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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 28 novembre 1994

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 8328
    M. Chrétien (Frontenac) 8330
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8335
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8336

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA CATASTROPHE DE LA MINE DE WESTRAY

LE BLOC QUÉBÉCOIS

L'EMPLOI

«LA FACE RÉPUGNANTE DE LA LIBERTÉ»

L'ÉRABLE COMFORT

L'ÉCONOMIE

LES SERVICES DE GARDE

    Mme Gagnon (Québec) 8339

LE PROGRAMME SAMARITAN'S PURSE CHRISTMAS CHILD

L'ENVIRONNEMENT

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

MADAME MARIE MALAVOY

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

LA CATASTROPHE DE LA MINE WESTRAY

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

CONFÉRENCE SUR L'ACQUISITION CONTINUE DU SAVOIR

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

QUESTIONS ORALES

LA BOSNIE

    M. Gauthier (Roberval) 8341
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8341
    M. Gauthier (Roberval) 8342
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8342
    M. Gauthier (Roberval) 8342
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8342

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8342
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8342
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8343
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8343
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8343

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8343
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8343

GOSAP ENERGY INCORPORATED

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8344

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 8344
    M. Martin (LaSalle-Émard) 8344

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

LES TRANSPORTS

L'AGENCE SPATIALE CANADIENNE

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Martin (LaSalle-Émard) 8346
    M. Martin (LaSalle-Émard) 8347

DOUANES CANADA

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LES PRÊTS AUX PME

LE BUDGET

    M. Speaker (Lethbridge) 8348
    M. Martin (LaSalle-Émard) 8348
    M. Speaker (Lethbridge) 8348
    M. Martin (LaSalle-Émard) 8348

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL AU PARLEMENT

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8349

LE RENOUVELLEMENT DES HYPOTHÈQUES

LE SIDA

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8349

LA BOSNIE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 8349

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

PÉTITIONS

LA JUSTICE

LES DROITS DE ENFANTS À NAÎTRE

LES PERSONNES ÂGÉES

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES RELATIONS ENTRE PERSONNES DU MÊME SEXE

LES ARMES À FEU

LES DROITS DE GRANDS-PARENTS

LE CHEF DE L'OPPOSITION

LES ANNONCES PUBLICITAIRES

LES ARMES À FEU

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES ARMES À FEU

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LES PHOQUES

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE

    Reprise de l'étude de la motion 8352
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8352
    M. Bernier (Gaspé) 8354
    M. Speaker (Lethbridge) 8355
    M. Bernier (Gaspé) 8368
    M. Leroux (Shefford) 8372
    M. Leroux (Shefford) 8375
    M. Leroux (Shefford) 8377
    M. Leroux (Shefford) 8380

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

    Projet de loi C-57. Reprise de l'étude à l'étape du rapport 8381
    Rejet de la motion par 138 voix contre 30 8381
    Rejet des motions nos 1, 2, 8 et 9 par 137 voix contre 30 8382
    Motion d'approbation 8383
    Adoption de la motion d'approbation par 163 contre 5 8384

MOTION D'AJOURNEMENT

L'IMMIGRATION

LE TRANSPORT FERROVIAIRE

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8386

LES SOINS DE SANTÉ


8315


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 28 novembre 1994


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE

L'hon. David Anderson (au nom du secrétaire d'État (Affaires parlementaires), Lib.) propose:

Que la Chambre prenne note des opinions exprimées par les Canadiens sur la politique budgétaire du gouvernement et, nonobstant les dispositions de l'article 83.1 du Règlement, qu'elle autorise le Comité permanent des finances à présenter un ou des rapports sur cette question au plus tard le 7 décembre 1994.
M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole ce matin. Le Parlement connaît actuellement une évolution historique dans sa façon d'aborder les questions et, surtout, nous vivons, à titre de Canadiens, un moment historique par rapport à ce que nous ferons de notre avenir économique.

Ensemble, la dette fédérale et celle des provinces sont supérieures à la somme de toutes les activités économiques au Canada en une année, représentant plus de 100 p. 100 de notre produit intérieur brut. Cette dette s'est accumulée depuis les 20 dernières années. À chaque minute où je parle à la Chambre, la dette augmente d'environ 85 000 $.

(1105)

Nous en sommes au point où un quart de toutes les dépenses fédérales sert à payer uniquement les intérêts. Pas un cent de la dette proprement dite n'est même remboursé. Un tiers de toutes les recettes du gouvernement fédéral sert à payer ces intérêts et ne peut donc être engagé dans les programmes indispensables pour assurer notre avenir économique et créer une société juste et équitable pour tous les Canadiens.

Malgré les nombreuses déclarations qu'ont faites d'autres gouvernements dans le passé, aucun d'entre eux ne s'est jusqu'à maintenant attaqué au problème de l'augmentation de la dette et du déficit. Dans le budget de février dernier, le ministre des Finances a dit que nous devions commencer à nous y attaquer. Nous ne pouvons plus continuer ainsi, et il a dit que nous devrions, à titre d'objectif provisoire d'ici deux ans, ramener le déficit d'environ 6 p. 100 à 3 p. 100 de notre produit intérieur brut.

En d'autres termes, notre déficit qui représente quelque 42 milliards de dollars cette année devra passer à 25 milliards de dollars d'ici deux ans. En supposant une certaine croissance de notre économie, nous devrons néanmoins intervenir comme aucun gouvernement ne l'a fait auparavant pour supprimer plus de 9 milliards de dollars de ce déficit, soit en augmentant les recettes fédérales, soit en réduisant les dépenses. C'est là un projet monumental inédit dans l'histoire budgétaire du gouvernement du Canada.

Pour aider le gouvernement et tous les parlementaires dans cette tâche, le ministre a demandé au Comité des finances, dont j'ai l'honneur de présider les travaux, d'entreprendre non seulement des discussions publiques sur l'ampleur du déficit et sur la mesure dans laquelle nous devrions essayer de le réduire, mais aussi sur la validité de ses hypothèses économiques. Il nous demande plus précisément de consulter les Canadiens pour déterminer ce que nous devrions faire, quelles hausses d'impôt nous devrions prévoir, s'il en est, et quels programmes devraient faire l'objet de compressions.

Notre comité a eu moins de deux mois, six semaines, en fait, pour exécuter cette tâche. Le ministre a témoigné devant le Comité des finances les 17 et 18 octobre et a déposé, à cette occasion, deux études importantes. L'une d'elles est le livre violet, Un nouveau cadre de la politique économique, qui traite des différents aspects de l'avenir de notre économie, de la façon dont nous allons soutenir l'emploi dans l'avenir, de la façon dont nous allons nous adapter à l'évolution de l'économie mondiale et au contexte international dans lequel nous sommes placés, et de la façon dont nous allons profiter de la nouvelle économie.

Dans ce document, il a parlé de cinq grands principes que nous devons examiner. Le premier est la nécessité, pour les Canadiens, d'acquérir de nouvelles compétences. Le deuxième est la façon dont nous devons tous, y compris les gouvernements, nous adapter à l'évolution de la situation économique, reconnaître que c'est le secteur privé qui crée des emplois et nous demander quel rôle le gouvernement peut jouer pour aider et soutenir le secteur privé à cet égard.

Il a dit, entre autres choses, que le niveau de vie des Canadiens avait réellement diminué, en termes non inflationnistes, au cours des vingt dernières années, et que cela coïncidait avec une baisse de la productivité des Canadiens. Notre principal défi, nous le savons, consiste à amener le Canada, un pays qui, à de nombreux égards, est un pays du tiers monde étant donné que son économie dépend beaucoup de ses ressources naturelles, à compter de plus en plus sur ses ressources humaines.


8316

Le troisième principe dont il est question dans ce livre veut que l'on repense les priorités de l'État, que l'on se demande dans quels secteurs nous devrions être présents et comment nous pouvons éliminer les aspects de nos activités qui sont moins prioritaires.

Le quatrième principe veut que nous reconnaissions, en tant que législateurs et en tant que gouvernements, que nous devons jouer un rôle de chef de file, sur le plan de l'économie, et que nous reconnaissions également, comme je l'ai dit, que c'est le secteur privé qui crée des emplois.

(1110)

Dans quelle mesure le secteur public cherche-t-il, avec le secteur privé, à faire en sorte que notre économie se transforme, à mettre en oeuvre de nouvelles technologies et à créer le nouveau genre d'infrastructure qui nous mènera au XXIe siècle et nous permettra de faire partie des leaders, pour ce qui est de la compétitivité mondiale? Comment pouvons-nous améliorer nos exportations? Comment pouvons-nous aider les petites entreprises, qui seront la principale source d'emplois dans l'avenir, et veiller à ce qu'elles disposent des ressources financières nécessaires et du savoir-faire qui nous permettront de jouer non pas un rôle passif mais un rôle actif sur la scène internationale?

Selon le cinquième élément de cette étude, le gouvernement doit jouer un rôle de premier plan et instaurer le genre de climat financier et monétaire dont nous avons besoin, au Canada, pour permettre à toutes ces choses de se concrétiser.

Je voudrais m'arrêter très brièvement sur la deuxième étude qu'il nous a présentée. Elle porte sur le cinquième aspect de la façon de créer des emplois dans l'économie de l'avenir, Instaurer un climat financier sain. Le ministre a déposé ce document le 18 octobre et, le lendemain, notre comité a entrepris ses audiences publiques sur cette question précise.

Avant d'entrer dans les détails de ce que nous avons entendu, permettez-moi de dire que les députés de tous les partis siégeant à ce comité ont pris leur tâche très au sérieux. Ils ont étudié et se sont rongé les sangs, ils ont apporté divers points de vue et, dans bien des cas, le comité a réussi à parvenir à un consensus fondé non seulement sur notre travail de députés, mais chose plus importante, sur ce que nous ont dit les Canadiens dans tout le pays.

Nous avons entendu de nombreux témoins à Ottawa et dans toutes les provinces. Comme d'habitude, nous avons eu droit aux instances des groupes de lobbyistes qui sont bien implantés, qui ont leurs sièges sociaux à Ottawa, qui, nous le savions, viendraient nous faire part de leur position et dont nous avons cherché activement à obtenir les conseils. Nous avons également entendu de nombreux Canadiens, inquiets pour notre avenir, qui ont profité de nos délibérations pour nous faire part de leur point de vue.

Une des principales choses qui font l'unanimité de la population dans tout le pays, c'est que nous devons au moins aller aussi loin que le ministre des Finances nous l'a proposé dans la réduction de notre déficit. Il s'agit, en deux ans, de parvenir à réduire le déficit fédéral à 25 milliards de dollars.

Bon nombre de témoins ont déclaré que le gouvernement devait réduire le déficit encore davantage. Pourquoi? Parce que nous savons que nous profitons actuellement d'une reprise économique. La croissance est forte et beaucoup d'emplois sont créés, mais cela ne peut pas toujours durer. Les cycles économiques sont inexorables. Nous ne pouvons compter à jamais sur un mouvement à la hausse, même si tout le monde souhaiterait que ce soit possible.

Beaucoup de témoins nous ont invités à aller encore plus loin à ce stade-ci. D'autres nous ont dit que, en effectuant des compressions ou en augmentant les impôts dans la mesure nécessaire pour parvenir à atteindre des objectifs mêmes supérieurs à ceux visés par le ministre des Finances, nous risquions de freiner la reprise économique, ainsi que de ralentir la croissance et la création d'emplois dont nous profitons déjà.

Les gens se sont également entendus sur la nécessité de sabrer dans nos dépenses. Aucun membre du comité et aucun témoin n'a affirmé que nous pouvions procéder à des compressions ou augmenter les impôts aux dépens des pauvres ou des plus défavorisés ou démunis. Nous sommes tous conscients du fort taux de pauvreté au Canada, surtout chez les enfants. Il serait tout à fait insensé de penser qu'on peut faire supporter le poids de ce programme d'austérité aux gens qui en ont le moins les moyens.

(1115)

Pour ce qui est des solutions à apporter à nos problèmes, le ministre nous a donné la consigne suivante: «Ne me proposez pas de belles théories. Suggérez-moi des mesures fiscales précises ou des domaines précis où il y a lieu d'effectuer des compressions.» Malheureusement, le processus de consultation était loin d'être parfait.

Toute une gamme de témoins ont comparu devant nous. Il y en a qui nous ont tenu à peu près ce langage: «Nous sommes un groupe tellement particulier que nous devrions être exemptés de cet exercice de réduction du déficit. Notre cas est tellement différent des autres qu'il faudrait nous accorder d'autres allégements. Nous avons besoin de fonds supplémentaires.» Il y a d'autres témoins dont le message se résumait à ceci: «Nous sommes un cas particulier et, pour cette raison, n'effectuez pas de compressions dans notre secteur. Nous allons nous débrouiller avec ce que vous nous avez déjà donné.»

Il y en a d'autres qui ont au moins tenté de relever le défi du ministre et qui sont venus nous voir en disant: «Nous sommes un cas particulier. Nous pouvons faire quelques concessions, mais faites vos compressions ailleurs.» Trop rares ont été les témoins qui nous ont dit: «J'ai une solution à proposer et je n'attends rien en retour.»

Voilà le genre de témoins chers à nos coeurs. C'est le cas, par exemple, d'un riche Albertain, Bob Blair, qui a déclaré que la génération dont il faisait partie, notre génération, la génération de ceux qui ont bénéficié des avantages découlant des énormes dépenses, bien au-dessus de nos moyens, qui ont été faites au cours des vingt dernières années, en un mot, que la génération de ceux d'entre nous qui ont tellement profité de la situation a maintentant l'obligation de faire sa part pour assainir les finances de son pays.


8317

Il a proposé que l'on demande aux riches de verser des dons à un fonds voué à la réduction du déficit national. C'est le genre de civitas, pour parler comme les Grecs, le genre de sens civique qui, je pense, fait l'admiration de tous.

Je me souviens d'un homme âgé qui a comparu devant nous au Canada atlantique. Il avait attendu toute une longue journée de témoignages. Une fois devant nous, il nous a dit: «Si je suis ici, c'est parce que je me sens coupable. Je suis un ancien combattant. Je touche une pension parce que j'ai été fait prisonnier pendant la Deuxième Guerre mondiale. Ma pension est d'environ 10 000 $. On ne m'a jamais demandé si j'en voulais ou si j'en avais besoin. On me l'envoyait régulièrement et je ne l'ai jamais retournée. Je ne paie même pas d'impôts dessus. Je reçois cette pension que je ne mérite pas. Je ne suis même pas un héros de guerre. J'ai sauté de mon avion au-dessus de la Ruhr.» Cet homme est prêt à donner cet argent pour aider le reste du Canada à faire face au problème du déficit.

Quand je passe en revue ces délibérations, je me souviens toujours de ces deux Canadiens-des exemples rares-qui nous ont dit: «Je peux être partie de la solution.» Tous les membres de notre comité sont convaincus que quelle que soit la solution que nous adoptions, tous les Canadiens-à l'exception des moins favorisés-doivent être partie de la solution. Nous devons demander à tous les Canadiens d'assumer leur juste part des conséquences des mesures que nous allons devoir prendre pour lutter contre la dette, pour la combattre de façon à ce que notre économie croisse à rythme plus rapide que notre dette. Nous le devons aux générations qui vont nous succéder.

L'un des principaux points qui sont ressortis de nos délibérations est que ma génération et les générations qui ont vécu de cet emprunt supplémentaire, de cette consommation excessive depuis ving ans et qui sont en train de laisser ce déficit en héritage aux jeunes générations, ont l'obligation de payer peut-être plus encore que leur juste part. C'est une idée très intéressante qui nous a été suggérée. Elle est venue de l'idée que nous devrions peut-être imposer les héritages de façon à ce qu'une partie de la richesse accumulée, au moins par les très riches, retourne à l'État pour pouvoir servir à régler le déficit.

(1120)

Un certain nombre de témoins ont dit que les impôts au Canada atteignaient pratiquement un plafond, qu'il n'était pratiquement plus possible d'augmenter les impôts si l'on se fie aux normes internationales et surtout aux normes américaines, qui sont les plus importantes dans ce domaine. Il n'y a pratiquement plus de possibilité, peut-être n'y en a-t-il pas du tout. Nous avons vu cette dernière décennie combien l'impôt sur le revenu des particuliers est important et est devenu de moins en moins progressif.

Comment être juste quand nous cherchons à réduire le déficit d'une façon qui ne s'est jamais vue au Canada et qui va avoir des conséquences dramatiques pour tous les Canadiens?

[Français]

La tâche sera vraiment difficile. Ce ne sera pas facile pour nous, en tant que députés et membres de notre comité, ni pour le ministre des Finances, le premier ministre et le Cabinet. Ce devrait être et ce sera leurs responsabilités de déposer des projets de politique budgétaire spécifique devant les Canadiens. Nous, membres de ce comité, nous sommes aperçus que le désir est presque universel au Canada de lutter contre le déficit et de le faire d'une manière équitable pour tous les Canadiens, surtout pour les plus démunis de notre société.

[Traduction]

Au sujet des réductions, et les programmes subiront des réductions importantes, le comité n'est pas le seul organisme chargé d'examiner des façons de réduire le déficit. Nous avons entrepris une analyse générale de l'ensemble de nos programmes; le gouvernement canadien procède à un examen de ses programmes. D'autres comités ont également été chargés d'examiner des programmes et des initiatives en particulier. Tous ces organismes joueront un rôle important dans la réforme des programmes.

Je crois cependant que rien n'aura plus d'importance que les recommandations du Comité des finances, qui a été le premier dans l'histoire du Canada à tenir des consultations publiques auprès d'un vaste échantillonnage de Canadiens.

Un des principaux avantages de ces consultations publiques, qui sont sans précédent, c'est que dans le passé ceux qui avaient accès au bureau du ministre des Finances pouvaient défendre leur point de vue derrière des portes closes. Le ministre des Finances a dit que ce n'est plus ainsi que se dérouleront les consultations prébudgétaires au Canada. Elles doivent avoir lieu en public, devant un comité composé de représentants de tous les partis. Nous voulons que tous les Canadiens sachent quels intérêts spéciaux et privilèges sont défendus et quelles sont les solutions recommandées.

Malheureusement, nous n'en savons pas suffisamment quant aux détails des solutions et le comité n'est pas parvenu à un consensus général satisfaisant. Comme je le disais, nous avons entendu trop de suggestions du genre «coupez ailleurs mais pas chez nous». C'est pourquoi il incombe aux membres du comité de prendre des décisions difficiles sur la façon d'accroître les recettes fiscales, de supprimer certaines injustices du système fiscal et de choisir les programmes qui devront subir des réductions. Quels sont les programmes nécessaires pour préserver cette justice sociale qui constitue une partie intégrante de la société canadienne?

(1125)

Quels sont les programmes nécessaires au maintien de cet équilibre que nous avons toujours eu au Canada et qui sera toujours un trait marquant de ce pays, l'équilibre entre un secteur privé dynamique et un secteur public qui apporte coopération et soutien et dont nous avons besoin pour éviter de réduire les dépenses de programmes qui nous permettront de construire une économie dynamique au Canada dans l'avenir?


8318

Tout en examinant ces questions, nous devrons, je crois, poursuivre les consultations avec les Canadiens et continuer de faire appel à eux. Nous devons continuellement solliciter l'opinion des députés de tous les partis à la Chambre, ceux-là mêmes qui nous ont dit clairement et de bonne foi où se trouvent, selon eux, les priorités.

La tâche ne sera pas facile. Je sais cependant que les Canadiens attendent que nous réduisions le déficit et ils nous jugeront sévèrement si, comme les gouvernements précédents, nous abordons le problème simplement pour la forme, sans nous y attaquer directement, de façon concrète et précise, dès maintenant. Nous avons une occasion d'agir et nous n'hésiterons pas à le faire.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, l'opposition officielle, comme depuis le début du processus, vous rappelle et rappelle aux Québécois et aux Canadiens la gravité de la situation des finances publiques canadiennes. Personne ne nie, à l'heure actuelle, de notre côté tout comme de l'autre côté de la Chambre, qu'il y ait de graves problèmes, et je dirais pire que de graves problèmes sur le plan des finances publiques fédérales, mais un état de crise.

On n'a qu'à constater l'évolution des dépenses, l'évolution des déficits et, malgré tous les contrôles imposés au cours des dernières années, l'évolution de la dette fédérale, pour constater que c'est une des plus importantes dettes à travers le monde. C'est la plus importante dette d'un gouvernement central et cette dette nuit à une reprise économique consistante et à la création d'emplois aussi. On en a vu certains indices au cours des deux dernières années, car malgré la reprise économique, malgré une certaine croissance, la création d'emplois tarde à venir de façon consistante. On ne nie pas qu'il faille imposer des mesures très sérieuses de réduction des dépenses, des mesures aussi très sérieuses au niveau des échappatoires fiscales, au niveau des dépenses fiscales, comme les a appelées le ministre des Finances. Là-dessus, je pense que nous avons un assez grand consensus.

Par contre, c'est sur les moyens que nous divergeons d'opinion. Et, au cours des prochaines minutes, je parlerai justement de notre analyse face aux moyens employés par le gouvernement libéral ou suggérés même par nos collègues réformistes, si le coeur leur en dit, et nous conclurons cet exposé en rejetant la motion qui est présentée ce matin, en suggérant que le Bloc québécois votera contre la motion présentée ce matin pour une raison particulière. Cette raison est la suivante: la motion déposée par le gouvernement libéral ce matin pour reculer la date de dépôt du rapport du Comité des finances n'est pas une motion qui est présentée pour les raisons invoquées par le président du Comité des finances.

Nous sommes convaincus depuis le début que ces consultations sont des consultations bidons. Ce sont des consultations qui ressemblent aux consultations que le ministre des Finances a tenues avant le dépôt de son premier Budget en février dernier. Nous sommes convaincus aussi que le gouvernement libéral cherche, d'une part, à retarder l'échéance, deuxièmement, à rapetisser comme une peau de chagrin le temps qu'on devrait attribuer à l'analyse et au débat du rapport sur les consultations prébudgétaires du Comité des finances.

(1130)

La résolution qu'on a devant nous, qui vise à faire passer la date de dépôt du 2 au 7 décembre, c'est l'aboutissement, je vous dirais, de pressions inouïes de la part de l'opposition officielle, parce que la proposition initiale, déposée au Comité des finances, visait-et à ce moment-là, je pense qu'on nous prenait pour ce qu'on n'est pas-à faire déposer le rapport du Comité des finances, non pas le 2 décembre, comme c'était inscrit dans l'ordre de la Chambre, non pas le 7 décembre comme on nous le présente dans cette motion, mais le 16 décembre, comme si on ne se rappelait pas, soudainement, comme si on était incapable de réfléchir au fait que le 16 décembre est la date de la fin des travaux de la Chambre des communes et que nous revenons seulement en février et que c'est en février que le ministre des Finances dépose son budget.

Alors, lorsqu'on invoque le besoin de consultation, le besoin d'avoir des idées additionnelles, on nous cache la vérité sur les véritables intentions du gouvernement. On nous cache la vérité, aussi, avec plein de compassion et de beaux discours sur les plus démunis, parce qu'on dit qu'on ne doit pas toucher aux plus démunis dans les réformes qu'on va proposer. On nous présente de beaux discours aussi sur la situation sociale, sur la pauvreté, alors que toutes les mesures qui ont été prises par ce gouvernement depuis un an, et en particulier à partir du budget présenté par le ministre des Finances, toutes les mesures présentées ont fait en sorte qu'on s'est attaqué aux chômeurs, aux assistés sociaux, aux étudiants, aux personnes âgées.

Lorsqu'on dit que dans le dernier budget, on a prévu des coupures de 5,5 milliards de dollars dans les programmes sociaux, dont une grande partie dans le fonds d'assurance-chômage, c'est ça, une mesure sociale, c'est ça le souci que le gouvernement libéral a pour les plus démunis de la société? Et c'est ça qu'on nous présente comme étant l'argument majeur pour dire que ça nous prend d'autres consultations, parce qu'on ne veut pas s'attaquer aux plus démunis.

Derrière les beaux discours se trouvent des mesures barbares, se trouvent des mesures sans précédent, des mesures rétrogrades et parmi les plus rétrogrades que le ministre des Finances fédéral ait prises depuis plusieurs années. Même les conservateurs n'ont pas osé faire des coupures draconiennes comme celles-là aux programmes sociaux et, de l'avis même du vérificateur général, on ne dispose de rien, en fait d'analyses, sur les incidences de ces coupures, sur les interrelations entre l'assurance-chômage et les bénéficaires de l'aide sociale, et on procède à des coupures, des coupures sombres, et on procède à un examen, supposément, des programmes sociaux, alors qu'on ne dispose même pas de l'information voulue.

Ça, ce n'est pas nous qui le disions. Nous l'avons déjà dit, mais c'est le vérificateur général qui, la semaine passée, nous a rappelé que ce gouvernement travaillait à l'envers, que ce gouvernement, sur la base d'absence d'information sur quoi que ce soit, prenait des décisions à l'aveuglette, prenait des décisions contre les plus démunis, alors qu'il tenait des beaux discours par ailleurs. C'est honteux, c'est scandaleux de se comporter de cette façon.

Comme le passé est garant de l'avenir et comme le gouvernement libéral tente de rapetisser le temps qui serait dévolu à un débat public sur des mesures fiscales, des mesures aussi concernant les dépenses, concernant les Québécois et les Canadiens, comme le passé est garant de l'avenir et puisqu'on nous présente


8319

ce rapetissage éhonté du débat démocratique, je vous rappellerais que ce gouvernement, depuis qu'il est en poste, ne fait que présenter des projets acrimonieux, des projets avec cynisme, aussi, qui s'attaquent aux programmes sociaux, aux étudiants, aux revenus moyens, aux personnes pauvres.

Il lance aussi des ballons d'essai, et ces ballons d'essai, s'ils sont lancés, ce n'est pas qu'on veut bien les lancer, mais c'est parce qu'ils font partie du plan du calendrier caché du ministre des Finances et du ministre du Développement des ressources humaines. Quand on parle, par exemple, de taxer les REER, si on parle de taxer les REER, ce n'est pas dans les airs qu'on lance cette possibilité, c'est parce que déjà, le gouvernement, le ministre des Finances, a en tête de couper les REER, de taxer les REER.

Quand on parle de réforme des transferts au niveau de l'éducation postsecondaire, au niveau du RAPC, du Régime d'assistance publique du Canada, au niveau des autres transferts effectués auprès des provinces et qu'on lance certains ballons d'essai ou certaines petites suggestions dans quatre ou cinq scénarios présentés dans le rapport du ministre responsable du Développement des ressources humaines, ce n'est pas par hasard. C'est parce que cela fait partie d'un plan d'ensemble visant à régler le problème des déficits, régler le problème qu'on ne nie pas au niveau de l'endettement du gouvernement fédéral, sur le dos des étudiants, sur le dos des provinces, avec le pelletage traditionnel qu'on connaît de la part du fédéral dans la cour des provinces et continuer de régler le problème du déficit et de la dette sur le dos des plus démunis.

(1135)

Lorsqu'on compte aussi sur la conjoncture, comme le font les membres du Parti libéral du Canada pour tenter un tant soit peu d'améliorer les finances publiques, ce n'est pas parce qu'on a un espoir sur la conjoncture, c'est qu'on est incapables de prendre des responsabilités. Ce gouvernement-là, depuis qu'il est en poste, ne prend pas ses responsabilités. Il est tellement irresponsable, que les économies qu'il a réalisées cette année, de plus de 2 milliards dans la Caisse de l'assurance-chômage, le fait de laisser ces économies là de plus de 2 milliards dans le bilan du gouvernement présente le déficit appréhendé pour l'année en cours à 39 milliards, alors qu'en réalité, ce déficit dépasse les 42 milliards.

C'est odieux de couper dans la Caisse d'assurance-chômage, alors que le gouvernement fédéral n'y contribue plus et de prendre ces économies réalisées cette année pour réduire le déficit, pour faire en sorte que le ministre des Finances se fasse une belle jambe, qu'il ait l'air d'un bon gestionnaire, alors qu'il est resté inactif dans la reprise du contrôle des finances publiques. Il est resté inactif dans des mesures qu'il aurait dû prendre depuis longtemps pour colmater les brèches de la fiscalité canadienne, pour faire en sorte que les injustices qu'on y observe depuis longtemps, et qu'il avait dénoncées aussi lorsqu'il était dans l'opposition, pour faire en sorte que ces injustices soient enrayées.

Ce gouvernement manque de sérieux et ce gouvernement n'inspire aucune confiance, surtout que ce gouvernement ne fait que gérer la décroissance d'un régime qui est ankylosé et dont le symbole le plus évident, à notre avis, demeure la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean. Quand on parle de cynisme et d'acrimonie, je pense que c'est un vrai symbole à l'heure actuelle, c'est plus qu'un symbole, surtout lorsqu'on voit le ministre des Affaires intergouvernementales, comme le précisait le chef de l'opposition cette fin de semaine, se promener avec le macaron contre la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean.

C'est horrible de faire de tels choses, et ça dénote cette attitude de cynisme et d'acrimonie, cette attitude de désinformation, alors que c'est lui-même qui ferme le Collège militaire de Saint-Jean. Cette attitude de désinformation et de cynisme est à l'exemple justement de l'attitude généralisée de ce gouvernement, et en particulier de l'attitude de ce gouvernement face à l'important dossier des finances publiques canadiennes.

C'est inadmissible d'agir de cette façon, alors que lorsque le Parti libéral du Canada était dans l'opposition, il parlait de transparence, de justice sociale, d'équité. Chacun des membres du Parti libéral traitait les conservateurs de pratiquemment d'éléments d'extrême droite, alors qu'ils font pire qu'eux.

Il y a pourtant beaucoup de choses à faire lorsqu'on regarde l'évolution des dépenses publiques, la situation de crise des finances publiques au Canada, l'évolution des déficits, année après année, et l'évolution de la dette. Nous, nous n'avons pas attendu deux mois après la comparution du ministre des Finances au Comité des finances avant de suggérer des voies pour en arriver à améliorer la situation des finances publiques. Nous l'avons fait directement. Nous l'avons fait à la face du ministre des Finances et suite à son exposé et le dépôt de ses deux livres, dont la couleur m'échappe. Il y a eu tellement de couleurs de déposées, monsieur le Président, depuis un an qu'on ne sait plus à quel saint se vouer.

On n'a pas attendu, comme nos collègues d'à côté, deux mois pour suggérer, premièrement, que le gouvernement libéral prenne ses responsabilités et mette en place des ressources pour récupérer-c'est ce qu'on suggérait, il y a deux mois-un montant de 6 milliards de dollars d'impôts impayés.

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D'ailleurs, cette première suggestion que nous avons faite au ministre des Finances lors de sa comparution au Comité des finances a été reprise, la semaine dernière, par le vérificateur général. Il ne parle pas de 6 milliards, comme nous l'avions estimé, mais de plus de 8 milliards à récupérer en impôts, un compte assez considérable, que des contribuables québécois et canadiens doivent, en moyenne, aux coffres fédéraux à titre d'impôts sur le revenu, d'impôt sur des profits aussi et de taxe sur les produits et services, la fameuse TPS, la taxe la plus haïe, paraît-il, d'est en ouest au Canada.

Alors, nous avions suggéré il y a deux mois au ministre des Finances et même au ministre du Revenu de mettre en place les ressources nécessaires, de cesser de faire preuve de laxisme, comme ils le font d'habitude, et d'aller récupérer ces six milliards, qui sont devenus huit milliards avec le récent dépôt du rapport du vérificateur général. Qu'ont-ils fait? Rien.

Nous avions suggéré aussi au ministre des Finances, à ce moment, de faire en sorte que le gouvernement fédéral se retire de tous les champs de juridication provinciale. Qu'il se mêle de ses affaires, autrement dit, étant donné l'attribution des champs de juridiction de la Constitution canadienne et des nombreuses interprétations qui en ont été faites au cours des dernières décennies.


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Nous l'avons dit et nous le répétons, les chevauchements, les duplications et les ingérences fédérales, de plus en plus nombreuses et encore plus centralisatrices avec un gouvernement libéral, coûtent, selon nos estimations, environ 3 milliards de dollars par année. C'est de l'argent! Mais c'est certain que, lorsque vous demandez à des hauts fonctionnaires des ministères de voir à quel endroit le gouvernement fédéral s'ingère inutilement et avec inefficacité dans des champs de juridiction provinciale, ils sont à la fois juge et partie. Ils ne feront pas en sorte de se tirer dans le pied. Ces hauts fonctionnaires qui, de l'autre côté, mènent la barque ne feront pas en sorte de réduire leur effectif, leur pouvoir, leur ingérence et leur budget. Des évidences empiriques ont été dénotées par le vérificateur général au cours des années et encore récemment sur des duplications et des chevauchementes entre les deux paliers de gouvernement, mais le gouvernement libéral ne veut pas prendre ses responsabilités.

Voici la deuxième suggestion que nous avions faite au ministre des Finances il y a environ un mois et demi ou deux mois. Nous lui avions suggéré non pas de réduire un peu les subventions aux entreprises, comme on l'a entendu assez souvent des deux côtés de la Chambre, mais de les éliminer. C'est 3,3 milliards qu'on verse annuellement aux entreprises. Et là, on ne parle pas des subventions au développement régional qui ont le mérite de réduire les disparités régionales dans certaines régions défavorisés, on parle plutôt de subventions directes offertes aux entreprises, de subventions qui font plus souvent l'objet de patronage et de graissage de patte des amis du parti, plutôt que des subventions qui sont utiles.

Une voix: Des contributions.

M. Loubier: Ça ne va pas jusque-là, mais ce sont des subventions qui n'ont pas fait leur preuve, en tout cas, en termes d'efficacité, en termes de retombées et aussi en termes d'impact sur le plan de la compétitivité des entreprises. Au contraire, quand vous versez une subvention à une entreprise dans un secteur, les subventions qui rentrent dans le cadre des 3,3 milliards ont créé une situation d'injustice pour les autres qui ne peuvent pas en bénéficier. Et on continue à vouloir couper les dépenses sur le dos des plus démunis, mais en ne parlant même pas d'éliminer ces subventions de 3,3 milliards aux entreprises.

Trouvez-vous cela normal? Est-ce normal qu'on coupe dans l'assurance-chômage, qu'on coupe dans l'aide sociale, qu'on veuille couper dans l'éducation postsecondaire et qu'on continue, au Comité des finances ou ailleurs, de laisser de côté ces subventions de 3,3 milliards versées directement aux entreprises? C'était la troisième suggestion que nous avions faites, à ce moment-là, au ministre des Finances.

Nous avions suggéré également que le gouvernement libéral se retire immédiatement du projet d'Hibernia, et nous ne sommes plus les seuls, maintenant, à le dire. Un peu partout on s'élève sur le gaspillage qui continue et qui a déjà englouti 3 milliards en dépenses directes et indirectes, en garantie de prêts, etc., de la part du gouvernement fédéral. Et cette année, on parle de 250 millions supplémentaires pour un projet qui ne fera jamais ses frais, un projet pour lequel on compte sur une reprise des prix mondiaux du pétrole alors que toutes les prévisions faites jusqu'à ce jour parlent d'une réduction encore plus importante du prix du baril de pétrole que celui qu'on connaît à l'heure actuelle.

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Alors, pourquoi s'acharner à une participation fédérale, une participation du Québec, de l'Ontario et d'autres provinces canadiennes pour un projet qui ne sera jamais rentable? Et s'il est rentable, alors pourquoi l'entreprise privée n'assume pas l'ensemble des investissements? Pourquoi le gouvernement fédéral doit encore investir des centaines de millions à tous les ans s'il est supposément rentable? On n'est plus dans les années 1960-1970. Regardez l'état des finances publiques. Même mon collègue libéral, tout à l'heure, le président du Comité des finances l'a mentionné, les finances publiques sont en état de crise.

On éprouve de graves problèmes et on continue, pour répondre possiblement à des besoins politiques, en contradiction avec la position même du premier ministre lorsque le vote a été pris sur le projet Hibernia. C'est à n'y plus rien comprendre. Si ce n'est pas de l'opportunisme politique, je me demande ce que c'est. C'était la quatrième suggestion que nous avions faite au ministre des Finances et qui reste sans réponse à ce jour.

Nous suggérions aussi au ministre des Finances à ce moment-là de couper 1,6 milliard dans le budget de la défense pour rencontrer une demande que l'opposition officielle lui avait faite l'année dernière de réduire de 25 p. 100 le budget de la Défense nationale. Encore une fois, une suggestion qui est restée lettre morte.

Nous avions demandé aussi au ministre des Finances de réduire les dépenses de fonctionnement de l'État en s'attaquant aux mauvaises méthodes de gestion et aux multiples cas de gaspillage. Laissez-moi vous dire que nous avons les références sur le gaspillage et les inefficacités qui fusent et en particulier du dernier rapport du vérificateur général. Je vais vous donner qu'un exemple parce que je ne voudrais pas prendre trop de temps, même si on m'attribue un temps illimité pour ce débat. On peut prendre l'exemple du ministère de la Défense nationale, exemple que nous aimons tous depuis un bout de temps et que nous aimons particulièrement depuis la semaine dernière, depuis que le vérificateur général a mis le doigt sur des incongruités terribles au niveau de la gestion, au niveau de l'efficacité. On se targue toujours qu'on a fait un ménage, dans le passé, et dans un passé récent au ministère de la Défense, et on s'aperçoit, à la lecture du dernier rapport du vérificateur général, que c'est un fouillis monumental, que c'est devenu un symbole d'une gestion ridicule de la chose publique.

Je vais vous donner seulement certains extraits pour visualiser ce que je vous ai présenté. On parle, dans le rapport du vérificateur général, de plusieurs cas de gaspillage. Entre autres, on dit: «La mauvaise gestion des biens immobiliers de la Défense nationale entraîne des coûts annuels de 100 millions de dollars.» Seulement la mauvaise gestion du parc immobilier, on prend 100 millions de dollars, on jette cela à la poubelle, tout en continuant de prétendre que la seule façon de réduire le gaspillage et d'augmenter l'efficacité de la gestion des finances publique, c'est de couper dans les programmes sociaux.

On parle de gaspillage aussi dans le programme d'évaluation de la performance des F-18. On dit que ce programme d'évaluation sera peut-être prêt en 2003, soit 20 ans après sa mise en service, et on dit qu'il aura fallu 26 ans pour informatiser les dossiers de la police militaire canadienne si l'objectif de mener le projet à terme en l'an 2000 est atteint. Imaginez, 20 ans pour le programme d'évaluation des performances des F-18. Un F-18 de 20 ans, c'est déjà un F-18 qui est vieux, et de 26 ans pour


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informatiser les dossiers de la police militaire canadienne. Je n'ai jamais vu, dans ma jeune carrière, une chose pareille.

On dit aussi dans le rapport du vérificateur général pour le ministère de la Défense nationale, que l'armée, l'aviation et la marine ont élaboré leur système d'information, de commandement et de contrôle chacune de leur côté en vase clos, et leur capacité d'interfonctionnement est limitée. Imaginez, vous avez trois forces qui constituent la défense nationale et leurs interrelations qui, normalement, auraient dû être faites à partir d'appareils de bureautique et d'information, on dit qu'il y a pratiquement incompatibilité entre les systèmes. On dit que l'interfonctionnement des trois forces est très limité.

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Imaginez ce qu'on vise ailleurs si on vise une telle chose à la Défense nationale. On dit, et c'est grave parce qu'il y a des milliards, des centaines de millions là-dedans: «. . .de futurs projets d'implantation de technologie de l'information prévus au coût de 1,2 milliard de dollars.» Monsieur le Président, 1,2 milliard de dollars pour implanter de la technologie! Ces futurs projets ne sont étayés par aucune estimation adéquate.

Autrement dit, on dépense 1,2 milliard pour l'implantation de projets technologiques, de nouvelles technologies et il n'y a aucune étude sérieuse sur la validité de ces projets d'implantation, sur leur efficacité et sur leur utilité pour le futur, pour les trois forces de la Défense nationale.

Un autre exemple, encore une fois au ministère de la Défense, on dit: «Le ministère n'a pas de système en place permettant d'évaluer les possibilités des coûts de projets de technologie de l'information, et de peser ainsi les avantages de la réduction des coûts par rapport à d'autres priorités. En conséquence, au moins 700 millions de dollars en économie éventuelle ont échappé au ministère.» Imaginez! On parle de centaines de millions, on parle de milliards, on met tout cela dans les poubelles et on coupe les dépenses sur le dos des plus démunis en laissant des choses scandaleuses comme ça se poursuivre.

C'est à n'y rien comprendre. Je suis estomaqué. J'étais encore plus scandalisé lorsque le vérificateur général a présenté son rapport, la semaine dernière, parce qu'on croyait que depuis un an, et c'est ce qu'on nous racontait de l'autre côté, mais on nous racontait des blagues, on croyait qu'on avait amélioré, un peu du moins, la gestion des finances publiques, mais ce n'est pas le cas.

Il y a des choses à faire en ce qui a trait à la fiscalité. Jusqu'à ce que le gouvernement libéral prenne des mesures et mette ses culottes concernant la fiscalité, nous ne cesserons de répéter que le scandale des fiducies familiales doit être stoppé. On doit cesser d'engloutir des centaines de millions, année après année, en permettant à des familles riches au Canada, des familles très riches au Canada, on ne parle pas de familles à revenu moyen, on ne parle pas de familles normalement riches, on parle de familles très riches qui utilisent les fiducies familiales, qui utilisent ce système permis par la fiscalité canadienne, pour reporter jusqu'à une période de 80 ans, des impôts à payer sur les gains en capital.

Ils se servent de ces fiducies familiales, non pas comme un outil de placement pour des générations futures, non pas pour permettre à des personnes malades ou à des personnes handicapées, des enfants handicapés de pouvoir vivre après leur décès, mais ils s'en servent comme un puissant instrument de planification fiscale. Je vous dirais que des fiscalistes très sérieux, M. Sydney Goldstein, par exemple, et M. Neil Brooks, qui étaient écoutés lorsque le Parti libéral était dans l'opposition, mais qui ne le sont plus maintenant, alors que le Parti libéral est au pouvoir, ces gens qui ont une réputation excellente au Canada, disent que c'est scandaleux de maintenir ces fiducies pour les familles canadiennes très riches.

Ils suggèrent que, par l'entremise d'études spéciales de Statistiques Canada, ou par l'entremise de données de Revenu Canada, ou de données dont disposent des entreprises, de grosses entreprises qui gèrent les actifs des fiducies familiales, comme le Canada Trust par exemple, qui est un gros donateur de la caisse du Parti libéral, ils suggèrent qu'on peut avoir suffisamment d'informations pour en arriver à estimer annuellement ce que ça coûte vraiment aux Québécois et aux Canadiens en sacrifices supplémentaires, parce que de grandes familles riches bénéficient de ce scandale des fiducies familiales.

Lors des séances d''un comité spécial mis en place pour analyser les fiducies familiales, avec toute la transparence voulue, comme le disait le ministre des Finances, l'opposition officielle a demandé à Revenu Canada de nous fournir ces données. Cela fait deux mois de cela, nous attendons toujours. On n'a même pas eu d'accusé de réception de notre demande. Si on appelle cela de la transparence, il y a comme un problème. On n'a pas la même définition de la transparence selon qu'on est libéral ou selon qu'on est de l'opposition officielle.

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M. Farber, du ministère des Finances, a déclaré aussi au Comité des Finances qu'il faudrait une autorisation législative pour procéder à la collecte de ces données, par l'entremise d'un feuillet fiscal. Nous avons acheminé également cette demande. Nous n'avons reçu aucune réponse. Non seulement nous n'avons pas de réponse, mais je peux vous dire que sous des couverts de transparence, sous des couverts aussi de désir de corriger une situation d'iniquité fiscale, nous n'avons pas eu la collaboration ni du Parti libéral, ni des hauts fonctionnaires du ministère des Finances, ni des hauts fonctionnaires du ministère du Revenu. Est-ce à croire que ces hauts fonctionnaires avaient reçu un ordre de leurs patrons de ne rien dévoiler, de ne pas enclencher de mesures de façon à colliger les données concernant les fiducies familiales?

On pourrait parler aussi du fait qu'il y a des choses à faire au niveau de la fiscalité, quand on parle des conventions fiscales signées, et on le répète, entre le Canada et des pays qui sont considérés comme de véritables passoires sur le plan fiscal. Et malgré les correctifs qui ont été apportés par le ministre des Finances, lors du dépôt de son dernier budget, il y a une étude qui circule, à l'heure actuelle, et c'est une étude, si ma mémoire est bonne, de Samson et Bélair, qui dit que malgré tout, malgré toutes les tentatives, toutes les mesures qui ont été prises lors du dernier budget, il transite encore des centaines de millions de dollars d'entreprises canadiennes qui disposent de filiales à l'étranger, dans des pays considérés comme des paradis fiscaux et que des pertes sont rapatriées de ces filiales jusqu'ici, pour être déduites des impôts faits au Canada et qu'il y aurait encore des centaines de millions de dollars de ces fuites, et c'est de l'avis même du vérificateur général, et c'est de l'avis même aussi de l'étude de Samson et Bélair.


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Je me permettrai de vous citer un petit passage en anglais, en ne faisant pas attention à mon fort accent: «The new rules have some merit.», en parlant des mesures prises par le ministre des Finances. «They will most certainly generate ambiguity and uncertainty. Unfortunately, the 1994 proposal did not bring the changes we were all hoping to see.»

Autrement dit, les mesures prises par le ministre des Finances ne sont pas suffisantes pour éviter que des conventions fiscales ne soient signées avec des pays qui ont des taux de taxation plus faibles sur les profits des entreprises, sur les revenus des entreprises que nos taux de taxation ici. Je pense par exemple à la Barbade, Chypre, Malte, la Papouasie, Nouvelle-Guinée.

À cause de ces conventions fiscales, on néglige notre dû, en termes de finances publiques, en termes de taxes et d'impôts versés par les entreprises, et pour la plupart de très grosses entreprises, et on omet délibérément d'aller chercher cette responsabilité fiscale que n'ont plus certaines grandes entreprises canadiennes, en profitant de ces trous, en profitant de ces paradis fiscaux pour faire en sorte, légalement, d'économiser des centaines de millions de dollars en paiement de taxes et d'impôts aux coffres fédéraux.

On n'a plus les moyens d'avoir ce genre de conventions fiscales, on n'a plus les moyens, surtout, de les signer avec des pays dont on sait pertinemment qu'ils sont considérés comme des paradis fiscaux, qu'ils sont considérés comme des passoires au niveau de la fiscalité et que nous, en même temps que l'on maintient ces injustices, sur le plan fiscal, on nous demande des sacrifices, on demande des sacrifices aux familles à revenu moyen, aux plus démunis, à tout le monde, sauf à ces grandes entreprises qui profitent des trous de la fiscalité canadienne et des trous créés délibérément par la signature de conventions fiscales de ce genre entre le Canada et les pays considérés comme des paradis fiscaux.

Il y a aussi l'ensemble de la fiscalité des entreprises. Je vous dirais qu'il y a un examen à faire dans cette fiscalité des entreprises.

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En regardant les statistiques fournies par Statistique Canada récemment, l'évolution de l'assiette fiscale et la contribution des entreprises à cette assiette fiscale versus celle des particuliers, je vous dirai qu'il y a des choses qui sautent aux yeux. Notons que ces données sont établies en termes réels, c'est-à-dire sur la base de 1986 égale 100. Ce sont des données réelles qui tiennent compte de l'inflation. En tenant compte de l'inflation, en 1950, par exemple, les entreprises canadiennes contribuaient 3,2 milliards de dollars aux coffres du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux. Toujours selon cette même donnée, 1986 égale 100, en 1992, elles contribuaient pour 7,4 milliards. Mais à ces 7,4 milliards, il faut enlever les subventions dont je faisais mention tout à l'heure, les subventions de 3,3 milliards que les entreprises reçoivent.

Alors, prenez les 7,4 milliards de dollars en termes réels payés par les entreprises canadiennes aux coffres fédéraux et provinciaux, enlevez les 3,3 milliards de subventions, et vous remarquerez qu'en termes réels, depuis 1950, les entreprises payent exactement la même chose. Elles n'ont pas augmenté leur fardeau fiscal, elles n'ont pas augmenté leur contribution fiscale en termes réels, alors que quand vous regardez les particuliers, ils sont passés, toujours en termes réels, de 3,3 milliards de dollars de contributions aux coffres gouvernementaux à 87,6 milliards en termes réels.

Alors, il y a un problème. Je vous dirai que ce problème est probablement lié, on peut voir cela intuitivement, à l'existence de dépenses fiscales utilisées par les très grandes entreprises. Le Comité sur l'équité fiscale de l'Ontario mentionnait, en 1990, qu'il y a à peu près 60 dépenses fiscales offertes aux grandes entreprises canadiennes qui leur permettent justement, depuis 1950, de ne pas contribuer de façon équitable aux coffres fédéraux, alors qu'on serait en droit d'exiger d'elles qu'elles le fassent. Et là, je ne parle pas des entreprises qu'on appelle les TPE, les très petites entreprises, ou les PME, les petites et moyennes entreprises qui font leur job et qui, si on regarde les données, contribuent comme des bons citoyens corporatifs aux coffres de l'État fédéral et des États provinciaux. Je ne parle pas des entreprises de ma région.

J'ai discuté la semaine dernière dans mon comté avec le propriétaire de Grégoire & Fils qui fait de la recherche et du développement dans le secteur de l'équipement agricole. Je ne parle pas non plus de Dutailier Inc. et de Lacasse qui sont dans le domaine des meubles qui exportent à l'extérieur du pays, sans subventions. Je ne parle pas de ces petites et moyennes entreprises qui créent des centaines et même des milliers d'emplois, parce que la définition d'une PME englobe des entreprises qui sont quand même de moyenne envergure où on peut parler de milliers d'emplois.

