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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 28 mars 2000

• 0937

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Mesdames et messieurs, la séance est ouverte. Nous avons du pain sur la planche ce matin. Nous avons le plaisir d'accueillir MM. Sinclair, McNee, Forsythe et Horak.

Comment pensez-vous procéder? L'un d'entre vous va-t-il faire une déclaration et laisser les autres répondre aux questions? Je vais vous demander de faire votre déclaration liminaire.

Alors, mesdames et messieurs, puisqu'il y a quorum, je vais donner la... attendez, il y a maintenant quorum. Mme Debien me permet encore une fois de sauver la face. Avant que nous entendions la déclaration des témoins...

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): [Note de la rédaction: Inaudible].

Le président: Et c'était bien? Le sénateur n'était pas trop difficile?

[Traduction]

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): J'ai entendu dire que le premier ministre allait nommer de nouveaux sénateurs. Bob, allez-vous passer au Sénat?

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Non, pas encore.

Le président: Chers collègues, il y a quorum. Diane Marleau, toutefois, n'est pas encore parmi nous pour présenter sa motion. Nous devrons réserver ce point à l'ordre du jour.

Quelqu'un parmi vous a-t-il vu cette motion?

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): La motion de Diane Marleau?

Le président: Oui, au sujet de la Croix-Rouge. Un bon nombre d'entre vous étaient là quand on a soulevé cette question. Mme Debien était présente. Écoutez, nous étions tous d'accord. Quelqu'un d'autre peut-il présenter cette motion et nous l'adopterons?

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Pouvons-nous voir cette motion?

M. Deepak Obhrai: Quelqu'un pourrait-il en faire la lecture afin que nous sachions de quoi il est question?

Le président: En fait, il en a été question au cours d'une séance du comité. Je ne pense pas qu'il y avait des membres du Parti réformiste, mais je sais qu'il y avait des Bloquistes.

M. Deepak Obhrai: Des membres de l'Alliance canadienne.

Le président: De l'Alliance canadienne, excusez-moi.

Une voix: Il s'agissait du Parti réformiste alors.

• 0940

Le président: On parlait alors du Parti réformiste. Accordez- moi un moment. L'actuelle Alliance canadienne, qu'on appelait alors le Parti réformiste, n'était pas représentée, n'est-ce pas?

En fait, nous avons tenu une séance au sujet de la Croix- Rouge. Étant donné la situation juridique dans laquelle elle se trouve au Canada, la Croix-Rouge n'est pas en mesure de respecter ses obligations financières envers l'organisation internationale dont elle fait partie. Donc, le Canada est un des pays incapables d'honorer ses engagements.

M. Keith Martin: Je sais de quoi il s'agit. Nous allons la présenter.

Le président: Très bien. Nous recommandons donc que le gouvernement du Canada envisage l'opportunité d'aider la Société canadienne de la Croix-Rouge à remplir ses obligations internationales prévues par la loi? Êtes-vous d'accord, mesdames et messieurs, membres du comité?

(La motion est adoptée—Voir Procès-verbaux)

Le président: Diane, nous venons d'adopter votre motion sur la Croix-Rouge.

L'honorable Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Merci.

Le président: Mesdames et messieurs, la deuxième résolution a trait à la Birmanie, vous l'avez sous les yeux. Nous l'avons approuvée en principe, mais il faut y apporter de légers changements terminologiques pour bien décrire la situation. Il nous faut reconnaître un comité. Nous ne pourrions pas reconnaître des gouvernements, par exemple. Alors, puisqu'il en est ainsi, avec l'aide du ministère, on a apporté le changement.

Je demande votre approbation. Approuvons la résolution et réglons cette question de la Birmanie. Tout le monde était d'accord sur cette résolution déjà; tout ce que nous faisons maintenant c'est d'approuver les changements terminologiques.

Des voix: Adopté.

[Français]

Le président: Madame Debien.

Mme Maud Debien: Monsieur le président, je n'ai la résolution qu'en anglais. J'aurais aimé en prendre connaissance. On me l'a probablement remise en français, mais...

Le président: Elle est dans le deux langues. C'est celle de la Croix-Rouge, que vous avez devant vous.

Il s'agit juste d'un changement de terminologie et rien d'autre. En principe, c'est la même résolution. D'accord?

[Traduction]

(La motion est adoptée—Voir Procès-verbaux)

Le président: J'en ferai rapport à la Chambre.

Nous avons maintenant l'avis de motion de M. Obhrai.

M. Deepak Obhrai: Merci, monsieur le président.

J'espère que vous avez tous reçu un exemplaire de la motion. Elle a trait à la SEE. Comme vous le savez, nous avons étudié la SEE, mais il s'agissait du rapport sur la loi concernant la SEE et son examen du mandat de la Société pour l'expansion des exportations. Cela ne nous a pas permis de mieux comprendre le fonctionnement du mécanisme interne de la SEE. C'est une société d'État qui doit rendre des comptes au Parlement, et un très grand nombre de questions ont été soulevées sur la façon dont a été mis en place le mécanisme interne de la SEE.

Sauf erreur, les méthodes d'octroi des prêts de la SEE suscite des critiques. Néanmoins, les Canadiens et nous tous ici, j'en suis certain, aimeraient comprendre comment fonctionne le mécanisme interne de la SEE. Le rapport Gowlings traitait aussi des aspects environnementaux, et je pense qu'il est tout à fait essentiel pour nous de comprendre comment le mécanisme de la SEE est mis en place et comment il fonctionnera.

• 0945

C'est pourquoi je présente cette motion, dans le but précis de comprendre comment la SEE autorise ses prêts, et comment fonctionne son mécanisme interne. C'est la raison d'être de cette motion.

Je ne crois pas que nous soyons ainsi en train de refaire le travail que nous avons déjà fait quand nous avons étudié la SEE et publié le rapport à son sujet. Je pense que l'on est sur une toute autre voie, monsieur le président.

Le président: J'accorde la parole à M. Speller et à M. Paradis.

M. Bob Speller: Monsieur le président, je ne suis pas vraiment d'accord avec M. Deepak sur l'étude ce que le comité a effectivement entreprise. Non seulement notre comité a-t-il étudié en profondeur le fonctionnement de la SEE, mais nous avons aussi rencontré des groupes de tout le pays qui voulaient comparaître et nous donner leur opinion de la SEE.

Auparavant, nous avons reçu un rapport effectué par Gowlings, un groupe indépendant qui a étudié la SEE. Ces représentants ont expliqué très clairement dans le rapport comment fonctionne la SEE, quelles en sont les fonctions, le rôle qu'elle joue au sein de la société canadienne pour promouvoir les exportations des petites et des moyennes entreprises canadiennes.

Étant donné tout le travail que nous avons à faire, je ne vois pas pourquoi on y reviendrait, après avoir tout juste terminé des mois d'étude de la SEE. Je n'arrive pas à comprendre les inquiétudes du membre du comité; il a l'occasion à la période de questions de présenter ces motions. Il y a d'autres informations qu'il ne semble pas parvenir à obtenir. Je me ferai un plaisir de l'aider à trouver toute l'information dont il a besoin pour mieux comprendre la situation.

J'estime que le comité a déjà consacré un temps énorme à l'étude de la SEE et qu'il n'est pas vraiment nécessaire d'y revenir. Si l'honorable membre du comité se pose des questions auxquelles il n'arrive pas à obtenir des réponses soit en les inscrivant au Feuilleton ou en les posant à la période des questions, je me ferai un plaisir de l'aider.

Le président: Monsieur Paradis.

M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Merci, monsieur le président.

[Français]

Mon collègue mentionne

[Traduction]

qu'il tend à rejeter, mais je ne suis pas du tout d'accord là- dessus. Je pense que c'est au Comité des comptes publics qu'il faut s'adresser. Tout ce à quoi il fait référence ici,

[Français]

tous les termes qu'il utilise dans son avis de motion—et je me demande si c'est la bonne place pour en discuter, puisqu'il ne s'agit en fait que d'un avis de motion, si je comprends bien—pour l'examen des décisions d'administration, d'opération et autres relèvent, à mon humble avis, du Comité des comptes publics.

Le Comité des comptes publics, monsieur le président, était sous la présidence d'un député de l'opposition: un réformiste, ou un député de l'Alliance canadienne maintenant, si je comprends bien. Ce comité a un mode de fonctionnement particulier. Le vérificateur général est là. Les députés peuvent poser des questions à l'administration en place et vérifier auprès du vérificateur général si tout est tel que cela doit être. C'est le forum approprié pour analyser la situation suggérée par le député de l'Alliance canadienne.

Merci, monsieur le président.

Le président: Madame Debien.

Mme Maud Debien: Est-ce qu'il s'agit tout simplement d'un dépôt de motion? D'après ce que je comprends, il faut un avis de 48 heures. Cependant, on m'a dit que cette motion avait déjà été reçue par nos bureaux. Alors, est-ce que l'avis de 48 heures tient? S'agit-il seulement d'un dépôt ou si on en discute en vue de l'adopter? Il faudrait s'entendre sur la procédure. On peut commencer une discussion qui va durer une demi-heure et reporter le vote à un autre moment. Je voudrais que ce soit clair.

Le président: Notre règle est toujours de 24 heures et non de 48 heures, et cela a été distribué il y a deux ou trois jours, soit vendredi. Cela dépasse largement les 24 heures. Donc, il est question du fond de la résolution et non pas de sa forme.

Mme Maud Debien: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

Étant donné la stratégie de développement durable des Affaires étrangères et du Commerce international, c'est le seul comité qui permettra vraiment d'entendre et de comprendre les témoins et qui pourra probablement faire des recommandations appropriées en ce qui concerne le rôle de la SEE.

Monsieur le président, toujours en ce qui concerne la SEE, des prêts consentis par cette dernière à de nombreux pays ont une incidence sur l'évaluation environnementale. Comme vous le savez, et je suis sûr que vous le reconnaîtrez, la géographie politique des pays ou plutôt leur vie politique a des frontières, mais l'environnement n'en a pas. En ce qui concerne notamment l'évaluation environnementale, il est de plus en plus important que nous discutions du rôle de la SEE et que nous ayons un entretien avec le ministre, de même qu'avec le président-directeur général de la SEE.

• 0950

Je demande instamment à tous les membres du comité de faire abstraction de leur allégeance politique, de se concentrer sur la question et d'adopter cette motion afin que ces représentants puissent s'adresser directement à nous.

Le président: Peut-être que M. Speller pourrait vous répondre. Ensuite, nous devrons poursuivre.

M. Bob Speller: Mon honorable collègue n'était peut-être pas présent, mais nous avons déjà entendu plus d'une quarantaine de témoins. La plupart d'entre eux nous ont expliqué comment à leurs avis les décisions de la SEE ont eu une incidence sur l'environnement. Nous avons entendu le président de la SEE, des représentants du personnel et différents groupes déjà. Si mon collègue lisait le rapport, il y trouverait la liste de témoins. Il pourrait le lire avant d'essayer de relancer à nouveau l'examen de cette question.

Le président: Monsieur Obhrai, puis monsieur Patry.

M. Deepak Obhrai: Merci, monsieur le président.

Bien sûr que j'ai entendu les réponses de mes deux collègues. Il est bien intéressant qu'ils fassent mention du Comité permanent des comptes publics, mais je pense toujours que cet examen nous incombe. Comme l'a dit le secrétaire parlementaire, nous avons effectué un examen, mais sans analyser le mécanisme interne ni de la façon précise dont les prêts sont octroyés. Nous avons aussi parlé du Compte du Canada qui relève de la SEE.

L'examen que nous avons fait portait sur l'incidence de la SEE sur la mondialisation—ce qu'est son mandat. Je reconnais, comme vous l'avez dit, que cela concerne les exportations et la réussite de la SEE. Je ne suis pas venu remettre en question la réussite de la SEE. Nous voulons savoir—et tous les Canadiens sont préoccupés par cette question—comment fonctionne le mécanisme de la SEE en ce qui concerne l'approbation des prêts et tout le reste.

Vous dites que je peux faire appel à vous pour obtenir des réponses à mes questions à ce propos, mais, Bob, on le sait, les témoins tergiversent. Nous ne pouvons pas obtenir de réponses sur le mécanisme interne de la SEE parce qu'ils se retranchent derrière le prétexte de la confidentialité.

Ce que vous dites n'est pas exact. Je vous invite à lire les réponses du ministre. Soyons francs—je parle de ce que nous essayons de faire ici. Nous ne remettons pas en question la réussite de la SEE ni rien d'autre; nous voulons savoir comment la SEE approuve les prêts qu'elle accorde. C'est l'objet de cette motion. En cas d'échec, j'en déduirai que le gouvernement ou la SEE cherche à nous cacher quelque chose. Soyons plus transparents. Je pense que le gouvernement aurait intérêt à faire preuve de plus de transparence.

Tout ce que nous demandons, c'est plus de transparence. Du reste, vous en parlez tout le temps. Je pense que c'est une excellente idée, ne ratez pas l'occasion.

M. Bob Speller: Vous vous souvenez sans doute, je pense, que le comité l'a effectivement recommandé dans son rapport. Nous avons déjà examiné ces questions. Nous avons fait des recommandations. Le gouvernement est en train de préparer une réponse, qu'il présentera au comité. C'est le processus que nous avons suivi. Nous avons présenté ces recommandations à titre de comité, en soumettant des recommandations fermes concernant l'environnement et la transparence. Le comité a étudié cette question et a déjà fait des recommandations à ce propos.

M. Deepak Obhrai: Alors pourquoi hésiter à accepter cette motion?

Le président: Nous essayons de faire en sorte qu'on puisse mettre les résolutions aux voix.

Le Dr Patry aimerait faire une brève observation, ensuite MM. Martin et McWhinney prendront la parole. Le débat prendra alors fin.

[Français]

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Vous me permettrez d'être en complet désaccord avec mes collègues. Comme M. Speller vient de le mentionner, nous avons fait une étude complète là-dessus.

[Traduction]

Sachez bien, monsieur Grewal, que même la Première nation de la Colombie a comparu devant notre comité. C'était un bon exemple des problèmes environnementaux.

Nous avons présenté une foule de recommandations. Nous devrions attendre le rapport de la Chambre des communes concernant les recommandations. Là-dessus, je ne suis pas du tout d'accord avec vous. Nous avons fait notre travail et nous l'avons bien fait. Nous avons présenté des recommandations, et je pense que nous devrions maintenant passer à autre chose. C'est tout.

Le président: Monsieur Martin, puis pour terminer, monsieur McWhinney.

M. Keith Martin: Mon collègue a déjà dit ce que je m'apprêtais à dire.

Le président: Très bien. Monsieur McWhinney.

• 0955

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): J'ai quelques inquiétudes. Nous avons ici un excellent comité; en fait, j'ai même laissé entendre l'autre jour qu'il était sans doute le meilleur des comités parlementaires. Il compte des membres qui possèdent des compétences intéressantes et diversifiés. Mais ce qu'on propose exige des connaissances spécialisées en droit administratif international. Je dirais que cette question dépasse la compétence particulière de la plupart des membres du comité.

