Passer au contenu
Début du contenu

ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
PDF

38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 15 février 2005




Á 1105
V         Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.))
V         M. Michael Cleland (président et président-directeur général de l'Association canadienne du gaz, Le Groupe pour un dialogue sur l'énergie)

Á 1110

Á 1115
V         Le président
V         Mme Nancy Hughes Anthony (présidente-directrice générale, Chambre de commerce du Canada)

Á 1120

Á 1125
V         Le président
V         M. Matthew Bramley (directeur, Changement climatique, Institut Pembina)

Á 1130

Á 1135

Á 1140
V         Le président
V         M. S. Ed Mallett (président-directeur général, Centre ontarien pour l'avancement des technologies environnementales)

Á 1145

Á 1150
V         Le président
V         M. Lee Richardson (Calgary-Centre, PCC)
V         M. Matthew Bramley
V         M. Lee Richardson
V         M. Matthew Bramley
V         M. Lee Richardson
V         Le président
V         M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC)
V         M. Michael Cleland
V         M. Brian Jean
V         M. Michael Cleland

Á 1155
V         M. Brian Jean
V         Dr S. Ed Mallett
V         M. Brian Jean
V         Dr S. Ed Mallett
V         M. Lee Richardson
V         Mme Nancy Hughes Anthony

 1200
V         Le président
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ)
V         M. Michael Cleland

 1205
V         M. Bernard Bigras
V         M. Michael Cleland
V         Le président
V         M. Bernard Bigras

 1210
V         Mme Nancy Hughes Anthony
V         Le président
V         M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.)

 1215
V         Le président
V         Dr S. Ed Mallett

 1220
V         Le président
V         M. Matthew Bramley
V         Le président

 1225
V         M. Matthew Bramley
V         Le président
V         Mme Nancy Hughes Anthony
V         Le président
V         M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD)
V         M. Michael Cleland
V         M. Nathan Cullen
V         M. Michael Cleland

 1230
V         M. Nathan Cullen
V         Mme Nancy Hughes Anthony
V         M. Nathan Cullen
V         Mme Nancy Hughes Anthony

 1235
V         M. Nathan Cullen
V         M. Matthew Bramley
V         Le président
V         M. Jeff Watson (Essex, PCC)

 1240
V         Le président
V         Dr S. Ed Mallett
V         M. Michael Cleland
V         Le président
V         L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.)

 1245
V         Mme Nancy Hughes Anthony
V         L'hon. Bryon Wilfert
V         Le président
V         M. Matthew Bramley
V         Le président
V         M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ)
V         M. Matthew Bramley

 1250
V         Simard, Christian Member
V         M. Matthew Bramley
V         Le président
V         M. Nathan Cullen
V         M. Michael Cleland

 1255
V         M. Nathan Cullen
V         M. Michael Cleland
V         M. Nathan Cullen
V         M. Michael Cleland
V         Le président
V         M. David McGuinty

· 1300
V         Mme Nancy Hughes Anthony
V         Le président
V         M. Brian Jean
V         M. Matthew Bramley
V         Le président
V         M. Michael Cleland
V         Le président
V         M. Brian Jean
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 019 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 février 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

Á  +(1105)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)): Bonjour mes amis, bonjour aux membres du comité, à nos témoins et à ceux qui suivent nos délibérations à la télévision. Bienvenue à cette séance.

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions la mise en oeuvre au Canada du protocole de Kyoto. Nous en sommes à la première partie, « Préparer la voie : la situation actuelle ».

    Nous sommes très heureux que vous soyez venus dialoguer avec le comité. Aujourd'hui, nous accueillons Michael Cleland, président du Groupe pour un dialogue sur l'énergie et président-directeur général de l'Association canadienne du gaz; Hans Konow, également membre du GDE et président-directeur général de l'Association canadienne de l'électricité, et Denis Tanguay, de l'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie.

    Nous accueillons également des représentants de la Chambre de commerce du Canada. Nancy Hughes Anthony en est la présidente-directrice générale et Scott Campbell est analyste des politiques. De l'Institut Pembina, Matthew Bramley, directeur, Changements climatiques, et du Centre ontarien de l'avancement des techniques écologiques, Ed Mallett, président-directeur général.

    Bienvenue à vous tous. Encore une fois, je vous remercie d'être venus.

    En général, nous accordons environ dix minutes aux témoins pour qu'ils fassent une présentation. Je crois savoir que le Groupe pour un dialogue sur l'énergie et la Chambre de commerce du Canada ont déposé des mémoires qui ont été distribués. Celui de l'Institut Pembina est arrivé ce matin et on est en train de le distribuer. En outre, nous avons reçu un CV de Ed Mallett et je l'en remercie.

    Je ne sais pas si vous avez une préférence pour l'ordre des présentations, sinon, nous suivrons l'ordre du jour. Ainsi, nous entendrons d'abord M. Cleland, du Groupe pour un dialogue sur l'énergie, puis ce sera le tour de la Chambre de commerce du Canada, suivie de l'Institut Pembina et enfin du Centre ontarien pour l'avancement des technologies environnementales.

    Monsieur Cleland, à vous la parole.

+-

    M. Michael Cleland (président et président-directeur général de l'Association canadienne du gaz, Le Groupe pour un dialogue sur l'énergie): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Comme vous l'avez mentionné, nous vous avons remis le texte de notre présentation. J'ai l'intention de le parcourir en tâchant de ne pas dépasser dix minutes. Je vais avancer assez rapidement, et, lors du dialogue qui suivra, nous voudrons peut-être revenir à certains des diagrammes.

    Le Groupe pour un dialogue sur l'énergie est une coalition de 18 associations du secteur de l'énergie. Nous représentons tous les secteurs, de la production en amont jusqu'à l'efficacité énergétique. Nous représentons un assez large éventail de perspectives commerciales en matière d'énergie. Nous nous sommes regroupés d'abord pour travailler avec le Conseil canadien des ministres de l'énergie au dossier de la politique énergétique dans son sens large, et cela nous a amené naturellement à formuler des avis sur les questions environnementales.

    Nous n'avons pas une position commune à l'égard du protocole de Kyoto, mais nous pensions vous offrir des renseignements de base sur l'énergie et l'économie énergétique et de sa place dans une stratégie canadienne de gestion des gaz à effet de serre qui serait réalisable.

    Comme je le disais, je vais vous présenter ce tableau assez rapidement. Il s'agit d'aperçus et de perspectives de base.

    À la page 2, notre message est tout simplement que la réalité au Canada est que nous sommes un grand producteur d'énergie par rapport à la taille de notre population ou de notre économie, plus important que tout autre pays du G-7 ou de l'ALENA et que la production d'énergie implique nécessairement une forte utilisation d'énergie et une forte production de gaz à effet de serre. C'est quelque chose dont il faut tenir compte.

    Cela reflète les avantages stratégiques que nous devrions mettre à profit. Il arrive parfois qu'on considère cela comme une faiblesse morale et je pense qu'il est temps de changer d'attitude.

    À la page suivante, on présente l'utilisation d'énergie et l'intensité énergétique de l'économie canadienne. Encore une fois, le Canada est le pays du G -7 et de l'ALENA dont l'intensité énergétique est la plus élevée, ce qui reflète les réalités canadiennes fondamentales : notre structure industrielle, nos modes de vie et nos habitudes, notre taille et notre climat nordique. Parallèlement, nous constatons une baisse de l'intensité énergétique—un peu plus rapide même que la moyenne des pays du G-7. Nous sommes sur la bonne voie. Il faudrait accélérer cette tendance et pour cela il nous faut un cadre politique propice. Néanmoins, cela vous donne une idée de la réalité dont nous devons tenir compte.

    À la page 4, nous présentons une ventilation de l'intensité énergétique par secteur. Il y a de bonnes nouvelles et des nouvelles moins bonnes. La bonne nouvelle c'est que dans le secteur industriel où, franchement, la pression des coûts concurrentiels oblige les entreprises à se soucier constamment de leur consommation d'énergie, on constate une réduction constante de l'intensité énergétique, tout comme dans le secteur résidentiel. Par contre, dans le secteur commercial, on constate des gains d'efficacité et des changements structurels moins impressionnants, et ce, pour diverses raisons, et dans le secteur des transports, les changements structurels ont fait obstacle à une baisse importante de l'intensité énergétique quoiqu'on ait enregistré des améliorations en matière d'efficacité énergétique.

    La page 5 vous donne une idée de l'apport des différents secteurs dans la croissance de la demande énergétique. Cela peut sembler contredire un peu la page 4, mais le secteur industriel est celui qui contribue le plus à l'accroissement de la demande. Cela montre que malgré la baisse constante de l'intensité énergétique et l'amélioration de l'efficacité énergétique, le secteur industriel a réalisé des gains très importants, y compris dans les secteurs des ressources naturelles et de l'énergie. En d'autres mots, croissance économie, création d'emplois, investissements, des choses importantes pour les Canadiens mais dont l'effet est d'accroître notre consommation d'énergie.

    À la page 6, nous présentons l'utilisation finale de l'énergie. Comme vous le voyez, il y a une certaine fluctuation, mais la tendance est en général à la hausse et se chiffre à environ 1,5 p. 100 par année. Il arrive qu'il y ait une légère baisse, mais la tendance est assez bien établie et profondément ancrée dans l'économie canadienne.

Á  +-(1110)  

    Cela ne va pas changer de sitôt. Il faut trouver des moyens de ralentir la demande et élaborer les politiques qui nous permettront d'atteindre cet objectif. Il est bien peu probable que nous réussissions à ralentir la croissance de manière spectaculaire d'ici quelques années, certainement pas dans les quelques années qui nous restent avant la période d'engagement de Kyoto.

    À la page 7, il y a une autre ventilation. Cette information vient de Ressources naturelles Canada. Pour ceux d'entre vous qui ne le sauraient pas, RNCan a de très bon renseignements sur l'utilisation finale de l'énergie et les facteurs qui sous-tendent la demande. Il examine la demande et la décompose—c'est ainsi qu'on dit—en cinq facteurs.

    Encore une fois, vous voyez une forte croissance de l'activité. L'activité, cela veut dire les mises en chantier, la croissance industrielle, la construction d'immeubles à bureaux qui dans une certaine mesure neutralise les gains d'efficacité énergétique mais pas assez pour réduire la croissance de la demande sous le niveau de 1 p. 100 à 1,5 p. 100 par année que nous avons constaté au cours des dernières années et que nous prévoyons pour l'avenir.

    À la page suivante, nous présentons l'autre terme de l'équation, soit l'offre d'énergie. Il s'agit d'un aperçu historique qui remonte jusqu'en 1871. Vous constatez la diversification constante de l'offre énergétique au Canada. Depuis la fin des années 70 environ, nous vivons dans ce qu'on appelle l'économie polycombustible. C'est une bonne chose. Cela nous donne plus d'options, renforce notre sécurité et, au bout du compte, améliore notre rendement sur le plan de l'environnement.

    Pendant les années 60, la diversification de l'offre énergétique a eu pour effet de réduire l'intensité des gaz à effet de serre. C'était une bonne chose. Cependant, depuis la fin des années 90 cette diversification s'est ralentie. Nous pourrions en énumérer les raisons, mais il y a un autre facteur clé auquel il faut penser. Comment peut-on non seulement ralentir la croissance de la demande mais aussi réduire l'intensité des gaz à effet de serre de l'offre énergétique tout en conservant cette diversité qui nous sert si bien?

    Pour ce qui est des émissions de gaz à effet de serre, je suis sûr que je ne vous apprendrai rien, mais j'aimerais néanmoins attirer votre attention sur un certain nombre de choses. Il est intéressant de noter que les émissions totales de GES ont augmenté à un rythme plus lent que les émissions dues à l'utilisation finale de l'énergie. Cela reflète en grande partie la baisse des émissions dues aux procédés industriels. En d'autres mots, le rendement du secteur industriel est très bon. Il y a eu bien sûr de nombreux changements ponctuels qui ne se répéteront pas. Cependant, la croissance des émissions provenant de la combustion de combustibles fossiles continue à croître à un rythme assez soutenu. C'est un problème difficile à régler et nous devons réfléchir à des solutions réalistes.

    Quels secteurs d'utilisation finale produisent des GES? À la page 10, on voit que ce sont les secteurs industriels et celui des transports qui ont le plus contribué à la croissance des émissions. La croissance dans le secteur industriel est attribuable à la croissance de l'économie et à la croissance du secteur des ressources alors que la croissance dans le secteur des transports s'explique par les préférences des Canadiens.

    Que faut-il faire maintenant? À la page 11, vous voyez deux points fondamentaux sur lesquels nos membres sont d'accord. Premièrement, il nous faut un cadre énergétique général qui permette d'élaborer une stratégie réaliste en matière d'émissions de gaz à effet de serre. Ce cadre doit refléter nos réalités énergétiques. Nous devons également faire appel à toutes les options disponibles. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser de côté quelque option que ce soit.

    À la page 12, nous expliquons très rapidement pourquoi nous avons besoin d'un nouveau cade énergétique au Canada. Il y a trois raisons que nous ne devrions jamais oublier. Il nous faut un approvisionnement sûr et fiable. Les Canadiens y comptent. Nous devons nous adapter à des prix plus élevés. Nous pensons que nous allons devoir nous adapter à des prix plus élevés. D'ailleurs, cela aura des effets bénéfiques sur l'environnement puisque ça enverra le bon message aux consommateurs. Enfin, nous devons répondre à un certain nombre d'impératifs environnementaux, pas seulement les émissions de gaz à effet de serre et le changement climatique, mais tous les autres : qualité de l'air, du sol, de l'eau, impact sur les habitants. Nous devons penser à tous ces éléments.

    À la dernière page, monsieur le président, nous présentons, en guise de conclusion, des stratégies multiples de gestion des GES. Nous devons agir immédiatement pour obtenir des résultats significatifs à long terme. Nous devons appuyer le déploiement des technologies nouvelles d'aujourd'hui et les commercialiser lorsque c'est possible, tout en investissant dans les technologies de demain.

    Nous devons viser trois cibles. L'efficacité énergétique est notre premier choix. Nous devons penser aux signaux qu'envoient les prix et faire en sorte de ne pas les masquer. Nous devons aller de l'avant sans relâche et nous devons être réalistes.

Á  +-(1115)  

    Il faudra consentir une aide financière et des conditions politiques favorables pour permettre l'utilisation de nouveaux combustibles et de nouvelles technologies comme les piles à combustible et l'énergie éolienne qui ajouteront à la diversité et réduiront notre profil de GES.

    Cependant, il reste les combustibles et les technologies classiques, dont j'ai déjà parlé, qui nous sont encore nécessaires. Les combustibles et les technologies classiques continueront tous à occuper une part importante dans la composition de l'offre globale d'énergie. Nous devons chercher les moyens de réduire le profil de GES et les autres incidences environnementales de ces technologies.

    Sur ce, monsieur le président, je vous rends la parole. Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Cleland. Vous avez fini juste à point, c'est remarquable.

    C'est maintenant le tour de Mme Hugues Anthony, de la Chambre de commerce du Canada.