Donc, il n'est pas question de ces entreprises-là qui contribuent à la croissance économique, à la création d'emplois, au développement de chacune de nos régions et qui font leur job et leur devoir sur le plan de la fiscalité canadienne. Je ne parle pas non plus d'un entrepreneur comme mon ami Jean-Marc, de la rive sud, qui est impliqué dans le très difficile secteur des équipements d'acier, qui fait concurrence à de grandes multinationales, qui crée 43 emplois, qui, lui, paie ses taxes et ses impôts. Non, je fais référence aux très grandes entreprises qui profitent justement de la légalité de certaines mesures, parfois «borderline», comme on dit aussi, pour faire des profits sur le dos de la détérioration des finances publiques canadiennes, à celles qui profitent de mesures légales pour éviter de payer leur dû au gouvernement fédéral ainsi qu'aux gouvernements provinciaux.

Depuis un an, soit depuis que je dois me pencher sur la fiscalité canadienne de façon plus précise et plus importante qu'auparavant, je trouve que le système est vicié. Il est tellement vicié que mon ami Léo-Paul Lauzon, un fiscaliste bien connu du Québec, me faisait parvenir la semaine dernière une annonce qu'il avait découpée dans un journal-je pense que c'est La Presse. Je sais que je ne peux pas montrer cette annonce-là, mais on disait ceci en gros titres dans les annonces classées: «Pertes fiscales à offrir». Et, en dessous, on disait: «Notre client, distributeur de cosmétiques ayant d'importantes pertes fiscales et des biens sous-évalués cherche un acheteur en mesure d'utiliser ses déductions fiscales. Discrétion assurée. Veuillez communiquer avec. . .»-je vais taire le nom de l'agence-à tel numéro, avec tel. . .» Autrement dit, le système est tellement vicié qu'on peut vendre maintenant. On vend comme on vend des paires de souliers, des oeufs et du poulets, on vend des pertes fiscales à des entreprises qui sont prêtes à les acheter pour les déduire de leurs revenus annuels?


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M. Chrétien (Frontenac): Scandale!

M. Loubier: Trouvez-vous cela normal?

M. Chrétien (Frontenac): Non, sûrement pas!

M. Loubier: C'est anormal, et je ne sens pas de volonté de l'autre côté de la Chambre de corriger les brèches de la fiscalité des entreprises. Je ne sens même pas une volonté non plus d'examiner la fiscalité des entreprises. À toutes les fois qu'on a fait cette suggestion, comme opposition officielle, et même dans le cadre de la campagne électorale, on n'a jamais eu de réponse. Encore récemment, au Comité des finances, on n'en a pas de réponse. Et, à cet égard, le gouvernememt, les députés du Parti libéral siégeant au Comité des finances peuvent compter sur la complicité du Parti réformiste parce que, eux non plus, ne veulent pas qu'on se penchent sur la fiscalité des entreprises. C'est grave. Quand vous dites que vous refusez même de regarder la fiscalité des entreprises. On ne parle pas de couper, on parle simplement de regarder pour confirmer peut-être ce qu'on véhicule depuis plusieurs années, pour confirmer aussi certains avertissements présentés par le vérificateur général du Canada, aussi certaines analyses présentées par les fiscalistes. Eh bien, là, on a comme notre voyage.

Il est évident, et cela je le répète, il est évident qu'il faille trouver des façons d'améliorer la gestion des finances publiques et nous sommes les premiers à réaliser que le problème est très grave. Alors que le ministre des Finances a parlé uniquement de problèmes des finances publiques, nous avons employé un terme plus grave encore. On a parlé de crise. On reconnaît encore plus que le ministre des Finances lui-même que la situation est intenable si on continue de cette façon-là.

Mais qu'est-ce que le gouvernement libéral a fait depuis un an pour en arriver à corriger la situation? Qu'est-ce qu'il a fait d'autre par rapport à tout ce qu'on lui a suggéré, par rapport à ce que d'autres lui ont suggéré, qu'est-ce qu'il a fait d'autre, ce gouvernement, pour assainir les finances publiques que de s'attaquer aux chômeurs, aux assistés sociaux, aux personnes âgées, aux étudiants maintenant avec les propositions de réforme du ministre du Développement des ressources humaines, aux familles à revenu moyen avec tous les ballons d'essai qu'on lance à gauche et à droite et qui viennent du ministre des Finances ou de ses acolytes ou de son secrétaire d'État? Qu'est-ce qu'on a fait d'autre aussi que de s'attaquer aux familles pauvres? Et j'en recontre à toutes les semaines dans mon comté. Les familles sont de plus en plus pauvres.

Justement, en cette Année internationale de la famille, les familles sont de plus en plus pauvres, sont de plus en plus désespérées parce qu'elles voient que malgré les beaux discours, malgré la belle campagne électorale que les membres du Parti libéral ont menée l'année dernière, malgré le discours de compassion aussi face aux plus démunis, ils sont plus de droite, ils sont plus extrémistes que les conservateurs l'étaient à certains moment. Ils sont plus extrémistes que ce qu'ils dénonçaient comme orientation conservatrice lorsqu'ils étaient dans l'opposition.

M. Chrétien (Frontenac): C'est un double langage!

M. Loubier: C'est un double langage, oui, mon collègue. Mais c'est surtout, je dirais, quelque chose qui ressemble un peu à une calomnie.

Qu'on parle de la pauvreté, je vous dirais que depuis les 15 dernières années, ce qui s'est passé au niveau de l'évolution de la pauvreté au Québec et au Canada, c'est quelque chose de grave. Les pauvres Québécois et les pauvres Canadiens à l'heure actuelle ne méritent pas le traitement qu'on leur offre depuis un an.

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J'aimerais vous énoncer rapidement certaines statistiques sur l'évolution de la pauvreté depuis 1973 pour vous indiquer l'évolution négative de la situation et le besoin qu'on mette en place de véritables politiques de développement économique, de véritables politiques de développement de l'emploi, de véritables politiques de formation de la main-d'oeuvre et de développement régional pour en arriver à inculquer une direction à l'économie québécoise, une direction à l'économie canadienne. Pas des programmes d'infrastructures qui sont assujettis à certaines pratiques de patronage, pas des programmes d'infrastructures qui créent 45 000 emplois temporaires à temps partiel, alors qu'on a besoin d'environ 800 000 emplois pour retrouver le bilan qu'on avait au début des années 1990, mais de vraies mesures.

Depuis 1973, le nombre de familles pauvres au Canada a augmenté de 41 p. 100. De la même façon, le nombre de personnes seules pauvres a fait un bond, depuis 1973, de 79 p. 100. Je cite une étude de M. David Ross qui a mis à jour il y a trois semaines les données sur la pauvreté au Canada. Si cela vous intéresse d'avoir un peu plus de détails, et si cela intéresse mes collègues libéraux de savoir que ce qu'ils sont en train de faire avec les familles pauvres au Canada, c'est d'empirer leur situation qui est déjà catastrophique, je leur donnerai une copie gracieusement.

On dit: «La hausse rapide du taux de pauvreté parmi les jeunes familles au Canada constitue l'une des tendances de la pauvreté familiale des plus inquiétantes.» Donc, non seulement les gens sont de plus en plus pauvres, mais ils sont de plus en plus pauvres et jeunes. Ce sont des jeunes familles qui sont de plus en plus pauvres, ce qui ne s'était jamais vu dans le passé.

Entre 1981 et 1991, le taux de pauvreté des familles de moins de 25 ans a presque doublé, est passé de 21,7 p. 100 à 40 p. 100. On a presque doublé la pauvreté chez les familles jeunes. C'est comme ça qu'on prépare les jeunes, c'est comme cela qu'on leur donne l'espoir en l'avenir, en les appauvrissant à un rythme supérieur à celui qu'ont connu les plus vieux.

Une autre donnée que j'ai trouvée intéressante pour ouvrir les yeux du gouvernement, en 1991, le nombre d'enfants pauvres à charge de moins de 18 ans s'élevait à presque 1,8 million. Les mères chef de famille, c'est intéressant de connaître les statistiques, ce sont elles qui subissent le plus de préjudices au Québec comme au Canada, en matière de revenu, en matière de services aussi. Les mères chef de famille, leur taux de pauvreté au Canada est de 52,1 p. 100. Il est de 6 p. 100 en Suède, pour avoir de bonnes bases de comparaison.


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Avant, on disait que s'instruire c'est s'enrichir. Une autre donnée importante, les diplômés. Malgré la présence de diplômes chez les gens, il est certain que la pauvreté est moindre chez les personnes qui sont éduquées, les personnes qui sont flexibles à cause de cette éducation. Il est évident que l'instruction enrichit toujours, mais l'instruction enrichit moins vite qu'auparavant. Chez les diplômés, en 1981, on retrouvait 13,5 p. 100 de personnes pauvres. À l'heure actuelle, c'est plus de 30 p. 100.

Je tenais à vous présenter ces données en Chambre parce qu'elles m'ont ébranlé. Je me disais, et c'est ce que l'on apprenait à l'école, au collège ou à l'université, qu'avec le temps, avec les économies postmanufacturières, avec la nouvelle économie mondiale aussi, avec tout ce qu'on avait connu comme développement de la société de loisir, que les sociétés modernes et industrialisées s'enrichiraient avec le temps. On disait cela au début des années 1970. Ce qu'on apprend, à partir de la mise à jour par M. Ross concernant les données sur la pauvreté au Canada, c'est que c'est tout à fait le contraire qui est arrivé.

C'est un signe qu'il faut un redressement très important de l'économie canadienne, qu'il faut que ce gouvernement fasse preuve de responsabilité. Non pas frapper ceux qui en arrachent à l'heure actuelle, mais suivre la voix qu'on lui suggère fortement, c'est-à-dire une réforme en profondeur de la fiscalité, des coupures des dépenses comme nous les avons énumérées tout à l'heure et telles que nous les présentons au ministre des Finances depuis le début, et en particulier depuis sa comparution au Comité permanent des finances, et que ce gouvernement cesse de s'acharner sur ceux qui ne méritent pas qu'on s'acharne sur eux ou sur elles.

(1215)

Pour conclure, je vous dirais que nous ne serons pas complices d'un rapetissage d'un débat démocratique, comme on nous le présente dans la motion ce matin. Nous ne serons pas complices de mesures qui pourraient apparaître dans le rapport du Comité des finances, du rapport majoritaire des membres libéraux du Comité des finances et j'ai l'impression que, comme je le mentionne depuis un bon bout de temps, les dés sont déjà pipés d'avance sur les mesures que va entreprendre ce gouvernement pour améliorer les finances publiques et pour en arriver à l'objectif énoncé par le ministre des Finances, c'est-à-dire un déficit à 3 p. 100 du PIB, en 1996-1997. De plus, ces mesures sont tellement honteuses, sont tellement dans la foulée du dernier budget du ministre des Finances, c'est-à-dire dans la foulée d'une attaque en règle contre les chômeurs, les personnes âgées, les personnes assistées sociales, les étudiants, qu'ils ont honte, justement, de les présenter le 2 décembre comme il était prévu, et de l'autre côté de la Chambre, on tente de rapetisser le nombre de jours prévus pour le débat autour de ces suggestions.

Alors, nous ne serons pas complices d'un débat que les libéraux ne veulent pas tenir, d'un débat qui va leur faire honte, par rapport à ce qu'ils disent depuis longtemps. Alors, nous ne serons pas complices non plus d'une immense mascarade, d'une immense consultationnite aiguë, parce que ce gouvernement consulte, consulte, mais à l'intérieur des consultations, il retient ce qui fait bien son affaire.

On l'a vu lors du dernier budget, quand le ministre des Finances a retenu une suggestion de couper dans le fonds de l'assurance-chômage, parmi des milliers de suggestions qui lui disaient de faire le contraire. Bien là, on voit ce que ça donne, ces consultations.

Alors, pour toutes ces raisons, l'opposition officielle rejettera la motion présentée par le gouvernement libéral et nous allons rejeter cette motion la tête haute, avec fierté et en ayant un souci, nous, de défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises, des Canadiens et des Canadiennes aussi, comme nous le faisons depuis le début.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Je rappelle à la Chambre que, conformément à l'article 43 du Règlement, les interventions dureront un maximum de 20 minutes, suivies d'une période de questions et d'observations de dix minutes.

Il arrive parfois que les partis ou les députés désirent partager leur temps. Je demande simplement aux députés de le signaler à la présidence, si c'est le cas. Sinon, les députés auront droit à 20 minutes d'intervention et à dix minutes de questions et d'observations.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, le député du Bloc qui vient d'intervenir, et qui est membre du Comité des finances, a retenu mon attention sur un bon nombre de points. J'hésite cependant à lui faire l'honneur de commenter ses propos, compte tenu de ce que son chef a déclaré, pas plus tard qu'hier. J'ai pris note de ce qu'il a dit à la télévision.

J'ai vu le chef de son parti déclarer que le Bloc n'était qu'«un événement superficiel sur la scène politique». Je pense que cela illustre bien la profondeur de l'engagement du Bloc envers l'ensemble du processus budgétaire. Quand le député utilise des expressions telles «mesures barbares et rétrogrades», et d'autres à l'extérieur de la Chambre qui ne font rien pour enrichir le débat, je crois qu'il retarde la solution d'un problème qui est tellement grave pour le Canada.

Au cours de son discours long et décousu, le député a mentionné que même les conservateurs n'avaient pas pratiqué de telles coupes. Il a raison, et c'est justement pour cela que nous nous trouvons maintenant dans une telle position. Les conservateurs n'ont pas eu le courage de réduire la dette faramineuse que leur avait laissée les libéraux.

Nous croyions que la dette de 180 milliards de dollars attribuable au dernier gouvernement libéral était une dette terrible, mais les conservateurs n'ont pas eu le courage de faire des compressions. C'est pour cela que nous sommes maintenant aux prises avec une dette de plus d'un demi-billion de dollars.


8325

(1220)

Je ne peux me permettre de passer sous silence la façon dont le député laisse entendre que les chiffres sont douteux. Je ne sais pas du tout comment il peut dire, en se fondant sur le rapport du vérificateur général, que les comptes débiteurs sont soudainement passés de 6 à 8 milliards dans ce rapport. C'est inexact.

Si le député a pris le temps de lire le rapport du vérificateur général-sans doute dans sa version française-je suppose qu'il parlait en réalité de ce que le vérificateur général a dit au sujet de certains comptes débiteurs qui remontent à près de deux ans. Comme ils font partie des 6 milliards, le vérificateur général craignait que ces créances soient irrécouvrables.

Cette attitude est probablement typique du député qui, en comité, répète constamment qu'il y a en moyenne 42 millions de dollars dans chaque fiducie familiale. S'il avait seulement pris le temps d'écouter au comité, il comprendrait que le rapport dont il parle a fait état de sociétés dont l'actif s'établissait en moyenne à 42 millions de dollars. Il s'agissait simplement d'un critère permettant de déterminer le genre de sociétés visées par le sondage en question. En conséquence, les bloquistes redisent toujours qu'il y a environ 42 millions de dollars dans chaque fiducie familiale.

Il n'y a pas que les bloquistes qui font cela. Même le député de Gander-Grand Falls entretient de fausses idées sur les échappatoires et les paradis fiscaux, et il nous parle de millionnaires qui reçoivent des prestations d'assurance-chômage. Bien des Canadiens pensent qu'ils cherchent à tirer leur épingle du jeu. N'est-ce pas ce que nous voulons tous? Pour bien des Canadiens, ils cherchent des raisons pour ne pas réduire les dépenses. En tant que politiciens, nous devons tous formuler des observations qui respectent les faits et éviter d'entretenir les idées fausses.

Je remets aussi en question l'affirmation du député du Bloc, selon laquelle les subventions de 3,3 milliards de dollars versées directement au secteur commercial n'incluent pas nécessairement les subventions accordées aux entreprises par l'intermédiaire d'organismes tels que l'APECA, le Fonds de diversification de l'économie de l'Ouest et le Bureau de développement régional-Québec. Le député semble considérer tout cela comme des subventions directes aux entreprises.

J'ai donc hâte de discuter avec des gens qui prendront le temps d'examiner les chiffres et, s'ils ne les comprennent pas, qui demanderont des explications, car les discussions seront alors fondées sur des faits et non sur des idées fausses.

Pendant les 20 minutes dont je dispose pour traiter de cette question, les Canadiens sauront que notre dette aura augmenté de 1,4 million de dollars. Chaque jour, le Canada dépense environ 460 millions de dollars. De ce montant, il y a 110 millions de dollars que nous empruntons sur le marché. Cela représente un endettement de 1 700 $ par seconde.

Pourquoi est-ce si important? Parce que même le plan des libéraux, que nous jugeons faible, prévoit un endettement de25 milliards par an. Même en vertu de ce plan anémique, le Canada contractera 100 milliards de dollars de dettes. C'est absolument effrayant. Nous ne savons pas quels seront les taux d'intérêt, mais s'ils se situent entre 7 et 10 p. 100, nous devons nous attendre à payer de 7 à 10 milliards supplémentaires pour les intérêts à la fin du mandat de ce gouvernement.

(1225)

C'est très important lorsqu'on songe que le gouvernement fédéral transfère 2,2 milliards de dollars aux provinces au titre de l'enseignement. Comparons donc maintenant ces 7 milliards de dollars qui s'ajouteront à notre dette aux 2,2 milliards de dollars qui vont, à l'heure actuelle, au financement de l'éducation.

Avant d'exposer les propositions réformistes, je me permets une dernière observation. Il faut comprendre que quelque 45 des 110 millions de dollars dont s'alourdira aujourd'hui notre dette seront empruntés sur les marchés étrangers. Cela signifie que, dans un an, cette dette additionnelle de 110 millions de dollars nous coûtera trois millions de dollars de plus sur les marchés étrangers de capitaux.

Que pourrait-on faire avec trois millions de dollars? Aux environs de Cranbrook, dans ma circonscription, on a besoin d'un scanner. Or, cet appareil coûte approximativement 100 000 $. Et il faudrait peut-être autant d'argent pour embaucher et former le personnel qui sera appelé à s'en servir.

Et pourtant, on est disposé à laisser aller à l'étranger trois millions de dollars d'intérêts pour la seule journée d'aujourd'hui. Ce qui est barbare et rétrograde, c'est que nous léguions une telle dette à nos enfants, à nos petits-enfants et à nos arrière-petits-enfants qui ne sont même pas encore nés.

Il y a des aspects de cette affaire qui rendent facile l'emploi d'étiquettes. Et c'est vraiment malheureux. Car, comme l'a si bien dit tout à l'heure, au cours de son allocution, le président du comité, le fait est qu'il y a un engagement ferme. Il y a un engagement ferme de la part des libéraux. Je suis persuadé qu'il y en a un de la part du Bloc et je puis confirmer qu'il y en a un de la part du Parti réformiste. Il faut prendre soin des gens qui sont le moins en mesure de s'occuper d'eux-mêmes. Il faut protéger ces gens-là.

Pourquoi le Parti réformiste recommande-t-il alors zéro p. 100 au lieu de 3 p. 100 de 25 milliards de dollars environ? Pour les raisons mêmes que le président a fait valoir. Nous sommes en période de très forte croissance économique à l'heure actuelle. On a très clairement démontré que si la création d'emplois n'a pas connu la même relance que l'économie, c'est tout simplement parce que les entreprises sont trop taxées, parce qu'elles sont taxées à mort.

Il existe des divergences d'opinions entre nous et les libéraux. En faisant notre exposé devant le comité nous avons pu faire ressortir de façon assez intéressante certaines de ces divergences. Selon le Parti réformiste, il faut examiner sérieusement l'ensemble du régime fiscal pour trouver le moyen de mettre fin aux injustices et d'éliminer les échappatoires que certains


8326

contribuables ont découvertes. Cependant, nous estimons que les Canadiens ne peuvent pas payer un sou de plus en impôt.

Il était intéressant d'entendre le député de St. Paul's déclarer: «Vos commentaires sur la fiscalité sont plutôt superficiels. Il est un peu banal de dire que l'on ne s'oppose pas à l'élimination des injustices du régime fiscal. Nous avons entendu beaucoup de témoignages sur le sujet. N'avez-vous rien entendu qui ait retenu votre attention, qui vous ait fait dire que oui, il faut examiner, par exemple, certains aspects des dépenses fiscales? N'y a-t-il rien qui ait capté votre attention?»

(1230)

Dans une deuxième intervention, il a déclaré: «Pour une rare fois, je suis d'accord avec le député du Bloc québécois. C'est peut-être parce que la vision que vous avez du pays et de nos rapports entre Canadiens est tellement différente de celle que j'ai.»

Dans la vision que le Parti réformiste a de notre responsabilité envers le Canada, nous devons faire en sorte que le gouvernement laisse respirer les Canadiens. Nous devons corriger la situation une fois pour toutes et cesser d'étouffer le marché des capitaux, qui est déjà très fragile et anémique, en nous accaparant une part toujours croissante des capitaux. Il serait tout à fait exact de dire que l'impôt n'est que la confiscation des fonds de roulement. Ce n'est rien d'autre que cela. Les taxes ne sont que la confiscation de la richesse.

Si nous retirons plus de richesses, plus de capitaux des mains des entreprises et des citoyens ordinaires, nous leur laissons moins d'argent à remettre en circulation pour stimuler l'activité économique. J'insiste sur un point: nous croyons qu'il ne doit pas y avoir de hausse nette d'impôt.

Notre programme repose sur cinq grands principes dont le premier dit que ce sont les plus haut placés au sein du gouvernement qui doivent être les premiers à faire des sacrifices importants et apparents.

Un député m'a demandé pourquoi, mardi dernier, nous avions consacré notre journée de l'opposition à discuter d'une motion visant à aligner le régime de pension des députés sur ceux des citoyens ordinaires. En passant, il est très intéressant de constater que tous les députés, à l'exception des 41 réformistes, qui avaient présenté la motion, ont voté contre. Ce régime de pension aurait déjà dû être réformé il y a un an.

Nous croyons également qu'il faut appliquer des compressions budgétaires de 15 p. 100 aux niveaux supérieurs des organismes gouvernementaux. Nous avons encore assisté la semaine dernière à la nomination de sénateurs et d'un gouverneur général et nous avons donc pu nous attarder aux fonctions publiques de ces gens. La population a commencé à examiner cela et à se dire: «Un instant, n'est-ce pas là le même gouvernement qui me demande de me serrer la ceinture?»

Éliminons les déplacements excessifs des fonctionnaires fédéraux et réduisons le nombre de secrétaires d'État et de ministres adjoints. Ce que la population attend, c'est un exemple, mais malheureusement, selon de nombreux commentateurs de la scène politique, le gouvernement ne semble pas vouloir entendre, comme si cela pouvait être une solution au problème. C'est une solution au problème seulement parce que les gens recherchent un leadership énergique. Ils veulent que nous donnions l'exemple et que nous nous imposions à nous-mêmes les réductions nécessaires.

Comme je l'ai déjà dit, le financement des secteurs hautement prioritaires doit être maintenu. À mon avis, il y a deux secteurs hautement prioritaires. Premièrement, il y a le secteur de l'application des lois, particulièrement aux ministères de la Justice et du solliciteur général. Deuxièmement, on doit s'assurer que ceux qui sont le moins capables de subvenir à leurs besoins reçoivent l'aide nécessaire. Troisièmement, il faut réduire et éliminer les dédoublements entre les divers ministères.

Il y a quelque chose de très intéressant ici. Une partie du problème découle du fait que beaucoup de gens, beaucoup de journalistes et certainement beaucoup de députés libéraux d'arrière-ban ne comprennent pas que nous devons faire des réductions considérables.

En lisant l'Ottawa Citizen durant le week-end, j'ai remarqué un article concernant une émission du réseau CTV appelée Due South. Il est intéressant de voir ce que les gens qui ont vu cette émission en pensent. Certains la détestent, d'autres l'aiment beaucoup. Toutefois, ce qu'il faut faire ressortir dans tout cela, c'est que cette émission a été produite sans l'aide financière du gouvernement.

(1235)

L'auteur de l'article demandait essentiellement pourquoi nous devrions célébrer cette grande réussite sur le plan commercial. Pourquoi devrions-nous célébrer le fait que cette émission a été produite à Toronto par notre industrie cinématographique? Pourquoi devrions-nous célébrer le fait que c'est une réussite sur le plan commercial, car 20 épisodes de cette émission seront présentés au réseau CBS? Pourquoi ne devrions-nous pas célébrer les émissions qui sont vraiment canadiennes et non seulement celles qui sont viables sur le plan commercial?

Je vais expliquer pourquoi à cette personne. C'est parce que, durant les 20 minutes que je prendrai pour faire mon discours, notre dette s'accroîtra de 1,4 million de dollars. C'est pourquoi nous devons prendre des mesures pour voir à ce que des secteurs comme celui de l'industrie cinématographique soient privatisés. Nous devons réduire les subventions aux musées nationaux, aussi valables qu'elles puissent être. Nous ne devrions pas dépenser l'argent que nous n'avons pas, mais nous le faisons quand même. Nous pourrions aller chercher 450 millions de dollars dans ce secteur.

Je voudrais faire une remarque au sujet du ministère de la Défense nationale. Le député du Bloc a soulevé cette question. Voici ma position à cet égard. Si nous nous attendons à ce que nos soldats risquent leur vie, que ce soit dans des hélicoptères au large du Labrador, dans l'ancienne Yougoslavie ou n'importe où au Canada, nous devons leur donner les outils et la formation nécessaires. S'ils doivent risquer leur vie, nous devons leur assurer un soutien adéquat.


8327

Nous avons combiné les compressions budgétaires qui avaient déjà été proposées pour le ministère de la Défense nationale avec celles de 300 millions de dollars qui avaient été recommandées par le comité mixte, et nous en sommes arrivés au chiffre de un milliard de dollars. À titre individuel, je ferai remarquer à la Chambre que si nous voulons réduire davantage le budget de la Défense nationale, nous devrons commencer par établir en quoi consistent nos priorités et nos objectifs en matière de défense. Je n'approuverai jamais pour ma part qu'on fasse des coupes arbitraires sans d'abord décider de réduire les services que la Défense nationale sera appelée à assurer.

Nous croyons qu'un dollar entre les mains d'un contribuable est plus productif qu'entre celles de l'État. Le ministre des Finances a lui-même déclaré de façon très explicite que les subventions créaient de la dépendance. Je ne sais pas si les députés ont vu cet article à la une du Financial Times il y a environ deux semaines, mais on y révélait qu'à l'heure actuelle, même dans le contexte de l'assurance-chômage, pour chaque dollar qu'un habitant de la Colombie-Britannique cotisait à la caisse de l'assurance-chômage, il en récupérait 0,70 $ alors que l'habitant de Terre-Neuve en touchait 3,70 $ pour une cotisation équivalente. Il y a donc un transfert de richesse même dans le contexte de l'assurance-chômage. Il faut examiner ces faits. Je ne veux pas laisser entendre qu'il ne devrait pas y en avoir; je ne fais que signaler le fait qu'il existe à l'heure actuelle des transferts de richesse qui créent une dépendance.

Nous avons dit explicitement, par exemple, que nous devrions réduire de 365 millions de dollars la subvention accordée à la Société Radio-Canada. Il était intéressant d'entendre dire au cours du week-end sur les ondes de la SRC que le gouvernement songeait également à le faire. C'est une chose bien simple à faire. Monsieur le Président, vous êtes peut-être au courant du fait que l'argent de mes impôts, l'argent provenant des impôts des Canadiens et de ceux de CTV, avait servi à la SRC pour surenchérir sur CTV afin d'obtenir les droits de diffusion des Jeux olympiques. C'est absolument bizarre.

Il y a toutes sortes de coupes budgétaires à faire. En dernière analyse, il n'y a pas de réponse simple. Il nous incombe à nous tous, députés, et aux médias, de tâcher de faire comprendre aux Canadiens qu'il n'y a pas de solution facile. Cela va être difficile, mais nous savons que nous verrons la lumière au bout du tunnel si nous sommes prêts à nous attaquer résolument à la dette.

(1240)

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, lorsque j'entends des interventions des députés du Parti réformiste, je me demande toujours s'ils sont au courant que le parti qui est à la tête du gouvernement, ce n'est pas le Bloc québécois, mais le Parti libéral du Canada. On dirige toujours les attaques contre le Bloc québécois, je ne sais pas pourquoi, mais je trouve cela un petit peu spécial.

J'ai relevé aussi certaines insultes qui ont été faites à l'égard de mon parti, à l'égard du travail, du sérieux que nous mettons, chacun des membres du Bloc québécois, à prendre nos responsabilités comme opposition officielle, et j'en ai été profondément insulté. Depuis le début, nous faisons ce qu'on attend de nous, autant au Québec, et je vous dirais que même à certains égards, au Canada aussi, puisqu'on a des témoignages de nos amis canadiens des Maritimes et même de ceux de l'Ouest et de l'Ontario, qui sont très élogieux face au travail que mes collègues font comme responsables de l'opposition officielle dans cette Chambre. On ne peut pas en dire autant des réformistes, même dans l'Ouest où ils commencent à perdre des plumes. Mais c'est leur problème.

J'aurais une question à poser à mon collègue, avec tout le respect que j'ai pour lui, qui est également un collègue du Comité des finances. Si le Parti réformiste est si sérieux dans son offensive, dans ses suggestions pour améliorer les finances publiques canadiennes, pourquoi laisse-t-on de côté tout un pan de la fiscalité, tout un pan aussi des subventions? Pourquoi met-on de côté la fiscalité des entreprises, pourquoi on ne veut même pas entendre parler d'un examen de la fiscalité des entreprises?

Pourquoi est-on si dogmatique face à la fiscalité des entreprises? Est-ce que c'est parce qu'on a un parti pris, au départ, qui est un parti pris dogmatique? Pourquoi rejette-t-on l'examen des conventions fiscales signées avec les paradis fiscaux, alors que le vérificateur général, qui est une personne objective, et même Samson Bélair suggèrent qu'il y a des centaines de millions perdues en rentrées fiscales dans les coffres fédéraux à cause de l'existence de ces fameuses conventions qui sont tout à fait légales mais qui, à mon avis, sont tout à fait immorales, étant donné la situation des finances publiques?

Pourquoi mes collègues du Parti réformiste ne veulent même pas examiner cet aspect de la fiscalité? Pourquoi mes collègues du Parti réformiste se braquent lorsqu'il est question de fiducies familiales?

Même au sous-comité du Comité des finances mis en place pour examiner les fiducies familiales, ils ont ridiculisé l'examen qu'on faisait de cette question, alors que c'est une mesure qui a été mise en place par le ministre des Finances. Pourquoi, lorsqu'il est temps d'examiner tout cela, fait-on preuve de fermeture, d'une fermeture totale, alors qu'on fait preuve d'une ouverture considérable lorsque vient le temps de couper encore plus dans l'assurance-chômage, dans le régime d'assistance publique du Canada, dans les transferts fédéraux effectués au titre de l'éducation postsecondaire, dans le budget de Radio-Canada? La semaine dernière, ils ont suggéré une mesure béotienne, soit de couper 30 p. 100, c'est-à-dire le tiers du budget de Radio-Canada, couper aussi l'ensemble des mesures mises en place au plan international?

Pourquoi le Parti réformiste est-il fermé à un examen sérieux? S'ils sont vraiment sérieux, qu'ils cessent de faire preuve de dogmatisme chaque fois qu'on leur suggère des voies parce qu'elles touchent aux entreprises, elles touchent aux très riches Canadiens et elles touchent à certains de leurs membres aussi.


8328

[Traduction]

M. Abbott: Monsieur le Président, la fiscalité, comme je l'ai expliqué très simplement, est une confiscation de la richesse. C'est, si vous me passez un humour un peu facile, du vol légalisé. En d'autres termes, les représentants élus aux Communes légalisent cette razzia parce que les Canadiens leur en donnent le pouvoir. Cela ne fait aucune différence, cependant. Les impôts sont arrachés aux particuliers et aux entreprises et ensuite redistribués, un peu selon la façon de faire de Robin des bois.

(1245)

Il y a des services, notamment dans le domaine de la protection, dans le domaine de l'environnement. . .

M. Mills (Broadview-Greenwood): Et les services de santé?

M. Abbott: Les services de santé sont un bon exemple. Il y a d'excellents exemples d'utilisations intelligentes des recettes fiscales, mais il n'en demeure pas moins que cet argent est confisqué aux entreprises et aux particuliers. Nous croyons, et je le réaffirme, que le dollar qu'on laisse entre les mains du contribuable est plus productif que celui qui est remis au gouvernement.

Je voudrais réfuter les observations du député au sujet des fiducies familiales. Selon un mythe auquel lui et ses collègues semblent croire, il y aurait des milliards de dollars immobilisés dans ces fiducies. Je retiendrai le chiffre de 42 millions de dollars par fiducie à titre d'exemple. Or, lorsqu'ils demandent quel montant se trouve dans ces fiducies, ils prétendent que Revenu Canada et le ministère des Finances, parce qu'ils refusent de donner ces chiffres, essaient de nous les cacher, que le processus n'est pas vraiment transparent.

La seule manière dont nous pourrions savoir combien d'argent se trouve dans les fiducies familiales, ce serait que la Chambre décide d'imposer la richesse. Pour l'instant, nous connaissons les revenus parce que nous les imposons. Nous ne prélevons aucun impôt sur la richesse, ce qui serait le seul moyen d'avoir des renseignements exacts sur les montants qui se trouvent en fiducie, car les fiducies familiales ne sont qu'un élément de l'ensemble des relations entre les particuliers et les sociétés. Il nous faudrait alors évaluer combien le patrimoine du Président, le mien ou celui du député peut valoir. À partir de ces renseignements sur la richesse, nous pourrions décider par exemple de prélever un impôt de 1 p. 100 sur la richesse, au-delà 100 000 $ ou d'un autre seuil, peu importe.

Selon moi, c'est une erreur que de prétendre que les ministères des Finances et du Revenu cachent des renseignements ouvertement ou par des voies détournées. Comme ces renseignements n'existent pas, comment pourraient-ils les fournir au comité?

Le député a dit que certaines de mes observations étaient des attaques contre le Bloc québécois. Je crois que ce sont certaines de ces positions qui font problème, parce qu'elles me semblent insensées.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, j'ai entendu le député du Parti réformiste parler de la richesse qui se trouvait dans les fiducies, que ce serait une taxe à la richesse, comme si la richesse était un concept qui s'appliquait seulement aux riches alors que les pauvres, eux, on s'en fout bien de leur richesse. Eux, on peut les taxer, on peut augmenter leur fardeau, réduire les services qu'on leur donne, il n'y a aucun problème.

Ma question est la suivante: Sur les fiducies familiales, il sait très bien que la demande du Bloc a toujours été d'avoir l'information, à savoir que les fiducies fassent une déclaration d'actifs, non pas seulement une déclaration de revenus, mais une déclaration d'actifs. En quoi peut-il s'opposer à ce que le ministre des Finances dise dans le prochain Budget: Cette année, tous les propriétaires ou tous les gens qui ont des fiducies familiales devront faire une déclaration dans laquelle nous saurons le montant d'actifs qu'ils ont. Qu'est-ce qui motive une opposition à cela, autre que le principe de la liberté des gens qui détiennent des fiducies? En quoi cela serait-il une mesure catastrophique pour ces gens-là?

(1250)

[Traduction]

M. Abbott: Monsieur le Président, les fiducies familiales comportent deux aspects fondamentaux. Le premier a trait aux biens immobiliers: la portion de gain en capital sur les biens immobiliers à laquelle le député fait sans cesse allusion. L'autre a trait aux titres négociables et autres éléments d'actif semblables. Je ne comprends vraiment pas. Cela n'existe pas. C'est aussi simple que cela.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais commencer par soulever certaines observations que d'autres députés ont faites dans ce débat sur cette question très complexe.

Le professeur Pierre Fortin, de l'Université du Québec, a donné une conférence les 8 et 9 août à l'Institut d'analyse politique de l'Université de Toronto sur une de ses recherches qui a pour titre, Une stratégie diversifiée pour la maîtrise du déficit: combiner l'accélération de la croissance avec la discipline sur le plan budgétaire.

Je voudrais lire quelques extraits du résumé de cette étude, laquelle tous les députés devraient lire parce qu'elle fait état de la complexité du défi qui se dresse devant nous. Il dit:

«Compte tenu des projections en matière de croissance économique et de politique budgétaire pour les deux années à venir, la probabilité que le gouvernement fédéral atteigne son objectif déclaré de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB d'ici 1996 est presque nulle. Quatre facteurs pourraient améliorer les probabi-


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lités que cet objectif soit atteint: d'abord, une croissance économique plus forte; ensuite, une baisse des taux d'intérêt; en troisième lieu, d'autres compressions des dépenses de programmes et, enfin, une hausse d'impôt.

Il est possible d'élaborer une stratégie diversifiée qui permettrait: en premier lieu, d'atteindre l'objectif visé en 1996; en deuxième lieu, de poursuivre la réduction de la dette et du déficit après cette date; en troisième lieu, de rétablir le plein emploi d'ici 1999; et, en quatrième lieu, de préserver les gains déjà faits dans la lutte contre l'inflation. En vertu de cette stratégie, les taux d'intérêts seraient abaissés et le taux de croissance moyen du PIB serait porté à 5 p. 100 pour les cinq prochaines années. Un gel nominal des dépenses de programmes serait imposé en 1995 et en 1996; ce gel serait suivi d'une croissance réelle modérée de 1997 à 1999. Il n'y aurait pas d'augmentation du taux d'imposition effectif global.»

Dans la plus grande partie de la recherche sont exposés les fondements analytiques et empiriques de cette combinaison proposée de croissance accélérée et de discipline budgétaire. Je cite des extraits de ce document parce que le professeur Fortin est un économiste respecté au Canada. En fait, j'ai même entendu dire qu'il donne, à l'occasion, des avis aux députés du Bloc québécois. C'est aussi pour cette raison que j'ai cité cette recherche.

J'estime que tous les députés ont, avec raison, mis l'accent sur les réductions. Je pense que personne ne contestera la nécessité d'apporter des réductions. On ne peut même plus allumer une lumière sans se faire dire qu'il ne faut pas le faire parce qu'il faut économiser. Le message suivant lequel il faut faire des réductions est bien compris dans cette enceinte et dans cette ville.

L'autre aspect de la réforme fiscale auquel nous n'avons pas accordé toute l'attention qu'il mérite est celui de l'accélération de la croissance. C'est la clé, à mon avis, et j'estime que nous n'en parlons pas assez en tant que députés.

(1255)

Pour pouvoir relever le défi et résoudre son problème de dette et de déficit, notre pays devra connaître une croissance économique. Nous aurons besoin d'emplois, d'investissements et d'un esprit d'entreprise renouvelé.

Je crois fermement que notre pays ne connaîtra pas la croissance nous permettant d'atteindre ces objectifs sans réforme du régime fiscal. Les entreprises et les particuliers ne font plus confiance au régime fiscal. Il suffit d'examiner la situation des entreprises dans notre pays. Les tribunaux sont actuellement saisis de 37 000 dossiers d'entreprises qui contestent la législation fiscale, ce qui constitue un important fardeau pour le système de justice. La plupart des Canadiens le reconnaissent.

Le gouvernement doit aussi composer avec une autre réalité. Certains députés en ont touché un mot ce matin. Nous sommes maintenant plus que jamais en concurrence pour l'obtention de capitaux étrangers. Nous devons soutenir la concurrence mondiale pour obtenir des capitaux. Pour attirer des capitaux, notre pays doit avoir un régime fiscal concurrentiel par rapport à ceux des autres pays.

Nous ne devrions pas considérer avec condescendance les pays qui attirent chez eux des capitaux à des fins d'investissement. Nous devrions réaliser qu'ils ont une longueur d'avance sur nous. Ils ont compris cela. Aujourd'hui, les fuites de capitaux peuvent se produire en un tournemain.

Si les gens nantis, ceux qui ont des capitaux et qui sont des entrepreneurs constatent qu'ils peuvent obtenir de meilleurs avantages fiscaux en plaçant une partie de leur avoir dans les îles, en Suisse ou ailleurs dans le monde, pourquoi penser qu'ils ne le feront pas? On ne saurait s'attendre à ce qu'ils nous laissent l'argent qu'ils ont si durement accumulé alors que nous ne faisons aucun effort pour réformer notre régime fiscal ou pour reconnaître que ces détenteurs de richesse sont un important agent de création d'emplois et de croissance économique.

Le défi de la réduction du déficit et de la dette au Canada est étroitement lié à un régime fiscal qui permettra d'enrayer la fuite de capitaux. Je vais tenter d'expliquer cela.

Si notre régime fiscal attire tout à coup dans notre pays des capitaux de partout dans le monde, nos institutions financières auront un surplus de capitaux. Ce surplus entraînera une baisse des coûts. Or, si ces coûts diminuent, l'intérêt lié au service de notre dette sera un élément budgétaire beaucoup moins contraignant pour notre pays.

Chose plus importante encore, si notre société dispose de capitaux facilement accessibles, les gens ayant l'esprit d'entreprise qui ont besoin de ces capitaux peuvent se les procurer et s'employer à faire ce qu'ils font le mieux, c'est-à-dire prendre des risques et créer des emplois.

(1300)

Une fois que ces emplois seront créés, nous devrons, à notre tour, faire notre part, c'est-à-dire alléger le fardeau fiscal de ce pays.

Nous voilà donc, à mon avis, confrontés ici à un défi de taille. En théorie, on est à peu près tous d'accord, et je dois reconnaître que le Parti réformiste y est pour beaucoup dans le fait que nous avons presque épuisé la question des compressions, mais, en tant que gouvernement et en tant que parlementaires, il nous faut maintenant consacrer autant de réflexion et de créativité à la croissance.

La croissance à l'échelle nationale est incompatible avec notre régime fiscal actuel. Il est un facteur de dissuasion pour les décideurs. Il est un facteur de dissuasion pour ceux qui prennent des risques. Il est un facteur de dissuasion pour les gens de ce pays qui ont l'esprit d'entreprise. Il y a tout lieu d'insuffler cet esprit d'entreprise qu'il nous faut pour prendre des risques et concrétiser des idées génératrices d'emplois. Or, ce n'est absolument pas ce que fait notre régime fiscal.

Le problème qui se pose quand on essaie de procéder à une réforme fiscale, tout en tenant compte des desiderata du moindre petit groupe d'intérêts, c'est que la volonté politique a du mal à


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s'affirmer. Les députés ne sont pas sans savoir que, au cours des cinq dernières années, j'ai essayé, dans un esprit constructif, je crois, de réformer notre régime fiscal.

Je me rends compte qu'il s'agit peut-être de la dernière chance que nous ayons, au cours du mandat du gouvernement, de réformer le régime fiscal. Si, dans ce budget, nous ne relevons pas le défi que constitue cette réforme fiscale globale, nous nous serons engagés dans un sentier, dans une voie qui nous mènera au terme de ce gouvernement. À mes yeux, les 30 à 45 jours qui viennent sont donc cruciaux, si nous tenons à procéder à une réforme fiscale globale qui touche tant les particuliers que les sociétés.

Pour reprendre mon propos, le problème, c'est que, dès que nous nous apprêtons à procéder à une réforme fiscale, tous les groupes d'intérêts du pays trouvent une échappatoire dans le régime fiscal actuellement en vigueur.

Comme les députés le savent, j'ai passé les cinq dernières années à peaufiner l'idée d'un régime fiscal unique. Aux nombreux Canadiens qui se demandent pourquoi j'ai tant de mal à faire progresser ce débat, je répondrai ceci: «On observe tout d'abord une léthargie généralisée à l'égard de la fiscalité et puis il y a les privilèges que l'on trouve dans le régime fiscal. Dès qu'on songe à les supprimer, les gens ont l'épiderme sensible. Leur volonté politique s'en trouve ébranlée.»

Dans la dernière proposition que notre équipe a faite, voici quelques-unes des déductions d'impôt sur le revenu que nous avions proposé de supprimer: frais de soins auxiliaires, frais de déménagement, indemnités d'accident du travail, déduction pour prêt à la réinstallation d'employés, déduction pour options d'achat d'actions et pour actions, déduction pour gains en capital, déduction pour les résidents du Nord, étalement du revenu, cotisations patronales anticipées au régime de santé, frais de garde d'enfants, réception de dividendes versés à des sociétés sur les principaux crédits d'impôt.

Il y a également toutes les déductions liées aux frais de scolarité, à l'éducation, certains fonds médicaux subventionnés par les travailleurs, les contributions politiques, les crédits d'impôt à l'investissement, etc. Nous devons supprimer une foule de préférences fiscales si nous voulons réformer la fiscalité au Canada.

J'estime que le régime fiscal est l'instrument dont dispose le gouvernement du Canada pour susciter la relance au Canada. La Loi de l'impôt sur le revenu est la loi du Parlement qui touche tous les Canadiens. Si nous la réformons en la simplifiant et en la rendant plus équitable et plus efficace, pour que tous les Canadiens puissent sentir qu'ils participent au mouvement de renouveau de la fiscalité, cela servira d'abord de catalyseur pour attirer des capitaux au Canada. Si nous avons un régime fiscal pouvant soutenir la comparaison avec d'autres pays, il y aura un afflux de capitaux au Canada. Cela permettra de raviver l'esprit d'entreprise, c'est-à-dire de prendre des risques et d'investir dans nos collectivités, d'où la création d'emplois. En même temps, forts de cette impulsion et de cette croissance plus rapide, nous pourrons beaucoup plus facilement effectuer des réductions dans les dépenses de programmes, car la croissance atténuera en partie les conséquences de ces fortes réductions qui s'imposent.

(1305)

Je me réjouis du débat que nous tenons aujourd'hui. J'estime qu'il est très important à la veille de la préparation du budget. Toutefois, j'invite les députés à examiner les propos qu'a tenus le professeur Fortin dans son document: notre régime est plus qu'une question de discipline fiscale. Nous devons aussi créer un climat propice à une croissance plus rapide. Nous avons besoin d'une croissance plus rapide. On ne peut pas encourager et motiver les gens à prendre des risques et à relancer l'économie si le régime fiscal n'est pas équitable et constructif.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, depuis ce matin, on entend des intervenants des deux côtés de la Chambre s'exprimer sur la façon rationnelle de gouverner le pays. On nous place devant deux choix possibles: l'un, couper dans les services, bien entendu dans les services sociaux, et l'autre, augmenter les taxes. En aucun moment, on a parlé de donner au pays une saine gestion.

Lorsque j'étais maire du canton de Garthby, nous avions l'obligation de présenter un budget équilibré, puisque le déficit n'est pas permis pour les municipalités. Quand je vois un gouvernement vouloir jouer au Père Noël en dilapidant les fonds publics, être généreux, être très, très généreux et faire payer la générosité de nos gouvernants d'aujourd'hui par les deux ou trois générations à venir, il est très inquiétant de voir qu'aujourd'hui on doit emprunter pour pouvoir payer l'intérêt courant.

Des exemples de saine gestion, je pourrais en rappeler quelques-unes à notre gouvernement libéral. Lorsque je voyais, l'an passé, avant les Fêtes, le ministre des Affaires intergouvernementales, le député de Hull-Aylmer, prendre le jet gouvernemental pour aller prononcer deux petites conférences de dix minutes chacune sur les bienfaits d'une saine administration publique, coût du déplacement, 170 000 $. Quand je vois, par exemple, que le restaurant au 6e étage, en haut, ici, a fait, l'an passé, un déficit de 2 millions en grande partie dû au fait que des sénateurs ou des députés quittent le restaurant en omettant de payer, il semble même que les serveurs ne se pressent pas pour courir après leurs clients. Deux millions.

L'autre Chambre nous coûte, bon an mal an, 65 millions de dollars. Le gouvernement pourrait administrer un petit peu mieux. Quand je vois que des bons contribuables doivent 6,6 milliards de dollars au gouvernement. Est-ce que ce sont des amis du régime? Je ne le sais pas. Ce sont des sociétés, des compagnies, des PME, des grandes, des petites et des moyennes entreprises qui doivent 6,6 milliards. Le gouvernement doit emprunter aujourd'hui parce qu'il est dans la cave, et il ne perçoit même pas ce qui lui est dû. Un gouvernement qui n'est pas capable de collecter ses avoirs ne mérite pas de gouverner le pays.


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(1310)

Monsieur le Président, vous étiez maire vous aussi, je crois, dans votre municipalité et vous savez très bien que l'électeur qui ne paie pas ses impôts fonciers, qu'est-ce qu'on fait? Après trois ans, on vend sa propriété pour payer.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Question!

M. Chrétien (Frontenac): Alors ma question est la suivante: Les fiducies familiales, les abris fiscaux, je sais très bien que cela fait mal au parti libéral parce que ce sont des amis du régime, ce sont eux qui les engraissent dans leur caisse électorale et ils en ont besoin.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Question! Question!

M. Chrétien (Frontenac): Pourquoi le député de Broadview-Greenwood ne parle-t-il pas d'une saine administration? Et je me rappellerai toujours quand je faisais des travaux dans le sixième rang, dans ma paroisse, et je termine là-dessus, on avait réservé tous les camionneurs du canton pour venir élargir la route et mettre 12 pouces de bon gravier, et évidemment, les camions ne chargeaient pas à 100 p. 100 et quelques contribuables viennent me voir et disent: Monsieur le maire, il va falloir vous occuper de cela. Je leur dis: Cela, tu sais très bien que ce n'est pas nous autres qui payons cela, c'est le gouvernement provincial. C'est le provincial? Pas de problème, ce n'est pas nous qui payons cela. Si bien qu'aujourd'hui, les contribuables canadiens, quand l'échelon augmente, ils ont l'impression que cela vient des étoiles, de la lune pour venir payer. Jamais dans vos interventions vous allez parler de donner une saine gestion. Des contrats qui se donnent à 175 000 $, on pourrait les réaliser bien souvent pour 20 000 $ ou 25 000 $.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Okay!

M. Chrétien (Frontenac): Alors, allez-y! C'est une saine gestion qu'on attend de vous.

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le maire. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Du temps où j'étais arbitre, on m'a appelé de toutes sortes de façons, mais on ne m'a jamais appelé monsieur le maire, parce que je n'ai jamais été maire.

