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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 6 décembre 1994

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES EXPÉRIENCES COMMUNAUTAIRES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

    Mme Gagnon (Québec) 8660

LOI SUR L'EFFICACITÉ DE LA RÉGLEMENTATION

    Projet de loi C-62. Adoption des motions de présentation et de première lecture 8662

PÉTITIONS

LES PERSONNES ÂGÉES

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

LE SUICIDE ASSISTÉ

LE TABAC

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 8663

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 8663

LE SUICIDE ASSISTÉ

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 8663

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 8663

LES PROGRAMMES DE TÉLÉVISION

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 8664

QUESTIONS AU FEUILLETON

DEMANDE DE LA TENUE D'UN DÉBAT D'URGENCE

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

    Mme Gagnon (Québec) 8669
    M. Chrétien (Frontenac) 8676

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES CLUBS DE RECHERCHE D'EMPLOI

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

    Mme Gagnon (Québec) 8692

LE PROJET HIBERNIA

LES BANQUES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LE RÉFÉRENDUM SUR LA SOUVERAINETÉ

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

    M. Harper (Simcoe-Centre) 8694

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE

QUESTIONS ORALES

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. Gauthier (Roberval) 8694
    M. Gauthier (Roberval) 8695
    M. Gauthier (Roberval) 8695

LE QUÉBEC

LA BOSNIE

LE QUÉBEC

    M. Harper (Calgary-Ouest) 8697
    M. Harper (Calgary-Ouest) 8697

LA MIL DAVIE

LA LOI SUR LES PRÊTS AUX PETITES ENTREPRISES

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    Mme Gagnon (Québec) 8699
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8699
    Mme Gagnon (Québec) 8699
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8699

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8700
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 8700

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

LES PÊCHES

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'AGENCE DE DÉVELOPPEMENT DU PARC CORNWALLIS

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE
DES QUESTIONS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

    Reprise de l'étude de la motion 8703

LOI SUR LE MINISTÈRE DE L'INDUSTRIE

    Projet de loi C-46. Reprise de l'étude à l'étape du rapport 8722
    Rejet de la motion par 182 voix contre 40 8722
    Rejet de la motion par 182 voix contre 40 8724
    Rejet de la motion no 10 par 173 voix contre 49 8725
    Motion d'approbation 8726
    Adoption de la motion par 134 voix contre 88 8726

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

    Projet de loi C-59. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 8727
    Deuxième lecture du projet de loi; renvoi à un comité 8727

LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA

    Projet de loi C-51. Reprise de l'étude à l'étape du rapport et de la motion no 1 8727
    Rejet de la motion par 142 voix contre 80 8728
    Rejet de la motion par 214 voix contre 8 8729
    Rejet de la motion par 174 voix contre 48 8730
    Motion d'approbation 8731
    Adoption de la motion par 182 voix contre 40 8731

LA LOI CANADIENNE SUR L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE

    Projet de loi C-56. Étape du rapport 8732
    Motion d'approbation 8733
    Adoption de la motion par 142 voix contre 80 8733

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    Projet de loi C-216. Étude à l'étape du rapport, sans propositions d'amendement 8734
    Motion d'approbation 8734
    Adoption de la motion 8734
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 8737

MOTION D'AJOURNEMENT

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8739

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 8742

8659


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 6 décembre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je crois que la Chambre consentira à l'unanimité à ce que, à l'heure prévue pour l'étude des initiatives ministérielles, la secrétaire d'État responsable du Multiculturalisme et de la Situation de la femme présente la motion suivante:

Que cette Chambre prenne note de la date anniversaire du meurtre de quatorze jeunes femmes à l'École Polytechnique le 6 décembre 1989 et de la nécessité urgente de prendre des mesures en vue d'éliminer la menace de violence au sein de la société, y compris la menace de violence envers les femmes.
Le Président: La Chambre y consent-elle à l'unanimité?

Des voix: D'accord.

* * *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 23 pétitions.

* * *

LES EXPÉRIENCES COMMUNAUTAIRES

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer à la Chambre, dans les deux langues officielles, un document qui s'intitule Les expériences communautaires, Mettre fin à la violence faite aux femmes. L'ouvrage consiste en une série d'anecdotes personnelles et retrace l'histoire des femmes dans leur lutte pour obtenir qu'on prenne des mesures de sécurité dans leur milieu.

Je proposerai incessamment: «Que cette Chambre prenne note de la date anniversaire du meurtre de quatorze jeunes femmes à l'École Polytechnique le 6 décembre 1989 et de la nécessité urgente de prendre des mesures en vue d'éliminer la menace de violence au sein de la société, y compris la menace de violence envers les femmes.»

Le Président: Je signale que cette question sera le premier point à l'ordre du jour dès que nous aurons terminé les affaires courantes.

* * *

[Français]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, le 6 décembre, est la date que tous les partis au Parlement ont proclamée à l'unanimité Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes.

[Traduction]

Ces jeunes femmes étaient intelligentes, ambitieuses et travailleuses. Elles avaient beaucoup à apporter à leur famille et à leur pays, mais tout cela leur a été volé par une rafale de fusil.

Aujourd'hui, 14 roses rouges ont été placées à l'entrée de la Chambre. Chacune symbolise la vie d'une jeune femme, pleine de promesses et de rêves, qui a été fauchée par un horrible acte de violence commis par un homme au nom de l'ancienne croyance cachée voulant que les femmes n'aient pas droit à l'égalité dans un monde d'hommes.

Cette tragédie a eu un effet catalyseur et la rose est devenu le symbole de ces femmes qui sont mortes. Elle figure sur les macarons vendus chaque année par la YWCAdans le cadre de sa campagne de lutte contre la violence faite aux femmes. La rose figure également sur l'épinglette du Congrès du travail du Canada dans le cadre de sa nouvelle campagne.

[Français]

Chaque année, depuis 1989, de plus en plus de partenaires, particuliers et organisations viennent unir leurs efforts à ceux des groupes féminins et d'autres organisations populaires, afin de faire progresser le changement social. De la Fédération canadienne des municipalités au Syndicat canadien de la fonction publique, en passant par la Fédération des femmes du Québec, les gens essaient de faire une différence dans leur collectivité.

[Traduction]

Notre gouvernement participe aussi aux efforts en vue de changer les choses. La semaine dernière, le ministre de la Justice a annoncé l'intention du gouvernement d'interdire le type d'arme utilisée à Montréal. Le contrôle des armes à feu est une question de vie ou de mort pour les femmes. En vertu des nouvelles propositions, toute personne accusée de harcèlement criminel, comme le harcèlement avec menaces, se verra temporairement interdire la possession d'une arme à feu.


8660

[Français]

Un registre national des armes à feu aura des avantages énormes. Lorsqu'ils répondront à un appel à cause de violence conjugale, les services policiers pourront savoir s'il se trouve une arme à feu enregistrée à l'adresse en question.

(1010)

Statistique Canada a signalé l'année dernière, en se basant sur la définition de la violence contenue dans le Code criminel, que la moitié des femmes du Canada ont été victimes de violence au cours de leur vie adulte, souvent à plus d'une reprise. Les hommes qu'elles connaissent sont plus dangereux pour les femmes que les inconnus.

[Traduction]

La lutte à volets multiples que mène le gouvernement fédéral contre la violence faite aux femmes dans la société canadienne repose sur l'action législative, c'est-à-dire la protection par la loi. Cette approche est notre priorité et fait partie de la solution, celle que nous entendons apporter. Toutefois, nous cherchons aussi d'autres moyens de faciliter l'action communautaire.

Je suis heureuse de déposer la publication intitulée Les expériences communautaires, Mettre fin à la violence faite aux femmes. On y relate l'expérience de dix localités qui ont participé à un projet pilote portant sur une trousse d'information communautaire sur la violence faite aux femmes. Cette publication et la trousse d'information constituent d'excellentes ressources pour l'action populaire dans nos quartiers et donnent une idée de ce qui peut être fait.

Il existe beaucoup d'autres excellentes ressources visant à accroître la sécurité pour toutes les femmes en milieu de travail, dans nos municipalités et dans leurs relations interpersonnelles. La violence faite aux femmes est tout simplement inacceptable et nous devons travailler ensemble à changer les attitudes et le comportement qui sont à l'origine de ces actes et de ces terribles tragédies.

La violence contre l'autre sexe ne menace pas que les femmes mais aussi leur famille, leurs proches et nous tous. Elle déchire le tissu même de notre société. Nous devons agir non seulement pour nous-mêmes mais aussi pour nos filles et nos petites-filles, et défendre leur droit de marcher en toute sécurité dans les rues de nos villes et de gagner un salaire équitable partout au Canada.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'émotion que nous nous rappelons aujourd'hui qu'il y a cinq ans, par une journée froide et enneigée, 14 étudiantes de l'École polytechnique de Montréal mouraient sous les balles d'un jeune homme qui portait en lui une haine viscérale envers les femmes et envers les féministes. Des filles qui avaient, comme bien d'autres, des familles, des amis, des espoirs. Et par ces gestes insensés, un cri d'alarme déchirant se fit entendre au Québec et au Canada, ayant même des échos aux États-Unis.

La violence faite aux femmes doit cesser. Non pas que ce mot d'ordre n'avait pas été lancé avant cet événement tragique, mais l'atrocité de ces meurtres a donné lieu à une nouvelle prise de conscience de la réalité vécue par un très grand nombre de femmes.

Désormais, toutes les formes de violence faites à l'endroit des femmes seraient vues sous un éclairage encore plus cru. Entre autres, un regard plus sérieux et rigoureux serait jeté sur un des aspects les plus ignobles de notre société. La violence conjugale doit arrêter, et nous devons prendre toutes les mesures pour l'enrayer. La violence conjugale est un phénomène répandu au Québec et au Canada. Les chiffres sont effarants, et il suffit ici de n'en mentionner que quelques-uns. Cet automne, Statistique Canada a révélé que 29 p. 100 des femmes qui ont été mariées ou ont déjà vécu en union libre ont été victimes d'une agression physique ou sexuelle commise par leur conjoint, à un moment ou à un autre de leur vie de couple.

Chez 21 p. 100 des femmes victimes de violence conjugale, les actes de violence avaient été commis alors qu'elles étaient enceintes. La violence physique peut s'accompagner ou non de violence psychologique. Les séquelles aux coups, aux blessures, aux menaces de mort, à l'humiliation laissent des traces psychologiques indélibiles chez les femmes et les enfants, souvent témoins et victimes eux-mêmes de ces sévices.

Depuis la deuxième moitié des années 1970, les centres d'hébergement pour femmes violentées ont vu leur nombre augmenter rapidement. Les soins et les services qu'ils procurent sont un besoin essentiel que personne ne remet en question pour nos sociétés. Cependant, la question du financement est plus qu'épineuse et le support financier qu'ils obtiennent du gouvernement fédéral est loin d'être adéquat. Des programmes de financement destinés au logement qui, autrefois, aidaient ces centres à se doter de nouvelles places pour les femmes violentées n'ont désormais plus de budget. Ce gouvernement a préféré offrir les fonds publics à des propriétaires privés.

(1015)

Le dernier budget, en février dernier, n'a prévu aucun financement pour une campagne contre la violence faite aux femmes et ce, en dépit de la promesse formelle contenue dans le livre rouge. Pourtant, tous les gouvernements, provinciaux, tout comme le fédéral doivent faire encore plus pour mettre en branle des moyens de sensibilisation et d'information pouvant contrer la violence faite aux femmes.

Une autre statistique touchant les femmes concerne les armes à feu. Les armes à feu sont l'arme de choix utilisée dans les homicides de conjoint. Entre 1974 et 1992, 42 p. 100 des femmes qui sont mortes aux mains de leur conjoint ont été tuées par balle.

C'est donc dans ce contexte que les députés du Bloc québécois, tout comme la majorité des Québécois et Canadiens, attendaient avec impatience le projet de loi spécifiant les moyens utilisés par le gouvernement fédéral pour contrôler efficacement les armes à feu. Malheureusement, c'est avec une certaine timidité que le ministre de la Justice nous a fait part d'un énoncé de politique au sujet du contrôle des armes. Il est de plus étonnant que, malgré l'urgence de contrôle des armes à feu, la mise en oeuvre de cette loi s'étalera sur les sept années suivantes, soit jusqu'en 2002.


8661

De plus, nous comprenons mal que les 4 000 propriétaires de AK-47 et les 6 000 propriétaires de FN-FAL pourront toutefois garder ces armes toute leur vie. Les 555 000 Canadiens qui possèdent des armes de poing de calibre 25 et 32 et celles dont le canon mesure 105 millimètres pourront également les garder jusqu'à leur mort.

Il faut néanmoins féliciter Heidi Rathjen, qui grâce à sa détermination et son travail au sein de la Coalition pour le contrôle des armes, a fait valoir l'importance de contrôler les armes sur le territoire canadien et québécois. C'est une croisade qui n'aura pas été vaine.

Les étudiantes de Polytechnique et les survivantes de ce massacre vivront dans notre conscience collective pour de nombreuses années à venir. Cependant, il ne faut pas oublier que cette violence continue, à une autre échelle, souvent loin des projecteurs et des caméras.

En 1993, 63 femmes ont été tuées par leur conjoint, soit 49 par leur conjoint de droit ou de fait, et 14 par leur conjoint séparé ou divorcé. Soixante-trois autres roses qui auraient pu être déposées à l'entrée de la Chambre des communes et devant toutes les assemblées législatives des provinces.

Chaque fois qu'une femme blessée cherche refuge dans un centre d'hébergement pour femmes violentées, chaque fois qu'une femme décide de poursuivre en justice son conjoint abuseur, chaque fois qu'une femme décide de partir de son foyer pour refaire sa vie, c'est un autre pas qui est franchi pour mettre fin à la violence.

Le 6 décembre 1989, quatorze étudiantes de Polytechnique se sont tues, mais nous, nous ne pouvons nous taire!

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je veux moi aussi rendre hommage aujourd'hui aux 14 femmes brutalement assassinées il y a cinq ans à l'École polytechnique. Nous déplorons une telle violence dans notre société. Nous devons tout faire pour réformer le système de justice pénale afin d'empêcher que des tragédies comme celle-ci se reproduisent.

Le 6 décembre 1989, notre société a vécu l'un des pires cauchemars. Un individu à l'esprit dérangé a pénétré armé dans l'école où il a abattu 14 jeunes femmes. La criminalité est une terrible réalité dans notre société et nous devons faire de notre mieux pour l'éradiquer. Elle nous touche tous.

Ce massacre est déplorable. Cependant, il y en a eu plusieurs autres depuis, peut-être pas à une échelle aussi grande, mais chaque personne victime de meurtre dans notre société est une victime de trop.

On rapporte que la criminalité est en hausse. Depuis 1988, le nombre de crimes violents commis rien que dans la capitale nationale, Ottawa, a augmenté de 75 p. 100. Face à ces statistiques alarmantes, nous devons ensemble chercher comment régler ce problème. Il ne s'agit pas de regarder en arrière, mais de nous tourner vers l'avenir et de voir comment nous pouvons empêcher de telles tragédies.

Nous devons faire attention de ne pas donner l'impression que les problèmes de violence dans notre société touchent seulement les femmes. Nous devons bien prendre garde de ne pas limiter ce problème aux femmes. Ce n'est pas un problème qui touche uniquement les femmes. Nous ne devons pas condamner tous les hommes. La plupart des hommes au Canada ont horreur de la violence. Il ne l'acceptent pas, pas plus qu'ils ne veulent qu'on les culpabilise sous prétexte qu'un maniaque ayant perdu la raison a commis un acte aussi déplorable.

Ces questions touchent tous les membres de notre société. De nombreuses personnes sont victimes de violence dans notre société, les femmes certes, mais aussi les hommes, les personnes âgées et les enfants. La plupart des crimes violents sont commis par des hommes contre d'autres hommes. Parmi les victimes d'abus verbaux et physiques, il y a des personnes âgées, des grands-parents, et, bien sûr, des enfants. En effet, de plus en plus d'enfants sont victimes de mauvais traitements.

(1020)

Le gouvernement prononce de belles paroles et affirme qu'il veut vraiment s'attaquer au problème de la violence faite aux femmes. La ministre vient tout juste de déclarer que des mesures s'imposent. Cependant, si l'on regarde le programme législatif du gouvernement depuis un an, on doit admettre que bien peu de mesures ont été prises pour corriger la situation.

Le régime doit être juste. En cas de crimes avec violence, la peine doit être déterminée d'une manière équitable. Récemment, dans la circonscription de Surrey-White Rock-South Langley, un père de deux enfants a tué sa femme, puis, l'ayant replacée dans son lit, il a confié à un ami ce qu'il avait fait. Cet homme n'a pas été condamné pour assassinat ou pour meurtre, mais seulement pour homicide involontaire coupable. Il s'est défendu en disant que sa femme l'avait menacé de répandre la rumeur qu'il brutalisait ses enfants. Condamné à cinq ans de prison, il a été libéré après deux ans à peine. C'est intolérable.

Je voudrais dire à la ministre qu'il faut absolument infliger un châtiment approprié au crime commis. Malheureusement, en voulant durcir sa position face aux criminels, le gouvernement s'en prend aux mauvaises personnes, au mauvais secteur de la société. Un homme qui tue sa femme, mais qui ne fait que deux ans de prison, c'est intolérable.

Si nous voulons vraiment endiguer la violence dans notre société, nous devons procéder de façon systématique. Nous sommes prêts à franchir le premier pas. Nous sommes prêts à nous engager dans cette lutte et à prendre les décisions difficiles nécessaires pour protéger les femmes, les enfants et les hommes au Canada. Si nous tenons vraiment à changer quelque chose et à montrer que les Canadiens ne tolèrent plus les crimes insensés, le gouvernement doit immédiatement prendre des mesures pour empêcher que les gens battent, violent ou tuent quelqu'un puis allèguent pour leur défense comme nous l'avons vu dernièrement, qu'ils étaient trop ivres pour savoir ce qu'ils faisaient, s'en tirant ainsi à bon compte.

Si la secrétaire d'État responsable de la Situation de la femme veut protéger les femmes, les enfants et les hommes au Canada, elle peut certainement user de son influence au Cabinet pour qu'il ne soit plus possible d'invoquer la défense fondée sur l'ivresse. Je prie la secrétaire d'État d'écouter les Canadiens et d'inviter le ministre de la Justice à présenter sans tarder un projet de loi modifiant le Code criminel. Nous nous sommes dits d'accord pour permettre l'adoption d'une telle mesure dans les 24 heures.


8662

Mme Finestone: Sur quoi?

Mme Grey: La ministre me demande sur quoi. Elle n'a malheureusement pas entendu ce que j'ai dit. Je vais donc le répéter, car c'est très important.

Nous, de notre parti, avons dit que nous consentirions à adopter une modification du Code criminel visant à supprimer immédiatement la possibilité d'invoquer la défense fondée sur l'ivresse. Si la ministre est sincère, si elle veut vraiment s'assurer que d'autres membres de notre société ne soient pas victimes de violence, surtout aux mains de personnes qu'ils connaissent et aiment, finalement, elle verrait à ce que nous adoptions maintenant une telle modification. Ça, ce serait agir, et rien ne saurait être plus éloquent qu'une modification au Code criminel.

J'exhorte la secrétaire d'État à écouter les Canadiens, à inciter le ministre de la Justice à présenter une modification au Code criminel.

«Et le contrôle des armes à feu?», demandent mes collègues d'en face. Oui, il faut contrôler les armes à feu dans le cas des personnes qui ne font pas un bon usage de ces armes et s'assurer que ces personnes soient châtiées. Il faut que cela soit fait dès maintenant.

Une voix: Qu'est-ce que cela a à voir?

Mme Grey: C'est bien ce que je me demande, justement: «Qu'est-ce que cela a à voir?»

Depuis que la Cour suprême a rendu son jugement dans l'affaire Daviault, la défense fondée sur l'ivresse a été invoquée avec succès trois fois en quelques semaines. Si le gouvernement était sérieux à ce sujet, nous pourrions adopter une telle modification avant le congé de Noël et je suis impatiente de collaborer là-dessus avec le gouvernement.

Nous sommes impatients de faire en sorte que la justice ne soit pas frustrée. Les femmes, les enfants et les hommes du Canada attendent rien de moins du gouvernement, de la secrétaire d'État et du ministre de la Justice. Ils comptent qu'on agira sans tarder.

Mme McLaughlin: Monsieur le Président, je sollicite le consentement unanime de la Chambre pour répondre à la déclaration ministérielle.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Français]

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, il y a cinq ans, nous nous sommes levés dans cette Chambre suite au décès des 14 jeunes femmes qui ont été tuées à Montréal. Aujourd'hui, nous devons nous rappeler ces 14 femmes, leurs familles et leurs amis, mais aussi nous devons proposer des actions dans le but d'implanter une politique de tolérance zéro à l'égard de la violence faite aux femmes.

[Traduction]

Il y a cinq ans, lorsque la Chambre a commémoré avec tristesse le tragique massacre de Montréal, nous nous sommes tous engagés à agir.

(1025)

Il est vrai que la population est maintenant plus sensibilisée à la question de la violence qu'à l'époque. La perte de jeunes vies n'a jamais rien de positif, mais on peut dire, je pense, qu'après le massacre, la question de la violence a beaucoup plus retenu l'attention.

Cependant, si l'ensemble de notre société a condamné le massacre, il reste tout de même beaucoup à faire. À mon sens, beaucoup trop peu a été fait. Il est triste de devoir dire que trop peu de mesures ont été prises pour lutter contre la violence. Par exemple, l'examen des programmes de sécurité sociale qui s'amorce évacue la question de la violence, mais laisse présager la réduction des fonds que le Régime d'assistance publique accorde aux provinces et aux territoires pour financer les foyers de transitions et les organismes qui aident les femmes menacées d'actes de violence.

Pis encore, nous avons récemment vu des tribunaux disculper des agresseurs et des auteurs d'agressions sexuelles sous prétexte qu'ils avaient agi sous l'influence de l'alcool ou de drogues. Cela est tout à fait inacceptable. Si nous voulons adopter une attitude de tolérance zéro, je joins ma voix à celle d'autres députés pour exiger que le gouvernement prenne des mesures tout de suite. Soyez assuré, monsieur le Président, que notre parti appuierait de telles mesures.

En nous souvenant de celles qui ont perdu la vie il y a cinq ans, nous nous réengageons à prendre des mesures concrètes et j'exhorte le gouvernement à le faire sans délai.

* * *

LOI SUR L'EFFICACITÉ DE LA RÉGLEMENTATION

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-62, Loi permettant de substituer à certains règlements de nouvelles normes et de conclure des accords administratifs pour la réalisation des objectifs de la réglementation.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

M. Eggleton: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais informer la Chambre que j'entends proposer que ce projet de loi soit renvoyé au comité avant l'étape de la deuxième lecture, conformément au paragraphe 73(1) du Règlement.

* * *

[Français]

PÉTITIONS

LES PERSONNES ÂGÉES

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, il me fait plaisir de déposer 586 signatures venant de tous les comtés de la province, y inclus également le comté du très honorable premier ministre, le comté de Saint-Maurice.

Ces pétitions proviennent des associations féminines d'action sociale, mieux connues sous le nom d'AFEAS, et également des groupes de l'âge d'or. Les pétitionnaires prient le Parlement de


8663

bien vouloir demander au gouvernement de renoncer au projetd'implantation des boîtes vocales pour les personnes âgées. J'appuie cette pétition.

[Traduction]

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Paul Steckle (Huron-Bruce, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter ce matin trois pétitions. La première demande au Parlement d'agir immédiatement, en modifiant le Code criminel, pour étendre aux enfants non encore nés la protection dont jouissent les autres êtres humains.

(1030)

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Paul Steckle (Huron-Bruce, Lib.): Les signataires de la deuxième pétition demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et de s'abstenir de toute modification législative qui sanctionnerait ou autoriserait l'aide ou l'encouragement au suicide ou encore l'euthanasie active ou passive.

Les pétitionnaires demandent aussi au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte des droits et libertés d'une manière qui laisse croire que la société accepte les relations entre personnes de même sexe ou l'homosexualité, et notamment de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne pour insérer parmi les motifs de distinction illicite l'expression non définie d'orientation sexuelle.

C'est pour moi un honneur de présenter ces pétitions ce matin.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter deux pétitions signées par des habitants du village de Westlock et de la ville de Fort McMurray, dans la circonscription d'Athabasca.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement, et de n'apporter à la loi aucune modification qui aurait pour effet d'approuver ou de permettre l'aide ou l'encouragement au suicide ou encore l'euthanasie active ou passive.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le devoir de présenter deux pétitions provenant des circonscriptions de Nickel Belt et de Sudbury et portant toutes deux plus de 600 signatures.

La première exhorte le Parlement à agir immédiatement pour protéger les enfants à naître en modifiant le Code criminel de manière à étendre aux enfants à naître la protection dont jouissent les êtres humains dès leur naissance.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, la seconde pétition provenant des mêmes circonscriptions et signée par le même nombre de personnes demande au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et de n'apporter à la loi aucune modification qui aurait pour effet de sanctionner ou de permettre l'aide ou l'encouragement au suicide ou encore l'euthanasie active ou passive.

J'appuie les deux pétitions.

LE TABAC

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureuse de déposer aujourd'hui une pétition signée par des citoyens de presque toutes les provinces du Canada, d'un océan à l'autre.

Les pétitionnaires font valoir que les recherches effectuées par Santé Canada démontrent que le nombre des fumeurs, notamment chez les adolescents, augmente à mesure que diminue le prix des cigarettes. Il existe un lien direct entre les produits du tabac et certaines formes de cancer, les attaques cardiaques, l'emphysème, la bronchite chronique et beaucoup d'autres maladies. Étant donné que les produits du tabac contiennent plus de 4 000 substances chimiques dont au moins 43 sont cancérigènes chez les humains et que leur consommation est directement responsable du décès prématuré de quelque 38 000 Canadiens chaque année, on peut à bon droit qualifier le tabac de produit dangereux.

Les pétitionnaires exhortent donc le Parlement à supprimer l'exemption dont jouit le tabac à l'égard de l'application de la Loi sur les produits dangereux.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je prends la parole pour présenter plusieurs pétitions.

Au nom de Darcy Siggelkow, je présente trois pétitions. La première demande au Parlement de ne pas modifier le code des droits de la personne ou la charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition demande au Parlement de conférer aux enfants à naître la même protection que celle dont jouissent les êtres humains qui ont vu le jour.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition demande au Parlement de ne pas modifier la loi de manière à autoriser ou à approuver le suicide assisté ou l'euthanasie active ou passive.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux autres pétitions à présenter au nom de Anne Pinkoski et de Norma Wood. Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier le code des droits de la personne, la


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Loi canadienne sur les droits de la personne ou la charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe.

LES PROGRAMMES DE TÉLÉVISION

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, j'ai aussi une pétition qui préconise l'adoption d'une loi établissant des normes de contenu acceptable pour les émissions télévisées de la SRC.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Les questions restent-elles toutes au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

* * *

DEMANDE DE DÉBAT D'URGENCE

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, je voudrais saisir la Chambre d'une importante question exigeant l'attention immédiate de la Chambre des communes.

(1035)

Cinq ans se sont écoulés depuis le meurtre de 14 femmes à l'École polytechnique de Montréal, mais la violence se poursuit à un rythme alarmant. Plus de la moitié des femmes du pays seront victimes, au cours de leur vie, d'au moins un acte violent. C'est pourquoi je demande qu'il se tienne aujourd'hui un débat sur cette question.

Nous avons certes exprimé nos condoléances, ce matin, aux familles des 14 jeunes femmes qui ont été si tragiquement et tristement assassinées il y a cinq ans. Cependant, il incombe à la Chambre de montrer qu'elle s'intéresse sérieusement à la question en tenant un vrai débat d'urgence sur cette question, et au gouvernement, d'entendre les propositions des députés siégeant des deux côtés de la Chambre.

J'exhorte la Chambre à accepter la tenue de ce débat d'urgence.

Le Président: C'est en effet un sujet très sérieux. Je voudrais toutefois soulever les points suivants. La violence faite aux femmes est un problème chronique dans notre société. En outre, la motion est libellée de telle manière qu'il n'y a pas, à proprement parler, matière à la tenue d'un débat d'urgence. Cependant, un tel débat n'est pas nécessaire puisque ce sujet figure déjà à l'ordre du jour, que nous allons aborder dans quelques instants. Tous les députés pourront alors exprimer leur point de vue sur cet important sujet.

Je voudrais informer la Chambre que, conformément au paragraphe 33(2), en raison de la déclaration de la ministre, les initiatives ministérielles seront prolongées de 20 minutes.

_____________________________________________


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.) propose:

Que cette Chambre prenne note de la date anniversaire du meurtre de quatorze jeunes femmes à l'École Polytechnique le 6 décembre 1989 et de la nécessité urgente de prendre des mesures en vue d'éliminer la menace de violence au sein de la société, y compris la menace de violence envers les femmes.
-Monsieur le Président, je suis très heureuse que la Chambre ait consenti à l'unanimité à traiter de la violence faite aux femmes dans notre société. C'est une question qui préoccupe de plus en plus d'hommes et de femmes à la Chambre et, bien sûr, bon nombre d'organismes, d'associations et de groupes dans notre société.

La Chambre a accepté à l'unanimité cette résolution reconnaissant l'enjeu soulevé par les femmes qui ont été les victimes d'un massacre gratuit, il y a cinq ans. C'est pour nous une merveilleuse occasion, même si les circonstances sont pénibles, de nous pencher sur cette question en toute objectivité dans l'intérêt du bien-être des femmes et des enfants, en raison de l'importance du rôle que jouent les femmes dans l'avenir de notre société, dans le bien-être de nos enfants et dans l'éducation et le travail communautaire si précieux qui est souvent l'affaire des femmes.

Les femmes assument des rôles multiples dans notre société. Certes, elles sont les génitrices des générations à venir, mais ce sont également elles qui éduquent et élèvent nos enfants. De plus, elles se consacrent beaucoup au travail communautaire et s'occupent des personnes âgées. Il y a également les femmes qui sont sur le marché du travail. Les femmes supportent beaucoup de stress et de contraintes. S'il y a une chose qu'elles ne méritent pas, c'est bien le manque de respect, de compréhension et de reconnaissance de la multiplicité et de l'importance de leur rôle à l'égard de tous ceux qui forment notre société.

Je suis heureuse de prendre la parole à ce sujet et je suis heureuse que la Chambre ait accepté à l'unanimité cette procédure. Ce matin, à l'occasion de cette journée nationale de souvenir et d'action à l'égard de la violence faite aux femmes, j'ai cité des statistiques et souligné l'importance du problème au Canada. J'aimerais maintenant présenter une fiche de renseignements qui pourrait être utiles aux femmes, aux hommes et aux organismes et institutions dans le cadre d'un effort concerté pour combattre victorieusement la violence faite aux femmes.

(1040)

En 1993, Statistique Canada a effectué une enquête à l'échelle nationale sur la violence faite aux femmes. Environ 12 300 femmes y ont participé. Cette enquête ne portait que sur les comportements considérés comme des infractions au Code cri-


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minel du Canada. En fait, les aspects qu'on désirait examiner étaient très précis.

Ils comprenaient une vaste gamme de comportements allant de menaces d'agression imminente, d'agressions causant des blessures graves, d'attouchements sexuels non désirés, à des agressions sexuelles avec violence causant des blessures graves. Les conclusions de cette enquête sont effrayantes. Elles devraient faire prendre conscience aux députés de leur responsabilité de représenter et de défendre les intérêts de leurs électeurs, dont la moitié sont des femmes.

Au Canada, 51 p. 100 des femmes ont vécu au moins un incident de violence depuis l'âge de 16 ans. Les femmes courent plus de risques d'être maltraitées par des hommes qu'elles connaissent que par des étrangers. Vingt-cinq pour cent des femmes ont été maltraitées par un conjoint actuel ou passé. Sur ces cas, 44 p. 100 des conjoints violents ont utilisé une arme et 21 p. 100 des femmes ont été agressées pendant qu'elles étaient enceintes. À mon avis, cette conclusion est la plus répugnante que je n'aie jamais entendue. Une femme mariée sur six a dit avoir été battue par son conjoint et 39 p. 100 ont admis l'avoir été plus d'une fois.

Pour ce qui est des sources de soutien dont la plupart des femmes ont besoin et auxquelles elles recourent, 51 p. 100 d'entre elles demandent l'aide d'amis et de voisins et 42 p. 100 se tournent vers leur famille. Ces chiffres proviennent des résultats de l'enquête sur la violence faite aux femmes publiés dans le numéro du 18 novembre 1993 du Quotidien de Statistique Canada.

Nous savons également à quel point les foyers pour femmes battues, les maisons de transition et les groupes de lutte contre la violence qui travaillent directement dans les collectivités sont importants pour aider les femmes à quitter leur domicile, à emmener leurs enfants avec elles, à se protéger et à obtenir une aide juridique et des conseils.

J'aimerais sincèrement qu'on se concentre davantage sur ceux qui battent leur conjointe. Si nous ne prenons pas de mesures à leur égard, d'autres femmes seront en danger. Nous devons donc faire des efforts en ce sens.

[Français]

L'autre situation importante qui ressort de ces informations au sujet de la violence faite aux femmes au Canada est la question des femmes et des armes à feu. En moyenne, une femme est tuée au moyen d'une arme à feu tous les six jours au Canada, souvent dans une résidence privée et par quelqu'un qu'elle connaît.

Les armes à feu sont l'arme de choix utilisée dans les homicides de conjoint. Entre 1974 et 1992, 42 p. 100 des femmes qui sont mortes aux mains de leur conjoint ont été tuées par balle, 21 p. 100 ont été poignardées et 21 p. 100 sont mortes à la suite de coups reçus.

Entre 1974 et 1992, une femme mariée courait neuf fois plus de risque d'être tuée par son conjoint que par un inconnu. Le nombre total d'homicides de conjoint entre ces années est de 1 886. Les femmes furent des victimes dans 76 p. 100 des cas. Et d'après une étude sur les homicides domestiques effectuée par le ministre de la Justice en 1992, seulement 18 p. 100 des armes à feu utilisées par les maris qui ont tué leur femme étaient détenues illégalement.

Je pense ce sont des faits importants qu'il faut soutenir et reconnaître lors d'une journée comme aujourd'hui et lors d'un débat comme celui-ci.

[Traduction]

Je voudrais aborder toute cette question en parlant des coûts sur le plan humain. Le témoignage suivant vient d'une femme qui vit au Canada. Elle nous a raconté que son mari l'avait frappée durant leur lune de miel et qu'il avait tué leur premier enfant dont elle était enceinte de quatre mois en lui donnant un violent coup de pied. Elle a ajouté que son médecin lui avait demandé ce qu'elle avait pu faire pour le rendre à ce point furieux. Son ministre anglican lui a rappelé qu'elle s'était mariée pour le meilleur et pour le pire. Son avocat voulait savoir comment elle obtiendrait l'argent nécessaire pour payer ses honoraires. Enfin, sa propre mère a dit à son mari où elle se cachait. Voilà ce que cette femme avait à nous dire.

(1045)

Cette histoire est à vous donner le frisson! C'est un appel mordant pour qu'on change d'attitude au Canada.

[Français]

J'aimerais souligner à cette Chambre deux vérités importantes pour les femmes du Canada. La première vérité est que nous sommes plus en danger d'être violentées par quelqu'un que nous connaissons, soit un conjoint ou un ami. Je reconnais que ma collègue de l'opposition a souligné ce fait et je viens de le souligner moi-même. Je pense qu'il est très important que les femmes connaissent ce fait et qu'elles le prennent en considération avant qu'elles aient des entretiens ou qu'elles prennent des démarches avec quiconque.

[Traduction]

Je viens de souligner quelques points saillants d'une enquête que Statistique Canada a réalisée l'année dernière. Je ne me suis pas arrêtée aux répercussions sur les enfants qui sont témoins de cette violence et qui imitent ensuite ce genre de comportement, plus tard, dans leur propre mariage ou leurs relations avec les femmes. On constate que la moitié des femmes qui disent avoir été victimes de violence de la part d'hommes connaissent leurs agresseurs. Il s'agit d'une connaissance, d'un petit ami, d'un conjoint, d'un ami, d'un membre de la famille ou d'un voisin. C'est très inquiétant.

L'autre réalité que je voulais souligner à la Chambre, c'est que la violence et l'inégalité des femmes sont inextricablement liées, la violence étant une manifestation de cette inégalité. Comme l'a dit une autre femme, lorsque son mari a volé une pizza, il a eu droit à une amende de 100 $, alors qu'il est parfois condamné à une amende de 50 $ pour l'avoir battue. Elle trouvait cela tout à fait terrible et avait le sentiment d'avoir moins de valeur qu'une pizza.

Quels messages ces paroles et pensées envoient-elles à toutes les femmes au sujet de ce qu'elles valent? À quel point l'ancienne perception que l'homme a le droit de contrôler son épouse et ses filles, comme c'était le cas dans les siècles passés où les femmes étaient simplement des possessions, est-elle encore bien ancrée?


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Le fait de reconnaître que ces attitudes existent est un pas important sur la voie des solutions. Je le répète, il est encourageant de constater les activités communautaires qui ont lieu dans tout le pays. En tant que nation, nous commençons à entendre ce que les groupes féminins disent depuis des années, c'est-à-dire que la violence contre les femmes se fait sentir un peu partout au Canada, qu'elle est tolérée dans notre pays et que c'est le symptôme le plus déplorable de l'inégalité des femmes.

Au nom des Canadiens, je veux vraiment remercier les femmes et groupes locaux qui ont créé des centres d'hébergement au Canada, qui s'occupent des centres de détresse-secours pour les victimes d'agression, qui sont à la base des cercles d'entraide et qui étaient bien décidés à attirer l'attention de la population sur ce problème. Nous devons faire en sorte que leurs voix continuent d'être entendues et appuyer leur travail et leurs initiatives.

Le gouvernement comprend que la violence faite aux femmes résulte de plusieurs facteurs complexes et interdépendants. C'est pourquoi nous préconisons une approche globale de cette question. Un député de l'opposition m'a demandé des éclaircissements au sujet de la décision rendue récemment par la Cour suprême du Canada dans une cause d'agression sexuelle où l'on a invoqué l'ivresse extrême comme excuse. Cette excuse a, depuis, été utilisée avec succès dans plusieurs autres causes devant des cours inférieures. Je trouve cela totalement inacceptable. Les députées de mon parti et moi l'avons d'ailleurs dit au ministre de la Justice, que cette situation choque également. Cependant, ce sont la Charte et la Constitution qui l'emportent devant les tribunaux.

Il s'agit de savoir comment modifier les lois de notre pays pour qu'elles ne se révèlent pas déficientes quand nous nous adressons aux tribunaux. Il ne faut plus tolérer un comportement aussi épouvantable et aussi inacceptable. Je pense que certains juges sont mal éclairés et ne recourent pas à des mécanismes de défense adéquats.

Je tiens à dire que le ministre de la Justice a l'intention de proposer des modifications, comme il l'a dit à plusieurs reprises à la Chambre. À la reprise de la session, en février, il présentera une modification au Code criminel qui traitera de l'auto-intoxication comme défense. Vendredi prochain, le 9 décembre, il rencontrera des groupes qui sont très intéressés à ce qu'il y ait moins de violence et à ce que nous fassions des progrès dans la lutte contre la violence faite aux femmes.

(1050)

[Français]

Quelques personnes ici ont fait allusion au fait que nous n'avions pas pris de mesures importantes. Mais comme je l'ai dit auparavant, notre responsabilité réside surtout dans les mesures législatives et je crois qu'à cet égard, nous avons vraiment fait un choix critique sur une série d'actions qui vont, en bout de ligne, être comblées par d'autres actions pendant notre mandat cette année.

Je pense également qu'il faut reconnaître que vraiment, nous avons pris des mesures importantes. Regardons le programme de contrôle des armes à feu. Le 30 novembre, le ministre de la Justice a présenté le programme de contrôle des armes à feu, qui constitue une étape importante vers l'élimination de la violence faite aux femmes. Un registre national des armes à feu, l'interdiction de certaines armes à feu et l'assouplissement des ordonnances d'interdiction seront bénéfiques pour les femmes et pourront sauver des vies.

Le Conseil national de prévention du crime a été établi en juillet 1994. Dans le cadre de son mandat, le Conseil se penchera sur la vulnérabilité des femmes face au crime. Ses membres proviennent de la collectivité et comprennent 14 femmes parmi les 25 membres. Pour ce qui est de nos engagements de garder la paix, en juin, le ministre de la Justice a déposé le projet de loi C-42, qui contient plus de 100 amendements proposés au Code criminel, y compris diverses dispositions qui rendront plus efficaces les engagements de garder la paix. Par exemple, les services policiers et d'autres intervenants pourront demander des engagements de garder la paix au nom des femmes en danger.

Le Système national de filtrage des personnes susceptibles de commettre des infractions sexuelles contre des enfants est un quatrième volet. Annoncée en novembre, cette base de données permettra aux organisations et aux employeurs de vérifier si des candidats à un emploi ont un dossier criminel pour délits sexuels avant de leur permettre de travailler avec des enfants. Je crois que c'est le cinquième projet de loi sur la réforme des sentences.

[Traduction]

Je tiens à dire aux députés que la réforme de la détermination de la peine est une mesure législative importante.

[Français]

Le projet de loi C-41 fournira aux tribunaux plus de moyens d'établir une distinction entre les crimes graves avec violence et les crimes moins graves sans violence. Cela transmet le message à la société que la violence faite aux femmes et aux enfants n'est pas acceptable. Le projet de loi fera en sorte que les crimes haineux, qui comprennent les délits sexuels et l'abus de confiance, soient considérés comme des circonstances aggravantes par les juges dans l'établissement des sentences appropriées.

Je dois dire qu'il m'apparaît que les plaintes de l'opposition ne sont pas fondées et on a vraiment fait quelque chose. On a aussi regardé la question de l'égalité devant la loi, et je peux citer ici le Programme de contestation judiciaire. En octobre 1994, le gouvernement a rétabli ce programme afin d'assurer le financement des affaires d'importance nationale qui visent à clarifier les droits à l'égalité et les droits linguistiques, en vertu de la Constitution du Canada.

[Traduction]

Étant donné toutes ces mesures, je ne pense pas que l'opposition puisse trouver à redire à ce que le gouvernement fait pour lutter contre la violence faite aux femmes. Les faits parlent d'eux-mêmes. Je peux d'ailleurs évoquer d'autres problèmes dont nous nous préoccupons. Il y a entre autres toute la question de l'égalité juridique, à laquelle s'attaque le Programme de contestation judiciaire dont je viens de parler, ainsi que celle de la sensibilisation de la population.


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(1055)

En avril dernier, le ministère du Patrimoine canadien, de concert avec d'autres ministères et l'Association canadienne des radiodiffuseurs, a lancé une série de programmes et de messages diffusés à la télévision et à la radio, faisant partie d'une campagne de trois ans sur la violence dans la société. Je remercie l'Association pour son engagement à cet égard. Nous avons consacré 10 millions de dollars à cette campagne afin de mettre un terme à la violence faite aux femmes et aux enfants, à la violence qui a cours dans notre société, qu'elle soit motivée par la race, les préjugés, la haine ou le sectarisme.

Aujourd'hui, j'ai déposé à la Chambre une trousse sur la violence faite aux femmes. Ce document doit promouvoir les mesures que la collectivité peut prendre pour que les gens chez eux, dans leur petit patelin, se chargent d'analyser les risques qui se présentent dans leur société et prennent des mesures collectives afin de prévenir la violence et de promouvoir la sécurité.

Cette trousse sur la violence faite aux femmes a été mise à l'essai dans 10 collectivités partout au Canada. Elle décrit des incidents qui se sont produits, ce qui a aidé et ce qui a nui, et explique comment l'analyse des risques peut vraiment être un atout si elle est faite au niveau de petites villes, de régions et de grandes villes partout au Canada.

Je souligne cette publication parce qu'à mon avis, la lecture des incidents qui s'y trouvent est très intéressante. Je recommande aux députés de lire attentivement ces documents qu'ils pourraient distribuer aux villes et aux villages qu'ils représentent afin de permettre à leurs électeurs de prendre leur vie en mains. Nous devons lutter contre la violence inhérente à notre société et veiller à ce que les femmes et les enfants puissent se promener dans nos rues et vivre dans leur foyer en toute sécurité.

Santé Canada a subventionné à l'échelle du pays plus de 2 000 projets portant sur les enfants maltraités ainsi que sur la violence faite aux femmes et aux personnes âgées dans le cadre de l'Initiative de lutte contre la violence familiale, qui en est à sa quatrième année. Cette initiative subventionne également la construction de foyers pour femmes et enfants victimes de violence.

En juin dernier, je me suis rendue à Regina pour discuter avec mes collègues, les ministres provinciales de la condition féminine, de toute la question de la violence faite aux femmes. Nous avons examiné le point de vue des provinces, celui du gouvernement fédéral, les initiatives que chacun d'entre nous pourrait prendre, de façon concertée, pour veiller à la sécurité des femmes et des enfants. Nous avons rédigé la déclaration de Regina sur les droits des femmes victimes de violence, dans laquelle nous exhortions les systèmes judiciaires de toutes les régions du pays à garantir la protection égale des femmes victimes de violence.

Comme je l'ai déjà mentionné, en novembre 1993, nous avons demandé à Statistique Canada de mener une étude très importante. En avril dernier, Statistique Canada a diffusé des données provenant de son enquête sur les maisons de transition et signalant une augmentation, entre 1992 et 1993, de 2 p. 100 du taux d'occupation de ces foyers qui accueillent des femmes cherchant un refuge contre la violence.

Les femmes qui font appel aux maisons de refuge ont pour la plupart entre 25 et 34 ans. Ce sont des femmes qui sont en âge de procréer, des femmes qui subissent la violence d'hommes agressifs même lorsqu'elles sont enceintes, des femmes qui ont des enfants à la maison. Ces enfants sont manifestement troublés par la violence qu'ils voient s'exercer contre leur mère et du fait qu'elle leur est présentée comme plus ou moins acceptable par la société qui les entoure. Moins de 10 p. 100 des maisons de refuge s'occupent principalement des femmes des minorités ethnoculturelles et visibles quoique 41 p. 100 offrent des services adaptés aux différences culturelles.

Le ministre de la Justice, la ministre de la Santé et moi-même avons mené des consultations publiques. Nous avons consulté des groupes de femmes sur la violence, sur le budget et sur la réforme de la sécurité sociale, et je dois vous dire que c'est un moyen très important et efficace de comprendre ce qui se passe dans notre société.

[Français]

Au cours de la première année de notre mandat, je crois que nous avons accordé la priorité à des mesures législatives visant à mieux protéger les femmes et les enfants. La protection de la loi est la base même de la sécurité personnelle et communautaire.

(1100)

[Traduction]

Au moment même où nous nous apprêtons à appuyer le programme de contrôle des armes à feu présenté par mon collègue, le ministre de la Justice, j'estime que nous avons vraiment une obligation à l'égard des Canadiennes. Les femmes n'aiment pas les armes à feu. C'est évidemment le moins qu'on puisse dire. Les femmes ont peur des armes à feu.

Je n'ai pas à insister sur le fait que le contrôle des armes à feu est d'une importance cruciale pour les femmes. Les Canadiennes se sont déjà prononcées là-dessus. Nombre d'organisations féminines de tout le pays et d'un large éventail de milieux sociaux et culturels se sont dites en faveur d'une législation plus stricte en matière de contrôle des armes à feu.

Les gens qui veulent posséder des armes à feu doivent le faire de façon responsable. Pour conduire une voiture, il faut avoir un permis et répondre à d'autres critères. Grands dieux, qu'il a-t-il de si terrible à exiger la même chose de ceux qui veulent posséder une arme? Nous n'enlevons pas leurs armes aux citoyens, mais ceux qui s'opposent à la mesure devraient, au moins, ne pas s'opposer à ce que nous sachions qui possède une arme. Il serait illogique qu'il en soit autrement. Les Canadiens veulent des mesures de contrôle plus rigoureuses sur la possession d'armes à feu et nous nous rendons à la volonté de la population.

Je voudrais répondre aux réformistes qui ne sont pas très heureux de la mesure. Selon un récent sondage Angus Reid, un respectable 70 p. 100 des Canadiens interrogés se sont dits en faveur de mesures de contrôle des armes à feu plus sévères. Les enseignants canadiens appuient aussi de telles mesures. Il y a deux semaines, dans une déclaration conjointe, la Fédération canadienne des enseignantes et enseignants et la Centrale de l'enseignement du Québec affirmaient qu'il était nécessaire d'adopter une série de mesures, dont celles que propose le


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ministre de la Justice, pour faire échec à la violence au sein de notre société.

Le ministre de la Justice a consulté tous les Canadiens, dans les grandes et les petites villes et dans les villages. Il a rencontré toutes sortes d'organisations. Il a écouté et il a adapté le projet de loi en tenant compte des besoins et de l'utilisation des armes à des fins sportives. Il comprend aussi la position des femmes. Nous devrions tous appuyer le projet de loi.

Nous avons aussi pris d'autres mesures juridiques. Songeons par exemple à toute l'importance que nous avons attachée à l'engagement à garder la paix dans les modifications au Code criminel ainsi qu'à la détermination de la peine dans les cas d'abus de confiance. Combien d'entre nous connaissent des cas d'inceste? Combien d'entre nous connaissent des cas où des proches, surtout des membres de la famille, ont été appelés pour garder des enfants et, par manque de valeurs morales, ont abusé de la confiance qui était placée en eux? Combien connaissent des enseignants et des prêtres qui ont abusé de la confiance que d'autres plaçaient en eux? Les abus de confiance et les abus sexuels ne sont pas acceptables dans la société canadienne. Nous voulons faire adopter notre projet de loi.

Nous avons mis en place un système d'information national et rétabli le programme de contestation judiciaire. D'autres mesures ont été prises pour améliorer la condition féminine et, même si elles ne portaient pas spécifiquement sur les mauvais traitements infligés aux femmes, elles n'en étaient pas moins importantes. Je pense notamment à la création du programme national d'échange de renseignements sur le cancer du sein, à la mise sur pied du programme de nutrition prénatale et à nos efforts pour aider les femmes à parvenir à l'égalité économique.

L'égalité économique donne aux femmes le pouvoir de se sortir des situations de violence. Lorsqu'une femme est prise sans argent, elle a souvent peur de se sortir d'une telle situation. Il est important de dire aux femmes que leur travail est apprécié à sa juste valeur, que leur contribution à notre société est honorée et respectée. L'égalité économique aide les femmes à subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants, leur donne l'indépendance à laquelle toute femme a droit non pas simplement parce qu'elle a un mari généreux, mais bien parce qu'elle contribue à sa croissance, à son développement et à son succès et qu'elle mérite une part de ses gains si elle reste à la maison pour élever les enfants. Élever des enfants dans la société d'aujourd'hui est une tâche importante.

Pour ce qui est des choses que nous avons été capables de faire, j'ai eu le plaisir de présider le groupe de travail sur les pensions alimentaires. Notre gouvernement présentera sous peu un train de mesures à cet égard, y compris des lignes directrices pour les tribunaux, des mesures d'exécution et des mesures fiscales. Nous aurons enfin une politique beaucoup plus complète dans ce domaine, ce que nous attendons depuis fort longtemps.

Nous devons trouver une façon de réduire le nombre d'enfants pauvres dans notre pays. Les enfants sont pauvres lorsque leurs mères sont pauvres. C'est là une autre forme de violence contre les femmes et contre les membres de notre société.

(1105)

Je voudrais terminer mes remarques en parlant un peu de la Conférence de Beijing qui s'en vient. Le Canada est considéré sur la scène internationale comme un ardent défenseur des questions touchant les femmes.