Il doit y avoir une autre tribune où l'on pourrait examiner cette question en détail. J'estime que cela nous éloignerait de l'examen de grandes questions de politique, notamment celle qui nous est soumise ce matin, et à propos de laquelle nous voulons présenter un rapport de toute urgence au gouvernement.

Le président: Très bien, je pense que c'est à peu près...

[Français]

Madame Debien, faites-vous appel au Règlement?

Mme Maud Debien: Je suis un peu fâchée.

Le président: Pardon?

Mme Maud Debien: Je suis un peu fâchée contre M. McWhinney, qui dit qu'on n'a pas ici les compétences pour évaluer...

M. Ted McWhinney: Les compétences spéciales. Il y a une distinction.

Mme Maud Debien: Compétences spéciales ou pas, je trouve que c'est un peu manquer de respect aux députés qui sont ici, qui travaillent, s'informent, étudient et analysent leurs dossiers. Je trouve que c'est un peu fort comme remarque. Permettez-moi de le mentionner, en premier lieu.

Le président: Oui, mais M. McWhinney...

Mme Maud Debien: C'est fini. C'était une remarque.

Le président: M. McWhinney a fait ces remarques en disant qu'à son avis, c'était le meilleur comité de la Chambre. C'est seulement sur le plan de la spécialisation qu'il y aurait un manque de compétences.

Mme Maud Debien: Nous avons des fonctionnaires qui viennent nous informer et qui sont justement des spécialistes.

Le président: Je me souviens d'avoir eu certains débats avec monsieur...

Mme Maud Debien: Je pense que nous sommes capables de comprendre les fonctionnaires, même ceux qui sont des spécialistes.

Le président: Très bien.

Mme Maud Debien: Monsieur le président, j'ai une question de fond concernant la motion de l'Alliance canadienne. Je pense que cette résolution contient plusieurs demandes concernant l'examen de divers objets. Si je la comprends bien—peut-être pourra-t-on me l'expliquer davantage—, l'examen des décisions concernant les opérations et les critères de gestion utilisés a déjà été fait, comme le soulignait M. Speller. Voilà pour cette partie de la résolution.

Par contre, les décisions de financement n'ont jamais été évaluées. Je sais où veulent en venir nos amis de l'Alliance canadienne. Ils veulent que soient examinées, possiblement une à une, les décisions de financement de la SEE. C'est une question que je pose à nos amis de l'Alliance canadienne. Je peux la poser, j'imagine. Ce n'est pas une affirmation que je fais.

Le président: Vous pouvez la poser, mais je pensais avoir mis fin au débat sur le sujet afin de mettre la résolution aux voix.

Mme Maud Debien: Ah, bon.

Le président: Mais s'il y a une réponse... Est-ce que vous avez terminé?

Mme Maud Debien: Oui, j'ai terminé.

[Traduction]

Le président: Voulez-vous répondre à cette question, monsieur Obhrai?

M. Deepak Obhrai: Oui. Merci, madame Debien, de l'avoir posée.

Vous pouvez bien dire qu'on a examiné le fonctionnement et les critères, mais à mon avis, nous ne l'avons pas fait à fond. La préoccupation qui subsiste, c'est que nous ne semblons pas saisir quels critères utilise la SEE pour justifier ses décisions aux yeux des contribuables, surtout en ce qui concerne le Compte du Canada. On nous oppose constamment la confidentialité chaque fois que la SEE embauche, et nous savons tous que la SEE est une société d'État.

Nous ne savons donc pas comment l'argent est dépensé. C'est ce que nous voulons que le comité étudie. C'est l'objectif de cette résolution. Je pense qu'elle suscitera la transparence. Cela pourrait même aider la SEE, et cela vous incitera aussi à plus de transparence.

M. Bob Speller: Le ministre comparaîtra, comme vous le savez, lors de l'étude des prévisions budgétaires de son ministère. Ce sera, sans doute, le meilleur moment pour poser ces questions.

M. Deepak Obhrai: Il va dire non.

Le président: J'aimerais revenir sur une chose, toutefois. Je pense que nous devons reconnaître, compte tenu du temps dont dispose le comité, que nous avons consacré un bon mois, sinon davantage, à la SEE. Je suis assez consterné d'entendre M. Obhrai laisser entendre que nous n'avons pas suffisamment étudié la question, et que nous allons maintenant l'étudier à fond et passer deux mois à refaire ce que nous avons déjà fait. Ce n'est tout simplement pas possible, mes amis, et je vous le fais remarquer.

• 1000

Nous avons présenté des recommandations, sur l'environnement, monsieur Grewal. Dans le rapport, il y a une recommandation sur l'environnement, et j'ai personnellement écrit au ministre relativement aux préoccupations de l'OCDE en matière d'environnement, lettre que je vous ferai parvenir, et vous pourrez en prendre connaissance.

Je suis tout à fait d'accord avec M. Speller. Le ministre comparaîtra mercredi, le 5 avril. Si l'Alliance canadienne veut utiliser son temps de parole pour l'interroger sur la SEE, c'est son droit. Posez-lui toutes les questions que vous voulez lui poser au sujet de la SEE. Vous pouvez peut-être...

M. Deepak Obhrai: La séance portera sur les prévisions budgétaires, monsieur le président.

Le président: À vous de choisir. Nous allons obtenir la réponse écrite au rapport à la Chambre. Il y aura des amendements à la Loi sur la SEE, peut-être, et on aura donc d'autres occasions d'en débattre. Mais je pense qu'il ne nous incombe pas de relancer une étude sur cette question, laquelle nous avons étudiée en profondeur récemment. C'est là mon opinion personnelle.

Mais nous allons mettre la question aux voix, n'est-ce pas?

M. Gurmant Grewal: Pouvons-nous procéder à un vote par appel nominal, monsieur le président?

Le président: Certainement. Nous allons voter par appel nominal.

(La motion est rejetée: par 8 voix contre 4) [Voir Procès-verbaux]

Le président: Mesdames et messieurs, nous devons régler une question administrative avant de parler de l'Iraq. Nous faisons attendre les témoins.

Nous essayons de formuler la résolution concernant le Kosovo pour ne pas avoir à en débattre pendant cinq heures, temps dont nous ne disposons d'ailleurs pas. Nous vous avons demandé d'envoyer par écrit vos observations ou de rencontrer Jim. Si vous avez des inquiétudes au sujet de la formulation actuelle et que vous pouvez l'aider à rédiger cette résolution en lui faisant part de vos préoccupations, nous vous en saurions gré.

[Français]

Je crois, madame Debien, que vous aviez certaines observations à faire, que vous pourriez peut-être au moins partager avec Jim, pas nécessairement pour terminer les choses, mais pour faire avancer le débat.

[Traduction]

M. Ted McWhinney: A-t-on distribué une nouvelle version de la résolution sur le Kosovo?

Le président: Non, nous attendons que les membres fassent connaître leurs opinions...

M. Ted McWhinney: J'ai déjà donné la mienne.

Le président: Oui, vous avez donné la vôtre, comme d'autres membres du comité, mais nous attendons toujours celle du Bloc et de quelques autres membres. Nous vous présenterons une version révisée une fois que nous connaîtrons leurs opinions.

Puisque nous sommes tous ici et que nous parlons boutique, êtes-vous d'accord pour que nous adoptions notre budget, que vous avez en main? Vous avez tous un exemplaire de ce budget de 96 000 $.

M. Deepak Obhrai: Pourquoi?

Le président: Pour les témoins, pas les déplacements. Ce n'est pas un budget pour nos déplacements, c'est simplement pour les frais des témoins et l'impression des rapports, la routine.

Mme Jean Augustine: Motion proposée.

M. Denis Paradis: Motion proposée.

Le président: De cette manière, elle pourra être soumise au Sous-comité du budget à midi aujourd'hui et nous pourrons l'approuver. C'est de la routine, il s'agit simplement de nous préparer à recevoir nos témoins en avril, mai et juin. Ce sont nos frais de fonctionnement jusqu'à juin. D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Bon, je considère qu'elle est approuvée. Merci beaucoup.

Encore une fois, je présente mes excuses à nos collègues du ministère des Affaires étrangères. Merci beaucoup d'être venus nous rencontrer.

Monsieur McNee, vous avez la parole.

M. John McNee (directeur général, Direction générale du Moyen- Orient et de l'Afrique du Nord, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Monsieur le président, nous remercions le comité de nous donner l'occasion de faire le point avec lui sur la politique du Canada concernant l'Iraq.

Cette politique repose sur deux éléments clés: notre grande inquiétude face à la situation humanitaire dans ce pays; et la nécessité de demeurer vigilant en ce qui concerne la sécurité régionale, les programmes iraquiens d'armes de destruction massive et la question du désarmement de l'Iraq. Ces deux volets sont essentiels si on veut bien comprendre la situation dans ce pays, et ils sont au centre de l'approche que nous-mêmes et la communauté internationale avons adoptée et continuons de suivre à l'égard de l'Iraq.

Le gouvernement du Canada reconnaît pleinement les souffrances endurées par le peuple iraquien. Comme M. Axworthy l'a dit récemment, le Canada n'a jamais oublié le triste sort des millions de citoyens iraquiens qui paient le tribut exigé par l'auto- isolement de leur pays. Dès le début, la communauté internationale a reconnu les risques attachés aux sanctions, et elle a cherché à atténuer les difficultés du peuple iraquien. Les produits alimentaires et médicaux ont toujours été exemptés de l'embargo, et le programme «Pétrole contre nourriture» a été conçu de manière à fournir à l'Iraq les moyens nécessaires pour répondre à ses besoins essentiels.

• 1005

Si le bilan de ce programme est impressionnant, nous savons aussi qu'il est loin d'être parfait et que le peuple iraquien continue de souffrir. En novembre, le ministre Axworthy a dépêché à Bagdad une mission canadienne chargée d'examiner la situation humanitaire dans le pays. Les fonctionnaires membres de cette mission qui avaient déjà effectué des visites à Bagdad ont constaté certaines améliorations, mais ils ont aussi conclu que les Iraquiens avaient toujours beaucoup de difficulté à composer avec la détérioration des infrastructures matérielles et avec les problèmes économiques, médicaux et sociaux qui en résultent.

Les constatations de la mission de novembre ne nous ont rien appris de bien nouveau. À l'époque, le Conseil de sécurité préparait déjà une autre résolution, de portée générale, visant notamment à améliorer le programme humanitaire en Iraq. Le texte final de la résolution 1284 propose un ensemble de mesures humanitaires nettement améliorées, qui a été proposé par le Canada et adopté avec l'appui des 11 membres du Conseil de sécurité.

La résolution prévoit l'approbation rapide des composantes humanitaires, c'est-à-dire dans les deux jours, un meilleur suivi du programme humanitaire sur le terrain, un programme d'achats locaux assortis de paiements en espèces, une étude de la situation dans l'industrie pétrolière iraquienne et surtout l'annulation du plafond imposé à ses exportations. Nous avons préparé un résumé en une page de ces modifications que nous avons annexé aux copies de la résolution pour votre information.

Dans l'ensemble, la résolution promettait d'importants changements positifs dans les modalités d'administration du programme et elle prévoit un régime nettement amélioré au profit des secteurs les plus vulnérables de la société iraquienne.

L'Iraq a déclaré qu'il n'acceptait pas la résolution et a exigé plutôt la levée immédiate des sanctions. La mise en oeuvre des changements au programme humanitaire n'est cependant pas assujettie à la coopération iraquienne sur la question du désarmement ou à toute autre concession de Bagdad. L'ONU et les membres du Conseil de sécurité, dont le Canada, ont d'ailleurs déjà déclenché le processus de mise en oeuvre de ces changements.

[Français]

La nouvelle résolution constitue une grande avancée et nous croyons réellement que les Irakiens en sentiront bientôt les effets positifs. C'est ce que d'autres pensent aussi.

Le 10 mars, dans son rapport au Conseil de sécurité, le secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a indiqué espérer que l'efficacité avec laquelle les dispositions prévues dans la partie C de la résolution concernant l'aspect humanitaire seront appliquées rehaussera l'effet du programme en atténuant la gravité de la situation sur le plan humanitaire. La semaine dernière, le directeur du bureau de l'UNICEF à Bagdad a semblé lui aussi optimiste lorsqu'il a dit, à l'occasion d'un compte rendu devant les membres du Conseil de sécurité, que la résolution avait le potentiel d'améliorer la situation sur le plan humanitaire.

Notre optimisme à cet égard est cependant tempéré par une solide dose de réalisme, compte tenu de l'expérience des neuf dernières années. Par exemple, le rejet du Programme pétrole contre nourriture par Saddam Hussein a de toute évidence retardé l'apport d'une aide qui pourtant s'imposait. Le gouvernement a systématiquement rejeté les recommandations de l'ONU voulant qu'il affecte des fonds mis de côté à des programmes alimentaires destinés aux enfants et aux mères allaitantes et n'a cédé qu'en septembre, et partiellement encore, aux pressions internationales en ce sens.

L'Irak, qui a mandat d'établir les plans de distribution du programme, c'est-à-dire de déterminer combien d'argent sera consacré aux divers postes de défense, n'a pas commandé suffisamment de fournitures alimentaires, là encore au mépris des recommandations de l'ONU sur l'apport calorique quotidien. On a même arraisonné des navires irakiens exportant des produits humanitaires.

C'est ce même gouvernement qui a détourné des ressources pourtant rares pour faire construire 48 palais et un centre de villégiature de luxe destiné à l'élite irakienne et qui a dépensé des centaines de millions de dollars pour l'assainissement des marais du sud, une opération qui a détruit le mode de vie des Arabes shiites habitant la région.

Le Canada n'a pas l'intention de laisser le peuple irakien à la merci de Saddam Hussein et de son régime. Nous poursuivons notre collaboration avec le Conseil de sécurité pour que les améliorations au programme humanitaire prévues à la résolution 1284 soient intégralement mises en oeuvre, dans le respect de l'esprit et de la lettre de la résolution.

• 1010

[Traduction]

Mais il est un autre aspect du dossier iraquien qu'on ne peut passer sous silence. Je veux parler ici de la question de la sécurité et du désarmement, qui a toujours été et demeure un élément clé de l'équation iraquienne pour le Canada et la communauté internationale dans son ensemble.

La seule façon de résoudre enfin le problème iraquien est de mettre un terme aux sanctions et que l'Iraq se conforme pleinement aux conditions de toutes les résolutions de l'ONU, ainsi que le demande la résolution 1284. L'Iraq sait, et a toujours su, que la levée des sanctions pourrait se faire très rapidement s'il acceptait de coopérer pleinement avec l'ONU et permettait l'élimination complète de ses programmes d'armes de destruction massive. Mais l'Iraq a jusqu'ici refusé d'obtempérer. Dès le début du programme de désarmement, il a placé des obstacles sur la route des inspecteurs internationaux, a harcelé ceux-ci, entravé leurs activités, et menti tant et plus quant à l'état et à la nature de ses programmes d'armements.

