entre les mains des jeunes entrepreneurs car il absorbe le risque dont s'inquiètent les banques. Elles ont une garantie. Leur prix n'est pas fonction du risque, mais elles obtiennent une garantie de l'État qui atténue leur crainte au sujet du risque.

M. Jim Pankiw: Mais elles ne peuvent pas établir de prix en fonction du risque à cause de la réglementation gouvernementale. N'est-ce pas le cas?

M. Brien Gray: Non, ce n'est pas le cas.

M. Jim Pankiw: Rien n'empêche une banque de...?

M. Brien Gray: Rien.

M. Garth Whyte: Et nous craignons qu'il y ait un parti pris contre les petits secteurs, surtout les micro-entreprises. C'est pourquoi, dans notre exposé, nous indiquons également que cela ne devrait pas servir de remplacement, mais simplement de complément.

Ici encore, ce programme exige essentiellement une très bonne évaluation et un très bon contrôle pour déterminer ce qui fonctionne. Et nous ne croyons pas que les gens devraient dépendre éternellement de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. C'est une mesure qui leur permet de démarrer et ils devraient ensuite pouvoir voler de leurs propres ailes. C'est pourquoi les montants de 5 millions de dollars et de 250 000 $ nous inquiètent. Si nous suivons la situation et constatons que ce montant est renouvelé année après année, cela devient alors un sujet de préoccupation.

M. Brien Gray: Permettez-moi d'apporter des précisions en ce qui concerne l'établissement du prix en fonction du risque. Je pense qu'il est approprié qu'une banque établisse des prix en fonction du risque lorsque le risque existe vraiment, mais il ne faudrait pas que cela soit interprété comme une permission générale accordée aux banques d'ajouter des points de risque à de nombreux prêts auxquels aucun risque ne se rattache vraiment. Autrement dit, il ne faut pas que les banques se croient autorisées à en profiter pour aller exploiter le marché. Lorsqu'un risque réel existe, ce genre d'activité pourrait être exercé jusqu'à un certain point.

• 1640

La présidente: Merci beaucoup. Madame Jennings, s'il vous plaît.

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci.

Je n'ai pas pu assister à la première partie de la réunion aujourd'hui et si on vous a déjà posé cette question, je vous demanderais de bien vouloir y répondre à nouveau. Je suis préoccupée par le point que vous avez soulevé selon lequel jusqu'à 16 p. 100 du total des prêts à terme à l'intention de la petite entreprise a été financé en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises depuis avril 1993. C'est ce que vous avez indiqué dans une lettre que vous avez adressée au ministre Manley en 1994.

Tout d'abord, d'après vos chiffres, ce pourcentage est-il toujours le même?

M. Brien Gray: Non. Il n'est plus le même. Il a diminué depuis, surtout par suite des changements qui ont permis de mieux contrôler la loi.

Mme Marlene Jennings: Et quel est le pourcentage à l'heure actuelle?

M. Brien Gray: Je ne me souviens pas du nombre avec précision, mais alors que le nombre le plus élevé était de 68 000 prêts, je crois qu'il est maintenant de 30 000 à 40 000.

M. Garth Whyte: Trente mille.

M. Brien Gray: Je vous remercie.

Mme Marlene Jennings: Mais ces prêts consentis en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises représenteraient quel pourcentage de ce total?

M. Brien Gray: Je n'ai pas de chiffre pour vous, mais je suis sûr...

Mme Marlene Jennings: Donc, vous ne savez pas si ce pourcentage est toujours de 16 p. 100.

M. Brien Gray: Je sais qu'il n'est pas de 16 p. 100.

Mme Marlene Jennings: Très bien.

M. Garth Whyte: C'était à l'époque le pourcentage maximum.

Mme Marlene Jennings: Donc, ce pourcentage demeure supérieur à la moyenne internationale.

M. Brien Gray: Oui, la moyenne internationale...

Mme Marlene Jennings: ...est d'environ 5 p. 100.

M. Brien Gray: Oui, d'environ 5 p. 100, et tout ce qui va au- delà doit être à mon avis surveillé. Il faut comprendre quelles en sont les raisons.

Mme Marlene Jennings: Très bien.