La machinerie que nous avons mise en place pour conseiller les ministres sur les projets, politiques et mesures législatives de tous genres est perçue comme un facteur très positif. La contribution que notre personnel a pu apporter sur la scène internationale est très importante. Nous ne sommes pas le seul pays du monde à chercher des solutions à ces problèmes. Nous pouvons vraiment être fiers de nos efforts à l'échelle mondiale. Nous avons joué un rôle de premier plan dans deux initiatives clés que je veux mentionner.

Premièrement, il y a l'adoption par l'Assemblée générale des Nations Unies de la déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes en décembre dernier.

Deuxièmement, il y a la nomination aux Nations Unies d'un rapporteur spécial sur la violence à l'égard des femmes. C'est une autre initiative du Canada. Le rapporteur présentera son rapport à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies chaque année à compter du mois de mars.

J'ai eu le plaisir de rencontrer la jeune femme qui occupe ces fonctions. Nous pouvons avoir l'assurance de faire des progrès sur la scène internationale dans ce domaine.

Dans moins d'un an, nous nous réunirons à Beijing pour la quatrième Conférence mondiale de l'ONU sur les femmes. Cette manifestation a un énorme potentiel de catalyseur en faveur du changement et du progrès pour l'égalité des femmes dans le monde entier et notamment en Chine.

Les ONG, les organismes non gouvernementaux, ont joué un rôle essentiel, très différent de celui qu'ils ont joué pour la conférence du Mexique et celle de Nairobi. Ils ont en effet apporté une contribution importante à l'élaboration des documents préliminaires que nous étudierons lors de la conférence. Cette dernière abordera dix domaines et sujets de préoccupation importants pour les femmes. On y discutera de la lutte des femmes contre la pauvreté, de la violence, de l'accès à l'éducation et aux services de santé, et de l'accès au pouvoir et à la prise de décisions, pour n'en mentionner que quelques-uns.

Nous voulons des solutions à ces problèmes ici même au Canada pour tous les Canadiens. Je ne pense pas que nous ayons à attendre jusqu'à la tenue de la Conférence mondiale de l'ONU.

J'encourage les femmes à la Chambre à réitérer aujourd'hui leur engagement à l'égard de l'égalité des femmes. Je les encourage à s'exprimer. Je terminerai en disant que nous avons l'intention de respecter tous les engagements que nous avons pris dans le livre rouge, en ce qui concerne notamment l'augmentation du financement des services destinés aux femmes battues. Nous mènerons des campagnes d'éducation publique qui devraient provoquer une modification du comportement avec la bonne volonté et le soutien des hommes en tant que partenaires dans la société. Les mesures visant à lutter contre les mauvais traitements dont les femmes sont victimes au foyer feront certainement partie des propositions que nous examinerons.

[Français]

Il m'a fait grand plaisir d'avoir eu la chance ici, aujourd'hui, d'énumérer la liste des choses qui nuisent à la vie des femmes, tout en espérant, en collaboration avec nos partenaires, députés de l'opposition, mais surtout les hommes et les femmes, que nous travaillerons ensemble pour améliorer le sort des femmes,


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dans le but d'éviter l'augmentation de la violence faite aux femmes et en essayant d'éduquer la population pour que cela ne se produise plus dans notre société.

Aujourd'hui, au nom des 14 femmes, les roses que tous les députés de cette Chambre ont déposées à nos portes démontrent que c'est le moment de repenser la société dans laquelle nous vivons.

[Traduction]

Il faut donc nous rappeler la mémoire de ces femmes. Je remercie tous les députés pour les gerbes de roses qui ont été déposées dans le hall, à l'extérieur de la Chambre.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, j'ai plusieurs choses à dire à ce gouvernement en réponse à la motion qu'on a déposée ce matin en cette Chambre. Je ne doute nullement de la bonne foi de mon honorable collègue. Je sais pertinemment qu'étant femme, elle est plus que sensibilisée à la problématique de la violence faite aux femmes.

(1110)

Nul besoin de réitérer ad nauseam les plus récentes statistiques, tout le monde les connaît. Les statistiques choquent, elles nous émeuvent, pendant quelques instants nous sommes troublés. Nous avons des élans spontanés pour dire: Il faut faire quelque chose; que font les gouvernements? Ce n'est pas tout à fait exact dans la réalité. Combien de fois nous sommes-nous exclamés, la rage et la tristesse au coeur, en lisant les journaux: Encore une autre femme victime de son conjoint ou de son ex.

La plupart des gens se sentent très impuissants face à ce phénomène. La plupart des gens ne se sentent malheureusement pas concernés directement, et j'y reviendrai.

Il n'en demeure pas moins que la violence faite aux femmes est un problème de société et que cette société se donne des gouvernements pour la diriger et voir à son bien-être collectif. Les politiciens et politiciennes sont très conscients du rôle du gouvernement face à cette fonction qui leur échoit. C'est pourquoi, au cours de chaque campagne électorale, on réfléchit, on analyse et on promet. Bien sûr, aucun politicien ou politicienne n'oserait promettre de régler définitivement le problème de la violence. Cependant, puisqu'on est très conscients des attentes de la population, on promet des actions, des budgets afin de redonner espoir, afin d'obtenir la confiance des électeurs.

Comme je l'ai dit au début de mon intervention, on est généralement de bonne foi. Que se passe-t-il après le jour fatidique de l'élection? Prenons comme exemple la situation actuelle. Comme nous la vivons, on ne pourra pas nous accuser de déformer la réalité ou d'analyser le passé à travers un prisme teinté.

Le gouvernement actuel avait de belles intentions. Comme tout le monde, il a analysé, promis. Il a promis de faire de l'élimination de la violence l'une de ses grandes priorités. Pour y arriver, on avait trouvé des moyens. On devait lancer une campagne massive de sensibilisation sur la violence. On devait favoriser l'approche communautaire. On devait contrôler étroitement les armes à la portée de tous et chacun. On devait resserrer les dispositions du Code criminel afin d'enrayer la violence conjugale.

Tout ceci concerne très directement et très concrètement la violence faite aux femmes. On a fait quelques progrès. On se vantera de n'avoir pas coupé directement les budgets alloués aux maisons d'hébergement pour femmes violentées, alors que d'autres postes budgétaires se sont vu diminués de 5 p. 100.

On se vantera également d'avoir fait sur le terrain des expériences de trousse communautaire. Bref, on se vantera d'être sensible à la problématique vécue par les femmes violentées.

Mais cependant, on a oublié certaines choses. On a oublié toutes les recommandations des comités qui ont étudié ce problème, qui ont rencontré des milliers de femmes, qui ont rencontré des centaines d'organismes oeuvrant sur le terrain avec les victimes. On a oublié que tous en sont arrivés à une grande conclusion: la violence continuera tant et aussi longtemps que les femmes ne seront pas égales aux hommes. C'est le vrai problème. Il y a unanimité chez les femmes.

Déjà ce gouvernement pourrait faire un pas vers cette égalité et reconnaître que les femmes qui sont les premières concernées sont parfaitement capables d'identifier la source de leurs problèmes, leurs symptômes et les moyens de solution. Si on veut atteindre un jour cette élusive égalité, il faudrait qu'on commence par nous faire confiance au moins dans ce domaine. Les femmes sont des adultes. Pour cesser d'être des victimes, elles ont besoin d'être reconnues et traitées comme des égales des hommes, à tous les points de vue et par tous, gouvernements y compris. Cela semble si simple, si évident, que je suis certaine qu'un bon nombre de mes collègues masculins se disent: Bien voyons donc, c'est acquis, de quoi se plaignent-elles? Que veulent-elles de plus?

La réponse est aussi simple: les femmes veulent l'égalité et le gouvernement se doit de les aider, comme il avait promis de le faire, mais comme il ne l'a pas fait.

L'égalité veut dire l'égalité des droits. Cela veut dire l'égalité des droits sociaux, humains et économiques. L'égalité des droits sociaux, cela veut dire qu'on traite les femmes chômeuses comme leurs conjoints et non comme des pis-aller économiques qui travaillent juste pour se payer un peu de luxe, comme un manteau de fourrure tous les cinq ans. Cela veut dire que la femme a le droit de travailler, d'étudier, de participer entièrement au marché du travail.

(1115)

L'égalité, on ne l'obtiendra pas avec un gouvernement qui s'enligne pour traiter les femmes sur le marché du travail comme des citoyennes qui, dans le fond, dépendent de leur mari pour les faire vivre et en qui l'État ne devrait pas investir ses précieuses ressources.

L'égalité, ça veut dire le droit de faire des études sans s'endetter à vie, quand on peut trouver à emprunter, puisqu'on est une femme. Où est-ce qu'on peut emprunter? Comment ce gouvernement prévoit-il qu'une femme qui dépend financièrement d'un homme peut atteindre son égalité si elle dépend du bon vouloir ou du bon compte de banque de ce dernier pour aller se décrocher un diplôme? Cela semble aberrant. Et pourtant, c'est exactement ce que ce gouvernement propose par le biais de son projet de


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réforme des programmes sociaux. Allez comprendre comment ce gouvernement aidera les femmes à devenir égales.

Allez aussi comprendre comment ce gouvernement peut tenir un beau discours sur l'égalité et faire si peu pour faciliter aux mères l'accès au travail. Des services de garde adéquats sont souvent la condition essentielle à la participation des femmes au marché du travail ou à la formation professionnelle. Qu'a-t-on fait dans ce domaine? On a promis de belles choses, genre «création de milliers de nouvelles places en garderie». On est même allé jusqu'à budgeter la création de ces places.

Cependant, on a repris d'une main ce qu'on donnait de l'autre. On a assorti la création de places à la situation de l'économie. Très belle façon de stimuler les emplois! Très belle façon de s'assurer que les femmes restent sagement chez elles, ou qu'elles confient leurs enfants à des soins de moindre qualité. On pourra ainsi les accuser d'être en plus de mauvaises mères.

Ce gouvernement préfère traîner devant les tribunaux et payer grassement ses avocats, plutôt que de donner à ses employées leur dû, ce qui leur permettrait une certaine amélioration de leur situation financière et, conséquemment, d'atteindre une nouvelle autonomie.

Ce gouvernement, contrairement aux recommandations des femmes, n'a pas encore bougé pour étendre l'application de la Loi sur l'équité en matière d'emploi à ses employées du Parlement, de sa fonction publique et de ses nombreux organismes et conseils. C'est ce même gouvernement qui parle d'égalité.

C'est ce gouvernement qui n'a pas pensé à remettre sur pied un comité qui s'occuperait de l'analyse de fond des problèmes vécus par les femmes. Quel souci le gouvernement a-t-il d'améliorer les conditions de vie des femmes, madame la Présidente? On a des comités pour tout, mais pas pour faire avancer la cause des femmes. Belle démonstration des préoccupations réelles d'un gouvernement!

L'égalité s'obtient aussi par la justice fiscale, domaine où le gouvernement actuel ne brille pas par ses lumières. Comment peut-on justifier avoir porté la cause de Mme Thibaudeau devant la Cour suprême, alors que ce jugement apportait un semblant de baume aux parents, généralement les femmes, qui reçoivent une pension alimentaire pour leurs enfants. Alors que le tribunal tentait de rétablir tant que faire se peut l'équilibre financier entre le parent payeur et le parent gardien, le ministre de la Justice se hâtait d'en appeler, craignant de déséquilibrer le ministère du Revenu. Noble préoccupation de ce gouvernement.

On a donc laissé les femmes se débrouiller seules. On nous dira qu'un comité étudie la chose. Bien sûr, on nous dira que ce comité nous apportera des solutions, bien sûr. C'est tout ce que ce gouvernement peut faire. Alors que les solutions sont visibles à l'oeil de toutes les personnes directement concernées, on met toutes les énergies à consulter. Il faut croire que c'est plus facile que d'agir. L'égalité en prend pour son rhume, mais peu importe. On sauve les finances de l'État, et Dieu sait que la vraie priorité est là.

Et pendant ce temps-là, la violence prend plusieurs formes.

(1120)

Elle peut être physique; c'est celle que tout le monde reconnaît. Elle peut être psychologique, et dans ces cas, elle a des effets aussi pernicieux que l'autre forme, sinon plus. La violence peut être financière. Elle peut être émotive.

Quelle que soit la forme qu'elle emprunte, la violence est un phénomène d'inégalité de forces et aussi d'inégalité financière. Elle est une actualisation de la perception qu'une personne vaut moins que l'autre, qu'elle est moins importante que l'autre, et pour la société et pour son conjoint.

Pour l'éliminer, des actions massives doivent être entreprises, sur le plan individuel, bien sûr; c'est là qu'on mesurera les effets concrets. Cependant, au niveau de la société, comme je le disais au début, il nous faut un gouvernement vraiment préoccupé par le problème dans ses manifestations et dans ses causes. Ce gouvernement-ci ne sait faire que de belles promesses et de belles consultations. Je l'invite sincèrement à poser des gestes concrets pour aider les femmes à atteindre l'égalité avec les hommes.

Et quand je dis «égalité», je parle de l'égalité dans toutes les sphères d'activité; je parle de l'égalité sociale, humaine, juridique et financière. Je parle d'un gouvernement qui, concrètement, posera les gestes nécessaires pour assurer et imposer l'égalité des femmes et des hommes. C'est ainsi que nous verrons un jour la violence envers les femmes diminuer.

J'aimerais aujourd'hui vous faire part d'une action qui a été entreprise au Québec pour souligner la terrible tragédie de Polytechnique. Cette action a été entreprise par différents milieux: les milieux d'affaires, le milieu syndical, le gouvernement, les politiciens et les associations.

J'aimerais vous lire un texte auquel se sont associés tous ces partenaires du Québec. Le texte s'intitule «Plus jamais».

Le 6 décembre 1989 restera pour toujours inscrit dans notre histoire. Ce jour-là, 14 jeunes femmes ont perdu la vie à l'École polytechnique de Montréal, tombant sous les balles d'un meurtrier qui en voulait aux femmes. Cinq ans plus tard, il faut se rappeler: des familles dévastées et de leur douleur, de la tristesse et de la colère qui nous ont envahis, tous et toutes autant que nous sommes.
Ce tragique événement a secoué la société dans son ensemble. Il a révélé, sans équivoque, que les femmes sont des cibles de la violence. Dans le quotidien, au travail, à la maison, sur la rue, le jour comme la nuit, en temps de paix ou de guerre, peu importe la région ou le pays.
À l'initiative d'individus, de groupes ou d'organismes publics et gouvernementaux, de nombreuses mesures ont vu le jour pour dénoncer et contrer cette violence infligée aux femmes. Mais nous savons qu'elle existe toujours.
Chaque personne doit ouvrir les yeux et refuser les diverses manifestations de la violence faite aux femmes, tant dans les petits gestes que dans les grands. Il faut aussi collectivement s'engager à bâtir un monde non violent. Le 6 décembre 1989 ne doit PLUS JAMAIS revenir.
On se souvient aujourd'hui. . . pour changer.
Voilà un texte paru dans différents quotidiens du Québec auquel 76 associations, organismes, ainsi que le Conseil du statut de la femme se sont joints pour manifester de façon toute particulière cette journée tragique, cette journée où 14 jeunes filles ont perdu la vie.


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J'aimerais vous faire l'énumération de ces organismes qui se sont associés à ce beau texte: l'Assemblée des évêques du Québec; l'Association des collaboratrices et partenaires en affaires; l'Association des femmes autochtones du Québec; l'Association des médecins-psychiatres du Québec; l'Association des ressources intervenant auprès des hommes violents; l'Association des sexologues du Québec; l'Association féminine d'éducation et d'action sociale; l'Association québécoise Plaidoyer-victimes; Avon Canada; le Barreau du Québec; la Centrale de l'enseignement du Québec; la Centrale des syndicats démocratiques; le Centre de recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la violence faite aux femmes; la Chambre des notaires du Québec; le Collège des médecins du Québec; la Commission des droits de la personne; la Confédération des syndicats nationaux; la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux du Québec.

Je poursuis l'énumération, madame la Présidente: le Conseil des femmes de Montréal; le Conseil du statut de la femme; le Développement québécois de la sécurité des femmes; la Fédération des ressources d'hébergement pour femmes violentées et en difficulté; la Fédération des CLSC du Québec; la Fédération des commissions scolaires du Québec; la Fédération des femmes du Québec; la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec; la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec; la Fédération du Québec pour le planning des naissances; le Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la province du Québec; Le Devoir; Le Journal de Montréal; Le Protecteur du citoyen.

(1125)

Et il y en a d'autres, comme: Le Québec dit non à la violence faite aux femmes; Les cercles de fermières du Québec; l'Institut de recherche des centres de femmes du Québec; l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec; l'Ordre des psychologues du Québec; l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec; le Regroupement des centres de santé des femmes du Québec; le Regroupement des équipes régionales Espace; le Regroupement des maisons de jeunes du Québec; le Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale; le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel; Relais-femmes; le Réseau des répondants à la condition des femmes, ODM, diocèse de Québec; le Service d'orientation et de consultation psychologique de l'Université de Montréal; la Sûreté du Québec; le Syndicat de la fonction publique du Québec.

Je poursuis toujours l'énumération: le Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec; The Gazette; l'Université de Montréal; l'Université de Sherbrooke; l'Université du Québec à Montréal; l'Université Laval; l'Université McGill; M. Jacques Parizeau, premier ministre du Québec; Lucien Bouchard et les députées et députés du Bloc québécois; Louise Beaudoin, ministre déléguée aux Affaires intergouvernementales canadiennes; Paul Bégin, ministre de la Justice; Jeanne Blackburn, ministre de la Sécurité du revenu et ministre responsable de la Condition féminine; Jacques Brassard, ministre de l'Environnement et de la Faune; Jean Campeau, ministre des Finances et ministre du Revenu; Guy Chevrette, ministre des Affaires municipales; Rita Dionne-Marsolais, ministre de la Culture et des Communications et ministre déléguée au Tourisme; Jean Garon, ministre de l'Éducation.

Je poursuis encore: François Gendron, ministre des Ressources naturelles; Louise Harel, ministre de l'Emploi; Bernard Landry, ministre des Affaires internationales, de l'Immigration et des Communautés culturelles; Marcel Landry, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation; Richard Le Hir, ministre délégué à la Restructuration; Jacques Léonard, ministre des Transports; Pauline Marois, ministre déléguée à l'Administration et à la Fonction publique, présidente du Conseil du trésor et ministre responsable de la Famille; Serge Ménard, ministre de la Sécurité publique; Daniel Paillé, ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie; et Jean Rochon, ministre de la Santé et des Services sociaux.

Voilà, madame la Présidente, la liste de tous les gens et organismes qui se sont associés à ce texte pour souligner cet événement.

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Nous en sommes maintenant aux discours de 20 minutes, suivis d'une période de 10 minutes pour les questions et observations.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Madame la Présidente, avant d'entrer dans le vif du sujet, soit la violence contre différents membres de notre société, et surtout contre les femmes, je voudrais faire remarquer que la vie humaine semble avoir peu de prix dans notre société. Cette évolution des mentalités, je l'observe à propos de questions comme celles de l'avortement et de l'euthanasie. Je constate que l'un comme l'autre sont désormais mieux acceptés, ce qui traduit une indifférence à l'égard de la vie humaine qui a mené à la dévaluation de celle-ci.

C'est aujourd'hui un anniversaire que la plupart des Canadiens préféreraient ne pas avoir à souligner. Mais ne pas rappeler ces tristes événements, ce serait nier la valeur de ces vies fauchées par une attaque violente et brutale, une attaque par laquelle un homme, poussé par la peur, la haine et l'exaspération, s'en est pris à un groupe de jeunes femmes innocentes et sans défense.

C'est la cause de ce crime qui est au coeur du débat sur la violence contre les femmes et d'autres membres de notre société. Pourquoi des hommes s'en prennent-ils aux femmes? Pourquoi des maris battent-ils leur femme? Pourquoi la violence contre les femmes est-elle si répandue, en tout cas beaucoup plus que jamais auparavant?

Ce sont là des questions auxquelles il faut tenter de répondre si nous voulons parvenir un jour à éliminer ou du moins à diminuer la violence.


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En attendant de pouvoir répondre à ces questions et déterminer les causes de la violence, nous resterons aux prises avec un problème dans notre pays, un problème qui défie la logique et qui menace de détruire les assises les plus solides que nous ayons, celles de la famille.

De 1981 à 1990, près de la moitié, soit 48 p. 100, des femmes tuées l'ont été par leur conjoint ou leur ex-conjoint, et un autre 27 p.100, par une connaissance. Depuis dix ans, 67 p. 100 des homicides perpétrés contre des femmes sont survenus dans la demeure de la victime. Parmi les cas d'homicides élucidés, un sur six implique le conjoint. D'après les statistiques, de 1974 à 1992, une femme mariée courait neuf fois plus de risques d'être assassinée par son conjoint que par un étranger. Les pourcentages d'homicides commis par des conjoints sont demeurés assez constants sur une période de 19 ans.

Ces statistiques révèlent une terrible réalité. À maintes reprises, les gouvernements de notre pays ont négligé de résoudre le problème à l'origine des crimes. Ils ont négligé de cerner et de comprendre les causes de la violence conjugale et de prendre des mesures pour l'enrayer. Des peines plus sévères, des mesures de contrôle des armes à feu plus rigoureuses et la collecte de statistiques ont été impuissantes à enrayer les homicides commis par les conjoints au Canada. Elles n'ont pas permis de réduire la violence croissante dans les rues de notre pays, ni celle faite aux femmes.

En 1991-1992, les autorités policières attribuaient 52 p. 100 des homicides commis par un conjoint à une dispute ou à une querelle, et 24 p. 100 à la jalousie. Ce que les statistiques ou les autorités policières ne révèlent pas, c'est la raison première de la dispute ou de la querelle. À mon avis, les questions ou les difficultés financières sont à l'origine de la plupart des disputes ou des problèmes conjugaux. De nos jours, les familles canadiennes subissent un stress énorme qui découle directement de la conjoncture économique de notre pays et qui leur est indirectement imposé par la mauvaise gestion budgétaire et monétaire du gouvernement actuel et de ses prédécesseurs.

Alors que le taux de chômage est de 10,8 p. 100-je crois comprendre qu'il a baissé récemment sous la barre des 10 p. 100-de nombreux Canadiens sont sans emploi et ceux qui travaillent n'ont aucune sécurité d'emploi en raison de la précarité et de l'incertitude du marché du travail actuel.

Autrefois, les hommes et les femmes pouvaient s'attendre à toujours avoir un emploi. La sécurité d'emploi est maintenant une chose révolue, mais nous n'avons pas aidé les Canadiens à s'adapter à la situation. Nous ne les avons pas aidés à s'adapter aux nombreuses conditions économiques et sociales qui ont rapidement détruit leur mode de vie.

Tandis que les banques affichent des bénéfices records, nombre de Canadiens doivent déposer leur bilan parce que leur endettement est devenu insupportable en raison du niveau relativement élevé des taux d'intérêt et des taux d'imposition pratiqués au Canada.

Tous les jours, nous sommes témoins des pressions financières qui s'exercent sur les familles du pays. En 1991-1992, les statistiques montrent que l'alcool était un facteur dans 37 p. 100 des cas d'épouses tuées et dans 82 p. 100 des cas de maris tués. Parmi les agresseurs, 55 p. 100 des hommes et 79 p. 100 des femmes avaient consommé de l'alcool, et 18 p. 100 des hommes et 13 p. 100 des femmes avaient consommé d'autres drogues.

Je m'arrête ici pour souligner le fait que nous ne nous attaquons pas aux causes du problème. Dans les annonces qu'on voit dans les journaux et à la télévision sur l'alcool au volant, il arrive trop souvent que les producteurs et les réalisateurs de ces annonces recommandet de désigner un chauffeur qui restera sobre pour que les autres puissent boire tout leur soûl. Leur seule préoccupation, semble-t-il, est que les chauffeurs désignés ne boivent pas. Cependant, personne ne s'inquiète du sort de la femme et des enfants lorsque la personne en état d'ébriété est ramenée à la maison. Rien ne montre que les pouvoirs publics ont la volonté de réduire la consommation d'alcool qui, d'après la police et les statistiques, est sans conteste un facteur contribuant à la violence et au crime dans notre pays.

Selon les statistiques, l'agresseur et la victime ont consommé de l'alcool dans 47 p. 100 des cas d'agression contre des femmes et dans 78 p. 100 des cas d'agression contre des hommes.

(1135)

La consommation abusive d'alcool est due au stress. Nous n'aiderons pas les alcooliques et nous ne réglerons pas le problème si nous ne déterminons pas les causes de ce stress.

Pourquoi les Canadiens s'agressent-ils et se tuent-ils les uns les autres? C'est une question à laquelle il faut trouver une réponse si nous voulons vraiment réduire la violence dans notre société. Et il s'agit tant des jeunes contrevenants et des batteurs de femmes que des bourreaux d'enfants et des assassins.

En collaboration avec les organismes communautaires et de services, les Églises, les écoles et les familles, les gouvernements doivent trouver une solution à ce problème. C'est une tâche monumentale qui doit être entreprise parce que les solutions habituelles ne donnent rien.

En réponse aux appels de la population en faveur de mesures préventives, cinq mois exactement après que le projet de loi C-17 des conservateurs sur le contrôle des armes à feu eut reçu la sanction royale, le Comité permanent de la justice et du Solliciteur général a accepté à l'unanimité, le 6 mai 1992, d'entreprendre une étude nationale sur la prévention du crime. Le comité a conclu que:

Les instruments usuels de la justice pénale, aussi nécessaires qu'ils soient, n'ont pas l'effet dissuasif escompté sur les actes qui menacent la sécurité du public et le modèle conventionnel de contrôle du crime ne parvient pas à régler les facteurs sous-jacents associés au crime et à la criminalité.
En d'autres termes, le comité a jugé que le projet de loi sur le contrôle des armes à feu, l'imposition de peines, une augmentation du nombre de policiers et d'organismes d'application de la loi, ainsi que l'accroissement du nombre de centres de détention constituaient une réponse bureaucratique de plus en plus négative qui ne réglerait jamais le problème croissant de la criminalité au Canada.


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On a soumis au comité des études effectuées en Angleterre, au Canada et aux États-Unis. En ce qui concerne les jeunes contrevenants, ces études ont montré qu'une minorité de délinquants masculins étaient responsables de la majorité de tous les crimes commis.

Le président de l'Association de directeurs de police du Québec et directeur du Service de police de Hull a fait part au comité des conclusions de certaines recherches montrant que 80 p. 100 des crimes sont commis par environ 20 p. 100 des délinquants.

À partir des propos des personnes intéressées et des rapports d'arrestation de délinquants ayant un long casier judiciaire, le comité a pu constater que ces gens avaient commencé à commettre des infractions très jeunes, que ces infractions étaient devenues progressivement plus violentes et qu'une proportion importante des jeunes contrevenants récidivistes devenaient des criminels à l'âge adulte.

Un professeur de criminologie de l'Université d'Ottawa a précisé au comité qu'environ 75 à 80 p. 100 des adultes incarcérés avaient été des jeunes contrevenants récidivistes. Le comité a appris que le niveau de criminalité dans une société ne pouvait être dissocié des conditions socio-économiques et politiques. Des recherches en sciences sociales ont permis de trouver, dans le milieu social des délinquants récidivistes, de nombreux facteurs interreliés qui favorisent la criminalité.

À partir de ses conclusions, le comité a soumis au gouvernement précédent un certain nombre de recommandations au sujet de la prévention du crime, mais ce dernier n'a pas présenté ni même proposé de mesures montrant qu'il avait l'intention de jouer un rôle de chef de file dans la prévention du crime.

Nous avons maintenant un nouveau gouvernement qui a la même approche face au crime. Nous semblons nous contenter de nous attaquer aux symptômes de la criminalité, plutôt qu'aux causes profondes de ce phénomène. Tant que le gouvernement ne pourra pas trouver les causes de la criminalité, tant qu'il n'établira pas les raisons qui expliquent la violence familiale et la violence contre les femmes, nous continuerons d'être confrontés à ce problème.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais féliciter la secrétaire d'État de l'excellent discours qu'elle a prononcé sur cette question très importante et remercier à l'avance tous les députés qui vont prendre la parole sur cette question.

Je voudrais brièvement faire part aux députés d'un exemple de violence conjugale. Pendant environ cinq ans, j'ai fait partie du conseil d'administration d'un refuge pour femmes battues de ma circonscription, Mississauga-Sud. Ce refuge s'appelle Interim Place. J'ai été très heureux d'apprendre que Interim Place avait réussi à obtenir des fonds supplémentaires pour ouvrir un deuxième refuge.

Je tiens à dire aux députés qu'en un mois seulement, du temps où je faisais partie du conseil, le refuge avait dû refuser 80 femmes, faute de place. Elles n'avaient aucun endroit où aller avec leurs enfants. Cela vous donne une idée de l'ampleur du problème qui existe au Canada. Comme la ministre l'a déclaré, la moitié des femmes seront victimes de violence familiale au cours de leur vie.

(1140)

Étant donné la gravité de la question de la violence familiale et étant donné aussi que la Chambre est actuellement saisie d'un projet de loi, le projet de loi C-41, qui essaie d'identifier les circonstances aggravantes que sont le parti pris, les préjugés ou la haine, le député peut-il me dire s'il est d'accord pour que l'on inclue la question de la violence familiale ou de la violence conjugale dans les questions où interviennent du parti pris, des préjugés et de la haine et qui justifient l'imposition d'une peine plus sévère que celle imposée pour l'infraction, comme telle, qui a été commise?

M. Ramsay: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question, que j'estime importante. Effectivement, si l'État le désire, il pourrait renforcer les peines infligées à la suite d'infractions. Mais tous doivent être égaux devant la loi. Les tribunaux et les juges devraient avoir le pouvoir discrétionnaire, compte tenu des circonstances, d'imposer ou non une peine plus sévère à une personne reconnue coupable d'une infraction motivée par la haine ou les préjugés.

Pendant les 14 années où j'ai été chargé de l'application de la loi, je n'ai jamais eu connaissance de cas d'agressions qui aient été motivées par autre chose que la colère, la haine ou les préjugés. Je n'ai jamais vu de cas d'agressions motivées par des sentiments positifs comme l'amour ou la compassion. Parmi les centaines de prévenus que j'ai amenés devant les tribunaux, aucun n'était animé par des sentiments de ce genre.

Lorsque je songe à la question du député et que j'examine le projet de loi C-41, je me demande pourquoi nous ne laissons pas aux tribunaux le soin de renforcer les peines et de les rendre plus sévères. Lorsque les tribunaux estiment que des circonstances particulières justifient l'imposition d'une peine plus sévère, ils devraient avoir le pouvoir discrétionnaire d'agir en ce sens.

L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Formation et Jeunesse), Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse et honorée, ce matin, de prendre part au débat sur la motion voulant que la Chambre prenne bonne note de l'anniversaire de l'assassinat de 14 femmes à l'École polytechnique le 6 décembre 1989 et du besoin urgent de prendre des mesures pour éliminer la menace de violence dans la société, y compris contre les femmes.

Je trouve ce débat particulièrement important parce qu'il y a un an jour pour jour, je suis allée à un service commémoratif pour ces 14 femmes à Montréal et j'y ai pris la parole. C'est une expérience qui a débouché pour moi sur un engagement envers la société, l'engagement à travailler pour que les êtres humains se vouent les uns aux autres le respect et la dignité qu'ils méritent, l'amour, la compassion et le désir de collaborer intensément avec tous les membres de la société.

Nous devons travailler avec les hommes, les femmes, les familles et les communautés, avec les divers paliers de gouvernement et l'ensemble des institutions de notre pays, de même qu'avec nos enfants, à créer une société sans violence. C'est une tâche très difficile à une époque où les guerres se multiplient dans le monde.


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Les médias, qui ne cessent d'étendre leur influence un peu partout, font étalage de violence. On assiste à une véritable désensibilisation à ce phénomène. Notre tâche, qui est énorme, consiste non seulement à adopter des lois, mais également à créer le sentiment que nous devons adopter une approche très humaine à cet égard, qu'il s'agit non pas d'un événement qui se produit une fois l'an, mais bien d'une mentalité à créer. C'est une façon de vivre. C'est une façon de se comporter les uns envers les autres. C'est un état d'esprit qui doit présider à notre travail, en tant que législateurs.

Il y a peu de temps, j'ai été dans l'impossibilité d'assister à une grande conférence qui se tenait à Vancouver. Comme je tenais absolument à y exposer certaines de mes convictions à ce sujet, une de mes collègues de la région s'est offerte pour me remplacer. Voici certaines des déclarations qui ont été faites à cette occasion: «Nous devons ajouter nos voix au débat urgent sur les défis à relever pour les familles canadiennes. La violence n'est pas le fait d'une seule personne ni d'un seul sexe. C'est une question qui touche l'humanité toute entière et tous les peuples d'un pays.»

Je suis particulièrement heureuse de parler de cette vision de la famille canadienne sans violence. Je suis fière d'être membre d'une équipe qui ose rêver, qui a foi en notre capacité individuelle et collective. Nous avons très clairement décrit notre rêve dans le plan d'action intitulé Pour la création d'emplois, Pour la relance économique. Il est animé par la conviction que chacun de nous peut faire partie de la solution.

Je suis particulièrement fière de mes collègues, le ministre de la Justice, et de la secrétaire d'État responsable de la Situation de la femme. Il n'est pas facile de déterminer ce qui pourrait contribuer à libérer la société des éventuels criminels violents et de ceux qui penchent plutôt vers le mal que vers le bien. Il est très difficile d'élaborer à partir des constatations un programme d'action législatif qui soit accessible, équitable et de conception universelle.

Je songe notamment aux diverses tentatives du ministre en vue de modifier le Code criminel et de régler un certain nombre de questions très délicates et controversées, par exemple la loi sur le contrôle des armes à feu. La commande est énorme, et je suis très satisfaite du travail accompli jusqu'à maintenant.

Nous sommes déterminés à changer l'avenir et à recréer le Canada pour en faire un meilleur pays pour nous tous. Nous croyons pouvoir préparer un avenir meilleur à notre pays si nos enfants et nos familles sont plus forts. Les gens ont tendance à ne s'intéresser qu'à un seul aspect, ou à une seule question. La division ou le cloisonnement des enjeux facilite les choses, facilite l'administration des mesures, mais ce n'est pas réaliste.

Nous ne pouvons pas séparer un enfant de ses parents et dire qu'il n'en souffre pas. Nous ne pouvons pas dire que la femme, la famille, la grand-mère ou la communauté n'en souffrent pas quand une famille ou une communauté sont en proie à la violence. Ce n'est pas ainsi que cela fonctionne. La violence est insidieuse. Ce qui ne tourne pas rond, ce qu'il y a de négatif dans une situation influe grandement sur les gens qui la vivent, et il s'agit souvent de jeunes enfants en plein développement.

Nous avons des responsabilités. Nous partons du principe simple, mais inébranlable, que nous avons tous le droit de jouir d'un foyer sûr, de marcher dans des rues sûres et de vivre sans souffrir les affres de la violence. Personne ne mérite d'être victime de violence physique, sexuelle, affective ou financière, et personne n'a le droit de manipuler les autres en utilisant les menaces, la coercition, l'intimidation physique ou toute autre forme d'abus de pouvoir et d'autorité. Les enfants victimes de violence, de négligence, d'agression sexuelle, les femmes victimes d'agression et toutes les personnes victimes d'une forme ou d'une autre de violence, comme les personnes âgées et les personnes handicapées qui sont maltraitées, font tous l'objet de graves abus de pouvoir au sein de leur famille. Un tel abus des relations de confiance et de dépendance a des conséquences néfastes pour nous tous. Cela jette le discrédit sur nous, en tant qu'individus, et sur notre société. Ceux qui dépendent le plus de nous, ceux qui ont le moins de ressources et les plus grands besoins, ceux qui sont le moins capables de prendre soin d'eux-mêmes, notamment les personnes handicapées, les enfants, les personnes âgées, ne méritent pas d'être maltraités. Ils méritent seulement d'être traités avec bienveillance et générosité.

(1150)

La violence et les souffrances personnelles, la dégradation du climat social et les dépenses publiques directes qui en résultent représentent des coûts incalculables. Les centaines de millions de dollars consacrés aux dépenses sociales n'arrivent pas à compenser les atteintes psychologiques et les vies brisées, dans certains cas de façon irrémédiable. La violence peut parfois engendrer un cycle qui se perpétue de génération en génération et l'élimination de ce cycle de violence et de ce silence coûte extrêmement cher. Il en coûte beaucoup plus en argent et en efforts pour réparer ces torts que si nous prenions des mesures proactives et préventives. Cette approche comporterait des avantages considérables.

La complexité de la violence familiale exige une approche coordonnée à long terme pour pouvoir en supprimer les causes profondes. Nous devons éliminer les conditions qui contribuent à la violence familiale et fournir aux jeunes un environnement sain qui leur permette d'échapper au cercle vicieux de la violence.

Nous ne pourrons prétendre vivre dans une société sans violence que lorsque chaque Canadien pourra vivre sans crainte. Pour y arriver, nous devrons surtout lutter contre l'inégalité sociale et économique afin de réduire le risque de violence familiale. Ce n'est pas une excuse, c'est une condition. La violence demeure inexcusable, mais il peut y avoir des circonstances atténuantes. Certains facteurs échappent à la volonté, aux capacités émotives, financières et sociales des individus et peuvent les amener à commettre eux-mêmes des actes de violence.

Nous devons lutter contre la discrimination fondée sur le sexe, l'âge, la capacité physique, la race et autres formes de discrimination et assurer à tous l'accès à des services adéquats, avant de pouvoir espérer faire du Canada une société sûre. Le gouvernement fédéral reconnaît la nécessité de traiter ces questions com-


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me des problèmes sociaux fondamentaux qui ont des ramifications étendues dans nos familles et dans l'ensemble de la société.

Je suis particulièrement inquiète au sujet des jeunes. En tant que secrétaire d'État à la Formation et à la Jeunesse, j'estime que nous faisons un énorme cadeau à nos enfants en leur apprenant à devenir des parents aimants et attentifs, à respecter la dignité des autres, à chérir leurs enfants, leurs petits-enfants et leurs parents, plutôt qu'à les négliger ou à les maltraiter, et à leur transmettre les valeurs et les principes qui sont censés nous guider, même ici à la Chambre.

Chaque année, le gouvernement fédéral consacre des millions de dollars aux enfants et à leurs familles pour veiller à ce qu'ils aient tout le nécessaire pour être en bonne santé, se développer et s'épanouir.

Nous avons introduit toute une série de mesures préventives, entre autres, l'initiative pour le développement de l'enfant, l'initiative de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants et le programme de prévention de la violence au foyer. Nous avons mis en place pour les autochtones des services qui visent à protéger les enfants et à promouvoir la sécurité des collectivités par le biais du développement et de l'investissement au niveau social.

La sécurité des enfants et de leurs familles est un élément essentiel dont il est tenu compte dans ces réformes. Nous nous posons des questions du genre: de quoi ont besoin les gens en matière de services de réadaptation, d'aide à la famille, d'enseignement, de formation et de perfectionnement afin de pouvoir se prendre en charge? Comment peut-on aider les familles à réussir?

Nous sommes convaincus que si nous leur donnons des moyens et des possibilités adéquats, les gens pourront avoir accès aux possibilités d'éducation et d'emploi nécessaires pour une vie saine, fructueuse et autonome. Ils pourront ainsi assurer une meilleure qualité de vie à leur famille.

Dans un monde parfait, cela serait suffisant. Malheureusement, la vie est plus compliquée que ça. Il est des circonstances indépendantes de la volonté des législateurs. Il y a des choses qui échappent au contrôle des gouvernements, quel que soit le palier. Il y a des choses qui échappent au contrôle des personnes de bonne volonté. Nous nous y attendons. Toutefois, cela ne nous empêche pas de travailler et d'essayer, car nous savons que l'avenir sera meilleur. Nous devons multiplier nos efforts pour notre famille, nos enfants et, finalement, notre collectivité et notre pays.

(1155)

Lorsque les enfants s'épanouissent, la société revit. En élevant des enfants sains, en faisant en sorte qu'ils soient physiquement, mentalement et émotionnellement équilibrés, qu'ils soient instruits et qu'ils trouvent du travail, nous avons de bonnes chances d'avoir une famille heureuse.

Je crois qu'aux yeux de beaucoup, nous avons réussi sur le plan professionnel; nous avons un travail dont nous pouvons être fiers et qui nous permet de gagner notre vie. C'est un honneur que de représenter la population. Je pense qu'en fin de compte la société ne nous jugera pas sur notre réussite personnelle, mais sur celle de nos enfants et nos petits-enfants et sur ce que nous aurons fait pour le bien de nos collectivités. On jugera de ce que nous aurons fait pour la société par le succès de nos enfants et de nos petits-enfants.

Ces efforts témoignent de l'existence d'un mouvement croissant en faveur non seulement de la prévention, mais aussi de la promotion de changements fondamentaux aux niveaux social, économique et culturel, un mouvement qui se caractérise par l'importance qu'il donne à l'individu. Nous avons beaucoup à faire, mais nous sommes tous ici pour nous entraider. Les Canadiens qui travaillent ensemble à bâtir des collectivités plus saines font la différence. Non seulement nous prouvons que la famille est ce qui importe, mais nous démontrons que nous pouvons améliorer la vie des gens en refusant de tolérer la violence dans la société.

Parlons des différentes formes de violence. Prenons un enfant de 10 ou 14 ans. J'ai élevé trois enfants et je sais comment ils sont à cet âge. Nous nous demandons où sont nos enfants et si nous avons pris le temps de les embrasser aujourd'hui. Tout cela nous vient à l'esprit.

Prenons le cas d'une ville, dans notre pays. Je ne la nommerai pas parce que ce ne serait pas juste. Il y a là un problème: on compte 400 jeunes prostitués âgés de 10 à 14 ans. Il ne s'agit plus de prostitution; c'est de l'exploitation sexuelle de mineurs ou d'enfants. C'est un véritable problème. C'est une forme de violence perpétrée contre les plus vulnérables d'entre nous, contre ceux qui ont le plus de valeur pour nous-les jeunes de notre société.

Nous portons une part des responsabilités. Cette situation n'existe pas que dans une seule ville. Qu'on nomme une ville, on peut y trouver ce problème. J'ai pris sur moi de remonter à la source, d'aller rencontrer les jeunes. Je sais que nous ne pouvons pas tout faire, mais nous faisons ce qu'il faut quand nous aidons ces jeunes.

Le problème ne se réglera pas tout seul. Ce n'est pas le problème d'une femme ou d'un enfant. C'est le problème de tout le monde et la responsabilité de tout le monde. En tant que société juste et compatissante, nous avons le devoir de faire passer notre famille avant tout le reste. Nous devons cela à nos enfants et à nous-mêmes. Si les défis sont grands, les perspectives d'amélioration n'ont jamais été meilleures.

Finalement, en 1994, l'Année internationale de la famille, les familles ont pris la place qui leur revient dans les programmes d'action nationaux et internationaux. Durant toute l'Année internationale de la famille, le gouvernement du Canada a travaillé, en collaboration avec tous les secteurs de notre société, à améliorer la vie des familles canadiennes. Ces partenariats ont contribué à sensibiliser les Canadiens aux problèmes nombreux et complexes, telle la violence familiale, qui se posent pour les familles d'aujourd'hui.

Le plus important, c'est d'appliquer avec plus de détermination le principe que les familles solides et saines créent une société forte, saine et productive. C'est en nous appuyant sur cette conviction que nous rebâtirons ensemble le Canada, pour qu'il se fasse le reflet de nos rêves et de nos aspirations, et qu'il nous permette, à nous et à nos enfants, de nous assurer l'avenir que nous méritons.

Il est intéressant de noter que ma circonscription des Territoires du Nord-Ouest compte quatre refuges pour femmes.


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(1200)

Cette fin de semaine, pour aller à la source, je vais visiter Sutherland House, un refuge pour femmes. Fait assez singulier, ce sont les collectivités compatissantes qui créent de tels refuges. Les femmes essaient de s'entraider en venant en aide aux victimes, à leurs familles et à leurs enfants. Que nous voulions ou non l'admettre, la plupart des victimes qui s'adressent à ces refuges sont des femmes ou des enfants qui ont dû quitter leur maison, leur salon, leur lit pour trouver refuge ailleurs.

Ces refuges offrent un service d'écoute téléphonique 24 heures sur 24. Apparemment, ce n'est pas suffisant. J'ai visité d'autres refuges dans des localités comme Hay River. Les gens ont tous leurs propres histoires à raconter. Mais l'essentiel est que nous devons poursuivre notre action. Nous devons arrêter d'isoler les gens, de les blâmer ou de les montrer du doigt. Nous devons nous donner la main et travailler ensemble. Si nous ne pouvons empêcher les gens de commettre des actes de violence, nous pouvons prendre des mesures pour aider les personnes prises dans l'engrenage d'une relation malsaine à faire ce qu'il faut pour s'en sortir, à se prendre en mains pour se donner une vie meilleure, un avenir meilleur.

Trente-neuf pour cent des femmes victimes de violence familiale rapportent que leurs enfants ont vu leur mari les maltraiter. C'est intéressant parce que les femmes qui travaillent dans les refuges de ma circonscription estiment que dans les T.N.-O, une femme sur quatre au moins a été maltraitée par son partenaire. Au Canada, c'est dans les T.N.-O que le taux d'agressions sexuelles signalées est le plus élevé. En 1988 et 1989, 54 p. 100 des agressions sexuelles signalées concernaient des filles âgées de 7 à 18 ans.

Au Canada, en moyenne, les femmes sont agressées 35 fois avant que la police ne soit appelée à intervenir. Une femme sur trois sera agressée sexuellement chez elle par un homme à un moment de sa vie. Au Canada toujours, 29 p. 100 de toutes les femmes qui ont été mariées ou ont vécu maritalement avec un homme ont connu la violence physique ou sexuelle. Au Canada, 90 p. 100 des victimes d'agression sexuelle ne le déclarent pas à la police.

Dans les Territoires du Nord-Ouest, selon le recensement de 1991, il y avait 27 595 femmes, et 47,4 p. 100 de la population avait plus de 15 ans. Chez les autochtones, 40 p. 100 estimaient que la violence familiale était un grave problème dans leur collectivité. Selon l'Institut canadien de la santé infantile, les Indiens des réserves et les Inuit mentionnaient cette forme de violence plus souvent que les Indiens en dehors des réserves et les Métis. Il va sans dire que nous avons un réel problème et que nous devons réellement travailler à réaliser nos engagements.

Nous devons nous souvenir que, homme ou femme, nous avons une responsabilité vis-à-vis de nos enfants, de notre société et de nous-même. Nous avons une responsabilité personnelle face à ce que nous voulons voir réaliser. Nous voulons des résultats. Nous avons une responsabilité face à notre collectivité et à notre pays. En nous rappelant la tragédie de ces 14 femmes, nous pourrons construire quelque chose de positif.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt ma collègue, secrétaire d'État à la formation et à la jeunesse, et mon ami, mon collègue de Chambly, qui est assis derrière me disait: Parfois, on dirait qu'au parti ministériel, la main droite ignore ce que la main gauche fait.

La violence faite aux femmes ne s'arrêtera jamais tant et aussi longtemps qu'on ne parviendra pas à une égalité complète et totale. Et il faudra que le gouvernement canadien commence par donner l'exemple. Lorsqu'on parle d'égalité complète et totale, cela commence bien sûr au berceau, à l'école, à la garderie, au cégep, à l'université, pour aboutir finalement au travail.

(1205)

Lorsque le gouvernement ici présent pourra dire: «Je paie mon personnel indépendamment du sexe au même salaire», on dira merci. Ce sera un pas dans la bonne voie, lorsque nos enfants auront toute la sécurité, partout, partout!

Par exemple dans ma région, à Sherbrooke, il y a eu trois viols en l'espace de six semaines. Ma fille qui étudie au cégep, en technique policière, a été se promener dans le quartier vulnérable avec une amie. Elles se sont fait interpeller par la police: «Ne vous promenez pas dans ce quartier.» «Pourquoi?» «Vous êtes des jeunes filles, vous paraissez bien, vous risquez de vous faire violer.»

Voyez-vous, parce que c'étaient des jeunes filles, elles n'avaient pas le droit de se promener sur le trottoir dans un quartier de la ville. C'est ça l'égalité.

Une autre jeune fille me racontait qu'elle se promenait, elle aussi, elle était seule, il est vrai, et elle s'est fait harceler par deux personnes, dans une automobile. Elle a eu le temps de prendre le numéro de la plaque minéralogique. Quelques secondes plus tard un policier passe, elle lui fait signe et lui transmet le message. Il lui a dit: «Tu n'as pas à te promener ici, c'est un mauvais quartier. Tu es dans un quartier de prostitution, va te promener ailleurs.» C'est ça la liberté qu'on offre à nos femmes, à nos jeunes filles.

La secrétaire d'État à la Formation et à la Jeunesse disait qu'elle avait élevé trois jeunes enfants. Moi aussi j'ai trois enfants, dont deux filles. Je ne serais pas fier si mes deux filles n'avaient pas l'égalité de se trouver un emploi aussi intéressant que mon fils. Je ne serais pas fier du gouvernement qui dirigerait mon pays, que ce soit le Québec ou le Canada, où l'égalité ne serait pas à portée de main pour mes enfants.

Quand mon collègue de Chambly parlait tout à l'heure de double langage, il me rappelait l'affaire Thibaudeau qui est tristement devenue très célèbre. Qui pousse en Cour suprême le dossier de Mme Thibaudeau? Le gouvernement assis en face de nous.

La réforme Axworthy va surtout frapper de plein fouet les conjoints, parce qu'on tiendra compte dorénavant du salaire familial, du salaire du couple. Double langage. J'ai hâte de voir un gouvernement qui ne parlera pas des deux côtés de la bouche, un gouvernement qui agira, à qui il ne faudra pas des décennies avant d'accoucher d'une politique.


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Le plus bel exemple, encore. Aujourd'hui est le cinquième anniversaire de la fameuse histoire de l'École polytechnique où 14 jeunes filles, parce que c'étaient des jeunes filles, ont été assassinées froidement. On a commencé a parler du contrôle des armes à feu. On a eu une sorte de dépôt de projet de loi la semaine dernière, mais on rapporte que cela ira jusqu'en 2002 ou 2003 avant que ce soit réglé. Des cas comme Polytechnique pourraient se reproduire plusieurs fois avant qu'on ait une loi très serrée et sévère.

On me rapportait encore la semaine dernière que dans certains clubs, brasseries ou tavernes de Montréal, il est facile de se procurer des armes très offensives pour quelques milliers de dollars. Il est aussi facile de s'acheter une arme qu'une bonne auto usagée.

(1210)

J'aimerais avoir l'opinion de la ministre, parce que la ministre d'État à la Formation et à la Jeunesse m'a semblé très sincère. J'aimerais lui demander si, premièrement, elle est prête à se mettre la tête sur le billot pour forcer le gouvernement duquel elle est membre, au Conseil des ministres, pour vérifier si son gouvernement va cesser, une fois pour toutes, de tenir un double langage et de mettre tout en oeuvre pour que les femmes, les jeunes filles, aient l'égalité des sexes?

[Traduction]

Mme Blondin-Andrew: Madame la Présidente, je trouve qu'il est déraisonnable de la part de mon collègue d'en face de me demander de mettre mon siège en jeu à la Chambre des communes. Il y a d'autres façons de régler les graves problèmes qu'il vient de soulever.

Je suis consciente du problème de l'égalité des sexes. J'ai travaillé toute ma vie et je connais les difficultés et tribulations qu'ont subies les femmes qui ont travaillé dans un monde composé essentiellement d'hommes. On trouve à la Chambre, à divers niveaux et à divers titres, beaucoup de femmes compétentes.