Souvenez-vous que c'est uniquement après la défection en Jordanie du gendre de Saddam Hussein, Hussein Kamal, en 1995 que l'Iraq s'est vu contraint de reconnaître l'existence d'un programme d'armes biologiques, et de remettre les documents pertinents. Jusque-là, l'Iraq avait nié l'existence d'un tel programme.

Les dossiers de la CSNU regorgent de tromperies pareilles. Les inspecteurs ont fait un travail extraordinaire en cherchant à démasquer les programmes d'armes de destruction massive de l'Iraq, malgré l'obstruction et la duperie des autorités iraquiennes, mais la tâche n'était pas encore terminée quand les inspecteurs sont partis en décembre 1998. Aucune organisation vouée à la cause du désarmement n'a qualifié de terminé le travail de désarmement prévu par les diverses résolutions de l'ONU. Même la Russie, la Chine et la France qui se sont abstenues sur la résolution 1284, reconnaissent qu'il y a encore à faire pour confirmer que l'Iraq a respecté ses obligations à ce chapitre.

La nouvelle résolution demande l'établissement d'un plan clair et précis pour le programme de désarmement. Comme il n'y a pas eu d'inspection depuis plus d'un an et demi, un effort considérable devra être fait pour déterminer l'état actuel du désarmement iraquien, ainsi que les étapes à venir pour l'achèvement du programme. Avec l'entière coopération de l'Iraq, cependant, cela pourra se faire et rapidement.

Comme je l'ai dit précédemment, le Canada considère le problème du désarmement comme un élément essentiel et incontournable de l'équation iraquienne. Doté d'armes de destruction massive, l'Iraq constituerait une menace pour ses voisins et pour la sécurité dans la région du Golfe. Ce pays, faut- il le rappeler, a déjà déclenché deux guerres meurtrières contre ses voisins, et est connu pour avoir fait usage d'armes chimiques contre l'Iran durant la guerre, et aussi contre ses propres habitants, nommément les Kurdes de Halabja en 1988.

La communauté internationale ne peut méconnaître cette réalité. La région du Golfe est trop importante, et la menace d'une escalade dans l'ensemble du Moyen-Orient trop grande, pour qu'on s'en remette au hasard ou à la croyance qu'un homme comme Saddam Hussein peut se réformer. Une vigilance de tous les instants s'impose.

Nous estimons que les sanctions sont un moyen efficace pour amener l'Iraq à respecter ses obligations en matière de désarmement et pour limiter son accès à des articles à double usage et au capital nécessaire pour reconstituer sa capacité militaire. Les sanctions empêchent l'Iraq de poursuivre ses activités routinières.

En sa qualité de membre du Conseil de sécurité de l'ONU, le Canada doit tenir compte de ces réalités lorsqu'il cherche à trouver la meilleure façon d'aborder le problème iraquien. En outre, le maintien de la stabilité dans la région du Golfe et ailleurs au Moyen-Orient présente pour lui un intérêt manifeste. C'est une responsabilité que nous prenons très au sérieux, et à laquelle nous ne pouvons nous soustraire.

Le problème de l'Iraq est l'un des plus complexes que le Canada ait eu à gérer depuis le début de son mandat au Conseil de sécurité de l'ONU en janvier 1999. Les rapports des comités d'experts, constitués à l'initiative du Canada, ont permis au Conseil de sortir de l'impasse et de présenter une nouvelle résolution qui, nous en sommes profondément convaincus, ouvre la voie à une conclusion finale satisfaisante de cette crise. Tous les membres du Conseil s'efforcent maintenant de faire en sorte que cette résolution soit mise en application.

• 1015

En fin de compte, c'est au gouvernement iraquien qu'échoit la responsabilité, comme cela a toujours été le cas, d'un règlement final de cette situation. L'Iraq doit honorer toutes ses obligations. Il est vrai que la réaction initiale de Baghdad à l'adoption de la résolution 1284 n'a pas été encourageante, mais cela n'a surpris personne. Nous sommes cependant convaincus que l'Iraq finira par accepter la résolution, pourvu que la communauté internationale demeure ferme et unie, et ne lui laisse aucune autre porte de sortie. Voilà la leçon à retenir des efforts persévérants mis à convaincre l'Iraq d'accepter le programme «pétrole contre nourriture».

[Français]

Le Canada et certains autres pays ont repris une politique d'engagements constructifs à l'égard de l'Irak afin de convaincre ce pays de se conformer pleinement aux dispositions de la résolution. Des représentants canadiens ont rencontré des officiels irakiens à Ottawa, à New York et à Bagdad pour presser l'Irak d'accepter ces dispositions et d'autoriser le retour des inspecteurs internationaux chargés du programme de désarmement, et nous persisterons à le faire.

[Traduction]

D'ici là, le Canada continuera de s'activer pour que soit mise en place l'infrastructure nécessaire à la réalisation de tous les aspects de la résolution. Nous chercherons à faire en sorte que le volet humanitaire soit opérationnel le plus tôt possible, et nous fournirons toute l'aide voulue pour que la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection de l'ONU dispose des outils dont elle a besoin—personnel et autres—pour remplir son mandat dès que Baghdad lui aura donné le feu vert.

Il n'a pas toujours été facile de préserver le profil et l'intégrité des deux volets de notre approche du problème iraquien, c'est-à-dire la situation humanitaire et le désarmement. Mais nous sommes fermement convaincus que notre politique constitue un mélange de compassion et de prudence qui est réaliste et qui correspond à la situation créée par l'Iraq. Comme l'a dit M. Axworthy, le Canada espère mettre un terme à une situation qui dure depuis trop longtemps. Trop longtemps pour la sécurité régionale et internationale. Et trop longtemps pour le peuple iraquien.

Merci beaucoup, monsieur le président. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur McNee.

Monsieur Obhrai, pour l'Alliance.

M. Deepak Obhrai: Merci, monsieur le président.

Je remercie les témoins d'être venus nous rencontrer. Votre analyse est bonne, mais je crois que le doute, la question que nous gardons tous à l'esprit, et à laquelle vous avez fait allusion, c'est l'idée que les sanctions n'ont pas réussi à infléchir la politique de Saddam Hussein. Personne ici n'aime Saddam Hussein, et nous savons bien que le gouvernement iraquien refuse et va continuer à refuser de coopérer. Je crois que Saddam en fait un point d'honneur personnel depuis qu'il a perdu la guerre du Golfe.

Nous savons donc que cet aspect de la situation ne va pas évoluer, mais nous savons aussi que ce sont les Iraquiens qui paient le prix de l'arrogance de ce type. La communauté internationale a déclaré que tant que l'orgueil de Saddam... Tant que ce type-là au sommet ne changera pas d'attitude, nous maintiendrons les sanctions, mais on a de plus en plus l'impression que ces sanctions ont des conséquences catastrophiques pour l'économie iraquienne.

Le programme d'échange de pétrole contre la nourriture est à mon avis un allégement mineur. En fin de compte, il ne permettra pas aux Iraquiens de vivre dans la prospérité.

À la fin de votre exposé, vous dites que M. Axworthy espère mettre fin à cette situation. Franchement, si l'on ne fait pas autre chose, je ne vois pas de solution à l'horizon. Je ne sais pas si vous partagez ce point de vue. Y a-t-il une solution à l'horizon pour l'Iraq? Comment pourrions-nous à votre avis progresser plus vite autrement que par le biais du programme pétrole contre nourriture, sachant qu'il n'est pas question que Saddam Hussein accepte de faire des concessions.

M. John McNee: Monsieur le président, nous n'avons pas de certitude sur l'avenir. Nous pensons que les sanctions n'ont pas permis de régler complètement le problème, mais qu'elles ont eu une certaine efficacité si l'on y réfléchi. L'Iraq a accepté au début la présence des inspecteurs envoyés par l'ONU, qui ont travaillé en Iraq de manière efficace pendant de longues années. Ils n'ont pas terminé leur travail, mais ils ont fait beaucoup de bon travail.

• 1020

À notre avis, cette nouvelle résolution présente beaucoup de potentiel pour l'Iraq. Effectivement, Saddam Hussein fait preuve d'une obstination sans borne. Oui, son orgueil est légendaire. Mais je crois que notre meilleur espoir est d'essayer de faire fonctionner cette résolution et de faire comprendre à l'Iraq, grâce aux efforts concertés de la communauté internationale, que c'est la seule solution. Nous espérons que nous pourrons convaincre l'Iraq.

Cela ne se fera peut-être pas immédiatement, du jour au lendemain. Il a mis longtemps à accepter le programme pétrole contre nourriture, mais nous espérons que cette résolution, qui comporte énormément d'allégements humanitaires immédiats, et qui à grande échelle... Songez qu'on supprime le plafond des exportations pétrolières, ce qui va rapporter quelque chose comme sept milliards de dollars de recettes tous les six mois, dont l'Iraq pourra se servir dans le cadre du programme pétrole contre nourriture. C'est impressionnant.

Nous ne prétendons pas que ce soit une panacée. Ce n'est pas un programme de développement, et cela ne remettra pas sur pied l'économie iraquienne, mais dans l'ensemble je crois que ce sera un pas en avant qui convaincra les Iraquiens, espère-t-on.

M. Deepak Obhrai: Il n'y a pas d'autre solution? Je veux dire, si on levait les sanctions... Je crois que ce qui nous inquiète, c'est la population iraquienne, alors laissons faire le gouvernement. Il n'y a pas d'autre solution? Supposons qu'on lève les sanctions, et que d'autres types de sanctions, des barrières technologiques, etc... Est-ce qu'on ne pourrait pas s'assurer de cette manière que l'Iraq ne soit pas une menace pour la région?

M. John McNee: Monsieur le président, je vais demander à M. Sinclair de répondre.

M. Donald Sinclair (directeur, Direction du Moyen-Orient, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci.

J'aimerais vous répondre en abordant la question des sanctions sous un angle un peu différent. Comme vous l'avez dit, personne n'aime Saddam Hussein. Personne ne lui fait confiance. C'est important. Ce n'est pas un dictateur bienveillant; c'est un dictateur sans scrupules, ce qui pose la question... Il y a une question fondamentale: Est-ce que nous, le Canada, ou la communauté internationale, serions responsables si nous acceptions de laisser quelqu'un qui a déjà utilisé des armes de destruction massive contre son propre peuple, continuer à en produire sans entraves?

C'est un dictateur sauvage et implacable. Il faut vous attendre à ce scénario si vous levez les sanctions sans avoir terminé le travail de désarmement. C'est une réalité, et c'est inquiétant. Personne ne peut prévoir l'avenir, mais c'est une des questions qui se posent pour l'avenir, et connaissant le passé de Saddam, nous savons qu'il est tout à fait prêt à prendre ce genre d'initiative.

L'autre aspect fondamental de cette situation, c'est le fait que quand le Canada est entré au Conseil de sécurité en janvier 1999, plein d'enthousiasme et d'idées, nous nous sommes trouvés dans une situation où personne à l'exception de l'Iraq ne réclamait la levée immédiate des sanctions. Tous les membres du Conseil convenaient que la tâche de désarmement n'était pas terminée et que la question morale dont je viens de parler demeurait au premier plan des préoccupations, et elle le demeure encore. C'est un véritable casse-tête: que faire face à un homme qui, si on lui lâche la bride, va continuer à fabriquer des armes de destruction massive et sera prêt à s'en servir.

Quand nous sommes arrivés au Conseil de sécurité, nous avons constaté que les cinq membres permanents étaient très divisés sur la façon de procéder. Certains membres estimaient que les résolutions en vigueur actuellement, les résolutions 687 et 981, étaient parfaitement adaptées à la situation, puisqu'elles exigent le respect intégral des exigences de ces résolutions par l'Iraq avant toute levée des sanctions.

Je crois qu'il y a un malentendu fondamental sur la résolution 1284 et la perspective complètement différente qu'elle ouvre, et je dois dire que le Canada peut en toute modestie s'enorgueillir de ce changement radical dans ce que nous avons à proposer.

• 1025

Au lieu d'exiger que l'Iraq respecte intégralement tous les termes de la résolution—autrement dit, on devait avoir la garantie totale que les armes de destruction massive avaient été détruites—, tout ce qu'on lui demande maintenant, c'est de coopérer avec les inspecteurs. À ce moment-là, on suspendra les sanctions.

Qu'entend-on par là? C'est vraiment une levée des sanctions. On les supprime. Les sanctions ne sont pas comme un commutateur électrique. On ne les allume pas à volonté, elles n'entrent pas en vigueur à minuit pour s'arrêter à 6 heures du matin. C'est un régime qui implique la participation de milliers de personnes en Iraq.

La suspension des sanctions serait déclenchée par la simple coopération des Iraquiens. La résolution 1284 apporte une foule d'avantages humanitaires qui sont déjà là.

Avant notre arrivée au Conseil de sécurité, l'un des moyens qu'utilisaient les membres permanents pour améliorer la situation du programme pétrole contre nourriture, consistait à simplement relever le niveau. Si l'on estimait que trois millions de dollars pour six mois ne suffisaient pas, on pouvait monter à quatre millions de dollars. Mais maintenant, ce plafond a disparu. L'Iraq peut vendre tout ce qu'il peut produire. Les cours sont élevés, les rentrées considérables. L'Iraq peut se servir de ces recettes pour importer toutes sortes de denrées.

Il ne peut pas acheter d'armes ni de chars. Il ne peut pas acheter de robinets en or, si vous voulez. Si l'on voit passer une commande de robinets en or pour l'Iraq, on va se demander si c'est vraiment utile pour les enfants d'Iraq, on va bloquer la commande et répondre: non, nous ne voyons pas l'utilité d'utiliser sept milliards de dollars pour acheter des robinets en or. Mais pour tout le reste, l'alimentation, les médicaments et les produits pharmaceutiques notamment, la procédure sera accélérée. Il y a toute une liste de produits qui pourront être importés automatiquement, pratiquement dans des conditions de libre marché.

La communauté internationale a donc radicalement modifié son attitude et ses propositions vis-à-vis de l'Iraq. Mais pour régler le problème moral et politique fondamental que pose un dictateur dans lequel on ne peut pas avoir confiance et qui a les moyens scientifiques de continuer à fabriquer des armes de destruction massive, tous les membres du Conseil sans exception sont d'accord pour dire qu'il faut que les inspecteurs retournent sur place terminer leur travail.

Vous avez entendu Ron Cleminson vous dire que ces inspecteurs avaient probablement accompli 80 à 90 p. 100 de leur travail, et qu'ils pourraient le terminer en 18 mois. Il reste certaines questions du côté du dossier des armes biologiques, mais sur le plan de la guerre chimique et nucléaire, les équipes d'inspecteurs sont convaincues d'avoir fait du bon travail. Tout de même, c'est grâce aux sanctions que ces inspecteurs ont pu aller sur place mettre fin à la production d'armes de destruction massive, d'armes chimiques et nucléaires.