L'autre question que j'ai à vous poser est la suivante: Est-ce que vous ou quelqu'un d'autre, que ce soit le gouvernement ou d'autres parties, surveillez en fait la situation pour déterminer si les prêts consentis en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises auraient pu être consentis en dehors du programme? Parce qu'il y a aussi cette question de saut de colonne qui me préoccupe également. Si les banques, dont le rôle est de prêter de l'argent, profitent d'un programme gouvernemental qui réduit leur risque et transfère ce risque au gouvernement, en fait elles transfèrent ce risque au contribuable canadien moyen. A-t-on fait des études sur cet aspect particulier des prêts consentis en vertu de la loi?

M. Brien Gray: Je mentionnais à Mme Lalonde récemment que je crois qu'il existe certaines mesures qui ont été instaurées à cet égard. L'une d'entre elles c'est que le coût des programmes est plus élevé, donc il y a moins d'activités. Pour ce qui est de prendre une décision d'affaire éclairée, si vous savez que vous êtes visé par le programme—et cela soulève la question de transparence—, que vous constatez la différence de coût et que vous pensez pouvoir financer ce prêt en dehors du programme, vous choisirez de ne pas en faire partie. Mais pour ce faire, il faut que vous sachiez que vous êtes admissible à ce programme et cela revient à ce que la présidente a dit à propos des consommateurs non informés qui doivent s'assurer de connaître leurs droits et obligations en vertu de la loi.

C'est une autre façon de procéder. Cela peut poser problème et je pense qu'il incombe au ministère d'essayer de suivre la situation, étant donné que le programme est basé sur l'octroi de prêts par un agent de prêts à l'aide des méthodes bancaires courantes. Mais lorsqu'on décide que le risque est tel qu'un prêt ne peut pas être consenti, je n'ai pas de réponse toute prête pour vous.

Je sais par contre que Riding a tâché d'établir une méthodologie pour comprendre et déterminer l'apport différentiel en vertu du programme. S'il prenait des mesures strictes de l'apport différentiel, si je me souviens bien, l'apport différentiel en vertu du programme était d'environ 54 p. 100. Puis il a fait d'autres hypothèses qui étaient relativement généreuses, qui ont porté cet apport à jusqu'à 80 p. 100 je crois, mais il s'agissait d'hypothèses assez généreuses en matière d'apport différentiel.

Si on prend un pourcentage qui se situe à mi-chemin entre 50 p. 100 et 80 p. 100, cela représente encore à mon avis un trop grand nombre de prêts en dehors du programme. J'estime important que l'on applique les règles prévues par la loi. Mais cela fait partie du rôle d'Industrie Canada.

M. Garth Whyte: Industrie Canada devrait surveiller la situation. Nous vous pressons de le faire. Et si vous avez l'intention de mettre sur pied des projets pilotes, il faut en établir les critères immédiatement. Il faut que ces projets soient mis sur pied de façon à ce que vous puissiez déterminer s'il s'agit d'un projet pilote efficace ou non. Ne prenez pas en considération le taux de participation ou le nombre d'entreprises auxquelles des prêts ont été consentis ou la taille du programme totale. Examinez le nombre d'entreprises que ce programme a aidées et si ces entreprises ont réussi par la suite à se débrouiller par leurs propres moyens. C'est ce que nous devons faire.

Et c'est ce qui nous préoccupe. Cela signifie en fait de surveiller les résultats des prêts. Je suppose qu'Industrie Canada attend; il y a eu un décalage et le ministère attend un an ou deux avant d'examiner la situation.

Mais c'est ce qui nous préoccupe. Car si vous continuez d'étoffer le programme sans réellement en évaluer le fonctionnement et que l'on abuse de ce programme... C'est ce qui nous préoccupe. Nous sommes d'accord avec vous sur beaucoup des choses que vous avez dites.

Mme Marlene Jennings: J'ai un dernier commentaire, et j'espère que vous l'accepterez avec le même esprit de générosité qui le motive.

• 1645

Je vous remercie de la documentation et des bulletins que vous m'avez envoyés. Il y a seulement un problème. J'ai été élue en juin, lors des dernières élections générales. Chaque fois que vous m'envoyez des bulletins censés venir de ma circonscription, au moins la moitié d'entre eux proviennent de l'extérieur de ma circonscription. Cela me préoccupe...