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony (présidente-directrice générale, Chambre de commerce du Canada): Merci beaucoup et bonjour. Merci de nous avoir invités, mon collègue Scott Campbell et moi, à venir discuter avec vous et vous présenter le point de vue de la Chambre de commerce du Canada.

    Bon nombre d'entre vous connaissent déjà, j'en suis sûre, la Chambre de commerce du Canada; il y en a certainement une dans votre circonscription. Nous représentons au-delà de 170 000 entreprises de toutes les provinces et des territoires.

[Français]

    Nous représentons aussi tous les secteurs de l'économie et toutes les régions du Canada et, comme vous le savez sans doute, nous commentons les politiques gouvernementales qui présentent un intérêt particulier pour le milieu des affaires. Aujourd'hui, évidemment, le sujet primordial est le changement climatique.

[Traduction]

    Monsieur le président, la Chambre de commerce du Canada reçoit de l'information de diverses sources et notamment de notre comité d'experts sur l'environnement, composé de représentants des secteurs de l'offre et de la consommation. Une majeure partie de son travail est consacrée au changement climatique. En outre, dans le cadre de notre engagement à l'égard de l'environnement, nous travaillons de concert avec le programme d'économie d'énergie dans l'industrie canadienne, le PEEIC, que vous connaissez sans doute, l'Organisation internationale de normalisation et Enquête pollution, avec qui nous avons mis sur pied un projet très intéressant pour aider les petites et moyennes entreprises à comprendre les GES et à réduire leurs émissions.

    Comme je le disais, nos membres sont à la fois producteurs et consommateurs d'énergie et je tiens à vous signaler qu'un grand nombre d'entre eux prennent des mesures pour protéger l'environnement et, particulièrement, pour atténuer le changement climatique. Il importe que le gouvernement et tous les Canadiens reconnaissent cette action et sachent que les entreprises prennent un grand nombre de mesures pour contrer le changement climatique. Les entreprises canadiennes avalisent et pratiquent la bonne intendance de l'environnement. Non seulement une consommation énergétique plus efficace et une meilleure intensité énergétique sont profitables, mais en agissant aujourd'hui nous contribuerons à léguer une économie durable aux générations futures.

    Monsieur le président, je sais que les membres du comité ont reçu notre mémoire.

[Français]

    Vous l'avez en anglais et en français.

[Traduction]

    Je ne vais pas présenter en détail tous ces exemples. Si vous allez sur le site Web du PEEIC, vous y trouverez des exemples de partenariat entre l'industrie et le gouvernement où des entreprises se sont engagées à promouvoir et à encourager l'efficacité énergétique. Je mentionne certains exemples dans mon mémoire, comme Dofasco, dans l'industrie de l'acier; Honda du Canada; et Stora Enso, dans le secteur des pâtes et papiers. Vous pourrez trouver de nombreux autres exemples sur le site Web du PEEIC.

    J'aimerais aussi vous dire, comme je le mentionne dans mon mémoire, qu'il y a certains secteurs industriels qui sont très fiers de ce qu'ils ont accompli au cours des dernières années alors que certains d'entre eux se sont mis à la tâche bien avant l'adoption du Protocole de Kyoto. Prenez l'exemple du secteur de l'aluminium dont les émissions de GES sont restées stables alors que leur production augmentait de 73 p. 100. Le secteur des pâtes et papiers a réduit de moitié sa consommation de pétrole au cours des 15 dernières années. Dans le secteur pétrolier et gazier, le brûlage du gaz naturel a diminué de 62 p. 100 depuis 1996.

    Ce ne sont que quelques exemples que je voulais vous citer pour illustrer le fait que nos membres se préoccupent du problème des changements climatiques depuis nombre d'années. Pour sa part, la Chambre de commerce du Canada a également été très active.

Á  +-(1120)  

[Français]

    La Chambre de commerce du Canada et les entreprises canadiennes sont prêtes à collaborer avec le gouvernement à la mise en oeuvre d'un cadre d'action sur le changement climatique.

    Il y a trois ans, nous nous sommes unis à d'autres associations de gens d'affaires pour formuler un plan pancanadien sur le changement climatique. Le gouvernement d'alors n'avait pas planifié la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto. À ce moment-là, nous voulions que les Canadiens sachent que les entreprises assumaient leurs responsabilités en matière de changement climatique et que nos solutions trouvaient un point d'équilibre entre les préoccupations environnementales et la croissance économique.

[Traduction]

Nous sautons quelques années et passons à 2005, et le gouvernement, me semble-t-il, n'a toujours pas expliqué aux Canadiens et aux Canadiennes comment nous allons respecter les objectifs et les échéanciers de Kyoto. Manifestement, vous savez quel est notre engagement au titre du protocole de Kyoto, ce qu'il était et ce qu'il reste. Nous avons à présent des prévisions gouvernementales indiquant que nous excéderons nos cibles par plus de 40 p. 100.

    Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles ces cibles et ces échéanciers sont inatteignables. L'une des raisons de base, à mon sens, est que le gouvernement de l'époque avait fixé un but trop ambitieux. Parmi les cibles que s'étaient fixées les pays industrialisés ayant signé le protocole, les nôtres étaient les plus difficiles à atteindre, étant donné notre climat, l'étendue de notre territoire et le fait, comme l'a souligné M. Cleland, que nous avons une économie axée sur les ressources naturelles et que nous sommes un important exportateur d'énergie.

    Je suis d'accord avec les observations de M. Cleland, et incrédule de constater que de nombreux Canadiens ne considèrent pas que les secteurs de l'énergie et des ressources sont importants pour la viabilité et la croissance économique d'ensemble du Canada. Ce sont des secteurs clés pour notre commerce et pour nos industries, sans parler de la façon dont ils répondent à nos besoins en matière de transport et de chauffage des résidences.

    Qui plus est, le Canada doit adopter des buts réalistes, qui tiennent compte de la réalité mondiale. Vous le savez aussi, le changement climatique est un problème mondial et les actions du Canada ne pourront à elles seules résoudre le problème. Je souligne que nous devons toutefois apporter notre contribution.

    Nous savons tous que le partenaire commercial le plus important du Canada, les États-Unis, n'a pas signé le protocole. Or, il est vital que nous restions concurrentiels avec les États-Unis, ainsi que sur la scène internationale. Je suggérerais que le Canada ne signe pas la prochaine période d'engagement de Kyoto, à moins que les États-Unis et les économies émergentes, comme la Chine et l'Inde, ne soient disposés à s'engager à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Pourquoi irions-nous chercher un handicap économique? Au jour le jour, nous entrons en concurrence avec ces pays pour l'investissement; il nous faut être concurrentiels quand il s'agit de vendre nos biens et nos produits.

    Dans cette optique, que voulons-nous voir le gouvernement proposer? Eh bien, nous plaidons pour le Canada un plan de lutte contre le changement climatique qui adopte un certain nombre de principes, présentés dans le mémoire que nous vous avons remis aujourd'hui, monsieur le président. Je vais juste en mentionner quelques-uns. Tout d'abord, l'encouragement du développement par le biais de la recherche et de la commercialisation de la technologie est un élément fondamental. À cet effet, il serait utile de mettre en place des mesures plus robustes en matière de déduction pour amortissement. Nous espérons d'ailleurs que le budget de M. Goodale comporte une mesure de ce type.

    Un autre point à garder à l'esprit est que, en matière d'usines et d'équipement, ainsi que de biens de consommation, de véhicules et de réfrigérateurs, on a affaire à des échéances à très long terme. Je pense qu'on ne peut pas fixer de date limite artificielle qui forcerait les compagnies ou les consommateurs à mettre de côté plus tôt que prévu ce type d'équipement ou d'usine.

    Nous avons le sentiment que les incitatifs sont préférables aux sanctions. Tout plan élaboré doit en tout cas reconnaître les actions entreprises depuis 1990—j'en ai mentionné quelques-unes aujourd'hui.

    Nous croyons certainement qu'il devrait y avoir un marché d'échange d'émissions, avec toute la souplesse possible, afin de permettre d'atteindre les objectifs par le biais de contreparties ou d'échange d'émissions.

    Nous aimerions aussi mettre à l'ordre du jour le transport en commun, comme priorité pour s'efforcer d'atteindre ces objectifs.

    Enfin, monsieur le président, nous voulons insister sur la nécessité de faire participer les provinces et les territoires à un plan qui ait l'assentiment des Canadiens et des Canadiennes. Nous ne voulons pas créer un carcan réglementaire dans lequel les provinces font une chose et le gouvernement fédéral une autre.

Á  +-(1125)  

[Français]

    Pour terminer, monsieur le président, dans le discours du Trône, le gouvernement a dit ce qui suit:

Legouvernement du Canada respectera les engagements qu’il a pris en signant l’accord deKyoto relatif au changement climatique, selon une stratégie qui donne des résultats delongue durée tout en soutenant une économie forte et prospère.

    Je pense qu'il faut peser ces derniers mots très soigneusement, car c'est une économie forte et croissante qui assurerait la prospérité des Canadiens et des Canadiennes.

[Traduction]

    Nous demandons également au gouvernement de réfléchir sérieusement à la façon dont il a affecté et va affecter l'argent des contribuables à ces initiatives sur le changement climatique. Il devrait également exercer une surveillance rigoureuse pour s'assurer que les fonds sont utilisés judicieusement. Nous croyons savoir qu'environ 3,7 milliards de dollars ont été budgétisés jusqu'à présent, mais on ne sait pas précisément ce qui a été accompli grâce à cet investissement.

    En terminant, j'aimerais mentionner que nous souhaitons que le gouvernement réussisse à engager les entreprises et les citoyens d'un bout à l'autre du pays dans un plan d'action sur le changement climatique. Je pense que pour ce faire, il devra absolument tenir compte du contexte mondial, aussi bien économique qu'environnemental, ou au sein duquel le Canada évolue et adopter le genre de principes que j'ai décrits aujourd'hui.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, madame Hughes Anthony : vous avez pris exactement 10 minutes. C'est très bien.

    Nous entendrons maintenant M. Bramley de l'Institut Pembina.

+-

    M. Matthew Bramley (directeur, Changement climatique, Institut Pembina): Merci beaucoup de m'avoir invité.

[Français]

    Je vais faire ma présentation en anglais, mais je me ferai un plaisir de répondre aux questions en français par la suite.

[Traduction]

    Ma présentation aujourd'hui porte sur ceux que le gouvernement appelle les grands émetteurs finaux, c'est-à-dire les grandes installations industrielles qui sont responsables de près de 50 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre au Canada. Il est clair que la politique à l'égard des grands émetteurs finaux est l'élément le plus essentiel de tout plan de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto qui se veut crédible en raison tout simplement de leur part des émissions.

    J'espère que vous avez sous les yeux le document que j'ai distribué. Il montre que les émissions industrielles représentent un peu plus de 50 p. 100 de la totalité des émissions de gaz à effet de serre au Canada, et ce, selon Environnement Canada. La part attribuée à l'industrie se divise à peu près en tiers : un tiers provenant du secteur pétrolier et gazier, un tiers de la production d'électricité et un tiers des autres industries. Ce sont des pourcentages approximatifs. C'est en fait un peu plus du tiers pour le secteur pétrolier et gazier et un peu moins pour le secteur minier et la fabrication.

    Vous avez également sous les yeux la tendance des émissions et vous voyez qu'il y a d'importants écarts. Dans l'ensemble, entre 1990 et 2002, les émissions industrielles ont augmenté plus rapidement que l'ensemble des émissions au Canada. Les émissions totales du Canada ont augmenté d'environ 20 p. 100. Les émissions industrielles ont augmenté de 23 p. 100. Les émissions du secteur pétrolier et gazier ont augmenté de 47 p. 100 entre 1990 et 2002. Les émissions du secteur de l'électricité ont augmenté de 35 p. 100 pendant cette même période de 12 ans. Il est clair que le cadre politique actuel à l'égard de ces émissions ne permettra pas d'atteindre les objectifs de Kyoto.

    Quels engagements le gouvernement fédéral a-t-il pris dans le Protocole de Kyoto à l'égard des grands émetteurs finaux? Ces données sont tirées du Plan du Canada sur les changements climatiques publié en novembre 2002. Le plan comporte trois éléments pour les grands émetteurs finaux. Premièrement, l'élément le plus souvent mentionné, est un système de cibles et de permis échangeables qui devrait aboutir à une réduction des émissions de l'ordre de 55 millions de tonnes.

    Cependant, il ne faudrait pas oublier les autres mesures soi-disant ciblées du plan sur les changements climatiques qui visent également à réduire directement ou indirectement les émissions des grands émetteurs finaux. Environ 18 millions de tonnes de réduction proviendront de mesures visant à réduire l'intensité des émissions industrielles et 19 millions de tonnes seront éliminées en réduisant la production d'électricité par la combustion de combustible fossile. Ces mesures totalisent donc environ 92 millions de tonnes de réductions de la part des grands émetteurs finaux dans le Plan du Canada sur les changements climatiques. Le plan attribuait à l'industrie la responsabilité financière d'obtenir les 55 millions de tonnes de réductions tandis que le gouvernement assumait les coûts des mesures visant à obtenir des réductions d'émissions supplémentaires.

    J'aimerais maintenant vous parler de quatre éléments qui affaiblissent le système de cibles et de permis échangeables pour les grands émetteurs finaux qui ressortent de discussions récentes avec le gouvernement fédéral et qui ont été rendues publiques. Je vous demanderais de regarder le graphique qui accompagne ma présentation. Je ne vais pas essayer de tout vous expliquer, car c'est un peu compliqué. Regardez la deuxième colonne à partir de la droite qui illustre le niveau prévu des émissions des grands émetteurs finaux en 2010 d'après le Plan du Canada sur les changements climatiques. On y montre les trois éléments que j'ai mentionnés : le système de cibles et de permis échangeables qui doit produire une réduction de 55 millions de tonnes. Les mesures ciblées visant une réduction additionnelle de 18 millions de tonnes et 19 millions de tonnes supplémentaires.

    Dans ma présentation, je mentionne deux articles publiés par la Presse canadienne en janvier. Le premier mentionnait un mémoire au Cabinet présenté par Ressources naturelles Canada et le deuxième portait sur un document de travail d'Environnement Canada. Je vais maintenant toucher un mot de ce qui ressort du mémoire de RNCan. Ce mémoire au Cabinet faisait état de trois grands éléments qui affaiblissent le Plan du Canada sur les changements climatiques.

Á  +-(1130)  

    Tout d'abord, il y a la décision de réviser à la hausse le niveau qu'atteindraient les émissions des grandes industries si aucune mesure n'était prise. Cette augmentation est représentée par une flèche vers le haut dans la partie supérieure gauche du graphique qui indique une hausse de 24 millions de tonnes. Ces émissions supplémentaires sont attribuables à une production industrielle plus forte que prévue en 2010 et attribuable surtout, semble-t-il, aux sables bitumineux. Comme le gouvernement a choisi de fixer des cibles d'intensité d'émissions plutôt que d'émissions réelles, ces 24 millions de tonnes d'émissions supplémentaires deviennent la responsabilité du gouvernement et non pas de l'industrie. Voilà le premier facteur d'affaiblissement. Essentiellement, nous avons déplacé le point de départ pour le calcul des réductions.