Je voudrais cependant aborder certaines des questions soulevées par le député. Mon collègue m'a demandé de mettre mon siège en jeu au nom de l'égalité des femmes, de l'égalité salariale entre les hommes et les femmes et autres questions du genre. Je souligne que nous avons pris des mesures importantes en vue d'avoir une loi sur l'équité en matière d'emploi qui s'applique au plus grand nombre de personnes possible. Nous y travaillons en ce moment même. Le député sera heureux d'apprendre que ce sont surtout des femmes qui travaillent à cette loi, mais que cette mesure vise non seulement les femmes mais aussi les personnes handicapées, les minorités visibles et les peuples autochtones qui sont aussi défavorisés.

Le député parle de la nécessité pour les enfants de pouvoir vivre au-dessus du seuil de la pauvreté. Pendant les prochains mois, alors que nous procéderons à la réforme de la sécurité sociale, la question de la pauvreté chez les enfants prendra évidemment beaucoup d'importance, mais nous ne pouvons pas espérer régler tous les problèmes d'un coup de baguette magique. Cette réalité s'imposera, comme toutes ces propositions. Je le répète, la pauvreté chez les enfants est une des préoccupations que notre gouvernement et le député ont en commun.

L'autre cas dont mon collègue a parlé est un cas typique. Un processus a été mis en place, mais je n'en parlerai pas parce qu'il est déjà très avancé. Mon collègue a parlé de la justification fondée sur le revenu. Il sait qu'il existe déjà un processus concernant la réforme de la sécurité sociale, que le comité examine les propositions et qu'il se rend d'une région à l'autre pour consulter la population. Les Canadiens ont exprimé très clairement des préoccupations similaires au sujet de la justification fondée sur le revenu. Toutes ces questions seront examinées.

Un homme, un député d'en face, ne devrait pas demander à une femme de mettre son siège en jeu s'il croit vraiment à l'égalité des sexes.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Madame la Présidente, j'aimerais dire que c'est avec grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui à la Chambre pour aborder ce sujet. Je trouve toutefois que le cinquième anniversaire d'un événement si tragique n'est pas une occasion pour célébrer, mais bien pour réfléchir. Nous marquons aujourd'hui le cinquième anniversaire du massacre de l'École polytechnique, à Montréal. Je crois que tous les Canadiens sont horrifiés qu'une telle chose ait pu se produire dans notre pays.

Il est tragique que 14 jeunes femmes aient été abattues simplement à cause de leur sexe. Je pense qu'il n'y a pas un seul être humain qui ne soit pas choqué que le sexe d'une personne puisse être la raison pour laquelle quiconque, homme ou femme, puisse décider de mettre fin à la vie de 14 jeunes femmes.

Depuis un an que je suis députée au Parlement, j'ai rencontré des douzaines de parents dont les enfants ont été assassinés. Assassinés parce que le meurtrier n'aimait pas la façon dont ils portaient leur chapeau. Assassinés parce que le meurtrier était en état d'ébriété. Assassinés parce qu'au beau milieu de l'après-midi, ils se promenaient dans une rue passante et qu'ils sont tombés sur la mauvaise personne.

(1215)

Les parents disent d'une voix unanime qu'il faut modifier le système judiciaire. Ils veulent savoir où est la justice dans un système qui envoie Robert Latimer en prison à perpétuité, sans espoir de libération conditionnelle avant au moins dix ans, pour avoir tué sa fille handicapée, acte que certains perçoivent comme un geste de compassion.

Comment comparer son cas à celui de Glenn Williams, de ma circonscription, qui a assassiné sa femme, mère de quatre enfants en bas âge; le plus jeune n'avait que six mois et prenait encore le sein. Cet homme a non seulement tué sa femme, mais il a nettoyé la maison, nettoyé la scène du crime, nettoyé le corps qu'il a remis au lit avant d'appeler la police, de l'alerter, six heures plus tard.

La scène du crime ne présentait aucun indice de ce qui s'était vraiment passé. Il n'y avait que la version donnée par le meurtrier, M. Glenn Williams. Ce dernier a d'abord été accusé de meurtre, mais il a été condamné pour homicide involontaire coupable et a reçu une peine de cinq ans de prison.


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La loi prévoit une peine d'emprisonnement d'au moins dix ans dans le cas de Robert Latimer, alors que Glenn Williams n'a été emprisonné que pendant 20 mois. C'est le système même qui est déficient. Depuis 20 ans, nous nous sommes attachés à garantir les droits du contrevenant plutôt qu'à protéger la société. Cela doit changer.

Le système de justice pénale doit avoir comme première priorité d'assurer la protection de la société. Nous ne pourrons jamais éliminer totalement les crimes avec violence dans nos collectivités. Il y aura toujours des crimes perpétrés sous le coup de la passion ou de la colère. Il est aussi regrettable de penser que des crimes sont souvent commis par suite d'une consommation abusive d'alcool ou de drogues. Ce problème persistera tant que nous ne nous y attaquerons pas.

Les gens s'inquiètent à l'extrême lorsque les crimes sont commis par des récidivistes. Un individu a droit à combien d'occasions de violer, d'infliger des mauvais traitements ou de commettre des crimes avec violence? À combien de victimes a-t-il droit?

À la dernière assemblée du Parti réformiste, nous avons adopté une proposition selon laquelle celui qui commet pour la deuxième fois une infraction au cours de laquelle il inflige de graves lésions corporelles doit être automatiquement considéré comme un criminel dangereux et, par conséquent, doit être passible d'une peine d'emprisonnement indéterminée. Tant que la commission des libérations conditionnelles juge cet individu dangereux, il reste en prison. Quand l'individu semble présenter un risque minimum pour la société, ou quand sa libération conditionnelle semble présenter peu de risque, il peut être libéré avec ou sans condition. Comme ces gens sont une menace à la société, ils feront l'objet d'une certaine forme de surveillance toute leur vie.

Les députés du Bloc s'empresseront probablement de déclarer qu'il s'agit là d'une mesure draconienne. Il reste que, selon un récent sondage mené par la firme Léger et Léger, 76 p. 100 des Québécois appuient cette position et seulement 16 p. 100 s'y opposent. Si un tel sondage était effectué un peu partout au Canada, je suis convaincue que les résultats seraient similaires. La plupart des Canadiens, sinon la majorité d'entre eux, pensent que les infractions graves commises par des criminels dangereux devraient être traitées ainsi.

Les Canadiens en ont assez de ces auteurs de crimes graves qui ont maintes fois la possibilité de récidiver. Prenons l'exemple de Ray Budreo. Cet homme a été trouvé coupable de plus de 35 infractions sexuelles contre des enfants sur une période de 30 ans. À sa dernière condamnation, il n'a reçu qu'une peine de six ans. De vives protestations ont empêché sa libération d'office. Il a dû alors purger toute sa peine. Le jour où sa peine s'est terminée, des manifestants se sont réunis près des portes de la prison pour protester sa libération, avec raison dois-je dire. Selon la loi, on devait le libérer même si bien des gens jugent qu'il est encore dangereux et qu'il présente un risque pour la société. Lorsqu'on a appris qu'il vivait à Peterborough, bien des habitants de cette région se sont inquiétés de sa présence parmi eux jusqu'à ce qu'il déménage à Toronto.

(1220)

M. Budreo n'aimait pas toute l'attention qu'on lui accordait. Il affirme qu'il ne représente aucun danger et qu'il veut simplement reprendre une vie normale. J'espère que M. Budreo se connaît assez bien pour donner ce genre de garantie à la société. J'espère qu'il ne commettra plus d'infractions. J'espère qu'il n'attaquera plus d'autres enfants, mais il y a de fortes chances qu'il récidive.

On ne peut pas guérir des pédophiles comme Ray Budreo. On peut tout au plus les surveiller. Mais notre système judiciaire ne nous permet même pas de veiller à ce que Budreo soit surveillé. Le système judiciaire estime ne rien pouvoir faire pour protéger la société, pour empêcher que d'autres enfants ne deviennent ses victimes. Cela exaspère les Canadiens d'entendre que leur système judiciaire ne peut rien faire pour les protéger contre les criminels violents de ce genre.

Nous, parlementaires, pouvons faire quelque chose. Nous pouvons promulguer la loi qui s'impose pour protéger la société. Une loi peut empiéter sur les droits des criminels, et d'ailleurs, l'emprisonnement peut en soi être considéré comme un empiétement sur les droits des criminels. Nous ne pouvons pas nous décharger de nos responsabilités en tant que législateurs seulement par crainte des contestations judiciaires. Les Canadiens nous ont chargés d'édicter la loi qu'il faut pour les protéger et j'estime que nous avons une obligation envers eux de faire exactement cela.

Cette idée, cette préoccupation a été reprise vendredi par le juge George Finlayson, de la Cour d'appel de l'Ontario. À propos de l'appel interjeté par Keith Léger, le juge Finlayson a présenté l'observation suivante: «Si la société souhaite que les pédophiles soient davantage surveillés, il faut alors que le gouvernement fédéral légifère, car le tribunal ne peut certes pas interpréter la loi de manière trop libérale.» Je crois que, dans le cas de Léger, c'est ce que le juge de première instance a fait. Voilà où nous en sommes. C'est à nous qu'il incombe de légiférer.

Lorsque le ministre de la Justice a présenté son programme de contrôle des armes à feu, la semaine dernière, il a dit que ce programme bénéficiait de l'appui de la majorité des Canadiens. Je suis vraiment heureuse de voir que le ministre accorde de l'importance aux sentiments des Canadiens et je voudrais bien tenir pour acquis que le ministre présentera bientôt un projet de loi visant à rétablir la peine de mort. Après tout, la majorité des Canadiens sont en faveur du rétablissement de la peine de mort.

Malheureusement, il semblerait que cela est improbable. Je tiens à dire au ministre de la Justice qu'il ne peut pas gagner sur les deux tableaux. S'il veut invoquer l'appui du public pour certaines mesures législatives, il devrait le faire pour toutes les mesures législatives. Si le contrôle des armes à feu est une bonne mesure parce qu'elle est appuyée par la majorité des Canadiens, le rétablissement de la peine de mort serait une mesure tout aussi bonne parce qu'elle bénéficierait certainement de l'appui de la majorité des Canadiens.


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C'est là la principale différence entre les deux partis. Pour le Parti réformiste, la volonté de la majorité des Canadiens a la priorité, qu'elle soit ou non conforme à la politique du parti. Dans le cas du Parti libéral, l'appui du public n'est important que pour les questions sur lesquelles la majorité des Canadiens se trouvent à être d'accord avec le gouvernement.

Ne nous y trompons pas. Les Canadiens réclament des lois criminelles plus sévères. Le Comité de la justice étudie actuellement le projet de loi C-37, qui vise à modifier la Loi sur les jeunes contrevenants. Rien ne semble irriter davantage les Canadiens que de voir des jeunes contrevenants se faire traiter avec ménagements après avoir commis des crimes graves et des crimes de violence. Si nous acceptons ou minimisons les actes de violence commis par des jeunes contre d'autres personnes, comment pouvons-nous venir à la Chambre des communes dénoncer la violence contre les femmes? On peut bien présenter une disposition qui inverse la charge de la preuve pour les jeunes de 16 et de 17 ans, mais les Canadiens croient que ces jeunes devraient être traités comme des adultes, surtout lorsqu'ils commettent des crimes violents contre d'autres personnes.

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Dans mon bulletin parlementaire du printemps dernier, je posais la question suivante: la limite d'âge prévue dans la Loi sur les jeunes contrevenants, actuellement de 12 à 17 ans, devrait-elle être abaissée pour ne couvrir que les jeunes de 10 à 15 ans? J'ai reçu près de 3 500 réponses, et 91 p. 100 des électeurs de ma circonscription pensaient que la limite d'âge de la loi devrait être abaissée. Je suis convaincue que si les libéraux posaient les mêmes questions dans leurs bulletins parlementaires, ils obtiendraient des réponses semblables.

L'opinion publique a-t-elle encore de l'importance pour le gouvernement ou cédera-t-il à l'étroitesse d'esprit en disant qu'il sait mieux que tout le monde ce qu'il faut faire? Comment le gouvernement peut-il invoquer un tragique crime haineux commis il y a cinq ans pour prétendre que tous les hommes commettent des actes violents à l'encontre de l'ensemble des femmes? Les Canadiens veulent être protégés de tous les crimes, qu'ils soient commis par des hommes, par des femmes ou par des enfants.

En dépit de cette inquiétude, les experts continuent de nous dire que les crimes violents ne sont pas vraiment à la hausse. Ils justifient leur affirmation en se fondant sur un certain nombre d'enquêtes. Je ne veux pas me lancer dans une querelle de statistiques, mais je voudrais citer certains chiffres. Selon Statistique Canada, il y a eu 204 crimes violents pour 100 000 personnes en 1971; en 1991, soit vingt ans plus tard, cette proportion était passée à 1 099 par 100 000 personnes. Cela représente un accroissement de 500 p. 100 en vingt ans. C'est ce qui inquiète les Canadiens.

Il y a 20 ans, les parents ne s'inquiétaient pas lorsque leurs jeunes enfants jouaient dehors avec leurs amis. Aujourd'hui, les jeunes enfants jouent habituellement sous la surveillance de parents. Il y a 20 ans, les élèves des écoles secondaires pouvaient circuler dans leurs écoles sans crainte. Aujourd'hui, les jeunes se déplacent par deux ou en groupe, et pas juste les filles, les garçons aussi.

Le danger de circuler seul est apparu évident dans ma ville le 4 octobre dernier. Après l'école, Pamela Cameron, une jeune fille de 16 ans qui venait d'emménager dans notre ville, est allée avec des camarades dans un restaurant boire un café et manger des muffins. Après cela, elle a emprunté la rue la plus passante de notre ville pour aller rendre visite à son petit ami. Elle ne s'est jamais rendue.

Pamela a été assassinée à quatre heures de l'après-midi à deux pâtés de maison de mon bureau de circonscription. Elle a été empoignée dans la rue la plus passante de ma localité, traînée dans les buissons et sauvagement assassinée.

Pendant la semaine, ou à peu près, qui a précédé l'arrestation du meurtrier, toute la localité a été plongée dans une absolue détresse. La peur était si intense que les parents ne laissaient plus leurs enfants aller à l'école à pied tout seuls. Ils les conduisaient en voiture à l'école ou au travail et ne laissaient plus ni leurs filles ni leurs garçons sortir.

Quand, dix jours plus tard, l'individu s'est livré aux autorités et a été inculpé de meurtre, ce fut un immense soulagement. Les habitants pouvaient enfin se sentir un peu plus à l'aise; pas énormément plus à l'aise, mais un peu. Puis, le soulagement, après cette grande tension, a tourné à la colère lorsqu'on a appris que le prévenu avait un casier judiciaire et était considéré comme un criminel violent et dangereux à sa sortie de prison.

Mes électeurs, et c'est tout à leur honneur, ont canalisé leur colère pour faire quelque chose d'utile. Ils ont formé des groupes de citoyens pour chercher immédiatement les jeunes lorsqu'ils manquent à l'appel. Ils ont entrepris une campagne pour appuyer mon projet de loi qui propose d'autoriser le maintien en incarcération des délinquants dangereux après l'expiration de leur peine. Il leur a suffi d'une journée, à un centre commercial local, pour recueillir 1 000 lettres adressées au solliciteur général et au ministre de la Justice. Ils ont fait signer une pétition par 6 700 personnes. À Milton, en Ontario, ville d'origine de la jeune victime, la soeur aînée de cette dernière a recueilli 10 000 noms sur une pétition semblable; cette ville a manifesté son appui pour un projet de loi d'initiative parlementaire qui propose de recourir à des mesures radicales face à des délinquants dangereux.

(1230)

À propos de mon projet de loi, quelque chose de tout à fait miraculeux s'est produit la semaine dernière. Même si tous les députés du Parti libéral et du Bloc québécois qui avaient participé au débat s'étaient prononcés contre, le projet de loi a été miraculeusement approuvé à l'unanimité en deuxième lecture jeudi dernier. Je ne sais pas très bien ce qui s'est produit, mais je crois que c'est parce que les Canadiens en général ont fait savoir qu'ils se préoccupaient beaucoup de la violence dans notre société et voulaient que la Chambre adopte des mesures pour s'attaquer au problème et fasse passer la protection de la société avant les droits des accusés.


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En ce cinquième anniversaire du massacre de l'École Polytechnique, je crois que nous devons accorder une attention spéciale à la violence contre les femmes. En tant que société, nous devons clairement faire comprendre que la violence au foyer à l'égard des femmes et des enfants ne sera pas plus tolérée que la violence à l'égard des inconnus. Que la violence émane d'un conjoint, d'un parent, d'un ami, d'un collègue, d'un patron ou même d'un inconnu, c'est un problème auquel nous devons nous attaquer. L'évolution a donné au mâle une force physique supérieure à celle de la femelle de l'espèce, mais nos lois sont censées établir des règles du jeu équitables.

Depuis malheureusement de nombreuses années, la loi fait preuve d'indulgence à l'égard de certaines formes de violence contre les femmes, surtout la violence conjugale. Même de nos jours, alors que la société condamne publiquement les actes de violence, le fait que la victime était le conjoint de l'agresseur semble constituer une circonstance atténuante dans ces crimes.

Nous ne pouvons pas continuer à excuser la violence contre les femmes et les enfants. Nous devons continuer à nous attaquer à ce problème. Que ce soit par l'éducation, par l'intervention communautaire, par un traitement ou par les sanctions prévues pour les actes criminels, nous devons répéter le message que la violence n'est pas un moyen d'expression acceptable. Il n'est pas acceptable d'infliger des mauvais traitements à son conjoint, à ses enfants ou, d'ailleurs, à n'importe quel autre être humain.

À titre de mère de quatre garçons, je trouve parfois difficile d'encourager les jeunes garçons, qui sont naturellement rudes et agressifs, à comprendre qu'il y a des limites à cette agressivité. Je crois qu'en tant que parents, nous avons à l'égard non seulement de nos jeunes garçons mais aussi de nos jeunes filles la responsabilité de les amener à exprimer leurs sentiments d'exaspération et de colère autrement que par la violence.

Je vous remercie de m'avoir permis de prendre part à ce débat. J'espère que nous verrons d'ici 20 ans un changement marqué touchant la violence envers qui que ce soit.

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais féliciter la députée de son excellent discours et de nous avoir présenté une foule de données intéressantes. J'ai toutefois des réserves à formuler au sujet d'une bonne partie de ses propos. La députée a donné un certain nombre de sources pour les études qu'elles a citées. Cela peut toujours être utile.

Je voudrais savoir dans quelle étude il est dit qu'une majorité de Canadiens sont favorables au rétablissement de la peine capitale. Il me semble qu'elle a dit cela dans son discours, et je ne mets pas en doute la validité de cette affirmation. Je saurais gré à la députée de bien vouloir nous dire de quelle étude cette affirmation est tirée. Et je ne mets aucunement en doute l'intégrité de la députée en lui demandant ce renseignement.

(1235)

Mme Meredith: Madame la Présidente, plusieurs sondages ont en fait été tenus sur la question. Le premier d'entre eux date, sauf erreur, de 1982-1983; 80 p. 100 des gens interrogés avaient alors répondu qu'ils étaient favorables au rétablissement de la peine capitale. Dans un autre sondage réalisé il y a quelques années, 76 p. 100 des gens interrogés se sont dits favorables au rétablissement de la peine capitale.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté avec attention le discours de ma collègue. J'aurais quelques remarques à faire sur le fait que, oui, il est important de dénoncer les situations pénibles et criminelles qui se sont présentées, mais qu'il est aussi important de réfléchir, dans le cadre d'un débat comme celui d'aujourd'hui, sur les causes réelles d'une telle situation. Effectivement, les comportements violents qu'on retrouve ne sont souvent que les symptômes d'une situation qui a été créée par la société.

À ce sujet, je pense qu'on doit examiner particulièrement la réforme des programmes sociaux et la façon dont on veut aider tout le monde à vivre dans des conditions acceptables.

Si on faisait une analyse en profondeur, ne pourrait-on en venir à la conclusion que les gens qui ont des comportements agressifs, des comportements criminels inacceptables ont souvent développé ces pratiques-là parce qu'on ne leur a pas donné une égalité de chances au départ? Peut-être ne s'est-on pas assuré, dans les programmes sociaux, selon la façon dont les gens sont élevés, de la possibilité d'avoir accès à des services de garde adéquats quand les enfants sont jeunes et tenter de combattre vraiment la pauvreté chez les enfants?

Est-ce que ce ne serait pas de ce côté qu'il faudrait chercher des solutions de façon plus approfondie pour régler les problèmes une fois pour toutes, et non seulement faire des interventions curatives et punitives?

C'est sûr qu'on aura toujours besoin de corriger des situations et de faire des interventions dans des cas précis, dans des cas de violence inacceptables comme celui de Polytechnique, mais il y a aussi tous les autres cas qui se présentent.

Est-ce qu'on ne devrait pas plutôt, comme élus, tenter de trouver des solutions de fond plutôt que d'énoncer des faits très reprochables, des faits qui sont inacceptables? Il faut que notre réflexion aille plus loin et qu'on aille jusqu'à trouver des solutions.

J'inviterais la députée à répondre à la question suivante: Dans le programme du Parti réformiste, y a-t-il ce qu'il faut de forme de compassion, de forme d'acceptation des situations et de traitements adéquats pour corriger ces situations dans notre société? Est-ce qu'on est prêt à mettre en vigueur la déclaration du Parlement de 1989 contre la pauvreté des enfants? Est-ce que ce n'est pas plus de ce côté-là, du côté de la prévention, qu'il faut mettre nos priorités, de telle façon qu'on ne répète pas, par exemple, le modèle américain où on dépense plus d'argent dans les prisons qu'à venir en aide aux personnes?

[Traduction]

Mme Meredith: Je remercie le député de sa question. Le Parti réformiste est certes en faveur de la prévention de la criminalité, mais on ne saurait s'occuper uniquement de prévention sans prendre de dispositions à l'égard des crimes eux-mêmes.

Nous croyons que les programmes sociaux devraient s'adresser aux plus nécessiteux, mais en réalité, les pauvres comme les riches commettent des crimes. La criminalité ne connaît pas de


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barrières. Si le député croit sincèrement qu'en réglant les problèmes de pauvreté, on enrayera la criminalité, je lui conseille de se pencher plus attentivement sur les auteurs de crimes.

Bien des crimes sont en effet commis par des gens qui ont eu une existence très privilégiée. Je pourrais donner de nombreux exemples bien connus, dont le cas Thatcher, en Saskatchewan, et celui de Huenemann, en Colombie-Britannique, cet homme qui a assassiné sa mère et sa grand-mère parce qu'il refusait de partager une succession de 4 millions de dollars.

Le crime ne connaît pas de barrières. Nous devons effectivement résoudre les problèmes de notre société: la pauvreté, l'analphabétisme, et d'autres questions semblables. Nous devons toutefois orienter l'aide vers les plus nécessiteux et éviter l'universalité qui nous oblige à accorder de l'aide à des gens qui n'en ont pas besoin et à donner à ceux qui en ont le plus besoin une aide insuffisante pour résoudre le problème.

(1240)

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement les propos de la députée et je trouve pour le moins étonnant de l'entendre parler de rétablir la peine de mort en ce jour où nous commémorons le massacre de 14 jeunes femmes. Il me semble que c'est contradictoire. De nombreuses mesures peuvent cependant être prises, au niveau de la justice pénale.

Étant donné qu'une partie des questions qui ont trait à la sécurité des femmes ont trait également à leur possibilité d'accès à l'aide et à l'information, la députée pourrait-elle me dire si le Parti réformiste ou elle appuieraient le financement de base des centres pour femmes? Comme elle le sait, chaque province et chaque territoire de notre pays offre ce genre d'aide aux femmes, mais aucun financement de base n'est prévu pour les centres pour femmes. Le Parti réformiste appuierait-il une telle proposition?

Mme Meredith: Madame la Présidente, je ne suis pas en faveur d'un financement de base de la part du gouvernement fédéral. Je suis en faveur, cependant, d'une aide financière de la part des municipalités où ces programmes existent. Je suis également en faveur du financement de la part du secteur privé local et des gouvernements provinciaux. Je pense que l'aide, pour ces centres et pour la prestation de ces services, devrait venir du niveau le plus proche.

Mme McLaughlin: Madame la Présidente, je dois dire que je trouve la réponse de la députée plutôt choquante.

Il me semble que ce que la députée dit en réalité, c'est que les femmes qui sont battues ou agressées sexuellement ou physiquement devraient compter sur les ventes de pâtisseries. Pour ma part, je soutiens que si nous voulons sérieusement lutter contre la violence faite aux femmes dans notre société, l'option des ventes de pâtisseries n'est pas suffisante. Que les militaires organisent des ventes de pâtisseries!

La députée est-elle en faveur de la tolérance zéro à l'égard de la violence contre les femmes? Dans l'affirmative, comment atteindrons-nous cet objectif si le gouvernement ne prévoit pas des centres d'hébergement et des services de soutien pour venir en aide aux femmes?

Mme Meredith: Madame la Présidente, en tant que députée de la Chambre des communes, j'ai pour rôle de m'assurer que les lois canadiennes traitent sérieusement les cas d'agressions contre des conjoints et contre des femmes. Lorsqu'un individu tue son conjoint, il ne devrait pas être condamné à seulement cinq ans d'emprisonnement pour homicide et ne purger que 20 mois de sa peine. Tant que nos lois ne prendront pas au sérieux les actes de violence contre les femmes et ne prévoiront pas des peines conformes à ces infractions, nous continuerons d'avoir besoin de toutes sortes de refuges pour les femmes.

Bon nombre de mes collègues appuient probablement ces maisons d'hébergement en versant 10 p. 100 de leur traitement à des oeuvres de bienfaisance. Je ne dis surtout pas que les ventes de pâtisseries sont le moyen idéal, pour qui que ce soit, de recueillir de l'argent. Cependant, les collectivités peuvent recourir et recourent entre autres à la sensibilisation et à l'information pour financer les maisons d'hébergement pour les femmes battues et leurs enfants.

C'est là où il faut mettre l'accent. Il revient à la collectivité de s'attaquer à ce problème et d'aider à le régler. Elle doit cesser d'attendre que le gouvernement agisse à sa place.

Mme McLaughlin: Madame la Présidente, puis-je m'exprimer très clairement et demander à la députée si elle est prête à affirmer que ni elle ni le Parti réformiste n'appuient le financement de maisons de transition par le truchement du Régime d'assistance publique du Canada?

Mme Meredith: Madame la Présidente, je ne connais pas assez ce dossier pour me prononcer à ce sujet. Toutefois, je crois que le Parti réformiste appuie de diverses façons le financement d'organismes de charité, comme les maisons de transition. Ils le font notamment, je le répète, en versant 10 p. 100 de leur traitement aux oeuvres de bienfaisance.

(1245)

[Français]

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Madame la Présidente, premièrement, je voudrais noter la contribution faite à cette journée par l'ex-députée néo-démocrate de cette Chambre, Mme Dawn Black, qui a proposé le projet de loi qui a créé cette journée à la mémoire des 14 femmes québécoises, et aussi pour que la Journée nationale de commémoration, dans toute l'étendue du Canada, le 6 décembre de chaque année, soit connue sous le nom de Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes.

Je pense qu'il est très important de mentionner les noms de ces 14 femmes qui sont décédées de façon tragique. Nous ne devons pas oublier les personnes qui ont été tuées. Les 14 victimes étaient: Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Barbara Klucznik Widajewicz, Maryse Leclair, Annie St-Arneault, Michèle Richard, Maryse Laganière, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Annie Turcotte.


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Je voudrais citer un extrait du mémoire du CTC et du Comité sur la condition féminine et droits de la personne du Congrès du travail du Canada: «Imaginez un monde où les filles et les femmes sont en sécurité dans leur foyer, leur école, dans les rues et dans le milieu de travail.» Imaginez, madame la Présidente.

[Traduction]

Nous voulons tous nous imaginer ce que serait la situation pour toutes les femmes et tous les enfants s'ils pouvaient se sentir en sécurité dans leur maison, leur rue et leur école.

Je voudrais me pencher sur plusieurs questions précises ce matin. On a donné de nombreuses statistiques, et je n'entends pas les répéter aujourd'hui. Je voudrais plutôt m'arrêter sur plusieurs questions qui, selon moi, sont extrêmement importantes en ce qui a trait à ce problème.

La première question est celle du contrôle des armes à feu. C'est pour cette raison que, au cours de la législature précédente, mon parti a appuyé le projet de loi qui proposait d'exercer un contrôle plus strict sur les armes à feu. C'est toujours une question dont la Chambre est saisie et un autre projet de loi sera présenté à la Chambre à ce sujet.

Cependant, je tiens à m'attarder sur plusieurs points. D'abord, permettez-moi de parler du travail de la psychologue Paula Pasquali, du Yukon, qui a soulevé certaines de ces questions, en tant que femme et psychologue travaillant sans relâche, depuis de nombreuses années, sur le dossier de la violence faite aux femmes. Elle s'est demandé si nous ne posions pas souvent la mauvaise question et si nous ne devions pas plutôt soulever des questions au sujet de la sécurité. Comme Mme Pasquali l'a signalé, il ne fait aucun doute que certaines formes de contrôle des armes à feu limitent à coup sûr l'accessibilité à ce type d'armes dont les femmes pourraient être victimes dans le foyer familial. Cependant, nous savons que de nombreuses femmes courent toujours un très grave danger, car des femmes sont encore tuées au Canada.

Elle a proposé, d'une part, d'envisager également d'interdire à des personnes ayant un passé violent ou un comportement menaçant d'obtenir une autorisation d'acquisition d'armes à feu et, d'autre part, de retirer les armes à feu aux individus condamnés pour des crimes violents. Nous n'avons pas besoin de réforme pour faire ça. Nous n'avons qu'à le prévoir dans le Code criminel actuel.

Selon une étude financée par le ministère de la Justice, les policiers saisissent rarement des armes à feu dans des maisons où ils sont appelés à intervenir à la suite d'actes de violence familiale, même s'ils savent qu'ils ont le pouvoir de le faire et qu'ils n'ignorent pas dans quelle mesure les armes à feu sont utilisées contre les femmes. Je suppose que le mari qui s'est livré à des voies de fait contre son épouse se voit rarement privé du droit de posséder des armes à feu. Pourtant, c'est possible en vertu de la loi actuelle.

Il n'y a rien de radical à proposer que les gens coupables de crimes violents ne puissent avoir accès à des armes à feu.

(1250)

Un argument que l'on invoque parfois, c'est que retirer les armes des mains des chasseurs et des trappeurs, c'est les priver de leurs moyens de subsistance. À mes yeux, il s'agit on ne peut plus manifestement d'un argument en faveur de la garde des armes à feu hors du milieu familial. Je parle ici des personnes qui ont été reconnues coupables d'un crime violent.

Nous devrions élargir le débat sur le contrôle des armes à feu, dont la portée est actuellement passablement restreinte, de façon à pouvoir nous entendre sur nos objectifs, c'est-à-dire les morts et les crimes que nous voulons prévenir, et sur nos priorités. Il s'agit de savoir s'il faut s'attaquer plus précisément à la violence au foyer, en plus d'adopter des mesures de réduction de ce phénomène grâce au contrôle des armes à feu. Il nous faut évaluer la loi sur le contrôle des armes à feu qui est actuellement en vigueur et voir comment nous pourrions utiliser au mieux les fonds débloqués pour éliminer la violence au foyer et l'usage des armes à feu en milieu familial.

Un deuxième aspect de notre système de justice pénale qui nous préoccupe tous grandement, c'est, bien sûr, la nécessité d'insister sur le fait qu'il s'agit de défendre l'intérêt des femmes qui ont décidé de déposer des plaintes. De nombreuses études ont été faites à ce sujet. Selon une d'elles, qui a été menée récemment en Ontario, la plupart des femmes étaient déçues de la réaction du système de justice pénale aux agressions commises par les hommes avec lesquels elles vivaient. Bon nombre de femmes ne veulent pas que leur partenaire soit puni, mais elles aspirent à un système qui comporterait des mesures efficaces pour assurer leur sécurité.

Cette étude ontarienne démontre que ce n'est que très rarement que la peine imposée atteint l'objectif visé. Les études de Mme Pasquali sur les agressions sexuelles au Yukon ne laissent pas grand espoir que cela arrive un jour sauf lorsqu'il existe un système clairement axé sur la victime et ses besoins et sur l'aide à l'agresseur par l'intermédiaire de groupes d'entraide.

En 1983, le Solliciteur général du Canada émettait une directive demandant à la GRC de porter des accusations et à la Couronne de poursuivre tout homme accusé de voies de fait contre son épouse, quels que soient les souhaits de cette dernière. À l'époque, nous étions nombreux à penser que c'était une bonne idée. Je pense toutefois que le moment est venu de voir si cette directive, ainsi que toute la législation mise en place à cette fin, servent bien les femmes.

Un troisième aspect du système judiciaire dont j'aimerais traiter est le cas des individus ayant commis un crime violent et qui sont condamnés à une peine moindre ou acquittés après avoir été déclarés non coupables pour cause d'intoxication produite par la consommation d'alcool ou de drogues. J'aimerais voir le gouvernement modifier le Code criminel afin de remédier à cette situation. Je crois qu'il est des plus choquant pour les femmes de ce pays de savoir qu'à notre époque, alors que la question de la violence est si souvent à la une, un tel état de choses soit encore possible. C'est totalement inacceptable. Je reçois des pétitions des quatre coins du pays exprimant l'indignation de leurs signataires.

Les services et l'accès aux services sont d'une importance primordiale. Toutes les femmes prisonnières de situations violentes vivent dans la peur. Ce n'est que depuis 15 ou 20 ans que nous avons mis en place un réseau de services pour les femmes, constitué de maisons de transition, de lignes téléphoniques de secours, et de centres d'aide aux victimes de viol, grâce auquel nous pouvons dire aux femmes que la façon dont elles sont traitées est inacceptable, qu'elles ont d'autres recours. La socié-


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té a pris ses responsabilités. En tant que société, nous sommes responsables de la sécurité de nos concitoyens.

Je voudrais revenir aux propositions du député libéral de Hamilton-Wentworth qui déclarait que l'on devrait cesser de financer les groupes d'intérêt. Il a cité, bien sûr, dans des déclarations publiques faites à divers endroits, les groupes de femmes. Laissez-moi vous donner quelques chiffres qui vous donneront une idée de ce que devraient être les priorités de notre société. On nous dit que la société ne peut plus se permettre de financer le travail que font ces groupes d'aide ou de défense pour les femmes et les enfants.

(1255)

Beaucoup de femmes aujourd'hui doivent se demander comment cela se fait qu'en 1992, le gouvernement a pu donner une subvention de plus de 54 millions à Pratt and Whitney, et de 183 000 dollars à l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance. Comment cela se fait-il que, la même année, Marconi Canada a reçu presque 10 millions et l'Institut canadien de recherches sur les femmes environ 250 000 dollars? Comment cela se fait-il que Spar Aérospatiale a reçu presque 14 millions cette année-là, alors que le Réseau d'action des femmes handicapées du Canada a reçu à peine plus de 100 000 dollars?

Il convient particulièrement aujourd'hui de rejeter pour de bon ce mythe qui veut que ce n'est pas la responsabilité du gouvernement de veiller à la sécurité des gens. Il existe sûrement des ressources à mettre à la disposition des femmes, et le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard.

En ce qui concerne l'accessibilité, je voudrais parler d'une manière particulière des régions rurales du pays. Comme nombre de députés le savent, il est très difficile, pour les femmes de la plupart des régions rurales, de recevoir des services de soutien et même des services juridiques à cause de leur isolement. J'estime qu'il est particulièrement important aujourd'hui de veiller à ce que les régions rurales occupent une place spéciale dans la planification des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

Je peux citer deux exemples locaux. Le Victoria Faulkner Women's Centre, à Whitehorse, au Yukon, a dû déménager trois fois depuis un an. Il tente de fournir des services aux femmes et est un des rares organismes qui soient facilement accessibles aux femmes au Yukon. Il est révoltant que cet organisme n'ait pas de locaux permanents. De même, à Watson Lake, au Yukon, le Help and Hope Transition Home for Families est également menacé. Il a même dû être fermé partiellement parce qu'il manque de fonds. C'est par l'entremise du Régime d'assistance publique du Canada que les maisons de transition des territoires et des provinces vont être partiellement financées.

Nous n'avons pas éliminé la violence faite aux femmes. Je voudrais bien qu'il ne soit pas nécessaire d'ouvrir des maisons de transition pour les femmes battues. Mais, tous les jours, des femmes viennent frapper à la porte des maisons de transition du pays, tous les jours, des femmes lancent un appel désespéré à l'un des centres pour femmes du pays. Nous ne pouvons pas les laisser tomber.

Cela m'amène à l'examen de la sécurité sociale, qui ne fait qu'effleurer cette question, mais qui traite du RAPC. Si le gouvernement avait vraiment voulu examiner tous les aspects des questions qui concernent les familles dans son examen de la sécurité sociale, il se serait manifestement penché sur le problème de la violence contre les femmes et les enfants et se serait fermement engagé, dans cet examen, à étudier sérieusement ce problème. Il ne l'a pas fait. C'est très déconcertant pour un grand nombre d'entre nous.

La pauvreté et les inégalités sont clairement liées à la violence faite aux femmes. Il ne fait aucun doute que des accords comme l'ALENA et l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis nuisent aux conditions de travail de bien des femmes. Ce sont souvent les femmes qui subissent les conséquences négatives de ces accords commerciaux. Ce sont surtout les femmes qui portent le poids des compressions dans les services sociaux de chaque province et de chaque territoire.

La ministre a mentionné aujourd'hui, dans un discours que j'estime extrêmement important, que les femmes jouent un rôle central dans la vie familiale et dans l'éducation des enfants. Pourtant, il y a encore un enfant sur cinq qui vit dans la pauvreté au Canada, ce qui signifie que ses parents sont pauvres.

(1300)

Il s'agit d'une forme de violence que l'on retrouve partout dans le monde, que l'on retrouve ici, au Canada, et pour laquelle nous pouvons faire quelque chose. Nous avons montré que nous étions bien intentionnés, en 1989, quand nous avons dit que nous voulions éliminer la pauvreté d'ici l'an 2000. Il ne suffit pas de vouloir. Nous devons prendre des mesures, et nous le pouvons.

Il y a beaucoup d'exemples de ces inégalités. J'ai parlé, tout à l'heure, de situations où des personnes qui défendent les intérêts des femmes recevaient du gouvernement des fonds qui n'étaient rien, comparativement aux fonds accordés dans d'autres secteurs.

Il faut à tout prix que nous nous engagions aujourd'hui à débloquer des ressources pour ces services et l'accessibilité à ces services. L'accessibilité aux cours de langue et aux services d'aide est un problème que rencontrent beaucoup d'immigrantes. La Chambre doit prendre au sérieux la responsabilité que nous avons, en tant que société, envers tous les citoyens.

La députée réformiste qui a pris la parole avant moi a dit que nous pourrions y parvenir si les gens étaient un peu plus charitables et si nous organisions un peu plus de ventes de pâtisseries, je suppose. Je ne suis pas contre l'idée. En fait, des particuliers organisent des activités de collecte de fonds pour la plupart des services offerts aux femmes. J'ai participé à bon nombre de ces activités, et les députés à la Chambre en ont probablement fait autant.

Le fait est que ces services ont besoin d'un certain financement de base pour être en mesure de poursuivre leurs activités. Nous ne pouvons leur tourner le dos et prétendre que la charité suffit. Cette époque est depuis longtemps révolue. Nous avons fait des progrès et nous sommes devenus plus sensibles au problème depuis l'institution de cette journée commémorative.


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Il est absolument essentiel que nous réaffirmions notre engagement à l'égard de mesures précises de lutte contre la violence faite aux femmes et d'éradication de cette violence. Toutes nos interventions doivent viser la tolérance zéro. Il ne suffit pas que les gouvernements agissent et que le Parlement agisse. Nous devons tous agir dans la société.

Nous pouvons poser de nombreux gestes précis, si nous le souhaitons. C'est nettement une question de volonté. Je voudrais conclure en citant un commentaire paru récemment dans un éditorial du Star de Whitehorse. Il résume très bien la question:

Le premier mandat d'un gouvernement est de servir ses électeurs. Il est difficile d'imaginer un rôle plus important que celui de protéger le bien-être physique des gens, sinon leur vie, contre les actes de violence criminelle au foyer.
Je prie tous les députés de s'intéresser sérieusement à cette question dans leur circonscription et ici, à la Chambre des communes, de même que d'appuyer tout projet de loi qui viendrait en aide à ces services de soutien et nous inciterait à maintenir notre engagement à ne tolérer absolument aucune violence à l'égard des femmes.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, j'ai une brève question. J'ai trouvé intéressant d'entendre le chef du Nouveau Parti démocratique parler de la violence faite aux femmes. La députée ne semblait pas très encline à penser que le gouvernement fédéral devrait s'en remettre davantage aux oeuvres charitables cherchant à remédier aux conséquences de la violence faite aux femmes plutôt qu'à s'attaquer aux causes du problème.

Je sais qu'elle appuierait probablement des mesures de sensibilisation qui régleraient une partie de ces problèmes. Elle n'a pas vraiment parlé de la position de son parti sur l'imposition de peines plus sévères et la réforme du système de justice pénale de façon qu'il prévoie des sanctions adéquates dans le cas d'actes de violence. Que pense-t-elle des droits des victimes, par rapport aux droits des criminels?

J'apprécierais qu'elle nous fasse part de la position de son parti sur ces questions très importantes, qui ont trait à la prévention de la violence non seulement contre les femmes, mais contre tous les Canadiens.

(1305)

Mme McLaughlin: Madame la Présidente, je me ferai un plaisir de répondre à ces questions. En fait, je crois avoir traité assez en détail de certaines questions ayant trait à la justice criminelle, notamment du contrôle des armes à feu et du fait que ceux qui ont commis des crimes avec violence ne devraient pas avoir accès à des armes à feu.

Deuxièmement, il est d'importance capitale que le gouvernement prenne rapidement des mesures pour modifier le Code criminel et faire de l'intoxication criminelle une nouvelle infraction.

Troisièmement, de toute évidence, tout programme visant à contrer la violence faite aux femmes doit prévoir des mesures sévères à l'intention des auteurs des crimes en question.

Pour ce qui est des droits des victimes, c'était exactement de cela que je parlais aujourd'hui. Les victimes ont le droit d'avoir des services de soutien et de counselling. D'abord et avant tout, elles ont le droit ne pas devenir des victimes. Nous devons prendre les mesures préventives qui s'imposent, offrir les ressources adéquates, dans nos villes et nos campagnes, pour que les femmes sachent qu'il est inacceptable qu'elles subissent de la violence. Il existe des recours.

Il y a des gens qui peuvent les défendre. Il existe des maisons de transition. Il existe des services de soutien. Les femmes doivent rester libres d'en décider elles-mêmes, parce que nous devons respecter leurs choix. Nous voulons toutefois éviter que des femmes deviennent victimes de violence. Nous pouvons y parvenir dans une large mesure en prenant les moyens que j'ai mentionnés aujourd'hui.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais demander à la députée du Yukon ce qu'elle pense de la violence.

Lorsque j'étais enfant, on nous disait de ne jamais nous habiller de rouge lorsque nous allions chercher le bétail au champ car cette couleur pouvait enrager le taureau.

J'ai souvent été témoin, dans ma communauté, d'actes de violence. En y regardant de plus près, on constate qu'il y a toujours une tension qui est en quelque sorte la conséquence des comportements de l'une ou l'autre partie.

Comment pouvons-nous l'éviter? Comment pourrions-nous prévenir des actes pareils dans de nombreux cas? Il s'agit de prévenir en évitant de provoquer lorsque nous savons qu'un problème existe déjà.

Voilà la réponse à nos problèmes. Il faudrait, d'une certaine façon, désamorcer les causes des problèmes familiaux ou conjugaux.

Mme McLaughlin: Madame la Présidente, j'espère que le député, à qui je donnerai le bénéfice du doute, ne veut pas dire que les femmes provoquent par leur comportement la violence dont elles sont victimes.

Je préfère croire que le député voulait proposer des façons d'aider les familles qui ont des problèmes conjugaux ou familiaux. Je pourrais en suggérer plusieurs.

Tout d'abord, nous pourrions adopter des mesures économiques afin de réduire le chômage. Il ne fait aucun doute, et toutes les études le prouvent, que la pauvreté et le chômage contribuent à la violence dans la société.

Deuxièmement, il est essentiel que les gouvernements de tous les niveaux assurent la sécurité des citoyens, en appliquant les mesures déjà prévues dans le système de justice criminelle afin de sévir contre ceux qui commettent des actes de violence; nous devons aussi faire en sorte que les gens aient accès à un groupe de services de base.

Il suffit de voir, par exemple, la façon dont certains services de police au Canada utilisent leurs unités de prévention de la violence familiale. Je pense notamment au service de police de London, en Ontario, qui s'est doté d'un programme très progressiste. Lorsque le personnel est appelé à se rendre dans un foyer, on s'assure qu'un travailleur social soit présent et qu'il puisse y avoir un service de consultation suivi. On a donc recours non pas à une seule mesure mais à plusieurs.


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Enfin, l'attitude de la société à l'égard des femmes est d'une importance capitale. Le fait de dénigrer les femmes, dans quelque domaine que ce soit, favorise l'acceptation de la violence. Il incombe à tous les députés de toujours considérer comme une priorité le respect et la dignité des hommes et des femmes. Je crois qu'il nous incombe tout particulièrement, en tant que députés, de nous assurer que les femmes bénéficient de chances égales dans tous les secteurs d'activité.

(1310)

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Madame la Présidente, nous célébrons aujourd'hui le triste anniversaire du massacre de l'École polytechnique où 14 jeunes femmes ont trouvé la mort. Malgré l'horreur et le dégoût que ce geste soulève, cet acte n'est qu'un pâle reflet de la violence subie par les femmes. C'est non seulement aujourd'hui que nous devrions dénoncer cette violence, mais bien tous les jours de l'année.

Le geste de Marc Lépine nous fait tous réfléchir, mais celui-ci ne représente que la pointe de l'iceberg. La violence faite aux femmes est rarement aussi spectaculaire. Heureusement. Cette violence prend plusieurs formes, toutes plus pernicieuses les unes que les autres. Les femmes en sont victimes 365 jours par année. La violence est insidieuse et elle touche toutes les sphères de la vie d'une femme.

Le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme définissait ainsi la violence faite aux femmes: «La violence faite aux femmes est un problème complexe qui comprend la violence physique, sexuelle, psychologique et économique contre les femmes et qui est tributaire des structures, des valeurs et des mesures sociales, économiques et politiques qui musellent les femmes dans notre société, favorisent la discrimination fondée sur le sexe et maintiennent l'inégalité des femmes.»

La violence est l'arme de choix pour celui qui veut assujettir et dominer. Les hommes l'ont appris depuis longtemps et l'utilisent. Encore aujourd'hui, nous, les femmes, sommes tenues à l'écart et sous le joug d'une attitude machiste et archaïque.

Notre Église catholique nous refuse la prêtrise mais nous suggère le bénévolat. C'est une autre façon de nous dire que nous, les femmes, ne sommes pas suffisamment éduquées ou cultivées ou même assez dévotes pour accéder aux échelons élevés d'une Église qui se veut un reflet de la société. Du diacre au Saint-Père, ils ne sont que des hommes trop souvent suffisants et imbus d'eux-mêmes. Leur pouvoir sur les fidèles en général et sur les femmes en particulier est un bel exemple de la philosophie masculine axée sur l'emprise et la domination. Croyez-vous que l'Église catholique serait plus mal en point qu'elle ne l'est si le pape était une femme?

Ce n'est pas, malheureusement, la seule institution qui méprise la femme de la sorte. Regardons-nous, ici, dans cette Chambre. Au Canada, les femmes représentent 52 p. 100 de la population. Cependant, quand on dénombre les femmes parlementaires, on aboutit au résultat suivant, pour la Chambre des communes évidemment: 53 femmes sur 295 députés. Notre auguste Parlement se conjugue au masculin. À peine un sixième des députés de cette Chambre représente plus de la moitié de la population canadienne.

Il ne faut donc pas s'étonner que le gouvernement mette autant de temps à proposer des projets de loi visant la sécurité et le mieux-être des femmes. Un parlement d'hommes propose et vote des projets d'hommes avec le résultat qu'aujourd'hui encore, on attend que M. le ministre de la Justice dépose un vrai projet de loi sur les armes à feu. Le temps ne presse pas car pour chaque homme qui meurt suite à une dispute conjugale, c'est six femmes qui sont assassinées. Si les chiffres étaient inversés, on aurait sûrement accéléré le processus.

Si le ministre de la Justice avait été une femme, ne croyez-vous pas que nous aurions un projet de loi modifiant le Code criminel pour y prévoir une interdiction expresse de la mutilations des organes génitaux féminins? Non, les victimes sont des femmes et le ministre de la Justice n'a même pas l'intention de modifier le Code criminel en conséquence. Non seulement notre ministre de la Justice a remis aux calendes grecques l'enregistrement universel des armes à feu, mais il refuse de déposer un projet de loi qui protégerait les innocentes victimes d'une pratique barbare et cruelle.

Le ministre de la Justice a promis qu'il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour mettre fin à ces activités criminelles. De deux choses l'une, ou bien le ministre de la Justice n'a le pouvoir que de promettre, ou bien il n'est pas dans ses priorités de protéger les jeunes filles avant qu'elles ne soient mutilées.

(1315)

La mutilation des organes génitaux des femmes est une forme de violence perpétrée contre les jeunes filles et elle constitue une violation de leur droit fondamental à l'intégrité physique. Faut-il attendre qu'une pratique aussi cruelle qui mutilerait les organes génitaux masculins fasse surface pour qu'enfin on se décide à agir? Si, dans cette Chambre, 52 p. 100 des députés étaient des femmes, j'ose croire que ces problèmes auraient déjà des solutions et une législation aurait déjà été déposée, adoptée et mise en vigueur.

La semaine dernière, le ministre de la Justice a raté une belle occasion de démontrer à tous qu'il se préoccupait de la sécurité des conjointes. Il semble que contrôler les armes à feu ne serait pas la solution, car au lieu de déposer un projet de loi, tel que promis, il nous a fait une déclaration ministérielle truffée de voeux pieux. Pendant ce temps, tous les six jours en moyenne, une femme succombe sous la décharge d'une arme à feu.

J'entends déjà les mauvaises langues nous dire que l'absence des femmes à la Chambre est due à notre mauvaise volonté, que c'est par choix que nous refusons d'être candidates aux élections. Rien n'est plus faux. Certains mâles chauvins et obtus ne comprennent pas le défi que cela représente pour une femme. Ces gardiens du savoir masculin ne peuvent s'imaginer que l'on puisse détester se battre dans les assemblées de mise en candidature, que la femme est fondamentalement différente quant à sa façon de vivre, son éducation, sa formation et son savoir-faire.

À ces rustres, je réponds que j'espère encore qu'un jour, cette Chambre soit vraiment représentative de la population et que les femmes y occupent 52 p. 100 des sièges, c'est-à-dire la place qui leur revient.


8686

[Traduction]

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, alors que nous prenons aujourd'hui la parole en cette enceinte, nos premières pensées sont pour les familles qui, cinq ans plus tard, vivent encore dans la douleur de la perte de leurs enfants, plus précisément de leurs filles.

Ce qui a choqué le pays tout entier le 6 décembre, voici déjà cinq ans, est non seulement le fait que 14 jeunes femmes à l'aube de leur vie venaient d'être tuées, mais surtout qu'elles avaient été spécialement choisies comme victimes ce jour-là, et que les hommes avaient été écartés de façon à ce que seules des femmes soient abattues. Étant moi-même mère de deux filles dans ces âges, j'imagine facilement la douleur que ces familles ressentent encore aujourd'hui.

