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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 17 avril 1997

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE PLAN DE GESTION DU PARC NATIONAL BANFF

COMITÉS DE LA CHAMBRE

SANTÉ

COMPTES PUBLICS

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-95. Adoption des motions de présentation etde première lecture 9845

LA LOI SUR LA PROTECTION DES PÊCHES CÔTIÈRES

    Projet de loi C-96. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 9845
    Adoption de la motion; première lecture et impression duprojet de loi 9845

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

    Projet de loi C-97. Adoption des motions de présentationet de première lecture 9846

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-406. Adoption des motions de présentationet de première lecture 9846
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9846

PÉTITIONS

L'ÉQUITÉ SALARIALE

LES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

LA FISCALITÉ

L'EMPLOI

LE LOGEMENT

LA DÉFENSE NATIONALE

LES RELATIONS DE TRAVAIL

LE CODE CRIMINEL

LE RÉSEAU ROUTIER NATIONAL

LES ARMES NUCLÉAIRES

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-46. Étape du rapport 9848
    Motion d'approbation 9848
    Adoption de la motion 9848
    Projet de loi C-46. Motion de troisième lecture 9848
    Mme Gagnon (Québec) 9849
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption duprojet de loi 9854

LOI SUR LES PROGRAMMES DE COMMERCIALISATION AGRICOLE

    Projet de loi C-34. Troisième lecture 9854
    M. Chrétien (Frontenac) 9854
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9858
    M. Hill (Prince George-Peace River) 9864
    M. Hill (Prince George-Peace River) 9868
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption duprojet de loi 9872

LOI SUR LA MÉDIATION EN MATIÈRE D'ENDETTEMENT AGRICOLE

    Projet de loi C-38. Étape du rapport 9872
    Motion d'approbation et de deuxième lecture 9872
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projetde loi 9872
    Motion de troisième lecture 9872
    M. Chrétien (Frontenac) 9873

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA JUSTICE

SCHOOLREACH

LE BÉNÉVOLAT

LES JEUNES BÉNÉVOLES

LES SOINS DE SANTÉ

LE PARTI RÉFORMISTE

LES SERVICES DE POLICE POUR LES AUTOCHTONES

    M. Harper (Churchill) 9877

LES COMMISSIONS SCOLAIRES LINGUISTIQUES

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

LE BLOC QUÉBÉCOIS

K.D. LANG

    M. Speaker (Lethbridge) 9878

LE PARTI LIBÉRAL DU CANADA

LA CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS

LES JEUNES ET L'EMPLOI

LE NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9879

LE BLOC QUÉBÉCOIS

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

QUESTIONS ORALES

LA CONSTITUTION

L'EMPLOI

    M. Hill (Prince George-Peace River) 9881
    M. Hill (Prince George-Peace River) 9881
    M. Martin (LaSalle-Émard) 9881
    M. Hill (Prince George-Peace River) 9882
    M. Martin (LaSalle-Émard) 9882

LES COMMISSION SCOLAIRES LINGUISTIQUES

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 9882
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 9882

L'EMPLOI

    M. Martin (LaSalle-Émard) 9883
    M. Martin (LaSalle-Émard) 9883

LES COMMISSIONS SCOLAIRES LINGUISTIQUES

LES PÊCHES

LA CULTURE CANADIENNE

    M. LeBlanc (Cap-Breton Highlands-Canso) 9885

LA FISCALITÉ

    M. Martin (LaSalle-Émard) 9885

LES DÉPENSES PUBLIQUES

LE DÉFICIT

    M. Martin (LaSalle-Émard) 9886
    M. Martin (LaSalle-Émard) 9886

LES NOMINATIONS FAITES PAR LE GOUVERNEMENT

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9886
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9886

LES CÉRÉALES

LA PROGRAMMATION DES ORDINATEURS

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 9888

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LA MÉDIATION EN MATIÈRE D'ENDETTEMENT AGRICOLE

    Projet de loi C-38. Reprise de l'étude de la motion detroisième lecture 9888
    M. Hill (Prince George-Peace River) 9896
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption duprojet de loi 9900

LA LOI D'AIDE AU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL(INSTITUTIONS FINANCIÈRES)

    Projet de loi C-77. Motion de deuxième lecture 9900
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet deloi; avec le consentement unanime, étude en comité;rapport 9902
    Motion d'approbation 9902
    Adoption de la motion 9902
    Motion de troisième lecture 9902
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption duprojet de loi 9902

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-95. Motion de deuxième lecture 9902
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projetde loi 9905

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA COMMISSION NATIONALE DES LIBÉRATIONS CONDITIONNELLES

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

LA COMMISSION NATIONALE DES LIBÉRATIONS CONDITIONNELLES

    Reprise de l'étude de la motion 9907
    M. Speaker (Lethbridge) 9912

MOTION D'AJOURNEMENT

LA SANTÉ

LES TRANSPORTS

LA SANTÉ


9845


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 17 avril 1997


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 22 pétitions.

* * *

[Traduction]

LE PLAN DE GESTION DU PARC NATIONAL BANFF

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le plan de gestion du parc national Banff.

* * *

COMITÉS DE LA CHAMBRE

SANTÉ

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le septième rapport du Comité permanent de la santé.

(1005)

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, votre comité a convenu d'adopter le rapport sur les stratégies de prévention pour que les enfants soient en bonne santé. Conformément à l'article 109 du Règlement, le comité demande à avoir une réponse globale à ce rapport dans les 150 jours.

Je me permets de signaler l'excellent travail de tous les membres du comité de tous les partis représentés à la Chambre que je remercie sincèrement pour leur diligence à l'égard de ce que nous croyons être une importante contribution à la recherche de stratégies pour que les enfants soient en bonne santé.

[Français]

COMPTES PUBLICS

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, à titre de président du Comité permanent des comptes publics, j'ai l'honneur de présenter le huitième rapport de ce comité.

Conformément à son ordre de renvoi du jeudi 20 février 1997, le Comité a examiné le crédit 30 sous la rubrique Finances du Budget des dépenses principal pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1998, et en fait rapport. Un exemplaire des procès-verbaux pertinents, qui comprend le présent rapport, est déposé.

* * *

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

L'hon. Herb Gray (au nom ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-95, Loi modifiant le Code criminel (gangs) et d'autres lois en conséquence.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Français]

LA LOI SUR LA PROTECTION DES PÊCHES CÔTIÈRES

L'hon. Alfonso Gagliano (au nom du ministre des Pêches et des Océans) demande la permission de déposer le projet de loi C-96, Loi modifiant la Loi sur la protection des pêches côtières et la Loi sur la marine marchande du Canada afin de mettre en oeuvre l'Accord aux fins de l'application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)


9846

[Traduction]

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-97, Loi modifiant la partie II du Code canadien du travail portant sur la santé et la sécurité au travail, et d'autres lois en conséquence.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LE CODE CRIMINEL

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-406, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et la Loi sur l'immigration, afin de faire de la propagation du VIH et du sida de nouvelles infractions et rendre obligatoire chez les détenus et les immigrants le dépistage des maladies sexuellement transmissibles en vue d'enrayer la propagation de la maladie.

-Monsieur le Président, chaque projet de loi que je présente à la Chambre s'inspire d'une histoire triste et celui visant à faire de la transmission du VIH et du sida une infraction criminelle et à rendre leur dépistage obligatoire ne fait pas exception à la règle.

(1010)

En septembre 1992, Margot Blackburn, de Dunham, au Québec, a été violée dans une église par un détenu qui bénéficiait d'une permission de sortir.

En 1994, Mme Blackburn a présenté une pétition de 50 000 signatures au ministre de la Justice, qui y a répondu en donnant aux droits des criminels préséance sur ceux des victimes et en refusant de modifier la loi de manière à obliger les violeurs à se soumettre à des tests de dépistage du sida. Mme Blackburn a décrit l'enfer qu'elle a vécu depuis cinq ans.

Mon projet de loi donnerait à Mme Blackburn et à toutes les victimes l'espoir que ce simulacre de justice peut être enrayé. Il prévoit un certain nombre de mesures visant à limiter la propagation du VIH, du sida et des maladies sexuellement transmissibles en créant de nouvelles infractions criminelles relativement à la transmission du VIH et du sida, en rendant obligatoires les tests de dépistage du VIH pour 13 catégories d'infractions criminelles, en exigeant le dépistage régulier du VIH chez les détenus, en créant un établissement carcéral axé sur la santé pour les détenus dont les résultats des tests sont positifs et en ajoutant les tests de dépistage du VIH et du sida à ceux que doivent subir les immigrants et les réfugiés.

Le projet de loi accorde aux droits des victimes la préséance sur ceux des criminels. Il accorde à la santé et à la sécurité des gardiens de prison la préséance sur les droits des prisonniers. Le projet de loi enrayera la propagation du VIH et du sida, il améliorera aussi la santé et la sécurité des citoyens canadiens et il sauvera des vies.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

L'ÉQUITÉ SALARIALE

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter une pétition au nom d'un certain nombre d'habitants des comtés d'Essex, de Kent et de Lambton ainsi que de la ville de Windsor.

Cette pétition a trait à la question de l'équité salariale dans la fonction publique fédérale.

LES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui.

La première vient de St. John's, à Terre-Neuve. Ces pétitionnaires voudraient attirer l'attention de la Chambre sur le fait que les policiers et les pompiers mettent leur vie en danger tous les jours en répondant aux appels d'urgence des Canadiens. Ils affirment également que, dans bien des cas, les familles des policiers et des pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions sont souvent laissées sans ressources pécuniaires suffisantes pour faire face à leurs obligations.

En conséquence, les pétitionnaires demandent au Parlement de créer un fonds d'indemnisation des agents de sécurité publique, qui pourrait recevoir des dons ou des donations pour les familles des policiers et des pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions.

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient de Saskatoon, en Saskatchewan. Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la gestion d'un foyer, dont le soin des enfants d'âge préscolaire, constitue une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de prendre des mesures pour éliminer la discrimination fiscale envers les familles qui décident de s'occuper à la maison des enfants d'âge préscolaire, des personnes handicapées, des malades chroniques ou des personnes âgées.

L'EMPLOI

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, je veux présenter une pétition préparée par des élèves de l'école secondaire parallèle de Ladner, en Colombie-Britannique. Je les félicite pour l'intérêt qu'ils manifestent pour les travaux de la Chambre des communes.

Le texte de la pétition est le suivant: «Nous, habitants de la municipalité de Delta, en Colombie-Britannique, attirons l'attention de la Chambre des communes sur les problèmes suivants: le nombre de jeunes chômeurs augmente sans cesse et leur sentiment d'aliénation en pousse beaucoup vers la criminalité et le suicide; il existe chez les jeunes un manque de motivation qui est en grande partie attribuable au chômage qui conduit à la consommation de drogues et à l'abus d'alcool; les programmes d'emploi existants ne sont pas facilement accessibles aux jeunes de niveau secondaire et


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ils sont exagérément axés sur un groupe sélect de participants. Par conséquent, les pétitionnaires prient humblement le Parlement de soutenir les programmes d'emploi locaux destinés aux jeunes comme le Delta Youth Services.»

LE LOGEMENT

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter une pétition signée par 87 habitants de Guelph-Wellington.

Ces pétitionnaires exhortent le gouvernement, particulièrement la ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, à suspendre immédiatement les négociations sur le transfert des programmes de logement social à la province de l'Ontario et à ne les reprendre qu'à la condition que la ministre adopte une série de principes établis en consultation avec les intervenants du secteur du logement coopératif.

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter ce matin. La première est signée par des milliers d'habitants de ma ville, North Bay, en Ontario.

Les habitants de North Bay prient humblement le Parlement de ne pas faire d'autres réductions d'effectifs, compte tenu du fait que 242 emplois seront supprimés à l'escadre 22 au cours des dix-huit prochains mois. Les pétitionnaires demandent aussi que l'escadre 22 et les escadrons 21 et 51 restent à North Bay, que le gouvernement annonce que le maintien de la base aérienne à North Bay avant les prochaines élections, que le système informatique prototype pour la surveillance aérienne soit installé à North Bay en 1998, que le site canadien permanent pour le nouveau système de surveillance demeure à North Bay et qu'on tienne davantage de consultations publiques avant de supprimer d'autres emplois ou d'autres installations, y compris le site souterrain.

(1015)

LES RELATIONS DE TRAVAIL

M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition.

Les membres de l'Alliance de la fonction publique du Canada dans la circonscription de Nipissing, que je représente, prient humblement le gouvernement de garantir que le Conseil du Trésor, représentant l'employeur, agira de bonne foi en ayant recours à des pratiques de négociation ouvertes et honnêtes et de garantir aussi qu'il n'abusera pas de son pouvoir en légiférant à l'égard de toute partie de la convention collective négociée et signée par le Conseil du Trésor, représentant l'employeur, et l'Alliance de la fonction publique du Canada, représentant les employés; de garantir que la question de l'équité salariale sera réglée avant les prochaines élections et que ce règlement n'entraînera pas la suppression d'autres emplois.

Les pétitionnaires demandent que cette pétition soit lue à la Chambre des communes et appuyée par un député démocratiquement élu avant les prochaines élections fédérales.

LE CODE CRIMINEL

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter deux pétitions.

La première pétition est signée par 99 électeurs de ma circonscription. Les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel interdisant l'aide au suicide soient appliquées rigoureusement.

Ils demandent au Parlement de n'apporter à la loi aucune modification qui aurait pour effet d'approuver ou de permettre l'aide au suicide ou l'euthanasie active ou passive.

LE RÉSEAU ROUTIER NATIONAL

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, la seconde pétition es signée par 52 de mes électeurs. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'exhorter le gouvernement fédéral à se joindre aux gouvernements provinciaux pour remettre en état le réseau routier national, comme cela se fait aux États-Unis et au Mexique.

LES ARMES NUCLÉAIRES

M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter un pétition signée par environ 100 résidents de ma circonscription, Algoma, principalement dans la région d'Elliot Lake et de Blind River.

Les pétitionnaires s'inquiètent à la pensée qu'il y a 30 000 armes nucléaires sur la terre à l'heure actuelle. Ils citent l'ancien secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, qui déclarait:

Le moyen le plus sûr et le plus rapide d'éliminer la menace des armes nucléaires est de les éliminer complètement.
Puisque le Canada est signataire du Traité de non-prolifération des armes nucléaires, les pétitionnaires croient que le gouvernement canadien devrait poursuivre les négociations de bonne foi et prendre des mesures qui mettront rapidement un terme à la course aux armes nucléaires et qui aboutiront au désarmement nucléaire.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

9848


9848

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (communication de dossiers dans les cas d'infraction d'ordre sexuel), dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

L'hon. Alfonso Gagliano (au nom du ministre de la Justice) propose que le projet de loi, tel que modifié, soit agréé.

(La motion est adoptée.)

Le vice-président: Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec le consentement de la Chambre, maintenant?

Des voix: D'accord.

M. Gagliano (au nom du ministre de la Justice) propose que le projet de loi C-46 soit lu pour la troisième fois maintenant et agréé.

M. Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Est-il proposé de voter sur le projet de loi C-46 à l'étape de la troisième lecture?

Le vice-président: Nous examinons maintenant le projet de loi à l'étape de la troisième lecture.

M. Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, nous avions cru comprendre que le gouvernement allait faire quelques observations pour ouvrir le débat et qu'un député de notre parti allait pouvoir ensuite prendre la parole. Nous sommes peu nombreux à vouloir prendre la parole, mais nous aimerions faire des remarques sur cette question.

Le vice-président: Peut-être serait-il plus facile que le secrétaire parlementaire fasse d'abord ses observations et que la parole soit ensuite accordée aux députés du Parti réformiste.

(1020)

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel à l'égard de la communication de dossiers dans les cas d'infraction d'ordre sexuel.

J'ai décrit les amendements proposés à cette mesure et exposé les problèmes que ces amendements visent à corriger quand j'ai pris la parole à la Chambre le 4 février dernier.

Je félicite le ministre de la Justice des efforts qu'il a faits pour réaliser des réformes progressistes à la législation canadienne sur les infractions d'ordre sexuel. Ces réformes visent à assurer le respect de la charte, qui garantit que tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi.

En tant que société, nous ne tolérons pas les comportements crapuleux. Nous comptons sur notre droit pénal pour nous protéger et pour étayer les poursuites en justice intentées contre ceux qui ne respectent pas la loi.

Les infractions d'ordre sexuel ne sont pas n'importe quelle infraction. Elles constituent le délit le plus agressant, le plus perturbant et le plus dégradant dont une personne puisse être victime. N'importe lequel d'entre nous pourrait être victime d'un acte criminel mais, comme nous le savons tous, les femmes et les enfants courent plus de risques d'êtres victimes d'une agression sexuelle.

Les attitudes dépassées qu'on entretient à l'endroit des infractions d'ordre sexuel et des femmes qui en ont été victimes sont en train de changer, mais la situation évolue lentement. De nombreux mythes et stéréotypes persistent dans notre société et au sein du système de justice pénale en ce qui a trait à ce type d'infraction.

Cela crée un climat qui mine notre confiance dans la justice pénale, conçue pour être juste et équitable. Come on l'a déjà signalé, les infractions d'ordre sexuel ont ceci de particulier qu'il y a rarement des témoins.

La notion de consentement et la crédibilité des plaignants sont à la base des arguments de la poursuite. Il semble que le fait d'avoir été victime d'une agression sexuelle stigmatise davantage une personne que le fait d'être accusé d'agression sexuelle. La crédibilité du plaignant et son caractère sont passés au peigne fin.

Une bonne part des agressions sexuelles et autres infractions de même nature ne sont jamais rapportées. On ne peut qu'estimer le véritable taux d'agressions sexuelles au moyen de sondages, mais les statistiques de la police nous en donnent aussi une idée. Environ 110 agressions sexuelles sont rapportées annuellement, sur un échantillon de 100 000 personnes, mais seulement 10 p. 100 de ces agressions sont rapportées.

Nous ne devrions pas être fiers de ces statistiques. On compte tellement d'agressions sexuelles par année que c'en est révoltant, mais le fait que tellement peu d'entre elles soient dénoncées, c'est encore plus révoltant.

Je suis fier de faire partie d'un gouvernement qui est déterminé à améliorer le système de justice pénale, déterminé à améliorer la sécurité publique et déterminé à supprimer plusieurs des obstacles qui empêchent les victimes d'avoir accès au système de justice.

Le fait que l'accusé puisse exploiter certains des dossiers les plus personnels et privés de la plaignante est plus que simplement gênant. C'est une atteinte à la dignité, à l'intégrité et à l'autonomie personnelle de la plaignante.

Je veux pouvoir dire en toute confiance que la loi nous protégera contre la criminalité et que la loi nous donnera les outils pour poursuivre les contrevenants dans le respect des principes de la justice fondamentale qui réservent un traitement équitable tant à l'accusé qu'à la victime. Les amendements que l'on propose au projet de loi C-46 contribueront grandement à la réalisation de cet objectif.

Cette mesure législative nous garantira que les demandes de communication de dossiers seront fondées sur la pertinence. Dans toutes les autres procédures au criminel, les tribunaux ne semblent avoir aucune difficulté à déterminer la pertinence d'une preuve ou de documents dont on demande la production ou la divulgation.

Dans les poursuites pour crime sexuel, il semble qu'une fausse déclaration de la part de l'avocat de la défense sur les raisons pour lesquelles il a besoin des dossiers suffise pour que la vie privée de la


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victime soit violée. Il semble qu'on soit incapable de débarrasser notre société de ces attitudes.

C'est pourquoi j'accueille aussi favorablement ce projet de loi qui va aider les tribunaux à déterminer si les dossiers sont pertinents et à s'assurer que seules les parties pertinentes de ces derniers sont communiquées à l'accusé.

J'aimerais m'arrêter sur certains éléments importants du projet de loi. Il renferme un préambule, chose que l'on retrouve maintenant assez couramment dans les projets de loi. Un préambule est un outil efficace pour aider les tribunaux à interpréter la loi et pour préciser les intentions du Parlement et les raisons qui l'ont poussé à proposer ces modifications.

Dans le préambule du projet de loi C-46, nous faisons part de nos préoccupations à l'égard de la violence faite aux femmes et aux enfants et du besoin de promouvoir et de protéger les droits garantis à tous par la Charte. Nous reconnaissons l'inicidence que peut avoir l'obligation de communiquer des dossiers privés et confidentiels sur les plaignantes et sur les témoins. Autrement dit, il décrit exactement les défauts que les amendements cherchent à corriger.

(1025)

On peut lire dans le préambule que toute demande de communication de dossier devrait être examinée avec prudence et à la lumière des droits accordés par la Charte à l'accusé, au plaignant et au témoin.

La Cour suprême du Canada a bien souligné qu'il n'existe aucune hiérarchie entre les droits accordés par la Charte. Il faut, dans toute la mesure du possible, rapprocher, concilier les droits conflictuels ou concurrents. Les amendements proposés reflètent cet objectif de conciliation entre les droits conflictuels.

Le ministre a précisé que les amendements visaient une cible bien limitée. Ils exigent que l'accusé prouve la pertinence possible des renseignements personnels et que le tribunal examine très attentivement les demandes de communication de dossiers, en se conformant aux dispositions détaillées sur le fond et la procédure, mais le nouveau régime de communication ne s'applique qu'aux infractions d'ordre sexuel.

Le processus de consultation exhaustif entrepris par le ministre de la Justice et ses fonctionnaires a fait ressortir que la grande majorité des demandes de communication de renseignements personnels étaient faites dans le cas des infractions d'ordre sexuel. La jurisprudence le confirme. Dans les causes pour infractions sexuelles, on demande toute une panoplie de renseignements personnels que l'on n'exige jamais dans les autres genres de causes. Par conséquent, ce type de régime de communication ne semble ni nécessaire, ni justifié dans les autres poursuites pénales.

Les amendements ne s'appliquent qu'aux poursuites pour infractions d'ordre sexuel et ont été attentivement rédigés et adaptés à ces infractions, mais ils serviront à protéger d'autres dossiers de toutes sortes. Le projet de loi définit un dossier comme étant toute forme de document contenant des renseignements personnels pour lesquels il existe une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée. La définition peut s'appliquer à une variété de dossiers et s'adapter à de nouvelles situations éventuellement.

En outre, la définition décrit certains dossiers précis pour que chacun comprenne bien que ces documents sont visés par le régime de communication.

Je tiens à féliciter le ministre de la Justice de ses initiatives. Le projet de loi C-46 montre qu'il a choisi une approche juste et équilibrée pour régler un problème fort complexe. Pour élaborer le projet de loi, le ministre a été attentif à l'opinion des gens les plus touchés par la communication de renseignements personnels, c'est-à-dire les fournisseurs de services aux victimes, les groupes de défense de l'égalité des femmes, les procureurs de la Couronne et les avocats de la défense. Tous ces gens ont contribué à l'élaboration d'un meilleur projet de loi sans qu'aucune opinion ne domine les autres.

En conclusion, le projet de loi C-46 est donc un excellent exemple de mesure législative qui met en pratique les valeurs que nous prônons en notre qualité de parlementaires: la justice et l'égalité. Je demande à tous les députés à la Chambre d'appuyer le projet de loi C-46.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, je suis heureuse aujourd'hui de prendre part au débat sur une mesure législative qui vise à contribuer, un tant soit peu, à la diminution de la violence à l'égard des femmes.

Responsable et critique officielle en matière de condition féminine, ce dossier m'intéresse au plus haut point. Le projet de loi C-46 vise donc à encadrer la communication des dossiers des victimes d'agression sexuelle qui sont malheureusement trop souvent les femmes et les enfants. Ce projet de loi est devenu nécessaire à la suite d'un jugement rendu en décembre 1995 par la Cour suprême du Canada dans l'affaire O'Connor.

Il s'agissait d'une cause d'agression sexuelle où un homme accusé d'agression sexuelle envers quatre jeunes filles réclamait l'accès aux dossiers scolaires, médicaux et socio-psychologiques des plaignantes. La Cour suprême, dans une décision très partagée, a déclaré que, dans certains cas, l'accusé devait avoir accès aux dossiers des plaignantes.

Il faut resituer le débat dans son contexte d'alors. Depuis quelques années déjà, les victimes d'agression sexuelle étaient protégées par les nouvelles dispositions du Code criminel, dispositions qui prévoyaient qu'un accusé ne peut attaquer la réputation de sa victime, surtout sa réputation sexuelle. On se rappellera que ces dispositions avaient été adoptées à la suite de décennies d'abus des victimes aux mains des accusés. Ces derniers pouvaient, et ne se gênaient surtout pas pour le faire, chercher à ternir la crédibilité de leurs victimes en étalant sur la place publique le passé sexuel de ces dernières. On maintenait ainsi le mythe à l'effet qu'une femme qui n'était plus vierge méritait d'être violée.

(1030)

Les moeurs ont changé. Les femmes ont graduellement acquis leurs droits à l'égalité, incluant leur droit à la liberté sexuelle. La bataille a été longue et ardue, et il n'est pas si évident qu'elle soit entièrement gagnée. Nous en avons la preuve régulièrement, quand certains juges se laissent aller à exprimer publiquement leurs sentiments véritables à l'égard des femmes.


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Les femmes avaient gagné une certaine protection judiciaire. Cette protection est importante, parce qu'elle incite les femmes victimes d'agressions sexuelles à porter plainte. Elle les incite également à continuer dans le processus, une fois la plainte initiale déposée. La protection judiciaire permet également aux victimes de minimiser, tant que faire se peut, l'impact que l'agression a eu sur elles, en les encourageant à aller chercher l'aide disponible dans la communauté et auprès des professionnels.

Ce contexte de protection judiciaire est essentiel à la lutte que mènent les femmes, et c'est pourquoi il est si important que nos lois, tout en assurant aux accusés le droit à une défense pleine et entière, protègent l'accès des victimes aux tribunaux. Cet accès concrétise les droits à l'égalité entre les femmes et les hommes. En effet, comment pourrait-on parler d'égalité entre les femmes et les hommes dans un contexte où les hommes pourraient continuer presque impunément à agresser sexuellement les femmes, puisque celles-ci s'empêcheraient de dénoncer les agressions dont elles sont victimes par peur de voir leur vie privée révélée au grand jour?

Si on veut une société où les hommes et les femmes sont égaux, il faut que nous prenions tous les moyens à notre disposition pour que le droit à l'intégrité et à la sécurité soit le même pour les femmes et pour les hommes. Or, le meilleur garant de ces droits demeure, malgré ses imperfections, le système judiciaire.

Parlant de protection des droits, j'aborderai le premier sujet qui soulève des interrogations: celui de l'équilibre entre les droits de l'accusé et les droits de la victime. Le projet de loi mentionne, dans le préambule, le droit de l'accusé à une défense pleine et entière et le droit de la victime à la protection de la vie privée et à l'égalité de la personne. Le préambule mentionne également qu'il faut viser à l'équilibre entre ces droits dans la mesure du possible.

C'est sur ces derniers mots, sur ce concept d'équilibre que repose l'argumentation des parties qui s'opposent à ce projet de loi. D'un côté, les avocats de la défense réclament un plus grand accès aux dossiers des victimes, justifiant cette demande par le droit absolu de l'accusé à une défense pleine et entière. L'idée derrière cela, c'est qu'il vaut mieux, peut-être, que 1 000 personnes coupables soient libérées qu'une seule personne innocente soit condamnée injustement.

De l'autre côté, les représentants des victimes traditionnelles d'agressions sexuelles, c'est-à-dire les femmes, disent que le nombre de procès basés sur de fausses accusations d'agressions sexuelles est pratiquement inexistant et que le droit des femmes à ne pas se faire agresser et leur droit à la vie privée passent par une interdiction absolue d'accès aux dossiers. Comment se situer entre ces deux positions? Comment atteindre l'équilibre entre les droits de l'accusé et ceux des victimes? On pourrait se demander si, dans le contexte actuel, les droits des accusés ne sont pas mieux protégés. Je m'explique.

Le droit d'un accusé à une défense pleine et entière est, comme on le sait, constitutionnalisé depuis 1982. Cependant, ce droit était déjà bien protégé par les tribunaux, même avant l'adoption de la Charte canadienne. Comme je le disais plus tôt, il est inscrit dans nos moeurs juridiques qu'on doit à tout prix protéger les innocents contre des condamnations erronées. De fait, les tribunaux, surtout depuis l'adoption de la Charte, ont développé toute une série de critères et de règles qui visent à protéger encore mieux ce droit à une défense pleine et entière. Les jugements sur cet article de la Charte pullulent, et on peut prévoir qu'il y en aura encore beaucoup d'autres.

Cependant, le droit à la vie privée et à la sécurité de la personne est beaucoup moins connu du public. Il ne fait pas encore partie de notre culture juridique et populaire. Il n'a pas fait l'objet d'autant de décisions judiciaires percutantes et donc perçues à tort comme étant moins importantes. Pourtant, les deux droits se côtoient dans la Charte et nulle part n'y trouve-t-on, en quelque indication, qu'ils soient moins importants. Comment expliquer cet état de fait? Il me semble que ce déséquilibre reflète malheureusement l'importance moindre qu'on a traditionnellement accordée aux droits des femmes.

Comme le soulignait Mme Michele Landsberg, une journaliste du Toronto Star, a-t-on déjà vu un officier de police qui témoigne à un procès contraint à dévoiler ses dossiers médicaux ou sa vie sexuelle afin d'établir sa crédibilité comme témoin? D'ailleurs, plusieurs témoins qui ont comparu devant le comité ont fait la même remarque.

(1035)

Pourquoi les femmes ont-elle été traditionnellement soumises à de telles humiliations, si ce n'est qu'on ne leur accordait pas la même crédibilité? Pourtant, comme le rapport la journaliste dans les autres causes criminelles, on n'envahit pas la vie privée des victimes. C'est quand on lie femme et sexualité que notre société a toujours ressenti le peu de besoin d'imposer des contraintes aux femmes. Pourtant, leur droit à la vie privée est protégé par la Charte lui aussi.

Ce problème étant posé, je reviens spécifiquement au projet de loi du ministre de la Justice. Par ce projet de loi, le ministre veut établir un équilibre entre les droits de l'accusé et ceux de la victime. Présentement, le droit actuel permet à l'accusé de demander un large éventail de dossiers, en prétextant simplement qu'ils pourraient être pertinents. Le droit actuel laisse également plusieurs question en plan. Par exemple, quels dossiers sont visés, quelles conditions peuvent être imposées pour la production de dossiers, quelle information doit être incluse dans le subpoena et que faire des dossiers en attendant les procédures d'appel?

Le projet de loi C-46 veut s'attaquer à toutes ces questions. Le projet de loi veut obliger l'accusé à préciser les raisons qui lui font croire que tel dossier serait pertinent à sa défense. Il veut aussi éliminer les parties de pêche.

Je sais que plusieurs témoins qui représentent les organismes voués à la défense des victimes d'agressions sexuelles ou encore des consultants auprès des victimes auraient souhaité qu'aucun dossier à caractère confidentiel ne puisse être transmis à l'accusé, mais tous et toutes savent très bien que cela est difficilement réalisable parce que, selon certains experts, ils ne passeraient pas le test de la Charte.

Donc, la communication des dossiers porte aussi potentiellement atteinte aux droits des femmes à avoir accès à des services sociaux et de santé qui sont essentiels à leur sécurité physique et psychologi-


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que. En effet, la possibilité qu'un entretien entre une femme et sa thérapeute soit dévoilé au juge du procès et à l'avocat à la défense risque de décourager bon nombre de femmes à obtenir les soins et le soutien dont elles ont besoin pour remédier aux effets d'une agression sexuelle. Cela faisait l'unanimité des propos tenus par les témoins lors des audiences du comité.

Tous s'entendaient à dire qu'il y aurait une diminution de la fréquentation des femmes pour avoir accès à certains services de thérapeute.

Compte tenu de l'importance des enjeux pour les victimes d'agressions sexuelles et du fait que l'information qui est contenue dans les dossiers risque fort probablement de ne pas être pertinente pour la défense de l'accusé, je crois qu'il faudrait exiger que la défense démontre que, d'une part, l'accès aux dossiers confidentiels est probablement nécessaire pour assurer la défense pleine et entière de l'accusé et que, d'autre part, les effets bénéfiques de la communication du dossier dépassent substantiellement ses effets préjudiciables sur les droits constitutionnels de la plaignante.

Tout comme plusieurs groupes qui ont été entendus, j'aurais souhaité plusieurs modifications à ce projet de loi. D'ailleurs, j'en ai présenté plusieurs en comité. Vous ne serez pas surpris si je vous dis, ce matin, qu'elles ont toutes été refusées par le comité composé en majorité de députés du Parti libéral. Cela vous surprend-il, monsieur le Président?

Pourtant, je crois en toute sincérité que ces modifications étaient très réalistes et tenaient surtout compte des suggestions apportées par les témoins, par ceux et celles qui accompagnent très souvent la victime qui a subi des abus sexuels contre sa personne.

Un des premiers amendements souhaités était d'inclure le préambule dans le texte de loi. Parmi les groupes qui ont fait ces recommandations, on retrouve le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, l'Action ontarienne contre la violence faite aux femmes, le Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes, et un dernier groupe, METRAC.

Plusieurs de ces témoins nous ont affirmé que certains juges se laissent facilement aller à exprimer publiquement leur sentiment véritable à l'égard des femmes.

(1040)

C'est pourquoi il aurait été souhaitable d'inclure le préambule dans le texte de loi afin de combattre ces mythes et ces préjugés sexistes encore bien présents dans notre système judiciaire. Pour mieux comprendre ou encore saisir l'importance du message de ce préambule, je vais en faire la lecture. Voici ce que le préambule disait:

Attendu que les cas de violence et d'exploitation sexuelle au sein de la société canadienne continuent de préoccuper sérieusement le Parlement du Canada, et, en particulier, la fréquence des agressions sexuelles contre les femmes et les enfants;
Attendu que le Parlement du Canada reconnaît que la violence a des effets particulièrement néfastes sur les chances d'égalité des femmes et des enfants au sein de la société et sur leurs droits à la sécurité de leur personne, à la vie privée ou aux mêmes bénéfices de la loi qui sont garantis par les articles 7, 8, 15 et 28 de la Charte canadienne des droits et libertés;
Attendu qu'il entend promouvoir et contribuer à assurer la pleine protection des droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés pour tous, y compris ceux qui sont accusés de violence ou d'exploitation sexuelle et ceux qui sont ou pourraient devenir des victimes de violence ou d'exploitation sexuelle;
Attendu que les droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés le sont pour tous et qu'en cas de conflit, l'équilibre entre eux doit être assuré dans la mesure du possible;
Attendu que le Parlement du Canada souhaite encourager la dénonciation des cas de violence ou d'exploitation sexuelle et faire en sorte que leur poursuite s'effectue dans un cadre juridique compatible avec les principes de la justice fondamentale et équitable à la fois à l'égard des plaignants et des accusés;
Attendu qu'il reconnaît que l'obligation de communiquer des renseignements personnels peut avoir un effet dissuasif sur la dénonciation d'agressions sexuelles et sur le recours aux traitements, thérapies ou services de consultation nécessaires;
Attendu qu'il reconnaît que le travail de ceux qui fournissent de l'aide et des services aux victimes d'agressions sexuelles est entravé par l'obligation de communiquer des renseignements personnels et par la procédure qui oblige à cette communication;
Attendu qu'il reconnaît que si la communication de renseignements personnels au tribunal et à l'accusé peut être nécessaire à une défense pleine et entière de l'accusé, elle peut aussi constituer une atteinte aux droits à la vie privée et à l'égalité de la personne qu'ils concernent et que, de ce fait, la décision de l'accorder ne devrait être rendue qu'avec prudence.
Donc, on constate, à la lecture de ce préambule et de l'objectif qu'il vise par son inclusion dans le Code criminel en introduction à la huitième partie portant sur les crimes contre la personne, il est difficile de comprendre pourquoi le comité a refusé les recommandations faites par plusieurs témoins et par le Bloc québécois.

Je comprends très bien qu'il ne faut pas alourdir le Code criminel indûment et que bien des principes se retrouvent dans les dispositions générales; c'est souvent l'argument qu'on nous sort. Mais compte tenu du but recherché de vouloir changer les mentalités, il aurait été souhaitable de consentir à cet amendement.

Il a été possible d'inclure un préambule dans le cadre du projet de loi sur les jeunes contrevenants. Pourquoi alors refuser de l'inclure dans le cadre de ce projet de loi? Est-ce à dire que les mentalités sont plus difficiles à changer lorsqu'il s'agit des femmes? Il faudrait peut-être répondre à la question.

Donc, il aurait été très important d'inclure ce préambule dans le projet de loi C-46. Le préambule a non seulement une grande valeur éducative auprès de la profession juridique et du grand public, mais il aurait également pu être d'un grand secours advenant une contestation judiciaire de la part des avocats de la défense, puisqu'on aurait pu l'invoquer afin d'assurer une interprétation qui tienne compte des droits constitutionnels des femmes autant que ceux des accusés.

L'introduction de ce préambule dans le Code criminel avait pour but de reconnaître les conséquences négatives de la communication des dossiers confidentiels sur la vie des femmes, ainsi que l'importance d'assurer le respect et la promotion de leurs droits constitutionnels.

Un deuxième amendement aurait aussi été souhaitable afin de limiter l'accès au dossier confidentiel de la victime. Cette modifica-


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tion avait pour but d'exiger de l'accusé qu'il démontre que l'accès au dossier confidentiel est «probablement essentiel», au lieu du terme «vraisemblablement pertinent» utilisé dans le projet de loi. Ainsi, le fardeau de la preuve aurait été supérieur avec le concept de la balance de la probabilité qu'avec celui de la vraisemblance pertinente.

(1045)

Donc, la balance de probabilité est un concept juridique qui demande davantage à celui qui désire obtenir le dossier et qui requiert une preuve précise. Cependant, il faut admettre que je suis heureuse que l'on ait accepté de revoir les effets de ce projet de loi d'ici les trois prochaines années. Cet amendement a fait l'unanimité au sein du comité. C'est un amendement qui avait été proposé par le Bloc québécois, et je sais qu'une collègue du Parti libéral avait déposé un même amendement. Il y a donc eu unanimité au comité à cet égard, parce que cela respecte la volonté de la majorité des témoins.

Ainsi, on pourra vérifier certaines craintes quant à l'application de cette loi, et je vais en citer quelques-unes: crainte par rapport à l'inclusion du journal intime dans la définition de «documents»; cette inclusion amènerait les tribunaux à accepter l'accès à d'autres documents domestiques rédigés par la victime, contrairement au dossier institutionnel. C'est une des craintes exprimées par les différents témoins entendus.

Il y a aussi la crainte qu'il y ait une diminution de consultation des victimes auprès des groupes ou individus leur venant en aide, que les femmes victimes n'aient pas à choisir entre la justice et la thérapie; crainte qu'une fois qu'un subpoena a été émis, la conseillère ou le conseiller, la ou le thérapeute ne puisse plus avoir de contact avec sa cliente, ce qui isolerait encore plus la victime; crainte de l'insensibilité des juges qui auraient à examiner des dossiers; crainte que la consultation de dossiers personnels ou thérapeutiques ne soit pas pertinente dans un procès; et crainte que les motifs invoqués soient de nature frivole et visent à intimider davantage la victime.

Aussi, il y a cette crainte que les femmes ne portent plus plainte de peur de voir étaler leur vie privée sur la place publique; crainte que la défense tente d'avoir accès aux dossiers thérapeutiques ou personnels, afin d'établir que la plaignante a un mobile pour mentir au sujet de l'agression sexuelle, qu'elle entretient une intention malicieuse à l'égard de l'accusé ou qu'elle a déjà fabriqué une fausse plainte contre lui.

Cette évaluation, après trois ans d'application de la loi, pourra en effet permettre de mesurer l'impact de cette loi sur les victimes et les différents consultants et consultantes du milieu.

Au Québec, on constate que les demandes d'accès aux dossiers des victimes sont beaucoup moins nombreuses que dans les autres provinces. Cependant, le milieu concerné par cette problématique s'inquiète du phénomène et reste toutefois vigilant quant au rattrapage qui pourrait se faire au Québec concernant cette pratique. C'est pourquoi l'adoption de ce projet de loi viendra en quelque sorte limiter sensiblement l'accès aux dossiers des victimes, et c'est cette préoccupation qui est ressortie lors de la consultation du comité, bien qu'on aurait voulu en limiter davantage l'accès à certains dossiers.

Le Parlement se devait de rétablir sans plus tarder un cadre légal et procédural qui rétablisse un réel équilibre entre les droits des femmes à la sécurité, à l'intégrité et à la vie publique, et ceux des accusés à une défense pleine et entière. Et le projet de loi C-46 tente de refermer partiellement une porte qui, selon nous, n'aurait jamais dû être ouverte de cette façon.

C'est pourquoi nous allons appuyer le principe de ce projet de loi. Toutefois, nous allons être vigilants et garder l'oeil ouvert quant à l'application de ce projet de loi, pour que nous puissions mesurer les craintes qui ont été exprimées au sein du Comité de la justice. Je suis certaine que l'adoption de ce projet de loi est un bon pas en avant, parce qu'il y avait quand même une situation qui n'était pas souhaitable pour les victimes d'agression sexuelle.

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, nous en sommes à la troisième lecture du projet de loi C-46. C'est un projet de loi destiné à renforcer la protection des renseignements personnels et des droits des plaignantes dans les cas de poursuites pour différentes infractions d'ordre sexuel. On donnera cette protection accrue en ne permettant pas aux avocats de la défense de demander la production et la divulgation de documents personnels comme des dossiers médicaux et thérapeutiques, des dossiers des services-conseils, etc.

Les modifications au Code criminel que propose le projet de loi n'autoriseraient la demande de production de dossiers sur la plaignante qu'à l'étape du procès et après un processus en deux étapes.

(1050)

Tout d'abord, l'accusé devrait établir que le dossier est vraisemblablement pertinent quant à un point en litige ou à l'habileté d'un témoin à témoigner. Si l'accusé démontre que le dossier est vraisemblablement pertinent, il serait communiqué au juge qui présidera le procès. À la première étape, seul le juge verrait le dossier.

À la deuxième étape, le juge examinera le dossier en privé pour déterminer dans quelle mesure il est pertinent et en prenant en considération les droits reconnus par la charte de la plaignante et de l'accusé. Le juge décidera alors dans quelle mesure l'accusé pourra avoir accès au dossier. Sa décision n'aura pas d'effet sur le test d'admissibilité de toute question que l'accusé voudrait présenter comme preuve au procès.

Le rôle de l'opposition est de passer au peigne fin les mesures et les propositions du gouvernement, de tenir le gouvernement responsable des mesures qu'il présente et d'agir comme chien de garde, autrement dit de faire contrepoids au pouvoir du gouvernement de présenter des mesures qui touchent les citoyens, leurs droits et leur vie. En tant qu'opposition, nous prenons cette responsabilité très au sérieux.

J'ai dit dans mes observations au moment de la deuxième lecture, avant le renvoi au comité, que je surveillerais attentivement les délibérations du comité pour voir ce que l'on présenterait comme


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faits, quelles inquiétudes on soulèverait et quelle serait l'opinion des gens les plus touchés.

En principe, le Parti réformiste appuie vigoureusement toute mesure qui accorde un supplément de protection aux citoyens respectueux de la loi et aux victimes de crime. Nous réclamons avec insistance une amélioration des droits des victimes. Le 9 avril, nous avons eu un exemple de personne touchée par ce dont nous parlons aujourd'hui. Je me reporte à un cas survenu à Edmonton, où l'on a ordonné la remise des dossiers de thérapie d'une adolescente de 13 ans à l'homme de 27 ans qui était accusé de l'avoir agressée sexuellement.

La mère de l'adolescente a dit: «Ma fille a été victime d'une agression il y a un an et demi, et voilà que ça recommence. Il semble bien que les victimes n'aient aucun droit.»

Le Parti réformiste a maintes fois exhorté la Chambre et le ministre de la Justice à adopter une déclaration des droits des victimes, et nous avons présenté une ébauche substantielle des mesures que cette déclaration devrait contenir. Jusqu'ici, le gouvernement et le ministre de la Justice n'ont pas pris ces exhortations à coeur et n'ont pas mis en place une déclaration des droits des victimes qui conférerait une capacité légale et une protection à toutes les victimes, et non seulement aux victimes d'agression sexuelle.

Il est bien évident que les personnes qui ont été agressées sexuellement s'inquiètent beaucoup du fait que le système de justice continue de les victimiser en permettant la communication de renseignements très confidentiels à leur sujet. Ces personnes deviennent alors des victimes une deuxième fois.

Cependant, ce qu'il faut considérer, malheureusement, c'est que les plaignants ne sont pas tous des victimes. Parfois, des gens deviennent des victimes parce qu'ils ont été accusés faussement et se retrouvent dans une situation où ils doivent prouver leur innocence. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de m'attarder sur le fait qu'une accusation d'agression sexuelle ou d'inconduite sexuelle portée contre un homme a des conséquences extrêmement sérieuses pour lui, les membres de la famille et ses proches.

(1055)

Comme je l'ai déjà dit en discutant du projet de loi, nous devons prendre bien soin d'établir un équilibre entre, d'une part, le droit des victimes d'agression sexuelle à la protection de leur vie privée et leur droit à l'égalité et, d'autre part, le droit à la liberté et à une défense pleine et équitable des personnes qui sont faussement accusées de ces actes et qui sont les véritables victimes.

Cet équilibre est difficile à atteindre. Je suis certaine que tous les députés de la Chambre, le Comité de la justice et le ministre de la Justice désirent vivement établir un juste équilibre dans cette situation.

Le projet de loi renferme un préambule soulignant la préoccupation du Parlement à l'égard de la violence sexuelle contre les femmes et les enfants. Je pense qu'il y a très peu de gens au Canada qui ne sont pas de tout coeur en faveur de protéger les femmes et les enfants contre les types de violence terrible dont nous parlons à la Chambre depuis quelques jours. Je ne veux pas répéter certaines des situations auxquelles des citoyens innocents, des femmes innocentes, ont été confrontés.

Le projet de loi C-55 aurait pu permettre de désigner délinquants dangereux les délinquants violents qui ont commis des agressions sexuelles et des crimes sexuels contre des femmes et des enfants, et de les garder en prison indéfiniment.

Pour des raisons qui me dépassent, ce projet de loi a oublié les prédateurs sexuels et les délinquants sexuels dans la liste des individus qu'on peut désigner comme délinquants dangereux. Je le répète, j'exhorte le gouvernement à rectifier ce que je pense être un très grave oubli qui va tout à fait à l'encontre de sa prétendue préoccupation pour la sécurité des femmes et des enfants.

Je voudrais maintenant formuler deux observations au sujet des audiences du comité sur ce projet de loi. J'ai été inquiète de constater qu'un seul exposé sur le projet de loi présentait le point de vue des accusés. Des groupes et des particuliers très inquiets des droits et de la protection des plaignants et des victimes d'agression sexuelle ont présenté d'excellentes instances. Ces instances venaient de particuliers et de groupes qui se sont donné beaucoup de mal pour s'occuper avec compassion, de façon très pratique, des femmes et des enfants victimes d'une agression sexuelle, cet acte si traumatisant.

À l'instar de tous les membres du comité, j'en suis certaine, je félicite ces gens pour le travail qu'ils accomplissent pour encourager, soutenir et aider les victimes d'agression sexuelle dont la vie est brisée. Nous avons apprécié leurs instances. Toutefois, un seul exposé se préoccupait du droit à une défense complète et équitable des individus qui peuvent être accusés à tort de ces terribles crimes. Je ne suis pas tout à fait satisfaite du type d'analyse et des points de vue communiqués sur cet aspect pourtant essentiel de la question.

Un amendement apporté à l'étape du comité m'a également troublée. Non seulement il faut demander le dossier en suivant la procédure voulue et non seulement il faut prouver que ce dossier est pertinent, mais encore, on a ajouté dans cet amendement qu'on n'exigerait la présentation de ce dossier, même s'il était pertinent, que si cela était dans l'intérêt de la justice.

Il me semble que si un dossier est pertinent dans le cadre d'une procédure judiciaire, ce devrait certes être dans l'intérêt de la justice qu'on le présente. Cela laisse la porte ouverte à une contestation aux termes de la Charte.

(1100)

Cette question me préoccupait. Je l'ai soulevée devant le comité. Les fonctionnaires du ministère chargés de rédiger le projet de loi ont souligné qu'ils voulaient que, dans la demande de dossiers, on tienne compte des préoccupations aussi bien que des droits des intéressés, ce qui est le fondement même du projet de loi. J'accepte cette explication.

Cependant, je crains quelque peu que, dans sa forme actuelle, le projet de loi ne soulève l'argument suivant: si un document est pertinent, mais n'est pas remis au cours d'une procédure judiciaire,


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cette décision serait illégitime. Les avocats de la défense avec qui je me suis entretenue à cet égard ont la même crainte.

Les fonctionnaires du ministère se sont efforcés d'établir un bon équilibre dans ce projet de loi. J'ai été convaincue qu'ils ont fait un excellent travail et consulté beaucoup de gens. J'ai été fort impressionnée par le soin, le souci et la compétence dont ils ont fait preuve dans la rédaction de ce projet de loi. Il convient de les en féliciter, ainsi que le ministre et son ministère.

Le projet de loi soulève d'autres préoccupations; il aurait d'importantes conséquences sur le plan des coûts, car, non seulement le plaignant, mais également le détenteur du dossier ou l'organisme qui s'est occupé d'un plaignant ont le droit d'être représentés par un avocat aux audiences sur la production de dossiers.

On a soulevé la question de savoir qui paiera pour cet avocat. Le ministère y avait réfléchi et avait des propositions à faire. Il s'agit là d'une question d'ordre pratique à laquelle on n'a pas encore trouvé de réponse.

Il y a également la crainte que ces causes se prolongent considérablement à cause des audiences supplémentaires et des dispositions supplémentaires qui s'appliquent à ce genre de causes pour l'examen des dossiers, la production de demandes et ainsi de suite.