    Le deuxième élément d'affaiblissement tient au fait que le gouvernement semble compter les 18 millions de tonnes de mesures ciblées deux fois : une fois en tant que mesures ciblées et la deuxième fois dans le cadre du système de cibles et de permis échangeables. En d'autres mots, ces 18 millions de tonnes sont absorbées dans les 55 millions de tonnes. Ainsi, nous perdons 29 millions de tonnes auxquelles s'ajoutent ces 18 millions de tonnes à cause du comptage en double des mesures ciblées.

    Le dernier élément d'affaiblissement est une réduction de l'objectif de 55 mégatonnes devant provenir du système de cibles et de permis échangeables. D'après le rapport que j'ai cité, cette réduction a été ramenée à 37 millions de tonnes. Un article du Toronto Star, paru le week-end dernier, disait que la réduction pourrait être de 45 millions de tonnes mais qu'il y aurait probablement une réduction importante de l'objectif. L'effet net de tous ces éléments d'affaiblissement est illustré à la droite du graphique.

    Parlons maintenant des mesures visant l'intensité des émissions. Dans le Plan du Canada sur les changements climatiques on prévoyait 73 millions de tonnes de réduction pour quatre grands émetteurs finaux. Si vous additionnez l'effet des trois éléments d'affaiblissement qui se trouvaient dans le mémoire au Cabinet de RNCan, ces 73 millions de tonnes tombent à 8 millions de tonnes si l'on conserve le même point de départ.

    Pour mieux comprendre, il faut savoir que le plan sur les changements climatiques de 2002 comportait déjà un écart de 60 millions de tonnes. Si cette proposition, ou quelque chose de semblable, était acceptée, nous nous trouverions à ajouter un autre écart du même ordre de grandeur.

    Malheureusement, il y a un quatrième élément d'affaiblissement qui ressort du document de travail d'Environnement Canada. Il y a eu un article à ce sujet dans la Presse canadienne en janvier. On donnerait à l'industrie le choix de verser de l'argent dans un fonds de développement de technologies qui serait défalqué de son objectif. Je n'ai rien contre des fonds de développement technologique et je n'ai rien contre l'idée que le gouvernement encourage le développement de technologies à long terme. L'ennui c'est que l'industrie pourrait compter pendant la période d'engagement de Kyoto, soit de 2008 à 2012, des réductions d'émissions qui ne se produiront en réalité que de nombreuses années plus tard, puisqu'il s'agit de développement de technologies à long terme.

    Encore une fois, cela a pour effet de transférer la responsabilité de la réduction des émissions pendant la période d'engagement de Kyoto de l'industrie au gouvernement et donc aux contribuables. Dans ma présentation j'indique que cela pourrait représenter jusqu'à 20 millions de tonnes. C'est un chiffre approximatif, mais si l'on calcule une réduction de 55 millions de tonnes dont la moitié seront peut-être effectivement réalisées par l'industrie et dont l'autre moitié devra être réalisée grâce aux échanges de permis, ou par un autre moyen, l'investissement dans ce fonds de développement technologique pourrait coûter 20 millions de tonnes de réductions. L'effet net est un affaiblissement de 80 millions de tonnes ou plus à cause des quatre éléments que j'ai mentionnés.

    En terminant, j'aimerais répondre aux arguments économiques. De nombreux représentants de l'industrie ont dit que les cibles proposées, soit une partie des 55 millions de tonnes, ne sont pas réalisables sur le plan économique. Il semble que Ressources naturelles Canada ait fait valoir des arguments semblables. J'aimerais me concentrer sur le secteur pétrolier. La réduction de 55 millions de tonnes grâce au système de cibles et de permis échangeables représente une réduction de 15 p. 100 pour chacun des secteurs. Le gouvernement a calculé, et l'industrie a reconnu, qu'une réduction de 15 p. 100 dans le secteur pétrolier et gazier représente un coût maximal de 0,25 $ le baril de pétrole. C'est un maximum, car cela suppose que la cible sera atteinte entièrement grâce à l'achat de droits d'émissions.

Á  +-(1135)  

    Il y a un article dans le Globe and Mail d'aujourd'hui sur lequel j'attire votre attention. Je pense que c'est à la page B3. On y cite le président de la Petroleum Technology Alliance Canada, Eric Lloyd, un ingénieur pétrolier qui a 30 ans d'expérience dans le secteur. Il croit qu'il y a 29 millions de tonnes de réductions rentables possibles dans l'industrie pétrolière et gazière du Canada qui permettraient en outre à ce secteur d'économiser un million de dollars par année.

    Enfin, les sociétés pétrolières et gazières qui ont adopté des cibles volontaires pour la réduction de gaz à effet de serre, des entreprises comme BP... Je vais vous citer un discours du PDG de BP qui disait qu'il a

...constaté que l'efficacité et la réduction des émissions constituaient de bonnes stratégies d'affaires. Plus tôt que de se cantonner dans un débat sur les coûts des réductions, nos employés mettaient sur pied des projets qui ajoutaient de la valeur. De fait, au cours des trois premières années, nous avons créé une valeur ajoutée de 650 millions de dollars avec un investissement de 20 millions de dollars environ.

    En conclusion, il nous faut un système de cibles obligatoires pour les grands émetteurs finaux qui soit proportionnel à leur part de 50 p. 100 des émissions. C'est un terme délibérément vague, car ce niveau reste évidemment à définir, mais la quantité de réductions exigée de l'industrie doit être équitable pour le reste de l'économie, et pour les contribuables qui devront combler les écarts, et il faut que ce soit raisonnablement économique. Mais je pense qu'on peut faire valoir qu'il y a d'importantes réductions qui seront raisonnablement économiques, du moins dans le secteur pétrolier et gazier.

    Il faut éviter de compter deux fois les réductions et nous devons éviter que le fonds pour la technologie soit utilisé comme échappatoire en devenant une option de conformité.

    Merci.

Á  +-(1140)  

+-

    Le président: Très bien. Merci beaucoup, monsieur Bramley. Vous avez légèrement dépassé le temps qui vous était alloué, mais pas trop.

    Nous passons maintenant à M. Ed Mallett, président-directeur général du Centre ontarien pour l'avancement des technologies environnementales.

+-

    M. S. Ed Mallett (président-directeur général, Centre ontarien pour l'avancement des technologies environnementales): Merci, monsieur le président.

    L'OCETA est l'un des trois centres canadiens pour l'avancement des technologies environnementales, qui inclut Enviro-Accès au Québec et le CETAC-WEST à Calgary, en Alberta. Créés en 1993-1994, ces trois organismes à but non lucratif faisaient partie du plan vert du Canada mis en place par le gouvernement de l'époque. Ce plan comprenait une stratégie pour une industrie verte de 25 initiatives. Je crois que nos centres représentent l'une des rares initiatives convenues dans ce plan qui aient survécu jusqu'à maintenant.

    Dans mon bref exposé, je vais vous donner un aperçu des activités menées au cours des 10 dernières années par le centre et de l'expérience que nous avons acquise et vous dire comment cette expérience a contribué aux progrès réalisés en matière d'efficacité énergétique, des réactions au changement climatique et en ce qui concerne l'accord de Kyoto. Je désire ajouter quelques observations sur les leçons que nous avons retenues de cette expérience et qui pourraient s'avérer utiles pour le gouvernement alors qu'il élabore son plan en vue d'atteindre les objectifs de Kyoto.

    Au départ, le principal mandat du Centre pour l'avancement des technologies environnementales était d'offrir des services d'affaires aux entrepreneurs, aux entreprises en démarrage et aux PME afin de les aider à commercialiser de nouvelles technologies environnementales. On estimait à l'époque que le secteur environnemental était fort intéressant et recelait d'énormes possibilités de développement. En outre, on croyait qu'il y avait de bonnes perspectives de croissance et de création d'emplois pour ce qui est de la promotion de l'industrie environnementale.

    Aujourd'hui, ces secteurs génèrent des revenus d'environ 16 milliards de dollars et la plupart des entreprises qui composent ces secteurs sont toujours des PME dont la plupart, soit près de 90 p. 100, ont un chiffre d'affaires de moins de 20 millions de dollars et, par conséquent, se contentent de 20 ou 30 employés. Néanmoins, les secteurs ont un taux de croissance supérieur à celui du PIB et offrent beaucoup de possibilités d'exportation. En outre, un fort pourcentage des employés qui travaillent dans ce domaine ont fait des études postsecondaires.

    Si, dans sa politique publique, le gouvernement s'est engagé en faveur du secteur environnemental, c'est en grande partie parce que les gouvernements croyaient que le fait d'encourager le succès de ces nouvelles entreprises innovatrices constituerait un énorme avantage pour le Canada tant d'un point de vue économique qu'écologique.

    Lorsque les centres pour l'avancement des technologies environnementales ont reçu un financement du gouvernement canadien, on espérait qu'ils deviennent autosuffisants sur le plan financier après avoir été subventionnés pendant un certain temps. Je suis heureux de vous dire que ces trois organisations existent toujours et se portent plutôt bien. Néanmoins, je dois ajouter que les centres ont survécu en élargissant la gamme de services qu'ils offrent et en s'éloignant quelque peu du domaine de la commercialisation des nouvelles technologies environnementales. En effet, les trois centres pour l'avancement des technologies environnementales ont mis sur pied des initiatives visant à fournir des programmes d'efficacité énergétique et d'éco-efficacité aux installations de production industrielle manufacturière que nous encourageons à investir leur capital dans la viabilité écologique.

    Ainsi, à titre d'exemple, au cours des dernières années, l'OCETA a effectué plus de 300 vérifications industrielles qui ont conduit à des recommandations portant sur 1 500 projets ayant pour objet l'amélioration du rendement écologique. Parmi ces projets figuraient notamment une meilleure utilisation de l'eau, une meilleure utilisation de l'énergie, un meilleur traitement des déchets et la réduction des déchets utilisés. D'ailleurs le CETAC-WEST et Enviro-Accès offrent des programmes similaires pour ce qui est de la production industrielle manufacturière. Ainsi, le CETAC-WEST travaille en étroite collaboration avec Ressources naturelles Canada sur un programme qui concerne le secteur d'aval de l'industrie gazière et pétrolière. En outre, le travail de vérification effectué par le centre démontre qu'il existait d'énormes possibilités de réduire la consommation d'énergie dans les secteurs gazier et pétrolier. On parle souvent d'une période de récupération de trois mois pour certains des investissements qui s'offrent dans ce secteur.

    Ces programmes destinés à la production industrielle manufacturière sont un bon complément à notre mandat de commercialisation des technologies environnementales, car il s'agit de promouvoir la conception de biens et de services écologiques, et ces programmes ont permis d'ouvrir des marchés pour l'industrie environnementale.

Á  +-(1145)  

    Quelles leçons avons-nous retenues de nos dix années d'existence? Quel est le lien entre ces leçons et les enjeux de Kyoto?

    D'abord, pour atteindre les objectifs du protocole de Kyoto, il faudra concevoir et commercialiser avec succès de nouvelles technologies. Il pourrait s'agir d'énergie de remplacement, d'efficacité énergétique, de nouveaux produits ou de technologies qui s'appliquent aux sources de gaz à effet de serre.

    Il est intéressant de constater que, dans le secteur agricole, c'est le fumier des exploitations d'élevage qui constitue la source la plus importante de gaz à effet de serre. En effet, ces exploitations génèrent près de 80 p. 100 des gaz à effet de serre provenant de tous les secteurs agricoles. On pourrait résoudre en grande partie ces problèmes en s'intéressant aux technologies de gestion du fumier, et cela pourrait faire partie du plan de mise en oeuvre du protocole de Kyoto.

    Beaucoup de ces nouvelles technologies sont issues d'entreprises de démarrage et d'entreprises qui tentent de mettre en marché les résultats de leurs efforts de recherche et développement. Le cycle de l'innovation au Canada doit faire en sorte que les entreprises qui conçoivent ces solutions innovatrices reçoivent une aide pour traverser ce qu'on appelle la vallée de la mort, c'est-à-dire la probabilité d'échec qui existe entre le moment de la conception et de la commercialisation. Bien entendu, nous croyons que les centres pour l'avancement de technologies environnementales ont un rôle majeur à jouer à cet égard.

    En deuxième lieu, il a beaucoup été question de la production industrielle manufacturière du Canada. Bien sûr, les fabricants consomment énormément d'eau, d'énergie et de matériaux, et ils produisent une grande quantité d'eaux usées et de déchets. En outre, leurs activités produisent des émissions de gaz à effet de serre. Le débat entourant cette question a surtout porté sur l'influence qui peut s'exercer auprès des entreprises, c'est -à-dire auprès de ces fabricants, afin qu'ils s'engagent concrètement en faveur du protocole de Kyoto.

    Je soutiens qu'il ne s'agit pas exclusivement d'une initiative issue du PEEIC, car, dans le secteur manufacturier, les décisions se prennent souvent à l'usine de fabrication. En effet, le gestionnaire de l'usine dispose d'une énorme marge de manoeuvre en ce qui concerne l'affectation de ce capital à divers usages. Pour changer les comportements dans le secteur manufacturier, il faut se pencher non seulement sur les politiques des entreprises, mais également sur l'influence qu'il convient d'exercer sur les décisions prises à l'usine et dont le gestionnaire de l'usine est en grande partie responsable.

    Suite aux 300 vérifications énergétiques que nous avons effectuées au cours des dernières années, nous pouvons très facilement visiter à peu près n'importe quelle usine de fabrication en Ontario et trouver des solutions qui permettraient à l'entreprise de réaliser des économies d'énergie de l'ordre de 15 à 20 p. 100 tout en récupérant les coûts de son investissement en moins de deux ans. Pour ceux qui se demandent quel est le taux de rendement d'une entreprise, je dirai qu'en toute probabilité, un délai de récupération de quatre ans est suffisant pour permettre à l'entreprise d'atteindre ses objectifs de rentabilité. Or, même si l'on envisageait un délai de récupération de quatre ans, il y aurait bien entendu de nombreuses possibilités d'investir dans les économies d'énergie tout en atteignant les objectifs de rentabilité de l'entreprise.

    Les investissements qui produisent des résultats satisfaisants du point de vue de la rentabilité ne peuvent nuire à l'entreprise. Il est évident que les politiques du gouvernement doivent encourager de tels investissements car ils ne causent aucun tort aux entreprises. D'un point de vue de politique publique, ces investissements sont très avantageux car, en réalité, ce sont les fonds de l'entreprise qui servent à mettre en oeuvre ces changements et non les deniers publics.

    Malgré les avantages du point de vue de la rentabilité, il convient de se demander pourquoi le gouvernement devrait avoir un rôle à jouer à cet égard. Après tout, si ces investissements sont rentables, pourquoi les entreprises ne prennent-elles tout simplement pas les mesures qui s'imposent? En fait, bien qu'ils soient rentables, ces investissements ne sont pas perçus comme étant prioritaires lorsqu'il s'agit d'affecter les ressources à divers usages dans le secteur manufacturier. De nombreux autres objectifs requièrent des capitaux et ces objectifs peuvent paraître plus urgents, d'un point de vue stratégique, que les investissements en faveur du développement durable. À titre d'exemple, il pourrait s'agir de la protection de la production, de l'expansion de la production ou de l'amélioration de l'efficacité de la main-d'oeuvre.