M. Garth Whyte: Bien sûr.

Mme Marlene Jennings: ...parce que s'il existe une telle anomalie en ce qui concerne vos envois postaux, alors...

M. Garth Whyte: Pourrais-je répondre à cette question?

Mme Marlene Jennings: Oui.

M. Garth Whyte: Je suis celui qui envoie à vous tous ces lettres. Et en passant, si vous me répondez, nous utilisons votre réponse et nous la distribuons, et beaucoup d'entre vous le savent.

On nous pose cette question constamment. Ces gens vivent dans votre circonscription. Leurs entreprises ne se trouvent pas dans votre circonscription mais ces personnes habitent dans votre circonscription. Et j'encouragerais tous les députés à tâcher de comprendre cela. Au haut de la lettre, chaque fois, nous disons que ces personnes vivent dans votre circonscription. J'aimerais que vous le compreniez. Elles votent dans votre circonscription. Nous préférons les envoyer là qu'avoir des gens qui ne sont pas des électeurs et qui travaillent à l'extérieur de votre circonscription...

Mme Marlene Jennings: Eh bien, je suis heureuse d'avoir posé la question. Je l'ai fait si gentiment.

M. Brien Gray: Je sais. On nous pose souvent cette question.

Des voix: Oh, oh.

La présidente: Merci beaucoup, Mme Jennings.

[Français]

Madame Lalonde, avez-vous une autre question?

Mme Francine Lalonde: J'en ai plus d'une. Je vais essayer d'être concise pour avoir des réponses à toutes.

J'ai exprimé une préoccupation quant à une vision macroéconomique des garanties de prêts plutôt qu'une vision uniquement comptable. La création et le maintien des PME ont non seulement un effet comptable mais aussi un effet économique. Si on considère cela uniquement d'une façon comptable, on peut se tromper. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.

Deuxièmement, vous parlez des effets de la fusion des banques sur l'accessibilité des prêts. J'aimerais que vous en parliez pour le Québec, parce qu'on peut penser que le Québec est moins touché. Cependant, j'ai déjà entendu des éléments à l'effet contraire.

Il y a une chose dont vous ne parlez pas et dont vous parliez dans le sondage, et c'est l'accroissement de l'exigence des garanties collatérales pour les prêts. La limite est fixée à 25 p. 100, mais les exigences peuvent quand même croître quant à la qualité de ces garanties-là.

Finalement, ne pensez-vous pas que le projet-pilote sur l'économie sociale pourrait être remplacé par le réinvestissement communautaire des banques?

M. Brien Gray: Je ne sais pas par quoi commencer.

D'abord, pour ce qui est de la fusion des banques, il est évident que plusieurs pensent que c'est un problème qui existe plus à l'extérieur du Québec qu'à l'intérieur du Québec, parce qu'au Québec, on a deux institutions financières énormes, le Mouvement des caisses Desjardins et la Banque Nationale, qui est en réalité une banque régionale.

Chose intéressante, au cours des années, on a constaté qu'au Québec, il y avait plus de participants sur le marché, plus de concurrence et plus de satisfaction chez nos membres. C'est évident: plus de joueurs, plus de concurrence et plus de satisfaction. Mais il y a un autre élément qui nous préoccupe. Les caisses populaires sont extrêmement efficaces pour les petites entreprises de zéro à cinq ou dix employés. Mais lorsqu'on dépasse un certain niveau de croissance, ce ne sont plus des prêts personnels ou des hypothèques personnelles qui sont rattachés à l'entreprise; les transactions financières deviennent un peu plus complexes. C'est pour cette raison qu'on a certaines craintes. À ce moment-là, on doit dépendre davantage des banques à charte. Si on fait la fusion des banques, le problème devient plus important qu'on ne l'avait perçu au début, au Québec ou ailleurs.

En Ontario, on a d'autres craintes qui sont rattachées au fait qu'après les banques à charte, il n'existe pas de deuxième palier. Si on élimine deux banques à charte en Ontario, on aura le choix entre seulement trois banques. On a des fiducies et certaines caisses populaires, mais elles ne sont pas établies en Ontario de la même façon qu'au Québec ou même dans l'Ouest du Canada.

• 1650

Les quatre banques à charte, en Ontario, dominent à peu près 75 p. 100 du marché. Si on en éliminait deux, on aurait une concentration très importante.