Ce que nous disons, c'est qu'au cours des 12 mois très difficiles de 1999 où nous avons été présents au Conseil de sécurité, le Canada a occupé une sorte de position médiane, essayant de convaincre une partie des cinq membres permanents de reconnaître la nécessité d'améliorer l'aide humanitaire en Iraq. En même temps, nous devions tenir compte du problème moral que posait un état de choses insatisfaisant du côté du dossier des armes de destruction massive.

Tout cela a débouché sur une résolution très complexe et difficile à lire que je vous ai communiquée, mais qui comporte des soulagements humanitaires immédiats pour les Iraquiens. Attendons de voir les effets. Cette résolution n'a été adoptée qu'en décembre.

Le changement radical, ce sont donc ces allégements humanitaires pour la population iraquienne et en même temps la réduction énorme des exigences qui figurent dans notre offre. Il suffit que l'Iraq coopère avec les inspecteurs pour que le travail soit terminé. Nous pourrons alors suspendre les sanctions. La suspension, c'est une forme de levée des sanctions. On les lève, mais en conservant en quelque sorte la possibilité de les remettre en vigueur. Si, pour une raison quelconque, l'Iraq change d'attitude et repart sur la mauvaise voie, le Conseil pourra redéclencher l'entrée en vigueur des sanctions. Mais c'est très difficile. Encore une fois, ce n'est pas comme un simple commutateur électrique.

• 1030

Voilà le casse-tête auquel nous sommes confrontés. C'est grâce à la diplomatie canadienne à New York que nous avons négocié cette nouvelle résolution, que nous avons réussi à convaincre la communauté internationale d'accepter une nouvelle résolution—et je le répète, même le principe de la nécessité d'une résolution n'existait pas à l'époque—pour apporter une aide humanitaire à la population iraquienne.

Nous estimons que notre politique a été un succès et que la résolution est aussi un très grand succès car elle préserve les deux aspects essentiels de cette politique, comme l'a dit John. Il s'agit d'une part d'apporter une aide humanitaire instantanée, immédiate, efficace et considérable aux Iraquiens et d'autre part d'essayer en même temps de finir le travail d'élimination des armes de destruction massive, car nous n'avons aucune envie qu'un dictateur brutal et implacable ne recommence à les utiliser.

Excusez-moi pour cette longue réponse.

M. Deepak Obhrai: Très bien. Merci.

Le président: Madame Debien.

[Français]

Mme Maud Debien: Bonjour, messieurs.

D'abord, je veux parler de la résolution 1284 et de la levée des sanctions. On sait, en rapport avec la résolution 1284, qu'il y effectivement une levée du plafond établi pour le pétrole. Par contre, à la suite de cette résolution, le coordonnateur humanitaire en chef de l'ONU a démissionné ainsi que deux coordonnateurs du programme alimentaire mondial en disant que la résolution 1284 était à peu près inutile, que cela était à peu près l'équivalent de 50 ¢ par jour par habitant pour les Irakiens. Trouvez-vous que 50 ¢ par jour suffisent pour survivre en Irak?

Ma deuxième question porte sur les propos que vous avez tenus sur le désarmement. Certains témoins sont venus nous dire, la semaine dernière, qu'environ 95 p. 100, de l'armement de l'Irak—on a même parlé de 97 p. 100—avait été détruit. Bien sûr, depuis 1998, il n'y a pas eu d'inspection. Donc, on ne sait pas ce qui s'est passé depuis ce temps, mais il est à peu près impensable que, depuis 1998, l'Irak ait pu remettre sa production d'armement en marche de façon à se réarmer autant qu'avant.

On a aussi parlé des armes biologiques. Effectivement, ils peuvent l'avoir fait au niveau des armes biologiques, parce que celles-ci sont très faciles à produire. N'importe quel pays peut facilement produire des armes biologiques. Au sujet du désarmement, vous savez que les pays avoisinants se sont joliment armés depuis. Alors, quand vous dites que le conflit peut s'étendre à la région, ce ne serait pas uniquement à cause de l'Irak, car depuis ce temps, les pays tout autour se sont fortement armés aussi.

Vous nous dites que tout ce qu'il y a à faire pour l'Irak, c'est de collaborer. Effectivement, ce serait la solution idéale, mais il y a aussi l'aspect alimentaire. L'Irak a refusé la partie alimentaire en disant que ce n'était pas suffisant. C'est une des raisons de son opposition.

La deuxième raison, c'est le contrôle de 120 jours. La résolution 1284 dit qu'il y aurait un contrôle continu pendant 120 jours à partir du moment où la levée des sanctions se ferait. Est-ce que cela ne veut pas dire au fond qu'à tous les 120 jours, on maintiendrait l'Irak dans une situation d'asservissement continu? Je comprends assez facilement que l'Irak refuse une telle atteinte à sa souveraineté. C'est assez facile à comprendre, même si on est pas d'accord.

La troisième chose dont j'aimerais que vous nous parliez, c'est de l'espèce d'entêtement irrationnel de la part des États-Unis dans ce conflit, à cause, évidemment, de ses intérêts stratégiques dans le golfe Persique. Ne pensez-vous pas que ce serait un des rôles du Canada que d'essayer de servir d'intermédiaire pour faire comprendre aux États-Unis le rôle immoral qu'ils jouent actuellement en Irak?

• 1035

[Traduction]

M. John McNee: Monsieur le président, peut-être pourrais-je commencer par répondre à la deuxième question de Mme Debien.

[Français]

Sur la question du désarmement, on aimerait souligner le fait que le régime de Saddam Hussein a utilisé ses armes contre sa propre population. Il n'a pas agi uniquement contre l'Iran et les autres pays voisins. Une des motivations profondes de notre politique est de protéger les minorités de ce pays qui ont déjà souffert sous le régime de Saddam Hussein. Ainsi, la situation interne nous préoccupe autant que la situation régionale.

Comme vous le dites, ou peut-être était-ce M. Cleminson qui était ici la semaine passée, il y a quatre aspects qui nous préoccupent au sujet du désarmement: l'aspect nucléaire, l'aspect des missiles—et sur ces deux fronts, la tâche était très bien avancée, presque terminée—, l'aspect chimique et l'aspect biologique, sur lesquels il y avait pas mal de travail à compléter. Comme vous le dites, le fait qu'on n'ait pas eu d'inspection depuis 1998 nous laisse dans l'ignorance.

La deuxième partie de la question de Mme Debien portait sur la période de 120 jours. Il est difficile de prévoir le futur, mais dans un premier temps, cela nous semble une approche très raisonnable afin de s'assurer que la tâche est bien terminée. Toutefois, il n'est pas impossible qu'il y ait une autre résolution après tout cela pour mettre fin aux sanctions.

En ce qui concerne le rôle du Canada auprès des États-Unis, nous collaborons étroitement avec tous nos alliés au Conseil de sécurité pour essayer d'arriver au plus grand consensus possible, parce que c'est ça qui va marcher. Plus le consensus de la communauté internationale sera grand, plus il aura de l'influence auprès des Irakiens. Dans ce contexte-là, nous poursuivons notre propre politique.

Je vais demander à M. Sinclair de répondre à votre première question, madame, en ce qui concerne les allocations alimentaires.

[Traduction]

M. Donald Sinclair: C'est une question délicate car il s'agit de savoir dans quelle mesure l'Iraq, le régime iraquien, a entravé à notre avis la bonne distribution de denrées essentielles à la population iraquienne. Car il a entravé cette distribution, c'est clair.

Maintenant que la production pétrolière n'est plus plafonnée, l'Iraq va pouvoir en vendre sur le marché libre autant qu'il pourra en produire. Cela représente quelque chose comme 7 milliards de dollars tous les six mois ou 14 milliards de dollars par an. C'est un montant considérable.

À l'époque des précédents programmes d'échange de pétrole contre de la nourriture, les limites étaient d'abord de 3 millions de dollars puis de 5,2 millions de dollars. Quand nous sommes arrivés au Conseil, l'un de nos objectifs a été de supprimer cette limite. L'Iraq exporte maintenant plus de pétrole que jamais auparavant. Je ne suis pas un expert en matière de cours du pétrole, mais je sais que quand je fais le plein, cela me coûte cher. Je pense donc que le pétrole n'a jamais rapporté autant à l'Iraq.

La question est de savoir ce qu'il peut faire de cet argent. Les sanctions limitent les achats possibles. L'Iraq ne peut pas acheter de canons ou de chars, ni d'articles à double usage, pas plus que des articles frivoles. Mais il est très difficile de mettre en place ce dispositif de contrôle. Ce n'est pas facile. Que peut acheter l'Iraq?

La résolution autorise le mouvement instantané, immédiat et libre de toute contrainte de produits pharmaceutiques, de produits alimentaires, d'approvisionnements médicaux, de matériel agricole, d'articles pédagogiques et de tout ce dont les Iraquiens ont besoin, selon la communauté internationale, d'un point de vue humanitaire.

• 1040

C'est donc à cela que doivent servir les 14 milliards de dollars. Si vous supprimez les sanctions, ils pourront servir à acheter n'importe quoi, et nous avons de sérieuses inquiétudes dans ce cas. Saddam n'est pas un dictateur tendre; c'est un dictateur. Nous en revenons toujours à la question fondamentale.

Est-ce que ce montant est suffisant pour l'Iraq? En l'occurrence, probablement pas. Il y a ensuite la question de savoir comment on peut aider l'Iraq à reconstruire sa société et son infrastructure, et c'est une tâche très importante et très difficile qui impliquera l'aide internationale. Cela ne fait aucun doute, vu la durée pendant laquelle les sanctions ont été imposées. L'Iraq a été mise à genou, et il faudra que la communauté internationale contribue à sa reconstruction. La question est de savoir quand, comment et dans quelles circonstances nous le ferons.

Nous disons qu'il y a maintenant une nouvelle offre sur la table et que c'est à l'Iraq de jouer en acceptant de coopérer avec les inspecteurs. C'est une offre que nous jugeons très raisonnable. Il est parfaitement raisonnable d'accepter de coopérer avec les inspecteurs, et cela permet à la communauté internationale d'avoir l'assurance morale que Saddam n'utilisera pas ces armes contre ses propres ressortissants.

Mais si nous levions les sanctions immédiatement, est-ce qu'il relancerait dès demain son programme de fabrication d'armes qu'il utiliserait la semaine suivante comme il l'a déjà fait dans le passé? C'est une question vraiment grave.

Merci.

Le président: Monsieur Assadourian.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Il faut savoir que 500 000 enfants sont morts au cours des 10 dernières années, depuis 1990. Je crois que c'est l'ONU qui a brandi ce chiffre en alléguant que c'était dû aux sanctions. C'est cela qui importe pour moi.

Revenons à la résolution de l'ONU: La dernière fois que nous avons discuté de la question, on nous a expliqué que la difficulté venait de ce qu'on disait dans la résolution que l'Iraq devait se conformer entièrement aux résolutions. On ne dit pas uniquement «se conformer», mais on précise «se conformer entièrement». Cela veut dire intégralement. Si on demandait à l'Iraq uniquement de se conformer, on pourrait accepter une mise en oeuvre à hauteur de 97, 98 ou 99 p. 100; mais lorsque l'on demande au pays de se conformer entièrement aux résolutions, cela nous empêche complètement de lever éventuellement les sanctions. Voilà mon premier propos, que je vous demande de commenter.

En deuxième lieu, on a mentionné plus tôt que tout ce que l'Iraq avait à faire, c'était d'accepter la visite des inspecteurs onusiens. Sauf erreur, je crois que les inspecteurs ont été boutés hors de l'Iraq, parce qu'ils ne travaillaient pas pour l'ONU mais plutôt pour une agence du gouvernement américain. Des inspecteurs ont été pris au fait dans des activités d'espionnage pour le compte du gouvernement américain, alors qu'ils devaient travailler pour l'ONU. Corrigez-moi là-dessus si je me trompe. On a entendu ces nouvelles à une époque où des caméras pouvaient encore se rendre là-bas; c'est un échantillon de ce que pourrait être l'argument de l'Iraq.

De plus, que je sache, jamais des sanctions appliquées mondialement par les Nations Unies depuis 50 ans n'ont eu pour le but de laisser mourir 500 000 enfants. Si on compare Saddam Hussein avec Nicolae Ceausescu ou le dictateur de la Corée du Nord, je ne sais pas qui est le pire d'entre eux. Je ne défends ni l'un ni l'autre, mais pourquoi, dans ce cas, n'imposerions-nous pas des sanctions similaires à l'égard de la Corée du Nord? Pourquoi n'avons-nous pas imposé des sanctions de ce genre à l'époque où Nicolae Ceausescu levait le bras sur les enfants de son propre pays? Les documentaires nous ont montré les orphelins.

Maintenant, que fait-on des voisins de l'Iraq, la Syrie et l'Iran? L'Iran ne s'oppose pas à la levée des sanctions. Cela fait 10 ans que ces deux pays sont en guerre et qu'ils ont tué un million de leurs opposants respectifs. Les sanctions ne me semblent plus logiques, car elles n'ont plus les effets escomptés. Elles n'ont pas réussi à faire tomber le régime, ni même à l'affaiblir, et Saddam Hussein peut encore déclarer la guerre s'il le veut. C'est d'ailleurs son genre.

Pouvez-vous répondre à mes questions?

M. John McNee: Monsieur le président, j'ai une ou deux choses à préciser au sujet de la mort de tous ces enfants.

• 1045

D'abord, nous ne cherchons pas à minimiser les souffrances qu'ont connues les Iraquiens depuis 10 ans. Mais je crois que le rapport de l'UNICEF dont parle M. Assadourian n'impute à personne les conséquences de la situation, mais note simplement que les taux de mortalité infantile pendant la période en question sont dus à plusieurs facteurs.

Il est instructif à cet égard de comparer les conclusions du même rapport sur les taux de mortalité infantile dans les trois provinces du nord du pays, là où les sanctions onusiennes s'appliquent intégralement, mais aussi où le programme humanitaire est administré par les Nations Unies. Dans ces provinces, les taux de mortalité ont en fait chuté au cours des 10 dernières années, ce qui laisse entendre que ce ne sont pas les sanctions en elles-mêmes qui sont les premières responsables. C'est beaucoup plus complexe.

Quant à savoir, comme le demande M. Assadourian, pourquoi on impose des sanctions à l'Iraq et non aux autres régimes tout aussi félons dans le monde, il faut comprendre que les sanctions ont été imposées par le Conseil de sécurité conformément au chapitre 7 de la Charte onusienne, qui établit que les sanctions doivent être imposées en réponse à une menace à la paix et à la sécurité du monde. La communauté internationale a évalué la menace et le Conseil de sécurité a réagi en imposant des sanctions à l'Iraq. Les sanctions ont été imposées dans la foulée de l'invasion du Koweit et de la menace persistante que l'on percevait contre la paix et la sécurité internationale.

M. Sinclair pourra peut-être répondre à votre question au sujet du degré de collaboration qu'exige la résolution 1284 de la part de l'Iraq.