C'est pourquoi je veux parler maintenant de la façon dont nous, les femmes, vivons en société et pourquoi il est si important que tout le monde, les hommes surtout, comprennent notre situation. Je veux parler du sentiment d'impuissance qui nous habite dès le moment où nous prenons conscience de notre existence en tant qu'être humain. Il est vital que tout le monde comprenne que les femmes vivent leur vie différemment, que cette différence est d'une importance vitale pour la société, et qu'il est d'une importance vitale pour nous, les femmes, que les décisions ne soient pas prises seulement en vertu de qui est le plus fort et le plus puissant.

Je sais très bien qu'il est extrêmement difficile pour bien des hommes de comprendre ce que cela signifie pour les femmes. La plupart des hommes ont grandi sachant depuis toujours qu'ils seraient grands et forts, et qu'ils seraient importants dans leur vie professionnelle. Ce n'est pas comme ça que grandissent les petites filles.

La plupart d'entre elles grandissent en sachant, dès l'âge de deux ans, qu'elles seront toujours plus petites, plus faibles, jamais aussi importantes, qu'elles n'occuperont jamais la même place dans la société, qu'elles n'auront jamais autant d'argent, et bien souvent qu'elles n'auront jamais d'argent à elles, et que ce sera toujours à elles de ramasser après tout le monde. Qu'elles seraient toujours de gentilles petites filles pour ne pas mettre papa en colère ou pour ne pas que maman se mette en colère parce que papa n'aime pas qu'elles se conduisent mal.

(1320)

C'est pourquoi, alors que nous devenons femmes, chaque minute de chaque jour de notre vie est réglée du fait que nous sommes des femmes. Contrairement aux hommes, nous devons décider où nous pouvons aller sans danger, à quelle heure, si nous pouvons y aller seules ou si nous devons trouver quelqu'un pour nous accompagner.

Je doute qu'il y ait à la Chambre un seul homme qui, dans le parc de stationnement, s'approche de sa voiture à la nuit tombée avec la même crainte qu'une femme. Il importe que nous comprenions pourquoi il est tellement essentiel pour les femmes d'avoir un type de société différent. C'est pourquoi nous devons mettre en place des mesures qui permettent aux femmes d'être traitées de façon égale.

Quand j'ai appris à conduire à ma fille de 17 ans, je lui ai appris à toujours verrouiller les portières quand elle était seule dans la voiture, même en plein jour, et de ne jamais monter dans une voiture à la nuit tombée sans s'être assurée que personne n'était dissimulé derrière la banquette avant. En fait, je lui ai enseigné la crainte, la même crainte que, comme toute femme, j'éprouve chaque jour. Quand j'ai appris à conduire à mon fils, un an plus tard, il ne m'est jamais venu à l'idée de lui enseigner les mêmes leçons parce qu'il n'en avait pas besoin.

Ce sentiment d'impuissance, de toujours avoir un petit peu peur, est en partie ce qui mène aux actes de violence du type de ceux que nous connaissons. C'est ce qui mène aux différentes formes d'exploitation des femmes dans le monde. C'est ce qui mène à l'exploitation des femmes et aux abus de pouvoir à leur égard, un phénomène universel. C'est pourquoi les femmes ont tendance à ne pas signaler aussi facilement, aussi spontanément les crimes dont elles sont victimes. Elles savent que le faire les place immédiatement dans une situation où encore une fois elles seront impuissantes. D'autres ont le contrôle de la situation et cela peut faire encore plus mal.

La motion d'aujourd'hui est très importante. Elle montre que cette question nous tient à coeur en tant que parlementaires et que leaders de nos communautés et de notre pays. Elle renforce notre espoir, notre volonté de changement.

Je me souviens d'un rapport, il y a une ou deux années, qui expliquait pourquoi il n'y avait pas plus de femmes en génie. Il se trouve que suis mariée à un ingénieur, que j'ai un fils ingénieur et un gendre ingénieur également. Je suis donc bien placée pour savoir que les ingénieurs peuvent être charmants.

Je sais aussi pas mal de choses sur les facultés de génie des universités. Il y a là une culture qui est insultante pour les femmes. C'est une culture tellement macho qu'aucune femme ne peut s'y trouver à l'aise. Il y a des choses comme le «poteau graisseux», heureusement disparu aujourd'hui, de l'université Queen's. Dites-moi quelle femme voudrait devenir ingénieure lorsque le processus d'initiation consiste à s'exposer à la cochonnerie et j'entends le terme dans son sens le plus sale, croyez-moi.

Pourquoi n'y a-t-il pas plus de femmes en politique? Nous n'aurons pas des lois qui permettent aux femmes d'obtenir plus facilement justice tant que nous n'aurons pas plus de femmes pour rédiger les lois. Ce n'est pas que je rédigerais de meilleures lois que mes collègues masculins, ici présents, c'est que je les verrais sous un autre angle, dans une perspective qui, je pense, est nécessaire pour que le travail soit complet lorsque nous adoptons des lois et que nous affectons des ressources.

Bertha Wilson l'exprimait à merveille lorsqu'elle parlait de la différence d'approche des hommes et des femmes en matière de droit, et lorsqu'elle expliquait que le système judiciaire était anathème pour les femmes. L'idée de gagner ou de perdre, qui semble fondamentale dans notre système judiciaire, semble aussi être un principe essentiellement masculin. Un principe défendu par ceux qui sont plus grands et plus forts et ont toujours de bonnes chances de gagner. Ce n'est pas un principe avec lequel les femmes se sentent à l'aise.

Je n'hésite pas aujourd'hui à vous exposer mes états d'âme, car je pense que cette motion porte avant tout sur des sentiments. Il s'agit avant tout de faire savoir que les femmes qui ont été agressées peuvent s'adresser à la justice qui est censée être là pour nous protéger tous. Il s'agit avant tout d'avoir des lieux de travail où les femmes ne sont pas exposées au harcèlement sexuel.


8687

(1325)

Pour bien faire comprendre mon argument, je voudrais citer un cas de harcèlement dont j'ai eu connaissance dernièrement et dont a été victime, au cours d'un emploi d'été, une étudiante de 21 ans. C'est une jeune femme dont la plupart d'entre nous serions fiers d'être parents. Je n'hésite pas à le dire, parce que je l'ai rencontrée. Voici ce qui s'est passé au cours de ses quatre premiers jours dans un bureau de la capitale:

Il m'a harcelé sexuellement en se penchant au-dessus de moi et en me touchant d'une manière inconvenante. Il me touchait souvent les épaules et, une fois, il a même promené ses doigts sur mon cou.
Il s'agit d'un homme marié, d'âge mur.

Il m'appelait souvent «ma chérie» ou «mon chou». Un jour, il a annoncé aux gens dans le bureau que sa femme était en voyage pour le week-end et a proposé que je vienne le garder chez lui. Une autre fois, sous prétexte de m'aider à porter un dossier que j'avais sur les genoux pour y mettre de l'ordre, il a saisi l'occasion pour passer la main sur mes cuisses. Il m'a ensuite demandé si je comprenais ce qu'il venait de faire, j'ai répondu «oui» et il a ajouté «C'est dommage, parce que c'était agréable de toucher tes jambes.»
Une fois, il a déclaré: «Le problème avec les enfants de nos jours, c'est que les mères travaillent et ne s'occupent pas d'eux comme elles le devraient.»
Il a raconté la blague suivante: «Quelle est la différence entre un avocat et une femme? Pour gagner sa cause, un avocat met sa robe tandis que la femme enlève la sienne.»
Il m'acculait parfois dans un coin et m'intimidait par sa forte taille. Il venait par derrière, faisait pivoter ma chaise, posait une main sur le bureau et l'autre sur ma chaise, de manière à m'emprisonner dans ses bras, et il me demandait alors ce qui n'allait pas.
Je l'ai vu donner une tape au derrière d'une compagne de travail. Je l'ai entendu parler de la chance qu'avaient certains de ses collègues.
C'est en travaillant dans un bureau du gouvernement que cette jeune femme de 21 ans a enduré tout cela. On lui a fait comprendre qu'elle ne devait pas déposer une plainte officielle. Un an plus tard, elle en souffre encore mentalement. On ne peut pas lui dire quelles mesures ont été prises contre cet homme qui l'a harcelée, car ce sont des renseignements personnels qu'il faut protéger. Pourtant, nous savons que le fait pour la victime d'apprendre quelles mesures ont été prises peut l'aider beaucoup à s'en remettre.

Je tiens à dire quelques mots au sujet d'un projet de loi à l'étude actuellement à la Chambre. Il s'agit du projet de loi C-41 qui a fait l'objet de nombreuses discussions. À mon avis, il a suscité bien des discussions, mais pas sur les bonnes questions. Le projet de loi C-41 vise à traiter plus sévèrement les infractions motivées par la haine.

Ce projet de loi prévoit que toute personne ayant commis un crime violent contre une femme simplement pour des motifs de haine sera punie plus sévèrement que si cette personne avait commis la même infraction, mais pour d'autres motifs, comme le vol, etc. Cela me semble une bonne mesure législative, puisqu'on ne peut pas dire qu'il est bien d'haïr les gens parce que ce sont des femmes, des Noirs, des sikhs ou des homosexuels. Le projet de loi C-41 protège les enfants en imposant des peines plus sévères aux personnes qui sont en situation d'autorité et qui maltraitent ou exploitent sexuellement les enfants.

Je veux appuyer un projet de loi qui vise cet objectif et c'est ce que je ferai. Que ceux qui refusent d'appuyer un projet de loi visant à protéger notre société contre la haine et la violence m'en donnent les raisons.

Certains pourraient prétendre que la violence est un problème qui touche l'ensemble de la société et c'est vrai. Toutefois, ce problème touche les femmes d'une façon particulière, puisque celles-ci sont devenues la cible d'actes de violence. Quelle femme, ici, à la Chambre ou de l'extérieur de la Chambre, n'a pas vécu au cours de sa vie, même dans sa tendre enfance, un incident où un homme au coin d'une rue ou dans l'autobus s'est pressé contre elle ou lui a tenu des propos grossiers à caractère sexuel.

(1330)

Je ne crois pas que les hommes qui sont ici présents comprennent- et je leur demande d'essayer de comprendre-la profonde angoisse que suscite un incident de ce genre. Je ne crois pas qu'ils comprennent ce que je ressens lorsqu'un député traite ici une députée de salope. Je ne crois pas qu'ils comprennent à quel point des députés d'en face ont minimisé par leurs observations, la semaine dernière, nos préoccupations à l'égard de la violence. Je ne crois pas qu'ils comprennent-et je leur demande de bien vouloir faire de leur mieux pour comprendre-que ce n'est là qu'une autre façon de me dire et de dire aux Canadiennes en général que nous ne comptons pas autant, que nous ne valons pas autant qu'eux.

Il faut aussi parler de la situation économique des femmes par rapport à celle des hommes. Il y a là un manque flagrant d'équité. Tant qu'on ne donnera pas aux femmes les mêmes chances de réussite économique grâce à leurs propres compétences, talents et énergies, elles ne seront pas les égales des hommes aux plans politique et social ni devant notre système judiciaire.

Je rejette catégoriquement l'argumentation qu'a avancée ce matin la députée de Beaver River lorsqu'elle a dit que la violence faite aux femmes n'est pas différente de la violence faite aux hommes. Elle est différente. Tant qu'on refusera de le reconnaître et de reconnaître que des femmes sont tuées par un homme qui leur est proche, par leur mari, leur amant, leur partenaire, à cause de rapports de pouvoir, on ne comprendra pas le problème. Et si l'on ne comprend pas le problème, on ne peut pas le résoudre.

On a raison de dire que ces questions touchent tous les membres de notre société, comme l'a fait ce matin la députée de Beaver River, mais c'est fermer les yeux sur les problèmes graves que vise à régler la motion à l'étude aujourd'hui, à savoir la violence dirigée contre des femmes tout simplement parce qu'elles sont des femmes.


8688

Il est vrai qu'il y a des grands-parents et des personnes âgées qui sont victimes d'agressions verbales et de mauvais traitements physiques. Il y a aussi des enfants battus. Cela reflète une valeur répandue au sein de notre société et qui veut que le pouvoir et la force soient ce qui prime et que les puissants et que les forts aient le droit de s'en prendre aux autres. Tant que nous n'aurons pas reconnu que les rapports de force expliquent pourquoi tant de femmes meurent des suites d'actes de violence, nous ne pourrons pas régler le problème. Nous n'aurons pas une société meilleure.

Je remercie la Chambre pour l'attention qu'elle porte au débat d'aujourd'hui. Je remercie tous ceux et toutes celles qui ont donné leur consentement unanime pour que nous discutions de la motion. Étant donné le triste anniversaire que nous soulignons aujourd'hui, je regrette que, pour obtenir ce consentement unanime, il ait fallu édulcorer la motion pour qu'elle porte sur la violence en général au sein de notre société plutôt que seulement sur la violence contre les femmes.

La question est importante. Notre gouvernement s'en occupe. Comme le ministre de la Justice l'a déclaré récemment: «Nous n'avons pas fait assez, mais nous ferons plus.» Je crois que les débats comme ceux d'aujourd'hui renforcent notre courage et notre détermination à faire davantage pour laisser à nos enfants et à nos petits-enfants un monde et un pays où tous sont égaux. Je dis cela au nom des petites-filles et des petits-fils que j'espère avoir un jour.

(1335)

Je crois que les hommes aussi bénéficient d'une société où le pouvoir ne prime pas tout, où l'égalité de tous les êtres humains et le respect d'autrui, qu'il s'agisse des hommes ou des femmes, sont appréciés comme dans aucune autre société. Je voudrais voir un jour notre nation en arriver là.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le discours de la députée qui vient de parler. Je suis père moi-même de trois filles, trois jeunes, forcément, mais trois filles qui vont devenir adultes un jour. Je réalise que le Québec, dans le domaine de l'égalité des conjoints ou des citoyens, est allé beaucoup plus loin que le gouvernement fédéral.

Par exemple, en 1990, le Québec a adopté une loi pour favoriser l'égalité économique des époux. Cette loi permet, lors d'un divorce, d'une séparation ou d'un décès, que les biens accumulés par un couple soient partagés à peu près équitablement entre les deux composantes de ce couple, c'est-à-dire l'homme et la femme. Le Canada est loin derrière le gouvernement du Québec et de plusieurs autres provinces, en ce qui a trait à la reconnaissance de ce fameux rapport d'égalité entre les conjoints.

Laissez-moi quand même être un peu sceptique. La députée qui vient de prononcer un discours, dans un élan vraiment justifié et justifiable, vient nous parler des femmes qui sont en danger dans la rue, qui sont en danger partout, qui subissent des injustices.

J'ai de la difficulté à concilier cela avec le fait qu'elle-même et ses collègues se soient levés à la Chambre des communes, récemment, pour applaudir à tout rompre lorsque le ministre du Développement des ressources humaines a déposé son fameux projet de loi modifiant l'assurance-chômage. Dans l'énoncé de politique, on dit que maintenant, pour être admissible à l'assurance-chômage au Canada, on tiendra compte du revenu du couple. Ce n'est ni moi ni le Bloc québécois qui en décide, mais malheureusement les femmes sont les premières visées par cette mesure. Si le mari gagne, par exemple, 55 000 $ par année et que sa femme a un petit revenu de 22 000 $, 25 000 $, 28 000 $, qu'elle se retrouve au chômage, on va lui couper son assurance-chômage parce que son mari gagne beaucoup.

La députée d'en face s'est levée pour applaudir cette mesure, lorsqu'elle nous a été présentée par le ministre du Développement des ressources humaines. Je trouve que c'est facile de jouer les personnes offensées, de se lever et de dire que la main droite ignore ce que la gauche a fait ou vice versa. Il faudrait être logique et se lever de temps en temps, pas seulement lorsqu'il s'agit de débats sur la condition féminine, ou sur la violence, ou ces choses-là, et dire au ministre qu'il se met un doigt dans l'oeil avec sa procédure.

On dirait qu'il y a deux sons de cloche, dépendant des circonstances. Si on a un débat sur la condition féminine, sur la violence, ou sur ce qui pourrait, de près ou de loin, toucher aux femmes, on vient ici s'insurger contre les injustices, et ça, je l'admets. Mais dans la vie courante de l'administration de tous les jours, lorsqu'on sait qu'au point de vue fédéral, les femmes ont 30 ans de retard sur les législations provinciales qui les gouvernent, il me semble qu'il y a plus que des énoncés comme celui que madame vient de faire pour essayer de rétablir la situation.

Cela préoccupe les hommes et les femmes, les pères comme moi aussi. J'ai trois jeunes filles qui, un jour, seront des femmes qui vont vivre dans cette société et je ne suis pas tellement fier de l'héritage qu'on va leur laisser. Il y a une annonce à la télévision qui dit: «Ha! Moi, la violence, ça ne me touche pas. Je ne sors pas le soir, je reste chez nous. Je ne réponds pas à des étrangers, je reste chez nous. Ha! Non, la violence, moi, ça ne me touche pas.»

C'est un peu ce qu'on vit au Canada, ce que des femmes vivent. Mon ami, le député de Frontenac, disait tout à l'heure que sa jeune fille, qui circulait dans les rues de Sherbrooke, dans un quartier plus ou moins bien famé, s'était fait dire par les policiers: «Qu'est-ce que vous faites là? Vous circulez le soir dans un quartier où vous ne devriez pas vous trouver.»

(1340)

Cela ne se vit pas juste à Sherbrooke. Cela se vit à Halifax, à Edmonton, à Calgary, un peu partout. Que fait-on à ce sujet? Qu'est-ce que les libéraux ont entrepris de faire? Le contrôle des armes à feu. Belle politique, appliquable en l'an 2003! Il a fallu 20 minutes à Marc Lépine pour faire sa fusillade à l'École polytechnique il y a cinq ans. Combien s'en fera-t-il de fusillades comme celle-là d'ici l'an 2003? Avec la rapidité des 20 minutes, je vous laisse deviner.


8689

Je pense que le gouvernement doit joindre le geste à la parole, se mettre un peu de raideur dans l'épine dorsale et essayer de faire quelque chose pour que les femmes puissent dire, après la journée d'aujourd'hui: Je pense qu'on a fait quelque chose aux Communes aujourd'hui et on sent un désir politique de rendre justice aux femmes. Mais non. Tout le monde parle ici, tout le monde fait de grands énoncés, mais quand vient le temps, au jour le jour, d'appuyer ou de rejeter des motions qui sont à l'encontre de l'intérêt des femmes, c'est la ligne du parti qui prévaut sur tout. Cela prévaut sur les beaux discours que madame vient de nous tenir.

Permettez-moi d'être en désaccord, et en désaccord profond, parce que je laisse trois jeunes filles derrière moi. Je n'ai pas envie qu'elles soient, dans dix, douze, quinze ou vingt ans d'ici, encore moins bien traitées que ne l'est leur mère actuellement.

Mme Catterall: Monsieur le Président, franchement aujourd'hui, je n'ai pas le goût de débattre qui fait le plus pour les femmes, les provinces ou le fédéral. Je pense qu'il est clair que tout parti doit faire beaucoup plus, en particulier dans le bien-être de la famille. Il est clair, partout au Canada, que le bien-être de la famille appartient à la femme et à l'homme dans un couple.

Concernant le bien-être social, il est vrai que c'est un domaine où il y a un besoin de beaucoup d'amélioration. Je veux indiquer que par exemple au Québec, il faut que la famille prenne la responsabilité avant que le bien-être puisse être accordé à quelqu'un. Ce n'est pas le cas partout au Canada.

Je pense vraiment, j'ai admis, et mon ministre a admis, que nous ne faisons pas assez pour améliorer la condition des femmes et en particulier la condition qui cause la violence faite aux femmes. Il faut faire plus, à tous les niveaux, dans tous les pays du monde. Je suis convaincue qu'avec plus de femmes au Parlement, des deux côtés de la Chambre, il sera plus facile de faire cela rapidement.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le discours de la députée. Je voudrais l'assurer que beaucoup d'hommes ont réfléchi, réfléchissent et apprennent au sujet de ce qui se passe dans la vie quotidiennement.

Comme mon prédécesseur, j'ai aussi des enfants, deux filles et un garçon et je veux qu'eux aussi aient des chances égales, les filles et les garçons, dans la vie qui est devant eux. Pour cela, il me semble important que le gouvernement fasse des signaux concrets. Vous dites que vous n'avez pas envie aujourd'hui de faire un débat. Je comprends que la question de la violence faite aux femmes soit une question universelle, mais en même temps, nous sommes là pour nous assurer qu'on prenne les moyens adéquats.

Sans accuser le gouvernement, on peut au moins s'interroger et se demander quels seraient les signaux que le gouvernement pourrait donner demain matin. Est-ce qu'il ne peut pas, dans la réforme des programmes sociaux, entre autres, indiquer les façons de lutter contre la pauvreté, autrement qu'en ciblant les parents pauvres, de viser seulement les enfants pauvres, ce qui ne permet pas à la classe moyenne de se maintenir? Il y a des soutiens à la famille sous toutes sortes de formes, mais sont-ils adéquats?

(1345)

Est-ce que le climat de violence qu'on retrouve dans notre société ne vient pas du fait qu'on ne s'est pas assuré, dans notre société, depuis 20 à 25 ans, de donner plus une chance égale à tout le monde? Cela s'applique aux femmes, aux handicapés et à plusieurs catégories. Est-ce que ça ne devrait pas être le fer de lance de l'action du gouvernement pour que, en l'an 2000, on ait atteint l'objectif, entre autres, de faire disparaître la pauvreté chez les enfants? Par ce moyen, peut-être qu'on aura aussi fait diminuer de beaucoup la violence faite aux femmes.

Mme Catterall: Monsieur le Président, notre but est vraiment d'améliorer la condition économique des femmes et des enfants et d'éliminer la pauvreté des enfants en particulier. Mais pour éliminer la pauvreté des enfants, il faut éliminer la pauvreté de leur mère, en général. C'est une des choses que nous essayons d'accomplir avec la réforme des programmes sociaux, soit d'accorder plus d'importance à la formation, plus d'appui aux femmes qui ont des enfants et aux familles où il y a de jeunes enfants.

Ce sont des choses que moi-même personnellement ainsi que beaucoup de mes collègues ont dites au ministre du Développement des ressources humaines que les femmes et les enfants devraient être. . .

Le Président: Je regrette d'interrompre la député mais son temps de parole est écoulé.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, avant de vous faire part de ma réflexion, je voudrais exprimer un regret. Je voudrais exprimer le regret suivant devant cette Chambre, à savoir que l'opposition officielle n'ait eu vent qu'hier de la présentation de la motion à l'étude présentement. J'espère que ce retard n'est pas le symbole clair du peu d'importance que notre société apporte à la violence faite aux femmes.

C'est avec tristesse, désarroi et douleur que je prends la parole dans le cadre de ce débat d'urgence commémorant le 6 décembre 1989.

Au Québec et au Canada tout entier, le 6 décembre 1989 a stigmatisé la violence faite aux femmes. Plus que tout autre, cet événement a fait se questionner toute notre société. Les spécialistes de toute discipline ont disséqué les tenants et aboutissants d'une pareille horreur. Mais les réponses ne sont ni simples ni claires. Notre monde est en mal d'être, et c'est souvent à l'endroit des femmes et des enfants que la violence, symptôme de ce mal d'être, s'exerce.

Cette violence est le plus souvent insidieuse, sournoise, imperceptible de l'extérieur, mais à d'autres moments, insoutenable, horrifiante parce que visible et bien réelle.

Alors que les données statistiques sont impuissantes à cerner rigoureusement la violence psychologique, cette forme de communication entre le dominant et le dominé qui mine l'âme et qui tue l'estime de soi, les données actuelles concernant la violence physique sont accablantes, d'autant qu'elles ne représentent que la pointe de l'iceberg.

En 1993, hier presque, Statistique Canada colligeait les informations suivantes: une femme sur deux a subi au moins un acte de violence depuis l'âge de 16 ans; une femme sur dix ayant vécu avec un conjoint a craint, à un moment ou à un autre, pour sa vie.

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D'autres données, publiées celles-là par le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme, en 1991, nous décrivent un portrait sans pitié et sans ombre de la situation faite aux femmes les plus démunies.

(1350)

En 1989, 8 femmes sur 10 habitant les réserves de l'Ontario ont été victimes de violence; en 1989, 8 femmes sur 10, détenues dans les prisons fédérales, ont été violentées avant leur incarcération; en 1989 toujours, 4 femmes handicapées sur 10 ont été violentées ou violées. Alors que la faiblesse devrait spontanément susciter protection et secours, nous nous retrouvons devant un comportement paradoxal. Plus on est faible, plus grands sont les risques de subir la violence. Comment expliquer cette réalité dérangeante?

Beth Allen, dans un document intitulé La violence conjugale et ses conséquences sur les enfants confirmait la théorie selon laquelle, et je cite: «Les enfants issus de foyers où régnait la violence risquent davantage de commettre ou de subir des actes de violence.» Comme si le fait d'être témoin de comportements violents ait comme conséquence d'intégrer la violence dans le schème comportemental de l'enfant témoin de cette violence.

Si la violence s'apprend au sein de la famille, pour certains, on ne peut dénier le rôle des médias de communication dans la dilution de cette violence. Même la chose la plus horrible finit par ne plus avoir de sens lorsque l'horreur est quotidienne. L'horreur devient indifférence. Le législateur a d'ailleurs une responsabilité importante à ce chapitre. Aujourd'hui, à la veille du troisième millénaire, est-ce que les victimes de violence parlent davantage des agressions qu'elles subissent?

On évalue actuellement qu'une femme sur quatre signale à la police les actes violents dont elle est victime. D'autres données sont beaucoup plus conservatrices puisque seulement une femme sur dix signalerait. Peut-être sont-elles plus près de la vérité? La crainte et le silence sont des soeurs jumelles. Est-ce que notre société est prête à donner aux femmes violentées le droit à la parole? La question est tout entière posée et je crains bien de devoir y répondre non.

En 1991, 270 femmes étaient tuées au Canada, ce qui représente une hausse de 33 p. 100 par rapport à 1988. Les armes à feu ont été utilisées a l'endroit de 85 de ces femmes. Trente pour cent des Canadiennes et des Québécoises tuées en 1991 l'ont été à l'aide d'armes à feu, et ces armes étaient le plus souvent utilisées par des gens qu'elles connaissaient. Alors que les femmes du Québec et les femmes du Canada attendaient avec confiance le dépôt d'un projet de loi juste et raisonnable sur le contrôle des armes à feu, le 30 novembre dernier, le ministre de la Justice, dans une déclaration ministérielle, nous annonçait que les armes à feu seraient enregistrées dès 1998 et que cet enregistrement allait être complété autour de 2003.

Monsieur le Président, je vous pose la question: Est-ce que notre société a le droit d'attendre? Est-ce que les femmes ont le temps d'attendre? Je regrette que ce gouvernement ne soit pas prêt à donner aux femmes violentées le droit à la parole.

Je vais maintenant vous parler d'une autre forme de violence. Je vais le faire en anglais. Déjà, moi, qui lis très lentement en français, là ça va être plus que lent.

[Traduction]

En général, lorsque nous parlons de violence contre les femmes, nous pensons aux dommages physiques et psychologiques qu'une personne peut causer à une autre. Mais que dire des façons plus insidieuses de causer du tort aux femmes? Les blessures infligées par la société et endurées en silence peuvent être aussi douloureuses que les blessures physiques.

(1355)

Permettez-moi de donner un exemple. Il y a une nouvelle industrie médicale au Canada qui se développe. Un an après la publication du rapport final de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction, le gouvernement fédéral n'a pas présenté une seule mesure pour réglementer la mise au point ou l'utilisation de ces nouvelles techniques. En conséquence, nous voyons des femmes qui vendent leurs ovules à la IVF Canada Clinic de Toronto pour payer des traitements de fertilité dont l'efficacité n'a pas été prouvée. Nous voyons des femmes qui ont tellement besoin d'argent qu'elles louent leur utérus en devenant mères porteuses.

C'est la pire forme d'exploitation, et je regrette sincèrement de dire que le gouvernement a fermé les yeux sur cela. Tout comme la violence faite aux femmes est un abus de pouvoir physique ou psychologique, l'exploitation des capacités reproductrices des femmes est un abus de pouvoir économique et politique. En n'agissant pas rapidement pour réglementer cette industrie et pour freiner le développement des nouvelles techniques de reproduction les plus exploitrices et aberrantes, le gouvernement fédéral se trouve à fermer les yeux sur une forme de violence à l'égard des femmes. Cette inaction ne peut plus être tolérée par les Québécoises et les Canadiennes.

Je continuerai plus tard.

[Français]

Le Président: Je regrette de devoir interrompre la députée, mais elle pourra reprendre la parole vers 15 heures.

Comme il est 14 heures, conformément à l'article 30(5) du Règlement, la Chambre procédera maintenant aux déclarations de députés conformément à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


8690

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, le 12 décembre 1948, l'Assemblée des Nations Unies a adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme. De-


8691

puis ce temps, le monde a été témoin d'importants changements dans l'ordre mondial, mais la souffrance est loin d'être disparue.

Le Canada, qui regroupe de nombreuses cultures, a toujours été respecté pour son engagement à l'égard des droits de la personne. Nous devons continuer de nous servir de notre influence pour encourager les autres gouvernements partout dans le monde à rehausser leurs normes en matière de droits de la personne.

Je suis heureux que notre gouvernement s'occupe de la question des droits de la personne chez nous en mettant sur pied des programmes visant à améliorer la situation des gens qui sont victimes de discrimination à cause de leur race, de leur orientation sexuelle ou encore d'un handicap physique ou mental. L'augmentation des crimes haineux et de la propagande haineuse est une tendance alarmante.

En célébrant cette semaine la Journée des droits de la personne, nous devons continuer de relever les nombreux défis qui se présentent dans ce domaine, tant sur la scène nationale que sur la scène internationale.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, au-delà des sondages, les groupes de femmes se sont clairement prononcés hier sur la réforme des programmes sociaux du gouvernement fédéral. Qualifiant les propositions du ministre du Développement des ressources humaines de discriminatoires et de rétrogrades, le Comité canadien d'action sur le statut de la femme a fermement rejeté les dispositions qui visent à réduire les prestations d'assurance-chômage des femmes.

Ces dispositions feraient en sorte que les femmes auraient accès ou non au régime d'assurance-chômage selon les revenus de leur conjoint, tout en continuant de payer des cotisations, bien sûr. Ces mesures attaquent directement l'autonomie financière des femmes, durement acquise au cours des 30 dernières années.

En négligeant totalement les questions d'équité soulevées par sa réforme, le ministre du Développement des ressources humaines entreprend simplement une série de coupures aveugles sur le dos des femmes, entre autres, dictées par la lutte au déficit du gouvernement fédéral.

* * *

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, ce matin, notre chef, le député de Calgary-Sud-Ouest, a annoncé que notre caucus s'opposait, aussi bien sur le plan juridique que sur le plan des droits de la personne, à l'ajout de l'orientation sexuelle aux motifs de distinction illicite énumérés dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Il a aussi clairement précisé que le Parti réformiste refusait de reconnaître les conjoints de même sexe et d'étendre aux couples homosexuels l'application des avantages prévus pour les conjoints, conformément à la résolution adoptée au congrès que notre parti a tenu en octobre 1994.

Des Canadiens de tout le pays s'inquiètent des intentions du gouvernement qui veut tenir compte de l'orientation sexuelle dans le Code criminel et dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

La politique que préconisent actuellement les libéraux ne figure pas dans leur livre rouge, et il serait présomptueux de leur part de prétendre qu'ils ont le mandat pour agir comme il le font.

Les Canadiens sont d'autant plus exaspérés lorsqu'ils constatent qu'il n'y aura pas de vote libre sur la question, de sorte que leurs préoccupations ne pourront trouver aucune expression démocratique.

Notre parti prête l'oreille aux Canadiens et il tient compte de leurs préoccupations. Pourquoi les libéraux ont-ils peur d'en faire autant? Peut-être parce que leur mandat ne reflète pas fidèlement le point de vue des électeurs.

* * *

[Français]

LES CLUBS DE RECHERCHE D'EMPLOI

M. Gilles Bernier (Beauce, Ind.): Monsieur le Président, après dix ans d'existence, les services des clubs de recherche d'emploi sont modifiés, à la suite d'un changement des règles du jeu par Développement des ressources humaines Canada. Le ministère exige qu'une forte proportion des personnes inscrites aux sessions de formation soient des prestataires d'assurance-chômage. On vient ainsi de fermer la porte à ceux et celles qui ne font pas partie des statistiques et qui utilisaient principalement les services des clubs de recherche d'emploi.

Bien sûr, l'objectif est louable: retourner les chômeurs sur le marché du travail le plus rapidement possible. Mais que fait-on des jeunes qui sortent de l'école et des gens sans revenu, qui auraient grandement besoin de profiter des sessions de recherche d'emploi et qu'on tente d'exclure, sous prétexte qu'ils ne font pas partie des statistiques officielles? Ce sont des êtres humains qui ont un urgent besoin de se trouver un travail et je crois que le ministère devrait assouplir ses règles.

* * *

[Traduction]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, beaucoup d'hommes et de femmes partout au Canada arborent aujourd'hui un ruban blanc pour nous rappeler qu'il y a cinq ans aujourd'hui, 14 jeunes femmes étaient tragiquement abattues par un homme à l'École Polytechnique de Montréal simplement parce qu'elles étaient des femmes.

Il est triste de constater que peu de choses ont changé de nos jours. Les femmes partout dans le monde vivent encore dans la crainte d'actes de violence aux mains d'hommes qu'elles connaissent aussi bien que d'inconnus.


8692

Santé Canada et d'autres organismes publics et communautaires ont beaucoup fait pour rendre les gens plus conscients de cette violence à l'égard des femmes. Avec ses propositions de réglementation des armes à feu, le ministre de la Justice a fait un modeste pas de plus pour protéger les Canadiennes, mais ce n'est pas suffisant.

Ce ne sera jamais assez tant que nous, les femmes, ne pourrons pas marcher sans crainte dans la rue et nous sentir en sécurité dans notre foyer. Et pourtant, il y a encore beaucoup de dénégation de la part des hommes quant au lien de cause à effet de cette violence. Les macarons du YMCA et la campagne du ruban blanc montrent aujourd'hui que nous nous souvenons et témoignent de notre engagement.

J'invite tous les hommes qui aiment une fille, une mère, une épouse, une compagne ou une amie à arborer un de ces symboles par solidarité avec nous. Nous avons besoin de leur appui. La violence ne cessera pas à moins qu'ils ne décident maintenant d'agir de façon positive pour nous aider à l'enrayer.

* * *

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

M. Guy H. Arseneault (Restigouche-Chaleur, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes aujourd'hui le 6 décembre, la Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes.

Par cette journée, nous voulons rappeler le souvenir des 14 jeunes femmes qui ont été tuées dans des circonstances tragiques à l'École polytechnique de Montréal le 6 décembre 1989.

[Français]

La violence evers les femmes est une triste réalité que nous devons changer. Toutefois, nous ne pouvons effectuer ce changement sans l'effort collectif de tous les membres de notre société. Statistique Canada rapportait récemment que 51 p. 100 des femmes au Canada avaient été victimes d'au moins une agression dans leur vie adulte. Le problème est très sérieux.

[Traduction]

Nous devons toujours nous souvenir de la tuerie du 6 décembre 1989 et veiller à ce que des tragédies semblables ne se reproduisent plus jamais. Nous devrions nous efforcer de créer un Canada dans lequel la violence faite aux femmes, aux hommes et aux enfants ne sera pas tolérée.

* * *

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Marlene Cowling (Dauphin-Swan River, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui la Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes.

Cette journée sert à rappeler le souvenir des 14 femmes qui ont perdu la vie à l'École polytechnique de Montréal, de toutes les femmes qui ont perdu la vie par suite d'actes violents insensés, qui ont été enlevées à leur famille et à leurs amis.

Cette année, 15 femmes ont perdu la vie par suite d'actes violents dans ma province, le Manitoba. Ces femmes sont plus que des statistiques. Ce sont des mères, des filles, des soeurs, des amies et des voisines.

En tant que pays, nous devons pleurer leur mort et les lendemains qu'elles ne verront jamais. En tant que législateurs, nous devons pleurer leur disparition et ne jamais oublier que nous devons aussi agir dès maintenant pour éduquer, soutenir et protéger les femmes. Nous devons prendre l'engagement envers les femmes, envers tous les Canadiens et envers nous-mêmes de mettre un terme à la violence.

* * *

(1405)

[Français]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, il y a cinq ans, le meurtre de 14 jeunes femmes à l'École polytechnique de Montréal a ému et bouleversé l'ensemble de la population québécoise et canadienne. Violences physiques, psychologiques et sexuelles vécues dans de nombreux foyers, harcèlement sexuel dans le milieu de travail, inceste et mutilations sexuelles ne sont que quelques-unes des manifestations de cette violence vécue quotidiennement par des millions de femmes ici et ailleurs dans le monde.

Pour mettre un terme à ce cycle de désespoir, il faut agir en utilisant toutes les ressources disponibles, tant juridiques que financières, autant par des campagnes de sensibilisation, que par l'éducation dans son sens le plus large.

Ce triste anniversaire est une invitation à tous les gouvernements d'intensifier leurs efforts pour qu'on puisse affirmer: «Le 6 décembre 1989: Plus jamais!»

* * *

LE PROJET HIBERNIA

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais déplorer que ma province natale de la Saskatchewan ne reçoive pas sa juste part de travail sur le projet Hibernia.

Avec presque 3,5 p. 100 de la population canadienne, nous n'avons pas même reçu un contrat de construction navale. Nos chantiers affairés au bord du lac Wascana à Regina sont prêts à contribuer. Après des générations d'exploitation coloniale aux mains de l'Ontario et du Québec, il est grand temps qu'ils nous donnent nos pots-de-vin. Nous demandons l'équité. Il faut se mettre au travail.

* * *

[Traduction]

LES BANQUES

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, lorsque le taux d'inflation est élevé, il en va de même des bénéfices des banques. Lorsqu'il est bas, les bénéfices des banques sont élevés. Lorsque les taux d'intérêt sont bas, les bénéfices des banques sont élevés, et lorsque ces taux sont


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élevés, les bénéfices des banques le sont aussi. L'an dernier seulement, les banques ont réalisé des bénéfices de plus de 4 milliards de dollars. Quelle que soit la conjoncture économique, les banques sont toujours gagnantes.

Le ministre des Finances cherche de nouvelles sources de revenus pour éponger le déficit. Pourquoi ne fait-il pas la première chose qui vient à l'esprit et ne demande-t-il pas aux banques de payer leur part du déficit? Pourquoi continue-t-il d'accabler les contribuables et les propriétaires de petites entreprises avec des impôts élevés et des services réduits? Pourquoi les banques bénéficient-elles d'un traitement de faveur? Pourquoi le ministre demande-t-il aux Canadiens de continuer de se serrer la ceinture et d'accepter des compressions au titre des programmes sociaux alors que les banques ne paient pas d'impôt sur leurs bénéfices? Est-ce parce qu'elles ont versé plus de 700 000 $ à la caisse du Parti libéral durant la campagne électorale de l'an dernier?

Le gouvernement doit enquêter sur les bénéfices des banques pour garantir que les consommateurs et les petites entreprises ne se fassent pas escroquer et que les banques paient leur juste part d'impôt.

* * *

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je rentre tout juste d'une cérémonie qui a eu lieu au Conseil national de recherches du Canada, à la mémoire des jeunes femmes assassinées à l'École polytechnique de Montréal, il y a cinq ans.

Cette cérémonie était particulièrement émouvante parce que ces jeunes femmes étaient le symbole par excellence de la présence des femmes dans le domaine des sciences et de la technologie. Elles étudiaient à l'un des établissements d'enseignement des sciences et de la technologie les plus prestigieux du Canada, l'École polytechnique de Montréal.

Certaines faisaient des stages au Conseil national de recherches du Canada, qui a honoré leur mémoire à l'heure du dîner.

Souvenons-nous de ces jeunes femmes de Montréal et employons-nous à supprimer tous les obstacles que les jeunes femmes devront surmonter dans l'avenir, notamment dans le domaine des sciences, de la technologie et du génie.

* * *

[Français]

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le Président, le jour du 6 décembre 1989 avait commencé comme tout autre jour, mais avant la fin de la journée, 14 étudiantes de l'École polytechnique de Montréal avaient été tuées par un homme qui ne pouvait pas accepter que les femmes envahissent ce qu'il considérait être un territoire tout à fait masculin.

[Traduction]

Quatorze jeunes femmes ont payé de leur vie, laissant 14 familles, de nombreux amis et tous les Canadiens dans un désarroi complet. La violence faite aux femmes est le geste le plus ignoble auquel la société doive faire face, parce que c'est un geste de faiblesse.

À Vancouver, un monument aux femmes sera inauguré dans ma circonscription, celle de Vancouver-Est, à l'été de 1995. Cette oeuvre de Beth Albert comprend 14 bancs de granit rose du Québec et s'intitule «Marker of Change». Sur chaque banc sera gravé le nom d'une des jeunes femmes assassinées à l'École polytechnique.

[Français]

Ce monument sera une déclaration officielle que la vie des femmes est précieuse et qu'on ne peut pas pardonner la violence.

Aujourd'hui, je voudrais assurer les quatorze familles et les nombreux amis des femmes tuées le 6 décembre 1989 qu'on déplore leur perte et que nous, comme eux, n'oublierons pas.

* * *

(1410)

[Traduction]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui la Journée nationale de commémoration et d'action pour mettre fin à la violence faite aux femmes.

Il y a cinq ans, jour pour jour, 14 jeunes femmes ont tragiquement perdu la vie à l'École Polytechnique de Montréal. Tout aussi inquiétant est le fait que 51 p. 100 des Canadiennes ont été l'objet d'au moins un acte violent commis par un homme au cours de leur vie d'adulte.

Il importe que tous les Canadiens réfléchissent à ce que nous pouvons faire pour éliminer la violence faite aux femmes dans notre société. Nous pourrions notamment souscrire au principe de la tolérance zéro en appuyant des services aux victimes, en collaborant avec des maisons de transition, des refuges et des centres d'aide aux victimes ou encore en sensibilisant davantage la population au fait que cette violence est inadmissible.

La violence faite aux femmes est un fait de société qui doit être changé. Que tous les députés à la Chambre collaborent à la réalisation de ce changement!

* * *

[Français]

LE RÉFÉRENDUM SUR LA SOUVERAINETÉ

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce matin, le premier ministre du Québec, M. Jacques Parizeau, rendait public un avant-projet de loi de même que le processus de consultation qui mèneront à la tenue du référendum sur la souveraineté.

Ce processus se distingue par sa clarté et son ouverture. En effet, 15 commissions régionales seront mises sur pied et procéderont à de vastes consultations sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec.

Pour s'assurer que le débat soit aussi large que possible, des élus de toutes tendances, de même que des non-élus, seront appelés à siéger sur ces commissions.

Cette formule permettra également de soustraire le débat référendaire des seules ornières des partis politiques pour plutôt en faire un véritable débat de société.

8694

En terminant, nous souhaitons que les députés québécois du Parti libéral du Canada respectent cette démarche et donnent suite à l'invitation du gouvernement du Québec en s'associant au processus de consultation.

* * *

[Traduction]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui le cinquième anniversaire du terrible massacre des 14 jeunes filles à l'École polytechnique de Montréal. Encore une fois, les familles et amis de celles qui ont été assassinées vont éprouver la douleur et l'angoisse de cette journée tragique.

Nous tous, dans cette enceinte, avons une pensée émue pour ces gens et tous les Canadiens commémorent la disparition de ces êtres chers qui leur ont été enlevés si cruellement et si stupidement. Même si elle n'a pas été mêlée à cette tragédie, la consommation d'alcool mène trop souvent aux actes de violence ou au meurtre.

Dernièrement, on a pu déplorer le fait que l'abus d'alcool avait servi d'excuse dans des cas d'agression contre des femmes. Nous devons ici même faire en sorte que les jeunes femmes dont nous rappelons le souvenir aujourd'hui ne soient pas mortes en vain. Il faut vite faire quelque chose pour faire disparaître l'impression que la violence sera tolérée dans les cas d'ébriété avancée.

Que tous les députés s'engagent de nouveau aujourd'hui à éliminer la violence de notre société, quelle que soit la forme que prend son hideux visage!

* * *

[Français]

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, est une journée de souvenir et de deuil pour les 14 jeunes femmes de l'École polytechnique qui ont été tuées suite à l'acte insensé d'un homme. Aujourd'hui est aussi une journée pour se souvenir de tous les hommes, femmes et enfants qui ont tragiquement perdu leur vie aux mains des gens armés.

En tant que parlementaires, le souvenir de ces femmes innocentes nous rappelle que nous devons faire tout ce qui est possible pour assurer que cette violence ne soit jamais répétée.

La nouvelle réglementation des armes à feu, présentée par le ministre de la Justice, répond au besoin de mettre en place des mesures de contrôle plus strictes.

[Traduction]

Je désire offrir mes sincères condoléances aux familles des 14 jeunes filles de Montréal. Leur mémoire nous rappelle à tous que le statu quo n'est plus acceptable et que le gouvernement, par l'intermédiaire du ministre de la Justice, a pris des mesures pour assurer la sécurité de tous les Canadiens.

[Français]

LA TRAGÉDIE DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount, Lib.): Monsieur le Président, il y a cinq ans aujourd'hui les Canadiens ont appris avec stupéfaction et horreur que 14 jeunes femmes avaient été tuées à l'École polytechnique de Montréal.

La semaine dernière, le ministre de la Justice a annoncé une série de propositions pour mieux contrôler les armes à feu. Ces propositions ont été bien accueillies par les familles des victimes. Ce qui me laisse croire que c'est un pas dans la bonne direction.

(1415)

Aujourd'hui, rappelons-nous des victimes. Je demande aux députés de cette Chambre et à tous les Canadiens et Canadiennes de se rappeler de Hélène Colgan, Annie St-Arneault, Maryse Leclair, Geneviève Bergeron, Annie Turcotte, Maryse Laganière, Barbara-Maria Klucznick Widajewicz, Anne-Marie Lemay, Michèle Richard, Sonia Pelletier, Nathalie Croteau, Maud Haviernick, Barbara Daigneault et Anne-Marie Edward.

_____________________________________________


8694

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, il y a cinq ans aujourd'hui, 14 jeunes femmes perdaient la vie à l'École polytechnique de Montréal, suite à l'assaut d'un meurtrier qui en voulait aux femmes. Cet événement tragique a suscité un important mouvement en faveur d'un contrôle accru des armes à feu, de même qu'une prise de conscience de la violence quotidienne faite aux femmes dans notre société.

Le ministre de la Justice reconnaît-il qu'il est toujours possible et facile, cinq ans plus tard, de se procurer sur le marché le même type d'arme qui a servi au meutrier de Polytechnique, et dans ce contexte, comment peut-il se satisfaire d'un simple plan d'action, plutôt que d'un projet de loi musclé et sévère, pour régir la vente et la circulation des armes à feu, comme ils s'y étaient engagés, lui et le premier ministre?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous avons annoncé, la semaine passée en Chambre, nos décisions concernant la politique de ce gouvernement vis-à-vis des armes à feu. Entre autres choses, nous avons décidé de déposer un projet de loi en février prochain, pour changer la loi, qui aura trois objectifs: Premièrement, nous voulons souligner qu'au Canada, nous sommes un pays où on ne désire pas une «gun culture» comme aux États-Unis. Nous avons besoin d'un contrôle plus strict des armes à feu pour notre société en général. Deuxièmement, nous voulons apporter des changements au Code criminel, pour assurer que ceux qui utilisent des armes à feu lors de la commission de crimes seront traduits devant les tribunaux et que des peines appropriées seront imposées. Troisièmement, nous voulons assurer la sécurité publique, entre autres l'entreposage sécuritaire, à l'aide d'un enregistrement universel de toutes les armes à feu.


8695

Alors, nous avons annoncé les décisions de ce gouvernement au sujet, en général, des armes à feu, y compris. . .

Le Président: Je regrette, mais le temps du ministre est écoulé. Je reconnais l'honorable député de Roberval.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice tient de bien beaux propos, mais reconnaît-il qu'en vertu du plan qu'il a proposé, les 13 000 armes automatiques enregistrées au Canada, dont 4 000 AK-47, des armes de guerre, pourront rester en toute légalité entre les mains de leurs propriétaires, et cela, toute leur vie durant?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, en vertu des décisions prises et annoncées la semaine dernière, dès que la loi aura été promulguée et mise en application, il sera interdit de vendre toute arme à feu du type de celle qu'a utilisée Marc Lépine lors des événements tragiques qui sont survenus il y a cinq ans aujourd'hui.

En outre, nous avons aussi annoncé que, dans quelques semaines, soit le 1er janvier 1995, un décret interdira la possession de certains pistolets et fusils d'assaut et que ceux-ci seront confisqués chez tous ceux qui en possèdent actuellement.

De plus, le 1er janvier 1995, un décret interdira aussi la possession de plus de 200 types d'armes à feu d'assaut et d'armes à feu paramilitaires.

(1420)

Il est vrai que ceux qui possèdent déjà des armes à feu paramilitaires et des armes de poing interdites pourront les conserver, mais ils ne pourront plus les transférer à qui que ce soit. Selon la nouvelle politique, ils pourront seulement les utiliser jusqu'à leur mort, les remettre aux services policiers ou les rendre inutilisables.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre sait très bien que des mouvements de ces armes à feu se font régulièrement lorsque les propriétaires les déclarent volées, perdues ou autrement. Or, sa réglementation ne règlera pas le problème.

Comment le ministre ne peut-il pas être convaincu de l'urgence d'agir quand on sait qu'un très grand nombre de femmes, au Québec notamment, ont été tuées par des armes à feu depuis les événements tragiques de Polytechnique et que son plan d'action à lui n'aura d'effets vérifiables qu'en l'an 2003?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais souligner que rien dans ce plan n'est est retard. Le décret interdisant la possession d'une vaste gamme d'armes à feu entrera en vigueur le 1er janvier, soit dans moins d'un mois. Au cours de l'année 1995, le Parlement promulguera la loi qui imposera les sanctions pénales très rigoureuses que nous avons annoncées.

Le 1er janvier 1996, le système d'enregistrement entrera en vigueur. Grâce à des mesures incitatives, nous espérons obtenir que la grande majorité des propriétaires d'armes à feu les enregistreront dès la mise en place du système.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Selon les policiers et les douaniers canadiens, les armes à feu prohibées entrent toujours à pleine porte au Canada. Or, de l'avis du vice-président du Syndicat des douaniers du Canada, le plan d'action du ministre de la Justice ne comprend aucune mesure pour arrêter la contrebande des armes à feu en provenance des États-Unis.

Le ministre de la Justice ne convient-il pas que des mesures de contrôle plus serrées, que son gouvernement avaient annoncées au printemps dernier, n'ont donné aucun résultat à ce jour et que son plan d'action n'aura pas plus de succès?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis d'accord avec l'honorable députée. Nous avons annoncé, la semaine dernière, les décisions que nous avons prises concernant un contrôle plus strict aux frontières. Le ministre du Revenu, le solliciteur général et moi-même avons annoncé la semaine passée que le gouvernement du Canada prendra des mesures pour nous assurer d'avoir le contrôle aux frontières.

[Traduction]

Le ministre du Revenu a annoncé que des changements précis seraient apportés dans la politique opérationnelle et les modifications législatives pour nous assurer un meilleur contrôle. Nous pourrons notamment exiger qu'un permis soit émis à l'avance pour toute arme à feu expédiée vers le Canada. Deuxièmement, la surveillance à la frontière sera accrue. Troisièmement, nous réduirons le nombre de points à la frontière où les armes à feu peuvent entrer au pays.