Les avocats chevronnés qui seraient peut-être disposés à se charger de ces causes sous le régime de l'aide juridique pourraient être plus enclins à se désister à cause de tout le temps qu'il faudra y consacrer, en abandonnant aux jeunes avocats la tâche de représenter les plaignants face à des procureurs de la Couronne chevronnés.

Voilà quelques considérations pratiques que l'on a évoquées, et avec raison. Tout compte fait, l'objet du projet de loi est satisfaisant. Les fonctionnaires et les légistes ont établi dans le projet de loi un équilibre aussi prudent que possible.

Il est justifié de soulever certains des sujets de préoccupations que je viens d'exprimer. Je dois dire que les avocats de la défense et les criminalistes sont très mécontents de voir jusqu'où peut nous mener le projet de loi en érigeant des obstacles à la production de documents qui pourraient être utiles pour assurer une défense entière et équitable.

Il est juste de le mentionner, mais une chose qui nous encourage, c'est l'amendement apporté par le comité prévoyant le réexamen des dispositions du projet de loi après trois ans. Nous allons surveiller très attentivement l'application du projet de loi dans la réalité. Nous serons alors en mesure de préconiser énergiquement des modifications si nous en constatons la nécessité.

Tout compte fait, après les audiences du comité et après avoir discuté avec un certain nombre de gens directement concernés par le projet de loi, mon parti est disposé à l'appuyer. Nous surveillerons cependant comment les choses se passent dans la réalité.

Nous voulons nous assurer que cette mesure maintient un équilibre convenable, mais nous devrions l'accepter pour voir si elle assure la protection nécessaire aux innocentes victimes d'un crime aussi révoltant.

(1105)

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

[Français]

LOI SUR LES PROGRAMMES DE COMMERCIALISATION AGRICOLE

L'hon. Ron Irwin (au nom du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) propose: Que le projet de loi C-34, Loi constituant des programmes de commercialisation des produits agricoles, abrogeant la Loi sur l'Office des produits agricoles, la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles, la Loi sur le paiement anticipé des récoltes et la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, j'interviens une fois de plus ce matin dans le débat entourant le projet de loi C-34. C'est avec intérêt et surtout avec plaisir que je réitère mon appui et l'appui du Bloc québécois à cette mesure législative qui, d'ailleurs, est fortement attendu de la classe agricole. Cependant, je ne voudrais pas que cet appui soit considéré par le gouvernement comme un cautionnement inconditionnel de la part de l'opposition officielle.

Entendons-nous bien, nous endossons le principe et la majorité des modalités de ce projet de loi, mais nous maintenons certaines réserves quant aux dispositions relevant de l'imputation budgétaire.

Dans cette expectative, j'aimerais élaborer davantage sur la nature et le fondement de mon intervention un tantinet hésitante qui consiste à soulever des irritants relatifs à l'imputation budgétaire. Nous avons longuement discuté, lors des délibérations du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, des avantages et surtout des gains que pouvait réaliser l'industrie de l'agriculture, tant au Québec que dans le reste du Canada.

L'irritant principal à l'origine de la contestation ou, du moins, de la prise de position hésitante du Bloc québécois se situait davantage au niveau de la répartition budgétaire. En effet, l'un des aspects majeurs du projet de loi C-34 consiste en l'élaboration du Programme de paiements anticipés.

J'ignore, monsieur le Président, si vous êtes personnellement suffisamment au fait de la problématique agricole, mais je me permets quand même de vous éclairer ou de tenter de vous éclairer sur la question. Le projet de loi C-34 prévoit l'attribution, l'allocation de 120 millions de dollars en parts égales pour les trois prochaines années en paiements anticipés des récoltes.


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Inutile de préciser que ces sommes sont plus que nécessaires à la survie ou, du moins, au maintien de la santé financière des entreprises agricoles. Dans bien des cas, le paiement final pour une récolte peut parvenir à l'exploitant des semaines, voire des mois plus tard, alors que, dans les faits, les montants afférents à l'exploitation même de la ferme parviennent à l'agriculteur dans un délai très court.

Ici, j'aimerais citer un cas précis. Par exemple, les acériculteurs. La période où les érables coulent peut durer deux, trois ou quatre semaines au maximum. Évidemment, durant cette période intense, l'acériculteur doit investir énormément et avant également, puisqu'on sait très bien que le travail débute dès le lendemain du jour de l'An, dans bien des cas, par des entailles, par la préparation des tubulures et de tout ce qui est nécessaire à la cabane à sucre.

(1110)

Durant trois ou quatre semaines intensives, l'acériculteur doit investir énormément. Bien sûr, il pourra détailler un tant soit peu ses produits au détail à des visiteurs qui passent par la cabane à sucre, mais le gros de la récolte est vendu en gros, en baril, et souvent, l'acériculteur doit patienter plusieurs mois, voire des années, avant de récupérer son dû final.

Alors, avec cette formule de paiements anticipés, l'acériculteur pourra recevoir un bon pourcentage de la valeur juste de son sirop. Cela implique également que les paiements anticipés des récoltes permettent un équilibre dans la gestion financière de l'entreprise agricole. Est-il nécessaire également de mentionner que cet élément représente, dans bien des cas, la planche de salut de l'exploitation agricole, la différence entre une gestion parsemée d'angoisses et d'inquiétudes, ou la prospérité et la rentabilité des entreprises agricoles qui sont la fierté des représentants des régions rurales.

Vous êtes à même de constater la nécessité pour un agriculteur de pouvoir compter sur une instance supérieure afin de garantir les investissements qu'engendre l'exploitation d'une entreprise agricole.

D'un point de vue strictement analytique et non partisan, le projet de loi du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire est certes très louable et rempli de bonne volonté. Cependant, certains éléments du même projet de loi me laissent perplexe quant aux véritables intentions, aux véritables motivations du ministre, lorsqu'on aborde l'idée principale de la commercialisation de ces produits agricoles.

Comme je le soulignais dans mon allocution du 17 juin dernier, tout juste avant l'ajournement de la Chambre pour la période estivale, on note une absurdité relativement évidente orchestrée par le gouvernement dans la mise en marché de ces récoltes. Je m'explique.

Agriculture et Agroalimentaire Canada utilisera des sommes considérables afin de faciliter la mise en marché des récoltes annuelles, mais ces fonds proviennent déjà de l'enveloppe budgétaire prévue pour les programmes de protection du revenu. Il y a donc là une incohérence de taille. À mon humble avis, le gouvernement tente de camoufler des coupures budgétaires qu'il impose à une catégorie de contribuables, lesquels doivent déjà jongler avec une certaine précarité financière.

Cela m'amène à parler du traitement injuste, inéquitable que le ministère de l'Agriculture fera subir à la classe agricole, particulièrement aux producteurs laitiers. Je rappelle que le 1er août 1995, l'hectolitre de lait de transformation a été coupé de 81c. Le 1er août 1996, on a appliqué la même dose, encore une coupure de 81c. l'hectolitre, et le 1er août prochain, dans quelques mois, on s'apprête à administrer 76c. par hectolitre, jusqu'à épuisement, c'est-à-dire jusqu'au 1er août 2001, et là, il ne restera plus rien du subside laitier qui, à l'origine, était de 5,43 $ l'hectolitre.

Je vous donne ici l'exemple d'une ferme moyenne du Québec, puisque le Québec produit à lui seul 47 p. 100 du lait de transformation au Canada. Une ferme moyenne, une ferme dite familiale, qui produit 1 900 hectolitres de lait de transformation par année, verra ses pertes s'établir à 1 500 $ par année, et sur la période de coupures appliquées à une dose régulière et constante durant les cinq années en question, cela fera perdre à chaque agriculteur, en moyenne, 7 500 $ sur ces cinq années. Cela représente une baisse de 5 p. 100 à 5,5 p. 100 de son revenu.

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Souvent, ce sont les derniers 5 p. 100 qui sont un revenu net, qui restent à la fin de l'année dans les poches de l'agriculteur, lui permettent, par exemple, de se payer une petite sortie, un petit voyage durant la saison.

Cette coupure ici, malheureusement, le gouvernement d'en face se garde d'en parler. Par exemple, de 1994 à 1995, où le subside était de 5,43 $ l'hectolitre-or, un hectolitre c'est 100 litres-ce qui veut dire 5,5c. environ par litre que le gouvernement donnait en subvention pour le lait de transformation. Le 1er août de l'an 2001, ce sera zéro.

Savez-vous ce que cela entraîne pour les producteurs laitiers du Québec, les 26 000 producteurs laitiers du Québec? Cela entraîne une coupure de 108 millions de dollars, seulement pour le Québec; pour l'ensemble du Canada, cela représente 228 millions de dollars. Comme le Québec produit 48 p. 100, vous comprendrez que c'est d'abord et avant tout les producteurs agricoles québécois qui sont les plus pénalisés.

Le ministère de l'Agriculture a subi, plus que tous les autres ministères, les coupures du ministre des Finances. Du budget de 1994-1995 au budget de 1998 qu'on aura l'année prochaine, ce sont des coupures de 35,5 p. 100, près de trois huitièmes des coupures qu'on appliquera à l'agriculture. Dans le projet de loi C-34, c'est l'utilisation du principe des vases communicants. Ce qu'on avait prévu comme source de revenu, ce qu'on va donner en paiements anticipés, on devait le garantir en revenu, advenant de mauvaises récoltes.

C'est donc prendre les montants d'argent dans une assiette pour les transférer dans une autre. On ne crée pas ici d'argent frais, d'argent neuf. Si bien qu'avec les coupures de subsides aux producteurs de lait industriel, cela entraînera inévitablement une augmentation pour les transformateurs de ce lait.

J'invite ici les producteurs laitiers à bien écouter ces chiffres. Selon une étude, chaque fois qu'on augmente le prix du beurre de10 p. 100, le beurre coûte au-delà de 3 $ la livre actuellement, on l'augmente de 30c. Est-ce que les gens consommeront plus de beurre? Non. Cela entraîne une chute des ventes de 7 p. 100.


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Notre problème, ici, au Québec, ce n'est pas une difficulté d'approvisionner les usines de transformation, bien au contraire. Chaque producteur laitier pourrait garder une vache ou deux de plus et il serait très heureux. Bien sûr, il serait très heureux, mais si on augmente le prix du lait de transformation, cela n'entraînera pas la possibilité de garder une vache de plus, mais il faudra qu'il enlève une vache, ce qui fait une différence de deux vaches. Vous comprendrez comme moi que ce n'est pas la première vache qui est payante dans le troupeau, c'est toujours la dernière. C'est la dernière vache qui est tout profit, c'est celle-là qui permettra à l'agriculteur de se payer un petit peu de luxe, comme tous les travailleurs spécialisés dans notre pays.

J'ai un autre exemple à propos du fromage, et c'est la même chose, si on augmente le fromage de 10 p. 100. Je vois le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture qui m'écoute attentivement; je l'invite à correspondre avec moi s'il ne comprend pas bien ces chiffres, mais surtout à bien écouter.

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Donc, dans le cas du fromage par exemple, si on l'augmente de 10 p. 100, cela entraîne une baisse de 4 p. 100. Là aussi, chaque fois qu'on va augmenter le prix, il y aura une baisse. Monsieur le Président, vous semblez indifférent à ces problèmes que je signale concernant les producteurs laitiers, et cela me fait beaucoup de peine, car ceux-ci ne doivent pas travailler cinq jours par semaine, mais bien sept jours par semaine.

La traite du matin, la traite du soir et l'entretien des animaux, cela se fait la semaine et le dimanche, même le jour de l'An, le jour de Noël et à Pâques. Ils ne peuvent se permettre de perdre, et on n'a pas le droit, nous, de couper 5,5 p. 100 de leurs revenus. On n'a pas le droit de couper unilatéralement des subsides que le gouvernement central, ici, avait établis au début des années 1970.

Je crois qu'il est important de souligner ceci à la Chambre, et si le secrétaire parlementaire n'est pas d'accord avec moi, je l'invite à contredire mes chiffres. Le budget global du ministère de l'Agriculture n'a investi que 9 p. 100 l'année dernière au Québec. En moyenne, semble-t-il, ce serait 11 p. 100. L'année au cours de laquelle ce ministère a été le plus généreux envers la classe agricole québécoise, il a investi au Québec, en achat de biens et services ou encore dans des stations d'agriculture, même s'il en a fermé 5 ou 6 il y a déjà deux ans, il a investi 17 p. 100. Cela a été un sommet.

Pourtant, au Québec, on produit une activité agricole de 17 p. 100, une activité agricole brute. Mais lorsqu'on inclut des usines de transformation, ce qu'on appelle communément la valeur ajoutée, la valeur ajoutée lorsqu'on fait du fromage, du yogourt, du beurre et de la crème glacée, le Québec génère, dans l'ensemble du Canada, une activité économique agricole de 24 p. 100. Pourtant, on n'investit au Québec qu'un maigre 9 p. 100, alors que la moyenne est de11 p. 100. C'est honteux, c'est scandaleux.

Lorsque je rencontre les producteurs de mon comté, je leur explique régulièrement l'iniquité qu'on administre, pas seulement une fois à l'occasion, mais chaque décennie, et j'oserais dire depuis le début de ce semblant d'union entre le Bas-Canada et le Haut-Canada qui s'est effectuée en 1841, avant la Confédération de 1967 où on avait justement fusionné les deux dettes du Haut et du Bas-Canada, le Haut-Canada étant l'Ontario d'aujourd'hui et le Bas-Canada, le Québec. On avait additionné les deux dettes, on les avait fusionnées et tout le monde devait payer.

L'Ontario, le Haut-Canada, était endetté 12 fois plus que le Québec et évidemment, ses infrastructures, son port à Toronto, les routes et les chemins de fer étaient aussi 12 fois plus développés qu'au Québec. On pourrait comparer cette situation à une louve qui met au monde quatre petits louveteaux. Vous savez déjà par expérience que c'est le premier louveteau qui prendra la première tétée et c'est lui qui sera le plus fort, le plus vigilant et le plus vigoureux de toute la meute de loups. Dès 1841, l'Ontario avait pris les devants et conserve toujours cette avance.

Un autre exemple d'iniquité, c'est lorsque, il y a deux ans, le gouvernement d'Ottawa a aboli la LTGO dans l'Ouest. Lorsqu'on a aboli ici la subvention aux producteurs de lait industriel, on l'a coupée et, bien sûr, on n'a absolument rien versé comme compensation, zéro. Mais lorsqu'on a coupé la LTGO, la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, pour épargner 860 millions par année, le gouvernement a investi 2,9, pas millions, mais milliards de dollars pour économiser 860 millions.

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On a réparti ces 2,9 milliards en trois tranches. Nous avons tout d'abord alloué 1,6 milliard aux producteurs céréaliers, dépendant de la grandeur de leur ferme, du nombre de boisseaux qu'ils avaient vendus l'année précédente et ainsi de suite. Alors, la situation géographique de leur ferme proche de ceci, proche de cela, était un critère. Alors, 1,6 milliard mais, tenez-vous bien, on a fait le chèque, mais on n'a pas remis de TP4 ou de T4, donc c'était sans impôt à payer; c'était de l'argent clair, ce qui est assez rare. Il faut le faire, n'est-ce pas.

Alors, le gouvernement fédéral leur a remis des montants très importants, alors que ceux qui les ont reçus n'avaient pas à les inclure dans leur rapport d'impôt, ce qu'on appelle de l'argent au noir.

De plus, on a prévu un montant de 300 millions de dollars en mesures d'adaptation, amélioration de routes, amélioration de chemins de fer, location, construction de silos, ainsi de suite. On a également prévu un milliard de dollars en garantie de prêt à certains pays étrangers qui voudraient, mais qui n'ont pas les moyens d'acheter des céréales de l'Ouest. Additionnez tout cela et vous obtenez un montant de 2,9 milliards.

Voyez-vous encore une fois l'iniquité du ministère de l'Agriculture entre les producteurs agricoles de l'Ouest et les producteurs agricoles de l'Est, et ce n'est pas seulement le Québec, j'inclus là-dedans les producteurs des provinces Maritimes et, bien sûr, les producteurs de l'Ontario.

Le projet de loi C-34, dans un certain sens, pourra donner certains avantages aux producteurs agricoles qui doivent subsister pendant une longue période sans revenu, car il arrive seulement dans un pouf, lorsque la récolte se fait. Je donnais le plus bel exemple, celui qui est facile à bien cerner puisqu'on est à la toute fin de la récolte, c'est l'acériculture et la production de sirop d'érable. L'acériculteur peut essayer de vendre sa récolte d'un coup, mais les produits seront détaillés l'année durant.


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En terminant, je voudrais rappeler que ce gouvernement, même s'il essaie de faire des améliorations, a un talon d'Achille, que je me chargerai de rappeler dans mes différents discours durant la prochaine campagne électorale, et c'est l'équité. On dirait que le gouvernement ne connaît pas l'équité.

Comme le journaliste André Pratte du quotidien La Presse l'a si bien décrit dans son volume intitulé Le syndrome de Pinocchio: la classe politique au Canada, malheureusement, à force d'abuser de l'électorat, a perdu toute crédibilité.

Un sondage paru dans une revue spécialisée, il y a quelque temps, disait que les politiciens, et on décrivait une trentaine de professions qui s'appliquent au Canada, arrivaient avant-dernier au bas de la liste, juste avant les vendeurs d'automobiles usagées. Les médecins et les policiers occupent le sommet, évidemment, et on descend. Les avocats, comme ils ont un travail assez difficile à accomplir souvent, étaient assez près des politiciens. Lorsqu'on regarde les fonctions de plusieurs de nos collègues, ici, plusieurs étaient avocats. Bref, les politiciens se retrouvent très bas sur la liste, juste avant les vendeurs d'automobiles usagées, parce que les vendeurs d'automobiles neuves se classent quand même relativement bien.

Alors, le vendeur de Ford va vanter la Ford au détriment d'une Chrysler et ainsi de suite, mais outre cela, les politiciens font dur là-dedans. Malheureusement, j'en suis devenu un tout à fait par hasard, et je vais essayer de garder le syndrome de Pinocchio le plus loin de mon coeur et de mes aspirations. Mes enfants me disent souvent ceci: Papa, il y a quelqu'un d'autre qui porte ton nom à la Chambre des communes.» Je leur dis: «Écoutez, lui, c'est le roi; sa vice-première ministre est la reine dans ce domaine.» On l'a vu avec la TPS, lorsqu'on promettait de la «scrapper». Nous, dans notre langage coloré, lorsqu'on dit «scrapper quelque chose», cela veut dire qu'on va le jeter, le détruire, et on va l'envoyer à la «scrappe», au rebut.

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Alors, on comprenait, nous, lorsque le premier ministre affirmait qu'il allait «scrapper» la TPS, qu'il allait l'abolir et peut-être trouver une autre façon imagée pour ramasser les 19 milliards de dollars que la TPS rapporte au Trésor public. Rappelons ce qu'il a dit vouloir dire: «Si vous avez compris que j'étais pour la «scrapper», vous avez mal compris; et si vous ne l'avez compris, c'est que vous avez les oreilles bouchées. Et si vous ne comprenez pas, c'est que vous êtes des imbéciles.» On a eu droit à cette réplique justement pendant la période des Fêtes, lorsque le premier ministre a été interrogé par plusieurs citoyens choisis au hasard à la grandeur du Canada.

Donc, les politiciens ne sont pas très populaires du côté de la moralité publique, bien sûr, et pourtant, on va se lancer, dans quelques jours, dans une campagne électorale. Ces distorsions de la vérité afflueront. Le président du Conseil du Trésor, qui est venu dans ma région à Thetford Mines à la veille du référendum de 1995, disait qu'il donnait au Québec beaucoup plus d'argent que cette province n'en payait. On donne, bon an mal an, 30 milliards de dollars en taxes, en droits, en douanes et en impôts à ce gouvernement, à cette institution qu'on appelle le gouvernement fédéral. Et le président du Conseil du Trésor essayait de nous faire croire qu'il nous en donnait trop. Si on coûte trop cher à ce gouvernement, à ce Conseil du Trésor, à ce ministre, qu'ils nous laissent partir, bon sang. Je n'ai jamais vu quelqu'un vouloir tant garder quelque chose qui lui coûte un surplus à garder.

Je suis convaincu que le Québec, quand on examine ministère par ministère, ne reçoit pas sa juste part. Je viens de vous donner l'exemple du ministère de l'Agriculture qui nous donne 9 p. 100 et qui, en moyenne, en donne 11 p. 100. L'année dernière, on a reçu, au Québec, 9 p. 100 de l'enveloppe globale du ministère de l'Agriculture, alors qu'on forme 24 ou 25 p. 100 de la population, qu'on paie 24 p. 100 des impôts, qu'on génère 17 p. 100 des activités agricoles directes. Lorsqu'on inclut à l'intérieur de cela les usines de transformation, on atteint facilement les 24 p. 100. On pourrait retrouver davantage d'exemples d'iniquité comme celle-ci, si on se donnait la peine de les chercher.

Somme toute, nous allons voter en faveur du projet de loi C-34. On va l'appuyer, bien que ce ne soit pas un projet de loi parfait. Je vous ai parlé du principe des vases communicants pour aller chercher 120 millions de dollars. Ce n'est pas de l'argent frais, ce n'est pas de l'argent neuf. On le prend dans une autre pochette, qui était dévolue aux agriculteurs, et on va le placer pour générer des paiements anticipés. Cependant, selon le voeu de plusieurs agriculteurs et de plusieurs associations de ces agriculteurs qui ont communiqué avec mon bureau pour nous demander d'appuyer le projet de loi C-34, on va acquiescer à la demande de ces agriculteurs de l'ensemble du Canada, parce que, il faut bien le signaler, il y a du bon.

On aurait pu présenter un projet de loi bien meilleur que celui-là si on s'était donné la peine d'accepter les amendements que le Bloc québécois avait présentés. C'étaient quand même des amendements très sérieux-et le secrétaire parlementaire s'en souviendra-qu'on avait présentés au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Mais comme le veut la coutume, quand ça vient de nous autres, ce n'est pas bon, et quand ça vient d'eux autres, c'est bon.

Je me rappelle, encore cette semaine, lors de l'étude du projet de loi C-72 où on devait élire une majorité de producteurs céréaliers au bureau de direction de la Commission canadienne du blé. Une majorité, c'était rédigé comme cela dans le projet de loi.

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Je leur ai dit: «Écoutez, on va inscrire le nombre. Sur 15, on pourrait mettre 9. C'est majoritaire, 9 sur 15. On pourrait mettre 8, c'est majoritaire aussi. Pour éviter les pelures de banane, on va mettre un chiffre.» J'ai placé la barre à 12. J'ai présenté un sous-amendement. Le Parti réformiste était d'accord avec le Bloc québécois; le Parti libéral, les huit députés présents, y compris le secrétaire parlementaire, ont voté contre, parce que ce n'était pas leur idée. Trente-six heures plus tard, on demandait l'unanimité du comité pour présenter un amendement qui fixait le nombre à 10 sur 15. Ce sera écrit dans le projet de loi C-72, «dix sur quinze seront élus par les producteurs céréaliers».

C'est une amélioration, mais 36 heures auparavant, c'était l'idée du Bloc québécois, et même mon collègue de Malpèque avait voté contre, un déshonneur pour la classe agricole de l'Île-du-Prince-Édouard. Il avait voté contre. Mais 36 heures plus tard, ils sont revenus, ces bons libéraux, et ont proposé 10. Alors, 10 sur 15, 66 p. 100. J'ai dit: «Je vais tester le coeur et le courage de mes collègues


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d'en face. Soixante-six pour cent, 12 sur 15, 75 p. 100, on va couper la poire en deux» et j'ai présenté un sous-amendement pour 11.

La Commission canadienne du blé, il faut le rappeler, n'a pas été créée, il y a 60 ans, en pleine crise économique, pour les agriculteurs de l'Est, pour faire plaisir aux députés de cette Chambre, pour les consommateurs ou pour les vendeurs de tracteurs, il n'y en avait pas à ce moment-là, ou très peu. La Commission canadienne du blé a été créée en pleine crise économique, dans les années 1930, pour subvenir, pour aider les céréaliers qui faisaient faillite l'un après l'autre, pour assurer une bonne mise en marché des céréales. Cela s'adressait donc à eux. Or, si c'est pour eux, on va leur donner le contrôle. Mais là, évidemment, le gouvernement veut en profiter pour faire trois ou quatre nominations partisanes.

Moi, j'ai proposé 12. Trente-six heures plus tard, ils sont revenus avec 10. Le lendemain, séance tenante, j'ai proposé 11. On s'est regardés dans le blanc des yeux et mes collègues libéraux ont voté contre. Mes collègues du Parti réformiste se sont ralliés au Bloc québécois et ont accepté 11. Mais comme le parti ministériel a le plein contrôle et que, souvent, les comités, ce n'est qu'une mascarade, une perte de temps, dans ce cas-ci, cela a été une bonne chose, puisqu'au moins, on les a sensibilisés avec nos arguments pour, au moins, voir «10» dans le projet de loi, et ce ne sera pas du superflu.

Si le Parti libéral était davantage à l'écoute de l'opposition officielle, souvent, ces projets de loi seraient plus acceptables et auraient un meilleur impact sur la classe agricole.

[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, je vais vous entretenir aujourd'hui du projet de loi C-34, Loi sur les programmes de commercialisation agricole.

Pour rafraîchir la mémoire des auditeurs, je rappelle que cette loi regroupe en un seul texte quatre lois distinctes et un programme qui concernent l'agriculture. Elle porte sur la commercialisation des produits agricoles.

Les quatre lois ainsi regroupées sont la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies, la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles et la Loi sur l'Office des produits agricoles. Le programme visé est le programme d'accroissement des liquidités.

Je voudrais passer en revue les trois grandes parties du projet de loi avant d'en venir à certaines choses que les réformistes aimeraient recommander. La nouvelle loi regroupe les dispositions actuelles de la Loi sur le paiement anticipé des récoltes et de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies dans le programme des paiements anticipés. Cela garantira des prêts sans intérêts. Le nouveau programme comprendra des rajustements et une période de transition permettant aux producteurs qui vendent leur blé et leur orge par l'intermédiaire de la Commission canadienne du blé de devenir admissibles aussi.

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La deuxième partie du projet de loi porte sur la mise en commun des prix. La nouvelle loi regroupe les dispositions de l'actuelle Loi sur la vente coopérative des produits agricoles, qui garantit les prix des produits agricoles dont la commercialisation est faite en application d'un plan coopératif. En outre, le processus d'administration et d'approbation du nouveau programme sera clarifié, modernisé et simplifié, étant donné que l'approbation relèvera désormais du ministre plutôt que du Cabinet et du Conseil du Trésor.

Le troisième volet du projet de loi touche au programme d'achats gouvernementaux. La nouvelle mesure législative comprend les dispositions actuelles de la Loi sur l'Office des produits agricoles qui vise les achats, la vente et l'importation de produits agricoles et abolit l'Office des produits agricoles.

Elle vise également le recouvrement des frais administratifs, crée des infractions, prévoit la présentation de rapports au Parlement et modifie certaines lois en conséquence. Elle prévoit un examen législatif obligatoire de la loi cinq ans après son entrée en vigueur, excellente proposition qui devrait s'appliquer à toutes les lois.

Dans sa politique agricole, le Parti réformiste appuie le maintien du programme de paiement anticipé des récoles, qui a réussi par le passé à stabiliser le marché tout en maintenant un niveau acceptable de risques pour les contribuables.

Les réformistes conviennent que les trois lois qui traitent du paiement anticipé des récoltes en espèces devraient être fondues en une loi, dans le but de réduire les frais administratifs. Nous avons proposé des amendements qui, premièrement, préciseraient dans la loi le plafond de la dette éventuelle que pourrait accumuler le gouvernement ou qui permettraient au Comité permanent de l'agriculture d'examiner toute nouvelle augmentation; deuxièmement, permettraient aux agriculteurs de toucher sans frais une avance de secours, qui serait toutefois comprise dans la portion de 50 000 $ sans intérêts de l'avance; troisièmement, aboliraient le programme d'achats gouvernementaux, parce qu'il est incompatible avec l'économie agricole canadienne moderne, qui est régie par la concurrence; et quatrièmement, traiteraient de façon égale toutes les organisations agricoles, en cas de défaut de paiement, ce qui signifie que la Commission canadienne du blé n'aurait plus droit à une exemption spéciale de deux ans.

Malheureusement, les libéraux n'ont tenu qu'environ 25 p. 100 des promesses électorales qu'ils ont faites au sujet de l'agriculture au cours de la campagne électorale de 1993. J'ai parcouru le livre rouge et il est même très difficile de trouver ces promesses dans les quelque 100 pages de promesses creuses. Ils avaient notamment promis de consentir des avances de fonds sans intérêt aux agriculteurs. En rejetant les amendements des réformistes, les libéraux vont à l'encontre de leur propre promesse.

Je viens d'entendre le député bloquiste parler du processus suivi au comité et des amendements qui y sont souvent proposés afin d'améliorer des projets de loi. De tels amendements sont fréquemment rejetés parce qu'ils ne viennent pas des libéraux. C'est regrettable, parce que les libéraux avaient promis d'élargir le rôle législatif des comités. Ils ne l'ont pas fait et c'est une autre promesse électorale qu'ils n'ont pas tenue.


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Tous les amendements des réformistes ont été rejetés au comité, même si le prétexte fourni pour renvoyer le projet de loi au comité avant l'étape de la deuxième lecture était de permettre aux députés d'apporter des modifications de fond. La promesse que les libéraux ont faite dans leur livre rouge, soit d'élargir le rôle des députés à l'égard de la rédaction de lois, était vraiment une promesse en l'air. Cette promesse des libéraux est faite dans le livre rouge, aux pages 87 et 88. C'était bien une promesse en l'air. Elle est restée lettre morte depuis trois ans et demi.

(1145)

Si les membres libéraux du comité avaient vraiment voulu remplir les promesses de leur livre rouge, ils auraient voté pour certaines propositions réformistes qui auraient apporté des modifications de fond, dont une qui aurait justement permis de réaliser une de leurs promesses du livre rouge.

Le fait qu'ils ont rempli à peine le quart de leurs promesses faites aux agriculteurs pendant la campagne électorale de 1993 est très grave. Il faut adopter une vue d'ensemble. Voici, par exemple, ce qu'ils avaient promis à la page 13 du livre rouge:

Les pouvoirs publics ont une marge de manoeuvre réduite côté fiscalité; ils doivent, à long terme, viser à alléger la charge fiscale.
Le fait est que le gouvernement a amassé 24 milliards de dollars de plus en recettes fiscales. Malheureusement, c'est là une très importante promesse qu'il n'a pas tenue.

À la page 52, les libéraux ont enfoui quelques-unes de leurs promesses à l'égard de l'agriculture. Ils avaient dit qu'ils développeraient de nouveaux marchés nationaux et internationaux pour les denrées alimentaires canadiennes, qu'ils réduiraient les coûts des facteurs de production dans un souci de rentabilité et qu'ils mettraient en place un programme «agro-global» d'aide aux revenus agricoles.

La question de la réduction des coûts de production m'est bien familière. Je vis dans une exploitation agricole et j'entretiens des relations étroites avec la communauté agricole. J'écoute presque tous les jours les préoccupations des agriculteurs. Et une de leurs préoccupations les plus critiques et les plus graves est que leurs coûts de production sont élevés. Beaucoup de ces coûts comprennent des taxes.

Par exemple, l'engrais est fabriqué à partir du gaz naturel, qui est fortement taxé. C'est ainsi qu'un produit que les agriculteurs doivent utiliser pour leur travail comporte un élément qui est fortement taxé. Tout cela parce que le gouvernement perçoit des taxes pour faire vivre une lourde administration au lieu de réduire les coûts et la taille du gouvernement.

Une autre préoccupation extrêmement sérieuse des agriculteurs réside dans les frais de transport élevés. J'ai parcouru tout le livre rouge et il n'y est dit nulle part que les libéraux devaient supprimer le tarif du Nid-de-Corbeau dès leur élection. Cela a été un choc pour les agriculteurs. Ce qui est extrêmement grave, très souvent, c'est que non seulement les libéraux n'ont pas tenu des promesses qu'ils avaient faites pendant la campagne électorale, mais encore ils ont fait une fois au pouvoir des choses auxquelles les gens ne s'attendaient pas du tout.

Le député bloquiste parle du cynisme de la population à l'égard des politiciens. Je suis d'accord. Nous devons être tenus responsables. Il faut prévoir un mécanisme dans notre structure démocratique qui permettra aux électeurs de vraiment tenir leur député responsable. C'est là un changement clé que nous, réformistes, apporterons lorsque nous formerons le gouvernement.

Je vais maintenant dire quelques mots de nos amendements. Nous proposons de limiter l'endettement des gouvernements. Le gouvernement laisse de plus en plus à des bureaucrates plutôt qu'à des élus le soin d'examiner la politique, la réglementation, les dépenses et les dettes.

J'ai demandé à la Bibliothèque du Parlement de me faire savoir combien des mesures législatives dont la Chambre a été saisie dernièrement enlèvent des pouvoirs aux élus du Canada pour les donner aux bureaucrates. Cette question ne lui avait jamais encore été posée. Les personnes qui ont fait la recherche ont été renversées et scandalisées de découvrir que de nombreux projets de loi dont la Chambre est saisie enlèvent des pouvoirs aux gens qui sont élus pour diriger les affaires de notre pays et les donnent aux bureaucrates.

(1150)

Le projet de loi à l'étude a le même effet. C'est une question très grave. C'était l'une de nos réserves au sujet de la Commission canadienne du blé. Il n'y a aucune raison pour que les agriculteurs ne puissent prendre en main toutes leurs affaires. Il n'est pas nécessaire que tout se fasse sous la direction du ministre de l'Agriculture, que celui-ci nomme le président-directeur général et qu'il contrôle entièrement les affaires de la commission du blé. Ce sont les provinces les plus visées par la commission, soit la Saskatchewan, l'Alberta et le Manitoba, qui devraient administrer celle-ci.

Fort de sa compétence, le comité permanent devrait examiner toute augmentation du passif éventuel aux termes du programme d'avances en espèces. Le ministre de l'Agriculture aurait simplement à aviser suffisamment à l'avance le comité de son intention de hausser le montant en question, de sorte que ses membres puissent tenir des audiences afin de rapidement déterminer si une hausse est bel et bien nécessaire.

Nous aimerions parler en tant que réformistes de l'octroi d'avances sans intérêts. En comité, les libéraux ont voté contre un amendement réformiste concernant le versement d'avances printanières sans intérêt. Il s'agissait d'une de leurs promesses électorales. Ils ne l'ont pas tenue. Pas plus qu'ils n'ont appuyé l'amendement proposé par les réformistes.

Permettez-moi maintenant de parler de l'imposition de limites concernant les achats gouvernementaux. Dans le cadre des achats gouvernementaux, le ministre dispose d'une vaste gamme de pouvoirs lui permettant d'acheter, de vendre ou d'importer des produits agricoles pour stabiliser la conjoncture sur le marché intérieur ou de conclure des accords de vente avec d'autres gouvernements ou organismes gouvernementaux.


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Bien qu'il n'ait pas prévu de fonds pour le programme, le gouvernement a été incapable de justifier de façon satisfaisante la prolongation de ce programme en l'enchâssant dans une nouvelle loi. Les pouvoirs étendus accordés pour ce programme n'ont pas été utilisés depuis 1985 et ne l'ont été qu'à quelques reprises depuis 20 ans. Qui plus est, l'objet de ce type de programme est incompatible avec l'économie canadienne moderne axée sur le marché.

Par exemple, quelles sont exactement les conditions inhabituelles du marché pour les denrées périssables sur lesquelles le gouvernement se fonde pour justifier le recours à ce programme? Le gouvernement devrait expliquer en détail pourquoi il continue de vouloir avoir la haute main sur l'économie agricole du Canada.

Je voudrais maintenant parler du traitement égal pour tous les producteurs. En vertu de la nouvelle loi, la portion de l'avance en défaut qui sera la responsabilité de l'administrateur du programme ou de l'organisation de producteurs sera fondée sur ses paiements en défaut précédents. Le montant à payer variera de 1 à 15 p. 100, selon les rendements antérieurs.

Le Parti réformiste est en faveur de cette modification, mais s'oppose au délai de deux ans pour la Commission canadienne du blé. Bien que le gouvernement prétende que la Commission canadienne du blé a besoin de temps pour apporter les correctifs administratifs, le principe de l'équité et de la responsabilité financière devrait être respecté.

Je me demande si certaines des tactiques politiques qu'utilise le gouvernement visent à détourner l'attention du public de ses projets de loi plus controversés. Je pense souvent à ce qui est arrivé ces dernières semaines alors que l'on se prépare aux prochaines élections. On a remarqué une hausse soudaine des dépenses du gouvernement dans certains secteurs. Cette augmentation des dépenses vise-t-elle à détourner notre attention de ce que le gouvernement a fait auparavant, en Saskatchewan notamment? Le projet de loi sur le contrôle des armes à feu a été un sujet de préoccupation pour une foule de gens. Mentionnons, de plus, la modification relative aux droits des homosexuels.

En présentant certains projets de loi renfermant de bonnes nouvelles, le ministre de l'Agriculture cherche peut-être à faire oublier ce que le gouvernement a fait depuis trois ans et demi. S'il est une chose que les Canadiens veulent, c'est avoir une plus grande maîtrise de leurs propres affaires. Ils veulent qu'en tant que députés nous améliorions les lois et les rendions plus efficaces. Cela n'est pas arrivé.

Ma plus grande préoccupation est que l'agriculture n'est pas une grande priorité pour le gouvernement. Bien peu a été fait pour les agriculteurs. La suppression du tarif du Nid-de-Corbeau sans avertissement, sans possibilité d'adaptation dans le secteur des transports a durement frappé les agriculteurs et aura un effet dévastateur sur toute l'économie agricole. Le gouvernement aurait dû faire ce qui était nécessaire pour réduire les coûts d'intrants des agriculteurs avant de prendre certaines de ces mesures.

(1155)

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat sur le projet de loi C-34 pour présenter le point de vue du gouvernement.

Le projet de loi C-34 établira la Loi sur les programmes de commercialisation agricole. Il s'agit d'un projet de loi important que le gouvernement a présenté pour aider les agriculteurs canadiens à soutenir la concurrence mondiale en modernisant les systèmes d'avances en espèces et de mise en commun des prix.

La nouvelle loi remplacera la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies, la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, la Loi constituant des programmes de commercialisation des produits agricoles et la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles. Les quatre lois ont été adoptées à des époques différentes pour combler des besoins différents. Cependant, elles avaient toutes un objectif en commun: soutenir et favoriser la commercialisation ordonnée des produits agricoles.

Le projet de loi remplit la promesse faite dans le livre rouge de rétablir le programme d'avances en espèces sans intérêt aux agriculteurs, qui avait été aboli par le gouvernement précédent. Il est vrai que les avances en espèces ont été rétablies chaque année à titre spécial par le Cabinet, mais les producteurs, aux prises avec des problèmes de liquidités, ne pouvaient jamais être certains que les avances seraient rétablies d'une année à l'autre.

Le rétablissement du programme d'avances en espèces sans intérêt est important parce que les agriculteurs ne peuvent pas choisir le moment où ils ensemenceront leurs champs et où ils feront leurs récoltes. Parfois, ils ne peuvent même pas décider quand ils vendront leurs produits. Des pressions financières peuvent parfois les obliger à vendre immédiatement après la récolte, au moment où, bien souvent, les prix sont les plus bas.

Avec le projet de loi, le gouvernement aidera à alléger les pressions financières que subissent les agriculteurs et à lever l'incertitude causée par l'attente de l'annonce du rétablissement temporaire des avances en espèces sans intérêt.

Au printemps de 1995, Agriculture et Agroalimentaire Canada a enclenché le processus rétablissement en lançant des consultations sur la mesure législative concernant les avances et la commercialisation ordonnée auprès de plus de 160 groupes de producteurs. Nous avons eu d'autres consultations à l'hiver et à l'été de 1996. Le ministère voulait connaître l'avis de tous les intervenants sur le projet de loi et voulait que les programmes financiers prennent la forme que souhaitaient les agriculteurs.

Les consultations ont permis de recueillir beaucoup de bonnes suggestions que le gouvernement a intégrées dans le projet de loi, y compris l'idée de combiner les quatres programmes en un seul. Les producteurs ont dit que c'était très déroutant d'avoir quatre lois différentes. Ils ont dit aussi que les quatre lois existantes ne traitaient pas tous les producteurs de façon égale et que certains produits n'y étaient même pas inclus. La nouvelle loi élimine ces injustices et ces anomalies.


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L'agriculture est une entreprise risquée. Le succès dépend beaucoup de différentes conditions à l'égard desquelles l'agriculteur n'exerce aucun contrôle. La Loi sur les programmes de commercialisation agricole apportera un peu plus de certitude aux agriculteurs canadiens qui sont vulnérables. Elle leur donnera un certain contrôle et une certaine flexibilité qu'ils n'auraient pas autrement. Elle les aidera à demeurer concurrentiels à l'échelle internationale.

Cette nouvelle mesure législative représente une véritable amélioration pour les contribuables et une utilisation plus efficace de leurs impôts. Elle représente aussi une amélioration pour les agriculteurs, qui jouiront d'une plus grande stabilité grâce au rétablissement, en vertu de la loi, d'un programme d'avances sans intérêt. Elle leur redonnera le contrôle et la flexibilité qu'ils n'ont plus depuis la fin des années 80.

Le projet de loi aidera les agriculteurs à soutenir la concurrence de leurs homologues sur les marchés internationaux. Ce sont là de bonnes nouvelles pour l'ensemble du Canada, car le succès des agriculteurs canadiens a un impact direct sur la création d'emplois dans le secteur agricole et agroalimentaire ainsi que dans l'industrie d'un bout à l'autre du pays.

Je voterai en faveur du projet de loi et j'exhorte tous les députés à faire de même.

(1200)

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, nous avons vu hier que la question du pilotage n'avait pas été réglée dans le projet de loi maritime. Je sais que les agriculteurs auraient bien voulu que cette question soit réglée, car ils auraient alors pu s'attendre à payer moins cher pour expédier leur grain.

Que pense le secrétaire parlementaire des frais exorbitants exigés par les pilotes étant donné qu'on n'a plus vraiment besoin d'eux aujourd'hui avec l'avènement du système de positionnement global? Les agriculteurs doivent encore payer 53 000 $ par voyage, soit une moyenne de 5 200 $ par jour par pilote. C'est le genre de question que les agriculteurs souhaiteraient qu'on règle pour pouvoir souffler un peu et espérer une réduction de leurs frais d'expédition.

M. Pickard: Monsieur le Président, le gouvernement a fait tout ce qu'il a pu pour que le coût des intrants, du transport et autres soient le plus abordables possible pour les agriculteurs.

Il va de soi que des coûts exorbitants doivent être examinés et qu'une solution raisonnable doit être apportée au problème. Tous les Canadiens ne souscrivent pas à la prémisse voulant que les coûts ne soient pas équitables, mais lorsqu'il s'est avéré que des coûts étaient trop élevés, nous avons examiné la situation et tenté de ramener les prix à un juste niveau.

Cette question se rapporte cependant à une autre mesure législative. Pour l'heure, notre attention porte sur les paiements anticipés et la restructuration de quatre projets de loi qui traiteront tout le monde, toutes les communautés agricoles sur un pied d'égalité et avec équité. Il s'agit d'une question fondamentale.

Je sais que les consultations qui ont eu lieu à la grandeur du Canada ont presque fait l'unanimité. Le projet de loi C-34 est une mesure très importante pour nous tous et nous en avons besoin pour permettre aux Canadiens de bénéficier d'un traitement équitable au chapitre de la concurrence agricole, tant sur le marché international que national.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour traiter de cette question. Nous avons examiné différents types de lois, et je sais que beaucoup des problèmes des agriculteurs ne tiennent pas seulement à une ou deux des lois que nous avons tenté d'améliorer, mais à six ou sept mesures législatives qui relèvent de la compétence du ministre de l'Agriculture. Nous devons tenir compte du fait que les problèmes ne sont pas réglés simplement parce que nous avons amélioré quelques-unes des lois en cause.

Le secrétaire parlementaire a mentionné que ce projet de loi réunissait plus ou moins trois lois: la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies et la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles. L'intégration de ces programmes est un pas dans la bonne direction, cela ne fait aucun doute. Si l'on peut réduire la lourdeur administrative des lois concernant l'agriculture, on ne fait que rendre service aux agriculteurs.

Le Parti réformiste est très favorable à la réduction des coûts d'administration, de la lourdeur administrative et de la paperasserie dont les agriculteurs doivent s'accommoder. Je pense que j'ai dit clairement hier, au comité, que l'harmonisation des règles sur l'enregistrement des produits chimiques et sur l'inspection des aliments était aussi un enjeu très important, en plus de ces lois.

Ce n'est que juste de montrer à quel point la législation concernant les agriculteurs peut parfois être injuste. Quand j'examine les témoignages formulés par les meuniers devant le comité permanent, il y a à peine quelques jours, je remarque que ceux-ci ont le droit d'importer du grain des États-Unis sans que la Commission du blé se mêle de la mouture ou de la transformation de leur produit. Cependant, quand les agriculteurs trouvent pour le grain qu'ils cultivent aux États-Unis un marché où le boisseau se vend 2 dollars de plus qu'au Canada, on les jette en prison.

(1205)

Ce n'est pas une façon équitable de traiter un secteur de notre économie. D'un côté, nous permettons une chose qui est profitable pour les produits à valeur ajoutée et de l'autre, nous refusons aux producteurs de matières premières qui essaient de capturer un marché l'accès à ce dernier. C'est contre ce genre de choses que les agriculteurs protestent et ils en tiendront compte lorsqu'ils voteront aux prochaines élections.

Nous sommes en faveur de maintenir les programmes de paiements anticipés car ils ont un effet stabilisateur sur le marché et


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réduisent les risques de défauts de paiement pour les contribuables. Les agriculteurs sont en général assez honnêtes et font leur possible pour honorer leurs engagements.

Le gouvernement libéral est loin de tenir ses promesses. Il est très facile de faire des promesses, mais il est plus difficile de les tenir. Le gouvernement avait entre autres promis de verser au printemps des paiements anticipés pour les récoltes ne portant pas d'intérêt. Je sais que le député de Malpèque s'était prononcé fortement en faveur d'une telle avance, mais comme c'est un libéral d'arrière-ban, il ne semble guère avoir d'influence sur son gouvernement.

Le Parti réformiste est en faveur d'un tel paiement anticipé et estime qu'il devrait être porté à au moins 50 000 $ et inclus dans les autres programmes de paiements anticipés si l'on veut traiter les agriculteurs de façon équitable. Certains députés libéraux ont parfois de bonnes idées, mais étant donné l'absence de démocratie au sein du gouvernement, ces députés n'ont guère d'influence ou d'impact.

Nous avons vu ce qui est arrivé quand tous les membres du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire ont dit qu'il fallait mettre fin au retour en arrière dans l'expédition du grain, car cela nous coûtait des millions de dollars. Cette pratique a fait perdre quelque chose comme 60 millions de dollars aux contribuables jusqu'à ce qu'on y mette fin finalement en éliminant la Loi sur le transport du grain de l'Ouest.

Voilà des domaines où les agriculteurs apprécieraient que la Chambre prenne des mesures lorsqu'elle est saisie du problème au lieu de simplement promettre, à la veille des prochaines élections, que la question sera étudiée en septembre lors de notre retour à la Chambre ou lors de la prochaine législature, comme on me l'a dit hier dans le cas des droits de pilotage pour le transport du grain.

Le Parti réformiste a proposé certains amendements qui auraient assuré une mise en oeuvre plus responsable de ce projet de loi. L'un d'entre eux portait sur les règlements du gouverneur en conseil régissant l'obligation du gouvernement dans le cas des accords de garantie d'avance. Nous constatons que le gouvernement a de plus en plus tendance à procéder par décret au lieu d'agir directement à la Chambre. C'est une orientation déplorable. Lors des prochaines élections, les contribuables et les électeurs le feront nettement savoir au gouvernement.

Nous voulions que les règlements soient présentés à la Chambre des communes, mais personne n'a voulu nous écouter. Tout cela leur est bien égal. Ils se disent: «Nous sommes au pouvoir et nous faisons comme il nous plaît.»

Nous voulions que les agriculteurs aient accès à des avances de secours, mais, comme nous l'avons entendu, le gouvernement ne l'a pas permis. Nous voulions que le gouvernement élimine le programme d'achats gouvernementaux et qu'il traite toutes les organisations agricoles également.

Lorsque j'examine certaines questions étudiées à la Chambre, je suis toujours étonné de voir que nous analysons ce qui se passe dans une industrie en oubliant qu'elle a un impact sur les autres.

(1210)

Lorsque nous avons vu arriver le boeuf de l'étranger, il y a à peu près un an, du fait que les quotas du GATT étaient passés de quelque chose comme 75 000 à 115 000 tonnes, nous n'avons pas réfléchi au nombre d'emplois que cela supprimait. Nos éleveurs ont été obligés d'exporter leurs veaux aux États-Unis pour les faire abattre. Cela a supprimé au moins trois emplois pour chaque emploi créé par l'importation de ces quantités supplémentaires de boeuf.

Qui plus est, les pays qui exportaient ce boeuf avaient un excédent d'exportations. Nous avons dû emprunter de l'argent pour financer ces importations. À mon avis, ce n'est pas comme ça qu'on dirige une entreprise et encore moins un pays.

Ce pays devrait être dirigé comme une entreprise. Si on est dans le rouge, il faut s'en sortir.

Par ailleurs, l'un des amendements proposés par les réformistes a été défait parce qu'il n'était pas politiquement avantageux à l'époque. Ce serait peut-être différent maintenant.

Cela prouve que la promesse du livre rouge de donner aux députés un rôle plus important dans l'élaboration des mesures législatives n'est rien d'autre que des paroles en l'air. C'est une autre de ces promesses que les libéraux n'ont pas tenues et dont ils vont devoir rendre compte à l'électorat.