M. Mills: J'ai pensé, monsieur le Président, que cela vous donnerait l'occasion de rectifier les choses.

Tout d'abord, je voudrais dire au député du Bloc, par votre entremise, que nous ne nous opposerons jamais à ce que l'on améliore l'administration publique. J'ai essayé de dire que l'on semblait fermement résolu à réduire les dépenses et à éliminer des programmes, et pas seulement des programmes, mais à réduire le gaspillage et les dépenses dont le député a parlé.

J'ai dit également que le système d'impôt unique est un système hermétique qui fait en sorte que tous paient leur juste part d'impôt, y compris les fiducies familiales. J'ai envoyé des exemplaires au député, mais il n'a peut-être pas eu le temps de lire la proposition.

Je pense qu'il y a aujourd'hui un point beaucoup plus important à souligner aux députés du Bloc. J'ai l'impression, d'après les propos qu'ils tiennent, qu'ils ne cherchent pas vraiment à insuffler aux Canadiens un esprit positif et qu'ils essaient plutôt de faire un peu d'épate.

Je ne chercherai pas à faire de l'épate, mais je tiens à leur dire ceci. Je crois que pour relancer l'économie du Canada, il faut, avant tout, rétablir la confiance dans nos collectivités, dans le secteur des entreprises et dans les investissements dans notre pays.

J'irais même jusqu'à dire que le fait que des gens, à la Chambre, parlent constamment de la séparation du Québec du reste du Canada, coûte très cher à l'économie du Canada. J'aimerais bien qu'ils cessent, aujourd'hui, de former le Bloc québécois et qu'ils deviennent plutôt le Bloc canadien.

(1315)

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, avant de passer à mon discours comme tel, je ne peux m'empêcher de répondre au député libéral qui vient de terminer, en lançant un beau slogan qu'on devrait être un Bloc canadien. Il devrait peut-être s'attarder à réfléchir sur le fait que ce qu'on propose comme solution et ce pourquoi on a été élu aussi, lorsqu'on fait la promotion de la souveraineté du Québec, c'est probablement dans le meilleur intérêt et du Québec et du Canada.

J'aimerais qu'il prenne quelques minutes seulement pour y réfléchir et voir quel genre de partenariat il pourrait y avoir dans l'avenir et cela alimenterait peut-être une réflexion plus positive chez lui. Maintenant, et pour le rassurer, il y a deux choses qui m'ont amené en politique. Il y a évidemment d'amener le Québec à sa destinée, là où il doit être, un pays souverain, mais il y a aussi le désir d'améliorer les finances publiques.

Il n'est pas vrai qu'on va continuer ainsi à nous endetter année après année, parce que peu importe ce qui arrivera au niveau politique, ce qu'on doit faire à court terme est d'améliorer les finances publiques. Là-dessus, le ministre des Finances n'a pas fait grand-chose depuis un an. J'anticipe déjà, lors de son prochain budget, qu'il va se lever dans cette Chambre pour dire: «Nous avons atteint nos prévisions, nous allons finir avec un déficit de 39,5 milliards de dollars.» Et là, vous allez voir ses collègues se lever et lui faire une ovation extraordinaire.

Ils seront fiers d'avoir un déficit si élevé, alors que l'an passé, le déficit était de 41 milliards de dollars et que seulement le surplus de la Caisse d'assurance-chômage va leur avoir permis de réduire le déficit cette année, le réduire de si peu, de 2 milliards de dollars provenant seulement de la Caisse d'assurance-chômage. Ces gens vont être contents, ils vont être fiers, ils vont avoir l'impression d'avoir pris le contrôle des finances publiques.


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Pour donner un aperçu de l'ampleur du problème, parlons de l'OCDE. Vous savez, l'OCDE compile des statistiques. Ce n'est pas le Bloc québécois, c'est un organisme très réputé au niveau économique et je veux vous faire part de quelques statistiques données par l'OCDE. Il n'est pas vrai qu'on puisse expliquer ce qui se passe ici en disant que ça se passe partout ailleurs dans le monde. Ce n'est pas vrai. L'endettement du Canada a été nettement plus fort qu'ailleurs. Je vous cite que la dette nette augmente beaucoup plus rapidement ici.

Entre 1985 et 1993, le rapport de la dette nette sur le produit intérieur brut des administrations publiques des pays membres de l'OCDE, 15 pays dont ceux du G-7, n'a augmenté que de 22 p. 100. C'est déjà grave, 22 p. 100, mais celui du Canada a augmenté de 77 p. 100, entre 1985 et 1993. Et là, j'entends mes amis libéraux dire: «C'est dû à la mauvaise gestion des conservateurs.» Eh bien non, on va regarder une autre statistique. L'explosion de la dette s'est produite entre 1970 et 1985. Si on prend encore les mêmes indicateurs, le rapport du déficit sur le produit intérieur brut, le PIB, on est passé d'un surplus de 0,3 p. 100 en 1970, à un déficit de 8,7 p. 100 en 1985, à la sortie de nos bons amis libéraux.

C'était un sommet inégalé depuis, un sommet sans précédent. Maintenant, les voilà de retour au pouvoir, avec le ministre des Finances qui nous lance une consultation sans précédent, pour dire: «Maintenant, on va frapper fort.» C'est un processus qui est fréquent chaque année, pas la consultation, mais de nous dire que ça va frapper fort. Les autres ministres des Finances l'ont fait dans les deux dernières années avant lui pour arriver au budget avec de timides mesures.

Pour toutes sortes de raisons, les gens sont sceptiques face au fait que cette année, il va nous annoncer les coupures qu'il doit mettre sur la table pour atteindre ses propres prévisions. Évidemment, il y a un contexte politique et le gouvernement doit prouver que le régime fédéral est bon et rentable pour tous les Québécois et Québécoises et là, cette année, le ministre des Finances ne va annoncer, encore une fois, que de timides mesures pour diminuer encore un peu le déficit.

Mais, surveillez l'année après le référendum, par exemple! C'est là que dans son plan, les coupures les plus majeures vont se faire. Je l'ai écouté attentivement, vendredi dernier, alors qu'il assistait à une émission très écoutée au Québec, très populaire, l'émission de Jean-Luc Mongrain. Notre ministre des Finances avait l'air d'un homme très sérieux, abattu par l'ampleur du déficit, disant: «Cette fois-ci, monsieur Mongrain, on n'a pas le choix et on n'épargnera personne.» Et je vais y revenir, sur ce «on n'épargnera personne.»

(1320)

Là, tout à coup, il nous dit qu'il faut régler le déficit pour améliorer le marché de l'emploi. Il inverse l'équation que son parti avait mise de l'avant lors de la campagne électorale. Je ne peux pas dire que j'ai suivi jour après jour chacune des déclarations des libéraux, mais il me semble, et c'est aussi ce que la population en avait retenu, on se rappelle de leur slogan où ils nous parlaient de «jobs, jobs» sans arrêt; ils disaient que c'était comme ça qu'ils allaient ramener la dignité chez tout le monde. Aujourd'hui ils nous disent: le déficit d'abord, et c'est ce qui va nous permettre de relever l'emploi.

Il me semble que c'est ce que les conservateurs disaient. C'est ce que le ministère des Finances disait, et comme le ministère des Finances est toujours en place, que le ministre soit libéral ou conservateur, cela n'a pas d'importance, le discours est resté et Paul Martin, le ministre des Finances a pris les anciens discours qui n'ont pas changé, sauf peut-être la couleur de la page couverture, et nous dit: c'est vrai, c'est ce qu'on doit faire.

C'est la même chose lorsqu'ils parlaient de la politique monétaire. C'est extraordinaire de voir comment, lorsqu'on change de côté, on change de discours. Les libéraux qui avaient critiqué férocement la politique monétaire des conservateurs, arrivés au pouvoir, pas un mot. Le même alignement, on change le directeur, le gouverneur de la Banque du Canada, pour le remplacer par son sosie ou presque en termes d'action.

Il y a des experts, et j'ai entendu un député libéral citer Pierre Fortin à plusieurs reprises tantôt, l'économiste de l'UQAM, qui lui, avec quelques économistes d'ailleurs au Comité des finances, avait suggéré qu'il était possible de jouer sur les taux d'intérêt à court terme, qu'il y avait encore là une marge de manoeuvre. L'inflation est faible au Canada, très faible, et le différenciel de taux avec nos voisins américains est encore relativement élevé par rapport à ce qu'il pourrait être. L'inflation commence à se faire sentir un peu plus aux États-Unis.

Mais non, on continue avec une même politique monétaire restrictive, austère. Par-dessus le marché on nous annonce qu'on va avoir les deux: une politique monétaire restrictive, une politique fiscale et budgétaire restrictive. Il y a peut-être là matière à réflexion sur la politique monétaire, particulièrement sur les taux d'intérêts à court terme. Mais maintenant qu'on est rentré dans les bureaux du ministère des Finances, on n'en parle plus, c'est terminé.

Il y a un député libéral aussi qui a fait référence tantôt, et c'est symbolique de leur approche, au fait que la croissance économique va tout régler. Il y a quelque chose de fondamentalement incorrect dans ce raisonnement. Les données qui nous viennent de leur propre ministère des Finances nous disent que du déficit structurel, 80 p. 100 du déficit actuel est relié aux problèmes structurels. Le taux de chômage structurel, 8,5 p. 100. Ce qui veut dire, au mieux, avec une croissance économique forte, on ne pourra pas réduire de plus de 20 p. 100 le déficit actuel, et de réduire le taux de chômage au-dessous de 8,5 p. 100.

Pour les problèmes structurels, et je vais y revenir plus tard avant ma conclusion, le World Competitiveness Report a fourni des données intéressantes sur la compétitivité du Canada. Cela fait référence à des problèmes structurels. C'est vrai que c'est complexe, ce n'est pas simple à expliquer, mais les gens qui gèrent le gouvernement devraient comprendre cela.


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Encore là, même discours, peu de changements par rapport aux précédents. Qu'est-ce qui arrive en ce qui touche le prochain budget?

Je vais faire une parenthèse sur les consultations prébudgétaires. J'y participe depuis le début, j'ai fait la tournée dans les provinces de l'Ouest, et je me demande qui parle à qui, dans le fond. On a prévu cela depuis un bon bout de temps, qu'il y aurait des consultations prébudgétaires, et comme par hasard, les groupes le savent deux ou trois jours d'avance. Ils se présentent à la dernière minute en s'excusant. Ils disent: Nous n'avont été avertis qu'à la dernière minute. Comment se fait-il? On veut faire la plus grande consultation de l'histoire du ministère des Finances et les gens sont peu au courant, mal informés. Ils n'arrivent pas à s'exprimer comme ils le voudraient. On a des contraintes de dernière minute.

À cette époque de l'année, le prochain budget est passablement avancé dans la réflexion. Jusqu'à quel point la contribution du comité pourra être importante dans la mesure où à partir d'aujourd'hui chaque jour est presque une journée de retard. On va avoir un report jusqu'au 7 décembre mais on aurait pu aller beaucoup plus loin. Il a fallu faire nettement pression pour ne pas aller plus loin que le 7 décembre.

(1325)

Je vais maintenant parler des ballons d'essai lancés par le ministre des Finances: les REER. C'est incroyable de constater l'inquiétude qui circule actuellement au sujet des REER. On a laissé toutes les hypothèses sur la table. Lorsque j'ai posé la question au ministre à de multiples reprises ici en cette Chambre, à savoir s'il entendait taxer le capital accumulé dans les REER, baisser les cotisations limites annuelles, les cotisations totales accumulées, il n'a pas dit un mot. Porte ouverte à tout.

Une des faiblesses du Canada au sujet de la compétitivité, c'est le niveau d'épargne. Lors du premier cours en macroéconomique, on apprend qu'une des variables clés qui permet de générer de l'investissement, c'est l'épargne. Lorsqu'on achète des REER, c'est de l'argent qu'on épargne et cet argent-là sert à être investi. Si le ministre des Finances s'amuse à toucher l'épargne des Canadiens, qui est déjà très limitée, on s'en va dans une très mauvaise direction.

C'est le signal qu'il donne actuellement aux gens pour l'année prochaine. Les gens seront inquiets quand va venir le temps de contribuer au REER: «Oui, j'investis là-dedans-c'est ce qu'ils vont dire aux gens qui vont leur vendre-c'est ce que vous nous dites là, c'est un bon véhicule parce que ça nous permet de faire une meilleure planification fiscale, de reporter notre revenu pour le futur, pour notre retraite, mais là, j'ai peur parce que des rumeurs circulent que le ministre des Finances va toucher à ça.» Même s'il ne le fait pas dans le budget de février, qu'est-ce qui nous dit qu'il ne le fera pas au mois de février suivant? Il devrait lancer un message clair à la population qu'il ne touchera pas à ce véhicule-là, que ça ne lui donne rien. Tout ce qu'il ferait, ce serait d'aller chercher de l'argent dans des caisses de retraite. Et non seulement on emprunte actuellement, mais là, on irait encore emprunter plus dans l'avenir.

Que va-t-il arriver quand ces gens-là vont arriver à la retraite, s'il y a moins d'argent d'investi dans leur régime d'épargne-retraite? Que va-t-il arriver? Ce serait catastrophique! C'est un drôle de raisonnement, parce que quand on parle des fiducies familiales qui, elles, peuvent reporter l'impôt sur le gain en capital jusqu'à la mort du dernier bénéficiaire, donc, théoriquement, cela peut aller jusqu'à 80 ans, si on prend des espérances de vie normales, elles peuvent reporter cet impôt-là. Et on dit: «Pas question de leur faire actualiser cela ou, comme avant, tous les 21 ans, leur faire réaliser des gains en capital.» On dit: «Non, il n'en est pas question. C'est mauvais pour l'économie. C'est mauvais. Cela ne servira à rien.» Pourtant, on veut le faire avec les particuliers, avec les contribuables à revenu moyen. On leur dit: «Vous, on va chercher de l'argent tout de suite de vos revenus futurs.»

Il y a quelque chose de très inconsistant. Il y a quelque chose qui ne marche pas dans cette logique, et ils devront s'expliquer. Évidemment, la porte est ouverte, car on dit: «Mais attendez, vous verrez le prochain budget. Ce n'est pas grave.» Des consultations saines, ça se tient si les gens savent un peu vers quoi on s'en va. Là, tout est ouvert, dans toutes les directions. Ce n'est pas nécessairement mauvais qu'on examine tout, mais lorsqu'on regarde les documents publiés par le ministre, on s'aperçoit qu'il y a de drôles de choses, comme des dépenses fiscales, les crédits pour les dons de charité étant présentés quasiment comme du gaspillage fiscal, alors qu'ils ont une vocation très saine pour l'économie. Ils permettent justement au gouvernement d'avoir des dépenses supplémentaires, de réduire les dépenses qu'il doit faire dans ce secteur. Mais on ne liste pas les dépenses, par exemple, au niveau de la fiscalité des entreprises, simplement au niveau des particuliers.

J'aimerais donner quelques statistiques pour illustrer l'ampleur du défi qui est devant nous, parce qu'on ne parle souvent que de coupures.

Regardons, par tranche de revenu, où est la population. On se base sur les déclarations d'impôt. Il y a environ 20 millions de contribuables qui font des déclarations d'impôt. C'est assez impressionnant de voir que 50 p. 100 de la population a un revenu annuel de 20 000 $ ou moins. Si on se rend jusqu'à 25 000 $, 60 p. 100 de la population a un revenu annuel de 25 000 $ et moins.

Pour équilibrer le déficit, pour le ramener à zéro, si on le répartit également, c'est un effort de 2 000 $ par personne. Vingt mille contribuables, 2 000 $, 40 milliards de dollars. Évidemment, il y a la croissance économique là-dedans qu'on pourrait intégrer. Mais il ne faut pas oublier une chose: notre poste «intérêt sur la dette» est croissant, parce qu'on continue à s'endetter. Donc, chaque année, on doit payer encore plus d'intérêt sur la dette. Et la croissance économique nous permet, elle, de générer des revenus additionnels qui servent à payer ces intérêts supplémentaires.

Là, on nous dit qu'il faut régler le problème. On prend la pyramide et on va frapper dans le bas, ou dans le milieu en bas. Soixante p. 100 de la population est là.

(1330)

Quand on parle de faire des coupures de dépenses, cela peut affecter tout le monde, et cela risque d'affecter tout le monde presque de la même façon. Mais proportionnellement, ce sont 60


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p. 100 de ces gens-là qui gagnent 25 000 $ et moins qui vont être frappés plus durement que les autres. On voit tout de suite que c'est impossible ou que c'est inhumain, si c'est l'approche qu'il préconise.

Qu'est-ce qu'il y a comme alternative? Pourquoi est-ce qu'on ne regarde pas plus le sommet de la pyramide? Et il y a la classe moyenne qui n'est pas encore tout à fait dans mon tableau. Si vous voulez qu'on en rajoute, si on continue à monter, c'est 20, 30 p. 100 de la population qui est entre 25 000 $ et 55 000 $. On voit tout de suite que ce sera un défi colossal et que ce ne sera pas seulement par des réductions de dépenses qu'ils vont pouvoir y arriver, pas des dépenses budgétaires. Et là, il faudrait regarder les dépenses fiscales. Alors là, quelle difficulté d'avoir de l'information. C'est complexe et cela touche l'économie, cela fait mal, mais toucher les plus démunis, couper l'aide aux chômeurs, cela ne fait pas mal. Eux ne consomment pas, eux n'alimentent pas l'économie, dans le raisonnement de ce parti-là. Il n'y a que les riches qui font vivre l'économie. C'est ce mythe-là. Et les réformistes sont entièrement d'accord avec cela. Ils sont dans le même bateau là-dessus. Eux pensent que ce sont les riches qui font rouler l'économie, ce n'est pas la classe moyenne. C'est un raisonnement terrible.

M. Chrétien (Frontenac): Terrible et tout croche!

M. Brien: J'espère qu'ils vont avoir le désir de s'attaquer au sommet de la pyramide et au gaspillage qu'il y a ici.

Je vois qu'il ne me reste que quelques minutes. Je vais parler un peu de fiscalité très rapidement pour dire que c'est un élément de confiance majeur qui manque présentement. Lorsqu'on voit des comptes en souffrance qui sont à 6,6 milliards de dollars, et cela dit, 25 p. 100 de tous les contribuables ayant des comptes en souffrance ont 82 p. 100 de ce montant-là et le ministre du Revenu s'amuse à nous dire: Oui, mais on est beaucoup plus efficaces, on récupère beaucoup plus de comptes. Oui, il s'attaque aux petits comptes. Les gros comptes, on n'y touche pas. Dans l'entreprise privée, on s'occupe d'abord des gros comptes, on ne s'occupe pas des petits comptes en premier. On met des efforts sur les deux, mais ici on est moins efficace. On commence par les petits comptes et les gros comptes. Après un certain temps, on se retrouve avec de multiples problèmes. Je ne parle pas des comptes en litige, parce qu'on pourrait ajouter encore un 2,5 milliards de dollars de comptes en litige présentement. En général c'est une bonne proportion de ceux-là qui sont gagnés par le ministère du Revenu. Donc, éventuellement, il y a encore quelques milliards qui vont s'ajouter.

À cela, ajoutons la TPS qui est au-dessus d'un milliard de dollars de comptes en souffrance. On arrive à un tableau où près de 9 milliards et demi de dollars de comptes en souffrance, d'argent qui est dû au gouvernement. Pourquoi? Parce que les gens n'ont pas confiance, parce que les gens n'ont pas le sentiment que c'est de payer leur juste part, et de plus en plus ils vont vers l'économie souterraine. Ils boudent notre système fiscal et se révoltent de plus en plus. Qu'est-ce qu'on fait de ce côté-là? Rien encore. Même pas le désir de s'y attaquer. On n'en parle même pas. Cela est inacceptable.

Dans le rapport que fera le Comité des finances, le Bloc québécois mettra des suggestions sur la table. Ils ne doivent pas oublier une chose. Eux ont été élus pour prendre des décisions. Là ils vont devoir arrêter de se cacher derrière toutes les consultations qu'ils mettent de l'avant pour prendre des décisions. Ils sont payés pour prendre les décisions. Le ministre des Finances a été nommé par le premier ministre pour prendre des décisions. Il n'ira pas se cacher derrière des comités pour appuyer ses propos ou dire qu'il ne fait pas ceci ou cela, c'est à lui de décider. Ces consultations bidons de toute façon, à l'usure, ce n'est pas long que les gens n'y croiront plus. Les gens seront très sceptiques et avec raison, parce qu'on va voir s'ils ont écouté la population. Sur les REER, on va voir s'ils ont écouté la population dans les consultations.

Je termine sur le rapport de compétitivité. Je vais nommer seulement quatre points. Il y en a plusieurs. On dit les points forts, les points où on est dans le milieu, et les points faibles. Comme on veut s'améliorer, regardons les points faibles. Il ne me reste que deux minutes et je vais terminer avec cela. Les compagnies qui n'entraînent pas assez leurs employés. Cela sonne comme étant de la formation, dans ma tête. Un manque d'ajustement entre le système d'éducation et l'entreprise, cela aussi sonne encore comme étant de la formation. On dit qu'on a des faiblesses encore dans notre système d'éducation. C'est vrai que cela concerne les provinces. Tout à fait. Mais ici, via les paiements de transferts, on donne de l'argent aux provinces. Là, tout à coup, on leur dit: On va vous couper l'aide, vous demanderez aux étudiants de s'endetter. Le gouvernement n'a plus les moyens. Ce sont les étudiants qui devront s'endetter. En plus d'avoir à supporter un fardeau fiscal incroyable dans les prochaines années, endettez-vous peresonnellement, en plus, pour payer votre propre système d'éducation. Nous en avons bénéficié. Maintenant, vous, payez la facture, payez votre propre système d'éducation, payez, payez, payez!

(1335)

On nous prend pour une bande d'idiots. Ce n'est pas vrai que ça va passer, ça. Et ce sont quelques milliards de dollars. Et là, en plus, on apprend qu'ils veulent même toucher à des points d'impôt que le Québec avait acquis dans le passé. Et là, ils vont frapper un os sur leur chemin, ils vont frapper un noeud. On va se dresser devant eux.

Deux autres points. On dit que les gouvernements ont de la difficulté à s'adapter aux nouvelles réalités économiques. Dans le contexte actuel, où on doit s'ajuster rapidement aux marchés, il faut avoir des entités politiques souples, rapides, efficaces. Mais non, ici, on est dans un système politique complètement paralysé, qui a de la difficulté à bouger, où on consulte, on consulte, et combien de consultations a-t-on fait? Les libéraux reprennent le même calendrier que les conservateurs avant 1984, des consultations sur les mêmes sujets. Pourquoi? En raison de l'incapacité d'en arriver à des consensus canadiens, c'est très difficile.

Et là, ils nous disent qu'on est complètement démagogues, quand on parle de souveraineté. Il y a là un modèle à regarder, ils devraient le regarder sérieusement. S'ils étaient honnêtes, ils diraient aux gens dans l'ensemble du Canada que c'est une option qui mérite d'être regardée. Je conclus en disant ceci: Les gens sont prêts à faire des sacrifices et ils le font dans la mesure


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où ils sentent que c'est juste, que tout le monde fait sa part et qu'on commence par le sommet de la pyramide. Ici, au niveau des dépenses, c'est le sommet de la pyramide et il va falloir en couper, des dépenses. Et là, les gens commenceront à avoir confiance pour vrai.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, justement, moi aussi, j'aurais quelques questions à poser à l'honorable député d'en face. On nous parle de scénarios, on nous parle beaucoup de la situation financière précaire du pays, l'explosion de la dette, tout ce qu'on a connu ces dernières années.

Vous savez, l'explosion de la dette n'est pas seulement un phénomène canadien, c'est un phénomène qu'on a connu sur le plan planétaire. Cependant, la question que je veux poser est que je serais quand même curieux de savoir quelle serait-on parle d'un scnénario d'indépendance du Québec-quelle serait, en réalité, la politique monétaire et fiscale d'un gouvernement indépendant? Je n'ai rien entendu de cela, et tout ce qu'on entend, c'est que le Québec a l'intention de partager le système financier et que toute politique monétaire serait, si je ne m'abuse, une politique commune.

Alors, quel serait l'apport du Québec, de quelle façon est-ce que le Québec pourrait changer le système tel qu'on le connaît à l'heure actuelle? J'ai aussi trouvé très intéressant ce qu'il a dit à propos des intérêts. Vous savez, monsieur le Président, de quelle façon allons-nous gérer cette confusion, cette inquiétude des financiers internationaux, advenant l'indépendance du Québec? Je serais très curieux de savoir de quelle façon on pourrait contrôler les intérêts.

Selon lui, il y a quelques experts qui prétendent que oui, les intérêts sont très bas au Canada, il y a beaucoup à faire à ce niveau, mais quelle garantie nous donne-t-il au niveau des intérêts, advenant un Québec souverain? Il est certain que dans le domaine des finances, il y a toujours une question de confiance politique. Je crois que la confiance politique règne quand même au Canada, mais quelle certitude avons-nous que tout va aller dans le meilleur des mondes au Québec, advenant la souveraineté?

De quelle façon le député va-t-il convaincre les investisseurs avec un Québec qui va prendre sa part des 500 milliards de dollars de déficit? Et je ne parlerai pas du déficit provincial, le déficit d'Hydro-Québec, car on sait fort bien que les déficits accumulés au Québec seraient beaucoup plus élevés per capita que n'importe où ailleurs en Occident.

Alors de quelle façon peut-il convaincre les investisseurs étrangers, suite à la création d'un nouveau pays criblé de dettes, qui possède une dette plus élevée que ce qu'on retrouve dans le reste du Canada? Alors, j'aimerais avoir des réponses à ces questions.

M. Brien: Monsieur le Président, écoutez, c'est avec grande joie que je vais inculquer quelques notions économiques à mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine.

Une voix: Il en a besoin.

M. Brien: Tout d'abord, je suis très enthousiaste à l'idée de voir qu'il commence à réfléchir aux possiblités d'un Québec souverain, ce qu'un Québec souverain devrait faire, ce que ça pourrait être. Probablement que c'est suite à la pression de ses électeurs qui, de plus en plus, lui disent que c'est un modèle souhaitable pour les Québécois et que c'est possiblement une voie d'avenir. Et là, il commence, actuellement, à s'informer des politiques du Bloc québécois et à démontrer un intérêt pour elles.

Je suis très content et je félicite ses électeurs de l'avoir rappelé à l'ordre. Dans sa question, il y a quatre points que je vais prendre un par un. Sur l'endettement public, il a dit que c'était un phénomène mondial. Que c'est facile de répéter les clichés! J'ai dit au début de mon discours et je vais le répéter pour lui, qu'il y a deux périodes, parce qu'il a dit que c'est un phénomène mondial.

(1340)

J'ai entendu un de mes collègues dire que c'est un phénomène libéral, l'endettement du Canada. C'est probablement plus exact. On a commencé entre 1970 et 1985, où on est parti d'un surplus avec un déficit très élevé, avec un sommet en 1985.

Au niveau international, si on prend les pays membres de l'OCDE, entre 1985 et 1993, une période des conservateurs, eux vont dire que c'était une période terrible ici, très mauvaise, l'endettement des pays de l'OCDE a augmenté de 22 p. 100. Pendant ce temps, l'endettement du Canada a augmenté de 77 p. 100. Si je fais un calcul rapide, cela fait 3 fois et demie plus. Peut-être que l'endettement est un phénomène mondial, mais l'ampleur du phénomène canadien est nettement supérieur au phénomène mondial, et probablement dû à ces problèmes structurels.

Il s'intéresse à la politique monétaire d'un Québec souverain. Je suis content de voir qu'il réfléchit à cela et qu'un Québec souverain pourrait avoir un siège à la Banque du Canada et discuter, donner ses visions. Ce serait intéressant de pouvoir enfin discuter d'un partenariat plus égal. De toute façon, ce que j'ai dit sur la politique monétaire, c'est que son parti, probablement qu'il n'était pas député à cette époque, je ne sais pas s'il suivait les travaux de la Chambre, mais son ministre des Finances, et tous les libéraux qui étaient là critiquaient John Crow et la politique monétaire de la Banque du Canada. Ils arrivent au pouvoir, donc en situation de contrôle et nous disent: non, non, la politique monétaire actuelle, la politique monétaire restrictive, féroce, il faut la maintenir.

Tout ce que j'ai relevé, c'est une contradiction très forte. Ce que j'ai dit sur la politique monétaire, et peu importe qui la dirige, c'est qu'on devrait mettre un peu de pression pour les obliger à regarder attentivement le problème des taux d'intérêts à court terme. Il a dit que les taux d'intérêts étaient bas, au Canada. C'est le contraire, les taux d'intérêts sont élevés au Canada. Il y a un différenciel plus grand avec les États-Unis. C'est ce qu'il faut regarder, particulièrement les taux à court terme. On ne peut pas induire les gens en erreur quand on parle de concepts sérieux.


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Il nous parle des financiers internationaux et de leur inquiétude face à un Québec souverain «criblé de dettes»-c'est une citation du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine-. Je me demande, si on parle d'un Québec souverain criblé de dettes, comment il décrit l'endettement actuel du Canada. Le Canada est un des pays les plus endettés, avec l'Italie. Si on regarde la situation italienne, l'endettement extérieur est beaucoup moins grave que l'endettement canadien ou même québécois.

Ce que les financiers internationaux vont regarder, ce sont les résultats. C'est ce qu'ils vont regarder. Lui et ses collègues, plutôt ses collègues parce que lui va continuer à vivre avec nous du côté du Québec, surtout qu'il y a un changement d'attitude très fort chez lui, ses collègues auront à assister à un élément de sens des responsabilités et d'envisager un partenariat économique qu'ils devront mettre de l'avant, parce que ce n'est pas vrai que l'Ontario va refuser de faire du commerce avec le Québec, ils ont un surplus commercial de 3 milliards de dollars. Je vois très mal les entreprises de Toronto dire: Nous, nos intérêts financiers -parce qu'ils disent qu'ils sont très rationnels-, on ne fait plus affaire avec le Québec, on fait de l'argent avec eux, on va arrêter cela, on ne veut plus faire d'argent.

Ce n'est pas sérieux, mais ils ont le devoir d'expliquer à leurs commettants que ce pourrait être une zone de libre-échange très intéressante. C'est une voie d'avenir, une voie constructive, et c'est ce que nos électeurs attendent de nous, d'avoir le sens des responsabilités, d'arrêter de faire de la petite politique comme on voudrait en faire à l'occasion.

Et les milieux financiers vont regarder effectivement très attentivement ce qui se passe du côté du Québec, du côté du Canada en comparaison avec les marchés internationaux.

Ce qui m'inquiète le plus présentement, c'est de voir que probablement le Canada est mal préparé à ce qui risque d'arriver dans la prochaine année. C'est peut-être leur cote de crédit à eux qui va en souffrir le plus, et ce n'est pas souhaitable. Comme Québécois, on ne souhaite pas que le Canada se retrouve dans une situation difficile, parce que ce sera notre voisin, et on souhaite qu'il soit bien développé économiquement. Le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine doit souhaiter la même chose que nous.

Ce qu'on nous dit, et je veux vous parler un peu des problèmes structurels, le déficit actuel, on dit que 80 p. 100 est dû à des problèmes structurels. Je vais parler des rapports de compétitivité faits par des gens qui ne sont pas nécessairement des membres du Bloc québécois, ce sont des experts au niveau mondial qui disent: vous avez des faiblesses à vous adapter rapidement au contexte actuel, au contexte moderne. Ils ont dit également qu'on a des problèmes dans la formation de la main-d'oeuvre. Et au Québec, tout le monde, fédéralistes et souverainistes demandent ce qui se passe, que cela devrait être une compétence du Québec. Mais non, ici, on continue à faire la sourde oreille à des demandes aussi élémentaires et simples comme celles-là.

(1345)

Voilà pourquoi de plus en plus de Québécois, comme ceux du comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine ont amorcé une réflexion positive et que dans la prochaine année, ils vont prendre une décision pour améliorer leur situation économique à eux, à celle des générations futures pour bâtir un Québec prospère à côté de voisins économiques qu'on espère prospères, qui sont le Canada et les États-Unis.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne m'attendais pas à ce que ce soit mon tour. Je vais quand même élaborer un peu sur le tableau de fond de la situation financière du pays. Je crois que le ministre des Finances l'a étalé depuis déjà quelque temps, on fait face à une situation fort difficile. De plus, on doit faire face non seulement à une période difficile, mais surtout au cynisme de l'opposition.

Quand j'entends l'opposition nous dire que la seule façon de s'en sortir, c'est par la voie de l'indépendance, de la souveraineté, à mon avis, je crois que la vaste majorité des Québécois ne souscrivent pas à ce dialogue qui n'avancera pas les avantages et les inquiétudes de l'économie que partagent tous les Québécois.

Je voudrais surtout parler de la consultation prébudgétaire qui se prépare. Je crois qu'on entre dans un nouveau cadre économique.

Il est important de retenir qu'on fait face à un gouvernement-et cela est partagé par les provinces, cela est partagé par le fédéral et par le monde entier, surtout dans les pays occidentaux-dont les revenus sont limités, que les possibilités des gouvernements d'investir directement ou de solutionner tous les problèmes, ce n'est pas à eux de le faire.

Je crois que le but de l'intervention gouvernementale, c'est d'encourager le partenariat. Au gouvernement fédéral, on est prêt à travailler de concert avec les provinces, les municipalités, les entreprises. Je crois que c'est très important, et comme le dit si bien le député d'en face, ce que les gens veulent, c'est un esprit de coopération.

Une des forces du fédéralisme canadien depuis 125 ans, c'est surtout de trouver des moyens de s'entendre, d'en arriver à des ententes sectorielles. Il est certain qu'il y a des compétences de la province de Québec et d'autres du gouvernement fédéral, mais souvent on est appelé à travailler ensemble. Au lieu de se diviser, de se dire qu'au Québec, ce sera mieux une fois qu'il se retrouvera seul dans un contexte nord-américain, je doute très fort que les Québécois soient d'accord avec un tel scénario ou enfin en ce qui concerne la proposition de M. Parizeau, et bien entendu, du chef de l'opposition.

On parlait du besoin de contrôler la dette. Je crois qu'il y a beaucoup à voir en ce qui a trait à la productivité canadienne. On a l'obligation de revoir nos politiques, de revoir la façon dont nous gérons l'État, mais aussi la façon dont on encourage les petites et moyennes entreprises à relancer l'économie canadienne.

Avec cela comme tableau de fond, il est certain qu'on vise certaines réductions, mais ces réductions ne veulent pas nécessairement dire qu'on ne veut pas recibler nos objectifs. La stratégie globale du gouvernement, c'est avant tout de créer des emplois. En créant des emplois, on encourage des gens à payer des taxes, à faire partie de l'économie. C'est la seule façon de s'en sortir.


8337

Quand on parle de l'examen des programmes, on parle toujours de la réforme de la sécurité sociale. Je crois qu'il est important de reconnaître qu'après 50 ans, on doit regarder ce programme, le réviser. On doit quand même recalculer, de façon à ce que gouvernement fédéral puisse intervenir correctement et de façon à relancer l'économie nationale.

Si on regarde la réforme, je crois qu'il y a une préoccupation du gouvernement, et je crois de tous les intervenants socio-économiques, soit du Québec, mais aussi au plan national, sur l'urgence de trouver de nouvelles niches, de nouvelles possibilités pour l'industrie canadienne. C'est certain qu'on a suaborder. . .

(1350)

M. Chrétien (Frontenac): C'est certain!

M. Gagnon: Malheureusement, l'opposition ne veut pas prendre part du débat. À leur avis, la seule chose qui les intéresse, c'est l'indépendance, la souveraineté, mais pas nécessairement le bien-être de leurs concitoyens.

Au niveau du comté de Bonaventure, je suis très préoccupé par le niveau d'éducation, de scolarité de mes commettants. C'est certain que c'est un problème. Il y a beaucoup de certitude en politique. Mais d'autres certitudes, c'est que le taux de finissants, au niveau secondaire, est beaucoup plus bas au Québec qu'ailleurs en Occident. On a beaucoup à faire au niveau de la formation professionnelle. On a la possibilité d'encourager ces jeunes à découvrir de nouveaux horizons. Mais la seule façon que l'on pourra encourager ces jeunes, c'et de s'assurer une forme de continuité de la fédération canadienne, mais aussi les encourager à terminer leurs études, encourager les entreprises à les embaucher par la suite et aussi donner une chance à ces nouvelles et petites entreprises de trouver de nouveaux marchés, soit au niveau canadien, mais aussi au niveau international.

Le gouvernement fédéral doit tenir compte non seulement de cette sécurité sociale, de ce filet social, mais aussi de la nouvelle politique de défense du gouvernement du Canada dans un monde qui a passé l'époque de la guerre froide où nous n'avons plus le même nombre de soldats et d'officiers, où nos besoins ou encore notre stratégie n'est plus militaire, faisant face à un bloc de l'Europe de l'Est. C'est certain qu'on en retire certains profits. C'est certain qu'on doit réviser, revoir, réétudier les montants d'argent qui sont consacrés à la défense nationale.

Il y a aussi notre politique étrangère. Des coûts considérables sont rattachés à la politique étrangère canadienne. Encore là, il faut se trouver une nouvelle stratégie. Quelle est cette nouvelle stratégie canadienne sur le plan international? Je crois que le premier ministre en a fait une démonstration remarquable; le rôle du gouvernement du Canada à l'avenir, enfin, le Canada sera appelé, surtout son premier ministre, à faire la promotion du commerce canadien sur le scène internationale.

Regardons ce qui s'est passé en Chine, par exemple. On a conclu des contrats de près de 8, 9, 10 milliards. Je crois que cela a été très profitable aux Canadiens, aux entreprises, non seulement canadiennes, mais aussi aux entreprises québécoises. On apprend aussi que 30 p. 100 des contrats ont été décernés à des entreprises québécoises. C'est certain que la réputation du Canada y est pour quelque chose. La façon de conclure des contrats, surtout en Asie, en particulier avec la Chine, c'est avec l'appui et le support, parfois monétaire, mais surtout de sa politique extérieure auprès des petites entreprises pour sceller des contats, et des contrats fort importants.

Il est malheureux que M. Bernard Landry ait fait le constat malheureux suivant, à savoir que ces contrats avaient été négociés à l'avance, avant l'arrivée du premier ministre du Canada en Chine.

Il faut reconnaître que dans ces pays, il est très important pour eux de faire affaire avec des pays stables, des pays reconnus sur le plan des affaires internationales, des pays qui ont su se construire une réputation fort enviable, dont le Canada. Il faut bien l'avouer, ce n'est pas le cas du Québec. Le Québec n'est pas un pays indépendant, le Québec a toujours su profiter de la présence du Canada et de sa bonne réputation dans le monde des affaires internationales dans le monde entier.

Je vais poursuivre encore une fois, suite à ce tableau, en disant que ces consultations, qui sont menées par le ministère des Finances, bien entendu par le comité, ont pour but de fournir des renseignements aux Canadiens.

(1355)

Je crois que les renseignements sur le déficit, on les connaît assez bien, on parle abondamment du déficit accumulé ainsi que de la situation des provinces, des municipalités. Aussi, nous devons tenir compte des nouvelles politiques canadiennes en développement de l'emploi, nos nouvelles politiques de défense, nos nouvelles politiques pour les affaires extérieures, tout cela pour encourager, bien entendu, la relance de l'économie nationale.

Cependant, une fois qu'on fournit ces renseignements de base, on doit quand même relever les dépenses, on doit quand même décrire aux Canadiens d'où vient notre argent, nos recettes, et expliquer pourquoi nous avons un défict. Vous savez, ce n'est pas facile à expliquer, mais il est certain que les chiffres parlent d'eux-mêmes, et c'est pour cela qu'on doit faire appels aux Canadiens dans tous les domaines, pour qu'ils puissent porter un jugement et qu'ils puissent proposer des solutions pour régler le problème du déficit qu'on vit.

C'est quand même un problème collectif. Et que le Québec soit indépendant ou pas, il fait quand même partie du problème auquel on fait face: le déficit. C'est un problème qu'on partage avec toutes les autres provinces. Alors, il est certain que, quand on priorise cette relance économique, on priorise la place du Canada pour le bien économique de tous les Canadiens, il est évident qu'on est appelés à travailler ensemble, et je crois que c'est le devoir de tout le monde de tenir compte de la réalité fiscale du pays, ainsi que des possibilités de trouver des solutions communes.

Là, on parle de ce rôle central du gouvernement fédéral, mais on veut quand même entendre le point de vue de tous les Canadiens dans tous les secteurs de l'économie. Et je crois qu'une fois que le comité va commencer à faire sa tournée pancanadienne, on va visiter sûrement des pêcheurs sur la côte Est, on va rencontrer

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des gens qui travaillent dans le secteur du bois, non seulement les travailleurs, mais aussi les industriels.

Par le fait même, on doit quand même évaluer nos forces et aussi nos faiblesses, mais c'est de cette façon qu'on va en arriver à une position commune. Il est certain qu'en passant par l'Ontario, on va discourir davantage avec certains industriels, soit au niveau de la voiture, de l'aérospatiale. Enfin, il y a beaucoup à faire dans toutes les provinces.

Une sollicitation des avis dans tous les domaines où nous sommes forts est une priorité de ces consultations. J'espère que l'opposition va en faire partie. Il y a aussi des professeurs, des chercheurs, des intellectuels qui pourront y contribuer pour relancer l'économie nationale. C'est curieux, quand on parle de relance économique nationale, ça veut bien entendu dire une relance de l'économie locale et même régionale.

Cette fin de semaine, dans l'est du Québec, l'Université du Québec à Rimouski a décerné des certificats en développement économique régional. Justement, on a demandé à des gens, surtout à des jeunes, de voir de quelle façon on pourrait établir de nouvelles politiques de développement économique régional. Je vois que le temps court, c'est dommage, je vois que 20 minutes, ça passe. . .

Le Président: Je redonnerai la parole au député à 15 heures, et nous écouterons très attentivement ce qu'il aura à dire. Mais, comme il est 14 heures, conformément à l'article 35 du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés, conformément à l'article 31.

_____________________________________________


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA CATASTROPHE DE LA MINE WESTRAY

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, à Stellarton, en Nouvelle-Écosse, le gouverneur général, le très honorable Ramon Hnatyshyn, présentera la Médaille de la Bravoure aux héros de la catastrophe de la mine de charbon Westray.

Près de 200 sauveteurs et mineurs ordinaires ayant participé aux opérations de sauvetage recevront cette décoration en récompense des gestes courageux qu'ils ont posés dans des circonstances très dangereuses. C'est la première fois dans l'histoire canadienne que tant de personnes recevront la Médaille de la Bravoure pour un même incident.

Je tiens aujourd'hui à saluer ces hommes pour l'héroïsme dont ils ont fait preuve à un moment aussi tragique.

Je demande à chaque député à la Chambre de prendre un moment pour réfléchir à ceux qui ont perdu la vie lors du désastre de la mine Westray. N'oublions pas les efforts de ceux qui ont travaillé sans relâche, même après cette tragédie. Ils méritent non seulement notre reconnaissance, mais aussi nos remerciements sincères.

[Français]

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, en fin de semaine dernière, le Bloc québécois, réuni en conseil général, s'est doté d'un plan d'action détaillé pour la lutte référendaire, en harmonie avec toutes les forces souverainistes du Québec. Ce plan d'action comprend, entre autres, la tenue d'un congrès qui se tiendra en avril prochain et qui sera axé sur la souveraineté du Québec et sur ses conséquences dans la vie quotidienne.

Le Bloc québécois est prêt à jouer son rôle d'acteur majeur lors du référendum, car la bataille qui se dessine sera celle de notre vie. Nous ferons la preuve que la souveraineté est un instrument nécessaire pour le développement du Québec et pour l'avenir de nos enfants. Nous rappellerons que l'alternative fédéraliste n'est rien d'autre que le statu quo, comme le répète inlassablement le premier ministre du Canada.

Notre choix, comme peuple québécois, sera celui de la souveraineté. Nous sommes prêts. Cette bataille décisive, nous la gagnerons.

* * *

[Traduction]

L'EMPLOI

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, vendredi dernier, des gens, à la Chambre et à l'extérieur de celle-ci, ont insinué que je ne laisserais pas des mères travailler dans mon bureau de peur que leurs responsabilités familiales nuisent à leur capacité d'accomplir leur tâche.

C'est tout simplement faux. Je m'excuse de n'avoir pas affirmé très clairement ma position lorsque j'ai fait mes commentaires devant le comité permanent. Deux employées de mon bureau sont des femmes mariées qui ont des enfants. Je suis opposé à toute discrimination en matière d'emploi, surtout celle fondée sur la situation de famille. Durant les entrevues, j'ai demandé aux postulants quelle était leur situation de famille, mais cela n'a pas influencé mon choix, que j'ai fondé uniquement sur leurs compétences et leur expérience.

Je comprends maintenant que cette façon de faire est contraire aux règlements et je m'abstiendrai d'agir ainsi à l'avenir. Toutefois, je crois qu'il est déplorable qu'un employeur ne puisse pas discuter de la situation de famille d'un employé afin de pouvoir lui venir en aide en cas d'urgence ou de maladie dans la famille.

* * *

«LA FACE RÉPUGNANTE DE LA LIBERTÉ»

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le Président, récemment, dans le cadre de l'émission de télévision américaine 60 minutes, on a passé un reportage sur ce qu'on appelait «la face répugnante de la liberté», reportage dans lequel on affirmait que l'antisémitisme était en hausse en Ukraine.

Cette émission calomniait l'Ukraine et les Ukrainiens de souche partout dans le monde. Pour prouver leurs affirmations, les journalistes en cause se sont basés sur des événements historiques et des entrevues avec des groupes politiques radicaux.


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Cependant, on ne nous a offert aucune preuve irréfutable. On a interviewé le rédacteur en chef d'un quotidien de droite ultranationaliste et on lui a donné la possibilité d'exprimer ses opinions tout à fait insensées, mais on a oublié de mentionner le tirage de ce journal.

En tant que membres des médias, les journalistes de l'émission 60 minutes profitent d'une position privilégiée et peuvent ainsi diffuser leurs messages dans tout le Canada et les États-Unis. Lorsque les gens regardent cette émission à la télévision, comment peuvent-ils savoir que la situation décrite n'a rien à voir avec la réalité?

J'exhorte le CRTC à prendre des mesures pour s'assurer que ce genre d'information tout à fait fausse ne peut être diffusée au Canada et que ce type de désinformation nuisible ne pourra jamais plus servir à calomnier un autre groupe.

* * *

L'ÉRABLE COMFORT

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, le plus vieux membre de ma circonscription a subi une chirurgie pour corriger des dommages causés par la foudre, il y a une trentaine d'années.

Ce phénomène bien connu se trouve à North Pelham. C'est un érable à sucre de 80 pieds de hauteur qui aurait 500 ans. On lui a donné le nom d'érable Comfort. Je suis heureux d'annoncer que les travaux de restauration effectués cet été ont eu d'excellents résultats et que cet érable récupère très bien.

Toujours cet été, cet érable a fait l'objet du lancement d'un timbre par la Société canadienne des postes dans le cadre de son émission de timbres sur les érables. Cet événement était d'autant plus important que la famille Comfort, de West Lincoln, dont cet arbre tire son nom, a célébré sa 100e réunion de famille consécutive.

Cet érable nous rappelle que nous sommes ici depuis peu de temps. Il y a 500 ans, l'exploration du Canada ne faisait que commencer. Pourtant, cet arbre, témoin de tous les événements qui ont suivi, est encore là.

L'histoire de notre nation est parallèle à celle de cet arbre. L'érable est un symbole durable de notre merveilleux pays. Cet arbre magnifique a survécu à bien des tempêtes, à l'instar du Canada. Tous deux continueront de s'épanouir et de grandir pendant de nombreuses années encore.

Nous, de la circonscription d'Erie, sommes fiers de l'érable Comfort et de notre citoyenneté canadienne.

* * *

L'ÉCONOMIE

Mme Susan Whelan (Essex-Windsor, Lib.): Monsieur le Président, la performance économique du Canada ces derniers mois a été très encourageante.

La croissance réelle de 6,4 p. 100 enregistrée au deuxième trimestre dépasse de loin la performance des autres pays du G-7. Les ventes au détail ont augmenté au troisième trimestre et ont enregistré une augmentation de 7,8 p. 100 par rapport à l'an dernier. Les recettes réelles d'exportation ont augmenté de 5,6 p. 100 au troisième trimestre. C'est un niveau record et la croissance la plus rapide depuis 1983.

Le nombre d'emplois a augmenté de 307 000 emplois à plein temps depuis janvier. L'emploi a connu ces derniers mois sa croissance la plus rapide en près de six ans. Le taux de chômage est tombé de 11,4 p. 100 en janvier à 10 p. 100 en octobre. Le déficit pour la période d'avril à août est inférieur de 4,5 milliards de dollars à ce qu'il était pour la même période en 1993-1994.

Face à de tels résultats, le FMI a prévu que le Canada sera le pays du G-7 qui, en 1994 et 1995, aura la croissance de production la plus forte et le taux de croissance de l'emploi le plus élevé.

* * *

(1405)

[Français]

LES SERVICES DE GARDE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines dévoilait récemment un autre document de consultation, celui-ci au sujet de la garde et du développement de l'enfant. Ce document révèle que le ministre a l'intention de remettre en question tous les modes de financement des services de garde, dans le cadre des objectifs qu'il s'est fixés dans sa réforme des programmes sociaux.

Pendant ce temps, le gouvernement coupe dans les prestations aux chômeurs et aux bénéficiaires d'aide sociale. Il est inconcevable que sur le plan de la logique, ce gouvernement fasse une distinction entre le bien-être des familles et celui des enfants. Comme si la pauvreté des enfants québécois et canadiens peut être vue et analysée de façon distincte de celle de leurs parents.

De plus, le gouvernement s'engage, encore une fois, dans un domaine qui relève de la compétence des provinces et ce, sans la moindre hésitation. Cette attitude est tout simplement inacceptable.

* * *

[Traduction]

LE PROGRAMME SAMARITAN'S PURSE CHRISTMAS CHILD

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir aujourd'hui d'adresser mes compliments aux enfants de Calgary pour leur généreuse participation à un projet mené dans le cadre du programme Samaritan's Purse Christmas Child.