Ces mesures, ajoutées à l'enregistrement universel, contribueront vraiment à diminuer la contrebande.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice peut-il nous dire s'il entend prendre autant de temps pour mettre en place des mesures visant à stopper la contrebande des armes à feu en provenance des États-Unis qu'il en prévoit pour mettre en place le processus d'enregistrement des armes à feu?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les nouvelles pratiques administratives et opérationnelles à la frontière que le ministre a décrites la semaine dernière et les modifications législatives qu'entraînera le projet de loi que nous allons présenter au Parlement en février prochain entreront toutes en vigueur immédiatement. Sitôt que ce projet de loi sera adopté, ces modifications entreront en vigueur.


8696

J'encourage ma collègue d'en face à appuyer les mesures importantes que le gouvernement a prises pour réaliser l'objectif que nous partageons, à savoir un pays plus sûr. Je voudrais l'inviter, ainsi que les autres membres de son parti, à se joindre à nous pour nous aider à faire de ces modifications une réalité.

* * *

LE QUÉBEC

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre du Québec a rendu public aujourd'hui un avant-projet de loi intitulé «Loi sur la souveraineté du Québec».

Des voix: Bravo!

Des voix: Oh, oh!

(1425)

M. Manning: Il a également déclaré son intention d'assurer l'adoption unilatérale de ce projet de loi à l'Assemblée nationale du Québec avant la tenue d'un référendum.

Ce projet de loi parle des frontières territoriales, des affaires autochtones, des programmes sociaux fédéraux, de la citoyenneté, de la monnaie et des traités internationaux, toutes des questions qui relèvent exclusivement de la compétence du Parlement fédéral.

Le gouvernement fédéral est-il d'accord pour dire que cet avant-projet de loi portant sur la souveraineté du Québec déborde le cadre des pouvoirs juridiques du gouvernement et de l'Assemblée nationale du Québec?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral est persuadé que, lorsqu'ils auront la chance de se prononcer sur la véritable question de savoir s'ils veulent former un pays séparé ou demeurer au sein du Canada, les Québécois se rangeront en grande majorité du côté du Canada.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous sommes convaincus nous aussi que les Québécois prendront la bonne décision, mais ce n'était pas là ma question.

Le gouvernement fédéral est-il d'accord pour dire que l'avant-projet de loi portant sur la souveraineté du Québec déborde le cadre des pouvoirs légaux du gouvernement et de l'Assemblée nationale du Québec?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, la question du chef du troisième parti est aussi confuse que la question de. . .

Des voix: Non.

Mme Copps: Le premier ministre du Québec n'a pas le droit de soumettre un projet de loi de ce genre à l'Assemblée nationale, alors que les gens n'ont pas choisi la voie de la séparation.

Nous n'entendons pas nous engager sur le terrain glissant des hypothèses, comme le chef du troisième parti souhaiterait que nous le fassions.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, en présentant les faits aux gens, on ne fera que relever le débat sur le choix entre le fédéralisme et la séparation.

Je pose une fois de plus ma question à la vice-première ministre: le gouvernement fédéral est-il d'accord pour dire que l'avant-projet de loi portant sur la souveraineté du Québec déborde le cadre des pouvoirs légaux du gouvernement et de l'Assemblée nationale du Québec?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, il est regrettable que le chef du Parti réformiste joue le jeu de Jacques Parizeau.

Nous n'avons pas l'intention de le faire. Nous entendons poser aux Québécois une question très claire: «Voulez-vous demeurer au sein du Canada ou vous séparer?» C'est la question sur laquelle ils se prononceront lors du référendum.

* * *

[Français]

LA BOSNIE

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense.

Pendant que l'on assiste aux travaux de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, à Budapest, où la communauté internationale tergiverse sur les moyens à prendre pour amener les Serbes bosniaques à entendre raison, ceux-ci continuent de narguer l'ONU et les grandes puissances. Ils refusent toujours de libérer les 309 Casques bleus qu'ils détiennent, parmi lesquels on compte 55 Canadiens.

Le ministre de la Défense confirme-t-il que les 55 Casques bleus canadiens détenus en otage depuis maintenant 13 jours n'ont pas été libérés, comme s'y étaient engagés les Serbes bosniaques, et n'est-ce pas là une nouvelle preuve de la mauvaise foi des Serbes qui ne respectent aucunement leurs engagements?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, on m'a informé qu'hier une réunion a eu lieu entre le commandant de l'ONU en Bosnie, le général Rose, et les Serbes bosniaques.

Les Serbes bosniaques ont assuré le général Rose que tous les détenus seront relâchés bientôt.

[Traduction]

Les dirigeants des Serbes bosniaques, le Dr Karadzic et le général Mladic, ont affirmé hier au général Rose, qui les a rencontrés à Pale, que tous les Casques bleus détenus-il y en environ 350 à l'heure actuelle-seraient bientôt relâchés.


8697

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, cela fait plusieurs fois que les Serbes promettent de relâcher les Casques bleus, et ça ne se produit toujours pas.

(1430)

Doit-on comprendre que les Serbes bosniaques ne consentent pas à libérer les Casques bleus pris en otage parce que l'ONU refuse de s'engager à ce que l'OTAN ne procède pas à de nouveaux raids aériens contre eux?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je reconnais, comme le député, qu'il est très frustrant de se faire dire constamment la même chose par les Serbes bosniaques. Ils nous avaient dit cela vendredi, quand M. Akashi, le représentant du secrétaire général, a négocié avec les dirigeants une entente à l'issue de laquelle seules quelques personnes ont été relâchées. J'espère que ces dernières négociations porteront fruit.

En ce qui concerne l'aspect plus précis des frappes aériennes de l'OTAN, je voudrais rappeler que l'OTAN a convenu d'un plan à ce sujet le printemps dernier. Le Canada est signataire de ce plan et l'on peut recourir à des frappes aériennes quand il y a entente aux deux niveaux, c'est-à-dire quand le commandant au sol préconise l'utilisation de telles mesures et que l'OTAN et, bien entendu, le représentant des Nations Unies, M. Akashi, sont d'accord.

* * *

LE QUÉBEC

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, en réponse au chef du Parti réformiste, la vice-première ministre a dit grosso modo que le gouvernement comptait poser une question précise sur l'unité du Canada ou la séparation du Québec.

Devons-nous comprendre que le gouvernement fédéral a l'intention de poser clairement à la population du Québec et à celle du Canada sa propre question sur la séparation?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Le leader parlementaire du Parti réformiste, son chef et d'autres députés de son parti s'engagent dans une voie très dangereuse lorsque, à un moment très crucial de l'histoire du Canada, ils cherchent davantage à s'attaquer au gouvernement fédéral qu'aux séparatistes.

Ce que j'ai dit en réponse à la question du chef du Parti réformiste, c'est que nous ne nous laisserons pas entraîner à faire des conjectures. Le prétendu projet de loi que le premier ministre du Québec a déposé devant la population québécoise aujourd'hui n'est pas une mesure législative légitime, car la question n'a pas été posée. La question clé que nous poserons sans cesse à la population québécoise au cours des prochains mois est celle-ci: «Voulez-vous vous séparer du Canada ou y demeurer?»

Nous sommes persuadés que si nous travaillons de concert avec tous les députés de la Chambre, avec le Parti réformiste, avec le Parti conservateur et avec le Nouveau Parti démocratique, la cause du fédéralisme l'emportera, car les Québécois veulent être des partenaires à part entière dans la fédération canadienne.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je me réjouis que la vice-première ministre nous ait transmis deux renseignements intéressants. Tout d'abord, elle et son gouvernement accepteront de collaborer avec tous les partis fédéralistes. Ensuite, elle estime que le projet de loi qu'a déposé aujourd'hui le premier ministre du Québec n'est pas légitime.

Le gouvernement du Canada a-t-il donc l'intention de préciser clairement au gouvernement du Québec et à M. Parizeau que le Parlement fédéral a une compétence et un pouvoir législatif exclusifs dans des secteurs comme les frontières, les questions autochtones, la citoyenneté, la monnaie, les traités internationaux et les programmes fédéraux de retraite? Est-ce là l'intention du gouvernement, et la vice-première ministre compte-t-elle exprimer clairement cette opinion à M. Parizeau?

[Français]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, ce que nous allons exprimer à M. Parizeau, c'est que s'il avait vraiment le courage de ses convictions, il aurait eu le courage de poser la vraie question qui est: Est-ce qu'il veut se séparer oui ou non?

Le fait qu'il ne l'a pas posée, le fait qu'il a déposé des livres et des études de commissions, c'est parce qu'il n'a pas l'assurance qu'il va gagner. Nous sommes convaincus que les Québécois vont voter oui pour le Canada.

* * *

LA MIL DAVIE

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. On apprend ce matin que les sous-ministres des Transports et de l'Industrie des gouvernements du Québec et d'Ottawa se rencontreront demain, ici même à Ottawa, sur l'avenir du dernier grand chantier maritime du Québec, MIL Davie, qui est menacé de fermeture.

Le ministre peut-il nous dire quel mandat il a donné aux hauts fonctionnaires quant aux gestes à poser par son gouvernement pour venir en aide au chantier MIL Davie?

(1435)

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai expliqué plusieurs fois ici à la Chambre, je crois que la première chose, pour MIL Davie, est de compléter un plan d'entreprise, accepté et appuyé par leur actionnaire, qui est le gouvernement du Québec, et que ce plan soit aussi accepté par les employés de MIL Davie.


8698

En ces temps-ci, il y a des problèmes qui sont très difficiles. Nous sommes prêts à discuter avec l'actionnaire, avec le gouvernement du Québec, mais il y aura toujours plusieurs choses à discuter. Nous sommes toujours prêts à avoir des réunions comme celle qui aura lieu demain.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, la question que j'avais posée était relative au mandat.

Le ministre de l'Industrie peut-il confirmer si, au-delà d'un contrat de construction d'un nouveau traversier pour les Îles-de-la-Madeleine, on abordera la question des retombées du mégaprojet Hibernia, à la suite de l'injustice flagrante commise par le consortium d'Hibernia envers MIL Davie?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Comme toujours, monsieur le Président, avec les bloquistes, c'est un exemple de démagogie. Est-ce que le député est prêt à accepter le fait qu'hier, le député de Roberval a dit que c'était un processus de rationalisation et qu'il avait tort au sujet des faits? Il a mal présenté les faits quand il a dit que la rationalisation se faisait plutôt au Québec.

Est-ce que le député est prêt à accepter que premièrement, c'est la responsabilité du gouvernement du Québec, comme actionnaire de MIL Davie, de prendre position sur le plan de l'entreprise? Est-ce que les bloquistes pensent que le gouvernement du Québec n'est pas capable de régler les affaires de son entreprise, MIL Davie? S'ils pensent ça, ne pensent-ils pas également que le gouvernement du Québec n'est pas capable de régler les affaires de la province de Québec?

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LES PRÊTS AUX PETITES ENTREPRISES

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement projette de hausser à 12 milliards de dollars la limite de prêts en vertu de la Loi sur les prêts aux petites entreprises. L'argent peut être utilisé pour les immobilisations, mais non pour les fonds de roulement.

Le rapport du Comité de l'industrie intitulé «Pour financer le succès de la PME» souligne que ce sont les fonds de roulement et non les immobilisations qui posent un problème. En fait, les institutions qui financent les immobilisations ont demandé au gouvernement de ne pas leur faire concurrence.

Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas suivi les recommandations de son propre comité en répondant aux besoins de fonds de roulement des petites entreprises, en particulier celles qui exportent, au lieu de faire concurrence aux sources actuelles de financement des immobilisations, et cela à grands frais pour les contribuables?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il faut bien comprendre la proposition que nous avons présentée hier, qui indique clairement que les modifications proposées à la Loi sur les prêts aux petites entreprises ne coûteront rien au gouvernement.

Les frais additionnels que nous avons proposé d'imposer et le plafonnement des taux d'intérêt y contribueront. Nous avons indiqué que nous collaborerons avec les parties intéressées pour faire en sorte que les changements que nous apportons assureront le maintien d'un programme efficace qui permettra aux petites entreprises de combler leurs besoins et qui n'obligera pas les contribuables à supporter des coûts additionnels liés aux garanties d'emprunt.

Je signale également au député que nous avons relevé le plafond pour une raison bien simple. Au cours des 18 derniers mois, la demande d'aide des petites entreprises dans le cadre de ce programme a fait en sorte que nous avons atteint la limite de 4 milliards. C'est dire à quel point le programme est une réussite. Je crois qu'il a contribué directement aux 400 000 emplois qui ont été créés au Canada depuis un an.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, il n'est pas nécessaire d'être un génie pour comprendre que si on hausse le taux et qu'on abaisse le montant disponible, si on fait en sorte qu'il est plus facile pour les banques de reconduire leurs prêts en retard ou les prêts consentis à mauvais escient, les gens vont en profiter. Le problème est que nous faisons en sorte qu'il sera plus facile aux banques de s'enrichir.

Les contribuables canadiens subventionnent actuellement la Loi sur les prêts aux petites entreprises à raison de 100 millions de dollars par année. Le gouvernement propose d'imposer des frais de 1 p. 100 pour compenser les pertes futures anticipées. Toutefois, le comité de l'industrie a recommandé que les prêts aux petites entreprises garantis en vertu de la loi portent un taux d'intérêt proportionnel au risque.

(1440)

Quelles garanties précises le ministre a-t-il prévues pour s'assurer que le programme ne devienne pas un énorme programme de subventions à l'intention des banques?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il n'est pas nécessaire d'être un génie pour comprendre que si on veut qu'un programme gouvernemental fonctionne bien, il faut consulter les intéressés.

Le député soulève une question sérieuse. Je tiens à lui dire que je partage ses préoccupations quant à l'utilisation qui pourrait être faite du programme.

Le député sait sans doute que nous avons demandé à M. Allan Riding, professeur à l'Université Carleton, d'effectuer une étude du programme, étude qui a révélé que les changements apportés en 1993 ont donné lieu à une hausse des prêts d'au moins 60 p. 100 par rapport à ce qui aurait été accordé, et que ces prêts ont directement servi à la création d'emplois.

C'est la raison pour laquelle nous croyons que la chose la plus importante est de relever le plafond afin que le programme continue d'être aussi utile aux petites entreprises qu'il l'a été dans le passé. Nous entendons apporter les changements nécessaires. Je comprends ce que le député demande. Nous ne voulons pas que le programme serve à subventionner les banques et nous


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en tiendrons compte dans les modifications que nous apporterons.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le ministre du Développement des ressources humaines a prétendu, hier, que 96 p. 100 des Canadiens appuyaient une réforme en profondeur des programmes sociaux. Il a même eu le culot de prétendre que ces 96 p. 100 appuyaient sa démarche. Or, le ministre aurait dû savoir que les Canadiens n'appuient pas une réforme des programmes sociaux qui se fera sur le dos des plus démunis.

Comment le ministre peut-il prétendre que sa réforme rallie une majorité de citoyens, alors que plus de 80 groupes de femmes, dont le Comité d'action sur le statut de la femme, rejettent clairement sa réforme de l'assurance-chômage parce qu'elle est discriminatoire et qu'elle pénalise surtout les femmes?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, tout ce que j'ai fait hier, c'est répéter les résultats d'un sondage national.

Ce qu'il est important de noter, c'est que quand on analyse les résultats de ce sondage par région, il y a autant de gens au Québec qui appuient les mesures de réforme sociale proposées par le gouvernement que dans le reste du Canada. Ce qu'il est également important de noter, c'est que, selon ce sondage, autant de femmes que d'hommes appuient les mesures proposées en vue de la réforme sociale. Hommes et femmes appuient également les mesures de réforme sociale que nous avons proposées.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, quand le ministre réalisera-t-il que sa réforme rendra les femmes plus dépendantes financièrement de leurs conjoints, puisque l'accès des femmes à l'assurance-chômage et le niveau des prestations qu'elles toucheront seront fonction du revenu de leurs conjoints?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): En fait, monsieur le Président, c'est absolument l'inverse.

Si on examine les propositions en vue d'un programme à deux types de prestations établies en fonction du revenu, les femmes à faible revenu dans les régions plus pauvres en bénéficieraient le plus. C'est le point du débat. Les faits et l'analyse présentés par la députée n'ont rien à voir avec les faits et l'analyse contenus dans le document sur l'assurance-chômage, que je serais heureux de lui faire partager.

C'est ça l'important. Ne nous faisons pas d'idées. N'exagérons pas. Venons-en aux faits. Le fait est que nos propositions en ce qui concerne l'amélioration des garderies, des possibilités d'emploi et des prestations, permettront aux femmes d'avoir un meilleur accès à la population active.

* * *

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Beryl Gaffney (Nepean, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire d'État chargée de la Situation de la femme.

Voilà aujourd'hui cinq ans que 14 femmes, toutes étudiantes en génie, ont été tuées à l'École polytechnique de Montréal. Voilà quatre ans que le rapport de tous les partis sur la violence faite aux femmes a été déposé à la Chambre des communes.

Étant donné qu'aucune des recommandations de ce rapport n'a encore été mise en oeuvre, est-ce que la ministre pourrait nous dire quand nous pouvons espérer quelque initiative sur les propositions contenues dans ce document?

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, ma collègue, je le sais, se consacre à l'action dans le domaine de la violence faite aux femmes et était membre de ce comité qui a fait rapport à la Chambre.

(1445)

La violence faite aux femmes et aux enfants est un sujet qui est traité dans le livre rouge. Le gouvernement est résolu à faire quelque chose. La question a plusieurs aspects et exige une action législative, une activité éducative et une collaboration avec nos partenaire provinciaux et territoriaux, ainsi qu'avec la police, le secteur publicitaire, etc.

Je pense que le ministre de la Justice a présenté une ensemble important de mesures qui répond à de nombreux rapports. Essentiellement, notre première tâche est de présenter une mesure législative qui établira les lignes directrices sur les mesures à prendre contre ceux qui se rendent coupables de violence contre les femmes.

Je dirais que l'autre rôle que nous avons à jouer est celui d'éduquer.

M. Abbott: Coupez, coupez.

M. Peterson: Encore, encore.

Mme Finestone: Vous n'occupez pas le fauteuil.

Le Président: J'allais dire, une fois assise vous n'avez plus la parole.


8700

L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Bien que le principe d'équité en matière d'emploi soit déjà appliqué dans la plupart des services du gouvernement fédéral, le ministre compte présenter bientôt un projet de loi sur l'embauche dans la fonction publique en fonction de critères de race, de sexe et de handicap. Le ministre affirme qu'il ne croit pas à l'utilité des quotas d'embauche, mais la mesure qu'il proposera fixera des objectifs numériques.

Le ministre peut-il nous dire la différence entre un objectif fixé en nombre d'employés et des quotas d'embauche, en ce qui a trait au respect des exigences du programme d'équité en matière d'emploi?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, nous nous sommes clairement engagés au cours de la dernière campagne électorale à réformer les programmes d'équité en matière d'emploi. Je rappelle aux députés que 170 des nôtres ont été élus. C'est dire à quel point les Canadiens appuient ce mandat que nous nous sommes donné.

La volonté d'assurer un accès égal et des chances égales à tous, en milieu de travail, est l'un de nos premiers objectifs dans notre entreprise de créer une économie plus efficace tout en préservant les droits de tous les Canadiens, hommes et femmes, y compris les membres des minorités visibles et les personnes handicapées.

Je déposerai mon projet de loi la semaine prochaine, conjointement avec mon collègue, le président du Conseil du Trésor. Le député pourra alors prendre connaissance de tout ce que prévoit la mesure. Je ne peux pas en dire davantage pour le moment. Je crois que le député devrait attendre d'avoir vu le projet de loi.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, la fonction publique s'est toujours fait un honneur d'engager ses employés en fonction de leur mérite, et de leur mérite seulement. Les gestionnaires qui ne respecteront pas les objectifs numériques ou les quotas-ou quel que soit le nom que le ministre leur donnera-encourront inévitablement des sanctions.

Le ministre peut-il nous dire comment il s'y prendra pour s'assurer que les gestionnaires, qui décident de l'embauche ou du congédiement des employés de la fonction publique, baseront leurs décisions sur des critères de mérite seulement?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait savoir que, en ce qui a trait à l'équité en matière d'emploi, la fonction publique du gouvernement du Canada est assujettie à un ensemble de lignes directrices qui remontent à l'ancien gouvernement libéral. Le solliciteur général de l'époque avait alors établi un régime très efficace.

Notre projet de loi veillera à établir parité et équilibre entre les règles qui s'appliquent au secteur privé et au secteur public.

Nous allons nous assurer que la loi établit clairement la parité entre le secteur privé et le secteur public, dans la législation. Les fonctionnaires du Canada réclament une telle mesure depuis un certain temps.

* * *

[Français]

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

J'aimerais rappeler à la ministre de la Santé que son directeur du Bureau des médicaments vétérinaires de Santé Canada, le patron du bureau, je pense que c'est important qu'elle le sache, le patron du bureau qui étudie la somatotrophine pour conseiller la ministre sur l'approbation recherchée, fait du lobby sur la colline parlementaire pour vanter les mérites de cette hormone.

Comment la ministre peut-elle se réfugier sans scrupule derrière un congé sans solde, comme elle l'a fait hier, pour cautionner un pareil conflit d'intérêts par son directeur?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la personne en question est en congé sans solde depuis déjà un an et demi. Pendant son congé sans solde, cette personne ne travaille pas pour Santé Canada et ne parle pas au nom de Santé Canada.

(1450)

Cela dit, je suis consciente des inquiétudes que le député a relativement à cette affaire. J'ai demandé à ma sous-ministre d'étudier la question pour assurer tous les gens qu'on n'a pas contrevenu aux règles de conflit d'intérêts qui gouvernement la fonction publique.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, comment la ministre peut-elle garantir que son directeur en congé sans solde, lobbyiste pour certaines compagnies pharmaceutiques, n'influencera pas les recommandations du Bureau des médicaments vétérinaires de Santé Canada concernant la somatotrophine, alors même que celui-ci a caché ses liens avec le ministère.

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, laissez-moi rappeler à l'honorable député que la somatotrophine bovine n'a pas été approuvée. Ce médicament ne sera approuvé que lorsque les scientifiques du ministère auront l'assurance qu'il n'aura pas d'effet néfaste sur les Canadiens et sur les animaux.

* * *

[Traduction]

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, hier le ministre de l'Agriculture a pris la défense des commissaires de la Commission canadienne du blé, disant qu'ils participaient «à des réunions publiques au cours desquelles ont été


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discutés de nombreux aspects touchant la commercialisation du grain de l'Ouest».

Le ministre a également ajouté qu'ils n'avaient «participé activement à la campagne électorale d'aucun des membres du comité consultatif». Il semble curieux que le ministre n'ait pas lu l'article du commissaire Richard Klassen, paru dans divers journaux agricoles, et dans lequel il ne faisait valoir qu'un seul des points de vue représentés à la Commission canadienne du blé.

Est-ce que le ministre va examiner les activités de M. Klassen et des autres commissaires afin de découvrir quels sont ceux qui ne sont pas demeurés politiquement neutres?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, il ne me semble pas inhabituel que de temps en temps un commissaire de la Commission canadienne du blé défende les politiques et les pratiques de cette dernière. Cela me semble tout à fait logique pour un membre de la Commission canadienne du blé dans l'exercice normal de ses fonctions.

Si le député a des accusations précises à porter au sujet de l'un quelconque des membres de la commission, ou de toute autre personne associée avec cette dernière et qui aurait agi de façon incorrecte, je lui saurais gré de nous en faire part au lieu de lancer toutes sortes de rumeurs.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le paragraphe 17(4) de la Loi sur la Commission canadienne du blé dit ceci: «Il incombe à la Commission de prendre les mesures administratives relatives à l'organisation des élections [des membres du comité consultatif] et à la surveillance de leur déroulement.» Par conséquent, le rôle des commissaires est similaire à celui que joue Élections Canada à l'occasion des élections fédérales.

En présentant le point de vue d'un groupe de candidats, plusieurs commissaires ont violé la Loi sur la Commission canadienne du blé. Le ministre va-t-il demander la démission de tous les commissaires qui ont fait activement campagne avant les élections des membres du comité consultatif de la commission?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, ma réponse au député est un non très bref puisque je ne dispose pour le moment d'aucun renseignement confirmant ses allégations.

* * *

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Transports Canada a plus que doublé le tarif des parcomètres aux aérogares 1 et 2 de l'aéroport international Pearson, le faisant passer de 3 à 8 $ l'heure.

Le ministre peut-il expliquer pourquoi il impose des augmentations aussi fortes aux voyageurs juste au moment où leur revenu disponible est à la baisse?

M. Joe Fontana (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député tient autant que le ministre à l'exploitation sûre et efficace de l'aéroport Pearson. Or, le tarif en question n'a subi aucun changement depuis 1991, sauf les changements exigés par les modifications fiscales de l'Ontario. De plus, les parcomètres se trouvent aux endroits où la circulation est la plus congestionnée à l'aéroport et où le stationnement ne devrait être que de courte durée afin de permettre le transport des bagages et le dispersement des voyageurs. Les gens qui veulent stationner plus longtemps peuvent se rendre au garage où le tarif n'est que de 3 $ la demi-heure. C'est de cette façon que nous allons régler le problème de la congestion à l'aéroport Pearson.

* * *

(1455)

[Français]

LES PÊCHES

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

Lors de la dernière conférence fédérale-provinciale des ministres des Pêches, le 1er novembre dernier, le gouvernement du Québec demandait au fédéral de lui redonner une partie de la gestion des pêches. Peu après, le ministre des Pêches déclarait en cette Chambre avoir l'intention de réorganiser le secteur des pêches. Il a même ajouté, et je le cite: «J'ai hâte de poursuivre les dialogues et les discussions fructueuses avec toutes les provinces, y compris le Québec.»

Pourquoi le ministre n'a-t-il toujours pas répondu à la requête du ministre des Pêches du Québec, alors qu'il s'apprête à déposer un plan de pêche qui affectera tout le secteur des pêches dans la zone atlantique? Pourquoi?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le député a parfaitement raison. C'est scandaleux de voir que 35 jours ont passé depuis que le gouvernement du Québec, son gouvernement, a officiellement proposé de changer radicalement la nature des relations entre le gouvernement fédéral et celui de la province. Notre gouvernement n'a pas encore réussi à donner une réponse exhaustive au changement radical qui est proposé dans le mode de gestion des pêches, bien que nous ayons eu 35 jours complets pour discuter de ce changement et le mettre en oeuvre. C'est vraiment scandaleux et je promets de faire mieux à l'avenir.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, Revenu Canada a diffusé un communiqué sur le contrôle des armes à feu dans lequel on déclare: «La GRC et Revenu Canada Douanes utilisent les ressources qui leur ont été accordées dans le cadre de l'initiative gouvernementale de lutte contre la contrebande et continueront d'appliquer des mesures plus sévères pour enrayer la contrebande.» Même le ministre de la Justice reconnaît que des milliers d'armes à feu


8702

traversent la frontière tous les mois et pourtant, au port de Fort Erie, situé en face de la ville de Buffalo, on a intercepté l'an dernier seulement six armes à feu par mois, six armes sur un millier.

Le ministre du Revenu ne croit-il pas que lui et son collègue, le ministre de la Justice, suscitent un faux sentiment de sécurité chez les Canadiens lorsqu'ils proposent une mesure législative de contrôle des armes à feu mal conçue tout en sachant qu'il leur sera de toute façon impossible de faire respecter la loi à la frontière?

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, le député ne semble pas savoir que le programme de contrôle des armes à feu est extrêmement bien conçu et qu'il reçoit l'appui d'une grande majorité de Canadiens.

De plus, en ce qui concerne le trafic à la frontière, je ne sais pas comment s'y prend le député pour obtenir des statistiques aussi précises sur la contrebande des armes à feu, à moins qu'il ne s'y adonne lui-même.

* * *

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre. Celle-ci n'ignore pas que, dans les quatre dernières années, nous avons reçu deux rapports sur la violence faite aux femmes, soit La guerre contre les femmes, publié par un sous-comité du Parlement, et le rapport du groupe de travail sur la violence faite aux femmes, qui a coûté plus de 11 millions de dollars. Elle n'ignore pas non plus que les maisons de refuge, les centres d'aide aux victimes de viol et les centres pour femmes doivent constamment se démener pour obtenir les fonds dont ils ont besoin.

La vice-première ministre peut-elle me dire si son gouvernement est déterminé à assurer, par un financement de base, le maintien de ces services essentiels de prévention, de traitement et de conseil en matière de violence faite aux femmes et si son gouvernement va en partager le coût avec les provinces et les territoires?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, connaissant l'intérêt que la députée et son parti portent à cette question, je puis certes assurer à la députée que nous allons faire tout notre possible pour respecter l'engagement que nous avons pris dans le livre rouge de faire du Canada un endroit plus juste et plus sûr pour toutes les femmes.

C'est pourquoi nous avons présenté dès la première année un projet de loi sur le contrôle des armes à feu, un programme très strict de nature à empêcher un autre massacre à la Marc Lépine. C'est pourquoi nous présenterons très bientôt un projet de loi sur la parité salariale, de telle sorte que les femmes qui travaillent dans la fonction publique obtiennent le traitement égal qu'elles méritent. C'est aussi pourquoi nous allons respecter notre engagement d'assurer le financement de base des maisons de refuge, de telle sorte que les Canadiennes soient protégées contre la violence, qu'elle s'exerce dans la rue, dans leur voisinage ou, malheureusement, dans leur foyer.

* * *

(1500)

L'AGENCE DE DÉVELOPPEMENT DU PARC CORNWALLIS

M. Harry Verran (South West Nova, Lib.): Monsieur le Président, dans South West Nova, l'agence de développement du parc Cornwallis a été mise sur pied pour promouvoir le développement économique de la région depuis que le gouvernement a annoncé la fermeture de la base militaire de Cornwallis.

Le ministre de la Défense nationale peut-il garantir à la Chambre que le gouvernement veut toujours assurer la viabilité économique de la collectivité de Cornwallis et que le ministère de la Défense nationale travaillera en collaboration avec l'agence de développement du parc Cornwallis pour rendre les terrains de la base de Cornwallis attrayants pour les investisseurs de l'extérieur?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je peux certainement donner des assurances au député de South West Nova, qui a travaillé très fort pour promouvoir les intérêts des électeurs de sa circonscription après la fermeture de la base militaire de Cornwallis.

Dans son dernier budget, le gouvernement a annoncé la création de l'institut Lester B. Pearson de formation au maintien de la paix. Nous voulons que cet institut soit un établissement de calibre international pour la formation aux techniques de maintien de la paix.

Grâce à des accords bilatéraux avec des pays d'Europe de l'Est et d'autres pays d'Europe, et grâce au réaménagement de notre fonds d'infrastructure de l'OTAN, nous espérons pouvoir canaliser davantage d'argent vers cet institut.

Nous tenons absolument à aider à mettre sur pied un établissement de calibre international, mais nous voulons aussi conserver autant d'immeubles que possible sur le site pour que le député et les autorités locales puissent leur trouver de nouveaux occupants et donner à la base une nouvelle vocation économique.

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je crois que, après réflexion, vous constaterez que le ministre du Revenu national m'a accusé de faire de la contrebande d'armes. Je crois que c'est exactement ce qu'il voulait dire.

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, si j'ai donné l'impression que le député faisait de la contrebande d'armes, je tiens à corriger sur-le-champ cette impression. Ma question visait seulement à savoir comment il obtient des chiffres aussi précis sur les armes passées en contrebande.

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Le Président: Je crois que, peu importe les paroles qui ont été dites, elles ont été retirées et que le ministre ne voulait pas du tout offenser le député.

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8703

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, permettez-moi une réflexion sur la violence faite aux enfants. Cette violence est une réalité douloureuse à laquelle ma tâche professionnelle m'a souvent confrontée.

Même si le réflexe de révolte face à ces drames inacceptables tend à prendre toute la place, mon expérience m'a appris à reconnaître encore dans cette violence les signes d'une société en déséquilibre, dans laquelle les attentes sociales liées à la performance à tout prix, l'isolement des familles, les difficultés financières, les carences psychologiques sont des éléments importants. Ces familles sont malades.

Comme le dit Fairholm, dans un ouvrage publié en 1990 et intitulé Child Abuse Prevention Program for Adolescents, des enfants de tous les âges sont victimes de mauvais traitements. Dans tous les milieux sociaux, économiques, raciaux et ethniques, des adultes infligent des mauvais traitements aux jeunes confiés à leurs soins. Toutes les familles et tous les enfants sont vulnérables face à ce problème. La violence psychologique est à la base de toute forme de mauvais traitements ou de négligence, mais on ignore la fréquence actuelle de la négligence physique. Est-ce que cette ignorance est acceptable? Je ne le crois pas.

(1505)

En conclusion, j'aimerais retourner un peu en arrière, exactement il y a cinq ans. Le 6 décembre 1989 il neige doucement sur la ville en fin d'après-midi, et c'est soudain l'horreur: quatorze jeunes filles sont parties, parties pour toujours, parties avant d'avoir tout dit.

Parmi les victimes de ce carnage il y en avait une qui m'était plus proche. Ce drame a frappé de plein fouet. Celle que je connaissais s'appelait Anne-Marie. En souvenir de toutes ses soeurs j'ai déposé près de sa tombe 14 lys blancs. J'ai pensé un moment y ajouter une rose rouge, une rose dédiée à la mère de Marc Lépine, mais je ne l'ai pas fait. La violence qui s'est abattue sur cette femme le soir du 6 décembre dépassait l'imagination. Cette femme, au plus profond de son âme, est morte.

Le vice-président: Chers collègues, comme le sujet dont nous sommes saisis est très sérieux, je demanderais à mes collègues de faire leurs conversations hors de la Chambre. Madame, vous pouvez continuer.

Mme Dalphond-Guiral: Merci, monsieur le Président. J'ai donc pensé un moment y ajouter une rose rouge, une rose dédiée à la mère de Marc Lépine. Le soir du 6 décembre, la violence qui s'est abattue sur cette femme dépassait l'imagination. Mais je ne l'ai pas fait. Cette femme, au plus profond de son âme, est morte.

Je veux lui dire aujourd'hui ce que je n'ai pas su lui dire le 6 décembre: Madame, votre chagrin est le nôtre; nous le partageons par solidarité et nous nous refusons de cautionner la violence au quotidien parce que cette violence finit toujours par exploser et laisser des cicatrices indélébiles.

Aux familles éprouvées le 6 décembre 1989, et plus particulièrement aux trois familles lavalloises, je veux dire que nous pensons à elles et que cet ultime sacrifice est devenu le symbole du non à la violence faite aux femmes.

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): C'était le 6 décembre 1989. Je me souviens très bien de cette soirée il y a cinq ans. Il faisait froid et il y avait beaucoup de neige à Ottawa.

Je me souviens particulièrement bien de cette soirée parce que le chef de l'opposition, qui était alors le député de Vancouver Quadra, donnait une réception à Stornoway pour les membres du caucus libéral. Je me souviens de la camaraderie, de l'atmosphère de Noël.

Certains d'entre nous étaient sortis dîner ensemble après la réception à Stornoway. Nous étions plus d'une douzaine dans un restaurant du centre-ville d'Ottawa et nous attendions le député de Humber-Sainte-Barbe-Baie-Verte, aujourd'hui ministre des Pêches et des Océans. Nous nous demandions ce qui le retenait et pourquoi il nous retardait. Je me souviens très bien. Il y a tant de souvenirs comme cela qui sont gravés dans notre mémoire. Je revois encore le député lorsqu'il est entré, tout pâle, dans le restaurant pour nous dire qu'il venait d'entendre à la radio que 14 jeunes femmes avaient été tuées à l'École polytechnique.

Je me souviens de bien des choses, mais j'en oublie d'autres. Je me souviens de la réaction de mon collègue, un des plus anciens députés à la Chambre. Comme les députés le savent, le député de Renfrew-Nipissing-Pembroke siège depuis de nombreuses années à la Chambre. Il était assis à côté de moi et a simplement dit que des choses comme cela ne se produisent pas au Canada. Elles ne sont pas censées se produire.

(1510)

Je me souviens que, plus tard ce soir-là, dans mon appartement, la députée de Saint-Laurent-Cartierville et moi-même étions rivées au petit écran pour regarder le reportage de Ian MacDonald de la CBC en provenance de l'École polytechnique. Je me souviens des fleurs dans la neige. Je me souviens particulièrement d'une jeune femme, une étudiante, qui parlait de sa rencontre fatidique avec Marc Lépine dans un des corridors de l'École polytechnique. Elle décrivait comment elle l'avait vu, comment elle s'était accroupie, comment il avait pointé l'arme vers elle et avait tiré deux fois et comment, par une chance incroyable ou par la grâce de Dieu, les deux coups avaient raté. Elle ne cessait pas de dire qu'elle ne savait pas pourquoi elle était encore en vie et pas les autres.


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Je me rappelle plus particulièrement, depuis le moment où j'ai appris la nouvelle jusqu'à aujourd'hui cinq ans plus tard, avoir compris que des femmes avaient été éliminées du nombre des étudiants. Elles ont été distinguées. Elles ont été alignées contre un mur et exécutées.

Elles ont été exécutées parce que, selon cet esprit indubitablement dérangé, elles s'étaient pour ainsi dire élevées au-dessus de leur condition. Elles s'étaient écartées de la norme. Elles s'étaient engagées dans une profession non traditionnelle pour les femmes. Elles avaient osé faire une chose que, selon cet esprit dérangé, les femmes n'étaient pas censées faire.

Je tiens à rendre spécialement hommage à deux de mes anciennes collègues à la Chambre. Je veux rendre tout particulièrement hommage à Dawn Black, l'ancienne porte-parole officielle du Nouveau Parti démocratique touchant la situation de la femme. C'est grâce à ses efforts pour faire adopter une mesure d'initiative parlementaire qu'elle avait présentée, que ce jour est devenu la Journée nationale de commémoration et d'activités concernant la violence dirigée contre les femmes.

Je me rappelle être intervenue plusieurs fois à la Chambre pour appuyer Dawn et avoir été appuyée par les autres femmes auxquelles je voudrais également rendre hommage aujourd'hui, d'abord l'honorable Mary Collins, qui était alors la ministre responsable de la situation de la femme, et notre collègue, la députée de Saint-Hubert, du Bloc québécois, qui ne nous a pas ménagé son appui à ce sujet.

Je me rappelle ces événements, et je veux que nous nous en rappelions tous. Je me rappelle les personnes que j'ai rencontrées quand cette terrible tragédie a polarisé le débat et la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Une personne que je n'oublierai jamais et à laquelle je voudrais également rendre hommage aujourd'hui est Suzanne Laplante-Edward, la mère d'Anne-Marie Edward, une des victimes. Elle ne voudrait probablement pas qu'on la signale aujourd'hui. Elle se représenterait plutôt comme une mère et une militante, mais elle est devenue également un symbole. Elle aurait probablement préféré demeurer la mère d'une ingénieure.

Ce qui est arrivé par cette froide soirée de décembre à Montréal nous a toutes galvanisées jusqu'à un certain point, mais il nous reste encore beaucoup de chemin à faire. Il est bien vrai qu'il existe dans notre société de la violence dirigée contre les hommes et contre les enfants. Il n'est cependant pas raisonnable de refuser de reconnaître que la violence dirigée contre les femmes constitue un problème particulier qui se rencontre dans tous les groupes culturels, dans toutes les sociétés de tous les coins du globe et dans tous les groupes raciaux. C'est une tragédie et une horreur, mais cela existe. Le fait que les hommes et les enfants sont eux aussi victimes de violence ne diminue en rien le problème particulier auquel les femmes font face dans beaucoup trop de cas en s'éveillant remplies de frayeur dans leur propre maison. Ce n'est pas parce que nous parlons de combattre ce problème que nous accordons moins d'importance aux victimes d'autres formes de violence, mais nous soulignons le caractère spécial de ce problème, qui exige des interventions, des moyens de protection particuliers. J'ai déjà parlé des journalistes et notamment de Ian MacDonald, de la CBC. Je voudrais dire un mot de Stevie Cameron, et je doute qu'une seule femme qui a lu le Globe and Mail cette semaine-là ait oublié l'incroyable chronique de cette journaliste, qui a choisi comme titre: «Que pouvons-nous dire à nos brillantes jeunes filles?» Elle se faisait l'interprète de nous toutes, celles d'entre nous qui ont des filles, celles d'entre nous qui ne sont pas mères mais ont des responsabilités envers toutes les filles. Elle a parlé de sécurité. Elle a parlé d'éduquer les jeunes femmes pour leur apprendre à ne pas vivre dans la peur. Elle a parlé de nos inquiétudes pour nos jeunes, qu'il s'agisse de nos enfants ou des jeunes en général. Je n'oublierai jamais ses mots.

(1515)

Hier encore, je regardais dans mon bureau une plaque avec la photo de ces 14 jeunes femmes. Je crois que leur âge moyen était de 22 ans. Je me suis fait la réflexion qu'une d'entre elle était très âgée. Elle avait 29 ans. Quel terrible gaspillage ce fut à Montréal, ce soir-là. Ces jeunes femmes auraient tellement fait pour leur profession, leur propre famille, leur collectivité, leur province, leur pays, pour nous tous.

Mme Edwards a dit dans son interview, dans la Gazette de Montréal de ce matin, que ce que notre pays a perdu, ce n'est pas seulement toute cette beauté, ce talent, cet enthousiasme, mais aussi une partie de son innocence et de sa candeur, car, comme le disait mon collègue de Renfrew-Nipissing-Pembroke, il n'est pas normal que ce genre de chose se produise au Canada. Soudain, c'est arrivé.

À la Chambre, nous avons de nombreux débats animés sur le contrôle des armes à feu, la violence ainsi que les moyens de l'enrayer et d'éviter qu'une tragédie comme celle de Montréal ne se reproduise. Si nous avons de la chance, jamais pareil massacre ne se reproduira au Canada. Nous prions tous pour cela. Le drame, c'est que, dans notre pays, la violence faite aux femmes est une réalité quotidienne.

Certains d'entre nous arborent aujourd'hui un macaron sur lequel est inscrit: «Plus jamais de 6 décembre 1989.» Le drame, c'est que cela continue, que nous n'avons pas encore réglé le problème de la violence faite aux femmes. Le drame, c'est que, tous les six jours, une femme est tuée au moyen d'une arme à feu au Canada. Je n'ai pas inventé ces statistiques. Elles existent et elles sont vraies. Le drame, c'est que des femmes sont battues, brutalisées et victimes de mauvais traitements.

D'autres sont aussi battus, brutalisés et victimes de mauvais traitements, c'est vrai, mais je le souligne et je le répète, un problème horrible et profondément enraciné accable la société canadienne, que ce soit en Colombie-Britannique, au Yukon, en Nouvelle-Écosse ou dans le sud de l'Ontario, aussi bien dans les villes qu'en milieu rural. Ce problème peut se manifester et il se manifeste effectivement dans chacune de nos circonscriptions. Dans une certaine mesure, nous sommes tous terrifiés et frappés par notre impuissance devant cette situation épouvantable et inacceptable.

Nous sommes des législateurs. Quels que soient nos antécédents ou nos convictions politiques, nous sommes tous ici parce que nous souhaitons ce qu'il y a de mieux pour les électeurs de nos circonscriptions et pour l'ensemble des Canadiens. Nous devons adopter les dispositions législatives que nous estimons appropriées. Nous devons comprendre que, pour enrayer la pro-


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pagation de ce fléau dans notre société, il faut parfois adopter des mesures radicales.

(1520)

Même s'il fallait empiéter sur certains droits, que ce soit le droit au respect de la vie privée ou celui de posséder certaines choses, il faut que chacun d'entre nous comprenne que le problème est tellement grave, persistant et envahissant dans notre pays que nous risquons d'être jugés très sévèrement si nous ne prenons pas les mesures nécessaires pour le régler.

Il y a un an et demi, le groupe d'étude formé d'hommes et de femmes d'élite chargé d'enquêter sur la violence faite aux femmes a déposé son rapport. C'était l'été avant les élections, et une partie de mon travail consistait à y répliquer. Je pense maintenant que ma réplique a été un peu trop dure. Ce groupe d'étude à coûté cher. Selon la députée du Yukon, il a dépensé près de 11 millions de dollars. Il est certain que j'ai encore des réserves à faire au sujet de certaines de ses constatations.

Cependant, je ne l'ai peut-être pas assez souligné à l'époque, et je le souligne aujourd'hui, comme le feront sans doute d'autres députés, c'est que ce groupe d'étude a fait très clairement état du fait que la population canadienne reconnaît que le problème de la violence faite aux femmes est profondément enraciné au Canada-et je dis bien violence faite aux femmes, car c'est bien de cela qu'il s'agit. Il ne s'agit pas de violence familiale, de violence conjugale, mais de violence faite aux femmes. Il ne faut pas se cacher derrière les mots. Il s'agit d'un problème dont encore trop de gens ne reconnaissent pas l'existence. Ces gens-là pensent que c'est un problème propre à une étrange sous-culture. Il y en a même ici à la Chambre-je le répète, je n'impute des arrières-pensées à personne; il s'agit simplement d'inconscience-qui pensent que la violence est provoquée, que les victimes provoquent en quelque sorte la violence contre elles.

Nous devons tous veiller à bien comprendre qu'il est mal de frapper autrui. C'est une infraction criminelle. On ne doit pas ranger ces agressions dans une catégorie à part parce qu'il s'agit d'actes commis à la maison, d'actes mettant en cause un homme et sa femme. Ce n'est pas parce qu'ils partagent le même lit que c'est différent. C'est de la violence. C'est toujours une infraction. Ce n'est jamais acceptable. Trop de femmes sont mortes. Trop de femmes ont été blessées. Trop d'enfants ont été battus.

Nous vivons au Canada. Le député de Renfrew-Pembroke-Nipissing a dit, il y a cinq ans ce soir, que ce genre de chose n'arrivait pas chez nous. Ce genre de chose ne devrait pas arriver chez nous. Nous devons tout faire en tant que législateurs pour que cela ne se reproduise plus.

Mme Catterall: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Étant donné l'intérêt manifesté dans ce débat, je voudrais vous dire que les ministériels vont diviser leur temps de parole à partir de maintenant.

(1525)

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat d'aujourd'hui et de prendre la parole après la députée de Halifax qui a parlé avec tant d'émotion et d'éloquence. Je suis certain que la Chambre a été très bouleversée il y a cinq ans, quand cette tragédie s'est produite.

Il est particulièrement opportun de réfléchir à cette situation parce que nous sommes en train de nous pencher sur la violence dans notre société et que nous commençons à examiner le projet de loi C-41, sur les crimes motivés par la haine, et la mesure législative sur le contrôle des armes à feu.

Toutes ces choses sont étroitement liées les unes aux autres et sont liées également à la violence qui se fait sentir un peu partout dans notre société. Quand on voit, à la télévision, des émissions pour enfants où une scène de violence n'attend pas l'autre, quand on voit, au cinéma, des films qui sont presque exclusivement basés sur la violence, peut-on être surpris quand une situation de violence éclate près de nous?

Cette tragédie a atteint un degré d'horreur que nous n'avions jamais vu au Canada, parce qu'il s'agissait d'un acte délibéré qui visait des femmes. Ce geste a été posé par une personne qui aurait pu être notre voisin, l'un de nos enfants, une personne qui était en apparence normale et que rien ne distinguait des autres.

Les victimes de cette tragédie étaient des personnes ordinaires. Le meurtrier s'en est pris à elles parce que c'étaient des femmes et qu'il voyait en elles une menace, étant donné qu'elles étudiaient en génie, un secteur qui était, pour ainsi dire, l'apanage des hommes.

Mon épouse et moi avons une fille qui est ingénieure. Nous savons que les femmes ingénieures sont rares, qu'il n'y en a pas beaucoup. Cela nous touche beaucoup à cause du caractère très ordinaire des personnes frappées par cette tragédie et du fait que cette tragédie s'est produite au Canada. On pense que de telles choses n'arrivent pas au Canada.

Or, cela arrive au Canada, cela arrive dans tout le pays, avec une fréquence alarmante et sans qu'on s'y en attende. Ici, à Ottawa, il y a eu ce jeune homme qui venait tout juste de terminer ses études universitaires. Il a été tué comme ça, sans raison, par un jeune contrevenant qui a tiré d'une voiture en marche.

Au vu de cette tragédie et du terrible massacre survenu à l'École polytechnique de Montréal, il y a cinq ans, tous les députés à la Chambre doivent penser à tous ceux et toutes celles qui sont victimes d'actes violents, pas seulement à celles qui ont été tuées ce soir-là, mais aussi à Barb Danalesko qui, réveillée dans la nuit, a été tuée comme les autres, ravie aux siens.

En tant que société et en tant que corps législatif, nous devons dépasser la surface des choses et voir s'il n'y aurait pas moyen d'en découvrir les causes, de déceler les faits de société qui provoquent ou permettent ce genre de tragédies. Nous savons que la violence faite aux femmes est généralement liée au milieu familial.


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(1530)

Ce qui m'a toujours étonné dans les cas de violence au foyer, c'est que ce sont les femmes et les enfants qui finissent par quitter les lieux pour aller dans une maison de refuge. On donne un avertissement à l'auteur de l'acte violent, mais ça va rarement plus loin. Il s'agit généralement d'un homme et on laisse cet homme aller à son travail et mener une vie à peu près normale. Or, qu'arrive-t-il aux enfants? On les expédie ailleurs, on les arrache à leur maison et à leur environnement, on les arrache à leurs amis et, dans les cas de harcèlement, on les arrache même à leurs familles élargies.

Pourquoi ne jette-on pas le mari en prison? C'est que le mari a des droits. La société n'a aucun droit. Les enfants n'ont aucun droit. La femme, qui en est peut-être morte, n'a aucun droit. Et l'homme, lui, a des droits.

Au cours de son intervention à propos du contrôle des armes à feu, la députée de Halifax a dit que, pour le bien suprême, il fallait parfois passer outre aux droits de certains. Je crois qu'elle faisait allusion aux armes à feu et au fait que les droits qu'ont les particuliers de posséder et d'utiliser des armes à feu doivent être restreints d'une façon ou d'une autre.

Si nous admettons ce fait, il nous faut aussi, toujours pour le bien suprême, restreindre les droits des maris. Je trouve absolument illogique que notre société en soit venue à une situation où on protège les droits d'un mari violent et où on expédie la femme et les enfants dans une maison de refuge parce qu'on ne peut aller contre les droits du mari. Cela n'a absolument aucun sens. Pourquoi ne pouvons-nous pas l'envoyer en prison pendant 90 ou 120 jours, le temps qu'il réfléchisse?

Les statistiques révèlent qu'une vaste majorité des femmes qui sont blessées ou tuées ont été victimes d'actes de violence familiale. Or, dans la majeure partie des cas, les voisins ou les amis savent qu'une catastrophe est imminente. Alors, si nous, en tant que concitoyens, voisins ou proches parents, savons ce qui se passe, pourquoi ne pouvons-nous pas intervenir? Pourquoi ne pouvons-nous pas alerter la police?

Nous savons que la violence est un des facteurs sous-jacents dans les homicides au sein de la famille. Nous savons que si des gens ne s'entendent pas bien, les risques de meurtre sont considérablement plus élevés. Par conséquent, il serait bon que la police puisse intervenir très gentiment en leur disant: «Nous savons que vous avez des problèmes. Nous ne voulons pas qu'ils s'aggravent. Nous savons aussi que vous avez des armes à feu. Nous voulons les retirer de votre domicile pour protéger la société et pour le bien de tous. Lorsque ces problèmes se résorberont, nous vous retournerons vos armes.»

Des lois en ce sens existent déjà. Nous n'aurions pas besoin d'une nouvelle loi. La police a le droit de confisquer des armes à feu si elle estime et sait qu'un crime risque d'être commis à l'aide de ces armes.