    La main-d'oeuvre et les matériaux constituent une composante beaucoup plus importante des activités manufacturières que l'énergie et les questions écologiques. Les économies de matériaux peuvent devenir une priorité. En outre, de nombreux obstacles organisationnels mettent un frein à la mise en pratique d'investissements écologiques à l'usine qui est le siège de ces décisions.

    J'aimerais ajouter qu'il y a deux messages que je voudrais véhiculer au gouvernement qui se penche sur le plan d'action de mise en oeuvre de l'accord de Kyoto. D'abord, il s'agit du programme d'innovation qui s'intéresse à la commercialisation de nouvelles technologies environnementales. En deuxième lieu, se pose la question suivante : comment inciter les entreprises à faire les investissements qui s'imposent, tout en les sensibilisant au fait qu'elles peuvent en tirer des avantages du point de vue de l'environnement, et qu'en outre, la compétitivité de leur processus de fabrication peut être accru en réduisant les coûts grâce à ces investissements?

Á  +-(1150)  

    Merci.

+-

    Le président: Monsieur beaucoup, monsieur Mallett.

    Au nom du comité, je vous remercie tous de vos exposés.

    Nous allons procéder selon l'ordre établi; je cède la parole à M. Richardson.

    D'abord, je voudrais expliquer aux témoins que chaque parti aura la parole à tour de rôle pendant 10 minutes. Il s'agit de blocs de 10 minutes. Le député peut utiliser tout le temps qui lui est imparti ou peut le partager avec d'autres députés. À titre d'exemple, nous avons trois députés conservateurs. Ils vont se partager leur temps de parole et je vais m'assurer qu'ils respectent ces règles.

    Très bien, monsieur Richardson, à vous la parole.

+-

    M. Lee Richardson (Calgary-Centre, PCC): Merci, monsieur le président.

    Je veux remercier les témoins de leur comparution, et par là j'entends non seulement leurs exposés de ce matin mais les documents qu'ils ont eu la gentillesse de nous faire parvenir d'avance. Cela a été très utile et nous a permis de mieux comprendre leurs exposés, de sorte que je n'ai pas réellement d'autres questions. J'ai été ravi d'entendre toutes vos observations.

    Néanmoins j'ai une question qui s'adresse à M. Bramley. En fait, j'aimerais obtenir un éclaircissement. Avez-vous réellement dit qu'il est possible d'atteindre l'objectif de réduction de 15 p. 100 dans l'industrie pétrolière en achetant des crédits au coût de 0,25 $ le baril tout simplement?

+-

    M. Matthew Bramley: C'est exact.

    George Anderson, le sous-ministre de Ressources naturelles Canada, a témoigné devant le Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes le 4 novembre et il a confirmé ce chiffre, c'est-à-dire 0,25 $ le baril. La méthode de calcul utilisée pour parvenir à ce chiffre s'explique facilement, les compagnies comme Suncor et Shell l'ont d'ailleurs confirmé.

+-

    M. Lee Richardson: Ces calculs se basent sur quel prix à la tonne pour les crédits d'émissions?

+-

    M. Matthew Bramley: Je suppose que la réponse est 15 $ la tonne. Pour ce qui est des sables bitumineux, qui produisent un dixième de tonne d'émissions par baril, il faut multiplier un dixième de tonne par 15 $ et l'on obtient 1,50 $. Si l'on multiplie par 15 p. 100, on obtient 22,5 cents.

+-

    M. Lee Richardson: Merci.

    C'était ma seule question.

+-

    Le président: Monsieur Jean.

+-

    M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Un point a suscité ma curiosité. Vous avez parlé d'augmentation. Il est évident qu'en 1990, l'Ontario était le plus important émetteur de gaz à effet de serre, alors que c'est maintenant l'Alberta.

    Ma question s'adresse à M. Cleland. Cette augmentation est-elle due principalement aux sables bitumineux ou plutôt au secteur des transports? N'est-il pas vrai que le secteur des transport en Alberta est responsable d'une grande proportion des émissions de gaz à effet de serre? Je pense, par exemple, aux gros camions à moteur diesel auxquels on a désormais recours puisque de nombreuses voies ferrées ont été retirées en Alberta. Il y a également d'autres exemples.

+-

    M. Michael Cleland: Je n'ai pas les chiffres exacts sous la main. Il ne fait aucun doute que le secteur énergétique dans son ensemble, le secteur pétrolier et gazier en général, constitue une source importante des émissions accrues. Cela vaut également pour les sables bitumineux et la production de gaz naturel.

    Quelle part des émissions de l'Alberta est attribuable au secteur des transports? Je ne suis pas certain de la réponse. En fait, vous avez raison de dire que ce secteur contribue de façon substantielle aux émissions bien qu'au Canada, c'est le transport individuel personnel qui est en grande partie responsable des augmentations d'émissions de gaz à effet de serre attribuables au secteur des transports en général. On retrouve ces chiffres dans l'inventaire des gaz à effet de serre du Canada.

    Quoi qu'il en soit, il ne fait aucun doute que le secteur gazier et pétrolier, qui se porte bien et connaît une croissance, produit beaucoup d'émissions et que le Canada est confronté à un défi : faire en sorte que nous bénéficions des retombées de ce secteur tout en s'attaquant aux émissions.

+-

    M. Brian Jean: Toutefois, monsieur Cleland, il me semble que les producteurs de pétrole issu des sables bitumineux ont volontairement réduit de près de 30 p. 100 les émissions provenant de chacune de leurs usines.

+-

    M. Michael Cleland: Oui, c'est essentiellement exact.

    En effet, si l'on considère ce secteur dans son ensemble, il est juste d'affirmer que les réductions d'énergie permettent de réaliser des économies. De façon générale, et je crois que cela reflète bien les façons dont les entreprises établissent leurs priorités stratégiques, au bout du compte, la réduction de la consommation d'énergie finit par devenir une priorité et une source de possibilités intéressantes.

    Ainsi, il est vrai que ces entreprises ont volontairement réduit leurs émissions. Ces réductions volontaires ont été considérables car elles étaient conformes aux intérêts commerciaux des entreprises. Il est important de continuer à faire avancer les choses dans cette direction.

Á  +-(1155)  

+-

    M. Brian Jean: Ma dernière question s'adresse à M. Mallett.

    Vous avez parlé du programme de l'innovation. Je crois que vous parliez à la fois des secteurs manufacturiers—par exemple, les appareils électroménagers écoénergétiques, l'industrie automobile, etc.—et peut-être des codes du bâtiment, des maisons intelligentes, des interrupteurs, de choses de ce genre.

    Le programme d'innovation dont vous parlez est-il davantage axé sur les grands émetteurs finaux ou sur les consommateurs de façon générale?

+-

    Dr S. Ed Mallett: Nous mettons l'accent sur l'industrie environnementale. Il est parfois difficile de définir ce que l'on entend par industrie environnementale, parce que les questions environnementales font partie d'une gamme très importante de produits différents que l'on ne considère pas forcément faisant partie de l'industrie environnementale. En tant qu'organisation, notre rôle consiste principalement à travailler avec de petites entreprises qui démarrent et qui sont en train de mettre au point de nouveaux biens et services à partir de la recherche et du développement. Par conséquent, notre rôle consiste à les aider à assurer la commercialisation efficace de leurs produits, et nous faisons donc partie de la chaîne d'innovation qui se penche sur la recherche qui est faite au Canada et s'interroge sur la façon d'assurer la commercialisation des biens et services dans ce domaine.

    Lorsque nous nous penchons sur le secteur manufacturier et le travail que nous faisons auprès des entreprises manufacturières, essentiellement nous mettons l'accent sur le secteur manufacturier industriel. On définit les PME de toutes sortes de façons. On peut dire qu'il existe 2 millions de PME au Canada, mais cela comprend à peu près toutes les entreprises qui existent, mais ce ne sont pas toutes des entreprises manufacturières. Vous êtes probablement plus au courant que moi des chiffres, mais il existe probablement aux alentours de 35 000 à 50 000 véritables exploitations et installations de fabrication. Il s'agit donc des clients avec qui nous travaillons. Il peut s'agir de fabricants de pièces automobiles, de fabricants de textile, de fabriques de produits chimiques, de fabriques de produits alimentaires et de boissons—ce genre de choses. Il existe environ 18 codes CAE selon la classification des activités économiques de Statistique Canada, et ce sont les types de PME du secteur de la fabrication avec qui nous travaillons.

+-

    M. Brian Jean: Très rapidement, à ce sujet, avez-vous une liste d'études ou de produits dont votre groupe recommanderait la mise en oeuvre par le biais de lois—par exemple, par le biais de codes du bâtiment établis en collaboration avec les provinces et des mesures de ce genre—qui seraient les plus avantageux pour les consommateurs finaux?

+-

    Dr S. Ed Mallett: Il existe tout un secteur industriel qui met l'accent sur l'amélioration de l'isolation, l'amélioration des appareils électriques entre autres. En fait, RNCan et la province de l'Ontario sont en train de consacrer d'énormes sommes d'argent pour favoriser l'introduction de ces types de produits. Je crois que l'on accorde plus d'attention aux maisons résidentielles ces jours-ci qu'au secteur industriel. Par exemple, le programme ÉnerGuide de RNCan prévoit aux alentours de 80 millions de dollars de mesures incitatives sur trois ans pour améliorer l'efficacité énergétique des maisons. Je ne crois qu'il existe une source de financement comparable pour le secteur industriel. Il existe beaucoup d'informations sur ces types de biens et de services, et une partie assez importante du secteur industriel met l'accent sur les produits écologiques en matière de logement et d'activités résidentielles.

+-

    M. Lee Richardson: Nous devrons peut-être passer au prochain tour, mais je voulais simplement poser une question à Mme Hughes Anthony parce que vous représentez un secteur assez vaste de la société canadienne. Je m'interroge sur la viabilité de l'économie lorsque les objectifs font l'objet d'exigences ou de changements draconiens. Certains doutes ont été exprimés, même de la part du gouvernement, quant à la possibilité d'atteindre ces objectifs dans le délai prévu. Dans votre examen des mesures incitatives par rapport aux sanctions, avez-vous déterminé que grâce aux mesures incitatives, il sera possible d'atteindre les objectifs proposés dans le délai qui est maintenant imposé?

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: Je ne crois certainement pas, monsieur Richardson, que le Canada parviendra à atteindre les objectifs prévus par le protocole de Kyoto dans les délais indiqués.

    Cela dit, bien des industries dans de nombreux secteurs font beaucoup de travail en ce qui concerne le changement climatique. Comme vous avez pu l'entendre aujourd'hui, nous avons obtenu de bons résultats dans certains secteurs. Je crois que la principale frustration qu'un bon nombre d'entre nous éprouvent dans les milieux d'affaires, c'est que le Canada a ici l'occasion d'établir—et mettons les objectifs de Kyoto de côté pour l'instant—un plan pancanadien qui permet de s'attaquer avec efficacité au changement climatique grâce à tout un ensemble de mesures tant sur le plan de la consommation que sur celui de la production d'énergie.

    Il y a je ne sais pas combien d'années que nous avons signé le protocole de Kyoto et pourtant ce plan n'existe toujours pas. Or, il existe énormément d'informations et d'indications selon lesquelles certaines personnes surveillent activement la situation. Dans certains secteurs, nous nous sommes heurtés à d'importants obstacles du côté technologique, que nous devons surmonter. Je crois que c'est là où nous devons maintenant concentrer nos efforts. Plutôt que de simplement offrir des incitatifs ici et là, tâchons de comprendre en quoi consiste notre perspective nationale sur l'approvisionnement énergétique, comme l'a indiqué M. Cleland. Tâchons de mettre l'accent sur les technologies d'avenir. Tâchons d'offrir des mesures incitatives dans ces secteurs en particulier afin de déterminer si nous pouvons vraiment faire des progrès.

  +-(1200)  

+-

    Le président: Je vous remercie. Je vais devoir vous interrompre pour l'instant.

    Si les témoins souhaitent ajouter quelque chose lors de la période de questions, vous pourrez y revenir, monsieur Cleland. Je suis sûr que l'on vous posera des questions.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.

    À entendre nos témoins aujourd'hui, je me croirais sur une autre planète. Je partage certains constats avec Mme Anthony et M. Cleland. Si le Canada a de la difficulté à atteindre les objectifs de Kyoto, c'est justement parce qu'il n'a pas agi et parce que des secteurs industriels n'ont même pas daigné répondre à l'appel à une approche volontaire du gouvernement fédéral. Je pense donc que s'il y a des reproches à adresser, c'est certainement à l'endroit de certains secteurs qui ont fait preuve de mauvaise foi et qui ont voulu carrément s'éloigner du Protocole de Kyoto.

    On vient nous parler ce matin d'un cadre sur le changement climatique qui devrait garantir l'approvisionnement. On nous dit qu'il faut que le plan s'adapte aux prix élevés. Mais je n'ai rien entendu, de la part des secteurs industriels, au sujet des objectifs clairs et à des mesures quantitatives afin d'atteindre ou de tendre vers l'atteinte de l'objectif de Kyoto.

    Ma question s'adresse à M. Cleland. Je comprends que vous voulez un plan pancanadien, mais dites-nous clairement quel engagement votre secteur industriel est prêt à prendre, avec le gouvernement, afin de contribuer à l'atteinte de l'objectif de Kyoto. Nous ne voulons pas de phrases creuses, monsieur le président, mais des objectifs quantitatifs. Le protocole fixe des objectifs quantitatifs de réduction. Ce qu'on attend des secteurs industriels, qui ont été responsables de 47 p. 100 de l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2002, c'est une cible précise en termes de mégatonnes. Quel engagement êtes-vous prêt à prendre quant à votre contribution pour atteindre l'objectifs du Protocole de Kyoto?

[Traduction]

+-

    M. Michael Cleland: Je vous remercie de votre question, monsieur Bigras.

    Tout d'abord, vous m'avez posé une question à propos de mon secteur particulier de l'industrie. Il s'agit du secteur en aval de l'industrie pétrolière et gazière. Je ne parlerai pas des autres secteurs. M. Konow voudra peut-être parler du secteur de l'électricité.

    Vous m'avez demandé quels sont les engagements précis que nous prendrons ou que nous avons pris. Nous avons pris un certain nombre d'engagements particuliers afin de travailler en collaboration avec les Canadiens pour leur permettre d'améliorer leur propre efficacité énergétique. Cela fait partie du travail de notre industrie. Nous travaillons par le biais de diverses instances de réglementation. Nous pouvons vous fournir des indications des réductions que nous avons obtenues dans ces secteurs. Nous avons l'intention de poursuivre nos efforts en ce sens, tant que les gouvernements et les instances de réglementation continuent de travailler avec nous.

    Pour ce qui est de nos propres émissions, nous avons travaillé étroitement avec RNCan, avec le gouvernement dans le cadre des grands émetteurs finaux. De toute évidence, ce sur quoi nous nous entendrons au bout du compte fera partie de la discussion générale et de la décision que prendra le gouvernement en matière de norme.