Nous aurions voulu que le comité soit plus démocratique. Nous aurions voulu que le comité lise le livre rouge et mette en oeuvre les promesses qu'il contient. La preuve est là. Ce sera tout à notre avantage de pouvoir le brandir de temps à autre pendant la campagne électorale en disant: «Les voilà leurs promesses. Voyez par vous-mêmes s'ils les ont tenues.»

Ce sera un plaisir d'avoir de la documentation qui nous sera réellement utile durant la prochaine campagne électorale. Parfois, les promesses qui sont consignées par écrit peuvent revenir vous hanter plus tard.

Je ne peux m'empêcher d'admirer mon collègue de Yorkton-Melville qui mentionnait un certain nombre de choses concernant la Commission canadienne du blé. Nous constatons une fois de plus que, ces derniers six mois, nous avons beaucoup de mal à assurer le transport des grains.

La Commission blâme les chemins de fer. Les chemins de fer blâment le temps et sans doute que les Libéraux blâment le Tout Puissant, ce que fait le gouvernement lorsqu'il est à court d'excuses.

Jusqu'où cela ira et qui prendra la responsabilité reste à déterminer. J'ai été stupéfait que l'an dernier, au printemps 1996, la Commission canadienne du blé ait annulé le quota C pour l'orge, sous prétexte qu'il n'y avait pas assez de grain, qu'il n'y avait rien à vendre.

Nous avions des milliers de wagons-trémies vides sur des voies de garage. Nous ne savions qu'en faire. Tout d'un coup, lorsque la nouvelle récolte arrive, on se rend compte que l'on a un reliquat record de grains de provendes de l'an dernier, ainsi qu'un reliquat record de blé durum. Nous avions tous ces wagons qui ne faisaient rien et personne n'a fait quoi que ce soit.


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Lorsque la LTGO a été abolie, les Libéraux nous avaient promis que le grain serait transporté. Ils allaient suivre la situation et mettre en place des règles et règlements que les chemins de fer devraient respecter.

Cela n'a pas été fait. Selon le plus récent rapport d'une des compagnies de chemins de fer, elle a transporté au cours du dernier mois 2000 wagons-trémies vides qui n'avaient jamais été chargés.

On se rend compte de la situation déplorable de notre réseau ferroviaire. Le gouvernement ne fait rien pour corriger la situation. Ces projets de loi essaient d'y parvenir. Ils auront un succès partiel, mais je pense que c'est loin d'être ce que veulent les agriculteurs et ce dont l'industrie a besoin.

(1215)

Le système de transport ne fonctionne pas. Les agriculteurs canadiens qui pourraient facilement se rendre aux États-Unis et profiter de débouchés viables là-bas ne peuvent le faire, car nous sommes confrontés à un monopole qui ne veut pas coopérer face aux problèmes auxquels nous sommes confrontés ou à l'évolution du marché durant l'année.

Je sais aujourd'hui qu'il y a une énorme demande pour notre grain fourrager aux États-Unis. Dans ma petite région de Morden-Winkler, durant la dernière semaine ou les 15 derniers jours, on a exporté plus de 200 000 boisseaux vers les États-Unis, car quelques agriculteurs ont trouvé un marché là-bas. Ils ont développé ce marché au point où il est devenu extrêmement lucratif.

C'est le type de politique agricole dont nous avons besoin, alors que les agriculteurs prennent le contrôle de la situation et demandent au gouvernement de rédiger des règlements établissant des lignes directrices équitables pour tout le monde. Ce n'est pas ce qui se produit. Là encore, je dois signaler ce que nous ont dit les témoins que nous avons entendus encore récemment, des meuniers. Ils ont affirmé qu'ils pouvaient importer le grain des États-Unis sans aucune restriction alors que les agriculteurs n'ont pas cette liberté, car ils doivent passer par le programme de rachat. Comme nous l'avons entendu dans le cadre des audiences du comité permanent, ce programme n'est pas ce que les agriculteurs souhaitent. Il n'est pas équitable pour tous les agriculteurs et on devrait le modifier.

Il est regrettable de constater à quel point les agriculteurs sont devenus méfiants à l'égard du gouvernement et des bureaucrates. Il est très difficile pour eux de vraiment prendre au sérieux ce qui se produit à la Chambre. Un incident très amusant s'est passé le 1er avril. J'ignore si la Chambre a déjà entendu parler de l'article paru dans Grainews, selon lequel le ministre de l'Agriculture avait annoncé un nouveau projet de carburant diesel biologique et créé une société de la Couronne appelée Petro Canola.

J'ai reçu un certain nombre d'appels de mes électeurs qui se demandaient si cela aurait pu vraiment se produire à Ottawa. Lorsque j'en ai entendu parler pour la première fois, j'ai jugé que c'était une idée folle. Je me suis demandé pourquoi quelqu'un allait même jusqu'à croire une chose comme celle-là.

Je voudrais simplement vous lire quelques passages tirés de l'article en question pour que les députés aient une idée des sentiments des agriculteurs au sujet du gouvernement fédéral et de la confiance qu'ils font aux politiciens. On dit dans cet article que le premier ministre avait un meilleur plan que l'ancien Programme énergétique national du début des années 80. «Nous allons mettre sur pied des raffineries près d'Ottawa, des deux côtés de la frontière séparant l'Ontario et le Québec, pour obtenir une industrie équilibrée. Les agriculteurs de l'Ouest profiteront de la culture du canola et les Canadiens de l'Est profiteront, quant à eux, de la valeur ajoutée d'une nouvelle industrie. Tout le monde y gagne.»

Cela ressemble vraiment à un projet viable auquel un bureaucrate ou un politicien a rêvé. On ajoute ceci dans l'article: «La nouvelle société de la Couronne Petro Canola va acheter du canola aux agriculteurs de l'Ouest à un prix moyen inférieur de 15 p. 100 au cours mondial, mais les agriculteurs pourront compter sur un marché garanti.» Je suppose qu'après avoir été liés à un monopole, soit la Commission canadienne du blé, ils croient vraiment qu'on va leur demander de vendre leurs produits à un prix probablement inférieur aux cours mondiaux.

Je peux imaginer certains d'entre eux mordre à cet hameçon, mais on dit ensuite dans l'article: «La commission transportera ensuite vers l'Est, au tarif subventionné de la pie d'Amérique, le canola qu'on raffinera et revendra aux agriculteurs de l'Ouest et à d'autres utilisateurs de diesel.» Lorsqu'on voit cela, je pense que tout le monde devrait avoir compris que cela ne peut être vrai et que si cela l'était, je suis persuadé que nous aurions davantage de provinces qui voudraient se séparer.

Cependant, c'est le type de problèmes auxquels nous, les agriculteurs, sommes confrontés depuis de nombreuses années. Je voudrais simplement préciser clairement au secrétaire parlementaire et aux députés que dans l'ouest du pays surtout, l'agriculture est encore le moteur de l'activité économique.

(1220)

Lorsque les agriculteurs et l'industrie agricole disparaîtront, il ne restera pas grand-chose à sauver dans les provinces de l'Ouest ou, probablement, dans tout le pays. C'est pourquoi j'estime qu'il est très important que nous commencions à collaborer, à la Chambre, pour protéger les agriculteurs, les usines de transformation alimentaire et les offices de commercialisation, de manière à ce que les agriculteurs réalisent davantage de bénéfices.

En ce qui concerne les prêts sans intérêts sur certains montants, ce programme d'avances en espèces est, à mon avis, la bonne voie à suivre. Cependant, lorsqu'un agriculteur subit une catastrophe et a probablement un besoin criant d'un peu d'argent au printemps, il me semble tout à fait ridicule de l'obliger à payer des intérêts sur les premiers 50 000 $. Je ne crois pas que c'est ce que veulent réellement les agriculteurs ou que cela bénéficiera à l'ensemble de l'industrie agricole.

Le Parti réformiste croit fermement que l'agriculture devrait être une industrie rentable et axée sur le marché, et que les agriculteurs devraient être payés pour leur travail et obtenir un prix raisonnable pour leurs produits.


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Lorsque je considère le coût de production d'un boisseau de céréales de nos jours, l'efficacité grandement accrue des agriculteurs, l'accroissement de leur volume de production chaque année et leur capacité accrue de nourrir la population mondiale, alors qu'ils sont frappés de toutes parts par le gouvernement ou par des règlements, je suis d'avis que les choses doivent changer.

Un exemple que j'ai présenté hier concernait la lutte antiparasitaire et l'harmonisation des règlements entre les États-Unis et le Canada. L'année dernière, j'ai aperçu dans un des journaux agricoles un article disant que les agriculteurs ontariens avaient importé illégalement au Canada des produits chimiques d'une valeur d'environ 11 millions de dollars pour les utiliser sur leurs récoltes de maïs, et que les autorités avaient fermé les yeux sur cette situation. Elle ne semblait pas contrarier les agents chargés d'exécuter la loi ou les fonctionnaires fédéraux.

Dans un autre document, on peut lire que des agriculteurs sont allés en prison parce qu'ils voulaient vendre leur boisseau de grain un dollar de plus. Quelque chose va de travers au Canada.

Les bureaucrates et les politiciens agissent comme cela depuis belle lurette. En 1992, avant mon élection à la Chambre, je sais qu'il y avait de la contrebande de blé grandin au Canada. Certains agriculteurs l'approuvaient, d'autres s'y opposaient, mais tout le monde a refusé de voir cette violation de la loi.

Quand des agents des douanes ont voulu intervenir parce que certains agriculteurs non seulement violaient la loi, mais réalisaient probablement des bénéfices considérables, des représentants d'Agriculture Canada et d'autres hauts placés du gouvernement leur ont conseillé de fermer les yeux car, disaient-ils: «Nous n'intenterons pas de poursuites.»

Je suis venu à la Chambre pour qu'on fasse respecter les lois au Canada. Quand je constate que des questions restent lettre morte, comme celle-ci ou encore le dossier des avances de fonds, et mettent dans le pétrin un agriculteur dont le cycle de production est ruiné, je pense qu'il faut changer le gouvernement. Depuis 25 ou 30 ans, nous voyons bien que les conservateurs et les libéraux, c'est la même chose. Ils ne pensent qu'à enrichir l'Est. Pour eux, l'Ouest pourrait disparaître.

Voilà pourquoi il y a 52 réformistes à la Chambre. Leur slogan est: «L'Ouest veut avoir voix au chapitre.» Nous sommes ici et nous allons y rester.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai apprécié le discours de mon collègue, comme je le fais toujours d'ailleurs. Il connaît bien l'agriculture et les mesures législatives qui s'y rapportent et dont la Chambre est saisie.

Sur les 50 réformistes élus aux dernières élections, il y en a sept qui sont toujours des agriculteurs actifs ou qui l'étaient juste avant de devenir députés. Il y a un certain nombre de députés réformistes qui peuvent parler des questions agricoles en connaissance de cause, et le député de Lisgar-Marquette est de ce nombre.

(1225)

Dans les quelques minutes dont je dispose, je voudrais raconter une chose qui m'est arrivée récemment en ma qualité de député de Prince George-Peace River en rapport avec la Commission canadienne du blé. Je vais raconter mon histoire à mon collègue et lui demander ce qu'il en pense, car je sais qu'il a fait beaucoup de recherche et adopté des positions bien arrêtées sur la réforme de la Commission canadienne du blé.

La Chambre a été saisie d'un projet de loi qui, pour quelque raison mystérieuse, ne lui est pas encore revenu depuis le congé de Pâques, le projet de loi C-72. Je voulais savoir s'il existait un consensus chez les agriculteurs de ma circonscription de sorte que je puisse m'exprimer avec autorité à la Chambre à ce sujet et voter en conséquence.

Je me suis adressé à la Commission canadienne du blé. J'avais une dizaine de questions que je voulais poser précisément au sujet de ce projet de loi. Je voulais poser ces questions aux titulaires de carnets de livraison de la Commission. Évidemment, comme tous ceux qui ont déjà fait des sondages le savent, nous ne voulons pas édulcorer les résultats sur un dossier comme celui-ci en interrogeant des éleveurs ou des producteurs laitiers ou autres qui ne s'occupent pas d'exportation de céréales. Pour obtenir les meilleurs résultats possibles de mon sondage, il était essentiel de m'adresser aux titulaires de carnets de livraison de la Commission.

J'ai appelé aux bureaux de la Commission canadienne du blé à Winnipeg pour expliquer que je voulais obtenir la liste de tous les titulaires de carnets de livraison de la Commission dans le nord et le sud de la vallée de la Peace River, en Colombie-Britannique. La commission m'a expliqué qu'elle ne pouvait en aucune circonstance divulguer la liste postale. Cette liste devait demeurer secrète.

J'ai dit qui j'étais. J'ai envoyé mon questionnaire par télécopieur. Je n'essayais pas de cacher quoi que ce soit. Je ne posais pas de questions tendancieuses. La commission refusait toujours de m'aider, alors que je suis un représentant élu par les habitants de cette région.

Voici ce que j'ai dit alors: «Je vais utiliser mon budget de député pour vous envoyer le questionnaire scellé dans des enveloppes. Il suffira d'imprimer les étiquettes, de les coller sur les enveloppes et d'expédier les enveloppes.» La commission a refusé de me rendre ce service, même si j'étais prêt à assumer les coûts. Je n'ai donc pas pu faire un sondage précis auprès des détenteurs de permis de ma circonscription.

Il est profondément troublant qu'un organisme comme la Commission canadienne du blé, qui est censée travailler dans l'intérêt des agriculteurs, refuse à un député, quelle que soit son allégeance politique, les moyens de sonder avec exactitude l'opinion de ses électeurs sur une question importante.

Voilà l'histoire de l'une de mes expériences avec la commission. Elle est très cachottière. Il est bien connu que la Commission canadienne du blé, tout comme le SCRS, n'a pas à se conformer aux demandes d'accès à l'information. Cela dérange de plus en plus les agriculteurs et les autres Canadiens.


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Dans ses contacts avec la commission, mon collègue s'est-il lui aussi heurté à un mur? A-t-il été incapable d'obtenir la liste postale de la commission pour pouvoir consulter sérieusement ses électeurs?

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question.

Comme les députés le savent probablement, j'ai souvent critiqué la Commission canadienne du blé, non pas parce qu'il s'agissait de la Commission canadienne du blé et qu'elle avait un travail à faire, mais à cause de son manque de transparence. Elle ne donne pas aux agriculteurs le droit de diriger ses affaires. Elle ne leur donne pas le droit de vérifier ses livres pour voir ce qui se passe.

Je voudrais signaler à mes collègues que, il y a environ un an et demi, à l'époque où je siégeais au sous-comité des transports, des représentants du conseil consultatif de la commission sont venus témoigner devant nous. À l'époque, l'orge était acheminé à Thunder Bay, puis chargé dans des wagons couverts et expédié en Californie, dans le but de respecter des contrats de vente. Il était absolument absurde d'acheminer l'orge jusqu'à Thunder Bay, puis de l'expédier par chemins de fer en Californie, quand on aurait pu passer par Vancouver et descendre le long de la côte, ce qui aurait fait économiser beaucoup d'argent aux agriculteurs canadiens.

(1230)

J'ai vu l'article et j'ai appelé à la Commission canadienne du blé après avoir entendu les membres du comité consultatif. On disait que les wagons couverts partaient de Thunder Bay pour se rendre en Californie. Selon notre politique des transports, les wagons couverts sont censés aller à Churchill et non à Thunder Bay. Les wagons-trémies, eux, sont censés aller à Thunder Bay.

J'ai demandé à ma recherchiste de contacter la Commission canadienne du blé à ce sujet. Je voulais savoir combien de wagons couverts étaient réservés à l'expédition du grain vers la Californie plutôt que d'être envoyés à Churchill où on a besoin d'eux. On a dit à ma recherchiste que cette information n'était pas divulguée au public, que ce n'était pas de mes affaires. Voici que j'essaie, en tant que député, de faire que les organismes fédéraux, que la commission du blé rende des comptes aux producteurs, aux gens qui dépendent vraiment d'elle, et on me dit que cette information n'est pas pour moi. Cela veut peut-être dire qu'il se passe quelque chose qui ne devrait pas se passer.

Le port de Churchill avait désespérément besoin de céréales. Nous pouvions expédier des céréales par ce port à 35 $ moins cher la tonne que par Thunder Bay, mais c'est comme cela que la balle rebondit pour les agriculteurs. Cela commence à me déranger sérieusement, et ces questions seront soulevées aux prochaines élections.

Cela fait 25 ou 30 ans que les gouvernements conservateurs et libéraux successifs négligent les organisations agricoles et les agriculteurs. Ces gouvernements ont plus ou moins concentré leur attention sur les intérêts de l'Est. La Voie maritime du Saint-Laurent n'a pas sa raison d'être sans le transport des céréales. Le gouvernement ne veut pas faire que le grain soit produit au meilleur coût possible ou qu'il soit expédié à l'étranger par les moyens les plus économiques pour que nous soyons concurrentiels sur le marché international. Tout ce qu'il veut, c'est acheter des votes pour les prochaines élections. Je crois que cela va changer. Je remercie mon collègue d'avoir posé cette question.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-34. Nous appuierons ce projet de loi parce qu'il prévoit suffisamment de mesures qui méritent d'être présentées aux agriculteurs.

Pourquoi la Chambre est-elle saisie du projet de loi à ce moment-ci pour le débat final? Je pense que ce projet de loi date d'au moins deux ans. Les agriculteurs demandent que cette mesure soit adoptée depuis longtemps. Or, elle dormait sur une tablette. Elle ne présentait pas beaucoup d'intérêt pour le gouvernement, malgré le menu législatif très léger de la Chambre.

Le gouvernement a débattu de mesures fort peu importantes pendant l'actuelle législature, et celles qu'il a adoptées étaient d'une importance très secondaire. Malgré cela, les projets de loi C-34 et C-38 sont restés là, oubliés dans une pile de documents, sur le bureau d'un secrétaire parlementaire ou ailleurs. C'est inacceptable.

Le gouvernement s'est tellement désintéressé et peu soucié des agriculteurs. Nous présenterons le bilan de ce qu'il a fait pour les agriculteurs d'un océan à l'autre, et ils pourront le comparer aux mesures que nous avons proposées et préconisées en matière agricole avant les dernières élections. Nous avons présenté de nombreuses idées. Les agriculteurs verront que le choix à faire est effectivement très simple et ils opteront pour le Parti réformiste.

(1235)

Pourquoi sommes-nous maintenant saisis de ce projet de loi? Pourquoi a-t-il été oublié sur le bureau d'un secrétaire parlementaire? Je ne connais évidemment pas la réponse à ces questions. Il y a une rumeur que je trouve difficile à croire, une rumeur selon laquelle il y aura des élections. J'ai du mal à croire cela puisqu'il reste encore six mois avant la fin du mandat de quatre ans. Je pense que les élections devraient avoir lieu dans six à dix-huit mois. C'est ce qui se produit habituellement.

Un gouvernement ne déclenche des élections hâtives, notamment aussi hâtives que celles-ci, après seulement trois ans et demi, que s'il a peur d'attendre encore un peu. Le gouvernement a bien raison d'avoir peur de déclencher des élections après quatre ans, comme c'est la coutume au Canada. La population lui a confié un mandat de cinq ans. Déclencher des élections après trois et demi signifie qu'il y aura des élections supplémentaires sur une période de dix ans, ce qui entraîne des coûts supplémentaires. Que coûte un appel aux urnes? Possiblement 400 millions de dollars, tout cela aux frais des contribuables. C'est quelque chose comme cela. Nous dépenserons un montant supplémentaire de 400 millions de dollars au cours d'une décennie, c'est pourquoi je doute que la rumeur soit fondée.


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Supposons que la rumeur soit fondée et que les élections soient déclenchées dans quelques mois, voire dans quelques semaines. J'ai même entendu cette rumeur. Pourquoi le gouvernement aurait-il attendu jusqu'à maintenant pour présenter ce projet de loi? Pourquoi donc?

Se peut-il que le gouvernement craigne au plus haut point d'être rejeté en masse par les agriculteurs à cause du projet de loi C-68, le projet de loi sur le contrôle des armes à feu? Ce projet de loi a en effet été largement rejeté par des agriculteurs et nombre d'habitants de villes et de villages d'un bout à l'autre du pays. C'est une loi médiocre. Les agriculteurs vont y penser à deux fois quand ils iront aux urnes.

Se peut-il que le projet de loi ait été délibérément oubliée sur le bureau du secrétaire parlementaire. Comme on ne se préoccupait des effets qu'il pourrait avoir sur les agriculteurs, se peut-il que le ministre l'ait mis de côté pour ne le ressortir qu'un peu avant les élections afin de faire oublier tout cela aux électeurs grâce au montant de 120 millions de dollars qui vient avec ce projet de loi. Ce n'est pas le montant exact, mais c'est celui qui circule. Se peut-il qu'on ait attendu au déclenchement des élections pour l'annoncer afin de faire oublier le projet de loi C-68?

Ou se peut-il qu'il ait été oublié sur le bureau du secrétaire parlementaire parce que les agriculteurs se souviennent du projet de loi C-33, qui accorde des droits spéciaux aux homosexuels? Si un membre de mon personnel dit être engagé dans une relation avec une personne du même sexe, il faut accorder à cette personne les mêmes avantages qu'à un conjoint de l'autre sexe. C'est là que nous a conduit le projet de loi C-33. Cela a été rejeté d'un bout à l'autre du pays, particulièrement dans les régions rurales.

Se pourrait-il que le projet de loi ait été oublié sous une pile de documents dans le bureau du secrétaire parlementaire jusqu'à aujourd'hui? Le gouvernement ne peut pas vouloir imposer aux Canadiens des dépenses de 400 millions de dollars pour tenir des élections qui ne devraient pas avoir lieu avant quatre ans. Et si c'était le cas, le projet de loi servirait-il à racheter certains autres projets de loi que le gouvernement aimerait bien savoir oubliés, surtout dans les régions rurales? Je crois que c'est la raison.

Je parlerai un peu du projet de loi, puis de quelques sujets connexes. La plupart des députés réformistes voteront en faveur du projet de loi. Cependant, il donne lieu à quelques très sérieuses préoccupations dont je voudrais parler un peu. Des députés ont expliqué en quoi consiste le projet de loi et ce qu'il ne fait pas.

(1240)

Les préoccupations du Parti réformiste et les amendements que nous avons proposés ont trait à quatre aspects de la question. Tout d'abord, nous croyons que l'on devrait fixer une limite au montant de la dette éventuelle du gouvernement. La plupart des contribuables n'acceptent pas que le gouvernement risque de contracter une dette dont le montant reste inconnu. Il faut fixer une limite maximale à la dette éventuelle dans la loi elle-même ou, sinon, que le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire examine régulièrement le montant de la dette. Nous ne pouvons pas nous en remettre uniquement à des décrets en conseil. Les décrets ont le pouvoir d'agir seuls. Cette mesure législative donne au ministre le pouvoir de déterminer ce qui constitue une dette acceptable sans n'avoir à consulter le Parlement. Cela correspond tout à fait au manque de respect envers le processus démocratique dont le gouvernement actuel a fait preuve depuis son accession au pouvoir, il y a trois ans et demi.

Deuxièmement, les agriculteurs devraient pouvoir obtenir des avances de secours sans intérêt, à condition que cela soit inclus dans la tranche de 50 000 $ sans intérêt déjà prévue. Cela ne s'est pas produit non plus.

Troisièmement, nous avons demandé au gouvernement d'éliminer son programme d'achats, qui permet au gouvernement, selon des conditions non précisées et dans des circonstances non précisées, d'acheter certaines récoltes non précisées, soi-disant pour aider les agriculteurs en difficulté. Ce programme n'a pas été utilisé depuis 1985 et nous ne savons pas vraiment à quoi il doit servir. Il n'a pas été défini d'aucune façon. Ce n'est pas une bonne mesure législative lorsqu'il n'y a pas de lignes directrices.

Quatrièmement, nous avons réclamé tout au long du que toutes les organisations agricoles soient traitées de la même façon par cette mesure législative. Cela ne s'est pas concrétisé. À quel organisme a-t-on accordé deux ans de grâce avant de devoir se conformer à cette loi? La Commission canadienne du blé. Pourquoi cela ne m'étonne-t-il pas?

Ce sont les commissaires qui dirigent la Commission canadienne du blé. Les agriculteurs n'ont pas voix au chapitre. Nous ne savons même pas ce qui se passe à la commission. Tout est gardé très secret, à un niveau de confidentialité égal à ce qu'on voit au SCRS et au Conseil privé. Incroyable. C'est la seule organisation qui n'aura pas à se conformer à cette loi avant deux ans. Cela ne me surprend pas. Les ministériels sont de connivence avec les membres de la Commission canadienne du blé.

La Commission canadienne du blé est très utile aux agriculteurs canadiens. Je l'ai toujours appuyée dans son rôle d'organisme de commercialisation. Or, les agriculteurs veulent un organisme qui rende compte de ce qu'il fait. Ils veulent savoir ce qui se passe à la commission. Ils veulent avoir des réponses à leurs questions. Ils veulent que le vérificateur général puisse examiner le fonctionnement de la commission à l'interne, mais cela ne lui est même pas possible. Nos questions demeurent sans réponse.

Il a fallu qu'une fuite se produise pour savoir que les commissaires qui sont congédiés ou qui décident de partir reçoivent une indemnité de départ pouvant atteindre 290 000 $. C'est incroyable.

Pourquoi cet organisme est-il le seul auquel le gouvernement ait accordé un sursis de deux ans relativement à l'adoption de cette loi? La chose n'est pas étonnante, mais elle n'est pas acceptable non plus. Voilà les modifications que nous avons tenté de faire apporter au projet de loi C-34.


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(1245)

Nous appuyons ce projet de loi parce qu'il répond au voeu des agriculteurs. Nous croyons que les paiements anticipés contribuent à la stabilité de l'ensemble de l'industrie de la commercialisation du grain. Cette mesure nous paraît nécessaire et c'est la politique que nous avons toujours défendue. C'est pourquoi nous appuyons le projet de loi, même si nous déplorons que les amendements que nous avons proposés n'aient pas été retenus.

J'ai déjà parlé brièvement de la raison pour laquelle nous sommes saisis de ce projet de loi maintenant. J'ignore la raison et je n'ose même pas imaginer les motifs à l'origine du dépôt de cette mesure à ce moment-ci. Le moment me paraît cependant bien étrange. Se peut-il que le gouvernement soit vraiment préoccupé par les problèmes survenus dans d'autres secteurs agricoles et qui sont la conséquence directe de ce qu'il a fait ou n'a pas fait?

Par exemple, l'industrie céréalière a actuellement un problème. J'ai des voisins qui devraient maintenant disposer de tout ce dont ils ont besoin pour les semences. Ils sont censés commencer les semailles dans deux ou trois semaines. Or, ils n'ont pas d'argent pour le faire parce que, faute de pouvoir le transporter, ils n'ont pas pu vendre leur grain. Pourquoi n'ont-ils pas pu le faire? Parce que les trois mesures législatives du gouvernement relatives à la commercialisation du grain sont un misérable échec.

Par exemple, le gouvernement a éliminé le montant compensatoire du Nid-de-Corbeau ou, comme nous l'appelons, la subvention du Nid-de-Corbeau que le Parti réformiste appuyait. Notre politique était, pour qu'elle ne fausse pas le commerce, de la faire rentrer dans le cadre d'un programme d'ajustement de façon à ce qu'elle soit là pour nous aider à nous battre contre, par exemple, certaines mesures commerciales de la Communauté économique européenne et le programme de subventions aux exportations des États-Unis. C'était la politique que nous défendions aux dernières élections. Nous disions qu'il fallait affecter l'argent à un tel programme. Cependant, nous avons reconnu que la subvention du Nid-de-Corbeau était néfaste, en ce qu'elle favorisait le transport du grain vers le Canada central, lequel profitait donc de toute la valeur ajoutée, et qu'en fait, elle subventionnait les exportations si bien que la transformation du grain se faisait à l'extérieur du pays. Ça n'avait pas de sens, et il était logique de l'éliminer.

Toutefois, certains changements devaient avoir lieu avant de prendre cette mesure. Or, ce n'est pas ce qui s'est produit.

Des changements du même genre auraient dû être faits lors de la privatisation du CN. Des changements du même genre auraient dû être faits dans le cadre de la nouvelle Loi sur les transports. Ils auraient permis de rendre le système de transport plus efficace. Ils auraient introduit une certaine concurrence au sein du système. Ils auraient permis de régler le problème de la répartition des wagons qui ne l'est toujours pas après trois et demi, alors que le gouvernement savait pertinemment lors de son arrivée au pouvoir que c'était un gros problème. Il savait que la répartition des wagons posait un problème. Un sous-comité spécial a été mis sur pied pour traiter cette question, mais il n'y a pas eu de suite. Le système d'attribution des wagons est donc totalement inadéquat. La Commission du blé a trop de pouvoirs sur le mode d'attribution. Cela explique, en grande partie, les problèmes actuels d'acheminement du grain.

À cause de cette façon de faire et de cette inaction du gouvernement, j'ai des voisins qui n'auront pas l'argent nécessaire pour acheter les semences de cette année. Ils devront aller quémander à la banque. Bien sûr, certaines banques prêteront l'argent, dans certains cas. Dans d'autres cas, étant donné la sécheresse qui sévit dans notre région depuis plusieurs années, beaucoup de banques refusent de prêter cet argent aux agriculteurs. Certains agriculteurs seront tout simplement incapables de faire les semailles cette année. Pour beaucoup d'entre eux, ce sera la fin d'une carrière et la perte de la ferme familiale.

Pourquoi? Le gouvernement n'a rien fait pour favoriser un système concurrentiel. Il n'a pas créé de facteurs incitatifs et dissuasifs qui auraient stimulé le rendement des sociétés ferroviaires et des sociétés céréalières. Il n'a pas voulu imposer, comme nous l'avions recommandé, un régime d'arbitrage des offres finales pour mettre un terme aux conflits avec les expéditeurs captifs. Nous avons fait cette proposition quand on a discuté de la nouvelle Loi sur les transports au Canada, de la privatisation du CN et de la loi qui éliminait le tarif du Nid-de-Corbeau, ou lors du débat sur cette question.

(1250)

C'est ce que nous avons proposé. Nous avons dit, faisons-le. Au comité, nous avons proposé des changements qui auraient donné aux expéditeurs captifs le pouvoir de traiter directement avec les compagnies de chemin de fer et les compagnies de manutention du grain lorsque leur performance n'étaient pas satisfaisante. Malheureusement ces changements n'ont pas eu lieu.

Nous avons un système qui, faut-il s'en étonner, ne fonctionne pas. Nous avions prédit qu'avec les changements proposés par le gouvernement, il ne fonctionnerait pas. C'était prévisible. Malheureusement, c'est ce qui s'est passé.

Les producteurs de grain se retrouvent maintenant dans une situation très grave; dans certains cas, leurs céréales sont en tas sur le sol où elles vont pourrir. Dans d'autres cas, les silos sont pleins mais ils n'ont pas l'argent pour faire les semailles.

Bien entendu, la Commission canadienne du blé n'a rien arrangé, l'an dernier, lorsque les agriculteurs ont ensemencé leurs champs et qu'elle prédisait que les prix seraient très élevées. Et maintenant, le prix réel que les agriculteurs touchent pour leurs céréales est tellement bas que ça ne fait qu'aggraver le problème.

Là est le problème et c'est également la raison pour laquelle le gouvernement a présenté cette mesure législative. Il veut dissimuler son inaction et, dans certains cas, ce qu'il a fait depuis les dernières élections.

Les libéraux veulent-ils faire oublier qu'ils n'ont tenu que 25 p. 100 de leurs promesses relatives à l'agriculture? C'est bien le cas.

Même si j'appuie cette mesure législative, je veux que les agriculteurs reconnaissent que c'est une manoeuvre électorale; d'ailleurs, je suis certain qu'ils s'en sont déjà aperçu. Le gouvernement les a laissés pour compte pendant je ne sais combien de temps. Il me semble que le projet de loi a été déposé il y a deux ans. C'est la


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raison pour laquelle il est resté si longtemps sur les tablettes. Les agriculteurs ne s'y tromperont pas.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, la présentation de mon collègue de Végréville a été très instructive. Je suis étonné de voir la quantité d'information qu'il a pu nous communiquer en vingt minutes seulement.

J'ai remarqué que les députés libéraux d'en face étaient captivés. J'espère qu'ils portaient vraiment attention aux propos du député et qu'ils ont profité de sa compétence et de ses connaissances dans ces domaines très importants.

Comme je l'ai indiqué plus tôt, le caucus du Parti réformiste compte de nombreux anciens agriculteurs qui connaissent bien la différence entre un boisseau de blé et une patate.

Je ne suis pas convaincu que les députés d'en face connaissent cette différence ou même qu'ils s'en préoccupent. Ils veulent nous faire croire qu'ils s'inquiètent du sort des agriculteurs de l'Ouest, mais je ne vois aucun projet de loi qui témoigne de leur inquiétude.

Comme mes collègues l'ont dit, nous appuyons ce projet de loi même s'il ne règle pas, tant s'en faut, les véritables problèmes des agriculteurs, surtout les producteurs céréaliers de l'Ouest.

Puisque mon collègue s'est donné tant de mal pour exprimer avec éloquence ses préoccupations au sujet de ce projet de loi et de la situation des producteurs de grains, j'aimerais en entendre plus.

Durant son discours, il a précisé qu'il ne voulait pas présumer des motifs pour lesquels le gouvernement présente ce projet de loi à ce qui pourrait être la dermière minute. Il a parlé des rumeurs qui courent au sujet d'élections prochaines alors qu'elles ne sont pas vraiment nécessaires pour le moment.

Rien n'empêchait le gouvernement de prolonger son programme législatif pour que l'on puisse débattre adéquatement de ce projet de loi, l'améliorer et présenter des amendements. Au lieu de cela, il a attendu à la dernière minute pour étudier à la hâte, juste avant les élections imminentes, ce projet de loi et d'autres.

(1255)

Je demande donc à mon collègue d'expliquer pourquoi, à son avis, le gouvernement est demeuré immobile pendant si longtemps et accélère maintenant le programme législatif pour les quelques jours qui restent.

M. Benoit: Monsieur le Président, je ne vais pas essayer de prêter des intentions, mais d'après la situation et les rumeurs, des élections seront déclenchées dans moins de six mois. Certains parlent même du 27 avril. C'est une date qui a été beaucoup mentionnée, mais je trouve cela tôt et je pense que les Canadiens tiendront rigueur au gouvernement de déclencher des élections six mois avant le début de la quatrième année de son mandat, plus tôt que le minimum acceptable. Les agriculteurs aussi en voudront au gouvernement s'il fait cela.

Je me demande pourquoi le gouvernement présente cela maintenant, pourquoi il fait passer le projet de loi avant beaucoup d'autres mesures qu'il a dit considérer comme importantes. Je suppose que la raison c'est que les Libéraux veulent contrer la réaction négative à leur projet de loi sur le contrôle des armes à feu. C'est véritablement un projet de loi qui impose des sanctions aux propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi et leur rend la vie très difficile. Il passe outre aux principes judiciaires normalement acceptés. Cette mesure crée un registre des armes à feu qui coûtera, selon certains, au moins 500 millions de dollars. C'est de l'argent qui ne sera pas disponible pour la santé ou autres choses réellement importantes pour les Canadiens.

Peut-être que les Libéraux essaient de faire oublier cela à la population. Peut-être qu'ils pensent que les agriculteurs vont oublier ces autres mesures qui leur ont fait un tort considérable, comme celle sur les transports qui a été un échec monumental.

Nous avons demandé des modifications à cette loi sur les transports pour améliorer la situation des agriculteurs. Malheureusement, nous ne les avons pas eues.

Le gouvernement prétend donner une haute priorité à l'agriculture. Il y a deux autres mesures qui touchent les agriculteurs de très près. Il y a le projet de loi C-65 sur les espèces menacées, une mesure qui va vraiment placer les agriculteurs dans une position délicate si le gouvernement en force l'adoption avant les élections. Je parle des agriculteurs, car il est maintenant question d'un projet de loi agricole. N'importe quel utilisateur ou propriétaire de terrain pourrait se voir placé dans une situation difficile par la loi concernant la protection des espèces menacées qui donne au gouvernement le pouvoir d'obliger les utilisateurs et propriétaires de terrains à dépenser de l'argent pour entourer d'une clôture une zone afin de protéger les espèces menacées, sous peine de se voir totalement refuser l'utilisation de leur terrain sans aucun dédommagement. C'est la clé. On n'indemnisera pas les gens à qui on aura interdit l'utilisation de leur terrain. On n'a prévu aucun montant pour aider à financer le coût d'érection d'une clôture sur le terrain.

Cela ne touchera pas que les agriculteurs. Pensez à quelqu'un qui veut établir une entreprise dans un parc industriel où se trouve un habitat pour des espèces menacées. La Loi concernant la protection des espèces menacées peut exiger que ce terrain ne soit jamais exploité. Il pourrait perdre presque toute sa valeur. Est-ce qu'on indemniserait les propriétaires? Pas du tout.

C'est une autre mesure législative que les libéraux veulent peut-être que les agriculteurs oublient. Ou pourrait-il s'agir de la Loi sur la commission canadienne du blé? J'ai fait des sondages dans ma circonscription et on en a effectué un dans la circonscription de Beaver River au sujet de la Commission canadienne du blé. J'ai soumis au comité de l'agriculture les résultats de l'enquête effectuée par Tele Research à partir d'Edmonton. Dans Beaver River,92 p. 100 des agriculteurs voulaient avoir le choix de commercialiser leur grain comme bon leur semble. Ils veulent que la Commission canadienne du blé demeure, mais qu'on lui retire son monopole. Ils souhaitent ce que beaucoup appellent un double système de commercialisation. Ils veulent avoir le choix du mode de commercialisation de leurs produits.


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(1300)

Le projet de loi C-72 ne leur donne pas ce choix. Dans le cadre du plébiscite que le gouvernement a tenu sur la commercialisation de l'orge, il n'y avait même pas de choix à ce sujet sur le bulletin. Ou les agriculteurs commercialisaient leur orge par l'entremise de la commission qui détenait un monopole ou on abolissait la commission. C'était le seul choix qu'on leur offrait.

Le gouvernement essaie peut-être, avec ce projet de loi, de camoufler le projet de loi C-72 qui n'a pas l'appui des agriculteurs. Il ne donnera pas aux agriculteurs un contrôle important sur la Commission canadienne du blé. Il sera plus difficile pour les agriculteurs de modifier la commission et de supprimer le monopole.

On a adopté le projet de loi C-72 envers et contre tous au comité. C'est un projet de loi extrêmement complexe. Il porte sur la Commission canadienne du blé, qui est une organisation très complexe et secrète. Je ne crois pas avoir eu suffisamment de temps pour examiner chaque article dans le cadre de l'étude du projet de loi. J'ai étudié les articles à l'avance et j'étais prêt, mais je ne pense pas qu'on ait donné aux membres du comité le temps voulu pour examiner en profondeur les articles et présenter des arguments. On adopte le projet de loi envers et contre tous. Les agriculteurs n'en veulent pas. Le gouvernement essaie peut-être de camoufler tout cela avec ce projet de loi.

Les agriculteurs ne font pas tout un plat de ce projet de loi. Les paiements anticipés existent depuis de nombreuses années. On ne met en place rien de nouveau, on ne fait que modifier la loi pour veiller à ce que les paiements anticipés ne soient pas éliminés.

Selon moi, nous sommes saisis de ce projet de loi maintenant parce que, selon les rumeurs répandues dans les médias, on va déclencher des élections dans un avenir très rapproché, aux alentours du 27 avril à 13 heures.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur le projet de loi C-34, Loi sur les programmes de commercialisation agricole. Le projet de loi regroupe un certain nombre de programmes, et j'estime que ce regroupement entrepris par le gouvernement est une bonne idée. Cela permettra d'alléger la bureaucratie au ministère de l'Agriculture. Plus expressément, le projet de loi porte sur les paiements anticipés. Je voudrais parler de façon assez détaillée de ce programme et en faire l'historique pour expliquer pourquoi il est nécessaire et comment il a évolué au fil des ans.

Beaucoup d'agriculteurs se prévalent de ce programme. Je l'ai moi-même fait. Il continuera d'être utile aux agriculteurs qui veulent mettre en commun leur production et recourir aux services de la Commission canadienne du blé.

La Commission canadienne du blé n'achemine pas toujours le produit au moment opportun. Elle ne répond pas toujours aux besoins de chacun. Voilà une des raisons pour lesquelles ce programme s'impose. Les agriculteurs s'en prévalent pour ne pas avoir à s'inquiéter de mettre leur grain sur le marché très tôt à l'automne, au moment où ils ont besoin de liquidités. Certains sont très heureux que la commission se charge de la commercialisation pour eux, et un de leurs moyens de gestion des liquidités est le programme des paiements anticipés.

Un certain nombre d'agriculteurs de l'Ouest sont toutefois mécontents de la commission. Ils ont essayé d'autres moyens pour vendre leur production sans passer par la commission. Certains ont des cultures dont la commission ne s'occupe pas. Ils veulent s'affranchir de ce régime. Ils veulent avoir le choix. Ils veulent pouvoir vendre leur grain lorsque cela leur convient le mieux. Ils refusent de se prévaloir du programme de paiements anticipés.

Le président du Comité de l'agriculture était à la Chambre tout à l'heure. Je crois qu'il commentera le projet de loi, à un moment donné. Il s'est rendu à Grand Prairie avec le comité pour discuter du projet de loi C-72. Un des agriculteurs qui faisait partie d'un des groupes de discussion ce matin-là a dit que seulement le tiers de son revenu provenait des récoltes assujetties à la Commission canadienne du blé et que cette proportion diminuait au fil des ans.

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Un de mes voisins, Terry Balisky possède une grande exploitation agricole dans la région. Il est réputé pour ses bonnes méthodes de gestion. Il a dit que, au cours des années, il cesse de produire des récoltes gérées ou contrôlées par la Commission canadienne du blé pour adopter des cultures qu'il peut mieux gérer.

Le président du comité lui a posé une très bonne question: «Vous ne produisez pas de récoltes assujetties à la Commission canadienne du blé. Est-ce parce qu'elles ne se vendent pas bien sur le marché mondial ou s'il y a d'autres raisons à cela?» Terry n'a pas su quoi lui répondre.

Je l'ai interrogé à ce sujet, plus tard, pendant que nous prenions un café, et il a dit: «J'ai réfléchi à cette question et je n'y ai vraiment pas bien répondu. L'important, c'est le choix du moment.» À son avis, la Commission canadienne du blé ne répond pas à ses besoins, car elle achemine les récoltes à un moment inopportun. Il ne s'agit pas uniquement d'une question de liquidités. Ses céréales demeurent parfois pendant plus d'un an dans les cellules de stockage de son exploitation agricole. Il se rend compte qu'il peut gérer son exploitation beaucoup mieux en adoptant des cultures qui ne sont pas assujetties à la Commission canadienne du blé. La commission ne sert pas bien ses intérêts. J'ai entendu d'autres agriculteurs tenir les mêmes propos.

Lorsque le groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest se trouvait à Edmonton, j'ai écouté les agriculteurs présenter des recommandations. Le groupe de consultation s'est déplacé dans tout l'ouest du Canada, sur l'ordre du ministre de l'Agriculture, pour connaître les voeux des agriculteurs au sujet de la commercialisation du grain à l'avenir. J'estime désormais que les agriculteurs veulent du leadership. Nous avions souhaité retrouver cet esprit de leadership dans les recommandations que le groupe de consultation sur la commercialisation du grain a faites au ministre de l'Agriculture. Ce dernier pouurait donner suite aux recommandations, une fois que le groupe aurait entendu des agriculteurs oeuvrant partout dans l'ouest du Canada sur le territoire de commercialisation visé par la Commission canadienne du blé. Après ses consultations, le groupe devait remettre ses recommandations et le ministre devait agir en conséquence.


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J'ai entendu un agriculteur de Prince George-Peace River, en Colombie-Britannique, la circonscription voisine de la mienne. Il s'agit de Gary Scott, qui est un excellent agriculteur de la région. Il a déclaré au groupe de consultation qu'il ne cultive plus de produit assujetti au contrôle de la Commission canadienne du blé. Je vais résumer son témoignage.

Il n'a pas dit que la commission ne faisait pas du travail satisfaisant pour son voisin. De nombreux agriculteurs veulent passer par la Commission canadienne du blé. Il ne disait pas au groupe que la commission n'avait pas sa raison d'être. Quant à lui-il a une exploitation et il fait du bon travail-, la commission ne le sert pas de façon satisfaisante. Les exploitations agricoles sont différentes et elles ont des besoins différents.

Il a dit qu'il pouvait lui arriver d'avoir besoin d'argent pour faire un paiement en octobre et qu'il y avait des limites au montant pouvant être obtenu du programme d'avances de fonds. Il serait peut-être obligé alors de vendre des produits, même à un prix légèrement inférieur, pour pouvoir faire son paiement. Un de ses voisins est en affaires depuis 35 ans et tout est payé chez lui, de sorte que ses besoins sont différents. On voit donc que les besoins des agriculteurs sont différents.

Ce que cet agriculteur voulait dire, c'est qu'il doit y avoir une alternative en matière de commercialisation du grain, une alternative tient compte des besoins différents des agriculteurs. Mon fils, ma famille et moi exploitations 1 500 acres dans la région de Peace River, en Alberta. Compte tenu de ma situation, je serais heureux que la Commission canadienne du blé vende mon produit, mais mon fils de 30 ans s'y oppose. Il veut être libre de vendre sa récolte lui-même. Il est diplômé de l'université et s'y connaît un peu en marketing. Je ne vois rien de mal dans la position qu'il défend. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond si on l'interdit. Nous vivons dans un pays libre et nous devrions tout simplement avoir le choix.

En fait, nous avons probablement un choix dans 97 p. 100 de l'économie. Au Canada, le PIB dépasse les 750 milliards de dollars. Dans quelle mesure est-il en situation de monopole? Dans une bien faible mesure.

Dans les domaines où il y a des monopoles, par exemple les services publics, où il n'y a pas de concurrence, les gouvernements ont vu à mettre en place des régies des services publics. Le public a des recours pour obtenir des mesures de redressement. Cela n'existe pas dans la commercialisation du blé et de l'orge destinés à l'exportation.

(1310)

Tout comme mes voisins qui utilisent de moins en moins les services de la commission, mon fils et moi sommes loin de confier toute notre production à la commission. Nous cultivons le canola, qui est une production importante. Dans l'Ouest, le canola dispute même la première place au blé pour le volume des ventes annuelles. Nous cultivons aussi la fétuque, pour produire des semences de gazon. Nous produisons du seigle de temps à autre. Nous cultivons aussi des pois et du trèfle. Les agriculteurs de l'Ouest cultivent de très nombreux produits qui ne sont pas commercialisés par la Commission canadienne du blé. J'ai pourtant l'impression que nous nous débrouillons pas mal. Je suis heureux que nous ayons ce choix et je suis d'avis que les agriculteurs qui veulent aussi commercialiser du blé et de l'orge devraient pouvoir le faire.

Pour en revenir à ce qui s'est passé dans l'ouest du Canada, nous devons remonter un peu plus loin, jusqu'à l'Uruguay Round du GATT. Cette série de négociations a mis huit ou neuf ans pour aboutir, en 1992. L'une de ses conséquences est que, pour la première fois, l'agriculture a été assujettie aux règles commerciales.

Nous avons des règles sur le commerce des marchandises et produits industriels depuis longtemps. Après la Seconde Guerre mondiale, le Canada a travaillé à l'établissement de ces règles dans le cadre de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. C'était dans notre intérêt. Après tout, 40 p. 100 de notre PIB a été attribuable aux exportations l'an dernier. Et la progression continue. Le Canada est un pays commerçant, et il nous faut des règles pour encadrer le commerce.

Je me suis réjoui lorsque les négociations d'Uruguay du GATT ont fini par aboutir à une entente et que l'agriculture a été soumise à des règles commerciales pour la première fois. Une guerre commerciale intense faisait rage à l'époque dans le domaine agricole et avait des effets dévastateurs pour le Canada.

Je crois que nos producteurs agricoles peuvent rivaliser avec ceux de n'importe quel autre dans le monde ou même les surpasser au plan de la production, mais je sais fort bien que nous ne pouvons pas rivaliser avec leurs trésoreries, spécialement celles des pays membres de l'Union européenne et celle des États-Unis. Nos gouvernements ont déployé à l'époque de vaillants efforts, très nécessaires et très appréciés, pour soutenir les agriculteurs, mais, comme nous le savons, la solution à long terme consistait plutôt à réduire graduellement cette guerre commerciale et à appliquer certaines règles dans le domaine agricole.

Après la conclusion de l'accord du GATT, l'agriculture a donc été soumise à des règles commerciales. Comme il s'agissait de la première étape dans ce processus, nous n'avons pas été en mesure d'accomplir tout ce que nous voulions faire. Il s'agissait cependant d'un pas dans la bonne direction. Le Canada a cessé de fermer ses frontières aux produits des secteurs assujettis à la gestion de l'offre pour imposer plutôt des droits tarifaires. Dans d'autres secteurs de l'agriculture, nous avons été priés de réduire graduellement les subventions et les droits tarifaires sur une période déterminée et selon un taux déterminé, au même rythme que tous les autres pays signataires de l'accord du GATT.

Cela a donc donné lieu à une diminution graduelle des droits tarifaires et des subventions à l'échelle mondiale, et je m'en réjouis. Presque immédiatement après l'entrée en vigueur des règles commerciales au sein du GATT, la guerre commerciale qui faisait rage en agriculture a pris fin. Les États-Unis n'appliquent à toutes fins pratiques plus leur programme de subventions aux exportations. Le Canada, quant à lui, a procédé plus vite que n'importe quel autre pays. Nous avons mis fin au programme RARB. Nous avons supprimé les subventions au transport, c'est-à-dire le tarif du Nid-de-Corbeau. Nous avons été le bon élève dans la classe du GATT. Nous


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avons réduit l'intervention de l'État plus rapidement que n'importe quel autre pays.