Nous devrions être prudents lorsque nous promulguons des lois qui traitent de la violence dans les foyers ou dans la société en général. La violence est devenue endémique dans la société canadienne. Ce que le gouvernement essaie actuellement de faire, à mon avis, c'est de faire passer la politique avant le principe. Le principe que nous devrions appuyer, en tant que nation, c'est que nous n'accepterons jamais que la violence devienne la façon de régler les différends dans notre société, que cela touche un père et son fils, un mari et son épouse ou deux frères. Il n'est pas question d'avoir recours à la violence pour une raison pareille.

(1535)

Nous sommes tous d'accord sur ce principe. Je suis persuadé que, dans notre société, nous ne tolérons tout simplement pas que la violence soit un moyen de régler les différends. Cependant, qu'est-ce qui se produit dans une société où nous déclarons que certaines formes de violence ou la violence dirigée contre certains groupes sont moins acceptables que d'autres? C'est ce qui arrive, selon moi, lorsque nous commençons à prévoir des peines associées à certaines caractéristiques de la victime, plutôt qu'au principe voulant que la violence soit inacceptable. C'est un peu comme si nous permettions certaines formes de violence ou la violence dirigée contre des personnes qui ne font pas partie d'une catégorie protégée.

Je sais que ce n'est pas l'objectif du projet de loi ni du gouvernement. C'est pourtant la réalité. Nous avons renoncé au principe d'équité pour tous et l'avons remplacé par la notion établissant que des crimes commis contre une personne d'un sexe en particulier ou d'un groupe donné sont plus haineux que d'autres. C'est tout à fait insensé.

On ne s'attaque pas alors à la cause profonde du problème qui nous afflige dans la société, à savoir que nous tolérons des niveaux de violence encore plus grands comme moyen de résoudre des conflits. On peut le constater dans nos écoles primaires et à la télévision. Je me demande combien de gens ont jamais regardé l'émission pour enfants Power Rangers qui a été interdite à tant d'endroits.

Lorsque les enfants grandissent en regardant des émissions où on accepte et on tolère une violence toujours plus grande, est-il surprenant alors que, dans notre société, on finisse par avoir recours à la violence dans le cadre de querelles? Je parle directement de la violence familiale qui représente, bien entendu, la majeure partie des cas de violence dans notre société.

Je voudrais aussi m'arrêter un instant cet après-midi sur la violence à l'égard des enfants, cette violence passive qui prend la forme de la négligence. À Edmonton, on retrouve un foyer appelé le Refuge pour jeunes. Il est administré par quelques professionnels, quelques employés très compétents et de très nombreux bénévoles. Il est financé largement par des dons. Sa réputation au sein de la collectivité est enviable.


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En 1983, en neuf mois, le refuge d'Edmonton a accueilli près de 200 jeunes de 14 à 16 ans. L'année dernière, le nombre a grimpé d'environ 15 p. 100 et plus de 200 jeunes ont reçu de l'aide au refuge. Nous avons demandé aux responsables de ce refuge pourquoi les jeunes s'adressent à eux et quel est leur taux de réussite.

(1540)

Si nous adoptons une approche préventive à l'égard de la violence dans nos collectivités, il me semble qu'il serait plus logique d'intervenir en appuyant des organismes comme ce refuge pour jeunes afin que les enfants, ou plutôt des jeunes de 13 ans qu'on ne peut certainement pas appeler des enfants, puissent disposer d'un lieu où ils pourront se réfugier et où on les accueillera sans poser de questions. Lorsqu'ils frappent à cette porte, ils n'ont pas à se justifier en demandant d'entrer parce qu'ils ont fait ceci ou cela. Ils n'ont qu'à se rendre au refuge. Une fois sur place, ils doivent respecter les règles, mais ils sont accueillis, nourris, logés, ils reçoivent de l'attention et de l'affection et les intervenants tentent dans la mesure du possible de réunir ces jeunes et leurs familles.

Entre parents et enfants, les conflits atteignent parfois l'état de crise et le point de non retour. On échange des paroles et parfois même des coups. Un geste en entraîne un autre et l'enfant quitte la maison. Même s'ils ont tort, les jeunes croient souvent qu'ils ne peuvent pas retourner chez eux parce qu'ils n'y sont plus les bienvenus.

Dans bien des cas, il suffit d'une période de décompression. Les jeunes ont besoin de réfléchir et les parents, de parler à des gens ayant une certaine expérience en la matière. Les parents ont toujours l'impression d'être les premiers à vivre certains événements, mais j'ai appris, durant ma courte association avec le Refuge pour jeunes et ma longue expérience dans le cadre des programmes pour jeunes du club Rotary, que la situation n'est jamais nouvelle, que quelqu'un d'autre l'a toujours vécue avant nous et que nous sommes toujours nombreux dans le même bain.

Il faut quelqu'un qui ait les qualifications voulues, un peu de compassion et la motivation nécessaire pour servir d'intermédiaire entre les parents et l'enfant afin de le ramener, si possible, dans sa famille où on prendra soin de lui. Malheureusement, nous savons que cela n'est pas toujours possible. Il arrive que la seule chance de salut pour un jeune soit de quitter sa famille pour échapper aux mauvais traitements.

Notre société y gagnerait beaucoup si nous faisions en sorte que ces jeunes, qui ne peuvent retourner chez eux, aient un endroit où se réfugier et où se sentir en sécurité. Nous leur éviterions la prison et ils finiraient par devenir des membres productifs de la société.

Ayant eu l'occasion de participer au débat d'aujourd'hui, je tiens à souligner que je reconnais que nous tous, hommes et femmes, avons un rôle à jouer pour prévenir la violence faite aux femmes, si courante dans notre société, ou pour améliorer la situation d'une façon ou d'une autre. Je pense également que nous devons envisager le problème sous l'angle plus large de la violence dans la société en général et, plus particulièrement, de la violence passive que représente la négligence, de même que les sévices dont souffrent les enfants dans leur famille.

[Français]

Le vice-président: Tout à l'heure, j'ai indiqué que j'allais donner la parole au député de Matapédia-Matane. Comme le ministre de la Justice n'est pas venu pour parler à ce moment, je cède donc la parole au député de Matapédia-Matane.

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, il est sûr qu'il faut se souvenir. J'étais chez moi lorsque j'ai appris la tragédie de Polytechnique, et même après cinq ans, c'est presque aussi cruel.

J'ai enseigné toute ma vie au secondaire, dans un milieu rural.

(1545)

Même dans une école polyvalente de 1 200 étudiants et étudiantes, il y avait passablement de violence, tellement, que certains enfants entre eux se persécutaient d'une façon, je dirais, presque tragique.

Au début de ma carrière, il y avait également de la violence sauf qu'elle était plus sporadique. À la fin de ma carrière dans l'enseignement, c'était presque journellement.

Tantôt, on a parlé de violence verbale et la violence verbale existe énormément chez les jeunes. C'est beau de la décrire cette violence-là. Bien sûr, quand on parle de violence, il n'est plus question de parti, il n'y a que des victimes et quand on pense aux victimes, on oublie évidemment les mesquineries.

Je voudrais poser une question à cette Chambre: Comment se fait-il qu'il y ait autant de violence? Quand un jeune n'est pas aimé, il ne s'aime pas. Et un jeune qui ne s'aime pas, il devient violent. Il éprouve une violence terrible qu'il va manifester de différentes façons.

Comment va-t-il manifester cette violence? Par des coups, par des paroles dures, par des outrages. On dit que la violence appelle la violence. On va former des gangs: trois contre trois, quatre contre quatre, etc. À ce moment-là, ça devient des gangs. Ces gangs continuent et s'alimentent très souvent de drogues, vont chercher des armes et cela n'a presque plus de limite.

Comment faire pour enrayer cela? Je crois qu'il y a différents moyens. En allant chercher des causes, en découvrant des causes, il faudra arriver aux moyens. Un moyen qui nous paraît excellent c'est la prévention. Dans plusieurs écoles, on a fait beaucoup plus de prévention que dans d'autres. Dans celles où on a fait beaucoup de prévention, le taux de violence a diminué considérablement.

Je m'aperçois également que dans les milieux où la pauvreté et le chômage sont plus fréquents on s'aperçoit que les crimes également deviennent plus nombreux et plus fréquents.

Que de jeunes étudiantes se fassent assassiner, c'est tragique, mais que deux jeunes fassent un pacte de suicide, c'est également tragique. J'ai vécu cela dans mon comté il y a deux ans, deux jeunes se sont suicidés. Quand on regarde ces jeunes-là intelligents, en santé, on se dit: Comment se fait-il qu'ils en soient arrivés à ne plus aimer la vie? Comment se fait-il qu'ils aient voulu se délivrer de leur propre vie? Il faut chercher la cause, il faut s'interroger. Une question me vient à l'esprit: Est-ce qu'on peut arriver à 16 ans, 17 ans, 20 ans à penser au suicide? Il y a beaucoup de mes élèves qui se sont suicidés et chaque fois me je disais: il y a une cause. Il y a une raison, parce que, on le sait très bien, ceux qui ont approché un peu plus la mort s'accrochent à la vie.


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(1550)

Quand tu es en bonne santé, que tu décides personnellement de t'enlever ta propre vie, et je n'ai pas de conclusion, c'est qu'il y a différentes causes, et pas seulement une, alors, il faut la trouver.

Il y a d'autres élèves qui sont en prison, de mes propres élèves, que je vois de temps à autre. Apparemment, à 15 ou 16 ans, ils étaient comme tout le monde, aussi généreux. Comment se fait-il que ce soit lui et pas l'autre? C'est que la vie leur a fourni certains éléments, ou ils se sont mis dans une espèce de carcan, dans certaines conditions, qui ont fait que cela a donné des résultats malheureux, très malheureux.

Je dis qu'il faut adopter des lois sur les armes, bien sûr, mais il y a plus que ça à faire. Il faut, à mon avis, dès le primaire, trouver des moyens pour enrayer cette petite violence qui naît année après année. Comment se fait-il qu'un enfant de trois ou quatre ans puisse devenir tellement agressif qu'il est presque prêt à étouffer son petit voisin? Si on les prend à 25 ans et qu'on les envoie au pénitencier, la société paie énormément cher. Des fois, ils reviennent avec des trucs nouveaux et certains, pas tous évidemment, recommencent.

Mon propos n'a pas trait aux armes. Je suis d'accord qu'on contrôle les armes. Je suis tout à fait d'accord. Ce n'est pas de les envoyer en prison, les endurcir pendant 20, 25 ou 30 ans. Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire, ce n'est pas ce que je dis. Je dis tout simplement qu'il faut aller à la cause, aller chercher, trouver, détecter les causes premières et ce, le plus tôt possible.

Des enfants arrivent à l'école primaire, ils n'ont pas déjeuné, ils n'ont pas dîné, et ils auront seulement un petit quelque chose pour le souper.

Il y avait certains grands élèves qui disaient: «La pauvreté, ça n'existe pas ou presque pas». À un moment donné, pendant la période des Fêtes, à l'école où j'enseignais, on a fait des paniers. J'ai dit à ces grands étudiants qui étaient fort en bras et en parole: «Venez avec moi.» Ils sont venus et la première maison où nous sommes allés, il y avait deux caisses de 24 bouteilles de bière vides, un monsieur était couché sur une espèce de divan, des armoires vides et des enfants qui pleuraient.

Ensuite, lors de notre retour, ces jeunes de 16, 17 ou 18 ans, assez durs, ont dit: «La pauvreté existe et on devrait aller rencontrer des familles pauvres plus souvent». Pour ces jeunes-là qui avaient déjà fait certains mauvais coups, certains vols, on peut comprendre qu'ils se trouvaient plus chanceux que d'autres, mais il faut mettre du temps pour le leur faire comprendre. Il faut leur faire vivre des expériences, autrement, leur coeur se durcit et à ce moment-là, on ne s'aime plus, et si on ne s'aime plus, tout est bon et on essaie d'émerger dans cette société, on essaie de devenir quelqu'un et cela, on le fait en étant en marge de la société.

Alors, je suis content que l'honorable ministre de la Justice soit là.

(1555)

Je lui demanderai si dans toutes les lois qu'on va adopter on ne peut pas mettre davantage l'accent sur la prévention. La prévention doit se faire dès le plus jeune âge, le plus tôt possible, parce que, à l'âge de 40 ans, lorsque quelqu'un est allé souvent en prison, je ne dis pas qu'il n'y a rien à faire, mais c'est sûrement beaucoup plus difficile.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je me permets de citer le message publié aujourd'hui dans les journaux du Québec:

Chaque personne doit ouvrir les yeux et refuser les diverses manifestations de la violence faite aux femmes, tant dans les petits gestes que dans les grands.
«Plus jamais, Polytechnique!»

Je me suis engagé personnellement, en tant que ministre de la Justice, à mettre de l'avant des mesures qui permettront de lutter contre cette violence.

[Traduction]

Pour être franc et direct, quand on nous demande ce que fait le gouvernement pour combattre la violence dans la société, en particulier la violence faite aux femmes, nous ne faisons pas assez.

Nous avons pris certaines mesures et sommes résolus à en prendre d'autres. Je pense qu'en travaillant avec les députés à la Chambre qui ont exprimé avec tant d'éloquence leur engagement à l'égard des principes que nous partageons et des efforts que nous faisons, nous pouvons vraiment changer les choses grâce à cette mesure législative.

Les mesures que nous avons prises incluent les changements qu'il est envisagé d'apporter dans le projet de loi C-42 au régime des ordonnances de bonne conduite, qui font que celles-ci sont plus faciles à obtenir du tribunal, ce qui permet aux policiers de présenter des demandes d'ordonnances préventives au nom des femmes victimes, facilite l'application de ces ordonnances et rend la violation de ces dernières plus grave.

Elles incluent aussi la création du Conseil national de prévention de la criminalité. Je suis tout à fait d'accord avec le député qui vient de prendre la parole quant à l'importance de la prévention dans tout ce que nous faisons. Le Conseil national de prévention de la criminalité qui s'est réuni pour la deuxième fois en octobre a fait de la violence contre les femmes et les enfants dans la société canadienne un de ses objectifs prioritaires pour les mois à venir.

Les mesures que nous avons prises incluent également le programme de prévention de la violence au foyer, placé sous la direction de ma collègue, la ministre de la Santé, ainsi que les efforts que suppose ce programme au plan de la coordination des programmes d'action mis en place à tous les paliers de gouvernement afin de combattre la violence familiale à l'égard des femmes et des enfants.


8709

La semaine dernière, notre gouvernement a exposé sa politique en ce qui concerne le contrôle des armes à feu et la façon directe dont cette politique est censée s'attaquer au problème de la violence familiale. Hier matin, à Edmonton, j'ai eu l'honneur de prononcer un discours à un déjeuner organisé pour recueillir des fonds destinés aux refuges pour femmes victimes de violence et aux services communautaires mis en place à l'intention de ces femmes. J'ai alors insisté sur l'une des caractéristiques de notre politique de contrôle des armes à feu qui en font un régime sensé, l'enregistrement obligatoire. Cette exigence donnera en effet à la police un moyen de faire respecter les ordonnances d'interdiction lorsqu'elles sont émises en raison d'un conflit familial.

Dans l'état actuel des choses, la loi permet de prendre des ordonnances d'interdiction, mais lorsque les agents arrivent sur les lieux pour veiller à leur application, ils n'ont aucune idée des armes qui peuvent se trouver dans la maison. Ils doivent donc se fier à la parole des occupants, qui lui indiquent quelles armes prendre. Ce n'est évidemment pas suffisant. Il faut qu'il y ait un registre. Un registre général des armes à feu sera constitué, et ce problème sera réglé.

J'en profite pour rappeler que je coordonne les efforts de neuf des ministres du Cabinet fédéral, qui cherchent à mettre au point un plan coordonné de lutte contre la violence dans l'ensemble de la société canadienne. Par exemple, le ministre du Patrimoine canadien est de ce nombre. Il s'intéresse pour sa part à la violence à la télévision. Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien y participe également, sur le chapitre des incidents violents qui surviennent dans les collectivités autochtones. Ensemble, nous coordonnons nos efforts pour prendre un éventail de moyens qui permettront de réduire les problèmes dus à la violence.

(1600)

[Français]

Enfin, le 13 juin dernier, nous avons déposé le projet de loi C-41, qui propose certains changements au processus de détermination de la peine. Ces changements feraient de l'abus de confiance ou d'autorité envers une victime, lors d'une infraction, un facteur aggravant pour la détermination de la peine.

Ce projet de loi sert à offrir une protection supplémentaire aux femmes contre la violence dont elles sont victimes aux mains d'une personne en position de confiance.

[Traduction]

Cette mesure aidera également, même si aucune des mesures prises n'est suffisante en soi.

Nous avons encore beaucoup à faire en tant que gouvernement. Nous devons faire davantage au ministère de la Justice pour évaluer et vérifier les conséquences de toutes les lois, en particulier les lois qui relèvent du droit pénal et leurs différentes conséquences selon le sexe des personnes visées. Quelles sont les conséquences spécifiques des modifications que nous apportons de temps en temps aux dispositions du droit pénal, pour les personnes des deux sexes?

Au ministère de la Justice, nous devons travailler plus dur et plus rapidement pour résoudre le problème, qui s'aggrave continuellement, de la divulgation des dossiers confidentiels lors des poursuites criminelles. Les avocats réclament souvent par citation la production de tels documents concernant la plaignante qui peuvent être les dossiers de leur médecin traitant, des dépositions de personnes de confiance auxquelles la plaignante a fait des déclarations, des dossiers de centre d'aide aux victimes de viol qui aurait aidé la plaignante immédiatement après l'agression présumée.

Nous devons trouver un moyen de résoudre ce problème, en tenant compte d'une part du droit de l'accusé de bénéficier d'une défense complète, ce qui est fondamental en droit, mais d'autre part du droit de la plaignante de ne pas être victimisée une seconde fois par une intrusion injustifiée dans sa vie privée, car cela reviendrait à de l'intimidation pour l'empêcher de donner suite à la poursuite.

Il faut aussi s'attaquer à la question de l'invocation de l'ivresse comme défense. Je travaille actuellement à des propositions législatives que je présenterai en février. À bien des égards, c'est une question qui concerne les femmes en même temps qu'une question de droit criminel. Ce n'est pas par hasard que l'affaire Daviault comporte des allégations d'agression sexuelle par un homme. Ce n'est pas par hasard non plus que les affaires qui se sont produites ensuite dans d'autres provinces comportaient très souvent des allégations de violence contre des femmes.

Donc, face à ces défis, face au fait que nous ne faisons pas assez et que nous devons faire plus, face à tout ce qui reste à faire, force est de constater qu'il y a urgence. J'invite donc tous les députés à participer avec le gouvernement à la réalisation de cet objectif de société, faire que nos filles héritent d'un pays différent, un pays qui rejetterait expressément, et par un geste civique fondamental, la violence sous toutes ses formes et en particulier la violence contre les femmes et les enfants. Ce doit être notre objectif et nous devons travailler ensemble à l'atteindre.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, à mon avis, il ne fait aucun doute que tous les députés abhorrent la violence, peu importe qu'elle soit dirigée contre les femmes ou contre les hommes. Cela ne fait aucun doute dans mon esprit.

Ce que je vois aujourd'hui à la Chambre, c'est toujours la même scène qui se répète et qui a pour unique but celui de nous culpabiliser, surtout nous, les hommes. Faisant appel notamment à la Loi canadienne sur les droits de la personne et à la Charte des droits et libertés, on s'en prend aux hommes, en particulier aux hommes de race blanche.

Je voudrais poser au ministre une question pour la forme: Est-ce que tout cela est juste? Le temps n'est-il pas venu de considérer la violence faite contre tout être humain comme étant grave et de s'occuper des criminels violents et, dans une certaine mesure, de ceux qui pourraient commettre des crimes avec violence? C'est au sein de la famille qu'il faut agir. Au lieu de culpabiliser surtout les hommes, nous ferions mieux de nous occuper des criminels et des crimes qu'ils commettent en prenant des mesures de prévention au sein même de la famille.


8710

(1605)

Au lieu d'adopter des lois qui nuisent à la famille, qui la détruisent, traitons-la donc d'une manière équitable dans nos lois fiscales, dans l'ensemble de nos programmes sociaux et dans les autres lois, surtout celles dont le ministre est responsable.

Je termine ma question en me reportant au contrôle des armes à feu. Si le contrôle proposé par le ministre doit empêcher les crimes avec violence, le ministre assume-t-il la responsabilité des crimes qui seront commis une fois que la loi sera en place? Quand il se rendra compte de l'échec total de sa loi sur le contrôle des armes à feu, le ministre franchira-t-il l'étape suivante qui consiste à confisquer toutes les armes à feu?

M. Rock: Monsieur le Président, les propos que je tiens aujourd'hui ne visent pas à culpabiliser le député ou toute autre personne. Je veux tout simplement que nous nous sentions tous responsables et que nous cherchions le moyen de corriger la situation.

Je ne vise pas les hommes blancs, les hommes d'âge moyen ou toute autre sous-catégorie de la population. Je veux que nous voyions la réalité en face. Il est évident que toute violence est inadmissible, mais il arrive parfois que la violence faite à un segment particulier de la société soit si évidente, si étendue, si enracinée dans notre culture qu'il faille prendre des mesures spéciales pour l'enrayer.

Permettez-moi de dire aux députés pourquoi je fais ces affirmations. En novembre 1993, Statistique Canada a publié les résultats d'une enquête unique au monde. Il a interviewé un grand segment de la population à propos de la violence. En fait, tous les répondants à l'enquête étaient des femmes.

Les résultats de l'enquête ont permis de constater entre autres que plus de la moitié des femmes interviewées ont déclaré avoir été victimes, au cours de leur vie adulte, d'un acte de violence commis par un homme. C'est quand même extraordinaire.

Qui suis-je? Je suis un Anglo-Saxon blanc d'âge moyen. Si les députés interrogeaient tous les hommes anglo-saxons blancs d'âge moyen, ils ne trouveraient pas le même nombre de victimes de violence que celui dont faisait état l'enquête que je viens de mentionner. Pourquoi ne pas ouvrir les yeux sur la réalité? Nous avons un problème, un problème qu'il faut régler.

L'homme qui a fait irruption à l'École polytechnique, en tenant un Ruger Mini-14 dans ses mains, il y a cinq ans aujourd'hui, a déclaré avant de tirer: «Amenez-moi les femmes. Je veux abattre les femmes.» Il a tué 14 femmes et en a blessé 13 autres. Il les a choisies au hasard. Il ne s'en est pas pris aux avocats anglo-saxons blancs d'âge moyen. Il s'est attaqué aux femmes, il faut accepter ce fait.

La violence nous entoure. Le député a-t-il regardé la télé récemment, a-t-il vu les vidéos de musique rock diffusés sur MTV ou la publicité où les femmes sont victimes de violence? C'est déplorable. Il faut que cela cesse. En agissant comme je le fais, je ne veux pas que les gens se sentent coupables.

Il est évident que j'appuie la famille. C'est d'ailleurs là où il faut entreprendre nos efforts. Nous devons apprendre à nos enfants à traiter les gens en êtres humains d'abord, peu importe leur sexe.

En ce qui concerne les mesures de contrôle des armes à feu, oui, je crois fermement qu'elles contribueront à réduire entre autres la violence familiale. Est-ce à dire que je prétends que ces mesures mettront un terme à tout jamais à cette forme de violence? Bien sûr que non, puisque nous ne pouvons pas aspirer à un monde parfait, mais je crois sincèrement qu'elles nous permettront d'améliorer la situation.

En terminant, je ne veux pas que le député se sente coupable, car il n'est pas dans notre intention de le culpabiliser pour des gestes posés par d'autres personnes. Nous voulons plutôt qu'il se sente, comme nous, responsable. Ensemble, les députés peuvent agir pour faire de ce monde un monde quelque peu meilleur.

Le vice-président: Il reste à peu près une minute, que je demanderai au député et au ministre de bien vouloir se partager.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, faute de temps, je me contenterai de dire ce que j'ai à dire au ministre de la Justice.

Je l'ai entendu parler de prévention. Certes, la prévention est un élément clé dans la réduction de la violence qui se manifeste dans notre société. Je hais et méprise la violence autant que n'importe qui ici, peu importe contre qui elle s'exerce, mais je voudrais entendre le ministre parler plus souvent de «moyens de dissuasion», de «conséquences» et de «peines», de telle sorte que je puisse espérer que le ministre veillera à ce que les crimes violents soient plus sévèrement punis à l'avenir.

(1610)

M. Rock: Je serai bref, monsieur le Président. Je me contenterai de dire que la dissuasion fait essentiellement partie de mon programme. C'est moi qui ai présenté ici la semaine dernière des dispositions portant à quatre ans la peine minimale ferme pour quiconque est reconnu coupable d'avoir utilisé une arme à feu pour commettre l'un ou l'autre d'une dizaine de délits graves, y compris le vol qualifié.

M. Thompson: Sans possibilité de libération conditionnelle?

M. Rock: Non, mais nous en discuterons au comité. C'est moi qui ai proposé. . .

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le temps est écoulé.

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de parler de cette question aujourd'hui.

Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Havernick, Barbara Marta Klucknik, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie St-Arnault et Annie Turcotte. Ce sont là les noms des 14 femmes qui ont perdu la vie sans raison à l'École polytechnique il y a cinq ans.


8711

Cela m'a toujours dérangée de voir que le nom de leur meurtrier nous vient plus facilement à l'esprit que les leurs. Le 6 décembre sera toujours au Canada la Journée nationale de commémoration et d'activités concernant la violence dirigée contre les femmes. Des cérémonies, des vigiles et des activités publiques sensibiliseront la population aux nombreuses répercussions de la violence faite aux femmes. Ces répercussions touchent le bien-être social, psychologique et économique des femmes, des hommes et des enfants de toutes les couches de la société, d'un bout à l'autre du Canada.

Ce soir, dans ma ville, London, on procède au dévoilement d'un monument à la mémoire de ces 14 femmes et d'autres femmes qui sont victimes de violence. Le monument porte l'inscription suivante: «Le monument aux femmes de London a été inauguré le 6 décembre 1994, date marquant le cinquième anniversaire du massacre de Montréal. C'est un endroit pour méditer sur la violence, particulièrement la violence faite aux femmes, ainsi qu'à toutes les femmes et à tous les hommes qui travaillent pour y mettre fin.»

Les droits des femmes font partie des droits de la personne. Nous devons reconnaître que la violence à l'égard des femmes est souvent un sous-produit de l'inégalité sociale des sexes et peut représenter le rejet de l'acquisition progressive de pouvoirs par les femmes.

Les gouvernements peuvent amener des changements, mais les changements les plus efficaces partent des individus. Tous les hommes et toutes les femmes peuvent prendre un engagement personnel à l'égard du principe de la tolérance zéro, ce qui veut dire qu'aucune violence n'est acceptable et que la sécurité des femmes est une priorité. En tant qu'individus, nous pouvons mettre davantage l'accent sur la collaboration plutôt que sur la concurrence.

Plus tôt aujourd'hui, les quatre femmes des trois partis politiques différents qui représentent des circonscriptions de London au niveau fédéral et au niveau provincial ont produit une déclaration conjointe contre la violence faite aux femmes. La violence contre les femmes est un problème social, même si beaucoup y voient un problème politique.

En tant qu'individus, nous pouvons choisir de ne pas rire aux plaisanteries dénotant de la haine contre les femmes, tout comme nous ne rions pas aux plaisanteries racistes. La violence contre les femmes n'est pas matière à plaisanterie. En tant qu'individus, nous pouvons discuter de ce que vivent les femmes, de leurs craintes et des obstacles auxquels elles se heurtent sur la voie de l'égalité. On se sent encore beaucoup plus à l'aise en niant ou en banalisant les statistiques alarmantes qui ont été accumulées. Mais nier l'existence d'un problème n'a jamais rien réglé. Il est maintenant temps de dénoncer tous les gestes exprimant de la tolérance envers la violence et les comportements sexistes et de dénoter ces gestes.

Lorsque cela est possible, les individus peuvent donner leur soutien financier ou politique aux services s'occupant des victimes et des survivants. Les individus peuvent aussi faire du bénévolat dans les foyers de transition de leur localité et dans les maisons d'accueil des victimes de viol. Ils peuvent appuyer les mesures prises par les gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral et par des organismes non gouvernementaux dans leur voisinage et dans leur ville. La violence contre les femmes leur fait perdre leur estime de soi et leur dignité et, trop souvent, elle gâche leur vie.

Depuis que Statistique Canada a fait sa première enquête nationale sur la violence contre les femmes, en 1993, la première du genre au monde, la gravité de la situation a été mise en lumière. Selon cette enquête, jusqu'à 51 p. 100 des femmes canadiennes ont subi au moins une agression physique ou sexuelle après l'âge de 16 ans. Près de 45 p. 100 de toutes les femmes ont été victimes d'actes violents de la part d'hommes qu'elles connaissaient-un homme avec qui elles sortaient, un petit ami, un conjoint, un ami, un membre de la famille ou un voisin.

(1615)

Au Canada, une femme tombe sous les balles tous les six jours. Les armes à feu sont les armes le plus souvent utilisées dans les homicides de conjoints. De 1974 à 1992, 42 p. 100 des femmes tuées par leur conjoint l'ont été au moyen d'armes à feu. Ces statistiques très troublantes ne révèlent qu'une partie du problème puisque Statistique Canada définit un acte de violence comme étant une agression physique ou sexuelle. Les autres formes que prend la violence contre de nombreuses femmes n'entrent pas dans ces statistiques.

Trois autres types de violence ont été définis dans le rapport de 1993, Changing the Landscape: Ending Violence-Achieving Equality: la violence psychologique, faisant appel à diverses tactiques pour miner la confiance en soi chez la femme; la violence financière, par laquelle le conjoint ou un membre de la famille empêche la femme de prendre un emploi ou de faire des placements; et la violence spirituelle, par laquelle les croyances culturelles et religieuses sont détruites par le ridicule ou des sévices. Toute une gamme d'indicateurs révèlent que ce mal social est omniprésent et systémique.

Par conséquent, des femmes de tous les milieux sont la cible de divers actes de violence. Non seulement les causes et les formes de violence contre les femmes sont extrêmement insidieuses, mais leurs conséquences le sont aussi. La violence laisse des séquelles chez les femmes, bien sûr, mais aussi chez les enfants et les hommes de leur entourage. Le corps est blessé, mais il y a aussi de profondes blessures dans l'esprit et l'âme des victimes.

La santé physique et mentale de la femme maltraitée peut être menacée. Ses chances d'avancement dans sa vie professionnelle peuvent être compromises, et ses aptitudes dans les relations interpersonnelles en souffrent généralement.

Cette violence, tellement destructrice pour la femme, déstabilise aussi les enfants qui en sont témoins. Les garçons qui grandissent dans un foyer violent courent de plus grands risques de devenir des pères violents, et les filles risquent davantage de devenir la victime de leur conjoint. En fait, les risques sont trois fois plus élevés pour la femme dont le beau-père est violent que pour les autres. Il faut rompre ce cycle de la violence.


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Comme c'est le cas pour d'autres problèmes comme la pauvreté et la criminalité, il n'y a pas de loi parfaite qui puisse tout résoudre. On ne peut, d'un coup de baguette magique, faire disparaître ce fléau qu'est la violence contre les femmes. Comme pour tous les problèmes complexes, il doit y avoir des approches interdisciplinaires.

Premièrement, nous devons prendre position. Le Canada l'a fait à l'échelle internationale en étant l'instigateur de la déclaration des Nations Unies sur l'élimination de la violence faite aux femmes, qui a été adoptée en décembre 1993. Pour la première fois sur la scène internationale, les Nations Unies ont désigné un rapporteur spécial sur la violence faite aux femmes qui fera rapport de ses constatations au commissaire des Nations Unies pour les droits de la personne, à compter de mars 1995.

Nous devons ensuite examiner tous les programmes gouvernementaux et y inclure des mesures concrètes qui nous permettront d'atteindre notre objectif, celui d'éliminer la violence faite aux femmes. Cela supposera évidemment une plus grande sensibilisation de la population à cette question.

En avril dernier, le ministère du Patrimoine canadien a lancé, en collaboration avec d'autres intéressés, une campagne publicitaire d'une durée de trois ans, à la radio et à la télévision, sur la violence dans la société. En octobre 1994, le gouvernement a remis en place le Programme de contestation judiciaire, afin de garantir du financement pour les contestations judiciaires d'une portée nationale qui visent à clarifier les droits à l'égalité et les droits linguistiques reconnus par la Constitution du Canada.

Le projet de loi sur la réforme de la détermination de la peine, actuellement étudié par un comité, devrait proposer diverses solutions pour enrayer la criminalité, y compris la violence.

Plus tôt cette année, j'ai parlé à la Chambre d'un autre projet de loi proposant plus de 100 modifications au Code criminel, y compris des dispositions visant à rendre plus efficaces les engagements à garder la paix. Ainsi, les policiers pourraient présenter des demandes d'engagement à garder la paix au nom de femmes en danger.

Quant au Conseil national de prévention de la criminalité qui a été créé en juillet 1994, il est chargé d'examiner, entre autres choses, la vulnérabilité des femmes par rapport à la criminalité.

Je crois que les mesures de contrôle des armes à feu proposées feront aussi de nos foyers et de nos rues des endroits plus sûrs. Un registre national des armes à feu, l'interdiction de certaines armes, dont celle qui a été utilisée lors du massacre de Montréal, et des ordonnances d'interdiction plus souples seront dans l'intérêt des femmes et devraient sauver des vies.

En juin dernier, les ministres responsables de la condition féminine au niveau fédéral ainsi que dans les provinces et les territoires ont adopté, à Regina, la déclaration des droits des femmes victimes de violence, qui invite le système judiciaire à garantir la même protection aux femmes victimes de violence. Le même mois, le ministre fédéral de la Justice, la ministre fédérale de la Santé et la secrétaire d'État responsable de la Situation de la femme ont consulté différents groupes de femmes sur la violence faite aux femmes. D'autres consultations seront organisées et, à mon avis, il faut poursuivre les efforts en ce sens si nous voulons surmonter ce problème.

Je suis reconnaissante aux députés d'avoir donné à la Chambre l'occasion de discuter de cette question aujourd'hui.

(1620)

J'espère que les sentiments exprimés à la Chambre aujourd'hui nous inspireront quotidiennement dans notre travail de législateurs, de manière à ce que nous n'oublions jamais les femmes victimes de violence au Canada. Je crois que nous réalisons des progrès à ce chapitre et je m'en réjouis. Il reste toutefois beaucoup à faire.

J'espère que les Canadiens qui suivent nos travaux aujourd'hui continueront de faire leur part dans leur foyer, leur collectivité et leur circonscription.

Le vice-président: Étant donné que la présidence considère ce débat très sérieux, je voudrais signaler que j'ai accordé plus tôt la parole à un député qui ne figurait pas sur la liste. Comme j'avais mal lu la liste, j'avais cru reconnaître un député du Bloc québécois à qui j'ai donné la parole, chose que je n'aurais pas dû faire.

[Français]

On m'a dit qu'il y avait une entente entre les deux partis. Maintenant, parce que j'ai fait une erreur, l'opposition officielle est prête à accepter que quatre libéraux parlent chacun leur tour. Est-ce qu'on est d'accord?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Je suis certain que tout le monde pourra prendre la parole cet après-midi, selon cette entente. Je cède maintenant la parole à l'honorable députée de York-Simcoe.

[Traduction]

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, j'ai ici une lettre d'une de mes électrices, appelée Sally. Sally m'a donné la permission de rendre sa lettre publique. Elle y parle de l'impact de la violence sur les femmes et de la pauvreté à laquelle elles font face en conséquence. La lettre a été préparée pour notre réunion de Campagne 2000. Il s'agit d'une coalition de nombreux organismes qui ont décidé de conjuguer leurs efforts pour lutter contre la pauvreté chez les enfants.

«Je m'appelle Sally, et je suis la mère indépendante de deux petites filles. Je suis également une bénéficiaire de prestations familiales en difficulté financière. Je suis reconnaissante pour l'aide que je reçois, mais je suis devenue découragée par l'incompréhension et l'insensibilité du système à l'égard des obstacles auxquels d'autres femmes et moi nous heurtons dans la voie de l'indépendance financière.

Lorsque j'ai entendu parler pour la première fois de Campagne 2000, le terme «pauvreté» était difficile à imaginer par rapport à ma situation. Le terme évoquait plutôt des images d'enfants souffrant de la faim dans les pays du tiers monde. Avec le temps, cependant, il m'est devenu de plus en plus difficile de subvenir aux besoins de mes enfants, et comme le système et les bureaucrates font la sourde oreille dans un pays comme le Canada, j'en suis arrivée à la conclusion brutale que je vis bien en-deça du seuil de la pauvreté.

En prenant la décision de quitter une situation où j'étais victime de mauvais traitements pour entrer dans un refuge pour femmes, ma vie et celle de mes enfants ont changé brusquement


8713

il y a deux ans. J'en suis maintenant réduite à compter sur un système où une allocation mensuelle de 1 028 $ est censée pourvoir aux dépenses de subsistance comme le logement, le téléphone et les services publics. Essayer de pourvoir aux dépenses de vêtement et de nourriture pour moi et mes filles devient un dur apprentissage des réalités de la vie pour un nombre beaucoup trop grand d'enfants au Canada. Quant à la banque d'alimentation, je n'y vais qu'une fois par mois si je peux trouver du transport. Pourquoi donc, dans ces conditions, ne pas trouver un emploi? J'ai essayé, mais hélas je vis dans une région où plus de trois cents personnes répondent à une offre d'emploi dans un magasin local. La concurrence est féroce pour une mère qui n'est plus dans la population active depuis sept ans.

Si on ajoute à cela les problèmes de transport et de service de garderie à prix abordable, la situation devient encore pire. Pourquoi alors ne pas tenter de se perfectionner, de s'instruire davantage? Encore une fois, on est aux prises avec les obstacles du transport, des garderies et des listes d'attente.

Le soutien? Pendant deux ans, j'ai dû me battre, avec le concours d'avocats, de l'aide juridique et d'une conseillère familiale, pour obtenir un soutien financier pour mes filles. Au bout de ces deux années, j'ai réussi à obtenir qu'un privilège d'aide juridique de 22 000 $ soit placé sur ma maison et que mon mari s'engage à me verser une pension de 100 $ par mois, soit 50 $ par enfant. Depuis l'entrée en vigueur de cette entente en juin dernier, mon mari ne m'a encore rien versé même s'il gagne 50 000 $ par année.

Cet homme est également en liberté surveillée pour avoir proféré des menaces de mort. Sa mise en liberté surveillée est assortie de plusieurs conditions. Tout d'abord, il doit subvenir aux besoins de ses personnes à charge. Il ne l'a pas fait. J'ai parlé aux avocats et à son agent de probation pour obtenir leur aide, mais ils ont fait la sourde oreille.

(1625)

Deuxièmement, il doit chercher un emploi et le garder s'il en trouve un. Je viens d'apprendre qu'il a été mis à pied quand il a demandé de l'aide à son agent de probation pour obtenir un allégement. Même s'il se rend tous les jours à l'endroit où il travaillait, il n'a plus d'emploi. Il a donc enfreint la deuxième condition de sa mise en liberté surveillée. Pourtant, on ne fait rien.

Troisièmement, il ne doit pas s'approcher à moins de 300 mètres de moi et de ma maison. Il a enfreint à maintes reprises cette condition. J'ai de nouveau rencontré son agent de probation. J'ai vu son superviseur. Je me suis fait dire par un policier que je mentais et j'ai été jetée à la porte du poste de police par ce même policier. La police est venue chez moi très souvent. Un des policiers a mentionné ceci: «À moins qu'on nous montre un trou de balle, nous ne pouvons rien faire.»

Si vous vous demandez ce que la troisième condition de probation a à voir avec la pauvreté et la situation critique de mes enfants, je vais vous le dire. Les coûts de réparation des portes et des fenêtres forcées, des tuyaux perforés et coupés, des pneus lacérés, d'un côté de la voiture endommagé à coups de pince-monseigneur, ainsi que les coûts liés à d'autres actes de vandalisme, commencent à être passablement astronomiques.

La police a recommandé l'installation de verrous et de serrures à pêne dormant, et de coûteux dispositifs de détection pour l'extérieur. Mais, pour cela, il faut avoir de l'argent et de l'électricité. Il y a un an, plus précisément au mois d'avril, comme je n'avais pas pu régler une mensualité, les gens de l'Hydro sont venus à la maison me couper le courant. Le courant n'a pas encore été rétabli. L'Hydro a fait passer ma note initiale d'électricité de 800 $ à plus de 1 700 $ en additionnant les frais de service et les suppléments de retard. Les gens de l'Hydro m'ont aussi facturé l'utilisation de leur ligne et d'un radiateur à eau chaude, même s'ils m'ont coupé le courant. Tous les trois mois, ils viennent encore lire un compteur que je n'ai plus et m'exiger des frais de service.

On m'a aussi expliqué que si jamais je voulais qu'Hydro-Ontario rétablisse le courant, j'aurais à payer pour le raccordement des lignes et je devrais leur verser un acompte de 1 600 $. J'aurais bien téléphoné à leur siège social, mais, au mois de juillet de la même année, Bell m'a coupé le téléphone pour une facture de 50 $, bien qu'on ait exigé de moi un acompte de 200 $, même si je me trouvais alors dans une maison de refuge pour femmes, pendant que mon mari subissait son procès. Alors qu'il était en liberté provisoire, il a quitté le bureau de son agent de probation et il est venu chez moi pour nous menacer une fois de plus, mes enfants et moi.

Au mois de juin de cette année, j'ai reçu un appel de la banque. Parce que mon mari a refusé de signer le contrat de renouvellement de l'hypothèque, malgré l'ordonnance de la cour qui m'autorisait à occuper les lieux et le fait que je vis de prestations familiales, on m'a dit que je disposais de 30 jours pour quitter la maison, et ce, même si j'ai toujours acquitté l'hypothèque, les taxes et maintenant les arriérés d'électricité. Un autre avocat, une autre facture. J'ai un an pour mettre de l'ordre dans tout cela, mais le temps file.

Je sais que vous pourrez facilement imaginer l'effet de cette situation sur mes deux petites filles. Je n'ai qu'à prononcer deux mots magiques, aide sociale, et je vois la dignité humaine et l'amour-propre disparaître. Acheter une auto? Demander un prêt d'amélioration résidentielle? Me lancer en affaires? J'entends encore les rires du directeur de banque. J'ai presque renoncé.

Si je suis là ce soir, c'est uniquement grâce à mes enfants. Je dois persévérer pour elles. Un jour, peut-être, quelqu'un écoutera et certains changements se produiront de sorte que mes deux filles, et tous les autres enfants de ce pays de l'abondance, pourront envisager un avenir meilleur.

Merci de votre attention.»

Je crois que Sally se cache, à l'abri de ce mari violent. J'espère que quelqu'un pourra lui faire savoir que j'ai lu sa lettre et raconté son histoire ici, à la Chambre des communes.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, l'histoire que nous venons d'entendre est très touchante. Elle me bouleverse, car elle montre que les lois permettant de protéger cette personne n'existent pas ou ne sont pas appliquées. Dans un cas comme dans l'autre, c'est tout à fait inadmissible.

La députée devrait faire savoir au ministre de la Justice que cette situation est tout à fait inacceptable et exiger que des lois appropriées soient adoptées ou que les lois existantes soient appliquées. J'aimerais que la députée fasse des observations à ce sujet.


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Mme Kraft Sloan: Monsieur le Président, il est très clair que, dans sa lettre, Sally a décrit un certain nombre de cas d'incompréhension de la part des services publics.

(1630)

Lorsque des femmes se trouvent dans cette situation et s'adressent à des gens qui, à leur avis, devraient les protéger, par exemple les forces policières, mais rejettent leurs plaintes et les traitent d'enquiquineuses, elles ont beaucoup de difficulté à s'en sortir. À mon avis, une partie du problème réside dans l'attitude de la société en général.

Le ministre de la Justice est très sensible à ces questions. J'ai entendu les députés d'en face dire que nous devrions être préoccupés par la violence faite à toutes sortes de gens. Je suis tout à fait d'accord avec cela, mais la violence contre les femmes fait en quelque sorte partie d'une catégorie à part, alors que les députés d'en face font d'elles un groupe d'intérêts spéciaux.

Nous devons comprendre que, tant que nous ne considérerons pas la violence contre les femmes comme un problème de violence particulier, avec les actes d'intimidation dont est victime tout un groupe de notre société, à savoir les femmes, nous ne pourrons jamais nous attaquer aux problèmes d'incompréhension des services publics. Peu importe si nos lois sont efficaces, tant que les attitudes et les mentalités ne changeront pas sur cette question très complexe et très dévastatrice, on ne réglera pas le problème de la violence faite aux femmes.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, en cette Journée nationale de commémoration et d'activités concernant la violence dirigée contre les femmes, je tiens à dire que nous ne devrions pas seulement nous rappeler cette tragédie une fois par an, mais tout au long de l'année.

La Chambre connaît bien les statistiques sur la violence faite aux femmes et les mauvais traitements dont elles sont victimes. Ces chiffres correspondent aux incidents qui ont été signalés, à ceux dont nous sommes informés. Cependant, cela ne tient pas compte de tous les incidents violents et tous les cas d'abus. La réalité est bien pire encore. C'est comme une immense vague qu'il faut endiguer.

Quand on sait qu'il faut établir des maisons d'hébergement dans des zones urbaines et que la police doit commencer à escorter des femmes jusqu'à leur domicile pour qu'elles puissent sauver ne serait-ce que leurs vêtements ou pour qu'elles puissent visiter leurs enfants, cela nous dit à quel point les relations entre les hommes et les femmes se sont détériorées et à quel point la vie familiale prend une toute autre tournure au Canada. Quand nous en sommes rendus à légiférer, à la Chambre, sur des comportements anormaux et indécents, cela signifie que le temps est venu, non seulement pour le gouvernement, mais aussi pour les particuliers et les entreprises, pour tous les citoyens, en fait, de faire quelque chose.

La violence n'est pas un phénomène étrange qui éclate sans raison. Ses germes sont soigneusement semés plusieurs années, voire plusieurs générations à l'avance. Les images de violence auxquelles les enfants sont exposés à la télévision et dans la société en général et les leçons qu'ils apprennent de leurs parents créent un cycle d'apprentissage de comportements violents, un apprentissage qui ne cesse de se parfaire et qui est aussi bien réglé qu'une horloge.

Si, au cours de ce cycle, nous n'arrivons pas à donner à nos enfants une bonne estime d'eux-mêmes ou si nous ne les aidons jamais à acquérir cette estime d'eux-mêmes, ils seront en danger. Cela leur nuira énormément et le danger risque de devenir plus grand à mesure qu'ils vieillissent et qu'ils nouent des relations intimes, parce que s'ils voient leur estime d'eux-mêmes menacée, ils battront en retraite ou au contraire, ils s'emporteront. Malheureusement, plus souvent qu'autrement, les hommes de notre société sont plus portés à donner libre cours à leur colère, alors que les femmes ont plutôt tendance à se replier sur elles-mêmes.

En règle générale, les pressions découlant de la pauvreté, du manque de communication, de la détérioration des quartiers, de l'abus de l'alcool et des drogues, ainsi que d'une pluie de messages dans les médias qui nous invitent à posséder ou à acquérir des biens matériels pour nous élever dans l'échelle sociale viennent accroître les pressions déjà énormes qui s'exercent sur les gens qui doivent élever des enfants et faire des choix à notre époque.

Trop souvent, la métaphore qui dit que lorsque les soldats ne combattent pas sur le front, ils se battent dans les camps, peut s'appliquer à cette situation terrible de violence contre les femmes et les enfants. Beaucoup de gens bien qui entrent dans une relation avec les meilleures intentions du monde regardent avec stupeur et horreur leur relation se détériorer au point d'en arriver à la violence verbale ou physique, alors que les personnes en cause lancent des menaces ou agissent de façon violente.

Comment expliquer cela? Les pressions de la vie quotidienne et les problèmes financiers détournent l'attention des gens de leur principal objectif qui est de fonder une famille, de creuser des racines et de créer un avenir basé sur la contribution de chacun. Face au défi du manque d'estime de soi, les gens décident de se séparer et de divorcer ou de laisser tout simplement libre cours à leur colère.

(1635)

Il n'incombe pas au gouvernement de s'ingérer dans la vie personnelle des Canadiens. Cependant, je crois que nous avons une responsabilité et que nous devons faire un choix pour l'avenir au nom de la famille, ainsi que des femmes et des enfants plus précisément.

Il faut élaborer des programmes et une politique qui prévoient une tolérance zéro et rendent la loi plus stricte pour permettre aux corps policiers d'appliquer ces modifications. Cela doit être considéré comme un dernier recours pour maîtriser ceux qui vont trop loin, qui choisissent non seulement de brutaliser, mais également d'exploiter les femmes et les enfants.

Il faut également changer de point de vue face aux relations interpersonnelles pour que les lois que nous rédigeons encouragent la protection des membres de la famille immédiate et de la famille étendue, nous donnent les moyens de faire face à des actes de violence possibles grâce à des professionnels vraiment sensibles aux besoins de ces gens, et suscitent dans les quartiers déshérités le sens des responsabilités sur les plans communautaire et personnel.

Enfin, nous devons, d'une part, communiquer et, d'autre part écouter. J'oserais dire que les 63 femmes assassinées en 1993 ont été victimes d'une personne qui était déjà isolée. Il aurait fallu pouvoir compter à ce moment-là sur un réseau de gens où ces


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conjoints auraient pu parler de leur situation ouvertement. Nous savons qu'une communication franche et ouverte ne conduit pas au meurtre.

Il faut rétablir la communication dans notre société, et ce, pas simplement parmi nos pairs mais aussi à l'extérieur de notre zone de confort. Les parents doivent commencer à parler avec leurs enfants, les grands-parents avec leurs petits-enfants, les hommes avec les femmes et les syndicats avec la direction.

Je crains que si nous ne renversons pas cette tendance et si nous ne commençons pas à communiquer honnêtement, d'une façon qui nous donne la possibilité de régler les différends plutôt que d'entraîner un éclatement de la relation, nous serons, en tant que société, tellement méfiants que notre croissance intérieure s'arrêtera et les familles canadiennes continueront de périr.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais tout simplement souligner l'excellence de l'intervention de ma collègue. Je la remercie de ses commentaires et j'aimerais partager avec vous le fruit de mes réflexions.

La violence faite aux femmes est de façon très réelle une attaque contre la vie, une violation des valeurs les plus chères aux Canadiens, et un défi à la paix, à l'ordre public et au bon gouvernement.

Les incidents qui nous sont rapportés sont horrifiants, mais ils ne prennent leur véritable signification que lorsque l'on considère leurs conséquences pour les victimes: les enfants laissés orphelins, les familles endeuillées et la collectivité toute entière en proie à la souffrance.

Je félicite donc la députée de son intervention. Il faut espérer que les actes de violence à l'endroit des femmes que nous avons connus et que nous connaissons encore ne se reproduiront plus à l'avenir.

Mme Brushett: Monsieur le Président, je remercie le député de ses remarques. Je crois comme lui que la question ne concerne pas seulement les femmes, les hommes et les enfants, mais la collectivité toute entière. À mon avis, la vie est un enchaînement de relations humaines. Vivre c'est développer et partager ces relations qui forment la base de la famille qui, elle, est le pilier de la collectivité.

Je partage le point de vue du député pour qui la violence envers qui que ce soit est une violation de la dignité humaine sur laquelle reposent les fondations de tout ce que nous devons respecter dans nos collectivités.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, lorsque j'ai pris connaissance du débat prévu pour aujourd'hui, j'ai pensé évidemment aux victimes de l'École polytechnique, mais je pensais aussi beaucoup à toutes les autres, aux 300 et quelques femmes qui sont mortes des suites d'accidents violents ou d'actes de violence depuis 1989, ainsi qu'aux milliers de femmes qui sont victimes de violence de toutes sortes tous les jours. Il est important qu'on voie cette situation-là, pas nécessairement comme un fait particulièrement atroce, mais une situation qui se présente dans l'ensemble de notre société qui fait qu'on a développé des comportements qui sont inacceptables et auxquels il faut accorder une priorité pour faire de la société québécoise, de la société canadienne, une société que l'on pourrait citer en exemple comme étant une société sans violence.