M. Sarkis Assadourian: C'est une situation difficile.

M. Donald Sinclair: Pour ce qui est du respect des obligations et de la vérification, vous avez tout à fait raison de dire que la résolution initiale exigeait que l'Iraq se conforme entièrement aux termes de la résolution.

Mais comme pour la beauté, chacun peut juger à sa manière s'il y a respect de toutes les obligations. L'AIEA vient inspecter au Canada nos installations nucléaires, mais elle ne peut garantir à la communauté internationale qu'elle effectue une vérification intégrale. Elle ne peut garantir à 100 p. 100 que le Canada ne détourne pas du matériel nucléaire vers un programme d'armement, mais elle peut néanmoins garantir qu'elle utilise les normes les plus élevées possible de vérification pour s'assurer que le Canada ne détourne pas de matériel nucléaire au profit d'un programme d'armement.

Si je vous donne cet exemple, c'est parce qu'il démontre que même dans notre propre pays, qui adhère au régime de non- prolifération, nous sommes obligés d'ouvrir nos installations aux inspecteurs aux termes du traité, ce qui n'est pas nécessairement mauvais.

La nouvelle résolution 1284 s'éloigne de l'idée du respect absolu de toutes les conditions; si la résolution parle maintenant de «coopération», c'est précisément parce que nous craignions que certains pays mettent la barre trop haute en insistant sur le respect absolu par l'Iraq de toutes ses obligations.

L'interprétation du terme «coopération» est évidemment, elle aussi, subjective. Quand y a-t-il coopération et quand n'y en a-t-il pas? La résolution 1284 porte que les présidents respectifs de la COCOVINU et de l'AIEA fourniront au Conseil des rapports sur la nature de cette coopération. Or, on se fondera en grande partie sur ces deux rapports pour déterminer si l'Iraq a coopéré ou pas.

Vous avez raison de signaler le problème que posaient les termes utilisés dans l'ancienne résolution. Mais si vous vous reportez au paragraphe 33 de la nouvelle résolution—qui vous a été distribuée, je crois—, vous verrez que l'on interprète tout à fait différemment la coopération, justement parce qu'on a fini par se demander si la vérification intégrale, à 100 p. 100, était vraiment possible. Personne ne prétendra qu'elle l'est. Toutefois, il est possible d'atteindre les normes les plus élevées de vérification ainsi que de confiance eu égard aux méthodes utilisées en termes d'objectifs fixés pour la vérification ou pour les équipes d'inspection.

Pour ce qui est de la CSNU, vous avez raison de dire qu'elle s'est heurtée à des difficultés. Les histoires abondent sur les méthodes utilisées par la commission. De son point de vue à elle, elle utilisait tous les moyens à sa disposition pour essayer de découvrir ce à quoi voulait en venir Saddam et exactement ce qu'il avait caché à la communauté internationale et aux inspecteurs. Il est possible que dans certains cas, ceux-ci aient quelque peu forcé la note.

• 1050

Je répète que la nouvelle résolution fait table rase: on a nommé un nouveau président, on a constitué une nouvelle équipe d'inspection et on lui a donné un nouveau visage. On a agi avec détermination pour corriger les erreurs du passé et créer une nouvelle équipe d'inspection qui se rendra sur place pour faire son travail de vérification.

Le président: Merci.

[Français]

Madame Picard.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Bonjour, messieurs. Dans un premier temps, je ferai une remarque. Je me demande pourquoi on ne dit pas clairement que les États-Unis ne veulent pas lever les sanctions. Tout le monde sait qu'ils refusent de le faire parce qu'ils ont des intérêts stratégiques dans le golfe. Je ne sais pas pourquoi on essaie tout le temps de faire l'autruche.

Ma question portera sur le Programme pétrole contre nourriture. Vous avez mentionné que 13,5 milliards de dollars avaient été réservés à l'achat de produits à des fins humanitaires, dont 1 milliard pour des produits médicaux et un montant pour 12 millions de tonnes de produits alimentaires.

Comme l'indiquait ma collègue, des groupes sont venus témoigner la semaine dernière pour nous dire que les Irakiens ne peuvent pas vraiment bien se nourrir si on ne leur donne que 50 ¢ par jour. Certaines personnes ont soulevé le fait que la plupart des produits médicaux qui sont arrivés en Irak étaient périmés et que des tonnes de produits qui y avaient été acheminés avaient été vendus sur le marché noir. Il y avait une espèce de petite mafia qui contrôlait les produits alimentaires et les produits de base, et qui les échangeait à la frontière des pays voisins. Il y avait donc un problème de marché noir. Je me demande si vous vous êtes penchés sur ces questions. Si oui, comment pourrait-on corriger cette situation?

C'est la première fois qu'on fait allusion dans un document aux prisonniers de guerre du Koweït, et j'aimerais qu'on parle un peu de leur situation.

M. John McNee: Monsieur le président, il faut souligner le fait que le Programme pétrole contre nourriture ne représente qu'une facette de la situation en Irak et qu'il existe toujours une économie locale et des fermiers qui produisent dans ce pays. Ce programme est très important, mais il ne représente pas la seule source de nourriture. Nous sommes conscients que la contrebande affecte l'économie locale. Nous ne partageons pas le point de vue de ceux qui affirment que la plupart des médicaments arrivent dans un état périmé. Le secrétaire général des Nations Unies a publié il y a 10 jours, je crois, un rapport très détaillé qui porte sur tous les aspects humanitaires.

Je n'en citerai, monsieur le président, qu'un seul extrait au sujet du secteur de la santé. Je vous le citerai en anglais, si vous me le permettez:

[Traduction]

    Du côté de la santé, l'arrivée soutenue de médicaments au cours des phases IV et V a eu pour conséquence d'élargir la gamme des traitements [...]

[Français]

Il donne une foule de détails concernant les médicaments:

[Traduction]

    [...] et grâce à une plus vaste distribution des médicaments à tous les services de santé, le nombre de patients traités a augmenté de 46 p. 100 et 90 p. 100 des patients hospitalisés ont pu recevoir les médicaments dont ils avaient besoin.

• 1055

[Français]

Ce n'est pas la perfection, mais le secrétaire général des Nations Unies dit que 90 p. 100 des médicaments requis par les Irakiens hospitalisés sont disponibles en ce moment.

Vous avez mentionné la situation des prisonniers de guerre. Il y a toujours un nombre assez important de prisonniers de guerre et on cherche à trouver une solution, mais 10 années plus tard. Le chiffre...

[Traduction]

Dennis, vous vous en souvenez?

M. Dennis Horak (directeur adjoint, Direction du Moyen-Orient, Affaires étrangères et Commerce international): Il y a environ 600 Koweitiens et quelque 55 ressortissants d'autres pays qui sont toujours portés disparus.

Une commission est censée se réunir pour en discuter. L'Iraq n'a pas fait preuve d'une collaboration complète là-dessus, et vous comprenez que cela peut faire craindre le pire. Un des trois principaux rapports du groupe d'experts traitait de la situation des prisonniers de guerre. La nouvelle résolution comporte une ou deux dispositions destinées à relancer la recherche.

[Français]

Mme Pauline Picard: Vous dites qu'ils sont disparus. Est-ce parce qu'on est sans nouvelles d'eux et qu'on ne sait pas s'ils sont vivants, ou si on sait qu'ils sont enfermés dans une prison?

[Traduction]

M. Dennis Horak: C'est justement la question.

[Français]

On ne le sait même pas.

Mme Pauline Picard: D'accord.

[Traduction]

M. John McNee: Disparus au combat.

[Français]

comme au Vietnam. Ils ne sont même pas identifiés. On ne sait pas s'ils sont vraiment morts.

[Traduction]

M. Donald Sinclair: Ce qu'il faut comprendre notamment de la situation des prisonniers de guerre, c'est que l'Iraq nie qu'il y en ait. C'est le Koweit qui affirme que l'Iraq en détient 600. L'Iraq affirme qu'il n'y a pas de problème dans ce domaine. Les Nations Unies ne cessent de maintenir que l'Iraq se doit de collaborer là-dessus et de coopérer avec la Croix-Rouge internationale, tout comme il se doit de tenir compte de la situation humanitaire. Or, l'Iraq a refusé de le faire.

Le président: Êtes-vous en train de nous dire que depuis 10 ans, il n'y a jamais eu d'inspection des centres de détention iraquiens, ni même de visite aux prisons ou aux autres centres d'incarcération?

M. Donald Sinclair: Pas à ma connaissance, à moins que la Croix-Rouge ait réussi à se rendre dans certains centres de détention, mais tous ces centres sont contrôlés par le gouvernement iraquien, de toute façon. Le gouvernement peut bien inviter la Croix-Rouge à venir, mais c'est lui qui choisit le centre de détention qu'il veut bien laisser voir. Le problème est énorme, et particulièrement pour le Koweit.

Le président: Monsieur Paradis.

Mesdames et messieurs, il me reste cinq ou six personnes sur ma liste qui voudraient prendre la parole. Si nous pouvions nous limiter tous à cinq minutes, nous pourrions avoir terminé d'ici une demi-heure, ce qui nous laisserait une dizaine de minutes pour discuter de ce que nous souhaitons voir ajouter à la résolution. Nous pourrions avoir fini un peu plus tôt que prévu.

[Français]

M. Denis Paradis: Tout d'abord, j'ai quelques mots à dire sur la résolution 1284. Je crois que c'est un pas en avant. Certains vont dire que le pas est trop petit et qu'il arrive trop tard, mais c'est un pas en avant qui a été fait il y a quelque temps et dont on voit le résultat présentement.

J'aimerais qu'on parle d'avenir plutôt que du présent ou du passé. Tous les témoins que nous avons entendus ont parlé de l'inefficacité des sanctions générales contre le régime de Saddam Hussein. Les sanctions ne sont pas contre le régime, mais contre la population. Elles visent la population et font en sorte que le régime va continuer. Comme vous le mentionnez bien dans votre texte, c'est ce même gouvernement qui a détourné les ressources, pourtant rares, pour faire construire 48 palais et un centre de villégiature de luxe destiné à l'élite irakienne. Mais ça va continuer. Saddam se fout un peu de sa population et on a un peu la démonstration, avec les témoins qu'on a entendus, que ça ne marche pas. Les sanctions contre la population pour faire changer Saddam d'idée ne marchent pas. On est un peu pris dans ce contexte-là. Tout le monde est d'accord pour qu'il y ait des sanctions contre Saddam Hussein et tout le monde est d'accord pour qu'il y ait des sanctions contre son régime, mais comment pourrions-nous faire en sorte qu'il y ait des sanctions contre Saddam, contre ceux que l'on vise, contre son régime, sans qu'il y ait des sanctions contre la population, qui souffre énormément? On l'a vu: des enfants meurent, etc. Il y a un peu de nouveau dans le droit humanitaire international avec le Kosovo où, pour une des premières fois peut-être, le droit humanitaire, ou le droit d'intervention humanitaire, l'a emporté sur la souveraineté de l'État. Il y a une évolution.

• 1100

On a l'impression qu'en Irak, il faut du temps avant qu'il y ait une évolution. On se dit que la vieille méthode est d'imposer des sanctions et qu'il va finir par écouter. C'est un peu ce que vous mentionnez à la page 6 de votre texte, où vous dites être convaincus que l'Irak finira par accepter la résolution, pourvu que la communauté internationale demeure ferme et unie.

Mais cela fait une dizaine d'années que c'est comme ça. Alors, je me demande ce qu'il faudra faire. Qu'est-ce que le Canada pourrait faire? Nous allons assumer la présidence du Conseil de sécurité à compter du début du mois d'avril. Ne faudrait-il pas faire preuve d'un leadership nouveau? Ne faudrait-il pas faire preuve d'ingéniosité, d'imagination? Ne devrait-on pas être inventif au niveau international lorsqu'on voit que quelque chose ne fonctionne pas, comme des sanctions dirigées vers la population alors qu'elles devraient être dirigées davantage vers les auteurs du régime, vers le président, vers Saddam Hussein? Comment fait-on pour s'élever contre Saddam et son régime sans pénaliser toute la population, comme c'est le cas en Irak en ce moment?

M. John McNee: Monsieur le président, nous sommes très ouverts à des idées nouvelles que vous pourriez nous proposer. Nous vous en serions très reconnaissants. Dans ce contexte-là, la réponse à la question de M. Paradis est qu'à notre avis, il y a eu une très grande évolution dans le régime de sanctions depuis 10 ans. La conclusion de ce processus, c'est-à-dire la nouvelle résolution de décembre, représente en soi un raffinement considérable du régime de sanctions qui a été imposé au début et qui vise à faire exactement ce que vous cherchez, c'est-à-dire minimiser les conséquences sur la population, mais maintenir un cadre de contrôle et d'obligations pour pousser le régime.

À notre avis, le fait qu'il n'y ait plus de limites aux exportations pétrolières, dont les revenus servent à payer la nourriture et les médicaments et à maintenir l'infrastructure, le fait que l'achat par l'Irak d'une multitude de choses sera automatiquement autorisé, ce qui n'était pas le cas...

M. Denis Paradis: Monsieur McNee, c'est peut-être juste un pas de plus que je souhaiterais que l'on fasse, et peut-être que d'autres membres du comité le souhaiteraient aussi. Comment faisons-nous pour éviter que les sanctions qui sont dirigées vers la population soient dissociées des inspections, du désarmement, etc.? Présentement, les deux dossiers sont intimement liés. Les deux éléments clés de notre politique, que vous avez mentionnés, sont extrêmement liés l'un à l'autre. Comment est-il possible de dissocier ces deux éléments clés tout en les gardant tous les deux, pour qu'ils ne soient pas interdépendants et pour faire en sorte que le Canada assume un leadership? Il y a de la place pour un leadership dans le monde. Comment faire pour y arriver?

M. John McNee: La grande question, monsieur le président, est de savoir comment exercer une pression efficace sur Saddam Hussein pour changer son comportement. C'est un défi auquel la communauté internationale fait face depuis 10 ans sans qu'il y ait eu de progrès. Tout à l'heure, on a fait allusion au progrès considérable qui a été fait par les inspecteurs pendant une longue période.

On n'a pas de solution magique à ce problème. Certaines personnes demandent pourquoi on ne remplace pas le régime de sanctions par un régime visant uniquement les choses militaires.

• 1105

Le problème, pour nous, c'est que Saddam Hussein a construit ses armes de destruction massive en faisant importer toute une gamme de matériaux, de produits chimiques et industriels qu'on appelle les dual-use items, des produits qui sont tout à fait légaux pour faire les... [Note de la rédaction: Mot inaudible] ...ou je ne sais quoi, mais qui servent aussi à produire des armes chimiques. Comment faire face à un défi comme celui-là? C'est pour nous un énorme problème qui nous pousse à maintenir un régime de sanctions plus vaste pour nous assurer de couvrir cet aspect qui a été déterminant dans le passé et qui, nous en sommes persuadés, reviendra dans le futur.