Cela ne me pose pas de problème, même s'il se trouve, j'imagine, des gens pour dire que nous aurions dû réduire nos activités au même rythme que les autres États membres.

Nous avions déjà tiré des avantages du vieil accord de libre-échange avec les États-Unis, dans le secteur de l'élevage du boeuf. Nous profitons depuis dix ans, soit depuis la ratification de l'accord de libre-échange avec les États-Unis, d'un marché continental et d'un prix nord-américain. Nos exportations de boeuf ont augmenté de plus de 50 p. 100. Voilà un exemple parfait d'une industrie axée sur le marché. D'ailleurs, les éleveurs de bovins de boucherie de l'ouest du Canada nous disent: «De grâce, ne nous donnez pas de subventions. Ne mettez sur pied aucun programme qui pourrait attirer l'attention des Américains et leur faire dire que notre industrie est subventionnée, ce qui leur donnerait des raisons pour ne pas faire affaire avec nous.»

(1315 )

L'application de règles commerciales en matière d'agriculture a grandement amélioré la situation, mais, en 1992, j'ai critiqué le gouvernement conservateur alors au pouvoir pour sa position concernant la gestion de l'offre. Le gouvernement a défendu l'article XI concernant la gestion de l'offre, soit la fermeture à la frontière. Il ne voulait pas entendre parler de remplacer le système en place par des droits tarifaires.

Le gouvernement libéral, élu en 1993, a poursuivi dans la même voie et s'est retrouvé isolé à la table des négociations du GATT, à Genève, avec l'appui du Japon et de la Corée. Je crois que tout cela était intentionnel. Le gouvernement s'est rendu là-bas pour affirmer qu'il n'allait pas céder et qu'il allait continuer de préconiser la fermeture à la frontière. Or, il savait fort bien qu'il ne pouvait pas gagner sur ce point. Cela contribuait à accroître sa popularité au Canada, mais il savait qu'on allait lui imposer des droits de douane, et c'est exactement ce qui s'est produit.

La situation se répète de nos jours, et cela me donne à réfléchir au leadership. Nous avons un plan d'action pour la deuxième phase des pourparlers sur l'agriculture que tiendra l'Organisation mondiale du commerce en 1999. Il y a un plan d'action. Le gouvernement canadien utilisera les mêmes tactiques cette fois-ci. Il sait qu'il y aura une réduction massive des droits tarifaires imposés dans le cadre du régime de gestion de l'offre. Il sait que les entreprises commerciales d'État, comme la Commission canadienne du blé, feront l'objet d'une révision, car cela figure à l'ordre du jour non seulement du Canada, mais aussi d'un certain nombre d'États membres, dont les États-Unis. Ces questions seront soulevées au cours des pourparlers.

Cela m'ennuie que le gouvernement fédéral joue à prétendre qu'il n'y aura pas du tout de changement alors qu'il sait que les sociétés commerciales d'État, comme la Commission canadienne du blé, vont probablement pâtir, parce qu'il n'y a pas de concurrence et parce que c'est un monopole, de devoir faire preuve de transparence. C'est le prix à payer pour l'absence de concurrence.

On dit que Cargill aux États-Unis ou Cargill au Canada n'ont pas à montrer leurs livres. C'est vrai, mais ces sociétés ont des concurrents. Nous n'avons pas à traiter avec Cargill. Nous pouvons traiter avec plusieurs sociétés céréalières. La Commission canadienne du blé a un système très fermé et, très franchement, je ne crois pas qu'elle survivra à la transparence.

Il faudait adopter une attitude proactive, faire preuve de leadership et permettre aux 10 p. 100 d'agriculteurs qui le désirent de commercialiser leur grain sans passer par la commission. Quel mal y a-t-il à cela?

Dans une lettre qui a été publiée dans le dernier numéro de la revue Maclean's, un agriculteur de l'Ouest dit essentiellement la même chose. Il s'agit de Ken Motiuk, de Mundare, en Alberta. Sa lettre figure à la rubrique réservée aux lecteurs, sous la mention: «The Road Ahead» .Voici ce qu'il écrit:

Les agriculteurs de l'ouest du Canada se préparent à de nouvelles semailles.
Les agriculteurs luttent chaque année contre les éléments. Ils possèdent et utilisent des instruments aratoires modernes qui valent des centaines de milliers de dollars. Ils ont adopté de nouvelles techniques. Ils gèrent des liquidités qui approchent les millions de dollars par année pour les plus grandes exploitations. Mais on ne les juge pas assez intelligents pour commercialiser eux-mêmes leur blé et leur orge.
Les agriculteurs doivent céder cette responsabilité aux bureaucrates de la Commission canadienne du blé, à Winnipeg-des employés fédéraux qui n'ont aucun investissement dans l'affaire, des gens qui n'ont jamais eu à faire marcher une entreprise, des gens qui ne gèrent pas leur propre régime de retraite parce que le gouvernement fait même cela pour eux. Dans leur infinie sagesse, nos maîtres politiques, à Ottawa, estiment que ces gens sont plus compétents que nous lorsqu'il s'agit de vendre notre blé et notre orge. Si le prix est meilleur de l'autre côté de la frontière, nous ne pouvons pas en profiter. Nous ne pouvons que fantasmer, comme un adolescent qu'une revue défendue fait rêver. Seuls les heureux élus, à Winnipeg, ont le droit d'accéder à ce marché pour nous- après toutes les déductions qui s'imposent, bien sûr.
Et il ne faut surtout pas aller porter soi-même son grain de l'autre côté de la frontière, car Ottawa n'épargnera alors ni argent ni efforts pour vous traquer et veiller à ce que justice soit faite. Si l'on ose vendre son grain de l'autre côté de la frontière, on risque de se faire réveiller aux petites heures du matin par des agents chargés d'exécuter la loi qui vont effrayer votre femme et vos enfants, saisir vos biens, vous mettre menottes et entraves et vous jeter en prison. Voilà la justice. Car vous avez enfreint la loi.
L'auteur de la lettre ajoute ceci:

Mon grand-père a quitté l'Ukraine parce que les soldats du tsar jetaient en prison les paysans qui cachaient du blé.
N'est-ce pas analogue avec ce dont nous parlons ici? L'auteur de la lettre dit ceci:

Cent ans plus tard, au Canada, on sévit contre ceux qui ne remettent pas leur blé au gouvernement pour que ce dernier le vende.
Comprenez-moi bien. Ce pays est extraordinaire, et nous l'avons choisi pour y élever notre famille et pour y exploiter notre entreprise, mais si nous ne dénonçons pas la situation, les bureaucrates d'Ottawa et de Winnipeg qui ont l'ego gonflé à bloc continueront de nous priver de nos droits et libertés.
(1320)

C'est une déclaration assez puissante. Le débat qui a lieu dans l'ouest du Canada porte sur la liberté de choix. Le ministre de l'Agriculture n'a pas bien défini le débat actuel. Selon lui, il y a ceux qui veulent détruire la Commission canadienne du blé et ceux qui souhaitent son maintien. C'est de la foutaise.


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Les gens avec lesquels je me suis entretenu dans ma circonscription, ceux qui ont comparu devant le comité aux audiences sur le projet de loi C-72 qu'il a tenues un peu partout au Canada, ne souhaitent pas la destruction de la commission. Ce qu'ils veulent, c'est que ceux qui souhaitent commercialiser leur blé par l'entremise de la commission, qui veulent mettre en commun leur produit et obtenir un prix moyen puissent leur faire, mais sans qu'on les oblige, eux, à subir le même sort, contre leur gré. Je rappelle aux députés que l'économie canadienne atteint 750 milliards de dollars. Notre économie s'appuie généralement sur le principe du marché libre. Qu'est-ce qu'il y a donc de mal à cela?

J'entends les députés libéraux nous expliquer ce qui est bon pour nous, les agriculteurs de l'ouest du Canada. Mes collègues, les députés de Lisgar-Marquette et de Végréville, dirigent, comme moi, des exploitations agricoles. Je suis dans la zone visée par la Commission canadienne du blé. Je pense qu'il faut maintenir la commission pour ceux qui veulent s'en prévaloir, sans prétendre qu'il est impossible de laisser le choix aux agriculteurs qui souhaitent l'avoir.

Les députés libéraux ne savent pas de quoi ils parlent. Il n'y a qu'un seul député de ce côté-là qui a une certaine crédibilité en la matière. La plupart d'entre eux sont des avocats, des exploitants assujettis à la gestion de l'offre; il y a aussi un député qui cultive la pomme de terre à l'Île-du-Prince-Édouard et qui n'a jamais été assujetti aux règles de la Commission canadienne du blé. Les députés d'en face n'ont aucune crédibilité dans ce dossier.

Les agriculteurs veulent du leadership. Ils veulent une approche proactive. Ils veulent pouvoir bien fonctionner et participer à l'économie de notre pays, à l'aube du XXIe siècle. Ils reconnaissent les aspects agricoles qui, en vertu des règles commerciales actuelles, sont bons pour le Canada. Ils reconnaissent aussi qu'il y aura d'autres réformes de l'Organisation mondiale du commerce dans le domaine agricole. Nous pourrions bénéficier de cela. Nous n'avons pas à craindre les changements qui surviennent.

Le président suppléant (M. Milliken): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Milliken): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée.)

* * *

LOI SUR LA MÉDIATION EN MATIÈRE D'ENDETTEMENT AGRICOLE

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-38, Loi visant à faciliter la médiation entre les agriculteurs et leurs créanciers, modifiant la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, dont le comité a fait rapport, avec des propositions d'amendement.

L'hon. Ron Irwin (au nom du ministre de l'Agriculture et de l'agroalimentaire, Lib.) propose: Que le projet de loi modifié soit agrée et lu pour la deuxième fois.

Le président suppléant (M. Milliken): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

(1325)

Le président suppléant (M. Milliken): Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec la permission, maintenant?

Des voix: D'accord.

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je présente le projet de loi C-38, Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, à l'étape de la troisième lecture.

Ce projet de loi remplacera les bureaux d'examen de l'endettement agricole par un service de médiation nouveau et renforcé. Il maintiendra les principales dispositions de l'ancienne loi, y compris le sursis des procédures et l'examen du processus de médiation. Il sera mis en oeuvre en même temps que le nouveau service de consultation en matière d'endettement agricole auquel il sera lié.

La loi reflète les points de vue des agriculteurs, des créanciers et des gouvernements provinciaux d'un bout à l'autre du pays. Nous avons tenu de nombreuses consultations avec ces trois éléments. Il a fallu 18 mois de consultations auprès des intéressés pour élaborer le projet de loi. Les institutions prêteuses, les bureaux d'examen de l'endettement agricole, des membres de groupes d'experts, des spécialistes financiers, des représentants des gouvernements provinciaux et de la Fédération canadienne de l'agriculture ont tous participé au processus de consultation.

Je voudrais faire ressortir qu'il s'agit là d'un parfait exemple montrant que le gouvernement remplit ses promesses en faisant davantage appel aux députés et aux comités parlementaires pour rédiger les projets de loi.

Des députés de tous les partis de même que de nombreux témoins informés et expérimentés provenant tant du gouvernement que de l'extérieur ont participé aux délibérations du comité permanent. Nous avons donc devant nous une mesure législative qui remplacera la Loi sur l'examen de l'endettement agricole en mettant en place un nouveau système de médiation simplifié pour les agriculteurs insolvables. Ce système aura tous les avantages de l'ancien et plusieurs autres. La nouvelle loi réduira les chevauchements, rationalisera l'administration des services de médiation et de consulta-


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tion financière et mettra en place un éventail plus large de services consultatifs.

Le projet de loi reconnaît que les agriculteurs et les créanciers apprécient le processus actuel de médiation, qui vise à trouver des solutions à l'endettement des agriculteurs. Cependant, ils réclament un système plus souple, plus efficace et moins lourd qui soit adapté à ce que vivent les agriculteurs. Ce système aidera les créanciers. Il aidera les gouvernements provinciaux à s'occuper des problèmes financiers en ayant une image globale du problème de l'endettement agricole. Nous recherchons des mécanismes utiles tant aux agriculteurs qu'aux créanciers.

Comme l'ont recommandé les organisations de producteurs, la nouvelle loi contiendra un mécanisme d'appel qui n'existait pas dans l'ancienne loi. Les agriculteurs et les créanciers auront donc accès à un mécanisme impartial d'examen des décisions relatives à la suspension des procédures. Nous aurons une loi qui permettra aux agriculteurs de retenir les services de conseillers financiers pour la préparation de plans de redressement.

La nouvelle loi sur la médiation en matière de dette agricole et le service de consultation complémentaire seront financés par le programme d'adaptation et de développement rural. Ce financement aidera les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire à être plus efficients, plus autonomes et plus concurrentiels.

J'insiste sur le fait que le nouveau service de consultation qui sera fourni aux agriculteurs en difficulté financière sera aussi étendu et peut-être même plus que tout autre service de consultation jamais prévu dans une loi jusqu'à maintenant.

(1330)

Le nouveau service sera plus proactif. Il aidera les agriculteurs à trouver les conseillers dont ils ont besoin et il leur offrira l'accès direct à un conseiller assez tôt au cours du processus, avant que les difficultés deviennent graves. Il fournira des services d'évaluation non agricoles et des analyses de dossier aux agriculteurs aux prises avec des difficultés graves, ce qui inclut l'élaboration de plans opérationnels de trois ans. Cela en aidera certainement beaucoup à redresser leur situation. Essentiellement, les services prévus sont plus étendus que ceux de l'article 16 de la loi.

Il y a dix ans, la Loi sur l'examen de l'endettement agricole est venue apporter une solution aux graves problèmes d'endettement des agriculteurs en établissant un bureau d'examen de l'endettement agricole dans chaque province. Leur mission était d'aider les agriculteurs et leurs créanciers à conclure des arrangements financiers satisfaisants pour les deux parties.

Il y a actuellement quelque 32 membres de bureaux d'examen nommés par décret à la discrétion du ministre. Ces personnes nommées par décret participent aux réunions entre les agriculteurs et les créanciers et facilitent les discussions conduisant à la conclusion d'un arrangement. Aux termes de la nouvelle Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, il n'y aura plus de nominations par décret. Les personnes ayant une expertise spécifique dans le domaine de la médiation et de l'expérience dans les domaines de l'agriculture et des finances pourront présenter une demande pour se faire inscrire sur une liste d'offres à commandes pour la prestation de services de médiation en vertu de la loi.

La loi existante exige aussi que trois personnes, soit un médiateur et deux experts, soient présentes à chaque réunion entre les agriculteurs et les créanciers, qu'on ait besoin d'elles ou non. Cela occasionne souvent des dépenses inutiles en indemnités journalières et en frais de voyage et d'hébergement. La nouvelle loi n'impose pas cette exigence, permettant que des experts soient invités à participer aux réunions seulement lorsque les circonstances l'exigent.

Je suis heureux que nous soyons arrivés à cette étape de l'étude du projet de loi C-38, qui a bénéficié de l'apport précieux de beaucoup d'organisations et de particuliers. Je suis heureux que, ensemble, nous ayons réussi à façonner une loi qui préserve les éléments les plus utiles de l'ancien régime tout en créant une approche novatrice pour l'avenir.

Je sais que le service plus efficace et plus amical que nous fournissons aujourd'hui sera accueilli favorablement par bien des gens. Il aidera les agriculteurs à améliorer leur situation financière et favorisera la croissance et la prospérité du secteur agricole et agroalimentaire canadien.

Ce projet de loi est très avantageux pour les agriculteurs canadiens, et j'espère que tous les députés l'appuieront.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens sur le projet de loi C-38 immédiatement après le secrétaire parlementaire.

Cette loi vise à faciliter, comme on l'a si bien dit tout à l'heure, la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers, modifiant ainsi la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur l'examen de l'endettement agricole.

Le ministre de l'Agriculture, avant de préparer le projet de loi C-38, aurait dû s'interroger sur une prémisse, à savoir comment il se fait que de nombreux agriculteurs éprouvent de sérieuses difficultés financières. Comment cela se fait-il? Des agriculteurs peuvent éprouver des situations difficiles s'il arrive un divorce ou une séparation. Cela peut causer des problèmes financiers, comme lorsqu'il est question de maladie, par exemple. L'agriculture, aujourd'hui, est très loin du fameux téléroman, qui est repris présentement sur les ondes de la SRC, Le Temps d'une paix.

(1335)

Les agriculteurs, aujourd'hui, doivent être de bons administrateurs, puisqu'ils gèrent de petites industries. Souvent, la mise de fonds approche ou dépasse le million de dollars. Mais est-ce que ne serait pas aussi une raison reliée directement au gouvernement fédéral, avec son manque de clairvoyance, face à l'agriculture canadienne, et québécoise par incidence?

Lorsque nous regardons ce gouvernement, depuis bientôt quatre ans, administrer à l'aveuglette les dossiers de l'agriculture, il n'est pas étonnant de constater que des centaines et des centaines d'agriculteurs éprouvent des difficultés chaque année et doivent déclarer faillite.


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Juste avant d'intervenir, je regardais les annonces classées du journal le plus lu au Canada français, au Québec, La Terre de chez nous, et lorsqu'on voit, au mois d'avril, de pleines pages d'annonces d'encans, de liquidations, c'est qu'il y a un malaise. Le malaise n'est pas uniquement dû à la mauvaise gestion des agriculteurs, à des problèmes de couple, ou encore à de la maladie à l'intérieur de la famille, mais il est dû aux conditions exécrables que le gouvernement impose, mois après mois, en en ajoutant chaque mois, à la classe agricole.

Je prends par exemple le cas de nos agriculteurs, à l'exception bien sûr des agriculteurs qui oeuvrent dans un secteur où la gestion de l'offre est incluse, comme les producteurs laitiers, de volaille et d'oeufs qui sont, heureusement pour eux, à l'abri, enfin «à l'abri»-et je reviendrai tout à l'heure sur les producteurs laitiers-de la fluctuation des prix.

Prenons l'exemple des veaux d'embouche. Il y a trois ans, on pouvait espérer obtenir 1,15 $, 1,20 $ la livre, à l'automne, pour les veaux de lait. Il y a un an, sept mois plus précisément, l'automne dernier, on pouvait se procurer de très beaux veaux à 50 p. 100 de leur valeur d'il y a deux ans. Le producteur agricole qui souhaitait recevoir 700 $ pour son veau recevait 350 $ ou 360 $. Ce ne sont plus des baisses de 2 ou 3 p. 100, ce sont des baisses de 50 p. 100.

Vous me rétorquerez qu'il doit avoir l'assurance-stabilisation vaches-veaux. Oui, vous avez raison, mais une assurance, vous savez ce que c'est: plus on utilise notre assurance, plus les primes augmentent. Comme le gouvernement s'apprête à sabrer également dans la péréquation dans le système d'assurance-stabilisation pour les agriculteurs, il est à prévoir, là aussi, une augmentation importante des primes, d'une part, et également une diminution des services.

On peut parler du sirop d'érable. Cette année, la récolte semble inférieure, et de beaucoup, en qualité et en quantité à ce qu'elle était l'année dernière. Donc, les prix vont augmenter légèrement, mais l'acériculteur ne recevra pas un salaire équitable. Les porcs, ça va bien; la vache de réforme, c'est complètement à terre. Pour le bois d'oeuvre, avec l'entente que le gouvernement fédéral a négociée avec nos voisins américains, lorsqu'on aura atteint le quota d'exportation, on y goûtera là aussi.

La Commission canadienne du blé, qu'un de mes collègues réformistes a ramenée sur le tapis tout à l'heure avec le projet de loi C-72, qui exerce un monopole, bien sûr, essaie d'obtenir les meilleurs prix, sauf que l'agriculteur, le céréalier de l'Ouest n'est pas libre de vendre directement à ses voisins d'outre-frontières à des prix bien souvent supérieurs à ce qu'il pourrait obtenir de la Commission canadienne du blé.

(1340)

Donc, à l'exception des producteurs qui jouent à l'intérieur d'un système de gestion de l'offre, pour les producteurs de lait, de volailles et d'oeufs, c'est l'incertitude quant à la fluctuation des prix.

Cela m'amène à me demander si ce gouvernement saura mettre ses culottes pour défendre la gestion de l'offre devant l'OMC, puisque la représentante américaine au Commerce extérieur a juré qu'elle ne laisserait pas lettre morte les tarifs imposés dans le cadre d'une négociation acceptée en décembre 1993 par le GATT, qui est devenu par la suite l'OMC, et qu'elle se battrait jusqu'à la mort s'il le faut pour avoir gain de cause. Les États-Unis semblent décider de porter ce litige devant un panel de l'OMC.

J'ai questionné le ministre de l'Agriculture à savoir s'il mettrait autant de vigueur et d'ardeur à défendre nos tarifs. On verra si ce gouvernement saura nous défendre. Évidemment, il ne reste que quelques jours de séance en cette Chambre. On sera appelés à se faire reconfirmer dans chacun de nos comtés. Alors, on ne sait pas qui sera en position de nous défendre. Est-ce qu'on aura un gouvernement minoritaire? Est-ce qu'on aura un gouvernement majoritaire? Toutes les hypothèses sont sur la table quant à qui formera le prochain gouvernement.

Cela nous amène également à examiner le rôle que pourrait jouer la Société du crédit agricole. J'espère que, lorsque la Société du crédit agricole évalue un agriculteur sur sa solvabilité et qu'elle accorde un prêt de l'ordre de 300 000 $ ou 400 000 $, elle est assez sérieuse pour faire une évaluation très complète. Si le risque est trop grand, ce serait honnête, de la part des représentants de la Société du crédit agricole, d'octroyer le prêt, de le consolider ou de le refuser tout simplement.

Donc, les agriculteurs sont comparables, à certains égards, à un travailleur spécialisé ou encore à un industriel, à l'exception qu'ils ne doivent pas s'attendre à travailler seulement 40 heures par semaine et cinq jours par semaine. Pour le producteur laitier, il faut traire les vaches deux fois par jour et sept jours par semaine. S'il quitte le vendredi soir, il n'y aura pas de voleur d'ouvrage sur sa ferme; il doit obligatoirement se faire remplacer ou encore échanger du temps avec un voisin, qu'il lui faudra remettre, puisqu'il n'y a pas, comme je vous l'ai signalé tout à l'heure, de voleur d'ouvrage.

Alors, l'agriculteur doit travailler sept jours par semaine et bien souvent, 60 à 70 heures par semaine. Malheureusement, son revenu, dans bien des cas, est inférieur à un ouvrier spécialisé qui, lui, se contentera de 40 heures par semaine réparties sur cinq jours et même, dans bien des cas, un peu moins de 40 heures réparties sur quatre jours. Donc, l'agriculteur consacre beaucoup de temps à la ferme, bien souvent avec sa conjointe et ses enfants, pour arriver à joindre les deux bouts.

Récemment, ce gouvernement a fait des coupures et la classe agricole a été frappée de plein fouet. Si je prends l'exemple d'un producteur laitier qui produit du lait de transformation, classe industrielle, le gouvernement, pour les trois années à venir et les deux dernières, a trouvé le truc de baisser son revenu de 5,5 p. 100 en moyenne. Ensuite, le gouvernement se demande pourquoi des producteurs laitiers doivent abandonner leur ferme ou encore déclarer faillite.

(1345)

On baisse leur salaire et ensuite, on leur dit: «Vous êtes des mauvais gestionnaires.» Vous savez comme moi que pour le producteur laitier, ce n'est pas la première vache de l'étable qui est payante mais bien la dernière qui est à tout profit. Le coût de l'électricité est le même, sauf que ça coûte un peu plus cher de moulée et de foin bien sûr, mais le lait qu'elle donnera sera à tout profit.

Le Bloc québécois de même que le Parti réformiste se sont opposés avec beaucoup de vigueur, mais ce gouvernement, même avec les députés qui oeuvrent dans le domaine laitier, comme le député de la circonscription de Malpèque à l'Île-du-Prince--


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Édouard, a voté en faveur de la coupure au subside laitier. C'est un vrai scandale.

Pourtant, dans quelques semaines, il va se promener dans sa belle circonscription de Malpèque, et il oubliera. Il va jouer au Pinocchio lui aussi, comme le disait si bien André Pratte, en cachant ou encore en falsifiant le fait qu'il a voté contre les producteurs laitiers de son comté pour abaisser à zéro le subside qui était de 5,43 $ l'hectolitre de lait, ce qui représente 5,5c. le litre. Cinq cents et demi le litre, cela représente, pour une ferme moyenne, comme c'est exactement le cas pour mon collègue de Malpèque, une perte de 7 500 $.

Il n'est pas étonnant de voir des producteurs laitiers qui, sans nécessairement déclarer faillite, annonceront une vente par encan le samedi telle date et à telle heure afin de tout liquider. On prend une retraite avant d'être obligé de la prendre. Le pire, c'est que les producteurs laitiers, on les retrouve à 48 p. 100 sur le sol québécois. Donc, ce gouvernement, comme c'est son habitude, frappe d'abord et avant tout sur le Québec et cela impose à nos producteurs laitiers une diminution de 108 millions de dollars par ce subside. Donc, c'est encore une fois le Québec qui en paie le gros prix.

Le pire, je le rappelle, c'est que si les cultivateurs laitiers souhaitent obtenir le même revenu pour leur lait, on devra augmenter, et c'est la Commission canadienne du lait qui décidera cela, le prix du lait de transformation. On n'a pas besoin d'avoir un cours de droit pour savoir que si on augmente le prix du lait de transformation, de ce fait, on augmentera le prix du beurre, du fromage et de tous les dérivés de transformation.

Selon une étude commandée par les producteurs laitiers du Canada, chaque fois qu'on augmente le prix du beurre de 10 p. 100, cela entraîne une baisse de la consommation de 7 p. 100. Quand je vous disais, monsieur le Président, que c'était la dernière vache qui était payante, vous avez opiné pour approuver mes allégations. Alors, si on doit maintenant baisser la consommation de 7 p. 100 ou de 14 p. 100, il ne sera pas possible d'en garder une de plus, mais possiblement deux ou trois de moins. Ce sont de telles situations qui entraînent des difficultés financières désagréables pour la classe agricole.

Lorsque vous augmentez le prix du fromage de 10 p. 100, la consommation baisse de 4 p. 100, selon la même étude, ce qui entraîne, encore une fois, une diminution du nombre de vaches du troupeau. Le pire, lorsqu'on prend le budget global d'Agriculture Canada, le pourcentage qu'il investit au Canada, c'est qu'au Québec, cet investissement n'était que de 9 p. 100 l'année dernière. Et lorsqu'on est chanceux, ce chiffre s'élève à 16 p. 100.

Le Québec, à lui seul, génère une activité agricole de l'ordre de 17 p. 100 directement. Lorsqu'on ajoute à cette activité agricole les usines de transformation-le fromage, le beurre, le jambon, etc.-cette activité agricole grimpe à 24 p. 100. On paie facilement 24 p. 100 des impôts fédéraux, soit 30 milliards de dollars globalement. On en retourne, sur le sol québécois, à peine 9 ou 10 p. 100, année après année. C'est scandaleux.

(1350)

Au cours de la prochaine campagne électorale, je vous attends, mes amis libéraux, lorsque vous allez venir dans le comté de Frontenac affirmer, comme le président du Conseil du Trésor l'a fait lors du référendum, que le Québec paie 30 milliards de dollars mais qu'il en reçoit 31 ou 32 milliards. Pourquoi tenez-vous tant à nous garder dans votre fédération canadienne si ça vous coûte si cher de nous garder?

Non, monsieur le Président. Dans les faits, on regarde qui, dans ce pays, a eu la première bouffée d'air frais. Rappelez-vous qu'en 1841, lorsqu'on a fusionné le Bas et le Haut-Canada-le Haut-Canada étant ce qu'on appelle l'Ontario aujourd'hui, et le Bas-Canada, le Québec-on a additionné les deux dettes. La dette du Haut-Canada était de 1,195 million de livres, alors que le Bas-Canada n'avait qu'à peine 200 000 livres. Qu'a-t-on fait avec la dette? On a dit A plus B, on vit ensemble, donc, on la paie ensemble; bingo! Payez, mes petits Canadiens français. À l'époque, on les appelait des Canadiens et de l'autre côté, on les appelait des Anglais. Ce fut cela, les débuts de la colonie.

Lorsque ce gouvernement a aboli, il y a deux ans, la LTGO, la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, cela coûtait, bon an mal an-oui, regardez-moi bien dans les yeux, monsieur le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture-il en coûtait à ce gouvernement 860 millions de dollars par année, bon an mal an. Qu'est-ce que vous avez fait pour dorer votre pilule dans l'Ouest, pour faire accepter cette coupure aux agriculteurs de l'Ouest? Vous avez donné aux agriculteurs 1,6 milliard de dollars. Pire encore, vous avez donné cet argent-là au noir. Les agriculteurs n'étaient pas tenus de le déclarer dans leurs revenus d'impôts. C'est de l'argent en-dessous de la table. C'est scandaleux.

Vous avez constitué un fonds de 300 millions de dollars pour les mesures d'adaptation, l'amélioration de routes, la construction de silos, l'amélioration et la construction de nouvelles lignes de chemins de fer. On a pris un milliard de dollars qui ont été destinés à un fonds qui pourrait servir de garantie de prêt à certains pays pour acheter des céréales au Canada. Additionnez tout cela, cela fait 2,9 milliards de dollars. Où est l'équité? Pour les producteurs céréaliers de l'Ouest, il s'agit de 2,9 milliards de dollars pour économiser 860 millions de dollars. Lorsqu'on a coupé l'aide aux producteurs laitiers d'une somme de 228 millions de dollars, que leur a-t-on donné en compensation? Zéro.

Monsieur le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture, 48 p. 100 du lait est produit en sol québécois. C'est ça, votre équité. Vous viendrez débattre avec moi dans le comté de Frontenac, et on en parlera.

Le Président: Mon cher collègue, il faut toujours se souvenir qu'il faut s'adresser à la Présidence, et ainsi, tout va se régler.

M. Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, vous avez entièrement raison. J'étais dans le feu de l'action. J'invite, par votre entremise-en même temps, il pourra prendre un bain de francophones-le secrétaire parlementaire à venir débattre de l'équité de son gouvernement dans la circonscription de Frontenac.

En terminant, puisque qu'il est 13 h 55 et que vous occupez le fauteuil pour la période des questions orales, en ce qui concerne le projet de loi C-38, le Bloc québécois donne son aval et votera en faveur. Évidemment, j'espère que nos producteurs agricoles n'auront jamais à se servir du projet de loi C-38. Il serait préférable que nos producteurs agricoles reçoivent un revenu décent, quoique je

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comprenne très bien qu'il peut arriver qu'un mauvais gestionnaire puisse avoir des problèmes à rentabiliser et à rembourser son prêt.

Là où j'en ai, monsieur le Président, et j'aimerais que vous le transmettiez au secrétaire parlementaire, c'est en ce qui concerne les fameuses nominations, nos médiateurs. Quand je regarde dans mon comté, qui a été nommé, par exemple, au comité d'arbitrage à l'assurance-emploi? Nathalie. Qui sera candidate du Parti libéral? Manon. Alors voyez-vous, tout se tient. Dans nos petites municipalités, tout le monde se connaît. Ce sont des promotions et des nominations dites partisanes. Quelle ne fut pas ma surprise, cette semaine, lorsque j'ai demandé à un témoin quel était le salaire des cinq commissaires à la Commission canadienne du blé-et mes collègues et amis du Parti réformiste ont été aussi surpris que moi-d'apprendre que leur salaire varie de 114 000 $ à 144 000 $ par année.

On nomme parfois des députés à ces commissions pour libérer des comtés, afin de pouvoir présenter des personnes qui vont occuper des postes de ministre, comme on l'a fait au Québec, lors d'une élection partielle, alors que deux personnages sont devenus, un, ministre du Développement des ressources humaines, et l'autre, ministre des Affaires intergouvernementales. Semble-t-il qu'on s'apprête, pour le comté de Beauce, à le libérer pour espérer faire passer le candidat du parti ministériel.

Mais qui paie en bout de course? Toujours les mêmes, les contribuables. Monsieur le Président, je collabore avec vous en terminant mon discours et en réaffirmant que, pour le bien de nos agriculteurs, nous allons appuyer le projet de loi C-38.

Le Président: Puisqu'il est maintenant presque 14 heures, nous allons reprendre le débat après la période des questions orales. Maintenant, nous allons passer aux déclarations de députés.

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9876

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA JUSTICE

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, le mois dernier j'ai déposé à la Chambre le projet de loi C-391, qui vise à accroître la peine maximale prévue par le Code criminel dans les cas d'infraction d'ordre sexuel impliquant des enfants. L'auteur d'un tel délit serait passible d'une peine d'emprisonnement à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.

Il est peu probable que ce projet de loi soit adopté avant la fin de la session, mais je tiens néanmoins à dire à mes électeurs que je demeure déterminé à lutter contre ce problème. Nous devons faire comprendre à ceux qui s'en prennent à nos enfants qu'ils risquent de passer le reste de leur vie derrière les barreaux. La peine maximale actuelle, qui est de 10 ans d'emprisonnement, n'est pas suffisante pour quelqu'un qui vole l'innocence d'un enfant.

Mes collègues députés et les électeurs d'Oxford peuvent avoir l'assurance que je poursuivrai mon combat.

SCHOOLREACH

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, en fin de semaine, ma ville, Ponoka, était l'hôte des championnats provinciaux de SchoolReach. Je félicite les gagnants et représentants de l'école secondaire polyvalente Leduc, Joanne Brownlee, Neil Jackie, Danny Jackson, Colin McIntrye, Taeed Quaddusi et Evan Saumer, ainsi que leurs entraîneurs Sandy Ogrodnick et Mme Senio.

Les concurrents, qui se disputaient les honneurs provinciaux, se sont livré une chaude lutte. J'étais un des juges et j'ai été impressionné par l'ampleur des connaissances, l'esprit de compétition et les réponses articulées des concurrents. Ces étudiants sont à l'image de parents qui prennent la peine d'inculquer à leurs enfants le goût de la connaissance et le fair-play.

L'esprit de participation et la confiance manifestés par ces jeunes nous prouvent que notre avenir est entre bonnes mains.

Je souhaite bonne chance à l'équipe SchoolReach de la polyvalente Leduc à la finale nationale. Je sais qu'elle sera une force formidable à Vancouver, mais qu'ils gagnent ou perdent ces étudiants auront fait la fierté de leurs parents, de leurs camarades d'école et de leur communauté.

* * *

(1400)

LE BÉNÉVOLAT

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Durant la Semaine nationale de l'action bénévole, du 13 au 19 avril, les communautés de partout au Canada rendent hommage à leurs bénévoles et réfléchissent aux nombreuses façons dont ils servent les particuliers, les organismes et diverses causes.

Le bénévolat est l'une des plus belles preuves de civisme. Le bénévolat nous aide à développer notre sens d'appartenance à notre communauté et à notre grand pays. Citoyens exceptionnels dont les efforts contribuent à améliorer la qualité de vie de tous, les bénévoles jouent un rôle déterminant dans chaque communauté.

Le ministère du Patrimoine canadien, dont le mandat consiste entre autres à assurer la croissance, la diversité et la vitalité de l'action bénévole au Canada, collabore avec un vaste réseau de centres bénévoles et d'autres organismes bénévoles à la promotion de la Semaine nationale de l'action bénévole.

Je félicite tous les bénévoles de Lambton-Middlesex, qui deviendra prochainement Lambton-Kent-Middlesex, et de partout au Canada pour les services qu'ils rendent à nos collectivités.

* * *

LES JEUNES BÉNÉVOLES

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, nos jeunes bénévoles joueront un rôle très important au prochain millénaire.


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Aujourd'hui, je désire rendre hommage à un jeune homme de Tatamagouche, Angus Bonnyman, qui a reçu le titre de Jeune bénévole de l'année de la Nouvelle-Écosse. Angus a fait du bénévolat pour le foyer de personnes âgées, la cantine de l'école et des associations d'étudiants. Il a aussi organisé des activités d'assainissement de l'environnement. Il était l'an dernier le délégué du Rotary Club de Truro à Ottawa pour le programme «Le Patriotisme vécu».

C'est la deuxième année qu'un élève de la North Colchester High School remporte ce titre prestigieux, et je voudrais féliciter le directeur et le personnel de cette école pour l'esprit de leadership et de solidarité qu'ils continuent d'inculquer à leurs élèves.

Toutes nos félicitations à Angus et à tous les bénévoles du Canada qui servent si généreusement leurs collectivités.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, le 17 avril marque la Journée internationale de l'hémophilie.

Dans le budget de cette année, le ministre des Finances a dit: «Notre gouvernement est fermement attaché aux principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé. Nous maintiendrons ces principes». Il faisait ainsi écho à la promesse faite par le premier ministre dans le discours du Trône d'assurer l'avenir de notre système de santé financé par les fonds publics.

Depuis, les partis de l'opposition rivalisent d'arguments sur l'importance des soins de santé. C'est une chose de faire des grands discours sur l'importance du régime d'assurance-maladie, mais ce qui importe réellement, c'est de nous donner les moyens de le financer.

Grâce à sa bonne gestion financière, le gouvernement nous a donné les moyens de préserver et de renforcer nos programmes sociaux. Du fait que chaque année depuis notre arrivée au pouvoir, nous avons atteint, voire dépassé nos objectifs en matière de réduction du déficit, nous avons pu allier le geste à la parole et engager quelque 300 millions de dollars sur trois ans pour la promotion de la santé.

Santé Canada appuie les travaux remarquables menés par la Société canadienne de l'hémophilie en vue d'améliorer le traitement des troubles de saignement et d'assurer aux Canadiens des approvisionnements de sang ne présentant aucun danger pour la santé. Célébrons la Journée internationale de l'hémophilie.

* * *

LE PARTI RÉFORMISTE

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, les années 50 et 60 ont été de bonnes années pour les Canadiens. Nous pouvions avoir l'emploi de notre choix, nous gardions une plus grande partie de nos revenus, nous avions du respect pour notre système de justice pénale et que sais-je encore.

Depuis le début des années 70, les vieux partis ont appliqué leurs politiques libérales et conservatrices de telle manière que les Canadiens se sont mis à perdre du terrain. Par exemple, ces partis ont adopté des lois qui rendaient presque nulles nos possibilités d'avoir l'emploi que nous désirions, diminuaient l'argent qu'il nous restait dans nos poches et que sais-je encore.

Les Nations Unies ont peut-être dit que le Canada est le meilleur pays où vivre, mais la majorité des Canadiens disent que même le meilleur pourrait encore s'améliorer. Nous avons déjà eu tous ces avantages et nous pouvons les ravoir. Nous avons les ressources nécessaires et, après 20 ans de mauvaise administration par les vieux partis, nous avons la motivation nécessaire.

Il est temps de modifier notre orientation et de prendre un nouveau départ. Le Parti réformiste a des plans tout tracés pour ce faire.

* * *

LES SERVICES DE POLICE POUR LES AUTOCHTONES

M. Elijah Harper (Churchill, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'annonce que le gouvernement libéral vient de signer avec la première nation de Shoal Lake, en Saskatchewan, une entente tripartite sur les services de police, la 100e du genre dans le cadre de la politique sur la police des premières nations. La politique sur la police des premières nations offre aux premières nations des services de police professionnels, efficaces et tenus de rendre des comptes à la communauté.

Cette politique est une manifestation de l'engagement du gouvernement à collaborer avec les premières nations. Au Manitoba, une seule entente a été signée, et ce, avec le conseil tribal dakota- ojibway. Nombreuses sont les premières nations de ma circonscription qui sont prêtes à négocier sérieusement une entente tripartite sur les services de police avec le gouvernement du Manitoba, mais elles n'arrivent à rien.

Il est grand temps que le gouvernement du Manitoba embarque.

* * *

[Français]

LES COMMISSIONS SCOLAIRES LINGUISTIQUES

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, je dénonce l'attitude du ministre des Affaires intergouvernementales et du premier ministre qui sermonnent le gouvernement du Québec en lui imposant leur définition de ce qu'est un consensus au Québec dans le dossier des commissions scolaires linguistiques.

(1405)

C'est ça, le résultat de 1982: un gouvernement fédéral qui agit envers les assemblées provinciales comme si elles étaient irresponsables, et ce, même dans leurs domaines exclusifs de compétences.

Je condamne donc sans réserve l'attitude du gouvernement fédéral dans ce dossier. Il n'existe qu'une seule façon pour le peuple du Québec d'accomplir sa destinée sans croc-en-jambe d'Ottawa, c'est de faire la souveraineté.


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LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, sous le titre «En mai la campagne fédérale sera la priorité de Bouchard», le quotidien La Presse nous a appris, hier matin, que le premier ministre du Québec entend se mettre au service du Bloc québécois lors de la future élection fédérale. Cette position est confirmée par son attaché de presse qui déclare, et je cite: «On attend de voir quelles seront les attentes du Bloc et on va répondre à leurs demandes».

En tant que Québécois, je trouve que ça prend un sacré culot à Lucien Bouchard pour abandonner ses responsabilités de premier ministre du Québec pendant plus d'un mois afin d'aller travailler comme bénévole à la campagne du Bloc québécois.

Quand on connaît la situation sociale et économique très difficile que traverse le Québec, le premier ministre aurait peut-être mieux à faire qu'aller réchauffer des salles pour le député de Laurier-Sainte-Marie. Est-ce ça, leur façon de gouverner? Ou encore, si les députés du Bloc québécois cherchent un vrai slogan pour la prochaine campagne électorale, je pourrais leur proposer: «Le Québec, ma passion, le Canada, ma pension».

* * *

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. Clifford Lincoln (Lachine-Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, pendant les votes qui eurent lieu hier après-midi, certains d'entre nous, siégeant de ce côté de la Chambre, ont clairement entendu, venant des bancs du Bloc québécois, des interjections de «traître», de «vendu» et de «salaud» lorsque le ministre des Affaires intergouvernementales s'est levé pour voter.

Ce genre d'intolérance et d'insultes personnelles est inacceptable dans une société ouverte et démocratique. Ces qualificatifs sont d'autant plus inacceptables qu'ils viennent d'un secteur de la Chambre dont l'objectif central est de détruire le même pays que ces députés ont le mandat de représenter.

[Traduction]

Les insultes personnelles sont le propre des brutes et n'ont pas leur place ici. Le Bloc québécois devrait se regarder dans une glace pour reconnaître les traîtres et les vendus qu'ils sont. Ce n'est certainement pas le cas du ministre. Il n'a fait que demander la tenue d'audiences démocratiques, lesquelles ont été refusées par le gouvernement séparatiste du Québec à ses citoyens.

* * *

K.D. LANG

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour féliciter k.d. lang, chanteuse et compositrice originaire de Consort en Alberta, qui hier a été décorée de l'Ordre du Canada.

J'ai vu k.d. lang pour la première fois en 1985. Elle se produisait devant les députés de l'Assemblé législative de l'Alberta où elle a donné un spectacle endiablé qui devait devenir son image de marque.

Depuis, elle s'est taillé une brillante carrière dans le monde de la musique, remportant de nombreux prix et maints honneurs, y compris, en 1989, le prix de l'artiste de l'année de la musique Country au Canada et, en 1990, celui du disque de l'année avec «Twang».

Connue partout en Amérique du Nord, k.d. lang ajoute son nom à la longue liste des artistes canadiens qui n'ont pas hésité à relever le défi de se produire avec succès sur la scène internationale. Elle est la preuve vivante que les musiciens canadiens peuvent relever la concurrence où que ce soit, contre qui que ce soit, non pas grâce aux subventions ou à la politique du gouvernement, mais parce qu'ils excellent dans ce qu'ils font.

Sincères félicitations à k.d. lang pour avoir été décorée de l'Ordre du Canada.

* * *

[Français]

LE PARTI LIBÉRAL DU CANADA

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, jour de deuil, deux semaines avant le déclenchement probable des élections, le peuple québécois doit se rappeler que le premier ministre actuel est celui qui, en avril 1982, a organisé l'isolement du Québec en cette nuit des longs couteaux. Cette Constitution, qui ne reconnaît pas le Québec et limite ses pouvoirs, a été rejetée unanimement par l'Assemblée nationale de l'époque.

Le peuple québécois doit se rappeler que le premier ministre actuel est celui qui a promis, lors du dernier débat référendaire, de reconnaître dans la Constitution la société distincte, un droit de veto au Québec et le respect des champs de compétence. Ce même premier ministre a renié ses promesses aussitôt le danger référendaire passé.

Que ce soit lors de cette élection ou lors du prochain référendum, le peuple québécois doit se souvenir que le Parti libéral du Canada n'a qu'un seul but: anéantir la spécificité du Québec.

* * *

(1410)

[Traduction]

LA CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord, Lib.): Monsieur le Président, l'objet de la Charte canadienne des droits et libertés est la dignité humaine. D'ailleurs, son préambule se lit comme suit: «Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit». C'est donc un honneur et un privilège de prendre la parole aujourd'hui pour marquer le 15e anniversaire de la Charte.

La Charte canadienne des droits et libertés reflète l'identité unique des Canadiens. Elle établit un juste équilibre entre les droits individuels des citoyens et leurs responsabilités envers la société, entre les citoyens et le gouvernement et entre le pouvoir des parle-

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ments et celui des tribunaux. Elle instaure un système de contrôles qui nous protège contre les abus de pouvoir.

La charte correspond à un jalon dans l'histoire canadienne; elle témoigne de l'ingéniosité de notre peuple. Nous pouvons en être fiers car elle reflète l'âme de la nation canadienne.

* * *

LES JEUNES ET L'EMPLOI

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, nous connaissons tous les défis que les jeunes doivent relever de nos jours pour réussir la transition entre les études et le marché du travail. Le gouvernement fédéral offre maintenant divers programmes, tout en assurant leur financement, et différents services qui aident les jeunes à relever ces défis.

Dans London-Ouest, nous avons organisé collectivement un salon d'information pour les jeunes où nous avons présenté tous ces programmes et services, permettant aux jeunes d'acquérir une expérience de travail fort précieuse.

Le salon, tenu au Junior Achievement Centre de London-Ouest, a réuni des jeunes représentatifs de leur génération, des partenaires éventuels et les organisateurs des divers programmes. Les jeunes ont reçu des informations sur l'esprit d'entreprise, les divers services, les stages, les possibilités d'emploi et les activités de création de partenariats, grâce à un groupe de la région, le Team London for Youth, un partenariat qui réunit le milieu des affaires, le gouvernement, les clubs philanthropiques non gouvernementaux et les conseils scolaires.

Durant tout le salon d'information, j'ai été frappée par l'engagement des organisations participantes et leur détermination à aider les jeunes de la collectivité. . .

Le Président: Le député de Yorkton-Melville.

* * *

LE NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière j'ai assisté, comme observateur, au congrès du NPD à Regina. Tommy Douglas ne serait pas heureux de voir que les syndicats et des groupes de pression se sont appropriés le programme du parti qu'il a créé.

Un thème récurrent du congrès était que le NPD existe non pas pour former le gouvernement, mais pour faire pression sur les Libéraux pour qu'ils consacrent davantage d'argent à de grands programmes gouvernementaux. Le coût de toutes les résolutions adoptées n'a jamais fait l'objet de discussions.

Non seulement il n'y a pas eu de débat valable sur les questions abordées au congrès, mais en plus il y a eu une absence totale de débats sur les grandes questions auxquelles les Canadiens sont confrontés. Y a-t-il eu un débat sur les questions touchant la sécurité, comme la Loi sur les jeunes contrevenants, la justice criminelle, la réforme des pénitenciers, l'enregistrement des armes à feu?

Y a-t-il eu un débat sur les questions de démocratie comme le fait de donner aux électeurs un plus grand contrôle sur leur député entre deux élections, améliorer le fonctionnement du Parlement et donner aux Canadiens une voix directe dans les affaires du pays? De plus, qu'un parti politique fédéral reste muet sur la question de l'unité national me paraît un grave oubli.

Le NPD fédéral est devenu quelque chose qui se comporte davantage comme un groupe de pression. . .

* * *

[Français]

LE BLOC QUÉBÉCOIS

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, il y a 15 ans, c'est-à-dire le 17 avril 1982, le gouvernement du Canada rapatriait unilatéralement la Constitution canadienne malgré l'opposition unanime de tous les partis politiques du Québec.

À l'époque, 73 des 75 députés fédéraux du Québec à Ottawa ont laissé tomber le Québec et appuyé le premier ministre actuel et Pierre Elliott Trudeau qui lui, a affirmé, et je cite: «Désormais, la fortune favorisera la gouvernement canadien. Même un front uni des dix provinces ne pourra pas obliger le gouvernement canadien à bouger: en assurant un équilibre créateur entre les provinces et le gouvernement central, la fédération va pouvoir durer 1000 ans.»

Malheureusement, le Bloc québécois n'existait pas. Mais aujourd'hui, il y a sur la scène fédérale un parti qui a eu comme mandat de défendre les droits et les intérêts des Québécois et des Québécoises.

Aujourd'hui, heureusement, le Bloc québécois est là.

* * *

[Traduction]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale aux députés la présence à notre tribune de M. Martin Lee, parlementaire et président du Parti démocratique de Hong Kong.

Des voix: Bravo!

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QUESTIONS ORALES

(1415)

[Français]

LA CONSTITUTION

M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, il y a 15 ans, en 1982, jour pour jour, le premier ministre actuel était à Ottawa et le gouvernement canadien rapatriait la Constitution à l'encontre de la volonté du gouvernement du Québec,


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à l'encontre de la volonté de l'Assemblée nationale du Québec, à l'encontre de l'opinion d'une vaste majorité de Québécois et de Québécoises.

J'aimerais demander au premier ministre ou à celui qui le remplace aujourd'hui, comment il peut considérer que la Constitution de 1982 est légitime, alors que le Québec n'a jamais reconnu cette Constitution, alors qu'aucun gouvernement du Québec, qu'il soit dirigé par des souverainistes ou des fédéralistes, n'a reconnu cette Constitution?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, étant donné que cela fait 15 ans que la Loi constitutionnelle de 1982 est en vigueur, on peut maintenant juger l'arbre à ses fruits.