(1640)

Un des exemples du problème qu'on vit, et je pense qu'on l'a ici dans la Chambre aujourd'hui, c'est que tout le monde se prononce contre la violence, tout le monde fait de beaux discours pour dire qu'il ne faut pas que cela se reproduise, qu'il faut prendre les bonnes mesures, qu'il faut poser les gestes corrects, mais c'est le même problème qu'on rencontre aussi dans la société.

La violence est souvent un problème, entre autres, parce qu'on ne parle pas de la réalité qu'il y a dedans. Du fait que les gens qui sont touchés, on ne leur donne pas les forums, autant aux personnes violentées, pour qu'elles puissent sortir cette peur d'elles-mêmes et qu'elles puissent recommencer à grandir après avoir passé au travers la période de violence, que ceux qui sont responsables de la violence, comme par exemple les hommes. On leur donne peu d'occasions d'exprimer ce qu'ils sont et de pouvoir libérer cette énergie négative et de faire qu'on puisse nettoyer le discours et faire que la réalité puisse changer.

C'est pour ça qu'en réfléchissant aux propos que je voulais tenir dans ce débat, j'ai beaucoup pensé à mes enfants, mes deux filles, Audrey et Maude et mon garçon, Renaud, parce que finalement, c'est pour eux qu'on essaie de bâtir une société qui soit différente.

Quand on lit les histoires de comment se perpétue la violence, eh bien, il y a beaucoup de comportements là-dedans qui sont transmis dans les familles, de père en fils, ou de mère en fille, des comportements qui, même chez les gens qui les pratiquent, ne sont pas nécessairement conscients de la violence qu'ils contiennent. Il faut qu'on puisse les mettre sur la place publique, comme je le disais plus tôt, faire un débat, s'assurer qu'il y ait un dialogue qui va permettre de corriger ces situations.

Les façons concrètes de permettre ce dialogue, c'est par exemple par le soutien qu'on peut donner aux centres de femmes ou aux groupes qui s'occupent des hommes violents. On a beau avoir les meilleures intentions au monde, s'il n'y a pas les énergies, s'il n'y a pas les ressources nécessaires pour permettre ces débats, eh bien, ils ne se feront pas et on va hériter, comme on le fait depuis longtemps, de résultats négatifs, d'événements tragiques comme ceux de Polytechnique et de tous les événements tragiques qu'on recueille et qui, comme anecdotes, nous arrivent un peu comme des sources qu'on devrait tout le temps régler par la répression. La répression, selon moi, c'est un mode qu'il faut utiliser à la limite pour s'assurer qu'il n'y a pas de gestes physiques de violence.

Il est évident qu'il faut réussir à éliminer, par un contrôle adéquat, les armes à feu et aussi tous les autres outils de violence, de les contrôler pour que ne puissent plus se produire des événements comme celui de Polytechnique. Mais en même temps, il faut aller voir plus loin, aller voir derrière cet événement pour savoir ce qui provoque de telles situations.

On se rend compte que la question de la violence conjugale et de la violence en général est un phénomène complexe parce que ça ne s'adresse pas nécessairement seulement aux familles pauvres, aux familles de la classe moyenne ou aux familles riches. Il y a des phénomènes de violence conjugale dans tous les milieux de la société et il faut trouver les façons de les corriger.


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Je parlais plus tôt de créer des conditions adéquates. Il y a quand même, dans beaucoup de nos populations, des besoins de base qui ne sont pas satisfaits, en termes d'éducation, de revenu familial, de garde d'enfants, d'équité entre les programmes sociaux qu'on peut avoir et les nouveaux types de familles qu'on retrouve dans notre société et les services de soutien qu'on leur accorde. Maintenant, avec les familles monoparentales, avec les familles reconstituées, il y a des situations complètement nouvelles qui sont vécues et auxquelles nos programmes sociaux ne sont pas nécessairement adaptés pour y répondre adéquatement.

Il y a aussi dans la violence un aspect que je qualifierais de subversif, un aspect un peu pervers qui est dû à l'inégalité entre les hommes et les femmes, en termes de possibilités d'emplois et de carrières.

(1645)

Cela a pour conséquence de perpétuer le sentiment d'inégalité et de permettre, la majorité du temps, à certains hommes de créer des relations de dépendance avec des femmes et cela peut créer des situations de violence. Il n'y a pas que la violence physique, toutes les autres sortes de violence peuvent être présentes.

Il est donc important qu'on puisse faire de la prévention le plus tôt possible, dès la naissance, car la façon dont l'enfant va se développer déterminera en partie ce qu'il y aura dans sa tête, sa vision des choses. Il faut que, dès cette étape, on permette aux familles de mettre au monde des enfants dans des situations acceptables, des enfants qui puissent grandir en recevant une alimentation adéquate, avec tous les éléments qui vont leur permettre de se développer et d'avoir conscience de leur valeur, ce qui les aidera à avoir du respect pour leurs concitoyens, pour les gens de l'autre sexe, pour leurs amis, de telle façon qu'on ait toujours une relation de respect qui s'établisse entre les personnes et non pas une relation de dépendance.

Il m'apparaît qu'il faut une offensive tous azimuts. On est devant une situation où, comme lorsqu'on parle de la pauvreté chez les enfants, lorsqu'on parle de violence, il faut assurer une intervention globale préventive, mais aussi permettre d'intervenir sur les situations ad hoc, les situations d'urgence afin d'éviter qu'elles puissent se présenter.

Il est aussi important de voir, durant les différentes phases de la vie de l'enfant, de la personne qui grandit, ce qui peut être fait pour contrer cette tendance à la violence. En parlant de la naissance, est-ce que, au Canada, on accorde des congés de maternité adéquats à toutes les femmes pour qu'elles puissent donner naissance à leurs enfants dans des conditions adéquates? Est-ce qu'elles sont suffisamment indépendantes financièrement lorsqu'elles sont par exemple dans une situation de famille monoparentale pour que, dès le départ, les conditions soient acceptables?

Plus tard, quand l'enfant grandit, est-ce qu'on lui accorde des services de garde adéquats? N'y a-t-il pas présentement, dans notre société, des gens qui peuvent profiter davantage des services de garde qui permettent à leurs enfants de se développer correctement? Et est-ce qu'on ne multiplie pas présentement souvent les stéréotypes?

L'enfant qui naît dans une famille d'une certaine condition financière qui peut offrir des services de garde privés de qualité recevra une éducation plus stable. Cet enfant pourra développer plus de confiance en soi, tandis qu'à côté il y a des gens qui, eux, vivent plutôt dans le cercle vicieux de la dépendance dont ils ne peuvent se sortir. Donc, il faut qu'on intervienne pour s'assurer qu'il y ait de plus en plus de chances égales pour que, dans 20 ou 25 ans, on puisse voir des changements par une diminution des situations de violence vécues et par une diminution du nombre de groupes qui étaient dans une condition qui créait ces problèmes de violence.

Ensuite, il y a l'école et la carrière. Si les femmes ont à recommencer à vivre des situtions difficiles de recherche d'emploi, à être dans des situations d'infériorité dans les emplois qu'elles décrochent, si on ne leur permet pas d'avoir accès aux carrières universitaires, si on ne brise pas les stéréotypes dans ce domaine, on contribue aussi à perpétuer le climat existant.

Là-dessus, il y a des choix à faire qui sont encore à l'étude présentement, lorsqu'on parle de la réforme des programmes sociaux, par exemple. On parle de s'organiser pour que les étudiants assument eux-mêmes leurs emprunts. Ainsi ils vont terminer leurs études avec des emprunts beaucoup plus élevés à rembouser. Dans le cas des femmes, si elles décident de fonder une famille, elles se retrouveront dans une situation d'inégalité.

Des gestes concrets comme ceux-là n'ont pas de lien direct avec des gestes spectaculaires de violence, mais ils font quand même partie de l'ensemble des situations qui sont créées qui, en fin de compte, vont contribuer à créer des situations de violence.

(1650)

Je voudrais aussi, quand on complète le cycle de la vie, que les femmes qui en sont à l'âge adulte, puissent aussi décider d'avoir une famille, d'avoir des enfants dans des conditions qui soient acceptables. Il ne faut pas qu'elles puissent se retrouver dans une situation où elles-mêmes peuvent être portées à poser des gestes de violence envers leurs enfants, parce qu'on n'a pas créé les conditions sociales acceptables pour qu'elles puissent élever leurs enfants dans des conditions intéressantes.

Donc, tout ce débat sur la question de la violence, c'est une question de société et il faut peut-être aussi dire que c'est une question d'individu. Il faut se tourner sur soi-même et s'interroger sur son propre comportement. Je pense que si on contribuait dans le débat actuel à faire que tous les Québécois et Québécoises ou tous les Canadiens et Canadiennes prennent une minute, un moment dans la soirée pour s'interroger, pour discuter dans leur milieu de vie de ce qui peut être des sources de violence, ce qui peut être des comportements qui chez chacun de nous devraient être corrigés, devraient nous amener à s'adapter, à pouvoir dire qu'on a contribué à ce qu'il y ait moins d'occasions de violence dans notre société, je pense qu'on aurait, de cette façon-là, contribué adéquatement au débat d'aujourd'hui. Cela, c'est au niveau des responsabilités de chacun de nous.

Au niveau de l'État, il y a une réflexion qui est en cours. Tantôt, on écoutait le ministre de la Justice parler d'un ensemble de mesures qui sont prises ou qui vont être prises, mais il y a des choix importants, des choix de ressources à consacrer à ces différents programmes. Il y a aussi la façon dont on fait face à ce problème-là et on pourra, je pense, juger l'arbre à ses fruits. Il faudra, lorsqu'on entamera le deuxième millénaire, qu'on ait pu voir, dans les actions du gouvernement actuel, des gestes concrets, des choses qui vont permettre de renverser un peu la tendance et de faire que la société dans laquelle nous vivons puisse être montrée en exemple.

Dans cinq ans, dans dix ans, lorsqu'on commémorera à nouveau cet événement affreux de Polytechnique, au lieu de ne


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pouvoir parler que du résultat négatif de la situation actuelle, il faudrait qu'on puisse au moins dire que les efforts de tous ceux qui ont été sensibilisés à la question de la violence par cet événement-là, tous les gens qui ont mis l'épaule à la roue, toutes les femmes qui ont travaillé au niveau des pétitions, tous ceux qui se sont assurés qu'il y ait une loi sur le contrôle des armes à feu, tous ces gens-là puissent dire: Mission accomplie. On aura alors obtenu des résultats qui feront que la violence aura diminué dans notre société. Ce sera peut-être un des critères principaux pour l'évaluer.

[Traduction]

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je pense que la plupart d'entre nous sommes d'accord avec ce qui a été dit aujourd'hui. Nous avons tous été profondément touchés par les événements qui se sont produits il y a cinq ans, et nous partageons ce sentiment d'horreur. Lorsque nous apprenons que de telles tragédies se sont produites, lorsque nous entendons parler de souffrances humaines, nous réagissons alors comme une famille. C'est comme si un proche parent souffrait.

Je voudrais poser une question au député. Il me semble qu'il a dit que les conditions sociales sont très importantes pour ceux qui peuvent devenir violents. Je me demandais où il situerait le rôle de l'économie? Est-ce qu'il pense que la vigueur ou la faiblesse de l'économie peut avoir un effet sur le déclenchement de ces actes?

[Français]

M. Crête: Monsieur le Président, je pense que c'est une excellente question et je l'ai soulevée un peu dans ma présentation lorsque j'ai parlé de l'emploi. Il m'apparaît qu'effectivement, si on avait, dans ce pays, une politique active de création d'emplois qui viserait à permettre à chacune des ressources humaines d'être utilisée selon son plein potentiel, cela voudrait dire que tous les hommes, toutes les femmes qui la composent pourraient être mis à contribution pour la société.

(1655)

Une politique active d'emploi, cela voudrait dire également qu'on se préoccupe plus de l'aspect social. Dans notre société actuelle, on a souvent tendance à faire une course à la productivité pure, alors que la société canadienne, malgré ses défauts, a quand même des valeurs comme la compassion.

Il faudrait éviter aujourd'hui de suivre le modèle américain car on voit les résultats qu'ils ont quant à la violence. Comme ce sont nos voisins du Sud on peut le voir tout de suite. C'est la hantise, je pense, qu'il y ait des actions comme le terrible événement de l'École polytechnique. C'est ce que disait un auteur dans un article du Devoir d'aujourd'hui. Il voyait cela un peu comme un début de choses qu'on peut voir plus aux États-Unis.

Pour contrer cela, pour revenir à la question du député, effectivement, si l'économie fonctionne bien, si les gens travaillent, s'ils paient des impôts, on aura une meilleur répartition de la justice. Je pense que c'est une contribution que le gouvernement actuel pourrait faire de façon particulière et devrait faire, lorsqu'il aura à ajuster sa réforme des programmes sociaux, pour répondre plus exactement aux représentations qui lui sont faites par plusieurs groupes à travers le Canada.

[Traduction]

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Une question rapide au député de Kamouraska-Rivière-du-Loup. Il a parlé avec beaucoup d'intégrité des femmes et de la difficulté de poursuivre une carrière tout en élevant des enfants, de la nécessité d'être une super personne pour tout faire et le faire bien, avec grâce, dignité et respect pour les enfants et la famille.

Quel rôle pensez-vous que les hommes doivent jouer dans le partage des responsabilités concernant les enfants, pour diminuer la pression que subissent actuellement les femmes dans notre société?

Le vice-président: À moins que les députés ne veuillent entendre le Président, je leur demanderais d'adresser leurs questions à la présidence.

[Français]

M. Crête: Monsieur le Président, c'est une question qui me touche beaucoup. Effectivement, avec notre métier de député, dans nos familles on se retrouve facilement avec le risque de revenir au modèle traditionnel. En tout cas, en tant qu'homme, je ne peux que rendre hommage à ma conjointe qui s'occupe particulièrement des enfants. On fait partie de ce modèle traditionnel et je ne voudrais pas faire un discours en porte-à-faux.

Mais, moi je pense qu'un des principaux exemples qu'on peut donner, c'est d'être des hommes, des parents qui reflètent un modèle différent, qui font qu'on donne espoir à nos filles, qu'on les respecte et qu'on les considère comme ayant des chances de carrière, des chances de se développer à l'égal des hommes et que, dans tous nos gestes quotidiens, on s'assure d'être vraiment présents lorsqu'on le peut.

Pour les familles où les conjoints ont la chance d'être plus souvent ensemble, je pense qu'il y a une question de répartition de tâches. Il y a une question aussi-et c'est vrai pour toutes les familles-de discourir entre nous des problèmes, d'en parler de ces choses-là, que ça existe la violence conjugale, que ce sont des choses qui peuvent se présenter, que lorsqu'à la télévision on voit une scène un peu affreuse, on ne change pas nécessairement de poste tout de suite, mais on parle entre nous pour s'expliquer ces choses-là.

Un des exemples concrets est que quand il y aura 50 p. 100 de femmes dans un Parlement, j'ai l'impression qu'on aura un Parlement plus équilibré qui adoptera de meilleures lois tenant compte de cette situation et de ce qu'il faut faire dans une société. Cela nous amènera à avoir des critères différents quant à la course au succès et au pouvoir. Je pense que c'est de cette façon qu'on peut contribuer.

Le vice-président: Conformément à l'article 38 du Règlement, il est de mon devoir de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement ce soir: l'honorable député de Malpèque-Le commerce international; l'honorable députée de London-Ouest-La violence dirigée contre les femmes; l'honorable député de Berthier-Montcalm-Le Service canadien du renseignement de sécurité.

(1700)

[Traduction]

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour commémorer cet ignoble événement du 6 décembre 1989. L'hor-


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reur que cet événement a inspirée à l'échelle nationale ne peut être apaisée, parce qu'il n'existe pas de réponses simples, qu'on ne peut pas tirer de conclusions faciles. Il semble que les temps modernes soient caractérisés par une société violente. On croit que notre taux de criminalité correspond à une façon de penser dans la population. Parfois, l'ambiance dans laquelle nous échangeons nos arguments à la Chambre suffirait à nous pousser au suicide. Nous sommes tellement portés à la confrontation, tant à la Chambre que dans le monde extérieur.

Ayant travaillé auparavant dans le domaine de la justice pénale, je connais trop bien la situation tant des contrevenants que des victimes. La violence nous rend tous victimes, dans la société, et nous sommes tous responsables du degré de permissivité générale qui se dégage de notre manque de courage, en tant que communauté, pour dénoncer les coupables.

J'approuve tout ce qu'on a dit aujourd'hui à la Chambre, mais pour bien faire honneur à cette journée spéciale, nous devons aussi reconnaître les tendances de notre société. Par le passé, le crime était loin d'être un employeur pratiquant l'égalité des chances d'emploi entre les sexes, mais l'écart semble se réduire. L'an dernier, cinq hommes étaient accusés d'infractions criminelles pour chaque femme dans le même cas. Il y a dix ans, la proportion était de sept pour un. La même tendance se dessine aux États-Unis, où les statistiques montrent qu'en 1992, le rapport n'était plus que de quatre hommes pour une femme, dans l'ensemble des arrestations.

Ce changement est plus apparent que partout ailleurs dans le cas des crimes avec violence. En 1981, le rapport des hommes et des femmes accusés de crimes de cette catégorie, qui vont des menaces au meurtre de sang froid, était presque de neuf pour un.

Les spécialistes de la criminalité disent que les statistiques révèlent peut-être aussi une tendance à la démocratisation dans l'application des dispositions du droit pénal. Peut-être est-ce la fin de la galanterie. Les études ont permis de déceler des différences dans le traitement traditionnel des hommes et des femmes dans le système de justice pénale. Par exemple, aux États-Unis, on a toujours eu moins tendance à condamner les femmes à la peine de mort.

Il y a une autre explication possible: les femmes sont plus susceptibles de faire l'objet d'accusations aujourd'hui à cause de l'intolérance croissante de la société à l'égard de la violence. Cela signifie que plus de gens, en général, se font accuser de crimes peu violents, comme les menaces.

Dans ce cas, les femmes ayant commis des crimes moins violents devraient représenter un plus gros pourcentage de la hausse constatée. Les statistiques révèlent que 62 p. 100 des accusations d'infractions avec violence portées contre des femmes concernaient des agressions de moindre gravité, comparativement à 55 p. 100 dans le cas des hommes.

Ces données soulèvent une question passionnante, à savoir est-ce que les femmes s'adonnent davantage au crime. Il est possible que la tendance se manifeste dans les nouvelles données puisque certaines portent à croire que les jeunes femmes contribuent davantage à rétrécir l'écart entre les sexes en matière de criminalité.

Pour en être sûr, il faudrait suivre les policiers et voir dans quelles circonstances ils portent des accusations. Le système de justice criminelle a exercé beaucoup de discrétion et a ainsi eu tendance à éliminer par sélection les accusations portées contre des femmes dans la population en général.

On ne peut saisir la portée réelle des données tant qu'on ne distingue pas les catégories précises d'actes criminels. Y a-t-il une hausse réelle du nombre d'actes violents ou d'infractions contre les biens, ou plutôt une différence dans la façon dont la justice traite la criminalité? Il y a sans doute un mélange des deux, c'est-à-dire un changement réel dans les comportements et un certain changement quant à la façon de compiler les chiffres.

Il est important de tenir compte des chiffres parce que nos convictions et peut-être aussi notre action législative dépendent de ce qui nous semble être vrai. La véracité des statistiques joue un rôle crucial dans nos convictions, lesquelles sont à l'origine de nos actions.

Le 19 novembre 1993, les médias canadiens publiaient les résultats stupéfiants d'une importante enquête effectuée par Statistique Canada. Les grands titres indiquaient que 50 p. 100 des femmes affirment avoir déjà été victimes d'agression, ou encore que l'enquête de Statistique Canada, la première du genre, révélait que la violence est généralisée. Les conclusions concernant la violence conjugale étaient horrifiantes. Vingt-neuf pour cent des femmes ayant déjà été mariées déclaraient avoir été victimes d'agression de la part de leur conjoint, ancien ou actuel. Quelque 2,6 millions de Canadiennes auraient donc déjà été victimes de violence conjugale.

Les autres sources d'information médiatiques contenaient des comptes rendus comparables. La revue Maclean's citait les propos d'une femme qui déclarait: «J'avais l'habitude de me réveiller avec un couteau sous la gorge. Peut-être les gens vont-ils le croire maintenant.»

Les groupes de femmes se sont dits outrés. Les services sociaux ont affirmé que cette étude prouvait à quel point la violence était répandue dans notre société. Un ministre du Cabinet fédéral a déclaré vouloir rencontrer des groupes de femmes afin de lancer une campagne nationale de prévention de la violence contre les femmes. Les commentateurs, hommes et femmes, citaient des exemples des dangers que les femmes rencontrent quotidiennement. Nous avons entendu beaucoup de propos en ce sens aujourd'hui à la Chambre, mais je me dois de manifester une certaine dissidence et de rétablir l'équilibre afin que nous puissions progresser plus résolument.

L'enquête nationale bénéficiait de toute la crédibilité de Statistique Canada. Les fonctionnaires ont dit qu'il s'agissait de l'enquête la plus exhaustive du genre jamais effectuée au Canada. Elle a coûté 1,9 million de dollars. Quelque 12 300 femmes ont été interrogées, mais les conclusions de l'enquête, et c'est là l'argument décisif, concernaient uniquement les agressions physiques et sexuelles qui pouvaient donner lieu à des accusations criminelles.

Aucun média n'a fait d'analyse critique des conclusions de Statistique Canada ou ne les a comparées aux résultats d'enquêtes américaines qui font autorité.

(1705)

Commençons par le Code criminel. Dans une enquête de Statistique Canada, on lit ceci:


8719

Dans cete enquête, la violence est définie comme les expériences d'agressions physiques et sexuelles qui correspondent aux définitions de ces infractions aux termes de la loi et qui peuvent nécessiter l'intervention de la police.
Cela fait beaucoup d'infractions en vérité. Cela comprend les infractions dites en jargon policier de niveau un, par exemple une personne qui profère une menace contre son voisin par-dessus la clôture ou encore un étranger qui fait une remarque belliqueuse dans la rue. Bref, toute remarque ou tout geste interprété par la personne à laquelle cette remarque ou ce geste est adressé comme une menace pouvant être qualifiée d'infraction de niveau un.

Selon cette enquête, les voies de fait contre l'épouse sont la forme la plus courante de violence. Afin de calculer le taux de voies de fait contre l'épouse, les auteurs de cette enquête assimilent de nombreuses disputes entre époux à de la violence alors que la plupart des gens ne le feraient pas. Par exemple, les disputes où il n'y a pas de contact physique, ni profération de menaces ou lancement d'objets. Viennent ensuite les disputes assorties de contacts mineurs, tels que bousculade ou empoignade. Le résumé de l'enquête classe ces contacts mineurs dans la même catégorie que les actes que l'on s'entendrait à reconnaître comme des actes manifestement violents tels que les coups, les coups portés à l'aide d'un objet, les tentatives d'étranglement, l'agression sexuelle, l'utilisation d'un couteau ou d'une arme à feu pour menacer ou blesser. Lancer une assiette, c'est pareil qu'attaquer quelqu'un avec un couteau.

Combien de femmes mariées ou qui l'ont été signalent des incidents manifestement violents? Onze pour cent disent qu'elles ont reçu un coup de pied ou un coup de poing, 9 p. 100 qu'elles ont été battues, 7 p. 100 qu'on a tenté de les étrangler, 6 p. 100 qu'elles ont été frappées avec un objet et 5 p. 100 qu'elles ont été menacées ou attaquées avec un couteau ou une arme à feu. Plusieurs réponses étant permises, les réponses se chevauchent souvent. Elles concernent principalement des conjoints anciens et non actuels.

Statistique Canada a emprunté les questions destinées à son enquête sur les voies de fait contre les femmes à des enquêtes poussées menées aux États-Unis par Richard Gelles et Murray Straus, du National Institute of Mental Health. Leurs enquêtes servent de référence. Contrairement à l'enquête de Statistique Canada, on y décompose les résultats d'une façon qui fait la distinction entre la violence mineure, sans blessures ou sans guère d'intimidation, et la violence grave, avec coups et pire encore.

MM. Gelles et Straus ont constaté que la violence familiale avec empoignade et coups s'observait chez 16 p. 100 des familles aux États-Unis, et que de 3 à 4 p. 100 des femmes avait été victimes au moins une fois d'un acte de violence grave de la part de leur partenaire.

Les voies de fait contre l'épouse constituent un problème national, un important fléau social au Canada. Nous devrions tout faire pour y mettre un terme, mais cette violence ne touche pas près du tiers des Canadiennes, comme certains bulletins de nouvelles l'ont annoncé, c'est-à-dire 29 p. 100 tel que l'a rapporté Statistique Canada, ou 2,6 millions de femmes.

En rendant publiques leur conclusions, ni les auteurs de l'enquête ni les journalistes ne voulaient induire la population en erreur. Ils faisaient consciencieusement leur travail qui consiste à analyser et à décrire les changements qui se produisent dans la société. S'ils avaient tiré des conclusions plus raisonnables à partir des données sur la violence, ils auraient dit que les taux d'abus dont les femmes sont victimes n'avaient pas tellement changé depuis 30 ans et que la plupart des femmes qui sont victimes de mauvais traitements de la part de leurs conjoints divorcent, mais la question n'aurait pas fait la manchette et leur existence serait moins justifiée.

À la place, ces conclusions sensationnelles ont davantage creusé le fossé entre les sexes, en laissant entendre que des millions de Canadiens, et non pas des dizaines de milliers, sont des brutes dans leur foyer. Les députés en sont-ils vraiment convaincus? Pas moi. Dès l'enfance, la plupart des garçons apprennent qu'ils doivent céder devant les filles et qu'ils seront punis plus sévèrement s'ils frappent une fille qu'un garçon. Cela a marqué l'histoire de notre société.

Enfin, si nous mesurons mal le problème, comment pourrons-nous élaborer les meilleurs politiques pour le régler? Nous n'avons certainement pas besoin de gonfler les chiffres pour établir que la violence familiale ou la violence contre quiconque est un mal qui ronge la société.

Nous n'avons sûrement pas besoin d'engendrer la panique dans tout le pays pour qu'on s'occupe du problème et qu'on agisse. Bien des femmes sont pourtant de cet avis et croient que les chiffres de Statistique Canada traduisent une grande vérité psychologique sur les multiples façons subtiles dont les femmes continuent d'être dévalorisées dans le monde. Le problème, c'est qu'il y a bien de choses que Statistique Canada ne peut mesurer et ne devrait pas essayer de mesurer.

Nous savons qu'il y a beaucoup plus de femmes que d'hommes qui sont responsables de mauvais traitements contre des enfants. Dans les conflits familiaux, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de brandir une arme. L'idée n'est pas de décrire le comportement des femmes ou des hommes, mais bien de dénoncer l'excès de violence. Nous sommes tous responsables de la violence à la télé, au cinéma et dans les revues. Les médias nous donnent ce qui se vend bien. Ils ne sont pas totalement à blâmer, ils nous renvoient simplement les pires aspects de notre société.

La tragédie survenue à Montréal ne tombera pas dans l'oubli. Dans notre vision du nouveau Canada, la violence implicite et explicite sera éliminée et c'est comme cela que nous allons vivre.

(1710)

Nous devons dénoncer la violence de même que les excuses pour y avoir recours, entre autres, la défense fondée sur l'intoxication ou la liberté d'expression dans les arts du spectacle et dans les médias de masse. D'une façon particulière aujourd'hui, nous pensons aux proches des victimes de la violence. Nous devons tous nous engager à adopter des règles de vie plus élevées, selon lesquelles chacun apprend à régler ses conflits et à contrôler ses frustrations. Chacun de nous doit apprendre à vivre plus paisiblement de manière qu'on ne s'enrichisse plus en misant sur la violence.

Nous devons mettre l'accent sur le comportement positif afin de transmettre à nos enfants une échelle des valeurs qui exclut les mouvements de violence. Selon ma vision du Canada, nous pouvons vivre en paix et renouer des relations tout en défendant énergiquement nos idéaux.

Mme Colleen Beaumier (Brampton, Lib.): Monsieur le Président, je m'étais promis de ne jamais rien dire, mais après avoir


8720

écouté les députés d'en face, je me demande si leur absence de malaise est au coeur du problème.

Il y a 25 ans, une jeune femme que je connaissais a été violée. Elle ne l'a pas rapporté, parce qu'il y a 25 ans les femmes pouvaient courir plus vite la juge retroussée que les hommes pouvaient le faire le pantalon baissé. Je connais une femme qui a été battue par son mari il y a 25 ans. Elle a dû recevoir des soins à l'hôpital. Elle ne l'a pas signalé à la police parce qu'elle devait avoir honte d'avoir si mal choisi et qu'il était évident qu'elle méritait cette raclée. Elle avait sûrement irrité son mari.

Grâce à nos actions, à nos protestations et à l'évolution de la situation, les femmes peuvent désormais dénoncer ces actes de violence. Cette femme n'a pas participé à l'enquête. Cette femme, c'était moi. Je comprends que nous devons trouver un équilibre, mais il faut régler ce problème et, pour cela, il faut unir nos efforts.

Je voudrais demander au député s'il croit que le problème tient au fait que de tels incidents se produisent plus souvent de nos jours ou que les femmes n'ont plus honte de rapporter ces agressions.

M. Forseth: Monsieur le Président, je crois que nous vivons dans une société violente et que nous devons prendre toutes les mesures possibles à l'intérieur de notre champ d'action, à l'intérieur de nos propres familles, pour éviter de poser des gestes violents. Il faut commencer par de petites choses, par exemple en calmant notre impatience au feu rouge et en réprimant notre colère contre le conducteur qui vient de faire une queue de poisson.

Je tenais à signaler aujourd'hui qu'il faut analyser correctement les statistiques dont nous disposons si nous voulons agir avec détermination et adopter une bonne politique sociale.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, ce que je viens d'entendre est absolument aberrant. Je pense que le député du Parti réformiste a besoin d'une grosse dose de réalité.

Il parle de statistiques. Il nous parle de chiffres, alors que sur le terrain il se passe des choses terribles et le député du Parti réformiste ne voit absolument rien. Je me demande s'il lui arrive de faire du bureau de comté et d'avoir des cas spécifiques de femmes battues, de femmes ayant des problèmes de chômage, de femmes ayant des enfants qui ne mangent pas le matin.

Je peux dire que dans mon comté j'en ai régulièrement. Dans mon comté, j'ai deux endroits où on peut recevoir des femmes battues et on a à peu près seulement 20 places pour elles. On n'a pas encore assez d'endroits pour aider ces femmes.

J'aimerais que le député me dise si dans son comté il rencontre ces gens-là et s'il essaie vraiment de les aider plutôt que de nous sortir des chiffres de statistiques comme il le fait présentement, ce qui pour moi n'a absolument aucune importance? Ce que je vois c'est sur le terrain. Ce qu'on voit sur le terrain en ce moment n'est pas très beau à voir.

Quand on a une crise économique comme celle que l'on a vécue, devinez ce qui arrive. Le crime augmente et ce sont encore les femmes et les enfants qui en paient le prix. Il ne viendra pas me faire croire que dans son comté tout est beau et tout est parfait parce que des statistiques circulent. J'espère que lorsqu'il rentrera dans son comté en fin de semaine, sa femme lui pardonnera le discours qu'il vient de faire ici en cette Chambre.

(1715)

[Traduction]

M. Forseth: Monsieur le Président, c'est là un autre bel exemple de ce dont je parle, du fait qu'il y a ici un tel esprit de confrontation qu'on déforme sciemment les propos de quelqu'un.

Si c'est une question de crédibilité personnelle, je dirai que, au cours de mes 22 ans de carrière dans le système de la justice criminelle, je me suis occupé des personnes, criminels ou victimes, qui en avaient le plus besoin, qui vivaient la plupart du temps une crise, un conflit.

J'ai passé toute la soirée de samedi à parcourir ma circonscription avec les policiers de la place, observant la tâche difficile qui est la leur, notamment lorsqu'il s'agit de résoudre des conflits.

Mais si nous, parlementaires, voulons vraiment régler les problèmes de l'heure en nous inspirant des diverses études dont se moquent des députés et surtout de celle qui a été mentionnée aujourd'hui par tellement d'intervenants, soit l'étude de Statistique Canada, il nous faut lire attentivement les rapports de ces études et en tirer les conclusions qui s'imposent.

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River, Lib.): Monsieur le Président, le député a laissé entendre que les femmes participent davantage à la criminalité. Il a relevé dans l'étude des erreurs concernant l'incidence de la violence faite aux femmes. Il a déclaré que davantage de femmes que d'hommes maltraitent des enfants. Tout cela ne vise qu'à minimiser et à banaliser la violence faite aux femmes.

Lorsqu'on songe à ce qui s'est passé en ce jour, il y a quelques années, il faut reconnaître le tort que la violence faite aux femmes cause à notre société et il ne faut pas la banaliser ni la minimiser comme s'il s'agissait d'un comportement excusable.

Le député croit-il encore que des observations de ce genre sont justifiées dans les circonstances?

M. Forseth: Monsieur le Président, je remarque que le député a une réaction plutôt émotionnelle devant la vérité.

Des affirmations ont été faites toute la journée et il me semble opportun d'assurer un équilibre en faisant entendre un autre son de cloche. Il ne faut pas pour cela déformer mes propos et me faire dire que je ne trouve pas graves les conflits et les troubles sociaux qui témoignent d'un niveau de violence inacceptable dans notre société.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, il m'est difficile de me lancer d'emblée dans le discours que j'avais préparé après avoir entendu ce que je viens d'entendre. Je dois dire que si l'éducation est la solution à beaucoup des maux de notre société et si les problèmes que nous avons découlent de l'ignorance, alors nous devons consacrer beaucoup plus d'argent et de temps à l'éducation de la population pour que les attitudes comme celle dont nous venons de voir l'expression ne prévalent jamais au sein de notre société.


8721

Lorsque je vois le nombre d'hommes d'âge moyen, de race blanche et de la classe moyenne qu'il y a sur les banquettes d'en face et que j'entends les horreurs que je viens d'entendre, je dois réagir avec force.

Tous les six jours en moyenne, au Canada, une femme est tuée par balle. Le 6 décembre 1989, 14 femmes ont été tuées par balles en l'espace de quelques minutes.

Aujourd'hui, des députés d'autres partis que le mien ont aussi pris la parole pour nous rappeler le massacre de ces femmes, pour nous rappeler leur vie, pour les pleurer et, en leur nom, pour espérer qu'un jour la violence sera chose du passé.

Une femme est tuée par balle tous les six jours dans notre pays. Une femmes a neuf fois plus de chances d'être tuée par son conjoint que par un étranger. Ces hommes n'utilisent pas uniquement des armes à feu, ils battent, ils poignardent et ils étranglent.

(1720)

Certains mentionnent des statistiques. Certains parlent des femmes qui s'adonnent à des activités criminelles. Les femmes sont violées et battues parce qu'il existe dans notre société une volonté de faire taire les femmes et de continuer de les faire taire même si nous sommes en 1994, même si nous sommes à l'aube du XXIe siècle, même si les femmes occupent des postes de direction en politique, dans les affaires et au sein des familles, même si les femmes doivent lutter sans cesse pour gagner le même salaire que les hommes qui font le même travail qu'elles et même si les femmes continuent de vivre dans la pauvreté lorsqu'elles sont seules à la tête d'une famille.

La vie semble très simple de l'autre côté de la Chambre. Nos vis-à-vis voudraient que nous soyons tous armés. Ils aimeraient retrancher 15 milliards de dollars de nos programmes sociaux sans aucune priorité. Ils aimeraient que les statistiques tirées de l'enquête la plus complète jamais faite sur la violence contre les femmes au Canada n'existent pas parce qu'ils n'aiment pas ce qu'elles révèlent. Eh bien, la vie n'est pas aussi simple que cela.

Nous avons d'énormes problèmes au Canada. Il y a des gens qui veulent aider, aider les femmes, les enfants et, oui, aider aussi les hommes d'âge moyen, de race blanche et de la classe moyenne à se faire une meilleure vie. Nous le faisons en amenant la prospérité au pays, en contribuant à créer des emplois, en respectant les préceptes de la Charte des droits et libertés et en respectant les règles du droit. Nous le faisons en traitant les autres humains avec la dignité qu'ils méritent et en nous souvenant avec respect, gravité et beaucoup d'intensité des femmes comme les 14 étudiantes de l'École polytechnique qui ont perdu la vie parce que notre société est loin d'être parfaite.

Vendredi soir, je retournerai dans la circonscription de Windsor-Sainte-Claire, plus précisément à Windsor, où je rejoindrai certains de mes collègues, qui sont aussi de grands amis à moi. Nous célébrerons Noël en tant qu'amis et collègues unis par une cause commune, une cause très importante, soit la perpétuation de l'esprit d'un endroit appelé Hiatus House et des services qui y sont offerts.

Hiatus House est une maison de transition pour les femmes battues et leurs enfants située à Windsor. Contrairement à ce que pensent mes collègues d'en face, cette maison est toujours pleine et a toujours une liste d'attente. Elle fait des merveilles dans notre collectivité. Hiatus House fonctionne sous la direction de Donna Miller, qui occupe le poste de directrice générale. Je suis fière de dire qu'elle est une amie à moi et je suis également heureuse de dire à la Chambre et à tous les Canadiens qu'elle est une visionnaire, comme beaucoup de femmes et d'hommes qui travaillent dans ce domaine.

Hiatus House est un endroit incroyable. Ce fut l'une des premières maisons de transition au Canada. C'est là qu'ont vu le jour de nombreux programmes spéciaux pour les enfants de femmes battues. C'est là qu'a également été mis sur pied un programme appelé «Fresh Start», qui s'adresse aux hommes qui battent leurs femmes et leurs enfants.

Hiatus House est une maison de transition qui voit les tristes réalités de la vie de ces gens et qui essaie fort de les aider à se sortir de cette situation, à briser le cycle de la violence familiale.

(1725)

Je suis fière de prendre la parole aujourd'hui à titre de députée de Windsor-Sainte-Claire pour parler de Hiatus House. J'aurais voulu passer plus de temps sur ce sujet, mais je me sentais obligée d'aborder d'autres questions.

Les Canadiens ne pourront jamais oublier le 6 décembre. Ils ne pourront pas l'oublier parce qu'il y a encore des gens qui sont opprimés dans notre pays. Il y a encore des Canadiens qui ne sont pas tout à fait des hommes d'âge moyen qui appartiennent à la classe moyenne et qui gagnent 64 000 $ par année.

Tant que ces gens seront opprimés, tant que notre structure politique et sociale sera telle qu'il y aura des gens qui ne seront pas sur un pied d'égalité avec les autres, je crois que nous devrons poursuivre nos efforts. Je suis fière de faire partie de ce gouvernement. Je suis fière de suivre un chef qui croit à ces principes et je suis fière d'être de ce côté-ci de la Chambre pour défendre ces principes même si je dois me faire chahuter.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je comprends très bien ce que la députée a dit. J'ai moi aussi contribué à l'établissement d'un foyer de transition. J'ai donné de l'argent, du temps et de l'énergie parce que cela me paraissait important. Il nous faut un plus grand nombre de ces foyers, mais il est dommage que nous en ayons besoin.

La députée a également parlé des chômeurs, de l'économie et ainsi de suite. Nous pouvons remonter jusqu'à la dépression. À cette époque où l'économie n'aurait pu aller plus mal, où le problème du chômage n'aurait pu être plus grave, le taux de criminalité était au plus bas, on peut le vérifier. Si quelqu'un conteste cette affirmation, nous pouvons vérifier les faits. On constatera que c'est vrai.


8722

Il y a une quarantaine d'années, on enseignait le respect. Mon père faisait une crise si je ne faisais pas preuve de respect, surtout envers les femmes, et si je ne leur rendais pas service lorsqu'elles en avaient besoin. À cette époque, nous ouvrions la porte pour les femmes, par exemple. Il n'était pas question de jurer en leur présence. C'était inacceptable.

La violence contre les femmes est une chose horrible. Vraiment, croyez-moi. J'en suis convaincu. Je me demande ce qui a bien pu faire que nous en soyons là. Qu'est-ce qui a pu faire qu'aujourd'hui des hommes aient ce genre de comportement envers les femmes? Ne me pointez pas du doigt, je n'ai jamais porté la main sur une femme de toute ma vie.

Mme Cohen: Monsieur le Président, c'était toute une entrée en matière. Je vais résister. Je suis convaincue que le député de Wild Rose tient en horreur la violence contre les femmes. Par contre, le problème que j'entrevois est cette difficulté à saisir l'ensemble du problème, ce désir panique de trouver une solution rapide et simple dont témoignent les politiques de son parti.

Dans les difficiles années 30, les femmes étaient aussi maltraitées que maintenant et peut-être davantage. La difficulté, c'est que, à cette époque, le contexte culturel voulait qu'on n'en parle pas. Les femmes avaient peur d'en parler. Elles croyaient qu'elles devaient subir ces traitement, les endurer.

Les temps ont changé. Malheureusement, certains n'ont pas évolué au même rythme et refusent d'admettre que les femmes ont leur place dans la société. Nous ne sommes pas un groupe d'intérêts. Nous ne réclamons aucun privilège. Nous réclamons seulement l'égalité.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, en l'espace de deux siècles, les femmes ont fait des progrès, passant du statut de simples possessions à celui de véritables personnes, pour passer maintenant du panthéon de l'orthodoxie politique à l'état de simples victimes.

Je trouve cela extraordinairement offensant et je pense que cela dégrade les femmes. Les femmes sont des personnes et devraient être traitées comme telles. La violence existe partout dans la société. Cela est symptomatique d'une perte alarmante de civilité et de la disparition des valeurs traditionnelles.

On parle des femmes qui étaient victimes de mauvais traitements dans les années 30. Je suis assez vieux pour me rappeler cette époque-là, et je puis vous dire que la violence conjugale existait à cette époque, mais quand cela se produisait, ceux qui s'en rendaient coupables se voyaient ostracisés socialement et couraient de grands risques de se faire battre par les frères, le père, les cousins, les oncles et ainsi de suite de la femme victime de mauvais traitements. Cela se voyait fréquemment.

Vous ne le savez pas, vous n'étiez pas là, Madame.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, je serai brève. Pour ce qui est du panthéon de l'orthodoxie politique, monsieur le Président, je dirai que j'en sais quelque chose. J'y étais, et vous vous trompez.

* * *

[Français]

LOI SUR LE MINISTÈRE DE L'INDUSTRIE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 1er décembre, du projet de loi C-46, Loi constituant le ministère de l'Industrie et modifiant ou abrogeant certaines lois, dont le Comité permanent de l'industrie a fait rapport avec des amendements.

Le vice-président: Comme il est 17 h 30, conformément à l'ordre adopté le jeudi 1er décembre 1994, la Chambre procédera maintenant aux votes par appel nominal différés sur les motions à l'étape du rapport du projet de loi C-46.

Convoquez les députés.

(1750)

Après l'appel du timbre:

Le vice-président: La première mise aux voix porte sur la motion no 1.

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 123)

POUR

Députés
Asselin
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
Duceppe
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guay
Guimond
Jacob
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Marchand
Mercier
Ménard
Nunez
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Sauvageau
St-Laurent
Tremblay (Rosemont)-40

CONTRE

Députés
Abbott
Adams
Althouse
Anderson
Arseneault
Assad
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Benoit
Berger
Bernier (Beauce)
Bethel
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar


8723

Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Chatters
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Culbert
Cummins
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Duncan
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Epp
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Forseth
Frazer
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jennings
Jordan
Karygiannis
Kerpan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Manning
Marleau
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Penson
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robinson
Rock
Rompkey
Schmidt
Serré
Shepherd
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Solomon
Speaker
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stinson
Strahl
Szabo
Taylor
Terrana
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Williams
Zed-182

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

(1800)

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 2. Le résultat du vote sur la motion no 2 s'applique aussi aux motions nos 4, 5, 6 et 7. Si la motion no 2 est adoptée, il est inutile de voter sur les motions nos 3, 6 et 8. Si la motion no 2 est rejetée, il faudra voter sur la motion no 3.

[Français]

Le vote sur la motion no 3 s'applique également aux motions nos 6 et 8.

La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 2, inscrite au nom du député de Richmond-Wolfe.

[Traduction]

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le résultat du vote précédent sur la motion no 1 s'applique à la motion no 2.

[Français]

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous vote no 123.]

Le vice-président: Je déclare la motion no 2 rejetée. Par conséquent, les motions nos 4, 5 et 7 sont rejetées.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 3.

M. Solomon: Monsieur le Président, en tant que whip du NPD, je vous informe que les députés néo-démocrates présents voteront oui sur la motion no 5.

Le vice-président: Nous y viendrons bientôt.

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que les whips ou les représentants de chacun des partis prennent la parole pour dire de quelle manière leurs collègues qui ont voté sur la motion précédente veulent se prononcer sur la présente motion. En ce qui concerne les députés libéraux, ils voteront contre la motion no 3 à l'instar du député de Beauce.


8724

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois voteront non sur cette motion.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, les députés du Parti réformiste ici présents voteront oui, sauf ceux qui voudront voter autrement.

M. Solomon: Monsieur le Président, les députés néo-démocrates ici présents voteront contre la motion no 3.

(1805)

Mme Wayne: Monsieur le Président, en tant que whip du Parti conservateur, je vous informe que les députés conservateurs ici présents voteront non.

(La motion no 3, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 124)

POUR

Députés
Abbott
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Chatters
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Jennings
Kerpan
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Schmidt
Silye
Solberg
Speaker
Stinson
Strahl
Thompson
Williams-40

CONTRE

Députés
Adams
Althouse
Anderson
Arseneault
Assad
Asselin
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Berger
Bergeron
Bernier (Beauce)
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bethel
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling

Crête
Culbert
Dalphond-Guiral
Debien
de Jong
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Duceppe
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Guimond
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jacob
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loney
Loubier
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mercier
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Plamondon
Pomerleau
Proud
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robinson
Rock
Rompkey
Sauvageau
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Solomon
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Taylor
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rosemont)
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Zed-182

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye


8725

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

[Français]

La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 9.

[Traduction]

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le résultat du vote précédent sur la motion no 3 s'applique à la motion no 9 à l'étape du rapport.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous le vote no 124.]

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée. Le vote suivant porte sur la motion no 10.

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que les whips ou les représentants de chacun des partis prennent la parole pour dire de quelle manière leurs collègues qui ont voté sur la motion précédente veulent se prononcer sur la présente motion.

En ce qui concerne les députés libéraux, ils voteront contre à l'instar du député de Beauce.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois appuient cette motion.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, vous constaterez que les députés du Parti réformiste présents aujourd'hui voteront contre la motion, à moins d'indication contraire.

M. Solomon: Monsieur le Président, les députés néo-démocrates à la Chambre des communes voteront en faveur de la motion no 10.

Mme Wayne: Monsieur le Président, les députés du PC qui sont présents ce soir voteront en faveur de la motion.

(La motion no 10, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 125)

POUR

Députés
Althouse
Asselin
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Blaikie

Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Debien
de Jong
Deshaies
Duceppe
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Guay
Guimond
Jacob
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Marchand
McLaughlin
Mercier
Ménard
Nunez
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Robinson
Sauvageau
Solomon
St-Laurent
Taylor
Tremblay (Rosemont)
Wayne-49

CONTRE

Députés
Abbott
Adams
Anderson
Arseneault
Assad
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Benoit
Berger
Bernier (Beauce)
Bethel
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Chatters
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Culbert
Cummins
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Duncan
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Epp
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Forseth
Frazer
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jennings
Jordan
Karygiannis
Kerpan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Manning
Marleau
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)


8726

McWhinney
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Penson
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Rompkey
Schmidt
Serré
Shepherd
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Speaker
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stinson
Strahl
Szabo
Terrana
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
Williams
Zed-173

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.) propose: Que le projet de loi soit agréé.

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez que les whips ou les représentants de chaque parti sont d'accord pour indiquer comment les collègues de leur caucus se prononceront en l'occurrence.

Les députés libéraux voteront en faveur de la motion d'approbation.

[Français]

M. Duceppe: Les députés du Bloc québécois voteront non.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, les députés réformistes présents ce soir voteront contre la motion, à moins d'indication contraire.

M. Solomon: Monsieur le Président, les députés néo-démocrates qui sont à la Chambre voteront contre la motion d'approbation.

Mme Wayne: Monsieur le Président, les députés du PC voteront en faveur de la motion.

(1810)

[Français]

M. Bernier (Beauce, Ind.): Je vote en faveur, monsieur le Président.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 126)

POUR

Députés
Adams
Anderson
Arseneault
Assad
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Berger
Bernier (Beauce)
Bethel
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Culbert
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Rompkey
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Vanclief


8727

Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Zed-134

CONTRE

Députés
Abbott
Althouse
Asselin
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
Debien
de Jong
Deshaies
Duceppe
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Guimond
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Jacob
Jennings
Kerpan
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McLaughlin
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ménard
Nunez
Penson
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Ramsay
Robinson
Sauvageau
Schmidt
Silye
Solberg
Solomon
Speaker
St-Laurent
Stinson
Strahl
Taylor
Thompson
Tremblay (Rosemont)
Williams-88

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 2 décembre, de la motion portant que le projet de loi C-59, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

[Traduction]

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté le vendredi 2 décembre 1994, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion de deuxième lecture du projet de loi C-59, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'aimerais savoir s'il y a consentement unanime pour que le résultat du vote précédent sur la motion d'approbation s'applique à la motion sur la Loi de l'impôt sur le revenu, le projet de loi C-59.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous le vote no 126.]

(Le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé au comité.)

* * *

LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 5 décembre, du projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et concernant certains règlements pris en vertu de celle-ci, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, ainsi que la motion no 1.

Le vice-président: La Chambre passe maintenant aux votes par appel nominal différés à l'étape du rapport du projet de loi C-51.

Le premier vote porte sur la motion no 1.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Si vous consultez la Chambre, je crois qu'elle sera unanimement d'accord pour que le whip de chaque parti précise dans quel sens ses collègues voteront.

Les députés libéraux voteront contre la motion no 1.

[Français]

M. Duceppe: Les députés du Bloc québécois appuient cette motion, monsieur le Président.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, vous constaterez que les députés du Parti réformiste voteront oui sur cette motion, à moins que certains ne veuillent voter autrement.

M. Solomon: Monsieur le Président, les députés du Nouveau Parti démocratique voteront non sur cette motion no l.

Mme Wayne: Non, monsieur le Président.

M. Bernier (Beauce): Non, monsieur le Président.


8728

(La motion no 1, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 127)

POUR

Députés
Abbott
Asselin
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
Duceppe
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Guimond
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Jacob
Jennings
Kerpan
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ménard
Nunez
Penson
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Ramsay
Sauvageau
Schmidt
Silye
Solberg
Speaker
St-Laurent
Stinson
Strahl
Thompson
Tremblay (Rosemont)
Williams-80

CONTRE

Députés
Adams
Althouse
Anderson
Arseneault
Assad
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Berger
Bernier (Beauce)
Bethel
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Culbert
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Dupuy
Easter
Eggleton
English

Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robinson
Rock
Rompkey
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Solomon
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Taylor
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Zed-142

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

[Français]

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 2.


8729

M. Boudria: Monsieur le Président, les députés du Parti libéral voteront non sur cette motion.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois votent non sur cette motion.