Voici maintenant des semaines que les élèves du niveau élémentaire de la ville de Calgary remplissent des boîtes à chaussures de cadeaux de Noël destinés aux enfants de la Bosnie et du Rwanda. Plus de 200 écoles, 500 enseignants, plusieurs organisations paroissiales et communautaires ont participé à ce projet. Les résultats ont été spectaculaires.

Ensemble, ils ont rempli plus de 30 000 boîtes à chaussures de jouets, de gâteries, de fournitures d'école, de vêtements et, souvent, de lettres personnelles. Entre 15 000 et 20 000 boîtes supplémentaires ont été reçues de l'extérieur de Calgary, pour un total impressionnant de 50 000 boîtes. D'autres dons de Calgariens ont permis d'acheter le billet d'avion de l'instituteur chargé de livrer les boîtes en Bosnie.


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Ceci est un exemple d'une collectivité qui unit ses efforts afin de venir en aide à d'autres. Les enfants qui ont pris part à ce projet ont éveillé un tel enthousiasme chez les autres participants que ça a été pour tous une expérience mémorable. Félicitations à tous.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'informer aujourd'hui la Chambre que la vice-première ministre et ministre de l'Environnement, la députée de Hamilton-Est, a annoncé qu'elle présidera une conférence des ministres de l'Environnement des pays du G-7, qui se tiendra à Hamilton, en avril 1995.

La conférence permettra aux ministres de l'Environnement des pays les plus industrialisés du monde de discuter des objectifs qu'ils partagent et de travailler ensemble à régler des problèmes communs. Le gouvernement est convaincu que cette conférence pourrait permettre d'aborder deux grandes questions qui vont de pair, un environnement sain et l'économie. En invitant à Hamilton les ministres de l'Environnement et des représentants des pays du G-7, nous voulons contribuer à amener les pays les plus industrialisés du monde à utiliser leur produit national brut-qui, combiné, représente plus de 20 billions de dollars-au profit du développement durable, pour le bien-être futur de tous nos concitoyens.

* * *

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, selon le Conseil national du bien-être, plus de 1,2 million d'enfants de moins de 18 ans vivent dans la pauvreté. Un récent rapport de la coalition Campagne 2000 nous apprend qu'on compte aujourd'hui 300 000 enfants pauvres de plus qu'il y a cinq ans.

En outre, à la dernière conférence de l'Association médicale canadienne, on rapportait que les enfants pauvres étaient deux fois plus susceptibles de souffrir de désordres psychiatriques et d'hyperactivité, et de mal réussir à l'école. Évidemment, les enfants pauvres sont plus enclins à devenir décrocheurs.

Pour des raisons sociales, morales et économiques, le gouvernement a la responsabilité de s'assurer que tous les enfants du Canada aient des chances égales de participer pleinement à la vie canadienne.

J'exhorte donc le gouvernement à mettre en oeuvre la résolution sur les enfants victimes de la pauvreté, adoptée à l'unanimité à la Chambre, en 1989.

* * *

[Français]

MADAME MARIE MALAVOY

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le Président, la démission de la nouvelle ministre de la Culture du Québec, Mme Marie Malavoy, est bien sûr regrettable. Par contre, ce qui est encore plus regrettable, ce sont les raisons inacceptables qu'elle a invoquées pour justifier ses actions illégales.

Mme Malavoy a sans doute oublié que le Canada l'a accueillie, de même que ses parents, dans un des meilleurs pays au monde, sinon le meilleur, où elle a pu bénéficier de tous les avantages d'un pays généreux, de même qu'accéder à un poste de doyenne de faculté, chose inaccessible pour un immigrant en France. De plus, a-t-elle songé aux milliers de Canadiens qui ont donné leur vie pour aider à la libération de son pays d'origine?

(1410)

Un vieil adage dit que la gratitude est la plus haute forme de justice. Les remarques de cette dernière démontrent une ingratitude et dénotent un manque de sens de justice.

* * *

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

M. Jean Landry (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, dans une entrevue accordée samedi au journal La Presse, le ministre des Finances tente de nous surprendre par sa clairvoyance d'homme d'affaires. Selon le ministre, l'économie souterraine dépasse de loin les niveaux rapportés par ses propres fonctionnaires.

Mais, une fois le problème reconnu, la clairvoyance du ministre s'estompe. Nous n'avons pas d'information sur l'ampleur de l'économie souterraine et surtout pas de solution à proposer.

Du côté de la TPS, l'État ne contrôle plus ses recettes et le ministre n'a pas le courage de réviser en profondeur sa politique fiscale. Il se propose d'agir, seul, et à l'aveuglette.

Même chose pour le déficit et la dette. Le ministre sait qu'il doit réduire les dépenses de la fonction publique mais n'avance aucune proposition. Pourtant, le ministre sabre déjà dans les programmes sociaux sans même avoir en main les études nécessaires. L'histoire se répète: Ottawa a décidé de couper et ce sont les provinces et les chômeurs qui écoperont.

* * *

[Traduction]

LA CATASTROPHE DE LA MINE WESTRAY

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, la mine Westray, en Nouvelle-Écosse, a été la scène d'une explosion le 9 mai 1992. Cet accident avait entraîné la mort de 26 mineurs, dont 11 sont restés emprisonnés dans la mine.

Pendant les cinq jours qu'a duré l'opération de sauvetage, une autre explosion aurait pu se produire, il a fallu traverser des éboulements et la mine était remplie de monoxyde de carbone, gaz mortel qui se dégage lors d'explosions dans des mines de charbon. Les mineurs ont fait fi de leur propre sécurité dans l'espoir de trouver leurs camarades.

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Fait sans précédent, les 195 membres de l'équipe de secours reçoivent aujourd'hui, des mains du gouverneur général, la Médaille de la Bravoure, à Stellarton, en Nouvelle-Écosse. Quatorze d'entre eux vivent maintenant dans ma ville d'origine, Campbell River, en Colombie-Britannique, et travaillent dans la mine de charbon de Quinsam, à 25 kilomètres de là.

Je suis certain que tous les députés se joindront à moi pour applaudir ces hommes courageux touchés par une tragédie qui a affecté les Canadiens d'un océan à l'autre.

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, selon des rapports de presse, le gouvernement songerait sérieusement à vendre les stations de télévision de la Société Radio-Canada.

Malgré les promesses, contenues dans le livre rouge, de soutenir la Société Radio-Canada et malgré le fait que le Comité permanent du patrimoine canadien examine actuellement le financement de la société d'État, le Cabinet discute d'un plan visant à modifier radicalement la radiodiffusion publique au Canada.

La Société Radio-Canada a joué un rôle essentiel en permettant aux Canadiens de se voir et de s'entendre et de développer leur identité culturelle. Le plan dont discute le Cabinet est-il la première étape en vue de privatiser le réseau d'État et faire disparaître la radiodiffusion publique? Si les stations de télévision du réseau d'État sont vendues, sur quelle chaîne de télévision les Canadiens pourront-ils regarder des émissions canadiennes?

À l'âge de la télévision à 500 canaux et des progrès rapides de la technologie, nous devrons peut-être un jour assurer la radiodiffusion publique par d'autres moyens comme les compagnies de téléphone, mais nous n'en sommes pas encore là.

Je suis d'accord avec le président du CRTC qui déclarait devant le Comité du patrimoine canadien: «Donnez. . .

Le Président: La parole est au député d'Ottawa-Centre.

* * *

CONFÉRENCE SUR L'ACQUISITION CONTINUE DU SAVOIR

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, la première conférence mondiale sur l'acquisition continue du savoir se tiendra à Rome du 30 novembre au 3 décembre prochains. Cette conférence doit permettre de faire ressortir l'importance de l'acquisition continue du savoir et d'établir un plan d'action pour promouvoir et mettre en oeuvre des initiatives d'apprentissage partout dans le monde.

Un de mes électeurs, Robbin Frazer, qui a travaillé fort à la promotion de la conférence au Canada, m'a informé qu'il y aurait 500 participants de 50 pays, notamment dix délégués du Canada.

Je profite de l'occasion pour rendre hommage à tous les participants de la conférence et pour leur déclarer que notre gouvernement, par l'entremise du ministère du Développement des ressources humaines, s'est engagé à améliorer la qualité de vie de ses citoyens et à faire en sorte qu'ils aient accès à l'éducation et à la formation.

Je crois que la conférence mondiale sur l'acquisition continue du savoir sera une réussite et qu'une stratégie sur l'éducation permanente sera en place pour nous guider au seuil du XXIe siècle.

* * *

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, lorsque le Parti réformiste a communiqué sa liste de coupes au budget fédéral, coupes les plus radicales jamais proposées dans toute l'histoire du Canada, le chef réformiste a osé déclarer que ces coupes ne touchaient pas les dépenses dans le secteur social.

En recommandant une réduction de 25 p. 100 dans le budget de la SCHL, le Parti réformiste a proposé au gouvernement fédéral non seulement de rompre des centaines de contrats et d'accords entre le fédéral et les provinces, ainsi que des milliers de contrats avec des organisations sans but lucratif et des coopératives des secteurs privé et public partout au Canada, mais aussi de réduire les dépenses sociales dans les secteurs qui touchent les plus démunis d'entre les pauvres.

(1415)

Les réformistes s'en prennent aux plus démunis, aux personnes pauvres, âgées, jeunes et handicapées, aux femmes chefs de famille et aux autochtones qui sont dans la rue. Le Parti réformiste dit à ces Canadiens qui font en moyenne moins de 12 000 $ par année de sortir des logements sociaux et d'aller quémander aux coins des rues.

Ainsi, la contribution fédérale au logement diminuerait de 25 p. 100.

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QUESTIONS ORALES

[Français]

LA BOSNIE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, la situation continue de se détériorer en Bosnie, où sont toujours détenus en otage 55 Casques bleus canadiens. Dans une manifestation évidente d'intimidation, les forces serbes ont lancé hier des roquettes à proximité de postes d'observation placés sous la responsabilité des Casques bleus canadiens près de Visoko. Les États-Unis, la France, la Russie, l'Allemagne et la Grande-Bretagne demandent un cessez-le-feu immédiat à Bihac et la cessation des combats en Bosnie-Herzégovine, alors que le général Michael Rose, commandant en chef des 24 000 Casques bleus en Bosnie, évoque la possibilité de retrait des Casques bleus devant l'escalade des conflits armés.

Le premier ministre peut-il confirmer que les 55 Casques bleus canadiens détenus en otage sont traités convenablement et que les négociations devant permettre leur libération sont toujours dans l'impasse avec les autorités serbes?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les 55 soldats canadiens ne sont pas, à strictement parler, en otage. Ils sont gardés dans les postes qu'ils


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occupaient et ils continuent à faire le travail qu'ils faisaient auparavant dans les territoires en question. De plus, on m'informe qu'ils sont traités d'une façon acceptable.

Les négociations se poursuivent pour essayer de rétablir la normalité de la situation. Tout le monde espère qu'il y aura un accord très bientôt sur un nouveau cessez-le-feu. Évidemment, nous devons tous ici au Canada soutenir nos troupes qui traversent une situation extrêmement difficile pour accomplir leur mission humanitaire dans ce coin du monde. Nous espérons que les difficultés que nos soldats connaissent en ce moment, ainsi que les soldats des autres pays, pourront retrouver la normalité dans les jours qui viennent.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, les 55 Casques bleus canadiens se retrouvent avec une mobilité extrêmement réduite, dans la situation qui sévit actuellement en Bosnie-Herzégovine.

Le premier ministre pourrait-il nous indiquer si les autorités serbes ont réagi officiellement à la demande de cessez-le-feu à Bihac faite par les États-Unis, la Russie, la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les informations indiquent que les Serbes accepteraient un cessez-le-feu indéfini, alors que les Musulmans de Bosnie veulent avoir un cessez-le-feu pour une période de trois mois. En ce moment, les discussions continuent pour essayer d'en venir à une entente. Ce qui est encourageant, c'est que les deux parties veulent un cessez-le-feu. Il s'agit maintenant de déterminer si c'est pour une période indéterminée ou pour une période fixe.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre partage-t-il l'avis du général Rose quant à un retrait éventuel de l'ensemble des Casques bleus de Bosnie et reconnaît-il qu'un tel retrait ne peut conduire qu'à une intensification de l'offensive serbe avec les conséquences tragiques pour les populations civiles et les milliers de réfugiés laissés à eux-mêmes sans secours ni aide humanitaire.

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les troupes canadiennes et les autres troupes des Nations Unies jouent un rôle très utile là-bas. Elles ont protégé les civils et leur ont fourni des vivres et des médicaments pendant les nombreux hivers de conflit.

Le député a parfaitement raison de dire que leur retrait pourrait créer une situation extrêmement difficile en Europe.

(1420)

Je dois aller en Europe à la fin de la semaine prochaine. Dimanche, je serai à Budapest où se réunissent tous les chefs d'État. Ce sera une excellente occasion de s'occuper du problème. Bien sûr, la position du Canada est la même que celle de la France et de la Grande-Bretagne, qui ont aussi des troupes sur place, mais si l'embargo sur les armes est levé, nous nous retirerons.

Entre-temps, il est très utile d'avoir des troupes sur place. Je tiens à féliciter les soldats canadiens qui sont là-bas et qui y font un travail remarquable. Je tiens à leur dire qu'ils ont l'appui de la population canadienne.

* * *

[Français]

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Parmi les pays membres du G-7, c'est le Canada qui consacre le moins d'argent à la recherche sur le SIDA, et cela alors que le Canada se situe au troisième rang des pays du G-7 pour le taux d'infection au VIH par habitant.

À deux jours de son départ pour Paris où il participera à une importante conférence internationale sur le SIDA, comment le premier ministre peut-il justifier que le Canada tire de l'arrière dans la lutte contre cette terrible maladie qui affecte et menace la vie de milliers de Québécois et de Canadiens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député affirme que le Canada ne fait pas sa part. Je pense, au contraire, que le Canada fait sa part et que nous avons investi des sommes considérables dans la recherche pour trouver une solution à ce fléau qui existe dans le monde entier à l'heure actuelle. J'espère que le sommet organisé par la France et présidé par M. Balladur pourra faire avancer le dossier dans tous les pays du monde. Je serai en mesure de leur dire que le Canada veut faire aussi bien que les autres pays en ce qui touche ce problème difficile.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, comment le premier ministre explique-t-il son intérêt soudain pour la lutte contre le SIDA alors que son gouvernement a maintenu du bout des lèvres le budget de 42 millions de dollars prévu pour la phase 2 de la stratégie nationale contre le SIDA, budget, il faut s'en rappeler, que les libéraux jugeaient nettement insuffisant lorsqu'ils étaient dans l'opposition?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce programme, comme tous les autres programmes, nous en discutons actuellement avec tous les ministères. Nous avons un problème difficile sur le plan budgétaire. Nous avons hérité d'une dette de 500 milliards de dollars et les moyens du gouvernement sont nécessairement limités. Nous maintenons le programme et espérons que la recherche progressera au Canada comme ailleurs dans le monde.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens sont consternés que des membres de nos forces de maintien de la paix soient gardés prisonniers et qu'ils aient été la cible d'une attaque à la roquette hier.

Au mois de septembre, le ministre de la Défense nationale a informé la Chambre qu'il avait renouvelé l'engagement du Canada en Yougoslavie pour six mois, à certaines conditions. Il a dit que cet engagement serait réévalué si la situation sur le terrain


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changeait, si nos troupes étaient menacées et si la présence des Nations Unies n'était plus utile.

Étant donné que la situation a changé, que nos troupes sont menacées et que la capacité des Nations Unies de remplir leur mandat a été ébranlée, le ministre réévaluera-t-il la participation du Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion, tout à l'heure, de dire que la contribution des Canadiens était très utile. Les chefs d'État discuteront sûrement de la question quand ils se réuniront ce week-end à Budapest.

La position canadienne a toujours été que nous voulons maintenir nos troupes là-bas tant qu'on ne lèvera pas l'embargo sur les armes et réévaluer notre engagement tous les six mois. L'engagement que nous avons pris en septembre sera maintenu jusqu'en février, et nous réévaluerons notre position en temps et lieu.

Entre temps, je vais m'entretenir d'une façon particulière, la semaine prochaine, avec les Français et les Anglais, qui sont dans la même situation que nous. Nous avons décidé de ne pas prendre de décision définitive avant d'en avoir discuté. Je serai mieux en mesure de vous informer la semaine prochaine.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je sais que les gens en général appuient la participation du Canada au sein des Nations Unies et de l'OTAN, mais nous craignons que la situation en Bosnie ne dégénère parce que les États-Unis se seraient rangés du côté des Bosniaques alors que les Russes appuieraient plutôt les Serbes et pourraient retirer unilatéralement leurs troupes de maintien de la paix.

(1425)

Comment le Canada réagit-il à l'abandon de la neutralité par nos alliés dans les troupes de maintien de la paix?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il n'est pas utile que quiconque prenne position pour les uns ou les autres, car cela n'est pas de nature à améliorer la situation.

Nous sommes là depuis trois ans. Nos troupes y sont, à l'instar de celles d'autres pays. J'estime que les pays qui n'ont pas envoyé de troupes devraient faire preuve de prudence parce que c'est la vie des soldats canadiens et des autres qui est en jeu. Ils devraient garder cela à l'esprit.

Nous sommes sur place et nous pensons que nous avons un rôle très important à jouer pour maintenir la paix et sauver des vies humaines. J'espère que les pays qui n'ont pas envoyé de troupes se souviendront que nous sommes là-bas.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens sont, à juste titre, fiers des troupes de maintien de la paix du Canada. Cependant, le mépris manifesté en Bosnie à l'égard des bérets bleus laisse croire que les Nations Unies ont raté leur mission et que leur réputation a été ternie, ce qui établit un dangereux précédent pour la mission actuelle et celles qui suivront.

Que va faire le gouvernement du premier ministre pour empêcher que le maintien de notre participation à cette mission ne compromette notre efficacité dans les futures missions de maintien de la paix?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le meilleur moyen de maintenir notre réputation internationale est de remplir notre mission là-bas. Lors de mon passage à Sarajevo, en juin, on m'a dit que les meilleurs soldats étaient toujours les Canadiens, que les Nations Unies faisaient toujours appel aux Canadiens dans les situations très difficiles.

Nous sommes tous très fiers d'eux. Le fait est que leur participation ne ternira pas leur réputation. Bien au contraire, ils ont toujours su garder leur calme dans la situation extrêmement difficile de ce week-end, et ils méritent tous nos félicitations. Nous tenons à leur dire que nous sommes très fiers d'eux.

* * *

[Français]

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Lors de l'adoption de la phase 2 de la Stratégie canadienne de lutte contre le SIDA, il a été convenu que 1,5 million de dollars seraient réservés à des besoins non prévus dans la stratégie. À la suite de propositions par des partenaires nationaux, la ministre peut donc disposer de ces fonds de manière discrétionnaire.

Comment le gouvernement justifie-t-il qu'à quatre mois de la fin de l'exercice financier, les chercheurs et les organismes qui luttent contre le SIDA ne sont toujours pas assurés qu'ils verront la couleur des 1,5 million de dollars promis?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je vais prendre note de la question et quand la ministre sera en Chambre, elle pourra donner une réponse plus détaillée à l'honorable député.

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, cela n'est pas certain, mais il pourra aussi noter ma question complémentaire.

Doit-on comprendre que son gouvernement s'est avéré incapable de consacrer les ressources allouées dans ce domaine, parce qu'il n'existe aucun plan directeur d'implantation de la phase 2 de la Stratégie nationale sur le SIDA?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ma réponse à la première question s'applique à la question supplémentaire.

* * *

[Traduction]

GOSAP ENERGY INCORPORATED

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, l'assiette au beurre libérale déborde. La GOSAP Energy Incorporated, une nouvelle société d'experts-conseils établie à Calgary,


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siphonne des fonds du gouvernement fédéral pour livrer concurrence dans le secteur privé.

Nous avons appris que la GOSAP bénéficie de bureaux sans loyer à payer et de subventions de la Banque fédérale de développement de même que des ministères de l'Industrie et de la Diversification de l'économie de l'Ouest totalisant 118 000 $.

Le ministre du Développement des ressources humaines est-il prêt à mettre le holà à cet abus révoltant de l'argent des contribuables?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je me ferai un grand plaisir de prendre note de la question du député et d'examiner ses allégations. Je ne répondrai certainement pas à la Chambre des communes à l'accusation qu'il a faite en 30 secondes concernant la valeur de cet organisme. Je suis certes disposé à examiner les faits qu'il a allégués et à les évaluer comme ils le méritent.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Lorsque vous aurez l'occasion de le faire, vous reconnaîtrez sûrement qu'il s'agit. . .

Le Président: Je prierais le député de s'adresser à la présidence.

M. Silye: Monsieur le Président, lorsque le ministre du Développement des ressources humaines examinera les faits, il reconnaîtra sûrement qu'il s'agit d'un gaspillage révoltant de l'argent des contribuables.

Ma question complémentaire s'adresse au ministre de l'Industrie et porte sur le même sujet. Son ministère a lui aussi accordé 15 000 $ à cette entreprise. L'investissement initial de 24 000 $ de la GOSAP a été assorti de subventions fédérales totalisant 118 000 $, sans compter les dépenses de bureau, mais cette entreprise n'a même pas d'employés possédant les compétences nécessaires sur place. Beaucoup de petites entreprises canadiennes ne peuvent que rêver d'un tel accès à des capitaux. Il est dommage qu'il faille être libéral pour bénéficier d'un tel financement.

(1430)

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre comment il peut justifier une dépense aussi inutile et inéquitable de fonds publics alors que le gouvernement doit effectuer des coupes dans les programmes sociaux?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, à l'instar de mon collègue, le ministre du Développement des ressources humaines, je dois répondre qu'il nous faudra certainement tâcher de savoir en quoi consistent les faits en l'occurrence.

Je puis assurer au député que s'il fallait que le requérant soit un libéral pour être admissible à une subvention, personne ne m'a consulté pour savoir si c'était bien le cas ou non.

[Français]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Dans une entrevue accordée samedi dernier au quotidien La Presse, le ministre des Finances annonçait clairement ses intentions quant à son projet de remplacer la TPS par une taxe de vente nationale. Il a laissé clairement entendre qu'Ottawa agira d'abord et négociera ensuite avec les provinces, une à une.

Doit-on comprendre que le gouvernement fédéral entend imposer sa vision aux provinces quant à l'implantation d'une taxe de vente nationale en les plaçant directement devant un fait accompli?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Pas du tout, monsieur le Président. Samedi, j'ai parlé du processus que j'ai abordé avec les ministres des Finances provinciaux lors d'une rencontre avec ces derniers. J'ai dit que puisque les consommateurs et la communauté des affaires voulaient tellement une taxe harmonisée et puisque cela faisait l'affaire de certaines provinces, incluant le Québec, il vaudrait la peine vraiment de continuer le processus, et c'est certainement notre intention.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Finances aura-t-il l'honnêteté de dire clairement les choses, c'est-à-dire que le ministre des Finances du Québec lui a dit qu'il rejetait toute proposition de taxe de vente nationale qui remplacerait la TPS et la TVQ?

Cela dit, le ministre reconnaît-il qu'en pratiquant, comme il l'a fait en fin de semaine, le fédéralisme dominateur, cynique et détestable qu'il propose avec sa taxe de vente nationale, il se dirige tout droit vers une impasse, parce qu'il attaque de front l'autonomie fiscale des provinces?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Pas du tout, monsieur le Président. Le député doit savoir que le Québec a la taxe de vente qui ressemble de plus près à la taxe du gouvernement fédéral. D'ailleurs, ce ne sera pas une étape énorme pour le Québec et Ottawa de s'entendre, comme d'ailleurs avec d'autres provinces.

De plus, je dois dire que lors de nos discussions, qui ont été très constructives, il a été très clair de la part du nouveau gouvernement du Québec qu'il n'était pas question de fédéralisme dominateur. Je constate, encore une fois, que l'écart, entre le Bloc québécois et le PQ, maintenant qu'ils sont au pouvoir, devient de plus en plus important.

* * *

[Traduction]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.


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Le 22 septembre dernier, en réponse à une question que je lui ai posée, le ministre a dit ceci: «Nous avons lu dernièrement le rapport sur les faiblesses de l'actuel système d'enregistrement des armes à autorisation restreinte et sur la nécessité d'apporter des améliorations.»

Le ministre parlait-il alors du rapport du ministère de la Justice présenté par M. Terrence Wade, relativement à l'actuel système d'enregistrement des armes de poing, ou y a-t-il plus d'un rapport faisant état des faiblesses du système canadien d'enregistrement de ces armes?

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice présentera sous peu ses propositions sur le contrôle des armes à feu. Je crois que le député obtiendra alors réponse à ses questions.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, ma question complémentaire concerne le même ministère.

Le ministre de la Justice n'a pas présenté le rapport de M. Terrence Wade au Comité permanent de la justice. Il ne l'a pas mis à la disposition du public, et les fonctionnaires du ministère ont refusé de le communiquer aux députés.

Le ministre peut-il nous dire si ce rapport est gardé secret parce qu'il condamne sévèrement le système actuel d'enregistrement des armes de poing, témoignant non seulement de l'échec du système à réduire l'utilisation de ces armes à des fins criminelles, mais montrant aussi l'inutilité du plan du ministre visant à assujettir les fusils et les carabines à ce mauvais système?

(1435)

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le ministre a l'intention, lorsqu'il présentera ses propositions, de rencontrer tous les députés pour répondre à leurs questions et pour bien leur expliquer les changements proposés.

* * *

[Français]

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Dans une entrevue, le ministre des Finances a clairement confirmé l'ampleur de la croissance de l'économie souterraine et je le cite: «Le ministre des Finances pense ce que les fonctionnaires vous disent et eux, ils disent que le marché au noir représente 5 p. 100 de l'économie. Paul Martin pense que c'est pas mal plus fort que ça.»

Le Président: Si c'est possible, il faut faire référence à nos collègues par le nom de leur comté.

M. Brien: Monsieur le Président, je reprends. Dans une entrevue, le ministre des Finances a clairement confirmé l'ampleur de la croissance de l'économie souterraine et je le cite: «Le ministre des Finances pense ce que les fonctionnaires vous disent et eux, ils disent que le marché au noir représente 5 p. 100 de l'économie. Le ministre des Finances pense que c'est pas mal plus fort que ça.»

Le ministre reconnaît-il que la croissance de l'économie souterraine, confirmée par la diminution des recettes de la TPS pour les six premiers mois de l'année par rapport à l'an dernier, s'explique par l'alourdissement récent du fardeau fiscal et par les iniquités d'un régime fiscal désuet, auquel de plus en plus de Canadiens tentent d'échapper?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, il est presque impossible de mesurer avec précision ce qui est par nature illégal et échappe aux moyens de mesurer dont dispose ordinairement un gouvernement.

Il n'en reste pas moins que l'économie souterraine est assurément un problème grave. Je suis persuadé que mon collègue, le ministre des Finances, a raison quand il affirme que nous sommes confrontés à un sérieux problème que nous réglerons.

Je rappellerai au député qui, semble-t-il, ne l'avait pas vu la première fois, que, il y a deux mois à peine, je lui ai envoyé un exemplaire d'un communiqué que j'avais fait paraître il y a un an et qui énonçait une série de mesures destinées à combattre l'économie souterraine. Je me réjouis de pouvoir affirmer que les mesures dont faisait état le communiqué ont eu pour effet de permettre au trésor public de recouvrer près de 750 millions de dollars en impôts non perçus.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse au ministre des Finances qui devrait se soucier beaucoup plus de divergences d'opinion avec son collègue, le ministre du Revenu national, qu'entre le Bloc québécois et le Parti québécois.

Le ministre reconnaît-il que seule une révision complète du régime fiscal peut permettre d'endiguer le phénomène du marché noir, puisque comme il le reconnaît lui-même, les nouvelles mesures administratives quant à la perception des taxes de son collègue du Revenu national ne seront pas suffisantes?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député devrait examiner d'un peu plus près la raison qui explique la situation des paiements de TPS.

C'est que notre économie s'est considérablement améliorée, en grande partie grâce aux mesures qu'a prises mon collègue, le ministre des Finances. Il s'ensuit que les investissements se sont accrus dans les biens servant la production, qui sont souvent exonérés de taxe. J'ajouterais que, grâce à certaines dispositions que mon ministère a prises en vue d'accélérer le remboursement,


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nous sommes maintenant en mesure de constater que les recettes de la TPS se sont remises à augmenter.

* * *

LES TRANSPORTS

M. Réginald Bélair (Cochrane-Supérieur, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Les habitants du nord de l'Ontario et des régions rurales du Canada craignent que d'importantes modifications soient effectuées de façon improvisée dans le secteur des transports. Ils sont inquiets de l'avenir.

Le ministre peut-il nous dire s'il songe à élaborer une politique d'ensemble pour les transports ferroviaires, aériens, routiers et maritimes? Peut-il garantir à ces habitants qu'ils auront le temps de s'adapter à d'éventuelles modifications?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il est clair qu'un examen exhaustif est en cours et je pense que nous avons réalisé des progrès importants en ce qui concerne les aéroports. Nous espérons nous attaquer aux ports. Quant aux chemins de fer, la situation est un peu différente.

Depuis 20 ans, des modifications ponctuelles sont apportées dans le secteur des transports ferroviaires. C'est pourquoi nous sommes aux prises avec des cas d'abandon de services et des décisions au jour le jour qui ne correspondent à aucune politique véritable.

À l'heure actuelle, le groupe de travail de Bob Nault examine ce que nous pouvons faire au sujet de la commercialisation du CN. Nous devrons très bientôt étudier la soumission spontanée du CP visant l'acquisition des éléments d'actif du CN qui se trouvent à l'est de Winnipeg. Compte tenu de cela et des consultations que nous menons avec les expéditeurs et autres intéressés, nous nous sommes engagés à formuler en 1995 une politique claire et très complète sur les transports ferroviaires.

(1440)

Nous ne sommes pas inactifs. Nous allons étudier l'offre du CP. Nous nous occuperons de la question de la commercialisation. Nous mettrons un terme aux décisions improvisées qui nuisent tant aux transports ferroviaires au Canada depuis 20 ans.

* * *

L'AGENCE SPATIALE CANADIENNE

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, récemment, l'Agence spatiale canadienne a donné 428 000 $ de l'argent des contribuables à Télésat Canada pour contribuer à stabiliser le satellite Anik E-2.

Voici ma question au ministre de l'Industrie: de quel droit l'Agence spatiale canadienne donne-t-elle des fonds publics à un consortium privé?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme tout autre organisme public, l'Agence spatiale canadienne a le droit de dépenser les crédits qui lui sont accordés par le Parlement.

Dans le cas en question, je crois savoir que les problèmes qui se sont produits l'hiver dernier avec les satellites Anik E étaient très importants pour le Canada d'abord et avant tout parce que ces satellites représentent un véhicule de communication pour une bonne partie du territoire canadien. Ensuite, pour réussir à remédier à ces problèmes qui touchaient des satellites déjà en orbite, on a dû mettre au point des techniques nouvelles qui seront toujours utiles. La tentative était réussie.

L'Agence spatiale est d'avis, m'a-t-on dit, que la technologie qui a été ainsi obtenue est précieuse pour le Canada et entre dans le mandat de l'Agence spatiale.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, à quoi a servi de privatiser Télésat Canada si l'on continue à y engloutir des deniers publics? Télésat Canada est un consortium des plus grandes compagnies de téléphone et de Spar Aérospatiale qui n'a nul besoin de l'argent des contribuables.

Ma question complémentaire est la suivante: le ministre peut-il garantir à la Chambre que des organismes relevant de sa compétence ne dépenseront pas des fonds publics à des fins privées sans obtenir au préalable la permission du ministre?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la question est beaucoup trop générale. Le député comprendra, je crois. . .

M. Silye: Trop générale pour qu'on y réponde franchement.

Des voix: Oh, oh!

M. Manley: Monsieur le Président, le dernier réformiste à poser une question voulait une autorisation du ministre pour toute dépense excédant 15 000 $. Cela devient un peu ridicule.

Le député comprendra que c'est avec le moins d'ingérence politique possible qu'on accorde des fonds au secteur privé, souvent par l'entremise de contrats ou d'acquisitions du gouvernement. J'aurais cru que le Parti réformiste approuverait cela.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Le ministre des Finances confirmait les propos du vérificateur général à l'effet qu'Ottawa ne possède aucun outil de gestion et d'évaluation de ses politiques. En d'autres mots, Ottawa gouverne à l'aveuglette.

Dans la même veine, le ministre des Finances admettra-t-il le bien-fondé des remarques du vérificateur général à l'effet que le gouvernement s'apprête à faire sa réforme des programmes sociaux sans disposer des outils lui permettant d'en mesurer les impacts?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Pas du tout, monsieur le Président. D'ailleurs, ce que j'ai dit, c'est qu'il fallait absolument moderniser les outils du gouvernement. C'est pour cela que nous avons demandé à la compagnie Ernst & Young de nous faire un rapport qui nous a été


8347

remis dès que nous avons pris le pouvoir, rapport qui nous aide beaucoup.

Je suis très surpris que le député ne comprenne pas que toute institution moderne doive évoluer avec les nouvelles technologies qui se présentent. Nous, comme gouvernement, je vous assure que nous avons l'intention d'utiliser toutes les technologies possibles pour mieux administrer le pays.

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, doit-on comprendre que le gouvernement mènera à terme sa réforme des programmes sociaux sans pouvoir en évaluer les impacts, tout simplement parce que le seul objectif de sa réforme est de couper les bénéfices des programmes sociaux pour réduire le déficit?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, cela est très clair. D'ailleurs, le ministre du Développement des ressources humaines l'a dit à maintes reprises, le but primordial de la réforme des programmes sociaux c'est vraiment de les mettre à jour, de pouvoir livrer la marchandise à ceux qui les reçoivent, de façon beaucoup plus efficace. Il faut dire que le monde a beaucoup évolué. Le ministre du Développement des ressources humaines le reconnaît, et c'est dommage que le Bloc québécois soit demeuré dans les années 1960.

(1445)

Des voix: Oh, oh!

* * *

[Traduction]

DOUANES CANADA

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, le ministre du Revenu national a affirmé à maintes reprises qu'il consacre davantage de ressources aux contrôles douaniers, mais en fin de semaine dernière, un agent de Douanes Canada déclarait dans l'Ottawa Sun que: «Lorsque les files deviennent trop longues, on nous donne l'ordre de laisser passer les gens sans contrôle. Nous ignorons combien d'armes et quelles quantités de drogue nous pourrions saisir.»

Comment le ministre peut-il continuer de prétendre que son ministère a augmenté le nombre de douaniers de 25 p. 100 devant une telle déclaration faite par un agent de première ligne?

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, il me semble que le député devrait comparer la situation actuelle à celle qui existerait si nous n'avions pas accru les ressources de 25 p. 100.

Je lui fais également remarquer que, si nous arrêtions tous les véhicules pour procéder à une fouille complète, les touristes ne viendraient plus au Canada et le libre-échange avec les États-Unis prendrait fin.

Je souligne également que nous mettons l'accent sur les secteurs où nous estimons le nombre d'infractions plus élevé. Par conséquent, grâce à des méthodes très élaborées d'évaluation des secteurs cibles, nous fournissons un service douanier remarquablement efficace.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, puisque le ministre se vantait d'avoir accru les ressources de 25 p. 100, le personnel de mon bureau a communiqué avec le bureau du sous-ministre pour demander des preuves des affirmations du ministre. Cette demande a été faite vendredi seulement et nous n'avons donc pas encore reçu de réponse.

Cependant, il est évident que le ministre ne ferait pas de déclaration qu'il ne peut pas étayer. Par conséquent, je me demande s'il peut dire à la Chambre où les douaniers supplémentaires ont été postés. Le ministre pourrait-il nous donner ce renseignement ou faut-il le croire sur parole, comme les gens qui affirment avoir croisé Elvis Presley?

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, j'ai répondu à une question du député, mais, apparemment, sa mémoire lui fait défaut.

J'ai souligné que nous prenons pour cible différents postes frontière à différents moments de l'année, selon l'affluence, et que nous répartissions nos douaniers entre les différents postes d'une même région et entre les différentes régions du pays en fonction des besoins. Je lui donné l'exemple des Jeux du Commonwealth, à Victoria, où nous avions ajouté 65 douaniers provenant du Yukon, de l'Alberta et d'autres postes en Colombie-Britannique. Par conséquent, nous avons un système qui nous permet de déployer nos ressources le plus efficacement possible.

Quant aux 25 p. 100, je fournirai au député les chiffres qu'il a demandés. Toutefois, je peux lui garantir que nous avons accru de façon marquée les activités douanières ces huit derniers mois.

* * *

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

Le projet de loi C-57 semble interdire l'imposition de droits sur les importations agricoles supplémentaires. Si on n'apporte pas les modifications nécessaires, cela pourrait compromettre notre capacité de protéger le système de gestion de l'offre, comme nous nous sommes engagés à le faire.

Le ministre est-il disposé à apporter les modifications nécessaires à la Loi sur les licences d'exportation et d'importation et au Tarif des douanes afin d'assurer la protection du système canadien de gestion de l'offre?

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, les dispositions du nouveau régime de contingents tarifaires relatives à nos importations agricoles porteront notamment sur les importations supplémentaires à diverses fins.

Le gouvernement a l'intention de consulter toutes les parties intéressées afin de déterminer les mesures qui doivent être prises pour assurer la viabilité de la production primaire et de la transformation dans les secteurs concernés. Au besoin, on proposera des modifications au Tarif des douanes pour régler cette question.


8348

Des voix: Bravo!

Des voix: Encore, encore.

Le Président: Le ministre semble avoir amélioré ses compétences en lecture.

* * *

(1450)

[Français]

LES PRÊTS AUX PME

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

La limite de 4 milliards de dollars prévue à la Loi sur les prêts aux petites entreprises ayant été atteinte, le ministre s'apprête, selon nos informations, à annoncer une augmentation des fonds disponibles.

Le ministre peut-il nous dire s'il profitera de cette annonce pour répondre aux besoins des PME en matière de financement et autoriser enfin que ces garanties de prêt puissent s'étendre au financement du fonds de roulement de l'entreprise?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait peut-être, le budget des dépenses supplémentaires que nous avons présenté prévoyait un relèvement du plafond imposé aux prêts accordés en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. Nous poursuivons nos consultations avec les groupes concernés par cette loi pour tâcher d'apporter au programme des ajustements qui leur seront acceptables et qui permettront d'en récupérer plus complètement les coûts.

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, toujours dans le but de faciliter l'accès au financement pour les PME, le ministre entend-il respecter les engagements du livre rouge et faire en sorte que les entrepreneurs n'aient plus à fournir de garantie personnelle pour les prêts accordés en vertu de la Loi sur les prêts aux PME?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je comprends la suggestion du député qui veut qu'on élimine l'obligation de fournir des garanties personnelles pour les prêts accordés en vertu de ce programme.

[Traduction]

Je tiens à ce que le député comprenne que nous allons examiner, avec son aide également, les mécanismes qui sont à la base de ce programme pour tâcher de trouver le meilleur moyen de rendre le programme le plus efficace possible pour le plus grand nombre de petites entreprises.

Il comprendra qu'il faut récupérer les coûts encourus à cet égard. Il s'agit nettement du principal programme dont nous disposions pour répondre aux besoins en emprunts des petites entreprises. En mettant le programme au point, nous devrons nous assurer que nous le faisons de la façon la plus efficace possible pour en faire profiter le plus grand nombre de petites entreprises.

* * *

LE BUDGET

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, si le gouvernement passait autant de temps à chercher les moyens de couper les dépenses qu'à essayer de concevoir de nouvelles façons de percevoir des impôts et d'emprunter, nous pourrions être bien engagés dans la voie de l'équilibre budgétaire.

La semaine dernière, le ministre des Finances a lancé un autre ballon d'essai, les «obligations de la Victoire». Le Canada a déjà des obligations à dix ans, des obligations à 30 ans, des bons du Trésor à 90 jours et les obligations d'épargne, pour ne mentionner que ceux-là.

Le ministre des Finances pourrait-il nous dire pourquoi il nous faut encore d'autres obligations?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, il ne fait pas de doute que, pour réduire le déficit, le gouvernement entend, au prochain budget, faire porter le gros de ses efforts sur le contrôle des dépenses de l'État. C'est certainement notre priorité.

Il ne doit subsister aucun doute à ce sujet. Mais le gouvernement n'a lancé aucun ballon d'essai. Ce qui s'est passé en fait, c'est qu'on m'a posé une question à Toronto, une question qui m'a d'ailleurs été posée dans presque toutes les villes où je suis allé depuis un mois, au sujet de la possibilité d'émettre des obligations de la Victoire, proposition qui s'inspire du geste très généreux de M. Carl McNeil qui, dans son testament, a légué 37 000 $ au gouvernement canadien.

Ce qui m'étonne, c'est que le Parti réformiste ne comprenne pas la volonté des Canadiens de s'unir pour résoudre nos très graves problèmes financiers.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, le Parti réformiste est conscient que les Canadiens veulent régler les problèmes économiques. Mais le ministre des Finances n'avouera-t-il pas que, pour résoudre le problème et rétablir la confiance, il faut en priorité réduire suffisamment les dépenses pour éliminer le déficit?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, non seulement nous reconnaissons que le contrôle et la réduction des dépenses de l'État sont un élément essentiel dans la réduction du déficit, mais nous sommes aussi conscients de l'importance absolue de la confiance des citoyens et des investisseurs canadiens. C'est pourquoi, la création d'emplois se poursuivant à un rythme soutenu, nous sommes très heureux des chiffres qui ont été rendus publics la semaine dernière et qui montrent que la confiance du milieu des affaires est à son niveau le plus élevé en dix ans.


8349

(1455)

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL AU PARLEMENT

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Aujourd'hui, sur la colline du Parlement, des travailleurs ont encore une fois été forcés de venir demander au gouvernement de respecter la santé et la sécurité de ses propres employés. Les parties II et III de la Loi sur les relations de travail au Parlement assujettiraient les employés du Parlement au Code du travail du Canada.

Je voudrais demander au premier ministre, comme je l'ai déjà fait à la vice-première ministre, pourquoi son gouvernement n'a pas encore proclamé ces parties de la loi pour montrer qu'il respecte ses propres employés.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il incombe au comité de la régie interne de se pencher sur la question. Ce n'est pas strictement un problème gouvernemental, mais un problème intéressant également la Chambre des communes.

* * *

LE RENOUVELLEMENT DES HYPOTHÈQUES

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Institutions financières. Le Comité sénatorial des banques et du commerce a proposé récemment d'exiger une évaluation lors du renouvellement d'une hypothèque.

Le ministre pourrait-il nous donner l'assurance que le gouvernement n'envisage pas pareille mesure ou que, le cas échéant, le coût de ces évaluations sera assumé par l'institution financière et non pas par l'emprunteur?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de l'intérêt qu'il porte à cette question.

La recommandation du comité sénatorial traduit une opinion courante, celle selon laquelle les gestionnaires des institutions financières ont besoin d'informations supplémentaires et de meilleure qualité sur ces questions. Cette recommandation ne précise toutefois pas que cela doit nécessairement se traduire par des frais supplémentaires pour faire des évaluations. C'est là une recommandation parmi les 42 formulées par le comité sénatorial.

Nous les examinerons toutes très attentivement et nous n'envisagerions certainement pas de mettre en oeuvre l'une d'elles sans avoir préalablement tenu de vastes consultations auprès des députés et de la population.

[Français]

LE SIDA

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre s'avère absolument incapable d'expliquer pourquoi son gouvernement n'a même pas investi tout l'argent prévu dans le cadre de la lutte contre le SIDA. Il se propose d'aller à Paris, cette semaine, pour vanter les mérites de son gouvernement dans le dossier de la lutte anti-SIDA.

Comment le premier ministre peut-il avoir la prétention d'apporter une contribution utile à Paris, à la Conférence internationale sur le SIDA, alors que visiblement, il ne connaît absolument pas ce dossier et qu'il s'avoue lui-même incapable de préciser si son gouvernement a adopté un plan directeur pour implanter la Stratégie canadienne de lutte au SIDA?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai indiqué tout à l'heure que le gouvernement avait fait un effort considérable en la matière et que nous voulions en faire davantage. Mais, la discussion qui aura lieu à Paris consistera pas à analyser le budget d'un ministère ou d'un autre, mais de discuter des solutions globales que tous les pays en cause dans le monde peuvent adopter, de façon à pouvoir un jour régler ce problème.

J'imagine que le premier ministre de la France ne voudra pas me demander si 3 ou 4 p. 100 de notre budget ont été dépensés ou non. Il voudra plutôt savoir ce que nous comptons faire. Je n'irai pas là-bas pour discuter de son budget. Je pense que globalement, nous pouvons développer une stratégie pour essayer d'enrayer ce fléau dans le monde entier.

* * *

[Traduction]

LA BOSNIE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, si on en croit les médias en Europe et au Canada, la CIA se serait rangée du côté des Musulmans bosniaques dans le cadre du conflit dans l'ancienne Yougoslavie.

Cette position américaine remet en question la mission de la FORPRONU. Le premier ministre pourrait-il dire aux Canadiens s'il s'est mis en rapport avec le gouvernement américain à ce sujet? Quelle position a-t-il adoptée à l'égard de nos voisins du Sud?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai toujours précisé clairement au président des États-Unis et aux Américains que le Canada et les autres pays membres de la FORPRONU, qui avaient des troupes sur place, jugeaient qu'il ne fallait pas lever l'embargo sur les armes et considéraient que personne de l'extérieur ne devait participer à cette guerre.

Nous avons toujours dit sans détour qu'il serait nettement préférable que tous les pays de l'extérieur se mêlent de leurs

8350

affaires et laissent aux troupes sur place le soin de trouver de leur mieux une solution de paix. C'est exactement ma position depuis le début et nous avons précisé au président en juin que non seulement le Canada, mais également les autres pays en cause trouvaient peu sage de lever l'embargo sur les armes à ce stade-ci. En effet, cette décision ne conduirait pas à la paix, mais plutôt à une escalade du conflit.

(1500)

Cette nouvelle selon laquelle l'embargo pourrait être levé pourrait donner l'impression que la guerre a repris. Si tout le monde s'entendait pour maintenir l'embargo et conserver les Casques bleus sur place, il est probable que la paix reviendrait plus rapidement.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale aux députés la présence à notre tribune de Son Excellence Milan Uhde, Président de la Chambre des députés du Parlement de la République tchèque, ainsi que de cinq parlementaires qui l'accompagnent dans le cadre de sa visite au Canada.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je voudrais également vous signaler la présence à notre tribune de l'honorable Gary Mar, ministre du Développement communautaire de l'Alberta.

Des voix: Bravo!

_____________________________________________


8350

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 16 pétitions.

* * *

PÉTITIONS

LA JUSTICE

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi de vous soumettre, ainsi qu'au Parlement, quelque 4 100 signatures pour une pétition qui a été lancée à l'école secondaire Brockton, située au centre-ville de Toronto, pratiquement au coin des rues Bloor et Dufferin.

Ce sont des professeurs et des étudiants de cette école secondaire qui ont eu l'idée de cette pétition, laquelle s'est étendue ensuite à d'autres écoles du conseil scolaire de Toronto.

Ces signatures sont très importantes, car elles ont été recueillies dans une école où deux orienteurs très dévoués ont été sérieusement blessés par balles. Ils se remettent maintenant de leurs blessures. Fondamentalement, cette pétition fait allusion aux armes illégales et aux incidents violents. Elle demande au Parlement de renforcer la législation actuelle sur le contrôle des armes à feu, de prévoir des sentences obligatoires plus longues à l'endroit des gens condamnés pour avoir commis des crimes avec des armes à feu et, enfin, de mettre un terme à l'entrée d'armes illégales au Canada.

(1505)

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur, encore une fois, de présenter une pétition signée par plusieurs centaines d'habitants de ma circonscription, Kent, qui veulent attirer l'attention de la Chambre sur le point suivant.

Étant donné que la plupart des Canadiens respectent le caractère sacré de la vie humaine et que la vie humaine, avant la naissance, n'est pas protégée par la société canadienne, les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier immédiatement le Code criminel pour étendre à l'enfant à naître la protection accordée aux autres êtres humains.

LES PERSONNES ÂGÉES

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, la pétition que je voudrais vous présenter est signée par des gens de toutes conditions sociales et de tous âges. Les pétitionnaires demandent au Parlement de reconnaître que les personnes âgées ont contribué et continuent de contribuer à la qualité de vie des Canadiens, que les personnes âgées sont de plus en plus nombreuses et que l'on devrait s'attendre à une utilisation accrue des programmes tels que le régime de pensions et le régime d'assurance-maladie, que les personnes âgées ont besoin de logements confortables, qu'elles ont besoin de participer à la vie de la société et de la collectivité et qu'elles doivent avoir accès à des soins médicaux abordables, et de faire en sorte que le gouvernement n'oublie pas les personnes âgées quand il songe à modifier certains programmes.

[Français]

Ils ont grandement contribué à la qualité de vie que nous avons maintenant comme citoyens et citoyennes.

[Traduction]

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'aimerais déposer trois pétitions à la Chambre.

Dans la première pétition, les signataires exhortent le gouvernement à faire appliquer rigoureusement les dispositions du Code criminel interdisant le suicide assisté. Ils prient également le gouvernement de n'apporter à ces dispositions aucune modification qui aurait pour effet de sanctionner ou d'encourager le suicide assisté.

LES RELATIONS ENTRE PERSONNES DU MÊME SEXE

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Dans la deuxième pétition, monsieur le Président, les signataires exhortent le gouvernement à maintenir le statu quo en ce qui concerne les relations entre personnes de même sexe.


8351

LES ARMES À FEU

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Enfin, monsieur le Président, les signataires de la troisième pétition exhortent le Parlement à rejeter le projet de loi du ministre de la Justice contre les armes à feu et à insister plutôt pour que celui-ci propose une mesure législative visant à combattre les crimes violents.