Bref, c'est ce qui nous amène à appuyer...

M. Denis Paradis: Monsieur McNee, je ne veux pas abuser du temps qui m'est imparti.

M. John McNee: Je vous en prie, monsieur Paradis. Voilà où nous sommes rendus.

M. Denis Paradis: Merci beaucoup.

Le président: Madame Beaumier, et ensuite Mme Debien.

[Traduction]

Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Tout cela est pour moi très frustrant. Comment faire pour aller au-delà de la propagande? On a l'impression d'entendre toujours la même propagande, celle des États-Unis.

Vous n'avez pas répondu à une des questions de M. Assadourian. Les Iraquiens se plaignaient du fait que la CIA comptait pour une grande partie de l'équipe d'inspection de la CSNU, ce que réfutaient avec véhémence les Américains jusqu'à ce qu'ils finissent par l'avouer. Comment l'Iraq peut-il être sûr que...? Les Iraquiens pourront-ils cette fois-ci choisir les membres de l'équipe d'inspection? Cela, c'est une des questions. Je ne sais pas comment l'Iraq parviendra à établir des preuves à rebours, et toute cette hypocrisie m'embête un peu.

Ce n'est pas que je sois d'accord avec Saddam Hussein, peu s'en faut. Mais nous savons que Saddam Hussein avait mis sur pied un régime exhaustif de soins de santé pour la population, que les Iraquiennes avaient plus de droits que dans beaucoup d'autres pays arabes, et que les Kurdes de l'Iraq avaient leur propre hôpital et leur propre système scolaire.

Lorsque vous dites qu'il faut protéger les minorités, j'imagine que vous parlez surtout des Kurdes, car les chrétiens, que je sache, se sentaient relativement en sécurité avec Saddam Hussein au pouvoir, lui qui n'est peut-être pas parfait, mais... Nous critiquons Saddam Hussein pour la façon dont il traite les Kurdes, mais nous envisageons d'autre part de vendre un réacteur nucléaire à la Turquie. Il semble même que personne ne se soit opposé au fait que Saddam Hussein utilisait des armes chimiques contre l'Iran, parce que cela faisait l'affaire des États-Unis; mais aujourd'hui, nous voulons être sûrs—comment nous y parviendrons, je n'en sais rien—qu'il ne lui reste plus une trace de ces armes qui lui avaient été fournies à l'origine par nos propres alliés.

Ensuite, nous sommes fondamentalement d'avis que Saddam Hussein doit partir; mais qui le remplacera? Nous sommes toujours convaincus de notre omniscience. Prenez le cas de l'Afghanistan: même si les Américains n'intervenaient pas là-bas ouvertement, il était quand même reconnu qu'ils aidaient à financer les rebelles. Or, regardez un peu quel type de régime est instauré aujourd'hui en Afghanistan. Moi-même, et beaucoup d'autres aussi, croyons qu'une bonne dizaine de chefs ne seraient que trop heureux de remplacer Saddam Hussein, mais peut-être bien pour le pire.

À mon avis, les raisons pour lesquelles on a déclenché la guerre étaient, dès le départ, très nébuleuses. Cela me chiffonne d'entendre M. Sinclair parler de raisons «morales» pour justifier notre participation actuelle.

M. John McNee: Monsieur le président, si je peux...

Le président: Essayez de répondre?

M. John McNee: Commençons par la politique du Canada vis-à-vis de Saddam Hussein et l'avenir. Le Canada ne serait certainement pas catastrophé de le voir quitter la scène, mais notre politique n'est pas non plus de renverser le régime. Nous sommes d'avis que le changement doit venir de l'intérieur.

M. Ted McWhinney: De plus, il est illégal de prendre part au renversement d'un gouvernement étranger.

M. John McNee: En effet. Voilà qui précise la politique du Canada.

• 1110

Mme Beaumier s'interroge, en second lieu, au sujet des motifs pour lesquels la guerre a été déclenchée au départ. Il me semble qu'ils étaient très clairs: l'Iraq avait envahi un État voisin.

Mme Colleen Beaumier: Dans une lettre, l'ambassadeur des États-Unis affirme que son pays n'avalise pas cette manoeuvre, mais...

M. John McNee: Nous sommes ici aujourd'hui pour tenter de répondre aux questions que vous auriez au sujet de la politique du Canada et expliquer pourquoi, à l'époque, le Canada avait appuyé la coalition dont l'objectif était de refouler l'invasion et y avait pris part. L'intervention de la communauté internationale en vue de prévenir ce type d'agression est un principe très important.

Quant à la question du traitement de la minorité kurde en Iraq, comme je l'ai déjà dit, il est important de regarder la façon dont se passent les choses actuellement dans le nord de l'Iraq, c'est-à-dire dans les trois provinces qui sont administrées par l'ONU. Dans le dernier rapport du secrétaire général de l'ONU qui remonte maintenant à dix jours, on constate que, dans presque tous les domaines, il y a eu de grandes améliorations dans cette région- là, lui permettant de dépasser le sud. À notre avis, la morale de cette histoire...

Une voix: Morale?

M. John McNee: La leçon qu'on peut en tirer, si vous préférez, c'est que le cadre que fournit le programme d'aide humanitaire peut faire toute la différence. Le gouvernement iraquien accepte même à certains égards d'utiliser dans le sud des méthodes qui ont fait leurs preuves dans le nord.

Quant au nouveau régime d'inspection, il sera constitué différemment du précédent. M. Blix, qui préside l'équipe, est un homme de grande intégrité et de grande expérience dans le domaine nucléaire. Mes collègues pourront me corriger, mais je crois que le Canada juge qu'il serait déraisonnable d'accorder à l'Iraq un droit de veto sur le choix des membres de la communauté internationale qui pourraient prendre part aux inspections. Le Canada dirait plutôt—mais j'ai peut-être tort—que c'est au Conseil de sécurité de décider qui fera partie du groupe.

M. Donald Sinclair: Un commentaire. Si j'ai parlé de «moral», c'était au début, en parlant de responsabilité. J'ai demandé si le Canada ou la communauté internationale pourrait être tenu responsable si, délibérément et sans faire de vérification, nous laissions un dictateur fabriquer des armes de destruction massive alors qu'il a déjà démontré qu'il serait prêt à les utiliser contre son propre peuple. Comme ce sont des hypothèses et qu'il n'y a aucune garantie ni dans un sens ni dans l'autre, vous devez vous convaincre vous-mêmes de la légitimité de vos actions. Dès lors que vous êtes prêts à lever les sanctions, vous devez en accepter les conséquences.

La position du Canada et celle de tous les membres du Conseil de sécurité est la suivante: il faut d'abord et avant tout régler la question de la fabrication des armes de destruction massive. Nous y sommes presque arrivés. Une nouvelle offre a été mise sur la table qui exige seulement la coopération de l'Iraq. Pourquoi ne pas régler d'abord cette question, clore le dossier, puis suspendre les sanctions une fois que cela est terminé? Pour nous, c'est très simple.

Il y a beaucoup d'autres questions qui ont été soulevées aujourd'hui sur lesquelles nous ne nous sommes pas suffisamment expliqués, sans doute, et je ne suis pas sûr d'avoir bien répondu à la question des 50 cents. Brièvement, les 14 milliards de dollars sur lesquels peut actuellement compter l'Iraq dépendent de sa capacité de production de pétrole et de ses possibilités de le vendre. Que les sanctions soient levées ou pas, l'Iraq pourra toujours mettre la main sur 14 milliards de dollars, puisque cela représente la quantité de pétrole qu'il peut actuellement produire. Il n'y a pas beaucoup d'autres façons de faire de l'argent pour l'Iraq, puisque ce pays n'a pas une production très diversifiée et qu'il n'existe aucune système de taxation interne. Peu importe ce qui arrive, ce montant sera de 14 milliards de dollars, divisé par la population iraquienne. Toute la question, c'est de savoir comment cet argent sera distribué, et si vous levez les sanctions, il s'agira de savoir quelle partie de cette somme sera consacrée au réarmement, aux armes, aux chars d'assaut, et à je ne sais quoi d'autre. Voilà le problème auquel nous faisons face.

• 1115

Merci.

Le président: Madame Debien, ou plutôt madame Beaumier.

Mme Colleen Beaumier: Je ne comprends pas pourquoi les témoins n'ont pas répondu à ma question qui était excellente, à mon humble avis. Je m'interrogeais au sujet de notre politique de deux poids deux mesures et je me demandais pourquoi nous permettons à d'autres régimes de faire ce que nous reprochons à l'Iraq. Toute cette hypocrisie m'embête énormément.

M. John McNee: Monsieur le président, je n'ai pas répondu à l'une des sous-questions de Mme Beaumier, au sujet de la position du Canada sur l'utilisation par l'Iraq d'armes chimiques lors de sa guerre avec l'Iran. Le Canada n'a jamais excusé ni appuyé le recours à ces armes chimiques et a même critiqué avec véhémence l'Iraq là-dessus. Ce qu'elle a dit n'est donc pas juste. Le Canada n'a jamais appuyé des actions de ce genre, et il est inconcevable qu'il le fasse un jour.

Le président: Bien.

[Français]

Madame Debien.

Mme Maud Debien: Tout d'abord, je ferai une remarque concernant ce que M. McNee nous a dit tout à l'heure. Vous avez dit, monsieur McNee, qu'entre les premières résolutions concernant les sanctions en Irak et la résolution 1284, il y avait eu un énorme progrès et un certain raffinement. Je suis d'accord avec vous: il y a eu un progrès et un raffinement de la souffrance de 100 p. 100. Ce n'est pas ce que vous avez voulu dire, mais c'est ma façon de l'interpréter.

Vous nous avez remis un document concernant la résolution 1284. J'ai posé une question la semaine dernière—ou c'est plutôt ma collègue qui l'a posée—concernant le fameux compte sous séquestre dont on fait mention au dernier paragraphe. Je lisais rapidement les paragraphes 23, 24 et 25, qui ont justement trait à cette question du fameux compte sous séquestre. C'est un petit peu abstrait pour nous qui sommes des profanes.

En fonction de la résolution 1284 et du fameux fonds qui sera sous séquestre, de quelle façon va-t-on acheminer cette aide? Quel est le fonctionnement de tout cela? Il ne faut surtout pas que cet argent aboutisse entre les mains de Saddam Hussein. C'est ce que je comprends à la lecture des paragraphes 23, 24 et 25 de la résolution 1284. Alors, quel est le mécanisme permettant l'acheminement de ce fonds déposé dans un compte sous séquestre?

M. John McNee: Si je comprends bien, monsieur le président, la procédure ne change pas; c'est-à-dire que—et mes collègues sont plus experts que moi—l'Irak est autorisé à exporter du pétrole et que les revenus ne reviennent pas directement au gouvernement.

Mme Maud Debien: Non, ils sont mis dans un compte sous séquestre.

M. John McNee: Voilà, et puis...

Mme Maud Debien: C'est là ma question. L'administration de ce compte sous séquestre est faite par le secrétaire général. Jusque-là, ça va. Mais ensuite, comment l'aide est-elle acheminée?

M. John McNee: À tous les six mois, le gouvernement de l'Irak doit soumettre au Conseil de sécurité un plan d'achat donnant le nombre de tonnes de céréales, la quantité de médicaments...

Mme Maud Debien: D'accord.

M. John McNee: Les listes sont énormes: c'est un grand pays. Après cela, ces plans, qu'on appelle les plans de disposition, sont approuvés par le Conseil de sécurité et les contrats sont autorisés; quand ils sont autorisés, les fournisseurs sont payés par les Nations Unies à partir de ce compte. Bien sûr, il y a certains frais. Si je me souviens bien, il y a des frais d'administration du fonds par les Nations Unies, des sommes prévues pour les réparations envers le Koweït. Ainsi, il y a certaines dépenses dans tout cela.

• 1120

Mme Maud Debien: Je comprends très bien et je vous remercie de ces précisions, mais je vais vous donner un exemple bien concret. Dans la liste de produits que l'Irak soumet au fameux comité des Nations Unies, supposons qu'il y ait—c'est un chiffre tout à fait fictif—2 000 tonnes de blé. On a besoin de 2 000 tonnes de blé. Alors, on passe un contrat avec un fournisseur pour acheminer 2 000 tonnes de blé, ou des médicaments ou autre chose, à la population irakienne. À ce moment-là, qui reçoit 100 tonnes de blé? Qui reçoit des boîtes de médicaments? Qui reçoit ces produits et qui les distribue? C'est là ma question.

[Traduction]

M. Donald Sinclair: C'est une excellente question qui va au coeur de l'un des problèmes, à savoir la distribution de ces biens, après leur arrivée en Iraq.

Dès que le bateau arrive en Iraq, un inspecteur de l'ONU monte à bord pour s'assurer que le blé ne cache pas d'armes. Une fois que le blé est déchargé et que les fournisseurs sont payés, le produit se retrouve entre les mains du gouvernement iraquien. Autrement dit, une fois le blé déchargé sur le quai, le gouvernement peut en faire ce qu'il veut, et fait sa distribution, notamment, qui pose problème.

[Français]

Mme Maud Debien: C'est tout un problème, parce qu'à ce moment-là, le gouvernement peut le revendre sur le marché noir ou le revendre à un autre pays. Dans la résolution 1284, n'y a-t-il pas un mécanisme de prévu pour la redistribution? On tourne en rond.

M. John McNee: Je crois qu'une partie de la réponse, monsieur le président, se trouve dans le paragraphe 21 de la résolution. Voilà, je l'ai en anglais. On parle d'améliorer ou d'augmenter l'inspection ou l'observation faite par les gens des Nations Unies sur le terrain pour s'assurer que ce qui est fourni soit utilisé comme prévu et autorisé. Sinon, ils doivent donner l'alerte. Cela devrait améliorer la situation.

Mme Maud Debien: D'accord. D'après ce que je comprends, le problème est là.

Le président: Il y a un petit problème, mais tout ce qu'on peut faire, c'est une sorte de vérification. On ne peut pas remplacer toute l'administration irakienne. Cela coûterait une fortune aux Nations Unies et on n'est pas prêt à payer cela.

Mme Maud Debien: D'accord. Merci.

Le président: Ce serait en quelque sorte comme au Kosovo, mais la situation est complètement différente. En tout cas, ce serait impossible.

Monsieur Patry. Ce sera ensuite à Mme Augustine et à M. McWhinney.

M. Bernard Patry: Ce matin, vous nous avez parlé de l'équation irakienne et du fait que le désarmement était un élément essentiel et incontournable. C'est ce que vous nous avez dit. Dans votre énoncé, vous nous avez aussi dit ce matin, et je vous cite en anglais:

[Traduction]

«Si ce bilan [du programme de pétrole contre nourriture] est impressionnant», et que la mission canadienne de novembre dernier à Baghdad a «constaté certaines améliorations»... La mission n'a pas dit avoir constaté des améliorations impressionnantes; elle a dit seulement «certaines améliorations».