    Vous avez dit que certains secteurs ont fait preuve de mauvaise foi, et je ne suis absolument pas d'accord avec cela. Nous avons travaillé de bonne foi avec le gouvernement afin d'établir un plan réaliste de réduction de nos émissions, conformément au cadre stratégique général.

  +-(1205)  

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Monsieur le président, je peux comprendre qu'on fixe des objectifs pour certains secteurs industriels qui possèdent la technologie ou pour des secteurs industriels qui n'en fixent pas.

    Dans l'industrie cimentière, par exemple, la technologie est quasi inexistante et les résultats seront donc plus difficiles à atteindre. Par ailleurs, les secteurs du pétrole et du gaz possèdent la technologie et pourraient très bien l'engager à contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

    Je me demande où les secteurs qui sont les plus grands émetteurs industriels sont prêts, en termes quantitatifs, à s'engager avec le gouvernement pour contribuer à la réduction de 240 mégatonnes.

    J'ai une autre question. Je suppose que le gouvernement vous a présenté le schéma qui démontre que l'impact économique de l'application du Protocole de Kyoto sur l'industrie pétrolière et gazière ne dépasserait pas 25 ¢ le baril de pétrole. Est-ce que vous êtes d'accord sur ce constat du gouvernement fédéral et qui vous a été présenté?

[Traduction]

+-

    M. Michael Cleland: Je devrais d'abord situer le contexte. Ce dont nous parlons ici, c'est de l'hypothèse de ce plafond de 15 $ et de la réduction de 15 p. 100 de l'intensité et, par conséquent, l'hypothèse selon laquelle cela est en majeure partie le résultat des crédits achetés.

    Cela m'amène à ce que je voulais faire valoir—monsieur le président, ce que je voulais faire valoir lorsque Mme Hughes Anthony parlait—, à savoir le problème de confondre l'importance et l'urgence. La gestion des émissions de gaz à effet de serre est une importante question stratégique pour le Canada. Les possibilités d'atteindre les taux de réduction des émissions qui permettront en fin de compte de stabiliser les émissions mondiales s'échelonneront en majeure partie sur les 10, 20, 30 ou 40 prochaines années. La difficulté à laquelle nous faisons face à l'heure actuelle en ce qui concerne Kyoto—et cette difficulté s'est présentée il y a cinq ou huit ans lorsque le protocole de Kyoto a été établi—, c'est que la majorité des possibilités étaient déjà exclues en raison du capital national existant au sein de l'économie canadienne, et c'est le cas pour l'ensemble de l'industrie. Il faut donc en tenir compte lorsque l'on parle d'une réduction réaliste et réelle des émissions.

    J'aimerais aussi vous signaler les passages de mon exposé où nous indiquons les mesures que l'industrie a effectivement déjà prises, et Mme Hughes Anthony en a parlé également. Nous avons fait des progrès pour ce qui est des émissions industrielles, dans d'autres secteurs de nets progrès ont été réalisés de façon générale en matière d'efficacité énergétique, et l'industrie poursuivra ses efforts en ce sens car, comme je l'ai dit, cela représente une saine gestion sur le plan des affaires.

    Quant à votre question précise sur les chiffres dans le contexte de l'achat de crédits d'émissions au prix plafond cité, il s'agit d'une déclaration exacte. Il n'est pas tout à fait évident qu'il s'agisse d'une très bonne politique, mais l'énoncé est exact, pour ce que cela vaut.

+-

    Le président: Il vous reste quatre minutes, monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Madame Anthony nous a dit qu'elle souhaitait que la politique de lutte contre le changement climatique mise sur les mesures incitatives plutôt que sur les pénalités. Cependant, la réalité est qu'au Canada, on a effectivement misé sur les incitatifs, mais que ces derniers étaient destinés à l'industrie pétrolière. On sait qu'il y a eu une augmentation de 33 p. 100 de l'aide au secteur des hydrocarbures entre 1996 et 2002. Il y a eu effectivement des incitatifs, mais ceux-ci favorisaient l'industrie des hydrocarbures qui, elle, a augmenté ses émissions de gaz à effet de serre de 47 p. 100 au cours des dernières années.

    Je suis également d'accord avec vous, madame Anthony, lorsque vous dites qu'il faut faire en sorte que l'argent soit alloué correctement. Par contre, n'est-on pas en train de mettre en place un système en vertu duquel, au cours des prochaines années et dans le plan qui va nous être présenté--et M. Bramley a fait une excellente présentation qui le démontre--, le fardeau qui sera imposé à l'industrie des hydrocarbures sera moindre, premièrement? Deuxièmement, ne va-t-on pas continuer à donner des incitatifs fiscaux à des citoyens corporatifs qui ont augmenté leurs émissions? Je prends pour exemple le projet de loi C-48, qui donne 250 millions de dollars par année au secteur des hydrocarbures. Ne serait-il pas plus avantageux, en effet, de se tourner vers des incitatifs fiscaux qui visent une réduction des émissions de gaz à effet de serre, par exemple, et qui visent l'encouragement au développement d'énergies renouvelables? Je pense que ce serait fort probablement une meilleure voie à suivre. Ne devrait-on pas faire un repositionnement, sur le plan fiscal, en faveur de ces industries, qui sont fort probablement aussi membres de la Chambre de commerce du Canada?

  +-(1210)  

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: Je vais répondre à quelques-uns des points que vous avez soulevés. Je pense qu'il faut établir clairement que l'année de base du Protocole de Kyoto était 1990. Il faut souligner aussi que nous avons mal choisi notre objectif, à mon avis, parce que le Canada était en pleine croissance. Nous avons bénéficié d'une croissance économique depuis ce temps, et nos exportations énergétiques ont évidemment aussi contribué à cette croissance. Je ne trouve donc pas, monsieur Bigras, qu'il est tout à fait juste de reprocher à l'industrie pétrolière d'avoir réussi tellement bien au cours des dernières années.

    Tout le monde au pays utilise de l'énergie, par exemple de l'essence pour les voitures, même au Québec, ou du pétrole pour chauffer les maisons ou à des fins industrielles. Je peux constater, à la lumière des faits que nous avons entendus aujourd'hui, que l'industrie énergétique a définitivement pris des mesures qui ont eu un effet sur l'intensité de ses émissions de gaz à effet de serre. Faut-il faire encore mieux? Absolument.

    Selon moi, il faut tenir compte de la contribution de notre production énergétique à notre économie et aussi de ce que cela apporte à nos consommateurs. Je ne pense pas que vous trouverez des consommateurs qui voudront jeter leur réfrigérateur après cinq ans alors qu'ils s'attendaient à le garder pendant 25 ans, sans qu'il y ait des incitations vraiment positives. C'est la raison pour laquelle je pense à la technologie, à des mesures d'incitation au développement de la technologie, comme le Dr Mallett l'a dit, pour vraiment avoir des technologies économiques autant pour les consommateurs que pour les industriels. Sinon, nous avons le One-Tonne Challenge--nous avons vu la publicité à la télévision--, mais les Canadiens ne savent pas ce que sait, ne savent pas quoi faire avec tout cela. Faut-il remplacer la voiture demain pour un smart car, qui n'est même pas disponible au Canada? Faut-il remplacer le réfrigérateur ou le congélateur par un modèle beaucoup plus efficace? Nous ne sommes pas rendus là. C'est un exercice à long terme, et tous les Canadiens doivent y participer.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, madame Hughes Anthony, monsieur Bigras.

    Monsieur McGuinty, vous avez la parole.

+-

    M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui. C'est un excellent groupe et j'ai beaucoup trop de questions à poser.

    Si vous me le permettez, monsieur le président, je prendrai cinq ou six minutes pour poser une série de questions et nous verrons alors qui peut y répondre et poursuivre ainsi la discussion.

    J'aimerais aborder la première présentation faite par M. Cleland et comme lui je considère qu'une stratégie en matière d'énergie s'impose, ou du moins un document de base quelconque, dans ce pays sur l'orientation que nous avons l'intention de prendre en matière énergétique. Le travail de l'Office national de l'énergie est sans doute le seul aperçu sérieux des tendances dans le domaine énergétique. Je considère moi aussi qu'il s'agit d'une nécessité.

    J'ai examiné de près l'expérience du Royaume-Uni et les facteurs en cause, y compris l'épuisement des réserves pétrolières et gazières de la mer du Nord dont dispose le Royaume-Uni. C'est ce qui a incité je crois le premier ministre à assumer la responsabilité du dossier du changement climatique et à reformuler le débat sur le changement climatique comme un débat sur l'énergie afin que les citoyens puissent comprendre de quoi il s'agit, parce qu'ils ne comprennent toujours pas le phénomène du changement climatique. La confusion règne.

    J'aime bien la publicité sur le défi d'une tonne, mais je crois qu'un grand nombre de Canadiens continuent de croire qu'il s'agit d'un programme de perte de poids. Donc, je tenais à préciser que j'appuie la préparation d'un document de base sur l'énergie.

    Deuxièmement, j'aimerais que les membres du groupe m'indiquent la similarité qui existe avec l'approche adoptée par les États-Unis en matière de changement climatique, parce que les Américains ont pris des mesures en matière de changement climatique. Elles ne relèvent pas simplement du protocole de Kyoto, mais les Américains ont pris des initiatives en matière de changement climatique. Dans quelle mesure les membres du groupe estiment-ils que l'approche canadienne est compatible avec celle que viennent d'adopter les Américains, surtout compte tenu du fait que nous avons constitué un groupe de travail nord-américain sur l'énergie à RNCan, qui assure la liaison avec ses homologues à Washington? Cependant, les Américains n'utilisent pas l'expression « développement durable » et ne parlent pas de réductions de gaz à effet de serre, ce que je trouve incroyable dans le contexte de l'ALENA.

    Nous procédons à la mise en oeuvre du protocole de Kyoto de façon multilatérale, mais nous sommes inextricablement liés aux États-Unis, et nos territoires et nos océans sont contigus aux territoires et océans américains. Pourquoi alors ne faisons-nous pas une étude approfondie des mesures à prendre pour répondre au changement climatique en fonction de l'ALENA?

    Madame Hughes Anthony, j'aimerais vous poser une question plus précise. Vous avez fait un certain nombre d'observations à propos des transports en commun en indiquant qu'il s'agissait d'une solution essentielle au phénomène du changement climatique. Vous avez émis certains doutes à propos de l'efficacité des dépenses que le gouvernement consacre à certains programmes. Vos membres sont-ils prêts à se déclarer publiquement en faveur, par exemple, d'une augmentation des impôts pour financer le transport en commun? Car la province de l'Ontario a subi sept années de réduction massive au financement du transport en commun, dans la région du Grand Toronto, par exemple, sous une administration conservatrice à saveur républicaine. Vos membres seraient-ils disposés aujourd'hui, comme solution au changement climatique, à appuyer des augmentations d'impôt pour financer, par exemple, les transports en commun? Sont-ils disposés à consentir des investissements supplémentaires au niveau des infrastructures et dans d'autres programmes gouvernementaux qui comme vous l'avez souligné avec raison devraient être efficaces? Croyez-vous que vos membres soient disposés à le faire à ce stade-ci?

    Ma prochaine question s'adresse à vous, monsieur . On a mentionné à plusieurs reprises un document récent publié par l'institut Pembina dont nous n'avons pas encore pris connaissance. J'aurais aimé savoir ce que ce document dit particulièrement à propos de l'appui du gouvernement fédéral à l'industrie des combustibles fossiles. J'aimerais avoir une idée du montant dont il s'agit. J'aimerais savoir aussi si ce document a été examiné par des pairs. Et avez-vous obtenu une réponse du gouvernement, des secteurs industriels ou des groupes de consommateurs?

    Ma dernière question s'adresse à M. Mallette. Je tiens à vous féliciter pour votre présentation. C'est l'une des présentations les plus rafraîchissantes que j'ai entendues sur les changements climatiques de la part de ceux qui se trouvent en première ligne et où on dissipe les mythes à propos des difficultés de mettre en oeuvre des mesures éco-énergétiques dans les usines, et de la répartition des rares ressources dans les usines, par opposition à la stratégie utilisée par des grandes entreprises. J'aimerais que vous m'indiquiez—et il serait peut-être utile, monsieur le président, que le comité entende les mesures particulières que peut prendre le gouvernement fédéral pour donner suite à la difficulté d'attribuer les rares ressources au niveau des usines.

    Vous avez parlé des mesures d'incitation, et contrairement à mon collègue du Bloc qui de toute évidence n'a pas pris connaissance de preuves provenant des États-Unis, les incitatifs du marché, particulièrement l'échange de droits d'émission, se sont avérés l'un des moyens les plus rentables de réduire les gaz à effet de serre et d'autres sources de pollution. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet, je vous prie.

  +-(1215)  

+-

    Le président: Monsieur McGuinty, je crois que vous avez posé trois questions à l'attention de Mme Hughes Anthony, de M. Bramley et de M. Mallett. Nous pourrions peut-être procéder dans l'ordre inverse, et ensuite pour ce qui est du reste, ceux qui le peuvent répondront aux deux autres questions concernant l'expérience britannique et l'expérience américaine dans le cadre de l'ALENA.

    Nous allons commencer par M. Mallett.

+-

    Dr S. Ed Mallett: C'est une question intéressante.

    Dans les années 90, RNCan et Industrie Canada ont coopéré pour examiner les investissements dans le secteur manufacturier et leur viabilité, et ont sondé environ 370 entreprises afin de leur demander quels étaient les obstacles aux investissements dans ce secteur en particulier? Je crois qu'ils ont établi qu'il existait sept obstacles, à savoir—en partie l'absence des ressources techniques à l'usine; en partie l'absence de connaissances à propos du type d'amélioration qui permettrait d'économiser l'énergie et de prévenir la pollution; l'affectation pour les dépenses en capital qui ne permet pas d'accorder la priorité à ce genre d'investissement; un malentendu avec les entreprises à propos des critères de rendement de l'investissement; et des préoccupations à propos de l'interruption de la production, c'est-à-dire si je modifie la chaîne de montage de l'usine, que vais-je faire; vais-je pouvoir quand même atteindre mes quotas? Les obstacles résultent donc en majeure partie de problèmes systémiques de gestion d'usine.

    Lorsque nous avons mis sur pied nos programmes dans ce secteur, nous avons conçu de façon systématique un programme qui permettrait de répondre à l'ensemble de ces questions et nous avons tâché de concevoir un programme qui permettrait d'amorcer un changement de comportement au sein de l'usine. Nous sommes partis du principe qu'il fallait mettre sur pied un programme en atténuant certains de ces obstacles, en incitant les intéressés à régler les problèmes et mettre sur pied des programmes au sein de l'usine et d'utiliser ensuite les cas de réussites obtenues grâce à ce moyen pour promouvoir la situation et encourager d'autres personnes à adopter le même comportement.

    Ces programmes ont donné d'assez bons résultats, parce que le taux de mise en oeuvre des recommandations que nous avons formulées a dépassé 95 p. 100 dans le cas d'une recommandation ou plus découlant de la vérification. Mais le fait est qu'il reste encore beaucoup à faire. Par exemple, les gens ont tendance à se donner deux ans pour récupérer leur investissement un point c'est tout. Il s'agit d'un taux de rendement extrêmement profitable et, de toute évidence, il faudrait pouvoir faire des investissements que l'on peut récupérer en quatre ans tout en permettant d'afficher des taux de rendement acceptables pour l'entreprise. Nous avons donc tâché de déterminer la façon d'accroître effectivement les incitatifs susceptibles de favoriser ce type d'investissement?