Au nom de ces électeurs préoccupés, je suis heureux de déposer ces trois pétitions à la Chambre.

LES DROITS DES GRANDS-PARENTS

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'aimerais déposer quelques pétitions portant les signatures d'électeurs de ma circonscription et d'un peu partout en Colombie-Britannique. Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada de songer davantage à la possibilité de modifier la Loi sur le divorce de façon à ce que les grands-parents puissent intervenir devant les tribunaux.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, moi aussi j'aimerais présenter à la Chambre des pétitions qui viennent s'ajouter aux milliers d'autres pétitions dont les signataires souhaitent que la Chambre modifie la Loi sur le divorce pour que les grands-parents soient autorisés à être représentés devant les tribunaux, à avoir accès à leurs petits-enfants et à obtenir des renseignements à leur sujet.

LE CHEF DE L'OPPOSITION

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis fière de présenter la prochaine pétition au nom d'habitants de ma circonscription qui désirent souligner le fait que le chef de l'opposition s'est rendu dans d'autres régions du globe pour promouvoir la séparation du Québec.

En outre, les pétitionnaires désirent aviser la Chambre des communes et le chef de l'opposition que la majorité des résidents d'Ottawa-Carleton veulent promouvoir la permanence de la présence du Québec au sein de la Confédération canadienne. Ils demandent au Parlement d'informer le chef de l'opposition qu'il ne représente pas la majorité de leurs opinions.

LES ANNONCES PUBLICITAIRES

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma troisième pétition porte la signature de plus de cent électeurs qui appuient toute modification législative autorisant les gens à refuser les annonces publicitaires livrées à domicile et à les retourner aux expéditeurs, port payé, dans l'intérêt de l'environnement.

LES ARMES À FEU

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter deux pétitions. La première porte la signature de 189 électeurs de la Colombie-Britannique qui demandent au Parlement de refuser les propositions du ministre de la Justice concernant le contrôle des armes à feu et le prient de présenter des lois visant à déclarer coupables et à punir les criminels au lieu de persécuter les innocents.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Dans cette deuxième pétition, les électeurs des basses terres de la Colombie-Britannique prient le Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et qu'il n'apporte à la loi aucune modification qui ait pour effet d'approuver l'aide ou l'encouragement au suicide, ou l'euthanasie active ou passive.

(1510)

LES ARMES À FEU

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais présenter deux pétitions au nom de mes électeurs de Surrey-Nord.

La première est signée par 189 résidents et dénonce le projet de loi injuste du ministre de la Justice sur le contrôle des armes à feu, qui ne fera pas grand-chose, pour ainsi dire rien, pour réduire les crimes avec violence au Canada.

Les pétitionnaires estiment que ce projet de loi restreindra ou même supprimera les droits des chasseurs et des amateurs de tir à la cible qui sont honnêtes et respectueux de la loi. Les pétitionnaires prient le Parlement de demander au ministre de la Justice de présenter des propositions qui permettront aux forces policières et aux tribunaux de s'occuper rapidement et fermement de ceux qui commettent toutes sortes de crimes violents.

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par 176 résidents. Ils attirent l'attention de la Chambre sur la montée de la criminalité chez les jeunes, sur l'absence de moyens de dissuasion et d'imputabilité dans la Loi sur les jeunes contrevenants, sur le fait que cette loi ne traite pas des droits des victimes, qu'elle encourage le recrutement de jeunes par des délinquants adultes et que ses dispositions actuelles concernant la détermination de la peine ne tiennent pas compte des demandes de la population en faveur de l'adoption de lois plus sévères.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'exhorter le gouvernement à revoir la Loi sur les jeunes contrevenants et à examiner trois principes: les moyens de dissuasion du contrevenant, l'imputabilité du contrevenant et les droits de la victime.

LES PHOQUES

M. Russell MacLellan (Cap-Breton-The Sydneys, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais présenter trois pétitions au nom de mon collègue, le député de Cap-Breton-Highlands-Canso. Les pétitions concernent la dévastation par les phoques des réserves de poisson de fond de l'Atlantique et le fait que l'industrie entourant la chasse au phoque a périclité à cause de l'attitude des Européens vis-à-vis des phoques.

Maintenant que les réserves de poisson de fond ont décliné, les pétitionnaires exhortent le gouvernement à saisir l'occasion offerte par l'accroissement considérable de la population de phoques et à autoriser les entreprises à exploiter certains troupeaux désignés.

8352

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 74.

[Texte]

Question no 74-M. Leroux (Richmond-Wolfe):

Combien y a-t-il eu d'interventions publiques faites par le Conseil des ministres fédéral actuel en ce qui a trait à l'accord du lac Meech et à l'entente de Charlottetown, quel est le nombre et les intervenants en faveur de l'accord du lac Meech et ceux qui s'y opposaient, quel est le nombre et les intervenants en faveur de l'entente de Charlottetown, et ceux qui s'y opposaient?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique): Le gouvernement a commencé à s'acquitter de ses responsabilités administratives le 4 novembre 1993. Depuis cette date, la réforme de la Constitution n'a pas fait partie de son programme législatif ou politique, pas plus qu'elle n'a fait l'objet de discussions avec les gouvernements provinciaux, à l'exception d'une modification bilatérale aux Termes d'union de l'Île-du-Prince-Édouard concernant un ouvrage fixe de raccordement entre la province et le Nouveau-Brunswick. Cette modification a été proclamée le 15 avril 1994.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Nous avons répondu à la question mentionnée par le secrétaire parlementaire.

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


8352

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on a laissé le débat avant la période des questions, je parlais du développement économique régional et de l'importance des consultations.

Je voudrais élaborer un peu sur le sens des consultations qui seront tenues dans toutes les régions du Canada. Je crois que le premier thème qu'on devrait reconnaître-et je crois que c'est un thème partagé par tous les députés de ce Parlement-c'est l'urgence d'acquérir de nouvelles qualifications pour le travail.

On a un deuxième thème, aussi, qui est de s'adapter aux changements qui se produisent sur la scène mondiale. C'est aussi, comme le troisième point, de repenser le rôle de l'État, et, quatrièmement, de mettre l'économie sur une bonne voie, et enfin, cinquièmement, de s'assurer un climat financier meilleur et plus sain.

Le but de ces consultations est de revoir en profondeur où va cette fédération canadienne, où va le gouvernement du Canada et de quelle façon on peut venir en aide au développement des régions, dont le comté de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine.

Dans le premier thème, par exemple, on parlait d'acquérir des qualifications. Je crois qu'il est important de reconnaître que plusieurs jeunes de ma région et même dans l'ensemble du Québec ne terminent pas leur secondaire V. Je crois qu'il est important de reconnaître que le gouvernement a un très grand rôle à jouer pour inciter non seulement les jeunes, mais aussi les institutions scolaires et l'entreprise privée, à être partenaires dans la relance de l'éducation de nos jeunes, car c'est la seule façon dont on pourra s'en sortir.

Quand on revient au deuxième thème, qui est de s'adapter aux changements mondiaux, il est certain que le monde d'aujourd'hui est très différent de l'époque qu'on a connue entre 1945 et 1960. Aujourd'hui, on reconnaît la montée de certains pays comme la Corée et Taiwan.

(1515)

Enfin, je ne parlais pas du cas du Japon ou encore de la Chine, mais il est certain qu'on vit dans un contexte où il y a eu, comment dire, une mondialisation des marchés. Il est certain que c'est un thème qui demande beaucoup de réflexion, mais aussi beaucoup de préparation. Je crois qu'on doit reconnaître, en tant que Canadiens, surtout des gens en région, que si nous voulons faire partie de ce nouveau contexte, de ce nouveau marché mondial, on doit s'équiper.

Le gouvernement fédéral tient certainement compte avant tout d'inviter les Canadiens à penser, à réfléchir et à trouver des solutions pour s'en sortir, à cause de cette mondialisation des marchés.

On revient au troisième thème qui est de repenser le rôle de l'État. Autrefois, quand on ne connaissait pas l'époque des déficits, c'est quand le gouvernement était capable de tout faire. Justement, on faisait toujours appel à l'interventionnisme gouvernemental, soit fédéral, provincial, municipal, de venir en aide à la population, de leur dire comment faire et quoi faire.

On l'a connu en régions, par exemple avec des programmes qui ont été lancés, non seulement par le gouvernement du Canada, mais aussi avec le concours du gouvernement du Québec et les instances locales. Ça n'a pas toujours marché. Il est vrai qu'il y a eu plusieurs échecs. Mais malheureusement, aujourd'hui, il est évident que ces vieilles formules ne fonctionnent plus. C'est pour ça qu'on fait appel à une nouvelle façon de voir, soit à un nouveau partenariat.


8353

Quand on demande au gouvernement d'intervenir localement, c'est d'inciter avant tout la petite entreprise à créer des emplois. Ce n'est plus au gouvernement à le faire. Il faut trouver des moyens financiers, des leviers financiers pour encourager la petite entreprise à dire: «Nous, on se prend en main. On consulte les gens qui nous entourent, mais on décide d'une politique locale qui souscrit à une politique provincial et qui s'encadre bien dans une politique nationale pancanadienne».

Je crois qu'il est important de souligner l'aspect pancanadien parce que beaucoup d'échanges du Québec dépendent du Canada tout entier. Je crois que le Québec dépend beaucoup d'un Canada en santé, vibrant, qui a une économie qui est toujours en développement.

Alors, si on encourage par exemple la séparation des pouvoirs, ou que le Québec quitte la fédération canadienne, il y a de fortes chances qu'un Canada scindé, divisé d'est en ouest, avec cette pierre angulaire qu'est le Québec qui n'est plus, aura sûrement des problèmes à moyen et à long terme.

Je crois que c'est dans les intérêts des Québécois, c'est dans les intérêts de l'opposition même que le Québec demeure enfin une partie vibrante de cette fédération canadienne.

On parle de remettre l'économie sur la bonne voie, et on parle de la confiance du monde des affaires. Ça, il ne faut pas l'oublier; cette confiance sera maintenue à la condition que le Canada demeure uni et entier. J'entends l'opposition dire: «Le Canada ne fonctionne plus». Mais, après tout, le Canada fait partie du G-7. Je comprends qu'on vit des difficultés économiques, mais Pierre Bourgault, il y a quelque temps, et je le cite, admettait que «la séparation serait coûteuse, même si elle contribue à promouvoir des motifs autres qu'économiques.»

Alors, selon M. Bourgault, ce grand nationaliste, fondateur du RIN, si le Québec quitte, ça va être pire pour les Québécois. Qu'est-ce qu'on offre, nous, en tant que consultation pour reformuler la fédération? La fédération canadienne, c'est quand même une fédération qui permet des ententes administratives. On a des centaines d'ententes administratives au niveau provincial, non seulement avec le Québec, mais avec d'autres provinces. Je crois que c'est ça le génie du fédéralisme, et il ne faut pas l'oublier. C'est la seule façon de s'en sortir.

Je crois qu'il me reste très peu de temps, mais j'aimerais parler de ces nouvelles mesures fiscales, non seulement entre la fédération et les provinces. Je crois qu'il y a moyen de moduler nos ententes et de trouver une formule au niveau régional. On l'a souvent vu en région, dans le Bas-Saint-Laurent, en Gaspésie, grâce à la participation directe du gouvernement du Canada.

Je peux vous citer quand même le Plan de l'Est, les interventions du BFDRQ qui relève du ministère des Finances. Grâce à leur intervention pointée, grâce à leur intervention directe auprès des petites entreprises, souvent ces entreprises-là ont su se rétablir, se développer et exporter à des marchés non seulement au Québec, mais pancanadiens et bien entendu d'outre-mer, dont l'Europe et tout dernièrement l'Asie.

(1520)

Alors, il est certain que ces mesures fiscales qu'on proposera grâce à l'intervention de tout le milieu, soit des gens des régions, des gens de la ville, de l'opposition, des intellectuels et des chefs d'entreprise, je crois que c'est une consultation commune qui va garantir la reprise de l'économie canadienne. Ce n'est pas en encourageant la séparation du Québec ou en disant que le Québec peut s'en sortir seul. Non, c'est le contraire, les Québécois sont conscients que, depuis 125 ans, ça fonctionne. On peut s'entendre, on peut développer une économie qui va durer encore plusieurs années, et je crois qu'on va faire face au prochain siècle ensemble, unis. C'est seulement en passant par la Fédération canadienne que les Québécois vont s'en sortir.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les remarques de mon collègue. Ce qui m'a frappé surtout, c'est lorsqu'il nous a décrit, en parlant de la PME, les petites industries, en disant qu'on devrait créer un climat de confiance pour permettre aux PME de créer de l'emploi afin de permettre à ces gens de pouvoir investir.

Ma question est la suivante. Il y a une quinzaine de jours, dans l'ombre du Parlement, un comité méconnu de l'ensemble de mes honorables collègues a fait échec à un projet de certains députés libéraux pour créer un climat d'incertitude concernant des investissements potentiels dans le domaine des produits pharmaceutiques. Il s'agit du projet de loi C-91. J'aimerais connaître la position du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine vis-à-vis de ces investissements qui ne se font pas actuellement, parce que l'incertitude du gouvernement place ces gens dans une difficulté de pouvoir investir. Cela représente beaucoup de sous et beaucoup de millions, ainsi que des emplois, et des emplois très très bien rémunérés.

M. Gagnon: Monsieur le Président, justement, je crois que le député d'en face comprend l'enjeu assez bien, que le financement du gouvernement fédéral, surtout dans l'industrie pharmaceutique, s'est fait très bien sentir au Québec.

On a connu le projet de loi C-22, par la suite le projet de loi C-97, et je crois qu'il y a quand même un engagement, enfin à mon avis, qu'on devrait maintenir cette politique, telle qu'énoncée dans le projet de loi C-91, dans le domaine de la pharmacie au Québec.

Il est certain qu'une bonne partie de l'économie montréalaise dépend de ces technologies. Mais c'est quand même une reconnaissance de l'opposition que c'est grâce à cette politique fédérale qu'on a su concentrer cette entreprise, enfin cette industrie de haute technologie à Montréal et au Québec.

Il est certain que, advenant l'indépendance ou le départ du Québec, il serait fort probable que ces industries décideront de quitter la belle province pour aller ailleurs. Après tout, ce qui est important pour ces compagnies-là c'est, avant tout, un esprit de confiance mais aussi une assurance que le gouvernement fédéral pourra maintenir ce marché et pourra maintenir les critères qui sont si importants pour les compagnies pharmaceutiques qui désirent demeurer, oeuvrer, exploiter et prendre de l'expansion dans la belle province.

Je crois qu'il ne faut pas négliger ce côté de confiance. Tout investisseur sait que ce qui est important, c'est la stabilité politique. C'est l'assurance que le pays y sera, malgré les difficultés qu'on connaît. Vous savez, on a connu des difficultés à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, un taux d'endettement très élevé per capita au Canada, mais on s'en est sorti. Les gens ont vu l'avenir avec confiance. Ils ont constaté qu'il y avait beaucoup à faire ensemble. Mais en séparant le Québec du Canada, malheu-


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reusement, on va perdre non seulement des avantages fiscaux, tels ceux garantis par le projet de loi C-91, mais aussi l'avantage de faire partie d'un partenariat économique qui, franchement, a fait ses preuves.

(1525)

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, je demanderais au député des Îles-de-la-Madeleine, lui qui est si soucieux du développement économique pour le Québec, pour le Canada, pour le monde aussi, s'il est aussi soucieux du développement économique aux Îles-de-la-Madeleine? S'il se soucie, par exemple, de ce qui apparaît ce matin dans son journal local, à la page éditoriale, où on dit que la ministre de l'Environnement, dans une émission de télévision, a tout confondu dans l'histoire du Irving Whale; qu'elle parlait des estacades qui devaient ramasser le pétrole en cas de catastrophe, et elle disait que les estacades étaient dans le fond de l'eau, que le bateau aussi qui devait recueillir le pétrole en cas de catastrophe, se trouvait lui aussi dans le fond de l'eau?

Je lui demanderais, avec une ministre qui ne semble pas maîtriser un dossier qui est pourtant crucial pour l'avenir économique et touristique des Îles-de-la-Madeleine, et qui peut créer une des pires catastrophes écologiques de la région, s'il n'est pas inquiet, justement, et s'il ne devrait pas voir à son affaire, dans son comté, et voir à ce que le Irving Whale, son renflouage se fasse de façon plus compétente que celle que nous présente la ministre de l'Environnement? Je me demande s'il a vraiment le souci du développement économique ou bien si c'est uniquement des belles paroles, des capsules, des «flashes» appris par coeur qu'il nous présente tous les jours et quelquefois avec des éléments qui sont un petit peu étranges?

Alors, je lui pose la question, parce que je trouve que c'est très sérieux ce qui se passe aux Îles-de-la-Madeleine, et je pense qu'il devrait prendre son travail au sérieux et non pas uniquement faire de beaux discours avec des paroles apprises par coeur. Le Irving Whale, c'est sérieux pour les gens des Îles-de-la-Madeleine, c'est sérieux pour les gens du Québec. Alors, qu'il réponde, monsieur le Président.

M. Gagnon: Monsieur le Président, je suis heureux de savoir qu'enfin l'opposition s'intéresse aux régions, surtout celle des Îles-de-la-Madeleine. Je voudrais faire remarquer au député que c'est le député Patrick Gagnon, de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, ainsi que mon collègue de Malpèque qui ont alerté les médias de l'importance et du danger que représentait le Irving Whale, même avant que la ministre de l'Environnement en prenne connaissance.

La ministre, enfin, la responsable de l'Environnement, le ministre des Transports et le gouvernement du Canada ont prêté leur concours. Ils ont reconnu l'importance de sortir cette épave qui se retrouvait sous l'eau depuis déjà une vingtaine d'années. Croyez-moi, je suis personnellement très conscient de l'importance. D'ailleurs, je remercie le député d'en face de quand même démontrer son intérêt, car, il ne faut pas l'oublier, ce n'est pas avec l'aide ou la coopération du Bloc qu'on a su garantir l'intérêt du gouvernement fédéral d'agir.

Nous avons agi. J'ai consulté les gens, avec mon collègue de Malpèque, au mois de février dernier, et c'était la priorité du député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine. Et croyez-moi, la priorité, pour moi, il est certain, c'est non seulement le développement économique des îles, mais aussi l'intégrité de son environnement. Car, à mon avis, et c'est partagé par tout le monde, malgré les objections de l'opposition, nous, on s'occupe de notre affaire, et malheureusement l'opposition vient tout juste de découvrir ce danger écologique qui existait depuis déjà un certain temps.

Il est malheureux que l'opposition ne s'est pas prêtée à nous, ne nous a pas encouragés dans nos consultations. Tout ce qu'ils ont su faire, c'est trouver des fautes et faire de la petite politique aux dépens des Madelinots et de la santé écologique de l'île.

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, je vais essayer d'être bref, malgré j'aurais eu plusieurs choses à dire. En étant bref, j'aimerais d'abord dire à la Chambre, malgré tout le respect que je dois à mon confrère d'en face, que ce n'est pas le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, ce n'est pas le député de l'Île-du-Prince-Édouard qui ont alarmé les journalistes, c'est le docteur vétérinaire aux Îles-de-la-Madeleine qui a sensibilisé la population, qui a sensibilisé le gouvernement là-dessus.

La deuxième chose que j'aimerais mentionner, pourquoi n'y a-t-il pas eu d'audience publique organisée par le gouvernement là-dessus? Ce sont des choses qui ont été organisées par le député, et ensuite la ministre est arrivée avec une annonce, qu'il y avait deux, trois projets pour renflouer le Irving Whale.

(1530)

Cependant, ce que la population veut, c'est que la cale de ce bateau soit vidée afin d'éviter qu'il y ait une catastrophe. Quand on parle de développement régional, le mandat du gouvernement fédéral est de s'assurer qu'au niveau national il y ait des eaux propres, de façon à ce que les plages entourant les îles de la Madeleine soient fréquentables et que le tourisme puisse continuer; ça c'est du développement régional.

M. Gagnon: Monsieur le Président, je pense que mon collègue et moi sommes très sensibles à l'environnement de la région soit en Gaspésie ou aux îles de la Madeleine. Mais je dois vous dire ceci: je suis entré ici comme député le 1er novembre; la première semaine de février, à peine deux mois plus tard, j'avais organisé des rencontres populaires aux îles de la Madeleine et sur l'île du Prince-Édouard. Je crois que j'ai rempli mon devoir de député pour défendre et promouvoir les intérêts des miens. C'est certain, je suis le premier concerné, le premier inquiet à savoir que s'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans cette affaire, on sera sensibilisé.

En conclusion, nous avons consulté la population. Oui, c'est vrai, il y en a d'autres qui nous ont démontré qu'il y avait un problème. Mais cela fait déjà une vingtaine d'années qu'on en parlait à l'île du Prince-Édouard et c'est grâce à cette coopération des îles de la Madeleine et de l'île du Prince-Édouard qu'on va sortir ce Irving Whale. C'est grâce au gouvernement libéral et c'est bien entendu grâce au concours des ministres responsables que nous avons ici.


8355

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir participer au débat.

Au cours du mois qui vient de s'écouler, des douzaines de Canadiens ont comparu devant le Comité des finances pour lui faire part de leurs priorités en vue du prochain budget. Ils ont exprimé à peu près toutes les opinions possibles quant à ce qu'il faut faire ou ne pas faire. Les consultations prébudgétaires ont cependant démontré un fait très important, à savoir qu'il existe un consensus parmi les Canadiens quant à la nécessité d'éliminer le déficit. Il ne s'agit plus de savoir s'il faut le faire, mais comment et quand le faire.

La semaine dernière, un de mes collègues et moi-même avons fait quelque chose d'assez singulier. Nous avons demandé à faire un exposé devant notre propre comité et nous avons proposé un objectif très clair, soit l'élimination du déficit en trois ans. Nous avons donné 25 exemples précis de réductions de dépenses qui nous permettraient d'atteindre cet objectif.

Nous n'avons pas tenté de cacher la vérité aux Canadiens de quelque façon que ce soit ou pour quelque raison politique que ce soit. Nous avons été francs et leur avons dit qu'il faudrait réduire les dépenses d'environ 25 milliards de dollars, après une croissance des recettes de 15 à 16 milliards de dollars, si nous voulons réduire le déficit actuel de 40 milliards. Cela signifie qu'il faudra réduire de 12 à 16 milliards, vraisemblablement 15 milliards, les dépenses des programmes sociaux en trois ans, non pas en une année mais en trois ans.

Nous n'étions pas obligés d'agir de la sorte. Nous n'avions pas à utiliser cette approche. Du point de vue politique, il aurait été beaucoup plus facile de ne rien dire et de critiquer le gouvernement une fois qu'il aurait déposé son budget. C'est ce que la plupart des partis d'opposition, les partis traditionnels ont fait jusqu'ici. C'est ainsi que les choses se passent habituellement. Je suis sûr que les députés ministériels qui siégeaient pendant la dernière législature ont été les plus habiles à ce jeu.

Les députés réformistes ne sont pas venus à Ottawa pour se prêter à de tels jeux. Nous considérons les finances nationales trop importantes pour cela. Cette question constituera notre priorité à la Chambre pendant toute la durée de la législature. Nous sommes venus ici pour changer la façon de faire de la politique dans ce pays.

La proposition que nous avons faite au comité n'était pas superficielle. Nous avons commencé à travailler à ce projet immédiatement après le dépôt du dernier budget du gouvernement. Pendant neuf mois, les porte-parole du Parti réformiste ont examiné chaque programme gouvernemental relevant de leur compétence et ils ont évalué ces programmes à la lumière de cinq principes de base que nous avons énoncés dans notre exposé. C'était pour nous la meilleure façon de proposer une solution de rechange constructive au programme budgétaire du gouvernement.

Au cours des dix minutes dont je dispose, je voudrais parler de la réaction du gouvernement à cet exposé. Je tiens en particulier à parler de deux critiques précises que nous ont adressées le gouvernement et d'autres membres du Comité des finances. Je crois qu'il est important d'en parler parce qu'elles touchent directement ce qui distingue le Parti réformiste du parti au pouvoir dans ce pays.

(1535)

Tout d'abord, le député de St. Paul's m'a simplement demandé: «Qu'est-ce qui vous amène à vous adresser au comité?» Une question simple. Nos propositions et nos recommandations sont fondées sur le fait que nous sommes convaincus que le plan du gouvernement en vue de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB d'ici 1997 ne sera pas suffisant pour régler le problème de la dette, car nous savons que même en ramenant le déficit à 3 p. 100 en 3 ans, la dette accumulée à la fin de trois années dépassera de beaucoup 600 milliards de dollars.

À mon avis, ce que le député voulait savoir, ce n'était pas ce qui amenait le Parti réformiste à s'adresser au comité mais plutôt ce qu'il avait à proposer. Tout le monde reconnaît que l'élimination du déficit en trois ans n'est pas une fin en soi. C'est un moyen vers une fin. Quelle est cette fin aux yeux du Parti réformiste? Quelle est notre vision du Canada?

Fait surprenant, si vous comparez ce que le gouvernement a dit dans son livre gris et ce que le Parti réformiste a dit dans l'exposé qu'il a fait au Comité des finances, vous constaterez que l'analyse financière et économique n'est pas tellement différente. En fait, le livre gris du gouvernement se rapproche davantage de la position réformiste que le livre rouge sur lequel le Parti libéral a fondé sa campagne électorale en 1993.

Par contre, il existe des différences fondamentales au niveau de notre perspective du Canada. Les réformistes sont pour que le gouvernement intervienne moins dans l'économie; pour la réduction des impôts, pour laisser plus de souplesse aux gouvernements municipaux et provinciaux. Ces propositions font, croyons-nous, peur aux libéraux. Pourquoi? Nous posons la question. Pourquoi? Parce que, alors que les réformistes sont en faveur de donner plus de pouvoir au peuple, les libéraux sont encore en faveur de donner plus de pouvoir aux bureaucrates. Alors que les réformistes font confiance aux individus, les libéraux font encore confiance au gouvernement. Alors que les libéraux ne semblent pas penser que les Canadiens peuvent se prendre en charge, nous croyons qu'ils le peuvent.

Même s'il importe de connaître leurs convictions et leur vision de l'avenir, les partis politiques du Canada ne doivent pas nous détourner du problème immédiat, qui n'a rien à voir avec les questions d'allégeance ou d'opinion politique. C'est le problème de la dette, un problème majeur.

La dette est en train de tuer le pays. Elle détruit des emplois. Elle anéantit tout esprit d'entreprise et toute créativité. Elle détruit notre filet de sécurité sociale et notre régime d'assurance-maladie. Elle n'a rien à faire des politiques et des priorités. Elle ne favorise aucun enjeu et n'évite aucun problème. Elle anéantit l'égalité des chances. Elle tuera notre pays si nous ne


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faisons rien pour l'enrayer. Si nous ne réglons pas le problème de la dette avant que nos créanciers le prennent en main, le Canada tel qu'on le connaît aujourd'hui cessera d'exister.

C'est ce qui m'amène à la deuxième critique que j'ai entendue à l'endroit de notre exposé. Celle-ci m'a réellement choqué. Elle portait sur nos 25 recommandations pour la réduction du déficit et les réductions de 12 à 16 milliards de dollars qu'il faudrait faire dans nos programmes sociaux sur les trois prochaines années. Des membres du comité et d'autres ont dit qu'agir ainsi serait renier nos responsabilités sociales envers les Canadiens. Rien n'est plus loin de la vérité.

Les réformistes ne sont pas venus à Ottawa pour affamer davantage les enfants pauvres. Nous ne sommes pas ici pour détruire les programmes sociaux et laisser les plus vulnérables et les plus malchanceux de notre société sans recours et sans abri. Le débat consiste à déterminer quand et comment nous pourrons éliminer le déficit. Il ne s'agit pas de savoir quel parti est le plus humain envers les Canadiens. Le bien-être des Canadiens nous tient tous à coeur. Mais il faut faire ce qui doit être fait. Le Parti réformiste ne s'excusera pas de dire la vérité aux Canadiens.

La vérité, c'est que les programmes sociaux doivent être ramenés de quelque 67 milliards de dollars à 50 ou 60 milliards, que cela nous plaise ou non. Si notre filet de sécurité sociale s'effondre parce que le gouvernement n'a pas su planifier et prendre les mesures qui s'imposent aujourd'hui, les démunis seront les premiers à souffrir et ce sont eux qui souffriront le plus.

(1540)

Les ministériels accusent les réformistes d'abdiquer leurs responsabilités sociales envers les Canadiens, mais depuis plus d'un an qu'ils sont au pouvoir, ils n'ont rien fait pour s'attaquer à la dette qui étouffe notre pays. En trois ans, le gouvernement aura laissé la dette grimper d'un montant additionnel de 97 milliards de dollars. Si le Canada s'écroule, qui sera coupable? Les créanciers internationaux ne demanderont pas au gouvernement canadien qui est responsable. Les créanciers internationaux diront alors au gouvernement canadien qu'ils ne lui prêteront de l'argent qu'à la condition qu'il réduise de 30 à 40 p. 100 tous ses programmes sociaux et nous verrons alors qui aura abdiqué ses responsabilités sociales envers les Canadiens.

Aujourd'hui, nous avons l'occasion de mettre de l'ordre dans nos finances. Je ne promets pas une tâche facile, mais il y a des signes encourageants. L'économie est en hausse et, d'un océan à l'autre, les Canadiens nous disent qu'ils sont disposés à accepter des coupes. Certains se demandent si ce n'est pas le meilleur moment pour le Canada d'éliminer la dette. Je le crois.

L'alternative est très simple: décider où et quand nous allons faire des coupes ou laisser d'autres le décider pour nous. Si le gouvernement laisse la décision à d'autres, ce ne sera pas une consolation pour moi de désigner quel parti aura vraiment abdiqué ses responsabilités envers les Canadiens.

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, mon collègue ne croit-il pas que, comme les dépenses publiques font partie de la demande globale, une réduction trop rapide de ces dépenses aurait pour effet de ralentir la croissance et de nous replonger peut-être dans une récession?

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, ce n'est pas l'avis du Parti réformiste. Le produit intérieur brut du Canada s'élève à environ 750 milliards de dollars. Nous envisageons une réduction des dépenses publiques de l'ordre de 25 milliards de dollars.

C'est peu. Selon nous, cela ne peut avoir aucun impact important sur la croissance économique. Nous croyons plutôt que ce genre de mesure rétablira la confiance dans notre économie, stimulera la croissance économique et favorisera l'emploi. À long terme, ce sera certainement mieux pour le Canada.

Mme Catterall: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je ne veux pas interrompre la période réservée aux questions et aux observations, qui n'est pas encore terminée, mais je tenais à vous informer que les prochains orateurs du parti ministériel sont le député d'Elgin-Norfolk et le député de Notre-Dame-de-Grâce et que, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, ils partageront leur temps de parole.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, mon collègue de Lethbridge dit que son parti est voué à aider les plus démunis. Je trouve ça irréel, étant donné tout ce qui a été dit au Comité des finances par lui et ses collègues aussi à l'égard des Maritimes, du Québec, de l'Ontario ou de l'Ouest. C'est un non-sens, ça sonne faux. Ça sonne faux de dire qu'on va couper 16 milliards de dollars, d'ici les trois prochaines années, dans les programmes sociaux, pour sauver les plus démunis. Imaginez-vous quelle déformation de la réalité cela peut être.

Ils ne présentent pas la réalité, ils déforment la réalité. Quand ils disent au gouvernement que la seule façon de mettre de l'ordre dans les finances publiques, c'est de couper encore plus que le gouvernement ne l'a fait dans l'assurance-chômage, dans le régime d'assistance publique du Canada, dans l'éducation postsecondaire, dans des programmes concernant les personnes du troisième âge, est-ce cela, aider les plus démunis? Est-ce cela, leur souci de justice sociale? Par contre, si on parle d'iniquité dans la fiscalité, ils nous ferment la porte à double tour.

(1545)

C'est ça, le souci qu'ils ont pour les Canadiens et les Canadiennes les plus démunis. Le seul souci qu'ils ont, c'est que les privilèges des très riches Canadiens, des très grosses entreprises, en ce qui concerne les iniquités fiscales qui s'appliquent à des deux catégories de contribuables, soient maintenus. C'est ça, leur intérêt dans le débat, uniquement.


8357

[Traduction]

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, en réplique au député du Bloc québécois, je tiens à dire que nos idéologies diffèrent complètement. Il y a deux façons d'aborder les problèmes économiques de notre pays, l'énorme dette, le déficit annuel de 40 milliards de dollars et un déficit qui ira croissant à en juger d'après le plan du gouvernement libéral qui veut le réduire à 3 p. 100 du PIB. L'une consiste à faire montre de prudence financière et à tâcher de vivre selon nos moyens. L'autre consiste à augmenter les impôts.

Depuis que je siège à la Chambre, j'ai appris que le Bloc québécois adopte une approche socialiste, néo-démocrate, pour résoudre les problèmes économiques. Ces députés devraient dire aux Canadiens-et j'espère que ceux-ci l'entendront-qu'ils veulent augmenter les impôts. Ils ne veulent pas réduire les dépenses d'une façon responsable. Ils croient qu'il y a des riches qui rempliront les coffres de l'État, de sorte que le gouvernement puisse dépenser davantage. Nous, au Parti réformiste, ne croyons pas ça; nous ne le croyons absolument pas.

Nous croyons que les Canadiens veulent plus d'indépendance. Ils veulent être libres de dépenser leur propre argent. Ils veulent pouvoir disposer de plus de capitaux à investir dans leur propre avenir et celui de leur famille. Ils veulent que l'État leur fiche la paix, que l'État intervienne moins dans leurs affaires. Voilà la meilleure façon de régler nos problèmes de déficit et autres problèmes économiques.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour traiter de la politique économique du gouvernement libéral qui, hélas, imitant ses prédécesseurs, n'a pas pris les mesures que dicte la gravité de notre crise financière, si bien que les Canadiens courent tout droit à la faillite.

Lorsqu'il siégeait dans l'opposition, le ministre des Finances a dit, dans sa réponse au budget conservateur de 1993:

Ce qui surprend le plus dans ce budget, c'est qu'alors que les contribuables canadiens semblent prêts à s'attaquer de front au déficit, le ministre des Finances leur a plutôt servi du réchauffé, dans un contexte optimiste à faire rêver.
Il a ajouté:

Les libéraux proposent de relever ce défi en l'abordant de front.
Par son premier budget, le ministre des Finances ne se démarque guère de ses prédécesseurs qui, depuis 20 ans, refusent de tenir les promesses qu'ils avaient faites lorsqu'ils étaient dans l'opposition.

Le service de la dette est maintenant le poste le plus important des dépenses fédérales, ce qui est une lourde ponction dans les fonds que nous pourrions affecter aux programmes. En 1981, la part de chaque Canadien dans la dette directe des gouvernements fédéral et provinciaux était de 4 500 $. Aujourd'hui, nous avons franchi le cap des 25 000 $. Avant qu'un seul dollar des recettes ne soit redistribué, avant qu'un cent ne soit affecté aux programmes sociaux ou à d'autres programmes, il faut payer chaque année 2 200 $ en intérêts pour chaque Canadien.

Le plus triste, c'est que, pour y arriver, nous empruntons, ce qui ne fait qu'alourdir la dette et aggraver nos problèmes. À la vérité, les politiques de dépenses actuelles du gouvernement libéral menacent directement le bien-être de tous les Canadiens. Les libéraux ont reconnu qu'en voulant ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB annuel, ils ajouteront près de 100 milliards de dollars à la dette. En quoi cela règle-t-il le problème?

En continuant d'augmenter les impôts et de dépenser, les libéraux n'ont rien changé à la Chambre, sauf le côté où se trouvent leurs fauteuils et le visage des ministres. Les pierres angulaires de notre société, comme les soins de santé, l'éducation et les programmes sociaux, sont toutes menacées parce que les Canadiens sont obligés d'emprunter 89 millions de dollars par jour ou 625 millions de dollars par semaine pour financer la dette.

Si le ministre des Finances croit vraiment qu'il respecte sa promesse de s'attaquer de front au déficit, je crois qu'il est incompétent. Dans cette situation, les subterfuges et l'inaction sont inhumains, et le gouvernement rend un très mauvais service à notre pays en s'amusant avec l'argent d'autrui, celui des contribuables.

(1550)

Notre économie et nos revenus ont toujours connu une croissance plus lente que notre dette, et nous empruntons actuellement pour payer l'intérêt sur cette dernière. Cette situation ne peut plus durer. Nous dépensons l'argent de nos enfants et de nos petits-enfants. Nous hypothéquons leur avenir à un taux alarmant. Cet après-midi, j'ai entendu la voix d'un enfant en provenance de la tribune. Cet enfant devra rembourser l'argent que nous empruntons et que nous dépensons aujourd'hui.

Nos enfants ont-ils leur mot à dire dans la façon dont nous dépensons ce qu'ils gagneront demain? Cela ne préoccupe-t-il pas le gouvernement libéral? Lorsqu'ils rentreront à la maison ce soir, j'invite les libéraux à regarder leurs enfants et leurs petits-enfants et à réfléchir à ce que sera leur existence avec des programmes sociaux qui ne seront plus que l'ombre d'eux-mêmes. Le gouvernement aura en effet emprunté au point de les sacrifier.

Il est grand temps d'agir. Le gouvernement devrait établir ses priorités de dépenses. Si les soins de santé viennent au premier rang, ils devraient constituer sa priorité numéro un, et le gouvernement devrait cesser de réduire la part des transferts annuels aux provinces. Si les programmes sociaux viennent au deuxième rang de ses priorités, le gouvernement devrait restructurer ces programmes de manière à ce que seuls ceux qui en ont vraiment besoin puissent en bénéficier, et non pas tout le monde.

C'est une question de bon sens. Les familles se servent de leur bon sens depuis des années lorsqu'elles planifient leur budget, et les députés qui ont des familles doivent évidemment faire de même à la maison. Pourquoi alors oublient-ils cela lorsqu'ils sont à la Chambre? Pourquoi n'appliquent-ils pas les mêmes principes lorsqu'ils forment le gouvernement ou lorsqu'ils sont ministres? Pourquoi ne gèrent-ils pas l'argent des contribuables


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comme ils gèrent leur budget familial? Peuvent-ils réhypothéquer leur maison pour payer les intérêts sur leur emprunt initial? Nous savons tous les deux que la réponse est non. La banque saisirait la maison. Nos créanciers vont prendre possession de notre pays et nous devrions faire quelque chose avant qu'ils nous l'enlèvent.

Nous devons vivre selon nos moyens. Si le gouvernement fédéral n'a que des recettes de 126 milliards de dollars, il ne devrait pas dépenser plus. Est-ce si difficile à comprendre? Pourquoi augmentons-nous toujours la dette par des dépenses excessives? Pourquoi ne commençons-nous pas à vivre selon nos moyens avec les recettes qu'une économie forte peut produire, envoyant du même coup les bons signaux aux investisseurs et aux autres pays?

Appliquons l'idéologie libérale et faisons le tour du Canada de l'avenir comme s'il s'agissait de la maison du gouvernement libéral. D'abord, la maison serait hypothéquée à raison de 650 milliards de dollars. Et ce serait dans quelques années seulement. Le tapis à l'entrée serait subventionné. En entrant, on verrait d'abord des bottes et des vêtements d'hiver usés, la famille n'ayant pas les moyens d'en acheter d'autres à cause des paiements hypothécaires et des impôts.

On remarquera ensuite que tout le monde semble être heureux en regardant, à la télévision, les tours de magie conçus par les hauts salariés de la SRC avec l'argent de ses impôts.

En passant dans la cuisine, on remarquera une facture d'épicerie accrochée sur le devant du réfrigérateur. On serait surpris du coût des aliments, mais au moins les libéraux auraient tenu leur promesse de supprimer la TPS, cette taxe honnie. Et qu'y a-t-il encore sur la facture, sinon une taxe nationale à valeur ajoutée de 15 p. 100? Dégoûté, on détourne les yeux, on aperçoit un recueil de remèdes maison sur la table de cuisine et on constate que les compressions des libéraux dans le secteur des soins de santé commencent à se faire lourdement sentir.

On se dit alors qu'au moins après toutes ces années de cotisation les parents vont enfin toucher leurs REER. Or, les libéraux ont peu à peu miné ce type de programmes avec leurs mesures fiscales, notamment celles à l'égard des gains en capital. Et qu'advient-il du RPC? Eh bien, le programme ne dispose pas des fonds nécessaires pour combler la pénurie de recettes.

Compte tenu des habitudes de dépense du gouvernement actuel, cette maison fictive gérée par les libéraux n'est pas si fictive que cela. Eh bien, je ne veux pas y vivre. Et voilà pourquoi j'évoque les problèmes auxquels nous sommes confrontés et propose certaines solutions pour nous en sortir. Nous voulons rien de moins qu'un budget équilibré dans trois ou quatre ans. En adoptant cette proposition du Parti réformiste, on bâtira une nouvelle maison au Canada qui sera bien meilleure que celle des libéraux.

Considérons quatre avantages que les Canadiens retireraient d'un programme d'élimination du déficit. Pour commencer, l'hypothèque baisserait à l'échelle nationale-580 milliards de dollars au lieu de 650 milliards de dollars. Ce n'est pas rien. Nous aurons ainsi une maison à prix abordable puisque nous pourrions commencer à effectuer des paiements au titre de l'intérêt et du capital et, en l'espace de 30 ans, nous aurions acquitté notre dette. C'est comme ça qu'il faut faire dans nos maisons.

Et puis, pour équilibrer ce budget, il faudrait procéder à une révision complète des programmes. Il serait alors possible de dégraisser l'appareil gouvernemental. Or, ce n'est pas ce que font les ministériels. S'ils avaient procédé à une révision en bonne et due forme, au lieu de consulter des groupes d'intérêts spéciaux un peu partout au Canada, les ministères auraient maintenu les bons programmes, décentralisé certains services pour supprimer le double emploi tout en réduisant les coûts, privatisé quelques sociétés dont le secteur privé saurait mieux tirer parti et éliminé certains programmes qui, compte tenu de nos priorités, sont superflus ou dont les coûts sont au-dessus de nos moyens.

(1555)

Nous pourrions ainsi déterminer le montant que nous devons recueillir, en tant que gouvernement fédéral, ce qui nous donnerait la possibilité, ensuite, de réduire les impôts. On réaliserait des économies grâce à ce processus. C'est le plus grand avantage que les Canadiens en retireraient. Nous laisserions l'argent entre les mains des gens qui l'ont gagné et qui savent mieux comment le dépenser que ceux qui sont élus pour siéger à la Chambre et qui perdent ensuite la tête.

En augmentant le revenu disponible des travailleurs, on relancerait l'économie tout en stimulant la reprise économique actuelle plutôt que de l'étouffer. Si on suivait les recommandations des réformistes, nous serions à nouveau fiers de nous-mêmes, ainsi que de notre gouvernement.

Tout ceci à une époque où la classe politique et les gouvernements voient leurs actions examinées de très près par les contribuables, les éditorialistes, ainsi que les gens qui savent que le problème réside dans l'exagération des dépenses. Si le gouvernement ne contrôle pas ses dépenses, tous les députés dans cette enceinte perdront la confiance des Canadiens. Lentement mais sûrement, c'est tout notre système politique qui sera ainsi miné.

Les recommandations réformistes ont également pour avantage de renfermer une solution pour le Québec. Notre nation englobe le Québec et on donne la chance aux Québécois d'obtenir la meilleure entente possible au sujet de leur rôle dans la Confédération sans pour autant déchirer notre pays ni porter un très dur coup à notre économie et en évitant toutes les incertitudes qui vont de pair avec la séparation qui est censée leur offrir toutes sortes de possibilités.

Il s'agit d'une question très délicate. L'unité nationale est très importante au Canada, et je crois dans le programme économique des réformistes qui consiste à éliminer le déficit. C'est là la différence entre notre proposition et celle des libéraux qui veulent simplement jouer aux durs. Les libéraux parlent beaucoup, mais ne prennent aucune mesure concrète pour résoudre nos problèmes. Ils ne font que mettre de l'huile sur le feu qu'ils essaient d'éteindre. En augmentant notre dette, ils nous frappent durement et aggravent nos problèmes.

Nous disons qu'il faut parvenir à un budget équilibré en trois ans. Pour cela, il s'agit d'éliminer le déficit annuel. Nous aurons alors une dette fixe ou une hypothèque sur notre pays ou notre maison. Il sera possible d'examiner de plus près ces dépenses, de commencer à accumuler un excédent et de ne plus payer simplement les intérêts, mais de rembourser une partie du principal sur


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cette maison dont nous sommes si fiers. Nous voulons que tout le monde continue à profiter des avantages, mais nous ne pouvons continuer à le faire en empruntant toujours plus d'argent et en ajoutant ainsi à notre dette.

Le gouvernement libéral devrait nous écouter. Nous sommes constructifs. Nous lui disons où et comment il devrait sabrer dans ses dépenses sur une période de trois ans, et non d'un an, comme les libéraux ne cessent de le dire. Ils essaient simplement de marquer ainsi des points sur le plan politique. Nous voulons offrir des solutions constructives. Il est temps d'adopter le programme réformiste.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations. Ses propos m'ont laissé un peu perplexe, car il a parlé de la nécessité d'être précis. Or, je ne l'ai entendu faire aucune proposition précise et concrète sur les secteurs où nous devrions comprimer les dépenses gouvernementales.

Je me demande si le député pourrait être plus clair. Ses arguments sont tous raisonnables, mais cela ne suffit pas. Parlons de choses précises, comme du coût d'exploitation de la fonction publique. Nous avons une combinaison de fonctionnaires fédéraux et provinciaux dont le nombre s'élève à 886 000. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante nous dit que ces fonctionnaires reçoivent en moyenne des salaires qui dépassent d'environ 20 p. 100 ceux du secteur privé.

Selon le député, comment peut-on régler un problème de ce genre? Propose-t-il la mise à pied de travailleurs de la fonction publique? Quelle est sa proposition concrète?

M. Silye: Monsieur le Président, comme je l'ai dit dans mon discours, le gouvernement libéral se contente de faire de la politicaillerie. Tout ce qui l'intéresse, c'est de parler sans agir.

Le député de Durham nous demande des détails. S'il écoutait ce qui se passe à la Chambre au lieu d'avoir le nez dans le livre rouge, à tenter encore de trouver les promesses qu'il avait faites pendant la campagne électorale, il saurait que, vendredi dernier, nous avons déposé devant le comité permanent un rapport contenant 25 mesures précises de compression des coûts qui profiteraient au Canada et au Parlement si le gouvernement libéral avait la sagesse de nous écouter, de tenir compte de nos propositions et de les mettre en oeuvre.

(1600)

Nous avons été extrêmement précis. Je me répéterais si je passais ces propositions en revue pendant la période qui m'est allouée. Comme le premier ministre se plaît à nous le dire, lisez le livre rouge, tout y est. Je propose donc ceci au député de Durham: lisez le rapport sur la politique budgétaire que mes collègues ont présenté au Comité permanent des finances. Il constatera que nous y avons fait des propositions on ne peut plus précises.

Pour ce qui est d'être précis au sujet de la fonction publique, est-ce de cela dont le gouvernement s'inquiète? S'inquiète-t-il de ce que les fonctionnaires et les bureaucrates vont penser de lui? Craint-il de ne pas être réélu, de ne pas remporter assez de votes? C'est de cela dont les Canadiens ont marre. Ce sont là des considérations insignifiantes.

Les salaires versés dans la fonction publique sont insignifiants si on les compare à l'ensemble du problème qui existe dans le pays et aux milliards de dollars que le gouvernement gaspille en subventions directes aux entreprises et à l'aide étrangère.

Au cours de la minute qui me reste, je voudrais faire une autre observation. Si nous parvenons à maîtriser les dépenses gouvernementales, nous pourrions alors jeter un coup d'oeil sur cette abomination qu'on appelle la Loi de l'impôt sur le revenu et adopter un impôt uniforme ou un taux unique pour les entreprises et les sociétés. Un député du gouvernement a déjà fait cette proposition. Mais le gouvernement est tellement ignorant des solutions qu'il ne se donne même pas la peine d'écouter ce député. Cela me déçoit.

Le président suppléant (M. Kilger): Il est clair que le député de Calgary-Centre a mal évalué le temps qu'il lui restait, car je peux même autoriser une autre question. Le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a la parole.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, il y a des gens ici qui font de la petite politique et ce sont ceux du Parti réformiste. Le Parti réformiste déforme toutes les propositions que le Bloc québécois a faites qui consistaient justement à couper dans le gras de l'appareil gouvernemental, à faire récupérer, au gouvernement fédéral, 8 milliards de recettes classées dans des créances douteuses, que le vérificateur général, d'ailleurs, a ramenées sur la table la semaine dernière, et à couper dans les subventions aux entreprises de 3,3 milliards. Jamais on a entendu les réformistes parler de cela. Savez-vous pourquoi? Parce qu'ils sont à la fois juge et partie. Ils ont des intérêts dans cette histoire-là.

J'ai une question à leur poser. Je vais leur lire un extrait en anglais, parce que je pense que c'est important, et j'en ferai ensuite une traduction libre. Je voudrais leur demander s'ils sont d'accord avec une petite annonce parue la semaine dernière et que j'ai relevée avec l'aide du fiscaliste bien connu Léo-Paul Lauzon. On y dit à peu près ceci en anglais, et veuillez excuser mon fort accent:

[Traduction]

«Perte financière à vendre. Notre client, un distributeur de produits de beauté, désire vendre une perte financière importante et recherche un acheteur intéressé à profiter de cette déduction d'impôt.»

Êtes-vous d'accord avec cette pratique?