Je ne me souviens plus des autres questions.

Mme Francine Lalonde: L'exigence de l'accroissement des garanties collatérales.

M. Brien Gray: Dans le cadre de ce programme-ci?

Mme Francine Lalonde: Oui.

M. Brien Gray: Eh bien, vous devrez m'expliquer cela davantage.

Mme Francine Lalonde: C'était un résultat de votre enquête. Étant donné que dans le programme, on peut exiger des garanties de 25 p. 100, je vous demandais si vous aviez des suggestions ou des propositions à cet égard.

M. Brien Gray: Je pense que pour le programme, les garanties actuelles sont bonnes. Même si on souhaitait l'élimination de cette forme de collatéral, le gouvernement et les banques mêmes seraient beaucoup plus à l'aise s'il y avait au moins un sens d'appartenance de la part de l'entrepreneur.

[Traduction]

M. Garth Whyte: Si vous me le permettez, j'ajouterai qu'il existe un équilibre précaire entre les responsabilités du gouvernement, des banques et des particuliers et entre les banques et les particuliers. Il ne faut pas que cela soit vu comme quelque chose de gratuit; il faut que chacun assume ses responsabilités.

On aime dire que les banques devraient tout faire, mais il faut que chacun rende des comptes, pas seulement les banques. Voilà pourquoi il faut exiger une garantie personnelle.

Un des défis que nous avons dû relever lorsque nous avons tenté d'adapter ce programme a été de nous assurer qu'il y aurait encore une garantie personnelle pour l'accès à des prêts de fonds de roulement ou à d'autres prêts pour lesquels la LPPE sert de garantie. C'est ce qui était bien dans ce programme lorsque nous l'avons conçu, en 1993; nous avons travaillé très étroitement avec les banques pour trouver cet équilibre très difficile à atteindre et je crois que nous avons assez bien réussi.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Parlons de la vision macroéconomique de la loi par rapport à la vision comptable. Je suis d'accord sur la vision comptable, mais il faut aussi avoir une vision macroéconomique. On se dirige peut-être vers un ralentissement économique.

M. Brien Gray: On ne devrait pas envisager ce programme comme une panacée pour tous les problèmes qui existent sur le marché. Si je me lance en affaires, je vais faire face à certains risques. Nous avons toutes sortes d'autres façons d'améliorer la situation des PME, notamment dans l'environnement même du marché. On se préoccupe de la dette, du déficit et de l'impact que cela pourrait avoir à l'avenir si on ne continue pas la bataille.

Quant au niveau de taxation, il est toujours trop élevé d'après nos membres, surtout dans le cas des taxes régressives, c'est-à-dire les taxes sur la masse salariale et les taxes municipales, ces taxes qu'on doit payer même si on n'est pas rentable.

Finalement, on a peut-être des divergences d'opinion sur la LPPE, mais pas sur le fait qu'on devrait créer des incitatifs pour que les Canadiens comme vous et moi investissent dans une PME plutôt que dans IBM, qui n'a pas besoin de mon argent. Il faut plutôt investir dans la petite entreprise locale. J'ai beaucoup confiance dans le petit entrepreneur local, je le connais assez bien et je peux le surveiller bien mieux de jour en jour que je ne puis le faire dans le cas d'IBM. Avec les REÉR, je peux investir chez IBM, mais pas dans l'entreprise locale.

Donc, il y a toutes sortes d'aspects macroéconomiques qu'on pourrait créer en dehors de ce programme qui vise surtout les entreprises débutantes.

[Traduction]

M. Garth Whyte: J'aimerais aussi répondre brièvement à votre question sur ce programme. Nous avons mené une étude intitulée des roses parmi les épines: pourquoi les entreprises pendant les récessions ont de meilleures chances de survie, il y a longtemps, et nous avons alors constaté que les entreprises mises sur pied pendant une récession avaient de meilleures chances de survie que celles créées pendant les périodes de prospérité. J'imagine qu'elles étaient plus prudentes. Mais on a aussi constaté que les banques ont tendance à resserrer l'octroi de prêts pendant les récessions.