Vous parlez des médicaments, mais vous n'avez pas vraiment répondu à la question de Mme Picard au sujet des médicaments périmés. C'est honteux d'envoyer en Iraq des médicaments périmés.

On en est arrivé au point où l'Iraq ne peut plus acheter de la craie pour les tableaux dans les écoles, et c'est peut-être parce qu'il pourrait l'utiliser pour produire des armes. C'était ce que disait le journal cette semaine, et c'est incroyable.

Monsieur McNee, vous avez dit que dans les provinces du nord de l'Iraq, la mortalité infantile avait chuté. Pourriez-vous donner à notre comité vos chiffres, étant donné que tous les témoins déjà entendus nous ont dit au contraire que de 300 à 500 enfants iraquiens mouraient chaque mois, ce qui est un chiffre saisissant.

Prenons maintenant un point de vue réaliste et parlons des militaires et de la menace que pose l'Iraq. Lorsque l'Iraq a déclenché la guerre contre l'Iran, il avait l'appui sans condition des États-Unis et des pays occidentaux, comme vous le signalait ma collège, Mme Beaumier. Soyons réalistes: à quel point l'Iraq est-il menaçant? L'Iraq s'est-il vraiment modernisé, si l'on considère que cela fait des années qu'il ne peut importer de nouvelles armes technologiques et si l'on considère qu'il n'a même pas été capable de se défendre le moins du monde contre les bombardements des pays occidentaux? Ne diriez-vous pas que les sanctions et l'embargo constituent des punitions exagérées qui nuisent surtout à la population iraquienne?

• 1125

En second lieu, vous dites que les inspecteurs en armement ont examiné les armes chimiques et nucléaires de l'Iraq, qu'ils se sont dit satisfaits de la situation, mais qu'ils doivent maintenant examiner les armes biologiques. Ne pourrait-on pas conclure, par conséquent, que la menace militaire que pose l'Iraq est grandement exagérée?

Je voudrais faire un petit commentaire pour conclure. Pourquoi les États-Unis et la Grande-Bretagne continuent-ils à bombarder quotidiennement l'Iraq? On nous a parlé de 30 000 sorties qui ont été effectuées soit en 1998 soit en 1999. C'est à n'y rien comprendre. J'aimerais bien qu'on nous répondre, car le Canada est un des protagonistes.

Pour terminer, le Canada entamera la semaine prochaine la présidence du Conseil de sécurité. Il est grand temps de trouver une solution et de réévaluer toutes ces sanctions.

Voilà ce que j'avais à dire.

M. John McNee: Monsieur le président, M. Patry a soulevé plusieurs questions différentes que j'aimerais aborder assez vite.

Pour ce qui est des taux de mortalité infantile, je parlais du rapport qu'a dressé l'UNICEF et que nous serions très heureux de vous faire tenir. Ce document n'a pas son pareil à mon avis.

En ce qui concerne l'importation de la craie, ce n'est pas ce que nous en savons. À notre connaissance, il n'y aurait aucun problème dans le cas de la craie. Il y a une nouvelle liste de...

M. Bernard Patry: J'ai lu cela à propos de la craie cette semaine. C'est paranoïaque.

M. John McNee: Il y a toute une nouvelle liste de matériels pédagogiques dont l'importation est permise sans difficulté.

En ce qui concerne les médicaments d'ordonnance dont la date est périmée, Dennis, êtes-vous...

[Français]

M. Bernard Patry: Ils sont périmés.

[Traduction]

M. Dennis Horak: Il y a eu des rapports à cet effet par le passé. Je ne connais pas l'ampleur du problème. Je sais que certainement dans le rapport le plus récent du secrétaire général, il n'en est pas question. Comme l'a dit M. McNee, on répond à 90 p. 100 des besoins des personnes hospitalisées dans la région centrale du pays, et je crois qu'il l'aurait mentionné s'il y avait un problème de médicaments périmés.

Je ne conteste pas le fait que cela s'est produit par le passé, pas du tout. Cela s'est certainement produit et ce n'est pas quelque chose que nous pouvons défendre. Il y a toutefois des procédures en place à cet effet. Il y a inspection des produits. L'Iraq peut rejeter un contrat, et si la cargaison n'est pas déchargée, le fournisseur n'est pas payé. Cela se passe en affaires. Il s'agit après tout de transactions commerciales. Une entreprise signe un contrat, et si elle ne le respecte pas, elle n'est pas payée. Si l'on vérifie les produits et qu'on ne les décharge pas, l'entreprise n'est pas payée. C'est comme ça.

M. John McNee: Je ne pense pas qu'il soit juste de dire que dans la guerre Iran-Iraq, le Canada appuyait pleinement l'Iraq. Ce n'était pas notre politique.

M. Bernard Patry: Les États-Unis.

M. John McNee: La question des bombardements est importante. Il faut absolument comprendre la situation actuelle là-bas: il y a des patrouilles aériennes très fréquentes, parfois quotidiennes—mes collègues me corrigeront si je fais erreur—de zones précises entre certaines latitudes dans le nord et le sud de l'Iraq par des avions américains et britanniques. Ces zones d'exclusion aériennes comme on les appelle ont été établies pour protéger les civils iraquiens des attaques par l'armée et l'aviation iraquienne sous la direction de Saddam Hussein. L'objectif est de protéger les civils et d'empêcher les attaques contre les minorités.

Vous vous rappellerez, monsieur le président, qu'à la suite de la guerre du Golfe, il y a eu une possibilité réelle de révolte armée dans le nord et dans le sud. Les avions sont donc là pour protéger. Il ne s'agit pas de sorties de bombardement, il s'agit de patrouilles. Lorsqu'il y a opposition, les avions de la coalition ripostent, mais le Canada appuie l'application des zones d'exclusion aérienne comme moyen de protéger les minorités civiles dans le nord et dans le sud. C'est vraiment un malentendu que de parler d'une campagne de bombardements.

• 1130

J'ai écrit «présidence du conseil». Je dois admettre que j'ai oublié la question, monsieur le président. On demandait si le Canada...?

M. Bernard Patry: N'est-il pas temps que le Canada s'affirme et tente de faire une évaluation de toutes ces sanctions imposées un peu partout dans le monde, parce que du point de vue humanitaire, ça ne fonctionne pas. Cela fait dix ans que nous imposons des sanctions à l'Iraq. Les gens meurent, les enfants meurent à tous les jours. Ça ne fonctionne pas, un point c'est tout. Il nous faut trouver autre chose.

Nous devons, comme vient de le mentionner mon collègue, distinguer entre l'aspect nucléaire et l'aspect humanitaire. C'est très important. Je veux simplement savoir si vous estimez vraiment qu'à l'heure actuelle—voilà ma question—les militaires iraquiens constituent une menace, qu'il n'y a pas exagération. Après tout, il n'y a aucun pouvoir actuellement en Iraq. Je parle du nucléaire et du chimique; on dit qu'il n'y a plus d'armes nucléaires ni chimiques. Et il ne s'agit que d'armes biologiques et je pense que vous pouvez consulter l'Internet pour apprendre à en fabriquer.

M. John McNee: Monsieur le président, je pense que ce qu'il faut dire, c'est que vu l'histoire, cette histoire passée terrible du régime iraquien, ce régime qui a déclenché deux guerres très destructives, ce régime qui traite mal ses propres citoyens, nous ne pensons pas qu'il soit prudent ni raisonnable que la communauté internationale donne le bénéfice du doute à Saddam Hussein. À notre avis, voilà la question, il faut que la communauté internationale fixe des limites afin de lui lier les mains.

Nous ne sommes pas ici aujourd'hui pour dire que nous avons trouvé la solution idéale, pas du tout. Nous reconnaissons que la situation est grave pour les habitants de l'Iraq, nous en sommes parfaitement conscients. Si nous avions une meilleure solution, une solution magique, nous serions certainement là pour la préconiser.

Le président: Merci.

Madame Augustine suivie de M. McWhinney.

Mme Jean Augustine: Merci, monsieur le président.

Nous avons entendu des témoignages déchirants. Nous avons entendu parler d'enfants affamés. Des témoins nous ont dit que comme Canadiens, ils n'arrivent pas à comprendre comment des femmes et des enfants iraquiens affamés répondent à l'intérêt national du Canada.

J'aimerais simplement exprimer un peu ma frustration ou ma déception, surtout à la lumière de la dernière page de votre document, car comme ministère, vous conseillez le ministre, vous avez un mot à dire. Il me semble qu'alors que nous sommes aux prises avec cette résolution et que notre comité cherche un moyen de conseiller ou d'avancer une position, vous ne nous avez vraiment pas donné quelque chose d'approfondi dans votre conclusion, où vous dites: «Le Canada espère mettre un terme à une situation qui dure depuis trop longtemps. Trop longtemps pour la sécurité régionale et internationale et trop longtemps pour le peuple iraquien.»

Je pense que nous le comprenons. Mais, que pouvons-nous faire? Quelles sont vos suggestions...? Encore et encore, dans vos derniers paragraphes, vous dites: «L'Iraq sait ce qu'il a à faire pour rompre son isolément et lever les difficultés de son peuple.», et vous ajoutez que nous avons «repris une politique d'engagement constructif» et que le Canada doit «s'activer pour que soit mise en place...». Mais je vous demande, comment?

Est-ce que nous sommes en mesure de prendre une décision autonome en matière de politique étrangère relativement aux sanctions contre l'Iraq? Dans l'affirmative, quelle devrait être, selon vous, les spécialistes, cette décision autonome en matière de politique étrangère?

• 1135

M. John McNee: Monsieur le président, pour revenir sur quelques points, j'ai mentionné à plusieurs reprises un rapport récent du secrétaire général des Nations Unies sur la situation humanitaire en Iraq. Et nous serions très heureux de mettre à la disposition du comité ce rapport des plus détaillés. On le trouve à la page Web des Nations Unies. On y fait valoir qu'en ce qui concerne la nutrition des enfants, il y a eu une réduction de la malnutrition aiguë chez les enfants de moins de cinq ans qui est passée de 3,1 p. 100 en 1997 à 1,8 p. 100 en 1999. Au cours de la même période et pour le même groupe d'âge, la malnutrition chronique est tombée de plus de 30 p. 100 à environ 18 p. 100. Cela ne signifie pas que tout est parfait, mais le secrétaire général fait ressortir qu'il y a eu des améliorations sur ce front ces derniers temps.

Pour revenir en arrière, la politique étrangère du Canada, comme le savent les membres du comité, a toujours inclus une composante multilatérale très forte. La politique canadienne, si on remonte à M. Pearson, cherche les approches collectives afin d'instaurer des changements positifs dans le monde. Dans ce contexte, comme l'a dit mon collègue, lorsque nous sommes devenus membres du Conseil de sécurité des Nations Unies il y a un plus d'un an maintenant, nous n'avons pas tenté d'adopter une approche indépendante mais de trouver un terrain commun d'entente entre les membres du conseil dont les opinions sur nombre de ces questions sont très divergentes.

Je pense que la contribution du Canada consiste à tenter de briser l'impasse entre les autres membres de ce groupe qui sont ceux qui ont la responsabilité de régler cette situation, et les seuls qui peuvent le faire efficacement. Sans trop nous vanter, je pense pouvoir dire que le Canada a joué un rôle très utile en proposant ces commissions qui en fait ont donné naissance à cette nouvelle résolution.

En ce qui concerne l'Iraq, nous considérons que les Nations Unies doivent aller de l'avant le plus rapidement possible et mettre en oeuvre toute la rationalisation, tout l'allégement, l'amélioration du programme humanitaire promis dans cette résolution. Il faut que cela se fasse le plus rapidement possible afin d'expédier le plus grand nombre de ces produits en Iraq, le plus tôt possible.

Nous appuyons l'idée qu'avance actuellement le conseil, une nouvelle idée qui permettrait de doubler la somme d'argent disponible pour les pièces de rechange dans le secteur de l'industrie pétrolière en Iraq afin de permettre au pays de continuer à produire du pétrole afin de gagner les recettes à l'exportation nécessaires pour payer des aliments et des médicaments à sa population. Voilà le genre de nouvelles initiatives que nous pensons d'un grand apport.

Toutefois, en Iraq, nous sommes en mi-courant et nous pensons qu'il faut persister jusqu'à la conclusion. Qu'il y ait ou non des conclusions plus importantes à tirer lors d'autres crises à l'avenir—et à la lumière des leçons à tirer de l'expérience en Iraq c'est peut-être le cas. Mais en ce qui concerne l'Iraq, nous pensons que c'est la chose à faire.

Mme Jean Augustine: Donc en dernière analyse voulez-vous dire qu'il n'y a rien à faire en ce qui concerne notre propre résolution?

Notre propre résolution sert à quoi, monsieur le président?

Le président: Je pense que nous aurons l'occasion d'en discuter après cette table ronde, qui risque de durer aussi longtemps que les sanctions, à bien y penser.

Néanmoins, je pense que nous sommes libres de recommander ce que nous voulons quant à savoir si... On a parlé de découplage, et je pense qu'il faudra discuter de ces questions une fois que nous pourrons profiter de l'expertise de nos collègues. J'ai des questions que je poserai après M. McWhinney, mais je dois vous dire que j'éprouve le même sentiment de frustration qu'un grand nombre des membres du comité.

Nous semblons entendre deux sons de cloche tout à fait différents de deux groupes complètement dignes de confiance... D'après ce que vous nous avez dit ce matin et ce que M. Halliday nous a dit l'autre jour, on peut conclure que c'est le jour et la nuit. Je n'ai aucun moyen de savoir qui a raison, qui a tort, qui vise juste et qui passe à côté. Vraiment pas.

• 1140

D'après M. Sinclair, c'est simple. La résolution 1284 va résoudre tous les problèmes. Il suffit que l'Iraq devienne décent, un bon citoyen, et ce sera fini. M. Halliday nous dit que la résolution 1284 ne réglera rien; les gens vont continuer à avoir faim, l'économie continuera à être en ruines, vous ne faites rien, les Nations Unies sont malhonnêtes dans l'application des résolutions. Il faut un découplage et il faut régler cet aspect.

Voici quelqu'un qui est un spécialiste de renommée mondiale sur le sujet, qui surveille la situation depuis des années. Franchement, je regrette, je ne veux pas vous crier par la tête, mais je suis complètement, oui complètement perplexe. Si je regarde autour de la table, je pense que mes collègues ressentent la même chose. Nous ne savons pas quoi recommander, parce que nous ne comprenons pas.

Je ne comprends pas la situation, sa raison d'être, comment la résolution 1284 la modifie, ce que Saddam Hussein a refusé de faire pour mettre en place la résolution 1284, et qui a raison et qui a tort. Enfin, je pense tout haut.

Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney: Merci, monsieur le président. En passant, je tiens à dire à nos témoins que nous apprécions leur travail et leur témoignage. Un aspect intéressant d'une démocratie florissante au Canada, c'est le fait que ce sont les députés ministériels qui ont posé les questions vraiment difficiles. Je suis surpris à certains égards par l'attitude combative de certains de mes collègues. Je vais donc tenter de maintenir la tradition.