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[Français]

Est-ce que c'est pour cela qu'ils ne daignent pas regarder la fiscalité des entreprises? Il ne s'agit pas d'augmenter les taxes et les impôts, mais de regarder la fiscalité des entreprises et voir s'il n'y a pas d'améliorations à y apporter pour que tout le monde, les particuliers comme les entreprises, les petites, les moyennes et les grosses entreprises fassent leur part. S'ils sont fermés à cela, c'est eux qui font de la petite politique et c'est eux qui n'ont pas l'avenir du Canada à coeur, comme ils le prétendent. C'est eux qui font de la petite politique, autrement dit.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, nous voulons décidément aider les Canadiens à résoudre leurs problèmes. D'après ce que je peux voir, ayant moi-même travaillé avec le député au ministère des Finances, la différence entre le Bloc québécois et le Parti réformiste réside dans le fait qu'ils ne veulent absolument pas toucher de quelque façon que ce soit aux dépenses consacrées aux programmes sociaux, lorsque vient le temps de faire des compressions. Ce domaine est sacré, aux yeux des bloquistes. Ils ne veulent pas réduire les dépenses d'un seul dollar à cet égard. Ce poste représente pourtant 67 p. 100 du budget total. S'ils refusent de s'attaquer au budget dans son entier et acceptent de couper uniquement dans la portion de 33 p. 100 qui reste, les montants coupés seront nécessairement limités. Les dépenses au titre des programmes sociaux doivent être examinées, comme l'a proposé le gouvernement libéral dans son livre gris. Il est important d'en parler et d'agir à ce sujet.

La différence, c'est que nous sommes prêts à procéder à l'examen des programmes sociaux et à recommander certaines compressions, tandis que le Bloc québécois ne l'est pas. Sur le thème de la fiscalité, nous refusons toute augmentation des impôts et taxes. Le Bloc affirme qu'on peut encore augmenter les impôts et qu'en imposant les fiducies familiales, les REER et tous les gens riches de notre société, on réglera le problème. Voilà la différence entre nos façons de voir.

(1605)

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais dire, tout d'abord, que je suis d'accord avec mes collègues et que je partage leurs préoccupations concernant la dette et le déficit. Le déficit a atteint des proportions critiques. Je partage aussi leurs préoccupations à propos des enfants.

Je pense que nous devons prendre immédiatement des mesures pour équilibrer le budget, mais que nous ne devons pas nous servir de la crise budgétaire comme excuse pour régler d'autres problèmes urgents.

Je félicite le gouvernement de s'être engagé à ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB dans les trois années de son arrivée au pouvoir. Étant donné que ce but me semble réalisable, je prie le gouvernement de prendre des mesures pour équilibrer le budget aussi rapidement que possible par la suite.

Certaines personnes se demandent pourquoi la dette pose un problème. Les intérêts annuels sur la dette sont de 44 milliards de dollars. Ce sont 44 milliards de dollars que nous ne pouvons consacrer à l'éducation, à l'infrastructure industrielle, à la recherche ou à une foule d'autres programmes importants. Une autre raison, tout aussi sérieuse, mais plus subtile, c'est que la dette fait augmenter les taux d'intérêt pour tous.

À cause de l'importance de notre dette, des prêteurs internationaux exigent et reçoivent une prime de risque pour se protéger contre une baisse possible de la valeur du dollar canadien. Cette prime de risque ou ces coûts supplémentaires nuisent à tout le marché monétaire et cela se reflète, par la suite, dans le coût d'emprunt. Les consommateurs, les propriétaires de maison, les étudiants et tous les autres emprunteurs paient également cette prime.

L'importance de notre dette rend notre pays extrêmement sensible à une hausse des taux d'intérêt aux États-Unis. Le Canada est obligé de payer une prime sur les taux américains pour attirer des capitaux étrangers. Quand les taux augmentent aux États-Unis, nous n'avons d'autre choix que de les augmenter ici, au Canada. Notre souveraineté diminue sérieusement à mesure que nous perdons le contrôle de notre politique monétaire.

Cela nous empêche de trouver nous-mêmes des solutions à nos problèmes. Le fait de perdre le contrôle de notre économie diminue notre pays et tous ceux qui y vivent. Nous ne pouvons qu'espérer que les forces internationales appuieront notre programme de réduction du déficit.

De plus, aussi mauvaise soit-elle, notre situation deviendra bien pire encore si nous n'agissons pas immédiatement avec discipline et fermeté.

Maintenant que je vous ai dit ce que je pensais de la gravité de ce problème, je voudrais vous parler de la solution. Mes observations pourraient d'intituler «Une bonne façon d'équilibrer le budget par opposition à une mauvaise». Tous reconnaissent que le gouvernement devrait réduire le gaspillage. Réduire le gaspillage est un excellent moyen d'équilibrer le budget. La plupart du temps, il y a du gaspillage dans la façon même dont les programmes sont conçus, et pour cette raison, ce gaspillage n'est pas toujours évident.

Par exemple, les deux gardes-côtières, celle administrée par le ministère des Transports et celle administrée par le ministère des Pêches et des Océans, ont des flottes distinctes dont les fonctions chevauchent. Ma propre circonscription, Elgin-Norfolk, s'étend sur environ 100 milles le long du lac Érié. Un des ports à Port Stanley est administré et bien administré par le ministère des Transports. Les ports moins importants sont gérés par la Direction des ports pour petits bateaux, du ministère des Pêches et des Océans. Ces ports sont souvent négligés à cause du manque de fonds. Quoi qu'il en soit, deux équipes de bureaucrates gèrent côte à côte une ressource similaire. À mon avis, une seule administration pourrait gérer les ports sur la rive du lac Érié. Ce serait mieux fait et moins cher.

On a souligné récemment qu'il y avait du gaspillage dans l'armée. Autrefois, quand l'on maintenait les bases à des fins exclusivement politiques et non à des fins militaires, le gaspillage faisait partie des choses. Maintenant que cela commence à changer, nous devons chercher à quel niveau se situe le gaspillage.

Nous dépensons d'importantes sommes d'argent pour l'achat de matériels de haute technologie comme les CF-18. Les CF-18 ne servent pas au maintien de la paix, mais seraient utilisés au cas, bien improbable, où surviendrait une troisième guerre mondiale ou à titre de contribution symbolique en cas de crise comme celle de la guerre du Golfe.


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Le Canada est actuellement le 12e pays du monde pour ce qui est des dépenses militaires. Je pense que nous pouvons couper les dépenses militaires et arriver à un plus grand dividende de paix tout en maintenant notre contribution au maintien de la paix et en respectant nos besoins sur le plan de la sécurité.

Les réservistes offrent de grandes possibilités en tant que solution moins chère que les CF-18 et autres armes de haute technologie dispendieuses. Dans ma circonscription, les régiments d'Elgin ont fourni neuf hommes à l'armée qui sert actuellement en Bosnie. Les compétences et l'engagement de ces jeunes gens font qu'ils rapportent plus pour chaque dollar que les soldats professionnels. Malheureusement, les réservistes semblent souvent sous-équipés et généralement sous-financés.

Je voudrais à présent parler de la politique fiscale. Je tiens pour acquis ce qu'a laissé entendre le gouvernement, à savoir qu'il n'est pas question d'une augmentation générale des impôts. La classe moyenne de ce pays ne tolérera certainement pas une augmentation générale des impôts. Néanmoins, il y a au Canada une grande disparité des revenus. Les 20 p. 100 qui se situent en haut de l'échelle des revenus touchent 44 p. 100 du revenu national par an, alors que les 20 p. 100 de salariés qui se situent en bas de l'échelle touchent environ 2,7 p. 100. C'est dans ce contexte que nous devons envisager l'équité en matière de politique fiscale. Il n'y a rien de contradictoire entre une imposition équitable et la réduction du déficit. Augmenter les impôts des 20 p. 100 qui se situent en haut de l'échelle serait à mon avis tout à fait approprié à l'heure actuelle.

(1610)

En outre, le gouvernement devrait examiner les dépenses fiscales. Il se prive de 860 millions de dollars en ne taxant pas les gains de loterie. On devrait revoir cela. Les crédits consentis aux couples mariés coûtent plus de 1 milliard de dollars. Le gouvernement devrait faire en sorte que cela profite principalement à la classe inférieure et à la classe moyenne.

Les REER ont fait dernièrement l'objet d'une attention considérable. À mon avis, la contribution annuelle devrait être limitée à 9 000 $, avec changements correspondants aux régimes privés de pension.

Les habitants de ma circonscription viennent juste de sortir de la pire récession que l'on ait vue depuis les années 30. Très peu d'entre eux pourraient même envisager de verser 9 000 $ par année dans leur REER. Les contributions au REER avantagent les plus riches, ceux qui sont assujettis au taux marginal le plus élevé. Cette situation est injuste en soi. Si la loi actuelle n'est pas modifiée, la contribution limite atteindra 15 000 $ par année, mais les travailleurs d'usine ou les agriculteurs d'Elgin-Norfolk ne pourront guère en profiter.

L'abaissement de la limite entraînerait une hausse des recettes gouvernementales de 750 millions à un milliard de dollars par année et redonnerait un peu d'équité au système fiscal.

Dans nos efforts en vue d'équilibrer le budget, il pourrait être indiqué dans certains cas d'accroître les dépenses d'un programme et non pas de les réduire. Je recommanderais au gouvernement de considérer la pauvreté chez les enfants comme une crise urgente à laquelle nous devons remédier non pas en réduisant ou même en gelant les ressources mais en les accroissant. Certains y verront une contradiction, mais je tiens à donner l'assurance à la Chambre qu'il n'en n'est rien.

Le gouvernement a indiqué qu'il devra effectuer des compressions annuelles de plus de six milliards de dollars au cours des deux prochaines années s'il veut pouvoir équilibrer le budget, et accroître ses recettes de 30 à 35 milliards de dollars ou encore réduire d'autant ses dépenses. Il risque d'être difficile, dans ce contexte, de trouver un milliard de dollars supplémentaire pour les enfants qui ont faim au Canada.

Le ministère du Développement des ressources humaines a publié en complément du livre vert un document dans lequel il décrit brièvement une formule améliorée de la prestation fiscale pour enfant qui permettrait d'en porter le montant à 2 500 $ par enfant. Une disposition de récupération s'appliquerait aux revenus de 15 000 $ et plus et ferait en sorte que la prestation serait réduite à zéro pour un revenu familial de 55 000 $. Le coût de ce programme serait d'environ un milliard de dollars.

Je voudrais rappeler en toute déférence à la Chambre que tous les Canadiens ne bénéficient pas de la relance économique et que certains ont toutes les chances de ne pas en profiter. Si le gouvernement ne procède pas à une redistribution équitable des revenus, la relance économique ne fera qu'élargir le fossé entre les riches et les pauvres. Les familles qui sont incapables de s'adapter aux changements rapides de l'économie fondée sur la connaissance se retrouveront sans emploi et leurs enfants en subiront les pires conséquences.

Plus d'un million et demi d'enfants, soit près de 20 p. 100 de la population infantile au Canada, vivent actuellement dans la pauvreté. Dans la plupart des cas, les parents travaillent. Pire encore, dans certaines provinces, entre le quart et le tiers des enfants vivent dans la pauvreté. C'est une situation intolérable. Nous devons nous attaquer à ce problème, même en période de réduction des dépenses. Tout comme nous devons lutter contre les conséquences du déficit, nous devons nous préoccuper des conséquences de la pauvreté chez les enfants.

Les enfants qui vivent dans la pauvreté sont souvent mal alimentés. Selon l'Institut canadien de la santé infantile, les enfants qui ne sont pas nourris convenablement souffrent de troubles de croissance, de déficience intellectuelle et de diverses maladies infectieuses. Ces enfants représenteront un fardeau supplémentaire pour le système de soins de santé et pour le système carcéral une fois devenus adultes.

En résumé, je reconnais comme mes collègues que la dette et le déficit sont des problèmes sérieux. Mais il en va de même de nombreux autres problèmes et celui que j'ai relevé le plus souvent est celui de la pauvreté infantile. Aussi, je demande à tous les députés de se joindre à moi pour demander au gouvernement d'accroître la prestation fiscale pour enfants et de trouver de vraies solutions au problème de la pauvreté infantile.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, j'aurais aimé que mon collègue d'en face nous parle un peu des cotisations de l'assurance-chômage. Nous savons pertinemment que l'an passé, le gouvernement libéral a augmenté cette cotisation de 4,20 $ à 4,30 $ par tranche de 100 $ pour les employeurs et de 3 $ à 3,07 $ pour les employés. Ce qui fait qu'actuellement, c'est de l'argent que l'on retire du marché et qui permettrait non


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pas de subvenir aux besoins des chômeurs mais bien de créer des emplois.

(1615)

De plus, actuellement, dans les réformes proposées, on nous demande de couper au niveau de l'assurance-chômage pour atteindre un objectif de 5,5 milliards de dollars sur trois ans. En plus d'une augmentation, allons couper 5,5 milliards de dollars!

Ma question est la suivante: Qu'arrivera-t-il de tout ça? Que vont devenir les chômeurs? Est-ce que l'on veut simplement faire un partage des chômeurs et des assistés sociaux, puis ensuite faire du pelletage de ces montants aux provinces qui devront assumer à elles seules le coût du bien-être?

[Traduction]

M. Knutson: Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de sa question.

La première chose que je veux signaler, c'est que le programme d'assurance-chômage doit pouvoir être maintenu, comme tout autre programme du gouvernement. Selon moi, quand le budget d'un programme passe d'environ 4 milliards à plus de 18 milliards de dollars en dix ans, cela ne peut plus durer. C'est pourquoi il fallait réformer le programme d'assurance-chômage. C'est l'une des raisons.

L'autre raison, c'est que le programme n'a pas vraiment fait ses preuves, pour ce qui est d'aider les gens à retourner sur le marché du travail. C'est pour cela que le ministre du Développement des ressources humaines a entrepris son examen de la politique sociale.

Je pense que l'objectif de l'assurance-chômage doit respecter le principe que la meilleure forme de sécurité sociale, c'est d'avoir un emploi. C'est pourquoi nous devons consacrer plus d'argent à la formation et à ce genre de choses, et peut-être moins aux prestations.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais interroger le député qui vient de faire son discours.

Plus tôt aujourd'hui, au cours de la période réservée aux déclarations de députés, un député libéral a soutenu que la recommandation des réformiste visant à effectuer des coupes de 20 à 22 milliards de dollars sur trois ans était trop draconienne. Lorsque mon collègue de Lethbrige a fait son discours, ce même député lui a demandé si la sévérité ou la taille des coupes recommandées par les réformistes nuirait à l'économie.

Le ministre des Finances a déclaré qu'il entendait effectuer des coupes de 9,5 milliards de dollars en deux ans, ou de 4,5 milliards par année. Or, nous recommandons de couper 22 milliards de dollars sur trois ans, soit 7 milliards par année. La différence serait de 2,5 milliards de dollars. La réduction annuelle que nous proposons correspond à 1 p. 100 du PIB.

Je voudrais savoir si le député juge nos coupes trop sévères, étant donné que nous parlons simplement de 2,5 milliards de dollars de plus par année et, dans l'affirmative, je voudrais qu'il réponde à la question suivante: ne craint-il pas que des coupes de 4,5 milliards de dollars soient jugées trop radicales et trop draconiennes par ses collègues?

M. Knutson: Monsieur le Président, je comprends la question du député. Le débat entre réformistes et libéraux ne porte pas seulement sur la taille des réductions, mais aussi sur les domaines où elles sont effectuées. C'est un débat dont je ne voudrais pas sous-estimer l'effet.

Si je comprends bien, le ministre des Finances cherche à couper un peu plus de 3 milliards de dollars pour atteindre ses objectifs en février, puis à effectuer une autre coupe de 3 milliards de dollars, ce qui totaliserait 6 milliards de dollars. Sauf erreur, je ne crois pas qu'il ait été question de 9 milliards, mais seulement d'un peu plus de 6 milliards de dollars.

Mais, peu importe si c'est 6 ou 9 milliards de dollars, je conviens que nous devons atteindre notre objectif correspondant à 3 p. 100 du PIB en trois ans et que des Canadiens vont en souffrir. Le député a écouté attentivement, mais je voudrais quand même lui rappeler ce que j'ai dit. Nous pourrions avoir plus d'argent en augmentant les impôts. Je trouve scandaleux que les 20 p. 100 de Canadiens les mieux nantis accaparent 44 p. 100 de tous les revenus alors que les 20 p. 100 des Canadiens les plus démunis n'en touchent que 2,7 p. 100. C'est tout simplement scandaleux, injuste et inacceptable.

Je ne pense pas que nous ayons besoin d'une limite annuelle de 15 000 $ au chapitre du REER. Cette limite favorise les Canadiens qui ont un taux marginal d'impôt de 50 p. 100 par année, autrement dit les bien nantis.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, comme le présent débat fait partie de la démarche devant mener à l'établissement du budget prévu pour février 1995, nous devons présumer qu'aucune mesure précise n'a encore été arrêtée par le gouvernement.

(1620)

En tenant le présent débat, le gouvernement nous demande de lui dire quelle orientation le budget devrait prendre et ce que les Canadiens nous disent en ce qui a trait aux questions budgétaires. C'est donc en supposant que rien n'a encore été bien arrêté et que la politique budgétaire est encore à définir que je présenterai mes observations.

Il est entendu, bien sûr, que le gouvernement entend respecter les principes établis dans le livre rouge et poursuivre deux objectifs, à savoir relancer la création d'emplois et la croissance et réduire le déficit et la dette. Comme vous le savez, monsieur le Président, le gouvernement a publié plusieurs documents de travail à cet égard. En ce qui concerne les emplois et la croissance, il a publié le fameux livre vert intitulé La sécurité sociale dans le Canada de demain. Puis, il en a publié deux autres, soit le livre violet intitulé Un nouveau cadre de la politique économique et le livre gris intitulé Instaurer un climat financier sain.

Il a demandé au Comité des finances de mener des consultations auprès des Canadiens sur ces deux derniers documents et au Comité du développement des ressources humaines de faire la même chose pour le premier. Les deux comités feront rapport à la Chambre avant la présentation du budget. Je précise que les deux comités travaillent en très étroite collaboration. La réforme de la


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sécurité sociale a notamment pour but de déterminer si nos programmes sociaux actuels sont abordables.

Les trois objectifs mentionnés dans le document sur la réforme de la sécurité sociale sont la justice, l'efficacité et un coût abordable. C'est ce dernier qui lie la réforme de la sécurité sociale aux questions économiques et financières et à la réforme budgétaire.

Je tiens à affirmer catégoriquement ici que je crois personnellement que nos programmes sociaux classiques sont abordables. Ils n'expliquent pas notre déficit. Cependant, il est indéniable qu'ils doivent être améliorés et qu'ils comportent des défauts qui doivent être corrigés, mais il ne faut pas les réduire. Il faut les améliorer et, dans certains cas, les élargir.

À cet égard, les documents de travail sont parfois ambigus. Ainsi, dans le document intitulé La sécurité sociale dans le Canada de demain, on remet en doute la capacité de payer les programmes. Je le répète, nos programmes sociaux ne sont pas la cause du déficit. Ils ne sont pas la cause de l'endettement du pays.

La plupart de nos programmes sociaux ont vu le jour ou ont été élaborés dans l'immédiat après-guerre et dans les années cinquante et soixante. Pendant cette période, le Canada connaissait des taux de croissance parmi les plus élevés de son histoire. Pendant ces décennies où nous étions en train de mettre en place nos programmes sociaux, nous attirions d'énormes investissements privés. D'autres pays développés ont connu le même phénomène. Nous ne devons pas perdre de vue que les pays qui ont les économies les plus fortes, les plus hauts niveaux de vie et la meilleure qualité de vie, comme l'Allemagne, la Hollande, la Suède, le Canada et le Japon, ont aussi les programmes sociaux les meilleurs et les plus solides.

La mise en place de ces programmes sociaux n'a pas nui à leur croissance économique ni aux investissements sur leur territoire et, une fois en place, ces programmes n'ont pas provoqué de déclin économique.

J'ai écouté les réformistes. Je crois que si nous faisions ce qu'ils proposent, nous mènerions le pays à la faillite. Non seulement les réformistes ne régleraient-ils pas le problème du déficit, mais ils l'aggraveraient. Nous deviendrions un pays du tiers monde. Il y aurait quelques riches, mais les idées réformistes ne régleraient pas le problème du déficit. Nous ferions presque du Canada un pays du tiers monde.

Les causes de notre déficit ne se trouvent pas dans les programmes sociaux, mais plutôt dans les points faibles de notre économie, dans les taux d'intérêt élevés, dans les changements structurels non planifiés, dans la mondialisation non préparée, dans les pratiques monopolistiques et dans une fiscalité injuste-beaucoup ne payant pas les impôts qu'ils doivent-et dans bien d'autres choses.

Dans le livre rouge, nous avons dit que le Parti conservateur était obsédé par le déficit.

(1625)

Je veux citer certaines des choses que nous avons dites dans le livre rouge. À la page 8, nous avons dit ceci: «Les conservateurs se sont laissés obnubiler par les problèmes, par exemple le déficit ou l'inflation, sans avoir conscience et sans se soucier des conséquences, comme les suppressions d'emplois, la paupérisation, la dépendance à l'égard de l'État. La facture sociale est lourde.»

Nous avons également dit ce qui suit à la page 81 du livre rouge: «Hélas, le gouvernement conservateur a réduit l'effort social national sans égard aux conséquences sur la délinquance. Les soins de santé, le logement, l'emploi et la formation sont des moyens de lutte indispensables.»

Par ailleurs, nous avons dit à la page 18 de notre livre rouge que l'objectif du gouvernement libéral serait de «réduire le déficit fédéral à l'équivalent de 3 p. 100 du PIB avant la fin de la troisième année de son mandat.» Nous avons toutefois précisé que les réductions de dépenses seraient réalisées grâce à l'annulation des programmes inutiles, à la rationalisation des processus et à l'élimination des dédoublements et que tout cela se ferait en collaboration avec les gouvernements provinciaux.

Nous avons donné certains exemples des réductions que nous ferions. Nous avons bien commencé en disant que nous annulerions le contrat des hélicoptères, que nous allégerions les dépenses militaires, que nous amputerions de 4,1 milliards de dollars le budget consacré aux services de conseil et aux services professionnels, que nous réduirions les subventions aux entreprises et que nous réduirions la taille et le budget des cabinets ministériels et du cabinet du premier ministre. Il n'y a rien là-dedans au sujet des programmes sociaux. Rien au sujet des programmes sociaux. Au contraire, au chapitre 5 du livre rouge, nous avons dit que ces programmes devraient être renforcés et améliorés.

Au pire, la réforme de la sécurité sociale ne devrait avoir aucune incidence sur les recettes. Si nous voulons vraiment améliorer les programmes, cette réforme ne devrait pas être un moyen de réduire le déficit. Ce n'est pas ce que nous avons dit dans le livre rouge; ce n'est pas ce que nous avons dit durant la campagne.

Jusqu'à maintenant, le gouvernement a tenu les engagements qu'il a pris dans le livre rouge, mais il ne doit pas oublier ce qu'il y a dit au sujet des programmes sociaux et du déficit.

Il est intéressant de noter que beaucoup d'hommes d'affaires, sinon tous, disent que n'avons pas les moyens de nous payer des services comme les pensions, les soins de santé, les garderies, la formation professionnelle, l'enseignement postsecondaire, l'assurance-chômage, un revenu minimum vital pour ceux qui ne sont pas en mesure de travailler; ce sont les mêmes qui tentent chaque jour de nous convaincre d'acheter toujours plus de voitures, d'appareils photo, de téléviseurs, de vacances, d'aliments pour animaux familiers, de bijoux, de caméscopes, de cigarettes et de boissons alcooliques, à l'aide de plus en plus de cartes de crédit et sans aucun versement initial. Évidemment, ou bien ils croient que nous avons les moyens de nous payer tout ça ou ils s'en fichent.

N'y a-t-il pas quelque chose qui ne tourne pas rond dans une société où l'on ferme des hôpitaux et des écoles, où plus de gens


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vivent dans la rue, où le fossé s'élargit entre les riches et les pauvres, alors que le monde des affaires nous incite à acheter toujours plus de produits qui ne sont absolument pas aussi importants que les services que je viens d'énumérer. Plus de yo-yo et moins de soins hospitaliers.

Ceux qui nous parlent de gaspillage des fonds publics nous vendent des produits à la désuétude calculée de sorte qu'après trois ou quatre ans il faut les remplacer. Voilà le véritable gaspillage.

Il faut donc examiner dans un contexte beaucoup plus large toute la question de savoir ce que notre pays a les moyens de s'offrir. Avons-nous les moyens de nous payer de plus en plus de biens de consommation qui ne comptent vraiment pas dans notre vie? Ou avons-nous les moyens de nous offrir de meilleurs hôpitaux, de meilleurs écoles, une meilleure formation, de meilleures pensions, de veiller à ce que les gens n'aient pas à vivre dans la rue et à ce que les gens qui veulent travailler puissent le faire?

En conclusion, je tiens donc à dire que si le gouvernement voulait connaître l'opinion des députés et de leurs électeurs, c'est ce que j'ai tâché d'exposer aujourd'hui. J'ai tenu une assemblée publique à Montréal la semaine dernière, et je transmets aujourd'hui ce que les participants m'ont dit lors de cette assemblée. Réduire le déficit, oui certes, mais comme nous nous sommes engagés à le faire dans le livre rouge, pas en sabrant dans les programmes sociaux. Nous ne voulons pas le statu quo. Nous devons améliorer les choses, nous devons rendre nos programmes sociaux plus efficaces et meilleurs, mais pas sabrer dedans. Il ne faut pas réduire le déficit au détriment de la classe moyenne et des pauvres.

(1630)

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, on se croirait sur une autre planète. Le député de Notre-Dame-de-Grâce prétend vouloir éliminer le déficit, mais sans toucher aux postes budgétaires concernant les transferts aux personnes. Ensuite, il avance un postulat énorme en disant que toutes les compressions dans ces transferts se feraient au détriment des pauvres. J'ai du nouveau à lui apprendre. Les programmes sociaux rapportent plus à la classe moyenne, et même à la classe moyenne supérieure, qu'aux pauvres. Il pourra le constater s'il se donne la peine de lire les statistiques qui figurent dans ses propres rapports.

Je reconnais au député le mérite d'avoir dit que les programmes sociaux ont bien marché tant que notre croissance économique était vigoureuse. C'est ce que nous avons toujours dit, mais nous ne pouvons continuer à jeter l'argent par les fenêtres au moment où notre économie est anémique.

Ne disons pas que ces programmes n'ont jamais provoqué aucun déclin économique dans les pays qui les ont appliqués. Voyez la Suède. Son économie vient de buter sur un mur. Quelques personnes avec qui je traite me disent qu'elles essaient d'immigrer au Canada parce qu'il n'y a plus d'emplois en Suède. Leur situation est même pire que la nôtre.

Si, comme le député le prétend, le déficit n'est pas un problème aussi grave que nous, réformistes, le disons, je trouve bien étrange que les libéraux aient accepté, bien que timidement, d'essayer de réduire le déficit. Il y a un problème ou il n'y en a pas. Il faut être logique. Branchons-nous.

Enfin, un autre passage de sa dissertation m'a paru un peu offensant. Le député a dit que ce n'était pas vraiment au gouvernement et à la fiscalité qu'il fallait imputer le déficit ou les dépenses excessives de l'État, mais plutôt à toutes ces petites gens ordinaires qui, malicieusement, insistent pour gaspiller leur argent en achetant des produits de consommation, alors que le gouvernement pourrait le dépenser tellement plus judicieusement à leur place.

Je voudrais que le député réagisse à certaines de mes observations.

M. Allmand: Monsieur le Président, le député a soulevé plusieurs questions, et je vais essayer de répondre à toutes.

Premièrement, j'ai bel et bien parlé de la classe moyenne. J'ai recommandé de ne pas régler le problème du déficit sur le dos de la classe moyenne et des démunis. Or, c'est ce que nous ferions en réduisant considérablement les programmes sociaux.

Deuxièmement, je n'ai pas dit que le déficit ne constituait pas un problème. C'est un problème, mais on peut s'y attaquer de deux façons. On peut s'y attaquer en augmentant les recettes, en renforçant son économie et en redonnant du travail aux gens, ou alors en pratiquant des compressions de programmes.

Dans une famille, si quelqu'un a des problèmes financiers, il peut retirer ses enfants de l'école, il peut vendre ses outils, sa voiture et sa maison. Il peut probablement réduire ses dettes ainsi, mais il peut aussi travailler plus fort et essayer d'accroître ses revenus. Si l'on opte pour la première solution, on risque de se débarrasser de sa dette, mais d'être aux prises avec un grave problème de pauvreté.

Je propose que nous adoptions la deuxième solution, celle que nous avons proposée dans le livre rouge et qui privilégie la croissance économique et l'emploi, le fait de redonner du travail aux gens, de sorte qu'au lieu de dépendre des prestations d'assurance-chômage et de bien-être social de l'État, ils paient des impôts. Oui, le déficit est un problème, mais on ne le règle pas particulièrement en sabrant les programmes sociaux.

Le député a parlé de pays comme la Suède. Depuis quand la récession en Suède est-elle attribuable aux programmes sociaux? En Suède, en Allemagne et dans de nombreux autres pays, il y a depuis très longtemps des programmes sociaux comme ceux qui existent au Canada, et le problème de chômage que nous connaissons actuellement ne se pose pas là-bas. Notre problème de chômage actuel est attribuable à de nombreux éléments qui, comme je l'ai dit, constituent un problème au Canada: les taux d'intérêt élevés, la mondialisation, les modifications structurelles non planifiées et bien d'autres questions semblables, mais pas les programmes sociaux.

C'est là où les réformistes se trompent grandement. Ils voient dans les programmes sociaux la cause de tous les maux. Durant les années 50 et 60, nous avons eu d'excellents programmes sociaux au Canada sans pour autant nous heurter aux problèmes


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que nous connaissons actuellement. La cause du problème qui nous assaille aujourd'hui ne réside pas dans les programmes sociaux, mais ailleurs.

(1635)

Le dernier point qu'il a soulevé est important. Il a dit que je critique le pauvre consommateur parce que ce dernier préfère acheter des biens de consommation plutôt que de dépenser son argent dans les soins de santé et l'éducation.

Il y a certaines choses importantes que les pays ne peuvent fournir collectivement que par l'entremise des pouvoirs publics. La population décide ensemble ce qu'elle veut faire. Il y a longtemps, nous avons décidé que l'éducation publique serait gratuite jusqu'à la douzième année. Le Parti réformiste préfère peut-être qu'on supprime la gratuité de l'éducation et qu'on privatise celle-ci.

Cependant, il existe des services, comme l'hospitalisation, l'assurance-maladie publique, les programmes d'aide sociale, l'éducation publique, les programmes environnementaux, les routes publiques et le système de justice, que seul le secteur public peut fournir. Si nous mettons de côté le secteur public et que nous accordons trop de fonds au secteur privé, ce dernier dépensera cet argent, mais le pays tombera en ruine parce qu'il ne disposera pas de l'infrastructure et du capital sociaux dont nous avons besoin pour que le Canada puisse soutenir la concurrence de l'Europe, du Japon et d'autres régions du monde.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle adordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Bourassa-L'immigration; l'honorable député de Chicoutimi-Le transport ferroviaire; et l'honorable députée de Yukon-Les soins de santé.

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, vous me permettrez, au départ, de remercier mon collègue de Saint-Hyacinthe de m'avoir permis de m'exprimer aujourd'hui.

Naturellement, je ne surprendrai personne en disant que je vais aborder le côté financier, mais de l'angle autochtone. Cependant, je viens d'écouter attentivement mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, et j'ai été très agréablement surpris. Pour nous, c'est un vent de fraîcheur d'entendre un discours comme celui-là, alors que, quelques minutes auparavant, on entendait son collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine dire tout à fait le contraire.

J'espère une chose, c'est que ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce a dit aura préséance au Cabinet comme tel et au Conseil des ministres. J'espère que ce point de vue va être retenu par le gouvernement libéral. Cependant, tous les sons de cloche qu'on a jusqu'à maintenant me laissent penser que, malheureusement, l'opinion de mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce va peut-être être minoritaire.

Quoiqu'il en soit, j'ai regardé moi aussi le livre rouge; tout le monde regarde le livre rouge forcément. C'est un livre qui est supposé guider les intentions de ce gouvernement-là pendant qu'il va exercer le pouvoir. On remarque une chose là-dedans; c'est qu'au départ, dans le livre rouge, un principe fondamental y était dès le départ et c'était le principe de l'équité. On nous exprimait très clairement que les plus démunis ne seraient pas laissés pour compte avec ce gouvernement-là. Toutefois, tous les sons de cloche qu'on a actuellement, entre autres, avec la réforme ministérielle annoncée sur les programmes sociaux, nous laissent penser, nous laissent anticiper le pire pour les plus démunis, mais j'espère que ce ne sera pas le cas.

Je viens d'énoncer le premier principe d'équité du livre rouge, mais les discours, dernièrement, des principaux ministres nous laissent voir que c'est plutôt une lutte au déficit. Il y a une lutte au déficit et à la dette nationale qui s'en vient, et à cause de cela, malheureusement, notre crainte, c'est que ce soit les plus démunis, justement, qui aient à payer la note. J'écoute parler les représentants de ce gouvernement-là et je ne peux faire autrement que me rappeler que le premier instigateur de la spirale de la dette nationale, c'est ce gouvernement-là, dans les années 1976, 1977, 1978.

J'ai regardé ça attentivement. D'ailleurs, l'actuel premier ministre était, à l'époque, en 1977, ministre des Finances. Le déficit est passé de 3,3 milliards de dollars en 1976, à 7 milliards de dollars lorsqu'il est devenu ministre des Finances en 1977. Donc, le déficit a grimpé à 7 milliards de dollars, c'est-à-dire qu'il a plus que doublé. L'année suivante, l'actuel premier ministre qui était ministre des Finances est arrivé avec des prévisions budgétaires où il estimait que la dette grimperait à 10 milliards de dollars en 1978.

Alors, on voit que la spirale a été d'abord occasionnée par les libéraux qui n'ont pas perdu de temps, cependant, à mettre ça sur le dos des conservateurs qui les ont précédés. Mais si on regarde depuis 1985, c'est la dette nationale et ses intérêts qui ont fait en sorte que la spirale des déficits continue de s'accentuer.

(1640)

Je pense que les libéraux ont un mea culpa à faire aussi de ce côté. Je veux réagir aux propos de mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine. J'espère qu'il m'écoute sur le canal parlementaire actuellement. Il a fait une affirmation que je ne partage pas du tout, c'est-à-dire que le Canada fonctionne formidablement depuis 125 ans. Moi, je fais un constat tout à fait différent.

À partir du Traité de l'Union-c'est peut-être là que ça a mal parti-le Traité de l'Union fusionnait le Haut et le Bas-Canada et fusionnait les dettes du Haut-Canada avec la bonne gestion du Bas-Canada et depuis ce temps, nous, on estime que ça va mal. Comment se fait-il que nous soyons rendus au 16e rang du côté de la compétitivité, alors qu'on a déjà été dans les cinq premiers de classe?

Comment se fait-il que nous soyons rendus derniers dans les pays du G-7? Il nous parle du prestigieux G-7. Il faudrait quand même aussi se rappeler qu'on est les enfants pauvres du G-7. Des chevauchements et des dualités, combien en avons-nous et combien cela nous coûte-t-il, annuellement? Il y a des rapports très conservateurs actuellement qui nous disent que ça peut nous coûter jusqu'à trois milliards de dollars par année en paiements de chevauchement, parce que le fédéral et le provincial se court-circuitent continuellement.


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On nous spécifie que le taux d'endettement des Québécois, je tiens à le dire, est beaucoup plus bas que celui des Canadiens. La gestion publique québécoise va beaucoup mieux que la gestion publique fédérale. C'est reconnu par tout le monde.

Pour ce qui est du taux de chômage toujours plus élevé, j'aimerais regarder la Gaspésie, entre autres, où on a un exemple typique. La Gaspésie est probablement une des régions du Québec qui a le plus haut taux de sans-emploi. Comment se fait-il que du côté du Québec le taux de sans-emploi ait toujours été supérieur à la moyenne canadienne? Moi, je dis que ça ne fonctionne pas et qu'à partir du moment où le Québec aura en main tous les outils, je peux certifier que le taux de sans-emploi au Québec va diminuer substantiellement. À ce moment-là, on va se comparer avantageusement à des pays beaucoup plus avant-gardistes que celui dans lequel on évolue actuellement.

Je voudrais maintenant dire aussi que les Premières nations sont inquiètes actuellement. Elles sont inquiètes pour les raisons que je viens d'énumérer. On pense que le gouvernement, ce gouvernement, va vraiment toucher aux plus démunis et à la classe pauvre et moyenne de cette société. Et s'il y a une classe pauvre au Canada, c'est bien celle des Premières nations.

Il n'y a pas seulement les programme sociaux qui risquent d'être menacés et qui sont une espèce de filet de sécurité pour eux. Je vais vous expliquer tantôt de quelle façon il faut s'en sortir. Ce n'est peut-être pas en donnant toujours plus de programmes sociaux aux autochtones, toujours plus de dépendance. Ce serait plutôt le contraire et je vais l'expliquer tantôt. Mais, ils sont préoccupés, non seulement par les dangers de coupures au ministère des Affaires indiennes, mais je rappelle qu'il y a dans certains ministères, des créneaux d'activités qui se consacrent spécifiquement aux Premières nations.

Je pense au ministère de la Santé, entre autres, où il y a un budget d'environ 900 millions de dollars par année consacré aux Premières nations. Alors, il est évident que s'il y a des coupures du côté de la santé, les Premières nations vont être affectées et s'il y a une classe de citoyens au Canada qui n'a pas besoin d'être affectée par les programme sociaux, actuellement, c'est bien celle des Premières nations.

Même chose au ministère de l'Industrie et du Commerce. On retrouve au ministère de l'Industrie et du Commerce un créneau d'activités spécifiques aux Premières nations. Donc, il y a danger là aussi que des idées de développement économique véhiculées à travers ce ministère fassent en sorte que les Premières nations se retrouvent encore plus dépourvues qu'elles ne le sont actuellement. Il y a d'autres résidus dans certains ministères qui se consacrent aux affaires indiennes, entre autres au ministère du Patrimoine canadien.

Quoi qu'il en soit, ce qu'il faut bien envisager, c'est qu'une coupure, peu importe les coupures qui toucheraient les Premières nations, ce serait déjà le désastre pour des gens qui sont considérés comme le tiers monde du Canada.

Alors que le gouvernement se félicite d'avoir augmenté ses contributions de 119 p. 100 du côté des nations autochtones depuis 1983 dans les domaines autochtones, les chiffres nous montrent que l'argent dépensé était déjà prévu en vertu des traités, parce qu'on sait que c'est souvent mis de l'avant par les nations autochtones et je pense que là-dessus, ils ont raison. Nos prédécesseurs ont signé des traités avec les nations autochtones, il y en a une douzaine au Canada, et ces traités se consacraient spécifiquement à certaines activtités, à certaines compensations. Aujourd'hui, les engagements de l'époque qui en découlent font en sorte que le gouvernement est obligé de maintenir les obligations de l'époque.

Je vous rappelle le contrat social de l'époque, parce que c'est une chose qui est véhiculée, actuellement, de façon incorrecte, à l'effet que le gouvernement s'assure de garder sous son aile les Premières nations.

(1645)

On a souvent entendu dire que les Premières nations, ce sont tous des paresseux, des gens qui habitent les îles du Sud. Le contrat social à l'époque n'était pas ça du tout. C'était: on va prendre 99 p. 100 de votre territoire, on va vous mettre sur 1 p. 100 du territoire, et nous allons exploiter l'ensemble des ressources. Vous allez voir tout à l'heure que dans les propositions que je fais, et qui sont celles des Premières nations, on va voir à un meilleur partage et probablement que ça va les sortir du degré de paternalisme et du degré du dépendance dans lesquels ils sont.

J'ai relevé quelques statistiques. Les familles autochtones reçoivent environ 7 480 $ par année. Alors je pense qu'avec 7 480 $ par année, l'expression que j'employais plus tôt, gens du Tiers monde, s'applique avec cette première statistique.

Si on regarde l'ensemble de l'économie canadienne, je pense qu'il est très difficile pour une famille d'arriver avec 7 480 $ par année. C'est inadmissible dans la société actuelle. Notre société canadienne se targue d'avoir la meilleure qualité de vie au monde, mais lorsqu'on regarde de façon attentive du côté des Premières nations et des plus démunis, on constate aussi qu'il y a un écart de plus en plus grandissant entre ceux qui ont du capital et ceux qui n'en ont pas du tout. Je pense que les Premières nations sont les enfants pauvres de cette du Canada et du Québec.

Dépendance très élevée. Le vérificateur général nous l'a dit la semaine passée. Quarante-trois p. 100 d'entre eux vivent en complète dépendance du gouvernement. Taux de chômage, rarement sous 30 p. 100. Je suis allé dans des réserves où le taux de chômage oscillait à 60 ou 70 p. 100. Les seules personnes qui étaient employées étaient les gens qui travaillaient pour les conseils de bande et ils étaient payés avec l'argent du fédéral. Mis à part ça, les gens sont entièrement aux crochets du gouvernement, non pas par choix, mais parce qu'ils se retrouvent dans une situation ultime de dépendance, isolés. Ils ne peuvent pas s'en sortir avec l'actuelle Loi sur les Indiens et j'expliquerai tantôt comment on peut s'en sortir.

En dix ans, la population autochtone âgée de 19 ans a augmenté de 80 p. 100, et dans un degré de dépendance, entre autres du côté de l'éducation. Cela cause des pressions énormes sur le système d'éducation.

Je reçois régulièrement des gens des Premières nations à mon bureau qui me décrivent qu'ils sont incapables actuellement de payer les études de certains enfants sur ces réserves, parce que, tout simplement ils manquent de fonds. Ils manquent de fonds, parce que cette population de moins de 19 ans est en train de


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progresser à un rythme tellement rapide que les budgets ne suivent pas. Alors on aura un problème pas seulement du côté de l'éducation et de la santé, mais sur l'ensemble des activités qui touchent les Premières nations.

Le taux d'augmentation démographique des Premières nations s'est échelonné depuis 1983 et totalise 60 p. 100, deux fois plus que la croissance démographique du Canada. Alors, il est normal que ces budgets soient de plus en plus serrés, de plus en plus difficiles à gérer. On a une augmentation épouvantable de jeunes qui ne peuvent même pas aller à l'école et avoir droit aux services que tout autre Canadien ici au Canada peut avoir du côté de l'éducation.

On a aussi un manque à gagner dans le logement. On en a parlé la semaine passée lors de l'étude d'une motion spéciale émanant d'un député. Actuellement, on à un manque à gagner d'environ 40 000 logements sur l'ensemble du territoire canadien. Tout ça, et je le citais aussi la semaine passée, a fait l'objet d'une dénonciation de la part du vérificateur général qui estimait que les coûts reliés à la santé et à l'éducation étaient extraordinaires et faramineux justement parce que ces gens logent dans des logements absolument pas enviables et vivables.

D'ailleurs, le Comité des affaires autochtones, en 1992, disait qu'il y a 50 p. 100 des logements dans les réserves qui ne sont presque pas vivables actuellement, c'est-à-dire qu'ils auraient besoin d'un réaménagement profond du côté de la politique de logement. Malheureusement, cela ne se fait pas. On nous dit tout le temps qu'il y a le déficit et que le budget est serré, mais en attendant il y a des gens qui continuent à vivre dans des logements où ils sont victimes de surpeuplement entre autres. Non seulement la bâtisse n'est pas adéquate, non seulement la bâtisse ne respecte pas leur culture, mais on peut retrouver, et je l'ai vu moi-même, jusqu'à quatre générations sous le même toit. Je pense que cela est inacceptable dans notre société.

Déclin des dépenses pour les programmes et servives aux autochtones.

(1650)

On sait que la solution, et j'y viendrai, comme je l'ai dit tantôt, c'est que les autochtones se prennent en main par une plus grande autonomie gouvernementale, par des programmes de cogestion, par exemple. Le gouvernement, normalement, met à la disposition des autochtones des budgets spéciaux qui font qu'ils peuvent préparer leurs négociations.

Eh bien, on assiste à un déclin de 7 p. 100 depuis quelques années dans ces programmes-là. Donc, cela produit comme situation que les autochtones doivent aller négocier avec des vis-à-vis qui, eux, ont les moyens de se payer les meilleurs avocats et les meilleurs consultants. Le gouvernement fédéral arrive avec une position de force à la table de négociation, et on dit aux Premières nations qui font face à l'adversaire redoutable qu'est le gouvernement fédéral: «Écoutez, on n'est pas capable de subventionner vos préparatifs de négociation. Alors, arrangez-vous comme vous le pouvez.» On s'en sert même actuellement, selon moi, comme d'un outil pour négocier à la baisse des conditions de vie du côté des Premières nations. Je trouve cela inadmissible aussi.

J'ai beaucoup parlé du déclin relatif aux sommes admises pour le logement autochtone. Naturellement, le problème de santé, surtout relié au logement, est apparent. Il a été dénoncé, je l'ai dit tantôt, par le vérificateur général à plusieurs reprises. Donc, la solution réside ailleurs.

Jusqu'à maintenant, que peut-on dire des autochtones au sujet de leur participation au développpement de l'économie canadienne? On peut dire que c'est de la politique d'exclusion. Une seule statistique a augmenté, celle de la dépense en assistance sociale. D'ailleurs, on l'a dénoncé à plusieurs reprises du côté du Québec. On contribue à 25 p. 100 de l'économie canadienne par nos taxes et nos impôts et jamais l'équivalent ne nous est retourné, sauf en assistance sociale ou en assurance-chômage. Alors, je pense que ce n'est pas une solution pour s'en sortir.

La solution de l'avenir des Premières nations n'est pas de leur dire: «Voici de l'assurance-chômage. Arrangez-vous. Nous, on ne s'occupe pas plus de vous que cela.» Il est bien évident qu'une société basée sur le non-emploi et l'assurance-chômage n'est pas une société prometteuse d'avenir, et je pense qu'il va falloir changer notre dynamique là-dessus.

Il y a moyen d'essayer de mieux investir ces sommes d'argent. De quelle façon? Probablement par l'autonomie gouvernementale. On en a eu des exemples avec le Yukon. On en a eu des exemples avec le Sahtu Tribal Council dans les Territoires du Nord-Ouest. On a eu le premier exemple, probablement, au Canada, avec la Convention de la Baie James. Si on regarde les conditions de vie des Cris actuellement dans le Nord québécois, je pense qu'il n'y a probablement pas une nation au Canada qui peut arriver à la cheville du développement économique qu'ont réussi à faire les Cris, du degré de richesse, même si ce ne sont pas des gens qui se promènent en Mercedes, j'en conviens.

D'ailleurs, une Mercedes, dans les réserves cries, ne servirait pas à grand-chose; ils seraient mieux avec une grosse motoneige. Mais je peux vous dire que ces gens-là, comparativement au sort des autres nations autochtones au Canada, sont probablement ceux qui sont le plus aptes à témoigner que la Convention de la Baie James a été un modèle. Ces gens-là, en se prenant en main, on fait que leur autonomie gouvernementale a servi d'instrument et de levier à leur développement économique. C'est une preuve que c'est de ce côté qu'on doit aller.

Si je regarde mon vis-à-vis à Québec, qui est le premier ministre du Québec, parce que je vous rappelle qu'il s'est gardé le dossier des autochtones, il est en train de regarder une nouvelle façon de voir la chose, la cogestion. J'en ai parlé tantôt. À un moment donné, dans l'histoire canadienne et québécoise, on a dit à ces gens: «Allez-vous-en sur un petit lopin de terre-il s'agissait souvent d'un lopin de terre dont on voulait se débarrasser-et on va assumer l'ensemble des coûts.»

Actuellement, le gouvernement du Québec est en train de voir une approche différente, celle de la cogestion. Alors, on va regarder avec des assises territoriales probablement un peu plus élargies, au Québec, la possibilité que ces gens-là partagent entre autres des royautés du côté des ressources naturelles.

Alors, les autochtones non seulement vont avoir une responsabilité du côté des ressources naturelles, mais en plus il vont pouvoir créer leurs propres richesses et faire travailler leurs gens. Et c'est important de faire travailler les gens parce que ça rehausse la fierté. Le droit au travail existe pour tout le monde au


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Québec et au Canada, et il devrait aussi s'exercer pour les Premières nations.

Il y a quelques solutions. Le ministre des Finances, par exemple, dit qu'il va falloir que tout le monde participe à l'effort.

(1655)

Je regarde les gens du Tiers monde, les autochtones du Canada et du Québec, et je dis qu'ils ont une chose à partager: leur désespoir. Il y a des choses effarantes, je l'ai dit tantôt, et j'en ai fait une petite démonstration, mais j'ai d'autres exemples ici. Des logements désuets, j'en ai parlé suffisamment, mais juste pour vous dire que la question de la surpopulation dans le logement est 16 fois plus importante chez les autochtones que chez le reste des Canadiens. La mortalité infantile est quatre fois plus élevée chez les Premières nations que chez le reste des gens du Canada. Le taux de suicide chez les adolescents est six fois plus élevé. L'espoir de vie est de huit ans plus court chez un autochtone que chez un Canadien ordinaire.

Le taux d'incarcération est astronomique. Pour une population quelquefois de 5 p. 100 d'autochtones, dans une ville donnée, on va retrouver jusqu'à 25 ou 30 p. 100 de la population incarcérée qui est autochtone. C'est un problème épouvantable. Il existe aussi les problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie. Finalement, on peut se rendre compte que du côté des Premières nations, la solution n'est plus dans la dépendance, mais cela ne justifie pas pour autant que le ministre mette la hache là-dedans. Cela justifie, cependant, que les sommes d'argent consacrées soient maintenues et ne soient pas touchées en termes de filet de sécurité, comme les programmes sociaux, et que cet argent-là soit maintenant mis du côté de l'autonomie gouvernementale et du partage des ressources.