• 1655

Ces «roses parmi les épines», ces entreprises qui se sont bien préparées mais ont du mal dans certaines localités n'ont aucune chance sans ce genre de programme qui les aident à obtenir du financement. Ayant vécu à Regina et à Winnipeg pendant la sécheresse des années 80 et sachant à quel point il était difficile d'obtenir des fonds, je sais que ce genre de programme peut aider les entreprises.

Par ailleurs, et c'est très important, cela se répercute sur la création d'emploi; sur toute période de cinq ans, 50 p. 100 des créations nettes d'emplois se font dans des entreprises qui n'existaient pas auparavant. Les nouvelles entreprises sont celles qui créent le plus de nouveaux emplois. Ce programme les aide, surtout pendant les récessions.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Diamonds in the Rough. Pouvez-vous m'en envoyer une copie?

M. Brien Gray: Oui, oui.

Mme Francine Lalonde: Finalement, c'est le réinvestissement communautaire pour l'économie sociale.

[Traduction]

M. Garth Whyte: Voulez-vous répondre?

M. Brien Gray: Non, allez-y.

Des voix: Oh, oh.

M. Garth Whyte: Nous aimons savoir où va l'investissement et quelle partie de cette somme est investie dans la collectivité, mais, encore une fois, il peut être coûteux d'aller dans le détail. Certains préfèrent que cela ne se sache pas. À Elbow, en Saskatchewan—je connais cette municipalité—il y a peu d'entrepreneurs et ces entrepreneurs ne veulent peut-être pas qu'on sache combien d'argent ils ont dû emprunter. Toutefois, nous estimons qu'il est bon de connaître l'envergure des prêts accordés dans chaque province et chaque région. Cela nous paraît utile. Nous avons sondé nos membres à ce sujet et c'est une idée qui...

M. Brien Gray: Nous leur avons posé la question. Je suis désolé, mais je n'ai pas les détails avec moi. Je ferai parvenir au comité un exemplaire des résultats de notre sondage sur le programme de réinvestissement communautaire.

La présidente: Merci beaucoup.

Merci, madame Lalonde.

M. Lastewka, je crois que vous avez des questions.

M. Walt Lastewka: M. Gray et M. Whyte ont déjà répondu à certaines d'entre elles au sujet de la question qu'a posée M. Pankiw tout à l'heure.

Pour toute la durée du programme, soit plus de 37 ans, 94 p. 100 des prêts ont été remboursés. Et au cours des cinq à dix dernières années, ce pourcentage serait encore plus élevé.

Je crois savoir, d'après les données dont je dispose, que 40 p. 100 des prêts accordés aux termes de la LPPE, de 1987 jusqu'à la dernière année où des données ont été recueillies, servent au démarrage. Je crois que vous avez eu raison de faire remarquer qu'il faut s'assurer que les entreprises savent bien—passons sur les raisons qui font qu'elles ne le savent pas, il y en a des milliers—qu'elles doivent assumer leur part de responsabilité. Vous avez eu raison de le souligner.

J'aimerais revenir au sujet qu'a abordé Mme Lalonde. Nous parlions alors des prêts qu'on octroie aux entreprises qui ne peuvent obtenir de prêts ailleurs. Il y a aussi des entreprises à risque—selon le nombre d'entreprises à risque qu'on est prêt à financer—qui auraient néanmoins pu obtenir un prêt d'une banque ou d'un établissement de crédit sans qu'il ait été nécessaire d'invoquer la LPPE. Je crois que nous tentons tous de limiter ce groupe d'entreprises, sachant qu'il y a des chevauchements, sachant qu'il y a une zone grise.

Pourriez-vous nous dire comment nous pourrions limiter ce groupe, de sorte qu'il y ait davantage d'entreprises qui n'ont pu obtenir de fonds de démarrage ailleurs qui puissent obtenir un prêt aux termes de la LPPE?

M. Garth Whyte: Nous n'avons pas réponse à tout—et je m'attends à ce que Brien intervienne à tout moment—mais je vous ferai une suggestion: ne tentez pas de financer davantage d'entreprises. N'élargissez pas la portée du programme.

Tentons d'abord d'obtenir des chiffres réels sur le programme actuel. Une analyse de l'application de la Loi sur les prêts aux petites entreprises soulève déjà des questions. Ainsi, en matière de crédit-bail, il serait bon de bien évaluer notre projet pilote pour voir ses résultats, car il aura pour conséquence d'élargir le programme. Étudions aussi le secteur bénévole mais de façon distincte, car plus on inclura d'intervenants, plus il sera difficile de se limiter.