Cette Loi constitutionnelle nous vaut une charte des droits et libertés qui est populaire partout au Canada, y compris au Québec. Elle nous vaut un renforcement du contrôle des provinces sur leurs ressources naturelles. Elle nous vaut la place du français renforcée partout au Canada dans ses droits . . .

Des voix: Oh, oh!

M. Dion: . . .elle nous vaut la péréquation mise dans la Constitution, dont le Québec profite pour près de la moitié, et elle nous vaut aussi la possibilité d'avoir des amendements bilatéraux, quand c'est nécessaire entre le Parlement canadien et celui d'une province.

C'est pas mal. Bien sûr que cette loi est perfectible; on pourrait, par exemple, avoir une meilleure formule d'amendement, une meilleure reconnaissance du Québec. Tout est perfectible mais, dans l'ensemble, c'est une belle réalisation.

M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, c'est un peu triste de voir des représentants du Québec applaudir la Constitution de 1982, quand je pense à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration qui faisait partie d'un gouvernement qui n'a jamais reconnu cette Constitution, quand je pense au ministre du Développement des ressources humaines, qui était l'adjoint de Claude Ryan, qui a dénoncé cette Constitution. On voit ce qui arrive à certains Québécois quand ils deviennent ministres à Ottawa.

Le ministre des Affaires intergouvernementales agit comme premier ministre aujourd'hui, j'imagine. En effet, il faut juger l'arbre à ses fruits. Le ministre voudrait-il qu'on oublie le passé, le rôle que son chef, le premier ministre, a joué depuis 30 ans, qu'on oublie que toute la carrière de ce premier ministre a été marquée par son opposition systématique envers le Québec, qu'on oublie que ce premier ministre a oeuvré toute sa carrière à rabaisser le Québec, qu'on oublie qu'il a passé sa carrière à vouloir remettre le Québec à sa place, à sa petite place? Comment ce ministre peut-il venir nous dire aujourd'hui que les Québécois devraient être fiers de l'acte ignoble posé par le Parti libéral du Canada en 1982?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je pense que les sarcasmes qui ont été lancés en face ne sont vraiment pas responsables. Je répondrai simplement que cette Charte canadienne des droits, nous la devons en effet au ministre de la Justice de l'époque.

Je dois rappeler aussi qu'à l'époque, les Québécois étaient plutôt derrière le premier ministre du Canada, les sondages le montraient. Beaucoup de mythes ont été créés autour de cela. J'aimerais un jour qu'on tienne un débat de fond sur la Loi constitutionnelle de 1982 et sur les bienfaits qu'elle a apportés partout au Canada, y compris au Québec. Qu'on cesse de sataniser continuellement l'actuel premier ministre et qu'on ait un jour un débat intelligent sur l'avenir du Québec dans le Canada. C'est très difficile d'en avoir un avec les propos du chef de l'opposition aujourd'hui.

M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, j'aurais bien aimé avoir ce débat avec le premier ministre aujourd'hui en Chambre, 15 ans après la rapatriement de la Constitution. J'aurais bien aimé avoir ce débat.

(1420)

Je demande au ministre, s'il veut avoir ce débat, est-il prêt, au Québec, dans tous les comtés, à ce que les députés libéraux fédéraux signent symboliquement, au nom des Québécois, cette Constitution, dans chacun des comtés du Québec, et viennent la défendre contre les souverainistes et contre les fédéralistes québécois qui n'ont jamais accepté cette Constitution?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, ils satanisent la Constitution. Ils sont incapables d'en discuter calmement, pour voir en quoi c'est un tel scandale. Si on montrait cela à l'ONU, est-ce qu'on dirait: «Mon Dieu, quelle Constitution inacceptable du point de vue des droits humains!»

Bien sûr que non, ils ne pourraient pas faire cela, comme ils seraient incapables de dire que la province de Québec n'a pas des responsabilités très élargies, si vous comparez à ce qui se passe dans d'autres fédérations. Ils seraient incapables de dire que la fédération ne s'est pas décentralisée depuis 1982. Bien sûr qu'elle s'est décentralisée dans un ensemble de domaines, on clarifie les rôles entre les ordres de gouvernement. Encore hier, pas rien que pour le Québec, pour la Colombie-Britannique, on vient de signer un accord qui clarifie les rôles dans le domaine essentiel des pêcheries.

C'est du bon fédéralisme, quand on clarifie les rôles dans le domaine de la main-d'oeuvre, de l'environnement, du logement social. Mais bien sûr, l'opposition n'est pas intéressée à faire ce débat. Tout ce qu'elle veut faire, c'est sataniser l'oeuvre de l'actuel premier ministre.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, 15 ans après le rapatriement unilatéral de la Constitution, après deux tentatives avortées de réforme constitutionnelle, après une série de promesses non respectées à la veille du référendum de 1995, le gouvernement fédéral n'a plus rien à offrir aux Québécois. Il a donc décidé de jouer la ligne dure et de contester le droit des Québécois à décider de leur avenir.


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J'aimerais demander au premier ministre ou à celui qui le remplace s'il admet qu'il y a un problème constitutionnel du fait qu'aucun gouvernement du Québec, fédéraliste ou souverainiste, n'a jamais voulu reconnaître la Constitution canadienne depuis maintenant 15 ans?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, il serait souhaitable, en effet, qu'on arrive à un accord qui fasse en sorte qu'un gouvernement du Québec, qui croirait dans le Canada, rentre dans le giron constitutionnel. Là-dessus, il n'y a pas de désaccord.

Le désaccord est le suivant: est-ce qu'on doit juger le Canada et ses bienfaits uniquement en fonction d'un désaccord sur certains aspects de la Constitution? À mon avis, ce serait une grave erreur de faire de telles choses. On doit plutôt regarder ce que les Québécois et les autres Canadiens ont fait ensemble, à quel point le pays que nous avons réalisé est un pays que nous envient des milliards d'êtres humains, et se demander pourquoi on y est arrivés. Et surtout, considérer ce que voudrait dire, pour les Québécois et les autres Canadiens, renoncer à la solidarité qui les unit aujourd'hui au sein d'une grande fédération.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, c'est assez surprenant d'entendre le ministre des Affaires intergouvernementales nous dire que ni Bourassa, ni Johnson ne croyaient au Canada. C'est surprenant, très surprenant.

Des voix: Bravo!

Mme Venne: La personne qui remplace le premier ministre reconnaît-elle que c'est le premier ministre actuel qui a agi à l'encontre de la volonté des Québécois en 1982, que toutes les tentatives de réparation depuis ont échoué, et que la seule solution que ce gouvernement privilégie, c'est de faire en sorte que le Québec n'ait plus les moyens de décider de son avenir?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je pense avoir répondu déjà à toutes ces questions.

Là, je serai obligé de me répéter, mais je constate qu'il est en effet impossible d'obtenir du Bloc québécois exactement ce qu'il reproche au contenu de la Loi constitutionnelle de 1982.

Des voix: Oh, oh!

M. Dion: Nous avons dit que nous préférions une formule d'amendement qui donne le droit de veto à toutes les grandes régions du pays et une reconnaissance plus affirmée du Québec dans la Constitution.

Effectivement, nous essayons d'en convaincre tous les Canadiens. Mais pour l'ensemble, c'est une bonne Constitution. Cela ne nous empêche pas d'aller de l'avant, cela ne nous empêche pas d'avoir une des meilleures qualités de vie au monde. Cela ne nous empêche pas de réaliser qu'on peut progresser au point, par exemple, que l'OCDE nous dise que nous sommes un des pays qui est le plus en forme pour entrer en bonne santé économique dans le prochain siècle.

Est-ce qu'on pourrait avoir tout cela si on n'était pas tous ensemble à s'entraider entre Canadiens? C'est ça, le vrai débat, et on est incapables d'avoir ce débat avec des gens qui ne cherchent qu'à sataniser l'oeuvre du premier ministre.

* * *

(1425)

[Traduction]

L'EMPLOI

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, on croirait assister à un jeu télévisé rondement mené par le premier ministre. L'accord Pearson, la pêche au saumon, la pêche à la morue, les nominations par favoritisme, la pluie de subventions. Les seuls qui se retrouveront encore les mains vides dans quelque temps sont les 1,4 million de chômeurs canadiens.

Étant donné que le premier ministre semble si empressé de distribuer des faveurs pré-électorales, peut-il nous dire ce qu'il a à offrir aux 1,4 millions de chômeurs au Canada?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, lorsque nous nous présenterons devant les électeurs, nous pourrons leur offrir une belle réussite, soit la création de près de 800 000 emplois, et l'engagement de faire beaucoup mieux que ce que propose le programme si décrié du Parti réformiste.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, la réalité, c'est que le Canada enregistre actuellement les pires statistiques en matière de chômage depuis la crise de 1929. Voilà la réalité et le gouvernement la connaît trop bien. On pourrait croire que les libéraux tenteraient de trouver de nouvelles façons de redonner du travail aux Canadiens, mais le gouvernement est si dépourvu d'idées qu'il veut déclencher des élections après seulement trois ans et demi au pouvoir.

Le premier ministre a-t-il quelque chose de nouveau à offrir aux chômeurs canadiens ou croit-il encore, comme il l'a dit au cours de l'assemblée publique télédiffusée par Radio-Canada, que certains sont chanceux, d'autres malchanceux et que c'est la vie?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si le député et ses collègues du Parti réformiste se préoccupaient vraiment du sort des chômeurs, ils auraient appuyé le gouvernement lorsque nous avons proposé le programme de rénovation des infrastructures, lorsque nous avons proposé les programmes stimulant le tourisme, lorsque nous avons proposé les programmes visant l'éducation, lorsque nous avons proposé les programmes appuyant la recherche et le développement.

Le Parti réformiste a voté contre chacune de ces mesures, peu importe s'il s'agissait de lutter contre le chômage chez les jeunes ou de créer des emplois d'été. Le Parti réformiste s'est toujours opposé aux mesures proposées par le gouvernement. Par contre, on peut comprendre pourquoi il s'est opposé à ces initiatives. Le leader à la


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Chambre a rappelé ce que le Parti réformiste avait à dire au sujet de son propre programme pour les chômeurs.

Dans le budget des contribuables, document qui renferme les propositions du Parti réformiste, on peut lire que le programme du Parti réformiste entraînera sur l'emploi à court terme des répercussions négatives, mais acceptables. Jusqu'à quel niveau le chômage est-il acceptable? Quel est le niveau de souffrance humaine que le Parti réformiste est prêt à tolérer? À quel niveau de misère le Parti réformiste condamnera-t-il les familles canadiennes afin de pouvoir appliquer ses politiques archaïques?

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, le ministre peut râler et bluffer tant qu'il veut. Il peut parler de documents qui datent de plusieurs années. Nous pourrions rappeler ce que le gouvernement a déclaré à l'époque où il siégeait dans l'opposition et ce qu'il a fait depuis. D'ailleurs, ce débat aura lieu au cours de la prochaine campagne électorale et je l'attends avec impatience.

Depuis trois ans et demi, les libéraux font bien peu pour redonner du travail aux Canadiens. Le ministre a énuméré divers programmes. J'imagine qu'on n'a pas pu construire des musées du canot, des hôtels et des manèges militaires partout, seulement à Shawinigan. En tout, 1,4 million de Canadiens sont en chômage, deux à trois millions de Canadiens sont sous-employés et un Canadien sur quatre craint de perdre l'emploi qu'il occupe actuellement. Voilà l'héritage que nous laissent les libéraux.

En 1993, le premier ministre a déclaré qu'il avait un plan. Le seul plan qu'il a en 1997 consiste-t-il à envoyer tous les chômeurs s'établir à Shawinigan?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, l'encre est à peine sèche sur le budget des contribuables, publié il y a deux ans, que déjà des réformistes le renient. Le Parti réformiste n'a-t-il aucune politique qu'il est prêt à défendre?

Le budget des contribuables n'est vieux que de deux ans et nous le rejetons. Le faux départ date de six mois et nous le rejetons.

(1430)

Très souvent, on voit des députés réformistes se lever à la Chambre pour nier ce que leurs collègues ont affirmé. Voilà pourquoi tant de députés réformistes ont déjà décidé de partir.

Toutes les politiques du Parti réformiste se contredisent les unes les autres. Les réformistes ne sont conséquents que dans leur inconséquence.

Nous n'hésiterons pas à comparer n'importe lequel de nos budgets aux déclarations que nous avons pu faire. Nous défendons notre premier budget. Nous défendons notre deuxième budget. Nous défendons notre troisième budget. Nous défendons notre quatrième budget. Et nous espérons avoir l'occasion d'en déposer quatre autres.

[Français]

LES COMMISSION SCOLAIRES LINGUISTIQUES

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, depuis des mois, le ministre des Affaires intergouvernementales dit qu'il devait y avoir un consensus raisonnable pour aller de l'avant avec la modification constitutionnelle demandée par le Québec. Hier, il a finalement admis qu'il y avait un consensus sur la question au Québec, mais qu'il ferait tout en son pouvoir pour inclure Alliance Québec dans le consensus.

Le premier ministre admettra-t-il que la seule raison pour laquelle son gouvernement exige des audiences publiques à la veille d'une élection fédérale, c'est pour satisfaire un groupe de pression, Alliance Québec, allié des libéraux fédéraux, à qui il donne plus de poids qu'à tous les députés allophones, anglophones et francophones démocratiquement élus au Québec et qui ont voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, hier, c'était quand même une bonne nouvelle. Le gouvernement du Canada dit qu'il appuie la proposition de modification constitutionnelle qui lui arrive de Québec. Nous l'approuvons, et on va la défendre. Ça va se faire; c'est quand même une bonne nouvelle.

En quoi c'est un tel scandale d'avoir une commission parlementaire sur une question aussi importante qui rejoint des aspects comme la langue, la religion, l'éducation? En quoi c'est un problème? Pourquoi est-ce que l'opposition officielle est incapable d'accueillir une bonne nouvelle? Est-ce que c'est parce que, par définition, elle craint qu'une bonne nouvelle soit interprétée au Québec comme une nouvelle preuve des bienfaits d'un Canada uni?

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales, au lieu de nous répondre n'importe quoi, devrait répéter ce qu'il a dit sur les ondes de RDI hier. Il a dit qu'il fallait voter libéral aux prochaines élections si on voulait que l'amendement constitutionnel soit adopté, parce que ça ne se fera pas avant les élections. C'est ce qu'il a dit.

Une voix: C'est du chantage.

Mme Tremblay: Monsieur le Président, il s'agit de chantage vraiment inacceptable et éhonté.

Ma question s'adresse au premier ministre suppléant. Convient-il qu'il peut, s'il le veut, mettre tout en oeuvre pour que son gouvernement adopte la modification constitutionnelle, et ce, avant les élections, quitte à en retarder la date?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Tout d'abord, monsieur le Président, je constate que l'opposi-


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tion officielle applaudit à l'idée de voter libéral, c'est déjà un progrès.

Deuxièmement, ce que j'ai dit, c'est qu'en effet, si cela ne peut pas se faire avant les élections, les gens sauront que s'ils votent pour les libéraux, ils votent pour des candidats qui appuient la modification. Ce sera une information intéressante. Je ne vois pas en quoi c'est un tel problème.

Et enfin, en ce qui concerne la durée que ça prendra, eh bien, ça prendra bien moins de temps que cela n'en a pris pour le gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec, qui a été élu en septembre 1994, n'est arrivé avec la proposition que le 7 février dernier, n'a présenté le libellé exact de la modification que le 24 mars, et l'a adoptée mardi dernier, après avoir attendu six jours pour que le chef de l'opposition officielle revienne de vacances.

C'était gentil de la part du premier ministre Bouchard, mais cela montre où sont ses priorités.

* * *

[Traduction]

L'EMPLOI

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, les libéraux veulent se faire élire au cours des prochaines élections en fonction de leur bilan. C'est tout un bilan.

(1435)

Le gouvernement a dépensé des millions de dollars pour construire des manèges militaires dans les circonscriptions du ministre de la Santé, de la vice-première ministre et du premier ministre, et des millions de dollars pour bâtir des hôtels et un musée du canot à Shawinigan. Il a également consacré des millions de dollars à des terrains de golf, à des marquises pour des mairies, à des terrains de boules et à d'autres projets du genre dans le cadre du programme d'infrastructure. Enfin, il a offert des comptes de dépenses de 500 000 $ à des gens nommés par favoritisme politique. Depuis trois ans et demi, le gouvernement administre mal les deniers publics, il les gaspille.

Le gouvernement libéral croit-il que la politique de l'assiette au beurre est la meilleure façon de créer des emplois?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on consacre 50 millions de dollars à la Banque de développement du Canada pour financer des petites et moyennes entreprises, s'agit-il d'une politique de l'assiette au beurre? Lorsqu'on consacre 50 millions de dollars à la Société du crédit agricole pour favoriser la diversification rurale, est-ce qu'on pratique la politique de l'assiette au beurre? Lorsqu'on donne à la Fondation canadienne pour l'innovation 800 millions de dollars pour que les universités canadiennes et nos hôpitaux d'enseignement puissent faire naître la nouvelle économie, pratique-t-on la politique de l'assiette au beurre? Est-ce le cas, lorsqu'on accorde des crédits pour frais de scolarité pour aider les étudiants à retourner à l'école et aider les parents à économiser pour l'éducation de leurs enfants?

La réponse est non. C'est le fruit d'une politique judicieuse qui assurera à notre pays un avenir florissant. Le Parti réformiste devrait se joindre à nous dans cette entreprise.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances se vante de toutes ces nouvelles dépenses alors que les contribuables n'ont même pas les moyens de payer leurs factures, et encore moins les impôts qu'il veut leur arracher.

Voyons le bilan du gouvernement. Les cotisations d'assurance-chômage ont augmenté de 900 millions de dollars. Les recettes tirées de l'impôt sur les sociétés ont augmenté de 1,3 milliard de dollars. Celles provenant de la TPS ont augmenté de 700 millions de dollars. On constate une augmentation de 1,3 milliard de dollars des autres recettes. Et je pourrais poursuivre ainsi bien longtemps. Le ministre a réussi à arracher aux contribuables 3,5 milliards de dollars de plus sous forme d'impôt personnel.

Qu'obtiennent les Canadiens dont la situation financière est catastrophique en retour de tout cet argent supplémentaire, si ce n'est la plus longue période de chômage depuis la grande crise de 1929 et un piètre programme de création d'emplois?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, voyons la situation.

Depuis notre arrivée au pouvoir, les cotisations d'assurance-chômage qui, sous les conservateurs, étaient censées grimper à 3,30 $ par tranche de 100 $ ont maintenant baissé à 2,90 $. Au cours des trois dernières années du gouvernement conservateur, ces cotisations ont augmenté chaque année. Nous les avons fait baisser ces trois dernières années.

Le député veut parler de réductions d'impôt. Que fait-il des réductions d'impôt et des crédits qu'on a accordés aux étudiants pour leur permettre de retourner à l'école? Qu'en est-il des crédits d'impôt accordés aux Canadiens handicapés pour leur donner des chances égales? Que fait-on des 600 millions de dollars en nouveaux crédits d'impôt pour les enfants pauvres pour leur donner une véritable chance de s'en sortir?

Le député s'oppose au fait que les recettes gouvernementales provenant des sociétés sont en hausse. Il devrait comprendre que c'est le cas parce que les affaires vont mieux et que l'économie est florissante. C'est une bonne chose, pas une mauvaise.

* * *

[Français]

LES COMMISSIONS SCOLAIRES LINGUISTIQUES

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre, ou à quiconque aspire à le remplacer.

Hier, en écoutant les réponses du ministre des Affaires intergouvernementales, on se serait cru en 1982 devant Pierre Elliott Trudeau. Encore une fois, le gouvernement s'affairait à nier la légitimité de l'Assemblée nationale et à bafouer le peuple québécois en intervenant directement dans des questions qui relèvent des compétences exclusives du Québec.

Le premier ministre se rend-il compte que, par l'attitude arrogante de son ministre des Affaires intergouvernementales, Ottawa s'érige en juge des décisions démocratiques de l'Assemblée nationale?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, si je comprends bien la question, l'honorable député dit que nous sommes les juges de la question à


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l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale a fait ce qu'elle estimait devoir faire en son âme et conscience. Il appartient maintenant au Parlement canadien de faire ce qu'il estime devoir faire en son âme et conscience.

Nous, le gouvernement du Canada, estimons que ce que l'Assemblée nationale a adopté est une bonne chose.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, hier, le premier ministre nous disait qu'il était fier d'avoir rapatrié unilatéralement la Constitution.

Comment le premier ministre peut-il être fier de continuellement passer par-dessus la tête de l'Assemblée nationale? Sa fierté n'est-elle pas plutôt du mépris à l'endroit des institutions québécoises?

(1440)

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, pour justifier une chose aussi grave qu'une sécession, et quand on n'a vraiment pas d'argument pour briser un pays qui est un succès comme le Canada, eh bien, à ce moment-là, évidemment, on doit s'inventer des choses graves. On doit dire qu'il y a eu des complots; on doit dire qu'il y a eu des choses scandaleuses . . . j'ai oublié les épithètes utilisées tout à l'heure par le chef de l'opposition officielle à ce propos.

Qu'on montre donc la Constitution canadienne à travers le monde, et trouvez-moi un pays au monde qui la trouverait scandaleuse. Trouvez-vous un autre pays où la minorité linguistique a autant de possibilité de développement que c'est le cas au Canada et notamment, évidemment, dans la province de Québec, qui a des responsabilités que lui envierait n'importe quelle autre entité fédérée à travers le monde. Où est le scandale? Ce qui est déplorable de l'opposition officielle, c'est qu'elle ne peut pas justifier une sécession autrement qu'en satanisant l'actuel premier ministre du Canada.

* * *

[Traduction]

LES PÊCHES

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral gère extrêmement mal la pêche à la morue. Le tout dernier rapport du ministère des Pêches et des Océans dit que le stock est encore extrêmement bas. Pourtant, aujourd'hui, à la veille d'élections anticipées, le ministre a annoncé la réouverture de la pêche à la morue au large de Terre-Neuve.

Pourquoi le ministre met-il en péril une ressource si précieuse et si importante pour l'économie de la région de l'Atlantique?

L'hon. Lawrence MacAulay (secrétaire d'État (Anciens combattants) (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, le ministre a fait aujourd'hui une annonce sur des prises très limitées, annonce qui a été faite sur la recommandation du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques.

Le total des prises autorisées qui a été annoncé aujourd'hui est moins élevé que celui qu'a recommandé le conseil.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la décision du ministre permettra au mieux de créer quelques emplois à court terme. Les prises seront beaucoup trop faibles pour permettre la réouverture d'usines de transformation arrêtées.

À cause de cette décision, il est pratiquement assuré que le secteur et les localités de pêche de Terre-Neuve ne pourront pas survivre, tout cela parce que les libéraux cherchent à obtenir quelques votes de plus aux prochaines élections.

Quelle est la véritable préoccupation du ministre: la survie de la pêche à la morue ou celle des libéraux?

L'hon. Lawrence MacAulay (secrétaire d'État (Anciens combattants) (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, je garantis à la députée que les deux survivront.

Je le répète, l'annonce d'aujourd'hui a été faite sur la recommandation du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques. Tous les renseignements qui proviendront de ce programme de pêches expérimentales sont cruciaux pour évaluer les stocks et pour connaître exactement la situation dans ce secteur.

Nous avons agi aujourd'hui sur la recommandation du conseil et des pêcheurs.

* * *

[Français]

LA CULTURE CANADIENNE

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant.

Des membres éminents de la collectivité québécoise se mobilisent derrière Pierre Falardeau et son projet de film portant sur les Patriotes de 1837 et refusé par Téléfilm Canada. Téléfilm est accusé de censure politique. Or, il n'y a pas si longtemps, le Comité du patrimoine convoquait les grandes institutions culturelles canadiennes, dont Téléfilm et le Conseil des arts, pour leur demander ce qu'elles faisaient pour promouvoir l'unité nationale.

Le premier ministre suppléant est-il conscient qu'en transformant son ministère en outil de propagande au service de son gouvernement, il a entaché la réputation d'indépendance et d'intégrité dont jouissaient, jusqu'à ce jour, les grandes institutions culturelles canadiennes?

[Traduction]

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, la prétendue propagande dont parle le député apporte beaucoup aux Canadiens.

Permettez-moi de mentionner certaines réalisations du BIC. Le BIC a notamment permis de mettre en oeuvre des programmes pour promouvoir des échanges entre les Canadiens, par exemple, le récent programme prévoyant des échanges d'élèves au Canada. Grâce au programme de leadership dans la collectivité, il a travaillé de concert avec des chefs de file, des bandes et des institutions partout au Canada. Le BIC a beaucoup fait pour promouvoir la richesse et la diversité à l'échelle nationale.


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(1445)

Nous n'avons pas de leçons à recevoir du député, pour ce qui est de la propagande. Nous avons vu que le parti d'en face a consacré des sommes faramineuses à la propagande faisant sa promotion.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): D'après moi, monsieur le Président, la ministre s'est trompée de page. Il vaut quand même mieux entendre ça qu'être sourd. Pourtant, j'avais parlé d'un cas spécifique, le film de M. Pierre Falardeau.

Le ministre des Affaires étrangères poursuit également ses activités de propagande. Malgré des demandes du Bloc et du gouvernement québécois, il maintient le critère de promotion de l'unité nationale comme un des critères d'attribution d'une subvention.

La ministre se rend-elle compte qu'en refusant d'abroger ce critère indécent, elle soumet, elle aussi, la culture canadienne à des impératifs de propagande?

M. Francis G. LeBlanc (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le ministère des Affaires étrangères a comme objectif de promouvoir la culture canadienne à l'étranger, et pour ce faire, nous utilisons les formes qui sont à la disposition des Canadiens, y compris des Québécois. C'est une partie des objectifs de notre gouvernement.

* * *

[Traduction]

LA FISCALITÉ

M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Les députés de tous les partis représentés à la Chambre reconnaissent que les organismes de bénévolat et de bienfaisance accueillent avec joie les incitatifs fiscaux améliorés que le ministre des Finances a mis en oeuvre pour encourager les Canadiens à faire des dons.

En même temps, nous craignons que la dernière motion des voies et moyens ait des effets imprévus pouvant être néfastes.

Le ministre peut-il garantir à la Chambre que le gouvernement va consulter les organismes de bienfaisance afin d'éviter qu'il y ait des effets nuisibles ou imprévus?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme le député vient de le souligner, nos budgets ont fait de l'aide à la levée de nouveaux fonds par les organismes de bienfaisance une priorité. Une grande partie du leadership à cet égard est venu du président et des membres du Comité des finances. Nous avons accru la générosité du système, mais nous avons aussi veillé à garantir son intégrité.

Le député a laissé entendre que le libellé d'une mesure en particulier, qui porte sur les opérations d'emprunt avec garantie, serait actuellement trop flou. J'assure le député que le gouvernement consulte actuellement les organismes de bienfaisance et continuera de collaborer avec eux pour que la loi n'ait aucun effet imprévu ou nuisible.

* * *

LES DÉPENSES PUBLIQUES

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, revoyons la liste des dépenses du gouvernement: 745 millions de dollars, mais pas d'hélicoptères; 2 millions de dollars pour apaiser Brian Mulroney et 260 millions de dollars à l'aéroport Pearson sans qu'une seule pelletée de terre n'ait été déplacée.

Est-ce là ce que les libéraux considèrent comme une saine dépense des fonds publics?

M. Stan Keyes (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le député a mentionné l'aéroport Pearson. Chose intéressante, je lisais aujourd'hui dans le journal que le chef du tiers parti a dit qu'on y avait dépensé de l'argent pour absolument rien.

Est-ce qu'une nouvelle piste «vent de travers» nord-sud à l'Aéroport international Pearson, c'est rien? Et la construction de postes d'incendie à l'aéroport Pearson, c'est rien? Et la nouvelle installation de dégivrage à l'aéroport Pearson, c'est encore rien? Voilà à quoi ont servi les 185 millions de dollars dépensés à l'Aéroport international Pearson.

Lequel de ces travaux d'immobilisations pour améliorer la sécurité et l'environnement à l'aéroport Pearson le député considère-t-il comme rien du tout?

(1450)

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, il n'est pas étonnant qu'on appelle cette partie de la séance la période des questions. Nous ne pouvons pas obtenir de réponses de nos vis-à-vis. Nous posons une question parfaitement légitime, et nous obtenons en retour une série de questions racoleuses. Comme nous sommes en pleine période des questions, je vais tâcher encore une fois d'obtenir une réponse des gens d'en face.

Puisque le gouvernement se targue de créer des emplois, comment pense-t-il pouvoir expliquer aux électeurs que la dépense de 260 millions de dollars à l'aéroport Pearson n'a pas permis de créer un seul emploi?

Si on s'était occupé correctement de ce dossier, cela aurait pu être un des plus grands programmes de travaux d'infrastructure mis en oeuvre sous le gouvernement actuel.

M. Stan Keyes (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le député essaie de déformer la réalité aux yeux des Canadiens, mais ils ne se laisseront pas berner. Ils comprennent que le gouvernement a voulu les proté-


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ger contre l'argent des lobbyistes qui allait être déboursé et exigé par ce consortium privé.

La réalité, c'est que le gouvernement a dépensé les 185 millions de dollars dont je viens de parler pour tous ces travaux d'immobilisations qui s'imposaient tellement à l'aéroport Pearson pour améliorer la sécurité.

L'aéroport international Pearson n'est pas le seul aéroport dans lequel le gouvernement ait investi. Et l'aéroport de Calgary? Le député nous reproche-t-il d'avoir consacré des fonds publics à des travaux d'immobilisations visant à améliorer la sécurité et l'environnement à cet aéroport? Et les 127 millions de dollars que nous avons dépensés à l'aéroport d'Edmonton? Et les 45 millions dépensés à l'aéroport de Vancouver? Et les 120 millions dépensés à l'aéroport de Montréal?

Nous avons une politique nationale des aéroports qui confiera la prise de décisions aux administrations aéroportuaires locales pour en faire les joyaux de l'économie locale qu'elles méritent tant de devenir.

* * *

[Français]

LE DÉFICIT

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Il y a deux mois, l'opposition officielle faisait remarquer au ministre des Finances que ses prévisions de déficit pour l'année financière 1996-1997 apparaissaient comme étant totalement erronées à 19 milliards de dollars. Le ministre refusait alors d'admettre son erreur et tentait de nous expliquer que dans les deux mois à venir, les chiffres pouvaient varier énormément. Or, après 11 mois sur 12, les chiffres révèlent maintenant que le déficit s'établit effectivement à 7,8 milliards de dollars, ce qui est très loin des prévisions du ministre.

De deux choses l'une, ou bien le ministre des Finances a volontairement surestimé les chiffres de son déficit pour mieux faire accepter les coupures importantes qu'il a imposées aux provinces et aux chômeurs, ou bien le gouvernement fonctionne à l'aveuglette, le ministre des Finances étant incapable de faire quelque prévision crédible que ce soit. Laquelle des deux hypothèses est la bonne?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait fort bien, lorsque j'ai présenté le budget, j'ai dit que le déficit, pour l'année en cours, ne dépasserait pas-cela veut dire qu'il serait en-dessous-19 milliards de dollars, ce qui est certainement le cas.

J'ai dit en même temps que nous n'avions pas les chiffres pour les mois de janvier, février et mars. Nous ne les avons pas encore pour le mois de mars. Certainement, lorsque j'aurai les chiffres pour le mois de mars, cela nous donnera une meilleure idée.

En même temps, je dois rappeler au député qu'à la fin de l'année, il y a toujours des ajustements, historiquement parlant, entre 4 et 6 milliards de dollars, lorsqu'on regarde les années antérieures. Enfin, j'aimerais rappeler au député que le fait que le déficit baisse n'est pas une mauvaise nouvelle, mais une bonne nouvelle.

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, quand on sait que 84 p. 100 de la réduction du déficit pour les onze premiers mois a été strictement faite sur les chômeurs, les assistés sociaux, les malades et les étudiants, on trouve un peu ridicule d'entendre des applaudissements de l'autre côté.

Étant donné que cette marge de manoeuvre grossit de mois en mois et permettra au ministre d'atteindre un déficit zéro avant l'an 2000, le ministre des Finances peut-il s'engager à remettre les sommes qu'il a dérobées aux provinces, aux chômeurs, aux assistés sociaux, aux malades et aux étudiants?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député se trompe de gouvernement. Il parle peut-être de certains gouvernements provinciaux, mais certainement pas de celui-ci.

Lorsqu'on examine la raison pour laquelle on est en avance, c'est parce que, d'abord, ce ne fut pas nécessaire d'utiliser notre réserve pour contingence, deuxièmement, nos revenus sont à la hausse, parce que l'économie est à la hausse, et troisièmement, parce que les taux d'intérêt sont plus bas que prévus. Encore là, ce sont de bonnes nouvelles.

* * *

(1455)

[Traduction]

LES NOMINATIONS FAITES PAR LE GOUVERNEMENT

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, à la page 88 du livre rouge on lit ceci:

Les conservateurs ont également pratiqué le copinage lorsqu'ils ont comblé des milliers de postes au sein des conseils . . .
En octobre, le Hill Times a signalé que, depuis 1993, 3 000 libéraux ont obtenu une nomination par favoritisme.

Le titre du livre rouge parle de création d'emplois. Comme les 1,4 million de chômeurs canadiens, je ne peux faire autrement que de me demander pour qui on crée des emplois.

Ma question s'adresse au premier ministre. Les 1,4 million de chômeurs doivent-ils devenir membres du Parti libéral pour obtenir des emplois?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a fait ces nominations en fonction de la compétence et du mérite. Nous ne croyons pas que l'allégeance politique soit une raison d'écarter qui que ce soit.

Je remercie le député d'avoir brandi le livre rouge. Cela me donne l'occasion de dire que les libéraux sont sommes satisfaits de leurs réalisations, mais le Parti réformiste tente de prendre ses distances par rapport à ses propres résultats.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre a nommé uniquement de loyaux libéraux au Sénat, ce qui est un bilan bien pire que celui des conservateurs qu'il décrie dans le livre rouge.

À la page 95 du livre rouge, on lit une série de statistiques qui traduisent le cynisme des Canadiens à l'égard de la politique. Selon un sondage Environics récent, 73 p. 100 des Canadiens pensent que le premier ministre a mal fait son travail.


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Le premier ministre est-il d'avis que ses milliers de nominations partisanes ont contribué à atténuer le cynisme au Canada?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, l'exemple du Sénat que le député a utilisé montre bien le ridicule de l'analyse réformiste. Le Sénat est une instance législative partisane, tout comme les Communes. Pourquoi le gouvernement voudrait-il y perpétuer indéfiniment une majorité conservatrice?

L'observation du député fait uniquement ressortir le ridicule de l'analyse réformiste. J'ai dit et je répète que les libéraux ont toute raison d'être fiers de leur bilan. Encore une fois, cela montre pourquoi le Parti réformiste n'a d'autre solution que de faire oublier ses résultats à lui.

* * *

LES CÉRÉALES

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Il a été déclaré aujourd'hui dans les actualités aux États-Unis que le Canada convient de limiter ses ventes de blé sur le marché américain à 1,5 million de tonnes.

Le ministre peut-il dire à la Chambre et aux agriculteurs de l'Ouest quelle est au juste la situation en ce qui concerne les expéditions vers le marché américain?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je me demande parfois ce que ces gens-là ne comprennent pas dans le mot «non». Soyons clairs.

Il n'y a pas d'écart. Il n'y a pas de limite. Il n'y a pas d'entente. Le Canada n'a aucunement l'intention d'aller dans ce sens.

Notre commerce céréalier avec les États-Unis est équitable. Il respecte toutes les règles de l'OMC et de l'ALENA. Il a fait trois fois l'objet d'une enquête par les États-Unis. Par trois fois, les pratiques commerciales canadiennes ont été justifiées. Nous allons continuer à nous défendre.

* * *

LA PROGRAMMATION DES ORDINATEURS

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre ou au porte-parole du gouvernement aujourd'hui. Elle concerne ce que l'on appelle, dans le monde de l'informatique, le problème du millénaire, le problème de l'an 2000.

Le député n'ignore peut-être pas que beaucoup de vieux macroordinateurs prévoyaient deux caractères numériques plutôt que quatre pour les dates. Dans le monde entier, il en coûtera des centaines de milliards de dollars pour modifier cela, ce qui aura aussi une incidence importante sur le gouvernement fédéral.

Où en sont les divers ministères du gouvernement à cet égard? Combien estime-t-on qu'il en coûtera pour redévelopper les programmes? Quelle incidence cela devrait-il avoir sur les recettes que le secteur privé reformule ses programmes au coût de centaines de millions de dollars?

(1500)

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le député a parfaitement raison de mentionner cette affaire, qui est complexe non seulement pour le secteur public, mais aussi pour le secteur privé. Nous y avons déjà consacré des millions de dollars et nous avons commencé à songer à la façon d'adapter nos divers réseaux informatiques.

Nous avançons, mais il reste beaucoup à faire et nous y voyons.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de Son Excellence Miloslav Vyborny, ministre de la Défense de la République tchèque.

Des voix: Bravo!

Le Président: C'est une journée assez spéciale, aujourd'hui. Au nom des députés, nous avons mis en oeuvre, ces dernières années, un programme qui consiste à inviter nos éminents Canadiens à la Chambre des communes pour que nous, les représentants de la population canadienne, reconnaissions leur mérite.

[Français]

Nous avons aujourd'hui l'honneur d'accueillir en cette Chambre de nouveaux récipiendaires de l'Ordre du Canada.

[Traduction]

Ces 31 femmes et hommes de toutes les régions du Canada se sont distingués dans différents domaines comme les arts, le bénévolat et la philanthropie, les affaires, les sciences, l'éducation et la fonction publique.

Je vais vous présenter un à un, à vous ainsi qu'à l'ensemble des Canadiens, les récipiendaires de l'Ordre du Canada. Je sais que vous aimeriez applaudir chacun d'eux individuellement, mais je vous prierais d'attendre que j'aie fini de les nommer tous avant de leur adresser vos applaudissements grandement mérités.

Quant à vous, chers concitoyens canadiens décorés de l'Ordre du Canada, lorsque je nommerai votre nom pour qu'on vous rende hommage ici, à l'endroit le plus honorable du Canada, je vous prierais de vous lever et de rester debout jusqu'à ce que je vous aie tous présentés.

Le très honorable Martial Asselin, Mary Frances Pratt, James Downey, Arthur Horne, James Kenneth Irving, Malak Karsh, Anne-Marie Alonzo, Sarah Anala, Simon Baker, Norman Barwin, Jenny Belzbert, Anthony Dobell, Frank Gunston, Joan Fletcher Harrison, Gerald Hatch, Simma Holt, Mary John, Charles Linkletter, Jean Loiselle, Lawrence Mysak, Sarah Weintraub Paltiel, Marilyn Ruth Peers, Jean-Henri Picard, Grace Davis Pine, Charles-Albert Pois-

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sant, Bernard Riedel, Raymond Setlakwe, Bernard Snell, Charles Alexander Thompson et Irving Zucker. Ce sont là les Canadiens exceptionnels décorés de l'Ordre du Canada.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je vous invite tous cordialement à accueillir les récipiendaires de l'Ordre du Canada dans la pièce 216, lors d'une réception qui suivra immédiatement la période des questions, si vous pouvez vous libérer de vos fonctions.

* * *

(1505)

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, la Chambre a l'air en vacances ou presque, mais j'aimerais demander au leader du gouvernement à la Chambre s'il peut nous dire si on revient lundi.

[Traduction]

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez sans doute que les partis continuent de négocier de façon régulière sur un certain nombre de questions qui seront présentées.

Nous avons l'intention de saisir la Chambre des projets de loi C-92 et C-93 et de voir comment les choses progresseront au cours des prochains jours. Je voudrais remercier tous les partis à la Chambre d'avoir collaboré à l'important travail que les Canadiens estiment que nous faisons dans cette enceinte.

______________________________________________


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LA MÉDIATION EN MATIÈRE D'ENDETTEMENT AGRICOLE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-38, Loi visant à faciliter la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers, modifiant la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-38, Loi sur la méditation en matière d'endettement agricole. Le projet de loi vise à modifier la législation sur l'examen de l'endettement agricole et à remplacer l'ancienne loi et son bureau d'examen par une loi prévoyant un service de médiation pour les agriculteurs qui risquent de se faire saisir leurs biens par des créanciers.

Je vais d'abord dire quelques mots sur la loi actuellement en vigueur, puis je passerai aux modifications qui y ont été apportées. J'aborderai ensuite certaines questions liées à ce projet de loi sur l'examen de l'endettement agricole. Les principales dispositions de ce projet de loi visent à mettre en place un processus d'examen de la situation financière des agriculteurs semblable à celui que prévoit la loi en vigueur, à instituer un service de médiation entre les agriculteurs et leurs créanciers et à remplacer l'ancien système, qui faisait davantage place à la confrontation. Je connais fort bien ce système, car j'en ai fait personnellement l'expérience avec des agriculteurs.

Le projet de loi prévoit la suspension des recours des créanciers contre les agriculteurs. Le véritable objectif du projet de loi est de faire patienter les créanciers si les agriculteurs et le bureau sont d'avis qu'il y a une possibilité de parvenir à une entente qui serait avantageuse tant pour les créanciers que pour le débiteur. C'est l'objet du projet de loi.

Le nouveau système remplacerait les membres du bureau nommés par des médiateurs qui seraient engagés par suite d'un processus d'appel d'offres. L'agriculteur menacé de saisie pourrait demander un sursis de procédures de 30 jours, lequel pourrait être renouvelé, à concurrence de 120 jours.

Dans les cas complexes, un expert en endettement et en réorganisation de la dette pourrait être engagé afin d'évaluer la situation financière de l'agriculteur. Cela se faisait aussi avec l'ancien système.

(1510)

Le plus grand changement, c'est la plus grande place qui est faite à la médiation. En fait, mon expérience personnelle me permet de dire que, dans bien des cas, l'ancien système fonctionnait comme un processus de médiation. Le projet de loi vient officialiser un processus qui existait déjà.

Le comité d'appel serait composé d'agriculteurs reconnus pour leur expertise financière et entendrait les plaintes concernant les décisions et les subventions, la prolongation ou l'interruption des procédures. C'est à cela que se résume le projet de loi.

La politique du Parti réformiste, même avant les dernières élections, était d'appuyer les mesures gouvernementales destinées à donner aux agriculteurs les instruments nécessaires pour devenir plus autonomes. Les agriculteurs utilisent ces instruments, dont certains existent depuis un certain temps déjà. Les agriculteurs les utilisent très efficacement et sont beaucoup plus capables maintenant qu'il y a quelques années de se débrouiller devant des situations financières complexes ou de négocier le rééchelonnement de leur dette.

Malheureusement, s'ils s'y connaissent aujourd'hui si bien en rééchelonnement de dette, c'est que certains d'entre eux ont dû passer par là à plusieurs reprises. Le secteur agricole a traversé des périodes extrêmement difficiles. Malheureusement, les gouvernements-et pas seulement le gouvernement libéral actuel, mais les gouvernements conservateurs qui l'ont précédé aussi-ont adopté des lois et mis en oeuvre des programmes qui ont causé beaucoup de tort aux agriculteurs.


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Il est très triste de devoir étudier une mesure législative destinée à aider les agriculteurs à rééchelonner leur dette ou à tenter de s'entendre autrement avec leurs créanciers pour qu'il leur reste quelque chose en cas de faillite ou de saisie par les créanciers. J'en tiens les gouvernements responsables, et pas seulement le gouvernement actuel. Il est clair que les gouvernements conservateurs ont mis en place plusieurs programmes qui ont aggravé la situation des agriculteurs et ont tellement perturbé les marchés que les agriculteurs ne peuvent pas travailler dans un marché libre, mais doivent le faire à l'intérieur du cadre défini par les différents programmes gouvernementaux. Cela a causé un tort incommensurable à la capacité concurrentielle des agriculteurs canadiens.

Les gouvernements libéraux qui ont précédé les conservateurs au pouvoir et le gouvernement libéral actuel doivent assumer une part de responsabilité pour les programmes qui ont remplacé les règles du marché, qui seraient beaucoup plus avantageuses pour les agriculteurs.

Bien que cette mesure législative représente une amélioration par rapport à la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, elle ne règle pas le problème principal auxquel les agriculteurs sont confrontés aujourd'hui. Le grand problème des agriculteurs, c'est l'intervention excessive des gouvernements dans le secteur agricole. Je ne parle pas seulement du gouvernement canadien, bien qu'il ait certainement été coupable d'une telle intervention excessive au cours des 20 ou 30 dernières années. Je parle aussi des gouvernements européens qui ont fait du dumping, de façon tout à fait déloyale, sur des marchés partout dans le monde qui, dans une situation de concurrence, dans une situation de commerce loyal, auraient été les marchés des agriculteurs canadiens.

Dans l'industrie du grain, par exemple, le gouvernement américain a mis en oeuvre son programme de subventions aux exportations, qui a affaibli les marchés partout dans le monde. Des gouvernements canadiens, libéraux et conservateurs, ont mis en oeuvre des programmes qui font que c'est extrêmement difficile pour les agriculteurs de faire des affaires. C'est ce qu'ils veulent. Les agriculteurs n'ont pas le choix à cause des accords commerciaux en vigueur.

(1515)

Nous sommes retournés dans une certaine mesure au système de libre entreprise que les agriculteurs veulent, mais nous avons encore beaucoup de progrès à faire et le gouvernement n'a certainement rien fait pour faciliter le changement. Il devrait être réprimandé pour cela.

J'ai mentionné au début de mes remarques que je sais comment fonctionne l'ancienne Loi sur l'examen de l'endettement agricole. J'ai vu comment les comités fonctionnent. Dans certains cas, ce système a aidé les agriculteurs à se sortir de situations difficiles. Malheureusement, dans la plupart des cas, les agriculteurs doivent cesser leurs activités. Au moins, dans certains cas, ils peuvent cesser leurs activités sans avoir à traîner des dettes pendant des années encore.

Dans d'autres cas, l'issue était plus heureuse. Des agriculteurs qui ont eu recours aux bureaux d'examen de l'endettement agricole ont réussi à garder leurs fermes. Dans certains cas, ils louaient leurs terres à la Société du crédit agricole, qui en était devenue propriétaire à la suite du processus d'examen de l'endettement agricole. Les agriculteurs pouvaient cultiver les terres et, parfois, réussissaient à les racheter à la Société du crédit agricole et à d'autres créanciers.

L'ancienne Loi sur l'examen de l'endettement agricole fonctionnait dans certains cas. Elle était bonne pour certains agriculteurs. Elle tenait compte aussi des désirs des créanciers. Elle réussissait à amener les agriculteurs et les créanciers à travailler ensemble pour essayer de conclure un arrangement avantageux pour les deux parties.

Par contre, il y avait beaucoup de chevauchement entre ce programme et les programmes provinciaux déjà en place. J'en ai eu personnellement l'expérience. J'ai été embauché comme consultant par le ministère de l'Agriculture de l'Alberta pour travailler avec les agriculteurs. Je sais que la Loi sur l'examen de l'endettement agricole offraient des services qui étaient offerts aussi par la province et par le secteur privé. Ce chevauchement était tout à fait inutile. Malheureusement, la nouvelle loi n'y changera rien mais, dans de nombreux cas, elle fait intervenir le gouvernement fédéral dans des champs de compétence provinciale.

Les services que le médiateur et d'autres offrent aux agriculteurs pour les aider à conclure des ententes avec leurs créanciers sont fournis par des consultants privés et par les gouvernements provinciaux. Les provinces ont eu recours aux services contractuels d'agriculteurs pour faire ce travail. Il y a beaucoup de chevauchement.

Il y a dix ans, lorsque la Loi sur l'examen de l'endettement agricole a été adoptée, elle avait son utilité. Les provinces remplissaient cependant cette fonction beaucoup mieux que ce n'est le cas avec la loi fédérale. À la fin des années 80, l'intervention du gouvernement sur les marchés a acculé des agriculteurs à la faillite, ce qui a fait baisser les prix à une vitesse alarmante.

Je crois que les gouvernements provinciaux avaient un rôle à jouer. Les consultants privés n'étaient pas disponibles et ils ne possédaient certainement pas le niveau de formation voulu pour pouvoir aider les agriculteurs à résoudre leurs problèmes. L'intervention des gouvernements provinciaux avait alors un sens. Ils avaient quelque chose à apporter.

J'ai travaillé pour le secteur agricole albertain. j'ai travaillé auprès de douzaines et de douzaines d'agriculteurs en tant que consultant en gestion d'entreprise. Je les ai aidés à traverser des situations difficiles.

(1520)

J'ai souvent travaillé comme intermédiaire auprès de créanciers afin de faciliter la conclusion d'ententes, parfois avec beaucoup de succès, mais dans bien des cas il a malheureusement été impossible de sauver l'entreprise. Toutefois, les agriculteurs qui étaient obligés de quitter leur exploitation arrivaient souvent à récupérer un petit quelque chose pour les aider à survivre.

Je crois que ce service était utile, mais je m'interroge sérieusement sur l'utilité du chevauchement. Je sais maintenant que les consultants privés ont une bien meilleure formation, qu'ils sont là et qu'ils sont très disposés à aider les agriculteurs à traverser ces


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énormes difficultés et, surtout, à travailler avec eux avant que la situation devienne tellement désespérée qu'ils doivent s'adresser au Bureau d'examen de l'endettement agricole ou avoir recours à ce nouveau système de médiation pour les entreprises agricoles.