Je remercie encore une fois mon collègue de Saint-Hyacinthe-Bagot de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer au nom des nations autochtones.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, je vous ai regardé écouter attentivement le portrait que vient de nous dresser le député de Saint-Jean concernant les autochtones. Je pense que c'est un portrait qui se passe de commentaires. Avec les statistiques qu'il a citées, les problèmes que vivaient ces personnes, que ce soit au niveau des logements, de la santé, de l'éducation, il a dressé un tableau vraiment réel de la situation. C'est bien sûr qu'à ce moment-là, on s'est aperçu que le taux de chômage était très élevé. Encore une fois, on s'aperçoit que peu importe la classe, les réformes que l'on veut faire actuellement, c'est toujours en s'attaquant aux mêmes personnes, aux chômeurs et aux moins bien nantis.

C'est difficile de poser une question après un exposé comme celui-là. Je vais simplement demander à mon collègue, le député de Notre-Dame-de-Grâce qui a fait un exposé très sensible, qui m'a marqué également, de bien vouloir transmettre, en plus du message qu'il a transmis tantôt, ce même message-là concernant le dossier des autochtones, à ses collègues du caucus libéral, au conseil des ministres. Et je suis sûr, qu'avec la façon dont il va pouvoir expliquer et faire entrer à l'intérieur le portrait qu'on vient de tracer, il aura une écoute attentive de son caucus.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Un moment, s'il vous plaît. Je veux simplement m'assurer auprès des députés qu'ils n'ont plus de questions à poser au député ou de commentaires à lui faire. Je dois dire à la Chambre que la parole sera accordée au parti ministériel, après l'intervention de l'opposition officielle. Si un ministériel prend part au débat, alors le débat se poursuivra et les députés d'en face pourront poser des questions ou faire des commentaires.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, je vous remercie de m'accorder la parole. Ce n'est pas de ma faute, mais la question autochtone m'intéresse aussi. Peut-être que j'ai été plus rapide que les députés du gouvernement pour me lever, mais chacun dans cette salle tirera la conclusion qui lui semblera bonne.

Ce que j'aimerais soulever aujourd'hui, et j'aimerais que le député de Saint-Jean puisse commenter ces choses-là, dans les réflexions que l'on veut adresser au ministre des Finances, notre collègue a fait état de la situation lamentable des autochtones. Ces gens ont une fierté.

(1700)

Ils nous l'ont dit aussi au Comité des pêches et océans. Les gens veulent avoir des outils pour s'en sortir. Mon collègue de Saint-Jean a démontré l'état lamentable dans lequel ils sont mais, en revanche, les autochtones nous demandent à nous, dans d'autres comités, les outils pour s'en sortir.

Je sais que mon collègue a aussi rencontré les Premières nations concernant cette situation. J'aimerais qu'il puisse nous la décrire un peu. Je sais que c'est difficile aussi de régler la question autochtone. Je n'en ai pas le pouvoir présentement, c'est le ministre en face de moi qui a le pouvoir.

Premièrement, j'aimerais que mon confrère de Saint-Jean puisse décrire comment les autochtones pourraient s'en sortir concernant les pêches.

Deuxièmement, un autre commentaire, il a fait état que le revenu moyen des familles autochtones était de 7 480 $. Je sais que le député de Saint-Jean a aussi posé une question à ce sujet au ministre la semaine dernière, mais le ministre ne nous a pas dit quand et comment cela sera corrigé.

On a parlé aussi du coût de la nourriture dans ces régions éloignées. Je ne sais pas si mon collègue a de plus amples informations mais j'aimerais qu'il dirige quelques flèches ou questions au gouvernement à ce sujet.

M. Bachand: Monsieur le Président, je voudrais remercier mon collègue de me donner l'opportunité d'expliquer un peu plus de quelle façon on peut régler la question des pêches, qui est un exemple typique.

On a un ministère comme celui des Affaires indiennes et du Nord canadien ou le ministère des Pêches et des Océans qui décide de programmes concernant les autochtones directement ici, d'Ottawa, sans jamais être allé voir sur le terrain comment cela se vit, comment ces autochtones sont aux prises avec des degrés de pauvreté élevée alors que souvent ces autochtones ont la clé du règlement de leurs problèmes. Mais, on se rend compte que c'est à Ottawa que les décisions sont prises et la solution est,


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comme je l'ai dit tantôt, de faire en sorte que du côté de l'autonomie gouvernementale on puisse leur donner la possibilité de se prendre en main, leur donner la possibilité de s'exprimer sur des créneaux d'activités qui les concernent directement et essayer de les sortir de cette dépendance dans laquelle on les a plongés depuis maintenant 125 ans.

On leur a toujours dit: On va vous donner de l'argent, ne vous inquiétez pas. Mais, en attendant, le problème ne se règle pas. Naturellement, le gouvernement a annoncé ses intentions là-dessus mais j'aimerais maintenant voir comment il va passer à l'action.

Dans le cas du Grand Nord qui est un autre très bon exemple soulevé par mon collègue, le ministre a répondu la semaine passée qu'il avait atteint son objectif à l'effet de me rendre à 60 p. 100 fédéraliste, sur une question du financement dans le Grand Nord. Je sais qu'à 14 h 15 c'est la période des questions, monsieur le Président, ce n'est pas la période des réponses. J'aurais quand même aimé avoir une réponse beaucoup plus exacte que cela. Je sais que le gouvernement canadien finance dans le Grand Nord 14 millions de dollars par année et qu'un panier d'épicerie coûte le double là-bas. Il coûte le double là-bas alors que les gens ont un salaire probablement deux fois moindre.

Je suis allé moi-même à Iqaluit. J'avais d'ailleurs fait un discours sur la distribution alimentaire dans le Grand Nord et j'avais emmené votre collègue la présidente suppléante de la Chambre faire ses courses d'épicerie au Northern Store d'Iqaluit. J'avais fait la liste des prix et, effectivement, le sac de trois litres de lait valait 12 $ alors qu'ici on paie 5 ou 6 $ et que notre revenu est le double du leur.

Effectivement, il y a des solutions qui sont la prise en charge par les autochtones eux-mêmes de leur avenir et là-dessus le Bloc québécois va soutenir toute initiative du gouvernement qui leur permettra d'aller dans cette direction. Je me joins aussi à mon collègue de Chicoutimi pour supplier le député de Notre-Dame-de-Grâce de faire en sorte que son point de vue soit bien véhiculé dans son gouvernement. Ne touchons pas aux programmes sociaux et ne touchons surtout pas aux programmes sociaux qui concernent les autochtones.

[Traduction]

Mme Susan Whelan (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui se lit comme il suit: «Que la Chambre prenne note des opinions exprimées par les Canadiens sur la politique budgétaire du gouvernement». Si nous avons ce débat aujourd'hui, c'est en raison du ministre des Finances qui, dans son budget de février dernier, a lancé les consultations prébudgétaires les plus complètes qui soient de l'histoire de notre pays, en prévision du budget de 1995.

(1705)

En dévoilant, le 17 octobre, le nouveau cadre économique du gouvernement, connu sous le vocable de Livre violet, le ministre des Finances a identifié cinq grandes priorités: améliorer les compétences, s'adapter aux changements, rendre le gouvernement plus productif, mettre l'économie sur la bonne voie et remettre de l'ordre dans les finances du pays.

Le 18 octobre, le ministre des Finances a aussi publié un deuxième document, le Livre gris, qui remplit l'engagement pris dans le budget de 1994 et expose l'état des finances. Le ministre des Finances a mis à la disposition de tous les Canadiens, par l'entremise de leur député, des exemplaires d'un guide préparé par la Fondation canadienne d'éducation économique. Il s'agit d'une organisation nationale, neutre et sans but lucratif qui a toujours cherché à mieux faire comprendre l'économie aux Canadiens.

Dans la préface de ce guide, il est écrit que le document de travail a pour but de fournir les renseignements nécessaires à l'étude des enjeux et des options qui s'offrent au Canada. De plus, on y mentionne que cet effort en vue de clarifier les points de vue du gouvernement visait à faire en sorte que tout le monde soit en mesure d'exprimer son accord ou son désaccord.

Le guide pose une série de questions, dont les suivantes: quels sont les secteurs où il faut procéder en priorité à des compressions? À quels services gouvernementaux les utilisateurs devraient-ils contribuer davantage? Comment faire face aux conséquences possibles de cet exercice sur les autres paliers de gouvernement? Quel est le juste équilibre à observer entre la réduction des dépenses et l'accroissement des recettes?

Le ministre des Finances ne pourra pas lire toutes les réponses au guide, mais il prendra connaissance d'un échantillon représentatif de ces réponses, ainsi que d'un rapport sommaire de celles-ci. Et puis, une équipe composée de fonctionnaires du ministère se penchera sur toutes les réponses et transmettra au ministère toutes celles qui présentent un intérêt particulier. J'encourage tous les Canadiens à prendre le temps qu'il faut pour analyser ce guide.

Pour seconder les efforts du ministre, le Comité des finances de la Chambre a parcouru le Canada pour y entendre les propositions des Canadiens. Dans ma circonscription, j'ai tenu une réunion de consultation prébudgétaire pour faire connaître les points de vue des électeurs d'Essex-Windsor au Comité des finances. Le mardi 17 janvier, à Essex, en Ontario, dans la salle du conseil de comté, je tiendrai, à 19 heures, une deuxième réunion de consultation prébudgétaire pour que mes électeurs aient une autre occasion de participer aux consultations prébudgétaires et d'exprimer leurs réactions face au rapport du Comité des finances.

À mon avis, il y a essentiellement quatre choses que l'on peut faire pour s'attaquer à la dette nationale dans le cadre d'un budget national. Premièrement, on peut augmenter les recettes gouvernementales en favorisant la croissance économique. L'augmentation des ventes et des revenus entraîne celle des recettes fiscales. Deuxièmement, on peut réduire les dépenses du gouvernement en favorisant la croissance économique. Par exemple, si un plus grand nombre de personnes travaillent, moins de Canadiens touchent des prestations d'assurance-chômage ou d'assistance sociale et les dépenses gouvernementales diminuent. Troisièmement, on peut augmenter les recettes gouvernementales totales en modifiant la politique fiscale. Il est possible d'accroître les taux d'imposition et d'élargir l'assiette fiscale. Quatrièmement et dernièrement, les dépenses gouvernementales peuvent être réduites grâce à des compressions.

Il y a deux ans, l'actuel ministre des Finances, qui était alors le porte-parole du Parti libéral pour les questions de finances, s'est penché sur ces quatre points en affirmant qu'il n'y avait que deux solutions pour régler le problème de la dette nationale. La pre-


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mière consistait, selon lui, à stimuler la croissance économique, ce qui avait pour effet d'accroître les recettes et de réduire les dépenses. La seconde résidait dans une réduction des dépenses gouvernementales, dans une augmentation des impôts ou une combinaison de ces deux éléments.

Le ministre a précisé alors, à juste titre, que, pour éponger la dette nationale, le gouvernement devait suivre ces deux voies. La raison pour laquelle le programme financier de l'ancien gouvernement n'a pas donné les résultats escomptés, c'est qu'on se concentrait sur la deuxième solution, en augmentant les impôts et en sabrant dans les programmes pendant que la politique économique entraînait notre pays dans une récession qui a conduit à un fléchissement de la croissance économique. Ainsi, le déficit n'a pratiquement pas baissé.

Pour me préparer à ce débat, j'ai organisé une séance de consultation prébudgétaire à LaSalle, en Ontario. En outre, j'ai reçu des centaines de lettres concernant le budget. Je voudrais vous faire part des points de vue exprimés. Je tiens à ce que mes électeurs sachent que je ne suis peut-être pas d'accord avec toutes les propositions soumises, mais, quoi qu'il en soit, je pense qu'il est important de les faire connaître. Les propositions qu'ont présentées les électeurs d'Essex-Windsor à cette réunion tombent dans les quatre catégories que j'ai mentionnées tout à l'heure et portent sur les deux voies à suivre.

Pour accroître les recettes et réduire les dépenses, grâce à la croissance économique, mes électeurs ont proposé de consacrer davantage d'argent à la recherche et au développement pour assurer la croissance de l'emploi et maintenir les emplois actuels. Ils ont également affirmé que l'élimination des REER allait frapper durement les entreprises canadiennes, étant donné que les investissements dans des actions et des fonds mutuels se feront alors à l'étranger. Cela aura pour effet de réduire la croissance économique.

(1710)

Selon eux, l'imposition des prestations-maladie pourrait avoir un effet contraire à celui souhaité. Si les gens décident de ne plus adhérer aux divers régimes de soins médicaux, ils vont alors attendre d'être encore plus malades avant de se faire traiter, ce qui augmentera le coût des soins de santé, car un plus grand nombre de personnes seront hospitalisées, et ce, pour une période plus longue. Ils considèrent, en outre, que les compressions dans le domaine des soins de santé risquent d'amener un accroissement des coûts dans ce domaine à long terme. On peut prendre pour exemple le financement de la sensibilisation au sida et de la recherche sur cette maladie. Chaque fois qu'on évite qu'une personne ne contracte le sida grâce à un programme de sensibilisation, on économise 100 000 $ en soins de santé.

Ils croient bon également de négocier avec les fonctionnaires. Ces derniers ne représentent qu'une petite partie du budget du gouvernement. Les compressions effectuées nuisent au moral des employés, ce qui n'améliore en rien l'efficience des services. Une fonction publique efficace est également essentielle à la croissance économique.

En ce qui concerne la réforme de la politique fiscale pour s'attaquer au problème de la dette nationale, les habitants de ma circonscription ont fait un nombre considérable de suggestions. Ils ont suggéré que les REER ne soient pas éliminés, non seulement parce qu'ils permettent de mettre des revenus à l'abri mais aussi parce qu'ils sont un moyen responsable de planifier la retraite, ce qui à la longue permettra au gouvernement d'économiser de l'argent.

Ils estiment en outre que le gouvernement devrait éliminer la déduction aux fins de l'impôt des frais de représentation des entreprises et devrait se concentrer davantage sur l'économie souterraine en tant que source de recettes.

Selon eux, les banques devraient payer des impôts plus élevés et le problème de la TPS devrait être réglé. Ils pensaient, et on leur avait dit lors de l'introduction de cette taxe, qu'elle était censée engendrer des recettes qui serviraient à rembourser la dette nationale. Ils veulent aussi que le gouvernement recouvre les impôts impayés. Enfin, ils estiment que le régime fiscal devrait faire l'objet d'une réforme.

La plupart des recommandations faites au comité portaient sur la quatrième option, à savoir où couper et où ne pas couper lorsqu'on établit un budget face à une dette publique aussi importante. Les habitants d'Essex-Windsor ont fait les suggestions suivantes. Nous pourrions réformer le régime de retraite des parlementaires, éliminer le cumul à la fonction publique, réduire les chevauchements au sein du gouvernement, autoriser une mesure législative qui permettrait de dénoncer le gaspillage de ressources publiques et éliminer la Banque fédérale de développement. Un employé du gouvernement fédéral a suggéré de réduire l'ampleur du programme d'avantages sociaux à participation obligatoire plutôt que le nombre d'employés. Ils veulent que l'on réforme les programmes de sécurité sociale.

Nombre des points soulevés par les habitants de ma circonscription sont les mêmes que ceux auxquels s'attaque ce gouvernement. J'aimerais les aborder un moment. J'ai commencé mon intervention d'aujourd'hui en faisant remarquer que le ministre des Finances croit que nous sommes en bonne voie de régler à la fois le problème du déficit et de la dette nationale. Le premier budget du ministre le démontre et, en conséquence, nous constatons une reprise de l'économie.

Au cours des derniers mois, la conjoncture a été très encourageante au Canada. Comme je l'ai dit plus tôt aujourd'hui, et je le répète, la croissance réelle de 6,4 p. 100 pour le deuxième trimestre surpasse grandement le rendement de tout autre pays du G-7. Les ventes au détail ont monté au troisième trimestre, et de 7,8 p. 100 par rapport à l'an dernier. Les recettes réelles d'exportation ont grimpé de 5,6 p. 100 au cours du troisième trimestre, pour atteindre un niveau record et enregistrer la croissance la plus rapide depuis 1983.

Le nombre d'emplois a augmenté de 307 000 depuis janvier, et tous ces nouveaux emplois sont à plein temps. Au cours des derniers mois, l'emploi a connu la croissance la plus rapide en près de six ans. Le taux de chômage est passé de 11,4 p. 100 en janvier à 10 p. 100 en octobre. L'indice de l'offre d'emploi avait enregistré une hausse de 2,1 p. 100 en octobre et était alors de 16,5 p. 100 supérieur au niveau d'avant les élections.

Cette croissance économique rapporte des fruits, et a aidé à réduire le déficit. Pour la période d'avril à août, le déficit était inférieur de 4,5 milliards de dollars à ce qu'il était à la même période en 1993-1994. Sans compter que des résultats comme


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ceux-là ont amené le FMI à prévoir que, de tous les pays du G-7, ce sera le Canada qui connaîtra la plus forte croissance de production et le plus fort taux de croissance de l'emploi, pour 1994 et 1995.

Une autre des suggestions qu'on m'a faites au cours de mon assemblée, à LaSalle, était d'abolir la déduction fiscale pour frais de représentation. Je fais remarquer que le gouvernement a réduit cette déduction de 80 à 50 p. 100, dans son plus récent budget. On m'a aussi suggéré d'augmenter les recettes gouvernementales en contrôlant davantage l'économie souterraine.

À ce sujet, il convient de se rappeler que 95 p. 100 de la totalité des impôts sont payés volontairement. Cependant, on s'attend aussi à ce que des mesures de contrôle permettent d'ajouter 3,8 milliards aux recettes fiscales de l'exercice 1994-1995. L'initiative de contrôle de l'économie souterraine entreprise par Revenu Canada permettra à elle seule de récupérer 750 millions de dollars en recettes fiscales, avant la fin du présent exercice.

(1715)

Une autre question qui a été soulevée par les électeurs est celle des impôts non perçus. Il est à remarquer que ce n'est pas là une source non exploitée de fonds dont le gouvernement se sert pour réduire le déficit.

Comme je l'ai dit à l'assemblée annuelle de l'Association canadienne d'études fiscales, le 23 novembre dernier, cet argent sera réclamé avec intérêt sauf s'il y a de bonnes raisons de rajuster la cotisation par suite de renseignements additionnels de la part du contribuable ou d'une erreur dans l'évaluation originale.

Je le répète, les électeurs ont proposé de réduire les doubles emplois et de réformer le système de la sécurité sociale afin de réduire le déficit. Le gouvernement est en train de réformer la sécurité sociale et tous les programmes gouvernementaux afin de garantir les services les plus productifs et les plus efficaces aux Canadiens.

J'ai tenu une assemblée de consultation, mais j'ai aussi reçu des centaines de lettres de mes électeurs offrant suggestions et observations. Deux thèmes principaux reviennent sans cesse: d'abord, les gouvernements doivent réduire leurs dépenses et, ensuite, les mesures pénibles à prendre doivent être justes, équitables et fidèles aux engagements pris par les gouvernements.

En ce qui concerne le premier thème, on reconnaît qu'il faut réduire la dette et le déficit. Les Canadiens comprennent que les dettes fédérale et provinciales totalisent 700 milliards de dollars environ. En outre, ils reconnaissent que pour payer toutes nos dettes, fédérale et provinciales, il faudrait débourser plus de 24 000 $ par Canadien, homme, femme ou enfant.

Cette statistique est alarmante, comme il se doit. Pour mettre les choses encore plus en perspective, ils se rendent compte que l'intérêt sur la dette fédérale augmente à lui seul de 85 000 $ à la minute. L'an dernier, plus de recettes fiscales ont servi à payer l'intérêt sur la dette que tout autre poste de dépenses, y compris les soins de santé, l'aide sociale et les programmes destinés aux personnes âgées, beaucoup plus qu'on en a utilisé pour faire fonctionner toute l'administration fédérale.

On a consacré 38 milliards de dollars au service de la dette, alors qu'on a consacré 7,6 milliards de dollars aux transferts au titre de l'assurance-chômage et 19,9 milliards aux transferts intéressant les personnes âgées. En outre, notre dette extérieure nette, équivalente à 44 p. 100 de notre produit intérieur brut, est la plus élevée de tous les pays du G-7. L'Italie vient au second rang à 11,6 p. 100. Quant à la dette extérieure des États-Unis, elle représente 8,7 p. 100 du PIB de ce pays.

C'est la Fondation canadienne d'éducation économique qui définit le mieux notre problème dans son manuel. En 1993-1994, notre déficit se composait presque exclusivement d'intérêts sur la dette, soit 38 milliards sur un déficit de 42 milliards de dollars. En 1994-1995, la présente année financière, la totalité de notre déficit sera attribuable au service de la dette. Si les choses ne changent pas, nous léguerons aux générations futures un fardeau extrêmement lourd qui aura très probablement pour effet de leur imposer un niveau de vie inférieur à celui des générations précédentes, qui elles, ont contracté les dettes. Nous leur laisserions une hypothèque à payer, mais pas de maison.

Beaucoup des électeurs de ma circonscription qui m'ont écrit réclament la réduction des dépenses gouvernementales. Le problème est tellement grave que je lis souvent des choses comme ceci: «Je n'ai jamais écrit à un député jusqu'à maintenant, mais je crois qu'il est nécessaire que nos représentants auprès du gouvernement se rendent compte que nous payons suffisamment de taxes et qu'ils réclament la réduction des dépenses en collaboration avec les provinces.»

Un de mes correspondants n'aurait pas pu présenter le problème de façon plus claire. Il m'a écrit: «Je vous supplie de comprendre que de nouvelles taxes ne sauraient être une solution. S'il vous plaît, réduisez radicalement les dépenses gouvernementales. Si je ne gagne pas suffisamment d'argent pour vivre comme je le voudrais, je n'ai qu'à faire plus d'argent ou à changer de mode de vie. C'est à moi qu'incombe la responsabilité. Je m'attends à ce que le gouvernement change son mode de vie.»

Un autre a écrit: «Lorsque les temps sont difficiles, nous n'avons pas à dépenser l'argent si libéralement. Nous ne devrions pas donner de subventions à tous les groupes d'intérêt qui se présentent. Si on mettait fin à toutes les idioties du genre, nous pourrions probablement abolir la TPS. L'argent que génère cette taxe devait servir à rembourser la dette, mais personne ne semble savoir où il va.»

Une autre chose qui revient constamment, comme je l'ai dit, est l'idée que les mesures douloureuses qui seront adoptées doivent être justes et équitables et qu'elles ne rompent pas des engagements que les gouvernements ont pris envers les Canadiens. Dans cet ordre d'idée, j'ai reçu des centaines de lettres sur la question des REER. Le message était le suivant: «Lorsque les REER ont été introduits, le gouvernement nous avait promis que l'argent que nous y mettons serait imposé au moment où nous le retirerions. Je suis révolté que vous envisagiez de rompre cette promesse.»


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(1720)

Poursuivant sur ce thème, le président de la section régionale de Windsor-Essex de l'Association canadienne des retraités a dit: «Les gouvernements ont toujours encouragé les Canadiens à économiser pour leur retraite en investissant dans des REER. Cela a procuré non seulement un report d'impôt sur le revenu gagné, mais a permis à ces cotisations de croître à l'abri de l'impôt jusqu'au retrait des fonds. Maintenant que des millions de Canadiens utilisent cette stratégie d'investissement, ce serait un grave abus de confiance que de commencer à imposer les cotisations au REER et les intérêts gagnés avant le retrait.»

La possibilité d'imposer les régimes de soins dentaires a suscité un appel en faveur d'un traitement équitable pour tous. Un de mes électeurs écrivait: «Les régimes de soins dentaires aident vraiment les personnes et les familles à aller régulièrement chez le dentiste pour un traitement préventif ou des soins dentaires au besoin. Imposer les avantages résultant d'un régime de soins dentaires aurait pour effet de réduire le revenu dont je dispose pour moi-même et ma famille, car je bénéficie d'un régime d'assurance-soins dentaires. Cela me paraît injuste. Je suis convaincu que beaucoup de gens comme moi se demanderont s'il faut conserver le régime de soins dentaires et être imposé ou l'abandonner pour ne pas l'être. Sans mon régime de soins dentaires, je sais que ma santé dentaire en souffrira, mais je ne suis pas convaincu que cet impôt produira l'impact économique qu'en attend le gouvernement. Ne violez pas notre confiance. N'imposez pas la santé.»

La croissance économique durable ne peut résulter que d'une solide planification et d'une véritable croissance de la productivité. Voici ce que le ministre affirmait dans son livre violet: «La croissance de la productivité est le fondement du progrès économique, ce qui en fait l'objet essentiel de la politique économique. Une économie plus productive constitue le seul moyen fiable d'assurer des emplois plus abondants et meilleurs aux Canadiennes et aux Canadiens.»

La recherche et le développement peuvent contribuer à atteindre cet objectif. De 1974 à 1993, les emplois dans les secteurs industriels qui font appel à la technologie de pointe ont augmenté presque trois fois plus vite que dans les secteurs utilisant une technologie rudimentaire. On calcule que près de la moitié des nouveaux emplois qui devraient être créés au cours de la présente décennie exigeront plus de 16 années d'études et de formation combinées. Le gouvernement doit maintenir la recherche et le développement dans tous les secteurs.

Dans ma région en particulier, on m'a signalé le besoin de recherche et de développement dans le secteur agricole. Faute de recherche et de développement dans ma région, par exemple, le conté d'Essex ne compterait pas comme aujourd'hui plusieurs établissements vinicoles florissants. Il est important de continuer à promouvoir la recherche et le développement à cet égard.

Je dirai en guise de conclusion que ces consultations prébudgétaires ont offert à mes électeurs une tribune où ils ont pu exprimer leur opinion et leurs préoccupations. Pour résumer leurs propos, je dirai que deux thèmes revenaient régulièrement: il faut assurer un équilibre et l'équité dans les coupes que nous aurons à faire. Voilà qui constitue à mon avis la solution. Le budget de 1995 devra être équitable pour tous les Canadiens. Ce n'est qu'à cette condition qu'il sera accepté.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention ma collègue du gouvernement. J'aimerais lui dire que le déficit que nous connaissons actuellement a été d'abord causé par les libéraux dans les années précédentes et ensuite, il a été élargi par les conservateurs. Donc, les deux vieux partis sont également responsables de la situation catastrophique dans laquelle nous nous trouvons actuellement.

La députée nous a présenté son discours qui aurait pu être lu au Canadian Club ou dans une université devant des étudiants de haut savoir. Maintenant, je pense qu'à la Chambre des communes, ici, on doit présenter des choses pragmatiques et pratiques. Le discours est rempli de voeux pieux, de souhaits, de ce que le gouvernement pourrait faire. Mais ce que les gens veulent, ce n'est pas ce qu'il pourrait faire. Ce que les gens veulent, c'est ce que le gouvernement va faire pour régler la situation et c'est ça qui est important. N'importe qui dans cette Chambre peut se lever et énoncer de beaux discours qui finalement ne veulent pas dire grand-chose. Et je suis très déçu.

Les Canadiens et les Québécois s'attendent du gouvernement qu'il prenne ses responsabilités et le gouvernement qu'on a en face de nous refuse cela depuis qu'il a été élu.

(1725)

On se rappellera, monsieur le Président, dans le temps du livre rouge, que toutes les solutions s'y trouvaient. Or, on s'aperçoit qu'actuellement, après avoir consulté, reconsulté et tout retardé ce gouvernement en est au point où il était il y a un an, c'est qu'il ne sait pas trop quoi faire. Il retarde et retarde et retarde. La population canadienne veut avoir des réponses maintenant.

La question c'est que ce gouvernement libéral, dans les années 1970, a fait en sorte, et c'était très louable, de redistribuer la richesse, alors, que maintenant, on en est à redistribuer le déficit. Je demande donc à ma collègue: Comment le gouvernement va-t-il faire pour redistribuer le déficit et faire en sorte que les moins bien nantis, les pauvres et la classe moyenne ne soient pas principalement ceux qui vont payer ce déficit?

[Traduction]

Mme Whelan: Monsieur le Président, je veux tout d'abord répondre aux observations du député, en ce qui concerne les électeurs de ma circonscription.

Comme je l'ai dit plusieurs fois dans mon discours aujourd'hui, les électeurs de ma circonscription ont participé à une consultation prébudgétaire, et des centaines d'entre eux m'ont écrit. J'estime qu'il était de mon devoir de présenter leur opinion aujourd'hui. C'est là leur opinion, mais pas mon point de vue quant à l'essentiel du discours que j'ai fait aujourd'hui. Je crois qu'il est juste et équitable que les électeurs d'Essex-Windsor aient les mêmes droits que ceux des autres provinces. Ils voulaient se prévaloir de ces droits, et c'est ce que j'ai exprimé aujourd'hui.


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Pour ce qui est d'imputer aux gouvernements libéraux des années 70 la responsabilité du déficit, je tiens à rappeler aux députés que le Canada a connu une récession à la fin des années 70 et au début des années 80. Or, tout le monde sait qu'on peut s'attendre à un déficit plus élevé en période de récession. Le gouvernement conservateur précédent aurait toutefois dû profiter des années 80 pour réduire les dépenses et le déficit, mais il n'en a rien fait. En réalité, il a augmenté les dépenses.

Je trouve déplorable que le député essaie de blâmer les gouvernements libéraux des années 70, quand on sait pertinemment que c'est durant une période de croissance économique comme celle que nous connaissons actuellement qu'il faut réduire les dépenses et mettre de l'ordre dans nos finances. Le gouvernement conservateur ne l'a toutefois pas fait lorsqu'il en avait la chance durant les années 80.

À mon avis, au lieu de blâmer les gouvernements passés, nous devrions plutôt féliciter le gouvernement actuel et son ministre des Finances des efforts qu'ils déploient, de laisser les Canadiens s'exprimer et de permettre la tenue du débat actuel et d'autres à venir. Nous avons ainsi la possibilité de présenter nos opinions et nos idées, et les Canadiens peuvent s'exprimer sur la question. Voilà ce qui se produit. Voilà la démarche sans précédent amorcée par le gouvernement.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de son discours. Je me demande si elle pourrait clarifier un point qui a suscité mon intérêt au cours de la question précédente. Nous avons parlé des responsables des déficits.

Le Québec a le déficit le plus élevé de toutes les provinces. Ce déficit représente 9 400 $ pour chaque homme, femme et enfant de la province. Quarante pour cent de cette dette est due à des intérêts extérieurs à la province et au Dominion du Canada, donc à des étrangers.

Fait intéressant, en effectuant des recherches, j'ai découvert que, pendant les sept dernières années où le Parti Québécois était au pouvoir, il a augmenté les déficits de la province de 285 p. 100, alors que les paiements de transfert fédéraux à cette province se sont en effet accrus. Après que le gouvernement péquiste a quitté le pouvoir, en 1985, je crois, le déficit a continué d'augmenter, mais moins de la moitié de cette augmentation est survenue pendant que le premier ministre actuel du Québec occupait le poste de ministre des Finances.

Je me demande si la députée pourrait faire quelques observations au sujet du discours de l'orateur précédent et de toutes ces dettes créées par le gouvernement fédéral.

Mme Whelan: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention. Je voudrais simplement donner plus de détails à cet égard.

Nous savons tous que chaque gouvernement, qu'il soit provincial ou fédéral, a une responsabilité à assumer. Comme je l'ai dit aujourd'hui, nous savons que la dette de 700 milliards de dollars appartient à la fois au gouvernement fédéral et aux provinces. Certaines provinces doivent mettre de l'ordre dans leurs finances. Si les ministres des Finances de toutes les provinces suivaient l'exemple du ministre des Finances fédéral, nous aurions un processus plus ouvert partout au Canada, ce qui serait merveilleux.

(1730)

Comme je l'ai dit plus tôt, un des problèmes que nous avons aujourd'hui, c'est que plus de 44 p. 100 de notre dette est due à des intérêts étrangers. Comme vous pouvez le constater au sujet des problèmes qui surgissent dans d'autres provinces, et mes collègues l'ont souligné, nous devons également maîtriser cette dette, tant aux paliers fédéral que provinciaux. J'estime que le processus de consultation et l'esprit d'ouverture dont nous faisons preuve en demandant leurs opinions aux Canadiens et en écoutant leurs propositions est la bonne façon de procéder.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous reprenons le débat. Je me demande si la Chambre ne pourrait pas me rendre un service. Si les députés décident de partager leur temps, pourraient-ils avoir l'obligeance de le préciser à la présidence?

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais signaler à la Chambre que je vais partager mon temps avec mon collègue. Mon intervention sera donc de dix minutes.

Je suis heureux de participer aujourd'hui à cet important débat sur la politique budgétaire. Comme l'a dit Will Rogers, il y a bien des années, en parlant du temps, le problème, c'est que tout le monde en parle, mais que personne ne fait rien pour remédier à la situation.

C'est ainsi que nous disons bien des choses à ce sujet aujourd'hui. J'entends des propositions tout à fait sensées et d'autres qui le sont moins. Je me demande ce qui résultera de tout ceci. Va-t-on enfin agir? Le ministre des Finances écoute-t-il les discours prononcés à la Chambre ou peut-il compter sur des collaborateurs pour trier tout ce qui se dit et trouver ce qui mérite d'être retenu? J'espère qu'on fait quelque chose, car des propositions constructives sont soumises aujourd'hui.

Comme l'a redit jeudi dernier, à la Chambre, le secrétaire d'État aux Institutions financières internationales, le gouvernement a pour politique de ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB. C'est inacceptable! De nombreux experts financiers l'ont dit. C'est la position de l'Institut C.D. Howe. On exhorte le gouvernement à accélérer les choses sur la question de la réduction du déficit. Certains signes permettent de croire que le message se rend au ministre des Finances. Cependant, j'ignore si c'est tout le message qui lui parvient.

Je trouve inacceptable que le gouvernement ait pour objectif de réduire notre déficit à 3 p. 100 du PIB, car cela nous laissera avec un déficit de 25 milliards de dollars par année dans deux ans. En outre, en réponse à une question d'un de mes collègues, jeudi, le même secrétaire d'État a déclaré que, même si la politique financière du gouvernement consistait à réduire le déficit à 3 p. 100 du PIB, ce n'était là qu'un objectif intermédiaire. C'est peut-être à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. Que sera donc l'objectif définitif?

Le gouvernement pourrait-il nous dire comment il s'attend à inspirer confiance dans l'économie, alors que sa politique financière ne vise qu'à atteindre un objectif intermédiaire? C'est inacceptable pour les marchés financiers et pour les contribuables canadiens! Selon moi, ils attendent davantage du gouvernement qu'une vague politique financière basée simplement sur un objectif de ce genre.


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Je commence à penser que c'est non seulement un objectif intermédiaire, mais également une véritable cible mobile. Ma solution et celle du Parti réformiste concernant les objectifs consiste à mieux cibler nos dépenses. Certains ont dit aujourd'hui qu'il fallait maintenir nos dépenses sociales pour les gens dans le besoin, et je suis tout à fait d'accord là-dessus. Consacrons notre argent seulement à ceux qui en ont besoin et cessons d'en verser à tout le monde.

(1735)

La semaine dernière, les critiques du Parti réformiste pour les questions de finances ont publié un document faisant état de compressions de l'ordre de dix milliards de dollars. À mon avis, c'est un document on ne peut plus utile. Je ne vais pas le parcourir ici, mais j'aimerais insister sur un aspect que le Parti réformiste a abordé ici la semaine dernière. En effet, les réformistes ont déclaré que, à leur avis, les gens qui sont au sommet du gouvernement doivent être les premiers à faire des sacrifices qui paraissent et qui comptent. Et le premier de ces sacrifices, c'est la réforme du régime de retraite des députés.

Il y a eu à la Chambre, la semaine dernière, un projet de loi d'initiative parlementaire en faveur de la réforme du régime de retraite des députés. Le gouvernement et tous les ministériels ont voté contre. Ils ne veulent pas d'une réforme, s'ils doivent en faire le moindrement les frais.

M. Cannis: Lisez le livre rouge.

M. Ringma: C'est inadmissible! J'ai lu le livre rédigé à l'encre rouge.

Le secrétaire d'État aux Institutions financières internationales a dit que le document du Parti réformiste renfermait d'excellentes propositions. Il est bon de constater que le secrétaire d'État reconnaît la pertinence de certaines idées qui sont débattues à la Chambre.

J'aimerais rappeler à tout le monde dans quelle situation précaire se trouve notre pays. La dette fédérale varie entre 530 et 540 milliards de dollars et nous continuons d'accroître cette dette. Pour ce seul exercice, nos dépenses liées au déficit avoisinent les 40 milliards de dollars, ce qui veut dire que notre dette augmente au rythme de 110 millions de dollars par jour. C'est un problème sérieux. Selon moi, la population canadienne commence à le comprendre. À coup sûr, les institutions financières l'ont compris. Il est temps que le gouvernement fasse de même.

Je voudrais aujourd'hui parler d'un petit point-de deux, peut-être, si j'en ai le temps-pour montrer ce que nous pouvons faire pour régler le problème de la réduction des dépenses. Je suis porte-parole de mon parti pour les langues officielles. Je tiens à dire que nous pourrions épargner 310 millions de dollars par an sur ce chapitre. Ce n'est pas énorme, si l'on compare cela au déficit actif, mais si nous pouvons épargner 310 millions de dollars et plus en un an dans chaque secteur et appliquer ce montant de façon générale, nous parviendrons à reprendre le contrôle.

Je parle des économies que nous pourrions réaliser dans le domaine des langues officielles en sachant que les députés d'en face vont m'attaquer et critiquer nos politiques à ce sujet. Permettez-moi de vous rappeler que pour ce qui est du bilinguisme et des langues officielles, le Parti réformiste est en faveur du bilinguisme. Nous ne sommes pas contre le bilinguisme. Plus il y a de gens bilingues, qui parlent l'anglais et le français, plus il y a de gens qui parlent plusieurs langues, mieux nous serons placés pour faire des échanges commerciaux avec la région du Pacifique, avec l'Europe et avec le monde entier. Nous ne sommes pas contre le bilinguisme. Nous sommes contre le gaspillage. La Loi sur les langues officielles donne lieu à beaucoup de gaspillage. C'est à cela que nous devons mettre fin.

Nous avons notamment pour politique de confier les langues et la culture aux provinces et de les laisser prendre soin de ces aspects, de les laisser libres d'y consacrer des fonds si elles le désirent, de les laisser libres d'agir comme elles l'entendent, à ce sujet. Qu'on laisse les provinces s'occuper de ces questions. Nous pouvons couper environ 30 p. 100 des 310 millions de dollars dont je parle, soit 80 millions, du seul financement de l'enseignement des langues officielles. Qu'on laisse cette question aux provinces. Que le gouvernement fédéral s'en retire et nous économisons 80 millions de dollars. Après tout, l'éducation est de compétence provinciale. Comme la culture et les langues, elle devrait être laissée aux provinces.

(1740)

Il faut aussi noter que la plus grande partie de cet argent sert à financer des programmes d'immersion. L'immersion, et surtout les programmes d'immersion française pour les tout jeunes, a été vantée sur tous les toits par des groupes d'intérêts spéciaux comme Canadian Parents for French. On en parlait comme du meilleur moyen de former des enfants bilingues. C'est tout simplement faux. Plusieurs études montrent que les cours d'immersion française ont été un échec, surtout chez les plus jeunes.

M. Hector Hammerly, du département de linguistique de l'Université Simon Fraser, a fait des recherches exhaustives dans ce domaine. Il conclut que la popularité de l'immersion française tient à une série de suppositions erronées, et que plutôt que des diplômés parlant couramment les deux langues, ce système produit des gens qui parlent franglais. Ils parlent et ils écrivent un français de piètre qualité, et ont de la difficulté en anglais également. M. Hammerly a constaté que les cours de base de français sont tout aussi efficaces que l'immersion française, pour ce qui est de produire des diplômés bilingues, et qu'ils coûtent beaucoup moins cher.

Donc, tant qu'à dépenser de l'argent sur un système qui ne fonctionne pas, nous pouvons sûrement nous permettre de supprimer cette dépense.

[Français]

Et je serai disponible pour discuter de tout le problème du bilinguisme ou de l'immersion en langue française avec qui veut le faire.

[Traduction]

Deuxièmement, nous pouvons épargner 41 millions de dollars en éliminant les bourses. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! Je regrette, mais le temps d'intervention du député est écoulé. Il peut peut-être conclure ses observations en répondant à une question ou à une observation qu'un collègue formulerait à son endroit.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le commentaire du député concer-


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nant l'apprentissage du français par immersion m'a beaucoup intéressé. J'ai oeuvré plusieurs années dans le domaine de l'éducation et j'ai appris des plus grands spécialistes non seulement au Canada, mais de partout dans le monde.

Si je ne m'abuse, il y a eu consensus selon lequel l'immersion était le meilleur moyen d'apprendre une langue seconde. J'ai donc été très étonné d'entendre l'affirmation du député. Cependant, je conviens qu'il est toujours possible de remettre un consensus en question.

Je me demande s'il est exact que ceux qui ont appris par immersion ne parlent pas vraiment bien. Les études que j'ai vues montrent que l'apprentissage par cette méthode est aussi satisfaisant, voire très souvent meilleur qu'au moyen des autres méthodes. Même lorsqu'on contrôle les facteurs tels que l'état socio-économique et l'intelligence.

Comment se fait-il que des gens comme moi qui ont le français comme langue maternelle et d'autres qui ont le grec ou l'italien comme langue maternelle sont capables d'apprendre l'anglais? Nous pouvons poursuivre l'apprentissage de notre propre langue sans nécessairement parler franglais. Pour ma part, je considère mon anglais assez bon.

Le député pourrait-il expliquer pourquoi cela semble soulever une contradiction. La plupart des Canadiens francophones que je connais, dont la langue maternelle est le français, et des Canadiens allophones, qui ont une autre langue que l'anglais ou le français comme langue maternelle, finissent par parler très bien l'anglais. Dans ce cas, pourquoi les anglophones, qui ont l'anglais comme langue maternelle et qui étudient le français, n'arrivent-ils pas à parler couramment le français? Je ne comprends pas cela. J'aimerais bien avoir des explications à cet égard.

M. Ringma: Monsieur le Président, les anglophones peuvent évidemment apprendre le français. Sauf erreur, il n'y a aucune différence au niveau du cerveau. Je tente simplement de dire au député de Saint-Boniface et à tous les intéressés que le programme d'immersion en français pour les jeunes soulève des problèmes. Cette question fait d'ailleurs l'objet d'un article dans le dernier numéro de la revue Saturday Night, dont je remettrais avec plaisir un exemplaire au député. Je serais aussi très heureux de lui remettre un exemplaire du livre du professeur Hammerly. On ne veut pas tenir compte de cet ouvrage qui décrit l'échec de l'apprentissage par immersion, parce que le groupe de parents en faveur de l'apprentissage du français reçoit une subvention de 900 000 $ par année du gouvernement fédéral. Ces gens veulent apparemment en recevoir davantage, de sorte que la seule chose qui les intéresse, c'est de continuer à promouvoir l'apprentissage par immersion peu importe le déficit du programme.

(1745)

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de mon collègue du Parti réformiste et je pense qu'il a raison sur le point de l'apprentissage d'une langue en bas âge. Cependant, je ne traiterai pas de ça. Ce qui me chicote un peu, c'est sa proposition de faire passer langue et culture aux provinces.

J'ai toujours pensé que le Canada était un pays artificiel et que la politique des deux langues officielles c'est ce qui le sous-tend, from coast to coast to coast, je pense que si on faisait ça, on aurait un problème: c'est qu'au Québec on a une longue tradition.

Vous savez que les anglophones au Québec ont leurs écoles élémentaires et secondaires et leurs commissions scolaires anglophones. Ils ont leurs hôpitaux. Ils ont leurs universités à Montréal et en dehors de Montréal. Donc, il n'y a pas de problème pour le Québec, mais dans le reste du Canada, je pense que les francophones seraient privés complètement de services et ce serait très dangereux. Je ne sais pas si le député l'a envisagé, mais je pense que pour le Québec il n'y aurait pas de problème, mais c'est dans le reste du Canada qu'il n'y aurait tout simplement plus de services. J'aimerais qu'il commente là-dessus.

M. Ringma: Monsieur le Président, tout d'abord, il faut réaliser qu'au Québec en ce moment il y a un problème. Le problème c'est la loi 101 et à la suite de ça il y a déjà un problème. Si je crois dans la générosité des gens du Québec, et j'y crois, il ne faut pas voir un problème dans l'avenir parce que les gens vont décider eux-mêmes quoi faire et pour qui et combien dépenser. Je vous assure que la même chose s'applique ailleurs au Canada. Les Canadiens sont généreux de nature, assez généreux et ils ont soin de leurs collègues de quelque origine que ce soit. Ils vont faire les choses nécessaires pour assurer le soin des langues ou n'importe quoi d'autre.

M. Leroux (Shefford): Ce n'est pas ça la réalité!

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, c'est vraiment un honneur de pouvoir parler d'un sujet aussi important. Je voudrais dire quelques mots de mon intérêt pour la dette et le déficit et des véritables raisons qui m'ont amené à faire de la politique. Les deux sont probablement liés.

En 1984, nous avons tous compris que notre pays avait un gros problème qu'il fallait régler à tout prix. Notre dette était alors de 190 milliards de dollars et quelqu'un nous avait promis de nous aider à l'éponger. En 1988, nous avons évidemment compris que cette promesse ne serait pas tenue et même si l'on disait pouvoir la tenir à condition de disposer d'un peu plus de temps, nous étions très nombreux à ne plus y croire et c'est ainsi qu'est né le Parti réformiste.

La population canadienne a été mise plusieurs fois à l'épreuve. L'élite et les médias prétendaient que l'Accord de Charlottetown allait être la solution à tous nos problèmes et la population canadienne a envoyé un premier message.

En 1993, un second message très senti a été envoyé, à savoir qu'il valait mieux régler le problème de la dette et du déficit. Les conservateurs n'ont pas su l'écouter et ils en ont pâti. Je dois dire à l'honneur des libéraux qu'ils ont bien compris ce que les Canadiens voulaient, à savoir qu'il fallait régler cela tout de suite.

Toutefois, le 22 février dernier, qui a probablement été la journée la plus noire de toute l'histoire de la Chambre, on s'est rendu compte que rien n'avait changé et qu'il ne s'était rien passé, en fait. Et voici qu'en cette fin d'année 1994, on nous promet que, quoi qu'il arrive, on va régler le problème de la dette et du déficit. J'espère que ce ne sont pas que des paroles en l'air,


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parce que si c'est le cas, le Parti libéral en entendra parler par l'électorat canadien.

(1750)

Trois pour cent du produit intérieur brut en 1996 ou en 1997, ce n'est pas assez. C'est un pourcentage insignifiant étant donné ce qu'il y a à faire. Les gens ne l'accepteront pas. Nous devons prendre des mesures pour changer les choses. Nous devons abaisser les taxes pour que les gens soient encouragés à dépenser davantage chez eux. Nous devons réduire radicalement la taille du gouvernement. Nous devons aider les gens à s'aider eux-mêmes. Il est clair que l'imposition des REER n'est pas une solution.

Le gouvernement doit se retirer du secteur des affaires. Il faut éliminer les chevauchements entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Il faut régler le problème du Québec et celui des revendications territoriales des autochtones. Nous devons nous imposer au sein d'organismes comme l'Organisation mondiale du commerce et l'OEA, pour ne nommer que ceux-là. Nous devons réformer l'ensemble du gouvernement en commençant par les pensions, comme nous l'avons entendu dire si souvent. Nous devons examiner tous les autres secteurs du gouvernement qu'il faut réformer, à commencer par le Sénat.

Beaucoup d'autres avant moi ont parlé de notre plan du zéro en trois que nous préconisons depuis quelques années et que nous avons raffiné. On a demandé à chacun d'entre nous de passer en revue les programmes du domaine dont il est le critique.

En tant que critique des affaires extérieures, je ne parlerai que de ce domaine et des économies qu'il serait possible d'y réaliser. Quelqu'un a dit tout à l'heure que nous n'avions pas tous les détails. Je lui répondrai que nous avons beaucoup de détails, en tout cas, beaucoup plus que nos vis-à-vis.

Donc, je vais aborder la question des réductions dans le secteur des affaires étrangères du point de vue de l'examen de la politique étrangère qui nous a amenés à entendre des centaines de témoins d'un bout à l'autre du Canada au cours des sept ou huit derniers mois. Ce qui est étrange dans tout cela, c'est que nous avons passé une grande partie de notre temps à parler de choses abstraites et non de choses concrètes. Il n'a jamais été question du genre de réductions que nous recommanderions au ministre lorsqu'il nous le demanderait.

Au lieu de nous interroger sur des questions clés comme ce que nous avons les moyens de payer et ce que devraient être nos priorités dans le domaine des affaires étrangères, nous avons essayé de déterminer si les violations des droits de la personne devraient être considérées comme graves, sévères ou sérieuses avant que le Canada ne prenne des mesures positives pour aider.

Je signale que ces termes sont tous synonymes et qu'il n'existe aucune différence entre eux tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif. Nous avons discuté pour déterminer si le film «The Omen» était effrayant, terrifiant ou horrifiant. Nous avons passé notre temps à discuter de la signification de certains mots, exercice qui est certainement intéressant du point de vue académique, mais qui n'apporte rien de concret.

Par conséquent, même s'il était très bien formulé, le rapport final ne répondait pas à certaines questions clés, par exemple comment réduire notre dette et comment réduire nos dépenses tout en continuant de faire notre travail.

Nous avons donc présenté un rapport dissident sur l'examen de la politique étrangère. La principale chose dont nous avons parlé était la responsabilité financière. Nous avons signalé que le comité réclamait de nombreuses augmentations de dépenses dans son rapport, mais aucune réduction. Il n'a pas recommandé une seule réduction.

Comme cela nous paraissait inacceptable, nous avons présenté notre proposition de zéro en trois. Nous nous sommes demandé comment faire des réductions et en sommes arrivés à des réductions d'une valeur de 1,3 milliard de dollars qui, selon nous, sont essentielles si nous voulons équilibrer ce budget.

Nous avons examiné un certain nombre de secteurs. Le premier était les dépenses de fonctionnement du gouvernement. Il y a certains coûts administratifs liés au ministère des Affaires étrangères et à l'ACDI. Ces coûts ont déjà été réduits dans le passé.