L'un des problèmes ici, c'est que la Cour suprême du Canada a déclaré qu'une guerre prend fin à un certain moment, et même s'il y a une période d'après-guerre, celle-ci n'est pas précise. Dans une décision il y a deux ou trois ans au plus, la Cour suprême du Canada... La guerre du Golfe est terminée depuis plus de neuf ans, et pourtant nous constatons que la Grande-Bretagne et les États- Unis... L'un de nos témoins a mentionné la surveillance des zones d'exclusion aérienne, mais d'après les témoignages que nous avons entendus, il y aurait eu bombardement sans discernement depuis l'opération Desert Fox en 1998.

Je suppose qu'un aspect rassurant dans toute cette affaire c'est que l'on a approché d'autres pays, y compris le Canada, qui ont décidé de ne pas participer à l'opération Desert Fox en 1998.

La résolution 1284 se fonde sur le chapitre VII pour justifier sa légalité, un chapitre qui est en fait une disposition de guerre. Mais là encore, la difficulté vient du fait que c'est terminé depuis neuf ans. Quand ce genre de chose se termine-t-il vraiment?

L'autre aspect troublant—et je me dois de le souligner—c'est que d'après les témoins que nous avons entendus et nos contacts dans la communauté diplomatique internationale... c'est le maque d'appui régional. Lorsque Mme Beaumier a soulevé la question d'un jugement moral, je pense que vous avez bien répondu, mais d'une certaine façon, il y a un sentiment d'eurocentrisme ici, le terme technique qui a été utilisé. La résolution 1104 du Conseil de sécurité, la résolution 1284... La Russie, la Chine, la France se sont abstenus, mais nous avons entendu parler beaucoup des objections de la France. Au Moyen-Orient, l'Iran a été la victime de cette guerre de 10 ans avec l'Iraq et les Iraniens ne demandent pas de sanctions.

Il y a donc quelque chose qui ne va pas dans le travail de recherche des faits. La difficulté c'est que nous avons des preuves déchirantes de l'incidence du blocus. Cela me rappelle—et je l'ai cité au président—le blocus kinder, l'une des choses que l'on peut reprocher aux alliés victorieux de la Première Guerre mondiale. On a maintenu ce blocus de l'Allemagne jusqu'en 1919-1920. On a la même preuve de la mort d'enfants et de la ruine d'une génération. On considère que c'est l'un des facteurs qui a créé la haine qui a aidé à accélérer les forces à l'oeuvre en Allemagne lors de la Deuxième Guerre mondiale. Le présent cas est beaucoup plus grave, d'après les faits que le Dr Patry et d'autres ont découverts.

J'aimerais donc soulever une question fondamentale. Je ne sais pas ce que notre comité recommandera. Nous avons été les personnes polies; nous n'avons pas participé à l'opération Desert Fox. Est-ce que cela démolirait les politiques canadiennes si nous faisions une distinction entre les sanctions économiques et les sanctions militaires et si, par exemple, notre comité proposait la possibilité de mettre fin immédiatement aux sanctions économiques? Voilà la question fondamentale en termes macropolitiques, la question sous-entendue dans les réflexions du président et les commentaires de mes collègues, Mme Augustine, Mme Beaumier et le Dr Patry. Même le secrétaire parlementaire ici doit faire preuve de grande diplomatie.

• 1145

Est-ce que cela vous serait utile dans vos discussions avec nos alliés puissants si ce genre de suggestion était faite? Le moment n'est-il pas venu de mettre fin aux sanctions économiques? Est-ce que cela changerait la situation géopolitique?

Le Dr Patry a été très éloquent à ce sujet. Même avec une aide énorme, tant secrète qu'officielle des Américains, l'Iraq a été bloqué dans son avance par l'Iran qui était censé être une cible facile parce qu'on y avait tué tous les généraux à la suite de la révolution de 1979. Serait-ce vraiment la fin de notre politique étrangère si on considérait ce genre de situation empreint de préjugés? Faut-il mettre fin aux sanctions économiques, non pas dans 25 ans, non pas dans cinq ans, mais immédiatement? Quel signal cela donnerait-il ou serait-ce le mauvais signal?

Nous n'avons rien décidé. Ces idées sont avancées, mais ce sont des idées très importantes qui sont en réaction aux faits déchirants que nous avons appris à propos des répercussions sur les êtres humains. Il y a un moment où le droit international humanitaire doit prendre le dessus et il interdit d'une manière. La question des enfants, le blocus des enfants, voilà ce qui nous a le plus touchés. C'est dévastateur, et cela nous vient de témoins canadiens ainsi que d'autres personnes.

C'est presque une question hypothétique. Est-ce que cela vous nuira si nous faisons ce genre de suggestion? Vous fonctionnez à l'intérieur de directives établies par des politiques à long terme. Le moment est-il venu de considérer, tout comme les Américains ont fini par devoir songer à quitter le Vietnam, de mettre fin à ces sanctions?

M. John McNee: Monsieur le président, à propos de...

Le président: Allez-vous répondre ici?

Des voix: Oh, oh!

M. John McNee: Je pourrais peut-être commencer par l'une des autres questions posées par M. McWhinney, c'est-à-dire par l'appui dans la région. Votre comité et la population canadienne s'inquiètent énormément du sort de la population iraquienne. C'est une inquiétude que partagent également le monde arabe, l'Europe, et d'autres pays encore. Or, cette inquiétude donne lieu à toutes sortes de débats sur ce qui devrait éventuellement être fait, et cela pose en même temps un problème insoluble.

On a tort d'affirmer, monsieur le président, que les Iraniens réclament la levée inconditionnelle des sanctions. Ils sont inquiets pour la population, du point de vue humanitaire, mais n'exigent certainement pas la levée des sanctions, sauf erreur de ma part.

Dans la région, c'est-à-dire dans le monde arabe, les opinions sont toutefois divergentes. Dans le Golfe, on est sympathique à la population iraquienne, mais on est clairement d'avis qu'il est nécessaire de maintenir une grande rigueur à l'égard de l'État, une rigueur bien plus grande que celle que préconiserait le Canada. Ce qui se dégage des débat qui ont cours au sein du Conseil de sécurité, c'est que même si on se préoccupe du sort de la population, il n'y a malgré tout pas unanimité d'opinion là-dessus.

Pour ce qui est de la question principale qu'a posée M. McWhinney, tout tourne autour de deux facteurs dont l'un est le suivant. La dernière résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, qui à notre connaissance vient tout juste d'entrer en vigueur, représente tout un changement et toute une amélioration par rapport au régime global de sanctions qui a été introduit au départ au moment de l'invasion du Koweit.

Le président: Il y a des choses qui m'échappent, et il faut que je comprenne. Avant que la résolution entre en vigueur, il faut bien que l'Iraq accepte de faire certaines choses, n'est-ce pas?

M. John McNee: Non, monsieur le président, en tout cas du côté humanitaire, qui est le premier objet...

Le président: Elle entre en vigueur de toute façon, peu importe.

M. John McNee: Exactement.

Le président: Qu'est ce qui entre en vigueur?

M. John McNee: La levée du plafond sur les exportations de pétrole, permettant à l'Iraq de vendre autant de pétrole qu'il peut en produire sur le marché international. Avant, on lui imposait une limite: l'Iraq ne pouvait vendre par année que pour tant de milliards de dollars de pétrole.

• 1150

Les listes des produits humanitaires sont très longues, et leur approbation par les Nations Unies sera automatique. Personne ne pourra les contester, ni les modifier, ni les remettre en question, ni les retenir. L'approbation des procédures devra se faire en deux jours, ce qui expédiera le cheminement. Donc, le feu vert a été donné, que l'Iraq fasse un pied de nez à la communauté internationale ou pas.

Toutefois, on surveillera de plus près le programme humanitaire sur place, pour s'assurer qu'il n'y aura pas d'abus, comme on a semblé s'en inquiéter plus tôt. Une étude entreprise de l'industrie pétrolière a conclu qu'il fallait injecter plus de fonds pour remettre à neuf l'industrie iraquienne pour que le pays puisse continuer à pomper du pétrole. Par conséquent, le programme inclura désormais un élément en espèces qui permettra de relancer l'économie locale.

Tout cela devait entrer en vigueur dès le 12 décembre, au moment où la résolution a été adoptée, ou doit désormais entrer en vigueur peu importe... Là où l'Iraq doit montrer sa collaboration, monsieur le président, c'est en acceptant le retour des inspections des armements, ce qui représente l'autre côté de l'équation. Ces inspections ne peuvent évidemment pas se faire si l'Iraq n'accepte pas.

Je répondrais à M. McWhinney que si seulement nous pouvions trouver une façon de faire ce que lui-même et les autres membres du comité ont suggéré, nous serions entièrement d'accord. Comme nous l'avons déjà expliqué, nous ne savons pas comment aborder autrement le problème que posent les biens à double usage, c'est-à-dire les fournitures industrielles et chimiques qui peuvent si facilement être utilisées pour fabriquer des armes biologiques et chimiques.

Le président: C'est utile. Je comprends ce que vous dites.

[Français]

Mme Maud Debien: C'est très important, ce que ces messieurs ont dit. Cela soulève une autre question aussi importante.

Le président: Toutes les questions le sont. C'est encore une autre question.

Mme Maud Debien: C'est que je veux comprendre. Vous dites que, peu importe que l'Irak accepte ou rejette la résolution 1284, les choses dont vous avez parlé, soit la levée du plafond, la liste de fournitures et le délai de deux jours, vont se faire quand même.

M. John McNee : Voilà.

Mme Maud Debien: Mais c'est conditionnel. Tout cela est conditionnel à ce qu'il y ait des observations sur le désarmement, n'est-ce pas?

M. John McNee: Non, madame, pas du tout.

Mme Maud Debien: Il n'y a aucun lien entre les deux. Merci.

M. John McNee: Non. Pourquoi? Parce que les membres du Conseil de sécurité, y compris le Canada, sont très préoccupés par les effets de la situation actuelle sur la population irakienne. Le Conseil a décidé d'améliorer la situation avant d'amender les procédures, de les alléger, de les rendre plus rapides et plus efficaces pour apporter de l'aide à la population.

Mme Maud Debien: Donc, la question des 120 jours ne joue pas non plus?

M. John McNee: Du tout, du tout.

Mme Maud Debien: D'accord. Je vous remercie.

M. John McNee: Vous soulevez un point qu'on considère très important.

Mme Maud Debien: D'accord.

[Traduction]

Le président: Monsieur Martin.

M. Keith Martin: Je m'excuse si ma question a déjà été posée avant. Il fallait que j'aille à la Chambre.

Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui.

La question de sanctions par opposition à la sécurité touche peut-être au coeur du débat que nous entretenons ici aujourd'hui. Certaines personnes qui ont témoigné avant vous ont mentionné qu'il y avait un moyen de s'assurer qu'on puisse lever certaines sanctions pour des besoins essentiels tels que la purification d'eau, la nourriture et tout ce que cela touche, l'équipement médical, pour permettre à l'économie iraquienne de croître. C'est la seule façon que ces gens vont devenir autonomes, et vont même pouvoir remplacer Saddam Hussein, ce qui est peut-être notre objectif inexprimé.

Est-ce possible? Est-ce qu'il existe un moyen de sauver la face qui permettrait qu'on lève certaines sanctions tout en permettant l'accès aux inspecteurs d'armes pour qu'ils puissent atteindre leur objectif de sécurité? Ils ont mentionné la subtilité de cette question de leur permettre de sauver la face.

M. Donald Sinclair: La réponse c'est que la résolution 1284 tente de suivre cette approche ascendante, certains biens étant exclus du régime de sanctions. Autrement dit, on les laisse passer automatiquement.

• 1155

D'une certaine manière, c'est une levée partielle des sanctions économiques. On inclut dans ces biens qui passeront automatiquement désormais des denrées alimentaires, des médicaments, des fournitures médicales, de l'équipement agricole, des manuels pédagogiques et des crayons. Toutes ces choses passeront automatiquement. Comment est-ce que cela se fait? C'est l'ONU même, le Bureau du secrétaire général, qui élabore ces listes.

Voici une liste de biens qui seront automatiquement exclus des sanctions. Ce sont des biens qui passeront automatiquement. Si l'Iraq demande—et je n'ai aucune idée de quoi il s'agit—des coiffes de capsules de nifédipine de 20 mg, cela passera automatiquement. Il y a des pages et des pages de...

M. Keith Martin: Est-ce que ça serait des comprimés de nifédipine?

M. Donald Sinclair: Vous savez de quoi il s'agit.

M. Keith Martin: Oui, c'est pour la pression artérielle.

M. Donald Sinclair: Je l'ai choisi au hasard, mais...

Le président: Je crains que nous en avons tous besoin de ces comprimés.

M. Donald Sinclair: Il y a des pages et des pages de biens qui, si l'Iraq les demande, passeront automatiquement. Si l'Iraq veut dépenser une partie de ses 14 milliards de dollars sur ces biens, ils passent automatiquement. Cette liste ne contient que des médicaments, mais il aura des listes dressées par l'ONU avec des biens qui ne constituent pas des menaces. Ces produits ne servent pas à d'autres usages; ce sont des biens d'ordre humanitaire. On les exclut du régime de sanctions, car il n'y a pas de révision. Si l'Iraq les veut, on les laisse passer.

Ce qu'on fait avec ces biens, en termes de distribution, c'est une autre question. Si les gens qui en ont besoin ont véritablement accès à ces comprimés, ça c'est une autre paire de manches, mais c'est comme ça, en se servant de cette approche ascendante, que l'ONU et le Conseil de sécurité ont décidé de traiter de cette question d'exemption de certains biens d'ordre humanitaire du régime de sanctions. Il s'agit de ces domaines.

M. Keith Martin: Merci.

Le président: Je m'excuse mais il va falloir terminer bientôt, parce qu'il est maintenant midi. Je pensais que nous pourrions terminer à 11 h 30.

Il se peut que nous ayons d'autres questions à vous poser parce que nous rédigeons notre rapport. Dans ce cas-là, nous pourrions peut-être vous les communiquer par écrit.

Si vous ressentez à quel point je suis frustré avec votre point de vue, monsieur McNee en particulier, vous avez raison et vous avez bien identifié la raison: c'est qu'à notre époque de guerre moderne, il est impossible de séparer les aspects militaires et humanitaires, car des biens d'ordre humanitaire tels que des produits chimiques peuvent être transformés en biens militaires pour les opérations chimiques ou biologiques. Donc une brasserie peut fabriquer des armes biologiques—tous ces problèmes. Il faudra voir comment nous pourrons poursuivre ces questions. On verra si le comité pourra trouver des solutions ou non. Il faudra travailler ensemble.

Merci beaucoup. La matinée a été très constructive. Je regrette que nous ne comprenions pas mieux la recommandation 1284 et sa portée avant de commencer nos délibérations, car il n'aurait peut-être été nécessaire de nous rendre jusqu'ici.

Merci beaucoup.