• 1700

Les deux domaines qui nous préoccupent le plus sont la taille de l'entreprise et la taille du prêt. Voilà pourquoi nous nous inquiétons de ce qu'on envisage d'accorder un prêt maximal de 250 000 $. Une fois que c'est fait, il est difficile de revenir en arrière. À une époque, les prêts étaient en moyenne de 30 000 $; maintenant, le prêt moyen est plutôt de 60 000 à 70 000 $.

Par conséquent, nous vous demandons premièrement de ne pas élargir le programme et, deuxièmement, de bien évaluer ce qui existe déjà.

M. Walt Lastewka: Excusez-moi. Permettez-moi de vous interrompre. Tenons-nous-en à un sujet...

M. Garth Whyte: Je suis désolé.

M. Walt Lastewka: ...car cette discussion m'apparaît très intéressante.

Le programme s'adressait aux entreprises dont le revenu était inférieur à 2 millions de dollars dans les années 80, dont le revenu était inférieur à 5 millions de dollars à partir de 1993, et le prêt maximal pouvant être octroyé est passé de 100 000 $ à 250 000 $, n'est-ce pas?

M. Garth Whyte: Oui, je crois.

M. Walt Lastewka: Et ce, en six ans.

Mais, avec le temps, les 5 millions de dollars ou 250 000 $, ça ne veut plus dire la même chose. Vous nous demandez de ne pas changer cela, et je comprends cela, je comprends votre raisonnement.

Compte tenu de la situation actuelle, expliquez-moi comment nous pourrions réduire le risque et améliorer le programmes des prêts aux petites entreprises afin qu'il serve vraiment aux fins pour lesquelles il a été conçu.

M. Garth Whyte: Je vais céder la parole à Brien dans un moment, mais on pourrait, dans un premier temps, réunir tous les intervenants. Parlez-en aux banquiers directement, à ceux qui sont sur le terrain et demandez-leur de vous décrire leurs expériences. On pourrait aussi parler aux entrepreneurs qui se sont prévalus du programme. On pourrait refaire le même genre d'étude. On pourrait revoir celle qui a été faite et recenser les questions qui sont restées sans réponse. Spontanément, je n'ai pas de meilleure réponse à vous donner.

M. Brien Gray: Je pense que les forces du marché commencent déjà à se faire sentir.

Au cours des dernières années, les banques ont poussé des hauts cris parce que la Wells Fargo voulait venir au Canada. Examinons cela. Il y a présélection; on ne peut pas s'adresser à la Wells Fargo à moins de recevoir une lettre. Et ils veulent avoir certains chiffres au sujet de votre entreprise: tant d'années d'existence, tant d'années de rentabilité. Si j'ai bonne mémoire, il est possible d'obtenir un prêt jusqu'à concurrence de 75 000 $, à un taux préférentiel majoré de 8 ou 9 p. 100.

Une voix: Huit ou neuf pour cent?

M. Brien Gray: Oui.

Or, il y a une grande différence entre l'aversion générale au risque suscité chez les banques par le passé quand le taux préférentiel était majoré de deux pour cent, et leur réaction éventuelle face à un taux préférentiel majoré de huit ou neuf pour cent, de sorte que lorsque je parle à Charlie Coffey ou à des représentants d'autres banques et qu'ils se plaignent de la venue de la Wells Fargo... Tout d'abord, c'est à cause de la Wells Fargo qu'ils ont commencé a consentir ce genre de prêts, ce qu'ils n'auraient pas fait autrement, mais s'ils doivent perdre cette clientèle, ils méritent de la perdre à ce prix. Ils le méritent vraiment.

Si une entreprise est rentable et ce, depuis de nombreuses années, et que vous leur demandez de payer un tel taux, si vous perdez cette entreprise comme client, c'est que vous l'avez mérité.

Or, si le secteur des banques commence à se fonder sur la compétitivité et la concurrence, alors je présume que les prix seront davantage établis en fonction du risque lorsqu'il y a vraiment un risque.