(1755)

Les bureaucrates diront qu'il est impossible de couper davantage. Mais je crois que, en cette période difficile, nous devons le faire. Nous n'avons pas le choix. Dans le monde irréel, utopique qui nous est si souvent décrit ici, nous n'aurions pas à faire de compressions. Mais l'utopie est une chimère et les compressions sont une nécessité. Il faut passer par là.

Deuxièmement, nous devons couper les programmes d'aide d'État à État. Beaucoup de députés le savent, nous avons adopté à notre dernier congrès, à Ottawa, une résolution demandant une analyse rigoureuse de cette aide. Un grand aspect incontournable est que cette aide peut devenir une caisse noire dans laquelle le ministre ou le premier ministre peuvent puiser pour saupoudrer les subventions dans leurs déplacements.

J'ai ici des communiqués que j'ai reçus aujourd'hui: 2 millions de dollars par ci, 80 millions de dollars par là. C'est une caisse noire. En allant à un cocktail, on remet un chèque pour montrer qu'on est bien sympathique. Les Canadiens ne vont plus tolérer ce comportement. Ils veulent que les ONG se chargent du programme d'aide. Ils veulent des ONG qui sont responsables et sont disposées à lever autant de fonds qu'ils en reçoivent de l'État. Ils ne sont plus prêts à payer entièrement la note. Ils réclament la transparence et ils veulent que les programmes auxquels ils participent soient évalués. Voilà comment le Parti réformiste s'y prendrait.

Je ne dis pas que nous supprimerions l'aide à l'étranger, mais que celle-ci serait mieux ciblée. Nous examinerions la situation et nous essayerions d'avoir le maximum pour notre argent. Nous ne pouvons pas être tout à tous.


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Un troisième domaine que nous examinerions est celui des subventions internationales. Nous en donnons beaucoup et, dans bien des cas, personne ne rend de comptes. Je pourrais poursuivre là-dessus si j'avais plus de temps, mais les Canadiens nous demandent d'évaluer ces programmes internationaux et de nous assurer que l'argent est dépensé de la manière la plus judicieuse possible. Nous coupons les fonds à nos étudiants, mais nous devrions nous demander ce que nous recevons en retour de ces subventions internationales.

Nous devons aussi nous interroger sur certaines des institutions auxquelles nous appartenons. Le gouvernement canadien a eu pour politique d'adhérer à tout ce qui est international. Nous adhérons à de nombreuses organisations dont nous ignorons la mission. Lorsque le vérificateur général a étudié la question, il y a trois ans, il a été incapable, dans certains cas, de trouver les objectifs de certaines organisations dont nous sommes membres, de savoir qui étaient les membres du conseil d'administration et ce que l'organisation espérait accomplir.

Ce que je dis, en somme, c'est que tous les domaines du gouvernement, peu importe dans quel ministère, vont devoir subir des coupes. Cela ne fait aucun doute. Nous devons l'admettre et compter sur les divers ministres pour faire les compressions chacun dans son secteur. C'est et ce doit être notre objectif. C'est là-dessus que tous les députés doivent s'entendre.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, j'ai énormément apprécié le discours de mon collègue. Je pense que c'est un discours très sensé, qui vient de l'opposition, et c'est le rôle de l'opposition de poser des questions. Le rôle du gouvernement au pouvoir est de trouver des solutions et de régler les problèmes. Je pense que le gouvernement libéral qu'on a devant nous n'a pas été assez longtemps dans l'opposition pour pouvoir vraiment se préparer à gouverner. Mais vous savez que les Canadiens, en dehors du Québec et de l'Ouest, ont décidé que ce gouvernement-là gouvernerait, donc il devrait gouverner.

Il y a une chose dans le discours de mon collègue qui m'a frappé, et c'est lorsqu'il parlait du problème du Québec. Vous savez, le Québec n'a pas de problème; je pense plutôt que c'est le reste du Canada qui en a un. Le Québec, librement, aura un référendum, et les Québécois se prononceront lors de ce référendum.

(1800)

Il nous a parlé de Charlottetown. Charlottetown est l'événement historique qui nous démontre, hors de tout doute, que les Canadiens et les Québécois ont voté non, mais exactement pour des raisons opposées. Donc, Charlottetown, ça nous démontre bien les différences qu'il y a entre le Québec et le reste du Canada.

Ma question pour mon honorable collègue, qui a fait un très bon discours, serait: N'est-il pas temps, maintenant, de voir ce que le Québec veut et de laisser le Québec se réaliser pleinement?

[Traduction]

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, j'ai certainement parlé du problème québécois. Le terme «problème» est peut-être mal choisi. J'aurais dû parler de question québécoise.

Les députés connaissent notre position à ce sujet. Nous croyons essentiellement que l'époque des deux peuples fondateurs est chose du passé. Nous avons maintenant dix provinces égales. Nous comptons dans notre pays 12 millions d'habitants dont la langue d'origine n'est ni l'anglais ni le français. Il faut maintenant aller de l'avant. Tâchons de bâtir notre pays, le Canada.

Nous sommes Canadiens. Nous en sommes fiers. Nous voulons que le Québec en fasse partie. Nous croyons que les Québécois de la masse veulent eux aussi en faire partie, mais ils en ont assez de la manière ancienne d'aborder les problèmes. Ils veulent qu'on le fasse maintenant à la mode de 1994. C'est-à-dire, nous attaquer vraiment aux problèmes touchant les emplois, le déficit, le système de justice pénale. Voilà ce dont ils veulent nous entendre parler.

Ils ne veulent pas nous entendre parler de questions constitutionnelles. S'il faut un référendum, allons-y. Exposons les faits à la population et laissons-la se prononcer une fois pour toutes.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais obtenir des éclaircissements du député de Red Deer. Durant son exposé, il a dit que l'imposition des REER n'était pas la solution. Plus tôt aujourd'hui, un des députés réformistes a dit que les REER devraient être imposés. Je m'y perds un peu. Le député devrait peut-être clarifier la situation.

M. Ramsay: De qui s'agit-il?

M. Cannis: C'est peut-être venu d'un télécopieur différent, je ne sais pas. Voici mon autre question.

Le député a parlé de compressions, de compressions et encore de compressions, ainsi que de l'absence de propositions du gouvernement. Souvent le ministre des Finances a posé ces questions. Comme le veut l'usage à la Chambre, au moment opportun, le ministre présentera ces réponses; comme tout le monde le sait, nous tenons actuellement des consultations pour connaître l'opinion de la population. Nous pouvons rassembler ces informations et présenter ensuite des propositions. J'aimerais donc avoir des éclaircissements au sujet des REER.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, moins le gouvernement intervient, plus les gens commencent à s'occuper d'eux-mêmes. Le REER est un moyen de s'occuper de soi. En rendant ce genre de régime imposable, on dit aux gens qu'on ne les laissera même pas s'occuper d'eux. Si nous n'avions pas souscrit au RPC en 1965, nous nous en porterions mieux aujourd'hui. Il aurait en effet mieux valu que le gouvernement ne l'administre pas comme un régime d'assurance.

Nous estimons qu'il faut encourager les gens à s'occuper d'eux-mêmes. C'est ce que permettent les REER, et il ne faut donc pas y toucher. Il ne faut pas les imposer davantage, mais je serais vraiment surpris si quelqu'un de ce côté abondait dans le même sens.

En 1984, nous savions que nous avions un problème, que notre dette atteignait 190 milliards de dollars, et nous avons demandé au gouvernement de trouver une solution. Le gouvernement Mulroney a promis de le faire, puis il s'est dégonflé. En 1988, il a dit qu'il n'avait pas eu suffisamment de temps, qu'il lui en fallait un peu plus. Nous n'en croyions alors rien, mais des élections ont eu lieu, et les gens lui ont réitéré leur confiance. En 1993, cependant, ils ne l'ont plus cru, et les députés ont vu ce qui s'est


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produit. C'est le sort qui sera réservé ici à quiconque ne s'attaquera pas au problème numéro un.

Voilà pourquoi il y a des pertes d'emplois et pourquoi le système ne fonctionne pas.

[Français]

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec soin les discours d'aujourd'hui, la grande majorité d'entre eux, que j'ai beaucoup appréciés et j'essaierai de faire un petit résumé des propos principaux de chaque parti.

(1805)

Lorsque les présentations viennent du Bloc, on parle du déficit. On dit que la dette est encore plus énorme qu'énorme. Ensuite on nous dit: ne touchez à rien parce que si vous touchez quelque chose, vous allez causer des ennuis. On comprend bien cela. Évidemment, c'est le Canada le gros problème! Cela résume tout.

Lorsque les collègues disent que le Québec est un problème, on rejette cela, mais on accepte que le Canada soit le gros problème. Non, je ne pense pas. Je pense qu'on devrait être assez honnête. Le problème c'est qu'on a beaucoup dépensé pendant des années; maintenant nous avons tous un problème qui est énorme, et nous avons tous la responsabilité d'essayer de travailler ensemble pour trouver des solutions.

Lorsqu'on parle du Parti réformiste, j'aime écouter leurs discours.

[Traduction]

La principale solution du Parti réformiste est de réduire les dépenses. C'est facile, c'est très simple de rétablir l'équilibre budgétaire. Ce n'est pas difficile. Je l'ai fait quand j'étais sous-ministre. Mais il faut savoir-et je pense que les députés le savent sans vouloir l'admettre-que la compression des dépenses fait des victimes.

Par exemple, quand on parle de réduire l'aide étrangère, on oublie que des gens pourraient en souffrir. Nous voudrions faire croire aux Canadiens que l'aide étrangère n'est motivée que par pur altruisme. Soyons honnêtes: nous en retirons beaucoup en retour. L'aide étrangère nous aide à garantir notre propre sécurité. Soyons donc justes quand nous parlons d'augmenter ou de réduire les dépenses. Soyons justes. Partageons les effets.

J'ai été vraiment offensé, monsieur le Président, et je pense que vous l'avez remarqué lorsque le député qui a précédé celui qui vient de parler-peut-être ne l'a-t-il pas vu sous cet angle-s'en est pris à Canadian Parents for French, qui est un organisme fort honorable. Il a laissé entendre que puisque cet organisme reçoit de l'aide de l'État, il fait la promotion de l'immersion plutôt que de simplement croire que l'immersion est la meilleure solution.

Vous vous souviendrez, monsieur le Président, que j'ai dit qu'il y a plus de sept millions de Canadiens d'expression française dont la première langue est le français et qu'il y aussi quelque douze millions de Canadiens dont la première langue était une autre langue que le français. Nous avons tous appris l'anglais dans les classes d'immersion. En fait, nous l'avons si bien appris que certains d'entre nous parlent mieux l'anglais que leur langue maternelle.

Je rejette complètement l'hypothèse voulant que l'immersion ne soit pas efficace. Je la rejette complètement, et j'ai même déjà fait des démarches pour obtenir la recherche la plus récente. Si je suis dans l'erreur, je le dirai au député.

C'est facile de venir faire ce genre d'accusation à la Chambre. Prenez une personne, un article du magazine Saturday Night, et voilà. Cela ne suffit pas. C'est absolument et totalement injuste, en ne donnant qu'une seule référence venant d'un supposé expert, d'attaquer un groupe de Canadiens responsables qui travaillent depuis des années pour assurer à leurs enfants la meilleure éducation possible.

[Français]

Eh bien, je fais mieux de changer de vitesse, je crois, parce que, franchement, lorsque je pense aux commentaires qui ont été faits, qui ont été exagérés, qui sont insensibles, cela me choque.

Je veux parler du processus de consultation. Vous n'êtes pas sans savoir qu'avant de débuter ce processus, il y a environ un mois, le ministre et son ministère ont eu le bon sens de nous donner un certain nombre de documents qui traitaient du développement économique au Canada, de la situation du déficit, de la dette, afin qu'on puisse avoir une toile de fond, afin qu'on puisse comprendre ce qu'était la problématique, avec des faits à l'appui. Vous n'êtes pas sans savoir que le Comité des finances s'est rendu un peu partout au Canada pour consulter les Canadiens, pour savoir ce qu'ils pensent de cette consultation prébudgétaire, pour savoir ce qui se passe au point de vue des coupures, pour savoir ce qui se passe au point de vue de l'impôt, etc.

Le ministre des Finances s'est rendu un peu partout, dans un grand nombre de villes, a assisté à plusieurs réunions où il a écouté des gens qui ont partagé leurs préoccupations avec lui. Ensuite, il a demandé à tous les députés de cette Chambre, non seulement ceux de son parti, mais aussi ceux des autres partis, de partager librement avec lui leurs pensées au sujet du budget.

Je trouve que c'est quand même une initiative qui devrait être appuyée. Lorsque j'ai entendu quelqu'un dire que c'était des consultations bidon, j'ai trouvé très insensible, injuste et vraiment très maladroit de prétendre que le ministre des Finances avait initié de telles consultations simplement pour la forme.

(1810)

Franchement, on exagère pas mal ici, mais lorsqu'on fait des commentaires semblables, on va trop loin. Je ne suis qu'un simple député, j'ai eu l'occasion de parler à un nombre de collègues, un nombre d'hommes et de femmes d'affaires, un nombre de commettants et de commettantes, non seulement chez moi dans ma circonscription de Saint-Boniface, mais partout à travers le pays. Voilà ce que j'ai trouvé.


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[Traduction]

Dans mes discussions non seulement avec mes électeurs, mais avec d'autres Canadiens de tous les coins du pays, j'ai recueilli un certain nombre de points de vue que j'ai transmis au ministre des Finances.

Surprise, tous ceux à qui j'ai parlé étaient d'avis qu'ils payaient trop d'impôts. Je suppose que je suis d'accord avec eux. Fait à remarquer, ils voulaient savoir dans quelle mesure notre taux d'imposition était comparable à celui d'autres pays, ceux en particulier qui sont nos principaux partenaires commerciaux, comme les États-Unis et le Japon, notamment. Certains estimaient aussi que les riches avaient les moyens d'éviter de payer leur juste part d'impôts. Tels sont les points de vue que j'ai entendus.

Ils croient aussi, assez ardemment, que le gouvernement ne devrait pas tolérer que les riches paient peu d'impôts, voire pas du tout. Que ce soit entièrement vrai ou non, là n'est pas la question. La question, c'est que cette idée correspond à leur conviction profonde. Ils pensent la même chose des grandes sociétés qu'ils appellent les sociétés riches.

Ils ont eu un peu de mal à définir le terme «riche» lorsqu'on leur a demandé de le faire et ils ont mis du temps à s'entendre sur cette définition. Toutefois, ils ont le sentiment que les banques ne paient pas suffisamment d'impôts et cela les contrarie énormément. À mon avis, les banques ne seraient probablement pas d'accord avec cette façon de voir. J'ai même rencontré des banquiers qui ont exprimé leur désaccord à ce sujet, mais voilà quelle est la perception des Canadiens.

Ce n'est pas tout. Ils veulent qu'on mette fin aux échappatoires fiscales. Il s'agit de Canadiens de différents milieux qui n'ont pas accès à ces échappatoires. Selon eux, bon nombre des échappatoires fiscales ne profitent ni au Canada, ni aux Canadiens en général, mais uniquement aux bien nantis. Ils croient donc que, probablement dans la plupart des cas, les échappatoires devraient être abolies.

Ils sont aussi unanimes à dire que ceux qui réalisent des bénéfices sur leurs placements au Canada peuvent éviter de payer des impôts canadiens. J'ai examiné cette question. Il semble que les gens peuvent effectivement réaliser des bénéfices sur leurs placements au Canada et payer moins d'impôts s'ils placent leur argent dans un autre pays. Les Canadiens rencontrés se demandent donc, si tel est le cas, s'il est juste que ces gens réalisent des bénéfices puis les expédient ensuite ailleurs afin de payer moins d'impôts. Voilà du moins ce qu'ils croient.

J'ai aussi entendu quelques arguments concernant les prêts aux étudiants. Certains ont parlé de cas où des gens très riches ou relativement riches aujourd'hui doivent encore des sommes empruntées qu'ils n'ont jamais remboursées. Ils sont fâchés parce que plusieurs d'entre eux ont reçu des prêts lorsqu'ils étaient étudiants, qu'ils ont une famille et des enfants qui reçoivent des prêts, qu'ils ont remboursé leurs propres prêts et qu'ils aident maintenant leurs enfants à poursuivre leurs études au collège et à l'université.

Ces gens sont aussi pleins de gros bon sens. Selon eux, si quelqu'un est incapable de rembourser un prêt étudiant, pourquoi le harceler? Pourquoi le poursuivre? Pourquoi ne pas laisser le dossier de côté temporairement, jusqu'à ce que la personne puisse mettre de l'ordre dans ses finances, et réclamer le montant du prêt plus tard, lorsque celle-ci sera en mesure de payer? Ils croient en majorité que toute personne, qui a aujourd'hui suffisamment de moyens et qui doit encore des sommes au gouvernement à cause d'un prêt étudiant, devrait les rembourser le plus tôt possible.

On a parlé longuement aujourd'hui des fiducies familiales. Ces gens les ont aussi mentionnées. Que leur perception soit bonne ou mauvaise, ils croient que des sommes énormes sont déposées dans ces fiducies familiales et qu'elles ne sont pas imposées au même taux que mes revenus, vos revenus et leurs propres revenus. Selon eux, une telle situation est injuste.

Ils ont aussi posé bien des questions intéressantes. Par exemple, n'est-il pas temps pour le pays de déterminer si l'impôt sur l'héritage serait une mesure utile, puisque notre pays serait, semble-t-il, l'un des rares à ne pas assujettir les héritages à l'impôt?

(1815)

Ils ont l'impression-il s'agit là aussi d'un sentiment très largement partagé-qu'il faut s'attaquer à notre économie de marché noir. Certains sont assez sympathiques à ce phénomène, y voyant «un moyen auquel ont recours dans bien des cas les pauvres et les citoyens de la classe intermédiaire inférieure pour contourner les impôts.» Ils sont d'avis que les Canadiens fortunés disposent de bon nombre de mécanismes pour les aider s'ils jugent bon de les utiliser. S'ils y ont recours, ce n'est sans doute pas si mauvais. Tout le monde est d'avis que l'économie de marché noir disparaîtra dans une large mesure dès que les riches paieront leurs juste part.

Monsieur le Président, vous ne serez sans doute pas étonné d'apprendre que la question des pensions des députés est venue sur le tapis. Ils sont heureux de savoir que le gouvernement va s'y attaquer sous peu. Quand bien même ne serait-ce que pour la valeur du symbole, ils estiment que ce régime de retraite comporte des avantages qui sont autrement supérieurs à ceux dont bénéficient la plupart des Canadiens. Ils souhaitent qu'on remédie à cette situation.

Leur souhait ne se borne pas à une réforme du régime de retraite des députés. Tout le monde est d'avis que tous les Canadiens devraient, au moment de leur retraite, disposer d'indemnités suffisantes pour pouvoir vivre le reste de leurs jours dans la dignité. Ils estiment qu'il faut procéder à une révision de l'ensemble des régimes de retraite, bonifier ensuite la plupart d'entre eux et réduire ceux qui sont effectivement trop généreux. Ils estiment que, à leur retraite, les Canadiens doivent disposer d'indemnités suffisantes pour pouvoir vivre dignement. Cela m'a grandement réjoui.

Je voudrais partager avec vous une dernière remarque au sujet de ces entretiens. Le vérificateur jouit d'une grande crédibilité. Ils disent qu'il faut régler les questions que le vérificateur général soulève et qui révèlent l'existence de graves problèmes dans la façon dont les fonds sont dépensés. Ils veulent que l'on examine ces questions dans le budget, chaque année.

Je vous fais part de ces points de vue parce que ce sont les questions dont les habitants de ma circonscription et des Canadiens de partout au Canada m'ont parlé au cours de mes rencontres avec eux. Je tiens à ajouter que j'ai fait part de ces points de


8380

vue au ministre des Finances dans l'espoir qu'il puisse les régler, en tout ou en partie, dans son prochain budget.

Je pense que le ministre des Finances attend ce genre de participation, de précision et d'aide de notre part. Dans le prochain budget, il traitera des mesures que le gouvernement a prises et entend prendre pour ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB d'ici la troisième année de son mandat.

[Français]

J'ai partagé avec vous et avec mes collègues les points de vue d'un nombre de commettants, de Canadiens et Canadiennes au sujet du budget qui sera déposé à la Chambre au mois de février 1995. Ce que le ministre des Finances cherche, je crois, c'est d'obtenir le même genre d'information d'autres députés afin qu'il puisse prendre leur point de vue en considération.

Ce sont les commentaires que je voulais partager avec vous et avec mes collègues en cette Chambre des communes.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention et un peu avec difficulté les propos de mon collègue d'en face. Il nous a parlé de la consultation du ministre des Finances qui se fait depuis un mois.

On pourrait facilement accepter cela si ce n'était pas uniquement le ministre des Finances qui consulte. Malheureusement, on est devant un gouvernement, on est face à une organisation qui a consulté continuellement. Les 25 comités et les ministères consultent. Pendant qu'on consulte, on ne prend aucune décision, et je pense qu'on tente de noyer le poisson en faisant croire à la population canadienne qu'on tient compte de son opinion. Mais on aura tellement consulté d'un bord et de l'autre que, finalement, les décisions vont se prendre, mais on les retarde sans cesse.

Au lieu de parler de ce qui nous divise, j'aimerais poser une question à mon collègue de Saint-Boniface sur ce qui nous unit.

(1820)

Dans ce pays, ce qui nous unit depuis plus de 25 ans, c'est la redistribution de la richesse. Nous avons, au Canada et au Québec, un système social inégalé et je pense qu'il ne faut pas le perdre. Ma crainte et celle des députés du Bloc québécois de ce côté-ci, c'est que le gouvernement détruise ce système, le minimise, le rende plus petit et moins efficace.

Et ce dont nous avons le plus peur, c'est que ce soit la classe moyenne et les gagne-petit qui y perdent. Alors, voici ma question: Est-ce que le député de Saint-Boniface peut me rassurer et déclarer à cette Chambre que ce n'est pas uniquement et essentiellement la classe moyenne et les gagne-petit qui vont payer pour les changements?

M. Duhamel: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour ses commentaires et ses questions. Oui, absolument, le premier ministre a dit en Chambre qu'il fallait changer les programmes sociaux, parce que ce sont des programmes qui avaient été préparés, implantés il y a déjà un certain nombre d'années dans des conditions qui n'existent plus aujourd'hui.

Il a aussi indiqué qu'épargner de l'argent n'était pas une priorité, il l'a dit il y a quelques jours. Si en même temps, on peut en épargner, ça va. J'ai aussi dit dans mon discours-et c'est pour cela que je suis surpris que mon collègue ait dit avoir écouté avec attention mais difficulté mon discours-j'ai proposé et indiqué dans mes propos qu'il ne fallait pas prendre l'argent des plus démunis.

Je l'ai dit à plusieurs reprises. J'ai donné plusieurs exemples. Alors, pourquoi a-t-il eu tellement de difficulté? L'autre chose qui me fait vraiment peur, c'est qu'il a accusé le gouvernement de consulter. Est-ce que ça veut dire que si jamais ils formaient le gouvernement, les députés du Bloc ne consulteraient pas? Ah, c'est ce qu'on essaie de proposer! Le Bloc québécois, s'il était le gouvernement, ne consulterait pas.

Bien sûr qu'on est en train de consulter. On n'a pas besoin de déposer un budget avant le mois de février 1995. Qu'est-ce qu'on devrait être en train de faire? Prendre des décisions sans consulter? C'est ce que le Bloc ferait. Ça me trouble énormément.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je suis d'accord avec bien des choses que le député a dites.

Certes, nous essayons tous de consulter nos électeurs depuis déjà quelque temps. Que ce soit au marché agricole ou lors d'une réunion publique, nous avons tous entendu le message, et bon nombre des propos que le député a tenus rejoignent ce message.

Il y a une chose qui m'intéresse réellement lorsque nous parlons de l'économie souterraine. On s'imagine en quelque sorte que, si les gens estimaient que le régime fiscal est équitable, ils s'empresseraient tous de commencer à acquitter leurs impôts. Je me demande si cela est vrai. À mon avis, l'économie souterraine est énorme et beaucoup plus répandue que nous l'avons imaginé.

Je me demande ce que le député pense de la proposition d'un impôt unique ou d'un impôt uniforme. Si je lui demande cela, c'est que, si nous réformons entièrement le régime fiscal pour que tous les Canadiens aient l'impression d'être traités équitablement, en plus des changements superficiels dont nous parlons ici, comment allons-nous faire en sorte que les gens soient disposés à payer leurs impôts?

M. Duhamel: Monsieur le Président, je comprends la question de mon collègue. Je pense qu'elle est équitable et qu'il soulève un certain nombre de points intéressants.

Si, dans mes observations, j'ai laissé entendre que je croyais que les Canadiens voudraient tout à coup payer des impôts à la suite de certaines modifications du système, ce n'était pas du tout mon intention. Au sujet de l'économie souterraine, mes électeurs m'ont dit qu'ils avaient le sentiment qu'il existait certaines échappatoires pour quelques privilégiés, peut-être des Canadiens nantis, et que le gouvernement devrait peut-être voir si certains aspects de l'économie souterraine ne constituaient pas des échappatoires pour les pauvres ou les gens de la classe moyenne.

Cette question a été soulevée. J'ignore la réponse, mais je ne voudrais certainement pas donner l'impression que les gens pensaient qu'on pourrait ainsi corriger le problème. Je crois qu'il est beaucoup plus complexe que cela. Comme mon collègue l'a


8381

signalé, à l'instar du ministre des Finances aujourd'hui ou du ministre du Revenu national, il est très difficile à quantifier. À ce sujet, je veux juste m'assurer que nous sommes sur la même longueur d'ondes et je pense que c'est le cas.

En ce qui concerne l'impôt uniforme, je dois avouer que j'ai beaucoup lu à ce sujet. Un de mes collègues s'est beaucoup intéressé à la question. Je n'en sais pas assez sur les impôts en général pour être en mesure d'affirmer que c'est la voie à suivre. En lisant tous ces documents, je me suis aperçu que certains étaient pour et d'autres contre.

(1825)

Ce qui me dérange dans tout cela, c'est que cet impôt uniforme ne tiendra pas compte, comme il le devrait, des gens situés dans les tranches d'imposition les plus basses, c'est-à-dire les Canadiens qui gagnent 7 000 $, 8 000 $ ou 12 000 $ par année et qui ne devraient pas payer d'impôts, selon moi. Ainsi, de ce point de vue-là, je ne pourrais appuyer cette proposition.

Permettez-moi de dire en terminant que je suis prêt à souscrire à tout type d'imposition reflétant les diverses réalités économiques au Canada. Je veux non seulement qu'il soit équitable, mais également qu'il soit perçu comme tel par les Canadiens, car, sans cela, peu importe qu'il soit uniforme ou je ne sais trop quoi, il ne donnera simplement pas les résultats escomptés.

Il faut prendre garde au fait que si nous modifions le régime d'imposition du tout au tout et nous entendons, par exemple, sur un taux uniforme, il pourrait y avoir toutes sortes de conséquences que nous risquons de ne pas prévoir. Nous devons évaluer les répercussions négatives possibles de toute réforme sur les Canadiens, et je voudrais vraiment m'assurer de bien les comprendre avant d'aller plus loin.

[Français]

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, j'apprécie toujours les interventions du député de Saint-Boniface en cette Chambre. J'aimerais demander à mon honorable collègue si relativement à l'imposition des Régimes enregistrés d'épargne retraite, le député peut nous dire s'il s'opposera avec la dernière énergie-j'allais dire, en voyant mon collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine avec l'ultime rébellion dont il peut faire preuve- s'il va s'opposer à ce que le gouvernement touche à ce véhicule?

Pour le contribuable moyen canadien c'est à peu près le seul accessible, là où nos parents, nos grands-parents ont pu mettre un peu d'argent de côté. Aujourd'hui, ils vivent dans l'insécurité face aux politiques gouvernementales, à appréhender le fait qu'on pourrait toucher à ce petit pécule que beaucoup gardent pour leurs vieux jours. Voyant l'inflation galopante, ils peuvent penser que ce véhicule n'est plus un véhicule sécuritaire. Est-ce que le député de Saint-Boniface a rencontré parmi ses électeurs et électrices les mêmes préoccupations? Quelle réponse sur cette question?

M. Duhamel: Monsieur le Président, j'apprécie la question de mon collègue. Oui, elle a été posée à plusieurs reprises. Je ne veux appuyer aucun impôt, aucune mesure qui empêcherait quelqu'un, que ce soit un homme, une femme ou un couple, de prendre une retraite avec l'argent qu'il leur faut afin de vivre avec une certaine dignité.

Ce que j'aimerais faire avant de me prononcer, et ce n'est pas pour éviter la question, c'est comprendre l'enjeu total, ce que le ministre des Finances a l'intention de faire. Si vous me demandez aujourd'hui de dire oui ou non, je ne peux pas, si je veux être un député responsable, parce que je ne sais pas encore-j'ai l'impression que je vais le savoir à peu près au même moment que vous-ce qui sera fait dans le budget qui sera déposé au mois de février.

Mais je veux assurer mon collègue que oui la question a été posée. Oui j'ai donné des réponses telle que celle-là et oui j'ai l'intention d'appuyer des mesures qui vont rendre le système plus juste, si possible, et qui sera perçu comme tel par la grande majorité. Je ne veux aucune mesure qui empêchera les gens de prendre leur retraite avec le montant d'argent nécessaire pour vivre avec une grande dignité, et non pas un peu de dignité.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Le temps de parole du député est écoulé. Étant donné qu'il reste seulement à peine un peu plus d'une minute, au lieu de demander à un député de commencer une intervention, la Chambre consentirait-elle à l'unanimité à ce que je déclare qu'il est 18 h 30?

Des voix: D'accord.

* * *

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 24 novembre, du projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement, ainsi que des motions nos 1, 2, 8, 9 et 10.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 18 h 30, conformément à l'article 45 du Règlement, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur les amendements proposés à l'étape du rapport de l'étude du projet de loi C-57, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.

Convoquez les députés.

(1850)

[Français]

Après l'appel du timbre:

M. Duceppe: Monsieur le Président, je crois que vous obtiendrez le consentement unanime afin de procéder, en premier lieu, au vote sur la motion no 10.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Le premier vote porte sur la motion no 10, inscrite au nom du député de Verchères.

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)


8382

(Vote no 118)

POUR

Députés
Bachand
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Blaikie
Brien
Chrétien (Frontenac)
Daviault
de Jong
de Savoye
Duceppe
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guimond
Jacob
Landry
Langlois
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Loubier
McLaughlin
Ménard
Nunez
Solomon
St-Laurent
Taylor
Venne-30

CONTRE

Députés
Adams
Allmand
Anderson
Arseneault
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Benoit
Berger
Bertrand
Bethel
Bodnar
Bonin
Boudria
Bridgman
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Campbell
Cannis
Catterall
Chan
Clancy
Collenette
Cowling
Culbert
Cummins
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Duhamel
Duncan
Dupuy
Eggleton
English
Epp
Finestone
Finlay
Flis
Forseth
Frazer
Gaffney
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gerrard
Godfrey
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jennings
Karygiannis
Kirkby
Knutson
Lastewka
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
O'Reilly
Pagtakhan
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Proud
Ramsay

Richardson
Ringma
Rompkey
Serré
Shepherd
Silye
Solberg
Speaker
Speller
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Stinson
Szabo
Telegdi
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Vanclief
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
White (Fraser Valley West)
Wood
Young -138

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Asselin
Augustine
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bevilacqua
Bouchard
Bélisle
Caccia
Canuel
Caron
Cauchon
Chamberlain
Copps
Crête
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
Dingwall
Dubé
Dumas
Fewchuk
Fontana
Gagliano
Goodale
Guay
Keyes
Lalonde
Laurin
LeBlanc (Cape/Cap Breton Highlands-Canso)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Marchand
Marchi
McCormick
McTeague
Mercier
Minna
Mitchell
Nault
Ouellet
Parrish
Paré
Patry
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Robichaud
Rocheleau
Rock
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Sheridan
Simmons
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Zed

(1855)

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le résultat du vote sur la motion no 10 à l'étape du rapport s'applique aux motions nos 1, 2, 8 et 9 à l'étape du rapport.

(1900)

M. Allmand: Monsieur le Président, je ne veux pas que mon vote sur la motion no 9 soit enregistré comme un vote négatif.

Le président suppléant (M. Kilger): Le résultat du vote sur la motion no 10 s'applique à toutes les autres motions. Par conséquent, les motions nos 1, 2, et 8 sont rejetées.

[Note de l'éditeur: Pour les motions nos 1, 2 et 8, voir le voteno 118.]

(La motion no 9, mise aux voix, est rejetée.)


8383

(Vote no 119)

POUR

Députés
Bachand
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Blaikie
Brien
Chrétien (Frontenac)
Daviault
de Jong
de Savoye
Duceppe
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guimond
Jacob
Landry
Langlois
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Loubier
McLaughlin
Ménard
Nunez
Solomon
St-Laurent
Taylor
Venne-30

CONTRE

Députés
Adams
Anderson
Arseneault
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Benoit
Berger
Bertrand
Bethel
Bodnar
Bonin
Boudria
Bridgman
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Campbell
Cannis
Catterall
Chan
Clancy
Collenette
Cowling
Culbert
Cummins
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Duhamel
Duncan
Dupuy
Eggleton
English
Epp
Finestone
Finlay
Flis
Forseth
Frazer
Gaffney
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gerrard
Godfrey
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jennings
Karygiannis
Kirkby
Knutson
Lastewka
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
O'Reilly
Pagtakhan
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Proud
Ramsay
Richardson

Ringma
Rompkey
Serré
Shepherd
Silye
Solberg
Speaker
Speller
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Stinson
Szabo
Telegdi
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Vanclief
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
White (Fraser Valley West)
Wood
Young -137

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Asselin
Augustine
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bevilacqua
Bouchard
Bélisle
Caccia
Canuel
Caron
Cauchon
Chamberlain
Copps
Crête
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
Dingwall
Dubé
Dumas
Fewchuk
Fontana
Gagliano
Goodale
Guay
Keyes
Lalonde
Laurin
LeBlanc (Cape/Cap Breton Highlands-Canso)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Marchand
Marchi
McCormick
McTeague
Mercier
Minna
Mitchell
Nault
Ouellet
Parrish
Paré
Patry
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Robichaud
Rocheleau
Rock
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Sheridan
Simmons
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Zed

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international, Lib.) propose: Que le projet de loi modifié soit agréé.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre la motion veuillent bien dire non:

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.


8384

M. Boudria: Monsieur le Président, je pense que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que les whips de chaque parti indiquent de quelle façon voteront les membres de leur parti. En ce qui nous concerne, je déclare que les députés libéraux votent oui sur la motion.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois appuieront également cette motion.

[Traduction]

M. Silye: Les membres présents du Parti réformiste votent oui.

M. Solomon: Les membres du Nouveau Parti démocratique votent non sur cette motion, monsieur le Président.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 120)

POUR

Députés
Adams
Allmand
Anderson
Arseneault
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Bachand
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Benoit
Berger
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bertrand
Bethel
Bodnar
Bonin
Boudria
Bridgman
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Campbell
Cannis
Catterall
Chan
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Collenette
Cowling
Culbert
Cummins
Daviault
de Savoye
Dhaliwal
Discepola
Dromisky
Duceppe
Duhamel
Duncan
Dupuy
Eggleton
English
Epp
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Forseth
Frazer
Gaffney
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Gerrard
Godfrey
Godin
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Guarnieri
Guimond
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jacob
Jennings
Karygiannis
Kirkby
Knutson
Landry
Langlois
Lastewka
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lee
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Loney
Loubier
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)

McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Ménard
Nunez
O'Reilly
Pagtakhan
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Proud
Ramsay
Richardson
Ringma
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Serré
Shepherd
Silye
Solberg
Speaker
Speller
St-Laurent
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Stinson
Szabo
Telegdi
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Vanclief
Venne
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
White (Fraser Valley West)
Wood
Young -163

CONTRE

Députés
Blaikie
de Jong
McLaughlin
Solomon
Taylor-5

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Asselin
Augustine
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bevilacqua
Bouchard
Bélisle
Caccia
Canuel
Caron
Cauchon
Chamberlain
Copps
Crête
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
Dingwall
Dubé
Dumas
Fewchuk
Fontana
Gagliano
Goodale
Guay
Keyes
Lalonde
Laurin
LeBlanc (Cape/Cap Breton Highlands-Canso)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Marchand
Marchi
McCormick
McTeague
Mercier
Minna
Mitchell
Nault
Ouellet
Parrish
Paré
Patry
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Robichaud
Rocheleau
Rock
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Sheridan
Simmons
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Zed

Le président suppléant (M. Kilger): Chers collègues, nous allons poursuivre le débat sur la motion d'ajournement; je de-

8385

manderais donc à ceux qui ne désirent pas rester de se retirer maintenant pour que nous poursuivions le débat.

_____________________________________________


8385

MOTION D'AJOURNEMENT

[Français]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office, en conformité de l'article 38 du Règlement.

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, le 16 novembre dernier, j'ai posé une question au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration au sujet du système de patronage implanté par le précédent gouvernement au sein de la CISR et poursuivi par le présent gouvernement quant aux nominations des commissaires.

En effet, il y a des problèmes très graves de luttes intestines dans cette commission entre les personnes nommées par les conservateurs et celles nommées par les libéraux. Ce patronage avait été dénoncé dans le rapport commandé par le ministre lui-même et rédigé par le professeur James Hathaway de l'Université York à Toronto. Des démissions et des suspensions surprises et non expliquées ont eu lieu dernièrement dans cet organisme quasi judiciaire.

À titre d'exemple, nous pouvons mentionner les cas de M. Michael Schelew, vice-président, actuellement sous enquête judiciaire; M. Greg Fyffe, directeur exécutif, qui a présenté sa démission dans des circonstances inconnues. Le commissaire Singh Bal a dû présenter sa démission, suite à l'examen des nominations effectué par le Comité permanent de l'immigration et de la citoyenneté, puisqu'il serait entré illégalement au Canada.

(1905)

Pour tous ces motifs, le Bloc québécois a demandé et continuera d'exiger une enquête en profondeur sur le fonctionnement global de la Commission.

Je profite de l'occasion pour attirer de nouveau l'attention du gouvernement sur le génocide et la tragédie que vit le peuple rwandais. La guerre se poursuit malheureusement au Rwanda. Des milliers et des milliers de personnes sont assassinées ou sont forcées de quitter le pays. Le Canada fait très peu pour venir en aide à ces réfugiés.

À titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de citoyenneté et d'immigration, je reçois des plaintes presque tous les jours concernant particulièrement les refus injustifiés de visas et les tracasseries administratives auxquels sont soumis à Nairobi, au Kenya, les Rwandais qui cherchent la protection du Canada. Il faut que le gouvernement fasse preuve de plus d'ouverture et de générosité envers les réfugiés rwandais.

Finalement, j'aimerais dire quelques mots sur la proposition 187 qui a été adoptée par référendum en Californie le 8 novembre dernier, jour des élections aux États-Unis. Cette proposition, devenue loi, prive les immigrants illégaux, leur famille et particulièrement leurs enfants des soins de santé, d'éducation et des services sociaux. Les victimes de cette atteinte à certains droits fondamentaux de la personne sont surtout des hispaniques provenant du Mexique et de l'Amérique centrale.

J'ai fait récemment un voyage au Costa Rica où j'ai été témoin de la condamnation unanime de cette loi par les différents gouvernements de la région. Le secrétaire général de l'OEA a également critiqué cette mesure. À l'intérieur même des États-Unis, le président Clinton, la Conférence des évêques catholiques ainsi que les organismes qui luttent contre la discrimination raciale se sont levés pour dénoncer cette mesure.

Je joins ma voix et j'exprime ma solidarité aux milliers d'hispaniques résidant aux États-Unis qui se prononcent contre cette loi.

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention, mais je dois dire qu'elle me laisse perplexe car elle n'a que peu ou pas de rapport avec la question qu'il avait posée. Je suis néanmoins heureuse de lui répondre.

Je souscris certainement aux propos du député, comme le feraient probablement tous les députés de ce côté-ci de la Chambre, au sujet de la situation en Californie. Je tiens à rassurer mon collègue en lui disant qu'il n'a pas à craindre que pareille situation se produise au Canada, du moins tant que le gouvernement actuel sera responsable de la politique.

En ce qui concerne le Rwanda, comme le ministre le lui a dit à plusieurs occasions, la situation est extrêmement difficile et complexe. Le personnel de l'immigration à l'étranger fait de son mieux compte tenu de la situation chaotique. Nous agirions de façon imprudente, pour ne pas dire criminelle, en mettant le personnel canadien en situation dangereuse et nous n'aiderions pas les réfugiés en exposant le personnel canadien à des dangers.

Nous traitons le dossier le plus rapidement possible par l'entremise du HCR et nous continuerons de le faire. Nous remercions le député de son intérêt pour la question. S'il connaît des cas précis où des problèmes surviennent à cause de difficultés au sein du ministère, nous lui saurions gré de nous en informer.

[Français]

LE TRANSPORT FERROVIAIRE

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, la semaine dernière, c'est-à-dire mardi, je demandais au ministre des Transports, suite aux deux tragédies ferroviaires, s'il avait émis des directives aux autorités de Via Rail afin de corriger immédiatement les carences en ce qui a trait aux mesures d'urgence et de premiers soins à donner aux passagers en cas d'accident.

Le ministre m'a bien répondu en confirmant qu'il avait demandé à Via Rail de s'assurer de prendre toutes les mesures sur une base intérimaire pour contrer les lacunes et ainsi assurer la sécurité, dans la mesure du possible, des personnes aussi bien

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que celles des employés. Le problème est justement ici: le ministre dit «dans la mesure du possible».

(1910)

Est-ce que le ministre est conscient que le possible se situe dans son cabinet ministériel? En effet, les mesures d'urgence et tout le matériel de premiers soins répondent aux normes du ministère des Transports. C'est au ministre à établir des normes de sécurité plus efficaces.

Lorsque le ministre répond que l'enquête déterminera les mesures qui s'imposent, les mesures souhaitables et les mesures possibles, je ne suis pas satisfait de sa réponse. Le ministre des Transports connaît très bien les mesures de sécurité nécessaires. Il les met en application dans les autres systèmes de transport.

Le ministre doit appliquer celles-ci immédiatement dans le transport ferroviaire. Le ministre se cache peut-être derrière le fait que le train représente le moyen de transport le plus sûr. Il me répondait d'ailleurs qu'il s'agissait d'une situation sans précédent.

Mais, ce n'est pas une raison pour ne pas réviser les normes de sécurité et les adapter à d'éventuels accidents. Ce ne sera pas après un autre accident de ce genre qu'il sera temps d'agir. C'est immédiatement que cela doit être fait, et le travail appartient au ministre des Transports. Que celui-ci augmente les normes de sécurité. Il ne faut pas oublier que les témoignages des victimes de l'accident nous indiquent que VIA Rail n'est pas préparé et équipé pour les urgences: des portes qui ne s'ouvrent pas, des fenêtres qu'il faut fracasser pour pouvoir sortir, des trousses de premiers soins ayant comme seul matériel des rouleaux de gaze.

La logique parle d'elle-même. La sécurité est insuffisante. Il faut intervenir aujourd'hui, même dans les normes de sécurité, d'autant plus que même les employés de VIA Rail considèrent qu'ils ne sont pas suffisamment formés pour faire face à une catastrophe de ce type et qu'ils n'ont pas l'équipement et le matériel nécessaires afin d'intervenir efficacement en cas d'urgence. C'est une situation très grave, lorsque même les employés se considèrent mal encadrés pour réagir dans une situation comme celle-là.

Je réitère donc ma question au ministre: Est-ce que le ministre entend réviser ces normes de sécurité à la hausse? Le ministre doit être conscient qu'un accident de ce genre aurait pu être plus catastrophique dans le nombre de blessés et de morts et qu'il faut faire tout en notre pouvoir pour éviter ce genre de tragédies.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je désire donner suite aux commentaires du député de Chicoutimi, à propos de l'accident ferroviaire de Brighton ainsi que celui de Rimouski.

D'entrée de jeu, je suis probablement le député qui prend le plus souvent le train et je voudrais aussi faire remarquer à l'honorable député que mon père était à bord du train en direction de la Gaspésie, lors de son déraillement. Alors, je me sens personnellement concerné par les propos tenus par l'honorable député.

Je ne suis guère en mesure d'ajouter quoi que ce soit à la réponse du ministre des Transports la semaine dernière. Les issues de secours, les trousses de premiers soins et les procédures d'évacuation en cas d'urgence sont des sujets de préoccupation. Permettez-moi de rappeler à tous que le ministre des Transports, le gouvernement, VIA Rail et Transports Canada considèrent ces points comme prioritaires et verront à ce que les enquêtes en cours les approfondissent.

Il n'en demeure pas moins que le Bureau de la sécurité des transports, comme l'a fait remarquer le ministre, est l'organisme qu'a créé le Parlement pour enquêter sur les accidents de transport, ce qu'il fait déjà dans le cas qui nous occupe. Si l'enquête révèle une irrégularité quelconque, relativement à la capacité d'intervention, il sera à même d'en aviser immédiatement Transports Canada.

Les corps policiers en cause, soit ceux de VIA Rail et la force publique, mènent leur propre enquête ou unissent leurs efforts et intensifient leurs mesures d'application des règlements et leur vigilance. De plus, VIA Rail a déjà commencé une revue préliminaire de l'accident et de ses procédures internes.

En conclusion, je cite les paroles du ministre: «Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir, au sein de VIA Rail, de Transports Canada et des forces policières. Nous prendrons tous les moyens possibles pour nous assurer que les gens qui voyagent à bord des trains de VIA Rail au Canada puissent le faire en toute sécurité.»

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, le 20 septembre dernier, j'ai posé au premier ministre une question que je considère d'une extrême importance si nous voulons maintenir un système fédéral de soins de santé au Canada. Ma question portait sur les cliniques privées en Alberta et les mesures que le très honorable premier ministre était disposé à prendre contre cette infraction à la Loi canadienne sur la santé. Le premier ministre a répondu qu'il était «résolu à maintenir un régime d'assurance-maladie gratuit et transférable pour tous».

(1915)

De toute évidence, ce que nous voyons en Alberta, c'est l'application non pas hypothétique, mais bien réelle, d'un double régime de soins de santé. Il ne fait aucun doute que les cliniques privées font partie d'un double régime de soins de santé. Toutes les recherches effectuées ont conclu qu'il s'agissait là d'une infraction à la Loi canadienne sur la santé. Pourtant, le gouvernement fédéral a refusé d'agir.

Entre-temps, le premier ministre de l'Alberta s'emploie à réduire les soins de santé généraux en retranchant 20 p. 100 du budget des soins de santé d'ici 1997, comme il avait promis de le faire. Même s'il est évident que bon nombre de simples citoyens de l'Alberta auront du mal à obtenir des soins de santé, on permet au double régime de soins de santé de s'implanter.

Si l'on examine la situation actuelle en Alberta, on s'aperçoit, par exemple, que le nombre de lits dans les hôpitaux d'Edmonton a été réduit de 20 p. 100. Cette réduction a eu de très graves répercussions sur de nombreux Albertains. Nous commençons à découvrir les conséquences dévastatrices que certaines de ces compressions ont pu avoir en Alberta. Nous savons que si le système de paiements de transfert poursuit sur sa lancée, les paiements de transfert que le gouvernement fédéral verse à

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toutes les provinces disparaîtront d'ici l'an 2015, et ce sera alors réellement la fin d'un régime véritablement national.

Nous voyons ici que, dans les cliniques privées, les patients doivent payer des frais qui viennent s'ajouter au montant versé à la clinique par le régime public d'assurance-maladie. Dans cette situation, la clinique se trouve donc à être payée deux fois pour le même service, soit une fois par le régime d'assurance-maladie du gouvernement et une fois par le consommateur.

Cela constitue clairement une violation de la Loi canadienne sur la santé. Le gouvernement fédéral doit corriger immédiatement cette situation s'il veut respecter son engagement à l'égard de notre système national de soins de santé et s'il veut préserver les cinq grands éléments de ce système. Évidemment, cela ne pourra pas se faire si le gouvernement fédéral ne continue pas ses transferts dans le cadre du financement des programmes établis.

En réponse à la question que j'ai posée le 20 septembre, le premier ministre a conclu en disant: «J'espère que M. Klein respectera les lois du Canada.»

Je voudrais soulever la question de nouveau. Il ne suffit pas d'espérer qu'on s'occupe de cette infraction à la Loi canadienne sur la santé. Je répète ma question: qu'est-ce que le gouvernement a l'intention de faire?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier le chef du Nouveau Parti démocratique d'avoir conservé la question qu'elle avait posée initialement. C'est intéressant.

Le gouvernement croit qu'il est très peu probable qu'un régime privé offrant des services de santé comme des biens de consommation, pour réaliser des profits, soit avantageux pour la santé des Canadiens.

À la conférence des ministres de la Santé, en septembre 1994, tous les ministres présents, à l'exception de celui de l'Alberta, en sont arrivés à une entente pour réglementer les cliniques privées. Il est clair que toutes les provinces, à l'exception de l'Alberta, sont prêtes à prendre des mesures pour mettre fin aux frais imposés dans les cliniques privées pour les soins nécessaires sur le plan médical.

Ces provinces et le gouvernement fédéral ne veulent pas, pour ce qui est du régime d'assurance-maladie, que l'on se dirige vers l'imposition de frais d'accès aux établissements. Notre régime d'assurance-maladie évolue. Il se pourrait que l'on recoure, pour les soins de santé, à des centres de soins plutôt qu'à un cadre hospitalier et que cela puisse être avantageux. Cependant, si cela s'accompagne de frais pour les soins nécessaires, sur le plan médical, cela ne sera pas conforme, je le répète, à ce qu'a été, jusqu'à maintenant, notre régime subventionné par l'État.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38 du Règlement, la motion d'ajournement de la Chambre est adoptée d'office. La Chambre s'ajourne donc à 10 heures demain, en conformité de l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 20.)