    Nous avons eu des cas où certains projets sont restés en suspens simplement parce qu'ils ne satisfaisaient pas au taux de rendement minimal de l'entreprise, qui à mon avis était trop élevé. Mais la question qui s'est posée à nouveau consistait à déterminer s'il existait un moyen d'avoir accès à un financement qui permettrait d'abaisser le coût du capital se rattachant à ce type d'investissement? Et il existe peut-être des avantages fiscaux liés à cette provision pour amortissement. J'estime que c'est le type de questions dont il faut s'occuper.

    Il existe en fait toute une gamme d'incitatifs économiques et fiscaux que l'on peut concevoir pour tâcher d'encourager ces investissements, mais la tâche est loin d'être facile. Les fabricants ont tellement d'autres utilisations à faire de ce capital qu'ils ne pourront consacrer, lorsqu'ils envisagent des investissements viables, que probablement 5 à 10  p. 100 du fardeau total des coûts de leur installation de fabrication à ce secteur en particulier. Ils accorderont beaucoup plus de priorité à tous les autres coûts de fabrication.

  +-(1220)  

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Mallett.

    Monsieur Bramley.

+-

    M. Matthew Bramley: Je vous remercie.

    L'étude que vous avez mentionnée dans votre question a été publiée par l'Institut Pembina le 31 janvier 2005. Ce rapport s'intitule Government Spending on Canada's Oil and Gas Industry et peut être téléchargé gratuitement à partir de notre site Web.

    D'après les principales constatations de l'étude, au cours de la période étudiée, soit de 1996 à 2002, la totalité des dépenses fédérales dans les secteurs de l'industrie pétrolière et gazière se sont élevées à 8,3 milliards de dollars. En 2002, ce chiffre était de 1,4 milliard de dollars, ce qui représente une augmentation de plus de 1,1 milliard de dollars par rapport à 1996. La proportion du montant de 8,3 milliards de dollars consacré aux sables bitumineux était de 1,2 milliard de dollars sur la même période de sept ans. Lorsque l'on exprime le total général des 8,3 milliards de dollars selon l'équivalent du coût du baril de pétrole, cela représente environ 0,65 $ le baril.

    La grande majorité de ce montant de 8,3 milliards de dollars représente les dépenses fiscales—autrement dit, les avantages fiscaux dont profite l'industrie pétrolière et gazière comparativement à un système fiscal neutre. Donc, sur ce montant de 8,3 milliards de dollars, 7,9 milliards de dollars proviennent de ces dépenses fiscales, et la grande majorité de ces dépenses était consacrée à l'exploration et la mise en valeur au Canada de même que la déduction pour amortissement accéléré.

    J'aimerais simplement mentionner également que l'étude a exclu ce qui pouvait être considéré comme d'autres subventions que reçoit le secteur. Elle a entre autre exclu toute considération des coûts environnementaux, des coûts des dommages causés à l'environnement par le secteur. Elle a aussi exclu toute considération de régime de redevances. Nous avons publié une autre étude il y a quelques mois qui fait état de ce que nous considérons comme des régimes de redevances insuffisants, qui ne permettent pas au public de recevoir sa juste part de l'exploitation d'une ressource qui lui appartient.

+-

    Le président: Monsieur Bramley, nous allons obtenir ce document et je vous en remercie. Mais je veux permettre à Mme Anthony de répondre à la question.

  +-(1225)  

+-

    M. Matthew Bramley: On m'a posé une question à propos de l'examen par les pairs. Je devrais probablement y répondre.

+-

    Le président: Prenez-en note et vous pourrez peut-être y répondre plus tard.

    Madame Hughes Anthony, en ce qui concerne le transport en commun.

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: Je vais simplement dire que je crois que ma question concerne les transports en commun. La Chambre et tous ses membres ont beaucoup appuyé le programme des villes, monsieur McGuinty, afin de s'assurer que nos centres urbains fonctionnent bien et que l'on prévoie une forme quelconque de partage des recettes pour certaines mesures importantes, comme l'infrastructure. Un grand nombre de nos villes considèrent le transport en commun comme une priorité, de même que l'approvisionnement en eau et les systèmes d'égout.

    Vous avez parlé d'augmentation d'impôts pour appuyer ce genre d'initiative et je crois que c'est là où nous divergeons d'opinion. Nos membres considèrent que le cadre budgétaire actuel du gouvernement permet largement de s'assurer que nous appuyons le transport en commun. Comme je l'ai mentionné dans mes remarques, un montant de 3,7 milliards de dollars a été prévu au budget jusqu'à présent pour des initiatives relatives au changement climatique. Ce montant n'a pas été entièrement dépensé. Nous savons que l'on pourrait en réaffecter une partie. Pour ce qui est dune augmentation d'impôt quelle qu'elle soit, cela ne sera pas facilement accepté par les membres de mon organisation. Mais lorsqu'il s'agit d'attribuer une partie des ressources existantes pour encourager les transports en commun, surtout dans nos grandes municipalités où l'engorgement routier est un réel problème, nous sommes tout à fait d'accord.

+-

    Le président: Je vous remercie, Nancy.

    Nous devrons laisser les autres questions peut-être pour plus tard.

    Monsieur Cullen.

+-

    M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD): Merci, monsieur le président.

    Je tiens également à remercier les membres du groupe.

    Comme vous pouvez le constater, si c'est la première fois que vous comparaissez devant un comité, je n'ai pas beaucoup de temps pour poser mes questions. Donc, je demanderais aux membres du groupe d'être aussi concis dans leurs réponses que je le serai dans mes questions. Il est un peu compliqué, comme M. McGuinty l'a dit, d'aborder tous les aspects dont on voudrait traiter.

    Je commencerai par M. Cleland. Je ne comprends pas bien les chiffres cités. Les chiffres ne sont pas toujours fiables et semblent varier considérablement. D'une part, on parle beaucoup des améliorations qui ont été apportées, que les industries ont fait beaucoup de chemin, particulièrement dans le secteur de l'énergie, mais parallèlement, je constate l'augmentation d'émissions au cours des 10 dernières années. J'ai de la difficulté à justifier ces deux éléments d'information.

    D'après la présentation que nous avons entendue aujourd'hui, si j'examinais la situation de façon objective, je dirais que nous faisons de l'excellent travail. Le secteur pétrolier et le secteur énergétique arrivent remarquablement bien à réduire leurs émissions. Mais les émissions, particulièrement dans le secteur de l'énergie, ont augmenté de façon spectaculaire et cette augmentation ne correspond pas à un accroissement de la rentabilité du secteur ni du pourcentage du PIB que représente le secteur de l'énergie. Il semble y avoir une accélération des émissions de gaz à effet de serre par ce secteur en tant que pourcentage.

    Je me demandais si vous pouviez rectifier ces deux points de vue qui, à mon avis, ne semblent tout simplement pas coïncider.

+-

    M. Michael Cleland: Je ne suis pas sûr d'être d'accord avec vous en ce qui concerne une accélération par rapport à la taille du PIB. Il faudrait déterminer de plus près ce qui vous amène à tirer une telle conclusion.

    Je sais qu'au cours des 10 dernières années, le Canada a augmenté de façon spectaculaire sa production de pétrole et de gaz naturel. Parallèlement, nous avons dû composer également avec un niveau élevé et inhérent d'intensité énergétique de la production pétrolière et gazière. Au Canada, une forte proportion du gaz par exemple contient beaucoup de soufre. Il faut énormément d'énergie pour éliminer le soufre. Et le secteur des transports joue un rôle à cet égard. Mais pour ce qui est de l'intensité, nous avons constaté une diminution très importante, surtout en ce qui concerne les sables bitumineux.

    Donc je dirais qu'effectivement nous avons apporté des améliorations. Nous devrons examiner d'un peu plus près les chiffres pour indiquer comment nous en sommes arrivés à cette conclusion.

+-

    M. Nathan Cullen: J'aimerais les connaître.

    J'ai une question pratique qui concerne Kyoto. On envisage de déplacer une forte masse de gaz naturel vers les sables bitumineux afin d'en faciliter le traitement. Pour ce qui est de la valeur du gaz naturel comme unité énergétique, en ce qui concerne nos émissions, croyez-vous qu'il soit bon pour le Canada d'encourager par l'installation d'un pipeline l'utilisation de ce que je considère être une de nos formes d'énergie les plus propres et, dans un sens, de produire davantage d'énergie à partir de l'une de nos formes les plus difficiles d'énergie qui réside dans les sables bitumineux?

+-

    M. Michael Cleland: Je ne peux pas résister à la tentation de dire comme vous que le gaz naturel est l'une de nos formes d'énergie les plus propres, et c'est l'un des arguments que mon association avance.

    La question est difficile. Vous devez cloisonner les questions. Tout d'abord, pour ce qui est d'encourager l'exploitation du gaz du delta du Mackenzie et son transport vers les marchés du sud, il faut y voir à mon avis un projet qui n'a rien à voir avec l'usage ultime de ce gaz. Essentiellement, ce que vous avez, c'est un gisement nord-américain de gaz naturel d'environ 70 milliards de pieds cubes par jour, et il faut savoir d'où proviennent les sources et comment on en fait ultimement un seul gisement.

    Aux prix actuels du gaz, les exploitants des sables bitumineux envisagent diverses possibilités. Chose certaine, ils recherchent des moyens de réduire l'intensité énergétique du processus de production. C'est l'un des avantages du système des prix. Le gaz naturel à 6 $ stimule grandement la réflexion. Je crois que ce qu'on va voir à long terme, c'est qu'on va trouver des moyens d'extraire ce bitume en utilisant beaucoup moins d'énergie.

  +-(1230)  

+-

    M. Nathan Cullen: Merci. Je vais maintenant passer à Mme Hughes Anthony.

    J'ai lu divers éditoriaux et articles de journaux qui faisaient état de la position de la Chambre face au protocole de Kyoto, et je note une différence marquée de ton entre ce que j'entends dans le grand public et ce que j'entends aujourd'hui. C'était beaucoup plus encourageant, et je vous encourage à faire valoir vos vues auprès du grand public aussi.

    Une chose m'intrigue. Quand le Canada au cours des dernières années a investi des milliards de dollars dans les télécommunications—pour câbler tout le pays, essentiellement—je ne me rappelle pas que la Chambre ait dénoncé cela comme étant un mauvais investissement. Cela semble bon pour vos membres. Je suis moi-même un ancien membre de votre chambre.

    Et nous voilà ici dans l'Est, quelques heures avant que cet accord soit mis en oeuvre. Je me demande si la question n'est pas de savoir maintenant si l'on a perdu une occasion—un investissement perdu dans la perspective du Canada—d'investir dans ces projets qui rendraient notre nation plus prospère. Je crois que les gains d'efficacité qu'on exige en vertu de l'accord de Kyoto, et je parle de gains d'efficacité dans l'énergie et les transports, sont une bonne chose.

    Vous avez mentionné les États-Unis, ce que je trouve intéressant. Mon collègue du Parti conservateur a mentionné ce matin au cours d'une table ronde que 39 États allaient atteindre les cibles de Kyoto. Les investisseurs ne fuient pas l'Amérique. Les investisseurs ne disent pas: « Mon Dieu, ces gens-là investissent dans des choses comme le changement climatique. Fichons le camp d'ici et allons nous installer en Chine. »

    Je ne comprends pas ceux qui disent que nous ne pouvons pas réaliser les investissements qu'exige Kyoto dans les technologies plus vertes parce que cela créera un climat d'investissement qui découragera l'entreprise, de telle sorte que nous ne pourrons pas faire concurrence aux États-Unis, alors que les États-Unis en ont fait beaucoup plus que nous.

    Le fond du problème ne tient-il pas au fait que nous tergiversons à Ottawa depuis les 12 dernières années, depuis que cette question s'est posée? Et voilà maintenant qu'à la onzième heure, on décide que c'est la panique et qu'on ne peut tout simplement pas le faire.

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: J'incline à dire comme vous que les tergiversations d'Ottawa ont définitivement marqué toute cette initiative. Les membres de la Chambre ont mis la main à la pâte avant que l'accord de Kyoto soit signé en 1997. Au moment où l'accord a été signé, le gouvernement a créé ce qu'on appelait, je crois, des tables sectorielles, et bon nombre des membres de la Chambre de commerce ont siégé à ces tables sectorielles ici et là. Il n'en est jamais rien sorti. Cela dit, j'ai la conviction que les initiatives dont je parlais ici, avec ce qu'elles vont mettre en place dans les divers secteurs, sont bonnes pour l'entreprise, demeureront bonnes pour l'entreprise et doivent être poursuivies.

    Si l'on pouvait, comme je l'ai dit, se défaire pour un moment du corset de Kyoto... Les délais de Kyoto posent un problème : on aura beau essayer, nous ne disposons pas des technologies voulues pour respecter ces délais. Je crois que ce que nous devons tous faire, si nous pouvions tous aller sur la lune et écouter notre conversation de là-bas... Pourquoi ne nous concentrons-nous pas sur ce que nous pouvons faire pour améliorer les choses dans la durée? Peu importe ce qui arrivera demain parce qu'l y a une date anniversaire, profitons de l'expertise que nous avons dans les divers secteurs industriels qui ont déjà réalisé des améliorations importantes. Allez plus loin de ce côté, investissez dans les bonnes technologies, et avancez; c'est ce que je propose.

+-

    M. Nathan Cullen: Très bien. Merci pour cette réponse.

    Permettez-moi de faire une remarque au sujet des cibles, après quoi je passerai à M. Bramley. J'étais planificateur stratégique. Sans délais et sans cibles, il est très difficile pour une entreprise de dire à ses employés ou associés qu'elle va devenir tout simplement plus rentable ou plus efficiente. De manière générale, on arrive à faire ces choses dans l'entreprise quand on a un but et une cible.

    Ce que j'ai entendu M. Dion dire—et c'était il y a quelques mois de cela—à savoir que nous devons oublier les cibles et simplement avancer, me laisse très perplexe d'un point de vue économique. Je ne proposerais jamais quoi que ce soit à une entreprise sans avoir une cible ou un but quelconque.

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: Je suis d'accord. Mais voyez où nous en sommes maintenant, par exemple dans la province de l'Ontario, dont le gouvernement a dit qu'on n'aurait plus jamais de centrale au charbon et qu'on n'aurait pas non plus de centrale nucléaire. Bon nombre de mes membres qui sont en Ontario disent : « Eh bien, d'où proviendra l'énergie dans 20 ans? Combien un kilowattheure d'électricité va-t-il coûter dans 20 ans? » Nous devons nous organiser.

  +-(1235)  

+-

    M. Nathan Cullen: Je n'aurais pas pu mieux le dire.

    Ma dernière question s'adresse à M. Bramley. J'ai entendu les chiffres qu'on a lancés, mais ceux-ci m'ont beaucoup frappé aujourd'hui lorsqu'on a parlé des subventions qui sont versées au secteur pétrolier et gazier, particulièrement pour les sables bitumineux, par le biais des incitatifs fiscaux—8,3 milliards et des poussières. Pourriez-vous me dire comment vous envisagez le scénario de demain—en réponse à la question de Mme Anthony sur la question de savoir où nous allons aboutir si nous commençons à exclure toutes ces sources d'énergie—si on égalisait les chances au Canada pour les énergies de remplacement.