[Traduction]

M. Silye: Les députés du Parti réformiste voteront oui, à moins que certains ne veuillent voter autrement.

M. Solomon: Monsieur le Président, les députés du Nouveau Parti démocratique qui sont présents aujourd'hui voteront oui sur cette motion.

Mme Wayne: Monsieur le Président, les députés conservateurs qui sont présents aujourd'hui voteront non sur cette motion.

M. Bernier (Beauce): Non.

[Français]

(La motion no 2, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 128)

POUR

Députés
Althouse
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Blaikie
de Jong
McLaughlin
Robinson
Solomon
Taylor-8

CONTRE

Députés
Abbott
Adams
Anderson
Arseneault
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Benoit
Berger
Bergeron
Bernier (Beauce)
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bethel
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Chamberlain
Chan
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Crête
Culbert
Cummins
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Duceppe
Duncan
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Epp
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Forseth
Frazer

Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Guay
Guimond
Hanger
Hanrahan
Harb
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jacob
Jennings
Jordan
Karygiannis
Kerpan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loney
Loubier
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Manning
Marchand
Marleau
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mercier
Meredith
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Penson
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Plamondon
Pomerleau
Proud
Ramsay
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Rompkey
Sauvageau
Schmidt
Serré
Shepherd
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Speaker
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stinson
Strahl
Szabo
Terrana
Thalheimer
Thompson
Tobin
Torsney
Tremblay (Rosemont)
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Williams
Zed-214

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye


8730

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 4.

M. Boudria: Monsieur le Président, avec le consentement unanime, les députés libéraux votent non.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois s'opposent à cette motion.

(1815)

[Traduction]

M. Silye: Les députés du Parti réformiste qui sont présents ce soir votent oui, à moins que certains ne veuillent voter autrement.

M. Solomon: Monsieur le Président, les députés du Nouveau Parti démocratique sont fiers de voter oui sur cette motion.

Mme Wayne: Monsieur le Président, le caucus du Parti conservateur vote non.

[Français]

M. Bernier (Beauce, Ind.): Monsieur le Président, je vote non.

(La motion no 4, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 129)

POUR

Députés
Abbott
Althouse
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Benoit
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Chatters
Cummins
de Jong
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Jennings
Kerpan
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
McLaughlin
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Robinson
Schmidt
Silye
Solberg
Solomon
Speaker
Stinson
Strahl
Taylor
Thompson
Williams-48

CONTRE

Députés
Adams
Anderson
Arseneault
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Berger
Bergeron
Bernier (Beauce)
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bethel
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Crête
Culbert
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Duceppe
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Guimond
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jacob
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loney
Loubier
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mercier
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Plamondon
Pomerleau
Proud
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Rock
Rompkey
Sauvageau
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Terrana


8731

Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rosemont)
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Zed-174

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 3.

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le résultat du vote sur la motion no 3 à l'étape du rapport du projet de loi C-46 s'applique à la motion dont la Chambre est actuellement saisie.

[Français]

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Oui.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous vote no 124.]

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 7.

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que la Chambre consentirait à ce que l'on applique le vote exprimé sur la motion no 3 à l'étape du rapport du projet de loi C-51 à la motion dont la Chambre est actuellement saisie.

[Français]

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous vote no 124.]

Le vice-président: Je déclare les motions nos 7 et 8 rejetées.

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) propose: Que le projet de loi soit agréé.

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que la Chambre consentirait à l'unanimité à ce que le résultat du vote que nous venons de prendre sur la motion no 7 s'applique à l'inverse à la motion d'approbation du projet de loi C-51.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 130)

POUR

Députés
Adams
Althouse
Anderson
Arseneault
Assad
Asselin
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellehumeur
Bellemare
Berger
Bergeron
Bernier (Beauce)
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bethel
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Bélisle
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Canuel
Caron
Catterall
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Crête
Culbert
Dalphond-Guiral
Debien
de Jong
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Duceppe
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fillion
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier (Roberval)
Godfrey
Godin
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Guay
Guimond
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jacob
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Langlois
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loney
Loubier
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mercier
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Ménard
Nault
Nunez
O'Brien
Pagtakhan


8732

Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Plamondon
Pomerleau
Proud
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robinson
Rock
Rompkey
Sauvageau
Serré
Shepherd
Sheridan
Skoke
Solomon
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Taylor
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rosemont)
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Zed-182

CONTRE

Députés
Abbott
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Chatters
Cummins
Duncan
Epp
Forseth
Frazer
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Jennings
Kerpan
Manning
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Schmidt
Silye
Solberg
Speaker
Stinson
Strahl
Thompson
Williams-40

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.

Conformément à l'alinéa 45a) du Règlement, la Chambre procédera maintenant aux votes par appel nominal différés à l'étape du rapport du projet de loi C-56, Loi modifiant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

LA LOI CANADIENNE SUR L'ÉVALUATION ENVIRONNEMENTALE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 5 décembre, du projet de loi C-56, Loi modifiant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 1.

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que la Chambre consentirait à l'unanimité à ce que l'on applique le vote exprimé sur la motion no 4 à l'étape du rapport du projet de loi C-51 à la motion dont la Chambre est maintenant saisie.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous le vote no 129.]

Le vice-président: Je déclare la motion rejeté.

Le vote suivant porte sur la motion no 3.

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a unanimité pour appliquer le résultat du vote précédent sur la motion no 1 à l'étape du rapport à la motion dont la Chambre est maintenant saisie.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous le vote no 129.]

Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.

Le vote suivant porte sur la motion no 4.

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a unanimité pour appliquer le résultat du vote sur la motion no 10 à l'étape du rapport du projet de loi C-46 à la motion dont la Chambre est maintenant saisie.

Le vice-président: Y a -t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Note de l'éditeur: Voir liste sous le vote no 125.]

[Français]

Le vice-président: Je déclare l'amendement rejeté.

(1820)

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 4.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le résultat du vote pris sur la motion no 2 à l'étape du rapport, du projet de loi C-51, s'applique à la motion dont nous sommes saisis.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.


8733

[Note de l'éditeur: Voir la liste sous le vote no 128.]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.) propose: Que le projet de loi soit agréé.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le résultat du vote pris sur la motion no 1 à l'étape du rapport, du projet de loi C-51, s'applique à l'inverse à la motion d'approbation du projet de loi C-56.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 131)

POUR

Députés
Adams
Althouse
Anderson
Arseneault
Assad
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing
Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bellemare
Berger
Bernier (Beauce)
Bethel
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Bélair
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Clancy
Cohen
Collins
Copps
Cowling
Culbert
de Jong
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dromisky
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West)
Grose
Guarnieri
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jordan
Karygiannis
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
Lee
Loney
MacAulay
MacLaren (Etobicoke North)
MacLellan (Cape/Cap Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest)
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robinson
Rock
Rompkey
Serré
Shepherd
Sheridan

Skoke
Solomon
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Taylor
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wappel
Wayne
Wells
Whelan
Zed-142

CONTRE

Députés
Abbott
Asselin
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brien
Bélisle
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
Debien
Deshaies
Duceppe
Duncan
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier (Roberval)
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Guimond
Hanger
Hanrahan
Harper (Calgary West)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hoeppner
Jacob
Jennings
Kerpan
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest)
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Ménard
Nunez
Penson
Picard (Drummond)
Plamondon
Pomerleau
Ramsay
Sauvageau
Schmidt
Silye
Solberg
Speaker
St-Laurent
Stinson
Strahl
Thompson
Tremblay (Rosemont)
Williams-80

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bachand
Bouchard
Chrétien (Saint-Maurice)
Collins
Daviault
Dubé
Duhamel
Dumas
Gerrard
Harper (Churchill)
Lalonde
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lefebvre
Leroux (Shefford)
Minna
O'Reilly
Ouellet
Paré
Rocheleau
Telegdi
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Valeri
Venne
Wood
Young
de Savoye

8734

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.

Comme il est 18 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires.

_____________________________________________


8734

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-216, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-chômage (fonctions de juré), dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement.

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Les députés constateront dans le Feuilleton que Son Excellence le gouverneur général a donné une recommandation concernant ce projet de loi pour permettre à la Chambre d'envisager son adoption finale sans contrevenir au paragraphe 79(1) du Règlement ou à l'article 54 de la Constitution.

Le gouvernement est heureux d'avoir la possibilité de procéder ainsi et d'obtenir, ce qui n'est pas coutume, une recommandation concernant une initiative parlementaire, ce qui est tout à fait conforme, cependant, à l'esprit et à la lettre de notre programme de réforme parlementaire.

Je m'empresse de préciser à la Chambre que le gouvernement a examiné très attentivement ce cas et que c'est uniquement parce que le projet de loi C-216 s'inscrit dans le cadre financier en vigueur qu'il a pu profiter de cette possibilité.

Il ne faudrait pas que la Chambre considère cette affaire comme un précédent. Il est fort peu probable qu'il y ait beaucoup d'autres cas qui se prêtent à une telle procédure. Pour maintenir un contrôle strict sur les dépenses, le gouvernement insistera pour que l'on applique rigoureusement cette mesure et, à l'autre endroit, le principe constitutionnel interdisant que l'on vote des crédits au moyen d'une motion ou d'un projet de loi d'initiative parlementaire sans que Son Excellence en ait fait la recommandation explicite à la Chambre.

M. Guy H. Arseneault (Restigouche-Chaleur, Lib.) propose que le projet de loi soit agréé.

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

[Note de l'éditeur: Voir la liste sous le vote no 130.]

M. Arseneault propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

-Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole ce soir pour débattre à l'étape de la troisième lecture de ce projet de loi d'initiative parlementaire.

Pour commencer, je voudrais remercier mes collègues de tous les partis à la Chambre qui m'ont appuyé tout au long de mes efforts. C'est une bataille que je mène depuis quatre ans. Une bataille qui a commencé en décembre, il y a quatre ans. Nous voici de nouveau en décembre et nous examinons cette mesure législative à l'étape de la troisième lecture.

Je remercie mes collègues en cette occasion historique. Je compte sur leur appui à l'étape de la troisième lecture ce soir, si tant est qu'elle se termine ce soir comme je l'espère.

[Français]

J'ai l'honneur et le plaisir de me lever en cette Chambre pour prendre la parole sur un projet de loi émanant des députés que j'ai parrainé et qui a pour but d'amender la Loi sur l'assurance-chômage.

Comme vous le savez, l'article 14 de cette loi empêche les gens qui sont dans l'obligation d'exercer leur devoir civique, en tant que jurés, de recevoir des prestations d'assurance lorsqu'ils sont en chômage.

[Traduction]

Voici quatre ans que je parle de cette question, et je pourrais encore continuer. D'autres députés en ont parlé aussi. Je pense que nous devrions la régler ce soir. Je m'en remets maintenant à mes collègues auxquels je demande leur consentement unanime afin que ce projet de loi soit adopté maintenant, à l'étape de la troisième lecture.

[Français]

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime afin d'adopter ce projet de loi en troisième lecture?

Des voix: D'accord.

M. Bellehumeur: Est-ce que c'est la continuation du débat, monsieur le Président?

Le vice-président: Chers collègues, je croyais qu'on était prêt à adopter ce projet de loi. Est-ce qu'il y a un malentendu de la part du député qui veut faire un rappel au Règlement?

M. Bellehumeur: Il y a eu un amendement proposé par le Parti réformiste, mais ce n'est pas à moi à faire ce rappel au Règlement.

Le vice-président: Il semble que le député de Berthier-Montcalm a le droit de faire une intervention.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, j'avais préparé quelques notes parce que de toute façon, j'avais l'intention d'appuyer le député dans cette démarche, comme nous, du Bloc québécois, l'avons fait, lorsque la députée de Mercier a pris la parole sur ce projet de loi. Nous avions donné notre accord pour l'initiative de ce député au niveau de cette loi. Je pense que c'était un manque. On a eu des commentaires plus tôt du gouvernement.


8735

Cela va dans la direction qu'on voulait apporter à l'appui qu'on donne au député, c'est-à-dire que présentement, je pense qu'on pénalisait des gens qui pouvaient remplir une fonction qui est extrêmement importante dans le domaine de la justice, soit d'être juré. Quelqu'un qui était sur l'assurance-chômage, soit qu'il était pénalisé, c'est-à-dire qu'il était juré et qu'il n'avait pas droit de recevoir les prestations d'assurance-chômage ou bien les juges, compte tenu de cet élément devant eux, repoussaient carrément ces personnes qui pouvaient détenir un poste de juré.

Cependant, avec la modification du député, et je le félicite d'avoir fait cette proposition, on vient corriger une lacune.

Dans les débats antérieurs, on a fait ressortir toute l'utilité que les jurés amenaient au système de justice. On doit dire immédiatement que le système de juré, c'est un élément provincial, c'est-à-dire que c'est de juridiction provinciale au niveau de l'administration de la justice.

Je pense que comme législateurs de la Chambre des communes, on a apporté des éléments pour accélérer, pour simplifier et pour aider ceux qui sont responsables de l'administration de la justice dans leurs démarches. À mon avis, le projet de loi C-216 va directement dans cette démarche de simplification et d'aide à la population à remplir son devoir de juré.

Je vais terminer, monsieur le Président, en vous racontant une petite anecdote que j'ai vécue dans le district judiciaire de Joliette lors du choix des personnes comme jurés. Dans une cause pour meurtre, après avoir rencontré environ 300 à 400 personnes pour être jurés, les avocats avaient refusé à peu près tout le monde, de sorte que le shérif avait ordonné de louer un autobus, de se présenter dans différentes rues de la municipalité de Joliette et de prendre les personnes qui semblaient être majeures et de les amener dans l'autobus pour les conduire au palais de justice pour être sélectionnées.

Ce que je veux dire, c'est que, être jurés, les gens ne courent pas après. Je pense donc que si on pouvait simplifier cela et aider les gens, si des gens touchent l'assurance-chômage et peuvent devenir jurés, on doit le faire et le projet de loi C-216 va dans cette direction.

Des voix: Bravo!

M. Bellehumeur: Cela étant dit, il me fait extrêmement plaisir d'apporter mon appui au projet de loi C-216.

[Traduction]

M. Hugh Hanrahan (Edmonton-Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole, devant mes collègues et mes électeurs, au sujet du projet de loi C-216, un projet de loi d'initiative parlementaire qui modifie les règles du régime d'assurance-chômage pour que les personnes qui servent en tant que jurés soient admissibles à des prestations pendant leur participation à cette activité.

Essentiellement, le projet de loi C-216, s'il est adopté, aura simplement pour effet d'ajouter huit mots dans la loi, à savoir: «soit qu'il remplissait les fonctions de juré».

Il y a donc lieu de se demander pourquoi nous consacrons tout ce temps à discuter de ces quelques mots. La réponse est simple. Si nous ajoutons ces mots, la Loi sur l'assurance-chômage s'éloigne encore davantage de son objet initial.

L'article 14 de la Loi sur l'assurance-chômage stipule qu'un prestataire n'est pas admissible aux versements des prestations initiales pour tout jour ouvrable pour lequel il ne peut prouver qu'il était capable de travailler et disponible à cette fin, ou incapable de travailler ce jour-là par suite d'une maladie, blessure ou mise en quarantaine prévue par les règlements. Un prestataire qui sert en tant que juré est considéré comme non disponible aux termes de l'article 14 de la Loi et est par conséquent inadmissible aux prestations.

Cet énoncé montre sans l'ombre d'un doute que les auteurs de la loi initiale sur l'assurance-chômage ont voulu que le système d'assurance-chômage exclue les personnes qui sont appelées à remplir leurs obligations civiques en servant comme jurés.

Le Parti réformiste appuie sans équivoque le retour de la Loi sur l'assurance-chômage à sa fonction initiale, à savoir un programme financé et administré par les employeurs et par les employés et ayant pour objet d'assurer un revenu temporaire en cas de perte d'emploi imprévue.

Nous défendons cette politique depuis la fin des années 80. Les Canadiens en ont assez de soutenir les fraudeurs habituels et saisonniers de l'assurance-chômage, et beaucoup de gens diraient que le projet de loi C-216 ouvre une autre porte aux abus contre notre remarquable système de sécurité sociale. En effet, les employeurs pourraient mettre à pied des employés appelés à servir comme jurés, afin qu'ils puissent recevoir des prestations d'assurance-chômage auxquelles ils ne devraient pas être admissibles.

Il y a donc un risque évident et inquiétant d'abus. Si le système d'assurance-chômage n'est pas utilisé aux fins pour lesquelles il a été initialement conçu, les Canadiens en souffriront. En effet, les injustices actuelles contenues dans le système d'assurance-chômage, et qui ont acquis un caractère permanent, réduisent les revenus disponibles des personnes qui ont des emplois à temps plein dans les régions qui connaissent une certaine vigueur économique.

Cela nuit constamment à la création d'emplois dans les compagnies dont les coûts sont accrus par les cotisations à l'assurance-chômage. Elles servent à subventionner l'immobilité de la main-d'oeuvre d'une manière qui nuit considérablement aux jeunes générations dont les parents ne se sentent pas enclins à déménager dans des régions où il y a davantage de possibilités d'emplois dans le secteur privé.

Selon les chiffres fournis par mon collègue de Restigouche-Chaleur, la mise en oeuvre de cette modification à la Loi sur l'assurance-chômage, cette modification de huit mots, devrait coûter entre 2 et 3 millions de dollars par année. Cette somme serait absorbée par les employeurs et les employés du pays. Ils perdent déjà près de 40 p. 100 de leur chèque de paye en retenues diverses, notamment en impôts.


8736

(1835)

Je doute sincèrement que les Canadiens soient prêts à absorber cette somme supplémentaire, surtout lorsque l'on se souvient que notre dette est de 535 milliards et que nous payons annuellement près de 40 milliards d'intérêts sur cette dette astronomique.

C'est pour cela que si les employeurs et les employés avaient leur mot à dire sur le régime d'assurance-chômage et sur la façon dont on dépense leur argent, je ne pense pas qu'ils seraient d'accord pour verser des prestations aux chômeurs pendant qu'il font fonction de juré.

La loi est simple, claire et nette. Si un prestataire fait fonction de juré il n'est pas disponible pour travailler et, en conséquence, il n'a pas droit à des prestations d'assurance-chômage. Depuis trop longtemps on s'éloigne des principes fondamentaux de l'assurance-chômage, qui devient de plus en plus une forme d'aide sociale.

Comme le disait Tommy Douglas: «Nous ne voulons pas payer des gens aptes à travailler simplement parce qu'ils ne trouvent pas de travail. À ceux qui sont incapables de trouver du travail parce qu'ils sont handicapés ou malades physiques ou mentaux, nous offrons l'aide sociale. Ceux qui sont capables de travailler participeront à des projets de travaux publics.»

L'aide sociale et l'assurance-chômage ne sont pas un droit au Canada, et l'assurance-chômage ne devrait être rien d'autre que ce que son nom indique. C'est un régime d'assurance et non un système d'indemnisation saisonnière ou spéciale.

Les travailleurs ne devraient toucher l'assurance-chômage que lorsqu'ils y ont droit et remplissent certaines conditions. L'une de ces conditions est qu'ils soient prêts et aptes à travailler immédiatement, pas demain, après-demain ou la semaine prochaine, immédiatement.

Comme je le disais plus tôt, il faut que le régime d'assurance-chômage redevienne un véritable régime d'assurance. Nous devrions étudier la façon dont fonctionnent d'autres régimes d'assurance et nous pourrions peut-être, en tant que gouvernement, apprendre une chose ou deux du secteur privé. Peut-être bien que notre régime national d'assurance-chômage devrait être financé par les usagers, tout comme les assurances automobiles ou domiciliaires pour lesquels plus on s'en sert, plus les primes sont élevées et, inversement, moins on s'en sert, plus les primes diminuent.

Ce système de financement par les usagers ne serait pas réservé aux employés. Il s'appliquerait également aux employeurs, et ceux qui licencieraient régulièrement des travailleurs devraient aussi payer des cotisations plus élevées.

Il est donc évident que ce projet de loi va dans la mauvaise direction. Nous devrions étudier la façon d'auto-financer le régime d'assurance-chômage ainsi que les autres programmes gouvernementaux afin de garantir leur permanence. Le projet de loi C-216 est bien loin de cet objectif, voire même de nous mettre sur la bonne voie.

Je tiens à souligner que même s'il existe un problème quant à l'équité de la rémunération des jurés, quelle que soit leur situation professionnelle, nous croyons que ce n'est pas en apportant une modification mineure à la Loi sur l'assurance-chômage que l'on redressera la situation.

Nous ne sommes pas les seuls à penser ainsi. En fait, nous comptons au nombre de nos adeptes à cet égard les spécialistes en politique au ministère responsable de l'assurance-chômage et ceux du Service de recherche de la Bibliothèque du Parlement. Le ministère responsable de l'assurance-chômage considère que ce n'est pas la réglementation du programme qui fait problème, mais bien la faible rémunération qui est offerte aux jurés. Voici ce qu'on peut lire dans un document de la Bibliothèque du Parlement: «La question fondamentale, dans cette affaire, est celle de la rémunération adéquate pour des fonctions de juré. C'est aux provinces d'y voir, plutôt qu'aux employeurs et aux employés qui contribuent à la caisse d'assurance-chômage.»

Par conséquent, le Parti réformiste propose que, plutôt que de modifier la Loi sur l'assurance-chômage, il soit laissé à la discrétion des juges d'exempter un prestataire de l'assurance-chômage de ses fonctions de juré, comme on l'a déjà fait par le passé. Encore une fois, je pense qu'il faut admettre l'évidence, soit que ceux qui assument des fonctions de juré ne sont pas nécessairement rémunérés adéquatement. Là-dessus, je suis sûr que tous les députés sont d'accord avec moi.

(1840)

Comme mon collègue de Yorkton-Melville l'a affirmé à la Chambre, il est inexcusable que des jurés doivent travailler des jours ou des semaines durant, et parfois même des mois, pour 15 $ ou 20 $ par jour. Comme le Parti réformiste, je crois à l'équité et à la justice et, par-dessus tout, au bon sens. C'est pourquoi il faut de toute évidence s'attaquer à cette question de la rémunération des jurés.

Nous croyons aussi, cependant, qu'il faut réduire les chevauchements et les doubles emplois entre les gouvernements. Nous croyons essentiellement qu'il ne faut pas empiéter sur les plates-bandes provinciales. Or, la question de la rémunération des jurés est entièrement de compétence provinciale. Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons pas appuyer ce projet de loi.

Enfin, je propose:

Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:
«le projet de loi C-216, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-chômage (fonctions de juré), ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loi retiré et l'objet renvoyé au Comité permanent du développement des ressources humaines».
Le vice-président: La présidence signale que la motion est recevable.


8737

M. Arseneault: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Permettez-moi d'exprimer mon désaccord. Je ne voudrais pas contester la présidence, mais le projet de loi a déjà été renvoyé au Comité du développement des ressources humaines, qui en a fait rapport sans amendement. Je crains que le Parti réformiste ne cherche à gagner du temps avec ce projet de loi d'initiative parlementaire et cela m'inquiète beaucoup.

M. Silye: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Il s'agit simplement d'une question donnant lieu à un débat.

Le Président: Les députés reconnaîtront que, comme le député de Restigouche l'a fait remarquer, le projet de loi a été renvoyé au comité, qui l'a étudié article par article et en a fait rapport.

Je ferai remarquer au député de Restigouche que la motion propose de retirer le projet de loi et de renvoyer l'objet au comité. La motion me semble donc recevable.

(1845)

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, depuis la présentation initiale de ce projet de loi d'initiative parlementaire, divers événements se sont produits qui exigent probablement son renvoi au comité une fois de plus. Un des principaux événements, c'est que le ministre du Développement des ressources humaines a ordonné un examen de certains des programmes dont son ministère est responsable, notamment celui de l'assurance-chômage.

Étant donné qu'il n'y a à la Chambre aucun membre du Comité du développement des ressources humaines, qui tient actuellement des audiences au Québec, comme il l'a fait partout au Canada, il va de soi que le projet de loi devrait être renvoyé de nouveau au comité.

Ce projet de loi va à l'encontre des principes d'une véritable assurance. Le ministre a souligné que les modifications qu'il propose feraient de la Loi sur l'assurance-chômage une vraie loi sur les assurances. Cela aurait de fortes répercussions sur ce que nous sommes en train de faire ici et c'est pourquoi j'appuie la motion de mon collègue.

Si nous voulons que l'assurance-chômage respecte vraiment les principes d'une véritable assurance, il y a divers aspects de ce projet de loi dont je voudrais discuter afin d'inviter les députés à renvoyer la mesure au comité aux fins d'amendement. Si les gens d'en face veulent bien écouter ce que j'ai à dire, ils en conviendront.

Si le projet de loi est adopté, ce serait la première fois dans l'histoire qu'une mesure législative d'initiative parlementaire exige du gouvernement qu'il dépense plus d'argent, soit environ 3 millions de dollars de plus. Je crois que les gens d'en face le reconnaîtront et rejetteront probablement la mesure pour cette raison.

Je le répète, les membres du Comité du développement des ressources humaines sont absents et ne peuvent donc pas rapporter ce que les gens leur disent au cours de ces consultations pancanadiennes. Je voyage avec le comité depuis trois semaines et j'ai entendu bien des témoignages contraires à l'esprit de ce projet de loi d'initiative parlementaire. Voilà pourquoi nous devrions retarder son étude.

Les députés iraient à l'encontre des souhaits exprimés par leur propre ministre du Développement des ressources humaines, comme le prouvera le rapport qui sera déposé en février. Il serait sage de renvoyer le projet de loi au comité pour qu'il le réexamine.

Parmi les opinions exprimées qui vont à l'encontre du projet de loi, mentionnons les suivantes. Les témoins qui se présentent devant le comité voudraient que soient réduits les programmes du fédéral qui font double emploi avec les programmes provinciaux.

En fait, le projet de loi prévoit tout le contraire, puisqu'il empiète sur un secteur de compétence provinciale, la justice, car de l'aveu même du député qui propose ce projet de loi, le problème n'est pas lié à l'assurance-chômage. Il revient au système judiciaire de régler le problème que posent les fonctions de juré, et non au régime d'assurance-chômage.

Les témoins nous disent aussi que le régime d'assurance-chômage devrait être géré comme un véritable régime d'assurance. Il devrait être rentable, et il ne l'est pas. Il devrait s'autofinancer. Voilà ce que nous disent de nombreux témoins. Le régime d'assurance-chômage devrait s'autofinancer.

Bien des gens nous disent que nous devons repenser tout le régime en fonction des principes qui régissent tout véritable régime d'assurance. Le projet de loi vise des objectifs tout à fait incompatibles. C'est pourquoi il devrait être renvoyé au comité. Le comité connaît maintenant un peu mieux ce que pensent les Canadiens et voudra probablement analyser le projet de loi en fonction de cela.

J'ai deux autres arguments à présenter. Si l'on en juge par les consultations que nous menons, les Canadiens voudraient bénéficier d'un traitement vraiment égal dans tout le Canada. Ce projet de loi n'accomplit rien en ce sens. Il est discriminatoire à l'endroit des travailleurs autonomes, puisque ces derniers n'auraient pas droit aux prestations d'assurance-chômage. Ils pourraient faire partie d'un jury au côté de personnes qui, elles, y auraient droit. Il y a donc là un problème d'équité.

(1850)

Il s'ensuivra qu'on abusera davantage encore du système. Le ministre du Développement des ressources humaines a bien déclaré qu'il voulait réduire les abus. Les coûts vont augmenter au moment même où nos moyens diminuent. En fait, nous allons approuver un projet de loi d'initiative parlementaire sans précédent prévoyant une dépense de trois millions de dollars.

Serait-il possible de renvoyer ce projet de loi au comité et de voir s'il n'y aurait pas moyen de corriger certaines de ces lacunes? Je le crois et c'est pour cette raison que j'appuie cette motion. J'espère que les députés d'en face et ceux du Bloc l'appuieront aussi.

Les gens qui participent aux consultations que nous menons nous demandent de réduire les possibilités d'abus, non de les accroître. C'est pourquoi j'appuie la motion proposée par mon collègue.


8738

M. John Harvard (Winnipeg St. James, Lib.): Monsieur le Président, je n'avais pas l'intention de prendre part au débat. Depuis le début, je voulais rendre hommage au député de Restigouche-Chaleur pour avoir présenté son projet de loi.

Cependant, je dois admettre que je suis consterné par les paroles des deux derniers députés réformistes qui sont intervenus. Je n'aurais jamais cru que des députés pouvaient être aussi mesquins.

M. Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le mot que vient d'utiliser le député à l'endroit du Parti réformiste n'est pas parlementaire. Je vous prie de demander au député de le retirer.

Le vice-président: J'ai fait des recherches. Une ministre avait utilisé ce mot et elle a dû se rétracter. J'invite le député de Winnipeg St. James à retirer ce mot sur-le-champ.

M. Harvard: Monsieur le Président, je serai plus qu'heureux de le retirer s'il est antiparlementaire. Comment puis-je exprimer mon dégoût? Est-ce antiparlementaire cela aussi? Je suis absolument dégoûté par les paroles des députés.

Le vice-président: Le député a retiré le mot offensant, lequel avait été déclaré antiparlementaire il y a moins de deux semaines. J'invite le député à poursuivre son intervention.

M. Harvard: Monsieur le Président, je suis heureux de continuer mon discours.

Quel est le but de ce projet de loi d'initiative parlementaire? Il vise à réparer une injustice. Ces gens sont prêts et disposés à travailler et capables de le faire. Il se trouve qu'ils sont sans emploi et qu'ils touchent des prestations d'assurance-chômage. Ils ont été mandatés par l'État, par le gouvernement, par la société pour remplir les fonctions de juré.

Ce n'est pas leur faute. Ce n'est pas de l'abus comme les orateurs du troisième parti l'ont laissé entendre. Ce n'est pas de l'abus. Ces gens font le devoir que leur a imposé le Parlement du Canada. Ce n'est pas leur faute. Ils ne veulent pas enfreindre la Loi sur l'assurance-chômage, mais on les oblige à faire partie d'un jury et ils doivent pour cela renoncer à leurs prestations d'assurance-chômage.

Au nom de l'équité et de la justice, on ne peut certainement pas leur demander de remplir les fonctions de juré et, en même temps, de renoncer à leurs prestations d'assurance-chômage. C'est une injustice, et ce projet de loi vise justement à réparer cette injustice.

N'avons-nous pas de compassion? N'avons-nous pas la décence de montrer à ces gens que nous nous préoccupons de leur sort, de leur dire que, oui, nous voulons qu'ils respectent la loi et qu'ils remplissent les fonctions de juré, mais que nous ne leur enlèverons pas leurs prestations d'assurance-chômage? Si les parlementaires ne peuvent pas comprendre ce concept pourtant si simple, alors je ne comprends plus ce qui se passe.

(1855)

En terminant, je veux simplement dire que cette mesure législative est justifiée. Les arguments présentés par les orateurs précédents ne sont qu'une diversion. Cette mesure a été examinée par le comité. Il n'y a plus de questions à se poser. Nous devrions régler cette affaire dès maintenant au nom de la justice.

Je félicite le député de Restigouche-Chaleur. Il a bien fait en présentant cette mesure législative. Au nom de la justice, adoptons-la sans plus tarder.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je ne parlerai pas longtemps, mais j'espère que je le ferai avec un peu plus de calme que le député qui m'a précédé. Un certain nombre des arguments qu'il a fait valoir réitèrent en réalité ce que mes collègues cherchent à faire en voulant faire renvoyer au comité l'objet du projet de loi.

Nous devons considérer cette question à la lumière de l'examen de tous nos programmes sociaux et des projets de réforme qui seront présentés, espérons-le, plus tard, mais pas beaucoup plus tard, au cours de la présente législature. Nous allons examiner le régime d'assurance-chômage et le réviser, espérons-le, dans le but d'en faire un véritable régime d'assurance. Par ailleurs, quand nous parlons du service de juré, il est possible que nous parlions d'autres champs de compétence, notamment provinciaux, en ce qui concerne le système de justice pénale.

Toute cette situation présente beaucoup d'éléments complexes et beaucoup d'autres aspects qui n'ont pas été exposées adéquatement à la Chambre et au comité, et les provinces n'ont pas eu le temps de dire ce qu'elles en pensaient. Cela souligne le fait qu'avant de mettre en application à la hâte cette mesure d'initiative parlementaire qui coûtera de l'argent aux contribuables et qui élargira la portée de l'assurance-chômage au lieu de la ramener à sa fonction initiale, il serait sage de ne pas lier les mains du gouvernements et du ministre du Développement des ressources humaines avec des propositions qu'il faudra annuler plus tard.

Je parle au nom des Canadiens rationnels qui veulent faire un examen minutieux et prendre de sages décisions, au lieu de déclamer avec une émotion débridée sans avoir vérifié tous les faits au préalable pour pouvoir prendre des décisions judicieuses au lieu de décisions idiotes. Nous avons vu les gouvernements libéraux antérieurs échafauder le régime d'assurance-chômage et les programmes de sécurité du revenu au point où il nous faut maintenant songer à les réformer, les restructurer et les ramener à leurs fins initiales de sorte qu'ils puissent vraiment venir en aide aux Canadiens qu'ils étaient censés aider.

Si le fait d'être appelé à exercer les fonctions de juré entraîne pour les intéressés des difficultés financières, il faut certainement examiner le problème. Mes collègues du Parti réformiste ne veulent pas dire que ce n'est pas une question valable à soulever à la Chambre. Nous disons simplement que le régime d'assurance-chômage n'est peut-être pas le bon instrument à utiliser pour régler ce problème. Nous créons ici un précédent, car un projet de loi proposé par un député va entraîner des dépenses pour le contribuable, et c'est pourquoi le secrétaire

8739

d'État aux Affaires parlementaires a fait une intervention passablement longue à la Chambre.

Cet incident crée donc un précédent. Je crois que nous devons faire preuve d'une prudence beaucoup plus grande, étant donné que notre dette atteint 540 milliards de dollars et qu'il faut rendre compte du moindre sou. La Chambre doit assumer une plus grande responsabilité à l'égard des dépenses. Nous ne devons pas nous hâter en faisant des interventions de deux minutes pour faire adopter en douce ces projets de loi sans de vraies consultations et sans un vrai débat à la Chambre.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

(1900)

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le whip adjoint m'a demandé de reporter le vote à demain. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

Mme Catterall: Monsieur le Président, compte tenu de la planification des votes pour cette semaine, vous constaterez peut-être qu'il y a consentement unanime pour différer encore le vote à 17 h 30, jeudi.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

M. Hermanson: D'accord.

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


8739

L'AJOURNEMENT

[Français]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office, en conformité de l'article 38 du Règlement.

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, pour que vous compreniez un peu la question, je vais vous faire un historique. C'est que le 20 septembre 1994, j'ai posé des questions très claires au solliciteur général du Canada relativement à ce qui se passait dans les dossiers Bristow, McInnis, les infiltrations de partis politiques, les infiltrations de syndicats et des enquêtes au niveau du Congrès juif de Toronto et de Montréal.

Nous avions surtout demandé au gouvernement de créer une commission royale d'enquête pour faire toute la lumière sur cette question. J'avais également demandé qui contrôle ce monstre que semble être le Service canadien du renseignement de sécurité, parce qu'il n'y a plus personne qui semble être capable de le contrôler et de mettre la main sur les véritables responsables, les gens qui engagent des deniers publics, qui posent des gestes. Il ne semble pas y avoir de responsable au Parlement.

À cette question, nous avons très rarement de réponse, comme vous le savez fort bien. On a mis ça entre les mains de CSARS. Vous connaissez le CSARS, le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité. Depuis le 20 septembre, on a débattu de cela en sous-comité, on a rencontré des témoins, l'inspecteur du Service canadien fait enquête, le Sous-comité sur la sécurité nationale a entendu des témoins et ainsi de suite. On va apprendre, le 9 décembre, que CSARS va remettre son rapport au solliciteur général du Canada.

Vous savez, monsieur le Président, qu'on a des réticences envers CSARS, parce que c'est «paqueté» de nominations politiques. La majorité sont des conservateurs qui enquêtent sur des activités qui se sont passées dans les années 1990, faites par des conservateurs. Je pense que c'est être juge et partie en même temps et bien qu'on ait des réticences, on va lire attentivement, en tout cas, on l'espère, le rapport que CSARS produira.

Ce que je demande ce soir au solliciteur général du Canada, c'est qu'il remette intégralement ce rapport au Sous-comité sur la sécurité nationale, sans ratures. Comme nous sommes bien représentés au Sous-comité sur la sécurité nationale, nous pourrons être en mesure de voir nous-mêmes si le travail a été bien fait, si CSARS a rempli son mandat. Cela va nous rassurer et voir ce qui a été fait dans les cas que j'ai énumérés plus haut, dans l'affaire Bristow et quant aux infiltrations par le Service canadien du renseignement de sécurité.

(1905)

Ce que je demande, et j'espère que nous allons l'obtenir, c'est une copie intégrale pour que notre représentant au Sous-comité sur la sécurité nationale puisse interroger les personnes et obtenir satisfaction à ce chapitre.

Je pense qu'il est extrêmement important, compte tenu que nous n'avons pas été capables d'obtenir la mise sur pied d'une commission royale d'enquête, qu'on puisse au moins examiner intégralement ce rapport-là.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'il a promulgué la Loi sur le SCRS, en 1984, le Parlement a atteint deux objectifs très importants. Tout d'abord, il a créé un organisme de renseignement de sécurité civil qui, par l'entremise du


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solliciteur général, rend compte au Parlement et à la population canadienne.

Deuxièmement, pour renforcer le contrôle des activités de cet organisme et le respect de son obligation de rendre compte, le Parlement a mis sur pied un organisme d'examen externe: le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, le CSARS.

Aux termes de la loi, le CSARS doit assumer deux sortes de fonctions: la première consiste à agir comme tribunal administratif pour entendre les plaintes dont fait l'objet le service; la deuxième qui s'applique au présent débat est d'examiner le rendement et les activités du service.

L'article 38 de la Loi sur le SCRS autorise le CSARS à surveiller la façon dont le SCRS exerce toutes ses fonctions, plus précisément en vertu de l'article 54. Le CSARS peut faire enquête sur toute question relative aux activités du SCRS, puis présenter un rapport spécial au solliciteur général.

Le CSARS est autorisé à obtenir du SCRS et de l'inspecteur général toute information dont il a besoin pour assumer ses responsabilités, y compris des documents, des rapports et des explications. De toute évidence, le CSARS a les compétences et les pouvoirs nécessaires pour bien faire son travail.

En conclusion, ce ne serait pas dans l'intérêt des Canadiens de mettre sur pied un autre organisme d'examen qui ferait exactement ce que le CSARS est déjà autorisé à faire.

Je propose donc que nous mettions de côté cette suggestion de convoquer une commission royale jusqu'au dépôt du rapport du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité.

[Traduction]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, la question posée au ministre du Commerce international vient de préoccupations d'un certain nombre d'organismes agricoles qui craignent que le projet de loi C-57, la loi de mise en oeuvre de l'Organisation mondiale du commerce, ne présente des lacunes et qu'il doive être modifié.

Ma question portait sur un sujet de préoccupation, à savoir les niveaux tarifaires et les quotas supplémentaires s'appliquant aux produits soumis à la gestion de l'offre. Mais il y a d'autres sujets de préoccupation, comme les articles du projet de loi qui portent sur la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, et les comparaisons avec la loi de mise en oeuvre américaine.

Il ne fait aucun doute dans mon esprit que la loi de mise en oeuvre américaine a plus de mordant et que les États-Unis conservent un plus grand contrôle politique.

Le 28 novembre, le ministre a répondu à ma question sur les niveaux tarifaires et sur les quotas supplémentaires s'appliquant aux produits assujettis à la gestion de l'offre en disant que des modifications au Tarif des douanes et autres lois, seraient apportées «au besoin».

Le ministre n'a pas répondu à ma satisfaction ni à celle de l'industrie en disant qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter ou que, compte tenu de ces préoccupations, un projet de loi modificatif sera présenté sous peu.

Un document sur le projet de loi C-57, que le Service de recherche de la Bibliothèque du Parlement a préparé à l'intention du comité permanent de l'agriculture, mentionne, à propos des quotas supplémentaires, que même si l'article 109 du projet de loi C-57 peut sembler nécessaire pour permettre des importations supplémentaires en cas d'urgence, la question de savoir quels droits s'appliqueraient sur ces importations supplémentaires reste nébuleuse.

Toujours selon le document de recherche, des pénuries pourraient être provoquées artificiellement et nécessiter des importations supplémentaires qui pourraient remplacer en permanence les produits nationaux. Les autorités concernées n'ont pu, jusqu'à maintenant, fournir une réponse satisfaisante quant aux droits qui s'appliqueraient aux importations supplémentaires.

Lorsqu'ils ont comparu devant le comité du commerce international, les représentants de la Fédération canadienne de l'agriculture ont aussi exprimé des préoccupations en ce sens.

(1910)

Il faut s'attaquer à ce problème. Comme je l'ai dit dans le cadre de débats précédents, il pourrait arriver qu'un transformateur sous-évalue volontairement la demande. Ainsi, dans le secteur de l'aviculture, les couvoirs contrôlent l'achat des oiseaux de reproduction et il n'est donc pas difficile pour eux de planifier une pénurie et d'exiger des importations supplémentaires.

Après avoir sous-évalué volontairement les besoins, ils exigent des importations supplémentaires. Le fabricant demandera des avantages semblables et obtiendra une licence d'importations supplémentaires exemptes de droits, ce qui remettra en question, dans une large mesure, le système canadien de gestion de l'offre.

La question demeure: pourquoi le ministre n'a-t-il pas présenté les modifications voulues au Tarif des douanes pour apaiser les craintes exprimées? J'ai bien peur également que si ces modifications ne sont pas contenues dans la loi, mais simplement dans des règlements, il devienne éventuellement très facile pour un ministre qui n'est pas aussi favorable à la gestion de l'offre que le gouvernement actuel de laisser, en fait, la loi elle-même être affaiblie quelque peu pour que le système de gestion de l'offre disparaisse avec le temps.

Je voudrais formuler une autre observation et poser à ce sujet une question au ministre. Le projet de loi C-57 ne renferme aucune disposition pour faire en sorte que les exportateurs de grain puissent être avertis à l'avance du moment où on atteindra le plafond sur les volumes ou sur les dépenses aux termes de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et des nouvelles exigences du GATT. Ainsi, les promesses de vente et les ventes de la Commission canadienne du blé, par exemple, à un prix établi, pourraient subir des répercussions négatives si les plafonds sont atteints avant que le grain en question ne soit expédié.

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Comment va-t-on résoudre ce problème et quelles seront les répercussions sur les activités de commercialisation de la Commission canadienne du blé, de même que sur sa capacité de vendre au meilleur prix et d'avoir accès à des approvisionnements? Je pose ces questions au ministre, car je suis très inquiet.

[Français]

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a déclaré que le nouveau régime des contingents tarifaires pour les produits agricoles comprendra des dispositions permettant les importations supplémentaires pour des fins diverses. Toutes les parties intéressées dans les secteurs de gestion de l'offre ont convenu de l'importance d'un tel accès. On a cependant posé des questions légitimes quant aux termes régissant l'accès pour combler les pénuries de marché.

D'une part, on dit que les transformateurs sont de plus en plus en mesure de contrôler la production, surtout dans les secteurs de la volaille, et peuvent donc provoquer une pénurie artificielle lorsqu'ils ont la certitude d'accès supplémentaire dans de telles situations. Puisque ceci réduirait les revenus des producteurs primaires, d'aucuns prétendent que ces importations supplémentaires devraient être imposables à un taux plus élevé que celui prévu en dedans du contingent tarifaire, afin de décourager une telle ligne de conduite.

D'autre part, les transformateurs avicoles et ovicoles soutiennent qu'ils doivent garantir et le prix et la disponibilité du produit à leurs clients pour ne pas perdre de contrats. Ils notent que leurs industries, y compris les éleveurs, doivent concurrencer les autres produits alimentaires, et que toute irrégularité du prix ou de l'offre conduirait à des pertes de parts de marché pour tous.

Il y a également de nombreux malentendus à l'égard de ce que prévoit le projet de loi C-57 au titre de l'accès supplémentaire. Il se peut que je puisse en dissiper.

D'abord, les dispositions actuelles et prévues de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation permettent les importations supplémentaires mais ne les imposent point. Le gouvernement n'a aucunement l'intention de permettre des importations supplémentaires à des droits tarifaires en deça du niveau «élevé» NPF là où cela ne serait pas dans l'intérêt du Canada.

Deuxièmement, les importations pour combler les pénuries de marché ne sont pas considérées comme étant «dans les limites de l'engagement d'accès» dans le projet de loi, et ne se traduiront nullement en une augmentation permanente des niveaux d'accès au marché. Tout au contraire, ces importations ne sont et ne seront tolérées qu'à la discrétion du gouvernement.

Troisièmement, il n'y a rien dans le projet de loi C-57 qui empêcherait le gouvernement d'examiner la question et d'introduire de nouvelles règles.

(1915)

Au fond, le projet de loi C-57 ne fait que renouveler le système actuel d'accès au marché supplémentaire, afin de fournir un moyen immédiat d'autoriser les importations supplémentaires pour de multiples raisons, dont l'appui à la compétitivité des exportations.

Et finalement, la situation requiert une analyse soignée et une large consultation. Si le gouvernement devait décider que les importations supplémentaires de produits des secteurs de gestion de l'offre devraient payer des droits supplémentaires, nous prendrions les mesures utiles afin d'instaurer un tel système. Au besoin, nous introduirions des projets de loi. Cela étant dit, on ne saurait introduire des modifications au projet de loi C-57 sans court-circuiter ce processus de consultation, et cela ne figure donc pas dans les plans du gouvernement.

[Traduction]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur une question que j'ai posée au ministre de la Justice le 1er décembre 1994 en prévision de cette Journée nationale de commémoration et d'activités concernant la violence dirigée contre les femmes. Ma question portait sur les mesures qui sont prises pour protéger les femmes contre la violence.

En ce jour de commémoration solennelle, on nous invite à rendre hommage aux nombreuses femmes qui sont mortes, victimes de violence et de mauvais traitements, et on nous rappelle que, chaque jour, des milliers d'autres personnes sont en danger et vivent dans la peur. Afin que cette journée prenne tout son sens, j'aimerais que la Chambre adopte une approche encore plus globale.

Jusqu'à tout récemment, la question de la violence faite aux femmes était une affaire privée et donc généralement ignorée ou banalisée. Heureusement, nous avons fini par nous rendre compte que la violence faite aux femmes constituait une violation on ne peut plus claire des droits de la personne. Elle dépossède les femmes de leur estime de soi, de leur dignité et, dans certains cas, de leur vie.

Depuis que Statistique Canada a mené, en 1993, sa première enquête nationale sur la violence faite aux femmes, une première mondiale, la gravité de la situation est clairement apparue. Selon cette enquête, jusqu'à 51 p. 100 des Canadiennes ont vécu au moins un incident de violence physique ou sexuelle depuis l'âge de 16 ans. Près de 45 p. 100 des femmes ont subi des actes de violence de la part d'un homme, qu'il s'agisse d'un garçon avec qui elles avaient rendez-vous, d'un ami, d'un conjoint, d'un parent ou d'un voisin. Alors qu'une femme meurt par balles tous les six jours au Canada, les armes à feu sont l'instrument le plus utilisé dans les cas d'homicide de conjoint. Entre 1974 et 1992, 42 p. 100 des femmes tuées par leur conjoint l'ont été avec une arme à feu.

Aussi bouleversantes que soient ces statistiques, elles ne représentent qu'une partie du problème puisque Statistique Canada restreint la définition de la violence aux agressions physiques ou sexuelles. On ne prend pas en compte les autres dimensions de la violence que connaissent bien des femmes.

Dans un rapport de 1993, on a souligné la nécessité de changer le paysage, de mettre fin à la violence et d'arriver à l'égalité. La violence psychologique englobe diverses tactiques qui visent toutes à miner la confiance des femmes. La violence financière survient quand une femme se voit refuser l'accès à des possibilités d'emploi ou d'investissement par son partenaire ou des membres de sa famille, et la violence psychologique, quand on détruit les moeurs ou les croyances religieuses des femmes en se mo-

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quant de ces moeurs ou de ces croyances ou en punissant les femmes qui les mettent en pratique.

Divers indicateurs nous montrent que ce fléau social est répandu et systémique. Dorénavant, des femmes de tous les milieux sont victimes d'actes de violence.

Ce ne sont pas seulement les causes et les formes de la violence faite aux femmes qui sont insidieuses. Leurs répercussions le sont aussi. Une telle violence marque non seulement les femmes, mais aussi les enfants et les hommes autour d'elles. Elle marque le corps, mais elle blesse aussi profondément l'âme et l'esprit des personnes touchées. Une femme qui a été victime de violence voit sa santé physique et mentale menacée. Cela peut nuire à ses possibilités d'avancement au travail, et ses relations interpersonnelles se détériorent habituellement.

En plus d'avoir des répercussions aussi dramatiques sur les femmes qui en sont victimes, la violence, on le sait, déstabilise grandement les enfants qui en sont témoins. Les garçons qui sont élevés dans un foyer où il y a de la violence sont plus susceptibles de devenir des pères violents, et les filles sont plus susceptibles de devenir des victimes entre les mains de leurs futurs partenaires.

Le Canada a joué un rôle de premier plan, sur la scène internationale, en prenant l'initiative de la déclaration des Nations Unies sur l'élimination de la violence faite aux femmes qui reconnaît l'urgent besoin d'appliquer à toutes les femmes les droits et les principes de l'égalité, de la sécurité, de l'intégrité et de la dignité de toutes les personnes.

Dans le livre rouge, nous avons réclamé un système judiciaire qui protégera nos maisons et nos rues. Même si d'autres ministères fédéraux seront appelés à jouer des rôles importants, je demande aujourd'hui au ministre de la Justice de nous dire ce qu'il entend faire pour mettre fin à ce grave problème que constitue la violence faite aux femmes.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous marquons aujourd'hui le triste anniversaire du meurtre de 14 jeunes femmes à l'École polytechnique de Montréal.

Le gouvernement reconnaît les effets désastreux de la violence faite aux femmes et s'efforce d'améliorer ses moyens d'aider les victimes et de maîtriser les contrevenants. À titre d'exemples des efforts que fait le ministère de la Justice pour s'attaquer au problème de la violence faite aux femmes, permettez-moi de mentionner ceux qui suivent.

Les nouvelles initiatives en matière de contrôle des armes à feu constitueront un moyen clair et efficace pour tenter d'empêcher que des femmes ne soient tuées à l'aide d'armes à feu. Le projet de loi C-42 propose des modifications au Code criminel et permettra aux forces policières et à d'autres groupes de demander un engagement à garder la paix au nom d'une personne en danger. Le projet de loi C-41 propose des réformes à la détermination de la peine et considère comme circonstance aggravante le fait de commettre une infraction par l'abus de la confiance d'une personne ou par l'abus d'autorité envers celle-ci. S'attaquer au problème de la violence contre les femmes demeure une des plus grandes priorités du gouvernement dans le domaine de la justice.

À la fin de la semaine, des consultations auront lieu avec des groupes de femmes sur les moyens de réagir au jugement de la Cour suprême qui a autorisé la défense d'intoxication extrême dans le cas d'un homme qui avait agressé sexuellement une femme pendant qu'il était intoxiqué. Le ministre de la Justice a déjà déclaré qu'il comptait donner suite aux problèmes découlant du jugement Daviault et il examine actuellement une proposition d'intoxication criminelle.

S'attaquer au problème de la violence contre les femmes demeure une des plus grandes priorités du gouvernement dans le domaine de la justice.

Le vice-président: La motion d'ajournement de la Chambre est adoptée d'office. La Chambre s'ajourne donc à 14 heures demain. Bonsoir à tous.

(La séance est levée à 19 h 22.)