Je crois que cette mesure législative comporte quelques améliorations. J'ai mentionné un peu plus tôt quelques raisons de croire que cette législation offrait un meilleur cadre de travail. Toutefois, la somme d'agent engagée me préoccupe, d'abord parce que le budget de réalisation est beaucoup trop gros. Ce n'est pas un jugement arbitraire de ma part. En ce moment-même, le Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan s'occupe d'environ la moitié de l'ensemble des cas, au Canada, au coût de 700 000 $. Pourtant, le budget de ce nouveau bureau de l'endettement agricole est de 2,2 millions de dollars. On peut se demander si le gouvernement ne prévoit pas une hausse radicale du nombre d'agriculteurs qui auront besoin de ce service. Il faut bien qu'il y ait une raison pour que le budget soit si élevé par rapport au budget actuel.

Il faut se demander si le gouvernement ne prévoit pas réellement une augmentation du nombre d'agriculteurs ayant de graves problèmes financiers et devant invoquer cette loi pour se dépatouiller de leurs difficultés financières, qui obligent trop souvent les agriculteurs à se retirer et à perdre tous leurs biens, avec pour seule consolation de ne plus avoir à payer leurs dettes.

Comme les députés le savent, beaucoup de députés réformistes sont des agriculteurs ou l'étaient avant d'être élus à la Chambre. Sur 52 députés, entre 14 et 17 ont de l'expérience en tant qu'agriculteurs, possèdent une ferme ou ont déjà travaillé pour l'industrie de l'agriculture. C'est vraiment un grand nombre dans un caucus de 52 députés. Quand des réunions sont prévues pour discuter de questions agricoles, il n'est pas rare de voir de 14 à 16 députés réformistes y assister. L'intérêt pour l'agriculture n'a son égal dans aucun autre caucus. Le niveau de connaissances en agriculture n'a son égal dans aucun autre caucus de la Chambre.

L'importance que le caucus réformiste accorde à l'agriculture, aux producteurs, aux éleveurs et autres intervenants de l'industrie agricole n'a son égal dans aucun autre caucus de ce pays. Nous avons prouvé que nous étions dévoués à la cause des agriculteurs, et nous continuerons à l'être. À la veille des élections, qui ne sauraient tarder, nous demandons aux agriculteurs, et à tous les Canadiens, de prendre connaissance du programme de chaque parti. Nous leur demandons d'étudier de près le programme de chaque parti non seulement en ce qui concerne l'agriculture, mais dans tous les domaines. Je leur demanderais ensuite de regarder le programme des réformistes et de le comparer à celui des autres partis, pour ce qui est de l'agriculture et des autres domaines.

(1525)

Qu'on fasse la campagne sur les questions à débattre et non les étiquettes que chaque parti essaye de coller sur les autres. Qu'on bannisse de la campagne les injures et les coups bas. J'invite tous les autres partis politiques à comparer leur programme au nôtre, que ce soit en matière d'agriculture ou dans d'autres domaines. Si cette comparaison a lieu pendant la campagne, le Parti réformiste formera le gouvernement après les élections.

Tout ce que je demande c'est que les partis comparent les programmes pour que les Canadiens puissent faire de même et votent pour celui qui a les meilleures idées, les meilleures politiques, les meilleurs candidats pour les mettre en oeuvre et le meilleur chef. Je sais qu'ils choisiront le Parti réformiste.

Un autre problème avec cette mesure législative, c'est qu'elle donne trop de place au favoritisme. Cela n'a rien d'étonnant car, toute la journée, les députés ont pointé du doigt les cas de favoritisme libéral, tous les libéraux nommés au Sénat depuis que ce gouvernement est au pouvoir. C'est incroyable.

Même à l'époque du gouvernement Mulroney, il y avait un sénateur élu, Stan Waters de l'Alberta. Comme par hasard, c'était un réformiste, mais ce qui importe c'est qu'il avait été élu au Sénat. Il avait établi un précédent.

En Colombie-Britannique, la loi prévoit la possibilité d'élire des sénateurs. Le premier ministre de la Colombie-Britannique a demandé que les sénateurs soient élus. Les Albertains et le gouvernement de l'Alberta ont demandé la même chose. Qu'avons-nous obtenu? Depuis les dernières élections, tous les nouveaux sénateurs ont été choisis par favoritisme et nommés par le premier ministre du pays. C'est tout à fait inacceptable. Et ce n'est que le début de la liste des nominations politiques. Elle est très longue. Je n'ai pas le temps d'en faire la lecture complète maintenant.

Ce projet de loi ouvre la porte à d'autres nominations politiques. C'est totalement inacceptable. Cette raison à elle seule suffirait pour que l'on refuse d'appuyer le projet de loi. Nous refusons d'appuyer une mesure qui créera d'autres postes à combler par nominations politiques.

Je reconnais que ce projet de loi n'est pas fondamental. Il apporte des modifications mineures à la Loi sur l'examen de l'endettement agricole. Il traite de questions secondaires, qui ne touchent qu'un nombre limité de personnes, alors qu'il devrait résoudre des questions beaucoup plus cruciales. Il propose au moins certaines mesures qui amélioreront la loi existante.

Je tiens à féliciter le gouvernement de ces quelques modifications. Par ailleurs, je le répète, bien d'autres modifications auraient dû être proposées qui ne l'ont pas été. Le budget prévu est de 2,2 millions mais, si nous pouvions avoir confiance dans la capacité du gouvernement de prévoir avec précision, je pense que les agriculteurs seraient très inquiets parce que c'est très au-dessus de ce qui devrait être nécessaire considérant ce qu'il en coûte actuellement.

Au lieu de s'occuper de cette mesure tout de suite avant les élections, le gouvernement aurait dû s'attaquer à l'amélioration du transport des grains, en autorisant la concurrence, en donnant aux agriculteurs des recours contre les chemins de fer et les manutentionnaires. Ce n'est pas ce qu'il fait. Il devrait nous présenter une mesure éliminant le monopole de la Commission canadienne du blé et la rendant plus responsable vis-à-vis des agriculteurs; une mesure qui donnerait aux agriculteurs la liberté de commercialiser leurs


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produits par l'intermédiaire de la Commission ou d'une compagnie céréalière, ou encore par eux-mêmes. Ce n'est pas ce que le gouvernement nous propose et c'est pourquoi nous parlons de cette mesure. Nous aurions dû consacrer notre temps à des choses bien plus importantes et c'est pour cette raison que je ne vais pas en dire davantage.

(1530)

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, dans le comté de Lévis, il n'y a pas un très grand nombre d'agriculteurs, mais je tenais quand même à intervenir dans ce débat. D'ailleurs, chaque fois qu'on parle d'agriculture à la Chambre des communes, je suis intéressé par le sujet pour deux raisons.

Étant fils d'agriculteur, j'ai été sensibilisé, dès mon jeune âge, au problème agricole. Les députés du Parti réformiste viennent de dire qu'il existe beaucoup de problèmes sur le plan agricole et agroalimentaire actuellement au Canada, plus particulièrement au Québec. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas notre part des dépenses fédérales en agriculture, pourtant, on paie 24 p. 100 pour l'agriculture.

On étudie aujourd'hui le projet de loi C-38, Loi visant à faciliter la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers. On traite de cela, parce qu'il y a de plus en plus d'agriculteurs et d'agricultrices qui ont de sérieux problèmes financiers, au Québec et au Canada. Pourquoi ont-ils autant de problèmes financiers? C'est parce qu'ils sont soumis à un contexte international de libre-échange qui fait la vie dure aux agriculteurs. C'est aussi parce que les politiques du gouvernement fédéral amènent plusieurs agriculteurs au bord de la faillite, et malheureusement, trop souvent, directement à la faillite.

Cette loi, bien qu'imparfaite, a pour effet d'adoucir un peu la situation vraiment intenable que vivent certains agriculteurs. Pour faire de l'agriculture, aujourd'hui, il faut investir, il faut s'endetter de plus en plus. Pour obtenir une certaine rentabilité, les gens sont obligés de fusionner leurs propriétés, leurs activités agricoles en achetant les terres du voisin. Dans le rang où je vivais, il y avait jadis sept ou huit agriculteurs, aujourd'hui, il n'y a plus qu'une propriété agricole, une entreprise agricole.

La personne qui doit gérer tout cela doit s'endetter énormément, prendre énormément de risques, d'autant plus que la relève agricole n'est pas là. On ne se bouscule pas dans le domaine agricole actuellement pour prendre la relève. Pourquoi cela? C'est en raison du fort endettement que cela exige.

Il faut avoir la vocation agricole, il faut presque être missionnaire aujourd'hui pour être agriculteur. C'est un domaine extrêmement exigeant. Comme le porte-parole du Bloc québécois, le député de Frontenac, le rappelait ce matin, c'est un travail de sept jours par semaine. C'est un travail aussi exigeant que celui de député. Il faut être ici durant la semaine et la fin de semaine chez nous, participer aux activités. C'est très exigeant.

Mais les agriculteurs, on ne les fait pas pleurer avec ça. Les députés ne feront pleurer aucun agriculteur québécois quant au nombre d'heures qu'ils doivent faire, parce que les agriculteurs et les agricultrices sont habitués, depuis des années, à faire un nombre incalculable d'heures pour faire vivre leur famille. Lorsque tout va bien, le bénéfice que peut véritablement retirer un agriculteur, un producteur agricole, c'est lorsqu'arrive l'âge de la retraite et qu'il réussit à convaincre son fils ou sa fille ou plusieurs de ses fils à prendre sa relève, à contracter un prêt agricole et finalement, à bénéficier peut-être de quelques douceurs de la vie.

(1535)

Pendant toutes ces années, pendant 30 et parfois 40 ans, les agriculteurs et les agricultrices doivent travailler très fort. Je dis agricultrices, parce que c'est un domaine, au Québec, où, s'il y a un exemple d'entreprise familiale, c'est bien celui du monde agricole.

Les femmes d'agriculteurs ont autant de mérite que les producteurs agricoles. Dans ce domaine, il y a un partage des tâches qui se fait depuis des années. La femme est souvent responsable de la comptabilité, qui devient de plus en plus compliquée. Il y a aussi la gestion du lait.

Ayant vécu cela lorsque j'étais jeune, je sais de quoi je parle. Mais les gens n'en ont pas idée. Il m'arrive parfois d'être scandalisé d'entendre les gens de la ville-j'en suis maintenant, et ces gens méritent aussi leur salaire, ils peuvent parfois avoir aussi leurs problèmes, mais ils n'ont pas des horaires comme les agriculteurs-faire des commentaires que je trouve déplorables.

Ils pensent que le gouvernement fait vivre les agriculteurs et subventionne largement l'agriculture. Finalement, dans l'esprit de plusieurs, comme il y a beaucoup de citadins qui font de tels commentaires, ils finissent par influencer les législateurs et ceux qui sont au gouvernement, j'entends surtout le gouvernement fédéral, et ils finissent par penser que c'est justifié de couper dans l'agriculture.

Alors, les gens ont une opinion à courte vue, car si notre agriculture est moins subventionnée, si on n'aide pas les producteurs agricoles dans cette activité, on parle du niveau primaire, cela aura des conséquences dans l'industrie de la transformation et donc dans le secteur tertiaire, celui de la commercialisation, la vente des produits agricoles, et en bout de ligne, c'est là qu'on rencontre les consommateurs.

J'écoutais plus tôt l'excellent critique à l'agriculture, le député de Frontenac pour le Bloc québécois, qui nous rappelle souvent au caucus l'importance de l'agriculture au Québec, et l'importance de l'agriculture sans doute aussi au Canada et dans l'Ouest, tel que le défend le Parti réformiste. Mais, on ne le fait pas assez.

Si je me base sur les années où j'ai été l'attaché politique de Jean Garon, le ministre de l'Agriculture du Québec lors de l'élection du Parti québécois, de 1976 à 1996-je n'hésite pas à le dire, le meilleur ministre de l'Agriculture que le Québec ait jamais connu-pendant cette période, il avait établi un concept, car il n'était plus seulement question d'agriculture, mais c'était un concept qu'on appelle l'agroalimentaire, c'est-à-dire faire le lien entre la production, la transformation et la commercialisation. Parce que cela se tient; c'est un tout.


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De plus M. Garon, à l'époque, parlait de l'importance de l'autosuffisance, l'importance d'acheter des produits fabriqués chez nous. C'est extrêmement important. Pourquoi? Parce que ça fait vivre davantage les habitants du secteur rural.

S'il y a un problème actuellement dans les communautés rurales au Canada, c'est parce qu'on a sûrement négligé l'agriculture. Sans agriculture, les grandes régions rurales ne peuvent vivre et je pense que le problème commence à la base. On a perdu de vue les problèmes de la communauté agricole, des producteurs agricoles, des gens qui font la transformation des produits agricoles et aussi de ceux qui en font la vente. C'est extrêmement difficile dans ce contexte de mondialisation.

Cette loi vient donc adoucir quelque peu ceux qui sont mal pris, parce qu'on a vu trop souvent des situations où des gens étaient acculés à la faillite. Je sais que vous savez comment cela fonctionne, mais il est toujours bon de le répéter. Les gens obtiennent un prêt agricole, mais souvent, ils ont une partie du financement à débourser, à produire eux-mêmes.

Les parents, voulant tellement que leur fils ou leur fille leur succèdent, sont quelquefois portés à prendre une partie des nouveaux avoirs que leur procure la vente de leur propriété à leur fils ou leur fille, et de le leur prêter pour qu'ils aient une source de revenu afin de combler cet écart-là. Ce qui fait qu'à un moment donné, on doit à la fois rendre le prêt agricole et ce qui a été emprunté des parents. Il vient un temps où ce n'est plus possible de rembourser, il n'y a plus de rentabilité, et certains sont presque conduits à la faillite.

(1540)

Alors, cette loi permet d'adoucir les coins. Elle permet de créer une nouvelle instance au niveau fédéral pour qu'il y ait une médiation, pour que les gens aient justement la possibilité, avant que ce soit la faillite, de s'arranger pour que l'activité de la ferme puisse se poursuivre.

À quoi cela avancerait-il de mettre quelqu'un en faillite s'il n'y a personne d'autre qui veut prendre cette propriété, si ce patrimoine agricole, qui s'étale parfois sur des générations, était laissé à l'abandon parce qu'on voudrait éponger une dette qui est devenue insupportable pour une famille? Or, je pense que ce moyen est bon.

Le Bloc québécois, par son représentant à l'agriculture, le député de Frontenac, à l'étape du rapport de ce projet de loi, a proposé plusieurs amendements au comité. Nous aussi, tout comme le troisième parti, nous avions des réserves. On s'inquiétait notamment de toute la question des nominations politiques. On voudrait que ce soit un choix non partisan, qu'on mette fin à la tradition fédérale des nominations politiques, de récompenser les candidats défaits. Il y en aura un lot à la prochaine élection fédérale.

Je sais que plusieurs s'attendent à remporter certains comtés représentés par le Bloc québécois, car ils disent: «On va aller dans certains comtés, même si le Bloc est très fort.» Mais il y aura des reconnaissances politiques et bientôt, on retrouvera sûrement un certain nombre de ces personnes qui siégeront sur ce genre de commission que le projet de loi C-38 vise à créer actuellement.

Il est très difficile d'arracher des amendements aux libéraux au comité, comme c'est l'habitude du gouvernement. Cela vient de l'opposition, des députés souverainistes, de gens qui veulent protéger les intérêts des Québécois, donc ils ne peuvent pas appuyer ça, c'est eux qui ont le pouvoir. Alors, ils rejettent les amendements.

Malgré cela, en faisant preuve d'une grande objectivité, on reconnaît que c'est un pas dans la bonne direction. Cela peut faire économiser un million de dollars à l'ensemble des contribuables, on votera en faveur de ce projet de loi en troisième lecture.

Beaucoup de lacunes ont été relevées par le député de Frontenac. Malheureusement, ces lacunes ne seront pas corrigées. Mais à défaut du meilleur, il faut prendre le moins pire. Cette loi étant une amélioration par rapport à ce qui existait auparavant, nous allons donc appuyer ce projet de loi.

Dans le reste de mon intervention, j'aimerais rappeler ce que je disais au début, c'est que le Québec n'obtient pas sa part des dépenses fédérales en matière d'agriculture. Selon les données du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, on n'a que 10 p. 100 environ des dépenses fédérales dans ce secteur pour, à peu près, 311 millions de dollars.

Pourtant, l'apport du Québec dans les recettes monétaires agricoles canadiennes est d'environ 16,4 p. 100. Cela grimpe à 21,4 p. 100, si on considère, non seulement l'agriculture, la partie production, mais l'ensemble du concept agroalimentaire. En ne se basant que sur la transformation dans ce cas-ci, on se rend compte que ce manque à gagner est de 201 millions de dollars de plus.

Au cours des années 1985-1986 à 1994-1995, donc, à l'époque des conservateurs, les dépenses fédérales en agroalimentaire pour le Québec n'ont atteint que 9 p. 100. Pendant cette période, les recettes monétaires agricoles se sont élevées à 16,3 p. 100. Donc, pour ces dix années, le manque à gagner cumulatif pour le Québec s'élevait à trois milliards de dollars. Et on pourrait continuer.

On aurait pu penser que les libéraux auraient corrigé cela, mais non. Ça continue et on est toujours soumis à la même iniquité. Rappelons un élément important. Le chiffre de trois milliards revient encore. On a aboli le Tarif du Nid-de-Corbeau. Or, qu'a donné l'abolition du Tarif du Nid-de-Corbeau? On a accordé trois milliards de dollars en mesures compensatoires aux fermiers de l'Ouest, parce que le Parti réformiste réclamait cela. Dans ce cas, il faut rendre hommage aux députés du Parti réformiste, ils ont obtenu trois milliards de dollars en compensation pour les agriculteurs de l'Ouest. Nous, du Québec, je ne sais pas ce qu'on a fait, on a demandé notre part de compensation aussi, mais au lieu des compensations, on a obtenu des coupures dans le domaine agricole.

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On n'a déjà pas notre part, voilà qu'on nous coupe davantage. Une somme de 107 millions a été coupée en 1995-1996; en 1996-1997, c'est 30 millions supplémentaires, en plus des autres coupures; pour 1997-1998, voilà que c'est 113 millions de coupures additionnelles. C'est inacceptable. Les consommateurs pensaient


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être au purgatoire, voilà qu'on se dirige vers l'enfer. C'est de mal en pis. Il faut le dénoncer avant les prochaines élections.

On ne le dira jamais assez. Les députés du Parti réformiste ont parlé de l'agriculture, parce qu'ils se préoccupent des électeurs de l'Ouest, mais je leur dis qu'au Québec, nos agriculteurs et nos agricultrices souffrent également.

Au fédéral, malgré qu'on représente 24 p. 100 de la population, nous ne recevons pas notre part. Tant qu'on sera dans ce régime, tant que la population du Québec n'aura pas décidé de faire la souveraineté, parce qu'on paie des impôts ici, à Ottawa, nous, du Bloc québécois, continuerons à réclamer notre part.

Des compensations de trois milliards qui proviennent de l'abolition du Tarif du Nid-de-Corbeau, on en exige autant. Malheureusement, ce projet de loi adoucira un peu la plaie de plusieurs agriculteurs, mais il ne règle rien. Il faudra que le ministre de l'Agriculture du Canada mette ses culottes et règle les problèmes, s'entende avec le gouvernement du Québec, notamment pour éviter des dédoublements.

Oui, j'ai applaudi dans cette Chambre, il y a quelque mois, la fusion des trois agences fédérales d'inspection des aliments. Il y en avait une qui relevait du ministère de la Santé, une autre de celui de l'Agriculture et une troisième, d'un autre ministère. On les a regroupées sous une seule agence.

En réalité, il faudrait absolument mettre fin aux dédoublements dans ce domaine et que le Québec reçoive sa compensation financière, parce qu'il est plus proche des citoyens. L'agriculture, cela ne se fait pas dans un bureau à Ottawa. L'élevage des vaches, la pêche, ou autre, cela ne peut se faire dans un bureau à Ottawa, il faut que le gouvernement se rapproche du milieu. Le gouvernement le plus près est le gouvernement du Québec. Pourquoi ne pas travailler davantage de concert au lieu de structurer et de réglementer, ce qui parfois n'est d'aucune utilité pour le Québec?

Je conclus là-dessus en invitant mes collègues d'en face à réfléchir, eux qui, malheureusement, voyant venir le vendredi, ont déjà quitté. On ne peut pas parler des absents, mais on n'est pas très nombreux en ce jeudi pour parler d'agriculture, ce qui est pourtant un domaine extrêmement important. Si on veut travailler de nouveau à l'économie, si le premier ministre était sérieux lorsqu'il parle d'économie et de «jobs, jobs, jobs», il interviendrait, il prononcerait des discours qui s'adressent au monde agricole.

Je répéterai une phrase qui peut faire rire mais qui est vraie. Dans le domaine agricole, certains ministres libéraux, comme le disait Jean Garon, se comportent comme des moustiques dans un camp de nudistes, ils ne savent pas par où commencer. Je m'excuse de cette petite anecdote, alors que la situation est triste.

[Traduction]

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir traiter du projet de loi C-38. Avant d'entrer dans le vif du sujet, je dois féliciter le député du Bloc de tenter de faire comprendre à la Chambre l'importance de l'agriculture pour le Québec. Les autres députés réformistes et moi avons toujours été reconnaissants aux bloquistes de s'intéresser d'une façon si particulière à l'agriculture. Ils se rendent compte qu'il faut avoir le ventre plein avant d'entreprendre quoi que ce soit.

(1550)

Le projet de loi C-38 accélère le règlement des problèmes des agriculteurs. Il réduit la période de souffrance, mais je préférerais tout de même qu'on puisse s'en passer.

La Loi sur l'examen de l'endettement agricole a été créée en 1986 suite à des circonstances exceptionnelles. La fin des années 70 et le milieu des années 80 ont été une période difficile dans le secteur agricole. De nombreuses familles ont dû abandonner l'agriculture, car elle n'était pas rentable. Pourquoi n'était-elle pas rentable? En raison d'une ingérence indue du gouvernement.

Certains députés se rappellent l'élection, en 1970 ou 1971, du gouvernement libéral du premier ministre Trudeau. À cette époque-là, le slogan était: Nous allons créer une société juste. Cela sonnait bien. Tous les habitants de l'Ouest pensaient que les conditions des agriculteurs de l'Ouest, de même que celles des usines de transformation de l'Ouest et de l'industrie des cultures spéciales, allaient peut-être s'améliorer.

La première chose que ce gouvernement libéral a faite, c'est d'augmenter d'un coup de 68 p. 100 les salaires des manutentionnaires de céréales. Ce geste paraissait démesuré bien qu'à l'époque, les manutentionnaires ne gagnaient probablement pas autant qu'ils auraient dû.

Cela a entraîné toute une série de problèmes. En raison des faibles prix des céréales, la deuxième chose que le gouvernement de l'époque a faite, c'est de mettre sur pied un programme de réduction des stocks de blé. Monsieur le Président, j'ignore si vous étiez à la Chambre à cette époque-là ou si vous vous rappelez ce programme. Il visait à encourager les agriculteurs à pratiquer la jachère et à réduire l'offre. Ils ont été payés 8 $ l'acre pour mettre leurs terres en jachère pour l'été.

C'était une erreur grave. L'année suivante, la récolte a été déficitaire et le milliard de boisseaux de trop dont tout le monde avait parlé, et qui était censé déprimer les prix, était disparu. Il n'y était plus, parce qu'à cause d'une mauvaise gestion, on avait mal évalué les quantités en réserve. Cette situation s'est produite parce qu'il y avait trois ou quatre céréalières différentes dans chaque ville et que chaque céréalière avait plus ou moins relevé le nombre de boisseaux dans la région, les avaient additionnés et avait obtenu un total qui était trois ou quatre fois supérieur à ce qu'il aurait dû être.

En 1972, les prix du grain ont atteint des sommets sans précédent. Le prix du boisseau est soudainement passé de 1,50 à 5 et 6 $. L'inflation sévissait. Les agriculteurs ont fait de très bonnes affaires. Ils ont commencé à être optimistes. On encourageait les Canadiens à dépenser.

Le pire, c'est que les représentants du gouvernement ont invité les agriculteurs à se spécialiser. Si un agriculteur voulait emprunter


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pour améliorer son cheptel de vaches laitières, sa laiterie ou son entreprise porcine, et s'il demandait 5 000, 10 000 ou 15 000 $, la Société du crédit agricole disait: «Pas question. Vous devez vous organiser et centrer votre énergie sur une activité.» Si on ne demandait pas un emprunt d'au moins 50 000 ou 100 000 $, on essuyait un refus.

Les agriculteurs ont donc décidé de se spécialiser. De petites exploitations ont tout abandonné et de grandes exploitations sont apparues. Avant qu'on s'en rende compte, de nombreux agriculteurs avaient des dettes dont ils ne pouvaient déjà assumer les frais, quand les taux d'intérêt se sont tout à coup mis à grimper sous la pression de la masse monétaire.

(1555)

Si je n'avais pas été à l'étranger en 1981 et si je n'avais pas vu ce que l'inflation avait fait à d'autres pays, je ne me serais peut-être pas rendu compte des ravages qu'elle pouvait faire au Canada. Cependant, quand les taux d'intérêt ont touché la barre de 24 p. 100, les agriculteurs qui avaient des dettes variant entre 100 000 et 200 000 $ ont alors vu leurs dettes augmenter du quart chaque année, de sorte qu'ils ne pouvaient plus en assumer les frais.

Voilà ce qu'était la société juste. J'ignore si c'était une société juste pour les banquiers et les financiers. Je sais qu'il y a eu à l'époque un grand débat sur la question de savoir s'il fallait supprimer le tarif du Nid-de-Corbeau et prendre certaines autres mesures.

Je n'oublierai jamais une émission que je regardais un soir, Front Page Challenge. Les députés se rappellent peut-être M. Gordon Sinclair qui était un des spécialistes invités à l'émission. On y parlait de la forte récession qui frappait le pays. M. Sinclair, qui ne réussissait plus à contenir son impatience lança soudain: «Quelle récession? Les taux d'intérêt sont à 24 p. 100! Quelle récession?» Les institutions financières et les investisseurs réalisaient des profits énormes. Les gens ne se rendaient pas compte que nous perdions de plus en plus d'agriculteurs et d'entreprises.

Je n'oublierai jamais la caricature qu'on avait fait de la grosse vache laitière libérale. Vous vous rappelez peut-être cette image, monsieur le Président: il y avait cette vache énorme que les agriculteurs de l'Ouest nourrissaient aussi vite qu'ils pouvaient. Ils étaient efflanqués, pauvres, surmenés et avaient presque l'air de squelettes comparés à la vache grasse. Tandis que les agriculteurs de l'Ouest nourrissaient cette grosse vache laitière libérale, ils se trouvaient en réalité à nourrir les capitalistes de l'Est, qui récoltaient l'argent que leur procurait ce taux d'intérêt de 24 p. 100.

Le pire, c'est que lorsqu'on a une grosse vache laitière comme celle-là, il en sort une matière organique dont il faut se débarrasser parce que, sinon, elle est nocive pour l'environnement. Par conséquent, cet engrais naturel était déversé sur les provinces de l'Est qui en étaient presque enterrées. Nous avions donc trois petits problèmes: les agriculteurs de l'Ouest mouraient de faim, les capitalistes de l'Est s'enrichissaient scandaleusement et payaient davantage d'impôts, et les provinces de l'Atlantique se trouvaient couvertes d'une matière qui ne leur plaisait pas vraiment. Telle est la situation qui a enfoncé les agriculteurs de l'Ouest dans un profond endettement.

Avec le recul, nous pouvons dire que, si nous avions pu éviter les taux d'intérêt élevés à l'époque, il y aurait aujourd'hui beaucoup plus de dirigeants de petites entreprises encore en affaires dans l'Ouest, et que l'exploitation agricole familiale n'en serait pas là.

Mais, je veux en revenir au Bureau d'examen de l'endettement agricole. Ce bureau était au moins disposé à examiner la situation des exploitations rentables, à les soutenir, à aider ces agriculteurs à se réorganiser.

Le projet de loi C-38 a pour seul but, en somme, d'amener les agriculteurs à renoncer à leur exploitation. Je suis convaincu que, lorsqu'on en est arrivé là, les conseils ne suffisent pas. Comme les députés le savent, lorsque les banques ou les institutions financières s'apprêtent à saisir des actifs, elles peuvent s'appuyer sur les meilleurs services juridiques et les meilleurs conseils qui soient. Elles ne s'inquiètent pas des coûts. Lorsque l'agriculteur est placé dans une situation aussi difficile, il n'a aucun moyen financier. Il n'a pas les ressources pour s'offrir des services de la même qualité.

Si le gouvernement se souciait vraiment des agriculteurs et voulait faire quelque chose pour eux, il mettrait des fonds à leur disposition pour qu'ils puissent obtenir les conseils de spécialistes, car les banques et les institutions financières ont un net avantage.

À cette époque, sous un gouvernement libéral, je crois, il y a eu un très grand débat sur le tarif du Nid-de-Corbeau. Je crois que quelqu'un avait illustré ses propos en montrant un corbeau pendu à la Chambre. Cela avait donné lieu à un véritable affrontement. On disait que les gouvernements étaient disposés à sortir les agriculteurs de l'Ouest du pétrin avec cette subvention en leur versant 15 milliards de dollars. Cela correspondait à la valeur qu'on attribuait à l'époque à la subvention.

(1600)

Certaines organisations agricoles se sont entêtées, ne se rendant pas compte à quel point la situation était critique. La somme leur paraissait insuffisante. Elles pensaient qu'il n'était pas dans l'intérêt des agriculteurs de l'Ouest d'accepter l'offre et elles l'ont rejetée. Comparativement aux 15 milliards de dollars offerts en 1978 ou en 1979, la somme de 1,5 milliard de dollars aujourd'hui paraît trois fois rien. L'ouest du Canada a commis de graves erreurs dans le temps.

Lorsque nous examinons la situation dans le secteur du transport des céréales, nous voyons que la Chambre a pris certaines mesures au cours de la dernière année. Nous avons versé 1,5 milliard de dollars pour nous débarrasser de la subvention du Nod-de-Corbeau, mais nous n'avons pas le réseau de transport qui devrait être en place.

Nos collègues de Peace River et de Végréville nous ont dit aujourd'hui que les agriculteurs connaissent une période difficile, à cause de toutes les céréales qui sont dans leurs silos ou encore dans les champs. Le projet de loi C-38 sera probablement invoqué plus que jamais pour liquider les actifs des agriculteurs.

Tout cela est très triste. Lorsque la situation est aussi désespérée qu'elle l'est actuellement, les agriculteurs devraient avoir d'autres recours, comme ceux qu'ont les grandes entreprises, au lieu de devoir se contenter des services de consultations qu'on leur offre. Ils demandent de jouir de la protection de la loi sur les faillites le


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temps de voir s'il n'y a pas moyen de s'en sortir. Ils n'ont pas l'actif nécessaire pour se protéger.

Comme le député du Bloc l'a dit, la production de denrées alimentaires doit passer en premier. Si nous sommes incapables de protéger notre approvisionnement alimentaire ou nos producteurs, le pays court à sa perte. Je l'ai toujours dit. Même si nous ne souscrivons pas à beaucoup des idées des membres bloquistes du Comité de l'agriculture, c'est un point sur lequel nous nous entendons. L'agriculture est l'une des choses les plus importantes dans ce pays. Si on a va dans un pays du tiers monde, ou du Bloc de l'Est, on se rend vite compte de l'importance de la nourriture.

Peu après mon élection, j'ai eu l'occasion de rencontrer une jeune femme qui accompagnait une délégation commerciale chinoise au Canada. Je lui ai demandé ce qui lui plaisait le plus chez nous. Elle m'a répondu que ce qu'elle aimait le plus, c'est la nourriture bon marché. Je lui ai demandé ce qu'elle voulait dire par cela. Je n'avais aucune idée de ce que ça signifiait pour les Chinois. Elle m'a donné l'exemple du McDonald dans la ville où elle habitait. Un hamburger là-bas coûtait exactement le double de ce qu'il coûtait à Ottawa.

Je lui ai demandé ce que l'argent qu'on dépensait pour sa nourriture en Chine représentait par rapport au pouvoir d'achat. Elle m'a répondu qu'une personne qui gagne bien sa vie en Chine dépense à peu près 30 à 50 p. 100 de son salaire pour la nourriture. Au Canada, nous dépensons environ 11 à 12 p. 100 de notre salaire pour la nourriture. Voila qui montre combien nous avons de la chance au Canada.

(1605)

Comme l'a fait remarquer un autre député, on parle de subventionner les agriculteurs, mais c'est vraiment les consommateurs qui sont subventionnés du fait qu'ils peuvent obtenir un produit meilleur à moins cher. Ce sont eux qui en profitent.

Examinons le revenu net des agriculteurs aujourd'hui. Je me réfère aux chiffres de Statistique Canada. Ces chiffres indiquent que 48 p. 100 du revenu agricole net de nos jours vient d'emplois à l'extérieur de la ferme. Cela nous donne une idée de ce qui arrive au secteur de la production alimentaire dans notre pays. Si l'on ne veille pas à la viabilité du secteur de la production alimentaire en l'adaptant aux exigences du marché, il s'effondrera en entraînant d'autres secteurs avec lui.

Il est très important de réaliser qu'autrefois les agriculteurs se spécialisaient dans la culture d'un produit. Ça n'a pas marché. Nous leur avons dit qu'ils devaient être plus efficaces. Maintenant le système les oblige à diversifier. Dans quelle mesure peuvent-ils diversifier lorsque 48 p. 100 de leur revenu agricole net provient d'emplois d'appoint à l'extérieur de l'exploitation agricole?

On dit aussi qu'il faut un secteur industriel à valeur ajoutée. Lorsqu'un agriculteur éprouve des difficultés financières, il n'a pas d'argent à investir dans des entreprises à valeur ajoutée. Quelqu'un d'autre le fera.

Pour que l'économie agricole soit à nouveau viable, il faut prendre de solides mesures. J'espère que, après les prochaines élections, un gouvernement réformiste se chargera de rendre le système plus efficace, viable et autonome. Cela aura un effet d'entraînement dans d'autres secteurs et nous n'aurons pas besoin de hausser les impôts ou de soutenir le gouvernement. Telle est l'orientation que doit prendre notre pays.

J'ai été impressionné, hier, au banquet du Forum pour jeunes Canadiens, par l'énergie et l'enthousiasme de ces jeunes et leur détermination à trouver une solution por l'avenir du Canada. Pour réussir, ils ont besoin d'un système qui s'occupera de l'énorme dette que leur a légué le gouvernement. Ils peuvent faire du Canada le pays viable qu'il devrait être.

Nous avons les ressources naturelles, renouvelables et humaines qu'il faut pour y arriver. Nous avons besoin du savoir-faire qui nous a manqué pendant les 25 ou 30 dernières années de gouvernements conservateurs ou libéraux. Ils ont orienté notre secteur industriel et nous ont trahis à chaque fois.

Il est essentiel que, aux prochaines élections, les électeurs examinent le programme du parti réformiste. Il prévoit d'énormes changements visant à donner aux provinces le droit de faire ce qu'elles font le mieux et au gouvernement fédéral, les outils qu'il lui faut pour réduire les impôts, éponger le déficit et faire du Canada un endroit où il fait encore mieux vivre. Comme l'a dit maintes fois notre chef, nous pourrions offrir un meilleur Canada et un meilleur avenir aux jeunes Canadiens et aux générations futures.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que j'ai écouté l'intervention du député de Lisgar-Marquette sur l'agriculture et l'agroalimentaire au Canada, étant donné que c'est une très importante composante de notre économie.

Nous sommes le deuxième pays du monde pour le plus bas niveau des prix des aliments. Nous avons une population de 29 millions d'habitants, notre PIB s'élève à plus de 700 milliards de dollars, nos exportations se chiffrent à 17 milliards de dollars et nous connaissons une croissance assez phénoménale.

Ce projet de loi et d'autres mettent l'accent sur la Société canadienne du crédit agricole, des fonds accrus, des prêts garantis, des programmes d'hypothèque à long terme, des programmes de garantie de prêt pour les vendeurs et des programmes de développement du capital agricole.

(1610)

Le député dit que le projet de loi C-38 acculera les agriculteurs plus rapidement à la faillite. En fait, le projet de loi prévoit un processus d'examen si un agriculteur devient insolvable. Si l'agriculteur éprouve des difficultés financières, il pourra recourir à un processus d'examen et de médiation, et à une suspension des procédures s'il risque d'être saisi.

Le député peut-il nous dire si son parti abrogerait la loi C-38 s'il formait le gouvernement et proposait de nouvelles orientations au public?

M. Hoeppner: Madame la Présidente, je remercie la députée d'en face de sa question.

J'ai essayé d'expliquer à la Chambre que l'industrie agricole n'aurait jamais dû être placée dans cette situation. Le projet de loi oblige les agriculteurs à abandonner. Rien, dans le projet de loi, n'aide les agriculteurs à raviver leur exploitation ou à la rendre de


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nouveau rentable. C'est une mesure de dernier recours visant à atténuer un peu leur douleur et à leur permettre de se retirer.

Ce n'est pas de cela dont nous avons besoin. Depuis une trentaine d'années, nous avons vu le nombre d'agriculteurs diminuer et atteindre un niveau inimaginable. Lorsque j'ai commencé comme agriculteur, une demi-section suffisait à nourrir une famille. De nos jours, un agriculteur ne peut survivre avec deux sections. Il faut que sa conjointe travaille à l'extérieur de l'exploitation agricole ou qu'il ait d'autres activités pour rentabiliser son exploitation.

Nous privons de leur emploi des gens qui méritent de travailler. Les membres d'une famille d'agriculteurs devraient rester à la ferme pour s'assurer que celle-ci fonctionne bien et qu'elle est efficace et rentable. C'est pour cela que je trouve cette mesure législative si mauvaise. Elle ne donne aucun espoir aux agriculteurs. Elle atténue seulement un peu la douleur qu'ils éprouvent lorsqu'ils abandonnent l'agriculture. Je ne sais pas s'ils deviendront assistés sociaux ou s'ils essaieront de se lancer dans un nouveau domaine, ce qui n'est guère facile non plus, de nos jours.

Ce qui m'étonne, c'est que, durant les années 70, le gouvernement libéral nous disait constamment qu'il fallait des taux d'intérêt élevés pour réduire l'inflation. Il fallait juguler celle-ci. Nous l'avons fait. Les taux d'intérêt sont bas et les agriculteurs n'arrivent pas à rentabiliser leur exploitation. Le projet de loi C-38 leur fera quitter le secteur agricole. C'est tout simplement insensé.

D'une part, des taux d'intérêt de 24 p. 100 contribuent à l'inflation. D'autre part, pour rester rentables, les banques et leurs semblables estiment que des taux de 24 p. 100 sont nécessaires. Si pareils taux ne contribuent pas à l'inflation lorsque ce sont les banques qui les imposent, pourquoi y contribuent-ils lorsque l'agriculteur les paie? Voilà ce que je déplore de certaines orientations du gouvernement. Celui-ci aime intervenir.

Tout d'abord, il a fallu nous spécialiser, mais cela n'a pas fonctionné. Ensuite, il a fallu diversifier nos activités, mais ce fut en pure perte. Il faut maintenant privilégier les produits à valeur ajoutée, mais qui sait si cela fonctionnera? Si les agriculteurs ne privilégient pas les produits à valeur ajoutée, ce sont d'autres secteurs qui en bénéficieront, et il y aura encore moins d'agriculteurs. Je le répète, le secteur agricole n'aurait jamais dû être mis dans une situation qui rend nécessaire l'adoption de pareilles dispositions législatives.

Ce sont les politiques gouvernementales des 30 dernières années qui sont à l'origine de cette situation. Ce n'est pas la façon dont les agriculteurs ont exploité leur ferme. Ils ont accru leur production. Ils sont devenus plus efficaces. Ils ont travaillé plus fort. S'ils ont dû abandonner l'agriculture, c'est à cause du régime fiscal et des fonctionnaires. C'est très facile à prouver.

(1615)

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Mississauga-Sud-La santé; le député de Davenport-Les transports; le député de Sarnia-Lambton-La santé.

Par ailleurs, le député de North Vancouver m'a avisé qu'il ne pourrait pas présenter sa motion durant l'heure réservée aux initiatives parlementaires le vendredi 18 avril. Il a été impossible d'arranger un échange de position sur la liste de priorité.

Par conséquent, je demande aux services du greffier de placer cet article au bas de la liste de priorité. L'heure réservée aux initiatives parlementaires sera donc annulée, et la Chambre continuera l'étude des affaires dont elle sera saisie avant le début de l'heure normalement réservée aux initiatives parlementaires.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer cet après-midi au débat sur le projet de loi C-38, qui est la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole.

Je veux tout d'abord répondre très brièvement à la question qui a été posée à mon collègue d'en face, le député de Lisgar-Marquette, il y a un instant.

La députée libérale a fait allusion au fait que les aliments ne coûtent pas cher au Canada. C'est certainement vrai, et tous les consommateurs en sont très heureux. Tout le monde doit manger, alors je suis certain que tout le monde est heureux d'une certaine façon.

Je rappelle toutefois à la députée quelque chose que les députés des circonscriptions rurales se font rappeler constamment, soit que la politique des aliments à bas prix est une arme à deux tranchants. Ce que les consommateurs gagnent grâce à ce genre de politique, ce sont les producteurs alimentaires qui le perdent.

Elle a ensuite demandé si le Parti réformiste abrogerait le projet de loi C-38. Lorsque nous formerons le prochain gouvernement, nous examinerons certainement toutes les mesures législatives adoptées par ce mauvais gouvernement libéral au cours de la35e législature et y apporterons peut-être des modifications.

Nous avons proposé un certain nombre d'amendements au projet de loi C-38, comme nous l'avons fait pour beaucoup de projets de loi, je dirais même pour la plupart des projets de loi qui ont été présentés à la Chambre. Malheureusement, ces amendements-le Parti réformiste en avait présenté quatre-ont tous été rejetés par le gouvernement. C'est pourquoi nous nous opposons à cette mesure.

Les orateurs précédents du Parti réformiste, le député de Végréville et le député de Lisgar-Marquette, ont fait remarquer que nous ne nous opposons pas à l'intention visée dans ce projet de loi. Aucun parti n'a le monopole des bonnes intentions et des bonnes idées.

Aussi étonnant que cela puisse être, même le Parti libéral a de bonnes idées de temps en temps.

M. Hoeppner: Particulièrement les simples députés.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Particulièrement les simples députés. Tous les députés ont, de temps à autre, de bonnes idées. Des députés de tous les partis proposent de bons amendements lors des études en comité et des débats à la Chambre des communes.


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Malheureusement, le Cabinet ou le ministre responsable impose invariablement sa discipline et ordonne, pour des motifs purement partisans, de défaire les amendements proposés, que ce soit lors de l'étude en comité ou des débats à la Chambre des communes.

Il importe peut qu'un amendement soit raisonnable. S'il a été proposé par un réformiste, un bloquiste ou un député indépendant, il sera automatiquement déclaré farfelu et défait. «Nous sommes majoritaires dans les comités et à la Chambre des communes. Et cet amendement sera défait». À la Chambre des communes, ils disent «ces réformistes votent contre toutes nos propositions, contre toutes nos bonnes idées, ces réformistes votent contre.»

Peut-on s'étonner? Il semble que chaque fois que nous proposons des amendements à un projet de loi, ils sont défaits. Ils sont automatiquement rejetés. Ils sont déclarés mauvais tout simplement parce qu'ils ont été proposés par des réformistes. C'est triste pour la démocratie et je crois que cela efface la promesse qui a été faite dans le livre rouge de restaurer la vraie démocratie et de permettre plus de votes libres à la Chambre des communes. Nous avons vu tout le contraire au cours de la 35e législature.

(1620)

Le Parti réformiste appuie l'objectif du projet de loi C-38. S'il reste suffisamment de temps avant que les ministériels décident de déclencher des élections, le projet de loi sera adopté et tous les amendements que nous pourrons proposer seront défaits parce que les libéraux sont en majorité.

Le projet de loi abroge la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, vieille de dix ans. Cette loi avait créé des bureaux d'examen de l'endettement agricole qui offraient des services de médiation de la dette aux agriculteurs dont les créanciers risquaient de saisir les biens. Lorsque j'étais agriculteur, je n'ai heureusement pas eu à subir ce genre de situation, mais certains de mes amis ou voisins l'ont vécue à cause des difficultés qu'à connues l'agriculture ces quinze ou vingt dernières années.

Même s'ils variaient d'une province à l'autre, les bureaux d'examen de l'endettement agricole ont fait beaucoup de bonnes choses et ont aidé des agriculteurs à surmonter les difficultés qu'ils ont eues avec leurs créanciers. Ces organismes aidaient autant qu'ils le pouvaient les agriculteurs à respecter leurs obligations financières. Le projet de loi à l'étude, qui vise à remplacer l'ancienne loi, repose certainement sur une intention valable et bonne.

Le projet de loi prévoit l'examen de la situation financière d'un agriculteur, la médiation entre lui et ses créanciers en vue de la conclusion d'un arrangement financier et la suspension temporaire des recours des créanciers contre l'agriculteur si ce dernier le demande.

Des réformistes mais également de nombreux particuliers et organisations qui ont comparu devant le comité permanent chargé d'étudier le projet de loi C-38 ont exprimé des inquiétudes. Je vais en dresser la liste pour que les téléspectateurs voient que de nombreux témoins ont fait état de préoccupations au sujet du projet de loi. Ils ont proposé des amendements à l'étape de l'étude en comité.

Il y avait le Bureau d'examen de l'endettement agricole de l'Alberta, l'Association des banquiers canadiens, la Fédération canadienne de l'agriculture, le Syndicat national des cultivateurs, le Bureau d'examen de l'endettement agricole de l'Ontario, le Bureau d'examen de l'endettement agricole du Québec et le Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan. Un certain nombre de mémoires ont été présentés et des préoccupations ont été formulées à l'étape du rapport quant à l'objet du projet de loi. Mes collègues de Végréville et de Lisgar-Marquette ont aussi exprimé des préoccupations.

Il semble notamment que le budget soit assez important, si l'on pense que le Bureau d'examen de l'endettement agricole de la Saskatchewan traite actuellement la moitié des cas au Canada avec un budget total de seulement 700 000 $, tandis que l'ensemble du budget prévu pour la médiation est de 2,2 millions de dollars, en vertu de cette nouvelle mesure. C'est un cas flagrant de bureaucratie qui se soigne, s'assurant d'un généreux financement, comme nous l'avons vu si souvent dans divers ministères pour assurer sa survie, quelle que soit l'issue des prochaines élections.

Il y a autre chose qui nous préoccupe, et ce fut le cas pour beaucoup d'autres projets de loi adoptés à la Chambre, c'est le risque que cette nouvelle mesure engendre du favoritisme. Par exemple, les membres des comités d'appel doivent être nommés par le ministre sans que leur choix ait été examiné ou approuvé par le Parlement ou le comité permanent.

(1625)

Comme dans le cas du projet de loi C-72, qui pour une raison quelconque a disparu de la circulation, cette mesure législative dit que le ministre aurait le pouvoir de nommer les membres du conseil d'administration et que, dans son infinie sagesse, il pourrait faire élire un ou plusieurs membres.

J'ai fait référence, il y a quelques heures, à une enquête sur le projet de loi C-34. J'ai dit que la Commission canadienne du blé avait refusé de me communiquer la liste de distribution contenant les adresses des producteurs résidant dans la circonscription que j'ai l'honneur de représenter à la Chambre. J'ai trouvé cela un peu tragique en ce sens que les députés veulent servir correctement leurs électeurs. Le credo du Parti réformiste du Canada, c'est de bien représenter leurs électeurs dans la mesure où l'on peut déterminer quel est le point de vue de la majorité dans une circonscription.

Dans ce cas, je visais les détenteurs de carnets de permis. Ce sont eux qui seront les plus touchés par le projet de loi C-72. Je n'ai pas réussi à obtenir la liste. La Commission canadienne du blé a même refusé quand j'ai dit que je paierais pour faire imprimer les étiquettes. Je lui ai dit que je lui enverrais les questionnaires. Qu'elle pourrait regarder les questions. Que je n'essayais pas de cacher quoi que ce soit. Que ce n'était pas de la propagande contre la Commission du blé. Que c'était un simple questionnaire contenant dix


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questions. Que je voulais faire une enquête auprès des détenteurs de carnets de permis. Elle a refusé.

Une voix: Quelle démocratie.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Exactement. Quelle démocratie. Comment un député est-il censé bien représenter ses électeurs?

Je ne voulais pas diluer les résultats du sondage en expédiant le questionnaire à des gens moins intéressés au projet de loi C-72 parce que leur subsistance n'en dépend pas.

J'ai donc fait parvenir le questionnaire à une liste plus longue de personnes dont j'ai pu obtenir les noms. J'ai reçu 124 réponses, ce qui est assez représentatif pour une région agricole aussi petite que celle de Peace River. Je ne sais pas combien de carnets de livraison sont en vigueur dans ma région parce que la Commission canadienne du blé refuse de me le dire. Il y en aurait de 450 à 500 semble-t-il. Un retour de 124 questionnaires est donc assez représentatif.

Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de parcourir toutes les questions du sondage, mais j'aimerais expliquer la première. J'ai demandé aux agriculteurs: «On a beaucoup discuté de l'avenir de la Commission canadienne du blé. Décrivez votre attitude générale à l'égard de la Commission canadienne du blé.» Je présentais ensuite plusieurs options: «Il faut l'éliminer. Il faut la restructurer complètement. Il faut y apporter certaines modifications. Je ne sais pas. La commission devrait-elle s'occuper aussi d'autres cultures? Il faut la conserver telle quelle.»

Neuf pour cent des répondants voulaient éliminer la Commission canadienne du blé et 70 p. 100 ont indiqué qu'il fallait la restructurer complètement ou la modifier quelque peu. De toute évidence, les agriculteurs veulent conserver la Commission canadienne du blé, mais il veulent des changements en profondeur, ils veulent pouvoir faire des choix.

Malheureusement, comme dans bien d'autres cas, le gouvernement n'entend pas le message de la communauté agricole.