+-

    M. Matthew Bramley: Je n'ai pas vu la modélisation qu'il faudrait faire pour vraiment répondre avec exactitude à cette question, mais il ne fait aucun doute que l'État investit lourdement dans des secteurs qui produisent de fortes émissions de gaz à effet de serre, et ces émissions connaissent une croissance très rapide, et au même moment, le Canada se trouve loin derrière d'autres pays industrialisés au niveau des technologies énergétiques non polluantes ou à faibles émissions.

    L'exemple que l'on cite toujours, c'est l'énergie éolienne, où le Canada a créé des installations qui produisent quelque 400 mégawatts, alors qu'un pays dont le territoire est beaucoup plus petit, l'Allemagne, produit quelque 15 000 mégawatts. Cela vous montre tout le retard que nous avons pris au niveau de cette technologie énergétique propre.

    Je tiens à ajouter rapidement que je suis quelque peu consterné par le débat que nous semblons avoir sur la question de savoir s'il y a lieu d'atteindre la cible de Kyoto, et on parle d'oublier les cibles, ou si le Canada a la bonne cible. Le fait est qu'il s'agit d'une exigence internationale du droit international. C'est une obligation légale qu'a le Canada, et j'espère donc qu'on pourra parler à l'avenir non pas du si mais du comment.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bramley.

    Nous allons maintenant passer à M. Watson. Vous avez cinq minutes.

+-

    M. Jeff Watson (Essex, PCC): En fait, l'observation de M. Bramley me permet d'enchaîner.

    Si le gouvernement s'est trompé au départ, nous sommes coincés avec une cible. En affaires, si je commets une erreur, je peux constamment repenser mes cibles et les modifier selon mes plans d'avenir. C'est une occasion importante...

    C'est le genre de compréhension qu'il faut avoir ici. Nous sommes coincés, et cela nous pose des défis intéressants. Voyez le marché en tant que tel et ses milliers de transactions individuelles que font les consommateurs—qu'il s'agisse de la distance qu'ils parcourent au volant de leur voiture, de ce qu'ils sont disposés à payer pour l'essence ou non—;en introduisant un facteur majeur de perturbation, on s'expose à de graves répercussions.

    Les idées existent dans l'abstraction, mais c'est la réalité qui les confirme ou les infirme. Je veux toujours voir... Si une norme fonctionne en Californie, on ne peut pas nécessairement l'importer dans une province comme l'Ontario. Si quelque chose marche bien en Suède, cela ne marchera pas nécessairement au Canada. Le contexte devient très important lorsqu'il s'agit de savoir si des idées vont marcher ou non. Ça paraît bien, par exemple...

    Il y a probablement plusieurs domaines dont j'aimerais parler, mais je ne vais pas vous faire de discours parce que je veux entendre de vraies réponses.

    M. Mallett a soulevé une idée importante au sujet des entreprises et de leurs priorités en matière d'investissement. Il y a des occasions à exploiter, mais certaines entreprises existent dans un marché compétitif—et pour les grandes entreprises, la concurrence est mondiale. Elles réagissent à la demande aussi bien qu'à la concurrence. Cela les contraint à prendre toutes sortes de décisions lorsqu'il s'agit d'investir. Je pourrais peut-être réaliser des économies dans ma consommation énergétique, mais je suis contraint d'améliorer mon matériel et mon produit parce que le consommateur ne l'achètera pas autrement. C'est le contexte dans lequel l'industrie doit agir.

    Je travaillais autrefois dans un atelier de l'industrie automobile, où la concurrence mondiale est féroce, et pourtant ces entreprises faisaient d'excellentes choses pour l'environnement, particulièrement les industries traditionnelles comme les trois Grands—amélioration dans le traitement et le réacheminement des déchets, réduction de la pollution, amélioration du produit, amélioration du transport—et elles doivent faire tout cela sans avoir le même accès aux capitaux virtuellement limités qu'a le gouvernement par le biais de la fiscalité, et pourtant elles doivent rester concurrentielles pour produire et satisfaire à la demande. Je crois que la voix de l'entreprise à la table doit être entendue, si on veut aller de l'avant.

    C'est bien joli de parler de grandes idées. Moi je veux de vraies idées qui vont atténuer le choc de telle manière que nous pourrons conserver ces emplois à 30 $ l'heure dans notre pays, au lieu de les voir quitter le pays et espérer peut-être attirer de nouveaux emplois technologiques, ou des choses dont nous ne savons même pas qu'elles pourraient exister ici ou non.

    Je vais poser une question au sujet des prix. Est-ce un bon mécanisme que d'augmenter les prix pour le consommateur? Cela va-t-il vraiment changer le comportement du consommateur, ou est-ce que les gens vont tout simplement devoir les accepter? Est-ce qu'ils vont accepter ces augmentations parce que c'est ce qu'il en coûte pour vivre et n'apporter aucun changement?

    Pouvons-nous d'abord discuter du mécanisme de prix comme moyen d'infléchir la demande?

  +-(1240)  

+-

    Le président: Nous allons d'abord entendre M. Mallett, et nous pourrons peut-être passer ensuite à M. Cleland, qui a fait savoir qu'il voulait répondre aussi.

+-

    Dr S. Ed Mallett: Presque chaque directeur de centrale doit prendre chaque année des décisions de capitalisation. Je crois qu'il y a des façons de modifier la priorité si vous voulez encourager l'efficience énergétique et l'investissement durable. Vous devez, d'une manière ou d'une autre, rendre ces investissements plus attrayants que d'autres investissements comparables. Il ne s'agit pas d'en faire des investissements rentables parce que les investissements eux-mêmes sont déjà rentables.

    Dans le contexte d'une centrale, la question énergétique est relativement simple. Nous avons créé à Toronto un programme de durabilité qui portait sur la prévention de la pollution, ce qui n'a rien à voir avec l'énergie; il s'agit de traiter les produits chimiques toxiques, de neutraliser les émissions favorables aux COV. D'après l'analyse comptable qui a été faite, le rendement moyen de ces investissements était réalisé au bout de 11 mois. En substance, il ne s'agit pas de savoir si nous pouvons rendre ces investissements rentables; il s'agit plutôt de savoir si vous allez hausser la priorité pour investir dans ce genre d'exercice.

    Malheureusement, il faut d'habitude essayer d'améliorer la rentabilité, de sorte que ces investissements se démarquent par rapport aux autres investissements qui vous sont offerts. Dans les faits, si votre période de récupération du capital investi est de moins de 12 mois, vous avez une meilleure chance d'investir là-dedans plutôt que dans des alternatives, si le projet demeure en fait rentable.

    Je crois que tout ce qui peut être fait pour faire de ce genre d'investissements une priorité dans les centrales encouragera l'investissement.

+-

    M. Michael Cleland: Au sujet des prix, le mécanisme des prix fonctionne. Nous disposons de beaucoup de preuves empiriques à ce sujet, le terme technique étant « l'élasticité de la demande par rapport au prix ». Mais il y a des limites à cela.

    L'un des facteurs est l'importance de l'énergie, par exemple, dans votre structure de coût. Si le coût énergétique est minime, on a tendance à l'oublier. Vous vous préoccuperez d'autres choses. Si son prix est élevé, vous allez y porter attention et vous allez réagir.

    L'autre facteur, c'est le long terme par rapport au court terme. C'est vraiment fondamental et pertinent en ce qui concerne certaines remarques faites par Mme Hughes Anthony lorsqu'elle parlait du moment d'agir. À court terme, l'élasticité de la demande est relativement faible, parce que l'énergie, c'est essentiellement les actifs que vous avez en place qui consomment de l'énergie. À long terme, l'élasticité des prix prend une importance beaucoup plus considérable. Si les gens ont les bons incitatifs ou les bons messages en ce qui concerne les prix, ils vont prendre des décisions de capitalisation qui auront pour effet de réduire leur consommation énergétique.

+-

    Le président: Merci, monsieur Cleland.

    Nous allons maintenant passer à M. Wilfert. Puis nous reviendrons à M. Simard.

    Monsieur Wilfert.

+-

    L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je remercie les témoins pour leurs exposés.

    À titre de mise en garde, je dirai que chaque fois que j'entends les mots « document de discussion »... Il y a beaucoup de documents de discussion qui circulent. Combien d'entre eux sont vraiment utilisés au bout du compte ou mis en oeuvre, c'est une autre histoire, et je connais celui dont vous parlez qui concerne Environnement Canada. Plutôt que d'en parler comme s'il s'agissait d'un fait, disons qu'on a proposé divers scénarios. On verra ce qui va se passer, particulièrement lorsque le budget sera déposé, et alors nous nous pencherons sur les questions de mise en oeuvre.

    Pour en revenir à la Chambre de commerce du Canada, vous avez parlé d'incitatifs. Chose certaine, nous ne sommes pas en désaccord sur ce point.

    Au sujet des sanctions, il s'agit évidemment de savoir comment récompenser ceux qui ont commencé tôt. La question est celle-ci, où situez-vous le délai? Jusqu'à quand va-t-on remonter? Il faut avoir un point limite. Avec les sanctions, il faut évidemment tenir compte de ceux qui ont déjà investi dans leur secteur, ont compris le message et sont allés de l'avant, et il faut s'en prendre à ceux qui attendent et qui marquent le pas. À mon avis, il est injuste que ceux qui ont bel et bien investi, souvent, dans le domaine du changement climatique soient pénalisés du fait que d'autres... Je crois que le gouvernement doit utiliser l'approche de la carotte et du bâton. J'aimerais vous entendre au sujet des pénalités parce que vous semblez ne pas y accorder beaucoup d'importance.

    Comme M. Cullen, je remarque que votre exposé et vos commentaires d'aujourd'hui sont, comment dire, moins vitrioliques que ce que j'ai lu dans le journal. Mais je ne crois jamais ce que je lis dans le journal.

  +-(1245)  

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: Ces damnés journalistes, monsieur Wilfert.

+-

    L'hon. Bryon Wilfert: Ces damnés journalistes, je sais.

    Mais la bonne nouvelle, c'est que je suis d'accord avec à peu près tout ce que vous avez dit. Je crois que nous devons aller de l'avant. Il s'agit d'un traité international. Le Canada ne signe pas de traités internationaux s'il n'a pas les moyens d'en atteindre les cibles.

    Le ministre l'a dit très clairement—et je vais le répéter très clairement à mes amis conservateurs et alliancistes qui sont sceptiques— nous allons nous assurer d'agir de telle manière que la compétitivité économique et l'environnement ne soient pas incompatibles et puissent marcher de pair. Je crois que le ministre a été extrêmement clair sur ce point. Nous collaborons, et très efficacement je crois, avec les autres ministères. Je dirai simplement, attendez de voir ce que le budget vous réserve.

    J'aimerais sûrement avoir votre avis à ce sujet.

    J'ai rencontré M. Mallett plus tôt la semaine dernière. Je dois dire, comme l'a dit M. McGuinty, qu'il nous donne amplement matière à réflexion, et je crois que c'est très important pour ce qui est du genre d'investissements que nous allons envisager pour encourager les avancées technologiques que nous escomptons.

+-

    Le président: Monsieur Bramley, vous voudrez peut-être répondre. Et vous pourriez ensuite répondre à M. Watson.

+-

    M. Matthew Bramley: M. Wilfert a mentionné le document de discussion d'Environnement Canada, que j'ai mentionné moi-même dans mon exposé lorsque je parlais de l'échappatoire potentielle d'un fonds d'investissement technologique dont pourraient se servir les grands émetteurs finaux pour atteindre les cibles. J'espère vivement que ce ne sera pas le cas parce que si ça l'était, on affaiblirait de beaucoup le régime d'incitatifs pour les grands émetteurs finaux. J'ai mentionné cet affaiblissement potentiel strictement pour attirer l'attention des membres du comité sur le danger qu'il y aurait à créer une nouvelle échappatoire dans le plan fédéral. J'espère donc vivement que le gouvernement ne prendra pas cette décision lorsqu'il finalisera son plan.

    On a posé une question plus tôt au sujet du mécanisme des prix. Je voulais simplement dire que, parfois, lorsqu'on parle à des économistes, ils aiment parler du mécanisme des prix comme si c'était le seul mécanisme capable d'opérer des changements. Et bien sûr, il y a d'autres mécanismes aussi, notamment les normes réglementées. En ce qui concerne les consommateurs, qui consomment des produits énergivores—les maisons, les véhicules et les électroménagers—dans ces trois cas, les gouvernements peuvent et doivent imposer des normes d'efficience énergétique fermes qui aideront ensuite les consommateurs à consommer moins d'énergie. On n'est donc pas obligé d'utiliser seulement le mécanisme des prix pour modifier le comportement des consommateurs.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bramley, et merci, monsieur Wilfert.

    Nous allons maintenant passer à M. Simard.

[Français]

+-

    M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ): J'avoue que j'ai été un peu estomaqué en entendant dire qu'il fallait oublier demain alors que la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto est un engagement contraignant au niveau international. Il en va de la contribution de ce pays à l'atteinte d'un objectif qui va sauver la planète. C'est donc assez fondamental.

    Ma question s'adresse à M. Bramley. Quand je vois ce que je pourrais qualifier, à tout le moins, de fraude intellectuelle, c'est-à-dire le fait de compter doublement certains objectifs de diminution--on parle quand même de 18 mégatonnes--, quand je vois les points d'affaiblissement qui sont là, je crains beaucoup que le prochain budget contienne des mesures de dépenses supplémentaires en soutien à des mesures volontaires qui, jusqu'à maintenant, ont conduit à l'échec de la politique canadienne en matière de contrôle et d'atteinte de l'objectif de Kyoto.

    Selon vous, quelles mesures minimales le budget du 23 février et le plan d'action devraient-ils pour véritablement atteindre l'objectif de Kyoto?

+-

    M. Matthew Bramley: Pour ce qui est des grands émetteurs finaux, selon nous, le gouvernement devrait absolument maintenir sa cible de 55 mégatonnes pour le système de permis échangeables. Nous ne voyons aucune justification économique pour affaiblir cette cible. Nous avons besoin d'une réponse claire en ce qui a trait au comptage en double des mesures ciblées. Je soulève cette question depuis deux ans. Je l'ai soulevée, par exemple, devant ce comité lors de ma comparution au mois de mars avant les élections. Je n'ai jamais reçu de réponse claire de la part des fonctionnaires qui travaillent là-dessus quant à la façon de s'assurer que les mesures ciblées pour les grands émetteurs donnent des réductions d'émissions supplémentaires aux réductions attribuées au système de permis échangeables.

    Il y a deux façons de le faire. On pourrait ajuster les cibles dans les systèmes de permis échangeables, pour tenir compte de l'effet des mesures ciblées. On pourrait aussi, éventuellement, exiger que les industries qui reçoivent des incitatifs financiers redonnent au gouvernement des permis, pour s'assurer qu'on évite le comptage en double. Il faut avoir des réponses claires là-dessus de la part du gouvernement.