Par exemple, bien des prêts qui relèvent de la Loi sur les prêts aux petites entreprises concernent des entreprises comme les restaurants, qui payent souvent des loyers élevés, etc. On fait face à des risques plus élevés si on prête à ces restaurants. Le secteur des banques dit donc: «Nous ne sommes pas intéressés à vous consentir un prêt pour quoi que ce soit au-dessus du taux préférentiel majoré de deux pour cent. Nous fermons en quelque sorte le livre sur tout ce qui dépasse le taux préférentiel majoré de deux pour cent.»

Il pourrait cependant y avoir un banquier qui ait un peu plus l'esprit d'entreprise et qui dise: «C'est plus risqué de vous prêter de l'argent. Par le passé, cela a été le cas pour votre secteur, et en se fondant sur le critère du risque réel, nous allons vous demander le taux préférentiel majoré de quatre ou de cinq pour cent.» J'imagine que l'entrepreneur répondrait: «Oui, je vais payer ce taux, car je veux être en affaire et j'ai confiance dans mes prévisions et dans ma capacité de faire concurrence.»

Cela commence à changer un peu à l'heure actuelle, mais par le passé, au-delà du taux préférentiel majoré de deux ou de 2,5 p. 100, les grandes banques à charte du Canada avaient vraiment une aversion pour le risque. Donc, je pense que cela répond en partie à votre question: si de nouveaux concurrents établissent des taux en fonction du risque, ce que j'appellerais... en termes d'affaires traditionnelles, on appelle cela une analyse de sensibilité, et c'est ce dont vous parlez.

Donc on l'applique à ce cas-ci. Ensuite, si on obtient le prix approprié à l'extérieur du programme, le programme sera vraiment établi en fonction de ceux qui en ont vraiment besoin et qui ne peuvent obtenir de prêts autrement.

M. Garth Whyte: Je viens tout juste de penser à autre chose également. Nous pourrions faire un sondage auprès des utilisateurs et leur demander s'ils auraient pu obtenir un prêt. Ou avaient-ils besoin d'un prêt en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises? Nous pourrions faire un sondage auprès des utilisateurs—ce que nous avons fait par le passé—tout simplement pour connaître leurs antécédents à ce sujet.

• 1705

M. Brien Gray: Je voudrais encore une fois insister sur cet aspect, car je constate que cela se produit trop souvent sur le marché lorsqu'il y a des intervenants qui dominent: nos membres diraient que les taux devraient être davantage établis en fonction du risque, mais ça ne devrait pas être une permission générale pour augmenter les taux lorsqu'ils n'ont pas besoin d'être augmentés.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.

Dans votre mémoire, messieurs Gray et Whyte, vous dites que le prêt maximum devra être de 150 000 $, si je me souviens bien. À un moment donné, vous ne vouliez pas que le maximum soit augmenté à 250 000 $. On parle d'une garantie de 25 p. 100—et puisque vous considérez que les prêts de 150 000 $ et plus ne visent pas les entreprises naissantes, mais plutôt les entreprises plus grandes—je me demande si on pourrait régler le problème en exigeant une garantie qui dépasse les 150 000 $, ou est-ce qu'on serait alors dans le domaine du fonds de roulement, quelque chose que vous préférez éviter?

M. Brien Gray: Ma réponse est double. La plupart de nos membres préconisent un maximum de 250 000 $, et non de 150 000 $. Donc, même si nous avons pris cette position par le passé, dernièrement nos membres préfèrent le chiffre de 250 000 $.

Et vous avez raison de dire qu'avec 25 p. 100, les entreprises ont une plus grande marge de manoeuvre, et donc si elles réussissent à obtenir un prêt de fonds de roulement, elles ont quelque chose à offrir comme garantie. Si elles utilisent tous les fonds pour faire des améliorations locatives, par exemple, elles n'auraient pas de garantie à offrir.

La présidente: Au nom des membres du comité, je tiens à vous remercier d'avoir comparu devant nous aujourd'hui. Nous avons beaucoup appris de la discussion. Je sais que nous sommes tous reconnaissants d'avoir la possibilité de vous poser des questions. Nous vous remercions particulièrement de votre mémoire très intéressant.

La séance est levée. Je rappelle aux membres du comité que demain nous allons examiner les statistiques de crédit avec les banques, plutôt que la LPPE.