Le ministre a demandé un vote par la poste au sujet de l'autre projet de loi. Je ne sais combien cette mesure a coûté aux contribuables. En fait, la question posée offrait un seul choix: «La Commission canadienne du blé devrait-elle continuer à gérer la vente de l'orge ou devrait-elle s'en retirer complètement?» Il ne présentait pas d'autres options aux agriculteurs.

(1630)

Ce que nous avons vu, ce que nous avons dit au ministre et ce que les regroupements d'agriculteurs et les exploitants parlant en leur nom propre lui ont dit-je suis certain qu'ils l'ont fait car ils nous l'ont dit-c'est que la question consacrait le statu quo. Elle ne réglait rien.

Le fait est que les agriculteurs continuent d'être envoyés en prison pour avoir essayé de vendre leurs propres produits. Cela ne règle rien et les agriculteurs le savent. De même, le projet de loi C-38 n'est pas une solution. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé quatre amendements.

Nous avons proposé que le projet de loi soit modifié de façon à ce que le Comité permanent de l'agriculture examine la nomination des administrateurs. Qu'y a-t-il de mal là-dedans? La communauté agricole ne serait-elle pas en faveur d'une telle mesure? De toute évidence, le comité serait l'endroit possédant les connaissances et les qualifications pour, au cas échéant, entendre des témoins pour savoir exactement qui nous nommons comme administrateurs.

Nous avons proposé un amendement en vue d'ajouter au projet de loi un article stipulant que le gouvernement élabore des règlements ou des lignes directrices portant sur l'évaluation du rendement des administrateurs et des médiateurs. Qu'y a-t-il de mal là-dedans? Cet amendement vise en plein l'obligation de rendre des comptes.

S'il y a une chose que les députés ont entendu les réformistes répéter jour après jour, discours après discours, au cours des trois dernières années, que ce soit au sujet de la justice, des dépenses, de la défense, de l'agriculture, de la santé ou des affaires autochtones, quel que soit le ministère, c'est le terme «responsabilité». Les gens haut placés doivent être tenus de rendre des comptes. Nous l'avons dit au sujet de l'enquête sur la Somalie. C'est pour cela que nous craignons ce qui semble être un camouflage au plus haut niveau. Nous l'avons dit au sujet de beaucoup d'autres ministères, que, malheureusement pour les Canadiens, ils ont trempé dans le scandale et le népotisme. C'est pourquoi nous insistons tant sur la responsabilité.

Nous avons proposé un amendement mineur. Nous demandons que le gouvernement prépare une réglementation sur l'évaluation de la performance pour tenir les médiateurs et les administrateurs responsables, mais on nous le refuse. La majorité libérale ne le trouve pas de son goût.

Le troisième amendement proposé portait sur l'article 15. Il se lisait ainsi:

Que l'article 15 soit amendé pour permettre que le Comité permanent de l'agriculture examine les nominations du ministre aux comités d'appel.
Que peut-on reprocher à cela? Qu'est-ce que le ministre veut cacher, en refusant que ses nominations soient examinées?

Le quatrième et dernier amendement proposé était:

Que l'article 28 soit amendé pour permettre que le Comité permanent de l'agriculture procède à un examen de l'application de cette loi après trois ans.
Cela aussi a été défait.

Lorsque je me lance dans certains de ces sujets, je ne vois pas le temps passer. De toute façon, dans le peu de temps qu'il me reste, je vais résumer.

En tant qu'ancien agriculteur dont la famille est toujours dans le secteur agricole, et en tant que personne active dans des groupes agricoles, je compte beaucoup d'amis et de partisans dans la com-


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munauté agricole de la circonscription que j'ai l'honneur de représenter à la Chambre. Je peux dire à la Chambre que la majorité des agriculteurs de ma région songent actuellement à essayer de sauver la récolte de l'année dernière, qui est ensevelie sous la neige. Ils veulent tenter de rentrer cette récolte ou d'en faire quelque chose, même s'ils doivent la brûler et accepter de subir de lourdes pertes, puis s'efforcer le plus possible, si les conditions climatiques le permettent, d'ensemencer la récolte de cette année.

Une chose qui m'exaspère au plus haut point, c'est que les députés d'en face ne semblent pas bien se rendre compte des obstacles et des épreuves que doivent surmonter les collectivités agricoles. Je suis très contrarié lorsque des gens disent que nous faisons ceci ou cela pour les agriculteurs et qu'ils se demandent pourquoi nous leur réservons un traitement aussi spécial.

(1635)

Beaucoup de Canadiens oublient d'où viennent les aliments et combien de gens doivent leur gagne-pain à l'agriculteur qui a du mal à sauver sa récolte. Ils oublient la personne qui vend les herbicides pour l'arrosage, ou celle qui gagne sa vie en transportant des céréales, qu'il s'agisse du conducteur de locomotive ou d'autres personnes engagées dans le transport des céréales. Ils oublient les gens qui vendent le matériel agricole, l'employé de magasin qui vend des matériaux de construction pour bâtir un nouveau grenier à blé. Ils oublient les centaines de milliers de personnes qui dépendent directement ou indirectement de l'agriculture.

Je crois qu'il est grand temps d'avoir au Canada un gouvernement réformiste qui mettra un peu l'accent sur l'agriculture.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Madame la Présidente, c'est toujours avec plaisir que j'écoute le député de Peace River, car il connaît l'importance de l'agriculture.

Pourrait-il nous dire ce qu'il pense d'une question que nous avons abordée ce matin lorsque nous étudions le projet de loi C-34? Cela se répercute en quelque sorte dans le projet de loi C-38 qui essaie plus ou moins de faire disparaître les exploitations agricoles et dont nous espérons pouvoir éviter les effets. Ce matin, nous avons demandé des avances d'urgence de 50 000 $ sans intérêt. On a rejeté notre requête, car le gouvernement a refusé d'accepter nos amendements au projet de loi C-34.

Cependant, au cours des derniers mois, le gouvernement libéral a versé à une entreprise comme Bombardier 250 millions de dollars environ. Cette somme représentait probablement un prêt sans intérêt à remboursement conditionnel. Comment peut-on comparer cela aux sentiments du député sur la façon dont les agriculteurs sont traités dans l'Ouest et même au Québec, comme nous l'a dit notre collègue du Bloc.

Le gouvernement libéral avait promis équité, égalité et démocratie. Je ne pense pas qu'on ait vu quoi que ce soit de ce genre dans les projets de loi qu'on a adoptés dernièrement.

Quels sont les sentiments de mon honorable collègue à ce sujet?

M. Hill (Prince George-Peace River): Madame la Présidente, je remercie le député de Lisgar-Marquette de sa question et de ses observations.

Les agriculteurs de la circonscription de Prince George-Peace River et de tout le pays sont, en toute franchise, consternés par le bilan du gouvernement libéral, qui distribue généreusement de l'argent à ses amis des sociétés. Cependant, lorsque les agriculteurs du Québec ou de l'Ouest, de la Nouvelle-Écosse ou de l'Ontario éprouvent des problèmes, il fait la sourde oreille. Il affirme qu'il n'y a pas d'argent, qu'on coupe au maximum et qu'on essaie de juguler le déficit.

Personne ne comprend mieux le problème du déficit et de la dette que les réformistes. C'est nous qui avons souligné ce problème au gouvernement libéral avant même qu'il y ait un gouvernement Mulroney. Nous savons ce que neuf années de gouvernement conservateur ont apporté au pays. Les conservateurs ont doublé la dette. Nous sommes bien au courant du problème de déficit systématique.

Nous disons depuis des années qu'il faut établir des priorités en ce qui concerne nos dépenses. Je ne vois pas comment le fait de faire un cadeau à une société qui réalise déjà des profits de millions de dollars est un bon investissement des deniers publics.

Cependant, lorsque des agriculteurs qui ont le dos au mur et se tournent vers le gouvernement et demandent non pas un cadeau mais un prêt sans intérêt pour les aider à court terme, sachant que le gagne-pain de milliers et de milliers de gens dépend du secteur agricole et des agriculteurs au Canada, le gouvernement répond alors qu'il ne peut rien faire, car il ne s'agit pas d'une priorité. On accorde plutôt la priorité à un terrain de boules dans la circonscription du ministre ou à un musée du canot à Shawinigan.

Je tiens à dire que les agriculteurs et les Canadiens en ont assez de ce genre d'attitude de la part du gouvernement.

(1640)

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les oui l'emportent.


9900

Des voix: Avec dissidence.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Je déclare la motion adoptée avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

[Traduction]

LA LOI D'AIDE AU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL (INSTITUTIONS FINANCIÈRES)

L'hon. Diane Marleau (au nom du ministre des Affaires étrangères, Lib) propose: Que le projet de loi C-77, Loi concernant un décret pris au titre de la Loi d'aide au développement international (institutions financières), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. John Godfrey (secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale, Lib.): Madame la Présidente, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour amorcer le débat de deuxième lecture d'un projet de loi qui autorisera les paiements au Fonds multilatéral du Protocole de Montréal et au Fonds pour l'environnement mondial.

Ces organisations ont été établies en 1990 en tant que premiers mécanismes financiers servant à protéger l'environnement mondial. Depuis ce temps, le Fonds multilatéral du Protocole de Montréal, ou FMPM, a agi comme principal mécanisme financier aux fins de projets visant à ralentir l'appauvrissement de l'ozone dans le monde en développement.

De même, le Fonds pour l'environnement mondial, ou FEM, est le principal mécanisme financier international grâce auquel les donateurs peuvent aider les pays en développement dans les domaines touchant la biodiversité, le changement climatique, l'ozone et les eaux internationales. L'organisme a été reconnu comme tel à la conférence de Rio qui, en 1992, a marqué une étape pour l'environnement et le développement.

Comme on le sait, madame la Présidente, nous remplissons entièrement et en temps voulu nos engagements envers les institutions internationales, afin qu'elles puissent poursuivre leurs tâches essentielles sans éprouver des ennuis financiers. À cette fin, il fallait ajouter le FEM et le FMPM à la liste des institutions financières, aux termes de la Loi d'aide au développement international. Un décret à cet effet a été approuvé le 15 novembre 1994 et publié dans la Gazette du Canada le 30 novembre 1994.

La Loi d'aide au développement international stipule également que le décret soit déposé au Parlement dans les 15 jours de séance après son approbation. En raison d'une erreur administrative, cette obligation n'a pas été remplie dans le délai prévu.

Le projet de loi que je dépose aux fins de la deuxième lecture corrigera cette erreur. Sur cette question, je sais que je puis compter sur l'appui des députés des deux côtés de la Chambre, qui connaissent la valeur que revêt la protection de l'environnement et qui tiennent à ce que le Canada continue de remplir ses obligations financières sans la moindre interruption.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La parole est au député de Terrebonne.

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Madame la Présidente, vous avez raison, c'est Terrebonne, pour encore quelques semaines et quelques jours parce que, comme je le disais à votre substitut, il y a quelques jours, après le 2 juin ou une date semblable, ce sera Repentigny.

J'ai fait une omission que je veux corriger, avant de parler du projet de loi C-77. J'ai fait une omission, la dernière fois, lorsque j'ai remercié les gens des cinq municipalités du comté de Repentigny. J'ai omis de remercier les gens de mes deux anciennes municipalités, c'est-à-dire Terrebonne et Bois-des-Filion, pour le bon temps que nous avons passé ensemble pendant ces trois dernières années et demie. Ce sont des gens avec qui, sous le règne deM. Irénée Forget à Terrebonne et M. Paul Larocque à Bois-des-Filion, on a pu, en concertation, travailler et conclure plusieurs dossiers afin d'améliorer la qualité de vie des citoyens et des citoyennes de ces deux municipalités avec beaucoup d'enthousiasme, de dynamisme et d'intérêt.

(1645)

Lors de ma dernière intervention en cette Chambre, j'avais oublié de remercier ces deux maires et la population de ces deux municipalités. C'est ce que je m'empresse de corriger.

Concernant le projet de loi C-77, comme mon collègue l'a dit tout à l'heure, effectivement, il s'agit de corriger un oubli. En février 1994, le Cabinet fédéral a convenu de contribuer au Fonds pour l'environnement mondial et au Fonds multilatéral du protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone.

Pour mettre en oeuvre cette décision, il fallait ajouter ces institutions à la Loi sur l'aide au développement international. Aussi, un décret du gouverneur en conseil a-t-il été approuvé, le 15 novembre 1994, et publié dans la Gazette du Canada le 30 novembre.

En vertu de la loi, un décret doit être déposé devant le Parlement dans les 15 jours de séance suivant sa signature. Plus tôt cette année, le Comité mixte permanent, sur lequel mon collègue siège, j'en suis sûr, lors d'un examen de la réglementation, a informé le ministère des Affaires étrangères de cette omission. Effectivement, cela avait été publié dans la Gazette du Canada et on a oublié de mettre cette loi en vigueur afin que les deux organismes mentionnés précédemment, le Fonds multilatéral pour l'application du protocole de Montréal ainsi que le Fonds pour l'environnement mondial, puissent recevoir les sommes d'argent prévues du gouvernement.

Comme les oublis peuvent arriver dans les meilleures familles, ayant plusieurs dossiers très importants qui se discutent ici en cette Chambre, nous comprenons l'urgence d'agir pour rétablir la situation financière de ces deux organismes.


9901

Comme mon prédécesseur l'a dit tout à l'heure, il obtiendra l'avis de cette Chambre pour encourager, pour accélérer l'adoption du projet de loi C-77, afin que les deux organismes mentionnés plus tôt puissent bénéficier des montants nécessaires afin qu'elles puissent améliorer la qualité environnementale et même aider les pays du tiers monde qui doivent eux aussi s'orienter vers une démarche environnementaliste.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi C-77. Cette mesure vise à remédier à un oubli commis en 1994. Je puis comprendre comment une telle chose peut arriver et nous avons accepté de participer au débat pour appuyer le projet de loi et corriger cette erreur.

Je voudrais profiter de l'occasion pour parler de la politique étrangère du Canada en général et du rôle qu'y joue le gouvernement. La politique étrangère n'est pas l'apanage exclusif du gouvernement, elle est aussi l'affaire du Parlement. Il est arrivé souvent que le gouvernement libéral ne tienne pas tenu compte du Parlement et omette de l'informer convenablement. Dans le domaine des affaires étrangères, le Parti réformiste a exprimé de nombreuses suggestions à la Chambre ces dernières années au sujet de la politique étrangère, mais elles ont presque toutes été complètement rejetées.

En octobre 1993, une motion d'initiative parlementaire a été proposée au sujet de l'importante question du maintien de la paix, qui devait par la suite occuper beaucoup de temps de la Chambre. Qu'a fait le parti ministériel à l'époque? Il a voté contre parce que, semble-t-il, il ne s'intéressait pas aux opinions des autres députés de ce côté-ci de la Chambre. La même chose est arrivée à d'autres occasions également.

Cela est arrivé malgré le fait que, lorsque le ministre actuel des Affaires étrangères siégeait de ce côté-ci de la Chambre, il reprochait beaucoup aux conservateurs de manquer de respect pour le processus parlementaire. J'aurais cru qu'une fois devenu titulaire de ce portefeuille, le ministre aurait été plus sensible à cette critique qu'il soulevait quand il était dans l'opposition.

Nous savons que, au cours de cette législature-ci, on a probablement utilisé davantage les dispositions sur la clôture et l'attribution de temps qu'au cours de toute autre, y compris pendant celles que le ministre des Affaires étrangères a tellement critiquées, c'est-à-dire les neuf ans du gouvernement Mulroney.

Si nous examinons la politique étrangère du gouvernement, nous constatons qu'elle a manqué de perspective et a échoué dans certains domaines. Il nous semble évident que les libéraux veulent utiliser la politique étrangère à leurs propres fins politiques. C'est là une accusation plutôt grave.

(1650)

Que penser du fait que le premier ministre ait attendu que trois ans et demi de son mandat se soient écoulés avant d'aller chez nos amis, à Washington, pour rendre visite au président des États-Unis, notre plus important partenaire commercial? D'aucuns diront que c'était une occasion de faire prendre des photos flatteuses, une bonne chance pour le premier ministre de se faire photographier avec le président peu avant une campagne électorale. Le Canada et les États-Unis ont des relations commerciales très étroites, et nos échanges commerciaux réciproques sont maintenant de l'ordre de un milliard de dollars par jour.

Sa motivation m'inspire un peu de cynisme. Toutefois, je voudrais parler d'une question sur laquelle les libéraux ont opéré un revirement complet, ce qui est tout à leur honneur. Il s'agit du libre-échange.

Lorsque les libéraux siégeaient sur les banquettes de l'opposition, ils ont vertement critiqué l'accord de libre-échange avec les États-Unis. Ils l'ont combattu d'arrache-pied en 1988. Ils ont aussi beaucoup critiqué le libre-échange pendant la campagne de 1993. Ils allaient déchirer l'accord ou le renégocier à moins qu'il ne soit accompagné d'un code des subventions et d'un code antidumping. Cela ne s'est pas produit, bien sûr.

Le premier ministre a dirigé un certain nombre de délégations commerciales à l'étranger. Excellente initiative. Ce sont les missions d'Équipe Canada.

Je me demande ce que pensent nos exportateurs. Il semble que nos exportations vers la plupart des pays où le premier ministre et son entourage se sont rendus ces trois dernières années ont diminué par suite de ces missions. Comment expliquer cela? La seule raison que je peux trouver, c'est que le Canada a fait ses devoirs à la maison pour veiller à ce que nos entreprises canadiennes puissent profiter des retombées de ces importantes missions commerciales.

Le premier ministre devrait se concentrer davantage sur des missions commerciales au pays même, afin de régler les problèmes qui empêchent nos entreprises de s'épanouir pleinement.

Le comité a longuement entendu parler des coûts d'exploitation d'une entreprise qui sont élevés au Canada. Il faut penser aux charges sociales, aux taxes et aux impôts, aux obstacles au commerce interprovincial, secteur où nous avons fait très peu de progrès. Le commerce intérieur au Canada est aux prises avec de graves problèmes.

Nous savons qu'à peine une centaine de sociétés canadiennes sont responsables de plus de 40 p. 100 des exportations du Canada. Nous voudrions que plus de sociétés s'adonnent à l'exportation. Le ministre du Commerce international a laissé entendre qu'il faudrait porter à environ 4 000 le nombre de sociétés exportatrices. Je suis d'accord avec lui.

Si nos entreprises ne peuvent même pas faire des affaires efficacement d'une province à l'autre, comment pourraient-elles exporter dans le monde entier? Comment nos entreprises peuvent-elles réaliser les économies d'échelle dont elles ont besoin pour soutenir la concurrence sur le marché international?

Le gouvernement fédéral doit prendre les choses en mains et veiller à abolir les obstacles au commerce interprovincial. Cela réglera bon nombre de nos problèmes.

Lorsque le Comité des affaires étrangères et du commerce international a étudié la situation des petites et moyennes entreprises, celles-ci nous ont expliqué ce qui les empêchait d'exporter leurs produits. Certaines d'entre elles ont avoué qu'elles allaient s'établir aux États-Unis. Elles auront plus facilement accès au marché canadien à partir des États-Unis qu'elles ne l'ont à partir de leur emplacement actuel au Canada. Le problème est grave.


9902

De toute façon, je suis heureux que les libéraux se soient convertis, pour ainsi dire, au libre-échange. C'est la bonne solution. Le Canada est un pays commerçant. D'ailleurs, 40 p. 100 de notre PIB de même qu'un emploi sur trois sont attribuables aux exportations. Ce secteur sera très important pour nous à l'avenir.

L'initiative que le ministre du commerce a mise au point pour essayer de rallier davantage de pays de l'hémisphère sud profitera au Canada. Efforçons-nous de corriger des problèmes que nous avons ici, au Canada, afin de pouvoir bénéficier de ces initiatives très importantes.

Quoique les libéraux soient de nouveaux convertis, je me réjouis de la chose. J'espère qu'ils ont le coeur à la bonne place et qu'ils continueront dans cette voie.

Je tiens à dire quelques mots au sujet de deux autres régions dont il a été question pour ce qui est du maintien de la paix. Le gouvernement n'a pas toujours tenu compte des conséquences à long terme de la participation canadienne. Haïti, par exemple, est un endroit où les Américains sont entrés tambour battant. Devinez qui a dû aller nettoyer les dégâts? Le Canada.

Il semble que nous continuions à remplir ce mandat. Des agents de la GRC sont là-bas pour aider à former des policiers haïtiens. Et pourtant, nous manquons de policiers au Canada. Nous nous faisons avoir, semble-t-il, par les Américains. Ils prennent la grande initiative, ils y vont tambour battant, puis nous devons nettoyer les dégâts. Des conséquences à long terme doivent être anticipées.

(1655)

Pourquoi ne tiendrions-nous pas un débat approfondi à la Chambre, comme l'a proposé un de nos députés en 1993 dans une motion d'initiative parlementaire? Faisons participer un peu plus la Chambre afin de savoir ce que d'autres personnes pensent à cet égard.

En Bosnie, le gouvernement s'est laissé entraîner dans une mission pour laquelle il n'était pas équipé. Nous devons nous demander si nous nous occupons de maintenir la paix ou de la faire.

Il y a eu la décision d'aller au Zaïre. Les choses ont changé très rapidement, mais la situation était plutôt paradoxale. Nos forces de maintien de la paix là-bas étaient paralysées. Elles ne pouvaient même pas sortir leurs armes de l'aéroport. Elles devaient contribuer à maintenir l'ordre dans la région, mais elles ne pouvaient même pas sortir leurs armes de l'aéroport. Ce fut un fiasco. C'est une bonne chose qu'il y ait eu un revirement majeur de la situation et que les gens aient commencé à revenir de leur plein gré.

Il y a bien des choses à changer. Il faut réévaluer l'efficacité des Nations Unies. Nous pensons que les Nations Unies devront réduire leur bureaucratie.

Je m'inquiète de certaines organisations qui ont été créées peu après la Seconde Guerre mondiale, dans un but tout à fait louable, et qui ont accompli de l'excellent travail, par exemple, la Banque mondiale, le FMI et les Nations Unies. Bon nombre essaient de se trouver une nouvelle vocation pour justifier leur maintien. Si elle n'ont plus de rôle à jouer ou si elles ont un rôle restreint, il faut le reconnaître.

Des réformes s'imposent dans un grand nombre de ces institutions, et le Canada doit être un chef de file à cet égard.

Nous appuierons la motion visant à rectifier cet oubli, mais faisons en sorte que tous les parlementaires puissent se prononcer sur la politique étrangère, car il y a d'excellentes idées qui mériteraient d'être discutées.

M. Godfrey: Madame la Présidente, puis-je proposer, avec le consentement de la Chambre, que cette question soit renvoyée non pas au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, mais plutôt au comité plénier?

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et, avec le consentement unanime, étudié en comité plénier; rapport est fait du projet de loi.)

(1700)

M. Zed: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je pense que vous constaterez qu'il y a unanimité pour que la Chambre passe maintenant à la troisième lecture.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

L'hon. Diane Marleau (au nom du ministre des Affaires étrangères, Lib.) propose: Que le projet de loi soit agréé.

(La motion est adoptée.)

La président suppléant (Mme Ringuette-Maltais): Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec la permission de la Chambre, maintenant?

Des voix: D'accord.

L'hon. Diane Marleau (au nom du ministre des Affaires étrangères, Lib.) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la troisième fois et adopté.)

M. Zed: Madame la Présidente, je crois savoir qu'il y a unanimité pour que la Chambre procède à la deuxième lecture du projet de loi C-95 cet après-midi et, par la suite, au renvoi de se dernier au comité plénier.

* * *

LE CODE CRIMINEL

L'hon. Herb Gray (au nom du ministre de la Justice, Lib.) propose: Que le projet de loi C-95, Loi modifiant le Code criminel (gangs) et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.


9903

-Madame la Présidente, en proposant la deuxième lecture de ce projet de loi, je dois commencer par remercier le Bloc québécois et le Parti réformiste de collaborer avec nous en nous permettant d'étudier ce projet de loi le plus rapidement possible à la Chambre. Je compte sur une telle collaboration à toutes les étapes du processus législatif, y compris l'étude en comité plénier et la troisième lecture. Je dis cela parce qu'il est question ici d'une mesure très importante.

Le projet de loi comprend une série de nouvelles mesures sévères pour lutter contre les activités des gangs. Les propositions élaborées à la suite de longues consultations avec les policiers d'un bout à l'autre du Canada donneront à ceux-ci et aux autres services d'application de la loi des outils plus efficaces pour faire enquête sur ceux qui participent aux activités criminelles des gangs et les poursuivre.

Les propositions prévoient une nouvelle façon de lutter contre les activités des gangs, autrement dit le crime organisé, en créant une nouvelle infraction, qui est la participation aux activités d'un gang. L'infraction ne criminalise pas le simple fait d'être membre d'un gang. La nouvelle infraction, avec les nouvelles définitions qui seront incluses dans le Code criminel, établira la base nécessaire pour l'utilisation ciblée des nouveaux outils d'enquête proposés et des dispositions du Code criminel.

(1705)

J'en mentionne quelques-uns: un nouvel engagement à ne pas troubler la paix, qui vise les chefs des gangs et rend plus difficile pour les gangs la poursuite de leurs activités. De nouveaux pouvoirs permettant aux policiers de saisir les produits des activités liées au crime organisé et, avec une ordonnance d'un juge, de consulter des données fiscales pouvant se rapporter aux activités de gangs. De nouvelles dispositions du Code criminel créant des infractions se rapportant à l'utilisation d'explosifs dans le cadre des activités des gangs. L'inclusion dans le Code criminel de nouvelles dispositions sur les peines visant les gangs, y compris la prolongation des délais d'admissibilité à des libérations conditionnelles dans le cas des auteurs de certaines infractions liées aux activités de gangs, et des mesures visant à faciliter la surveillance policière des activités des gangs.

En septembre dernier, le ministre de la Justice et moi avons présidé un forum national sur le crime organisé. Les propositions contenues dans le projet de loi à l'étude s'inspirent en grande partie des recommandations formulées par les participants, qui incluaient des représentants de corps policiers de tout le Canada, des experts du droit et des avocats qui ont étudié le sujet.

Afin de donner suite à une recommandation faites lors de ce forum national et que je n'ai pas encore mentionnée, j'établirai un comité de coordination national et des comités régionaux. Il s'agit d'une réponse aux préoccupations exprimées par les policiers au sujet de la coordination et de la direction des activités d'exécution auxquelles participent plusieurs agences. En plus du comité national, il y aura cinq comités de coordination régionaux. Sauf erreur, deux ont déjà été mis sur pied, un en Colombie-Britannique et un en Ontario.

Cela démontre bien que le projet de loi ne vise pas une seule région du Canada. Des préoccupations particulières ont été exprimées à Montréal, à Québec et dans les régions environnantes au sujet des activités des gangs de motards, mais on m'a dit qu'il y avait des gangs de motards dans toutes les provinces du Canada à l'exception, peut-être, de l'Île-du-Prince-Édouard. Par ailleurs, le crime organisé est présent partout au Canada. Le projet de loi est un projet de loi national important qui vise à accroître la protection de la population.

Suite à la recommandation faite par des organisations policières au Forum national sur le crime organisé, le solliciteur général fera une déclaration annuelle à la Chambre des communes sur le crime organisé. La première déclaration devrait être faite à la fin de 1997. Nous saurons en temps et lieu qui la fera. J'ai ma petite idée au sujet du parti qui formera le gouvernement, mais je n'aborderai pas cette question étant donné le caractère relativement non partisan du débat actuel à l'étape de la deuxième lecture.

Nous avons atteint deux objectifs en travaillant avec la police. Nous avons donné aux organismes d'application de la loi de meilleurs moyens de collaborer à la lutte contre le crime organisé.

[Français]

Dans ce même ordre d'idées, je veux citer mon collègue, le ministre de la Justice, M. Allan Rock, parce que, comme je viens de le dire, il a aussi dit que:

Grâce à la collaboration avec la police, nous avons réalisé deux objectifs: nous avons fourni aux organismes chargés de l'application de la loi des meilleurs outils pour combattre le gangstérisme, et nous avons mis au point un ensemble de mesures qui résisteront vraisemblablement mieux aux contestations judiciaires. Ces mesures constituent un premier pas dans la bonne direction. Le gouvernement fédéral avait promis d'instaurer des mesures pour combattre le gangstérisme et le gouvernement actuel a tenu parole; cependant, pour qu'elle soit efficace, cette lutte nécessite la participation du gouvernement fédéral, des provinces et des organismes chargés de l'application de la loi.
(1710)

[Traduction]

Les gangs du crime organisé représentent une menace grandissante pour de nombreuses communautés partout au Canada. Les agents de police ont bien fait comprendre qu'ils ont besoin de moyens plus efficaces et d'un mécanisme qui leur permette de mieux coordonner et intégrer leur efforts pour s'acquitter de la tâche à accomplir.

J'ai bon espoir que ce projet de loi leur sera utile. Il ne permettra pas de régler le problème du jour au lendemain, mais il dotera les forces policières partout au Canada de nouveaux moyens importants et efficaces qui leur permettront de réaliser des percées dans leur lutte contre le crime organisé, où que ce soit au pays.

Je crois que cette mesure aidera beaucoup les forces policières à préserver la sécurité publique. Les mesures contenues dans le projet de loi sont le résultat de consultations menées auprès des représentants provinciaux et municipaux partout au Canada, y compris la


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province de Québec, ainsi qu'auprès d'organismes d'application de la loi de toutes les régions.

Je ne parlerai pas de ces questions en détail. Je crois savoir que le Parti réformiste et le Bloc québécois sont disposés à coopérer pour permettre l'adoption rapide du projet de loi. Encore une fois, je les en remercie.

En travaillant ensemble à la Chambre, nous pouvons contribuer à assurer aux Canadiens une plus grande sécurité dans leurs quartiers, dans les rues, dans leurs relations professionnelles partout au pays. J'invite la Chambre à adopter rapidement le projet de loi en deuxième lecture.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Madame la Présidente, à l'invitation du solliciteur général, le Bloc québécois, qui constitue l'opposition officielle, va collaborer à l'étude rapide de ce projet de loi en deuxième lecture. Nous sommes d'accord avec le principe du projet de loi qui, comme l'a reconnu le ministre de la Sécurité publique du Québec, aujourd'hui, est un pas dans la bonne direction, qu'il allait dans le sens qu'il désirait.

Cependant, il aurait souhaité que ce projet de loi aille un peu plus loin, soit plus précis, étant donné les problèmes particuliers, au Québec, que connaissaient les régions de Montréal et la ville de Québec. Dans mon comté de Lévis, le 16 mars dernier, il y a eu une mobilisation de la population de Saint-Nicolas à la suite d'un incident. L'explosion d'une Jeep a provoqué beaucoup d'émoi dans le quartier où se trouve le repère des Hell's Angels. Les citoyens ont exprimé leur ras-le-bol concernant cette guerre entre motards qui inquiétait et inquiète encore beaucoup de citoyens et de citoyennes.

Tant que cette guerre se faisait entre gangs, entre ces gens-là, on n'y voyait pas de problème outre mesure, mais lorsqu'il s'agit de la qualité de vie, de la vie même de citoyens et de citoyennes, on prend conscience des problèmes. On a vu par exemple le dévouement qu'a mis dans ce dossier le député de Hochelaga-Maisonneuve, lui aussi, suite à un incident survenu dans son comté. On s'en souviendra, je crois que c'était la mort d'un jeune garçon, Daniel Desrochers.

Tout cela avait conduit le député de Hochelaga-Maisonneuve à réclamer une loi antigang. À l'initiative de ce député, le Bloc québécois s'était penché sur la question et avait restreint sa position pour que, à l'instar du Québec, il y ait une loi contre des gangs de motards criminalisés.

(1715)

Je me souviens qu'à plusieurs reprises, à la Chambre, l'ancien leader parlementaire de l'opposition officielle, qui est devenu le chef de notre parti, est intervenu auprès du ministre de la Justice et auprès du gouvernement pour qu'il agisse le plus rapidement possible. Finalement, cela a conduit le ministre de la Justice à se rendre à Québec rencontrer le ministre de la Sécurité publique, le ministre québécois de la Justice, des maires de la région de Québec et les représentants des forces policières concernées pour examiner une façon de résoudre ce problème.

Donc, l'opposition réserve son droit de critique, son droit d'analyse plus complet, plus spécifique pour l'étape de l'étude en comité. Mais à cette étape de la deuxième lecture, qui est une tradition parlementaire, nous appuyons la motion et souhaitons qu'on en fasse l'étude en comité le plus rapidement possible. On y collaborera, vous pouvez compter sur nous.

[Traduction]

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Madame la Présidente, j'ai quelques observations à formuler sur ce projet de loi.

Nous appuyons les éléments positifs du projet de loi, car il y en a. Ce projet de loi suscite cependant des préoccupations pour nous et nous les soulèverons quand le projet de loi sera examiné en comité plénier.

Je veux signaler quels nouveaux moyens ont été mis à la disposition de la police. Les lois sur les tables d'écoute seront d'application plus large, ce qui est très utile pour réprimer un certain type d'activité criminelle.

L'un des aspects les plus intéressants du projet de loi pourrait très bien être la percée qu'on a effectuée sur le plan de l'accessibilité des dossiers fiscaux. Cela permet de suivre à la trace les activités administratives découlant des activités criminelles. Un autre élément qui peut s'avérer très précieux, c'est l'engagement à ne pas troubler l'ordre public. Les membres d'une organisation criminelle peuvent être forcés de s'engager à ne pas troubler l'ordre public, c'est-à-dire qu'on peut leur ordonner de ne pas communiquer ni s'associer avec des membres d'une organisation criminelle. S'ils le font, le seul fait qu'ils aient rompu leur engagement donne le droit de les traîner en cour. À long terme, on peut ainsi parvenir à éliminer les organisations criminelles. Ce sont trois éléments très importants de ce projet de loi.

J'aborde maintenant deux aspects qui m'inquiètent, dans cette mesure. D'abord, elle prévoit l'établissement d'une définition de l'expression «organisation criminelle». Comment s'y prendra-t-on pour ce faire? Est-ce possible d'établir une telle définition?

Certains projets de loi adoptés à la Chambre-par exemple le projet de loi C-27, qui portait sur le tourisme sexuel impliquant des enfants-paraissent bien mais pourraient s'avérer inapplicables. Comment définir une organisation criminelle en vertu de ce nouveau projet de loi? Il s'agit de tout groupe, association ou organisation d'au moins cinq personnes, constitué de façon formelle ou non et dont l'une des principales activités consiste à commettre des actes criminels définis par la présente loi ou une autre loi fédérale et passibles d'un emprisonnement maximal de cinq ans ou plus.

C'est ce que la Couronne devra prouver pour qu'un groupe, une association ou une autre organisation soit déclaré une organisation criminelle. Comment va-t-on le faire? Il faut qu'il y ait au moins cinq personnes dans le groupe, l'association ou l'organisation en question. La Couronne devra aussi prouver que l'une des principales activités des membres du groupe en question est de commettre des actes criminels. Qu'est-ce que ça veut dire? Est-ce que ça veut dire que la Couronne doit avoir la preuve d'une condamnation pour acte criminel ou seulement la preuve que les personnes en question se livrent à des activités qui pourraient les mener à commettre un

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acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans ou plus? Il y a pas mal de questions que j'aimerais qu'on éclaircisse.

(1720)

Une fois qu'un groupe, une association ou une organisation est déclarée organisation criminelle, nous devons nous pencher sur cette nouvelle infraction. Le paragraphe 467.1 dit: «Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, à la fois participe aux activités d'un gang, ou y contribue de façon importante, tout en sachant que les membres de celui-ci ou certains d'entre eux commettent ou ont commis, au cours des cinq dernières années, une série d'actes criminels définis par la présente loi ou une autre loi fédérale et passibles d'un emprisonnement maximal de cinq ans ou plus.»

À quoi la Couronne est-elle confrontée si elle peut prouve qu'une personne est membre d'une organisation criminelle? Quelles preuves doit-elle réunir pour le reconnaître coupable? Il doit prouver, au-delà de tout doute raisonnable, que l'accusé participe aux activités d'un gang, ou y contribue de façon importante, tout en sachant que les membres de celui-ci ou certains d'entre eux ont commis, au cours des cinq dernières années, une série d'actes criminels passibles d'un emprisonnement maximal de cinq ans ou plus.

J'espère que le gouvernement pourra nous expliquer ainsi qu'à la population du pays, et cela de façon claire, que cet article du projet de loi ne revient pas simplement à créer de faux espoirs dans l'esprit des gens, leur faisant croire que c'est applicable, que le procureur pourra obtenir une condamnation.

J'ai dit plus tôt que d'autres parties du projet de loi seront très utiles à la police et permettront des interventions plus importantes dans le secteur du crime organisé. Je ne m'attends pas à des tas de condamnations en vertu de cette nouvelle infraction.

Le dernier point qui m'inquiète, c'est celui des gangs de jeunes. Est-ce que ce projet de loi s'applique aux gangs de jeunes? Si oui, est-ce que les peines consécutives s'appliquent également aux jeunes? Si oui, comment réconcilie-t-on cela avec le fait que, en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, la peine maximale est de trois ans? Qu'allons-nous faire? Est-ce que cette loi ne s'appliquerait qu'en cas de transfert à un tribunal pour adulte?

J'espère que dans les prochains jours, avant que les élections soient déclenchées, on répondra à ces questions, non seulement pour les députés, mais pour toute la population du pays qui espère que ce projet de loi aura des conséquences positives, qu'il donnera à la police les outils dont elle a besoin pour briser le crime organisé.

Nous avons des réserves au sujet de ce projet de loi, mais nous appuyons la direction suivie, car nous pensons que c'est la bonne. Nous savons que les chefs de police et les forces policières le veulent. Ils nous l'ont demandé.

Je termine sur cette note un peu triste. Je me demande pourquoi il a fallu aussi longtemps avant que l'on propose cette initiative. Elle va maintenant être étudiée à toute vitesse, sans que nous ayons le temps d'établir sa constitutionnalité et son applicabilité en entendant des témoins qui nous donneraient le point de vue de la défense et de l'accusation. Je me demande pourquoi le gouvernement a attendu deux ans après que ce jeune garçon ait été tué du fait des activités du crime organisé pour présenter ce projet de loi. La Chambre doit maintenant l'étudier à toute vapeur.

Nous avons vu cela trop souvent depuis trois ans et demi. Ce n'est pas une bonne chose et je pense que c'était évitable. Néanmoins, nous allons appuyer le principe de ce projet de loi. J'espère que les questions soulevées par moi et d'autres recevront une réponse qui satisfera la population.

(1725)

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois.)

M. Zed: Madame la Présidente, je me demande si la Chambre consentirait à l'unanimité à ce qu'il soit 17 h 30.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime pour qu'il soit 17 h 30?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


9905

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA COMMISSION NATIONALE DES LIBÉRATIONS CONDITIONNELLES

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord, Réf.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait ordonner à la Commission nationale des libérations conditionnelles, lors des audiences de libération et les délibérations qui s'y rapportent, de donner le bénéfice du doute, non pas au prisonnier, mais à la victime, à la famille de la victime et à la sécurité du public.
-Madame la Présidente, je désire informer la présidence que je partagerai mon temps de parole avec le député de Nanaïmo-Cowichan.

J'aimerais attirer l'attention de la Chambre sur la motion et lui faire remarquer qu'elle porte spécifiquement sur la Commission nationale des libérations conditionnelles. Elle demande à la commission d'avoir comme objectif de faire passer les droits de la victime et de sa famille ainsi que la sécurité du public avant les droits du prisonnier.

Dans un certain sens, je suis très triste que nous soyons obligés de proposer une motion de cette nature à la Chambre pour faire reconnaître les droits des citoyens respectueux des lois, et plus particulièrement des victimes. Leurs droits, en tant que citoyens, devraient


9906

être respectés avant ceux des prisonniers, eux qui ont choisi de ne pas obéir aux règles de la société.

Un certain nombre de questions découlent de cette motion, dont la détermination de la peine et autres. Toutefois, j'aimerais me limiter à la Commission des libérations conditionnelles et à son rôle en tant qu'outil d'évaluation.

La commission est un outil du système de justice. Elle entre en jeu une fois qu'une personne est condamnée. En gros, quand on parle des audiences de libération on ne parle pas de juger une personne relativement au crime commis, mais plutôt de juger de ses possibilités de réinsertion après une certaine période d'emprisonnement et de déterminer si cette personne est prête à retourner dans la société.

En tant que société, nous avons convenu d'imposer certaines règles que la majorité d'entre nous accepte de respecter. Nous fixons les règles qui forment le fondement de notre société au moyen de mesures législatives et avec le concours de plusieurs autres organismes gouvernementaux répartis à travers le pays.

(1730)

Le fait que nous établissions ces règlements oriente l'évolution des droits et des privilèges accordés aux Canadiens. Si on décide d'enfreindre les règlements établis par la société, il s'ensuit qu'on décide de renoncer aux droits et aux avantages accordés par la société.

Il semble que nous nous soyons éloignés de cette notion pour adopter le point de vue que les droits et les privilèges que la société canadienne confère à l'honnête citoyen devraient également être accordés à ceux qui les violent. Je soutiens que ce n'est pas justifiable. Si on décide de ne pas respecter les limites imposées par la société, on ne devrait pas avoir droit aux avantages et aux privilèges que cette société a créés pour nous.

On peut dire que ce point de vue est dénué de compassion, mais lorsque quelqu'un enfreint une loi et cause du tort à une autre personne, nous considérons qu'il présente une menace pour la sécurité publique. Nous décidons de l'incarcérer dans un établissement que nous appelons une prison.

À une autre époque de notre histoire, c'est simplement ce que nous faisions. Nous retirions cette personne de la société pour l'enfermer quelque part, et le traitement qu'il y subissait n'était pas beaucoup mieux que la garde en milieu surveillé. Des débats qui ont eu lieu dans le passé montrent à quel point ce traitement était inhumain. Depuis cette époque, nous avons progressé pour établir dans le système carcéral un programme de réadaptation. Il me semble que, lorsque nous retirons des gens de la société parce que nous avons peur d'eux et du tort qu'ils risquent de nous causer, à savoir que la sécurité publique est en jeu, et que nous les incarcérons, nous devrions les guider et les conseiller pour qu'ils puissent se réintégrer à la société et y participer de façon à ne pas nuire à la population et à ne pas harceler leurs anciennes victimes.

Nous avons inséré dans la loi des mesures qui donnent à ces personnes le choix de participer à un programme de réadaptation. Nous pourrons tenir cet autre débat une autre fois. Pour le moment, je dis que, lorsqu'un détenu se présente devant une commission des libérations conditionnelles, la commission devrait déterminer s'il s'est réadapté pendant la période où il a été incarcéré. A-t-il participé à une sorte de programme qui modifiera sa conduite de sorte qu'il puisse fonctionner dans la société, au lieu de présenter une menace pour la sécurité publique et pour les victimes auxquelles il a causé du tort?

Dans les circonstances actuelles, cela ne semble pas se produire. On ne procède pas à cette évaluation du processus de réadaptation. Les efforts semblent plutôt centrés sur les droits du détenu. Je crois qu'il faut accorder davantage d'importance aux droits des victimes, à la sécurité publique ou aux citoyens canadiens.

Lorsqu'une personne choisit de violer la loi et qu'on l'emprisonne, elle doit comprendre qu'elle renonce à ces droits et que la victime et la population passent en premier. Je me demande souvent à partir de quand nous avons fait fausse route. J'ai tendance à penser que, parfois, dans notre loi, et cela remonte à la détermination de la peine probablement, nous avons oublié de nous attarder d'abord et avant tout sur le crime qui a été commis. Nous avons commencé à mettre l'accent sur les motifs de l'acte en question. Je tiens à dire à la Chambre que c'est à partir de ce moment-là que nous avons eu tendance à abandonner les victimes à leur sort et à nous préoccuper davantage des détenus. Je pense qu'il faut revenir en arrière et remédier à cette situation également.

Je suis très inquiète de constater que la tendance au Canada est à l'établissement de groupes. Nous avons un groupe de défense des droits des victimes. Nous devrions avoir des droits en tant que citoyens canadiens et ces droits devraient s'appliquer à tous les citoyens, qu'ils soient victimes ou pas.

(1735)

Étant donné la voie dans laquelle nous sommes engagés, je vois la nécessité d'une déclaration des droits des victimes. En effet, notre système est anormal puisqu'il semble favoriser le criminel au détriment du citoyen respectueux des lois. Nous mettons alors sur pied tous ces mécanismes comme les droits des victimes et les divers groupes de défense des intérêts des victimes. Ce phénomène semble prendre de l'ampleur, ce qui m'amène à penser qu'il y a un manque de respect et de confiance dans le système actuel.

Si les personnes incarcérées pour avoir violé la loi ne profitaient pas des mêmes droits et privilèges que les citoyens honnêtes, nous n'aurions probablement pas besoin d'une déclaration des droits des victimes.

Je tiens à dire à la Chambre que, comme il faut commencer quelque part, nous devrions nous pencher sur les commissions des libérations conditionnelles. On doit évaluer ce qui se passe une fois qu'une personne est emprisonnée. Il n'y a aucune raison de libérer une personne qui ne participe pas à un programme de réadaptation, qui est incapable de réintégrer la société et de devenir un citoyen productif. Elle devient un risque pour la sécurité publique et elle va probablement causer d'autres dommages physiques à ses victimes ou, chose certaine, des dommages moraux en les harcelant, etc.


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Puisque tant de choses sont refusées aux victimes devant la Commission des libérations conditionnelles, je pense que nous devrions revoir tout le processus ainsi que l'orientation ou les objectifs de cette commission.

Ces criminels sont incarcérés parce qu'ils ont infligé du mal à quelqu'un. Je ne vois donc pas pourquoi on s'opposerait à ce que les victimes soient mises au courant du progrès que réalisent les criminels qui suivent le programme de réadaptation. À l'heure actuelle, dès qu'une personne est reconnue coupable, c'est la fin. Les victimes ne reçoivent plus d'information, à moins qu'elles ne le demandent par écrit à la Commission des libérations conditionnelles et alors les renseignements sont limités.

La motion que je parraine a pour objet de demander au gouvernement d'ordonner à la Commission nationale des libérations conditionnelles, quand elle délibère ou quand elle évalue la réadaptation des détenus, d'accorder le bénéfice du doute, le cas échéant, non pas aux détenus qui risquent de nuire aux victimes ou de compromettre la sécurité publique, mais bien aux victimes et à la population. Les détenus peuvent alors poursuivre le processus de réadaptation.

Je crains que mon temps de parole soit écoulé, de sorte que je conclus en espérant que le gouvernement examine la question et revoit l'orientation de la Commission des libérations conditionnelles, afin de lui recommander de tenir compte des intérêts des victimes.

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, peut-être la présidence pourrait-elle m'éclairer sur ce point, mais je crois que, si vous le demandez, vous obtiendrez le consentement unanime de la Chambre pour que, en dépit du vote sur le projet de loi C-95, à l'étape de la deuxième lecture, le projet de loi C-95 soit remis à l'ordre du jour afin que l'on puisse poursuivre la deuxième lecture. Quand vous avez demandé le vote, comme personne ne s'est levé, la motion a été mise aux voix et adoptée.

(1740)

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord

* * *

LA COMMISSION NATIONALE DES LIBÉRATIONS CONDITIONNELLES

La Chambre reprend l'étude la motion.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Une petite correction s'impose. La députée n'avait pas obtenu la permission de partager son temps de parole avec son collègue. Le Règlement ne permet pas aux députés de partager le temps qui leur est accordé durant l'heure réservée aux initiatives parlementaires.

[Français]

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner la possibilité de me joindre à la discussion sur la motion M-139 présentée devant nous.

Si je comprends bien, l'honorable député estime que le gouvernement devrait ordonner à la Commission nationale des libérations conditionnelles d'accorder le bénéfice du doute, non pas au prisonnier, mais à la victime, à sa famille, et à la sécurité du public, lors des audiences et des délibérations sur les libérations conditionnelles.

Cette motion tient d'une préoccupation très légitime que le gouvernement et moi-même partageons à l'égard des victimes, de leurs famille et de la sécurité du public. Cependant, il est important, je pense, de noter qu'il existe déjà un certain nombre de mesures gouvernementales répondant aux préoccupations des victimes d'actes criminels et assurant la sécurité du public.

J'aimerais commencer en soulignant que la protection de la société est le critère prépondérant dans toute décision sur la libération d'un délinquant. La Commission nationale des libérations conditionnelles n'accorde la libération conditionnelle que si, à son avis, soit le délinquant ne va pas présenter un risque inacceptable pour la société avant la fin de sa peine, ou la libération du délinquant contribuera à la protection de la société en favorisant son retour dans la collectivité en tant que citoyen respectueux des lois.

Le Service correctionnel du Canada et la Commission nationale des libérations conditionnelles consacrent déjà tous leurs efforts à protéger la société en contrôlant les délinquants et en les aidant à modifier les comportements et les attitudes qui les ont déjà entraînés au crime.

Passer de l'emprisonnement à la liberté peut être difficile, et les délinquants ont de meilleures chances d'y arriver s'ils bénéficient d'une surveillance, de programmes adéquats, de possibilités de formation et de soutien dans la collectivité à laquelle ils doivent un jour se réajuster.

En contribuant à la réinsertion des délinquants dans la société, le gouvernement assure la sécurité du public et veille à la sécurité des victimes. Le Service correctionnel du Canada consacre déjà une bonne partie de son énergie à aider des délinquants à se réadapter et à réinsérer la société.

De même, la Commission nationale des libérations conditionnelles contribue à la protection du public en prenant des décisions judicieuses appuyant la réinsertion des délinquants en tant que citoyens respectueux des lois.

J'ajouterais que l'information fournie par les victimes joue un rôle clé dans les décisions que prend la Commission nationale des libérations conditionnelles. Il faut réaliser un équilibre entre les


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préoccupations de la victime et la nécessité d'aider le délinquant à réintégrer la société sans porter atteinte à la sécurité publique.