    Enfin, en parlant plus généralement de l'ensemble du plan, au cours des sept ans qui ont été carrément gaspillés depuis la conférence de Kyoto, on a vu très peu de politiques mises en place par les gouvernements pour vraiment faire fléchir la courbe des émissions. On a gaspillé, à toutes fins pratiques, sept ans. Nous sommes maintenant rendus à un point où il est impossible d'atteindre la cible de Kyoto purement par des mesures à l'intérieur du Canada. Cela veut dire que nous sommes obligés d'acheter, dans une certaine mesure, des crédits sur le scène internationale. Évidemment, on ne veut pas que cet achat de crédits devienne trop élevé. Il faut donc absolument mettre l'accent sur une action urgente et raisonnable à l'intérieur du Canada, avec une approche règlementaire, oui, combinée à des incitatifs.

  +-(1250)  

+-

    Simard, Christian Member : Maintenant, s'il y a un achat significatif de droits internationaux par le Canada, on croit que les Québécois devront payer en double, c'est-à-dire qu'ils devront financer 25 p. 100 de cet achat, alors que la performance du Québec est relativement intéressante en termes de réduction des gaz à effet de serre. Mais c'est aussi l'ensemble des Canadiens qui devront payer en double. Leur base industrielle sera moins efficace et moins compétitive que partout ailleurs parce qu'on n'aura pas développé de nouvelles technologies, et ils devront supporter le fardeau de l'inaction du gouvernement et de son incapacité à contrôler les grands émetteurs finaux, c'est-à-dire principalement les industries représentées par la gens qui sont ici aujourd'hui.

    Êtes-vous d'accord avec moi sur cette assertion?

+-

    M. Matthew Bramley: Je suis d'accord avec vous dans la mesure où l'achat de crédits internationaux n'a pas nécessairement de bénéfices économiques pour le Canada. Par contre, il peut y avoir certains achats de crédits internationaux qui peuvent rapporter des bénéfices économiques au Canada. C'est le cas si ce sont des compagnies canadiennes qui sont les exportateurs de la technologie. Il est donc clair que pour maximiser les cobénéfices des réductions des gaz à effet de serre, il faut réaliser le maximum de réduction possible ici, au Canada.

    Cela dit, je pense qu'il faut être réaliste. Les analyses économiques démontrent aujourd'hui qu'il n'est plus réaliste de s'imaginer qu'on va tout faire à l'intérieur du Canada. On est maintenant voués à une certaine quantité d'achats. Il faut cibler ces achats sur de bons projets environnementaux qui, dans la mesure du possible, rapportent des bénéfices économiques pour les compagnies canadiennes qui sont impliquées dans ces projets.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Je pense que nous n'avons que le temps de poser quelques questions, monsieur Cullen, après quoi nous terminerons avec M. Jean.

+-

    M. Nathan Cullen: Très bien. On ne se rend pas normalement à ce tour, et je ne m'y attendais pas.

    J'aimerais reprendre la question de M. McGuinty parce que je n'en ai pas entendu suffisamment—peut-être de Mme Hughes Anthony ou de M. Cleland—en ce qui concerne l'ALENA et les approches que nous pouvons utiliser au regard des régimes de compétitivité.

    On entend souvent parler de l'ALENA, et particulièrement du chapitre 11, en termes négatifs—on parle de manquement aux lois de la concurrence et d'empiètement sur la souveraineté canadienne dans la façon dont nous faisons affaire ici. Entrevoyez-vous des possibilités dans l'approche plus progressiste qu'ont épousée certains États américains—pas nécessairement le gouvernement américain lui-même, tenons-nous-en à l'énergie et au mouvement et à la consommation de l'énergie pour le moment—que nous pourrions faire connaître pour inciter le Canada à aller plus loin dans cette voie?

+-

    M. Michael Cleland: En un mot, la réponse à votre question est oui. Il y a toutes sortes d'exemples d'États américains qui font des choses assez positives. Il y a d'autres exemples de mesures qui ne sont peut-être pas tout à fait réalistes, et il y a des déclarations d'intention qui ne seront peut-être pas suivies du genre de mesures voulues, mais il ne fait aucun doute qu'il se passe des choses aux États-Unis qui sont très novatrices sur le plan de la politique gouvernementale—et ce sont des domaines où nous devrions collaborer avec nos collègues américains.

    Il est moins clair pour moi que l'on pourra utiliser le cadre officiel de l'ALENA. Je dirai cependant qu'à mon avis, l'observation de M. McGuinty est extrêmement juste. Nous collaborons avec les États-Unis, et M. Konow travaille avec les États-Unis, dans les dossiers liés à la fiabilité de l'électricité, les interconnexions électriques, les pipelines, la production, la création de ressources gazières et ainsi de suite. Nous nous préoccupons de sécurité énergétique, mais les discussions sur le changement climatique se passent ailleurs; elles ne sont pas liées.

    Donc je suis tout à fait d'accord pour dire que nous devons y songer dans un contexte nord-américain, dans un contexte où l'énergie rejoint l'environnement, et je pense aussi qu'il faut noter certaines initiatives intéressantes qui se déroulent au niveau des États—et aussi au niveau des provinces au Canada. Tout ne se fait pas, loin de là, au niveau des gouvernements nationaux.

  +-(1255)  

+-

    M. Nathan Cullen: Toujours à ce sujet, le principal organisme avec lequel vous faites affaire est RNCan, j'imagine, pour la plupart de vos échanges.

+-

    M. Michael Cleland: C'est exact.

+-

    M. Nathan Cullen: Divers témoins nous ont parlé de la tension qui existe entre Environnement Canada et RNCan dans ce dossier. On a confirmé les tergiversations qui ont eu cours à Ottawa. Certains les ont attribuées au fait que RNCan et Environnement Canada ne sont pas toujours d'accord, dans le dossier de Kyoto en particulier.

    Pensez-vous qu'au sein de vos groupes membres, certains voudraient que ces deux instances forment une coalition, que l'on retire essentiellement cette responsabilité à ces deux ministères ou que l'on crée un secrétariat distinct pour Kyoto, pour donner plus de certitude et de clarté au secteur des affaires et particulièrement au secteur énergétique? Ces querelles intestines dont on entend toujours parler—et il se peut que vous en ayez entrevu un aspect—sont telles que rien, essentiellement, ne se fait, ou alors très peu de choses.

    Je ne suis pas d'accord, mais sans m'en offenser, avec M. McGuinty lorsqu'il dit qu'il aime les annonces de M. Mercer. Je les trouve pour ma part offensantes parce que je songe à cet argent du contribuable qu'on utilise ici de la manière la plus inefficace qui soit parce que c'est quelque chose qui n'a pas de sens pour 90 p. 100 des gens à qui j'ai parlé, qui n'ont aucune idée, comme vous dites, madame Hughes Anthony, de ce que ça veut dire. Je trouve offensant en tant que contribuable de payer pour cela.

    Pour ce qui est des deux ministères qui doivent focaliser leur action en ce qui concerne Kyoto, vos groupes réclameraient-ils la création d'un secrétariat distinct, ou croyez-vous qu'il serait profitable qu'un seul ministère soit responsable aussi bien de Kyoto que de l'énergie?

+-

    M. Michael Cleland: En guise d'introduction à mes commentaires, laissez-moi préciser, monsieur le président, que c'est un sujet sur lequel je pourrais m'étendre longuement, vu que j'ai été autrefois sous-ministre adjoint du secteur de l'énergie à NRCan. J'ai donc plusieurs partis pris et, en tout cas, c'est une question que je connais très bien.

    Soyons justes : il faut comprendre, je crois, qu'il s'agit de deux visions du monde différentes. Ressources naturelles Canada apporte au débat le point de vue du secteur de l'énergie et des ressources, avec son intégration dans l'économie canadienne. Environnement Canada apporte au débat un point de vue dicté expressément par l'idée de protection environnementale. Ce sont des visions du monde légitimement différentes, dont il convient de débattre lors de l'élaboration des politiques.

    Essayer de les amener à s'entendre est, à mon sens, une mauvaise idée, en fait. Il convient plutôt de s'assurer que les deux points de vue différents sont en mesure de s'exprimer à la table du Cabinet, de veiller à ce que ce soit à la table du Cabinet que l'on arrive à une solution, parce qu'il s'agit de questions politiques. Ce sont les ministres et le parlementaire qui doivent les résoudre. Si vous enterrez le problème dans la bureaucratie et si, en plus, vous consacrez la majeure partie des deux prochaines années—voire des cinq prochaines années—à essayer de reconstruire l'appareil bureaucratique, ce sera une perte de temps supplémentaire. C'est pourquoi je dirais que non, ce n'est sans doute pas une bonne idée.

    Comme vous le constatez, il existe différents points de vue sur la question. Il me semble raisonnable que les points de vue divergent. Au bout du compte, concilier ces points de vue est une décision d'ordre politique. Ce n'est pas aux administrateurs que l'on peut demander de le faire.

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Cleland.

    Monsieur McGuinty, puis M. Jean, pour conclure.

    Je vous remercie de votre indulgence. On dépasse un peu le temps qui nous était alloué, mais je trouve particulièrement utiles les questions qui se posent maintenant.

    Monsieur McGuinty.

+-

    M. David McGuinty: Merci, monsieur le président.

    Je voudrais revenir aux commentaires de Mme Hughes Anthony sur la seconde période d'engagement. Je crois vous avoir entendu dire que le Canada ne devrait pas se préparer à la seconde période ou y participer sans que participent également l'Inde, la Chine et les États-Unis.

    Il y a deux points sur lesquels je voulais solliciter votre réaction, ainsi peut-être que celle d'un autre membre du groupe.

    Tout d'abord, nous parlons d'un traité international de droit public portant sur l'environnement. C'est un traité qui fait ses premières armes. C'est le premier traité international qui court-circuite véritablement la fiction selon laquelle il y aurait des atmosphères multiples. Ce n'est pas le cas, nous avons juste une atmosphère.

    Il y en a qui prétendent que les mécanismes pour faire respecter le traité sont défaillants, voire absents, et qu'aucun État ne saurait être en mesure de se présenter à la table de négociations les mains nettes et de le faire respecter au vu du droit international. Je ne suis pas certain que ce soit le cas, mais il y en a d'autres, par contre, qui prétendent que l'Europe de l'Ouest et l'Amérique du Nord ont construit leurs économies sur le dos de l'atmosphère, laissant les Chinois, les Indiens et la majorité du monde en voie de développement et des économies émergentes dans la poussière. Ils prétendent qu'il incombe à l'Occident et au monde industrialisé riche de montrer la voie à suivre et de prouver qu'ils sont sérieux quand ils disent qu'il n'y a qu'une atmosphère.

    C'est une opinion que je voulais vous soumettre et à laquelle j'aimerais avoir votre réaction.

·  -(1300)  

+-

    Mme Nancy Hughes Anthony: Je suis sûre que vous allez me dire d'être brève, monsieur le président.

    Mon objection principale tient à la question de savoir comment nous pouvons prendre de nouveaux engagements alors que nous n'avons pas de plan cohérent, pancanadien, à nous. Nous ne pourrions pas faire la leçon à la Chine ou à l'Inde sur la façon de procéder parce que nous n'avons pas de plan nous-mêmes. Il ne fait aucun doute que nous devons prendre des mesures au niveau du changement climatique, et je ne peux pas répéter assez souvent que nous devons faire cela, mais je crois que pour assurer le genre de leadership dont vous parlez, nous devrions pouvoir dire : voici le plan du Canada, voici ce que nous allons faire, voici les carottes et voici les bâtons que nous avons prévus dans ce plan particulier. Je crois que nous serons ensuite en mesure de donner des conseils à d'autres. Mais dans les circonstances où nous nous trouvons, je ne crois pas que nous pourrions donner l'exemple.

+-

    Le président: Merci, madame Anthony.

    Monsieur Jean. Nous allons conclure.

+-

    M. Brian Jean: Je me demande s'il existe des études sur l'influence que peut avoir un investissement sur le produit intérieur brut. Par exemple, pour le pétrole et le gaz, je sais qu'on a investi, comme l'a dit M. Cullen, entre 6 et 10 milliards de dollars au cours des six dernières années, mais le secteur pétrolier et gazier a aussi réinvesti entre 16 et 25 milliards de dollars dans ma région. Je me demande s'il existe des études dont nos témoins d'aujourd'hui sont au courant et qui traitent du rendement des investissements du gouvernement fédéral.

+-

    M. Matthew Bramley: Notre étude portait sur la quantification des dépenses du gouvernement fédéral, ce qui est en soi une tâche assez compliquée, et nous n'avons pas essayé de quantifier le rendement des investissements.

+-

    Le président: Monsieur Cleland.

+-

    M. Michael Cleland: Il n'y a pas de réponse simple à cette question. Le problème, c'est que lorsqu'on cherche à calculer le rendement qu'obtient le gouvernement pour ces diverses subventions, il est assez difficile d'obtenir une réponse très concrète parce qu'il n'entre pas dans la nature du gouvernement d'évaluer sa comptabilité de cette manière.

    Il y a diverses études qui portent sur cette question des subventions. M. Bramley en a cité une. Tout ce que je peux dire, c'est qu'il serait peut-être rentable pour votre comité d'examiner certains autres travaux qui ont été faits—notamment, je me permets de l'ajouter, certaines interventions que j'ai faites devant votre comité il y a quelques années de cela, à l'époque où j'étais à RNCan, et je fais valoir que bon nombre des subventions dont on fait longuement état ici relèvent quelque peu du mythe. Le terrain est beaucoup plus égalisé que le pense beaucoup de monde.

    Je vous recommande fortement de convoquer des témoins, par exemple de l'industrie pétrolière en amont, qui vous donneront plus d'information à ce sujet.

+-

    Le président: Merci.

    Je rappelle en passant que la vérificatrice générale a la responsabilité de vérifier l'optimisation des ressources, monsieur Jean. C'est une approche intéressante dont nous pourrons peut-être discuter lorsque la vérificatrice générale sera ici.

+-

    M. Brian Jean: Ce n'est pas une mauvaise idée.

    La nature de l'industrie des sables bitumineux est telle que, par exemple, vendredi dernier, Horizon a annoncé un projet de 10 milliards de dollars. La raison pour laquelle c'est tellement d'argent, c'est qu'on ne peut pas amorcer un projet dans les sables bitumineux à moins de 5 ou de 10 milliards de dollars. C'est la raison pour laquelle l'intervention du gouvernement, dans la plupart des cas, est nécessaire, si l'on veut que l'investissement soit rentable pour les contribuables.

-

    Le président: Je vois. Merci beaucoup.

    Sur ce, chers témoins, merci beaucoup de votre collaboration. Vous avez fait entendre des vues équilibrées qui ont aidé le comité à comprendre beaucoup de choses en ce qui concerne Kyoto, et sa mise en oeuvre. Comme vous voyez, le comité veut utiliser ces discussions et ces témoignages pour étudier le plan d'action en matière climatique et produire un plan équilibré et stratégique. Votre contribution d'aujourd'hui aura été très utile au comité.

    Merci aux membres du comité.

    La séance est levée.