Le meilleur moyen pour réaliser cet équilibre, c'est d'évaluer et de gérer le risque. Certains délinquants représentent un danger plus important que d'autres. Conformément aux politiques de la Commission nationale des libérations conditionnelles, les commissaires examinent systématiquement le risque que représenterait un délinquant pour la société s'il était libéré.

Ils examinent toute l'information pertinente qu'ils ont en main en vue d'une évaluation initiale du risque. Ils prennent en considération des facteurs comme l'infraction, les antécédents criminels, les problèmes sociaux-par exemple la toxicomanie et la violence familiale-l'état de santé mentale de l'individu, surtout sous l'angle du potentiel criminel, le comportement lors de mises en liberté antérieures, les rapports psychologiques et psychiatriques, la motivation pour changer et l'information provenant de la victime.

(1745)

Après cette évaluation initiale, la Commission nationale des libérations conditionnelles examine d'autres facteurs plus particuliers, comme le comportement en établissement, l'information fournie par le personnel de gestion des cas et autres professionnels qui témoigne de changements, le profit tiré des programmes que le délinquant a suivis, comme les programmes de lutte contre la toxicomanie ou d'acquisition d'aptitudes cognitives.

Après avoir examiné toute cette information, les commissaires prennent une décision. Si la mise en liberté est accordée, la Commission peut ajouter des conditions en plus de celles imposées par la loi afin d'appuyer la gestion de la réinsertion du délinquant et d'assurer la sécurité du public.

Par exemple, elle peut exiger que le délinquant s'abstienne de consommer de l'alcool si on juge que c'est raisonnable et nécessaire pour la gestion du risque et la protection de la société. Il est courant, si la victime le demande, qu'on interdise au délinquant d'avoir des contacts avec elle.

La grande majorité des délinquants purgent des peines à durée déterminée et finissent par retourner dans la collectivité. Comme vous le savez, l'emprisonnement n'est qu'une mesure temporaire qui ne suffit pas à garantir la sécurité du public.

Par conséquent, dès que la peine est imposée, le personnel correctionnel commence à évaluer le risque et à préparer le jour où le délinquant pourra être libéré. Le personnel dans la collectivité recueille de l'information sur le délinquant à partir de sources très diverses: famille, police, tribunal, victimes, autres membres du public. L'information communiquée par la victime est un élément intégral de l'évaluation du risque et de la décision de libérer le délinquant.

Ce que je veux dire, c'est qu'en nous servant de toute l'information à notre disposition pour prendre des décisions judicieuses de mise en liberté sous condition, en permettant une mise en liberté graduelle et en préparant le délinquant à réintégrer la collectivité, nous protégeons le public et les victimes en même temps.

Pour l'instant, j'aimerais vous parler des droits que notre système correctionnel accorde aux victimes. Un pas important a été franchi en 1992 quand la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition a été adoptée. Pour la première fois, les droits des victimes étaient officiellement reconnus dans les textes de loi fédéraux sur les services correctionnels.

[Traduction]

Je voudrais également parler des droits des victimes tels qu'ils existent dans notre système correctionnel. On a fait un pas important à cet égard en 1992 avec l'adoption de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. À partir de ce moment-là, et pour la première fois, les droits des victimes se trouvaient officiellement reconnus dans la loi fédérale sur le système correctionnel.

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition reconnaît clairement le rôle de la victime dans le contexte du système correctionnel fédéral. Elle prévoit la communication de renseignements aux victimes et leur permet d'avoir accès aux audiences concernant la libération conditionnelle.

Aux termes de l'alinéa 101b) de la loi, les victimes peuvent fournir à la Commission nationale des libérations conditionnelles de l'information dont cette dernière doit tenir compte quand elle examine le dossier de détenus pour toutes sortes de mises en liberté sous condition. Elles peuvent le faire par écrit ou à l'occasion d'une entrevue avec un agent de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui doit faire une recommandation à cet égard et établir un compte-rendu de l'entrevue pour l'ajouter au dossier du délinquant.

La loi permet au Service correctionnel et à la Commission nationale des libérations conditionnelles de communiquer aux victimes, à leur demande, des renseignements concernant les délinquants dans l'affaire les concernant. À la demande de la victime, le Service correctionnel et la Commission ont donc l'obligation de divulguer certains renseignements au sujet du délinquant, dont son nom, l'infraction dont il a été déclaré coupable, les dates d'admissibilité et de réexamen du dossier pour la permission de sortir ou la libération conditionnelle, la date du début de la peine de prison et la durée de la peine. Cette information est également mise à la disposition du public.

Les victimes ont cependant le droit d'avoir d'autres renseignements qui ne sont pas normalement révélés au public. Ces renseignements peuvent inclure la localisation du pénitencier où le délinquant purge sa peine; la date, le cas échéant, où il bénéficiera d'une permission de sortir avec ou sans surveillance, d'un placement à l'extérieur, d'une libération conditionnelle ou de la libération d'office; la date d'une audience aux fins de réexamen; les conditions attachées à toute forme de mise en liberté; la destination du délinquant pour toute forme de mise en liberté; si le délinquant est en détention; et, sinon, pourquoi; si le délinquant a interjeté appel ou non d'une décision de la Commission; et le résultat de cet appel.

[Français]

On peut communiquer aux victimes ces informations précises, si le président de la Commission nationale des libérations conditionnelles ou le commissaire du Service correctionnel du Canada estime que l'intérêt de la victime est de toute évidence plus important que l'atteinte à la vie privée qu'entraînerait la révélation de ces renseignements.


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(1750)

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition tient également compte des inquiétudes et des besoins des victimes en leur donnant la possibilité d'assister aux audiences de libération conditionnelle à titre d'observateurs.

Autrefois, elles ne pouvaient le faire que si le délinquant était d'accord; maintenant, c'est la Commission nationale des libérations conditionnelles qui décide. Comme je l'ai déjà dit, les victimes peuvent également donner de l'information à la Commission qui devra en tenir compte au cours de l'examen du cas.

L'information fournie par la victime, dont la Commission doit tenir compte au cours du processus d'examen, englobe la déclaration de la victime présentée au procureur de la Couronne, les rapports de police sur la nature de l'infraction et les renseignements fournis directement à la Commission ou aux autorités correctionnelles par la victime ou sa famille.

La Commission tient compte également de toute indication de violence ou de mauvais traitements à l'égard des membres de la famille ou des personnes ayant des relations d'intimité, de dépendance ou de confiance avec le délinquant. L'information communiquée par la victime est également importante lorsqu'il s'agit d'évaluer la pertinence des conditions pour gérer un risque particulier.

C'est aussi un facteur dont on tient compte lorsqu'on prépare le plan de libération du délinquant, surtout si celui-ci est un membre de la famille de la victime ou si, une fois libéré, il doit résider près de la victime. La Commission tient compte des demandes de la victime lorsque celle-ci estime que certaines conditions sont nécessaires à sa protection.

[Traduction]

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour appuyer la motion proposée par ma collègue, la députée de Surrey-Nord. Il serait peut-être utile de répéter la motion:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait ordonner à la Commission nationale des libérations conditionnelles, lors des audiences de libération et les délibérations qui s'y rapportent, de donner le bénéfice du doute, non pas au prisonnier, mais à la victime, à la famille de la victime et à la sécurité du public.
Bien que l'objet de la motion M-139 me paraisse clair, je voudrais expliquer plus en détail l'objectif visé pour la gouverne de ceux qui pourraient critiquer l'emploi de l'expression «bénéfice du doute». Cette expression donne à la motion de la force et un caractère raisonnable.

Le droit pénal est conçu de façon à ce que les accusés reprennent leur liberté si leur culpabilité ne peut être prouvée hors de tout doute raisonnable. Il s'agit d'un principe assez fondamental de notre système de justice. Il est par conséquent tout à fait normal que la demande de libération conditionnelle d'une personne reconnue coupable et incarcérée soit rejetée s'il persiste des doutes quant à la possibilité que l'individu puisse être réintégré dans la société. Autrement dit, on a déjà tenu compte, en grande partie, du «bénéfice du doute».

Malheureusement, il y a toujours des gens pour tenter de nous convaincre que c'est simplement la façon dont le système fonctionne maintenant. Je pourrais vous citer de nombreux exemples qui montrent que les gens qui pensent ainsi font l'autruche.

La circonscription de Surrey-Nord que représente ma collègue a vécu de véritables cauchemars à cause de criminels qui ont été libérés et qui ont récidivé, commettant encore une fois des crimes violents. Par exemple, une fillette de 10 ans a été tirée de son lit, sauvagement agressée puis tuée par un criminel en liberté conditionnelle. Une dame a été tuée, dans sa propre maison, par un individu en liberté conditionnelle, qui avait été reconnu coupable d'une série d'infractions, y compris de vols d'auto. Des incidents tragiques de la sorte se produisent dans toutes les localités du Canada et sont très nombreux.

Voici les statistiques pour 1994-1995. Des contrevenants en liberté conditionnelle, 256 ont récidivé et ont été accusés d'infractions criminelles, allant du meurtre au vol à main armée. Depuis 1987-1988, et dans presque chacune des années de cette période, environ 250 criminels bénéficiant d'une libération conditionnelle ont été accusés d'infractions graves. En 1989-1990 seulement,39 d'entre eux ont été accusés de meurtre et 63 d'agression sexuelle. Il y a certainement lieu de se demander si le système fonctionne correctement.

(1755)

Voici ce qu'on lit aujourd'hui dans un journal de la côte ouest, le Sun de Vancouver:

Un homme qui purgeait une peine pour tentative de meurtre a été accusé mercredi d'agression sexuelle contre une jeune femme bénévole des services correctionnels. L'agression a été commise pendant une période de semi-liberté. Cette femme qui est dans la vingtaine se trouvait seule chez elle lundi avec Clinton Dale McNutt, 29 ans, et c'est à ce moment que l'agression aurait eu lieu, selon un policier d'Abbotsford. «On ne saurait dire à quel point nous sommes préoccupés par tout le régime de libération conditionnelle» a-t-il dit. «Lorsque ces détenus sortent, nos citoyens sont en danger.»
C'est de cela que nous discutons ici. Parfois, lorsque nous nous attaquons à ce système de justice, des députés d'en face répondent que tout va bien et que le ministre de la Justice fait un excellent travail. C'est tout le contraire, à mon avis. Nous nous faisons chahuter parce que nous disons notre façon de penser, parce que nous revenons toujours à la charge, surtout lorsque nous parlons au nom des victimes.

Dans ma circonscription, et aussi partout ailleurs, semble-t-il, les Canadiens en ont plein le dos d'un système de justice qui fait passer les droits des criminels avant ceux des victimes. C'est aussi élémentaire que cela.

Nos vis-à-vis nous critiquent. Lorsqu'ils vont frapper aux portes des gens dans deux semaines, s'ils écoutent ce que les Canadiens ont à dire, ils vont s'apercevoir qu'ils ont beaucoup de reproches à leur adresser. Les gens ordinaires disent que le système ne fonctionne pas. Lorsque les députés libéraux viendront les voir chez eux, rien ne pourra empêcher les électeurs de leur dire ce qu'ils pensent vraiment du gouvernement et du système de justice.

Je me demande si les députés libéraux ne vont pas essayer de réprimander leurs électeurs lorsque ces derniers vont soulever la question de la justice pénale durant la campagne électorale, de la


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même façon que le premier ministre a essayé de dire à une serveuse de Montréal qu'elle avait cru lire et cru entendre que le gouvernement promettait d'éliminer la TPS. Voilà pour les critiques de nos vis-à-vis.

Qu'allons-nous faire? Nous allons prôner un changement fondamental dans la façon d'établir qui sont les véritables victimes de la criminalité. Il s'agit tout d'abord de modifier la définition à courte vue que la Commission nationale des libérations conditionnelles donne d'une victime, d'élargir cette définition. Les réformistes donneraient à la définition une beaucoup plus grande portée en considérant qu'une victime est toute personne qui subit, par suite d'une infraction, un préjudice physique, psychologique ou financier, ou tout conjoint, frère, soeur, parent ou enfant de la personne contre qui l'infraction a été perpétrée, ou toute personne ayant une relation équivalente sans qu'il y ait nécessairement un lien de consanguinité. C'est une modification importante de la définition de «victime».

Chose plus importante, le Parti réformiste reconnaît également la nécessité d'apporter des améliorations à la Commission nationale des libérations conditionnelles, qui fait totalement fi des droits des victimes dans la société canadienne. Le gouvernement devra mettre en oeuvre chacune des modifications suivantes pour que la motion M-139 ait un sens.

Tout d'abord, il faut réformer la Commission nationale des libérations conditionnelles pour veiller à ce que les conditions de libération appliquées soient favorables à la victime, dont je viens de vous donner une nouvelle définition, à la famille de la victime et la sécurité du public, plutôt qu'au délinquant. En fait, cette réforme fondamentale doit toucher non seulement la Commission des libérations conditionnelles, mais tout notre système de justice.

(1800)

Il faut réformer la Commission des libérations conditionnelles et confier ses responsabilités à des comités communautaires de libération au mérite. On doit également procéder à cette réforme pour veiller à ce que les délinquants violents purgent au complet les peines qui leur sont imposées. Il faut réformer la commission pour veiller à ce qu'on puisse demander à déclarer un détenu délinquant dangereux à n'importe quel moment avant l'expiration de sa peine et pas simplement au moment du prononcé de la peine. Enfin, une réforme s'impose pour que les libérations conditionnelles soient limitées, pour que les détenus soient forcés de les mériter et pour qu'ils soient soumis à une surveillance serrée.

En conclusion, la motion dont la Chambre est saisie mérite d'être étudiée attentivement. Je regrette que cette motion ne puisse pas faire l'objet d'un vote. Si c'était le cas, je veux que les députés sachent que je voterais certes en faveur de cette motion pour qu'on puisse procéder à une réforme en profondeur du système de justice pénale dans l'intérêt de tous les Canadiens.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir au sujet de la motion M-139 parrainée par la députée de Surrey-Nord.

Je voudrais rendre hommage à la députée, qui ne se portera pas candidate aux prochaines élections. Comme bon nombre d'entre nous, c'est en 1993 qu'elle a été élue à la Chambre pour la première fois. Nous avons siégé tous deux au Comité de la santé. Je sais que cette infirmière diplômée gardera de précieux souvenirs du grand nombre d'amis qu'elle s'est fait à la Chambre. Au nom de tous les députés, je lui signale qu'elle nous manquera. Nos meilleurs voeux l'accompagnent dans sa prochaine carrière.

J'ai pu remarquer que, chaque fois que la députée intervient à la Chambre et au comité, elle le fait avec beaucoup de calme et de logique. Au moyen de sa motion, elle attire l'attention de la Chambre sur un élément du système judiciaire, soit la Commission nationale des libérations conditionnelles. Selon le principe qu'elle fait valoir-et qui est important-, le bénéfice du doute devrait être donné à la victime, de sorte que les intérêts de cette dernière soient protégées dans les cas où des gens ont été reconnus d'infractions pénales.

Le discours de la députée montre bien qu'elle ne tient pas à incarcérer tout le monde à perpétuité et à jeter la clé. Ses déclarations et ses raisonnements sont réfléchis. Elle a expliqué, en se fiant à son expérience, que les victimes et leurs familles ne savent pas toujours ce qui se passe. Dans une telle situation, on est pris au dépourvu. Quand, malheureusement, un être cher, un ami, un membre de la famille ou une connaissance a été victime d'un crime, on vit une situation terriblement tragique. Cette situation se produit si souvent et c'est très regrettable, mais il faut admettre que, dans notre société, certains individus commettent des choses épouvantables.

L'important, c'est que la députée a fait des propositions fort logiques et constructives. Même le secrétaire parlementaire qui est intervenu tout à l'heure l'a reconnu. Il faut féliciter la députée d'avoir fait ces propositions et d'avoir procédé d'une manière très logique.

(1805)

La députée a reconnu que les personnes qui sont incarcérées pour des crimes n'ont pas toutes la même attitude. Les circonstances et les situations varient. Imaginez le nombre de personnes visées par l'appareil judiciaire qui ont commis des crimes contre des membres de leur famille, y compris des meurtres, des agressions ou d'autres infractions criminelles dont les victimes sont des êtres qu'ils connaissent et qu'ils aiment. On n'a qu'à songer à ceux qui tuent leur conjoint, par exemple.

J'ai été fort étonné de constater qu'un pourcentage élevé de victimes d'homicides au Canada sont tuées par quelqu'un qu'elles connaissent. C'est une honte. Ces crimes ne sont pas commis par des êtres pervers comme Clifford Olson. Ils sont le résultat de circonstances. Ces crimes sont provoqués par une raison profonde. Un événement quelconque a déclenché la réaction qui a entraîné le geste posé. Les auteurs de ces crimes ne risquent pas de tuer qui que ce soit d'autre. Ces personnes n'ont pas une mentalité de criminel; elles ont réagi de façon extrême, à un moment précis, lorsque quelque chose de mauvais s'est produit.


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La députée a essentiellement dit qu'il serait peut-être possible de faire certaines choses. Peut-être pourrait-on établir que, dans la grande majorité de ces cas, nous ne retrouvons pas les circonstances bizarres qui caractérisent les crimes dont il est souvent fait état à la Chambre. Il importe que les Canadiens soient sensibilisés aux genres de choses qui se produisent. Il y a beaucoup d'incompréhension, ou de manque d'information, relativement à ce qui se produit.

Je ne suis ni sociologue ni psychologue, et je ne connais guère la théorie et la philosophie qui sous-tendent nos systèmes pénitentiaire et judiciaire. Toutefois, je sais qu'une fois qu'ils ont purgé leur peine, ceux qui ont commis des méfaits doivent réintégrer la société. Ces gens-là devront réintégrer la société. Ils seront peut-être mes voisins ou mes compagnons de travail. Ils en auront parfaitement le droit.

Il nous faut donc un système efficace de libérations conditionnelles qui doive tenir compte de la nécessité de la réadaptation, et de la nécessité de sensibiliser l'opinion à tout ce qu'il faut faire pour amener les détenus à comprendre, pendant leur incarcération, ce qui leur est arrivé et pourquoi, et à faire face au problème pour être en mesure de réintégrer un jour la société. C'est ce qui se passe dans la grande majorité des cas.

Il y a maintenant des dispositions sur les récidivistes dangereux, et nous savons qu'ils ne pourront peut-être jamais sortir de prison, ce qui est probablement aussi bien.

J'aimerais aborder un autre sujet dans les quelques minutes qui me restent. Les jeunes contrevenants forment également un groupe important de personnes qui sont incarcérées ou qui ont commis des crimes et n'ont peut-être pas reçu de sentence.

Beaucoup de Canadiens ont leur opinion sur les jeunes contrevenants. Beaucoup diraient que nous devons abaisser l'âge, parce que les jeunes contrevenants commettent des crimes en plus bas âge qu'autrefois. Beaucoup estiment qu'il faut traiter les jeunes contrevenants comme des adultes et que, s'ils commettent des crimes d'adultes, ils doivent être traités comme des adultes. Il y a des cas où c'est vrai jusqu'à un certain point. Les recherches que j'ai faites sur la famille et le divorce me disent qu'environ 70 p. 100 des jeunes contrevenants sont issus de familles monoparentales. C'est beaucoup. Cela se rapporte à la motion de la députée. Il y a aussi d'autres facteurs à prendre en considération.

Je ne suis pas sûr qu'il faille mettre tous ces 70 p. 100 des jeunes contrevenants dans le même sac en disant qu'ils sont promis à tel ou tel avenir parce qu'ils sont de mauvais garnements. Je veux savoir ce que les parents ont fait, dans quelles conditions ils ont grandi, s'ils ont souffert de la pauvreté, si les mauvais traitements étaient chose courante dans leur petite enfance, s'il y a eu d'autres circonstances dont nous ne pouvons pas être au courant.

(1810)

C'est un autre exemple qui explique pourquoi il ne faut pas, à mon avis, mettre tous les criminels dans le même sac et les considérer comme autant de Clifford Olson à qui il faut réserver le même traitement. Ils ne sont pas tous des Clifford Olson. Certains sont des voisins, des amis, des jeunes qui ont été en proie à des difficultés pendant leur existence. Nous ne devons pas nous occuper seulement des criminels endurcis. Nous devons aussi faire de la prévention pour empêcher que certains problèmes ne surgissent.

Je remercie la députée, qui est une amie et une collègue, d'avoir proposé cette motion.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais dire moi aussi que notre collègue va sûrement nous manquer. Je tiens à la remercier d'avoir proposé cette motion aujourd'hui.

En 1968, quand le pays était en proie à la trudeaumanie, le gouvernement libéral a entrepris de moderniser le système juridique. Nous discutons aujourd'hui de certains des aspects de cette modernisation qui découlait de la doctrine de la société juste chère à M. Trudeau et sous laquelle nous fonctionnons depuis assez longtemps. Par exemple, ce gouvernement libéral a aboli la peine capitale contre les voeux de la majorité des Canadiens. Il l'a remplacée par une peine de 25 ans de prison que l'on peut purger en 15 ans.

Comme mon collègue d'en face l'a fait remarquer, les circonstances diffèrent dans chaque cas, et je vais en reparler plus tard.

Ce gouvernement-là nous a également donné la Loi sur les jeunes contrevenants. Le châtiment a été remplacé par un nouveau mot à la mode: la réadaptation. Alors comme maintenant, les libéraux ont omis d'établir la valeur d'une vie.

Depuis son arrivée à Ottawa, le Parti réformiste réclame des changements au système de justice pénale, des changements visant à réconforter les victimes et à punir les criminels reconnus. Nous avons réclamé la suppression complète de la clause de la lueur d'espoir, c'est-à-dire l'article 745 du Code criminel, qui permet aux meurtriers de demander la libration conditionnelle après avoir purgé 15 années de prison.

Les réformistes croient que le seul châtiment juste et équitable pour le meurtre avec préméditation est la prison à perpétuité. Comme les orateurs qui m'ont précédé l'ont déjà fait remarquer, il existe des circonstances qui justifieraient que l'on accorde la libération conditionnelle avant que le criminel ait purgé ses 25 années de prison.

Grâce aux libéraux mous, la prison à perpétuité veut dire au mieux 25 ans, une peine qui peut être purgée en 15 ans. Quand on a finalement réussi à convaincre le ministre que la loi devait être modifiée, il y a laissé une échappatoire assez grande pour permettre au criminel le plus notoire du Canada, Clifford Olson, de s'en prévaloir.

Le ministre n'a rien fait pour empêcher Clifford Olson d'en profiter. Il n'a rien fait pour empêcher Clifford Olson de forcer les familles de ses victimes à revivre le cauchemar dont le souvenir les hante quotidiennement depuis que leur enfant a été assassiné aussi sadiquement. Ce tueur a violé tous les droits de ses victimes. Il ne leur a même pas laissé l'ombre d'un espoir de survie.


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Personne ne s'attend à ce que sa demande de libération soit couronnée de succès, mais il aura eu la chance de présenter sa défense à un jury composé de Canadiens. Pensons à l'horreur que ce sera pour les malheureux qui auront été choisis comme membres du jury.

Maintenant, à cause de l'inaction du ministre, Clifford Olson aura non seulement droit de cité, mais on lui offrira une tribune où il pourra défendre le bien-fondé de sa demande de libération conditionnelle, en août. Il n'y a rien de surprenant à ce qu'il ne veuille pas que le jury entende les déclarations des familles de ses victimes ou prenne connaissance des rapports de la police ou de la prison à son sujet et qu'il ne veuille pas non plus se soumettre à un examen psychiatrique, à la demande de la Couronne. Avec ses antécédents, ce n'est pas surprenant qu'il ne veuille pas qu'un jury ayant le sens des responsabilités soit saisi de ces renseignements.

De même, des lacunes du système de justice pénale font qu'il est impossible de revenir sur l'entente de négociation de plaidoyers que Karla Homolka avait obtenue en mentant aux procureurs de la Couronne et aux policiers. Elle pourra présenter une demande de libération conditionnelle cet été, après avoir purgé à peine quatre ans de sa peine de douze ans de prison.

(1815)

Si elle décide de ne pas faire une demande de libération conditionnelle en ce moment car elle fait les manchettes, elle pourra exercer cette option à une date future. C'est probablement ce qu'elle fera.

C'est cette sorte de cas auquel le parti Réformiste s'oppose tant. Il y a certainement des gens qui obtiendront une libération conditionnelle anticipée, mais dans les cas comme celui-ci, c'est insensé, et le public canadien est révolté par une telle possibilité.

Les élections seront déclenchées dans dix jours, et le ministre et ses collègues ont découvert que les Canadiens d'un bout à l'autre du pays s'inquiètent du manque de justice dans le système judiciaire. Où étaient-ils, depuis trois ans et demi? En faisant du porte-à-porte, ils auront à convaincre les électeurs qu'ils se sont attaqués à la criminalité et qu'ils ont adopté des lois pour moderniser le système de justice pénal.

Voyons comment le gouvernement a modifié le Code criminel. Les projets de loi C-37 et C-41 sur la détermination de la peine n'améliorent en rien le sort des victimes. Le projet de loi C-45, qui traitait de l'article 745, trahit les victimes de la criminalité. Le ministre de la Justice a promis aux familles des victimes de meurtre qu'elles pourraient se faire entendre au cours des audiences d'appel de libération conditionnelle. Elles auront cette possibilité, mais pas avant longtemps. Le ministre s'est arrangé pour que cette loi ne s'applique qu'aux gens qui seront condamnés à l'avenir et non pas aux gens qui purgent actuellement une peine d'emprisonnement à perpétuité. Il a trahi les familles en deuil, qui ne pourront pas se faire entendre au cours des quinze prochaines années. Voilà l'engagement des libéraux envers les droits des victimes.

En décembre 1994, un projet de loi d'initiative privé du député de York-Sud-Weston exigeant la suppression de l'article 745 a été adopté par la majorité des députés de la Chambre des Communes, dont 73 députés ministériels. Il a été ensuite renvoyé au comité de la justice.

Comment le député de York-Sud-Weston a-t-il été récompensé de ses efforts? L'histoire montrera qu'il a été expulsé du Parti libéral. Le député de York-Sud-Weston a perdu la possibilité d'apporter un changement important au système judiciaire et les familles des victimes de meurtre ont perdu une chance de voir le meurtrier de leurs proches payer en années d'emprisonnement les vies qu'ils avaient fauchées.

Le ministre de la Justice se sert du vieil adage voulant que les affaires difficiles font les mauvaises lois comme excuse pour ne pas durcir sa position. Cela pourrait avoir du sens s'il était question de cas isolés. Toutefois, il y a quelque 650 meurtriers condamnés qui attendent leur chance de demander cette lueur d'espoir, qui est devenue plutôt une garantie de libération à coup sûr dans bien des cas.

Si nous avions adopté des lois sévères dès le départ, nous pourrions contrer avec efficacité toutes les facettes de l'activité criminelle.

Le premier ministre, les ministres et les simples députés ministériels ne pensent pas qu'un meurtre est un crime très grave. Qu'est-ce qui me faire dire une telle chose? Ils envoient le message aux victimes que leur douleur n'est pas importante. Ils envoient le message aux criminels que leurs crimes seront tolérés. Ils envoient le message à tous les Canadiens que leurs rues, leurs foyers et leurs terrains de jeu ne sont pas sûrs.

Je dirai au gouvernement qu'il n'est pas trop tard. Au lieu de faire des promesses insensées dans le livre rouge, tome 2, comme il fera sans doute, pourquoi le gouvernement ne profiterait-il pas de la dernière semaine de la 35e législature pour faire oeuvre vraiment utile en accordant aux victimes les droits qui leur reviennent. S'il le fait, il s'assurera une meilleure réception quand il rencontrera les Canadiens.

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Madame la Présidente, je vous remercie de me permettre de participer au débat sur la motion présentée par ma collègue, la députée de Surrey-Nord. Sa contribution aux travaux de la Chambre est immense; on se souviendra certainement de la compassion dont elle fait preuve à l'égard de ceux qui sont dans le besoin, non seulement les familles autochtones de notre pays, mais bien d'autres qui ont besoin qu'on leur accorde une attention particulière et qu'on les considère avec beaucoup d'humanité. Je remercie la députée de faire cela.

(1820)

J'espère que, lors des prochaines élections, elle pourra jouer un rôle, être candidate, quelque part au Canada. Ce serait aussi une perspective enthousiasmante.

La motion M-139 enjoint la Commission nationale des libérations conditionnelles d'accorder la priorité aux droits des victimes plutôt qu'à ceux des criminels et d'assurer un meilleur équilibre. En


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présentant cette motion, ma collègue a voulu montrer la voie à suivre.

Cela nous semble tout à fait sensé. Il convient toutefois de se demander pourquoi il n'en est pas ainsi? Pourquoi n'avons-nous pas pu, au fil des ans, reconnaître qu'il faut prendre en considération les droits de la victime avant de relâcher le détenu dans la société, de le libérer?

J'ai discuté de cette question avec des ministres de la Justice, des procureurs généraux de diverses provinces et avec des avocats et des spécialistes du droit. Ils disent souvent que leur tâche consiste à déterminer si la personne qui a commis un crime devrait bénéficier d'une libération conditionnelle ou si elle devrait demeurer en milieu carcéral plus longtemps. C'est ce qui entre en ligne de compte. C'est sur cet individu qu'ils se concentrent. Ils disent: «Les victimes ne peuvent pas se présenter devant nous pour faire un plaidoyer parce que ce ne sont pas les victimes que nous jugeons». Ils disent que c'est le dilemme auquel ils sont confrontés dans ce genre de décisions, que ce soit à titre de membre d'une commission des libérations conditionnelles ou de juge.

Cependant, il faut avoir l'esprit ouvert et admettre que, si un individu demande une libération conditionnelle, c'est qu'il a commis un crime dans la rue ou dans la maison de quelqu'un, c'est qu'il a porté atteinte à la propriété ou à la vie privée de quelqu'un, c'est qu'il a blessé une autre personne, peut-être gravement. Un acte criminel a été commis et il y a nécessairement une victime.

Au moment de remettre cet individu en liberté, ne conviendrait-il pas de penser aux droits de la victime et de lui donner une voix au chapitre?

Cette motion va dans ce sens. Elle vise, comme la députée le dit si bien sans sa motion, à affirmer que nous en tant que députés de la Chambre des communes devrions ordonner à la Commission nationale des libérations conditionnelles de donner, lors des audiences de libération et des délibérations qui s'y rapportent, le bénéfice du doute, non pas à l'individu qui a commis le crime, mais à la victime, à la famille de la victime et à la sécurité du public.

Qu'avons-nous obtenu du gouvernement depuis que nous sommes arrivés ici, en 1994? Pas beaucoup en 1994. Mes collègues ont exposé une foule de cas où le ministre de la Justice a été trop mou avec les criminels sans accorder la moindre attention aux victimes. J'ai entendu mes collègues de l'Alberta et de la Colombie-Britannique dire cela à maintes reprises. On peut mettre en doute le bien-fondé de l'article 745 du Code criminel lorsqu'une personne reconnue coupable de meurtre au premier degré est admissible à la libération conditionnelle après avoir purgé 15 ans d'une peine d'emprisonnement de 25 ans. Nous trouvons cela insensé.

Comme nous l'avons dit souvent au ministre de la Justice, on n'a pas tenu compte des nombreuses victimes de crime.

(1825)

Soudainement, en 1997, trois ans plus tard, le gouvernement s'emballe. Il décide de faire quelque chose au sujet des criminels, de prendre des mesures sévères à leur égard.

Dans un communiqué de presse en date du 17 avril 1997, le ministre de la Justice et le solliciteur général réitèrent aux Albertains qu'ils seront impitoyables envers les criminels. Ils disent qu'ils ont présenté une série de nouvelles mesures sévères pour lutter contre les activités criminelles des gangs dans notre pays.

Ce n'est qu'une façade. Cela fait partie de la stratégie du gouvernement, qui veut que nous fassions cela aujourd'hui. Cette mesure ne vise pas à donner plus de sens à notre système de justice pénale. Si c'était le cas, ce serait excellent. Le but, c'est tout simplement que le gouvernement veut faire cela. C'est ce que dit le gouvernement fédéral.

M. Gallaway: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour passer immédiatement à l'étude de la motion concernant l'amendement apporté par le Sénat au projet de loi C-216 et pour l'adopter sans autre débat ni amendement.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, le gouvernement tente sans cesse de faire croire qu'il va durcir le ton envers les criminels, rendre le système de justice pénale un peu plus juste envers les victimes ou traiter ces dernières comme telles.

Voyons les motifs qui se cachent derrière cette attitude. La chose est très claire. Le dimanche 27 avril, le premier ministre va déclencher des élections. Le gouvernement doit, pour avoir la faveur des électeurs canadiens, leur proposer un ensemble de mesures pénales qui les convainquent qu'il durcit le ton envers les criminels et travaille pour les victimes.

Ce sont là de faux motifs. Absolument faux. Si le gouvernement voulait vraiment améliorer le système et prendre ses responsabilités au lieu d'agir uniquement pour des motifs politiques, nous aurions un meilleur gouvernement, une politique plus efficace à l'égard des criminels et une meilleure reconnaissance des droits des victimes.

Ce n'est pas comme ça que ça se passe. Cette réaction instinctive du gouvernement est censée être une bonne politique.

Regardons maintenant les commissions des libérations conditionnelles. Comment les membres sont-ils nommés? J'en connais certains car ça fait environ 34 ans que je fais de la politique. Je me souviens en Alberta de Mike Maccagno qui était un bon libéral. C'était le chef du Parti libéral de l'Alberta. Il avait été élu à l'Assemblée législative de l'Alberta et nous étions devenus de bons amis en dépit du fait que j'étais ministre.

Je me souviens avoir eu un jour une discussion avec M. Maccagno. Il m'avait dit: «Ray, je pense que je vais démissionner en tant que chef du Parti libéral parce que je m'en vais au Paradis fédéral. On va me nommer à la Commission nationale des libérations conditionnelles.» C'est ce qui s'est passé et, par la suite, il vécut très heureux.

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Ce qu'il faut se demander, c'est si les gens qui font partie de la Commission ont les compétences nécessaires. Je ne le crois pas. Les gens nommés à la commission doivent avoir de l'expérience et une contribution à faire. Je sais que les députés en tiendront compte en ce qui a trait à cette motion.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton.

______________________________________________


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MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA SANTÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, en 1992, le Comité permanent de la santé a publié une étude intitulée Syndrome d'alcoolisme foetal-une tragédie évitable. On y présente une brève description de ce syndrome. Il n'y a aucun doute que la consommation d'alcool par la mère peut avoir un effet terrible sur le foetus.

(1830)

Le fait est que, lorsqu'une femme enceinte consomme de l'alcool, son bébé en consomme aussi. L'alcool véhiculé dans le sang de la mère traverse le placenta pour se retrouver dans le sang du foetus. Il se peut que le taux d'alcool dans le sang du bébé demeure plus longtemps à un niveau élevé parce que son foie immature métabolise l'alcool plus lentement.

La recherche a montré que le syndrome d'alcoolisme foetal est responsable de 5 p. 100 des malformations congénitales. Il peut se traduire par des troubles neurologiques graves, un comportement asocial, des problèmes permanents de comportement, une tendance à la criminalité, une réduction de la durée de vie, une atrophie du cerveau, des troubles d'apprentissage, de l'hyperactivité, un retard mental, un retard de croissance intra-utérin et post-natal, des troubles de la parole et de la vue et autres malformations physiques.

Il ne fait aucun doute qu'au Canada le syndrome de l'alcoolisme foetal ou SAF est un problème croissant. Des études récentes faites en Ontario indiquent que, bien que tous les autres problèmes associés avec la consommation d'alcool soient en baisse, le seul qui ne le soit pas est le syndrome de l'alcoolisme foetal pour lequel on a enregistré une augmentation des cas. Au cours de la dernière décennie, le nombre de cas reconnus a augmenté de quelque 400 p. 100.

En juin 1995, j'ai présenté une projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-337, demandant que des étiquettes soient apposées sur les contenants de boissons alcooliques mettant en garde contre les dangers que représentent ces dernières pour la santé. Une partie du message prévenait les femmes enceinte des risques associés avec la consommation d'alcool. Par la suite, ce projet de loi a été adopté à la Chambre et renvoyé au comité et j'espère qu'il pourra revenir à la Chambre.

Il y a quelques semaines, le ministère de la Santé et la Société canadienne de pédiatrie ont enfin émis un communiqué conjoint affirmant que la meilleure voie à suivre pour les femmes enceintes était de s'abstenir entièrement de boire de l'alcool. Voilà la nouvelle sagesse du ministère de la Santé. Le ministre a signalé quelques mesures qu'il avait prises. Tout ce qu'il faut savoir, c'est que la consommation, même modérée, d'alcool durant la grossesse peut nuire à la santé de l'enfant à naître.

J'espère que le ministre de la Santé entendra le message. Nous devons prendre des moyens extraordinaires pour alerter les femmes qui prévoient avoir des enfants ou sont maintenant enceintes et leur faire comprendre qu'elles doivent s'abstenir de boire de l'alcool. Nous devrions publier de pleines pages d'annonces dans tous les journaux du pays pour faire savoir clairement, une bonne fois pour toutes, que la consommation d'alcool durant la grossesse met en danger la santé de l'enfant à naître.

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de répondre à la question sur le syndrome d'alcoolisme foetal soulevée par le député de Mississauga-Sud, qui s'intéresse inlassablement à ce sujet.

La consommation d'alcool pendant la grossesse est un problème national, car l'alcool peut nuire à la santé de la mère et du foetus, ainsi qu'à la capacité de l'enfant d'avoir une vie adulte normale. Le syndrome d'alcoolisme foetal est un diagnostic médical basé sur un certains nombres de problèmes liés à l'alcool et associés à la consommation d'alcool pendant la grossesse. Les enfants atteints de ce syndrome souffrent de toute une gamme de problèmes physiques et comportementaux, notamment des difficultés d'apprentissage. Ces enfants ont tendance à avoir de mauvaises expériences scolaires et, une fois adultes, ils courent plus de risques d'avoir des démêlés avec la justice criminelle.

La déclaration sur la prévention du syndrome d'alcoolisme foetal a été rédigée conjointement par 18 organisations de santé nationales et communautaires et le ministère de la Santé. Le message principal c'est que les femmes devraient éviter de consommer de l'alcool pendant qu'elles sont enceintes. La déclaration demande également la création de centres familiaux appropriés et des programmes de traitement tenant compte des différences culturelles pour les femmes alcooliques. Ces recommandations visent surtout la prévention; il faut empêcher le problème de survenir.

Il faut également un diagnostic correct, des méthodes de traitement des enfants et des services d'aide aux familles. De plus, il faut avoir une meilleure idée de la proportion des cas de ce syndrome au Canada et faire plus de recherches sur les effets des programmes de suivi des enfants atteints.

Santé Canada travaille avec les cosignataires de la déclaration pour répondre à ces besoins. L'alcoolisme, la consommation d'al-


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cool pendant la grossesse constitue un problème pour tous ceux qui s'intéressent à la santé des femmes, des enfants et des familles.

LES TRANSPORTS

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Madame la Présidente, le 7 mars, j'ai demandé au secrétaire parlementaire du ministre des Transports si le ministre allait donner suite aux recommandations du Bureau de la sécurité des transports pour veiller à ce que les normes de sécurité visant les wagons-citernes soient plus sévères afin de protéger le public, pour ce qui est du transport de produits chimiques dangereux.

(1835)

Je remercie le secrétaire parlementaire d'avoir précisé dans sa réponse qu'on a déjà entrepris des travaux pour renforcer les wagons-citernes. C'est un progrès certain, pour ce qui est de protéger les Canadiens, leurs terres et leurs eaux contre les produits chimiques en cas de déraillement. Cela devrait également aider grandement à maintenir la confiance des Canadiens dans le transport ferroviaire.

Cependant, même si c'est un pas dans la bonne direction, l'intérêt public est beaucoup plus large que cela. Si nous voulons élaborer une politique de transport réellement durable au Canada, nous avons besoin non seulement d'un réseau ferroviaire sûr, si important soit-il, mais nous devons également examiner les effets de la pollution atmosphérique causée par la circulation accrue des automobiles et des camions. Nous devons également nous attaquer au sérieux problème que présentent les émissions de dioxyde de carbone et leur contribution au changement climatique.

Permettez-moi de traiter plus longuement de l'un de ces aspects. Dans une étude qu'a menée en 1995 la Table ronde de l'Ontario sur l'environnement et l'économie, groupe de travail qui a examiné à fond la question du transport, on a calculé que, pour chaque tonne de marchandises transportées, le transport routier entraînait sept fois plus d'émissions de dioxyde de carbone que le transport ferroviaire. Il faut accorder la priorité à cette considération lorsqu'on prend des décisions en matière de transport au Canada. Malheureusement, nous nous dirigeons actuellement dans la mauvaise direction. La quantité de marchandises transportées sur les routes du Canada augmente considérablement, tandis que celle de marchandises transportées par voie ferroviaire diminue.

En effet, la part du marché qu'occupe au Canada le transport routier a augmenté, passant d'à peine 30 p. 100 dans les années cinquante à 70 p. 100 en 1991. À l'heure actuelle, les subventions au secteur ferroviaire font l'objet de compressions, tandis que les subventions au transport routier ne cessent d'augmenter. Par conséquent, nos autoroutes sont encombrées de camions, alors que, dans certaines régions, les lignes de chemin de fer sont sous-utilisées ou même abandonnées.

Il y a aussi l'aspect hygiène publique de toute politique de transport durable qui met en relief les dépenses de santé liées au smog urbain au Canada. Des centaines de millions de dollars sont dépensés en soins médicaux et hospitaliers. Il y a manifestement un lien entre la politique de transport et la santé publique. Il nous faut donc trouver des façons de réduire le transport routier.

Il est utile de fabriquer des automobiles et des camions qui polluent moins, mais cela ne suffit pas; il faut que cette mesure s'accompagne d'une réduction de la circulation automobile. Il faut renverser la tendance actuelle et amorcer un grand virage vers une utilisation accrue du train, l'incitation à utiliser les transports en commun en ville et une réduction des subventions au transport routier.

J'ai une question pour le secrétaire parlementaire. Quand les Canadiens peuvent-ils s'attendre à voir le gouvernement fédéral présenter une politique de transport durable qui tienne compte de la santé en favorisant la réduction de la pollution et des émissions de dioxyde de carbone grâce à la promotion du transport de marchandises par rail, et grâce aussi à des politiques favorisant les services de transport en commun?

[Français]

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Président, si vous me le permettez, je voudrais répondre, en français, à la question que soulevait le député de Davenport, le 7 mars dernier.

Il faisait alors référence aux recommandations du Bureau de la sécurité des transports, à l'effet que des restrictions supplémentaires soient prises à l'égard des wagons-citernes de catégorie 111A utilisés pour le transport des marchandises dangereuses.

Je voudrais le rassurer et lui dire que la sécurité a toujours constitué la première priorité de Transports Canada et qu'il continuera d'en être ainsi. Le ministre travaille constamment à rehausser la sécurité des systèmes de transport utilisés au Canada.

En ce qui concerne les recommandations précises du Bureau de la sécurité des transports auxquelles le député fait référence, je désire l'informer que Transports Canada avait effectué l'examen complet des produits pouvant être transportés à bord des wagons-citernes de catégorie 111A bien avant la présentation du rapport du Bureau.

À l'époque, des restrictions particulières avaient été imposées au transport de 80 marchandises dangereuses qui, depuis, sont interdites de transport à bord de ce type de wagon-citerne. Récemment, deux autres produits dangereux ont été ajoutés à la liste des produits soumis à des restrictions. Transports Canada poursuit l'examen de 14 autres produits dangereux.

(1840)

De plus, je voudrais souligner que de tous les wagons-citernes, ceux de la catégorie 111A constituent la bête de somme du parc ferroviaire avec 165 000 wagons en service en Amérique du Nord. Bien que Transports Canada estime que ces wagons représentent un moyen de confinement sécuritaire, le ministère poursuit ses recherches pour trouver des moyens efficaces d'améliorer davantage la sécurité d'ensemble des wagons de catégorie 111A.

Des travaux sont en cours en ce qui a trait aux améliorations à apporter aux wagons-citernes en aluminium et en nickel de catégorie 111A. Ils devront désormais être munis d'un bouclier de protection complet pour protéger les extrémités des wagons-citernes de toute perforation lorsqu'ils seront affectés au transport de marchandises dangereuses.

Enfin, je veux affirmer de nouveau que la sécurité a toujours constitué la première priorité de Transports Canada et il continuera d'en être ainsi à l'avenir.

9916

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.): Madame la Présidente, le 20 février j'ai posé une question à la Chambre au sujet d'un dossier très important pour de nombreux Canadiens, soit leur droit d'utiliser des herbes et d'autres produits naturels à des fins médicinales.

Ces personnes disent tout simplement que Santé Canada, et plus précisément la Direction générale de la protection de la santé, n'écoute pas et, par conséquent, ne tient pas compte de la liberté de choix des Canadiens.

Le secrétaire parlementaire va nous dire, comme il l'a fait le 20 février, que les produits vendus doivent être sûrs et efficaces. Il parle d'éphédra et de Canadiens de l'Ouest qui ont mal réagi à cet arbuste, mais il ne dit pas un mot des produits pharmaceutiques qui font que des gens aboutissent quotidiennement dans les salles d'urgence, alourdissant considérablement les coûts du système, tout simplement parce que ces produits ne sont pas sûrs pour ceux auxquels ils sont destinés.

Au fond, ce dont il est question, c'est du miracle qui se produit quand, grâce à la magie de la Direction générale de la protection de la santé, une plante qui pousse dans la terre ou dans l'eau n'est plus seulement un aliment, mais devient un médicament dont la distribution peut être restreinte ou carrément interdite. Un supplément nutritif au sud de la frontière est considéré comme une drogue au Canada. Un produit qui est utilisé depuis des centaines de milliers d'années en raison de ses effets bénéfiques est interdit au Canada. Un produit naturel et, pire encore, inoffensif est interdit par des personnes non identifiables, au nom de la médecine au Canada.

Dans toute cette question, on a oublié le consommateur. C'est la manie de tout réglementer et de recouvrer les coûts qui prime. Santé Canada impose le fardeau de la preuve au consommateur, mais qui défend vraiment le consommateur?

Il est à noter que la Colombie-Britannique va investir plus de5 millions de dollars pour financer un centre chargé de mettre à l'essai d'autres remèdes et d'autres méthodes de soins. Avec l'arrivée de gens originaires du bassin du Pacifique, on se rend compte que leurs méthodes, sans que l'on sache trop pourquoi, sont sûres et bénéfiques. Nous savons que c'est le cas, car leurs méthodes donnent de bons résultats depuis des milliers d'années. Or, la direction générale de la protection de la santé dit: «Jamais entendu parler de ça. Prouvez ce que vous avancez!»

Je soutiens que les droits du consommateur l'emportent sur les droits des bureaucrates. Je soutiens que les bureaucrates devraient reconnaître le droit des Canadiens d'avoir accès aux produits naturels qu'ils estiment bénéfiques pour eux.

J'exhorte le ministre à défendre les intérêts des Canadiens et non ceux des entreprises, des puissants et des multinationales.

Dans la même veine, samedi dernier, le Globe and Mail publiait un article sur le pouvoir de la prière, qui contribuerait à améliorer la condition des malades. Pourquoi ce traitement est-il efficace? Sur le plan scientifique, personne ne le sait. Je pourrais peut-être proposer à la Direction de la protection de la santé de faire enquête et de réglementer également cette activité.

Je pousse la comparaison un peu loin, mais pourquoi alors réglementer l'utilisation des bulbes de narcisse, de l'huile tirée du persil et du muguet qui poussent dans mon jardin? Si je crois que la consommation de ces produits pourrait, d'une façon naturelle, régler mon problème de santé, pourquoi la Direction de la promotion de la santé devrait-elle s'en faire si ces produits, tout comme la prière, ne peuvent réellement avoir d'effets bénéfiques dans mon cas particulier?

Voici ce que je prescris pour Santé Canada. Une bonne dose de logique et de discernement, avant que cela soit également réglementé, contribuerait peut-être à persuader le ministre de reconsidérer la position de mon ministère.

Les remèdes efficaces, comme les bulbes de narcisse ou la prière, ne sont pas toujours quantifiables de façon scientifique.

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, c'est sans doute moi qui vais répondre, puisque nous sommes partis pour utiliser plusieurs langues.

[Note de l'éditeur: Le député s'exprime en italien.]

[Traduction]

Je ne veux pas revenir sur ce que j'ai dit tout à l'heure, mais le député a présumé de ce que j'allais dire. Je vais sans doute l'étonner.

Je vais répondre au député de Sarnia-Lambton à propos des produits à base d'herbes médicinales au Canada. Le mandat de Santé Canada est de veiller à ce que les médicaments qui sont sur le marché soient inoffensifs, efficaces et de haute qualité.

Nous n'entendons pas restreindre la liberté de choix, mais veiller à ce que les choix puissent se faire sans préoccupation quant à l'efficacité et à l'innocuité des produits. Tout produit à base d'herbes présenté au consommateur comme produit à usage médicinal doit avoir une identification numérique, le DIN. Si un produit a un DIN, les Canadiens peuvent avoir l'assurance que le gouvernement fédéral en a vérifié l'innocuité et l'efficacité.

Il faut signaler que c'est l'importateur qui doit s'assurer que ses produits sont conformes à la réglementation. Il y a sur le marché des milliers de produits en règle. Santé Canada encourage l'industrie des herbes médicinales à faire des propositions au sujet de l'utilisation acceptable de divers produits à base d'herbes.

Pour répondre aux nombreuses demandes de listes d'herbes et de produits dérivés qui pourraient être refusés par les services douaniers, notre ministère est en train d'élaborer un système qui donnera une information plus sûre et plus transparente sur les produits autorisés au Canada.

[Note de l'éditeur: Le député s'exprime en italien.]

9917

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée.

La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 47.)